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Full text of "La Sainte Bible avec commentaire d'après dom Calmet, les saints Pères et les exégètes anciens et modernes"

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SAINTE   BIBLE 


AVEC    COMMENTAIRE 


D  APRES    DOM    CALMET,    LES    SAINTS    PERES    ET    LES    EXEGETES 
ANOIENS   ET   MODERNES 


MPRIMATUR 

Atrebali,  die  3  Seplembris   1897. 

Z.  LIÉNARD,  vie.  gen. 


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LA 


SAINTE  BIBLE 


AVEC    COMMENTAIRE 


D  APRES 


DOM   CALMET,   LES   SAINTS   PÈRES   ET   LES   EXÉGÈTES  ANCIENS   ET   MODERNES 

OUVRAGE   DÉDIÉ   A 

Sa    Grandeur    Monseigneur    DENNEL 
h'vêque  d'Arras,  Boulogne  et  Saint-Omer 

PAR 

l'abbé    J.-A.    PETIT 

MEMBRE     DE     PLUSIEURS    SOCIÉTÉS    SAVANTES 


TOME   XII 
LES   MACCABÉES 


ARRAS 


SUEUR-CHARRUEY,   I  M  PRIMEUR- LIBRAIRE- ÉDITE  J£$Afi£ 
10,  rue  des  Balances,   10  ---•%_ 


^Ottawa 

-    O    *. 


PB 


LES    MACCABÉES 


INTRODUCTION 


On  distingue  quatre  livres  différents  qui  portent  le  nom  des  Maccabées  (i)  ;  mais  il 
n'y  a  que  les  deux  premiers  qui  soient  canoniques  ;  les  deux  derniers  sont  apocryphes. 
Suivant  l'ordre  des  événements  rapportés  dans  ces  quatre  livres,  le  troisième  devrait 
être  le  premier,  et  le  premier  devrait  être  le  troisième.  Les  deux  premiers  seront 
l'unique  objet  de  cette  préface,  et  nous  donnerons  à  la  fin  du  volume  les  troisième  et 
quatrième  livres  des  Maccabées. 

L'auteur  du  premier  livre  des  Maccabées  était  hébreu;  son  style  le  prouve  :  il  ren- 
ferme de  nombreux  hébraïsmes.  Origène  nous  rapporte  même  le  titre  hébreu  qu'on 
lisait  à  la  tète  de  cet  ouvrage  (2),  Sarbelh  (ou  Schebet  Sar-bené-El),  c'est-à-dire  Sceptre 
du  prince  des  enfants  de  Dieu;  comme  sri  l'on  voulait  marquer  le  gouvernement,  la 
force,  ou  le  règne  des  Maccabées,  désignés  par  le  nom  de  princes  des  enfants  de 
Dieu.  Saint  Jérôme  avait  encore  vu  cet  ouvrage  en  hébreu  (3),  c'est-à-dire  en  syro- 
chaldaïque,  qu'on  parlait  en  Judée  du  temps  des  Maccabées  (4).  Les  Juifs  ne  l'ont 
plus  aujourd'hui  en  cette  langue.  Joseph  ben  Gorion  a  cité  ces  livres  sous  le  nom  de 
livres  des  Asmonéens  ($).  11  n'est  pas  impossible  que  cet  auteur,  qui  vivait  dans  le 
onzième  siècle,  ait  vu  cet  ouvrage  en  hébreu.  Le  grec  est  à  présent  considéré  comme 
l'original  ;  et  c'est  sur  lui  qu'a  été  faite  l'ancienne  version  latine  qui  nous  en  reste. 
Cette  version  est  d'une  haute  antiquité,  puisqu'elle  était  en  usage  dans  l'Eglise  avant 
saint  Jérôme,  et  que  Josèphe  même  s'en  est  servi  dans  la  rédaction  de  ses  Antiquités 
judaïques,  où  il  l'a  souvent  copiée  sans  y  rien  changer  (6). 

11  y  a  lieu  de  croire  que  cet  ouvrage  (ut  composé  sur  les  registres  publics,  qu'on 
dressait  de  ce  qui  arrivait  de  plus  mémorable  dans  la  république  des  Hébreux.  L'Ecri- 
ture rend  témoignage  au  soin  de  Judas  Maccabée  (7),  qui  recueillit  les  monuments  de 
sa  nation,  qui  avaient  été  dispersés  durant  la  guerre;  et  l'auteur  de  cet  écrit  cite  à  la 
fin  de  son  livre  (8),  les  mémoires  du  pontificat  de  Jean  Hyrcan,  comme  la  source  où 
l'on  peut  s'instruire  plus  à  fond  de  ce  qu'il  avance.  Quelques  auteurs  ont  cru  que  Jean 
Hyrcan  même  était  l'auteur  de  ce  premier  livre;  mais  cette  opinion  n'a  pour  fonde- 
ment que  d'assez  faibles  conjectures.  Celui  qui  a  écrit  ce  premier  volume,  suivait  dans 
ses  supputations  chronologiques  l'ère  des  Grecs,  selon  la  manière  de  compter  des 
Hébreux;  il  la  commençait  au  mois  de  Nisan,  six  mois  plus  tôt  que  les  Grecs  et  les 
Syriens,  qui  en  mettaient  le  commencement  vers  le  mois  de  septembre  ou  d'octobre. 


(1)  Dans  les  exemplaires  latins  de  la  VuUate,  on  lit  Machabœi,  les  Machabées;  mais  le  grec  porte  Maccabœi, 
les  Maccabées.  Nous  parlerons  de  l'étymolo^ie  de  ce  nom  dans  la  note  sur  le  chap.  n.  t.  4.  du  Ie'  livre.  —  (2)  Ori- 
gen.apud  Euseb.  lib.  vi.  c.  ult.  Hist.  eccles.  S»,o6r)()  aap6av:sX,  Sn  >j3  iur  -azv  ou  la-aiw.  —  (?)  Hieronrm.  Prolog. 
Galeal.  Machabaeorum  primum  librum  hebraicum  reperi. —  (4)  Ita  Drus,  prxfal.  in  lib.  Vêler.  Test.  Huet.  Demonslrat. 
Evang.  propos.  îv.  —  (5)  Cf.  Antiq.  jud.  lib.  xn.  xui.  —  (6)  =.>:oun  isc.  Vide  Drus,  prœfat.  in  hos.  lib.  —  (7)  11.  Mach. 
u.  14.  —  (8)  11.  Mach.  11.  25. 

S.    B.   —  T.    XII.  I 


2  INTRODUCTION 

Ce  livre  contient  l'histoire  de  quarante  ans  (175-135).  depuis  le  commencement  du 
règne  d'Antiochus  Epiphane,  jusqu'à  la  mort  du  grand  prêtre  Simon  ;  l'auteur  a  pu  être 
témoin  de  presque  tout  ce  qu'il  écrit,  quoiqu'il  ait  vécu  après  le  gouver«ement  de 
Jean  Hyrcan  (1);  puisque,  depuis  le  commencement  de  la  persécution  d'Antiochus 
Epiphane,   jusqu'à   la  mort  de  Jean  Hyrcan,  il  n'y  a  pas  plus  de  soixante-quatre  ans. 

Le  second  livre  des  Maccabôes  est  un  abrégé  de  l'histoire  des  persécutions  d'An- 
tiochus Epiphane  et  d'Eupator  contre  les  Juifs  (2),  composée  en  cinq  livres  par  un 
nommé  Jason.  L'auteur  de  l'abrégé  est  inconnu,  et  l'ouvrage  entier  de  Jason  est  perdu. 
L'un  et  l'autre  étaient  grecs,  et  suivaient  la  manière  de  compter  les  années  des  Séleu- 
cides,  suivant  l'usage  des  Syriens.  L'abréviateur  ne  s'est  pas  tellement  contraint  à  suivre 
Jason,  qu'il  n'ait  rien  ajouté  à  son  ouvrage.  11  ne  promet  que  (3)  l'histoire  de  Judas 
Maccabée  et  de  ses  frères,  de  la  purification  du  temple,  de  la  dédicace  de  l'autel,  des 
combats  qu'Antiochus  Epiphane  et  son  fils  Eupator  livrèrent  aux  Juifs,  et  des  signes 
qui  parurent  dans  l'air  au-dessus  de  Jérusalem  ;  et  cependant,  au  chapitre  m  et  au 
commencement  du  quatrième,  on  trouve  l'histoire  de  la  punition  d'Héliodore,  qui 
arriva  sous  Séleucus,  prédécesseur  d'Antiochus  Epiphane.  Les  deux  derniers  chapi- 
tres comprennent  aussi  des  choses  arrivées  sous  Démétrius  Soter,  successeur  d'Eupa- 
tor. Mais  comme  elles  regardent  le  temps  de  Judas  Maccabée,  on  ne  peut  pas  dire  à 
la  rigueur  qu'elles  soient  hors  du  dessein  de  Jason  et  de  son  abréviateur  ;  cependant, 
on  remarque  dans  la  rédaction  de  ces  derniers  chapitres  des  diversités  de  style,  qui  font 
juger  qu'ils  sont  d'un  auteur  difïérent  de  Jason  (4). 

Quoique  l'auteur  du  second  livre  des  Maccabées  raconte  presque  partout  les  mêmes 
choses  que  l'auteur  du  premier,  il  ne  paraît  pourtant  pas  qu'ils  se  soient  vus  ni  copiés 
l'un  l'autre.  Ils  se  ressemblent  de  telle  manière,  qu'on  ne  peut  pas  dire  qu'ils  aient 
cherché  à  se  suivre,  ni  à  s'imiter. 

Le  compilateur  du  second  a  mis  à  la  tète  de  son  ouvrage  une  préface  (5),  dans  la- 
quelle il  nous  avertit  qu'ayant  considéré  le  grand  nombre  de  livres  qu'on  avait  composés 
sur  cette  matière,  et  la  difficulté  de  s'instruire  en  les  consultant  tous  séparément,  il 
s'est  chargé  du  travail  d'en  donner  l'abrégé,  pour  diminuer  la  peine  des  lecteurs.  Il  cite 
d'abord  une  lettre  écrite  aux  Juifs  d'Alexandrie  par  ceux  de  Jérusalem  (6),  pour  les 
avertir  de  célébrer  la  fête  de  la  purification  du  temple  par  Judas  Maccabée.  On  en 
trouve  ensuite  une  seconde  (7),  du  sénat  de  Jérusalem  et  de  Judas  à  Aristobule,  pré- 
cepteur du  roi  Ptolémée,  qui  tend  à  la  même  fin.  Ce  second  livre  contient  l'histoire 
d'environ  quinze  ans  (176-161),  depuis  l'entreprise  d'Héliodore  sur  le  temple,  jusqu'à 
la  victoire  de  Judas  Maccabée  sur  Nicanor. 

La  beauté  du  style  de  cet  écrit  l'a  fait  attribuer  par  quelques  auteurs  (8)  à  Philon 
ou  à  Josèphe.  On  attribue  à-<fosèphe  un  petit  ouvrage  intitulé,  des  Maccabées  (9)  ou 
de  l'empire  de  la  raison;  mais  cet  écrit  est  tout  différent  de  celui  que  nous  examinons. 
Quant  à  Philon,  la  ressemblance  de  son  style  avec  celui  de  cet  ouvrage  est  si  peu 
sensible,  et  d'ailleurs  il  paraît  avoir  si  peu  connu  ce  qui  regarde  les  Maccabées,  qu'on 
ne  peut,  sans  quelque  témérité,  assurer  qu'il  en  soit  l'auteur.  Enfin  ni  Eusèbe  ni  saint 
Jérôme  ne  parlent  de  cet  ouvrage  parmi  ceux  de  Philon.  Sérarius  (10)  a  prétendu  que 
c'était  l'ouvrage  de  Judas  l'essénien,  connu  dans  Josèphe  par  ses  prédictions.  Il  pré- 
tend que  c'est  de  ce  Judas  qu'il  est  parlé  au  second  chapitre  en  ces  termes  :  Judas  a 
recueilli  tout  ce  qui  avait  été  dispersé  pendant  la  guerre  qui  nous  est  arrivée,  et  tout  cela  est 
entre  nos  mains  (11).  Il  y  a  beaucoup  plus  d'apparence  que  ces  paroles  regardent  Judas 

(1)  1.  Mach.  xvi.  ult.—  (:)  Clément  cl'  Alexandrie,  Slrom.,  I.  v,  p.  ^95,  l'appelle  "ôiv  Ma/.xaSaiztùv  ini-out). —  (j)  11.  Mach. 
il.  20.  21.  22.  2j.  24.  —  i_|)  V  lie  Grot.  ad  11.  Mach.  prcejal.  et  comment,  ad  xn.  I.  19.  21.  22.  25.  26;  xiv.  22.  Vide  et 
Huel.  demonstrat.  Evang.  propos:  iv.  —  (s)  "•  Mach.  11.  2^.  et  seqq.  —  (û;  11.  Mach.  1.  1.  et  seqq.  ad  f.  10.  exclusive.  — 
(7)  11.  Mach.  1.  f.-.  10.  ad  y.  19.  cap.  11.  inclusive.—  (H,i  Honor.  Augustod.  de  Scriptor.  Eccl.  in  Pliilone.  —  (9)  U<;  Mou/.a- 
6aioiiç,  7)  7t£pi  aùzo/.pà-oço;  lo  acfxoù.  —  (ioi  Scrar.  prolog.  il.  in  Mach.  et  in  cap.  1.  et  2.  Ub.n.  Vide  et  Rupert.  de 
Victoria  verbi.  —  (11)  11.  Mach.  11.  14. 


*  INTRODUCTION  3 

Maccabée  ;  mais  il  est  certain  qu'elles  ne  prouvent  pas,  ni  que  Judas  l'essénien  ait 
écrit  cette  histoire,  ni  que  Judas  Maccabée  en  soit  l'auteur.  On  a  conjecturé  (1)  que 
le  grand  prêtre  Simon  Maccabée  l'avait  écrite  ;  mais  ces  conjectures  n'ont  aucun  fon- 
dement certain. 

Quelques  exégètes  (2)  ont  cru  que  ce  livre  n'était  qu'une  lettre  écrite  par  le  sénat 
de  Jérusalem  aux  Juifs  d'Egypte,  et  Cotelier  cite  un  ancien  abrégé  de  ce  livre,  où  il 
est  dit  qu'il  a  la  forme  d'une  lettre  ;  mais  il  est  aisé  de  distinguer  ce  qui  fut  écrit  par 
le  sénat  de  Jérusalem,  d'avec  ce  qui  est  de  l'historien.  Celui-ci  se  fait  remarquer  par 
sa  préface,  et  par  toute  la  suite  de  sa  narration. 

Les  protestants  contestent  aux  livres  des  Maccabées  la  qualité  de  canoniques.  Ils 
montrent 'que  quelques  anciens  auteurs  ecclésiastiques  les  ont  rangés  dans  les  apocry- 
phes ;  et  ils  prétendent  que,  comme  l'Eglise  ne  peut  pas  faire  qu'un  auteur  inspiré  ne 
le  soit  pas,  aussi  ne  peut-elle  pas  donner  l'inspiration  à  ceux  qui,  dès  le  commence- 
ment, n'ont  point  eu  cet  avantage;  sa  déclaration  ne  fait  rien  au  fond  de  la  chose,  mais 
suppose  la  vérité  de  ce  qu'elle  décide, et  ses  décisions  postérieures  ne  peuvent  donner 
à  un  ouvrage  une  autorité  divine  qu'il  n'avait  pas  auparavant. 

Ce  dernier  principe  est  reconnu  de  tous  les  théologiens  :  il  ne  s'agit  que  de  distin- 
guer l'équivoque  de  ces  paroles,  que  les  anciens  auteurs  ecclésiastiques  ont  rangé  les 
Maccabées  parmi  les  livres  apocryphes.  Si  l'antiquité  s'était  expliquée  d'une  manière 
uniforme  et  constante  sur  ce  sujet;  si  les  premières,  les  plus  grandes  et  les  plus  nom- 
breuses églises  avaient  déclaré,  dans  leurs  assemblées,  que  ces  livres  n'étaient  point 
canoniques,  on  ne  pourrait  aujourd'hui  les  donner  pour  tels.  On  doit  suivre  dans  ces 
matières,  dit  saint  Augustin  (5),  l'autorité  du  plus  grand  nombre  d'églises,  ou  des 
églises  apostoliques,  et  de  celles  qui  ont  reçu  des  lettres  des  apôtres.  Les  Ecritures 
qui  sont  reçues  de  toutes  les  églises  catholiques  doivent  être  préférées  à  celles  qui  sont 
rejetées  par  quelques-unes;  et,  parmi  ces  dernières,  on  doit  préférer  celles  qui  sont 
reçues  par  le  plus  grand  nombre  et  par  les  plus  considérables,  à  celles  qui  n'ont  pas 
ce  privilège.  Or,  quoique  les  livres  des  Maccabées  ne  soient  pas  mis  dans  le  catalogue 
des  livres  canoniques  par  Méliton,  par  le  concile  de  Laodicée,  par  saint  Athanase 
dans  la  Synopse  publiée  sous  son  nom,  par  saint  Cyrille  de  Jérusalem,  par  saint  Hilaire, 
par  saint  Grégoire  de  Nazianze,  par  saint  Grégoire  le  Grand  (4),  par  saint  Jean  Da- 
mascène  (5),  on  peut  leur  opposer  un  bien  plus  grand  nombre  d'auteurs  anciens,  et 
quelques  conciles  qui  les  ont  reconnus  pour  canoniques.  L'auteur  de  l'épître  aux  Hé- 
breux (6)  fait  une  allusion  visible  au  supplice  du  saint  vieillard  Eléazar,  lorsque,  par- 
lant des  martyrs  de  l'Ancien  Testament  qui  ont  signalé  leur  zèle  dans  la  défense  de  la 
foi,  il  dit  qu'il  y  en  a  qui  ont  souffert  la  peine  du  tympanum,  supplice  que  souffrit  le 
vieillard  dont  nous  venons  de  parler  (7).  L'auteur  des  canons  apostoliques  (8),  Tertul- 
lien  (9),  saint  Cyprien  (  10),  Lucifer  de  Gagliari  (  1 1),  saint  Hilaire  (12),  saint  Am- 
broise(n),   saint   Augustin  (14),  Cassiodore,  Raban   Maur,   le  prêtre   Bellator,  saint 


(1)  A  liât,  de  Simonib.  p.  200.  —  (2)  Vide  Rab..n.  Gencbrard.  Chronolog.  Médina.  L  1.  de  fide.  c.  IJ.  Cotel.  not.  ad  Can. 
Apnst.  p.  ?j8.  H:  SeuiEpa  Si  J3i6Xoç  iv  eïfiei  ÉjttffToXïjç  oùaa.  —  (  j)  Aug.  de  Doclr.  Christ.  L  11.  c.  8.  In  canonicis  scripturis 
ecclesiarum  catholicarum  quamplurium  auctoritatem  sequatur  ;  inter  quas  sane  illae  sunt  quas  apostolicas  sedes 
tenere,  et  epistolas  habere  meruerunt.  Tenebit  igitur  hune  modum  in  scnpiuris  canonicis,  ut  eas  quas  ab  omnibus 
accipiuntur  ecclesiis  catholicis  prasponat  eis  quas  quaedam  non  accipiunt;  in  eis  vero  quas  non  accipiuntur  ab  omni- 
bus, prseponat  eas  quas  plures  gravioresque  recipiunt,  eis  quas  pauciores,  minorisque  auctoritatis  ecclesiae  tenent. 
(4)  Cregor.  Moral,  lib.  xix.  c.  :i.  n.  54.  non.  edit.  v ide  prœfat.  gênerai,  p.  xj.  art.  it>.  —  (s)  Damascen.  de  fide  ortho- 
doxa.  lib.  i\.  c.  18.  Mais  ie  même  père,  dans  le  discours  sur  les  fidèles  trépassés,  cite  le  second  livre  des  Macca- 
bées comme  Écriture  divine.  —  (6j  Hcbr.  xi.  ?;.  A'ÀXot  oi  étuu.Jiav!8r)iav.  —  (7j  11.  Mach.vf.  19.  AôôoupSToj;  ir.i  xô 
TÙpmvov  KpoaTJve.  —  (8)  Can.  apostol.  84.  seu  85.—  (9)  Tertul.  advers.  Jud.  c.  4.  —  ^io)  Crprian.  lib.  de  exhort.  ad  martrr. 
c.  11.  et  Testimon.  ad  Quinc.  lib.  m.  c.  15.  et  ep.L\.  ad  Cornet.  Pap.  —  (11  j  Lucifer.  Calarit.  lib.  de  non  parcendo  in 
Deum  delinquentibus.  —  (12)  Hilar.  in  Psalm.  cxxxiv.  et  lib.  contra  Constantium  imper.  —  (1?)  Ambros.  de  Jacob,  et  vita 
beata.  lib.  11.  c.  10.  11.  12.  et  de  Offic.  lib.  1.  c.  40.  41.  et  iib.  m.  c.  29.  -  (14)  Aug.  lib.  de  cura  gerenda  pro  mortuis.  ci. 
et  de  Doct.  Christ,  et  de  Civit.  lib.  xvm.  c.  j6.  et  lib.  11.  contra   Caudent.  Donatist.  lib.  1.  c.  51. 


4  INTRODUCTION 

Isidore  de  Séville,  et  divers  autres  les  ont  cités  comme  écritures  canoniques  ;  le  troi- 
sième concile  de  Carthage  (15),  et  enfin  celui  de  Trente  (16),  les  ont  reconnus  pour 
livres  inspirés,  et  les  ont  reçus  dans  leur  canon.  Le  pape  Gélase,  dans  les  imprimés, 
ne  marque  qu'un  livre  des  Maccabées  canonique  ;  mais  on  assure  qu'il  y  a  de  bons 
manuscrits  qui  en  marquent  deux. 

Nous  avons  omis  exprès  les  autorités  d'Origène  et  de  saint  Jérôme,  parce  qu'elles 
ne  sont  pas  tout  à  (ait  uniformes,  et  qu'il  paraît  quelque  espèce  de  contradiction  dans 
leurs  propres  sentiments  comparés  entre  eux.  Origène,  dans  sa  préface  sur  les  Psaumes, 
exclut  les  deux  livres  des  Maccabées  du  nombre  des  divines  Ecritures;  mais  dans  le 
second  livre  des  Principes,  chapitre  iel',  et  dans  son  commentaire  sur  le  chapitre  v  de 
l'épître  aux  Romains,  il  en  parle  comme  d'ouvrages  inspirés  et  d'une  autorité  égale 
aux  autres  livres  canoniques.  Saint  Jérôme,  dans  sa  préface  sur  les  livres  de  Salomon, 
dit  que  l'Eglise  lit  à  la  vérité  les  volumes  des  Maccabées,  mais  qu'elle  ne  les  reçoit 
point  parmi  les  ouvrages  canoniques  :  Machabœorum  libres  legit  quidem  Ecclesia,  sed  eos 
inter  canonicas  scripturas  non  recipit.  Mais  ailleurs  le  même  père  cite  ces  ouvrages 
comme  Ecriture  divine. 

Enfin,  on  doit  faire  attention  que  la  plupart  des  pères  qui  ont  exclu  ces  livres  du 
canon  n'ont  parlé  que  dans  le  sentiment  des  Juifs,  qui  ne  les  y  reçoivent  pas  encore 
aujourd'hui  :  d'autres  ont  été  assez  peu  exacts  et  assez  peu  constants  dans  ce  qu'ils  en 
ont  dit  ;  les  uns  ont  cité  comme  divins  les  mêmes  ouvrages  qu'ils  excluaient  du  canon, 
comme  saint  Jérôme  et  Origène  ;  les  autres  ont  admis  dans  le  canon  des  ouvrages  qui 
en  sont  exclus  depuis  très  longtemps  du  consentement  unanime  de  toute  l'Eglise, 
comme  saint  Jean  Damascène  qui  y  reçoit  les  canons  des  apôtres,  composés  par  saint 
Clément.  Quelques-uns  ont  omis  dans  les  catalogues  des  livres  reconnus  sans  contra- 
diction et  des  Juifs  et  des  chrétiens,  comme  le  livre  d'Esther,  qui  est  omis  par  Méli- 
ton,  par  saint  Athanase,  ou  par  l'auteur  de  la  Synopse,  par  saint  Grégoire  de  Nazianze, 
par  Léontius  et  par  Nicéphore  de  Constantinople. 

On  ne  peut  donc  pas  raisonnablement  contester  à  ces  deux  livres  leur  qualité  de  cano- 
niques sur  ces  diversités  de  sentiments,  puisque  le  poids  des  preuves  et  des  autorités  qui 
la  leur  assurent  est  sans  comparaison  plus  grand  que  celui  des  raisons  contraires. 

Le  premier  livre,  qui  contient  l'histoire  des  Juifs  depuis  le  commencement  du  règne 
d'Antiochus  Epiphane  jusqu'à  la  mort  du  pontife  Simon,  remonte  d'abord  jusqu'à 
Alexandre  le  Grand.  Ce  monarque  puissant  défait  Darius,  roi  des  Perses  et  des 
Mèdes,  et  porte  ses  conquêtes  jusqu'aux  extrémités  du  monde.  11  tombe  malade,  laisse 
à  ses  principaux  officiers  le  gouvernement  des  provinces  qu'il  leur  avait  confiées,  et 
meurt.  Plusieurs  royaumes  se  forment  dans  les  provinces  de.  son  empire,  et  entre 
autres  celui  de  Syrie,  à  la  tète  duquel  paraît  enfin  Antiochus  Epiphane.  Alors  des  Juifs 
ambitieux  et  impies  font  alliance  avec  les  gentils  ;  ils  embrassent  leurs  coutumes  et  aban- 
donnent la  loi  du  Seigneur.  Antiochus  s'empare  de  l'Egypte,  ravage  la  Judée,  pille  le 
temple  de  Jérusalem,  et  s'en  retourne  en  Syrie  chargé  de  dépouilles.  11  envoie  à  Jéru- 
salem Apollonius,  surintendant  des  tributs,  avec  une  nombreuse  suite.  Cet  officier  porte 
la  désolation  dans  la  ville  :  il  la  remplit  de  carnage,  en  enlève  les  richesses,  en  détruit 
les  maisons,  en  renverse  les  murailles,  en  emmène  les  habitants,  et  y  met  une  garnison 
qui  y  cause  toutes  sortes  de  maux.  Antiochus  fait  publier  un  édit  par  lequel  il  déclare 
qu'il  ne  veut  plus  souffrir  qu'une  seule  religion  dans  tout  son  royaume.  Plusieurs  Israélites 
s'y  soumettent,  et  embrassent  le  culte  des  idoles.  11  fait  placer  l'idole  de  Jupiter  sur 
l'autel  du  Seigneur.  11  fait  dresser  des  autels  dans  toutes  les  villes  de  Juda,  et  emploie 
les   derniers  supplices   pour   contraindre   les  Juifs  de  sacrifier  aux    idoles   (chap.  1). 


(1)  Concil.  Carthag.  ni.  Can.  47.  —  (2;  Innocent.  1.  ad  Exupcr. 


INTRODUCTION  5 

Mattathias,  touché  des  maux  de  son  peuple,  et  de  la  profanation  des  choses  saintes, 
sort  de  Jérusalem  avec  sa  famille,  et  se  retire  sur  la  montagne  de  Modin.  Il  refuse  de 
sacrifier  aux  idoles,  et  rejette  toutes  les  offres  qu'on  lui  fait  pour  commettre  cette  im- 
piété. Il  tue  sur  l'autel  profane  un  Juif  qui  s'était  avancé  pour  y  sacrifier.  Il  tue  aussi 
l'officier  d'Antiochus  qui  l'y  contraignait,  et  se  retire  dans  les  montagnes  avec  les 
siens,  abandonnant  tout  ce  qu'ils  avaient  dans  la  ville.  Plusieurs  Juifs  attachés  à  la  loi 
de  Dieu  se  retirent  aussi  dans  le  désert.  L'armée  d'Antiochus  vient  les  y  attaquer  un 
jour  de  sabbat,  Ils  se  laissent  tuer  sans  se  défendre,  de  peur  de  violer  le  repos  sacré 
de  ce  jour.  Mattathias  et  ses  gens  n'approuvent  pas  cette  conduite,  et  prennent  la 
résolution  de  se  défendre  le  jour  du  sabbat  même,  s'ils  sont  attaqués.  Tous  ceux  qui 
avaient  du  zèle  pour  la  loi  se  joignent  à  Mattathias  :  ils  forment  un  corps  d'armée,  et 
vont  partout  détruire  le  culte  des  idoles  et  rétablir  celui  du  Seigneur.  Mattathias,  sen- 
tant sa  mort  approcher,  exhorte  ses  enfants  à  être  de  vrais  zélateurs  de  la  loi  du  Sei- 
gneur. Il  leur  représente  la  piété  de  leurs  ancêtres,  et  la  faiblesse  de  leurs  ennemis.  Il 
feur  ordonne  de  suivre  les  conseils  de  Simon  leur  frère,  et  d'obéir  aux  ordres  de  Judas 
Maccabée  qu'il  établit  leur  général  d'armée  (chap.  n). 

Judas  succède  à  son  père  en  la  charge  de  chef  du  peuple  d'Israël.  Il  défait  et  tue 
dans  un  grand  combat  Apollonius,  qui  commandait  pour  Antiochus  dans  la  Samarie. 
Séron,  général  de  l'armée  de  Syrie,  espérant  acquérir  de  la  gloire  par  la  défaite  de  Judas, 
vient  'l'attaquer  avec  une  puissante  armée.  Judas  marche  au-devant  de  lui,  plein  de 
confiance  dans  la  justice  de  sa  cause  et  dans  la  puissance  de  Dieu.  Il  défait  l'armée 
ennemie,  et  acquiert  une  grande  réputation.  Antiochus,  irrité  de  la  défaite  de  ses  deux 
armées,  en  lève  une  troisième,  la  paie  pour  un  an,  et  s'en  va  en  Perse.  Il  laisse  à 
Lysias  le  gouvernement  de  son  royaume,  et  le  soin  de  l'éducation  de  son  fils,  avec 
ordre  de  détruire  entièrement  la  Judée  et  d'exterminer  tous  les  Juifs.  Lysias  y  envoie 
trois  généraux  avec  quarante  mille  hommes  de  pied  et  sept  mille  chevaux.  Judas  et  les 
siens  ont  recours  au  jeûne,  à  la  prière  et  à  d'autres  exercices  de  religion,  pour  se 
disposer  à  combattre  les  ennemis  ^chap.  m).  Gorgias,  l'un  des  trois  généraux,  tâche 
de  surprendre  Judas  pendant  la  nuit,  avec  un  détachement  de  l'armée  royale.  Judas  en 
est  averti,  et  marche  lui-même  pour  attaquer  le  camp  des  ennemis;  il  les  charge,  les 
défait  et  les  met  en  fuite.  Revenu  de  la  poursuite  des  ennemis,  il  empêche  ses  gens 
de  se  jeter  sur  le  butin,  jusqu'à  ce  qu'ils  aient  défait  le  détachement  commandé  par 
Gorgias.  Ce  général  s'aperçoit  de  la  défaite  de  l'armée;  et,  saisi  de  frayeur,  il  prend  la 
fuile°avec  toute  sa  troupe.  Judas  pille  alors  le  camp  des  ennemis,  et  chante  les  louanges 
du  Seigneur.  Lysias  lève  une  nouvelle  armée  plus  nombreuse  et  plus  forte  que  la  pré- 
cédente, et  se  met  lui-même  à  la  tète.  Judas  invoque  le  secours  du  Seigneur,  taille  en 
pièces  cinq  mille  hommes  de  l'armée  ennemie  et  met  le  reste  en  fuite.  Lysias  retourne 
à  Antioche  pour  y  lever  de  nouvelles  troupes,  et  revenir  en  Judée.  Judas,  profitant  du 
repos  que  lui  donnaient  l'absence  de  Lysias  et  la  défaite  de  son  armée,  va  à  Jérusalem, 
purifie  les  lieux  saints,  y  rétablit  le  culte  du  Seigneur,  et  fortifie  la  montagne  de  Sion 

(chap.  iv). 

Les  nations  voisines  de  la  Judée,  irritées  de  ce  qu'on  y  avait  rétabli  le  culte  du 
Seigneur,  prennent  la  résolution  d'exterminer  tous  les  Juifs,  et  en  tuent  quelques-uns. 
Judas  défait  les  Iduméens  et  les  Ammonites,  prend  la  ville  de  Gazer  au-delà  du  Jour- 
dain et  revient  en  Judée.  11  marche  au  secours  des  Juifs  opprimés  dans  le  pays  de 
Galaad,  et  envoie  son  frère  Simon  au  secours  de  ceux  de  Galilée  qui  étaient  dans  la 
même  oppression.  Il  laisse  Joseph  et  Azarias  pour  garder  la  Judée,  et  leur  défend  de 
rien  entreprendre  contre  les  ennemis.  Simon  défait  les  ennemis  dans  la  Galilée,  enlève 
leurs  dépouilles,  délivre  les  Juifs  opprimés  et  les  emmène  dans  la  Judée.  Judas  etJona- 
thas,  son  frère,  apprennent  l'état  déplorable  où  sont  réduits  les  Juifs  dans  le  pays  de 
Galaad.  Ils  marchent  contre  leurs  ennemis,  les  défont  et  brûlent  leurs  villes.  Timothée, 
général  des  ennemis,  rassemble  une  nouvelle  armée,  et  se  prépare  à  attaquer  Judas. 


6  INTRODUCTION 

Judas  le  prévient,  jette  la  terreur  parmi  ses  troupes,  les  défait  entièrement,  et  brûle  la 
ville  et  le  temple  de  Carnaïm,  où  les  fuyards  s'étaient  retirés.  Il  emmène  dans  la  Judée 
tous  les  Israélites  qui  étaient  au  pays  de  Galaad.  Il  prend,  pille  et  détruit  la  ville 
d'Ephron  qui  lui  avait  refusé  le  passage.  Il  arrive  à  Jérusalem,  et  y  offre  des  sacrifices 
en  actions  de  grâces.  Joseph  et  Azarias  apprennent  les  heureux  exploits  de  Judas  et 
de  Simon,  son  frère.  Ils  veulent  aussi  rendre  leur  nom  célèbre  sur  la  terre.  Ils  marchent 
contre  Jamnia.  Mais,  au  lieu  de  signaler  leur  courage,  ils  sont  défaits  par  Gorgias,  et 
s'enfuient  après  avoir  perdu  environ  deux  mille  hommes.  Les  troupes  de  Judas  sont 
honorées  de  tous  les  peuples.  Il  les  mène  contre  les  Iduméens  qui  étaient  vers  le  midi 
de  la  Judée,  et  à  qui  il  prend  Chébron.  Il  marche  contre  les  Philistins,  renverse  leurs 
autels,  brûle  leurs  idoles,  enlève  le  butin  qu'il  trouve  dans  leurs  villes,  et  revient  en 
Judée  (chap.  v).  Antiochus,  ayant  appris  qu'Elymaïde,  ville  de  Perse,  était  remplie  de 
richesses,  entreprend  de  s'en  rendre  maître  :  il  est  repoussé  par  les  habitants.  Il 
apprend  en  même  temps  la  mauvaise  issue  de  la  guerre  que  ses  généraux  faisaient  en 
Judée.  Il  en  est  outré  de  douleur  ;  il  tombe  malade,  et  meurt.  Son  fils.  Antiochus  Eu- 
pator,  lui  succède.  Les  étrangers  qui  étaient  dans  la  forteresse  de  Jérusalem  incom- 
modent les  Juifs.  Judas  les  assiège;  quelques-uns  en  sortent,  et  vont  avec  des  impies 
qui  se  joignent  à  eux,  implorer  le  secours  d'Eupator.  Ce  prince  irrité  entre  en 
Judée  avec  une  armée  formidable.  Judas  s'avance  au-devant  de  lui  avec  le  peu  de 
troupes  qu'il  commandait,  et  lui  tue  six  cents  hommes.  Eléazar,  frère  de  Judas,  expose 
sa  vie  pour  le  salut  de  son  peuple  :  il  est  écrasé  sous  un  éléphant  après  l'avoir  percé. 
Les  Juifs,  ne  pouvant  soutenir  les  efforts  des  ennemis,  se  retirent  à  Jérusalem.  Eupator 
les  y  suit.  Il  reçoit  à  composition  la  ville  de  Bethsura,  et  y  met  garnison.  Il  attaque  les 
lieux  saints.  Les  Juifs  les  défendent  avec  un  grand  courage.  Plusieurs  d'entre  eux  se 
retirent,  faute  de  vivres.  Lysias  apprend  que  Philippe,  nommé  tuteur  du  jeune  prince, 
veut  se  rendre  maître  du  gouvernement  du  royaume.  Il  conseille  au  jeune  prince  de 
faire  la  paix  avec  les  Juifs.  Eupator  y  consent,  et  elle  est  conclue  (chap.  vi). 

Démétrius,  fils  de  Séleucus  Philopator,  qui  était  resté  en  otage  à  Rome,  en  étant 
sorti,  vient  en  Syrie,  et  recouvre  le  royaume  qu'Antiochus  Epiphane,  son  oncle,  avait 
usurpé  sur  lui.  11  fait  mourir  Eupator  et  Lysias,  envoie  en  Judée  Bacchide,  et  établit 
grand  prêtre  l'impie  Alcime.  Bacchide  et  Alcime  tâchent  en  vain  de  surprendre  Judas. 
Ils  tuent  soixante  docteurs  de  la  loi  qui  s'étaient  fiés  à  leur  parole,  et  à  qui  ils  avaient 
juré  de  ne  faire  aucun  mal.  Bacchide  fait  mourir  plusieurs  Juifs,  laisse  le  gouvernement 
de  la  province  à  Alcime,  et  va  retrouver  le  roi.  Alcime  travaille  à  s'affermir  dans  la 
principauté  du  sacerdoce.  Les  Juifs  méchants  et  impies  se  joignent  à  lui,  et  font  plus 
de  mal  à  leurs  frères  que  n'en  avaient  fait  les  gentils.  Judas  s'oppose  à  ces  désordres; 
et  Alcime,  le  voyant  plus  fort  que  lui,  va  l'accuser  auprès  du  roi,  qui  envoie  Nicanor 
avec  une  armée  nouvelle  ;  mais  cette  armée  est  défaite,  et  contrainte  de  s'enfuir. 
Nicanor  monte  sur  le  mont  de  Sion.  Il  méprise  les  prêtres  et  les  sacrifices  qu'ils 
offraient  pour  le  roi.  Il  menace  de  brûler  le  temple,  et  se  retire  plein  de  fureur.  Les 
prêtres  ont  recours  à  Dieu,  et  Judas  remporte  une  victoire  complète  :  Nicanor  est  tué 
le  premier.  Ses  troupes,  le  voyant  tué,  jettent  leurs  armes  et  prennent  la  fuite.  Celles  de 
Judas  les  poursuivent.  Les  peuples  de  la  Judée  les  chargent  de  tous  côtés,  et  les  «tuent 
tous.  Ils  s'enrichissent  de  leurs  dépouilles,  et  font  de  ce  jour  une  fête  solennelle  (chap. 
vu).  Le  nom  des  Romains  vient  à  la  connaissance  de  Judas.  Il  est  informé  de  la  gran- 
deur de  leur  puissance,  de  la  valeur  de  leurs  troupes,  de  la  sagesse  de  leur  gouverne- 
ment, et  de  la  protection  qu'ils  donnent  à  leurs  alliés.  Il  envoie  des  ambassadeurs  à 
Rome  pour  faire  alliance  avec  eux.  Ici  se  trouvent  rapportées  la  formule  et  les  condi- 
tions de  cette  alliance  (chap.  vin). 

Démétrius  renvoie  Bacchide  et  Alcime  dans  la  Judée  avec  ses  meilleures  troupes. 
Judas  ne  laisse  pas  de  les  combattre  avec  huit  cents  hommes,  et  est  tué  dans  le  com- 
bat. Ses  frères  l'enterrent  avec  honneur.  Tout  Israël  le  pleure  pendant  plusieurs  jours. 


INTRODUCTION  7 

Les  méchants  profitent  de  sa  mort  pour  se  rendre  maîtres  du  pays  :  en  même  temps  sur- 
vient une  grande  famine.  Les  amis  de  Judas  choisissent  Jonathas,  son  frère,  pour  les 
commander  à  sa  place.  Bacchide  cherche  le  moyen  de  tuer  Jonathas,  qui  s'enfuit  dans 
le  désert.  Bacchide  vient  l'y  chercher  avec  toute  son  armée.  Jonathas  envoie  Jean,  son 
irère,  prier  les  Nabathéens  de  l'assister.  Jean  est  tué  par  les  fils  de  Jambri.  Jonathas 
venge  sa  mort,  et  se  retire  vers  le  Jourdain.  Bacchide  vient  l'attaquer  avec  une  puis- 
sante armée,  Jonathas  lui  tue  mille  hommes,  et  passe  le  Jourdain  en  sa  présence.  Bac- 
chide retourne  à  Jérusalem,  et  bâtit  plusieurs  forteresses  dans  la  Judée.  Alcime  com- 
mence à  faire  abattre  les  murailles  du  temple.  Il  est  frappé  de  Dieu,  et  meurt  dans 
d'extrêmes  douleurs.  Bacchide  s'en  retourne  vers  le  roi,  son  maître,  et  la  Judée  demeure 
en  paix.  A  la  sollicitation  des  mauvais  Juifs,  Bacchide  revient  en  Judée  avec  une  puis- 
sante armée  pour  surprendre  Jonathas.  Ce  chef  du  peuple  de  Dieu  se  retire  dans  une 
ville  du  désert,  qu'il  fortifie.  Bacchide  assiège  cette  place,  Simon  la  défend,  brûle  les 
machines  de  Bacchide,  défait  son  armée,  et  l'oblige  de  se  retirer.  Bacchide  irrité  fait 
mourir  les  hommes  d'iniquité  qui  l'avaient  rappelé  en  Judée.  11  fait  la  paix  avec  Jona- 
thas, lui  rend  les  prisonniers,  se  retire  pour  toujours  dans  son  pays,  et  laisse  la  Judée 
en  paix  (chap.  ix).  Alexandre  Bala,  qui  se  disait  fils  d'Antiochus  Épiphane,  s'empare  de 
Ptolémaïde.  Démétrius  lève  une  puissante  armée  pour  le  combattre;  il  s'efforce  d'attirer 
Jonathas  dans  son  parti.  Il  lui  donne  le  pouvoir  de  lever  une  armée,  et  lui  remet  toutes 
les  places  qu'il  avait  dans  la  Judée.  Alexandre  tâche  aussi  de  gagner  l'amitié  de  Jona- 
thas. Il  lui  écrit  une  lettre  obligeante,  lui  confirme  la  souveraine  sacrificature,  et  lui  fait 
de  riches  présents.  Jonathas  entre  dans  l'exercice  de  la  sacrificature.  Il  lève  une  puis- 
sante armée,  et  fait  faire  quantité  d'armes.  Démétrius  lui  écrit  une  lettre  pleine  de  pro- 
messes magnifiques  pour  lui  et  pour  sa  nation.  Jonathas  et  son  peuple  ne  croient  point 
sincères  les  propositions  de  Démétrius  :  ils  les  rejettent,  et  embrassent  le  parti 
d'Alexandre.  Celui-ci  lève  une  nombreuse  armée,  marche  contre  Démétrius,  le  com- 
bat, le  défait  et  le  tue.  Il  envoie  des  ambassadeurs  à  Ptolémée  Philométor  pour  lui  de- 
mander son  amitié  et  sa  fille.  Ptolémée  lui  accorde  sa  demande.  Ils  viennent  à  Ptolé- 
maïde, où  les  noces  se  célèbrent  avec  une  grande  magnificence.  Jonathas,  à  la  prière 
d'Alexandre,  vient  saluer  les  deux  rois  à  Ptolémaïde.  Il  y  paraît  avec  beaucoup  d'éclat, 
et  leur  lait  de  riches  présents.  Il  y  est  accusé  par  ses  ennemis.  Alexandre  refuse  de 
les  écouter,  et  les  couvre  de  confusion  par  les  honneurs  dont  il  comble  Jonathas.  Dé- 
métrius, fils  du  précédent,  part  de  l'île  de  Crète,  où  son  père  l'avait  mis  en  sûreté  pen- 
dant la  guerre,  et  vient  en  Cilicie.  Il  fait  Apollonius  général  de  son  armée,  et  l'envoie 
contre  les  Juifs,  qui  demeuraient  fermes  dans  le  parti  d'Alexandre.  Jonathas,  vivement 
touché  des  insultes  d'Apollonius,  choisit  dix  mille  hommes  et  marche  contre  lui,  lui 
livre  bataille,  défait  son  armée,  la  met  en  fuite,  brûle  Azot  et  le  temple  de  Dagon,  avec 
tous  ceux  qui  s'y  étaient  retirés,  et  revient  à  Jérusalem  comblé  d'honneurs  et  chargé  de 
butin  (chap.  x). 

Ptolémée,  feignant  de  vouloir  secourir  Alexandre,  son  gendre,  lève  une  grande- 
armée,  et  s'empare  de  son  royaume.  Jonathas  vient  le  voir  à  Joppé,  et  en  est  très  bien 
reçu.  Ptolémée  ôte  sa  fille  à  Alexandre,  et  la  donne  à  Démétrius.  Alexandre  marche 
contre  lui,  et  perd  la  bataille.  Il  se  retire  auprès  de  Zabdiel,  prince  des  Arabes,  qui 
lui  fait  couper  la  tète,  et  l'envoie  à  Ptolémée.  Ptolémée  meurt.  Démétrius  fait  passer 
au  fil  de  l'épée  les  gens  que  le  roi  d'Egypte  avait  mis  en  garnison  dans  les  places  de 
Syrie.  11  rentre  en  possession  de  ce  royaume.  Jonathas  assiège  la  forteresse  de  Jéru- 
salem. Démétrius  le  fait  venir  à  Ptolémaïde  pour  conférer  avec  lui,  et  le  comble  d'hon- 
neurs, malgré  les  calomnies  de  ses  ennemis.  Il  accorde  plusieurs  immunités  et  de 
grands  privilèges  aux  Juifs,  en  considération  et  à  la  prière  de  Jonathas.  Il  congédie  son 
armée  et  ne  garde  que  les  troupes  étrangères.  Cette  conduite  lui  attire  la  haine  des 
soldats,  et  donne  lieu  à  Tryphon  de  vouloir  élever  sur  le  trône  Antiochus,  fils 
d'Alexandre,   qui   était  auprès  d'Elmalchuel,  roi  des   Arabes.  Jonathas   envoie   prier 


8  INTRODUCTION 

Démétrius  de  retirer  les  garnisons  qu'il  avait  dans  les  places  de  Judée.  Démétrius  pro- 
met de  le  faire  et  de  le  combler  de  biens.  Il  lui  demande  du  secours  contre  son  peuple, 
qui  s'était  révolté  contre  lui.  Jonathas  lui  envoie  trois  mille  Juifs,  qui  tuent  cent  mille 
rebelles,  délivrent  le  roi,  et  lui  soumettent  la  ville  d'Antioche.  Démétrius,  au  lieu  de 
combler  de  biens  Jonathas,  comme  il  le  lui  avait  promis,  lui  fait  tout  le  mal  qu'il  peut. 
Tryphon  amène  le  jeune  Antiochus,  et  le  fait  reconnaître  pour  roi.  Ce  jeune  prince 
combat  Démétrius,  et  le  met  en  fuite.  Il  écrit  à  Jonathas,  lui  confirme  la  souveraine 
sacrificature,  lui  fait  de  riches  présents,  et  donne  à  son  frère  Simon  le  gouvernement 
de  la  Phénicie  et  de  la  Palestine.  Jonathas,  pour  reconnaître  les  bienfaits  d'Antiochus, 
va  lui  soumettre  les  villes  d'au-delà  du  Jourdain,  qui  tenaient  encore  le  parti  de  Démé- 
trius. II  laisse  à  son  frère  Simon  le  soin  d'achever  les  conquêtes  qu'il  avait  commen- 
cées, et  il  revient  au  secours  de  la  Galilée,  que  les  généraux  de  Démétrius  avaient 
attaquée.  11  marche  contre  les  ennemis.  11  est  abandonné  des  siens.  Il  a  recours  au  Sei- 
gneur. Fortifié  par  la  prière,  il  attaque  les  troupes  de  Démétrius,  les  met  en  fuite  ; 
et  son  exemple  ayant  ranimé  les  siens,  ils  poursuivent  les  ennemis  jusque  dans  leur 
camp  (chap.  xi).  Jonathas  renouvelle  l'alliance  avec  les  Romains  et  les  Lacédémo- 
niens.  11  va  ensuite  au-devant  de  l'armée  de  Démétrius,  qui  veut  le  surprendre.  Sa  pré- 
sence met  la  terreur  dans  le  camp  des  ennemis  ;  ils  prennent  la  fuite.  Il  les  poursuit 
sans  pouvoir  les  atteindre.  Il  tourne  ses  armes  contre  les  Arabes  et  les  Syriens  ;  et  son 
frère  Simon  étend  ses  conquêtes  jusqu'à  Joppé.  Jonathas  relève  les  murs  de  Jérusalem, 
et  bâtit  des  forteresses  dans  la  Judée,  mais  il  se  laisse  surprendre  par  les  artifices  de 
Tryphon.  Il  va  avec  lui  à  Ptolémaïde,  où  Tryphon  le  fait  arrêter,  et  tue  tous  ceux  qui 
étaient  avec  lui.  Tryphon  envoie  des  troupes  contre  celles  que  Jonathas  avait  congé- 
diées. Ces  dernières  montrent  tant  de  courage  et  de  fermeté,  que  celles  de  Tryphon 
n'osent  les  attaquer.  La  prise  de  Jonathas  met  tout  Israël  en  deuil,  et  relève  le  courage 
de  ses  ennemis  (chap.  xn). 

Simon  va  à  Jérusalem,  assemble  le  peuple,  lui  découvre  la  disposition  où  il  est  de 
sacrifier  sa  vie,  comme  ont  fait  ses  frères,  pour  le  salut  de  sa  patrie.  Il  est  reconnu  chef 
de  la  nation,  et  tous  promettent  de  lui  obéir.  Il  rassemble  une  petite  armée,  rebâtit  les 
murs  de  Jérusalem,  reprend  Joppé  et  s'oppose  aux.  entreprises  de  Tryphon,  qui,  après 
avoir  tiré  de  lui  de  l'argent  et  les  deux  enfants  de  Jonathas,  sous  prétexte  de  délivrer 
celui-ci,  fait  tuer  le  père  avec  ses  deux  enfants.  Simon  recueille  les  os  de  Jonathas,  et 
les  ensevelit  avec  honneur.  Il  bâtit  un  tombeau  magnifique  pour  son  père  et  ses  frères. 
Tryphon  tue  le  jeune  Antiochus  et  s'empare  de  son  royaume.  Après  avoir  réparé  les 
places  de  Judée,  Simon  envoie  offrir  à  Démétrius  de  se  déclarer  pour  lui  contre  Tryphon. 
Démétrius  accepte  ses  offres,  et  décharge  la  Judée  de  tout  impôt.  Les  Juifs  sont  délivrés 
du  joug  des  gentils  et  font  de  cet  événement  une  époque  nouvelle. Simon  assiège  et  prend 
Gaza.  11  en  chasse  tous  les  habitants,  et  y  entre  en  chantant  des  hymnes  au  Seigneur. 
Les  Syriens  enfermés  dans  la  forteresse  de  Jérusalem,  pressés  de  la  faim, lui  remettent  la 
place.  Il  y  entre  en  chantant  les  louanges  de  Dieu.  Il  ordonne  qu'on  en  célébrera  tous 
les  ans  la  mémoire  par  une  fête  solennelle.  Il  établit  son  fils  Jean  Hyrcan  général  de 
toutes  les  troupes  d'Israël  (chap.  xm).  Démétrius  rassemble  une  armée,  et  marche 
contre  les  Parthes.  Il  est  défait  et  pris.  Les  Juifs  jouissent  d'une  tranquillité  parfaite 
sous  le  gouvernement  de  Simon.  Les  Romains  et  les  Lacédémoniens  s'affligent  de  la 
mort  de  Jonathas.  Ils  renouvellent  leur  alliance  avec  Simon,  et  lui  écrivent  des  lettres 
très  flatteuses.  Simon  envoie  des  ambassadeurs  à  Rome  avec  de  riches  présents.  Il 
reçoit  des  Juifs  la  souveraine  autorité  sur  eux  en  reconnaissance  des  grands  services 
qu'il  avait  rendus  à  la  nation.  Ici  se  trouve  le  dénombrement  de  ses  belles  actions 
(chap.  xiv). 

Antiochus, autre  fils  de  l'ancien  Démétrius, prenant  le  titre  de  roi  de  Syrie  à  la  place  de 
son  frère,  écrit  à  Simon  des  lettres  très  favorables,  lui  confirme  tous  les  dons  que  ses 
prédécesseurs  lui  ont  faits,  et  promet  de  le  combler  d'honneur  et  de  gloire.  Antiochus 


INTRODUCTION  9 

entre  dans  le  pays  de  ses  pères.  Tryphon  est  abandonné  de  ses  troupes,  qui  se  joignent 
à  celles  d'Antiochus.  Celui-ci  poursuit  Tryphon,  et  l'assiège  dans  Dora.  Les  Romains 
écrivent  en  faveur  des  Juifs  aux  peuples  qui  étaient  leurs  voisins.  Antiochus  serre  de  près 
Dora,  et  y  tient  Tryphon  enfermé.  Il  refuse  le  secours  et  les  présents  de  Simon,  et  lui 
fait  faire  de  très  injustes  propositions.  Simon  y  répond  avec  beaucoup  de  modération. 
Tryphon  se  sauve  de  Dora.  Antiochus  le  poursuit,  après  avoir  donné  ordre  à  Cen- 
débée  de  marcher  contre  les  Juifs  avec  son  armée  (chap.  xv).  Simon  envoie  ses  deux 
fils,  Judas  et  Jean,  contre  Cendébée,  qui  venait  les  attaquer  avec  l'armée  d'Antiochus. 
Cette  armée  est  défaite  et  mise  en  fuite.  Ptolémée,  gendre  de  Simon,  le  fait  tuer  avec 
deux  de  ses  enfants,  Mattathias  et  Judas,  afin  de  se  rendre  maître  de  tout  le  pays. 
Ptolémée  demande  du  secours  au  roi  Antiochus,  et  promet  de  lui  livrer  le  pays.  Il 
envoie  des  gens  pour  tuer  Jean  Hyrcan,  et  pour  se  rendre  maître  de  Jérusalem.  Ils 
sont  découverts,  et  Jean  les  fait  mourir.  Ici  finit  le  premier  livre  des  Maccabées 
(chap.  xvi). 

Le  deuxième  livre  commence  par  la  lettre  des  Juifs  de  Judée  aux  Juifs  d'Egypte, 
pour  leur  recommander  de  célébrer  avec  eux  la  fête  de  la  nouvelle  dédicace  du  temple, 
établiée  par  Judas  Maccabée  (chap.  ier).  Elle  est  de  l'an  188,  de  l'ère  des  Séleucides, 
date  marquée  au  verset  10.  Ensuite  se  trouve  une  seconde  lettre  qui  commence  au  ver- 
set 1 .  Cette  lettre  ne  porte  point  de  date  ;  mais  elle  dut  être  écrite  lorsqu'on  eut  appris  par 
des  bruits  encore  incertains  les  premières  nouvelles  de  la  mort  d'Antiochus  Epiphane. 
Cette  lettre  remplit  les  vingt-sept  derniers  versets  du  chapitre  ier  et  les  dix-neufs 
premiers  du  chapitre  11.  A  la  suite  de  ces  deux  lettres  se  trouve  une  espèce  de  préface 
qui  contient  les  quatorze  derniers  versets  du  chapitre  11. 

L'ouvrage  commence  au  chapitre  m.  L'auteur  y  rappelle  d'abord  le  bonheur  des 
Juifs  sous  le  pontificat  d'Onias  m,  et  le  respect  que  les  rois  étrangers  avaient  alors 
pour  le  lieu  saint  :  de  là  il  vient  à  l'entreprise  d'Héliodore.  Simon,  préfet  de  temple, 
fait  savoir  à  Séleucus  Philipator,  roi  de  Syrie,  qu'il  y  a  de  très  grands  trésors  dans  le 
temple  et  qu'il  peut  s'en  rendre  maître.  Séleucus  envoie  Héliodore  à  Jérusalem  pour 
les  enlever.  Héliodore  est  d'abord  bien  reçu  par  le  grand  prêtre  Onias;  mais  il  déclare 
son  dessein,  et  toute  la  ville  est  dans  la  consternation.  Les  Juifs  ont  recours  à  la  prière 
et  à  la  pénitence.  Pendant  que  les  prêtres  invoquent  le  Seigneur,  Héliodore  veut  en- 
trer dans  le  temple.  11  en  est  chassé  par  des  anges  qui  le  frappent  si  rudement,  qu'il 
tombe  comme  mort.  Le  grand  prêtre  offre  un  sacrifice  pour  lui  :  Dieu  lui  rend  la  santé, 
et  lui  fait  dire  par  les  mêmes  anges  qui  l'avaient  châtié,  de  remercier  le  grand  prêtre  à 
qui  il  doit  la  vie,  et  d'annoncer  partout  la  puissance  de  Dieu.  Héliodore  obéit  à  cet 
ordre,  et  rend  témoignage  à  la  vérité. 

Simon,  qui  avait  attiré  Héliodore,  ose  accuser  Onias  de  cette  infidélité.  Onias  va 
trouver  Séleucus  pour  le  prier  d'arrêter  les  violences  de  Simon.  Antiochus  Epiphane 
succède  à  Séleucus  'son  frère.  Jason  obtient  à  prix  d'argent  la  souveraine  sacrificature 
qu'Onias,  son  frère,  exerçait  saintement.  11  commet  toutes  sortes  d'impiétés.  Il  envoie 
de  l'argent  à  Tyr  pour  les  sacrifices  d'Hercule.  Apollonius,  officier  d'Antiochus,  est 
envoyé  en  Egypte  par  ce  prince.  Antiochus  vient  à  Jérusalem,  et  y  est  reçu  magnifique- 
ment. Ménélaiis  enlève  la  souveraine  sacrificature  à  Jason,  en  offrant  à  Antiochus  une 
plus  grande  somme  d'argent.  Antiochus  ôte  cette  dignité  à  Ménélaiis  faute  de  paie- 
ment, et  la  donne  à  Lysimaque.  Les  habitants  de  Tharse  et  de  Mallo  se  révoltent 
contre  Antiochus.  Ménélaiis  dérobe  des  vases  sacrés  du  temple.  11  en  est  repris  par 
Onias,  qui  est  tué  par  Andronique.  Antiochus  pleure  la  mort  d'Onias  et  la  venge  sévè- 
rement. Lysimaque  commet  des  sacrilèges  dans  le  temple  par  le  conseil  de  Ménélaiis, 
et  est  tué  par  le  peuple.  Ménélaiis  est  accusé  devant  le  roi  par  des  députés  des  Juifs. 
Il  promet  une  grande  somme  d'argent  à  Ptolémée,  favori  du  roi,  qui  engage  ce  prince 
à  le  déclarer  innocent,  et  à  envoyer  ses  accusateurs  au  supplice  (chap.  iv). 


io  INTRODUCTION 

Des  prodiges  effrayants  paraissent  dans  l'air  au-dessus  de  Jérusalem  durant  quarante 
jours.  Jason  se  rend  maître  de  cette  ville,  et  y  fait  un  grand  carnage.  Il  est  obligé  de 
s'enfuir,  et  il  meurt  misérablement.  Antiochus  se  défie  des  Juifs,  et  entre  en  fureur 
contre  eux.  Il  prend  par  force  la  ville  de  Jérusalem,  et  en  fait  tuer  les  habitants.  Il 
entre  dans  le  temple,  profane  les  vases  sacrés,  en  enlève  les  richesses  et  retourne  à 
Antioche.  Il  s'abandonne  à  un  excès  d'orgueil.  Il  laisse  des  intrigants  dans  la  Judée 
pour  tourmenter  le  peuple.  Il  y  envoie  Apollonius  qui  y  exerce  de  grandes  cruautés. 
Judas  Maccabée  se  retire  dans  le  désert,  et  y  demeure  avec  les  siens  (chap.  v).  An- 
tiochus force  les  Juifs  d'abandonner  les  lois  de  Dieu  pour  embrasser  le  culte  des 
idoles.  Il  fait  profaner  le  temple  de  Jérusalem,  et  le  consacre  à  Jupiter  Olympien.  De 
nouvelles  cruautés  sont  alors  exercées  contre  les  Juifs  fidèles  à  la  loi  du  Seigneur.  Ici 
l'auteur  interrompt  sa  narration  pour  faire  remarquer  le  dessein  de  Dieu  dans  la  con- 
duite qu'il  tenait  alors  sur  son  peuple.  Il  reprend  l'histoire,  et  expose  la  fidélité  et  le 
courage  du  saint  vieillard  Eléazar,  la  fausse  compassion  de  ses  amis,  la  fermeté  de  sa 
foi,  son  attachement  à  la  religion,  la  prière  qu'il  fait  en  mourant  (chap.  vi)  ;  ii  y  joint 
le  martyre  des  sept  frères  et  de  leur  généreuse  mère  (chap.  vu). 

il  revient  à  Judas  Maccabée.  Cet  homme  plein  de  zèle  fortifie  son  parti,  et  attaque 
les  ennemis.  Il  invoque  le  Seigneur,  et  réussit  dans  toutes  ses  entreprises.  Philippe, 
gouverneur  de  Judée,  demande  du  secours  à  Ptolémée,  qui  commandait  dans  la  Ccelé- 
Syrie.  Ptolémée  lui  envoie  Nicanor  et  Gorgias  avec  vingt  mille  hommes.  Nicanor 
vend  par  avance  les  esclaves  qu'il  comptait  faire  sur  les  Juifs.  Judas,  instruit  de  l'arrivée 
et  des  desseins  de  Nicanor,  en  avertit  les  Juifs.  Ils  conjurent  le  Seigneur,  et  sont  en- 
couragés par  les  exhortations  de  Judas.  Celui-ci  partage  son  armée  en  plusieurs 
corps,  attaque  les  ennemis,  et  les  force  de  prendre  la  fuite.  Les  Juifs  enlèvent  l'argent 
de  ceux  qui  étaient  venus  pour  les  acheter,  et  toutes  les  dépouilles  de  leurs  ennemis. 
Ils  célèbrent  le  sabbat,  et  prient  le  Seigneur  de  se  réconcilier  avec  eux.  Ils  continuent 
de  remporter  de  grands  avantages  sur  leurs  ennemis,  et  particulièrement  sur  Timothée 
et  Bacchide.  Ils  se  rendent  maîtres  de  plusieurs  places,  et  font  un  riche  butin.  Nicanor 
s'enfuit  à  Antioche,  et  y  publie  la  puissance  du  Dieu  des  Juifs  (chap.  vm).  Antiochus, 
qui  était  allé  en  Perse,  entreprend  d'y  piller  un  temple  :  il  est  honteusement  repoussé. 
Il  revient,  et,  sur  sa  route,  il  reçoit  la  nouvelle  de  la  défaite  de  ses  généraux  vaincus 
par  les  Juifs.  Il  jure  d'ensevelir  tous  les  Juifs  sous  les  ruines  de  Jérusalem,  et  hâte  son 
voyage  pour  exécuter  promptement  ce  dessein.  Dieu  le  frappe  d'une  plaie  horrible,  et 
le  force  de  publier  sa  puissance,  de  confesser  sa  propre  faiblesse,  et  de  reconnaître 
que  l'homme  ne  doit  pas  s'égaler  à  Dieu.  Antiochus  prie  le  Seigneur;  mais  sa  prière 
n'est  point  exaucée.  11  promet  de  réparer  tous  les  maux  qu'il  avait  faits  aux  Juifs,  de 
rendre  au  temple  toutes  les  richesses  qu'il  en  avait  enlevées,  de  se  faire  juif,  et  de  pu- 
blier partout  la  grandeur  du  Seigneur.  Il  écrit  aux  Juifs,  et  leur  recommande  son  fils 
Antiochus,  après  l'avoir  désigné  pour  son  héritier.  11  meurt.  Philippe,  son  frère  de 
lait,  transporte  son  corps  à  Antioche,  et  se  retire  en  Egypte  (chap.  ix). 

Avant  la  mort  d'Antiochus,  Judas  reprend  le  temple,  le  purifie  et  y  rétablit  le  culte 
du  Seigneur.  11  célèbre  cette  fête  pendant  huit  jours,  et  ordonne  qu'elle  sera  célébrée 
tous  les  ans  à  perpétuité.  Antiochus  Eupator  succède  à  Epiphane  son  père,  et  donne 
la  conduite  de  son  royaume  à  Lysias.  Ptolémée,  gouverneur  de  Ccelé-Syrie,  meurt. 
Gorgias  inquiète  les  Juifs.  Judas  remporte  plusieurs  victoires  sur  les  Iduméens.  Timo- 
thée vient  en  Judée  avec  une  nouvelle  armée  pour  s'en  rendre  maître.  Les  Juifs  mar- 
chent au-devant  de  lui,  après  avoir  invoqué  le  Seigneur  qui  combat  pour  eux,  et  leur 
fait  remporter  une  victoire  complète.  Timothée  prend  la  fuite.  Il  s'enferme  dans  la  for- 
teresse de  Gazara.  Il  y  insulte  aux  Juifs  qui  s'emparent  de  la  forteresse,  y  mettent  le 
feu,  le  tuent  avec  son  frère,  et  rendenl  grâces  au  Seigneur  par  des  hymnes  et  des  can- 
tiques (chap.  x).  Lysias  rassemble  une  nouvelle  armée  de  plus  de  cent  mille  hommes, 
et  marche  contre  les  Juifs.  Ils   invoquent  le  Seigneur,  qui  leur  donne  des  marques 


INTRODUCTION  il 

sensibles  de  sa  protection,  et  leur  lait  remporter  une  victoire  complète.  Lysias,  recon- 
naissant la  puissance  du  Dieu  des  Juifs,  leur  demande  la  paix  :  Judas  l'accorde,  et  fait 
alliance  avec  Eupator.  Lysias  adresse  à  cette  occasion  une  lettre  aux  Juifs.  Eupator 
en  écrit  deux  autres,  la  première  à  Lysias,  et  la  seconde  aux  Juifs,  qui  en  reçurent 
aussi  une  des  ambassadeurs  romains  qui  allaient  à  Antioche.  Ces  quatres  lettres  sont 
rapportées  textuellement  (chap.  xi). 

Lysias  retourne  vers  le  roi,  et  laisse  les  Juifs  en  paix.  Ils  sont  persécutés  par  les 
gouverneurs  des  pays  voisins   de  la  Judée.  Les  habitants    de  Joppé  font  périr  deux 
cents  Juifs   par  une   noire  trahison.  Judas  venge  ce  crime  avec  sévérité.  Il  punit  de 
même   les   habitants  de  Jamnia.    Il  marche  contre   Timothée.    Il    est  attaqué  par  les 
Arabes,  les  défait,  et  leur  accorde   la   paix.  Il  prend  la  ville  de  Casphin,  et  y  fait  un 
horrible  carnage.    Dosithée  et  Sosipater,   qui  commandaient  avec  lui,  tuent  dix  mille 
hommes  des  troupes  de  Timothée.  Judas  s'avance  lui-même  contre  Timothée.  A  son 
approche,  Dieu  répand  la  terreur  parmi  les  ennemis.  Ils  prennent  la  fuite,  et  perdent 
trente  mille  hommes.  Timothée,  qui  avait  été  fait  prisonnier,  recouvre  sa  liberté,  en 
promettant  de  la  rendre  à  plusieurs  Juifs.  Judas  retourne  à  Camion,  et  y  tue  vingt-cinq 
mille  hommes.  Il  en  tue  autant  à  Ephron.  Il  va  à  Scythopolis.  Il  marche  ensuite  contre 
Gorgias,   qui    obtient   d'abord  quelque    avantage    sur  les  Juifs,   mais   qui  est  ensuite 
vaincu  par  la  force  des  prières  de  Judas.  Celui-ci  rassemble  ses  gens  à  Odolla,  s'y  pu- 
rifie, et  y  célèbre  le  sabbat.  Il  vient  sur  le  champ  de  bataille  pour  ensevelir  les  morts. 
Il  trouve  que  ceux  qui   avaient   été    tués   avaient   caché  sous  leurs  habits  des  choses 
consacrées  aux  idoles,  ce  qui  lui  donne  lieu  de  regarder  leur  mort  comme  une  puni- 
tion de  Dieu.  Il  fait  faire  une  quête,  et  envoie  à  Jérusalem  offrir  des  sacrifices  pour 
leurs  péchés  (chap.  xn).  Eupator  marche  contre  les  Juifs  avec  une  puissante  armée. 
Il  fait  mourir  Ménélaus  qui  s'était  joint  à  lui,  dans  l'espérance  d'obtenir  la  souveraine 
autorité  sur  ceux  de  sa  nation.  Judas  exhorte  les  Juifs  à  avoir  recours  au  Seigneur.  Ils 
passent  trois  jours  dans  les  jeûnes,  les  humiliations  et  les  prières.  Ils  marchent  ensuite 
contre  Eupator,  attaquent  son  camp  pendant  la  nuit,  y  tuent  quatre  mille  hommes,  et 
y  jettent  le  trouble  et  l'effroi.   Eupator  assiège  Bethsura.  Il  est  repoussé,  et  obligé  de 
lever  le  siège,  pour  aller  s'opposer  à  Philippe  qui  s'était  révolté  à  Antioche.  Il  se  ré- 
concilie avec  les  Juifs,  offre  des  sacrifices,  et  fait  des  dons  au  temple  (chap.  xm). 

Démétrius,  fils  de  Séleucus,  vient  pour  se  rendre  maître  de  la  Syrie.  Alcime,  qui 
avait  été  déposé  de  la  grande  sacrificature,  va  trouver  Démétrius,  et  l'irrite  contre  Judas 
et  contre  les  Juifs.  Démétrius  envoie  Nicanor  dans  la  Judée,  avec  ordre  de  prendre 
Judas  en  vie.  Les  Juifs,  après  avoir  invoqué  le  secours  du  Seigneur,  marchent  contre 
les  ennemis.  Nicanor,  n'osant  hasarder  un  combat,  envoie  faire  des  propositions  de 
paix.  Elles  sont  acceptées  et  la  paix  est  conclue.  Nicanor  demeure  à  Jérusalem.  Il  se 
lie  d'amitié  avec  Judas,  et  l'engage  à  se  marier.  Alcime,  jaloux  de  l'union  de  Nicanor 
avec  Judas,  le  décrie  dans  l'esprit  du  roi.  Ce  prince  ordonne  à  Nicanor  de  lui  envoyer 
Judas  lié  et  garrotté.  Nicanor  cherche  l'occasion  d'exécuter  sa  commission.  Judas 
s'aperçoit  du  changement  de  Nicanor  à  son  égard  :  il  se  retire.  Nicanor  le  poursuit, 
et  veut  obliger  les  prêtres  à  le  lui  remettre.  Il  blasphème  contre  le  temple  du  Seigneur. 
On  accuse  auprès  de  Nicanor  Razias,  homme  vertueux  et  fort  zélé  pour  les  Juifs. 
Nicanor  envoie  cinq  cents  hommes  pour  l'arrêter.  Razias  les  prévient  et  se  tue 
(chap.  xiv).  Nicanor  veut  attaquer  les  Juifs  le  jour  du  sabbat.  Ceux  qui  servaient  dans 
son  armée  l'exhortent  à  respecter  la  sainteté  de  ce  jour.  11  répond  par  un  blasphème 
plein  d'orgueil.  Judas  met  sa  confiance  en  Dieu,  et  exhorte  ses  gens  à  ne  point 
craindre  les  hommes.  Il  les  fait  souvenir  des  grâces  qu'ils  ont  reçues  du  Seigneur.  Il 
les  arme,  non  de  boucliers  et  de  dards,  mais  de  foi  et  de  piété.  Il  leur  rapporte  une 
vision  qu'il  avait  eue;  elle  les  remplit  de  courage  et  de  confiance.  Il  implore  de  nou- 
veau le  secours  du  Seigneur,  étant  près  de  charger  les  ennemis.  Il  en  tue  trente-cinq 
mille,  et  met  le  reste  en  fuite.  Nicanor  est  trouvé  au  nombre  des  morts.  Judas  lui  fait 


12  INTRODUCTION 

couper  la  tète  et  la  main  qu'il  avait  étendue  contre  la  maison  du  Seigneur.  Il  fait  don- 
ner sa  langue  à  manger  aux  oiseaux,  et  exposer  sa  tète  au  haut  de  la  citadelle.  Les 
Juifs  établissent  en  ce  jour  une  fête  solennelle  pour  célébrer  à  jamais  la  mémoire  de 
cette  insigne  victoire.  Ils  demeurent  maîtres  de  la  ville  Sainte  (chap.  xv).  Et  c'est  là 
que  l'auteur  finit  son  ouvrage. 

Ainsi,  des  quinze  chapitres  qui  composent  ce  second  livre,  les  deux  premiers  ne  sont 
qu'un  préliminaire.  Le  troisième  contient  un  fait  arrivé  sous  le  règne  de  Séleucus  Phi- 
lipator,  et  antérieur  à  l'histoire  contenue  dans  le  premier  livre.  Les  douze  derniers  ré- 
pondent aux  sept  premiers  du  premier  livre;  c'est  la  même  histoire  rapportée  quelque- 
fois avec  plus  de  détail  :  nous  en  donnerons  une  concordance  abrégée  à  la  suite  de 
cette  préface. 

Non  seulement  on  peut  goûter  un  plaisir  particulier  dans  la  lecture  des  deux  livres 
canoniques  des  Maccabées,  où  tout  est  merveilleux,  parce  que  c'est  Dieu  qui  suscite 
par  une  vocation  extraordinaire  ces  généreux  défenseurs  de  sa  loi  et  de  son  alliance  ; 
mais  on  y  trouve  aussi  partout  de  grandes  instructions  pour  toutes  sortes  d'états,  de 
grands  exemples  de  toutes  sortes  de  vertus. 

Ici,  nous  apprenons  à  obéir  aux  puissances  en  tout  ce  qui  est  juste  et  conforme  à  la 
loi  de  Dieu  ;  mais  non  pas  jusqu'à  craindre  d'encourir  leur  disgrâce,  quand  leurs 
ordres  se  trouvent  contraires  à  cette  divine  loi  :  car  c'est  alors  qu'il  faut  dire,  après  le 
père  des  Maccabées,  ce  que  le  prince  des  apôtres  a  dit  depuis  :  //  faut  obéir  à  Dieu 
plutôt  qu'aux  hommes  (1). 

Là,  nous  apprenons  à  perdre  tout,  plutôt  que  de  nous  départir  de  la  foi  que  nous 
avons  promise  à  Dieu;  à  souffrir  tous  les  tourments  plutôt  que  de  contrevenir  à  ses 
ordonnances  ;  à  confesser  son  nom  sans  déguisement,  dût-il  nous  en  coûter  la  vie, 
plutôt  que  de  la  racheter  par  une  dissimulation  lâche  et  honteuse;  bien  persuadés  que 
la  sincérité  du  culte  qu'on  se  flatte  de  rendre  à  Dieu  dans  le  secret  du  cœur  ne  justi- 
fiera jamais  le  culte  apparent  qu'on  fait  semblant  de  rendre  à  Bélial,  parce  que  ces 
ménagements  politiques  ne  sont  que  les  fruits  d'une  prudence  charnelle  (2)  qui  donne 
la  mort. 

Ici,  on  apprend  à  regarder  tous  les  maux  temporels  plutôt  comme  des  dons  de  la 
miséricorde  de  Dieu,  que  comme  des  fléaux  de  sa  colère  ;  à  baiser  avec  respect  la 
main  qui  châtie  ;  à  recevoir  ses  coups  avec  actions  de  grâces,  bien  loin  de  se  révolter 
contre  elle  par  le  murmure;  à  les  craindre  moins  que  la  profanation  de  ce  sanctuaire 
intérieur,  que  chacun  doit  dresser  à  Dieu  dans  son  cœur,  pour  y  brûler  en  son  hon- 
neur une  victime  d'humilité,  avec  le  feu  de  la  charité. 

Là,  on  apprend  à  purifier  ce  sanctuaire  par  les  larmes  d'une  sincère  pénitence, 
quand  il  a  été  profané  par  cette  idole  de  jalousie,  qui  n'est  autre  que  l'amour  criminel 
d'un  objet  créé  ;  à  y  détruire  l'autel  qu'un  feu  étranger  y  a  souillé  ;  à  en  faire  un  de 
pierres  toutes  neuves,  c'est-à-dire  à  se  faire,  avec  le  secours  de  la  grâce  divine,  un 
cœur  nouveau,  dont  la  consécration  ne  se  renouvelle  pas  seulement  tous  les  ans  par 
une  fête  solennelle,  comme  la  dédicace  du  temple  de  Jérusalem,  mais  se  perpétue  en 
quelque  sorte  à  tous  les  moments  de  la  vie. 

Car,  après  tout,  si  d'un  côté  on  voit  que  Dieu  se  déclare  le  vengeur  de  son  temple 
en  faveur  de  ceux  qui  le  servent  avec  fidélité,  d'un  autre  côté,  on  y  voit  aussi  qu'il  ne 
laisse  pas  longtemps  impuni  l'abus  des  choses  saintes  ;  qu'il  n'en  diffère  la  peine  que 
pour  la  rendre  plus  éclatante  ;  mais  que  la  plus  terrible  peine  qu'il  tire  ici-bas  est 
lorsqu'il  permet,  dans  sa  colère,  la  profanation  du  temple  même,  la  perte  de  la  foi, 
l'extinction  de  la  religion. 


(1)  Ad.  iv.  19.  et  v.  29.  —  (2)  Rom.  vm.  6. 


INTRODUCTION  13 

Enfin  on  voit  partout,  dans  cette  histoire  des  persécutions  de  la  Synagogue  sous 
Antiochus,  une  image  des  persécutions  que  l'Eglise  a  eues  à  soutenir  depuis  sous  les 
empereurs  païens,  et  de  celles  qu'elle  aura  à  soutenir  dans  les  derniers  temps,  sous  la 
domination  des  ennemis  du  nom  chrétien  sous  le  règne  de  l'Antéchrist.  Mais  on  y 
voit  aussi  la  preuve  de  cette  vérité  si  terrible  de  l'Evangile  :  Beaucoup  d'appelés,  feu 
d'élus  (1).  On  y  voit  que,  tandis  qu'une  multitude  d'hommes  perfides  et  ingrats  aban- 
donnent la  loi  du  Seigneur,  il  est  peu  d'hommes  fidèles  qui  gardent  son  alliance;  et 
l'épreuve  sert  à  les  faire  connaître. 

Ainsi,  non  seulement  les  vertus  des  saints  qui  nous  y  sont  dépeintes  avec  de  si  vives 
couleurs  nous  édifient,  mais  les  passions  mômes  des  plus  grands  pécheurs,  que  nous 
y  voyons  portées  jusqu'à  l'excès,  nous  instruisent,  par  la  punition  qui  les  suit  de  près. 
La  chute  prompte  des  Jason,  des  Ménélaûs,  des  Alcime,  qui  n'achètent  à  prix 
d'argent  la  grande  sacrificature  que  pour  dominer  sur  la  foi  des  peuples  et  la  pervertir, 
apprend  aux  ambitieux  que  leur  prospérité  passagère,  dans  l'Eglise  ou  dans  le  siècle, 
ne  se  termine  que  dans  d'éternelles  douleurs.  La  plaie  subite  qui  humilie  le  superbe 
Antiochus,  jusqu'à  lui  faire  implorer  la  miséricorde  du  Dieu  d'Israël,  qu'il  avait  insulté 
avec  tant  d'arrogance,  mais  qui  ne  le  convertit  pas  jusqu'à  le  rendre  digne  de  la  misé- 
ricorde qu'il  demande,  apprend  aux  pécheurs  incorrigibles  qu'on  ne  se  moque  pas  de 
Dieu  impunément;  que  ce  souverain  Juge  (2)  se  rit  souvent  des  pleurs  des  mourants, 
qui  se  sont  moqués  de  ses  menaces  pendant  leur  vie;  et  que  (3)  la  mort  dans  le  péché 
est  une  suite  presque  inévitable  de  la  vie  qu'on  a  passée  dans  l'impénitence,  parce 
qu'un  repentir  tardif,  qui  n'a  que  des  motifs  humains,  ne  peut  réconcilier  Dieu  avec  un 
cœur  qui  demeure  ennemi  de  la  justice. 

Ce  n'est  là  qu'une  petite  partie  des  instructions  répandues  presque  à  l'infini  dans 
ces  livres  divins  pour  affermir  la  foi,  et  régler  les  moeurs  des  chrétiens  en  général.  Que 
serait-ce  si  l'on  voulait  recueillir  toutes  celles  qui  peuvent  convenir  à  chaque  condition 
en  particulier,  dans  les  actes  héroïques  de  mille  vertus  différentes  qu'on  y  voit  briller 
partout?  Par  exemple,  quelle  instruction  pour  les  princes,  les  conquérants,  les  hommes 
de  guerre,  dans  la  conduite  pleine  de  piété  de  ces  grands  héros,  qu'on  voit  toujours 
vainqueurs  dans  les  combats,  couvrant  le  camp  ennemi  d'une  multitude  innombrable 
de  morts,  souvent  sans  perdre  un  seul  des  leurs,  mais  qu'on  voit  toujours,  aussi,  se 
préparant  au  combat  par  la  prière,  qu'ils  continuent  même  pendant  plusieurs  jours,  y 
joignant  quelquefois  un  jeûne  volontaire,  gardant  même,  dans  l'ardeur  du  combat,  le 
jeûne  prescrit  par  la  loi,  ne  comptant  que  sur  la  puissance  du  Seigneur  dans  le  fort  de 
la  mêlée,  ne  s'y  proposant  que  la  gloire  de  Dieu  pour  fin,  ne  rapportant  qu'à  Dieu 
toute  la  gloire  du  succès,  par  des  actions  de  grâces  solennelles  qui  suivent  toujours  la 
victoire,  ne  profitant  des  dépouilles  de  l'ennemi,  que  pour  en  orner  le  temple,  ou 
pour  partager  ces  fruits  de  la  guerre  avec  les  pauvres  et  les  faibles,  qui  n'ont  pu  en 
partager  les  fatigues  avec  eux  ! 

11  est  vrai  qu'une  troupe  de  ces  généreux  défenseurs  de  la  patrie  est  défaite  une 
(ois,  pendant  que  tout  plie  sous  leurs  coups  partout  ailleurs.  Mais  c'est  que  les  chefs 
de  ce  parti  marchent  à  l'ennemi  contre  l'ordre,  et  qu'ils  se  proposent  moins  l'honneur 
du  Dieu  de  Jacob  que  leur  propre  gloire.  Aussi  ne  sont-ils  pas  de  la  race  de  ceux  par 
qui  le  Seigneur  a  voulu  sauver  Israël.  Mais  en  cela  même,  quelle  instruction  pour 
tout  homme  constitué  en  dignité,  et  principalement  pour  ceux  qui  sont  dans  les  pre- 
miers postes  de  l'Eglise,  de  ne  pas  employer,  contre  l'ordre  de  Dieu,  les  armes  spiri- 
tuelles que  l'Eglise  leur  met  en  main  contre  l'ennemi  de  Dieu  qui  est  le  péché,  de  ne 


(1)  Mali.  ix.  \ù\  xx.  i6.—  (2)  Prou.  1.  26.  —  (j)  Joan.  vin.  21. 


i4  INTRODUCTION 

marcher  jamais  à  ces  saints  combats  que  pour  la  fin  pour  laquelle  ils  sont  envoyés, 
comme  ils  ne  doivent  jamais  s'engager  dans  cette  milice  sainte,  qu'après  s'être  assurés 
de  la  vocation  de  Dieu  ! 

De  même,  quelle  instruction,  et  pour  les  pères,  dans  les  sages  avis  de  Mattathias 
mourant  à  ses  enfants,  auxquels  il  ne  laisse  pour  héritage  que  la  crainte  du  Seigneur, 
et  l'amour  de  sa  loi  ;  et  pour  les  mères  chrétiennes,  soit  dans  la  générosité  de  ces 
deux  femmes  fidèles,  que  toutes  les  menaces  d'Antiochus  ne  peuvent  empêcher  de 
donner  à  leurs  enfants  la  circoncision,  pour  obéir  à  la  loi  ;  soit  dans  le  courage  mâle 
de  cette  mère  de  sept  jeunes  martyrs,  qui  ne  se  croit  jamais  plus  véritablement  mère, 
que  quand  elle  les  enfante  pour  le  ciel. 

Peut-être  néanmoins  que,  au  milieu  de  tant  d'actions  si  dignes  de  louanges,  il  s'en 
trouvera  quelques-unes  qui  paraîtront  avoir  besoin  d'apologie,  à  ceux  qui  ne  jugent  des 
choses  que  par  l'extérieur,  sans  porter  leurs  vues  plus  loin.  I!  semble  bien  plus  con- 
forme aux  règles  de  la  piété,  de  souffrir  patiemment  la  persécution,  que  de  la  repous- 
ser par  la  force,  comme  ont  fait  les  Maccabées,  surtout  quand  on  la  souffre  de  la  part 
des  princes  mêmes  auxquels  on  doit  l'obéissance.  Mais  si  l'on  considère  d'abord  que 
que  ce  n'est  que  par  l'inspiration  de  Dieu  qu'ils  se  sont  portés  à  secouer  le  joug  des 
Syriens,  auquel  leur  nation,  libre  de  sa  nature,  n'avait  été  assujettie  que  par  un  effet  de 
la  colère  du  Seigneur  ;  si  l'on  considère  ensuite  que  la  protection  continuelle  de  sa 
main,  qu'ils  ont  éprouvée  dans  toutes  leurs  entreprises,  est  une  preuve  indubitable 
qu'ils  ne  les  ont  formées  que  par  le  mouvement  de  son  Esprit  ;  on  comprendra  aisément 
que  le  législateur  étant  au-dessus  de  la  loi,  Dieu  qui  est  le  souverain  maître,  après 
avoir  tenu  les  Maccabées  soumis  aux  Syriens  pendant  tout  le  temps  qu'il  avait  destiné 
pour  leur  épreuve,  a  pu  les  affranchir  de  cette  servitude  dans  le  temps  marqué  pour 
leur  délivrance;  et  qu'ils  ont  pu  secouer  ce  joug  par  son  ordre, sans  être  coupables  de 
révolte  à  ses  yeux  ;  comme  leurs  pères  autrefois  purent  bien,  par  le  même  principe, 
dépouiller  les  Egyptiens,  sans  être  coupables  de  larcin. 

Il  semble  encore  qu'après  tant  de  preuves  d'une  continuelle  assistance  de  Dieu,  il 
était  peu  digne  de  la  piété  de  Judas  de  mettre  sa  confiance  dans  les  hommes,  en  con- 
tractant alliance  avec  des  idolâtres,  c'est  à  dire  avec  les  Romains.  Mais,  outre  qu'il 
ne  faut  pas  tenter  Dieu,  en  négligeant  les  moyens  humains  que  sa  providence  présente, 
n'était-ce  pas  une  chose  louable  dans  Judas,  de  chercher  à  épargner  le  sang  de  ses 
ennemis,  pour  assurer  le  repos  de  son  peuple,  en  réprimant  leur  mauvaise  volonté 
contre  lui  par  la  crainte  d'un  allié  qui  paraissait  plus  puissant  qu'eux?  Après  tout,  si, 
consultant  plus  en  cela  la  prudence  humaine  que  l'Esprit  de  Dieu,  Judas  a  fait  une 
faute  ;  et  si  c'est  pour  l'en  punir  que  plus  de  deux  mille  de  ses  soldats  l'abandonnent, 
pendant  qu'il  ne  reste  auprès  de  lui  que  huit  cents  hommes  pour  tenir  tête  à  une  armée 
formidable,  la  manière  courageuse  et  pleine  de  foi  avec  laquelle  il  se  livre  à  la  mort,  en 
combattant  pour  la  gloire  du  Dieu  d'Israël  jusqu'au  dernier  soupir,  la  répare  pleine- 
ment. Et  cette  faute,  s'il  y  en  a  quelqu'une,  devient  en  même  temps  une  belle  leçon 
pour  tous  les  princes  chrétiens,  par  l'occasion  qu'elle  donne  à  l'historien  sacré  de  leur 
faire  voir  dans  le  caractère  de  la  république  romaine,  toute  païenne  qu'elle  était,  une 
probité  morale,  une  droiture,  une  équité  naturelles,  capables  d'exciter  l'émulation  de 
ceux  qui  sont  éclairés  de  la  lumière  surnaturelle  de  la  foi. 

L'action  de  Razias,  homme  d'ailleurs  recominandable  par  sa  religion  parmi  les  Juifs, 
qui  se  tue  lui-même,  est  encore  moins  excusable,  si  ce  n'est  point  par  un  mouvement 
extraordinaire  de  l'Esprit  de  Dieu,  qu'il  s'est  porté  à  une  résolution  si  contraire  aux 
règles  ordinaires.  Cependant  on  ne  peut  nier  que  cette  action,  tout  irrégulière  qu'elle 
est,  ne  soit  un  effet  de  son  zèle  pour  sa  loi,  mais  d'un  zèle  moins  réglé  par  la  science, 
que  précipité  par  !a  crainte  de  tomber  entre  les  mains  des  incirconcis,  crainte  qui  ne 
lui  laisse  pas  assez  de  liberté  d'esprit  pour  bien  juger  de  la  qualité  des  moyens  qu'il 


INTRODUCTION 


«5 


emploie  pour  s'en  délivrer  :  Eligens  nolvliter  mon',  potius  quam  subdifus  fierï  peccato- 
ritus  (i)  :  il  aime  mieux  mourir  noblement,  que  de  se  voir  assujetti  aux  pécheurs.  Il 
est  vrai  qu'il  aurait  mieux  fait  de  mourir  humblement,  dit  saint  Augustin,  puisqu'il  l'au- 
rait fait  plus  utilement  :  Mêlais  vcllct  humUiter  :  sic  enim  ulili/er.  Mais  au  moins  nous 
apprend-il,  par  le  stoïcisme  avec  lequel  il  endure  les  maux  qu'il  se  lait  à  lui-même  pour 
l'amour  de  sa  loi,  avec  quel  courage  le  même  amour  doit  nous  faire  souffrir  tous  les 
maux  que  les  ennemis  de  cette  loi  voudront  nous  faire  éprouver. 


(i)  Mach.  xiv.  42. 


CONCORDANCE    DES  DEUX  LIVRES  CANONIQUES 
D  ES    M ACCABÉES 


I.  Conquêtes  d'Alexandre.  Sa  mort.  Partage  de  son  empire,  i.  Macc.  i.   10.  —  Mort  d'Antiochus  le 
Grand  n.  Macc.  i.  10-17. 

II.  Entreprise  de  Séleucus  Philopator.  Héiiodore  puni.  n.  Macc.  m.  integr.  et  iv.  i.  . 

I I I.  Commencement  du  règne  d'Antiochus  Épiphane.  i.  Macc.  i.  11-16. 

IV.  Jason  supplante  Onias.  Antiochus  vient  à  Jérusalem.  11.  Macc.  iv.  7-22. 

V.  Expédition  d'Antiochus  contre  l'Egypte,  1.  Macc.  1.  17-22. 

VI.  Ménélaùs  supplante  Jason.  Onias  est  tué.  11.  Macc.  iv.  23.  ad  finem. 

VII.  Prodiges  dans  l'air.  Prise  de  Jérusalem  par  Jason.  Sa  mort.  n.  Macc.  v.  1-10. 

VIII.  Antiochus  ravage  la  Judée,  prend  Jérusalem,  pille  le  temple.    1.  Macc.  1.  21-29.  et  "•  Macc.  v. 
1 1-23. 

IX.  Apollonius  exerce  de  grandes  cruautés  à  Jérusalem.  1.  Macc.  1.  30-42.  el  11.  Macc.  v.  24-27. 

X.  Antiochus  oblige  tous  les  peuples  à  embrasser  le  même  culte.  1.  Macc.  1.  43-44. 

XI.  Il  force  les  Juifs  à  embrasser  le  culte  des  idoles.  1.  Macc.  45-^.  n.  Macc.  vi.  1-6. 

XII.  Il  fait  placer  l'idole  de  Jupiter  sur  l'autel  du  Seigneur.  1.  Macc.  1.  <)7-62. 

XIII.  Suite  des  maux  causés  par  Antiochus.  1.  Macc.  1-63.  ad  finem.  et  n.  Macc.  v.  7-17. 

XIV.  Martyre  d'Éléazar.  11.  Macc.  vi.  18.  ad  finem. 

XV.  Martyre  des  sept  frères,  et  de  leur  mère.  11.  Macc.  vu.  integr. 

XVI.  Zèle  de  Matthathias  :  exhortation  qu'il  adressée  ses  enfants.  Sa  mort.  1.  Macc.  n.  integr. 

XVII.  Judas  succède  à  son  père,  et  défait  Apollonius.  1.  Macc.  ni.  1-1 2. 

XVI II.  Il  fortifie  son  parti.  11.  Macc.  vin.  1-7. 

XIX.  Défaite  de  Séron,  1.  Macc.  m.  1 3-26. 

XX.  Antiochus  lève  une  nouvelle  armée.  Il  s'en  va  en  Perse.  1.  Macc.  111.  27-37. 

XXI.  Ptolémée,  Nicanor  et  Gorgias  s'unissent  contre  Judas,  et  sont  défaits.  1.  Macc.  m.  38..  ad  fin. 
iv.  1-27.  el  n.  Macc.  vin.  8-20. 

XXII.  Autres  avantages  remportés  par  Judas,  n.  Macc.  vin.  30.  ad  fin. 

XXIII.  Défaite  de  Lysias.  1.  Macc.  iv.  28-35. 

XXIV.  Purification  du  temple.  1.  Macc.  iv.  36.  ad  fin.  n.  Macc.  x.  1-8. 

XXV.  Victoires  de  Judas  sur  les  Iduméens  et  sur  les  Ammonites.  Défaite  de  Thimothée.  1.  Macc.  v. 
integr. 

XXVI.  Mort  d'Antiochus  Épiphane.  1.  Macc.  vi.  1-17.  et  n.  Macc.  ix.  integr. 

XXVII.  Commencement  d'Antiochus   Eupator.   Victoires  de  Judas  sur  les  Iduméens.  Autre  défaite 
de  Timothée.  n.  Macc.  x.  9.  ad  finem. 

XXVIII.  Victoires  de  Judas.  Paix  conclue  entre  Eupator  et  Judas.  Lettres  de    Lysias,  d'Eupator  et 
des  Romains,  n.  Macc.  xi.  integr. 

XXIX.  Autres  avantages  de  Judas,  n.  Macc.  xn.  integr. 

XXX.  Judas  assiège  les  Syriens  qui  étaient  dans  la  forteresse  de  Jérusalem.  1.  Macc.  vi.  18-27. 

XXXI.  Eupator  marche  contre  les  Juifs,  assiège   Bethsura,  attaque  les  lieux  saints,  fait  la    paix. 

I.  Macc.  vi.  28.  ad- fin.  el  n.  Macc.  xm.  integr. 

XXXII.  Commencement  de  Démétrius  Soter.  Alcime   l'irrite  contre  les  Juifs.   1.  Macc.  vu.  1-7.    et 

II.  Macc.  xiv.  1-1 1. 

XXXI I I.  Bacchide  et  Alcime  viennent  en  Judée.  1.  Macc.  vin.  8-25 .  ' 

XXXI  V.  Nicanor  vient  en  Judée,  se  lie  avec  Judas,  puis  le  poursuit,  et  blasphème  contre  le  Seigneur. 
1.  Macc.  vu.  26-38.  el  n.  Macc.  xiv.  12-36. 

XXXV.  Mort  de  Razias.  n.  Macc.  xiv.  37.  ad  finem. 

XXXVI.  Défaite  de  Nicanor.  1.  Macc.  vu.  59.   ad  finem,  et  n.  Macc.  xv.  integr.  Ici  finit  le  11e  livre 
des  Maccabées. 


LIVRE    PREMIER 


CHAPITRE    PREMIER 

Victoires  d'Alexandre  le  Grand.  Sa  mort.  Partage  de  ses  états.  Des  Juifs  impies  se 
séparent  de  l'alliance  sainte.  Antiochus  Epiphane  ravage  la  Judée  et  pille  le  temple. 
Jérusalem  est  désolée  par  ses  ordres.  Il  veut  contraindre  les  Israélites  d'abandonner 
leur  loi.  Il  fait  dresser  une  idole  dans  le  temple. 


i.  Et  factum  est,  postquam  percussit  Alexander  Phi- 
lippi,  Macedo,  qui  primus  regnavit  in  Graecia,  egressus 
de  terra  Cethim,  Darium,  regem  Persarum  et  Medorum, 

2.  Constituit  praslia  multa,  et  obtinuit  omnium  muni- 
tiones,  et  interfecil  reges  terrœ; 


i.  Après  qu'Alexandre,  roi  de  Macédoine,  fils  de 
Philippe,  qui  régna  d'abord  dans  la  Grèce,  fût  sorti  du 
pays  de  Céthim,  et  qu'il  eût  vaincu  Darius, roi  des  Perses 
et  des  Mèdes, 

2.  11  livra  plusieurs  batailles;  il  prit  les  villes  les  plus 
fortes  de  toutes  les  nations;  il  tua  les  rois  de  la  terre. 


COMMENTAIRE 


■  f.  i.  Et  factum  est,  postquam  percussit 
Alexander  Philippi,  Macedo,  qui  primus  regna- 
vit in  Gr/ecia.  La  conjonction  Et,  se  met  sou- 
vent au  commencement  des  livres  historiques  des 
Hébreux, commeon l'a  remarqué  plusieurs  fois(i); 
c'est  probablement  un  hébraïsme,  car  ces  divers 
livres  n'ont  qu'un  rapport  très  éloigné  entre  eux. 
Alexandre,  dont  il  est  parlé  ici,  est  Alexandre  le 
Grand,  fils  de  Philippe,  roi  de  Macédoine.  //  régna 
d'abord  dans  la  Grèce,  il  succéda  à  son  père  Phi- 
lippe, et  augmenta  son  royaume  par  ses  conquêtes 
dans  la  Grèce.  Le  texte  semble  dire  qu'Alexandre 
est  le  premier  roi  qu'on  ait  vu  dans  la  Grèce  (2)  : 
Qui  primus  regnavit  in  Grœcia;  mais  avant  Alexan- 
dre il  y  avait  eu  plusieurs  rois,  non  seulement 
dans  la  Macédoine,  mais  à  Athènes,  à  Thèbes,  à 
Argos,  à  Lacédémone  et  ailleurs.  Des  exégètes, 
sous  le  nom  de  Grèce,  entendent  ici  l'Asie-Mineu- 
re  qu'on  appelait  du  nom  (j)  de  royaume  de  Javan 
ou  des  Grecs.  Le  premier  livre  des  Maccabées 
ayant  été  certainement  rédigé  en  hébreu,  cette 
opinion  n'est  pas  invraisemblable.  Mais  l'historien 
sacré  avoulumarquersans  doute  tout  simplementle 
lieu  d'où  Alexandre  était  sorti,  et  où  il  avait  régné, 
avant  qu'il  eût  vaincu  Darius  ;  et  par  conséquent 
on  ne  peut  l'entendre  que  de  la  Grèce  proprement 
dite. 


Egressus  de  terra  Cethim.  Primitivement, 
Céthim  désignait  l'île  de  Chypre,  plus  tard  il 
désigna  les  îles  de  l'archipel,  puis  la  Macédoine 
et  même  l'Italie  ;  en  général  l'acception  semble 
comprendre  les  contrées  grecques  ou  latines  bai- 
gnées par  la  Méditerranée.  Ce  qui  put  introduire 
cette  acception  si  générale,  c'est  que  le  nom  de 
Grèce  même  ne  demeura  point  fixe.  En  face  de  la 
Grèce  proprement  dite  se  trouvait,  sur  le  territoire 
latin,  italien  si  l'on  veut,  la  grande  Grèce.  Qu'un 
étranger  veuille  expliquercette  géographie  bizarre, 
il  esl  certain  qu'il  considérera  la  Grande-Grèce,  à 
cause  de  son  titre  ,de  grande,  comme  supérieure 
ou  plus  ancienne  que  l'autre.  Nous  sommes  expo- 
sés souvent  à  raisonner  d'une  manière  aussi  gau- 
che quand  nous  nous  fions  aux  apparences  dans 
les  interprétations  anciennes.  Il  est  très  facile, 
pour  peu  qu'on  tienne  à  se  donner  la  réputation 
de  savant,  en  disant  plus  et  autrement  que  d'au- 
tres, de  faire  fausse  route.  Pour  Céthim,  voyez 
le  bel  article  de  M.  F.  Lenormant  (4). 

Perc'ussit  Darium,  regem  Persarum.  C'est 
Darius  Codoman,  dernier  roi  des  Perses,  vaincu 
dans  plusieurs  combats  par  Alexandre,  et  mis  à  mort 
par  Bessus,  à  qui  il  avait  donné  l'intendance  delà 
Bactriane. 

f.  2.  Constituit  pr^lia  multa.  //  livra  plusieurs 


(1)  Voyez  les   commencements  de   l'Exode,   du    Lévi- 
tique,  des  Nombres,  de  Josué,  de  Judith,  de  Baruch,etc- 

(2)  E  (JocoftEOGEv   jv:'   «mou    rpo'tepo;  iiù  xijv  E'XXâoa. 

S.  B.  —  T.  XII. 


Ms.  Alex.  Ilfôtspov.  lia  et  Syr. 
(4)  Revue  des  Quest.  historiques,  hv.  lxvii,  22;  et  suiv. 


Il; 


I.  —  MACCABÉES.  —   I.  -  ALEXANDRE   LE  GRAND 


?.  Et  pertransiit  usque  ad  fines  terrœ,  et  accepit  spolia 
multitudinis  gentium,  et  siluit  terra  in    conspectu  ejus. 

4.  Et  congregavit  virtutem,  et  exercitum  fortem  nimis; 
et  exaltatum  est,  et  elevatum  cor  ejus; 

5.  Et  obtinuit    regiones  gentium    et    tyrannos,  et  facti 
sunt  illi  in  tributum. 

6.  Et    post  hase    decidit  in     lectum,   et    cognovit  quia 
moreretur. 


;.  Il  passa  jusqu'à  l'extrémité  du    monde;    il  s'enrichit 
des  dépouilles  des  nations,  et  la  terre  se  tut  devant  lui. 

4.  Il  rassembla  de  grandes  troupes,  et  une  armée  très 
forte  :  son  cœur  s'éleva,  et  s'enfla  d'orgueil. 

5.  Il  se  rendit    maître  des    peuples   et  des  rois,  et  les 
assujettit  à  lui  payer  tribut. 

6.  Après  cela,  il  tomba  malade,  et  il  connut  qu'il  allait 
mourir; 


COMMENTAIRE 


batailles  ;  sans  compter  les  combats  qu'il  livra  dans 
la  Grèce,  et  où  il  fut  toujours  heureux  ;  il  eut  si 
souvent  à  combattre  contre  les  généraux  de 
Darius  et  contre  ce  monarque  lui-même,  contre 
d'autres  princes  et  contre  les  rois  des  Indes,  qu'il 
serait  fastidieux  de  faire  le  dénombrement  de  ses 
combats.  Toutes  ses  conquêtes  se  firent  avec  une 
rapidité  surprenante  ;  il  fut  toujours  accompagné 
d'un  bonheur  si  constant,  qu'on  ne  peut  pas  dire 
qu'il  ait  perdu  aucune  bataille  considérable. 
Daniel  (1)  le  dépeint  comme  un  bouc,  qui  vient 
avec  tant  de  promptitude,  qu'il  semble  ne  pas 
toucher  la  terre. 

Obtinuit  omnium  munitiones.  Il  n'attaqua 
aucun  ennemi  qu'il  ne  lait  vaincu  ;  il  n'assiégea 
aucune  ville  qu'il  ne  l'ait  prise;  il  ne  combattit 
aucune  nation,  qu'il  ne  l'ait  terrassée  (2)  :  Cum 
nutlo  hoslium  unquam  congressus  est,  quem  non 
vicenl;  nullam  urbem  obsedit,  quam  non  expugna- 
verit;  nullam  genlem  adiil,  quam  non  calcaverit. 

f.  ).  Usque  ad  fines  terrée.  Jusqu'aux  Indes. 
Les  anciens  ne  connaissaient  rien  au-delà  (3). 

Siluit  terra  in  conspectu  ejus.  Tout  lui  obéit, 
tout  céda,  tout  plia  sous  son  autorité  et  sous  la 
force  de  ses  armes.  Cette  expression  marque  dans 
Isaïe,  un  pays  désolé,  abandonné,  vaincu  (4). 
Habacuc  (5)  :  Que  la  terre  se  taise  en  présence  du 
Seigneur. 

,v.  4.  Exaltatum  est,  et  elevatum  cor  ejus. 
La  prospérité  gâta  Alexandre  ;  il  voulut  se  faire 
passer  pour  un  dieu  ;  il  voulut  qu'on  le  nommât 
roi  de  tous  les  pays  et  de  tout  le  monde  (6)  :  Re- 
gem  se  terrarum  omnium  ac  mundi  appellari  jussit. 

f.  6.  Decidit  in  lectum,  et  cognovit  quia 
moreretur.  Les  uns  croient  que  ce  fut  le  poi- 
son (7),  d'autres  veulent  que  ce  tut  l'excès  du  vin, 
qui  lui  causèrent  sa  dernière  maladie. 

Un  ancien  auteur,  qui  a  écrit  un  livre  sur  la  mort 
et  la  sépulture  d'Alexandre  et  d'Ephestion  (8), 
raconte  que  ce  prince,  après  avoir  soupe  avec  ses 
amis,  demeura  à  table  jusque  bien  avant  dans   la 


nuit  ;  comme  il  se  retirait,  un  de  ses  amis  nommé 
Médius,  Thessalien,  l'invita  à  boire  et  ceux  qui 
étaient  avec  lui.  Ils  se  remirent  à  table  au  nombre 
de  vingt  convives  ;  et,  après  avoir  bien  bu,  Alexan- 
dre demanda  la  coupe  d'Hercule  :  c'est  ainsi  qu'ils 
appelaient  un  grand  vase  à  boire,  qui  tenait  deux 
congés,  environ  six  litres.  Il  la  but,  et  porta  la 
santé  à  Protée  ;  celui-ci  fit  raison  au  roi,  et,  peu 
de  temps  après,  ayant  demandé  de  nouveau  la 
même  coupe,  il  la  but  encore,  et  la  présenta  au 
roi  ;  Alexandre  prit  la  coupe  et  la  vida,  mais  il 
laissa  tomber  le  vase  sur  la  table  et  se  jeta  sur 
son  coussin  ;  alors,  comme  s'il  eût  été  frappé  d'un 
coup  mortel,  il  poussa  un  grand  soupir  et  se  plai- 
gnit à  haute  voix.  Ses  amis  le  prirent  et  l'emme- 
nèrent hors  de  la  salle  ;  tel  fut  le  commencement 
de  la  maladie,  qui  l'enleva  en  peu  de  jours.  Telle 
fut  la  fin  du  vainqueur  de  l'Asie,  de  cet  homme, 
qui,  ne  se  contentant  pas  des  honneurs  ordinaires 
des  mortels, affecta  les  hommages  qui  ne  sont  dûs 
qu'à  Dieu  seul,  de  ce  conquérant  à  qui  l'univers 
ne  suffisait  pas. 

Le  Saint-Esprit  nous  représente  en  ce  lieu  le 
grand  Alexandre,  comme  un  conquérant,  de  qui 
tous  les  princes  et  tous  les  peuples  recevaient  les 
lois,  devant  lequel  toute  la  terre  se  tut,  par  la 
crainte  que  les  nations  eurent  de  ses  armes  vic- 
torieuses, auxquelles  nulle  puissance  n'osait  résis- 
ter. Mais  il  ne  nous  le  représente  si  grand  et  si 
puissant,  que  pour  nous  faire  comprendre  plus 
sensiblement  le  néant  de  cette  gloire  qu'on  esti- 
mait tant.  Son  cœur  s'éleva  et  s'enjla,  dit  le  texte 
sacré.  Mais  après  s'être  rendu  maître  des  rois  et 
des  peuples,  il  tomba  malade,  et  il  reconnut  qu'il 
devait  bientôt  mourir.  C'est  donc  là  que  toutes  les 
grandes  conquêtes  d'Alexandre  se  sont  terminées. 
Son  cœur  s'est  enflé  d'orgueil,  comme  s'il  avait 
été  immortel,  en  se  voyant  victorieux  de  l'univers. 
Mais  la  maladie  lui  fait  connaître  qu'il  est  homme 
comme  un  autre.  Et  il  ne  songe  qu'il  doit  mourir 
qu'étant  proche  de  la  mort.  Qu'il  a  encore  aujour- 


(1)  Dan.  vin.  <,.    et   21.    Hircus  caprarum,   rex  Graeco- 
rum  est. 

(2)  Justin.  I.  xn.  ad  finem. 

(?)  Virg.  Ultra  Garamantas  et  Indos. 

(4)  Isai.  xiv.  7.  Conquievit  et  siluit  omnis  terra. 

(5)  Habac.  11.  20.  Sileat  a  lacie  ejus  omnis  terra. 
(0)  Justin,  t.  xn. 


(7)  D.odor.  Sicul.  I.  xvii.  et  Justin,  t.  xn.  ad  finem. 
Victus  ad  postremum,  non  virtute  hostili,  sed  insidiis 
suorum  et  fraude  civili.  Hieronrm.  ep.  ad  Lœtam.  -  Oros. 
tib.  111.  c.  20. 

(8;  Ephipp.  Olyntk.  apud  Alhen.  I.  x.  c.  II.  Vide  et 
Diodor.  Sicul.  t.  xvn. 


I.  — MACCABÉES.—   I.  -  SA  MORT 


'9 


7.  Et  vocavit    pueros    suos   nobiles,  qui    secum  erant  7-  Et  il  appela  les  grands  de   sa  cour,  qui   avaient  été 

nutriti  a  juventute,  et  divisit  illis  regnum  suum  cum  adhuc       nourris  avec   lui   dès   leur  jeunesse  ;  et  il  leur  partagea 
viveret.  son  royaume  lorsqu"il  vivait  encore. 

COMMENTAIRE 


d'hui  d'imitateurs  dans  cette  insensibilité  qui  con- 
duit l'homme  jusqu'au  tombeau,  sans  qu'il  ait 
presque  songé  qu'il  devait  mourir  ! 

f.  7.  Vocavit  pueros  suos  nobiles,  qui  secum 
erant  nutriti  a  juventute.  L'histoire  (1)  nous 
apprend  que,  le  neuvième  jour  de  sa  maladie  et 
celui  qui  précéda  sa  mort,  les  soldats  d'Alexandre 
contraignirent,  par  leurs  cris  et  par  leurs  menaces, 
les  amis  de  ce  prince  à  les  Jaisser  entrer,  pour  le 
voir  et  pour  le  saluer.  Ils  entraient  par  une  porte 
de  sa  chambre  et  sortaient  par  l'autre;  Alexandre, 
tout  accablé  qu'il  était  par  la  fièvre,  se  tint  assis 
sur  son  lit  et  présenta  sa  main  à  quiconque  voulut 
la  baiser,  jusqu'à  ce  que  toute  l'armée,  depuis  le 
premier  jusqu'au  dernier  soldat,  fût  passé  près  de 
son  lit  (2).  Après  qu'ils  furent  sortis,  le  roi  demanda 
à  ses  amis,  s'il  leur  semblait  qu'ils  dussent  trouver 
après  sa  mort  un  semblable  roi.  Comme  tout  le 
monde  demeurait  dans  le  silence  :  je  sais  bien  au 
moins,  ajouta-t-il,  je  prédis  et  je  vois,  pour  ainsi 
dire,  de  mes  yeux,  combien  de  sang  on  répandra 
pour  cette  cause  et  par  combien  de  morts  et  de 
carnages  on  célébrera  mes  funérailles.  Il  ordonna 
ensuite  qu'on  l'enterrât  dans  le  temple  d'Ammon  ; 
et  ses  amis  lui  ayant  demandé  à  qui  il  laissait  le 
royaume  :  Au  plus  digne,  répondit-il,  ou  au  plus 
vaillant.  Il  tira  ensuite  l'anneau  de  son  doigt  et  le 
donna  à  Perdiccas,  ce  qu'on  interpréta,  comme 
s'il  eût  voulu  lui  confier  la  garde  et  la  régence  du 
royaume,  jusqu'à  ce  que  ses  véritables  héritiers 
en  prissent  eux-mêmes  le  gouvernement.  Perdic- 
cas lui  ayant  demandé  quand  il  souhaitait  qu'on 
lui  rendît  les  honneurs  divins,  il  répondit  :  Quand 
vous  sere\  heureux.  Ce  fut  la  dernière  parole 
d'Alexandre  (3)  ;  ainsi  il  abandonna  ses  états  à 
l'ambition  de  ses  généraux.  Lucain  : 

Nulloque  haerede  relicto, 

Totius  fati   Iacerandas  prasbuit  urbes. 

Ce  qu'on  vient  de  dire  paraît  assez  contraire  à 
l'auteur  sacré,  qui  enseigne  qu'Alexandre  parta- 
gea   son  empire  entre   les  grands  de  sa    cour. 


avant  sa  mort.  Il  y  en  a  qui  veulent  (4),  que  cet 
écrivain  ait  parlé  en  cela,  plutôt  suivant  l'opinion 
vulgaire,  que  selon  l'exacte  vérité.  D'autres  (ï) 
disent  qu'Alexandre  partagea  ses  états,  c'est-à- 
dire,  qu'il  les  laissa  partager  à  ses  officiers;  il  les 
leur  laissa,  comme  un  père  laisse  son  héritage  à 
ses  enfants,  sans  se  déclarer  en  faveur  d'aucun 
d'entr'eux,  sans  avantager  l'un  au-dessus  de  l'au- 
tre ;  alors  il  est  censé  leur  donner  à  tous,  et  en 
quelque  sorte  leur  partager  une  égale  portion. 
Mais  ne  peut-on  pas  dire,  qu'il  en  fit  lui-même  le 
partage  pendant  sa  vie,  puisqu'il  leur  avait  donné 
les  gouvernements  des  provinces  avant  sa  mort, 
et  qu'on  conserva  presque  partout  la  disposition 
dont  il  était  auteur,  par  déférence  à  son  choix  et 
à  sa  volonté  r1  Ce  ne  tut  qu'après  sa  mort  que  les 
gouverneurs  qu'il  avait  établis  voulurent  se  ren- 
dre absolus  dans  les  provinces. 

Mais  le  bruit  courut  et  s'accrédita  même  après 
la  mort  d'Alexandre,  qu'il  avait  partagé  son  em- 
pire entre  ses  généraux.  Quinte-Curce  avoue  que 
ce  sentiment  avait  été  suivi  par  quelques  anciens 
nistoriens  (6)  :  Credidêre  quidam  lestamento  Ale- 
xandri  dislributas  esse  provincias  :  sed  famam  ejus 
rei  vanam  fuisse  comperimus.  Diodore  de  Sicile 
nous  apprend  aussi,  que  ce  prince  avait  fait  un  tes- 
tament pour  le  partage  de  ses  états,  et  qu'il  l'avait 
déposé  dans  la  ville  de  Rhodes,  de  préférence 
aux  autres  villes  (7).  Alexandre  ayant  désigné  Per- 
diccas pour  son  successeur,  en  lui  donnant  son 
anneau,  il  est  censé  avoir  aussi,  par  avance,  ratifié 
et  approuvé  tout  ce  qui  se  fit  après  sa  mort  au 
sujet  de  sa  succession,  en  conséquence  de  cette 
déclaration  tacite  qu'il  avait  faite  de  sa  der- 
nière volonté,  en  faveur  de  ce  capitaine.  Enfin  la 
Chronique  d'Alexandrie  porte  expressément, 
qu'Alexandre  ordonna  par  son  testament,  que  l'on 
partageât  les  provinces  de  son  empire  entre  les 
généraux,  de  la  manière  que  l'exécuta  Perdiccas. 

Après  la  mort  d'Alexandre,  l'armée  et  les  géné- 
raux déférèrent  l'empire  à  Aridée,  frère  de  ce 
prince,  et,  comme  Roxane,  épouse  d'Alexandre, 


(1)  Plutarch.  Alex.-  Lucian.  Pseudomant.  -  Valer.  Max. 
lib.  v.  c.  2.  -  Quint.  Curt.  lib.  x.  c.  7. 

(î)  Justin,  lib.  xii.  Dimissis  militibus,  amicos  circums- 
tantes  percunctatur,  videanturne  similem  sibi  reperturi 
regem.  Tacentibus  cunctis,  tune  ipse,  ut  hoc  nesciat, 
ita,  illud  scire,  vaticinarique  se,  ac  pêne  oculis  videre 
dixit,  quantum  sit  in  hoc  certamine  sanguinis  fusura 
Macedonia,  quantis  cajdibus,  quo  cruore,  mortuo  sidî 
parentatura...  Cum  deficere  eum  amici  vidèrent,  quarunt 
quem   imperii  faciat  hseredem;   respondit,  dignissimum. 


Dicdor.  Histor.   lib.  xvii.  TYvt   ri]v  BastXafav   ômokslnsu  ; 
tint,  xàj  xp aî:'a-a>.  Et  initio  lib.  xviu.  T«J>  âptetio. 

(5)  Quint.  Curt.  Ub.  x.  cap.  7. 

(4)  Vide  Drus.  hic.  et  Usser.  ad  an.  5681.  et  alios. 
(î)  Raban.  D.  Thom.'alii.   Vide  Alberic.  Gentil.  dispuU 
in  1.  Macc.  cap.  2. 

(6)  Quint.  Curt.  lib.  x. 

(7)  Dicdor.  I.  xx.  A'Xî'ÇavSsoM  ^fo■:tu^<<îav':,  i'j'.r^j  jid- 
Xtota  iu>v  TtdXeuiv,  xat  trjv  ûr.ip  oXrj;  T7J;  SaaiXeia;  ôtaOrj-/.r,v 
Êxe'i  ÔeaQai. 


20 


I.  —  MACCABÉES.  —  I.  -   PARTAGE   DE  SON    EMPIRE 


8.  Et regnavit Alexanderannis  duodecim,et  mortuusest. 

9.  Et  obtinuerunt  pueri  ejus  regnum,  unusquisque  in 
loco  suo  ; 

10.  Et  imposuerunt  omnes  sibi  diademata  post  mor- 
tem  ejus,  et  filii  eorum  post  eos  annis  multis;  et  multi- 
plicata  sunt  mala  in  terra. 

il.  Et  exiit  ex  eis  radix  peccatrix,  Antiochus  illustris, 
filius  Antiochi  régis,  qui  fuerat  Romœ  obses;  et  regnavit 
in  anno  centesimo  trigesimo  septimo  regni  Graecorum. 


8.  Alexandre  régna  donc  douze  ans,  et  il  mourut  : 

9.  Et  les  grands  de  sa  cour  se  firent  rois,  chacun  dans 
son  gouvernement. 

io.  Ils  prirent  tous  le  diadème  après  sa  mort,  et  leurs 
enfants  après  eux,  pendant  plusieurs  années  :  et  les 
maux  se  multiplièrent  sur  la  terre. 

il.  C'est  de  là  que  sortit  cette  racine  de  péché, 
Antiochus  surnommé  l'Illustre,  fils  du  roi  Antiochus,  qui 
avait  été  envoyé  en  otage  à  Rome,  et  qui  régna  la  cent 
trente-septième  année  du  règne  des  Grecs. 


COMMENTAIRE 


était  grosse  de  six  ou  de  huit  mois,  on  devait  aussi 
donner  pour  associé  à  Aridée,  le  prince  qui  devait 
naître.  Perdiccas,  à  qui  Alexandre  avait  remis  son 
anneau  un  peu  avant  sa  mort,  fut  reconnu  régent 
du  royaume,  ou  plutôt  il  fut  véritablement  investi 
de  la  royauté,  puisqu'Aridée,  dont  on  a  parlé, 
était  incapable  de  gouverner.  Le  reste  des  char- 
ges de  l'empire  fut  ensuite  distribué  de  la  sorte  : 
Méléagre  eut  le  soin  du  camp  et  de  l'armée  ;  Sé- 
leucus  fut  déclaré  général  de  toute  la  cavalerie  ; 
Cratère  fut  fait  trésorier  général.  Tout  cela  sous 
la  dépendance  de  Perdiccas  (i).  Mais  cette  dis- 
position ne  dura  pas  longtemps,  comme  nous  le 
verrons  sur  le  ).  io. 

jr.  8.  Regnavit  Alexander  annis  duodecim. 
Les  historiens  ne  conviennent  pas  précisément 
de  la  durée  de  son  règne,  mais  ils  ne  s'éloignent 
pas  beaucoup  de  ce  nombre  de  douze  ans.  Jules 
Africain  et  Eusèbe(2)  lui  donnent  douze  ans  et  de- 
mi de  règne;  Diodore  de  Sicile  {}),  douze  ans  et 
sept  mois;  Aulu-Gelle  (4),  onze  ans;  Tive-Live^), 
etÉmiliusProbus(6),  treize;  Arrien(7),  douze  ans 
et  huit  mois.  Mais  Ératosthène  cité  dans  Clément 
d'Alexandrie  (8),  Tertullien  (9),  l'empereur  Ju- 
lien (10),  Porphyre  (1 1),  Josèphe(i2),  Orose(i3), 
saint  Jérôme,  Théodoret  (14)  et  d'autres,  ne  lui  en 
donnent  que  douze. 

Quant  à  l'âge  d'Alexandre,  on  n'est  pas  moins 
partagé  sur  cet  article,  que  sur  ie  précédent.  Jus- 
tin (15)  lui  donne  trente-trois  ans  et  un  mois; 
Cicéron  (16)  trente-trois;  Philostrate  (17)  Eu- 
sèbe  (18),  saint  Jérôme  (19)  et  quelques  autres, 
trente-deux;  Arrien  (20), trente-deux  et  huit  mois. 


ff.  10.  Imposuerunt  omnes  sibi  diademata 
post  mortem  ejus.  Perdiccas  ayant  été  déclaré 
régent,  comme  on  l'a  dit,  assembla  les  généraux 
de  l'armée  d'Alexandre,  et  leur  distribua  les  pro- 
vinces (21).  Il  serait  trop  long  d'en  faire  ici  le 
dénombrement,  il  suffit  de  savoir  que  tous  ces 
gouverneurs,  après  s'être  détruits  l'un  l'autre  pour 
la  plupart,  par  leurs  guerres  mutuelles,  furent  ré- 
duits à  un  petit  nombre,  qui  prirent  le  diadème 
en  môme  temps  (2?), vers  la  douzième  année  après 
la  mort  d'Alexandre.  Ptolomée,  fils  de  Lagus,  ré- 
gna en  Egypte,  Séleucus  Nicator  en  Syrie,  Cas- 
sandre  en  Macédoine,  Lysimaque  dans  la  Thrace 
et  dans  les  provinces  voisines.  Ils  s'abstinrent  du 
nom  de  roi  et  de  la  couronne  royale,  tant  qu'il 
y  eut  des  enfants  ou  d'autres  légitimes  héritiers 
d'Alexandre  :  mais  la  mère,  les  sœurs,  et  les 
deux  fils  de  ce  prince,  nés  de  Roxane  et  de  Bar- 
sine,  ayant  été  tués,  ils  crurent  pouvoir  user  de 
leur  bonne  fortune  (2;). 

y.  11.  Exiit  ex  eis  radix  peccatrix,  Antio- 
chus ILLUSTRIS,  FILIUS  ANTIOCHI  REGIS,  QUI  FUE- 
RAT Rom^e  obses.  Séleucus  Nicanor,  ou  plutôt 
Nicator,  c'est-à-dire,  le  Vainqueur,  fut  la  souche 
de  la  race  desSéleucides,  qui  régnèrent  en  Syrie  ; 
c'est  de  sa  race  que  sortit  Antiochus  Epiphane  ou 
l'Illustre,  dont  l' Écrit u're  fait  ici  le  portrait,  en 
l'appelant  racine  de  péché  .  Il  fut  fils  d'Antiochus 
le  Grand,  roi  de  Syrie,  qui,  ayant  été  vaincu  par 
les  Romains,  fut  obligé  de  leur  donner  vingt 
personnes  en  otage,  du  nombre  desquelles  était 
Antiochus  son  second  fils,  qui  depuis  fut  surnom- 
mé Epiphane.  Il  demeura  à  Rome  pendant  envi- 


(1)  Quint.  Curt.  lib.  x.- Diodor.  t.  xvin.-  Justin,  lib.xm. 
Plutarck.  in  Alex.-  Usser.  ad  an  mundi  j68i. 

(2)  Euseb.  in  Clironic.  ex  Jul.  African. 
(j)  Diodor.  I.  xvn.  ad  fin. 

(4)  A.  Gell.  I.  xvii.  c.  ai. 
^5)  Liv.  t.  ix.  et  xlv. 

(6)  AZinil.  Prob.  in  Eumene. 

(7)  Arrian.  lib.  vu. 

(8)  Clem.  Alex,  strom.  t.  t. 
(0)  Terlull.  contra  Jud.  c.  8. 
(10)  Julian.  in  Cœsar. 

(il)  Porphrr.  in  Grœc.  Euseb.  Scalig.  p.  124. 
[12)  Joseph.  An  iq.  I.  xn.  c.  2. 


(  1  j)  Oros.  I.  m.  c.  2;. 

(14)  Hieron.  et  Théodoret.  in  Dan.  xi. 

(M)  Justin,  t.  xii.  in  fine. 

(16)  Tull.  Philippic.  v. 

(17)  De  vitis  Sophist.  I.  11. 

(18)  Euseb.  Chron. 

(19)  Hieron.  in  Dan.  vm.  et  îx. 

(20)  Arrian.  t.  vu.  p.  167. 

(21)  Justin.  I.  xiii.  initia. 
(-2)  Idem  Ub.  xv. 

(2j)  Idem    ibid.  Diodor.    I.    xx.  Olymp.    118.  an.  primo. 
Usscr.  ad  an.  jOyO.  item  ad  an.  5698. 


!.—  MACCABÉES.—  I.  -   IMPIÉTÉ  DES  JUIFS 


21 


12.  In  diebus  illis  exierunt  ex  Israël  filii  iniqui,  et 
suaserunt  multis,  dicentes  :  Eamus,  et  disponamus  testa- 
mentum  cum  gentibus  quas  circa  nos  sunt,  quia  ex  quo 
recessimus  ab  eis,  invenerunt  nos  multa  mala. 


12.  En  ce  temps-là,  il  sortit  d'Israël  dos  enfants  d'ini- 
quité, qui  donnèrent  ce  conseil  à  plusieurs:  Allons  et 
faisons  alliance  avec  les  nations  qui  nous  environnent, 
parce  que  depuis  que  nous  nous  sommes  retirés  d'avec 
elles,  nous  sommes  tombés  dans  beaucoup  de  maux. 


ron  quatorze  ans  ;  son  frère  SéleucusIV,  surnom- 
mé Philopator,  donna  son  propre  fils,  Démétrius, 
pour  otage  à  la  place  de  son  frère  (i),  et  ainsi 
Antiochus  revint  en  Syrie.  Avant  son  arrivée  dans 
ce  pays,  Séleucus  mourut,  et  Antiochus  se  rendit 
maître  du  royaume,  à  l'exclusion  du  jeune  Démé- 
trius son  neveu,  qui  était  demeuré  en  otage  à 
Rome  en  sa  place.  Le  roi  d'Egypte  avait  voulu  se 
saisir  de  la  Syrie,  mais  le  retour  d'Antiochus, 
appuyé  des  forces  des  rois  Eumène  et  Attale, 
déconcerta  les  Égyptiens  et  les  obligea  de  se  reti- 
rer. C'est  ce  qui  fit  donner  à  ce  roi  de  Syrie  le 
nom  d'Antiochus  Dieu  Epiphanc,  c'est-à-dire, 
Dieu  qui  apparaît,  qui  se  manifeste  aux  hommes; 
parce  qu'on  regarda  son  arrivée  si  à  propos,  com- 
me l'apparition  d'une  divinité  favorable  au  bon- 
heur de  la  Syrie.  On  lui  donne  pour  l'ordinaire  le 
simple  nom  d'Épiphane,  qu'on  traduit  par  Illustre; 
mais  les  antiquaires  (2)  remarquent,  qu'on  ne 
trouve  jamais  sur  ses  médailles,  qui  sont  fort  com- 
munes, le  nom  d'Épiphane,  sans  celui  de  Dieu, 
qui  lui  est  toujours  joint.  Il  prit  ce  nom  principa- 
lement depuis  que  les  Samaritains  le  lui  eurent 
déféré  dans  une  députation  impie, qu'ils  lui  envoyè- 
rent pour  se  rédimer  de  la  persécution  que  ce 
prince  faisait  aux  Juifs  (3). 

Pour  se  faire  une  idée  du  mauvais  caractère  de 
ce  prince,  il  suffit  de  lire  ce  que  les  auteurs  profa- 
nes en  ont  écrit  (4).  Souvent  il  sortait  secrètement 
la  nuit  du  palais,  et,  s'écartant  dans  les  rues  éloi- 
gnées, accompagné  d'un  ou  de  deux  serviteurs,  il 
allait  ainsi  à  travers  la  ville.  Quelquefois  il  mar- 
chait seul  dans  les  rues,  portant  une  couronne  de 
roses  sur  sa  tête,  et  vêtu  d'une  robe  brochée  d'or, 
ayant  sous  son  bras  des  pierres,  qu'il  jetait  aux 
passants;  on  l'a  vu,  dans  quelques  occasions,  je- 
ter ce  qu'il  avait  d'or  et  d'argent  sur  lui  dans  le 
chemin,  en  criant  :  Attrape  qui  pourra  !  Il  se  fai- 
sait une  espèce  d'honneur  de  converser  et  de  boire 
avec  des  personnes  de  la  plus  vile  condition,  avec 
des  inconnus  et  des  étrangers.  Il  aimait  le  vin 
avec  excès,  s'enivrait  souvent,  et  ne  traitait  guère 
des  affaires  les  plus  sérieuses,  qu'après  avoir  bu  ; 
il  donnait  au  sommeil  le  jour  qui  suivait  ses  débau- 
ches, et,  s'éveillant  le  soir,  il  recommençait  à 
boire  de  nouveau.  S'il  savait  quelque  lieu  où  il  y 
eût  des  jeunes  gens  qui  se  divertissent,  il  y  allait 


COMMENTAIRE 

avec  des  bouteilles,  menant  aussi  des  musiciens, 
et  troublait  souvent  la  fête  par  sa  présence.  On 
l'a  vu  dans  les  boutiques  des  orfèvres,  parler  de 
ce  qui  regardait  ce  métier  avec  les  maîtres,  et 
faire  avec  eux  une  vaine  parade  de  ses  connais- 
sances. Il  allait  aux  bains  publics  avec  les  der- 
niers du  peuple,  et  se  faisait  frotter  et  parfumer 
devant  tout  le  monde.  Il  n'avait  point  de  honte 
des  saletés  les  plus  honteuses,  et  commettait  en 
public,  avec  des  femmes  débauchées,  des  actions 
que  la  pudeur  réprouve.  Toute  sa  conduite  mar- 
quait l'inconstance  et  la  vanité  de  son  esprit  ;  on 
ne  savait  à  qui  le  comparer,  tant  il  y  avait  d'iné- 
galité dans  ce  qu'il  faisait.  Quelquefois  il  quittait 
ses  habits  royaux,  et,  imitant  la  manière  pleine 
de  bassesse  dont  les  Romains  briguaient  les  char- 
ges de  la  République,  il  prenait  un  habit  blanc, 
saluait  et  caressait  tout  le  monde,  et,  les  prenant 
par  la  main,  leur  demandait  leurs  suffrages  ;  puis 
il  se  faisait  mettre  une  chaise  d'ivoire,  comme  à 
un  édile,  écoutait  les  plaintes,  prononçait  les  sen- 
tences, et  entrait  dans  les  derniers  détails  des 
petites  affaires  de  police.  Il  faisait  ses  libéralités 
sans  choix,  sans  jugement,  sans  esprit  ;  tantôt  il 
donnait  de  l'or,  tantôt  des  os  de  moutons  ou  de 
chevreuils,  tantôt  des  dattes  de  palmiers.  Tout  ce- 
la joint  à  la  cruauté  qu'il  fit  éclater  dans  la  suite, 
lui  fit  donner  le  nom  d'Épimane,  qui  signifie  un 
fou,  un  furieux,  au  lieu  d'Épiphane  (<,).  Voilà  quel 
était  le  persécuteur  du  peuple  de  Dieu,  cette 
racine  d'iniquité. 

Regnavit  in  anno  centesimo  trigesimo  septimo 
regni  GR^coRUM.En  l'an  175  avant  l'ère  vulgaire. 
Il  est  à  remarquer  que  Josèphe,  les  Juifs,  et  l'au- 
teur du  premier  livre  des  Maccabées,  commencent 
ces  années,  ou  cette  ère,  au  mois  de  Nîsan,  le 
premier  de  l'année  sainte,  qui  répond  à  nos  mois 
de  mars  et  d'avril  ;  au  lieu  que  l'auteur  du  second 
livre  en  prend  le  commencement  au  mois  de 
Thischri  qui  répond  à  septembre  et  octobre. 
De  là  un  désaccorj  de  six  mois.  Les  uns  mettent 
l'ère  des  Séleucides  en  septembre  312,  les  autres 
en  mars  311.  La  chronologie  de  Dreyss  adopte 
les  deux  dates  :  dans  le  texte,  c'est  312,  dans 
la  table,  art.  Syrie,  c'est  311. 

y.  12.  In  diebus  illis  exierunt  ex  Israël  filii 
iniqui.  Pour  entrer  dans  la  pensée  de  l'historien, 


(i)  Polyb.  lib.  xxxv.  Appian.  Srriac. 

(2)   Vaillant.     Hist.     Re°.    Svr.    p.     194.    BASlAEOi] 
ANTIOXOT  WËOY  Eni^ANUYS. 

[Il  Joseph.  I.  xii. an.  145.  Seteucid.  -  Vaillant.  ibid>  et  p.içô. 


(4)   Vide  Athen.  lib.  v.  c.  4.  et  x.  c.  12.  et  excerpta  Dio- 
dori  a   Vales.  Hicron.  in  Dan.  etc. 
{^)  Polrb.  I.   xxvi.  hist.  Apud  Athen.  t.  x.  KaXsî    aùtov 

£7:[piavrj,  y.a.\  ou/,  ijiri'avrj,  o:a''.  xà;  TroiÇciç. 


22 


I.—  MACCABÉES.  —  I.  -  IMPIÉTÉ   DES  JUIFS 


'j.  Et  bonus  visus  estsermo  in  oculis  eorum. 

14.  Et  destinaverunt  aliqui  de  populo,  et  abierunt  ad 
regem  ;  et  dédit  illis  potestatem  ut  facerent  justitiam 
Gentium. 

15.  Et  aedificaverunt  gymnasium  in  Jerosolymis  secun- 
dum  leges  nationum, 

16.  Et  fecerunt  sibi  prasputia,  et  recesserunt  a  testa- 
mento  sancto,  et  juncti  sunt  nationibus,  et  venundati 
sunt  ut  facerent  malum. 


1;.  Et  ce  conseil  leur  parut  bon. 

14.  Quelques-uns  du  peuple  furent  donc  députés  vers 
le  roi;  et  il  leur  donna  pouvoir  de  vivre  selon  les  cou- 
tumes des  gentils. 

15.  Et  ils  bâtirent  dans  Jérusalem  un  gymnase  à  la  ma- 
nière des  nations. 

16.  Et  ils  s'ôtèrent  les  marques  de  la  circoncision  :  ils 
se  séparèrent  de  l'alliance  sainte,  et  se  joignirent  aux 
nations,  et  ils  se  vendirent  pour  faire  le  mal. 


COMMENTAIRE 


il  est  bon  de  remarquer  ici  que,  sous  le  pontificat 
d'Onias  III,  Jason, son  frère, qui  mourait  d'envie  de 
lui  succéder,  alla  trouver  Antiochus  Épiphane  (1), 
lui  offrit  trois  cent  soixante  talents,  avec  promesse 
de  lui  endonnerencorequatre-vingtspour  d'autres 
revenus,  et  cent  cinquante  autres  dans  la  suite, 
s'il  voulait  lui  donner  le  gouvernement  de  Jéru- 
salem, et  lui  permettre  d'établir  une  académie, 
ou  un  gymnase,  comme  chez  les  Grecs,  et  s'il 
voulait  accorder  aux  habitants  de  Jérusalem,  le 
droit  de  citoyens  d'Antioche  (2).  Épiphane  reçut 
volontiers  cet  argent,  et  accorda  à  Jason  tout 
ce  qu'il  voulut  ;  mais  le  principal  dessein  de 
Jason  n'était  pas  celui  qu'il  exprimait  dans  ses 
demandes  ;  il  avait  en  vue  de  dépouiller  son 
frère  Onias  de  la  souveraine  sacrificature  :  il 
commença  donc  par  là,  et,  prenant  le  gouver- 
nement de  la  ville,  il  en  changea  lesanciens  usages, 
et  y  introduisit  les  coutumes  des  Grecs,  toutes 
contraires  à  celles  des  Juifs.  Onias  étant  mort 
vers  le  même  temps,  Antiochus  lui  substitua  Jason, 
moyennant,  dit-on,  une  somme  de  trois  mille  six 
cent  soixante  talents,  qu'il  devait  lui  payer  chaque 
année  (}).  Le  nouveau  pontite  signala  son  impiété 
par  l'érection  d'un  gymnase,  ou  d'un  lieu  public 
pour  les  jeux  et  les  exercices  ;  de  sorte  que  les 
prêtres  eux-mêmes,  au  lieu  de  vaquer  aux  fonc- 
tions de  leurs  charges,  s'occupaient  aux  exercices 
de  lalulteetdu  palet  ;  ils  tombèrent  insensiblement 
dans  le  mépris  des  coutumes  et  des  lois  de  leurs 
pères,  et  conçurent  une  estime  excessive  de  tout 
ce  qui   était  en  honneur  chez  les  Grecs. 

Jason  fut  dépossédé  trois  ans  après  par  son 
frère  Ménélaùs,  qui  sut  gagner  les  bonnes  grâces 
d'Antiochus  Épiphane,  et  qui  lui  offrit  trois  cents 
talents  de  plus  que  Jason  lui  en  avait  donné  ;  mais 
ne  s'étant  pas  mis  en  peine  de  payer  la  somme  qu'il 
avait  promise,  il  fut  cité  à  Antioche  ;  il  laissa  à 
Jérusalem,    en   sa   place,  Lysimaque,   qui    ne  se 


rendit  pas  moins  odieux  que  lui  par  ses  crimes  et 
ses  sacrilèges;  il  dépouilla  le  temple  de  Jérusalem 
de  ses  plus  grandes  richesses,  pour  les  distribuer 
à  ceux  qu'il  croyait  propres  à  l'appuyer  de  leur 
crédit  ;  mais  il  reçut  la  juste  peine  de  ses  crimes, 
car  il  fut  mis  à  mis  à  mort  dans  le  temple  même 
qu'il  avait  profané  (4).  Il  s'agit  probablement,  pour 
l'évaluation  de  la  monnaie,  du  talent  attique  qui 
valait  )$6ofr.  oo.Lessommesparaissentexagérées. 

Ex     QUO     RECESSIMUS    AB    EIS,  INVENERUNT    NOS 

multa  mala.  Faux  prétexte  du  changement  de 
religion.  C'est  ainsi  que  parlaient  les  Hébreux 
du  temps  de  Jérémie  ('-,),  c'est  ainsi  qu'on  parlait 
au  commencement  du  christianisme  ;  on  accusait 
la  nouvelle  religion  d'être  la  cause  de  tous  les 
malheurs  qui  arrivaient  dans  l'empire  (6),  au  lieu 
de  les  attribuera  leur  véritable  origine,  à  l'impiété 
générale. 

f.    15.  iCDIFICAVERUNT    GYMNASIUM.   Ils  bâtirent 

un  lieu  public  d'exercices,  un  gymnase,  une  acadé- 
mie ;  ces  lieux  étaient  destinés  aux  athlètes,  qui 
s'exerçaient  à  la  course,  à  la  lutte,  à  sauter,  à 
tirer  de  l'arc,  à  lancer  le  palet  ;  exercices  pour 
lesquels  les  Grecs  étaient  passionnés.  Quelques 
auteurs  (7)  ont  cru  qu'on  enseignait  dans  ce 
gymnase  les  lois  et  les  lettres  profanes. 

f.  16.  Fecerunt  sibi  pr^putia.  Josèphe  (8)  : 
Ils  couvrirent  les  marques  de  leur  circoncision,  afin 
qu'ils  ne  fussent  pas  différents  des  Grecs,  lorsqu'ils 
paraissaient  nus  dans  leur  gymnase.  Voilà  jusqu'où 
les  porta  l'envie  d'imiter  les  peuples  gentils  en 
toutes  choses.  Ils  effacent,  autant  qu'il  est  en  eux, 
la  marque  de  l'alliance  d'Abraham  avec  le  Sei- 
gneur, ils  renoncent  en  quelque  sorte  par  là,  à 
leurs  plus  glorieux  privilèges,  bien  éloignés  de  la 
piété  et  du  zèle  de  leurs  ancêtres,  qui  ne  croyaient 
pas  pouvoir  désigner  leurs  ennemis  d'une  manière 
plus  insultante  et  plus  pleine  de  mépris,  qu'en  les 
appelant   incirconcts.  La  manière  dont  ils  dégui- 


(1)  Usser.  ad  an.  mundi  5820.  -  Vaillant,  an.  ij8.  Scleu- 
cid.  2.  Epiphan. 

(2)  il.  Macc.  iv.  7.   11.  et  Joseph.  Anliq.  I.  xii.  c.  (>. 
(j)  Vide  Joseph,  libel.  de  Macc.  c.  2. 

(4)  11.  Macc.  iv.  42. 
(<,)  Jerem.  xliv.  18. 


(6)  Vide    Tertull.    Apotcg.  -  Aug.  lotis   lihris  de  civitate 
Dei.  item  retracl.  I.  11.  c.  4J. 

(7)  Auctor  Comment,  in  1.  Macc.  sub  nomine   D.  Tliom. 
Lyran.  Geneb. 

(8)  Joseph.  Antiq.lib.xu.  c.  6.  Tf,v  tfiiv  a-ootav  nspttoaV' 
ÉJiexàXu'Iay,  6>;  àv  elêv    xaî   ta  TUEpt  trjv  <X7:oousiv  E"X).7]ve;. 


I. 


MACCABEES.—   I.-   IMPIÉTÉ   DES  JUIFS 


saient  leur  circoncision,  n'était  pas  inconnue  aux 
anciens  ;  les  rabbins  prétendent  qu'elle  doit  son 
origine  à  Ésaû  (i),  qui  la  mit,  disent-ils,  le  pre- 
mier en  pratique,  pour  abandonner  la  religion 
d'Abraham  et  de  Jacob.  Quelques-uns  d'entre 
eux  soutiennent,  que  les  Israélites,  dans  le  désert, 
avaient  aussi  caché  la  marque  de  leur  circoncision, 
ce  qui  obligea  Josué  à  les  circoncire  une  seconde 
fois  (2):  Circumcide  secundo.  Les  Juifs  attachés 
à  Tobie  et  à  Ménélaùs,  les  imitèrent  dans  leur 
gymnase  de. Jérusalem,  dont  il  est  parlé  ici  ;  enfin 
plusieurs  Israélites  eurent  la  môme  faiblesse  après 
la  ruine  du  temple  par  Titus.  Pour  se  mettre  à 
couvert  de  la  persécution  et  des  outrages  qui  les 
suivaient  partout,  ils  s'avisèrent  de  faire  revenir 
le  prépuce,  afin  qu'on  ne  pût  plus  les  reconnaître 
pour  Juifs;  mais  Bar-Coziba,  ou  Bar-Cocheba 
ies  fit  tous  circoncire  de  nouveau.  Les  Samari- 
tains ne  recevaient  aucun  prosélyte  de  cette  nation 
dans  leur  société,  qu'il  n'eût  non  seulement  abjuré 
le  judaïsme,  mais  encore  aboli,  autant  qu'il  se  pou- 
vait, sa  première  circoncision,  pour  se  disposer  à 
en  recevoirune  nouvelle  de  leurs  mains.  Les  Juifs 
en  usaient  de  même  envers  les  Samaritains  ;  ce 
qu'on  aurait  de  la  peine  à  croire,  si  saint  Epi- 
phane  (  5  )  ne  nous  en  assurait  expressément,  et  s'il 
ne  citait  l'exemple  du  célèbre  Symmaque,  traduc- 
teur des  saintes  Écritures,  qui  fut  obligé  de  subir 
cette  loi  à  son  retour  chez  les  Samaritains,  dont  il 
était  sorti  auparavant  pour  se  faire  Juif.  Il  semble 
que  saint  Paul  craignait  quelque  abus  semblable 
dans  le  christianisme,  lorsqu'il  veut  que  ceux  qui  se 
convertissent  du  judaïsme  à  la  religion  chrétienne, 
ne  couvrent  pas  les  marques  de  leur  circoncision  (4). 
Saint  Jérôme  (5),  et  quelques  commentateurs 
après  lui,  ont  cru  la  circoncision  une  marque  per- 
manente, tellement  ineffaçable,  que  l'adresse  des 
médecins  n'était  pas  capable  de  supprimer  ce 
signe,  imprimé  sur  la  chair  des  circoncis.  Neque 
enim  poteslalis  nostrœ  est  prœput'.um  adducere  posl 
circoncisionem,    juxla  eos  qui  in  Macchabœorum 


libro  dicunlur  sibi  fecisse  prœpulia.  Ils  soutiennent 
que  le  passage  des  Maccabées  ne  signifie  que  la 
malice  ou  la  négligence  des  pères,  qui  ne  don- 
nèrent pas  la  circoncision  à  leurs  enfants  après 
leur  naissance  :  Quod  de  nascenlibus  fillis,  non  de 
patribus  dicilur.  Origène  (6)  soutient  de  même 
qu'il  est  impossible  de  faire  renaître  la  pellicule, 
qui  est  une  fois  coupée  dans  la  circoncision  ; 
mais  ailleurs  (7)  il  reconnaît  que  des  Juifs,  pour 
cacher  la  difformité  qu'ils  trouvaient  dans  la  mar- 
que de  la  circoncision,  se  mettaient  entre  les 
mains  des  médecins  pour  retirer  la  peau  ;  saint 
Épiphane  (8)  parle  de  l'instrument  qu'on  em- 
ployait à  cette  opération,  et  des  moyens  dont  0,1 
se  servait  pour  faire  reprendre  la  pellicule  qui 
avait  été  rompue  ;  Théophylacte  insinue  la  même 
chose  (9);  Cornélius  Celsus  a  fait  un  chapitre 
touchant  cette  opération  (10).  Enfin,  les  rab- 
bins (11), et  les  plus  habiles  commentateurs  (  12),  ne 
doutent  pas  que  ce  ne  soit  la  véritable  explication 
de  cet  endroit  des  Maccabées.  Bartolin,  dans 
son  ouvrage  des  maladies  de  la  Bible,  art.  26, 
cite  des  autorités  médicales,  qui  ont  enseigné  le 
secret  de  couvrir  les  marques  de  la  circoncision. 
Galien  en  parle  à  peu  près  de  même  que  Celse. 
Buxtorf  fils,  dans  une  lettre  à  Bartholin,  cite  un 
grand  nombre  de  témoignages  des  Juifs,  attes- 
tant cette  pratique  comme  usitée  parmi  les  apos- 
tats. 

Recesserunt  a  testamento  sancto.  Ils  se  sé- 
parèrent de  l'alliance  sainte,  en  supprimant  la  cir- 
concision, qui  en  était  le  sceau;  ils  quittèrent  en- 
tièrement la  religion  juive,  et  apostasièrent  hau- 
tement. Cette  apostasie  est  décrite  dans  Jo- 
sèphe  (13),  et  dans  le  second  Livre  des  Macca- 
bées (14). 

Venundati  ut  facerent  malum.  Ils  devinrent 
comme  les  esclaves  du  péché,  et  les  instruments 
du  démon  pour  détruire  la  religion  de  leurs 
pères.  Cette  expression  est  familière  aux  Hé- 
breux (1 5). 


(1)  Epiph.  de  Ponderib.  n.  16. 

(?)  Josue.  v.  2.   Vide  Mas.  in  hune  loe. 

(;,  Etiphan.  lib.  de  Mensur.  el  Pond:rib.  n.  16.  O'aot 
•yàp  inô  I'ouoa'ojv  Sa|iap£;rai;  JtpoatpEÛyouŒtv,  avxi7:£pi-csjj.- 
vovxai  ôaaÔTu  ;  >.a\  o'\  cuzr>  SaaapeiTaiv  Ttpo;  l'ouSac'ou; 
sp/ d[j.svot,  tÔ  ôà  eti  to'jkuv  y aXsi:d:spov ,  ou  /.ai  a.izo 
JtepiTopi^;  à/.po'Suaw  yivovrat. 

(4)  i.  Cor.vn.  i8.risp'.TEpi7]aEvo;  tîç  £xXr|(Jr)  ;  pir;  irctajrâaOtu. 

(5)  Hieron.  in  Isai.  lu.  et  in  lovinian.  I.  1.  et  Lyran.  hic 
et  Rupert.  de  victona  t.  ix.c.18.  et  Haimo.  in  1.  Cor.  vu.  18. 

(6)  Lib.  iv.  ricoi  ipyaiv.  c.  2. 

(7)  Philocatiœ  c.  I.  Tt;  ipEÎ  àoixEîv  tov  Et  Ouvatôv  oià  ir)v 
Jïapa  tou  rroXXoî;  vou.iÇo(j.s'vt)v  ÉKttùJ  7T£pc:5'tjj.rîa0ai,s;tiOiô,ôvTa 
Éautov  tô  È7:ia7C0(3aa6at. 


(8)  Epiphan.  de  Ponderib.  et  Mensur.  TéyvT)  tivï  tatpufj 
Otà  zoù  y.aXoupt.e'vo'j  anaaOfjpo;  Tr,v  tiôv  usX<J5v  ôj:oOcpp.aitoa 
ûiroj-aaOta'JE'vrcç  pxsEvTEatc,  /.al  xoXXr,Twoî;  TtoptoSeuOEVCE; 
3t*po6jotfav    àjit;    àut^v  xrtoTsXoùa:. 

(9)  Theophilact.  in  1.  Cor.  vu.  18. 
(to)  Cornet.  Cels.  lib.  vit.  c.  i<,. 

(11)  Lexic.  Aruck.  Vide  Ioh.  Buxtorf.  ep.  ad  Bartol. 
art.  26.  de  Morb.  Bibl. 

(12)  Vide  Sixt.  sen.  Bibl.  t.  tv.Serar.  Fuller.  Grot.  Drus. 
hic.  et  in  1.  Cor.  vu.  18.  -  Mcnoch.  Tir.  Vershorst.  Capelt. 
in  1.  Cor.  vu.  18.  et  alii.-  D'Allioli. 

(15)  Joseph.  Antiq.  t.  xn.  c.  0.  et  lib.  de  Macc.  c.  4. 

(14)  11.  Macc.  iv.  19;  v.   1$. 

(15)  Vide  III.  Reg.  xxi.  25.  -  Rom.  vu.  14.  -  Judith,  vu, 
14.  etc. 


24 


I. 


MACCABEES.  —  !.-  GUERRE  D'ANTIOCHUS  CONTRE  L'EGYPTE 


17.  Et  paratum  est  regnum  in  conspectu  Antiochi,  et 
cœpit  regnare  in  terra  ,-Egypti,  ut  regnaret  super  duo 
régna. 

18.  Et  intravit  in  /Egyptum  in  multitudine  gravi,  in 
curribus,  et  elephantis,  et  equitibus,  et  copiosa  navium 
multitudine  ; 

19.  Et  constituit  bellum  adversus  Ptolemasum,  regem 
>Egypti,  et  veritus  est  Ptolemaeus  a  facie  ejus,  et  fugit, 
et  ceciderunt  vulnerati  multi. 

20.  Et  comprehendit  civitates  munitas  in  terra  ^Egypti, 
et  accepit  spolia  terrae  /Egypti. 

21.  Et  convertit  Antiochus,  postquam  percussit 
>Egyptum  in  centesimo  et  quadragesimo  tertio  anno,  et 
ascendit  ad  Israël. 

22.  Et  ascendit  Jerosolymam  in  multitudine  gravi. 


17.  Et  Antiochus, s'étant  établi  dans  son  royaume, com- 
mença à  vouloir  régner  aussi  en  Egypte  pour  se  rendre 
roi  de  ces  deux  royaumes. 

18.  C'est  pourquoi  il  entra  dans  l'Egypte  avec  une 
puissante  année,  avec  des  chariots,  des  éléphants,  de 
la  cavalerie,  et  un  grand  nombre  de  vaisseaux. 

19.  Il  fit  la  guerre  à  Ptolémée,  roi  d'Egypte;  et  Ptolé- 
mée  eut  peur  devant  lui,  et  il  s'enfuit  avec  perte  de 
beaucoup  des  siens. 

20.  Et  Antiochus  prit  les  villes  les  plus  fortes  de 
l'Egypte,  et  s'enrichit  de  ses  dépouilles. 

2i.  Et  après  avoir  ravagé  l'Egypte  en  la  cent  quarante- 
troisiôme  année,  il  revint,  et  marcha  contre  Israël, 

22.  Et  s'avança  vers  Jérusalem,  avec  une  puissante 
armée. 


COMMENTAIRE 


jh  17.  Paratum  est  regnum  in  conspectu  An- 
tiochi. Antiochus  s'élani  établi  dans  son  royaume 
de  Syrie,  voulut  aussi  se  rendre  maître  de 
l'Egypte.  C'était  le  premier  dessein  d'Antiochus 
le  Grand,  père  d'Épiphane,  en  donnant  sa  fille 
Cléopâtre  en  mariage  à  Ptolomée,  roi  d'Egypte, 
et  de  Séleucus  IV,  en  rappelant  Antiochus  Épi- 
phane,  son  frère,  de  Rome  (1).  Quoiqu'Antiochus 
Épiphane,  tel  que  nous  l'avons  représenté,  ne 
fût  nullement  propre  à  conduire  une  entreprise  de 
cette  conséquence,  il  ne  laissa  pas  de  la  tenter  et 
d'y  réussir.  Ptolomée  Philipator,  et  sa  femme 
Cléopâtre,  sœur  d'Antiochus  Épiphane,  avaient 
laissé,  par  leur  mort,  le  royaume  à  Ptolomée  Phi- 
lométor,  qui  n'était  qu'un  enfant  ;  Eulée  et  Lé- 
née,  qui  gouvernaient  en  son  nom,  réclamèrent 
la  Cœlé-Syrie,  qui  avait  été  donnée  en  mariage  à  la 
mère  du  pupille,  et  qu'Antiochus  le  Grand  avait 
reprise;  Antiochus  Epiphane  n'avait  nulle  envie 
de  la  rendre,  et  il  prétendait,  de  plus,  que  le  gou- 
vernement du  royaume  d'Egypte  lui  était  dû, 
comme  étant  oncle  et  tuteur  du  jeune  roi.  11  s'a- 
vança jusqu'à  Tyr,  vint  à  Joppé,  et  de  là  à  Jéru- 
salem, où  il  fut  reçu  avec  tous  les  honneurs  ima- 
ginables (2).  Ceci  arriva  la  quatrième  année  de 
son  règne;  mais  il  n'alla  pas  plus  loin  vers 
l'Egypte;  il  s'en  retourna  avec  son  armée  en 
Phénicie.  Cependant  les  gouverneurs  de  l'Egypte 
se  préparaient  à  la  guerre,  pour  l'obligera  rendre 
la  Cœlé-Syrie.  Antiochus,  voyant  la  lenteur  des 
officiers  du  roi  d'Egypte,  alla  lui-même  les  atta- 
quer. Le  combat  se  livra  entre  Péluse  et  le  mont 
Casius,  et  il  remporta  la  victoire  (2). 


Comme  cette  bataille  fut  plutôt  une  déroute 
qu'une  véritable  défaite,  Antiochus  ne  tira  pas  de 
grands  avantages  de  sa  victoire;  mais  étant  re- 
tourné en  Egypte,  l'année  suivante,  et  l'ayant  atta- 
quée par  mer  et  par  terre, il  en  fit  aisément  la  con- 
quête et  se  rendit  maître  de  tout  le  pays,  sans 
presque  trouver  de  résistance  (4).  Pendant  qu'il 
était  occupéau  siège  d'Alexandrie,  on  répandit  le 
bruit  de  sa  mort  ;  cette  nouvelle  causa  une  grande 
joie  dans  Jérusalem.  On  comprend  si  Antiochus 
en  fut  irrité  ;  il  vint  mettre  le  siège  devant  la 
ville,  et,  l'ayant  emportée,  il  s'y  rassasia  de  car- 
nage. Quatre-vingt  mille  hommes  furent  égorgés 
ou  vendus  (5).  C'est  de  la  deuxième  expédition 
contre  l'Egypte,  qu'il  est  parlé  aux  versets  17,  18, 
19  et  20  de  ce  chapitre  et  au  chapitre  v  du  deu- 
xième livre  des  Maccabées.  Son  entreprise  contre 
Jérusalem  est  marquée  ici  depuis  le  verset  21 
jusqu'au  30.  Nous  avons  rapporté  ces  événements 
tout  de  suite,  pour  éviter  les  redites. 

Cœpit  regnare  in  terra  jCgypti.  Le  grec  à 
la  lettre  (6)  :  //  conçut  le  dessein  de  régner  en 
Egypte. 

y.  21.  Centesimo  et  quadragesimo  anno. 
169  avant  l'ère  vulgaire. 

f.  22.  In  multitudine  gravi.  Il  amena  contre 
cette  ville  son  armée  victorieuse,  avec  laquelle  il 
avait  assujetti  l'Egypte.  Josèphe  dit  ici  qu'Antio- 
chus prit  la  ville  sans  résistance  (7),  car  des  traî- 
tres lui  en  ouvrirent  les  portes.  Mais  ailleurs  (8), 
il  est  conforme  à  ce  que  l'Écriture  nous  en  dit 
dans  le  deuxième  livre  des  Maccabées  (9)  :  Civi- 
tatem  armis  cepit. 


(1)  Vaillant.  Hist.  Rcg.  Srr.  p.  157.  et  16c. 

(2)  11.  Macc.  îv.  21.  22. 

(j)  Usser.  ad  an.  58 jj-  -  Polyb.  Valesii.  excerpla    Dio- 
dori.  etc. 

(4)  Hieron.  in  Dan.  xi.  -  Excerpla  Diodor.  p.  ?io. 

(5)  11.  Macc.  v.  ij.  14.  -  Joseph,  lib.  de  Maccab.  et  Ub.  1. 
de  Belle  Jud.  Vide  Usser.  ad  an.  5854. 


(6)  Y'^éXocpE  SocatXEÛaou  'fj;  A'iyÛKt'iv. 

(7)  Anliq.  I.  xiii.  c.  7.  A  fJ-a/.l't  ).au.|3<ivEi  -f,v  tcoXiv, 
àvotÇavTiDV  âutôi  taj  JttJXa;,  ôaoi  x?j;  Ê/.s:'vOj  Tcpoatpsjsio; 
r|iav. 

(8)  Joseph,  de  Bello  Jud.  I.  1.  c.  1.  et  l.  vi. 

(9)  11.  Macc.  v.  11. 


I.  —  MACCABEES. 


I.  -  ANTIOCHUS  A  JERUSALEM 


'■'■> 


2;.  Et  intravit  in  sanctilicationem  cum  supeibia;  et 
accepit  altare  aureum,  et  candelabrum  luminis,  et 
universa  vasa  ejus,  et  mensam  propositionis,et  libatoria, 
et  phialas,  et  mortariola  aurea,  et  vélum,  et  coronas,  et 
ornamentum  aureum  quod  in  facie  templi  erat  ;  et  com- 
minuit  omnia. 

24.  Et  accepit  argentum,  et  aurum,  et  vasa  concupis- 
cibilia  ;  et  accepit  thesauros  occultas  quos  invenit,  et 
sublatis  omnibus,  abiit  in  terram  suam. 

25.  Et  fecit  casdem  hominum,  et  locutus  est  in  super- 
bia  magna. 

26.  Et  factus  est  planctus  magnus  in  Israël,  et  in  omni 
loco  eorum; 

27.  Et  ingemuerunt  principes  et  seniores,  virgines  et 
juvenes  infirmati  sunt,  et  speciositas  mulierum  immutata 
est. 

28.  Omnis  maritus  sumpsit  lamentum,  et  quje  sedebant 
in  thoro  maritali  lugebant  ; 

29.  Et  commota  est  terra  super  habitantes  in  ea,  et 
universa  domus  Jacob  induit  confusionem. 

;o.  Et  post  duos  annos  dierum,  misit  rex  principem 
tributorum  in  civitates  Juda,  et  venit  Jérusalem  cum  turba 
magna. 

?I.  Et  locutus  est  ad  eos  verba  pacifica  in  dolo  ;  et 
crediderunt  ei. 

?2.  Et  irruit  super  civitatem  repente,  et  percussit  eam 
plaga  magna,  et  perdidit  populum   multum  ex  Israël. 


2,'.  Il  ontra  plein  d'orgueil  dans  le  lieu  saint,  il  prit 
l'autel  d'or,  le  chandelier  où  étaient  les  lampes,  avec 
tous  ses  vases,  la  table  de  proposition  où  les  pains 
étaient  exposés  devant  le  Seigneur,  les  bassins,  les  cou- 
pes, les  encensoirs  d'or,  le  voile,  les  couronnes,  et  l'or- 
nement d'or  qui  étaient  devant  le  temple,  et  il  brisa 
tout. 

24.  Il  prit  l'argent,  l'or  et  tous  les  vases  précieux,  et 
les  trésors  cachés  qu'il  trouva;  et  ayant  tout  enlevé,  il 
s'en  retourna  en  son  pays. 

2\  Il  fit  un  grand  carnage  d'hommes,  et  il  parla  avec 
un  grand  orgueil. 

26  Alors  il  y  eut  un  grand  deuil  parmi  le  peuple 
d'Israël,  et  dans  tout  leur  pays. 

27.  Les  princes  et  les  anciens  furent  dans  les  gémis- 
sements, les  vierges  et  les  jeunes  hommes  dans  l'abatte- 
ment; et  la  beauté  des  femmes  fut  changée. 

28.  Tous  les  maris  s'abandonnèrent  aux  pleurs;  et  les 
femmes  assises  sur  leur  lit  nuptial    fondaient  en   larmes. 

29.  La  terre  fut  émue  de  la  désolation  de  ses  habitants  ; 
et  toute  la  maison  de  Jacob  fut  couverte  de  confusion. 

;o.  Deux  ans  après,  le  roi  envoya  dans  les  villes  de 
Juda  un  surintendant  des  tributs  qui  vint  àJérusalem  avec 
une  grande  suite. 

;i.  H  leur  parla  d'abord  avec  une  douceur  feinte,  et 
comme  s'il  fût  venu  dans  un  esprit  de  paix  ;  et  ils  le  cru- 
rent. 

j2.  Mais  il  se  jeta  tout  d'un  coup  sur  la  ville,  y  fit  un 
grand  carnage,  et  tua  une  grande  multitude  d'Israélites. 


COMMENTAIRE 


f.  22.  Intravit  in  sanctificationem  cum  su- 
perbia.  Menelao  duciore,  qui  legum  et  patriœ  fuit 
proditor,A\l  le  deuxième  livre  des  Maccabées  (1). 
Les  auteurs  profanes  (2)  parlent  de  cette  entre- 
prise injuste  et  sacrilège  d'Antiochus,  qui,  sans 
aucun  sujet  légitime,  prit  de  force  une  ville  alliée, 
y  exerça  d'horribles  cruautés,  pilla  le  temple,  sa- 
crifia des  pourceaux  sur  l'autel,  aspergea  le  temple 
avec  leur  sang  (3),  et  entreprit  de  changer  les  lois 
des  Hébreux.  Josèphe  nous  apprend  (4)  que  les 
rois  de  Syrie,  successeurs  d'Antiochus,  rendirent 
aux  Juifs  d'Antioche  les  vases  d'airain  qu'il  avait 
emportés  du  temple,  et  qu'ils  furent  mis  en  dépôt 
dans  la  synagogue  de  cette  ville,  où  ils  étaient 
encore  du  temps  de  Titus. 

Coronas,  et  ornamentum  aureum  quod  in 
facie  templi  erat.  On  ornait  les  façades  du  tem- 
ple de  couronnes  d'or,  de  boucliers,  et  d'autres 
ornements  précieux,  que  les  princes  ou  d'autres 
personnes  riches  et  pieuses,  y  offraient  en  ex- 
voto  (5). 

Comminuit  omnia.  Le  grec  (6)  ;  //  dépouilla 
tout.  Il  enleva  les  lames  d'or  et  d'argent  qui  cou- 
vraient les  lambris  et  les  portes.  En  un  mot,  il  ne 
prit  pas  seulement  les  vases  qui  étaient  d'or  mas- 


sif, mais  il  arracha  aussi  les  lames  précieuses  qui 
couvraient  les  différentes  parties  du  temple. 

jfr.  24.  Thesauros  occultos  quos  invenit.  Les 
dépôts,  les  richesses,  les  fonds  ou  les  objets  de 
réserve,  distincts  des  vases  qui  étaient  en  vue,  et 
à  l'usage  ordinaire  du  temple. 

;v.  28.  Omnis  maritus  sumpsit  lamentum.  Le 
grec  (7)  :  Les  nouveaux  mariés  se  mirent  à  faire  le 
deuil,  à  chanter  des  chants  lugubres. 

p.  30.  Misit  principem  tributorum.  Ce  surin- 
tendant, ou  prince  des  tributs,  est  probablement 
Apollonius,  qui  fut  envoyé  par  Antiochus  à  la 
tête  d'une  armée  de  vingt-deux  mille  hommes, 
avec  ordre  de  tuer  tous  les  hommes  d'un  âge 
mûr,  et  de  vendre  pour  esclaves  les  femmes  et 
les  enfants  (8).  Étant  venu  à  Jérusalem,  il  affecta 
des  dispositions  pacifiques,  et  attendit  sans  rien 
dire  jusqu'au  jour  du  sabbat.  Un  grand  nombre 
de  Juifs  y  vinrent  du  dehors  pour  accomplir  leur 
dévotion.  Apollonius  donna  le  signal  à  ses  trou- 
pes ;  elles  se  répandirent  dans  tous  les  quartiers  ; 
la  ville  fut  pillée  et  brûlée,  et,  après  avoir  fait  un 
carnage  horrible  des  habitants,  il  prit  dix  mille 
personnes  qu'il  emmena.  C'est  ce  que  nous  ap- 
prenons du  second  livre  des  Maccabées. 


(1)  Ibid.  f.i^.     ■ 

(2)  Vide  Polyb.  Strab.  Nicot.  Damasc.  Timagen.  Castor 
Appollodor.  apud  loseph.  lib.  11.  contra  A ppion.  -  Dwdor. 
lib.  xxxiv.  et  Pholii  Bibl.  cud.  244. 

(  3)  Joseph,  t.  xii.  7.  et  xm.  16. 
(4)  Joseph  de  Belle  I.  vu.  c.  21. 


[<,)  Voyez  chap.  iv.  57, 

(6)  E'Xejuos  xâvea. 

(7)  lia;  vL>|j.a>!Oç  àvÈXajk  0p7Jvov. 

(8;    Vide  11.  Macc.  v.  24.  25.  26.  et  Joseph.  Antiq.  I.  xu. 
c.  7.  et  1.  Macc.  m.  10. 


26 


I. 


MACCABÉES. 


I.  -   PILLAGE   DE  LA  VILLE 


jj.  Et  accepit  spolia  civitatis,  et  suscendit  eam  igni  ; 
et  destruxit  doraos  ejus,  et  muros  ejus  in  circuitu  ; 

?4.  Et  captivas  duxerunt  mulieres,  et  natos  et  pecora 
possederunt. 

?>;.  Et  aedificaverunt  civitatem  David  muro  magno  et 
firmo,  et  turribus  firmis,  et  facta  est  illis  in  arcem  ; 

j6.  Et  posuerunt  illic  gentem  peccatricem,  viros  ini- 
quos,  et  convaluerunt  in  ea  ;  et  posuerunt  arma,  et  escas  ; 
et  congregaverunt  spolia  Jérusalem, 

j7.  Et  reposuerunt  illic;  et  facti  sunt  in  laqueum  mag- 
num. 

j8.  Et  factum  est  hoc  ad  insidias  sanctificationi,  et  in 
diabolum  malum  in  Israël  ; 

;*?.  Et  effuderunt  sanguinem  innocentem  per  circuitum 
sanctificationis,  et  contaminaverunt  sanctificationem. 

40.  Et  lugerunt  habitatores  Jérusalem  propter  eos  ;  et 
facta  est  habitatio  exterorum,  et  facta  est  extera  semini 
suo  ;  et  nati  ejus  reliquerunt  eam. 

41.  Sanctificatio  ejus  desolata  est  sicut  solitudo  ;  dies 
festi  ejus  conversi  sunt  in  luctum,  sabbata  ejus  in  oppro- 
brium,  honores  ejus  in  nihilum. 

42.  Secundum  gloriam  ejus  multiplicata  est  ignominia 
ejus  et  sublimitas  ejus  conversa  est    in  luctum. 

4J.  Et  scripsit  rex  Antiochus  omni  regno  suo  ut  esset 
omnis  populus  unus,  et  relinqueret  unusquisque  legem 
suam. 

44.  Et  consenserunt  omnes  gentes  secundum  verbum 
régis  Antiochi  ; 


ij.  H  prit  les  dépouilles  de  la  ville,  et  y  mit  le  feu  ; 
il  en  détruisit  les  maisons,  et  les  murs  qui  l'environnaient. 

Î4.  Ils  emmenèrent  les  femmes  captives,  et  ils  se  ren- 
dirent maîtres  de  leurs  enfants  et  de  leurs  troupeaux. 

?ç.  Et  ils  fortifièrent  la  ville  de  David,  avec  une 
muraille  grande  et  forte,  et  de  bonnes  tours;  et  ils  en 
firent  leur  citadelle. 

56.  Ils  y  mirent  une  race  de  péché,  des  hommes 
corrompus,  qui  s'y  établirent  puissamment  :  Ils  y  appor- 
tèrent des  armes  et  des  vivres,  y  assemblèrent  et  y 
mirent  en  réserve  les  dépouilles  de  Jérusalem: 

?7.  Et  ils  s'y  établirent,  et  ils  devinrent  un  filet  très 
dangereux. 

58.  Ils  dressèrent  des  embûches  à  tous  ceux  qui  venaient 
se  sanctifier  dans  le  temple;  et  ils  furent  sans  cesse 
comme  le  mauvais  démon  d'Israël. 

;q.  Ils  répandirent  le  sang  innocent  autour  du  lieu  saint, 
et  ils  souillèrent  le  sanctuaire. 

40.  Les  habitants  de  Jérusalem  s'enfuirent  à  cause 
d'eux  :  elle  devint  la  demeure  des  étrangers  et  étrangère 
à  ses  citoyens,  et  ses  propres  enfants  l'abandonnèrent. 

41.  Son  temple  saint  fut  désolé,  et  devint  une  solitude  : 
ses  jours  de  fêtes  se  changèrent  en  des  jours  de  pleurs  : 
ses  jours  de  sabbats  furent  en  opprobre  ;  et  tous  ses 
honneurs  furent  anéantis. 

42.  Le  comble  de  son  ignominie  a  égalé  celui  de  sa 
gloire  ;  et  sa  haute  élévation  a  été  changée  en  deuil. 

4;.  Alors  le  roi  Antiochus  écrivit  des  lettres  à  tout 
son  royaume  afin  que  tous  les  peuples  n'en  fissent  plus 
qu'un,  etque  chaque  peuple  abandonnât  sa  loi  particulière. 

44.  Toutes  les  nations  consentirent  à  cette  ordonnance 
du  roi  Antiochus  ; 


COMMENTAIRE 


jh  33.  Succendit  eam.  Il  en  brûla  la  plus  belle 
partie  (i\  et  démolit  tout  ce  qu'il  n'enferma  pas 
dans  l'enceinte  de  la  muraille,  qu'il  y  fit  bâtir  pour 
servir  de  forteresse. 

f.  35.  jEdificaverunt  civitatem  David  muro 
magno.  Ils  bâtirent  la  citadelle  de  Jérusalem,  ou 
plutôt  ls  en  augmentèrent  les  fortifications,  et  lui 
donnèrent  une  plus  grande  étendue  ;  car  il  est 
certain,  par  le  second  livre  des  Maccabées, 
qu'avant  la  seconde  expédition  d'Antiochuscontre 
l'Egypte,  il  y  avait  déjà  une  citadelle  dans  Jéru- 
salem entre  les  mains  des  Syriens.  Voyez  11.  Macc. 
iv.  27.  et  v.  5.  Indépendamment  des  travaux  qui 
furent  faits  sur  le  mont  Sion,  dans  la  cité  de  Da- 
vid, les  Syriens  bâtirent  encore  une  citadelle  dans 
la  ville  Basse,  comme    le  dit  expressément  Josè- 

phe  :  E'v  ift   zârw  r.o'Xst    tozoîo'uTpsv    â'/.pav  (2). 

f.  38.  Factum  est  hoc  ad  insidias  sanctifi- 
cationi, ET  IN  DIABOLUM  MALUM  IN  ISRAËL.  Les 
troupes  qui  étaient  en  garnison  dans  la  cité  de 
David,  étaient  comme  une  ambuscade  contre 
tous  ceux  qui  voulaient  aller  au  temple  ;  quicon- 
que entreprenait  d'y  monter,  s'exposait  nécessai- 
rement à  être  volé  ou  tué  par  les  soldats.  Sanc- 
tificalio,  dans  ce   liyre,  signifie  ordinairement   le 


temple,  le  lieu  saint.  Diabolus  malus,  signifie  un 
calomniateur  ou  un  ennemi,  un  mauvais  génie, 
image  du  démon,  qui  rôde  autour  de  nous,  comme 
un  lion  rugissant,  pour  nous  dévorer. 

?.  40.   FUGERUNT    HABITATORES    JERUSALEM.  Le 

peu  de  Juifs  qui  étaient  restés  dans  la  ville,  fu- 
rent obligés  de  l'abandonner,  et  ceux  qui  s'étaient 
enfui  auparavant,  n'osèrent  y  revenir.  De  ce 
nombre  furent  Judas  Maccabée,  et  les  autres 
dont  on  parlera  plus  loin  (3).  Josèphe  (4)  nous 
apprend  que  les  Samaritains,  voyant  la  haine 
d'Antiochus  contre  les  Juifs,  et  craignant  de  se 
voir  enveloppés  dans  la  persécution,  publièrent 
qu'ils  étaient  Sidoniens  d'origine.  Ils  écrivirent  à 
Antiochus,  qu'ils  qualifient  Dieu  manifesté,  ou  qui 
apparaît  aux  hommes  ;  ils  lui  exposèrent  que  leurs 
ancêtres  ayant  bâti  un  temple  sur  le  Garizim, 
sans  le  dédier  à  aucune  divinité  particulière,  ils 
souhaitaient  de  le  dédier  à  Jupiter  Grec,  et  le 
priaient  d'ordonner  à  Apollonius  et  à  Nicanor,  ses 
gouverneurs,  de  ne  pas  les  confondre  avec  les 
Juifs. 

f.  43.  Ut  esset  omnis  populus  unus.  Afin  que 
tous  les  peuples  n'en  fissent  plus  qu'un  ;  qu'ils  sui- 
vissent les  mêmes  lois,  et  les  mêmes  usages.  De- 


(i)  Joseph,  ibid.  Ei\ér.\jpy)Si  «jt/j;  zx  xdÉXXiata. 
(2)  Joseph.  Ant.  Jud.  xu.  5. 


(?)  Vide  11.  Macc.  v.  ult. 
(4)  Joseph.  Antiq.  I.  XII.  c.  7. 


I.  —   MACOABEES.  —  I.  -  APOSTASIE   DES  JUIFS 


45.  Et  multi  ex  Israël  coiisenserunt  servituti  ejus,  et 
sacrificaverunt  idolis,  et  coinquinaverunt   sabbatum. 

46.  Et  misit  rex  libros  per  manus  nuntiorum  in  Jérusa- 
lem et  in  otnnes  civitates  Juda,  ut  sequerentur  leges  gen- 
tium  terrœ, 

47.  Et  prohibèrent  holocausta,  et  sacrificia,  et  placa- 
tiones  fieri  in  templo  Dei  ; 

« 

48.  Et  prohiberentcelebrari  sabbatum  et  dies  solemnes  ; 

49.  Et  jussit  coinquinari  sancta,  et  sanctum  populum 
Israël; 

so.  Et  jussit  asdificari  aras,  et  templa,  et  idola,  et  im- 
immolari  carnes  suillas,  et  pecora  communia; 

51,  Et  relinquere  filios  suos  incircumcisos,  et  coin- 
quinari animas  eorum  in  omnibus  immundis  et  abomina- 
tionibus,  ita  ut  obliviscerentur  legem,  et  immutarent 
omnes  justificationes  Dei; 

52.  Et  quicumque  non  fecissent  secundum  verbum  régis 
Antiochi,  morerentur. 

5;.  Secundum  omnia  verba  hase  scripsit  omni  regno 
suo,  et  prasposuit  principes  populo,  qui  hase  cogèrent. 

54.  Et  jusserunt  civitatibus  Juda  sacrificare. 

SS-  Et  congregati  sunt  multi  de  populo  ad  eos  qui  de- 
reliquerant  legem  Domini,  et  fecerunt  mala  super  terram; 

56.  Et  effugaverunt  populum  Israël  in  abditis,  et  in 
absconditis  fugitivorum  locis. 

ST  Die  quinta  décima  mensis  casleu,  quinto  et  quadra- 
gesimo  et  centesimo  anno,  aedificavit  rex  Antiochus  abo- 
minandum  idolum  desolationis  super  altare  Dei;  et  per 
universas  civitates  Juda  in  circuitu  œdificaverunt  aras; 


4$.  Et  d»  nombreux  Israélites  embrassèrent  celte 
servitude  qu'il  leur  imposait  ;  ils  sacrifièrent  aux  idoles, 
et  ils  violèrent  le  sabbat. 

46.  Et  le  roi  envoya  des  lettres  par  des  hommes  exprès 
à  Jérusalem,  et  à  toutes  les  villes  de  Juda,  afin  qu'elles 
eussent  à  suivre  les  lois  des  nations   de  la  terre  ; 

47.  Qu'elles  empêchassent  qu'on  offrît  dans  le  temple 
de  Dieu  des  holocaustes,  des  sacrifices,  et  des  oblations 
pour  l'expiation  du  péché, 

48.  Et  qu'on  ne  célébrât  le  sabbat  et  les  fêtes  solen- 
nelles. 

40.  Et  il  ordonna  qu'on  souillât  les  lieux  saints,  et  le 
saint  peuple  d'Israël, 

<,o.  Qu'on  bâtit  des  autels  et  des  temples,  qu'on  dressât 
des  idoles,  qu'on  sacrifiât  de  la  chair  de  porc,  et  d'autres 
bètes  immondes. 

Si.  Qu'on  laissât  les  enfants  mâles  incirconcis;  et 
qu'ils  souillassent  leurs  âmes  par  toutes  sortes  de  viandes 
impures,  et  d'abominations;  en  sorte  qu'ils  oubliassent 
la  loi  de  Dieu,  et  qu'ils  renversassent  toutes  ses  ordon- 
nances : 

52.  Et  il  commanda  que  si  quelqu'un  n'obéissait  pas  à 
cet  ordre  du  roi  Antiochus,  il  fût  aussitôt  puni  de  mort. 

S?.  Il  écrivit  de  la  sorte  dans  tout  son  royaume,  et  il 
établit  des  officiers  pour  contraindre  le  peuple  d'obéir  à 
cet  édit. 

54.  Ils  ordonnèrent  donc  aux  villes  de  Juda  de 
sacrifier. 

SS-  Et  plusieurs  du  peuple  vinrent  se  joindre  à  ceux 
qui  avaient  abandonné  la  loi  du  Seigneur,  et  ils  firent 
beaucoup  de  maux  dans  le  pays. 

56.  Ils  contraignirent  le  peuple  d'Israël  à  s'enfuir  dans 
des  lieux  écartés,  et  à  chercher  des  retraites  où  ils  pus- 
sent se  caclier  dans  leur  fuite. 

57.  Le  quinzième  jour  du  mois  de  Casleu,  en  la  cent 
quarante-cinquième  année,  le  roi  Antiochus  dressa 
l'abominable  idole  de  la  désolation  sur  l'autel  de  Dieu  ; 
et  on  bâtit  des  autels  de  tous  côtés  dans  toutes  les  villes 
de  Juda  : 


COMMENTAIRE 


mère  superslilionem,  et  mores  Grœcorum  dare 
adnixus,  dit  Tacite  (1).  Il  envoya  en  Judée  un 
sénateur  d'Antioche  (  2j,  pour  souiller  le  temple  de 
Jérusalem,  y  faire  cesser  les  sacrifices,  et  le  dédier 
ensuite  à  Jupiter  Olympien.  On  publia  les  ordres 
du  roi  à  Jérusalem,  et  dans  les  autres  villes  de  la 
province. 

f.  4<j.  Multi  ex  Israël  consenserunt  servi- 
tuti ejus.  Plusieurs  d'entre  les  Israélites  embras- 
sèrent celte  servitude,  ou  mieux  avec  le  grec  (5), 
embrassèrent  ce  culte,  ou  adhérèrent  à  la  fausse 
religion.  A«,ce;a  est  la  traduction  grecque  du  mot 
m;y  'abodâh,  qui  signifie  à  la  fois  service  divin  et 
servitude. 

y.  49.  Jussit  coinquinari  sancta,  et  sanctum 
pupulum  Israël.  Il  commanda  qu'on  offrît  des 
sacrifices  d'animaux  impurs  dans  le  temple  ;  qu'on 


répandît  du  sang  impur  dans  le  lieu  saint, et  qu'on 
contraignît  ceux  des  Israélites  qui  résistaient 
encore  et  les  prêtres,  à  manger  des  viandes  défen- 
dues. 

fi.  <,o.  Aras,  et  templa,  et  idola.  Le  texte 
porte  (4)  :  Qu'on  bâtît  des  autels,  qu'on  plantât 
des  bois  sacrés,  et  qu'on  fît  des  temples  aux  idoles 

h  57.  Die  quinta  décima  mensis  casleu.  Le 
mois  de  Casleu  répond  à  nos  mois  de  novem- 
bre et  décembre,  et  la  cent  quarante-cinquième 
année  de  l'ère  des  Séleucides  tombe  en  167. 
Dans  toute  la  suite  de  ces  livres,  on  lit  le  vingt- 
cinquième  jour  de  Casleu  ('-,),  comme  celui  de  la 
profanation  du  temple.  Peut-être  y  a-t-il  une 
faute  de  copiste,  ou  bien  a-t-on  commencé  les 
travaux  le  1 5  et  (ait  l'inauguration  dix  jours  après, 
quand  tout  fut  terminé. 


(1)  Tacit.  hist.  lib.  v. 

(2)  1.   \lacc.  vi.  1.  et  seq. 

(j)  E'uôoxrjaav  trj  Xat^eia  àutoO. 


(4)  O'i/.oôofAfjaat  6fo[j.où;,  xat  •.Eo.^VT),  xa't  éiStoXeîa. 

(5)  Vide  1.  VJacc.  1.  52;   iv.  52.  et  59.  et  11.   Macc.  1.  \i 
et  x.  5. 


28 


I.  —  MACCABÉES.  -  I.  -   PERSÉCUTION 


$8.  Et  ante  januas  domorum,  et  in  plateis  incendebant 
thura,  et  sacrificabant ; 

S9.  Et  libros  legis  Dei  combusserunt  igni,  scindentes 
eos; 


58.  Et  ils  diraient  de  l'encens,  et  sacrifiaient  devant 
les  portes  des  maisons  et  au  milieu  dîs  rues. 

$9.  Ils  déchirèrent  les  livres  de  la  loi  de  Dieu,  et  les 
jetèrent  au  feu  ; 


COMMENTAIRE 


jEdificavit  rex  Antiochus  abominandum  ido- 
lum  desolationis,  super  altare  Dei.  On  attri- 
bue avec  raison  à  ce  prince  tout  ce  que  firent  les 
officiers  en  suivant  ses  ordres.  L'idole  abomina- 
ble qui  fut  placé?  dans  le  temple  n'est  autre  que 
la  statue  de  Jupiter  Olympien(i),  qu'Antiochus  y 
fit  mettre.  Daniel  (2)  avait  prédit  cette  profana- 
tion longtemps  auparavant,  et  Notre  Seigneur, 
dans  l'Évangile  (3),  prédit  une  abomination  sem- 
blable, qui  arriva  après  que  les  Romains  eurent 
pris  la  ville  et  brûlé  le  temple. 

Daniel  (4)  avait  très  expressément  marqué  cette 
circonstance  dans  sa  prophétie,  lorsqu'il  avait  dit 
qu'on  souillerait  le  sanctuaire,  qu'on  abolirait  le 
le  sacrifice  perpétuel,  et  qu'on  mettrait  dans  le 
temple  l'abomination  de  la  désolation;  c'est-à- 
dire,  l'idole  profane  et  abominable  de  Jupiter 
Olympien.  Cette  profanation  porta,  en  effet,  la 
dernière  désolation  dans  J  érusalem, parmi  les  vrais 
fidèles  ;  ils  ne  purent  voir  cette  idole  dans  le  sanc- 
tuaire, sans  être  blessés  jusqu'au  cœur.  Le  Tout- 
Puissant  souffrait  cet  outrage,  lorsqu'il  lui  était 
facile  de  l'empêcher  :  et  il  le  sourirait,  parce  qu'il 
voulait  que  cette  profanation  extérieure  de  son 
temple  fût  en  quelque  sorte  la  figure  et  le  châti- 
ment d'une  autre  sorte  d'abomination,  qui,  pour 
être  moins  sensible,  n'en  était  pas  moins  horrible 
devant  ses  yeux. 

Cette  abomination  était  celle  ou  cœur  même 
de  son  peuple,  qui  n'avait  pas  craint  de  souiller  ce 
sanctuaire  intérieur  et  spirituel  par  tant  de  crimes  ; 
qui  avait  cessé  de  lui  offrir  le  sacrifice  perpétuel 
de  son  amour,  en  se  vendant  au  péché,  comme 
parle  l'Écriture,  et  qui,  de  l'autel  de  Dieu,  dressé 
au  fond  de  son  âme  comme  en  un  lieu  saint,  avait 
fait  un  autel  d'idolâtrie  par  l'abominable  désola- 
lion  qu'il  y  avait  introduite,  en  substituant  à 
l'hommage  qu'il  devait  lui  rendre,  l'adoration  des 
dieux  des  païens  et  l'amour  de  toutes  les  choses 
qu'il  lui  défendait. 

Ainsi  tous  ces  différents  autels  que  l'on  bâtit 
dans  toutes  les  villes  de  Juda,  étaient  comme 
autant  de  monuments  extérieurs  des  prévarica- 
tions spirituelles  de  Juda.  On  brûlait  de  l'encens, 
et  on  sacrifiait  aux  idoles  devant  les   portes   des 


maisons,  comme  afin  de  reprocher  à  ce  peuple 
ingrat,  et  de  lui  remettre  devant  les  ye»ix  cet  autre 
encens,  ces  autres  sacrifices  qu'il  avait  offerts  tant 
de  fois  aux  créatures,  dont  il  avait  préféré  l'amour 
à  celui  de  Dieu.  Les  livres  mêmes  de  la  loi  furent 
déchirés  el  jetés  au  feu,  pour  faire  connaître  à 
Israël  qu'il  s'était  rendu  indigne  de  cette  loi,  dont 
il  avait  violé  la  sainteté  en  tant  de  manières. 

Enfin,  tout  ce  qu'on  vit  arriver  alors  de  plus 
funeste  dans  la  désolation  du  temple  et  de  la  ville 
de  Jérusalem,  n'était  qu'une  image  de  ce  qui 
s'était  passé  auparavant,  et  de  ce  qui  se  passe 
dans  le  cours  de  tous  les  siècles  au  fond 
du  cœur  de  la  plus  grande  partie  des  hommes, 
contre  ce  qu'on  doit  à  Dieu  et  à  la  sainteté  in- 
violable de  sa  loi.  Pourra-t-on  en  être  surpris, 
lorsqu'on  entend  Jésus-Christ  même  déclarer  aux 
femmes  qui  le  suivaient,  toutes  fondantes  en  lar- 
mes, lorsqu'il  marchait  chargé  de  sa  croix  vers  le 
Calvaire,  que  ce  n'était  pas  sur  lui,  mais  sur  elles- 
mêmes  et  sur  leurs  enfants,  qu'elles  devaient  plu- 
tôt pleurer  (;).  Car  en  effet,  la  mort  du  Fils  de 
Dieu,  et  les  profanations  de  son  temple  n'étaient 
que  des  suites  naturelles  des  crimes  commis.  Les 
hommes  pouvaient  juger  par  là  combien  ils  doi- 
vent pleurer  leurs  propres  péchés,  puisqu'ils 
étaient  capables  de  produire  de  si  effroyables 
renversements. 

jK  <;8.  Ante  januas  domorum,  et  in  plateis 
incendebant  thura.  On  portait  sans  doute  de 
petits  autels,  ou  des  trépieds,  ou  des  encensoirs, 
et  des  réchauds  devant  chaque  maison,  afin 
d'obliger  chaque  famille  d'offrir  de  l'encens  aux 
fausses  divinités;  ou,  si  l'on  veut,  l'on  érigea  de- 
vant chaque  maison  un  autel  avec  piédestal  à 
Trivia,  déesse  qui  présidait  aux  portes  et  aux 
carrefours.  Le  culte  de  cette  fausse  divinité 
n'était  pas  inconnu  aux  Hébreux.  Isaïe  le  leur 
reprochait  longtemps  avant  la  captivité  (6).  Les 
Grecs  avaient  des  niches  et  des  statues  d'Hécate, 
presque  à  toutes  leurs  portes  (7).  Ils  les  appelaient 
e'xaTEtov  ou  exâtatov  (8).  Ils  avaient  aussi  leurs  Ju- 
piter, Apollon,  Mercure,  qui  présidaient  aux 
rues  (9). 

y.  ',().  Libros  legis  combusserunt  igni.  Josè- 


(1)  II.  Macc.vi.  2.  Contaminarc  quod    in  Hicrosolymis 
erat  templum,  et  cognominare  Jovis  Olympii. 

(2)  Dan-  xi.  Ji. 

(;,  Mail.  xxiv.  n.-  Marc.  xiu.  14. 
(4;  Dan.  XI.  51. 
1  C)  Luc.  xxtn.  28. 


(6)  Vide  ad  Isai.  lvii.  8.  et  Macrob.  Saturnal.  I.  1.  c.9. 

(7)  V ide  Aristophan.    in    Vespis.    Alschil.    Castcllan.  de 
feslis  Grœc.  in  E'xcrcrjffiet. 

(8)  Hesvch.  E'/.atoua,  xà.  r.po  Oupav  E'xxcfj?    àyàXpiaTa. 

(9)  Zeù;   '.m   E'pu.r|4  àYupiîot.    A'noXXwv    âyuiêu;.    Z^ù; 
Ipy.eîo:. 


I.  —   MACCABÉES.  —  I.  -  SA  RIGUEUR 


29 


00.  Et  apud  quemcumque  inveniebantur  libri  testnmenti 
Domini,  et  quicumque  observabat  legera  Domini,  se- 
cundu.ii  edictum  régis  trucidabant  eum. 

6t.  In  virtute  sua  faciebant  haec  populo  Israël,  qui  in- 
veniebatur  in  omni  mense  et  mense  in  civitatibus. 

62.  Et  quinta  et  vigesimtdie  mensis,  sacrificabant  super 
aram  quas  erat  contra  altare. 

6?.  Et  mulieres  quas  circumcidebant  rilios  suos  truci- 
dabantur,  secundum  ;ussum  régis  Antiochi; 

64.  Et  suspendebant  pueros  a  cervicibus  per  universos 
domos  eorum,  et  eos  qui  circumciderant  il  1  os  trucidabant. 

65.  Et  multi  de  populo  Israël  definierunt  apud  se  ut 
non  manducarem  immunda,  et  elegerunt  magis  mori 
quam  cibis  coinquinari  immundis  ; 


60.  Et  si  l'on  trouvait  chez  quelqu'un  les  livres  de 
l'alliance  du  Seigneur,  s'il  observait  la  loi  du  Seigneur, 
il  était  tué  aussitôt,  selon  redit  du  roi. 

61.  C'est  ainsi  qu'ils  traitaient  avec  violence  tout  le 
peuple  d'Israël,  qui  se  trouvait  chaque  mois  dans  toutes 
les  villes. 

62.  Et  le  vingt-cinquième  jour  de  chaque  mois,  ils 
sacrifiaient  sur  l'autel  qui  était  opposé  à  l'autel  de  Dieu. 

6;.  Les  femmes  qui  avaient  circoncis  leurs  enfants 
étaient  mises  à  mort,  selon  le  commandement  du  roi 
Antiochus. 

64.  Ils  pendaient  les  enfants  au  cou  de  leurs  mûres, 
dans  toutes  les  maisons  où  ils  les  avaient  trouvés;  et  ils 
tuaient  ceux  qui  les  avaient  circoncis. 

6;.  Alors  plusieurs  du  peuple  d'Israël  résolurent  en 
eux-mêmes  de  ne  rien  manger  de  ce  qui  serait  impur;  et 
ils  aimèrent  mieux  mourir  que  de  se  souiller  par  des 
viandes  impures. 


COMMENTAIRE 


phe  dit  qu'on  détruisit  la  loi,  et  tout  ce  qu'on 
trouva  de  livres  sacrés  (1),  et  Sulpice  Sévère  (2) 
assure  qu'on  brûla  les  livres  de  la  loi  et  des  pro- 
phètes. Les  Juifs  eurent  grand  soin  de  sauver 
tout  ce  qu'ils  purent  de  leurs  monuments  sacrés. 
Et  nous  verrons  plus  loin  (}),  que  Judas  en  avait 
conservé  des  exemplaires,  et  qu'il  travailla  à  ra- 
masser tout  ce  qui  avait  échappé  à  la  fureur  des 
persécuteurs  (4). 

jh      6l.     QUI    1NVEN1EBATUR    IN    OMNI     MENSE    IN 

civitatibus.  Les  commentateurs  sont  partagés 
sur  ce  passage.  Les  uns  veulent  que  chaque  mois 
on  renouvelât  la  dédicace  de  la  statue  de  Jupiter 
Olympien  D'autres  (5),  qu'à  chaque  mois,  on 
représentât  aux  officiers  du  roi  le  catalogue  de 
ceux  qui  avaient  été  mis  à  mort.  Mais  nous 
croyons  que,  chaque  mois,  on  célébrait  la  fête  de 
la  naissance  du  roi,  ainsi  qu'il  est  dit  dans  le  se- 
cond livre  des  Maccabées  (6),  et  que,  ce  jour- 
là,  on  obligeait  tous  ceux  qui  étaient  dans  les 
villes,  à  participer  aux  sacrifices  qui  s'y  faisaient, 
pour  la  santé  du  prince. 

jtf.  62.  QUINTA  ET  VIGESIMA  DIE  MENSIS,  SACRI- 
FICABANT super  aram.  Il  semble  qu'à  chaque 
mois,  on  avait  coutume  de  sacrifier  à  Jupiter 
Olympien  le  2$  ;  mais  pourquoi  ce  jour  là  plutôt 
qu'un  autre  ?  C'est  que  l'on  avait  commencé  à 
sacrifier  sur  l'autel  le  25  de  Casleu,  comme  on  le 
voit  au  chapitre  iv,  versets  52,  54  de  ce  livre  (7), 
où  il  est  dit  que  Judas  Maccabée  et  1er.  siens 
sanctifièrent  l'autel  le  25  de  Casleu,  jour  où  les 
gentils  l'avaient  profané.  C'est   ce   qui  est   aussi 


remarqué  au  second  livre  des  Maccabées,  cha- 
pitre x,  verset  s  :  Qua  die  autem  iemplum  ab  alie- 
nigenis  pollution  fixerai,  contigil  eadem  die  purift- 
cationem  fieri,  vigesima  quinta  mensis.  Les  pre- 
miers travaux  nécessaires  à  l'installation  de  l'idole 
avaient  commencé  le  1 5  (8)  ;  mais  on  ne  lui  offrit 
des  sacrifices  que  dix  jours  après,  et  on  continua 
de  le  faire  dans  la  suite,  au  même  jour  de  chaque 
mois. 

Super  aram  qum  erat  contra  altare.  Sur 
l'autel  qui  était  vis-à-vis  de  l'autel  du  Seigneur, 
ou  plutôt,  selon  le  grec  (9),  sur  l'autel  qu'on  avait 
dressé  sur  l'autel  du  Seigneur.  L'autel  du  Sei- 
gneur était  vaste,  et  bien  différent  des  autels  païens, 
qui  n'étaient  pas,  à  beaucoup  près,  si  grands  ni 
si  larges.  On  bâtit  donc  sur  le  grand  autel  des 
holocaustes,  un  autel  plus  petit  pourles  sacrifices 
de  Jupiter  Olympien. 

f.  64.  Suspendebant  pueros  a  cervicibus.  On 
pendait  les  mères  avec  leurs  enfants  au  cou  (10). 
Dans  le  second  livre  des  Maccabées (1  i),il  est  dit 
qu'on  prit  deux  femmes,  qui  avaient  circoncis 
leurs  enfants,  qu'on  les  mena  publiquement  par 
toute  la  ville,  ayant  leurs  enfants  à  leurs  mamelles, 
et  qu'ensuite  on  les  précipita  du  haut  des  mu- 
railles. Heureuses  mères,  d'avoir  tant  souffert 
pour  Dieu;  mais  que  leur  sacrifice  dut  être  pé- 
nible ! 

}.  65.  Multi  de  populo  definierunt  apud  se, 
ut  non  manducarent  immunda.  Tels  furent  le 
saint  veillard  Éléazar  (12),  et  les  sept  frères,  avec 
leur  mère,  dont  on  lit  l'histoire  et  le  martyre  dans 


(1)  Antiq.  t.  xn.  c.  vu.  H'çavï&to   ewtôu  jJi'jJXoç  iupeâct») 
'u'oa,  /.ai  vdjj.0;. 

(2)  Sulpit.  Sevcr.  hist.  sacr.  I.  11. 
(?)  1.  Macc,  m.  48. 

(4)  il.  Macc.  1.  14. 

(5)  Grot.  hic. 

(6)  II.  Macc.  vi.  7. 


($3)  obtulerunt  saerificium    secundum  legem...;4.  secun- 
dum tempus    et  secundum  diem  in  qua  contaminaverunt 
illud  gentes. 
(8j  Verset  5;. 

(9)  bj'~i  ïov  po)jj.ov  05  7)v  licl  toO  8'jataaT7)p:'ùu. 

(10)  Vide  Joseph.  Antiq.  !■  xn.  c.  7. 
lu;  11.  Macc.  vi.  10. 


(7)  1.  Macc.  iv.  52.  Quinta  et  vigesima  die  mensis  noni  (12)  II.  Macc.  vi.  18.  et  seq. 


jo 


1. 


MACCABEES.  —  I.  -  COURAGE  DES  JUIFS  FIDELES 


66.  Et    noluerunt   infringere    legem    Dei    sanctam  ;    et  66.  Ils  ne  voulurent  point  violer  la  loi  sainte  de  Dieu, 
trucidati  sunt,                                                                                    et  ils  furent  tués. 

67.  Et  facta  est  ira  magna  super  populum  valde.  67.  Et  une  grande  colère  tomba  alors  sur  le  peuple. 

COMMENTAIRE 


le  second  livre  des  Maccabées,  et  dans  Josè- 
phe(i). 

Cette  généreuse  résolution  que  prirent  plu- 
sieurs Israélites  de  mourir  plutôt  que  de  violer  la 
loi,  était  visiblement  une  grâce  de  la  nouvelle 
alliance,  qu'ils  avaient  reçue,  selon  l'Apôtre,  dans 
le  temps  môme  de  l'ancienne  loi  :  et  Dieu  vou- 
lut, comme  dit  le  même  apôtre,  faire  paraître 
envers  ceux-ci  les  richesses  abondantes  de  sa  gloire 
et  de  sa  grâce,  en  même  temps  qu';7  soufrait  les 
autres  avec  une  extrême  patience  comme  des  vases 
de  colère  destinés  à  la  perdition  (2). 

Qu'on  n'estime  donc  pas  heureux  ceux  qui  se 
sauvèrent  de  la  mort  en  se  joignant  aux  impies, 
ni  malheureux  ceux  qui  furent  tués  dans  cette 
grande  persécution  ;  puisqu'il  était  aussi  glorieux 
aux  uns  de  perdre  la  vie  pour  la  cause  de  Dieu 
même,  et  de  souffrir  comme  ses  fidèles  serviteurs, 
qu'il  était  honteux  aux  autres  de  renoncer  à  l'al- 
liance qu'il  avait  faite  avec  leurs  pères,  et  de 
préférer  à  leur  religion  et  à  leur  salut  une  vie  de 
quelques  années.  Mais  que  la  vue  de  cette  foi  si 
généreuse  de  ces  anciens   Israélites   nous   serve 


aussi,  à  nous  autres,  d'un  puissant  motif  pour  nous 
réjouir,  comme  le  dit  saint  Pierre,  lorsque  nous 
participons  aux  souffrances  de  Jésus-Christ,  et  pour 
nous  croire  très  heureux  de  pouvoir  souffrir  des 
injures  et  des  diffamations  pour  la  gloire  de  son 
nomlj).  Car  ce  serait  une  honte  pour  des  chré- 
tiens de  voir  ces  Juifs  mourir  pour  la  loi,  et  de 
refuser  eux-mêmes  de  souffrir  pour  Jésus-Christ, 
puisque  la  justice  du  chrétien  doit  être  plus  abon- 
dante que  celle  du  Juif,  et  que  sa  force  et  sa 
gloire,  depuis  l'Incarnation,  consiste  dans  sa 
souffrance,  pourvu  néanmoins  qu'il  souffre  comme 
chrétien  et  comme  disciple  de  Jésus-Christ  : 
Gloriabor  in  infirmitalibus  meis  ;  et  cum  infirmor, 
tune  potens  sum  (4). 

f.  67.  Facta  est  ira  magna  super  populum. 
Le  peuple  ressentit  alors  les  plus  terribles  effets 
de  la  colère  de  Dieu  ;  il  se  vit  exposé  aux  plus 
grands  maux.  Souvent  on  appelle  les  châtiments 
du  Seigneur,  sa  colère  (5)  ;  l'effet  est  mis  pour  la 
cause  ;  ou  bien  la  colère  de  Dieu  est  mise  pour 
les  instruments  de  sa  colère,  pour  les  persé- 
cuteurs. 


(1)  11.  Macc.  vu.  -  Joseph,  de  Maccabœis. 

(2)  Rom.  ix.  22.  25.  -  Ephes.  u.  7. 
(?)  1.  Petr.  iv.  15. 


(4)  11.  Cor.  xii.  9    10.  -1.  Petr.  iv.  16. 

(5)  Grot.   hic.    Vide    Exod.   xv.  7.  -  Num.  xvi.  46.  etc. 
1.  Thessal.  1.  10. 


CHAPITRE   II 

Mattathias,  touché  des  maux  de  son  peuple,  se  retire  à  Modin.  Il  refuse  de  sacrifier  aux 
idoles  ;  il  lue  un  Juif  qui  s'avançait  pour  sacrifier,  et  l'officier  qui  l'y  contraignait. 
Plusieurs  Juifs  se  retirent  dans  le  désert.  Ils  se  laissent  tuer  de  peur  de  violer  le  sabbat. 
Mattathias  avec  un  corps  d'armée  entreprend  de  détruire  le  culte  des  idoles  :  il  exhorte 
ses  enfants  ;  il  meurt. 


i.  In  diebus  illis  surrexit  Mathathias,  filius  Joannis,  filii 
Simonis,  sacerdos  ex  lïliis  Joarib,  ab  Jérusalem,  et  con- 
sedit  in  monte  Modin. 


i.  En  ce  temps-là  Mattathias  fils  de  Jean,  fils  de 
Siméon,  prêtre  d'entre  les  enfants  de  Joarib,  sortit  de 
Jérusalem,  et  se  retira  sur  la  montagne  de  Modin. 


COMMENTAIRE 


y.  i.  Surrexit  Mathathias,  sacerdos  ex  fi- 
lms Joarib,  ab  Jérusalem,  et  consedit  in  monte 
Modin.  Nous  croyons  avec  la  plupart  des  inter- 
prètes, que  Mattathias  descendait  d'Éléazar  (i) 
et  de  Phinées  (2),  et  appartenait  à  une  des  pre- 
mières familles  sacerdotales.  S'étant  trouvé  à  Jéru 
salem  où  peut-être  il  était  de  service,  lorsqu'Apol- 
lonius  y  arriva  avec  les  ordres  cruels  et  impies 
d'Antiochus  ;  il  se  retira  à  Modin  sa  patrie,  où 
étaient  les  sépulcres  de  ses  ancêtres,  et  sa  famille. 
Il  y  demeura,  en  attendant  que  cette  tempête 
fût  passée,  ou  que  Dieu  lui  offrit  quelque  occa- 
sion de  signaler  le  zèle,  dont  il  brûlait  pour  son 
service.  Modin  a  été  retrouvé  de  nos  jours  par 
M.  Guérin  à  Khirbet  el  Médieh.  Là  se  trouve 
encore  le  tombeau  des  Maccabées  (3). 

Des  commentateurs  juifs  et  chrétiens  (4)  ont 
prétendu  que  Mattathias  avait  été  élu  grand 
prêtre  de  sa  nation,  et  prince  du  peuple,  depuis 
qu'il  s'était  retiré  dans  les  montagnes  de  Modin  . 
On  appuie  ce  sentiment,  sur  ce  qu'il  tranche  une 
question  qui  semblait  n'être  que  du  ressort  du 
grand  prêtre,  l'observation  du  sabbat  ;  il  décide 
de  son  autorité  privée  qu'il  est  permis  de  défen- 
dre sa  vie  ce  jour-là.  Mais  cette  opinion  ne  nous 
paraît  pas  incontestable.  On  ne  peut  montrer  en 
aucun  endroit,  que  Mattathias  ait  jamais  exercé 
la  souveraine  sacrificature  ;  s'il  eût  été  reconnu 
pour  grand  prêtre,  sa  dignité  serait  passée  à  ses 
successeurs  par  le  droit  de  la  naissance,  et  le  peu- 
ple  ne   l'aurait  pas  déférée  à  Judas    Maccabée. 


Josèphe  dit  expressément  que  l'assemblée  de  la 
nation  l'offrit  à  ce  dernier  :  et  ailleurs,  que  Jona- 
thas  en  fit  les  fonctions,  après  sept  ans  de  va- 
cance (î),  qui  secomptent depuis lamortd'Alcime, 
dernier  grand  prêtre  de  ia  race  de  Josué,  fils  de 
Josédec.  Quant  à  la  déclaration,  ou  à  la  dis- 
pense d'observer  le  sabbat,  lorsqu'on  est  attaqué 
et  en  danger  de  perdre  la  vie, c'est  un  cas  extraor- 
dinaire, que  tout  autre  que  Mattathias  aurait  pu 
décider  comme  lui,  quand  même  il  n'aurait  pas  été 
de  la  race  sacerdotale,  s'il  se  fût  vu  dans  les 
mêmes  circonstances,  à  la  tête  du  peuple,  comme 
il  y  était  alors. 

D'autres  (6)  ont  avancé  que  les  Maccabées 
étaient  de  la  race  de  Juda  par  leur  mère,  comme 
ils  étaient  de  celle  d'Aaron  par  leur  père  :  ils 
ont  cru  cela  nécessaire,  pour  montrer  l'accomplis- 
sement de  la  prophétie  de  Jacob,  qui  prédit  à 
Juda,  que  le  sceptre  et  la  souveraine  puissance 
ne  sortiront  point  de  sa  race  jusqu'à  la  venue  du 
Messie  (7)  ;  mais  cette  opinion  n'est  appuyée 
d'aucune  preuve  directe  et  positive, et  d'ailleurs  la 
prophétie  peut  aisément  s'expliquer  sans  recourirà 
ce  dénouement  ;  nous  ne  croyons  donc  pas  devoir  y 
adhérer  ;  sans  toutefois  manquer  au  respect  qui  est 
dû  aux  pères, qui  s'en  sont  déclarés  les  défenseurs. 

On  donne  communément  le  nom  d'Asmonéns, 
ou  Assamonéens,  aux  descendants  de  Mattathias. 
Kim'hi  soutient  que  ce  nom  lui  fut  donné  par 
honneur,  etqu'ilpassaàsessuccesseurs.  'Hasckina- 
nîm  en  hébreu,  signifie  des  princes  (8),  de  grands 


(1)  Vide  1.  Par.  xxiv.  7. 

(2)  Vide  infra.  y.  54. 

(?)  Revue  archéot.,  Nov.  1872,  p.  265.  -  Journal  Asiati- 
que,  VI,  XVIII,   2$. 

(4)  Abulens.  Tornicl.  Salian.  Serar.  Fullon.  Geneb. 
Verhost.  Tirin.  toar.  Drus,  et  Rabb.  Kim'hi,  Abcn  E^ra, 
Joseph  Gorion.  Ritaale  et  Chronic.  HeUr. 


(<i)  Antiq.  t.  xx.  c.  10. 

(6)  hieron.  in  cap.  11t.  Osée,  et  in  cap.  t.  Sophon.  -  Aug. 
contra  Faust.  L  1.  C.  72.  -  Lyran.  Abul.  Serar.  Fullon.  alii. 

17)  Gènes,  xlix.  10. 

(8,  Vide  Kim'hi  ad  Psalm  lxv.i.  p.  ':a  —K-ivn  vr.tf» 
DHX3  Venient  magni  piincipes  {'haschmanim)  ex  /Egypto. 
Vulg.  Venient  légat:  ex  /Egypto.  Sept.  Kps<j$e\$, 


;• 


L  —  MACCABEES.  —  II.-   FILS  DE   MATTATHIAS 


2.  Et  habebat    filios  quinque  :  Joannem,  qui  cognomi- 
nabatur  Gaddis  ; 

5.  Et  Simonem,  qui  cognominabatur  Thasi; 
4.  Et  Judam,  qui  vocabatur  Machabaeus; 


2.  Il  avait  cinq  fils  :  Jean,  surnommé  Gaddis, 

j.  Simon,  surnommé  Thasi, 
4.  Judas,  appelé  Maccabée, 


COMMENTAIRE 


seigneurs.  Mais  Josèphe  nous  apprend  que  Mat- 
tathias  était  fils  de  Jean,  petit-fils  de  Simon,  et 
arrière-petit-fils  d'Assamonée  (  1  ).  Quelques-uns  (2) 
font  venir  Mattathias  immédiatement  d'Assamo- 
née ;  d'autres  le  font  fils  de  Jean,  et  petit- fils  de 
Hésmaï(j).  Le  nom  d'Asmonéen  peut  venir  aussi 
de  quelque  prêtre  célèbre, prédécesseur  de  Matta- 
thias, ou  du  bourg  d'Asamon  (4),  dont  cette 
famille  pourrait  être  originaire.  Le  nom  d'Asmo- 
néen est  devenu  illustre  depuis  Judas  Maccabée, 
et  les  Juifs  doivent  à  cette  famille,  après  Dieu,  la 
conservation  de  leur  religion,  et  le  rétablissement 
de  leur  liberté.  Elleposséda  la  souveraine  autorité 
dans  sa  nation  depuis  Mattathias  jusqu'au  règne 
du  grand  Hérode,  pendant  l'espace  d'environ 
cent  vingt-huit  ans. 

f.  2.  Joannem,  qui  cognominabatur  Gaddis. 
Quelques  exemplaires  grecs  lisent  Kaddis  ;  d'au- 
tres Jaddis  ;  Josèphe  dit  Gaddes.  Ce  dernier 
signifie,  ou  la  bonne  fortune  (5),  de  même  que  le 
nom  de  Gad  ;  ou  un  monceau  de  froment,  ou  un 
chevreau,  ou  même  une  troupe. 

f.  3.  Simonem...  Thasi.  Simon  surnommé  Thasi. 
En  syriaque  ce  nom  (6)  signifie  ardent  ou  faible  (7). 
C'est  peut-être  le  même  que  thaïsch,  un  bouc. 

v.  4.  Judam,  qui  vocabatur  Machar^us.  Les 
uns  dérivent  ce  nom  d'une  racine  hébraïque,  qui 
signifie  éteindre  (8),  comme  si  l'on  voulait  dire,  le 
destructeur,  ouïe  vainqueur  des  ennemis  de  Dieu. 
D'autres  interprètent  le  mot  de  Maccabée,  par 
la  plaie  de  Dieu  est  en  moi  (9),  Dieu  m'a  frappé 
et  humilié  ;  ou  dans  un  sens  opposé,  la  plaie  est 
causée  par  moi  ;  j'ai  battu,  j'ai  vaincu,  j'ai  terrassé 
les  ennemis  de  mon  peuple  ;  on  pourrait  le  tra- 
duire encore  par  (10),  le  vainqueur  dans  le  Sei- 
gneur, ou  par  le  Seigneur.  C'est  un  nom  qui 
convient  fort  bien  à  Judas  ;  il  est  équivalent  à 
Nicalor,  ou  Nicanor,  que  l'on  donna  au  premier 
Séleucus,  qui  régna  en  Syrie  ;  le  double  c  qui  se 
lit  dans  Maccabée,  favorise  encore  cette  explica- 
tion. Il  y  a  assez  d'apparence  que  Judas  porta  ce 


nom  avant  de  parvenir  au  gouvernement  de  son 
peuple  ;  son  père  dit  de  lui  au  verset  66  :  Judas 
Maccabée  a  été  très  vaillant  dès  sa  jeunesse.  Dom 
Calmet  approuve  cette  étymologie. 

D'autres  tirent  ce  nom  d'une  racine  qui  signifie 
caché(n);  on  donna  peut-être  d'abord  ce  nom  par 
moquerie  à  Mattathias  et  à  ses  fils,  qui  se  ca- 
chèrent dans  les  montagnes  ;  mais  ensuite  ils  s'en 
firent  honneur,  et  donnèrent  ce  titre  à  leur  plus 
illustre  général  ;  dans  cette  supposition,  il  est 
aisé  de  s'expliquer  pourquoi  le  nom  de  Macca- 
bée n'est  pas  particulier  à  Judas,  mais  qu'il  se 
donne  à  tous  ses  frères  et  aux  martyrs  qui  souf- 
frirent alors  pour  la  défense  de  la  loi. 

L'opinion  la  plus  commune  et  la  plus  univer- 
selle (12),  est  que  Judas  fit  mettre  sur  ses  éten- 
dards les  cinq  lettres  hébraïques  équivalentes  à 
celles-ci  (1 3)  :  M.  C.  B.  E.  I.  qui  marquent  en 
raccourci  cette  sentence  de  l'Exode  (14):  Qui  est 
semblable  à  vous  parmi  les  dieux  ï  Les  Juifs 
ont  depuis  longtemps  cet  usage  de  certains  ter- 
mes abrégés,  dont  chaque  lettre  signifie  un  mot  : 
par  exemple,  Ralbag,  désigne  le  Rabbin  Lévi  Ben 
Gerson;  Rambam  se  met  pour  le  Rabbin  Moïse 
ben  Maimom,  et  ainsi  des  autres.  C'est  par  une 
semblable  abbréviation  que  les  Romains  portaient 
dans  leurs  enseignes  S.  P.  Q.  R.Senaluspopulus- 
que  Romanus  ;  mais  ce  qui  infirme  cette  dernière 
explication,  c'est  que  Judas  portait  le  surnom  de 
Maccabée  avant  qu'il  eût  des  troupes,  et  avant 
qu'il  eût  fait  paraître  ses  étendards. 

Sérarius  veut  que  les  quatre  lettres  M.  C.  B.  I. 
signifient  (15),  la  force  de  la  guerre  est  en  Juda.  Il 
suppose  avec  ceux  dont  on  vient  de  parler,  que  les 
anciens  Hébreux  avaient  coutume  d'abréger  leurs 
inscriptions  ;  ce  dont  on  n'a  aucune  preuve.  Les 
anciens  pères  ne  paraissent  pas  avoir  connu  ces 
subtilités  sur  le  nom  de  Maccabée.  La  racine 
la  plus  logique,  serait  n-po  maqqàbâh,  marteau. 
Judas  le  Marteau,  comme  nous  disons  Charles  le 
Martel. 


(1)  Aniiq.  t.  xii.  c.  8.  Y'tô;  I'oiwou,  toC  Suusôjvo; ,   tou 
A  asoefuovafou. 

(2)  Joseph,  de  Bello,  t.  1.  c.  1.  -   Euseb.    Chronic.  minor 
Seder  olam  Hebr. 

(j)  lia  vers.  Arab.  lib.  11.  Macc.  in  cap.  6. 

(4)  Josue  xv.  27.   Vide  Drus.  Prœf.  in  hos  Lib. 

(5)  i:  lunna,   ou  fortuna,  nj    hœdus,   -fâîoT)?.  Frugum 
congerics.  Chald.  Arab.  Heb.  Grot.  hic. 

{(>)  ion  ebulliens.  u/'n  hircus. 

(7)  i«m  debilis.  Drus.  ■—  (8)  >2Da  de  m;  extinguo.  Drus. 


(9)  »a  n;a  plaga,  ou  percussio  in  me,  ou  per  me. 
;io)  n>z  n:D   Makkeh'baiah.    Percutiens,  ou   vincens  in 
Domino. 

(11)  mno  absconditus.  Vide  1.  Reg.  xiv.  2:. 

(12)  Rab.  Isaac.    Ben.  Sclwla.    Sixi.    Sen.  Geneb.  Jun. 
Grot.  alii  passim. 

(iî)  >s;;d 

(14)  rr>n>  cbto  n~D3  >o  Exod.  xv.n.  mi  kâmokâli  bâélim 
Jehovâh. 

(15)  mino  m:  riDn'*n  >a=a 


MACCABÉES.  —  II.  -  TRISTESSE  DE  MATTHATHIAS 


33 


;.  Et  Eleazarum,  qui  cognominabatur  Abaron  ;  et  Jo- 
nathan, qui  cognominabatur  Apphus. 

6.  Hi  viderunt  mala  quse  fiebant  in  populo  Juda  et  in 
Jérusalem. 

7.  Et  dixit  Mathathias  :  Vœ  mihi!  ut  quid  natus  sum 
videre  contritionem  populi  mei,  et  contritionem  civitatis 
sanctce,  et  sedere  illic,  cum  datur  in  manibus  inimi- 
coruni? 

8.  Sancta  in  manu  extraneorum  factt  sunt;  templum 
ejus  sicut  homo  ignobilis. 


5.  Eléazar,  surnomme  Abaron,  et  Jonathas,  surnommé 
Apphus. 

6.  Ils  considérèrent  les  maux  qui  se  faisaient  parmi  le 
peuple  de  Juda,  et  dans  Jérusalem. 

7.  Et  Matthathias  dit  ces  paroles  :  Malheur  à  moi  ! 
S'jis-je  donc  né  pour  voir  l'affliction  de  mon  peuple,  et 
le  renversement  de  la  ville  sainte,  et  pour  demeurer  en 
paix,  lorsqu'elle  est  livrée  entre  les  mains  de  ses  ennemis? 

8.  Son  sanctuaire  est  entre  les  mains  des  étrangers; 
son  temple  est  traité  comme  un  homme  infâme. 


COMMENTAIRE 


y.  5 .  Eleazarum  qui  cognominabatur  Abaron. 
Le  terme  d'Avaron  ou  Abaron,  peut  signifier  (1), 
celui  qui  passe,  qui  s'expose  au  danger  avec  intré- 
pidité, qui  passe  partout.  Au  chapitre  vi,  ver- 
set 45,  Éléazar  est  nommé  fils  de  Saura;  c'est 
apparemment  une  faute  qui  est  venue  des  Grecs(2), 
qui  ont  lu  Avara  ou  Savara,  au  lieu  à' Abaron.  Le 
texte  d'Arias  Montanus  porte  aux  deux  endroits  : 

Jonathan...  Apphus.  Jonathas,  surnommé  Ap- 
phus. Ce  dernier  terme  (5)  peut  signifier  celui  qui 
succombe,  qui  finit,  qui  tombe  en  défaillance.  On 
peut  aussi  le  dériver  d'un  verbe  qui  signifie  (4) 
abonder,  ou  d'un  autre  qui  marque  ($)  dissiper. 

y.  7.  Vje  mihi  !  ut  quid  natus  sum  videre  con- 
tritionem populi  mei,  et  contritionem  civitatis 
sancta.  Voyant  la  désolation  universelle  du  peu- 
ple de  Dieu,  Matthathias  résolut  de  s'opposer  aux 
violences  et  aux  profanations  des  idolâtres.  On 
ne  peut  douter  qu'il  ne  l'ait  fait  par  un  mouve- 
ment de  l'Esprit  de  Dieu,  qui  le  destinait,  lui  et 
ses  enfants,  à  soutenir  la  majesté  de  son  saint  nom, 
et  qui  les  remplit  de  iorce  pour  lutter  contre  les 
armées  d'un  prince  impie,  qui  se  faisait  gloire  de 
déclarer  la  guerre  au  Dieu  d'Israël. 

Aussi  saint  Cyprien  cite  l'exemple  de  ces  géné- 
reux Maccabées  (6),  pour  faire  voir  que  Dieu  se 
réserve,  dans  les  temps  mêmes  du  plus  grand 
relâchement,  de  fidèles  serviteurs.  «  Quoique 
nous  soyons,  dit  ce  saint  évêque,  à  la  dernière 
des  époques,  la  vigueur  évangélique,  l'ardeur  de 
la  vertu  et  de  la  foi  chrétienne  n'est  pas  tellement 
éteinte  dans  l'Eglise,  qu'il  ne  reste  encore  une 
partie  des  évêques  qui  se  soutiennent  au  milieu 
de  ces  ruines  et  de  ces  naufrages  de  la  foi,  et  qui 
défendent  avec  force  et  avec  une  crainte  religieuse 
l'honneur  de  la  majesté  divine  et  de  la  dignité 
sacerdotale.  Aussi  nous  nous  souvenons  que 
Matthathias  défendit  courageusement  la  loi  de 
Dieu,  lorsque  les  autres  cédaient  à  la  violence  et 
succombaient  à  l'impiété  :  Meminimus  et  tenemus, 


succumbentibus  licet  et  cedenlibus  céleris,  Malha- 
thiam  legem  Dei  vindicasse  forliler.  » 

Sous  le  coup  du  deuil  qui  l'accable,  à  la  vue  de 
tant  d'ignominies,  Matthathias  ne  peut  s'empêcher 
de  déplorer  son  malheur,  d'avoir  été  réservé  pour 
être  témoin  de  tant  de  maux.  Ainsi  s'exprimait 
plus  tard  le  grand  Polycarpe,  le  saint  évêque  de 
Smyrne,  lorsqu'envisageant  avec  tristesse  la  pro- 
fondeur de  la  malice  de  Satan  en  la  personne  de 
ses  ministres,  il  s'écriait  avec  larmes  :  O  mon 
Dieu,  pourquoi  \mave\-vous  conservé  la  vie  jusqu'à 
présent,  afin  que  j'aie  b  douleur  de  voir  des  choses 
si  affligeantes? 

Mais  le  zèle  de  Matthathias  n'est  pas  un  zèle 
contemplatif.  11  ne  peut  point  se  résoudre  à  vivre 
en  paix,  lorsqu'il  voit  la  sainte  cité  livrée  à  ses 
ennemis.  Il  se  décide  à  ne  plus  vivre;  c'est-à-dire 
à  mourir  plutôt  que  de  souffrir  davantage  de  si 
grandes  profanations.  Il  a  recours  cependant  à  la 
pénitence  et  à  la  prière,  pour  se  rendre  digne  du 
secours  de  Dieu.  Ils  déchirent,  lui  et  ses  fils,  leurs 
vêtements  et,  se  couvrant  de  cilices,  ils  pleurent  et 
font  un  grand  deuil,  en  la  présence  de  Celui  dont 
ils  souhaitaientprincipalementde  venger  la  gloire 
outragée  par  tant  de  blasphèmes. 

Ce«t  exemple  du  zèle  si  juste  de  Matthathias 
condamne  la  lâcheté  de  ces  faux  pasteurs,  qui, 
bien  loin  d'être  ennuyés  de  la  vie,  comme  Mat- 
thathias, vivent  sans  inquiétude,  lorsque  l'épouse 
de  Jésus-Christ  est  livrée  ^ntre  les  mains  de  ses 
ennemis  ;  et  lorsque  son  sanctuaire  est  abandonné  à 
des  étrangers.  Tous  ne  sont  pas  appelés  à  venger, 
comme  Matthathias,  ces  sacrilèges  ;  mais  tous 
sont  indispensablement  obligés  d'en  gémir  et  de 
témoigner  à  Dieu  par  un  vrai  demi,  que  ces 
outrages  leur  sont  sensibles  et  qu'ils  ne  sont  pas 
indifférents  aux  maux  de  leur  mère. 

y.  8.  Templum  ejus  sicut  homo  ignobilis.  Il 
est  réduit  à  la  confusion,  comme  un  homme  autre- 
fois riche,  illustre  et  glorieux,  accablé  ensuite 
sous  sa  mauvaise  fortune.  Si  on  lisait  (7)  :  Son  peu- 


(1)  p-cy  transiens.  Grot.    hic.  A'uapàv.  Joseph.  A'upàv. 
(2)Grxc.  E'XsâÇap  ô  Savâpav.  Ita  Rom.  edit.  sed  Basile 
A'ôpàv. 
(3)  Di3N  deficiens. 

S.   B.  —  T.  XII. 


(4)  w>s  abundare. 

(ç)  113  spargere.  —  (6)  Cypr.  ep.  vi.  8. 
(7)  O'   Xad;   âoTfjç,  w;    «vrjp    aoo^o;.  Au  lieu  de  6  vaô; 
âuirfi,  ci);  àvf/p  aoo;oç.  Drus. 


54 


I.  —  MACCABÉES.  —   II.  -  TRISTESSE   DE   MATTHATHIAS 


9.  Vasa  gloriae  ejus  captiva  abductasunt;  trucidati 
sunt  senes  ejus  in  plateis,  et  juvenes  ejus  ceciderunt  in 
gladio  inimicorum. 

10.  Quaî  gens  non  hereditavit  regnum  ejus,  et  non 
obtinuit  spolia  ejus-- 

il.  Omnis  compositio  ejus  ablata  est:  quaa  erat  libéra 
facta  est  ancilla. 

12.  Et  ecce  sancta  nostra,  et  pulchritudo  nostra,  et 
claritas  nostra  desolata  est, et  coinquinaverunt  ea  gentes. 

i?.  Quo  ergo  nobis  adhuc  vivere? 

14.  Et  scidit  vestimenta  sua  Mathathias,  et  filii  ejus  ; 
et  operuerunt  se  ciliciis,  et  planxerunt  valde, 

15.  Et  venerunt  illuc  qui  missi  erant  a  rege  Antiocho, 
ut  cogèrent  eos  qui  confugerant  in  civitatem  Modin  im- 
molare,  et  accendere  thura,  et  a  lege  Dei  discedere. 

16.  Et  multi  de  populo  Israël  consentientes  accesserunt 
ad  eos,  sed  Mathathias  et  filii  ejus   constanter  steterunt. 

17.  Et  respondentes  qui  missi  erant  ab  Antiocho,  dixe- 
runt  Mathathias:  :  Princeps,  et  clarissimus,  et  magnus  es 
in  hac  civitate,  et  ornatus  filiis  et  fratribus; 

18.  Ergo  accède  prior,  et  fac  jussum  régis,  sicut  fece- 
runt  omnes  gentes,  et  viri  Juda,  et  qui  remans-'runt  in 
Jérusalem  ,  et  eris  tu,  et  filii  tui.  inter  amicos  régis,  et 
amplificatus  auro  et  argento,  et  muneribus  multis. 

19.  Et  respondit  Mathathias,  et  dixit  magna  voce  :  Etsi 
omnes  gentes  régi  Antiocho  obediunt,  ut  discedat  unus- 
quisque  a  servitute  legis  patrum  suorum,  et  consentiat 
mandatis  ejus . 

20.  Ego,  et  filii  mei,  et  fratres  mei,  obediemus  legi 
patrum  nostrum. 

3i.  Propitiussit  nobis  iJeus  !  non  est  nobis  utile  relln- 
quere  legem  et  justitias  Dei. 

22.  Non  audiemus  verba  régis  Antiochi,  nec  sacrificz,- 
bimus  transgredientes  legis  nostree  mandata,  ut  eamus 
altéra  via. 

25.  Et  ut  cessavit  loqui  verba  hœc,  accessit  quidam 
Judasus  in  omnium  oculis  sacrificare  idolis  super  aram  in 
civitate  Modin,  secundum  jissum  régis; 


9.  Les  vases  consacrés  à  sa  gloire  ont  été  enlevés 
comme  des  captifs  dans  une  terre  étrangère  ;  les  vieil- 
lards ont  été  assassinés  dans  les  rues  ;  et  les  jeunes 
gens  sont  tombés  morts  so  :s  l'épée  de  leurs  ennemis. 

io.  Quelle  nation  n'a  point  hérité  de  son  royaume,  et 
ne  s'est  point  enrichie  de  ses  dépouilles  ? 

1 1 .  Toute  sa  magnificence  lui  a  été  enlevée  :  celle  qui 
était  libre,  est  devenue  esclave. 

12.  Tout  ce  que  nous  avions  de  saint,  de  beau  et 
et  d'éclatant,  a  été  désolé   et  profané  par  les  nations. 

I?.  Pourquoi  donc  vivons-nous  encore  > 

14.  Alors  Matthathias  et  ses  fils  déchirèrent  leurs 
vêtements  :  ils  se  couvrirent  de  cilices,  et  ils  firent  un 
grand  deuil.  * 

15.  En  même  temps,  ceux  que  le  roi  Antiochus  avait 
envoyés  vinrent  pour  contraindre  ceux  qui  s'étaient  reti- 
rés dans  la  ville  de  Modin,  de  sacrifier  et  de  brûler  de 
l'encens,  et  d'abandonner  la    loi  de   Dieu. 

16.  Beaucoup  du  peuple  d'Israël  y  consentirent,  et  se 
joignirent  à  ceux  ;  mais  Matthathias  et  ses  fils  demeu- 
rèrent fermes. 

17.  Et  ceux  qu'Aruiochus  avait  envoyés, direntà  Mattha- 
thias :  Vous  êtes  le  premier,  le  plus  grand  et  le  plus 
considéré  de  cette  ville;  et  vous  recevez  encore  une 
nouvelle  gloire  de  vos   fils  et  de  vos  frères. 

18.  Venez  donc  le  premier  exécuter  le  commandement 
du  roi,  comme  ont  fait  toutes  nations,  et  les  hommes  de 
Juda,  et  ceux  qut  sont  demeurés  dans  Jérusalem  ;  et 
vous  serez,  vous  et  vos  fils,  au  rang  des  amis  du  roi, 
comblés  d'or  et  d'argent,  et  de  grands    présents. 

19.  Matthathias  leur  répondit  en  haussant  la  voix  : 
Quand  toutes  les  nations  obéiraient  au  roi  Antiochus,  et 
que  tout  Israël  abandonnerait  la  loi  de  ses  pères  pour  se 
soumettre  à  ses  ordonnances, 

20.  Nous  obéirons  toujours,  mes  enfants,  mes  frères 
et  moi,  à  la  loi  de  nos  pères. 

il.  A  Dieu  ne  plaise  que  nous  en  usio.is  autrement  : 
il  ne  nous  est  pas  utile  d'abandonner  la  loi  et  la  justice 
de  Dieu. 

22.  Nous  n'obéirons  point  au  commandement  du  roi 
Antiochus,  et  nous  ne  prendrons  point  une  autre  voie 
que  celle  que  nous  avons  suivie,  pour  offrir  des  sacrifi- 
ces, en  violant  les  ordonnances  de  notre  loi. 

21.  Cornu. e  il  cessait  de  parler,  un  Juif  s'avança  pour 
sacrifier  aux  idoles  devant  tout  le  monde,  sur  l'autel 
qu'on  avait  dressé  dans  la  ville  de  Modin,  selon  le  com- 
mandement du  roi. 


COMMENTAIRE 


pie  est  comme  un  homme  dans  l'ignominie  ;  le  sens 
paraîtrait  meilleur. 

f.  i).  Venerunt  illuc  qui  missi  erant  a  rege 
Antiocho.  Josèphe  (1)  nomme  Apellès  celui  qui,fut 
envoyé  à  Modin  ;  Rufin  lui  donne  le  nom  d'Apol- 
lonius et  les  rabbins  (2)  celui  de  Phiiippe. 

jL  17.  Princeps,  et  clarissimus,  et  magnus  es 
in  hac  civitate.  Ce  que  les  impies  disaient  à 
Matthathiaspourleporterà l'impiété,  était  au  con- 
trairecequiaugmentaitsonzèle  pour  l'attacher  plus 
fortement  à  son  devoir.  Car  pi  us  il  était  en  considéra- 
tion dans  le  pays,  pi  us  il  craignait  que  sa  lâcheté  ne  fît 
une  grande  plaie  parmi  son  peuple  ;  il  se  regardait 
donc  comme  obligé  par  sa  position  de  donner  aux 


autres  un  exemple  de  courage,  de  zèle  et  de  foi. 
La  chute  d'un  personnage  élevé  en  dignité  est 
bien  différente  de  celle  d'un  homme  ordinaire  ; 
puisqu'il  entraîne  après  soi  une  multitude  de  per- 
sonnes comme  par  le  poids  de  sa  propre  autorité. 
Mais,  si  sa  chute  produit  un  effet  si  désastreux, 
sa  fermeté  soutient  une  multitude  de  personnes 
faibles,  à  qui  son  exemple  est  un  encouragement 
pour  empêcher  qu'elles  ne  tombent. 

La  vue  de  toutes  les  nations  qui  avaient  plié  sous 
l'ordre  impie  du  roi  Antiochus,  et  la  chute  même 
des  hommes  de  Juda  et  de  la  ville  de  Jérusalem, 
bien  loin  de  produire  sur  l'esprit  de  Matthathias 
l'effet  dont  les  ennemis  de  Dieu  s'étaient  flattés, 


(1)  Joseph.  Anliq.  tib.  xii.  c.  8. 


(2)  In  Chronico  apud  Drus. 


I.  —  MACCABÉES. 


II. 


SON  ZELE   POUR  LA  LOI   DE    DIEU 


Y-, 


24.  Et  vidit  Mathathias,  et  doluit,  et  contremuerunt 
renés  ejus;  et  accensus  e=t  furor  ejus  secundum  judicium 
legis,  et  insiliens  trucidavit  eum  super  aram. 

2>.  Sed  et  virum  quem  rex  Anthiochus  miserat,  qui 
cogebat  immolare,  occidit  in  ipso  tempore;  et  aram 
destruxit, 

26.  Et  zelatus  est  legem  sicut  fecit  Phinees  Zarnri,  filio 
Salomi. 

27.  Et  exclamavit  Mathathias  voce  magna  in  civitate, 
dicens  :  Omnis  qui  zelum  habet  legis, statuens  testamen- 
tuin,  exeat  post  me. 

28.  Et  fugit  ipse  et  filii  ejus,  in  montes,  et  reliquerunt 
quœcumque  habebanl  in  civitate. 

20.  Tune  descenderunt  multi  quserentes  judicium  et 
justit'am,  in  desertum. 

?o.  Et  sederunt  ibi  ipsi,  et  fiiii  eorum,et  mulieres  eorum, 
et  pecora  eorum, quoniam  inundaverunt  swper  eos  mala. 


24.  Matthathias  le  vit,  et  fut  saisi  de  douleur  ;  ses  en- 
trailles en  furent  émues  ;  et  sa  fureur  s'étant  allumée, 
selon  l'esprit  de  la  loi,  il  se  jeta  sur  cet  homme,  et  le 
tua  sur  l'autel. 

2$.  Il  tua  aussi  en  même  temps  l'officier  que  le  roi 
Antiochus  avait  envoyé  pour  contraindre  les  Juifs  à  sa- 
crifier ;  et  il  renversa  l'autel, 

26.  Et  il  fut  transporté  du  zèle  de  la  loi,  comme  Phi- 
néès,  lorsqu'il  tua  Zarnri  fils  de  Salomi. 

27.  Alors  Matthathias  cria  à  haute  voix  dans  la  ville  : 
Quiconque  est  zélé  pour  la  loi,  et  veut  demeurer  ferme 
dans  l'alliance  du  Seigneur,  me  suive. 

28.  Et  il  s'enfuit  avec  ses  fils  sur  les  montagnes  ;  et 
ils  abandonnèrent  tout  ce  qu'ils  avaient  dans  la  ville. 

29.  Alors  plusieurs,  qui  cherchaient  à  vivre  selon  la  loi 
et  la  justice,  s'en  allèrent  dans  le  désert  ; 

;o.  Et  ils  y  demeurèrent  avec  leurs  fils,  et  leurs 
femmes,  et  leurs  troupeaux,  parce  qu'ils  se  voyaient 
accablés  de  maux  de  tous  côtés. 


COMMENTAIRE 


en  produisirent  un  tout  contraire.  Le  grand  nom- 
bre des  impies  ne  contribue  qu'à  faire  croître  le 
zèle  des  justes,  et  les  attache  plus  que  jamais  à  la 
véritable  religion,  dont  ils  savent  que  les  autres 
n'ont  pu  s'écarter  que  par  crainte  ou  par  intérêt. 
Aussi  ce  grand  homme,  ne  pouvant  avoir  que  du 
mépris  pour  l'offre  qu'on  lui  faisait  d'être,  au 
prix  de  l'apostasie,  des  amis  du  roi  et  comblé  de 
biens,  s'écria-t-il  dans  un  saint  transport  d'indi- 
gnation, que  la  multitude  des  prévaricateurs  ne  le 
porterait  jamais,  ni  lui,  ni  ses  proches,  à  violer  la 
loi  de  ses  pères. 

f.    24.      ACCENSUS    EST     FUROR    EJUS    SECUNDUM 

judicium  legis.  Moïse  ordonnait  (1)  qu'on  mît  à 
mort  aussitôt  et  sans  forme  de  procès,  celui  qui 
était  convaincu  de  vouloir  séduire  le  peuple,  et  le 
pousser  à  abandonner  le  Seigneur  et  à  suivre  les 
dieux  étrangers. 

f.  24-25.  Trucidavit  eum  super  aram...  et 
virum  quem  rex  Antiochus  miserat.  Cette  action 
paraît  hardie  et  surprend  d'abord  :  mais  si  on  la 
considère  de  près,  si  on  en  juge  par  l'Écriture, 
non  seulement  on  ne  la  condamnera  pas,  mais  on 
l'admirera  comme  un  effet  de  l'obéissance  et  de  la 
foi  de  Matthathias.  Saint  Cyprien  (2)  nous  fait 
remarquer  que  Dieu  avait  une  telle  horreur  de 
l'idolâtrie,  qu'il  avait  donné  un  ordre  exprès  à  son 
peuple,  de  tuer  ceux  qui  voudraient  leur  persua- 
der de  sacrifier  aux. idoles.  Si  votre  frère,  dit  le 
Seigneur  (3),  5/  votre  fils  ou  votre  fille  ou  votre 
femme  qui  vous  est  si  chère,  si  votre  ami  que  vous 
aime\  comme  voire  âme,  veut  vous  persuader,  et 
vous  vient  dire  en  secret  :  Allons,  adorons  les  dieux 
étrangers...  ne  tene\  point  secret  ce  qu'il  aura  dit; 
mais  iue\-le  sur  le  champ.  C'est  de  ce  comman, 
dément  de  Dieu,  dit  saint  Cyprien,  que   Mattha- 


thias se  souvint,  lorsque,  rempli  de  vigueur,  il  tua 
celui  qui  s'était  avancé  pour  sacrifier,  non  pas  en 
secret,  mais  publiquement  sur  l'autel  profane  : 
Cujus  praicepti  et  vigoris  memor  Matthathias. 
inter fecit  eum  qui  ad  aram  sacrificalurus  accesseral. 

Il  est  bon  de  remarquer  que  la  circonstance  du 
temps  auquel  il  fit  cette  action  si  hardie,  pour 
obéir  à  la  loi  de  Dieu,  ne  permettait  pas  qu'il  fit 
punir  juridiquement  cet  impie,,  comme  il  l'aurait 
fait  peut-être  en  un  autre  temps.  Ainsi,  étant 
comme  le  chef  de  la  ville,  princeps  et  clarissimus  et 
magnus  in  hac  civitate,  et  ayant  même  l'autorité 
comme  issu  de  la  première  famille  sacerdotale,  il 
crut  devoir  sur  le  champ,  selon  l'expression  de 
l'Écriture,  tuer  ceux  qui  voulaient  porter  le  peuple, 
non  en  secret,  mais  ouvertement,  à  sacrifier  aux 
idoles.  Et  il  voulut  en  cela  faire  un  exemple  écla- 
tant, capable  d'intimider  les  autres  prévaricateurs. 
Aussi  le  texte  sacré  porte-t-il  expressément,  que 
Matthathias  agit  en  cette  rencontre  par  un  \èle 
de  la  loi,  semblable  à  celui  de  Phinéès.  Et  l'on  sait 
que  le  zèle  de  Phinéès  fut  très  agréable  à  Dieu  (4)- 
Aussi  lui  dit  il,  que  parce  qu'il  avait  été  animé  de 
son  \ele  contre  les  enfants  d'Israël,  d  lui  donnait 
la  paix  de  son  alliance  ;  et  qu'il  faisait  avec  lui  et 
avec  sa  race  un  pacte  éternel  pour  le  revêtir  du 
sacerdoce,  comme  ayant  expié  par  son  \èle  pour 
son  Dieu  le  crime  de  tout  le  peuple. 

f.  29.  Quserentes  judicium  etjustitiam.  Ceux 
qui  cherchaient  à  vivre  selon  la  loi,  et  la  justice, 
ou  selon  les  cérémonies  de  la  loi  et  les  préceptes 
moraux.  Judicium,  marque  les  coutumes  ou  la  loi 
cérémonielle  ;  justifia,  la  loi  morale. 

Deux  conditions  étaient  nécessaires  pour  être 
en  état  de  se  joindre  à  Matthathias  dans  la  dé- 
fense de  la  loi.   L'une,  de   n'être  attaché  à   rien, 


(t)  Deut.  xiii.  9. 

(2)  Cypr.  de  exlicrt.  martyr,  cap.  v. 


(j)  Deut.  xni.  6.  7.  9. 
(4)  Num.  xxv.  11.  12. 


?6 


I.  —   MACCABEES. 


II. 


SCRUPULES  FUNESTES 


ji.  Et  renuntiatum  est  viris  régis,  et  exercitui  qui 
erat  in  Jerusalein,  civitate  David,  quoniam  discessissent 
viri  quidam,  qui  dissipaverunt  mandatum  régis,  in  loca 
occulta  in  deserto,  et  abiissent  post  illos  multi. 

J2.  Et  statim  perrexerunt  ad  eos,  et  constituerunt 
adversus  eos  praslium  in  die  sabbatorum; 

}}.  Et  dixerunt  ad  eos:  Resistitiset  nunc  adhuc?  Exite, 
et  facite  secundum  verbum  régis  Antiochi,  et  vivetis. 

J4.  Et  dixerunt:  Non  exibimus,  neque  faciemus  verbum 
régis,  ut  polluamus  diem  sabbatorum. 

J5.  Et  concitaverunt  adversus  eos  prœlium. 
j6.  Et  non  responderunt  eis,  nec    lapidem  miserunt  in 
eos,  nec  oppilaverunt  loca  occulta, 

57.  Dicentes  :  Moriamur  omnes  in  simplicitate  nostra, 
et  testes  erunt  super  nos  cœlum  et  terra  quod  injuste 
perditis  nos. 

58.  El  intulerunt  illis  bellum  sabbatis;  et  mortui  sunt 
ipsi,  et  uxores  eorum,  et  filii  eorum  et  pecora  eorum, 
usque  ad  mille  animas  hominum. 

Î9.  Et  cognovit  Mathathias,  et  amici  ejus,  et  luctum 
habuerunt  super  eos  valde. 

40.  Et  dixit  vir  proximo  suo  :  Si  omnes  fecerimus  sicut 
fratres  nostri  fecerunt,  et  non  pugnaverimus  adversus 
gentes  pro  animabus  nostris  et  justificationibus  nostris, 
nunc  citius  disperdent  nos  a  terra. 


;i-  Les  officiers  du  roi,  et  l'armée  qui  étaient  à  Jéru- 
salem dans  la  ville  de  David,  furent  avertis  que  quel- 
ques gens  qui  avaient  foulé  aux  pieds  i'édit  du  roi 
s'étaient  retirés  dans  les  lieux  déserts,  et  que  plusieurs 
les  avaient  suivis. 

J2.  Ils  marchèrent  aussitôt  à  eux,  et  se  préparèrent  à 
les  attaquer  au  jour  du  sabbat  ; 

JJ.  Et  ils  leur  dirent:  Résisterez-vous  encore  à  pré- 
sent? Sortez,  et  obéissez  à  I'édit  du  roi  Antiochus,  et 
vous  vivrez. 

;4.  Ils  leur  répondirent  :  Nous  ne  sortirons  point,  et 
nous  ne  violerons  point  le  jour  du  sabbat  pour  obéir  au 
roi  Antiochus. 

jç.  Ces  gens  les  attaquèrent   donc  ; 

jo.  Et  ils  ne  leur  répondirent  point  ;  ils  ne  jetèrent  pas 
une  seule  pierre  contre  eux;  et  ils  ne  bouchèrent  point 
les  lieux  les  plus  retirés. 

)7.  Mais  ils  dirent  :  Mourons  tous  dans  la  simplicité 
de  notre  cœur  ;  et  le  ciel  et  la  terre  seront  témoins  que 
vous  nous  faites  mourir  injustement. 

;8.  Les  ennemis  les  attaquèrent  donc  dans  le  jour  du 
sabbat  ;  et  ils  furent  tués,  eux,  leurs  femmes,  et  leurs 
enfants  avec  leurs  bestiaux  ;  mille  personnes  périrent  en 
ce  lieu-là-, 

je;.  Matthathias  et  ses  amis  en  reçurent  la  nouvelle,  et 
ils  firent  un  grand  deuil  de  leur  perte. 

40.  Alors  ils  se  dirent  les  uns  aux  autres  :  Si  nous  fai- 
sons tous  comme  nos  frères  ont  fait,  et  que  nous  ne 
combattions  point  contre  les  nations  pour  notre  vie  et 
pour  notre  loi,  ils  nous  extermineront  en  peu  de  temps 
de  dessus  la  terre. 


COMMENTAIRE 


mais  d'être,  au  contraire,  préparé  à  abandonner 
toutes  choses,  comme  fit  ce  grand  serviteur  de 
Dieu  avec  toute  sa  famille  ;  l'autre,  de  chercher 
sincèrement  à  vivre  selon  les  préceptes  du  Seigneur 
et  selon  la  véritable  justice.  Ceux  qui  craignaient 
de  perdre  leurs  biens  ne  pouvaient  être  préparés  à 
s'enfuir  sur  les  montagnes,  et  à  tout  quitter  pour 
Dieu  ;  et  ceux  qui  n'étaient  point  possédés  d'un 
grand  amour  de  sa  loi  et  de  5a  justice,  n'étaient 
non  plus  guère  disposés  à  se  retirer  dans  le  désert 
plutôt  que  de  se  mettre  en  danger  de  la  violer. 

f.  31.  In  Jérusalem,  civitate  David.  Dans  la 
partie  supérieure  de  la  ville,  où  ils  s'étaient  for- 
tifiés (1)  ;  car  tout  le  reste  était  abattu  et  aban- 
donné. 

jh  36.  Loca  occulta  (2).  Josèphe  :  Ils  ne  fer- 
mèrent point  les  issues  des  lieux  où  ils  s'étaient 
retirés. 

p.  37.  Moriamur  omnes  in  simplicitate  nos- 
tra. La  simplicité  est  mise  ici  pour  l'innocence, 
l'intégrité,  la  piété,  la  perfection,  et  enfin  pour 
l'attachement  fidèle  à  la  loi  de  Dieu.  Le  zèle  et 
la  fermeté  de  ces  Juifs,  qui  ne  veulent  pas  se  dé- 
fendre le  jour  du  sabbat,  sont  sans  doute  très 
louables  en  principe  ;  mais  il  faut  avouer  que  leur 
conduite  n'a  pas  été  tout  à  fait  éclairée,  ni  réglée 


selon  la  science.  Les  lois  cérémonielles  sont  fai- 
tes pour  l'homme,  et  non  pas  contre  lui.  La  con- 
servation de  la  vie  est  d'une  obligation  plus  indis- 
pensable que  l'observation  de  ces  sortes  de  lois, 
qui  ne  sont  que  de  droit  positif,et  sujettes  au  chan- 
gement ;  à  moins  que  d'autres  circonstances  n'en 
rendent  l'observation  indispensable,  comme  si  le 
tyran  en  voulait  à  toute  la  loi,  ou  si  le  scandale 
et   la   chute  des  faibles  étaient  inévitables. 

Mais  Dieu  permit  qu'ils  agissent  dans  cette 
simplicité  de  cœur  qui  les  a  fait  regarder  en  quel- 
que sorte  comme  des  martyrs  de  l'obéissance, afin 
qu'elle  condamnât,  dans  tous  les  siècles,  la  f;ici- 
li té  étonnante  avec  laquelle  on  se  dispense  si  sou- 
vent des  préceptes  indispensables  de  la  loi  de 
Jésus-Christ  ;  non  pas  seulement  pour  sauver  sa 
vie,  mais  môme  pour  des  causes  très  légères,  et 
quelquefois  sans  d'autre  raison  que  celle  de  la 
coutume,  ou  du  caprice  des  hommes. 

Dieu  fit  donc  voir  par  l'exemple  de  ces  Juifs, 
qui  se  laissaient  égorger  comme  des  victimes  le 
jour  du  sabbat,  ce  que  peut  une  obéissance  aveu- 
gle à  ses  ordres,  et  combien  une  âme  qui  ne  re- 
garde et  ne  révère  que  sa  volonté,  est  élevée  au- 
dessus  de  toute  crainte.  Mais  il  fit  connaitre 
aussi,  par  l'exemple  de  Matlhatiaset  de  ses  saints 


(1)  Voyez  chap.  1.  y.  35. 


(1)  Q'ùl  sv£9;-«?av  ■coùçi'.pûçQ'j;.  Joseph.  O'uoe  toc;  Èiaô- 
Sou;  ;u.'.pp(i<;avTa;. 


I. 


MACCABEES.  —  II.-   RESOLUTION   DE  MATTHATHIAS 


y, 


41.  Et  cogitaverunt  in  die  illa,  dicentes:  Omnis  homo 
quicumque  venerit  ad  nos  in  bello  die  sabbatorum,  pug- 
nemus  adversus  eum;  et  non  moriemur  omnes,  sicut 
mortui  sunt  fratres  nostri  in  occultis. 

4 2.  Tune  congregata  est  ad  eos  synagoga  Assidosorum, 
fortis  viribus  ex  Israël,  omnis  voluntarius  in  lege; 


41.  Ils  prirent  donc  ce  jour  là  cette  résolution  :  Qui 
que  ce  soit,  dirent-ils,  qui  nous  attaque  le  jour  du  sab- 
bat, ne  faisons  point  difficulté  de  combattre  contre  lui  : 
et  ainsi  nous  ne  mourrons  point  tous  comme  nos  frères 
sont  morts  dans  les  lieux  cachés  du  désert. 

42.  Alors  les  Assidéens,  qui  étaient  des  plus  vaillants 
d'Israël,  s'assemblèrent  tous  et  se  joignirent  à  eux  :  tous 
ceux  qui  s'étaient  attachés  volontairement   à  la  loi, 


COMMENTAIRE 


compagnons,  une  vertu  plus  éclairée,  qui  ne  son- 
geait à  mettre  leur  vie  à  couvert  que  pour  l'em- 
ployer plus  utilement  à  combattre  la  violence  des 
impies,  et  pour  le  salut  de  leurs  frères.  Les  uns 
n'étaient  point  plus  attachés  que  les  autres  à  la 
vie,  puisqu'ils  l'exposaient  tous  pour  la  gloire  de 
leur  Dieu.  Mais  ces  derniers  l'exposaient  d'une 
manière  plus  avantageuse  pour  la  piété,  puisqu'en 
combattant  pour  Israël,  ils  empêchaient  que  ce 
peuple,  d'où  devait  venir  le  Messie,  ne  fût  exter- 
miné, selon  le  dessein  du  roi  impie  qui  voulait 
détruire  entièrement  la  religion  du  vrai  Dieu. 
y.  41.  Quicumque  venerit  ad  nos  in  bello  die 

SABBATORUM,  PUGNEMUS  ADVERSUS  EUM.  La  loi  de 

Moïse  qui  ordonne  le  repos  au  jour  du  sabbat,  a 
toujours  été  sujette  aux  variations,  de  même  que 
toutes  les  autres  lois  cérémonielles  ;  on  en  a 
quelquefois  porté  l'observance  à  un  point  de  ri- 
gueur qui  paraissait  excessif,  et  d'autres  fois  on 
s'en  est  beaucoup  relâché  ;  les  Samaritains,  par 
exemple,  se  sont  crus  obligés  à  demeurer  ce 
jour-là  dans  une  inaction  bien  plus  grande  (1)  que 
les  Juifs;  ceux-ci  peuvent  fuir  la  persécution,  et 
faire  une  certaine  quantité  de  chemin  ;  les  Sa- 
maritains ne  changent  pas  de  leur  place,  suivant 
cette  expression  littérale  de  la  loi  (2)  :  Nullus 
egrediatur  de  loco  suo.  Du  temps  de  Jésus-Christ, 
les  Juifs  se  permettaient  de  retirer  un  animal 
d'une  fosse  ou  d'un  puits  (?)  ;  mais  les  thalmu- 
distes  ont  révoqué  cette  permission.  Ils  repro- 
chaient à  Jésus-Christ  qu'il  violait  le  sabbat,  en 
guérissant  les  malades  le  jour  du  sabbat  ;  et  au- 
jourd'hui ils  appliquent  des  remèdes  et  guéris- 
sent leurs  malades  ce  jour-là.  Les  Maccabées 
étaient  instruits  par  plusieurs  expériences,  que 
l'observation  trop  scrupuleuse  du  sabbat  avait 
souvent  exposé  leur  nation  à  de  très  grands  maux. 
Ptolomée,  fils  de  Lagus,  ayant  remarqué  que  les 
Juifs  ne  faisaient  aucune  œuvre  profane  le  jour 
du  sabbat,  profita  de  ce  jour  pour  attaquer  Jéru- 
salem, et  pour  s'en  rendre  maître  (4).  Les  Macca- 
bées voyaient  de  leurs  yeux  la  mort  toute  récente 


de  leurs  frères,  pour  n'avoir  osé  se  défendre  au 
jour  du  sabbat  ;  ils  résolurent  donc  de  se  défen- 
dre, quelque  jour  que  ce  fût. 

Mais  ils  ne  décidèrent  point  s'il  était  permis 
d'attaquer  :  et  l'on  a  des  exemples  qui  prouvent 
qu'ils  se  contentaient  de  repousser  la  force  par  la 
force.  Pompée  assiégeant  Jérusalem,  remarqua 
que  les  Juifs  se  contentaient  ce  jour-là  de  se  dé- 
fendre, si  on  les  attaquait,  mais  que  de  leur  part 
ils  ne  faisaient  aucune  entreprise  ;  il  les  laissa 
donc  en  repos  pendant  le  sabbat,  profitant  de  ce 
temps  pour  avancer  et  perfectionner  ses  ouvrages, 
ses  terrasses  et  ses  machines,  bien  assuré  de  le 
faire  sans  trouble  de  la  part  des  assiégés  ($).  An- 
tiochus  Sidétès  ayant  formé  le  siège  de  Jérusa- 
lem, Hyrcan  et  les  autres  Juifs  le  prièrent  de 
leur  accorder  une  trêve  de  sept  jours,  afin  qu'ils 
pussent  célébrer  la  fête  des  Tabernacles.  Non 
seulement  ce  prince  accorda  ce  qu'on  lui  deman- 
dait, il  envoya  même  libéralement  des  victimes, 
des  aromates  et  des  vases  précieux  au  temple; 
cette  générosité  gagna  l'estime  et  l'affection  du 
peuple,  qui  le  reçut  dans  la  ville  (6).  Du  temps  de 
Josèphe,  la  superstition  du  sabbat  avait  repris  le 
dessus;  les  Juifs  ne  croyaient  pas  pouvoir  prendre 
les  armes  ce  jour-là,  pour  quelque  cause  que  ce 
fût.  Il  dit  dans  le  livre  de  sa  vie,  qu'il  ne  voulut 
pas  assembler  des  troupes  le  jour  du  sabbat,  car 
c'est,  dit-il  (7),  un  jour  auquel  les  lois  des  Juifs 
ne  permettent  pas  de  combattre,  même  dans  les 
occasions  les  plus  pressantes.  Frontin  assure  que 
Vespasien  défit  les  Juifs  un  jour  de  sabbat  (8)  : 
Judœos  Saturai  die,  quo  eis  ne/as  est  quidquam  sé- 
ria' rei  agere,  adortus  superavit. 

y.   ^2.  TUNC  CONGREGATA   EST  AD  EOS  SYNAGOGA 

Assid^eorum.  Le  nom  d'Assidéens  semble  venir 
de  l'hébreu  (9)  'hasidîm,  pieux,  saints,  pleins  de 
compassion  et  de  miséricorde:  leurnom  se  trouve 
encore  au  chapitre  vu.  verset  13.  et  au  chapitre 
xiv.  7.  du  second  livre  des  Maccabées,  et  enfin 
au  psaume  lxxiii,  verset  2.  L'auteur  de  l'Ecclé- 
siastique (10), faisant  l'éloge  des  plus  grands  hom- 


(1)   Ep.  11.  Samarit.  ad  Scalig. 
{2)  Exod.  xvi.  29. 
(j)  Luc.  xiv.  5. 

(4)  Joseph.  Antiq.  I.  xn.  c.  i.  et  Agatharcid.  apud  eumd. 
ibid.  et  lib.  1.  contra  Appion. 


{<,)  Antiq.  lib.  xiv.  c.  8.  et  de  Bello.  t.  1.  c.  5. 

(6)  Antiq.  I.  xm.  c.  16. 

(7)  Josepli.  lib.  de  vila  sua. 
18)  Frontin.  Stratagem. 

(9)  =n>Dn  de  tert  Pietas.  misericordia. 

(10)  Eccli.  xliv.  10. 


38 


I.  —  MACCABEES.  —  II.  SES  SUCCÈS 


4;.  Et  omnes  qui  fugiebant  a  malis,  additi  sunt  ad  eos, 
et  facti  sunt  illis  ad  firmamentum. 

44.  Et  collegerunt  exercitum,  et  percusserunt  pecca- 
tores  in  ira  sua,  et  viros  iniquos  in  indignatione  sua;  et 
ceteri  fugerunt  ad  nationes,  ut  évadèrent. 

45.  Et  circuivit  Mathathias,  et  amici  ejus,  et  destru- 
xerunt  aras; 

46.  Et  circumciderunt  pueros  incircuracisos  quotquot 
invenerunt  in  finibus  Israël,  et  in  fortitudine. 

47.  Et  persecuti  sunt  filios  superbiœ,  et  prosperatum 
est  opus  in  manibus  eorum; 

48.  Et  obtinuerunt  legem  de  manibus  gentium,  et  de 
manibus  regum;  et  non  dedcrunt  cornu  peccatori. 

49.  Et  appropinquaverunt  dies  Mathathias  moriendi,  et 
dixit  filiis  suis  :  Nunc  confortata  est  superbia,et  castigatio, 
et  tempus  eversionis,  et  ira  indignationis. 


4?.  Et  tous  les  autres  qui  fuyaient  les  maux  dont  ils 
étaient  menacés  vinrent  s'unir  à  eux  et  fortifièrent  leurs 
troupes. 

44.  Ils  firent  donc  un  corps  d'armée,  et  ils  se  jetèrent 
sur  les  prévaricateurs  dans  leur  colère,  et  sur  les  nié- 
chants  dans  leur  indignation,  et  les  tuèrent  :  et  tout  le 
reste  s'enfuit  vers  les  nations,  pour  y  trouver  leur  sûreté. 

4Ç.  Et  Matthathias  alla  partout  avec  ses  amis  et  ils 
détruisirent  les  autels. 

46.  Ils  circoncirent  tous  les  enfants  incirconcis  qu'ils 
trouvèrent  dans  le  pays  d'Israël  ;  et  agirent  avec  cou- 
rage. 

47.  Ils  poursuivirent  les  enfants  d'orgueil  ;  et  ils  (réus- 
sirent dans  toutes  leurs  entreprises. 

48.  Ils  délivrèrent  la  loi  de  l'asservissement  des  nations, 
et  de  la  puissance  des  rois  ;  et  ils  ne  permirent  point  au 
pécheur  d'abuser  impunément  de  son  pouvoir. 

40.  Après  cela,  le  jour  de  la  mort  de  Matthathias 
s'approchant,  il  dit  à  ses  fils  :  Le  règne  de  l'orgueil  s'est 
affermi;  voici  un  temps  de  châtiment  et  de  ruine,  d'indi- 
gnation et  de  colère. 


COMMENTAIRE 


mes  de  la  nation  juive,  depuis  Moïse,  jusqu'au 
grand  prêtre  Simon,  fils  d'Onias,  leur  donne  le 
nom  d'hommes  de  miséricorde,  qui  est  équivalent 
à  celui  d'Assidéens  :  Isti  viri  misericordiœ  sv.nl, 
quorum  pielaies  non  defuerunl.  Plusieurs  savants 
commentateurs  (1),  soutiennent  que  ces  Assidéens 
sont  les  mêmes  Esséniens,  si  célèbres  dans  les 
écrits  de  Josèphe  et  de  Philon.  Il  n'en  est  rien. 
Le  nom  à* Assidéens  ou  pieux, comme  nom  propre, 
désigne  exclusivement  ces  Juifs  patriotes  qui  s? 
groupèrent  sous  la  conduite  des  Maccabées,pour 
affranchir  leur  patrie.  On  les  nommait  pieux  par 
opposition  aux  impies  qui,  renonçant  aux  lois  mo- 
saïques, favorisaient  les  coutumes  grecques  (2). 
Quelques  anciens  exemplaires  latins  portent  Sy- 
nagoga  Judœorum,  au  lieu  de  Synagoga  Assidœo- 
rum  ;  mais  les  meilleurs  textes  sont  semblables 
au  grec,  qui  porte  Assidœorum. 

jL  44.  Percusserunt  peccatores.  Ils  se  jetè- 
rent sur  les  prévaricateurs,  sur  ceux  des  Juifs  qui 
avaient  abandonné  la  loi  du  Seigneur.  La  suite 
demande  ce  sens. 

*.  46.  Et  in  fortitudine.  Il  n'y  a  point  de 
conjonction  dans  le  grec;  il  porte  (3)  :  Ils  cir- 
concirent généreusement  (sans  rien  craindre  de  la 
part  des  officiers  du  roi)  tout  ce  qu'ils  trouvèrent 
d'enfants  qui  n'étaient  pas  circoncis  dans  l'étendue 
de  la  terre  d'Israël, 

,v.  49.  Nunc  confortata  est  superbia,  cas- 
tigatio, etc.  Il  donne  le  nom  d'orgueil  à  l'impiété 
qui  animait  Antiochus  :  et  c'était  véritablement 
un  règne  d'orgueil  que  celui  d'un  prince  qui 
n'avait    que  des    paroles  de   blasphème   dans  la 


bouche.  L'Écriture  joint  ici  le  châtiment  à  la 
ruine,  parce  que  la  même  persécution  qui  servait 
d'épreuve  et  de  châtiment  salutaire  aux  uns.  était 
un  sujet  de  ruine  pour  les  autres,  en  les  renver- 
sant entièrement.  Ainsi  la  colère  du  Seigneur 
éclatait  envers  plusieurs  de  ces  Juifs,  d'une  ma- 
nière bien  différente  de  ce  que  son  indignation 
produisait  contre  les  autres.  Il  se  mettait  en  colère 
pour  sauver  les  uns  en  les  châtiant  comme  ses 
enfants,  sans  leur  retirer  sa  miséricorde;  mais  il 
entrait  en  fureur  contre  les  autres,  en  les  livrant 
au  dérèglement  de  leur  cœur,  et  en  permettant 
que  le  scandale  de  cette  horrible  persécution 
découvrît  publiquement  leur  impiété. 

Matthathias  ,  comme  un  père  qui  désirait 
laisser  sa  piété  pour  principal  héritage  à  ses 
enfants,  et  comme  un  zélateur,  qui  songeait  uni- 
quement, en  mourant,  à  ce  qui  pouvait  contribuer 
à  l'affermissement  de  sa  religion,  exhorte  ses  fils 
à  donner  pour  la  sainte  alliance  les  vies  qu'ils 
avaient  reçues  de  lui;  et  il  les  porte  à  avoir  du 
\èle,  non  pour  la  conservation  de  leurs  biens,  de 
leurs  femmes  et  de  leurs  enfants,  mais  pour  la 
défense  de  la  loi  de  Dieu.  Il  veut  que  la  foi  de 
leurs  ancêtres  les  anime  dans  cette  guerre  sainte, 
pour  s'y  conduire  dans  les  mêmes  vues.  Il  leur 
propose  la  fidélité  d'Abraham,  la  fermeté  de 
Joseph,  le  zèle  de  Phinéès,  l'obéissance  de  Josué, 
la  généreuse  confession  de  Caleb,  la  grande  dou- 
ceur de  David,  l'ardeur  d'Élie,  l'humble  confiance 
d'Ananias,  d'Azarias  et  de  Misaël,  la  simplicité 
de  la  foi  toujours  égale  de  Daniel  ;  afin  de  les 
affermir,  par  l'exemple,  de  ce  qui  s'était  passé   de 


il)  Scrar.  ad    cap.  vu.  f.  ij.    Jwj.    libri.   Menoch.    Tir. 
A.'jr.  Qorionid.  Munsf.  Verlicrst.  Grot.  alii. 
(2)  S.  Munk,  Palestine,  p.  496. 


(}}  IlEpiÊ«u.ov    ta    rcottoxpia oaa    s~op&v    iv    ôpfoi; 

I'apa/]).  sv  ta/  ui. 


MACCABÉES.  —  II.  -  SES  DERNIÈRES   PAROLES 


39 


ço  Nunc  ergo,  o  filii,  œmulatores  estote  legis  et  date 
animas  vestras  pro  testamento  patrum  vestrorum, 

ci.  Et  mementote  operum  patrum,  quœ  fecerunt  in 
generationibus  suis,  et  accipietis  gloriam  magnam  et 
nomen  asternum. 

<)2.  Abraham  nonne  in  tentatione  inventus  est  fidelis, 
et  reputatum  est  ei  ad  justitiam? 

^;.  Joseph  in  tempore  angustiae  suas  custodivit  man- 
datum,  et  factus  est  dominus  /Egypti. 

54.  Phinees,  pater  noster,  zelando  zelum  Dei,  accepit 
testamtntum  sacerdotii  asterni. 

55.  Josuc,  dum  implevit  vcrbum,  factus  est  dux  in 
Israël. 

56.  Caleb,  dum  testiricatur  in  ecclesia,  accepit  heredi- 
tatem. 

57.  David,  in  sua  misericordia,  consecutus  est  sedein 
regni  in  soscula. 

58.  Elias,  dum  zelat  zelum  legis,  receptusest  in  ctslum. 

59.  Ananias,  et  Azarias,  et  Misael,  credentes,  libe- 
rati  sunt  de  flamma. 


Ço.  Soyez  donc  maintenant,  mes  enfants,  de  vrais  zéla- 
teurs de  la  loi,  et  donnez  vos  vies  pour  l'alliance  de  vos 
pères. 

51.  Souvenez-vous  des  œuvres  qu'ont  faites  vos  ancê- 
tres, chacun  dans  leur  temps,  et  vous  recevrez  une 
grande  gloire  et    un  nom  éternel. 

<,2.  Abraham  n'a-t-il  pas  été  trouvé  fidèle  dans  la  ten- 
tation, et  cela  ne  lui  a  t-il  pas  été  imputé  à  justice  ? 

5?.  Joseph  a  gardé  les  commandements  de  Dieu  pen- 
dant le  temps  de  son  affliction;  et  il  est  devenu  le  sei- 
gneur de  l'Egypte. 

14.  Phinéès  notre  père,  en  brûlant  de  zèle  pour  la  loi 
de  Dieu,  a  reçu  la  promesse   d'un  sacerdoce  éternel. 

55.  Josué,  accomplissant  la  parole  du  Seigneur,  est 
devenu  le  chef  d'Israël. 

56.  Caleb,  en  rendant  témoignage  dans  l'assemblée  de 
son  peuple,  a  reçu  un    héritage. 

Ç7.  David,  par  sa  douceur,  s'est  acquis  pour  jamais  le 
trône  royal. 

58.  Élie, étant  embrasé  de  zèle  pour  la  loi,  a  été  enlevé 
dans  le  ciel. 

59.  Ananias,  Azarias  et  Misael,  croyant  fermement  en 
Dieu,  ont  été  sauvés  des  flammes. 


COMMENTAIRE 


race  en  race,  dans  l'espérance  qu'ils  doivent  avoir 
en  Dieu,  et  contre  la  crainte  des  menaces  de 
l'homme  pécheur,  c'est-à-dire,  d'Antiochus.  Car 
il  regarde  ce  prince  comme  un  esclave  du  péché  ; 
et  toute  sa  gloire,  comme  du  fumier  et  la  pâture 
des  vers. 

C'est  l'idée  qu'il  veut  que  ses  fils  et  tous  les 
vrais  serviteurs  de  Dieu  aient  d'un  roi  impie,  au 
milieu  même  de  tout  l'éclat  de  la  gloire  passa- 
gère qui  l'environne.  77  s'élève,  leur  disait-il,  au- 
jourd'hui, et  il  disparaît  demain  :  et  cependant  il 
entreprend  de  faire  la  guerre  au  Dieu  éternel. 
C'est  un  rejeton  de  la  terre,  qui  doit  bientôt  y 
rentrer  :  et  il  ose  s'élever  contre  le  ciel,  et  ouvrir 
sa  bouche  contre  le  Très-Haut.  Il  est  destiné  à 
devenir  la  pâture  des  vers,  et  il  forme  de  vains 
projets  d'établir  son  trône  sur  la  ruine  de  celui 
du  Dieu  d'Israël  ! 

Matthathias  n'attendit  pas  qu'il  fût  proche  de 
la  mort,  pour  avoir  ce  saint  mépris  d'un  prince 
superbe  et  impie,  ennemi  déclaré  de  son  Dieu. 
11  était  dans  ces  mêmes  sentiments,  lorsqu'il 
quitta  tous  ses  biens  pour  se  retirer  dans  les 
déserts;  lorsqu'il  refusa  d'être  du  nombre  des 
amis  du  roi,  et  qu'il  rejeta  les  grands  présents 
dont  on  voulait  le  flatter.  Ainsi  il  ne  ressemblait 
pas  à  ceux  dont  parle  un  saint  pape  (1),  quand  il 
dit  qu'ils  attendent  à  reconnaître  le  néant  de  toute 
la  gloire  des  grands  de  la  terre,  lorsqu'elle  s'est 
évanouie  tout  d'un  coup  par  quelque  disgrâce 
ou  par  la  mort;  au  lieu  qu'ils  devraient  confesser 


cette  vérité  au  moment  même  qu'ils  voient  ces 
fiers  personnages  au  comble  des  honneurs,  selon 
cette  excellente  parole  de  l'Ecriture  :  J'ai  vu 
l'insensé  affermi  par  de  profondes  racines  :  et  dans 
V instant  j'ai  donné  ma  malédiction  à  son  vain 
éclat  (2). 

f.  53.  Factus  est  Dominus  ^Egypti.  Il  en  est 
devenu  comme  le  père,  le  maître,  le  gouverneur, 
le  sauveur.  Après  le  roi,  Joseph  était  le  pre- 
mier et  le  plus  puissant  de  l'Egypte  (3). 

f.    S  4.    TESTAMENTUM    SACERDOTII     iCTERNI.    La 

promesse  d'un  sacerdoce  éternel,  ou  l'alliance  d'un 
sacerdoce  perpétuel  dans  sa  famille.  Voyez  Nom- 
bres, xxv.  1 2.  Ce  sacerdoce  a  été  éternel  dans  ce 
sens,  pour  les  promesses  qui  se  bornaient  à  l'An- 
cien Testament  :  elles  ne  s'étendaientqu'au  temps 
de  la  loi. 

f.  $6.  Caleb,  dum  testificatur  in  ecclesia. 
Lorsqu'après  le  retour  des  envoyés  qui  avaient 
considéré  la  terre  Promise,  il  rendit  témoignage 
à  la  vérité,  il  soutint,  contre  le  rapport  de  ses 
associés,  que  le  peuple  pourrait  aisément,  avec  le 
secours  de  Dieu,  faire  la  conquête  de  cet  excel- 
lent pays  (4). 

f.  57.  David,  in  sua  misericordia.  David  par 
sa  douceur,  par  sa  bonté,  par  sa  clémence.  Il 
semble  que  le  véritable  caractère  de  ce  prince 
était  la  miséricorde  et  la  clémence  ;  il  en  a  donné 
des  marques  en  plusieurs  occasions  envers  Saùl, 
envers  Absalom,  envers  Séméï,  envers  Nabal, 
envers  Joab,  etc. 


(1)  Gregor.  Magn.  Moral,  lib.  vi.  c.  1. 

(2)  Job.  v.  j. 


(?)  Gènes,  xli.  40.  41.  4: 
(4)  Num.  xiv.  7.  8. 


40 


I.  —  MACCABÉES.  -  II.  -  SES  DERNIÈRES  PAROLES 


60.  Daniel,  in  sua  simplicitate,  liberatus  est  de  ore 
leonum. 

61.  Et  ita  cogitate  per  generationem  et  generationem, 
quia  omnes  qui  speran!  in  eum  non  infirmantur. 

62.  Et  a  verbis  viri  peecatoris  ne  timueritis,quia  gloria 
ejus  stercus  et  vermis  est  : 

65.  Hodie  extollitur,  et  cras  non  invenietur,  quia  con- 
versus  est  in  terram  suam,  et  cogitatio  ejus   periit. 

64.  Vos  ergo,  filii,  confortamini,  et  viriliter  agite  in  lege 
quia  in  ipsa  gloriosi  eritis. 

6^.  Et  ecce  Simon,  frater  vester,  scio  quod  vir  con- 
silii  est  ;  ipsum  audite  semper,  et    ipse  erit  vobis  pater. 

66.  Et  Judas  Machabasus,  fortis  viribus  a  juventute  sua, 
sit  vobis  princeps  militias,  et  ipse  aget  bellum  populi. 

•   67.  Et  adducetis  ad  vos  omnes  factores  legis,  et  vindi- 
cate  vindictam  populi  vestri. 

68.  Retribuite  retributionem  gentibus,  et  intendile  in 
praecepium  legis. 

69.  Et  benedi\it  eos,  et  appositus  est   ad    patres  s  10s. 

70.  Et  defunctus  est  anno  centesimo  et  quadragesimo 
sexto,  et  sepultus  est  a  filiis  suis  in  sepulcris  patrum 
suorum,  in  Modin;  et  planxerunt  eum  omnis  Israël 
planctu  magno. 


60.  Daniel,  dans  la  simplicité  de  son  cœur,  a  été  déli- 
vré de  la  gueule  des  lions. 

61.  Ainsi  considérez  tout  ce  qui  s'est  passé  de  race  en 
race,  et  vous  trouverez  que  tous  ceux  qui  espèrent  en 
Dieu,  ne  s'affaiblissent  point. 

62.  Ne  craignez  dftnc  point  les  paroles  de  l'homme 
pécheur,  parce  que  toute  sa  gloire  n'est  que  de  l'ordure 
et  que  la  pâture  des  vers. 

61.  Il  s'él-ôve  aujourd'hui,  et  disparaîtra  demaûi,  parce 
qu'il  sera  retourné  dams  la  terre  d'où  il  est  venu,  et  que 
ses  pensées  se  seront  évanouies. 

64.  Vous  donc,  mes  enfants,  armez-vous  de  courage, 
et  agissez  vaillamment  pour  la  défense  de  la  loi,  parce 
que  c'est   elle  qui  vous  comblera   de   gloire. 

65.  Et  voilà  Simon  votre  frère  :  je  sais  qu'il  est  homme 
de  conseil  ;  écoutez-le  toujours,  et  il  vous  tiendra  lieu 
de  père. 

66.  Judas  Maccabée  a  été  fort  et  vaillant  dès  sa  jeu- 
nesse; qu'il  soit  le  général  de  vos  troupes,  et  il  con- 
duira votre  peuple  dans  la  guerre. 

67.  Joignez  à  vous  tous  les  observateurs  de  la  loi,  et 
vengez  votre  peuple  de  ses  ennemis. 

08.  Rendez  aux  nations  le  salaire  qu'elles  méritent,  et 
soyez  toujours  attentifs  aux  préceptes  de  la  loi. 

09.  Après  cela,  il  les  bénit,   et  il  fut  réuni  à  ses  pères. 
70.   Il  mourut  en    la  cent  quarante-sixième   année  et  il 

fut  enseveli  à  Modin  par  ses  enfants  dans  le  sépulcre  de 
ses  pères  ;  et  tout  Israël  le  pleura,  et  lit  un  grand  deuil 
à  sa  mort. 


COMMENTAIRE 


'f.  60.  Daniel,  in  sua  simplicitate.  Ce  pro- 
phète aima  mieux  s'exposer  aux  dernières  extré- 
mités, que  de  violer  la  loi  de  Dieu.  Le  terme 
hébreu  (1)  que  les  Grecs  ont  souvent  rendu  par 
simplicité,  signifie  aussi  la  perfection,  l'intégrité, 
la  pureté  de  mœurs,  l'exemption  de  défauts,  d'im- 
pertections,  de  souillures. 

%     67.      VlNDICATE     VINDICTAM    POPULI     VESTRI. 

Wenge\  votre  peuple  de  ses  ennemis,  défendez-le 
contre  ceux  qui  l'oppriment  injustement,  et  qui 
veulent  l'obligera  quitter  la  loi  du  Seigneur.  Ven- 
gez l'injure  faite  à  Dieu,  et  rétablissez  par  la  force 
la  pratique  de  ses  lois.  Matthathias  parle  en 
prince  et  en  chef  de  sa  nation  à  ses  fils,  qui 
devaient  lui  succéder  dans  le  même  emploi. 

f.  68.  Retribuite  retributionem  gentibus,  et 
intendite  in  pr^eceptum  legis.  Le  premier  pré- 
cepte de  cette  loi  leur  ordonnait  d'aimer  Dieu  de 
tout  leur  cœur,  de  toute  leur  âme,  de  tout  leur 
esprit.  Ils  étaient  donc  obligés,  suivant  ce  pré- 
cepte, de  préférer  Dieu  et  par  conséquent  sa 
religion  à  toutes  choses.  Ainsi  Matthathias  com- 
mandant à  ses  enfants  de  rendre  aux  nations  le 
mal  que  les  natiorvs  leur  avaient  fa  %  les  oblige  en 


même  temps  à  avoir  toujours  les  yeux  attentifs  sur 
les  saints  préceptes:  c'est-à-dire,  qu'il  les  oblige 
de  considérer,  dans  la  guerre  qu'ils  feraient  aux 
infidèles,  non  leurs  injures  et  leurs  propres  inté- 
rêts, mais  la  gloire  et  la  volonté  de  Dieu,  qui 
devait  être  la  règle  de  leurs  actions. 

Les  commandements  de  Dieu  sont  comme  un 
miroir  qui  nous  représente  nos  devoirs.  On  ne 
peut  manquer  d'avoir  une  juste  appréciation  des 
choses,  en  le  consultant.  Mais  il  est  aisé,  en  le 
perdant  de  vue,  de  s'écarter  de  la  voie  de  la  vérité  ; 
parce  que  la  passion  et  l'amour-propre  se  substi- 
tuent adroitement  à  sa  place,  et  trouvent  toujours 
un  grand  accès  dans  le  cœur  humain.  C'est  pour- 
quoi connaissant  la  difficulté  qu'il  y  avait  de  se 
conduire  avec  sagesse  et  avec  justice  dans  des 
circonstances  si  malheureuses, Matthathias  donne 
à  ses  enfants  ce  L,'rand  précepte,  d'être  toujours 
attentifs  aux  ordonnances  de  la  loi;  voulant  leur 
marquer  par  là,  qu'ils  ne  trouveraient  leur  salut, 
leur  gloire  et  leur  sûreté,  que  dans  l'observance 
des  commandements  de  Dieu. 

v.  70.  Anno  centesimo  quadragesimo  sexto. 
L'an  166  avant  l'ère  vulgaire. 


(1)  =n  Thom.  A'^ÔTriç.  Vide  Gènes,  vi.  9;  xx.  5.  6.  -       .lob.  1.  -  Psabn.  cxvui.    1.  -  Proverb.  xx.  7.  -  Isai.  xlvii.  9. 


CHAPITRE    III 

Judas  Maccabée  succède  à  Matthathias  son  père.  Il  défait  et  lue  Apollonius.  Il  marche 
contre  Séron  et  le  défait.  Les  victoires  de  Juda  irritent  Antiochus.  Lysias  envoie  une 
armée  nombreuse  contre  les  Juifs.  Juda  et  les  siens  se  préparent  à  combattre  les  ennemis. 


i.  Et  surrcxit  Judas,  qui  vocabatur  Machabœus,  filius 
ejus,  pro  eo; 

2.  Et  adjuvabant  eum  omnes  fratres  ejus,  et  univdrsi 
qui  se  conjunxerant  patri  ejus,  et  praeliabantur  prœlium 
Israël  cum  laetitia. 

5.  Et  dilatavit  gloriam  populo  suo;  et  induit  se  loricain 
sicut  gigas,  et  succinxit  se  arma  bellica  sua  in  prasliis,  et 
protegebat  castra  gladio  suo. 

4.  Similis  factus  est  leoni  in  operibus  suis,  et  sicut 
catulus  leonis  rugiens  in  venatione. 

5.  Et  persecutus  est  iniquos  perscrutans  eos;  et  qui 
conturbabant  populum  suum,  eos  succendit  flammis  ; 

0.  Et  repulsi  sunt  inimici  ejus  praa  timoré  ejus,  et 
omnes  operarii  iniquitatis  conturbati  sunt,  et  direcia  est 
salus  in  manu  ejus. 


1.  Alors  Judas  son  fils,  surnommé  Maccabée,  prit  sa 
place. 

2.  Il  était  assisté  par  tous  ses  frères,  et  par  tous  ceux 
qui  s'étaient  joints  à  son  père  ;  et  ils  combattaient  avec 
joie  pour  la  défense  d'Israël. 

j.  Ce  fut  lui  qui  accrut  la  gloire  de  son  peuple  :  il  se 
revêtit  de  la  cuirasse  comme  un  géant  :  il  se  couvrit  de 
ses  armes  dans  les  combats,  et  son  épée  était  la  protec- 
tion de  tout  le  camp. 

4.  Il  devint  ssmblable  à  un  lion  dans  ses  grandes  ac- 
tions, et  à  un  lionceau  qui  rugit  en  voyant  sa  proie. 

;.  Il  poursuivit  les  méchants,  en  les  cherchant  de  tous 
côtés,   et  il  brûla  ceux  qui  troublaient  son  peuple. 

6.  La  terreur  de  son  nom  fit  fuir  ses  ennemis  devant 
lui  :  tous  les  ouvriers  d'iniquité  furent  dans  le  trouble  ; 
et  son  bras  procura  le  salut  du  peuple. 


COMMENTAIRE 


$,  1.  Surrexit  Judas  pro  eo.  Il  succéda  à 
Matthathias  dans  le  gouvernement  du  peuple. 
La  situation  demandait  un  homme  sage,  intrépide, 
zélé;  Judas  était  le  troisième  des  enfants  de  Mat- 
thathias, comme  le  remarque  Josèphe  (1),  mais 
il  méritait  d'être  choisi  et  préféré  aux  autres,  à 
cause  de  son  insigne  valeur. 

f.  3.  Protegebat  castra  gladio  suo.  Son  épée 
était  la  protection  de  tout  le  camp,  ou  plutôt  de 
toute  l'armée.  L'auteur  de  ce  livre  et  en  général 
les  Hébreux,  mettent  souvent  le  camp  pour  les 
troupes  qui  composent  l'armée  (2). 

Cette  peinture  si  vive  que  l'Écriture  nous  a 
faite  du  courage  et  de  la  force  invincible  de  Judas 
Maccabée,  présente  en  abrégé  tout  ce  que  fit 
ce  grand  zélateur  de  la  loi,  lorsqu'avec  une  petite 
troupe  de  soldats  soutenus  par  son  exemple  et 
par  la  vertu  divine,  il  taillait  en  pièces  des  armées 
nombreuses,  et  remplissait  de  frayeur  tous  ses 
ennemis.  C'est  une  des  belles  figures  de  l'histoire, 
et  le  mystérieux  symbole  du    Messie. 

Jésus  est  ce  lion  de  la  tribu  de  Juda  (])  qui  a 
vaincu  véritablement  tous  ses  ennemis, comme  parle 
l'Écriture.  C'est  lui  qui  a  marché  commeun  géant 
au  combat  :  Exullamt  ut  gigas  ad  currendam 
viam  (4).  C'est  à  lui  qu'un  saint  prophète  et  un 


saint  roi  demande  instamment  qu'il  prenne  ses 
armes  et  son  bouclier,  et  qu'il  tire  son  épée  (5),  afin 
de  fermer  tout  passage  à  ses  ennemis.  Il  a  été 
comme  un  agneau  en  vivant  parmi  les  hommes,  et 
on  l'égorgea  comme  la  victime  du  salut  de  tout 
Israël  ;  mais,  par  sa  mort,  il  est  devenu  comme 
un  lion,  et  comme  une  lionne  qui  rugit  en  voyant 
sa  proie.  Il  a  agi  avec  ce  pouvoir  suprême  qui 
brise  ceux  qui  lui  résistent,  et  qui  fléchit,  quand 
il  lui  plaît,  les  volontés  les  plus  rebelles,  les  ren- 
dant ainsi  les  uns  et  les  autres  comme  sa  proie,  et 
nulle  puissance  ne  saurait  la  lui  enlever. 

Sa  colère  s'embrase,  dit  le  roi  prophète,  comme 
un  grand  feu  (6),  et  c'est  pour  brûler  ceux  qui  trou- 
blent son  peuple.  Dieu  d'unifcé  et  de  paix,  il  ne  hait 
rien  tant  et  ne  punit  rien  plus  sévèrement  que  ce 
qui  rompt  cette  unité  d'Israël.  Tous  les  ouvriers 
d'iniquilé  sont  dans  la  terreur  en  sa  présence  ;  par- 
ce que  ceux  qui  font  mal  fuyent  et  haïssent  la 
lumière  de  sa  vérité,  qui  condamne  toutes  leurs 
œuvres  (7)  comme  des  œuvres  de  ténèbres,  qui  ne 
sont  point  faites  par  son  esprit.  Ses  actions  mira- 
culeuses ont  causé  le  désespoir  de  plusieurs  princes, 
et  relevé  en  même  temps  l'espérance  et  la  joie  de 
Jacob,  lorsqu'il  a  rendu  inutiles  tous  les  efforts 
des   empereurs   idolâtres,   et  affermi  contre    les 


(1)  Joseph.  Ant.  I.  xii.  c,  8.  Ailleurs,  de  Belle  l.  1.  c.  1. 
il  dit  l'aîné. 
12)  Voyez  versets  1 5.  et  57.  Gènes,  xi.ix,  9.  -  Num.  xxm. 


24.-  Deut.  xxxn.  221. 

(i)  Apec.  v.  <,.  —  (4)  Psalm.  xvui.  6.—  (5)  Ps.  xxxiv.  2. 
(6)  Psalm.  lxxxviii.  47.  —  (7)  Joan.  m.   20. 


42 


I.—  MACCABÉES.  —  III.-  JUDAS  M  VCCABÉE 


7.  El  exacerbabat  reges  multcs,  et  laetificabat  Jacob 
in  operibus  suis;  et  in  sasculum  memoria  ejus  in  bene- 
dictione. 

8.  Et  perambulavit  civitates  Juda,  et  psrdidit  impios 
ex  eis,  et  avertit  iram  ab  Israël. 

9.  Et  nominatus  est  usque  ad  novissimum  terras,  et 
congregavit  pereuntes. 

10.  Et  congregavit  Apollonius  gentes,  et  a  Samaria 
virtutem  multam  et  magnam  ad  bellar.dum  contra  Israël. 

11.  Et  cognovit  Judas,  et  exiit  obviam  illi,  et  percussiti 
et  occidit  illum  ;  et  ceciderunt  vulnerati  multi,  et  reliqui 
fugerunt. 

12.  Et  accepit  spolia  eorum,  et  gladium  Apollonii 
abstulit  Judas,  et  erat  pugnans  in  eo  omnibus  diebus. 

15.  Et  audivit  Seron,  princeps  exercilus  Syriœ,  quod 
congregavit  Judas  congregationem  fidelium  et  ecclesiam 
secum. 

14.  Et  ait  :  Faciam  mihi  nomen,  et  glorilïcabor  in  regno, 
et  debellabo  Judam  et  eos  qui  cum  ipso  sunt,  qui  sper- 
nebant  verbum  régis. 

15.  Et  prseparavit  se;  et  ascenderunt  cum  eo  castra 
impiorum,  fortes  auxiliarii,  ut  facerent  vindictam  in  lilios 
Israël, 


7.  Ses  grandes  actions  irritèrent  plusieurs  rois,  et 
furent  en  même  temps  la  joie  de  Jacob  ;  et  sa  mémoire 
sera  éternellement  en  bénédiction. 

8.  Il  parcourut  les  villes  de  Juda;  il  en  fit  disparaître 
les  impies  ;  et  il  détourna  la  colère  de  Dieu  de  dessus 
Israël. 

9.  Son  nom  devint  célèbre  jusqu'aux  extrémités  du 
monde  ;  et   il   rassembla  ceux    qui  étaient  près  de  périr. 

10.  Alors  Apollonius  assembla  les  nations,  et  leva  de 
Samarie  une  grande  et  puissante  armée,  pour  combattre 
contre  Israël. 

11.  Et  Judas,  en  ayar.t  été  averti,  marcha  contre  lui, 
le  défit  et  le  tua  :  et  un  grand  nombre  des  ennemis  fut 
taillés  en  pièces, et  le  reste  mis  en  fuite. 

t2.  Il  en  rapporta  les  dépouilles,  et  il  prit  l'épée 
d'Apollonius,  et  s'en  servit  dans  les  combats  toute  sa  vie. 

ij.  Séron,  général  de  l'armée  de  Syrie,  ayant  appris 
que  Judas  avait  rassemblé  auprès  de  lui  une  grande- 
troupe  de  ceux  qui  étaient  fidèles  à  la  loi, 

14  Dit:  Je  m'acquerrai  de  la  réputation  et  de  la 
gloire  dans  tout  le  royaume,  par  la  défaite  de  Judas  et 
de  tous  ceux  qui  sont  avec  lui,  qui  méprisent  les  ordres 
du  roi. 

15.  Il  se  prépara  donc  pour  le  combattre  ;  et  l'armée 
des  impies  le  suivit  avec  un  puissant  secours,  pour  se 
venger  des  enfants  d'Israël. 


COMMENTAIRE 


puissances  de  l'enfer  son  Église,  qui  a  commencé 
par  la  maison  de  Jacob. 

C'est  lui  enfin  qui  a  détourné  la  colère  du  Sei- 
gneur, non  seulement  d'Israël,  mais  encore  de 
toutes  les  nations,  lorsqu'il  s'est  fait,  par  un  excès 
de  sa  charité,  une  victime  de  propitiation  pour 
leur  salut  :  et  sa  mémoire  sera  éternellement  en 
bénédiction  parmi  les  hommes  ;  puisqu'on  ne  peut 
dire  réellement  que  de  lui  seul,  ce  qui  n'est  d;t 
qu'en  un  sens  restreint  de  Judas  Maccabée,  que 
son  nom  est  devenu  célèbre  jusqu'aux  extrémi- 
tés du  monde,  depuis  qu'il  a  rassemblé  ceux  qui 
périssaient  sous  l'esclavage  du  démon,  entraînés 
par  le  torrent  de  la  corruption  générale  du 
péché. 

,v.  7.  Exacerbabat  reges  multos.  Judas  Mac- 
cabée gouverna  sous  trois  rois  de  Syrie,  An- 
tiochus  Epiphane,  Antiochus  Eupator  et  Démé- 
trius.  Il  remporta  sur  eux  et  sur  leurs  généraux, 
de  très  grands  avantages  ;  ils  eurent  la  mortifica- 
tion de  le  voir  rétablir  les  affaires  de  sa  nation, 
sans  pouvoir  l'en  empêcher.  Le  nom  de  roi  se 
prend  quelquefois  pour  des  princes,  des  gouver- 
neurs de  villes  et  de  provinces  ;  on  peut  encore 
l'entendre  ici  en  ce  sens. 

f.  8.  Avertit  iram  ab  Israël.  Il  fit  cesser  la 
persécution,  en  mettant  les  ennemis  dans  la  néces- 
sité de  songer  à  leur  propre  défense,  ou  il  dé- 
tourna les  effets  de  la  colère  de  Dieu  ;  il  en  arrê- 


ta la  cause,  en  proscrivant  l'exercice  de  l'idolâtrie 
dans  le  temple  et  dans  le  pays. 

h  9.  Congregavit  pereuntes.  //  rassembla 
ceux  qui  étaient  prêts  de  périr;  les  peuples  persé- 
cutés, dispersés  et  malheureux.  Les  Hébreux 
appellent  un  homme  dans  la  disgrâce  ou  dans  la 
captivité,  un  périssant  (1). 

f.  10.  Congregavit  Apollonius  gentes.  Apol- 
lonius est  le  gouverneur  envoyé  auparavant  par 
Antiochus  (2),  pour  placer  à  Jérusalem  la  statue 
de  Jupiter  Olympien,  et  pour  contraindre  les  Juifs 
à  quitter  leurs  lois.  C'est  probablement  le  même 
qui  fut  envoyé  en  Egypte  au  commencement  du 
règne  de  ce  prince  (3;,  pour  tâcher  d'obtenir  la 
tutelle  du  jeune  roi  Ptolomée  Philométor.  Apol- 
lonius se  trouvait  à  Samarie,  lorqu'il  apprit  que 
Judas  paraissait  à  la  tête  d'une  armée  de  six  mille 
hommes  (4)  :  cechel  du  peuple  de  Dieu,  profilant 
de  l'absence  d'Apollonius,  était  sorti  des  monta- 
gnes, et,  parcourant  les  bourgades  et  les  villages, 
avait  ramassé  tout  ce  qu'il  avait  trouvé  de  Juifs 
zélés  pour  la  loi.  Avec  sa  troupe,  il  ravageait  les 
campagnes,  et  portait  la  désolation  partout,  brû- 
lant les  villes  et  les  villages,  et  taillant  en  pièces 
tous  les  ennemis  qui  tombaient   entre  ses  mains. 

v.  i].  Seron,  princeps  exercitus  Syri-c.  De 
laCœlé-Syrie,  ditJosèphe. 

v.  i).  Castra  impiorum.  Ceux  des  Juifs  qui 
avaient  apostasie. 


(1)  13N  Deul.  xxvi.  4.  5.  on  taiN  >n-iN  Syrus  periens 
pater  meus.  Vulg.  Syrus  persequebatur  patiem  meum.  - 
Prov.  xxxi.  -  Job.  xix,  ij;  xxxi.  19. 


(2)  11.  Macc.  v.  24.  25.  26. 

(3)  11.  Macc.  iv. 

(4)  11.  Macc.  vm.  et  Joseph.  Antiq. 


I. 


MACCABEES. 


III.  -  SES   EXPLOITS 


4? 


16.  Et  appropinquaverunt  usque  ad  Bethoron,  et  exivit 
Judas  obviam  illi  cum  paucis. 

i".  Ut  autem  viderunt  exercitum  venientem  sibi  obviam, 
dixerunt  Judas  :  Quomodo  poterimus  pauci  pugnare  con- 
tra multijudinem  t?ntam  et  tam  fortem,  et  nos  fatigati 
sumus  jejunio  hodie  ? 

18.  Et  ait  Judas  :  Facile  est  concludi  multos  in  manus 
paucorum  ;  et  non  est  diflferentia  in  conspectu  Dei  cœli 
liberare  in  multiset  in  paucis, 

19.  Quoniam  non  in  multitudine  exercitus  Victoria  bel  I S  ; 
sed  de  ccelo  forlitudo  est. 

20.  Ipsi  veniunt  ad  nos  in  multitudine  contumaci  et  su- 
perbia,  ut  disperdant  nos,  et  uxores  nostras,  et  filios 
nostros,  et  ut  spolient  nos; 

21.  Nos  vero  pugnabimus  pro  animabus  nostris,  et 
legibus  nostris; 

22.  Et  ipse  Dominus  conteret  eos  ante  faciem  nostram  ; 
vos  autem  ne  timueritis  eos. 

2;.  Ut  cessavit  autem  loqui,  insiluit  in  eos  subito  ;  et 
contritus  est  Seron  et  exercitus  ejus  in  conspectu  ipsius. 

24.  Et  persecutus  est  eum  in  descensu  Bethoron  usque 
in  campum,  et  ceciderunt  ex  eis  octingenti  viri  ;  reliqui 
autem  fugerunt  in  terram  Philisthiim. 

25.  Et  cecidit  timor  Judae  ac  fratrum  ejus,  et  formido 
super  omnes   gentes    in    circuitu    eorum  ; 


16.  Ils  s'avancèrent  jusqu'à  Bethoron  ;  et  Judas  vint 
au-devant  d'eux  avec  peu  de  soldats. 

17.  Mais  ceux-ci,  ayant  vu  marcher  contre  eux  l'armée 
ennemie,  lui  dirent  :  Comment  pourrons- nous  combattre 
contre  une  armée  si  grande  et  si  forte,  nous  qui  sommes 
en  si  petit  nombre  et  fatigués  du  jeûne  d'aujourd'hui? 

18.  Judas  leur  dit  :  Il  est  aisé  que  peu  de  gens  en  bat- 
tent beaucoup  :  et  quand  le  Dieu  du  ciel  veut  sauver,  il 
n'y  a  point  de  différence  entre  un  grand  et  un  petit 
nombre  ; 

19.  Car  la  victoire  ne  dépend  point  de  la  grandeur  des 
armées,  mais  c'est  du  ciel  que  vient  toute   la  force. 

20.  Ils  marchent  contre  nous  avec  une  multitude  de 
gens  superbes  et  insolents  pour  nous  perdre  tous  avec 
nos  femmes  et  nos  enfants,  et  pour  s'enrichir  de  nos 
dépouilles. 

2i.  Mais  pour  nous,  nous  combattrons  pour  notre  vie 
et  pour  notre  loi  ; 

2?.  Et  le  Seigneur  brisera  lui-même  tous  leurs  efforts 
devant  nous  :  c'est  pourquoi  ne  les  craignez  point. 

2;.  Quand  il  eut  cessé  de  parler,  il  se  jeta  aussitôt  sur 
eux,  et  Séron  fut  renversé  devant  lui,  avec  toute  son 
armée. 

24.  Judas  le  poursuivit  à  la  descente  de  Bethoron 
jusqu'à  la  plaine  ;  et  huit  cents  hommes  des  ennemis 
furent  tués:  mais  le  reste  s'enfuit  au  pays  des  Philistins. 

25.  Alors  la  terreur  de  Judas  et  de  ses  frères  se  répan- 
dit de  tous  côtés  parmi  les  nations  voisines. 


COMMENTAIRE 


jK  16.  Usque  ad  bethoron.  Cette  ville  était 
environ  à  quatre  lieues  au  nord  de  Jérusalem. 
Voyez  Josué,  x,  10. 

f.  17.  Fatigati  sumus  jejunio  hodie.  Judas 
s'était  préparé  au  combat  par  la  prière  et  par  le 
jeûne,  selon  sa  coutume  (1). 

Le  jeûne,  l'humiliation  et  la  prière  font  toute 
la  force  du  grand  Judas  Maccabée.  Et,  après  qu'il 
s'est  affermi  par  ces  armes  invincibles,  il  ne  craint 
pas  plus  toute  cette  multitude  d'ennemis,  selon 
un  commentateur,  qu'une  troupe  de  moucherons. 
C'est  là  véritablement  la  cuirasse  dont  ce  géant 
s'est  revêtu.  Ce  sont  là  les  armes  toutes  spirituelles 
dont  il  s'est  armé  dans  les  combats.  C'est  là  cette 
épée  qui  faisait  la  protection  de  tout  son  camp. 
C'était  là  enfin  le  rugissement  du  lion  et  du  lion- 
ceau, en  voyant  ses  ennemis  et  les  regardant  com- 
me sa  proie  assurée.  Car  vit-on  jamais  une  foi  plus 
ferme,  un  courage  plus  humble  que  celui  d'un 
homme  qui  ne  rassure  le  peu  de  gens  qui  l'accom- 
pagnent, contre  la  frayeur  que  leur  inspire  la  vue 
de  l'armée  nombreuse  d'Apollonius,  qu'en  leur 
disant  ce  peu  de  paroles  :  Le  grand  et  le  petit  nom- 
bre est  indifférent  au  Dieu  du  ciel  lorsqu'il  veut 
sauver  :  c'est  du  ciel  que  vient  notre  force,  et  non 
de  la  multitude  des  troupes  :  l'orgueil  des  ennemis 
sera  la  cause  de  leur  perte  ;  ajoutant  que  ceux 
qui  combattaient  pour  la  loi  de  Dieu,  devaient  se 
persuader  que  Dieu  briserait  lui-même  leurs  enne- 
mis en  leur  présence. 


Il  faisait  donc  consister  la  faiblesse  des  ennemis 
d'Israël  dans  leur  orgueil,  et  dans  l'injustice  de 
leur  cause  :  et  il  mettait  toute  sa  force  dans  la 
confiance  qu'il  avait  en  Dieu,  dans  les  jeûnes, 
dans  les  prières,  et  dans  la  cause  pour  laquelle  il 
combattait,  puisque  c'était  celle  du  Seigneur. 
Ainsi,  s'appuyant  sur  Dieu  même,  il  pouvait  dire 
hardiment  à  ses  compagnons  :  Ne  les  craigne^ 
point  ;  parce  que  Dieu  brisera  tous  leurs  efforts  de- 
vant vous. 

Ce  qu'il  dit  des  Syriens,  qui  attaquaient  Israël 
avec  tant  d'audace,  il  nous  apprend  à  le  dire  des 
ennemis,  visibles  ou  invisibles,  de  notre  salut,  et 
de  tous  ceux  qui  s'élèvent  contre  l'Église.  Ceux 
qui  ont  la  science  spirituelle  de  Judas  Maccabée, 
sont  convaincus,  par  l'expérience  de  tous  les  siè- 
cles, que  la  multitude  des  ennemis  de  la  vérité, 
et  l'orgueil  de  ceux  qui  s'opposent  à  notre  salut, 
ne  peut  rien  contre  la  force  qui  nous  vient  du  ciel. 
Celui  qui  ne  s'appuie  point  sur  ses  propres  for- 
ces et  qui  croit  avec  certitude  que  Dieu  peut 
briser,  quand  il  lui  plaira,  tous  les  efforts  de  ses 
adversaires,  a  sujet  de  s'assurer,  que  c'est  à  lui- 
même  que  s'adresse  cette  parole  du  chef  invinci- 
ble d'Israël  :  Ne  les  craigne^  point,  et  confiez-vous 
en  celui  par  qui  le  monde  a  été  vaincu  (2). 

f.  2'-,.  Cecidit  timor  Jud,e...  super  omnes 
gentes  in  circuitu.  Nous  lisons  dans  le  second 
livre  des  Maccabées  (3),  que  Philippe,  qui  avait 
été  établi  par  Antiochus  à  Jérusalem  pour  mal- 


(1)  Voyez  les  versets  46.  47.  —  (2)  Joan.  xvi.  j?. 


(5)  11.  Macc.  vm.  8.  -Joseph.  Antiq.  xn. 


44 


MACCABÉES. 


III. 


SES   EXPLOITS 


26.  Et  pervenit  ad  regem  nomen  ejus,  et  de  praeliis 
Judas  narrabant  omnes  gentes. 

27.  Ut  audivit  autem  rex  Antiochus  sermones  istos, 
iratus  est  animo  ;  et  misit,  et  congregavit  exercitum 
universi  regni  sui,  castra  fortia  valde  ; 

28.  Et  aperuit  asrarium  suum,  et  dédit  stipendia  exer- 
citui  in  annum,  et  mandavit  illis  ut  essent  parati  ad  omnia. 

29.  Et  vidit  quod  déficit  pecunia  de  thesauris  suis,  et 
tributa  regionis  modica  propter  dissensionem,  et  plagam 
quam  fecit  in  terra,  ut  tolleret  légitima  quas  erant  a  pri- 
mis  diebus; 

;o.  Et  timuit  ne  non  haberet  ut  semel  et  bis,  in  sump- 
tus  et  donaria  quae  dederat  ante  larga  manu,  et  abunda- 
verat  super  reges  qui  ante  eum  fuerant. 


26.  Son  nom  fut  connu  du  roi  même  ;  et  tous  les  peu- 
ples parlaient  des  combats  et  des  victoires  de  Judas. 

2~.  Lors  donc  que  le  roi  Antiochus  eut  reçu  ces  nou- 
velles, il  entra  dans  une  grande  colère  ;  et  il  envoya 
dans  tout  son  royaume  lever  des  troupes  dont  il  fit  une 
puissante  armée. 

28.  Il  ouvrit  son  trésor,  il  paya  ses  gens  pour  un  an, 
et  il  leur  commanda  d'être  prêts  à  tout. 

29.  Mais  ayant  vu  que  l'argent  de  ses  trésors  avait 
manqué,  et  qu'il  retirait  peu  de  tributs  du  pays  des 
Juifs,  à  cause  des  troubles  qu'il  y  avait  excités,  et  des 
maux  qu'il  y  avait  faits,  en  leur  ôtant  la  loi  qu'ils  avaient 
gardée  de  tout  temps. 

?o.  Il  eut  peur  de  n'avoir  pas  de  quoi  fournir  comme 
auparavant  aux  frais  de  la  guerre,  et  aux  grandes  libé- 
ralités qu'il  avait  coutume  de  faire  avec  une  largesse 
extraordinaire,  ayant  été  magnifique  plus  que  tous  les 
rois  qui  l'avaient  précédé. 


COMMENTAIRE 


traiter  les  Juifs  (1).  voyant  qu'Apollonius  et  Séron 
avaient  été  défaits  par  Judas,  écrivit  à  Ptolomée, 
qui  commandait  dans  la  Ccelé-Syrie, d'envoyer  du 
secours  en  Judée  pour  fortifier  le  parti  du  roi. 
Ptolomée  y  envoya  aussitôt  Nicanor  et  Gorgias, 
avec  vingt  mille  hommes  de  bonnes  troupes.  Ni- 
canor doutait  si  peu  du  succès,  qu'il  fit  venir  des 
marchandsde  laCœlé-Syrie, pour  acheter  les  escla- 
ves qu'il  prétendait  faire.  Avec  ce  bénéfice,  il  se 
flattait  de  pouvoir  payer  les  deux  mille  talents  de 
tribut,  qu'Antiochus  devait  aux  Romains.  Mais 
il  en  arriva  tout  autrement,  comme  on  le  verra 
dans  la  suite  (2). 

f.  20.  Tributa  regionis  modica.  Sulpice  Se 
vère  dit  qu'avant  la  persécution,  il  en  tirait  trois 
cents  talents  (3).  Mais  depuis  qu'il  eut  déclaré  la 
guerre  à  Dieu  et  à  son  peuple,  non  seulement  il 
n'en  tirait  plus  rien  ;  mais  même  il  était  obligé  de 
faire  de  grandes  dépenses  pour  y  entretenir  des 
troupes. 

y.  20.  Timuit  ne  non  haberet  ut  semel  et  bis, 
in  sumptus  et  donaria.  Antiochus  était  l'homme 
du  monde  le  plus  bizarre  et  le  plus  inégal  dans 
les  divers  projets  qu'il  formait,  et  dans  les  entre- 
prises auxquelles  il  s'engageait.  Ses  desseins 
étaient  tantôt  les  plus  grands  et  les  plus  beaux, 
tantôt  les  plus  mesquins  et  les  plus  extravagants 
qu'un  homme  pût  former.  L'Ecriture  nous  parle 
ici  en  général  de  ses  profusions  et  de  ses  dépenses 
inconsidérées,  qui  le  réduisirent  à  la  nécessité 
d'aller,  pour  ainsi  dire,  faire  le  bandit,  et  piller 
lui-même  les  provinces  et  les  temples  de  ses  pro- 
pres états  ;  mais  l'histoire  profane  nous  dépeint 
ses  folles  dépenses  d'une  manière  qui  mérite  d'être 
remarquée,  pour  donner  une  juste  idée  du  per- 
sonnage. 

Antiochus  ayant  appris  que  Paul   Emile  avait 


fait  représenter  des  jeux  magnifiques  à  Amphipo- 
lis  en  Macédoine,  il  lui  prit  envie  de  l'imiter,  et 
de  le  surpasser  même  en  somptuosité  (4).  Il  fit 
publier  ces  jeux,  et  invita  toute  la  Grèce  ;  le  fau- 
bourg de  Daphné  près  d'Antioche,  fut  choisi  pour 
scène,  et  il  s'y  trouva  une  très  grande  quantité  de 
spectateurs  de  toutes  les  parties  du  monde.  Le 
spectacle  fut  des  plus  pompeux.  On  vit  d'abord 
marcher  mille  jeunes  guerriers,  armés  à  la  romai- 
ne ;  après  cela,  mille  autres  de  Mysie,  puis  trois 
mille  Ciliciens,  armés  à  la  légère,  avec  des  cou- 
ronnes d'or  sur  la  tête  ;  puis  un  pareil  nombre  de 
Thraces,et  cinq  mille  Galates,  et  d'autres  encore 
avec  des  boucliers  d'argent.  Deux  cent  quarante 
paires  de  gladiateurs  suivaient,  et  mille  cavaliers 
montés  sur  les  plus  beaux  chevaux  des  campa- 
gnes de  Nicée,et  trois  mille  montés  sur  des  chevaux 
ordinaires  ;  la  plupart  avec  des  couronnes  d'or 
sur  la  tête,  et  les  harnais  recouverts  de  même 
métal  :  les  autres  avec  des  couronnes  d'argent  et 
les  ornements  des  chevaux  de  même  ;  après  ceux- 
là,  on  voyait  encore  trois  escadrons  de  mille  che- 
vaux richement  ornés  ;  la  marche  de  la  cavalerie 
était  fermée  par  quinze  cents  chevaux  capara- 
çonnés, avec  leurs  cavaliers  armés  de  toutes 
pièces. 

Les  chars  paraissaient  ensuite  :  il  y  en  avait 
cent  à  six  chevaux,  quarante  à  quatre  chevaux, 
puis  un  char  tiré  par  quatre  éléphants,  et  un 
autre  de  deux  éléphants  ;  ensuite  on  voyait  trente- 
six  de  ces  animaux  qui  conduisaient  séparément 
huit  cents  jeunes  hommes  avec  des  couronnes 
d'or,  environ  mille  bœufs  gras,  trois  cents  tables 
d'argent  pour  les  sacrifices,  huit  cents  défenses 
d'éléphants,  puis  les  figures  de  tous  les  dieux,  et 
de  tout  ce  qu'on  connaissait  de  divinités,  suivaient 
ce   long  cortège.  Après  cela  étaient  mille  jeunes 


(1)  u.  Macc.  v.  22.  —  (2)  11.  Macc.  vin. 
(3)  Sulpit  Sever.  hist.  sacr.  t.  11. 


(4)  Vide  Diodor.  SicuL  inexcerpt.  Vales.p.  J22.  et  Polyb. 
apud  Allien.  t.  v.  c.  4.  et  l.  x.  c.  12. 


I.  —   MACCABÉES.  —   III.-   EXPÉDITIONS   DANTIOCHUS 


45 


jl.  Et  conslernatus  est  animo  valde,  et  cogitavit  ire  in 
Persidem,  et  accipere  tributa  regionum,  et  congregare 
argentum  multum. 

;2.  Et  reliquit  Lysiam,  hominem  nobilem  de  génère 
regali,  super  negotia  regia,  a  flumine  Euphrate  usque 
ad  flumen  .€gypti  ; 

jj.  Et  ut  nutriret  Antiochum.  filium  suum,  donecrediret. 

J4.  Et  tradidit  ei  médium  exercitum,  et  elephantos,  et 
mandavit  ei  de  omnibus  quae  volebat,  et  de  inhabitan- 
tibus  Judœam  et  Jérusalem; 

JÇ.  Et  ut  mitteret  ad  eos  exercitum  ad  conterendam  et 
extirpandam  virtutem  Israël  ei  reliquias  Jérusalem,  et 
auferendam  memoriam  eorum  de  loco; 


il.  Dans  la  grande  consternation  où  il  se  trouvait, 
il  résolut  d'aller  en  Perse,  pour  y  lever  les  tributs  des 
peuples,  et  y  amasser  beaucoup  d'argent. 

ji.  Il  laissa  donc  Lysias,  prince  de  la  maison  royale, 
pour  avoir  soin  des  affaires  du  royaume,  et  commander 
depuis  le  fleuve  de  l'Euphrate  jusqu'au  fleuve  de 
l'Egypte, 

jj.  Et  pour  avoir  soin  de  l'éducation  de  son  fils  Antio- 
chus  jusqu'à  ce  qu'il  fût  de  retour. 

54-  "  lui  laissa  la  moitié  de  l'armée  et  des  éléphants  ; 
et  il  lui  donna  ses  ordres  pour  tout  ce  qu'il  voulait  faire, 
et  pour  ce  qui  regardait  aussi  les  peuples  de  la  Judée 
et  les  habitants  de  Jérusalem, 

ÎS-  Lui  commandant  d'y  envoyer  une  armée,  pour  per- 
dre et  exterminer  entièrement  toutes  les  troupes  d'Israël 
et  les  restes  de  Jérusalem,  et  pour  effacer  de  ce  lieu 
tout  ce  qui  pourrait  en  renouveler  la  mémoire  ; 


COMMENTAIRE 


hommes,  qui  portaient  chacun  un  vase  d'argent 
qui  pesait  au  moins  mille  drachmes  ;  puis  six  cents 
autres  qui  portaient  des  vases  d'or  ;  et  après  eux, 
des  femmes  au  nombre  de  deux  cents,  qui  répan- 
daient sur  les  spectateurs  du  parfum  qu'elles  por- 
taient dans  des  vases  d'or  ;  ces  femmes  étaient 
suivies  de  quatre-vingts  autres  femmes,  que  l'on 
portait  dans  des  chaises,  dont  les  pieds  étaient 
d'or  ;  puis  cinq  cents  autres  dans  des  chaises  à 
pieds  d'argent.  Les  jeux  et  les  spectacles  durèrent 
un  mois  entier,  et  l'on  n'y  épargna  ni  les  parfums, 
ni  les  huiles  de  senteur  les  plus  précieuses.  An- 
tiochus  donna  à  manger,  pendant  ce  temps,  quel- 
quefois à  mille,  quelquefois  à  quinze  cents  tables, 
toujours  avec  une  somptuosité  et  une  magnificence 
royales. 

Ce  qui  se  faisait  le  plus  remarquer  dans  cette 
superbe  cérémonie,  et  ce  qui  en  rendait  le  spec- 
tacle plus  divertissant,  était  la  fonction  que  le  roi 
y  avait  choisie  ;  il  courait  à  cheval,  à  travers  les 
rangs,  faisant  hâter,  avancer,  ou  arrêter  chacun, 
selon  que  l'ordre  de  la  marche  lui  semblait  le 
demander, et  celaavec  si  peu  de  décence  et  de  ma- 
jesté, que  si  on  lui  eût  ôté  le  diadème,  on  l'aurait 
pris  pour  le  dernier  de  ses  officiers.  Dans  les  festins 
qui  accompagnèrent  cette  fête,  Antiochus  était  à  la 
porte  des  salles,  faisant  le  métier  d'introducteur, 
laissant  entrer  et  plaçant  sur  les  lits,  ou  rebutant 
ceux  qu'il  jugeait  à  propos.  Pendant  le  repas,  il 
conduisait  les  officiers  qui  apportaient  les  services; 
tantôt  il  s'asseyait  à  table,  tantôt  il  se  mettait  à 
terre  ;  puis  tout  à  coup,  laissant  ce  qu'il  mangeait, 
ou  posant  sa  coupe  sur  la  table,  il  se  levait,  et 
courait  dans  les  rangs,  prenant  les  coupes  qu'on 
lui  présentait,  recevant  les  santés  qu'on  lui  por- 
tait, et  buvant  ainsi  à  la  hâte  et  tout  droit  ;  il  se 
mêlait  aux  baladins  qui  divertissaient  la  compa- 
gnie, dansait  avec  eux,  et  faisait  mille  singeries, 
qui  causaient  plus  d'étonnement  que  de  gaîté. 


Il  donna  des  marques  de  sa  profusion  et  de  sa 
magnificence  à  plusieurs  villes  de  la  Grèce.  Il 
consacra  dans  les  unes  des  statues,  dans  d'autres 
des  boucliers  et  des  vases  d'or;  il  fournit  à  la 
plus  grande  partie  des  frais  pour  enfermer  de  mu- 
railles la  ville  de  Mégalopolis  en  Arcadie,  il  fit  à 
Tégée  un  théâtre  de  marbre  très  magnifique,  il 
combla  de  biens  la  ville  de  Rhodes,  il  augmenta 
de  la  quatrième  partie  la  ville  d'Antioche  de  Sy- 
rie, et  embellit  la  ville  d'Émath,  à  qui  il  donna  le 
nom  d'Epiphanie  (i).  Il  bâtit  à  Antioche  un  tem- 
ple somptueuxàJupiter  Oiympien  ;  tout  l'intérieur, 
tant  les  plafonds  que  les  murs,  était  couvert  de 
lames  d'or  (2).  Tant  de  frais  et  de  dépenses  mal 
réglées,  le  réduisirent  en  l'état  que  l'Écriture 
nous  décrit  ici.  Les  jeux  dont  on  a  parlé  turent 
représentés  à  Antioche,  l'année  même  qu'Apol- 
lonius fut  défait  par  Judas  Maccabée  (3).  L'ara- 
be (_|)  nous  apprend  une  circonstance,  qui  serait 
intéressante  au  point  de  vue  historique  si  elle  était 
mieux  appuyée,  c'est  que  le  roi  de  Perse  ayant 
appris  les  beaux  faits  d'armes  de  Judas,  voulut 
suivre  son  exemple,  et  se  souleva  contre  Antio- 
chus Épiphane.  Ce  fut  pour  le  réduire  à  son  de- 
voir, qu'Antiochus  passa  l'Euphrate,  comme  nous 
allons  le  voir. 

f.  32.  Reliquit  Lysiam,  hominem  nobilem 
de  génère  regali.  Lysias  était  un  des  premiers 
personnages  de  la  cour  d'Antiochus.Ce  prince  lui 
confia  l'éducation  de  son  fils  Anthiochus  Eupator,et 
lui  donna  le  gouvernement  de  la  Syrie,  de  la 
Phénicie,  de  la  Samarie,  de  la  Palestine  et  de  la 
Judée;  en  un  mot,  ce  toutes  les  provinces  qui 
sont  entre  l'Euphrate  et  le  Nil. 

V.  35.  AD  CONTERENDAM  ET  EXTIRPANDAM  VIR- 
TUTEM Israël  et  reliquias  Jérusalem,  et  aufe- 
rendam memoriam  eorum  de  loco.  Tel  est  le  lan- 
gage plein  de  vanité  et  d'orgueil,  que  le  Saint- 
Esprit  a  reproché  si'souvent  dans  l'Écriture  à  ce 


(1)  Voyez  Vaillant,  Hist.  Rcg.  Syr.  ad  finem  Antiochiu. 

(2)  Liv.  lib.  xli. 


(j)  Usser  ad  an.  }8j8.  -Vaillant,  hist.  Rcg.  Syr. 
(4)  Arab.  in  Polygl.  Paris,  n.   Mac.  c.  7. 


46 


I.  —   MACCABÉES.  —  III.-  INVASION   DE   LA  JUDÉE 


36.  Et  ut  constitueret  habitatores  filios  alienigenas  in 
omnibus  finibus  eorum,  et  sorte  distribuent  terram 
eorum. 

37.  Et  rex  assumpsit  partem  exercitus  residui,  et 
exivit  ab  Antiochia,  civitate  regni  sui,  anno  ceniesimo  et 
quadragesimo  septimo,et  transfretavit  Euphraten  flumen, 
et  perambulabat  superiores  regiones. 

38.  Et  elegit  Lysias  Ptolemasum,  filium  Dorymini,  et 
IVicanorem,  et  Gorgiam,   viros  potentes  ex  amicis  régis; 

39.  Et  misit  cum  eis  quadraginta  milha  virorum,  et 
septem  millia  equitum,  ut  venirent  in  terram  Juda,  et 
disperderent  eam,  secundum  verbum  régis. 

40.  Et  processerunt  cum  universa  virtute  sua,  et  vene- 
runt,  et  applicuerunt  Emmaum,  in  terra  campestri. 

41.  Et  audierunt  mercatores  regionum  nomen  eorum, 
et  acceperunt  argentum  et  aurum  multum  valde,  et  pue- 
ros,  et  venerunt  in  castra  ut  acciperent  filios  Israël  in 
servos;  et  additi  sunt  ad  eos  exercitus  Syriae  et  terras 
alienigenarum. 

42.  Et  vidit  Judas  et  fratres  ejus,  quia  multiplicata 
sunt  mala,  et  exercitus  applicabant  ad  fines  eorum;  et 
cognoverunt  verba  régis,  quas  mandavit  populo  facere 
in  interitum  et  consummationem  ; 

4?.  Et  dixerunt  unusquisque  ad  proximum  suum  :  Eri- 
gamus  dejectionem  populi  nostri,  et  pugnemus  pro  po- 
pulo nostro  et  sanctis  nostris. 

44.  Et  congregatus  est  conventus  ut  essent  parati  in 
prœlium,  et  ut  orarent,  et  peterent  misericordiam  et 
miseraticnes  ; 


36.  Et  d'établir  des  étrangers  dans  tout  leur  pays  pour 
l'habiter  ;  et  de  distribuer  au  sort  toutes  leurs  terres. 

37.  Le  roi  prit  la  moitié  de  l'armée  qui  lui  restait,  par- 
tit d'Antioche,  capitale  de  son  royaume,  en  la  cent  qua- 
rante-septième année,  passa  l'Euphrate,  et  traversa  le 
haut  pays. 

38.  Et  Lysias  choisit  Ptolémée,  fils  de  Dorymini,  Nica- 
nor  et  Gorgias,  qui  étaient  des  hommes  puissants  entre 
les  amis  du  roi. 

îo.  Et  envoya  avec  eux  quarante  mille  hommes  de 
pied,  et  sept  mille  chevaux;  il  leur  donna  ordre  d'aller 
dans  le  pays  de  Juda,  et  de  ruiner  tout,  selon  que  le 
roi  l'avait  commandé. 

40.  Ils  s'avancèrent  donc  avec  toutes  leurs  troupes,  et 
vinrent  camper  près  d'Emmaiïs,  le  long  de  la  plaine. 

41.  Les  marchands  des  pays  voisins  ayant  su  leur  arri- 
vée, prirent  beaucoup  d'or  et  d'argent,  et  des  serviteurs, 
et  vinrent  au  camp,  afin  d'acheter  les  enfants  d'Israël 
que  l'on  devait  faire  esclaves,  et  l'armée  de  Syrie  se 
joignit  à  eux  avec  celle  du  pays  des  étrangers. 

42.  Judas  et  ses  frères  reconnurent  alors  que  leurs 
maux  s'étaient  multipliés,  et  que  l'armée  ennemie  s'appro- 
chait de  leur  pays  :  ils  surent  l'ordre  que  le  roi  avait 
donné  de  perdre  leur  peuple,  et  de  le  détruire  entière- 
ment. 

4?.  Et  ils  se  dirent  les  uns  aux  autres  :  Relevons  les 
ruines  de  notre  nation,  et  combattons  pour  notre  peuple 
ou  pour  notre  religion. 

44.  Ils  s'assemblèrent  donc  pour  se  préparer  à  com- 
battre, et  pour  prier  le  Seigneur,  et  implorer  sa  bonté  et 
ses  miséricordes.  * 


COMMENTAIRE 


prince  impie.  Il  s'imaginait  qu'il  n'avait  qu'à 
donner  ses  ordres  pour  être  obéi;  et  que  tout 
serait  soumis  à  ses  volontés.  Mais  qui  peut  l'en- 
tendre parler  de  la  sorte,  lorsque  c'était  princi- 
palement contre  le  Dieu  des  dieux,  selon  qu'il  est 
dit  ailleurs  (1),  qu'(7  s'élevait  insolemment,  et  qu'il 
ne  songeait  à  exterminer  l'armée  d'Israël,  et  les 
restes  de  Jérusalem,  que  parce  que  cette  ville  et 
ce  peuple  appartenaient  au  Très-Haut  ;  Qui  peut 
voir  sans  étonnement,  qu'un  ver  de  terre,  comme 
Matthathias  appelait  Anliochus  au  milieude  toute 
sa  gloire  (2),  entreprenne  de  détruire  l'héritage  du 
Seigneur;  comme  si  tous  ses  efforts  eussent  pu 
faire  autre  chose  dans  la  Judée  et  dans  la  ville  de 
Jérusalem,  qu'accomplir  les  adorables  desseins 
de  Dieu  sur  son  peuple,  en  punissant  les  uns 
selon  les  rigueurs  de  sa  justice,  et  en  éprouvant 
la  vertu  des  autres  selon  son  infinie  miséricorde? 

y.  37.  Perambulabat  superiores  regiones.  Il 
entra  dans  l'Arménie,  et  défit  Artaxias,  roi  du 
pays;  il  le  prit,  et  mit  son  armée  en  fuite  (j)  en 
165  avant  Jésus-Christ. 

f.  38.  Ptolem.<eum  filium  Dorymini.  Ptolémée 
fils  de  Dorymini  avait  d'abord  eu  le  gouverne- 


ment de  l'île  de  Chypre  au  nom  de  Ptolémée 
Philométor,  roi  d'Egypte.  Pendant  la  minorité 
de  ce  prince,  il  n'envoya  aucun  subside  des  reve- 
nus de  son  gouvernementaux  régents  du  royaume  ; 
mais  aussitôt  que  le  roi  eut  commencé  à  gouver- 
ner par  lui-même,  il  lui  rendit  compte  de  tout  ce 
qu'il  avait  tiré  de  l'île  qu'il  gouvernait  (4).  Ayant 
dans  la  suite,  reçu  quelque  mécontentement  de 
la  part  de  la  cour  d'Egypte,  il  livra  l'île  au  roi 
Antiochus  Épiphane  (5). 

y.  40.  Applicuerunt  Emmaum,  in  terra  cam- 
pestri. Emmaûs  est  environ  à  sept  lieues  de  Jé- 
rusalem vers  l'occident. 

y.  41.  Audierunt  mercatores  regionum.  Jo- 
sèphe  dit  (6)  que  les  marchands,  dans  l'espérance 
d'acheter  un  grand  nombre  de  captifs  juifs,  qu'on 
devait  leur  donner  à  vil  prix,  avaient  déjà  fait  pro- 
vision de  liens  pour  les  mener  enchaînés  dans  leur 
pays,  et  d'or  et  d'argent  pour  les  payer;  tout 
cela  servit  contre  eux-mêmes  :  ils  furent  surpris 
par  les  troupes  de  Judas,  et  liés  de  leurs  propres 
liens.  Nicanor  avait  promis  à  ces  marchands  de 
leur  donner  quatre-vingt-dix  Juifs  pour  un  ta- 
lent (7).   S'il  s'agit  du   talent  attique,  ce    serait 


(1)  Dan.  xi.  6;. 

(2)1.  Macc.  11.  26. 

(?)  Appian.  Syriae.  Porphvr.  apud  Hicron'  in  Dan.  xn. 

(41  Polyb.  I.  xxvn.  in  excerptis  Vaks. 


(S)  Vide  11.  Macc.  vin.  8;  x.  12. 

(ù)  Antiq.  I.  xn.  c.  11.  EUoaç  u.fv  /.oatÇovrd;  à:;  ôrpoust 
toÙ;  Xrjï.Or)tô;j.£vou;,  àpyupov  3î  y.ai  yjpùvm  Tijxrjv  â'jTÔJv  y.aTa 
Oriiôacvot.  Ita  et  Srr. 

(7)  11.  Macc.  via.  10.  11.  et  seq. 


I.—   MACCABÉES.  —  III.-  DÉSOLATION    DE  JÉRUSALEM 


45.  Et  Jérusalem  non  habitabatur,  sed  erat  sicut  deser- 
tum  ;  non  erat  qui  ingredereturet  egrederetur  de  natis  ejus, 
et  sanctum  conculcabatur,  et  filii  alienigenarum  erant  in 
arce  :  ibi  erat  habitatio  gentium;  et  ablata  est  voluptas  a 
Jacob,  et  defecit  ibi  tibia  et  cithara. 


46.  Et  congregati  sunt,  et  venerunt  in  Maspha,  contra 
Jérusalem,  quia  locus  orationis  erat  in  Maspha  ante  in 
Israël. 

47.  Et  iejunaverunt  illa  die,  et  induerunt  se  ciliciis,  et 
cinerem  imposuerunt  capiti  suo,  et  disciderunt  vestimenta 
sua  ; 

48.  Et  expanderunt  libros  legis,  de  quibus  scrutaban- 
tur  gentes  similitudinem  simulacrorum  suorum; 


4i.  Jérusalem  n'était  point  alors  habitée,  mais  parais- 
sait comme  un  désert  ;  on  ne  voyait  plus  aucun  de  ses 
enfants  y  entrer  ou  en  sortir  :  son  sanctuaire  était  foulé 
aux  pieds  :  les  étrangers  demeuraient  dans  la  forteresse, 
qui  était  devenue  la  retraite  des  nations  :  toute  !a  joie 
de  Jacob  en  était  bannie  ;  et  on  n'y  entendait  plus  le 
son  de  la  flûte,  ni  de  la  harpe. 

46.  Ils  s'assemblèrent  donc,  et  vinrent  à  Maspha,  vis- 
à-vis  de  Jérusalem,  parce  qu'il  y  avait  eu  autrefois  dans 
Israël,  un  lieu  de  prière  à  Masp.ia. 

47.  Ils  jeûnèrent  ce  jour  là  ;  ils  se  revêtirent  de  cilices  ; 
ils  se  mirent  de  la  cendre  sur  la  tête  ;  ils  déchirèrent 
leurs  vêtements. 

48.  Ils  ouvrirent  les  livres  de  la  loi,  où  les  gentils 
cherchaient  à  trouver  quelque  chose  qui  eût  du  rapport 
avec  leurs  idoles. 


COMMENTAIRE 


Ç.5601Ï.90;  s'il  s'agit  de  l'évaluation  hébraïque, ce 
serait  8.500  fr. ;  le  talent  d'Égine  équivaudrait  à 
9,300  fr. 

y.  46.   LOCUS  ORATIONIS  ERAT  IN    MASPHA    ANTE 

in  Israël.  C'est  à  Maspha  que  les  tribus  s'assem- 
blèrent pour  résoudre  la  guerre  contre  les  Ben- 
jamites,  à  l'occasion  de  l'outrage  fait  à  la  femme 
du  Lévite  (1).  On  s'y  assembla  aussi  sous  Sa- 
muel (2),  et  pour  l'élection  de  Saûl  (3).  Les  Juits, 
sous  Judas  Maccabée,ne  pouvant  aller  au  temple, 
qui  était  profané  et  souillé  par  les  nations,  se  ren- 
daient à  Maspha  pour  y  prier  le  Seigneur,  et 
pour  y  faire,  comme  ils  pouvaient,  les  exercices 
de  leur  religion. 

Comme  ils  ne  pouvaient  plus  alors  se  servir  du 
temple,  a  cause  des  profanations  et  des  violences 
des  païens, ils  se  rendirent  à  Maspha.  Mais  quelle 
fut  la  manière  extraordinaire  dont  J  udas  Maccabée, 
ce  géant  et  ce  lion,  se  prépara  avec  tous  ses  com- 
pagnons au  combat?  Les  personnes  accoutumées 
à  un  courage  tout  humain  et  à  une  vaine  bravoure, 
ne  seront  guère  sans  doute  en  état  de  compren- 
dre ce  langage.  Le  jeûne,  le  cilice  et  la  cendre  ne 
paraissent  point  aux  hommes  du  siècle  des  moyens 
propres  pour  vaincre  leurs  ennemis.  Ils  laissent 
ces  sortes  d'armes  aux  religieux  et  aux  dévots;  et 
ils  se  regardent  comme  plus  en  état  de  remporter 
la  victoire,  lorsqu'ils  sont  et  bien  nourris  et  bien 
armés. 

C'est  qu'ils  ne  combattent  pas  sous  la  conduite 
du  Dieu  des  batailles  et  du  Seigneur  des  armées. 
Car  s'ils  étaient  convaincus  de  cette  importante 
vérité,  que  les  princes  les  plus  braves,  comme 
David,  ont  fort  bien  comprise,  que  la  victoire 
dépend  de  la  volonté  de  Dieu,  et  non  des  forces 


de  l'homme  ;  et  que,  pour  confondre  la  vaine  con- 
fiance qu'ont  les  conquérants  dans  la  force  de 
leurs  troupes,  il  emploie,  quand  il  lui  plaît,  les 
plus  faibles  instruments,  ils  ne  croiraient  pas  sans 
doute  s'abaisser  ni  se  tromper,  en  suivant  l'exem- 
ple de  ces  grands  hommes,  qui  étaient  vraiment 
des  héros  de  Dieu. 

y.  48.   Expanderunt  libros  legis,  de  quibus 

SCRUTABANTUR  GENTES  SIMILITUDINEM  SIMULA- 
CRORUM suorum  (4).  Ce  texte  est  assez  obscur. 
Des  commentateurs  (5)  croient  que  les  gentils, 
ayant  en  main  les  livres  de  Moïse,  y  cherchaient 
de  quoi  appuyer  leur  superstition,  en  prenant, 
dans  un  sens  contraire,  quelque  point  de  la  loi, 
et  quelque  histoire  de  l'Écriture;  voulant,  par 
exemple,  prouver  l'adoration  des  statues  par 
l'exemple  des  chérubins,  ou  l'histoire  de  Bacchus 
par  celle  de  Noé.  D'autres  lisent  ainsi  le  texte 
grec  (6)  :  Ils  étendirent  les  livres  de  la  loi,  sur  les- 
quels les  gentils  cherchaient  à  peindre  des  figures 
de  leurs  dieux.  Les  gentils  profanaient  les  livres 
saints  qui  tombaient  entre  leurs  mains,  en  y  dé- 
peignant les  figures  des  faux  dieux,  en  y  écrivant 
leurs  noms  (7).  Le  syriaque  :  IU  étendirent  le 
livre  de  la  loi  devant  le  sanctuaire,  à  cause  des 
gentils,  qui  voulaient  les  obliger  d'imiter  leur  ido- 
lâtrie. La  construction  du  grec  est  visiblement 
fautive.  Ils  étendirent  le  livre  de  la  loi,  sur  les- 
quels, etc.  11  faudrait  dire  :  Sur  lequel;  ou  lire, 
les  livres  sur  lesquels,  etc.  Dom  Calmet  propose 
de  lire  :  7.sp>  ôv  xatpov.  Ils  étendirent  le  livre  de  la 
loi,  dans  le  même  temps  que  les  gentils  consultaient 
les  simulacres  de  leurs  idoles.  Ce  sens  est  assez 
clair,  et  ne  demande  que  peu  de  changement 
dans  le  texte.  Mais  en  général  il  faut  s'abstenir  de 


(1)  Judic.  xx.  1;  xxi.  $.  8. 

(2)  1.  Reg.  vu.  5. 
(j)  Ibid.  x.  17. 

(4)  E'Çe^ETajav   -6  ô:6X:ov   toS  v&',aoj,  nep'i  wv  sçipsûycov 
Ta  iOvrj   Ta  ô|j.otu:;j.ata  a&v  siSoiXtov  otUTâiv. 


(ç)  Lrran.  Serar.  Salian.  Fab.  Tirin.  alii. 

(6)  Edit.  Complut.  Ilspt  wv  e^epeûvcov  :à  è'Ovti  toO  sJttYpâ- 
astv  iiz'  âtiToiv  Ta  ô[j.oiai;j.aTa  tojv  éipoiXwv  àuTùiv. 

(7)  lia  Grct.  Sar.  Mar.  cl  Badvct. 


48 


I. 


MACCABEES.  -   III. 


RELIGION    DE  JUDAS  MACCABÉE 


49.  Et  attulerunt  ornamenta  sacerdotalia  et  primitias, 
et  décimas;  et  suscitaverunt  Nazarasos  qui  impleverant 
dies; 

<;o.  Et  clamaverunt  voce  magna  in  cœlum  Jicentes  : 
Quid  faciemus  istis,  et  quo  eos  ducemus  ? 

51.  Et  sancta  tua  conculcata  sunt  et  contaminata  sunt, 
et  sacerdotes  tui  facti  sunt  in  luctum  et  in    humilitatem. 

52.  Et  ecce  nationes  convenerunt  adversum  nos  ut  nos 
disperdant  ;  tu  scis  quas  cogitant  in  nos. 

îî.  Quomcdo  poterimus  subsistere  ante  faciem  eorum, 
nisi  tu,  Deus,  adjuves  nos? 

'4.  Et  tu±>is  exclamaverunt  voce  magna. 

55.  Et  post  hase  consiituit  Judas  duces  populi,  tribunos, 
et  centuriones,  et  pentacontarchos,  et  decuriones. 

56.  Et  dixit  his  qui  œdificabant  domos,  et  sponsabant 
uxores,  et  plantabant  vineas,  et  formidolosis,  ut  redirent 
unusquisque  in  domum  suam,  secundum  legem. 


49.  Ils  apportèrent  les  ornements  sacerdotaux,  les  pré- 
mices et  les  dîmes,  et  ils  rirent  venir  les  Naziréens  qui 
avaient  accompli  leurs  jours. 

ço.  Et  élevant  leurs  voix,  ils  poussèrent  leurs  cris  jus- 
qu'au ciel,  en  disant  :  Que  ferons-nous  à  ceux-ci,  et  où 
'.es  mènerons-nous  ? 

Çl.  Votre  sanctuaire  a  été  souillé  et  foulé  aux  pieds  ; 
vos    prêtres   sont  dans  les  larmes  et  dans  l'humiliation. 

<,2.  Vous  voyez  que  ces  nations  se  sont  assemblées 
pour  nous  perdre  :  vous  savez  les  desseins  qu'elles  ont 
formés  contre  nous. 

<;;.  Comment  pourrons-nous  subsister  devant  eux,  si 
vous-même,  ô  Dieu  !  ne  nous  assistez  ? 

54.  Et  ils  firent  retentir  les  trompettes  avec  un  grand 
bruit. 

55.  Après  cela,  Judas  établit  des  officiers  pour  com- 
mander l'armée,  des  tribuns,  des  capitaines  de  cent 
hommes,  et  des  officiers  de  cinquante  et  de  dix  ; 

56.  Et  il  dit  à  ceux  qui  venaient  de  bâtir  des  maisons, 
d'épouser  des  femmes,  et  de  planter  des  vignes,  et  à 
ceux  qui  étaient  timides,  de  retourner  chacun  en  leur 
maison,  selon  la  loi. 


COMMENTAIRE 


ces  changements  qui  finiraient  par  bouleverser  les 
textes.  Le  texte  de  Complute  donne  un  autre  sens 
qui  n'est  pasà  dédaigner.  La  Vulgate  fournit  aussi 
une  version  acceptable.  D'après  ces  deux  ver- 
sions, les  Maccabées  auraient  muté  le  saint  roi 
Ézéchias(i),  en  exposant  devant  le  Seigneur  la 
preuve  matérielle  de  l'insolence  de  ses  ennemis. 

jh  49.  Attulerunt  ornamenta  sacerdotalia. 
//s  apportèrent  les  ornements  sacerdotaux,  qu'ils 
avaient  sauvés  du  temple,  lorsqu'Antiochus  et 
ensuite  Apollonius  le  profanèrent.  Il  semble 
même  qu'ils  y  avaient  dressé  un  tabernacle,  puis- 
qu'ils étendirent  les  livres  sacrés  devant  le  sanc- 
tuaire, suivant  le  syriaque,  ou  devant  le  Seigneur. 

Suscitaverunt  Nazar^os  qui  impleverant 
dies.  On  peut  voir,  Nombres  vi.  1,  et  suivants,  les 
règlements  des  Naziréens.  Après  le  temps  de 
leurs  vœux,  ils  devaient  se  présenter  au  temple, 
et  offrir  des  hosties  ;  mais,  dans  l'état  où  étaient 
réduits  les  Juifs,  tout  ce  qu'ils  pouvaient  faire, 
était  de  se  présenter  aux  prêtres,  et  de  prier  le 
Seigneur  de  les  mettre  en  état  d'exécuter  plus 
parfaitement  les  cérémonies,  en  leur  rendant 
l'usage  de  son  temple  ;  c'est  la  prière  qu'il  lui 
font  ici  en  commun.  Quid  faciemus  islis,  et  quo 
eos  ducemus  (  Que  ferons-nous  à  ceux-ci,  et  où 
les  mènerons-nous  ?  Ou  encore  que  ferons-nous 
de  ces  objets, ornements,  prémices  etdîmes,  puis- 
que le  temple  est  profané. 

Ce  n'était  pas  pour  offrir  des  sacrifices,  que 
l'on  faisait  apporter  les  ornements  sacerdotaux  ; 
puisque,  le  temple  subsistant,  il  leur  était  défendu 
de  le  faire  ailleurs.  C  était  donc  pour  les  présen- 
ter à  Dieu  avec  les  prémices  et  les  dimes,   comme 


les  marques  de  sa  religion  foulée  aux  pieds  par 
les  infidèles  ;  et  pour  le  toucher  de  compassion 
en  même  temps  envers  son  peuple,  qu'il  voyait 
privé  alors  de  la  consolation  la  plus  sensible  qu'il 
pouvait  avoir,  n'ayant  plus  l'usage  ni  de  son  tem- 
ple, ni  des  sacrifices,  ni  de  tous  les  autres  exer- 
cices d'une  religion  si  auguste.  Ce  fut  encore  la 
même  raison  qui  les  porta  à  faire  venir  les  Nazi- 
réens ;  ils  avaient  dessein,  en  les  présentant  à 
Dieu,  de  fléchir  sa  miséricorde  par  la  vue  de  ces 
personnes,  parce  que  leurs  jours  étaient  accom- 
plis, c'est-à-dire, le  temps  de  leurs  vœux  ;  et  qu'on 
ne  savait  où  Us  mener,  pour  le  sacrifice  qu'elles 
devaient  lui  offrir,  n'ayant  plus  la  liberté  de  le 
faire  dans  le  temple,  dont  le  sanctuaire,  comme  ils 
le  disent,  était  souillé  et  foulé  aux  pieds. 

f.  54.  Tubis  exclamaverunt  voce  magna.  Les 
prêtres  étaient  chargés  de  sonner  de  la  trompette  à  la 
guerre,  et  Dieu  avait  comme  attaché  la  promesse 
de  son  secours  et  de  sa  protection  au  son  de  cet 
instrument  (2).  Si  exierilis  ab  bellum...  clangelis 
ululanlibus  tubis,  et  eril  recordalio  vestri  coram 
Domino...  ut  eruaminide  manibus  inimicorum  ves- 
trorum. 

f.  56.  Dixit  his  qui  ^dificabant  domos.  Il 
exécuta  ce  qui  est  porté  par  la  loi  du  Deutéro- 
nome,  chapitre  xx,  verset  3  et  suivant. 

Il  parait  bien  que  Judas  ne  faisait  pas  consister 
sa  force  dans  le  nombre  de  ses  troupes,  mais  dans 
le  secours  de  Dieu  ;  puisque,  songeant  seulement 
à  accomplir  l'ordonnance  de  la  loi,  il  ne  craint 
point  de  diminuer  encore  son  armée,  quoique  si 
petite,  et  de  la  réduire  à  ceux-là  seuls  que  le  Sei- 
gneur avait  marqués  comme  propres  au    combat. 


(ij  iv.  Reg.  xix.  14. 


(2)  Num.  x.  9. 


I.  —  MACCABÉES.— III.-  RÉSIGNATION   DE  JUDAS 


49 


57.  Et  moverunt  castra,  et  collocaverunt  ad  austrum 
Emmaum. 

58.  Et  ait  Judas  :  Accingimini,  et  estote  filii  potentes  ; 
et  estote  parati  in  mane,  ut  pugnetis  adversus  nationes 
has  quœ  convenerunt  adversus  nos,  disperdere  nos  et 
srncta  nostra  ; 

59.  Quoniam  melius  est  nos  mori  in  bello,  quam  videre 
raala  gentis  nostras  et  sanctorum. 

60.  Sicut  autem  fuerit  voluntas  in  coelo,  sic  fiât! 


57.  Alors  l'armée  marcha,  et  vint  camper  près  d'Em- 
mai'is,  du  côté  du  midi  : 

<,8.  Et  Judas  dit  :  Prenez  vos  armes,  et  remplissez- 
vous  de  courage  ;  tenez-vous  prêts  pour  demain  matin, 
afin  de  combattre  contre  ces  nations  assemblées  contre 
nous  pour  nous  perdre,  et  pour  renverser  notre  sainte 
religion  ; 

59.  Car  il  vaut  mieux  pour  nous  mourir  dans  le  com- 
bat, que  de  voir  les  maux  de  notre  peuple,  et  la  des- 
truction de  toutes  les  choses  saintes  : 

Oo.  Mais  que  ce  qui  est  ordonné  par  la  volonté  de 
Dieu  dans  le  ciel, s'accomplisse  ! 


COMMENTAIRE 


Clément  d'Alexandrie  dit  que  le  précepte  par 
lequel  Dieu  excluait  des  combats  ces  trois  sortes 
de  personnes,  était  digne  de  Celui  qui  connaissait 
parfaitement  les  qualités  nécessaires  à  la  guerre, 
parce  que  le  cœur  de  ceux  qui  sont  possédés  par 
quelque  désir,  se  détourne  nécessairement  vers 
ces  objets  qu'il  désire,  et  se  porte  par  conséquent 
avec  moins  d'ardeur  dans  les  combats  :  au  lieu  que 
ceux  qui  sont  dégagés  de  ces  mêmes  désirs, 
s'abandonnent  à  tous  les  périls,  sans  être  arrêtés 
par  aucun  prétexte  (1).  Saint  Paul  dit  également, 
selon  l'expression  du  texte  grec  (2),  que  nul  de 
ceux  qui  sont  engagés  dans  la  guerre,  ne  s'em- 
barrasse dans  les  soins  de  la  vie  présente,  afin  de 
plaire  à  celui  qui  l'a  enrôlé  :  ce  qui  revient  au 
sens  de  la  Vulgate,  que  celui  qui  est  enrôlé  au  ser- 
vice du  Seigneur,  ne  s'embarrasse  point  dans  les 
affaires  du  siècle. 

Judas  Maccabée  ne  demandait  donc  pour  com- 
pagnons, dans  cette  guerre  sainte,  que  des  gens 
détachés  de  tous  désirs,  et  pleins  de  courage  pour 
Dieu.  Car  si  Dieu  hait  les  superbes,  il  a  aussi 
les  timides  en  horreur,  puisqu'il  les  met  dans  le 


rang  des  exécrables,  des  homicides  et  des  idolâ- 
tres; et  qu'il  les  menace  de  V étang  brûlant  de 
feu  et  de  souffre,  qui  doit  être  leur  partage  (}).  Il 
nous  défend  de  nous  confier  en  nous-mêmes  ce 
qui  constitue  l'orgueil  :  mais  il  nous  défend  aussi 
de  rien  craindre  en  nous  appuyant  sur  lui  ;  puis- 
que c'est  douter  non  de  notre  force,  mais  de  la 
sienne,  et  faire  outragea  sa  puissance.  Ainsi  ceux 
qui  étaient  timides,  dansl'armée  de  Judas  Macca- 
bée, ne  se  confiaient  pas  pleinement  en  Dieu  ;  et, 
en  cela,  ils  étaient  indignes  de  combattre  pour  sa 
cause. 

Mais  quelque  confiance  qu'eût  ce  grand 
homme  au  secours  de  Dieu,  il  ne  regardait  dans 
cette  guerre  que  sa  sainte  volonté.  Songeant  seu- 
lement à  s'acquitter  de  son  devoir,  il  abandonnait 
à  sa  providence  le  succès  du  combat,  sans  se 
mettre  en  peine  de  ce  qui  arriverait,  pourvu  qu'il 
lui  fût  fidèle.  C'est  être  assuré  de  la  victoire,  de 
combattre  dans  cette  humble  et  généreuse  dis- 
position ;  puisque  soit  que  l'on  meure,  ou  que 
l'on  vainque,  notre  foi  demeure- toujours  victo- 
rieuse. 


(1)  Clem.  Alex.  Slromat.  11.  —  (2)  11.  Tim.  11.  4. 


Apocal.  xxi.  8. 


S.  B.  —  T.  XII. 


CHAPITRE  IV 

Judas  Maccabée  attaque  séparément  Nicanor  et  Gorgias,  et  les  met  en  déroute. 
Il  remporte  la  victoire  sur  Lysias.  Il  va  à  Jérusalem,  purifie  les  lieux  saints  et  fortifie 
la  montagne  de  Sion. 


i.  El  assumpsit  Gorgias  quinque  millia  virorum,  et 
mille  équités  electos,  et  moverunt  castra  nocte, 

2.  Ut  applicarent  ad  castra  Judasorum,  et  percutèrent 
eos  subito;  et  filii  qui  erant  ex  arce  erant   illis  duces. 

5.  Et  audivit  Judas,  et  surrexit  ipse,  et  potentes,  per- 
cutere  virtutem  exercituum  régis,  qui  erant  in  Emmaum  : 

4.  Adhuc  enim  dispersus  erat  exercitus  a  castris. 

5.  Et  venit  Gorgias  in  castra  Judae  noctu,  et  neminem 
invenit  ;  et  quasrebat  eos  in  montibus,  quoniam  dixit  : 
Fugiunt  ni  a  nobis. 

6.  Et  cum  dies  factus  esset,  apparuit  Judas  in  campo 
cum  tribus  millibus  virorum  tantum,  qui  tegumenta  et 
gladios  non  habebant; 

7.  Et  viderunt  castra  gentium  valida,  et  loricatos,  et 
equitatus  in  circuitu  eorum,  et  hi  docti  ad  prœlium. 


1.  Alors  Gorgias  prit  cinq  mille  hommes  de  pied,  et 
mille  chevaux  choisis,  et  décampa  la  nuit, 

2.  Pour  venir  attaquer  le  camp  des  Juifs,  et  les  acca- 
bler subitement  :  et  ceux  de  la  forteresse  leur  servaient 
de  guides. 

j.  Mais  Judas  en  fut  averti,  et  il  marcha  aussitôt  avec 
1rs  plus  vaillants  guerriers,  pour  aller  attaquer  le  gros 
de  l'armée  du  roi,  qui  était  à  Emmaùs; 

4.  Car  une  partie  de  cette  armée  était  encore  disper- 
sée hors  du  camp. 

<,.  Gorgias  étant  donc  venu  pendant  la  nuit  au  camp 
de  Judas,  n'y  trouva  personne  ;  et  il  les  cherchait  sur  les 
montagnes,  en  disant  :  Ces  gens  fuient  devant  nous. 

6.  Lorsque  le  jour  fut  venu, Judas  parut  dans  la  plaine, 
accompagné  seulement  de  trois  mille  hommes,  qui 
n'avaient  ni  boucliers,  ni  épées. 

7.  Et  ils  reconnurent  que  l'armée  des  nations  était 
forte,  et  environnée  de  cuirassiers  et  de  cavalerie,  qui 
étaient  tous  gens  aguerris. 


COMMENTAIRE 


f.  2.  FlLII  QUI  ERANT  EX  ARCE  ERANT  ILLIS  DU- 
CES. Il  y  avait  parmi  eux  plusieurs  Juifs  apos- 
tats (1),  qui  connaissaient  mieux  le  pays  que  les 
Grecs,  et  qui  conduisirent  l'ennemi  au  camp  où 
était  Judas  ;il  parait  par  le  chapitre  précédent  (2), 
que  Judas  et  ses  troupes  étaient  à  Maspha,  ou 
près  de  là. 

y.  4.  Adhuc  enim  dispersus  erat  exercitus  a 
castris.  Gorgias  avait  pris  un  détachement  de 
cinq  mille  hommes  de  pied  et  de  mille  chevaux  ; 
il  y  avait,  outre  cela,  un  grand-nombre  de  troupes 
débandées,  répandues  dans  le  pays  pour  fourra- 
ger, n'ayant  aucune  défiance  des  Juifs,  dont  ils 
méprisaient  le  petit  nombre. 

jL6.  Apparuit  Judas  in  campo  cum  tribus  mil- 
libus VIRORUM  TANTUM,  QUI  TEGUMENTA  ET  GLA- 
DIOS non  habebant.  Judas  ne  prit  avec  lui  que  ce 
qu'il  avait  de  meilleures  troupes  ;  il  avait  ren- 
voyé les  timides,  et  ceux  que  la  loi  exemptaitde  la 
milice  (3).  On  lit  dans  le  second  livre  des  Macca- 
bées,  que  son  armée  était  de  sept  mille  hom- 
mes (4)  ;  mais  il  ne  jugea  pas  à  propos  de  les 
prendre  tous,  ni  même    de  les  laisser   dans    son 


camp.  Ils  les  divisa  en  plusieurs  corps,  et  n'en 
réserva  auprès  de  lui  que  trois  mille,  encore  mal 
armés.  Quand  on  dit  qu'ils  n'avaient  ni  boucliers, 
ni  lances,  Cela  ne  doit  pas  s'entendre  à  la  lettre  ; 
le  texte  grec  et  quelques  exemplaires  latins  y  joi- 
gnent une  restriction  (s)  :  Ils  n'en  avaient  point, 
comme  ils  auraient  bien  voulu.  En  effet,  il  est  in- 
vraisemblable qu'ayant  déjà  gagné  deux  batailles, 
et  ayant  profité  des  dépouilles  et  des  armes  des 
troupes  d'Apollonius  et  de  Séron,  ils  fussent  alors 
absolument  sans  armes  ;  et  n'est-il  pas  dit  expres- 
sément au  verset  1  '-,,  qu'ils  passèrent  au  fil  de 
l'épée  tous  ceux  de  l'armée  de  Nicanor,  qui  ne 
purent  leur  échapper  par  la  fuite  :Novissimi  aulem 
omnes  ceciderunl  in  gladio.  On  pourrait  même  ex- 
pliquer le  texte  dans  un  sens  tout  différent  de  ce- 
lui qu'on  lui  donne,  en  disant,  que  Judas  parut 
dans  la  plaine  avec  trois  mille  hommes  (6),  n'ayant 
pas  pris  ceux  qui  n'avaient  ni  épées,  ni  boucliers, 
comme  ils  auraient  voulu.  Josèphe  (7)  dit  qu'ils 
étaient  mai  armés,  à  cause  de  leur  pauvreté  ;  et 
le  syriaque,  qu'ils  n'avaient  que  leurs  boucliers  et 
leurs  épées  (8).  Zacharie  semble   dire  qu'ils   n'a- 


(1)1.  Macc.  vi.  18.  —  (2)  sup.  c.  m.  j^.  46. 
(  j)  Sup.  c.  m,  56. 
(4)  11.  Macc.  vin.  16.  et  22. 

(ç)  IlXf,v    xaXùp.y.ara    xal    jxaya;'pa;    ou/.    Et/ov  ,    zaOôi; 
ÈSoûXovto. 


(6)  Comme   s'il    y  avait    rcXrjv    Jiv,    01    xaXuu.u.aTa,    xal 
(xa/ ai'pa;    ou/,    et/ov,    comme    s'il    y    avait    en    hébreu 

(7)  Joseph.  Antiq.  XII.  'taù^to;  (IjJiXtau.sviov  Stà  JieWav. 

(8)  Syr.  et  quœd.  Grœca.  IlX^v  xaXu[.i(jt.<xTcov  xal  |ia-/aipu>y. 


I.  —  MACCABÉES.  -  IV.  -  DÉFAITE   DES  SYRIENS 


5'i 


8.  Etait  Judas  viris  qui  secum  erant  :  Ne  timuentis 
multitudinem  eorum,  et  impetum  eorum  ne  formidetis. 

9.  Mementote  qualiter  salvi  facti  sunt  patres  nostri  in 
mari  Rubro,  cum  sequeretur  eos  Pharao  cum  exercitu 
multo. 

10.  Et  nunc  clamemus  in  cœlum.  et  miserebitur  nostri 
Dominus;  et  memor  erit  testamenti  patrum  nostrorum, 
et  conteret  exercitum   istum  ante  faciem  nostram  hodie; 

11.  Et  scient  omnes  génies  quia  est  qui  redimat  et 
liberet  Israël. 

12.  Et  elevaverunt  alienigenœ  oculos  suos,  et  viderunt 
eos  venientes  ex  adverse 

Ij.  Et  exierunt  de  castris  in  prœlium,  et  tuba  cecine- 
runt  hi  qui  erant  cum  Juda, 

14.  Et  congressi  sunt;  et  contritae  sunt  gentes,  et 
fugerunt  in  campum. 

iç.  Novissimi  autem  omnes  ceciderunt  in  gladio,  et 
persecuti  sunt  eos  usque  Gezeron,  et  usque  in  campos 
Idumaeas,  et  Azoti,  et  Jamniaj;  et  ceciderunt  ex  illis  us- 
que ad  tria  millia  virorum. 

16.  Et  reversus  est  Judas,  et  exercitus  ejus,  sequens 
eum. 


8.  Alors  Judas  dit  à  ceux  qui  étaient  avec  lui  :  Ne 
craignez  point  cette  grande  multitude,  et  n'appréhendez 
point  leur  choc. 

9.  Souvenez-vous  de  quelle  manière  nos  pères  furent 
sauvés  dans  la  mer  Rouge,  lorsque  le  pharaon  les  pour- 
suivait avec  une  grande  armée. 

10.  Crions  donc  maintenant  vers  le  ciel,  et  le  Seigneur 
nous  fera  miséricorde  ;  il  se  souviendra  de  l'alliance 
qu'il  a  faite  avec  nos  pères,  et  il  brisera  aujourd'hui 
toute  la  force  de  cette  armée  devant  nos  yeux  : 

11.  Et  toutes  les  nations  reconnaîtront  qu'il  y  a  un 
rédempteur  et  un  libérateur  d'Israël. 

12.  Alors  les  étrangers,  levant  les  yeux,  aperçurent  les 
gens  de  Judas  qui  marchaient  contre  eux. 

ij.  En  même  temps,  ils  sortirent  de  leur  camp  pour 
les  combattre  :  et  ceux  qui  étaient  avec  Judas,  sonnè- 
rent de  la  trompette, 

14.  Et  les  chargèrent  ;  et  les  troupes  des  nations 
furent  battues,  et  s'enfuirent  dans  la  plaine. 

15.  Les  derniers  furent  tous  massacrés;  et  Judas  avec 
ses  gens  les  poursuivit  jusqu'à  Gézeron  et  jusqu'aux  cam- 
pagnes de  l'Idumée,  d'Azot  et  de  Jamnia,  et  il  en  de- 
meura sur  la  place  jusqu'à  trois  mille. 

16.  Judas  retourna  avec  son  armée  qui  le  suivait. 


COMMENTAIRE 


vaient  que  des  frondes  (Zach.  ix.  15).  Quelques 
mss.  latins  :  Quia  non  habebant  legumenta,  etc., 
au  lieu  de,  qui  non  habebant.  Il  ne  prit  que  trois 
mille  hommes,  n'ayant  pas  de  quoi  en  armer  un 
plus  grand  nombre. 

f.  8.  Ne  timueritis  multitudinem  eorum.  Le 
Saint-Esprit  qui,  dans  la  description  de  toutes 
ces  guerres,  a  dessein  principalement  de  nous 
inspirer  un  grand  mépris  de  la  vanité  des  hommes 
qui  se  confient  en  leurs  forces,  et  une  foi  vive  en 
l'assistance  de  Dieu,  ne  manque  guère  de  nous 
faire  remarquer  partout  ces  deux  grandes  vérités. 
Il  veut  donc  que  les  Israélites  reconnaissent  les 
forces  de  leurs  ennemis,  afin  d'avoir  lieu  d'en  être 
moins  effrayés.  Il  veut  que  la  vue  de  tous  ces  cui- 
rassiers et  de  toute  cette  cavalerie,  qui  environ- 
naient les  infidèles,  frappe  d'abord  ceux  qui  com- 
battent pour  sa  gloire,  afin  qu'ils  ne  puissent  s'at- 
tribuer leur  défaite,  lorsqu'ils  se  regardent  comme 
étant  eux-mêmes  sans  armes  et  sans  défense. 
Ainsi,  plus  l'armée  ennemie  est  nombreuse  et  pa- 
raît puissante,  plus  Judas  les  rassure,  et  leur  dé- 
fend de  rien  craindre  ;  parce  que,  moins  ils  sont 
en  état  de  compter  sur  leurs  propres  forces,  plus 
ils  se  voient  engagés  à  tout  attendre  de  Dieu. 

C'est  là  le.  sens  véritable  des  paroles  que  leur 
dit  Judas  Maccabée;  il  ne  veut  pas  que  ses  com- 
pagnons craignent  cette  grande  multitude.  La  rai- 
son qu'il  en  donne  est  tirée  de  la  puissance  de 
Celui  qui  avait  sauvé  leurs  pères  dans  la  mer 
Rouge,  lorsque  le  pharaon  voulait  les  perdre,  il 
veut  que  ce  souvenir  les   remplisse   de   courage  : 


il  veut  qu'ils  étonnent  leurs  ennemis  en  criant  vers 
le  ciel  ;  et  qu'ils  se  persuadent,  que  ces  cris  de 
leur  humble  foi  engageront  le  Seigneur  à  briser 
toute  la  force  des  infidèles  devant  leurs  yeux.  Ces 
deux  choses  étaient  nécessaires  pour  relever  la 
gloire  de  Dieu.  L'une,  que  son  peuple  ne  craignît 
point  en  comptant  sur  son  assistance  :  et  l'autre, 
que  les  nations  fussent  saisies  de  frayeur,  et  con- 
vaincues du  pouvoir  suprême  de  Celui  qui  se  dé- 
clarait le  libérateur  d'Israël. 

Il  est  inutile  de  s'arrêter  à  en  faire  ici  l'appli- 
cation à  ce  qui  regarde  les  combats  spirituels, 
puisqu'elle  est  claire  par  elle-même.  Il  ne  faut  ce- 
pendant pas  qu'on  s'imagine  que  ce  qui  est  dit 
ici,  que  Dieu  brisera  toute  la  force  de  nos  ennemis 
devant  nos  yeux,  doive  s'entendre  comme  si  nous 
ne  devions  y  contribuer  en  rien  de  notre  côté. 
Car  de  même  que  Judas  et  ses  compagnons  ne 
laissaient  pas  de  combattre  en  même  temps  avec 
un  grand  courage  ;  il  est  nécessaire  aussi  que 
nous  résistions  avec  toute  la  force  de  notre  foi  à 
ce  lion  rugissant,  qui  tourne  sans  cesse  pour  nous 
perdre  (1)  ;  convaincus  que  Dieu  nous  donnera 
cette  force  pour  lui  résister. 

f.i}.  Tuba  cecinerunt  hi  qui  erant  cum  Juda. 
Cet  office  était  réservé  aux  prêtres  (2).  Il  y  en 
avait  un  grand  nombre  dans  l'armée  de  Judas;lui- 
même  était  de  leur  ordre. 

j.  i'-,.  Persecuti  sunt  eos  usque  Gezeron,  et 
usque  in  campos  Iuvmjeje.  On  ne  connaît  point 
de  ville  de  Gézéron  dans  la  terre  Sainte  ;  maison 
trouve  Ga^erah,  ou  Gazer  dans  la  tribu  d'Éphraïm  : 


.(1)  1.  Petr.  v.  8. 


(2)  Num.  x.  9. 


<2 


I.  —  MACCABÉES.  —  IV.  -   FUITE   DE   GORGIAS 


17.  Dixitque  ad  populum  :  Non  concupiscatis  spolia, 
quia  bellum  contra  nos  est, 

18.  Et  Gorgias  et  exercitus  ejus  prope  nos  in  monte; 
sed  state  nunc  contra  inimicos  nostros,  et  expugnate 
eos  ;  et  sumetis  postea  spolia  securi. 

19.  Et  adhuc  loquente  Juda  hase,  ecce  apparuit  pars 
quaedam  prospiciens  de  monte. 

20.  Et  vidit  Gorgias  quod  in  fugam  conversi  sunt  sui 
et  succenderunt  castra;  fumus  enim  qui  videbatur  decla- 
rabat  quod  factum  est. 

21.  Quibus  illi  conspectis  timuerunt  valde,  aspicientes 
simut  et  Judam,  et  exercitum  in  campo  paratum  ad  prae- 
lium  ; 

22.  Et  fugerunt  omnes  in  campum  alienigenarum. 


17.  Et  il  dit  à  ses  gens  :  Ne  vous  laissez  point  empor- 
ter au  désir  du  butin,  parce  que  nous  avons  encore  des 
ennemis  à  combattre, 

18.  Et  Gorgias  avec  son  armée  est  près  de  nous  sur 
la  montagne  :  mais  demeurez  fermes  maintenant  contre 
nos  ennemis,  et  achevez  de  les  défaire  ;  et  après  cela, 
vous  emporterez  leurs  dépouilles  en  sûreté. 

19-  Lorsque  Judas  parlait  encore, on  vit  paraître  quel- 
ques troupes  qui  regardaient  du  haut  de  la  montagne. 

20.  Et  Gorgias  vit  que  les  siens  avaient  été  mis  en 
fuite,  et  son  camp  brûlé,  car  la  fumée  qui  paraissait, 
lui  faisait  voir  ce  qui  était  arrivé. 

21.  Ce  qu'ayant  aperçu,  et  voyant  Judas  avec  son 
armée, dans  la  plaine,  toute  prête  à  combattre,  ils  eurent 
une  grande  frayeur  ; 

22.  Et  ils  s'enfuirent  tous  au  pays  des  étrangers. 


COMMENTAIRE 


il  était  naturel  que  les  fuyards  se  jetassent  du  côté 
de  Samarie,  qui  était  à  eux.  D'autres  se  retirè- 
rent du  côté  de  l'Idumée,  voulant  apparemment 
aller  joindre  Gorgias,  ou  ceux  des  leurs  qui  occu- 
paient Jérusalem  ;  mais  ayant  été  vivement  pour- 
suivis, ils  ne  trouvèrent  de  salut  que  dans  les 
montagnes  d'idumée,  dans  la  partie  méridionale 
de  la  tribu  de  Juda  ;  enfin  d'autres  fuyards  pri- 
rent la  route  de  Jamnia  et  d'Azot,  vers  le  pays 
des  Philistins.  Chacun  alla  où  il  put,  comme  il 
arrive  dans  les  déroutes. 

Au  lieu  de  Ge^eron,  Josèphe  lit  Gadara;  quel- 
ques exemplaires  grecs  (  1  )  lisent  Ga^eron,  et  d'au- 
tres (2),  Assaramoth  ;  ce  dernier  nom  pourrait  se 
traduire  par  le  parvis  de  la  mort,  ou  le  parvis 
d'Émath,  suivant  les  diverses  manières  de  lire.  Si 
on  l'entend  de  Gadara  au-delà  du  Jourdain,  et 
d'Émath,  dans  le  passage  du  Liban  ;  ces  lieux 
sont  bien  éloignés  d'Emmaus.  Nous  ne  doutons 
pas  que  Gé^éronne  soit  Gezer  (2),  nommée  Ga- 
gera (4),  et  Gazer  (j).  Dans  la  carte,  pi.  lxix,  qui 
accompagne  la  Palestine  de  S.  Munk,  on  voit 
entre  Gazer  et  Joppé  une  localité  nommée  Ga- 
zara.  Si  ce  détail  géographique  est  exact, la  proxi- 
mité des  deux  localités  a  dû  souvent  amener  des 
confusions  (6).  Dans  le  Bibel- Atlas  du  Dr  Richard 
von  Riess,  carte  vi,  on  voit  aussi  près  de  Jamnia 
deux  localités  :  Gédéroth  et  Gadaris.  Quant  à 
Asaramoth,  il  paraît  par  Jérémie  (7),  que  ce 
pouvait  être  un  lieu  au  voisinage  de  Jérusalem. 
Au  lieu  des  campagnes  d'idumée,  le  mss.  Alexan- 
drin lit  de  Judée  ;  ce  qui  semble  plus  probable, 
et  nous   éloigne  moins  d'Emmaus. 

Azot  nous  est  déjà  connu  par  les  livres  des 
Rois;  Jamnia  est  située  plusau  nord  à  trois  heures 


et  demie  plus  haut,  sur  une  petite  rivière,  appelée 
aujourd'hui  Nahr  Rûbin. 

Le  texte  dit  ici  que  trois  mille  ennemis  furent 
tués  :  mais  dans  le  second  livre  des  Maccabées, 
on  en  lit  neuf  mille,  ce  qu'on  peut  concilier,  en 
disant  qu'il  y  eut  trois  mille  de  tués  sur  place,  et 
six  mille  dans  la  fuite. 

jh  17.  Non  concupiscatis  spolia.  Tant  que 
nous  sommes  exposés  à  la  fureur  et  aux  artifices 
de  nos  ennemis,  il  nous  faut  nécessairement 
veiller,  et  nous  tenir  sous  les  armes  comme  les 
Israélites;  de  peur  que,  si  nous  songeons  à  nous 
reposer  avant  le  temps,  et  à  jouir  dès  cette  vie  du 
fruit  de  notre  victoire,  nous  ne  soyons  accablés, 
sans  y  penser,  par  ceux  mêmes  que  nous  avions 
vaincus.  C'est  la  vérité  qui  nous  est  représentée 
sous  cette  ancienne  figure.  La  foi  nous  apprend 
que  nous  avons  un  grand  nombre  d'ennemis,  et 
en  nous-mêmes  et  hors  de  nous-mêmes,  que  nous 
sommes  obligés  de  combattre  tous  les  jours.  La 
vie  de  l'homme  est  une  guerre  continuelle,  selon 
l'Écriture.  Il  est  vrai  que  la  grâce  de  Jésus-Christ 
nous  fait  vaincre  ces  différents  ennemis  de  notre 
salut,  lorsqu'elle  nous  fait  mépriser  le  monde,  et 
haïr  la  chair  ;  mais  ni  ce  renoncement,  ni  cette 
haine,  ni  ce  mépris  ne  peuvent  être  parfaits  en 
nous  tant  que  nous  vivons.  Nous  n'achèverons  de 
défaire  nos  ennemis  que  par  notre  mort,  et  nous 
ne  pourrons  emporter  leurs  dépouilles  qu'étant  dé- 
pouillés nous-mêmes  de  ce  corps  mortel  :  alors 
nous  prendrons  la  place  de  l'ange  apostat,  et 
nous  jouirons  dans  le  ciel,  avec  assurance,  du 
fruit  de  notre  victoire. 

f.  22.  Fugerunt  in  campum  alienigenarum. 
Dans  ces  livres,  Alienigena  se   prend  ordinaire- 


(1)  Edit.  Rom.  et  M  s.  Alex. 

(2)  Edit.  Complut.  A'aaapa|.tojO. 
(?)  11.  Reg.  v.  25  ;  111.  Reg.  ix.  15. 

(4)  1.  Paralip.  xiv.  16. 

(5)  Josue.  xvi.  j.  et  1.  Macc.  v.  8, 


(6)  Reland.  Palcest.  illust.  p.  778. 

(7)  Jerem.  xxxi.  40.  Le  mot  hébreu  moiwn  haschre- 
moth  signifie  les  champs,  mais  d'anciens  traducteurs  grecs 
l'ont  pris  pour  un  nom  propre. 


1.  —  MACCABÉES.  —  IV.-   EXPÉDITION   DE   LYSIAS 


5  5 


2?.  Et  Judas  reversus  est  ad  spolia  castrorum  ;  et  ac- 
ceperunt  aurum  mtiltum,  et  argentum,  et  hyacinthum, 
et  purpuram  marinam,  et  opes  magnas. 

24.  Et  conversi,  hymnum  canebant,  et  benedicebant 
Deum  in  cœlum,  quoniam  bonus  est,  quoniam  in  sasculum 
misericordia  ejus. 

25.  Et  facta  est  salus  magna  in  Israël  in  die  illa. 

2b.  Quicumque  autem  alienigenarum  evaserunt,  vene- 
runt  et  nuntiaverunt  Lysias  quae  acciderant. 

27.  Quibus  ille  auditis,  consternatus  animo  deficiebat, 
quod  non  qualia  voluit,  talia  contigerunt  in  Israël,  et 
qualia  mandavit  rex. 

28.  Et  sequenti  anno  congregavit  Lysias  virorum  elec- 
lorum  sexaginta  milita,  et  equitum  quinque  mil  lia,  ut 
debellaret  eos. 

29.  Et  venerunt  in  Judajam,  et  castra  posuerunt  in 
Bethoron  ;  et  occurnt  illis  Judas  cum  decem  millibus 
viris. 

50.  Et  viderunt  exercitum  fortem,  et  oravit,  et  dixit  : 
Benedictus  es,  salvator  Israël,  qui  contrivisti  impetum 
potentis  in  manu  servi  tui  David,  et  tradidisti  castra 
alienigenarum  in  manu  Jonathae,  filii  Saul,  et  armigeri 
ejus. 


2j.  Ainsi  Judas  retourna  pour  enlever  le  butin  du 
camp  ;  et  ils  emportèrent  beaucoup  d'or  et  d'argent,  de 
l'hyacinthe,  de  la  pourpre  marine,  et  de  grandes  riches- 
ses. 

24.  Et  en  revenant,  ils  chantaient  des  hymnes,  et  bénis- 
saient Dieu  hautement,  disant  :  Qu'il  est  bon,  et  que  sa 
miséricorde  s'étend  dans  tous  les  siècles. 

2;.  Et  en  ce  jour-là,  Israël  remporta  une  grande  vic- 
toire qui  fut  son  salut. 

2<>.  Ceux  des  étrangers  qui  échappèrent,  en  vinrent 
porter  la  nouvelle  à  Lysias,  et  lui  dirent  tout  ce  qui  était 
arrivé. 

27.  L'ayant  appris,  il  en  fut  consterné,  et  pensa  mourir 
de  douleur,  de  ce  qu'il  n'avait  pu  réussir  dans  ses  des- 
seins contre  Israël,  ni  dans  l'exécution  des  ordres  qu'il 
avait  reçus  du  roi. 

28.  L'année  suivante,  Lysias  leva  une  armée  de  soixante 
mille  hommes  choisis,  et  de  cinq  mille  chevaux,  pour 
exterminer  les  Juifs. 

29.  Cette  armée  marcha  en  Judée,  et  campa  près  de 
Bethoron  :  et  Juda  vint  au  devant  d'eux  avec  dix  mille 
hommes. 

50.  Ils  reconnurent  que  l'armée  ennemie  était  forte, 
et  Judas  fit  sa  prière,  et  dit  :  Soyez  béni,  Sauveur 
d'Israël,  vous  qui  avez  brisé  la  force  d'un  géant  par 
la  main  de  votre  serviteur  David,  et  avez  livré  le 
camp  des  étrangers  entre  les  mains  de  Jonathas,  fils  de 
Saùl,  et  de  son  écuyer. 


COMMENTAIRE 


ment  pour  les  Philistins,  ou  en  général  pour  les 
peuples  étrangers  aux  Juifs  ;  ainsi  l'armée  de 
Gorgias  put  se  retirer  ou  dans  la  Phénicie,  ou 
dans  la  Samarie,  ou  dans  le  pays  des  Philistins. 
Les  Septante  désignent  toujours  les  Philistins 
sous  le  nom  à\X\6-M\o:. 

f.  2).  ACCEPERUNT  AURUM  MULTUM...  ET  PURPU- 
RAM marinam,  et  opes  multas.  Ils  profitèrent  non 
seulement  des  dépouilles  des  généraux  et  des 
soldats,  mais  aussi  de  celles  des  marchands  qui 
étaient  venus  pour  acheter  des  esclaves  Juifs. 
C'est  ce  que  nous  apprend  l'auteur  du  second 
livre  des  M.accabées  (1)  ;  il  remarque  aussi  qu'ils 
ne  purent  achever  de  les  poursuivre,  et  de  piller 
leur  camp,  parce  que  le  combat  eut  lieu  la  veille 
du  sabbat.  Enfin  nous  lisons  au  même  livre,  (1), 
que  les  Juifs  tuèrent  dans  diverses  rencontres 
plus  de  vingt  mille  hommes  à  Timothée  et  à 
Bacchide  ;  qu'ils  se  rendirent  maîtres  de  diverses 
places  fortes,  amassèrent  quantité  d'armes  et  de 
butin,  qu'ils  mirent  en  réserve  dans  des  lieux  sûrs; 
Philarque  et  Callisthène  furent  mis  à  mort,  et 
Nicanor  futobligédese  sauverdéguiséà  Antioche, 
et  par  des  chemins  écartés. 

L'auteur  sacré  distingue  ici  la  pourpre  marine, 
c'est-à-dire,  celle  qui  est  teinte  avec  le  sang  du 
poisson  nommé  purpura,  d'avec  l'autre  espèce  de 
pourpre  qui  se  teignait  avec  des  herbes  ;   la  pre- 


mière était  infiniment  plus  estimée  que  la  seconde  ; 
nous  n'avons  plus  le  secret  de  la  pourpre  marine, 
mais  on  a  conservé  et  perfectionné  la  pourpre 
ordinaire. 

v.  24.  Quoniam  in  S/ECulum  misericordia  ejus. 
C'est  le  refrain  d'un  cantique  de  victoire,  qu'ils 
chantèrent  en  cette  occasion.  Ils  prirent  apparem- 
ment le  psaume  cxxxv  où  ces  paroles  se  lisent 
à  chaque  verset. 

f.  26.  Nuntiaverunt  Lysi,e  quje  acciderant. 
Ils  lui  rapportèrent  les  défaites  de  Nicanor,  de 
Gorgias,  de  Timothée  et  de  Bacchide,  et  tout  ce 
que  Judas  et  les  siens  faisaient  dans  le  pays. 

f.  29.  Venerunt  in  Jud^am.  Le  grec  lit:  Dans 
l'Idumée,  mais  c'est  une  faute  ;  Josèphe  porte 
comme  la  Vulgate. 

Castra  posuerunt  in  Bethoron.  Le  grec  et 
Josèphe  lisent  Bethsur,  au  lieu  de  Bethoron.  Nous 
pensons  que  c'est  une  suite  du  nom  d'Idumée  qu'on 
a  vu  plus  haut  verset  29,  au  lieu  de  Judée.  Si  on 
lit  ridumée,  il  faut  conserver  Bethsur;  mais  si  l'on 
admet  la  Judée,  il  vaut  mieux  mettre  Bethoron. 
Celle-ci  était  au  nord  et  assez  près  de  Jérusalem; 
Bethsur  était  au  midi  de  la  même  ville,  dans  la 
région  qu'on  appelait  alors  l'Idumée,  comme  on 
le  voit  au  verset  61. 

t.  30.  Viderunt  exercitum  fortem,  et  oravit, 
et  dixit  :  Benedictus  es,  salvator  Israël.  On 


(1)  11.  Macc.  vin.  25.  Pecuniis  eorum  qni  ad  emptionem 
ipsorum  vénérant,  sublalis,  etc. 


(2)  Ibid.  f.  50  et  seq. 


u 


I.  —  MACCABÉES. 


IV.  -    DÉFAITE   DE   LYSIAS 


ji.  Conclude  exercitum  istum  in  manu  pupuli  tui  Israël, 
et    confundantur  in  exercitu  suo  et  equitibus. 

52.  Da  illis  formidinem,  et  tabefac  audaciam  virtutis 
eorum,  et  commoveantur  contritione  sua. 

jj-  Dejice  illos  gladio  diligentium  te,  et  collaudent  te 
omnes  qui  noverunt  nomen  tuum  hymnis. 

Î4.  Et  commiserunt  praelium,  et  ceciderunt  de  exercitu 
Lysias  quinque  raillia  virorum. 

?$.  Videns  autem  Lysias  (ugam  suorum,  et  Judasorum 
audaciam,  et  quod  parati  sunt  aut  vivere  aut  mori  fortiter, 
abiit  Antiochiam,  et  elegit  milites,  ut  multiplicati  rursus 
venirent  in  Judaaam. 

j6.  Dixit  autem  Judas,  et  fratres  ejus  :  Ecce  contriti 
sunt  inimici  nostri  ;  ascendamus  nunc  mundare  sancta,  et 
renovare. 

J7.  Et  congregatus  est  omnis  exercitus,  et  ascenderunt 
in  montem  Sion. 

?8.  Et  viderunt  sanctificationem  desertam,  et  altare 
profanatum,  et  portas  exustas,  et  in  atriis  virgulta  nata 
sicut  in  saltu  vel  in  montibus,   et  pastophoria  diruta. 

!9-  Et  sciderunt  vestimenta  sua,  et  planxerunt  planctu 
magno,  et  imposuerunt  cinerem  super  saput  suum; 

40.  Et  ceciderunt  in  faciem  super  terrain,  et  exclama- 
verur.t  tubis  signorum,  et  clamaverunt  in  coclum. 


51.  Livrez  de  même  maintenant  cette  armée  entre  les 
mains  de  votre  peuple  d'Israël  ;  et  qu'ils  soient  couverts 
de  confusion  avec  toutes  leurs  troupes  et   leur   cavalerie. 

}2.  Frappez-les  de  crainte  ;  faites-les  sécher  de  frayeur, 
en  abattant  cette  audace  que  leur  inspirent  leurs  forces  : 
qu'ils  soient  renversés  et  brisés. 

5J.  Détruisez-les  par  l'épée  de  ceux  qui  vous  aiment; 
afin  que  tous  ceux  qui  connaissent  votre  nom,  publient 
vos  louanges  dans  leurs  cantiques. 

54.  Le  combat  fut  livré  en  même  temps,  et  cinq  mille 
hommes  de  l'armée  de  Lysias  furent  tués. 

}?■  Lysias,  voyant  la  fuite  des  siens,  et  le  courage  des 
Juifs,  et  cette  disposition  où  ils  étaient  de  vivre  avec 
honneur,  ou  de  mourir  généreusement,  s'en  alla  à  Antio- 
che,  et  y  leva  de  nouveaux  soldats,  pour  revenir  en  Judée 
avec  plus  de  troupes  qu'auparavant. 

?6.  Alors  Judas  et  ses  frères  dirent  :  Voilà  nos  ennemis 
défaits;  allons  maintenant  purifier  et  renouveler  le  tem- 
ple. 

17.  Aussitôt  toute  l'armée  se  rassembla  ;  et  ils  montè- 
rent à  la  montagne  de  Sion. 

j8.  Ils  virent  les  lieux  saints  ruinés,  l'autel  profané, 
les  portes  brûlées,  le  parvis  rempli  d'épines  et  d'arbris- 
seaux, comme  on  en  voit  dans  un  bois  et  sur  les  mon- 
tagnes, et  les   chambres  contigucs  au  temple  démolies. 

iv.  Ils  déchirèrent  leuis  vêtements,  firent  un  grand 
deuil,  et  se  mirent  de  la  cendre  sur  la  tête. 

40.  Ils  se  prosternèrent  le  visage  contre  terre,  'irent 
retentir  les  trompettes  dont  on  donnait  le  signal  et  pous- 
sèrent leurs  cris  jusqu'au  ciel. 


COMMENTAIRE 


ne  peut  mieux  caractériser  la  foi  de  Judas  Mac- 
cabée  qu'en  citant  sa  prière.  Il  voit  que  l'armée 
ennemie  est  forte,  tandis  qu'il  n'a  lui-même  sous 
la  main  qu'une  poignée  d'hommes  mal  équipés. 
Mais  Dieu  est  avec  lui  ;  il  n'hésite  pas  ;  il  se  rue 
sur  l'ennemi,  et  la  victoire  lui  appartient. 

f.  J2.  Commoveantur  contritione  sua.  Qu'ils 
tournent  leurs  armes  contre  eux-mêmes;  que  le 
mal  qu'ils  méditent  contre  nous,  retombe  sur  eux- 
mêmes  ;  ou  enfin,  qu'ils  périssent,  qu'ils  soient 
exterminés  sans  ressource  (1). 

f.  36.  ECCE  CONTRITI  SUNT  INIMICI  NOSTRI  ; 
ASCENDAMUS  NUNC  MUNDARE  SANCTA,  ET   RENOVARE. 

C'était  pour  cela  que  ces  généreux  Maccabées 
s'étaient  exposés  à  tout  :  et  la  première  pensée 
qu'ils  ont  après  la  défaite  de  leurs  ennemis,  est  la 
même  que  celle  qui  les  avait  engagés  a  les  com- 
battre. N'ayant  en  vue  que  la  gloire  de  leur  Dieu, 
ils  n'ont  pas  plus  tôt  vaincu  les  nations,  par  un  effet 
de  son  assistance,  qu'ils  se  hâtent  de  lui  témoi- 
gner leur  gratitude.  Ils  se  préparent  à  relever  son 
culte,  afin  qu'il  soit  encore  adoré,  et  qu'on  puisse 
lui  offrir  les  sacrifices  qu'il  avait  lui-même  deman- 
dés dans  sa  loi.  Ce  déchirement  d'habïls,  ce  deuil 
extraordinaire,  ces  cendres  qu'ils  jetèrent  sur  leurs 
têtes,  ces  prosternations  contre  terre,  ces  cris  de 
douleur  poussés  jusqu'au  ciel  et  joints   au  son  des 


trompettes,  attestaient  publiquement  combien  ils 
étaient  sensibles  aux  profanations  par  lesquelles 
les  gentils  avaient  souillé  le  temple.  Mais  ce  grand 
soin  qu'ils  apportèrent  à  rétablir  toutes  choses 
dans  l'état  où  elles  devaient  être  selon  la  loi,  était 
aussi  un  témoignage  public  de  leur  zèle,  de  leur 
exacte  obéissance  et  de  leur  profond  respect  pour 
tous  les  préceptes  de  leur  Dieu. 

S'il  est  vrai  que  nous  admirons  dans  ce  grand 
homme  un  courage  si  extraordinaire,  une  piété  si 
éclairée,  et  une  foi  si  ardente,  nous  avons  peut- 
êire  lieu  de  rougir,  en  considérant  que  ce  qui  fait 
le  sujet  de  notre  admiration,  est  notre  propre 
condamnation.  Les  Maccabées  étaient  croyants, 
braves,  désintéressés,  et  nous  ne  sommes  généra- 
lementquedesêtres égoïstes,  pusillanimes,  défiants 
à  l'égard  de  Dieu,  et  pleins  de  la  plus  belle  et  la 
plus  naïve  confiance  en  nous-mêmes. 

v.  j8.  Viderunt  portas  exustas.  Elles  avaient 
été  brûlées  par  l'impie  Callisthène,  qui  fut  lui- 
même  brûlé  par  les  Juifs  dans  une  maison  où  il 
s'était  réfugié  (2). 

Pastophoria  diruta.  Les  Septante  ont  souvent 
employé  le  nom  de  itajro^opsîa  dans  leurs  versions  (  3  ). 
Saint  Jérôme  se  sert  plus  volontiers  de  Ga^ophy- 
lacium,  qui  est  pris  d'Aquila  ;  ou  de  Thalami,  à 
l'imitation  de  Symmaque.    Tous   ces    termes  ne 


(i)  SaXEuGrjaojaav  Tfl  auvtf^f,  efatûv. 
(2)  11.  Macc.  vin.  ?;. 


(?)  vide  E\cch.  xl.  17.  et  ?8.  -  1.  Par.  ix.  2.  et  xxxin.  2;. 


MACCABÉES.   -   IV.  -  PURIFICATION   DES  LIEUX  SAINTS 


•>-) 


41.  Tune  ordinavit  Judas  viros  ut  pugnarent  adversus 
eos  qui  erant  in  arce,  donec  emundarent  sancta. 

42.  Et  elegit  sacerdotes  sine  macula,  voluntatem  ha- 
bentes  in  lege  Dei  ; 

4j.  Et  mundaverunt  sancta,  et  tulerunt  lapides  conta- 
minations in  locum  immundum. 

44.  Et  cogitavit  de  altari  holocaustorum  quod  profana- 
tum  erat,  quid  de  eo  faceret. 

45.  Et  incidit  illis  consilium  bonum  ut  destruerent  illud, 
ne  forte  illis  esset  in  opprobrium,  quia  contaminaverunt 
illud  gentes  ;  et  demoliti  sunt  illud, 

46.  Et  reposuerunt  lapides  in  monte  domus,  in  loco 
apto,  quoadusque  veniret  propheta,  et  responderet  de 
eis. 


41.  Alors  Judas  chargea  quelques  hommes  de  contenir 
ceux  qui  étaient  dans  la  forteresse,  jusqu'à  ce  qu'ils 
eussent  purifié  les  lieux  saints. 

42.  Et  il  choisit  des  prêtres  sans  tache,  religieux 
observateurs  de  la  loi  de  Dieu. 

4;.  Ils  purifièrent  les  lieux  saints,  et  emportèrent  en 
un  lieu  impur  les   pierres  profanes. 

44.  Et  Judas  délibéra  sur  ce  qu'il  ferait  de  l'autel  des 
holocaustes  qui  avait  été  profané. 

45.  Et  ils  prirent  un  bon  conseil,  qui  fut  de  le  détruire, 
de  peur  qu'il  ne  devînt  pour  eux  un  sujet  d'opprobre, 
parce  qu'il  avait  été  souillé  par  les  nations  ;  ainsi  ils  le 
démolirent, 

46.  Et  ils  en  mirent  les  pierres  sur  la  montagne  du 
temple  dans  un  lieu  propre,  en  attendant  qu'il  vînt  un 
prophète  qui  déclarât  ce  qu'on  en  ferait. 


COMMENTAIRE 


signifient  autre  chose  que  les  chambres  ou  les 
appartements  qui  étaient  contre  les  temples.  Les 
païens,  les  Juifs  et  les  chrétiens,  ont  eu  leurs 
paslophoria.  Rufin  parle  de  ceux  du  temple  de 
Sérapis  (1).  L'Écriture  décrit  en  plusieurs  endroits 
ceux  du  temple  de  Jérusalem,  et  les  Cons Ululions 
Apostoliques  font  mention  de  ceux  de  nos  ancien- 
nes églises  (2).  Le  nom  de  Pastophorion  vient,  à 
ce  qu'on  croit,  des  Paslophores,  serviteurs  des 
temples  des  faux  dieux.  Le  motTix^rd;  désigne  une 
chambre  nuptiale  ou  un  petit  temple  portatif  con- 
tenant la  statue  d'un  dieu,  ou  même  plusieurs 
statues.  On  appelait  ainsi  en  Egypte  ceux  qui 
étaient  à  la  porte  des  temples,  et  qui  étaient  les 
gardiens  des  voiles  qui  les  fermaient  ;  car  pour 
l'ordinaire  le  temple  intérieur  n'était  fermé  que 
d'un  voile  précieux  et  de  diverses  couleurs.  Clé- 
ment d'Alexandrie  (3),  décrivant  les  temples  égyp- 
tiens, dit  qu'après  avoir  passé  des  cours  magnifi- 
ques, on  vous  conduit  au  temple,  et  qu'un  Pas- 
tophore  lève  gravement  le  voile  de  la  porte  pour 
vous  faire  voir  la  divinité,  qui  n'est  qu'un  chien, 
un  chat,  ou  un  autre  animal.  On  donnait  le  môme 
nom  de  Paslophore,  à  ceux  qui  portaient  les  divi- 
nités païennes  dans  des  niches,  ou  sous  des  tentes  ; 
tels  étaient  ceux  qui  portaient  la  déesse  Syrien- 
ne (4),  et  le  dieu  Moloch,  dont  parle  Amos  {<,), 
et  après  lui  saint  Etienne  (6).  Paslophoria,  dans 
la  rigueur,  semble  n'avoir  signifié  d'abord  que  les 
chambres  de  ces  prêtres,  ou  de  ces  portiers  du 
temple  ;  mais  ensuite  on  l'étendit  à  tous  les  appar- 
tements, à  toutes  les  demeures  de  ces  employés. 
^.41.  Pugnarent  adversus  eos  qui  erant  in 
arce.  Pour  combattre  ceux  qui  étaient  dans  la  for- 
teresse; ou  plutôt  pour    leur  tenir  tête,    au    cas 


qu'ils  sortissent  pour  troubler  la  cérémonie.  Ces 
troupes  étaient  logées  dans  la  citadelle,  tout  près 
du  temple  (7). 

f.  42.  Sacerdotes  sine  macula.  Des  prêtres 
sans  tache,  exempts  non  seulement  des  défauts  de 
corps  et  de  naissance,  qui  excluaient  du  sacer- 
doce (8)  ;  mais  aussi  qui  fussent  d'une  vie,  d'une 
conduite  sans  reproche,  qui  n'aient  donné  aucun 
soupçon  d'infidélité  dans  la  dernière  persécution. 

f.  43.  Lapides  contaminations.  Les  pierres 
profanes,  qui  avaient  servi  de  base  à  l'idole  de 
Jupiter  Olympien,  ou  de  matière  à  l'autel  sacrilège, 
qui  avait  été  dressé  sur  l'autel  des  holocaustes  (9). 
On  jeta  ces  pierres  dans  un  lieu  souillé,  c'est-à- 
dire,  dans  la  vallée  de  Topheth  ou  dans  la  voirie, 
sur  le  torrent  du  Cédron  (10).  On  démolit  en 
même  temps  les  autres  autels,  qui  avaient  été 
dressés  dans  les  places  publiques  et  aux  portes 
des  maisons  (11). 

y.  44.  Cogitavit  de  altari  holocaustorum 

QUOD   PROFANATUM    ERAT,     QUID    DE    EO    FACERET. 

Antiochus  avait  fait  immoler  sur  cet  autel  des 
porcs,  animaux  impurs,  défendus  par  la  loi  ;  il 
avait  aussi  fait  ériger  au-dessus  un  autel  profane 
à  son  idole  ;  enfin  les  officiers  avaient  affecté  de 
souiller  tout  le  temple,  en  y  répandant  un  liquide 
impur,  où  l'on  avait  fait  cuire  des  viandes  impures. 
Voyez  ce  que  nous  avons  dit  au  chapitre  premier 
de  ce  livre,  verset  23. 

y.  46.  Reposuerunt  lapides  in  monte  domus, 

IN  LOCO  APTO,    DONEC    VENIRET  PROPHETA.    L'autel 

des  holocaustes  était  revêtu  de  cuivre,  mais  le 
dedans  était  de  pierres  brutes.  Voyez  notre  com- 
mentaire sur  l'Exode,  chapitre  xx,  verset  25.  On 
ne  sait  pas  si  l'autel  que  l'on  bâtit  depuis  la   cap- 


(1)  Ru  fin.  hist.  Ecoles.  I.  11.  c.  2j. 

(2)  Constit.  Apost.  I.  n.  c.  57. 

(5)  Clem.  Alex.  Pœdagog.  I.  m.  c.  2. 

(4)  Vide  Apuleium.  Asini  aurei,  lib.  x.  c.  ii.-Rich.  dict. 
d'antiq.  art.  Pastophorus. 

(5)  Amos.  v.  25. 


(6)  Ad.  vu.  4j. 

(7)  1.  Macc,  1.  5$- 

(8)  Lcvit.  xxi.   7.  17.  et  seq. 

(9)  1.  Macc.  1.  57. 

(10)  Vide  11.  Par.  xxix.   16.  et  iv.  Reg.  xxm.  6.  10. 

(11)  11.  Macc.  x.  1. 


!.  —  MACCABEES. 


IV.  -  DEDICACE  DE  L'AUTEL 


47.  Et  acceperunt  lapides  integros,  secundum  legem, 
et  aedificaverunt  altare  novum,  secundum  illud  quod  fuit 
prius  ; 

48.  Et  asdificaverunt  sancta  et  quas  intra  domum  erant 
intrinsecus,  et  œdem  et  atria  sanctificaverunt. 

49.  Et  feceruntvasa  sancta  nova,  et  intulerunt  candela- 
brum,  et  altare  incensorum,  et  mensam  in  templum. 

50.  Et  incensum  posuerunt  superaltare,  et  accenderunt 
lucernas  quae  super  candelabrum  erant, et  lucebant  in 
lemplo. 

51.  Et  posuerunt  super  meiisam  panes,  et  appenderunt 
vêla,  et  consu.mmaverunt  omnia  opéra  quas  fecerant. 

$2.  Et  ante  matutinum  surrexerunt  quinta  et  vigesima 
die  mensis  noni  (hic  est  mensis  casleu)  centesimi  quadra- 
gesimi  octavi  anni  ; 

Çj.  Et  obtulerunt  sacrificium,  secundum  legem,  super 
altare  holocaustorum  novum  quod  fecerunt. 

54.  Secundum  tempus  et  secundum  diem  in  qua  conta- 
minaverunt  illud  génies,  in  ipsa  renovatum  est  in  canticis, 
et  citharis,  et  cinyris,  et  in  cymbalis. 


47.  Et  ils  prirent  des  pierres  entières,  selon  l'ordon- 
nance de  la  loi  ;  et  ils  en  bâtirent  un  autel  nouveau, 
semblable  au  premier. 

48.  Ils  rebâtirent  le  sanctuaire,  et  ce  qui  citait  au- 
dedans  du  temple,  et  sanctifièrent  le  temple  et  le  parvis- 

49.  Ils  firent  de  nouveaux  vases  sacrés,  et  placèrent 
dans  le  temple  le  chandelier,  l'autel  des  parfums  et  la 
table. 

50.  Ils  mirent  l'encens  sur  l'autel,  allumèrent  les  lam- 
pes qui  étaient  sur  le  chandelier,  et  qui  éclairaient  dans 
le  temple. 

5 1.  Ils  posèrent  les  pains  sur  la  table,  suspendirent  les 
voiles,  et  enfin  achevèrent  tout  ce  qu'ils  avaient  com- 
mencé. 

52.  Le  vingt-cinquième  jour  du  neuvième  mois  nommé 
Casleu,  la  cent  quarante-huitième  année,  ils  se  levèrent 
avant  le  point  du  jour  ; 

S  ]■  Et  ils  offrirent  le  sacrifice  selon  la  loi,  sur  le  nouvel 
autel  des  holocaustes  qu'ils  avaient  bâti. 

54.  Il  fut  dédié  de  nouveau  au  bruit  des  cantiques, 
des  harpes,  des  lyres  et  des  cymbales,  dans  le  même 
temps  et  le  même  jour  auquel  il  a  été  souillé  par  les  na- 
tions. 


COMMENTAIRE 


ti vite,  était  revêtu  de  cuivre  ;  mais  il  est  incon- 
testable qu'il  était  de  pierres  brutes,  et  que  celui 
que  Salomon  érigea,  était  de  bronze  (1).  On  mit 
les  pierres  de  cet  autel  dans  un  lieu  propre,  sur 
la  montagne  où  le  temple  était  bâti,  en  attendant 
que  Dieu  suscitât  un  prophète,  qui  déclarât  ce 
qu'on  en  devait  faire.  Depuis  Zacharie  et  Mala- 
chie,  les  Juifs  n'avaient  point  eu  de  prophètes 
reconnus  et  autorisés.  Dieu,  par  ce  silence,  les 
disposait  à  entendre  la  voix  de  Celui  qui  avait  été 
désigné  par  tous  les  prophètes,  et  dont  la  venue 
n'était  pas  bien  éloignée. 

f.  47.  Lapides  integros,  secundum  legem.  Des 
pierres  entières,  selon  l'ordonnance  de  la  loi;  ou 
des  pierres  brutes,  des  pierres  non  taillées.  La 
loi  n'ordonnait  rien  expressément  touchant  la 
matière,  ni  la  forme  de  l'autel  du  temple.  L'autel 
dont  on  se  servait  dans  le  désert,  était  de  bois, 
revêtu  de  lames  de  bronze.  Celui  que  Moïse 
érigea  au  pied  du  mont  Sinaï,  pour  la  cérémonie 
de  la  ratification  de  l'alliance,  était  de  pierres 
brutes  ou  de  gazon  (2).  L'autel  qu'on  devait  ériger 
sur  le  mont  Hébal,  devait  aussi  être  de  pierres 
brutes  (5).  Les  Juifs  ont  conclu  de  ces  endroits, 
qu'il  n'était  pas  permis  d'en  faire  de  pierres  tail- 
lées. 

j^.  48.  jEdificavekunt  sancta.  Ils  rebâtirent  le 
sanctuaire,  ou  plutôt  ils  réparèrent  ce  qu'il  y  avait 
de  démoli  dans  le  Saint,  dans  le  sanctuaire  et 
dans  les  chambres  contiguës. 

f.  '-,  1 .  Appenderunt  vêla.  Ils  suspendirent  les 


voiles,  qui  étaient  à  l'entrée  du  Saint  et  du  sanc- 
tuaire. 

jfr.   52.  Quinta  et  vigesima  die  mensis  noni... 

CENTESIMI  QUADRAGESIMI    OCTAVI    ANNI.    Le   vingl- 

cinquième  jour  du  neuvième  mois...  la  cent  qua- 
rante-huitième année  de  l'ère  des  Séleucides, 
répond  à  l'an  164  avant  l'ère  vulgaire.  Les  Mac- 
cabées  rétablirent  les  sacrifices  interrompus 
depuis  trois  ans,  et  dédièrent  le  temple  que  les 
officiers  d'Antiochus  avaient  souillé.  Dieu  permit 
qu'il  fût  consacré  et  dédié  de  nouveau  au  même 
jour  et  au  même  mois,  trois  ans  après  qu'il  avait 
été  profané,  secundum  tempus  et  secundum  diem  in 
qua  conlaminaverunt  illud  génies. 

11  y  a  quelque  difficulté  sur  l'année  de  cette 
dédicace.  Car,  dans  le  second  livre  des  Macca- 
bées,  on  remarque  positivement  qu'elle  se  fit  post 
biznnium,  deux  ans  après  (4;.  Et  ici  (5)  on  exprime 
la  cent  quarante-huitième  année  des  Séleucides 
pour  le  temps  de  la  dédicace,  et  la  cent  quarante- 
cinquième  pour  la  profanation,  et  par  conséquent 
trois  ans  complets.  Quelques  auteurs  (6)  recon- 
naissent deux  dédicaces  faites  en  deux  années 
consécutives;  mais  la  manière  la  plus  simple,  est 
de  dire  qu'il  se  passa  trois  ans  entre  la  profana- 
tion {y)  et  la  dédicace,  et  seulement  deux  ans 
depuis  que  Judas  Maccabée  fut  établi  chef  de  la 
nation,  jusqu'à  cet  événement. 

>'.     54.  IN  CITHARIS,  ET  CINYRIS,  ET   IN    CYMBALIS. 

On  peut  consulter  l'introduction  des  Psaumes  sur 
les  instrumentsdemusique  des  Hébreux.  Le  second 


(1)  m.  Reg.  viii.  64.  -  11.  Par.  iv.  1. 

(2)  Exod.  xx.  24.  25. 
(?'  Dcut.  xxvn.  5. 
(4)  11.  Macc.  x.  j. 


(5)  1.  Macc.  1.  57.  et  62.  et  iv.  52. 

(6)  Sixt.  Sen.  Bibt.  t.  fin. 

(7;  lia  D.  Thom.  seualius  in  Maccab.  Usser.  ad  an.  J840. 
Menoc.  Tir.  alii  passim. 


I.  —  MACCABEES. 


IV.-  JOIE   DANS  ISRAËL 


57 


y>.   El  cecidit  omnis  populus  in  faciem,  et  adoraverunt, 
et  benedixerur.t  in  cœlum  eum  qui  prosperavit  eis. 


56.  Et  fecerunt  dedicationem  altaris  diebus  octo,  et 
obtulerunt  holocausta  cum  lœtitia,  et  sacrificium  salutaris 
et  laudis. 

57.  Et  ornaverunt  faciem  templi  coronis  aureis  et 
scutulis  ;  et  dedicaverunt  portas,  et  pastophoria,  et  impo- 
suerunt  eis  januas. 

}8.  Et  facta  est  lœtitia  in  populo  magna  valde,  et  aver- 
sum  est  opprobrium  gentium. 

59.  Et  statuit  Judas,  et  fratres  ejus,  et  universa  eccle- 
sia  Israël,  ut  agatur  dies  dedicationis  altaris  in  tempori- 
bus  suis,  ab  anno  in  annum,  per  dies  octo,  a  quinta  et 
vigesima  die  mensis  casleu,  cum  lœtitia  et  gaudio. 


5$,  Tout  le  peuple  se  prosterna  le  visage  contre  terre  ; 
ils  adorèrent  Dieu,  et  poussèrent  jusqu'au  ciel  les  béné- 
dictions qu'ils  donnaient  à  Celui  qui  les  avait  fait  réussir 
si  heureusement  dans  leur  entreprise. 

56.  Ils  célébrèrent  la  dédicace  de  l'autel  pendant  huit 
jours  :  Ils  offrirent  des  holocaustes  avec  joie,  et  un 
sacrifice  d'actions  de  grâces  et  de  louanges. 

57.  Ils  parèrent  le  devant  du  temple  avec  des  cou- 
ronnes d'or  et  de  petits  écussons  :  ils  renouvelèrent  les 
entrées  du  temple  et  les  chambres  des  côtés,  et  y  mirent 
des  portes. 

58.  Tout  le  peuple  fut  comblé  de  joie,  et  l'opprobre 
des  nations  fut  banni. 

59.  Alors  Judas,  avec  ses  frères  et  toute  l'assemblée 
d'Israël,  ordonna  que,  dans  la  suite  des  temps,  on  célé- 
brerait ce  jour-là  la  dédicace  de  l'autel,  chaque  année 
pendant  huit  jours,  à  commencer  le  vingt-cinquième  du 
mois  de  Casleu,  avec  beaucoup  de  réjouisance  et  d'allé- 
gresse. 


COMMENTAIRE 


livre  des  Maccabées  (1)  ajoute  que,  dans  cette 
cérémonie,  les  Juifs,  en  mémoire  de  ce  qu'ils 
avaient  passé  les  trois  années  précédentes  dans 
les  montagnes  et  dans  les  lieux  déserts,  imitèrent 
ce  qui  se  pratiquait  dans  la  fête  des  Tabernacles  ; 
ils  vinrent  au  temple  portant  des  branches  d'ar- 
bres touffues  et  des  palmes,  pour  reconnaître  le 
secours  qu'ils  avaient  reçu  du  Seigneur;  et,  afin 
de  perpétuer  le  souvenir  d'un  si  grand  bienfait, 
ils  ordonnèrent  qu'on  célébrerait  tous  les  ans 
cette  dédicace,  qu'ils  appellent  dans  leur  lettre  à 
leurs  concitoyens  d'Egypte  (2),  la  fêle  des  Taber- 
nacles du  mois  de  Casleu. 

f.  $7.  Ornaverunt  faciem  templi  coronis 
aureis  et  scutulis.  Ils  rétablirent  autant  qu'ils 
purent  la  façade  du  temple,  et  y  remirent  des 
ornements  pareils  à  ceux  qu'Antiochus  en  avait 
enlevés  (5).  Les  riches  dépouilles  qu'ils  avaient 
prises  sur  leurs  ennemis,  dans  les  diverses  vic- 
toires qu'ils  avaient  remportées  contre  eux,  leur 
en  fournissaient  les  moyens.  Les  anciens  ornaient 
souvent  l'entrée  de  leurs  temples  de  couronnes 
de  fleurs  et  de  verdure  (_j)  ;  mais  les  couronnes 
dont  on  parle  ici, étaient  d'or;  c'étaient  des  monu- 
ments des  victoires  des  Hébreux,  et  des  marques 
de  leur  reconnaissance  envers  le  Dieu  des  armées. 
Les  boucliers  étaient  de  même  matière  :  c'étaient 
comme  des  trophées  consacrés  à  la  gloire  du  Sei- 
gneur. Démosthène  parle  de  l'ancienne  coutume 
des  païens  de  conserver  des  couronnes  dans  leurs 


temples,  avec  des  inscriptions  ('-,)  ;  et  Plutarque 
raconte  que  Cléomène,  roi  de  Lacédémone,  fut 
chassé  d'Argos  par  les  femmes  de  cette  ville,  qui 
prirent  aux  temples  les  armes  qui  y  étaient  consa- 
crées (6).  Nous  verrons  plus  loin  (7),  que,  dans  le 
temple  d'Élymaïs,  il  y  avait  des  cuirasses  et  des 
boucliers  d'or,  qu'Alexandre  y  avait  laissés.  On 
remarque  au  même  endroit  (8),  qu'il  y  avait  des 
soldats  de  l'armée  d'Antiochus,  qui  portaient  des 
boucliers  d'or.  C'est  de  ces  boucliers  pris  sur 
l'ennemi,  qu'on  orna  la  façade  du  temple. 

).  59.  Ut  agatur  dies  dedicationis  altaris 
in  temporibus  suis.  Cette  fête  est  connue  dans 
l'Évangile  sous  le  nom  à'bncœnia  (9).  Jésus- 
Christ  se  trouva  au  temple  ce  jour-là,  et  c'était 
l'hiver. Quelques  anciens(io)ont  cru  qu'elle  regar- 
dait la  dédicace  du  temple  de  Zorobabel,  ou 
même  de  Salomon  (1 1);  mais  celle  du  temple  de 
Salomon  se  fit  au  mois  de  Thischri,  en  au- 
tomne (12);  cellede  Zorobabel, le  1 S  d'Adar(i3), 
qui  répond  à  février  et  à  mars.  Mais  celle-ci 
arriva  au  2}  de  Casleu.  qui  répond  à  novembre  et 
décembre.  Les  Juifs  la  célèbrent  à  la  lueur  des 
lampes  allumées,  ce  qui  lui  a  fait  quelquefois 
donner  le  nom  de  fête  des  lumières.  L'usage  de 
ces  illuminations  est  très  ancien,  puisque  Josèphe 
en  parle,  et  qu'il  en  donne  la  raison,  en  disant 
que  ces  lampes  sont  un  symbole  de  la  joie  dont 
furent  remplis  les  Juifs,  lorsqu'ils  furent  délivrés 
de  la  persécution   d'Antiochus.   Alors   une   nou- 


(1)  11.  Macc.  x.  6.  7. 

(2)  n.  Macc.  1.  9.  18. 
(?)  1.  Macc.  1.  2j. 
{A)  Virgil.  AZneid.  iv. 

Fuit  in  tectis  de  marmore  templum, 
Velleribus  niveis  et  festa  fronde  revinctum. 

(5)  Demosth.  orat.  contra  Andestion.  ad  fin. 

(6)  Plutarch.  Apophleg.  Laconica. 


(7)  1.  Macc.  vi.  2. 

(8)  Ibid.  f.   ?g. 

(9)  Joann.  x.  22. 

(10)  Chrvsost.  komil.  lxi.  in  Joan.  Tkeopkrlact.  Euthrm. 
Non  nus  Panopol. 

(11)  Theodor.  Mopsuesl. 
(12J  m.  Reg.  vin.  2. 
(ij)  1.  Esdr.  vi.  15. 


5' 


I. 


MACCABEES.  —  IV.  -  FORTIFICATIONS  DE  SION 


60.  Et  aedificaverunt  in  tempore  illo  montem  Sion,  et 
per  circuitum  muros  altos  et  turres  firmas,  ne  quando 
venirent  gentes,  et  conculcarent  eum,  sicutantea  fecerunt. 

61.  Et  collocavit  illic  exercitum  ut  servarent  eum,  et 
munivit  eum  ad  custodiendam  Bethsuram,  ut  haberet 
populus  munitionem  contra  faciem  Idumaeae. 


60.  En  ce  même  temps,  ils  fortifièrent  la  montagne  de 
Sion, et  l'environnèrent  de  hauts  murs  et  de  fortes  tours; 
de  peur  que  les  nations  ne  vinssent  la  profaner  de  nou- 
veau, comme  elles  avaient  fait  auparavant. 

61.  !1  mit  des  gens  de  guerre  pour  la  garder,  et  la 
fortifia,  pour  assurer  encore  Bethsura,  afin  que  le  peuple 
eût  une  forteresse  contre  l'Idumée. 


COMMENTAIRE 


velle  lumière  parut  à  leurs  yeux,  et  les  remplit  de 
consolation  (1).  Cette  explication  a  paru  trop 
simple  aux  rabbins:  il  a  fallu  y  chercher  du  mer- 
veilleux et  y  supposer  des  prodiges .  Antiochus 
ayant  protané  tout  ce  qui  se  trouva  d'huile  dans 
le  temple,  on  n'en  put  conserver  de  pure  qu'une 
petite  fiole,  qui  avait  heureusement  été  scellée 
par  le  grand  prêtre.  A  peine  cette  huile  aurait- 
elle  pu  suffire  pour  un  jour  aux  lampes  du  Saint  ; 
mais  Dieu  la  multiplia,  et  permit  qu'elle  durât 
pendant  toute  l'octave.  Pour  conserver  la  mé- 
moire de  ce  prodige,  les  Juifs  allumaient  des 
lampes  sur  leurs  fenêtres,  et  en  mettaient  d'abord 
un  nombre  égal  à  celui  des  personnes  qui  étaient 
dans  la  maison;  le  second  jour  de  la  fête,  ils  dou- 
blaient ce  nombre,  et  tous  les  jours  de  l'octave 
de  même,  en  sorte  qu'au  huitième  jour,  il  y  avait 
huit  lampes  pour  chaque  personne  (2).  Cet  usage 
existe  encore  aujourd'hui,  sinon  pour  autant  de 
personnes  que  renferme  la  maison,  au  moins  pour 
chaque  demeure.  Mais  cette  fête  dégénère  trop 
souvent  en  puérilités  et  même  en  grossièretés. 
«  Le  soir,  dit  l'ancien  rabbin  Drach,  quand  les 
lumières  dont  nous  venonsde  parler  sontallumées, 
on  fait  sauteries  enfants  par-dessus  à  plusieurs  re- 
prises; à  tous  les  repas  on  fait  de  l'extraordinaire; 
mais  le  samedi  qui  se  rencontre  dans  ces  jours  est 
consacré  à  de  véritables  orgies  :  j'ai  vu  plus  d'une 
fois  des  docteurs  en  Israël'wres  morts  s'exposer  aux 
risées  de  leurs  ouailles  pour  glorifier  Dieu  en  ce 
saint  jour  ;  les  écoles  sont  fermées  :  hommes,  fem- 
mes, enfants,  tout  le  monde   joue  aux   cartes   des 


sommes  considérables,  presque  sans  relâche,  jour 
et  nuit.  On  pense  bien  que  ces  jeux  sont  ordinaire- 
ment accompagnés  de  tricheries,  de  rixes  et  de  jure- 
ments affreux.  Voilà  comment  le  peuple,  autrefois 
peuple  de  Dieu,  dont  les  nations  étrangères 
admiraient  la  majesté  et  la  sainteté  du  culte, 
maintenant  déplorable  héritier  de  l'aveuglement 
et  de  la  réprobation  de  ses  pères  déicides,  pré- 
tend honorer  le  Dieu  infiniment  parfait!  » 

v.  61.  Munivit  eum  ad  custodiendam  Beth- 
suram, UT  HABERET  POPULUS  MUNITIONEM  CONTRA 
faciem  iDUMyCyE.  On  doit  remarquer  que,  pen- 
dant la  captivité  de  Babylone,  les  Iduméens 
s'étaient  avancés  dans  la  Judée,  et  en  avaient 
occupé  toute  la  partie  méridionale  (5).  Après  le 
retour  de  la  captivité,  ils  s'étaient  maintenus  dans 
la  possession  d'une  grande  partie  de  ce  territoire  ; 
et,  depuis  la  persécution  d'Antiochus,  ils  avaient 
continué  d'empiéter  sur  les  terres  des  Juifs; 
en  sorte  que  Judas,  pour  arrêter  leurs  progrès  et 
pour  se  mettre  à  couvert  de  leurs  courses,  jugea 
à  propos  de  fortifier  Bethsur,  dont  il  s'était  rendu 
maître  auparavant;  il  fortifia  encore  le  mont  Sion, 
afin  que  ces  deux  forteresses  pussent  se  soutenir 
l'une  l'autre.  Le  grec  peut  se  prendre  dans  un 
sens  assez  différent  de  celui  de  la  Vulgate  (4)  : 
//  fit  fortifier  Bethsura,  afin  d'avoir  une  forteresse 
contre  l'Idumée.  Ce  sens  paraît  plus  naturel  ('-,); 
Bethsur  mettait  Sion  à  couvert  du  côté  de  l'Idu- 
mée :  mais  Sion  ne  pouvait  que  soutenir  etsecourir 
Bethsur  attaquée  par  l'Idumée,  parce  qu'elle  était 
derrière, au  nordde  cette  ville. Voyez  Josué,xv,'-,ïï. 


(1)  Antiq.  I.  XII.  11.  Tî]v  lopT^v  ayo\xév  xaXoû'vrec;  au-rjv 
'iàjTa,  éx  toû  7tc/p  ÊXrLÔaç,  o'tu.ai,  TaÛTTjv  rju/tv  (pavfjvat  Tr,v 
éÇouiiav. 

(2)  Vide  si  placet  Selden  de  Syned.  t.  m.  c.  ij.  art.  9.  - 
Thalmud,  traité  schabbat. 


(?)  Vide  infra,  c.  v.  65.  et  xiv.  3J. 

(4)  Kat  or/ ùpwîav  auto  T7)peW  rîjv  Bottûaoûpav,  xoû  ïyav 
tov  Xàov  c/upojp.a  Kaïa  rpriaojKov  zffi  I'oauixota;. 

(<>)  Drus.  Grot.  Vat.  Comme  s'il  y  avait,  *ai  oj/ûpoiiav 
xrjv  Baiôaoïipav  T7)pE'.v     auto,  (opo;  Çuùv). 


CHAPITRE   V 

Guerres  de  Jiuia  contre  les  Jduméens  el  contre  les  Ammonites.  Expéditions  de  Simon  dans 
la  Galilée,  et  de  Judas  dans  le  pays  de  Galaad.  Joseph  et  Avarias  laissés  en  Judée, 
s'avancent  témérairement  contre  Gorgias,et  sont  vaincus.  Judas  revenu  en  Judée,  marche 
contre  les  Iduméens  et  contre  les  Philistins. 


i.  Et  factum  est,  ut  audierunt  gentes  in  circuitu,  quia 
asdilicatum  est  altare  et  sanctuarium  sicut  prius,  iratas 
sunt  valde  ; 

2.  Et  cogitabant  tollere  genus  Jacob  qui  erant  inter 
eos,  et  cœperunt  occidere  de  populo,  et  persequi. 


i.  Aussitôt  que  les  nations  d'alentour  eurent  appris 
que  l'autel  et  le  sanctuaire  avaient  été  rebâtis  comme 
auparavant,  elles  entrèrent  dans  une  grande  colère, 

2.  Et  résolurent  d'exterminer  ceux  de  la  race  de  Jacob 
qui  étaient  parmi  eux  ;  et  elles  commencèrent  à  tuer 
quelques  hommes  du  peuple,  et  à  poursuivre  les  autres- 


COMMENTAIRE 


f.    I.    UT  AUDIERUNT  GENTES   IN    CIRCUITU.    Ces 

peuples  sont  les  Iduméens,  les  Samaritains,  les 
Ammonites,  les  Moabites,  les  Philistins,  les  Phé- 
niciens. On  verra  dans  la  suite  de  ce  chapitre,  la 
manière  dont  ces  nations  se  mirent  à  persécuter 
les  Juifs,  chacune  dans  leur  pays.  On  remarque 
par  toute  l'histoire,  que  la  nation  des  Hébreux  a 
toujours  été  odieuse  aux  peuples  voisins,  et  que 
ceux-ci  n'ont  jamais  manqué  d'insulter  à  leurs 
malheurs,  et  de  se  joindre  à  leurs  ennemis,  lors- 
qu'ils en  ont  trouvé  l'occasion,  et  qu'ils  ont  cru 
pouvoir  le  faire  impunément. On  en  a  de  fréquents 
exemples  dès  le  temps  des  Juges,  et  sous  les 
rois,  mais  principalement  dans  la  guerre  de  Na- 
bucodonosor  contre  les  Juifs,  et,  après  le  retour 
de  la  captivité, durant  la  persécution  d'Antiochus, 
et  pendant  la  dernière  guerre  des  Romains.  Dieu 
se  servait  ainsi  de  la  haine  des  nations  païennes, 
ou  pour  exercer  sa  vengeance  contre  son  peuple, 
ou  mettre  sa  vertu  et  sa  force  dans  une  plus 
grande  évidence  par  la  persécution. 

Autant  le  démon  était  opposé  au  vrai  Dieu, 
autant  ces  nations  infidèles  ,  qu'il  gouvernait 
comme  ses  esclaves,  et  qu'il  remplissait  de  sa 
fureur,"  étaient  ennemies  du  peuple  consacré  à  ce 
Dieu  unique  et  tout-puissant.  La  grande  colère 
que  conçurent  ces  nations  contre  le  peuple  de 
Dieu,  qui  venait  de  rebâtir  son  autel  el  son  sanc- 
tuaire, était  donc  plutôt  la  colère  du  démon  qui  les 
animait  contre  le  Seigneur,  que  leur  colère  parti- 
culière contre  les  Hébreux  :  car  s'il  n'y  eûteu que 
la  différence  de  religion  entr'eux,  ces  infidèles 
auraient  dû  se  haïr  les  uns  les  autres,  en  adorant 
tous  des  dieux  différents.  Mais  comme  l'adoration 
de  tous  ces  dieux  et  de  toutes  ces  idoles  se  rap- 
portait uniquement  au  démon,  il  possédait  paisi- 
blement, selon  la  parole  de  Jésus-Christ,  tout  ce 
qui  lui  appartenait,  et  il  n'inspira  jamais  à  aucune 


de  ces  nations  de  persécuter  les  autres  au  sujet 
de  leur  religion,  parce  qu'au  fond,  sous  diffé- 
rentes formes,  elles  n'en  avaient  qu'une  seule 
toutes  ensemble,  qui  les  tenait  toutes  assujetties 
à  celui  qui  est  nommé  leur  père  commun  :  vos  ex 
pâtre  diabolo  estis. 

11  n'en  était  pas  de  même  de  la  religion  des 
Hébreux,  contre  laquelle  le  démon  faisait  éclater 
sa  fureur  en  toutes  rencontres,  parce  qu'elle  était 
la  seule  qui  s'opposât  à  la  sienne. 

Ce  fut  donc  pour  cette  raison  qu'il  anima  tous 
ces  peuples  idolâtres  contre  Israël,  et  qu'il  leur 
fit  prendre  la  résolution  d'exterminer  la  race  de 
Jacob  qui  se  trouvait  parmi  eux,  aussitôt  qu'ils 
eurent  appris  le  rétablissement  de  l'autel  et  du 
sanctuaire,  car  le  temple  de  Jérusalem  était  le 
seul  de  tout  l'univers  où  le  vrai  Dieu  était  adoré. 
Le  démon  se  flattait  que  la  destruction  de  ce 
temple  serait  l'affermissement  de  sa  tyrannie,  et 
de  son  usurpation  sacrilège  des  honneurs  divins. 
Mais  quel  excès  de  folie  à  cet  esprit  orgueilleux, 
de  se  promettre  de  pouvoir  vaincre  sur  la  terre 
Celui  qui  l'avait  précipité  du  haut  du  ciel;  et  à  ces 
peuples  idolâtres  d'entreprendre  d'exterminer  une 
race  destinée  à  triompher  de  toutes  les  nations 
en  leur  donnant  le  Messie. 

Ce  qui  se  passa  alors  était  une  image  de  ce  qui 
arrive  encore  tous  les  jours  dans  l'Église.  Le 
monde,  représenté  par  ces  nations,  ne  peut  man- 
quer de  haïr,  comme  l'assure  Jésus-Christ,  ceux 
qui  ne  sont  point  du  monde  ;  et  l'on  ne  doit  point 
prétendre  travailler  impunément  à  rebâtir  l'autel 
et  le  sanctuaire  du  Seigneur.  Les  princes  de  ce 
monde  ont  formé  le  projet  d'exterminer  la  race 
de  Jacob,  et  les  disciples  du  Fils  de  Dieu,  des- 
cendu, selon  son  humanité,  de  cet  ancien  patriar- 
che. Ils  ont  agi  en  ce  sens  dans  les  premiers  siè- 
cles de    l'Église,    lorsqu'ils   en   ont  fait    mourir 


6o 


MACCABEES. 


V.  -  VICTOIRES    DE  JUDAS  MACCABEE 


j.  Et  debellabat  Judas  filios  Esau  in  Idumasa,  et  eos 
qui  erant  in  Acrabathane,  quia  circumsedebant  Israelitas  ; 
et  percussit  eos  plaga  magna. 

4.  Et  recordatus  est  malitiam  filiorum  Bean,  qui  erant 
populo  in  laqueum  et  in  scandalum,  insidiantes  ei  in  via. 

Ç.  Et  conclusi  sunt  ab  eo  in  turribus,  et  applicuit  ad 
eos,  et  anathernatizavit  eos,  et  incendit  turres  eorum  igni, 
cum  omnibus  qui  in  eis  erant. 

0.  Et  transivit  ad  filios  Ammon,  et  invenit  manum  for- 
tem,  et  populum  copiosum,  et  Timotheum,  ducem  ipso- 
rum  ; 

7.  Et  commisit  cum  eis  prœlia  multa,  et  contriti  sunt 
in  conspectu  eorum,  et  percussit  eos  ; 

8.  Et  cepit  Gazer  civitatem  et  filias  eius,  et  reversus 
est  in  Judasam. 


j.  Cependant  Judas  était  occupé  b  battre  les  enfants 
d'Ésaii  dans  l'Idumée,  et  ceux  qui  étaient  dans  l'Acraba- 
tène,  parce  qu'ils  tenaient  toujours  les  Israélites  comme 
investis  ;  et  il  en  fit  un  grand  carnage. 

4.  Il  se  souvint  aussi  de  la  malice  des  enfants  de  Béan, 
qui  étaient  comme  un  piège  et  un  filet  pour  prendre  le 
peuple,  en    lui  dressant  des   embûches   dans  le    chemin. 

5.  Il  les  contraignit  de  se  renfermer  dans  des  tours,  où 
il  les  tint  investis  ;  et  il  les  anathématisa,  et  brûla  leurs 
tours  avec  tous  ceux  qui  étaient  dedans. 

6.  Il  passa  de  là  aux  enfants  d'Ammon,  où  il  trouva  de 
fortes  troupes  et  un  peuple  nombreux,  dont  Timothée 
était  le  chef. 

7.  Il  leur  livra  divers  combats  ;  et  il  les  défit,  et  les 
tailla  en  pièces  ; 

8.  Et  il  prit  la  ville  de  Gazer  avec  les  villes  qui  en  dé- 
pendaient :  après  quoi  il  revint  en  Judée. 


COMMENTAIRE 


plusieurs,  et  persécuté  les  autres;  ils  continuent  de 
le  faire  d'une  manière  plus  subtile  dans  la  suite  de 
tous  les  siècles.  S'ils  ne  tuent  pas  à  présent  les 
corps,  ils  s'appliquent  avec  encore  plus  d'artifice 
à  tuer  les  âmes. 

Mais  quand  tout  semble  perdu  ou,  au  moins, 
très  compromis,  Dieu  suscite  les  hommes  de  son 
choix  qui  brisent  tous  les  obstacles,  et  rétablis- 
sent ici-bas  le  règne  de  la  religion. 

jfr.  }.  Debellabat  filios  Esau  in  Idum^ea,  et 
eos  qui  erant  in  Acrabathane.  Le  grec  (  i  )  et  le 
syriaque  lisent  :  Il  combattait,  ou  il  faisait  la 
guerre  aux  fils  d'Esaii  dans  l'Idumée,  dans  l'Acra- 
batène; ou,  selon  le  ms.  Alexandrin  :  Dans  la 
Judée,  vers  ÏAcrabalène.  L'un  et  l'autre  est  vrai. 
La  Judée,  ou  le  partage  de  Juda,  comprenait  au 
moins  en  partie  l'Acrabatène,  et' l'Idumée  lui  était 
limitrophe.  De  plus,  les  Iduméens  s'étant  jetés 
dans  les  montagnes  de  Juda,  ou  s'en  étant  mis  en 
possession  (2),  l'Acrabatène  qui  en  ta'.sait  partie, 
était  aussi,  en  ce  sens,  dans  l'Idumée.  On  place 
l'Acrabatène  vers  l'extrémité  méridionale  de  la 
mer  Morte,  sur  la  frontière  d'Idumée;  c'est  ce 
défilé  qui  est  nommé  dans  Moïse  (3),  la  Montée 
des  Scorpions.  =»2-p»  'Aqrabîm,  en  hébreu,  signi- 
fie des  scorpions;  ils  étaient  apparemment  com- 
muns en  ces  parages  (4). 

Quia  circumsedebant  Israelitas.  Il  les  enve- 
loppaient en  quelque  sorte  (5),  et  les  tenaient 
comme  assiégés  dans  leur  propre  pays, les  empè  ■ 
chant  de  s'établir,  et  de  s'étendre  dans  les  quar- 
tiers méridionaux  de  Juda. 

jh    4.    Recordatus    est    malitiam   filiorum 


Bean.  On  ne  sait  pas  qui  étaient  les  enfants  de 
Béan;  les  uns  croient  que  Béan  était  un  ancien 
roi,  ou  un  patriarche,  dont  les  descendants  ten- 
daient des  pièges  aux  Israélites,  et  en  faisaient 
périr  plusieurs  dans  leurs  embuscades.  D'autres 
veulent  que  Béan  soit  le  nom  d'une  ville  de  ce 
pays.  On  connaît  dans  les  environs  de  la  mer 
Morte  la  ville  de  Béon  (6),  qui  pourrait  bien 
être  celle  dont  il  s'agit  ici.  D'autres  (7)  prennent 
Béan  pour  la  Bathanée,  province  de  delà  le  Jour- 
dain. 

f.  5.  Anathematizavit  eos.  Il  résolut  de  les 
exterminer  entièrement,  et  de  n'en  rien  réserver. 
Il  y  avait  plus  d'une  manière  d'anathème.  Voyez 
notre  commentaire  sur  le  Lévilique,  xxvn,  28. 
Quelquefois  on  dévouait  en  général  tout  ce 
qui  se  rencontrait  dans  le  pays  ennemi,  depuis  les 
hommes  jusqu'aux  animaux  :  d'autres  fois  on 
mettait  quelque  restriction  à  ce  dévouement  ;  on 
le  restreignait  aux  champs,  aux  maisons,  aux 
biens  meubles  et  aux  animaux  (8).  Ce  qui  était 
exprimé  dans  le  vœu,  était  dévoué,  et  rien  autre 
chose.  Il  y  a  quelques  circonstances  de  cette 
guerre  qu'on  ne  lit  pas  ici,  et  qu'on  trouvera 
1 1  Macc.  x,  16...  23. 

f.  6.  Transivit  ad  filios  Ammon,  et  invenit... 
Timotheum,  ducem  ipsorum.  Ce  Timothée  est 
fort  différent  d'un  autre  du  même  nom,  dont  on 
parlera  au  verset  ri.  Judas  attaqua  les  Ammo- 
nites avec  tant  de  vigueur,  qu'il  les  défit,  et  les 
dispersa  entièrement. 

f.  8.  Et  cepit  Gazer...  et  reversus  est  in 
Jud^am.  Le  grec,  dans  les  meilleurs    exemplai- 


(1)  Ka't  èno).S[i.ei  I"oû8a;  r.pô;  toIiç  ûiou:  E  aau  iv  TÎJ 
I'oeMj.ai'a  t^v  A'xpaSativrjv.  Ms.  Alex.  E'v  tf,  l 'ouSat'a 
ttjv  A'xpa6*t(vr|v.  Joseph.  I.  XII.  c.  n.Toî;  Ioou>.ùaoi;  /.ai' 
Arxpoc6Eliv*]V- 

(2)  Voyez  le  chapitre  précédent,  verset  61,  et  plus 
bas  verset  65  et  le  chapitre  VI,  verset  48. 

(?)  Num.  xxxiv.  4.  -  Vide  et  Josue  xv.  j.  -  Judic.   t.  36. 


(4)  Deut.  vin.   15. 

(5)  Ilepi7]y.à0r]vto  xov   I'oparjX.   Syr.  Cum    Israël itis   de- 
gebant. 

(6;  Num.  xxxn.  ;.  Ita  Tirin.  et  a!ii. 

(7)  Vide  Serar  et  Fullon. 

(8)  Num.  xxt.  1.  -  Deut.  vu    26;xm.  17.-  Josue.  VI.  17. 


!.  -    MACCABÉES.  -  IV.  -  COALITION    ÉTRANGÈRE 


61 


9.  Et  congregatas  sunt  gentes  quae  sunt  in  Galaad,  ad- 
versus  Israelitas  qui  erant  in  finibus  eorum,  ul  tollerent 
eos  ;  et  fugerunt  in  Datheman  munitionem. 

10.  Et  miserunt  litteras  ad  Judam  et  fratres  ejus,  di- 
santes :  Congregatae  sunt  adversum  nos  gentes  per  circui- 
tum,  ut  nos  auferant  ; 

n.  Et  parant  venire,  et  occupare  munitionem  in  quam 
confugimus  ;  et  Timotheus  est  dux  exercitus  eorum. 

12.  Nunc  ergo  veni,  et  eripe  nos  de  manibus  eorum, 
quia  cecidit  multitudo  de  nobis. 

Ij.  Et  omnes  fratres  nostri  qui  erant  in  locis  Tubin 
interfecti  sunt  ;  et  captivas  duxerunt  uxores  eorum,  et 
natos,  et  spolia,  et  peremerunt  illic  fere  mille  viros. 

14.  Et  adhuc  epistolas  legebantur,  ecce  alii  nuntii  vene- 
runt  de  Galilœa,  conscissis  tunicis,  nuntiantes  secundum 
verba  hsec  : 

M.  Dicentes  convenisse  adversum  se  a  Ptolemaida,et 
Tyro,  et  Sidone  ;  et  repleta  est  omnis  Galilasa  alieni- 
genis,  ut  nos  consumant. 


çj.  Cependant  les  nations  qui  étaient  en  Galaad  s'assem- 
blèrent pour  exterminer  les  Israélites  qui  étaient  dans 
leur  pays  ;  mais  ils  s'enfuirent  dans  la  forteresse  de  Da- 
theman ; 

10.  Et  ils  envoyèrent  des  lettres  à  Judas  et  à  ses 
frères,  pour  leur  dire  :  Les  nations  se  sont  assemblées 
de  tous  côtés  pour  nous  perdre  ; 

1 1.  Elles  se  préparent  pour  venir  prendre  la  forteresse 
où  nous  nous  sommes  retirés  ;  et  Timothée  est  le  général 
de  leur  armée. 

12.  Venez  donc  promptement  pour  nous  délivrer  de 
leurs  mains,  parce  que  nous  avons  déjà  perdu  beaucoup 
des  nôtres. 

Ij.  Ils  ont  fait  mourir  tous  nos  frères  qui  étaient  aux 
environs  de  Tubin  :  ils  ont  emmené  leurs  femmes  capti- 
ves avec  leurs  enfants  ;  ils  ont  enlevé  leurs  dépouilles, 
et  ont  tué  en  ce  lieu  près  de  mille  hommes. 

14.  On  lisait  encore  leurs  lettres,  lorsqu'il  vint  d'autres 
gens  envoyés  de  Galilée,  qui  avaient  leurs  habits  déchi- 
rés, et  qui  apportaient  des  nouvelles  semblables  aux 
autres, 

15.  En  disant  qu'on  s'était  assemblé  de  Ptolémaïs, 
de  Tyr  et  de  Sidon,  contre  eux,  et  que  toute  la  Galilée 
était  pleine  d'étrangers  qui  voulaient  les  perdre. 


COMMENTAIRE 


res  (  1  ),  lit  ïa\er. Cette  ville  est  célèbre  au-delà  du 
Jourdain  (2).  Elle  est  à  la  source  d'une  petite 
rivière  nommée  Jazer,  qui  tombe  dans  le  Jour- 
dain. Après  le  retour  de  Judas  dans  la  Judée, 
arriva  la  guerre  dont  il  est  parlé  11  Macc.  x, 
24...  38,  où  Timothée  fut  mis  à  mort.  Voyez  cet 
endroit. 

f.  9.   CONGREGATAE  SUNT    GENTES     QVM    SUNT  IN 

Galaad,  adversus  Israelitas.  Avant  même  la 
captivité  de  Babylone,  et  sur  le  déclin  des  royau- 
mes de  Juda  et  d'Israël,  les  Ammonites  et  les 
Moabites  s'étaient  emparés  de  presque  toutes  les 
terres  des  Israélites  au-delà  du  Jourdain.  Cet 
empiétement  est  signalé  dans  divers  passages  des 
prophètes  (3}.  Depuis  le  retour  de  la  captivité,  il 
est  probable  que  plusieurs  Israélites  des  dix  tri- 
bus profitèrent  de  la  liberté  accordée  à  Juda,  et 
se  rétablirent  dans  leur  ancien  pays,  et  dans  l'hé- 
ritage de  leurs  ancêtres;  ils  y  vécurent  en  paix 
tant  que  les  rois  du  pays  leur  accordèrent  quel- 
que protection  ;  mais  depuis  l'édit  d'Antiochus, 
qui  les  obligeait  à  quitter  leur  religion,  tous  les 
peuples  voisins  et  ennemis,  se  crurent  permis  de 
les  opprimer;  ils  se  joignirent  avec  plaisir  aux 
troupes  d'Antiochus  pour  leur  faire  la  guerre. 

Fugerunt  in  Datheman  munitionem.  On 
ignore  la  situation  de  cette  forteresse.  Quelques 
auteurs  la  confondent  avec  Rathma,   dont  il  est 


parlé  dans  les  Nombres  (4).  Dom  Calmet  se  de- 
mande si  ce  ne  serait  point  la  ville  de  Péira, 
quelquefois  nommée  Botamanis  (=i)  ï 

f.  1 1.  Timotheus  est  dux  exercitus  eorum. 
Ce  n'est  pas  celui  dont  il  est  parlé  au  ,v.  6  :  il  avait 
été  tué  avec  son  irère  Chéréasà  Gazara(6),  l'année 
précédente.  Ou,  si  c'est  le  même,  il  faut  admettre 
qu'il  aurait  survécu  à  ses  blessures  ;maisl'auteur  du 
second  livre  des  Maccabées  dit  positivement  qu'il 
fut  tué. 

f.  13.  In  locis  Tubin.  C'est  la  terre  de  Tob 
au-delà  du  Jourdain,  au  midi  de  la  tribu  de 
Gad(7). 

v.  1 5.  Convenisse  adversum  se  a  Ptolemaida; 
et  repleta  est  omnis  Galilœa  alienigenis.  Le 
grec  (8)  :  Et  que  toute  la  Galilée  des  étrangers 
était  assemblée  contre  eux.  Cette  Galilée  des  étran- 
gers, est  la  même  que  la  Galilée  des  gentils,  con- 
nue dans  l'ancien  et  dans  le  nouveau  Testa- 
ment (oj.  Elle  portait  ce  nom,  parce  qu'elle  était 
occupée  par  les  peuples  païens,  au  lieu  que  le 
reste  du  pays  appartenait  aux  Israélites.  Voyez 
sur  cette  persécution  ce  qui  est  dit,  il.  Macc. 
vi.  8.  Elle  fut  excitée  par  un  édit  du  roi  rendu  à 
la  sollicitation  des  habitants  de  Ptolémaïs.  Pto- 
lémaïs, aujourd'hui  Akka,  est  un  petit  port  de 
mer,  à  l'embouchure  de  la  Nahr  Namân,  l'ancien 
Bélus,  à  trois  lieues  au  nord  de  la  pointe  du  Car- 


(1)  I'aÇjjp.  Ita  Edit.  Rom.  Aldi,  Basil,  et  Ms.  Alex.  Sola 
Edit.  Complut.  TaÇrip. 

(:)  Num.  xxi.  ?2-  -  Josue  xm.  25. 

(i)Jcrem.  xnx.  1.  -  E^ech.  xxv.  2.-  Amos.  1.  ij.  etc. 

(4)  Num.  xxxiu.  18.  19.  -  Drus,  nom  Rathma.  nnm 
Dalhma.  Les  lettres  sont  presque  semblables. 


(')  Serapion  cap.  de  Bdellio  apud  Ortel. 
(6;  11.  Macc.  x.  57. 

(7)  Vide  Judic.  xi.  î.  et  5. 

(8)  E'nauvfjy^Oat  ir.'    ocutoj;....    7:âaïjç   Ta^iXala;  siXXo- 
çjXcjv.  Ms.  Alex,  nâjav  Ta)aXatav. 

,(9)  Isai.  ix.   1  -  Malt.  iv.  15. 


62 


I.  —   MACCABÉES.  —  V.  -   EXPÉDITIONS   DE  JUDAS   ET  DE  SIMON 


16.  Ut  audivit  autem  Judas  et  populus  sermones  istos, 
convertit  ecclesia  magna  cogitare  quid  facerenl  fratribus 
suis  qui  in  tribulatione  erant,  et  expugnabantur  ab  eis. 


17.  Dixitque  Judas  Simoni,  fratri  suo  :  Elige  tibi  viros, 
el  vade,  et  libéra  fratres  tuos  in  Galilaea  ;  ego  autem  et 
frater  meus  Jonathas  ibimus  ir>  Galaaditim. 

18.  Et  reliquit  Josephum,  filium  Zacl.ariae,  et  Azariam, 
duces  populi,  cum  residuo  exercitu  in  Judasa  ad  custo- 
diam. 

19.  Et  prascepit  il  lis,  dicens  :  Praeestote  populo  huic, 
et  nolite  bellum  committere  adversum  gentes,  donec 
revertamur. 

20.  Et  partiti  sunt  Simoni  viri  tria  mil  lia,  ut  iret  in 
Galilasam  ;  Judas  autem  octo  millia  in  Galaaditim. 

21.  Et  abiit  Simon  in  Galilasam,  et  commisit  prselia 
multa  cum  gentibus,  et  contritas  sunt  gentes  a  facie  ejus  ; 
et  persecutus  est  eos  usque  ad  portam 

22.  Ptolemaidis,  et  ceciderunt  de  gentibus  fere  tria 
millia  virorum,  et  accepit  spolia  eorum  ; 

2j.  Et  assumpsit  eos  qui  erant  in  Galilaea  et  in  Arbatis, 
cum  uxoribus,  et  natis,  et  omnibus  quae  erant  illis,  et 
adduxit  in  Judaeam  cum  lastitia  magna. 

24.  Et  Judas  Machabasuset  Jonathas,  fraterejus,  transie- 
runt  Jordanem,  et  abierunt  viam  trium  dierum  per  de- 
sertum. 

2Ç.  Et  occurrerunt  eis  Nabuthœi,  et  susceperunt  eos 
pacifiée  ;  et  narraverunt  eis  omnia  quas  acciderant  fra- 
tribus eorum  in  Galaaditide, 


16.  Judas  et  tout  le  peuple  ayant  appris  ces  nouvelles, 
tinrent  une  grande  assemblée,  afin  de  délibérer  sur  ce 
qu'ils  feraient  pour  secourir  leurs  frères  qui  étaient  dans 
la  dernière  affliction,  et  près  de  périr  par  la  violence  de 
leurs  ennemis. 

17.  Alors  Judas  dit  à  son  frère  Simon  :  Prenez  des 
gens  avec  vous,  et  allez  délivrer  vos  frères  qui  sont 
dans  la  Galilée  ;  pour  moi  et  mon  frère  Jonathas,  nous 
irons  en  Galaad. 

18.  Il  laissa  Joseph,  fils  de  Zacharie,  et  Azarias,  pour 
être  les  chefs  du  peuple  et  pour  garder  la  Judée  avec  le 
reste  des  troupes. 

19.  Et  il  leur  donna  cet  ordre  :  Gouvernez  ce  peuple, 
et  ne  combattez  point  contre  les  nations,  jusqu'à  ce  que 
nous  soyons  revenus. 

20.  On  donna  à  Simon  trois  mille  hommes,  pour  aller 
en  Galilée  ;  et  à  Judas  huit  mille,  pour  aller  en  Galaad. 

21.  Simon  étant  donc  allé  dans  la  Galilée,  livra  plu- 
sieurs fois  combat  aux  nations,  qui  furent  défaites,  et 
s'enfuirent  devant  lui  ;  et  il  les  poursuivit  jusqu'à  la 
porte  de  Ptolémaïs. 

22.  Il  y  en  eut  près  de  trois  mille  de  tués  ;  il  emporta 
leurs  dépouilles. 

2;.  Il  prit  avec  lui  ceux  de  leurs  frères  qui  étaient 
dans  la  Galilée  et  dans  Arbates,  avec  leurs  femmes  et 
leurs  enfants,  et  tout  ce  qui  leur  appartenait  ;  et  il  les 
emmena  en  Judée  dans  une  grande  réjouissance. 

24.  Cependant  Judas  Maccabée  et  Jonathas  son  frère 
ayant  passé  le  Jourdain,  marchèrent  durant  trois  jours 
dans  le  désert. 

25.  Et  les  Nabathéens  vinrent  au  devant  d'eux;  et  ils 
les  reçurent  avec  amitié,  et  ils  leur  racontèrent  tout  ce 
qui  était  arrivé  à  leurs  frères  en  Galaad, 


COMMENTAIRE 


mel.  C'est  la  ville  de  Saint-Jean  d'Acre  assiégée 
en  1799  par  le  général  Bonaparte. 

f.  18.  Reliquit  Josephum  et  Azariam,  duces 
populi.  On  ne  connaît  ces  deux  personnages,  que 
par  la  mauvaise  manière  dont  ils  s'acquittèrent  de 
l'emploi  qui  leur  avait  été  confié.  Voyez  jh  57.  et 
suivants. 

f.  23.  Eos  qui  erant  in  GaliL/EA  et  in  Arba- 
tis adduxit  in  Jud/eam.  77  amena  en  Judée  ceux 
qui  étaient  en  Galilée  et  à  Arbates,  afin  de  les  sous- 
traire à  la  violence,  et  à  la  fureur  de  leurs  enne- 
mis ;  c'était  aussi  une  excellente  politique  de 
réunir  ainsi  leurs  forces,  en  ramassant  dans  la  Ju- 
dée, alors  fort  déserte  par  la  fuite  et  la  désertion 
des  habitants,  tout  ce  qu'il  y  avait  d'Israélites  aux 
environs.  Judas  suivit  la  même  ligne  de  conduite 
enversceux qu'il  trouva  dans  le  paysde  Galaad (i). 

On  ne  connaît  en  Galilée  aucune  ville  du  nom 
d' Arbates.  Des  commentateurs  croient  avec  assez 
de  vraisemblance  que  ce  terme  est  pris  de  l'hé- 
breu Arboth  (2),  qui  signifie  des  lieux  incultes  et 
des  plaines,  comme  les  plaines   ou  les  Arboth   de 


Moab,  dont  il  estparlé  dans  Moïse  (j).  Il  faut  aussi 
mettre  le  nom  d'Arbales,  au  lieu  d'Arbêles,  au 
chapitre  ix.  ^.  2.  Ces  Arboihs  désignent  les  plai- 
nes, la  contrée  qui  s'étend  des  deux  côtés  du 
Jourdain  et  de  la  mer  Morte.  On  les  prend  tantôt 
pour  la  campagne  de  Jéricho  (4),  tantôt  pour 
celle  de  Moab  (=,). 

JL24.  Abierunt  viamtrium  dierum  per  deser- 
tum.  Judas  passa  sans  doutele  Jourdain  à  Bethsan, 
au  même  endroit  où  il  le  repassa  à  son  retour.  De 
là  à  Bosor,  et  aux  autres  villes  dont  on  va  parler, 
il  ne  faut  guère  moins  de  trois  jours  de  marche, 
surtout  à  des  gens  qui  veulent  surprendre  leurs 
ennemis, et  cacher  leur  présence  ;  aussi  marchent- 
ils  dans  le  désert. 

f.  25.  Nabuth^i.  Les  Nabathéens  descendus  de 
Nabajoth  (0),  fils  aîné  d'ismaêl,  étaient  très  in- 
fluents dans  l'Arabie  Pétrée  ;  leur  capitale  était 
Pétra  ;  la  manière  dont  ils  parlent  à  Judas  et  aux 
siens,  fait  voir  qu'ils  étaient  amiset  alliés  des  Israé- 
lites, que  les  Ammonites  et  les  Moabites  persé- 
cutaient. . 


(1)  Verset  4s. 

(2)  pis"!»  Grol.  hic. 

(?)  Num.  xxu.  1;  xxvi.  oj;    xxxin.  48.  -  Deut.  1.  I.  etc. 


(4)  Gènes,  xxv.  ij. 

{<,)  Josue  v.  10. 

(6)  Deutêron.  xxxiv.  1. 


I.  —  MACCABÉES.  —  V.  -  VICTOIRE    DE  JUDAS 


6j 


2b.  Et  quia  multi  ex  eis  comprehensi  sunt  in  Barasa, 
et  Bosor,  et  in  Alimis,  et  in  Casphor,  et  Mageth,  et  Car- 
naim  ;  hae  omnes  civitates  munita?  et  magna;. 

27.  Sed  et  in  ceteris  civitatibus  Galaaditidis  teneniur 
comprehensi,  et  in  crastinum  constituerunt  admovere 
exercitum  civitatibus  his,  et  comprehendere,  et  tollere 
eos  in  una  die. 

28.  Et  convertit  Judas,  et  exercitus  ejus,  viam  in  deser- 
tum  Bosor  repente,  et  occupavit  civitatem  ;  et  occidit 
omnem  masculum  in  ore  gladii,  et  accepit  omnia  spolia 
eorum,  et  succendit  eam  igni. 

29.  Et  surrexerunt  inde  nocte,  et  ibant  usque  ad  muni- 
tionem. 

50.  Et  factum  est  diluculo,  cum  élevassent  oculos 
suos,  ecce  populus  multus  cujus  non  erat  numerus, 
portantes  scalas  et  machinas,  ut  comprehenderent  muni- 
tionem,  et  expugnarent  eos. 

jl.  Et  vidit  Judas  quia  ccepit  bellum,  et  clamor  bel l ï 
ascendit  ad  ccelum  sicut  tuba,  et  clamor  magnus  de  civi- 
tate  ; 

j2.  Et  dixit  exercitui  suo  :  Pugnate  hodie  pro  fratribus 
vestris. 

??•  Et  venit  tribus  ordinibus  post  eos  ;  et  exclamave- 
runt  tubis,  et  clamaverunt  in  oratione. 

54.  Et  cognoverunt  castra  Timothei  quia  Machabaeus 
est,  et  refugerunt  a  facie  ejus  ;  et  percusserunt  eos  plaga 
magna,  et  ceciderunt  ex  eis  in  die  illa  fere  octo  millia 
virorum. 


25.  Et  comment  plusieurs  d'entre  eux  avaient  été  enfer- 
més dans  Barasa, dans  Bosor,  dans  AIimas,dans  Casphor, 
dans  Mageth  et  dans  Carnaïm,  qui  étaient  toutes  de 
grandes  et  fortes  villes. 

27.  Ils  ajoutèrent  qu'on  les  tenait  encore  enfermés 
dans  les  autres  villes  de  Galaad,  et  que  leurs  ennemis 
avaient  résolu  de  faire  marcher,  le  lendemain,  leur  ar- 
mée contre  ces  villes,  afin  de  les  prendre,  et  de  les  per- 
dre tous  en  un  même  jour. 

28.  Judas  marcha  aussitôt  avec  son  armée  vers  le  dé- 
sert de  Bosor,  et  surprit  la  ville  tout  d'un  coup  :  il  fit 
passer  tous  les  hommes  au  fil  de  l'épée,  et  enleva  tout 
le  butin  qu'il  trouva,  et  y  mit  le  feu. 

29.  Ils  en  sortirent  pendant  la  nuit,  et  marchèrent  jus- 
qu'à la  forteresse. 

;o.  Et,  au  point  du  jour,  levant  les  yeux,  ils  aperçu- 
rent une  troupe  innombrable  de  gens  qui  portaient  des 
échelles  et  des  machines  pour  se  saisir  de  cette  forte- 
resse, et  prendre  les  Juifs. 

ji.  Judas  vitdonc  que  l'attaque  était  déjà  commencée, 
et  que  le  bruit  des  combattants  montait  jusqu'au  ciel, 
comme  le  son  éclatant  d'une  trompette  ;  et  qu'il  s'éle- 
vait aussi  un  grand  cri  de  la  ville. 

;j.  Alors  il  dit  à  son  armée  :  Combattez  aujourd'hui 
pour  vos  frères. 

j;  Et  il  marcha  en  trois  corps  derrière  les  ennemis  : 
ils  firent  en  même  temps  retentir  les  trompettes,  et  pous- 
sèrent des  cris  mêlés  à  leurs  prières. 

54.  Les  gens  de  Timothée  reconnurent  aussitôt  que 
c'était  Maccabée,  et  ils  fuirent  devant  lui.  Judas  en  fit 
un  grand  carnage  ;  et  il  en  demeura  ce  jour-là  près  de 
huit  mille  sur  place. 


COMMENTAIRE 


f.   26.     MULTI    COMPREHENSI    SUNT    IN     BARASA. 

On  les  tenait  enfermés  dans  les  villes  où  ils  se 
trouvaient,  et  on  était  résolu  de  les  y  exterminer, 
sans  les  en  laisser  sortir.  Barasa,  ou  Bosorra  se- 
lon le  grec  et  Josèphe,  est  apparemment  la  même 
que  Bolsrâh,  ville  de  Moab,  dont  parle  Jéré- 
mie  (1),  qu'on  croit  différente  d'une  autre  Bols- 
râh dans  l'Idumée  (2). 

Et  Bosor,  et  in  Admis.  Dans  Bosor,  dans 
Alimas. Bosor  vient  d'une  racine  hébraïque  (3)  qui 
signifie  fortifier,  défendre  ;  ainsi  il  ne  doit  pas 
paraître  étonnant  que,  dans  l'Arabie,  on  trouve 
plus  d'une  ville  de  ce  nom.  Alimas  est  apparem- 
ment la  même  qu'É/z'mdans  le  pays  de  Moab, dont 
parle  lsaïe  (4).  Le  grec  peut  se  prendre  en  cet  au- 
tre sens  :  Dans  Bosor  qui  est  près  d'Alem  ;  peut-être 
conviendrait-il  de  le  lire,  à  Béer  près  d  Alem  (5). 

Casphor.  On  croit  avec  raison  qu'il  faut  lire  ici 
comme  au  f.  36,  Casbon,  au  lieu  de  Casphor  ;  on 
ne  connaît  aucune  ville  du  nom  de  Casphor,  mais 
Casbon  ou  Chesbon,  ou  Hésébon,  est  fort  connue 


dans  l'Écriture  ;  elle  appartenait  autrefois  au  roi 
Séhon  (6)  ;  elle  fut  ensuite  donnée  à  la  tribu  de 
Ruben  (7),  et  enfin  elle  retourna  aux  Moabites, 
qui  en  avaient  été  les  premiers  possesseurs  (8). 

Mageth,  ou,  comme  porte  le  grec,  Maked; 
peut-être  la  même  que  Machali,  dont  il  est  parlé 
dans  Moïse  (9)  et  dans  Josué^io).  C'est  la  pen- 
sée de  plusieurs  commentateurs,  et  on  ne  voit 
d'autre  objection  à  cette  conjecture,  que  l'éloi- 
gnement  de  Machati,  qui  était  vers  l'extrémité  du 
partage  de  Manassé  au  nord  de  Galaad. 

Carnaïm,  ou  Aslarolli-Carnaim  (1 1).  Elle  est 
nommée  Camion  dans  le  second  livre  des  Mac- 
cabées(  1 2).  Les  auteurs  profanes  l'ont  connue  sous 
le  nom  de  Carna  (1  ]).  Elle  est  située  au  pays  de 
Galaad,  et  on  croit  qu'elle  tire  son  nom  d'As- 
tarté,  ou  de  la  Lune,  qui  était  adorée  avec  des 
cornes  ;  c'est  ce  que  signifie  Carnaïm. 

$.  29.  Ibant  usque  ad  munitionem.  Ils  mar- 
chèrent jusqu'à  la  forteresse  de  Dathéman,  où  la 
plupart  des  Juifs  s'étaient  retirés  (14). 


(1)  Jercm.  xlviii.  24. 

(2)  Gènes,  xxxvi.  jj.  -  1.    Par.   1.    44.  -   Isai.   xxxtv.  6, 

LXI1I.   1. 

(j)  11X3  de  ^23  bdlsar. 

(4)  Isai.  xv.  8.  Usque     ad    puteum    Elim  clamor  ejus 
ou  usque  ad  Béer  Elim  clamor  ejus. 

(!,)  Koô  Boaop  év  AX^aoi;. 

(6)  Num.  xxi.  26.  et  suw.  -  Deut.  1.  4.  n.  24.  etc. 


(7)  Num.  xxxii.  J7. 

(8)  Voyez  Isai.  xv.  4;  xvi.  8.  -  Jercm.  xlvii.  2.  etc. 

(9)  Deut.  m.   14. 

(10)  Josue.  xiii.  1?. 
(ri)  Gènes,  xiv.  ;. 
(12)  11.  Macc.  xii.  26. 
(1?)  Plolcm.  Strabo. 
(14)  Verset  9. 


64 


I.  —  MACCABÉES.—  V.  -  ARMÉE   DE  TIMOTHÉE 


55.  Et  divertit  Judas  in  Maspha  ;  et  expugnavit,  et 
cepit  eam,  et  occidit  omnem  masculum  ejus,  et  sumpsit 
spolia  ejus,  et  succendit  eam  igni. 

j6.  Inde  perrexit,  et  cepit  Casbon  et  Mageth,  et  Bosor, 
et  reliquas  civitates  Galaaditis. 

57.  Post  hase  autem  verba  congregavit  Timotheus  exer- 
citum  slium,  et  castra  posuit  contra  Raphon,  trans  tor- 
rentem. 

j8.  Et  misit  Judasspeculari  exercitum,et  renuntiaverunt 
ei,  dicenles  :  Quia  convenerunt  ad  eum  omnes  gentes 
quae  in  circuitu  nostro  sunt,  exercitus  multus  nimis  ; 

J9.  Et  Arabas  conduxerunt  in  auxilium  sibi  ;  et  castra 
posuerunt  trans  torrentem,  parali  ad  te  venire  in  pras- 
lium.  Et  abiit  Judas  obviam  illis. 

40.  Et  ait  Timotheus  principibus  exercitus  sui  :  Cum 
appropinquaverit  Judas  et  exercitus  ejus  ad  torrentem 
aquae,  si  transierit  ad  nos  prior,  non  poterimus  sustinere 
eum,  quia  polens  poterit   adversum  nos  ; 

41.  Si  vero  timuerit  transire,  et  posuerit  castra  extra 
flumen,  transfretemus  ad  eos,  et  poterimus  adversus 
illum. 

42.  Ut  autem  appropinquavit  Judas  ad  torrentem  aquae, 
statuit  scribas  populi  secus  torrentem,  et  mandavit  eis 
dicens  :  Neminem  hominum  reliqueritis,  sed  veniant 
omnes  in  praalium. 


?$.  Judas  alla  de  là  à  Maspha  ;  il  la  força,  et  la  prit  : 
tua  tous  les  hommes,  en  remporta  les  dépouilles,  et 
brûla  la  ville. 

;6.  Il  se  rendit  maître  ensuite  de  Casbon,  de  Mageth, 
de  Bosor  et  des  autres  villes  de  Galaad. 

57.  Après  cela,  Timothée  rassembla  une  autre  armée, 
et  se  campa  vis-à-vis  de  Raphon.  au  delà  du  torrent. 

j8.  Judas  envoya  reconnaître  cette  armée,  et  ses  gens 
revinrent  lui  dire  :  Toutes  les  nations  qui  nous  environ- 
nent se  sont  assemblées  près  de  Timothée  ;  et  l'armée 
qu'elles  composent  est  extraordinairement  grande. 

$9.  Ils  ont  fait  venir  les  Arabes  à  leur  secours  :  ils 
sont  campés  au-delà  du  torrent  ;  et  ils  se  préparent  pour 
venir  vous  attaquer.  Judas  marcha  aussitôt  contre  eux. 

40.  Alors  Timothée  dit  aux  principaux  officiers  de  son 
armée  :  Lorsque  Judas  sera  venu  avec  ses  gens  près  du 
torrent,  s'il  passe  vers  nous  le  premier,  nous  ne  pourrons 
en  soutenir  le  choc,  parce  qu'il  aura  tout  l'avantage  sur 
nous. 

41.  Mais  s'il  craint  de  passer,  et  qu'il  se  campe  au-delà 
du  fleuve,  passons  à  eux,  et  nous  le  battrons. 

42.  Judas  étant  arrivé  au  bord  du  torrent,  mit  le  long 
de  l'eau  les  scribes  de  l'armée,  et  il  leur  dit  :  Ne  laissez 
demeurer  ici  aucun  homme,  mais  que  tous  viennent 
combattre. 


COMMENTAIRE 


jh  35.  In  Maspha.  A  Maspha,  ville  située  vers 
le  milieu  des  montagnes  de  Galaad  (1). 

y.  56.  Bosor.  Il  l'avait  déjà  prise  au  verset  28. 
11  est  donc  probable  que  Bosor  est  mis  ici  pour 
Bosra,  ou  Barasa,  du  verset  26. 

f.  37.  Post  h/ec  verba  congregavit  Timo- 
theus exercitum  alium.  Entre  la  première  ba- 
taille contre  Timothée,  dont  il  est  parlé  aux  ver- 
sets précédents,  et  la  seconde  guerre  qu'il  fit  aux 
Juifs,  et  dont  il  est  parlé  ici,  il  se  passa  plusieurs 
affaires  importantes  dans  la  Judée  ;  Lysias  y  vint 
avec  une  armée  de  quatre-vingt  mille  hommes  de 
pied,  de  toute  la  cavalerie  du  roi,  et  de  quatre- 
vingts  éléphants;  ii  ne  laissa  pas  d'être  mis  en  dé- 
route par  Judas  Maccabée;  on  peut  voir  ce  détail 
au  second  livre  des  Maccabées,  xi.  1.  et  sui- 
vants. 

Castra  posuit  contra  Raphon.  Cette  ville 
n'est  connue  dans  l'Écriture  que  par  cet  endroit. 
Elle  était  probablement  sur  la  rive  occidentale  du 
torrent  d'Arnon,  puisque  Timothée  devait  être 
campé  sur  le  bord  occidental  du  même  fleuve. 
Des  commentateurs  croient  que  Raphon  est  la 
même  que  Raphana  (2),  ou  Raphanéïa,  ville  de 
Syrie  ;  mais  elle  était  trop  éloignée  puisqu'elle 
faisait  partie  de  la  province  d'Apamée  (j). 

}.  40.  Si  transierit  ad  nos  prior,  non  pote- 
rimus sustinere  eum.  Remarque  superstitieuse  à 
peu  près  semblable  à  celle  dont  il  est  parlé  au 


premier  livre  des  Rois  (4)  :  avec  cette  différence 
néanmoins,  que  Jonathas  demandait  à  Dieu  qu'il 
lui  fit  connaître  le  succès  de  son  entreprise,  par 
un  moyen  qu'il  semblait  lui  prescrire,  au  lieu  que 
Timothée  veut  simplement  tirer  un  présage  de  sa 
victoire  ou  de  sa  défaite  future  du  mouvement 
libre  de  ses  ennemis.  Il  faut  pourtant  reconnaître 
qu'il  demande  pour  présage  de  sa  victoire,  une 
chose,  qui  devait  marquer  une  espèce  de  timidité 
dans  les  troupes  de  Juda.  S'il  passe  le  lorrenl, 
dit-il,  nous  serons  ballus  ;  mais  s'il  craint  de  le  pas- 
ser, nous  le  battrons. 

y.  42.  Statuit  scribas  populi  secus  torren- 
tem, et  mandavit  eis,  dicens  :  Neminem  hominum 
reliqueritis.  Ces  scribes,  ou  écrivains  de  l'ar- 
mée,étaient  chargés  de  faire  la  revue  des  troupes, 
d'en  tenir  les  registres,  de  les  assembler,  de  les 
ranger. 

11  est  remarquable  que  Judas  voulut  qu'i/  n'y 
eût  pas  un  seul  homme  qui  ne  passât  le  torrent.  Il 
savait  bien  que  cette  guerre  était  la  guerre  de 
Dieu,  la  victoire  ne  dépendait  pas  d'un  peu  plus 
ou  d'un  peu  moins  de  personnes,  puisque  c'était 
Dieu  qui  leur  donnait  la  victoire  ;  mais  il  voulait 
que  tous  prissent  également  part  au  combat  ;  que 
nul  lâche  ne  se  trouvât  dans  une  armée  qui  mar- 
chait sous  les  étendards  du  Dieu  d'Israël,  et  dont 
la  cause  leur  était  commune  à  tous  ;  et  qu'étant 
unis  tous  ensemble  dans  le  péril  et  dans  la  gloire, 


(  1  )  Vide  ad  Judic.  xi.  29.  etc. 

{7)  Plin.  v.  18.  P totem.  Sieph.  Ortet. 


(?)  Abulfeda.  Tabul.  Syr.  p.  107. 
(4)  1.  Reg.  xiv.  91 


I.  -   MACCABÉES.  -  V.-   RUINE  D'ÉPHRON 


65 


4j.  Et  transfretavit  ad  illos  prior,  et  omnis  populus 
post  eum,  et  contrits  sunt  omnes  gentes  a  facie  eorum  ; 
et  projecerunt  arma  sua,  et  fugerunt  ad  fanum  quod 
erat  in  Carnaim. 

44.  Et  occupavit  ipsam  civitatem,  et  fanum  succendit 
igni,  cum  omnibus  qui  erant  in  ipso  ;  et  oppressa  est 
Carnaim,  et  non  potuit  sustinere  contra  faciem  Judas. 

41;.  Et  congregavit  Judas  universos  Israelitas  qui  erant 
in  Galaaditide,  a  minimo  usque  ad  maximum,  et  uxores 
eorum,  et  natos,  et  exercitum  magnum  valde,  ut  venirent 
in  terram  Juda. 

46.  Et  venerunt  usque  Ephron  ;  et  haec  civitas  magna 
in  ingressu  posita,  munita  valde,  et  non  erat  declinare 
ab  ea  dextra  vel  sinistra,  sed  per  mediam  iter  erat. 


47.  Et  incluserunt  se  qui  erant  in  civitate,  et  obstruxe- 
runt  portas  lapidibus.  Et  misit  ad  eos  Judas  verbis  paci- 
ficis, 

48.  Dicens  :  Transeamus  per  terram  vestram,  ut  eamus 
in  terram  nostram  ;  et  nemo  vobis  nocebit,  tantum  pedi- 
bus  transibimus.  Et  nolebant  eis  aperire. 

40.  Et  praecepit  Judas  prasdicare  in  castris  ut  applica- 
rent    unusquisque  in  quo  erat  loco. 

ço.  Et  applicuerunt  se  viri  virtutis  ;  et  oppugnavit  civi- 
tatem illam  tota  die  et  tota  nocte,  et  tradita  est  civitas 
in  manu  ejus. 

51.  Et  peremerunt  omnem  masculum  in  ore  gladii,  et 
eradicavit  eam,  et  accepit  spolia  ejus,  et  transivit  per 
totam  civitatem  super  interfectos. 

52.  Et  trangressi  sunt  Jordanem  in  campo  magno,  con- 
tra faciem  Bethsan. 


45.  En  même  temps,  il  passa  l'eau  le  premier,  et  toute 
l'armée  le  suivit  ;  et  les  ennemis  furent  tous  défaits  par 
eux  ;  ils  jetèrent  leurs  armes,  et  s'enfuirent  dans  le  tem- 
ple de  Carnaim. 

44.  Judas  prit  la  ville,  et  brûla  le  temple  avec  tous 
ceux  qui  étaient  dedans  ;  et  Carnaim  fut  réduite  à  la  der- 
nière humiliation,  et  elle  ne  put  subsister  devant  Judas. 

4^.  Alors  Judas  rassembla  tous  les  Israélites  qui  étaient 
en  Galaad,  depuis  le  plus  grand  jusqu'au  plus  petit,  avec 
leurs  femmes  et  leurs  enfants,  et  composa  une  très 
grande  armée,  pour  les  emmener  dans  le  pays  de  Juda. 

46.  Étant  arrivés  à  Ephron,  ils  trouvèrent  que  cette 
ville,  qui  est  située  à  l'entrée  du  pays,  était  grande  et 
extrêmement  forte  ;  et  qu'on  ne  pouvait  se  détourner  ni 
à  droite  ni  à  gauche,  mais  qu'il  fallait  nécessairement 
passer  par  le  milieu. 

47.  Ceux  qui  étaient  dans  la  ville  s'y  renfermèrent,  et 
en  bouchèrent  les  portes  avec  des  pierres.  Judas  leur 
envoya  porter  d'abord  des  paroles  de  paix, 

48.  Et  leur  fit  dire  :  Trouvez  bon  que  nous  passions 
par  votre  pays,  pour  aller  au  nôtre  ;  nul  ne  vous  fera 
aucun  tort  :  nous  passerons  sans  nous  arrêter.  Mais  ils 
ne  voulurent  point  lui  ouvrir. 

49.  Alors  Judas  fit  p  ibher  dans  le  camp  que  chacun 
eût  à  attaquer  la  ville  par  l'endroit  où  il  était. 

50.  Les  vaillants  guerriers  s'attachèrent  donc  aux  mu- 
railles :  il  livra  l'assaut  à  la  ville  pendant  tout  le  jour  et 
toute  la  nuit  ;  et  elle  fut  livrée  entre  ses  mains. 

51.  Ils  firent  passer  tous  les  hommes  au  fil  de  l'épée  : 
il  détruisit  Ephron  jusqu'aux  fondements, emporta  tout  le 
butin  qui  s'y  trouva,  et  passa  à  travers  toute  la  ville  sur 
les  corps  morts. 

=,2.  Us  passèrent  ensuite  le  Jourdain  dans  la  grande 
plaine  qui  est  vis-à-vis  de  Bethsan. 


COMMENTAIRE 


ils  n'eussent  entr'eux  aucun  sujet  de  division  et  de 
jalousie. 

C'est  aussi  cette  unité  inviolable  de  tous  les 
vrais  soldats  de  Jésus-Christ,  qui  fait  encore  au- 
jourd'hui toute  la  force,  tout  l'honneur  et  toute 
la  sûreté  de  l'Église.  C'est  une  armée  bien  ran- 
gée, étroitement  unie,  dans  laquelle  tout  est  ani- 
mé d'un  même  esprit,  et  tout  marche  ensemble 
contre  les  puissances  ennemies  :  il  n'y  a  que  pé- 
ril et  déshonneur  à  s'écarter  de  ce  corps,  qui  est 
toujours  invincible  dans  ceux  qui  demeurent  bien 
unis  entr'eux.  Ne  croyons  pas  nous  éloigner  du 
danger,  en  refusant  de  prendre  part  au  combat. 
Tout  est  à  craindre  pour  ceux  qui  évitent  de  s'y 
engager  :  il  faut  se  résoudre  à  passer  avec  toute 
l'armée  le  torrent,  si  l'on  aspire  à  la  victoire  :  tous 
les  travaux  et  tous  les  périls  de  la  vie  présente, 
figurés  par  ce  torrent,  n'ont  rien  de  terrible  pour 
ceux  qui  le  passent,  ayant  à  leur  tète  Judas 
Maccabée,  cette  excellente  figure  du  chef  divin 
de  l'Église.  On  doit  s'assurer  que  l'on  peut  tout 
avec  lui. 

f.  43.  Projecerunt  arma,  et  fugerunt  ad 
fanum  quod  erat  in  Carnaim.  Dans  le  second 
livre  des  Maccabées  (1),  on  remarque  que  Judas 


tua  trente  mille  hommes,  et  qu'ensuite  il  prit  Car- 
naïm,où  il  en  tua  encore  vingt-cinq  mille.  L'auteur 
ajoute  que  Timothée  étant  tombé  entre  les  mains 
de  Dosithée  et  Sosipater,  les  conjura  de  lui  con- 
server la  vie,  ce  qui  lui  fut  accordé,  parce  qu'il 
avait  entre  ses  mains  plusieurs  Juifs,  à  qui  il  ren- 
drait la  liberté, à  condition  qu'on  le  laisserait  aller. 

f.  44.  Fanum  succendit.  //  brûla  le  temple,  dé- 
dié à  Astarté. 

jfr.  45.  Congregavit  universos  Israelitas,  qui 
erant  in  Galaaditide...  ut  venirent  in  terram 
Juda.  11  fit  à  l'égard  des  peuples  de  Galaad,  ce 
que  Simon  son  frère  avait  fait  envers  ceux  de 
Galilée  (2). 

f.  46.  Venerunt  usque  Ephron.  L'Écriture 
ne  parle  de  cette  ville  d'Éphron, située  au-delà  du 
Jourdain,  qu'en  ce  seul  endroit.  Le  savant  juif  S. 
Munk,  met  Ephron  à  l'origine  du  wady  Ajlûn. 
Quant  à  la  question  de  droit,  savoir  si  Judas  a  pu 
traiter  ainsi  cette  ville  pour  lui  avoir  seulement 
refusé  le  passage,  on  peut  voir  ce  que  nous  avons 
dit  sur  les  Nombres  xx.  i8;  et  sur  les  Juges,  vin. 
5  et  suivants. 

jL>2.  IN  CAMPO  MAGNO, CONTRA  FACIEM  BETHSAN. 

Cette  grande  plaine  s'étend  d'orient  en  occident, 


(i'j  11.  Macc.  xii.  20.  et  seq. 
S.    B.  —  T.   XII. 


(2)  Verset  2?. 


66 


I.  —  MACCABÉES.  -    V.  -  DÉPART  DE  JOSEPH    ET  D'AZARIAS 


$;.  Et  erat  Judas  congregans  extremos,  et  exhortaba- 
tur  populum  per  totam  viam,  donec  venirent  in  terram 
Juda. 

54.  Et  ascenderunt  in  montem  Sion  cum  laîtitia  et  gau- 
dio,  et  obtulerunt  holocausta  quod  nemo  ex  eis  ce-cidis- 
set,  donec  reverterentur  in    pace. 

55.  Et  in  diebus  quibus  erat  Judas  et  Jonathas  in 
terra  Galaad,  et  Simon,  frater  ejus,  in  Galilaea  contra 
faciem  Ptolemaïdis, 

56.  Audivit  Josephus,  Zachariae  filius,  et  Azarias,  prin- 
ceps  virtutis,  res  bene  gestas,  et  prœlia   quas  facta  sunt, 

57.  Et  dixit  :  Faciamus  et  ipsi  nomen,et  eamus  pugnare 
adversus  gentes  quas  in  circuitu  nostro  sunt. 

58.  Et  praecepit  his  qui  erant  in  exercitu  suo,  et  abie- 
runt  Jamniam. 

59.  Et  exivit  Gorgias  de  civitate,  et  viri  ejus  obviam 
illis  in  pugnam. 

60.  Et  fugati  sunt  Josephus  et  Azarias  usque  in  fines 
Judaeas  ;  et  ceciderunt  illo  die  de  populo  Israël  ad  duo 
millia  viri,  et  facta  est  fuga  magna  in  populo, 

61.  Quia  non  audierunt  Judam  et  fratres  ejus,  existi- 
mantes  fortiter  se  facturos. 

62.  Ipsi  autem  non  erant  de  semine  virorum  illorum 
per  quos  salus  facta  est  in  Israël. 


<,  ;.  Et  Judas  était  à  l'arrière-garde,  ralliant  les  derniers 
et  encourageant  le  peuple  dans  tout  le  chemin,  jusqu'à 
ce  qu'ils  fussent  arrivés  au  pays  de  Juda. 

54.  Ils  montèrent  sur  la  montagne  de  Sion,  dans  une 
grande  réjouissance  ;  et  ils  offrirent  des  holocaustes  en 
action  de  grâces  de  ce  qu'ils  étaient  revenus  en  paix 
sans  qu'aucun  d'eux  eût  été  tué. 

çç.  Pendant  que  Judas  avec  Jonathas  était  au  pays  de 
Galaad,  et  Simon  son  frère  dans  la  Galilée,  devant  Ptolé- 
maïde, 

56.  Joseph,  fils  de  Zacharie,  et  Azarias,  général  des 
Juifs,  apprirent  les  heureux  succès  des  autres,  et  les 
combats  qui  avaient  été  livrés. 

$7.  Et  Joseph  dit  :  Rendons  aussi  nous-mêmes  notre 
nom  célèbre,  et  allons  combattre  contre  les  nations  qui 
nous  environnent. 

58.  Il  donna  donc  ses  ordres  à  ses  troupes  ;  et  elles 
marchèrent  contre  Jamnia. 

$9.  Gorgias  sortit  de  la  ville  avec  se6  gens,  et  alla  au- 
devant  d'eux  pour  les  combattre. 

60.  Et  Joseph  et  Azarias  furent  battus,  et  s'enfuirent 
jusqu'à  la  frontière  de  Judée  :  il  demeura  sur  la  place 
environ  deux  mille  hommes  des  Israélites  ;  et  la  déroute 
du  peuple  fut  grande, 

Oi.  Parce  qu'ils  n'avaient  pas  suivi  les  ordres  de  Judas 
et  de  ses  frères,  s'imaginant  qu'ils  signaleraient  leur  cou- 
rage. 

62.  Mais  il  n'étaient  point  de  la  race  de  ces  hommes 
par  qui  le  Seigneur  a  sauvé  Israël. 


COMMENTAIRE 

depuis  Bethsan  ou  Scythopolis,  jusqu'au-dessous 
de  Jezrahel  ;  on  lui  donne  aussi  le  nom  de  vallée 
de  Jezrahel. 

f.  <)■).  Erat  Judas  congregans  extremos. 
Judas  était  à  l'arrière-garde,  qui  est  la  place  la 
plus  périlleuse  dans  les  retraites. 

).  56.  Josephus,  et  Azarias,  princeps  virtutis. 
Voyez  les  versets  18.  19.  Leur  désobéissance  et 
leur  témérité  furent  justement  punies  ;  le  succès 
des  guerres  saintes  ne  dépend  ni  de  la  valeur,  ni 
du  nombre  des  soldats  ;  Dieu  seul  en  est  l'auteur; 
il  ne  peut  approuver  les  dispositions  criminelles 
de  ceux  qui  s'emploient,  même  pour  l'intérêt  de 
la  religion,  par  des  motifs  de  vanité.  Voyez  les 
versets  60.  61. 

f.  <;8.  Abierunt  Jamniam.  Ils  marchèrent  contre 
Jamnia,  village  maritime  du  pays  des  Philistins, 
entre  Joppé  et  Accaron. 

f.  59.  Exivit  Gorgias  de  civitate.  C'est  le 
même  Gorgias  qui  avait  manqué  son  coup,  lors- 
qu'il voulut  aller  surprendre  Judas  dans  son 
camp  (1).  Ce  général  était  un  grand  capitaine,  et 
d'une  longue  expérience  dans  les  choses  de  la 
guerre.  Adjurato  ei  Gorgia,  viro  militari,  et  in 
bellicis  rébus  experientissimo,  dit  le  second  livre 
des  Maccabées  (2). 

f.  60.  Fugati  sunt  Josephus  et  Azarias.  Le 
Saint-  Esprit  nous  marque  bien  clairement  les  rai- 
sons de  la  défaite  de  ces  généraux  du  peuple  de 
Dieu.  Ils  songeaient,  dit  l'Écriture,  à  rendre  leur 


nom  célèbre.  Piqués  d'une  jalousie  secrète  contre 
leurs  frères  qui  venaient  de  se  signaler  par  tant  de 
victoires,  ils  ne  craignirent  point  de  violer  l'ordre 
que  Judas  leur  avait  donné  avant  qu'il  partit,  de 
ne  point  combattre  contre  les  nations,  jusqu'à  ce 
qu'il  fût  de  retour.  Il  était  donc  juste  que,  sortant 
de  l'ordre  de  Dieu,  ils  se  privassent  de  son  se- 
cours, et  que,  s'en  étant  privés  par  leur  orgueil, 
ils  éprouvassent,  à  leur  confusion,  leur  propre 
faiblesse. 

Judas  Maccabée  se  conduisait  dans  cette  guerre 
avec  un  esprit  bien  différent:  son  but  était,  non 
de  rendre  son  nom  célèbre,  mais  de  défendre  la 
gloire  de  Dieu  ;  de  réprimer  l'insolence  des  na- 
tions qui  profanaient  son  temple,  et  de  délivrer 
ses  frères.  C'est  pourquoi,  ayant  toujours  Dieu 
et  le  prochain  devant  les  yeux  dans  tous  ses  com- 
bats, il  était  toujours  victorieux. 

Que  ceux-là  tremblent  qui  entreprennent, comme 
Joseph  et  Azarias,  de  combattre  les  nations  sans 
l'ordre  de  Dieu.  Que  ceux-là  soient  confondus, 
qui  se  proposent,  comme  ces  chefs  orgueilleux, 
pour  objet  de  leurs  travaux  et  de  leur  victoire,  de 
rendre  leur  nom  célèbre  parmi  les  hommes.  On 
ne  parvient  à  la  gloire  que  par  le  mépris  de  cette 
gloire  même  :  Dieu  ne  promet  la  victoire  qu'à 
l'obéissance  de  ceux  qui  servent  sous  ses  éten- 
dards. Le  courage  humain  n'est  qu'un  piège  qui 
nous  engage  dans  notre  perte,  s'il  n'est  soumis  à 
sa  volonté.  L'exemple  des  actions  héroïques  de 


(1)  Chapitre  iv.  1.  5. 


(2)  11.  Macc.  vin.  9. 


MACCABEES. 


V.  -  SUCCES   DE  JUDAS 


67 


6;.  Et  viri  Juda  magnificati  sunt  valde  in  conspectu 
omnis  Israël,  et  gentium  omnium  ubi  audiebatur  nomen 
eorum. 

64.  Et  convenerunt  ad  eos  fausta  acclamantes. 

65.  Et  exivit  Judas,  et  fratres  ejus,  et  expugnabant 
filios  Esau,  in  terra  quas  ad  austrum  est  ;  et  percussit 
Chebron  et  filias  ejus,  et  muros  ejus  et  turres  succendit 
igni  in  circuitu. 

06.  Et  movit  castra  ut  iret  in  terram  alienigenarum,  et 
perambulabat  Samariam. 

67.  In  die  illa  ceciderunt  sacerdotes  in  bello,  dum 
volunt  fortiter  facere,  dum  sine  consilio  exeunt  in 
praeliuir. 

68.  Et  declinavit  Judas  in  Azotum,  in  terram  alieni- 
genarum ;  et  diruit  aras  eorum,  et  sculptilia  deorum 
ipsorum  succendit  igni;  et  cepit  spolia  civitatum,  et 
reversus  est  in  terram  Juda. 

COMM 

nos  frères  n'est  capable  que  de  nous  tromper,  s'il 
nous  porte  à  présumer  de  nos  forces.  Chacun  doit 
se  mesurer,  non  sur  la  grâce  des  autres,  mais  sur 
celle  qu'il  a  reçue. Ceux  que  Dieu  destine, comme 
Judas  Maccabée,  par  le  choix  de  sa  volonté,  à 
combattre  ses  ennemis,  manqueraient  à  leur  vo- 
cation, s'ils  préféraient  leur  repos  à  cette  guerre 
toute  sainte.  Ceux  qu'il  destine  par  un  choix 
contraire  à  demeurer  dans  le  repos  et  dans  la 
Daix,  s'exposeraient  à  un  péril  manifeste  s'ils  s'in- 
géraient dans  le  ministère  des  autres.  Que  tous 
soient  donc  convaincus,  que  c'est  à  Dieu  d'appli- 
quer les  hommes  chacun  à  son  oeuvre.  Il  y  a  de  la 
gloire  pour  tous,  quand  on  fait  la  volonté  de  Dieu. 

j^.  63.  Viri  Juda  magnificati  sunt  valde.  Le 
grec  lit  (1)  :  El  Judas  et  ses  frères  furent  extrê- 
mement glorieux  devant  tout  Israël,  etc.  Voyez 
une  expression  pareille  dans  l'Exode  (2),  touchant 
Moïse  :  Vir  Moses  magnus  in  terra  ALgypli.  Ou, 
selon  la  Vulgate  :  Fuilque  Moses  vir  magnus 
valde  in  terra  JEgypti. 

y.  65.  Expugnabant  filios  Esau,  in  terra  quje 
ad  austrum  est  ;  et  percussit  Chebron.  Chébron 
ou  Hébron,  ville  célèbre,  dans  la  partie  méridio- 
nale de  Juda  (3  ).  Les  Iduméens  s'étaient  emparés 
de  tout  ce  pays  pendant  les  derniers  troubles  de 
la  province.  On  doit  mettre  avant  cette  expédi- 
tion de  Judas,  la  guerre  qu'il  entreprit  contre 
Gorgias,gouverneurde  l'Idumée,  et  dont  on  verra 
le  détail  dans  le  second  livre  des  Maccabées  (4). 

y.  66.  Ut  iret  in  terram  alienigenarum. 
Sous  ce  terme,    en  cet  endroit,  il    faut  entendre 


6j.  Or,  les  troupes  de  Judas  furent  en  grand  honneur 
dans  tout  Israël,  et  parmi  tous  les  peuples  où  l'on  enten- 
dit parler  de  leur  nom. 

64.  Et  tout  le  monde  vint  au-devant  d'eux,  avec  de 
grandes  acclamations  de   joie. 

65.  Judas  marcha  ensuite  avec  ses  frères,  et  alla  ré- 
duire les  enfants  d'Esaiï  dans  le  pays  qui  est  vers  le  midi. 
Il  prit  de  force  Hébron  avec  les  villes  qui  en  dépendent, 
et  brûla  les  murs  et  les  tours  qui  l'environnaient. 

66.  Après  cela,  il  décampa,  pour  aller  au  pays  de 
étrangers,  et  il  parcourut  la  Samarie. 

67.  En  ce  temps-là,  des  prêtres  furent  tués  à  la  guerre, 
en  voulant  signaler  leur  courage,  et  s'engageant  sans 
ordre  dans  le  combat. 

68.  Et  Judas  se  détourna  pour  marcher  vers  Azot,  au 
pays  des  étrangers  :  il  renversa  leurs  autels,  et  brûla  les 
statues  de  leurs  dieux  ;  il  prit  le  butin  qui  se  trouva 
dans  leurs  villes,  et  revint  dans  le  pays  de  Juda. 

ENTAIRE 

les  Philistins,  à  qui  ce  nom  est  toujours  donné 
dans  les  Septante  ;  le  verset  68  prouve  ce  senti- 
ment. 

Perambulabat  Samariam.  La  Samarie  paraît 
trop  éloignée  des  lieux  où  Judas  était  alors.  11  y 
en  a  qui  lisent  Saraïam,  au  lieu  de  Samariam.  Le 
premier  nom  se  lit  dans  Josué(^),  comme  une 
ville  de  la  tribu  de  Juda.  D'autres  lisent  Marésa, 
ville  sur  la  frontière  de  l'Idumée,  près  d'Hé- 
bron  (6).  Cette  correction  est  appuyée  sur  le 
second  livre  des  Maccabées,  où  il  est  dit  que 
Gorgias  ayant  été  mis  en  fuite  par  Judas,  se  retira 
à  Marésa  (7)  ;  Josèphe  porte  aussi  Marissa  en 
cet  endroit  (8),  au  lieu  de  Samarie.  Peut-être 
est-ce  la  même  que  Ressa  dont  il  est  parlé  dans 
les  Nombres  (9),  et  qui  est  mentionnée  dans  les 
auteurs  profanes. 

y.  67.  In  die  illa  ceciderunt  sacerdotes  in 
bello.  En  ce  temps-là  des  prêtres  furent  tués  à  la 
guerre,  en  voulant  signaler  leur  courage,  etc.  Le 
sens  de  la  Vulgate  est  très  bonet  semblableà  l'édi- 
tion romaine  (10)  :  mais  dans  d'autres  éditions 
grecques,  on  lit  que  les  prêtres  furent  tués,  parce 
que  Judas  voulait  signaler  son  courage,  et  attaquer 
l'ennemi  sans  conseil.  Ou  que  les  prêtres  des  villes 
furent  tués  parce  qu'elles  voulaient,  ou  parce  qu'ils 
voulaient  signaler  leur  courage.  Le  sacerdoce 
n'était  point  incompatible  avec  la  profession  des 
armes  parmi  les  Hébreux,  et  l'Écriture  ne  leur 
reproche  ici  que  trop  de  bravoure  et  de  hardiesse. 
Judas  lui-même  et  ses  frères  étaient  de  l'ordre 
sacerdotal  et  de  la  famille  d'Aaron. 


(i)  Koi  ô  avrip  I'oûSa;  xat  ôi  âoeX^oî   âutoù  sooïaaOriaav 
aooopa  IvavTi'ov  jïavto;  l 'aparjX- 
(2)  Exod.  XI.  J. 
(?)  Gènes,  xm.  18. 
(4)  11.  Macc.  xii.  j2.  jj.  et  suiv. 
(<,)  Josue  xv.  j6. 
(6)  1.  Par.  11.  42.  et  11.  Par.  xi.  8.  et  xiv.  o.  Ha  Grot.  hic. 


(7)  11.  Macc.  xii.  j$. 

(8)  Joseph.  Antiq.  t.  xn.  c.  12.  ad  fin. 
(g)  Num.  xxxiii.  21. 

(10)  K":uao>ispeH  --v  7:oXe'u.a>  [iouXû^t/O1.  ivoptxy*(>Tlatx.i.,e!c. 
Edit.  Complut.  (îouXo'fievoO  àutou  àvopaYa8T)<rat.  lia  Ms. 
Alex.  Aliœ  Edit.  b:  îspeî;  t(5v  7toXetov  pouXous'vwv  oiu-ûv 
âvSpayaO^aai. 


CHAPITRE  VI 

Mort  d'Anliochus  Epiphane;  son  fils  Eupator  lui  succède.  Eupalor  vient  en  Judée  avec 
une  puissante  armée.  Prise  de  Belhsura.  Les  Juifs  sont  assiégés  dans  le  temple. 
Paix  entre  Eupator  et  les  Juifs. 


i.  Et  rex  Antiochus  perambulabat  superiores  regiones, 
et  audivit  esse  civitatera  Elymaidem  in  Perside,nobilissi- 
mam,  et  copiosam  in  argento  et  auro, 

2.  Templumque  in  ea  locuples  valde  ;  et  illic  velamina 
aurea,  et  loricas,  et  scuta  quœ  reliquit  Alexander  Phi- 
lippi,  rex  Macedo,  qui  regnavit  primus  in  Grœcia. 

5.  Et  venit,  et  quserebat  capere  cjvitatem,  et  deprsedari 
eam;  et  non  potuit,  quoniam  innotuit  sermo  his  qui  erant 
in  civitate. 


1.  Cependant  Antiochus,  parcourant  les  hautes  pro- 
vinces, apprit  qu'Élymaïde  était  une  des  plus  célèbres 
villes  de  Perse  ;  qu'il  y  avait  une  grande  quantité  d'or, 
et  d'argent, 

2.  Et  un  temple  très  riche,  où  étaient  les  voiles  d'or, 
les  cuirasses  et  les  boucliers  qu'y  avait  laissés  Alexan- 
dre, roi  de  Macédoine,  fils  de  Philippe,  qui  établit  le 
premier  la  monarchie  des  Grecs. 

5.  Il  marcha  donc  vers  cette  ville,  et  il  s'efforça  de  la 
prendre  et  de  la  piller  ;  mais  il  ne  le  put,  parce  que  les 
habitants  en  avaient  été  avertis. 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Antiochus  perambulabat  superiores 
regiones.  C'est  ainsi  que  les  Grecs  appelaient 
les  provinces  au  delà  de  l'Euphrate.  On  a  vu  plus 
haut  (1)  les  motifs  qui  obligèrent  Antiochus  à 
entreprendre  ce  voyage  dans  les  provinces,  qui 
lui  obéissaient  au  delà  de  l'Euphrate. 

Audivit  esse  civitatem  elymaidem  in  per- 
side,  nob1l1ssimam,  templumque  in  ea  locuples 
valde.  Comme  l'envie  d'amasser  de  l'argent  pour 
continuer  ses  profusions,  était  ce  qui  l'avait  en- 
gagé à  venir  en  Perse,  il  ne  manqua  pas  de  s'in- 
former des  lieux  où  il  en  pourrait  trouver.  La 
ville  d'Élymaïs  était  capitale  de  l'ancien  pays 
d'Élam  ;  depuis  la  domination  des  Perses,  cette 
province  faisait  partie  de  la  Perse.  Le  temple 
d'Élymaïs  est  célèbre  par  ses  immenses  richesses 
non  seulement  dans  l'Écriture,  mais  aussi  dans 
les  auteurs  profanes, qui  conviennent  qu'Antiochus 
Epiphane  entreprit  de  le  piller.  On  ne  voit  pas 
pourquoi  l'auteur  du  second  livre  des  Macca- 
bées  (2)  a  mis  Persépolis  au  lieu  d'Élymaïs.  Per- 
sépolis  était  tellement  ruinée  du  temps  d'Antio- 
chus  Epiphane,  qu'elle  ne  pouvait  guère  contribuer 
à  satisfaire  son  avidité  d'amasser  de  l'argent. 
Alexandre  le  Grand  l'avait  brûlée  (;)  ;  depuis  ce 
temps  elle  put  se  relever.  Hermann  Janssens  (4) 
et  M.Vigouroux())croient  pourtant  devoir  préfé- 
rerla  leçon  qui  porte  Persépolis  ;  S.    Munck    est 


d'un  avis  opposé,  et  l'abbé  Sionnet  pense  que  le 
nom  de  Persépolis  a  pu  être  donné  à  Élymaïs, 
avec  la  signification  commune  de  ville  ou  capitale 
des  Perses,  après  la  ruine  de  la  véritable  Persé- 
polis par  Alexandre  le  Grand.  C'est  une  suppo- 
sition, et  rien  de  plus.  Quelques  exemplaires 
grecs  des  Maccabées,  lisent  ainsi  ce  passage  (6): 
//  apprit  qu'il  y  avait  une  ville  dans  le  pays  d'Élam, 
dans  la  Perse.  Ils  ne  marquent  pas  ici  le  nom  de 
cette  ville  ;  mais  l'édition  romaine,  Josèphe,  le 
syriaque  et  les  auteurs  profanes,  donnent  le  nom 
d'Élymaïs  à  la  ville  où  se  trouvait  le  fameux  tem- 
ple dont  nous  parlons. 

La  divinité  qu'on  adorait  dans  ce  temple,  était 
la  déesse  Nanâ,  comme  nous  l'apprend  l'auteur 
du  second  des  Maccabées  (7)  ;  Strabon  (8)  parle 
souvent  de  la  déesse  Anaïs,  ou  Anaïlis ,  qui 
est  apparemment  la  même  que  Nanâ.  Pline  assure 
que  la  première  statue  qu'on  connaisse  en  or 
massif  (9),  est  celle  du  temple  d'Anaïtis.  C'était 
une  grande  tentation  pour  les  princes  sans  scru- 
pules, ayant  besoin  de  beaucoup  d'argent.  Antio- 
chus le  Grand  avait  péri  dans  la  même  entre- 
prise (10).  Antiochus  Epiphane,  qui  avait  bravé 
Jéhovah,  ne  devait  pas  reculer  devant  Nanà. 

Velamina  aurea.  Les  voiles  d'or,  qui  cachaient 
la  statue  ou  le  sanctuaire. Ce  prince  impie  avait  en- 
levé les  voiles  précieux  du  temple  de  Jérusalem(i  1). 


(1)1.  Macc.  m.  J7. 

(21  11.  Macc.  ix.  2.  Intraverat  in  eam,  quas  dicitur  Per- 
sépolis, et  tentavit  expoliare  templum. 
(?)  Diodor.  Arrian.  Plut.  Curt.  I.  v.  c.  15. 
(4)  Hermeneul.  sac.  1.  591. 
(5j  Vigouroux,  Man.  bibl.  11.  181. 


(6)  ir'xouasv  ou  iav   s'v  E'Xufxai;   e'v  trj    ïlEpaiSi  no'Xi;, 
etc.  Ms.  Alex,  et  alix  editioncs  praiter  Roman. 

(7)  11.  Macc.  1.  1  j.  15. 

(8)  Strabo.  t.  xi.  XII.  et  xv. 

(9)  Plin.  t.  xxxii.  c.  4. 

(10)  11.  Macc.  1.  16. —  (11)  1.  Macc.  1.  2j. 


MACCABÉES.—  VI.-  MORT  D'ANTIOCHUS   EPIPHANE 


69 


4.  Et  insurrexerunt  in  prœlium;  et  fugit  inde  et  abiit 
cum  tristitia  magna,  et  reversus  est  in  Babyloniam. 

5.  Et  venit  qui  nuntiaret  ei,  in  Perside,  quia  fugata 
sunt  castra  quae  erant  in  terra  Juda  ; 

6.  Et  quia  abiit  Lysias  cum  virtute  lorti  in  primis,  et 
fugatus  est  a  facie  Judeeorum,  et  invaluerunt  armis,  et 
viribus,  et  spoliis  multis  quae  ceperunt  de  castris  quae 
exciderunt  ; 

7.  Et  quia  diruerunt  abominationem  quam  œdificavefet 
super  altare  quod  erat  in  Jérusalem,  et  Lanctificationem, 
sicut  prius,  circumdederunt  mûris  excelsis,  sed  et  Beth- 
suram,  civitatem  suam. 

8.  Et  factum  est,  ut  audivit  rex  sermones  istos,  expa- 
vit,  et  commotus  est  valde;  et  decidit  in  lectum,  et 
incidit  in  languorem  prae  tristitia,  quia  non  factum  est  ei 
sicut  cogitabat. 

f).  Et  erat  illic  per  dies  multos,  quia  renovata  est  in 
eo  tristitia  magna,  et  arbitratus  est  se  mori. 

10.  Et  vocavit  omnes  amicos  suos,  et  dixit  illis  :  Ré- 
cessif somnus  ab  oculis  meis,  et  concidi,  et  corrui  corde 
pras  sollicitudine  ; 


4.  Ils  sortirent  contre  lui, et  le  chargèrent  ;  et  il  s'enfuit, 
et,  se  retirant  avec  une  grande  tristesse,  il  prit  la  route 
de  Babylone. 

5.  Et  quand  il  était  encore  en  Perse,  il  reçut  la  nou- 
velle que  son  armée  avait  été  défaite  dans  le  pays  de 
Juda, 

6.  Et  que  Lysias,  ayant  marché  contre  les  Juifs  avec 
une  armée  très  forte,  avait  été  mis  en  fuite  ;  que  les 
armes  et  les  dépouilles  qu'ils  avaient  prises  dans  son 
camp  après  la  déroute  de  ses  troupes,  les  avaient  ren- 
dus encore  plus  forts  ; 

7.  Qu'ils  avaient  renversé  l'idole  abominable  qu'il  avait 
fait  élever  sur  l'autel  de  Jérusalem,  et  environné  leur 
temple  de  hautes  murailles,  comme  auparavant,  aussi 
bien  que  sa  ville  de  Bethsura. 

8.  Le  roi,  ayant  appris  ces  nouvelles,  en  fut  saisi 
d'étonnement  et  tout  troublé.  Il  fut  obligé  de  se  mettre 
au  lit  :  et  il  tomba  dans  la  langueur  par  l'excès  de  sa 
tristesse,  voyant  qu'il  était  arrivé  tout  le  contraire  de  ce 
qu'il  s'était  imaginé. 

0.  Il  demeura  là  pendant  plusieurs  jours,  parce  que  sa 
tristesse  se  renouvelait  et  croissait  de  plus  en  plus,  et  il 
crut  qu'il  allait  mourir. 

10.  Il  fit  donc  venir  tous  ses  amis,  et  leur  dit:  Le 
sommeil  s'est  éloigné  de  mes  yeux;  mon  cœur  est  tout 
abattu  ;  et  je  me  sens  défaillir,  à  cause  du  grand  cha- 
grin dont  je  suis  saisi. 


COMMENTAIRE 


LORICiE,  ET    SCUTA    QUJE    RELIQUIT  ALEXANDER. 

Voyez  au  chapitre  iv.  verset  $7.  l'ancienne  cou- 
tume de  consacrer  des  armes  dans  les  temples. 

f.  4.  Insurrexerunt  in  prœlium.  On  ne  sait 
si  la  ville  d'Élymaïs  obéissait  à  Antiochus,  mais 
nous  voyons  ici  qu'ayant  reçu  ce  prince  dans  son 
enceinte  comme  ami,  elle  s'éleva  contre  lui  aus- 
sitôt qu'il  voulut  piller  le  temple  de  Nanà  ;  elle 
prit  les  armes,  et  l'obligea  de  sortir  de  la  ville. 
Strabon  nous  dépeint  cette  place  comme  très 
jalouse  de  sa  liberté  (1)  ;  elle  sut  la  conserver 
contre  les  rois  des  Perses,  et  ensuite  contre  ceux 
de  Syrie,  successeurs  d'Alexandre. 

Reversus  est  in  Babyloniam.  Nous  ne  lisons 
pas  qu'il  ait  été  auparavant  à  Babylone,  ni  qu'il 
y  soit  retourné  depuis  ;  il  se  mit  en  chemin  pour 
y  aller.  On  peut  paraphraser  ainsi  cet  endroit  :  II 
s'en  retourna,  il  se  retira  d'Élymaïs  pour  s'en 
retourner  à  Antioche,  et  il  voulut  passer  par  la 
Babylonie,  ou  par  Babylone,  avant  de  franchir 
l'Euphrate.  Il  mourut  dans  les  montagnes  qui  sé- 
parent la  Perse  de  la  Babylonie. 

f.  5.  Et  venit  qui  nuntiaret  ei,  in  Perside. 
Lorsqu'il  était  encore  en  Perse,  il  recul  la  nouvelle 
que  son  armée  avait  été  défaite.  Il  était  alors  à 
Ecbatane,  suivant  l'auteur  du  second  livre  des 
Maccabées  (2). 


f.  7.  Bethsuram  civitatem  suam.  Le  grec 
lit  (3)  :  Sa  ville  de  Bethsura  :  la  ville  d'Antiochus, 
que  Judas  avait  prise  sur  lui. 

f.  8.  Decidit  in  lectum.  Le  genre  et  les  cir- 
constances de  sa  maladie  nous  sont  marqués  plus 
particulièrement  dans  le  second  livre  des  Macca- 
bées (4).  On  y  dit  que  ce  prince,  ayant  appris  la 
perte  de  ses  armées,  fut  transporté  de  fureur,  et 
menaça  de  faire  de  la  Judée  le  tombeau  de  ses  ha- 
bitants ;  il  n'eut  pas  plus  tôt  proféré  ces  paroles  de 
menaces,  qu'il  se  sentit  frappé  d'une  douleur  inté- 
rieure, et,  ayant  ordonné  à  son  cocher  de  faire 
diligence,  il  tomba  de  son  char,  qui  courait  avec 
impétuosité,  et  se  froissa  tous  les  membres.  Cela 
ne  fut  pas  capable  de  l'arrêter,  il  continua  son 
voyage  en  litière  ;  mais  son  corps  se  corrompit, 
et,  tombant  en  pourriture,  rendait  une  puanteur 
insupportable  à  toute  son  armée.  11  fut  obligé  de 
rester  à  Tabès,  ville  de  Perse,  où  il  mourut, 
après  avoir  reconnu  sa  faute,  et  fait  une  pénitence 
inutile  ;  c'est  ce  qu'on  verra  ailleurs  avec  plus  de 
détails. 

f.  9.  Erat  illic  per  dies  multos.  Non  pas  au 
lieu  où  il  avait  reçu  la  mauvaise  nouvelle  qui  causa 
sa  maladie, mais  àTabès, dans  la  Parétacène  ()),où 
la  violence  du  mal  ne  lui  permettant  plus  de  souf- 
frir la  fatigue  du  voyage,  il  fut  obligé  de  s'arrêter. 


(1)  Slrabo.  I.  xvi.  O'  paoïXeù;  âu-»ûv  3ùva[xiv  XEXT7)fxe'vo; 
u.SYaXT]v  aux  àÇioî  toi  TtJiy  rapOuatav  PaaiXet  :iapaJiX7]ci'o; 
toi;  aXA.0'.:  u^jj/.ooç  s~tva'.,  ôu.oi'coç  8s  /.ai  7tpd;  toù;  Ma/.s- 
oova;  'jît=pov  tou:  trj;  ïup('a;  apyovra;  otsxEtTO. 


(2)  11.  Macc.  ix.  j. 

(?)  Trjv  BatÔaoôpav  Trjv  TtôXiv  âutoû. 

(4)  11.  Macc.  ix. 

(5)  Diodor.  Excerpta  Vales.  p.  144.  et  Hieron.  inDan.xu 


7° 


I. 


MACCABÉES.  —  VI.-   MORT  D'ANTIOCHUS   ÉPIPHANE 


11.  Et  dixi  in  corde  raeo  :  In  quantam  tribulationem 
deveni,  et  in  quos  fluctus  tristitiœ  in  qua  nunc  sum,  qui 
jucundus  eram,  et  dilectus  in  potestate  mea  ! 

12.  Nunc  vero  reminiscor  malorum  quas  feci  in  Jéru- 
salem, unde  et  abstuli  omnia  spolia  aurea  et  argentea 
quœ  erant  in  ea,  et  misi  auferre  habitantes  Judœam  sine 
causa. 

i;.  Cognovi  ergo  quia  propterea  invenerunt  me  mala 
ista  ;  et  ecce  pereo  tristitia  magna  in  terra  aliéna. 

14.  Et  vocavit  Phillippum,  unum  de  amicis  suis,  et 
prœposuit  eum  super  universum  regnum  suum  ; 

iç.  Ft  dédit  ei  diadema,  et  stolam  suam,  et  annulum, 
ut  adduceret  Antiochum,  filium  suum,  et  nutriret  eum, 
et  regnaret. 

16.  Et  mortuusest  illic  Antiochus  rex,  anno  centesimo 
quadragesimo  nono. 

17.  Et  cognovit  Lysias  quom'am  mortuus  est  rex,  et 
constituit  regnare  Antiochum,  filium  ejus,  quem  nutrivit 
adolescentem  ;  et  vocavit  nomen  ejus  Eupator. 


11.  J'ai  dit  au  fond  de  mon  cœur:  A  quelle  affliction 
suis-je  réduit,  et  en  quel  abîme  de  tristesse  me  vois-je 
plongé  maintenant,  moi  qui  étais  auparavant  si  content  et 
si  chéri  au  milieu  de  la  puissance  qui  m'environnait  ? 

12.  Je  me  souviens  à  présent  des  maux  que  j'ai  fait 
dans  Jérusalem,  ayant  emporté  toutes  ses  dépouilles  en 
or  et  en  argent,  et  envoyé  exterminer  sans  sujet  ceux  qui 
habitaient  dans  la  Judée. 

ij.  Je  reconnais  donc  que  c'est  pour  cela  que  je  suis 
tombé  dans  tous  ces  maux  ;  et  dans  l'excès  de  ma  tris- 
tesse, je  péris  maintenant  dans  une  terre  étrangère. 

14.  Alors  il  appela  Philippe,  l'un  de  ses  amis,  et  il 
l'établit  régent  sur  tout  son  royaume. 

i^.  11  lui  mit  entre  les  mains  son  diadème,  sa  robe 
royale,  et  son  anneau,  afin  qu'il  allât  chercher  son  fils 
Antiochus,  qu'il  prît  soin  de  son  éducation  et  le  fit 
régner. 

16.  Le  roi  Antiochus  mourut  là,  en  l'année  cent  qua- 
rante-neuvième. 

17.  Lysias,  ayant  appris  la  moit  du  roi,  établit  roi  en  sa 
place  Antiochus,  son  fils,  qu'il  avait  élevé  depuis  sa 
jeunesse,  et  il  l'appela  Eupator. 


COMMENTAIRE 


y.  1 3.  Cognovi  quia  propterea  invenerunt 
me  mala  ista.  L'homme  est  à  lui-même,  par  son 
orgueil,  l'instrument  le  plus  redoutable  de  son 
supplice  ;  et  la  justice  de  Dieu  n'a  qu'à  le  laisser 
faire,  pour  le  punir  de  la  manière  la  plus  terrible. 
Antiochus  avait  cru  pouvoir  exercer  un  empire 
souverain  sur  des  peuples  qu'il  haïssait  ;  il  les 
avait  condamnés  à  être  effacés  de  la  liste  des  na- 
tions, comme  s'il  eût  eu  cette  puissance  qui  est  le 
propre  caractère  de  Dieu  seul.  Que  fait  Dieu 
pour  le  renverser  ?  Il  n'oppose  à  son  orgueil  que 
l'humilité  des  Maccabées  ;  à  toutes  ses  armées  si 
formidables,  qu'une  petite  troupe  de  gens  qui  se 
confient  en  leurs  prières  et  en  son  secours.  Aussi- 
tôt que  ce  prince  impie  voit  ses  grands  projets 
renversés,  et  le  contraire  arrivé  de  ce  qu'il  s'était 
imaginé,  il  se  plonge  de  lui-même  dans  le  dernier 
désespoir.  Faisant  la  comparaison  de  l'état  heu- 
reux où  il  s'était  vu,  avec  cette  désolation  effroya- 
ble où  il  se  voyait  alors  réduit,  il  commence  à 
concevoir  le  néant  de  toutes  ses  pensées  ;  et  il 
envisage  le  mal  qu'il  a  commisdans  la  Judéecomme 
la  vraie  cause  du  renversement  de  tout  son  bonheur. 

Il  semblait  que,  jusqu'alors,  son  impiété  lui  eût 
causé  une  espèce  d'assoupissement  ou  d'enivre- 
ment, qui  l'empêchait  de  connaître  ce  qu'il  faisait; 
mais,  dans  le  moment  qu'il  est  frappé  de  la  justice 
divine,  et  que  ses  disgrâces,  en  l'humiliant,  ont  levé 
ce  voile  qu'un  excès  d'orgueil  avait  placé  sur  ses 
yeux,  il  recouvre  la  lumière  naturelle  de  son  esprit, 
pour  porter  ce  jugement  équitable  contre  soi-mê- 
me :  Que  ses  sacrilèges  et  ses  injustices  lui  avaient 
fait  mériter  ce  châtiment. 


Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  faire  voir  le  défaut 
qui  se  trouvait  dans  le  repentir  de  ce  prince  impie- 
Comme  l'Écriture  nous  fournira,  dans  un  autre 
endroit  de  cette  histoire, une  occasion  encore  plus 
propre  pour  en  parler,  il  suffit  de  dire  que  cet 
aveu  sorti  de  la  bouche  de  ce  prince,  quoiqu'il 
lui  ait  été  inutile,  doit  nous  servir  à  nous-mêmes, 
pour  nous  porter  à  réfléchir.  Il  ne  faut  pas  atten- 
dre que  le  moment  suprême  de  notre  mort  tire 
aussi  de  notre  bouche  des  regrets  forcés,  qui  ne 
naissent  point  de  la  volonté  de  notre  cœur  ;  mais 
prévenir,  par  des  fruits  d'une  digne  pénitence,  un 
temps  auquel  on  ne  saurait  guère  recueillir  pour 
l'éternité  que  ce  que  l'on  a  semé  dans  le  cours 
de  la  vie. 

j^.  14.  Vocavit  Philippum,  unum  de  amicis  suis. 
77  appela  Philippe,  Vun  de  ses  amis,  l'un  de  ceux 
qui  avait  été  nourris  avec  lui  dès  la  jeunesse  (1)  ; 
il  lui  remit  son  diadème,  son  manteau  royal,  et 
son  anneau,  et  lui  dit  de  faire  venir  le  jeune  An- 
tiochus, son  fils,  qui  n'avait  alors  que  neuf  ans, 
comme  le  remarque  Appien  (2),  afin  de  le  faire 
reconnaître  par  l'armée.  Par  là,  ce  prince  révo- 
quait tout  le  pouvoir  qu'il  avait  donné  à  Lysias 
en  partant  de  Syrie,  et  transportait  à  Philippe  la 
qualité  de  régent,  et  de  tuteur  du  jeune  roi. 

Antiochus,  fils  d'Épiphane,  fut  surnommé  Eu- 
pator par  les  Syriens,  c'est-à-dire,  fils  d'un  bon 
père  (3),  pour  marquer  qu'étant  sorti  d'un  prince 
si  glorieux  et  si  bon,  il  ne  pouvait  manquer  d'être 
lui-même  un  grand  et  bon  prince. 

jL  16.  Anno  centesimo  quadragesimo  nono. 
164-163  avant  l'ère  vulgaire. 


(1)  11.  Macc.  ix.  29.  O'  oi5vT,Jo<po;  «utou. 


[2)  Appian.  Syriac.  —  (?)  Idem.  Syr.  p.   115 


I.  —  MACCABÉES.—  VI.  -   ETAT  DE  JERUSALEM 


18.  Et  hi  qui  erant  in  arce  concluserant  Israël  in  cir- 
cuitu  sanctorum,  et  quaîrebant  eis  mala  semper,  et  firma- 
mentum  gentium. 

19.  Et  cogitavit  Judas  disperdere  eos,  et  convocavit 
universum  populum  ut  obsiderent  eos. 

20.  Et  convenerunt  simul,  et  obsederunt  eos  anno  cen- 
tesimo  quinquagesimo,  et    fecerunt  balistas  et   machinas. 


21.  Et  exierunt  quidam  ex  eis  qui  obsidebantur,  et 
adjunxerunt  se  illis  aliqui  impii  ex  Israël, 

22.  Et  abierunt  ad  regem,  et  dixerunt  :  Quousque  non 
facis  judicium,  et  vindicas  fratres    nostros  ? 

ïj.  Nos  decrevimus  servire  patri  tuo,  et  ambulare  in 
prœceplis  ejus,  et  obsequi  edictis  ejus  ; 

24.  Et  filii  populi  nostri  propter  hoc  alienabant  se  a 
nobis  ;  et  quicumque  inveniebantur  ex  nobis,  interficie- 
bantur,  et  hereditates  nostraï  diripiebantur. 

25.  Et  non  ad  nos  tantum  extenderunt  manum,  sed  et 
in  omnes  fines  nostros  ; 

26.  Et  ecce  applicueru-nt  hodie  ad  arcem  Jérusalem 
occupare  eam,  et  munitionem    Bethsuram  munierunt  ; 

27.  Et  nisi  praeveneris  eos  velocius,  majora  quam  hase 
facient,  et  non  poteris  obtinere  eos. 

28.  Et  iratus  est  rex  ut  hase  audivit  ;  et  convocavit 
omnes  amicos  suos,  et  principes  exercitus  sui,  et  eos  qui 
super  équités  erant  ; 

20.  Sed  et  de  regnis  aliis,  et  de  insulis  maritimis,  vene- 
runt  ad  eum  exercitus  conductitii. 


18.  Or,  ceux  qui  étaient  dans  la  forteresse  fermaient 
à  Israël  toutes  les  avenues  autour  du  temple;  et  ils  ne 
cherchaient  qu'à  leur  faire  du  mal,  et  à  fortifier  le  parti 
des  nations. 

19.  Judas  résolut  de  les  perdre  ;  et  il  fit  assembler 
tout  le  peuple  pour  les  assiéger. 

20.  S'y  étant  donc  rendus  tous  ensemble,  ils  les  assié- 
gèrent en  la  cent  cinquantième  année,  et  ils  firent  des 
instruments  pour  jeter  des  pierres,  et  d'autres  machines 
de  guerre. 

21.  Alors  quelques-uns  des  assiégés  sortirent  ;  et 
quelques  Israélites  impies  s'étant  joints  à  eux, 

22.  Ils  allèrent  vers  le  roi,  et  lui  dirent  :  Jusqu'à  quand 
différerez-vous  de  nous  faire  justice,  et  de  venger  nos 
frères  ? 

2;.  Nous  nous  sommes  engagés  à  servir  votre  père, 
à  nous  conduire  selon  ses  ordres,  et  à  obéir  à  ses  édits. 

24.  Nos  compatriotes  nous  ont  pris  en  aversion  pour 
ce  sujet  :  ils  ont  tué  tous  ceux  d'entre  nous  qu'ils  ont 
trouvés,  et  ils  ont  pillé  nos  héritages. 

25.  Ils  ont  étendu  leurs  violences,  non  seulement  sur 
nous,  mais  sur  tout  notre  pays. 

26.  Et  maintenant  ils  sont  venus  attaqtier  la  forteresse 
de  Jérusalem,  pour  s'en  rendre  maîtres,  et  ils  ont  fortifié 
Bethsura. 

27.  Si  vous  ne  vous  hâtez  de  les  prévenir,  ils  feront 
encore  plus  de  mal  qu'ils  n'en  ont  fait  jusqu'à  présent,  et 
vous  ne  pourrez  plus  les  assujettir. 

28.  Le  roi,  ayant  entendu  cela,  en  fut  irrité  :  il  fit 
venir  tous  ses  amis,  les  principaux  officiers  de  son  armée 
et  ceux  qui  commandaient  la  cavalerie. 

29.  Des  troupes  auxiliaires  des  royaumes  étrangers  et 
des  pays  maritimes  qu'il  entretenait  à  ses  dépens  vinrent 
encore  se  joindre  aux  siennes. 


COMMENTAIRE 


f.  20.  Fecerunt  balistas  et  machinas.  Les 
balistes  (1)  étaient  des  machines  propres  à  lancer 
des  pierres.  Elles  pouvaient  être  établies  sur  le  sol 
ou  sur  une  charpente  plus  ou  moins  élevée.  Josè- 
phe  écrit  des  terrasses  (2),  qui  servaient  au  même 
usage.  Ceci  arriva,  dit  l'Écriture,  la  cent  cinquan- 
tième année  des  Séleucides,  162  avant  l'ère  chré- 
tienne. Mais  comment  accorder  cette  date  avec 
ce  qui  est  dit  .dans  le  second  livre  des  Macca- 
bées  (]),  que  la  cent  quarante-huitième  année  des 
Séleucides,  Antiochus  Eupator,  et  Lysias,  régent 
du  royaume,  firent  la  paix  avec  Judas  Maccabée, 
quoiqu'Antiochus  Épiphane  ne  soit  mort  que  la 
cent  quarante-neuvième  année  (4). 

«  Cette  variation,  dit  M.  Vigouroux,  provient 
de  la  manière  de  compter  qu'ont  employée  les 
deux  écrivains.  L'ère  des  Séleucides  commença 
en  212  avant  Jésus-Christ,  mais  ceux  qui  l'em- 
ployaient comptaient  une  année  en  plus  ou  en 
moins,  selon  qu'ils  plaçaient  le  premier  mois  de 
l'année  en  automne  ou  au  printemps  suivant  (5).  » 
Ces  faits  se  seraient  passés  dans  l'intervalle  d'une 
seule  de  nos  années,  dont  le  point  de  départ  varie 


de  six  mois,  suivant  le  calendrier  adopté.  Cette 
explication  contraste  avec  nos  habitudes  de  comp- 
ter ;  mais  chez  les  Juifs  mêmes,  il  y  avait  deux 
chronologies  distinctes,  selon  qu'on  prenait  pour 
base  le  cycle  civil  ou  l'année  religieuse. 

Pour  résoudre  cette  difficulté,  dit  dom  Cal- 
met,  Usser  suppose  que,  dans  les  lettres  et  les 
traités  qui  se  passaient  à  la  cour  des  rois  de  Syrie, 
on  ne  suivait  pas  l'ère  ordinaire  des  Séleucides, 
qui  commençait  au  mois  de  septembre  ;  mais  celle 
des  Chaldéens,  qui  commençait  six  mois  plus 
tard.  Ainsi  Antiochus  Épiphane  étant  mort  au 
printemps  de  l'an  du  monde  5841,  on  peut  dire 
qu'il  est  décédé  la  cent  quarante-neuvième  année 
des  Séleucides  suivant  les  Juifs,  et  la  cent  qua- 
rante-huitième, selon  les  Grecs,  les  Syriens,  et 
les  Chaldéens;  et  que  l'automne  de  l'an  du  monde 
5841,  qui  est  le  commencement  de  la  cent  qua- 
rante-neuvième année  des  Séleucides,  selon  les 
Grecs,  n'est  encore  que  la  cent  quarante-hui- 
tième des  Chaldéens.  De  la  sorte,  le  roi  Antio- 
chus Eupator  a  commencé  à  régner  la  cent  qua- 
rante-neuvième année  des  Séleucides,  qui  est  celle 


(1)  BsXoaïiaEt;  /.at  [irp/avâ;.  (?)  n.  Macc.  xi.   21. 

^2)  Aniiq.  t.  xii.  c.  14.  Mri/avrj|j.a-ta  «1  /côjj.a'ia  syEtpaç.  (4)  1.  Macc.  vi.  16.  ■ 


(5)  Manuel  bibliq.,  11.  187. 


72 


I.  —  MACCABEES.  —  VI.  -  ATTAQUE  DES  SYRIENS 


jo.  Et  erat  numerus  exercitus  ejus  centum  milita  pedi- 
tum,  et  viginti  millia  equitum,  et  elephanti  triginta  duo 
docti  ad  praslium. 

ji.  Et  venerunt  per  Idumasam,  et  applicuerunt  ad 
Bethsuram,  et  pugnaverunt  dies  multos,  et  fecerunt  ma- 
chinas ;  et  exierunt,  et  succenderunt  eas  igni,  et  pugna- 
verunt viriliter. 

32.  Et  recessit  Judas  ab  arce,  et  m o  vit  castra  ad  Bethza- 
charam,  contra  castra  régis. 

j?.  Et  surrexit  rex  ante  lucem,  et  concitavit  exercitus 
in  impetum  contra  viam  Bethzacharam  ;  et  comparave- 
runt  se  exercitus  in  praslium  et  tubis  cecinerunt  ; 

?4.  Et  elephantis  ostenderunt  sanguinem  uvas  et  mori, 
ad  acuendos  eos  in  praslium  ; 

?<.  Et  diviserunt  bestias  per  legiones,  et  astiterunt 
singulis  elephantis  mille  viri  in  loricis  concatenatis,  et 
galeas  aereae  in  capitibus  eorum,  et  quingenti  équités 
ordinati  unicuique  bestias  electi  erant. 


jo.  Ainsi  son  armée  était  composée  de  cent  mille 
hommes  de  pied,  de  vingt  mille  chevaux,  et  de  trente- 
deux  éléphants  dressés  au  combat. 

ji.  Ils  marchèrent  par  l'Idumée,  et  vinrent  assiéger 
Bathsura  :  ils  l'attaquèrent  durant  plusieurs  jours,  et  ils 
firent  pour  cela  des  machines  ;  mais  les  assiégés,  étant 
sortis,  les  brûlèrent,  et  combattirent  avec  un  grand  cou- 
rage. 

J2.  Judas,  qui  était  parti  de  devant  la  forteresse,  mar- 
cha avec  son  armée  vers  Bethzachara,  contre  le  camp 
du  roi. 

jj.  Et  le  roi,  s'étant  levé  avant  le  jour,  fit  marcher 
impétueusement  toutes  ses  troupes  sur  le  chemin  de 
Bethzachara:  les  armées  se  préparèrent  au  combat,  et 
sonnèrent  des  trompettes. 

?4-  Ils  montrèrent  aux  éléphants  du  jus  de  raisin  et  de 
mûres,  afin  de  les  animer  au  combat. 

;$.  Ils  partagèrent  les  bêtes  par  légions;  et  mille 
hommes  armés  de  cottes  de  maille  et  de  casques  d'airain 
accompagnaient  chaque  éléphant  ;  et  cinq  cents  cava- 
liers choisis  avaient  ordre  de  se  tenir  toujours  près  de 
chaque  bête. 


COMMENTAIRE 


de  la  mort  de  son  père,  et  en  même  temps  il  écri- 
vit à  Judas,  pour  lui  donner  la  paix,  la  cent 
quarante  -  huitième  année  ,  suivant  la  date  des 
Chaldéens. 

jr.  30.  Centum  millia  peditum.  Cent  mille  hom- 
mes de  pied.  Le  second  livre  des  Maccabées  (1)  et 
Ben  Gorion  (2)  n'en  mettent  que  quatre-vingt 
mille,  et  toute  la  cavalerie.  Dom  Calmet  et  Usser 
pensent  (3)  que  l'expédition  dont  il  est  parlé  dans 
le  second  livre  des  Maccabées,  est  différente  de 
celle  dont  nous  parle  ici  l'Ecriture,  et  qu'elle 
arriva  quelque  temps  après.  On  pourrait  peut- 
être  le  croire  parce  que  Josèphe,  dans  un 
endroit  (4],  parle  d'une  armée  composée  exacte- 
ment du  même  nombre  en  fantassins,  en  cavaliers 
et  en  éléphants,  et  dans  un  autre  endroit  (<,  )  d'une 
armée  de  cinquante-mille  hommes  de  pied,  cinq 
mille  chevaux  et  quatre-vingts  éléphants. 

jh  31.  Venerunt  per.  Idum^am,  et  applicue- 
runt ad  Bethsuram.  Ils  ne  purent  venir  directe- 
ment' assiéger  Jérusalem,  sans  doute  parce  que 
les  défilés  qui  y  conduisaient  du  côté  du  nord,  ou 
de  l'occident,  étaient  occupés  par  les  Juifs  ;  ils 
furent  donc  obligés  de  tourner  par  la  partie  méri- 
dionale du  pa-ys,  alors  occupée  par  les  Iduméens, 
ennemis  des  Juifs. 

f.  32.  Recessit  Judas  ab  arce,  et  movit  cas- 
tra ad  Bethzacharam. Judasquitta  le  siège  de  la 


forteresse  de  Sion,  où  étaient  les  troupes  d'An- 
tiochus,  et  vint  se  poster  à  Bethzachara,  entre 
Jérusalem  et  Bethsura.  Josèphe  dit  que  ce  poste 
de  Bethzachara  était  un  défilé  fort  étroit  (6).  Dans 
la  vallée  au  sud-est  de  Bethléhem,  à  deux  lieues 
environ  de  cette  ville,  se  trouve  encore  une  loca- 
lité appelée  Beit  Sakârieh  que  l'on  identifie  avec 
le  poste  dont  il  s'agit  ici  (7). 

jfr.  34.  Elephantis  ostenderunt  sanguinem 
uwje  etmori.  C'était  apparemment  pour  les  accou- 
tumer à  voir  le  sang,  car  on  sait  que  ce  n'est  pas 
la  couleur  rouge,  mais  la  blanche,  qui  irrite  ces 
animaux.  C'est  ce  que  remarque  Plutarque  (8), 
lorsqu'il  dit  que  ceux  qui  sont  vêtus  de  rouge, 
évitent  de  se  montrer  devant  les  taureaux,  comme 
ceux  qui  ont  des  habits  blancs,  devant  les  élé- 
phants ;  parce  que  ces  animaux  s'irritent,  et  s'effa- 
rouchent par  la  vue  de  ces  couleurs.  On  enivre 
aussi  quelquefois  les  éléphants,  comme  on  le  voit 
dans  le  troisième  livre  des  Maccabées  (9),  pour 
leur  ôter  le  sentiment  et  pour  les  mettre  en  fureur, 
car  autrement  cet  animal  n'est  nullement  cruel. 
Pline  (10)  raconte, que  le  roi  Bocchus  ayant  voulu 
irriter  trente  éléphants  contre  des  criminels  qu'il 
avait  attachés  à  des  poteaux,  on  ne  put  jamais  les 
obliger  à  déchirer  ces  malheureux,  comme  si,  par 
un  sentiment  de  compassion,  ils  eussent  épargné 
leur  sang.  Il  est  même   dangereux  de  les   enivrer 


(1)  11.  Macc.  xi.  2. 

(2)  Ben  Gorion.  kist.  F.  jo.  col.  1.  apud  Drus. 
(?)  Usser  ad  an.  5841. 

(4)  Antiq.  xn.  14. 
(t)  De  Bello.  jud.  1.  1. 

(6)  Antip.  I.  xn.   c.    4.    BàXXsxat     axpaxc>7t£Oov    lia 
acévôîv  i'>  xi'vc  to'tcoj  BeO^a/capta  ~ktyo\j.év(a. 
(")  Robinson's  Laler  Biblic.  Research.  11.  p.  284. 


(8)  Plut,  defortuna  Alex.  <I>iAâxxovrat  xaûpot;  ô-fôfjvat 
(sotvtx;oa;  ïyov.i-i,  ïké(fa.c.  oà  Xîuxoôç  y  ixtôvaç,  Èpe6^sxai 
yàp  uTto  tojv  yfu.fj.âxtoy  Ta  Tcùi  xoûxcov,  y.a>.  ôiaOïjpioùxat. 
Vide  eitmdem  conjugial.  prœcept.  el  Bo.hart  de  animal 
sacr.  prima  parle.  I.  vu.  c.  27. 

(9)  m.  Macc.  v.  ;o. 

(10)  Plin.  I.  vin.  c.  5. 


I.—  MACCABÉES.  —  VI.-   LEUR  TACTIQUE    MILITAIRE 


75 


;6.  Hi  ante  tempus  ubicumque  erat  bestia,  ibi  erant  : 
et  quocumque  îbat,  ibant,  et  non  discedebant  ab  ea. 

}7.  Sed  et  turres  ligneas  super  eos  firmae  protegentes 
super  singulas  bestias  ;  et  super  eas  machina;,  et  super 
singulas  viri  virtutis  triginta  duo,  qui  pugnabant  desuper, 
et  Indus  magister  bestiae. 

j8.  Et  residuum  equitatum  hinc  et  inde  statuit  in  duas 
partes,  tubis  exercitum  commovere,  et  perurgere  cons- 
tipâtes in  legionibus  ejus. 


?6.  Ces  gens  se  hâtaient  de  prévenir  en  tous  lieux  les 
éléphants  :  ils  allaient  partout  où  chaque  éléphant  allait, 
et  ils  ne  l'abandonnaient  jamais. 

57.  11  y  avait  aussi  sur  chaque  bête  une  forte  tour  de 
bois,  destinée  à  mettre  à  couvert,  et  des  machines  des- 
sus ;  et  dans  chaque  tour,  étaient  trente-deux  guerriers 
qui  combattaient  d'en  haut,  et  un  Indien  qui  conduisait 
la  bête. 

;8.  Il  rangea  le  re-te  de  la  cavalerie  sur  les  deux 
ailes,  pour  exciter  son  armée  par  le  son  des  trompettes, 
et  pour  animer  son  infanterie  serrée  dans  ses  bataillons. 


COMMENTAIRE 


avec  du  vin  (  1  ),  car  cette  liqueur  leur  ôte  la  force. 
Elien  (2)  remarque  que,  lorsqu'on  veut  les  expo- 
ser au  combat,  on  leur  donne  à  boire,  non  pas  du 
vin  de  la  vigne,  mais  quelqu'autre  vin  tiré  des 
grains  ou  des  roseaux  ;  on  y  ajoutait  même  des 
drogues  pour  les  étourdir  ;'  on  faisait  passer  le  vin 
sur  des  paquets  de  myrrhe  ou  d'encens,  afin  que 
l'odeurde  la  myrrhe  leur  troublât  les  sens,  pendant 
que  la  chaleur  du  vin  les  mettrait  en  fureur.  C'est 
ainsi  qu'on  étourditles  éléphants,  auxquels  Ptolé- 
mée  Philopator  voulut  exposer  les  Hébreux  de  ses 
états  (3). 

f.    36.   Hi  ANTE    TEMPUS   UBICUMQUE    BESTIA,    IBI 

erant.  Ces  gens  se  trouvaient  partout  où  allait 
l'éléphant,  mèmeavantqu'il  fût  absolument  néces- 
saiie  qu'ils  s'y  trouvassent  (4).  Le  syriaque  :  Ces 
gensavaient  été  choisis  avant  le  combat,  et  accom- 
pagnaient l'éléphant  partout  où  il  allait. 

f.  37.  Sed  et  turres  lignes  super  eos...;    et 

SUPER  EAS  MACHINA,  ET  SUPER  SINGUI.AS  VIRI  VIR- 
TUTIS triginta  duo.  On  dressait  surles  éléphants 
des  espèces  de  tours  de  bois,  arrêtées  par  deux 
fortes  chaînes,  qui  passaient  en  forme  de  sangles 
sous  le  ventre  de  l'animal,  et  on  plaçait  sur  ces 
tours  des  combattants,  qui  lançaient  des  dards 
ou  des  flèches  contre  l'ennemi.  C'est  ce  que  Ju- 
vénal  exprime  en  ces  vers: 

Dorso  ferre  cohortes 

Partem  aliquam  belli,  et  euntem  in  praslia  turrem  (<,). 

Quant  ou  nombre  de  trente-deux  combattants 
montés  sur  chacune  de  ces  bêtes,  Bochart  le  traite 
de  paradoxe  incroyable  (6).  D'autres  ne  sont  pas 
si  incrédules  (7)  ;  ils  assurent  qu'on  a  vu  sur  un 
éléphant  jusqu'à  trente  et  quarante  archers  ;  mais 


il  faut  avouer  qu'il  est  rare  d'en  voir  un  si  grand 
nombre.  Pline  (8)  avance  pourtant  qu'en  une  cir- 
constance bien  remarquable  et  à  la  vue  de  Rome 
entière,  on  en  a  compté  jusqu'à  soixante.  Les 
commentateurs  font  remarquer  avec  raison,  que 
les  éléphants  d'Antiochus  étaient  indiens,  et  par 
conséquent  beaucoup  plus  gros  et  plus  forts  que 
ceux  d'Afrique.  Cependant,  malgré  l'autorité  de 
Pline,  nous  trouvons  le  chiffre  excessif.  On  a  pro- 
posé de  lire  Sûo  r\  ipei?  :  cela  ne  vaudrait  vraiment 
pas  la  peine  ni  de  changer  le  texte,  ni  d'amener 
des  éléphants.  S'il  faut  admettre  une  correction, 
et  c'est  notre  avis,  il  vaudrait  mieux  mettre 
Suozaiof/.a,  qui  aura  bien  pu  être  écrit  irrégulière- 
ment S'jo  /.a-  3cV..  La  confusion  pouvait  se  faire  ai- 
sément avec  les  abréviations  des  anciens  mss.  Il 
est  plus  probable,  à  notre  avis,  que  l'erreur  sera 
venue  de  l'hébreu,  où  un  iod  trop  allongé  vers  le 
haut  pour  éviter  de  le  confondre  avec  le  vav,  aura 
été  pris  pour  un  lamed.  La  courbe  de  Viod  favorise 
la  méprise,  quand  Viod  est  plus  grand  ou  le  lamed 
plus  petit  qu'ils  ne  doivent  être.  En  hébreu  douze 
s'écrit  ='  et  trente-deux  =b. 

Et  Indus  magister  besti/e.  Le  grec  plus  simple- 
ment :  El  son  Indien.  L'usage  a  voulu  qu'on  nom- 
mât Indienne  cornac  qui  conduisait  les  éléphants, 
de  quelque  nation  qu'il  fût.  On  le  trouve  en  ce 
sens  dans  les  meilleurs  auteurs  de  l'antiquité. 
Comme  les  meilleurs  éléphants  venaient  des  In- 
des, on  leur  laissait  pour  conducteur  un  homme 
de  cette  nation,  comme  plus  expert  que  les  au- 
tres. 

jr.  38.  Equitatum  hinc  et  inde  statuit  in  duas 
partes,  tubis  exercitum  commovere,  et  perur- 
gere constipatos  in   legionibus   ejus.  Le   grec 


(1)  Aïlian.  Var.  hist.  I.  11.  c.  40.  rii8r)xo;  xoc't  éXe'cpa;  sàv 
o'.voo  mcoat,  ô  uiv  rîjç  âXx7J;  ÉJtiXavOavETat,  ô  os  xrj;  Jta- 
voupyi'aç. 

(2)  Idem.  I.  xin.  c.  8.  E'XÉcpavct  êcç  7co'Xsu.ov  aGXoùVi 
o'tvoç  uiv,  6u  fA'.v  ô  xwv  «;j.7CsXaiv,  ir.ù  ttov  uiv  ÈÇ  ôpuÇr); 
•/Mpoup-foùat,  TOv  8è  £/.  y.aXiijLOu. 

(?)  m.  Macc.  v.  Aa^tXeai  ocâxsat  XiSavuoTOÙ,  zaî  otvco 
ïcXsî'ovi  àxpa:a>,  a7tavT«;  v.lic,  ÉXetpavia;  JtOT.'oai..».  xa'i 
âfpitoQgutaç  f?j  xoù  Tioi^ato;  âsOôvcu  /op/iyt'a  EfjayaY6"(v 
j:.io:  aiivav;r)aiv  toû  jxôpou  tg>v  I'ouoai'wv. 


(4)  O'utoi  Jtpô  xaipoû  o~u  ïàv  i',v  tô  07)p{ov,  rjaav.  Vide 
Lyr.  Grot.  Men. 

(5)  Juuenal.  Sat.  12. 

(6)  Vide  Boch.  de  animal  sacr.  parte  1.  I.  11.  c.  27. 

(7)  Albert.  Mag.Auctor  de  nat.  rerum.  Drus.  Grot.  Serar- 
Tyr.  Verhorst.  Vide  Gésier. 

(8)  Plin.  I.  vin.  c.  7.  Pugnavere  et  Caesari  dictatori 
tertio  consulatu  ejus,  viginti  elephantes  contra  pedites 
quinquagenos  ;  iterumque  totidem  turriti  cum  sexagenis 
propugnatoribus,  eodem  quo  priores  numéro  peditum 
et  pari  equitum  ex  adverso  dimicante. 


'4 


!.  —   MACCABÉES.  —  VI.  -  TERREUR  QU'ILS   EXCITENT 


J9.  Et  ut  refulsit  sol  in  clypeos  aureos  et  aereos,  res- 
plenduerunt  montes  ab  eis,  et  resplenduerunt  sicut  lam- 
pades  ignis. 

40.  Et  distincta  est  pars  exercitus  régis  per  montes 
excelsos,  et  alia  per  loca  humilia;  et  ibant  caute  et 
ordinate. 

41.  Et  commovebantur  omnes  inhabitantes  terram  a 
voce  multitudinis,  et  incessu  turbas,  et  collisione  armo- 
rum  ;  erat  enim  exercitus  magnus  valde  et  fortis. 

42.  Et  appropia"it  Judas  et  exercitus  ejus  in  praslium, 
et  ceciderunt  de  excrcitu  régis  sexcenti  viri. 

4J.  Et  vidit  Eleazar,  fi ti us  Saura,  unam  de  bestiis  lori- 
catam  loricis  régis  ;  et  erat  eminens  super  ceteras  bestias, 
et  visum  est  ei  quod  in  ea  esset  rex  ; 


jq.  Lorsque  le  soleil  eut  frappé  de  ses  rayons  les  bou- 
cliers d'or  et  d'airain,  il  en  rejaillit  un  éclat  sur  les  mon- 
tagnes d'alentour,  qui  brillèrent  comme  des  lampes  ar- 
dentes. 

40.  Une  partie  de  l'armée  du  roi  allait  le  long  des 
hautes  montagnes,  et  l'autre  marchait  dans  la  plaine  ;  et 
ils  marchaient  avec  précaution  et  avec  ordre. 

41.  Tous  les  habitants  des  environs  étaient  épouvantés 
des  cris  de  celte  multitude  de  soldats,  du  bruit  de  leur 
marche,  et  du  fracas  de  leurs  armes,  qui  se  touchaient  ; 
parce  que  l'armée  était  très  grande  et  très  forte. 

42.  El  Judas  s'avança  avec  son  armée  pour  combattre 
les  ennemis;  et  six  cents  hommes  de  l'armée  du  roi 
furent  taillés  en  pièces. 

4;.  Alors  Éléazar,  fils  de  Saura,  vit  un  des  éléphants 
encuirassé  aux  armes  du  roi,  et  il  était  plus  grand  que 
tous  les  autres,  il  crut  que  le  roi  même  était  dessus. 


COMMENTAIRE 


n'est  pas  uniforme  dans  tous  les  exemplaires  (1)  ; 
quelques-uns  portent,  que  les  généraux  d'Antio- 
chus  rangèrent  leur  cavalerie  aux  deux  côtés  de 
Vinfanlerie,  pour  l'encourager,  et  la  tenir  serrée 
dans  les  défilés  (2).  D'autres,  pour  l'animer, et  pour 
la  serrer  dans  ses  bataillons.  Ce  dernier  sens  pa- 
raît le  plus  juste.  Il  était  naturel  de  placer  la  ca- 
valerie à  côté  et  autour  de  l'infanterie,  pour  la 
soutenir  et  pour  la  tenir  serrée  ;  mais  quelle  né- 
cessité, et  quel  moyen  de  couvrir  et  de  serrer 
l'infanterie  par  le  moyen  de  la  cavalerie  dans  des 
défilés  ?  La  variante  des  textes  grecs  vient  de  ce 
que  défilé,  ravin  profond, se  dit  oâ?ayÇ,et  phalange 
9ÎXaf?.On  aura  confondu  le  p  avec  X  comme  ona  pu 
confondre  au  verset  précèdent  ai  avec  ->.  La  Vul- 
gate  lit  :  On  rangea  la  cavalerie  à  côté  de  l'infan- 
terie, pour  l'exciter  par  le  son  des  trompettes  ;  l'au- 
teur avait  sans  doute  un  texte  grec  différent  du 
nôtre  en  cet  endroit  ;  sa  manière  de  lire  ne  forme 
pas  un  sens  fort  heureux,  à  moins  qu'on  ne  dise 
que  les  Grecs  n'avaient  point  de  trompettes  pour 
l'infanterie,  mais  seulement  pour  la  cavalerie,  et 
que,  pour  animer  l'infanterie  au  combat,  il  fallait 
faire  approcher  la  cavalerie  avec  ses  trompettes. 
jK  39.  In  clypeos  aureos  et  yEREOS.  Certains 
textes  grecs  ne  lisent  pas  boucliers  d'airain;  mais 
l'édition  romaine  le  porte  comme  la  V^lgate.  Les 
soldats  portaient  ordinairement  des  boucliers 
d'airain,  mais  les  principaux  officiers  pouvaient  en 
porter  d'or.  Dans  l'armée  d'Alexandre,  les  Argy- 
raspides  étaient  ainsi  nommés  à  cause  de  leurs 
boucliers  d'argent;  les  rois  de   Syrie  purent  imi- 


ter, ou  même  surpasser  en  cela  la  magnificence 
d'Alexandre. 

f.  42.  Sexcenti  viri.  Josèphe  (])  :  Mille  hom- 
mes. Le  second  livre  des  Maccabées  (4)  :  On^e 
mille  hommes  de  pied,  et  six  cents  chevaux.  Les 
six  cents  hommes  marqués  ici,  ne  sont  que  ceux 
qui  tombèrent  au  premier  choc,  avant  la  mort 
d'Éléazar  ;  Josèphe  dit  que  ce  ne  fut  que  des 
avant-coureurs,  et  qu'il  y  en  eut  mille  de  tués. 

jfr.  43.  Eleazar,  filius  Saura.  C'est  le  même 
qui  est  nommé  (j)  Éléazar  Abaron;  il  était  frère 
de  Judas  Maccabée.  On  attribue  ailleurs  à  Judas, 
ce  qui  se  lit  ici  d'Éléazar  (6)  ;  mais  c'est  l'ordi- 
naire d'attribuer  au  général,  ce  qui  s'est  fait  de 
plus  remarquable  dans  le  combat  ;  d'ailleurs  l'his- 
toire de  Ben  Gorion  (7)  porte  que  ce  fut  à  la  sol- 
licitation de  Judas, qu'Éléazar  s'exposa  à  cette  pé- 
rilleuse action.  L'ar'be  dit  qu'Éléazar  était  un 
des  domestiques  de  Judas.  On  ne  sait  d'où  lui 
vient  le  ncm  de  Saura. 

Vidit  unam  de  bestiis  loricatam  loricis  ré- 
gis. L  éléphant  a  le  cuir  dur  partout,  excepté  sous 
le  ventre  ;  cependant  pour  plus  de  sûreté,  on 
les  armait,  et  on  les  couvrait  d'une  espèce  de  cui- 
rasse de  fer  (8).  Quinte-Curce  dit  que,  lorsque 
les  rois  des  Indes  vont  en  campagne,  ils  se  font 
traîner  par  des  éléphants  tout  couverts  d'or  (9). 
Florus  nous  dépeint  des  éléphants  qui  sont  con- 
duits au  combat,  couverts  d'or,  d'argent,  de  pour- 
pre et  d'ivoire  (10).  Elephanlis  immensœ  magnilu- 
dinis  auro,  argenlo,  purpura,  et  suo  ebore  fulgenli- 
bus  aciem   ulrinque   vallaverat.  On   leur   donnait 


(i)  Edit.  Rom.  cl  aluv  communiter.  Kaî  w]v  Èr.ô.it.r.ov 
t'jiTtov  è'v6ev  xai  è'vOev  siirpav  Éitl  ta  ôûo  u.Jpi')  T7)ç  r.apB[j.- 
6oXfj;,   /.ataa£;ov*e;  xai  xataopaaaduEvo!   év   rat;  oâpayÇtv. 


Ms.  Alex.  E'v  ï«tç  sàXayÇiv. 

(2)  lia  Grot. 

(5)  Joseph.  Antiq.  I.    xm.    c.   4. 
È£axoaîou;  âyoapeî. 

(4)  11.  Macc.  xi.  il. 


T 


oiv    ~pOÔpO|xiôv     r.ïp'i 


(5)1.  Macc.  11.  5. 
(6)  il.  Macc.  xm.  5. 

{'/)  Joseph.  Ben  Gorion.  I.  III,    c.    20.    lia    et  Arab.   -  11. 
Macc.  c.  2-;. 
(3)  Heliodor.  t.  ix.  Vide  Doch.  de  anim. parte  1.  /.  11.  c.  27. 
(0)  Quint.  Curt.  I.  vin. 
(10)  F'.or.  I.  11.  c.  8. 


I.—   IVfACCABÉES.  —  VI.-   DÉVOUEMENT  D'ÉLÉAZAR 


7) 


44.  Et  dédit  se  ut  liberaret  populum  suum,  et  acqui- 
reret  sibi  nomen  œternum. 

4$.  Et  cucurrit  ad  eam  audacter  in  medio  legionis, 
interficiens  a  dextris  et  a  sinistris,  et  cadebant  ab  eo 
hue  atque  il  lue. 

46.  Et  ivit  sub  pedes  elephantis,  et  supposuit  se  ei,  et 
occidit  eum  ;  et  cecidit  in  terram  super  ipsum,  et  mor- 
tuus  est  illic. 


44.  Il  exposa  sa  vie  pour  délivrer  son  peuple,  et  pour 
s'acquérir  un  nom  immortel  ; 

45.  Car  il  courut  hardiment  au  milieu  de  la  légion, 
tuant  à  droite  et  à  gauche,  et  faisant  tomber  tout  ce  qui 
se  présentait  devant  lui. 

46.  Et  étant  allé  se  mettre  sous  le  ventre  de  l'éléphant, 
il  le  tua  et  le  fit  tomber  par  terre  ;  et  Éléazar,  sur  qui  il 
tomba,  mourut  sous  lui. 


des  espèces  de  cuirasses  de  fer,  de  même  qu'aux 
chevaux  (1) : 

Spumantemque  agitabat  equum,  quem  pellis  ahenis 
In  plumam  squamis  auro  conserta  tegebat. 

f.  44.  Dédit  se  ut  liberaret  populum  suum. 
L'action  héroïque  d' Éléazar,  qui  sacrifie  sa  vie 
pour  le  salut  de  sa  nation,  a  trouvé  des  censeurs, 
même  parmi  les  pères.  Ce  qui  a  fait  le  plus  de 
tort  à  cet  homme,  dont  le  paganisme  aurait  fait  un 
héros,  et  dont  le  christianisme  a  peine  de  justifier 
la  conduite,  c'est  que  l'Écriture  lui  donne  pour 
motif  de  son  action,  l'envie  de  s'acquérir  une 
gloire  immortelle  :  Ut  acquirerel  sibi  nomen  œier- 
num.  Saint  Grégoire  le  Grand  (2;  dit  qu'Éléazar 
écrasé  sous  l'éléphant  qu'il  fait  mourir,  est  la 
figure  de  ceux  qui  semblent  surmonter  les  vices, 
mais  qui  y  succombent  en  effet  par  leur  orgueil, 
en  même  temps  qu'ils  paraissent  remporter  la  vic- 
toire :  Qui  vilia  superant,  sed  sub  isla  quœ  subjï- 
ciunl,  superbiendo  succumbunt.  Raban  Maur  paraît 
aussi  désapprouver  l'action  et  l'intention  d' Éléa- 
zar (3).  Il  le  regarde  comme  la  figure  des  arro- 
gants et  des  hypocrites,  qui  n'ont  que  l'apparence 
de  la  vertu,  sans  en  avoir  la  réalité,  et  qui  cor- 
rompent par  les  mauvaises  dispositions  de  leur 
cœur,  ce  qui  paraît  de  plus  louable  aux  yeux  des 
hommes  ;  on  dit  de  plus,  que  le  motif  de  sauver 
son  peuple  et  de  procurer  le  bien  public,  n'est  pas 
capable  de  le  justifier.  Il  n'est  pas  permis  de  se 
donner  la  mort,  ou  de  s'exposer  au  danger  cer- 
tain de  mourir,  pour  procurer  la  délivrance  des 
autres.  L'exemple  de  Samson,  qui  fut  écrasé  sous 
les  ruines  du  temple  qu'il  avait  abattu,  ne  fait  rien 
pour  la  caused'Éléazar  ;  Samson  pria,  avant  d'en- 
treprendre cette  action  :  il  n'agit  que  par  l'inspi- 
ration de  l'Esprit  saint  (4).  Mais  nous  ne  lisons 
rien  de  pareil  dans  l'action  d' Éléazar. 

La  plupart  des  commentateurs  néanmoins  jus- 
tifient Éléazar,  et  parlent  de  son  entreprise  comme 
de  l'action  la  plus  belle  et  la  plus  glorieuse.  Saint 
Ambroise  ('-,)  relève  sa  valeur,  son  intrépidité,  son 
mépris  de  la  mort.  Les  commentateurs  distinguent 
deux  choses  dans  ce  dessein  si  hardi  :  la  première 


COMMENTAIRE 

intention  d'Éléazar,  était  de  sauver  son  peuple, 
démettre  à  couvert  la  liberté  et  la  religion  d'Israël, 
d'empêcher  la  profanation  du  temple  et  des  cho- 
ses saintes,  la  désolation  et  la  dispersion  du  peu- 
ple ;  et  la  seconde  intention  était  de  s'acquérir  de 
la  réputation.  Il  est  permis,  sans  doute,  dans  une 
juste  guerre,  de  s'exposer  au  péril,  pour  la  con- 
servation de  sa  patrie  et  de  sa  religion,  surtout 
lorsqu'on  agit  avec  les  ordres,  ou  au  moins  avec 
la  permission  du  général  ;  il  est  permis  encore  de 
regarder  sa  réputation,  comme  un  bien  naturel, 
dont  tout  le  monde  doit  avoir  un  soin  légitime, 
subordonné  à  celui  qu'on  a  de  son  salut,  et  des 
autres  biens  d'un  ordre  plus  relevé.  Or  l'Écriture 
donne  à  Éléazar  ces  deux  intentions,  et  la  charité 
ne  nous  permet  pas  de  croire,  sans  en  avoir  de 
bonnes  raisons,  qu'elles  aient  été  souillées  par  des 
considérations  humaines  qui  auraient  pu  en  altérer 
le  mérite.  Nous  ne  pouvons  donc  pas,  sans  témé- 
rité, condamner  Éléazar,  ni  lui  refuser  une  justice 
que  nous  devons  à  tous  ceux  dont  les  actions  sont 
louables  au  dehors  ;  nous  devons  les  croire  véri- 
tablement bonnes,  tant  que  nous  n'avons  point 
de  preuve  du  contraire.  Les  pères  qui  ont  regardé 
son  entreprise  comme  une  figure  des  orgueilleux, 
quitrouventleurmortdans  leurs  meilleuresactions, 
n'ont  pas  pour  cela  condamné  Éléazar.  Il  pouvait 
représenter  les  méchants  et  les  superbes,  sans 
l'être  lui-même.  De  plus,  Éléazar  ne  croyait  peut- 
être  pas  que  cet  animal  tomberait  si  vite  et  si 
directement  sur  lui  ;  l'éléphant  pouvait  survivre 
quelque  temps  à  sa  b'essure,  ou  tomber  à  côté, 
sans  écraser  celui  qui  l'avait  blessé.  Enfin,  n'y 
eût-il  que  le  zèle  d'Éléazar  à  délivrer  sa  religion 
et  sa  patrie  des  rois  qui  en  étaient  le  fléau,  l'on 
devrait  louer  son  abnégation,  son  dévouement. 
Nous  trouvons,  d'ailleurs,  dans  les  livres  des 
Maccabées,  un  certain  nombre  de  réflexions  qu 
rappellent  les  auteurs  profanes.  On  s'aperçoit  que 
l'hellénisme  avait  fait  des  progrès  non  seulement 
dans  les  mœurs,  mais  aussi  dans  le  style  et  dans  la 
manière  de  penser. 

f.  46.  Ivit  sub  pedes  elephantis.  Un  éléphant 
caparaçonné  et  couvert  de  la  manière  dont  l'au- 


(1)  Virgil.  JEneid.  xi. 

(2)  Greg.  Mag.  Moral.  L  xix.  c.  i'j. 
(j)  Raban.  Maur.  in  hune  loe. 

(4)  Aug.  contra  Epist.Gaudent.  t.  11.  c. 


(5)  Ambros.  Offic.  L.  1.  c.  40.  Voyez  aussi  Serar.  in 
1.  Macc.  Est.  Tir.  Menoch.  etc.  Grot.  de  jure  Belli  ei  Pac. 
I.  ni.  c.  4.  art.  18.  -  Nauarr.  Francise,  a  Victoria. 


;6  I.  —  MACCABÉES.  —  VI.  -   FAMINE   A   BETHSURA   ET  A  JÉRUSALEM 


47.  Et  videntes  virtutem  régis,  et  impetum  exercitus 
ejus,  diverterunt  se  ab  eis. 

48.  Castra  autem  régis  ascenderunt  contra  eos  in 
Jérusalem,  et  applicuerunt  castra  régis  ad  Judaeam  et 
montem  Sion. 

49.  Et  fecit  pacem  cum  his  qui  erant  in  Bethsura  ; 
et  exierunt  de  civitate,  quia  non  erant  eis  ibi  alimenta 
conclusis,  quia  sabbata  erant  terrae. 

ço.  Et  comprehendit  rex  Bethsuram,  et  constituit  illic 
custodiam  servare  eam. 

51.  Et  convertit  castra  ad  locum  sanctificationis  dies 
multos;  et  statuii  illic  balistas,  et  machinas,  et  ignis 
jacula,  et  tormenta  ad  lapides  jactandos,  et  spicula,  et 
scorpios  ad  mittendas  sagiltas,  et  fundibula. 

52.  Fecerunt  autem  et  ipsi  machinas  adversus  machinas 
eorum,  et  pugnaverunt  dies  multos. 

5;.  Escas  autem  non  erant  in  civitate,  eo  quod  sept i mus 
annus  esset,  et  qui  remanserant  in  Judaea  de  gentibus 
consumpserant  reliquias  eorum,  quœ  repositas  fuerant. 

54.  Et  remanserunt  in  sanctis  viri  pauci,  quoniam  obti- 
nuerat  eos  famés,  et  dispersi  sunt  unusquisque  in  locum 
suum. 


47.  Mais  les  Juifs,  voyant  la  puissance  du  roi  et  l'impé- 
tuosité de  son  armée,  se  retirèrent  du  combat. 

48.  En  même  temps  l'armée  du  roi  marcha  contre  eux 
vers  Jérusalem,  et  elle  vint  en  Judée,  et  campa  près  du 
mont  de  Sion. 

49.  Cependant  le  roi  écouta  les  propositions  de  paix 
que  lui  firent  ceux  qui  étaient  dans  Bethsura,  et  ils  sor- 
tirent de  la  ville  n'ayant  plus  de  vivres,  parce  que  c'était 
l'année  du  sabbat  de  la  terre. 

ço.  Ainsi  le  roi  prit  Bethsura,  et  y  mit  garnison  pour 
la  garder. 

(I.  Il  fit  ensuite  marcher  ses  troupes  vers  le  lieu  saint, 
où  il  demeura  longtemps  :  il  y  dressa  divers  instruments 
de  guerre,  et  plusieurs  machines  pour  lancer  des  feux, 
pour  jeter  des  pierres  et  des  dards,  des  arbalètes  pour 
lancer  des  flèches,  et  des  frondes. 

<2.  Les  assiégés  firent  aussi  des  machines  contre  leurs 
machines,  et  ils  combattirent  durant  plusieurs  jours. 

1;.  Mais  il  n'y  avait  point  de  vivres  dans  la  ville,  parce 
que  c'était  la  septième  année,  et  que  ceux  d'entre  les 
nations  qui  étaient  demeurés  dans  la  Judée  avaient  con- 
sommé les  restes  de  ce  qu'on  avait  mis  en  réserve. 

S4.  Il  ne  demeura  donc  que  peu  de  gens  pour  la 
garde  des  lieux  saints,  parce  qu'étant  pressés  par  la 
famine,  chacun  s'en  retourna  chez  soi. 


COMMENTAIRE 


teur  nous  dépeint  celui-ci,  ne  pouvait  guère  être 
blessé  que  sous  le  ventre  :  c'est  l'endroit  où  il 
a  la  peau  la  plus  tendre  ;  et  lorsque  le  rhinocéros 
attaque  cet  animal,  c'est  ordinairement  au  ventre 
qu'il  le  prend,  comme  à  l'endroit  le  plus  aisé  à 
percer  (  1). 

jh  48.  Applicuerunt  castra  régis  ad  Jud^am 
et  montem  Sion.  Judas,  ayant  vu  qu'il  ne  pouvait 
résister  à  toute  l'armée  du  roi,  s'était  retiré  à 
Jérusalem,  et  dans  le  temple;  le  roi  l'y  suivit,  et 
campa  près  du  mont  Sion.  Jérusalem  n'était  pas 
en  état  de  défense,  elle  était  démolie  et  ouverte 
de  tous  côtes  ;  il  n'y  avait  de  fortifié  que  le  temple 
occupé  par  Judas,  et  la  citadelle  de  Sion  qui  tenait 
pour  le  roi.  Il  est  à  remarquer  que  l'Écriture  don- 
ne ici  (2)  le  nom  d'Idumée  à  tout  ce  qui  est  au 
midi  de  Bethsura,  et  le  nom  de  Judée  à  ce  qui  est 
au  nord  de  cette  ville  et  de  Jérusalem  ;  car  tout  la 
midi  était  au  pouvoir  des  Iduméens.  Le  roi  laissa 
une  partie  de  son  armée  devant  Bethsura,  pour 
en  continuer  le  siège  (3).  Il  paraît  même  par  la 
suite,  qu'il  ne  s'attacha  qu'à  cette  dernière  place, 
se  contentant  de  tenir  le  temple  bloqué,  verset  S 1 . 

$.  49.  Fecit  pacem  cum  his  qui  erant  in  Beth- 
sura. Le  siège  de  Betnsura  est  raconté  plus  en 
détail  dans  le  second  livre  des  Maccabées  (.4)  :  le 
roi  et  son  armée  y  souffrirent  beaucoup  ;  les  Juifs 
ne  se  rendirent  que    faute  de    vivres,    parce   que 


c'était  l'année  sabbatique,  dans  laquelle  on  n'avait 
rien  recueilli  de  la  terre. 

f.  51.  Convertit  castra  ad  locum  sanctifi- 
cationis. //  fil  marcher  ses  troupes  vers  le  lieu 
saint,  vers  le  temple,  où  Judas  s'était  retiré  et 
qu'il  avait  fait  environner  de  bonnes  murailles  (5). 

Balistas.  Des  machines  à  jeter  des  pierres,  à 
lancer  des  dards;  ou,  selon  le  grec (6),  des  terras- 
ses ou  des  tours,  pour  y  placer  des  machines. 
Voyez  le  verset  20. 

Ignis  jacula  (7).  Les  anciens  lançaient  du    feu 
dans  les  villes  assiégées  ou  sur  leurs  ennemis,  de 
diverses  manières.  Quelquefoisc'étaient  de  simples 
bois  allumés,  dont  on  frappait  l'ennemi  (8)  : 
Hi  pinu  flagrante  cient,  hi  pondère  pili. 

Quelquefois  c'étaient  des  dards  chargés  de  ma- 
tières enflammées  (9)  : 

Spiculaquc  et  multa  crinitum  missile  flamma. 

D'autres  fois  c'étaient  des  fagots  de  genêts  en- 
duits de  poix,  qu'on  jetait  sur  les  ennemis  ou  sur 
leurs  machines  (  io).Tite  Live  parle  d'une  sorte  de 
javelot  assez  long, qu'on  armait  de  fer  et  de  feu,  et 
qu'on  lançait  par  le  moyen  des  machines.  On 
appelait  ce  javelot  falarica  (11).  Silius  en  parle 
en  ces  termes  (12)  : 

Fulminis  haec  ritu  summis  et  masnibus  arcis 
Incita  sulcatum  tremula  secat  aéra  flamma. 


(1)  Plin.  I.  vin.  c.  20. 

(2)  Verset  ji.  chap.  iv.  61;  v.  ;.  et  65. 

(j)  Joseph.  Anliq.  1.  xn.  c.  14.  Grot.  hic.  Vide  et  confer. 
I.  M  ace.  xni.  18.   10.  et  seq. 

(4)  11.  Macc.  xii.  19.  etc. 

(5)  Vide  1.  V:acc.  iv.  (-0.  et  seq.  vi.  02. 

(t>)    BêXoaTofoEîÇ. 


(7)  Ilupô5o).a. 

(8)  Silius  de  pugna  Cannensi. 
(<>)  Statius  I.  v. 

(10)  \'onnus    Marcel.  Malleoli.   Vide    Lips.     Poliorcclic. 
lib.  v.  cap.  ;. 

(11)  Lii'ius  lib.  xxi. 

(12)  SU.  Sagunt.  hist. 


I. 


MACCABÉES.  —  VI.-   PARJURE   DU    ROI   DE  SYRIE 


77 


<,  5.  Et  audivit  Lysias  quod  Philippus,  quem  constituerai 
rex  Antiochus,  cum  adhuc  viveret,  ut  nutriret  Antiochum, 
filium  suum,  et  regnaret, 

56.  Reversus  esset  a  Perside  et  Media,  et  exercitus 
qui  abierat  cum  ipso,  et  quia  quasrebat  suscipere  regni 
negotia. 

57.  Festinavit  ire,  et  dicere  ad  regem  et  duces  exerci- 
tus: Deficimus  quotidie,  et  esca  nobis  modica  est,  et 
locus  quem  obsidemus  est  munitus,  et  incumbit  nobis 
ordinare  de  regno. 

$8.  Nunc  itaque  demus  dextras  hominibus  istis,  et 
faciamus  cum   illis  pacem,  et   cum    omni    gente  eorum  ; 

ça.  Et  constituants  illis  ut  ambulent  in  legitimis  suis 
sicut  prius  :  propter  légitima  enim  ipsorum,  quas  despe- 
ximus,  irati  sunt,  et  fecerunt  omnia  hase. 

60.  Et  placuit  sermo  in  conspectu  régis  et  principum  ; 
et  misit  ad  eos  pacem  facere,  et  receperunt  illam, 

61.  Et  juravit  illis  rex  et  principes,  et  exierunt  de  mu- 
nitione. 

62.  Et  intravit  rex  montem  Sion,  et  vidit  munitionem 
loci  ;  et  rupit  citius  juramentum  quod  juravit,  et  mandavit 
destruere  murum  in  gyro. 

6j.  Et  discessit  festinanter,  et  reversus  est  Antiochiam., 
et  invenit  Philippum  dominantem  civitati  ;  et  pugnavit 
adversus  eum,  et  occupavit  civitatem. 


55.  Cependant  Lysias  apprit  que  Philippe,  qui  avait 
été  choisi  par  le  roi  Antiochus,  lorsqu'il  vivait  encore, 
pour  élever  Antiochus  son  fils,  et  pour  le  faire  régner  en 
sa  place, 

56.  Était  revenu  de  la  Perse  et  de  la  Médie  avec  l'armée 
qui  l'y  avait  accompagné,  et  qu'il  se  préparait  à  prendre 
le  gouvernement  des  affaires  du  royaume. 

57.  Il  se  hâta  donc  d'aller  dire  au  roi  et  aux  généraux 
de  l'armée  :  Nous  nous  consumons  ici  tous  les  jours  ; 
nous  avons  très  peu  de  vivres  ;  la  place  que  nous  assié- 
geons est  bien  fortifiée  ;  et  nous  sommes  obligés  de 
mettre  ordre  aux  affaires  du  royaume. 

58.  Maintenant  donc,  tendons  la  main  à  ces  gens,  fai- 
sons la  paix  avec  eux  et  avec  toute  leur  nation  ; 

ço.  Et  permettons-leur  de  vivre  selon  leurs  lois  comme 
auparavant  ;  car  c'est  le  mépris  que  nous  avons  fait  de 
leurs  lois  qui  les  a  si  fort  animés,  et  qui  leur  a  fait  faire 
tout  ce  qu'ils  ont  fait  jusqu'à  présent. 

60.  Cette  proposition  plut  au  roi  et  à  ses  principaux 
officiers  :  il  envoya  aussitôt  traiter  de  la  paix  avec  les 
Juifs,  qui  l'acceptèrent. 

61.  Et  le  roi  et  ses  officiers  l'ayant  confirmée  avec 
serment,  ceux  qui  défendaient  la  forteresse  se  retirèrent. 

62.  Alors  le  roi  entra  sur  la  montagne  de  Sion,  et  en 
vit  les  fortifications,  et  il  viola  aussitôt  le  serment  qu'il 
avait  fait,  car  il  commanda  qu'on  abattît  tous  les  murs 
qui  l'environnaient. 

6j.  Il  partit  ensuite  en  grande  hâte  et  retourna  à  An- 
tioche,  où  il  trouva  que  Philippe  s'était  rendu  maître  de 
la  ville.   Et  après  avoir  combattu  contre  lui,  il  la  reprit. 


COMMENTAIRE 


L'Écriture  veut  marquer  apparemment  ici  les 
machines  qui  lançaient  ces  falariques,  sous  le  nom 
de  machines  à  lancer  des  feux. 

SCORPIOS     AD    MITTENDAS     SAG1TTAS.     Le      latin 

scorpius,  ou  scorpion,  est  une  sorte  d"arbalète  qui 
lançait  des  balles  de  plomb  ou  des  flèches.  Elle 
était  maniée  par  un  seul  homme  ;  mais  il  fallait 
une  certains  habileté  pour  en  tirer  tous  les  avan- 
tages voulus  (1). 

f.  55 .  Et  audivit  Lysias  quod  Philippus,  quem 
constituerat  rex  Antiochus,  etc.  Lysias  ap- 
prit que  Philippe,  choisi  par  le  roi  Antiochus, 
pour  élever  son  fils, et  pour  gouverner  son  royaume 
pendant  sa  minorité,  était  arrivé  en  Syrie.  A  sa 
mort,  Antiochus  Épiphane  avait  déclaré  Philippe 
gouverneur  du  jeune  Antiochus  Eupator,  et  ré- 
gent du  royaume,  en  place  de  Lysias. 


v.  58.  Demus  dextras  hominibus  istis.  Cette 
expression  se  rencontre  souvent  dans  ces  livres  (2). 
Les  Perses  et  la  plupart  des  Orientaux  n'avaient 
point  de  marque  plus  assurée  de  leurs  promesses, 
que  de  donner  la  main  droite  (3). 

jL  59.  Ut  ambulent  in  legitimis  suis,  sicut 
prius.  Ils  avaient  joui  de  ce  privilège  depuis 
Cyrus  ;  ce  privilège  leur  avait  été  confirmé  par 
Artaxerxès,  Darius  fils  d'Hystaspe,  Alexandre 
et  les  autres.  Antiochus  Épiphane  avait  été  le 
premier  à  l'enfreindre. 

Qu/E  DESPExiMus.Le  grec  (4): Nous  avons  dissipé 
leurs  lois.  Nous  avons  voulu  les  abolir. 

f.  63.  Occupavit  civitatem.  //  reprit  Anlio- 
che,  et  fit  mourir  Philippe,  qui  était  dans  la 
ville  {S). 


(1)  Rich.  Dicl.  desaniiq.  ad  verb.  Scorpio. 

(2)  1.  Macc.  xi.  50.  62.  66  ;   xiu.  45.    50.  -   11. 
J4  ;  xi.  jo;  xii.  11. 


(j)  Xenoph.  de  Expcdit.  Cm.  -  Jun.  Vide  et   Brisscn  de 
Macc.  iv.        Reg.  Pers.  t.  1.  p.  141.  et  seq. 

(4)  Atea/.soâaafiEv. 

(5)  Joseph.  Antiq.  I.  xu.  c.  ii 


CHAPITRE    VII 

Démétrius,  fils  de  Séleucus,  vient  en  Syrie  el  fait  mourir  Antiochus  Eupator  et  Lysias. 
Il  envoie  en  Judée  Bacchidc  pour  établir  grand  prêtre  l'impie  Alcime.  Bacchide  tâche 
en  vain  de  surprendre  Judas  ;  il  se  relire.  Nicanor  est  envoyé  contre  Judas;  il  est  tué 
et  son  armée   entièrement  défaite. 


i.  Anno  centesimo  quinquagesimo  primo,  exiit  Deme- 
trius,  Seleuci  filius,  ab  urbe  Rcma,  et  ascendit  cum 
paucis  viris  in  civitatem  maritimam,  et  regnavit  il  lie 


i.  En  la  cent-cinquante-unième  année,  Démétrius,  fils 
de  Séleucus,  étant  sorti  de  la  ville  de  Rome,  vint  avec 
peu  de  gens  dans  une  ville  sur  la  côte  de  la  mer,  et  il 
commença  à  y  régner. 


COMMENTAIRE 


}.    1    EXIIT  DEMETRIUS,  SELEUCI  FILIUS,  AB  URBE 

RoMA.On  avu  précédemment  (  i)  que  Séleucus  IV, 
fils  cTAntiochus  le  Grand, avait  envoyéà  Rome  son 
fils  Démétrius;  en  place  d'Antiochus  Épiphane, 
son  frère,  qui  y  était  en  otage  depuis  quelques 
années.  Antiochus  Épiphane,  sans  se  mettre  en 
peine  des  droits  de  son  neveu  Démétrius,  avait 
pris  possession  du  royaume,  après  la  mort  de 
Séleucus,  et  avait  laissé  en  mourant  la  couronne  à 
son  (ils  Antiochus  Eupator,  dont  on  a  parlé  au 
chapitre  précédent.  Le  sénat  romain  avait  envoyé 
en  Syrie  trois  légats  pour  administrer  le  royaume, 
pendant  la  minorité  du  roi,  et  pour  réduire  ses 
vaisseaux  et  les  éléphants,  au  nombre  prescrit  par 
les  articles  de  la  paix  conclue  avec  Antiochus  le 
Grand.  Mais  il  arriva  qu'Octavius,  chef  de  cette 
légation,  fut  mis  à  mort  à  Laodicée,  par  un  par- 
ticulier nommé  Leptine.  Eupator  et  Lysias  firent 
ce  qu'ils  purent  pour  éloigner  d'eux  le  soupçon 
d'avoir  contribué  à  cette  mort  ;  ils  envoyèrent 
des  ambassadeurs  à  Rome  pour  se  justifier  ;  mais 
le  sénat,  après  avoir  entendu  leurs  raisons,  les 
renvoya  sans  leur  donner  de  réponse  fixe. 

Cependant  Démétrius,  fils  de  Séleucus,  crut 
que  cette  affaire  lui  ouvrait  un  chemin  pour  rentrer 
en  possesion  des  états  de  son  père  :  il  consulta 
l'historien  Polybe,  qui  était  alors  à  Rome  (2)  ,  et 
lui  demanda  s'il  devait  traiter  avec  le  sénat  de  son 
retour  en  Syrie.  Polybe  n'en  fut  pas  d'avis  ;  mais 
il  lui  conseilla,  sans  toutefois  s'expliquer  trop 
clairement,  de  s'en  retourner  à  petit  bruit  en 
Syrie, et  d'entreprendre  quelque  chose  de  digne  de 


son  rang.  Démétrius  ne  suivit  pas  cet  avis  ;  il  pria  le 
sénat  de  le  déchargerde  la  nécessité  de  demeurera 
Rome,  puisqu'ils  avaient  donné  le  royaume  à  Eu- 
pator, à  son  exclusion.  On  n'eut  point  d'égard  à 
ses  remontrances,  et  il  s'aperçut  bientôt  de  la 
faute  qu'il  avait  faite  ;  il  la  répara  promptement 
par  la  résolution  qu'il  prit  de  s'enfuir  ;  ses  amis 
lui  facilitèrent  le  moyen  de  s'embarquer  :  il  partit 
avec  peu  de  monde,  et  il  y  avait  quatre  jours 
qu'il  était  sorti  de  Rome,  lorsqu'on  s'en  aperçut. 
Etant  arrivé  en  Syrie,  il  écrivit  au  sénat  qu'il 
allait  non  faire  la  guerre  à  Eupator,  son  neveu,  que 
le  sénat  avait  reconnu  ;  mais  qu'il  marchait  contre 
Lysias,  pour  venger  la  mort  du  légat  Octavius, 
Il  se  rendit  bientôt  maître  de  Tripoli,  ville  mari- 
time de  Syrie,  et,  de  là,  il  fut  reçu  à  Apamée  ; 
Antiochus  Eupator  et  Lysias  n'avaient  point  osé 
prendre  les  armes  contre  lui,  parce  qu'il  se  disait 
envoyé  par  les  Romains  ;  ils  vinrent  même  au  de- 
vant de  lui  avec  l'armée;  mais  les  soldatsd'Eupator 
se  saisirent  de  leur  jeune  roi  et  de  Lysias,  et 
Démétrius  ayant  déclaré  qu'il  ne  voulait  pas 
qu'on  les  lui  présentât,  on  comprit  bien  qu'il  vou- 
lait qu'on  les  fît  mourir,  ce  qui  fut  exécuté  aussitôt. 
Ascendit  cum  paucis  viris  in  civitatem  ma- 
ritimam. Cette  ville  est  Tripoli,  comme  nous 
l'apprennent  le  second  livre  des  Maccabées(j) 
et  Josèphe  (4).  Démétrius  n'avait  à  sa  suite, 
lorsqu'il  s'enfuit  de  Rome  et  qu'il  s'embarqua 
pour  venir  en  Syrie,  que  huit  compagnons,  cinq 
serviteurs,  et  trois  autres  personnes  (5).  162-161 
avant  l'ère  vulgaire. 


(1)  Voyez  le  Ciap.  1.  verset  11. 

(2)  Polrb.  Legjt.  114.  122. 


(3)  n.  Macc.  xiv.  1. 

(4;  Joseph,  xn.  16.  —  (5)  Polrb.  loco  cimIo. 


I.  —  MACCABÉES.  —  VII.   -   DÉMÉTRIUS 


79 


2.  Et  factum  est,  ut  ingressus  est  domum  regni  patrum 
suorum,  comprehendit  exercitus  Antiochum  et  Lysiam, 
ut  adducerent  eos  ad  eum. 

j.  Et  res  ei  innotuit,  et  ait  :  Nolite  mihi  ostendere 
faciem  eorum. 

4.  Et  occidit  eos  exercitus;  et  sedit  Demetrius  super 
sedem  regni  sui. 

5.  Et  venerunt  ad  eum  viri  iniqui  et  impii  ex  Israël,  et 
Alcimus,  dux  eorum,  qui  volebat  fieri  sacerdos  ; 

6.  Et  accusaverunt  populum  apud  regem,  dicentes: 
Perdidit  Judas,  et  fratres  ejus,  omnes  amicos  tuos,  et 
nos  dispersit  de  terra  nostra. 

7.  Nunc  ergo  mitte  virum  cui  credis,  ut  eat  et  videat 
exterminium  omne  quod  fecit  nobis  et  regionibus  régis, 
et  puniat  omnes  amicos  ejus,  et  adjutores  eorum. 


:.  Et  lorsqu'il  fut  entré  dans  le  siège  du  royaume  de 
ses  pères,  l'armée  se  saisit  d'Antiochus  et  de  Lysias, 
pour  les  amener  à  Démétrius. 

?.  Lorsqu'il  en  fut  averti,  il  leur  dit  :  Ne  me  faites 
point  voir  leur  visage. 

4.  Alors  l'armée  les  fit  mourir  ;  et  Démétrius  s'assit 
sur  le  trône  de  son  royaume. 

j.  Alors  des  hommes  d'Israël  méchants  et  impies  vin- 
rent le  trouver,  ayant  à  leur  tête  Alcime  qui  aspirait  à 
être  établi  grand  prêtre. 

6.  Et  ils  accusèrent  le  peuple  devant  le  roi,  en  disant  : 
Judas  et  ses  frères  ont  fait  périr  tous  vos  amis,  et  il 
nous  a  même  chassés  de  notre  pays. 

7.  Envoyez-donc  maintenant  un  homme  dont  vous 
soyez  assuré,  afin  qu'il  reconnaisse  tous  les  maux  qu'il 
nous  a  fait  souffrir  et  aux  provinces  qui  appartiennent  au 
roi,  et  qu'il  punisse  tous  ses  amis,  et  tous  ceux  qui  le 
soutiennent. 


COMMENTAIRE 


f.  2.  Ut  ingressus  est  domum  regni  patrum 
suorum.  Il  vint  de  Tripoli  à  Apamée,  et,  ayant 
assemblé  des  troupes,  il  marcha  droit  à  Antioche, 
capitale  du  royaume  de  Syrie  ;  comme  il  s'avançait 
vers  la  ville,  Antiochus  Eupator  et  Lysias  vinrent 
au  devant  de  lui  ;  mais  il  leur  arriva  ce  que  nous 
avons  raconté,  et  ce  qu'on  lit  dans  les  versets  2, 
3  et  4  de  ce  chapitre. 

JT.     $.    Al.CIMUS,    QUI    VOLEBAT    FIERI  SACERDOS. 

Antiochus  Eupator,  ayant  fait  la  paix  avec  les 
Juifs,  marcha  contre  Philippe  qui  s'était  emparé 
d'Antioche,  comme  gouverneur  du  royaume.  Il 
mena  avec  lui  Ménélaiis,  grand  prêtre  des  Juifs, 
qui,  pour  satisfaire  son  ambition,  avait  vendu  son 
pays  à  l'ennemi.  Lysias  savait  par  expérience 
combien  cet  esprit  était  dangereux,  et  combien  la 
guerre  contre  les  Juifs  avait  coûté  de  sang;  il 
inspira  donc  à  Eupator  le  dessein  de  se  défaire  de 
Ménélaiis,  comme  de  celui  qui  avait  causé  tous 
les  troubles  de  la  Judée.  On  fit  donc  mourir  ce 
grand  prêtre,  en  le  précipitant  dans  une  tour 
pleine  de  cendres,  à  Bérée  en  Syrie  (1).  Onias, 
fils  du  grand  prêtre  Onias  1 1 1,  aurait  dû  succéder  à 
son  père,  si  l'on  eût  suivi  l'ordre  légitime  ;  effrayé 
de  la  mort  de  son  oncle,  l'usurpateur  Ménélaiis, 
et  craignant  pour  sa  vie,  il  se  retira  en  Egypte, 
où  il  bâtit  dans  la  suite  un  temple  sur  le  modèle 
de  celui  de  Jérusalem  (2).  La  souveraine  sacrifi- 
cature  était  donc  vacante  par  la  mort  de  l'usur- 
pateur et  la  fuite  du  successeur  légitime, 

Lysias  conseilla  au  roi  de  transporter  le  sacer- 
doce, de  la  famille  qui  l'avait  possédé  jusqu'alors, 


dans  une  autre  moins  puissante,  qui  serait  par  là 
plus  attachée  à  son  service,  en  reconnaissance 
d'un  tel  bienfait  (3).  Eupator  établit  dans  cette 
dignité  Alcime  ou  Jacim,  prêtre  de  la  race 
d'Aaron  (4)  ;  mais  non  pas  de  la  famille  sacerdo- 
tale, qui  jusqu'alors  avait  possédé  le  souverain 
pontificat  (5).  Comme  Alcime  s'était  souillé,  sous 
la  persécution  d'Antiochus  Épiphane,  en  sacri- 
fiant ou  en  mangeant  des  viandes  impures  (6),  il 
ne  put  se  faire  reconnaître  parles  Juifs,  et,  se 
voyant  exclu  des  fonctions  de  sa  dignité,  il  re- 
courut au  roi  Démétrius,  et  accusa  Judas  et  ses 
partisans. 

f.  6.  Perdidit  Judas  omnes  amicos  tuos. 
Judas  a  /ail  périr  tous  vos  amis,  tous  ceux  des 
Juifs  qui  étaient  attachés  à  votre  service,  et  qui 
avaient  obéi  aux  ordres  d'Antiochus  votre  père, 
en  abandonnant  leur  religion.  Rien  n'était  plus 
vrai  que  cette  accusation  (7)  ;  elle  faisait  même 
infiniment  d'honneur  à  Judas.  On  peut  voir  dans 
le  second  livre  des  Maccabées(8),  la  manière  dont 
s'y  prit  Alcime,  pour  se  rendre  Démétrius  favo- 
rable. 

Comme  l'union  est  toute  la  force  des  états, 
aussi  les  factions  particulières  en  sont  la  destruc- 
tion. Quoiqu'Alcime  ne  fut  point  de  la  race 
sacerdotale,  selon  Josèphe  (9),  comme  il  ne  pen- 
sait qu'à  procurer  son  intérêt  propre,  et  foulait 
aux  pieds  toutes  les  lois  les  plus  saintes  de  sa  reli- 
gion, il  ne  craignit  point  d'usurper  la  souveraine 
sacrificature,  et  de  bouleverser  son  pays,  pourvu 
que  son  ambition   fût    satisfaite.    11  profita  donc 


(1)  11.  Macc.  xiii.  4...  8. 

(2)  Joseph.  Anliq.  I.  xn.  c.   5.  et  de  Belle*  l.  1.  c.  I. 

(?)  Idem.  Ub.  xu.  c.  (,.  Y'^o  Akgi'ou  Jt£ta0s\;  [juio-G^vai 
T7iv  T[u.r)v  arcô  xaûirj;  trj;  oixia;  si;  é'tepov  o7(/.ov. 

(4)  Verset  14.  Homo  sacerdos  de  semine  Aaron  venit, 
non   decipiet  nos. 


(5)  Joseph.  Anliq.  I.  xn.  c.  5.  et  l.  xx.  c.  8.  Kathatôbiv 
I  «x[u.ov  ap^'.epe'a,  Y'vou;  [ièv  A  'apcôvoç,  ou/,  ovia  SE  tr}; 
ûiy.ia;  xaûlT):. 

(0)  11.  Macc.  xiv.   J. 

(7)  1.  Macc.  m.  $.  6.  8. 

(8)  11.  Macc.  xiv.  1.  2.  et  seq.        , 

(9)  Joseph.  Anliq.  L  xn.  cap.  15.  et  16, 


8o 


MACCABEES.—  VII.-  ALCIME   ET  BACCHIDE 


8.  Et  elegit  rex  ex  amicis  suis  Bacchidem,  qui  domi- 
nabatur  trans  (lumen,  magnum  in  regno,  et    fidelem  régi. 

9.  Etminit  eum  ut  videret  exterminium  quod  fecit  Judas  ; 
sed  et  Alcimum  impium  constituit  in  sacerdotium,  et 
mandavit  ei  facere    ultionem  in  filios  Israël. 

10.  Et  surrexerunt,  et  venerunt  cum  exercitu  magno 
in  terram  Juda,  et  miserunt  nuntios,  et  locuti  sunt  ad 
Judam  et  ad  fratres  ejus  verbis  pacificis  in  dolo. 

11.  Et  non  intenderunt  sermonibus  eorum,  viderunt 
enim  quia  venerunt  cum  exercitu  magno. 

12.  Et  convenerunt  ad  Alcimum  et  Bacchiiem  congre- 
gatio  scribarum  requirere  quas  justa  sunt  ; 

1;.  Et  primi,  Assidaei  qui  erant  in  filiis  Israël,  et  exqui- 
rebant  ab  eis  pacem. 


8.  Et  le  roi  choisit  d'entre  ses  amis  Bacchide  qui  com- 
mandait au-delà  du  fleuve,  et  qui  était  grand  dans  le 
royaume  et  fidèle  au  roi  ; 

9.  Et  il  l'envoya  reconnaître  tous  les  maux  qu'avait 
fait  Judas;  et  il  établit  grand  prêtre  l'impie  Alcime,  et 
lui  ordonna  de  punir  les  enfants  d'Israël. 

10.  Ils  vinrent  donc  aussitôt  avec  une  grande  armée 
dans  le  pays  de  Juda;  et  ils  députèrent  vers  Judas  et 
vers  ses  frères  pour  leur  faire  des  propositions  de  paix, 
dans  le  dessein  de  les  surprendre. 

11.  Mais  ils  n'eurent  aucun  égard  à  leurs  paroles, 
voyant  qu'ils  étaient  venus  avec  une  puissante  armée. 

12.  Cependant  les  docteurs  de  la  loi  s'étant  assemblés, 
vinrent  trouver  Alcime  et  Bacchide,  pour  leur  faire  des 
propositions  très  justes. 

ij.  Ceux  d'entre  les  enfants  d'Israël  qu'on  appelait 
Assidéens  étaient  les  premiers  de  cette  assemblée,  et  ils 
voulaient  leur  demander  la  paix  ; 


COMMENTAIRE 


des  troubles  et  des  guerres  de  la  Judée  ;  et,  ayant 
déjà  obtenu  celte  haute  dignité  sous  le  règne 
d'Antiochus,  à  la  sollicitation  de  Lysias,  la  crainte 
qu'il  eut  que  le  nouveau  prince  ne  l'en  dépouillât, 
comme  d'une  chose  qui  ne  pouvait  lui  appartenir, 
le  porta  à  recourir  aux  calomnies  et  à  vouloir 
affermir  sa  fortune  aux  dépens  de  son  pays. 

Tels  sont  les  effets  ordinaires  de  l'ambition  et 
de  la  cupidité,  sources  funestes  de  tous  les  cri- 
mes'. Combien  vit-on  autrefois,  dans  l'Église 
même  de  personnes  indignes  aspirer,  comme 
Alcime,  aux  premières  dignités, par  une  excessive 
ambition  qui  les  portait  à  se  séparer  de  leurs 
frères,  et  à  trahir  lâchement  leur  (oi,  pour  plaire 
à  ceux  qui  avaient  la  souveraine  autorité  entre  les 
mains.'  Que  d'évèques,  du  temps  des  Ariens,  ont 
usurpé  les  premiers  sièges  ecclésiastiques  aux 
dépens  de  la  divinité  de  Jésus-Christ,  dont  ils 
trahissaient  la  cause,  afin  d'occuper  les  sièges  de 
ses  plus  saints  défenseurs  ?  Que  de  prélats  du 
temps  de  saint  Jean  Chrysostôme,  ne  se  sont-ils 
pas  aussi  écartés  de  la  voie  de  la  justice,  en  pu- 
bliant des  calomnies  contre  l'innocent,  pour  se 
disculper,  en  quelque  sorte,  de  leurs  propres  dé- 
règlements, par  l'oppression  de  celui  qui  travail- 
lait à  réformer  la  corruption  de  leurs  mœurs  ?  Ils 
s'élevaient  comme  des  Alcimes  impies  et  ambi- 
tieux contre  les  zélés  défenseurs  de  la  foi  et  de 
la  morale  de  Jésus-Christ,  qu'ils  traitaient  de 
personnes  séditieuses,  et  qu'ils  accusaient  de  faire 
toutes  sortes  de  maux  à  leurs  frères,  lorsqu'étant 
eux-mêmes  les  vraies  causes  de  tous  les  troubles, 
ils  ne  travaillaient  qu'à  s'appuyer  sur  les  puis- 
sances séculières,  pour  perdre  ceux  qui  s'oppo- 
saientà  leurs  excès. 

On  n'a  vu  encore  que  trop  souvent  des  imita- 
teurs de  cet  impie  usurpateur  du   sacerdoce  de 


l'ancienne  loi,  faire  à  ceux  qui  marchaient  fidèle- 
ment sur  les  traces  du  généreux  Maccabée,  des 
propositions  de  paix  dans  le  dessein  de  les  sui pren- 
dre. Les  faux  synodes  qui  se  sont  tenus  pendant 
que  saint  Athanase  vivait,  et  qu'il  défendait  la  foi 
du  concile  de  Nicée,  nous  en  fournissent  beau- 
coup d'exemples,  et  on  le  retrouve  plus  ou  moins 
dans  tous  les  siècles  sous  des  formes  spéciales, 
jusqu'à  notre  époque. 
f.  8.   Elegit  rex  ex  amicis  suis   Bacchidem, 

QUI     DOMINABATUR    TRANS  FLUMEN.     Le  roi    choisit 

d'entre  ses  amis  Bacchide,  qui  commandait  au-delà 
du  fleuve,  au-delà  de  l'Euphrale,  qui  est  ordi- 
nairement nommé  le  fleuve  par  excellence,  ou  le 
grand  fleuve.  Démétrius,  ayant  confirmé  Alcime 
dans  la  souveraine  sacrificature, l'envoya  en  Judée 
avec  Bacchide,  gouverneurde  la  Mésopotamie  (  1  ). 
Ils  y  avaient  probablement  succédé  à  Héraclide, 
qu'Antiochus  Épiphane  'avait  établi  trésorier  de 
la  Babylonie,  et  à  Timarque  son  frère,  qui  avait  été 
établi  gouverneur  de  la  même  province.  Ces  deux 
personnages  ayant  abusé  de  leur  autorité,  Démé- 
trius les  fit  mourir  ;  cet  acte  de  vigueur  lui  mé- 
rita le  surnom  de  Soler,  c'est-à-dire  sauveur  ;  les 
Babyloniens  le  lui  donnèrent,  et  il  le  porta  tou- 
jours depuis  (2). 

jh  12.  Convenerunt  congregatio  scribarum, 
requirere  qVjE  justa  sunt.  Cette  corporation  des 
scribes  était  une  des  principales  de  la  nation  ;  ils 
exerçaient  une  sorte  de  magistrature  dans  la  paix 
comme  dans  la  guerre.  Ces  scribes  viennent  ici 
pour  traiter  avec  Alcime  et  avec  Bacchide,  au 
nom  de  tout  le  peuple  ;  on  conçoitaisément  pour- 
quoi Judas  ne  s'y  trouva  pas. 

f.  13.  Primi,Assid/ei...  exquirebant  ab  eis  pa- 
cem. Voyez  ce  que  nous  avons  dit  des  Assidéens, 
au  chapitre  il,  42. 


(  1  )  lia  Grot.  Usser.  Joseph,  alii. 


(2)  Appian.  Syriac.  p.  118. 


MACCABÉES.  —  VII.  -  CRIME   DU   GRAND   PRETRE 


81 


14.  Dixerunt  enim  :  Homo  sacerdos  de  semine  Aaron 
venit,  non  decipiet  nos. 

1  <,.  Et  locutus  est  cum  eis  verba  pacifica,  et  juravit  illis, 
dicens:  Non  infereraus  vobis  malum,  neque  amicis  ves- 
tris. 

16.  Et  crediderunt  ei;  et  comprehendit  ex  eis  sexaginta 
viros,  et  occidit  eos  in  una  die,  secundum  verbum  quod 
scriptum  est  : 

17.  Carnes  sactorum  tuorum,  et  «anguinem  ipsorum 
elTuderunt  in  circuitu  Jérusalem,  et  non  erat  qui  sepeliret. 

18.  Et  incubuit  timor  et  tremor  in  omnem  populum, 
quia  dixerunt:  Non  est  veritas  et  judicium  in  eis  ;  trans- 
gressi  sunt  enim  constitutum,  et  jusjurandum  quod 
juraverunt. 


14.  Car  ils  disaient  :  C'est  un  prêtre  de  la  race  d'Aaron 
qui  vient  à  nous  ;  il  ne  nous  trompera  pas. 

15.  Alcime  leur  répondit  comme  un  homme  qui  n'au- 
rait eu  que  des  pensées  de  paix,  et  leur  dit  avec  ser- 
ment :  Nous  ne  vous  ferons  aucun  mal,  ni  à  vous  ni  à 
vos  amis. 

16.  Ils  le  crurent  ;  mais  il  en  fit  arrêter  soixante  d'en- 
tre eux,  qu'il  fit  mourir  tous  en  un  même  jour,  selon 
cette  parole  de  l'Écriture  : 

17.  Ils  ont  fait  tomber  les  corps  de  vos  saints  ;  et  ils 
ont  répandu  leur  sang  autour  de  Jérusalem,  sans  que 
personne  les  ensevelît. 

18.  Et  tout  le  peuple  fut  saisi  de  crainte  et  de  frayeur, 
et  ils  se  disaient  les  uns  aux  autres:  Il  n'y  a  ni  vérité  ni 
justice  parmi  eux,  car  ils  ont  violé  la  parole  qu'ils  avaient 
donnée,  et  le  serment  qu'ils  avaient  fait. 


COMMENTAIRE 


Il  paraît  que  les  docteurs  de  la  loi,  quoique  sa- 
vants et  éclairés  dans  les  choses  de  la  religion, 
étaient  simples,  sans  expérience  des  artifices  d'un 
esprit  fourbe ,  tel  qu'était  celui  d'Alcime.  Les 
Assidéens,  de  leur  côté,  étaient  plus  attachés  que 
les  autres  Juifs  à  l'observation  exacte  de  la  loi  de 
Dieu  ;  ils  faisaient  profession  d'une  régularité  de 
vie  plus  austère  ;  malgré  leur  sainteté,  ils  tombè- 
rent aussi  dans  le  même  piège  que  ces  docteurs 
de  la  loi.  Mais,  quoique  leur  intention  fût  bonne 
lorsqu'ils  allèrent  trouver  Alcime  et  Bacchide, 
pour  leur  demander,  dit  l'Ecriture,  ce  qui  était 
juste,  c'est-à-dire,  pour  les  prier  de  ne  rien  faire 
contre  la  justice,  et  de  conserver  les  droits  du 
peuple  ;  ils  firent  peut-être  une  faute,  en  ce  qu'ils 
ne  consultèrent  point  sans  doute  Judas  Maccabée 
et  ses  frères,  en  faveur  desquels  Dieu  s'était  si 
visiblement  déclaré  dans  cette  guerre,  et  dont  la 
lumière  plus  pénétrante  aurait  pu  leur  découvrir 
le  piège  de  leurs  ennemis. 

La  faute  qu'ils  purent  faire  en  cela  fut  lavée 
dans  leur  sang,  et  l'Écriture  nous  donne  lieu  de 
les  regarder  comme  des  saints,  lorsqu'après  avoir 
rapporté  la  perfidie  de  ce  grand  prêtre  qui  fit 
mourir  cruellejientsoixanted'entr'eux,  elleajoute, 
que  cela  est  arrivé  selon  celle  parole  du  psaume: 
Ils  ont  fait  tomber  les  corps  de  vos  saints,  et  ont  ré- 
pandu leur  sang  autour  de  Jérusalem  (1).  Il  vaut 
donc  mieux,  sans  comparaison,  tomber  dans  le 
piège  des  méchants  par  simplicité,  et  perdre  la 
vie  pour  la  religion,  que  triompher  de  ses  frères 
par  la  force  ou  la  ruse,  et  soutenir  sa  grandeur 
par  l'oppression  des  innocents.  Mais  néanmoins 
il  est  très  avantageux  aussi  à  ceux  qui  tiennent  en 
quelque  sorte  dans  l'Église  la  place  des  Macca- 
bées,  d'imiter  la  prudence  qu'ils  firent  paraître 
pour  se  défendre  des  artifices  des  Alcime  et  des 
Bacchide,  et  pour  ne  pas  exposer  la  pureté  de  la 
foi  à  leurs  violences,  en  s'exposant  imprudemment 
à  tomber  victimes  de  leurs  artifices. 


Ainsi  il  est  important  de  ne  séparer  jamais  ces 
deux  vertus  que  le  Fils  de  Dieu  nous  dit  de 
joindre  ensemble  :  la  prudence  du  serpent,  et  la 
simplicité  de  la  colombe.  Eslote  prudentes  sicut 
serpentes,  elsimplices  sicut columbœ.  Desgens, pour 
être  de  la  race  sacerdotale  d'Aaron,  n'ont  pas  tou- 
jours eu  cet  esprit  de  sincérité  et  de  vérité,  qui 
empêche  qu'on  ne  trompe.  On  n'a  vu  que  trop 
souvent,  même  dans  les  premiers  siècles  de 
l'Église,  des  hommes  établis  prêtres,  non  selon 
l'ordre  d'Aaron,  mais  selon  celui  de  Jésus-Christ, 
abuser  de  ce  caractère  de  sainteté,  pour  surpren- 
dre ceux  qui  les  regardaient  comme  incapables 
de  les  tromper.  S'il  est  dit  de  Jésus-Christ,  qu'i/ 
ne  se  fiait  pas  aux  Juifs,  qui  faisaient  même  pro- 
fession de  croire  en  son  nom,  parce  qu'il  les  connais- 
sait tous  (2),  on  a  eu  raison,  en  tout  temps  de  ne 
pas  se  fier  aussi  aux  faux  prophètes  qui  venaient, 
comme  un  Alcime,  revêtus  de  l'apparence  de  bre- 
bis (?),  pour  tromper  les  simples. 

L'avis  que  le  Fils  de  Dieu  nous  donne  sur  ce 
sujet, est  de  juger  d'eux  par  leurs  fruits  :  Ex  fruc- 
tibus  eorum  cognoscetis  eos.  Mais  il  est  trop  tard 
pour  ceux  que  leur  caractère  engage  à  défendre 
la  foi,  d'attendre  qu'ils  aient  été  trompés  par  ces 
faux  prophètes,  pour  le  reconnaître  :  comme  ces 
Juifs  dont  il  est  parlé  ici,  qui, saisis  de  tremblement 
et  de  frayeur,  s'écrièrent  à  la  vue  de  la  perfidie 
d'Alcime  :  Il  n'y  a  ni  vérité  ni  justice  parmi  eux. 
Il  faut  que  leur  vigilance  et  leur  lumière  s'appli- 
quent sans  cesse,  comme  celles  de  Judas  Maccabée, 
à  prévenir  tout  ce  qui  pourrait  blesser  cette  vérité 
et  cette  justice,  si  précieuses  aux  vrais  fidèles  ; 
c'est-à-dire,  tout  ce  qui  regarde  la  pureté  de  la 
foi  et  de  la  morale. 

y.  16.  Occidit  eos  in  una  die,  secundum  ver- 
bum quod  scriptum  est.  Il  semble  que  Bacchide 
fit  tuer  non  seulement  les  Assidéens,  mais  encore 
les  scribes  qui  étaient  venus  le  trouver.  L'auteur 
cite  à  cette  occasion  le  psaume  lxxviii,  comme 


^i)  Psalm.  lxxvui.  2.  ?. 
S.  B.  —  T.  XI! 


(2)  Joan.  n.  2j.  24.  —  (;)  Matth.  xvi.  20. 


82 


I.  —  MACCABÉES.  —  VII.  -  VENGEANCES  QU'IL   EXERCE 


10.  Et  movit  Bacchides  castra  ab  Jérusalem,  et  appli- 
cuit  in  Bethzecha;  et  misit,  et  compre.hendit  multos  ex 
eis  qui  a  se  efîugerant,  et  quosdam  de  populo  macta"it, 
et  in  puteum  magnum  projecit. 

20.  Et  commisit  regionem  Alcimo,  et  reliquit  cum  eo 
auxilium  in  adjutoriuin  ipsi  ;  et  abiit  Bacchides  ad  regem. 

21.  Et  satis  agebat  Alcimus  pro  principatu  sacerdotii 
sui  ; 

22.  Et  convenerunt  ad  eum  omnes  qui  perturbabant 
populum  suum,  et  obtinuerunt  terram  Juda,  et  fecerunt 
plagam  magnam  in  Israël. 

2;.  Et  vidit  Judas  omnia  mala  quae  fecit  Alcimus  et 
qui  cum  eo  erant,  filiis  Israël,  multo  plus  quam  gentes  ; 


24.  Et  exiit  in  omnes  fines  Judœaa  in  circuitu,  et  fecit 
vindictam  in  viros  desertores  ;  et  cessaverunt  ultra 
exire  in  regionem. 

2Ç.  Vidit  autem  Alcimus  quod  pwasvaluit  Judas  et  qui 
cum  eo  erant,  et  cognovit  quia  non  potest  sustinere  eos, 
et  regressus  est  ad  regem,  et  accusavit  eos  multis  cri- 
minibus. 

26.  Et  misit  rex  Nicanorcm,  unum  ex  principibus  suis 
nobilioribus,  qui  erat  inimicitias  exercens  contra  Israël, 
et  mandavit  ei  evertere  populum. 

27.  Et  venit  Nicanor  in  Jérusalem  cum  exercitu  magno, 
et  misit  ad  Judam  et  ad  fratres  ejus  verbis  pacilicis 
cum  dolo, 

28.  bicens:  Non  sit  pugna  inter  me  et  vos.  Veniam 
cum  viris  paucis,  ut  videam  faciès  vestras  cum  pace. 


iq.  Bacchide,  étant  parti  de  Jérusalem,  alla  camper 
près  de  Bethzecha  ;  et  il  envoya  prendre  plusieurs  de 
ceux  qui  avaient  quitté  son  parti;  et  il  tua  quelques 
hommes  du  peuple,  qu'il  fit  jeter  dans  un  grand  puits. 

20.  Après  cela,  il  remit  toute  la  province  entre  les 
mains  d'Alcime,  à  qui  il  laissa  des  troupes  pour  le  sou- 
tenir ;  et  il  retourna  vers  le  roi. 

21.  Cependant  Alcime  faisait  tous  ses  efforts  pour  s'af- 
fermir dans  la  principauté  du  sacerdoce. 

22.  Et  tous  ceux  qui  troublaient  le  peuple,  s'étant 
assemblés  près  de  lui,  se  rendirent  maîtres  du  pays  de 
Juda,  et  firent  un  grand  carnage  dans  Israël. 

2;.  Judas,  considérant  que  tous  les  maux  qu'Alcime  et 
ceux  qui  étaient  avec  lui,  avaient  faits  aux  enfants  d'Is- 
raël, étaient  beaucoup  plus  grands  que  tout  ce  que  les 
nations  leur  avaient  fait, 

24.  Alla  de  tous  côtés  dans  la  Judée,  et  punit  les  dé- 
serteurs de  son  parti  ;  et,  depuis  ce  temps-là,  ils  ne 
firent  plus  de  courses  dans  le  pays. 

2t.  Mais  lorsqu'Alcime  eut  reconnu  que  Judas  et  ses 
gens  étaient  les  plus  forts,  et  qu'il  eut  senti  qu'il  ne  pou- 
vait leur  résister,  il  retourna  vers  le  roi,  et  les  accusa 
de  plusieurs  crimes. 

26.  Alors  le  roi  envoya  Nicanor,  l'un  des  principaux 
seigneurs  de  sa  cour,  qui  était  un  grand  ennemi  d'Israël, 
et  lui  commanda  de  détruire  ce  peuple. 

27.  Nicanor  vint  donc  à  Jérusalem  avec  une  grande 
armée  ;  et  il  députa  vers  Judas  et  ses  frères  pour  les 
surprendre,  sous  prétexte  de  traiter  de  la  paix  avec  eux. 

28.  Il  leur  fit  dire  :  Qu'il  n'y  ait  point  de  guerre  entre 
vous  et  moi  ;  je  viendrai  avec  peu  de  gens  pour  vous 
voir  et  pour  vous  parler  de  paix. 


COMMENTAIRE 


ayant  prédit  la  mort  de  ces  saints  personnages. 
Les  termes  du  cantique  sont  une  allusion  visible 
au  nom  d'Assidéens{  l)  ;  et  plusieurs  interprètes, 
tant  anciens  que  modernes  (2),  l'ont  expliqué  à  la 
lettre,  du  meurtre  commis  contre  eux  par  Alcime 
et  Bacchide. 

f.  19. Movit  Bacchides  castra  ab  Jérusalem, 
et  applicuit  in  Bethzecha.  Bethzecha,  ou  mieux 
Beth-Zetha,  signifie  plantation  ou  jardin  des  Oli- 
viers. C'est  le  mont  des  Oliviers  actuel  ou  un 
endroit  aux  environs. 

In  puteum  magnum  projecit.  Le  texte  grec  (3) 
semble  indiquer  un  certain  grand  puits  bienconnu. 
77  les  tua  dans  le  grand  puits  ;ou  :  il  les  tua  près  du 
grand  puits. 

jL  22.  In  Israël.  Dans  Israël.  L'édition  grecque 
de  Complute  lit,  dans  Jérusalem  ;  mais  l'édition 
romaine,  et  le  ms.  Alexandrin  lisent,  dans  Israël. 

f.  25.  Alcimus  reversus  est  ad  regem.  Alcime 
retourna  vers  le  roi  Démétrius  à  Antioche,  et  lui 
porta  une  couronne,  une  palme  et  des  branches 
d'or,  qu'il  avait  probablement  prises  au  temple  de 
Jérusalem  (4).  11  attendit  quelque  temps  sans  rien 


dire  ;  mais,  ayant  ensuite  trouvé  l'occasion  favo- 
rable, il  se  mit  à  solliciter  encore  du  secours  con- 
tre ses  frères,  accusant  Judas  et  les  autres  Juifs 
de  rébellion. 

f.  26.  Et  misit  rex  Nicanorem.  Nous  lisons 
dans  le  second  livre  des  Maccabées  (5),  que  Ni- 
canor étant  arrivé  en  Judée,  Judas  lui  envoya 
Simon,  son  frère,  au  bourg  de  Dessau,  pour  con- 
férer avec  lui.  Voyant  la  constance  des  Juifs,  et 
leur  ferme  résolution  de  défendre  leur  liberté, 
Nicanor  ne  jugea  pas  à  propos  de  les  attaquer  ; 
il  envoya  trois  députés  à  Judas,  pTiur  traiter  delà 
paix  ;  elle  fut  conclue.  Judas  et  Nicanor  se  virent, 
et  vécurent  quelque  temps  ensemble,  avec  assez 
de  familiarité,  et  une  confiance  mutuelle.  Mais 
Alcime,  à  qui  cet  accommodement  ne  plaisait  pas, 
retourna  en  toute  hâte  à  Antioche,  et  accusa 
Nicanor  auprès  de  Démétrius,  comme  ayant  trahi 
ses  intérêts  clans  la  Judée.  Le  roi  envoya  ordre  à  son 
général,  de  lui  amener  Judas  prisonnier.  Quelque 
répugnance  qu'il  eût  à  exécuter  ce  commande- 
ment, Nicanor  ne  laissait  pas  de  chercher  l'occa- 
sion de  surprendre  Judas  pour  l'envoyer  au  roi  ; 


(1)  Psalm.  lxxviii.  in  Vulg.  lxxix  in  Heb.  fi.  tH'Dn  -ua 

yiN  in>m 

(2)  lia  Basil.  Euthrm.  Beda. 


(!)  Kai  j'0u3£v  atjTOÙ;  et ç  xo  tpps'ap  to  ,uiya. 

(4}  11.  Macc.  xiv.  j.  4. 

{<,)  11.  Macc.  xiv.  15.  25.  Vide  Usser  ad  an  7842. 


!.—  MACCABÉES.  —  VIL-  DÉFAITE   DE   NICANOR 


83 


29.  Et  venu  ad  Judam,  et  salutaverunt  se  invicem 
pacifiée;  et  hostes  parati  erant  rapere  Judam. 

?o.  Et  innotuit  sermo  Judas,  quoniam  cum  dolo  véné- 
rât ad  eum  ;  et  conterritus  est  ab  eo,  et  amplius  noluit 
videre  faciem  ejus. 

ji.  Et  cognovit  Nicanor  quoniam  denudatum  est  con- 
silium  ejus,  et  exivit  obviam  Judae  in  pugnam  juxta 
Capharsalama. 

?2.  Et  ceciderunt  de  Nicanoris  exercitu  fere  quinque 
millia  viri,  et  fugerunt  in  civitatem  David. 

;?•  Et  post  hajc  verba  ascendit  Nicanor  in  montem 
Sion,  et  exierunt  de  sacerdotibus  populi  salutare  eum  in 
pace,  et  demonstrare  ei  holocautomata  quas  offerebantur 
pro  rege. 


29.  Il  vint  ensuite  vers  Judas,  et  ils  se  saluèrent 
comme  amis,  et  les  ennemis  se  préparaient  à  se  saisir  de 
Judas. 

jo.  Mais  Judas  fut  averti  qu'il  était  venu  à  lui  pour  le 
surprendre  :  et,  ayant  perdu  toute  confiance  en  lui,  il  ne 
voulut  plus  le  voir. 

ji.  Nicanor,  voyant  que  son  dessein  était  découvert, 
marcha  contre  Judas,  pour  le  combattre  près  de  Caphar- 
salama ; 

J2.  Et  il  y  eut  près  de  cinq  mille  hommes  de  l'armée 
de  Nicanor  qui  demeurèrent  sur  la  place  ;  et  le  reste 
s'enfuit  dans  la  cité  de  David. 

;?.  Après  cela,  Nicanor  monta  sur  la  montagne  de 
Sion,  et  quelques  prêtres  vinrent  le  saluer  avec  un  es- 
prit de  paix,  et  lui  montrèrent  les  holocaustes  qu'on 
offrait  pour  le  roi. 


COMMENTAIRE 


mais  Judas  s'en  étant  aperçu,  se  retira,  et  Nica- 
nor vint  à  Jérusalem,  prenant  toujours  les  dehors 
de  l'amitié. 

Josèphe  (1)  assure  que  Nicanor  était  un  des 
meilleurs  amis  du  roi  ;  il  était  du  nombre  de  ceux 
qui  l'avaient  accompagné,  lorsqu'il  s'enfuit  de 
Rome.  L'auteur  du  second  livre  des  Maccabées 
dit  (2)  qu'il  élait  maître  des  éléphants. 

f.  29.  Salutaverunt  se  invicem  pacifice.  Ils 
se  virent  à  l'ordinaire,  quoique  Judas  eût  déjà  de 
la  défiance  de  Nicanor;  mais  le  général  syrien 
ayant  voulu  le  saisir,  et  ayant  manqué  son  coup, 
Judas  s'enfuit  et  amassa  des  troupes.  Nicanor 
apprit  qu'il  était  à  Caphar-Salama,  et  marcha  à  lui 
pour  l'attaquer  ;  on  ignore  la  situation  de  Caphar- 
Salama.  Ce  nom  signifie  le  champ  de  la  paix. 
Quelques-uns  (?)  ont  cru  que  c'était  Anlipatride, 
nommée  Capharsabe,  avant  qu'Hérode  lui  eût 
donné  le  nom  d'Antipatride  (4).  Mais  cette  opinion 
n'est  pas  soutenable.  Caphar-Samala  devait  être 
près  de  Jérusalem,  puisque  Judas  s'y  retira  après 
le  premier  combat  contre  Nicanor.  Cette  localité 
est  mentionnée  dans  la  Ghémare  ($)  ;  peut-être 
était-ce  la  localité  actuelle  de  Salamiyeh  près  de 
Béthel.  Le  mot  Caphar-Salama  peut  très  bien  signi- 
fier le  village  de  Salama  ou  de  Salamiyeh  puisque 
■us-  Kopher  ou  Caphar  signifie  village. 

f.  32.  Fugerunt  in  civitatem  David.  Judas 
et  ses  troupes  ayant  tué  cinq  mille  hommes  de 
l'armée  de  N  icanor,et  voyant  qu'ils  n'étaient  point 
en  état  de  soutenir  longtemps  l'effort  des  Syriens, 
se  retirèrent  dans  la  ville  de  David  et  dans  le 
temple,  de  même  qu'ils  avaient  fait  auparavant, 
après  la  bataille  de  Bethsura  (6).  La  plupart  des 
commentateurs    croient   que    ce  fut  Nicanor  qui 


s'y  retira  ;  mais  la  suite  n'est  pas  favorable  à  cette 
opinion.  Quelques  exemplaires  grecs  lisent  cinq 
cents  hommes,  au  lieu  de  cinq  mille.  Et  Grotius 
voudrait  qu'on  traduisît  ainsi  la  première  partie 
du  verset  32  :  //  en  fut  tué  cinq  mille  (des  Juifs) 
par  V armée  de  Nicanor  ;  parce  que,  dit-il,  Josèphe 
et  le  second  livre  des  Maccabées  donnent  la 
victoire  à  Nicanor.  En  réalité,  malgré  ses  pertes, 
Nicanor  pouvait  se  considérer  comme  vainqueur, 
puisque  Judas  fuyait  devant  lui,  car  c'est  toujours 
gagner  la  victoire,  que  d'obliger  les  ennemis  à  se 
retirer,  et  à  abandonner  le  champ  de  bataille. 
Judas  ne  demeura  pas  longtemps  à  Jérusalem,  il 
en  sortit  avec  ses  troupes  et  se  retira  dans  les 
terres  de  Samarie  ;  en  sorte  que  Nicanor  étant 
venu  pour  le  prendre,  les  prêtres  l'assurèrent  avec 
serment,  qu'ils  ne  savaient  où  il  était  (7). 

jfr.  33.  Demonstrare  ei  holocautomata  quje 
offerebantur  pro  rege.  Les  Hébreux  avaient 
la  louable  coutume  d'offrir  des  sacrifices  pour  la 
prospérité  des  princes,  sous  lesquels  la  Providence 
les  avait  mis.  Les  Juifs  captifs  à  Babylone  en- 
voyèrent à  Jérusalem  une  somme  d'argent,  qu'ils 
avaient  recueillie  entr'eux,  pour  offrir  des  sacri- 
fices, en  expiation  de  leurs  péchés  et  pour  la  con- 
servationdu  roi  Nabucodonosor  et  de  son  fils  Bal- 
tasar  (8).  Plus  tard  Darius  veut  que  les  Juifs  de 
Jérusalem  offrent  des  holocaustes  pour  lui  et  ses 
enfants  (9).  Dans  les  lettres  que  l'on  écrivit  aux 
Spartiates  (10),  il  est  dit  que  l'on  offrait  aux  jours 
de  solennité  des  hosties  en  leur  intention.  Le 
grand  prêtre  Onias  en  offrit  aussi  pour  la  guérison 
d'Héliodore,  qui  avait  été  envoyé  par  Séleucus, 
pour  piller  le  temple  (1 1).  Enfin  nous  voyons  par 
iPhilon  et  par  Josèphe,  que,  jusqu'au  dernier  temps 


(1)  Joseph.  Antiq.  L  xu.  c.  17.  Nuavopa  tov  êuvoûaratov 
âurtf)  xa't  naTÔratov  tûv  y:Xu>v,  oîlto;  fàp  eati  xat  ô  ârcà  t^; 
Pwu.«t'ajv  r.oXami  àutù  auu.^>UYcov. 

(2)  E'Xsoavràp/rjv.  11.  Macc.  xiv.  12. 
(?)  Futlon.  Tirin. 

'4)  Joseph.  Antiq.  I.  xvi.  c.  9. 


(5)  Gemar.  Hieros.  Avoda  Zara,  fol.  44. 

(6)  1.  Macc.  v.  47. 

(7)  11.  Macc.  xiv.  ji.  )2. 

(8)  Baruch.  1.  10. 
(9;  1.  Esdr.  vi.  10. 

(10)  1.  Macc.  xu.  11.  —(11)  11.  Macc.  m.  jî. 


84 


I.  —  MACCABÊES.  —  VII.-   IMPIÉTÉ  DE   NICANOR 


54.  Et  irridens  sprevit  eos,  et  polluit  ;  et  locutus  est 
superbe. 

?|).  Et  juravit  cum  ira,  dicens  :  Nisi  traditus  fuerit  Judas 
etexercitus  ejus  in  manus  meas,  continuo  cum  regressus 
fuero  in  pace,  succendam  domum  istam.  Et  exiit  cum 
ira  magna. 

}6.  Et  intraverunt  sacerdotes,  et  steterunt  ante  faciem 
altaris  et  templi,  et  llentes  dixerunt: 

;;.  Tu,  Domine,  elegisti  domum  istam  ad  invocandum 
nomen  tuum  in  ea,  ut  esset  domus  orationis  et  obsecra- 
tionis  populo  tuo. 

58.  Fac  vindictam  in  domine  isto  et  exercitu  ejus,  et 
cadant  in  gladio.  Mémento  blasphemias  eorum,  et  ne 
dederis  eis  ut  permaneant. 

59.  Et  exiit  Nicanor  ab  Jérusalem,  et  castra  applicuit 
ad  Bethoron,  et  occurrit  illi  exercitus  Syria;. 

40.  Et  Judas  applicuit  in  Adarsa  cum  tribus  millibus 
viris  ;  et  oravit  Judas,  et  dixit  : 


54.  Mais  il  les  méprisa,  en  les  raillant  ;  il  les  traita 
comme  des  personnes  profa.ies,  et  leur  parla  avec  grand 
orgueil. 

!$.  Il  leur  dit  avec  colère,  et  en  jurant  :  Si  on  ne  me 
livre  entre  les  mains  Judas  avec  son  armée,  aussitôt  que 
je  serai  revenu  en  bonne  santé,  je  brûlerai  ce  temple. 
Et  il  s'en  alla  plein  de  fureur. 

îù.  Alors  les  prêtres,  étant  entrés,  se  présentèrent 
devant  l'autel  et  devant  le  temple,  et  dirent  en  pleurant  : 

37.  Seigneur,  vous  avez  choisi  cette  maison  afin  que 
votre  nom  y  fût  invoqué,  et  qu'elle  fût  une  maison 
d'oraison  et  de  prière  pour  votre  peuple  ; 

;8.  Faites  éclater  votre  vengeance  contre  cet  homme 
et  contre  ses  troupes  ;  et  qu'ils  tombent  sous  le  tran- 
chant de  l'épée  :  souvenez-vous  de  leurs  blasphèmes,  et 
ne  permettez  pas  qu'ils  subsistent  plus  longtemps. 

59.  Nicanor  étant  parti  de  Jérusalem,  vint  camper 
près  de  Bethoron,  où  l'armée  de  Syrie  vint  le  joindre. 

40.  Et  Judas  alla  camper  près  d'Adarsa,  avec  trois 
mille  hommes  et  fit  sa  prière  en  ces  termes  : 


COMMENTAIRE 


de  la  nation  juive,  on  continua  d'offrir  des  sacri- 
fices pour  les  empereurs  romains.  L'Église  chré- 
tienne hérita  de  ces  pratiques  de  la  Synagogue. 
Saint  Paul  (1)  veut  qu'on  fasse  des  prières  pour 
les  princes,  et  pour  tous  ceux  qui  sont  élevés  en 
dignité.  Nous  sacrifions  pour  le  salut  de  l 'empereur, 
dit  Tertullien  (2)  ;  mais  à  son  Dieu  et  au  nôtre. 

f.  54.  Irridens  sprevit  eos,  et  polluit.  Josè- 
phe  semble  dire  qu'il  souilla  leurs  oreilles  par  ses 
blasphèmes  (3),  ou  qu'il  les  outragea  par  des  pa- 
roles injurieuses  et  outrageantes.  Les  J  uifs  se  bou- 
chaient les  oreilles,  en  entendant  proférer  quelques 
paroles  injurieuses  à  la  Divinité  (4),  comme  si  ces 
impiétés  eussent  souillé  ceux  qui  les  enten- 
daient. 

f.  37.  Tu,  Domine,  elegisti  domum  istam  ad 

INVOCANDUM  NOMEN  TUUM  IN  EA.  Touchés  de  l'or- 

gueil  et  des  blasphèmes  de  Nicanor,  qui  parlait 
insolemment  contre  Dieu,  et  qui  menaçait  de 
brûler  ce  temple  consacré  à  son  honneur,  les  prê- 
tres de  Jérusalem  ont  recours  aux  larmes,  et  le 
supplient  de  se  souvenir,  qu'il  avait  choisi  celte 
maison,  afin  que  son  nom  y  fût  invoqué;  ils  lui 
représentent  qu'il  y  allait  de  sa  gloire,  de  ne  pas 
souffrir  qu'un  impie  déshonorât  le  lieu  saint.  Ils 
lui  témoignent,  qu'ayant  fait  bâtir  ce  temple,  pour 
Cire  une  maison  de  prière  à  tout  son  peuple,  il 
s'était  lui-même  engagé  à  l'exaucer  quand  il  l'y 
prierait  (=;).  C'est  donc  ici  votre  cause,  Seigneur, 
lui  disent-ils.  Il  s'agit  de  la  sainteté  de  votre  nom 
qu'on  outrage  par  des  blasphèmes.  Il  s'agit  de  la 
certitude  et  de  la  fidélité  inviolable  de  vos  pro- 
messes; et,  si   nous  mettons  notre  confiance  en 


votre  secours,  c'est  que  nous  sommes  assurés  que 
que  vous  ne  pouvez  manquer  à  la  parole  que  vous 
nous  avez  donnée,  de  nous  exaucer  dans  la  mai- 
son que  vous  vous  êtes  choisie,  lorsque  nous  nous 
humilierons  en  votre  présence,  et  que  nous  invo- 
querons votre  saint  nom.  Si  la  prière  de  ces  prê- 
tres, jointe  à  celle  que  fit  ensuite  Judas  Maccabée 
dans  les  mêmes  sentiments,  eurent  la  force  de  lui 
faire  vaincre  tous  ses  ennemis,  nous  devons  attri- 
buer à  notre  insouciance,  le  peu  d'avantage  que 
nous  remportons  sur  les  ennemis  de  notre  salut. 
A  présent  que  Jésus-Christ  a  vaincu  le  monde,  et 
qu'il  nous  a  ordonné  de  nousconfier  en  sa  victoire, 
nous  serions  toujours  infailliblement  victorieux  si 
nous  priions  comme  il  le  faut,  et  si  nos  prières 
n'étaient  point  souillées  par  des  vues  toutes 
humaines  qui  en  empêchent  l'effet.  L'humanité 
sainte  du  Fils  de  Dieu  est  un  temple  sans  compa- 
raison plus  sacré  que  celui  de  Salomon.  Nous  y 
trouverons  des  secours  plus  puissants,  quand  nous 
les  demanderons  comme  il  le  faut,  dans  la  sainte 
communion. 

f,  39.  Applicuit  ad  Bethoron,  et  occurrit 
illi  exercitus  Syri/E.  Nicanor  sortit  de  Jérusa- 
lem, pour  aller  chercher  Judas,  et  pour  lui  livrer 
la  bataille.  Il  campa  à  Bethoron,  où  il  reçut  un 
renfort  de  troupes  de  Syrie.  Bethoron  est  environ 
à  quatre  lieues  de  Jérusalem. 

f.  40.  Judas  applicuit  in  Adarsa.  Judas  alla 
camper  près  d'Adarsa,  à  une  lieue  et  demie  de 
Bethoron  (ô),  c'est-à-dire,  environ  à  quatre  milles 
de  cette  ville.  Adarsa,  ou  Adasa  selon  le  grec, 
verset  45,  était  dans  la  tribu  d'Éphraïm  (7). 


(1)  1.  Timotk.  h.  1. 

(2)  Tcrlull.   ad  Scaput.   c.    ?.    Saciificamus   pro    saluta 
imperatoris,  sed  Deo  nostro  et  ipsius. 

(j)  O'  oï  (3Xaa:or)(ji7J7a;  àutoù;.  Antiq.  I.  xu.  c.  17. 


(4)  Acl.  vu.   56. 

t5j  111.  Rcg.  vin.  ix. 

(t>)  Joseph.  A ntii].  xu.  c.  17.-  Rclaïui.  Palcest.  illusl.  o;j. 

(7)  Hieron.  in  lotis  hcbr. 


MACCABÉES.  —  VII.  -   MORT  DE  NICANOR 


85 


41.  Qui  missi  erant  a  rege  Sennacherib,  Domine,  quia 
blasphemaverunt  te,  exiit  angélus,  et  percussit  ex  eis 
centum  octoginta  quinque  mil  lia. 

42.  Sic  contere  exercitum  istum  in  conspectu  nostro 
hodie,  et  sciant  ceteri  quia  maie  locutus  est  super  sancta 
tua  ;  et  judica    illum  secundum  malitiam   illius. 

4;.  Et  commiserunt  exercitus  praslium  tertiadecima  die 
mensis  adar  ?  et  contrita  sunt  castra  Nicanoris,  et  cecidit 
ipse  primus  in  praalio. 

44.  Ut  autem  vidit  exercitus  ejus  quia  cecidisset  Nica- 
nor,  projecerunt  arma  sua,  et  fugerunt  ; 

45.  Et  persecuti  sunt  eos  viam  unius  diei,  ab  Adazer 
usquequo  veniatur  in  Gazara  ;  et  tubis  cecinerunt  post 
eos  cum  significationibus. 

40.  Et  exierunt  de  omnibus  castellis  Judaeasin  circuitu, 
et  ventilabant  eos  cornibus,  et  convertebantur  iterum 
ad  eos,  et  ceciderunt  omnes  gladio,  et  non  est  relictus 
ex  eis  nec  unus. 

47.  Et  acceperunt  spolia  eorum  in  prœdam;  et  caput 
Nicanoris  amputaverunt,  et  dexteram  ejus,  quam  exten- 
derat  superbe  ;  et  attulerunt,  et  suspenderunt  contra 
Jérusalem. 

48.  Et  lœtatus  est  populus  valde,  et  egerunt  diem 
illam  in  laetitia  magna. 

49.  Et  constituit  agi  omnibus  annis  diem  istam,  tertia 
décima  die  mensis  adar. 

50.  Et  siluit  terra  Juda  dies  paucos. 


41.  Seigneur,  lorsque  ceux  qui  avaient  été  envoyés  par 
le  roi  Sennacherib  vous  blasphémèrent,  un  ange  vint, 
qui  leur  tua  cent  quatre-vingt-cinq  mille  hommes. 

42.  Exterminez  de  môme  aujourd'hui  cette  armée 
devant  nous,  afin  que  les  autres  sachent  que  Nicanor  a 
déshonoré  par  ses  blasphèmes  votre  maison  sainte  ;  et 
jugez-le  selon  sa  malice. 

ji.  La  bataille  fut  donc  livrée  le  treizième  jour  du 
mois  d'Adar  ;  et  l'armée  de  Nicanor  fut  défaite,  et  lui  tué 
le  premier  dans  le  combat. 

44.  Ses  troupes,  voyant  que  leur  général  était  mort, 
jetèrent  leurs  armes,  et  prirent  la  fuite  ; 

45.  Et  les  partisans  de  Judas  les  poursuivirent  une 
journée  de  chemin,  depuis  Adazer  jusqu'à  l'entrée  de 
Gazara  ;  et  ils  sonnèrent  des  trompettes  derrière  eux 
pour  annoncer  leur  victoire. 

46.  Et  les  peuples  de  tous  les  villages  de  la  Judée, 
qui  étaient  aux  environs,  les  chargèrent  avec  une  grande 
vigueur  ;  et,  revenant  attaquer  de  front  ceux  qui  étaient 
demeurés  derrière,  ils  les  taillèrent  tous  en  pièces,  en 
sorte  qu'il  n'en   échappa  pas  un  seul. 

47.  Ils  s'emparcrent  ensuite  de  leurs  dépouilles  ;  ils 
coupèrent  la  tête  de  Nicanor,  et  sa  main  droite  qu'il 
avait  étendue  insolemment  ;  et,  les  ayant  apportées,  ils 
les  suspendirent  à  la  vue  de  Jérusalem. 

48.  Le  peuple  ressentit  une  grande  joie;  et  ils  passè- 
rent ce  jour-là  dans  une  réjouissance  publique. 

40.  On  ordonna  que  ce  même  jour  serait  céléoré  tous 
les  ans  comme  une  fête,  le  treizième  du  mois  d'Adar. 

,o.  Et  le  pays  de  Juda  demeura  en  repos  pendant 
quelques   jours. 


COMMENTAIRE 


v.  41.  Qui  missi  erant  a  rege  Sennacherib. 
Ceux  qui  avaient  été  envoyés  par  le  roi  Senna- 
cherib. Quelques  exemplaires  omettent  le  nom  de 
Sennacherib,  et  portent  simplement,  envoyés  par 
le  roi,  ou  par  le  roi  des  Assyriens. 

v.  4:.  Ab  Adazer  usquequo  veniatur  in 
Gazara.  Ces  deux  lieux  étaient  éloignés  d'une 
journée  de  chemin.  Ada\er  semble  être  la  mémo 
localité  qu'A dasa,  verset  40,  et  on  a  parlé  de 
Gazer  ou  Gazara,  au  chapitre  iv,  verset  ; ,. 

Tubis  cecinerunt  post  eos  cum  significatio- 
nibus. Le  grec  (  1  )  :  Ils  sonnèrent  après  eux  avec 
les  trompettes,  dont  on  donne  le  signal;  ou  avec  les 
trompettes ,  dont  les  prêtres  se  servaient  pour 
donner  les  divers  signaux,  de  camper,  de  décam- 
per, de  livrer  la  bataille,  de  se  retirer. 

f.  46.  Ventilabant  eos  cornibus.  Ils  les 
jetaient  au  vent  comme  des  taureaux   irrités,  qui 


jettent  au  vent,  avec  leurs  cornes,  tout  ce  qui  se 
rencontre  devant  eux.  Ou,  ils  enveloppaient  l'en- 
nemi de  tous  côtés,  ils  l'enfermaient  comme  une 
armée,  qui  étend  ses  cornes  ou  ses  ailes,  et  qui 
enveloppe  celles  des  ennemis  (2). 

jb.  47.  Suspenderunt  contra  Jérusalem. Ils  les 
suspendirent  à  la  vue  de  Jérusalem,  hors  de  la  ville, 
et  en  face  du  temple  (3).  Le  second  livre  des  Mac- 
cabées  ajoute  que  Judas  fit  hacher  la  langue  de 
cet  impie,  et  qu'il  la  donna  à  mangeraux  oiseaux. 

f.  49.  Constituit  agi  diem  istam  omnibus  an- 
nis. Il  ordonna  que  ce  jour  serait  célébré  tous  les 
ans,  comme  un  jour  de  fête  :  elle  se  célébra  assez 
longtemps,  et,  du  temps  de  Josèphe,  elle  était  en- 
core en  pratique  parmi  les  Juifs.  On  l'a  négligée 
après  la  ruine  de  Jérusalem,  puis  adandonnée 
dans  la  suite.  Elle  tombait  le  jour  d'avant  la  fête 
des  Sorts  (4). 


(1)  B  ixkr.laa'/  ojti'aw  etuTwv  taî;  saXii^Çi  iojv  <jrj(j.aatdiy. 

(2)  Vide  Judith,  xv.  6. 


(î)  11.  Macc.   xv.    jî-    Manum    autem    démentis    jussit 
contra  templum  suspendi. 
(4)  Ibid.  f.  j7. 


CHAPITRE    VIII 

Le  nom  des  Romains  vient  à  la  connaissance  de  Judas  Maccabée.  Il  envoie  des  ambassadeurs 
à  Rome  pour  faire  alliance  avec  eux.  Formule  et  conditions  de  cette  alliance. 


i.  Et  audivit  Judas  nomen  Romanorum,  quia  sunt 
potentes  viribus,  et  acquiescunt  ad  omnia  quas  postulantur 
ab  eis  :  et  quicumque  accesserunt  ad  eos,  statuerunt  cum 
eis  amicitias,  et  quia  sunt  potentes  viribus. 


t.  Or,  Judas  entendit  parler  de  la  renommée  des  Ro- 
mains :  il  apprit  qu'ils  étaient  puissants,  qu'ils  étaient 
toujours  prêts  à  accorder  toutes  les  demandes  qu'on 
leur  faisait,  qu'ils  avaient  fait  amitié  avec  tous  ceux  qui 
étaient  venus  se  joindre  à  eux,  et  que  leur  puissance 
était  fort  grande. 


COMMENTAIRE 


f.  i.  Quia  sunt  potentes  viribus.  Saint  Au- 
gustin nous  donne  la  raison  de  cette  prodigieuse 
grandeur.  «  Voyons,  dit-il  (1),  quelles  ont  été  les 
mœurs  de  tous  ces  anciens  Romains,  et  pour 
quelle  raison  le  vrai  Dieu,  qui  tient  en  sa  main 
tous  les  royaumes  de  la  terre,  a  daigné  les  assis- 
ter, et  élever  leur  empire  à  ce  haut  point  de  gran- 
deur. II  est  vrai  qu'ils  adoraient  les  faux  dieux, 
et  qu'ils  immolaient  des  victimes  aux  démons  ; 
mais  ils  étaient  généreux  et  libéraux,  et  brûlaient 
d'ardeur  pour  les  louanges.  N'aspirant  point  aux 
grandes  richesses,  mais  à  une  grande  gloire,  ils 
l'aimaient  uniquement  ;  ils  ne  vivaient  que  pour 
elle;  ils  étaient  prêts  à  mourir  pour  l'acquérir  : 
et  cette  passion  était  telle  dans  leur  cœur,  qu'elle 
seule  y  étouffait  toutes  les  autres  passions.  C'est 
pourquoi, regardant  la  servitude  comme  une  honte 
et  la  domination  comme  une  chose  très  glorieuse, 
ils  souhaitèrent  ardemment  d'abord  de  rendre  li- 
bre leur  patrie,  et  ensuite  de  la  rendre  maîtresse 
des  autres  peuples. 

«  Ce  fut  donc  d'abord  l'amour  de  la  liberté, 
ensuite  celui  de  la  domination,  et  l'ardent  désir 
de  la  gloire,  qui  leur  firent  faire  tant  de  grandes 
actions.  Ainsi  les  empires  de  l'Orient  ayant  sub- 
sisté longtemps  dans  un  grand  éclat,  Dieu  voulut 
enfin  établir  celui  d'Occident,  et  le  rendre,  quoi- 
que le  dernier  de  tous  quant  au  temps,  le  premier 
et  le  plus  illustre  par  sa  grandeur  et  son  étendue. 
Pour  accomplir  ce  dessein,  et  punir  en  môme 
temps  les  crimes  énormes  de  plusieurs  peuples,  il 
s'est  servi  de  ces  Romains  qui  ne  travaillaient 
qu'à  procurer  l'avantage  de  leur  patrie,  quoique 
dans  la  vue  seule  de  la  gloire,  et  qui  préféraient 
généreusement  son  salut  à  leur  propre  vie,  en  sa- 
crifiant à  cet  amour  de  la  louange,  l'amour  de 
l'argent  et  beaucoup  d'autres  grands  vices. 


«  Mais  bien  que  leurs  vues  fussent  toutes  hu- 
maines, elles  ne  manquaient  pas  d'une  certaine 
fierté,  d'une  certaine  grandeur,  et  ces  vertus  hu- 
maines les  élevaient  au-dessus  des  autres  nations 
païennes. Ce  n'étaient  pas  des  modèles, ce  n'étaient 
pas  non  plus  des  hommes  méprisables  :  non  qui- 
dem  jam  sancti,  scd  minus  lurpes.  Ainsi  ces  Ro- 
mains ne  connaissant  point  la  vraie  gloire  qui  vient 
de  Dieu  seul,  non  seulement  ne  résistaient  pas  à 
ce  désir  de  la  gloire  humaine,  mais  le  regardaient 
comme  une  vertu  et  comme  un  bien  très  utile  à 
la  République  ;  ils  croyaient  même  devoir  travail- 
ler à  l'allumer  dans  les  hommes.  C'est  la  raison 
pour  laquelle,  selon  la  réflexion  du  même  père  (2), 
Dieu  qui  ne  devait  pas  leur  donner  la  vie  éter- 
nelle, privilège  de  ses  serviteurs,  leur  accordait  la 
récompense  due  aux  vertus  morales  qu'ils  prati- 
quaient, en  leur  donnant  cette  gloire  passagère 
d'un  empire  florissant.  Dieu  devait  donc,  si  l'on 
peut  parler  ainsi,  pour  récompense  temporelle  de 
leurs  vertus  purement  humaines, les  faire  ainsi  res- 
pecter de  tous  les  peuples,  soumettre  ce  grand 
nombre  de  nations  à  leurs  lois,  et  rendre  leur  nom 
célèbre  dans  toute  la  terre.  Mais  ils  n'ont  aussi 
aucun  sujet  de  se  plaindre  de  la  justice  au  Dieu 
souverain,  puisqu'il  leur  a  accordé  la  récompense 
qui  leur  était  propre. 

«  Or  ce  ne  fut  pas  seulement  pour  cette  rai- 
son, ajoute  saint  Augustin  (3),  que  leur  empire 
s'étendit  si  fort,  et  fut  élevé  à  ce  comble  d'une 
gloire  purement  humaine.  Dieu  l'a  fait  encore, 
afin  que  les  citoyens  de  la  cité  éternelle  considè- 
rent avec  une  attention  pleine  de  sagesse  ces 
exemples,  tant  qu'ils  yivent  sur  la  terre  comme 
étrangers,  et  qu'ils  jugent  combien  ils  sont  obli- 
gés d'aimer  leur  patrie  céleste  pour  une  vie  im- 
mortelle ;  puisque  celle  de  la  terre  a  été  si  fort 


(i)  Aug.  de  av.  Dei.  I.  v.  c.  18. 


(2)  Ibid.  c.  15.  —  (?)  Ibid.  c.  16. 


I.  —  MACCABÉES.—  VIII.-  RÉPUTATION    DES   ROMAINS 


87 


2.  Et  audierunt  prœlia  eorum,  et  virtutes  bonas  quas 
fecerunt  in  Galatia,  quia  obtinuerunt  eos,  et  duxerunt 
sub  tributum  ; 


2.  Il  avait  aussi  entendu  parler  des  combats  qu'ils 
avaient  livrés,  et  des  grandes  actions  qu'ils  avaient  faites 
dans  la  Galatie,  et  comment  ils  s'étaient  rendus  maîtres 
de  ces  peuples,   et  les  avaient  assujettis  à   payer  tribut. 


COMMENTAIRE 


aimée  de  ses  citoyens  pour  la  seule  gloire  des 
hommes.  » 

Mais  il  nous  suggère  encore  un  autre  réflexion 
très  importante,  lorsqu"en  nous  représentant  com- 
bien de  choses  ces  anciens  Romains  ont  mépri- 
sées, combien  de  travaux  ils  ont  soufferts,  et  com- 
bien de  cupidités  ils  ont  domptées  pour  la  seule 
gloire  humaine,  il  ajoute  ces  excellentes  paroles: 
«  Que  cette  considération  nous  serve  à  étouffer 
tout  orgueil  dans  nous.  Car  puisque  cette  cité 
sainte,  dans  laquelle  Dieu  veut  bien  que  nous  ré- 
gnions, est  aussi  éminemment  élevée  par  dessus  la 
cité  terrestre, que  le  ciel  est  au-dessus  de  la  terre  ; 
puisque  la  gloire  solide  qui  vient  de  Dieu  sur- 
passe les  vaines  louanges  des  hommes,  Lomme 
la  société  des  anges  surpasse  celle  des  mortels  ; 
ceux  qui  sont  les  citoyens  d'une  si  noble  patrie 
ne  doivent  pas  s'imaginer  avoir  fait  quelque  chose 
de  grand,  lorsque,  pour  y  parvenir,  ils  ont  pratiqué 
quelques  bonnes  œuvres,  ou  souffert  quelques 
maux  passagers  ;  puisque  ces  anciens  Romains 
ont  tant  fait  et  tant  souffert  pour  l'empire  de  la 
terre ,  qu'ils  avaient  déjà  acquis  :  Nihil  sibi 
magnum  fecisse  videanlur  lantcc  palriœ  cives,  sïpro 
Ma  adipiscenda  fecerint  boni  operis  aliquid,  vel 
mala  aliqua  suslinuerint  ;  cum  illi  pro  hac  ierrena 
jam  adepta  tanU  fecerint,  lanla  perpessi  sint.  » 

C'est  donc  avec  les  yeux  de  la  foi  que  nous 
devons  lire  ce  que  l'histoire  des  Maccabées  nous 
raconte  ici  de  la  grandeur,  des  conquêtes,  de  la 
puissance  si  redoutable,  et  des  bonnes  qualités 
des  Romains  ;  et  c'est  par  cette  lumière  de  la  piété 
que  nous  devons  en  juger,  pour  en  porter  un  ju- 
gement conforme  aux  enseignements  chrétiens 
qui  nous  obligent  à  regarder  comme  un  néant 
toute  la  gloire  des  hommes,  et  comme  l'éclat  pas- 
sager d'une  fleur  qui  dure  un  jour,  toute  la  pompe 
du  siècle. 

Quia  acquiescunt  ad  omnia  qu^e  postulan- 
tur  ab  eis.  L'Écriture  nous  donne  ici  la  peinture 
de  la  république  romaine,  telle  qu'elle  était  dans 
sa  splendeur,  avant  la  troisième  guerre  Punique. 
La  Providence  permit  que  les  vertus  des  Ro- 
mains, tout  inutiles  qu'elles  étaient  pour  l'éter- 
nité, à  cause  du  défaut  de  la  charité,  fussent 
mentionnées  dans  les  saintes  Écritures  ;  elle  leur 
donnait  ainsi  une  récompense  temporelle,  propor- 
tionnée à  leur  mérite  presque   toujours  borné  à 


l'estime  des  hommes,  et  au  siècle  présent.  On 
nous  dépeint  les  Romains,  tels  que  la  renommée, 
qui  flatte  toujours  un  peu  dans  les  choses  favora- 
bles, comme  elle  outre  dans  les  odieuses,  les  pu- 
bliait. La  République  était  alors  dans  sa  plus 
grande  beauté,  dit  Florus  (1),  elle  cultivait  la 
piété  envers  les  dieux,  la  fidélité  envers  les  hom- 
mes ;  elle  faisait  paraître  de  la  grandeur  et  de  la 
magnificence  en  elle-même  et  envers  les  étran- 
gers. Les  Romains  étaient  comme  les  protecteurs 
universels  de  tous  les  opprimés,  et  leur  empire 
était  moins  une  domination,  qu'une  protection  ; 
leur  attention  et  leur  soin  ne  s'étendaient  pas 
moins  à  secourir  leurs  alliés,  qu'à  défendre  leur 
propre  pays  ;  c'est  par  ces  moyens  que  leur  Ré- 
publique est  parvenue  à  ce  point  de  puissance, que 
l'histoire  nous  fait  admirer  encore  aujourd'hui. 

Après  avoir  passé  successivement  sous  la  domi- 
nation des  Perses  et  des  Grecs,  pendant  tout  le 
temps  qui  s'écoula  depuis  Cyrus  jusqu'à  Démé- 
trius  Soter,  les  Juifs  commencèrent  enfin  à  penser 
à  leur  liberté.  Ce  furent  les  premiers  peuples 
d'Orient,  dit  Trogus  (2j,  qui  profitèrent  de  la  pro- 
tection des  Romains,  pour  se  délivrer  du  joug  de 
l'oppression  ;  les  Romains  étant  alors  fort  libé- 
raux de  ce  qui  ne  leur  coûtait  rien.  ^4  Demelrio 
cum  desciuissent,  amicilia  Romanorum  pelila,  primi 
omnium  ex  Orienlalibus  libertatem  receperunl  ;  fa- 
cile lune  Romanis  de  aliène  largientibus. 

f.  2.  In  Galatia.  Le  nom  de  FaXi-na  en  grec, 
se  prend  également  pour  la  Galatie,  et  pour  la 
Gaule.  On  ne  sait  ici,  de  laquelle  des  deux  on 
doit  l'expliquer.  On  convient  que,  du  temps  de 
Judas  Maccabée,  la  Galatie  entière  n'était  pas 
encore  assujettie  aux  Romains;  Antiochus  le 
Grand,  ayant  déclaré  la  guerre  aux  Romains, 
avait  obligé  les  Galates  à  se  joindre  à  lui  (3). 
Après  la  victoire  remportée  sur  ce  prince,  par 
Lucius  Cornélius  Scipion,  le  consul  Cneius  Man- 
lius  Vulso,  qu'on  avait  envoyé  l'année  suivante 
en  Asie,  pour  en  régler  les  affaires,  attaqua  et 
battit  les  Galates  (4)  en  deux  combats.  Les  his- 
toriens ne  marquent  point  expressément  qu'alors 
on  ait  imposé  tribut  aux  Galates;  mais  la  chose 
paraît  probable  ;  le  P.  Hardouin  préfère  l'entendre 
de  la  Gaule  Narbonnaise,  qui  était  alors  tribu- 
taire des  Romains,  et  le  verset  suivant,  qui  parle 
de  l'Espagne,  favorise  ce  sentiment. 


(1)  Flor.  Hactenus  populus  Romanus  pulcher,  egregius, 
pius,  sanctus  atque  magnificus.  Vide  et  Sallust.  et  Cicer.  etc. 


(2)  Justin.  I.  xxxvi. 

(4)  Livius  l.  xxxvin. 


(?)  Appian.  pag.  jg. 
Flor.  I.  11.  -  Potyb.  I.  m. 


88 


I. 


MACCABÉES. 


VIII.-  LEUR  PUISSANCE 


?.  Et  quanta  fecerunt  in  regione  Hispaniae,  et  quod  in 
potestatem  redeserunt  metslla  s.rgenti  et  auri  quas  illic 
sunt,  et  possederunt  omnem  locum  consilio  suo  et 
patientia  ; 

4.  Locaque  quaj  longe  erant  valde  ab  eis,  et  reges  qui 
supervenerant  eis  ab  extremis  terrae,  contriverunt,  et 
percusserunt  eos  plaga  magna;  ceteri  autem  dant  eis 
tributum  omnibus  annis  ; 

5.  Et  Philippum,  et  Persen,  Ceteorum  regem,  etcete- 
ros  qui  adversum  eos  arma  tulerant,  contriverunt  in 
bello,  et  obtinuerunt  eos  ; 

6.  Et  Antiochum  magnum,  regem  Asiae,  qui  eis  pugnam 
intulerat  habens  centum  viginti  elephantos,  et  equitatum, 
et  currus,  et  exercitum  magnum  valde,  contritum  ab  eis; 

7.  Et  quia  ceperunt  eum  vivum,  et  statuerunt  ei  ut 
daret  ipse,  et  qui  regnarent  post  ipsum,  tributum  ma- 
gnum, et  daret  obsides,  et  constitutum  ; 


j.  Il  avait  encore  appris  tout  ce  qu'ils  avaient  fait  dans 
l'Espagne,  de  quelle  manière  ils  avaient  réduit  en  leur 
puissance  les  mines  d'argent  et  d'or  qui  sont  en  ce  pays, 
et  avaient  conquis  toutes  ces  provinces  par  leur  conseil 
et  leur  patience  ; 

4.  Qu'ils  s'étaient  assujetti  des  pays  très  éloignés  d'eux  ; 
qu'ils  avaient  vaincu  des  rois  qui  étaient  venus  les  atta- 
quer de  l'extrémité  du  monde,  et  avaient  fait  un  grand  car- 
nage de  leurs  armées,  et  que  les  autres  leur  payaient 
tribut  tous  les  ans  ; 

Ç.  Qu'ils  avaient  vaincu  Philippe  et  Persée,  roi  des 
Céthéens  ;  et  les  autres  qui  avaient  pris  les  armes  con- 
tre eux  ;  et  qu'ils  s'étaient  rendus  maîtres  de  leurs  pays  ; 

6.  Qu'Antiochus  le  Grand,  roi  d'Asie,  les  ayant  atta- 
qués avec  une  puissante  armée,  avec  cent  vingt  éléphants, 
et  beaucoup  de  cavalerie  et  de  chariots,  ils  l'avaient 
défait  entièrement. 

7.  Qu'ils  l'avaient  pris  vif,  et  l'avaient  obligé,  lui  et 
les  rois  ses  successeurs,  de  payer  un  grand  trtbut,  et  de 
leur  donner  des  otages,  et  tout  ce  dont  ils  étaient  con- 
venus ; 


COMMENTAIRE 


v.  }.  Quanta  fecerunt  in  regione  Hispani^:. 
Les  peuples  d'Aragon  et  de  Castille,  Celtiberi, 
avaient  été  soumis  par  Marcus  Porcius  Caton, 
par  Fulvius  Flaccus,  et  par  Tiberius  Sempronius 
Gracchus.  Ceux  de  Léon,  Vacccvi,  par  Lucius 
Posthumus. 

In  potestatem  redegerunt  metalla  argenti 
et  auri.  Melallis  plumbi,  ferrï,  ceris,  argenti,  auri, 
lola  ferme  Hispania  scatet,  dit  Pline  (1).  Stra- 
bon  (2)  convient  qu'on  ne  connaissait  alors  aucun 
endroit  du  monde,  où  il  y  eut  de  si  bons  métaux, 
et  en  si  grande  quantité.  On  peut  voir  dans  Bo- 
chart  ce  qu'il  dit  des  Espagnes  (}). 

y.  4.  Reges  qui  supervenerant  eis  ab  extre- 
mis terr/e,  contriverunt.  Les  Romains  avaient 
vaincu  Pyrrhus,  roid'Épire,  Scyphax,  roi  de  Nu- 
midie,  Virdumar,  roi  des  Gaulois  ;  ils  avaient 
dompté  les  Carthaginois,  les  rois  d'Asie,  de  Macé- 
doine,etc.  (4). On  sait  que  les  Hébreux  donnaient 
le  nom  d'extrémité  de  la  terre,  ou  du  bout  du 
monde,  aux  pays  éloignés;  surtout  ceux  qui  leur 
étaient  les  plus  inconnus,  comme  l'Afrique,  et 
ceux  où  l'on  ne  pouvait  aller  que  par  mer. 

y.  5.  Philippum,  et  Persen,  Ceteorum  re- 
gem. Philippe,  et  Persée,  roi  des  Céthéens,  ou  des 
Macédoniens  (5).  Titus  Quintus  Flaminius  vain- 
quit Philippe,  roi  de  Macédoine  (6),  un  des  suc- 
cesseurs d'Alexandre,  qui  voulait  opprimer  la  li- 
berté d'Athènes.  Le  prince  était  appuyé  par 
Attale,  roi  de  Pergame,  et  par  les  Rhodiens  ;  il 
fut  battu  deux  fois,  deux   fois   mis   en   fuite,    et 


chassé  de  son  camp.  La  guerre  contre  Persée  fut 
conduite  par  Paul  Emile  ;  Persée,  n'y  fit  rien  qui 
fût  digne  de  la  majesté  royale,  et  de  la  iiaute  ré- 
putation de  ses  ancêtres  (7). 

y.  6.  Antiochum  magnum,  regem  Asi>e,  ha- 
bens centum  viginti  elephantum.  Antiochus  le 
Grand,  roi  de  Syrie,  ou  roi  d'Asie,  car  il  était  le 
le  plus  puissant  monarque  de  l'Asie  occidentale, 
rît  la  guerre  aux  Romains  avec  des  préparatifs 
extraordinaires,  disposés  depuis  longtemps  ;  ce- 
pendant il  fut  vaincu  par  Lucius  Cornélius  Sci- 
pion  l'Asiatique,  et  obligé  de  subir  des  conditions 
très  dures  et  très  humiliantes  (8).  Les  auteurs 
profanes  ne  conviennent  pas  du  nombre  des  élé- 
phants. Tite  Live  n'en  met  que  cinquante-quatre. 
Florus  dit  qu'il  en  avait  bordé  toute  son  armée, 
elephanlis  aciem  ulrinque  vallaverat;  mais  ils  ne 
conviennent  pas  même  entre  eux  du  nombre  des 
troupes  d'Antiochus.  Florus  lui  donne  trois  cent 
mille  hommes  de  pied,  et  Appien  ne  fait  son 
armée  forte  que  de  soixante-dix  mille  hommes. 

y.  7.  Ceperunt  eum  vivum.  Les  Juifs  furent 
mal  renseignés.  Après  la  perte  de  la  bataille  de 
Magnésie  en  Lydie,  Antiochus  prit  la  fuite, et  se 
sauva,  sans  s'arrêter,  jusqu'à  Sardes,  où  il  arriva 
au  milieu  de  la  nuit,  accompagné  d'un  petit  nom- 
bre de  personnes.  De  là  il  se  rendit  à  Apamée, 
où  il  avait  appris  que  Séleucus  et  quelques-uns 
de  ses  amis  s'étaient  retirés  ;  et  ensuite  il  passa 
en  Syrie,  d'où  il  envoya  des  ambassadeurs  à  Sci- 
pion,  pour  recevoir  les  conditions  de  paix   qu'il 


(1)  Plin.  lib.  m.  c.  ?. 

(2)  Slrabo.  I.  m.  cl  iv. 

;  j)  Boch.  Canaan.  I.  1.  c.  55. 

(4)  Vide  Drus,  et  (irai,  cl  alios  intcrp.  passim. 

(5;  Voyez  le  chap.  1,  1  et  Gènes,  x. 


(6)  Flor.  I.  il.  c.  7.  -  Lii>.  I.  xxxiu.  -  Polrb.  leg.  vi. 

(7)  Flor.  e.  Polyb.  ibidem,  c.   10. 

(8)  Vide  Polrb.  t.  xxiu.  -  T.  Lin.    I.   xxxvn.  -    Appian. 
Syriac.  -  Flor.  I.  11.  c.  8. 


I.  —  MACCABÉES.  —  VIII.  -   LEUR  PUISSANCE 


89 


8.  Et  regionem  Indorum,  et  Medos,  et  Lydos,  de  opti- 
mis  regionibus  eorum,  et  acceptas  eas  ab  eis,  dederunt 
Eumeni  régi  ; 

9.  El  quia  qui  erant  apud  Helladam  voluerunt  ire  et 
tollere  eos,  et  innotuit  sermo  his, 

10.  Et  miserunt  ad  eos  ducem  unum,  et  pugnaverunt 
contra  il I os,  et  ceciderunt  ex  eis  multi,  et  captivas  duxe- 
runt  uxores  eorum,  et  lîlios,  et  diripuerunt  eos,  et 
terram  eorum  possederunt,  et  destruxerunt  muros  eorum, 
et  in  servitutem  illos  redegerunt  usque  in  hune  diem; 

11.  Et  residua  régna,  et  insulas  quœ  aliquando  restite- 
rant  illis,  exterminaverunt   et  in  potestatem   redegerunt; 

12.  Cum  amicis  autem  suis,  et  qui  in  ipsis  requiem 
habebant,  conservaverunt  amicitiam  ;  etobtinuerunt  régna 
quae  erant  proxima  et  qua?  erant  longe,  quia  quicumque 
audiebant  nomen  eorum  timebant  eos  ; 


8.  Savoir  :  le  pays  des  Indiens,  des  Modes  et  des 
Lydiens,  les  plus  belles  de  leurs  provinces,  qu'ils  avaient 
ensuite  données  au  roi  Eumène  ; 

9.  Que  ceux  de  la  Grèce  ayant  voulu  marcher  contre 
eux  pour  les  perdre,  ils  en  furent  avertis, 

10.  Et  qu'ils  avaient  envoyé  contre  eux  un  de  leurs 
généraux  ;  qu'ils  les  combattirent,  et  en  tuèrent  un  grand 
nombre,  qu'ils  emmenèrent  leurs  femmes  captives  avec 
leurs  enfants,  pillèrent  et  assujettirent  leurs  pays,  détrui- 
sirent les  murailles  de  leurs  villes,  et  les  réduisirent  en 
servitude,  comme  ils  sont  encore  aujourd'hui  ; 

11.  Qu'ils  avaient  ruiné  et  soumis  à  leur  empire  les 
autres  royaumes,  et  toutes  les  îles  qut  leur  avaient  ré- 
sisté ; 

12.  Mais  qu'ils  conservaient  avec  soin  les  alliances 
qu'ils  avaient  faites  avec  leurs  amis,  et  avec  ceux  qui 
s'étaient  donnés  à  eux  ;  que  les  royaumes,  soit  voisins 
ou  éloignés,  leur  avaient  été  assujettis,  parce  qu'ils  étaient 
redoutés  de  tous  ceux  qui  entendaient  parler  d'eux  ; 


COMMENTAIRE 


plairait  aux  Romains  de  lui  imposer.  Les  histo- 
riens ne  disent  donc  point  que  le  roi  soit  tombé 
entre  les  mains  du  vainqueur;  mais  Polybe  (1) 
raconte  qu'Antiochus  se  trouva  avec  les  légats  à 
Lysimachie  après  la  guerre,  pour  régler  l'exécu- 
tion des  articles  du  traité  de  paix  conclu  aupara- 
vant. Et  certes  ce  prince  se  soumit  au  vainqueur, 
ni  plus  ni  moins  que  s'il  eût  été  réellement  son 
captif. 

STATUERUNT    El    TRIBUTUM    MAGNUM,    ET    DARET 

obsides,et  constitutum.  Le  grec  (2)  :  Un  grand 
tribut,  des  otages,  et  le  partage.  Voici  les  condi- 
tions de  la  paix  qui  lut  arrêtée  entre  Antiochus  le 
Grand,  et  les  Romains  {})  :  11  lui  fallut  d'abord 
payer  tous  les  frais  de  la  guerre,  c'est-à-dire, 
quinze  mille  talents  d'Eubée  (4),  cinq  centscomp- 
tant,  deux  mille  cinq  cents  après  la  ratification  de 
la  paix,  et  les  douze  mille  autres  dans  l'espace  de 
douze  ans,  à  divers  paiements,  mille  talents  par 
an;  outre  cela,  trois  cent  cinquante  talents  au  roi 
Eumène,  à  payer  durant  le  temps  de  cinq  ans, 
et  cent  vingt-sept  talents  pour  le  froment  qu'il 
était  obligé  de  fournir.  De  plus,  il  devait  donner 
vingt  otages,  et  les  échanger  tous  les  trois  ans  ; 
les  otages  ne  devaient  pas  avoir  moins  de  dix 
huit,  ni  plus  de  quarante-cinq  ans.  On  l'obligea 
d'abandonner  tout  le  pays  qu'il  avait  en  Europe, 
et  tout  ce  qui  était  au-delà  du  mont  Taurus,  jus- 
qu'au fleuve  Halys;  c'est  ce  qui  est  appelé  ici  le 
partage,  ou  la  distraction,  la  séparation.  Outre 
cela,  il  était  obligé  de  livrer  tous  les  éléphants 
qu'il  avait  à  Apamée,  sans  avoir  la  liberté  d'en 
acheter  de   nouveaux  ;   de   donner  tous  les  vais- 


seaux de  guerre  et  leurs  équipages,  de  n'en  con- 
server que  dix  de  transport,  sans  pouvoir  en 
équiper  aucun,  qui  eût  plus  de  trente  rames. 

Regionem  Indorum,  et  Medos,  et  Lydos. 
Tout  le  monde  convient  que,  du  temps  de  Judas 
Maccabée,  les  Romains  n'avaient  pas  porté  leurs 
armes  ni  dans  les  Indes,  ni  dans  la  Médie.  Il  ne 
paraît  pas  même  par  l'histoire,  qu'ils  soient 
jamais  allés  jusqu'aux  Indes.  Quelques  exé- 
gètes  (5)  conjecturent,  qu'au  lieu  des  Indiens,  il 
faudrait  lire,  les  Ioniens,  et  au  lieu  des  Mèdes,  les 
Mysiens.  Nous  lisons  dans  Tite-Live  (6), 
qu'après  la  paix  conclue  avec  Antiochus  le  Grand, 
on  céda  la  Mysie  et  l'Ionie  au  roi  Eumène,  à 
l'exception  des  villes  qui  avaient  joui  auparavant 
de  la  liberté.  D'autres  (7)  disent  que,  quand  il  ne 
serait  pas  vrai,  dans  la  rigueur,  que  les  Romains 
eussent  assujetti  les  Indes  ;  il  suffirait  pour  la 
vérité  de  ce  récit,  que  Judas  l'eût  ainsi  appris,  et 
que  la  renommée  l'eût  publié.  On  sait  que  le  nom 
d'Inde  était  assez  vague  chez  les  anciens,  comme 
il  l'est  encore  aujourd'hui. 

}.  9.  Qui  erant  apud  Helladam  voluerunt 
ire  et  tollere  eos.  On  pense  qu'il  s'agit  ici  (8) 
de  la  guerre  des  Romains  contre  les  Etoliens. 
Ceux-ci  s'étant  départis  de  l'alliance  des  Romains, 
appelèrent  à  leurs  secours  Antiochus  le  Grand, 
et  sollicitèrent  Philippe,  roi  de  Macédoine,  et 
Nabis,  roi  de  Lacédémone,  à  entrer  dans  leur 
parti  et  dans  leurs  desseins.  Quintus  Flaminius 
s'efforça  par  ses  remontrances,  de  les  rappeler 
à  des  sentiments  plus  sages.  Démocrite,  qui 
était  l'auteur  de  cette  entreprise,  lui  dit  qu'il  lui 


(1)  Polyb.  I.  xvii.    Vide  Grot.    hic.   el  si    plaçai   Ai 
Gentil.  Dispul.  ad  1.  Macc.  c.  4. 

^2)  (î>ôpov  U-Eyav,  xa''  otâcivaf  o;ar)pa_  /.ai  oiaatoXr)';. 
(})  Liv.  I.   xxx vin. 


{4)  Le  talent  d'Eubée  valait,    dit-on,    9.  joo   fr. 
celui  d'Égine. 
(S)  Grot.  Drus. 

('j)  Liv.  I.  xxxviii.  —  (7)  Mcnoc.  Serar.   alii. 
(8)  Salian.  Fullon.   Verhorst.  Menoch. 


ço 


I.  —  MACCABÉES.  —  VIII.  -   AMBASSADE  JUIVE   A   ROME 


i?.  Quibus  vero  vellent  auxilio  esse  ut  regnarent, 
regnabant;  quos  autem  vellent,  regno  deturbabant  ;  et 
exaltati  sunt  valde; 

14.  Et  in  omnibus  istis  nemo  portabat  diadema,  nec 
induebatur  purpura,  ut  magnificaretur   in  ea  ; 

IÇ.  Et  quia  curiam  fecerunt  sibi,  et  quotidie  consule- 
bant  trecentos  viginti,  consilium  agentes  semper  de  mul- 
titudine,  ut  quae  digna  sunt  gérant  ; 

16.  Et  committunt  uni  homini  magistratum  suum  per 
singulos  annos  dominari  universœ  terras  suae,  et  omnes 
obediunt  uni,  et  non  est  invidia,  neque  zelus  inter  eos. 

17.  Et  elegit  Judas  Eupolemum,  filium  Joannis,  filii 
Jacob  et  Jasonem,  filium  Eleazari  ;  et  misit  eos  Romain 
constituere  cum  illis  amicitîam  et  societatem, 

18.  Et  ut  auferrent  ab  eis  jugum  Graecorum,  quia  vide- 
runt  quod  in  servitutem  premerent  regni/m  Israël. 


1  ?.  Qu'ils  faisaient  régner  tous  ceux  à  qui  ils  voulaient 
assurer  le  royaume  ;  qu'au  contraire,  ils  le  faisaient 
perdre  à  ceux  qu'ils  voulaient  ;  et  qu'ainsi  ils  s'étaient 
élevés  à  une  très  grande  puissance  ; 

14.  Que  néanmoins  nul  d'entre  eux  ne  portait  le  dia- 
dème, et  ne  se  revêtait  de  la  pourpre  pour  paraître  plus 
grand  que  les  autres  ; 

1  <,.  Mais  qu'ils  avaient  é'abli  un  sénat  parmi  eux, et  qu'ils 
consultaient  tous  les  jours  les  trois  cent  vingt  sénateurs, 
tenant  toujours  conseil  touchant  les  affaires  du  peuple, 
afin  qu'ils  agissent  d'une  manière  qui  fût  digne  d'eux  ; 

16.  Et  qu'ils  confiaient  chaque  année  leur  souveraine 
magistrature  à  un  seul  homme,  pour  commander  dans 
tous  leurs  états  ;  et  ainsi  que  tous  obéissaient  à  un  seul, 
sans  qu'il  y  eût  d'envie  ni  de  jalousie  parmi  eux. 

17.  Alors  Judas  choisit  Eupolémus,  fils  de  Jean,  fils  de 
Jacob,  et  Jason,  fils  d'Éiéazar;  et  il  les  envoya  à  Rome, 
pour  faire  amitié  et  alliance  avec  eux, 

18.  Et  afin  qu'ils  les  délivrassent  du  joug  des  Grecs, 
parce  que  Judas  et  les  siens  virent  qu'ils  réduisaient  en 
servitude  le  royaume  d'Israël. 


COMMENTAIRE 


rendrait  réponse,  quand  il  serait  sur  les  bords  du 
Tibre.  On  envoya  donc  contre  eux  Marcus  Acilius 
Glabrio,  qui  les  subjugua  (1). 

v.  1  3.  Quibus  vellent  auxilio  esse  ut  regna- 
rent,  regnabant.  Ils  avaient  conservé  sur  le  trône, 
les  rois  Masinissa,  Eu  mène,  Prusias  ;  ils  avaient 
confirmé  le  titre  de  roi  à  Antiochus  Eupator, 
contre  Démétrius  Soter  ;  ils  avaient  protégé  Pto- 
lomée  Philométor,  contre  Antiochus  Épiphane. 

y.  '.4.  Nemo  portabat  diadema,  nec  indueba- 
tur purpura.  Les  Romains  étaient  en  république  ; 
ils  s'étaient  délivrés  du  joug  des  rois,  par  l'expul- 
sion des  Tarquins  ;  l'amour  qu'ils  avaient  pour 
leur  liberté,  leur  donnait  de  l'horreur  même  pour 
les  marques  de  la  royauté. 

y.  15.  Quotide  consulebant  trecentos  VI- 
GiNTi.  Du  temps  de  l'auteur  de  ce  livre,  le  nombre 
ordinaire  des  sénateurs  était  apparemment  de 
trois  cent  vingt,  ou  du  moins  on  le  disait  ainsi. 
Sous  Romulus,  le  nombre  n'en  était  que  de 
cent  ;  il  en  ajouta  ensuite  cent  autres.  Depuis 
Tarquin  l'Ancien  jusqu'au  temps  de  Sylla,  ils  fu- 
rent trois  cents  :  et  le  nombre  s'augmenta  ensuite 
au  point  qu'on  en  a  compté  jusqu'à  mille  (2).  Ainsi 
du  temps  de  Judas  Maccabée,le  nombre  ordinaire 
devait  être  de  trois  cents  sénateurs.  Il  n'y  a  que 
les  vingt  que  l'on  ajoute  ici,  qui  causent  de  la 
difficulté.  Quelques  auteurs  (3)  ont  cru  que  ce 
n'étaient  point  de  simples  sénateurs,  mais  d'autres 
personnes  à  qui  leur  emploi  donnait  droitd'entrée 
au  sénat  ;  par  exemple,  les  deux  consuls,  deux 
préteurs,  deux  questeurs,  quatre  édiles,  et  dix 
tribuns  du  peuple,  en  tout  vingt  personnes. 

y.  16.  Committunt  uni  homini  magistratum. 
Tout  le  monde  sait  que   les    Romains  créaient 


chaque  année  deux  consuls,  dont  l'un  avait  soin 
des  expéditions  militaires  au  dehors,  et  l'autre 
demeurait  dans  la  ville,  à  la  tète  du  sénat. 
L'auteur  avait  peut-être  entendu  dire,  qu'ils  créaient 
tous  les  ans  un  dictateur  :  mais  c'était  un  faux 
bruit  ;  on  n'élisait  de  dictateurs  que  dans  des  oc- 
casions extraordinaires  ;  ou  bien  il  a  parlé  du 
consul  à  qui  le  sort  avait  donné  le  soin  de  la 
guerre,  comme  du  seul  consul  connu  des  étrangers. 
Il  y  en  a  qui  ont  prétendu  qu'on  ne  fait  ici  men- 
tion que  d'un  consul,  parce  que  leur  pouvoir 
était  partagé  de  telle  sorte,  que  l'un  commandait 
un  jour,  et  l'autre  un  autre,  ou  l'un  un  mois,  et 
l'autre  le  suivant.  On  vit  un  exemple  de  cette 
autorité  partagée  des  consuls,  dans  la  tatale  ba- 
taille de  Cannes,  où  le  consul  qui  était  de  jour, 
s'opiniâtra  à  vouloir  livrer  le  combat  malgré  son 
collègue;  Tite-Live  (4),  parlant  des  consuls,  dit 
qu'il  n'y  avait  que  le  premier  qui  en  portât  les 
marques:  Omnia  jura,omnia  insignia  primi  consules 
lenuere. 

Non  est  invidia,  neque  zelus  inter  eos.  Il  n'y 
avait  point  de  jalousies  publiques,  qui  éclatassent 
chez  les  étrangers.  Chacun  contribuait  au  bien 
de  l'état,  avec  une  ardeur  merveilleuse.  Romani 
domi  mïlitiœque  inlenti,  fcsHnare,  parare,  alius 
aliumhor tari, hoslibus obviant  ire, libcrlatem,palriam, 
parentesque  armis  légère  (<,),  etc.  Mais  cette  union 
fut  bien  altérée  dans  la  suite,  par  la  jalousie  et 
l'ambition  qui  éclatèrent  dans  les  guerres  civiles. 

y.  \~ .  Jacob.  Le  grec  :  Accos. 

$.  17-10.  Misit  eos  Romam  constituere  cum  il- 
lis amicitîam  et  societatem, utauferrent  ab  eis 
jugum  Gr/ecorum.  L'Écriture  marque  ici  cette 
circonstance, sans  la  louer  ou  la  blâmer.  Si  l'on  en 


(i)   Vide  liv.  I.  ?8. 

(2)   Vide  Alex,  ab  Alex.  Génial,  dier.  I.  iv.  c.  il.  et  Noi. 
7  iraquel. 


(?)   \ide  Manulium  lib.  de  Senaiu.  Albert.  Gentil,  dispul. 
in  1.  Macc.  c.  6. 
(4)  Liv.  lib.  11. 
{(,)  Salust.  in  his'.  Conjur.  Caiilina- 


I.  —  MACCABÉES.  —    VIII.-  ALLIANCE  AVEC  LES  ROMAINS 


9' 


19.  Etabierunt  Romam  viam  mullam  valde,  et  introie- 
runt  curiam,  et  dixerunt  : 

20.  Judas  Machabaeus,  et  fratres  ejus,  et  populus 
Judaeorum,  miserunt  nos  ad  vos  statuere  vobiscum  socie- 
tatem  et  pacem,  et  conscribere  nos  socios  et  amicos 
vestros. 

2i.   Et  placuit  sermo  in  conspectu  eorum. 

22.  Et  hoc  rescriptum  est,  quod  rescripserunt  in  tabu- 
lis  sereis,  et  miserunt  in  Jérusalem,  ut  esset  apud  eos  ibi 
memoriale  pacis  et  societatis  : 

2;.  Bene  sit  Romanis  et  genti  Judaeorum  in  mari  et  in 
terra  in  a.-ternum,  gladiusque   et  hostis  procul  sit  ab  eis. 

24.  Quod  si  institerit  bellum  Romanis  prius,  aut  omni- 
bus sociis  eorum,  in  omni  dominatione  eorum, 

25.  Auxilium  feret  gens  Judasorum,  prout  tempus  dic- 
taverit,  corde  pleno  ; 


19.  Ils  partirent  donc;  et  après  un  long  chemin,  ils 
arrivèrent  à  Rome;  et,  étant  entrés  dans  le  sénat,  ils 
dirent  : 

20.  Judas  Maccabée  et  ses  frères,  et  1-e  peuple  des 
Juifs,  nous  ont  envoyés  pour  faire  alliance  avec  vous,  et 
pour  établir  la  paix  entre  nous,  afin  que  vous  nous  met- 
tiez au  nombre  de  vos  alliés  et  de  vos  amis. 

21.  Cette  proposition  leur  plut. 

22.  Et  voici  le  rescrit  qu'ils  firent  graver  sur  des  tables 
d'airain,  et  qu'ils  envoyèrent  à  Jérusalem,  afin  qu'il  y 
demeurât  comme  un  monument  de  la  paix  et  de  l'alliance 
qu'ils  avaient  faite  avec  les  Juifs  : 

2;.  Que  les  Romains  et  le  peuple  juif  soient  comblés 
de  biens  à  jamais,  sur  mer  et  sur  terre;  et  que  l'épée  de 
l'ennemi  s'écarte  loin  d'eux. 

24.  S'il  survient  une  guerre  aux  Romains,  ou  à  leurs 
alliés,  dans  toute  l'étendue  de  leur  domination. 

2-.  Les  Juifs  les  assisteront  avec  une  pleine  volonté, 
selon  que  le  temps  le  permettra 


COMMENTAIRE 


juge  par  d'autres  endroits  des  livres  saints  (1),  où 
divers  rois  de  Juda  sont  blâmés  d'avoir  mis  plutôt 
leur  confiance  dans  des  princes  étrangers,  dont 
ils  imploraient  le  secours,  que  dans  l'assistance 
du  Seigneur,  et  où  les  prophètes  les  accusent  de 
folie  d'en  avoir  ainsi  usé  (2),  il  semble  qu'on 
aurait  lieu  de  blâmer  aussi  ce  que  Judas  Mac- 
cabée fit  alors,  comme  ayant  manqué  en  cela  à 
la  confiance  qu'il  devait  avoir  en  Dieu.  Car  il 
devait  être  convaincu,  par  une  longue  expérience, 
que  la  protection  divine  le  mettait  infiniment  plus 
à  couvert  des  insultes  de  ses  ennemis,  que  ne 
pouvait  faire  cette  alliance  qu'il  contracta  avec  les 
Romains.  Ce  qui  pourrait  donner  lieu  de  faire 
au  point  de  vue  religieux  des  réserves  sur  la  dé- 
termination de  Judas  Maccabée,  c'est  qu'il  fut 
tué  peu  de  temps  après  s'être  allié  avec  les  Ro- 
mains, comme  si  Dieu  avait  voulu  témoigner 
par  là  qu'il  n'approuvait  pas  cette  alliance. 

Cependant  on  ne  laisse  pas  de  trouver  aussi  de 
quoi  justifier  cetteconduitedeJudas,carl'Ecriture 
dit  que  c'était  afin  qu'ils  les  délivrassent  du  joug 
des  Grecs,  qui  réduisaient  en  servitude  le  royaume 
d'Israël;  c'est-à  dire,  qui  s'efforçaient  de  renverser 
leur  religion,  et  qui  usaient  de  toutes  sortes  de 
violences  pour  implanter  l'idolâtrie  jusque  dans 
Jérusalem.  Ainsi,  il  semble  qu'on  peut  excuser 
par  là  le  zèle  de  ce  grand  homme,  qui  cherchait 
tous  les  moyens  de  mettre  à  couvert  les  faibles, 
et  de  conserver  la  foi  parmi  son  peuple.  Dieu  ne 
défend  pas  toujours,  d'ailleurs,  d'user  aussi  de 
moyens  humains  pour  se  garantir  de  la  fureur  des 
infidèles,  pourvu  néanmoins  que  ces  moyens  ne 
soient  point  contraires  à  sa  sainte  loi,  et  que 
nous  soyons  persuadés  qu'ils  ne  peuvent  rien 
pour  nous  défendre,  si  Dieu  même  ne  s'en  sert 
pour  ce  sujet. 


C'est  le  sentiment  qu'on  peut  à  bon  droit  attri- 
buer à  Judas  Maccabée  en  cette  circonstance. 
Les  autres  princes  dont  nous  venons  de  parler, 
étaient  justement  blâmés,  lorsqu'ils  imploraient 
le  secours  du  roi  de  Syrie  ou  du  roi  d'Egypte; 
parce  que,  ou  ils  le  faisaient  contre  l'ordre  du 
Seigneur  qui  le  leur  avait  défendu  expressément  : 
ou  ils  mettaient  leur  principale  confiance  dans  ces 
appuis  étrangers,  ne  se  confiant  point  dans  son 
assistance.  Mais  Judas  n'avait  reçu  à  cet  égard 
aucune  défense  de  la  part  de  Dieu  :  il  s'appuyait 
principalement  sur  le  bras  du  Dieu  des  armées  : 
et  il  regarda  peut-être  la  connaissance  qu'il  eut 
des  Romains,  comme  un  moyen  que  Dieu  même 
lui  présentait,  pour  mettre  à  couvert  ses  frères  de 
cette  cruelle  oppression  des  rois  de  Syrie. 

Quoi  qu'il  en  soit,  quand  même  il  serait  cons- 
tant, ce  qui  n'est  pas,  qu'il  aurait  fait  quelque 
faute  en  cette  rencontre,  elle  serait  excusable 
dans  un  homme  qui  a  prodigué  sa  vie  jusqu'à  la 
fin  pour  le  maintien  de  sa  religion  ;  qui  parut  plus 
grand  par  la  fermeté  de  sa  foi,  que  par  son  cou- 
rage héroïque  ;  et  qui  enfin  lava  dans  son  sang,  en 
mourant  pour  la  cause  du  Seigneur,  ce  qu'il  pou- 
vait y  avoir  de  défectueux  et  d'humain  dans  cette 
action. 

jh  21.  Placuit  sermo  in  conspectu  eorum. 
La  politique  des  Romains  trouvait  son  compte  à 
ce  que  les  Juifs  se  séparassent  de  Démétrius 
Soter  ;  ce  prince  régnait  dans  la  Syrie,  sans  leur 
participation  ;  ils  ne  doutaient  pas  qu'ils  ne  dussent 
bientôt  entrer  en  guerre  avec  lui,  après  le  meurtre 
du  légat  Octavius.  Il  était  de  leur  intérêt  de  sus- 
citer des  ennemis  à  Démétrius,  et  de  diminuer 
autant  qu'ils  le  pouvaient  sa  puissance.  La  valeur 
de  Judas  et  le  bruit  de  ses  victoires,  ne  pouvait 
être  inconnu  à  Rome. 


(1)  n.  Parai,  xvi.  7.  9. 


(2)  Jerem.  xxxvn. 


I.  —   MACCABÉES.   -   VIII.  -  SES  CONDITIONS 


26.  Et  prœliantibus  non  dabunt,  neque  subministrabunt 
triticum,  arma,  pecuniam,  naves,  sicut  placuit  Romanis; 
et  custodient  mandata  eorum,  nihil  ab  eis  accipientes. 

27.  Similiter  autem  et  si  genti  Judaeorum  prius  accide- 
nt bellum,  adjuvabunt  Romani  ex  animo,  prout  eis  tem- 
pus  permiserit  ; 

28.  Et  adjuvantibus  non  dabitur  triticum,  arma,  pecunia, 
naves,  sicut  placuit  Romanis;  et  custodient  mandata 
eorum  absque  dolo. 

20.  Secundum  hœc  verba  constituerunt  Romani  populo 
Judajorum. 

?o.  Quod  si  post  haac  verba  hi  aut  illi  addere  aut  demere 
ad  haac  aliquid  voluerint,  facient  ex  proposito  suo  ;  et 
quœcumque  addiderint,  vel  dempserint,  rata  erunt. 

}l.  Sed  et  de  malis  qwe  Demetrius  rex  fecit  in  eos 
scripsimus  ei,  dicentes  :  Quare  gravasti  jugum  tuum  super 
amicos  nostros  et  socios  Judœos? 

?2.  Si  ergo  iterum  adierint  nos,  adversum  te  faciemus 
illis  judicium,  et  pugnabimus  tecum  mari  terraque. 


26.  Sans  que  les  Romains  donnent  et  fournissent  aux 
gens  de  guerre,  ni  blé,  ni  armes,  ni  argent,  ni  vaisseaux, 
car  c'est  ainsi  qu'il  a  plu  aux  Romains  :  et  ces  soldats 
juifs  leur  obéiront  sans  rien  recevoir  d'eux. 

27.  Et  de  même,  s'il  survient  une  guerre  au  peuple  juif, 
les  Romains  l'assisteront  de  bonne  foi,  selon  que  le 
temps  le  leur  permettra  ; 

28.  Et  les  Juifs  ne  fourniront  à  ceux  que  l'on  enverra 
à  leur  secours,  ni  blé,  ni  armes,  ni  argent,  ni  vaisseaux, 
car  c'est  ainsi  qu'il  a  plu  aux  Romains  :et  ils  leur  obéiront 
sincèrement. 

29.  C'est  là  l'accord  que  les  Romains  font  avec  les 
J  u  i  f s . 

;o.  Si,  à  l'avenir,  les  uns  ou  les  autres  veulent  ôter  ou 
ajouter  quelque  chose  à  ce  qui  est  écrit  ici,  ils  pourront 
le  faire  de  concert;  et  tout  ce  qui  sera  ôté  ou  ajouté, 
demeurera   ferme. 

;t.  Et  pour  ce  qui  est  des  maux  que  le  roi  Dcmétrius 
a  faits  au  peuple  juif,  nous  lui  en  avons  écrit  en  ces  ter- 
mes :  Pourquoi  avez- vous  accablé  d'un  joug  si  pesant  les 
Juifs,  qui  sont  nos  amis  et  nos  alliés? 

j2.  S'ils  viennent  de  nouveau  se  plaindre  à  nous,  nous 
leur  rendrons  justice,  et  nous  vous  attaquerons  par  mer 
et  par  terre. 


COMMENTAIRE 


jh  26.  Pr/ELIANTIBUS  non  dabunt  triticum, 
arma,  etc.  Les  Juifs  aideront  de  tout  leur  pou- 
voir les  Romains,  dans  les  guerres  qui  leur  sur- 
viendront, et  les  troupes  qui  seront  fournies, 
seront  armées,  nourries,  soudoyéesaux  frais  des 
Juifs  (1).  Grotius  et  d'autres  commentateurs  l'en- 
tendent autrement  :  Les  Juifs  ne  donneront  aucun 
secours  d'hommes,  d'armes  ou  d'argent  aux  enne- 
mis des  Romains.  Si  on  le  prend  en  ce  dernier 
sens  en  cet  endroit,  il  faudra  expliquer  le  v.  28 
de  la  même  manière  :  Et  les  Romains  ne  fourni- 
ront aux  ennemis  des  Juifs,  ni  hommes,  ni  armes, 
ni  argent.  Ce  sens  est  contraire  au  texte  grec  (2), 
qui  marque  évidemment  des  amis  et  des  alliés  qui 
nous  aident,  et  non  pas  des  ennemis  qui  nous  atta- 
quent. Mais  le  syriaque  et  l'arabe  (3)  l'expliquent 
comme  Grotius,  et  c'est  le  sens  le  plus  juste  et  le 
plus  naturel  ;  mais  le  grec  et  la  Vulgate  y  sont 
opposés. 

f.  31.  Quare  gravasti  jugum  tuum  super 
amicos  nostros?  Antiochus  Épiphane,  et  son  fils 
Eupator.  et  enfin  Démétrius  Soter,  avaient  sans 
doute  porté  les  choses  à  toute  extrémité  à  l'égard 
des  Juifs.  Ils  abusaient  visiblement  du  pouvoir 
que  Dieu  leur  avait  donné,  en  voulant  contrain- 
dre leurs  sujets  à  renoncer  à  une  religion,  qui  n'a 
rien  de  contraire,  ni  aux  bonnes   moeurs,   ni  à  la 


paix  de  l'état,  ni  à  la  soumission  que  les  peuples 
doivent  à  leurs  souverains.  Les  Juifs  jusqu'alors 
avaient  vécu  en  liberté,  dans  la  pratique  de  leur 
culte,  à  l'abri  des  lois  et  des  privilèges  des  prin- 
ces prédécesseurs  d'Antiochus  ;  ils  ne  s'étaient 
jamais  rendus  indignes  de  ces  privilèges,  par 
aucune  action  de  révolte  ou  de  désobéissance  ; 
cependant,  on  les  avait  traités  en  ennemis,  on 
avait  employé  contre  eux  les  plus  rigoureux  sup- 
plices ;  on  les  avait  forcés,  malgré  leur  cons- 
cience, et  contre  leurs  lois,  à  offrir  de  l'encens 
aux  idoles,  et  on  en  avait  fait  mourir  un  très  grand 
nombre.  Tout  cela  semblait  devoir  les  autorisera 
prendre  les  armes  contre  leurs  persécuteurs,  pour 
la  défense  dé  leurs  lois,  de  leur  religion  et  de 
leur  liberté. 

S'ils  n'avaient  point  eu  d'autre  motif  que  celui- 
là,  nous  ne  pourrions  cependant  les  justifier  (j). 
C'est  une  obligation  indispensable,  fondée  sur  la 
justice  naturelle,  de  souffrir  la  persécution,  môme 
la  plus  injuste,  de  la  part  de  son  souverain,  plu- 
tôt que  de  prendre  les  armes  contre  lui.  Ce  devoir 
était  pour  l'Ancien  comme  pour  le  Nouveau  Tes- 
tament. Le  malheur  des  guerres  civiles  est  encore 
plus  grand  que  celui  de  la  persécution  ;  ils  pou- 
vaient mettre  leur  religion  à  couvert,  au  moins 
par  la  fuite.  C'était  pour  eux  un  très  grand   bon- 


(1)  lia  Menoch.  Tir.  alii  Plerique. 

(2)  Verset  26.  Kai  toi;  KoXcfioîiat  6j  BcIxtouti  airov,  etc. 
Verset  28.  Kai  toi;  lu^^ayouat  ôj  ooOri'jSrai  3ÎT0Ç,  or.la, 
etc.  Grot  veut  qu'on  lise  en  ce  dernier  verset  Ka;.  toi? 
no^eu-t'o;;,  /.ai  toi?  ou(A(xa^o3ai. 


(j)  Vide  m.  Macc.  Arabice  c.  1?.  in  Polrglott  Paris,  et 
Londinens. 

(4)  L'abbé  Rupert.  de  Victoria  rerbi  Dei  c.  ult.  et 
Pierre  de  Blois,  Canon  Episcop.  et  F.p.  146.  condamnent 
expressément  la  conduite  des  Maccabées,  d'avoir  eu 
recours  à  la  protection  des  Romains. 


I.—  MACCABÉES.  —  VIII.-   ALLIANCE  AVEC   LES   ROMAINS 


9^ 


heur,  de  donner  leur  vie  pour  la  religion  de  leurs 
pores.  Il  n'y  a  donc  que  l'inspiration  surnaturelle 
de  Dieu,  procurée  et  manifestée  par  des  miracles 
évidents, qui  ait  pu  rendre  l'action  des  Maccabées 
permise  et  louable  ;  le  Seigneur  fit  apparaître  en 
plus  d'une  circonstance,  des  anges  sous  la  figure 
d'hommes  armés,  qui  marchaient  à  la  tète  des 
troupes,  et  qui  couvraient  Judas  Maccabée  de 
leurs    armes  (i).  Le  prophète  Jérémie  lui  apparut 


plein  de  gloire  et  de  majesté,  et  lui  mit  en  main 
une  épée  d'or,  en  lui  disant  (2)  :  Receve\  comme 
un  présent  de  la  pari  de  Dieu  celle  épée,  avec 
laquelle  vous  renverserez  les  ennemis  de  mon  peu- 
ple d'Israël.  Enfin  les  éloges  que  le  Saint-Esprit 
donne  aux  Maccabées,  et  le  succès  miraculeux 
et  toujours  certain  de  leurs-  armes ,  prouvent 
visiblement  que  leur  entreprise  était  agréable  à 
Dieu. 


(1)  11.  Macc.  x.  29.  jo.  et  xi.  8. 


(2)  11.  Macc.  xv.  12.  14.  15.   16. 


CHAPITRE    IX 

Bacchide  et  Alcime  reviennent  en  Judée.  Judas  est  tué  dans  le  combat.  Jonathas  son  frère 
lui  succède.  Bacchide  le  poursuit.  Jean,  frère  de  Jonathas,  est  tué.  Jonathas  traverse 
le  Jourdain  à  la  vue  de  V ennemi.  Alcime  meurt  frappé  de  Dieu.  Bacchide  se  retire  ;  il 
revient,  et  est  défait  par  Jonathas.  Paix  entre  Jonathas  et  Bacchide. 


i.  Interea,  ut  audivit  Demetrius  quia  cecidit  Nicanor 
et  exercitus  ejus  in  praelio,  apposuit  Bacchidem  et  Alci- 
mum  rursum  mittere   in  Judasam,  et  dextrum  cornu  cum 

mis. 

2.  Et  abierunt  viam  quae  ducit  in  Galgala,  et  castra 
posuerunt  in  Masaloth,  quae  est  in  Arbellis  ;  et  occupa- 
verunt  eam,  et  peremerunt  animas  hominum  multas. 

;.  In  mense  primo  anni  centesimi  et  quinquagesimi 
secundi  applicuerunt  exercitum  ad  Jérusalem  ; 

4.  Et  surrexerunt,  et  abierunt  in  Beream  viginti  millia 
virorum,  et  duo  millia  equitum. 

<,.  Et  Judas  posuerat  castra  in  Laisa,  et  tria  millia  viri 
electi  cum  eo. 


1.  Cependant  Démétrius  ayant  appris  que  Nicanor 
avait  été  tué  dans  le  combat,  et  son  armée  défaite, 
envoya  de  nouveau  Bacchide  et  Alcime  en  Judée,  avec 
l'élite  de  son  armée. 

2.  Ils  marchèrent  par  le  chemin  qui  mène  à  Galgala, 
et  campèrent  à  Masaloth  qui  est  en  Arbelles,  et  ils  pri- 
rent cette  ville,  et  y  tuèrent  un  grand  nombre  d'hommes. 

;.  Au  premier  mois  de  l'année  cent  cinquante-deux,  ils 
se  rendirent  avec  toute  l'armée  près  de  Jérusalem. 

4.  Puis  ils  se  levèrent  et  s'en  allèrent  à  Bérée,  au  nom- 
bre de  vingt  mille   hommes  avec  deux  mille  chevaux. 

S-  Or  Judas  s'était  campé  à  Laïse  avec  trois  mille  hom- 
mes choisis  ; 


COMMENTAIRE 


jh  1.  Demetrius  apposuit  Bacchidem  et 
Alcimum  rursum  mittere  in  Jud^eam,  et  dex- 
trum cornu  cum  illis.  Josèphe,  dans  toute  l'his- 
toire que  nous  allons  voir,  se  trompe  visiblement 
en  ce  qu'il  suppose  qu'Alcime  était  mort,  et  que 
Judas  lui  avait  succédé  dans  la  souveraine  sacrifi- 
cature  (1),  pendant  que  Simon,  son  frère,  gou- 
vernait la  nation,  et  commandait  l'armée.  Il  est 
démenti  par  son  propre  témoignage,  puisqu'ail- 
leurs  (2)  il  reconnaît  qu'entre  Alcime  et  Jonathas, 
il  n'y  eut  point  de  grand  prêtre  ;  et  par  l'Écriture 
qui  dit  ici  clairement,  qu'après  la  mort  de  Judas, 
Alcime  a  vécu,  et  a  même  exercé  les  fonctions 
sacerdotales  dans  le  temple  (j). 

On  a  déjà  parlé  de  Bacchide  (_))  ;  il  fut  d'abord 
envoyé  avec  Alcime,  et,  après  lui  avoir  remis 
l'administration  de  la  province,  il  s'en  retourna  en 
Syrie.  Le  roi  l'envoya  cette  seconde  fois,  pour 
tenir  tête  à  Judas,  qui  s'était  rendu  redoutable 
par  la  victoire  qu'il  avait  remportée  sur  Nicanor. 
Le  roi  lui  donna  l'aile  droite  de  son  année,  c'est-à- 
dire,  l'élite  de  ses  troupes;  car  comme  le  prince 
commandait    ordinairement    l'aile  droite  en  per- 


sonne, il  prenait  toujours  ce  qu'il  y  avait  de  plus 
vaillant  et  de  meilleur  parmi  ses  soldats.  L'armée 
était  de  vingt  mille  hommes  de  pied,  et  de  deux 
mille  chevaux  (5)  ;  Josèphe,  fils  de  Gorion,  la  dit 
forte  de  trente  mille  hommes. 

jr.  2.   Abierunt  viam  quje  ducit  in  Galgala, 

ET  CASTRA  POSUERUNT  IN    MASALOTH,   QUyE    EST     IN 

Arbellis.  11  y  a  beaucoup  d'apparence  que  Gal- 
gala est  mis  ici  pour  la  Galilée  (6).  Arbelles, 
aujourd'hui  Irbid,  était  située  sur  une  hauteur 
qui  domine  le  lac  deTibériade.  Quant  à  Masaloth, 
d'après  le  savant  Robinson,  ce  ne  serait  proba- 
blement qu'un  nom  propre,  rmoa  qui  signifie 
route,  chaussée,  escalier  (7). 

jL  3-4.  Applicueruntexercitum  ad  Jérusalem; 

ET  SURREXERUNT,   ET  ABIERUNT  IN    BtREAM.    Avant 

l'ère  vulgaire  160.  Bérée,  selon  d'Allioli,  désigne 
le  lieu  dit  grande  Citerne  ou  grand  puits,  qu'on 
voyait  à  Bézeth  (vu,  19;. 

f.  <;.  Laisa.  Au  lieu  de  Laïsa,  le  grec  lit  E'Xdcja. 
S.  Munk  pense  que  la  véritable  leçon  pourrait 
être  li'Wa,  qui  serait  la  traduction  de  Beth-Zétha. 
Voyez  le  chapitre  vu,  19. 


(1)  Joseph.  Antiq.  I.  xn.  C.  17.  E'^pâ^r]  xd  Sôyu.a....  En: 
âp/t=.pEcj;  p.:v  'où  s'Jvou;  I'oû5a,  stpaTriyoû  8à  2i'u.ojvo;  xoCi 
âoEAooù  âutoû. 

(2)  Idem  Antiq.  I.  xx,  c.  8.  O'  SE  I'â/.tu.o;  è'tr,  tpla  xrtv 
oipy  i£pocûv7)v  xataay  a>v  iztkiùzTfit .  AicB^ato  oè  oùàE';  âutôv, 
xXXà  ûiêtcXsasv  7]  nôX'.i  tvtauxoù;  éntà  '/atpî:  «pvtepéw; 
ouaa,  etc. 


(j)  Voyez  le  verset  $4  et  suiv. 

(4)  Voyez  le  chap.  vu,  8. 

(5)  Verset  4. 

(6)  Vide  Drus.  hic.  et  Joseph.  Antiq.  xu.  c.  li 

(7)  Robinson,  Bibtic.  research,  111.  280. 


I.  —  MACCABÉES.  —   IX.-   NOUVELLE   ATTAQUE  DES  SYRIENS 


9  S 


6.  Et  viderunt  multitudinem  exercitus  quia  multi  sunt, 
et  timuerunt  valde  ;  et  multi  subtraxerunt  se  de  castris,  et 
non  remanserunt  ex  eis  nisi  octingenti  viri. 

7.  Et  vidit  Judas  quod  deiluxit  exercitus  suus,  et  bellum 
perurgebat  eum,et  confractus  est  corde,  quia  non  habebat 
tempus  congregandi  eos,  et  dissolutus  est. 

8.  Et  dixit  his  qui  residui  erant  :  Surgamus,  et  eamus 
ad  adversarios  nostros,  si  poterimus  pugnareadversuseos. 

9.  Et  avertebant  eum,  dicentes  :  Non  poterimus;  sed 
liberemusanimas  nostras  modo,  et  revertamur  ad  fratres 
nostros,  et  tune  pugnabimus  adversus  eos;  nos  autem 
pauci  sumus. 

10.  Et  ait  Judas  :  Absit  istam  rem  facere  ut  fugiamus  ab 
eis;  et  si  appropiavit  tempus  nostrum,  moriamur  in  vir- 
tute  propter  fratres  nostros,  et  non  inferamus  crimen  glo- 
rias  nostrae. 

11.  Et  movit  exercitus  de  castris,  et  steterunt  illis 
obviam,  et  divisi  sunt  équités  in  duas  partes  ;  et  fundibu- 
larii  et  sagittarii  prasibant  exercitum,  et  primi  certaminis 
omnes  poternes. 


6.  Et  ses  gens,  voyant  une  si  grande  armée,  furent  sai- 
sis de  frayeur,  et  plusieurs  se  retirèrent  du  camp  ;  en 
sorte  qu'il  n'en  demeura  que  huit  cents. 

- .  Lorsque  Judas  vit  son  armée  réduite  à  ce  petit  nom- 
bre, et  la  nécessité  où  il  était  de  combattre,  il  en  eut  le 
cœur  abattu,  parce  qu'il  n'avait  pas  le  temps  de  les  ras- 
sembler; et  il  se  sentit  comme  défaillir. 

8.  Cependant  il  dit  a  ceux  qui  étaient  restés  :  Allons 
et  marchons  à  nos  ennemis  pour  les  combattre  si  nous 
pouvons. 

9.  Mais  ses  gens  l'en  détournaient,  en  lui  disant".  Nous 
ne  le  pourrons  jamais  ;  mais  pensons  présentement  à 
assurer  notre  vie,  et  retournons  vers  nos  frères;  après 
cela  nous  reviendrons  combattre  contre  eux  ;  car  nous 
sommes  trop  peu  de  monde. 

10.  Judas  leur  dit  :  Dieu  nous  garde  d'en  user  ainsi,  et 
de  fuir  devant  eux  :  si  notre  heure  est  arrivée,  mourons 
courageusement  pour  nos  frères  ;  et  ne  souillons  point 
notre  gloire  par  aucune  tache. 

11.  L'armée  ennemie  étant  sortie  de  son  camp,  vint  au- 
devant  d'eux  ;  et  la  cavalerie  fut  divisée  en  deux  corps  : 
les  frondeurs  et  les  archers  marchaient  à  la  tête  de 
l'armée  ;  et  tous  ceux  qui  les  suivaient  au  premier  rang 
étaient  les   plus  (ermes  et  les  plus  vaillants. 


COMMENTAIRE 


Tria  millia  viri  electi.  Josèphe  n'en  met  que 
mille  ;  Rufin  son  traducteur  deux  mille  ;  le  fils  de 
Gorion,  environ  trois  mille. 

f.  7.  Quia  non  habebat  tempus  congregandi 
eos,  et  dissolutus  est.  On  a  déjà  vu  en  d'autres 
endroits  de  l'Écriture,  que  Dieu  permet  que  ses 
plus  grands  serviteurs  tombent  quelquefois  dans 
une  espèce  de  défaillance  et  de  découragement. 
L'exemple  du  prophète  Elie,  qu'une  menace  de 
Jézabel  fit  fuir  dans  le  désert  et  demander  au 
Seigneur  qu'il  le  tirât  de  ce  monde  (1),  et  celui 
du  grand  Apôtre  (2),  tellement  accablé  d'une  afflic- 
tion qui  lui  survint  en  Asie,  que  la  vie  lui  en  devint 
à  charge,  font  voir,  comme  dit  le  même  Apôtre, 
que  Dieu  le  permet  ainsi,  afin  que  ses  serviteurs 
prennent  garde  de  ne  mettre  point  leur  confiance 
en  eux-mêmes,  mais  en  Dieu  qui  ressuscite  les 
morts. 

C'est  le  jugement  qu'on  doit  porter  de  ce 
qu'on  vit  arriver  alors  à  Judas  Maccabée. 
Les  grandes  victoires  qu'il  avait  gagnées,  et 
tant  d'actions  éclatantes  qu'il  avait  faites,  étaient 
sans  doute  un  grand  sujet  de  tentation  et  d'or- 
gueil. Nul  ennemi  ne  pouvait  tenir  devant  lui  : 
il  renversait  des  armées  formidables  avec  une 
poignée  de  soldats  ;  tout  fuyait  au  bruit  seul  du 
nom  de  Judas  et  des  Maccabées.  Il  fallait,  comme 
le  dit  saint  Grégoire  au  sujet  d'Élie  (3),  que  tout 
le  monde  vît  que  c'était  de  Dieu  qu'il  avait  reçu 
la  force,  puisqu'abandonné  à  lui-même,  il  ressentit 
la  faiblesse  qui  lui  était  naturelle.  Comme  cette 
force,  qu'il  fit  éclater  aux  yeux  des  hommes,  était 


une  preuve  de  sa  vertu  :  la  faiblesse  dans  laquelle 
on  le  vit  tomber  tout  d'un  coup,  servit  à  mettre  à 
couvert  cette  vertu  même,  et  à  l'affermir  contre 
l'orgueil. 

Mais  enfin,  si  l'on  examine  les  circonstances 
qui  donnèrent  lieu  à  sa  crainte,  l'on  sera  peut-être 
encore  moins  étonné  de  ce  qu'il  s'est  affaibli  ainsi 
en  un  instant,  que  de  ce  qu'il  se  soutint  et  se  ras- 
sura aussitôt  avec  une  foi  incroyable,  contre  tant 
de  sujets  qu'il  avait  de  perdre  courage.  Il  n'avait 
d'abord  avec  lui  que  trois  mille  hommes,  et  l'ar- 
mée ennemie  était  très  forte  en  infanterie  et  en 
cavalerie.  La  vue  d'une  armée  si  redoutable  ne 
l'étonna  point  ;  accoutumé  à  vaincre  parle  secours 
que  Dieu  lui  donnait,  il  ne  craignit  point  le  nom- 
bre de  ses  ennemis.  Mais  ceux  qui  l'accompa- 
gnaient et  qui  étaient,  comme  lui,  accoutumés  àla 
victoire,  sont  effrayés  par  la  multitude  de  ces 
infidèles  :  ils  se  retirent  l'un  après  l'autre,  et  ils 
abandonnent  celui  qui  les  avait  soutenus  jusque 
alors  avec  un  courage  et  une  foi  si  admirable. 

V.    10.    NON  INFERAMUS  CRIMEN  GLORIA  NOSTRAE. 

Ne  souillons  point  notre  gloire  par  aucune  tache, 
par  une  action  si  honteuse  et  si  criminelle  ;  car  il 
semble,  par  son  expression,  qu'il  aurait  cru  com- 
mettre un  crime  de  se  retirer  (4)  :  Ne  inferamus 
crimen  gloruv  nosirœ.  Il  jugea  que  Dieu  ayant  dis- 
posé les  circonstances  de  manière  qu'il  ne  pouvait 
plus  se  retirer  que  honteusement,  c'était  une 
espèce  de  déclaration  de  sa  volonté,  à  laquelle  il 
ne  devait  pas  résister.  Si  c'est  notre  heure,  disait- 
il  à  ses  gens,  mourons  courageusement  pour  nos 


(1)  m.Reg.  ix.  ?.  4. 

(2)  11.  Cor,  1.  8,  9. 


(5)  Gregor.  Magn.  Moral.  Ub.  xix.  c.  5. 
(4)  Mrj  xoe7al:7;w;j.ev  «itfav  xrj  3ô;ij  r)u.u>v. 


(/) 


I.  —  MACCABÉES.  —  IX.  -   MORT  DE  JUDAS 


!  2.  Bacchides  autem  erat  in  dextro  cornu;  et  proxi- 
mavit  legio  e\  duabus  partibus,  et  clamabant  tubis. 

t  ;.  Exclamaverunt  autem  et  ni  qui  erant  ex  parte  Judas, 
etiam  i psi ,  et  commota  est  terra  a  voce  exerciluum,  et 
commissum  est  praelium  a  mane  usque  ad  vesperam. 

14.  Et  vidit  Judas  quod  n>mior  est  pars  exercitus  Bac- 
chidis  in  dextris,  et  convenerunt  cum  ipso  omnes  cons- 
tantes corde  ; 

1^.  Et  contrita  est  dextera  pars  ab  eis,  et  persecutus 
est  eos  usque  ad  montem  Azoti. 

16.  Et  qui  in  sinistro  cornu  erant  viderunt  quod  contri- 
tum  est  dextrum  cornu,  et  secuti  sunt  post  Judam,  et  eos 
qui  cum  ipso  erant,  a  tergo, 

17.  Etingravatum  est  praelium;  et  ceciderunt  vulnerati 
multi  e\  his  et  ex  illis. 

18.  Et  Judas  cecidit,  et  ceteri  fugerunt. 


12.  Bacchide  était  à  l'aile  droite;  et  les  bataillons  mar- 
chèrent des  deux  côtés,  et  firent  retentir  le  bruit  des 
trompettes. 

[j  Les  gens  de  Judas  sonnèrent  aussi  des  trompettes 
de  leur  côté  :  la  terre  retentit  du  bruit  des  armes;  et  le 
combat  dura  depuis  le  matin  jusqu'au  soir. 

14.  Judas  ayant  reconuu  que  l'aile  droite  de  Bacchide 
était  la  plus  forte,  fit  un  effort  avec  les  plus  vaillantes  de 
ses  troupes. 

i<,.  Ils  rompirent  cette  aile  droite,  et  les  poursuivirent 
jusqu'à  la  montagne  d'Azot. 

16.  Mais  ceux  qui  étaient  de  l'aile  gauche,  voyant  que 
l'aile  droite  avait  été  défaite,  prirent  en  queue  Judas  et 
ses  gens  ; 

17.  Et  le  combat  fut  longtemps  opiniâtre  ;  beaucoup 
de  part  et  d'autre  furent  blessés  et  tués; 

18.  Judas  môme  tomba  mort;  et  les  autres  s'enfuirent. 


COMMENTAIRE 


frères  ;  sinon,  Dieu  saura  bien  nous  donner  la  vic- 
toire et  nous  conserver  ;  combien  de  fois  avons- 
nous  éprouvé  les  effets  de  sa  toute-puissance  ?  La 
victoire  n'est-elle  pas  toujours  entre  ses  mains  ?  Il 
n'y  a  point  de  différence  à  son  égard  entre  un 
grand  et  un  petit  nombre.  Voilà  apparemment  les 
raisons  qui  déterminèrent  J  udas  à  «ouloir  soutenir, 
avec  huit  cents  hommes,  les  efforts  d'une  armée 
de  vingt-deux  mille  hommes.  C'est  ce  qui  met 
son  action  à  couvert  du  reproche  de  témérité,  et 
d'avoir  voulu  tenter  Dieu.  Saint  Ambroise  (i) 
relève  son  action  par  les  expressions  les  plus  bril- 
lantes, et  l'Église  emprunte  ses  paroles  dans 
son  office  (2).  Ce  père  représente  Judas  et  ses 
frères,  comme  le  modèle  du  véritable  héroïsme  ; 
Habcs  forliludinein  bellicam,  in  qua  non  mediocris 
honesli  ac  decori  forma  est,  quod  morlem  serviluli 
pr  ce  fer  al  ac  turpitudini  (3). 

D'ailleurs,  en  se  retirant,  ils  découvraient  Jéru- 
salem ;  ils  abandonnaient  leur  capitale  et  le  tem- 
ple à  l'ennemi.  Il  n'y  avait  pas  de  milieu:  Si  l'on 
voulait  conserver  Jérusalem,  il  fallait  vaincre  ;  se 
retirer  sans  combattre  c'était  la  livrer  aux  Syriens. 
Aussi,  malgré  l'énorme  disproportion  des  forces, 
Judas  considère-t-il  la  retraite  comme  une  honte. 
Pour  entrer  à  Jérusalem  l'ennemi  devra  lui  pas- 
ser le  corps. 

jf.    12.    PrOXIMAVIT  LEGIO  EX  DUABUS    PARTIBUS. 

L'auteur  de  la  Vulgate  traduit  ordinairement  par 
legio,  le  grec  oâXayxi  qui  signifie  unt  bataillon  de 
troupes  serrées  (4)  ;  Macedones  phalangem  vocanl 
pedilum  slabile  agmen,  quando  vit  viro,  armaarmis 
conserla  sunt.  Végèce  dit  que  la  phalange  est  ordi- 
nairement de  huit  mille  hommes.  La  légion  n'était 
que  de  six  mille  sept  cent  vingt-six ,  selon  le 
même  Végèce,  ou  de  six  mille  six  cent  soixante- 


six,  selon  d'autres.  Les  bataillons  serrés  et  sou- 
tenus par  la  cavalerie  rangée  aux  deux  ailes, 
s'avancèrent  donc  contre  Judas,  pour  l'envelopper. 

f.  1^.  Usque  ad  montem  Azoti.  Jusqu'à  la 
montagne  dA\ot.  On  ne  peut  pas  l'entendre 
d'Azot  ville  des  Philistins  ;  elle  était  trop  éloignée 
des  lieux  où  nous  avons  dit  que  la  bataille  se 
livra  ;  Josèphe  écrit  :  La  montagne  d'Asa.  On 
n'en  connaît  pas  la  situation,  mais  elle  devait 
être  à  très  peu  de  distance  de  Jérusalem. 

jh  18.  Et  Judas  cecidit.  Ainsi  mourut  ce  grand 
homme,  que  la  Providence  avait  suscité  dans  les 
temps  désastreux,  pour  en  faire  le  soutien  de  la 
religion,  pour  mettre  sa  nation  en  liberté,  pour 
sauver  le  peuple  d'Israël  (<,)  :  Qui sahnim  faciebal 
populum  Israël.  Il  soutint  jusqu'au  dernier  soupir 
le  caractère  de  sauveur,  ayant  préféré  la  mort 
pour  le  salut  de  ses  frères,  à  une  retraite  honteuse  ; 
ainsi  la  mort  est  devenue  plus  glorieuse  pour  lui 
que  les  triomphes  les  plus  magnifiques:  Glorio- 
siolrem  Iriumphis  morlem  invewl  (6).  A  peine  dans 
tout  l'Ancien  Testament  trouvera-t-on  un  person- 
nage en  qui  l'on  remarque  plus  de  ces  excellentes 
qualités,  qui  font  les  saints  et  les  grands  hommes. 
On  voit  peu  de  guerriers  modérés,  religieux,  maî- 
tres de  leurs  passions,  exempts  d'ambition  et  de 
vanité,  éloignés  du  plaisir,  et  au-dessus  de  la 
vaine  gloire.  Judas  avait  toutes  les  qualités  d'un 
héros:  le  courage,  l'intrépidité,  la  force,  le  con- 
seil, la  sagesse  ;  tout  cela  sans  emportement,  sans 
violence,  sans  faste.  Il  avait,  outre  cela,  tout  ce 
qui  doit  distinguer  un  prêtre  et  un  prince  religieux. 
Le  zèle  pour  la  religion,  la  pureté  des  mœurs, 
l'amour  de  son  peuple  ;  pieux,  sans  superstition  ; 
attaché  à  ses  devoirs,  sans  bassesse  ;  zélé  pour 
l'observation  des  lois,  mais  d'un  zèle  réglé  par  la 


(1)  Ambros.  Offic.  I.  1.  c.  41. 

(2)  Offtciuin  Matulinorum  Domin.  m  Octob. 

(j)  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  ci-dessus  de  la  mort 
d'Élcazar;  voyez  aussi  Scrar.  Tirin.  Est.  Verhorst.  etc. 


(4)  Quint.  Curt. 

(5)  Verset  21. 

(0)  Ambros.  Offic.  I.  1.  c.  41. 


I.  —    MACCABÉES.  —  IX.  -   MORT  DE  JUDAS 


ig  Et  Jonatlias  et  Simon  tulerunt  Judam,  l'iatrem  siium, 
et  srpeherunt  eum  in  sepulchro  patrum  suorum,  in  civi- 
tate  Modin. 

20.  Et  tleverunt  eum  omnis  populus  Israël  planctu  ma- 
gno,  et  lugebant  dies  multos. 

21.  Et  dixerunt  :  Quomodo  cecidit  potens,  qui  salvum 
faciebat  populum  Israël  ! 

22.  Et  cetera  verba  bellorum  Judas,  et  virtutum  quas 
fecit,  et  magnitudinis  ejus,  non  sunt  descripta,  muHa  enim 
erant  valde. 

2j.  Et  factum  est:  post  obitum  Judae  emerserunt  iniqui 
in  omnibus  finibus  Israël,  et  exorti  sunt  omnes  qui  opera- 
bantur  iniquitatem. 


19.  Jonatlias  et  Simon  emportèrent  le  corps  de  Judas 
leur  frère,  et  le  mirent  dans  le  sépulcre  de  leurs  pères 
dans  la  ville  de  Modin. 

20.  Tout  le  peuple  d'Israël  fit  un  grand  deuil  à  sa  mort, 
et  ils  le  pleurèrent  plusieurs  jours. 

21.  Et  ils  disaient  :  Comment  est-il  tombé  cet  homme 
invincible,  qui   sauvait  le  peuple  d'Israël? 

22.  Les  autres  guerres  de  Judas,  les  actions  extraor- 
dinaires qu'il  a  faites,  et  la  grandeur  de  son  courage,  ne 
sont  pas  décrites  ici,  parce  que  ces  guerres  et  ces 
actions  sont  en  trop  grand  nombre. 

2;.  Après  la  mort  de  Judas,  les  méchants  parurent  de 
tous  côtés  dans  Israël,  et  tous  les  hommes  d'iniquité 
s'élevèrent  de  toutes  parts. 


COMMENTAIRE 


science,  et  soutenu  par  la  charité.  Quelle  idée  ne 
nous  donnent  pas  de  sa  profonde  connaissance 
des  lois  de  Dieu  et  des  principes  de  la  vraie  mo- 
rale, les  discours  qu'il  tient  à  ses  troupes  pour  les 
animer,  pour  les  soutenir  dans  les  épreuves,  pour 
les  disposer  à  mépriser  les  plus  grands  périls  ! 
Avec  quelle  humilité,  dans  quels  sentiments  de 
pénitence  ne  se  prosterne-t-il  pas  devant  le  Tout- 
Puissant,  lorsqu'il  se  prépare  au  combat  !  Avec 
quelle  fermeté  monte-t-il  au  temple  tout  environné 
d'ennemis,  pour  le  purifier  des  souillures  des 
gentils  !  Avec  quelle  vigueur  s'oppose-t-il  aux 
impies,  et  venge-t-il  les  injures  faites  à  son  Dieu  ! 
Enfin  quelle  est  son  attention  à  ménager  les  inté- 
rêts de  son  peuple,  et  à  procurer  sa  gloire  et  ses 
avantages,  tant  spirituels  et  temporels  ;  Dilatavit 
gloriam  populo  suo  (1). 

Ce  grand  homme  est  une  des  belles  figures 
symboliques  de  Jésus-Christ.  Judas,  choisi  entre 
ses  frères  pour  sauver  son  peuple,  pour  être  leur 
chef,  dans  les  temps  les  plus  difficiles,  où  il  sem- 
blait que  la  religion  devait  faire  naufrage,  n'est-il 
pas  une  image  de  Jésus-Christ,  qui  est  venu  dans 
les  derniers  temps,  pour  tirer  le  monde  des  pro- 
fondes ténèbres  où  il  était  plongé,  pour  dissiper  la 
superstition  et  l'idolâtrie  par  l'éclat  de  sa  doctrine, 
pour  réformer  la  corruption  des  mœurs,  par  la 
pureté  de  sa  morale  toute  divine.  Quand  on  envi- 
sage Judas  aux  prises  avec  tous  les  ennemis 
d'Israël,  remporter  contre  eux  des  victoires  signa- 
lées, quoique  presque  seul,  et  sans  secours  humain; 
quand  on  le  voit  presque  toujours  persécuté,  errant 
au  milieu  de  la  défaillance  ou  de  la  désertion  de  la 
plus  grande  partied'Israël,  contraint  de  rechercher 
l'alliance  des  étrangers  ;  quand  on  le  considère 
occupé  à  nettoyer  le  temple  de  ses  abominations, 
ériger  un  autel  nouveau,  et  rétablir  l'usage  des 
sacrifices  ;  enfin  quand  on  se  le  représente  dans 
le  dernier  combat,  succombant  à  la  fleur  de  l'âge 


sous  le  grand  nombre  de  ses  ennemis,  donnant 
généreusement  sa  vie  pour  ses  frères  ;  peut-on  ne 
pas  voir  en  même  temps,  comme  dans  un  miroir, 
Jésus-Christ  persécuté  dans  sa  personne  et  dans 
ses  disciples,  non  seulement  par  les  étrangers, 
mais  encore  plus  par  les  Juifs,  ses  propres  frères, 
et  faisant  alliance  avec  la  gentilité  pour  sauver 
la  religion  ;  Jésus- Christ  chassant  ceux  qui  pro- 
fanaient le  temple  et  se  livrant  à  la  mort  pour  le 
salut  de  son  peuple  ?  Les  qualités  même  de  prêtre 
et  de  prince  des  Juifs,  qui  se  rencontrent  dans 
Judas,  désignaient  encore  parfaitement  les  mêmes 
prérogatives  que  Jésus-Ghrist  a  si  divinement 
réunies  dans  sa  personne.  , 

v.  10.  Sepelierunt  eum  in  sepulcro  patrum 
suorum,  in  civitate  Modin.  On  y  a  vu  longtemps 
leurs  tombeaux  ;  Eusèbe  (2)  dit  qu'on  les  y 
voyait  encore  de  son  temps.  Saint  Jérôme  (3) 
s'étonne  qu'on  montre  leurs  reliques  à  Antioche, 
Mais  ce  n'était  point  les  reliques  des  fils  de  Mat- 
thathias,  mais  des  sept  frères  Maccabées,  qui 
souffrirent  sous  Antiochus  Epiphane  (4). 

jK  2).  Et  factum  est, post  obitum Jud^e  emer- 
serunt iniqui  in  omnibus  itnibus  Israël.  On  est 
obligé  d'adorer,  avec  un  profond  respect,  les 
jugements  du  Seigneur  dans  la  mort  de  ses  servi- 
teurs, qui  étaient,  durant  leur  vie,  comme  les  co- 
lonnes et  les  fermes  appuis  de  son  peuple.  Le 
nom  de  Judas  imprimait  de  la  terreur  dans  l'esprit 
non  seulement  des  étrangers,  maisdes  faux  frères 
qui  étaient  d'intelligence  avec  les  gentils  pour 
persécuter  Israël.  11  semblait  qu'il  y  allait  de  l'in- 
térêt et  de  la  gloire  de  Dieu  môme,  de  faire  vivre 
longtemps  ce  grand  homme,  qui  était  regardé 
comme  l'ange  tutélaire  de  Juda  ;  mais  Dieu  con- 
naît les  raisons  de  sa  conduite  toujours  adorable, 
lorsqu'il  ôte  tout  d'un  coup  à  son  peuple  ce  grand 
protecteur,  et  qu'il  donne  occasion  par  sa  mort,  à 
tous  les  méchants  et  à  lous  les  hommes   d'iniquité 


(1)  1.  Macc.  m.  3. 

(2)  Euseb.  in  locis.  -  Voyez  ce  qui  a  été  dit  au  chapitre 
11,  verset  1. 

S.    B.  —  T.  XII. 


(!)  Hieron.  in  locis  Hcb. 
(4)  Voyez  11.  Macc.  vu.  1. 


98 


I.  —  MACCABEES.  —  IX.  -  JONATHAS  LUI  SUCCÈDE 


24.  In  diebus  illis  facta  est  famés  magna  valde,  et  tra- 
didit  se  Bacchidi  omnis  regio  eorum  cum  ipsis. 

2;.  Et  elegit  Bacchides  viros  impios,  et  constituit  eos 
dominos  regionis  ; 

26.  Et  exquirebant,  et  pcrscrutabantur  amicos  Judas, 
et  adducebant  eos  ad  Bacchidem,  et  vindicabat  in  illos, 
et  illudebat. 

27.  Et  facta  est  tribulatio  magna  in  Israël,  qualis  non 
fuit  ex  die  qua  non  est  visus  propheta  in  Israël. 

28.  Et  congregati  sunt  omnes  amici  Judas,  et  dixerunt 
Jonathas  : 

29.  Ex  quo  frater  tuus  Judas  defunctus  est,  vir  similis 
ei  non  est,  qui  exeat  contra  inimicos  nostros,  Bacchi- 
dem, et  eos  qui  inimici  sunt  gentis  nostras. 

?o.  Nunc  itaque  te  hodie  elegimus  esse  pro  eo  nobis  in 
principem,  et  ducem  ad  bellandum  bellum  nostrum. 

)!.  Et  suscepit  Jonathas  tempore  il lo  principatum,  et 
surrexit  loco  Judas,  fratris  sui. 

p.  Et  cognovit  Bacchides,  et  quasrebat  eum  occidere. 

jj.    Et   cognovit   Jonathas,   et    Simon,    frater    ejus,  et 
omnes  qui  cum  eo   erant,  et  fugerunt  in  desertum  The- 
cuas,  et  consederunt  ad  aquam  lacus  Asphar. 
•    J4.  Et  cognovit    Bacchides,    et  die  subbatorum   venit 
ipse,  et  omnis  exerciius  ejus,  trans  Jordanem. 


24.  En  ce  temps  il  survint  une  très  grande  famine  ;  et 
tout  le  pays  avec  ses  habitants  se  rendit  à  Bacchide. 

25.  Bacchide  choisit  des  hommes  impies,  et  leur  donna 
le  gouvernement  de  tout  le  pays. 

26.  Ils  faisaient  une  exacte  recherche  des  amis  de  Judas, 
et  les  amenaient  à  Bacchide,  qui  exerçait  sa  vengeance 
sur  eux,  et  les  traitait  avec  insulte. 

27.  Et  Israël  fut  accablé  d'une  si  grande  affliction! 
qu'on  n'en  avait  point  vu  de  semblable  depuis  le  temps 
qu'il  ne  paraissait  plus  de  prophète  dans  Israël. 

28.  Alors  tous  les  amis  de  Judas  s'assemblèrent,  et 
dirent  à  Jonathas  : 

20.  Depuis  que  votre  frère  Judas  est  mort,  il  ne  se 
trouve  point  d'homme  semblable  à  lui,  pour  marcher 
contre  Bacchide   et  les  autres  ennemis  de  notre    nation. 

jo.  C'est  pourquoi  nous  vous  avons  choisi  aujourd'hui 
pour  être  notre  prince  et  notre  chef  en  sa  place,  et  pour 
nous  conduire  dans  toutes  nos  guerres. 

jt.  Jonathas  reçut  donc  alors  le  commandement,  et 
prit  la  place  de  Judas  son  frère. 

jj.  Bacchide  en  fut  averti;  et  il  cherchait  le  moyen  de 
le  tuer. 

?  j.  Mais  Jonathas  et  Simon,  son  frère,  et  tous  ceux  qui 
les  accompagnaient,  l'ayant  su,  s'enfuirent  dans  le  désert 
de  Thécua, et  s'arrêtèrent  près  des  eaux  du  lac  d'Asphar. 

Î4.  Bacchide  le  sut,  et  vint  lui-même,  avec  toute  son 
armée,  le  jour  du  sabbat,  au-delà  du  Jourdain. 


COMMENTAIRE 


de  s'élever  de  toutes  parts,  et  de  se  produire  de  tous 
côtés  dans  Israël.  Jamais  il  ne  prouve  davantage 
que  ses  jugements  surpassent  toutes  nos  pensées, 
et  que  nos  moyenshumains  ne  sont  rien  à  ses  yeux. 

Mais  si  la  conduite  du  Seigneur  anéantit  l'hom- 
me dans  ces  coups  imprévus,  et  humilie  infini- 
ment tous  les  faux  raisonnements  de  son  orgueil, 
nous  avons  lieu  d'admirer  en  même  temps  la  mo- 
destie des  frères  de  Judas  Maccabée,  dont  aucun 
ne  s'ingère  à  prendre  sa  place  dans  la  conduite 
d'Israël.  On  ne  peut  dire  cependant  qu'ils  man- 
quassent de  courage  pour  s'opposer  à  leurs  en- 
nemis, ils  l'avaient  toujours  montré  en  assistant 
leur  frère,  et  les  circonstances  même  semblaient  les 
obliger  à  recueillir  ce  patriotique  héritage.  Car  il 
est  marqué  que  l'ajfliclion  dont  Israël  fut  accablé 
était  telle,  qu'on  n'en  avait  point  vu  de  semblable 
depuis  qu'il  ne  paraissait  plus  de  prophète  ;  c'est-à- 
dire,  depuis  Zacharie,  Aggée  et  Malachie. 

Qui  osera  donc,  après  un  si  grand  exemple,  se 
choisir  soi-même  pour  la  conduite  du  peuple  de 
Dieu,  et  se  regarder  comme  nécessaire  à  procu- 
rer la  délivrance  d'Israël  ?  Ce  n'est  pas  assez  que 
le  vaisseau  soit  menacé  du  naufrage  par  la  vio- 
lence de  la  tempête,  pour  se  croire  capable  d'en 
prendre  le  gouvernail  ;  il  faut  que  l'on  soit  choisi 
de  Dieu. 

f.  24.  Tradidit  se  Bacchidi  omnis  regio  eo- 


rum. Josèphe  (1)  limite  cette  expression,  en  di- 
sant qu'une  grande  partie  du  pays  se  soumit  à 
Bacchide  ;  en  effet,  nous  allons  voir  Jonathas  à 
la  tête  du  peuple,  s'opposer  à  Bacchide,  et  lui 
faire  même  la  guerre  avec  succès.  On  peut  donc 
croire  que  d'abord,  après  la  mort  de  Judas,  per- 
sonne ne  parut  pour  conduire  le  peuple  ;  tout  le 
pays  parut  ainsi  soumis  ;  mais  bientôt  Jonathas 
et  Simon  rassemblèrent  des  troupes. 

jfr.  26.  Vindicabat  in  illos,  et  illudebat.  Il 
leur  faisait  souffrir  divers  tourments,  et  les  met- 
tait à  mort  après  les  avoir  traités  avec  insulte,  dit 
Josèphe  (2). 

f.  27.  Ex  DIE  qua  non  est  visus  propheta  in 
Israël.  Depuis  le  retour  de  la  captivité,  selon 
Josèphe  (3),  et  quelques  commentateurs  (4),  ou 
depuis  la  mort  d'Aggée,  de  Zacharie  et  de  Mala- 
chie, qui  parurent  immédiatement  après  la  capti- 
vité de  Babylone. 

f.  35.  In  desertum  Thecu^.  Cette  ville  était 
près  de  Jérusalem,  dans  la  tribu  de  Juda.  Elle 
n'était  pas  loin  du  château  d'Hérodion  (5)  ;  on 
la  met  à  sept  milles  de  Bethléhem,vers  ie  midi (6). 

Ad  aquam  lacus  Asphar.  C'est  le  lac  Asplial- 
tite  (7),  nommé  par  les  Hébreux  la  mer  de  So- 
dome  ;  les  Grecs  lui  donnèrent  le  nom  de  lac 
Asphaltite,  à  cause  de  l'asphalte  ou  bitume  qu'on 
en  tire. 


(1)  Joseph.  Anliq.  L  xm.  C.  1.  Œ'ç  JioXXoù;  âuro;ju>).rjaat 
npô;  toùç  MocxeSôvk;. 

(2)  Joseph.  Antiq.  L  xm.  c.  1.  O'   Se   (BacjaviÇtov   rcpàhov 
à'jToù:    r.a:  roo;    rfiov^v  iixiÇJaevoç   eJietO    outgj  ou^ÛEtpe. 


(j)  Joseph.  Ibid.  —  (4)  Grot.  Menoch. 
(5)  Joseph  de  Beilo.  I.  vu. 
(0)  Hieron.  Prcef.  in  Amos.  -  11.  Rcg.  xiv.  2. 
(7)  Gorionid.  Lyran.  Menoch. 


I.—  MACCABÉES.  —  IX.-  ESCARMOUCHES  DIVERSES 


99 


55.  Et  Jonathas  misit  fratrem  suum  ducem  populi,  et 
rogavit  Nabuthasos,  amicos  suos,  ut  commodarent  illis 
apparatum  suum,  qui  erat  copiosus. 

j6.  Et  exierunt  filii  Jambri  ex  Madaba,  et  comprehen- 
derunt  Joannem,  et  omnia  quas  habebat,  et  abierunt 
habentes  ea. 

!7.  Post  hase  verba,  renuntiatum  est  Jonathas,  et  Simoni, 
fratri  ejus,  quia  filii  Jambri  faciunt  nuptias  magnas,  et 
ducunt  sponsam  ex  Madaba,  filiam  um'us  de  magnis  prin- 
cipibus  Chanaan,  cum  ambitione  magna. 

jo.  Et  recordati  sunt  sanguinis  Joannis,  fratris  sui,  et 
ascenderunt,  et  absconderunt  se  sub  tegumento    montis- 

?9.  Et  elevaverunt  oculos  suos,  et  viderunt,  et  ecce 
tumultus,  et  apparatus  multus  ;  et  sponsus  processif,  et 
amici  ejus,  et  fratres  ejus  obviam  iilis  cum  tympanis  et 
musicis,  et  armis  multis. 

40.  Et  surrexerunt  adeos  ex  insidiis,  et  occiderunt  eos, 
et  ceciderunt  vulnerati  multi,  et  residui  fugerunt  in  mon- 
tes, et  acceperunt  omnia  spolia  eorum; 

41.  Et  conversœ  sunt  nuptiœ  in  luctum,  et  vox  musico- 
rum  ipsorum  in  lamentum. 

42.  Et  vindicaverunt  vindictam  sanguinis  fratris  sui,  et 
reversi  sunt  ad  ripam  Jordanis. 

4;.  Et  audivit  Bacchides,  et  venil  die  sabbatorum 
usque  ad  oram  Jordanis  in  virtute  magna. 


J5.  Alors  Jonathas  envoya  son  frère  qui  commandait 
le  peuple,  et  pria  les  Nabuthéens,  qui  étaient  leurs  amis, 
de  leur  prêter  leur  équipage  qui  était  fort  grand. 

56.  Mais  les  fils  de  Jambri  étant  sortis  de  Madaba,  pri- 
rent Jean  avec  tout  ce  qu'il  avait,  et  l'enlevèrent  avec 
eux. 

?7.  Après  cela,  on  vint  dire  à  Jonathas  et  à  Simon,  son 
frère,  que  les  fils  de  Jambri  faisaient  un  mariage  célèbre, 
et  qu'il  menaient  de  Madaba,  en  grande  pompe,  une  nou- 
velle fiancée,  qui  était  fille  d'un  des  premiers  princes  de 
Canaan. 

}8.  Ils  se  souvinrent  alors  du  sang  de  Jean,  leur  frère  ; 
et  ils  allèrent  se  cacher  derrière  une  montagne  qui  les 
mettait  à  couvert. 

59.  Ayant  levé  les  yeux,  ils  virent  un  grand  tumulte  et 
un  appareil  magnifique  :  le  nouveau  marié  parut  avec  ses 
amis  et  ses  parents,  et  vint  au-devant  de  la  fiancée,  au 
son  des  tambours  et  des  instruments  de  musique,  accom- 
pagné de  beaucoup  de  gens  armés. 

40.  En  même  temps,  ils  sortirent  de  leur  embuscade  ; 
et  fondant  sur  eux,  ils  en  tuèrent  un  grand  nombre  :  le 
reste  s'enfuit  sur  les  montagnes,  et  ils  emportèrent  tou- 
tes leurs  dépouilles. 

41.  Ainsi  les  noces  se  changèrent  en  deuil,  et  les  con- 
certs de  musique  en  cris  lamentables. 

42.  Ils  vengèrent  de  la  sorte  le  sang  de  leur  frère,  et 
ils  retournèrent  sur  le  rivage  du  Jourdain. 

4j.  Bacchide  en  fut  averti;  et  il  vint  avec  une  puissante 
armée  le  jour  du  sabbat  sur  le  bord  du  Jourdain. 


COMMENTAIRE 


,v\  35.  Rogavit  Nabuth^os,  amicos  suos,  ut 

COMMODARENT  ILLIS  APPARATUM  SUUM.   Le  grec  et 

le  syriaque,  Vatable,  Josèphe,  et  quelques  an- 
ciens exemplaires  latins,  lisent  :  //  pria  les  Naba- 
théens de  recevoir  clïe^  eux  leurs  effets,  ou  leurs 
bagages.  Jonathas  ne  jugea  pasà  propos  de  garder 
auprès  de  soi  cet  attirail  de  bagage,  qui  ne  pou- 
vait que  l'embarrasser,  et  exciter  l'avidité  de  ses 
ennemis.  Il  les  confia  aux  Nabathéens  ou  Naba- 
téens,  ou  Nabuthéens,  qui  étaient  ses  anciens 
amis  (1)  ;  il  les  mit  en  dépôt  chez  eux. 

Filii  Jambri  ex  Madaba.  Médaba  était  une 
ville  bien  connue  du  pays  de  Moab.  Voyez  les 
Nombres  xx,  50.  Le  nom  de  Yaamrou,  Jambri 
a  été  retrouvé  dans  une  inscription  à  Médaba 
même.  C'était  celui  d'un  stratège  (2). 

%   36.  COMPREHENDERUNT    JûANNEM     ET    OMNIA 

QUiE  habebat.  Jean  était  chargé  de  conduire  tout 
le  bagage  de  l'armée  chez  les  Nabathéens  ;  mais 
il  fut  pris  en  chemin,  avec  tout  ce  qu'il  conduisait. 
f.  37.  Madaba.  Ce  nom  figure  ici  par  erreur. 
Il  est  en  désaccord  avec  les  faits.  Car  si  la  jeune 
fiancée  était  de  Médaba,  destinée  à  se  marier  à 
Médaba,  elle  n'avait  point  à  sortir  de  la  ville. 
Aussi  Josèphe  lit-il  Gabatha,  et  le  grec  Nabadath 


et  d'autres  versions  Nadabath.  Et  en  effet,  si  les 
fils  de  Jambri  étaient  de  Médaba,  comme  il  est 
dit  au  verset  36,  il  n'est  pas  vraisemblable  qu'on 
leur  menât  une  épouse  de  la  même  ville.  Il  faudrait 
dire  qu'on  la  leur  amenait  à  Médaba,  et  suivant 
le  grec,  qu'on  la  conduisait  de  Nabadath,  au  lieu 
de  leurdemeure,qui  était  Médaba.  La  ressemblance 
de  ces  deux  termes  a  fait  naître  la  confusion  qui 
s'est  glissée  dans  la  Vulgate. 

Au  lieu  de  Madaba,  ou  de  Nabadath,  ou  de 
Gabatha,  MM.  Niese  et  Clermont-Ganneau  pro- 
posent de  lire  Rabatha,  et  de  voir  dans  cette  ville 
la  fameuse  Rabbath-Ammon,  voisine  de  Médaba. 

Il  résulte  de  ce  passage  que  les  Maccabées 
étaient  en  excellents  termes  avec  les  Nabathéens, 
puisqu'ils  leur  confièrent  leurs  bagages  (verset  35) 
et  qu'ils  furent  dépouillés  par  les  habitants  de 
Médaba.  Cette  ville  n'appartenait  pas  encore  aux 
Nabathéens  et  ceux  qui  en  étaient  les  maîtres 
étaient  ennemis  des  Juifs.  Voyez  ce  que  nous 
avons  dit  à  ce  sujet  dans  la  Genèse  xxv,  1 3 . 

De  magnis  principibus  Chanaan.  Josèphe  s'ex 
prime  avec  plus  d'exactitude  (3),  lorsqu'il  dit  que 
c'était  un  riche  Arabe.  Canaan  est  mis  ici  pour 
un  étranger,  un  infidèle. 


(I)  Grœc.  Il*pexâXêae  toù;  Na6uiai'ou;  oi'Xouç  âii-coû,  Menoc.  Grot, 
TOxpaOETÔac  àuTOÎ;  ttjv  <xtco-j/.£U/]v  âu-uo'v  Trjv  uoXXrjv.  mendarent  il 
Plurima  mss.  legunt,  ut  commendarent  ipsis,  etc.  Drus. 


Badvcll.  Ita   legit  Lrran.  Sixt.  V.  Ut  com- 
lli. 
(2)  Journ.  Asiat.  VIII.  xvn.   559.  —  (?)  Ch.  v.  25. 


IOO 


I 


MACCAREES. 


IX.-  SUCCES  DE  JONATHAS 


44.  Et  dixit  nrl  suos  Jonalhas  :  Surgamus,  et  pugnemus 
contra  inimicos  nostros,  non  est  enim  hodie  sicut  heri  et 
nudius  ertius  ; 

4>.  Ecce  enim  bellum  ex  adverso,  aqua  vero  Jordanis 
hinc  et  inde,  et  ripa?,  et  paludes,  et  saltus,  et  non  est 
locus  divertendi. 

46.  Nunc  ergo  clamate  in  caslum,  ut  liberemini  de  manu 
inimicorum  vestrorum.  Et  commissum  est  bellum. 

47.  Et  extendit  Jonathas  manum  suam  percutere  Bac- 
chidem,  et  divertit  ab  eo  rétro  ; 

48.  Et  dissiliit  Jonathas,  et  qui  cura  eo  erant,  in  Jorda- 
nem,  et  trausnatavei  unt  ad  eos  Jordanem. 

49.  Et  cecider.mt  de  parte  Bacchidisdie  i I la.  mille  viri; 
et  reversi  sunt  in  Jérusalem. 

Ço.  Et  œdificaverunt  civitates  munitas  in  Judœa,  muni- 
tionem  quas  erat  in  Jéricho,  et  in  Ammaum,  et  in  Betho- 
ron,  et  in  Bethel,  et  Thamnata,  et  Phara,  et  Thopo,  mu- 
ris  excelsis,  et  portis,  et  seris; 

51.  Et  posuit  custodiam  in  eis,  ut  inimicitias  exercèrent 
in  Israël. 

152.  Et  munivit  civitatam  Bethsuram,  et  Gazaram,  et 
arcem;  et  posuit  in  eis  auxilia,  et  apparatum  escaruin. 

<ih  Et  accepit  filios  principum  regionis  obsides,  et 
posuit  eos  in  arce  in  Jérusalem  in  custodiam. 

54.  Et  anno  centesimo  quinquagesimo  tertio,  mense 
secundo,  praacepit  Alcimus  destrui  muros  domus  sanctas 
interioris,  et  destrui  opéra  prophetarum;  et  ccepit  des- 
truere. 


44.  Alors  Jonathas  dit  à  ses  ^ens  :  Allons  combattre 
nos  ennemis,  car  il  n'en  est  pas  de  ce  jour  comme  d'hier, 
ou  du  jour  d'auparavant. 

45.  Nous  avons  les  ennemis  en  tèie,  et  derrière  nous 
l'eau  du  Jourdain  avec  les  marais,  et  le  bois  à  droite  et  à 
gauche  ;  et  il  ne  nous  reste  aucun  moyen  d'échapper. 

46.  C'est  pourquoi  criez  au  ciel,  afin  que  vous  soyez 
délivrés  des  mains  de  vos  ennemis.  En  même  temps,  la 
bataille  se  donna  ; 

47.  Et  Jonathas  étendit  la  main  pour  frapper  Bacchide; 
mais  Bacchide  évita  le  coup,  en  se  retirant  en  arrière. 

48.  Enfin  Jonathas  et  ceux  qui  étaient  avec  lui  se  jetè- 
rent dans  le  Jourdain,  et  le  passèrent  à  la  nage  devant 
eux. 

49.  Mille  hommes  de  l'armée  de  Bacchide  demeurèrent 
en  ce  jour-là  sur  la  place  ;  et  il  retourna  avec  ses  gens 
à  Jérusalem. 

ço.  Ils  bâtirent  des  villes  fortes  dans  la  Judée,  et  forti- 
fièrent de  hautes  murailles,  de  portes  et  de  serrures,  les 
citadelles  qui  étaient  à  Jéricho,  à  Ammaïis,  à  Béthoron, 
à  Béthel,  à  Thamnata,  à  Phara  et  à  Thopo. 

51.  Bacchide  y  mit  des  garnisons,  pour  faire  des  cour- 
ses contre   Israël. 

52.  Il  fortifia  aussi  Bethsura  et  Gazara,  et  la  forteresse  ; 
il  y  mit  des  gens  pour  les  garder,  avec  une  grande  pro- 
vision de  vivres. 

5?.  Il  prit  pour  otages  les  enfants  des  premières  per- 
sonnes du  pays,  et  il  les  tint  prisonniers  dans  la  forte- 
resse de  Jérusalem. 

Ç4.  Et  la  cent  cinquante-troisième  année,  au  second 
mois,  Alcime  commanda  qu'on  abattit  les  murailles  de  la 
partie  intérieure  du  temple  et  qu'on  détruisît  les  ouvra- 
ges des   prophètes  :  et  il  commença  à  les  faire  abattre. 


COMMENTAIRE 


J>.  44.  Non  est  enim  hodie  sicut  heri  et  nudius 
tertius.  Il  faut  combattre  de  toute  nécessité  ;  il 
ne  nous  est  plus  libre  de  reculer  comme  nous 
avons  fait  jusqu'ici;  la  situation  des  lieux  et  la 
circonstance  des  temps  ne  nous  laissent  point 
d'autre  parti  à  prendre,  que  celui  de  vaincre  ou 
de  mourir;  voyez  le  verset  suivant.  On  peut  aussi 
l'entendre  de  cette  manière  :  Malgré  le  jour  du 
sabbat  (versets  34  et  43),  il  faut  se  préparer  au 
combat;  la  chose  n'est  plus  en  notre  pouvoir 
comme  auparavant  ;  l'ennemi  presse,  et  ne  permet 
pas  de  différer.  On  peut  voir  au  chapitre  n.  41, 
la  résolution  qui  fut  prise  dès  le  temps  de  Mat- 
thathias,  de  combattre  les  jours  de  sabbat,  si  on 
les  attaquait. 

jfr.  48.   Dissiliit  Jonathas...  in  Jordanem,  et 

TRANSNATAVERUNT  AD  EOS  JORDANEM.  Le  grec  lait 

un  sens  tout  différent  (1)  :  Jonalhas  et  les  siens  se 
jetèrent  dans  le  Jourdain,  et  le  passèrent  à  la  nage  ; 
et  Bacchide  et  ses  gens  ne  le  passèrent  pas  après 
eux.  Ce  texte  paraît  plus  conforme  à  la  suite  du 
discours  que  le  latin.  Il  ne  paraît  pas  que  l'armée 


de  Bacchide  se  soit  hasardée  de  passer  ce  fleuve 
à  la  nage.  • 

y.  50.  Ammaum.  Emmaiis  ou  Nicopolis,à  cinq 
lieues  à  l'ouest  de  Jérusalem. 

Thamnata.  Dans  la  tribu  de  Dan,  sur  la  fron- 
tière des  Philistins  (2). 

Phara.  Le  grec  la  nomme  Pharaloni;  et  Josè- 
phe  Pharato.  Elle  était  de  la  tribu  d'Éphraïm  (}). 

Thopo.  La  même  que  Taphua  dans  la  même 
tribu.  Les  autres  villes  sont  trop  connues  pour 
qu'il  soit  nécessaire  d'en  parler. 

f.  M.  Bethsuram.  Entre  Jérusalem  et  les  fron-' 
tières  de  l'Idumée.  Voyez  le  chapitre  v,  61. 

Gazaram.  Voyez  plus  haut  1.  Macc.  iv,  i^. 

Arcem.  La  forteresse,  située  dans  la  plus  haute 
partie  de  la  ville  de  Jérusalem  (4). 

v.  >j.  Posuit  eos  in  custodiam.  //  les  tint 
prisonniers,  ou  plutôt  :  //  les  fit  garder  dans  la 
citadelle.  Il  les  retint  en  qualité  d'otages,  sans  leur 
faire  aucun  mal. 

j^.  54.  Pr/ecepit  Alcimusdestrui  muros  domus 
sanct^e  interioris.  Avant  l'ère  vulgaire  159,  ($). 


(1)  Kcù  ÊvEîte07)?ev  I'wvâOav,  y.a't  ôt  fj.er"  âutoû  ft;  tov 
I'opoâv7)v,  zai  5tex(Aû[j.67j?av  in  xô  r.iptxy,  xal  où  otc5r,7av 
Ik'  âuiroù;  tov  I'opoâvTjv. 


(i)  Judic.  xiv.   1.  —  (?)  Judic.  xu.  ait. 

(4)  Plus  haut  1.  Macc.   1.  55. 

{<,)  Grcec.  Tô  teî/o;    xrj;  aiiXrj;  ttov  iyfaiv  T'î?  s'ouiïe'paç. 


I.  —  MACCABÉES. 


IX  -   MORT   D'ALCIME 


IOI 


<,<,.  In  tempore  il lo  percussus  est  Alcimus,  et  impedita 
sunt  opéra  illius;  et  occlusum  est  os  ejus,  et  dissolutus 
est  paralysi,  nec  ultra  potuit  loqui  verbum,  et  mandare 
de  dorao  sua, 

<,(>.  Et  mortuus  est  Alcimus  in  tempore  illo,  cum  tor- 
mento  magno. 

Ç7.  Et  vidit  Bacchides  quoniam  mortuus  est  Alcimus, 
et  reversus  est  ad  regem;  et  siluit  terra  annis  duobus. 

>8.  Et  cogitaverunt  omnes  iniqui,  dicentes  :  Ecce  Jona- 
thas  et  qui  cum  eo  sunt,  in  silentio  habitant  confidenter  : 
nunc  ergo  adducamus  Bacchidem,  et  comprehendet  eos 
omnes  una  nocte. 

^o.  Etabierunt,  et  consilium  ei  dederunt. 

60.  Et  surrexit  ut  veniret  cum  exercitu  multo,  et  misit 
occulte  epistolas  sociis  suis  qui  erant  in  Judaea,  ut  com- 
prehenderent  Jonathan  et  eos  qui  cum  eo  erant  ;  sed  non 
potuerunt,  quia  innotuit  eis  consilium  eorum. 


61.  Et  apprehendit  de  viris  regionis,  qui  principes  erant 
malitiaî,  quinquaginta  viros,  et  occidit  eos. 


55.  Mais  il  fut  frappé  de  Dieu  en  ce  même  temps,  et  il 
ne  put  achever  ce  qu'il  avait  commencé  :  sa  bouche  fut 
fermée  ;  il  devint  perclus  par  une  paralysie  ;  et  il  ne  put 
plus  dire  une  seule  parole,  ni  mettre  aucun  ordre  à  sa 
maison. 

ï6.  Alcime  mourut  de  la  sorte,  étant  tourmenté  de 
grandes  douleurs. 

57.  Bacchide  voyant  qu'Alcime  était  mort,  s'en  retourna 
vers  le  roi  ;  et  le  pays  demeura  en  repos  pendant  deux 
ans. 

58.  Au  bout  de  ce  temps,  tous  les  méchants  formèrent 
entre  eux  ce  dessein  :  Jonathas,  dirent-ils,  et  ceux  qui 
sont  avec  lui,  vivent  maintenant  en  paix  et  en  assurance  : 
faisons  donc  venir  Bacchide,  et  il  les  surprendra  tous  en 
une  nuit. 

59.  Et  ils  s'en  allèrent  et  lui  donnèrent  ce  conseil. 

60.  Bacchide  se  hâta  donc  de  venir  avec  une  grande 
armée,  et  il  envoya  en  secret  des  lettres  à  ceux  qui 
étaient  de  son  parti  dans  la  Judée,  pour  les  avertir  de 
se  saisir  de  Jonathas,  et  de  ceux  qui  étaient  avec  lui; 
mais  ils  ne  le  purent,  parce  que  leur  entreprise  [fut 
découverte. 

61.  Et  Jonathas  ayant  pris  cinquante  hommes  du  pays, 
qui  étaient  les  chefs  d'un  dessein  si  malicieux,  les  fit 
mourir. 


COMMENTAIRE 


On  n'est  pas  d'accord  sur  cette  muraille  qu'Alcime 
fit  démolir.  Les  uns  (1)  croient  que  c'est  celle  qui 
sépare  le  Saint  d'avec  le  sanctuaire  ;  les  autres  (2), 
celle  qui  séparait  le  parvis  des  lévites,  de  celui  du 
peuple.  D'autres  (5)  enfin,  celle  qui  séparait  les 
gentils  d'avec  les  Juifs,  comme  s'il  eût  voulu  ôter 
la  distinction  du  sacré  et  du  profane,  et  donner  en- 
trée aux  gentils  dans  le  temple.  Cette  opinion 
paraît  la  plus  vraisemblable  avec  un  Juif  comme 
l'était  Alcime.  Les  murailles  dont  on  vient  de  par- 
ler, étaient  l'ouvrage  des  prophètes,  puisqu'Aggée 
et  Zacharie  avaient  été  comme  les  directeurs  et 
les  architectes  du  second  temple,  et  que  rien  ne 
s'y  était  fait  sans  leur  avis. 

Alcime  est  peut-être  l'un  des  plus  terribles 
exemples  de  la  malédiction  attachée  à  l'usurpa- 
tion sacrilège  du  sacerdoce.  L'ambition  seule 
l'avait  élevé  à  cette  haute  dignité;  et,  par  une 
suite  effroyable  de  cette  première  démarche,  il  va 
jusqu'à  cet  excès,  de  vouloir  confondre  les  idolâ- 
tres avec  les  adorateurs  du  vrai  Dieu,  et  d'ad- 
mettre dans  le  même  temple  les  Israélites  et  les 
gentils.  Depuis  que  l'orgueil  a  renversé  l'ordre 
dans  son  cœur,  il  n'est  plus  capable  que  de  mettre 
de  la  confusion  partout.  Il  ne  songe  point  que  la 
dignité  qu'il  possède  le  rend  le  pontife  du  Très- 
Haut  :  il  se  moque  de  la  sainteté  du  temple  dont 
la  garde  lui  est  confiée;  et  le  souvenir  des  pro- 
phètes Aggée  et  Zacharie,  qui  avaient  contribué 
par  leurs  exhortations  à  rebâtir  ce  saint  ouvrage, 
n'est  d'aucun  poids  sur   son  esprit  tout  profane. 


//  commence  donc  à  faire  abattre  les  murailles  de 
la  partie  intérieure  du  temple.  Mais  cet  attentat  est 
puni  dans  le  moment  :  Alcime  est  frappé  de  Dieu  ; 
la  paralysie  dont  il  est  saisi  lui  ôte  l'usage  de  la 
parole,  le  rend  perclus  de  ses  membres,  et  le  fait 
mourir  au  milieu  de  grandes  douleurs. 

Le  Seigneur  ne  fait  pas  toujours  de  ces  miracles 
qui  étonnent  les  plus  impies,  et  il  ne  punit  sou- 
vent des  crimes  aussi  énormes  que  celui  d'Alcime, 
que  par  son  silence.  Les  hommes,  aveugles  et 
insensibles  aux  menaces  des  maux  à  venir,  ne 
regardent  point  ce  silence  de  Dieu  comme  un 
châtiment  pour  eux  :  tout  ce  qui  contribue  à  les 
affermir  dans  l'impunité  présente,  leur  parait 
doux  :  ils  sont  contents,  pourvu  qu'ils  ne  soient 
point  troublés  dans  la  jouissance  actuelle  du  fruit 
de  leurs  crimes;  ils  regardent  comme  un  rêve 
l'effroyable  réveil  de  cet  assoupissement.  Par 
leurs  actes  et  pat  leurs  paroles,  ils  abattent  la 
muraille  qui  sépare  les  fidèles  des  impies,  les 
âmes  austères  des  mondains  :  plus  détestables 
en  cela  qu'Alcime  même,  puisqu'ils  détruisent  les 
dernières  retraites  du  temple  intérieur  de  la  cons- 
cience. Le  Seigneur  se  tait  cependant,  et  les 
hommes  s'imaginent  que  Dieu  approuve,  ou  qu'il 
néglige  tout  ce  qu'il  ne  châtie  pas  présentement. 
Mais  ils  se  trompent,  et  ils  connaîtront  trop  tard 
combien  il  leur  aurait  été  plus  avantageux  que 
Dieu  eût  tonné  pour  les  effrayer  par  quelque 
punition  sensible,  que  de  les  avoir  laissés  dans  la 
paix  de  leur  propre  iniquité. 


(1)  Joseph,  xn.  17.    Tô   teï/o;    tou    àyt'ou    tÔ    jraXoaàv. 
Drus.  Lyr. 


(2)  Menoch.  Satian.  Verhorst.  etc. 
(l)Grot. 


102 


I.  —   MACCABEES.  —  IX.-  MORT  D'ALCIME 


62.  Et  secessit  Jonathas,  et  Simon,  et  qui  cum  eo  erant, 
in  Bethbessen  quœ  est  in  deserto  ;  et  exstruxit  diruta 
ejus,  et  firmaverunt  eam. 

6;.  Et  cognovit  Bacchides  ;  et  congregavit  universam 
multiludinem  suam,et  his  qui  de  Judasa  erant  denuntiavit, 

64.  Et  venit,  et  castra  posuit  desuper  Bethbessen  ;  et 
oppugnavit  eam  dies  multos,  et  fecit  machinas. 

65.  Et  reliquit  Jonathas  Simonem,  fratrem  suum,  in 
civitate,  et  exiit  in  regionem,  et  venit  cum  numéro, 

66.  Et  percussit  Odaren,  et  fratres  ejus,  et  filios  Pha- 
seron  in  tabernaculis  ipsorum;  et  cocpit  caedere,  et  cres- 
cere  in  virtutibus. 

67.  Simon  vero  et  qui  cum  ipso  erant  exierunt  de  civi- 
tate, et  succenderunt  machinas  ; 

68.  Et  pugnaverunt  contra  Bacchidem,  et  contritus  est 
ab  eis;  et  alTlixerunt  eum  valde,  quoniam  consilium  ejus 
et  congressus  ejus  erat  inanis. 

69.  Et  iratus  contra  virosiniquos  qui  ei  consilium  dede- 
rant  ut  veniret  in  regionem  ipsorum,  multos  ex  eis  occi- 
dit;  ipse  autem  cogitavit  cum  reliquis  abire  in  regionem 
suam. 

70.  Et  cognavit  Jonathas,  et  misit  ad  eum  legatos  com- 
ponere  pacem  cum  ipso,  et  reddere  ei  captivitatem. 

71.  Et  libenter  accepit,  et  fecit  secundum  verba  ejus, 
et  juravit  se  nihil  facturum  ei  mali  omnibus  diebus  vitae 
ejus. 

72.  Et  reddidit  ei  captivitatem  quam  prius  erat  pra?Ja- 
tus  de  terra  Juda;  et  conversus  abiit  in  terram  suam,  et 
non  apposuit  amplius  venire  in  fines  ejus. 

7J.  Et  cessavit  gl-.diusex  Israël  ;  et  habitavit  Jonathas 
in  Machmas,  et  crepit  Jonathas  ibi  judicare  populum;  et 
exterminavit  impios  ex  Israël. 


62.  Il  se  retira  ensuite  avec  Simon  et  ceux  qui  l'accom- 
pagnaient à  Bethbessen,  qui  est  au  désert;  il  en  répara 
les  ruines,  et  en  fit  une  place  forte. 

6j.  Bacchide  le  sut;  et  ayant  rassemblé  toutes  ses 
troupes,  et  fait  avertir  ceux  qui   étaient  en  Judée, 

64.  Il  vint  camper  au-dessus  de  Bethbessen:  il  la  tint 
longtemps  assiégée,  et  fit  dresser  des  machines  de 
guerre. 

65.  Mais  Jonathas  ayant  laissé  dans  la  ville  Simon,  son 
frère,  sortit  à  la  campagne,  et  marcha  avec  un  assez  grand 
nombre  de  troupes. 

66.  Il  défit  Odaren  et  ses  frères,  et  les  enfants  de  Pha- 
séron,  dans  leurs  tentes;  et  il  commença  à  tailler  en 
pièces  ses  ennemis,  et  à  devenir  célèbre  par  ses  grandes 
actions. 

67.  Cependant  Simon  sortit  de  la  ville  avec  ses  gens; 
et  ils  brûlèrent  les  machines. 

68.  Ils  attaquèrent  l'armée  de  Bacchide,  et  la  défirent  ; 
et  ils  lui  causèrent  une  extrême  douleur,  parce  qu'il  vit 
que  ses  desseins  et  toute  son  entreprise  étaient  sans 
effet. 

69.  C'est  pourquoi  il  entra  dans  une  grande  colère  con- 
tre ces  hommes  d'iniquité  qui  lui  avaient  conseillé  de 
venir  en  leur  pays  ;  et  il  en  tua  plusieurs,  et  résolut  de 
s'en  retourner  en   son  pays  avec  le  reste  de   son  armée. 

70.  Jonathas  en  ayant  été  averti,  lui  envoya  des  ambas- 
sadeurs, pour  faire  la  paix  avec  lui,  et  lui  offrit  de  lui 
rendre  les  prisonniers. 

71.  Bacchide  reçut  favorablement  cette  ouverture  :  il 
consentit  à  ce  qu'il  voulait,  et  il  jura  que  de  sa  vie  il  ne 
lui  ferait  aucun  mal. 

72.  Il  lui  rendit  les  prisonniers  qu'il  avait  faits  dans  le 
pays  de  Juda  ;  et  étant  retourné  en  son  pays,  il  ne  revint 
plus  depuis  en  Judée. 

7Î.  Ainsi  la  guerre  cessa  dans  Israël  :  et  Jonathas 
demeura  à  Machmas,  où  il  commença  à  juger  le  peuple  ; 
et  il  extermina  les  impies  du  milieu  d'Israël. 


COMMENTAIRE 


y.  62.  Bethbessen.  Le  grec  Bethbasi.  Josèphe: 
Bcthalaga  :  c'est  Belhagla  (1),  dans  le  désert  de 
]  éricho. 

y.  66.  Percussit  Odaren.  Les  ennemis  des 
Juifs  étaient  des  habitants  du  pays,  alliés  de  Bac- 
chide, et  attachés  à  son  parti.  Josèphe  n'exprime 
point  cette  circonstance. 

CŒPIT  C/EDERE,  et  crescere  in  virtutibus. 
On  peut  traduire  ainsi  le  grec  (2)  ;  //  commença  à 
ballre  l'ennemi,  el  à  pénétrer  dans  l'armée  de  Bac- 
chide. C'est  ainsi  que  le  syriaque  (5)  et  des  com- 
mentateurs l'entendent.  D'autres  :  //  commença  à 
ballre  l'ennemi  el  à  se  montrer,  à  paraître  en  cam- 
pagne avec  des  troupes,  à  marcher  en  force. 


y.  73.  Habitavit  Jonathas  in  Machmas,  et 
cœpit  ibi  judicare  populum.  Jonathas  demeura 
à  Machmas,  où  il  commença  à  juger  le  peuple, 
comme  avaient  fait  autrefois  les  juges,  qui  succé- 
dèrent à  Josué.  La  nation  juive  se  servit  dans  la 
suite  avec  beaucoup  d'avantage,  de  l'alliance 
qu'elle  avait  faite  avec  les  Romains  ;  elle  recon- 
quit une  certaine  indépendance.  Machmas  est 
située  sur  les  limites  des  tribus  d'Éphraïm  et  de 
Benjamin,  dans  les  montagnes  de  Béthel  (4).  11 
ne  lit  pas  d'abord  sa  résidence  à  Jérusalem,  parce 
que  les  troupes  de  Démétrius  en  occupaient  en- 
core la  citadelle. 


(  i  )  nSan  n>3  -  Josue.  xv.  6. 

(2)  E'£»{>t*TO  tûkteiv,  /ai  âvaSatvEtv  Èv  ôuva'u.eai. 


(j)  Joseph,  lib.  xiu.  c.  2. 
(4)  1.  Reg.  xiii.  2.  5. 


CHAPITRE  X 

Alexandre  Balas  s'élève  contre  Démétrius  So/er.  Ils  recherchent,  l'un  el  Vautre  V amitié  Je 
Jonathas.  Celui-ci  se  déclare  pour  Alexandre  qui  le  comble  d'honneurs.  Alexandre 
défait  el  tue  Démétrius.  Il  épouse  fa  fille  de  Ptolémée  Philométor.  Il  fait  venir 
Jonathas  à  Ptolémals,  el  l'élève  en  gloire.  Démétrius  Nicalor  envoie  Apollonius  contre 
les  Juifs.  Jonathas  défait  Apollonius. 


1.  Et  anno  centesimo  sexagesimo  ascendit  Alexander, 
Antiochi  filius,  qui  cognominatus  est  Nobilis,  et  occi;pa- 
vit  Ptolemaidam  ;  et  receperunt  eum,  et  regnavit  illic. 

2.  Et  audivit  Demelrius  rex,  et  congregavit  exercitum 
copiosum  valde,  et  exivit  obviam  illi  in  praslium. 


i.  En  la  cent  soixantième  année,  Alexandre,  (ils  d'An- 
tiochus  surnommé  l'Illustre,  s'empara  de  Piolémaïs,  où 
il  fut  reçu  par  les  habitants;  et  il  commença  à  y  régner. 

2.  Le  roi  Démétrius  en  ayant  été  averti,  leva  une  puis- 
sante armée,  et  marcha  à  lui  pour  le  combattre. 


COMMENTAIRE 


p.  f.  Alexander,  Anthiochi  filius,  qui  cogno- 
minatus EST  NOBILIS,  OCCUPAVIT  PTOLEMAIDAM, 
et  regnavit  illic.  Antiochus  Épiphane,  ou  Vil- 
lustre,  nobilis,  comme  l'appelle  la  Vulgate,  laissa 
deux  fils  ;  l'un  légitime,  qui  fut  Antiochus  Eupator, 
et  qui  régna  après  lui  ;  et  l'autre,  Alexandre,  fils 
naturel,  surnommé  Balles,  ou  Balas,  du  nom  de 
sa  mère  Bala,  concubine  du  prince.  C'est  de  lui 
qu'il  s'agit  ici.  Son  origine  est  tout  à  fait  obscure, 
et  les  historiens  lui  contestent  la  qualité  de  fils, 
même  naturel,  d'Épiphane  (i).  Florus  l'appelle 
un  homme  inconnu,  et  d'une  origine  incertaine  ; 
Justin  (2)  dit  que  les  ennemis  de  Démétrius  subor- 
nèrent un  jeune  homme  de  la  lie  du  peuple,  exlre- 
mœ  sortis  hominem,  qui  se  déclara  fils  et  héritier 
d'Antiochus,  et  qui,  ayant  fait  la  guerre  au  roi  de 
Syrie,  s'empara  de  son  royaume.  Appien  (3)  dit 
nettement,  qu'il  prétendit  faussement  être  de  la 
famille  des  Séleucides  ;  et  Athénée  (4),  qu'il  était 
fils  supposé  d'Antiochus  Épiphane.  Enfin,  Sulpice 
Sévère  (5)  assure  que  c'était  un  jeune  homme 
élevé  à  Rhodes,  qui  se  vanta  faussement  d'être 
de  la  famille  des  rois  de  Syrie,  et  fils  d'Antiochus. 
Quoi  qu'il  en  soit  de  son  origine,  le  sénat  romain 
et  les  Juifs,  aussi  bien  que  les  Égyptiens  et  les 
Syriens,  le  reconnurent  pour  fils  d'Antiochus 
Epiphane.  Les  uns  et  les  autres  avaient  intérêt 
que  la  chose   fût  ainsi,  et  ils  furent  ravis  d'avoir 


trouvé  ce  prince  vrai  ou  faux,  pour  l'opposer  à 
Démétrius  Soter,  qui  s'était  rendu  suspect  aux 
Romains,  odieux  aux  Juifs,  méprisable  aux  Syriens, 
et  redoutable  aux  Égyptiens  (6).  . 

Alexandre  est  surnommé  Balas,  dans  Strabon, 
et  Balles  dans  Josèphe  (7).  Ce  dernier  terme  peut 
signifier  un  homme  méprisable.  (Rac.  Sa  bal,  rien, 
ou  nS;  ou  bâlâh,  tomber  en  décomposition,  en 
pourriture).  Les  médailles  lui  donnent  le  surnom 
de  Théopator  Évergète,  fils  d'un  père  divin  bien- 
faisant. Par  le  premier  mot,  il  marquait  Antiochus 
Épiphane,  mis  au  rang  des  dieux,  et  éloignait 
l'idée  honteuse  de  son  origine  ;  et  par  le  surnom 
de  bienfaisant,  il  cherchait  à  s'attirer  l'amitié  et  la 
laveur  des  peuples. 

Héraclide  de  Byzance  (i),  que  Démétrius 
avait  dépouillé  de  la  charge  de  trésorier  des  finan- 
ces de  Babylone,  conduisit  à  Rome  Alexandre  et 
Laodicée,  fille  d'Antiochus  Épiphane.  Il  eut 
l'adresse  de  s'insinuer  et  de  gagner  plusieurs  séna- 
teurs. Alexandre  et  Laodicée,  étant  un  jour  venus 
au  sénat,  demandèrent  qu'on  voulût  bien  les  aider 
à  rentrer  dans  le  royaume  de  leur  père,  usurpé 
par  Démétrius,  ou  du  moins  qu'on  leur  permît  de 
s'en  retourner  en  Syrie,  pour  y  faire  valoir  leur 
droit,  avec  le  secours  de  ceux  qui  s'offraient  de 
les  y  aider.  Héraclide  appuya  leur  demande,  par 
un  long  discours,  et,  quoique  plusieurs  sénateurs 


(1)  Epilome  Livii  lib.  lu.  Homo  ignotus  et  incertre 
stirpis. 

(2)  Justin,  lib.  xxxv.  Subornant  Propalum  quemdam 
sortis  extremœ  juvenem,  qui  Syrias  regnum  velut  pater- 
num  armis  repeteret.  Et  ne  quid  conlumelia  decsset, 
nomen  ei  Alexandri  inditur,  genitusque  ab  Antiocho 
rege  dicitur. 


(?)  Appian.SYriœ.  p.  jl.  'Feuoo'u.evoç  È'tvoct  :où  ÏeXeuxei'ou 
yÉvouç. 

(4j  Athcn.  L  v.  c.  10.  A'vT'.d/ou  ioù  E'^i^avoù?  ucôç 
ujîo6Xj)8eiç. 

['-,)  Scvcr.  I.  ii.  /(/s/,  sacr.  Adolescens  Rhodii  educatus, 
Antiochi  se  esse  filium  falso  dictitans. 

(6j  Vide  si  placet  Usser.  et   Vaillant,  hist.  Reg.  S/rice. 

(7)  Slrab.  I.  xvi.  —  (8)  Joseph,  lib.  xin.  c    j. 


104 


I.  -  MACCABÉES.  —  X.  -   DÉMÉTRIUS   ET  ALEXANDRE   BALAS 


j.  Et  misit  Demetrius  epistolam  ad  Jonathan  verbis 
pacificis,  ut  magnificaret  eum. 

4.  Dixit  enim  :  Anticipemus  facere  pacem  eum  eo, 
priusquam  faciat  eum  Alexandro  adversum  nos. 

$.  Recordabilur  enim  omnium  malorum  quaî  fecimus 
in  eum,  et  in  fratrem  ejus,  et  in  gentem  ejus. 

6  Et  dédit  ei  potestatem  congregandi  exercitum,  et 
fabricare  arma,  et  esse  ipsum  socium  ejus;  et  obsides 
qui  erant  in  arce  jussit  tradi  ei. 

7.  Et  venit  Jonathas  in  Jérusalem,  et  legit  epistolas  in 
auditu  omnis  populi,  et  eorum  qui  arce  erant. 

8.  Et  timuerunt  timoré  magno,  quoniam  audierunt  quod 
dédit  ei  rex  potestatem  congregandi  exercitum. 

0.  Et   tradi ti   sunt.   Jonathas    obsides,    et  reddidit   eos 

parentibus  suis  ; 

10.  Et  habitavit  Jonathas  in  Jérusalem,  et  ccepit  aedifi- 
care  et  innovare  civitatem. 

11.  Et  dixit  facientibus  opéra  ut  exstruerent  muros,  et 
montem  Sion  in  circuitu  lapidibus  quadratis  ad  munitio- 
nem;  et  ita  fecerunl. 

12.  Et  fugerunt  alienigenas  qui  erant  in  munitionibus 
quas  Bacchides  asdificaverat. 

I).  Et  reliquit  unusquisque  locum  suum,  et  abiit  in 
terram  suam. 

14.  Tantum  in  Bethsura  remanserunt  aliqui  ex  his  qui 
reliquerant  legem  et  prascepta  Dei;  erat  enim  hase  eis 
ad  refugium. 

15.  Et  audivit  Alexander  rex  promissa  quas  promisit 
Demetrius  Jonathas;  et  narraverunt  ei  praslia,  et  virtutes 
quas  ipse  fecit  et  fratres  ejus,  et  labores  quos  labora- 
verunt. 

10.  Etait  :  Numquid  inveniemus' aliquem  virum  talem , 
et  nunc  faciemus  eum  amicum  et  socium  nostrum. 

17.  Et  scripsit  epistolam,  et  misit  ei  secundum  hase 
verba,  dicens  : 

18.  Rex  Alexander,  fralri  Jonathas,  salutem. 


?.  Il  envoya  en  même  temps  à  Jonathas  une  lettre  qui 
ne  respirait  que  la  paix,  et  où  il  relevait  beaucoup  son 
mérite. 

4.  Car  il  dit  :  Hâtons-nous  de  faire  la  paix  avec  lui; 
avant  qu'il  la  fasse  avec  Alexandre  contre  nous. 

$.  Car  il  se  souviendra  de  tous  les  maux  que  nous  lui 
avons  faits,  à  lui,  à  son  frère  et  à  sa  nation. 

6.  Il  lui  donna  donc  pouvoir  de  lever  une  armée,  et 
de  faire  faire  des  armes  :  il  le  déclara  son  allié,  et 
ordonna  qu'on  lui  remit  ses  otages  qui  étaient  dans  la 
forteresse. 

7.  Jonathas  s'étant  rendu  à  Jérusalem,  lut  ses  lettres 
devant  tout  le  peuple,  et  devant  ceux  qui  étaient  dans 
la  forteresse. 

8.  Et  ils  furent  saisis  d'une  grande  crainte,  lorsqu'ils 
apprirent  que  le  roi  lui  avait  donné  le  pouvoir  de  mettre 
une  armée  sur  pied. 

9.  Les  otages  furent  remis  entre  les  mains  de  Jonathas  1 
et  il  les  rendit  à  leurs  parents. 

10.  Il  demeura  dans  Jérusalem  ;  et  il  commença  à  bâtir 
et  à  renouveler  la  ville. 

11.  Il  ordonna  à  ceux  qui  y  travaillaient  de  bâtir  tout 
autour  de  la  montagne  de  Sion  des  murs  de  pierres  de 
taille  pour  la  fortifier  ;  et  ils  le  firent  comme  il  leur  avait 
dit. 

12.  Alors  les  étrangers  qui  étaient  dans  les  forteresses 
que  Bacchide  avait  bâties  s'enfuirent. 

15.  Ils  quittèrent  tous  le  lieu  où  ils  étaient,  et  s'en 
retournèrent  en  leur  pays. 

14.  Il  resta  seulement  dans  Bethsura  quelques-uns  de 
ceux  qui  avaient  abandonné  la  loi  et  les  ordonnances  de 
Dieu  ;  parce  que  cette  ville  leur  servait  de  retraite. 

i<;.  Cependant  le  roi  Alexandre  apprit  les  promesses 
que  Demetrius  avait  faites  à  Jonathas  :  on  lui  raconta 
aussi  les  combats  qu-rlui  et  ses  frères  avaient  livrés,  les 
victoires  qu'ils  avaient  remportées,  et  les  grands  travaux 
qu'ils  avaient  exécutes  : 

10.  Et  il  dit  :  Pourrons-nous  trouver  un  autre  homme 
tel  que  celui-ci  ?  songeons  donc  à  le  faire  aussi  notre  ami 
et  notre  allié. 

17.  Ainsi  il  lui  écrivit,  et  lui  envoya  une  lettre  conçue 
en  ces  termes  : 

18.  Le  roi  Alexandre,  à  son  frère  Jonathas,  salut. 


COMMENTAIRE 


regardassent  tout  cela  comme  une  fable,  ceux  qui 
avaient  été  gagnés  par  Héraclide  l'emportèrent,  et 
il  futarrêté  sur  le  champ  qu'Alexandre  et  Laodicée, 
fils  et  fille  du  roi  Antiochus,  pourraient  rentrer  dans 
les  états  de  leurs  pères,  et  que  le  peuple  romain  les 
appuyerait  et  leur  donnerait  son  secours.  Aussitôt 
Héraclide  se  mit  à  lever  des  troupes,  et,  ayant 
ramené  Alexandre  et  Laodicée  à  Éphèse,  il  se 
prépara  à  faire  la  guerre  à  Demetrius.  Alexandre 
passa  en  Syrie  ;  Ptolémaïs,  qui  était  gardée  par 
des  troupes  mécontentes  de  Demetrius,  se  rendit 
à  lui,  et  ce  fut  le  commencement  de  sa  fortune. 
Au  reste,  rien  ne  contribua  tant  au  bonheur  et  à 
la  liberté  des  J  uifs,  que  les  troubles  de  Syrie,  et  la 
division  entre  Demetrius  et  Alexandre  (153-152 
av.  J.-C.i. 

f.  }.  Ut  magnificaret  eum.  Demetrius  Soter 


ayant  appris  qu'Alexandre,  son  compétiteur,  s'était 
rendu  maître  de  Ptolémaïs,  qui  était  une  bonne 
place  de  Phénicie,  avec  un  port  de  mer,  crut  de- 
voir se  ménager  l'amitié  des  Juifs,  et  prévenir 
Alexandre  en  écrivant  à  Jonathas.  L'amitié  du 
grand  prêtre  avait  une  influence  considérable.  11 
était,  en  quelque  sorte,  par  le  secours  de  circons- 
tances inespérées,  l'arbitre  de  la  situation. 

y.  6.  Odsides  qui  erant  in  arce.  Voyez  le  cha- 
pitre ix,  53. 

f,  11.  Ut  exstruerent  muros,  et  montem 
Sion.  Judas  Maccabée  avait  bâti  desmurailles  au- 
tour de  la  ville  haute,  ou  du  mont  Sion  (1)  ;  mais 
les  Syriens  les  avaient  démolies  (2).  Jonathas  les 
fit  rétablir. 

jr\  18.  Rex  Alexander  fratri  Jonath>e.  Le 
roi  Alexandre  à  son  frère  Jonathas;  le  nom  de 


(1)  1.  Macc.  îv.  60. 


(:)  Ibid.  vi,  0:. 


I. 


MACCABEES. 


X.  -  ALEXANDRE    ET  JONATHAS 


ro$ 


19.  Audivimus  de  te  quod  vir  potens  sis  viribus,  et 
aptus  es  ut  sis  amicus  noster; 

20.  Et  nunc  constituimus  te  hodie  summum  sacerdotem 
gentis  tua;,  et  ut  amicus  voceris  régis  (et  misit  ei  pur- 
puram  et  coronam  auream),  et  quas  nostra  sunt  sentias 
nobiscum,  et  conserves  amicitias  ad  nos. 


si.  Et  induit  se  Jonathas  stola  sancta  septimo  mense, 
anno  centesimo  sexagesimo,  in  die  solemni  scenopegise; 
et  congregavit  exercitum,  et  fecit  arma  copiosa. 


10.  Nous  avons  appris  que  vous  êtes  un  homme  puis- 
sant, et  propre  pour  être  notre  ami. 

20.  C'est  pourquoi  nous  vous  établissons  aujourd'hui 
grand  prêtre  de  votre  nation,  nous  vous  donnons  la  qua- 
lité d'ami  du  roi;  et  nous  voulons  que  vous  soyez  tou- 
jours attaché  à  nos  intérêts,  et  que  vous  conserviez  l'ami- 
tié avec  nous.  Il  lui  envoya  en  même  temps  une  robe  de 
pourpre  et  une  couronne  d'or. 

21.  Et  l'année  cent  soixante,  au  septième  mois,  Jona- 
thas se  revêtit  de  la  robe  sainte  en  la  fête  solennelle  des 
Tabernacles.  Il  leva  une  armée,  et  fit  faire  une  grande 
quantité  d'armes. 


COMMENTAIRE 


frère  peut  marquer  ici  simplement  ami  et  allié. 
Ou  bien  Alexandre  reconnaît  Jonathas  comme 
souverain  indépendant,  fondé  sur  ce  que  les  Ro- 
mains avaient  fait  alliance  avec  les  Juifs,  comme 
avec  un  peuple  libre.  La  coutume  entre  les  sou- 
verains de  s'appeler  frères,  est  très  ancienne  (1)  ; 
enfin  le  nom  de  frère  se  donnait  alors  assez  sou- 
vent aux  gouverneurs  des  provinces  (2). 

y.   20.  Et  NUNCCONST1TUIMUS  TE   HODIE  SUMMUM 

sacerdotem  gentis  tu^e.  On  est  surpris  de  voir 
un  prince  païen  conférer  la  souveraine  sacrifi- 
cature  à  Jonathas,  et  on  trouve  extraordinaire 
qu'un  défenseur  zélé  de  la  sainteté  de  la  loi  sem- 
ble 'l'avoir  violée  lui-même,  en  recevant  cette 
dignité  de  la  main  d'un  roi  profane,  qui  ne  pou- 
vaitlégitimementl'en  revêtir  Maison  peut  répon- 
dre avec  le  savant  Estius,  que  ce  prince  en 
établissant,  comme  il  le  dit,  Jonathas  grand  prêtre 
de  sa  nation,  ne  fit  autre  chose  que  le  confirmer 
par  l'autorité  royale  dans  la  dignité  qu'il  avait 
déjà  reçue  après  la  mort  de  Judas  son  frère.  Nous 
le  voyons  en  effet  exercer  à  Machmas,  les  fonc- 
tions de  guerrier,  de  juge  et  de  prêtre  (3).  Ce 
ne  fut  donc  pas  du  roi  Alexandre  qu'il  reçut 
cette  dignité  :  mais  l'autorité  de  ce  prince  servit 
seulement  à  lui  en  rendre  l'exercice  plus  facile, 
en  l'appuyant  puissamment  contre  la  mauvaise 
volonté  des  déserteurs  de  la  loi,  qui  s'opposaient 
de  tout  leur  pouvoir  au  zèle  si  généreux  des  Mac- 
cabées. 

D'ailleurs,  Jonathas  ne  sollicita  point  Alexan- 
dre afin  qu'il  le  confirmât  dans  sa  dignité  :  mais 
ce  fut  Alexandre  même  qui  lui  écrivit  sur  ce  sujet, 
sans  en  avoir  été  prié.  Alexandre  lui  envoya  une 
robe  de  pourpre  avec  une  couronne  d'or,  et  l'Écri- 
ture ajoute,  que  Jonathas  se  revêtit  de  la  robe 
sainte  en  la  fête  solennelle  des  Tabernacles. On  ne 
doit  pas  entendre,  par  cette  robe,  celle  de  pour- 
pre, mais,  selon  Josèphe  (4),  la  robe  pontificale, 
qui  était  la  robe  vraiment  sainte,  et  destinée  aux 
fonctions  du  grand  prêtre.  Peut-être  donc  qu'il  ne 


commença  à  s'en  revêtir  qu'après  que  l'autorité 
de  ce  prince,  aussi  bien  que  celle  de  Démétrius, 
l'eut  mis  à  couvert  de  la  violence  des  Syriens  qui 
étaient  dans  la  forteresse  de  Jérusalem. 

Il  est  vrai  qu'on  peut  faire  une  nouvelle  objec- 
tion sur  cette  double  alliance  que  fit  Jonathas 
avec  ces  deux  princes  armés  l'un  contre  l'autre, 
et  l'accuser  en  quelque  façon  d'avoir  manqué  de 
sincérité  ;  puisqu'il  semblait  ne  pouvoir  se  lier 
ainsi  avec  l'un  des  deux,  sans  se  déclarer  en  même 
temps  contre  l'autre.  Mais  Jonathas  jouait  ici  un 
rôle  purement  passif;  il  laissait  agir  ces  princes, 
dans  le  dessein  qu'ils  avaient  de  le  mettre  chacun 
dans  son  parti.  S'il  eût  promis  à  Démétrius  de  se 
déclarer  en  sa  faveur  contre  Alexandre,  il  aurait 
manqué  à  sa  parole  en  recevant  les  présents 
qu'Alexandre  lui  envoya  :  mais  on  ne  voit  point 
qu'il  eût  donné  aucune  parole  à  ce  prince,  qui, 
d'ailleurs,  avait  exercé  mille  violences  contre  les 
Juifs,  etqui  usurpait  injustementla  domination  sur 
Israël.  Comme  c'était  donc  la  seule  crainte  du 
ressentiment  de  Jonathas  et  de  tout  son  peuple, 
qui  le  portait  à  le  rechercher  alors,  en  lui  faisant 
même  rendre  les  otages  qu'il  avait  forcé  les  Juifs 
de  lui  donner,  il  était  libre  à  Jonathas  d'user  de 
son  droit,  en  recevant  les  otages  qu'on  lui  avait 
retenus  injustement  sans  que,  pour  cela,  il  fût 
obligé  d'user  de  ménagements  avec  un  usurpa- 
teur. Ainsi  il  envisageait  tout  ce  que  Démétrius 
faisait  alors,  comme  étant  moins  un  effet  de  sa 
bonne  volonté  pour  lui,  que  de  la  nécessité  pré- 
sente de  ses  affaires,  ou  plutôt  de  la  divine  pro- 
vidence, qui  relevait  les  faibles  et  abaissait  les 
orgueilleux. 

Misit  ei  purpuram  et  coronam  auream. 
L'usage  de  la  pourpre  était  réservé  aux  rois,  et  à 
ceux  à  qui  ils  voulaient  bien  l'accorder  (5).  La 
couronne  d'or  de  même. 

y.  21.  Induit  se  Jonathas  stola  sancta.  Jona- 
thas se  revêtit  de  la  robe  sainte,  en  la  fête  solen- 
nelle des  Tabernacles  de  l'an    1  <, 2,  huit  ans  après 


(i)  Voyez  m.  Reg.  ix.  15.  et  xx.  }?•  (5)  Voyez  plus    bas   f.  62.  ch.    xi.  58;  xiv.  44.  -  Esth. 

(2)  11.  Macc.  xi.  1.  e*22.  viii.    15.  -    Dan.   v.    29.   -    liai.    xxn.    22.    in    grxco.  - 

})  Joseph.  Antiq.  Jud.  xm.  2.— (4)  Joseph.  Antiq.Kin.  5.        11.  Macc.  iv.  j8. 


io6 


I.  -     MACCABÉES.  —  X.  -  SECONDE   LETTRE  DE  DÉMÉTRIUS 


22.  Et  audivit  Demetrius  verba  ista,  et  contristatus 
est  nimis,  et  ait  : 

2J.  Quid  hoc  fecimus,  quod  praeoccupavit  nos  Alexan- 
der  apprehendere  amicitiam  Judœorum  ad  munimen  sui  ? 

24.  Scribam  et  ego  illis  verba  deprecatoria,  et  digni- 
tates,  et  dona,  ut  sint  mecum  in  adjutorium. 

25.  Et  scripsit  eis  in  hase  verba  :  Rex  Demetrius, 
genti  Judœorum,  salutem. 

26.  Quoniam  servastis  ad  nos  pactum,  et  mansistis  in 
amicitia  nostra,  e'  non  accessistis  ad  inimicos  nostros, 
audivimus,  et  gavisi  sumus. 

27.  Et  nunc  perseverate  adhuc  conservare  ad  nos 
fidem,  et  retribuemus  vobis  bona  pro  his  quse  fecistis 
nobiscum; 

28.  Et  remittemus  vobis  prasstationes  multas,  et  dabi- 
mus  vobis  donationes. 


22.  Demetrius  l'ayant  su,  en  fut  extrêmement  affligé, 
et  il  dit  : 

2;.  Comment  avons-nous  permis  qu'Alexandre  nous 
ait  prévenus,  et  que,  pour  fortifier  son  parti,  il  ait  gagné 
l'amitié  des  Juifs. 

24.  Je  veux  leur  écrire  aussi  d'une  manière  obligeante, 
et  leur  offrir  des  dignités  et  des  dons,  afin  qu'ils  se  joi- 
gnent à  moi  pour  me  secourir. 

2<,.  Il  leur  écrivit  donc  en  ces  termes  :  Le  roi  Deme- 
trius au  peuple  iuif,  salut. 

26.  Nous  avons  appris  avec  joie  que  vous  avez  gardé 
l'alliance  que  vous  aviez  faite  avec  nous;  que  vous  êtes 
demeurés  dans  notre  amitié,  et  que  vous  ne  vous  êtes 
point  unis  à  nos  ennemis. 

27.  Continuez  donc  maintenant  à  nous  conserver  tou- 
jours la  même  fidélité;  et  nous  vous  rendrons  avantageu- 
sement ce  que  vous  aurez  fait  pour  nous. 

28.  Nous  vous  remettrons  beaucoupde  choses  qui  vous 
avaient  été  imposées,  et  nous  vous  ferons  de  grands 
dons. 


COMMENTAIRE 


la  mort  de  Judas  Maccabée,  et  sept  ans  après 
celle  d'Alcime,  dernier  grand  prêtre  (1);  il  est 
probable  que  ces  deux  choix  y  concoururent,  et 
que  le  peuple  pria  Jonathas  d'accepter  la  dignité 
que  le  roi  lui  offrait.  Cependant  aucun  historien 
juif  n'en  dit  rien,  et  ce  silence  laisse  planer  de 
graves  doutes. 

f.  26.  Quoniam  servastis  ad  nos  pactum.  De- 
metrius savait  fort  bien  le  contraire:  mais  il  dissi- 
mula pour  ne  pas  aigrir  les  Juifs.  11  veut  les  enga- 
ger à  lui  demeurer  fidèles,  en  leur  témoignant 
lui-même  beaucoup  de  confiance. 

Demetrius  était  un  grand  politique  ;  il  jugea 
que  la  conjoncture  présente  l'engageait  à  dissi- 
muler son  ressentiment,  de  ce  qu'il  semblait  que 
Jonathas  n'eût  pas  égard  à  la  lettre  qu'il  lui  avait 
envoyée,  et  aux  grâces  qu'il  lui  avait  faites.  C'est 
pourquoi  il  lui  écrit  de  nouveau,  comme  s'il  n'eût 
rien  connu  de  ce  qu'Alexandre  lui  avait  écrit,  et  des 
présents  qu'il  lui  avait  envoyés.  Bien  plus,  il  lui 
donne  de  grands  éloges  sur  la  fermeté  qu'il  faisait 
paraître  à  demeurer  dans  son  alliance,  comme  si 
effectivement  il  en  eût  été  convaincu  ;  il  s'efforce 
de  le  gagner  tout  à  fait  par  les  grâces  extraordi- 
naires dont  il  leint  de  vouloir  le  combler. 

L'Ecriture  se  contente  de  rapporter  simple- 
ment ce  qui  se  passait  alors,  sans  le  condamner 
positivement  ;  voulant  peut-être  nous  faire  voir 
jusqu'où  va  la  prudence  des  enfants  du  siècle,  nom 
que  Jésus-Christ  même  a  donné  dans  l'Évangile 
à  cette  conduite  artificieuse  (2).  Car,  quoique  la 
lettre  de  ce  prince  fût  pleine  d'astuce,  et  que  sa 
manière  de  traiter  avec  Jonathas  ne  tendît  qu'à  le 
surprendre  ;  elle  confond  néanmoins,  toute  mé- 
chante qu'elle  est,  l'emportement  avec  lequel  nous 
nous  élevons  d'ordinaire  contre  ceux  de  qui  nous 


croyons  avoir  été  offensés.  Il  y  a  une  sainte  dissi- 
mulation et  un  pieux  déguisement,  très  dignes  de 
la  charité  des  chrétiens.  C'est  d'agir  avec  nos 
frères,  lorsqu'ils  nous  ont  outragés,  et  avec  nos 
plus  cruels  ennemis, comme  s'ils  ne  violaient  point 
à  notre  égard  la  charité  chrétienne,  et  qu'ils  nous 
fussent  demeurés  toujours  unis.  C'est  de  leur 
prouver,  par  la  douceur  de  notre  conduite,  et  par 
ie  zèle  que  nous  témoignons  pour  les  servir,  que 
nous  ne  pouvons  les  regarder  autrement  que 
comme  étant  demeurés  dans  le  devoir  de  l'amitié 
à  notre  égard.  C'est  de  nous  dissimuler  à  nous- 
mêmes  tous  les  sujets  qu'ils  nous  donnent  de 
penser  mal  de  leur  conduite,  pour  ne  songer 
qu'au  bien  qui  nous  revient  devant  Dieu  d'oublier 
ainsi  nos  injures,  et  à  celui  que  nous  désirons  leur 
procurer  à  eux-mêmes  par  notre  patience  et  notre 
douceur. 

Cette  dissimulation  apparente,  qui  naît  d'un 
grand  fond  de  sincérité  chrétienne,  est  digne  des 
enfants  du  Père  céleste,  qui,  outragé  tous  les  jours 
par  les  blasphèmes  des  hommes,  fait  luire  égale- 
ment son  soleil  sur  les  impies  et  sur  les  justes,  et 
qui,  ayant  invité  longtemps  par  un  excès  de  pa- 
tience ses  ennemis  à  se  reconnaître,  leur  donne  à 
la  fin  lui-même,  comme  à  saint  Paul,  la  lumière 
dont  ils  ont  besoin  pour  connaître  leur  égarement, 
et  les  comble  ensuite  de  ses  grâces. 

Que  les  enfants  de  lumière  ne  soient  donc  pas 
moins  prudents  que  les  enfants  du  siècle  :  et  si 
Jésus-Christ  à  proposé  à  ses  disciples  la  prudence 
de  l'économe  infidèle,  pour  les  exhorter  à  se  faire 
des  amis  dans  le  ciel  par  le  bon  usage  des  riches- 
ses de  la  terre  ;  qu'il  nous  soit  permis  de  nous 
proposer  aussi  la  sagesse  d'un  roi  politique, qui  eut 
la  force  de  dissimuler  ses  injures  pour  venir  à  bout 


(1)  Joseph.  Anliq.  xm.  c.  7.  et  lib.  Usscr.  ad  an.  $852. 


(2)  Luc.  xviii.  8. 


I.  —  MACCABÉES.  —  X.  -   LETTRE  DE  DÉMÉTRIUS 


107 


29.  Et  nunc  absolvo  vos  et  omnes  Judaeos  a  trihutis; 
et  pretia  salis  indulgeo,  et  coronas  remitto,  et  tertias 
seminis; 

jo.  Et  dimidiam  partem  frucUis  ligni,quod  est  portionis 
meoe,  relinquo  vobis  ex  hodiemo  die,  et  deinceps,  na 
accipiatur  a  terra  Juda,  et  a  tribus  civitatibus  quœ  additse 
sunt  illi  ex  Samaria  et  Galila;a,  ex  hodierna  die  et  in 
totum  tempus  ; 


ji.  Et  Jérusalem  sit  sancta  et  libéra  cum   finibus  suis, 
et  décimas  et  tributa  ipsius  sint. 


29.  Et  dès  à  présent  je  vous  remets, et  à  tous  les  Juifs, 
les  tributs,  les  impôts  du  sel,  les  couronnes,  la  troisième 
partie  des  fruits  de  la  semence. 

50.  Et  ce  que  j'avais  droit  de  prendre  pour  la  moitié 
des  fruits  des  arbres  :  je  vous  tiens  quittes  de  toutes  ces 
choses  dès  à  présent  et  pour  l'avenir,  ne  voulant  plus 
qu'on  les  lève  sur  !e  pays  de  Juda  ;  ni  sur  les  trois  vil- 
les qui  lui  ont  été  ajoutées  et  détachées  de  la  Samarie, 
et  de  la  Galilée,  à  commencer  depuis  ce  jour,  et  dans 
toute  la  suite. 

;i.  Je  veux  aussi  que  Jérusalem  soit  sainte  et  libre 
avec  tout  son  territoire  ;  et  que  les  dimes  et  les  tributs 
lui  appartiennent, 


COMMENTAIRE 


de  ses  desseins;  afin  qu'usant  d'une  plus  sainte 
dissimulation,  fondée  sur  une  vraie  charité,  nous 
ne  songions  qu'au  grand  dessein  que  nous  devons 
tous  avoir  de  nous  sauver,  et  de  sauver  avec  nous 
nos  ennemis  mêmes,  par  la  fermeté  de  notre  dou- 
ceur, invincible  à  tous  leurs  outrages. 

$.  29.  Pretia  salis  indulgeo.  Je  vous  remets 
les  impôts  du  sel;  ou  je  vous  remets  ce  que  vous 
versiez  au  trésor  pour  le  sel  :  j'abandonne  la  pro- 
priété des  salines  de  Judée,  et  je  permets  à  cha- 
cun de  se  fournir  de  Sel  où  il  pourra,  et  comme  il 
voudra.  Il  y  avait  des  salines  dans  le  pays,  comme 
on  le  voit  au  chapitre  xi,  verset  35.  Il  est 
parlé  en  quelques  endroits  de  l'Écriture,  de  la 
vallée  des  salines  (1);  mais  on  ne  convient  pas 
que  c'ait  été  de  véritables  salines  ;  c'était  plutôt 
un  vallon  situé  sur  la  mer  Morte,  appelée  en  hé- 
breu, la  Mer  du  sel. 

Coronas  remitto.  Je  vous  remets  les  couronnes, 
que  vous  deviez  nous  donner  tous  les  ans.  Antio- 
chus  le  Grand  avait  déjà  fait  une  pareille  remise, 
longtemps  auparavant  (2),  aux  anciens,  aux  prêtres, 
aux  scribes  et  aux  chantres  du  temple  ;  mais  l'obli- 
gation était  demeurée  pour  le  reste  du  temple. 
Les  Juits,  après  la  destruction  du  temple,  avaient 
coutume  de  faire  ce  présent  à  leurs  princes  ;  les 
empereurs  romains  exigèrent  ensuite  ce  droit,  des 
Juifs  comme  des  autres  ;  ce  tribut  spécial  portait 
le  nom  d'aurum  coronarium  (3). 

Jf.  30.  Dimidiam  partem  fructusligni.  Certains 
exégètes  pensent  que  ce  texte  désigne  le  profit 
que  le  roi  tirait  de  la  moitié  des  forêts.  Ils  préten- 
dent que  Josèphe  le  favorise  (4);  mais  le  passage 
parallèle  du  chapitre  xi.  34.  détermine   au  sens 


que    nous    avons  exprimé  dans   la  traduction  (<,). 

Et  a  tribus  civitatibus  qu/e  audits  sunt  illi. 
Le  nom  de  civitas  en  cet  endroit  ne  signifie  pas 
une  simple  ville  :  il  se  prend  pour  un  canton,  une 
petite  province.  Le  grec  se  sert  ici  du  nom  de 
vou.o;  (6),  qui  rappelle  les  Nomes,  ou  cantons  de 
l'Egypte.  Josèphe  se  sert  du  terme  de  Topar- 
chie  17).  Il  dit  que  Démétrius  accorda  l'exemption 
de  tribut  à  tous  les  Juifs  qui  habitaient  la  Judée 
et  les  trois  toparchies  de  la  Samarie,  de  la  Gali- 
lée et  de  la  Pérée.  On  avait  démembré  trois  can- 
tons de  ces  trois  provinces,  pour  les  joindre  à  la 
Judée  ;  et  les  principales  villes  des  trois  cantons 
réunis,  étaient  Lydda,  Ramatha  et  Apherima  (8). 
Ces  trois  districts  occupaient  une  partie  du  bassin 
delà  rivière  actuellement  connue  sous  le  nom  de 
Nahr-el-Aujeh,  à  l'est  de  Joppé. 

jfr.  31.  Jérusalem  sit  sancta  et  libéra  cum 
finibus  suis.  Il  accordait  à  cetteville  le  droitd'asi- 
le,  selon  Josèphe  (9), ou  plutôt,  selon  le  grec($),illa 
déclarait  ville  sainte  et  privilégiée, se  gardant  elle- 
même  sans  garnison  étrangère,  comme  la  ville  de 
Delphes,  en  Grèce.  On  a  divers  exemples  de  ces 
villes  qui  passaient  pour  saintes,  et  qui  jouissaient  du 
droit  d'asile  ;  elles  avaient  grand  soin  de  marquer 
ce  privilège  sur  leurs  médailles,  de  l'acquérir  et 
de  le  conserver  comme  une  marque  de  distinction 
très  particulière.  La  ville  de  Tyr  est  quelquefois 
qualifiée  de  sainte  et  de  ville  d'asile,  dans  les 
médailles,  depuisla  174e  année  des  Séleucides  (11). 

Décimée  et  tributa  ipsius  sint.  Que  les  dîmes 
et  les  tributs  que  le  roi  tirait  de  son  territoire,  lui 
appartiennent  :  qu'elle  en  soit  exempte,  ou  qu'elle 
les  convertisse  à  son  usage,  à  son  entretien. 


(1)  11.  Reg.  vin.   1  ?.  et  1.  Par.  xviu.  12.  et  titul.  Psal.  lix. 

(2)  Vide  Joseph,  tib.  xii.  A 'jioXus'aOu  oà  tj  yspouai'a,  -/.ai 
tepeî;,  xaî  fpa|j.[xa'C£tç  toû  UpoCf,  y.a't  lepo^âXtat,':(jû  ate-aav:'- 
tou  ^opou. 

(j)  Grot.  hic.   Vide  L.  penutt.  c.  de  Judœis. 

(4)  Toû  ^uiaou;  toù  xapnoû  toû  ÇuXfvou. 

(5)  Joseph,  xiii.  5.  Toû  ï]|j.iaoù;  toû  ÇuXt'vou  xap7ioû,  tô 
YEvojjuvov  laoi  pi^po;  ûjjùv  â»t/)u.i. 

(6)  Tpiûv  vou.ûv. 


(7)  Ka't  tojv  Tpiwv  Torcap^iôiv.  Joseph,  toco  cit. 

(8)  Vide  infra  C.  xi.  f.  54. 

(9)  Joseph.   I'cpàv  y.a't  àauXov  e"tvat  |3oûXo[j.at. 

(10)  Grot.hic.  sic  inlerprctntur  Grœc.  A'ylot  xat  â^etuevr). 
Ne  ullo  prsRsidio  externo  oneretur,  ad  exemplum  Del- 
phorum  in  Graecia. 

(11)  Vaillant,  hisi.  Reg.  Syr.  pag.  504.  J05.  TTPOT 
IEPAS  ASTAOT, 


io8 


1.  —  MACCABÉES.  —  X.  -   LETTRE   DE   DÉMÉTRIUS 


}2.  Remittoetiam  potestatem  arcis  quas  est  in  Jérusalem, 
et  do  eam  summo  sacerdoti,ut  constituât  in  ea  viros  quos- 
cumque  elegerit,  qui  custodiant   eam. 

?;.  Et  omnem  animam  Judaeoium,  quas  captiva  est  a 
terra  Juda  in  omni  regno  meo,  relinquo  liberam  gratis, 
ut  omnes  a  tributis  solvantur,  etiam  pecorum  suorum. 


J4.  Et  omnes  dies  solemnes,  et  sabbata,  et  neomenias, 
et  dies  decreti,  et  trts  dies  ante  diem  solemnem,  et  très 
dies  post  diem  solema^m,  sint  omnes  immunitstis  et  remis- 
sionis  omnibus  Judaeisqui  sunt  in  regno  meo; 


j$.  Et  nemo  habebit  potestatem agere  aliquid, et  movere 
negotia  adversus  aliquem  illorum,  in  omni  causa. 

i6.  Et  ascribantur  ex  Judasis  in  exercitu  régis  ad  tri- 
gin  ta  mil  lia  virorum,  et  dabuntur  illis  copias  ut  oportet 
omnibus  exercitibus  régis,  et  ex  eis  ordinabuntur  qui  sint 
in  munitionibus  régis  magni  ; 

J7.  Et  ex  his  constituentur  super  negotia  regni  quas 
aguntur  ex  fide,  et  principes  sint  ex  eis,  et  ambulent  in 
legibus  suis,  sicut  praecepit  rex  in  terra  Juda. 


?8.  Et  très  civitates  quas  additas  sunt  iudsœ  ex  regione 
Samariœ,  cum  Judasa  reputentur,  ut  sint  sub  uno,  et  non 
obediantalii  potestati  nisi  summi  sacerdotis; 


jh  }2.  Remitto  POTESTATEM  ARCIS  QU/E  EST  IN 
Jérusalem.  On  a  vu  précédemment  (i),  que  les 
troupes  de  garnison  s'étaient  retirées,  à  l'excep- 
tion de  celles  de  Bethsura  ;  mais  la  citadelle  de 
Jérusalem  était  toujours  occupée  par  les  Syriens. 
Jonathas  ne  profita  point  de  l'offre  que  le  roi  lui 
fait  ;  nous  verrons  plus  loin  (2),  qu'il  fut  obligé  dé- 
faire le  siège  de  cette  forteresse,  et  de  la  réduire 
par  force. 

jh  ■)■).  Ut  omnes  a  tributis  solvantur,  etiam 
pecorum  suorum.  Je  les  affranchis  tous  des  tri- 
buts, et  des  charges  mêmes  qu'ils  devaient  pour 
leurs  bestiaux  ;  c'est-à-dire,  des  corvées  et  des 
services  publics  pour  lesquels  on  les  obligeait  de 
fournir  leurs  animaux  (;). 

y.  34.  Très  dies  ante  diem  solemnem,  et  très 
dies  post  diem  solemnem.  Que  les  trois  jours 
d'avant  une  fête  solennelle,  et  les  trois  jours  d'après, 
soient  des  jours  d'immunités,  afin  que  le  peuple 
puisse,  en  toute  sûreté  et  en  toute  liberté,  venir 
au  temple,  et  s'en  retourner.  Qu'on  n'exige  aucun 
tribut  de  tout  ce  qu'ils  pourront  porter  à  Jérusa- 
lem, ni  de  tout  ce  qu'ils  pourront  en  rapporter  ; 
qu'on  ne  puisse  point  les  saisir,  et  les  arrêter  pen- 
dant ces  jours  réservés.  Voyez  le  verset  suivant. 


J2.  Je  remets  aussi  entre  vos  mains  la  forteresse  qui 
est  dans  Jérusalem,  et  je  la  donne  au  grand  prêtre,  afin 
qu'il  y  établisse,  pour  la  garder,  'les  gens  que  lui-même 
aura  choisis. 

j?.  Je  donne  encore  la  liberté,  sans  aucune  rançon,  à 
tous  les  Juifs  qui  ont  été  emmenés  captifs  du  pays  de 
Juda,  qui  se  trouveront  dans  tout  mon  royaume  ;  et  je  les 
affranchis  tous  des  tributs  et  des  charges  mêmes  qu'ils 
devaient  pour  leurs  bestiaux. 

J4.  Je  veux  aussi  que  toutes  les  fêtes  solennelles,  les 
jours  de  sabbat,  les  nouvelles  lunes,  les  fêtes  instituées, 
les  trois  jours  qui  précèdent  une  fête  solennelle,  et  les 
trois  jours  qui  la  suivent,  soient  des  jours  d'immunité  et 
de  franchise  pour  tous  les  Juifs  qui  sont  en  mon  royau- 
me, 

jç.  fit  qu'il  ne  soit  permis  alors  à  personne  d'agir  en 
justice  contre  eux,  ni  de  leur  faire  aucune  peine,  pour 
quelque  alfaire  que  ce  puisse  être. 

;6.  J'ordonne  de  plus  qu'on  fera  entrer  dans  les  trou- 
pes du  roi  jusqu'à  trente  mille  Juifs,  qui  seront  entrete- 
nus comme  doivent  l'être  toutes  les  troupes  des  armées 
du  roi  ;  et  qu'on  en  choisira  d'entre  eux  pour  les  mettre 
dans  les  forteresses  du  grand  roi  ; 

57.  Que  l'on  confiera  aussi  à  quelques-uns  d'entre  eux 
les  affaires  importantes  du  royaume,  qui  demandent  le 
plus  de  fidélité,  et  qu'ils  en  auront  l'intendance,  en  vivant 
toujours  selon  leurs  lois,  comme  le  roi  l'a  ordonné  pour 
le  pays  de  Juda  ; 

?8.  Et  que  les  trois  villes  du  pays  de  la  Samarie,  qui 
ont  été  annexées  à  la  Judée,  afin  qu'elles  ne  dépendent 
que  d'un  chef,  sans  obéir  à  aucune  autre  puissance  qu'à 
celle  du  grand  prêtre. 

COMMENTAIRE 

Le  texte  exprime  ici  les  jours  du  sabbat,  les  pre- 
miers jours  du  mois,  les  trois  grandes  fêtes  de 
l'année  et  les  fêtes  ordonnées,  Dies  decreti,  com- 
me sont  la  fête  de  Judith,  la  fête  des  Sorts,  la 
fête  de  la  dédicace  du  temple,  etc.  Tous  ces  jours 
étaient  privilégiés. 

f.  36.  Ascribantur  ex  Jud^eis  in  exercitu 
régis  ad  triginta  millia.  11  ne  les  oblige  pas  à 
s'enrôler  dans  ses  troupes  ;  il  le  leur  permet  seu- 
lement, pour  preuve  de  sa  confiance  en  eux. 

v.  37.  Constituentur  super  negotia  regni, 
qu/e  aguntur  ex  fide.  Josèphe  (4)  l'explique  de 
la  garde  de  la  personne  du  roi.  D'autres  l'enten- 
dent, avec  plus  de  raison,  des  affaires  de  l'état  ou 
des  finances  ()).  C'est  le  sens  du  grec  et  de  la 
Vulgate. 

Principes  sint  ex  eis.  Que  leurs  officiers  ne 
soient  point  étrangers  ;  qu'ils  n'obéissent,  après  le 
roi,  qu'à  des  gens  de  leur  nation.  C'était  la  der- 
nière marque  de  distinction  et  de  confiance. 

Ambulent  in  legibus  suis.  Il  confirme  les  an- 
ciens privilèges  de  la  nation  (6),  et  révoque  les 
ordres  injustes  d'Antiochus  Épiphane  (7). 

y.  38.  Très  civitates,  etc.  Voyez  plus  haut  le 
verset  30. 


(1)  Vers.  12.  15. 

(2)  Chap.  xi.  20. 

(})  nâvie;  ct^t/tojaav  xoù;  epopou;,  xai  t<j">v  xxr\viï>V  «utfflv. 
(4)  Antiq.  xm.  $.  Tivàç  Si  m\     rcspl   -^v    cpu^a/.fjv   iou 


<jÙ)u.otoç.  Ita  cl  Grol. 

(5)  Vide  Baducl.   Tir. 

(6)  Eslh.  xiv.  19.  -  Joseph.  Ant'uj.  xi.  ult. 
(^)  1.  Mjcc.  1.  46.  et  seq. 


MACCABEES. 


LETTRE   DE    DEMÉTRIUS 


109 


?9.  Ptolemaida  et  confines  ejus,  quas  dedi  donum 
sanctis  qui  sunt  in  Jérusalem  ad  necessarios  sumptus 
sanctorum. 

40.  Et  ego  do  singulis  annis  quindecim  miilia  siclorum 
argenti  de  rationibus  régis,  qu<e  me  contingunt  ; 

41.  Et  omne  quod  reliquum  fuerit,  quod  non  reddide- 
rant  qui  super  negotia  erant  annis  prioribus,  ex  hoc  dabunt 
in  opéra  domus. 

42.  Et  super  hœc  quinque  miilia  siclorum  argenti,  quse 
accipiebant  de  sanctorum  ratione  per  singulos  annos,  et 
haec  ad  sacerdotes   pertineant  qui    ministerio  funguntur. 

4Î.  Et  quicumque  confugerint  in  templum  quod  est 
Jerosolymis  et  in  omnibus  finibus  ejus,  obnoxii  régi  in 
omni  negotio  dimittantur,  et  universa  quœ  sunt  eis  in 
regno  meo  libéra  habeant. 

44.  Et  ad  œdificanda  vel  restauranda  opéra  sanctorum, 
sumptus  dabuntur  de  ratione  régis; 

45.  Et  ad  exstruendos  muros  Jérusalem,  et  commu- 
niendos  in  circuitu,  sumptus  dabuntur  de  ratione  régis, 
et  ad  construendos  muros  in  Judasa. 

46.  Ut  audivit  autem  Jonathas  et  populus  sermones 
istos,  non  crediderunt  eis,  nec  receperunt  eos,  quia 
recordati  sunt  malitiae  magnas  quam  fecerat  in  Israël,  et 
tribulaverat  eos  valde. 

47.  Et  complacuit  eis  in  Alexandrum,  quia  ipse  fuerat 
eis  princeps  sermonum  pacis;  et  ipsi  auxilium  ferebant 
omnibus  diebus. 


;o.  Je  donne  hiissi  Ptolémaïs  et  tout  son  territoire  en 
don  au  sanctuaire  de  Jérusalem,  pour  fournir  à  toute  la 
la  dépense  nécessaire  à  l'entretien  des  choses  saintes. 

40.  Je  donnerai  outre  cela  tous  les  ans  quinze  mille 
sicles  d'argent  à  prendre  sur-les  droits  du  roi,  et  sur  les 
revenus  qui  m'appartiennent. 

41.  J'ordonne  aussi  que  ceux  qui  gouvernaient  mes 
finances  les  années  passées  paieront,  pour  les  ouvrages 
du  temple,  tout  ce  qui  reste  de  ces  années  qu'ils  n'ont 
point  encore  payé. 

42.  Pour  ce  qui  est  des  cinq  mille  sicles  d'argent  qui 
se  prenaient  sur  le  sanctuaire  chaque  année,  ils  seront 
remis  aux  prêtres,  comme  appartenant  à  ceux  qui  font 
les  fonctions  du  saint  ministère. 

4î.  Je  veux  encore  que  tous  ceux  qui,  étant  redevables 
au  roi.  pour  quelque  affaire  que  ce  puisse  être,  se  réfu- 
gieront dans  le  temple  de  Jérusalem  et  dans  tout  son 
territoire,  soient  en  sûreté;  et  qu'on  leur  laisse  la  jouis- 
sance libre  de  tout  ce  qu'ils  ont  dans  mon  royaume. 

44.  On  donnera  aussi  de  l'épargne  du  roi  de  quoi  four- 
nir aux  bâtiments  ou  aux  réparations  des  lieux  saints. 

4>.  Et  on  prendra  encore  des  mêmes  deniers  de  quoi 
bâtir  et  fortifier  les  murailles  de  Jérusalem,  et  desautres 
villes  qui  sont  en  Judée. 

46.  Jonathas  et  le  peuple  ayant  entendu  ces  proposi- 
tions de  Démétrius,  ne  les  crurent  point  sincères  et 
ne  les  reçurent  point  ;  parce  qu'ils  se  souvinrent  des 
grands  maux  qu'il  avait  faits  a  Israël,  et  de  quelle  manière 
il   les  avait  accablés. 

47.  Ils  se  portèrent  donc  à  favoriser  plutôt  Alexandre, 
parce  qu'il  leur  avait  parlé  le  premier  de  paix  ;  et  ils  l'as- 
sistèrent toujours  dans  la  suite. 


y.  39.  Ptolemaida...  dedi  donum  sanctis. 
Démétrius  ne  fait  pas  un  grand  présent  en  donnant 
Ptolémaïs,  puisque  cette  ville  était  alors  entre 
les  mains  d'Alexandre  son  compétiteur  ;  mais  il 
tâche  d'engager  les  Juifs  à  entrer  dans  son  parti, 
pour  l'aider  à  chasser  Alexandre  de  cette  ville, 
en  vue  de  leurs  propres  intérêts. 

y.  40.  Quindecim  millia  siclorum.  Josèphe 
met  cent  cinquante  mille  drachmes ■  (1).  Les  quinze 
mille  sicles  d'argent,  font  42.4^0  fr.  Le  chiffre 
donné  par  Josèphe  réprésente  une  somme  trois 
fois  plus  forte. 

y.  41.  Omne  quod  reliquum  fuerit,  etc.  Tout 
ce  qui  reste  à  payer  au  trésor,  est  abandonné  au 
temple.  Démétrius  n'était  guère  alors  en  état  de 
contraindre  les  reliquataires,  puisqu'Alexandre 
occupait  une  bonne  partie  du  pays.  11  est  libéral 
de  ce  qu'il  ne  possède  point. 

y.  42.  Quinque  millia  siclorum  argenti,  qu^: 
accipiebant  de  sanctorum  ratione.  Les  cinq 
mille  sicles  d'argent  (  14,150  fr.)  que  l'on  prenait 
chaque  année,  sur  les  comptes  du  temple,  sur  les 
revenus  des  prêtres,  sur  leurs  dîmes,  leurs  pré- 
mices, leur   offrande.    Le  grec  à  la   lettre  (2)  : 


COMMENTAIRE 

Les  cinq  mille  sicles  qu'ils  prenaient  des  dettes  du 
Saint,  du  compte  de  chaque  année.  On  lit  dans 
Josèphe  (]),  que  Bagose,  gouverneur  de  la  Judée 
au  nom  d'Artaxerxès,  roi  de  Perse,  exigeait  cin- 
quante drachmes  pour  chaque  agneau,  avant 
qu'on  pût  offrir  le  sacrifice  de  chaque  jour.  Ce 
chiffre  paraît  exagéré,  puisque  c'était  beaucoup 
plus  que  la  valeur  de  l'agneau. 

y.  43.  Quicumque  confugerint  in  templum. 
Cette  proposition  constituait  le  droit  d'asile  le 
le  plus  ample  qu'on  puisse  souhaiter  ;  non  seule- 
ment l'intérieur  du  temple,  mais  aussi  son  contour, 
jouit  du  droit  de  protection  ;  et  non  seulement 
les  personnes  des  débiteurs  y  sont  en  sûreté  ; 
mais  aussi  leurs  biens  et  leurs  effets  sont  privilégiés. 
Les  débiteurs  des  deniers  royaux,  ne  sont  point 
exclus  de  celte  grâce;  elle  est  générale  pour 
tous. 

y.  47.  Complacuit  eis  in  Alexandrum.  Plus 
Démétrius  promettait  de  grandes  choses  aux 
Juifs,  moins  ils  crurent  qu'il  y  eût  de  la  sincérité 
dans  ses  promesses.  Ils  jugèrent  de  ce  prince, 
non  par  les  paroles  que  la  nécessité  tirait  de  sa 
bouche  comme  par  force,  mais  par  les  grands  maux 


(1)  Antiq.  xm.   5.  Kccc'  ëto;  [/upcocûa;  lé- 

(2)  Ou;  EXau.6avov  txno  Ttliv  ypE'.ûv  tou  âyi'ou,  ârco  tou 
XÔyoC  y.at'  ÉvirjTov.  Grol.  legit.  tûv  ypsn">v  debitorum, 
pro  tûv  ypsiàiv.  Negotiorum.  Ms.  Alex  et  edilion.es  Com- 
plut. Aldina,  Basil,  addunt.  w;  Év  loi?  Ttpcôtoi;  Bteat,  ut  in 


prioribus  annis.  -  Joseph.  Anliq.  xm.  5.  Ta;  6è  u.up:'à; 
ôpayjjià;  a;  sXâ[j.6avov  éx  toû  ispoù  6c  (3acjcXeu,  &|xïv  âo-'ijut. 
(ï)  Idem.  Antiq.  I.  xi.  c.  7.  lïpi'v  r\  Ta;  y.oOr)(jiEptvà{ 
ËJtEOE'pEiv  Ouaia;,  unèp  àpvou  Ixiatou  teXecv  àutoù;  Ô7]p.03i<x 
Spa/aà;  ù.  Voyez  11.  Macc.  xi.  1. 


no 


!. 


MACCABÉES.  —  X.  -  MORT  DE  DÉMÉTRIUS 


48.  Et  congregavit  rex  Alexander  exercilum  magnum, 
et  admovit  castra  contra  Demetrium. 

49.  Et  commiserunt  praïlium  duo  reges,  et  fugit  exer- 
citus  Demetrii;  et  insecutus  est  eum  Alexander,  et  incu- 
buit  super  eos. 

50.  Et  invaluit  prœlium  nimis,  donec  occidit  sol;  et 
cecidit  Demetrius  in  die  i lia. 

51.  Et  misit  Alexander  ad  Ptolemaeum,  regem  /Egypti, 
legatos  secundum  hase  verba,  dicens  : 

$3.  Quoniam  regressus  sum  in  regnum  meura,  et  sedi 
in  sede  patrum  meorum,  et  obtinui  principatum,  et  con- 
trivi  Demetrium,  et  possedi  regionem  nostram, 

5J.  Et  commisi  pugnam  cum  eo,  et  contritus  est  ipse 
et  castra  ejus  a  nobis,  et  sedimus  in  sede  regni  ejus  ; 

$4.  Et  nunc  statuamus  ad  invicem  amicitiam,  et  da  mihi 
filiam  tuam  uxorem,  et  ego  ero  gêner  tuus,  et  dabo  tibi 
dona,  et  ipsi,  digna  te. 


48.  Après  cela,  le  roi  Alexandre  leva  une  grande 
armée,  et  marcha  contre  Démétrius. 

49.  Les  deux  rois  se  livrèrent  bataille,  et  l'armée  de 
Démétrius  s'enfuit  :  Alexandre  les  poursuivit,  et  fondit 
sur  eux. 

<,o.  Le  combat  fut  rude  et  opiniâtre,  et  dura  jusqu'au 
coucher  du  soleil  ;  et  Démétrius  y  fut  tué. 

51.  Alexandre  envoya  ensuite  des  ambassadeurs  à  Pto- 
lémée,  roi  d'Egypte, et  lui  écrivit  en  ces  termes  : 

52.  Comme  je  suis  rentré  dans  mon  royaume;  que  je 
suis  assis  sur  le  trône  de  mes  pères;  que  j'ai  recouvré 
mon  empire,  et  tous  les  pays  qui  m'appartenaient,  par  la 
défaite  de  Démétrius, 

5J.  A  qui  j'ai  livré  bataille,  et  que  j'ai  défait  avec 
toute  son  armée  ;  étant  ainsi  remonté  sur  le  siège  du 
royaume  qu'il  occupait, 

$4.  Faisons  maintenant  amitié  ensemble  :  donnez-moi 
votre  fille  en  mariage,  ^t  je  serai  votre  gendre;  et  je 
vous  ferai,  aussi  bien  qu'à  elle,  des  présents  dignes  de 
vous. 


COMMENTAIRE 


qu'il  avait  faits  à  Israël.  C'était  un  des  dignes  suc- 
cesseurs d'Antiochus,  le  plus  grand  persécuteur 
des  Juifs  ;  et  il  imitait  fort  bien  son  faux  repentir. 
L'un  et  l'autre  promettait  ce  qu'il  n'avait  point  la 
volonté  de  tenir  ;  et  ils  méritèrent  tous  deux 
d'être  rejetés  comme  de  faux  pénitents  qui  s'ef- 
forçaient de  tromper  Dieu  et  les  hommes. 

Jonathas  n'entreprit  point  d'éclaircir  le  droit 
qu'Alexandre  pouvait  avoir  à  la  couronne  :  il  ne 
se  mit  point  en  peine  de  juger  de  ce  différend, 
dont  il  laissa  la  décision  à  Dieu  même.  Mais  le 
souvenir  des  violences  que  Démétrius  avait  exer- 
cées contre  sa  nation,  le  convainquant  du  peu  de 
sincérité  de  ses  promesses,  lui  fit  croire  qu'il 
était  plus  sûr  de  se  fier  à  Alexandre,  de  qui  les 
Juifs  n'avaient  reçu  aucun  mal.  Ce  fut  ce  qui  le 
porta,  avec  tout  le  peuple,  à  le  favoriser  et  à 
l'assister  en  tout  ce  qu'ils  purent  dans  la  suite  de 
cette  guerre. 

Mais  on  a  peine  à  comprendre,  comment  il  est 
véritable  qu'Alexandre  leur  avail  parlé  le  premier 
de  paix;  puisqu'on  a  vu  que  Démétrius  s'était 
hâté  de  prévenir  Alexandre,  en  écrivant  le  premier 
à  Jonathas,  pour  faire  alliance  avec  lui.  C'est 
peut-être  que  les  Juifs,  n'ayant  pu  se  fier  à  la  pa- 
role d'un  prince  qui  s'était  toujours  déclaré  leur 
ennemi,  ne  regardèrent  la  première  proposition 
d'alliance  qu'il  leur  fit,  que  comme  une  ruse  et 
une  vraie  trahison.  Ainsi,  quoique  l'autre  n'écrivît 
sur  ce  sujet  à  Jonathas  que  le  second,  il  fut  néan- 
moins regardé  comme  l'ayant  fait  le  premier  • 
parce  que  les  Juifs,  n'ayant  nul  sujet  de  se  défier 
de  lui,  regardèrent  ce  qu'il  mandait  comme  ten- 
dant sincèrement  à  la  paix  ;  au  lieu  que  les 
propositions  de  Démétrius  cachaient,  sous  une 
apparence  de  paix,  un  esprit  de  haine  et  de  guerre. 


//  se  portèrent  donc  à  favoriser plulôt  Alexandre, 
pour  plusieurs  raisons  :  i°  Parce  qu'il  avait  parlé 
le  premier,  et  qu'on  avait  déjà  pris  des  engagements 
avec  lui.  20  Parce  qu'on  ne  se  fiait  point  à  Démé- 
trius, et  qu'on  avait  l'expérience  de  la  haine  que 
ses  pères  et  lui,  avaient  fait  éclater  contre  les 
Juifs.  }°  Enfin,  il  put  entrer  encore  une  autre 
raison  dansleurdétermination;  c'est  qu'Alexandre 
était  allié  et  ami  des  Romains,  dont  les  Juifs  de- 
vaient ménager  les  bonnes  grâces.  Il  n'entrèrent 
point  dans  l'examen  du  droitdes  prétendants. Cela 
ne  les  regardait  pas  directement.  11  suffisait 
qu'Alexandre  se  portât  pour  fils  d'Antiochus  Épi- 
phane,  et  qu'il  fût  reconnu  pour  tel  par  les 
Romains  et  par  plusieurs  chefs  syriens. 

f.  49.  Commiserunt  pr/elium  duo  reges. 
Alexandre  ayant  réuni  une  grande  armée,  tant  des 
troupes  syriennes,  qui  désertaient,  que  de  celles 
qui  lui  furent  fournies parlesrois  Attale,Ariarathe, 
Ptolomée  Philométor,  et  par  Jonathas,  prince 
des  Juifs,  livra  la  bataille  à  Démétrius  l'an  i^o 
avant  Jésus-Christ.  L'aile  gauche  de  Démétrius 
mit  en  fuite  les  troupes  d'Alexandre,  qui  lui 
étaient  opposées  ;  mais  l'aile  droite  où  ce  prince 
combattait  en  personne,  fut  obligée  de  reculer. 
Démétrius  résista  seul,  et  tint  ferme  contre  les 
ennemis,  poussant  les  uns,  tuant  les  autres  ;  à  la 
fin,  s'étant  jeté  malheureusement  dans  un  bour- 
bier, il  tomba  de  cheval,  fut  percé  de  flèches,  et 
ne  cessa  de  combattre  vaillamment,  jusqu'au  der- 
nier soupir.  11  avait  régné  douze  ans,  et  il  périt 
par  la  conspiration  des  rois  voisins, avecqui  il  n'avait 
pas  su  se  maintenir  en  bonne  intelligence  (1). 

y.  51.  Ad  Ptolem/eum.  Ptolémée  Philométor,  à 
qui  Alexandre  devait  principalement  la  victoire 
qu'il  venait  de  remporter. 


;i)  Voyez  Joseph.    Anltq.   XIII.  5.  -   Justin.  Ub.  xxxv. 


Appian.  Syriac,  p.  i;i. 


!.—   MACCABEES.  —  X.  -  GLOIRE   DE  JONATHAS 


i  1 1 


55.  Et  respondit  rex  Ptolemaeus,  dicens  :  Félix  dies  in 
qua  reversus  es  ad  terram  patrum  tuorum,  et  sedisti  in 
sede  regni  eorum  ! 

56.  Et  nunc  faciam  tibi  quod  scripsisti  ;  sed  occurre 
mini  Ptolemaidam,  ut  videamus  invicem  nos,  et  spon- 
deam  tibi  sicut  dixisti. 

<,".  Et  exivit  Ptolemaeus  de  .-Egypto,  ipse,  et  Cleopa- 
tra,  filia  ejus,  et  venit  Ptolemaidam,  anno  centesimo 
sexagesimo  secundo. 

58.  Et  occurrit  ei  Alexander  rex,  et  dédit  ei  Cleopa- 
tram,  filiam  suam;  et  fecit  nuptias  ejus  Ptolemaidaî, 
sicut  reges,  in  magna  gloria, 

$<).  Et  scripsit  rex  Alexander  Jonathas,  ut  veniret 
obviam  sibi. 

60.  Et  abiit  cum  gloria  Ptolemaidam,  et  occurrit  ibi 
duobus  regibus,  et  dédit  illis  argentum  multum,  et  aurum, 
et  dona;  et  invenit  gratiam  in  conspectu  eorum. 

61.  Et  convenerunt  adversus  eum  viri  pestilentes  ex 
Israël,  vin  impii  interpellantes  adversus  eum  ;  et  non 
intendit  ad  eos  rex. 

62.  Et  jussit  spoliari  Jonathan  vestibus  suis,  et  indui 
eum  purpura  ;  et  ita  fecerunt.  Et  collocavit  eum  rex 
sedere  secum  ; 

65.  Dixitque  principibus  suis:  Exite  cum  eo  in  médium 
civitatis,  et  prasdicate  ut  nemo  adversus  eum  interpellet 
de  ullo  negotio,  nec  quisquam  ei  molestus  sit  de  ulla 
ratione. 

64.  Et  factum  est,  ut  viderunt,  qui  interpellabant,  glo- 
riam  ejus  quae  praedicabatur,  et  opertum  eum  purpura, 
fugerunt  omnes. 

65.  Et  magnificavit  eum  rex,  et  scripsit  eum  inter  pri- 
mos  amicos,  et  posuit  eum  ducem  et  participem  princi- 
patus. 

66.  Et  reversus  est  Jonathas  in  Jérusalem  cum  pace  et 
laetitia. 

67.  In  anno  centesimo  sexagesimo  quinto  venit  Deme- 
trius,  fil ius  Demetrii,a  Creta  in  terram  patrum  suorum. 

68.  Et  audivit  Alexander  rex,  et  contristatus  est  valde, 
et  reversus  est  Antiochiam. 

69.  Et  constituit  Demetrius  rex  Apollonium  ducem, 
qui  prœerat  Cœlesyrias,  et  congregavit  exercitum  ma- 
gnum ;  et  accessit  ad  Jamniam,  et  misit  ad  Jonathan, 
summum  sacerdotem, 

COMM 
;V.     57.    ANNO  CENTESIMO  SEXAGHSIMO   SECUNDO. 

En  l'an  1^0  avant  Jésus-Christ. 

f.  61.  Viri  pestilentes.  Les  Hébreux  donnent 
le  nom  de  pesle,  ou  dlwmmes  pestiférés,  aux  mé- 
chants, aux  impies;  ils  se  servent  souvent  de  ce 
terme  dans  leurs  Livres  moraux  (1). 

f.  65.  Posuit  eum  ducem  ac  participem  prin- 
cipatus.  Au  lieu  de  participem  principatus,\e  grec 
porte  [j.spioap^r)v,  c'est-à-dire  gouverneur  d'une 
partie  de  l'armée  ou  d'une  portion  du  pays. 

j>.  67.  Venit  Demetrius,  filius  Demetrii,  a 
Creta  in  terram  patrum  suorum.  Au  commen- 
cement de  la  guerre,  Demetrius  Soter,  craignant 
l'incertitude  des  événements  et  la  bizarrerie  de  la 
fortune,  envoya  ses  deux  fils,  Demetrius,   qui  fut 


<,<,.  Le  roi  Ptolémée  lui  répondit  :  Heureux  le  jour  où 
vous  êtes  rentré  en  possession  du  pays  de  vos  pères, et 
où  vous  vous  êtes  assis  sur  le  trône  de  leur  royaume. 

;6.  Je  suis  prêt  à  vous  accorder  ce  que  vous  m'avez 
demandé  ;  mais  venez  jusqu'à  Ptolémaïs  afin  que  nous 
nous  voyions,  et  que  je  vous  donne  ma  fille,  comme 
vous  le  désirez. 

57.  Ptolémée  sortit  donc  d'Egypte  avec  Cléopàtre  sa 
fille,  et  vint  à  Ptolémaïs,  l'an  cent  soixante-deuxième. 

58.  Le  roi  Alexandre  vint  l'y  trouver;  et  Ptolémée  lui 
donna  sa  fille  Cléopàtre  :  et  les  noces  furent  célébrées  à 
Ptolémaïs  avec  une  grande  magnificence,  selon  la  cou- 
tume des  rois. 

Y).  Le  roi  Alexandre  écrivit  aussi  à  Jonathas,  afin  qu'il 
vint  au-devant  de  lui  à  Ptolémaïs. 

60.  Jonathas  y  alla  avec  grand  éclat,  et  salua  les  deux 
rois:  il  leur  apporta  quantité  d'argent  etd'or,et  leurfit  de 
grands  présents;  et  il  fut  fort  bien  reçudecesdeux  princes. 

61.  Alors  quelques  Israélites  qui  étaient  des  hommes 
couverts  d'iniquité,  et  comme  des  pestes  publiques, 
s'unirent  ensemble  pour  présenter  des  chefs  d'accusa- 
tion contre  lui  ;  mais  le  roi  ne  voulut  point  les  écouter. 

62.  Il  ordonna  même  qu'on  ôtàt  à  Jonathas  ses  vête- 
ments, et  qu'on  le  revêtit  de  pourpre;  ce  qui  fut  fait  : 
et  le  roi  le  fit  asseoir  près  de  lui. 

6;.  Et  il  dit  aux  grands  de  sa  cour  :  Allez  avec  lui  au 
milieu  de  la  ville,  et  dites  tout  haut  :  Que  nul  n'entre- 
prenne de  former  aucune  plainte  contre  lui,  et  ne  lui 
fasse  aucune  peine,  pour  quelque  aifaire  que  ce  puisse 
être. 

64.  Ceux  donc  qui  étaient  venus  pour  l'accuser, voyant 
ce  qu'on  publiait  de  lui,  et  la  pourpre  dont  il  était  revê- 
tu, s'enfuirent  tous. 

65.  Le  roi  l'éleva  en  grand  honneur,  le  mit  au  nombre 
de  ses  principaux  amis,  et  l'établit  chef,  et  prince  asso- 
cié. 

66.  Et  Jonathas  revint  à  Jérusalem  en  paix  et  avjc 
joie. 

67.  En  la  cent  soixante-cinquième  année,  Demetrius, 
fils  de  Demetrius,  vint  de  Crète  au  pays  de  ses  pères. 

68.  Le  roi  Alexandre  en  ayant  été  averti,  en  fut  extrê- 
mement affligé,  et  retourna  à  Antioche. 

60.  Le  roi  Demetrius  fit  général  Av.  ses  troupes  Apol- 
lonius, gouverneur  de  la  Cœlé-Syrie,  lequel  leva  une 
grande  armée  ;  et,  étant  venu  à  Jamnia,  il  envoya  dire  à 
Jonathas  grand  prêtre 

ENTAIRE 

depuis  surnommé  Nicalor,  et  Anliochus  SiJétès,  à 
Cnide,  chez  un  de  ses  amis  (2),  pendant  les  trou- 
bles de  son  royaume.  Après  sa  mort,  et  en  l'an 
148,  Demetrius  Nicator,  l'aîné  de  ses  fils,  ayant 
appris  qu'Alexandre  s'était  plongé  dans  la  débau- 
che et  dans  la  négligence,  se  mit  à  la  tête  de 
quelques  troupes,  qu'il  avait  reçues  de  Lasthène 
de  Crète,  et  passa  en  Cilicie.  Alexandre  en  ayant 
été  informé,  quitta  la  Phénicie,  où  il  était  alors, 
et  vint  en  grande  hâte  à  Antioche,  pour  mettre 
ordre  à  ses  affaires,  avant  l'arrivée  de  Deme- 
trius (3),  en  147. 

y.  69.  Constituit  Demetrius  rex  Apollo- 
nium ducem.  Apollonius,  qui  avait  été  établi 
gouverneur  de  laCcelé-Syrie  par  Alexandre, quitta 


(1)  Psalm.  1.  1.  -  Prov.  xix.  2$;  xxi.  24;  xxn.  30;  xxiv.  9.  (j)  Justin.  I.  xxxv.  c.  2.  -  Diodor.  Sicut.  in  excerp,    VaUs. 

(2)  Lin.  L.  lu.  et  Justin.  '..  xxxv.  Usser.  ad  an.  3856.  -  Joseph.  Antiq.  t.  xni.  c.  8. 


II 


1.  —  MACCABÉES.  —  X.  -  APOLLONIUS  FT  JONATHAS 


70.  Dicens  :  Tu  solus  resislis  nobis  ;  ego  autem  lactus 
sum  in  derisum  et  in  opprobrium,  prop'.erea  quia  tu 
potestatem  adversum  nos  exerces  in  montibus. 

71.  Nunc  ergo  si  confidis  in  virtutibus  tuis,  descende 
ad  nos  in  campum,  et  comparemus  illic  invicem;  quia 
mecum  est  virtus  bellorum. 

72.  Interroga,  et  disce  quis  sum  ego,  et  ceteri  qui 
auxilio  sunt  mihi,  qui  et  dicunt  quia  non  potest  stare  pes 
vester  ante  faciem  nostram,  quia  bis  in  fugam  conversi 
sunt  patres  tui  in  terra  sua; 

7J.  Et  nunc  quomodo  poteris  sustinere  equitatum  et 
exercitum  tantum  in  campo  ubi  non  est  lapis,  neque 
saxum,  neque  locus  fugiendi  ? 

74.  Ut  audivit  autem  Jonathas  sermones  Apollonii, 
motus  est  animo  :  et  elegit  decem  millia  virorum,et  exiit 
ab  Jérusalem,  et  occurrit  ei  Simon,  frater  ejus,  in  adjuto- 
rium  ; 

75.  Et  applicuerunt  castra  in  Joppen,  et  exclusif  eum 
a  civitate,  quia  custodia  Apollon'i  Joppe  erat,  et  oppu- 
gnavit  eam. 

76.  Et  exterriti  qui  erant  in  civitate  aperuerunt  ei,  et 
obtinuit  Jonathas  Joppen. 

77.  Et  audivit  Apollonius,  et  admovit  tria  millia  equi- 
tum  et  exercitum  multum. 


70.  Ces  paroles  :  Vous  êtes  le  seul  qui  nous  résiste?:  ; 
et  je  suis  devenu  un  sujet  de  risée  et  d'opprobre,  parce 
que  vous  vous  prévalez  contre  nous  de  l'avantage  que 
vous  avez  sur  vos  montagnes. 

71.  Si  vous  vous  fiez  donc  maintenant  en  vos  troupes, 
descendez  à  nous  dans  la  plaine  ;  et  faisons  là  l'essai  de 
nos  forces;  car  la  valeur  et  la  victoire  m'accompa- 
gnent toujours. 

72.  Informez-vous,  et  apprenez  qui  je  suis,  et  qui  sont 
ceux  qui  combattent  avec  moi,  lesquels  disent  haute- 
ment que  vous  ne  pouvez  tenir  ferme  devant  nous,  parce 
que  vos  pères  ont  été  mis  en  fuite  par  deux  fois  dans 
leur  pays. 

7;.  Comment  donc  pourrez-vous  soutenir  présen- 
tement l'effort  de  ma  cavalerie  et  d'une  si  grande  armée, 
dans  une  campagne  où  il  n'y  a  ni  pierres  ni  rochers,  ni 
aucun  lieu  pour  vous  enfuir? 

74.  Jonathas  ayant  entendu  ces  paroles  d'Apollonius, 
fut  ému  au  fond  de  son  cœur  ;  et  il  choisit  dix  mille  hom- 
mes, et  partit  de  Jérusalem,  et  Simon  son  frère,  vint  à 
son  secours. 

7<j.  Ils  vinrent  camper  près  de  Joppé;  et  les  habitants 
de  la  ville  lui  fermèrent  les  portes,  parce  que  Joppé 
avait  une  garnison  d'Apollonius  :  Jonathas  assiégea  donc 
cette  ville. 

70.  Les  habitants  de  la  ville  étant  épouvantés,  lui  ou- 
vrirent les  portes  :  et  il  se  rendit  ainsi  maître  de  Joppé. 

77.  Apollonius  l'ayant  su,  prit  avec  lui  trois  mille  che- 
vaux et  beaucoup  de  troupes. 


COMMENTAIRE 


son  parti,  et  se  jeta  du  côté  du  jeune  Démétrius. 
Celui-ci  lui  confia  le  commandement  de  ses  trou- 
pes, et  lui  ordonna  de  marcher  contre  les  Juifs, 
qui  demeuraient  fermes  dans  l'alliance  d'Alexan- 
dre. 

f.  70.  Ego  autem  factus  sum  in  derisum.  Je 
suis  devenu  un  sujet  de  risée,  de  m'attacher  à  un 
ennemi  tel  que  vous,  dont  toute  la  force  consiste 
en  des  montagnes  inaccessibles,  où  vous  vous 
tenez  :  osez  paraître  en  rase  campagne,  si  vous  êtes 
des  hommes  de  cœur,  et  venez  éprouver  vos  forces 
contre  les  miennes. 

jh    72.    BlS  IN  FUGAM  CONVERSI  SUNT  PATRES  TUI. 

Vos  pères  ont  été  mis  en  fuite  par  deux  fois;  c'est- 
à-dire,  plusieurs  fois,  dit  Josèphe.  Apollonius 
veut  peut-être  marquer  la  défaite  de  Joseph  et 
d'Azarias,  qui  avaient  combattu  contre  Gorgias, 
malgré  les  ordres  de  Judas  (1),  et  la  déroute  de 
l'armée  de  Judas,  dans  le  dernier  combat,  où  ce 
héros  fut  tué  (2). 

f.  74.  Ut  audivit  autem  Jonathas  sermones 
Apollonii,  motus  est  animo.  C'est  une  parole 
très  commune  dans  les  Écritures,  et  confirmée 
par  l'expérience  de  tous  les  siècles,  que  les  gran- 
des chutes  sont  précédées  ordinairement  par  un 
grand  orgueil;  et  que  les  impies,  dans  le  temps 
même   qu'ils  s'élèvent   le    plus    audaciéusement, 


approchent  le  plus  près  du  précipice.  A  entendre 
les  insultes  d'Apollonius,  on  eût  cru  entendre 
encore  l'impie  Goliath,  qui  insultait  du  temps  de 
Saùl,  avec  tant  d'impudence,  au  camp  d'Israël  et 
au  peuple  du  Seigneur.  Il  se  fiait,  en  la  force  de 
la  cavalerie,  et  en  la  grande  multitude  de  ses 
troupes!  Et  il  croyait  que  Jonathas  mettait  comme 
lui  sa  confiance  dans  la  force  de  ses  soldats  :  Si 
vous  vous  fie\,  lui  disait-il,  en  vos  troupes,  descen- 
de^ à  nous  dans  la  plaine,  et  faisons  ensemble  l'essai 
de  nos  forces. 

Mais  cet  homme  vain,  qui  se  regardait  comme 
invincible,  mecum  est,  dit-il,  virtus  bellorum, 
jugeait  des  choses  d'une  manière  bien  différente 
de  Jonathas,  qui  pouvait  lui  répondre  avec  le  roi 
prophète  :  Pour  nous,  notre  force  est  dans  l'invo- 
cation du  nom  adorable  de  notre  Dieu  :  Nos  au- 
tem in  nomine  Domini  Dei  noslri  invocabimus  (j). 
Ce  fut  là  sans  doute  la  principale  cause  de  cette 
grande  émotion  que  ressentit  Jonathas,  en  enten- 
dant les  paroles  insolentes  d'Apollonius,  qui 
s'attribuait  ridiculement  un  titre  qui  n'appartient 
qu'au  Dieu  des  armées,  d'être  invincible  dans  les 
guerres.  Aussi  n'hésita-t-il  point  d'aller  l'attaquer. 

j^.  77.  Tria  millia  equitum  et  exercitum 
multum.  Josèphe  lui  donne  huit  mille  hommes  de 
pied  et  trois  mille  chevaux. 


[i)  1.  A.'acc.  v.  00.—  v2)  r  ace.  îx  M.  6.  18. 


(j)  Psalm.  xix.  8. 


I, 


MACCABEES. 


X.  -   DÉFAITE   D'APOLLONIUS 


ii3 


78.  Etablit  Azotum  tanquam  iter  faciens,  et  statimcxiit 
in  campuin,  eo  quod  haberet  multitudinem  equitum,  et 
confideret  in  ois.  Et  insecutus  est  eum  Jonalhas  in  Azo- 
tum, et  commiserunt  praslium. 

79.  Et  reliquit  Apollonius  in  oastris  mille  équités  post 
eos  occulte. 

80.  Et  cognovit  Jonathas  quoniam  insidias  sunt  post  se. 
Et  circuierunt  castra  ejus,et  jecerunt  jacula  in  populum, 
a  mane  usque  ad  vesperam. 

81.  Populus  autem  stabat,  sicut  praeceperat  Jonathas; 
et  laboraverunt  equi  eorum. 

82.  Et  ejecit  Simon  exercitum  suum,  et  commisit  con- 
tra legionem,  équités  enim  fatigati  eranl  ;  et  contriti  sunt 
ab  eo,  et  fugerunt. 

8;.  Et  qui  dispersi  sunt  per  campum  fugerunt  in  Azo- 
tum, et  intraverunt  in  Bethdagon,  idolum  suum,  ut  ibi  se 
liberarent. 

84.  Et  succendit  Jonathas  Azotum  et  civitates  quae 
erant  in  circuitu  ejus,  et  accepit  spolia  eorum  ;  et  tem- 
plum  Dagon, et  omnes  qui  fugerunt  in  illud, succendit  igni. 

8ç.  Et  fuerunt  qui  ceciJerunt  gladio,  cum  his  qui  suc- 
censi  sunt,  fere  octo  millia  virorum. 

86.  Et  movit  inde  Jonathas  castra,  et  applicuit  ea  As- 
calonem;  et  exierunt  de  civitate  obviam  illi  in  magna 
gloria. 

87.  Et  reversus  est  Jonathas  in  Jérusalem  cum  suis, 
habentibus  spolia  multa. 

88.  Et  factum  est,  ut  audivit  Alexander  rex  sermones 
istos,  addidit  adhuc  glorificare  Jonathan. 

80.  Et  misit  ei  fibulam  auream,  sicut  consuetudo  est 
dan  cognatis  regum;  et  dédit  ei  Accaron  et  omnes  fines 
ejus,  in  possessionem. 


78.  Il  marcha  comme  pour  aller  vers  Azot,  et  il  se 
jeta  tout  d'un  coup  dans  la  plaine,  parce  qu'il  avait  beau- 
coup de  cavalerie  en  laquelle  il  se  fiait  principalement. 
Jonathas  le  suivit  vers  Azot,  et  i's  livrèrent  bataille. 

79.  Apollonius  avait  laissé  secrètement  dans  son  camp 
mille  chevaux  derrière  les  ennemis  ; 

80.  Et  Jonathas  fut  averti  qu'il  y  avait  derrière  lui  une 
embuscade  :  les  ennemis  environnèrent  donc  son  camp, 
et  lancèrent  beaucoup  de  traits  contre  les  gens,  depuis 
le  matin  jusqu'au  soir. 

81.  Mais  les  gens  de  Jonathas  demeurèrent  fermes, 
selon  l'ordre  qu'il  leur  en  avait  donné.  Cependant  les 
chevaux  des  ennemis  se   fatiguèrent  beaucoup. 

82.  Alors  Simon  fit  avancer  ses  troupes,  et  attaqua 
l'infanterie,  parce  que  la  cavalerie  était  déjà  fatiguée  ;  et 
l'ayant  rompue,  elle  prit  la  fuite. 

8j.  Et  ceux  qui  se  dispersèrent  dans  la  campagne  se 
réfugièrent  à  Azot, et  entrèrent  dans  le  temple  de  Dagon 
leur  idole,  pour  y  être  en  sûreté. 

84.  Mais  Jonathas  brûla  Azot  et  les  villes  desenvirons; 
et  il  emporta  les  dépouilles  :  et  il  brûla  aussi  le  temple 
de  Dagon,  avec  tous  ceux  qui  s'y  étaient  réfugiés. 

8^.  Il  y  périt  près  de  huit  mille  hommes,  tant  de  ceux 
qui  furent  tués  par  l'épée,que  de  ceux  qui  furent  brûlés. 

86.  Jonathas  ayant  décampé  de  ce  lieu,  marcha  contre 
Ascalon;mais  les  habitants  de  la  ville  sortirent  au  devant 
de  lui,  et  le  reçurent  avec  de  grands  honneurs. 

87.  Il  revint  ensuite  à  Jérusalem  avec  ses  gens  chargés 
de  butin. 

88.  Le  roi  Alexandre  ayant  appris  ces  nouvelles,  éleva 
encore  Jonathas  à  un  plus  haut  degré  de  gloire. 

89.  Et  il  lui  envoya  une  agrafe  d'or,  telle  qu'on  en 
donnait  d'ordinaire  aux  princes  du  sang  royal  :  il  lui 
donna  de  plus  Accaron,  avec  tout  son  territoire,  afin 
qu'il  la  possédât  en  propre. 


COMMENTAIRE 


fi.  80.  Circuierunt  castra  ejus.  Les  ennemis 
environnèrent  son  camp,  ou  plutôt  son  armée  ; 
car,  l'auteur  de  ce  livre  donne  ordinairement  le 
nom  de  castra,  le  camp,  à  l'armée,  surtout  à 
l'infanterie.  Josèphe  explique  autrement  le  texte 
de  cet  endroit  (1).  Il  dit  que  Jonathas  ayant 
aperçu  les  ennemis  qui  venaient  par  derrière,  n'en 
fut  pas  troublé;  mais  qu'ayant  rangé  ses  troupes, 
en  un  bataillon  carré  (à  la  lettre,  comme  une 
tuile,  selon  la  forme  de  la  phalange  macédo- 
nienne) ;  il  leur  ordonna  de  faire  face  de  tous 
côtés. 

fi.  82.  Et  ejecit  Simon  exercitum   suum,  et 

COMM1S1T    CONTRA     LEGIONEM.    Simon    détacha    SCS 

troupes,  et  attaqua  l'infanterie,  ou  la  phalange  des 
ennemis.  Ce  fut  seulement  vers  le  soir  que 
Simon,  voyant  la  cavalerie  fatiguée  et  l'infanterie 
épuisée,  détacha  le  corps  de  troupes  qu'il  com- 
mandait, et  se  jeta  sur  l'infanterie  ennemie. 


fi.  83.  Et  qui  dispersi  sunt  per  campum  fuge- 
runt in  Azotum.  Il  y  a  beaucoup  d'apparence 
que  les  copistes  ont  mis  et  qui  pour  equi  ;  car  le 
texte  porte  (2)  :  La  cavalerie  fut  dispersée  dans  la 
plaine,  et  se  sauva  vers  Azot. 

Intraverunt  in  Bethdagon,  idolum  suum  (3). 
Le  grec.Ils  entrèrent  dans  le  temple  de  Dagon, leur 
lieu  d'idole.  Il  porte  idolium  suum,  au  lieu  d'idolum 
suum,  qui  pourrait  bien  être  une  faute  du  copiste 
latin  ;  car  la  construction,  intraverunt  in  idolum 
suum,  n'est  pas  naturelle.  Belh-dagon  en  hébreu 
psi  n»=  signifie  la  maison,  ou  temple  de  Dagon. 
On  a  parlé  de  cet  idole  sur  les  Juges  (4). 

fi.  89.  Misit  ei  fibulam  auream.  L'agrafe 
d'or  était  une  marque  de  distinction  parmi  les 
Grecs (5)  et  parmi  les  Perses  (6),  à  qui  les  Macé- 
doniens avaient  sans  doute  emprunté  ces  marques 
de  dignité.  Les  Romains  furent  jaloux  de  cet 
honneur.    On  ne  donnait  d'abord   la  boucle  d'or 


(1)  Kaî  Ëzôy.Xcoaav  âutoû  irçy  7Cap£u.6<Àr)v,  xa't  ÊÇetêîvafav 
iâ;  o//Ça;  Et;  xov  >.âov,  etc.  Joseph.  Antiq.  xui.  8.  TaÇa; 
oe  zi\<i  a-rpauav  Év  nXivOtoj  xat'  aiioôispa  Toù;  Kokiaiouç 
oi[j.ôveaÛat  TCap£-/.eXsûaa-:o. 

(2)  Ka;  i)  [kko;   EaxopjtiVjï)   sv    :oi    rceôtu>,  xai   ïyuyov  il; 

S.  B.  -  T.  XII. 


ATtoTov.  Ita  et  Srr.  et  Joseph. 

(?)   Kai  siafjXO'jv  Et;  fiqDùxyd)'/  '.o  stSùAstOV  âuTàlv. 
(4)  Judic.  XVI.   2). 

(<,)  Voyez  1.  M  ace.  xi.  58.  et  xiv.  44.  et  11.  Macc.  xt.  55. 
(6)  Alex,  ab  Alex.  Génial,  dier.  I.  11.  c.  29. 


'M 


I. 


MACCABEES. 


X.  -  HONNEURS  ACCORDÉS  A  JONATHAS 


qu'aux  tribuns  militaires  ;  ensuite  on  en  récom- 
pensa jusqu'aux  simples  soldats,  pour  des  actions 
d'une  valeur  extraordinaire  (i).  L'agrafe  se  por- 
tait sur  l'épaule,  comme  le  dit  saint  Isidore,  et 
comme  on  le  remarque  dans  les  médailles.  Quant 
aux  parents  du  roi  dont  il  est  parlé  ici,  c'étaient 
des  personnes  de  la  première  dignité  à  la  cour  des 
rois  de  Perse  ;  souvent   ils  ne  touchaient  nulle- 


ment au  roi  par  le  sang,  ni  par  les  alliances  :  on 
leur  donnait  le  nom  de  parents,  par  distinction  et 
par  honneur.  Aman  était  nommé  le  père  du  roi 
Assuérus  (2);  Quinte-Curce  compte  jusqu'à  quinze 
mille  parents  du  roi  Darius  (3),  cognati  régis. 
Xénophon  parle  de  cette  dignité  avec  beaucoup 
d 'estime  (4\On  verra  au  chapitre  suivant  (^Lasthène 
nommé  parent  du  roi,  et  père  de  Démétrius. 


(1)  TU.  Liv.  xxxix.   ;i.  -    Plin.   xxxm. 
Alex.  Génial,  dicr.  cl  not.  Tiraquel. 

(2)  Esth.  xvi.  1 1. 


12.  -  Alex,   al 


1 5)  Quint.  Curt.  I .  m. 

(4)  Xcnopk.  Cyropxd.  L  vin 

(5)  1.  Macc.  xi.   ji.  et  î2. 


CHAPITRE    XI 

Ptolémée  Philométor  envahit  le  royaume  d'Alexandre  Balas.  Combat  entre  ces  deux 
princes.  Alexandre  se  sauve;  on  lui  tranche  la  tête.  Ptolémée  meurt.  Démétrius  Nicator 
monte  sur  le  trône,  comble  d'honneurs  Jonalhas,  accorde  plusieurs  privilèges  aux  Juifs. 
Entreprise  de  Tryphon.  Soulèvement  à  A  ntioche.  Les  Juif  s  sauvent  Démétrius.  Ingratitude 
de  ce  prince.  Antiochus  Théos  est  mis  sur  le  trône  et  recherche  l'amitié  de  Jonathas. 
Guerre  de  Jonathas  contre  les  troupes  de  Démétrius. 


i.  Et  rex  /Egypti  congregavit  exercitum,  sicut  arena 
quae  est  circa  oram  maris,  et  naves  multas  :  et  quœrebat 
obtinere  regnu.ti  Alexandri  dolo,  et  addere  illud  regno 
suo. 

2.  Et  exiit  in  Syriam  verbis  pacificis;  et  aperiebant  ei 
civitates,  et  occurrebant  ei,  quia  mandaverat  Alexander 
rex  exire  ei  obviam,  eo  quod  socer  suus  esset. 

;.  Cum  autem  introiret  civitatem  Ptolemasus,  ponebat 
custodias  militum  in  singulis  civilatibus. 

4.  Et  ut  appropiavit  Azoto,  ostenderunt  ei  templum 
Dagon  succensum  igni  et  Azotum,  et  cetera  ejus  demolita, 
et  corpora  projccta,  et  eorum  qui  cœsi  erant  in  bello 
tumulos  quos  fecerant  secus  viam. 


1.  Après  cela,  le  roi  d'Egypte  rassembla  une  armée 
qui  était  comme  le  sable  du  rivage  de  la  mer,  et  un  grand 
nombre  de  vaisseaux;  et  il  cherchait  à  se  rendre  maître 
par  surprise  du  royaume  d'Alexandre,  et  à  l'ajouter  au 
sien. 

2.  Il  marcha  d'abord  comme  ami  dans  la  Syrie  ;  et  les 
habitants  des  villes  lui  ouvraient  les  portes,  et  venaient 
au  devant  de  lui,  selon  l'ordre  qu'Alexandre  leur  avait 
donné,  parce  que  le  roi  d'Egypte  était  son  beau-père. 

5.  Mais  aussitôt  que  Ptolémée  était  entré  dans  une 
ville,  il  y  mettait  une  garnison  de  ses  gens. 

4.  Lorsqu'il  fut  venu  près  d'Azot,  on  lui  montra  le 
temple  de  Dagon  qui  avait  été  brûlé,  les  ruines  de  la 
ville  d'Azot,  plusieurs  corps  qui  étaient  encore  sur  la 
terre,  et  tous  les  autres  qui  avaient  été  tués  dans 
la  guerre,  et  qu'on  avait  amassés  dans  des  sépultures 
communes  le  Ions  du  chemin. 


COMMENTAIRE 


jh  1.  Rex  .tEgypti  qu/erebat  obtinere  regnum 
Alexandri  dolo.  Ptolomée  Philométor,  roi 
d'Egypte,  avait  eu  des  vues  d'intérêt,  en  se  joi- 
gnant à  Alexandre  Balas,  pour  détrôner  Démé- 
trius Soter,  et  en  lui  donnant  sa  fille  en  mariage. 
Son  dessein  était  de  réunir  les  deux  royaumes  de 


mauvais  dessein  ;  et,  pour  colorer  sa  trahison,  il 
publie  qu'Alexandre  a  voulu  le  surprendre,  en  lui 
dressant  des  embûches  dans  Ptolémaïs.  Il  s'avance 
alors  jusqu'à  Antioche,  sans  trouver  de  résistance. 
Ammonius  est  abandonné,  le  roi  d'Egypte  prend 
possession   du  royaume  de  Syrie,  et  met  sur  sa 


Syrie  et  d'Egypte,  comme  ils  l'avaient  été  autre-      tète  les   deux  diadèmes.  Alexandre  était  occupé 

dans  la  Cilicie,  qui  avait  été  soulevée  par  Démé- 
trius. Il  y  assembla  beaucoup  de  troupes,  et,  de 
là,  vint  avec  son  armée  dans  la  Syrie.  Pendant  ce 
temps,  Ptolémée  avait  donné  à  Démétrius  Nica- 
tor,   sa    fille,    qui  avait   épousé  Alexandre.   Ces 


fois.  Alexandre  étant  monté  sur  le  trône  d'une 
manière  inespérée,  s'abandonna  à  la  débauche,  et 
laissa  le  gouvernement  à  Ammonius  ;  les  cruautés 
d'Ammonius  et  la  lâcheté  d'Alexandre,  les  rendi- 
rent odieux  et  méprisables.  Démétrius  Nicator, 


fils  aîné  de  Démétrius  Soter,  profita  de  ces  con-  deux  princes  alliés  marchèrent  contre  Alexandre, 
jonctures  et  déclara  la  guerre  à  Alexandre,  ainsi  lui  livrèrent  la  bataille,  et  l'obligèrent  à  s'enfuir 
qu'on  l'a  vu  dans  le  chapitre  précédent.  Ptolomée      en  Arabie,  avec  cinq  cents  hommes  (1). 


Philométor  feignit  d'aller  au  secours  d'Alexandre, 
son  gendre,  mais  avec  la  résolution  secrète  de  se 
rendre  maître  de  ses  états.  Sous  le  spécieux  pré- 
texte d'assister  Alexandre,  il  lève  une  grande  ar- 
mée de  mer  et  de  terre,  et  s'avance  vers  la  Syrie. 
Toutes  lesvilleslereçoiventcommeami,  et  comme 
beau-père  du  roi  ;  Ptolémée  en  profite  pour  met- 
tre partout  des  garnisons.    Enfin,  il  découvre  son 


jfr.  3.  Cum  introiret  civitatem  Ptolem/eus, 
ponebat  custodias  militum.  Plusieurs  exemplai- 
res grecs  (2)  lisent  :  Aussitôt  quil  fût  entré  dans 
ta  ville  de  Ptolémaïde,  d  y  mit  une  garnison,  etc. 
Mais  l'édition  romaine,  le  syriaque,  et  Josèphe 
lisent  Ptolémée,  ce  qui  fait  un  bien  meilleur  sens. 

f.  4.  Eorum  qui  cesi  erant  in  bello  tumu- 
los. Ces  monceaux  de  cadavres  avaient  pour  but 


(1)  Vide  Usser.  ad  an.  $8$8.  -  Joscj.li.  Antiq.  twn.  C.8.- 
Diodor.  t.  xxxu.  -  Epilotn.  Liv.  lu.  -  Justin,  t.  xxxv. 


(2)  Ms.  Alex,  alia  cdit,  Gr.  prxtcr  Rom. 


n6 


MACCABEES. 


XI.-   FUITE   D'ALEXANDRE   BALAS 


'-..  Et  narraverunt  régi  quia  hœc  fecit  Jonathas,  utinvi- 
diam  facerent  ei  ;  et  tacuit  rex. 

6.  Et  occurrit  Jonathas  régi  in  Jcppen  cum  gloria;  et 
invicem  se  salutaverunt,  et  dormierunt  illic. 

7.  Et  abiit  Jonathas  cum  rege  usque  ad  fluvium  qui 
vocatur  Eleutherus,  et  reversus  est  in  Jérusalem. 

8.  Rex  autem  Ptolemœus  obtinuit  dominium  civitatum 
usque  Seleuciam  marilimam,  et  cogitabal  in  Alexandrum 
consiiia  mala. 

0.  Et  misit  legatos  ad  Demetrium,  dicens  :  Veni,  com- 
ponamus  inter  nos  pactum  ;  et  dabo  tibi  filiam  meam 
quam    habet  Alexander,  et  regnabis  in  regno   patris  ta i. 


10.  Pœnitet  enim  me  quod  dederim  illi  filiam  meam  ; 
quœsivit  enim  me  occidere. 

11.  Et  vituperavit  eum,  propterea  quod  concupierat 
regnum  ejus. 

12.  Et  abstulit  filiam  suam,  et  dédit  eam  Demetrio,  et 
alienavit  se  ab  Alexandro;  et  manifestatœ  sunt  inimicitiœ 
ejus. 

i;.  Et  intravit  Ptolemœus  Antiochiam,  et  imposait  duo 
diademata  capiti  suo,  /Egypti  et  Asiœ. 

14.  Alexander  autem  rex  erat  in  Cilicia  illistemporibus, 
quia  rebellabant  qui  erant  in  locis  illis. 

1  ç.  Et  audivit  Alexander,  et  venit  ad  eum  in  bellum  ; 
et  produxit  Ptolemœus  rex  exercitum,  et  occurit  ei  in 
manu  valida,  et  fugavit  eum. 

16.  Et  fugit  Alexander  in  Arabiam,  ut  ibi  protegeretur; 
rex  autem  Ptolemœus  exaltatus  est. 


<,.  Et  ils  dirent  au  roi  que  c'était  Jonathas  qui  avait  fait 
tous  ces  maux;  voulant  ainsi  le  rendre  odieux  dans  son 
esprit  :  mais  le  roi  ne  répondit  rien. 

6.  Jonathas  vint  ensuite  avec  grand  éclat  trouver  le 
roi  à  Joppé  ;  ils  se  saluèrent,  et  passèrent  la  nuit  en  ce 
lieu  ; 

7.  Et  Jonathas  ayant  accompagné  le  roi  jusqu'au  fleuve 
qu'on  nomme  Éleuthère,  revint  à  Jérusalem. 

8.  Or  le  roi  Ptolémée  se  rendit  maître  des  villes  jus- 
qu'à Séleucie,  qui  est  au  bord  de  la  mer;  et  il  avait  de 
mauvais  desseins  contre  Alexandre, 

9.  Et  il  envoya  des  ambassadeurs  à  Démétrius,  pour 
lui  dire  de  sa  part:  Venez,  afin  que  nous  fassions  alliance 
ensemble  ;  et  je  vous  donnerai  ma  fille  qu'Alexandre  a 
épousée,  et  vous  rentrerez  dans  le  royaume  de  votre 
père. 

10.  Car  je  me  repends  de  lui  avoir  donné  ma  fille  en 
mariage,  parce  qu'il  a  cherché  les  moyens  de  me  tuer. 

11.  Il  l'accusait  de  la  sorte,  par  ;le  désir  qu'il  avait  de 
lui  enlever  son  royaume. 

12.  Rt  enfin  lui  ayant  ûté  sa  fille,  il  la  donna  à  Démé- 
trius, et  s'éloigna  tout  à  fait  d'Alexandre  ;  et  alors  son 
inimitié  se  manifesta  publiquement. 

1  j.  Ptolémée  entra  ensuite  dans  Antioche,  et  se  mit  sur 
la  tête  deux  diadèmes,  celui  d'Egypte  et  celui  d'Asie. 

14.  Le  roi  Alexandre  était  alors  en  Cilicie,  parce  que 
les  habitants  de  ces  régions  s'étaient  révoltés  contre  lui. 

1 5.  Ayant  donc  appris  ces  choses,  il  marcha  avec  ses 
troupes  pour  le  combattre;  et  le  roi  Ptolémée  fit  mar- 
cher aussi  ses  gens,  et  vint  au  devant  de  lui  avec  une 
puissante  armée,  et  le  défit. 

16.  Alexandre  s'enfuit  en  Arabie,  pour  y  trouver  quel- 
que protection;  et  le  roi  Ptolémée  fut  élevé  en  grande 
gloire. 


COMMENTAIRE 


de  rendre  odieuse  la  conduite  de  Jonathas,  et 
d'irriter  contre  lui  le  roi  d'Egypte.  Mais  ce  prince 
avait  alors  bien  autre  chose  dans  l'esprit;  il 
n'avait  garde  d'aigrir  Jonathas. 

}.  7.  Usque  ad  fluvium  qui  vocatur  Eleu- 
therus. Les  géographes  ne  conviennent  pas  de 
la  situation  de  ce  fleuve.  Les  uns  le  mettent  entre 
Tyr  et  Sidon,  d'autres  au  delà  du  L'rban.  I!  coule 
entre  Tripoli  et  Antarade,  et  porte  aujourd'hui 
le  nom  de  Nahr-el-Kebir. 

f.  8.  Usque  Seleuciam  maritimam.  Jusqu'à 
Séleucie  qui  est  au  bord  de  la  mer,  sur  l'embou- 
chure de  l'Oronte. 

jr.  10.  Qu^sivit  me  occidere.  Ptolémée  fei- 
gnit qu'Ammonius  lui  avait  dressé  des  embûches 
à  Ptolémaïs,  et  qu'Alexandre  n'avait  pas  voulu 
le  lui  livrer,  pour  en  faire  justice  (1).  Josèphe 
prend  cette  accusation  au  sérieux,  et  la  croit  vé- 
ritable ;  mais  l'historien  sacré  insinue  que  ce 
n'était  qu'un  prétexte  de  Ptolémée,  pour  rompre 
avec  son  gendre. 

^.13.  Intravit  Ptolemœus  Antiochiam.  Cette 
ville  et  toute  la  province  se  révoltèrent  contre 
Alexandre,  à  cause  d'Ammonius,  dont  ils  avaient 


été  maltraités.  Alexandre,  occupé  alors  à  mainte- 
nir la  Cilicie,  n'avait  pu  intervenir.  Antioche  ou- 
vrit ses  portes  à  Ptolémée  et  le  proclama  roi.  Am- 
monius  s'étant  déguisé  en  femme  pour  se  sauver 
fut  tué.  Ptolémée,  qui  avait  donné  sa  fille  Cléo- 
pâtre  à  Démétrius  Nicator,  pria  les  habitants 
d'Antioche  d'oublier  les  injures  qu'ils  avaient 
reçues  de  Démétrius  Soter,  et  de  recevoir  Démé- 
trius Nicator,  son  gendre,  pour  roi  ;  pour  lui,  il 
se  contentait  du  royaume  d'Egypte,  et  ne  préten- 
dait pas  garder  celui  de  Syrie,  qu'ils  lui  avaient 
déféré  (2). 
f.  14.  Alexander  autem  rex  erat  in  Cilicia... 

QUIA  REBELLABANT     QUI  ERANT    IN    LOCIS    ILLIS.    Le 

texte  semble  dire  qu'Alexandre  était  allé  en  Cili- 
cie, parce  que  cette  province  s'était  révoltée  con- 
tre lui.  11  y  a  deux  opinions  à  cet  égard.  D'après 
la  première,  ces  mots  in  locis  illis  doivent  s'en- 
tendre de  la  province  de  Syrie.  11  convient  donc 
de  traduire  le  verset  en  ce  sens  :  Le  roi  Alexandre 
était  alors  en  Cilicie,  parce  que  les  habitants  des 
provinces  syriennes  s'étaient  repolies  contre  lui. 
Josèphe  est  favorable  à  cette  opinion,  puisque, 
d'après  son  récit,  Alexandre  se  relira  en   Cilicie. 


(ij  Vide  Joseph.  Antiq.  I.  xm.  c, 
Reg.  Syr.  pag.  2.;o. 


8,   Ha   et    Vaillant  hist. 


(a)  Justin.  I.  xxxv.  -  Joseph.  Antiq.  XIII.  c.  8. 


MACCABÉES.  —  XI.  -   DÉMÉTRIUS   ET  JONATHAS 


1:7 


17.  Et  abstulit  Zabdiel  Arabs  caput  Alexandri,  et  misit 
Ptolemaeo. 

18.  Et  rex  Ptolemaeus  mortuus  est  in  die  tertia  ;  et  qui 
erant  in  munitionibus  perierunt  ab  his  qui  erant  inter 
castra. 

19.  Et  regnavit  Demetrius  anno  centesitno  sexagesimo 
septimo. 

20.  In  diebus  il  lis  congregavit  Jonathas  eos  qui  erant 
in  Judasa,  ut  expugnarent  arcem  quae  est  in  Jérusalem  ; 
et  fecerunt  contra  eam  machinas  multas. 

2t.  Et  abierunt  quidam  qui  oderant  gentem  suam  viri 
iniqui  ad  regem  Demetrium,  et  renuntiaverunt  ei  quod 
Jonathas  obsideret  arcem. 

22.  Et  ut  audivit,  iratus  est;  et  statim  venit  ad  Ptole- 
maidam,  et  scripsit  Jonathas  ne  obsideret  arcem,  sed 
occurreret  sibi  ad  colloquium  festinato. 

2?.  Ut  audivit  autem  Jonathas,  jussit  obsidere  ;  et  ele- 
git  de  senioribus  Israël,  et  de  sacerdotibus,  et  dédit  se 
perici'lo. 

24.  Et  accepit  aurum,  et  argentum,  et  vestem,  et  alia 
xenia  multa,  et  abiit  ad  regem  Ptolemaidam  ;  et  invenit 
gratiam  in  conspectu  ejus. 

25.  Et  interpellabant  adversus  eum  quidam  iniqui  ex 
gente  sua. 

26.  Et  fecit  ei  rex  sicut  fecerant  ei  qui  ante  eum  fue- 
rant,  et  exaltavit  eum  in  conspectu  omnium  amicorum 
suorum  ; 

27.  Et  statuit  ei  principatum  sacerdotii,  et  quascumque 
alia  habuit  prius  pretiosa,  et  fecit  eum  principem  amico- 
rum. 


17.  Mais  Zabdiel,  prince  des  Arabes,  fit  couper  la  tête 
d'Alexandre,  et  1  envoya  à  Ptolémée. 

18.  Trois  jours  après,  le  roi  Ptolémée  mourut,  et  ses 
gens,  qui  étaient  dans  les  forteresses,  furent  tués  par 
ceux  du  camp  de  Démétrius, 

19.  Qui  recouvra  son  royaume  en  la  cent  soixante- 
septième  année. 

20.  En  ce  même  temps,  Jonathas  rassembla  ceux  qui 
étaient  dans  la  Judée,  pour  prendre  la  forteresse  de 
Jérusalem  ;  et  ils  dressèrent  plusieurs  machines  de 
guerre  pour  la  forcer  : 

21.  Mais  quelques  méchants  qui  haïssaient  leur  nation, 
allèrent  trouver  le  roi  Démétrius,  et  lui  rapportèrent 
que  Jonathas  assiégeait  la  forteresse. 

22.  Démétrius  l'ayant  su,  entra  en  colère  ;  il  vint  aus- 
sitôt à  Ptolémaïs,  et  il  écrivit  à  Jonathas  de  ne  point 
assiéger  la  forteresse,  mais  de  venir  le  trouver  prompte- 
ment,  pour  conférer  avec  lui. 

25.  Jonathas  ayant  reçu  cette  lettre,  ordonna  que  Ton 
continuât  le  siège;  et  il  choisit  quelques-uns  des  anciens 
du  peuple  et  des  prêtres  ;  et  il  alla  avec  eux  s'exposer 
au  péril. 

24.  Il  prit  de  l'or,  de  l'argent,  de  riches  vêtements,  et 
beaucoup  d'autres  présents  et  se  rendit  près  du  roi  à 
Ptolémaïs;  et  il  trouva  grâce  devant  lui. 

25.  Quelques  hommes  perdus  de  sa  nation  formèrent 
encore  des  plaintes  et  des  accusations  contre  lui. 

2ô.  Mais  le  roi  le  traita  comme  l'avaient  traité  les 
princes  ses  prédécesseurs,  et  l'éleva  en  grand  honneur  à 
la  vue  de  tous  ses  amis. 

27.  Il  le  confirma  dans  la  souveraine  sacrificalure,  et 
dans  toutes  les  autres  marques  d'honneur  qu'il  avait  eues 
auparavant,  et  le  fit  le  premier  de  ses  amis. 


COMMENTAIRE 


La  seconde  opinion  veut  que  la  Cilicie  se  soit  ré- 
voltée, et  qu'Alexandre  y  soit  allé  pour  rétablir 
l'ordre.  Cette  opinion  n'est  pas  dépourvue  de 
vraisemblance,  puisque  c'était  en  Cilicie  que  Dé- 
métrius avait  débarqué.  11  est  évident  qu'il  n'au- 
rait pas  pris  terre  en  Cilicie  avec  ses  Cretois,  s'il 
n'y  avait  eu  quelques  intelligences.  Le  savant  juif 
S.  Munk  soutient  cette  seconde  opinion,  et  c'est 
aussi  la  nôtre. 

v.  17.  Abstulit  Zabdiel  Arabs  caput  Alexan- 
dri. Diodore  de  Sicile  appelle  Dioclès  ce  prince 
des  Arabes.  Les  historiens  (1)  nous  apprennent 
que  les  généraux  d'Alexandre,  pensant  à  leurs  in- 
térêts et  à  leur  sûreté,  après  la  retraite  de  leur 
maître,  traitèrent  en  particulier  avec  Démétrius, 
et  tuèrent  Alexandre,  dont  la  tète  fut  envoyée  à 
à  Ptolémée,  par  Zabdiel,  dont  on  a  parlé. 

T.   l8.    PtOLEM/EUS  MORTUUS  EST  IN  DIE   TERTIA. 

Ce  prince  avait  été  renversé  de  cheval,  dans  le 
combat,  car  son  cheval  s'était  effarouché  au  cri 
d'un  éléphant.  Les  soldats  d'Alexandre  s'étaient 
jetés  sur  lui,  et  lui  avaient  porté  plusieurs  coups 
sur  la  tête  ;  il  fut  délivré  à  grand'peine  par  ses 
gardes.  Il  demeura  quatre  jours  sans  connaissance, 
enfin  il  revint  à  lui  frappé    par  la  vue  de  la  tête 


d'Alexandre  son  ennemi.  Mais  trois  jours  après, 
les  médecins  ayant  voulu  essayer  le  trépan,  il 
mourut  dans  l'opération. 

Qui  erant  in  munitionibus  perierunt  ab  his 
qui  erant  intra  castra.  Après  la  mort  de  Ptolé- 
mée, les  troupes  qu'il  avait  laissées  dans  les  villes 
et  dans  les  forteresses  de  Syrie,  furent  tuées  par 
celles  de  Démétrius  Nicator,  son  gendre.  Ce 
jeune  prince,  oubliant  les  services  que  lui  avait 
rendus  Ptolémée,  maltraita  les  troupes,  qu'il  avait 
laissées  en  mourant  dans  la  Syrie,  et  les  obligea  à 
se  retirer  en  Egypte  (2). 

y.  19.  Et  regnavit  Demetrius  anno  cente- 
simo  sexagesi mo septimo.  En  l'an  146  avantJ.-C. 

y.  20  Ut  expugnarent  arcem  quje  est  in  Jé- 
rusalem. Démétrius  Soter,  père  de  Nicator,  avait 
offert  de  remettre  à  Jonathas  la  forteresse  de  Jé- 
rusalem, et  d'en  retirer  ses  troupes  (3);  mais  les 
Juifs  n'ayant  pas  jugé  à  propos  de  se  ranger  du 
parti  de  ce  prince,  ses  offres  n'avaient  point  eu 
d'effet;  la  citadelle  de  Jérusalem  était  demeurée 
entre  les  mains  des  Syriens.  Jonathas  voulut  donc 
en  entreprendre  le  siège. 

y.  27.  Fecit  eum  principem  amicorum.  Le 
grec  à  la   lettre  (4)  :  //  le  fit  chef  de  ses  premiers 


(1)  Vide  Usser.  ad  an.  jStf.-Polyb.  excerpt.  Vales.  p.  194. 
■  Diod.  Sicut.  I.  xxxiv.  in  Photii  Biblict.  etc. 


(2)  Joseph.  Antiq.  /.  xut.  c.   18.  —  (?)  1.  Macc.  x. 
(4)   B'7:o''r)Tev  âutôv  T<iy  Tcpok'nv  tfiXi^v  Tiye'tcrôa'.. 


II! 


I.—  MACCABÉF.S.-    XI.      CONCESSIONS   DE    DÉMÉTRIUS 


28.  Et  postulavit  Jonathas  a  rege  ut  immunem  faceret 
Judasam,  et  très  toparchias,  et  Samanam,  et  confinesejus; 
et  promisit  ei  talenta  trecenta. 

20.  Et  consensit  rex  ;  et  scripsit  Jonathas  epistolas  de 
his  omnibus,  hune  modum  continentes  : 

50.  Rex  Demetrius,  fratri  Jonathas,  salutem,  et  genti 
Judasorum. 

?i.  Exemplum  epistolas  quam  scripsimus  Lastheni, 
parenti  nostro,  de  vobis,  misitnus  ad  vos, ut  sciretis. 

52.   Rex  Demetrius,  Lastheni  parenti,  salutem. 

?}•  Genti  Judasorum,  amicis  nostris,  et  conservantibus 
quas  justa  sunt  apud  nos,  decrevimus  benefacere,  prop- 
ter  benignitatem  ipsorum,  quam  erga  nos  habent. 

34.  Statuimus  ergo  illis  omnes  fines  Judasas,et  très  civi- 
tates,  Lydan,  et  Ramathan,  quas  additae  sunt  Judasas  ex 
Samaria,  et  omnes  confines  earum,  sequestrari  omnibus 
sacrificantibus  in  Jerosolymis,  pro  his  quae  ab  eis  prius 
accipiebat  rex  per  singulos  annos,  et  pro  fruclibus  terrr« 
et  pomorum. 

1<>.  Et  alia  quas  ad  nos  pertinebant,  decimarum  et  tri- 
butorum,  ex  hoc  tempore  remittimtis  eis  ;  et  areas  sali- 
narum,  et  coronas  quas  nobis  deferebantur. 

;0.  Omnia  ipsis  concedimus  ;  et  nihil  horum  irritum 
erit  ex  hoc,  et  in  omne  tempus. 


28.  Jonathas  supplia  le  roi  de  donner  la  franchise  et 
l'immunité  à  la  Judée,  aux  trois  toparchies,  à  Samarie  et 
à  tout  son  territoire  ;  et  il  lui  promit  trois  cents  talents. 

29.  Le  roi  y  consentit  ;  et  il  fit  expédier  à  Jonathas, 
touchant  toutes  ces  affaires,  des  lettres  patentes  qui 
étaient  conçues  en  ces  termes  : 

jo.  Le  roi  Demetrius,  à  son  frère  Jonathas,  et  à  la 
nation  des  Juifs,  salut. 

?i.  Nous  vous  avons  envoyé  une  copie  de  la  lettre 
que  nous  avons  écrite  à  Lasthène,  notre  père,  touchant 
ce  qui  vous  regarde,  afin  que  vous  en   fussiez    informés. 

52.  Le  roi  Demetrius,  à  Lasthène,  son  père,  salut. 

;î.  Nous  avons  résolu  de  faire  du  bien  à  la  nation  des 
Juifs,  qui  sont  nos  amis,  et  qui  nous  conservent  la  fidé- 
lité qu'ils  nous  doivent,  à  cause  de  la  bonne  volonté 
qu'ils  ont  pour  nous. 

54.  Nous  avons  donc  ordonné  que  les  trois  villes, 
Lyda,  Ramatha  (et  Aphérima),  qui  ont  été  annexées  à  la 
Judée  du  territoire  de  Samarie,  avec  toutes  leurs  appar- 
tenances, seront  destinées  aux  prêtres  de  Jérusalem,  au 
lieu  des  impositions  que  le  roi  en  retirait  chaque  année, 
et  de  ce  qui  lui  revenait  des  fruits  de  la  terre  et  des 
arbres. 

;Ç.  Nous  leur  remettons  aussi  dès  à  présent  les  autres 
choses  qui  nous  appartenaient,  comme  les  dîmes  et  les 
tributs;  et  de  même  les  impôts  des  salines,  et  les  cou- 
ronnes qu'on  nous  apportait. 

;6.  Nous  leur  donnons  toutes  ces  choses;  et  cette  con- 
cession demeurera  ferme  dès  maintenant  et  pour  tou- 
jours. 


COMMENTAIRE 


amis.  Il  lui  donna  des  marques  d'une  distinction 
très  particulière,  et  d'une  parfaite  amitié. 

f.  28.  Très  toparchias  et  Samariam.  On  a 
déjà  parlé  précédemment  (1)  des  trois  toparchies 
ajoutées  à  la  Judée;  elles  étaient  démembrées  de 
la  Samarie.  Jonathas  rachète  les  tributs  et  les 
charges  que  Demetrius  pouvait  imposer  à  ces 
provinces,  pour  la  somme  une  fois  payée,  de 
trois  cents  talents,  soit  2.$ 50,000  francs. 

jr.  31.  Lastheni,  parenti  nostro. C'est  ce  Las- 
thène de  Crète,  qui  contribua  tant  à  mettre  Deme- 
trius sur  le  trône  de  ses  ancêtres,  en  lui  fournis- 
sant les  troupes  avec  lesquelles  il  passa  en  Cili- 
cie,  et  de  làen  Syrie.  Demetrius  l'en  récompensa, 
en  lui  confiant  la  principale  autorité,  et  le  gouver- 
nement du  royaume  ;  mais  comme  Lasthène  abu- 
sait visiblement  du  pouvoir,  il  jeta  bientôt  le  roi 
dans  de  nouveaux  dangers. 

f.  34.  Lydan,  et  Ramathan.  Le  grec  ajoute 
Aoaicî^ia  qui  manque  ici  dans  la  Vulgate.  Le  syria- 
que l'appelle  Aphrem.  C'est  la  ville  d'Aphérima, 
placée  dans  la  carte  qui  accompagne  l'ouvrage  de 
S.  Munk  au  nord  de  la  Nahr-el-Aujeh.  Lidda 
ou  Diospolis  est  bien  connue,  à  la  naissance  de 
la  vallée.    On  a  voulu  identifier  Ramatha  avec  la 


ville  de  Ramleh  actuelle  ;  mais  cette  identification 
est  loin  d'être  admise.  On  ne  peut  douter  toute- 
fois qu'il  n'y  ait  eu  dans  ces  parages,  même  aux 
origines  chrétiennes,  une  ville  de  Ramatha  ou  de 
Ramathem,  désignée  aussi  sous  le  nom  d'Arma- 
tha.  Elle  n'était  point  éloignée  de  Lidda,  c'est 
tout  ce  que  l'on  peu  attester.  Eliam  periere  ruina'. 
D'Allioli  écrit  :  «  Ces  petits  pays  (cercles)  étaient 
les  districts  d'Ephraïm,  de  Lidda  et  de  Rama- 
thaïm.  »  C'est  se  payer  des  mots  qui  ne  fixent 
absolument  rien  pour  Aphérima  et  Ramatha. 

Le  grec  peut  faire  un  autre  sens  (2):  Nous 
fixons  les  limites  de  la  Judée,  el  nous  y  comprenons 
les  villes  de  Lidda,  de  Ramalha  el  d' Aphérima,  el 
loul  leur  territoire  ;  el  nous  remettons  à  ceux  qui 
sacrifient  à  Jérusalem,  les  droits  royaux,  que  le  roi 
recevait  des  fruits  de  la  terre  et  des  arbres,  comme 
aussi  les  dîmes  et  les  tributs  qui  nous  appartiennent. 

y.  55.  Areas  Salinarum.  Le  grec  (4):  Les  lacs 
des  salines.  Il  est  probable  qu'il  s'agit  de  salines 
exploitées  aux  environs  de  la  mer  Morte  «  Sur  le 
rivage  sud-ouest,  »  dit  Volney,  «  il  y  a  des  mines 
de  sel  gemme,  dont  j'ai  rapporté  des  échantillons. 
Elles  sont  situées  dans  le  flanc  des  montagnes 
qui  régnent  de  ce  côté,    et  elles  fournissent,  de 


(11  1.  Macc.  x.    jo.  IX«u.6«v6'  ô  [îaaiXeùç  rap'  âui<ôy...  xfc  rà  âXXa  Ta  àvrjxovta 

(2)  EaTaxafUV  o"'uv  âuTOîç  tare   o~pca   ttjî   I'ouoa^aç,    xa'i  r);j.îv...  navra  ércapxôiç  jeapte^EV  âutoî?  ou  £7rapy.£aop.Ev. 

xoù;  toeî;  vop.où; xa't  îtavra  rà  au-f/upoûvra  àutoî;.    Oaat  (j)  Ta;  xoû  aXoç  X/p:vaç. 

xo\;   QuatâÇoujt    éi;    IspoaûXupa,    ayri    rtôv    JjaatXtxojv    oj'v 


1.  —   MACCABÉES.  —  XI.  -   RÉVOLTE   DE   TRYPHON 


"9 


57.  Nunc  ergo  curate  facere  horum  exemplum,  et  de  tur 
Jonathae,  et  ponatur  in  monte  sancto,  in  lococelebri. 


58.  Et  videns  Demetrius  rex  quod  siluit  terra  in  cons- 
pectu  suo,  et  nihil  ei  resistit,  dimisit  totum  exercitum 
suum,  unumquemque  in  locum  suum,  excepto  peregrino 
exercitu,  quem  contraxit  ab  insulis  gentium  :  et  inimici 
erant  ei  omnes  exercitus  patrum  ejus. 

jo.Tryphonautem  erat  quidam  partium  Alexandri  p.ius; 
et  vidit  quoniam  omnis  exercitus  murmurabat  contra 
Demetrium,  et  ivit  ad  Emalchuel  Arabem,  qui  nutriebat 
Antiochum,  filium  Alexandri  ; 

40.  Et  assidebat  ei  ut  traderet  eum  ipsi,  ut  regnaret 
loco  patris  sui  ;  et  enuntiavit  ei  quanta  fecit  Demetrius, 
et  inimicitias  exercituum  ejus  adversus  illum  ;  et  mansit 
ibi  diebus  multis. 

41.  Et  misit  Jonathas  ad  Demetrium  regem,  ut  ejiceret 
eos  qui  in  arce  erant  in  Jérusalem,  et  qui  in  preesidiis 
erant,  quia  impugnabant  Israël. 

42.  Et  misit  Demetrius  ad  Jonathan,  dicens  :  Non  hase 
tantum  faciam  tibi,  et  genti  tuée,  sed  g'oria  illustrabo  te, 
et  gentem  tuam,  cum  fuerit  opportunum. 

4;.  Nunc  ergo  recte  feceris  si  miseris  in  auxilium  mihi 
viros,  quia  discessit  omnis  exercitus  meus. 

44.  Et  misit  ei  Jonathas  tria  millia  virorum  fortium 
Antiochiam  ;  et  venerunt  ad  regem,  et  delectatus  est  rex 
in  adventu  eorum. 

45.  Et  convenerunt  qui  erant  de  civitate,  centum  viginti 
millia  virorum,  et  volebant  interficere  regem. 

46.  Et  fugit  rex  in  aulam  ;  et  occupaverunt  qui  erant 
de  civitate  itinera  civitatis,  et  cœperunt  pugnare. 

47.  Et  vocavit  rex  Judasos  in  auxilium,  et  convenerunt 
omnes  simul  ad  eum  et  dispersi  sunt  omnes  per  civitatem, 


?7.  Ayez  donc  soin  de  faire  une  copie  de  cette  ordon- 
nance ;  et  qu'elle  soit  donnée  à  Jonathas,  et  qu'on  l'ex- 
pose sur  la  montagne  sainte,  en  un  lieu  où  elle  soit  vue 
de  tout  le  monde. 

;8.  Le  roi  Demetrius  voyant  que  tout  le  royaume  était 
paisible,  et  que  rien  ne  lui  résistait,  licencia  toute  son 
armée,  et  renvoya  chacun  en  sa  maison,  excepté  les 
troupes  étrang'res  qu'il  avait  levées  des  peuples  des 
îles  :  et  ceci  lui  attira  la  haine  de  toutes  les  troupes  qui 
avaient  servi  ses  pères. 

?o.  Alors  Tryphon,  qui  avait  été  auparavant  du  parti 
d'Alexandre,  voyant  que  tous  les  gens  de  guerre  murmu- 
raient contre  Demetrius,  alla  trouver  Emalchuel,  roi  des 
Arabes,  qui  nourrissait  auprès  de  lui  Antiochus,  fils 
d'Alexandre. 

40.  Et  il  le  pressa  longtemps,  afin  qu'il  lui  donnât  ce 
jeune  prince,  pour  le  faire  régner  en  la  place  de  son 
père  :  il  lui  rapporta  tout  ce  que  Demetrius  avait  fait,  et 
la  haine  que  les  gens  de  guerre  avaient  conçue  contre 
lui,  et  il  demeura  longtemps  en  ce  lieu. 

41.  Cependant  Jonathas  envoya  vers  le  roi  Demetrius, 
pour  le  prier  de  chasser  ceux  qui  étaient  en  garnison 
dans  la  forteresse  de  Jérusalem  et  dans  les  autres  forte- 
resses, parce  qu'ils  faisaient  beaucoup  de  mal  à  Israël. 

42.  Demetrius  envoya  dire  à  Jonathas  :  Non  seulement 
je  ferai  pour  vous  et  votre  nation  ce  que  vous  me  deman- 
dez ;  mais  je  vous  élèverai  en  gloire,  vous  et  votre  peu- 
ple, aussitôt  que  le  temps  me  le  permettra. 

4;.  Vous  ferez  donc  maintenant  une  action  de  justice  de 
m'envoyer  de  vos  gens  pour  me  secourir,  parce  que 
toute  mon  armée  m'a  abandonné. 

44.  Alors  Jonathas  envoya  à  Antioche  trois  mille  hom- 
mes très  vaillants,  qui  vinrent  trouver  le  roi  ;  et  le  roi 
reçut  une  grande  joie  de  leur  arrivée. 

4<;.  En  ce  même  temps,  cent  vingt  mille  hommes  de  la 
ville  voulaient  tuer  le  roi. 

46.  Le  roi  s'enfuit  dans  le  palais;  et  les  habitants  de  la 
ville  se  saisirent  de  toutes  les  rues,  et  commencèrent  à 
l'attaquer. 

27.  Le  roi  fit  venir  les  Juifs  à  son  secours;  et  ils  s'as- 
semblèrent tous  près  de  lui,  et  firent  des  courses  dans  la 
ville. 


COMMENTAIRE 


temps  immémorial,  à  la  consommation  des  Ara- 
bes de  ces  cantons,  et  même  de  la  ville  de  Jéru- 
salem (1).  »  Voyez  chap.  x.  ).  29. 

f.  37.  In  loco  celebri.  Dans  un  lieu  célè- 
bre (2).  un  lieu  apparent,  un  lieu  d'assemblée. 

jr.  38.  Ab  insulis  gentium.  Particulièrement 
de  Crète,  d'où  était  la  plupart  de  ses  troupes. 
C'était  apparemment  Lasthène  qui  donnait  ce  con- 
seil au  roi  ;  mais  il  ne  pouvait  rien  faire,  ni  de  plus 
contraire  aux  intérêts  du  prince, ni  de  plus  dange- 
reux pour  lui-même, comme  l'évène.nentle  fit  voir. 

f.  39.  Tryphon  autem  erat  quidam  partium 
Alexandri.  Tryphon  s'appelait  auparavant  Dio- 
dote  ;  il  ne  prit  le  nom  de  Tryphon,  que  lorsqu'il 
fut  monté  sur  le  trône  de  Syrie  ;  il  était  dans  la 
forteresse  de  Cassiana,  près  d'Apamée.  S'étant 
aperçu  du  mécontentement  des  troupes  que  De- 
metrius Nicator  avait  congédiées,  il  alla  en  Ara- 


bie, et  sollicita  puissamment  Elmachucl  ou,  selon 
le  grec,  S^a^ouè,  roi  des  Arabes,  deluiconfier  le 
jeune  prince  Antiochus,  fils  d'Alexandre  Balas, 
se  faisant  fort  de  le  rétablir  sur  le  trône  de  Syrie. 
L'Arabe  ne  se  rendit  à  ses  prières  qu'avec  diffi- 
culté ;  mais  enfin  il  lui  donna  le  jeune  prince  qui 
n'était  alors  qu'un  enfant. 

f.  4î.  Convenerunt  qui  erant  de  civitate, 
centum  viginti  millia  virorum.  Demetrius  Nica- 
tor ayant  congédié  les  anciennes  troupes  du  pays, 
et  s'étant  appuyé  exclusivement  sur  les  troupes 
étrangères  qu'il  avait  amassées,  entreprit  d'ôtei 
les  armes  aux  habitants  d'Antioche.  Non  seule- 
ment ils  n'obéirent  point  à  ses  ordres,  mais  ils  se 
soulevèrent  et  coururent  assiéger  leur  roi,  jusque 
dans  son  palais  (3).  Il  ne  se  tira  de  ce  danger  que 
par  le  secours  des  Juifs, mais  il  ne  sut  pas  recon- 
naître un  si  grand  service. 


(1)  Volncy,  Voyage  en  Egypte  et  en  Syrie,  11.  ch,  1,  7. 

(2)  E'v  tÔtio)  É7narîu.(|). 


Vide  Diodor.  Sicul.  excerpta  Vates.p.  546. 


120 


I.  —  -MACCABÉES.  —  XI.  -  INGRATITUDE   DE   DÉMÉTRIUS 


48.  Et  occiderunt  in  illa  die  centum  millia  hominum, 
et  succenderunt  civitatem,  et  ceperunt  spolia  multa  in 
die  illa,  et  hberaverunt  regem. 

49.  Et  viderunt  quierant  de  civitate,  quod  obtinuissent 
Judaei  civitatem  sicut  volebant,  et  infirmati  sunt  mente 
sua  ;  et  ciamaverunt  ad  regem  cum  precibus  dicentes  : 

■;o.  Da  n  >bis  dextras,  et  cessent  Judaei  oppugnare  nos, 
et  civitatem. 

51.  Et  projecerunt  arma  sua,  et  fecerunt  pacem.  Et 
glorificati  sunt  Judaai  in  conspectu  régis  et  in  conspectu 
omnium  qui  erant  in  regno  ejus;  et  nominati  sunt  in 
regno,  et  regressi  sunt  in  Jérusalem  habentes  spolia 
multa. 

52.  Et  sedit  Demetrius  rex  in  sede  regni  sui  ;  et  siluit 
terra  in  conspectu  ejus. 

<;;.  Et  mentitus  est  omnia  quaecumque  dixit;  et  abalie- 
navit  se  a  Jonatha,  et  non  retribuit  ei  secundum  béné- 
ficia quas  sibi  tribuerat,  et  vexabat  eum  valde. 

54.  Post  hase  autem  reversus  est  Tryphon,et  Antiochus 
r.um  eo  puer  adolescens  ;  et  regnavit,  et  imposuit  sibi 
diadema. 

51.  Et  congregati  sunt  ad  eum  omnes  exercitus  quos 
disperserat  Demetrius  ;  et  pugnaverunt  contra  eum,  et 
fugit,  et  terga  vertit. 

56.  Et  accepit  Tryphon  bestias,  et  obtinuit  Antiochiam. 

<■"].  Et  scripsit  Antiochus  adolescens  Jonathas  dicens: 
Constituo  tibi  sacerdotium,  et  constituo  te  super  quatuor 
civitates,  ut  sis  de  amicis  régis. 

58.  Et  misit  illi  vasa  aurea  in  ministerium,  et  dédit  ei 
potestatem  bibendi  in  auro,  et  esse  in  purpura,  et  habere 
fibulam  auream  ; 

59.  Et  Simonem,  fratrem  ejus,  constituit  ducem  a  ter- 
minis  Tyri  usque  ad  fines  /Egypti. 

60.  Et  exiit  Jonathas,  et  perambulabat  trans  (lumen 
civitates,  et  congregatus  est  ad  eum  omnis  exercitus 
Syrias  in  auxilium  ;  et  venit  Ascalonem,  et  occurrerunt  ei 
honorifice  de  civitate. 


48.  Et  ils  tuèrent  en  ce  jour-là  cent  mille  hommes  :  ils 
mirent  aussi  le  feu  à  la  ville,  en  remportèrent  un  grand 
butin,  et  délivrèrent  le  roi. 

49-  Les  habitants  de  la  ville  voyant  que  les  Juifs  s'en 
étaient  rendus  maîtres,  pour  y  faire  tout  ce  qu'ils  vou- 
draient, furent  consternés  ;  et  étant  venus  implorer  le  roi, 
ils  lui  firent  cette  prière  : 

ço.  Tendez-nous  une  main  favorable,  et  que  les  Juils 
cessent  de  nous  attaquer,  nous  et  notre  ville. 

51.  Ils  mirent  en  même  temps  bas  les  armes,  et  firent 
la  paix  :  les  Juifs  s'acquirent  une  grande  gloire  dans  l'es- 
prit du  roi  et  des  habitants  de  son  royaume,  et  revinrent 
à  Jérusalem  chargés  de  dépouilles. 

52.  Le  roi  Demetrius  fut  ainsi  affermi  sur  son  trône  et 
dans  son  royaume  ;  et  le  pays  demeura  paisible  en  sa 
présence. 

$?.  Mais  ce  prince  ne  tint  rien  du  tout  ce  qu'il  avait 
promis:  il  s'éloigna  de  Jonathas;  et,  bien  loin  de  lui 
témoigner  aucune  reconnaissance  de  toutes  les  obliga- 
tions qu'il  lui  avait,  il  lui  fit  même  tout  le    mal  qu'il  pût. 

54.  Après  cela,  Triphon  revint,  et  avec  lui  le  jeune 
Antiochus,  qui  commença  à  se  faire  reconnaître  pour  roi, 
et  qui  se  mit  le  diadème  sur  la  tète. 

H'.  Toutes  les  troupes  que  Demetrius  avait  licenciées 
se  rassemblèrent  aussitôt  près  d'Antiochus  ;  elles  com- 
battirent contre  Demetrius,  qui  fut  défait  et  qui  s'enfuit. 

56.  Tryphon  se  saisit  alors  des  éléphants,  et  se  rendit 
maître  d'Antioche. 

<i7.  Le  jeune  Antiochus  écrivit  ensuite  à  Jonathas,  en 
ces  termes  :  Je  vous  confirme  dans  la  souveraine  sacrifi- 
cature,  et  je  vous  établis  sur  les  quatre  villes  afin  que 
vous  soyez  du  nombre  des  amis  du  roi. 

î8.  Il  lui  envoya  des  vases  d'or  pour  son  service,  et 
lui  donna  le  pouvoir  de  boire  dans  une  coupe  d'or, 
d'être  vêtu  de  pourpre,  et  de  porter  une  agrafe  d'or. 

59.  Et  il  établit  son  frère  Simon  gouverneur, depuis  la 
côte  de  Tyr  jusqu'aux  frontières  d'Egypte. 

60.  Jonathas  alla  ensuite  dans  les  villes  qui  sont  au- 
delà  du  fleuve, et  toute  l'armée  de  Syrie  vint  àson  secours; 
il  marcha  vers  Ascalon  ;  et  les  habitants  de  la  ville  vin- 
rent au  devant  de  lui,  en  lui  faisant  de  grands  honneurs. 


COMMENTAIRE 


v.   ^3.    Et   mentitus  est   omnia   quaecumque 

DIXIT  ;  ET  ABAL1ENAV1T  SE  A  JONATHA.   Les  princes 

syriens  étaient  avant  tout  des  ambitieux  sans 
scrupule  et  sans  honneur.  Ils  flattaient  les  Juifs 
en  faisant  appel  à  leur  dévouement,  quand  ils 
en  avaient  besoin  ;  mais  à  peine  le  danger  avait-il 
disparu,  qu'ils  oubliaient  toutes  leurs  promesses. 
Mais  enfin  de  compte, ils  étaient  toujours  victimes 
de  leur  mauvaise  foi.  Car  c'est  une  loi  de  la  Pro- 
vidence que  la  fausseté  amène  toujours  après  elle 
des  conséquences  funestes.  Elle  peut  réussir 
pendant  quelque  temps  ;  mais  il  arrive  un  temps 
où,  fatalement,  elle  échoue. 

f.  54.  Reversus  est  Tryphon,  et  Antiochus 
cum  eo.  Ce  fut  en  144,  que  Tryphon  ramena  le 
jeune  Antiochus,  qui  prit  ensuite  le  surnom  de 
Theos  Épiphane,  c'est-à-dire  Dieu  qui  se  manifeste, 
à  l'imitation  d'Antiochus  Épiphane,  son  aïeul. 
Après  la  prise  d'Antioche,  il  se  fit  encore  appeler 
Nicéphore  (1),  ou  victorieux. 


jh  58.  Misit  illi  vasa  aurea  in  ministerium.  // 
lui  envoya  des  vases  d'or  pour  son  service,  de  la 
vaisselle  d'or  pour  son  usage.  Ministerium  signifie 
proprement,  les  vases  d'or  et  d'argent  qu'on  met 
sur  le  buffet.  Il  n'y  avait  que  le  roi,  ou  ceux 
à  qui  il  en  donnait  la  permission,  qui  pussent  user 
de  vaisselle  d'or.  Le  grec  porte  Swvwvios,  service, 
fonction  domestique. 

jh  59.  Simonem  constituit  ducem  a  terminis 
Tyri  usque  ad  fines  jEgypti.  Gouverneur  de 
la  Phénicie,  et  de  la  Palestine.  Ainsi  ce  prince 
donna  aux  deux  frères,  Jonathas  et  Simon,  toutes 
les  marques  d'estime  et  de  confiance,  qu'il  pouvait 
leur  donner.  Eupator  avait  donné  déjà  autrefois  à 
Judas  le  même  gouvernement,  mais  seulement 
depuis  Ptolémaïs  jusqu'à  l'Egypte  (2). 

f.  60.  Perambulabat  trans  flumen  civitates, 

ET     CONGREGATUS    EST    AD    EUM    OMNIS   EXERCITUS 

Syri^e.  Jonathas  s'étant  déclaré  pour  Antiochus, 
fils  d'Alexandre  Balas,  et  ayant  obtenu  permission 


(i)  Vaiil.  hist.  Reg.  Syr.  p.  281. 


(2)  n.  Macc.  xiii.  24. 


I.  —   MACCABÉES.—  XI.  -  VICTOIRES   DE  JONATHAS 


I  21 


61.  Et  abiit  inde  Gazam,  et  concluserunt  se  qui  erant 
Gazas  ;  et  obsedit  eam,  et  succendit  quae  erant  in  cir- 
cuitu  civitatis,  et  praedatus  est  ea. 

62.  Et  rogaverunt  Gazenses  Jonathan,  et  dédit  illis  dex- 
teram  ;  et  accepit  filios  eorum  obsides,  et  misit  illos  in 
Jérusalem;  et  perambulavit  regionem  usque  Damascum. 

6).  Et  audivit  Jonathas  quod  prasvaricati  sunt  princi- 
pes Demetrii  in  Cades,  quae  est  in  Galilasa,  cum  exer- 
citu  multo,  volentes  eum  removere  a  negotio  regni  ; 


64.  Et  occurrit  illis,  fratrem  autem  suum  Simonem  reli- 
quit  intra  provinciam. 

6^.  Et  applicuit  Simon  ad  Bethsuram,  et  expugnabat 
eam  diebus  multis,  et  conclusit  eos. 

66.  Et  postulaverunt  ab  eo  dextras  accipere,  et  dédit 
illis;  et  ejecit  eos  inde,  et  cepit  civitatem,  et  posuit  in 
ea  praesidium. 

67.  Et  Jonathas  et  castra  ejus  applicuerunt  ad  aquam 
Genesar  ;  et  ante  lucem  vigilaverunt  in  campo  Asor. 

68.  Et  ecce  castra  alienigenarum  occurrebant  in  campo, 
et  tendebant  ei  insidias  in  montibus  ;  ipse  autem  occurrit 
ex  adverse 

69.  Insidiae  vero  exsurrexerunt  de  locis  suis,  et  com- 
miserunt  praelium. 

70.  Et  fugerunt  qui  erant  ex  parte  Jonathas  omnes,  et 
nemo  relictus  est  ex  eis,  nisi  Mathathias,  filius  Absalo- 
mi,  et  Judas,  rilius  Calphi,  princeps  militiae  exercitus. 

71.  Et  scidit  Jonathas vestimenta  sua,  et  posuit  terram 
in  capite  suo,  et  oravit. 

72.  Et  reversus  est  Jonathas  ad  eos  in  praslium,  et 
convertit  eos  in  fugam,  et  pugnaverur.t. 

7?.  Et  viderunt  qui  fugiebant  partis  illius,  et  reversi 
sunt  ad  eum,  et  insequebantur  cum  eo  omnes  usque 
Cades  ad  castra  sua  ;  et  pervenerunt  usque  illuc. 


61.  Il  alla  de  là  à  Gaza  ;  et  les  habitants  de  la  ville  lui 
fermèrent  les  portes  :  il  y  mit  le  siège,  et  il  pilla  et 
brûla  tous  les  environs  de  la  ville. 

62.  Alors  les  habitants  de  Gaza  demandèrent  à  capi- 
tuler, et  Jonathas  le  leur  accorda  :  il  prit  leurs  fils  pour 
otages  et  les  envoya  à  Jérusalem  ;  et  il  alla  dans  tout  le 
pays  jusqu'à  Damas. 

6;.  Mais  ayant  appris  que  les  généraux  de  Démétrius 
étaient  venus  avec  une  puissante  armée  soulever  la  ville 
de  Cadès,  qui  est  en  Galilée,  pour  l'empêcher  de  se 
mêler  davantage  de  ce  qui  regardait  le  royaume  de 
Syrie, 

64.  Il  marcha  au-devant  d'eux,  et  laissa  dans  la  pro- 
vince son  frère  Simon. 

6^.  Simon  mit  le  siège  devant  Bethsura,  et  l'attaqua 
longtemps,  et  il  tint  investis  ceux  qui  étaient  dedans. 

66.  Ils  lui  demandèrent  ensuite  à  capituler,  et  il  le 
leur  accorda  :  il  les  fit  sortir  hors  de  la  ville,  s'en  rendit 
le  maître,  et  y  mit  garnison. 

67.  Jonathas  vint  avec  son  armée  sur  le  bord  de  l'eau 
de  Génésar,  et  s'étant  levés  avant  le  jour,  se  rendirent 
dans  la  plaine  d'Azor. 

68.  Il  y  trouva  l'armée  des  étrangers  qui  venaient  au- 
devant  de  lui,  et  qui  lui  dressaient  des  embuscades  sur 
les  montagnes  :  il  marcha  droit  à  eux. 

69.  Et  cependant  ceux  qui  étaient  cachés  sortirent  de 
leur  embuscade,  et  vinrent  charger  ses  gens. 

-o.  Tous  ceux  du  côté  de  Jonathas  s'enfuirent,  sans 
qu'ilen  demeurât  aucun, sinon  Matthathias  fils  d'Absalom, 
et  Judas  fils  de  Calphi,  général  de  son  armée. 

71.  Alors  Jonathas  déchira  ses  vêtements,  se  mit  de 
la  terre  sur  la  tête,  et  fit  sa  prière. 

72.  Et  Jonathas  retourna  au  combat,  chargea  les  enne- 
mis, et  les  fit  fuir  devant  lui;  et  ils  furent  mis  en  dé- 
route : 

77.  Et  ses  gens  qui  avaient  fui,  voyant  cela,  revinrent 
le  joindre,  ei  poursuivirent  avec  lui  les  ennemis  jusqu'à 
Cadès,  où  éiait  leur  camp  :   et  ils  vinrent  jusque-là. 


COMMENTAIRE 


de  faire  la  guerre  auxgénéraux  de  Démétrius  (t), 
rassembla  des  troupes,  et  alla  d'abord  au-delà  du 
Jourdain,  où  il  fut  joint  par  les  troupes  de  Syrie  ; 
il  parcourut  toutes  les  villes  de  la  région  jusqu'à 
Damas,  et  les  assura  au  parti  d'Antiochus.  De  là, 
étant  venu  sur  les  côtes  de  la  Méditerrannée,  il 
fut  reçu  dans  Ascalon,  et  fit  le  siège  de  Gaza,  qui 
se  rendit  bientôt  après,  comme  il  est  marqué  ici. 
y.  63.  Pr^evaricati  sunt  principes  Demetrii 
in  Cades.  Le  grec  (2)  met  simplement:  Les  géné- 
raux de  Démétrius  étaient  venus  devant  Cadès, 
avec  une  grande  armée,  pour  éloigner  Jonathas  de 
la  province,  où  il  était  alors,  ou  pour  l'éloigner 
des  affaires.  Cadès  était  une  ville  très  considérable 
de  la  Galilée,  au  nord-ouest  au  lac  Samochonitis. 
Les  généraux  syriens  crurent,  et  ils  ne  se  trom- 
pèrent pas,  que  Jonathas  ne  manquerait  pas 
d'accourir  au  secours  de  ses  frères  assiégés  dans 
Cadès  ;  mais  il  eut  la  précaution   de  laisser  son 


frère  Simon  dans  la  province,  pour  continuer  à 
réduire  ce  qui  ne  leur  obéissait  pas. 

y.  67.  Applicuerunt  ad  aquam  Genesar,  et 
ante  lucem  vigilaverunt  in  campo  Asor.  Le 
grec  est  fautif,  il  lit  N asor  au  lieu  d'Asor.  Cette 
ville  est  célèbre  dans  l'Écriture  (j);  elle  était 
dans  la  haute  Galilée,  vers  les  eaux  du  lac  Sa- 
mochonitis. Le  lac  de  Génésar,  ou  de  Génésareth, 
ou  la  mer  de  Tibériade  est  sur  le  haut  Jourdain. 
Jonathas  suivit  le  Jourdain,  arriva  au  lac  de  Gé- 
nésareth ou  mer  de  Tibériade,  puis  au  lac  Samo- 
chonitis ou  de  Mérom,  pour  se  rendre  devant 
Cadès. 

'y.  70. Nemo  relictus  est  ex  eis,  nisi  Mattha- 
thias, filius  Absalomi,  et,  Judas  filius  Calphi. 
Josèphe  (4)  appelle  Judas  fils  de  Chasphée.  Il  dit 
que  ces  deux  capitaines  demeurèrent  avec  Jona- 
thas, accompagné  d'environ  cinquante  hommes. 
Ce  fut  avec  cette  petite   troupe   que  Jonathas 


(1)  Josep.  Antiq.  I.  xui.  c.  9. 

(2)  0"xt   icaprjaav    01    aç^ovts;    Ar)f£3?p'!ou   Et;    KâS7)ç.... 
(JoiAdjjievoi  jjutaatTJaaiâutdv  I*  Tijç  y_iopâ;,  ou  sx  ir\i  y_psia;. 


(;)  Josue  xi.  1.  et  seq. 

(4)  Joseph.  Antiq.  I.  xiu.  c.  9. 


122 


I.         MACCABEES.  -   XI.  ■    RÉFLEXIONS 


74.  Et  ceciderunt  de    alienigenis  in    die    illa  tria  millia 
virorum  ;  et  reversus  estJonathas  in  Jérusalem. 


74.  ïl  demeura  sur  place,  en  ce  jour-là,  trois  mille 
hommes  de  l'armée  des  étrangers  :  et  Jonathas  retourna 
à  Jérusalem. 


COMMENTAIRE 


attaqua  l'ennemi,  et  le  fit  plier  ;  le  reste  de  son      1 


armée  se  rallia  ensuite,  et  les  généraux  de  Démé- 
trius  furent  enfin  mis  en  fuite. 

f,  74.  Tria  millia  virorum.  Josèphe  n'en  met 
que  deux  mille. 

Dieu  permet  que  Jonathas  soit  surpris  par  les 
ennemis,  et  abondonné  de  ses  propres  soldats, 
afin  que,  dans  cette  grande  extrémité,  il  soit 
obligé  de  mettre  toute  sa  force  en  Dieu  seul.  Que 
fait-il  donc  en  ce  moment,  sinon  de  s'anéantir  en 
sa  présence,  en  jetant  de  la  terre  sur  sa  tête  ;  de 
marquer  son  deuil  en  déchirant  ses  vêlements  ;  et 
de  prier  Dieu,  pour  implorer  son  secours  ?  I!  ne 
craint  point  que  le  temps  qu'il  emploie  ,à  la 
prière  soit  perdu,  et  donne  le  loisir  à  ses  ennemis 
de  le  défaire  entièrement  :  il  sait  bien  qu'il  les 
combat  plus  puissament  par  cette  prière  que 
par  son  épée.  1 1  rend  à  Dieu  cet  hommage,  de  lui 
remettre  tous  ses  intérêts  entre  les  mains  :  et 
néanmoins,  se  relevant  aussitôt  avec  une  grande 
foi  sans  regarder  le  petit  nombre  de  ceux  qui 
l'accompagnaient,  il  a  la  force  de  mettre  en  fuite 
ses  ennemis  vainqueurs, et  de  redonner  le  courage 
à  tous  ceux  qui  l'avaient  abandonné. 

Le  désir  qu'avait  Jonathas  de  vaincre  ses  enne- 
mis, n'était  pas  en  lui  l'effet  d'une  gloire  humaine  ; 


a  profonde  humiliation  par  laquelle  il  s'efforça  de 
mériter  le  secours  de  Dieu,  fait  bien  connaître 
qu'il  regardait  la  cause  pour  laquelle  il  combattait, 
comme  étant  plus  celle  de  Dieu  même  que  la 
sienne.  Il  craint  donc  d'être  vaincu,  moins  pour 
lui,  que  parce  qu'il  soutient  la  cause  du  peuple  de 
Dieu,  et  celle  de  sa  religion.  Il  doit,  en  cela, 
servir  de  modèle  aux  princes  de  l'Église.  Comme 
un  général  ne  peut  séparer  ses  intérêts  d'avec 
ceux  de  ses  soldats,  et  que  leur  perte  est  la 
sienne  ;  il  en  est  de  même  des  supérieurs  ecclési- 
astiques. Ils  doivent  se  regarder  comme  vaincus 
et  abattus  en  la  personne  des  fidèles,  lorsqu'ils  le 
sont.  Ils  doivent  dire  très  sincèrement  avec 
saint  Cyprien,  que  leur  propre  salut  ne  saurait 
les  consoler,  lorsqu'ils  voient  leurs  enfants  couchés 
par  terre,  et  blessés  à  mort. 

Jonathas  ne  refuse  point  le  concours  de  ceux 
qui  voulaient  lutter  avec  lui  ;  c'est  un  devoir  aussi 
pour  les  princes  de  l'Église  de  ne  pas  écarter  bru- 
talement ou  décourager, par  une  avilissante  jalousie, 
les  prêtres  et  les  fidèles  qui  veulent  engager  avec 
eux  et  soutenir  à  la  vie  et  à  la  mort  le  bon  combat. 
Jonathas  seul  n'aurait  pu  rien  faire  sinon  mourirà 
la  tâche  ;  avec  une  cinquantaine  d'hommes  déter- 
minés, il  mit  l'ennemi  en  fuite. 


CHAPITRE    XII 

Jonathas  renouvelle  l'alliance  avec  les  Romains  et  avec  les  Lacé  démo  mens.  Il  met  en  finie 
V armée  de  Démé/rius.  Il  tourne  ses  armes  contre  les  Arabes  et  les  Syriens.  Simon  étend 
ses  conquêtes  jusqu'à  Joppé.  Jonathas  est  pris  à  Ploléma'fs  par  Tryphon. 


i.  Et  vidit  Jonathas  quia  tempus  eum  juvat,  et  elegit 
viros,  et  misit  eos  Romam,  statuere  et  renovare  cum  eis 
amicitiam  ; 

i.  Et  ad  Spartiatas  et  ad  alia  loca  micit  epistolas  secun- 
dum  eamdem  formam. 

j.  Et  abierunt  Romam,  et  intraverunt  curiam,  et  dixe- 
runt  :  Jonathas,  summus  sacerdos,  et  gens  Judaeorum, 
miserunt  nos  ut  renovaremus  amicitiam  et  societatem, 
secundum  pristinum. 

4.  Et  dederunt  illis  epistolas  ad  ipsos  per  loca,  ut  dedu- 
cerent  eos  in  terrain  Juda  cum  pace. 

5.  Et  hoc  est  exemplum  epistolarum  quas  scripsit  Jona- 
thas Spartiatis  : 

0.  Jonathas  summus  sacerdos,  et  seniores  gentis,  et 
sacerdotes,  et  reliquus  populus  Judoeorum,  Spartiatis 
fratribus,  salutem. 


1.  Jonathas,  voyant  que  le  temps  lui  était  favorable, 
choisit  des  hommes  qu'il  envoya  à  Rome,  pour  renouve- 
ler l'amitié  avec  les  Romains. 

2.  Il  envoya  aussi  vers  les  Lacédémoniens,  et  en  d'au- 
tres lieux,  des  lettres  semblables. 

?.  Ses  gens  allers  nt  donc  à  Rome;  et  étant  entrés 
dans  le  sénat,  ils  dirent  :  Jonathas,  grand  prêtre,  et  le 
peuple  juif,  nous  ont  envoyés  pour  renouveler  avec  vous 
l'amitié  et  l'alliance,  selon  qu'elle  a  été  faite  auparavant 
entre  nous. 

4.  Et  les  Romains  leur  donnèrent  des  lettres  adressées 
à  leurs  officiers,  dans  chaque  province,  pour  les  (aire 
conduire  en  paix  jusqu'au  pays  de  Juda. 

ç.  Voici  la  copie  des  lettres  que  Jonathas  écrivit  aux 
Lacédémoniens  : 

6.  Jonathas  grand  prêtre,  les  anciens  de  la  nation,  les 
prêtres  et  le  reste  du  peuple  juif,  aux  Lacédémoniens 
leurs  frères,  salut. 


COMMENTAIRE 


y.  1.  Vidit  Jonathas  quia  tempus  eum  juvat. 
Jonathas  voyant  que  le  temps  lui  était  favorable  , 
que  les  divisions  qui  régnaient  en  Syrie,  lui  four- 
nissaient les  moyens  de  s'affermir,  et  d'affranchir 
sa  nation,  songea  à  s'assurer  d'une  puissante  pro- 
tection au  dehors,  en  faisant  alliance  avec  les 
deux  plus  célèbres  républiques  du  monde,  celle 
de  Rome  et  celle  de  Lacédémone. 

$.  2.  Ad  Spartiatas  et  ad  alia  loca.  On 
ignore  quels  sont  les  autres  lieux,  différents  de 
Rome  et  de  Lacédémone,  où  les  Juifs  envoyèrent 
renouveler  l'alliance,  si  ce  n'est  peut-être  aux 
Juifs  restés  dans  la  Mésopotamie,  ou  à  quelques 
peuples  d'Arabie,  comme  les  Nabathéens,  leurs 
alliés. 

jh  4.  Ut  deducerent  eos  in  terram  Juda. 
Les  gouverneurs  des  provinces  les  reçurent,  leur 
fournirent  des  voitures  et  des  escortes,  comme 
aux  députés  d'un  peuple  ami,  allié  de  la  répu- 
blique. 

v.  6.  Jonathas, summus  sacerdos,  etseniores 

GENTIS,    ET   SACERDOTES,     ET     RELIQUUS     POPULUS. 


L'état  des  Juifs  était  alors  une  aristocratie  mêlée 
de  démocratie,  assez  semblable  au  gouvernement 
des  républiques  romaine  et  Spartiate.  Le  grand 
prêtre  et  le  sénat  gouvernaient  la  nation  ;  mais  le 
peuple  avait  part  aux  délibérations,  et  on  ne 
faisait  rien  sans  sa  participation. 

Spartiatis  fratribus.  Il  paraît  par  toute  la 
suite,  que  le  nom  de  frères,  en  cet  endroit,  ne 
signifie  pas  de  simples  alliés,  mais  des  peuples 
sortis  d'une  même  souche. 

Les  Lacédémoniens,  ayant  trouvé  dans  leur 
tradition  ou  dans  quelque  histoire,  qu'ils  étaient 
frères  des  Juifs,  et  qu'ils  avaient  pour  père  com- 
mun Abraham,  cette  origine  les  flatta,  et,  malgré 
la  fierté  qui  était  propre  aux  Spartiates  encore 
plus  qu'aux  Grecs,  ils  comprirent  qu'une  parenté 
si  ancienne  et  si  belle  ne  pouvait  que  leur  faire 
honneur  :  ils  résolurent  de  cultiver  cette  liaison, 
et  ils  firent  la  première  démarche.  Aréus,  leur 
roi,  écrivit  au  grand  prêtre  Onias,  qui  était  alors 
à  la  tête  de  la  nation  des  Juifs  (  1  ),  qu'ayant  appris 
que  les  Lacédémoniens  étaient  frères  des  Juifs  et 


(ij  1.  Macc.  xii.  20.  et  seq.  Le  texte  latin  porte  que 
les  Juifs  avaient  écrit  les  premiers  aux  Lacédémoniensi 
et  que  ceux-ci  leur  rendaient  réponse  :  Bene  facitis  scri- 
bentes  nobis  de  pace  veslra;  sed  et  nos  rcscripsimus  vobis, 
etc.  Mais  le  texte  grec  porte   au  contraire  que  ce  furent 


les  Lacédémoniens  qui  écrivirent  les  premiers,  et  qui 
prièrent  les  Juifs  de  leur  rendre  réponse  :  KaXûi;  notr)- 
ct£TS  Ypâ:poy:e;  fjjitv  r.zp\  T7Jç  Etprjvr];  ujuov,  x«l  f]u.eU  3è 
«vuYpâ?i>;iev  ûu.ïv.  Josèphe  reproduit  la  lettre  d'Aréus, 
sans  nier  la  parenté,  ni  s'en  expliquer  d'aucune  manière. 


124 


I.         MACCABEES.  —  XII.-  JUIFS   ET   LACEDEMONIENS 


7.  Jampridem  missae  erant  epistolse  ad  Oniam, minimum 
sacerdotem,  ab  Ario,  qui  regnabat  apud  vos,  quoniam 
estis  fratres  nostri,  sicut  rescnptum  continet  quod  sub- 
jectum  est. 

8.  Et  suscepit  Onias  virum  qui  missus  luerat  cum 
honore,  et  accepit  epistolas  in  quibus  significabatur  de 
societate  et  amicitia. 


7.  Il  ya  déjà  longtemps  qu'Aréus,  qui  régnait  à  Lacé- 
démone,  envoya  des  lettres  au  grand  prêtre  Onias,  qui 
témoignaient  que  vous  êtes  nos  frères,  comme  on  peut 
le  voir  par  la  copie  de  ces  lettres  que  nous  avons  join- 
tes à  celles-ci. 

8.  Et  Onias  reçut  avec  grand  honneur  celui  que  le  roi 
avait  envoyé,  et  ses  lettres  où  il  lui  parlait  de  cette 
alliance  et  de  cette  amitié  que  nous  avons  avec  vous. 


COMMENTAIRE 


de  la  race  d'Abraham,  il  le  priait  de  leur  mander 
l'état  de  leurs  affaires  ;  que  pour  eux,  ils  leur  en- 
voyaient cette  lettre,  pour  les  assurer  de  leur 
parfaite  union,  et  qu'ils  pouvaient  disposer  en 
maîtres  de  tout  ce  qui  appartenait  aux  Lacédé- 
moniens. 

Nous  ne  savons  pas  quelle  fut  la  réponse 
d'Onias  ;  mais  nous  voyons  par  la  suite  de  l'his- 
toire, que  ces  deux  peuples  entretinrent  de  bonne 
foi  cette  nouvelle  alliance,  et  qu'ils  se  considérè- 
rent sérieusement  dans  la  suite  moraine  frères. 
Nous  lisons  que  le  grand  prêtre  Jason,  étant 
obligé  de  quitter  la  Judée  sa  patrie,  et  l'Arabie 
où  il  s'était  retiré,  se  réfugia  chez  les  Lacédé- 
moniens; et  plusieurs  années  après  la  lettre 
d'Aréus  à  Onias,  nous  voyons  ici  Jonathas,  frère 
de  Judas  Maccabée,  écrire  au  sénat  et  au  peu- 
ple de  Lacédémone,  pour  renouveler  l'ancienne 
alliance  qui  était  entre  eux.  Ainsi  cette  parenté 
était  un  article  dont  on  convenait,  les  Juifs  et  les 
Lacédémoniens  étant  également  persuadés  qu'ils 
descendaient  les  uns  et  les  autres  d'Abraham. 

Mais  ni  les  monuments  qui  nous  restent  aujour- 
d'hui dans  les  Écritures  saintes  des  Juifs,  ni  les 
écrits  des  auteurs  grecs  ou  étrangers,  ne  nous 
fournissent  aucune  preuve  assez  claire  ni  assez 
solide  pour  faire  sur  nous  la  même  impression, 
ni  pour  nous  convaincre  que  ces  deux  peuples 
soient  des  branches  sorties  d'une  même  souche, 
et  qu'Abraham  soit  le  père  des  urts  et  des  autres. 

Nous  ne  prétendons  pas  soutenir  la  parenté 
des  Juifs  avec  les  Spartiates;  les  documents  nous 
font  défaut.  Cependant  l'assertion  de  ces  deux 
peuples  pourrait  bien  repeser  sur  une  tradition 
sérieuse.  M.  Clermont-Ganneau  a  déjà  signalé, 
il  y  a  quelques  années,  de  curieux  rapports  entre 
les  nations  cananéennes  et  les  petites  républiques 
du  Péloponnèse(i).Diodore  de  Sicile  raconte  une 
tradition  qui   a  dû  reposer   sur  quelque    chose. 

«  Dans  un  temps  très  reculé  de  nous  »,  dit-il, 
«  une  contagion  pestilentiellesedéclara  en  Egypte, 
et  le  plus  grand  nombre  des  habitants  attribua 
cette  calamité  au  courroux  d'une  divinité  offen- 
sée. En  effet,  comme  le  pays  contenait  une  foule 
d'étrangers  de  nations  diverses,  qui  étaient  venus 


s'y  établir,  et  dont  les  cérémonies  religieuses 
différaient  grandement  de  celles  qui  étaient  jadis 
pratiquées  en  Egypte,  il  résulta  de  ce  mélange 
que  le  mode  des  sacrifices  et  le  culte  des  dieux, 
transmis  de  père  en  fils,  étaient  insensiblement 
tombés  en  désuétude.  Les  habitants  indigènes  en 
avaient  inféré  que  la  maladie  qui  les  désolait 
n'aurait  un  terme  que  par  l'expulsion  des  étran- 
gers. Cette  mesure  fut  donc  adoptée,  et  les  hom- 
mes les  plus  distingués  par  leur  valeur,  qui  s'y 
trouvaient  compris,  se  réunirent  et  quittèrent 
l'Egypte,  pour  aller,  si  l'on  en  croit  le  récit  de 
quelques  historiens,  chercher  un  refuge,  soit  en 
Grèce,  soit  dans  quelque  autre  région.  Les  chefs 
qui  présidaient  à  cette  émigration  étaient  Danai'is 
et  Cadmus;  mais  une  nombreuse  population  qui 
n'en  faisait  pas  partie  gagna  la  Judée,  contrée 
de  l'Egypte,  et  à  cette  époque  tout  à  fait 
déserte.  Le  conducteur  de  cette  dernière  co- 
lonie se  nommait  Moïse,  homme  d'une  haute 
sagesse  et  d'un  grand  courage,  etc.  (2).  » 

L'époque  où  nous  fait  remonter  ce  récit  est 
bien  celle  de  l'expulsion  des  Hyksos  ou  Impurs. 
D'après  la  tradition  générale,  certaines  popula- 
tions grecques  tiraient  donc  leur  origine  de 
l'Egypte  comme  les  Hébreux.  Il  n'est  pas  impos- 
sible que  quelques  descendants  de  Jacob  ne  se 
soient  mêlés  aux  étrangers  et  n'aient  fui  avec 
eux  la  servitude,  avant  l'arrivée  de  Moïse.  Quoi 
qu'il  en  soit,  les  Spartiates  pouvaient  s'autoriser 
de  la  tradition  générale  pour  se  dire  parents  des 
Juifs,  et  ceux-ci  accepter  cette  parenté  sous 
bénéfice  d'inventaire,  pour  avoir  au  dehors  des 
alliés  naturels. 

f.  7.  Jampridem  miss^î  erant  epistoltE  ad 
Oniam,  summum  sacerdotem,  ab  Ario.  C'est  le 
grand  prêtre  Onias  III,  qui  reçut  les  lettres  des 
Lacédémoniens.  On  ignore  en  quelle  année.  Ce 
grand  prêtre  commença  son  pontificat  en  19=;  et 
fut  assassiné  en  171.  Il  ne  serait  pas  impossible 
que  les  Lacédémoniens  ne  l'eussent  écrite  au 
moment  où  dans  leurs  difficultés  avec  la  ligue 
achéenne  (en  1B8);  ils  avaient  besoin  de  compter 
sur  des  alliances  solides  pour  résister.  Ils  avaient 
tout  intérêt  alors  à    exploiter,  à    leur  profit,    ces 


(1)  Journal  asiat.  VU,  x,  157  et  suiv. 


(2)  Diod.  sicul.  Fragm.  lib.  xl. 


I.  _  MACCABÉES.  r-  XII.   -  JUIFS   ET   LACÉDÉMON  I  ENS 


125 


0.  Nos,  cum  nullo  horum  indigeremus,  habentes  sola- 
tio  sanctos  libros  qui  sunt  in  manibus  nostris, 

10.  Maluimus  mittere  ad  vos  renovare  fraternitatem  et 
amicitiam,  ne  forte  alieni  efticiamur  a  vobis;  multa  enim 
tempora  transierunt,  ex  quo  misistis  ad  nos. 


11.  Nos  ergo  in  omni  tempore  sine  intermissione  in 
diebus  solemnibus,  et  céleris  quibus  oportet,  ratmores 
sumus  vestri  in  sacrifiais  quae  olferimus,  et  in  dbserva- 
tionibus,  sicut  fas  est  et  decet  nieminisse  fratrum. 


12.  Lœtamur  itaque  de  gloria  vestra. 

ij.  Nos  autem  circumdederunt  multas  tribulationes  et 
multa  prœlia;  et  impugnaverunt  nos  reges  qui  sunt  in 
circuitu  nostro. 

14.  Noluimus  ergo  vobis  molesti  esse,  neque  ceteris 
sociis  et  amicis  nostris,  in  his  praeliis; 

1 5.  Habuimus  enim  de  coelo  auxilium,  et  liberati  sumus 
nos,  et  humiliati  sunt  inimici  nostri. 

16.  Elegimus  itaque  Numenium,  Antiochi  filium,  et 
Antipatrem,  Jasonis  filium,  et  misimus  ad  Romanos  reno- 
vare cum  eis  amicitiam  et  societatem  pristinam  ; 

17.  Mandavimus  itaque  eis  ut  veniant  etiam  ad  vos,  et 
reddant  vobis  epistolas  nostras  de  innovatione  fraterni- 
tatis  nostrae. 


9.  Quoique  nous  n'eussions  aucun  besoin  de  ces  cho- 
ses, ayant  pour  notre  consolation  les  livres  saints  qui 
sont  entre  nos  mains, 

10.  Nous  avons  mieux  aimé  néanmoins  envoyer  vers 
vous,  pour  renouveler  cette  amitié  et  cette  union  fra- 
ternelle, de  peur  que  nous  ne  devenions  comme  étran- 
gers à  votre  égard,  parce  qu'il  s'est  déjà  passé  beaucoup 
de  temps  depuis  que  vous  avez  envoyé  vers  nous. 

11.  Sachez  donc  que  nous  n'avons  jamais  cessé  depuis 
ce  temps-là,  de  nous  souvenir  de  vous  dans  les  fêtes 
solennelles,  et  les  autres  jours  où  cela  se  doit,  et  dans 
les  sacrifices  que  nous  offrons,  et  dans  toutes  nos  céré- 
monies, selon  qu'il  est  du  devoir  et  de  la  bienséance  de 
se  souvenir  de  ses  frères. 

12.  Nous  nous  réjouissons  de  la  gloire  dans  laquelle 
vous  vivez. 

ij.  Mais  pour  nous  autres,  nous  nous  sommes  vus  dans 
de  grandes  afflictions,  et  en  diverses  guerres  ;  et  les  rois 
qui  nous  environnent,  nous  ont  souvent  attaqués. 

14.  Cependant  nous  n'avons  voulu  être  à  charge  ni  à 
vous,  ni  à  nos  autres  alliés,  dans  tous  ces  combats. 

ij.  Car  nous  avons  reçu  du  secours  du  ciel  ;  nous 
avons  été  délivrés,  et  nos  ennemis  se  sont    vus  humiliés. 

16.  Ayant  donc  choisi  Numénius,  fils  d'Antiochus,  et 
Antipater,  fils  de  Jason  ,  pour  les  envoyer  vers  les 
Romains  renouveler  l'alliance  et  l'amitié  ancienne  que 
nous  avons  avec  eux. 

17.  Nous  leur  avons  donné  ordre  d'aller  aussi  vers 
vous,  de  vous  saluer  de  notre  part,  et  de  vous  remettre 
nos  lettres  touchant  le  renouvellement  de  notre  union 
fraternelle. 


COMMENTAIRE 


vagues  traditions  qui  leurdonnaient,avecles  Juifs, 
une  commune  origine.  Les  exemplaires  grecs 
et  le  syriaque,  lisent  ici  Darius,  au  lieu  de  Arius, 
Mais  l'erreur  est  manifeste.  Le  nom  véritable  est 
Oniarès,  Aréios  ou  Aréus. 

f.  9.  Cum  nullo  horum  indigeremus,  haben- 
tes solatio  sanctos  libros.  Si  nous  recherchons 
votre  alliance,  c'est  moins  par  intérêt,  et  par  le 
besoin  que  nous  en  avons,  que  par  l'estime  que 
nous  faisons  de  votre  amitié  (1).  Le  syriaque  : 
Mais  sans  nous  fier  sur  cela,  car  les  livres  saints 
que  nous  avons  nous  servent  de  consolation,  nous 
avons  voulu,  etc.  D'autres  donnent  ce  sens  au 
grec  (2)  :  Quoique  nous  ri  ayons  aucun  besoin  de 
ce  témoignage,  de  la  lettre  d'Aréus,  pour  nous 
assurer  de  notre  parenté  réciproque,  puisque  nous 
en  sommes  avertis  et  instruits  par  les  livres  saints. 
C'est  en  ce  sens  que  Josèphe,  Sérarius,  et  de 
nombreux  commentateurs  l'entendent  (2);  et  c'est 
ce  qui  paraît  le  plus  naturel.  Nous  ne  trouvons 
plus  rien  à  cet  égard  dans  les  livres  saints,  à  moins 
que  ce  ne  soit,  de  la  part  des  Lacédémoniens  et 
des  J  uifs,  une  réminiscence  commune  de  l'Exode. 
S'il  en  était  ainsi,  cette  tradition  confirmerait  ce 
ce  que  nous  avons  dit  au  verset  6. 


f.  11.  In  diebus  solemnibus,  et  ceteris  qui- 
bus OPORTET,  MEMORES  SUMUS  VESTRI  IN   SACRIFI- 

cns,  et  in  observationibus.  Au  lieu  de  cérémo- 
nies, le  grec  lit  (4),  dans  nos  prières.  Et  il  y  a 
beaucoup  d'apparence  que  le  traducteur  avait 
d'abord  mis  dans  le  latin,  obsecralionibus,  au  lieu 
a" observationibus,  qui  s'y  est  glissé  depuis.  Les 
Juifs  priaient  et  offraient  des  sacrifices  pour  les 
princes  leurs  alliés,  et  pour  ceux  auxquels  ils 
étaient  soumis,  comme  nous  l'avons  déjà  vu  plus 
d'une  fois  (<;).  Ces  sacrifices  ne  pouvaient  être 
que  pour  demander  à  Dieu  la  conversion  de  ces 
peuples,  ou  pour  leur  obtenir  la  paix  et  les  autres 
biens  temporels,  que  Dieu  donne  souvent  aux 
bons  comme  aux  méchants. 

f.  I  2-1  3.  L/ETAMURITAQUEDEGLORIA  VESTRA.  NOS 
AUTEM  CIRCUMDEDERUNT  MULTjE  TRIBULATIONES. On 

croirait  entendre  parler  des  disciples  de  l'Évan- 
gile, se  réjouissant  de  la  paix  et  de  la  gloire  de 
leurs  frères,  et  ne  mettant  leur  propre  gloire  que 
dans  leurs  grandes  souffrances,  et  dans  l'assis- 
tance du  Seigneur.  Ils  parlent  de  leurs  persécu- 
tions à  peu  près  comme  saint  Paul  parlait  lui-même 
des  siennes. 

Impugnaverunt  nos  reges.  Depuis  le   pontifi- 


(1)  Lvran.  Men.  Tir.  Hue\.  Demonstrat.  Evcing.  prop.  4. 

(2)  H'[i£îç    o"uv    àjt;joa8sE~[ç    tojtov    û'vte;  ,    7;apâx).Tjaiv 
evovteç  Ta  pt(3X['a  ïà  ayta. 

(j)  Joseph.  Antiq.  I.  xiii.  c.  9.  O'j  geoulevoi    x/jç   TOtâuxrj? 


ajtoÎEtçEto?  3:a  to  ex  tôjv  îêpùiv  f,[iwv  TzerttatEÙaOat ypa|jL|j.aT(j)v, 
lia  Grot. 

(4)  K'v  raîç  rcpoaeu^aîç.  lia  et  Syr. 

(5)  Voyez  Chap.  vu.  jj. 


126 


I.  —   MACCABÉES.  —  XII.-  JUIFS   ET   LACÉDÉMON I ENS 


18.  Et  nunc  benefacietis  respondentes  nobis  ad  haec. 

iQ.  Et  hoc  est  rescriptum  epistolarum  quod  miserat 
Onias  : 

20.  Arius,  rex  Spartiatarum,  Onias,  sacerdoti  magno, 
salutem. 

11.  Inventum  est  in  scriptura  de  Spartiatis  et  Judaeis, 
quoniam  sunt  fratres,  et  quod  sunt  de  génère   Abraham. 

22.  Et  nunc  ex  quo  hase  cognovimus,  benefacitis  r,cr\- 
bentes  nobis  de  pace  vestra. 

2j.  Sed  et  nos  rescripsimus  vobis  :  Pecora  nostra,  et 
possessiones  nostras,  vestras  sunt  ;  et  vestrœ,  nostrae  : 
mandavimus  itaque  haec  nuntiari  vobis. 

24.  Et  audivit  Jonalhas  quoniam  regressi  sunt  princi- 
pes Demetrii  cum  exercitu  multo  supra  quam  prius, 
pugnare  adversuseum  ; 

25.  Et  exiit  ab  Jérusalem,  et  occurrit  eis  in  Amathite 
regione,  non  enim  dederat  eis  spatium  ut  ingrederentur 
regionem  ejus. 


t8.  C'est  pourquoi  vous  ferez  bien  de  répondre  à  ce 
que  nous  vous  avons  écrit. 

19.  Voici  la  copie  des  lettres  qu'Aréus  avait  envoyées 
à  Onias  : 

20.  Aréus,  roi  des  Lacédémoniens,  au  grand  prêtre 
Onias,  salut. 

21.  Il  a  été  trouvé  ici,  dans  un  écrit  touchant  les  Lacé- 
démoniens  et  les  Juifs,  qu'ils  sont  frères,  et  qu'ils  sont 
tous  de  la  race  d'Abraham. 

22.  Maintenant  donc  que  nous  avons  su  ces  choses, 
vous  ferez  bien  de  nous  écrire,  si  toutes  choses  sont  en 
paix  parmi  vous. 

2;.  El  voici  ce  que  nous  vous  avons  écrit  :  Nos  bes- 
tiaux et  nos  biens  sont  à  vous  ;  et  les  vôtres  sont  à  nous. 
C'est  ce  que  nous  avons  ordonné  qu'on  vous  déclare  de 
notre  part. 

24.  Cependant  Jonalhas  apprit  que  les  généraux  de 
l'armée  de  Déméirius  étaient  revenus  pour  le  combattre, 
avec  une  armée  beaucoup  plus  grande  qu'auparavant. 

25.  Ainsi  il  partit  de  Jérusalem,  et  alla  au  devant  d'eux 
dans  le  pays  d'Amathite,  parce  qu'il  ne  voulait  pas  leur 
donner  le  temps  d'entrer  sur  ses  terres. 


COMMENTAIRE 


cat  d'Onias  III,  et  les  premières  lettres  des 
Lacédémoniens,  les  Juifs  avaient  souffert  la  per- 
sécution, et  soutenu  la  guerre  de  la  part  des  rois 
Antiochus  Épiphane,  Antiochus  Eupator,  Démé- 
trius  Soter,  Démétrius  Nicator. 

i.  21.  Inventum  est  in  scriptura  de  Spartia- 
tis   ET    JUD/EIS,    QUONIAM    SUNT    FRATRES.     Josè- 

phe  (  1  )  rapporte  cette  lettre  en  sa  place  naturelle, 
dans  l'histoire  du  grand  prêtre  Onias.  Mais  il  la 
rapporte  dans  des  termes  différents  de  ceux  que 
nous  lisons  ici.  En  voici  la  traduction  d'après 
Arnauld  d'Andilly  :  Arius,  roi  de  Lacédémone,  à 
Onias,  salut.  Nous  avons  vu  par  certains  titres 
que  les  Juifs  et  les  Lacédémoniens  n'ont  qu'une 
même  origine,  étant  tous  descendus  d'Abraham. 
Puis  donc  que  nous  sommes  frères,  et  qu'ainsi 
tous  nos  intérêts  doivent  être  communs,  il  est 
juste  que  vous  nous  fassiez  savoir  avec  une  en- 
tière liberté  ce  que  vous  pouvez  désirer  de  nous  ; 
et  que  nous  en  usions  de  la  même  manière  à  vo- 
tre égard.  Démotélès  vous  remettra  cette  lettre 
écrite  sur  une  feuille  carrée,  scellée  d'un  cachet 
où  est  empreinte  la  figure  d'un  aigle  qui  tient  un 
serpent  dans  ses  serres. 

Nous  ignorons  quelle  fut  la  réponse  du  grand 
prêtre  Onias.  On  verra  dans  le  chapitre  xiv  de  ce 
livre,  versets  22  et  suivants,  la  lettre  que  les  La- 
cédémoniens envoyèrent  plus  tard  à  Simon,  et  au 
sénat  des  Juifs. 

f.  23.  Seu  et  nos  rescripsimus  vobis.  Le  grec 
porte  (2):  Voici  ce  que  nous  récrivons,  comn.e  si 


les  Juifs  leur  avaient  écrit  les  premiers  ;  ce  qui 
ne  paraît  nullement,  ni  par  l'Écriture,  ni  par  Jo- 
sèphe  ;  ce  furent  les  Lacédémoniens  qui  firent  la 
première  démarche,  et  qui  recherchèrent  l'amitié 
des  Juifs.  Ce  fut  probablement,  comme  nous  l'a- 
vons dit  plus  haut,  après  les  terribles  épreuves  de 
188,  ou  Philopœmen  prit  Sparte,  en  fit  raser  les 
murailles  et  abolit  la  législation  de  Lycurgue. 
Ils  demandent  que  les  Juifs  entretiennent, de  leur 
côté,  cette  amitié  mutuelle,  en  leur  écrivant  l'état 
de  leurs  affaires.  Benejacitis  scribentes  nobis  de 
pace  vèslra.  Le  grec  (3)  est  au  futur  :  Vous  ferez 
bien  de  nous  écrire  ce  qui  vous  regarde. 

y.  24.  Audivit  Jonathas  quomiam  regressi 
sunt  principes  Demetrii.  Démétrius  Nicator, 
dépouillé  d'une  partie  de  ses  états  par  le  jeune 
Antiochus,  demeurait  à  Laodicée,  uniquement 
occupé  à  faire  bonne  chère  et  à  se  divertir,  sans 
se  mettre  en  peine  du  mauvais  état  de  ses  affai- 
res (4).  Pendant  ce  temps,  ses  généraux  résolurent 
de  faire  une  irruption  dans  la  Judée,  pour  tâcher 
de  détacher  Jonathas  du  parti  d'Antiochus.  Mais 
Jonathas  ayant  été  informé  de  leur  dessein,  alla 
au  devant  d'eux  et  les  empêcha  d'entrer  dans  sa 
province.  Il  s'avança  jusqu'au  pays  d'Emath  ou 
Émèse  en  Syrie,  dans  la  vallée  de  l'Oronte,  et 
s'étant  approché  de  l'armée  ennemie,  à  la  dis- 
tance de  cinquante  stades,  il  intimida  les  géné- 
raux de  Démétrius  au  point  qu'ils  repassèrent  le 
fleuve  Eleuthère,  Nahr-el-Kebîr,  avant  que  Jona- 
thas eût  rien  su  de  leur  fuite. 


(1)  Joseph.  Antiq.  L  xti.  c.  5.  E\ioy  oV.3,  Ypa?;j  tivi 
l'jpouev  fïiç  éÇ  Ivo;  eTiev  y^vou;  I'o^Saîoi  /.où  Aax.e5atu.oviO'., 
iv.  ttj;  T.oo;  A'Spaàu.  oix££<kt)Tqç.  A;'/.aiov  oùv  éati  â8eX;pou; 
$)aâ;   O'/ra  ,  3carc6|.>.7t£50ai  npô;  J)u.â;  reepi  <n~'v  àv  [JoûX^aÛe, 


Jt0:'7|30a£v  Oî  /.ai  ï),ast;  ;o  auro,  etc. 
(2)  Ka'i  T\u.t"ii  Si  âvnypaso^ev  ûu.Tv. 

(j)  KaXù;  TCotrjaeTE  ypâ:aovTEç  f)u,tv  rtepi  iffi  ètprfvT);  ûjxaiv. 
(4)  Excerpla  Vales.  ex  Diodor.  Sicul.  p.  j6;. 


MACCABEES. 


XII.-   EXPEDITIONS    DIVERSES 


27 


26.  Et  misit  speculaiores  in  castra  eorum,  et  reversi 
renuntiaverunt  quod  constituunt   supervenire  illis  nocte. 

27.  Cum  occiiisset  autem  sol,  prascepit  Jona'has  suis 
vigilare,  et  esse  in  armis  paratos  ad  pugnam  tota  nocte  ; 
et  posuit  custodes  per  circuitum  castrorum. 

23.  Et  audierunt  adversarii  quod  paratus  est  Jonathas 
cum  suis  in  bello.  et  timuerunt,  et  formidaverunt  in  corde 
suo  ;  et  accenderunt  focos  in  castris  suis. 

29.  Jonathas  autem,  et  qui  cum  eo  erant,  noii  cogno- 
verunt  usque  mane,  videbant  autem  luminaria  ardentia. 

jo.  Et  secutus  est  eos  Jonathas;  et  non  compre  hendit 
eos,  transierant  enim  tlumen  Eleutherum. 

;i.  Et  divertit  Jonathas  ad  Arabas,  qui  vocantur  Zaba- 
daei  ;  et  percussit  eos,  et  accepit  spolia  eorum. 

?2.  Et  junxit,  et  venit  Damascum,  et  perambulabat 
omnem  regionem  illam. 

5}.  Simon  autem  exiit,  et  venit  usque  ad  Ascalonem, 
et  ad  proxima  praesidia  ;  et  declinavit  in  Joppen,  et  occu- 
pavit  eam  : 

54.  Audivit  enim  quod  vellent  praesidium  tradere  par- 
tibus  Demetrii  ;  et  posuit  ibi  custodes  ut  custodirent 
eam. 

55.  Et  reversus  est  Jonathas,  et  convocavit  seniores 
populi,  et  cogitavit  cum  eis  aedificare  praesidia  in  Judasa, 

}6.  Et  asdificare  muros  in  Jérusalem,  et  exaltare  alti- 
tudinem  magnam  inter  médium  arcis  et  civitatis  ut  sepa- 
raret  eam  a  civitate,  ut  esset  ipsa  singulariter,  et  neque 
emant,  neque  vendant. 

$7.  Et  convenerunt  ut  œdificarent  civitatem;  et  cecidit 
murus  qui  erat  super  torrentem  ab  ortu  solis,  et  repara- 
vit  eum,  qui  vocatur  Caphetetha. 


26.  Et  il  envoya  dans  leur  camp  des  espions,  qui  rap- 
portèrent qu'ils  avaient  résolu  de  venir  le  surprendre 
pendant  la  nuit 

27.  Après  donc  que  le  soleil  fût  couché,  Jonathas  or- 
donna à  ses  gens  de  veiller,  et  de  se  tenir  toute  la  nuit 
sous  les  armes  et  prêts  à  combattre,  et  il  mit  des  gardes 
autour  du   camp. 

28.  Les  ennemis  ayant  su  que  Jonathas  se  tenait  avec 
ses  gens  prêt  au  combat,  eurent  peur,  et  leurs  cœurs 
furent  saisis  de  frayeur,  et  ils  allumèrent  des  feux  dans 
leur  camp. 

20.  Jonathas  et  ceux  qui  étaient  avec  lui,  voyant  ces 
feux  allumés,  ne  s'aperçurent  point  de  leur  retraite  jus- 
qu'au matin. 

;o.  Et  Jonathas  les  poursuivit  :  mais  il  ne  put  les  attein- 
dre, parce  qu'ils  avaient  déjà  passé  le  fleuve  Éleuthère. 

JI.  Il  marcha  de  là  vers  les  Arabes,  qui  sont  appelés 
Zabadéens  :  il  les  défit,  e'  en  rapporta  les  dépouilles. 

52.  Il  partit  de  là  ensuite,  et  vint  à  Damas;  et  il  faisait 
des  courses  dans  tout  le  pays. 

;j.  Cependant  Simon  alla  jusqu'à  Ascalon,  et  jusqu'aux 
forteresses  voisines:  il  marcha  de  là  vers  Joppé,  et  la 
prit  ; 

34-  Car  il  avait  su  qu'ils  voulaient  livrer  la  place  aux 
partisans  de  Démétrius  :  et  il  y  mit  garnison  pour  gar- 
der la  ville. 

;<.  Jonathas  étant  revenu,  rassembla  les  anciens  du 
peuple  ;  et  il  résolut  avec  eux  de  bâtir  des  forteresses 
dans  la  Judée, 

;0.  De  bâtir  les  murs  de  Jérusalem,  et  de  faire  aussi 
élever  un  mur  d'une  très  grande  hauteur  entre  la  forte- 
resse et  la  ville,  afin  que  la  forteresse  en  fût  séparée  et 
sans  communication, et  que  ceux  de  dedans  ne  pussent  ni 
acheter  ni  vendre. 

J7.  On  s'assembla  donc  pour  bâtir  la  ville;  et  la  mu- 
raille qui  était  le  long  du  torrent,  du  côté  de  l'orient, 
étant  tombée,  Jonathas  la  rétablit;  et  elle  fut  appelée 
Caphététha. 


COMMENTAIRE 


^31.  Divertit  ad  Arabas,  qui  dicuntur  Za- 
BADiCi.  La  plupart  des  commentateurs  adoptent 
la  manière  de  lire  de  Josèphe,  qui  porte  Naba- 
Ihéens,  au  lieu  de  Zabadéens.  En  effet,  on  ne 
connaît  point  d'Arabes  Zabadéens  ;  mais  tout  le 
monde  connait  les  Nabathéens.  Mais  il  y  a  une 
difficulté,  c'est  que  les  Nabathéens  étaient  alliés 
des  Juifs  (4),  au  lieu  que  ceux-ci  étaient  leurs 
ennemis  ;  il  peut  se  faire  pourtant  que,  au  milieu 
de  tant  de  rivalités  politiques,  les  Nabathéens 
aient  soutenu  un  prince  et  les  Juifs  un  autre.  Ou- 
tre cette  objection  historique  que  l'on  peut  oppo- 
ser à  la  leçon  de  Josèphe,  il  en  est  une  autre  plus 
grave,  tirée  de  la  position  géographique:  c'est 
que  Jonathas  opère  au  nord  et  non  au  midi  de  la 
Palestine.  Émèse,  le  fleuve  Éleuthère,  Damas  se 
trouvent  dans  la  même  région.  Ces  Arabes  de 
Zabad  ne  seraient-ils  pas  ce  mélange  de  peuples 
qui  occupaient  l'ancienne  province  de  Tsobah  ? 
L'auteur  écrivant  en  hébreu,  n'avait  guère  d'autre 
mot  pour  désigner  ces  peuplades  diverses,    ara- 


méennes,  arabes,  cananéennes  et  autres  peut-être 
que  le  substantif  collectif  hébreu  2-1?  '  creb,  qui 
signifie  un  mélange  d'étrangers,  une  multitude 
composée  de  toutes  sortes  de  gens.  Le  traduc- 
teur grec  aura  traduit  littéralement  par  Arabe, 
sans  faire  preuve  pour  cela  d'ignorance,  puisque, 
au  moment  du  siège  de  Tyr,  Alexandre  faillit  pé- 
rir parmi  ces  Arabes.  11  y  avait  donc  réellement 
des  Arabes  dans  la  chaîne  de  l'Antiliban.  Et  ces 
mêmes  Arabes  d'Alexandre  se  trouvaient  juste- 
ment sur  la  route  qui  mène  d'Émèse  à  Damas, 
dans  le  Tsobah.  Le  royaume  de  Tsobah  a  joué 
un  rôle  important  sous  David. 

jfr.  36.  Exaltare  altitudinem  magnam  inter 
médium  arcis  et  ci vitatis. C'était  afin  d'ôter  aux 
Syriens  tout  moyen  de  subsister,  en  leur  cou- 
pant la  communication  avec  la  ville,  dont  ils 
tiraient  leur  nourriture. 

v.  ■)"].  Et  cecidit  murus  qui  erat  super  tor- 
rentem. Le  grec  porte  (2)  :  El  il  approcha  de  la 
muraille  du  torrent,  qui  passe  à  l'orient  de  la  ville. 


(1)  1.  Macc.  v.  25.  et  ix.  55. 


[i,  Kai  vcYtas  îofl  Te:'-/ouî.  Mais  le  ms.  alex.  lit  :  srase 
;o  tvl/o;,  que  notre  Vulgate  a  suivi. 


128 


F.—  MACCABÉES.  —  XII.-  TRAHISON    DE  TRYPHON 


j8.  Et  Simon  aediricavit  Adiada  in  Sephela,  et  munivit 
eam,  et  imposuit  portas  et  seras. 

$o.  Et  cum  cogitasset  Tryphon  regnare  Asiae,  et  assu- 
mere  diadema.  et  extendere  manum  in  Antiochum  regem, 

40.  Timens  ne  forte  non  permitteret  eum  Jonathas, 
sed  pugnaret  adversus  eum,  quajrebat  comprehendere 
eum,  et  occidere.Et  exsurgens  abiit  in  Bethsan. 

41.  Et  exivit  Jonathas  obviam  illi  cum  quadraginta  mil- 
libus  virorum  electorum  in  prœlium,  et  venit  Bethsan. 

42.  Et  vidit  Tryphon  quia  venit  Jonathas  cum  exercitu 
multo  ut  extenderet  in  eum  manus,  et  timuit; 

4).  Et  excepit  eum  cum  honore,  et  commendavit  eum 
omnibus  amicis  suis,  et  dédit  ei  munera,  et  prsecepit  exer- 
citibus  suis  ut  obedirent  ei  sicut  sibi. 

44.  Et  dixit  Jonathas  :  Ut  quid  vexasti  universum  popu- 
lum,  cum  bellum  nobis  non  sit  ? 

45.  Et  nunc  remitte  eos  in  domossuas;  elige  autem 
tibi  viros  paucos,  qui  tecum  sint,  et  veni  mecum  Ptole- 
maidam,  et  tradam  eam  tibi,  et  reliqua  pra.-sidia,  et  exer- 
citum,  et  universos  prasposilos  negotii,  et  conversus 
abibo  ;  propterea  enim  veni. 


46.  Et  credidit  ei,  et  fecit  sicut  dixit;  et  dimisit  exer- 
citum,  et  abierunt  in  terram  Juda. 

47.  Retinuit  autem  secum  tria  millia  virorum,  ex  quibus 
remisit  in  Galilfeam  duo  millia;  mille  autem  venerunt 
cum  eo. 

48.  Ut  autem  intravit  Ptolemaidam  Jonathas, clauserunt 
portas  civitatis  Ptolenienses,  et  comprehenderunt  eum  , 
et  omnes  qui  cum  eo    intraverant  gladio  interfecerunt. 


j8.  Simon  bâtit  aussi  Adiada,  dans  la  plaine,  et  la  for- 
tifia, et  y  mit  des  portes  et  des  serrures. 

;q.  Mais  Tryphon  avait  résolu  de  se  faire  roi  d'Asie, 
de  prendre  !e  diadème,  et  de  tuer  le  roi   Anticchus. 

40.  Craignant  que  Jonathas  ne  l'en  empêchât,  et  ne 
lui  déclarât  la  guerre,  il  cherchait  les  moyens  de  se  sai- 
sir de  sa  personne,  et  de  le  tuer  :  il  s'en  alla  donc  dans 
cette  pensée  à  Bethsan. 

41.  Jonathas  marcha  au  devant  de  lui  avec  quarante 
milie  guerriers  de  choix,  et  vint  à   Bethsan. 

42.  Tryphon  voyant  que  Jonathas  était  venu  avec  une 
grande  armée  pour  le  combattre,  fut  saisi  de  crainte. 

4j.  Il  le  reçut  avec  distinction,  le  recommanda  à  tous 
ses  amis,  lui  fit  des  présents,  et  ordonna  à  toute  son 
armée  de  lui  obéir  comme  à  lui-même. 

44.  Il  dit  ensuite  à  Jonathas  :  Pourquoi  avez-vous  fati- 
gué inutilement  tout  ce  peuple,  puisque  nous  n'avons 
point  de  guerre  ensemble  ? 

4Ç.  Renvoyez-les  donc  dans  leurs  maisons,  et  choisis- 
sez-en seulement  un  petit  nombre  d'entre  eux  pour  être 
avec  vous  :  venez  avec  moi  à  Ptolémaïs,  et  je  vous  la 
mettrai  entre  les  mains,  avec  les  autres  forteresses,  les 
troupes  et  tous  ceux  qui  ont  la  conduite  des  affaires,  et 
je  m'en  retournerai  ensuite  ;  car  c'est  pour  cela  que  je 
suis  venu. 

4b.  Jonathas  le  crut,  et  fit  ce  qu'il  lui  avait  dit  ;  il  ren- 
voya ses  gens,  qui  s'en  retournèrent  au  pays  de  Juda. 

47.  Et  il  ne  retint  avec  lui  que  trois  mille  hommes, 
dont  il  renvoya  encore  deux  mille  en  Galilée;  et  mille 
l'accompagnaient. 

48.  Aussitôt  que  Jonathas  fut  entré  dans  Ptolémaïs,  les 
habitants  fermèrent  les  portes,  et  le  prirent  et  ils  passè- 
rent au  fil  de  l'épée  tous  ceux  qui  étaient  venus  avec  lui. 


COMMENTAIRE 


L'ouvrage  nouveau  queJonathas  avait  commencé, 
bordait  la  vallée  du  Cédrpn,  qui  coulait  à  l'orient 
de  Jérusalem. 

Reparavit  eum  qui  vocatur  Caphetetha.  // 
répara  le  mur  appelé  Caphélétha,  ou  selon  le 
grec  (1),  Chaphénatha.  C'est  un  mur  différent  du 
précédent.  Le  syriaque  le  nomme  Chespanalsa 
qu'on  pourrait  traduire  par  argenlé,  ou  mur  d'ar- 
gent. 

f.  38.  Adiada  in  sephela.  Schephêlâh  signifie 
en  hébreu  une  plaine  (2);  elle  se  prend  principa- 
lement pour  celle  qui  est  aux  environs  d'Éleuté- 
ropolis,  au  couchantdes  montagnes  Je  Juda,  vers 
le  pays  des  Philistins,  de  J  oppé  à  Gaza.  Voyez  ce 
qu'on  a  dit  sur  Josué,  x.  f.  40.  Adiada  ne  nous 
est  connue  que  par  ce  passage,  elle  est  nommée 
Addus.  1.  Macc.  xin,  1  j.  Reland  croit  que  c'est 
la  môme  ville  que  Hadid  (3). 

jh  39.  Cum  cogitas5Et  Tryphon  regnare 
Asi/E.  Tryphon,  ayant  mis  le  jeune  Antiochus  sur 
le  trône,  ne  se  contenta  pas  de  régner  sous  son 
nom,  et  d'exercer  la  souveraine  autorité  dans  son 
royaume  ;  il  voulut  se  défaire  de  ce  jeune  prince; 
mais  connaissant  le  pouvoir  de  Jonathas,  et  sa- 


chant bienque,  tant  qu'il  soutiendrait  Antiochus,  il 
ne  pourrait  le  déposséder,  il  commença  par  l'atta- 
quer, et  lui  faire  la  guerre.  Il  vint  pour  cela  jus- 
qu'à Bethsan,  autrement  Scythopolis,  au  sud  du 
lac  de  Génésareth  (4). 

f.  48.  Ut  autem  intravit  Ptolemaidam,  etc. 
On  peut  bien  blâmer  Jonathas  de  s'être  fié  trop 
légèrement  à  son  ennemi  :  mais  on  ne  doit  pas, 
comme  ont  fait  quelques  hérétiques,  regarder  cet- 
te perfidie  dont  Tryphon  usa  envers  lui,  comme 
un  châtiment  par  lequel  Dieu  le  punissait  d'avoir 
eu  recours  aux  Romains  et  aux  Lacédémoniens 
sans  nécessité.  Ce  que  l'on  a  dit  auparavant  de 
ses  véritables  dispositions,  peut  suffire  à  réfuter  ce 
sentiment.  Il  est  vrai  qu'il  fit  une  faute,  en  croy- 
ant si  facilement  ce  que  lui  disait  un  traître:  mais 
cette  faute  était  elle-même  une  preuve  de  la 
grandeur  de  son  âme,  et  de  la  simplicité  de  son 
cœur.  Il  jugeait  de  la  bonne  foi  de  Tryphon  par 
la  sienne  propre.  S'il  manqua  de  prudence,  c'est 
qu'il  était  trop  haut  de  caractère  pour  soupçon- 
ner la  trahison.  11  méprisait  d'ailleurs  le  danger. 
C'était  pour  lui  un  très  petit  mal  de  tomber  dans 
l'embuscade  d'un  perfide,  dont  toute  la  cruauté 


(1)  Ka'i  iîliay.tiacsev  x6  xa).oû(isvov  XaasvaOa. 

(2)  lle'V.ov  rnsv 


(î)  Esdras.  11.  jj-  ~  Nèhim.  xi.  J4. 
(4)  Josue  xvii.  11. 


I.  —  MACCABÉES. 


XII.-  TRISTESSE    DES  JUIFS 


120 


49.  Et  misit  Tryphon  exercitum  et  équités  in  Gali- 
lœam  et  in  campum  magnum,  ut  perderent  omnes  socios 
Jonathae. 

$0.  At  illi,  cum  cognovissent  quia  comprehensus  est 
Jonathas,  et  periit,  et  omnes  qui  cum  eo  erant,  hortati 
sunt  semetipsos,  et  exierunt  parati  in  praelium. 

5 1.  Et  videntes  hi  qui  insecuti  fuerant,  quia  pro  anima 
res  est  illis,  reversi  sunt; 

52.  Illi  autem  venerunt  omnes  oum  pace  in  terram 
Juda.  Et  planxerunt  Jonathan,  et  eos  qui  cum  ipso  fue- 
rant, valde;  et  luxit  Israël  luctu  magno. 

5;.  Et  quœsierunt  omnes  gentes,  quse  erant  in  circuitu 
eorum,  conterere  eos:  dixerunt  enim  : 

S4.  Non  habent  principem  et  adjuvantem  ;  nunc  ergo 
e.xpugnemus  illos,  et  tollamus  de  liominibus  memoriam 
eorum. 


40.  Et  Tryphon  envoya  ses  troupes  et  sa  cavalerie  en 
Galilée,  et  dans  la  grande  plaine,  pour  tuer  tous  ceux 
qui  avaient  accompagné  Jonathas. 

50.  Mais  ceux-ci,  ayant  appris  que  Jonathas  avait  été 
arrêté,  et  qu'il  avait  péri  avec  tous  ceux  qui  l'accompa- 
gnaient, s'encouragèrent  les  uns  les  autres,  et  se  présen- 
tèrent pour  combattre  avec  une  grande  assurance. 

}I.  Ceux  qui  les  avaient  poursuivis,  les  voyant  résolus 
à  vendre  chèrement  leur  vie,  s'en  retournèrent. 

«2.  Ainsi  ils  revinrent  tous  dans  le  pays  de  Juda  sans 
être  attaqués  ;  ils  pleurèrent  beaucoup  Jonathas,  et  ceux 
qui  étaient  avec  lui;  et  tout  Israël  en   fit  un  grand  deuil. 

5J.  Alors  tous  les  peuples  dont  ils  étaient  environnés 
firent  un  nouvel  effort  pour  les  prendre,  en  disant  : 

54.  Ils  n'ont  aucun  chef  qui  les  commande,  ni  personne 
qui  les  assiste  :  attaquons-les  donc  maintenant  ;  exter- 
minons-les, et  effaçons  leur  nom  de  la  mémoire  des 
hommes. 


COMMENTAIRE 


1 


ne  pouvait  faire  autre  chose  qu'avancer  un  peu  sa 
mort.  C'était  même  quelque  chose  de  plus  glo- 
rieux pour  lui,  de  mourir  ainsi  par  la  main  de  ses 
ennemis,  que  de  jouir  paisiblement  de  tous  les 
honneurs  attachés  à  sa  dignité.  Car  enfin,  le  par- 
tage des  vrais  Israélites  a  toujours  été  la  souf- 
france, l'opprobre  et  la  persécution  :  et  s'ils  cher- 
chaient des  consolations  en  cette  vie,  c'était  dans 
les  livres  saints,,  dont  la  lecture  les  soutenait  con- 
tre toutes  sortes  d'afflictions,  et  les  affermissait 
dans  la  patience. 

,v.  49.  In  campum  magnum.  La  grande  plaine, 
ou  le  grand  Champ,  est  la  plaine  d'Esdrelon  ou 
de  Jezrahel. 

y.  <,o.  Quia  comprehensus  est  Jonathas,  et 
periit.  On  crut  d'abord  que  Tryphon  l'avait  fait 
mourir;  mais  on  sut  le  contraire  dans  la  suite. 

fi.  53.  Et  qu.esiek.unt  omnes  gentes,  que: 
erant  in  circuitu  eorum,  conterere  eos.  Si 
Dieu  permet  quelquefois  la  consommation  de  la 
malice  des  hommes,  il  les  empêche  souvent  d'en 
recueillir  tout  le  fruit  qu'ils  se  proposaient  :  et  ja- 
mais sa  toute-puissance  n'éclate  plus  sensiblement 
pour  les  confondre,  que  lorsqu'ils  se  flattent 
d'avoir  triomphé  de  ceux  qu'il  protège.  Try- 
phon use  de  la  plus  noire  de  toutes  les  perfidies 
pour  se  saisir  de  la  personne  de  Jonathas,  que 
l'on  regardait  alors  comme  l'invincible  bouclier 
de  la  maison  d'Israël.  Dieu  souffre  que  cette 
indigne  trahison  lui  réussisse  ;  et  tous  les  peuples 


qui  environnaient  les  Juifs,  regardant  cette  occa- 
sion comme  favorable  pour  détruire  un  pays  dont 
ils  ne  pouvaient  supporter  la  religion  et  l'éclat, 
sedisentlesunsaux  autres:  Voiciletemps  d'exter- 
miner tout  à  fait  les  Israélites  ;  puisque,  n'ayant 
point  de  chef,  il  est  très  facile  de  les  perdre 
entièrement,  et  d'effacer  leur  nom  même  de  la 
mémoire  des  hommes. 

Hœc  cogilaveru.nl,  et  erraveru.nl  ;  excœcavitenim 
illos  malitia  eorum  (1).  Telles  étaient  leurs  pen- 
sées, dit  l'Écriture  sur  un  sujet  semblable  ;  mais  ils 
s'égaraient  dans  leurs  vains  raisonnements,  aveu- 
glés par  leur  propre  malice.  Ils  regardaient  le 
gouvernement  du  peuple  de  Dieu  comme  un  gou- 
vernement tout  humain  ;  et  ils  ne  considéraient 
pas  que  c'était  le  Tout-Puissant  qui  veillait  pour 
la  garde  d'Israël,  et  qu'il  tendait  même  des  piè- 
ges à  l'orgueil  de  ses  ennemis,  lorsqu'il  permet- 
tait que  les  défenseurs  de  son  peuple  périssent. 
Nous  verrons,  en  effet,  dans  la  suite,  que  jamais 
l'état  des  Juifs  ne  parut  plus  florissant  sous  les 
Maccabées,  que  lorsque  leurs  ennemis,  après  la 
prise  de  Jonathas,  les  regardaient  comme  perdus 
sans  ressource  :  tant  il  est  vrai  que  le  méchant 
n'a  jamais  moins  de  sujet  de  se  confier  en  ses  for- 
ces, que  lorsqu'il  se  considère  comme  le  plus 
fort  ;  etqu'au  contraire  l'humble  serviteur  de  Dieu 
n'a  jamais  plus  de  sujet  d'espérer  son  assistance, 
que  lorsqu'il  semble  que  tous  les  hommes  et  tous 
les  démons  conspirent  également  pour  le  perdre. 


(1)  Sap.  11.  21. 


S.   B. 


T.  Xli. 


CHAPITRE    XIII 


Simon  succède  à  Jonalhas.  Il  s'oppose  aux  entreprises  de  Tryphon.  Mort  de  Jonalhas. 
Simon  bâtit  un  sépulcre  pour  son  père  et  ses  frères.  Tryphon  tue  le  jeune  A  nliochus 
et  règne  à  sa  place.  Simon  recherche  l'amitié  de  Démétrius  Nicator ,  et  obtient 
V affranchissement  de  son  pays.  Il  assiège  et  prend  Ga\a.  La  forteresse  de  Jérusalem 
lui  est  rendue.  Il  met  Jean  Hyrcan,  son  fils,  à  la  tète  de  l'armée. 


i.  Et  audivit  Simon  quod  congregavil  Tryphon  exer- 
citum  copiosum,  ut  veniret  in  terrain  Juda,  et  attereret 
eam. 

2.  Videns  quia  in  tremore  populus  est,  et  in  timoré, 
ascendit  Jérusalem,  et  congregavit  populum; 

5.  Et  adhortans,  dixit  :  Vos  scitis  quanta  ego,  et  IVa- 
tres  mei,  et  domus  patris  mei  fecimus  pro  iegibus  et  pro 
sanctis  prœlia,  et  angustias  quales  vidimus  : 


i.  Cependant  Simon  fut  averti  que  Tryphon  avait  levé 
une  grande  armée,  pour  venir  tout  ravager  dans  le  pays 
de  Juda. 

2.  Et  voyant  le  psuple  saisi  de  frayeur,  il  monta  à 
Jérusalem,  et  fit  assembler  tout  le  monde. 

5.  Il  leur  dit  pour  les  encourager:  Vous  savez  combien 
nous  avons  combattu,  mes  frères  et  moi,  et  la  maison  de 
mon  père,  pour  nos  lois  et  pour  le  temple  saint,  et  en 
quelles  afflictions  nous  nous  sommes  vus. 


COMMENTAIRE 


f.    ].    VOS  SCITIS  QUANTA  EGO,  ET   FRATRES  MEI, 
ET  DOMUS  PATRIS  MEI,  FECIMUS  PRO  LEGIBUS   ET  PRO 

sanctis  pr/ELia,  etc.  Dieu  fait  connaître,  par  ces 
grands  exemples,  combien  le  courage  et  la  fer- 
meté sont  nécessaires  aux  chefs  des  peuples  ;  tout 
Israël  était  saisi  de  frayeur  en  se  voyant  en- 
vironné de  nations  qui  avaient  conjuré  sa  perte 
et  près  d'être  exterminé  par  les  troupes  de  Try- 
phon. Qu'aurait  fait  ce  peuple  dans  une  conster- 
nation si  générale,  si  un  homme  rempli  de  cou- 
rage et  de  vertu  ne  se  fût  mis  à  sa  tête  pour  le 
rassurer r  Mais  qui  rend  cet  homme  intrépide, 
sinon  Dieu  même  qui  remplit,  quand  il  lui  plaît, 
de  son  esprit  et  de  sa  force,  ceux  qu'il  a  choisis 
pour  sauver  son  peuple?  Le  pouvoir  passe  de 
main  en  main  chez  les  Maccabées  et  tous  se 
montrent  à  la  hauteur  de  leur  tâche,  car  ils  sont 
plus  attachés  à  leur  foi  qu'à  leur  vie.  Nous  avons 
vu  (1)  que  Matthathias,  leur  père  commun,  dans 
le  discours  si  touchant  qu'il  fit  à  ses  fils  sur  son 
lit  de  mort,  les  exhorta  par  les  exemples  de  tous 
les  saints  qui  les  avaient  précédés,  à  mépriser  la 
puissance  et  la  gloire  des  impies,  et  à  donner  de 
bon  cœur  leur  vie  pour  la  défense  de  la  loi  de 
Dieu.  Par  une  sorte  d'intuition  prophétique,  il 
leur  désigna  Judas  et  Simon  comme  particuliè- 
rement doués  pour  être  les  chefs  d'Israël.  A  pro- 
pos de  Simon,  il  leur  dit  que  c'était  un  homme 
d'un  bon  conseil,  scio  quod  vir  boni  consilii  est; 
qu'il  le   leur  donnait    pour   père,    ipse  erit   vobis 


pater;  et  leur  commandait  d'écouter  toujours  ce 
qu'il  leur  dirait,  ipsum  ctudite  semper. 

C'était  donc  une  excellente  vocation  que  celle 
de  ce  grand  homme;  puisque  ce  fut  par  le  choix 
d'un  père  mourant  et  rempli  du  Saint-Esprit,  qu'il 
fut  établi  comme  le  père  et  l'oracle  de  tout  Israël. 
Si  nous  ne  voyons  point  que,  pendant  la  vie  de 
Judas.  Maccabée  et  de  Jonathas,  ses  frères,  il  ait 
entrepris  de  conduire  le  peuple  de  Dieu  par  ses 
conseils;  et  si  l'on  voit,  au  contraire,  que  ces 
deux  illustres  chefs  conduisirent  successivement 
Israël  dans  la  guerre  comme  dans  la  paix,  la 
sagesse  de  Simon  n'en  paraît  que  plus  admirable, 
d'avoir  su  si  bien  obéir  lorsqu'il  était  si  capable 
de  commander,  et  de  ne  s'être  prévalu  en  aucune 
sorte  du  jugement  de  son  père,  pour  ôter  ni  à 
Judas  ni  à  Jonathas  une  partie  de  leur  autorité. 
Ce  rare  exemple  d'une  modestie  si  humble  mé- 
rite presque  d'être  comparé  avec  celui  de  David, 
qui,  ayant  été  sacré  roi  par  l'ordre  de  Dieu,  n'eut 
jamais  la  moindre  pensée  de  s'élever  sur  le  trône 
avant  le  temps  marqué  par  la  Providence. 

Ce  fut  donc  après  la  prise  de  Jonathas,  que 
l'on  croyait  mort,  que  Simon,  son  frère,  resté  seul 
des  fils  de  Matthathias,  commença  véritablement 
à  paraître  comme  le  père  d'Israël.  Ce  fut  alors 
que,  s'étant  tû  si  longtemps,  il  mérita  d'être 
écoulé  comme  un  homme  dont  le  conseil  devait 
être  le  salut  du  peuple.  Tous  les  travaux  qu'ils 
avaient    soufferts,   toutes  leurs  guerres  et    leurs 


Macc.  11.  65. 


MACCABÉES.  -  XIII    -  GOUVERNEMENT  DE  SIMON 


Mi 


4.  Horum  gratis  perierunt  (ratres  mei  omnes  propter 
Israël  ;  et  relictus  sum   ego  solus. 

5.  El  mine  non  imhi  contingat  parecre  animas  meas  in 
oinni  tempore  tribu lationis  !  non  enim  melior  sum  fratri- 
Tdus  meis. 

6.  Vindicabo  itaque  gentem  meam  et  sancta,  natos 
quoque  nostros  et  uxores,  quia  congr'egatae  sunt  univer- 
sels génies  conterere  nos  inimicitiae  gratia. 

7.  El  accensus  est  spiritus  populi,  simul  ut  audivit  ser- 
mones  istos  ; 

8.  Et  responderunt  voce  magna,  dicentes  :  Tu  es  dux 
uoster  loco  Judue  et  Jonathce,  fratris  tui  ; 

q.  Pugna  praelium  nnstrum,  et  omnia  quœcumque  di- 
xeris  nobis  faciemus. 

10.  Et  congregans  omnes  viros  bellatores,  acceleravit 
consummare  universos  muros  Jérusalem,  et  munivil  eam 
in  gyro. 

11.  Et  misit  Jonathan,  filium  Absalomi,  et  cum  eo  exer- 
citum  novuni,  in  Joppen  ;  et,  ejectis  his  qui  erant  in  ea, 
lemansit  illic  ipse. 

12.  Et  movit  Tryphon  a  Ptolemaida  cum  exercitu 
multo.  ut  veniret  in  terrain  Juda  ;  et  Jonathas  cum  eo  in 
custodia. 


4.  C'est  pour  cela  que  tous  mes  frères  ont  péri,  en  vou- 
lant sauver  Israël  ;  et  je  suis  demeuré  seul. 

(,.  Mais  à  Dieu  ne  plaise  que  je  veuille  épargner  ma 
vie,  tant  que  nous  serons  dans  l'affliction  ;  car  je  ne  suis 
pas  meilleur  que  mes  frères. 

G.  Je  vengerai  donc  mon  peuple  et  ie  sanctuaire,  nos 
enfants  et  nos  femmes,  parce  que  toutes  les  nations  se 
sont  assemblées  pour  nous  opprimer,  par  la  seule  haine 
qu'elles  nous  portent. 

7.  A  ces  paroles  tout  le  monde  fut  animé  de   courage. 

8.  Ils  lui  répondirent  à  haute  voix  :  Vous  êtes  notre 
chef  en  la  place  de  Judas  et  de  Jonathas  votre  frère. 

9.  Conduisez-nous  dans  nos  combats;  et  nous  ferons 
tout  ce  que  vous  nous  ordonnerez. 

10.  Aussitôt  il  fit  rassembler  tous  les  gens  de  guerre, 
et  il  rebâtit  en  toute  hâte  toutes  les  murailles  de  Jéru- 
salem, et  il  la  fortifia  tout  autour. 

11.  Il  envoya  Jonathas  fils  d'Absalom  â  Joppé  avec  une 
nouvelle  armée  ;  et,  après  qu'il  en  eût  chassé  ceux  qui 
étaient  dedans,  il  y  demeura  avec  ses  troupes. 

12.  Cependant  Tryphon  partit  de  Ptolémaïs  avec  une 
grande  armée,  pour  venir  dans  le  pays  de  Juda;  et  il 
menait  avec  lui  Jonathas  qu'il  avait  retenu  prisonnier. 


COMMENTAIRE 


afflictions  précédentes,  la  mort  môme  de  ses  frè- 
res, qui  avaient  péri  en  voulant  sauver  Israël, 
étaient  les  moyens  les  plus  puissants  qu'il  em- 
ploya pour  rassurer  les  J  uifs  ;  il  leur  fit  comprendre 
que  toute  leur  gloire  devait  être,  comme  la  sienne 
et  comme  celle  de  la  maison  de  son  père,  de  sup- 
porter toutes  sortes  d'afflictions,  et  de  soutenir 
toutes  sortes  de  combats  pour  la  sainteté  de  leurs 
lois  et  de  leur  temple.  Comme  il  ne  se  croyait  pas 
meilleur  que  ses  frères,  c'est-à-dire,  d'une  condi- 
tion à  se  ménager  plus  qu'eux,  il  déclare  qu'il 
n'épargnera  jamais  sa  vie  tant  que  son  peuple 
sera  dans  l'affliction  ;  parce  qu'en  effet  le  père  du 
peuple  doit  donner  sa  vie  pour  le  sauver  ;  et  ce 
n'est  pas  aimer  que  de  rechercher  la  douceur  et 
le  repos,  lorsque  ceux  dont  on  est  chargé  de  pro- 
curer le  salut,  sont  affligés  et  persécutés. 

Mais  il  est  très  remarquable  ,  que  ce  qui 
augmente  son  courage  pour  venger  son  peuple  et 
le  sanctuaire  du  Seigneur,  est  le  nombre  même 
de  ses  ennemis,  leur  conspiration  générale  pour 
le  perdre,  et  l'injustice  de  la  haine  toute  gratuite 
qu'ils  lui  portent:  Je  les  vengerai,  dit-il, parce  que 
toutes  les  nations  se  sont  assemblées  pour  nous  oppri- 
mer par  la  seule  haine  quelles  ont  conçue  contre 
nous.  Quel  est  ce  langage  si  disproportionné  à  la 
faiblesse  de  l'homme,  sinon  celui  du  roi  prophète, 
qui,  tout  environné  de  troupes  campées  autour  de 
lui.  déclarait  aussi  que  son  cœur  n'en  était  point 
effrayé  :  Si  consistant  adversum  me  caslsa,  non 
iimebil  cor  meum  (1).  On  a  vu  auparavant  (2),  que 


Simon  avait  déjà  donné  des  preuves  éclatantes  de 
courage  en  d'autres  rencontres;  comme  lorsqu'é- 
tant  choisi  par  Judas  pour  s'en  aller  délivrer  les 
Juifs  qui  étaient  en  Galilée,  il  attaqua  les  nations 
et  les  défit  en  divers  combats,  mit  en  liberté  ceux 
de  ses  frères  qui  avaient  gémi  jusqu'alors  sous 
l'oppression  de  ces  infidèles,  et  les  ramena  avec 
leurs  femmes,  leurs  enfants  et  tous  leurs  biens, 
de  Galilée  en  Judée.  Mais  rien  ne  parut  plus 
grand  en  lui  que  cette  humble  fermeté  qu'il  fit 
paraître,  et  qu'il  eut  la  force  d'inspirer,  par  son 
exemple,  à  tout  Israël,  lorsqu'étant  privé  de  l'ap- 
pui de  tous  ses  frères,  il  n'eut  pas  la  moindre 
crainte  de  ce  qui  avait  abattu  le  courage  de  tout  le 
peuple;  il  trouva  dans  la  mort  même  de  ses  frères 
un  nouveau  sujet  de  s'encourager  à  mourir, 
comme  eux,  pour  la  gloire  du  Seigneur. 

f.  10.  Acceleravit  consummare  universos 
muros.  lise  hâta  de  rebâtir  toutes  les  murailles  de 
Jérusalem,  qui  avaient  été  commencées  par  Jona- 
thas (]). 

jh  11.  Jonathan,  filium  Absalomi.  Il  envoya 
Jonathas,  fils  d'Absalon;  c'était  un  homme  de 
confiance,  et  ami  particulier  de  Simon  (4),  et  dont 
il  est  parlé  plus  haut  (<,). 

v.  12.  Et  Jonathas  cum  eo  in  custodia.  On 
attachait  ces  sortes  de  personnes  par  une  chaîne, 
avec  un  soldat  qui  en  était  chargé,  et  qui  en 
répondait  sur  sa  vie  (6).  Saint  Paul  demeura  quel- 
que temps  à  Rome,  lié  avec  le  soldat  qui  le  gar- 
dait (7). 


(  1)  Psalm.  xxvi.   ç. 
(2)  1.  M  ace.  v.  17.  si. 
(j)  Sap.  xn.  ;o. 


(4)  Joseph.  Grot. 

Ci)  1.  Macc.  xi.  70. 

(G)   Grot.  hic—  (7)  Ad.  xvin.   16. 


IJ2 


1. 


MACCABÉES.  --  XKI.-   MAUVAISE   FOI    DE  TRYPHON 


ij.  Simon  autem  applicuit  in  Addus,  contra  faciem 
campi. 

14.  Et  ut  cognovit  Tryphon  quia  surrexit  Simon  loco 
fratris  sui  Jonathas,  et  quia  commissurus  esset  cum  eo 
proihum,  misit  ad  eum  legatos, 

1$.  Dicens  :  Pro  argento  quod  debebat  frater  tuus 
Jonathas  in  ratione  régis  propter  negotia  quas  habuit, 
detinuimus  eum. 

16.  Et  nunc  mitte  argenti  talenta  centum,  et  duos  filios 
ejus  obsides,  ut  non  dimissus  fugiat  a  nobis,et  remitte- 
mus  eum. 

17.  Et  cognovit  Simon  quia  cum  dolo  loqueretur  secum; 
jussit  tamen  dari  argentum  et  pueros,  ne  inimicitiam  ma- 
gnam  sumeret  ad  populum  Israël,  dicentem  : 


18.  Quia  non  misit  ei  argentum  et  pueros,  propterea 
periit. 

10.  Et  misit  pueros  et  centum  talenta;  et  mentitus  est, 
et  non  dimisit  Jonathan. 

:o.  Et  post  hœc  venit  Tryphon  intra  regionem,  ut  con- 
tereret  eam  ;  et  gyraverunt  per  viam  qure  ducit  Ador  -, 
et  Simon  et  castra  ejus  ambulabant  in  omnem  locum 
quoeumque  ibant. 

ai.  Qui  autem  in  arce  erant  miserunt  ad  Tryphonem 
legatos,  ut  feslinaret  venire  per  desertum,  et  mitteret 
alimonias. 


ij.  Simon  campa  près   d'Add«s,  vis-à-vis  de  la  plaine. 

14.  Et  Tryphon  ayant  su  que  Simon  avait  été  établi  en 
la  place  de  Jonathas, son  frère, et  se  disposait  à  lui  livrer 
bataille,  lui  envoya  des  ambassadeurs, 

15.  Et  il  lui  fit  dire  :  Nous  avons  retenu  Jonathas  votre 
frère,  parce  qu'il  devait  de  l'argent  au  roi,  à  cause  des 
alfaires  dont  il  a  eu  la  conduite. 

16.  Mais  envoyez-moi  présentement  cent  talents  d'ar- 
gent, et  ses  deux  fils  pour  otages,  afin  qu'étant  mis  en 
liberté,  il  ne  s'enfuie  pas,  et  nous  le  renverrons. 

17.  Quoique  Simon  Reconnût  qu'il  ne  lui  parlait  ainsi 
que  pour  le  tromper,  il  ordonna  néanmoins  que  l'on 
envoyât  l'argent  avec  ses  enfants,  de  peur  d'attirer  sur 
lui  une  grande  haine  de  la  part  du  peuple  d'Israël,  qui 
aurait  dit  : 

18.  Jonathas  a  péri,  parce  qu'on  n'a  pas  envoyé  cet 
argent  et  ses  enfants. 

i<).  Il  envoya  donc  et  les  enfants  et  les  cent  talents  ; 
•et  Tryphon  manqua  à  sa  parole,  et  ne  renvoya  point 
Jonathas. 

20.  Il  entra  ensuite  dans  le  pays,  pour  tout  ravager; 
et  il  tourna  par  le  chemin  qui  mène  à  Ador;  mais  Simon 
le  côtoyait  avec  son  armée  par  tous  les  lieux  où  il  mar- 
chait. 

21.  Et  ceux  qui  étaient  dans  la  forteresse  envoyèrent 
des  gens  à  Tryphon,  pour  le  prier  de  se  hlter  de  venir 
par  le  désert,  et  de  leur  envoyer  des  vivres. 


COMMENTAIRE 


î.  13.  Applicuit  in  Addus,  contra  faciem 
campi.  Addus  est, à  ce  qu'on  croit, la  même  quA- 
diada,  dont  on  a  parlé  plus  haut  (1)  ;  et  la  plaine 
est  celle  de  Schephêlâh,  au-dessus  d'Éleuthéro- 
polis.  Simon  occupa  donc  le  défilé  d'Adiada,  pour 
fermera  Tryphon  l'entrée  de  la  Judée,  et  l'abord 
de  Jérusalem,  qui  n'était  guère  accessible  à  un 
corps  d'armée  que  de  ce  côté. 

%  16.  Ut  non  dimissus  fugiat  a  nobis.  Comme 
garantie  qu'il  ne  se  détachera  pas  du  parti  du 
jeune  Antiochus  pour  s'attacher  à  Démétrius  Ni- 
cator.  Les  cent  talents  forment  une  somme  de 
850.000  francs. 

jfr.  17.  Et  cognovit  Simon  quia  cum  dolo  lo- 
queretur SECUM  ;  JUSSIT  TAMEN  DARI  ARGENTUM 
et  pueros.  Ce  que  Simon  fit  alors  peut  être  blâmé 
comme  une  espèce  de  cruauté  qu'il  commit  à 
l'égard  des  enfants  de  Jonathas.  Puisque,  à  son 
avis,  il  n'y  avait  point  de  sincérité  dans  ce  que 
Tryphon  lui  faisait  dire,  il  semble  d'abord  qu'il 
aurait  mieux  fait  de  ne  point  exposer  ces  pauvres 
enfants  à  la  fureur  d'un  perfide,  et  de  ne  point 
dépouiller  l'état  de  cette  somme  d'argent  qui  de- 
vait être  inutile  pour  sauver  la  vie  à  Jonathas. 
Mais  l'éloge  que  Matthathias  fit  de  Simon  avant 
sa  mort,  en  lui  attribuant  le  conseil  et  la  sagesse, 
doit  nous  empêcher  de  l'accuser  légèrement  en 
cette  circonstance.  En  agissant  autrement,  il  au- 
rait donné  lieu  à  tout  Israël,  selon  l'Écriture,  de 
le  blâmer  comme  n'ayant  pas  voulu  sauver  la  vie 


à  Jonathas  ;  il  n'était  pas  maître  absolument  de 
faire  alors  ce  qu'il  aurait  souhaité. 

Ainsi  l'on  peut  bien  juger  de  la  douleur  que  lui 
causa  la  nécessité  indispensable  où  il  se  voyait, 
de  refouler  au  fond  de  son  cœur  les  plus  nobles 
sentiments,  d'imposer  silence  à  la  voix  du  sang  et 
de  la  pitié  pour  exposer  à  la  mort  ses  deux  ne- 
veux, sans  espérance  de  sauver  la  vie  au  père. 
C'était  un  double  sacrifice  qu'il  fit,  en  se  dépouilr 
lant  de  toute  tendresse  naturelle,  et  en  renonçant 
à  la  lumière  de  sa  raison,  pour  ne  pas  scandaliser 
Israël. 

f.  20.  Gyraverunt  per  viam  qvje  ducit  Ador. 
Josèphe  écrit  Dora.  Adora  ou  Dura  était  à  une 
lieue  au  sud-ouest  d'Hébron.  C'était  une  des  vil- 
les les  plus  méridionales  de  la  tribu  de  Juda,  sur 
la  frontière  de  l'Idumée.  Si  l'on  veut  admettre 
que  cette  ville  est  bien  celle  qui  est  ici  désignée,  il 
faut  dire  que  Tryphon  fit  le  tour  de  la  Judée  pour 
l'envahir  par  le  midi.  Mais  cette  marche  est  en 
dehors  de  toutes  les  règles,  et  nous  paraît  abso- 
lument inexplicable.  Aussi  n'essayons-nous  pas 
d'expliquer  à  autrui  ce  que  nous  ne  comprenons 
pas  nous-môme.  Notre  opinion  est  absolument 
contraire,  et  voici  sur  quoi  elle  repose.  Deux 
points  sont  connus,  les  points  de  départ  :  Tryphon 
est  à  Ptolemaïs,  Simon  à  Adiada.  Tryphon  des- 
cend vers  la  Judée.  La  vallée  du  Cison  lui  ouvre 
l'accès  au  cœur  du  pays.  Mais  pour  éviter  les 
nombreuses  places  fortes  qui  se  dressent  sur  le 


(1)   Chapitre  xu.  38. 


I.  —   MACCABÉES.  —  XIII.  -   MORT  DE  JONATHAS   ET   DE  SES   FILS  15; 


22.  Et  paravit  Tryphon  omnem  equitatum,  ut  veniret 
illanocte;  erat  autem  nix  multa  valde,  et  non  venit  in 
Galaaditim. 

2?.  Et  cum  appropinquasset  Bascaman,  occidit  Jona- 
than et  filios  ejus  illic. 

24.  Et  convertit  Tryphon,  et  abiit  in  terram  suam. 

25.  Et  misit  Simon,  et  accepit  ossa  Jonathœ,  fratris 
sui,  et  sepelevit  ea  in  Modin,  civitate  patrum  ejus. 

25.  Et  planxerunt  eum  omnis  Israël  planc.tu  magno,  et 
luxerunt  eum  dies  multos. 

27.  Et  œdificavit  Simon  super  sepulcrum  patris  sui  et 
fratrum  suorum  asdificium  altum  visu,  lapide  polito  rétro 
et  ante. 

28.  Et  statuit  septem  pyramidas,  unam  contra  unam, 
patri  et  matri,  et  quatuor  fratribus; 


22.  Tryphon  tint  toute  sa  cavalerie  prête  pour  partir 
cette  nuit-la  même  ;  mais,  comme  il  y  avait  une  grande 
quantité  de  neige,  il  n'alla  pas  au  pays  de  Galaad. 

2j.  Et  lorsqu'il  fut  proche  de  Bascaman,  il  tua  là  Jona- 
thas  avec  ses  fils. 

24.  Ensuite  rebroussant  chemin  tout  d'un  coup,  il  s'en 
retourna  en  son  pays. 

25.  Alors  Simon  envoya  chercher  les  os  de  son  frère 
Jonathas,  et  les  ensevelit  à  Modin,  qui  était  la  ville  de 
ses  pères. 

26.  Tout  Israël  fit  un  grand  deuil  à  sa  mort  ;  et  ils  le 
pleurèrent  pendant  plusieurs  jours. 

27.  Et  Simon  fit  élever  sur  le  sépulcre  de  son  père  et 
de  ses  frères  un  haut  édifice  qu'on  voyait  de  loin,  dont 
toutes  les  pierres  étaient  polies  devant  et  derrière. 

2Û.  Il  fit  dresser  sept  pyramides,  dont  l'une  répondait 
à  l'autre,  une  à  son  père,  une  à  sa  mère,  et  quatre  à  ses 
frères. 


COMMENTAIRE 


chemin  de  Jérusalem,  il  fait  un  détour  à  travers 
le  Carmel,  descend  dans  la  petite  vallée  de  la 
Nahr-Belka,  et  arrive  à  Dora,  sur  le  littoral  : 
Gyraverunt  per  viam  qucv  ducil  Ador.  Il  n'a  plus 
qu'à  suivre  le  littoral  pour  pénétrer,  par  la  voie 
qui  lui  paraîtra  préférable,  au  cœur  de  la  Judée. 
Mais  quand  il  s'éloigna  du  littoral,  l'armée  juive 
manœuvra  sur  une  ligne  parallèle,  de  manière  à 
couvrir  toujours  Jérusalem.  Les  soldats  enfermés 
dans  la  citadelle,  envoient  dire  à  Tryphon  de  ve- 
nir par  le  désert  de  Jéricho  leur  porter  secours. 
Il  se  préparait  à  profiter  de  la  nuit  pour  tourner 
l'armée  juive.  Du  moment  où  il  entrait  avant  elle 
dans  la  vallée  du  Jourdain,  toute  difficulté  avait 
disparu  :  Jérusalem  était  découverte  :  la  position 
des  deux  armées  était  intervertie.  Mais  la  neige 
qui  tomba  la  nuit  même,  empêcha  la  réalisation 
de  ce  hardi  projet.  Cette  circonstance  de  la  neige 
prouve  que  l'armée  de  Tryphon  était  alors  dans 
le  nord  du  pays  et  non  dans  l'Idumée,  où  la  cha- 
leur est  forte  en  toute  saison.  Il  fallait  que  la 
quantité  de  neige  fût  considérable  pour  être  un 
obstacle  à  la  marche  de  la  cavalerie. 

jh  22.  Et  non  venu  Galaaditim.  Le  grec  ex- 
plique la  chose  plus  clairement  (1)  :  //  ne  put  pas 
aller  à  Jérusalem,  à  cause  de  la  neige  ;  il  décampa 
et  alla  vers  le  pays  de  Galaad.  Il  prit  la  direction 
de  Galaad,  mais  n'y  alla  point,  selon  la  Vulgate. 
Les  deux  versions  ne  sont  point  absolument  con- 
traires. 

f.  23.  Cum  appropinquasset  Bascaman.  Bas- 
cama  ou  Basca,  comme  l'appelle  Josèphe,  est 
probablement  Bésech.  Cette  ville  était  assez  près 
de  Bethsan,  et  de  l'endroit  où  l'on  passait  ordi- 
nairement le  Jourdain,  pour  aller  au  pays  de  Ga- 
laad. Saùl   y  marqua  le  rendez-vous  général  de 


l'armée,  qui  devait  aller  au  secours  de  Jabès  de 
Galaad  (2).  Cette  situation  s'accorde  assez  avec 
ce  que  nous  lisons  ici  du  dessein  de  Tryphon  de 
passer  le  Jourdain,  pour  aller  dans  ce  pays. 

^.  24.  Et  convertit  Tryphon,  et  abiit  in 
terram  suam.  Au  lieu  de  passer  le  Jourdain,  il 
reprit  la  route  de  Syrie.  K«  ini-npitys  Tpûstov.  Ce 
verset  est  inintelligible  dans  le  cas  où  l'on  veut 
que  Tryphon  soit  venu  de  l'Idumée.  Il  est  évi- 
dent, au  contraire,  que  venant  du  nord  au  sud,  de 
Ptolémaïs  à  Dora,  puis  obliquant  à  l'est  pour  évi- 
ter l'armée  juive  et  les  places  de  l'intérieur,  Try- 
phon arrivé  à  Besech,  devait  ensuite  rebrousser 
chemin  vers  le  nord,  convcrlere,  ij:<mpssi6iv,  pour 
regagner  la  Syrie. 

jh  28-29.  Septem  pyramidas...  et  his  circumpo- 
suit  columnas  magnas.  Les  septpyramides  étaient 
comme  des  monuments  funèbres,  portant  sans 
doute  une  inscription,  mais  ne  recouvrant  pas  les 
restes  de  ceux  dont  elles  portaient  le  nom.  C'était 
plutôt  des  obélisques  que  des  pyramider,  propre- 
ment dites. 

Les  frères  de  Simon  étaient  Judas  et  Jona- 
thas, Jean  et  Éléazar.  Mais  comme  ces  héros, 
avec  leur  père  et  leur  mère,  faisaient  seule- 
ment le  nombre  de  six  personnes  et  qu'il  est 
marqué  ici  que  Simon  fil  dresser  sept  pyramides, 
on  ne  peut  guère  douter  que  la  septième  n'ait  été 
pour  lui,  et  qu'il  n'ait  songé  à  joindre  sa  sépulture 
à  celle  de  sa  famille  ;  non  par  un  esprit  de  vanité, 
mais  dans  le  dessein  de  se  réunir,  après  sa  mort, 
à  ceux  avec  qui  l'esprit  de  Dieu  l'avait  uni  si  étroi- 
tement pendant  la  vie,  pour  défendre  d'un  com- 
mun accord  la  sainte  religion  de  leurs  pères,  et  le 
temple  du  Dieu  d'Israël.  Aussi  était-il  très  juste 
et  même  très  utile  qu'il  y  eût  un  monument  éter- 


(i)  Ka'i  oùz  T|X0s  S'.à   ytdva,  xal  àxrjpt,  xai  t|X9ev  hc,  tr]v 
raXaao'/civ. 


[2)  1.  Reg.  xi. 


154 


I.  —   MACCABÉES.  —  XIII.  -  SIMON    ET  DÉMÉTR1US 


2g.  Et  his  circumposuit  columnns  magnas  ;  et  super 
co'umnas  arma,  ad  memoriam  aîternatn  ;  et  juxta  arma 
naves  sculptas,  quas  viderentur  ab  omnibus  navigantibus 
mare. 

50.  Hoc  est  sepulcrum  quod  fecit  in  Modin,  usque  in 
hune  diem. 

JI.  Tryphon  autem,  cum  iter  faceret  cum  Antiocho, 
rege  adolescente,  dolo  occidit  eum. 

J2.  Et  regnavit  loco  ejus,  et  imposuit  sibi  diadema 
Asiaa;  et  fecit  plagam  magnam  in  terra. 

5;.  Et  œdificavit  Simon  prassidia  Judaîae,  muniens  ea 
turribus  excelsis,  et  mûris  magnis,  et  portis,  et  seris  ;  et 
posuit  alimenta  in  munitionibus. 

J4-  Et  elegit  Simon  viros,  et  misit  ad  Demetrium 
regem,  ut  faceret  remissionem  regioni,  quia  actus  omnes 
Tryphonis  per  direptionem  fuerant  gesti. 


20.  Il  fit  dresser  tout  autour  de  grandes  colonnes,  et 
sur  ces  colonnes,  des  armes  pour  servir  de  monument 
éternel  ;  et  auprès  des  armes,  des  navires  en  sculpture, 
pour  être  vus  de  loin  par  tous  ceux  qui  naviguaient  sur 
la  mer. 

;o.  C'est  là  le  sépulcre  qu'il  fit  à  Modin,  et  que  l'on 
voit  encore. 

ji.  Or,  Tryphon  étant  en  voyage  avec  le  jeune  roi 
Antiochus,  le  tua  en  trahison; 

j2.  Et  il  régna  en  sa  place,  s'étant  mis  sur  la  tète  le 
diadème  d'Asie  ;  et  il  lit  de  grands  maux  dans  tout  le 
pays. 

?j.  Simon  cependant  réparait  les  places  de  la  Judée, les 
fortifiant  de  hautes  tours,  de  grandes  murailles,  avec 
des  portes  et  des  serrures  ;  et  il  faisait  mettre  des  vivres 
dans  tous  les  lieux  fortifiés. 

54.  Il  choisit  aussi  des  hommes  qu'il  envoya  vers  le 
roi  Démétrius,  le  priant  de  rétablir  la  Judée  dans  ses 
franchises,  parce  que  toute  la  conduite  de  Tryphon 
n'avait  été  jusqu'alors  que  brigandage. 


COMMENTAIRE 


nel  de  cette  union  si  admirable  du  père  et  de  ses 
enfants,  dans  les  exercices  d'une  piété  toujours 
constante  malgré  les  plus  grandes  persécutions, 
et  dans  la  défense  de  leurs  lois  et  de  leur  patrie. 
11  fallait  que  la  postérité  connut,  par  un  tel  exem- 
ple, qu'il  n'y  a  point  de  circonstance  qui  doive 
jamais  dispenser  les  vrais  serviteurs  de  Dieu  de 
demeurer  fermes  dans  le  devoir. 

f.  29.  Super  COLUMNAS  arma...  et  juxta  arma, 
naves  sculptas.  Ces  colonnes  avaient  pour  but 
de  marquer  les  victoires  de  son  père  et  de  ses 
frères,  et  leur  application  à  procurer  la  liberté  et 
la  sûreté  des  Juifs,  sur  mer  et  sur  terre.  Les  Mac- 
cabées  avaient  réparé  le  port  de  Joppé,  qui  fut, 
dans  la  suite,  le  principal  port  juif  sur  la  Méditer- 
née  (1).  Simon  était  alors  gouverneur  de  toutes 
les  côtes  maritimes  depuis  Tyr  jusqu'aux  frontiè- 
res d'Egypte  (2).  La  coutume  de  mettre  des  ar- 
mes et  des  trophées,  ou  en  réalité,  ou  en  scul- 
pture, sur  les  tombeaux  des  grands  capitaines,  est 
commune  dans  l'antiquité  (3). 

jh  3 1.  Tryphon,  cum  iter  faceret  cum  Antio- 
cho, rege  adolescente,  dolo  occidit  eum.  Try- 
phon n'ayant  pu  réussir  à  se  rendre  maître  de  la 
Judée,  se  contenta  de  faire  mourir  Jonathas,  et 
s'en  retourna  en  Syrie.  Il  s'appliqua  alors  à  se  dé- 
faire du  jeune  Antiochus,  dont  jusqu'alors  il  avait 
eu  la  tutelle  ;  il  corrompit  des  médecins,  qui  pu- 
blièrent que  le  jeune   prince   était  tourmenté    de 


la  pierre,  et  qui  le  tuèrent  en  le  taillant  (4).  Antio- 
chus n'avait  alors  que  dix  ans;  il  mourut  en   144. 

f.  32.  Et  regnavit  loco  ejus.  Après  la  mort 
du  jeune  Antiochus,  Tryphon  sollicita  l'armée  par 
de  grandes  promesses,  à  lui  déférer  la  couronne. 
Les  soldats,  se  flattant  de  s'enrichir  sous  son  rè- 
gne, se  déclarèrent  aussitôt  pour  lui  (5).  Il  com- 
mença par  se  saisir  d'Apamée,  sa  patrie,  puis  de 
Larissa,  de  Casiane,  de  Mégare,  d'Apollonie,  et 
des  villes  voisines  (6),  et  il  étendit  rapidement  sa 
domination  sur  les  autres  villes  de  Syrie.  Ensuite 
il  se  hâta  de  demander  au  sénat  romain  la  confir- 
mation du  royaume  qu'il  venait  d'usurper.  Il  en- 
voya à  Rome  une  statue  de  la  victoire,  du  poids 
de  dix  mille  pièces  d'or,  espérant  que  la  valeur 
du  présent  lui  ferait  obtenir  tout  ce  qu'il  voudrait. 
Mais  le  sénat  sut  éluder  ses  espérances,  en  rece- 
vant la  statue,  et  en  y  mettant  le  nom  du  jeune 
Antiochus,  que  Tryphon  venait  de  faire  mourir. 
On  trouve  quelques  médailles  de  ce  tyran,  où  il 
prend  le  nom  de  roi  et  d'autocrate  (7).  Il  est  tou- 
jours représenté  avec  le  casque. 

f.  34.  Misit  ad  Demetrium  regem,  ut  face- 
ret remissionem  regioni.  Démétrius  Nicator 
s'était  toujours  maintenu  dans  une  bonne  partie 
de  la  Syrie  ;  le  jeune  Antiochus  était  maître 
d'Antioche,  et  de  l'autre  partie  du  royaume.  Jona- 
thas s'était  attaché  au  jeune  Antiochus  (<"),  et 
avait  abandonné  Démétrius,  qui  ne  lui    avait   rien 


(1)1.  Macc.  x.  ;ç.  75  ;  xiv.  6.  -  Strabo.  I.  vi.  Kai  os  v.a.\ 
EKtve^O)  -out<|)  zê/f.Tjvtat  xottaoavts;  V-Eypi  OuXâtTiri;  61 
l 'ouoai'ot. 

(2)  1.  Macc.  xi.   59. 

(?)   Vide  E;cch.  xxxn.  27.  -  Virgil.  AZncid. 

(4)  F.pilomc  Lirii.  i.  i.v.  Alexandri  filius,  rex  Syriœ, 
decem  annos  admodum  habens,  a  DioJoto,  qui  Tryphon 
eognominabatur,  tutore  suo  per  fraudem  occisus  est  : 
corruptis  quidem  medicis,  qui   cum  calcul  i    dolore    con- 


sumi  ad  populum  mentiti,  dura  sécant  illum,  occiderunt. 
On  peut  voir  aussi  Strabon.  I.  xvi.  -  Jus/in.  t.  xxxvi.  - 
Appian.  Srr. 

(5)  Joseph.  Anliq.  t.  xm.  c.  12. 

(6)  Appian.  S\r.  Strabo.  I.  xvi.    Vide   Vaillant,  hisl.  Rcg. 
Srriat  p.  28;.  284.  et  205.  296. 

(7)  !!A2JLAi;<.2i:  TPY<î>QNOi]  AYTOKPATOrOS. 
Vide  Vaillant  ibid. 

(8)  1.  Mat  c.  xi.  )  ;.  57. 


1.  —  MACCABÉES.  —  XIII.  -   LETTRE  DE   DÉMÉTRIUS 


135 


;Ç.  Et  Demetrius  rex  ad  verba  ista  respondit  ei,  et 
scripsit  epistolam  talem  : 

56.  Rex  Demetrius  Simoni,  summo  sacerdoti  et  amico 
regum,  et  senioribus,  et  genti  Judœorum,  salutem. 

?7.  Coronam  auream,  et  bahem  quam  misistis,  susce- 
pimus;  et  parati  sumus  facere  vobiscum  pacemmagnam, 
et  scribere  prœpositis  régis  remittere  vobis  quas  indulsi- 
raus. 

?8.  Quaecumque  enim  constituimus  vobis  constant  ; 
munitiones  quas  asdificastis  vobis  sint. 

?0.  Rcinittimus  quoque  ignorantias  et  peccata  usque  in 
hodiernum  diem,  et  coronam  quam  debebatis;  et  si  quid 
aliud  erat  tributarium  in  Jérusalem,  jam  non  sit  tributa- 
rium. 

40.  Et  si  qui  ex  vobis  apti  sunt  conscribi  inter  nostros, 
conscribantur  ;  et  sit  inter  nos  pax. 


;ï-  Le  roi  Demetrius  répondit  à  la  demande  qu'il  lui 
avait  faite, et  lui  écrivit  en  ces  termes  : 

56.  Le  roi  Démétnus,  à  Simon  grand  prêtre  et  ami  des 
rois,  aux  anciens,  et  à  tout  le  peuple  des  Juifs,  salut. 

?7.  Nous  avons  reçu  la  couronne  et  la  palme  d'or  que 
vous  nous  avez  envoyées;  et  nous  sommes  disposés  à 
faire  avec  vous  une  paix  solide  et  durable,  et  à  écrire  à 
nos  intendants  qu'ils  vous  fassent  les  remises,  selon  les 
grâces  que  nous  vous  avons  accordées. 

?8.  Tout  ce  que  nous  avons  ordonné  en  votre  faveur, 
demeurera  ferme  et  inviolable  :  les  places  que  vous  avez 
fortifiées  seront  à  vous. 

jo.  Nous  pardonnons  aussi  toutes  les  fautes  et  tous 
les  manquements  qui  auraient  pu  se  commettre  jusqu'au- 
jourd'hui :  nous  vous  déchargeons  de  la  couronne  que 
vous  deviez  :  et  si  l'on  payait  quelque  autre  impôt  dans 
Jérusalem,  on  ne  le  paiera  plus  à  l'avenir. 

40.  S'il  s'en  trouve  parmi  vous  qui  soient  propres  à 
être  enrôlés  dans  nos  troupes,  ils  peuvent  y  entrer  :  et 
nous  voulons  qu'il  y  ait  entre  nous  une  bonne  paix, 


COMMENTAIRE 


tenu  de  tout  ce  qu'il  lui  avait  promis.  Depuis  la 
mort  du  jeune  Antiochus  et  la  tyrannie  de  Try- 
phon,  Simon,  successeur  de  Jonathas,  jugea  qu'il 
était  de  l'intérêt  de  sa  nation  de  se  réconcilier 
avec  Demetrius  Nicator,  et  de  le  reconnaître 
pour  roi  de  Syrie,  mais  sous  des  conditions  avan- 
tageuses à  son  pays.  Il  lui  demanda  donc,  de 
rétablir  la  Judée  dans  ses  franchises,  ou  plutôt  de 
la  délivrer  de  tout  tribut  ;  c'était  ce  que  Deme- 
trius Soter,  père  de  Nicator,  avait  offert  longtemps 
auparavant  à  Jonathas  (1);  mais  cette  proposition 
n'avait  point  eu  de  suite,  parce  queJonathas  avait 
préféré  le  parti  d'Alexandre  Balas,  à  celui  de 
Demetrius  (2). 

'y.  37.  Coronam  auream,  et  bahem  quam  mi- 
sistis, suscepimus.  Le  terme  Bahem  de  la  Vul- 
gate  n'est  pas  connu.  Le  grec  lit  Bafvr)  (3;  , 
branche  de  palmier.  L'Ecriture  ne  dit  pas  que 
cette  branche  ait  été  d'or  ;  mais  il  y  a  beaucoup 
d'apparence  qu'elle  n'était  pas  de  moindre  valeur 
que  la  couronne.  Et  ce  qui  confirme  cette  opinion 
c'est  qu'au  second  livre  des  Maccabées  (4),  on 
lit  qu'Alcime  vint  offrir  à  un  autre  Demetrius 
une  couronne  d'or  jet  une  palme.  On  remarque 
chez  les  anciens  des  palmiers,  des  vignes,  des 
raisins  d'or. 

Le  syriaque  entend  Bainan,  d'un  habit  ;  les 
Romains  donnaient  un  habit  orné  de  palme  en 
broderie  d'or,  à  ceux  qui  triomphaient  :  lunica 
palmata  ;  ils  accordaient  quelquefois  cet  honneur 
aux  rois  amis  et  alliés,  comme  ils  firent  à  Masi- 
nissa,  roi  de  Numidie  (5).  Masinissam  primum  re- 
gem   appellalum,     eximiisque    ornatum    laudibus, 


aurea  corona,  aurea  paiera,  sella  curuli,  el  scipione 
eburneo,  loga  picta,  el  palmata  lunica  donat. 
Ainsi,  en  cet  endroit,  Baina  pourrait  marquer 
cette  espèce  d'habit  broché  d'or,  et  orné  de  pal- 
mes. D'autres  croient  que  ce  terme  signifie  un 
manteau  de  pourpre  (6),  parce  que  la  branche  du 
palmier  est  rouge,  à  l'endroit  qu'on  l'a  arrachée 
de  son  tronc. 

D'autres  enfin  veulent  que  Bahem  signifie  des 
perles  ;  ils  traduisent  :  II  lui  envoya  une  couronne 
d'or,  semée  de  perles,  ou  plutôt,  une  couronne  d'or 
el  un  collier  de  perles  ;  colloque  monile  baccalum, 
comme  parle  Silius  (lib.  vm),  Bacca,  signifie  une 
perle.  Nicolas  de  Lyre  et  quelques  autres,  sous 
le  nom  de  couronne,  entendent  un  collier  com- 
posé d'anneaux  d'or  (7);  mais  de  tous  ces  senti- 
ments, le  premier  est  le  plus  suivi  (8). 

V.  38.  Qu^CUMQUE  CONSTITUIMUS  VOBIS  CONS- 
TANT. Demetrius  Nicator  accorde  à  Simon  tout 
ce  qu'il  lui  avait  demandé,  et  la  confirmation  de 
tout  ce  qu'il  avait  promis  auparavant,  au  commen- 
cement de  son  règne  (9). 

f.    39.    Remittimus   quoque   ignorantias  et 

PECCATA     USQUE  IN     HODIERNUM     DIEM.     Les    Juifs 

appellent  péchés  d'ignorance,  les  péchés  qu'on 
commet  par  erreur,  par  précipitation,  par  empor- 
tement ,  quelquefois  seulement  toute  sorte  de 
péchés.  Demetrius  Nicator  se  conduit  avec  une 
grande  habileté  en  accordant  cette  amnistie  gé- 
nérale. 

y.  40.  Si  qui  ex  vobis  apïi  sunt  conscribi  in- 
ter nostros.  Il  confirme  l'offre  qu'il  avait  faite 
autrefois.  1,  Macc.  x,  36. 


(1)1.  Macc.  x.  20. 

(2)  Ibid.  y.  46.  47.  _ 

15)  Tov  ccé^avov  xov  ^puaoCv,  xai  if(v  (2a!/7]v,  f]v  àr.io- 
Tei'Xoae. 

(4)  11.  Macc.  xiv.  4.  Alcimus  venitad  regem  Demetrium.. 
offerens  ei  coronam  auream,  et  palmam. 


(5)  Lis.  Dec.  m.  lib  x.  Vide  si  lubet  eumdem   1.  Decad. 
/.x.-  Sucton.  in  Claud.  c.iy.-Seri>ius  in  Aîneid.  Lxi.etEclog.x. 

(6)  Munk,  Palestine,  p.  508. 

(7)  Vide  et  Isidor.  orig.  in  Bae'n. 

(8)  Vide  Serar.  Menoch.  Tir.  la  Haie,  etc. 
(91  1.  Macc.  xi.  jj...  ?7. 


ij6 


I.  -•  MACCABEES. 


XIII.  -   PRISE  DE  GAZA 


41.  Anno  centesimo  septuagesimo  ablatum  est  jugum 
gentium  ab  Israël. 

42.  Et  cœpit  populus  Israël  scribere  in  tabulis  et  ges- 
tis  publicis  :  Anno  primo  sub  Simone,  summo  sacerdote, 
magno  duce,  et  principe  Judasorum. 

4;.  In  diebus  illis  applicuit  Simon  ad  Gazam,  et  cir- 
cumdedit  eam  caslris,  et  fecit  machinas,  et  applicuit  ad 
civitatem  et  percussit  turrem  unam,  et  comprehendit 
eam. 

44.  Et  eruperunt  qui  erant  intra  machinam  in  civitatem, 
et  factus  est  motus  magnus  in  civitate. 

41.  Et  ascenderunt  qui  erant  in  civitate,  cum  uxoribus 
et  filiis,  supra  murum,  scissis  tunicis  suis;  et  clamave- 
runt  voce  magna,  postulantes  a  Simone  dextras  si bi  dari. 

46.  Et  dixerunt  :  Non  nobis  reddas  secundum  malitias 
nostras,  sed  secundum  misencordias  tuas. 

47.  Et  flexus  Simon,  non  debellavit  eos  ;  ejecit  tamen 
eos  de  civitate,  et  mundavit  œdes  in  quibus  fuerant  simu- 
lacra,  et  tune  intravit  in  eam  cum  hymnis,  benedicens 
Dominum. 

48.  Et  éjecta  ab  ea  omni  immunditia,  collocavit  in  ea 
viros  qui  legem  facerent,  et  munivit  eam,  et  fecit  sibi 
habitationem. 


41.  En  l'année  cent  soixante-dixième,  Israël  fut  affran- 
chi du  joug  des  nations. 

42.  Et  le  peuple  d'Israël  cemmença  à  mettre  cette 
inscription  sur  les  tables  et  sur  les  registres  publics  :  La 
première  année  sous  Simon  souverain  pontife,  grand 
chef  et  prince  des  Juifs. 

4;.  Vers  ce  temps-là, Simon  alla  mettre  le  siège  devant 
Gaza  :  il  l'investit  avec  son  armée,  dressa  des  machines, 
s'approcha  des  murailles  de  la  ville  ;  et  en  ayant  attaqué 
une  tour,  il  l'emporta. 

44.  Ceux  qui  étaient  dans  une  de  ces  machines  étant 
entrés  tout  à  coup  dans  la  ville,  il  s'excita  un  grand 
tumulte  parmi  le  peuple. 

41.  Les  habitants  de  la  ville  vinrent  donc  avec  leurs 
femmes  et  leurs  enfants  sur  les  murailles,  ayant  leurs 
habits  déchirés  ;  et  ils  jetèrent  de  grands  cris,  en  deman- 
dant à  Simon  qu'il  les  reçût  à  composition. 

46.  Et  lui  disant  :  Ne  nous  traitez  pas  selon  notre  ma- 
lice, mais  selon  vos  miséricordes. 

47.  Simon,  touché  de  compassion,  ne  voulut  point  les 
exterminer  ;  mais  il  les  chassa  seulement  hors  de  la  ville, 
et  il  purifia  les  maisons  où  il  y  avait  eu  des  idoles  :  il 
entra  ensuite  dans  Gaza,  en  chantant  des  hymnes,  et 
bénissant  le  Seigneur. 

48.  Et  après  qu'il  eût  ôté  de  la  ville  toutes  les  impure- 
tés, il  y  établit  des  hommes  pour  y  observer  la  loi  ;  il  la 
fortifia,  et  y  fit  sa  demeure. 


COMMENTAIRE 


^.41.  Anno  centesimo  septuagesimo  ablatum  est 
jugum  gentium  ab  Israël.  142  avant  J  ésus-Christ. 

v.  43.  Applicuit  Simon  ad  Gazam.  Gaza  avait 
été  soumise  par  Jonathas  (1).  Mais  les  habitants 
ayant  appris  sa  mort,  se  révoltèrent,  et  ne  voulu- 
rent plus  obéir  aux  Juifs.  Simon  les  réduisit  de 
nouveau,  et  les  chassa  de  la  ville,  pour  y  mettre 
des  Juifs.  Voyez  les  versets  47,  48. 

Fecit  machinas.  Le  grec  à  la  lettre  (2)  :  //  fît 
des  élépoles.  Ce  nom  signifie  à  la  lettre,  des  ma- 
chines à  prendre  les  villes;  mais  il  se  donna  en 
particulier  à  une  machine,  d'une  grandeur  mons- 
trueuse, inventée  par  Démétrius,  fils  d'Antigone, 
exécutée  par  Epimaque  et  mise  en  usage  au  siège 
de  Rhodes  ;  elle  fit  donner  à  ce  Démétrius,  le 
surnom  de  Poliorcète.  Vitruve  (5)  dit  qu'elle  avait 
cent  vingt-cinq  pieds  de  haut,  et  soixante  de 
large.  Elle  était  couverte  de  tissus  de  poil,  et  de 
cuirs  nouvellement  écorchés,  de  manière  qu'elle 
était  à  l'épreuve  d'une  baliste  qui  eût  jeté  une 
pierre  de  trois  cent  soixante  livres  ;  la  machine 
en  pesait  trois  cent  soixante  mille.  Ammien  Mar- 
cellin  (4)  ajoute  que  le  haut  de  la  machine 
était  couvert  de  mortier  pour  la  préserver  du 
feu.  Elle  était  armée  par  devant  de  plusieurs 
pointes  de  fer  fort  pesantes.  Des  soldats  cachés  au 
dedans  de  la  machine,  la  faisaient  avancer  à  force 
de  roues  et  de  cordages,  et  l'on  choisissait  l'en- 


droit le  plus  faible  des  murs,  pour  les  heurter  de 
cette  lourde  masse  ;  il  en  était  peu  qui  lui  résis- 
tassent. Cette  description  convient  assez  à  ce  que 
l'Ecriture  nous  dit  ici,  de  l'entreprise  de  Simon 
contre  Gaza.  Il  appliqua  son  élépole  près  d'une 
tour,  et  l'abattit,  de  manière  que  les  soldats  sorti- 
rent de  la  machine, et  se  jetèrent  dans  Gaza,  verset 
44.  El  eruperunt  qui  erant  intra  machinam  in  civita- 
tem, etc. 

Jf. 47.  Mundavit  ^edes  in  quibus  fuerant  simu- 
lacra.  //  purifia  les  maisons  où  il  y  avait  eu  des 
idoles,  soit  qu'on  entende,  par  ces  maisons,  les 
temples  de  Gaza,  ou  les  maisons  particulières,  où 
il  y  avait  toujours  au  moins  des  dieux  domesti- 
ques. Ayant  destiné  cette  ville  à  la  demeure  des 
Juifs,  il  en  abolit  toutes  les  marques  d'idolâtrie. 
Gaza  faisait  partie  de  l'ancien  héritage  d'Israël  (5); 
elle  avait  été  attribuée  par  Josué  à  la  tribu  de 
Juda  ;  par  conséquent,  la  loi  qui  ordonnait  la  des- 
truction des  idoles  dans  les  villes  prises  sur  les 
Cananéens  (6)  avait  lieu  à  son  égard. 

f.  48.  Fecit  sibi  habitationem.  Il  n'y  demeura 
pas  ordinairement  en  personne  ;  mais  il  y  allait 
souvent,  afin  d'être  à  portée  de  contenir  toute  la 
côte  dans  l'obéissance,  et  de  mettre  le  pays  à  cou- 
vert du  côté  de  l'Egypte.  Jean  Hyrcan,  son  fils, 
avait  sa  demeure  à  Gazara,  près  d'Azot,  un  peu 
plus  au  nord. 


(1)  1.  Macc.  xi.  61. 

(2)  Kal  É7tonr)<jev  iXsTtoXeiç- 

(j)  Vitriw.  I.  x.  c.  22.  Voyez  les   notes  de   Ferrant  sur 
cet  endroit. 


(4)  Ammian.  Marcell.  /.  xxiu.  c.  9. 
(1)  Josuc.  xv.  47. 
(6)  Deut.  vu.  2j. 


I.  —  MACCABÉES.  —  XIII.  -   REDDITION    DE   LA  CITADELLE   DE  SION      157 


49.  Qui  autem  erant  in  arce  Jérusalem  prohibebantur 
egredi  et  ingredi  regionem,  et  emere,  ac  vendere  ;  et 
esurierunt  valde,  et  multi  ex  eis  famé  perierunt; 


50.  Et  clamaverunt  ad  Simonem  ut  dextras  acciperent; 
et  dédit  illis;  et  ejecit  eos  inde,  et  mundavit  arcem  a 
con  ta  minât  ion  i  bus. 

51.  Et  intraverunt  in  eam  tertia  et  vigesima  die  secundi 
mensis,  anno  centesimo  septuagesimo  primo,  cum  laude, 
et  ramis  palmarum,  et  cinyris,  et  cymbalis,  et  nablis,  et 
hymnis,  et  canlicis,  quia  contritus  est  inimicus  magnus 
ex  Israël. 

<,2.  Et  constituit  ut  omnibus  annis  agerentur  dies  hi 
cum  lsetitia. 

ÎJ.  Et  munivit  montem  templi,  qui  erat  secus  arcem, et 
habitavit  ibi  ipse  et  qui  cum  eo  erant. 

^4.  Et  vidit  Simon  Joannem,  filium  suum,  quod  fortis 
prselii  vir  esset,  et  posuit  eum  ducem  virtutum  universa- 
rum  ;  et  habitavit  in  Gazaris. 


49.  Or,  ceux  qui  étaient  dans  la  forteresse  de  Jérusa- 
lem, ne  pouvant  ni  en  sortir,  ni  entrer  dans  le  pays,  ni 
rien  acheter,  ni  rien  vendre,  parce  qu'on  les  en  empê- 
chait,se  virent  réduits  à  une  grande  famine  ;  et  plusieurs 
d'entre  eux  moururent  de  faim. 

ço.  Ils  crièrent  donc  vers  Simon,  pour  lui  proposer 
une  capitulation,  et  il  la  leur  accorda,  et  il  les  chassa 
de  la  forteresse,  et  la  purifia  de  toutes  souillures. 

51.  Et  ils  y  entrèrent  le  vingt-troisième  jour  du  second 
mois,  l'année  cent  soixante-onzième,  ayant  des  bran- 
ches de  palme  à  la  main;  et  louant  Dieu  avec  des  har- 
pes, des  cymbales  et  des  lyres,  et  chantant  des  hymnes 
et  des  cantiques,  parce  qu'un  grand  ennemi  avait  été 
exterminé  d'Israël. 

52.  Et  il  ordonna  que  ces  jours  se  célébreraient  tous 
les  ans  avec  grande  jouissance. 

S  5.  Il  fortifia  aussi  la  montagne  du  temple,  qui  était 
près  de  la  forteresse  et  il  y  habita  avec  ses  gens. 

$4.  Ensuite  Simon  voyant  que  Jean,  son  fils,  était  un 
homme  de  guerre  très  vaillant,  le  fit  général  de  toutes 
les  troupes  :  et  Jean,  demeura  à  Gazara. 


COMMENTAIRE 


y.  '-,0.  Ejecit  eos  inde,  et  mundavit  arcem  a 
contaminationibus.  La  forteresse  de  Jérusalem 
avait  été  entre  les  mains  des  Syriens,  depuis  l'an 
168  (1)  jusqu'en  142.  Après  qu'ils  en  furent  sortis, 
la  ville  se  trouva  absolument  libre  ;  on  eut  soin, 
avant  d'y  entrer  en  solennité  et  d'en  prendre  pos- 
session dans  les  formes,  d'en  ôter  toutes  les  mar- 
ques d'idolâtrie,  et  tout  ce  qui  était  contraire  aux 
lois  des  Juifs. 

y.  ',i.  Et  cinyris,  et  cymbalis,  et  nablis. 
On  peut  voir  dans  la  préface  des  Psaumes  les  noms 
de  ces  divers  instruments.  An  141. 

y.  5  2.  Constituit  ut  omnibus  annis  agerentur 
dies  hi  cum  Laetitia.  C'était  la  fête  de  l'affran- 
chissement de  Jérusalem.  Simon,  comme  grand 
prêtre,  ordonna  cette  solennité  ;  elle  était  du 
nombre  de  ces  jours  d'ordonnance,  dies  decreti, 
dont  il  est  parlé  ailleurs  (2).  Peut-être  ne  la  célé- 
bra-t-on  pas  après  le  pontificat  de  Simon.  On  n'en 
voit  aucune  mention  dans  Josèphe.  Cet  historien 
nous  apprend  une  circonstance  particulière,  qu'on 
ne  lit  point  ici  (5)  ;  c'est  qu'après  l'évacuation  de 
la  citadelle,  Simon  assembla  tout  le  peuple,  et  lui 
ayant  représenté  les  maux  que  cette  forteresse 


avait  causés  à  la  ville,  et  le  danger  qu'il  y  avait 
que,  dans  la  suite,  elle  ne  devînt  encore  funeste 
à  sa  liberté,  il  l'exhorta  à  la  raser,  et  à  aplanir  la 
hauteur  sur  laquelle  elle  était  bâtie.  Le  peuple  se 
laissa  aisément  persuader  ;  il  y  travailla  pendant 
trois  ans,  sans  relâche,  et  vint  à  bout  de  ce  grand 
ouvrage.  Mais  il  faut  reculer  cet  événement  de 
quelques  années  ;  car  nous  lisons  dans  le  chapitre 
suivant  (4),  que  Simon,  ayant  chassé  les  étrangers 
de  la  forteresse  de  Jérusalem,  y  mit  des  Juifs  en 
leur  place,  pour  la  sûreté  du  pays  ;  et  au  chapitre 
xv.  verset  28,  Antiochus  Sidèle  réclame  la  cita- 
delle de  Jérusalem,  comme  ayant  été  usurpée  par 
Simon  ;  ce  prince  ne  commença  à  régner  que  l'an 
1 39,  et  la  citadelle  était  rendue  dès  l'an  142  ;ainsi 
elle  demeura  au  moins  trois  ans  dans  son  entier. 

y.  $?.  Munivit  montem  templi.  Josèphe  assure 
qu'on  fut  six  ans  à  cet  ouvrage  (^). 

y.  >)4.  Vidit  Simon  Joannem,  filium  suum.  Jean 
Hyrcan,  succéda  à  Simon,  son  père,  dans  le  gou- 
vernement du  peuple,  et  dans  la  souveraine  sacri- 
ficature. 

Habitavit  in  Gazaris.  Voyez  le  chapitre  îv,  1  <, . 


(1)  Vide  1.  Macc.  1.  54. 

(2)  1.  Macc.  x.  J5. 


(5)  Anliq.  I.  xm.  c.  11. 

(4)  1.  Macc.  xiv.  56.  J7-  —  (5)  Joseph.  Antiq.xui.  eu. 


CHAPITRE  XIV 

Guerre  de  Demetrius  contre  les  Par  thés;  il  est  fait  prisonnier .  Bonheur  du  gouvernement 
de  Simon.  Les  Romains  et  les  Lacédémoniens  renouvellent  l'alliance  avec  lui.  Les  Juifs 
lui  confirment  par  un  acte  solennel  la  souveraine  autorité. 


i.  Anno  centesimo  septuagesimo  secundo,  congregavit 
rex  Demetrius  exercitum  suum.  et  abiit  in  Mediam  ad 
contrahenda  sibi  auxilia,  ut  expugnaret  Tryphonem. 

2.  Et  audivit  Arsaces,  rex  Persidis  et  Médias,  quia 
intravit  Demetrius  confines  suos,  et  misit  unum  de  prin- 
cipibus  suis  ut  comprehenderet  eum  vivum,  et  adduceret 
eum  ad  se. 


i.  En  la  cent  soixante-douzième  année,  le  roi  Demetrius 
rassembla  son  armée,  et  s'en  alla  en  Médie,pour  s'y  for- 
tifier par  un  nouveau  secours,  et  être  en  état  de  combattre 
contre  Tryphon. 

2.  Or,  Arsacès,  roi  des  Perses  et  des  Mèdes,  ayant 
appris  que  Demetrius  était  entré  dans  ses  états,  envoya 
l'un  des  généraux  de  ses  armées,  pour  le  prendre  vif  et 
le  lui  amener. 


COMMENTAIRE 


f.  i.  Anno  septuagesimo  secundo,  congrega- 
vit  rex  Demetrius  exercitum  suum.  Josèphe  (  i) 
meteette  expéditionde  Demetrius  Nicator  avant  la 
mort  du  jeune  Antiochus,  mais  l'Écriture  marque 
clairement  que  Simon  n'envoya  ses  ambassadeurs 
à  Demetrius  qu'après  la  mort  du  jeune  prince,  et 
en  142  (2),  et  que  Demetrius  entreprit  la  guerre 
contre  les  Parthes,  en  140.  Voici  ce  qui  donna 
occasion  à  ce  voyage  de  Demetrius.  Ce  prince 
voyait  ses  états  diminuer  tous  les  jours,  par  la  dé- 
sertion des  villes  qui  quittaient  son  parti,  car  il 
s'était  rendu  méprisable  par  sa  fainéantise  et  par 
ses  débauches  ;  il  crut  qu'en  entreprenant  une 
guerre  importante,  il  rétablirait  et  sa  fortune  et 
sa  réputation.  Le  royaume  des  Parthes  s'était 
extrêmement  agrandi, fortifié  par  la  sage  conduite 
et  par  la  valeur  de  Mithridate.  Son  empire  s'éten- 
dait depuis  l'Euphrate  jusqu'à  l'Indus  ;  la  Méso- 
potamie, la  Babylonie,  et  les  provinces  voisines, 
qui,  jusqu'alors,  avaient  obéi  aux  rois  de  Syrie, 
furent  soumises  comme  les  autres. 

Demetrius  assembla  une  puissante  armée,  et 
marcha  vers  la  Mésopotamie.  D'abord  la  Médie 
se  déclara  pour  lui  ;  il  se  vit  ensuite  appuyé  par 
les  Élyméens,  les  Bactriens,  et  les  Perses,  qui  se 
révoltèrent  contre  Mithridate;  il  gagna  plusieurs 
batailles,  et  remporta  divers  avantages  sur  l'enne- 
mi. Mais  enfin,  il  tomba  dans  les  embûches  qu'on 
lui  avait  dressées;  son  armée  fut  taillée  en  pièces, 
et,  prisonnier  entre  les  mains  de  son  ennemi,  on 


le  promena  dans   les  villes,  pour  intimider  ceux 
qui  avaient  envie  de  remuer  (3). 

Ut  expugnaret  Tryphonem.  Depuis  la  mort 
du  jeune  Antiochus,  Tryphon  gouvernait  sou- 
verainement la  Syrie,  et  prenait  le  titre  de  roi. 
Demetrius,  fatigué  d'un  tel  compétiteur,  qui 
occupait  la  plus  belle  partie  de  ses  états, 
résolut  de  passer  l'Euphrate,  et  d'y  rétablir  son 
autorité,  afin  de  venir  ensuite  plus  aisément  à 
bout  de  Tryphon.  Celui-ci,  n'ayant  plus  rien  à 
ménager,  s'abandonna  à  la  débauche,  et  étant 
tombé  insensiblement  dans  le  mépris,  ses  troupes 
l'abandonnèrent  petit  à  petit,  et  se  donnèrent 
à  Cléopâtre,  épouse  de  Demetrius  Nicator.  Cette 
princesse  habitait  Séleucie,  sur  l'embouchure 
de  l'Oronte,  pendant  que  le  roi,  son  mari,  était 
prisonnier  chez  les  Parthes  (4). 

f.  2.  Arsaces.  Ce  nom  devint  commun  à 
tous  les  rois  des  Parthes, depuis  Arsace, fondateur 
de  leur  monarchie  ($)  ;  de  même  que  celui  de 
César  à  tous  les  empereurs  romains,  depuis 
Jules  César.  Ce  sont  les  Arsacides.  Le  nom 
propre  de  ce  prince,  à  qui  Demetrius  fit  la  guerre, 
était  Mithridate. 

Misit  unum  de  principibus  suis.  Ce  ne  fut 
qu'après  quelques  combats,  que  ùémétrius  tomba 
entre  les  mains  de  Mithridate.  Orose  dit  que 
ce  fut  dans  la  seconde  bataille  (6).  Mais  Justin 
assure  qu'il  livra  plusieurs  combats,  où  il  eut 
l'avantage  (7)  :  Cum  mull's  congressionibus  viclor 


(1)  Joseph.  Antiq.  I.  xiu.  c.  9. 

[2)  1.  Macc.  xtii.  41. 

(?)  Vide  Usser  ad  an.  mundi  j86j.-  Joseph.  Antiq.  I.  xm. 
c.  o.  -  Justin.  I.  xxxvi.  cl  l.  xli.  -  Paul.  Oros.  l.  v 
(4)   Vaillant,  hisl.  Rcg.  Svr.  et  Usscr.  Annal. 


(5)  Justin.  'XLI.  Cujus  memorias  hune  honorem  Parthi 
tribuerunt,  ut  omnes  exinde  reges  suos,  Arsacis  nomine 
nuncupent. 

(6)  Lib.  v.  c.  4. 

(7)  Justin.  I.  xxxvi.  c\  1. 


I. 


MACCABEES. 


XIV.  -   BONHEUR  DES  JUIFS 


139 


;.  Et  abiit,  et  percussit  castra  Demetrii,  et  comprehen- 
dit  eum,  et  duxit  eum  ad  Arsacem,  et  posuit  eum  in  cus- 
todiam. 

4.  Et  siluit  omnis  terra  Juda  omnibus  diebus  Simonis  ; 
et  qucesivit  bona  genti  suse,  et  placuit  illis  potestas  ejus, 
et  gloria  ejus,  omnibus  diebus. 

ç.  Et  eum  omni  gloria  sua  accepit  Joppen  in  portuni, 
et  fecit  introitum  in  insulis  maris. 

6.  Et  dilata vi t  fines  gentis  suce,  et  obtinuit  regionem. 

7.  Et  congregavit  eaptivitatem  multam,  et  dominatus 
est  Gazaras,  et  Beihsurœ,  et  arci  ;  et  abstulit  immundi- 
tias  ex  ea,  et  non    erat  qui  resisteret  ei. 

8.  Et  unusquisque  colebat  terrain  suam  eum  pace  ;  et 
terra  Juda  dabat  fructus  suos,  et  ligna  camporum  fruc- 
tum  suum. 

9.  Seniores  in  plateis  sedebant  omnes,  et  de  bonis 
terras  tractabant  ;  et  juvenes  induebant  se  gloriam  et 
slolas  bel  1  i. 


;.  Il  marcha  donc  contre  Démétrius,  défit  son  armée, 
le  prit,  et  le  mena  à  Arsacès,  qui  le  fit  mettre  en  prison. 

4.  Tout  le  pays  de  Juda  demeura  paisible  pendant  tout 
le  temps  de  Simon  ;  il  ne  chercha  qu'à  faire  du  bien  à 
sa  nation  ;  et  sa  puissance  et  sa  gloire  furent  agréables 
aux  Juifs   tant  qu'il   vécut. 

ç.  Outre  toutes  les  actions  glorieuses  qu'il  fit,  il  prit 
Joppé  pour  lui  servir  de  port  ;  et  il  en  fit  un  passage  pour 
aller  dans  les  îles  de  la  mer. 

6.  Il  étendit  les  limites  de  sa  nation,  et  se  rendit  maître 
de  tout  le  pays. 

7.  Il  lit  un  grand  nombre  de  prisonniers  :  il  s'empara 
de  Gazara,  de  Bethsura,  et  de  la  forteresse;  en  ôta  toutes 
les  impuretés,  et  il  n'y  avait  personne  qui  lui  résistât. 

8.  Chacun  cultivait  alors  sa  terre  en  paix  :  la  terre  de 
Juda  donnait  ses  moissons,  et  les  arbres  de  la  campagne 
leurs  fruits. 

9.  Les  vieillards  étaient  tous  assis  dans  les  places 
publiques,  et  s'entretenaient  de  l'abondance  des  biens  de 
la  terre  ;  les  jeunes  gens  se  paraient  de  vêtements  magni- 
fiques, et  d'habits  de  guerre. 


COMMENTAIRE 


fuissel,  repente  insidiis  circumvenlus,  amisso  exer- 
cilu  capilur.  Ainsi  ce  ne  peut  être  que  la  deuxième 
année  de  la  guerre  ;  et  l'on  trouve  encore  de  ses 
médailles  de  l'an  174  des  Séleucides  (i). 

V.    }.   DUXIT  EUM    AD    ARSACEM,  ET    TOSU1T  EUM 

IN  custodiam.  Après  avoir  tenu  quelque  temps 
Démétnus  dans  les  liens,  et  l'avoir  fait  voir  en 
cet  état  aux  peuples  qui  l'avaient  suivi  (2),  Tra- 
duclus  per  ora  civilalum,  populis  qui  desciveranl, 
in  iudibnum  favoris  ostendilur,  Mithridate  l'envoya 
dans  l'Hyrcanie,  où  il  le  traita  d'une  manière  pro- 
portionnée à  sa  première  fortune  ;  non  seulement 
il  lui  rendit  les  marques  de  la  royauté,  mais  il  lui 
donna  sa  fille  en  mariage,  et  lui  promit  de  le  ré- 
tablir dans  son  royaume  de  Syrie  (3). 

jh  4.  Et  siluit  omnis  tf.rraJuda  omnibus  die- 
bus Simonis.  C'est  ainsi  que  Dieu  se  joua  des 
vains  projets,  et  qu'il  renversa  tous  les  desseins 
des  ennemis  de  son  peuple.  La  chute  de  Jonathas 
leur  avait  fait  prendre  la  résolution  de  perdre 
les  Juifs,  lorsqu'ils  les  voyaient  sans  chef,  et  dé- 
pouillés d'un  appui  si  invincible.  Ils  avaient  espéré 
en  venir  à  bout  sans  difficulté  :  mais  il  arriva,  au 
contraire,  que  jamaisceux  qu'ils  haïssaient  si  injus- 
tement, ne  jouirent  d'une  paix  plus  profonde  ;  et 
qu'à  l'ombre  de  Simon,  ce  nouveau  bouclier 
d'Israël,  ils  demeurèrent  inaccesibles  à  toute  la 
mauvaise  volonté  de  leur  adversaires.  C'est  donc 
le  Seigneur  qui  leur  procure,  contre  toute  attente, 
cette  paix  parfaite  ;  c'est  lui  qui  ferme  la  gueule 
à  ces  lions  affamés,  et  qui  les  empêche,  par  sa 
puissance,  de  faire  du  mal  à  ses  serviteurs. 
Touché   de  compassion   pour   un   peuple   qui   lui 


était  demeuré  fidèle  au  milieu  de  tant  de  persécu- 
tions, il  arrête  tout  d'un  couple  fléau  des  guerres 
en  sa  faveur  et  le  comble  des  bienfaits  de  la  paix. 

Placuit  illis  potestas  ejus,  et  gloria  ejus. 
Simon  usa  de  son  pouvoir  avec  tantde  modération 
et  de  justice,  que  personne  n'en  eut  de  jalousie 
ni  de  peine  ;  il  sut  contenter  toute  la  nation  ;  et 
c'est  là  un  des  éloges  lesplusrares  qu'on  ait  peut- 
être  jamais  donné  à  aucun  prince,  de  n'avoir 
mécontenté  personne  dans  l'exercice  de  la  sou- 
veraine autorité. 

y.  5.  Accepit  Joppen  in  portum,  et  fecit  in- 
troitum in  insulis  maris.  On  a  déjà  vu  que 
Joppé  était  le  port  ordinaire  des  Juifs  (4),  dans 
ces  derniers  temps  de  leur  république.  Ce  port 
était  déjà  très  fréquenté  sous  les  rois,  comme 
on  le  voit  par  l'histoire  de  Salomon  («)  et  de 
Jonas  (6).  C'était  pourtant  un  assez  mauvais  port, 
sans  fond  et  sans  abri.  Les  îles  de  la  mer,  dans  le 
style  des  Hébreux,  signifient  non  seulement  les 
îles  proprement  dites,  mais  tous  les  pays  maritimes 
et  où  l'on  va  parmer,et  qui  n'étaient  pas  du  même 
continent  que  la  Palestine. 

f.  7.  Congregavit  captivitatem  multam.  Il  fit 
de  nombreux  prisonniers,  dans  les  diverses  expé- 
ditions qu'il  entreprit. 

Dominatus  estGazar/e.  Ils'empara  de  Gazara, 
ou  plutôt  de  Gadara,  près  d'Azot,  dont  on  a  déjà 
parlé  au  chapitre  iv,  verset  iî.  C'était  une  place 
considérable,  par  rapport  aux  côtes  de  la  Médi- 
terranée. 

%  9.  De  bonis  terr,e  tractabant.  Les  vieil- 
lards traitaient  de  ce  qui  était  avantageux  au  pays, 


(i)  Vaillant  kist.  Reg.  Syr.  p.  279. 
(2)  Justin,  lib.  xxxvi.  c.  1. 
(i)  Justin,  ibid.  t.  xxxvni. 


(4)  Supra  xiii.  29.   Vide  et  1.   Esdr.  m. 

(5)  11.  Par.  11.  16. 

(6)  Jonas.  1.  j. 


'4° 


I.  —  MACCABÉES.  —  XIV.  -  ALLIANCES  RENOUVELÉES 


io.  Et  civitatibus  tribuebat  alimonias,  et  constituebat 
eas  ut  essent  vasa  munitionis,  quoadusque  nominatum  est 
nomen  gloriae  ejus  usque  ad  extremum  terrœ. 

il.  Fecit  pacem  super  terrain,  et  lœtatus  est  Israël 
laetitia  magna. 

12.  Et  sedit  unusquisque  sub  vite  sua  et  sub  ficulnea 
sua;  et  non  erat  qui  eos  terreret. 

iî.  Defecit  impugnans  eos  super  terram,  reges  contriti 
sunt  in  diebus  illis. 

14.  Et  confirmavit  omnes  humiles  populi  sui,  et  legem 
exquisivit,  et  absluiit  omnem  iniquum  et  malum  ; 

15.  Sancta  glorificavit,  et  multiplicavit  vasa  sanctorum. 

16.  Et  auditum  est  Romas  quia  defunctus  esset  Jona- 
thas,  et  usque  in  Spartiatas,  et  constritati  sunt  valde. 

17.  Ut  audierunt  autem  quod  Simon,  frater  ejus,  factus 
esset  summus  sacerdos  loco  ejus,  et  ipse  obtineret  om- 
nem regionem  et  civitates  in  ea, 

18.  Scripserunt  ad  eum  in  tabulis  aereis,  ut  renovarent 
amicitias  et  societatem  quam  fecerant  cum  Juda  et  cum 
Jonatha,  fratribus  ejus. 

19.  Et  lectae  sunt  in  conspectu  ecclesias  in  Jérusalem. 
Et  hoc  exemplum  epistolarum  quas  Spartiatœ  miserunt: 

20.  Spartianorum  principes  et  civitates,  Simoni,  sacer- 
doti  magno,  et  senioribus,  et  sacerdotibus,  et  reliquo 
populo  Judaeorum,  fratribus,  salutem. 


10.  11  distribuait  des  vivres  dans  les  villes  ;  et  il  en 
faisait  des  places  d'armes  :  enfin  son  nom  devint  célèbre 
jusqu'aux  extrémités  de  la  terre. 

11.  Il  établit  la  paix  dans  son  pays  ;  et  Israël  fut  rempli 
d'une  grande  joie. 

12.  Chacun  se  tenait  assis  sous  sa  vigne  et  sous  son 
figuier  ;  et  nul  n'était  en  état  de  leur  donner  de  la  crainte. 

15.  Il  ne  se  trouva  plus  dans  le  pays  aucun  ennemi 
qui  osât  les  attaquer,  et  les  rois  furent  abattus  dans  ces 
jours-là. 

14.  Il  protégea  tous  les  pauvres  de  son  peuple  ;  il  fut 
zélé  pour  l'observation  de  la  loi,  et  il  extermina  tous  les 
injustes  et  tous  les  méchants. 

iç.  Il  rétablit  la  gloire  du  sanctuaire,  et  il  multiplia  les 
vases  saints. 

16.  Or,  la  nouvelle  de  la  mort  de  Jonathas  ayant  été 
portée  jusqu'à  Rome  et  à  Lacédémone,  cas  peuples  en 
furent  fort  affligés. 

17.  Mais  lorsqu'ils  apprirent  que  Simon, son  frère, avait 
été  fait  grand  prêtre  en  sa  place,  et  qu'il  était  maître  de 
tout  le  pays  et  de  toutes  les  villes, 

18.  Ils  lui  écrivirent  sur  des  tables  d'airain  pour  renou- 
veler l'amitié  et  l'alliance  qu'ils  avaient  faite  avec  Judas 
et  Jonathas,  ses  frères. 

19-  Ces  lettres  furent  lues  dans  Jérusalem,  devant  le 
peuple  ;  et  voici  ce  que  contenaient  celles  que  les  Lacé- 
démoniens  envoyèrent  : 

20.  Les  princes  et  les  villes  des  Lacédémoniens,  à 
Simon  grand  prêtre  ;  aux  anciens,  aux  prêtres  et  à  tout 
le  peuple  des  Juifs  leurs  frères,  salut. 


COMMENTAIRE 


de  ce  qui  concernait  le  bien  de  la  nation  ;  les 
anciens,  les  conseillers  s'assemblaient  en  toute 
liberté,  et  traitaient  entr'eux  des  moyens  d'assurer 
la  paix  et  la  prospérité  publique. 

Stolas  belli.  Des  habits  de  guerre,  des  armes, 
ou  bien  des  habits  pris  à  la  guerre,  des  dépouilles 
de  l'ennemi. 

fi.  10.  Ur  essent  vasa  munitionis.  Legrec(i): 
//  les  déposa,  il  les  prépara  à  soutenir  des  sièges, 
s'il  en  était  besoin,  par  les  instruments  de  force  ; 
il  y  mit  des  provisions  de  bouche  ;  il  les  munit 
de  machines  de  guerre,  et  de  tout  ce  qui  pouvait 
les  mettre  en  état  de  défense. 

fi.  12.  Sedit  unusquisque  sub  vite  sua. Manière 
de  parler  proverbiale,  parmi  les  Hébreux,  pour 
marquer  un  état,  où  l'on  jouit  d'une  paix  profonde, 
et  où  l'on  est  dans  l'abondance  (2).  C'était  la 
juste  récompense  du  zèle  que  les  Maccabées  et 
les  Juifs  fidèles  avaient  déployé  pour  leur  religion. 
En  prenant  la  défense  de  leur  foi,  ils  défendirent 
et  relevèrent  la  patrie.  Le  bonheur  temporel  fut 
ici,  comme  dans  tous  les  siècles,  la  conséquence 
de  la  paix  religieuse  et  de  la  ferveur  avec  laquelle 
Dieu  était  servi. 

fi.  14.  Confirmavitomneshumii.es  populi  sui, 
et  legem  exquisivit.  Ce  peu  de  paroles,  qui  font 
l'éloge  de  Simon,  comprennent  les  principaux  de- 


voirs de  ceux  qui  sont  à  la  tête  des  peuples  :  leur 
puissance  ne'. tend  pas  à  les  relever  simplement, 
et  à  les  faire  respecter  desautres  :  ils  sont  grands, 
non  pour  eux-mêmes,  mais  pour  le  bien  de  ceux 
qui  leur  sont  soumis.  Proléger  les  pauvres,  exter- 
miner les  méchants,  être  \élé  pour  la  loi  de  Dieu, 
et  pour  la  gloire  de  son  sanctuaire,  .ou  de  son 
Église  ;  c'est  le  caractère  propre  de  ceux  qui  sont 
revêtus  de  l'autorité  de  Dieu.  Car  si  la  puissance 
ne  se  propose  pas  ces  effets  différents,  elle  tend 
à  tout  autre  chose  qu'à  sa  fin:  c'est  un  abus  cri- 
minel du  pouvoir  de  Dieu  ;  c'est  travailler  pour 
soi-même  et  pour  ses  propres  intérêts,  lorsqu'on 
est  chargé  d'agir  dans  les  intérêts  du  peuple.  Si- 
mon devint  donc  grand,  honoré  parmi  son  peuple, 
et  redouté  de  ses  ennemis,  par  la  protection  qu'il 
donna  à  ceux  que  leur  pauvreté  exposait  aux  vio- 
lences des  puissants  ;  par  la  fermeté  qu'il  témoi- 
gna pour  abattre  les  impies;  par  le  zèle  qu'il  fit 
éclater  pour  toutes  les  choses  qui  regardaient  la 
gloirede  Dieu.  Toute  autre  voie  que  celle-là  nous 
rend  indignes  de  l'amour  des  peuples,  et  de  la 
bénédiction  du  ciel. 

fi.  20.  Spartianorum  principes  et  civitates, 
Simoni.  Le  grec  (3)  :  Les  magistrats  et  la  ville  des 
Spartiates,  au  grand, prêtre  Simon.  Les  Lacédé- 
moniens n'avaient  plus  de  rois  à  cette  époque. 


(1)  K«*.  É'taijev  âuxâ;  év  oxeûsoi  ô/uptôaEo>;. 

(2)  Voyez  111.  Rcg.  iv.  25.  -  Mich.  iv.  4.  -  Zach.  in.  10. 


(j)  Ercapnarwv     ap/ovte;,     xoù     r\   Ko'Xt;,     S^fitiiVt    ispe't 

[JLEIfàXuj. 


[. 


MACCABÉES.  -   XIV.-   ALLIANCES   RENOUVELEES 


'4' 


21.  Legati  qui  missi  suntad  populum  nostrum  nuntia- 
verunt  nobis  de  vestra  gloria,  et  honore,  ac  laetitia;  et 
gavisi  sumus  in  introitu  eorum. 

22.  Et  scripsimus  quai  ab  eis  erant  dicta  in  conciliis 
populi,  sic  :  Numenius  Antiochi,  et  Antipater,  Juaonis 
tilius,  legati  Judceorum,  venerunt  ad  nos,  rénovantes 
nobiscum  amicitiam  pristinam. 

2;.  Et  placuit  populo  excipere  viros  gloriose,  et  ponere 
txemplum  sermonum  eorum  in  segregatis  populi  libris, 
ut  sit,  ad  memoriam  populo  Spartiatarum.  Exemplum 
autem  horum  scripsimus  Simoni,  magno  sacerdoti. 

24.  Post  hœc  autem  misit  Simon  Numenium  Romain, 
habentem  clypeum  aureum  magnum,  pondo  mnarum  mille, 
ad  statuendam  cum  eis  societatem. 

Cum  autem  audisset  populus  romanus  sermones  istos, 

25.  Dixerunt  :  Quam  gratiarum  actionem  reddemus 
Simoni  et  filiis  ejus? 

26.  Restituit  enim  ipse  fratres  suos,  et  expugnavit  ini- 
micos  Israël  ab  eis;  et  statuerunt  ei  libertatem;  et  des- 
cripserunt  in  tabulis  ajreis,  et  posuerunt  in  titulis  in  monte 
Sion. 

27.  Et  lioc  est  exemplum  scripturœ  :  Octava  décima 
die  mensis  elul,  anno  centesimo  septuagesimo  secundo, 
anno  tertio  sub   Simone,   sacerdote  magno,   in  Asaramel, 

28.  In  conventu  magno  sacerdotum,  et  populi,  et  prin- 
cipum  gentis,  et  seniorum  r  egionis,  nota  facta  sunt  hœc  : 
Quoniam  fréquenter  facta  sunt  prselia  in  regione  nostra. 


21.  Les  ambassadeurs  que  vous  avez  envoyés  vers  notre 
peuple,  nous  ayant  informés  de  la  gloire,  de  l'honneur  et 
de  la  joie  où  vous  êtes  présentement,  nous  nous  sommes 
réjouis  de  leur  arrivée. 

22.  Et  nous  avons  écrit  en  ces  termes  dans  les  registres 
publics,  ce  qu'ils  nous  avaient  dit  de  votre  part  :  Nume- 
nius, fils  d'Antiochus,  et  Antipater,  fils  de  Jason,  députés 
des  Juifs,  sont  venus  vers  nous  pour  renouveler  l'ancienne 
amitié  qui  est  entre  nous. 

2;.  Et  le  peuple  a  trouvé  bon  de  recevoir  ces  ambas- 
sadeurs avec  grand  honneur,  et  d'écrire  leurs  paroles 
dans  les  registres  publics, afin  qu'elles  servent  de  monu- 
ment au  peuple  de  Lacédémone  :  et  nous  avons  envoyé 
une  copie  de  cet  écrit  à  Simon  grand  prêtre. 

24.  Après  cela,  S, mon  envoya  à  Rome  Numenius,  avec 
un  grand  bouclier  d'or  du  poids  de  mille  raines,  pour 
renouveler  l'alliance  avec  elle  ;  ce  que  le  peuple  romain 
ayant  appris, 

2;.  11  dit  :  Comment  témoignerons-nous  notre  recon- 
naissance à  Simon  et  à  ses  fils  ? 

2ù.  Car  il  a  rétabli  ses  frères,  et  il  a  exterminé  du  milieu 
d'Israël  ses  ennemis.  Et  ils  lui  donnèrent  le  privilège 
d'une  entière  liberté  ;  et  cela  fut  écrit  sur  des  tables 
d'airain,  et  mis  dans  une  instruction  publique  sur  la  mon- 
tagne de  Sion. 

27.  Voici  ce  que  contenait  cet  écrit  :  Le  dix-huitième 
jour  du  mois  d'ÉluI,  l'an  cent  soixante-douzième,  la  troi- 
sième année  de  Simon  grand  prêtre,  cette  déclaration 
fut  faite  à  Asaramel, 

28.  Dans  la  grande  assemblée  des  prêtres  et  du  peuple, 
des  premiers  de  la  nation  et  des  anciens  du  pays  :  Tout 
le  inonde  sait  que  le  pays  de  Judée  ayant  été  affligé  de 
beaucoup  de  guerres, 


COMMENTAIRE 


Nabis  le  dernier  des  tyrans  de  Lacédémone,  était 
mort  longtemps  avant  Simon  (1),  en  192,  et  l'an- 
née suivante,  la  république  avait  été  agrégée  à  la 
ligue  achéenne. 

f.  22.  Scripsimus  qvje  ab  eis  erant  dicta  in 
conciliis  populi.  Nous  avons  écrit  dans  les  regis- 
tres publics,  ce  qu'ils  nous  avaient  dit  de  votre  part  ; 
ou  bien  :  Nous  avons  écrit  en  ces  termes,  ce  qu'ils 
nous  ont  dit  de  votre  part,  dans  l'assemblée  du  peu- 
ple. Le  grec  et  le  latin  peuvent  souffrir  ces  deux 
sens  (2).  L'historien  sacré  ne  rapporte  pas  ici  les 
propres  mots,  mais  seulement  la  substance  de 
ce  qui  fut  dit  par  les  envoyés  des  Juifs,  et  ce  qui 
était  porté  dans  les  registres  publics  (3). 

,v.  23.  In  segregatis  populi  libris.  Dans  les 
registres  publics,   ou  dans  les  archives. 

f.  24.  Pondo  mnarum  mille.  Il  s'agit  sans 
doute  ici  de  la  mine  grecque  de  324  grammes. 

Cum  audisset  populus  romanus.  Ni  le  grec, 
ni  le  syriaque,  ne  lisent  point  Romain;  mais  sim- 
plement (4):  Le  peuple  ayant  appris  ces  choses.  Et 
les  interprètes  (5)   conviennent  qu'il  est  bien  plus 


naturel  de  l'expliquer  du  peuple  juif,  que  du  peu- 
ple romain,  puisque  dans  toute  la  suite  du  dis- 
cours, ce  sont  les  Jui.'s  qui  parlent,  et  qui  expri- 
ment leur  reconnaissance,  pour  les  services  que 
Simon  a  rendus  à  leur  nation. 

f.  26.  Restituit  enim  ipse  fratres  suos,  iît 
expugnavit  inimicos  Israël.  Il  a  rendu  la  liberté 
à  son  peuple,  il  l'a  délivré  du  joug  des  Syriens.  Le 
grec  (6)  :  //  a  affermi,  lui  et  ses  frères,  et  la  maison 
de  son  père,  et  ils  ont  combattu  contre  les  ennemis 
d'Israël.  Le  syriaque  :  Ils  se  sont  comportés  avec 
valeur,  lui  et  ses  frères,  et  la  maison  de  son  père, 
et  ils  ont  fait  la  guerre  aux  ennemis  d'Israël. 

jh  27.  Mensis  elul.  Ce  mois  répond  à  août 
et  septembre  ;  c'est  le  sixième  de  l'année  sainte, 
et  le  dernier  de  l'année  civile.  La  172e  année  des 
Séleucides  revient  à  l'an  140.  C'était  la  troi- 
sième du  pontificat  de  Simon. 

In  Asaramel.  Dom  Calmet  pense  (7)  que  c'est 
la  même  place  qui  est  nommée  Mello,  dans  les 
livres  des  Rois  (8).  Hasarmello  dit-il,  peut  signi- 
fier  le   parvis   de  Mello.    D'autres  (9)     veulent 


(1)  Vide  Grol.  hic. 

(2)  Ksi  àvEYpài|/a|jL£v  ta  ûr.  '  âuiûv  iipr\iiv/a.  iv  xatç  (îouXat; 
xoùi  orjaou,  oiltoç,  etc. 

(j)  E'v  toïç  aTtooeoEifuivot;  toù  orju.ou  (BiëXc'oi,-. 

(4)  Q  ;  oi  rjxouaev  ô  ôrju.o;  twv  Xoywv  ■toùuov. 

(5)  Serar.  Salian.  Menoch.  Tir.  Drus.  alii. 


(6)  E 'atrjpias  yàp  âuro;,  xat  ôt  âcsX^o't  âvcoZ,  xal  6  ôixoç 
xoù  Jtatpo;  àuxsù,  xai  £7toXÈu.riaav  xoù;  ê'/Ûpoùç  l 'aparjX. 
Voyez  la  même  expression  i.  Macc.  xvi.  2. 

17)  lia  Grol.  hic.  et  alii  quidam. 
.(8)  11.  Reg.  v.  9  Nbn  iyn  Atrium  Mello. 

(9)  Ita  Valab.  Tirin 


142 


i.  —   MACCABEES.  --  XIV.  -  GLOIRE  DE  SIMON 


20.  Simon  autem,  Mathathiae  filius,  ex  filiis  Jarib,  et 
fratres  ejus,  dederunl  se  periculo,  et  restiteruru  adver- 
sariis  gentis  suas,  ut  starent  sancta  ipsorum,  et  lex,  et 
gloria  magna  glonficaverunt  gentem  suara. 

;o.  Et  congregavit  Jonathas  gentem  suam,  et  factus  est 
illis  sacerdos  magnus,  et  appositus  est  ad  populum  suum. 

II.  Et  voluerunt  inimici  eorum  calcare  et  atterere 
regionem  ipsorum,  et  extendere  manus  in  sancta  eorum. 

j?.  Tu"C  restitit  Simon,  et  pugnavit  pro  gente  sua,  et 
erogavit  pecunias  multas,  et  armavit  viros  virtutis  gentis 
suse  et  dédit  illis  stipendia  ; 

jî.  Et  munivit  civilates  Judaeas.  et  Bethsuram,  qu»  erat 
i  n  finibus  Judnsre.  ubi  erant  arma  hostium  antea  ;  et  posuit 
illic  praesidium  viros  Judasos 

Î4.  Et  Joppen  munivit,  quas  eratad  mare,  et  Gazaram, 
quas  est  in  finibus  Azoti.in  qua  hostes  antea  habitabant  : 
et  collocavit  illic  Judasos,  qua;cumque  apta  erant  ad  cor- 
reptionem  eorum  posuit  in  eis. 

55.  Et  vidit  populus  actum  Simonis,  et  gloriam  quam 
cogitabat  facere  genti  su», et  posuerunt  eum  ducem  suum 
et  principem  sacerdotum,  eo  quod  ipse  fecorat  hase 
omnia,  et  justitiam,  et  fidem  quam  conservavit  genti  suas, 
et  exquisivit  omni  modo  exaltare  populum  suum. 


20.  Simon,  fils  de  Matthathias,de  la  race  de  Jarib,  et  ses 
Irères,  se  sont  abandonnés  au  péril,  et  ont  résisté  aux 
ennemis  de  leur  nation,  pour  soutenir  leur  temple  saint 
et  leur  loi,  et  ont  élevé  leur  peuple  à  une  grande  gloire. 

;o.  Jonathas  a  rassemblé  ceux  de  sa  nation,  est  devenu 
leur  grand  pontife,  et  a  été  réuni  à  son  peuple. 

;  ; .  Et  les  ennemis  des  Juifs  se  sont  efforcés  ensuite  de 
les  fouler  aux  pieds,  de  ravager  leur  pays,  et  de  profaner 
leur  temple  saint. 

!2.  Mais  Simon  leur  a  résisté  alors  :  il  a  combattu  pour 
son  peuple  ;  il  a  distribué  beaucoup  d'argent  :  il  a  armé 
les  hommes  vaillants  de  sa  nation,  et  les  a  entretenus  à 
ses  dépens. 

}?•  Il  a  fortifié  les  villes  de  Judée,  et  la  ville  de 
Bethsura,  qui  était  sur  la  frontière  de  Judée,  dont  les 
ennemis  avaient  l'ait  auparavant  leur  place  d'armes,  et  il 
y  a  mis  une  garnison  de  Juifs. 

;4  II  a  fortifié  Joppé  sur  la  côte  de  la  mer,  et  Gazara 
qui  est  sur  la  frontière  d'Azot,  où  les  ennemis  demeu- 
raient auparavant  ;  il  y  a  mis  des  Juifs,  pour  les  garder 
et  les  a  pourvues  de  toutes  les  choses  nécessaires  pour 
leur  défense. 

;$.  Le  peuple  a  vu  la  conduite  de  Simon,  et  tout  ce 
qu'il  faisait  pour  relever  la  gloire  de  sa  nation  ;  et  ils 
l'ont  établi  leur  chef  et  prince  des  prêtres,  parce  qu'il 
avait  fait  toutes  ces  choses,  qu'il  avait  conservé  toujours 
la  justice  et  une  exacte  fidélité  envers  son  peuple,  et 
qu'il  s'était  efforcé  par  toutes  sortes  de  moyens  de  relever 
l'honneur  de  sa  nation. 


COMMENTAIRE 


qu'Asaramel,  ou,  comme  porte  le  grec,  Saramel, 
soit  mis  pour  Jérusalem  ;  le  syriaque  lit  Israël. 
Sérarius  croit  que  c'est  un  terme  hébreu,  qui 
signifie  le  prince  du  Seigneur,  et  qu'il  faut  tra- 
duire :  La  troisième  année  du  grand  prêtre  Simon, 
prince  du  Seigneur,  un  ~v  iwn  ;  d'autres  préfèrent 
lire  :  -n  c;  isin  dans  la  chambre  du  trésor  du  peu- 
ple de  Dieu.  L'ôlsâr  est  le  ga\ophylacium  de 
l'Évangile.  Ce  sens  paraît  le  meilleur  en  ce  qu'il 
fixe  le  lieu  où  ladéclaration  fut  faite.  Cette  décla- 
ration du  peuple  juif  avait  pour  but  de  transmet- 
tre à  la  postérité  la  reconnaissance  publique,  pour 
les  éminents  services  que  ce  grand  prêtre  lui  avait 
rendus. 

y.  29.  Jarib.  Autrement  Joarib.  1 .  Macc.  1 1 .  1 . 
et  1.  Paralip.  xxiv.  7. 

y.  33.  Bethsuram,  quje  erat  in  finibus  ]udjeje. 
Cette  lorteresse  n'avait  été  fortifiée  par  Judas, 
que  pour  servir  de  boulevard  à  Jérusalem,  du 
côté  de  l'Idumée  (1).  Les  Iduméens  occupaient 
alors  toute  la  partie  méridionale  de  ce  pays.  Leur 
territoire  s'étendait  jusqu'à  Hébron. 

y.  34.  Gazaram, quje  est  in  finibus  Azoti.  Ga- 
zara est  la  même  que  Gadara.  Voyez  plus  haut  ce 
que  nousen  avons  dit  (2). 

QU/ECUMQUE    APTA     ERANT      AU      CORREPTIONEM 

eorum.  Toutes  les  choses  nécessaires  pour  leur 
défense;  le  grec  (})  :  pour  leur  rétablissement:,  ou 


pour  les  remettre  en  meilleur  état  ;  ad  correclio- 
nem,  représenterait  mieux  la  force  du  grec,  que, 
ad  correptionem. 

y.  3  5 .  Et  vidit  populus  actum  Simonis,  et  glo- 
riam QUAM  COGITABAT  FACERE  GENTI  SU^ET  POSUE - 

runt  eum  ducem  suum.  L'Ecriture  a  soin  de  nous 
faire  remarquer  ce  qui  motiva  le  choix  qu'on  fit  de 
Simon.  Le  peuple  vitsa  conduite,  dit  le  texte  sacré; 
car  il  est  juste  de  n'établir  pourlaconduitedesau- 
tres  qu'un  hommedont  la  conduite  particulièreleur 
soit  connue;  afin  qu'étant  persuadés  de  sa  sagesse 
et  desa  vertu,  ils  lui  obéissent,  non  à  regret,  mais 
avec  joie.  Et  c'est  pour  cette  raison  qu'on  choisissait 
dans  les  premiers  temps,  pour  être  pasteur  d'une 
église,  un  membre  du  clergé  de  cette  église,  afin 
que  la  connaissance  que  l'on  y  avait  de  sa  con- 
duite rendît  les  peuples  plus  dociles  à  sa  voix  et  à 
ses  saintes  instructions.  Ce  fut  la  justice  et  l'ex- 
acte fidélité  de  Simon  qui  le  rendit  digne  d'être 
établi  chef  d'Israël  et  prince  des  prêtres;  c'est 
aussi  sur  ce  modèle  que  toutes  les  élections  doi- 
vent être  faites.  Saint  Paul  dit  que  ce  qui  est  à 
désirer  principalement  dans  les  dispensateurs  des 
my stères  de  Dieu,  est  qu'ils  soient  trouvés  fidè- 
les (41.  Et  Jésus-Christ  avait  déclaré  avant  lui, 
queceuxqui  n'avaient  pas  été  fidèles  dans  les  riches- 
ses injustes,  ne  méritaient  pas  qu'on  leur  confiât  les 
biens  véritables  ('-,). 


(1)  1.  Macc.  iv.  61. 

(2)  1.  Macc,  iv.  15. 


(4I  1.  Cor.  iv.  1.  2. —  ())  Luc.  xvi.  11, 


I.—   MACCABÉES.—  XIV.-  GLOIRE    DE  SIMON 


M3 


?6.  Et  in  diebus  ejus  prosperatum  est  in  manibus  ejus, 
ut  tollerentur  gentes  de  regione  ipsorum,  et  qui  in  civi- 
tate  David  erant  in  Jérusalem,  in  arce,  de  qua  procede- 
bant,  et  contaminabant  omnia  quas  in  circuitu  sanctorum 
sunt,  et  inferebant  plagam  magriam  castitati  : 


?7.  Et  collocavit  in  ea  viros  Judaeos  ad  tutamentum 
regionis  et  civitatis,  et  exaltavit  muros  Jérusalem. 

;8.  Et  rex  Demetrius  siatuit  illi  summum  sacerdotium; 

59.  Secundum  hœc  (ecit  eum  amicum  suum,  et  glorifi- 
cavit  eum  gloria  magna. 

40.  Audivit  enim  quod  appellati  sunt  Judaei  a  Romanis 
amici,  et  socii,  et  fratres,  et  quia  susceperunt  legatos 
Simonis  gloriose  ; 

41.  Et  quia  Judaei  et  sacerdotes  eorum  consenserunt 
eum  esse  ducem  suum  et  summum  sacerdoiem  in  a?ter- 
num,  donec  surgat  propheta  fidelis; 

42.  Et  ut  sit  cuper  eos  dux,  et  ut  cura  esset  illi  pro 
sanctis,  et  ut  constitueret  prœpositos  super  opéra  eorum, 
et  super  regionem,  et  super  arma,  et  super  praasidia  ; 


;6.  Les  araires  ont  réussi  de  son  temps  1res  heureu- 
sement sous  sa  conduite  ;  en  sorte  que  les  étrangers  ont 
été  bannis  du  pays  d'Israël,  et  qu'il  a  chassé  de  la  ville 
de  David,  et  de  la  forteresse  de  Jérusalem,  ceux  qui  y 
étaient  en  garnison,  qui  faisaient  des  sorties,  profanaient 
tout  aux  environs  du  sanctuaire,  et  faisaient  une  grande 
plaie  à  la  pureté  des  lieux  saints. 

57.  Et  il  y  a  établi  des  Juifs  pour  la  sûreté  du  pays  et 
de  la  ville,  et  a  relevé  les  murs  de  Jérusalem. 

j8.  Le  roi  Démétrius  l'a  confirmé  dans  la  souveraine 
sacrificature, 

?q.  Et  en  même  temps,  il  l'a  déclaré  son  ami,  et  l'a 
élevé  dans  une  haute  gloire, 

40.  Car  il  avait  su  que  les  Romains  avaient  appelé  les 
Juifs  leurs  amis,  leurs  alliés  et  leurs  frères  ;  et  qu'ils 
avaient  reçu  avec  grand  honneur  les  ambassadeurs  de 
Simon; 

41.  Que  les  Juifs  et  les  prêtres  avaient  consenti  qu'il 
fût  leur  chef  et  leur  grand  prêtre  pour  toujours,  jusqu'à 
ce  qu'il  s'élevât  parmi  eux  un   prophète  fidèle. 

42.  En  sorte  qu'ayant  sur  eux  l'autorité  de  chef,  il  prit 
soin  des  choses  saintes,  qu'il  établit  ceux  qui  devaient 
avoir  l'intendance  sur  les  ouvrages  publics,  sur  la  pro- 
vince, sur  les  armes,  et  sur  les  garnisons; 


COMMENTAIRE 


La  justice  que  l'on  demande  aux  pasteurs  est 
celle  qui,  les  rendant  justes  devant  Dieu  par  la 
pureté  du  cœur,  les  rend  encore  des  modèles  et 
comme  des  sources  de  justice  à  l'égard  des  peu- 
ples. Il  faut  qu'ils  soient  justes,  non  seulement 
pour  eux-mêmes,  mais  encore  pour  tous  ceux 
dont  ils  doivent  procurer  la  justification  par  leurs 
travaux,  par  leurs  prières,  par  leurs  exhortations, 
et  par  tous  les  autres  moyens  que  Dieu  leur  pres- 
crit. Leur  fidélité  n'est  pas  non  plus  celle  qui  est 
propre  à  tous  les  particuliers,  qui  ne  sont  char- 
gés que  du  bon  usage  des  dons  qu'ils  ont  reçus 
pour  leur  propresalut  ;  mais,  comme  la  dispensa- 
tion  de  tous  les  trésors  et  des  mystères  de  Dieu 
est  confiée  à  ses  ministres,  en  faveur  des  peuples 
à  qui  ils  sont  obligés  d'en  faire  part,  ils  ont  besoin 
d'une  sagesse  surnaturelle,  pour  s'en  acquitter 
avec  cette  fidélité  qui  est  propre  à  leur  ministère. 
C'est  de  la  sorte  qu'ils  travailleront,  comme 
Simon,  à  relever  l'honneur  et  la  gloire  de  leur  peu- 
ple, qui  consiste  à  rendre  à  Dieu  ce  qu'ils  lui  doi- 
vent, par  le  culte  véritable  de  leur  cœur. 

y.  56.  Inferebant  plagam  magnam  casti- 
tati (1).  Ils  faisaient  une  grande  plaie  à  ta  pureté, 
ou  à  l'innocence.  Le  syriaque  :  Dans  le  sanctuaire; 
ou  dans  le  culte  de  Dieu.  Les  Latins  se  servent 
du  nom  de  chaste,  chastement,  lorsqu'ils  parlent 
de  la  pureté  de  leurs  mystères.  C'est  aussi  le 
sens  d'âpo;  qui  signifie  pur,  principalement  sous 
le  rapport  religieux.  Il  est  probable  que  l'auteur 
avait  écrit  p'p:  niqqâyôn,  qui  a  le  même  sens  en 
hébreu. 


y.  37.  Collocavit  in  ea  viros  Jud^os.  Josè- 
phe  assure  qu'il  la  démolit  ;  mais  ce  ne  fut  pas 
immédiatement.  Voyez  ce  qu'on  a  dit  plus  haut 
au  chapitre  xm,  5 2. 

y.  39.  Secundum  h^ec  fecit  eum  amicum  suum. 
Le  grec  joint  ce  verset  au  précédent,  de  la 
sorte  (2)  :  Démétrius  l'établit  grand  prêtre,  suivant 
cela,  ou  en  toutes  choses,  ou  pour  toujours,  ou 
pour  toute  sa  race,  ou  avec  tous  ses  droits.  Voyez 
le  verset  _j  1. 

y.  41 .  Summum  sacerdotem  in1  sternum.  On 
rétablit  en  sa  faveur  l'ordre  primitif  des  grands 
prêtres  qui  se  succédaient  l'un  à  l'autre,  de  père 
en  fils,  et  qui  possédaient  cette  dignité  toute 
leur  vie.  O.i  y  avait  dérogé  auparavant  depuis 
Onias    III. 

Donec  surgat  propheta  fidelis.  Ce  rétablis- 
sement du  sacerdoce  dans  la  famille  des  Macca- 
bées,  s'étant  fait  simplement  par  le  choix  des 
hommes,  en  suivant  les  lumières  naturelles,  on  a 
soin  de  marquer  ici,  que  cette  disposition  ne  pré- 
judiciera  point  aux  ordres  surnaturels,  à  la  révé- 
lation particulière  de  Dieu,  s'il  juge  à  propos  de 
découvrir  un  jour  plus  formellement  ses  volontés, 
par  la  voie  de  la  prophétie,  en  faveur  de  quel- 
qu'autre  famille  sacerdotale.  Ce  passage  et  celui 
qu'on  a  vu  précédemment  (3),  à  l'occasion  de  la 
démolition  de  l'autel  des  holocaustes,  profané  par 
les  Grecs,  montrent  que  les  Juifs  attendaient 
alors  l'avènement  prochain  d'un  prophète  fidèle, 
qui  devait  les  éclairer  sur  tous  leurs  doutes,  et 
fixer  d'une  manière  irrévocable   leur  constitution 


(i)  Kot!  Èlïo'.oûv  ttXtj-,"},';  [i£-;oà.rlv  Év  tf,  âyvEta. 

(2)  At)u./!tp  0;  à'on)(7£v  âw.ù)  xr,v  acyicf-oiùvr)/  vatà  raïï'a, 


ou  selon  d'autres  exemplaires,  '-ata  TtavT». 
(})  1.  Macc.  iv.  46. 


144 


I.  —   MACCABÉES.  —  XIV.  -  GLOIRE   DE  SIMON 


4J.  Et  cura  sit  illi  de  sanctis,  et  ut  audiatur  ab  omni- 
bus, et  scribantur  in  nomine  ejus  omnes  conscriptiones 
in  regione,  et  ut  operiatur  purpura  et  auro; 

44.  Et  ne  liceat  ulli  ex  populo,  et  ex  sacerdotibus,  irri- 
tum  facere  alijjuid  horum,  et  contradicere  his  quas  ab  eo 
dicuntur,  aut  convocare  conventum  in  regione  sine  ipso, 
et  vestiri  purpura,  et  uti  fibula  aurea  ; 

4^.  Qui  autem  fecerit  extra  haoc,  aut  irritum  fecerit  ali  - 
quid  horuin,  reus  erit. 

46.  Et  complacuit  omni  populo  staluere  Simonem,  et 
facere  secundum  verba  ista. 

47.  Et  suscepit  Simon,  et  placuit  ei  ut  summo  sacerdo- 
tio  fungeretur,  et  esset  dux  et  princeps  gentis  Judaeorum 
et  sacerdotum,  et  prasesset  omnibus. 

48.  Et  scripturam  istam  dixerunt  ponere  in  tabulis 
aereis,  et  ponere  eas  in  peribolo  sanctorum,  in  loco 
celebri  ; 

49.  Exemplum  autem  eorum  ponere  in  aerario,  ut  habeat 
Simon,  et  filii  ejus. 


47.  Qu'il  veillât  à  la  garde  des  lieux  saints;  que  tous 
lui  obéissent,  que  tous  les  actes  publics  fussent  écrits  en 
son  nomdansle  pays  ;  et  qu'il  fût  vêtu  de  pourpre  etd'or; 

44.  Qu'il  ne  fût  permis  à  aucun  ni  du  peuple,  ni  des 
prêtres,  de  violer  aucune  de  ces  choses,  ni  de  contredire 
à  ce  qu'il  aurait  ordonné,  ni  de  convoquer  aucune 
assemblée  dans  la  province  sans  son  autorité,  ni  de  se 
vêtir  de  pourpre,  et  de  porterune  agrafe  d'or. 

45.  Et  que  quiconque  agirait  contre  cette  ordonnance 
ou  en  violerait  quelque  chose,  serait  tenu  pour  coupable. 

46.  Tout  le  peuple  agréa  donc  que  Simon  fût  établi 
dans  celte  grande  autorité,  et  qu'on  exécutât  tout  le 
contenu  de  cette  déclaration. 

47.  Simon  accepta  le  gouvernement,  et  il  consentit  à 
faire  les  fonctions  de  la  souveraine  sacrificature,  et  à 
être  chef  et  prince  de  la  nation  des  Juifs  et  des  prêtres, 
et  à  avoir  le  commandement  sur  toutes  choses. 

48.  Il  fut  ordonné  que  cette  déclaration  serait  écrite 
sur  des  tables  d'airain,  que  l'on  placerait  dans  les  gale- 
ries du  temple,  en  un  lieu  exposé  à  la  vue  de  tous. 

49.  Et  qu'on  en  mettrait  une  copie  dans  le  trésor  du 
temple,  pour  servir  de  titre  à  Simon  et  ses  enfants. 


COMMENTAIRE 

civile    et  religieuse.    Les  derniers  prophètes  (1)  Juifs,  et  de  les  disposer  à  recevoir  ce  Messie,  ce 

en    avaient  désigne   la  venue    comme    très   pro-  grand   Prophète,  qui    est  venu    nous  donner    un 

chaine  ;  et  toute  la  nation  l'attendait  avec  impa-  sacerdoce  nouveau  et  éternel, 

tience  ;  il  semble  même  que,    par  un  effet  de    la  jfr.   43.    Operiatur    purpura,    et   auro.    Qu'il 

sagesse  de  Dieu,  la  prophétie  ait  manqué  dans  porte  des    habits    de   pourpre,    et    l'agrafe    d'or. 

Israël  pendant  quelques  siècles,   avant  la  venue  Voyez  les  chapitres  x,  89,  et  xi,  58,  et  ici  ver- 

de  Jésus-Christ,   afin    d'augmenter  l'ardeur  des  set  44. 


(11  Malach.  m.  I.  Stalim  veniet  ad  lemplum  suum 
dominator  quem  vos  qurcritis,  et  angélus  testamenli  quem 
vos  vullis,  ecce  venit.  Agg.  il.  7.  Adhuc  unum  modicum 
est,  et  ego  commovebo  cœlum  et  terrain...  et  veniet  de- 


sideraïus  cunciis  gentibus,  etc.  Et  Eiech.u.  H.  Ecce  enim 
ego  adducam  servum  meum  orientem,  etc.  Et  v.  12.  Ecce 
vir  oriens  nomen  ejus.  Et  ix.  9.  Ecce  rex  tuus  veniet  libi 
justus  et  salvator,  etc. 


CHAPITRE    XV 

Offres  avantageuses  d' Anliochus  Sidèle  à  Simon.  Tryphon,  abandonné  de  ses  troupes, 
est  assiégé  dans  Dora.  Les  Romains  écrivent  en  faveur  des  Juifs  aux  rois  et  aux 
peuples  voisins.  Anliochus  se  broudle  avec  Simon.  Tryphon  se  sauve  de  Dora. 
Antiochus  le  poursuit,  après  avoir  donné  l'ordre  à  Cendébée  de  marcher  contre  les 
Juifs  avec  une  puissante  armée. 


i.  Et  misit  rex  Antiochus,  filius  Demetrii,  epistolas  ab 
insulis  maris  Simoni,  sacerdoti  et  principi  gentis  Judae- 
orum,  et  universas  genti  ; 

2.  Et  erant  continentes  hune  modum  :  Rex  Antiochus 
Simoni,  sacerdoti  magno  et  genti  Judasorum  salulem. 

?.  Quoniam  quidam  pestilentes  obtinuerunt  regnum 
patrum  nostrorum,  volo  autem  vindicare  regnum,  et  res- 
lituere  illud  sicut  erat  antea;  et  electam  feci  multitudi- 
nem  exercitus,  et  feci  naves  bellicas. 


i.  Alors  le  roi  Antiochus,  fils  deDémétrius,  écrivit,  des 
îles  de  la  mer,  des  lettres  à  Simon  grand  prêtre  et  prince 
des  Juifs,  et  à  toute  la  nation. 

2.  Et voicieequecontenaient  ces  lettres:  Le  roi  Antio- 
chus,à  Simon  grand  prêtre  et  à  la  nation  des  Juifs,  salut. 

;.  Quelques  corrupteurs  de  nos  peuples  s'etant  rendus 
maîtres  du  royaume  de  nos  pères,  j'ai  entrepris  d'y  ren- 
trer et  de  le  rétablir  comme  il  était  auparavant  ;  c'est 
pourquoi  j'ai  levé  une  grande  armée  de  gens  choisis,  et 
j'ai  fait  construire  des  vaisseaux  de  guerre. 


COMMENTAIRE 


y.  i.  Misit  rex  Antiochus.  Le  roi  Anliochus, 
fils  de  Démétrius  Soter,  et  frère  de  Démëtrius 
Nicator,  écrivit  à  Simon.  Cet  Antiochus  avait  été 
envoyé  par  son  père,  avec  Démétrius  Nicator, 
son  frère,  à  Gnide,  chez  un  de  ses  amis,  où  il 
demeura  jusqu'au  règne  de  Nicator  (i).  Celui-ci 
étant  allé  au-delà  de  l'Euphrate,  pendant  que  la 
plupart  des  villes  de  Syrie  se  déclaraient  pour 
Tryphon,  Antiochus,  son  frère,  après  avoir  erré 
quelque  temps  dans  ce  pays,  sans  pouvoir  trouver 
de  retraite  assurée  dans  aucune  ville,  par  la 
crainte  qu'on  avait  de  Tryphon,  fut  obligé  de  se 
retirer  dans  l'île  de  Rhodes  (2),  où  il  apprit  la 
captivité  de  Nicator,  pris  par  Mithridate,  roi  des 
Parthes.  C'est  de  cette  île  qu'il  écrivit  à  Simon 
et  au  peuple  juif,  pour  les  engagerdans  son  parti  ; 
Misit  epislolas  ab  insulis  maris,  dit  [ici  l'Écriture. 

Il  prend  le  titre  de  roi  dans  ces  lettres,  parce 
que  la  reine  Cléopâtre,  épouse  de  son  frère,  en- 
fermée avec  ses  enfants  dans  Séleucie,  lui  avait 
offertde  l'épouser, etde  luiremettre  l'armée  qu'elle 
avait  auprès  d'elle.  Quoique  Nicator,  son  époux 
ît  frère  d'Antiochus,  fût  encore  vivant,  cette 
alliance  inconvenante  fut  conclue.  Antiochus 
îe  tarda  pas  à  passer  la  mer  ;  il  épousa  Cléo- 
)âtre,  prit  le  diadème,  et  se  mit  à  la  tète  de  l'ar- 


mée, pour  combattre  Tryphon,  dont  le  parti 
s'affaiblissait  de  jour  en  jour,  exolescenle  favore 
recenlis  imperii,  comme  dit  Justin.  Antiochus  prit 
alors  le  nom  de  Sidèle  (j),  soit  à  cause  de  son 
inclination  pour  la  chasse,  rs  Isid,  en  phénicien 
et  en  hébreu  (4),  soit  parce  qu'il  partit  de  Side, 
ville  de  Pamphilie,  pour  aller  combattre  Try- 
phon (5)  ;  mais,  dans  ses  médailles,  on  ne  le 
trouve  jamais  sous  ce  nom  ;  peut-être  parce  qu'il 
n'est  point  assez  relevé.  Josèphe  lui  donne  en- 
core les  noms  de  Pieux  (6)  et  de  Soler  (7),  ou 
sauveur  ;  mais  on  ne  les  lui  a  point  donnés  dans 
ses  monnaies  ;  on  n'y  voit  que  celui  A'Evergèle, 
ou  bienfaisant  (8). 

Simoni,  sacerdoti  et  principi  gentis  Jud^eo- 
rum.  Le  grec  (9)  :  Prêtre,  et  elhnarque  des  Juifs. 
Ce  titre  d'ethnarque  se  trouve  souvent  dans  Josè- 
phe pour  marquer  un  prince  indépendant,  mais 
d'un  rang  au-dessous  de  celui  de  roi. 

y.  }.  Pestilentes  obtinuerunt  regnum.  Des 
hommes  peslijérés,  des  hommes  corrompus,  qui 
répandent,  pour  ainsi  dire,  partout  le  venin  de  la 
discorde.  Les  Hébreux  et  les  Syriens  se  servent 
souvent  de  ce  terme  (10).  Antiochus  voulait  dési- 
gner sous  ce  nom,  Alexandre  Balas,  Antiochus 
son  fils,  et  particulièrement  Tryphon. 


(1)  Justin.  L.  xxxv.  c.  2.  et  t.  xxxvi.  c.  1. 

(2)  Joseph.  Antlq.  I.  xm.  c.  12.  et  Appian.  Syriac.  p.  ij2. 
(j)  Trog.  Prolog,  t.  xxxix.-Euseb.  Cronic. 

{<,)  Usscr.   ad  an.    J864.  -  Vaillant   hist.    Rcg.  Syr.   Vide 
Hularch.  Problem. 
(5)  Syncell.  Grot.  hic. 

S.   B.  —  T.  XII. 


(6)  Anliq.  lih.  xm.   16.  —  (7)  Idem.  lib.  xm.  c.  12. 

(8)  E'uÉpysxri;  dicitur  Porphyrio  apud  Euseb.  Vide  Vail- 
lant hist.  Reg.  Syr.  p.  Î05.  jo6.  BASIAEQS  ANTIO- 
XOY  EYEPrEÏOY. 

(9)  ï^fitovi  upti  /.al  c'9vàp/7)  tûiv  Iou5a''tov. 

(10)  Voyez  vin.  29;  xi.  jj;  xii.  6;  xm.  j6  ;  xiv.  20. 

10 


146 


I.  -    MACCABÉES.—  XV.-   LETTRE  D'ANTIOCHUS  SIDÈTE 


4.  Volo  autem  procedere  per  regionem,  ut  ulciscar  in 
eos  qui  corrupeTunt  regionem  nostram,  et  qui  desolave- 
runt  civitates  multas  in  regno  meo. 

5.  Nunc  ergo  statuo  tibi  omnes  oblationes  quas  remise- 
runt  tibi  ante  me  omnes  reges,  et  quascumque  alia  dona 
remiserunt  tibi  ; 

6.  Et  permitto  tibi  facere  percussuram  proprii  numis- 
matis  in  regione  tua  ; 

7.  Jérusalem  autem  sanctam  esse,  et  liberam,  et  omnia 
arma  quas  fabricata  sunt,  et  prœsidia  quas  construxisti, 
quae  tenes,  maneant  tibi. 

8.  Et  omne  debitum  régis,  et  quas  futura  sunt  régi,  ex 
hoc  et  in  totum  tempus  remittuntur  tibi. 

9.  Cum  autem  obtinuerimus  regnum  nostrum,  glorifica- 
bimus  te,  et  gentem  tuam,  et  templum  gloria  magna,  ita 
ut  manifestetur  gloria  vestra  in  universa  terra. 

10.  Anno  centesimo  septuagesimo  quarto  exiit  Antio- 
chus  in  terram  patrum  suorum,  et  convenerunt  ad  eum 
omnes  exercitus,  ita  ut  pauci  relicti  essent  cum  Try- 
phone. 

1 1.  Et  insecutus  est  eum  Antiochus  rex,  et  venit  Doram 
fugiens  per  maritimam; 

12.  Sciebat  enim  quod  congregata  sunt  mala  in  eum,  et 
reliquit  eum  exercitus. 

ij.  Et  applicuit  Antiochus  super  Doram  cum  centum 
viginti  millibus  virorum  belligeratorum  et  octo  millibus 
equitum  ; 

14.  Et  circui vit  civitatem,  et  naves  a  mari  accesserunt  ; 
et  vexabant  civitatem  a  terra  et  mari,  et  neminem  sine- 
bant  ingredi  vel  egredi. 


4.  Ainsi  j'ai  dessein  d'entrer  dans  mes  états  pour  me 
venger  de  ceux  qui  ont  ravagé  mes  provinces,  et  qui  ont 
désolé  plusieurs  villes  dans  mon  royaume. 

5.  Je  vous  remets  donc  maintenant  tous  les  tributs  qu 
tous  les  rois  mes   prédécesseurs  vous   ont    remis,   et  je 
vous  confirme  dans  toutes  les  immunités  qu'ils  vous  ont 
données. 

6.  Je  vous  permets  de  faire  battre  monnaie  à  votre 
coin  dans  votre  pays. 

7.  J'ordonne  que  Jérusalem  soit  une  ville  sainte  et 
libre,  et  que  vous  demeuriez  maître  de  toutes  les  armes 
que  vous  avez  fait  faire,  et  de  toutes  les  places  fortes 
que  vous  avez  rétablies,  et  que  vous  occupez. 

8.  Toutes",les  dettes  du  roi,  tant  pour  le  passé  que 
pour  l'avenir,  depuis  ce  temps  et  pour  toujours,  vous 
sont  remises. 

9.  Et  lorsque  nous  serons  rentrés  dans  la  possession 
de  notre  royaume,  nous  renouvellerons  de  telle  sorte 
votre  gloire,  et  celle  de  votre  peuple  et  de  votre  tem- 
ple, qu'elle  éclatera  dans  toute  la  terre. 

10.  En  la  cent  soixante-quatorzième  année,  Antiochus 
entra  dans  le  pays  de  ses  pères  ;  et  toutes  les  troupes 
vinrent  aussitôt  se  donner  à  lui  ;  de  sorte  qu'il  n'en  resta 
que  très  peu  avec  Tryphon. 

11.  Le  roi  Antiochus  le  poursuivit  ;  et  Tryphon  vint  à 
Dora,  en  s'enfuyant  le  long  de  la  côte  de  la  mer. 

'.z.  Car  il  vit  bien  qu'il  allait  être  accablé  de  malheurs, 
l'armée  l'ayant  abandonné. 

1  ;.  Antiochus  vint  camper  au-dessus  de  Dora  avec 
cent  vingt  mille  hommes  de  guerre  et  huit  mille  chevaux. 

14.  Et  il  investit  la  ville,  et  fit  avancer  les  vaisseaux 
qui  étaient  sur  mer  ;  et  il  la  pressait  par  terre  et  par  mer, 
sans  permettre  que  personne  y  entrât  ou  en  sortit. 


COMMENTAIRE 


y.  5.  Statuo  tibi  omnes  oblationes  quas  re- 
miserunt tibi  ante  me  omnes  reges.  Le  grec  (1) 
iça{pE|A««  qui  est  traduit  ici  par  oblaliones,  signifie 
les  prémices,  les  dîmes,  et  les  autres  choses  qu'on 
séparait  de  l'usage  commun,  pour  les  offrir  au 
Seigneur.  On  pourrait  le  traduire  par  séparation, 
retranchement,  ou  même,  don,  présent  (2).  Dru- 
sius  semble  croire  qu'il  faudrait  lire  &s&u.<«a(3.)  ; 
je  vous  confirme  toutes  les  remises  que  vous  ont 
faites  les  rois  mes  prédécesseurs  ;  mais  cela  re- 
vient au  même  pour  le  sens.  Antiochus  était  libé- 
ral du  bien  d'autrui  ;  il  ne  se  dépouillait  de  rien 
en  accordant  à  Simon  tout  ce  dont  il  était  alors 
en  possession  ;  il  lui  était  bien  plus  aisé  de  le  lui 
abandonner,  que  de  le  lui  contester. 

y.  6.  Permitto  tibi  facere  percussuram  pro- 
prii numismatis  in  regione  tua.  C'est  un  droit 
de  souverain  que  celui  de  battre  la  monnaie  à  son 
coin.  Antiochus  comptait  apparemment  que  Simon 
y  ferait  mettre  son  empreinte  ou  sa  tête.  Mais, 
dans  les  médailles  qui  nous  restent  de  lui,  on  n'y 
remarque  aucune  figure  humaine  (4)  ;  on  y  voit 
seulement  quelques  vases  du  lemple,  ou  quelques 


plantes,  lauriers,  palmes,  ceps  de  vigne  qui  étaient 
le  symbole  du  pays. 

L'inscription  de  ces  monnaies  est  quelquefois 
Sicle,  ou  demi-sicle  d'Israël,  et  d'autres  fois, 
année  1.  2.  3.  ou  4,  années  de  la  délivrance  de 
Sion,  ou  de  Jérusalem,  ou  d'Israël.  Dans  quel- 
ques-unes, paraît  le  nom  de  Simon,  ou  de  Simon 
prince  d'Israël  ;  mais  dans  la  plupart,  ce  nom  ne 
se  lit  pas.  On  ne  trouve  de  ces  sicles,  que  pour 
quatre  années  du  gouvernement  de  Simon.  Jean 
Hyrcan,  son  successeur,  ne  fit  point  frapper  de 
monnaie,  que  l'on  sache.  Il  ne  parait  pas  même 
que  Simon  ait  usé  de  ce  privilège  pendant  tout 
son  règne  ;  soit  qu'il  s'en  soit  abstenu  par  un  mo- 
tif de  religion,  comme  l'ont  pensé  quelques  com- 
mentateurs, de  crainte  que  ces  empreintes  ne 
fussent  pas  permises  par  la  loi  ;  soit  qu'il  n'ait  pas 
jugé  à  propos  de  continuer  de  fabriquer  des  mon- 
naies, qui  n'apportaient  aucun  profit  à  l'Etat. 

y.  10.  Exiit  Antiochus  in  terram  patrum 
suorum.  Antiochus  entra  dans  le  pays  de  ses  pères  ; 
en  l'an  i74des  Séleucides,  1  }8avant  Jésus-Christ. 
11  aborda  à  Séleucie,  où  il  épousa  Cléopâtre,  sa 


(1)  I"«»]u.l  aoi  r.ânct  xà  âoa''pêu.«ta  â  âorjxav  soi  ôi  r.po  (j)  Io0ti)(xi  aoî  îiâvca  ta  ào^iata.    Vide  1.   Macc.  x.  28; 
£u.où  fiaatXeiç.                                                                                      *M.  J7- 

(2)  Hcsych-  AWp7]|,.a,  ÂvâOri(xa,  oôifov.  (4)  Voyez  S.  Munk,  Palestine,  pi.  xxi. 


MACCABÉES.  —  XV.  -   LETTRE  DU   CONSUL   ROMAIN 


14/ 


iî.  Venit  autem  Numenius,  et  qui  cum  eo  fuerant,  ab 
urbe  Roma,  habentes  epistolas  regibus  et  regionibus 
scriptas,  in  quibus  continebantur  haec  : 

16.  Lucius, consul  Romanorum,Ptolemaeo  régi,  salutem. 

17.  Legati  Judajorum  venerunt  ad  nos  amici  nostri, 
rénovantes  pristinam  amicitiam  et  societatem,  missi  a 
Simone,  principe  sacerdotum,  et  populo  Judasorum 

18.  Attulerunt  autem  et  clypeum  aureum  mnarum  mille. 

19.  Placuit  itaque  nobis  scribere  regibus  et  regionibus, 
ut  non  inférant  illis  mala,  neque  impugnent  eos,  et  civi- 
tates  eorum,  et  regiones  eorum  ;  et  ut  non  ferant  auxi- 
lium  pugnantibus  adversus  eos. 

20.  Visum  autem  est  nobis  accipere  ab  eis  clypeum. 

21.  Si  qui  ergo  pestilentes  refugerunt  de  regione  ipso- 
rum  ad  vos,  tradite  eos  Simoni,  principi  sacerdotum,  ut 
vindicet  in  eos  secundum  legem  suam. 

22.  Hasceadem  scripta  sunt  Demetrio  régi,  et  Attalo, 
et  Ariarathi,  et  Arsaci, 

2;.  Et  in  omnes  regiones;  et  Lampsaco,  et  Spartiatis, 
et  in  Delum,  et  in  Myndum,  et  in  Sycionem,et  in  Cariam, 
et  in  Samum,  et  in  Pamphyliam,  et  in  Lyciam,  et  in  Ali- 
carnassum,  et  in  Coo,  et  in  Siden,  et  in  Aradon,  et  in 
Rhodum,  et  in  Phaselidem,  et  in  Gortynam,  et  Gnidum, 
et  Cyprum,  et  Cyrenen. 


iç.  Cependant  Numenius  et  ceux  qui  avaient  été  avec 
lui,  !x  Rome,  en  revinrent  avec  des  lettres  écrites  aux 
rois  et  aux  divers  peuples,  lesquelles  contenaient  ce  qui 
suit  : 

16.  Lucius,  consul  des  Romains,  à  Ptolémée,  roi,  salut. 

17.  Les  ambassadeurs  des  Juifs,  nos  amis,  sont  venus 
vers  nous,  envoyés  par  Simon, prince  des  prêtres,  et  par 
le  peuple  des  Juifs,  pour  renouveler  l'ancienne  alliance 
et  amitié  qui  est  entre  nous. 

18.  Ils  ont  aussi  apporté  un  bouclierd'or  de  millemines. 

19.  Nous  avons  donc  résolu  d'écrire  aux  rois  et  aux 
peuples, qu'ils  ne  leur  fassent  aucun  mal;qu'ils  n'attaquent 
ni  eux,  ni  leurs  villes,  ni  leur  pays,  et  qu'ils  ne  donnent 
aucun  secours  à  ceux  qui  leur  font  la  guerre. 

20.  Or,  nous  avons  cru  devoir  recevoir  le  bouclier 
qu'ils  ont  apporté. 

21.  Si  donc  quelques  gens  corrompus  sont  sortis  de 
leur  pays  pour  se  réfugier  vers  vous,  remettez-les  entre 
les  mains  de  Simon,  prince  des  prêtres,  afin  qu'il  en  fasse 
la  punition  selon  la  loi. 

22.  Ils  écrivirent  ces  mêmes  choses  au  roi  Démétrius, 
à  Attale,  à  Ariarathe,  àArsace, 

2;.  Et  dans  tous  les  pays  qui  leur  étaient  alliés  ;  à 
Lampsaque,  aux  Lacédémoniens,  à  Délos,  à  Myndos,  à 
Sicyone.  en  Carie,  à  Samos,  en  Pamphylie.  en  Lycie,  à 
Halicarnasse,  à  Coo,  à  Siden,  à  Aradon,  à  Rhodes,  à 
Phasélides,  à  Gortyne,  à  Gnide,  en  Chypre  et  à  Cyrène. 


COMMENTAIRE 


belle-sœur,  indignée  de  ce  que  Démétrius  Ni- 
cator,  son  époux,  avait  épousé  Rhodogune,  fille 
du  roi  des  Parthes(i).Les  troupes  qui,  jusqu'alors, 
étaient  demeurées  attachées  au  parti  de  Tryphon, 
vinrent  en  foule  se  soumettre  à  Antiochus  ;  il 
composa  une  armée  de  cent  vingt  mille  hommes 
de  pied,  et  de  huit  mille  chevaux,  avec  lesquels  il 
battit  Tryphon,  le  chassa  de  la  haute  Syrie,  et 
alla  l'assiéger  dans  Dora,  ville  maritime  de  Pales- 
tine, au  midi  du  mont  Carmel,  où  il  s'était  jeté. 
Voyez  plus  haut,  chapitre  xm,  20. 

f.  16.  Lucius,  consul  Romanorum.  Ce  Lucius 
était,  selon  les  uns  (2),  Lucius  Melellus  Calvus, 
ou  Lucius  F urius  Philus.  Ou,  selon  Usserius  (3), 
Lucius  Calpurnius  Piso,  qui  eut  pour  collègue 
Lucilius  Popilius  Lœnas,  qui  fut  envoyé  cette 
même  année  en  Espagne,  contre  la  ville  de  Nu- 
mance.  Plolémée,  à  qui  est  adressée  la  lettre  du 
consul,  est  Ptolémée  Évergète  II,  ou  Physcon. 

y.22.\\j£C  EADEM  SCRIPTA  SUNT  DEMETRIO  REGI. 

Ils  écrivirent  ces  mêmes  choses  au  roi  Démétrius 
Nicator,  nonobstant  qu'il  fût  alors  captif  chez  les 
Parthes  ;  mais  les  lettres  furent  remises  à  Antio- 
chus, son  frère. 

Attalo.  A  Attale,  roi  de  Pergame,  surnommé 
Philadelphe,  qui  établit  le  peuple  romain  héritier 
de  son  royaume. 


Ariarathi.  A  Ariarathe,  roi  de  Cappadoce  (4). 

Arsaci.  A  Arsace, roi  des  Parthes;  c'est  le  mê- 
me que  Mithridate,  dont  on  a  déjà  parlé,  qui 
retenait  alors  prisonnier  Démétrius  Nicator. 

$.  2j.  Lampsaco.  A  Lampsaque,  célèbre  dans 
la  Mysie  sur  l'Hellespont,  alors  ville  libre  (^).  Le 
grec  lit  (6):  Sampsamé,  ou  Sampsacé.  On  connaît 
Samsa  dans  l'Arabie,  et  Samphé  dans  la  Phénicie  ; 
mais  il  faut  s'en  tenir  à  la  Vularate. 

Delum.  Ile  célèbre  de  la  mer  Egée,  connue 
par  son  temple  d'Appollon,  et  par  l'importance 
de  son  commerce,  après  la  ruine  de  Carthage. 

Myndum.  Ile  de  Carie,  avec  un  bon  port. 

Sicyonem.  Ville  très  ancienne  dans  l'Achaïe, 
avec  un  port  sur  le  golte  de  Corinthe. 

In  Cariam.  En  Carie.  Province  maritime  de 
l'Asie  mineure.  Cette  indication  paraît  une  répé- 
tition avec  Mindos,  mais  la  Carie  avait  d'autres 
villes  plus  considérables  que  ce  port  de  mer. 

Samum.  Ile  très  puissante  alors,  et  libre,  près 
des  côtes  de  l'Asie  mineure. 

Pamphyliam.  Province  maritime  d'Asie  mi- 
neure, comprenant  la  Pisidie  et  l'Isaurie. 

Lyciam.  La  Lycie  estvoisine  de  la  Pamphylie  ; 
les  Romains  l'ôtèrent  aux  Rhodiens,  et  lui  rendi- 
rent sa  liberté  (7). 


(1)  Appian.  Srriac.  p.  ija.  -  Justin,  xxxvi. 

(2)  Drus.  Grot. 

(J)  lia  et  Salian.  Menoch.  etc. 
(4)  Vide  Justin.  I.  xxxv. 


(5)  Vide   Livium.  I.  xxxm.  et  xliii.  Elle    avait  favorisé 
les  Romains  contre  Antiochus  le  Grand. 

(6)  Sa[jnJ;âu.r],  vel  Sau.tj/âxr].  Srr.  Samsane. 

(7)  Livius.  I.  xliv. 


148 


I. 


MACCABEES. 


XV.-   MAUVAISE   FOI    D'ANTIOCHUS 


24.  Exemplum  autem  eorum  scripserunt  Simoni,  prin- 
cipi  sacerdotum,  et  populo  Judxorum. 

2Ç.  Antiochus  autem  rex  applicuit  castra  in  Doram 
secundo,  admovens  ci  semper  manus,  et  machinas  faciens  ; 
et  conclusit  Tryphonem,  ne  procederet. 

26.  Et  misit  ad  eura  Simon  duo  milla  virorum  electo- 
rum  in  auxilium,  et  argentum,  et  aurum,  et  vasa  copiosa; 

27.  Et  noluit  ea  accipere,  sed  rupit  omnia  quee  pactus 
est  cum  eo  antea,  et  aliehavit  se  ab  eo. 


24.  Les  Romains  envoyèrent  une  copie  de  ces  lettres  à 
Simon,  prince  des  prêtres,  et  au  peuple  des  Juifs. 

25.  Or,  le  roi  Antiochus  mit  une  seconde  fois  le  siège 
devant  Dora  et  la  serra  toujours  de  plus  près,  en  cons- 
truisant diverses  machines  ;  et  il  y  renferma  tellement 
Tryphon,  qu'il  ne  pouvait  plus  en  sortir. 

20.  Alors  Simon  envoya  à  Antiochus  un  secours  de 
deux  mille  hommes  choisis,  avec  de  l'argent  et  de  l'or, 
et  des  vases  précieux  en  grande  quantité. 

27.  Mais  il  ne  voulut  point  les  recevoir;  et  il  ne  garda 
aucun  des  articles  du  traité  qu'il  avait  fait  avec  lui  aupa- 
ravant, et  s'éloigna  tout  à  fait  de  lui. 


COMMENTAIRE 


Alicarnassum.  Ville  de  Carie,  célèbre  dans 
l'antiquité. 

Coo,  ou  mieux  Cos,île  et  ville  célèbre  de  l'Ar- 
chipel, au  sud-ouest  de  la  Carie. 

Siden.  Side,  ville  de  la  Pamphylie.  Au  lieu 
de  Siden,  il  faudrait  peut-être  lire  Sidon,  capitale 
de  la  Phénicie. 

Aradon.  Ile  près  des  côtes  de  Syrie  (1). 

Rhodum.  Ville  et  île  célèbre  par  son  colosse 
du  Soleil. 

Phaselidem.  Ville  maritime  sur  les  confins  de  la 
Lycie  et  de  la  Pamphilie.  Phisélis  était  habitée 
par  des  pirates,  et  tormait  un  district  séparé  du 
reste  des  Lyciens. 

Gortynam.  Ville  fameuse  dans  l'île  de  Crète. 
Cette  île  était  alors  indépendante  et  alliée  du 
peuple  romain. 

Gnidum.  Ville  de  Carie  dans  la  Doride. 

CYPRUM.Ile  célèbre  de  la  Méditerranée, que  sa 
position  mettait  en  contact  avec  l'Europe,  l'Asie 
mineure,  la  Syrie  et  la  Phénicie. 

Cyrenen.  Ville  et  province  de  Libye.  Il  faut  que 
dès  lors,  elle  ait  joui  de  quelque  liberté,  et  qu'elle 
ait  été  alliée  des  Romains,  quoique  dans  la  dé- 
pendance des  rois  d'Egypte. 

f.  24.  Exemplum  eorum  scripserunt  Simoni. 
Ils  envoyèrent  une  copie  de  ces  lettres  à  Simon, 
pour  lut  faire  connaître  les  égards  qu'on  avait  eus 
pour  lui. 

f.  25..  Applicuit  castra  in  Doram  secundo. 
Ce  terme  secundo  (2),  peut  signifier  qu'il  com- 
mença ce  siège  le  jour  qui  suivit  l'arrivée  des 
députés  (2);  ou  le  lendemain  de  leur  arrivée  (4)  ; 
ou  qu'enfin  il  recommença  le  siège  avec  plus 
d'ardeur  que  jamais,  ayant  été  obligé  de  l'inter- 
rompre ou  de  le  quitter  (5),  pour  des  raisons  qui 
ne  nous  sont  point  connues.  Il  ne  serait  pas  im- 
possible cependant  que  le  texte  n'eût  voulu  indi- 
quer par  là  une  seconde  parallèle  dans  les  travaux 
des  assiégeants.    Peut-être    même    l'auteur   a-t-il 


eu  en  vue  la  ville  plutôt  que  l'armée.  C'était 
peut-être  la  seconde  fois  que  Dora  était  assiégée  : 
la  première  fois  par  Tryphon  (6),  et  la  seconde 
par  Antiochus,  en  cet  endroit. 

jL  26.  Misit  ad  eum  Simon  duo  millia  viro- 
rum. Simon  lui  envoya  un  secours  de  deux  mille 
hommes  choisis,  qu'il  ne  voulut  pas  recevoir.  Josè- 
phe(;)  semble  dire  le  contraire;  il  raconte  qu'An- 
tiochus  étant  occupé  au  siège  de  Dora,  envoya 
des  ambassadeurs  à  Simon,  pour  lui  demander 
son  amitié,  et  des  vivres  pour  ses  troupes.  Simon 
accorda  volontiers  au  roi  tout  ce  qu'il  lui 
demandait,  et  lui  envoya  des  vivres  et  de  l'argent  ; 
mais  Antiochus  oublia  bientôt  les  obligations 
qu'il  avait  au  grand  prêtre.  11  envoya  contre  lui 
Cendébée  avec  des  troupes.  Cet  historien  ne 
parle  pas  de  la  députation  d'Antiochus  vers 
Simon.  Voyez  le  verset  28. 

Lorsque  Dieu  veut  humilier  un  prince,  il  l'aban- 
donne à  son  propre  orgueil,  afin  que  sa  chute  soit 
d'autant  plus  redoutable,  qu'il  se  sera  plus  élevé. 
On  en  voit  ici  un  grand  exemple  en  la  personne 
d'Antiochus.  Sa  fierté  et  sa  perfidie  le  firent  tom- 
ber à  la  fin  dans  une  très  grande  confusion.  Rien 
ne  l'avait  obligé  de  faire  à  Simon,  comme  on  le 
voit  au  commencement  de  ce  chapitre,  toutes  ces 
avances,  qui  semblaient  tendre  à  affermir  une 
paix  solide  entr'eux  ;  ni  de  lui  promettre  tant  de 
choses  avantageuses,  soit  pour  lui-même  ou  pour 
tous  les  Juifs,  soit  pour  le  temple.  Il  lui  était 
libre  de  ne  point  lui  témoigner  cet  empressement 
à  relever  la  gloire  du  peuple  de  Dieu.  Mais  de 
rompre  tout  d'un  coup  ces  bons  procédés,  de  se 
moquer  des  paroles  qu'il  avait  données  pour 
marquer  sa  vénération  pour  le  temple,  et  de  se 
porter,  sans  autre  raison  que  celle  de  son  ambi- 
tion, à  s'éloigner  tout  à  fait  du  grand  prêtre,  dans 
le  temps  même  qu'il  lui  donnait  les  plus  fortes 
preuves  de  son  attachement;  c'était  insulter  en 
même  temps  à  Dieu  et  aux  hommes,  c'était  faire 


(1)  Voyez  Gcnes.  x.  18. 

(2)  Ilapsve'SaXEv  in:  Aiopa  e'v  t?/  SEurepa. 
(j)  Grotius. 

iv4)  Drusius. 


(5)  Lyran. 

(6)  1.  Macc.  xm.  20. 

(7)  Joseph.  Antiq.  t.  xm.  c.  12.  Il^u.7tei  ?:pô;    £iu,a)va. 
rcepi  «piXia;  xal  au|j.jj.a^iaç  r.piiÇxii,  etc. 


I. 


MACCABÉES. 


XV.-   MISSION   D'ATHENOBIUS 


H9 


28.  Et  misit  ad  eum  Athenobium,  unum  de  amicis  suis, 
ut  tractaret  cum  ipso,  dicens  :  Vos  tenetis  Joppen,  et 
Gazaram,  et  arcem  quae  est  in  Jérusalem,  civitates  regni 
mei. 

29.  Fines  earum  desolastis,  et  fecistis  plagam  magnam 
in  terra,  et  dominati  estis  per  loca    multa  in  regno  meo. 

;o.  Nunc  ergo  tradite  civitates  quas  occupastis,  et  tri- 
buta  locorum  in  quibus  dominati  estis  extra  fines  Judaeae. 

51.  Sin  autem,  date  pro  illis  quingenta  talenta  argenti, 
et  exterminii  quod  exterminastis,  et  tributorum  civitatum 
alia  talenta  quingenta;  sin  autem,  veniemus,  et  expugna- 
bimus  vos. 

?:.  Et  venit  Athenobius,  amicus  régis,  in  Jérusalem,  et 
vidit  gloriam  Simonis,  et  claritatem  in  auro  et  argento, 
et  apparatum  copiosum,  et  obslupuit  ;  et  retulit  ei  verba 
régis. 

H-  Et  respondit  ei  Simon,  et  dixit  ei  :  Neque  alienam 
terram  sumpsimus,  neque  aliéna  detinemus;  sed  heredi- 
tatem  patrum  nostrorum,  quae  injuste  ab  inimicis  nostris 
aliquo  tempore  possessa  est. 

J4.  Nos  vero  tempus  habentas,  vindicamus  heredita- 
tem  patrum  nostrum. 

;$.  Nam  de  Joppe  et  Gazara  quas  expostulas,  ipsi 
faciebant  in  populo  plagam  magnam,  et  in  regione  nos- 
tra  ;  horum  dainus  talenta  centum.  Et  non  respondit  ei 
Athenobius  verbum. 

;6.  Reversus  autem  cum  ira  ad  regem,  renuntiavit  ei 
verba  ista,  et  gloriam  Simonis,  et  universa  quae  vidit;  et 
iratus  est  rex  ira  magna. 

57.  Tryphon  autem  fugit  navi  in  Orthosiada. 


28.  Antiochus  envoya  ensuite  Athenobius,  l'un  de  ses 
confidents,  pour  traiter  avec  Simon,  et  lui  dire  de  sa 
part  :  Vous  avez  entre  vos  mains  Joppé,  Gazara,  et  la 
forteresse  de  Jérusalem,  qui  sont  des  villes  de  mon 
royaume. 

20.  Vous  en  avez'désolé  tous  les  environs  ;  vous  avez 
fait  un  grand  ravage  dans  le  pays,  et  vous  vous  êtes  rendu 
maître  de  beaucoup  de  lieux  qui  étaient  de  ma  dépendance. 

50.  Rendez  donc  maintenant  les  villes  que  vous  avez 
prises,  et  les  tributs  des  lieux  où  vous  avez  dominé  hors 
des  frontières  de  la  Judée. 

jl.  Ou  payez,  pour  les  villes  que  vous  retenez,  cinq 
cents  talents  d'argent  ;  et  pour  les  dégâts  que  vous  avez 
faits,  et  les  tributs  des  villes,  cinq  cents  autres  talents 
d'argent  :  autrement  nous  viendrons  a  vous,  et  vous  trai- 
terons comme  ennemis. 

52.  Athenobius.  favori  du  roi.  vint  donc  à  Jérusalem  : 
il  vit  la  gloire  de  Simon,  l'or  et  l'argent  qui  brillaient 
chez  lui  de  toutes  parts,  et  la  magnificence  de  sa  maison, 
et  il  en  fut  fort  surpris  :  ii  lui  rapporta  ensuite  les  paroles 
du  roi. 

j  j.  Et  Simon  lui  répondit  en  ces  termes  :  Nous  n'avons 
point  usurpé  le  pays  d'un  autre,  et  nous  ne  retenons 
point  le  bien  d'autrui  ;  mais  nous  avons  seulement  repris 
l'héritage  de  nos  pères  qui  avait  été  possédé  injustement 
par  nos  ennemis  pendant  quelque  temps. 

J4.  Ainsi  le  temps  nous  ayant  été  favorable,  nous  nous 
sommes  remis  en  possession  de  l'héritage  de  nos  pères. 

?$.  Pour  ce  qui  est  des  plaintes  que  vous  faites  tou- 
chant Joppé  et  Gazara,  c'étaient  elles-mêmes  qui  cau- 
saient beaucoup  de  maux  parmi  le  peuple  et  dans  notre 
pays  :  cependant  nous  sommes  prêts  à  donner  pour  ces 
villes  cent  talents.  Athénobiusne  lui  répondit  pas  un  mot. 

56.  Mais  il  retourna  tout  en  colère  vers  le  roi  :  il 
lui  rapporta  cette  réponse  de  Simon,  la  magnificence  où 
il  était,  et  tout  ce  qu'il  avait  vu,  et  le  roi  en  fut  extraordi- 
nairement  irrité. 

J7-  Cependant  Tryphon  s'enfuit,  par  le  moyen  d'un 
vaisseau,  à  Orthosiade. 


COMMENTAIRE 


connaître  que,  s'il  avait  recherché  d'abord  l'ami- 
tié de  ce  grand  prêtre  des  Juifs,  la  crainte  seule 
de  sa  puissance  l'y  avait  porté  ;  l'orgueil  de  sa 
récente  victoire  sur  Tryphon  son  ennemi,  lui 
inspirait  cette  rupture  et  cette  honteuse  infidé- 
lité. Mais  quand  orgueil  chemine  devant,  misère 
suit  après,  dit  un  vieux  proverbe.  Une  défaite 
imprévue  renversa  en  un  moment  tous  les  grands 
desseins  qu'Antiochus  avait  formés  contre  cette 
nation,  dont  Dieu  même  s'était  déclaré  le  protec- 
teur. 
f.  28.  Vos  tenetis  Joppen,  et   Gazaram,  et 

ARCEM   QUjE     EST    IN     JERUSALEM.     Pour   Joppé    et 

Gazara  ou  plutôt  Gadara,  comme  parle  l'édition 
de  Bâle,  voyez  le  chapitre  xiv,  versets  >.  7.  La 
forteresse  de  Jérusalem  avait  été  cédée  à  Simon, 
par  Démétrius  Soter  (1),  en  l'an  160  des  Séleu- 
cides,  152  avant  Jésus-Ghrist.  Mais  la  cession 
n'eut  point  d'effet  alors;  Simon  ne  s'en  rendit  le 
maître  que  l'an  171  des  Séleucides,  142  avant 
Jésus-Christ  (2). 


y.  30.  Tributa  locorum,  in  quibus  dominati 
estis  extra  fines  JuDMM.  Les  Iribuls  des  diffé- 
rents lieux  où  vous  ave\  dominé,  hors  des  fron- 
tières de  la  Judée  ;  par  exemple  les  trois  toparchies 
démembrées  de  la  Galilée,  de  la  Samarie  et  de 
la  Pérée,  les  villes  de  Gaza  et  de  Gadara,  et  les 
autres  lieux  que  Simon  avait  réunis  à  la  Judée. 
Antiochus  demande  qu'on  lui  restitue  ces  villes,  ou 
qu'onluidonne  cinqcents  talents,  soit  2.78o.ooofr. 
en  prenant  le  talent  attique. 

j.  31.  Et  exterminii  quod  exterminastis,  et 
tributorum  civitatum  alia  talenta  quingenta. 
Quant  au  dégât  fait  dans  les  villes  de  Bethsura,  de 
Gaza,  de  Joppé  et  autres  domaines  du  roi,  Antio- 
chus demande  encore  cinq  cents  talents. 

y.  p.  Claritatem  in  auro  et  argento.  Le 
grec  (])  :  //  vil  le  buffet  couvert  de  vases  d'or  et 
d'argent,  et  un  service  proportionné,  des  serviteurs 
en  grand  nombre,  ou  des  meubles  en  quantité. 

y.  37.  Tryphon  fugit  navi  in  Orthosiada. 
Cette   ville    était   dans   la    Phénicie,   entre   l'île 


(i)  1.  Macc.  x.  ?2. 
(2)  1.  Macc.  xiii.  51. 


(})  KuXixsîov  [*età  ^,-uacDi.i.accov,   xa'i    «pYupwu.âtoJV,    xat 
napâatastv  ï*avr)v. 


150 


I.  —  MACCABÉES.  —  XV.  -   EXPÉDITION    DE  CENDÉBÉE 


38.  Et  constituit  rex  Cendebaeum  ducem  maritimum,  et 
exercitum  peditum  et  equitum  dédit  illi. 

39.  Et  mandavit  illi  movere  castra  contra  faciem  Judaeaî) 
et  mandavit  ei  asdificare  Gedorem,  et  obstruere  portas 
civitatis,  et  debellare  populum.  Rex  autem  persequeba- 
tur  Tryphonem. 

40.  Et  pervenit  Cendebaeus  Jamniam,  et  cccpit  irritare 
plebem,  et  conculcare  Judaeam,  et  captivare  populum,  et 
inlerficere,  et  aedificare  Gedorem. 

41.  Et  collocavit  illic  équités,  et  exercitum,  ut  egressi 
perambularent  viam  Judasae,  sicut  constituit  ei  rex. 


38.  Et  le  roi  Antiochus  donna  à  Cendébée  le  comman- 
dement de  toute  la  côte  de  la  mer,  avec  une  armée 
composée  d'infanterie  et  de  cavalerie. 

39.  Et  il  lui  ordonna  de  marcher  contre  !a  Judée,  de 
fortifier  Gédor,  de  boucher  les  portes  de  la  ville,  et  de 
réduire  le  peuple  par  la  force  de  ses  armes  :  quant  au 
roi,  il  alla  poursuivre  Tryphon. 

40.  Cendébée  étant  arrivé  à  Jamnia,  commença  à  vexer 
le  peuple,  à  ravager  la  Judée,  à  faire  un  grand  nombre 
de  prisonniers,  à  en  tuer  d'autres,  et  à  fortifier  Gédor. 

4t.  Il  y  mit  de  la  cavalerie  et  des  gens  de  pied,  pour 
faire  des  courses  dans  le  pays  de  la  Judée,  selon  que  le 
roi  le  lui  avait  commandé. 


COMMENTAIRE 


d'Arade  et  Tripoli.  D'Orthosiade,  ou  cCOrlho- 
sie,  Tryphon  s'enfuit  à  Apamée,  sa  patrie,  dans  la 
vallée  de  l'Oronte,  où  il  avait  beaucoup  d'amis 
et  de  correspondance.  Frontin  (1)  raconte  que, 
pour  arrêter  les  soldats  d'Antiochus,  qui  le  pour- 
suivaient dans  sa  marche,  il  sema  beaucoup  d'ar- 
gent dans  le  chemin.  Apamée  fut  assiégée  et  prise 
de  force,  et  Tryphon  mis  à  mort  la  cinquième 
année  de  son  règne  ou  de  son  usurpation  (2). 
Strabon  assure  qu'il  s'enferma  dans  un  château, 
où  il  fut  contraint  de  se  donner  la  mort,  pour  se 
dérober  à  la  vengeance  de  son  ennemi  (3). 

y.  38.  Constituit  rex  Cendeba;um  ducem  ma- 
ritimum. Antiochus  donna  à  Cendébée  le  com- 
mandement de  toute  la  côte  de  la  mer.  Le  jeune 
Antiochus,    fils  d'Alexandre    Balas,    avait  donné 


auparavant  ce  gouvernement  à  Simon  (4),  et  il  en 
avait  été  en  possession  jusqu'alors. 

p.  39.  Gedorem.  Ville  delà  Palestine, aux  envi- 
rons de  Jamnia  et  d'Azot  ($).  Le  grec  lit  Cedron 
et  le  syriaque  Hebron.  Le  mot  œdificare  ne  si- 
gnifie pas  toujours  bâtir,  mais  il  est  souvent  pris, 
en  parlant  des  villes,  dans  le  sens  de  reconstruire, 
fortifier. 

Obstruere  portas  civitatis.  Le  grec  lit  sim- 
plement (6)  -.Fortifier  les  portes,  les  munir  de 
tours,  et  de  défenses,  les  armer  de  fer,  de  barres 
et  de  bonnes  serrures.  Quelques  auteurs  (7)  l'en- 
tendent des  défilés  :  garder,  ou  fortifier  les  défi- 
lés; l'on  sait  que  ce  nom  de  portes  leur  est  sou- 
vent donné  dans  les  historiens  ;  le  manuscrit 
alexandrin  porte  (8),  fortifier  des  villes. 


(1)  Frontin.  Stratag.  t.  11.  c.  13. 

(2)  Vaill.  hist.  Reg.  Syr.  p.  294.   295 
/.  xiii.  c.  12. 

(3)  Strabo.  tib.  xiv.  —  (4)  1.  Macc.  xi.  ^9. 


(<i)  Voyez  Josue  x».  ;8.  -  1.  Paralip. 

Joseph.    Aniiq.  (6)  O'y  ucoiaai  toc;  rciAà;.  ita  Syr. 

(7)  Grotius. 

(8)  O'yupcôiai  toc;  r.okti;. 


J9- 


CHAPITRE    XVI 

Guerre  de  Cendébée  contre  les  Juifs.  Il  est  mis  en  fuite  par  les  fils  de  Simon.  Simon  est 
tué  par  Ptolémée  son  gendre.  Jean  Hyrcan  succède  à  Simon  son  père. 


i.  Et  ascendit  Joannes  de  Gazaris,  et  nuntiavit  Simoni, 
patn  suo,  quas  fecit  Cendebasus  in  populo  ipsorum. 

2.  Et  vocavit  Simon  duos  filios  seniores,  Judam  et 
Joannem,  et  ait  illis  :  Ego, et  fratres  mei,et  doraus  patris 
mei,  expugnavimas  hostes  Israël  ab  adolescentia  usque 
in  hune  diem;  et  prosperatum  est  in  manibus  nostris 
liberare  Israël  aliquoties. 

}.  Nunc  autem  senui,  sed  estote  loco  meo,  et  fratres 
mei,  et  egressi  pugnate  pro  gente  nostra;  auxilium  vero 
de  cœlo  vobiscum  sit. 

4.  Et  elegit  de  regione  viginti  millia  virorum  belligera- 
torum  et  équités  ;  et  profecti  sunt  ad  Cendebasum,  et 
dormierunt  in  Modin. 

5.  Et  surrexerunt  mane,  et  abierunt  in  campum  ;  et  ecce 
exercitus  copiosus  in  obviam  illis  peditum  et  equitum,  et 
lluviiis  torrens  erat  inter  médium  ipsorum. 

6.  Et  admovit  castra  contra  faciem  eorum  ipse,  et 
populus  ejus;  et  vidit  populum  trepidantem  ad  transfre- 
tandum  torrentem,  et  transfretavit  primus;  et  viderunt 
eum  viri,  et  transierunt  post  eum. 

7.  Et  divisit  populum,  et  équités  in  medio  peditum; 
erat  autem  equitatus  adversariorum  copiosus  nimis. 


1.  Jean  étant  venu  de  Gazara,  avertit  Simon,  son  père, 
de  tout  ce  que  Cendébée  avait  fait  contre  leur  peuple. 

2.  Et  Simon  ayant  fait  venir  ses  deux  fils  aînés,  Judas 
et  Jean,  il  leur  ait  :  Nous  avons  battu,  mes  frères  et  moi, 
et  la  maison  de  mon  père,  les  ennemis  d'Israël,  depuis 
notre  jeunesse  jusqu'à  ce  jour  ;  et  les  affaires  ayant 
réussi  sous  notre  conduite,  nous  avons  délivré  Israël 
diverses  fois. 

;.  Me  voilà  maintenant  devenu  vieux  ;  mais  prenez  ma 
place  :  tenez-moi  lieu  de  frères,  et  allez  combattre  pour 
notre  peuple  ;  je  prie  Dieu  qu'il  vous  envoie  son  secours 
du  ciel. 

4.  Après  cela,  il  choisit  de  tout  le  pays  vingt  mille 
hommes  de  pied,  et  de  la  cavalerie  ;  et  ils  marchèrent 
contre  Cendébée,  et  reposèrent  à  Modin. 

5.  Et  s'étant  levés  dès  la  pointe  du  jour,  ils  se  rendi- 
rent dans  la  plaine  ;  et  il  parut  tout  d'un  coup  une  grande 
armée  de  gens  de  pied  et  de  cheval,  qui  marchait  contre 
eux,  et  un  torrent  séparait  les  deux  armées. 

6.  Jean  fil  avancer  ses  troupes  vers  eux  ;  et  voyant 
que  ses  gens  craignaient  de  passer  le  torrent,  il  le  passa 
le  premier  :  ce  que  ses  troupes  ayant  vu,  elles  le  passè- 
rent après  lui. 

7.  Il  divisa  son  infanterie  en  deux  corps,  et  mit  au 
milieu  sa  cavalerie  :  quant  aux  ennemis,  ils  avaient  une 
cavalerie  très  nombreuse. 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Ascendit  Joannes  de  Gazaris.  Jean 
Hyrcan,  fils  du  grand  prêtre  Simon,  qui  avait  été 
envoyé  par  son  père  à  Gazara,  ou  Gadara,  pour 
gouverner  en  son  nom,  et  pour  garder  la  côte  de 
Palestine  (1),  vint  à  Jérusalem  rapporter  les  dé- 
gâts que  Cendébée  faisait  dans  ce  pays.  Cha- 
pitre précédent,  versets  40,  41. 

f.  2.  Ego,  et  fratres  mei,  et  domus  patris 
mei,  'expugnavimus  hostes  Israël.  Le  grec  du 
ms.  alexandrin  et  le  syriaque  (2)  :  Nous  avons 
soutenu,  mes  frères  et  moi,  et  la  maison  de  mon 
père,  les  guerres  d'Israël.  Voyez  chapitre  xiv, 
verset  26. 

î.  3.  Nunc  autem  senui,  sed  estote  loco 
meo,  et  fratres  mei.  Le  grec  (3)  et  le  syriaque  : 
Me  voilà  maintenant  devenu  vieux  ;  pour  vous, -par 
la  miséricorde  de  Dieu,  vous  êtes  asse?  en  âge, 
pour  faire  la  guerre,  prene\  ma  place,  et  celle  de 
mon  frère.  Il  parle   de    son    frère   Jonathas,   qui 


avait   été    malheureusement   tué    dans  le   temps 
qu'ils  gouvernaient  ensemble. 

f.  4.  Dormierunt  in  Modin. Ce  fut  une  grande 
sagesse  de  la  part  de  Simon,  d'engager  ses  fils, 
de  son  vivant,  à  le  remplacer  dans  la  lutte  entre- 
prise pour  la  gloire  du  Seigneur  et  pour  le  salut 
d'Israël.  Il  était  vieux,  et  il  craignait  "que,  si  ses 
enfants  attendaient  après  sa'mortà  prendrela  con- 
duite des  armées,  ils  fussent  moins  en  état  alors 
de  résister  à  leurs  ennemis.  Il  voulait  donc  qu'ils 
s'accoutumassent  de  bonne  heure  à  les  vaincre,  et 
à  protéger  leur  peuple  ;  afin  que  sa  mort,  quand 
elle  serait  arrivée,  ne  pût  préjudicier  à  la  sûreté 
de  sa  nation.  Il  paraît  que  ce  fut  là  sa  véritable  pen- 
sée; car,  quoiqu'il  fût  avancé  en  âge,  il  ne  laissait 
pas  d'avoir  encore  de  la  vigilance  et  delà  vigueur, 
comme  on  le  verra  dans  la  suite.  Il  pouvait  com- 
battre encore,  s'il  n'avait  songé  à  former  ses  fils 
et   à   asseoir   d'une    manière   incontestable   leur 


(1)  1.  Macc.  xiii.  54. 

(;)  E'::eXE[j.7J!jau.Ev  toù;  JtoXÉ|j.ou;  I'apa'-;).. 


(})  Nùv  oè  YEYrJpaxa,   xat  Ofj.=T;  ÔÊ  Èv  tû  ÉXs'et  Ixavol   serte 
îv  tôt;    ïxstsi.  TiveÔe  ave'  £,uoC,  xal  toù  aScXçou  u,ou. 


1)2 


I. 


MACCABEES. 


XV!.-   DEFAITE  DE  CENDEBÉE 


8.  Et  exclamaverunt  sacris  tubis,  el  in  fugam  conver- 
sus  est  Cendebeeus,  et  castra  ejus  ;  et  ceciderunt  ex  eis 
multi  vulnerati,  residui  autem  in  munitionem  fugerunt. 

<).  Tune  vulneratus  est  Judas,  frater  Joannis;  Joannes 
autem  insecutus  est  eos,  donec  venit  Cedronem,  quam 
asdificavit. 

10.  Et  fugerunt  usque  ad  turres  quae  erant  in  agris  Azoti, 
et  succendit  eas  igni;  et  ceciderunt  ex  illis  duo  millia 
virorum  ;  et  reversus  est  in  Judaeam  in  pace. 

il.  Et  Ptolemseus,  filius  Abobi,  constitutus  erat  dux  in 
campo  Jéricho,  et  habebat  argentum  et  aurum  multum  ; 

12.  Erat  enim  gêner  summi  sacerdotis. 

ij.  Et  exaltatum  est  cor  ejus;  et  volebat  obtinere 
regionem,  et  cogitabat  dolum  adversus  Simonem,  et  filios 
ejus,  ut  tolleret  eos. 


8.  Mais,  dans  le  moment  où  l'on  eut  fait  retentir  les 
trompettes  sacrées,  Cendébée  prit  la  fuite  avec  toutes 
ses  troupes  :  plusieurs  furent  blessés  et  tués  ;  et  le  reste 
s'enfuit  dans  la  forteresse. 

0.  Judas,  frère  de  Jean,  fut  blessé  en  cette  occasion  ; 
et  Jean  poursuivit  les  ennemis,  jusqu'à  ce  qu'il  arriva  à 
Cédron,  que  Cendébée  avait  fortifiée. 

io.  Et  ils  s'enfuirent  jusqu'aux  tours  qui  étaient  dans  la 
campagne  d'Azot  ;  et  Jean  fit  brûler  ces  tours  ;  et  il  y 
eut  deux  mille  ennemis  qui  furent  tués  :  ensuite  Jean 
retourna  heureusement  en  Judée. 

il.  Or  Ptolémée,  fils  d'Abobus,  avait  été  établi  gou- 
verneur de  la  plaine  de  Jéricho  ;  et  il  avait  beaucoup 
d'or  et  d'argent. 

12.  Car  il  était  le  gendre  du  grand  prêtre. 

i?.  Et  son  cœur  s'éleva  d'orgueil  :  il  voulait  se  rendre 
maître  de  tout  le  pays  ;  et  il  cherchait  quelque  moyen 
de  se  défaire  par  trahison  de  Simon  et  de  ses  fils. 


COMMENTAIRE 


autorité  sur  la  nation.  Le  pouvoir  se  transmettait 
ainsi  sans  secousse,  et  les  Juifs,  habitués  à  obéir, 
ne  s'apercevaient  pas  de  la  mort  du  vieillard. 

f.  8.  Sacris  tubis.  La  plupart  des  exemplaires 
grecs,  et  le  syriaque  lisent  simplement,  les  trom- 
pettes. Mais  l'édition  romaine  porte  :  les  trompettes 
sacrées;  ce  sont  celles  dont  les  prêtres  sonnaient 
dans  les  armées,  conformément  à  la  loi  (i). 

Ces  trompettes  étaient  d'argent,  et  on  les  nom- 
mait les  trompettes  sacrées,  parce  qu'elles  avaient 
été  faites  par  Tordre  de  Dieu,  pour  appe- 
ler le  peuple  à  l'entrée  du  Tabernacle,  et 
parce  que  c'étaient  les  prêtres  et  les  enfants 
d'Aaron  qui  en  sonnaient.  Les  prêtres  étaient  les 
seuls  qui  en  eussent  l'usage,  même  à  la  guerre, 
et  Dieu  y  avait  attaché  ses  bénédictions.  Si  vous 
sorle\,  leur  dit  il,  pour  aller  à  la  guerre  contre  vos 
ennemis  qui  combattent  contre  vous,  vous  fere\  re- 
tentir bruyamment  ces  trompettes,  el  le  Seigneur 
voire  Dieu  se  souviendra  de  vous,  pour  vous  déli- 
vrer des  mains  de  vos  ennemis.  Le  son  des  trom- 
pettes sacrées  était  donc  comme  un  signal  dont  il 
avait  plu  à  Dieu  de  convenir  avec  son  peuple, 
pour  le  secourir  au  moment  où  elles  sonneraient. 
Ce  n'était  pas  qu'il  eût  besoin  de  ce  son  pour  se 
souvenir  d'Israël;  mais  il  obligeait  plutôt  le  peu- 
ple à  se  souvenir,  lorsqu'il  entendait  sonner  ces 
trompettes,  que  c'était  de  Dieu  qu'il  devait  atten- 
dre tout  son  secours,  afin  que  cet  humble  sou- 
venir lui  fit  mériter  d'être  effectivement  secouru. 
Ainsi  lorsque  nous  lisons,  qu'au  moment  où  ion 
eut  fait  retentir  les  trompettes  sacrées,  Cendébée 
s'enfuit  avec  toutes  ses  troupes,  nous  concevons 
aussitôt  que  Dieu,  en  accomplissant  sa  promesse, 
donnait  une  nouvelle  preuve  aux  Israélites,  que 
c'était  lui,  et  non  eux,  qui  avait  mis  tous  leurs 
ennemis  en  fuite. 


In  munitionem  fugerunt.  Le  reste  se  sauva 
dans  la  forteresse  de  Gédor,  que  Cendébée  avait 
fait  bâtir,  chapitre  xv,  versets   39.   40. 

jk  9.  Donec  venit  Cedronem.  Jusqu'à  ce  qu'il 
arriva  à  Cédron,  ou  plutôt  à  Gédron  ou  Gédor 
dont  on  vient  de  parler  ;  on  a  déjà  vu  la  même 
faute  dans  le  grec,  au  chapitre  xv,  19. 

y.  10.  Fugerunt  usque  ad  turres  quje  erant 
in  agris  Azoti.  Une  partie  des  fuyards  se  jetè- 
rent dans  les  redoutes,  ou  dans  de  petits  forts 
qu'on  avait  faits  dans  la  campagne  pour  y  placer 
des  sentinelles,  ou  les  gardes  avancées  de  l'ar- 
mée (2).  Il  paraît  que  les  tours  étaient  de  bois, 
puisque  Jean  les  brûla. 

v.  1  l-I  2.PTOLEM/EUS...GENERSUMMISACERDOTIS. 

Ptolémée,  gendre  du  grand  prêtre,  c'est-à-dire,  de 
Simon.  Ce  Ptolémée  ne  se  contenta  point  du 
gouvernement  de  la  plaine  de  Jéricho,  qui  lui 
avait  été  confié  par  Simon;  il  prétendit  parvenir 
au  gouvernement  de  toute  la  Judée,  en  assassi- 
nant le  grand  prêtre  et  en  appelant  à  son  secours 
les  Syriens,  qui  ne  demandaient  qu'une  occasion, 
pour  recouvrer  la  souveraineté  de  la  Judée. 

y.  13.  Et  exaltatum  est  cor  ejus...  Simon 
autem,  etc.  On  peut  remarquer  ici  deux  conduites 
bien  opposées  l'une  à  l'autre,  et  deux  hommes  ani- 
més de  deux  esprits  bien  différents  :  l'un  enflé 
d'orgueil,  ne  songeant  qu'à  son  intérêt  particulier; 
et  l'autre,  rempli  d'amour  pour  sa  patrie,  ne  s'ap- 
pliquant  qu'à  procurer  le  bien  commun  ;  l'un, 
ingrat  envers  celui  dont  il  avait  épousé  la  fille,  et 
enivré  de  la  cruelle  ambition  de  déposséder  son 
beau  père,  de  le  tuer,  et  de  s'emparer  de  son 
pays  ;  l'autre,  plein  de  reconnaissance  envers 
Dieu  et  Israël,  qui  l'avaient  choisi  pour  chef  et 
grand  prêtre,  et  tout  occupé  du  soin  de  veiller  à 
la  sûreté  et  au  soulagement  de  ses  villes  ;   enfin, 


|i)  Num.  x.  8.  9.-  Dcut.  xx.  2.  -  n.  Par.  xxix.  26. 


(2)   Vide  Gret.  hic. 


MACCABEES. 


XVI.-  ASSASSINAT  DE  SIMON 


'5? 


14.  Simon  autem  perambulans  civitates  quas  erant  in 
regionem  Judœae,  et  sollicitudinem  gerens  earum,  des- 
cendit in  Jéricho  ipse,  et  Mathathias,  filius  ejus,  et  Judas, 
anno  centesimo  septuagesimo  septimo,  mense  undecimo, 
hic  est  mensis  sabath. 

15.  Et  suscepit  eos  filius  Abobi  in  munitiunculam,  quas 
vocaïur  Doch,  cum  dolo,  quam  asdificavit,  et  fecit  eis 
convivhim  magnum,  et  abscondit  illic  viros. 

16.  Et  cum  inebriatus  esset  Simon,  et  filii  ejus,  surrexit 
Ptolemasus  cum  suis,  et  sumpserunt  arma  sua,  et  intra- 
verunt  in  convivium,et  occiderunteuin,  et  duos  filios  ejus, 
et  quosdam  pueros  ejus. 

17.  Et  fecit  deceptionem  magnam  in  Israël,  et  reddidit 
mata  pro  bonis. 

18.  Et  scripsit  ha?c  Ptolemasus,  et  misit  régi,  ut  mitte- 
ret  ei  exercitum  in  auxilium,  et  traderet  ei  regionem,  et 
civitates  eorum,  et  tributa. 


14.  Simon  faisait  alors  la  visite  des  villes  qui  étaient 
dans  le  pays  de  la  Judée,  et  avait  un  grand  soin  d'y  régler 
toutes  choses.  Étant  arrivé  à  Jéricho,  lui  et  ses  deux  fils 
Matthathias  et  Judas,  Tan  cent  soixante-dix-septième  et 
le  onzième  mois  appelé  Sabath, 

i;.  Le  fils  d'Abobus  les  reçut  avec  un  mauvais  des- 
sein, dans  un  petit  fort  qu'il  avait  fait  bâtir,  appelé  Doch  ; 
et  il  leur  fit  un  grand  festin,  ayant  caché  auparavant 
plusieurs  hommes  en  ce  lieu. 

16.  Après  donc  que  Simon  et  ses  fils  eurent  fait  grande 
chère,  Ptolémée  se  levaavec  ses  gens,  et  ayant  pris  leurs 
armes,  ils  entrèrent  dans  la  salle  du  festin,  et  tuèrent 
Simon,  ses  deux  fils  et  quelques-uns  de  ses  serviteurs. 

17.  Il  causa  une  grande  déception  dans  Israël,  et  ren- 
dit le  mal  pour  le  bien. 

18.  Ptolémée  écrivit  ceci  au  roi,  et  lui  demanda  de  lui 
envoyer  une  armée  pour  le  secourir,  promettant  de  lui 
livrer  le  pays  avec  toutes  les  villes,  et  de  lui  payer  un 
tribut. 


COMMENTAIRE 


l'un  en  proie  à  tous  les  excès  où  l'orgueil  est 
capable  de  précipiter  l'homme  qui  s'y  abandonne  ; 
et  l'autre  en  qui  le  Seigneur  faisait  éclater  la  cha- 
rité et  la  vigilance  infatigables  des  vrais  pasteurs 
de  son  peuple.  Si  Dieu  permit  que  l'orgueil  et 
l'ambition  monstrueuse  de  Ptolémée  triomphât 
de  la  bonne  foi  et  de  la  candeur  de  Simon, 
c'est  qu'il  voulut  faire  voir,  comme  en  tanl  d'au- 
tres occasions,  que  cette  vie  temporelle  est  peu 
de  chose,  puisqu'elle  expose  tous  les  jours  ses 
serviteurs  à  la  perdre  par  la  violence  des  mé- 
chants. 

,v.  14.  Mensis  Sabath.  Le  mois  de  Schebalh  était 
le  onzième  de  l'année  sainte  et  le  cinquième  de 
l'année  civile  ;  il  correspondait  à  janvier,  avec  une 
partie  de  février  selon  la  lunaison  (135  a°s  avant 
Jésus-Christ). 

y.  1  v  In  munitiunculam  qu^e  vocatur  Doch. 
Josèphe  l'appelle  Dagon  (1)  ;  c'était  une  forte- 
resse près  de  Jéricho. 

i.  16.  Cum  inebriatus  esset  Simon.  Les  com- 
mentateurs (2)  remarquent  avec  raison  que,  dans 
le  langage  des  Hébreux,  l'expression  inebriari 
ne  marque  pas  toujours  cette  action  honteuse  que 
nous  appelons  s'enivrer.  Ce  verbe  ne  signifie  par- 
fois autre  chose  que  faire  bonne  chère,  boire 
librement  mais  sans  excès  (}).  Inebriatio  pro  saiie- 
tale,  disent  saint  Jérôme  et  saint  Augustin. 

OcCIDERUNT   EUM,    ET    DUOS     FILIOS     EJUS.     J  0- 

sèphe  (4)  dit  que  Ptolémée  fut  assiégé  dans  la  for- 
teresse de  Doch,  au-dessus  de  Jéricho,  par  Jean 
Hyrcan,  fils  de  Simon.    Pour  paralyser  son   cou- 


rage, il  faisait  cruellement  battre  à  coups  de  fouet 
sur  les  murailles,  la  mère  de  Jean  et  ses  deux 
frères,  lorsque  les  assiégeants  voulaient  donner 
l'assaut  à  la  forteresse.  La  compassion  de  Jean 
et  l'inhumanité  de  Ptolémée  furent  cause  que  le 
siège  tira  en  longueur.  L'année  sabbatique  étant 
commencée,  Hyrcan  fut  obligé  de  lever  le  siège, 
et  Ptolémée  se  retira  chez  Zenon,  surnommé 
Cotyla,  tyran  de  Philadelphie,  après  avoir  fait 
mourir  la  mère  et  les  deux  frères  de  Jean  Hyrcan 
qui,  à  son  égard,  par  son  mariage  avec  une  fille 
de  Simon,  étaient  sa  belle-mère  et  ses  beaux- 
frères.  Selon  cet  historien,  il  faudrait  dire  qu'il 
n'y  eut  que  Simon  de  tué  à  Doch,  et  que  Ptolé- 
mée réserva  Matthathias  et  Judas,  fils  de  Simon, 
jusqu'après  le  siège  de  Doch.  Mais  Salien  et 
Usher  montrent  que  le  récit  de  Josèphe  est  fabu- 
leux et  ne  s'accorde,  ni  aux  circonstances  du 
temps,  ni  à  celles  des  personnes  {<,).  L'Écriture 
dit  ici  expressément  que  Ptolémée  fit  tuer  en 
même  temps  Simon  et  ses  deux  fils,  et  on  a 
de  fortes  raisons  de  le  soupçonner  de  n'avoir 
commis  ce  parricide,  qu'avec  la  participation 
d'Antiochus,  roi  de  Syrie,  et  sur  l'assurance  d'être 
fait  gouverneur  du  pays  après  la  mort  de  Simon. 
Toute  la  suite  favorise  cette  conjecture. 

y.  17.  Fecit  deceptionem  magnam  in  Israël. 
Le  syriaque  :  //  fil  un  grand  crime  dans  Israël  (6). 

y.  18.  Et  traderet  ei  regionem.  Promellant 
de  lui  livrer  le  pays,  de  lui  en  remettre  la  sou- 
veraineté (7),  pourvu  que  lui,  Ptolémée,  en  eût  le 
gouvernement,  sous  la  charge  de  payer  le  tribut. 


(1)  Joseph.  Antiq.  xm.  15. 

(2)  Lrr.  Vatab.  Tir.  Grot.  Drus,  alii  passim. 

(?)  Voyez  Gènes,  xliu.  54.  -  Agge.  1.  6.  -  Eccli.  1.  14.  - 
Joann.  11.   10. 
(4)  Joseph.  Antiq.  I.  xm.  c.  14.  15.  et  de  Belto.  I.  1.  c.  2. 


(5}  Salian.  ad  an.  joio.  §.  5.  6.  7.  et  J920.  §.  $.  6.  Usser. 
ad  an  j86q. 

(6)  lia  Vatab.  Badwel. 

(7)  Joseph.  Antiq.  I.  xm.  14. 


ï$4 


I.  —   MACCABEES.  —  XVI.  -  JEAN    HYRCAN 


19.  Et  misit  alios  in  Gazaram  tôlière  Joannem;  et  tri- 
bunis  misit  epistolas,  ut  venirent  ad  se,  et  daret  eis 
argentum  etaurum,  et  dona. 

20.  Et  alios  misit  occupare  Jérusalem,  et  montem  tem- 
pli. 

21.  Et  prascurrens  quidam,  nuntiavit  Joanni  in  Gazara, 
quia  periit  pater  ejus,  et  fratres  ejus,  et  quia  misit  te 
quoque  interfici. 

22.  Ut  audivit  autem,  vehementer  expavit,  et  compre- 
liendit  viros  qui  vénérant  perdere  eum,  et  occidit  eos  : 
cognovit  enim  quia  quserebant  eum  perdere. 

2j.  Et  cetera  sermonum  Joannis,  et  bellor-im  ejus,  et 
bonarum  virtutum  quibus  fortiter  gessit,  et  œdificii  muro- 
rum  quos  exstruxit,  et  rerum  gestarum  ejus  : 

24.  Ecce  hœc  scripta  sunt  in  libro  dierum  sacerdotii 
ejus,  ex  quo  tactus  est  princeps  sacerdotum  post  patrem 
suum. 


19.  Il  envoya  en  même  temps  d'autres  soldats  à 
Gazara,  pour  tuer  Jean  :  et  il  écrivit  aux  officiers  de 
l'armée  de  venir  se  joindre  à  lui,  et  recevoir  de  l'argent 
et  de  l'or,  et    plusieurs  présents  qu'il  voulait  leur  faire. 

20.  Il  en  envoya  encore  d'autres  pour  se  rendre  maî- 
tres Je  Jérusalem,  et  de  la  montagne  du  temple. 

21.  Mais  un  homme  les  ayant  prévenus,  arriva  à  Gazara, 
et  avertit  Jean  que  son  père  et  ses  frères  avaient  été  tués 
par  Ptolémée,  et  qu'il  avait  envoyé  des  gens  pour  le 
tuer  aussi  lui-même. 

22.  Cette  nouvelle  l'effraya  extrêmement  :  il  fit  arrêter 
ceux  qui  venaient  pour  le  perdre,  et  les  fit  mourir,  car 
il  reconnut  qu'ils  avaient  dessein  de  le  tuer. 

2j.  Le  reste  de  la  vie  de  Jean,  ses  guerres,  les  grandes 
actions  qu'il  fit  avec  un' courage  extraordinaire,  le  soin 
qu'il  eut  de  rebâtir  les  murailles,  et  enfin  tout  ce  qu'il 
fit  pendant  son  gouvernement, 

24.  Est  écrit  au  livre  des  annales  de  son  sacerdoce, 
depuis  qu'il  fût  établi  prince  des  prêtres  en  la  place  de 
son  père. 


COMMENTAIRE 


jÊ.  19.  In  Gazaram  tollere  Joannem.  Josèphe 
raconte  que  Jean  Hyrcan,  après  avoir  fait  arrêter 
et  mettre  à  mort  ceuxque  Ptolémée  avait  envoyés 
pour  l'assassiner,  alla  promptement  à  Jérusalem, 
où  il  entra,  en  même  temps  que  Ptolémée,  qui 
se  présenta  à  une  autre  porte,  qui  lui  fut  fermée. 
Jean  prit  possession  delà  souveraine  sacrificature 
et  fut  reconnu  prince  de  la  nation,  en  la  place  de 
Simon  ;  et,  après  avoir  offert  des  sacrifices,  il 
marcha  contre  Ptolémée  et  l'assiégea  dans  la  for- 
teresse de  Doch,  comme  on  Ta  dit  plus  haut. 


f.  24.  Ecce  h^ec  scripta  sunt  in  libro  dierum 
sacerdotii  ejus.  Depuis  que  les  grands  prêtres 
furent  en  possession  du  gouvernement,  on  fit  à 
leur  égard,  ce  qu'on  avait  fait,  avant  la  captivité, 
pour  les  rois  de  Juda  et  d'Israël  ;  on  écrivit  des 
Annales,  de  tout  ce  qu'ils  faisaient  de  mémorable 
et  de  tout  ce  qui  arrivait  dans  la  nation.  C'est 
dans  ces  sources  que  Josèphe  a  puisé  un  grand 
nombre  des  documents  qu'il  reproduit,  et  le  récit 
des  événements  qu'il  raconte. 


LIVRE     DEUXIEME 


CHAPITRE    PREMIER 

Lettre  des  Juifs  de  Judée  à  ceux  d'Egypte,  pour  leur  recommander  de  célébrer  la  fêle  de 
la  nouvelle  dédicace  du  temple.  Autre  lettre  antérieure  à  la  précédente.  Les  Juifs  de 
Judée  exhortent  ceux  d' Egypte  à  célébrer  avec  eux  la  fête  de  la  nouvelle  dédicace 
du  temple  et  celle  du  recouvrement  du  feu  sacré. 


i.  Fratribus,  qui  sunt  per  /Esyptum,  Judasis,  salutem 
dicunt  Iratres,  qui  sunt  in  Jerosolymis,  Judasi,  et  qui  in 
regione  Judaeœ,  et  pacem  bonam. 

2.  Benefaciat  vobis  Deus,  et  meminerit  testamenti  sui 
quod  locutus  est  ad  Abraham,  et  Isaac,  et  Jacob,  servo- 
rum  suorum  fidelium  ; 

!.  Et  det  vobis  cor  omnibus,  ut  colatis  eum,  et  facia- 
tis  ejus  voluntatem  corde  magno,  et  animo  volenti. 

4.  Adaperiat  cor  vestrum  in  lege  sua,  et  in  prasceptis 
suis,  et  faciat  pacem  ; 


1.  Les  Juifs  qui  sont  dans  Jérusalem  et  dans  le  pays 
de  Judée,  aux  Juifs  leurs  frères  qui  sont  répandus  dans 
l'Egypte,  salut  et  heureuse  paix. 

2.  Que  Dieu  vous  comble  de  biens  ;  qu'il  se  souvienne 
de  l'alliance  qu'il  a  faite  avec  Abraham,  Isaac  et  Jacob, 
ses  fidèles  serviteurs. 

?.  Qu'il  vous  donne  à  tous  un  cœur,  afin  que  vous  l'ado- 
riez, et  que  vous  accomplissiez  sa  volonté  avec  un  cœur 
vraiment  grand,  et  un  esprit  plein  d'ardeur. 

\.  Qu'il  ouvre  votre  cœur  à  sa  loi  et  à  ses  préceptes, 
et  qu'il  vous  donne  la  paix. 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Fratribus,  qui  sunt  per  .tEgyptum,  Ju- 
d^eis.  On  voit  par  les  deux  lettres  qui  sont  rap- 
portées dans  ce  chapitre,  que  les  Juifs  de  Jérusalem 
et  de  la  Judée  entretenaient  une  correspondance 
suivie  avec  ceux  de  l'Egypte  ;  on  peut  remarquer 
la  même  chose  par  la  conclusion  qui  se  lit  à  la  fin 
du  livre  d'Esther  dans  le  grec  (1).  11  ne  paraît 
pas  qu'ils  aient  eu  les  mêmes  liaisons  et  les  mê- 
mes égards  pour  les  autres  Juifs  des  provinces 
éloignées  ;  peut-être  parce  qu'ils  n'étaient  point 
en  si  grand  nombre,  ni  si  près  que  ceux  de 
l'Egypte. 

f.  5.  Det  vobis  cor  omnibus.  Ils  avaient  sans 
doute  un  cœur  ;  mais  c'était  un  cœur  humain,  un 
cœur  charnel,  un  cœur  étroit  et  inanimé,  inca- 
pable par  lui-même  d'adorer  Dieu,  et  de  l'aimer 
d'une  manière  digne  de  lui.  Il  leur  fallait  donc 
un  autre  cœur,  qui  fût  grand,  spirituel  et  plein 
d'ardeur,  afin  qu'ils  pussent  accomplir  sa  volonté, 
et  l'adorer  en  vérité  et  en  esprit.  Or  il  n'y  avait 
que  Dieu  qui  pût  leur  donner  ce  cœur  :  et  c'est-là 
le  plus  grand  don  qu'il  fasse  aux  hommes,  puisque 
c'est  lui  qui  les  rend  dignes  de  l'aimer,  et  d'être 
en   même   temps   aimés  de  lui.  C'était   donc  ce 


cœur  que  les  Juifs  de  Jérusalem  souhaitaient  que 
Dieu  donnât  à  leurs  frères,  aux  Juifs  qui  demeu- 
raient en  Egypte. 

jh  4.  Adaperiat  cor  vestrum  in  lege  sua,  et 

IN   PR.CCEPTIS   SUIS,  ET    FACIAT   PACEM.  Qu'il    VOUS 

donne  la  paix  ;  ou  qu'il  vous  comble  de  biens  et  de 
prospérités.  Ces  Juifs  d'Egypte  se  flattaient  en 
quelque  sorte  d'observer  la  loi  de  Dieu,  en  lui 
immolant  des  victimes,  et  en  lui  offrant  des  sacri- 
fices. Ils  s'étaient  même  imaginé  que  le  temple 
bâti  dans  cette  terre  étrangère  servirait  à  réunir 
tous  les  Juifs  qui  y  demeuraient,  en  les  rassem- 
blant dans  un  même  lieu,  pour  célébrer  les  louan- 
ges du  Seigneur (2).  Ils  s'appuyaient  sur  cette 
prédiction  mal  entendue  du  prophète  Isaïe,  qu  il 
y  aurait  dans  V  Egypte  un  autel  consacré  à  Dieu  (3). 
Leur  cœur  était  donc  fermé  à  sa  loi  et  à  ses  pré- 
ceptes :  et  c'était  leur  propre  orgueil  et  leurs  dif- 
férentes passions  qui  le  tenaient  ainsi  fermé,  en 
l'empêchant  de  découvrir  la  vérité,  ou  au  moins 
de  s'y  soumettre.  C'est  pourquoi  les  Juifs  de  Jéru- 
salem, touchés  de  zèle  pour  le  salut  de  leurs  frères, 
priaient  Dieu  qu'il  daignât  ouvrir  leur  cœur  à  sa 
loi  et  à  ses  préceptes  ;  en  leur   en  faisant  pénétrer 


(1)  Esllier.  xi.  1.  in  Vulg. 


(2)  Joseph.  Antiq.  lib.  xm.  c.  6.  —  (5)  Isai.  ix.  9. 


Ho 


II. 


MACCABEES.—   I.  -  CORRESPONDANCE   DES  JUIFS 


Ç.  Exaudiat  orationes  vestras,  et  reconcilietur  vobis, 
nec  vos   deserat  in  tempore  malo. 

6.  Et  nunc  hic  sumus  orantes  pro  vobis. 

7.  Régnante  Demetrio,  anno  centesimo  sexagesimo 
nono,  nos  Judasi  scripsimus  vobis  in  tribulatione,  et  im- 
petu  qui  supervenit  nobis  in  istis  annis,  ex  quo  recessit 
Jason  a  sancia  terra  et  a  regno. 


5.  Qu'il  exauce  vos  prières,  qu'il  se  réconcilie  avec 
vous,  et  qu'il  ne  vous  abandonne  point  dans  le  temps 
mauvais. 

6.  Quant  à  nous,  nous  sommes  maintenant  occupés  ici 
à  prier  pour  vous. 

7.  Sous  le  règne  de  Démétrius,  l'an  cent  soixante-neu- 
vième, nous  vous  écrivîmes,  nous  autres  Juifs,  dans 
l'affliction  et  dans  l'accablement  des  maux  qui  nous  étaient 
survenus  pendant  ces  années,  depuis  que  Jason  se  fut 
retiré  de  la  terre  sainte  et  du  royaume. 


COMMENTAIRE 


le  sens  véritable,  ou  en  les  leur  faisant  accomplir. 
Car  si  c'était  un  malheur  pour  eux  de  ne  pas  con- 
naître la  volonté  du  Seigneur,  c'en  eût  été  un 
plus  grand  encore  de  ne  pas  l'accomplir,  après 
l'avoir  connue. 

jh  5.  Exaudiat  orationes  vestras,  et  recon- 
cilietur  vobis.  Les  prières  des  Juifs  fixés  en 
Egypte  ne  pouvaient  être  que  désagréables  à  Dieu, 
tant  qu'ils  les  offraient  dans  un  temple  bâti  contre 
son  précepte,  tant  qu'ils  ne  se  réunissaient  point 
avec  leurs  frères,  en  reconnaissant  pour  seul  tem- 
ple celui  de  Jérusalem.  Lors  donc  que  les  Juifs 
de  Jérusalem  souhaitent  que  Dieu  exauce  les 
prières  de  ces  autres  Juifs,  ils  (ont  connaître  le 
grand  désir  qu'ils  avaient  de  voir  leurs  frères  réu- 
nis avec  eux  en  un  seul  temple,  l'unique  où  Dieu 
exauçât  les  prières  de  son  peuple.  Qu'il  se  récon- 
cilie avec  vous,  ajoutent-ils,  c'est-à-dire,  qu'il  vous 
regarde  d'un  œil  favorable,  en  rompant  ce  mur 
de  séparation  qui  est  entre  son  sanctuaire  et  vous; 
afin  que  vous  méritiez  ensuite  qu'i/  ne  vous  aban- 
donne point  dans  le  temps  mauvais.  Car  qu'est-ce 
qu'un  peuple  qui,  en  s'éloignant  de  Dieu  par  ses 
crimes,  s'est  rendu  digne  d'être  abandonné  de  lui 
dans  le  temps  où  ses  ennemis  ont  reçu  le  pouvoir 
de  l'affliger  et  de  l'accabler  ?  Et  qu'est-ce  qu'une 
âme  qui  ne  s'est  point  réconciliée  avec  son  Dieu, 
et  qui  mérite  de  n'être  point  exaucée  dans  le  temps 
mauvais,  lorsque  l'ennemi  de  son  salut  la  persé- 
cute et  la  pousse,  selon  la  parole  d'un  prophète  t  •■  \ 


leur  salut,  comme  ils  la  sentent  pour  la  leur  pro- 
pre. C'est  là  un  admirable  esprit  de  charité  digne 
du  christianisme.  «  Si  les  marchands  traversent  les 
terres  et  les  mers,  disait  autrefois  saint  Jean  Chry- 
sostôme,  pour  s'enrichir  de  plus  en  plus  ;  si  les 
artisans  se  tuent  pour  ajouter  quelque  chose  au 
peu  de  bien  qu'ils  ont  ;  comment  nous  autres, 
pouvons-nous  être  assez  lâches  pour  nous  con- 
tenter de  nous  sauver  seuls  ;  puisque  nous  hasar- 
dons notre  propre  salut  si  nous  n'avons  soin  de 
celui  des  autres  ?  » 

jL  7.  Régnante  Demetrio,  anno  centesimo 
sexagesimo  nono.  L'auteur  du  second  livre  des 
Maccabées,  marque  la  date  des  événements, 
d'après  l'ère  des  Séleucides,  de  même  que  l'auteur 
du  livre  précédent.  Mais  le  premier  commence 
ses  années  au  mois  de  Nisan  (mars),  et  l'auteur 
du  second  les  commence  en  Thischri  (septembre); 
de  là  vient  que  leurs  dates  ne  paraissent  pas  tou- 
jours se  rencontrer.  Démétrius,  roi  de  Syrie,  dont 
l'auteur  parle  ici,  est  Démétrius  Nicator. 

In  tribulatione,  et  impetu.  Le  grec(2):  Dans 
V affliction,  et  dans  la  pointe  qui  est  venue  sur  nous; 
c'est-à-dire,  dans  le  fort  de  nos  afflictions;  quand 
notre  douleur  était  la  plus  vive  et  la  plus  sensible; 
ou  enfin  dans  les  premières  attaques  de  nos  maux. 
Cette  description  ne  convient  pas  au  temps  de  Dé- 
métrius Nicator,  mais  à  celui  de  la  persécution 
d'Antiochus  Épiphane.  Les  Juifs  de  Judée  rappel- 
lent ici  une  première  lettre,  que  nous  n'avons  plus, 


dans  des  lieux  glissants  et  au  milieu  des  ténèbres,      et  qui  fut  écrite  à  ceux  d'Egypte,  quand  sévis 


de  précipice  en  précipice  ?  Mais  quel  est  l'état 
sans  comparaison  plus  effroyable  de  cette  àme 
même  lorsque,  sortant  de  ce  monde  sans  ce  gage 
de  sa  réconciliation,  elle  se  voit  tout  d'un  coup 
abandonnée  de  son  Dieu  dans  ce  temps  vraiment 
mauvais,  où  il  n'y  a  plus  aucune  espérance,  et 
qui  est  le  commencement  de  son  malheur  éternel } 
jh  6.  Et  nunc  hic  sumus  orantes  pro  vobis. 
Tel  est  l'exercice  continuel  de  la  charité  des  jus- 
tes. Ils  ne  prient  pas  seulement  pour  eux-mêmes; 
mais  ils  regardent  véritablement  tous  leurs  frères 
comme  les  membres  du  corps  mystique  de 
l'Église,  ils   sentent  une  sainte    inquiétude  pour 


sait  la  persécution  d'Antiochus  Épiphane.  Celle- 
ci  ne  fut  envoyée  qu'environ  trente-huit  ans  après, 
en  l'an  169  des  Séleucides.  Dom  Calmet  propose 
de  joindre  cette  date  à  ce  qui  précède,  de  la  sorte  : 
verset  6.  Quant  à  nous,  nous  sommes  occupés  à 
prier  pour  vous,  à  présent,  en  Vannée  169  des  Sé- 
leucides, sous  le  règne  de  Démétrius  Nicator.  Il 
est  bien  certain  que  la  date  ne  peut  tomber  sur  ce 
qui  suit.  La  persécution  ne  durait  plus  sous  Dé- 
métrius, et  Jason  n'était  plus  en  vie. 

Ex  quo  recessit  Jason  a  sancta  terra  et  a 
regno.  Josèphe  (3)  raconte  qu'après  la  mort  du 
grand   prêtre  Onias,   la   souveraine    sacrificature 


(1)  Psalm.  xxxi v.  6. 


(2)  E'v  tf)  GXIiJ/é;,  xo'i  év  tt)  owu.fj  xf)  ÉJuXOoôar]  î)u.iv. 
(5)  Joseph.  Antiq.  t.  XIII.  c.  6. 


II.  —   MACCABÉES.  —   I.  -  CORRESPONDANCE   DES  JUIFS 


'57 


8.  Portam  succenderunt,  et  effuderunt  sanguinem  inno- 
centem  ;  et  oravimus  ad  Dominum,  et  exauditi  suraus,  et 
obtulimus  sacrificium,  et  similaginem,  et  accendimus 
lucernas,  et  proposuimus  panes. 

9.  Et  nunc  frequentate  dies  scenopegiae  mensis  casleu. 

10.  Anno  contesimo  octogesimo  oclavo,  populus  qui 
est  Jerosolymis,  et  in  Judaea,  senatusque  et  Judas,  Aris- 
tobolo,  magistro  Ptolemasi  régis, qui  est  de  génère  chris- 
torum  sacerdotum,  et  his  qui  in  /Egypto  sunt  Judasis, 
salutem  et  sanitatem. 


8.  Ils  brûlèrent  la  porte  du  temple,  et  ils  répandirent 
le  sang  innocent.  Nous  priâmes  le  Seigneur  et  nous  fûmes 
exaucés  ;  nous  offrîmes  le  sacrifice  accoutumé,  et  les 
offrandes  de  fleur  de  farine  ;  nous  allumâmes  les  lampes, 
et  nous  exposâmes  les  pains  devant  lui. 

9.  Célébrez  donc  maintenant  la  fête  des  tabernacles  du 
mois  de  Casleu. 

io.  L'an  cent  quatre-vingt-huitième. 

1-e  peuple  qui  est  dans  Jérusalem  et  dans  la  Judée,  le 
sénat  et  Judas,  à  Anstobule  précepteur  du  roi  Ptolémée, 
de  la  race  des  prêtres  sacrés,  et  aux  Juifs  qui  sont  en 
Egypte,  salut  et  prospérité. 


COMMENTAIRE 


lut  déférée  à  Jason  son  frère  ;  mais  le  roi  (sans 
doute  le  roi  d'Egypte,  à  qui  la  Judée  obéissait 
alors),  ayant  conçu  quelque  mécontentement  con- 
tre Jason,  le  déposa,  et  mit  en  sa  place  Onias, 
son  frère  cadet,  qui  prit  le  nom  de  Ménélaùs. 
Jason,  irrité  de  la  préférence  qu'on  avait  donnée  à 
Ménélaùs,  souleva  le  peuple,  et  se  mit  à  la  tête 
d'un  puissant  parti,  qui  obligea  Ménélaùs  et  ses 
adhérentsàseretirerauprès  d'Antiochus  Épiphane, 
et  de  lui  demander  sa  protection.  Mais  le  même 
historien  parle  ailleurs  (i)d'une  manière  bien  diffé- 
rente, de  la  succession  d'Onias  III.  Il  dit 
qu'AntiochusEpiphane  le  déposa  de  la  souveraine 
sacrificature,  et  donna  cette  dignité  à  Jason,  frère 
d'Onias,  moyennant  la  somme  de  trois  mille  six 
cent  soixante  talents  par  an,  que  Jason  s'engagea 
de  lui  payer.  Enfin  l'auteur  de  ce  second  livre 
des  Maccabées  parle  encore  de  cet  événement, 
d'une  manière  assez  éloignée  de  Josèphe.  Il  ra- 
conte (2)  que  Jason,  frère  du  grand  prêtre  Onias, 
ayant  conçu  le  dessein  d'usurper  la  souveraine 
sacrificature,  s'adressa  à  Antiochus  Épiphane,  à 
qui  il  promit,  pour  le  prix  de  cette  dignité,  trois 
cent  soixante  talents  d'argent,  et  quatre-vingt 
talents  pour  d'autres  revenus,  plus  cent  cinquante 
talents,  si  on  lui  donnait  pouvoir  d'établir  à  Jéru- 
salem un  gymnase  pour  la  jeunesse,  et  de  donner 
aux  habitants  de  Jérusalem  le  titre  de  citoyens 
d'Antioche.  Il  obtint  du  roi  tout  ce  qu'il  deman- 
dait, et  n'omit  rien  pour  se  rendre  agréable  à  ce 
prince.  Cependant  il  ne  put  conserver  longtemps 
une  dignité,  dans  laquelle  il  était  entré  d'une  fa- 
çon si  peu  régulière.  Ménélaùs,  son  frère,  sut 
gagner  l'esprit  d'Antiochus,  et  obtint  le  souverain 
pontificat,  sous  la  promesse  d'une  plus  grande 
somme  d'argent.  11  n'est  pas  aisé  sans  doute 
d'accorder  ces  divers  récits;  mais  comme  Josèphe 
n'est  pas  d'accord  avec  lui-même,  il  y  a  beaucoup 
d'apparence  qu'il  n'a  pas  été  parfaitement  informé 
de  cet  événement  ;  ainsi  l'on  doit  s'attacher  uni- 
quement à  ce  que  nous  apprend  l'auteur  de  ce 
livre.    Ce  qu'il  dit  dans  ce   verset,    que   Jason 


quitta  la  terre  Sainte  et  le  royaume,  marque  la  con- 
duite irrégulière  et  séditieuse  de  ce  grand  prêtre, 
qui,  au  lieu  d'attendre  la  mort  naturelle  de  son 
frère,  pour  lui  succéder,  selon  les  lois  du  pays, 
s'adresse  à  un  prince  étranger,  à  Antiochus  Épi- 
phane, roi  de  Syrie,  pour  obtenir  de  lui  le  souve- 
rain pontificat,  dans  le  temps  que  les  rois  d'Egypte 
étaient  les  souverains  de  la  Judée.  Le  royaume 
qu'il  quitte  est  donc  le  royaume  â!  Egypte,  que 
l'auteur  appelle  simplement  le  royaume,  parce 
qu'il  écrit  aux  Juifs  d'Egypte.  Le  syriaque  porte: 
Depuis  que  Jason  et  les  siens  furent  envoyés  de  la 
part  du  royaume  dans  la  terre  Sainte. 

f.  8.  Obtulimus  sacrificium,  et  similaginem. 
Après  que  Judas  Maccabée  eût  purifié  le  temple, 
on  y  offrit  les  sacrifices  ordinaires  du  soir  et  du 
matin  (3),  et  tous  les  autres  sacrifices,  tant  d'obli- 
gation que  de  dévotion.  Les  offrandes  de  pure 
farine,  sont  nommées  en  hébreu  nn:a  Minhah, 
et  on  comprend  sous  ce  terme,  les  offrandes  de 
grains, de  gâteau  et  de  diverses  manières  de  farine 
et  de  gruaux. 

f.  9.  Frequentate  dies  scenopegiae  mensis 
casleu.  C'est  la  fête  du  renouvellement,  ou  de 
la  nouvelle  purification  du  temple,  par  Judas 
Maccabée  (4)  ;  elle  se  fit  le  25  du  mois  de  Casleu, 
qui  répond  à  novembre,  et  elle  dure  huit  jours.. 
On  l'appelle  ici,  la  fête  des  Tabernacles  du  mois 
de  Casleu,  parce  qu'on  lu  célébra  à  peu  près  avec 
les  mêmes  cérémonies  que  la  fête  des  Taberna- 
cles, en  portant  des  branches  de  perdure  et  de  pal- 
mier, comme  il  est  marqué  plus  bas  (5).  Se  sou- 
venant qu'ils  avaient  passé, peu  de  temps  auparavant, 
la  fêle  solennelle  des  Tabernacles  sur  les  monta- 
gnes et  dans  les  cavernes,  où  ils  vivaient  comme 
les  bêles.  On  sait  que  la  vraie  fête  des  Taberna- 
cles se  célébrait  au  mois  de  Thischri  (octobre). 
Le  grec  de  l'édition  de  Complute  lit  (6)  :  Afin 
que  vous  célébriez  aussi  la  fêle,  comme  celle  des 
Tabernacles. 

f.  10.  Anno  centesimo  octogesimo  octavo. 
«   D'après  la   ponctuation   de   nos  éditions  »,  dit 


(1)  Lib.  de  Maccab.  c.  4. 

(2)  11.  Macc.  îv.  7.  et  seq. 
(j)  1.  Macc.  iv.  56. 


(4)  1.  Macc.  iv.  52. 

1,5)  11.  Macc.  x.  6.  7. 

(6)  r'voc  -/.ai  âuTOt  â-(i\\e  <1>;  <7/i7)v07:7|y!.'aç. 


i58 


II.  --   MACCABÉES.  —  I.  -  CORRRSPON  DANCE   DES  JUIFS 


m.  De  magnis  periculis  a  Deo  liberali,  magnifiée  gra- 
tias  agi  mas  ipsi,  utpote  qui  adversus  talem  regem  dimi- 
cavimus. 

12.  Ipse  enim  ebullire  fecit  de  Perside  eos  qui  pugna- 
verunt  contra  nos  et  sanetam  civitatem. 

I}.  Nam  cum  in  Perside  esset  dux  ipse,  et  cum  ipso 
immensus  exercitus,  cecidit  in  templo  Naneae,  concilio 
deceptus  sacerdotum  Naneae. 

14.  Etenim  cum  ea  habitaturus  venit  ad  locum  Antio- 
chus,  et  amici  ejus,  et  ut  acciperet  pecunias  tnultas  dotis 
nomine  ; 

i^.Cumque  proposuissent  eas  sacerdotes  Naneas,  et 
ipse  cum  paucis  ingressus  esset  intra  ambitum  fani,  clau- 
serunt  templum  cum  intrasset  Antiochus  ; 


1 1.  Dieu  nous  ayant  délivrés  de  très  grands  périls,  nous 
lui  en  rendons  aussi  de  très  grandes  actions  de  grâces, 
pour  avoir  eu  la  force  de  combattre  contre  un  tel  roi. 

12.  Car  c'est  lui  qui  a  fait  sortir  de  Perse  cette  multi- 
tude de  gens  qui  ont  combattu  contre  nous  et  contre  la 
ville  sainte. 

ij.  Mais  ce  chef  de  nos  ennemis  étant  lui-môme  en 
Perse  avec  une  armée  innombrable,  a  péri  dans  le  tem- 
ple de  Nanée,  ayant  été  trompé  par  le  conseil  trauduleux 
des'prêtres  de  cette  idole. 

14.  Car  Antiochus  étant  vsnu  avec  ses  amis  au  temple 
de  cette  déesse,  pour  habiter  avec  elle,  et  pour  y  rece- 
voir de  grandes  sommes  d'argent  à  titre  de  dot. 

15.  Les  prêtres  de  Nanée  lui  montrèrent  tout  cet 
argent  ;  et  après  qu'Antiochus  fût  entré  avec  peu  de  gens 
au  dedans  du  temple,  ils  le  fermèrent  sur  lui. 


COMMENTAIRE 


M.  Vigouroux,«  la  date  donnée  II  Mac.  1,  ioa  de 
l'année  1  SB  de  l'ère  des  Séleucides,  c'est  à  dire 
Tan  1  24  avant  Jésus-Christ,  se  rapporte  à  la  let- 
tre suivante  ;  mais  comme  la  date  des  lettres  se 
met  à  la  fin,  1 1,  Mac.  xi,  21,  33,  38,  non  au  com- 
mencement, il  en  résulte  que  io"  appartient  à 
la  lettre.  C'est  l'opinion  soutenue  par  Bellar- 
min  (1).  » 

Judas  est  Judas  Maccabée  ;  Aristobule  est  un 
de  ces  nombreux  Juifs  qui  étaient  alors  en  Egypte. 
C'est  sans  doute  le  Juif  péripatéticien  qui  dédia 
à  Ptolémée  VI  Philométor  son  explication  allégo- 
rique du  Pentateuque.  L'abbé  Rupert  croit  que, 
depuis  le  règne  de  Ptolémée  Philadelphie,  qui  fit 
traduire  la  Bible  en  grec,  les  rois  d'Egypte  avaient 
coutume  de  prendre  des  précepteurs  juifs.  Il  pou- 
vait au  moins  y  en  avoir  ordinairement  quelques 
uns  de  cette  nation,  parmi  ceux  qui  étaient  pré- 
posés à  leur  éducation.  Car  la  connaissance  de  la 
langue  et  des  usages  juifs  et  syriens  était  indis- 
pensable à  des  souverains  qui  dominaient  ou  re- 
vendiquaient des  droits  sur  ces  contrées. 

f.  11.  Adversus  talem  regem.  La  plupart  des 
commentateurs  (2) l'entendent  d'Antiochus  Sidète; 
dom  Calmet  pense  que  c'est  Antiochus  Epiphane. 
Nous  préférons,  avec  M.Vigouroux,  y  voir  Antio- 
chus III,  le  Grand. 

f.  12.  Ipse  EBULLIRE  FECIT  de  Perside  eos  qui 
pugnaverunt  contra  nos.  Le  grec  (3)  :  C'est  lui 
qui  fit  fourmiller  ceux  qui  attaquèrent  la  sainte  cité. 
L'édition  romaine,  et  le  ms.  alexandrin  ne  lisent 
point  dans  ce  verset  le  nom  de  Perse.  D'autres 
éditions  portent  :  c'est  leSeigneur  quia  jeté  comme 
une  fourmillière  dans  la  Perse,  ceux  qui  attaquaient 


la  ville  sainte.  Le  Seigneur  a  obligé  Antiochus  à 
aller  avec  une  puissance  armée,  dans  le  pays  où 
il  est  mort  misérablement  (4).  D'autres  entendent 
ainsi  la  Vulgate  :  Le  même  Antiochus,  qui  a  en- 
voyé contre  nous  tant  de  troupes  de  la  Perse,  est 
lui-même  mort  dans  la  Perse  (5).  Le  nom  de 
Perse  se  prend  ici,  pour  tout  le  pays  soumis  à 
Antiochus  ;  ou  bien,  l'auteur  veut  marquer  que 
ce  prince  envoya  de  grandes  armées  dans  la 
terre  Sainte,  en  même  temps  qu'il  partit  pour  la 
Perse. 

f.  13.  Cecidit  in  templo  Nane^e.  Le  temple 
de  Nanée,  Nana  (6),  ou  Anaïs,  est  célèbre  dans 
l'antiquité.  Nous  avons  parlé  de  cette  déesse  au 
premier  livre  des  Maccabées  (7). 

jh  14.  Cum  ea  habitaturus  venit  ad  locum 
Antiochus,  et  amici  ejus,  et  ut  acciperet  pe- 
cunias multas  dotis  nomine.  C'est  ainsi  que  les 
païens  se  jouaient  de  leur  religion.  Les  prêtres 
faisaient  difficulté  de  donner  les  trésors  de  leurs 
temples  à  Antiochus  ;  ce  prince,  pour  avoir  un 
prétexte  de  les  ravir,  feignit  de  vouloir  prendre 
pour  femme  la  déesse  Nanée,  afin  de  profiter,  en 
sa  qualité  d'époux,  des  grandes  richesses  qui 
étaient  inutiles  à  la  déesse,  et  qui  seraient  deve- 
nues communes  entre  lui  et  elle,  par  ce  mariage 
prétendu.  Les  Athéniens  autrefois  ayant  choisi 
Marc-Antoine  pour  époux  à  leur  Minerve  (8),  ce 
nouveau  mari  leur  demanda  pour  la  dot  de  son 
épouse,  une  somme  de  mille  talents.  Héliogabale 
épousa  en  cérémonie  la  déesse  Uranie,  ou  Vénus 
céleste,  et  voulut  qu'on  la  lui  amenât  (9).  Cali- 
gula  eut  aussi  cette  folie,  au  rapport  de  Suétone. 
Il  invitait  la  lune  à  s'approcher  de  lui. 


(1)  Vigouroux,  Manuel  blbliq.,  11.  18 7. 

(2)  Rupert.  Médina.  Sigon.  Serar.  Tir.  Ménoch. 

(?)  A'utô;  f*P  ÉçE'Spooe  toù;  ^aparaÇaiiEvou;  sv  xî]  ay'? 
KÔXei. 

(4)  lia  Syr.  Cum  enim  venisset  in  nos  rex  ad  bellum 
contra  civitatem    sanetam  gerendum,    depulit  eum,  et  in 


Persidem  ejecit.  lia  et  Val. 

(5)  Ita  Grot.  Lyr.  Men.  Tyr. 

(6)  Smith,  Histor  oj  Assurbanipal,  p.  274, 

(7)  1.  Macc.  vi.  1. 

(8)  Senec.pater,  Suasoriar,  1.  et  Dion,  epitom.  in  Augusto- 

(9)  Xiphilin. 


II. 


MACCABÉES.  —   I.-  CORRESPONDANCE    DES  JUIFS 


IÎ9 


16.  Apertoque  occulto  aditu  templi,  mittentes  lapides, 
percusserunt  ducem  et  eos  qui  cum  eo  erant, et  diviserunt 
membratim,  et  capitibus  amputatis,  foras  projecerunt. 

i".  Per  omnia  benedictus  Deus,  qui  tradidit  imnios  ! 

18.  Facturi  igitur,  quinta  et  vigesima  die  mensis  casleu, 
purificationem  templi,  necessarium  duximus  significare 
vobis,  ut  et  vos  quoque  agatis  diem  scenopegias,  et  diem 
ignis  qui  datus  est  quando  Nehemias,  asdificato  templo, 
et  altari,  obtulit  sacrilicia. 

19.  Nam  cum  in  Persidem  ducerentur  patres  nostri, 
sacerdotes,  qui  tune  cultores  Dei  erant,  acceptum  ignem 
de  altari  occulte  absconderunt  in  valle,  ubi  erat  puteus 
altus  et  siccus,  et  in  eo  contutati  sunt  eum,  ita  ut  omni- 
bus ignotus  esset  locus. 


20.  Cum  autem  pra?terissent  anni  multi,  et  placuit  Deo 
ut  mitteretur  Nehemias  a  rege  Persidis,  nepotes  sacer- 
dotum  illorum  qui  absconderant,  misit  ad  requirendum 
ignem;  et  sicut  narraverunt  nobis,  non  invenerunt  ignem, 
sed   aquam  crassam. 

21.  Et  jussit  eos  haurire,  et  afferre  si bi  ;  et  sacrificia 
quse  imposita  erant  jussit  sacerdos  Nehemias  aspergi 
ipsa  aqua,  et  ligna,  et  quae  erant  superposita. 


16.  Alors  ouvrant  une  porte  secrète  du  temple,  ils 
l'assommèrent  à  coups  de  pierres,  lui  et  ceux  qui  l'accom- 
pagnaient; et  mettant  leurs  corps  en  pièces,  ils  leur  cou- 
pèrent la  tête,  et  les  jetèrent  dehors. 

17.  Dieu  soit  béni  en  toutes  choses,  lui  qui  a  livré 
ainsi  les  impies. 

18.  Comme  donc  nous  devons  célébrer,  le  vingt-cin- 
quième jour  du  mois  de  Casleu,  la  purification  du  temple, 
nous  avons  jugé  nécessaire  de  vous  en  donner  avis,  afin 
que  vous  célébriez  aussi  la  lête  des  tabernacles,  et  la  fête 
du  feuqui  fut  donné  lorsque  Néhémie,  après  avoir  rebâti 
le  temple  et  l'autel,  y  offrit  les  sacrifices. 

19.  Car  lorsque  nos  pères  furent  emmenés  captifs  en 
Perse,  ceux  d'entre  les  prêtres  qui  craignaient  Dieu, 
ayant  pris  le  feu  qui  était  sur  l'autel,  le  cachèrent  secrè- 
tement dans  une  vallée,  où  il  y  avait  un  puits  qui  était 
profond  et  à  sec,  et  le  mirent  là  pour  être  gardé 
sûrement  ;  comme  en[effet  ce  lieu  demeura  inconnu  à  tout 
le  monde. 

20.  Et  beaucoup  d'années  s'étant  passées  depuis  ce 
temps-là,  lorsqu'il  plut  à  Dieu  de  faire  envoyer  Néhémie 
en  Judée,  par  le  roi  de  Perse,  il  envoya  les  petits-fils 
de  ces  prêtres  qui  avaient  caché  ce  feu  pour  le  cher- 
cher; et  ils  ne  trouvèrent  point  ce  feu,  comme  ils  nous 
l'ont  dit  eux-mêmes,  mais  seulement  une  eau  épaisse. 

21.  Alors  le  prêtre  Néhémie  leur  commanda  de  puiser 
cette  eau,  et  de  la  lui  apporter  ;  et  il  leur  ordonna  d'en 
faire  des  aspersions  sur  les  sacrifices,  sur  le  bois,  et  sur 
ce  qu'on  avait  mis  dessus. 


COMMENTAIRE 


$.  16.  Apertoque  occulto  aditu  templi,  mit- 
tentes  lapides  percusserunt  ducem.  Alors  ou- 
vrant une  porte  secrète,  qui  regardait  sur  te  temple, 
iis  l'assommèrent  à  coups  de  pierres.  Le  grec  lit  (1)  : 
Ils  ouvrirent  une  fausse  porte,  qui  était  au  lam- 
bris du  temple,  et  firent  tomber  sur  ce  prince  une 
grêle  de  pierres.  Antiochus  fut  vaincu  par  les 
Romains  et  obligé  de  payer  une  très  forte  indem- 
nité de  guerre.  Pour  ?e  procurer  de  l'argent,  il 
attaqua  en  187  le  temple  de  Bélus,  en  Élymaïde, 
et  fut  tué  par  le  peuple.  C'est  ce  que  racontent 
les  historiens  profanes  (2).  Or  nous  voyons  dans 
une  inscription  d'Assour-ban-habal  que  la  déesse 
Nana  était  honorée  dans  l'Elymaïde  (3).  Bélus 
était  le  dieu,  et  Nana  la  déesse  (4). 

f.  18.  Ut  et  vos  quoque  agatis  diem  sceno- 
PEGI.E.  Afin  que  vous  célébriez  aussi  la  fête  des 
Tabernacles  ;  ou  plutôt  la  fête  de  la  dédicace  du 
temple,  du  vingt-cinq  de  Casleu,  avec  des  céré- 
monies à  peu  près  pareilles  à  celle  de  la  fête  des 
Tabernacles.  Voyez  plus  haut  le  verset  9. 

Et  diem  ignis  qui  datus  est  quando  Nehe- 
mias, etc.  La  fête  de  la  découverte  du  feu  sacré, 
du  temps  de  Néhémie,  tombait  au  septième  mois, 
ou  au  mois  de  Thischri,  en  même  temps  que  la 
fêle  des  Tabernacles,  plus   de  deux  mois  avant 


la  fête  de  la  purification  du  temple  par  Judas 
Maccabée.  Voyez  IL  Esdr.  vin.  1.  14. 

,v\  19.  In  Persidem.  En  Perse,  ou  plutôt  en 
Chaldée.  Du  temps  de  l'auteur  de  ce  livre,  on 
comprenait  sous  le  nom  de  Perse,  tout  le  pavs  au 
delà  de  l'Euphrate. 

Acceptum  ignem  de  altari  occulte  abscon- 
derunt. On  montreencore  aujourd'hui  cepuits(<;), 
dans  la  vallée  de  Topheth,  au  pied  du  mont  des 
Oliviers,  vers  le  midi.  Le  puits  est  d'une  profon- 
deur médiocre,  et  il  y  a  de  l'eau  en  assez  grande 
quantité  ;  il  est  couvert  d'un  petit  bâtiment  fait 
en  forme  de  salle.  On  voit  au  verset  33,  que  le 
roi  Artaxerxès  Longue-main  fit  bâtir  un  temple, 
c'est-à-dire,  un  enclos  de  murailles   tout  autour. 

jK  21.  Jussit  sacerdos  Nehemias.  Le  prêtre 
Néhémie  ordonna  qu'on  répandît  de  cette  eau 
boueuse  sur  le  bois,  et  sur  les  victimes  préparées. 
Le  grec  (6)  porte  que  Néhémie  commanda  aux 
prêtres  de  faire  cette  aspersion  ;  il  n'est  pas  dit 
qu'il  fut  prêtre. 

Si  la  foi  parut  admirable  dans  ces  prêtres,  lors- 
qu'ils cachèrent  le  feu  sacré  de  l'autel  pour  le 
conserver  jusqu'au  temps  du  retour  des  Juifs; 
elle  ne  parut  pas  moins  dans  Néhémie,  lorsque, 
revenant  dans  la  Palestine  pour  le  rétablissement 


(1)  A  vo;Çavxî;  tr|v  toC   <paTvcôu.aro;  xpDjrtrjv  Oûpav,  fiàX- 
KQ'/xii  X:'Hou;  G'jvo/.epaûy&jaav  tov  f)y£u.cva. 

(2)  Diod.  sicul.  Jragm.  xxix.  -  Strabo.  xvi.  -  Justin,  xxxu. 
:.  -  Appian.  Syr.  57. 

(?)  Smith,  Histor  of  Assurbanipal,  toc.  cil. 


(4)  Maspcro,  Hist.  anc.  des  peuples  de  l'Orient,  p.  149. 

(5)  Voyez  Doubdan,  ch.  xv,  p.  118.  -  Voyage  nouveau 
de  la  Terre-Sainte,  p.  !j 24  et  suiv.  -  Pockocke,  Voyages, 
m.  67.  -  Mémoires  du  chevalier  d'Arvieux,  11,  171. 

(6)  E'xs'Xsuas  Toii;  ispeîç  Nscpuaç  É^ippàvai. 


i6o 


II.—  MACCABEES.  —   I.  -  CORRESPONDANCE   DES  JUIFS 


22.  Utque  hoc  faclum  est,  et  tempus  affuit  quo  sol 
refulsit,  qui  prius  erat  in  nubilo,  accensus  est  ignis  ma- 
gnus,  ita  ut  omnes  mirarentur. 

2î.  Orationem  autem  faciebant  omnes  sacerdotes,  dum 
consuminaretur  sacrificium,  Jonatha  inchoante,  ceteris 
autem  respondentibus. 

24.  Et  Nehemias  erat  oratio  hune  habens  modum  ;  Do- 
mine, Deus  omnium  creator,  terribilis  et  fortis,  justus  et 
misericors,  qui  solus  es  bonus  rex, 

25.  Solus  prasstans,  solus  justus,  et  omnipotens,  et 
aeternus,  qui  libéras  Israël  de  omni  malo,  qui  fecisti 
patres  electos,  et  sanctificasti  eos  ; 

26.  Accipe  sacrificium  pro  universo  populo  tuo  Israël, 
et  custodi  partem  tuam,  et  sanctifica. 

27.  Congrega  dispersionem  nostram,  libéra  eos  qui  ser- 
viunt  gentibus,  et  contemptos  et  abominatos  respice,  ut 
sciant  gentes  quia  tu  es  Deus  noster. 


28.  Afflige  oppriinentes  nos,  et  contumeliam  facientes 
in  superbia  ; 

2Q.  Constitue  populum  tuum  in  loco  sancto  tuo,  sicut 
dixit  Moyses. 

îo  Sacerdotes  ai'tem  psallebant  hymnos,  usquequo 
consumptum  esset  sacrificium. 


22.  Ce  qui  ayant  été  fait,  et  le  soleil  qui  était  aupara- 
vant caché  d'un  nuageayant  commencé  à  luire,  il  s'alluma 
un  grand  feu,  qui  remplit  d'admiration  tous  ceux  qui 
étaient  présents. 

2j.  Cependant  tous  les  prêtres  faisaient  la  prière  à 
Dieu,  jusqu'à  ce  que  le  sacrifice  fût  consumé,  Jonathas, 
commençant,  et  les  autres  lui  répondant. 

24.  Et  Néhémie  priait  en  ces  termes  :  Seigneur  Dieu, 
Créateur  de  toutes  choses,  terrible  et  fort,  juste  et  misé- 
ricordieux, qui  êtes  le  seul  bon  roi, 

2Ç.  Seul  excellent,  seul  juste,  tout-puissant  et  éternel, 
qui  délivrez  Israël  de  tout  mal,  qui  avez  choisi  nos  pères, 
et  qui  les  avez  sanctifiés; 

26.  Recevez  ce  sacrifice  pour  tout  votre  peuple  d'Israël; 
conservez  et  sanctifiez  ceux  que  vous  avez  rendus  votre 
portion. 

27.  Rassemblez  tous  nos  frères  dispersés  :  délivrez 
ceux  qui  sont  sous  l'esclavage  des  gentils  ;  regardez 
favorablement  ceux  qui  sont  devenus  un  objet  de  mépris 
et  d'abomination  ;  afin  que  les  nations  connaissent  que 
vous  êtes  notre  Dieu. 

28.  Affligez  ceux  qui  nous  oppriment,  et  qui  nous  outra- 
gent aveô  orgueil. 

29.  Et  établissez  votre  peuple  dans  votre  lieu  saint, 
selon  que  Moïse  l'a  prédit. 

50.  Cependant  les  prêtres  chantaient  des  hymnes  jusqu'à 
ce  que  le  sacrifice  fût  consumé. 


COMMENTAIRE 


du  temple  de  Jérusalem,  il  envoya  les  petits-fils 
de  ces  anciens  prêtres  chercher  ce  feu,  dans  le 
lieu  où  ils  savaient  que  leurs  grands-pères  l'avaient 
caché.  Mais  ce  qui  fait  éclater  bien  davantage  la 
foi  si  vive  de  ce  grand  serviteur  de  Dieu,  est 
qu'ayant  su  que  ce  feu  n'existait  plus,  mais  seule- 
ment une  eau  épaisse  en  sa  place,  il  ne  se  rebuta 
point.  Quoique  rien  ne  paraisse  plus  opposé  au 
feu  que  l'eau,  il  crut  avec  fermeté,  que  Dieu 
saurait  convertir  cette  eau  épaisse  en  un  feu  divin, 
propre  pour  les  sacrifices  qu'il  se  préparait  à  lui 
offrir.  Aussi  commanda-t-il  aussitôt  que  l'on 
puisât  de  celle  eau  pour  la  répandre  sur  le  bois,  et 
sur  les  victimes  qui  étaient  dessus. 

y.  22.  Utque  hoc  factum  est,  et  tempus  af- 
fuit   QUO    SOL    REFULSIT...    ACCENSUS     EST    IGNIS 

magnus.  Il  ne  faut  pas  s'imaginer, disent  les  com- 
mentateurs,que  lechangement  de  cette  eau  épaisse 
en  feu,  ait  été  produit  d'une  manière  naturelle 
par  la  lumière  du  soleil,  qui  se  découvrit  tout 
d'un  coup  de  dessous  le  nuage  qui  le  cachait. 
Dieu  vouiut  seulement,  en  faisant  luire  sur  cette 
eau  le  soleil  qui  était  caché,  et  en  produisant  en 
même  temps  un  grand  feu  qui  remplit  d'élonne- 
menl  tous  ceux  qui  étaient  [présents,  faire  admirer 
sa  toute  puissance  :  il  voulut  convaincre,  par  cette 
figure,  tout  son  peuple,  que,  de  même  que  cette 
eau  épaisse  n'était  que  de  l'eau,  tant  que  le  soleil 
demeura  caché,  et  qu'elle  fut  convertie  en  feu  dès 
le  moment  que  le  soleil  eût  paru  ;    ainsi  tant  que 


les  crimes  des  Juifs  obligèrent  Dieu,  soleil  de  jus- 
tice, à  s'éloigner  et  à  se  cacher  d'eux,  toute  leur 
religion  figurée  par  ce  feu  sacré  n'était  plus  alors 
que  comme  de  l'eau,  une  eau  épaisse  devant  lui, 
incapable  de  servir  aux  sacrifices,  et  de  consumer 
les  holocaustes  :  mais  dans  l'instant  que  sa  divine 
miséricorde  avait  regardé  favorablement  son  peu- 
ple, et  fait  luire  la  lumière  de  sa  grâce  dans  les 
cœurs,  il  avait  produit  en  eux  ce  changement  si 
miraculeux  d'une  eau  épaisse  en  un  feu  divin, pour 
marquer  qu'il  se  réconciliait  avec  Israël,  et  qu'il 
agréerait  à  l'avenir  les  sacrifices,  qu'il  avait  eus 
auparavant  en  abomination. 

y.  23.  Orationem  faciebant  omnes,  Jonatha 
inchoante.  Ce  Jonathas  n'était  pas  le  grand  prê- 
tre, car  du  temps  de  Néhémie  le  grand  prêtre  se 
nommait  Éliasib  ;  c'est  peut-être  Joïada,  fils 
d'Éliasib,  ou  quelqu'autre  prêtre  d'un  rang  dis- 
tingué, qui  prononçait  les  paroles  de  la  prière, 
que  tous  les  prêtres  répétaient  après  lui. 

y.  2<.  Qui  FECISTI     PATRES    ELECTOS.    Qui    aVC\ 

choisi  nos  pères,  qui  en  avez  fait  la  nation  sainte 
et  choisie,  qui  les  avez  distingués  et  séparés  des 
autres  peuples. 

f.  28.  Afflige  opprimentes  nos.  Du  temps  de 
Néhémie,  les  Samaritains  et  les  païens  ne  cessè- 
rent de  harceler  les  Juifs. 

y.  29.  Sicut  dixit  Moyses.  Selon  que  Moïse 
Va  prédit,  en  disant  (  1  )  :  Le  Seigneur  vous  tirera 
de  votre  captivité,  et  vous  rassemblera  du  milieu  des 


(  1)  Deut.  xxx.  j.  4.  5. 


MACCABEES.  —  [.  -  CORRESPONDANCE   DES  JUIFS 


iôt 


51.  Cum  autem  consumptum  essct  sacrificium,  ex  resi- 
dua  aqua  Nehcmias  jussit  lapides  majores  perfundi. 

J2.  Quod  ut  factum  est,  ex  eis  flamma  accensa  est  ;  sed 
ex  lumine  quod  refulsitab  altari  consumpta  est. 

>?■  Ut  vero  manifestata  est  res,  renuntiatum  est  régi 
Persarum  quod  in  loco  in  quo.ignem  absconderant  hiqui 
transluti  fuerant  sacerdotes,  aqua  apparuit,de  qua  Nehe- 
mias,  et  qui  cum  eo  erant,  purificaverunt  sacrificia. 

)4.  Considerans  autem  rex,  et  rem  diligenter  exami- 
nans,  fecit  ei  ternplum,  ut  probaret  quod  factum  erat. 

Î5-  Et  cum  probasset,  sacerdolibus  donavit  multa  bona, 
et  alia  atque  alia  munera,et  accipiens  manu  sua,  tribue- 
bat  eis. 

56.  Appellavit  autem  Nehemias  hune  locum  Nephthar, 
quod  interpretatur  Purificatio  ;  vocatur  autem  apud  plu- 
res  Nephi. 


ji.  Et  le  sacrifice  étant  consumé,  Néhémie  ordonna 
que  Ton  répandît  ce  qui  restait  de  cette  eau  sur  les  gran- 
des pierres. 

J2.  Ce  qu'on  n'eut  pas  plus  tôt  fait, qu'il  s'y  alluma  une 
grande  flamme  ;  mais  elle  fut  absorbée  par  la  lumière 
qui  s'éleva  de  dessus  l'autel. 

?;.  Lorsque  cet  événement  fut  rendu  public,  on  rap- 
porta au  roi  de  Perse,  qu'au  môme  lieu  où  les  prêtres 
qui  avaient  été  emmenés  captifs  avaient  caché  le  feu 
sacré,  on  avait  trouvé  une  eau,  dont  Néhémie  et  ceux 
qui  se  trouvaient  avec  lui  avaient  purifié    les  sacrifices. 

?4.  Le  roi,  après  avoir  considéré  ce  qu'on  lui  disait, 
et  s'être  assuré  par  une  recherche  exacte  de  la  vérité  du 
fait,  fit  bûtir  en  ce  même  lieu  un  temple. 

;ç.  Et  se  tenant  assuré  de  ce  prodige,  il  donna  aux 
prêtres  de  grands  biens,  et  leur  fit  divers  présents,  qu'il 
leur  distribuait  de  sa  propre  main. 

?6.  Néhémie  appela  ce  lieu  Nephthar,  c'est-à-dire 
purification  ;  mais  il  y  en  a  plusieurs  qui  l'appellent 
Nephie,  c'est-à-dire  sacré. 


COMMENTAIRE 


peuples,  où  il  vous  avait  dispersés.  Quand  vous 
serie\  écartés  aux  coins  du  monde,  il  saura  vous  en 
retirer  ;  il  vous  prendra,  el  vous  inlroduira  dans  la 
terre  que  vos  pères  ont  possédée,  etc. 

f.  }2.  Ex  EIS  FLAMMA  ACCENSA  EST,  SED  EX  LU- 
MINE  QUOD  REFULSIT  AB   ALTARI,    CONSUMPTA    EST. 

On  distingue  ici  deux  sortes  de  feu  ;  l'un  allumé 
sur  les  pierres  de  l'autel,  par  le  moyen  de  l'eau 
qui  y  fut  répandue, et  l'autre  descendu  du  ciel,  ou 
produit  miraculeusement  sur  l'autel.  Celui  ci, 
plus  fort  et  plus  véhément,  absorba  le  feu  qui 
s'était  allumé,  après  l'épanchement  de  l'eau 
boueuse,  dont  on  a  parlé  au  verset  20. 

f.  34.  Fecit  ei  templum.  Le  grecàla  lettref:): 
Le  roi  s'étant  informé  de  la  chose,  fil  enfermer  le 
lieu,  el  le  rendit  sacré  et  inviolable.  L'auteur  parle 
du  lieu  où  le  feu  avait  été  trouvé.  Le  nom  de 
templum  se  prend  souvent  pour  une  enceinte 
découverte,  mais  fermée  de  murailles,  et  séparée 
des  choses  communes  et  profanes. 

}.  35.  Et  cum  probasset,  sacerdotibus  do- 
navit MULTA    BONA,  ET  ALIA    ATQUE    ALIA  MUNERA, 


ET  ACCIPIENS  MANU    SUA     TRIBUEBAT     EIS.  Le     grec 

est  plus  court  (2)  :  Et  le  roi  prenait  et  distribuait 
divers  présents  à  ceux  à  qui  il  était  favorable.  Le 
syriaque  dit  que  le  roi  vint  sur  les  lieux,  qu'il 
examina  exactement  la  chose,  qu'il  y  bâtit  un 
temple,  et  qu'il  fit  plusieurs  présents  aux  prêtres, 
lesquels  en  faisaient  la  distribution  à  ceux  qui  en 
avaient  besoin.  Grotius  croit  qu'il  faut  lire  (3)  : 
Le  roi  prit  el  distribua  de  sa  main  beaucoup  d'ar- 
gent à  ceux  dont  il  s'était  servi  pour  découvrir  la 
vérité  de  la  chose.  On  pourrait  aussi  traduire  (4)  : 
Le  roi  leur  fit  distribuer  de  l'argent,  selon  leurs 
besoins.  Les  anciens  exemplaires  latins,  manus- 
crits et  imprimés, varient  beaucoup  dansce  verset. 

fi.  36.  Nephthar.  Néhémie  appela  ce  lieu  Neph- 
thar, c'est-à-dire  purification.  Il  vaudrait  mieux 
lire  (5),  Necphar. 

Nephi.  Le  syriaque  et  l'édition  romaine  Naph- 
lai.  Le  ms.  alexandrin  et  les  autres  exemplaires 
grecs ,  Nephlar  ;  Vatable,  Ephlar.  On  peut  le 
dériver  du  chaldéen  Phelir  (6),  qui  signifie  être 
pur,  sans  mélange,  sans  levain. 


(l)  FlEpicppâÇaç  ok  o  pa-tXcù;,   ispov  È7:oi7J<7e. 

12)  Kat  o~i;  Éyapi'ÇeTO  ô  (jotaiÀEÙ;  r.oW'a.  ôtà-jopa  ïki'jfiivs, 
/.ai  jjLsxêoi'ôou 

(j)  Ivai  ôj;  ÈypïjaaTO  ô  |îaat).£Ù;,  TtoXXà  àtâfopa  ÈXocuSavs, 
xa'c  u.eteo:'oou.   Le  mot  Siotcpopa  signifie  de  l'argent.    Voyez 


11.  Macc.  in.  6.  -  Eccli.  vu.  19.  et  xxvn.  i. 

(4)  K0.1  ojv  É/pr)iÇovio,  etc. 

(5)  1333  de  133  II  a  expié,  il  a  nettoyé. 

(6)  i"U3  A^rinum,  purum,  non  inixtum. 


S.  B.  —  T.  XII. 


11 


CHAPITRE   II 

Suite  de  la  lettre  précédente,  où  se  trouvent  diverses  particularités  arrivées  au  temps 
de  la  transmigration  des  Juifs  à  Babylone.  Préface  où  V auteur  de  ce  livre 
expose  son  dessein. 


i.  Invenitur  autem  in  descriptionibus  Jeremiae  prophe- 
tœ,  quod  jussit  eos  ignem  accipere  qui  transmigrabant,  ut 
significalum  est,  et  ut  mandavit  transmigratis. 


2.  Et  dédit  illis  legem  ne  obliviscerentur  prascepta  Do- 
mini,  et  ut  non  exerrarent  mentibus  videntes  simulacra 
aurea  et  argentea,  et  omamenta  eorum  ; 

?.  Etalia  hujusmodi  diccns,  hortabatur  ne  legem  arri- 
vèrent a  corde  suo. 

4.  Erat  autem  in  ipsa  scriptura,  quomodo  tabernacu- 
lum  et  arcam  jussit  propheta,  divino  responso  ad  se 
facto,  comitari  secum,  u^quequo  exiit  in  montem  in  quo 
Moyses  ascendit,  v.i  vidit  Dei  hereditatem. 


1.  Or,  on  trouve  dans  les  écrits  du  prophète  Jérémie, 
qu'il  commanda  à  ceux  qui  allaient  de  Judée  en  un  pays 
étranger,  de  prendre  le  feu  sacré,  comme  on  l'a  marqué 
auparavant  ;  et  qu'il  leur  donna  des  préceptes  dans  le 
temps  de  leur  transmigration. 

2.  Et  il  leur  enjoignit  très  expressément  de  ne  pas 
oublier  les  ordonnances  du  Seigneur,  et  de  ne  pas  tomber 
dans  l'égarement  d'esprit,  en  voyant  les  idoles  d'or  et 
d'argent,  avec  tous  leurs  ornements. 

;.  Et  leur  donnant  encore  divers  avis,  il  les  exhortait  à 
n'éloigner  jamais  de  leur  cœur  la  loi  de  Dieu. 

4.  Il  était  aussi  marqué,  dans  le  même  écrit,  que  ce 
prophète,  par  un  ordre  particulier  qu'il  avait  reçu  de 
Dieu,  ordonna  qu'on  emportât  avec  lui  le  Tabernacle  et 
l'Arche,  jusqu'à  ce  qu'il  fût  arrwé  à  la  montagne  sur 
laquelle  Moïse  était  monté  pour  contempler  de  là  l'héri- 
tage du  Seigneur. 


COMMENTAIRE 


jL  1.  Invenitur  in  descriptionibus  Jeremi/e 
prophète.  Ces  écrits  étaient  sans  doute  encore 
entre  les  mains  des  Juifs,  lorsqu'ils  écrivirent 
cette  lettre,  la  1880  année  des  Séleucides,  et  124 
ans  avant  l'ère  vulgaire  ;  mais  on  ne  les  trouve 
plus,  depuis  très  longtemps,  parmi  les  écrits  de 
ce  prophète.  Peut-être  même  n'était-ce  plus  déjà 
qu'une  tradition,  puisque  les  Septante  omettent, 
comme  l'hébreu,  les  détails  dont  il  est  ici  ques- 
tion. 

Et  ut  mandavit  transmigratis.  Lorsqu'on  les 
menait  en  captivité  (1)  ,  il  les  exhorta  à  la  fidé- 
lité envers  le  Seigneur. 

f.  2.  Dédit  illis  legem...  ne  exerrarent  men- 
tibus videntes  simulacra  aurea,  etc.  L'auteur 
semble  faire  allusion  à  la  lettre  que  Jérémie  en- 
voya â  ceux  des  captifs  qu'on  allait  mener  en 
Chaldée.  Elle  est  reproduite  dans  Baruch,  chap. 
vi.  Il  leur  donna  aussi  le  livre  de  la  loi,  afin  qu'il 
leur  servit  durant  l'exil. 

Il  est  étonnant  qu'après  que  Dieu  a  parlé  aux 
hommes  poui  leur  faire  connaître  ses  volontés,  il 
soit  besoin  qu'un  prophète  recommande  à  ces 
mêmes  hommes  de  ne  pas  oublier  les  ordonnances 
du  Seigneur:  comme  si  la  voix  de  Dieu  ne  devait 
pas  faire  une  impression   sans  comparaison   plus 


forteet  plus  vive  surleurs  cœurs,  que  celle  detous 
les  prophètes.  Mais  telle  est  la  fragilité  du  cœur 
humain,  telle  est  son  inconstance,  qu'il  a  besoin 
d'être  soutenu  sans  cesse  contre  les  objets  qui 
frappent  ses  sens,  et  qui  l'exposent  à  toute  heure 
à  être  emporté  par  l'attrait  trompeur  des  créatu- 
res, et  à  oublier  ou  à  négliger  la  loi  de  son  Dieu. 
C'était  contre  cet  égarement  d'esprit  que  le  pro- 
phète Jérémie  travaillait  à  affermir  les  captifs  de 
Jérusalem,  lorsqu'entre  les  divers  avis  qu'il  leur 
donnait,  il  les  exhorta  de  n'éloigner  jamais  de  leur 
cœur  la  loi  de  Dieu,  de  peur  qu'il  ne  s'égarât  en 
voyant  les  idoles  d'or  et  d'argent  des  Chaldéens  si 
bien  ordonnées,  et  ne  se  laissât  aller  à  les  adorer. 
fi.  4.  Quomodo  tabernaculum  et  arcam  jussit 
propheta,  divino  responso  ad  se  facto,  comi- 
tari secum  usque  in  montem,  etc.  Cette  monta- 
gne n'est  autre  que  le  Nébo,  où  Moïse  monta, 
pour  considérer  la  terre  Promise  ;  c'est  là  qu'il 
mourut,  et  qu'il  fut  enseveli  (2).  Le  texte  ne  mar- 
que pas  distinctement,  si  ce  fut  avant  le  dernier 
siège,  ou  après  la  prise  de  Jérusalem,  que  Jéré- 
mie sauva  l'Arche  et  le  Tabernacle,  construits 
par  Moïse,  et  l'autel  des  parfums.  La  plupart  des 
commentateurs  (3)  croient  avec  assez  de  vraisem- 
blance que  Jérémie  obtint  de  Nabuzardan,  géné- 


(1)  E 'veTEi'Xoao  xoiç  (xEiafevouivot;  ô  7tpoorjT7)î. 

(2)  Deut.  xxxii.  49. 


(?)  lia  Dorotheus  cl  Epiphan.  in  vila  Jcrem.  D.  Thom 
seu  alius  Aucl.  Comment,  in  11.  Macc.  Serar.  Salian.  Tor- 
niel.  Tyr.  etc. 


II.—  MACCABÉES.  —  Il    -   L'ARCHE   D'ALLIANCE 


.63 


rai  des  troupes  chaldéennes,  qui  avait  pour  lui 
une  considération  toute  particulière  (i),  de  pou- 
voir cacher  les  vases  sacrés.  Il  se  passa  apparem- 
ment quelques  jours  entre  la  prise  de  Jérusalem 
et  l'ordre  que  Nabucodonosor  donna  de  la  brû- 
ler, ainsi  que  le  temple  (2).  D'autres  veulent  (3), 
que  c'ait  été  avant  le  siège,  sous  le  règne  de  Joa- 
chim,  durant  l'intervalle  que  Jérémie  demeura  en 
liberté  à  Jérusalem.  Cette  affaire  se  fit  en  secret, 
sans  que  personne  en  fût  informé,  sinon  un  petit 
nombre  de  prêtres. 

On  demande  ici  si  l'Arche  fut  retrouvée  du 
temps  de  Néhémie,  ou  si  elle  est  encore  aujour- 
d'hui cachée  et  inconnue?  Les  commentateurs  de 
tous  les  siècles  sont  partagés  sur  cette  question. 
Le  sentiment  le  plus  répandu  aujourd'hui,  et  qui 
a  été  le  plus  ordinaire  parmi  les  anciens,  est  que 
l'Arche  ne  fut  jamais  recouvrée,  et  ne  parut  pas 
dans  le  second  temple.  Le  passage  de  Jérémie, 
chap.  m.  f.  16,  que  l'on  a  cité,  et  où  ce  prophète 
assure  qu'on  ne  parlera  plus  de  l'arche  d'alliance 
el  que  l'on  ne  s'en  souviendra  plus,  est  expliqué 
fort  naturellement  par  les  Hébreux,  parThéodo- 
ret,  par  saint  Thomas,  par  le  cardinal  Hugues  et 
par  Sanctius,  du  temps  qui  suivit  la  captivité  de 
Babylone  :  il  ne  fut  plus  parlé  alors  de  l'arche 
d'alliance.  C'est  l'opinion  qu'ont  suivie  le  faux 
Épiphane  (4),  Dorothée  (5),  le  fils  de  Gorion(6), 
quelques  pères,  et  plusieurs  théologiens  moder- 
nes (7)  ;  et  voici  les  preuves  dont  ils  l'appuient. 
Le  silence  d'Esdras,  de  Néhémie,  des  Macca- 
bées,  de  Josèphe,  est  d'un  grand  poids  dans  cette 
matière.  Ils  ne  parlent  jamais  de  l'Arche,  quoi- 
qu'ils aient  eu  vingt  occasions  d'en  parler;  il  n'en 
est  fait  mention  ni  dans  la  dédicace  du  temple, 
sous  Néhémie,  ni  dans  sa  purification,  sous  Ju- 
das Maccabée,  ni  dans  le  rétablissement  des 
sacrifices,  au  retour  delà  captivité,  ni  dans  la  pro- 
fanation el  le  pillage  des  vases  sacrés,  sous  Antio- 
chus  Épiphane,  ni  dans  l'incendie  du  temple, 
sous  Titus.  Pourquoi  n'en  aurait-on  dit  rien  dans 
le  dénombrement  de  ce  qu'Antiochus  Épiphane, 
Pompée,  Crassus  et  Titus  enlevèrent  du  temple 
de  Jérusalem,  puisque  c'était  la  chose  qui  aurait 
mérité  le  plus  d'attention,  si  elle  s'y  fût  trouvée  ? 


Josèphe  dit  même  expressément  qu'à  la  prise  de 
Jérusalem  par  Titus,  il  n'y  avait  rien  du  tout  dans 
le  sanctuaire  (8).  Dans  la  description  du  triom- 
phe de  Vespasien  et  de  Titus,  l'Arche  ne  parut 
point,  quoiqu'on  eût  porté  la  table  d'or,  et  le 
chandelier  à  sept  branches,  et  la  loi  des  Juijs,  qui 
était,  dit  Josèphe,  la  dernière  des  dépouilles  qui 
parurent  dans  celle  pompeuse  cérémonie  (g).  Il  veut 
dire  apparemment  le  rouleau  où  les  livres  saints 
étaient  écrits. 

On  sait  quequelques  écrivains  (10)  ont  prétendu 
que  Pompée  avait  vu  dans  le  temple  une  arche  et 
des  chérubins  semblables  à  ceux  que  Moïse  avait 
faits;  que  l'on  avait  porté  l'arche  d'alliance  au 
triomphe  de  Vespasien(i  i),et  qu'on  la  remarquait 
encore  aujourd'hui  dans  l'arc  de  triomphe  de  Ti- 
tus à  Rome  (12).  Mais  d'autres  auteurs  (13)  sou- 
tiennent qu'on  ne  voit  rien  de  pareil  dans  l'arc  de 
triomphe  en  question  ;  que  ce  qu'on  prend  pour 
l'arche  d'alliance  n'est  autre  chose  que  la  table 
des  pains  de  proposition  ;  qu'il  est  aisé  de  s'en 
persuader  par  la  lecture  de  Josèphe,  qui  dit  que 
la  loi  des  Juifs  fut  portée  la  dernière.  Or  ce  qu'on 
prend  pour  l'Arche  ressemble  à  la  vérité  assez  à 
un  coffre,  mais  il  y  a  toute  sorte  d'apparence  que 
c'est  la  table  des  pains  de  proposition,  ou  l'autel 
des  parfums,  parce  qu'il  est  placé  dans  la  marche 
avant  le  chandelier  d'or. 

Quoique  Dieu  irrité  contre  son  peuple  à  cause 
de  tant  d'impiétés  et  d'abominations  qu'il  avait 
commises,  eût  résolu  de  livrer  aux  idolâtres  ce 
temple  auguste,  qu'il  avait  choisi  pour  le  lieu  de  sa 
demeure  parmi  les  hommes,  et  auquel  les  Juifs 
avaient  toujours  été  si  fortement  attachés  ;  il  ne 
voulut  pas  néanmoins  exposer  aux  profanations 
des  infidèles  ce  qu'il  y  avait  alors  de  plus  sacré 
dans  la  vraie  religion,  le  Tabernacle,  l'arche  d'ail- 
liance,  el  l'autel  des  parfums.  Ce  n'était  pas  que 
cette  arche,  malgré  sa  haute  sainteté,  fût  invio- 
lable ;  puisqu'autrefois  il  l'avait  livrée  entre  les 
mains  des  Philistins,  pour  punir  l'infidélité  et  l'in- 
gratitude de  son  peuple:  mais  il  voulait  ici  mettre 
des  bornes  à  la  rigueur  de  sa  justice,  et  faire 
connaître  en  même  temps  à  tous  les  hommes  que 
c'était  lui,  comme  il   l'avait  si  souvent  prédit,  qui 


(ij    Vide  Jerem.  xxxix.  II.  12. 

(2)   Vide  iv.  Reg.  ait. 

(?)  Vide  Natal.  Alex.  hist.  vel.  Test.  art.  de    lib.  Macc. 

(4)  Epiphan.  de  Vita  Prophel.  vita  Jerem. 

(5)  Doroth.  Sinops.  vites  prophet. 

(6)  Gorionid.  I.   1.  c.  17. 

(7)  Serar.  in  11.  Macc.  il.  (7.  17.  18.-  Villalp.  tom  11.  p.  2. 
I.  v.  c.  70.  A  Castro  in  Jerem.  m.  n.  20.  -  Porchet.  1.  parte 
Victoria:  contra  Heb.  c.  7.  -  Galat.  t.  vu.  c.  4.  -  Tost.  in 
Exod.  q.  2.  el  14.  et  in  Deut.  x.  7.  2.  et  alibi  Lrr.  Rickard. 
a  sancto  Vict.  Rupert.  Carthusian.  Mariana,  Tirin  et  alii 
non  pauci. 


(8)  Joseph.de  bello.  t.  v.  c.  14.  in  grxco  t.  vi.  c.  6.  in 
latino.  E'/.sito  3=  oùôàv  o'Xa>;  sv  autûi. 

(9)  Joseph,  de  Bello,  l.  vu.  c.  17.  in  grxco.  Xpi/U/j  zé 
•tpàr^a,  xrjv  ôXxr)v  noXutotXsvto;  nai  Xu/v;a  ^puaoû  uiv 
Ôjxoicj;  7t£rtoiT)piév.. .  0  te  vdfio;  ô  tcùv  I'ouôai'ajv  Eisi  toutoî; 
éoe'psto  tcov  Xa:pôpu>v  TiXeuTato;. 

(10)  Hegestpp.  lib.  1.  car.  17. 

(11)  Pe.r.  Comestor.  Iiistor.  yfudic.  c.  h 

(12)  Martian.de  arca  Tili.  L  m.  c.  6.  Vide  Bartholocci 
Bibl.  Rabin.  I.  }.  p.  itf.-Torniel.  annal,  ad  an.  7885. 

(ij)  Ribera  in  Aggcei,  i.-Villalpand.  alii  p'.ures. 


.64 


II.—   MACCABÉES.  —  II.-    L'ARCHE    D'ALLIANCE 


ç.  Et  veniens  ibi  Jeremias,  invenit  locum  speluncae  ;  et 
tabernaculum,  et  arcam,  et  altare  incensi  intulit  illuc,  et 
ostium  obstruxit. 

6.  Et  accesserunt  quidam  simul,  qui  sequebantur,  ut 
notarent  sibi  locum,  et  non  potuerunt  invenire. 

7.  Ut  autem  cognovit  Jeremias,  culpans  illos  dixit  : 
Quod  ignotus  erit  locus,  donec  congreget  Deus  congre- 
gationem  populi,  et  propitius  fiât  ; 

U.  Et  tune  Dominus  ostendet  hase,  et  apparebit  majes- 
tas  Domini,  et  nubes  erit,  sicut  etMoysi  manifestabatur, 
et  sicut  cum  Salomon  petiit  ut  locus  sanctificaretur  ma- 
gno  Deo,  manifestabat  haec. 

9.  Magnifiée  etenim  sapientiam  tractabat  ;  et  ut  sapien- 
tiam  habens,  oblulit  sacrificium  dedicationis  et  consum- 
mationis  templi. 

10.  Sicut  et  Moyses  orabat  ad  Dominum,  et  descendit 
ignis  de  cœlo,  et  consumpsit  holocaustum  ;  sic  et  Salomon 
oravit,  et  descendit  ignis  de  cœlo,  et  consumpsit  holo- 
caustum. 

11.  Et  dixit  Moyses  :  Eo  quod  non  sit  comestum  quod 
erat  pro  peccato,  consumptum  est. 

12.  Similiter  et  Salomon  octo  diebus  celebravit  dedi- 
cationem. 

ij.  Inferebantur  autem  in  descriptionibus  et  commen- 
tariis  Nehemias  haec  eadem  ;  et  ut  construens  bibliothe- 
cam  congregavit  de  regionibus  libros,  et  prophetarum, 
et  David,  et  epistolas  Regum,  et  de  donariis. 


5.  Et  Jérémie  y  étant  arrivé,  y  trouva  une  caverne,  où 
il  mit  le  Tabernacle, l'Arche  et  l'autel  des  parfums  ;  et  il 
en  boucha  l'entrée. 

6.  Or, quelques-uns  de  ceux  qui  l'avaient  suivi,  s'étant 
approchés  pour  remarquer  ce  lieu,  ne  purent  le  trouver. 

7.  Et  Jérémie  l'ayant  su,  les  blâma  et  dit  que  ce  lieu 
demeurerait  inconnu  jusqu'à  ce  que  Dieu  eût  rassemblé 
son  peuple  dispersé,  et  qu'il  lui  eût  fait  miséricorde; 

8.  Et  qu'alors  le  Seigneur  ferait  voir  ces  choses  ;  que 
la  majesté  du  Seigneur  paraîtrait  de  nouveau  ;  et  qu'il  y 
aurait  une  nuée,  selon  qu'elle  avait  paru  à  Moïse,  et 
qu'elle  fut  manifestée  lorsque  Salomon  demanda  que  le 
temple  fût  sanctifié  pour  le  grand  Dieu. 

9.  Car  il  faisait  éclater  sa  sagesse  d'une  manière  magni- 
fique ;  et  il  offrit  le  sacrifice  de  la  dédicace  et  de  la  con- 
sommation du  temple,  comme  un  homme  qui  était  rempli 
de  sagesse. 

10.  Comme  Moïse  pria  le  Seigneur,  et  que  le  feu  des- 
cendit du  ciel  et  consuma  l'holocauste,  ainsi  Salomon 
pria,  et  le  feu  descendit  du  ciel,  et  consuma  l'holocauste. 

11.  Et  Moïse  dit  :  Parce  que  l'hostie  qui  a  été  offerte 
peur  le  péché  n'a  point  été  mangée,  elle  a  été  consumée 
par  le  feu. 

12.  Salomon  de  même  célébra  pendant  huit  jours  la 
dédicace  du  peuple. 

1  ;.  Ces  mêmes  choses  se  trouvent  aussi  dans  les  écrits 
et  dans  les  mémoires  de  Néhèmie,  où  l'on  voit  qu'il  fit 
une  bibliothèque,  ayant  rassemblé  de  divers  pays  les 
livres  des  prophètes,  ceux  de  David,  et  les  lettres  des 
rois,  et  ce  qui  regardait  les  dons  faits  au  temple. 


COMMENTAIRE 


livrait  Jérusalem,  le  temple,  et  son  peuple  à  Na- 
bucodonosor,  et  qui  retirait  d'entre  ses  mains  ce 
qu'il  lui  plaisait  ;  afin  qu'on  jugeât  par  là  que  la 
destruction  de  la  ville  sainte  était  plus  l'effet  de 
sa  justice  envers  Israël,  que  de  la  puissance  de 
ses  ennemis. 

f.  7.  Donec  congreget  Dominus  congrega- 
tionem  populi.  Cette  expression  marque  naturel- 
lement, que  l'Arche  devait  être  découverte  au 
retour  de  la  captivité  de  Babylone.  C'est  le  plus 
fort  argument  en  faveur  de  ceux  qui  soutiennent 
qu'elle  le  fut;  d'autres  commentateurs  le  prennent 
au  sens  spirituel  et  prétendent  que  l'arche  véri- 
table fut  Jésus-Christ.  Mais  le  sens  spirituel,  tout 
respectable  qu'il  est,  dogmatiquement  parlant, 
n'est  pas  d'une  grande  force  en  exégèse  quand  il 
s'agit  d'un  fait  historique.  Dans  le  passage  où 
J  érémie  parle  de  l'Arche  (m,  1 }  ),Ie  prophète  déclare 
très  clairement  que  l'Arche  ne  paraîtra  plus  même 
au  retour  de  la  captivité  et  durant  les  temps  mes- 
sianiques. Ce  verset  peut  donc  être  interprété 
des  derniers  temps,  lors  de  la  conversion  générale 
des  Juifs.  L'Écriture,  en  effet,  parle  bien  du 
leu  sacré  miraculeusement  retrouvé  ;  elle  ne  dit 
rien  de  l'Arche.  Et  pourtant,  c'était  là  l'emblème 
le  plus  sacré  du  culte. 

f,  9.  Magnifice  enim  sapientiam  tractabat.  // 


faisait  éclater  sa  sagesse  d'une  manière  magnifique  ; 
ou  bien,  il  faisait  les  choses  grandement  ;  ou 
enfin,  il  faisait  principalement  briller  sa  sagesse 
dans  la  magnificence  du  temple,  de  sa  cour,  de 
ses  palais.  Le  grec  (1)  est  plus  simple  :  Il  fit  pa- 
raître quelle  était  sa  sagesse,  lorsqu'il  offrit  les 
sacrifices  de  la  dédicace  du  temple.  Ce  fut  princi- 
palement dans  la  prière  qu'il  fit  alors  au  Seigneur, 
qu'éclata  sa  profonde  sagesse. 

f.  10.  Descendit  ignis  de  cœlo.  Le  /eu  des- 
cendit du  ciel,  à  la  dédicace  du  Tabernacle  par 
Moïse  (2),  et  à  la  dédicace  du  temple  de  Salo- 
mon (3).  L'une  et  l'autre  dédicace  se  célébra 
pendant  huit  jours. 

f,    II.   Eo  QUOD  NON  SIT  COMESTUM  QUOD  ERAT 

pro  peccato,  consumptum  est.  L'auteur  fait 
allusion  à  ce  qui  arriva  à  Nadab  et  Abiu,  qui 
furent  consumés  par  des  flammes  surnaturelles 
pour  avoir  voulu  offrir  l'encens  sur  un  feu  com- 
mun (4).  Alors  Aaron  oublia  de  manger  sa  part 
de  l'hostie  pour  le  péché,  il  la  laissa  entièrement 
consumer  par  le  feu.  On  apporte  ici  comme 
exemple  de  l'attention  de  Moïse  aux  moindres 
choses  du  culte,  ce  qu'il  dit  en  cette  occasion  à 
son  frère  Aaron. 

jh  13.  Inferebantur  commentariis  Nehemi^: 
hmc  eadem.  On  ne  les  lit  point  dans  le  livre  que 


(1)  Ateaot'feïTO  SI,    xa'i  6>i  aoolav   ï-jfjuv   âvrivEY«  Guafov 
iYxatviou.oû'. 


(2)  Lcvit.  ix.  2j.  24. 

(j)  11.  Par.  vu.  1.  —  (4)  Levit.  x.  1.  2. 


II. 


MACCABEES.—  II.-   PURIFICATION   DU  TEMPLE 


16$ 


14.  Similiter  autem  et  Judas  ea  quae  deciderant  per 
bellum,  quod  nobis  acciderat,  congregavit  omnia,  et 
sunt  apud  nos. 

15.  Si  ergo  desideratis  hœc  ,  mittite  qui  perferant 
vobis. 

iô.  Acluri  itaque  purificationem,  scripsimus  vobis  : 
bene  ergo  facietis,  si  egeritis  nos  dies. 

17.  Deus  autem,  qui  liberavil  populum  suum,  etreddi- 
dit  hereditatem  omnibus,  et  regnum,  et  sacerdotium,  et 
sanctificationem, 

18.  Sicut  promisit  in  lege,  speramus  quod  cito  nostri 
miserebitur,  et  congregabit  de  sub  cœlo  in  locum  sanc- 
tum. 

19.  Eripuit  enim  nos  de  magnis  periculis,  et  locum 
purgavit. 


14.  Judas  a  encore  recueilli  tout  ce  qui  s'était  perdu 
pendant  la  guerre  que  nous  avons  eue  ;  et  ce  recueil  est 
entre  nos  mains. 

15.  Si  vous  désirez  avoir  ces  écrits,  envoyez-nous  des 
personnes  qui  puissent  vous  les  porter. 

16.  Nous  vous  avons  donc  écrit,  étant  sur  le  point  de 
célébrer  la  purification  ;  et  vous  ferez  bien  de  célébrer 
cette  fête  comme  nous. 

17.  Or,  nous  espérons  que  Dieu,  qui  a  délivré  son  peu- 
ple, qui  a  rendu  à  tous  leur  héritage,  et  qui  a  rétabli  le 
royaume,  le  sacerdoce,  et  le  lieu  saint, 

18.  Selon  qu'il  l'avait  promis  dans  la  loi,  nous  fera 
bientôt  miséricorde,  et  nous  rassemblera  de  tous  les 
pays  qui  sont  sous  le  ciel  dans  son  lieu  saint. 

19.  Car  il  nous  a  délivrés  de  grands  périls,  et  il  a  purifié 
son  temple. 


COMMENTAIRE 


nous  avons  sous  son  nom  ;  ainsi  ces  mémoires 
étaient  autre  chose  ;  ou  bien  le  livrequi  nous  reste 
de  Néhémie,  n'est  qu'un  abrégé  de  ses  mémoi- 
res ;  ce  qui  est  plus  probable. 

CONSTRUENS     BIBLIOTHECAM      CONGREGAVIT      DE 

regionibus  libros.  Il  y  a  beaucoup  d'apparence, 
qu'avant  Néhémie,  on  n'avait  aucun  recueil  entier 
et  complet  des  livres  saints  ;  ou  du  moins  que, 
depuis  la  captivité,  personne,  avant  lui,  n'avait  eu 
la  curiosité  ou  les  moyens  de  les  amasser  tous. 
Il  fallait  les  faire  venir  à  grands  frais  de  divers 
endroits,  où  les  Juifs  étaient  dispersés;  de 
l'Egypte, de  la  Babylonie,  de  la  Perse  et  d'ailleurs. 
A  cette  époque,  les  livres  étaient  d'un  prix  et 
d'un  rareté  extraordinaires,  et  on  ne  saurait  trop 
louer  le  zèle  de  Néhémie,  qui  s'employa  à  une 
chose  si  utile,  si  nécessaire  à  la  religion.  On  croit 
que  ce  fut  à  la  sollicitation  d'Esdras,  que  Néhémie 
entreprit  de  réunir  les  livres  saints,  et  que  le 
même  Esdras  les  lui  indiqua,  et  s'empressa  de  les 
faire  venir  de  tous  côtés.  Ce  fut  alors  que  fut 
arrêté  le  canon  des  Juifs,  c'est-à-dire  qu'on  fixa 
le  nombre  des  livres  qu'ils  reconnurent  pour  ins- 
pirés. Cette  grave  mesure  fut  prise  solennellement, 
et  d'une  manière  très  authentique,  dans  une  as- 
semblée générale  des  anciens  de  la  nation,  à  la- 
quelle Néhémie  et  Esdras  assistèrent  (1). 

Et  epistolas  Regum,  et  de  donariis.  Les 
lettres  de  Cyrus,  de  Darius,  d'Artaxerxès,  d'As- 
suérus,  en  faveur  des  Juifs,  étaient  comme  les 
titres  de  la  nation,  et  les  monuments  de  leur 
liberté.  Le  grec  lit  (2):  Les  lettres  du  roi,  louchant 
les  présents  faits  au  temple.  Les  lettres  dans  les- 
quelles les  rois  marquaient  ce  qu'ils  envoyaient 
au  temple.  On  a  quelques-unes  deces  lettres  dans 
Esdras  (3).  Josèphe  en  rapporte  quelques  autres. 


$.  14.  Similiter  autem  et  Judas  ea  qu^e  deci- 
derant PER  BELLUM....  CONGREGAVIT  OMNIA.  J  udas 

Maccabée  imita  le  zèle  de  Néhémie,  en  recueil- 
lant les  livres  sacrés, que  la  persécution  d'Antiochus 
Épiphane  avait  dispersés.  On  veut  qu'il  se  soit 
fait  une  seconde  assemblée  générale  des  docteurs 
de  ia  nation  juive,  pour  recevoir  dans  le  canon 
les  livres  qui  avaient  été  écrits  depuis  Néhémie. 
On  peut  remarquer,  dans  le  premier  livre  des 
Maccabées  (4),  qu'au  milieu  de  la  persécution, 
Judas  conservait  précieusement  les  livres  saints, 
et  qu'un  des  premiers  soins  des  ennemis  des 
Juifs,  fut  de  s'en  saisir,  et  de  les  déchirer  (5): 
Libros  legis  Dei  combusserunt  igni,  scindenles  eos. 

f.   15.    Si  ERGO    DESIDERATIS    HJEC,    MITTITE   QUI 

perferant  vobis.  Les  Juifs  d'Egypte  avaient  les 
anciens  livres  saints  recueillis  sous  Néhémie,  et 
traduits  en  grec,  sous  Ptolémée  Philadelphe  ; 
mais  ils  pouvaient  n'avoir  pas  les  monuments 
écrits  depuis  cette  époque,  et  rassemblés  par 
Judas  Maccabée  ;  c'est  de  ces  derniers  qu'il  est 
parlé  ici. 

f.  16.  Acturi  purificationem.  Étant  sur  le 
point  de  célébrer  la  purification,  la  fête  de  la  puri- 
fication du  temple,  par  Judas  Maccabée  ;  c'est  la 
même  fête  qu'il  a  appelée  précédemment  la  fête 
des  Tabernacles  du  25  de  Casleu  (6). 

}.  18.  Speramus  quod  cito  miserebitur,  et 
congregabit  de  sub  cœlo.  La  captivité  de  Ba- 
bylone  étant  finie,  les  J  uifs  jouissaient  de  la  liberté 
dans  leur  pays  ;  ceux  qui  avaient  la  dévotion  de 
retourner  dans  la  Judée,  n'en  étaient  point  empê- 
chés. Quelle  autre  délivrance  pouvaient-ils  donc 
alors  souhaiter, que  la  liberté  et  l'affranchissement 
général,  qu'ils  attendaient  du  Messie,  dont  ils 
ne  doutaient  point  que  la  venue  ne  fût  prochaine? 


(\)  On  peut  voir  sur  le  Canon  des  Juifs,  Gcnebr,  Chro- 
nolcg.  Serar.  Simon,  hist.criliq.  du  V.  T.  I.  1.  c.  I, 
(2)   Kocï  ÊJtiaToXà;  paiiXcio;  jwpi  oiva8Ejj.âwnv. 


(;)  1.  Esdr.  iv.  12;  vi.  5;  vu.  12.  et  11.  Esdr.  11,  8. 

(4)  1.  Macc.  11.  48. 

(5)  1.  Macc.  1.  59.  —  (6)  11.  Macc.  1.  9.  et  18. 


[66 


II.—  MACCABÉES.  —  II.-  DESSEIN   DE   L'AUTEUR 


20.  De  Juda  vero  Machabaeo,  et  fratribus  ejus,  et  de 
templi  magni  purificaiione,  et  de  aras  dedicatione; 

21.  Sed  et  de  praeliis,  quse  pertinent  ad  Antiochum 
Nobilem,  et  filium  ejus  Eupatorem; 

22.  Et  de  illuminationibus  quœ  de  cœlo  factae  sunt  ad 
eos  qui  pro  Judasis  fortiter  fecerunt,  ita  ut  universam 
regionem,  cum  pauci  essent,  vindicarent,  et  barbaram 
multitudinem  fugarent, 

2j.  Et  famosissimum  in  toto  orbe  templum  recupera- 
rent,  et  civitatem  liberarent,  et  leges,  quae  abolitse  erant, 
restituerentur,  Domino  cum  omni  tranquillitate  propitio 
facto  illis  ; 

24.  Itemque  ab  Jasone  Cyrenaeo  quinque  libris  com- 
prehensa,  tentavimus  nos  uno  volumine  breviare. 

15.  Considérantes  enim  multitudinem  librorum,  et  diffi- 
cultatem  volentibus  aggredi  narrationes  historiarum, 
propter  multitudinem  rerum, 

26.  Curavimus  volentibus  quidem  légère, ut  esset  animi 
oblectatio;  studiosis  vero,  ut  facilius  possint  memoriaj 
commendare  ;  omnibus  autem  legentibus  uti I i tas  confe- 
ratur. 

27.  Et  nobis  quidem  ipsis,  qui  hoc  opus  breviandi  causa 
suscepimus  ;  non  facilem  laborem,  immo  vero  negotium 
plénum  vigiliarum  et  sudoris  assumpsimus. 

28.  Sicut  hi  qui  praeparant  convivium,et  quœrunt  alio- 
rum  voluntati  parère  propter  multorum  gratiam,  libenter 
laborem  sustinemus. 


20.  Nous  avons  dessein  d'écrire  ce  qui  regarde  Judas 
Maccabée  et  ses  frères,  la  manière  dont  le  grand  temple 
a  été  purifié,  et  dont  la  dédicace  de  l'autel  s'est  faite; 

21.  Comme  aussi  les  combats  qui  se  sont  livrés  sous 
Antiochus  l'illustre,  et  sous  son  fils  Eupator. 

22.  Et  les  faveurs  éclatantes  qu'ont  reçues  du  ciel  ceux 
qui  ont  combattu  pour  les  Juifs,  avec  un  si  grand  cou- 
rage, qu'étant  peu  de  gens,  ils  se  sont  rendus  maîtres  de 
tout  le  pays,  ont  mis  en  fuite  une  multitude  de  barbares. 

2(.  Ont  recouvré  le  plus  fameux  temple  qui  soit  dans 
le  monde,  ont  délivré  la  ville  de  la  servitude,  et  remis 
en  leur  vigueur  les  lois  qui  avaient  été  abolies,  le  Sei- 
gneur les  ayant  favorisés  par  toutes  sortes  de  témoi- 
gnages de  sa  bonté. 

24.  Enfin  nous  avons  tâché  de  rapporter  en  abrégé 
dans  un  seul  livre,  ce  qui  a  été  écrit  en  cinq  livres  par 
Jason  le  Cyrénéen. 

2<;.  Car,  ayant  considéré  que  la  multitude  des  livres 
rend  l'histoire  difficile  à  ceux  qui  veulent  l'apprendre,  à 
cause  de  ce  grand  nombre  de  choses  qu'on  leur  repré- 
sente, 

26.  Nous  avons  tâché  d'écrire  celle-ci  de  telle  sorte 
qu'elle  r pût  plaire  à  ceux  qui  voudraient  la  lire  ;  qu'elle 
pût  se  retenir  facilement  par  ceux  qui  sont  plus  studieux  ; 
et  qu'elle  pût  également  être  utile  à  tous  ceux  qui  la  liraient. 

27.  Or,  nous  engageant  à  faire  cet  abrégé,  nous  avons 
entrepris  un  ouvrage  qui  demande  une  grande  application 
et  beaucoup  de  peine. 

28.  Nous  l'entreprenons  néanmoins  avec  joie,  en  consi- 
dérant l'avantage  de  beaucoup  de  personnes,  comme 
ceux  qui,  étant  chargés  de  préparer  un  festin,  s'étudient 
à  satisfaire  les  autres. 


COMMENTAIRE 


f.  20.  De  Juda  vero  Machab^o.  Les  deux 
pièces  qui  précèdent,  dans  le  chapitre  premier  et 
dans  celui-ci,  n'ont  point  de  rapport  direct  à  l'his- 
toire des  Maccabées,  qui  ne  commence  qu'au 
chapitre  troisième.  L'auteur  de  cet  ouvrage  est 
un  Juif,  qui  a  réduit  en  un  seul  volume  ce  qui 
avait  été  écrit  auparavant  en  cinq  livres,  par  un 
nommé  Jason  de  Cyrène  (1).  Ici  commence  la 
préface  du  traducteur  ;  c'est  un  petit  morceau 
de  littérature,  où  l'on  constate  malheureusement 
la  disparition  du  génie  hébraïque  devant  les  for- 
mules de  la  rhétorique  grecque. 

f.  22.  De  illuminationibus  qu>e  de  cœlo  fac- 
tje  sunt  ad  eos.  Comme  il  arriva  avant  la  seconde 
expédition  d'Antiochus  contre  l'Egypte  (2).  On 
vit  pendant  quarante  jours,  des  escadrons  de  ca- 
valerie, qui  parurent  en  l'air,  comme  rangés  en 
bataille  ;  et  lorsqu'Héliodore  vint  pour  piller  le 
temple,  il  parut  un  homme  à  cheval,  et  deux  jeu- 
nes hommes  à  pied  (3),  qui  faillirent  le  faire  mou- 
rir de  frayeur  et  de  coups. 

y.  24.  Itemque  ab  Jasone  Cyrenaeo.  La  parti- 
cule ilemque,  qui  se  lit  dans  la  Vulgate,  est  su- 


perflue en  cet  endroit  ;  Jason  était  un  Juif  de  la 
province  de  Cyrène,  voisine  de  l'Egypte;  il  y  eut 
toujours  beaucoup  de  J  uifs  dans  cette  province  (  4). 

$  2$.  Considérantes  enim  multitudinem  li- 
brorum, etc.  Le  grec  (5):  Car  considérant  la  con- 
fusion, ou  la  grande  quantité  des  nombres,  et  la 
difficulté  de  renfermer  tant  de  choses,  dans  le  récit 
d'une  histoire,  à  cause  de  la  multitude  de  la  matière. 
Le  syriaque  :  Faisant  attention  que  le  grand  nom- 
bre des  versets  (ou  des  lignes)  cause  de  l'embarras 
à  ceux  qui  cherchent  à  s'instruire  de  la  vérité  de 
l'histoire,  etc. 

v.  28.  Sicut  hi  qui  préparant  convivium,  et 
qu^runtaliorum  voluntati  parère.  Le  grec  (6): 
De  même  que  celui  qui  prépare  un  festin  et  qui 
cherche  l'avantage  des  autres,  ne  fait  point  une  chose 
aisée  ;  ainsi  nous  nous  exposerons  volontiers  au 
travail,  pour  faire  plaisir  à  plusieurs.  L'auteur 
semble  faire  allusion  à  la  coutume  des  anciens  qui, 
dans  les  festins,  choisissaient  ordinairement  un 
d'entr'eux,  pour  avoir  soin  de  préparer  toutescho- 
ses,  en  sorte  que  chacun  fût  content  (7)  ;  c'était 
un  emploi  fort  difficile  de  plaire  au  goût   de  tout 


(1)  Verset  24. 

(2)  11.  Macc.  v.  2.  ). 

(  j)  II,  Macc.  m.  2Ç.  26. 

(4)  Acl.  11.  10.  -  Joseph.  Anl.ii].  xiv.  i  j;  xvi.  10.  De  Bello 
lib.  vin.  c.  j8. 


(.;)  yjuvopouvTEç  y"P  T°  '(j*}?-*  U')V  *plV'',v>  xo"  x'iv  °ùoav 
3jT/£p£tav  toÎç  OAouai  âazu^Xe'caÛat  zolç,  rfj;  l'atoptaç  3cr)- 
Yiju.aai  oti  -;j  jiXfjOo;  ttjç  G'Xtjç. 

(61  KaOaitep  cû  7tapaa«'uâÇovu  auanoacov,  r.a\  'Çtjtouvt'. 
•ur,y  ET^poiv  Xuaue'Xetav,  où/.  eV/cpe';  [xiv. 

(7)  Voyez  Eccti.  xxxn.  1.  et  Estli.  1.  8. 


II.—  MACCABÉES.  —   II.  -   DESSEIN    DE   L'AUTEUR 


167 


29.  Veritatem  quidem  de  singulis  auctoribus  conceden- 
tes,  ipsi  autem  secundum  datam  formam  brevitati  stu- 
dentes, 

?o.  Sicut  enim  novas  domus  architecto  de  universa 
structura  curandum  est;  ei  vero  qui  pingere  curât,  quas 
apta  sunt  ad  ornatum  exquiranda  sunt  :  ita  œstimanJum 
est  et  in  nobis. 

}I.  Etenim  intellectum  colhgere,  et  ordinare  sermonem, 
et  curiosius  partes  singulas  quasque  disquirere,  historiée 
congruit  auctori  : 


?2.  Brevitatem  vero  dictionis  sectari,  et  executiones 
rerum  vitare,  brevianti  concedendum  est. 

}?•  Hinc  ergo  narrationem  incipiemus:  de  praefatione 
tantum  dixisse  sufficiat  ;  stultum  etenim  est  ante  histo- 
riam  effluere,  in  ipsa  autem  historia  succingi. 


20.  Nous  nous  reposons  de  la  vérité  des  choses  sur  les 
auteurs  qui  les  ont  écrites  ;  mais  pour  nous,  nous  tra- 
vaillerons seulement  à  les  abréger,  selon  le  dessein  que 
nous  avons  pris. 

50.  Car,  comme  un  architecte  qui  entreprend  de  bâtir 
une  nouvelle  maison  est  appliqué  à  en  régler  toute  la 
structure,  et  qu'un  peintre  cherche  seulement  ce  qui  est 
propre  à  l'embellir,  on  doit  juger  de  nous  de  la  môme 
manière. 

jl.  Il  est,  en  effet,  du  devoir  de  celui  qui  compose 
une  histoire,  d'en  recueillir  les  différentes  matières,  de 
les  raconter  dans  un  certain  ordre,  et  de  rechercher 
avec  grand  soin  les  circonstances  particulières  de  ce  qu'il 
raconte. 

52.  Mais  on  ne  doit  pas  trouver  mauvais  que  celui  qui 
fait  un  abrégé  affecte  d'être  court  dans  ce  qu'il  écrit,  et 
qu'il  évite  de  s'étendre  en  de  longs  discours. 

î?.  Nous  commencerons  donc  ici  notre  narration,  et 
nous  finirons  notre  préface  ;  car  il  y  aurait  de  la  folie 
d'être  long  avant  de  commencer  une  histoire,  tandis  que 
l'on  serait  court  dans  l'histoire  même. 


COMMENTAIRE 


le  monde,  et  de  ménager  leurs  intérêts  communs. 

jL  29.  Veritatem  quidem  de  singulis  aucto- 
ribus concedentes.  Le  grec  (1)  :  Nous  laissons  à 
ihislorien,  le  soin  de  donner  une  description  ache- 
vée de  chaque  chose  ;  pour  nous,  nous  nous  effor- 
çons de  suivre  les  traits  d'un  abrégé.  Il  fait  allusion 
à  l'art  des  peintres.  Jason  est  comme  un  peintre 
habile,  qui  a  travaillé  à  faire  un  excellent  tableau  ; 
pour  moi,  je  me  contente  d'en  donner  une  réduc- 
tion ou  une  copie  en  petit. 

f.  30.  Sicut  enim  nov^e  domus  architecto  de 
universa  structura  curandum  est,  etc.  Jason 
est  ce  savant  architecte,  chargé  d'élever  ce  mo- 
nument ;  je  ne  suis  que  comme  un  peintre  occupé 
à  orner  quelques  parties  de  l'édifice.  Les  termes 
grecs,  qui  sont  traduits  par  peindre,  signifient  à  la 
lettre  (2):  Peindre  au  feu,  et  représenter  des  ani- 
maux. Pour  bien  entrer  dans  la  pensée  de  l'au- 
teur, on  doit  faire  attention  que  les  anciens 
avaient  coutume  d'orner  leurs  constructions  de 
peintures  ;  mais  d'une  manière  assez  différente  de 
la  nôtre.  Ils  peignaient  souvent  de  grandes  pièces 
à  fresque,  et  chargeaient  de  peintures  toutes  les 
murailles  d'une  salle  ou  d'une  galerie  (3).  Ce 
n'était  pas  de  simples  tableaux,  que  l'on  plaçait 
où  l'on  voulait;  c'était  une  série  de  peintures,  in- 
séparables des  murailles.  Pour  les  conserver,  et 
pour  donner  du  lustre  à  la  peinture,  on    enduisait 


le  mur  avec  de  la  cire  blanche  (4),  fondue  avec 
un  peu  de  miel  ;  et,  ayant  étendu  cette  composi- 
tion avec  une  brosse,  on  réchauffait  avec  un  ré- 
chaud, puis  on  la  polissait,  en  passant  dessus 
un  linge  bien  net.  C'est  ce  qu'on  appelait  peindre 
avec  le  feu,  ou  brûler.  Il  y  avait  encore  une  autre 
manière  de  peindre  avec  le  feu,  plus  recherchée 
et  plus  riche; elle  consistait  à  représenter  d'ab&rd, 
en  creusant  avec  un  fer  chaud,  la  figure  que  l'on 
voulait  peindre  sur  le  bois  ou  sur  l'ivoire  ;  on  y 
appliquait  ensuite  avec  un  pinceau,  de  la  cire 
blanche  fondue  avec  de  l'huile  et,  après  cela,  on 
échauffait  cette  cire  avec  des  charbons  allumés, 
jusqu'à  ce  que  le  bois  suât;  puis  on  le  frottait 
avec  du  suif,  et  enfin  avec  du  linge,  en  sorte  que 
cette  peinture  devenait  luisante  comme  du  mar- 
bre, et  ne  se  gâtait,  ni  à  l'eau,  ni  au  vent,  ni  au 
soleil  ;  c'était  une  sorte  d'émail.  Pour  revenir  à 
l'abréviateur  de  Jason,  il  se  compare  à  un  pein- 
tre, qui  orne  les  salles  ou  les  galeries  d'un  bâti- 
ment, et  qui  leur  donne  le  lustre  ou  le  vernis, par 
le  moyen  de  la  cire. 

f.  31.  Etenim  intellectum  colligere.  et  ordi- 
nare sermonem.  Le  grec  porte  (j)  :  Il  est  du  de- 
voir de  celui  qui  écrit  un  corps  d'histoire,  de  s'éten- 
dre et  de  promener  son  discours,  et  d'embrasser 
diverses  choses,  entrant  dans  le  détail  des  événe- 
ments. 


(1)  To  uev  ota'ptSoOv  r.iry  =  ,'io-Tojv  ïw  ^uvYpa'fSï  r.aoa- 
•/'•jc.rj'îavTe:,  TO  os  ir.ir.vpzÛE'jOct'.  ^oî;  ù^oypaajjtoî;  Tij; 
EWCOU.JJÇ  Ôia/.OVOÛVCE'. 

(2)  "iô  oè  iy/.txluv  /.ai  Çojypaa-îv  siït^Etpo'ûvu. 
(?)  Voyez  Vitruve,  t.  vu.  c.  ;. 


(4)  Idem.  ibid.  c.  9.  -  Monuments  de  Ninive.  -  Description 
des  ruines  de  Pompeï  et  d'Herculanum. 

(5)  To  [j.èv  É;ji6aTeÙ£iv,  xal  rapiTtâtov  ;roi£îaQai  Xo'yov,  xal 
noXu7ipayu.oveîv  Év  tôt;  xaià  [j.£po;,  tài  Tfj;  iuTOpi'a;  âpx,7)" 
ys'ir)  xaOrfxEi. 


CHAPITRE    III 

Bonheur  des  Juifs  sous  le  pontificat  d'Onias  III.  Simon,  préfet  du  temple,  fait  savoir  à 
Séleucus,  roi  de  Syrie,  qu'il  y  a  de  grands  trésors  dans  le  temple.  Héliodore  est 
envoyé  pour  les  enlever.  Dieu  le  châtie  par  la  main  des  anges. 


I.  Ifjtur  cum  s&ncta  civitas  habitaretur  in  omtii  pace, 
leges  etiam  adhuc  optime  custodirentur,  propier  Onias 
pontifias  pietatem,  et  animos  odio  habentes  mala, 

t.  Fiebat  ut  et  ipsi  reges  et  principes  locum  summo 
honore  dignum  ducerent,  et  templum  maximis  muneribus 
illustrarent; 

;.  Ita  ut  Séleucus,  Asiœ  rex,  de  redditibus  suis  prass- 
taret  omnes  sumptus  ad  ministerium  sacrificiorum  perti- 
nentes. 

4.  Simon  autem,  de  tribu  Benjamin,  prœpositus  templi 
constitutus,  contendebat,  obsistente  sibi  principe  sacer- 
dotum,  iniquum  aliquid  in  civitate  moliri. 


1.  La  cité  sainte  jouissant  donc  d'une  paix  parfaite,  et 
les  lois  y  étant  exactement  observées,  à  cause  de  la  piété 
du  grand  prêtre  Onias  et  de  la  haine  qu'il  avait  dans  le 
cœur  contre  tout  mal, 

2.  Il  arrivait  de  là  que  les  rois  mêmes  et  les  princes 
étrangers  se  croyaient  obligés  d'avoir  pour  le  lieu  saint 
une  grande  vénération,  et  honoraient  le  temple  de  riches 
présents; 

j.  En  sorte  que  Séleucus,  roi  d'Asie,  faisait  fournir  de 
son  domaine  toute  la  dépense  qui  regardait  le  ministère 
des  sacrifices. 

4.  Mais  Simon,  qui  était  de  la  tribu  de  Benjamin,  et 
qui  commandait  à  la  garde  du  temple,  s'efforçait  de  faire 
quelque  entreprise  injuste  dans  la  ville,  malgré  la  résis- 
tance qu'y  apportait  le  prince  des  prêtres. 


COMMENTAIRE 


f.  I.  CUM  SANCTA  CIVITAS  HABITARETUR  IN 
OMNI  PACE...  PROPTER  ONI^E  PONTIEICIS  PIETATEM, 
ET  ANIMOS  ODIO  HABENTES  MALA.  Oll'iaS  III  (i),   fils 

de  Simon  1 1 .  C'est  à  ce  grand  prêtre  que  les  Lacé- 
démoniens  adressèrent  la  lettre  reproduite  dans 
le  premier  livre  des  Maccabées  (2),  et  dans  Josè- 
phe  (3);  c'est  également  à  lui  que  l'auteur  de 
l'Ecclésiastique  a  consacré  le  bel  éloge  que  nous 
lisons  dans  son  livre  (4).  La  paix  et  la  religion 
fleurirent  sous  son  heureux  gouvernement.  Prop- 
ier OnLv  pontifias  pietalem,  et  animos  odio  haben- 
tes mala  (<,).  Ce  pontife  avait  une  vraie  et  solide 
piété,  une  fermeté  inébranlable  contre  les  mé- 
chants, un  zèle  qui  ne  pouvait  souffrir  le  moindre 
désordre.  On  voit  encore  un  fait  très  glorieux 
pour  sa  mémoire  au  chapitre  xv,  12,  et  au  chapi- 
tre 1  du  quatrième  livre  des  Maccabées. 
p.  2.  Fiebat  ut  et  ipsi  reges...   locum  summo 

HONORE    DIGNUM    DUCERENT.  SoUS    SOn    pontificat, 

Antiochus  le  Grand  combla  de  bienfaits  la  ville 
et  le  temple  de  Jérusalem.  On  peut  voir  les  let- 
tres que  ce  prince  écrivit  à  ce  sujet  à  Ptolémée, 
gouverneur  de  la  province  (6).  Sous  ce  terme, 


locum,  on  peut  entendre,  ou  la  ville,  ou  le  tem- 
ple; cette  expression  se  prend  indifféremment 
pour  désigner  l'un  et  l'autre  (7);  mais  ce  qui  ferait 
croire  qu'il  veut  marquer  la  ville  de  Jérusalem, 
c'est  qu'immédiatement  après,  il  parle  du  temple  ; 
Et  templum  maximis  muneribus  illustrarent. 

f.  3.  Séleucus,  Asiœ  rex.  Séleucus,  roi  d'Asie, 
surnommé  Philopator,  fils  aîné  d'Antiochus  le 
Grand,  roi  de  Syrie,  imita  la  piété  de  son  père 
envers  le  temple  de  Jérusalem.  Mais  les  mauvais 
rapports  de  Simon  l'engagèrent  à  s'emparer  du 
trésor  du  temple  et  ce  fait  ternit  sa  mémoire. 

v.  4.  Simon,  de  tribu  Benjamin,  prœpositus 
templi.  Ce  Simon  n'était  ni  prêtre,  ni  lévite,  puis- 
qu'il était  de  la  tribu  de  Benjamin  ;  l'emploi  qu'il 
occupait  ne  se  donnait  pourtant  d'ordinairequ'aux 
enfants  de  Lévi,  comme  on  le  voit  dans  l'histoire 
des  Rois  et  dans  les  Paralipomènes  (8).  Mais  ce 
n'était  pas  une  nécessité  que  le  préfet  ou  l'inten- 
dant du  temple,  fût  de  cette  tribu.  Cet  emploi 
n'avait  rien  de  sacré,  ni  d'incompatible  avec  la 
qualité  de  simple  laïque;  il  n'était  chargé  d'au- 
cune fonction  au-dedans  du  temple;  son  office  se 


(i)  Joseph.  Grot.  Usser.  alii. 
(2)  1.  M  ace.  xii.  20.  et  seq. 
(;)  Joseph.  Antiq.  I.  xn.  c.  5. 
(d)  Hccli.  L. 

(S)  A  là  T7]v  O'v.'oj  tou  A'p/ispe'co;  sjasSetaviE,  /.ai  (j.iao- 
rovrjpîav. 


(0,   Vide  Joseph.  Antiq.  I.  xn.  c.  j. 

(7)  Joan.  xi.  48.  et  infrci  f.  12.  locus  pro  templo  et  forte. 
Psalm.  lxxviii.  -  Jerem.  xix.  ;.  et  passim  pro  Jérusalem. 

(b)  Voyez  iv.  Reg.  XXII.  5.  -  1.  Par.  xxvi.  29.  et  seq.  - 
11.  F.sd.  xi.  16.  Super  omnia  opéra  quas  erant  forinsecus 
in  domo  Dei, 


II.  -    MACCABÉES.  -  III.  -   MISSION    D'HÉLIODORE 


169 


5.  Sed  cum  vincere  Oniam  non  posset,  venit  ad  Apol- 
lonium,  Tharsasœ  filium,  qui  eo  tempore  erat  dux  Cœle- 
syrias  et  Phœnicis  ; 

6.  Et  nuntiavit  ei,  pecuniis  innumerabilibus  plénum  êsse 
rerarium  Jerosolymis,  et  communes  copias  immensas 
esse,  quse  non  pertinent  ad  rationem  sacrificiorum  ;  esse 
autem  possibile  sub  potestate  régis  cadere  universa. 


7.  Cumque  retulisset  ad  regem  Apollonius  de  pecuniis 
quas  delatae  erant,  ille  accitum  Heliodorum,  qui  erat 
super  negotia  ejus  misit  cum  mandatis,  ut  prajdictam 
pecuniam  transportaret. 

8.  Stalimque  Heliodorusiter  est  aggressus,  specie  qui- 
dem  quasi  per  Cœlesyriam  et  Phœnicen  civitates  esset 
peragraturus.re  vera  autem  régis  propositum  perfecturus. 

9.  Sed,  cum  venisset  Jerosolyman,  et  bénigne  a  summo 
sacerdote  in  civitate  esset  exceptus,  narravit  de  dato 
indicio  pecuniarum,  et,  cujus  rei  gratia  adesset,  aperuit  ; 
interrogabat  autem,  si  vere  hase  ita  essent. 

10.  Tune  summus  sacerdos  ostendit  deposita  esse  heec, 
et  victualia  viduarum  et  pupillorum  ; 


5.  Et  voyant  qu'il  ne  pouvait  vaincre  Onias,  il  alla  trou- 
ver Apollonius,  fils  de  Tharsée,  qui  commandait  en  ce 
temps  là  dans  la  Coelé-Syrie  et  dans  la  Phénicie. 

6.  Il  lui  déclara  qu'il  y  avait  dans  Jérusalem  des  sommes 
infinies  d'argent  ramassées  dans  un  trésor  ;  que  ces 
sommes  étaient  immenses  et  destinées  pour  les  affaires 
publiques,  et  non  pour  la  dépense  des  sacrifices  ;  et 
qu'on  pourrait  bien  trouver  le  moyen  de  faire  tomber 
tous  ces  trésors  entre  les  mains  du  roi. 

7.  Apollonius  ayant  donné  au  roi  cet  avis,  qu'il  avait 
reçu  touchant  cette  grande  quantité  d'argent,  le  roi  fit 
venir  Héliodore,  qui  était  son  premier  ministre,  et  l'en- 
voya avec  ordre  de  faire  transporter  tout  cet  argent. 

8.  Héliodore  se  mit  aussitôt  en  chemin,  comme  pour 
visiter  les  villes  de  Cœlé-Syrie  et  de  Phénicie,  mais 
véritablement  dans  le  dessein  d'exécuter  l'intentiondu  roi. 

9.  Étant  arrivé  à  Jérusalem,  et  ayant  été  reçu  dans  la 
ville  par  le  grand  prêtre  avec  déférence,  il  lui  déclara 
l'avis  qu'on  avait  donné  au  roi  touchant  cet  argent,  et  le 
vrai  suiet  de  son  voyage  ;  et  il  demanda  si  ce  qu'on  avait 
dit  était  véritable. 

10.  Alors  le  grand  prêtre  lui  représenta  que  cet  argent 
était  en  dépôt  dans  le  temple  ;  que  c'était  la  subsistance 
des  veuves  et  des  orphelins  ; 


COMMENTAIRE 


bornait  à  l'entretien  des  bâtiments  du  temple  ;  ou 
à  acheter  les  provisions  et  les  habits  des  prê- 
tres (1). 

CONTENDEBAT,  OBSISTENTE  SIBI  PRINCIPE  SACER- 
DOTÎJM,  INIQUUM  ALIQUID   IN     CIVITATE  MOLIRI.    Le 

grec  de  l'édition  romaine  (2)  :  //  étail  en  différend 
avec  le  grand  prêtre,  sur  les  transgressions  de  la 
loi,  qui  se  commettaient  dans  la  ville.  Les  autres 
éditions  portent,  que  ce  différend  regardait  la 
charge  de  lieutenant  de  police,  ou  de  gouverneur 
de  la  ville. 

f.  ).  Venit  ad  Apollonium.  C'est  le  même 
dont  il  est  parlé  dans  le  premier  livre  des  Macca- 
bées,  et  qui  attaqua  Jonathas  avec  si  peu  de 
succès  (3). 

,v.  6.  Communes  copias  immensas  esse.  Simon 
n'ignorait  pas  que  Séleucus  n'eût  du  respect  pour 
le  temple  de  Jérusalem,  puisqu'il  fournissait  à  ses 
frais  les  victimes  pour  les  sacrifices  (q).  Il  lui  fait 
comprendre  que  les  Juifs  ont  dans  le  temple  un 
trésor  public,  qui  renferme  d'immenses  richesses. 
Un  prince  dans  le  besoin,  comme  était  alors 
Séleucus,  encore  chargé  d'une  partie  du  tribut 
que  les  Romains  avaient  imposé  à  son  père^  ne 
manquait  pas  de  prétextes,  pour  se  saisir  de  ces 
sortes  de  biens,  des  villes  et  des  communautés. 

La  calomnie  est  toujours  armée  de  prétextes 
spécieux,  capables  d'imposer  aux  meilleures  in- 
tentions des  princes.  Séleucus,  qui  honorait, 
comme  on  l'a  dit,  le   temple   de  Jérusalem,  n'au- 


rait pas  été  si  susceptible  des  mouvements  d'ava- 
rice qu'on  voulait  lui  inspirer,  si  on  ne  lui  eût 
représenté  les  trésors  du  temple,  comme  n'étant 
point  destinés  au  culte  sacré  de  la  religion  des 
Juifs,  mais  aux  dépenses  de  l'état.  Il  ne  songe 
point  à  s'informer  davantage  de  la  vérité,  et,  sans 
consulter  si  la  justice  permettait  qu'il  fît  ce  que 
la  seule  avarice  lui  inspirait,  il  charge  Héliodore 
d'aller  enlever  tout  cet  argent  dont  on  lui  avait 
parlé. 

,v.  7.  Heliodorum,  qui  erat  super  negotia. 
Le  grec())  :  Sur  son  argent;  surintendant  de  ses 
finances.  L'édition  romaine  et  le  syriaque  lisent 
comme  la  Vulgate  :  Qui  était  sur  ses  affaires.  Le 
quatrième  livre  des  Maccabées,  ne  parle  point 
d'Héliodore  ;  il  porte  que  ce  fut  Apollonius 
qui  vint  au  temple,  et  qui  y  fut  traité  comme 
l'Ecriture  le  dit  ici  d'Héliodore. 

f.  10.  Deposita  esse  hjec,  et  victualia  vidua- 
rum et  pupillorum.  Le  grec  lit  simplement,  que 
c'étaient  (6)  les  dépôts  des  veuves  et  des  orphelins. 
On  peut  l'entendre  en  deux  manières  :  la  pre- 
mière, que  cet  argent  était  des  aumônes  ou  des 
offrandes  qui  se  faisaient  au  temple,  pour  l'entre- 
tien des  veuves  et  des  orphelins,  conformément 
à  la  loi  (7),  qui  veut  que,  chaque  année,  on  apporte 
au  temple,  ou  en  argent,  ou  en  espèces,  une  sorte 
de  dîmes,  pour  y  faire  des  festins,  en  faveur  de 
la  veuve  et  de  l'orphelin.  La  seconde  manière 
d'expliquer  ce  passage,  est  de  dire  que  les  veuves 


(i)  n.  Paralip.  xxxiv.  8.  9.  -  iv.  Reg.  xu.  10. 

(2)  Atr)V£/')r)  tùi  âpytepet  7:spt  xfjç  xaià  Trjv  7côXtv  rapa- 
vop.(a;.  Ms.  Alex,  et  Ed.it.  Reg.  resp'.  xr]z  /.ara  ti)V  r.ijlw 
âyopavou.taç. 

(?)  1.  M  ace.  x.  69.  et  seq. 


(4)  Sup.f.  h 

(5)  Tô;  ÉJîi  tûv  ^p7)jjtâta)v.  Edit.  Rom.  et  Ms.  Alex,  tôv 
ici  t(ùv  JtpaypiaTOJv. 

(6)  n<xpaQ}]xaç  e'tvoa  /7]pàivrs   xat  âpcpavffiv.  Ita  et  Syr. 

(7)  Deut.  xtv.  2?.  24.  et  seq.  lia  Lyran.  Menoch. 


I"0 


II.         MACCABÉES.  —  III.  -   MISSION    D'HÉLIODORE 


il.  Quaedam  vero  esse  Hircani  Tobiae,  viri  valde  emi- 
nentis,in  his  quœ  detulerat  impius  Simon;  uni  versa  au  te  m 
argenti  taler.ta  esse  quadringenta,  et  auri  ducenta; 


12.  Decipi  vero  eos,  qui  credidissent  loco  et  templo, 
quod  per  universum  mundum  honoratur,  pro  sui  venera- 
tione  et  sanctitate,  omnino  impossibile  esse. 

i  ;.  At  i lie,  pro  his  quœ  habebat  in  mandatis  a  rege, 
dicebat  omni  génère  régi  ea  esse  deferenda. 

14.  Constituta  autem  die  intrabat  de  his  Heliodorus 
ordinaturus.  Non  modica  vero  per  universam  civitatem 
erat  trepidatio. 

«Ç.  Sacerdotes  autem  ante  altare  cum  stolis  sacerdota- 
libus  jactaverunt  se,  et  invocabant  de  cœlo  eum,  qui  de 
depositis,  legem  posuit  ut  his,  qui  deposuerant  ea,  salva 
custodiret. 

16.  Jam  vero  qui  videbat  summi  sacerdotis  vultum, 
mente  vulnerabatur  ;  faciès  enim  et  color  immutatus 
declarabat  internum  animi  dolorem. 

17.  Circumfusa  enim  erat  mœstitia  quœdam  vir>,  et 
horror  corporis,  per  quem  manifestus  aspicientibus  dolor 
cordis  ejus  efficiebatur. 

18.  Alii  etiarn  gregatim  de  domibus  confluebant,  publica 
supplicatione  obsecrantes,  pro  eo  quod  in  contempium 
locus  esset  venturus. 


11.  Qu'une  partie  même  de  cet  argem,  que  l'impie 
Simon  av.iit  signalé,  appartenait  à  Hyrcan  fils,  de  Tobie, 
homme  d'une  très  grande  considération,  et  que  toute 
cette  somme  consistait  en  quatre  cents  talents  d'argent, 
et  en  deux  cents  talents  d'or  ; 

12.  Qu'au  reste,  il  était  absolument  impossible  de  trom- 
per ceux  qui  avait  cru  ne  pouvoir  mieux  assurer  leur 
argent,  qu'en  le  mettant  en  dépôt  dans  un  temple  qui 
était  en  vénération  à  toute  la  terre  pour  sa  sainteté. 

II.  Mais  Héliodore,  insistant  sur  les  ordres  qu'il  avait 
reçus  du  roi,  répondit  qu'il  fallait,  à  quelque  prix  que  ce 
fût,  que  cet  argent  fût  porté  au  roi. 

14.  Il  entra  donc  dans  le  temple  le  jour  qu'il  avait 
marqué  pour  exécuter  cette  entreprise  :  cependant  toute 
la  ville  était  remplie  d'effroi. 

IÇ.  Les  prêtres  se  prosternaient  au  pied  de  l'autel  avec 
leurs  robes  sacerdotales,  et  ils  invoquaient  Celui  qui  est 
dans  le  ciel,  et  qui  a  fait  la  loi  louchant  les  dépôts,  le 
priant  de  conserver  les  dépôts  de  ceux  qui  les  avaient 
mis  dans  son  temple. 

16.  Mais  nul  ne  pouvait  regarder  le  visage  du  grand 
prêtre,  sans  être  touché  jusqu'au  cœur,  car  le  change- 
ment de  son  teint  et  de  sa  couleur  marquait  clairement  la 
douleur  intérieure  de  son  âme. 

i/.  Une  certaine  tristesse  répandue  dans  tout  son  exté- 
rieur, et  l'horreur  même  dont  son  corps  paraissait  saisi, 
découvraient  à  ceux  qui  le  regardaient,  quelle  était  la 
plaie  de  son  cœur. 

18.  Plusieurs  accouraient  en  troupes  de  leurs  maisons, 
conjurant  Dieu,  par  des  prières  publiques,  de  ne  pas 
permettre  qu'un  lieu  si  saint  fût  exposé  au  mépris. 


COMMENTAIRE 


et  les  orphelins,  et  en  général  quiconque  avait 
dessein  de  conserver  plus  sûrement  ce  qu'il  avait, 
le  mettait  en  dépôt  dans  le  temple,  comme  cela 
se  oratiquait  de  tous  temps  parmi  tous  les  peuples. 
On  ne  croyait  pas  pouvoir  placer  plus  sûrement 
ce  qu'on  avait  de  précieux,  que  dans  ces  lieux 
sacrés  (1). 

Rien  n'est  plus  commun  que  la  disposition  du 
cœur  d'Héliodore  :  il  s'informe  au  grand  prêtre, 
si  ce  qu'on  avait  mandé  au  roi  touchant  ces  tré- 
sors immenses  gardés  dans  le  temple,  était  véri- 
table :  il  apprend  qu'ils  y  étaient,  mais  seulement 
en  dépôt,  et  qu'ils  étaient  même  en  partie  desti- 
nés pour  la  subsistance  des  veuves  et  des  orphe- 
lins. Mais  il  ne  s'attache  qu'à  l'une  de  ces  deux 
vérités  qui  était  capable  de  satisfaire  l'avarice  du 
roi  son  maître,  et  il  néglige  l'autre  qui  était  con- 
traire à  son  dessein.  Il  se  contente  d'être  assuré 
de  la  vérité  de  ces  trésors,  sans  se  mettre  en  peine 
de  cette  autre  vérité  bien  plus  importante  qu'il 
ne  pouvait  pas  toucher  à  un  dépôt,  et  à  la  vie  des 
pauvres  veuves  et  des  orphelins.  C'est  ainsi  qu'il 
arrive  encore  tous  les  jours,  que  des  vérités  de 
l'Évangile  qui  nous  sont  prêchées,  nous  en  pre- 
nons ce  qui  paraît  plus  conforme  à  notre  humeur, 
ou  moins  opposé  à  nos  inclinations;  et  que   nous 


laissons  à  part  ce  qui  choque  davantage  la  pas- 
sion dominante  de  notre  cœur.  Nous  nous  atta- 
chons à  ce  qui  nous  plaît,  et  nous  rejetons  ce  qui 

nous  gêne. 

).     II.    Qu/EDAM    VERO    ESSE    TOBI.E     HlRCANI. 

Qu'une  partie  de  cet  argent  appartenait  à  Hyrcan 
Tobie,  ou  plutôt,  à  Hyrcan,  fils  de  Joseph,  petit- 
fils  de  Tobie,  alors  fort  connu  dans  ce  pays  (2). 
Il  avait  été  établi  par  Séleucus,  gouverneur  de 
tout  le  pays  au-delà  le  Jourdain,  et  il  en  levait  les 
tributs  pour  le  roi. 

}/.  12.  Decipi  vero  qui  credidissent  loco... 
impossibile  esse.  Le  grec  (î)'-H  était  injuste, 
indigne,  contraire  à  toutes  les  lois,  de  frauder 
ceux  qui  avaient  confié  leur  argent  au  temple.  Les 
jurisconsultes  disent  qu'une  chose  est  impossible, 
lorsqu'elle  est  contre  la  justice. 

^.15.  Sacerdotes  autem  ante  altare  cum 
stolis  sacerdotalibus  jactaverunt  se,  etc.  On 
vit  autrefois  Moïse  combattre  les  ennemis  du  peu- 
ple de  Dieu,  et  les  vaincre,  en  étendant  ses  mains 
vers  le  ciel  et  en  priant.  C'est  aussi  par  la  prière, 
que  ces  prêtres  se  disposent  à  résister  à  la  vio- 
lence d'Héliodore,  qui  ne  regardait  que  les  ordres 
de  son  maître,  sans  envisager  le  respect  qu'il  de- 
vait avoir  pour  un  lieu  si  saint.  Comme  le  grand 


(1)  Vide  si  placet  Grol.  hic. 

(2)  Joseph.  Antiq.  t.  xn.  c. 


ï>erar  et  ex  eo  Tir  in. 
4- 


(?)  A'ôtx7]0fjvat  os  toù;  TCsptuxsu/.ôta;  tïj  toû  to'tiou  âyico- 
aûv»j...  r.txvtwi  àurj/avov  E^ivat. 


II. 


MACCABÉES.  —  III.  -   DÉSOLATION    DES  JUIFS 


17' 


10.  Accinctaeque  mulieres  ciliciis  pectus,  per  plateas 
confluebant  ;  sed  et  virgines  quae  conclusas  erant,  procur- 
rebant  ad  Oniam,  alias  autem  ad  muros,  quasdam  vero 
per  fenestras  aspiciebant  ; 

20.  Universas  autem  protendentes  raanus  in  cœlum 
deprecabantur  : 

21.  Erat  enim  misera  commistas  multitudinis,  et  magni 
sacerdotis  in  agone  constituti  expectatio. 


22.  Et  hi  quidem  invocabant  omnipotentem  Deum,  ut 
crédita  sibi,  his  qui  crediderant,  cum  omni  integritate 
conservarentur  ; 

2?.  Heliodorus  autem,  quod  decreverat,  perficiebat 
eodem  loco  ipse  cum  satel litibus  circa  œrarium  prassens. 

24.  Sed  spiritus  omnipotentis  Dei  magnam  fecit  suae 
ostensionis  evidentiam,  ita  ut  omnes,  qui  ausi  fuerant 
parère  ei,  ruentes  Dei  virtute,  in  dissolutionem  et  for- 
midinem  converterentur. 

25.  Apparuitenim  illis  quidam  equus  terribilem  habens 
sessorem,  optimis  operimentis  adornatus  ;  isque  cum  im- 
petu  Heliodoro  priores  calces  elisit;  qui  autem  ei  sede- 

bat,  videbatur  arma  habere  aurea. 


19.  Les  femmes  revêtues  de  cilices,  qui  les  couvraient 
jusqu'à  la  ceinture,  allaient  en  foule  par  les  rues  ;  les 
filles  mêmes,  qui  demeuraient  auparavant  renfermées, 
couraient  les  unes  vers  Onias,  les  autres  vers  les  murailles 
du  temple,  et  quelques-unes  regardaient  par  les  fenêtres. 

20.  Toutes  adressaient  leurs  prières  à  Dieu,  en  éten- 
dant leurs  mains  vers  le  ciel. 

21.  Et  c'était  vraiment  un  spectacle  digne  de  piété,  de 
voir  toute  cette  multitude  confuse  de  peuple, et  le  grand 
prêtre  accablé  d'affliction,  dans  l'attente  où  ils  étaient  de 
ce  qui  arriverait. 

22.  Pendant  que  les  prêtres  invoquaient  le  Dieu  tout- 
puissant,  afin  qu'il  conservât  inviolable  le  dépôtde  ceux 
qui  le  leur  avaient  confié, 

2î.  Héliodore  ne  pensait  qu'à  exécuter  son  dessein, 
étant  lui-même  présent  avec  ses  gardes  à  la  porte  du 
trésor. 

24.  Mais  l'esprit  du  Dieu  tout-puissant  se  fit  voir  alors 
par  des  marques  bien  sensibles  ;  en  sorte  que  tous  ceux 
qui  avaient  osé  obéir  à  Héliodore,  étant  renversés  par 
une  vertu  divine,  furent  tout  d'un  coup  frappés  d'une 
frayeur  qui  les  mit  hors  d'eux-mêmes. 

25.  Car  ils  virent  paraître  un  cheval  très  richement 
caparaçonné,  sur  lequel  était  monté  un  homme  terrible, 
qui,  fondant  avec  impétuosité  sur  Héliodore,  le  frappa 
en  lui  donnant  plusieurs  coups  des  deux  pieds  de  devant, 
et  celui  qui  était  monté  dessus  semblait  avoir  des 
armes  d'or. 


COMMENTAIRE 

prêtre  Onias  surpassait  autant  les  autres  par  sa 
piété,  que  par  l'éminence  de  sa  dignité,  il  sentait 
encore  plus  vivement  l'outrage  qu'on  voulait  faire 
au  temple  en  ravissant  ces  dépôts  sacrés.  Son 
silence  et  la  douleur  intérieure  de  son  cœur 
étaient  une  voix  qui  s'élevait  jusqu'au  trône  du 
Seigneur  :  et  son  visage  abattu  faisait  connaître  à 
tous  ceux  qui  le  voyaient,  quelle  était  l'angoisse 
de  son  âme,  et  quelle  devait  être  aussi  celle  de 
tous  les  vrais  serviteurs  de  Dieu.  Cependant  l'im- 
pie croyait  triompher,  parce  qu'on  ne  lui  opposait 
point  d'autres  armes  que  les  prières.  Mais  ces 
gémissements  arrachés  à  la  faiblesse,  à  des  prêtres 
désarmés,  à  une  population  timide,  à  des  femmes 
et  à  des  jeunes  filles  consternées,  sont  plus 
puissants  que  l'audace,  car  le  ciel  est  intéressé  à 
les  soutenir. 
f.  19.  Sed  et  virgines  qvje  conclus^  erant, 

PROCURREBANT  AD  ONIAM,  ALI/E  autem  ad    muros. 

Dans  l'Orient,  les  filles  ne  paraissaient  presque 
jamais  au  dehors  de  la  maison  ;  les  Hébreux  leur 
donnent  le  nom  d,Alamôth(i),  qui  signifie  cachées, 
fermées.  L'auteur  ne  peut  guère  exprimer  d'une 
manière  plus  forte,  la  consternation  où  se  trouva 
Jérusalem,  qu'en  disant  que  les  vierges  même 
sortirent  de  leurs  maisons,  et  coururent  les  unes 
vers  Onias,  les  autres  vers  les  murailles,  comme 
dans  une  ville  prise  par  l'ennemi. 


jfr.  21.  Erat  enim  misera  commist^e  multitudi- 
nis, et  magni  sacerdotis  in  agone  constituti 
expectatio.  Le  grec  (2):  Celait  une  chose  digne 
de  compassion,  de  voir  celte  multitude  jetée  par 
terre  confusément,  et  l'attente  du  grand  prêtre,  qui 
était  alors  dans  un  violent  combat,  partagé  entre 
la  crainte  et  l'espérance.  Dans  de  sembla- 
bles occasions,  on  a  souvent  vu  les  Juifs  se  jeter 
par  terre,  et  y  demeurer  couchés  pendant  un  long 
temps,  pour  apaiser  la  colère  du  ciel,  ou  pour 
fléchir  la  dureté  de  ceux  qui  les  persécutaient  (3). 

f.  24.  Qui  ausi  fuerant  parère  ei.  Le  grec  (4): 
Tous  ceux  qui  furent  asse%  hardis  pour  s'y  trouver, 
pour  se  trouver  avec  Héliodore,  quand  il  voulut 
ouvrir  le  trésor,  etc. 

Jt.  25.  Apparuit  enim  illis  quidam  equus,  etc. 
Les  prières,  les  soupirs,  les  vœux  ardents  du  grand 
prêtre  Onias  et  des  autres  prêtres,  du  peuple,  des 
femmes  et  des  filles,  qui  imploraient  tous  ensem- 
ble, avec  une  profonde  humilité,  le  secours  du 
ciel,  firent  une  sainte  violence  à  Dieu,  qui  humilia 
toutd'un  coup  le  superbe  Héliodoreavectousceux 
de  sa  suite.  Tout  fut  renversé  en  un  instant  par 
la  vertu  de  l'Esprit  de  Dieu.  Ces  soldats  impi- 
toyables que  n'arrêtait  aucun  scrupule,  senti- 
rent combien  ils  étaient  extravagants  d'entre- 
prendre d'attaquer  ainsi  sa  toute  puissance.  Cet 
homme   terrible  habillé  magnifiquement,  et   monté 


(1)  rirnSy  A'i    8à  y.a-câxXetatoi    tojv   7rap0£va)v.     Vide    m. 
Macc.  1.  15.  -  Philo  de  Flacco. 

(2)  E'Xeêiv  oè  rjv    xov   toû;    rcXrjûou;  r.ajxjjLtY^   KpdrcTuxjtv, 
■trjvie  toû  [xcyâXou  ocayiovi-ôvco;  <xp-/_iepc'u>ç  rcpoaooxiav- 


{))  Verset  1$.  el  Joseph,  passim.  et   Judith.  îv. 
et  11.  Macc.  xiii.  12.  etc. 

(4)  Q"<m  mxvta;  xat«i:oXfj.7J3avca;  auvsXOetv. 


vu.  4. 


I"'2 


MACCABÉES. 


III.-  CHATIMENT  D'HÉLIODORE 


26.  Alii  etiam  apparuerunt  duo  juvenes  virtute  decori, 
optimi  gloria,  speciosique  amictu,  qui  circumsteterunt 
eum,  et  ex  utraque  parte  flagellabant,  sine  intermissione 
multis  plagis  verberantes. 

27.  Subito  autem  Heliodorus  concidit  in  terram,  eum- 
que  multa  caligine  circumfusum  rapuerunt,  atque  in  sella 
gestatoria  positum  ejecerunt. 

28.  Et  is,  qui  cum  multis  cursoribus  et  satellitibus  pras- 
dictum  ingressus  est  aerariiim,  portabatur  nullo  sibi  auxi- 
lium  ferente,  manifesta   Dei  cognita  virtute. 

29.  Et  i I le  quideni  per  divinam  virtutem  jacebat  mutus, 
atque  omni  spe  et  salute  privatus. 

îo.  Hi  autem  Dominum  benedicebant,  qui  magnificabat 
locum  suum;  et  templum,  quod  pauto  ante  timoré  ac  tu- 
multu  erat  plénum,  apparente  omnipotente  Domino,  gau- 
dio  et  laetitia  impletum  est. 

51.  Tune  vero  ex  amicis  Heliodori  quidam  rogabant 
confestim  Oniam  ut  invocaret  Altissimum,  ut  vitam  dona- 
ret  ei  qui  in  supremo  spiritu  erat  constitutus. 

?  2.  Considerans  autem  summus  sacerdos,  ne  forte  rex 
suspicaretur  malitiam  aliquam  ex  Judasis  circa  Heliodo- 
rum  consummatam,  obtulit  pro  salute  viri  hostiam  salu- 
tarem. 

?;.  Cumque  summus  sacerdo:  exoraret.  iidem  juvenes, 
eisdem  vestibus  amicti,  astantes  Heliodoro,  dixerunt  : 
Onia;  sacerdoli  gratias  âge  ;  nam  propter  eum  Ijominus 
tibi  vitam  donavit. 

54.  Tu  autem  a  Deo  flagellatus,  nuntia  omnibus  magna- 
lia  Dei  et  potestatem.  Et    his    dictis,  non  comparuerunt. 

75.  Heliodorus  autem.  hostia  Deo  oblata,  et  votis  ma- 
gnis  promissis  ei  qui  vivere  illi  concessit,  et  Oniae  gra- 
tias agens,  recepto  exercitu,  repedabat  ad  regem. 


26.  Deux  autres  jeunes  hommes  parurent  en  même 
temps,  pleins  de  force  et  de  beauté,  brillants  de  gloire, 
et  richement  vêtus,  qui,  se  tenant  aux  deux  côtés 
d'Héliodore,  le  fouettaient  chacun  de  son  côté  et  le 
frappaient  sans  relâche. 

27.  Héliodore  tomba  tout  d'un  coup  par  terre,  enve- 
loppé d'obscurité  et  de  ténèbres  :  et  ayant  été  mis  dans 
une  chaise,  on  l'emporta  de  là,  et  on  le  chassa  hors  du 
temple. 

28.  Ainsi  celui  qui  était  entré  dans  le  trésor  avec  un 
grand  nombre  de  satellites  et  de  gardes  était  emporté, 
sans  que  personne  pût  le  secourir  ;  la  vertu  de  Dieu 
s'étant  fait  connaître  manifestement. 

20.  Cette  vertu  divine  le  réduisit  à  demeurer  couché 
par  terre,  sans  voix,  et  sans  aucune  espérance  de  vie. 

jo.  Mais  les  autres  bénissaient  le  Seigneur  de  ce  qu'il 
relevait  la  gloire  de  son  lieu  saint  ;  et  le  temple  qui 
était  rempli  auparavant  de  frayeur  et  de  tumulte,  le  fut 
ensuite  d'allégresse  et  de  cris  de  joie,  le  Seigneur  y 
ayant  fait  paraître  sa  toute-puissance. 

JI.  Alors  quelques-uns  des  amis  d'Héliodore  se  hâtè- 
rent de  supplier  Onias  de  vouloir  invoquer  le  Très-Haut, 
afin  qu'il  donnât  la  vie  à  celui  qui  était  réduit  à  l'extré- 
mité. 

?2.  Le  grand  prêtre  considérant  que  le  roi  pourrait 
peut-être  soupçonner  les  Juifs  d'avoir  commis  quelque 
attentat  contre  Héliodore,  offrit  pour  sa  guérison  une 
hostie  salutaire. 

55.  Et  lorsque  le  grand  prêtre  faisait  sa  prière,  les 
mêmes  jeunes  hommes,  revêtus  de  leurs  habits,  se  pré- 
sentèrent à  Héliodore,  et  lui  dirent  :  Rendez  grâces  au 
grand  prêtre  Onias,  car  le  Seigneur  vous  a  donné  la  vie 
à  cause  de  lui. 

;4.  Ayant  donc  été  ainsi  châtié  de  Dieu,  annoncez  à 
tout  le  monde  ses  merveilles  et  sa  puissance.  Après  avoir 
dit  ces  paroles,  ils  disparurent. 

?i.  Héliodore  ayant  offert  une  hostie  à  Dieu,  et  fait 
des  vœux  et  de  grandes  promesses  à  Celui  qui  lui  avait 
redonné  la  vie,  rendit  grâces  à  Onias,  alla  rejoindre  les 
troupes,  et  retourna  vers  le  roi. 


COMMENTAIRE 


sur  un  cheval,  qui  parut  fondre  d'abord  sur  Hé- 
liodore pour  le  châtier  de  son  orgueil,  pouvait 
bien  représenter  saint  Michel,  le  protecteur  du 
peuple  de  Dieu  :  et  ces  deux  autres  jeunes  hom- 
mes qui  parurent  en  même  temps  tout  brillants  de 
gloire,  et  qui  fouettèrent  longtemps  Héliodore, 
jusqu'à  le  laisser  à  demi-mort,  étaient  sans  doute 
deux  autres  anges,  à  qui  Dieu  avait  donné  ordre 
de  réprimer  l'insolence  de  ce  chef  impie,  et  de 
venger  l'honneur  de  son  temple  et  sa  propre  gloi- 
re. Saint  Ambroise  prenait  autrefois  son  peuple  à 
témoin,  combien  il  s'était  souvent  opposé  aux  em- 
pereurs, et  quels  combats  il  avait  été  obligé  de 
soutenir  pour  la  défense  des  dépôts  sacrés  que  l'on 
confiait  à  la  garde  de  l'Église  (  1  ),  et  il  assure  qu'il 
fallut  un  jour  se  servir  de  l'exemple  du  châtiment 
d'Héliodore,  pour  faire  entendre  à  l'empereur 
qu'il  voulait  usurper  des  biens  sacrés  auxquels  il 
était  très  dangereux  de  toucher  :  Exposila  divinœ 
legis  auctoritate,  et  Heliodori  periculo,  vix  tandem 
rationem  imperator  accepit. 


jh  27.  Concidit  in  terram.  L'arabe  dit  qu'il 
entra  à  cheval  dans  le  temple,  et  qu'il  fut  renversé 
de  son  cheval  par  un  ange  armé  de  toutes  pièces, 
et  monté  sur  un  cheval  d'une  grandeur  extraor- 
dinaire (2). 

Jr.  32.  Hostiam  salutarem.  Le  grec,  simple- 
ment, une  hostie  ;  le  traducteur  a  ajouté  salutaire, 
avec  raison,  puisqu'en  effet,  ce  sacrifice  était 
pour  obtenir  la  guérison  d'Héliodore. 

j8\  33.  Propter  eum  Dominus  tibi  vitam  do- 
navit.  Un  si  grand  prodige  étonna  ces  infidèles, 
et,  frappés  de  la  puissance  du  Dieu  des  Juifs,  ils 
ne  doutèrent  point  que  Celui  qui,  par  une  vertu 
divine,  avait  réduit  tout  d'un  coup  Héliodore  à 
une  si  grande  extrémité,  ne  pût  aussi  l'en  retirer 
par  sa  volonté  toute-puissante.  Ainsi  la  foi  que 
ces  idolâtres  firent  paraître  en  cette  circonstance, 
était  comme  une  autre  espèce  de  prodige  aussi 
surprenant  que  le  premier  :  et  cette  humble  sou- 
mission avec  laquelle  ils  viennent  prier  le  grand 
prêtre  de  redonner  la  santé  à  celui  qui  venait  de 


(1)  Ambros.  de  Offic.  lib  11.  cap.  29. 


(2)  Arab.  11.  Macc.  1.  in  Bibt.  Polygloti.  Paris. 


II.  —  MACCABÉES.  —   III.  -  SES  SENTIMENTS 


'73 


;6-  Testabatur  autem  omnibus  ea  quae  sub  oculis  suis 
viderat  opéra  magni  Dei. 

;■?.  Cum  autem  rex  interrogasset  Heliodorum,  quis 
esset  aptus  adhuc  semel  Jerosolymam  mitti,  ait  : 

j8.  Si  quem  habes  hostem,  aut  regni  tui  insidiatorem, 
mitte  illuc,  et  HagelUitum  eum  recipies,  si  tamen  evase- 
rit,  eo  quod  in  loco  sit  vere  Dei  quaedam  virtus. 


10.  Nam  ipse,  qui  habet  in  cœlis  habitationem,  visi- 
tator  et  adjutor  est  loci  illius,  et  venientes  ad  malefacien- 
dum  percutit,ac  perdit. 

40.  Igitur  de  Heliodoro,  et  asrarii  custodia,  ita  res  se 
habet. 


?6.  Il  rendait  témoignage  à  tout  le  monde  des  œuvres 
du  grand  Dieu,  qu'il  avait  vues  de  ses  yeux. 

57.  Et  le  roi  lui  demandant  qui  lui  paraissait  propre 
pour  être  encore  envoyé  à  Jérusalem,  il  lui  répondit  : 

j8.  Si  vous  avez  quelque  ennemi,  ou  quelqu'un  qui  ait 
formé  des  desseins  sur  votre  royaume,  envoyez-le  en  ce 
lieu;  et  vous  le  verrez  revenir  déchiré  de  coups,  si  néan- 
moins il  en  revient,  parce  qu'il  y  a  véritablement  quelque 
vertu  divine  dans  ce  temple. 

Î9.  Car  celui  qui  habite  dans  le  ciel,  est  lui-même  pré- 
sent en  ce  lieu,  il  en  est  le  protecteur  :  et  il  frappe  de 
plaies,  et  fait  périr  ceux  qui   viennent  pour  faire  du  mal. 

40.  Voilà  donc  ce  qui  se  passa  à  l'égard  d'Héliodore, 
et  la  manière  dont  le  trésor  fût  conservé. 


COMMENTAIRE 


se  moquer  de  toutes  ses  remontrances,  était  une 
preuve  de  leur  conviction. 

Héliodore  ne  méritait  pas  d'obtenir  ce  que  ses 
amis  demandaient  pour  lui  :  mais  il  était  de  la 
grandeur  de  Dieu  de  faire  de  ce  chef  impie  un 
témoin  public  de  son  pouvoir  suprême.  C'était 
aussi  un  devoir  pour  le  grand  prêtre,  de  ne  point 
exposer  la  religion  et  les  Juifs  à  la  calomnie  des 
flatteurs  qui  approchaient  de  la  personne  du  roi  : 
et  d'ailleurs,  le  caractère  des  grands  serviteurs 
de  Dieu,  tel  qu'était  Onias,  a  toujours  été  un 
esprit  de  charité  et  de  douceur,  qui  les  porte  à 
faire  du  bien  à  ceux  qui  leur  font  du  mal,  et  à 
demander  miséricorde  pour  ceux  que  la  main  de 
Dieu  a  frappés,  lorsqu'il  y  a  lieu  d'espérer  que 
cette  indulgence  sera  utile  à  eux-mêmes,  ou  aux 
autres. 

Ce  que  les  deux  anges  témoignèrent  à  Hélio- 
dore, lorsqu'ils  lui  dirent  en  le  guérissant,  de  ren- 
dre grâces  au  grand  prêtre  Onias,  parce  que  le 
Seigneur  lui  avait  donné  la  vie  à  cause  de  lui,  doit 
faire  connaître  combien  la  prière  ou  la  malédiction 
des  ministres  de  Dieu  est  puissante,  et  combien 
on  doit  appréhender  d'attirer  sur  soi  leur  juste 
indignation  ;  puisque  la  vie  ou  la  mort,  d'Hélio- 
dore était  alors,  selon  que  les  anges  le  déclarent 
hautement,  entre  les  mains  d'Onias. 

f.    39.   ViSITATOR    ET    ADJUTOR    EST  LOCI  ILLIUS. 

Le  grec  [(  1)  :  //  est  l'inspecteur,  le  gardien,  le  dé- 
Jenseur  de  ce  lieu.  Il  y  préside,  il  le  protège. 


Tout  est  étonnant  dans  cette  histoire  :  L'im- 
piété d'Héliodore,  qui  veut  d'abord  piller  le  tem- 
ple malgré  toutes  les  remontrances  d'Onias  ;  la 
foi  de  ce  souverain  pontife  et  des  autres  prêtres, 
qui  a  la  force  de  faire  une  sainte  violence  à  Dieu; 
la  punition  si  miraculeuse  de  cet  officier  du  roi  ; 
la  loi  surprenante  de  ses  amis  ;  sa  guérison  sur- 
naturelle ;  et  sa  généreuse  liberté  à  annoncer  à 
tout  le  monde  les  merveilles  et  la  puissance  de  Dieu, 
selon  l'ordre  que  les  anges  lui  avaient  donné. 
Mais  ce  qui  doit  paraître  encore  plus  étonnant 
que  toutes  ces  choses,  est  l'aveuglement  et  l'ava- 
rice de  ce  prince,  qui,  non  seulement  ne  se  rend 
point  à  des  témoignages  si  sensibles  de  la  divine 
toute-puissance,  mais  qui  semble  même  n'y  faire 
aucune  attention.  Il  entend  dire  à  son  premier 
ministre  la  manière  dont  Dieu  l'avait  empêché 
d'exécuter  l'ordre  qu'il  avait  reçu  de  lui,  et  sa 
guérison  miraculeuse  qui  avait  été  l'effet  des 
prières  du  grand  prêtre:  mais,  étant  sourd  à  cette 
voix  si  éclatante  qui  était  capable  de  ressusciter 
un  mort,  il  demande  froidement  au  même  ministre 
qui  lui  attestait  tous  ces  prodiges,  lequel  de  ses 
officiers  il  croyait  le  plus  capable  d'être  chargé  de 
la  même  commission,  et  envoyé  de  nouveau  à 
Jérusalem  en  sa  place,  pour  en  enlever  tous  les 
trésors.  La  réponse  d'Héliodore  est  remarquable; 
elle  prouve  la  réalité  des  souffrances  qu'il  avait 
éprouvées. 


(1     E'nÔTiTr);  eari  /.a>.  J5o7)0o;  èxsc'voo  toù  iù7tou. 


CHAPITRE  IV 

Calomnies  de  Simon.  Jason  obtient  à  prix  d'argent  la  souveraine  sacrificature.  Il  commet 
toutes  sortes  d'impiété.  Antiochus  est  reçu  à  Jérusalem.  Ménélails  supplante  Jason. 
Il  est  accusé  devant  Antiochus,  et  laisse  à  sa  place  Lysimaque.  Onias  reprend  Ménélails, 
et  est  tué  par  Andronique.  Antiochus  venge  la  mort  d' Onias.  Lysimaque  est  tué  par  le 
peuple.  Ménélails  rachète  sa  vie  pour  une  somme  d'argent. 


!.  Simon  autem,  praedictus  pecuniarum  et  patriae  dela- 
tor,  maie  loquebatur  de  Onia,  tanquam  ipse  Heliodorum 
instigasset  ad  haec,  et  ipse  fuisset  incentor  malorum  ; 

2.  Provisoremque  civitatis,  ac  defensorem  gentis  suae, 
et  asmulatorem  legis  Dei,  audebat  insidiatorem  regni 
dicere. 

?.  Sed  cum  inimicitiae  in  tantum  procédèrent,  ut  etiani 
per  quosdam  Simonis  necessarios  homicidia  fièrent, 

4.  Considerans  Onias  periculum  contentionis,  et  Apol- 
lonium  insanire,  utpote  ducem  Cœlesyriae  et  Phœnicis, 
ad  augcfndam  malitiam  Simonis,  ad  regem  secontulit, 


<;.  Non  ut  civium  accusator,  sed  communem  utilitatem 
apud  semetipsum  universas  multitudinis  considerans. 

6.  Videbat  enim  sine  regali  providentia  impossibile 
esse  pacem  rébus  dari,  nec  Simonem  posse  cessare  a 
stultitia  sua. 

7.  Sed  post  Seleuci  vitae  excessum,  cum  suscepisset 
regnuin  Antiochus,  qui  Nobilis  appellabatur,  ambiebat 
Jason,  frater  Onias,  summum  sacerdotium  ; 

8.  Adito  rege,  promittens  ei  argenti  talenta  tr.centa 
sexaginta,  et  ex  redditibus  ahis  talenta  octoginta  ; 


1.  Mais  Simon,  qui  avait,  comme  on  l'a  dit,  donné  l'avis 
touchant  cet  argent,  et  qui  s'était  déclaré  contre  sa 
patrie,  décriait  Onias  par  ses  médisances,  comme  si  c'eût 
été  lui  qui  eût  inspiré  à  Héliodore  ce  qu'il  avait  fait,  et 
qu'il  eût  été  la  cause  de  tous  ces  maux. 

2.  El  il  osait  faire  passer  pour  un  traître  au  royaume 
le  protecteur  de  la  ville,  le  défenseur  de  sa  nation,  et 
l'observaieur  très  zélé  de  la  loi  de  Dieu. 

?.  Mais  comme  celte  inimitié  passa  jusqu'à  un  tel  excès, 
qu'il  se  commettait  même  des  meurtres  par  quelques 
amis  de  Simon, 

4.  Onias,  considérant  les  suites  dangereuses  de  ces 
querelles,  et  l'emportement  d'Apollonius,  qui,  ayant 
l'autorité  de  gouverneur  dans  la  Cœlé-Syrie  et  dans  la 
Phénicie,  secondait  et  fortifiait  encore  la  malice  de 
Simon,  alla  trouver  le  roi, 

5.  Non  pour  accuser  ses  concitoyens,  mais  dans  l'inté- 
rêt commun  de  tout  son  peuple,  qu'il  se  proposait  uni- 
quement. 

6.  Car  il  voyait  bien  qu'il  était  impossible  de  pacifier 
les  choses  autrement  que  par  l'autorité  royale,  et  qu'il 
n'y  avait  que  ce  seul  moyen  de  faire  cesser  les  folles 
entreprises  de  Simon. 

7.  Mais  après  la  mort  de  Séleucus,  Antiochus  surnommé 
l'Illustre,  lui  ayant  succédé  sur  le  trône,  Jason,  frère 
d'Onias,  tâchait  d'usurper  le  souverain  sacerdoce. 

8.  Étant  venu  pour  cela  trouver  le  roi,  et  lui  promet- 
tant trois  cent  soixante  talenis  d'argent,  et  quatre  vingts 
talents  d'autres  revenus, 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Tanquam  ipse  Heliodorum  instigasset 
ad  hjec.  Simon  veut  faire  retomber  sur  le  grand 
prêtre  Onias,  l'odieux  de  l'entreprise  d'Héliodore, 
en  publiant  partout,  quec'était  lui  qui  avait  décou- 
vert au  roi  les  trésors  du  temple. 

jr.  1.  Provisorem  civitatis....  audebat  insi- 
diatorem regni  dicere.  Le  grec(i)  :  //  osait 
appeler  traître  des  affaires  (publiques),  le  bienfai- 
teur de  la  ville.  Il  accusait  d'avoir  trahi  les  inté- 
rêts de  sa  patrie,  celui  à  qui  la  ville  avait  tant 
d'obligations. 

v.  4.  Ad  regem  se  contulit.  //  alla  trouver  le 
roi  Séleucus  Philopator  le  même  qui  avait  envoyé 


Héliodore  à  Jérusalem,  bien  informé,  par  consé- 
quent,de  celui  qui  lui  avait  donné  avis  des  riches- 
ses cachées  dans  le  temple. 

f.  7.  Post  Seleuci  excessum,  cum  suscepisset 
regnum  Antiochus,  qui  nobilis  appellabatur. 
Nous  avons  marqué  ailleurs (2)  de  quelle  manière 
Antiochus  Épiphane,  ou  l'Illustre,  monta  sur  le 
trône  de  Syrie.  C'est  à  ce  prince  que  Jason,  frère 
d'Onias,  s'adressa,  pour  obtenir  la  souveraine 
sacrificature,  et  pour  en  déposséder  son  frère. 

jh  8.  Talenta  trecenta  sexaginta.  Le  qua- 
trième livre  des  Maccabées  compte  en  tout  trois 
mille  six  cent  soixante  talents,    ce   qui    est    une 


(1)  Tov  £u£pY^T7]v  xi);    jioXsu);,  ÉtciSoijXov  iôjv  7tpavu.àTwv 


(2)  1.  Macc.  1.  il. 


II.  —  MACCABÉES.  —   IV.  -  SIMONIE   DE  JASON 


■7i 


9.  Super  hoec  promittebat  et  alia  centum  quinquaginta, 
si  potestati  ejus  concederetur  gymnasium  et  ephebiam 
sibi  constituere,  et  eos,  qui  in  Jerosolymis  erant,  Antio- 
chenos  scribere. 


g.  Et  de  plus,  cent  cinquante  autres  talents,  si  on  lui 
donnait  pouvoir  d'établir  une  académie  pour  la  jeunesse,  et 
de  faire  les  habitants  de  Jérusalem  citoyens  de  la  ville 
d'Antioche. 


COMMENTAIRE 


somme  exorbitante,  pour  un  aussi  petit  pays  que 
la  Judée.  Il  s'agit  probablement  ici  du  talent  atti- 
que  qui  valait  5 . 5 60  francs  90. 

Quiconque  envisage  toutes  ces  offres  d'or  et 
d'argent  que  Jason  fait  à  Antiochus,  afin  d'acheter 
de  lui  la  souveraine  sacrificature,  et  le  pouvoir 
d'établir,  dans  la  ville  même  de  Jérusalem,  une 
académie  toute  profane  et  toute  païenne,  est  sans 
•  doute  frappé  d'horreur;  et  il  a  peine  à  concevoir 
que  le  propre  frère  de  ce  grand  pontife,  qui  était 
si  saint  et  si  modéré,  ait  pu  se  porter  à  un  tel 
excès  de  brutalité  et  d'impiété,  que  de  mettre  à 
prix  d'argent  ce  qu'il  y  avait  de  plus  sacré  dans  la 
religion.  Mais  peut-être  que  l'on  ne  remonte  pas 
jusqu'à  l'origine  de  cet  attentat  sacrilège,  et  que 
l'on  n'en  envisage  pas  la  première  cause  avec 
horreur  comme  on  le  devrait .  Car  c'est  cette 
ambition  secrète,  et  ce  désir  de  l'élévation  au- 
dessus  des  autres,  qui  est  comme  la  semence  de 
ces  fruits  de  mort,  et  comme  la  source  de  tous 
ces  ruisseaux  empoisonnés.  Un  cœur  possédé  de 
cet  orgueil,  qui  lui  fait  envisager  avec  jalousie  les 
premières  dignités,  renferme  en  soi  le  principe  de 
toutes  sortes  de  crimes  ;  et  l'on  doit  être,  en 
quelque  sorte,  moins  étonné  des  mauvais  fruits 
que  produit  naturellement  cette  racine  de  corrup- 
tion et  de  malice,  que  du  principe  qui  les  produit. 
Jason  conçoit  d'abord  le  désir  de  l'élévation  :  ce 
désir  produit  en  lui  une  noire  jalousie  contre  son 
frère;  cette  jalousie  le  porte  à  vouloir  se  procurer 
une  dignité  qui  ne  lui  appartenait  pas.  Dès  ce 
moment,  il  se  propose  de  se  la  faire  donner  par 
un  prince,  qui  n'avait  point  d'autre  droit  pour  la 
donner  que  c^lui  de  la  force.  Pour  y  parvenir,  il 
flatte  l'ambition  et  l'avarice  de  ce  roi;  son  ambi- 
tion, en  le  regardant  comme  le  maître  de  conférer 
la  première  dignité  de  la  religion  des  Juifs;  et 
son  avarice,  en  lui  offrant  une  très  grande  somme 
d'argent  .  L'esprit  tout  profane  avec  lequel  il 
usurpe  cette  souveraine  principauté,  le  porte  à 
complaire  au  prince  païen  qui  la  lui  avait  conférée. 
Il  commença,  dit  l'Écriture,  à  initier  les  habitants 
de  son  pays  aux  mœurs  et  aux  coutumes  des  gentils. 
Il  établit  une  académie  pour  instruire  les  jeunes 
gens  des  maximes  et  des  lois  du  paganisme  :  et, 
renversant  tout  parmi  ses  concitoyens,  après  les 
avoir  initiés  aux  mœurs  des  infidèles,  il  les  engage 


dans  la  dissolution.  Voilàoù  conduit  une  ambition 
désordonnée. 

,v.  9.  Si  potestati  ejus  concederetur  gymna- 
sium, ET  EPHEBIAM    SIBI    CONSTITUERE,   ET    EOS  QUI 

in  Jerosolymis  erant,  Antiochenos  scribere. 
C'était  donc  une  prérogative  et  un  privilège  par- 
ticulier d'avoir  de  ces  gymnases,  puisque  Jason 
donne  cent  cinquante  talents,  pour  qu'il  lui  soit 
permis  d'en  établir  un  à  Jérusalem.  Il  achète 
aussi  le  droit  de  citoyen  du  royaume  de  Syrie, 
pour  les  habitants  de  Jérusalem.  Antioche  était 
alors  la  capitale  de  la  Syrie  ;  et,  en  devenant 
citoyens  d'Antioche,  ceux  de  Jérusalem  avaient 
part  à  la  liberté  et  aux  privilèges  de  cette  ville  ; 
mais  la  première  vue  de  Jason,  en  tout  cela,  était 
de  rapprocher  insensiblement  les  Juifs  des  païens, 
d'ôter  aux  premiers  cette  aversion  invincible  qu'ils 
avaient  des  cérémonies  étrangères,  de  détruire  le 
mur  de  séparation,  qui  existait  entre  le  Grec  et  le 
Juif;  de  s'affermir  ainsi  dans  le  pontificat,  qui 
était  la  première  dignité  de  sa  nation,  et  de  faire 
oublier  les  lois  mosaïques.  L'auteur  du  premier 
livre  des  Maccabées  exprime  parfaitement  ses 
desseins,  lorsqu'il  lui  fait  dire  et  à  ses  asso- 
ciés (1)  :  Allons  et  faisons  alliance  avec  les  nations 
qui  nous  environnent,  parce  que  depuis  que  nous 
nous  sommes  retirés  d'elles,  nous  sommes  tombés 
dans  beaucoup  de  maux. 

L'on  distingue  ici  Y"!JLV*tIiyv,  d'avec  i<?i\Zeïov.  Le 
premier  était  pour  les  hommes  faits,  qui  s'exer- 
çaient à  la  course,  au  saut,  au  jet  du  palet,  à  la 
lutte  et  à  l'épreuve  de  leur  force.  Le  nom  de 
Gymnasium  vient  du  grec  y"^0',  nu,  parce  qu'on 
s'exerçait  tout  nus  dans  les  gymnases.  L'î^ôeîov 
était  une  salle  destinée  pour  les  exercices  des 
jeunes  garçons  au-dessus  de  quatorze  ans  ;  Vi- 
truve  les  décrit  avec  beaucoup  d'exactitude  (2). 
L'auteur  sacré  parle  ici  de  ces  lieux  d'exercice 
des  jeunes  hommes,  comme  d'autant  de  lieux  de 
corruption  et  de  prostitution  :  Et  optimos  quosque 
epheborum  in  lupanaribus  poncre,  à  cause  du  dan- 
ger continuel  que  courait  la  chasteté,  dans  ces 
sortes  d'exercices,  qui  se  faisaient  tout  nus,  à  la 
vue  de  tout  le  monde.  Les  Grecs,  surtout  les  La- 
cédémoniens,  avaient  encore  des  gymnases,  où 
les  jeunes  filles  s'exerçaient  de  même,  mais  sépa- 
rées des  garçons. 


(1)  1.  Macc.  1.  j. 


(2)  Vitruv.  t.  v.  c.  11. 


6 


II.  —  MACCABÉES.  —  IV.-   DÉMORALISATION   QU'IL  PROPAGE 


10.  Quod  cum  rex  annuisset,  et  obtinuisset  priiKipa- 
tum,  statim  ad  gentilem  ritum  contribules  suos  transferre 
cœpit. 

il  Et  amotis  his  quas  humanitatis  causa  Judasis  a 
regibus  fuerant  constituta,  per  Joannem,  patrem  Eupo- 
lemi,  qui  apud  Romanos  de  amicitia  et  socielate  func- 
tus  est  legatione,  légitima  civium  jura  destituens,  prava 
instituta  sanciebat. 

12.  Etenim  ausus  est  sub  ipsa  arce  gymnasium  consti- 
tuere,  et  optimos  quosque  epheborum  in  lupanaribus 
ponere. 

ij.  Erat  autemhocnoninitium,sedincrementumquod- 
dam,  et  profectus  gentilis  et  alienigenaa  conversationis, 
propter  impii  et  non  sacerdotis  Jasonis  nefarium  et  inau- 
ditum  scelus. 

14.  Ita  ut  sacerdotes  jam  non  circa  altaris  officia  dediti 
essent,  sed  contempto  templo,  et  sacrificiis  neglectis, 
festinerent  participes  fieri  palaestras,  et  praebitionis  ejus 
injustœ,  et  in  exercitiis  disci. 

15.  Et  patrios  quidem  honores  nihil  habentes,  graacas 
glorias  oplimas  arbitrabantur. 


10.  Le  roi  lui  accorda  ce  qu'il  demandait  ;  mais  il 
n'eut  pas  plus  tôt  obtenu  la  principauté, qu'il  commença  à 
faire  prendre  à  ses  concitoyens  les  mœurs  et  les  coutu- 
mes des  gentils. 

n.  Il  abolit  les  privilèges  que  la  bonté  des  rois  avait 
accordés  aux  Juifs, par  l'entremise  de  Jean, père  d'Eupo- 
lémus,  qui  fut  envoyé  en  ambassade  vers  les  Romains, 
pour  renouveler  l'amitié  et  l'alliance  des  Juifs  avec  eux  • 
et  il  renversa  les  ordonnances  légitimes  de  ses  conci- 
toyens, pour  en  établir  d'injustes  et  de  corrompues. 

12.  Car  il  eut  la  hardiesse  de  bâtir  un  lieu  d'exercice 
public  sous  la  forteresse  même,  et  d'exposer  les  jeunes 
hommes  les  plus  accomplis  en  des  lieux  infâmes. 

iî.  Ce  qui  n'était  pas  seulement  un  commencement, 
mais  un  grand  progrès  de  la  vie  païenne  et  étrangère, 
causé  par  la  méchanceté  détestable  et  inouïe  de  l'impie 
Jason,  usurpateur  du  nom  de  grand  prêtre. 

14.  Les  prêtres  mêmes  ne  s'attachant  plus  aux  fonctions 
de  l'autel,  méprisant  le  temple  et  négligeant  les  sacri- 
fices, couraient  aux  jeux  de  la  lutte, aux  spectacles  désor- 
donnés qui  se  représentaient  et  aux  exercices  du  palet. 

i<.  Ils  ne  faisaient  aucun  cas  de  tout  ce  qui  était  en 
honneur  dans  le  pays  ;  et  ne  croyaient  rien  de  plus 
grand  que  d'exceller  en  toul  ce  qui  était  en  estime  parmi 
les  Grecs. 


COMMENTAIRE 


f.  10.  Cum  obtinuisset  principatum.  La  sou- 
veraine sacrificature,  qui  lui  donnait  en  môme 
temps  la  principale  autorité,  le  premier  rang  dans 
sa  nation.  Voyez  aussi  les  y.  21.  et  50.  où  cette 
môme  façon  de  parler  se  remarque. 

y.  11.  Per  Joannem,  patrem  Eupolemi.  Eupo- 
lème  fut  envoyé  dans  la  suite  en  ambassade  à 
Rome,  par  Judas  Maccabée,  pour  faire  alliance 
avec  les  Romains  (1). 

j^.  12.  Optimos  quosque  epheborum  in  lupa- 
naribus ponere.  C'est  ainsi  qu'il  appelle  les  lieux 
d'exercices.  Le  grec  l«,j)6tfovse  prend  quelquefois 
en  ce  sens  (2).  Le  grec  est  différent  (3)  :  Et  Jason 
obligeait  les  plus  forls  des  jeunes  gens,  ceux  qui 
réusissaient  le  mieux  dans  les  exercices,  à  passer 
sous  le  r.i-.asoi.  Ce  pélasos  était  un  chapeau  à 
bord,  semblable  à  celui  dont  on  couvre  la  tête  de 
Mercure.  Hésychius  et  Pollux  nous  apprennent 
que  les  jeunes  gens,  Ephebi,  le  portaient  (4).  Il  y 
a  donc  assez  d'apparence  que  Jason  donnait  le 
pélasos,  comme  une  marque  d'honneur,  et  comme 
une  espèce  de  consécration  à  l'idolâtrie,  à  ceux 
des  jeunes  gens  qui  s'étaient  distingués  dans  les 
jeux  ;  ou  plutôt,  il  contraignait  ceux  qu'il  croyait 
propres  aux  exercices,  à  prendre  le  pélasos,  que 
portaient  les  jeunes  gens,  parmi  les  Grecs  ;  afinde 
les  engager  par  là  à  entrer  dans  le  gymnase,  et  à 
prendre  les  habits  et  les  coutumes  des  Grecs. 


f.  13.  Hoc  non  initium,  sed  incrementum 
quoddam,  etc.  Les  exercices  dont  on  vient  de 
parler,  et  le  pélasos  qu'on  donnait  aux  jeunes 
gens,  étaient  comme  une  consécration  à  la  vie 
païenne.  Le  grec  ('■,):  Ainsi  l'hellénisme  (ou  les 
mœurs  des  Grecs)  se  fortifiait,  elles  coutumes  étran- 
gères faisaient  de  nouveaux  progrès. 

y.  14.  Participes  fieri  pal«str>e,  et  pr>ebi- 
tionis  ejus  injustye.  Le  grec  (6)  :  Ils  se  hâtaient 
d'avoir  pari  à  l'injuste  distribution  des  prix  qui  se 
faisait  dans  le  lieu  des  exercices.  Ou,  ils  s'em- 
pressaient de  fournir  aux  dépenses  illégales  de  ces 
exercices. 

Exercitiis  disci.  C'était  un  lourd  palet  de 
plomb,  de  fer  ou  d'airain,  ou  une  pierre  ronde, 
que  les  athlètes  s'exerçaient  à  jeter  au  plus  loin 
et  au  plus  haut.  Cet  exercice  est  très  ancien, 
puisqu'on  le  voit  dans  Homère  (7).  Le  grec 
porte  (8)  :  Ils  s'empressaient  d'avoir  part  aux 
prix,  après  l'invitation  (ou  la  provocation)  du  dis- 
que. On  exposait  les  prix  au  milieu  de  la  place, 
afin  d'exciter  par  cette  vue,  le  nombre  et  l'ardeur 
de  ceux  qui  entraient  en  lice  pour  cet  exer- 
cice. 

y.  15.  GR/ECAS  glorias  optimas  arbitraban- 
tur. Ils  estimaient  les  prix,  les  récompenses,  les 
honneurs  de  ces  exercices,  comme  quelque  chose 
de  très  relevé  (9). 


(  1)  1.  Macc.  vin.  17. 

(2)  Gloss.  fsiJ.  Ephebion,  locus  construprationis  pue- 
rorum  pubentium. 

(j)  Ka't  toùç  /.piiiaTOu;  rôiv  Êçprj6tov  ûitotâaato»,  urcô  né- 
■:ao6s  l'jaycv. 

(4)  IKtaao;  rô  tûv  e'cpr{6wv  tpopTjrj.*.. 

(^)  II"v  oi  oûtto;  «y.u.7Jttç  §XXr)yiau.oû,  xai  JtpoaâTjaiç 
«XXo'iuXt3u.oû. 


(6)  E'areeuoov  (aet^/siv  x9\i  iv  7caXa(aTpa  jrapavôu.oO 
yopT)YÏ«Ç. 

(7)  Homer.  Odyss.  vin.  Voyez  aussi  dans  Ovide,  Mcta- 
morph.  I.  x.  la  description  de  ce  jeu.  On  peut  voir  dans 
le  Diction,  des  Aniiq.  de  Rich,  art.  Discobolus,  un  athlète 
lançant  le  disque. 

(8)  Metx  irjv  tou  oi'axou  Jipda/.X7)aiv. 

(9)  Tirin.  Vide  Serar.  hic. 


II.  —  MACCABEES.  —  IV.  -  IMPIETÉ  DE  JASON 


■/, 


16.  Quarum  gratia  periculosa  eos  contcntio  habebat, 
et  eorum  instituta  asmulabantur,  ac  per  omnia  his  con- 
similes  esse  cupiebant,  quos  hostes  et  peremptores 
habuerant. 

17.  In  leges  enim  divinas  impie  agere  impune  non 
cedit;  sed  hoc  tempus  sequens  declarabit. 

18.  Cum  autem  quinquennalis  agon  Tyri  celebraretur, 
et  rex  prœsens  esset, 

19.  Misit  Jason  facinorosus  ab  Jerosolymis  viros  pec- 
catores,  portantes  argenti  didrachmas  trecentas  in  sacri- 
ficium Herculis;  quas  postulaverunt  hi  qui  asportaverant 
ne  in  sacrificiis  erogarentur,  quia  non  oporteret,  sed  in 
alios  sumptus  eas  deputari. 


20.  Sed  has  oblatas  sunt  quidem,  ab  eo  qui  miserat,  in 
sacrificium  Herculis;  propter  prœsentes  autem  datas 
sunt  in  fabricam  navium  triremium. 


10.  Il  s'excitait  pour  cela  une  dangereuse  émulation 
entre  eux  ;  ils  étaient  jaloux  des  coutumes  de  ces  païens, 
et  affectaient  d'être  en  tout  semblables  à  ceux  qui 
avaient  été  auparavant  les  mortels  ennemis  de  leur  pays. 

17.  Car  on  ne  viole  pas  impunément  les  lois  de  Dieu  ; 
et  on  le  verra   clairement  par  la  suite  de  cette  histoire. 

18.  Un  jour  où  l'on  célébrait  à  Tyr  les  jeux  qui  se  font 
de  cinq  ans  en  cinq  ans,  et  le  roi  étant  présent, 

10.  L'impie  Jason  envoya  de  Jérusalem  des  hommes 
couverts  de  crimes  porter  trois  centsdidrachmes  d'argent 
pour  le  sacrifice  d'Hercule  ;  mais  ceux  mêmes  qui  les 
apportaient  demandèrent  qu'elles  ne  fussent  pas 
employées  à  ces  sacrifices,  parce  qu'on  ne  devait  pas 
en  faire  un  tel  usage  ;  et  qu'on  s'en  servît  pour  d'autres 
dépenses. 

20.  Ainsi  elles  furent  offertes  pour  le  sacrifice  d'Her- 
cule par  celui  qui  les  avait  envoyées  ;  mais  en  égard  à 
leur  demande  on  les  employa  pour  la  construction  des 
galères. 


COMMENTAIRE 


f.  16.  Quorum  gratia  periculosa  eos  con- 
tentio  habebat.  Le  grec  fait  un  sens  assez  diffé- 
rent (1)  :  Tout  cela  leur  attira  un  grand  malheur, 
et  Dieu  se  servit,  pour  les  punir,  de  ceux  mêmes 
dontils  imitaient  les  manières  avec  tant  d'ardeur- 
Les  Grecs  devinrent  leurs  plus  grands  ennemis, 
leurs  plus  violents  persécuteurs. 

Quel  changement  dans  ces  prêtres  !  Ces  mê- 
mes hommes  qui  déplorent  avec  Onias  III  la 
violence  d'Héliodore,  méprisent  aujourd'hui  le 
temple  et  vivent  comme  les  païens.  Il  n'a  fallu 
qu'un  mauvais  pontife  pour  les  perdre.  Aujour- 
d'hui encore,  un  saint  évèque  rend  son  clergé 
saint,  un  ambitieux  le  rend  ambitieux. 

jh  18.  Cum  quinquennalis  agon  Tyri  cele- 
braretur. C'étaient  les  jeux  Olympiques,  si  cé- 
lèbres dans  toute  l'antiquité  ;  ils  se  célébraient 
de  cinq  ans  en  cinq  ans,  à  Élée,  dans  le  Pélopo- 
nèse.  A  leur  imitation,  on  en  institua  de  pareils 
dans  diverses  autres  villes,  comme  à  Alexan- 
drie, à  Athènes  et  à  Tyr.  Le  roi  était  présent 
à  ces  jeux,  et  c'était  apparemment  en  sa  considé- 
ration qu'on  les  célébrait. 

f.  19.  Misit  ab  Jerosolymis  viros  peccato- 
res,  portantes  argenti  didrachmas  trecentas 
in  sacrificium  Herculis.  A  cette  époque  le 
didrachme  valait  environ  1  fr.  75.  Cet  argent  tut 
envoyé  à  Tyr,  pour  en  offrir  des  sacrifices  à  Her- 
cule, divinité  tutélaire  de  cette  fameuse  ville. 
Les  Syriens  l'appelaient  Melcarth,  c'est-à- 
dire  (:)  le  roi  de  la  ville,  ou  selon  d'autres  (]),  le 


roi  de  la  terre.  Le  grec  porte  ici  (^),  que  Jason 
envoya  de  Jérusalem  des  spectateurs,  pour  assis- 
ter à  ces  jeux,  des  personnes  qui  étaient  citoyens 
d'Anlioche,  (qui  avaient  reçu  cet  honneur  de  Ja- 
son, Voyez  II.  Mac.  10.  9.)  et  qui  portaient  trois 
cents  drachmes  d'argent,  pour  le  sacrifice  d'Her- 
cule. 

p.  20.  Oblat-e  sunt  quidem  ab  eo  qui  miserat 
in  sacrificium  Herculis,  propter  présentes 
autem,  dmm  sunt  in  fabricam  navium  trire- 
mium. L'argent  que  Jason  avait  destiné  pour  un 
sacrifice  sacrilège  à  Hercule,  ne  fut  pas  employé 
à  cet  usage  ;  ceux  qu'il  avait  envoyés  à  cette  fête, 
n'eurent  aucun  égard  à  son  intention  impie.  Soit 
par  politique  ou  par  honte  de  quitter  ainsi  leur 
ancienne  religion,  ou  par  quelque  reste  de  piété 
et  d'attachement  au  culte  de  leurs  pires,  ils  de- 
mandèrent qu'on  employât  les  trois  cents  didrach- 
mes,  à  construire  les  vaisseaux  qu'on  faisait  alors 
àTyr  ;  ilscrurent  apparemment,  parla,  faire  mieux 
leur  cour  à  Antiochus  Épiphane,  qu'en  offrant 
quelques  victimes  à  Hercule. 

L'emploi  qu'on  fit  de  cet  argent,  à  la  construc- 
tion des  galères,  a  fait  croire  à  quelques  commen- 
tateurs que  le  texte  qui  lit  trois  cents  drachmes, 
est  corrompu,  et  qu'il  faudrait  lire  trois  mille,  au 
lieu  de  trois  cents  (,).  Usher  trouva  trois  mille 
trois  cents  dans  un  manuscrit  de  la  bibliothèque 
du  comte  d'Arundel  (6).  Le  syriaque  porte  la  mê- 
me somme.  Ménochius  voudrait  qu'on  entendît 
ce  passage  de  trois  cents    drachmes  d'or,   qui  fe- 


(1)  Qv  /.scpiv    Xipiiyrtv  âutoli;  y_aXer:r-,  rcepîa'raaiç,  /al  wv 
E^Xoi/v    ta;    âycoyà;....    toutou;   7ioXEp.''ou;,  xal   TtjaopTjiàç 

È'<J£OV. 

(2)  n-ip  iSn 

(i)  Grot.  y-*N  "ibc 

(4)  A'^s'atEiXEv    Oewpo-j;   ânô    r'epciîoXûawv,    A'vT'.o^Et; 
ù'/toc:,    zapay.op'ÇovTa;    àpyupi'ou    opayi-ià;    ïptaxoafaç,  etc. 

S.   B.  —  T.  XII. 


Grot.  hic.  ©ecooo:  vocantur  qui  aliunde  mittuntur  ad 
sacra  externa.  Sic  usurpant  Plato,  Thucid.  Sophoc.  Plut. 
At  Hcnric.Stcph.Sacrorum  procuratores./ta  Hesrck.  ©eco- 
pO',  ôt  opovT^ÇovcE;  Jvspl  ta  ÛEÎa.  Idem.  ©îiopcKOv,  àpvù- 
ptov  to  Éiç  Ô£(ôv  ^p.r)v,  xal  s'optrjv  8iodu.svov. 

(5)  lia  Grot.  hic. 

(6)  Approbat.  Usser.  ad  an.  ?8jo. 

12 


i78      II.  -  MACCABÉES.  —  IV.-  RÉCEPTION   D'ANTIOCHUS  A  JÉRUSALEM 


2i.Misso  autcm  in  /Egyptum  Apollonio,  Mnesthei 
filio,  propter  primates  Ptolem<Ei  Philometoris  régis, 
cum  cognovisset  Antiochus  alienum  se  a  negotiis  regni 
efiectum,  propriis  utilitatibus  consulens,  profectus  inde 
venit  Joppen,  et  inde  Jerosolymam. 

22.  Et  magnifiée  ab  Jasone  et  civitate  susceptus,  cum 
facularum  luminibus  et  laudibus  ingressus  est  ;  et  inde  in 
Phœnicen  exercitum  convertit. 


21.  Cependant  Apollonius,  fils  de  Mnesthéus,  avait  été 
envoyé  en  Egypte,  pour  figurer  parmi  les  grandsdu  roi 
Ptolémée  Philométor.  Lorsque  Antiochus  eut  reconnu 
qu'on  l'avait  entièrement  éloigné  du  gouvernement  des 
affaires  du  royaume,  il  ne  consulta  plus  que  ses  propres 
intérêts,  il  partit,  vint,  à  Joppé,  et  ensuite  à  Jérusalem. 

22.  Il  fut  reçu  magnifiquement  par  Jason  et  par  la 
ville  ;  et  il  y  fit  ion  entrée  à  la  lumière  des  flambeaux, 
au  milieu  des  acclamations  publiques  ;  et  il  retourna  de 
là  en  Phénicie  avec  son  armée. 


COMMENTAIRE 


raient  une  somme  quatorze  fois  plus  grande  que 
celle  que  nous  avons  marquée  (1).  Il  est  vrai  que 
le  texte  désigne  formellement  de  l'argent  ;  mais 
souvent  ce  terme  signifie,  non  ce  métal,  mais  la 
valeur  de  la  chose.  Le  grec  lit  trois  cents  drach- 
mes, au  lieu  des  trois  cents  didrachmes  de  la  Vul- 
gate.  Il  y  a  donc  quelque  erreur  dans  le  chiffre 
donné.  Comme  la  somme,  en  drachmes  ou  en  di- 
drachmes, paraît  trop  faible  pour  compter  dans  la 
fabrication  d'une  galère,  dom  Calmet  pense  que 
cet  argent  fut  employé  à  appareiller  les  galères, 
qui  servirent  dans  les  jeux  à  cette  occasion  ?  Le 
grec  peut  souffrir  ce  sens  (2)  ;  et  les  Tyriens,  se 
faisant  un  honneur  d'exceller  à  conduire  des  na- 
vires, ne  manquèrent  pas  sans  doute  de  donner 
au  roi  le  divertissement  d'un  combat  naval. 
f.  2 1 .  Misso  in  ^gyptum  Apollonio,  propter 

PRIMATES     PTOLEM/EI     PhiLOMETORIS     REGIS.      Le 

grec  dit  qu'Apollonius  fut  envoyé  en  Egypte  (3), 
Pour  la  cérémonie  de  la  première  séance,  du  jeune 
roi  Ptolémée,  sur  son  trône  ;  ou  pour  sa  prise  de 
possession  du  royaume.  Ce  jeune  prince  était 
neveu  d'Antiochus  Épiphane  par  sa  mère  Cléo- 
pâtre,  fille  d'Antiochus  le  Grand.  Après  la  mort 
de  cette  princesse,  Ptolémée,  qui  avait  perdu 
son  père,  quelques  années  auparavant,  monta  sur 
le  trône  ;  mais  il  était  trop  jeune  pour  gouverner 
par  lui-même.  L'eunuque  Eulaïus,  nourricier  du 
jeune  Ptolémée  Philométor,  et  Lenœus,  prirent 
la  régence  du  royaume.  Ayant  voulu  obliger  Antio- 
chus Épiphane,  à  rendre  au  pupille  la  Cœlé-Syrie, 
qui  avait  été  cédée  en  dot  à  sa  mère  Cléopâtre, 
par  Antiochus  le  Grand,  ils  attirèrent  sur  l'Egypte 
le  fléau  de  la  guerre.  Antiochus  Épiphane  avait 
plus  d'une  vue,  en  envoyant  Apollonius  en  Egypte  ; 
il  voulait,  en  apparence,  honorer  son  neveu  ;  mais 
son  principal  dessein  était  d'examiner  la  disposition 
de  la  cour  à  son  égard.  Il  voulait  qu'on  lui  déférât 
la  tutelle  de  Ptolémée  Philométor  et  le  gouver- 
nement de  l'Egypte,  en   attendant  que  le  jeune 


prince  fût  en  âge  de  gouverner  ;  mais  Appollonius 
vit  bientôt  qu'il  n'y  avait  rien  à  faire  pour  Antio- 
chus par  cette  voie  ;  c'est  ce  qui  détermina  le  roi 
de  Syrie  à  faire  la  guerre  à  Ptolémée. 

Propriis  utilitatibus  consulens,  profectus 
inde  venit  Joppen  et  inde  Jerosolymam.  Ce 
détail  continue  l'accomplissement  de  la  prophétie 
que  l'ange  Gabriel  avait  faite  au  sujet  d'Antio- 
chus, en  parlant  à  Daniel  (4),  dans  cette  célèbre 
vision  où  il  lui  prédit  les  bouleversements  des 
empires  de  la  terre,  et  tout  ce  qui  devait  arri- 
ver au  peuple  de  Dieu  jusqu'à  l'avènement  du 
Sauveur  du  monde.  Car  il  lui  marqua,  entr'autres 
choses,  qu'on  refuserait  à  ce  prince  la  dignité  de 
roi  ;  mais  qu'il  viendrait  en  secret  et  s'emparerait 
du  royaume  par  artifice.  Ainsi,  quoique  Démétrius, 
fils  de  Séleucus,  dût  succéder  à  son  père,  Antio- 
chus se  rendit  maître  du  royaume  par  adresse  : 
et  comme  il  voulut  encore  usurper  le  royaume 
d'Egypte,  sous  prétexte  d'en  être  établi  régent 
pendant  la  minorité  de  Ptolémée  Philométor, 
lorsque  s'en  vit  éloigné,  il  songea,  dit  l'Écriture, 
à  ses  propres  intérêts;  c'est-à-dire  qu'il  pensa  à 
s'affermir  dans  l'usurpation  du  royaume  qui  ne 
lui  appartenait  pas.  Ainsi  il  partit  de  Tyr,  et  vint 
par  Joppé  se  rendre  à  Jérusalem.  Car  cette  ville 
était  regardée  par  les  rois  d'Asie  comme  une 
place  forte  dont  il  était  très  avantageux  de  s'as- 
surer, aussi  bien  que  de  tout  le  peuple  juif. 

y.  22  Cum  facularum  luminibus  et  laudibus. 
La  coutume  des  feux  de  joie  'et  des  illuminations 
aux  jours  de  fête  et  de  réjouissances,  est  très  an- 
cienne ()).  On  alluma  des  lampes  sur  les  toits 
d'Athènes,  lorsque  M  arc- Antoine  y  fut  reçu  (6). 
Jules  César  monta  au  Capitole,  à  la  lumière  des 
flambeaux,  qui  étaient  portés  par  quarante  élé- 
phants rangés  à  droite  et  à  gauche  du  chemin  (7). 
Ascendit  Capilolium  ad  lumina  :  quadraginta  ele- 
phanlis,  dexlra  atque  sinislra,  lychnos  geslan- 
iibus. 


(1)  Menoch.  hic. 

(2)  E^ve/.dv  3à  tàJv  rtapa/.OU'.Ço'vîuiv,  et;  •cà;  Xiïtv  rptrfpaiV 
/.axscaxsua;. 

(?)  Aià  xà  rotoTO/.Xi'aia  ou  ^u.coTO/'.XacJiïj  Yl'.o\i[xcf[ou. 
Grotius  voudrait  lire  ^pwco/.ojp^a.  La  fête  de  la  pre- 
mière chevelure,  c'est-à-dire  le  jour  auquel  on  coupait 


pour  la  première  fois  les  cheveux,  que  l'on  consacrait  à 
quelque  divinité;  ce  jour  était  fort  solennel,  et  on  y 
faisait  grande  fête. 

(4)  Daniel,  xi.  21. 

(ç)  Vide  si  lubit  Judith,  m.  10.  et  Isai.  xxv.  15.  in  Heb. 

(6)  Plutarch.  in  Antonio.  —  (7)  Sueton.  in  Julio  c.  )■]. 


MACCABÉES.  —   IV.  -  TRAHISON   DE   MENELAUS 


■79 


2;.  Et  post  triennii  tempus  misit  Jason  Menelaum,  su- 
pradicti  Simonis  fratrem,  portantem  pecunias  régi,  et  de 
negotiis  necessariis  responsa  perlaturum. 

24.  At  ille  commendatus  régi,  cum  magnificasset  faciem 
potestatis  ejus,  in  semetipsum  retorsit  summum  sacerdo- 
tium,  superponens  Jasoni  talenta  argenti  trecenta. 


2<;.  Acceptisque  a  rege  mandatis  venit,  nihil  quidem 
habens  dignum  sacerdotio,  animos  vero  crudelis  tyranni, 
et  feras  belluas  iram  gerens. 

26.  Et  Jason  quidem,  qui  proprium  fratrem  captivave- 
rat,  ipse  deceptus,  profugus  in  Ammanitem  expulsus  est 
regionem. 


2;.  Trois  ans  après,  Jason  envoya  Ménélaiïs,  frère  de 
Simon,  dont  il  a  été  parlé  auparavant,  pour  porter  de 
l'argent  au  roi,  et  pour  savoir  sa  réponse  sur  des  affaires 
importantes. 

24.  Mais  Ménélai'is  s'étant  acquis  la  bienveillance  du 
roi, par  la  manière  dont  il  le  flatta  en  relevant  la  grandeur 
de  sa  puissance,  trouva  moyen  de  faire  retomber  entre 
ses  mains  la  souveraine  sacrificature,  en  donnant  trois 
cents  talents  d'argent  par  dessus  ce  que  Jason  en  avait 
donné  ; 

2;.  Et  ayant  reçu  les  ordres  du  roi,  il  s'en  revint, 
n'ayant  rien  qui  fût  digne  du  sacerdoce,  et  n'apportant  à 
cette  dignité  que  le  cœur  d'un  cruel  tyran  et  la  colère 
d'une  bête  farouche. 

26.  Ainsi  Jason,  qui  avait  surpris  son  propre  frère,  fut 
trompé  lui-môme  et,  ayant  été  chassé,  il  se  réfugia  au 
pays  des  Ammonites. 


COMMENTAIRE 


jh  23.  Menelaum  supradicti  Simonis  fratrem. 
Des  commentateurs  prennent  ici  le  nom  de 
frère  (1)  dans  sa  signification  rigoureuse,  et  veu- 
lent que  Ménélaùs  ait  été  de  la  tribu  de  Benja- 
min, de  même  que  Simon  (2)  ;  et  que,  comme 
Simon  avait  usurpé  la  charge  de  préfet  du  temple, 
Ménélaùs,  par  un  attentat  encore  plus  horrible,  ait 
acheté  la  souveraine  sacrificature  ;  maisd'autres(2.), 
après  Josèphe  (4),  croient  que  Ménélaùs  était 
frère  de  Jason  et  d'Onias  III, et  cette  opinion  est 
de  beaucoup  la  plus  admissible.  S'il  est  nommé 
frère  de  Simon,  c'est,  dit-on,  parce  qu'il  était  son 
beau-frère,  son  parent  quelconque  ou  parce  qu'il 
figurait  dans  son  parti  (<). 

f.  24.  At  ille  commendatus  régi  ,  cum  ma- 
gnificasset faciem  potestatis  ejus.  Le  grec 
peut  aussi  s'entendre  de  cette  manière  (6)  :  Mé- 
nélaùs s'étant  rendu  agréable  au  roi,  et  s'étant  servi 
des  moyens  que  lui  donnait  sa  légation  pour  s'éle- 
ver, se  fit  donner  la  souveraine  sacrificature. 

fi.  25.  Acceptis  a  rege  mandatis.  Ayant  reçu 
les  lettres  patentes,  le  diplôme  de_  sa  nomination 
à  la  souveraine  sacrificature. 

f.  26  Jason  qui  proprium  fratrem  captivave- 
rat.  Le  grec  (7)  :  Qui  avait  trompé,  fraudé,  son 
propre  frère  Onias  III,  à  qui  il  avait  ôté  la  souve- 
raine sacrificature  (8). 

Tous  les  impies  ne  sont  pas  punis,  dès  ce 
monde,  des  crimes  qui  leur  ont  servi  de  degré 
pour  s'élever  au-dessus  des  autres.  Mais  Dieu  en 
fait  néanmoins  quelquefois  des  exemples  écla- 
tants, pour  attester  la  vérité  de  sa  providence,  et 
pour  affermir  les  justes,  lorsqu'ils  se  voient  acca- 


blés par  la  puissance  des  méchants.  Il  est  impor- 
tant d'envisager  la  facilité  avec  laquelle  il  se  joue, 
quand  il  lui  plaît, de  tous  les  mauvais  desseins  des 
ennemis  de  ses  serviteurs.  Jason  se  regarde 
comme  le  possesseur  paisible  d'une  dignité  usur- 
pée ;  Onias  est  obligé  de  se  retirer  à  Antioche 
pour  y  être  en  sûreté.  Il  agit  en1  souverain  prêtre 
des  Juifs,  lorsqu'il  n'en  est  qu'un  fantôme  :  et, 
continuant  à  faire  sa  cour  au  roi,  il  lui  envoie  un 
homme  semblable  à  lui,  Ménélaùs,  digne  associé 
de  l'impie  Simon,  qui  avait  été  le  premier  auteur 
de  tous  les  troubles  arrivés  à  Jérusalem.  Cet 
homme  rempli  d'orgueil,  comme  celui  dont  il 
était  député,  songe  à  procurer  sa  propre  éléva- 
tion :  et  la  souveraine  sacrificature  étant  exposée 
alors  comme  à  l'enchère,  il  en  offre  au  roi  trois 
cents  talents  d'argent,  plus  que  Jason  ne  lui  en 
avait  promis.  La  plus  grande  somme  l'emporta  sur 
l'esprit  de  ce  prince  avare;  et,  où  il  n'y  avait  au- 
cun mérite  de  part  ni  d'autre,  le  plus  scélérat  fut 
préféré  :  celui,  dit  l'Ecriture,  qui  n'avait  rien  qui 
fût  digne  du  sacerdoce,  s'ingéra  en  cette  dignité, 
avec  le  cœur  d'un  tyran  et  la-  fureur  d'une  bêle 
féroce.  Ainsi  Dieu,  sans  prendre  part  à  la  [malice 
de  Jason,  permet  qu'Onias,  ce  saint  prêtre,  soit 
éprouvé  et  purifié,  obligé  même  de  sortir  de  Jé- 
rusalem :  et,  sans  approuver  en  aucune  sorte  la 
trahison  de  Ménélaùs,  il  permet  que  Jason  soit 
dépossédé  par  celui-là  même  dont  il  se  ser- 
vait dans  son  ministère  d'impiété  ;  purifiant  de  la 
sorte  ses  élus  par  la  furear  des  méchants,  et  pu- 
nissant ensuite  ces  méchants  mêmes  les  uns  par 
les  autres,  sans  se  servir  pour  cela  d'autres  armes 


(1)  Sulpil.  Server.  I.  11. 

(2)  Lvr    Tirin.  Scrar.  Harduin.  Chronol.  V.  T.  p.  iSi.c/c. 
(î)  D.  Tliom.  in  Maccab.-  Gloss.  or  dinar,   hist.   Scolast. 

-  Pelav.  de  Doclr.  Temp.  I.  x.  c.  1. 

(4)  Joseph.  Aniiq.  xu.  6.  cum.  xv.  j. 

(5)  D'Allioli,  S.  Munk. 


(6)  Û'  ôî  5'v5:a0e'c;  'Si  (3aitXs~!,  x«:  Sjçxîa;  dtuïôv  toi 
Koonti'iTM  tf;;  Écouta;,  si;  ixj-à\i  caT^vcrjos  xtjv  âp/tepo- 
eûvr,v.  Cum  se  commendasset  ac  spectabilem  fecisset 
proetextu  potestatis  acceptas.  Grot. 

(7)  Tôv  ïoiov  aSdX^oy  ûrîovoQs'JTa;. 

(8)  Supra  f.  j.  8.  ' 


II. 


MACCABEES.—  IV.  -  ASSASSINAT  D'ONIAS 


27.  Menelaus  autem  principatum  quidem  obtinuit;  de 
pecuniis  vero  régi  promissis  nihil  agebat,cum  exactionem 
faceret  Sostratus,  qui  arci  erat  prœpositus, 


28.  Nara  ad  liunc  exactio  vectigalium  pertinebat;  quam 
ob  causam  utrique  ad  regem  sunt  evocati. 

20.  Et  Menelaus  amotus  est  a  sacerdotio,  succedente 
Lysimacho,  fratre  suo;  Sostratus  autem  praslatus  est 
Cypriis. 

30.  Et  cum  hase  agerentur,contigit  Tharsenscs  et  Mal- 
lotas  seditionem  movere,  eo  quod  Antiochidi, régis  con- 
cubinas,  dono  essent  dati. 

31.  Festinanter  itaque  rex  venit  sedare  illos,  relicto 
sulfecto  uno  ex  comitibus  suis  Andronico. 

32.  Ratus  autem  Menelaus  accepisse  se  tempus  oppor- 
tunum  aurea  quasdam  vasa  e  templo  furatus  douavit 
Andronico,  et  alia  vendiderat  Tyri,  et  per  vicinas  civi- 
tates. 

3?.  Quod  cum  certissime  cognovisset  Onias,  arguebat 
eum,  ipse  in  loco  tuto  se  continens  Antiochias  secus 
Daphnem. 

34.  Unde  Menelaus  accedens  ad  Andronicum,  rogabat 
ut  Oniam  interficeret.  Qui  cum  venisset  ad  Oniam,  et 
datis  dextris  cum  jurejurando  (quamvis  esset  ei  suspec- 
tus)  suasisset  de  asylo  procedere,  statitn  eum  peremit, 
non  veritus  justitiam. 


27.  Ménélaùs  entra  de  la  sorte  dans  la  souveraine  sacri- 
ficature  ;  mais  il  ne  se  mit  point  en  peine  d'envoyer  au 
roi  l'argent  qu'il  lui  avait  promis,  quoique  Sostrate, 
qui  commandait  à  la  forteresse,  le  pressât  d'en  faire  le 
paiement, 

28.  Comme  ayant  l'intendance  des  tributs:  c'est  pour- 
quoi ils  reçurent  tous  deux  un  ordre  de  se  rendre  auprès 
du  roi. 

29.  La  dignité  de  grand  prêtre  fut  ôtée  à  Ménélaùs; 
et  Lysimaque,  son  frère,  lui  succéda  dans  cette  charge  : 
et  le  gouvernement  de  Chypre  fut  donné  à  Sostrate. 

30.  Pendant  que  ces  choses  se  passaient,  les  habitants 
de  Tharse  et  de  Mallo  excitèrent  une  sédition,  parce 
qu'ils  avaient  été  donnés  à  Antiochide,  concubinedu  roi. 

31.  Le  roi  y  vint  en  grande  hâte  pour  les  apaiser, 
ayant  laissé  pour  son  lieutenant  un  desgrands  de  sa  cour, 
nommé  Andronique. 

32.  Mais  Ménélaùs  croyant  que  cette  occasion  lui  était 
favorable,  déroba  du  temple  quelques  vases  d'or,  et  en 
donna  une  partie  à  Andronique,  et  vendit  les  autres  à 
Tyr,  et  dans  les  villes  voisines. 

33.  Onias  l'ayant  su  à  n'en  pouvoir  douter,  le  repro- 
chait à  Ménélaiis,  se  tenant  cependant  à  Antioche  dans 
un  lieu  sur  près  de  Daphné. 

54.  C'est  pourquoi  Ménélaùs  alla  trouver  Andronique, 
et  le  pria  de  tuer  Onias.  Andronique  étant  donc  venu 
où  était  Onias,  et  lui  ayant  persuadé,  par  la  parole  qu'il 
lui  donna  avec  serment  (quoiqu'il  le  tînt  pour  suspect), 
de  sortir  de  l'asile  où  il  était,  il  le  tua  aussitôt,  sans  avoir 
aucune  crainte  de  la  justice. 


COMMENTAIRE 


que  de  leur  propre  cupidité,  qui  les  rend  mutuel- 
lement ennemis,  par  un  effet  de  l'ambition  qui  les 
possède  également. 

Jr.  27.  Sostratus  qui  arci  erat  pr/epositus. 
Soslrale  commandait  dans  la  forteresse  que  les 
Syriens  avaient  à  Jérusalem,  sur  le  mont  de  Sion. 
Cette  citadelle  n'était  pas  encore  dans  l'état  ou 
elle  fut  mise  dans  la  suite  (1). 

jh  29.  Menelaus  amotus  est  a  sacerdotio, 
succedente  Lysimacho  fratre  suo.  On  ne  con- 
vient pas  qu'il  ait  succédé  en  qualité  de  grand 
prêtre;  il  ne  paraît  pas  qu'il  ait  jamais  été  reconnu 
en  cette  qualité,  ni  qu'il  en  ait  fait  les  fonctions; 
il  fut  simplement  son  vice-gérant  (2),  pour  exer- 
cer quelques-unes  de  ses  fonctions  en  son  ab- 
sence. Ménélaùs  n'était  pas  encore  déposé;  il 
était  allé  à  Antioche  pour  rendre  compte  au  roi, 
du  délai  apporté  dans  le  paiement  des  trois  cents 
talents  qu'il  avait  promis. 

Sostratus  autem  pr^elatus  est  cypriis.  Le 
grec  (3)  :  El  Soslrale  laissa  en  sa  place  Craies,  qui 
èlail,  ou  qui  avait  été  gouverneur  de  Chypre,  ou 
commandant  des  troupes  de  cette  île. 


f.  30.  CONTIGIT  THARSENSES  ET  MaLLOTAS  SE- 
DITIONEM movere.  Tharse  était  la  capitale  de  Ci- 
licie;  Mallo,  ou  Mallus,  est  une  autre  ville  de  la 
même  province,  sur  le  Pyramus(4).  La  cause  de 
cette  révolte,  était  qu'Antiochus  avait  donné 
ces  deux  villes  à  une  de  ses  concubines  nommée 
Antiochide.  Outrés  de  ce  mépris,  les  habitants 
prirent  les  armes,  et  se  soulevèrent.  Les  exem- 
ples de  quelques  villes  données  par  les  rois  de 
Perse  à  leurs  iemmes,  à  leurs  maîtresses,  et  à 
leurs  amis,  sont  fréquents  dans  l'histoire  (5).  Ces 
villes  n'en  étaient  nullement  déshonorées  dans 
l'opinion;  mais  il  n'en  était  pas  ainsi  des  villes 
grecques  ;  elles  étaient  plus  délicates  sur  le  point 
d'honneur. 

f.  32.  Menelaus  aurea  quidam  vasa  e  tem- 
plo furatus,  donavit  Andronico.  Ménélaiis 
n'était  plus  à  Jérusalem;  mais  il  y  avait  Lysima- 
que son  vice-gérant,  aussi  méchant  que  lui,  qui, 
par  ses  ordres,  enleva  des  vases  d'or  du  temple 
et  les  envoya  à  Antioche. 

f.  33.  Onias  arguebat  eum.  Le  grand  prêtre 
Onias  III  était    allé   à   Antioche,   pour  détruire 


(1)  1.  Macc.  1.  35. 

(2)  A'veXitté  srfi  cÉpyjspoaûv?)j  Suoayov.   Vide  Grol.  hic. 
infra  f.  31.  et  ix.  23;  xiv.  20.  et  Usscr.  ad  an.  M.  3834. 

(3)  2]oJ5TpaTo;  os  Kpcr.rjta  xov  i~.i  tov  Kurcpttov.  lia  Srr. 
et  Inlerpp.  passim. 

[a)  Plin.  I.  v.  c.  27.  -  Slrabo.  L  xiv.  -  Grct. 


(5)  Vide  si  placct  Plat,  in  Aleibiad.  Ptutare.  in  Themis- 
toct.  Athen.  t.  1.  Serar.  Grol.  Tutti,  in  Verrem.  5.  Uxo- 
nbus  attribuunt  civitates  hoc  modo  :  hœc  civitas  mulieri 
in  redimiculum  prajbeat,  hase  in  collum,  hase  in  crines. 
lta  populos  habent  universos  non  solum  conscios  libi- 
dinis  suse,  sed  etiam  administros. 


II.—  MACCABÉES.  —  IV.-  CHATIMENT  D'ANDRONIQUE 


îtfi 


5$.  Ob  quam  causam  non  solum  Judœi,  sed  alise  quo- 
que  nationes  indignabantur,  et  moleste  ferebant  de  ne  ce 
tanti  viri  injusta. 

56.  Sed  regressum  regem  de  Cilicias  locis  adierunt 
Judœi  apud  Antiochiam,  simul  et  Grœci,  conquerentes 
de  iniqua  nece  Onioe. 

?7.  Constritatus  itaque  animo  Antiochus  propter  Oniam, 
et  flexus  ad  misericordiam,  lacrymas  fudit,  recordatus 
defuncti  sobrietatem  et  modestiam: 


58.  Accensisque  animis,  Andronicum  purpura  exutum, 
per  totam  civitatem  jubet  circumduci,  et  in  eodem  loco, 
in  quo  in  Oniam  impietatem  commiserat,  sacrilegum  vita 
privari,   Domino  1 11  ï  condignam  retribuente  pœnam. 


j$.  Aussi  non  seulement  les  Juifs,  mais  les  autres 
nations  même  en  conçurent  de  l'indignation,  et  ne  pou- 
vaient supporter  l'injustice  de  la  mort  d'un  si  grand 
homme. 

;6.  C'est  pourquoi  le  roi  étant  revenu  de  Cilicie,  les 
Juifs  avec  les  Grecs  allèrent  le  trouver  à  Antioche,  et  lui 
firent  leurs  plaintes  de  ce  meurtre  si  injuste  d'Onias. 

J7.  Antiochus  fut  saisi  de  tristesse  au  fond  du  cœur  à 
cause  de  la  mort  d'Onias  ;  il  fut  touché  de  compassion  ; 
et  il  répandit  des  larmes,  se  souvenant  de  la  sagesse  et 
de  la  modération  qui  avaient  toujours  éclaté  dans  sa 
conduite. 

38.  Et  entrant  dans  une  grande  coière  contre  Andro- 
nique,  il  commanda  qu'on  le  dépouillât  de  la  pourpre, 
qu'on  le  menât  par  toute  la  ville,  et  que  ce  sacrilège  fût 
tué  au  même  lieu  où  il  avait  commis  cette  impiété  contre 
Onias  ;  le  Seigneur  rendant  ainsi  à  ce  misérable  la  puni- 
tion qu'il  avait  si  justement  méritée. 


COMMENTAIRE 


dans  l'esprit  du  roi  les  calomnies  de  Simon  (1). 
Pendant  ce  temps,  Jason,  son  frère,  obtint  d'An- 
tiochus  la  souveraine  sacrificature,  et  Onias,  qui 
aimait  la  paix,  demeura  à  Antioche  (2).  Il  eut 
l'honneui  de  gagner  l'estime  et  l'amitié  du  prince, 
et  Antiochus  fut  si  touché  de  sa  mort,  qu'il  en 
versa  des  larmes.  Onias  étant  à  Antioche,  fut 
informé  des  sacrilèges  commis  par  Lysimaque, 
suivant  les  ordres  de  Ménélaiis,  il  s'en  plaignit 
auprès  d'Andronique,  que  le  roi  avait  laissé  à 
Antioche,  pour  gouverner  en  son  absence  (3). 
Onias  se  tenait  dans  l'asile  de  Daphné  près  de 
la  ville,  craignant  avec  raison,  la  violence  de  Mé- 
nélaiis. Ce  faubourg  de  Daphné  est  fort  célèbre 
dans  toute  l'antiquité.  Strabon  (4)  dit  qu'il  est  à 
quarante  stades  de  la  ville,  dans  un  lieu  délicieux, 
renommé  pour  ses  belles  eaux,  et  pour  l'ombre 
de  son  bois  de  lauriers,  au  milieu  duquel  est  le 
temple  d'Apollon,  un  asile  inviolable  pour  tous 
ceux  qui  s'y  retirent.  Onias,  tout  pieux  qu'il  était, 
ne  craignit  point,  dans  une  occasion  si  péril- 
leuse, de  se  retirer  dans  l'asile  d'une  fausse  divi- 
nité. 11  est  permis  dans  ces  occasions,  non  pas 
de  reconnaître  les  faux  dieux,  mais  de  profiter 
des  privilèges  que  l'erreur  des  hommes  a  attachés 
à  leurs  temples  ou  aux  bois  qui  leur  sont  consa- 
crés. 

En  nous  marquant  qu'Onias  ne  reprocha  à 
Ménélaiis  l'enlèvement  des  vases  sacrés  qu'après 
qu'il  en  eût  été  très  assuré,  l'Écriture  semble  vouloir 
nous  instruire  touchant  la  sagesse  avec  laquelle 
on  doit  se  conduire  dans  les  réprimandes.  11  faut 
connaître  très  certainement  la  vérité  des  choses 
dont  sont  accusés  ceux  qu'on  veut  reprendre; 
parce  qu'il  est  aussi  dangereux  de  s'élever  injus- 
tement contre  les  personnes  innocentes  accablées 
par  la  calomnie,  que  de  tolérer  et  de  laisser  im- 


punis des  méchants  couverts  de  crimes.  Plus 
même  les  accusations  sont  atroces,  comme  l'était 
celle  dont  on  chargeait  Ménélaiis,  plus  l'équité  et 
la  charité  nous  obligent  à  les  examiner,  pour  ne 
pas  tomber  dans  des  fautes  presqu'irréparables 
contre  la  réputation  de  nos  frères.  Que  de  juge- 
ments précipités  et  téméraires  seraient  arrêtés 
par  la  sagesse  de  cette  conduite,  dont  ce  saint 
prêtre  nous  montre  ici  un  si  bel  exemple!  Que 
de  calomnies  seraient  étouffées  dès  leur  naissance, 
si  l'on  n'a'vait  pour  principe  que  de  s'éclaircir  de 
la  vérité  !  Que  de  calomniateurs  seraient  même 
retranchés  du  milieu  des  hommes,  s'ils  savaient 
qu'on  ne  dût  les  écouter  que  pour  les  convaincre 
de  fausseté!  Onias  connaissait  l'impiété  de  Mé- 
nélaiis, et  il  pouvait  bien  juger  qu'un  homme  qui 
avait  eu  l'insolence  d'enlever  à  prix  d'argent  la 
souveraine  sacrificature,  était  très  capable  aussi 
d'enlever  les  vases  sacrés  du  temple  et  de  les 
vendre  :  mais  ce  n'était  pas  assez  pour  un  saint 
prêtre  comme  Onias,  de  connaître  en  général  la 
corruption  de  ce  prêtre  simoniaque,  pour  l'accu- 
ser de  cette  impiété  particulière  qu'on  lui  impu- 
tait, s'il  n'en  avait  eu  une  connaissance  très  cer- 
taine. 

Aussitôt  qu'il  en  eût  été  assuré,  il  ne  craignit 
point  de  lui  reprocher  ce  sacrilège,  s'acquittant 
de  ce  qu'il  devait  à  la  sainteté  de  son  ministère, 
et  se  mettant  néanmoins,  autant  qu'il  put,  à  cou- 
vert de  sa  fureur.  Si  Dieu  permit  que  sa  géné- 
reuse liberté  à  reprendre  cet  impie  fut  suivie  de 
la  trahison  et  du  meurtre  qu'on  commit  en  sa 
personne',  c'est  que  ce  grand  prêtre,  modèle  de 
sainteté,  devait  mourir  martyr  de  son  zèle. 

f.  27.  CONTRISTATUS  ANIMO  ANTIOCHUS  PROP- 
TER Oniam.  C'est  le  plus  bel  éloge  que  l'on  puisse 
faire  de  la  vertu  d'Onias,   que  de  dire  qu'Antio- 


(1)  11.  Macc.  iv.  4.  5.  6.  et  sdj. 

(2)  Verset  57. 


(?)  Verset  \i. 

(4)  Strabo.  t.  xvi.  p.  712. 


i82       II.—  MACCABÊES.  —  IV.-  CONDUITE  COUPABLE   DE  MÉNÉLAUS 


?0.  Multis  autem  sacrilegiis  in  templo  a  Lysimacho 
commissis  Menelai  consilio,  et  divulgata  fama,  congre- 
gata  est  multitudo  adversum  Lysimachum,  multo  jam 
auro  exportato. 

40.  Turbis  autem  insurgentibus,  et  animis  ira  repletis, 
Lysimachus,  armatis  fere  tribus  millibus,  iniquis  manibus 
uti  cœpit,  duce  quodam  tyranno,  œtate  pariter  et  demen- 
tia  proveclo. 

41.  Sed,  ut  intellexerunt  conatum  Lysimachi,  alii  lapi- 
des, alii  fustes  validos  arripuere,  quidam  vero  cinerem 
in  Lysimachum  jecere. 

42.  Et  multi  quidem  vulnerati,  quidam  autem  et  pros- 
trati,omnes  vero  in  lugam  conversi  sunt;  ipsum  etiam 
sacrilegum  secus  œrarium  interfecerunt. 

4?.  De  his  ergo  ccepit  judicium  adversus  Menelaum 
agitari. 

44.  Et  cum  venisset  rex  Tyrum,  ad  ipsum  negotium 
detulerunt  missi  très  viri  a  senioribus. 

45.  Et  cum  superaretur  Menelaus,  promisit  Ptolemœo 
militas  pecunias  dare  ad  suadcndum  régi. 

4C.  Itaque  Ptolemœus  in  quodam  atrio  positum  quasi 
refrigerandi    gratia  regem    adiit,  et  deduxit  a  se.itentia  ; 

47.  Et  Menelaum  quidem  universas  malitias  reum  cri- 
minibus  absolvit,  miseros  autem,  qui,  etiamsi  apud  Scy- 
thas  causam  dixissent,  innocentes  judicarcntur,  hos  morte 
damnavit. 

4O.  Cito  ergo  injustam  pœnam  dederunt,  qui  pro  civi- 
tate ,  et  populo,  et  sacris  vasis,  causam  prosecuti 
sunt. 

49.  Quamobrem  Tyrii  quoque  indignati,  erga  sepultu- 
ram  eorum,  liberalissimi  extiterunr 

50.  Menelaus  autem,  propter  eorum,  qui  in  potentia 
erant,  avaritiam,  permanebat  in  potestate,  crescens  in 
malitia  ad  insidias  civium. 


COMM 

chus  Épiphane  lui-même,  son  ennemi,  qui  l'avait 
privé  de  sa  dignité,  ne  put  retenir  ses  larmes  à  la 
nouvelle  de  sa  mort.  On  raconte  (1),  que  Jules 
César  versa  des  larmes  en  voyant  la  tête  de 
Pompée;  et,  lorsqu'il  apprit  la  mort  de  Caton,  il 
dit  qu'il  enviait  sa  gloire,  et  que  Caton  lui  avait 
dérobé  celle  de  lui  conserver  la  vie  :  Se  illius  glo- 
riœ  invidere,  et  illum  suce  invidisse  dixit. 

f,  40.  Duce  quodam  tyranno.  Ayant  pour 
chej  un  certain  Tyran,  un  homme  du  nom  de 
Tyran.  Le  grec  lit:  A"upâvou  un  homme  du  Hau- 
rân,  contrée  voisine  de  Damas. 

f.  41.  Quidam  cinerem  in  Lysimachum  jecere. 
Le  grec  (2)  :  Quelques  uns  prenant  de  la  cendre 
qui  était  là,  en  répandirent  de  toutes  parts  sur  Lysi- 
maque  et  les  siens.  On  lui  jeta  de  la  cendre  ou  de 


?o.  Or,  Lysimaque  ayant  commis  plusieurs  sacrilèges 
dans  le  temple  par  le  conseil  de  Ménélaus,  et  le  bruit 
s'étant  répandu  qu'il  en  avait  déjà  emporté  quantité  d'or, 
la  multitude  se  souleva  contre  Lysimaque. 

40.  Comme  donc  les  habitants  de  la  ville  se  soulevaient, 
et  qu'ils  étaient  animés  d'une  grande  colère,  Lysimaque 
arma  environ  trois  mille  hommes,  et  commença  à  user 
de  violence,  ayant  pour  chef  un  certain  Tyran  également 
avancé  en  âge,  et  consommé  en  malice. 

4.  Mais  lorsque  les  Juifs  virent  que  Lysimaque  les 
attaquait  de  cette  sorte,  les  uns  prirent  des  pierres,  les 
autres  de  gros  bâtons  ;  et  quelques-uns  jetèrent  de  la 
cendre  contre  lui. 

42.  Il  eut  beaucoup  de  ses  gens  blessés,  et  quel- 
ques-uns de  tués  ;  et  tous  furent  mis  en  fuite  :  et  le 
sacrilège  fut  aussi  tué  lui-même  près  du  trésor. 

4;.  On  commença  donc  à  accuser  Ménélaus  de  tous 
ces  désordres. 

44.  Et  le  roi  étant  venu  à  Tyr,  trois  députes  envoyés 
par  les  anciens  de  la  ville  vinrent  lui  porter  leurs  plaintes 
sur  cette  alfaire. 

4v  Ménélaus,  voyant  qu'il  succombait  sous  cette  accu- 
sation, promit  à  Ptolémée  une  grande  somme  d'argent 
pour  l'engager  à  parler  au  roi  en  sa  faveur. 

46.  Ptolémée  ayant  donc  été  trouver  le  roi,  lorsqu'il 
s'était  mis  dans  un  vestibule  comme  pour  se  rafraîchir, 
le  fit  changer  de  résolution. 

47.  Et  ce  prince  déclarant  Ménélaus  innocent,  quoiqu'il 
fût  coupable  de  toutes  sortes  de  crimes,  condamna  en 
même  temps  à  la  mort  ces  pauvres  députés,  qui  auraient 
été  jugés  innocents  par  des  Scythes  môme,  s'ils  avaient 
plaidé  leur  cause  devant  eux. 

4".  Ainsi  ceux  qui  avaient  soutenu  les  intérêts  de  la 
ville  et  du  peuple,  et  le  respect  dû  aux  vases  sacrés, 
furent  punis  aussitôt  contre  toute  justice. 

49.  C'est  pourquoi  les  Tyriens  même,  touchés  d'indi- 
gnation, se  montrèrent  fort  généreux  dans  la  sépulture 
honorable  qu'ils  leur  donnèrent. 

ço.  Cependant  Ménélaus  se  maintenait  dans  l'autorité, 
à  cause  de  l'avarice  de  ceux  qui  étaient  puissants  auprès 
du  roi  ;  et  il  croissait  en  malice,  ne  travaillant  qu'à  ten- 
dre des  pièges  à  ses  concitoyens. 

ENTAIRE 

la  poussière.  Tout  ceci  se  passa  dans  le  temple,  où 
il  y  avait  beaucoup  de  cendre,  à  cause  du  feu 
de  l'autel.  Il  y  avait  même  un  endroit  du  parvis, 
destiné  à  y  mettre  la  cendre  (j). 

j^.  4).  Cum  superaretur  Menelaus.  Le 
grec  (4)  :  Ménélaiïs  se  voyant  en  défaut,  abandonné 
ou  convaincu,  s'adressa  à  Ptolémée,  favori  du  roi. 
C'est  ce  même  Ptolémée,  fils  de  Dorymini,  dont 
il  est  parlé  au  premier  livre  des  Maccabées  (5). 
Ayant  quitté  le  parti  de  Ptolémée  Philométor, 
roi  d'Egypte, il  livra  l'îledeChypreàAntiochus(6), 
et  reçut,  en  récompense  de  sa  perfidie,  le  gouver- 
nement de  la  Cœlé-Syrie  et  de  la  Phénicie. 

fr.  46.  In  quodam  atrio.  Le  grec  (7)  Dans  un 
péristyle,  une  galerie,  soutenue  de  colonnes,  pour 
prendre  le  frais. 


(1)  Valcr.  Max.  I.  1.  c.  5.  cxcmplo  11.  10. 

(2)  TVve;  Sa  h.  x/j;  r:apotxEt(iévr)i  cr7:ôîou  opaaior/evo1.  ç<5p- 
£r,v  ëvETi'vaaaov  hi  touç  r.tp\  xov  Auat[j.â/ov. 

(?)  Ltvit  1.  16;  îv.  12.  etc. 


(4)  H"o7]  Vi  XeXsifijjLê'vo;  ô  MeveXoco; 

(5)  1.  Macc.  ni.  jO. 

(6)  1.  Macc.  x.  5. 

(7)  E'iç  xi  îîeptatuXov  o'j;  âva'Iu'Jovxa. 


CHAPITRE   V 

Antiochus  se  prépare  à  marcher  contre  V Egypte.  Prodiges  effrayants  qui  paraissent  dans 
l'air  au  dessus  de  Jérusalem.  Expédition  de  Jason  contre  Jérusalem;  sa  fuite  et  sa  fin 
malheureuse.  Antiochus  marche  contre  Jérusalem;  violences  qu'il  y  exerce.  Il  envoie 
Appollonius ,  qui  y  exerce  de  nouvelles  cruautés;  Judas  Maccabée  se  retire  dans 
le  désert. 


i.  Eodem  tempore  Antiochus  secundam  profectionem 
paravit  in  ^Egyptum. 

2.  Contigit  autem  per  universam  Jerosolymorum  civi- 
tatem  videri  diebus  quadraginta  per  aéra  équités  diseur- 
rentes,  auratas  stolas  habentes,  et  hastis,  quasi  cohor- 
tes, armatos  ; 

5.  Et  cursus  equorum  per  ordines  digestos,  et  con- 
gressiones  fieri  cominus,  et  scutorum  motus  et  galeato- 
rum  multitudinem  gladiis  districtis,  et  telorum  jactus,  et 
aureorum  armorum  splendorem,  omnisque  generis  lori- 
carum. 

4.  Quapropter  omnes  rogabant  in  bonum  monstra  con- 
verti. 

5.  Sed  cum  falsus  rumor  exisset,  tanquam  vita  exces- 
sisset  Antiochus,  assumptis  Jason  non  minus  mille  viris, 
repente  aggressus  est  civitatem;  et  civibus  ad  murum 
convolantibus,  ad  ultimum  apprehensa  civitate,  Mene- 
laus  fugit  in  arcem. 


î.  En  ce  temps-là,  Antiochus  se  préparait  pour  faire 
une  seconde  fois  la  guerre  an  Egypte. 

2.  Or  il  arriva  que  l'on  vit  dans  toute  la  ville  de  Jéru- 
salem, pendant  quarante  jours,  des  hommes  à  cheval, 
qui  couraient  en  l'air,  habillés  de  draps  d'or,  et  armés  de 
lances  comme  des  troupes  de  cavalerie  ; 

;.  Des  chevaux  rangés  par  escadrons,  qui  couraient 
les  uns  contre  les  autres  ;  des  combats  de  main  h  main  ; 
des  boucliers  agités  ;  une  multitude  de  gens  armés  de 
casques  et  d'épées  nues  ;  des  dards  lancés  ;  des  armes 
d'or  brillantes  ;  et  des  cuirasses  de  toutes  sortes. 

4.  C'est  pourquoi  tous  priaient  Dieu  que  ces  prodiges 
tournassent  à  leur  avantage. 

î.  Mais  un  faux  bruit  de  la  mort  d'Antiochus  s'étant 
répandu,  Jason  prit  mille  hommes  avec  lui,  vint  attaquer 
tout  d'un  coup  la  ville  :  et,  quoique  les  citoyens  accou- 
russent de  tous  côtés  aux  murailles,  il  se  rendit  enfin 
maître  de  la  ville  ;  et  Ménélaus  s'enfuit  dans  la  forteresse. 


COMMENTAIRE 


y.  1.  Antiochus  secundam  profectionem  para- 
vit in  iEcYPTUM.  Antiochus  Épiphane  avait  fait 
une  première  tentative  contre  l'Egypte,  en  y  en- 
voyant Apollonius  (1),  sous  prétexte  d'assister  à 
la  prise  de  possession  du  royaume  par  le  jeune 
Ptolémée  Philométor;  mais  Antiochus  Épiphane 
ne  passa  pas,  cette  fois,  jusque  dans  l'Egypte, 
arrêté  sans  doute  par  la  crainte  des  Romains;  il 
n'alla  que  jusqu'à  Joppé,  vint  à  Jérusalem,  où  il 
fut  reçu  par  Jason,  et  s'en  retourna  en  Phéni- 
cie  (2).  Trois  ans  après  (3),  voyant  que  les  régents 
d'Egypte  se  préparaient  sérieusement  à  lui  faire 
la  guerre,  pour  l'obliger  à  rendre  à  Ptolémée 
Philométor  la  Cœlé-Syrie,  qui  avait  été  cédée  à 
Cléopâtre,  sa  mère,  pour  dot,  Antiochus  les  pré- 
vint et  alla  les  attaquer  dans  l'Egypte.  C'est  de 
cette  seconde  guerre  que  parle  ici  l'auteur  (170 
avant  Jésus-Christ). 

f.  2.  Contigit  videri  per  aéra  équités  dis- 
currentes.  Souvent  Dieu  a  permis  qu'on  vît  de 
semblables  signes,  présages  des  malheurs  futurs. 
Josèphe  nous  décrit  ceux  qui  parurent  avant  le 
dernier  siège  de  Jérusalem  (4).  Suétone  et  Tite- 


Live  sont  pleins  de  ces  sortes  de  prodiges  signi- 
ficatifs. L'imagination  et  l'erreur  des  peuples,  et 
la  trop  grande  crédulité  des  historiens,  les  ont 
sans  doute  beaucoup  grossis;  mais  cela  ne  doit 
pas  nuire  aux  prodiges  certains  et  véritables.  On 
peut  assurer  au  contraire,  qu'il  y  a  de  vrais  pro- 
diges et  de  vrais  miracles,  puisque  l'on  en  a  tant 
publiés  de  faux.  Ceux  dont  on  nous  parle  ici  ont 
un  caractère  particulier  de  certitude.  Ils  sont 
rapportés  par  un  auteur  contemporain,  ou  presque 
contemporain  ;  ce  ne  sont  point  des  phénomènes 
qui  n'aient  fait  que  passer  devant  les  yeux  de  peu 
de  personnes,  ou  distraites,  ou  d'un  esprit  faible; 
ils  ont  paru  pendant  quarante  jours,  à  la  vue 
de  toute  une  ville  de  plus  de  cent  mille  habi- 
tants, dont  une  grande  partie  étaient  très  éclairés, 
nullement  superstitieux,  si  peu  enclins  à  la  mys- 
ticité qu'ils  abandonnaient  la  religion  de  leurs 
pères  pour  suivre  les  cultes  étrangers. 

y.  5 .  Cum  falsus  rumor  exisset  tanquam  vita 
excessisset  Antiochus.  Cette  fausse  nouvelle 
de  la  mort  d'Antiochus,  qui  était  alors  en  Egypte, 
occupé  au    siège   d'Alexandrie,  causa  bien   des 


(1)  Usser.  ad  an.  M.  j8ji. 

(2)  11.  Macc.  iv.  ai. 


(?)  An.  38j4- 

(4)  Joseph,  de  Bello.  I.  vu.  c.  12. 


;84 


II.  —  MACCABÉES.   -  V.-  FIN   MISERABLE  DE  JASON 


6.  Jason  vero  non  parcebat  in  caede  civibus  suis,  nec 
cogitabat  prosperitatem  adversum  cognatos  malum  esse 
maximum,  arbitrans  hostium,  et  non  civium,  se  trophcea 
capturum. 

7.  Et  principatum  quidem  non  obtinuit,  finem  vero  insi- 
diarum  suarum  confusionem  accepit,  et  profugus  iterum 
abiit  in  Ammaniten. 


8.  Ad  ultimum,  in  exitium  sui  conclusus  ab  Areta,  Ara- 
bum  tyranno,  fugiens  de  civitate  in  civitatem,  omnibus 
odiosus,  ut  refuga  legum  et  execrabilis,  ut  patrias  et 
civium  hostis,  in  /Egyptum  extrusus  est  ; 


0.  Et  qui  multos  de  patria  sua  expuierat,  peregre  periit, 
Lacedœmonas  profectus,  quasi  pro  cognatione  ibi  refu- 
gium  habiturus  ; 

10.  Et  qui  insepultos  multos  abjecerat,  ipse  et  illamen- 
tatus  et  insepultus  abjicitur,  sepultura  neque  peregrina 
usus,  neque  patrio  sepulcro  participans. 


6.  Cependant  Jason  fit  un  grand  carnage,  sans  songer 
à  épargner  ses  concitoyens  :  il  ne  considérait  point  que 
c'est  un  très  grand  malheur  d'être  heureux  dans  la 
guerre  qu'on  fait  à  ses  proches  ;  et  il  croyait  remporter 
un  trophée  de  ses  ennemis,  et  non  de  ses  concitoyens. 

7.  11  ne  put  pas  néanmoins  se  mettre  en  possession  de 
la  principauté  :  mais  tout  le  fruit  de  sa  trahison  et  de  sa 
malice  fut  sa  propre  confusion  :  et  il  se  vit  obligé  de 
s'enfuir  de  nouveau,  et  de  se  retirer  au  pays  des  Ammo- 
nites. 

8.  Il  fut  enfin  mis  en  prison  par  Arétas,  roi  des  Arabes, 
qui  voulait  le  perdre;  s'étant  sauvé,  et  fuyant  de  ville  en 
ville,  haï  de  tout  le  monde  comme  un  violateur  de  toutes 
les  lois,  comme  un  homme  exécrable,  comme  un  ennemi 
déclaré  de  sa  patrie  et  de  ses  concitoyens,  il  fut  chassé 
en  Egypte. 

9.  Ainsi  celui  qui  avait  chassé  tant  de  personnes  hors 
de  leur  pays,  périt  lui-même  hors  du  sien,  étant  allé  à 
Lacédémone  pour  y  trouver  quelque  refuge,  à  cause  de 
la  parenté. 

10.  Et  comme  il  avait  fait  jeter  de  nombreux  corps 
sans  les  faire  ensevelir,  le  sien  fut  jeté  de  même,  sans 
être  ni  pleuré  ni  enseveli,  et  sans  qu'il  ait  pu  trouver  de 
tombeau,  ni  dans  son  pays,  ni  parmi    les  étrangers. 


maux  à  Jérusalem.  Jason,  qui  avait  été  déposé 
du  pontificat  par  ce  prince,  et  qui  s'était  retiré 
dans  le  pays  d'Ammon,  auprès  d'Arétas,  crut  que 
l'occasion  était  venue  de  recouvrer  sa  première 
dignité  ;  il  se  rend  à  Jérusalem,  à  la  tête  de  mille 
soldats,  et  prend  la  ville  ;  mais  il  ne  put  conserver 
une  conquête  de  cette  importance.  Ménélaûs  se 
sauva  dans  la  forteresse,  où  étaient  les  troupes 
d'Anliochus;  Jason  fut  obligé  de  se  retirer  de 
nouveau  chez  le  roi  des  Ammonites. 

D'un  autre  côté,  Antiochus,  informé  que  les 
Juifs  avaient  témoigné  de  la  joie,  à  la  nouvelle  de 
sa  mort  (1),  en  conçut  une  indignation,  dont  ils 
ressentirent  bientôt  les  violents  effets.  Il  comprit 
par  là  qu'ils  n'étaient  nullement  affectionnés  à  sa 
domination,  et  qu'ils  conservaient  du  penchant 
pour  les  rois  d'Egypte,  à  qui  ils  avaient  été  sou- 
mis assez  longtemps  ;  il  revint  donc  en  Judée,  et 
exerça  contre  Jérusalem  tout  ce  que  la  rage  et  la 
vengeance  purent  lui  inspirer  de  plus  cruel. 
L'arabe  dit  que  les  mauvais  Juifs  firent  entendre 
à  Antiochus,  qu'on  avait  pris  les  signes  qui  avaient 
paru  dans  l'air,  au-dessus  de  Jérusalem,  comme 
des  présages  de  sa  mort,  et  que  le  peuple  en  avait 
témoigné  de  la  joie  (2). 

f.  6.  Nec  cogitabat  prosperitatem  adversus 
cognatos  malum  esse  maximum.  Il  ne  considérait 
point  que  c'est  un  très  grand  malheur  d'être  heu- 
reux dans  la  guerre  qu'on  fait  à  ses  proches  ;  parce 
qu'on  se  détruit  soi-même,  en  diminuant  le  nom- 


COMMENTAIRE 

bre  de  ses  propres  sujets  ;  c'est  là  le  malheur 
des  guerres  civiles,  où  la  victoire  est  toujours 
désavantageuse.  Tacite,  en  parlant  de  la  guerre 
entre  Othon  et  Vitellius  :  Ulrasque  impias 
preces,  utraque  delesianda  vola,  inler  duos,  quorum 
bello  solum  id  scires  détériorera  fore  qui  vicisset. 

i.  8.  In  exitium  sui  conclusus  ab  Areta.  On 
ne  connaît  pas  la  raison  de  son  emprisonnement. 


Le  grec  porte  (5)  :  77  reçut  enfin  la  récompense  de 
sa  mauvaise  conduite,  ayant  été  arrêté  par  A  ré  las, 
roi  des  Arabes.  Quelques-uns  lisent  :  Ilreçul  enfin 
la  peine  de  sa  mauvaise  vie,  ayant  été  accusé  près 
d'Arélas.  La  construction  du  grec  s'accorde  mieux 
avec  cette  dernière  manière  de  lire,  et,  en  gardant 
même  la  leçon  ordinaire,  il  vaut  mieux  traduire: 
Il  fut  tellement  resserré  et  attaqué  de  toute  part 
chez  les  Ammonites,  qu'il  fut  contraint  de  se 
sauver  de  ville  en  ville,  et  enfin  de  s'enfuir  en 
Egypte. 

j>.  9.  Quasi  pro  cognatione  refugium  ibi 
habiturus.  Voyez  1.  Macc.  xn,  21.  Le  grec 
lit  (4)  :  Il  se  rendit  auprès  des  Lacédémoniens.  Des 
exégètes  l'entendent  des  Lacédémoniens,  qui 
étaient  alors  en  Egypte,  et  qui  servaient  dans  l'ar- 
mée de  Ptolémée  Philométor.  Il  est  certain  que 
les  Lacédémoniens  faisaient  alors  partie  de  la 
ligue  Achéenne,  avec  qui  le  roi  d'Egypte  était 
allié  (<,). 

f.    10.   Sepultura    neque    peregrina    usus, 

NEQUE  PATRIO  SEPULCHRO  PARTICIPANS.  LegreC  (6): 


(i)  Joseph,  libelle-  de  Maccab.  c.  4.  H'V.oucs  oïl  ÇiffJW)? 
oiaooOsi'or];  7T2pt  toù  xsOvâvat  àuTov  to;  è'vtoi  [j.âXcaxa  ya:- 
pats/  Si  I'Epoao).u;j.tTa[. 

(2)  n.Macc.^c.  j.   Vide  Arab.  in  Polyglott.  Paris. 

(j)  IL'pa:  oùv  /.a/.fjç  âvasTpoyrj;    È'toyov  ÉY'/AeiaOjiç    rcpà; 


A'pe'tay.  Quelques  commentateurs  lisent  ey/Ai^Oà:,  accusé, 
au  lieu  de  iy/.lsiGQù:,  enferme. 

(4)  Ilpô;  Aazsôatjioviou;  àva/Oe'iç. 

(5)  Polyb  in  excerpt.  de  Lcgationib.  xxxvn.  et  lvii. 

(6)  Kai  y.7)3j:'a;  oùoè  fjitlvoç,  offxs  r.o.zç>MW  tâ-fou  [Uïia/J.. 


II.  —  MACCABÉES.  —  V.  -  MASSACRE   DES  JUIFS 


18 


il.  His  itaque  gestis,  suspicatus  est  rex  societatem 
deserturos  Judasos;  et  ob  hoc  profectus  ex  ^gypto  effe- 
ratis  animis,  civitatem  quidem  armis  cepit. 

12.  Jussit  autem  militibus  interficere ,  nec  parcere 
occursantibus,  et  per  domos  ascendentes  trucidare. 

i  j.  Fiebant  ergo  csedes  juvenum  ac  seniorum,  et  mulie- 
rum  et  natorum  exterminia,  virginumque  et  parvulorum 
neces. 

14.  Erant  autem  toto  triduo  octoginta  millia  interfecti, 
quadraginta  millia  vincti,  non  minus  autem  venundati. 

15.  Sed  nec  ista  sufficiunt  :  ausus  est  etiam  intrare 
templum  universa  terra  sanctius,  Menelao  ductore,  qui 
legum  et  patrios  luit  proditor; 

16.  Et  scelestis  manibus  sumens  sancla  vasa  ;  quas  ab 
aliis  regibus  et  civitatibus  erant  posita^ad  ornatum  loci 
et  gloriam,  contrectabat  indigne,  et  contaminabat. 

17.  Ita  alienatus  mente  Antiochus,  non  considerabat 
quod  propter  peccata  habitantium  civitatem,  modicum 
Deus  fuerat  iratus,  propter  quod  et  accidit  circa  locum 
despectio  ; 


18.  Alioquin,  nisi  contigisset  eos  muitis  peccatis  esse 
involutos,  sicut  Heliodorus,  qui  missus  est  a  Seleuco 
rege  ad  expoliandum  œrarium,  etiîm  hic  statim  adveniens 
flagellatus  et  repulsus  utique  fuisset  ab  audacia. 


11.  Ces  choses  s'étant  passées  de  la  sorte,  le  roi  s'ima- 
gina que  les  Juils  pourraient  bien  abandonner  l'alliance 
qu'ils  avaient  faite  avec  lui;  ainsi  il  partit  d'Egypte  plein 
de  fureur,  et,  ayant  emporté  la  ville  de  vive  force, 

12.  Il  commanda  à  ses  soldats  de  tuer  tout,  de  n'épar- 
gner aucun  de  tous  ceux  qu'ils  rencontreraient,  et 
d'égorger  ceux  qui  monteraient  au  haut  des  maisons. 

ij.  Ils  firent  donc  un  carnage  général  des  jeunes  gens 
et  des  vieillards,  des  femmes  et  des  enfants  ;  et  ni  les 
filles,  ni  les  plus  petits  enfants  ne  purent  éviter  la  mort. 

14.  Il  en  fut  tué  quatre-vingt  mille  pendant  trois  jours  : 
quarante  mille  furent  faits  captifs  ;  et  il  n'y  en  eut  pas 
moins  de  vendus. 

15.  Mais, comme  si  cette  cruauté  n'eût  pas  suffit  à  An- 
tiochus, il  osa  même  entrer  dans  le  temple,  qui  était  le 
lieu  le  plus  saint  de  toute  la  terre,  ayant  pour  conduc- 
teur Ménélaûs,  l'ennemi  des  lois  et  de  sa  patrie. 

16.  Et,  prenant  avec  ses  mains  criminelles  les  vases 
sacrés,  que  les  autres  rois  et  les  villes  avaient  placés  en 
ce  lieu  saint,  pour  en  être  l'ornement  et  la  gloire,  il  les 
maniait  d'une  manière   indigne,  et  les  profanait. 

17.  Ainsi,  Antiochus  ayant  perdu  toute  la  lumière  de 
l'esprit,  ne  considérait  pas  que,  si  Dieu  faisait  éclater 
pour  un  peu  de  temps  sa  colère  contre  les  habitants  de 
cette  ville,  c'était  à  cause  de  leurs  péchés  ;  et  que  c'était 
pour  cela  qu'un  'lieu  si  saint  avait  été  exposé  à  la  profa- 
nation. 

10.  Car  autrement,  s'ils  n'avaient  été  coupables  de  plu- 
sieurs crimes,  ce  prince,  à  l'exemple  d'Héliodore  qui  fut 
envoyé  par  le  roi  de  Séleucus  pour  piller  le  trésor, 
aurait  été  fouetté  comme  lui  au  moment  de  son  arrivée 
et  empêché  d'exécuter  son  entreprise  insolente. 


COMMENTAIRE 


On  ne  lui  rendit  aucun  des  devoirs  qu'on  rend  aux 
morts,  et  il  ne  fut  point  enterré  dans  le  tombeau  de 
ses  pères.  Ce  que  la  Vulgate  traduit  ici  par  sepul- 
tura  peregrina,  peut  marquer  les  devoirs  que  1  "hu- 
manité ne  permettait  pas  'de  refuser  même  aux 
étrangers,  qui  mouraient  hors  de  leur  pays.  On 
employa  les  trente  pièces  d'argent,  qui  furent  don- 
nées pour  le  prix  de  Jésus-Christ,  à  acheter  un 
champ  pour  la  sépulture  des  étrangers  (1). 

jK  11.  Suspicatus  est  rex  societatem  deser- 
turos Jud/EOS.  L'entreprise  de  Jason,  et  la  joie 
que  les  habitants  de  Jérusalem  avaient  témoignée 
à  la  fausse  nouvelle  de  sa  mort,  lui  donnèrent  de 
l'inquiétude.  Il  craignit  qu'ils  ne  se  rendissent  à 
l'Egypte  et  n'abandonnassent  son  parti. 

Civitatem  quidem  armis  c-epit.  Josèphe  dit 
que  les  habitants  de  Jérusalem  sortirent  en  armes, 
contre  Antiochus  (2)  ;  que  ce  prince  forma  le  siège 
de  la  place,  et  qu'il  la  prit  de  force  (5)  ;  mais  ail- 
leurs, il  avance  qu'il  la  prit  sans  combat,  parce 
que  ses  partisans  lui  en  ouvrirent   les    portes  (4). 

y.  14.  Octoginta  millia  interfecti.  Il  y  a 
apparence  que,  dans  ces  quatre-vingt  mille,  sont 
compris  les  quarante  mille  qui  furent  vendus. 
Voici  le  grec  ()):  II  y  en  eut  quatre-vingt  mille  de 


détruits;  quarante  mille  dans  le  premier  feu  du  com- 
bat, ou  l'épée  à  la  main,  et  autant  de  vendus.  La 
construction  insinue  que  la  somme  de  quatre -vingt 
mille,  comprend  tous  ceux  qui  furent  tués  ou  faits 
captifs  dans  cette  occasion. 

jL   17.  Ita  alienatus  mente  Antiochus,   non 

CONSIDERABAT,  QUOD  PROPTER  PECCATA  HABITAN- 
TIUM CIVITATEM    MODICUM    DEUS   FUERAT    IRATUS. 

La  connaissance  de  tant  de  prodiges  que  Dieu 
avait  faits  en  faveur  du  peuple  juif,  dans  le  cours 
de  tous  les  siècles,  depuis  son  établissement, 
aurait  dû  convaincre  en  effet  ce  prince,  qu'il  fal- 
lait bien  que  ce  même  Dieu  fût  en  colère  contre 
son  peuple,  lorsqu'il  permettait  à  ses  ennemis  d'en 
faire  un  si  grand  carnage,  et  de  profaner  ainsi  son 
temple  et  les  vases  consacrés  à  son  saint  culte.  77 
avait  donc  perdu  toute  la  lumière  de  l'esprit,  en  se 
prévalant  ridiculement  de  ce  pouvoir  que  Dieu  lui 
donnait  pour  punir  les  péchés  des  Juifs,  comme 
s'il  ne  l'avait  pas  reçu  de  lui.  Car  il  n'était  point 
absolument  nécessaire  d'avoir  la  foi  pour  en  juger 
de  la  sorte  :  la  lumière  naturelle  de  la  raison 
devait  lui  suffire  pour  le  détromper  de  sa  sotte 
vanité.  Il  devait  savoir,  ce  que  tant  de  princes 
avant  lui  avaient  éprouvé,  que  le  peuple   d'Israël 


(1)  Matth.  xxvn.  7. 

(2)  Joseph,  de  Bdlo  lib.  vi.  p.  929. 
(j)  Idem.  ibid.  t.  1.  c.  1. 


(4)  Idem.  lib.  xii.  Antiq.  e.  7. 

(1)  OV.Ttù  [iuptâos;  xaiE-jOotpEoav.  Téaaape;  [jiv  ëv  a/S 
pdW  voaaïç,  où/.  fjiTov  oï  wov  £a^ayu.e'vcov  eîtoâO^aav. 


i86 


II.  —  MACCABÉES.  —  V.  -  LEUR   OPPRESSION 


19.  Verum  non  propter  locum  gentem,  sed  propter 
gentem  locum  Deus  elegit. 

20.  Ideoque  et  ipse  locus  particeps  factus  est  popul' 
malorum,  postea  autem  fiet  socius  bonorum  ;  et  qui  de- 
relictus  in  ira  Dei  omnipotentis  est,  iterum  in  magni 
Domini  reconciliatione  cum  summa  gloria  exaltabitur. 


21.  Igitur  Antiochus,  mille  et  octingentis  ablatis  de 
templo  talentis,  velociter  Antiochiam  regressus  est,  exis- 
timans  se,  praa  superbia,  terram  ad  navigandum,  pelagus 
vero  ad  iter  agendum  deducturum,  propter  mentis  ela- 
tionem. 

22.  Reliquit  autem  et  prœpositos  ad  affligendam  gentem: 
Jerosolymis  quidem  Philippum,  génère  Phrygem,  mori- 
bus  crudeliorem  eo  ipso  a  quo  constitutus  est  ; 

2?.  In  Garizim  autem  Andronicum  et  Menelaum,  qu' 
gravius  quam  ceteri  imminebant  çivibus. 


19.  Mais  Dieu  n'avait  pas  choisi  le  peuple  à  cause  du 
temple;  il  a  choisi  au  contraire  le  temple  à  cause  du 
peuple. 

20.  C'est  pourquoi  ce  lieu  saint  a  eu  part  aux  maux 
qui  sont  arrivés  au  peuple,  comme  il  aura  part  aussi  aux 
biens  qu'il  doit  recevoir;  et,  après  avoir  été  quelque 
temps  abandonné,  à  cause  de  la  colère  du  Dieu  tout- 
puissant,  il  sera  encore  élevé  à  une  souveraine  gloire, 
lorsque  le  grand  Dieu  se  réconciliera    avec  son  peuple. 

ai.  Antiochus  ayant  donc  emporté  du  temple  dix-huit 
cents  talents,  s'en  retourna  promptement  à  Antioche, 
s'abandonnant  à  un  tel  excès  d'orgueil,  et  s'élevant  dans 
le  cœur  d'une  manière  si  extravagante,  qu'il  s'imaginait 
pouvoir  rendre  la  terre  navigable,  et  (aire  de  la  mer  un 
chemin  ferme. 

22.  Il  laissa  aussi  des  hommes,  qu'il  établit  en  autorité 
afin  qu'ils  affligeassent  le  peuple;  savoir,  dans  Jérusa- 
lem, Philippe,  originaire  de  Phrygie,  plus  cruel  que  celui 
qui  l'y  avait  établi  ; 

25.  Et  à  Garizim, Androniqueet  Ménélaùs, plus  acharnés 
que  tous  les  autres  à  faire  du  mal  à  leurs  concitoyens. 


COMMENTAIRE 


avait  en  tout  temps  paru  invincible,  tant  qu'il  avait 
observé  fidèlement  la  loi  de  son  Dieu  :  Quant  au 
temple,  l'exemple  tout  récent  d'Héliodore,  que  le 
roi,  son  prédécesseur,  avait  envoyé  pour  le  piller, 
pouvait  lui  faire  juger  que  le  même  Dieu  qui  l'avait 
si  hautement  protégé  contre  la  violence  de  Séleu» 
eus,  n'était  pas  moins  redoutable  qu'il  l'avait  été 
alors,  pour  faire  encore  éclater  sa  toute-puis- 
sance. 

y.  19.  Non  propter  locum,  gentem;  sed  prop- 
ter gentem,  locum  Deus  elegit.  Dieu  n'a  que 
faire  de  nos  temples,  ni  de  nos  sacrifices  (1)  ;  c'est 
pour  nous  que  nous  travaillons,  lorsque  nous 
bâtissons  des  temples  au  Très-Haut  ;  c'est  pour 
nous  procurer  des  asiles  contre  la  colère  du  Sei- 
gneur, des  lieux  de  prières  pour  fléchir  sa  colère. 
Qui  suis-je,  disait  Salomon,  pour  entreprendre  de 
bâtir  un  temple  au  Seigneur,  dont  le  ciel  et  la 
terre  ne  sont  pas  capables  de  contenir  l'immen- 
sité (2)  ?  Ce  n'est  donc  que  pour  avoir  des  lieux 
où  nous  puissions  lui  rendre  nos  vœux  et  nos  hom- 
mages :  Ad  hoc  lantum  facla  est,  ut  respicias  ora- 
iionem  servi  lui,  cl  obsecralionem  ejus,  cl  audias 
preces  quas  fundil  famulus  tuus  coram  le.  De  là 
vient  que  le  Seigneur,  dans  sa  vengeance,  ne 
manque  guère  de  permettre  la  profanation  des 
temples  et  des  autels,  comme  pour  faire  sentir 
aux  peuples,  qu'il  abandonnait  ces  lieux  sacrés, 
qui  étaient  comme  des  gages  de  sa  présence  et  de 
sa  protection,  et  qu'il  ne  regarde  qu'avec  horreur, 
dès  qu'ils  ne  servent  plus  que  de  retraite  à  des 
méchants. 


y.  11.  Terram  ad  navigandum,  pelagus  vero 
ad  iter  agendum  deducturum.  Expressions  hy- 
perboliques, qui  marquent  l'extravagance  et  la 
vanité  du  roi  Antiochus,  qui,  après  la  conquête 
de  l'Egypte,  ne  se  croyait  plus  rien  d'impossible. 
L'histoire  a  conservé  la  mémoire  de  l'entreprise 
de  Xerxès  et  de  Caligula,  qui,  par  un  effet  c l'une 
vanité  ridicule,  voulurent  rendre  la  terre  naviga- 
ble, et  la  ruer  ferme,  propre  à  y  marcher  à  che- 
val. Le  premier  bâtit  un  pont  pour  joindre  l'Asie 
à  l'Europe  (1),  fit  aplanir  les  montagnes  et  rem- 
plir les  vallées,  fit  percer  les  terres,  pour  la  com- 
munication des  mers  ;  enfin  prétendit  se  faire 
passer  pour  le  maître  de  la  nature.  L'autre,  plus 
ridicule,  voulut  à  l'imitation  de  Xerxès,  faire  un 
pont  sur  le  lac  Lucrin,  entre  Baies  et  Pouzzoles, 
à  la  longueur  de  trois  mille  six  cents  pas,  pour 
avoir  le  plaisir  d'y  marcher  à  cheval,  et  d'y  passer 
dans  l'équipage  d'un  triomphe  chimérique  (2.) 
Antiochus  avait  trouvé  si  peu  de  résistance  dans 
l'armée  d'Egypte,  et  dans  les  conquêtes  qu'il 
avait  faites  dans  ce  pays,  qu'il  ne  devait  pas  beau- 
coup se  flatter  de  ses  victoires. 

y.  23.  In  Garizim  autem  Andronicum.  Il  faut 
finir  ici  le  sens  ;  car  Ménélaùs  n'eut  aucune  auto- 
rité sur  les  Samaritains,  qui  avaient  leur  temple 
à  Garizim.  Cette  montagne  semble  être  mise  ici, 
pour  tout  le  pays  de  Samarie. 

Et  Menelaum,  qui  gravius  imminebant  çivi- 
bus. Outre  ceux-ci  il  laissa  en  Judée  Ménélaùs 
qui  élait  plus  acharné  que  les  autres,  contre  ses 
citoyens.  Il  faut  lire  imminebat  et  non  imminebant, 


(1)  hai.  1.  11.  -  Jercm.  vi.  20.  -  Ames.  v.  22. 

(2)  Vide  m.  Reg.  vin.  27.  et  n.  Par.  11.  6.  cl  vi.   19. 

(j)  Justin,   t.    11.    Fiducia   virium    velut  naturas    ipsius 
dominus,  et  montes  in    planum    deducebat,   et  convexa 


vallium  rcquabat,  et   quœdam   maria    pontibus  sternebat, 
quasdam  ad    navigationis  commodum,    per   compendium 
ducebat. 
(4)   Vide  Sucloti.  in  Caio  Caligula. 


II. 


MACCABÉES.  —  V.-   RETRAITE  DE  JUDAS  MACCABÉE 


187 


24.  Cumque  appositus  esset  contra  Judœos,misit  odio- 
sum  principëm,  Apollonium,  eu  m  exercitu  viginti  et 
duobus  millibus,  prœcipiens  ei  omnes  perfeclaa  aetati s 
interficere,  mulieres  ac  juvenes  vendere. 


2$.  Qui  cum  venisset  Jerosolymam,  pacem  simulans, 
quievit  usque  ad  diem  sanctum  sabbati  ;  et  tune  feriatis 
Judœis,  arma  capere  suis  prœcepit. 


26.  Omnesque  qui  ad  spectaculum  processerant,  Iru- 
cidavit  ;  et  civitatem  cum  armatis  discurrens,  ingentem 
multitudinem  peremit. 

27.  Judas  autem  Machabaaus,  qui  decimus  fuerat, 
secesserat  in  desertum  locum,  ibique  inter  feras  vitam  in 
montibus  cum  suis  agebat;  et  fœni  cibo  vescentes,  demo- 
rabantur,  ne  participes  essent  coinquinationis. 


24.  Et  la  haine  qu'il  avait  contre  les  Juifs  n'étant  pas 
encore  satisfaite.il  leur  envoya  le  détestable  Apollonius, 
avec  une  armée  de  vingt-deux  mille  hommes  qu'il  com- 
mandait; et  il  lui  donna  ordre  de  tuer  tous  ceux  qui  se- 
raient dans  un  âge  mûr,  et  de  vendre  les  femmes  et  les 
jeunes  hommes. 

2Ç.  Lors  donc  qu'il  fut  arrivé  à  Jérusalem,  il  feignit  de 
vouloir  la  paix,  et  il  demeura  en  repos  jusqu'au  saint  jour 
du  sabbat;  mais  lorsque  les  Juifs  se  tenaient  dans  le 
repos  auquel  le  sabbat  les  obligeait,  il  commanda  à  ses 
gens  de  prendre  les  armes. 

26.  Il  tailla  en  pièces  tous  ceux  qui  étaient  venus  pour 
les  regarder;  et  courant  toute  la  ville  avec  ses  soldats, 
il  tua  un  grand  nombre  de  personnes. 

27.  Cependant  Judas  Maccabée  s'était  retiré,  avec  neuf 
autres,  en  un  lieu  désert,  où  il  vivait  avec  les  siens 
sur  les  montagnes  parmi  les  bêtes;  et  ils  demeuraient  là 
sans  manger  autre  chose  que  l'herbe  des  champs,  afin  de 
ne  point  prendre  part  à  ce  qui  souillait  les  autres. 


COMMENTAIRE 


en  suivant  le  grec  (1):  Cet  acharnement  ne  re- 
garde que  la  personne  de  Ménëlaùs. 

V.   24.   MlSlT  ODIOSUM    PRINCIPËM  ApOLLONIUM. 

La  Vulgate  semble  rapporter  ceci  à  Ménélaùs  ; 
mais  quelle  autorité  avait  ce  grand  prêtre,  pour 
envoyer  Apollonius  contre  les  Juifs  ?  Le  syriaque 
marque  que  ce  fut  Antiochus  qui  l'envoya,  et  la 
suite  du  discours  et  des  faits  racontés  ici  et  dans 
le  premier  livre  des  Maccabées  (2),  semble  de- 
mander ce  sens.  Le  grec  n'en  est  point  éloigné^), 
et  c'est  aujourd'hui  le  sens  le  plus  généralement 
admis.  Le  grec  (4),  au  lieu  de  l'épithète  d'odieux, 
de  détestable,  que  la  Vulgate  donne  à  Apollo- 
nius, lui  donne  le  nom  de  [waip)rjis ,  c'est-à-dire, 
prince  des  scélérats.  Grotius  croit  qu'il  était  prince 
ou  gouverneur  de  Mysie. 

f.  26.  Omnes  qui  ad  spectaculum  processe- 
rant, trucidavit.  77  tailla  en  pièces  tous  ceux  qui 
étaient  venus  pour  les  regarder,  ou  (5),  tous  ceux 
qui  étaient  venus  pour  cette  fête,  qui  étaient  venus 


à  Jérusalem  et  au  temple,  le  jour  du  sabbat,  pour 
participer  aux  sacrifices  et  pour  satisfaire  leur 
dévotion.  Il  faut  comparer  le  premier  livre  des 
Maccabées,  chapitre  1,  verset  30  et  suivants  pour 
voir  la  suite  de  cette  histoire. 

f.  27.  Judas  Machab^eus  qui  decimus  fuerat. 
L'auteur  nomme  exprès  Judas  Maccabée,  parce 
que  son  nom  était  alors  plus  fameux  que  celui  de 
Matthathias,  son  père,  et  d'aucun  de  ses  frères. 
Matthathias  et  ses  cinq  fils,  du  nombre  desquels 
était  Judas,  et  quatre  autres  Juifs  dont  nous  ne 
connaissons  pas  les  noms,  se  retirèrent  d'abord 
ensemble  ;  mais  il  y  en  eut  beaucoup  d'autres  qui 
les  suivirent  dans  les  montagnes.  Le  texte  dit 
qu'ils  se  nourrirent  d'herbes  sauvages,  c'est-à-dire, 
de  fruits,  d'herbes,  de  racines,  et  de  ce  qu'ils 
trouvèrent  à  la  campagne,  n'ayant  pu  emporter 
des  provisions,  pour  tout  le  temps  qu'ils  furent 
obligés  de  demeurer  dans  les  solitudes. 


(1)   ripôç  Sè  TOikoiç    MsvAaov,    ô;    /EipiaTa    TiT.v    a)J.wv 
ur.^peio  toî;  -.okhot-i: .  lia  Syr.  etc. 
^2)  Vide  1.  Macc.  1.  ;o.  et  ni.  10. 
(j)  A'^e^Orj  Se  r.pô;  to;j;  ^oXita;  I'ouoa'iou;   è'/.wv  ola- 


Oetiv,  zr.zp.fyi  Sa  xov  u.uaxp-/7]v  A'r.oXXûvio'/,  etc. 

(4)  Vide  Serar.  Tir.  Grot.Usser.  Vaill.  Vide  ad  1.  Macc. i.]o. 

(5)  Toù;  z^iXOôna;  Tïâyia;  zr:\   xr,v    Oscopiav   auvsxEVTrjcrc. 
Vide  supra  ad  cap.  iv.  19. 


CHAPITRE  VI 


Antiochus  force  les  Juifs  d?  abandonner  les  lois  de  Dieu  pour  embrasser  le  culte  des  idoles. 
Profanation  du  temple.  Cruautés  exercées  contre  les  Juifs  fidèles  à  la  loi  du  Seigneur. 
Dessein  de  Dieu  en  permettant  ces  maux.  Martyre  du  saint  vieillard  Eléa\ar. 


i.  Sed  non  post  multum  temporis,  misit  rex  senem 
quemdam  Antiochenum,  qui  oompelleret  Judasos  ut  se 
transferrent  a  patriis  et  Dei  legibus  ; 

:.  Contaminare  etiam  quod  in  Jerosolymis  erat  tem- 
plum,  et  cognominare  Jovis  Olympii,  et  in  Garizim, 
prout  erant  hi  qui  locum  inhabitabant,   Jovis    hospitalis. 

j.  Pessima  autem  et  universis  gravis  erat  maiorum 
incursio  ; 


i.  Peu  de  temps  après,  le  roi  envoya  un  certain  vieil- 
lard d'Antioche  pour  forcer  les  Juifs  à  abandonner  les 
lois  de  Dieu  et  celles  de  leur  pays; 

2.  Pour  profaner  le  temple  de  Jérusalem,  et  l'appeler 
le  temple  de  Jupiter  Olympien  ;  et  pour  donner  au  tem- 
ple de  Garizim  le  nom  de  temple  de-Jupiter  l'Étranger, 
comme  l'étaient  ceux  qui  habitaient  en  ce  lieu. 

;.  Ainsi  l'on  vit  fondre  tout  d'un  coup  sur  tout  le  peu- 
ple comme  un  déluge  terrible  de  toutes  sortes  de  maux  : 


COMMENTAIRE 


f.  i.  Senem  Antiochenum.  Un  vieillard  d'An- 
tioche, ou  un  sénateur  d'Antioche.  Le  grec  (i)  : 
Un  vieillard  Athénien,  on  un  sénateur  nommé 
Athénée. 

f.  2.  Cognominare  Jovis  Olympii.  Les  Grecs, 
voulant  introduire  leur  religion  dans  l'Asie,  se 
contentèrent  de  remarquer  les  propriétés  des  di- 
vinités anciennes  du  pays,  et  d'en  changer  les 
noms,  pour  y  substituer  les  noms  grecs.  On 
trouva  quelque  ressemblance  entre  le  Dieu  du 
Ciel,  que  les  Juifs  adoraient,  et  le  Jupiter  Olym- 
pien des  Grecs  ;  on  voulut  obliger  les  Juifs  à  trans- 
férer à  ce  dieu  des  Grecs,  les  honneurs  qu'ils 
rendaient  au  Dieu  du  ciel.  Les  autres  nations  n'y 
firent  point  de  façon  ;  elles  changèrent  aisément 
le  nom  et  les  cérémonies  de  leurs  dieux,  croyant 
qu'il  était  indifférent  de  les  adorer  à  la  manière 
des  Grecs,  ou  autrement.  On  ne  leur  en  deman- 
dait pas  davantage  ;  mais  les  Juifs,  plus  éclairés 
et  plus  religieux  que  les  autres  peuples,  ne  prirent 
pas  le  change,  et  surent  toujours  mettre  une  dif- 
férence infinie,  entre  le  Dieu  du  ciel  qu'ils  ado- 
raient, et  le  Jupiter  Olympien  des  païens.  Ils  ne 
purent  se  résoudre  à  rendre  à  la  créature ,  le 
culte  qui  n'est  dû  qu'au  Créateur  ;  ils  aimèrent 
mieux  souffrir  les  derniers  supplices,  que  de  faire 
le  moindre  changement  à  leurs  cérémonies.  Dans 
le  quatrième  livre  des  Maccabées  (2),  il  est  dit  que 
le  vieillard  Eléazar  et  les  sept  frères  Maccabées 
souffrirent  en  la  présence  d'Antiochus  lui-même. 
C'était  plus  par  politique  que  par  religion,  que  les 
conquérants  voulaient  contraindre  les  J  uifs  à  l'apos- 


tasie. Tant  qu'ils  conserveraient  leur  culte,  ils 
formeraient  nécessairement  une  nation  à  part, 
réfractaire  à  la  fusion  dans  une  même  nationalité 
avec  les  Syriens.  Il  fallait  donc  détruire  cette  reli- 
gion exclusive,  briser  le  cadre  de  la  législation 
mosaïque,  pour  assouplir  ce  peuple  à  un  joug 
étranger. 

Et  in  Garizim  prout  erant  hi,  qui  locum 
inhabitabant,  Jovis  hospitalis.  Jupiter  l'hospita- 
lier était  le  protecteur  des  étrangers  et  des  voya- 
geurs. Les  Samaritains  ayant  vu  la  persécution 
allumée  contre  les  Juifs,  recoururent  à  leur  artifice 
ordinaire  ;  ils  nièrent  d'avoir  aucun  rapport  avec 
les  Juifs, ni  avec  leur  religion  ;  ils  écrivirent  même 
à  Antiochus  Épiphane  (3),  une  lettre  pleine  de 
flatterie,  dans  laquelle  ils  prenaient  le  nom  de 
Sidoniens,  demeurant  à  Sichem,  et  exposaient  que 
leurs  ancêtres,  portés  par  de  vaines  superstitions, 
avaient  embrassé  la  coutume  des  Juits,  de  célé- 
brer le  jour  du  sabbat,  pour  se  mettre  à  couvert 
de  la  peste,  qui  avait  souvent  ravagé  leurs  pays, 
et  qu'ils  avaient  érigé  un  temple,  sur  le  mont 
Garizim,  sans  le  dédier  à  aucune  divinité.  Ils 
ajoutaient  que  le  roi  ayant  ordonné  qu'on  fit 
souffrir  aux  Juifs  la  juste  peine  de  leur  méchan- 
ceté, ces  officiers  voulaient  les  envelopper  dans 
leur  châtiment,  comme  étant  de  la  même  nation, 
et  de  même  religion  qu'eux.  C'était  une  erreur 
et  une  injustice,  puisqu'ils  étaient  Sidoniens 
d'origine,  et  qu'ils  n'avaient  rien  de  commun  avec 
les  Juifs;  ils  priaient  donc  le  roi  d'écrire  à  Apol- 
lonius et  à  Nicanor,   ses  officiers,  de  les  laisser 


(1)  E'ÇanstKEtXeô  pxo:X=j;  Yepsvïa  A'0r)vxïov.  lia  et  Syr. 

(2)  iv.  Macc.  c.  2. 


(?)  Joseph.    Antiq.  I.    xil.    c.   7.    Bas'.Xst   A'vtiÔ/i.»    Osa> 
E'j;iyavsî,  &rcrffl.VT)fj.a  r.apà.  tàiv  ev  Euc^LOtç  StScovtav. 


II.—  MACCABÉES.—  VI.-  PERSÉCUTIONS  CONTRE   LES  JUIFS 


189 


4.  Nam  templum  luxuria  et  comessationibus  gentium 
erat  plénum,  et  scortantium  cum  meretricibus,  sacratis- 
que  aadibus  mulieres  se  ultro  ingerebant,  intro  ferentes 
ea  quse  non  licebat. 

<,.  Altare  etiam  plénum  erat  illicitis,  quce  legibus  pro- 
hibebantur. 

6.  Neque  autem  sabbata  custodiebantur,  neque  dies 
solemnes  patrii  servabantur,  nec  simpliciter  Judasum  se 
esse  quisquam  confitebatur. 

7.  Ducebantur  autem  cum  amara  necessitate  in  die 
natalis  régis  ad  sacrificia  ;  et  cum  Liberi  sacra  celebra- 
rentur,  cogebantur  hedera  coronati  Libero  circuire. 


8.  Decretum  autem  exiit  in  proximas  Gentilium  civita- 
tes,  suggerentibus  Ptolemaais,  ut  piri  modo  et  ipsi  adver- 
sus  Judasos  agerent,  ut  sacrificarent  ; 

9.  Eos  autem,  qui  nollent  transire  ad  instituta  gentium, 
interficerent.    Erat  ergo  videre  miseriam. 


4.  Car  le  temple  était  rempli  des  dissolutions  et  des 
festins  de  débauche  des  gentils,  d'hommes  impudiques 
mêlés  avec  des  courtisanes,  et  de  femmes  qui  entraient 
insolemment  dans  ces  lieux  sacrés,  y  portant  des  choses 
qu'il  était  défendu  d'y   introduire. 

5.  L'autel  était  plein  aussi  de  viandes  impures,  qui  sont 
interdites  par  nos  lois. 

6.  On  ne  gardait  point  les  jours  de  sabbat;  on 
n'observait  plus  les  fêtes  solennelles  du  pays;  et  nul 
n'osait  plus  avouer  simplement  qu'il  était  Juif. 

7.  Ils  étaient  menés  par  une  dure  nécessité  aux  sacrifi- 
ces profanes,  le  jour  de  la  naissance  du  roi,  et,  lorsque 
l'on  célébrait  la  fête  de  Bacchus,  on  les  contraignait 
d'aller  par  les  rues  couronnés  de  lierre,  en  son  hon- 
neur. 

8.  Les  Ptoléméens  suggérèrent  aussi  et  furent  cause 
qu'on  publia  un  édit  dans  les  villes  voisines  des  gentils, 
pour  obliger  d'agir  de  la  même  sorte  contre  les  Juifs,  et 
de  les  contraindre  à  sacrifier, 

9.  Ou  de  tuer  ceux  qui  voudraient  point  embrasser  les 
coutumes  des  gentils  :  ainsi  on  ne  voyait  que  misère. 


COMMENTAIRE 


en  paix  ,  et  de  dédier  leur  temple  à  Jupiter 
Grec  (1).  Le  roi  écrivit  à  Nicanor  en  leur  faveur, 
et  leur  accorda  tout  ce  qu'ils  demandaient;  mais 
il  changea  sans  doute  d'opinion  dans  la  suite, 
puisque  nous  apprenons  de  l'auteur  de  ce  livre, 
que  leur  temple  fut  consacré  à  Jupiter  l'Hospita- 
lier, ou  l'étranger. 

f.  4.  Scortantium  cum  meretricibus.  Le 
grec  {2)  :  Le  temple  était  plein  de  gentils,  qui 
commettaient  des  actions  abominables,  avec  leurs 
semblables,  et  qui  s'approchaient  des  courtisanes 
jusque  dans  les  sacrés  portiques.  C'était  un  sacri- 
lège odieux,  puisqu'il  n'était  pas  même  permis  aux 
prêtres  de  s'approcher  de  leurs  femmes  légitimes, 
durant  le  temps  de  leur  service  au  temple,  et  que 
les  femmes  les  plus  pures  n'avaient  point  entrée 
dans  l'intérieur. 

p.  6.  Neque  simpliciter  Jud^eum.  Nul  n'osait 
avouer  simplement  qu'il  était  Juif,  ou  qu'il  était  de 
la  religion  des  Juifs.  Le  nom  de  Juifs  était  alors 
un  crime,  comme  longtemps  après  celui  de  chré- 
tiens, sous  les  persécuteurs  de  l'Église. 

f.  7.  In  die  natalis  régis.  Le  grec  (3)  :  Ils 
étaient  conduits  par  une  dure  nécessité,  au  festin 
de  la  naissance  du  roi,  qui  se  faisait  chaque  mois.  Il 
y  a  beaucoup  d'apparence  que  c'est  de  cette  fête 
de  la  naissance,  ou  de  la  prise  de  possession  du 
royaume  d'Antiochus,  qu'on  doit  entendre  ce  qui 
est  dit  dans  le  premier  livre  des  Maccabées  (-|), 
qu'on  maltraitait  ce  jour-là  tous  les  Israélites   qui 


se  trouvaient  dans  chaque  ville.  Il  était  ordinaire 
aux  rois  d'Orient  de  célébrer,  et  défaire  célébrer 
dans  leurs  états,  le  jour  de  leur  naissance,  ou  de 
leur  avènement  à  la  couronne  (5).  Mais  c'est  une 
innovation  de  la  part  d'Antiochus  Épiphane,  d'a- 
voir fait  célébrer  cette  fête  tous  les  mois.  Le  grec, 
pour  exprimer  le  festin  superstitieux  qu'on  faisait 
alors,  se  sert  d'un  terme  qui  signifie  les  entrail- 
les (6),  parce  qu'après  avoir  immolé  la  victime, 
les  prêtres  rendaient  à  ceux  qui  fournissaient 
l'hostie,  une  partie  des  entrailles  pour  faire  un 
festin  (7). 

Cogebantur  hedera  coronati  Libero  cir- 
cuire. Cette  fausse  divinité  était  très  honorée 
dans  ce  pays.  On  voit  son  image  sur  plusieurs  mé- 
dailles des  rois  deSyrie(8).  Nous  croyons  que  l'on 
substitua  son  culte  à  celui  d'Adonis,  si  connu  dans 
toutes  ces  provinces  (9).  Le  terme  grec  que  nous 
traduisons  par  circuire,  aller  par  les  rues,  signifie 
proprement,  marcher  avec  solennité,  à  la  suite 
d'une  idole,  faire  une  procession  à  l'honneur  de 
Bacchus  ;  à  la  lettre  (10)  ;  on  les  contraignait  de 
suivre  la  marche  de  Dionysius,  ou  de  Bacchus, 
ayant  du  lierre,  ou  couronné  de  feuilles  de  lierre, 
ou  portant  des  branches  de  cet  arbre,  ou  des 
thyrses,  c'est-à-dire  des  bâtons  enveloppés  de 
lierre;  tout  le  monde  sait  que  cet  arbre  était  con- 
sacré à  Bacchus. 

f.  8.   Decretum  ex;it  in  proximas  gentilium 
civitates,  suggerentibus   Ptolem^is.  Les  parti- 


(t)  Idem  ib'ui.  riposayopEuOrjvai  oï  xô  «vojvu;j.ov  ttpôv, 
AIOS  EAAIINIOY.  _ 

(2)  Y'jio  Tt3v  iOvàjv  f âûuao'jv'ojv  u.ïrà  twv  Ixaipcov,  xal 
Sv  toî;  îspo~iç  JîîpiSôXct;  yuvaiÇt  TtXrptaÇovtujY. 

( J)  H'youvxo  Cî  fj.ità  r.v/.cà.;  ctvây/.Tj;  s':;  Ti-,v  y.aîà  [jltjV3 
xoù  j3a;X:co;  yEvÉOX'.ov  rjjxspav  sri  a7;Xay^vtau6v. 

14)  1.  Macc.  1.  Ot.  In  virtute  sua  faciebant  hase  populo 
qui  inveniebatur  in  omni  mense  et  mense  in  civitatibus. 

(5)  Voyez  le  commentaire  sur  saint  Matthieu  xiv.  0. 


(6)  SitX*Y^v'.au.ôv.  Vide  infra  y.  8.  et  21.  cl  vu.  42. 
(;)   Vide  Grot.  Anstoplian.  osXay^veysiv.  Plaut.  ad  exta 
vocare. 

(8)  Vaillant,  lust.  Reg.  S,t.  pag.  j  17.  520.  564. 

(9)  Doetlingcr  Pagan.  cl  jud.  1.  204.  -    Selden.    de   Diis 
syris,  p.  80. 

(10)  II  'vayxâ.'o/TO  ô;  l'ouo>;oi   y.ioaoù;  6/Ovte;  7:oa^eij£ty 
xài  A'.ov'J'aj. 


190 


II.  —   MACCABÉES.  —  VI.  -   PERSÉCUTION   CONTRE  LES  JUIFS 


10.  Duœ  enim  muliercs  delatœ  sunt  natos  suos  circum- 
cidisse,  quas,  infantibus  ad  ubera  suspensis,  cum  publice 
per  civitateni  circumduxissent,  per  muros  prœcipave- 
runt. 

11.  Alii  vero,  ad  proximas  coeuntes  speluncas,  et  laten- 
ter  sabbati  diem  célébrantes,  cum  i  ndicati  essent 
Philippo,  flammis  succensi  sunt,  eo  quod  verebantur, 
propter  religionem  et  observantiam ,  manu  sibimet 
auxilium  ferre. 

12.  Obsecro  autem  eos  qui  hune  librum  lecturi  sunt, 
ne  abhorrescant  propter  adversos  casus,  sed  reputent 
ea  quae  acciderunt,  non  ad  interitum,  ssd  ad  correptio- 
nem  esse  generis  nostri. 


10.  Car  deux  femmes  ayant  été  accusées  d'avoir  circon- 
cis leurs  enfants,  furent  menées  publiquement  par  toute 
la  ville,  ayant  ces  enfants  pendus  à  leurs  mamelles  ;  et 
ensuite  furent  précipitées  du  haut  des  murailles. 

1 1.  D'autres  s'étant  assemblés  en  des  cavernes  voisines> 
et  y  célébrant  secrètement  le  jour  du  sabbat,  Philippe 
en  fut  averti  ;  il  les  fit  tous  consumer  par  les  flammes, 
car  ils  n'osèrent  se  défendre,  à  cause  du  grand  respect 
qu'ils  avaient  pour  l'observation  du  sabbat. 

12.  Je  conjure  ceux  qui  liront  ce  livre  de  ne  pas  se 
scandaliser  de  tant  d'infortunes;  mais  de  considérer  que 
tous  ces  maux  sont  arrivés,  non  pour  perdre  notre  nation, 
mais  pour  la  châtier. 


COMMENTAIRE 


sans  des  Plolémées  ou  mieux  les  habitants  de  Plo- 
Umaïs  (])  donnèrent  l'idée  de  publier  aussi  un 
édit  dans  les  villes  des  gentils,  voisines  des  Juifs, 
pour  les  obliger  de  contraindre  les  Israélites,  qui 
demeuraient  dans  ces  lieux,  à  sacrifier.  En  effet, 
nous  voyons  dans  le  premier  livre  des  Macca- 
bées  (2),  que  les  habitants  de  Ptolémaïs,  de  Tyr 
et  de  Sidon,  s'étaient  attroupés  contre  les  Juils, 
et  que  toute  la  Galilée  s'était  soulevée  contre 
eux.  Cette  ligue  malfaisante  obligea  Judas  Mac- 
cabée  d'accourir  au  secours  de  ses  frères,  et  de 
les  amener  dans  la  Judée,  pour  les  mettre  à  cou- 
vert de  la  fureur  de  leurs  ennemis.  Le  syriaque 
porte  que  l'on  envoya  à  Ptolémaïs  et  aux  villes 
des  gentils,  qui  étaient  voisines,  l'ordre  qu'elles 
eussent  à  faire  quartier  à  ceux  qui  leur  obéiraient, 
et  qui  sacrifieraient;  mais  qu'elles  missent  à  mort 
ceux  qui  refuseraient  de  le  faire.  La  plupart  des 
exemplaires  grecs  lisent  que  cet  édit  fut  rendu  à  la 
sollicitation  de  Plolémée,  ce  qu'on  entend  de  Pto- 
lémée,  fils  de  Dorymini  (3).  Mais  nous  préférons 
la  leçon  de  l'édition  romaine,  qui  est  conforme  à 
la  Vulgate. 

£.  10.   Du£  mulieres.  Voyez  1.    Macc.  1,  04, 
et  suivants. 

$.     II.     LATENTER     SABBATI     DIEM     CELEBRANTES. 

Comparez  1.  Macc.  11,  31.  Philippe  dont   il    est 

parlé  ici,  est  le  gouverneurdeJérusalem,  verset  22. 

y.   12.  Ne  abhorrescant  propter   adversos 

CASUS,  SED  REPUTENT  EA  QU.E  ACCIDERUNT  NON  AD 
INTERITUM  SKD    AD     CORRECTIONEM     ESSE     GENERIS 

nostri.  Ce  scandale  dont  il  est  parlé  ici,  et  que  l'au- 
teur craignait  pour  ceux  qui  y  verraient  tant  de  mal- 
heurs arrivés  au  peuple  de  Dieu,  consiste  dans  un 
affaiblissement  de  la  foi, causé  très  souvent  par  la  vue 
des  grandes  persécutions  où  se  trouvent  exposés 
ceux  qui  vivent  dans  la  piété.  Le  peuple  d'Israël 
s'était  attirélacolère  de  Dieu  par  ses  crimes,  mais 
tout  le  monde  n'était  pas  également  perverti  :  il  y 


avait  beaucoup  de  justes  qui  lui  rendaient  un  culte 
sincère,  et  qui  cependant  éprouvaient,  comme  les 
autres  et  plus  que  les  autres,  la  cruauté  d'Antio- 
chus.  Sans  parler  des  Maccabées  qui  souffrirent 
le  martyre,  et  des  enfants  de  Matthathias  qui 
soutinrent  tant  de  travaux  pour  la  défense  de  leur 
patrie  et  de  leur  religion;  on  le  voit  assez  par 
l'exemple  de  ces  Juifs  même  dont  il  est  parlé  ici, 
et  à  l'occasion  desquels  l'écrivain  sacré  conjure 
tous  les  lecteurs  de  n'être  point  scandalisés.  Le 
soin  qu'ils  eurent  de  se  retirer  dans  des  cavernes 
et  d'y  célébrer  secrètement  le  jour  du  sabbat,  mar- 
quait assez  qu'ils  avaient  de  l'attachement  à  la 
vraie  religion,  et  la  fermeté  qu'ils  firent  paraître, 
en  aimant  mieux  se  laisser  brûler  tout  vifs,  que 
de  violer  la  sainteté  du  sabbat  en  prenant  les 
armes  pour  se  défendre,  fait  admirer  la  fidélité 
avec  laquelle  ils  craignaient  de  se  départir  de 
l'observation  de  la  loi  de  Dieu. 

C'était  donc  véritablement  un  grand  scandale 
au  temps  de  l'ancienne  loi,  de  voir  tant  de  justes 
et  de  fidèles  périr,  au  lieu  des  coupables  dont  un 
grand  nombre  se  rachetaient  en  trahissant  leur 
religion.  Mais,  quoique  la  loi  promit  effective- 
ment toute  sorte  de  bonheur  à  ceux  qui  l'accom- 
pliraient, les  vrais  enfants  d'Israël  et  d'Abraham 
ont  toujours  compris  néanmoins  que  les  biens 
qu'on  leur  promettait  étaient  autres  que  ceux 
d'ici-bas ,  qui  n'en  étaient  qu'une  image  :  et 
ainsi  ils  pratiquaient  par  avance  cette  vérité  que 
saint  Pierre  a  longtemps  après  enseignée  à  toute 
l'Église,  lorsqu'il  disait  aux  fidèles, de  n'être  point 
surpris  lorsque  Dieu  les  éprouvait  par  le  feu  des 
afflictions,  comme  si  quelque  chose  d'extraordinaire 
leur  arrivait  ;  mais  de  se  réjouir  plutôt  de  ce  qu'ils 
participaient  ainsi  aux  souffrances  du  Sauveur  (4). 
Souffrant  donc,  comme  dit  encore  le  même  apô- 
tre, selon  la  volonté  de  Dieu,  ils  se  conl entaient 
de  remettre  leurs  âmes  entre  les  mains  de  Celui  qui 


(1)  Edit.  Roma.ia.  IlToXeiKtfaiv  î>-cmGsuiva>v.  Edi/iones 
aliœ.  Il'.olv,).*(ot)  ir.oOe|j.ê'vou.  Nous  pensons  qu'il  faudrait 
lire  ritoXîijiaEtoiv  Plclcmccnscs,  rhoXepEî;.  Infra  xnt.25. 
et  1.  Macc.  xii.  4. 


(2)  i.  Macc.  v.  ij. 

(j)  Supra  11.  Macc.  IV.  45. 

(4)  1.  Pctr.  iv.  12. 


II.—  MACCABCES.  —  VI.-  MORT  D'ÉLÉAZAR 


191 


n.  Etcnim  multo  tempore  non  sinere  peccatoribus  ex 
sententia  agere,  sed  statim  ultiones  adhibere,  magni 
beneficii  est  indicium. 

14.  Non  enim,  sicut  in  aliis  natioribus,  Dominus  patien- 
ter expectat,  ut  eas,  cum  judicii  dies  advenerit,  in  pleni- 
tudine  peccatorum  puniat; 

11;.  Ita  et  in  nobis  statuit,  ut  peccatis  nostris  in  finem 
devolutis,  ita  demum  in  nos  vindicet. 

16.  Propter  quod  nunquam  quidem  a  nobis  misericor- 
diam  suam  amovet  ;  corripiens  vero  in  adversis,  populura 
suum  non  derelinquit. 

17.  Sed  liœc  nobis  ad  commonitionem  legentium  dicta 
sint  paucis;  jam  autem  veniendum  est  ad  narrationem. 

18.  Igitur  Eleazarus,  unus  de  primoribus  scribarum,  vir 
œtate  provectus,  et  vultu  decorus,  aperto  ore  hians 
compellebatur  carnem  porcinam  manducare. 

10.  At  ille  gloriosissimam  mortem  magis  quam  odibi- 
lem  vitam   complectens,  voluntarie  prœibat  ad    suppli- 


:j.  Car  c'est  la  marque  d'une  grande  miséricorde  de 
Dieu  envers  les  pécheurs,  de  ne  pas  les  laisser  long- 
temps vivre  selon  leurs  désirs,  mais  de  les  châtier 
promptement. 

14.  En  effet,  le  Seigneur  n'agit  pas  à  notre  égard 
comme  à  l'égard  des  autres  nations,  qu'il  souffre  avec 
patience,  se  réservant  de  les  punir  dans  la  plénitude  de 
leurs  péchés,  lorsque  le  jour  du  jugement  sera  arrivé. 

15.  Quant  à  nous,  il  n'attend  pas,  pour  nous  punir, 
que  nos  péchés  so  ient  montés  à  leur  comble. 

16.  Ainsi  il  ne  retire  jamais  sa  miséricorde  de  nous,  et 
parmi  les  maux  dont  il  alllige  son  peuple  pour  le  châtier, 
il  ne  l'abandonne  po  int. 

17.  Après  avoir  dit  ce  peu  de  paroles  pour  l'instruction 
des  lecteurs,  il  faut  reprendre  maintenant  la  narration. 

18.  Eléazar,  l'un  des  premiers  d'entre  les  docteurs  de 
la  loi,  un  vieHlard  d'un  visage  vénérable,  fut  pressé  de 
manger  de  la  chair  de  porc,  et  on  voulait  l'y  contraindre, 
en  lui  ouvrant  la  bouche  par  force. 

19.  Mais  lui,  préférant  une  mort  pleine  de  gloire  à  une 
vie  criminelle,  alla  volontairement  au  supplice. 


COMMENTAIRE 


en  était  le  créateur,  et  qui  ne  pouvait  manquer 
de  leur  être  fidèle  pour  récompenser  leurs  bonnes 
œuvres.  C'est  cette  foi  touchant  la  conduite  ado- 
rable de  Dieu  dans  les  châtiments  qu'il  exerce  sur 
son  peuple,  que  l'auteur  veut  inspirer  à  ses  lec- 
teurs, pour  les  empêcher  d'être  -affaiblis,  par  la 
vue  de  tant  de  malheurs,  dans  l'attachement  à 
tous  leurs  devoirs. 

Voyez  le  discours  de  Matthathias  1.  Macc.  11, 
Jl,  52,  et  suivants.  Judith,  vin,  22,  25  et  sui- 
vants,   et  plus  bas  chapitre  vu,  32,  33,  34. 

y.  13.  Statim  ultiones  adhibere,  magni  bene- 
ficii est  indicium.  En  effet,  s'il  les  laisse  lone- 
temps  impunis,  ils  en  deviendront  plus  mauvais, ;et 
tomberont  enfin  dans  l'impénitence  et  l'incorrigi- 
bilité.  Dieu  ne  peut  nous  donner  en  cette  vie  une 
plus  grande  preuve  de  sa  colère,  que  de  nous 
laisser  impunis  ;  c'est  la  dernière  menace  qu'il 
fait  à  son  peuple  infidèle  (1):  Ma  colère  se  repo- 
sera à  votre  égard,  ma  jalousie  ne  s'allumera  plus 
sur  vous,  je  demeurerai  en  repos,  je  ne  me  fâche- 
rai plus. 

f.  Ut  eas,  cum  judicii  dies  advenerit,  in  ple- 
nitudine  peccatorum  puniat.  A  l'égard  des 
païens,  Dieu  les  abandonne  à  eux-mêmes  ;  il  leur 
laisse  remplir  la  mesure  de  leurs  crimes  ;  i!  voit 
en  quelque  sorte,  sans  s'émouvoir,  qu'ils  mettent 
le  comble  à  leur  iniquité.  Il  se  réserve  à  les  punir 
dans  l'autre  vie,  au  jour  terrible  de  son  jugement; 
quelquefois  cependant,  dès  cette  vie,  il  exerce 
contre  eux  un  jugement  sans  pitié,  il  les  exter- 
mine sans  miséricorde  ;  comme  il  a  fait  pour  les 
Cananéens  et  les  habitants  de  Sodome.    Il  n'en 


est  point  ainsi  des  Juifs  ;  Dieu  exerce  contre  eux 
sa  justice  pour  les  corriger,  pour  les  éprouver, 
pour  les  rendre  meilleurs.  Ses  châtiments  sont  à 
leur  égard,  comme  ceux  d'un  père  envers  ses 
enfants,  toujours  tempérés  de  miséricorde  et  de 
clémence.  Il  faut  avouer  que  les  philosophes 
païens  n'ont  jamais  émis  de  maximes  si  élevées. 

j^.    l6.   NUMQUAM  QUIDEMANOBIS  MISERICORDIAM 

suam  amovet.  Quoique  Dieu  retirât  alors  sa  mi- 
séricorde de  nombreux  pécheurs,  qui  devaient 
persévérer  jusqu'à  la  fin  dans  l'impiété,  il  ne  la 
relirait  jamais  entièrement  de  son  peuple  ;  parce 
que,  même  en  le  châtiant  par  un  grand  nombre  de 
maux  dont  il  l'affligeait,  il  ne  l'abandonnait  point  ; 
mais  lui  faisait  même  recueillir  des  fruits  de  vie  et 
de  salut,  en  sauvant  plusieurs  pécheurs  par  les 
châtiments  qu'il  leur  envoyait. 

f.    l8.   ÉLEAZARUNUSDE  PRIMORIBUS  SCRIBARUM. 

Saint  Grégoire  de  Nazianze  et  saint  Ambroise 
assurent,  après  Josèphe,  qu'il  était  de  race  sacer- 
dotale. Josèphe,  dans  son  livre  des  Maccabées (2), 
a  décrit  en  détail  le  martyre  du  vieillard  Éléazar  ; 
il  prétend  qu'il  eut  lieu  en  présence  d'Antiochus 
lui-même  ;  l'Écriture  paraît  l'insinuer  au  chapitre 
suivant,  verset  1.  Nous  croyons  qu'il  souffrit  à 
Antioche,  aussi  bien  que  les  sept  frères  Macca- 
bées,  ses  disciples, dont  on  on  parlera  au  chap.vn. 
f.  19.  Pr^eibat  ad  supplicium  (3).  //  marchait 
devant  ses  bourreaux,  et  allait  volontairement  au 
iympanum.  Le  supplice  du  tympanum  était  la 
bastonnade.  C'est  apparemment  Éléazar  qu'avait 
en  vue  l'auteur  de  l'Épître  aux  Hébreux,  lorsqu'il 
a  parlé  de  ceux  qui  ont  souffert  ce  supplice  (4). 


(1)  Ei&ch.  xvi.  42.  —  (3)  Libcl.  dé  Macc.  c.  j. 

(3)  A 'uOaioTs'oj;  iz\  tô  tûtir.xw/  noO'jf^i. 


(4)  Hcb.  xi.  35.  A"XXoi  3s  fwjxrta/iaOTjîjav.   Vulgat.  Dis- 
tend sunt. 


102 


II.—  MACCABÉES.—  VI.-  MORT  D'ÉLEAZAR 


20.  Intuens  autem,  quemadmodum  oporterct  accedere, 
patienter  sustinens,  destinavit  non  admittere  illicita 
propter  vilae  amorem. 

21.  Hi  autem  qui  astabant,  iniqua  m'seratione  commoti, 
propter  antiquam  viri  amicitiam,  tollentes  eum  sacreto, 
rogabant  alTerri  carnes  quibus  vesci  ei  licebat,  ut  simu- 
laretur  manducasse,  sicut  rex  imperaverat,  de  sacrifiai 
carnibus. 

22.  Ut,  hoc  facto,  a  morte  liberaretur;  et  propter 
veterem  viri  amicitiam,  hanc  in  eo  faciebant  humanita- 
tem. 

2'.  At  ille  cogitare  ccepit  œtatis  ac  senectutis  suas 
eminentiam  dignam,  et  ingenitae  nobilitatis  canitiem, 
atque  a  puero  optimoe  conversationis  actus  ;  et  secundum 
sanctaî  et  a  Deo  conditas  legis  constituta,  respondit  cito, 
dicens,  prœmitti  se  velle  in  infernum. 


24.  Non  enim  œtati  nostrae  dignum  est,  inquit,  fingere, 
ut  multi  adolescentium,  arbitrantes  Eleazarum  nonaginta 
annorum  transisse  ad  vitam  alienigenarum, 

25.  Et  ipsi,  propter  meam  simulationem,  et  propter 
modicum  corruptibilis  vitœ  tempus,  decipiantur,  et  per 
hoc  maculam,  atque  execrationem  meas  senectuti  con- 
quiram. 


20.  Considérant  ce  qu'il  lui  faudrait  soulTrir  en  cette 
rencontre,  et  demeurant  ferme  dans  la  patience,  il  réso- 
lut de  ne  rien  faire  contre  la  loi  par  amour  de  la  vie. 

zt.  Ceux  qui  étaient  présents,  touchés  d'une  compas- 
sion impie,  à  cause  de  l'ancienne  amitié  qu'ils  avaient 
pour  lui,  le  prirent  à  part,  et  le  supplièrent  de  trouver 
bon  qu'on  lui  apportât  des  viandes  dont  il  lui  était  permis 
de  manger,  afin  qu'on  pût  feindre  qu'il  avait  mangé  des 
viandes  du  sacrifice,  selon  le  commandement  du  roi, 

22.  Et  qu'on  le  sauvât  ainsi  de  la  mort  :  ils  usaient 
donc  de  cette  espèce  d'humanité  à  son  égard,  par  un 
effet  de  l'ancienne  affection  qu'ils  lui  portaient. 

2j.  Mais  pour  lui,  il  commença  à  considérer  ce  que 
demandaient  de  lui  un  âge  et  une  vieillesse  si  vénérable, 
ces  cheveux  blancs  qui  accompagnaient  la  grandeur  de 
cœur  qui  lui  était  naturelle,  et  cette  vie  innocente  et 
sans  tache  qu'il  avait  menée  depuis  son  enfance  ;  et  il 
répondit  aussitôt,  selon  les  ordonnances  de  la  loi  sainte 
établie  de  Dieu,  qu'il  aimait  mieux  descendre  dans  le 
tombeau. 

24.  Car  il  n'est  pas  digne  de  l'âge  où  nous  sommes, 
leur  dit-il,  d'user  de  cet:e  fiction,  qui  serait  cause  que 
plusieurs  jeunes  gens,  s'imaginant  qu'Éléazar,  à  l'âge  de 
quatre-vingt-dix  ans,  aurait  passé  au  paganisme, 

25.  Seraient  eux-mêmes  trompés  par  cette  feinte,  dont 
j'aurais  usé  pour  conserver  un  petit  reste  de  cette  vie 
corruptible  :  et  ainsi  j'attirerais  une  tache  honteuse  sur 
moi,  et  l'exécration  des  hommes  sur  ma  vieillesse. 


COMMENTAIRE 


f.  20.  Intuens  autem  quemadmodum  oporte- 

RET  ACCEDERE,  PATIENTER  SUSTINENS,  DESTINAVIT 
NON  ADMITTERE    ILLICITA    PROPTER   VIT/E    AMOREM. 

Le  grec  est  entortillé  et  peu  compréhensible,  à 
moins  de  reconstituer  la  phrase  en  hébreu  (1). 
Le  voici  mot  à  mot  en  latin  :  Expuens  autem  se- 
cundum quemoporlebat  modum  accedere  sustinen- 
les  puniri,  qux  non  licebat  gustare  propter  vîtes 
amorem.  C'est-à-dire,  littéralement,  mais  selon  la 
manière  dont  devaient  se  conduire  ceux  qui  avaient 
la  force  de  souffrir,  il  crachait  ces  choses  qu'il  ne  lui 
était  pas  permis  de  goûter  pour  sauver  sa  vie.  La 
phrase  a  une  tournure  hébraïque  très  accentuée. 

y.  21.  Qui  astabant  iniqua  miseratione  com- 
moti. Le  grec  (2)  :  Ceux  qui  étaient  préposés  à 
cet  injuste  festin,  où  l'on  servait  les  entrailles  des 
bêles  immolées  aux  idoles.  Ce  grand  homme  aime 
mieux  souffrir  la  mort  que  de  scandaliser  les  fai- 
bles par  une  action  permise  en  elle-même,  mais 
qui  serait  prise  infailliblement  pour  une  prévari- 
cation. Il  suivait  dès  lors,  dans  la  pratique,  les 
règles  de  morale  que  Jésus-Christ  (3),  que  saint 
Paul  (4),  que  les  martyrs  {<,),  ont  depuis,  ensei- 
gnées et  pratiquées. 

h  24.  Non  enim  jetati  nostr/e  dignum  est, 
inquit, fingere.  CeUe  fiction  n'aurait  été  digned'au- 
cun  âge,  puisque  tous  les  hommes, de  quelque  âge 


qu'ils  puissent  être,  sont  obligés  de  donner  aux 
autres  l'exemple  d'une  foi  sincère,  et  d'une  piété 
sans  déguisement.  Mais  le  scandale  que  cause  la 
chute  d'un  homme  chargé  d'années  et  consommé 
dans  les  exercices  de  la  piété,  est  d'une  autre 
conséquence  sans  comparaison,  que  celui  que 
causerait  la  chute  d'une  personne  ordinaire.  La 
grande  estime  que  l'on  a  conçue  pour  la  vertu  et 
pour  la  lumière  du  premier,  donne  un  poids  par- 
ticulier à  toutes  ses  actions.  Il  ne  fait  rien  qui  ne 
soit,  non  pas  seulement  un  fruit,  mais  une  se- 
mence de  vie  ou  de  mort  pour  plusieurs  person- 
nes, qui  le  regardent  comme  un  modèle  que  l'on 
doit  suivre.  Ainsi  Éléazar  avait  raison,  quand  il 
répondit  à  ceux  qui  voulaient  lui  inspirer  cette 
fiction,  qu'elle  aurait  été  indigne  de  son  grand  âge  : 
non  qu'elle  eût  pu  convenir  àun  âge  moinsavancé, 
mais  parce  que  sa  vieillesse  aurait  rendu  son 
exemple  plus  dangereux  pour  plusieurs  jeunes 
personnes  qu'il  aurait  trompées  par  ce  déguise- 
ment, et  à  qui  il  serait  ainsi  devenu  un  sujet  de 
scandale. 

11  préféra  donc,  comme  il  le  dit,  laisser 
aux  jeunes  gens  un  exemple  de  fermeté,  plutôt 
que  de  conserver  un  petit  reste  de  cette  vie  corrup- 
tible, par  une  dissimulation  si  pernicieuse  tant  à 
son  salut  qu'à  celui  de  ses  frères. 


(1)  ripT-Ttisa;  _3È  xaO'  5v  à'Sst  tpo'sov  Kpoocp'/c^Oa;  toù; 
C-oyeVjvtaç  ap.'JvïïOat,  wv  où  Ùc'iju;  ^tûjx^tloi'.  o:x  xr)v  itpo; 
16  Çt,v  oiXociopyfav. 

(2)  0"i  Ss  ^po;  toi    r.«pavdjj.oj  o7c).a-1'-i'_v,.o;j.fÔ   Z£.xx-([j.i'/0'.. 


(5)  Maltk.  xvitt.  7.  et  scq. 

(4)  Rom.  xiv.   14.  15.  20.  21.  et  1.  Car.  vtn.  4.  10.  II. 

(5)  S.  Saba,  Marlyrolog.  12.  April. 


II.—  MACCABÉES.  -   VI.-  MORT  D'ÉLÉAZAR 


•93 


26.  Nam,  etsi  in  prœsenti  tempore  suppliciis  hominum 
eripiar,  sed  manum  Omnipotentis  nec  vivus,  necdefunc- 
tus  effugiam. 

27.  Quamobrem  fortiter  vita  excedendo,  senectute 
quidem  dignus  apparebo  ; 

28.  Adolescentibus  autem  exemplum  forte  relinquam,  si 
prompto  animo,  ac  fortiter  pro  gravissimis  ac  sanctissi- 
mis  legibus  honesta  morte  perfungar.  His  dictis,  confestim 
ad  supplicium  trahebatur. 

29.  Hi  autem  qui  eum  ducebant,  et  paulo  ante  fuerant 
mitiores,  in  iram  conversi  sunt  propter  sermones  ab  eo 
dictos,  quos  illi   per  arrogantiam  prolatos  arbitrabantur. 

;o.  Sed,  cum  plagis  perimeretur,  ingemuit,  et  dixit  : 
Domine,  qui  habes  sanctam  scientiam,  manifeste  tu  scis, 
quia  cum  a  morte  possem  liberari,  duros  corporis  sustineo 
dolores  ;  secundum  animam  vero  propter  timorem  tuum 
libenter  hsec  patior. 

51.  Et  iste  quidem  hoc  modo  vita  decessit,  non  solum 
juvenibus,  sed  et  universae  genti  memoriam  mortis  suas, 
ad  exemplum  virtutis  et  fortitudinis  derelinquens. 


26.  Car  bien  que  je  me  délivrasse  présentement  des 
supplices  des  hommes,  je  ne  pourrais  néanmoins  fuir  la 
main  du  Tout-Puissant,  ni  pendant  ma  vie,  ni  après  ma 
mort. 

27.  C'est  pourquoi  mourant  courageusement,  je  paraî- 
trai digne  de  la  vieillesse  où  je  suis  ; 

28.  Et  je  laisserai  au  jeunes  gens  un  exemple  de  fer- 
meté, souffrant  avec  joie  une  mort  honorable  pour  le 
culte  sacré  de  nos  lois  très  saintes.  Aussitôt  qu'il  eut 
achevé  ces  paroles,  on  le  traîna  au  supplice 

20.  Et  ceux  qui  le  conduisaient,  ayant  paru  aupara- 
vant plus  doux  envers  lui,  passèrent  tout  d'un  coup  à 
une  grande  colère,  à  cause  de  ces  paroles  qu'il  avait 
dites,  et  qu'ils  attribuaient  à  l'orgueil. 

;o.  Lorsqu'il  était  près  de  mourir  des  coups  dont  on 
l'accablait,  il  jeta  un  grand  soupir,  et  il  dit  :  Seigneur, 
qui  avez  la  science  divine,  vous  connaissez  clairement 
qu'ayant  pu  me  délivrer  de  la  mort,  je  souffre  dans  mon 
corps  de  très  sensibles  douleurs,  mais  que  dans  l'âme 
je  sens  de  la  joie  de  les  souffrir  pour   votre  crainte. 

jl.  Il  mourut  ainsi,  laissant  non  seulement  aux  jeunes 
gens,  mais  aussi  à  toute  sa  nation,  un  grand  exemple  de 
vertu  et  de  fermeté  dans  le  souvenir  de  sa  mort. 


COMMENTAIRE 


f.  26»  Manum  omnipotentis  nec  vivus,  nec 
defunctus  effugiam.  On  ne  peut  rien  souhaiter 
de  plus  formel,  pour  attester  le  châtiment  des 
méchants  dans  l'autre  vie.  Ces  sentiments  parais- 
sent plus  nettement  formulés  dans  les  écrits  des 
auteurs  sacrés,  depuis  Ézéchiel  et  Daniel,  qu'au- 
paravant (1).  A  mesure  qu'on  approchait  du 
Messie,  Dieu  répandait  de  plus  vives  lumières 
sur  son  peuple. 

f.  30.  Domine,  qui  habes  sanctam  scientiam. 
La  science  de  Dieu  est  sainte,  en  ce  qu'elle  est 
pure  et  exempte  de  tout  mélange  d'erreur  ;  elle 
est  sainte  encore,  en  ce  qu'elle  naît  de  la  source 
même  de  la  sainteté  ;  elle  n'est  point  semblable  à 
la  nôtre,  que  quelque  levain  d'enflure  et  d'orgueil 
secret  souille  presque  toujours  ;  car  rien  n'est 
plus  rare  en  cette  vie  qu'une  science  humble  et 
fondée  sur  la  charité.  Éléazar  s'adresse  donc  à 
Dieu  même  au  milieu  de  ses  plus  grandes  souf- 
frances, parce  que  seul  il  connaissait  clairement  le 
fond  de  son  âme,  et  sa  science  ne  pouvait  être 
suspecte  d'aucune  tâche  ni  d'aucune  erreur  :  il  le 
prend  à  témoin  de  la  véritable  disposition  de  son 
cœur.  J'aurais  pu,  Seigneur,  lui  dit-il,  et  vous  le 
savez  ;  j'aurais  pu  me  délivrer  de  la  mort  présente. 
C'est  donc  volontairement  que  je  m'expose  à 
mourir  :  mais  si  je  meurs,  ce  n'est  pas  par  entête- 
ment, ni  par  vaine  gloire,  ni  par  aucune  considé- 
ration humaine,  c'est  par  votre  crainte,  par  votre 
amour,  par  le  seul  désir  que  j'ai  de  ne  point  vous 
offenser.  Quoique  je  souffre  dans  mon  corps  de 
très  sensibles  douleurs,  mon   esprit,   mon  âme  est 


dans  la  joie  de  les  souffrir  pour  l'amour  de  vous. 
Il  faisait  cette  déclaration,  non  pas  pour  Dieu 
qui  avait  une  parfaite  connaissance  du  fond  de 
son  cœur,  mais  pour  tous  ceux  qui  étaient  pré- 
sents, car  il  leur  laissait  un  grand  exemple  à  sui- 
vre. C'est  ainsi,  dit  saint  Ambroise  (2),  qu'Éléa- 
zar  ne  voulut  point,  étant  vieux,  devenir  un  piège 
pour  faire  tomber  les  jeunes  gens,  lui  qui  leur 
avait  servi  jusqu'alors  de  modèle  ;  mais  il  regarda 
sa  vieillesse  comme  un  port,  et  non  pas  comme 
un  écueil  où  il  dût  faire  naufrage  et  perdre  le  fruit 
de  toute  sa  vie  passée,  Sanctus  portus  débet  esse, 
non  vilœ  superioris  naufragium.  «  C'est  ainsi,  » 
dit  saint  Grégoire  de  Nazzianze  (3),  que  ce  saint 
prêtre  et  ce  vénérable  vieillard  paraissant  à  la 
tête  de  ceux  qui  souffrirent  avant  Jésus-Christ, 
comme  Etienne  a  paru,  depuis,  à  la  tête  de  tous 
ceux  qui  sont  morts  pour  Jésus-Christ  ;  ayant  of- 
fert auparavant  des  sacrifices  et  des  prières  pour 
le  peuple,  s'offrit  à  la  fin  lui-même  à  Dieu  com- 
me une  victime  en  expiation  pour  ce  même  peu- 
ple, et  commença  le  premier  à  combattre  avec  un 
succès  si  avantageux.  »  Saint  Jean  Chysostô- 
me  (4)  a  fait  aussi  son  éloge  presque  dans  les  mê- 
mes termes.  Il  l'appellelechef  des  généreux  com- 
battants ;  la  base  et  le  fondement  des  anciens 
martyrs  :  la  porte  de  la  carrière  où  ont  couru 
ceux  qui  remporté  le  prix  ;  le  général  des  héros  ; 
le  précurseur  qui  a  donné  à  tous  les  autres  un 
modèle  de  constance;  le  vieillard  en  qui  éclata 
toute  la  force  de  la  jeunesse  ;  le  premier  martyr 
de  l'ancienne  loi  ;  l'image  de    Pierre  le  chef  des 


(1)  Vide  si  lubet,  Grot.  hic  et  in  Matth.  xn.  52.  et  infra 
c.  vu.  9.  11.  14.  2$.  etc.  Vide  et  Sap.  v.  16.  et  Commenta, 
nostr.  in  Psalm.  1.  6. 

S.  B.  —  T.  XII. 


(2)  Ambros.  de  Jacob.  I.  11.  c.  10.  14. 

(?)  Gregor.  Na^.  orat.  xxn. 

(4)  Chrvsost.  hom.  L.  de  Macc.  scrmt  J. 


13 


194 


II.  —  MACCABÉES.—  VI.-   MORT  D'ÉLÉAZAR 


apôtres.  «  O  nouvelle  espèce  de  victoire,  »  s'é- 
crie-t-ii.  «  Un  seul  vieillard  tout  chargé  de  coups 
et  couvert  de  plaies  renverse  une  armée  amassée 
contre  lui.  » 

La  raison  qui  a  porté  les  saints  pères  à  donner 
cette  qualité  de  premier  martyr  de  l'ancienne  loi  à 
Éléazar,  a  été  de  ce  qu'étant  mort  pour  la  loi  de 
Dieu  avec  une  si  grande  piété,  il  lui  offrit  en  mê- 
me temps  les  sept  frères  Maccabées  comme  des 
fruits  de  sa  sainte  éducation,  comme  des  hosties 
vivantes  et  agréables  au  Seigneur,  comme  des  vic- 
times plus  illustres  et  plus  pures  que  toutes  celles 
qu'on  offrait  dans  ces  anciens  sacrifices  (i).  Car 
quoique  plusieurs  fissent  autrefois  difficulté  d'ho- 
norer ces  saints  comme  des  martyrs,  parce  qu'ils 
n'avaient  point  souffert  après  Jésus-Christ,  le 
même  père  nous  assure  qu'ils  méritent  d'autant 
plus  d'être  révérés  de  tous  les  fidèles,  qu'ayant 
souffert  avant  Jésus-Christ,  ils  nous  donnent  lieu 
de  juger  ce  qu'ils  auraient  fait,  s'ils  avaient  été 
persécutés  pour  Jésus-Christ,  et  qu'ils  eussent  eu 
à  imiter  le  grand  exemple  de  cet  amour  ineffable 
d'un  Homme-Dieu  mort  pour  nous.  Et  il  ajoute, 
que  ni  lui  ni  tous  ceux  qui  aimaient  Dieu  vérita- 
blement, ne  pouvaient  douter  que  nul  homme 
avant  Jésus-Christ  n'était  parvenu  à  la  vraie  jus- 
tice, sans  la  foi  en  Jésus-Christ,  parce  que  le 
Verbe  adorable,  même  avant  sa  naissance  tempo- 
relle, ne  laissait  pas  d'être  connu  de  ceux  qui 
avaient  l'esprit  et  le  cœur    pur. 

C'est  ce  que  saint  Augustin  (2)  a  déclaré  enco- 
re plus    précisément    en   faisant  l'éloge    de  ces 


saints  martyrs  de  l'ancienne  loi.  «  Il  est  vrai,  dit- 
il,  que  Jésus-Christ  n'était  pas  encore  mort:  mais 
Jésus-Christ  néanmoins  qui  devait  mourir,  était 
celui  qui  les  rendait  martyrs.  Nondum  quidem  eral 
inorluus  Christus  :  sed  eos  martyres  fecit  morilurus 
Chrislus.  Ils  étaient  chrétiens  par  la  foi,  et  ils  ont 
prévenu  par  leurs  actions  le  nom  de  chrétiens, 
qu'on  n'a  connu  que  depuis..  Les  martyrs  chrétiens 
ont  souffert  pour  Jésus-Christ  lorsque  l'Évangile 
nous  a  été  révélé,  et  les  anciens  ont  souffert  pour 
le  nom  de  Jésus-Christ,  caché  encore  sous  les 
voiles  de  la  loi.  Les  uns  et  les  autres  appartien- 
nent à  Jésus-Christ  ;  Jésus-Christ  les  a  assistés 
les  uns  et  les  autres  lorsqu'ils  combattaient  :  il  les 
a  tous  couronnés,  et  il  a  paru  en  cela  comme  un 
prince  accompagné  d'un  grand  nombre  de  minis- 
tres et  d'officiers,  dont  les  uns  marchent  devant, 
et  les  autres  vont  après.  Tanquam  quidam  polen- 
lissimus  incedens  cum  agmine  obsequenlium , 
aliis  prœcedenlibus,  aliis  sequentibus.  Et  afin  que 
vous  ne  puissiez  douter,  ajoute-t-il,  que  ceux  qui 
sont  morts  en  défendant  la  loi  de  Mcfïse,  sont 
morts  effectivement  pour  Jésus-Christ,  écoutez 
parler  Jésus-Christ  même  :  Si  vous  croyie\  en 
Moïse,  disait-il  aux  Juifs,  vous  croiriez  aussi  en 
moi,  parce  que  c'est  de  moi  qu'il  a  écrit  (3).  S'il  est 
donc  vrai  que  Moïse  a  écrit  de  Jésus-Christ,  ce- 
lui qui  est  mort  véritablement  pour  la  défense  de 
la  loi  de  Moïse,  a  souffert  par  conséquent  pour 
Jésus-Christ  :  Si  de  Chrislo  Moyses  scripzil,  qui 
pro  lege  Moysi  veraciler  morluus  est,  pro  Chrislo 
animam  posuil . 


(1)  Cregcr.  Na%.  ib.  ut  sup. 


(2)  Aug.  de  diverscr.  cix.  —  (j)  Joan.  v.  46. 


CHAPITRE    VII 


Martyre  des  sept  frères  Maccabées  et  de  leur  mère. 


I.  Contigit  autem  et  septem  fratres  una  cum  matre  sua 
apprehensos,  compelti  a  rege  edere  contra  fas  carnes 
porcinas,  flagris  et  taureis  cruciatos. 


i.  Unus  autem  ex  il  lis,  qui  erat  primus,  sic  ait  :  Quid 
quaeris,  et  quidvis  discere  a  nobis  ?  Parati  sumus  mori, 
magis  quam  patrias  Dei  leges  prsevaricari. 


i.  Or,  il  arriva  que  Ton  prit  aussi  sept  frères  avec 
leur  mère  :  et  le  roi  voulut  les  contraindre  à  manger, 
contre  la  défense  de  la  loi,  de  la  chair  de  porc,  en  les 
faisant  déchirer  avec  des  fouets  et  des  lanières  de 
cuir  de  taureau. 

2.  Mais  l'un  d'eux,  qui  était  l'aîné,  lui  dit  :  Que  de- 
mandez-vous, et  que  voulez-vous  apprendre  de  nous  ? 
Nous  sommes  prêts  à  mourir  plutôt  que  de  violer  les 
lois  de  Dieu  et  de  notre  pays. 


COMMENTAIRE 


%  i.  Flagris  et  taureis  cruciatos.  Le 
grec  (i)lit:  Avec  des  fouets  et  des  nerfs.  Le  latin 
taurea,  sign'rfie  du  cuir  de  taureau,  ou  un  nerf  de 
bœuf  (2).  Les  sept  frères,  dont  l'auteur  parle  dans 
ce  chapitre,  sont  ordinairement  appelés  Macca- 
bées. Josèphe  leur  a  le  premier  donné  ce  nom, 
dans  le  livre  qu'il  a  composé  sur  leur  martyre  ;  les 
pères,  et  l'Église  même,  ont  adopté  ce  sentiment, 
et  leur  ont  attribué  le  même  nom,  quoiqu'il  ne  se 
trouve  pas  dans  les  livres  canoniques.  On  est  as- 
sez peu  d'accord  sur  l'origine  de  cette  dénomina- 
tion (?).  Les  uns  (4)  croient  qu'elle  vient  de  leur 
mère,  qui  se  trouve  quelquefois  appelée  Macca- 
bœa,  ou  de  leur  frère  aîné  ($),  qui  porte  le 
nom  de  Maccabœus,  dans  l'ancienne  édition  latine 
du  livre  de  Josèphe.  Mais  ce  nom  ne  se  lit  pas 
dans  le  grec,  et  il  ne  lui  est  pas  plus  propre  qu'à 
ses  frères  ;  c'est  un  nom  commun  et  générique, 
qui  leur  est  donnéàtous,  à  la  mèreet  aux  enfants. 
D'autres  (6)  veulent  que  le  nom  deMaccabées  ait 
étécommun  généralementà  tous  ceux  quise  distin- 
guaient par  leur  courage,  dans  cette  persécution. 
Nous  croyons  que  Judas  Maccabée  s'étant  mis  à 
la  tête  de  ceux  qui  persévérèrent  dans  la  religion 
de  leurs  pères,  rendit  son  nom  si  célèbre  qu'il  fut 
communiqué,  non  seulement  à  ses  frères  et  à  tou- 
te sa  famille  ;  mais  encore  à  tous  ceux  qui  com- 
battirent alors  contre  l'impiété,  soit  en  versant 
leur  sang  dans  les  supplices,  comme  Éléazar  et 


ses  sept  frères,  dont  nous  parlons,  soit  en  expo- 
sant leur  vie  dans  les  combats,  contre  les  ennemis 
de  leur  nation,  comme  Judas  et  les  siens.  Aussi 
tous  les  livres  qui  renferment  l'histoire  de  ces 
guerres  ou  de  ces  persécutions,  sont-ils  appelés 
les  livres  des  Maccabées  ;  même  ceux  qui  racon- 
tent ce  qui  est  arrivé  avant  Judas,  comme  le  troi- 
sième livre  des  Maccabées,  qui  parle  de  la  persé- 
cution des  Juifs  en  Egypte,  et  le  petit  livre  de  Jo- 
sèphe, touchant  le  martyre  d'Éléazar  et  des  sept 
frères,  qui  souffrirent  avant  que  Judas  fut  chef  du 
peuple. 

Quelques  commentateurs  ou  historiens  (7)  ont 
cru  qu'ils  avaient  souffert  à  Jérusalem,  pendant 
qu'Antiochus  y  était  encore,  ou  lorsqu'il  y  retour- 
na la  seconde  fois  ;  mais  l'opinion  la  plus  suivie 
et  la  plus  certaine,  est  qu'ils  souffrirent  à  Antio- 
che  (8). Du  temps  de  saint  Jérôme,  on  y  montrait 
leurs  tombeaux  (9),  et  saint  Augustin  (10)  parle 
de  l'Église  dédiée  en  leur  nom,  dans  cette  même 
ville.  L'ancien  traducteur  latin  de  Josèphe  assure 
qu'on  les  amena  du  château,  ou  du  bourg  de  Su- 
sandre  à  Antioche,  pour  être  présentés  à  Antio- 
chus  Éhiphane;  mais  ces  particularités,  qui  ne 
se  lisent  pas  dans  le  grec,  sont  fort  suspectes. 

y.  2.  Quid  qu^eris,  et  quid  vis  discere  a  no- 
bis  ?  parati  sumus  mori.  On  peut  se  moquer, 
dit  saint  Ambroise,  de  ce  tyran,  qui  crut  devoir 
commencer  à  exercer  sa  fureur  sur  un  vieillard 


(1)  MctJïtÇi,  -/.où  vEup'jî;  âtxu^opivouç. 

(2)  Gloss.  Taurea  scutica  de  veretro  tauri  facta. 
(5)  Vide  Serar.  in  hune  loeum. 

(4)  Auctor.  Comment,  in  Maccab.  sub  nomine  D.  Thcmx 
in  Prœfat. 

(5)  Serar.  Esti.  Tir  in. 

(6)  Scatig.  I.  v. 

(7)  Joseph.  Antiq.  l.xn.  c.~.  et  Libet.  de  Macc.  -  Cedrcnus. 


(8)  lia  Gorionid.  Lrran.  Serar.  Tir.  Martrrol.  Rom.  et 
alia  Martyrologia. 

(9)  Hieron.  in  locis,  verbo  Modin.  Il  s'étonne  qu'on 
montre  les  tombeaux  des  Maccabées  h  Antioche;  mais 
M  ne  pensait  qu'aux  descendants  de  Matthathias,  dont  les 
tombeaux  étaient  à  Modin,  sans  faire  attention  aux  sept 
frères  Maccabées  martyrisés  à  Anlioche,  qui  n'étaient 
pas  de  la  ra;e  de  Matthathias. 

(10)  Aug.  Ser.  1.  de  Macc.  jo.  Nov.  Edit. 


196 


II.  —  MACCABÉES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRÈRES 


;.  Iralus  itsque  rex,  jussit  sartagines  et  ollas  œneas 
succendi;  quibus  slatim  succcnsis, 

4.  Jussit,  ci  qui  prior  fuerat  locuius,  amputari  linguam; 
et  cute  capitis  abstracta,  summas  quoque  manus  et  pedes 
ei  praescindi,  ceterisejus  fratribus  etmatre  inspicienhbus- 

ç.  Et  cum  jam  per  omnia  mutilus  factus  esset,  jussit 
ignem  admoveri,  et  adhuc  spirantem  torreri  in  sartagine; 
in  qua  cum  diu  cruciaretur,  ceteri  una  cum  matre  invicem 
se  hortabantur  mori  fortiter, 


j.  Le  roi  entrant  en  colère,  commanda  qu'on  fit  chauf- 
fer sur  le  feu  des  poêles  et  des  chaudières  d'airain,  et 
lorsqu'elles  furent  toutes  brûlantes, 

4.  Il  ordonna  qu'on  coupât  la  langue  à  celui  qui  avait 
parié  le  premier,  qu'on  lui  arrachât  la  peau  de  la  tète, 
et  qu'on  lui  coupât  les  extrémités  des  mains  et  des 
pieds,  à  la  vue  de  ses  frères  et  de  sa  mère. 

5.  Après  qu'il  l'eut  fait  ainsi  mutiler  par  tout  le  corps, 
il  commanda  qu'on  l'approchât  du  feu,  et  qu'on  le  fit 
rôtir  dans  la  poêle,  pendant  qu'il  respirait  encore  :  et 
dans  tout  le  temps  qu'il  était  tourmente,  ses  autres  frè- 
res s'encourageaient  l'un  l'autre  avec  leur  mère  à  mourir 
constamment, 


COMMENTAIRE 


accablé  de  faiblesse,  sans  songer  qu'il  choisissait 
en  sa  personne  un  maître  excellent,  dont  l'exem- 
ple devait  servir  à  rendre  plus  forts  et  plus  coura- 
geux les  disciples.  Insullare  licel  tyranno,  qui  dum 
calllde  a  sene  incipkndum  putat,  magistrum  elegil 
quo  discipulos  facerel  forliorcs.  Antiochus  s'ima- 
gina que  des  enfants  comme  ceux  qu'il  attaquait, 
pourraient  se  laisser  gagner  par  les  récompenses 
qu'il  leur  promettait,  ou  intimider  par  ses  mena- 
ces. Mais  ils  parurent  comme  de  braves  soldats, 
dignes  du  vaillant  chef  qui  venait  de  leur  donner 
un  si  bel  exemple  ;  et  ils  résolurent  de  le  suivre, 
comme  des  enfants  suivent  leur  père,  et'  des  dis- 
ciples leur  maître  :  Sequamur  patrem  filii,  disci- 
puli  doclorem. 

L'aîné  lui  ayant  donc  été  présenté  le  premier, 
il  méprisa  le  tyran,  dit  saint  Ambroise,  et  lui  fit 
connaître  que  c'était  très  justement  qu'il  gardait  à 
son  égard  l'ordre  même  de  la  nature  :  il  se  réjouis- 
sait de  ce  qu'il  voulait  commencer  par  lui  ;  mais 
il  pouvait  l'assurer  qu'il  se  trompait,  s'il  s'imagi- 
nait que  ses  frères, quoique  moins  âgés,  n'auraient 
pas  tous  le  même  courage  que  leur  aîné  pour  la 
défense  de  la  religion  :  et  pro  piclale  quidem  om- 
nes  maximi  sumus.  «  Que  cherchez-vous,  lui  dit- 
il  ?  Je  vous  déclare  que  nous  servons  le  grand 
Dieu  :  et  vous-mêmes  vous  nous  apprenez  ce 
que  nous  avons  à  faire  ;  puisque  cette  ténacité 
avec  laquelle  vous  vous  efforcez  de  nous  arracher 
la  vérité,  nous  apprend  en  même  temps  à  nous  y 
tenir  attachés  de  toutes  nos  forces.  » 

De  quelques  supplices  dont  on  usa  envers  lui, 
sa  piété  l'emporta  sur  la  fureur  du  tyran.  S'il  per- 
dit la  beauté  physique  lorsqu'on  lui  fit  enlever  la 
peau  de  la  tête,  il  acquit  en  même  temps  un  nou- 
veau courage  et  une  nouvelle  force  au  fond  de  son 
cœur;  Conum  capitis  exulus,  speciem  mulaveral, 
virlulem  auxeral  (1). 

jt.   5  .  C/ETERI  UNA  CUM  MATRE  INVICEM  SE  EXHOR- 

tabantur    mori   fortiter.    L'esprit    est    frappé 
d'horreur  à  la  vue  d'un  tel  spectacle,   et  l'homme 


n'est  pas  par  lui-môme  capable  de  concevoir  une 
si  grande  constance,  jointe  à  une  si  grande  fai- 
blesse, au  milieu  de  tant  de  supplices  effroyables. 
Mais  il  ne  faut  pas,  comme  le  dit  fort  bien  saint 
Jean  Chrysostôme  (2),  juger  de  ces  combats  di- 
vins comme  des  spectales  profanes,  où  l'on  attend 
la  victoire  des  athlètes,  de  la  jeunesse  et  de  la 
grande  vigueur  de  leur  corps.  Les  combats  de 
ceux  qui  appartiennent  à  Jésus-Christ  sont  tout 
différents.  «  Car  ce  ne  sont  pas  des  hommes  qui 
combattent  contre  d'autres  hommes  ;  mais  ce  sont 
.  des  hommes  qui  combattent  contre  les  démons. 
Ainsi  Jésus-Christ  ne  nous  propose  point  ici  des 
jeunes  gens  robustes  et  aguerris,  mais  des  en- 
fants, un  vieillard,  une  femme  âgée,  mère  de  ces 
enfants.  Qui  avait  jamais  entendu  parler  de  cette 
espèce  de  combat  et  de  spectacle  si  nouveau  et 
si  surprenant  ?  Mais  celui  qui  y  préside,  Jésus- 
Christ,  ne  fait  pas  dépendre  entièrement,  comme 
les  autres,  l'issue  du  combat  de  la  force  des  com- 
battants. Il  est  lui-même  présent  parmi  eux; 
il  les  assiste  divinement  ;  il  leur  tend  sa  main 
invisible;  et  enfin  l'heureux  succès  de  leurs 
combats  est  l'effet  du  secours  même  qu'il  leur 
donne. 

Lors  donc  que  vous  voyez  une  personne  faible 
triompher  de  toute  la  cruauté  d'un  tyran,  et  de 
toute  la  fureur  du  démon,  admirez  lagrâce  de  celu 
qui  la  soutient  dans  ce  grand  combat  ;  adorez  la 
toute  puissance  de  Jésus-Christ  dans  les  athlètes, 
qui  ne  vainquent  pas  leurs  ennemis  par  la  force 
de  leur  corps,  mais  par  l'ardeur  de  leur  foi;  et 
qui  se  trouvent  aussi  puissants  par  l'onction  toute 
divine  de  la  grâce,  qu'ils  sont  faibles  et  fragiles 
de  leur  nature.  Ne  les  envisagez  point  d'après  les 
apparences,  mais  pénétrez  jusqu'au  fond  de  leur 
âme,  pour  y  remarquer  la  vertu  toute-puissante 
de  leur  foi.  Obslupesce  in  inluenda  Chrisli  virtuU, 
cujus  athlelce  non  corporis  robore,  sed  fidei  pirlule 
luclaniur.  Infirma  eorum  natura  :  sed  quœ  eos  un- 
xil  gralia,  potens  est.  » 


(1)  Idem,  Ambros.  de  Ojfic.  I.  i.-c.  11 


(2)  Chrvsosl.  hom.  xliv. 


II.  —  MACCABÉES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRÈRES 


'97 


6.  Dicentes  :  Dominus  Deus  aspiciet  veritatem,  et 
consolabitur  in  nobis,  quemadmodum  in  protestatione 
cantici  declaravit  Moyses  :  Et  in  servis  suis  consolabitur. 

7.  Mortuo  itaque  i!lo  primo  hoc  modo,  sequentem 
deducebant  ad  îlludendum  ;  et  cute  capitis  ejus  cura 
capillis  abstracta,  interrogabant,  si  manducaret  prius 
quam  toto  corpore  per  membra  singula  puniretur. 


8.  At  ille,  respondens  patria  voce,  dixit  :  Non  faciam. 
Propter  quod  et  iste,  s'equenti  loco,  primi  tormenta 
suscepit  ; 

9.  Et  in  ultimo  spiritu  constitutus,  sic  ait  :  Tu  quidem, 
scelestissime,  in  praesenti  vita  nos  perdis;  sed  rex  mundi 
defunctos  nos  pro  suis  legibus  in  aeternaî  vitze  resurrec- 
tione  suscitabit. 


6.  En  disant  :  Le  Seigneur  Dieu  considérera  la  vérité, 
il  sera  consolé  en  n  )us,  selon  que  Moïse  le  déclare  dans 
son  cantique  par  ces  paroles  :  Et  il  sera  consolé  dans 
ses  serviteurs. 

7.  Le  premier  ét?nt  mort  de  la  sorte,  ils  se  moquaient 
du  second  en  le  conduisant  au  supplice  :  et  lui  ayant 
arraché  la  peau  de  la  tète  avec  les  cheveux,  ils  lui  de- 
mandaient s'il  voulait  manger  des  viandes  qu'on  lui  pré- 
sentait plutôt  que  d'être  tourmenté  dans  tous  les  mem- 
bres de  son  corps. 

8.  Mais  il  répondit  en  la  langue  de  ses  pères  :  Je  n'en 
ferai  rien.  C'est  pourquoi  il  souffrit  aussi  les  moines 
tourments  que  le  premier. 

9.  Et  étant  près  de  rendre  l'âme,  il  dit  au  roi  :  Vous 
nous  faites  perdre,  ô  très  méchant  prince  !  la  vie  pré- 
sente ;  mais  le  Roi  du  monde  nous  ressuscitera  un  jour 
pour  la  vie  éternelle,  après  que  nous  serons  morts  pour 
la  défense  de  ses  lois. 


COMMENTAIRE 


f.  6.  Consolabitur  in  nobis.  Ce  passage  peut- 
être  pris  en  trois  sens  différents  :  Les  souffran- 
ces des  serviteurs  de  Dieu  attestent  leur  amour, 
et  par  là  même,  elles  consolent  des  ingrati- 
tudes ou  des  outrages  des  méchants.  Dans 
l'autre  sens  plus  conforme  à  la  phrase  hébraïque, 
il  s'apilo/era  sur  ses  serviteurs,  il  les  vengera  (1). 

Enfin  ilseraconsolé  en  nous;  c'est-à-dire,  nous 
recevrons  nous-mêmes  en  lui  une  consolation 
ineffable. 

C'est  la  vue  de  cette  joie,  préparée  par  Dieu  à 
ses  fidèles  serviteurs,  qui  les  soutient  d'une  ma- 
nière admirable  pendant  cette  vie,  et  qui  les  em- 
pêche de  s'affaiblir  dans  les  plus  grandes  souf- 
frances. Aussi  saint  Ambroise  exprimant  les 
sentiments  intérieurs  de  l'un  de  ces  saints  mar- 
tyrs, lui  mét-il  dans  la  bouche  ces  admirables 
paroles  :  Qu'il  est  agréable  de  mourir  pour  la 
religion  !  Que  l'amertume  de  la  mort  la  plus 
cruelle  devient  douce  à  ceux  qui  la  souffrent  pour 
la  religion,  lorsqu'ils  envisagent  la  récompense 
infinie  qui  les  attend!  Les  tourments  que  vous 
souffrez,  ô  prince,  sont  plus  grands  que  les  sup- 
plices que  nous  souffrons  ;  et  vous  êtes  plus  cru- 
ellement déchiré  que  nous,  quand  vous  vous 
sentez  vaincu,  malgré  tous  les  efforts  de  votre 
puissance. 

}'.  8.  Patria  voce.  Il  répondit  en  hébreu,  qui 
était  la  langue  de  ses  pères.  Les  Juifs  ont  toujours 
été  jaloux  de  la  langue  hébraïque  ;  ils  l'ont  pres- 
que toujours  conservée  parmi  eux,  quoique  pour 
le  commerce  avec  les  étrangers,  ils  soient  obligés 
d'apprendre  la  langue  des  peuples,  au  milieu  des- 
quels ils  vivent.  Ce  jeune  homme  savait  sans  doute 
le  grec,  puisqu'il  avait  été  élevé  à  Antioche,  et  il 
y  a  toute  apparence  que  son  frère  aîné  n'avait 
répondu  qu'en  cette  langue  :    celui-ci  répond  en 


hébreu  ou  en  araméen,  qui  était  à  cette  époque  la 
langue  vulgaire  de  la  Judée.  On  voit  aux  ver- 
sets 21  et  27  que  la  mère  de  ces  sept  frères,  leur 
parlait  en  hébreu,  en  les  encourageant  au  martyre. 

f.  9.  IN  JETERN.-E  VIT/E  RESURRECTIONEM  SUSCI- 
TABIT. Ce  sentiment  de  la  résurrection,  paraît  si 
clairement  clans  toutes  las  réponses  de  ces  mar- 
tyrs (2),  qu'on  peut  dire,  qu'ils  étaient  déjà  chré- 
tiens par  leur  foi,  aussi  bien  que  par  leur  cons- 
tance, Christiani  fuerunt,  dit  saint  Augustin  (3), 
sed  nomen  Chrislianorum  postect  divulgatum,  factis 
antecesserunt.  Les  vérités  de  la  religion,  la  résur- 
rection des  corps,  les  récompenses  de  l'autre  vie, 
se  développaient  de  plus  en  plus,  à  mesure  qu'on 
approchait  du  Libérateur. 

On  peut  remarquer  ici,  en  effet,  quecesgénéreux 

martyrs  parlent  beaucoup  de  la  résurrection  ;  ce 
qui  n'était  pas  ordinaire  avant  cette  époque  :  et  l'on 
croit  que  la  raison  qui  les  y  portait,  pouvait  être 
de  ce  que,  selon  Josèphe,  la  secte  des  saducéens 
qui  niaient  la  résurrection  des  morts,  s'était 
élevée  parmi  les  Juifs.  Ainsi  les  Maccabées,  com- 
battant l'erreur  de  cette  doctrine  impie,  attes- 
taient publiquement  que  le  motif  qui  les  engageait 
à  mépriser  la  vie  présente  que  ce  méchant  prince 
leur  faisait  perdre,  était  l'assurance  qu'ils  avaient 
que  le  Roi  de  l'univers  les  ressusciterait  un  jour 
pour  une  vie  qui  ne  serait  plus  périssable,  mais 
éternelle.  En  effet,  il  eut  été  impossible  qu'ils  se 
fussent  soutenus  dans  de  si  cruels  tourments,  si 
l'espérance  d'une  autre  vie  plus  heureuse  ne  leur 
avait  inspiré  un  vrai  mépris  pour  tous  les  maux 
de  celle-ci  :  car  ce  n'est  pas  sans  raison  que  saint 

Paul  a  déclaré  que,  si  nous  n'avions  d'espérances  en 
Jésus-Christ  que  pour  celle  vie,  nous  serions  les 
plus  misérables  de  tous  les  hommes  (4).  Et  pouvait- 
on  effectivement  se  figurer  un  état   plus  malheu- 


(1)  Voyez  Dcuteron.  xxxu.  56. 

(2)  Voyez  les  versets  11,  14,  27/29. 


(?)  At/g.  Scr.  1.  de  Maccab.  c.  2. 
(4)  1.  Cor.  xv.  29. 


ic;8 


II.  —  MACCABÉES. 


VII.-  LES  SEPT  FRERES 


io.  Post  hune  tertius  illuditur;  et  linguam  postulatus 
cito  protulit,  et  manus  constanter  extendit, 

11.  Et  cum  tiducia  ait  :  Et  cœlo  ista  possideo,  sed 
propter  Dei  leges  nunc  hase  ipsa  despicio,  quoniam  ab 
ipso  me  ea  recepturura  spero; 

12.  Ita  ut  rex,  et  qui  cum  ipso  erant,  mirarentur  ado- 
lescentis  animum,  quod  tanquam  nihilum  duceret  cru- 
ciatus. 

ij.  Et  hoc  ita  defuncto,  quartum  vexabant  similiter 
torquentes. 

14.  Et  cum  jam  esset  ad  mortem,  sic  ait  :  Potius  est  ab 
hominibus  morti  datos  spem  expectare  a  Deo,  iterum  ab 
ipso  resuscitandos  ;  tibi  enim  resurrectio  ad  vilam  non 
erit. 

15.  Et  cum  admovissent  quintum,  vexabant  eum.  At 
il  le  respiciens  in  euro,  dixit  ; 


10.  Après  celui-ci,  on  insulta  encore  au  troisième  : 
on  lui  demanda  sa  langue,  qu'il  présenta  aussitôt  ;  et  il 
étendit  constamment  ses  mains, 

11.  Et  dit  avec  confiance  :  J'ai  reçu  ces  membres  du 
ciel  ;  mais  je  les  méprise  maintenant  pour  la  défense  des 
lois  de  Dieu,  parce  que  j'espère  qu'il  me  les  rendra  un 
jour. 

12.  De  sorte  que  le  roi  et  ceux  qui  l'accompagnaient 
admirèrent  le  courage  de  ce  jeune  homme,  qui  considé- 
rait comme  rien  les  plus  grands  tourments. 

1;.  Celui-ci  étant  aussi  mort  de  la  sorte,  ils  tourmen- 
tèrent de  même  le  quatrième. 

14.  Et  lorsqu'il  était  prêt  de  rendre  l'âme,  il  dit  :  Il 
est  bien  avantageux  d'être  tué  par  les  hommes,  dans  l'es- 
pérance que  Dieu  nous  rendra  la  vie  en  nous  ressus- 
citant; car  pour  vous,  votre  résurrection  ne  sera  point 
pour  la  vie. 

i<,.  Ayant  pris  le  cinquième,  ils  le  tourmentèrent 
comme  les  autres.  Alors  regardant  le  roi,  il  lui  dit: 


COMMENTAIRE 


reux  que  celui  de  ces  Maccabées,  à  qui  l'on  cou- 
pait tous  les  membres  l'un  après  l'autre,  à  qui  l'on 
arrachait  la  peau  delà  tête,  que  l'on  faisait  rôtir 
tout  vivants  dans  des  poêles  ardentes,  s'il  eût  été 
vrai,  selon  que  l'assuraient  les  saducéens,  que 
leur  âme  dût  mourir  avec  leur  corps  ? 

C'était  donc  la  plus  pernicieuse  doctrine  que 
l'on  pût  enseigner,  et  la  plus  directement  oppo- 
sée à  la  piété,  puisqu'elle  n'était  capable  que  de 
faire  des  apostats  et  des  impies,  qui,  n'espérant 
et  ne  craignant  rien  après  la  mort,  se  donnent  une 
entière  liberté  de  vivre  présentement  comme  ils 
l'entendent,  sans  consulter  d'autres  règles  que 
celles  de  leurs  passions  et  de  leur  caprice. 

,v.  10.  Linguam  postulatus  cito  protulit,  et 
manus  constanter  extendit.  Il  ne  craint  point 
qu'en  donnant  sa  langue  à  couper,  il  ne  puisse 
plus  confesser  le  nom  de  son  Dieu  ;  parce  que 
cette  constance  avec  laquelle  il  la  perdait  pour  la 
défense  de  sa  religion,  était  la  plus  noble  confes- 
sion qu'il  pût  faire  de  sa  foi.  Aussi  saint  Ambroise, 
qui  ne  peut  assez  admirer  la  généreuse  disposition 
de  ces  saints  martyrs,  lui  fait  dire  encore  ces  paro- 
les si  touchantes  (1).  «  Vous  voilà  vaincu,  ô  An- 
tiochus,  du  moment  que  vous  commandez  qu'on 
me  coupe  l'instrument  de  ma  voix.  C'est  confes- 
ser publiquement  que  vous  êtes  dans  l'impuis- 
sance de  répondre  à  nos  raisons,  et  que  les  coups 
de  notre  langue  vous  sont  plus  sensibles  que  ne  le 
sont  pour  nous,  tous  ceux  que  vous  nous  faites 
souffrir.  Mais  vous  vous  trompez,  si.  en  nous 
ôtant  la  voix,  vous  croyez  par  là  vous  échapper  ; 
car  sachez  que  Dieu  entend  ses  serviteurs  lors 
même  que  leur  langue  ne  lui  parle  pas,  et  qu'il  les 
entend  même  alors  d'autant  plus,  qu'ils  ne  lui  par- 
lent que  par  les  cris  de   leur  cœur.   Ainsi    vous 


pouvez  couper  ma  langue  ;  mais  vous  ne  pouvez 
me  dépouiller  de  la  constance  que  Dieu  m'ins- 
pire ;  vous  ne  pouvez  m'empècher  de  rendre  té- 
moignage à  la  vérité  ;  vous  ne  pouvez  étouffer  le 
cri  de  mon  cœur.  Le  sang  a  sa  voix,  par  laquelle 
il  crie  vers  Dieu  ;  et  celui  qui  entend  nos  pensées 
les  plus  secrètes,  entend  encore  plutôt  la  voix  du 
sang  qui  s'élève  jusqu'à  son  trône.  Habel  el  san- 
guis  vocem  suam  qua  clamât  ad  Deum  :  audit  enim 
sanguinis  vocem,  qui  audit  internas  cogilaliones. 

Il  est  marqué  que  le  roi  et  ceux  qui  raccom- 
pagnaient, ne  purent  s'empêcher  d'admirer  eux- 
mêmes  le  courage  de  ce  jeune  homme  :  mais  on  ne 
sait  ce  que  l'on  doit  admirer  le  plus,  de  ce  cou- 
rage des  martyrs,  qui  donnaient  leur  langue  et 
leurs  autres  membres  à  couper,  et  leur  tête  à 
écorcher,  comme  si  leur  corps  eût  été  le  corps 
d'un  autre  ;  ou  de  la  fureur  et  de  l'obstination 
presque  incroyable  de  ce  roi,  qui  se  contente 
d'admirer  dans  ceux  qu'il  persécutait  des  effets  si 
surprenants,  sans  se  mettre  en  peine  de  remon- 
ter jusqu'à  la  cause  d'une  résolution  si  étonnante. 
Ce  sont  deux  prodiges  presqu'également  incom- 
préhensibles, si  ce  n'est  toutefois  que  l'un  est 
l'effet  des  ténèbres  les  plus  profondes  d'un  cœur 
plongé  dans  l'impiété  et  dans  l'orgueil,  et  que 
l'autre,  au  contraire,  est  un  effet  surnaturel  de  la 
grâce  toute-puissante  de  Celui  qui  vit  dans  les 
justes  :  Vivit  vero  in  me  Chrislus  (2).  C'est  lui  qui 
souffre  dans  les  martyrs,  selon  le  témoignage 
d'une  très  illustre  martyre,  sainte  Félicité  (5). 
Elle  souffrait  alors  les  grandes  douleurs  de  l'en- 
fantement. Un  de  ses  cardes  lui  demanda  ce 
qu'elle  ferait  étant  exposée  aux  bêtes,  si  elle 
criait  pour  mettre  simplement  au  monde  un  enfant; 
elle  lui  fit  aussitôt  cette  admirable  réponse:  C'est 


(1)  Ambras,  de  Jacob.  I.  11.  c.  11.  Idem  deOffïc.  I.  n.c.41. 


(2)  Galal.  11.  20.  —  (?)  Ad.  Perpel.  el  Fdicis. 


II.  —  MACCABÉES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRÈRES 


199 


16.  Potestatem  inter  homines  habens,  cum  sis  corrup- 
tibilis,  facis  quod  vis;  noli  autem  putare  genus  nostrum 
a  Deo  esse  derelictum. 

17.  Tu  autem  patienter  sustine,  et  videbis  magnam 
potestatem  ipsius,  qualiter  te    et  semen  tuum  torquebit. 

18.  Post  hune  ducebant  sextum,  et  is,  mori  incipiens, 
sic  ait  :  Noli  frustra  errare  ;  nos  enim  propter  nosmet- 
ipsos  hase  patimur,  peccantes  in  Deum  nostrum,  et 
digna  admiratione  facta  sunt  in  nobis. 


19.  Tu  autem  ne  existimes  tibi  impune  futurum,  quod 
contra  Deum  pugnare  tentaveris. 

20.  Supra  modum  autem  mater  mirabilis,  et  bonorum 
memoria  digna,  quas  pereuntes  septem  filios  sub  unius 
diei  tempore  conspiciens,  bono  animo  ferebat,  propter 
spem  quam  in  Deum  habebat; 


16.  Vous  faites  ce  que  vous  voulez,  parce  que  vous 
avez  reçu  la  puissance  parmi  les  hommes,  quoique  vous 
soyez  vous-même  un  homme  mortel;  mais  ne  vous  ima- 
ginez pas  que  Dieu  ait  abandonné  notre  nation  : 

17.  Attendez  seulement  un  peu,  et  vous  verrez  quelle 
est  la  grandeur  de  sa  puissance,  et  de  quelle  manière 
il  vous  tourmentera,  vous  et  votre  race. 

18.  Après  celui-ci,  ils  menèrent  au  supplice  le  sixième  ; 
et  lorsqu'il  était  près  de  mourir,  il  dit  :  Ne  vous  trompez 
pas  vainement  vous-même  ;  car  si  nous  souffrons  ceci, 
c'est  parce  que  nous  l'avons  mérité,  ayant  péché  contre 
notre  Dieu  ;  et  ainsi  nous  nous  sommes  attiré  ces  fléaux 
si  épouvantables. 

19.  Mais  ne  vous  imaginez  pas  que  vous  demeurerez 
impuni,  après  avoir  entrepris  de  combattre  contre  Dieu 
même. 

20.  Cependant  leur  mère,  plus  admirable  qu'on  ne 
peut  dire,  et  digne  de  vivre  éternellement  dans  la  mé- 
moire des  bons,  voyant  périr  en  un  même  jour  ses  sept 
enfants,  souffrait  constamment  leur  mort,  par  l'espérance 
qu'elle  avait  en  Dieu. 


COMMENTAIRE 


moi  qui  souffre  à  présent,  mais  là,  il  y  en  aura  un 
autre  qui  souffrira  en  moi,  parce  que  je  souffrirai 
pour  lui. 

f.  16.  Potestatem  inter  homines  habens... 
facis  quod  vis.  On  ne  peut  rien  de  plus  libre 
que  cette  réponse,  qui  a  beaucoup  de  rapport  à 
celle  de  Jésus-Christ  (1)  :  Vous  riaurie\  aucun 
pouvoir  sur  moi,  s'il  ne  vous  eût  été  donné  d'en 
haut. 

f.  l8.  NOS  ENIM  PROPTER  NOSMETIPSOS  H/EC 
PATIMUR,  PECCANTES  IN  DEUM   NOSTRUM.    Dans  Ces 

paroles,  le  jeune  martyr  parle  au  nom  et  comme 
faisant  partie  de  la  nation  juive.  Les  Juifs,  dans 
leur  ensemble,  avaient  irrité  le  Seigneur  et  mérité 
un  sévère  châtiment  ;  il  était  Juif,  et,  comme  tel,  il 
ne  pouvait  se  soustraire  aux  châtiments  qu'avaient 
mérités  ses  compatriotes. 

v.  20.  Supra  modum  autem  mater  mirabilis  et 
bonorum  memoria  digna,  etc.  Tous  les  pères  (2) 
ont  été,  effectivement,  dans  l'admiration  de  la 
constance  et  de  la  foi  presque  incroyable  de  cette 
mère  de  tant  de  martyrs.  Saint  Grégoire  de 
Nazianze  dit  qu'elle  sut  allier  parfaitement  l'amour 
de  Dieu  à  celui  de  ses  enfants.  Elle  sentait  ses 
entrailles  déchirées,  mais  d'une  manière  qui 
paraissait  tout  opposée  à  la  nature,  parce  qu'elle 
n'était  pas  touchée  de  voir  ses  enfants  souffrir  ; 
elle  était  au  contraire  dans  la  dernière  inquiétude, 
de  peur  que  quelqu'un  d'eux  ne  souffrît  pas  comme 
les  autres  ;  elle  offrit  à  Dieu,  en  quelque  sorte, 
un  sacrifice  plus  grand  que  celui  même  d'Abra- 
ham, puisque  ce  saint  patriarche  n'offrit  au  Sei- 
gneur qu'un  seul  fils,  quoiqu'il  fût  à  la  vérité  un 
fils  unique  et  l'enfant  de  la  promesse,  mais  elle  lui 


consacra  successivement  toute  une  famille  qu'elle 
aimait  très  tendrement  ;  elle  surpassa,  par  cette 
oblation  volontaire  de  tant  de  victimes  raison- 
nables qui  se  hâtaient  de  mourir  pour  Dieu,  et 
toutes  les  mères  et  tous  les  sacrificateurs,  lors- 
qu'elle montrait  ses  mamelles  à  ceux  qu'elle 
avait  nourris  ;  lorsqu'elle  leur  remettait  devant  les 
yeux  la  peine  et  les  soins  qu'elle  avait  pris  pour 
les  élever;  et  lorsqu'enfin,  elle  leur  représentait 
sa  vieillesse,  pour  les  engager  plus  fortement,  non 
à  conserver  leur  vie,  mais  à  souffrir  et  à  mourir 
pour  leur  Dieu,  ne  craignant  rien  tant  que  le 
retard  de  leur  mort. 

Saint  Jean  Chrysostôme  témoigne  qu'il  ne 
savait  ce  qu'il  devait  admirer  le  plus  en  elle,  ou 
la  faiblesse  du  sexe,  ou  l'état  môme  de  la  vieillesse, 
ou  la  tendresse  si  compatissante  d'une  mère  pour 
ses  enfants,  qui  étaient,  comme  il  le  dit,  trois 
grands  obstacles  à  la  constance  dont  elle  eut 
besoin  pour  courir  dans  une  si  rude  carrière.  Mais 
il  ajoute  qu'il  y  en  avait  encore  un  autre,  où  la 
malice  du  démon,  et  la  fermeté  de  cette  mère 
incomparable  se  remarquèrent  plus  sensiblement. 

«  Considérez,  dit-il,  qu'on  ne  la  fit  pas  entrer 
la  première  dans  le  combat,  mais  après  tous  ses 
enfants  ;  afin  qu'étant  abattue  parleurs  supplices, 
à  la  vue  de  tant  de  souffrances,  elle  fut  moins  en 
état  de  soutenir  les  attaques  de  son  ennemi.  Car, 
dit-il,  il  faut  se  représenter  qu'à  chaque  fois  que 
l'on  tourmentait  l'un  de  ses  fils,  elle  souffrait  en 
elle-même  des  tourments  encore  plus  cruels 
qu'eux  ;  et  qu'elle  mourait  en  quelque  sorte  autant 
de  fois  qu'elle  en  voyait  quelqu'un  mourir  avant 
elle,  h 


(1)  Joan.  xix.  n. 


(2)  Grcgor.  Nazian.  oral.  xxu. 
Aug.  de  divers,  ser.  cix. 


Chrrsost.    Iwm.  xlix. 


200 


II.  —  MACCABEES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRÈRES 


21.  Singulos  i'.lorum  hortabatur  voce  patria  fortiter, 
repleta  sapientia;  et  feminea?  cogitationi  masculinum 
animum  inserens, 

22.  Dixit  ad  eos  :  Nescio  qualiter  in  utero  meo  appa- 
ruistis  ;  neque  enim  ego  spiritum  et  animam  donavi  vobis 
et  vitam,  et  singulorum  membra    non  ego  ipsa  compegi. 

2?.  Sed  enim  mundi  Creator,  qui  formavit  hominis  nati- 
vitatem,  quique  omnium  invenit  originem,  et  spiritum 
vobis  iterum  cum  misericordia  reddet  et  vitam,  sicut 
nunc  vosmetipsos  despicitis  propter  leges  ejus. 

24.  Antiochus  autem,  contemni  se  arbitratus  simul  et 
exprobrantis  voce  despecta,  cum  adhuc  adolescentior 
Superesset,  non  solum  verbis  hortabatur,  sed  et  cum 
juramento  affirmabat,  se  diviiem  et  beatum  facturum,  et 
translatum  a  patriis  legibus  amicum  habiturum,  et  res 
necessarias  ei  prsebiturum. 


25.  Sed  ad  hase  cum  adolescens  nequaquam  inclinare- 
tur,  vocavit  rex  matrem,  et  suadebat  ei  ut  adolesccnti 
fieret  in  salutem. 

26.  Cum  autem  multis  eam  verbis  esset  hortatus,  pro- 
misit  suasuram  se  fil io  suo. 


1.  Elle  exhortait  chacun  d'eux  avec  des  paroles  fortes 
dans  la  langue  de  ses  pères,  étant  remplie  de  sagesse: 
et  alliant  un  courage  mâle  avec  la  tendresse  féminine. 

22.  Elle  leur  disait  :  Je  ne  sais  comment  vous  avez 
été  formés  dans  mon  sein,  car  ce  n'est  point  moi  qui 
vous  ai  donné  l'âme,  l'esprit  et  la  vie,  ni  qui  ai  joint  tous 
vos  membres  pour  en  faire  un  corps  ; 

25.  Mais  le  Créateur  du  monde,  qui  a  formé  l'homme 
dans  sa  naissance,  et  qui  a  donné  l'origine  à  toutes  cho- 
ses, vous  rendra  encore  l'esprit  et  la  vie  par  sa  miséri- 
corde, en  récompense  de  ce  que  vous  vous  méprisez 
maintenant  vous-mêmes  pour  la  défense  de  ses  lois. 

24.  Or.  Antiochus  croyant  qu'on  le  méprisait,  et 
voyant  toutes  les  insultes  qu'il  avait  faites  à  ces  jeunes 
hommes  devenues  inutiles,  comme  le  plus  jeune  de  tous 
était  resté,  il  commença,  non  seulement  à  l'exhorter  par 
ses  paroles,  mais  à  l'assurer  avec  serment  qu'il  le  met- 
trait au  rang  de  ses  favoris  et  lui  donnerait  toutes  les 
choses  nécessaires,  s'il  voulait  abandonner  les  lois  de 
ses  pères. 

25.  Mais  ce  jeune  homme  ne  pouvant  être  ébranlé  par 
ces  promesses,  le  roi  appela  sa  mère,  et  l'exhorta  à  ins- 
pirer à  son  fils  des  sentiments  plus  salutaires. 

26.  Après  donc  qu'il  lui  eut  dit  beaucoup  de  choses 
pour  la  persuader,  elle  lui  promit  d'exhorter  son  fils. 


COMMENTAIRE 


jh  21.  Voce  patria.  Elle  leur  parlait  hébreu, 
et  n'était  point  comprise  du  roi,  ni  de  la  plupart 
des  assistants. 

f.  22.  Nescio  qualiter  in  utero  meo  appa- 
ruistis.  La  formation  de  l'homme  dans  le  sein  de 
la  mère,  d'une  manière  inconnue  à  la  mère  même, 
et  souvent  malgré  elle,  a  toujours  été  le  sujet  de 
l'étonnement  des  physiologistes.  L'Écriture,  en 
plus  d'un  endroit  (1  ),  relève  la  puissance  de  Dieu, 
dans  la  production  naturelle  de  l'homme. 

f.   24.    Antiochus  contemni   se  arbitratus, 

SIMUL      ET      EXPROBRANTIS     VOCE     DESPECTA.       Le 

grec  (2):  Antiochus  croyant  qu'on  le  méprisait,  et 
soupçonnant  quelle  lui  insultait  par  ses  discours. 
Ce  prince  n'entendait  pas  la  langue  hébraïque, 
que  cette  femme  parlait  à  ses  enfants  ;  mais  les 
voyant  si  fermes,  il  se  douta  que  la  mère  les 
encourageait  et  rendait  inutiles  ses  remontrances, 
ses  menaces  et  ses  supplices.  Le  syriaque:  An- 
tiochus se  voyant  méprisé,  se  détourna  pour  ne  pas 
entendre  ses  reproches,  faisant  semblant  de  m  les 
pas  écouler. 

j.  25.  Vocavit  rex  matrem  et   suadebat   ei, 

UT  ADOLESCENTI  FIERET  IN  SALUTEM.  Le  persécu- 
teur Antiochus  jugeait,  dit  saint  Augustin  (3),  de 
la  disposition  de  cette  femme  si  généreuse  par 
celle  des  autres  mères.  Persuade^  à  votre  fils,  lui 
disait  ce  prince,  de  ne  pas  périr  par  sa  faute.  Je 
l'exhorterai,  lui  répondit-elle.  Mais  elle  entendait 
ces  paroles  d'une  manière  toute  différente  de   ce 


qu'il  croyait  :  car  elle  voulait  lui  procurer  la  vraie 
vie,  en  l'exhortant  à  mourir,  au  lieu  qu'il  aurait 
voulu  l'engager  dans  une  mort  éternelle,  en  lui 
conservant  la  vie  présente.  «  Mais  quel  est 
donc,  ajoute  le  même  saint,  l'entretien  de  la 
mère  avec  le  fils  ?  Quelle  piété!  quelle  sollicitude 
maternelle  !  Et  combien  elle  pouvait  être  inter- 
prétée différemment  par  les  hommes  spirituels  et 
par  les  charnels  !  Qualis  collocutio  !  quam  pia! 
quam  materna  !  quam  inler  spirilales  et  carnales  in 
ambiguo  suspensa  !  Mon  fils,  lui  dit-elle,  aye\ 
pitié  de  moi  qui  vous  ai  porté  neuf  mois  dans  mon 
sein,  qui  vous  ai  nourri  de  mon  lait  pendant  trois 
ans,  et  qui  vous  ai  élevé  jusqu'à  cet  âge  où  vous 
îles.  Tous  ceux  qui  l'ont  ainsi  entendue  parler, 
devaient  croire,  dit  saint  Augustin,  qu'elle  allait 
ensuite  ajouter  ces  autres  paroles:  Consentez, 
mon  fils,  à  ce  que  demande  Antiochus.  et  ne 
soyez  pas  assez  dur  pour  abandonner  votre  mère. 
Mais  elle,  bien  éloignée  d'un  tel  langage,  exhorta 
son  fils  à  ne  se  soumettre  qu'à  Dieu,  et  à  ne  pas 
se  séparer  d'avec  ses  frères.  Ne  diminuez  pas, 
mon  fils,  lui  disait-elle,  le  nombre  de  mes  cou- 
ronnes. Soyez  uni  à  vos  frères  dans  les  souffran- 
ces du  martyre,  comme  vous  l'avez  été  dans  les 
entrailles  qui  vous  ont  enfanté.  Que  la  vertu  ne 
vous  rende  pas  moins  frères  que  la  nature.  Et 
enfin  ne  faites  pas,  mon  cher  fils,  qu'étant  mère 
de  sept  enfants,  je  ne  le  sois  que  de  six  martyrs. 
«  Où  sont  maintenant,  s'écrie   saint  Jean  Chry- 


(1)  Jcb.  x.  10.  -  Sap.  vu.  2.  -  Voyez  S.  Aug.  de  anima       aavj'f<j£o5u.£vo;  çuv^'v.  Hcsych.  C"jop'ô;j.evo;,  u-o6Xî^o;j.£vo;, 
et  cjus  origine  lil>.  1.  c.  15.  oovjum.evo;,  &jsovowv. 

(2)  A'-iV.o/o-.  ôi6\itvoi  xaiatppovefoOat,  »«':  xtjv  ôvaioCou-  (3)  Aug.  de  divers,  serin,  cix.  g 


II.  —  MACCABÉES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRÈRES 


201 


27.  Itaque  inclinita  ad  illum,  irridens  crudelem  tyran- 
num,  ait  palria  voce  :  Fili  mi,  miserere  mei,  quaa  te  in 
utero  novem  mensibus  portavi,  et  lac  triennio  dedi  et 
alui,  et  in  œtatem  istam  perduxi. 


28.  Peto,  nate,  ut  aspicias  ad  crelum  et  terram,  et  ad 
omnia  quse  in  eis  sunt,  et  intelligas  quia  ex  nihilo  fecit 
illa  Deus,  et  hominum  genus  ; 

29.  Ita  fiet,  ut  non  timeas  carnificem  istum  ;  seddignus 
fratribus  tuis  effectus  particeps,  suscipe  mortem,  ut  in 
illa  miseratione  cum  fratribus  tuis  te  recipiam. 


?o.  Cum  hase  illa  adhuc  diceret,  ait  adolescens  :  Quem 
sustinetis  ?  non  obedio  prsecepto  régis,  sed  prsecepto 
legis,  quse  data  est  nobis  per  Moysen. 

51.  Tu  vero,  qui  inventor  omnis  malitiœ  factus  es  in 
Hebraeos,  non  elîugies  malum  Dei. 

J2.  Nos  enim  pro  peccatis  nostris  hsec  patimur  ; 

?}•  Et  si  nobis  propter  increpationem  et  correptionem 
Dominus  Deus  noster  modicum  iratus  est,  sed  iterum 
reconciliabitur  servis  tuis. 

J4.  Tu  autem,  o  sceleste,  et  omnium  hominum  flagitio- 
sissime,  noli  frustra  exlolli  vanis  spebus  in  servos  ejus 
inflammatus, 

55.  Nondum  enim  omnipotentis  Dei,  et  omnia  inspi- 
cientis,  judicium  effugisti. 

?6.  Nam  fratres  mei,  modico  nunc  do'ore  sustenlato, 
sub  testamento  alternas  vitse  effecti  sunt;  tu  vero,judicio 
Dei  justas  superbise  tuas  pœnas  exsolves. 


27.  Elle  se  baissa  en  même  temps  pour  lui  parler,  et 
se  moquant  de  ce  cruel  tyran,  elle  lui  dit  en  la  langue 
de  ses  pères  :  Mon  fils,  ayez  pitié  de  moi,  qui  vous  ai 
porté  neuf  mois  dans  mon  sein,  qui  vous  ai  nourri  de 
mon  lait  pendant  trois  ans,  et  qui  vous  ai  élevé  jusqu'à 
l'âge  où  vous  êtes  : 

28.  Je  vous  conjure,  mon  fils,  de  regarder  le  ciel  et  la 
terre,  et  toutes  les  choses  qui  y  sont  renfermées  ;  et  de 
bien  comprendre  que  Dieu  les  a  créées  de  rien,  aussi 
bien  que  tous  les  hommes. 

29.  Ainsi  vous  ne  craindrez  point  ce  cruel  bourreau  ; 
mais,  vous  rendant  digne  d'avoir  part  aux  souffrances  de 
vos  frères,  vous  recevrez  de  bon  cœur  la  mort,  afin  que 
je  vous  reçoive  de  nouveau  avec  vos  frères  dans  cette 
miséricorde  que  nous  attendons. 

îo.  Lorsqu'elle  parlait  encore,  ce  jeune  homme  se  mit 
à  crier  :  Qu'attendez-vous  de  moi  ?  je  n'obéis  point  au 
commandement  du  roi,  mais  au  précepte  de  la  loi  qui 
nous  a  été  donnée  par  Moïse. 

ji.  Quant  à  vous,  qui  êtes  l'auteur  de  tous  les  maux 
dont  on  accable  les  Hébreux,  vous  n'éviterez  pas  la 
main  de  Dieu. 

;2.  Car  pour  nous,  c'est  à  cause  de  nos  péchés  que 
nous  souffrons  ces  persécutions  ; 

??.  Et  si  le  Seigneur  notre  Dieu  s'est  mis  un  peu  en 
colère  contre  nous,  pour  nous  châtier  et  nous  corriger, 
il  se  réconciliera  de  nouveau  avec  ses  serviteurs. 

54.  Mais  pour  vous,  qui  êtes  le  plus  scélérat  et  le  plus 
abominable  de  tous  les  hommes,  ne  vous  flattez  pas 
inutilement  par  de  vaines  espérances,  en  vous  enflam- 
mant de  fureur  contre  les   serviteurs  de  Dieu  ; 

ij.  Car  vous  n'avez  pas  encore  échappé  au  jugement 
de  Dieu,  qui  peut  tout  et  qui  voit  tout. 

j6.  Et  quant  à  mes  frères,  après  avoir  supporté  une 
douleur  passagère,  ils  sont  entrés  maintenant  dans  l'al- 
liance de  la  vie  éternelle  ;  mais  pour  vous,  vous  souf- 
frirez au  jugement  de  Dieu  la  peine  que  votre  orgueil  a 
justement  méritée. 


COMMENTAIRE 


sostôme  (1),  ceux  qui  refusent  de  faire  à  Dieu 
quelques  offrandes  de  leurs  biens,  lorsque  cette 
mère  offre  aujourd'hui  à  son  divin  Maître  sept 
jeunes  enfants  tout  à  la  fois,  et  qu'elle  n'hésite 
point  à  lui  faire  ce  grand  sacrifice  du  fond  de  ses 
propres  entrailles  ?  » 

j8\  27.  Lac  triennio  dedi.  Les  enfants  tétaient 
ordinairement  jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  capables 
de  prendre  une  nourriture  solide.  Les  anciens 
médecins  ont  approuvé  cette  méthode  (2).  Voyez 
notre  commentaire  sur  la  Genèse,  xxi,  8. 

f.  28.  Ex  nihilo  fecit  illa.  Deus.  Illes  a  tirées 
du  néant.  Le  grec  (5):  //  les  a  faites  de  ce  qui 
n'était  pas.  Voilà  l'éternité  prétendue,  et  la  pré- 
existence de  la  matière  première  et  du  chaos,  clai- 
rement renversées.  Tout  ce  que  Dieu  n'a  pas  pro- 
duit de  sa  substance,  dit  saint  Augustin  (4),  mais 
qu'il  a  créé  au  dehors  par  son  Verbe,  il  ne  l'a  pas 


fait  de  ce  qui  était  déjà,  mais  de  ce  qui  n'était  pas, 
c'est-à-dire  du  néant.  De  là  celle  parole  de  l'Apô- 
tre ($)  :  Dieu  appelle  les  choses  qui  ne  sont  pas, 
comme  celles  qui  sont.  Judas  Maccabée  parle  plus 
loin,  du  pouvoir  infini  de  Dieu,  qui  peut  d'un 
clin  d'oeil,  réduire  toutes  choses  au  néant.  Uni- 
versum  munduin  uno  nulu  delere.  II.  Macc, 
vin,  18. 

f.   29.   UT  IN  ILLA  MISERATIONE    CUM    FRATRIBUS 

tuis  te  recipiam.  Afin  que  je  vous  reçoive  de 
nouveau  avec  vos  frères,  dans  cette  miséricorde  que 
nous  attendons  ;  afin  que  je  vous  reçoive  dans  le 
ciel,  dans  l'autre  vie,  dans  la  résurrection.  C'est 
le  vrai  sens  du  texte  (6). 

f.  36.  Sub  testamento  ^etern,*:  vit/e  effecti 
sunt.  Ils  sont  entrés  dans  l'alliance  de  la  vie  éter- 
nelle ;  ou  plutôt,  dans  la  jouissance  de  la  vie  éter- 
nelle, qui  leur  est  promise  par  l'alliance  de  leurs 


(1)  Chrysost.  hom.  l. 

(2)  Valcs.  de  sacra  Philcsoph.  c.  8j. 

(j)  E'Ç  où/  ovxojv  Ê^o;'r)(jcv  âuxà  ô  ®(ô:_. 

(4)  Aug.  iib.  de  Nat.  boni.  c.  26.  Deus  omnia  quae  de 
se  non  genuit,  sed  per  Verbum  suum  fecit,  non  de  his 
rébus  quse  jam  erant,  sed  de  his  quse  omnino  non  erant, 


hoc  est  de  nihilo  fecit  :  ita  dicit  Aposlolus  :  Qui    vocat 
ea  quse  non  sunt,  tanquam  ea  quse  sunt. 

(5)  Rom.  iv.  17. 

(6)  I"va  Èv  zS>  ÊXùi  gÙv  toïç  àotX'JOî;  aou  xou/aoj;j.ai    aô'. 
Comparez  ce  verset  avec  le  2j  et  le  syriaque. 


202 


II. 


MACCABEES.  —  VII.  -  LES  SEPT  FRERES 


J7.  Ego  aulem,  sicut  et  fratres  mei,  animam  et  corpus 
meum  trado  pro  patriis  legibus,  invocans  Deum  maturius 
genti  nostras  propitium  fieri,  teque  cum  tormentis  et 
verberibus  confiteri  quod  ipse  est  Deus  solus. 


j8.  In  me  vero  et  in  fratribus  meis  desinet  Omnipo- 
tentis  ira,  quas  super  omne  genus  nostrum  juste  super- 
ducta  est. 

5Q.  Tune  rex,  accensus  ira,  in  hune  super  omnes  cru- 
delius  de:asvit,  indigne  ferens  se  derisum. 

40.  Et  hic  itaque  mundus  obiit,  per  omnia  in  Domino 
confidens. 

41.  Novissime  autem  post  filios  et  mater  consumpta 
est. 

42.  Igitur  de  sacrificiis,  et  de  nimiis  crudelitatibus  satis 
dictum  est. 


57.  Pour  ce  qui  est  de  moi,  j'abandonne  volontiers, 
comme  mes  frères,  mon  corps  et  mon  âme  pour  la  dé- 
fense des  lois  de  mes  pères,  en  conjurant  Dieu  de  se 
rendre  bientôt  favorable  à  notre  nation,  et  de  vous  con- 
traindre par  les  tourments  et  par  plusieurs  plaies,  à  con- 
fesser qu'il  est  le  seul  Dieu. 

j8.  Mais  la  colère  du  Tout-Puissant,  qui  est  tombée 
justement  sur  tout  notre  peuple,  finira  à  ma  mort  et  à 
celle  de  mes  frères. 

;9.  Alors  le  roi  tout  transporté  de  colère  fit  éprouver 
sa  cruauté  à  celui-ci  encore  plus  qu'à  tous  les  autres, 
ne  pouvant  souffrir  qu'on  se  moquât  ainsi  de  lui. 

40.  Il  mourut  donc  dans  la  pureté  de  son  innocence, 
comme  les  autres,  avec  une  parfaite  confiance  en  Dieu. 

41.  Enfin  la  mère  souffrit  aussi  la  mort  après  ses  en- 
fants. 

42.  Mais  nous  avons  assez  parlé  et  de  sacrifices  et  de 
cruautés  excessives. 


pères  avec  Dieu.  Le  grec  (1 

vie  éternelle,  promise  par  l'alliance  que  Dieu  a  faite 

avec  leurs  pères. 

jL  37.   Teque   cum  tormentis  et  verberibus 

CONFITERI,  QUOD  IPSE     EST    DEUS    SOLUS.    On     vit 

l'accomplissement  de  ces  menaces  ou  de  ces 
prédictions,  lorsqu'Antiochus  accablé  de  maux, 
et  prêta  expirer,  reconnaissait  la  main  vengeresse 
du  Seigneur  et  promettait  de  se  faire  Juif  (2). 
Voyez  le  verset  17,  et  le  chapitre  ix,  15,  16,  17. 

f.  38.  In  me  et  in  fratribus  meis  desinet  om- 
nipotentis  ira.  Nous  sommes  comme  les  victimes 
d'expiation  de  notre  peuple.  Dieu,  content  de 
notre  sacrifice,  se  réconciliera  avec  notre  nation. 
En  effet,  si  la  persécution  d'Antiochus  fut  violente, 
elle  ne  fut  pas  longue.  Dieu  commença  bientôt  à 
faire  briller  les  rayons  de  sa  miséricorde  sur  ses 
fidèles  (?). 

f.  40.  Mundus  obiit.  Il  mourut  sans  s'être  souillé 
par  les  viandes  immolées  aux  idoles,  ni  par  le 
culte  impie  des  taux  dieux.  Le  quatrième  livre 
des  Maccabées  porte  qu'il  se  jeta  dans  une  chau- 
dière bouillante  où  il  mourut. 

v.41 .  Novissime  et  mater  consumpta  est. Cette 
héroïque  mère,  est  nommée  Salomona  dans  le 
latin  du  livre  de  Josèphe,  sur  les  Maccabées.  Les 
Grecs,  dans  leur  calendrier,  l'appelaient  Salomé. 
L'original  grec  de  Josèphe,  ne  lui  donne  point 
de  nom  particulier  ;  il  nous  apprend  seulement 
que,  pour  éviter  qu'aucun  homme  ne  la  touchât, 
elle  se  jeta  dans  un  bûcher  qui  était  allumé  (4). 
Josèphe  ben  Gorion  et  l'arabe  assurent,  qu'après 


COMMENTAIRE 

Leur  sort  sera   la      le  martyre  de  ses  fils,  elle  se  mitau  milieude  leurs 


corps,  et  élevant  ses  mains  au  ciel,  elle  demanda 
à  Dieu  qu'il  la  tirât  du  monde  ;  elle  fut  exaucée, 
et  elle  tomba  morte  sur  ses  enfants.  D'autres  [<,) 
ont  avancé  qu'elle  était  morte  de  joie,  d'avoir  vu 
souffrir  constamment  ses  sept  fils,  sans  qu'aucun 
d'eux  ait  manqué  de  générosité  et  de  courage. 
Mais  la  plupart  ont  cru,  après  le  traducteur  latin 
du  livre  de  Josèphe,  que  cette  héroïne  souffrit 
un  glorieux  martyre,  immédiatement  après  ses 
fils  ;  qu'on  la  traîna,  qu'on  la  dépouilla,  qu'on  lui 
déchira  les  mamelles  ;  et  qu'après  lui  avoir  fait 
souffrir  le  supplice  du  fouet,  elle  fut  jetée  dans 
une  chaudière  bouillante  où  elle  expira. 

L'Église  n'a  pu  marquer  d'une  manière  plus 
éclatante,  son  estime  et  sa  vénération  pour  les 
Maccabées,  qu'en  instituant  une  fête  en  leur  hon- 
neur et  en  leur  érigeant  des  temples,  dès  les  pre- 
miers siècles,  avant  même  qu'elle  eût  accordé 
cet  honneur  à  aucun  autre  martyr  de  l'Ancien 
Testament.  On  a  divers  sermons  que  les  pères 
ont  prononcés  le  jour  de  leur  fête.  Saint  Gré- 
goire de  Nazianze(6),  saint  Chrysostôme  (7), 
saint  Ambroise(8),  saint  Léon,  saint  Augustin  (9), 
saint  Gaudence  de  Bresse  (10),  saint  Maxime  de 
Turin,  leur  ont  consacré  des  éloges,  et  ont  relevé 
leur  mérite  comme  appartenant  déjà  à  Jésus- 
Christ  et  à  la  nouvelle  alliance.  On  peut  à  juste 
titre,  les  appeler,  martyrs  de  la  résurrection  des 
corps,  personne  dans  l'Ancien  Testament,  n'en 
ayant  parlé  d'une  manière  si  distincte  et  si  for- 
melle. 


(1)  A'svvaou  Çcofj;  ur.ô  8taO»{x7)V  0£oî  r.îztto'.xii.  Ceci- 
derunt,  id  est  sors  illorum  cecidit,  sub  testamentum  Dei 
aeiernœ  vitaî. 

(21  1.  Macc.  vi.  j.  -  11.  Macc.  ix.  12.  cl  scq.  -  Joseph. 
Anliq.  I.  xn.  1  ;. 

(5)  11.  Macc.  vin.  5.  et  27. 

(4)  Joseph,  libel  de  Macc.  c.  .  I"va  [i.t]  tyxiieit  rlo  tou 
ob>ij.xzo',  àjT7J;,  laur/jv  ?ppi<|<e  xaxà  ttjç  itQpa;. 


(5)  Vide  Scxt.  Scn.  Bibl.  I.  v.  Victor  in.  Carm.  de  Macc. 
apud  Serar.  hic. 

(6)  Gregor.  Na^ian^.  Orat.  xxu. 

(7)  Chrysost.  homil.  de  Maccab. 

(8)  Ambros.  de  Offic.  lib.  \.  c.  14.  cl  Ep.  17.  et  de  Jacob, 
lib.  11.  cm.  12. 

(9)  Aug.  Serin,  ecc  et  ceci  de  Maccab.  in  nov.  edit.  alias 
cix.  et  ex. 

(10)  Gaudent.  Serin,  de  Maccab.  etc. 


CHAPITRE   VIII 


Judas  Maccabée  fortifie  son  parti  et  fait  des  courses  sur  les  ennemis.  Nicanor  et  Gorgias 
sont  envoyés  contre  lui.  Il  exhorte  les  siens  à  combattre  avec  courage.  Il  met  en  fuite 


l'armée  ennemie.   Il  continue 
à   Antioche. 


de    remporter   de    grands 


avantages. 


Nicanor   s'enfuit 


i.  Judas  vero  Machabaeus,  et  qui  cum  illo  erant,  in- 
troibant  latenter  in  castella,  et  convocantes  cognatos  et 
amicos,  et  eos  qui  permanserunt  in  Judaismo,  assumentes, 
eduxerunt  ad  se  sex  millia  virorum. 

2.  Et  invocabant  Dominum,  ut  respiceret  in  populum, 
qui  ab  omnibus  calcabitur;  et  misereretur  templo,  quod 
contaminabatur  ab  impiis; 

;.  Misereretur  etiam  exterminio  civitatis,  quae  esset 
illico  complananda,  et  vocem  sanguinis  ad  se  clamantis 
audiret  ; 

4.  Memoraretur  quoque  iniquissimas  mortes  parvulo- 
rum  innocer.tum,  et  blasphemias  nomini  suo  illatas,  et 
indignaretur  super  his. 

<,.  At  Machabasus,  congregata  multitudine,  intolerabilis 
gentibus  efliciebatur  ;  ira  enim  Domini  in  misericordiam 
conversa  est. 

6.  Et  superveniens  castellis  et  civitatibus  improvisus 
succendebat  eas  ;  et  opportuna  loca  occupans,  non  pau- 
cas  hostium  strages  dabat; 

7.  Maxime  autem  noctibus  ad  hujuscemodi  excursus 
ferebatur,  et  fama  virtutis  ejus  ubique  difîundebatur. 


1.  Cependant  Judas  Maccabée, et  ceux  qui  étaient  avec 
lui,  entraient  secrètement  dans  les  châteaux,  et  faisaient 
venir  leurs  parents  et  leurs  amis  ;  et,  prenant  avec  eux 
ceux  qui  étaient  demeurés  fermes  dans  la  religion  judaï- 
que, ils  attirèrent  à  eux  jusqu'à  six  mille  hommes. 

2.  Et  ils  invoquaient  le  Seigneur,  afin  qu'il  regardât 
favorablement  son  peuple,  que  tout  le  monde  foulait 
aux  pieds;  qu'il  fût  touché  de  compassion  pour  son  tem- 
ple, qui  était  profané  par  les  impies  ; 

5.  Qu'il  eût  pitié  des  ruines  de  la  viile,  qui  allait  être 
rasée  ;  et  qu'il  écoutât  la  voix  du  sang  qui  criait  jusqu'à 
lui  ; 

4.  Qu'il  se  souvînt  aussi  des  meurtres  si  injustes  des 
petits  innocents,  et  des  blasphèmes  que  l'on  avait  pro- 
férés contre  son  nom  ;  et  qu'il  conçût  de  l'indignation 
contre  cet  excès. 

<,.  Maccabée  ayant  donc  rassemblé  près  de  lui  beau- 
coup de  gens,  devenait  formidable  aux  gentils  ;  car  la 
colère  du  Seigneur  se  changea  alors  en  miséricorde. 

6.  Il  surprenait  tout  d'un  coup  les  villages  et  les  villes, 
et  il  les  brûlait  ;  et,  se  saisissant  des  lieux  les  plus  avan- 
tageux, il  taillait  en  pièces  un  grand    nombre  d'ennemis. 

7.  Il  faisait  principalement  ces  courses  pendant  la 
nuit;  et  le  bruit  de  sa  valeur  se  répandait  de  toutes 
parts. 


COMMENTAIRE 


jh  1.  In  castella.  Le  grec  (1)  :  Dans  tes  pil- 
lages. Voyez  pour  plus  de  détails  le  livre  premier 
des  Maccabées,  chap.  m, 

y.  3.  Vocem  sanguinis  ad  se  clamantis  audi- 
ret. Le  sang  de  tant  d'Israélites  misa  mort,  d'une 
manière  si  cruelle.  La  voix  du  sang  d'Abel,  cria 
vers  le  ciel  (2),  de  même  que  celle  du  sang  de 
Jésus-Christ  en  notre  faveur  (5).  C'est  un  hé- 
braïsme  qui  est  passé  dans  un  certain  nombre  de 
langues. 

y.  5.  Ira  enim  Domini  in  misericordiam  con- 
versa est.  Le  dernier  des  martyrs  avait  déclaré 
en  parlant  à  Antiochus  que  la  colère  du  Tout- 
Puissant,  qui  était  tombée  sur  tout  son  peuple,  de- 
vait finir  à  sa  mort  et  à  celle  de  ses  frères  (1).  Et 
c'est  l'accomplissement  de  cette  prédiction,  qui 
est  marquée  en  ce  lieu.  Car,  en  effet,  ni  Antiochus 
ni  ses  successeurs,  n'eurent  plus  depuis  cette  épo- 


que, la  liberté  de  fouler  aux  pieds  comme  aupa- 
ravant, le  peuple  juif,  et  de  profaner  impunément 
le  temple  du  Seigneur.  Au  contraire,  leurs  armées 
furent  presque  toujours  vaincues  par  un  petit 
nombre  de  Juifs  conduits  par  Judas  et  par  ses  frè- 
res ;  et  la  puissance  du  Dieu  d'Israël,  qu'ils  avaient 
soin  d'invoquer,  et  en  laquelle  ils  mettaient  leur 
principale  confiance,  éclatait  publiquement  dans 
les  victoires  miraculeuses  qu'il  leur  faisait  rem- 
porter sur  leurs  ennemis,  comme  on  l'a  vu  déjà 
au  premier  livre  et  qu'on  le  verra  encore  dans  la 
suite  de  celui-ci. 

Dieu  fit  donc  connaître  aux  Juifs,  en  changeant 
ainsi  tout  d'un  coup  sa  colère  en  miséricorde,  que, 
forcé  de  les  traiter  selon  la  rigueur  de  sa  justice, 
lorsqu'ils  l'avaient  irrité  par  leurs  crimes,  il  s'était 
laissé  fléchir  par  leur  pénitence  et  par  leurs  priè- 
res, et   toucher   de   compassion  pour  son  temple, 


(1)  E't;  là;  xcô[j.a;. 

(2)  Gènes,  iv.  10. 


(i)  Heb.  xii.  24. 
(4)  11.  Macc.  vu.  j8. 


204 


II.—  MACCABÉES.—  VIII.-  INVASION   DE   NICANOR 


8.  Videns  autem  Philippus  paulatim  virum  ad  prof.ec- 
tum  venire,  ac  (requentius  res  ei  cedere  prospère,  ad 
Ptolemaeum,  ducem  Cœlesyriaî  et  Phœnicis  scripsit,  ut 
auxilium   ferret  régis  negotiis. 


0.  At  ille  velociter  misit  Nicanorem  Patrocli,  de  pri- 
moribus  amicum,  dalis  ei  de  permistis  gentibus,  armatis 
non  minus  viginti  millibus,ut  universum  Judœorum  genus 
deleret,  adjunctoei  et  Gorgia,  viro  militari,  et  in  bellicis 
rébus  experientissimo. 

io.  Constituit  autem  Nicanor,  ut  régi  tributum,  quod 
Romanis  erat  dandum  :  duo  millia  talentorum,  de  capti- 
vitate  Judasorum  suppleret; 

il.  Statimque  ad  maritimas  civitates  misit,  convocans 
ad  cocmptionem  judaicorum  mancipiorum,  promittens 
se  nonaginta  mancipia  talento  distracturum,  non  respi- 
ciens  ad  vindictam,  quas  eum  ab  Omnipotente  esset 
consecutura. 

12  Judas  autem  ubi  comperit,  indicavit  his  qui  secum 
erunt  Judseis,  Nicanoris  adventum. 

i?.  Ex  quibus  quidam  formidantes,  et  non  credentes 
Dei  justifias,  in  fugam  vertebantur  ; 


8.  Alors  Philippe,  voyant  le  progrès  que  ce  grand 
homme  faisait  de  jour  en  jour,  et  le  bonheur  de  ses  en- 
reprises  qui  réussissaient  presque  toujours,  écrivit  à 
Ptolémée,  qui  commandait  dans  la  Ccelé-Syrie  et  dans 
la  Phénicie.  de  lui  envoyer  du  secours  pour  fortifier  le 
parti  du  roi. 

9.  Ptolémée  lui  envoya  aussitôt  Nicanor,  fils  de  Pa- 
trocle,  l'un  des  premiers  de  la  cour,  et  son  ami,  à  qui  il 
donna  environ  deux  mille  hommes  de  guerre  de  diverses 
nations  afin  qu'il  exterminât  tout  le  peuple  juif;  et  il  lui 
adjoignit  Gorgias,  brave  capitaine  et  homme  d'une  grande 
expérience  dans  les  choses  de  la  guerre. 

10.  Nicanor  résolut  de  payer  le  tribut  de  deux  mille 
talents  que  le  roi  devait  aux  Romains,  avec  l'argent  qui 
reviendrait  de  la  vente  des  esclaves  juifs. 

il.  Il  envoya  donc  en  même  temps  vers  les  villes  ma- 
ritimes, pour  inviter  les  marchands  à  venir  acheter  des 
esclaves  juifs,  promettant  de  leur  en  donner  quatre- 
vingt-dix  pour  un  talent,  sans  faire  réflexion  sur  la  ven- 
geance du  Tout-Puissant  qui  devait  bientôt  tomber 
sur  lui. 

12.  Judas  ayant  appris  l'arrivée  de  Nicanor,  en  avertit 
les  Juifs  qui  l'accompagnaient. 

ij.  Quelques-uns  étant  saisis  de  crainte,  et  n'ayant  pas 
de  confiance  en  la  justice  de  Dieu,  prirent  la  fuite. 


COMMENTAIRE 


lorsqu'ils  s'étaient  humiliés,  et  qu'ils  l'avaient 
invoqué  comme  leur  Dieu.  Car  lorsqu'il  punit  les 
peuples,  c'est  pour  leur  faire  miséricorde,  en  sol- 
licitant leur  conversion,  et  non  la  mort  des  pé- 
cheurs. 

î.  8.  Videns  autem  Philippus,  ad  Ptolem/eum 
ducem  Cœlesyri/e  scripsit.  Ce  Philippe  est  celui 
qui  avait  été  laissé  pour  gouverneur  de  Jérusalem, 
deux  ans  auparavant  (i).  Lorsqu'il  vit  que  Judas 
avait  mis  en  déroute  les  armées  d'Apollonius, 
gouverneur  de  la  Samarie  (2),  et  de  Séron,  gou- 
verneur de  la  Ccelé-Syrie  (  j )  ;  il  envoya  vers  Pto- 
lémée, fils  de  Dorymini  (4),  pour  le  prier  d'en- 
voyer promptement  dans  la  Judée,  des  forces 
capables  d'arrêter  les  progrès  de  Judas  Macca- 
bée,  qui  commençait  à  devenir  très  redoutable. 

f.  9.  Nicanorem  Patrocli.  Voyez  ce  qui  est 
dit  1.  Macc.  111.  38.  39.  On  lui  donne  ici  vingt 
mille  hommes  qui  faisaient  partie  des  quarante 
mille,  dont  était  composée  l'armée  envoyée  con- 
tre la  Judée.  Ces  troupes  étaient  commandées  par 
Ptolémée,  par  Nicanor  et  par  Gorgias. 

f.  10.  Constituit  Nicanor  ut  régi  tributum, 
quod  Romanis  erat,  etc.  Antiochus  le  Grand, 
père  d'Antiochus  Épiphane,  ayant  été  vaincu  par 
les  Romains,  fut  obligé  de  payer  la  somme  de 
quinze  mille  talents,  pour  les  frais  de  la  guerre  ; 
cinq  cents  comptant,  deux  mille  cinq  cents  après 
la  signature  de  la  paix,  et  les  douze  mille  restants 
dans  l'espace  de  douze  ans,  mille  talents  chaque 
année  (5).  Antiochus    Épiphane    était   chargé  du 


reste  de  cette  dette,  comme  héritier  d'Antiochus 
le  Grand  :  ses  prodigalités  l'avaient  mis  en  retard  ; 
il  devait  encore  deux  mille  talents  aux  Romains,  il 
était  parti  lui-même  de  Syrie,  pour  aller  amasser  de 
l'argent  dans  les  provinces  au-delà  de  l'Euphra- 
te  (6).  Nicanor  se  natta  de  fournir  au  roi  deux 
mille  talents,  de  la  vente  des  Juifs  qu'il  prendrait 
à  la  guerre.  Il  s'agit  probablement  ici  du  talent 
attique  évalué  à  5.560  fr.  90. 

jiï.  1 1.  Ad  maritimas  civitates  misit.  77  envoya 
dans  les  villes  maritimes,  pour  inviter  les  marchands 
à  venir  acheter  des  esclaves  juifs  ;  il  leur  promit 
de  les  leur  donner  à  bon  compte  :  quatre-vingt- 
dix  pour  un  talent.  Les  esclaves  de  choix  se 
payaient  jusqu'à  un  talent  par  personne  ;  et  Josè- 
phe  (7)  assure  que  le  jeune  Hyrcan,  fils  de  Joseph, 
en  acheta  deux  cents  pour  les  présenter  au  roi  et 
à  la  reine  d'Egypte,  cent  jeunes  garçons  et  autant 
de  jeunes  filles,  au  prix  d'un  talent  chacun.  On 
peut  juger  par  là  du  mépris  que  Nicanor  faisait 
des  Juifs,  en 'offrant  quatre-vingt-dix  hommes, 
pour  un  talent.  Voyez  ce  qu'on  a  dit,  1.  Macc. 
m.  41. 

f.  13.  Non  credentes  Dei  justitiœ.  Ils  furent 
donc  sa'sis  de  crainte,  parce  qu'ils  manquaient  de 
confiance  en  Dieu,  et  qu'ils  ne  comptaient  pas  sur 
sa  justice,  qui,  étant  fléchie  par  leurs  larmes,  ne 
pouvait  manquer  de  se  faire  sentir  à  leurs  enne- 
mis. Judas,  au  contraire,  envisageait  cette  guerre 
comme  celle  du  Seigneur  ;  il  méprisait  le  nombre 
et    l'orgueil    de    ces   infidèles,  parce  qu'il  savait 


(1)  11.  Macc.  v.  2j. 

(2)  1.  Macc.  ni.  10.  11.  iî.  -  Joseph.  Antiq.  xn.  c.  10. 
(j)  Ibid.  1.  Macc.  m.  ij...  24.   Vide  Usscr.  ad  an.  j3}8- 


(4)  Vide  11.  Macc.  iv.  45.  —  (5)  Vide  Liv.  t.  xxxvn. 
(6)  1.  Macc.  m.  J2--  37- 
(7}  Joseph.  Antiq.  t.  XII.  c.  4. 


II.  —  MACCABÉES.  —  VIII.  -  JUDAS  MACCABÉE 


205 


14.  Alii  vero  si  quid  eis  supererat  vendebant,  simulque 
Dominum  deprecabantur  ul  eriperet  eos  ab  impio  Nica- 
ivore,  qui  eos,  priusquam  continus    veniret,    vendiderat; 

15.  Et  si  non  propter  eos,  propter  testamentum  tamen 
quod  erat  ad  patres  eorum,  et  propter  invocationem 
sancti  et  magnifici  nominis  ejus  super  ipsos. 

16.  Convocatis  autem  Machabœus  septem  millibus  qui 
cum  ipso  erant,  rogabat  ne  hoslibus  reconciliarentur, 
neque  metuerent  inique  venientium  adversum  se  hostium 
multitudinem,  sed  fortiter  contenderent, 

17.  Ante  oculos  habentes  contumeliam  quas  loco  sancto 
ab  his  injuste  esset  illata,  itemque  et  ludibrio  habit» 
civitatis  injuriam,  adhuc  etiam  veterum  instituta  convulsa. 

18.  Nam  i 11 i  quidem  armis  confidunt,  ait,  simul  et  au- 
dacia;  nos  autem  in  omnipotente  Domino,  qui  potest  et 
venientes  adversum  nos,  et  universum  mundum  uno  nutu 
delere,  confidimus. 

19.  Admonuit  autem  eos  et  de  auxiliis  Dei,  quaî  facla 
sunt  erga  parentes, et  quod  sub  Sennacherib  centum  octo- 
gintaquinque  miUia  perierunt  ; 

20.  Et  de  praslio  quod  eis  adversus  Galatas  fuit  in 
Babylonia,  ut  omnes,  ubi  ad  rem  ventum  est,  Macedo- 
nibus  sociis  hassitantibus,  ipsi  sex  millia  soli  peremerunt 
centum  vigint i  millia,  propter  auxilium  illis  datum  de 
ccclo,  et  bénéficia  pro  his  plurima  consecuti  sunt. 

21.  His  verbis  constantes  effecti  sunt,  et  pro  legibus  et 
patria  mori  parati. 


14.  Les  autres  vendaient  tout  ce  qui  pouvait  leur  être 
resté;  et  en  même  temps  ils  conjuraient  le  Seigneur  de 
les  délivrer  de  l'impie  Nicanor  qui,  avant  même  de  s'être 
approché  d'eux,  les  avait  vendus  ; 

15.  Et  de  vouloir  bien  le  faire,  sinon  pour  l'amour 
d'eux-mêmes,  au  moins  en  considération  de  l'alliance 
qu'il  avait  faite  avec  leurs  pères,  et  de  l'honneur  qu'ils 
avaient  de  porter  son  nom  si  grand  et  si  saint. 

16.  Maccabée  ayant  fait  assembler  les  sept  mille  hom- 
mes qui  étaient  avec  lui,  les  conjura  de  ne  point  se  récon- 
cilier avec  leurs  ennemis,  et  de  ne  point  craindre  cette 
multitude  d'adversaires  qui  venaient  les  attaquer  injuste- 
ment, mais  de  combattre  avec  grand  courage, 

17.  Ayant  devant  les  yeux  la  profanation  si  indigne 
dont  ils  avaient  déshonoré  le  lieu  saint,  les  insultes  et 
les  outrages  qu'on  avait  faits  à  la  ville,  et  la  violation 
des  ordonnances  des  anciens. 

18.  Car  pour  eux,  ajoutait-il,  ils  se  fient  sur  leurs  ar- 
mes et  sur  leur  audace  ;  mais  pour  nous,  nous  mettons 
notre  confiance  dans  le  Seigneur  tout-puissant,  qui  peut 
renverser  par  un  clin  d'œil,  et  tous  ceux  qui  nous  atta- 
quent, et  le  monde  entier. 

19.  Il  les  fit  souvenir  aussi  des  secours  que  Dieu  avait 
autrefois  donnés  à  leurs  pères,  et  des  cent  quatre-vingt- 
cinq  mille  hommes  qui  furent  tués  du  temps  de  Senna- 
cherib ; 

20.  Et  de  la  bataille  qu'ils  avaient  livrée  contre  les 
Galates  en  Babylonie  :  Ils  avaient  attaqué  avec  leurs 
alliés,  mais  réduits  à  six  mille  par  l'hésitation  des  Macé- 
doniens, ils  avaient  tué  cent  vingt  mille  hommes,  à  cause 
du  secours  qu'ils  avaient  reçu  du  ciel,  et  avaient  ensuite 
obtenu  pour  récompense  de  grandes  faveurs. 

21.  Ces  paroles  les  remplirent  de  courage;  en  sorte 
qu'ils  étaient  prêts  à  mourir  pour  leurs  lois  et  pour  leur 
patrie. 


COMMENTAIRE 


qu'un  million  d'hommes  qui  osent  s'attaquer  à 
Dieu,  ne  sont  devant  lui  que  comme  une  armée 
de  moucherons  qu'il  peut  dissiper  en  un  instant 
par  le  souffle  de  sa  bouche.  La  foi  donc  était  ce 
qui  le  distinguait,  lui  et  ses  gens,  de  ces  autres 
J  uifs  timides.  Ces  derniers,  prenant  la  fuile,  étaient 
regardés  dès  ce  moment  comme  vaincus  par  leurs 
ennemis;  mais  Judas  demeurant  ferme  par  la  con- 
fiance qu'il  avait  en  Dieu,  s'assurait  en  même 
temps  la  victoire,  et  se  mettait  en  état  de  faire 
fuir  ses  adversaires.  Tel  fut  alors,  et  sera  durant 
tout  le  cours  des  siècles,  le  vrai  caractère  et  des 
bons  et  des  méchants  ;  les  premiers  sont  toujours 
victorieux  par  cette  foi  pratique  dont  saint  Paul 
relève  lé  mérite  dans  tous  les  justes  de  la  loi  an- 
cienne (1)  ;  et  les  derniers  sont  toujours  vaincus 
par  un  effet  de  cette  vaine  confiance  qu'ils  ont  en 
eux-mêmes,  et  qui  les  rend  lâches  et  timides  dans 
le  combat. 

f.  16.  Rogabat  ne  hostibus  reconciliarentur. 
//  les  conjura  de  ne  point  se  réconcilier  avec  leurs 
ennemis,  de  n'entrer  en  aucune  composition  avec 
eux,  persuadés  qu'ils  ne  feraient  jamais  de  bonne 


foi  aucun  traité.  Le  grec(2j:  //  les  pria  de  ne 
point  s'effrayer  à  cause  du  grand  nombre  de  leurs 
ennemis. 

y.  20.    ET  DE  PR/ELIO  QUOD  EIS  ADVERSUS  GALA- 

tas  fuit  in  Babylonia.  Le  grec  est  plus  cir- 
constancié ;  il  porte  que  les  Galates  vinrent  atta- 
quer les  Juifs  dans  la  Babylonie  ;  l'armée  des 
Juifs  n'était  que  de  huit  mille  hommes  (3),  sou- 
tenus de  quatre  mille  Macédoniens  ;  ces  derniers, 
hésitèrent  et  ne  prirent  aucune  part  au  combat  ; 
les  huit  mille  Juifs  seuls  défirent  cent-vingt  mille 
Galates.  Le  syriaque  lit  que  l'armée  des  Galates 
était  de  quatre-vingt  mille  hommes,  outre  quarante 
mille  Macédoniens,  qui  étaient  venus  avec  eux 
comme  alliés  ;  les  Juifs,  réduits  à  une  poignée  de 
monde,  défirent  cette  grande  armée.  L'Écriture 
ne  nous  dit  pas,  ni  quand,  ni  à  quelle  occasion 
ceci  arriva  ;  et  les  exégètes  jusqu'ici  n'ont  encore 
pu  découvrir  à  quoi  l'on  doit  rapporter  cette 
guerre. 

Onsaitseulement  que,  sous  le  règne  d'Antiochus 
le  Grand,  les  Galates  étaient  très  puissants  en 
Asie  ;  ces  peuples,  au  moins    en  partie,  s'étaient 


fi)  Hebr.  xi. 

(2)  napsxocXei  pj  xatarcXayrjvai  xoù;  JtoXsuiou?. 


(j)  OV.xo/.tcr/iXiot.  Ms.  Alex.  E'Çout<j£i'Xiot,    Six    mille, 
comme  la  Vulgate. 


2c6 


II.  —   MACCABÉES.  —  VIII.  -  CAMPAGNE  CONTRE  NICANOR 


22.  Constituit  itaque  fratrcssuos  duces  utrique  ordini  : 
Simonem,  et  Josephum,  et  Jonathan,  subjectis  unicuique 
millenis  et  quingentenis. 

2j.  Ad  hoc  etiam  ab  Esdra  lecto  illis  sancto  libro,  et 
dalo  signo  adjutorii  Dei,  in  prima  acie  ipse  dux  commi- 
sit  cum  Nicanore. 


22.  Il  divisa  son  armée  en  plusieurs  corps,  et  en  par- 
tagea le  commandement  avec  ses  frères,  Simon,  Joseph 
et  Jonathas,  chacun  d'eux  ayant  sous  soi  quinze  cents 
hommes. 

2j.  Esdras  leur  ayant  lu  aussi  le  livre  saint,  le  général, 
après  les  avoir  assurés  du  secours  de  Dieu,  se  mit  lui- 
même  à  la  tête  de  l'armée,  et  marcha  contre  Nicanor. 


COMMENTAIRE 


joints  à  ce  prince,  contre  les  Romains  ;  et  leurs 
forces  étaient  alors  si  grandes,  qu'après  la  victoire, 
le  consul  Cneius  Manlius  ne  crut  pas  pouvoir 
assurer  la  paix  dans  l'Asie  ,  tant  qu'une  nation 
si  belliqueuse  et  si  remuante  ne  serait  pas  domp- 
tée. Ils  avaient  alors  trois  rois  qui  les  gouvernaient, 
et  la  nation  était  composée  de  trois  peuples  dif- 
férents ;  les  Tolistoboïens,  les  Tectosages  et  les 
Trocmes.  Ils  furent  vaincus  et  obligés  de  de- 
meurer dans  leurs  terres,  sans  en  sortir  pour 
faire  des  courses  sur  les  pays  voisins  (  i  ).  Mais  ils 
observèrent  mal  ces  conditions  :  ils  ne  purent  se 
contenir  dans  les  bornes  qu'on  leur  avait  prescri- 
tes. Dans  le  temps  même  qu'Antiochus  persécu- 
tait les  Juifs,  ils  attaquèrent  le  roi  Eumène  jusque 
dans  son  royaume  (2).  Il  est  assez  croyable  que 
l'afTaire  dont  on  nous  parle  ici,  fut  quelque  entre- 
prise de  ces  Galates  sur  la  Babylonie.  L'on  sait 
que  les  Juifs,  depuis  Alexandre  le  Grand,  servirent 
ordinairement  dans  les  armées  des  rois  de  Syrie. 
Les  Macédoniens  exprimés  ici,  sont  les  soldats 
grecs  ou  syriens  chargés  de  défendre  la  Babylonie, 
avec  d'autres  troupes  juives. 

D'autres  exégètes  croient  que  cette  guerre 
arriva  sous  le  règne  d'Antiochus  Soter,  parce  que 
ce  prince,  selon  que  l'écrit  un  historien  (3),  re- 
poussa les  Galates  qui  étaient  venus  fondre  de 
l'Europe  dans  l'Asie.  Et  ce  qui  est  dit  ici,  que  les 
Juifs, à  la  suite  de  cette  fameuse  victoire,  obtinrent 
pour  récompense  de  grandes  faveurs,  s'accorde 
avec  ce  que  plusieurs  historiens,  môme  profanes, 
ont  remarqué  que  des  honneurs  et  des  privilèges 
très  considérables  leur  furent  accordés  tant  par 
ce  prince  que  par  son  fils. 

Quoi  qu'il  en  soit,  rien  ne  paraissait  plus  propre 
à  affermir  le  courage  des  sept  mille  hommes  qui 
accompagnaient  Judas  Maccabée,  que  cet  exem- 
ple qu'il  leur  rapporta  de  sept  mille  Juifs  qui 
avaient  tué  cent-vingt  mille  hommes  par  [le  secours 
qu'ils  avaient  reçu  du  ciel  :  et  c'était  avec  raison 
que  Judas  conjurait  ses  compagnons,  en  souvenir 
de  ce  grand  miracle,  de  ne  point  craindre  la  multi- 
tude des  ennemis  qui  venaient  les  attaquer  si  injus- 
tement ;  parce  que  Dieu  les  soutiendrait  et    ven- 


gerait par  leurs  mains  les  profanations  de  son  saint 
temple. 

Quelle  foi  dans  ce  grand  homme,  lorsque  mé- 
prisant la  vaine  confiance  que  ses  ennemis  avaient 
en  leurs  armes  et  en  leur  audace,  il  engageait  les 
siens  à  regarder  tout  cet  appareil  d'une  armée  si 
imposante  comme  le  jouet  de  la  toute-puissance  du 
Seigneur,  qui  pouvait,  dit- il,  en  un  clin  a"  ce  il 
renverser  même  le  monde  entier  !  On  est  assez  con- 
vaincu, en  général,  du  pouvoir  infini  de  Dieu,  et 
de  l'impuissance  de  tous  les  hommes  unis  ensem- 
ble, s'il  était  possible,  contrelui  ;  mais  l'on  manque 
trop  souvent  à  faire  l'application  de  cette  grande 
vérité  aux  différentes  occasions  qui  se  présentent. 
Or  il  n'appartient  qu'à  'la  foi  et  à  une  foi  non 
chancelante  de  la  faire  et  non  au  raisonnement, 
qui  trompe  presque  toujours  quand  il  s'agit  de  faire 
passer  de  l'esprit  au  cœur  ces  vérités  qui,  pour 
être  utiles,  doivent  passer  du  domaine  de  la 
théorie  dans  la  pratique. 

v.  22.  Constituit  fratres  suos  duces  utri- 
que ordini.  11  partagea  son  armée  en  quatre 
corps,  composés  chacun  de quinzeeents  hommes  ; 
Judas  et  trois  de  ses  frères,  Simon,  Joseph  et 
Jonathas  commandaient  ces  quatre  corps.  Le 
nom  de  Joseph  ne  se  trouve  point  ailleurs  au 
nombre  des  frères  de  Judas.  Des  exégètes  (4) 
croient  que  c'est  le  même  que  Jean  Gaddis  (<)  ; 
d'autres  que  c'est  Eléa\ar, surnommé  Abaron  (6), 
qui  fut  dans  la  suite  écrasé  sous  un  éléphant  (7). 
D'autres  aiment  mieux  dire  que  Joseph  était  sim- 
plement parent,  ou  beau-frère  de  Judas.  Si 
Éléazar,  dont  il  est  parlé  dans  le  grec  au  verset 
suivant,  est  le  frère  de  Judas,  il  est  visible  que  ce 
ne  peut-être  que  lui  qui  est  marqué  sous  le  nom 
de  Joseph. 

f.  25.  Ab  Esdra  lectio  illis  sancto  libro. 
On  ne  voit  pas  dans  l'Écriture,  que  c'ait  été  la 
coutume  dans  Israël  de  lire  l'Écriture  avant  le 
combat;  mais  Judas  avait  assemblé  son  armée  à 
Maspha,  comme  il  l'aurait  fait  dans  le  temple,  il 
l'avait  sanctifiée  par  le  jeûne  et  par  la  prière  ;  il  y 
a  beaucoup  d'apparence  que  pour  encourager  ses 
soldats,  il  leur  fit  lire  quelque  passage  choisi  des 


(t)  Vsser.  ad  an.  M.  jSi$.  et  J817. 
(2)  Usser.  ad  an.  $857. 
U)  Appian.  in  Syriac. 


(4)  Serar.  et  ex  eo  Tirin. 

(5)1.  Macc.  11.  2. 

(6)  Ibid.  f.  5.  -  D' Ailloli, 


(7)  i.  Macc.  vi.  4J. 


II.  -   MACCABÉES.  -  VIII.  -  VICTOIRE   DES  JUIFS 


207 


2\.  Et  facto  sibi  adjutore  Omnipotente,  interfecerunt 
super  novem  millia  hominum  ;  majorem  autem  pariem 
exercitus  Nicanoris  vulneribus  debilem  factam  fugere 
compulerunt. 

25.  Pecuniis  vero  eorum,  qui  ad  emptionem  ipsorum 
vénérant,  sublatis,  ipsos  usquequaque  pcsecuti  sunt; 

26.  Sed  reversi  sunt  hora  conclusi,  nain  erat  ante  sab- 
batum  :  quam  ob  causam  non  perseveraverunt  insequentes. 

27.  Arma  autem  ipsorum  et  spolia  congregantes,  sab- 
batum  agebant,  benedicentes  Dominum  qui  liberavit  eos 
>n  isto  die,  misericordiœ  initium  stillans  in  eos. 


28.  Post  sabbatum  vero,  debilibus,  et  orphanis,  et 
viduis  diviserunt  spolia  ;  et  residua  ipsi  cum  suis  habuere. 

29.  His  itaque  gestis,  et  communiier  ab  omnibus  facta 
obsecratione,  miseiicordem  Dominum  postulabani  ut  in 
finem  servis  suis  reconciliaretur. 

jo.  Et  ex  his  qui  cum  Timotheo  et  Bacchide  erant 
conira  se  contendentes,  super  viginti  millia  interfecerunt  ; 
et  munitiones  excelsas  obtinucrunt,  et  plures  praedas 
diviserunt,  a?quam  portionem  debilibus,  pupillis  et  viduis, 
sed  et  senioribus  facientes. 


2.4.  Et  le  Seigneur  tout-puissant,  s'étant  déclaré  en 
leur  faveur,  ils  tuèrent  plus  de  neuf  mille  hommes;  et  la 
plus  grande  partie  de  l'armée  de  Nicanor  s'étant  allai- 
blie  par  les  blessures  qu'elle  avait  reçues,  ils  la  forcè- 
rent de  prendre  la  fuite. 

2Ç.  Ils  prirent  tout  l'argent  de  ceux  qui  étaient  venus 
pour  les  acheter,  et  les  poursuivire/it  bien  loin  ; 

26.  Mais  ils  revinrent,  se  voyant  pressés  de  l'heure, 
parce  que  c'était  la  veille  du  sabbat  ;  ce  qui  les  empêcha 
de  continuer  à  les  poursuivre. 

27.  Ayant  ensuite  ramassé  les  armes  et  les  dépouilles 
des  ennemis,  ils  célébrèrent  le  sabbat,  en  bénissant  le 
Seigneur,  qui  les  avait  délivrés  en  ce  jour-là  et  qui  avait 
répandu  sur  eux  comme  les  premières  gouttes  de  la  rosée 
de  sa  miséricorde. 

28.  Après  le  «abbat,  ils  firent  part  des  dépouilles  aux 
infirmes,  aux  orphelins  et  aux  veuves;  et  ils  retinrent  le 
reste  pour  eux  et  pour  ceux  qui  leur  appartenaient. 

20.  Ils  firent  ensuite  la  prière  tous  ensemble,  en  con- 
jurant le  Seigneur  très  miséricordieux  de  se  réconcilier 
pour  toujours  avec  ses  serviteurs. 

50.  lis  tuèrent  dans  la  suite  plus  de  vingt  mille  hom- 
mes des  gens  de  Timothée  et  de  Bacchide,  qui  combat- 
taient contre  eux  :  ils  se  rendirent  maîtres  de  diverses 
places  fortes  ;  et  ils  firent  un  grand  butin,  qu'ils  partagè- 
rent également  entre  les  malades,  les  orphelins,  les  veu- 
ves et  même  les  vieillards. 


COMMENTAIRE 


livres  saints.  Peut-être  aussi  qu'on  lut  seulement 
l'endroit  du  Deutéronome  (1),  où  il  est  dit  que 
les  nouveaux  mariés,  ceux  qui  ont  bâti  une  nou- 
velle maison,  qu'ils  n'ont  pointencore  habitée. etc, 
peuvent  se  retirer  dans  leurs  maisons.  En  effet, 
dans  le  premier  livre  des  Maccabées(2),  il  est 
marqué  expressément  que  Judas  fit  publier  cette 
ordonnance  à  la  tête  de  son  armée,  avant  le  com- 
bat. Le  grec  et  le  syriaque,  lisent  Eléa^ar,  au  lieu 
d'Esdras,  et  on  croit  avec  assez  de  fondement, 
que  c'était  Éléazar,  frère  de  Judas.  11  était  prêtre 
et  la  fonction  de  lire  la  Bible  lui  convenait  en  cette 
qualité. 

Il  y  en  a  qui  joignent  le  grec  à  ce  qui  précède 
de  la  sorte  (3)  :  Il  établit  sur  chaque  corps  de  ses 
troupes,  Simon,  Joseph,  Jonathan  et  Eléazar  ;  et 
après  avoir  lu  le  livre  Saint,  et  avoir  donné  le 
signal...  Mais  nous  préférons  la  leçon  de  la  Vul- 
gate,  qui  est  semblable  au  syriaque  et  à  laquelle 
on  peut  rapporter  l'expression  grecque.  Gro- 
tius  (4),  dit  que  Judas  lui-même  lut  le  récit  de  la 
mort  d'Éléazar,  le  saint  vieillard  de  ce  nom,  car 
l'autre  Eléazar  ne  mourut  que  sous  le  règne  du 
jeune  Antiochus  Eupator,  successeur  d'Épipha- 
ne(5). 


Dato  signo  adjutorii  Dei.  C'était  comme  le 
mot  d'ordre,  auquel  ses  troupes  devaient  se  re- 
connaître. Nous  lisons  (6)  que,  dans  une  autre 
occasion,  Judas  leur  donna  pour  mot  d'ordre  :  La 
victoire  de  Dieu. 

y.  24.  Super  novem  mili.ia  hominum.  Il  en 
demeura  sur  place  trois  mille  (7)  :  le  reste  fut  tué 
dans  la  déroute. 

f.  26.  Reversi  sunt  hora  conclusi.  Le  sabbat 
commençait  au  soir, il  s  voulurent  être  au  camp  avant 
que  la  fête  commençât  :  il  paraît  même  que  leur 
dessein  était  de  recueillir  les^  dépouilles  avant  la 
nuit,  verset  27. 

f.  28.  Debilibus,  et  orphanis,  et  viduis  divi- 
serunt spolia.  Cela  n'était  point  ordonné  par  la 
loi:  elle  (8)  voulait  seulement  qu'on  partageât 
également  les  dépouilles  entre  ceux  qui  avaient 
assisté  au  combat,  et  ceux  qui  étaient  demeurés 
pour  garder  le  bagage.  Judas  fait  un  acte  de 
subrogation,  suivant  plutôt  l'esprit  (9)  que  la 
lettre  de  la  loi. 

y.  30.  Ex  his  qui  cum  Timotheo  et  Bacchide 

ERANT,    SUPER  VIGINTI  MILLIA  INTERFECERUNT.     On 

ne  connaît  pas  les  particularités  de  cette  guerre, 
contre  Timothée  et  Bacchide  ;  l'Écriture  en   fait 


(1)  Deut.  xx.  6.  7.  8. 
1    (2)  1.  Macc.  va,  56. 

(j)  E"ti  Se  /.ai  E'XeàÇapov  7capavayvûù;  tJjv  îïpàv  pVSXov. 
Dom  Calmet  croit  que  l'auteur  a  mis  ^apay^yvoù;,  au 
lieu  de  sxeXeiJse  rcapava-Yivoisxeiv,  comme  s'il  y  avait  en 
hébreu  N>-ipn 


(4)  Grot.  le  g  il  :  E"ti  Sa  xai  E'X£a£apou  KapavaY^ûù;  Tr,v 
ÎEpàv  fjt'SXov. 

(5)  Vide  Usscr.  adan.  M.  J841.  Vide  et  1.  Macc.  vi.  ji.?2. 

(6)  11.  Macc.  xni.  15. 

(7)  1.  Macc.  iv.  1 5. 

(8)  Vide  Num.  xxxi.  27.  et  1.  Rcg.  xxx.  24.  25. 
{<))  Deut.  xiv.  29. 


2o8 


I._  MACCABÉES.-VIII.-  IMPORTANCE  DE  CETTE  VICTOIRE 


>I  Et  cum  arma  eorum  diligenter  collegissent,  omnia 
composuerunt  in  locis  opportunis  :  residua  vero  spolia 
Jerolosymam  detulerunt  ; 

'2.  Et  Philarchen,  qui  cum  Timotheo  erat,  înterfece- 
runt,'  virum  scelestum,  qui  in  multis  Judaeos  adlixerat. 

,5  Et  cum  epinicia  agerent  Jerosolymis.eum  qui  sacras 
januas  incenderat,  id  est,  Callisthenem,  cum  in  quoddam 
domicilium  refugisset,  ir.cenderunt,  digna  ei  mercede  pro 
impietatibus  suis  reddita. 


54.  Facinorosissimus  autem  Nicanor,  qui  mille  nego- 
tiantes  ad  Judaeorum  venditionem  adduxerat, 

jt  Humiliatus,  auxilio  Domini,  ab  his  quos  nullos  exis- 
timaverat,  deposita  veste  gloriaa,  per  Mediterraneam  fu" 
giens,  solus  venit  Antiochiam,  summam  infehcitatem  de 
interitu  sui  exercitus  consecutus. 


j6.  Et  qui  promiserat  Romanis  se  tributum  restituere 
de'captivitate  Jerosolymorum,  praîdicabat  nunc  protec- 
torem  Deum  habere  Judaeos,  et  ob  ipsum  invulnerabiles 
esse,  eo  quod  sequerentur  leges  ab  ipso  constitutas. 


31.  Ils  ramassèrent  avec  soin  les  armes  de  leurs  enne- 
mis, qu'ils  mirent  en  réserve  dans  des  lieux  avantageux  ; 
et  ils  portèrent  le  reste  des  dépouilles  à  Jérusalem. 

32.  Ils  tuèrent  aussi  Philarque,  qui  était  un  homme 
très  méchant,  et  l'un  de  ceux  qui  accompagnaient  Timo- 
thée,  et  qui  avait  fait  beaucoup  de  mal  aux  Juifs. 

jj.  Et  lorsqu'ils  rendaient  à  Dieu,  dans  Jérusalem,  des 
actions  de  grâces  pour  cette  victoire,  ils  découvrirent 
que  Callisthène,  qui  avait  brûlé  les  portes  sacrées,  s'était 
sauvé  dans  une  maison,  et  ils  l'y  brûlèrent  ;  Dieu  lui  ren- 
dant de  la  sorte  une  digne  récompense  pour  toutes  les 
impiétés  qu'il  avait  commises. 

34.  Mais  Nicanor,  cet  homme  couvert  de  crimes,  qui 
avait  amené  mille  marchands  pour  leur  vendre  les  escla- 
ves juifs,  . 

35.  Ayant  été  humilié,  avec  le  secours  du  Seigneur, 
par  ceux  mêmes  qu'il  avait  regardés  comme  des  gens 
méprisables,  s'enfuit  par  la  mer  Méditerranée,  après 
s'être  dépouillé  des  riches  habits  qui  le  distinguaient,  et 
arriva  seul  à  Antioche,  ayant  trouvé  le  comble  de  ses 
malheurs  dans  la  perte  de  son  armée. 

36.  Et  celui  qui  avait  promis  de  payer  le  tribut  aux 
Romains  du  prix  de  la  vente  des  habitants  de  Jérusalem 
qu'il  réduirait  en  esclavage,  publiait  alors  que  les  Juits 
avaient  Dieu  pour  protecteur,  et  qu'ils  étaient  invul- 
nérables, parce  qu'ils  s'attachaient  à  suivre  les  lois  qu'il 
leur  avait  données. 


COMMENTAIRE 


encore  mention  en  passant  au  chapitre  x,    verset 
24  (1).  Ceci  n'arriva  probablement   qu'après  la 
prise  de  Jérusalem  et  la  purification  du  temple, 
puisqu'on  porta  dans    cette  ville   les    dépouilles 
prises  sur  Timothée  et  Bacchide  (2).  Il  iaut  bien 
distinguer  cette   première  guerre   contre  Timo- 
thée et  Bacchide,  d'avec  d'autres  combats  livrés 
au  même  Timothée,  quelque  temps  après,  et  rap- 
portés au  premier  livre  des  Maccabées,  chap.   v, 
versets  5,  6,  7,  8,  et  au  second  livre,  chapitre  x, 
24,  jusqu'au  verset  37.  Ce  Timothée  est  différent 
d'un  autre  général  du  même  nom,  avec  qui  Judas 
et  ses  frères   rirent  la    guerre    au  delà  du  Jour- 
dain (3). 


jh  31.  Residua  spoiia.  jerosolymam  detule- 
runt. Ils  avaient  pris  cette  ville  à  l'exception  de 
la  citadelle,  et  avaient  purifié  le  temple  aussitôt 
après  la  victoire  contre  Nicanor  (4). 

}.  35.  Deposita  veste  glori^.,  per  Mediter- 
ranea  fugiens.  Il  quitta  les  marques  de  sa  dignité 
et  se  sauva  par  des  chemins  détournés,  seul  et 
déguisé  comme  un  fugitif  (5). 

Summam  infelicitatem  de  interitu  exercitus 
sui  consecutus.  Le  grec  (6)  :  Trop  heureux 
d'avoir  échappé  après  la  perle  de  son  armée. 
L'édition  romaine  (7)  et  le  syriaque  sont  confor- 
mes à  la  Vulgate. 


(1)  Timotheus  qui  prius  fuerat  a  Judaeis  superatus. 

(2)  Ici  verset  31. 

(j)  Voyez  1.  Macc.  v.  11...  J4.  J?.    et  11.  Macc.  xu. 

et  scq. 

(4j  Voyez  1.  Macc.  îv.  56.  et  11.  Macc*.  1.  2.  J. 


(5)  Tr;v  BoÇtMiV    «JtoO^evo;,    éoû^a   Stà  T%  juao-ft'.oa, 
Spane'tou  zpénov,  iaurév  k'p7i;xov  j:o:îj(J«î>  Vev  ^  A'vwS/  etav. 
'(0)  Y'r.lp  zr.Oiv  6Uï)fiepn)xu>î  êïci  tf,  toù  a:paxoÛ  SiayOopa. 
(7)  Y'rcepâyav  cuaJifiepïjaaç,  clc. 


CHAPITRE  IX 


Antiochus  revient  de  Perse.  Il  apprend  que  ses  généraux  ont  été  défaits  par  les  Juifs. 
Il  jure  la  perte  de  ce  peuple.  Dieu  le  frappe,  et  le  force  de  confesser  sa  propre 
faiblesse.  Vaines  protestations  d' Antiochus.  Lettre  qu'il  écrit  aux  Juifs.  Il  meurt 
misérablement.  Philippe  transporte  son  corps. 


i.  Eodem  tempore  Antiochus  inhoneste  revertebatur 
de  Perside. 

2.  Intraverat  enim  in  eam,  quœ  dicitur  Persepolis,  et 
tentavit  expoliare  templum,  et  civitatem  opprimere;  sed 
multitudine  ad  arma  concurrente,  in  fugam  versi  sunt;  et 
ita  contigit  ut  Antiochus  post  fugam  turpiter  rediret. 

;.  Et  cum  venisset  circa  Ecbatanam,  recognovit  quœ 
erga  Nicanorem  et  Thimotheum  gesta  sunt. 

4.  Elatus  autem  in  ira,  arbitrabatur  se,  injuriam  illorum 
qui  se  fugaverant,  posse  in  Judseos  retorquere  ;  ideoque 
jussit  agitari  currum  suum,  sine  intermissione  agens 
iter,  cœlesti  eum  judicio  perurgente,  eo  quod  ita  superbe 
locutus  est  :  Se  venturum  Jerosolymam,  et  congeriem 
sepulcri  Judœorum  eam  facturum. 


5.  Sed  qui  universa  conspicit  Dominus  Deus  Israël, 
percussit  eum  insanabili  et  invisibili  plaga.  Ut  enim  fini- 
vit  hune  ipsum  sermonem,  apprehendit  eum  dolor  dirus 
viscerum,  et  amara  internorum  tormenta  ; 

6.  Et  quidem  satis  juste,  quippe  qui  multis  et  novis 
cruciatibus  aliorum  torserat  viscera,  licet  illenullo  modo 
a  sua  malitia  cessaret. 

7.  Super  hoc  autem  superbia  repletus,  ignem  spirans 
animo  in  Judasos,  et  preecipiens  accelerari  negotium, 
contigit  illum  impetu  euntem  de  curru  cadere,  et  gravi 
corporis  collisione  membra  vexari. 


1.  En  ce  temps-là,  Antiochus  revint  de  Perse,  honteux 
de  son  échec. 

2.  Car  étant  entré  dans  la  ville  de  Persepolis,  et  se 
disposant  à  piller  le  temple  et  à  accabler  la  ville,  tout 
le  peuple  courut  aux  armes,  et  le  mit  en  fuite  avec  ses 
gens  ;  ainsi  Antiochus  fut  obligé,  après  cette  fuite  hon- 
teuse, de  se  retirer. 

?.  Lorsqu'il  fut  venu  vers  Ecbatane,  il  reçut  les  nou- 
velles de  la  défaite  de  Nicfinor  et  de  Timothée. 

4.  Et,  transporté  de  colère,  il  s'imaginait  qu'il  pour- 
rait se  venger  sur  les  Juifs  de  l'outrage  que  lui  avaient 
fait  ceux  qui  l'avaient  mis  en  fuite.  C'est  pourquoi  il 
commanda  à  celui  qui  conduisait  son  chariot  de  presser 
sans  cesse  et  de  hâter  son  voyage,  étant  lui-même  pour- 
suivi par  la  vengeance  du  ciel,  à  cause  de  cette  parole 
insolente  qu'il  avait  dite,  qu'il  irait  à  Jérusalem  et  qu'il 
en  ferait  le  tombeau  de  tous  les  Juifs. 

ç.  Mais  le  Seigneur  Dieu  d'Israël,  qui  voit  toutes  cho- 
ses, frappa  ce  prince  d'une  plaie  incurable  et  invisible; 
car,  dès  qu'il  eut  proféré  cette  parole,  il  fut  attaqué 
d'une  effroyable  douleur  dans  les  entrailles,  et  d'une 
colique  qui  le  tourmentait  cruellement. 

6.  Et  ce  fut  sans  doute  avec  beaucoup  de  justice,  puis- 
qu'il avait  déchiré  lui-même  les  entrailles  des  autres,  par 
un  grand  nombre  de  nouveaux  tourments,  et  qu'il  n'avait 
point  depuis  renoncé  à  sa  malice. 

7.  Au  contraire,  se  laissant  aller  aux  transports  de  son 
orgueil,  ne  respirant  que  feu  et  flamme  contre  les  Juifs, 
il  commanda  qu'on  précipitât  son  voyage  ;  mais  lorsque 
ses  chevaux  couraient  avec  impétuosité,  il  tomba  de  son 
char  et  eut  les  membres  tout  meurtris  de  cette  chute. 


COMMENTAIRE 


y.  1  Inhoneste  revertebatur  ex  Perside.  On 
a  vu  au  premier  livre  des  Maccabées,le  motif  qui 
engagea  Antiochus  à  ce  voyage,  et  l'échec  qu'il 
subit  (1). 

y.  2.  Intraverat  enim  in  eam,  qvm  dicitur 
Persepolis.  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  au  pre- 
mier livre  des  Maccabées.  vi,  1. 

y.  }.  Cum  venisset  circa  Ecbatanam.  Ce  fut 
après  avoir  été  chassé  d'Elymaïs,  que,  s'en  retour- 
nant vers  Babylone,  il  apprit  le  malheur  qui  était 
arrivé  à  ses  troupes  commandées  par  Nicanor  et 
Timothée.  Ecbatane  n'est  pas  la  ville  de  ce  nom 
située  en  Médie,  mais  l'Ecbatane  des  Mages, 
située  non  loin  de  Persepolis.  Ce  détail   fournit 


un  puissant  argument  en  faveur  de  l'opinion  qui 
préfère  lire  Persepolis,  au  lieu  d'Elymaïs,  au  pre- 
mier livre  des  Maccabées,  comme  au  second. 
Ajoutons  que  plusieurs  très  anciens  manuscrits 
grecs  ne  lisent  pas  le  nom  d'Elymaïs  au  premier 
livre. 

j^.  4.  CvELESTI  EUM  JUDICIO    PERURGENTE.     Il    Se 

sentit  d'abord  attaqué  de  violentes  douleurs  d'en- 
trailles. Voyez  le  verset  suivant,  et  1.  Macc.  vi,8 
et  suiv. 

y.  7.  Contigit  illum  impetu  euntem  de  curru 
cadere.  L'arabe  ajoute  qu'un  des  éléphants  de 
l'armée  s'étant  échappé,  avait  rugi  d'une  manière 
qui  effraya  leschevauxqui  portaient  la  litière  d'An- 


(1)  1.  Macc.  ni.  ji.  37.  et  vi.  1.  et  seq. 
S.  B.  —  T.  XII. 


U 


210 


li.-    MACCABÉES.  —  IX.-  MALADIE   D'ANTIOCHUS 


8.  Isque  qui  sibi  videbatur  etiam  fluctibus  maris  impe- 
rare,  supra  humanum  modura  superbia  repletus,  et  înon- 
tium  altitudines  in  statera  appendere,  nunc  humiliatusad 
terram  in  gestatorio  portabatur,  manifestam  Dei  virlutem 
in  scmetipso  contestans; 


9.  Ita  ut  de  corpore  impii  vermes  scaturirent,  ac  vi- 
ventis  in  doloribus  carnes  ejus  eftluerent,  odore  etiam 
illius  et  fcetore  exercitus  gravaretur. 


10.  Et  qui  paulo  acte  sidéra  cœli  contingere  se  arbitra- 
batur,  eum  nemo  poterat,  propter  intolerantiam  fœtoris, 
p'ortare. 

11.  Mine  igitur  cœpit,  ex  gravi  superbia  deductus,  ad 
agnitionem  sui  venire,  divina  admonitus  plaga,  per  mo- 
menta  singuia  doloribus  suis  augmenta  capientibus, 


12.  Et  cum  nec  ipse  jam  fœtorem  suum  ferre  posset, 
ita  ait  :  Justum  est  subditum  esse  Deo,  et  mortalem  non 
paria  Deo  sentire. 

ij.  Orabat  autem  hic  scelestus  Dominum,  a  quo  non 
esset  misericordiam  consecuturus  ; 


8.  Ainsi  celui  qui,  s'élevant  par  son  orgueil  au-dessus 
de  la  condition  de  l'homme,  s'était  flatte  de  pouvoir 
même  commander  aux  flots  de  la  mer,  et  peser  dans  une 
balance  les  montagnes  les  plus  hautes,  se  trouva  alors 
humilié  jusqu'à  terre;  on  le  portait  mourant  dans  une 
chaise,  attestant  publiquement  la  toute-puissance  de 
Dieu,  qui  éclatait  en  sa  personne  ; 

9.  Car  il  sortait  des  vers  du  corps  de  cet  impie  comme 
d'une  source;  et  vivant  au  milieu  de  tant  de  douleurs, 
toutes  ses  chairs  tombaient  par  lambeaux,  avec  une 
odeur  telle,  que  toute  l'armée  ne  pouvait  en  souffrir  la 
puanteur. 

10.  Celui  qui,  peu  auparavant,  s'imaginait  pouvoir 
atteindre  jusqu'aux  étoiles  du  ciel,  était  alors  en  un  tel 
état,  que  nul  ne  pouvait  plus  le  porter,  à  cause  de  l'in- 
fection intolérable  qui  sortait  de  lui. . 

11.  Il  commença  donc  à  rabattre  de  ce  grand  orgueil 
dont  il  était  possédé,  et  à  entrer  dans  la  connaissance 
de  lui-même,  averti  de  ce  qu'il  était,  par  la  plaie  dont  il 
se  sentait  frappé,  et  ses  douleurs  redoublaient  h  chaque 
que  moment. 

12.  Ainsi,  ne  pouvant  plus  lui-même  souffrir  la  puan- 
teur qui  venait  de  lui,  il  dit  :  Il  est  juste  que  l'homme 
soit  soumis  à  Dieu,  et  que  celui  qui  est  mortel,  ne 
s'égale  pas  au  Dieu  souverain. 

ij.  Or,  ce  scélérat  priait  le  Seigneur,  de  qui  il  ne 
devait  point  recevoir  de  miséricorde. 


COMMENTAIRE 


tiochus  ;  ce  prince  fut  alors  jeté  par  terre  et  tout 
froissé  de  sa  chute.  Au  lieu  d'être  portées  à  bras, 
ces  litières  étaient  posées  sur  deux  chevaux   (1). 

f.  8.  Qui  sibi  videbatur  etiam  fluctibus  ma- 
ris imperare.  Voyez  le  chapitre  v,2i,où  il  est  dit 
que  ce  prince  s'imaginait  pouvoir  naviguer  sur  la 
terre,  et  faire  marcher  ses  troupes  sur  la  mer. 

f.  12.  Justum  est  mortalem  non  paria  Deo 
sentire.  Antiochus  avait  pris  le  nom  superbe  de 
Dieu  manifesté  aux  hommes  Oso;  lnioay»}<.  L'ara- 
be (2)  assure  même  qu'il  avait  voulu  se  faire 
adorer  comme  un  Dieu,  et  qu'il  avait  fait  mettre 
sa  statue,  comme  celle  d'une  divinité,  dans  le 
temple.  Le  chapitre  ix,  verset  8  insinue  quelque 
chose  de  pareil:  Supra  humanum  modum  superbia 
repletus.  Voyez  aussi  Daniel,  xi,  36,  37. 

^.13.  Orabat  autem  hic  scelestus  Dominum 
a  quo  non  esset  misericordiam  consecuturus. 
//  priait  le  Seigneur  dont  il  ne  devait  point  recevoir 
miséricorde,  suivant  la  menace,  ou  la  prédiction 
que  lui  en  avaient  faite  les  martyrs,  qu'il  fit  si 
cruellement  tourmenter  (3).  Antiochus  avait  aban- 
donné le  Seigneur,  et  le  Seigneur  à  son  tour 
l'abandonne  et  lui  tourne  le  dos  (4)  :  Ego  autem 
in  interilu  vestro  ridebo,  et  subsannabo,  cum  vobis 
id  quod  timebalis,  adi'cnerit.  Ce  prince  est  le  mo- 
dèle des  pécheurs  endurcis,  et  des  faux  pénitents, 
qui  n'ont  point  d'autre  motif  de  leur  retour  à 
Dieu,  qu'une  crainte  purement  servile,  naturelle 
et  intéressée. 


Au  verset  1  i,il  est  dit:  Ccepit  ex  gravi  superbia 
deductus  ad  agnitionem  sui  venire,  et  ici  hic  sce- 
lestus, il  paraît  d'abord  très  difficile  de  concilier 
ces  paroles  l'une  avec  l'autre  ;  et  on  a  peine  à 
comprendre  comment  il  peut  être  vrai  que  ce 
prince  commença  à  quitter  ce  grand  orgueil  dont 
il  était  possédé,  et  à  entrer  dans  la  connaissance  de 
soi-même;  et  que,  néanmoins,  il  était  encore  un 
scélérat  aux  yeux  du  Seigneur.  Il  confesse  qu'iï 
était  juste  que  l'homme  fût  soumis  à  Dieu;  et  il 
est  regardé  de  Dieu  en  même  temps  comme  un 
orgueilleux  invétéré  :  il  le  priait  sans  qu'il  dût 
recevoir  miséricorde.  Quoi  donc!  s'il  est  vrai  que 
ce  prince  quittât  son  orgueil,  le  Saint-Esprit  n'a- 
t-il  pas  promis  de  se  reposer  sur  celui  qui  est 
humble.-'  S'il  entra  véritablement  dans  la  connais- 
sance de  soi-même,  et  s'il  reconnut  la  justice  avec 
laquelle  tous  les  hommes  doivent  se  soumettre  à 
Dieu,  ne  cessait-il  pas  d'être  superbe  ?  Et  enfin, 
s'il  priait  le  Seigneur  dans  cette  disposition  d'hu- 
milité et  de  foi, n'était-il  pas  digne  d'obtenir  misé- 
ricorde ?  Cependant  la  sainte  Écriture  nous  dit 
ici  nettement,  que  ce  prince  était  scélérat  lors 
même  qu'il  priait  le  Seigneur;  et  que,  nonobstant 
cette  protestation  publique,  par  laquelle  il  déclara 
qu'il  était  juste  que  l'homme  fût  soumis  à  Dieu,  il 
ne  devait  point  recevoir  miséricorde. 

Disons  donc  sans  crainte,  qu'il  est  certain 
qti  Antiochus  ne  renonça  point  sincèrement  à  son 
orgueil,  que  la  connaissance  qu'il  eut  de  soi-même 


(1)  Voyez  la  Perse  de  M.  L.  Dubeux,  planche  Lxxvt. 

(2)  Vide    11.   Maee.   c.   j.    Arabice   in  Polyglott.   Paris, 
et  Lcndin. 


(?)  11.  Mace.  vu.  14.  17.   19.  51.  $4.  75.  j6. 
(4)  Proverb.  1.  26. 


II. 


MACCABÉES.  -   IX.-  VAIN    REPENTIR   D'ANTIOCH  US 


21  I 


14.  Et  civilatem,  ad  quam  festinans  veniebat  ut  eam  ad 
solimi  deduceret,  ac  sepulcrum  congestorum  faceret, 
nunc  optât  liberam  reddere; 

15.  Et  Judasos,  quos  nec  sepultura  quidem  se  dignos 
habiturum,  sed  avibus  ac  feris  diripiendos  traditurum, 
et  cura  parvulis  exterminaturum  dixerat,  asquales  nunc 
Atheniensibus  facturum  pollicetur. 


14.  Et  celui  qui  se  hâtait  auparavant  d'aller  à  Jérusa- 
lem pour  la  raser  jusqu'en  terre,  et  pour  n'en  faire  qu'un 
sépulcre  de  corps  morts  entassés  les  uns  sur  les  autres, 
souhaite  maintenant  de  la  rendre  libre  ; 

15.  Et  il  promet  d'égaler  aux  Athéniens  ces  mêmes 
Juifs  qu'il  avait  jugés  si  indignes  de  la  sépulture,  et  de 
qui  il  avait  dit  qu'il  exposerait  en  proie  leurs  corps 
morts  aux  oiseaux  du  ciel  et  aux  bêtes  féroces,  et  qu'il 
exterminerait  jusqu'aux  plus  petits  enfants. 


COMMENTAIRE 


ne  l'humilia  point  véritablement  devant  Dieu,  et 
que  sa  prière  ne  partait  point  d'un  cœur  péni- 
tent. Il  est  vrai  que,  frappé  d'une  si  terrible  plaie, 
sa  chair  fut  humiliée,  son  esprit  abattu  et  décon- 
certé ;  mais  il  paraît  que  son  cœur  n'en  fut  pas 
touché.  Il  ne  quitta  donc  ce  grand  orgueil  qu'à 
l'extérieur  seulement  ;  il  cessa  de  se  vanter  comme 
auparavant,  avec  insolence,  de  ruiner  Israël  ; 
parce  que  la  pesanteur  de  la  main  de  Dieu  l'avait 
terrassé.  //  commença  à  se  connaître  soi-même; 
c'est-à-dire,  qu'il  connut,  par  la  douleur  et  par 
i'horreur  de  cette  plaie  si  sensible  dont  il  fut 
frappé,  que  Dieu  était  sans  comparaison  plus 
fort  que  l'homme,  et  qu'/7  était  juste  qu'un 
homme  mortel  ne  s'égalât  pas  au  Dieu  souverain. 
Mais  ce  sentiment  était  plutôt  un  sentiment 
de  la  chair,  ou  tout  au  plus  de  l'esprit,  que 
d'un  cœur  pénétré  sincèrement  de  son  néant 
et  de  la  grandeur  de  Dieu.  11  ne  parlait  de  la 
sorte  que  par  désespoir,  semblable  à  cet  autre 
prince,  Julien  l'Apostat,  qui,  ayant  été  abattu  de 
même  par  la  main  toute-puissante  du  Très-Haut, 
lorsque/  ne  respirait,  comme  celui-ci,  que  feu  et 
flammes  contre  les  fidèles,  se  sentit  forcé  de  se 
déclarer  vaincu,  et  de  dire  d'une  manière  déses- 
pérée en  s'adressant  à  Jésus-Christ  même  :  Vi- 
cisti,  Galilœe  (1). 

Saint  Augustin  (2)  dit  que  Dieu  sauva  les  trois 
jeunes  gens  des  flammes  de  la  fournaise  de  Baby- 
lone,  pour  faire  grâce  à  Nabucodonosor,  afin  que 
ce  grand  miracle  le  portât  à  croire  en  lui,  et 
qu'ainsi  la  délivrance  de  leur  corps  fût  le  salut  de 
son  âme;  mais  qu'Antiochus,  qui  tourmenta  si 
cruellement  les  Maccabées,  se  rendit  indigne 
d'une  telle  grâce,  en  se  réjouissant  de  ce  que  ces 
saints  martyrs  avaient  été  consumés  par  le  feu  et 
par  les  autres  tourments:  cette  joie  cruelle  devint 
en  lui  la  source  jl'une  effroyable  humiliation. 

Le  même  saint  dit  encore  ailleurs,  en  parlant 
de  la  différence  des  péchés,  que,  s'il  est  vrai  que 
le  pécheur  pénitent  obtienne  toujours  le  pardon, 
il  y  a  certains  péchés,  tel  que  celui  de  Judas,  (et 
nous  pouvons  ajouter  celui  d'Antiochus),  dont  la 
malice  est  si  grande,  qu'elle  empêche  ceux  qui 
les    ont    commis,    d'entrer  dans    les    sentiments 


d'une  humilité  sincère,  pour  en  demander  le 
pardon  comme  ils  le  doivent;  quoique  d'ailleurs 
leur  mauvaise  conscience  soit  forcée  de  recon- 
naître et  de  publier  leur  péché  :  quia  illius  pec- 
cali  ianlœ  labes,  ut  deprecandi  humililalem  subire 
non  possit,  eliamsi  peccalum  suum  mala  conscien- 
iia  et  agnoscere  el  enuntiare  cogalur.  C'est  pour- 
quoi, ajoute  ce  père,  il  est  important  de  discerner 
la  pénitence  qui  mérite  le  pardon  de  Dieu.  Car' 
il  y  en  a  beaucoup  qui  confessent  très  prompte- 
ment  qu'ils  ont  péché,  et  qui,  entrant  en  colère 
contr'eux-mêmes,  souhaiteraient  extrêmement  de 
n'être  point  tombés  dans  le  péché  qu'ils  confes- 
sent :  mais  cependant  ils  n'humilient  et  ne  brisent 
point  leur  cœur,  pour  en  implorer  le  pardon. 
Mullum  inlerest  quali  pcenitent'uv  ignoscat  Deus  : 
mulli  enim  mullo  cilius  se  falenlur  peccasse,  alque 
ila  sibi  succensent,  ut  vehemenler  se  peccasse  nol- 
lent  :  sed  tamen  animum  ad  humiliandum  el  oble- 
rendum  cor,  implorandamque  veniam  non  depo- 
nunt. 

Si  l'on  veut  objecter  qu'Antiochus  ayant  prié 
le  Seigneur,  semblait  n'être  pas  dans  cette  dispo- 
sition dont  parle  ici  saint  Augustin,  on  peut  ré- 
pondre que  sa  prière  n'était  pas  efficace,  car  elle 
ne  partait  pas  d'un  eœur  humilié  et  brisé,  mais  de 
la  douleur  qui  arrachait  à  un  homme  accablé  sous 
le  poids  de  la  divine  justice  un  tardif  repentir. 

f.  14.  Optât  liberam  reddere.  77  souhaite  de 
rendre  libre  Jérusalem,  de  lui  donner  le  privilège 
de  se  gouverner  d'après  ses  lois,  avec  ses  magis- 
trats propres,  de  se  garder  elle-même,  d'être  ville 
libre  et  indépendante.  Telles  étaient  Antioche  et 
Séleucie,  sous  les  rois  de  Syrie  (}). 

y.  i).  ./Equales  Atheniensibus.  Le  grec  et  le 
syriaque  lisent  Athénien.  Mais  ce  mot  ne  signifie 
absolument  rien  ici.  Pour  un  sens  logique  en 
rapport  avec  les  événements,  il  faut  lire  Anlio- 
chenis  (4).  Antiochus  voulait  donner  aux  habitants  de 
Jérusalem,  le  droit  de  bourgeoisie  d'Antioche.  Ce 
droit  avait  déjà  été  acquis  moyennant  la  somme  de 
cent  cinquante  talents  (s)  ;  mais  ce  privilège  avait 
été  révoqué,  ou  du  moins  n'avait  point  eu  son 
exécution,  depuis  les  derniers  troubles.  On  a  déjà 
remarqué  (6)  le  nom  d'Athénien  glissé  peut-être 


(1)  Theodoret.  hist.  Ecoles.  I.  m.  c.  20. 
(:)  August.  ex  und  homil.  Iiomil.  xxiv. 


(j)  Plln.  I.  v.  c.  21.  et  vi.  26.  —  (4)   Vide  Grot.  hic. 
(5)  a.  M  ace.  iv.  9.  —  (6)  11.  Macc.  vi.  1. 


2  12 


II. 


MACCABEES. 


IX.  -  VAIN   REPENTIR  D'ANTIOCHUS 


16.  Templum  etiam  sanctum,  quod  prius  expoliaverat, 
optimis  donis  ornaturum,  et  sancta  vasa  multiplicaturum, 
et  pertinentes  ad  sacrificia  sumptus  de  redditibus  suis 
pravstaturum  ; 

17.  Super  hœc,  et  Judœum  se  futurum,  et  omnem  locum 
terra;  perambulaturum,  et  prœdicaturum  Dei  potestatem. 

18.  Sed  non  cef santibus  doloribus,  supervenerat  enim 
in  eum  justum  Dei  judicium,  desperans,  scripsit  ad  Ju- 
dœos,  in  modum  deprecationis,  epistolam  hœc  conti- 
nentem  : 

19.  Optimis  civibus  Judœis  plurimam  salutem,  et  bene 
valere,  et  esse  felices,  rex  et  princeps  Antiochus. 

20.  Si  bene  valetis,  et  filii  vestri,  et  ex  sententia  vobis 
cuncta  sunt,  maximas  agirr.  us  gratias. 

21.  Et  ego  in  infirmitate  constitutus,  vestri  autem  me- 
mor  bénigne,  reversus  de  Persidis  locis,  et  infirmitate 
gravi  apprehensus,  nccessarium  duxi  pro  communi  utili- 
tate  curam  habere  ; 

12.  Non  desperans  memetipsum,  sed  spem  multam  ha- 
bens  eirugiendi  infirmitatem. 

2;.  Respiciens  autem  quod  et  pater  meus,  quibus  tem- 
poribus  in  locis  superionbus  ducebat  extrcitum,  ostendit 
qui  post  se  susciperet  principatum  ; 

24.  Ut  si  quid  contrarium  accideret,  aut  difficile  nun- 
tiaretur,  scientes  hi  qui  in  regionibus  erant,  cui  esset 
rerum  summa  derelicta,  non  turbarentur  ; 


2'.  Ad  hœc  considerans  de  proximo  potentes  quosque 
et  vicinos,  temporibusinsidiantes,  et  eventum  expectantes, 
desisrnavi  filium  meum  Antiochum  regem,  quem  sœpe 
recurrens  in  superiora  régna  multis  vestrum  commenda- 
bam  ;  et  scripsi  ad  eum  quœ  subjecta  sunt. 


COMM 
dans  le  grec,  pour  celui  d'Anlicchicn  si  on  le 
prend  comme  nom  commun.  On  a  quelques 
exemples  de  villes  de  Syrie,  qui  ont  joui  des 
droits  de  citoyens  d'Antioche.  Certaines  mé- 
dailles donnent  ce'  titre  à  Ptolémaïs,  et  à  Cal- 
lirhoé  (i). 

y.  16.  Pertinentes  ad  sacrificia  sumptus, etc. 
C'est  ce  qu'avaic  it  fait  avant  lui  Darius  (2)  et 
Ptolémée  Philométor  (3),  et  ce  que  fit  depuis 
Démétrius  Nicator(_|). 

y.  20.  Si  bene  valetis  et  filii  vestri.  Cette 
formule  se  remarque  dans  les  lettres  des  empe- 
reurs au  sénat  et  au  peuple  romain  (5)  :  Si  vos  U- 
berique  vestri  valetis,  bene  est.  Ils  l'ont  aussi  quel- 
quefois employéâ  envers  les  peuples  amis  et  alliés, 
comme  Jules  César  en  écrivant  aux  Sidoniens  (7), 
et  Marc-Antoine  aux  Juifs  (6). 

v.  2}.  Respiciens  quod  et  pater  meus,  quibus 
temporibus  in  locis  superioribus  ducebat  exer- 
citum.  Au  sujet  du  voyage  d'Antiochus  le  Grand, 


16.  Il  s'engage  aussi  à  orner  de  dons  précieux  le  tem- 
ple saint  qu'il  avait  pillé  auparavant,  à  y  augmenter  le 
nombre  des  vases  sacrés,  et  à  fournir  de  ses  revenus  les 
dépenses  nécessaires  pour  les  sacrifices, 

17.  Et  même  à  se  faire  Juif,  et  à  parcourir  toute  la 
terre  pour  publier  la  toute-puissance  de  Dieu. 

18.  Mais  lorsqu'il  vit  que  ses  douleurs  ne  cessaient 
point,  parce  que  le  juste  jugement  de  Dieu  était  enfin 
tombé  sur  lui.  commençant  à  perdre  espérance,  il  écri- 
vit aux  Juifs  une  lettre  en  forme  de  supplication,  qui 
contenait  ce  qui  suit  : 

19.  Le  roi  et  prince  Antiochus  souhaite  le  salut,  la  santé 
et  toutes  sortes  de  prospérités  aux  Juifs  ses  bons  citoyens. 

20.  Si  vous  êtes  en  santé,  vons  et  vos  enfants,  et  si 
tout  vous  réussit  comme  vous  le  souhaitez,  nous  en  ren- 
dons de  grandes  grâces  à  Dieu. 

21.  Étant  maintenant  dans  la  langueur,  et  n'ayant  pour 
vous  que  des  sentiments  de  bonté,  dans  cette  grande 
maladie  dont  je  me  suis  trouvé  surpris  lorsque  je  reve- 
nais de  Perse,  j'ai  cru  nécessaire  de  prendre  le  soin  des 
intérêts  communs  de  mon  état. 

22. Ce  n'est  pas  que  je  désespère  de  ma  santé;  j'ai  au  con- 
tra ire  une  grande  confiance  que  je  reviendrai  de  m  a  maladie. 

2;.  Ayant  donc  considéré  que  mon  père  même,  lors- 
qu'il marchait  avec  son  armée  dans  les  hautes  pro- 
vinces, déclara  celui  qui  devait  régner  après  lui, 

24.  Afin  que  s'il  arrivait  quelque  malheur,  ou  qu'on 
vint  à  publier  quelque  fâcheuse  nouvelle,  ceux  qui 
étaient  dans  les  provinces  de  son  royaume  ne  pussent 
en  être  troublés,  sachant  qui  était  celui  qu'il  avait  laissé 
héritier  de  sa  couronne  ; 

2<>.  Sachant  de  plus  queceux  qui  sont  proches  de  nous 
et  les  plus  puissants  de  nos  voisins  observent  les  temps 
favorables  à  leurs  desseins,  et  se  préparent  à  profiter 
des  conjonctures  qui  leur  seront  propres,  j'ai  désigné 
mon  (ils  Antiochus  pour  régner  après  moi,  lui  que  j'ai 
souvent  recommandé  à  plusieurs  d'entre  vous,  lorsque 
j'étais  obligé  de  me  transporter  dans  les  hautes  provinces 
de  mes  états  :  je  lui  ai  écril  ce  qui  est  joint  ci-dessous. 

ENTAIRE 

dans  les  provinces  au-delà  de  l'Euphrate,  que 
l'Écriture,  aussi  bien  que  les  historiens  profanes, 
appelle  les  provinces  supérieures,  Diodore  de  Sicile 
et  d'autres  écrivains  (8)  nous  apprennent  que  ce 
prince,  se  voyant  chargé  d'un  gros  tribut  par  les 
Romains,  soit  qu'en  effet  il  manquât  d'argent, 
ou  qu'il  voulût  colorer  son  avarice,  sous  le  pré- 
texte de  ce  tribut,  qui  lui  avait  été  imposé,  prit  la 
résolution  de  dépouiller  le  temple  de  Bélus  à 
Élymaïs,  des  richesses  immenses  qui  y  étaient 
amassées  depuis  des  siècles.  Il  y  vint  avec  son 
armée,  entra  la  nuit  dans  le  temple,  enleva  une 
grande  quantité  d'argent;  mais  les  habitants  des 
peuples  voisins  en  ayant  été  informés,  y  accou- 
rurent, et  le  taillèrent  en  pièces,  avec  toute  son 
armée.  11  eut  pour  successeur  Séleucus  Philopa- 
tor,  qu'il  avait  désigné  avant  son  départ,  et  à  qui 
il  avait  donné  la  régence  du  royaume. 

y.   25.    Designavi   filium    meum   Antiochum 
regem.    C'est   Antiochus    Eupator,     qui    n'avait 


(1)  Apud  Harduin.  Chronol.  Vit.  Tes!,  p.  181.  ANÏIO- 
XlSQN  TÛN  EN  I1TOAUMAIAI. //cm  ANTIOXEQN 
TON  IIPO2;  KAAAIPOIIN. 

(2)  1.  Esdr.  vi.  6. 

(?)  Jcscph.  Anliq.  t.  xn,  c.  2.  —  (4)  1.  Macc.  x.  59.  40. 


(5)  Vide  Grol.  hic.  et  Tull.  Epistctas. 

(6)  Joseph.  Anliq.  I.  xiv.  17.  —  (7)  ibid.  c.  22. 

(8)  Vide  Diodor-  in  excerptis  Vales.  p.  292.  298.  -  Strabo. 
I.  xvi.  -  Justin.  I.  xxxu.  et  Usser  ad  an.  M.  5817.  -  llicrcn. 
in  Dan.  xi. 


II.—   MACCABEES. 


MORT  D'ANTIOCHUS 


213 


26.  Oro  itaque  vos  et  peto,  memores  beneficiorum 
publiée  et  privatim,  ut  unusquisque  conservet  fidem  ad 
me  et  ad  filium  meum. 

27.  Confido  enim  eum  modeste  et  humane  acturum,  et 
sequentem  propositum  meum,  et  communem  vobis  fore. 

28.  Igitur  homicida  et  blasphemus,  pessime  percussus, 
et  ut  ipse  alios  tractaverat,  peregre  in  montibus  misera- 
bili  obitu  vita  functus  est. 

29.  Transferebat  autem  corpus  Philippus,  collactaneus 
ejus,  qui  metuens  lilium  Antiochi,  ad  Ptolemaeum  Philo- 
metorem  in  /Egyptum  abiit. 


26.  Je  vous  prie  donc,  et  je  vous  conjure  que,  vous 
souvenant  des  grâces  que  vous  avez  reçues  de  moi  en 
public  et  en  particulier,  vous  gardiez  la  fidélité  que  vous 
deviez  et  à  moi  et  à  mon  fils; 

2".  Car  j'espère  qu'il  se  conduira  avec  modération  et 
avec  douceur,  selon  mes  intentions,  et  qu'il  vous  don- 
nera des  marques  de  sa  bonté. 

28.  Enfin  ce  meurtrier  et  ce  blasphémateur,  frappé 
d'une  horrible  plaie,  et  traité  de  même  qu'il  avait  traité 
les  autres,  étant  sur  les  montagnes,  et  loin  de  son  pays, 
finit  sa  vie  par  une  misérable  mort, 

29.  Philippe,  son  frère  de  lait,  prit  soin  de  trans- 
porter son  corps,  et  craignant  le  fils  d'Antiochus,  il 
s'en  alla  en  Egypte  vers  Ptolémée  Philométor. 


COMMENTAIRE 


alors  que  neuf  ans  (1).  Lysias  gouvernait  en  son 
nom,  malgré  la  dernière  disposition  du  roi,  qui 
avait  nommé  Philippe  régent  du  royaume,  pen- 
dant la  minorité  d'Eupator  (2). 

Scripsi  ad  eum,  QUM  subjecta  sunt.  La  lettre 
qu'il  écrivit  à  son  fils,  en  faveur  des  Juifs,  est 
perdue. 

f.  26.  Memores  beneficiorum.  Tout  ce  dis- 
cours d'Antiochus  se  ressent  du  dérangement  de 
son  esprit.  Pouvait-il  dire  avec  vérité,  qu'il  eut 
fait  des  grâces  aux  Juifs,  après  avoir  exercé  con- 
tre eux  toutes  les  cruautés  qu'il  imagina?  Il  n'y 
a  guère  plus  d'apparence  de  vérité  dans  ce  qu'il 
dit  au  verset  2  5 ,  que  souvent  il  avait  recommandé 
son  fils  à  plusieurs  d'entre  les  Juifs  :  Quem  sœpe 
mullis  veslrum  commendabam. 

jfr.  27.  Communem  vobis  fore.  Qu'il  vous  sera 
commun,  qu'il  sera  tout  à  vous.  Le  grec  (3)  : 
qu'il  s'accordera  avec  vous.  Qu'il  vivra  bien  avec 
vous. 

jh  28.  Peregre  in  montibus  vita  functus  est. 
Polybe  (4),  et  après  lui  saint  Jérôme  (5),  assurent 
qu'il  mourut  dans  Tabès,  ville  de  Perse,  située 
la  Parétacène,  selon  Quinte-Curce  (6).  Les  his- 
toriens remarquent  que  ce  prince  impie  tomba 
dans  la  folie,  quelque  temps  avant  sa  mort  (7).  Il 
était  continuellement  agité  par  les  remords  de  sa 
conscience,   et   par  des    terreurs  causées,  à   ce 


qu'ils  croyaient,  par    l'apparition  de  la   déesse, 
dont  il  avait   voulu  piller   le  temple   à    Élymaïs 
Les  Juifs  et  les  chrétiens  l'attribuent  plutôt  aux 
sacrilèges  qu'il  avait  commis  en  Judée,  et  à    sa 
cruauté  contre  les  martyrs. 

Ji.  29.  Transferebat  corpus  Philippus  col- 
lactaneus ejus.  Le  grec  (8)  :  Philippe  qui  avaH 
élé  nourri  avec  lui.  Le  syriaque  :  Philippe,  fils  de 
sa  nourrice;  c'était  son  confident,  et  son  plus 
grand  ami.  Il  lui  remit  son  diadème,  son  anneau, 
et  son  manteau  royal,  pour  les  donner  à  son  fils; 
il  le  chargea  de  son  éducation  et  de  la  régence  du 
royaume,  pendant  son  bas  âge  (9),  car  le  jeune 
prince  n'avait  que  neuf  ans. 

Qui  metuens  filium  Antiochi,  ad  Ptolem/eum 
Philometorem  in  jEgyptum  abiit.  Lysias,  qu'An- 
tiochus  Epiphane  avait  nommé  gouverneur  du 
royaume  et  de  son  fils,  Antiochus  Eupator,  avant 
son  départ  pour  la  Perse,  n'eut  pas  plutôt  appris 
la  mort  d'Epiphane,  qu'il  fit  reconnaître  le  jeune 
roi,  et  se  fit  nommer  régent  du  royaume,  gouver- 
neur de  la  Ccelé-Syrie  et  de  la  Phénicie  (10), sa  s 
se  mettre  en  peine  des  dernières  volontés  d'Ai- 
tiochus  Epiphane.  Jugeant  bien  après  cela,  qu'il 
ne  serait  pas  sûr  pour  lui,  d'aller  en  Syrie,  Phi- 
lippe prit  le  parti  de  se  retirer  en  Egypte,  et  de 
demander  la  protection  de  Ptolémée  Philométor, 
pour  l'exécution  du  testament  de  son  maître. 


(1)  Appian.  Syriac. 

(2)  1.  Macc.  vi.  14. 

(?)  Suuxepievca/OrjaêaOat  ûlul"iv.  Vide  Grot.  hic.  2u;j.jrept- 
çe'pcsOat  se  dit  des  amis  qui  se  donnent  réciproquement 
des  marques  d'amitié  par  leurs  bons  services,  par  leurs 
complaisances;  et  du  mari  et  de  la  femme  qui  sont  bien 
unis,  etc. 

{4)  Polyb.  in  excerpt.  Vales.  p.  144. 

(5)  Hieron.  in  Dan.  xi. 


(6)  Quint.  Curl.  lib.  v.  -    Vide   Grot.    et    Usser.  ad  an 
Mundi  Î840. 

(7)  Polyb.  loco  cit.  E'v  Ta6at;  zrfi  Ilspatoo;  i%i)..r.i  v><> 
(3r'ov,  8atu.ov7Jaaî,  w;  È'viol  tpaa:',  oià  tq  ysvEaOat  tîvaç 
iKiGÔr^xx'ylai  zoù  3aiu.o'viOu,  xaià  tf,v  Jtepi  là  7:po£'.prj;j.£vov 
(A'pTEpLtoo;)  hpàv  ^apovo^av.  lia  et  Hieron.  in  Dan.  xi. 

(8)  0'  a'jviposu;  âuiou. 

(9)  Vide  1.  Macc.  vi.  14.  15.  16. 

(10)  11.  Macc.  xi.  11.   Vide  Joseph.  Antiq.  I.  xii.  c.  ri. 


CHAPITRE  X 

Purification  du  Temple  par  Judas  Maccabée.  Lysias  régent  du  royaume  de  Syrie  sous 
Antiochus  Eupator.  Mort  de  Ptolémée  Macron.  Courses  de  Gorgias  sur  les  Juifs. 
Victoires  de  Judas  sur  les  Idumeens.  Défaite  de  Timothée.  Prise  de  Ga^a. 


i.  Machabœus  autem,  et  qui  cum  eo  erant,  Domino  se 
protegente,  templum  quidem  et  civitatem  recepit. 

2.  Aras  autem,  quas  alienigenaj  per  plateas  exstruxe- 
rant,  itemque  delubra  demolitus  est  ; 

5.  Et  purgato  templo,  aliud  altare  fecerunt  ;  et  de 
ignitis  lapidibus  igné  concepto  sacrificia  obtulerunt  post 
biennium,  et  incensum,  et  lucernas,  et  panes  propositionis 
posuerunt. 

4.  Quibus  gestis,  rogabant  Dominum,  prostrati  in  ter- 
rain, ne  amplius  talibus  malis  inciderent  ;  sed  et  si  quando 
peccassent,  ut  ab  ipso  mitius  corriperentur,  et  non  bar- 
baris  ac  blasphemis  hominibus  traderentur. 


5.  Qua  die  autem  templum  ab  alienigenis  pollutum 
(uerat,  contigit  eadem  die  purificationem  fie r i,  vigesima 
quinta  mensis,  qui  fuit  casleu. 


1.  Cependant  Maccabée  et  ceux  qu'il  avait  avec  lui, 
soutenusde  la  protection  du  Seigneur,  reprirent  le  temple 
et  la  ville. 

2.  Ils  détruisirent  les  autels  que  les  infidèles  avaient 
dressés  dans  les  places  publiques,  et  les  temples  des 
idoles. 

;.  Et  après  avoir  purifié  le  temple,  ils  y  élevèrent  un 
autel  ;  et,  ayant  fait  sortir  quelques  étincellesdes  pierres 
à  feu,  ils  offrirent  des  sacrifices  au  bout  de  deux  ans,  et 
ils  y  mirent  l'encens,  les  lampes,  et  les  pains  qu'on  ex- 
posait devant  le  Seigneur. 

4.  Cela  étant  fait,  prosternés  contre  terre,  ils  con- 
juraient le  Seigneur  de  ne  plus  permettre  qu'ils  tom- 
bassent en  de  grands  maux  ;  mais  de  vouloir  bien  les 
châtier  plus  doucement,  s'il  arrivait  quelque  jour  qu'ils 
péchassent  contre  lui,  et  de  ne  plus  les  livrer  à  des 
barbares  et  des  blasphémateurs  de  son  nom. 

ç.  Et  il  arriva  que  le  temple  fut  purifié  le  même  jour 
qu'il  avait  été  profané  par  les  étrangers,  c'est-à-dire  le 
vingt-cinquième  du  mois  de  Casleu. 


COMMENTAIRE 


f.  I.  M ACCABjEUS  TEMPLUM  ET  CIV1TATEM  RE- 
CEPIT. Il  avait  repris  l'un  et  l'autre,  avant  la  mort 
d'Antiochus  Épiphane  (1.  L'auteur  retourne  ici 
à  son  sujet  et  à  l'ordre  des  événements,  qu'il  avait 
interrompus,  pour  mettre  le  voyage  d'Antiochus 
en  Perse,  et  sa  mort. 

v.  2.  Aras  quas  alienigen/e  per  plateas  ex- 

TRUXERANT,  ITEMQUE  DELUBRA  DEMOLITUS  EST.  On 

a  vu  dans  le  premier  livre  des  Maccabées  (2),  que 
l'on  avait  dressé  des  autels  devant  les  portes  des 
maisons,  el  au  milieu  des  rues  ou  des  places  pu- 
bliques ;  qu'on  avait  bâti  des  temples  et  consa- 
cré des  bois  (3)  en  l'honneur  des  faux  dieux. 
Les  villes  païennes  étaient  pleines  de  statues  pro- 
fanes: on  en  voyait  presque  à  chaque  porte,  et 
dans  chaque  rue.  Jérémie  reprochait  autrefois  aux 
Juifs  de  Jérusalem,  d'avoir  érigé  autant  d'autels  à 
Baal,  qu'il  y  avait  des  rues  dans  leurs  villes  (4)  : 
Secundum  numerum  viarum  Jérusalem,  posuisti 
aras  confusionis,  aras  ab  libandum  Baalim. 

f.  3.  Aliud  altare  fecerunt.  Voyez  1.  Mac- 
cab.  iv,  47,  et  dans  Josèphe,  Antiq.  I,  xn,  C,  II, 
les  circonstances  de  ce  qui  se  fît  alors. 


On  a  vu  auparavant  que  Dieu  avait  défendu 
aux  Juifs  de  se  servir  dans  les  sacrifices  d'un  feu 
étranger,  c'est-à  dire,  d'un  autre  feu  que  celui 
qui  était  anciennement  descendu  du  ciel  sur  le 
sacrifice  d'Aaron,  et  que  les  prêtres  étaient  obli- 
gés de  conserver  avec  grand  soin.  On  a  aussi 
remarqué  que  ce  fut  pour  cette  raison  que,  lors- 
que la  ville  de  Jérusalem  fut  détruite  avec  le 
temple  par  Nabucodonosor,  on  cacha  ce  même 
feu  au  fond  d'un  puits  sec,  où  les  Juifs  le  retrou- 
vèrent après  leur  retour  de  Babylone,  changé  en 
une  eau  épaisse;  et  que  cette  eau  répandue  par 
l'ordre  de  Néhémie  sur  le  sacrifice  et  sur  les 
pierres  de  l'autel,  se  convertit  de  nouveau  en  feu. 
Ainsi  le  temple  de  Dieu  ayant  été  profané  par 
l'impiété  et  par  les  abominables  sacrifices  d'An- 
tiochus, comme  le  feu  sacré  s'était  sans  doute 
perdu  pendant  la  persécution,  il  /allut,  lorsque 
Judas  Maccabée  purifia  le  temple,  renouveler  le 
même  feu  pour  les  sacrifices. 

De  ignitis  lapidibus  igné  concepto.  Ayant 
fait  sortir  quelques  étincelles  des  pierres  à  feu  ;  en 
battant  deux  cailloux  l'un  contre  l'autre,  ou  avec 


(1)  Voyez  1.  Macc.  iv.  56...  el  Usser.  ad  an.  j8.|o. 

(2)  1.  Macc.  1.  50.  cl  58. 


(;)  Te|A£V7).  1.  Macc.  1.  ço.  C'est    le    même    terme  qui 
est  traduit  ici  pour  delubra. 
i,4j  Jerem.  xi.   ij. 


II.—  MACCABÉES.  —  X.  -  PURIFICATION   DU  TEMPLE 


215 


6.  Et  cum  laetitia  diebus  octo  egermU  in  modum  taber- 
naculorum,  recordantes"quod,  ante  modicum  temporis, 
diem  solemnem  tabernaculorum  in  montibus  et  in  spelun- 
cis,  more  bestiarum,  egerant. 


0.  Ils  célébrèrent  cette  fête  avec  grande  joie  pendant 
huit  jours,  comme  celle  des  tabernacles,  se  souvenant 
qu'ils  avaient  passé  peu  de  temps  auparavant  la  fête 
solennelle  des  tabernacles  sur  les  montagnes  et  dans  les 
cavernes,  où  ils  vivaient  comme  les  bêtes. 


COMMENTAIRE 


de  l'acier  (1),  et  recevant  les  étincelles  dans  du 
linge  sec,  ou  dans  quelque  autre  matière  inflam- 
mable. Ce  feu  passait  pour  plus  pur  et  plus  saint 
que  le  feu  ordinaire,  qui  a  déjà  servi  à  divers  usa- 
ges communs.  L'Église  imite  cette  cérémonie 
respectueuse  des  Juifs,  en  faisant,  le  jour  du 
Samedi  saint,  du  feu  nouveau,  qu'elle  tire  d'un 
caillou,  ou  d'une  pierre  à  fusil.  Quelques  com- 
mentateurs (2)  ont  cru  que  Judas  ayant  fait  chauf- 
fer au  feu  des  pierres,  jusqu'à  les  rendre  toutes 
brûlantes,  leur  avait  appliqué  une  matière  com- 
bustible, qui  servit  à  mettre  le  feu  au  bois  de 
l'autel.  Le  grec  et  le  syriaque  sont  très  favorables 
à  cette  opinion.  D'autres(2)  veulent  que  les  Juifs, 
après  avoir  mis  le  bois  sur  l'autel,  se  soient 
adressé  à  Dieu,  et  aient  obtenu  du  ciel  un  feu 
miraculeux,  qui  sortit  de  la  pierre. 

Les  païens,  qui  avaient,  comme  les  Hébreux, 
la  coutume  de  conserver  un  feu  perpétue!  dans 
leur  temple  (4),  auraient  cru  manquer  au  respect 
dû  à  la  divinité,  s'ils  se  fussent  servi  d'un  feu 
commun  et  ordinaire,  pour  rallumer  celui  qu'ils 
regardaient  comme  sacré,  lorsque,  par  hasard,  il 
était  éteint.  C'était  déjà  une  chose  à  expier,  que 
cette  extinction;  on  punissait  sévèrement  ceux 
qui,  par  leur  faute  ou  autrement,  avaient  contri- 
bué à  ce  malheur  ;  et  on  avait  inventé  diverses 
manières,  pour  allumer  cette  flamme  sacrée.  A 
Delphes,  on  en  tirait  d'un  miroir  ardent  ;  à  Rome, 
également,  selon  quelques  auteurs.  On  avait  un 
vase  d'airain  battu  et  fort  luisant  à  trois  faces, 
dont  les  rayons  venant  se  réunir  au  centre,  ou 
au  foyer,  qui  était  rond,  allumaient  la  matière 
qu'on  lui  exposait,  comme  nous  le  voyons  dans 
nos  miroirs  ardents.  Sextus(^)  assure  que  lorsque 
le  feu  sacré  de  Vesta  était  éteint,  la  vestale,  par 
la  négligence  de  qui  ce  malheur  était  arrivé,  était 


fouettée  par  le  pontife;  et,  pour  rallumer  le  feu, 
on  taraudait  le  tronc  desséché  d'un  arbre  fruitier, 
jusqu'à  ce  que  le  bois  s'enflammât  ;  alors  la  ves- 
tale portait  ce  feu  dans  le  temple,  dans  un  crible 
d'airain.  On  renouvelait  ce  feu  tous  les  ans,  vers 
les  calendes  de  mars  (6),  quoiqu'il  ne  fût  pas 
éteint. 

Adde  quod  arcani  fieri  novus  ignis  in  asJe 
Dicitur,_et  vires  flamma  refecta  capit. 

On  connaît  la  dévotion  des  Guèbres  pour  le 
feu  (7).  On  n'éteint  le  feu  sacré  en  Perse  qu'à  la 
la  mort  des  rois.  Alexandre  le  Grand  ordonna 
qu'on  l'éteignit  dans  toute  la  Perse,  aux  obsèques 
d'Éphestion  son  ami  (8). 

Ces  pratiques  étaient  superstitieuses  chez  les 
païens  :  chez  les  Hébreux,  elles  étaient  fondées 
sur  diverses  déclarations  assez  sensibles  de  la 
volonté  de  Dieu.  On  sait  avec  quelle  sévérité 
Dieu  punit  Nadab  et  Abiu,  fils  d'Aaron,  pour 
avoir  osé  présenter  l'encens  sur  l'autel,  avec  un 
feu  étranger  (9).  Jérémie,un  peu  avant  la  captivité, 
eut  la  précaution  de  cacher  le  feu  sacré  (10),  et 
au  retour  de  Babylone,  à  la  dédicace  du  second 
temple,  Dieu  fit  un  miracle  éclatant,  pour  renou- 
veler le  feu  sacré  ;  on  vit  la  flamme  s'élever  du 
bois,  qui  avait  été  arrosé  de  l'eau  du  puits,  où  le 
feu  avait  été  caché  si  longtemps  auparavant(  1 1  ). 

Post  biennium.  Deux  ans  après  que  Judas  eut 
pris  le  gouvernement  du  peuple  (12),  et  trois  ans 
après  la  profanation  du  temple  (13). 

j}\  6.  In  modum  tabernaculorum.  Non  seule- 
ment ils  la  célébraient  avec  la  même  solennité  que 
celle  desTabernacles  ;  mais  même  avec  les  mêmes 
cérémonies,  puisqu'ils  allaient  autemple  avec  des 
branches  vertes  ou  des  bâtons  environnés  de  feuil- 
lages et  des  palmes. 


(\)  Lrran.  Menoc.  Marian.  Sacr,  Usser.  ad  an.  M.  j8fo. 

(2)  Scrar.  et  Srr.  et  Grxc.  Kal  7:jpà>javTE;  X.'Uou;,  v.<x( 
KÙo  ex  toùtcov  Xaoôvïe:,  <x'ji\vs.yy.of.'/  (W;av. 

(?l  Gortonid.  I.  xm.  Et  ut  videlur  Tirinus  nec  aliénas  est 
Serar.  Ita  et  Arabs    in   Polrglott.    Paris.  -  n.   Macc.  c.  9. 

(4)  Tels  étaient  les  Athéniens,  qui  entretenaient  une 
lampe  perpétuelle  à  Minerve,  Plut,  in  fila  Numce.  Les 
Delphiens,  les  Perses,  les  Mèdes,  les  Chaldéens,  les 
Assyriens,  les  Romains,  les  Bretons,  avaient  aussi  la 
coutume  d'entretenir  dans  leurs  temples  un  feu  éternel. 
Alex.  ab.  Alex.  I.  v.  c.  12.  Génial,  dier. 

(s)  Sext.  Pompeius,  voce  ignis.  Ignis  Vestaî  si  quando 
interstinctus   esset,    virgines    verberibus    alliciebantur  a 


pontifice,  quibus  mos  erat  tabulam  felicis  materias  tandiu 
terebrare  quousque  exceptum  ignem  cribro  asneo  virgo 
in  asdem  ferret. 

(6)  Ovid.  Fust.  I.  m. 

•7)  Doellinger,  Pagan.  et  judai.  11.  19  j. 

^8)  Diodor.  Sicul.  I.  xvn.  -  Doellinger,  Pagan.  et  jud.xi 
11.  et  111.  passim.  -  Vossius  de  Idotolat.  id. 

(9)  Leml.  x.  1.  et  2.  3 

(10)  11.  Macc.  1.  18.  10,  cl  seq.  et  11.  1. 

(11)  Ibid.  et  1.  Macc.  1.  20.  21.  etc. 

(12)  Usser.  ad  an.  5840. 

(ij)  1.  Macc.  îv.  'il.  54.  -  Joseph.  Antiq.  xm.  11. 


2l6 


II.  —  MACCABEES.  —  X.  -  MORT  DE   PTOLEMEE   MACER 


7.  Propter   quod  thyrsos,  et  ramos  virides,  et    palmas 
praeferebant  ei  qui  prosperavit  mundari  locum  suum. 


8.  Et  decreverunt,  communi  prascepto  etdecreto,  uni- 
vers» genti  Judasorum,  omnibus  annis  agere  dies  istos. 

9.  Et  Antiochi  quidem,  qui  appellatus  est  Nobilis,  vitaa 
excessus  ita  se  liabuit. 

10.  Nunc  autem  de  Eupatore,  Antiochi  impii  filio,  quas 
gesta  sunt  narrabimus,  breviantes  mala  quas  in  bellis  gesta 
sunt. 

11.  Hic  enim,  suscepto  regno,  constituit  super  negolia 
regni  Lysiam  quemdam,  Phccnicis  et  Syrire  militiae  prin- 
cipem. 

12.  Nam  Ptolemœus,  qui  dicebatur  Macer,  justi  tenax 
erga  Judœos  esse  constituit,  et  prœcipue  propter  iniqui- 
tatem  quae  facia  erat  in  eos,  et  pacifiée  agere  cum  eis. 


ij.  Sed  ob  hoc  accusatus  ab  amicis  apud  Eupatorem, 
cum  fréquenter  proditor  audirel,  eo  quod  Cyprum  crédi- 
tant sibi  a  Philometore  deseruisset,  et  ad  Antiochum  No- 
bilem  translatus  etiam  ab  eo  recessisset,  veneno  vitam 
finivit. 


7.  C'est  pourquoi  ils  portaient  des  bâtons  couverts  de 
feuillages,  des  rameaux  verts  et  des  palmes  en  l'honneur 
de  Celui  qui  leur  avait  procuré  la  liberté  de  purifier  son 
temple. 

8.  Et  ils  enjoignirent,  par  une  déclaration  et  une  or- 
donnance unanime,  à  toute  la  nation  des  Juifs,  de  célé- 
brer cette  fête  tous  les  ans  les  mêmes  jours. 

g.  Telle  fut  donc  la  mort  d'Antiochus  qui  fut  appelé 
l'Illustre. 

10.  Nous  raconterons  maintenant  les  actions'd'Eupator, 
fils  de  cet  impie  Antiochus,  et  nous  abrégerons  le  récit 
des  maux  qui  sont  arrivés  pendant  ses  guerres. 

11.  Ce  prince,  étant  parvenu  à  la  couronne,  établit 
pour  la  conduite  des  affaires  de  son  royaume,  un  certain 
Lysias,  général  des  armées  de  Phénicie  et  de  Syrie. 

12.  Car  Ptolémée,  surnommé  le  Maigre,  résolut  d'ob- 
server religieusement  la  justice  envers  les  Juifs,  princi- 
palement à  cause  de  ce  traitement  si  injuste  qu'on  leur 
avait  fait,  et  d'agir  toujours  avec  un  esprit  de  paix  à  leur 
égard. 

ij.  C'est  pourquoi  étant  accusé  auprès  d'Eupator  par 
ses  favoris,  qui  le  traitaient  souvent  de  traître,  parce 
qu'il  avait  abandonné  Chypre  que  le  roi  Philométor  lui 
avait  confiée,  et  qu'après  être  passé  dans  le  parti  d'An- 
tiochus l'Illustre,  il  s'était  encore  éloigné  de  ce  prince, 
il  mit  fin  à  sa  vie  par  le  poison. 


COMMENTAIRE 


jt\  7.  Thyrsos  et  ramos  virides,  et  palmas. 
Le  grec  (1)  :  Des  Thyrses,  de  belles  branches  et 
des  palmes.  Le  thyrse  signifie  proprement  un  bâ- 
ton orné  de  feuillages,  ou  de  branches  de  lierre 
ou  de  vigne  ,que  les  païens  donnaient  comme 
attribut  à  Bacchus  et  aux  Bacchantes.  Ilseprend 
aussi  quelquefois,  pour  un  simple  rameau  de  ver- 
dure (2).  Ce  que  le  texte  appelle  de  belles  bran- 
ches, est  tiré  du  livre  du  Lévitique,  où  il  est 
ordonné  de  prendre  des  branches  des  plus  beaux 
arbres,  avec  leurs  fruits,  pour  célébrer  la  fête  des 
Tabernacles  (3). 

f.  8.  Decreverunt  communi  pr/ecepto. 
Voyez  1.  Macc.  iv,  ^9,  Joseph.  Anliq.  lib.  xn, 
chap.  11,  et  11.  Macc.  1,  9. 

jK  11.  Constituit  super  negotia  regni  Ly- 
siam quemdam  PHENICIS  ET  SyRI^Î  MILITI/E  prin- 
cipem.  C'est  ainsi  que  Lysias  le  publiait,  et  vou- 
lait qu'on  le  crût  :  mais  au  fond,  c'était  lui-même 
qui  s'était  donné  cet  emploi,  et  qui  usurpait  la 
régence  du  royaume  sous  un  jeune  prince  âgé 
seulement  de  neuf  ans.  Voyez  le  chapitre  ix,  29. 

Lysias  était  non  seulement  gouverneur  de  la 
Phénicie  et  de  la  Syrie,  mais  généralement  de 
toutes  les  provinces  qui  obéissaient  à  Eupator,  de- 
puis l'Euphrate  jusqu'aux  frontières  de  l'Egypte, 


et  cela,  avant  même  la  "mort  d'Antiochus  Épi- 
phane  (4). 

$.  12.  Ptolem^us  qui  dicebautr  Macer. 
Ptolémée  surnommé  Macer,  ou  plutôt  Macron, 
comme  porte  le  grec  (5).  Macron  signifie  le  long, 
haut  de  taille  :  et  Macer,  en  latin,  signifie  maigre. 
Ce  Ptolémée  est  celui  dont  on  a  parlé  plus 
haut  (6)  ;  il  fut  longtemps  en  honneur  et  en  crédit 
à  la  cour  d'Antiochus  Epiphane  ;  mais  ayant 
témoigné  d'une  manière  trop  sincère,  qu'il  n'ap- 
prouvait pas  la  conduite  qu'on  tenait  envers  les 
Juifs  et  souhaitant  qu'on  leur  rendit  la  paix,  il 
devint  suspect  à  Lysias.  On  voulut  le  faire  passer 
pour  un  traître,  et  on  disait  à  la  cour,  que,  comme 
il  avait  trahi  le  roi  d'Egypte,  en  livrant  l'île  de 
Chypre  à  Antiochus  Epiphane,  il  voulait  aussi 
trahir  celui-ci,  en  favorisant  les  Juifs.  Ne  pouvant 
souffrir  ces  reproches,  Ptolémée  résolut  de  finir 
sa  vie  par  le  poison.  Polybe  dit  à  sa  louange, 
qu'il  ne  tenait  rien  des  défauts  des  Égyptiens, 
mais  qu'il  était  prudent  et  homme  d'exécution  (7). 

f.  n.  Et  ad  Antiochum  nobilem  translatus 
etiam  ab  EO  recessisset.  On  disait  qu'il  trahis- 
sait ses  intérêts,  en  favorisant  les  Juifs  ;  on  le 
soupçonna  peut-être  d'avoir  reçu  d'eux  de  l'ar- 
gent. Le  grec  est  un  peu  différent  (8).  Se   voyant 


(1)  0ûpŒOu;,   /.ai    y.).x5ou;    {ôpa?ouç,   ïn    Se    -/.ai  tpoiv'/a; 
è'-/ovte;' 

(2)  Auclor.  Comment,  in  Horal.  Epod.  16.  Thyrsi,  et  ar- 
borum  rami  sunt,  et  velamenta  puellarum. 

(j)  Lcvti.  xxin.  40.—  (4)  1.  Macc    m.  $2. 
(5)  llToXsij.aîc;     ô    xaXotiu.Evo;    |/cMpioy.     Le    syriaque: 
Maccdo. 


(6)  11.  Macc.  iv.  45;  vin.  8. 

(7)  Polyb.  in  excerpt.  Valcs.  p.  126.  IlT<AEu.aîo;  ô  cj-epa- 
•crj^oç  ô  w.z  KuTtpov,  oùootfjiwç  A'tyuTiTiaxo;  Ys'yovsv,  àXXà 
v0ovE/r)C  xai  TCpa/.TCxoç. 

(#)  Ka;  r.po;  A'vrfojrov  tov  E'^tyavîj  âva/topfjsai  |/fj-* 
èuYÊvrj  tJjv  è^ow7''av  ë/oov. 


II.  ~  MACCABÉES.  —  X.  -   EXPLOIT  DE  JUDAS  MACCABEE 


217 


14.  Gorgias  autem,  cum  esset  dux  locorum,  assumptis 
advenis,  fréquenter  Judasos  debellabat. 

15.  Judosi  vero,  qui  tenebant  opportunas    munitiones, 
fugatos  ab  Jerosolymis  suscipiebaut,  et  bellare  tentabant. 


16.  Hi  vero  qui  erant  cum  Machabaso,  per  orationes 
Dominum  rogantes  ut  essetsibi  adjutor,  impetum  fecerunt 
in  munitiones  Idumasorura  ; 

17.  Multaque  vi  insistentes,  loca  oblinuerunt,  occur- 
rentes  interemerunt,  et  omnes  simul  non  minus  viginti 
millibus  trucidaverunt. 

18.  Quidam  autem,  cum  confugissent  in  duas  lurres 
valde  munitas.  omnem  apparatum  ad  repugnandum  ha- 
bentes, 

19.  Machabaeus  ad  eorum  expugnationem,  relicto  Si- 
mone, et  Josepho,  itemque  Zachaeo,  eisque  qui  cum  ipsis 
erant  satis  multis,  ipse  ad  eas,  quas  amplius  perurgebant, 
pugnas  conversus  est. 

20.  Hi  vero  qui  cum  Simone  erant  cupiditate  ducti,  a 
quibusdam  qui  in  turnbus  erant  suasi  sunt  pecunia,  et 
septuaginta  millibus  didrachmis  acceptis,  dimiserunt 
quosdam  effugere. 

21.  Cum  autem  Machabseo  nuntiatum  esset  quod  fac- 
tum  est,  principibus  populi  congregatis,  accusavit,  quod 
pecunia  fratres  vendidissent,  adversariis  eorum  dimissis. 

22.  Hos  igitur  proditores  factos  interfecit,  et  confes- 
tim  duas  turres  occupavit. 


14.  Or,  Gorgias,  qui  commandait  vers  la  Palestine, 
ayant  pris  avec  lui  des  troupes  étrangères,  combattait 
souvent  et  maltraitait  fort  les  Juifs. 

iç.  D'un  autre  côté,  les  Juifs  qui  tenaient  des  places 
fortes  et  d'une  situation  avantageuse,  recevaient  ceux 
qui  avaient  été  chassés  de  Jérusalem,  et  cherchaient  les 
occasions  de  faire  la  guerre. 

16.  Cependant  ceux  qui  étaient  avec  Maccabée,  ayant 
conjuré  par  leurs  prières  le  Seigneur  de  venir  à  leur 
secours,  attaquèrent  avec  une  grande  vigueur  les  forte- 
resses des  Iduméens. 

17.  Et, après  un  rude  combat,  ils  s'en  rendirent  maîtres, 
taillèrent  en  pièces  tout  ce  qu'ils  rencontrèrent  ;  et  tous 
ensemble  ne  tuèrent  pas  moins   de    vingt  mille    hommes 

18.  Quelques-uns  s'étant  retirés  dans  deux  tours  extrê- 
mement fortes,  où  ils  avaient  tout  ce  qui  était  néces- 
saire pour  se  bien  défendre, 

19.  Maccabée  laissa  pour  les  forcer  Simon,  Joseph  et 
Zachée,  et  des  troupes  assez  nombreuses  qu  ils  avaient 
avec  eux;  et  pour  lui,  il  s'occupa  des  expéditions  les 
plus  pressantes. 

20.  Mais  les  gens  de  Simon,  poussés  par  un  mouve- 
ment d'avarice,  se  laissèrent  gagner  pour  de  l'argent 
par  quelques-uns  de  ceux  qui  étaient  dans  ces  tours,  et 
ayant  reçu  soixante-dix  mille  didrachmes,  en  laissèrent 
échapper  queiques-uns. 

ai.  A  cette  nouvelle,  Maccabée  assembla  les  premiers 
du  peuple,  et  accusa  ces  gens-là  d'avoir  vendu  leurs 
frères  pour  de  l'argent,  en  laissant  échapper  leurs  en- 
nemis. 

22.  Et  après  avoir  fait  mourir  ces  hommes  devenus 
traîtres,  il  força  aussitôt  les  deux  tours. 


COMMENTAIRE 


accusé  par  ses  amis  auprès  d'Antiochus  Eupator, 
et  désigné  comme  un  traître  parce  qu'il  avait  livré 
l'île  de  Chypre,  qui  lui  avait  été  confiée  par  Phi- 
lométor  ;  et  comme  après  avoir  embrassé  le  parti 
d'Antiochus  Êpiphane,  on  ne  lui  donnait  point  un 
emploi  proportionné  à  sa  dignité  ;  à  la  lettre,  qu'on 
ne  lui  donnait  pas  une  puissance  noble,  Ptolémée 
prit  du  poison  et  se  fit  mourir. 

f.  14.  Gorgias  cum  esset  dux  locorum. 
Gorgias  était  un  ancien  capitaine  fort  expérimen- 
té (3),  qui  commandait  dans  l'Idumée  et  avait  le 
gouvernement  des  places  de  la  Palestine, qui  sont 
sur  lacôte  delà  Méditerranée,  au  midi  du  mont 
Carmel  ;  comme  il  manquait  de  monde  ou  d'ar- 
gent, il  ne  pouvait  tenir  la  campagne;  mais  il  tirait 
la  guerre  en  longueur  (4),  attendant  l'occasion  de 
battreles  Juifs,  et  profitant  de  tous  les  avantages 
que  le  temps  lui  fournissait. 

f.    I  =;.  JUD.EI  VERO     QUI    TENEBANT    OPPORTUNAS 

munitiones.  On  peut  l'entendre  des  Juifs  renégats 
qui  tenaient  pour  Antiochus,  et  qui  recevaient 
dans  leurs  forteresses,  ceux  que  Judas  chassait  de 
Jérusalem.  Le  grec   (5)   et  le   syriaque  portent 


que  leslduméensqui  tenaient  les  forteresses, don- 
naient beaucoup  de  soucis  aux  Juifs,  et,  recevant 
dans  leurs  places  les  fuyards  de  Jérusalem,  ils 
s'efforçaient  de  traîner  la  guerre  en  longueur,  de  la 
soutenir  avec  Gorgias,  de  lasser  les  Juifs,  de  les 
tenir  en  bride.  La  suite  fait  voir  en  effet  que 
c'étaient  les  Iduméens  qui  tenaient  les  forteresses, 
et  non  pas  les  Juifs. 

jh  16.  Impetum  fecerunt  in  munitiones  Idu- 
m^orum.  Ils  attaquèrent  les  forteresses  des  Idu- 
méens, ces  forteresses  dont  on  vient  de  parler, 
qui  étaient  dans  le  pays  méridional  de  Juda,  oc- 
cupé alors  par  les  Iduméens.  Voyez  les  particula- 
rités de  cette  guerre  dans  1.  Macc.v. versets  3,4; 
Joseph,  antiq.  xn.  c.  11. 

y.  18.  Cum  confugissent  in  duas  turres.  Ce 
furent  apparemment  les  fils  de  Béan,  qui  se  reti- 
rèrent dans  ces  tours.  L'histoire  en  est  plus  cir- 
constanciée ici,  que  dans  le  premier  livre  des 
Maccabées  (1). 

,v.  20.  Septuaginta  millibus  didrachmis.  Le 
didrachme  à  cette  époque,  valait  environ  1  fr.  75. 


(1)  Sup.  vin.  9.  et  infra  xn.  52. 

(2)  Fréquenter  Judasos  debellabat.  Grec.  Iiap^.aaa 
^po;  toj;  I'ouîaiou;  lnoXerjio:pdcp£i  Bellum  ducebat,  vel 
trahebat.   Grot. 


(5)  0'fi°u  Sa  TOÔtco  y. ai  ôi  I'ooujj.atoi  éy/.pairsî?  Iwy.a'ptov 
<r/u,.)â(j.âTG)v  o'vcEç,  èfûjxvaÇov  xoù;  I'ouSaiouç,  xa'i  toù; 
cpuyaosuOcvca;  ârcô  I  'eposuXû(j.u>v  7:poaXa6ôu.evoi  TioXejjiOTpo- 

tfSÎV    ïJVE/EipoCiy. 

(4)  1.  Macc.  v.  4.  5. 


:l8 


II.  —  MACCABÉES.—  X.-  INVASION   DE  TIMOTHÉE 


2j.  Armis  autem  ac  manibus  omnia  prospère  agendo, 
in  duabus  munitionibus  plus  quam   viginti  millia  peremit. 

24.  At  Timotheus,  qui  prius  a  Judasis  fuerat  superatus, 
convocato  exercitu  peregrinse  multitudinis,et  congregato 
equitatu  asiano,  advenit  quasi  armis  Judœam  capturus. 

25.  Machabasus  autem,  et  qi-i  cum  ipso  erant,  appro- 
pinquante  illo,  deprecabantur  Dominum,  caput  terra  as- 
pergentes,  lumbosque  ciliciis  praecincti, 

26.  Ad  altaris  crepidinem  provoluti,  ut  s'.bi  propitius 
inimicis  autem  eorum  esset  inimicus,  et  adversariis  •  ad- 
versaretur,  sicut  lex  dicit. 

27.  Et  ita  post  orationem,  sumptis  armis,  longius  de 
civitate  procedentes,  et  proximi  hostibus  effecti,  rese- 
derunt. 

28.  Primo  autem  solis  ortu  utrique  commiserunt,  isti 
quidem  victorias  et  prosperifatis  sponsorem  cum  virtute 
Dominum  habentes,  illi  autem  ducem  bel  1  i  animum  ha- 
bebant. 


2;.  Tout  céda  heureusement  à  la  valeur  de  ses  armes 
il  tua  dans  ces  deux  places  plus  de  vingt    mille   hommes 

24.  Mais  Timothée,  qui  avait  auparavant  été  vaincu 
par  les  Juifs,  ayant  levé  une  armée  de  troupes  étran- 
gères, et  rassemblé  de  la  cavalerie  d'Asie,  vint  en  Judée, 
s'imaginant  s'en  rendre  maître  par  les  armes. 

25.  Dans  le  temps  même  qu'il  approchait,  Maccabée 
et  ceux  qui  étaient  avec  lui,  conjurèrent  le  Seigneur,  la 
cendre  sur  la  tête,  les  reins  couverts  d'un  cilice, 

26.  Prosternés  a  1  pied  de  l'autel,  de  leur  être  favo- 
rable, et  de  se  déclarer  l'ennemi  de  leurs  ennemis,  et 
l'adversaire  de  leurs  adversaires,  selon  la  parole  de  la 
loi. 

27.  Ayant  ainsi  pris  les  armes  après  la  prière,  et 
s'étant  avancés  assez  loin  de  la  ville,  ils  s'arrêtèrent  lors- 
qu'ils furent  près  des  ennemis. 

28.  Aussitôt  que  le  soleil  commença  à  paraître,  les 
deux  armées  marchèrent  l'une  contre  l'autre;  les  uns 
ayant,  outre  leur  valeur,  le  Seigneur  même  pour  garant 
de  la  victoire  et  du  succès  de  leurs  armes;  et  les  autres 
n'ayant  pour  guide    dans  le  combat  que   leur   courage. 


COMMENTAIRE 


$.  23.  Plusquam  viginti  millia  peremit.  Quand 
on  parle  de  tours,  il  ne  faut  pas  entendre  une 
seule  tour  ;  c'étaient  des  forteresses  défendues 
par  quelques  tours  d'une  force  et  d'une  grandeur 
extraordinaires.  On  lit  ailleurs  que  Judas  y  mit 
le  feu  et  les  brûla,  avec  tous  ceux  qui  étaient  de- 
dans (1). 

f.  24.  Timotheus,  qui  prius  a  Jud^eis  fuerat 
superatus.  Il  fut  battu  avec  Bacchide,  par  Judas 
Maccabée,  peu  de  temps  après  la  célèbre  victoire 
remportée  sur  Nicanor  (2). 

f.  26.  Ad  altaris  crepidinem  provoluti.  Le 
grec  (5):  Ils  se  prosternèrent  sur  le  pavé,  qui  est 
vis-à-vis  l'autel  du  parfum,  c'est-à-dire,  devant  le 
Saint,  entre  l'autel  des  holocaustes,  et  le  vesti- 
bule du  temple  :  Inter  vestibulum  et  allare,  comme 
parle  Joël  (4).  C'est  l'endroit  ordinaire  où  les  prê- 
tres se  prosternaient  pour  prier  dans  les  calamités 
publiques. 

Ut  adversariis  adversaretur,  sicut  lex  di- 
cit. De  se  déclarer  l'adversaire  de  leurs  adversai- 
res, selon  la  parole  de  la  Loi,  qui  porte  (5):  Si 
feceris  omnia  quœ  loquor,  inimicus  ero  inimicis 
luis;  et  affligam  affligeâtes  le. 

jr,  27.  Longius  de  civitate  procedentes.  Ils 
attaquèrent  Timothée  et  le  défirent,  avec  le  se- 
cours de  cinq  anges,  qui  parurent  comme  des 
cavaliers,  trois  en  l'air  et  deux  au  côté  de  Judas, 
pour  le  protéger  et  pour  le  mettre  à  couvert  avec 
leurs  armes. 

f.  28.  Isti  quidem  victori/e  et  prosperitatis 


sponsorem  cum  virtute  Domini  habentes.  La 
victoire  que  Judas  avait  remportée  sur  Timothée, 
quelque  temps  auparavant,  ne  l'avait  point  enor- 
gueilli. La  foi  le  convainquait  que  c'était  Dieu 
qui  le  rendait  victorieux  ;  elle  le  tenait  toujours 
dans  la  même  disposition  d'esprit  devant  lui,  et 
lui  inspirait  également,  avant  et  après  la  victoire, 
des  sentiments  d'une  profonde  humilité  en  sa  pré- 
sence. C'est  pourquoi  il  est  dit  ici  que,  lorsqu'il 
vit  approcher  ce  général  qu'il  avait  déjà  vaincu, 
il  se  prosterna  avec  les  siens  devant  Dieu,  se  cou- 
vrit la  tête  de  cendre,  et  ceignit  ses  reins  d'un  cilice, 
pour  le  conjurer  de  se  déclarer  l'ennemi  de  leurs 
ennemis.  Il  n'agissait  pas  ainsi  par  timidité,  mais 
par  un  effet  de  cette  foi  éclairée,  qui  lui  faisait 
regarder  le  Tout-Puissant  comme  le  Dieu  des 
armées.  Car  on  ne  doit  pas  s'imaginer  que  la  piété 
véritable  inspire  la  lâcheté  ;  puisque  la  foi,  au 
contraire,  rend  les  hommes  intrépides.  Elle  ne 
les  rend  donc  pas  lâches,  mais  humbles,  et  par 
conséquent  courageux  et  invincibles.  Elie  ne  re- 
tranche du  cœur  de  l'homme  que  l'enflure  de  l'or- 
gueil, qui  le  priverait  du  secours  de  Dieu  ;  et, 
l'empêchant  de  fonder,  comme  ces  peuples  dont 
il  est  parlé  ici,  sa  victoire  sur  sa  propre  force, 
elle  l'oblige,  sans  le  dépouiller  de  sa  valeur,  à 
prendre  pour  guide  dans  ses  combats  le  Seigneur 
même  qui  se  déclare  toujours  pour  les  humbles, 
et  qui,  résistant  aux  superbes,  fit  mériter  à  l'hum- 
ble Judas  et  à  ses  saints  compagnons,  de  triom- 
pher de  l'orgueil  de  leurs  ennemis. 


(1)  lbid.  jr.  5. 

(2)  11.  Macc.  vin.  ;o. 

(j)  E'tç  it)v  anévavci  xoù   0uacao,C7|p''ou   Y.^r.loa    jtpoaree- 
oôvte;. 


(4)  Joël  11.  17. 

(;)  Exod.    xxiii.    22.  \oyez__I.evit.  xxvi.   7.8.    cl    scq. 

Dilll.   vil.   15.   10. 


II.—  MACCABÉES.  —  X   -  DÉFAITE  DE  TIMOTHÉE 


219 


29.  Sed,  cum  vehemens  pugna  esset,  apparuerunt  ad- 
versariis  de  caelo  viri  quinque  in  equis,  frenis  aureis 
decori,  ducatum  Judasis  prajstantes. 

50.  Ex  quibus  duo  Machabasum  médium  habentes,  ar- 
mis  suis  circumseptum  incolurnem  conservabant  ;  in  ad- 
versarios  autem  tela  et  fulmina  jaciebant,  ex  quo  et  cœ- 
citate  confusi,  et  repleti  perturbatione,  cadebant. 

jl.  Interfecti  sunt  autem  viginti  millia  quingenti,  et 
équités  sexcenti. 

;2.  Timotheus  veto  confugit,  in  Gazaram,  praesidium 
munitum,cui  prœerat  Chasreas. 

;;.  Machabœus  autem,  et  qui  cum  eo  erant,  lsetantes 
obsederunt  praesidium  diebus  quator. 

54.  At  hi  qui  intus  erant,  loci  firmitate  confisi,  supra 
niodum  maledicebant,  etsermonss  nefandos  jactabant. 

}>.  Sed  cum  dies  quinta  illuscesceret,  viginti  juvenes 
ex  his  qui  cum  Machabaso  erant,  accensi  animis  propter 
blasphemiam,  viriliter  accesserunt  ad  murum,  et  feroci 
animo  incedentes  ascendebant  ; 

36.  Sed  et  alii  similiter  ascendentes,  turres  portasque 
succendere  aggressi  sunt,  atque  ipsos  maledicos  vivos 
concremare. 

57.  Per  continuum  autem  biduum  prœsidio  vastato. 
Timotheum  occultantem  se,  in  quodam  repertum  loco 
peremerunt;  et  fratrem  illius  Chaîream,  et  Apollopha- 
ncm  occiderunt. 


29.  Mais  lorsque  le  combat  était  opiniâtre  de  part  et 
d'autre,  les  ennemis  virent  paraître,  venant  du  ciel,  cinq 
hommes  sur  des  chevaux  ayant  des  freins  d'or  éblouis- 
sants, et  servant  de  guides  aux  Juifs. 

30.  Deux  d'entre  eux  marchant  aux  deux  côtés  de  Mac- 
cabée,  le  couvraient  de  leurs  armes,  afin  qu'il  ne  pût  être 
blessé;  et  les  autres  lançaient  des  traits  et  des  foudres 
contre  les  ennemis,  qui,  frappés  d'aveuglement  et  mis 
en  désordre,  tombaient  morts  devant  eux. 

ji,  Il  y  en  eut  vingt  mille  cinq  cents  de  tués,  et  six 
cents  chevaux. 

52.  Timothée  s'enfuit  à  Gazara,  qui  était  une  place 
forte    où  commandait  Chéréas. 

3î.  Maccabée  et  ceux  qui  étaient  avec  lui,  pleins  de 
joie,  assiégèrent  cette  forteresse    pendant    quatre  jours. 

J4  Ceux  qui  étaient  dedans,  se  confiant  en  la  force 
de  la  place,  les  outrageaient  extraordinairement  par 
leurs  injures,  et  proféraient  des  paroles  abominables. 
•  J5.  Mais,  dès  le  matin  du  cinquième  jour,  vingt  jeunes 
hommes  de  ceux  qui  étaient  avec  Maccabée,  irrités  par 
ces  blasphèmes,  s'approchèrent  courageusement  de  ja 
muraille,  et  y  montèrent  avec  un    courage    inébranlable. 

j6.  Ft  d'autres  y  étant  montés  ensuite,  commencèrent 
à  mettre  le  feu  aux  tours  et  aux  portes,  et  brûlèrent 
tout  vifs  ces  blasphémateurs. 

37.  Ils  pillèrent  et  ravagèrent  tout  dans  la  place  pen- 
dant l'espace  de  deux  jours  entiers;  et,  ayant  trouvé  Ti- 
mothée en  un  certain  lieu  où  il  se  cachait,  ils  le  tuèrent 
avec  son  frère  Chéréas,  et  Apollophanes. 


COMMENTAIRE 


f.  29.  Apparuerunt  adversariis  de  celo  viri 
quinque.  Dieu  rendait,  quand  il  voulait,  son  peu- 
ple victorieux,  sans  faire  paraître  aucun  ange 
pour  le  protéger  ;  mais  quelquefois  il  faisait  voir 
ces  esprits  célestes,  soit  pour  effrayer  davantage 
les  ennemis,  soit  pour  inspirer  un  plus  grand  cou- 
rage à  ses  serviteurs,  et  les  affermir  en  même 
temps  dans  l'humilité,  par  la  vue  même  de  ceux 
qui,  combattant  à  leur  tête,  leur  procuraient  la 
victoire.  L'Écriture  ne  dit  point  ici  si  ces  anges 
du  Seigneur,  revêtus  extérieurement  de  la  îigure 
et  de  l'apparence  d'homme,  furent  vus  des  Juifs  : 
elle  ne  marque  autre  chose  sinon  qu'ils  parurent 
du  ciel  aux  ennemis,  c'est-à-dire,  qu'ils  parurent 
comme  descendre  du  ciel  :  et  peut-être  effective- 
ment que  ni  Judas  ni  ses  gens  ne  les  virent  point. 
Dieu  exerçait  davantage  leur  foi  en  leur  cachant 
la  vue  de  son  assistance. 

La  lumière  de  la  foi  nous  fait  donc  connaître 
que  les  anges  du  Seigneur  combattent  pour  nous 
quand  nous  combattons  pour  lui,  lors  même  que 
nous  ne  les  voyons  pas.  Ils  sont  ses  ministres  pour 
nous  assister  dans  toutes  nos  guerres  spirituelles; 
et  ils  marchent,  pour  ainsi  dire,  à  nos  côtés,  comme 


ceux  qui  marchaient  aux  deux  côtés  de  Judas  Mac- 
cabée ;  afin  de  couvrir  nos  âmes  de  leurs  armes 
invincibles,  et  d'empêcher  que  nous  ne  soyons  bles- 
sés par  les  traits  empoisonnés  des  ennemis  de 
notre  salut. 

jfr.  32.  Gazara.  Voyez  ce  que  nous  avons  dit 
dans  le  livre  précédent(  1).  Les  Juifs  s'étant  rendus 
maîtres  de  cette  place,  en  firent  une  des  meilleures 
forteresses  du  pays. 

Ch/ereas.  C'était  le  frère  de  Timothée, général 
syrien. 

jK  36.  Sed  et  alii  similiter  ascendentes.  Voici 
le  grec  de  tout  le  verset  (2)  :  Les  autres  montant 
de  même  par  des  détours,  ou  par  des  endroits 
écartés  et  mal  défendus,  contre  ceux  qui  étaient 
au- dedans  (3)  mirent  le  feu  aux  tours,  et,  dressant 
des  bûchers,  brûlèrent  ces  blasphémateurs.  Le  sy- 
riaque :  Les  autres  se  hissant  et  sautant  sur  les 
murailles,  brûlaient  ceux  qui  étaient  dans  les  tours, 
etc.  Le  terme  grec  jcEç^nasad;  signifie  proprement 
le  tour  de  conversion  d'une  armée,  à  droite  ou  à 
gauche. 

jfr.  37.  Per  continuum  biduum  pr^sidio  vas- 
tato. Ce  détail  ne  se  lit,  ni  dans  le  grec,  ni  dans 


(1)  Vide  1.  Macc.  iv.  15. 

(2)  E"Tspoi  Se  Ôuloc'oj;    7ïpotjava6âvte;  êv    xw  JtîpctT7ïa<Tu.<3 
r.çià;  toùç  Ëvoov,  J7i'.'[j.^pajy  t«;  7tûpY0U»>  **'<  tupà;  ivà'|av:ê;, 


ïàWta;  xoù;  |3Xaapr)jj.ou;  /.ai^/.atov. 
(j)  Grot.  hic  :  Ubi  non  erant  propugnatores. 


220  II.  —  MACCABÊES.  —  X.  -  ACTIONS  DE  GRACES  DES  JUIFS 

j8.  Quibus    gestis,  in  hymnis   et  confessionibus  bene-  38.  Après  cela,  chantant  des  hymnes  et  des  cantiques, 

dicebant  Dominum,  qui    magna  fecit    in  Israël,  et   victo-       ils  bénissaient    le   Seigneur,   qui   avait    fait   ces    grandes 
riam  dédit  illis.  choses  en  Israël,  et  qui  les  avait   rendus    victorieux  de 

leurs  ennemis. 

COMMENTAIRE 

le  syriaque  ;  voici  ce  qui  s'y  trouveen  la  place  (1  ):  In  quodam   repertum  loco.    Le  grec    (2),  et 

Ils   brisèrent  les  portes,  et,  ayant  fait  entrer  dans  le  syriaque  :    dans    un  certain    creux,  dans    une 

la  forteresse  le  reste  de  Varmée,  ils  se  rendirent  citerne. 
maîtres  de  la  place. 


([)  O'iSiià;  JT'jXa;  Gi:'xo7;-.ov,  ÊisSeÇaixsvo!  oï  tJ;v  Xotnqv  une  citerne,  ou  dans  une  fosse  où  l'on  serre    le    vin  qui 

Ta^'.v,  r.fj:y.ix-.i\i''jQv-.o  if,v  r.6\iv.  coule  du  pressoir,  et  que  les   copistes  ont  corrompu     le 

(2)  E'v  ~.lvi  "ki'.v.ut.  II  y  a  beaucoup  d'apparence  que  texte  en  voulant  le  corriger,  et  en  mettant  in  quodam  loco. 
l'ancien  interprète  latin  avait    mis    in   quodam  lacu,  dans 


CHAPITRE  XI 

Lysias  vient  en  Judée  avec  une  armée  nombreuse.  Les  Juifs  invoquent  le  Seigneur,  et 
remportent  la  victoire.  Lysias  leur  demande  la  paix  :  Judas  l'accorde.  Lettre  de  Lysias 
aux  Juifs.  Lettres  d'Antiochus  Eupalor  à  Lysias  et  aux  Juifs.  Lettre  des  Romains 
aux  Juifs. 


i.  Sed  parvo  post  tempore,  Lysias,  procuratorregis, 
et  propinquus,  ac  negotiorum  prœpositus,  graviter  ferens 
de  his  quae  acciderant, 

2.  Congregatis  octoginta  millibus,  et  equitatu  universo, 
veniebat  adversus  Judaeos,  existimans  se  civitatem  qui- 
dem  captam  gentibus  habitaculum  facturum  ; 

j.  Templum  vero  in  pecuniœ  quaastum,  sicut  cetera 
delubra  gentium,  habiturum,  et  per  singulos  annos  vénale 
sacerdotium  ; 

4.  Nusquam  recogitans  Dei  potestatem,  sed  mente 
effrœnatus,  in  multitudine  peditum,  et  in  inillibus  equi- 
tum,  et  in  octoginta  elephantis  confidebat. 


1.  Peu  de  temps  après,  Lysias,  gouverneur  du  roi  et 
son  parent,  qui  avait  la  conduite  de  toutes  les  affaires 
du  royaume,  étant  sensiblement  touché  de  tout  ce  qui 
était  arrivé, 

2.  Rassembla  quatre-vingt  mille  hommes  de  pied  avec 
toute  la  cavalerie,  et  marcha  contre  les  Juifs,  s'imaginant 
qu'il  prendrait  la  ville,  et  qu'il  la  ferait  habiter  par  les 
gentils  ; 

j.  Qu'il  tirerait  de  l'argent  du  temple  de  Dieu,  comme 
des  temples  païens  ;  et  qu'il  vendrait  tous  les  ans  la  di- 
gnité du  grand  prêtre. 

4.  Ne  faisant  aucune  réflexion  sur  le  souverain  pouvoir 
de  Dieu,  mais  s'abandonnant  à  l'emportement  de  son 
orgueil,  il  mettait  toute  sa  confiance  dans  la  multitude 
de  son  infanterie,  dans  le  grand  nombre  de  sa  cavalerie, 
et  dans  quatre-vingts  éléphants, 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Lysias  procurator  régis,  etpropinquus. 
C'est  le  môme  Lysias,  dont  il  a  été  parlé  plus 
haut  (1)  :  il  était  gouverneur  du  roi,  son  tuteur, 
et  régent  du  royaume  ;  il  avait  supplanté  Philippe, 
et  l'avait  exclus  de  cet  emploi,  auquel  Antiochus 
Épiphane  l'avait  nommé  avant  sa  mort  (2).  Il  est 
nommé  ici  parent  du  roi,  et  plus  loin  frère  du 
roi  (})  ;  il  était  en  effet  du  sang  royal  (4);  mais  ce 
nom  de  frère  ne  lui  convient,  à  la  rigueur,  qu'à 
cause  de  sa  dignité.  Les  empereurs  romains  don- 
naient souvent  cette  qualité  aux  gouverneurs  des 
provinces  (5). 

p.  3.  Templum  in  pecuni;e  quœstum.  Qu'il  lire- 
rail  de  l'argent  du  temple,  comme  d'une  ferme  (6); 
soit  en  vendant  les  charges  et  les  dignités  de  ce 
temple,  soit  en  exigeant  de  l'argent  de  ceux  qui 
y  venaient  offrir  des  victimes.  On  peut  voir  ce  que 
nous  avons  dit  précédemment  sur  le  premier 
livre  des  Macc.  x.  42. 

}.  4.  Nusquam  recogitans  Dei  potestatem 
sed  mente  effrœnatus  in  multitudine  peditum. 
L'aveuglement  des  impies  a  quelque  chose  d'in- 
compréhensible, et  leur  orgueil  entraîne  avec  soi 


des  ténèbres, qui  les  portent  jusqu'àTextravagance. 
Tant  d'expériences  réitérées  auraient  dû  faire 
connaître  à  un  homme  qui  aurait  usé  de  la  seule 
lumière  de  la  raison,  qu'il  y  avait  quelque  chose 
de  surnaturel  dans  les  avantages  que  Judas  Mac- 
cabée  remportait  sur  ses  ennemis.  Plus  le  petit 
nombre  de  ses  troupes  pouvait  paraître  méprisable 
à  Lysias,  plus  il  était  obligé  de  croire  que  Dieu 
combattait  pour  eux  :  et  le  dernier  prodige  de 
cette  apparition  miraculeuse  de  cinq  anges  sous 
la  figure  de  cinq  hommes  qui  avaient  mis  en  dé- 
route l'armée  du  roi,  était  seul  capable  de  faire 
rentrer  ce  général  en  lui-même,  si  l'excès  de  son 
désespoir  et  de  son  orgueil  ne  l'eût  emporté  sur  sa 
raison.  Il  s'abandonna  donc  à  l'impétuosité  de  son 
esprit  que  la  fureur  aveuglait,  et  qui  ne  pouvait, 
dit  l'Écriture,  souffrir  ce  qui  était  arrivé;  c'est-à- 
dire,  et  la  mort  de  Timothée,  et  la  défaite  de  ses 
troupes.  Son  extrême  ambition  et  son  avarice 
excessive  lui  faisaient  d'ailleurs  envisager  la  ville 
de  Jérusalem,  le  temple  de  Dieu,  et  la  dignité  de 
grand  prêtre,  comme  des  objets  très  propres  à 
satisfaire  l'une  et  l'autre,  à  cause  de  la  gloire   et 


vt.   0.    1; 


(1)  1.  Macc.  m.  72;  iv.  25.  J4.    j 
11.  Macc.  x.  11. 

(2)  11.  Macc.  vi.  14.  15.  -  11.  Macc  ix.  29 
[1)  Verset  22.  Lysise  fratri  salutem. 


et  (4)  1.   Macc.    111.    j2.    Lysiam     hominem    nobilem,    de 

génère  regali. 

(5)  Vide  Grot.  ad  y.  22.  et  si  lubcl,  1.  Macc.  xi.  18. 

(6)  To   3à    îepôv    oépvupo).(ÎY^xov  ,    /.aQù>;    T«    Xotrcà    tûy 
èOvw/  lepivr). 


222 


II. 


MACCABÉES.  —  XI.  -  SECOURS  PROVIDENTIEL 


Ç.  Ingressus  autem  Judaeam,  et  appropians  Bethsurae, 
quas  erat  in  angusto  loco.  ab  Jerosolyma  intervallo  quin- 
que  stadiorum,  illud  praesidium  expugnabat. 

t>.  Ut  autem  Machabseus,  et  qui  cum  eo  erant,  cogno. 
verunt  expugnari  prassidia,  cum  fletu  et  lacrymis  roga- 
bant  Dominum,  et  omnis  turba  simul,  ut  bonum  angelum 
mitteret  ad  salutem  Israël. 

7.  Et  ipse  primus  Machabœus,  sumptis  armis,  ceteros 
adhortatus  est  simul  secum  periculum  subire,et  ferre  auxi- 
lium  fratribus  suis. 

8.  Cumque  pariter  prompto  animo  procédèrent,  Jero- 
solymis  apparuit  prœcedens  eos  eques  in  veste  candida, 
armis  aureis  hastam  vibrans. 


9.  Tune  omnes  simul  benedixerunt  misericordem  Do- 
minum, et  convaluerunt  animis,  non  solum  homines,  sed 
et  bestias  ferocissimas,  et  muros  ferreos  parati  pene- 
trare. 

10.  Ibant  igitur  prompti,  de  caelo  habentes  adjutorem, 
et  miserantem  super  eos  Dominum. 


11.  Leonum  autem  more  impetu  irruentes  in  hostes, 
prostraverunt  ex  eis  undecim  mil  lia  peditum,  et  equitum 
mille  sexcentos  : 

12.  Universos  autem  in  fugam  verterunt,  plures  autem 
ex  eis  vulnerati  nudi  evaserunt  :  sed  et  ipse  Lysias  tur- 
piter  fugiens  evasit. 

1?.  Et  quia  non  inser.satus  erat,  secum  ipse  reputans 
factam  erga  se  diminutiontm,  et  intelligens  invictos  esse 
Hebrseos,  omr.ipotentis  Dei  auxilio  innitentes,  misit 
ad  eos  ; 

14.  Promisitque  se  consensurum  omnibus  quae  justa 
sunt,  et  regem  compulsurum  amicum  fieri. 


5.  Étant  entré  en  Judée  et  s'étant  approché  de  Beth- 
sura,  située  dans  un  lieu  étroit,  à  cinq  stades  de  Jérusa- 
lem, il  attaqua  cette  place. 

6.  Lorsque  Maccabée  et  ceux  qui  étaient  avec  lui, 
eurent  su  que  les  ennemis  commençaient  à  attaquer  les 
forteresses,  ils  conjurèrent  le  Seigneur  avec  tout  le 
peuple,  par  leurs  prières  et  par  leurs  larmes,  d'envoyer 
un  bon  ange  pour  le  salut  d'Israël. 

7.  Et  Maccabée  prenant  les  armes  le  premier,  exhorta 
les  autres  à  s'exposer  comme  lui  au  péril,  pour  secourir 
leurs  frères. 

8.  Et  lorsqu'ils  marchaient  tous  ensemble,  avec  un 
courage  assuré,  il  parut  à  la  sortie  de  Jérusalem  un 
homme  à  cheval,  qui  marchait  devant  eux  revêtu  d'un 
habit  blanc  avec  des  armes  d'or,  et  une  lance  qu'il  tenait 
à  la  main. 

9.  Alors  ils  bénirent  tous  ensemble  le  Seigneur  plein 
de  miséricorde,  et  ils  s'animèrent  d'un  grand  courage, 
étant  prêts  à  combattre,  non-seulement  les  hommes, 
mais  les  bêtes  les  plus  farouches,  et  à  passer  au  travers 
des  murailles  de  fer. 

10.  Ils  marchaient  donc  avec  une  grande  ardeur,  ayant 
pour  eux  le  Seigneur,  qui  du  haut  du  ciel  se  déclarait 
leur  protecteur,  et  faisait  éclater  sur  eux  ses  miséri- 
cordes, 

11.  En  même  temps,  ils  se  jetèrent  impétueusement 
sur  leurs  ennemis  comme  des  lions  ;  et  ils  tuèrent  onze 
mille  hommes  de  leur  infanterie,  et  seize  cents    chevaux  : 

12.  Ils  firent  fuir  tout  le  reste,  dont  la  plupart  ne  se 
sauvèrent  que  blessés  et  sans  armes  :  Lysias  même 
n'échappa  que  par  une  luite  honteuse. 

IJ.  Comme  il  ne  manquait  pas  de  sens,  considérant  en 
lui-même  la  perte  qu'il  avait  faite,  et  reconnaissant,  que 
les  Hébreux  étaient  invincibles,  lorsqu'ils  s'appuyaient 
sur  le  secours  du  Dieu  tout-puissant,  il  leur  envoya  des 
ambassadeurs  ; 

14  Et  il  leur  promit  de  consentir  à  toutes  les  condi- 
tions de  paix  qui  seraient  justes,  et  de  persuader  au  roi 
de  devenir  leur  ami. 


COMMENTAIRE 


des  grands  trésors  qu'il  espérait  recueillir  de  cette 
conquête  qui  lui  paraissait  facile.  Ainsi,  ne  son- 
geant en  aucune  façon  au  pouvoir  suprême  du  Dieu 
d' Israël,  il  se  confia  uniquement  dans  la  force  de 
son  infanterie,  de  sa  ca-valerie  et  des  éléphants 
armés  et  exercés  au  combat. 

Telle  est  fort  souvent  la  source  du  renversement 
des  plus  grands  états  ;  et  telle  est  aussi,  selon  le 
sens  spirituel,  l'origine  des  plus  grandes  chutes 
et  de  la  perte  d'un  grand  nombre  d'âmes.  Dieu 
renverse  quelquefois  tous  nos  desseins  ;  et,  pour 
punir  notre  orgueil,  il  permet  que  nous  devenions 
comme  le  jouet  de  nos  ennemis.  On  doit  regarder 
cette  première  punition  comme  un  châtiment 
de  miséricorde,  qui  nous  avertit  d'humilier  notre 
esprit  sous  sa  main  toute-puissante.  Si,  par  une 
confiance  présomptueuse  en  nous-mêmes,  nous 
osons  nous  ailermir  contre  lui,  notre  orgueil  ne 
peut  alors  que  nous  attirer  une  plus  grande 
confusion  et  une  plus  dangereuse  chute.  Heureux 


néanmoins  si,  à  la  fin,  nous  reconnaissons,  comme 
Lysias,  que  la  main  de    Dieu  est  invincible. 

y.  5.  Appropians  Bethsur/E.  On  doit  bien  dis- 
tinguer cette  guerre,  de  celle  qui  est  racontée 
dans  le  premier  livre  de-s  Maccabées  (1). 

Bethsur.*:  ab  Jerosolyma  intervau.o  quinque 
stadiorum.  Les  cinq  stades  ne  faisaient  pas  un 
kilomètre  ;  nous  croyons  que  ce  nombre  est  peu 
correct,  et  que  Bethsur  était  beaucoup  plus  éloi- 
gnée de  Jérusalem.  Eusèbe  et  saint  Jérôme  (2), 
la  mettent  à  vingt  milles  de  cette  ville,  en  tirant 
vers  Hébron,  ce  qui  nous  paraît  beaucoup  plus 
juste.  Bethsur  était  un  château  fort  situé  sur  le 
chemin  de  l'idumée  à  Jérusalem,  environ  à  six 
lieues  de  cette  ville.  Voyez  notre  commentaire, 
sur  Josué,  chapitre  xv.  verset  58. 

y.  8.  Apparuit  prœcedens  eos  eques  in  veste 
candida.  C'était  un  ange  sous  la  forme  d'un  cava- 
lier. Voyez  ce  qu'on  a  dit  ailleurs  des  cinq  cava- 
liers, qui  parurent  à  la  tète  de  l'armée  juive  (3). 


(1)  1.  Macc.  vt.   20.  et  seq. 


(i)  Euscb.  in  Bethsur.  —  (j)  11.  Macc.  x.  29. 


II.  —  MACCABÉES. 


XI.  -  LETTRE   DE   LYSIAS 


225 


15.  Annuit  aufem  Machabosus  precibus  Lysias,  in  om- 
nibus utilitati  consulens  ;  et  quaecumque  Machabasus 
scripsit  Lysias  de  Judasis,  ea  rex  concessit. 

16.  Nam  erant  scriptas  Judasis  epistolae  a  Lysia  quidem 
hune  modum  continentes  :  Lysias  populo  Judasorum,sa- 
lutem. 


15.  Maccabée  se  rendit  aux  prières  de  Lysias,  n'ayant 
pour  but  en  toutes  choses  que'  l'intérêt  du  public  ;  et  le 
roi  accorda  toutes  les  choses  que  Maccabée  demanda 
pour  les  Juifs,  dans  les  lettresqu'il  écrivit  à  Lysias. 

16.  Car  la  lettre  que  Lysias  écrivit  aux  Juifs  était 
conçue  en  ces  termes  : 

Lysias,  au  peuple  juif,  salut  : 


COMMENTAIRE 


Judas  et  les  siens  avaient  demandé  à  Dieu,  par 
leurs  larmes  et  par  leurs  prières,  qu'il  voulût  bien 
envoyer  son  bon  ange  pour  le  salut  d'Israël.  Ainsi 
on  ne  peut  douter  que  cet  homme  qui  parut,  à  la 
sortie  de  Jérusalem,  marcher  à  cheval  à  leur  tête, 
n'ait  été  l'ange  favorable  au  peuple  de  Dieu, 
peut-être, selon  les  commentateurs, l'archange  saint 
Michel,  le  protecteur  des  Hébreux,  et  de  tous  les 
justes.  Ils  marchaient  déjà  avec  un  courage  assuré, 
dit  le  texte  sacré,  lorsque  cet  ange  leur  apparut. 
Ainsi  ils  étaient  soutenus  invisiblement,  avant 
même  que  Dieu  leur  fit  voir  le  ministre  de  sa 
puissance,  qu'il  envoyait  pour  les  secourir.  Car  ils 
vivaient  de  la  foi,  et  ils  agissaient  parle  mouvement 
de  cette  vertu  surnaturelle,  qui  rendait  visibles  aux 
yeux  de  leur  âme  les  choses  les  plus  invisibles. 
Pourquoi  donc  Dieu  leur  fait-il  voir  cet  homme 
à  cheval,  puisqu'ils  marchaient  avec  une  entière 
confiance  en  son  secours,  et  qu'il  semblait  qu'ils 
n'eussent  aucun  besoin  de  cette  apparition  afin 
d'en  être  assurés?  C'était  peut-être  pour  les  affer- 
mir plus  puissamment  dans  l'humilité,  et  les  pré- 
server, dans  la  suite,  d'une  aussi  grande  tentation 
que  le  pouvait  être  leur  victoire  même.  Car  qu'une 
armée  de  quatre-vingt  mille  hommes  de  pied,  de 
quatre-vingts  éléphants,  et  d'une  nombreuse  cava- 
lerie, soit  défaite  par  une  petite  troupe  de  sept 
ou  huit  mille  hommes  ,  c'est  quelque  chose  de  si 
surprenant,  qu'on  peut  dire  que  c'aurait  été  pour 
les  Juifs  le  sujet  d'une  très  redoutable  tentation, 
Ainsi  on  peut  assurer  que  Dieu  leur  fit  une  grâce 
sans  comparaison  plus  grande,  en  leur  ôtant  par 
avance  tout  sujet  de  s'enorgueillir  de  leur  victoire, 
qu'en  leur  procurant  la  victoire  même  sur  leurs 
ennemis. 

y.  15.  Annuit  autem  Machabœus  precibus 
Lysine,  in  omnibus  utilitati  consulens.  Qui 
n'admirera  la  grandeur  de  Dieu,  et  son  extrême 
bonté  envers  son  peuple  ?  Celui  qui  s'était  vanté 
auparavant  de  rendre  Jérusalem  la  retraite  des  na- 
tions, de  s'enrichir  des  dépouilles  du  temple,  et 
de  faire  un  revenu  considérable  de  la  vente  annu- 
elle de  la  dignité  de  grand  prêtre  ;  celui  qui  foulait 
aux  pieds  le  pouvoir  suprême  du  Dieu  d'Israël  et 
qui  se  livrait  tout  entier  à  l'emportement  de  son 
orgueil  ;  celui  qui  se  regardait  comme  invincible, 


au  milieu  de  cette  multitude  de  troupes  armées 
qui  l'environnaient,  est  abattu  tout  d'un  coup  ;  et 
d'audacieux  qu'il  était,  il  devient  suppliant.  Il  re- 
connaît la  toute-puissance  du  secours  de  Dieu:  il 
donne  lui-même  aux  Hébreux  la  qualité  d'invincibles, 
à  cause  de  ce  secours  du  Seigneur  qu'il  appelle  le 
Tout-Puissant  :  enfin  il  est  le  premier  à  demander 
la  paix  à  Judas  Maccabée.  Or  comme  Judas  n'avait 
en  vue,  selon  'l'Écriture,  que  l'intérêt  public  en 
toute  choses  ;  il  se  rendit  aux  prières  de  Lysias. 

Mais  l'intérêt  public  n'était-il  donc  pas  de  pous- 
ser plus  loin  sa  victoire,  et  d'achever  de  détruire 
des  ennemis  qui  cherchaient  toujours  les  occasions 
de  perdre  Israël,  etqui  ne  cessaient  de  lui  insulter 
que  lorsqu'ils  étaient  dans  l'impuissance  de  le 
faire  ?  Il  est  vrai  que  la  politique  du  siècle  aurait 
peut-être  demandé  qu'on  en  usât  de  la  sorte  : 
mais  ce  n'était  point  la  sagesse  que  Dieu  inspirait 
à  Judas  Maccabée.  Quelque  courageux  qu'il  fût, 
quelqu'invincible  qu'il  parût,  il  n'envisageait  la 
guerre  que  comme  un  moyen  pour  parvenir  à  la 
paix,  selon  l'excellente  idée  que  nous  en  donne 
saint  Augustin  dans  ses  ouvrages  :  Pacem  habere 
débet  voluntas,  bellum  nécessitas  ;  non  enim  pax 
quœrilur,  ut  bellum  excitetur  :  sed  bellum  gerilur, 
ut  pax  acquiralur  (1).  Il  savait  que  toutes  les 
guerres,  mêmes  les  plus  justes,  sont  comme  de 
très  grandes  maladies,  et  des  fièvres  très  dange- 
reuses qui  peuvent  être  la  ruine  des  états.  Assuré 
du  secours  de  Dieu  dans  celles  qu'on  lui  suscitait, 
et  qu'il  était  obligé  de  soutenir  pour  la  défense 
de  sa  gloire,  il  avait,  au  contraire,  tout  lieu 
de  douter  de  son  assistance,  s'il  s'engageait  par 
lui-même  à  combattre  les  ennemis,  et  s'il  refusait 
de  procurer  à  ses  frères  un  aussi  grand  bien 
qu'était  celui  de  la  paix,  lorsqu'on  la  lui  deman- 
dait, et  qu'on  lui  laissait  la  liberté  de  s'acquitter 
tranquillement  de  tous  les  devoirs  de  la  .vraie  reli- 
gion. C'était  en  cela  qu'il  regardait  l'intérêt  public 
plutôt  que  sa  propre  gloire,  qui  aurait  pu  le 
porter,  comme  les  héros  mondains,  à  chercher  les 
occasions  de  se  rendre  nécessaire  à  sa  patrie.  11 
jugeait  que  la  seule  chose  qui  fût  nécessaire  alors, 
était  de  donner  la  paix  à  ses  frères,  et  il  se  crut 
obligé  de  regarder  les  offres  que  lui  faisait  Lysias, 
plutôt  comme  lui    étant  faites    par   le   Seigneur 


(1)  August.  epist.  cv.  ad  Boni/. 


224 


II. 


MACCABÊES.  —  XI.-   LETTRE  DE  LYSIAS 


17.  Joannes  et  Abesalom,  qui  missi  fuerant  a  vobis, 
tradentes  scripta,  postulabant  ut  ea,  quàe  per  illos  signi- 
lïcabantur,  implerem. 

18.  Quœcumque  igitur  régi  potuerunt  perferri,  expo- 
su i ,  et  qua;  res  permittebat,  concessit. 

19.  Si  igitur  in  negotiis  fidem  conservaveritis,  et  dein- 
ceps  bonorum  vobis  causa  esse  tentabo. 

20.  De  ceteris  autem  per  singula  verbo  mandavi,  et 
istis,  et  his>  qui  a  me  missi  sunt,  colloqui  vobiscum. 

21 .  Bene  valete.  An  no  centesimo  quadragesimo  octavo, 
mensis  dioscori  die  vigesima  et  quarta. 

22.  Régis  autem  epistola  ista  continebat  :  Rex  Antio- 
chus  Lysias  fratri,  salute-m. 

2;.  Pâtre  nostro  inter  deos  translato,  nos  volentes 
eos,  qui  sunt  in  regno  nostro,  sine  lumultu  agere,  et 
rébus  suis  adhibere  diligentiam  ; 

24.  Audivimus  Judaeos  non  consensisse  patri  meo  ut 
transferrentur  ad  ritum  Grascorum,  sed  tenere  velle 
suum  institutum,  ac  oropterea  postulare  a  nobis  concedi 
sibi  légitima  sua. 

25.  Volentes  igitur  hanc  quoque  gentem  quietam  esse, 
statuentes  judicavimus  templum  resti lui  illis,  ut  agerent 
stcundum  suorum  majorum  consuetudinem. 

2t>.  Bene  igitur  feceris,  si  miseris  ad  eos,  et  dexteram 
dederis,  ut  cognita  nostra  voluntate,  bono  animo  sint, 
et  utilitatibus  prûpriis  deserviant. 


17.  Jean  et  Abesalom  que  vous  m'avez  envoyés,  m'ayant 
transmis  vos  lettres,  m'ont  demandé  que  j'accomplisse  les 
choses  qu'elles  contenaient. 

18.  Aussi,  ayant  exposé  au  roi  tout  ce  qui  pouvait  lui 
être  représenté,  il  a  accordé  ce  que  ses  affaires  ont  pu 
lui  permettre. 

19.  Si  donc  vous  demeurez  fidèles  au  roi  dans  vos 
traités,  je  tâcherai  à  l'avenir  de  vous  procurer  tout  le 
bien  que  je  pourrai. 

20.  Pour  ce  qui  regarde  les  autres  choses,  j'ai  chargé 
ceux  que  vous  m'avez  envoyés,  et  ceux  que  je  vous  en- 
voie de  conférer  en  détail  avec  vous. 

il.  Adieu.  L'an  cent  quarante-huitième,  le  vingt-qua- 
trième jour  du  mois  de  Dioscore. 

22.  La  lettre  du  roi  contenait  ce  qui  suit  : 

Le  roi  Antiochus,  à  Lysias  son  frère,  salut. 

2;.  Le  roi  notre  père  ayant  été  transféré  entre  les 
dieux,  et  nous,  désirant  que  ceux  qui  .sont  dans  notre 
royaume  vivent  en  paix,  pour  pouvoir  s'appliquer  avec 
soin  a  leurs  affaires, 

24.  Nous  avons  appris  que  les  Juifs  n'ont  pu  consentir 
au  désir  qu'avait  mon  père  de  les  faire  passer  aux  céré- 
monies des  Grecs,  mais  qu'ils  veulent  conserver  toujours 
leurs  coutumes;  et  que,  pour  cette  raison,  ils  nous  de- 
mandent qu'il  leur  soit  permis  de  vivre  selon    leurs  lois- 

25.  C'est  pourquoi,  voulant  que  ce  peuple  soit  en 
paix  comme  les  autres,  nous  avons  arrêté  et  ordonnô 
que  leur  temple  leur  sera  rendu,  afin  qu'ils  vivent  selon 
les  coutumes  de  leurs  ancêtres. 

26.  Vous  ferez  donc  bien  d'envoyer  vers  eux,  et  de 
faire  alliance  avec  eux  :  afin  qu'ayant  connu  notre  vo- 
lonté, ils  reprennent  courage,  et  qu'ils  s'appliquent  à  ce 
qui  regarde  leurs  intérêts  particuliers. 


COMMENTAIRE 


même,  que  par  ses  ennemis,  puisqu'elles  étaient 
l'efTet  de  la  victoire  que  le  Dieu  d'Israël  lui  avait 
fait  remporter  sur  eux. 

f.  17.  Joannes  et  Abesalom,  qui  missi  fuerant 
a  vobis.  Ils  furent  députés  de  la  part  des  Juifs, 
pour  proposer  au  roi  les  conditions  auxquelles  ils 
souhaitaient  la  paix.  Le  grec  porte  (1)  que  ces 
députés  rendirent  l'arrêt  souscrit,  et  demandèrent 
l'exécution  de  ce  qui  /était  contenu.  Cet  arrêt  ou 
cette  décision  peut  marquer,  ou  la  résolution  de 
Judas  et  des  Juifs,  ou  les  lettres  qu'Antiochus 
Épiphane  avait  écrites  aux  Juifs  peu  de  temps 
avant  sa  mort  (:),  ou  la  lettre  que  le  roi  avait 
envoyéeà  Lysias,  par  laquelle  il  lui  donnait  le  pou- 
voir de  traiter  avec  les  Juifs. 

f.  2),  Anno  centesimo  quadragesimo  octavo 
mensis  Dioscori.  En  16?.  On  ne  connaît  point 
parmi  les  Grecs  de  mois  Dioscore  ;  le  texte  grec 
lit  ici,  At6:  xopivûîou  c'est-à-dire, de  Jupiter  deCorin- 
the  :  ce  qui  est  encore  plus  inconnu.  Le  syriaque: 
Du  dernier  Thischri.  C'est  ce  nom  grécisé,  et 
ensuite  défigurépar  les  copistes, qui  est  devenu  par 
deux  tranformations  différentes  le  A.o.  xoptvtiîou 
du  grec,  et  le  Dioscorus  de  L  Vulgate. 

Une  autre  difficulté  très  considérable,   est  de 


savoir  comment  Eupator  date  sa  lettre  de  l'an 
148  des  Séleucides,  après  la  mort  d'Antiochus 
Épiphane  son  père,  Paire  nostro  inler  deos  trans- 
lato, quoiqu'Antiochus  ne  soit  mort  que  l'année 
suivante  149,  comme  il  est  expressément  marqué, 
dans  le  premier  livre  des  Maccabées  (3).  Mais 
nous  avons  tâché  de  donner  la  solution  de  cette 
difficulté,  qui  n'est  fondée  que  sur  la  manière  de 
commencer  l'ère  des  Séleucides,  usitée  parmi  les 
Juifs,  les  Grecs  et  les  Chaldéens. 

y.  22.  Lysi/E  fratri.  Voyez  précédemment  le 
verset  1  de  ce  chapitre. 

f.  23.  Pâtre  nostro  inter  deos  translato. 
La  coutume  impie  de  donner  aux  hommes  le  nom 
de  dieux,  et  de  leur  rendre  pendant  leur  vie  et 
après  leur  mort,  les  honneurs  divins,  commença 
dans  l'Orient  :  elle  infecta  ensuite  les  Grecs  et 
passa  aux  Romains.  Le  christianisme  en  a  enfin 
aboli  l'usage. 

f.  24.  Concedi  sibi  légitima  sua.  Qu'il  leur 
soit  permis  de  vivre  selon  leurs  lois  (4),  conformé- 
ment aux  privilèges  accordés  par  Alexandre  le 
Grand  et  par  les  rois,  ses  successeurs. 

j.  25.  Templum  restitui  illis.  Ils  le  possé- 
daient déjà  alors  ;  [mais  on    leur   en    confirme    la 


(l)  E'rciodvTE;  tôv  ùî:'jyfypjtu.[j^vûv  ypT)u.atfa;aôv,  fâouv 
îtipi  ttôv  01  auroù  or)|jLa[vop.svu-v.  La  Vulgate  et  le  syriaque 
ont  lu  Ë'jctS^ovt-î, 


(2)  11.  Mac.  ix.  19.  et  scq. 

(?)  1.  Macc.  vi.  16, 

(4)  yj'jy^(jjpiOf(vat  âuïoîs  :à  v5u.'.u.«  i\)-.JJ'i. 


II.  -  MACCABÉES.  -  XL-  LETTRE  D'ANTIOCHUS 


22< 


27.  Ad  Judaeos  vero  régis  epistola  talis  erat  :  Rex 
Antiochus  senatui  Judasorum,  et  ceteris  Judaeis  salutem. 

28.  Si  valetis,  sic  eslis  ut  volumus;  sed  et  ipsi  bene 
valemus. 

29.  Adiit  nos  Menelaus,  dicens  velle  vos  descendere 
ad  vestros  qui  sunt  apud  nos. 

30.  His  igitur,  qui  commeant  usque  ad  diem  trigesimum 
mensis  xanihici,  damus  dextras  securitatis, 

?i.  Ut  Judaei  utantur  cibis  et  legibus  suis,  sicut  et 
prius,  et  nemo  eorum  ullo  modo  molestiam  patiatur  de 
his  quae  per  ignorantiam  gesta  sunt. 

52.  Misimus  autem  et  Menelaum,  qui  vos  alloquatur. 

35.  Valete .  Anno  centesimo  quadragesimo  octavo  ", 
xanthici  mensis  quinta  décima  die. 

?4.  Miserunt  autem  etiam  Romani  epistolam  ita  se 
habentem  :  Quintus  Memmius  et  Tilus  Manilius,  legati 
Romanorum,  populo  Judaeorum,  salutem. 

;5.  De  his  quae  Lysias,  cognatus  régis,  concessit  vobis, 
et  nos  concessimus. 

36,  De  quibus  autem  ad  regem  judicavit  référendum, 
confestim  aliquem  mittite,  Jdiligentius  inter  vos  confe- 
rentes,  ut  decernamus,  sicut  congruit  vobis  ;  nos  enim 
Antiochiam  accedimus. 


27.  La  lettre  du  roi  aux  Juifs  contenait  ce  qui  suit  : 

Le  roi  Antiochus,  au  sénat  des  Juifs,  et  à  tous  les 
autres  Juifs,  salut. 

28.  Si  vous  vous  portez  bien,  vous  êtes  en  l'état  que 
nous  souhaitons  ;  et  nous  nous  portons  bien  aussi  nous- 
mêmes. 

29.  Menelaus  s'est  adressé  à  nous,  et  nous  a  dit  que 
vous  désirez  venir  trouver  vos  gens  qui  sont  auprès  de 
nous. 

;o.  Nous  donnons  donc  un  passeport  pour  ceux  qui 
voudront  venir  jusqu'au  trentième  jour  du  mois  de  Xan- 
thique  ; 

?i.  Et  nous  permettons  aux  Juifs  d'Iser  de  leurs 
viandes,  et  de  vivre  selon  leurs  lois  comme  auparavant, 
sans  qu'on  puisse  faire  la  moindre  peine  à  aucun  d'eux 
pour  les  fautes  qui  ont  été  faites    par  ignorance. 

32.  Nous  avons  aussi  envoyé  Ménélaus,  afin  qu'il  en 
confère  avec  vous. 

;;.  Adieu.  L'an  cent  quarante-huitième,  le  quinzième 
de  Xanthique. 

34.  Les  Romains  envoyèrent  aussi  une  lettre  conçue 
en  ces  termes  : 

Quintus  Memmius  et  Titus  Manilius,  envoyés  des  Ro- 
mains, au  peuple  des  Juifs,  salut. 

;  s.  Nous  vous  accordons  les  mêmes  choses  que  Lysias, 
parent  du  roi,  vous  a  accordées. 

36.  Et  pour  ce  qui  est  de  celles  qu'il  a  cru  devoir  être 
représentées  au  roi, envoyez  quelqu'un  au  plus  tôt,  après 
en  avoir  bien  délibéré  entre  vous,  afin  que  nous  ordon- 
nions ce  qui  vous  sera  le  plus  avantageux,  car  nous 
allons  à  Antioche, 


COMMENTAIRE 


jouissance,  on  leur  accorde  la  liberté  d'y  exercer 
la  religion,  sans  crainte  de  la  part  des  troupes  qui 
étaient  dans  la  citadelle  voisine  du  temple,  et  qui 
jusqu'alors  avaient  fort  molesté  ceux  qui  allaient 
accomplir  leurs  dévotions. 

f.  27.  Senatui  Judaeorum.  Le  gouvernement 
des  Juifs  était  alors  aristocratique.  Ils  avaient  un 
chef  pour  la  guerre,  lequel  présidait  aussi  aux 
assemblées  ;  mais  toutes  les  résolutions  émanaient 
des  notables  de  la  nation  (1). 

f.  29.  Adiit  nos  Menelaus,  dicens  velle  vos 

DESCENDERE  AD  VESTROS,  QUI  SUNT  APUD  NOS. 

Ménélaus,  qui  était  alors  auprès  du  roi,  à  Antio- 
che, s'employa  pour  obtenir  de  ce  prince  un 
passeport,  afin  que  les  assiégés  pussent  conférer 
avec  leurs  frères,  dans  le  camp  syrien.  Ces  Juifs 
étaient  ou  des  transfuges  volontaires,  partisans 
de  Ménélaus,  ou  des  prisonniers  de  guerre  faits 
à  Bethsura  ou  ailleurs.  Ménélaus  passait  encore 
pour  grand  prêtre  des  Juifs,  car  il  avait  été  établi 
dans  cette  dignité  par  Antiochus  Épiphane  (2); 
mais  il  ne  fut  pas  reçu  dans  Jérusalem,  et 
ne  fit  pas  les  fonctions  du  sacerdoce  dans  le  tem- 
ple. Les  Juifs  avaient  déféré  la  dignité  de  grand 


prêtre  à  Judas,  pendant  l'absence  de  Méné- 
laus. 

y.     31.     QuM    PER    IGNORANTIAM     GESTA     SUNT. 

C'est  ainsi  qu'il  excuse  tout  ce  qui  s'est  passé 
jusqu'alors  ;  il  en  donne  une  amnistie  générale. 
On  a  déjà  vu  de  pareilles  expressions,  dans  un 
cas  semblable  (3). 

fi.  34.  Miserunt  etiam  Romani  epistolam. 
Les  légats  envoyés  par  les  Romains  en  Syrie, 
s'intéressèrent  aussi  aux  affaires  des  Juifs  ;  comme 
étant  alliés  des  Romains.  Ils  écrivirent  donc  à 
Judas  et  au  sénat,  d'envoyer  quelques-uns  des 
leurs  vers  le  roi  de  Syrie,  pour  lui  représenter 
leurs  raisons,  et  pour  soutenir  leurs  intérêts.  On 
ne  sait  pas  positivement  quel  était  le  sujet  du 
voyage  de  ces  légats.  Il  en  vint  d'autres  bientôt 
après  (4),  pour  brûler  les  vaisseaux,  et  couper  les 
jarrets  aux  éléphants  d'Antiochus  Eupator  ;  car  il 
en  possédait  plus  que  le  nombre  prescrit,  par  les 
articles  de  la  paix  avec  Antiochus  le  grand. 

f.  36.  Ut  decernamus  sicut  congruit  vobis. 
Le  grec  (5)  :  Afin  que  nous  exposions  selon  qu'il 
vous  sera  le  plus  avantageux.  Afin  que  nous 
apprenions  vos  prétentions  et  vos  demandes. 


(1)  1.  Macc.  xii.  6.  et  11.  Macc.  1.  10.  c/iv,  44. 

(2)  11.  Macc.  iv.  27.  50. 

(3)  1.  Macc.  xiii.  39. 

S.   B.  —  T.  XII 


(4)  Vide  Usser.  ad  an.  M.  3841. 

(5)  I"vx  è/.0wp.EV  (ï>;  xaOrj/.ci  Gfjûv. 


>î 


226 


II.  —  M  ACCABLES.  —  XI.-   LETTRE  DES  ROMAINS 


Î7.  Ideoque  festinate  rescribere,  ut  nos  quoque  scia- 
nius  cujus  eslis  voluntatis. 

jS.  Bene  valete.  Anno  centesimo  quadragesimo  octavo, 
quinta  décima  die  mensis  zanthici. 


37.  C'est  pourquoi  hâtez-vous  de  nous  récrire ,  afin  que 
nous  soyons  informés  de  ce  que  vous  souhaitez. 

;8.  Adieu.  L'an  cent  quarante-huitième,  le  quinzième 
du  mois  de  Xanthique. 


COMMENTAIRE 

Nos  enim  Antiochiam  accedimus.  11  paraît  par  romains  devaient  se  rendre  incessamment  auprès 

tout  ce  qui  précède,  que  le  roi  n'était  point  au  d'Antiochus  Eupator,  où  l'on  devait  arrêter  tous 

camp  devant  Jérusalem,  mais  à  Antioche  ;   et  par  les  articles  de  la  paix  avec  les  Juifs  ;   mais   cette 

conséquent,  que  cette  guerre  est  différente  de  paix  ne  fut  pas  de  longue  durée,   comme  on   le 

celle  qui  est  rapportée  dans  le  chapitre  vi  du  pre-  verra  au  chapitre  suivant.  11  n'est  pas  même  bien 

mier livre  des  Maccabées,  où  le  roi  était  en  per-  certain,  si  elle  fut  arrêtée;  il  semble  qu'il  n'y  eut 

sonne  devant  la  capitale  de  la  Judée.   Les  légats  qu'une  trêve. 


CHAPITRE  XIII 

Antiochus  Eupafor  marche  contre  les  Juifs  avec  une  puissante  année.  Il  fait  mourir 
Ménélaûs.  Judas  jette  le  trouble  dans  le  camp  des  ennemis.  Siège  de  Belhsura.  Paix 
entre  Eupator  et  les  Juifs. 


i.  Anno  centesimo  quadragesimo  nono,  cognovit  Ju- 
das Antiochum  Eupatorem  venire  cum  multitudine  adver- 
sus  Judasam, 

2.  Et  cum  eo  Lysiam,  procuratorem  et  praspositum 
negotiorum,  secum  habentem  peditum  centum  decem 
millia,  et  equitum  quinque  milia,  et  elephantos  vijinti 
duos,  currus  cum  falcibus  trecentos. 

J.  Commiscuit  autem  se  illis  e^  Menelaus  ;  et  cum 
multa  fallacia  deprecabatur  Antiochum,  non  pro  patrias 
salute,  sed  sperans  se  constitui  in  principatum. 


t.  La  cent  quarante-neuvième  année,  Judas  apprit 
qu'Antiochus  Eupator  marchait  avec  de  grandes  troupes 
contre  la  Judée. 

2.  Accompagné  de  Lysias  régent  et  premier  ministre 
du  royaume  ;  et  qu'il  avait  avec  lui  cent  dix  mille  hommes 
de  pied  et  cinq  mille  chevaux,  vingt-deux  éléphants,  et 
trois  cents  chariots  armées  de  faux. 

;.  Ménélaûs  se  mêla  aussi  avec  eux  ;  et,  poussé  par 
un  esprit  de  dissimulation  et  de  tromperie,  il  faisait  des 
prières  à  Antiochus,  non  pour  procurer  le  salut  de  sa 
pairie,  mais  pour  s'établir  par  son  moyen  dans  la  souve- 
raine autorité,  selon  l'espérance  qu'il  en  avait. 


COMMENTAIRE 


f.  1.  Anno  centesimo  quadragesimo  nono. 
Voyez  1  Macc.  vi,2o.  Antiochus  Eupator  vint  en 
Judée  avec  une  puissante  armée  (en  162),  pour  la 
réduire  entièrement,  et  pour  écraser  Judas,  qui 
avait  battu  en  plusieurs  rencontres  toutes  les  trou- 
pes syriennes,  qui  étaient  dans  le  pays  et  aux 
environs.  Cette  guerre  est  différente  de  celle 
qu'on  a  vue  au  chapitre  xi,mais  c'est  la  même  qui 
est  racontée  au  premier  livre  des  Maccabées 
chapitre  vi, verset  28  et  suivants. 

^v.  2.  Peditum  centum  decem  millia.  Le  premier 
livre  des  Maccabées  (1)  porte  cent  mille  hommes 
de  pied, vingt  mille  chevaux, et  trente-deux  éléphants. 
Il  ne  dit  rien  des  chariots  armés  de  faux.  Comme 
cette  armée  était  composée  de  troupes  auxiliaires 
de  divers  pays  (2),  et  qu'elle  se  grossit  à  mesure 
qu'elle  s'avança  vers  Jérusalem,  on  ne  doit  pas 
être  surpris,  que,  considérée  en  divers  temps, elle 
fût  tantôt  plus,  et  tantôt  moins  grosse,  et  par 
conséquent,  que  les  dénombrements  ne  s'accor- 
dent pas  tout  à  fait  entr'eux. 

f.  3.  Menelaus  cum  multa  fallacia  depre- 
cabatur Antiochum.  Ménélaûs  avait  acheté 
d'Antiochus  Épiphane,  la  dignité  de  grand 
prêtre  (3)  :  mais  depuis  que  Judas  s'était  rendu 
maître  de  Jérusalem, ce  grand  prêtre  n'avait  point 
osé  se  présenter  au  temple, ni  même  paraître  dans 
la  Judée;  il  se  tint  à  Antioche  auprès  d'Eupator, 
cherchant  quelque  occasion  d'entrer  dans  la  pos- 
session réelle  d'une  dignité,  dont  il  n'avait  eu 
jusqu'alors  que  le  nom.  Il  priait  donc  Antiochus 
Eupator   de  conserver  sa   patrie,  d'épargner  le 


temple  et  les  habitants  inoffensifs,  et  de  se  con- 
tenter de  punir  les  chefs  du  parti  et  de  la  rébellion  ; 
c'est  ainsi  qu'il  appelait  Judas  et  ses  partisans; 
mais  ces  prières  étaient  toutes  intéressées  ;  il  ne 
tendait  qu'à  se  faire  donner  le  gouvernement  du 
pays,  et  la  première  dignité  de  sa  nation  :  Sperans 
se  constilui  in  principalum. 

Sed  Rex  regum  suscitavit  animos  Antio- 
chi  in  peccatorem.  C'est  donc  Dieu  qui 
remue  le  cœur  des  princes  comme  il  lui  plaît,  et 
qui  leur  fait  exécuter  les  ordres  de  sa  justice, 
lorsqu'ils  pensent  n'accomplir  que  leur  volonté. 
C'est  lui  qui, après  avoir  supporté  longtemps  avec 
une  patience  toute  divine  l'impiété  et  les  sacrilèges 
de  Ménéiaiis,  ce  trafiqueur  des  choses  saintes, 
qui  avait  mis  à  l'enchère  la  souveraine  sacrificature, 
se  sert  enfin,  pour  le  punir, de  ceux  qui  étaient 
les  plus  grands  ennemis  de  son  peuple.  Tous  les 
instruments  lui  sont  propres  pour  exécuter  ce 
qu'il  lui  plaît  ;  il  sait  tirer  des  méchants  mêmes 
tout  le  bien  qu'il  veut, sans  qu'ils  aient  de  part  au 
bien  qu'il  en  tire, et  sans  qu'il  participe  lui-même 
à  leur  perversité.  Il  est  vrai  qu'Antiochus  punit 
Ménélaûs  en  apparence  par  un  principe  de  justice, 
comme  l'auteur  et  la  cause  de  tous  les  maux  :  mais 
cette  action  d'une  justice  apparente  ne  tendait 
qu'à  satisfaire  son  ambilion  ;  puisqu'il  s'efforçait 
dans  ce  temps  même, par  la  plus  grande  de  toutes 
les  injustices, de  détruire  le  peuple  de  Dieu,  à  qui 
il  avait  donné  sa  parole,  auparavant,  de  le  laisser 
vivre  en  paix,  et  de  ne  point  le  troubler  dans 
l'exercice  de  sa  religion  (4). 


(1)  1.  Macc.  vi.  ;o.  lia  el  Joseph.  Antiq.  I.  xn.  c.  11. 

(2)  1.  Macc.  vi.  79. 


(5)  n.  Macc.  iv.  24. 
(4)  11.  Macc.  xi.  25. 


228 


II.—  MACCABÉES.   -XII.-   EXPLOIT  DE  JUDAS 


6.  Venit  adversus  interfectores  fratrum,  et  portum 
quidem  noctu  succendit,  scaphas  exussit,  eos  autem  qui 
ab  igné  refugerant,  gladio  peremit. 

7.  Etcum  hœc  ita  egisset,  discessit  quasi  iterum  rever- 
surus,  et  universos  Joppitas  eradicaturus. 

8.  Sed  cum  cognovisset  et  eos  qui  erant  Jamniœ,  velle 
pari  modo  facere  habitantibus  secum  Judasis, 

9.  Jamnitis  quoque  nocte  supervenit,  et  portum  cum 
navibus  succendit;  ita  ut  lumen  ignis  appareret  Jeroso- 
lymis  a  stadiis  ducentis  quadraginta. 

io.  Inde  cum  jam  abiissent  novem  stadiis,  et  iter  face- 
rent  ad  Timotheum  ,  commiserunt  cum  eo  Arabes, 
quinque  millia  viri,  et  équités  quingenti  ; 

11.  Cumque  pugna  valida  fieret,  et  auxilio  Dei  prospère 
cessisset,  residui  Arabes  victi  petebant  a  Juda  dextram 
sibi  dari,  promittentes  se  pascua  daturos,  et  in  ceteris 
profuturos. 

12.  Judas  autem  arbitratus  vere  in  multis  eos  utiles, 
promisit  pacem  ;  dextrisque  acceptis,  discessere  ad 
tabernacula  sua. 

ij.  Aggressus  est  autem  etcivitatem  quamdam  fïrmam, 
por.tibus  murisque  circumseptam,  quœ  a  turbis  habita- 
batur  gentium  promiscuarum,  cui  noinen  Casphin. 


6.  Il  marcha  contre  ces  meurtriers  de  leurs  frères  ;  il 
brûla  leur  port  pendant  la  nuit  ;  il  mit  le  feu  à  leurs 
barques,  et  fit  passer  au  fil  de  l'épée  ceux  qui  s'étaient 
échappés  des  flammes. 

7.  Après  cette  action,  il  partit  faisant  mine  de  vouloir 
y  revenir  pour  exterminer  tous  les  habitants   de   Joppé. 

8.  Mais,  averti  que  les  habitants  de  Jamnia  voulaient 
user  d'une  semblable  perfidie  à  l'égard  des  Juifs  qui  de- 
meuraient avec  eux, 

9.  Il  les  surprit  de  même  la  nuit,  et  brûla  leur  port 
avec  leurs  vaissaux  ;  de  sorte  que  la  lumière  de  ce  feu 
parut  jusqu'à  Jérusalem,  quoique  éloignée  Je  deux  cent 
quarante  stades. 

10.  Lorsqu'il  (ut  parti  de  Jamnia  avec  ses  gens,  ayant 
déjà  fait  neuf  stades,  et  marchant  contre  Timothée,  il 
fut  attaqué  par  les  Arabes,  qui  avaient  cinq  mille  hommes 
d'Infanterie  et  cinq  cents  chevaux. 

11.  Et  après  un  rude  combat,  Judas  réussit  heureuse- 
ment par  le  secours  de  Dieu  ;  les  Arabes  qui  étaient 
restés,  se  voyant  vaincus,  lui  demandèrent  qu'il  com- 
posât avec  eux,  promettant  de  lui  donner  des  pâturages, 
et  de  l'assister  en  tout. 

12.  Judas,  croyant  qu'effectivement  ils  pourraient  lui 
être  utiles  en  beaucoup  de  choses,  leur  promit  la  p^.ix  ; 
et   l;i  paix  étant  faite,  ils  se  retirèrent  dans  leurs  tentes. 

ij.  Il  attaqua  aussi  une  place  nommé  Casphin,  que  ses 
ponts  et  ses  murailles,  où  habitait  un  mélange  de  diverses 
nations,  rendait  presque  imprenable. 


COMMENTAIRE 


n'ayant  aucun  motif  de  vengeance  contre  eux,  les 
noyèrent,  etc. 

Les  habitants  de  Joppé,  préméditant  cette 
noire  trahison  dont  ils  avaient  résolu  d'user  à 
l'égard  des  Juifs  qui  demeuraient  dans  leur  ville, 
publièrent  un  arrêté  par  lequel  ils  établissaient 
une  nouvelle  alliance  avec  eux,  soit  pour  trafi- 
quer ensemble,  soit  pour  vivre  entr'eux  avec 
encore  plus  d'union.  Les  Juifs  qui  ne  soupçon- 
naient aucun  mal,  et  qui  regardaient  les  habitants 
de  Joppé  comme  bien  intentionnés  à  leur  égard, 
agirent  de  bonne  foi  :  mais  ces  hommes  perfides 
les  ayant  ensuite  engagés,  sous  prétexte  d'amitié, 
à  monter,  eux,  leurs  femmes  et  leurs  enfants  sur 
des  barques  qu'ils  leur  avaient  préparées,  ils  en 
noyèrent  tout  d'un  coup  environ  deux  cents,  lors- 
qu'ils furent  avancés  en  pleine  mer.  Judas,  qui 
était  alors  l'homme  du  Seigneur,  et  comme  l'ange 
tutélaire  de  sa  nation,  ayant  appris  cette  perfidie, 
se  crut  obligé  de  venger  ses  frères  ;  mais  ayant 
Dieu  dans  le  cœur,  et  ne  suivant  point  l'impétuo- 
sité de  son  humeur,  il  ne  marcha  contre  ces  injus- 
tes meurtriers,  qu  après  qu'il  eut  invoqué  Dieu,  le 
juste  juge  de  tous  les  hommes.  Aussi  la  fidélité 
avec  laquelle  il  s'acquittait  en  toutes  rencontres, 
dans  la  vue  de  Dieu  seul,  de  ce  qu'il  devait  à  son 
peuple,    le  rendait  digne     de    l'avoir     toujours 


pour  protecteur,  et  de  faire  tous  les  jours, 
comme  un  autre  Josué,  de  nouveaux  prodiges, 
en  renversant  tous  ses  ennemis,  en  dissipant  parla 
vertu  de  sa  foi  des  armées  nombreuses  et  redou- 
tables, comme  si   c'étaient  des  moucherons. 

v.  6.  Portum  noctu  succendit.  Il  brûla  les 
édifices  bâtis  sur  le  port,  les  jetées,  les  passerel- 
les mobiles,  et  surtout  les  vaisseaux. 

jK  9.  Stadiis  ducentis  quadraginta.  Le  stade 
était  de  184  à  185  mètres.  La  situation  de  Jéru- 
salem, sur  une  hauteur  permettait  de  voir  ce  feu, 
à  la  distance  de  onze  lieues. 

jfr.  10.  Commiserunt  cum  eo  Arabes.  C'étaient 
de  ces  Arabes  vagabonds,  et  qui  n'ont  point 
d'autres  demeures  que  leurs  tentes:  les  Grecs  les 
appellent  Scéniles  et  Nomades,  et  le  texte  grec 
leur  donne  ici  ce  dernier  nom  au  jfr.  11.  Residui 
Arabes  victi,  en  grec  (1)  :  Les  Arabes  nomades  qui 
avaient  été\vaincus.  Ce  peuple  ne  vivait  que  de  rapi- 
nes, et  de  ce  que  ses  troupeaux  lui  fournissaient  ; 
toujours  prêta  se  battre  et  à  piller  (2).  C'était 
l'horoscope  d'Ismaél.  Manus  ejus  contra  omnes, 
et  manus  omnium  contra  eum  (2). 

f,  I].  ClVITATEM  QUAMDAM  FIRMAM,  PONTIBUS 
MURISQUE  CIRCUMSEPTAM,  CUI  NOMEN  CASPHIN.    La 

ville   de    Casphin  n'est  autre  qu'Hésebon  (4),   ou 
Chasbon  ())  ou  Esbus,   fameuse  avant  même  le 


(i)  E'XaTTioOevre;  ô:  Nou.âos;  A"p»os;. 

{il  Strabo.    hb.    xvi.    O'i    2/7pîTcu    A'paSê:    Xyjaïptxol 

Tlv^l,  /ai  KOtpEVUQ!, 


(5)  Gènes,  xvi.  12. 

(4)  Num.  xxi.  25  ;  xxxu. 

(5)  1.  Macc.  v.  26.  et  }ù. 


j.  -  Deu/.  t.  4.  etc. 


II. 


MACCABEES. 


XII.  -  PRISE    DE  CASPHIN 


229 


14.  Hi  vero  qui  intus  erant,  confidentes  in  stabilitate 
murorum,  et  apparatu  alimoniarum,  remissius  agebant, 
maledictis  lacessentes  Judam,  et  blasphémantes,  ac 
loquentes  quœ  fas  non  est. 

15.  Machabœus  autem.invocato  magno  mundi  Principe, 
qui  sine  arietibus  et  machinis  temporibus  Jesu  prœcipi- 
tavit  Jéricho,  irruit  ferociler  mûris; 

16.  Et  capta  civitate  per  Domini  voluntatem,  innume- 
rabiles  casdes  fecit,  ita  ut  adjacens  stagnum  stadiorum 
duorum  latitudinis, sanguine  interrectorum  lluere  videretur. 

17.  Inde  discesserunt  stadia  septingenta  quinquaginta 
et  venerunt  in  Characa  ad  eos,  qui  dicuntur  Tubianaei, 
Judaeos  ; 

18.  Et  Timotheum  quidem  in  illis  locis  non  compre- 
henderunt,  nulloque  negotio  perfecto  regressus  est, 
relicto  in  quodam  loco  firmissimo  prassidio. 

ig.  Dositheus  autem  et  ïosipater,  qui  erant  duces  cum 
Machabaeo,  peremerunt  a  Timotheo  relictos  in  pras- 
sidio,  decem  millia  viros. 

20.  At  Machabasus,  ordinatis  circum  se  sex  millibus, 
et  constitutis  per  cohortes,  adversus  Timotheum  pro- 
cessif, habentem  secum  centum  viginti  millia  peditum, 
equitumque  duo  millia  quingentos. 


14.  Ceux  qui  l'habitaient  se  confiant  en  la  force  de  leurs 
murailles,  et  en  l'abondance  des  vivres  dont  ils  avaient 
provision,  se  défendaient  négligemment,  et  disaient  à 
Judas  des  injures  mêlées  de  blaphèmes  et  de  paroles 
détestables. 

15.  Mais  Maccabée  ayant  invoqué  le  grand  Prince  du 
monde,  qui  au  temps  de  Josué  fit  tomber  sans  machines 
et  sans  béliers  les  murs  de  Jéricho,  monta  avec  furie 
sur  les  murailles  : 

16.  Et  ayant  pris  la  ville  par  la  volonté  du  Seigneur, 
il  y  fit  un  carnage  incroyable  ;  de  sorte  que  l'étang 
d'auprès,  qui  avait  deux  stades  de  large,  était  tout  rouge 
du  sang  des  tués. 

17.  Etant  partis  de  là,  ils  marchèrent  sept  cent  cinquante 
stades,  et  ils  vinrent  à  Characa  vers  les  Juifs  qui  étaient 
appelés  Tubianéens. 

18.  Et  ils  ne  purent  prendre  Timothée  en  ces  parages, 
parce  que,  comme  il  n'avait  pu  y  rien  faire,  il  s'en  était 
retourné  après  avoir  laissé  en  un  certain  lieu  une  gar- 
nison très  forte. 

10.  Mais  Dosithée  et  Sosipater,  qui  commandaient  les 
troupes  avec  Maccabée,  tuèrent  dix  mille  hommes  que 
Timothée  avait  laissés  pour  la  garde  de  cette  place. 

20.  Cependant  Maccabée  ayant  mis  en  ordre  autour  de 
lui  six  mille  hommes  de  ses  troupes,  et  les  ayant  divisés 
par  cohortes,  marcha  contre  Timothée,  qui  avait  cent 
vingt  mille  hommes  de  pied  et  deux  mille  cinq  cents 
chevaux. 


COMMENTAIRE 


temps  de  Moïse,  et  connue  par  ses  belles  eaux  (1). 
Nous  voyons  au  y.  16.  qu'il  y  avait  près  de  là,  un 
étang  de  deux  stades  de  largeur,  et  que  la  ville 
était  forle  par  ses  ponts  qui  en  rendaient  l'appro- 
che difficile  et  dangereuse,  soit  qu'on  démontât 
les  ponts,  soit  qu'on  les  fermât,  ou  qu'on  voulût 
les  défendre.  On  lit  dans  le  premier  livre  des 
Maccabées,  que  les  Juifs  qui  se  trouvèrent  dans 
cette  ville,  et  dans  quelques  autres,  y  avaient  été 
enfermés  et  que  leurs  ennemis  étaient  résolus  à 
les  y  exterminer  (2). 

f.  14.  Loquentes  qvm  fas  non  est.  Les  enne- 
mis des  Juifs  les  attaquaient  pour  l'ordinaire,  par 
les  injures,  par  les  blasphèmes  et  les  insultes  (3)  ; 
la  nation  juive  était  odieuse  aux  Grecs  et  aux 
autres  peuples. 

y.  15.  Invocato  magno  mundi  Principe.  Judas 
ne  commence  d'actions  importantes,  qu'après 
avoir  invoqué  le  Dieu  des  armées. 

y.  16.  Innumerabiles  cèdes  fecit.  Judas  est 
l'homme  des  contrastes.  Nous  le  voyons  succes- 
sivement courageux,  et  néanmoins  défiant  de  lui- 
même  ;  saint  et  en  même  temps  sanguinaire,  un 
homme  plein  de  bonté  envers  le  peuple  de  Dieu, 
et  plein  de  rigueurà  l'égard  de  ses  ennemis  !  On  le 
voit  tantôt  brûler  les  ports  de  Joppé  et  de  Jam- 
nia  avec  leurs  vaisseaux,  et  faire  passer  au  fil 
de  l'épée  ceux  qui  s'étaient  échappés  des  flam- 
mes; tantôt  tuer  dix  mille  hommes  d'une  garnison; 


tantôt  trente  mille  hommes  de  l'armée  de  Timo- 
thée; tantôt  vingt- cinq  mille  à  Camion;  tan- 
tôt vingt-cinq  autres  mille  hommes  à  Éphron  ; 
enfin  on  peut  dire  qu'il  faisait  un  carnage  perpé- 
tuel des  ennemis  du  peuple  de  Dieu  ;  mais  sans 
perdre  néanmoins  de  vue  Celui  dont  il  défendait 
la  gloire,  pour  la  religion  duquel  il  combattait,  et 
dont  le  secours  seul  le  rendait  victorieux  d'un  si 
grand  nombre  d'adversaires,  quoiqu'il  ne  les  atta- 
quât ordinairement  qu'avec  une  petite  poignée  de 
gens  choisis  et  fidèles,  comme  lui,  à  ce  qu'ils  de- 
vaient à  Dieu. 

y.  17.  Venerunt  in  Characa.  Ils  vinrent  à 
Characa,  vers  les  Juifs,  qui  étaient  appelés  Tubia- 
néens, qui  habitaient  le  pays  de  Tob  (4)  ou  de 
Tubin.  On  voit  dans  le  premier  livre  des  Mac- 
cabées, que  les  ennemis  des  Juifs  avaient  déjà 
tué  en  ce  canton,  près  de  mille  hommes,  et  avaient 
emmené  leurs  femmes  et  leurs  enfants  (<,).  La 
ville  de  Characa  est  peut-être  celle  dont  parle 
Ptolémée,  sous  le  nom  de  Charac-Moab,  ou 
Charac-Moba  à  l'est  de  la  mer  Morte. 

y.  18.  NULLO  NEGOTIO  PERFECTO  REGRESSUS 
EST,  RELICTO  IN  QUODAM  LOCO  FIRMISSIMO    PRjESI- 

dio.  Les  Juifs  du  pays  de  Tubin,  s'étant  retirés 
dans  Dalhéma  (6), ou  à  Characa,T\mothée  ne  put 
les  y  forcer;  il  dévasta  le  pays,  y  laissa  une  gar- 
nison, et  abandonna  ce  canton  pour  éviter  la  ren- 
contre de  Judas  Maccabée.  Mais  sa  garnison  fut 


(1)  Cant.  vu.  4. 

(2)  1.  Macc.  v.  25.  26.  27. 

(?)  Voyez  11.  Macc.  vin.  4;  îx. 


*•  4-   ?4-  J5-  J'J- 


(4)  Judic.  xi.   j. 

($)  1.  Macc.  v.  9...  ij. 

(6)  Comparez  ceci  avec  1.  Macc.  v. 


9.  et  suiv. 


230 


II.—  MACCABEES.—  XII.  -  ACTIVITE  DE  JUDAS 


2t.  Cognito  autem  Judas  adventu,  Timotheus  prœ- 
misit  mulieres,  et  filios.  et  reliquum  apparatum,  in  pras- 
sidium  quod  Camion  dicitur  :  erat  enim  inexpugnabile, 
et  accessu  dillicile  propter  locorum  angustias. 

22.  Cumque  cohors  Judae  prima  apparuissel,  timor 
hostibus  incussus  est,  ex  praesenlia  Dei.  qui  universa 
conspicit,  et  in  fugam  versi  sunt  alius  ab  alio,  ita  ut 
magis  a  suis  dejicerentur,  et  gladiorum  suorum  ictibus 
debilitarentur. 

2j.  Judas  autem  vehementer  instabat,  puniens  profa- 
nos;  et  postravit  ex  eis  tringinta  millia  virorum. 

24.  Ipse  vero  Timotheus  incidit  in  partes  Dosithei  et 
Sosipatris,  et  multis  precibus  postulabat  ut  vivus  dimit- 
teretur,  eo  quod  multorum  ex  Judasis  parentes  haberet, 
ac  fratres,  quos  morte  ejus  decipi  eveniret. 


25.  Et  cum  fidem  dedissel  restituturum  se  eos  secun- 
dum  constitutum,  illœsum  eum  dimiserunt,  propter  fra- 
trum  salutem. 

26.  Judas  autem  esressus  est  ad  Camion,  interfectis 
viginti   quinque  millibus. 

27.  Post  horum  fugam  et  necem,  movit  exercitum  ad 
Ephron,  civitatem  munitam,  in  qua  multitude  diversarum 
gentium  habitabat,  et  robusti  juvenes  pro  mûris  consis- 
tentes  fortiter  repugnabant;  in  hac  autem  machina;  multa?, 
et  telorum  erat  apparatus, 


28.  Sed  cum  Omnipotentem  invocassent,  qui  potestate 
sua  vires  hoslium  conlringit,  ceperunt  civitatem,  et  ex 
eis  qui  intus  erant  viginti  quinque    millia    prostraverunt. 

29.  Inde  ad  civitatem  Scytharum  abisrunt,  quse  ab 
Jerosolymis  sexcentis  stadiis  aberat. 

50.  Contestantibus  autem  his,  qui  apud  Scythopolitas 
erant,  Judasis,  quod  bénigne  ab  eis  haberentur,  etiam 
temporibus  infelicitatis  quod  modeste  secum  egerint, 

jl.  Gratias  agentes  eis,  et  exhortati  etiam  de  cetero 
erga  genus  suum  benignos  esse,  venerunt  Jerorolymam 
die  solemni  septimanarum  instante. 

?2.  Et  post  Pentecostem  abierunt  contra  Corgiam, 
praepositum  Idumœas. 


21.  Timothée  ayant  su  l'arrivée  du  Judas,  envoya  les 
femmes,  les  enfants  et  le  reste  du  bagage  dans  une  place 
nommé  Camion,  qui  était  imprenable,  l'accès  en  étant 
difficile  à  cause  des  défilés  qu'il  fallait  passer. 

22.  Mais  la  première  cohorte  de  Judas  ayant  paru, 
les  ennemis  furent  frappés  de  terreur  par  la  présence  de 
Dieu  qui  voit  toutes  choses  ;  et  ils  furent  renversés  et 
mis  en  fuite  les  uns  par  les  autres  ;  en  sorte  qu'ils  étaient 
percés  plutôt  par  leurs  propres  épées  que  par  celles 
des  ennemis. 

2j.  Judas  les  poursuivit  avec  la  dernière  vigueur,  en 
punissant  ces  profanes  ;  et  il    en  tua  trente   mille. 

24.  Timothée  étant  tombé  entre  les  mains  de  Dosi- 
thée  et  de  Sosipater,  les  conjura  avec  de  grandes  ins- 
tances qu'ils  voulussent  le  laisser  aller  en  vie,  parce 
qu'il  avait  fait  prisonniers  plusieurs  pères  et  plusieurs 
frères  des  Juifs,  qui  perdraient  par  sa  mort  l'espérance 
de  recouvrer  la  liberté. 

25. Et  leur  ayant  donné  sa  parole  qu'il  leur  rendrait  ces 
prisonniers,  selon  l'accord  fait  entre  eux,  ils  le  laissè- 
rent aller,  sans  lui  faire  aucun  mal,  dans  la  vue  de  sau- 
ver leurs  frères. 

2<S.  Judas  retourna  ensuite  a  Camion,  011  il  tua  vingt- 
cinq  mille  hommes. 

27.  Après  la  fuite  et  le  carnage  de  ces  ennemis,  il  fit 
marcher  son  armée  vers  Ephron,  qui  était  une  ville 
forte,  habitée  par  une  multitude  de  divers  peuples  :  ses 
murailles  étaient  bordées  de  jeunes  hommes  fort  vail- 
lants, qui  les  défendaient  vigoureusement  ;  et  il  y  avait 
dedans  plusieurs  machines  deguerre,  et  toutes  sortes  de 
traits  et  de  dards. 

2!!.  Mais  les  Juifs  ayant  invoqué  le  Tout-Puissant,  qui 
renverse  par  son  pouvoir  toutes  les  forces  des  ennemis, 
prirent  la  ville,  et  tuèrent  vingt-cinq  mille  hommes  de 
ceux  qui  étaient  au  dedans. 

29.  De  là  ils  allèrent  à  la  ville  des  Scythes,  éloignée 
de  six  cents  stades  de  Jérusalem. 

;o.  Et  les  Juifs  qui  demeuraient  dans  Scythopolis 
ayant  eux-mêmes  assuré  que  ces  peuples  les  avaient  fort 
bien  traités,  et  avaient  usé  d'une  grande  modération  à 
leur  égard,  dans  le  temps  même  de  leur  malheur  ; 

jl.  Judas  leur  en  rendit  grâces  ;  et  les  ayant  exhortés 
à  continuer  à  l'avenir  de  témoigner  la  même  bonté  à 
ceux  de  sa  nation,  il  vint  à  Jérusalem  avec  ses  gens, 
Ionique  la  fête  solennelle  des  semaines  était  proche. 

52.  Ils  en  partirent  après  la  Pentecôte,  et  marchèrent 
contre  Gorgias,  gouverneur  de  l'Iduméc. 


COMMENTAIRE 


taillée  en  pièces  par  Dositéeet  Sosipater, envoyés 
par  Judas;  et  Timothée  lui-même,  quoiqu'il  eut 
une  armée  de  cent-vingt  mille  hommes,  fut  battu 
par  Judas,  qui  n'en  avait  que  six  mille  (1). 

%  21.  In  praesidium  quod  Carnion  dicitur. 
C'est  la  ville  de  Camaim,  ou  Aslarolh  Car- 
naïm  (2).  Elle  prenait  son  nom  de  la  déesse 
Astarté  ou  la  Lune  ;  Carnaïm  en  hébreu  signifie 
les  deux  cornes.  La  déesse  portait  deux  cornes 
sur  la  tète  en  forme  de  croissant  .  Le  grec,  au 
verset  26,  ajoute  à  Carnion  A'^pyaniov,  que  l'on 
croit  être  le  temple  de  Dercéto,  déesse  philistine, 
"où  les  ennemis  s'étaient  réfugiés  (3). 

f.  24.  Quos  morte  ejus  decipi  eveniret.  On 


les  traiterait  sans  miséricorde,  on   ne  leur  ferait 
aucun  quartier,  si  l'on  tue  Timothée. 

y.  27.  Ad  Ephron.  Voyez  ce  qui  a  été  dit 
sur  1.  Macc.  verset  ^6. 

y.  29.  Ad  civitatem  Scytharum.  A  Scytho- 
polis, autrement  Bethsan,  à  quelque  distance  de 
la  pointe  méridionale  de  la  mer  de  Tibériade, 
près  du  Jourdain. 

f.  31.  Die  solemni  septimanarum. 
tecôte,  ainsi  nommée,  parce  qu'elle  se 
sept  semaines  après  Pâques  (4). 

v.  32.  Pr/epositum  Idum,E;e.  Grotius  croit 
qu'il  faut  lire  Jamniœ,  au  lieu  à'Idumeœ,  parce 
que,  dans  le  premier  livre  des^Maccabées  (<,)  et 


La   Pen- 

célébrait 


(1)  Ibid.  versets  57...  47.  —  (2)  1.  Macc.  v.  44. 

(?)  1.  Macc.  v.  4?.  -  Cf.  Rcland,  Palesl.  illust.  p.  601. 

(4)  Lcrit.  xxm.   If.    Numerabitis  ab  altcro  die  sabbati, 


in  quo  obtulistis  manipulum  primitiarum  septem  Hebdo- 
uiadas  plenas. 
(5)  1.  Macc.  v.  58.  5}. 


II.  —  MACCABEES. 


XII.  -  ACTIVITE  DE  JUDAS 


-ni 


?;.  Exivit  autem  cum  peditibus  tribus  millibus,  et  equi- 
tibus  quadringentis. 
j4.  Quibus  congressis.contigitpaucos  ruere  Judaeorum. 

}Ç.  Dositheus  vero  quidam  de  Bacenoris  eques,  vir 
fortis,  Gorgiam  tenebat;  et  cum  vellet  illum  capere 
vivum,  eques  quidam  de  Thracibus  irruit  in  eum,  hume- 
rumque  ejus  amputavit,  atque  ita  Gorgias  etTugit  in 
Maresa. 

56.  At  il  lis,  qui  cum  Esdrin  erant,  diutius  pugnantibus 
et  fatigatis,  invocavit  Judas  Dominum  adjutorem  et  du- 
cem  belli  lieri  ; 

57.  Incipiens  voce  patria,  et  cum  hymnis  clamorem 
extollens,  fugam  Gorgias  militibus  incussit. 


55.  Judas  alla  l'attaquer  avec  trois  mille  hommes  de 
pied,  et  quatre  cents  chevaux. 

54.  Et  les  deux  armées  en  étant  venues  aux  mains,  peu 
de  Juifs  demeurèrent  sur  place. 

;$.  Un  cavalier  de  Bacenoris,  nommé  Dosithée,  un 
vaillant  homme,  se  saisit  de  Gorgias  ;  et  lorsqu'il  vou- 
lait le  prendre  vif,  un  cavalier  de  Thrace  se  jeta  sur 
lui,  et  lui  coupa  l'épaule.  Gorgias  put  ainsi  se  sauver  à 
Marésa. 

56.  Mais  ceux  qui  étaient  commandés  par  Esdrin, 
combattant  depuis  longtemps  se  trouvaient  fatigués  ; 
Judas  invoqua  le  Seigneur,  afin  qu'il  devint  lui-même  le 
protecteur  et  le  chef  de  son  armée. 

57.  Et,  commençant  à  élever  sa  voix  dans  la  langue 
de  ses  pères,  et  poussant  vers  le  ciel  des  cris  avec  des 
hymnes  et  des  cantiques,  il  mit  en  fuite  les  soldats  de 
Gorgias. 


COMMENTAIRE 


dans  Josèphe  (1)  il  est  dit  que  Gorgias  était  gou- 
verneur de  Jamnia,  et  plus  bas  au  verset  39,  on 
remarque  que  quelques  soldats  de  l'armée  de 
Judas,  avaient  pris  de  l'or  et  de  l'argent  dans  les 
temples  de  Jamnia.  Mais  cela  empèche-til  qu'il 
ne  commandât  dans  l'Idumée,  c'est-à-dire,  dans 
la  partie  la  plus  méridionale  du  pays  de  Juda  ? 

jf,  55.  Dositheus  quidam  de  Bacenoris  eques- 
Ce  Dosithée  est  sans  doute  différent  de  Dosithée, 
capitaine  d'une  partie  des  troupes  de  Judas,  dont 
il  est  parlé  au  verset  24. Celui-ci  était  de  Kinnéreth, 
ou  Génésareth,  sur  le  lac  de  même  nom,  c'est 
l'explication  la  plus  naturelle  du  terme.  Bacenoris, 
ou  en  grec  Baxijvapoc.  En  reconstruisant  la  phrase 
en  hébreu,  nous  aurions  m:~  a  qui  se  décom- 
pose =  be  dans  le  sens  de  D  avec  lequel  il  se  per- 
mute :  de  et  mua  Kinnéreth  ;  de  Kinnéreth,  de 
Génésareth.  D'autres  commentateurs  (2)  croient 
que  le  cavalier  était  de  la  compagnie  d'un  nommé 
Bacénor. 

Effugit  in  Maresa.  Gorgias  se  sauva  à  Marésa, 
près  d'Éleutéropolis.  Voyez  ce  qu'on  a  dit  sur  1, 
Macc.  v,  verset  66.  Le  syriaque  lit  ici  :  La  Sa- 
marie,  de  même  que  la  Vulgate,  et  le  grec  dans 
l'endroit  cité  du  premier  livre  des  Maccabées. 

jL  }6.  Qui  cum  Esdrin  erant.  Ceux  qui  étaient 
commandés  par  Esdrin,  ou  par  Esdras,  ou  peut- 
être  par  Avarias,  l'un  de  ces  capitaines,  qui 
avaient  été  maltraités  par  Gorgias,  quelque  temps 
auparavant,  et  repoussés  jusque  dans  la  Judée  (3). 

Invocavit  Judas  dominum  adjutorem.  La 
mort  de  ces  Juifs  qui  demeurèrent  sur  place,  et 
cette  fatigue  extraordinaire  qu'eurent  les  autres, 
jointe  à  l'opiniâtreté  des  ennemis  qui  les  combat- 
taient, marquaient  visiblement  qu'il  y  avait  quel- 
que raison  pour  laquelle  Dieu  différait  de  les 
secourir  comme  auparavant.  C'est  pourquoi 
l'humble  Maccabée  l'invoqua  avec  plus  d'ardeur; 


et,  redoublant  ses  prièresetses  cris,  eny  joignant 
les  louanges  et  les  cantiques  pour  relever  la  ma- 
jesté de  Celui  qu'il  invoquait  avec  la  foi  de  ses 
pères,  il  obtint  enfin  la  grâce  de  surmonter  ceux 
qui  étaient  près  de  triompher  du  peuple  de  Dieu 
pour  la  faute  de  quelques-uns.  Judas  ignorait  la 
cause  de  ce  petit  désavantage  qu'il  avait  souffert: 
mais,  après  que  ses  soldats  se  turent  purifiés  selon 
l'ordonnance  de  la  loi,  à  cause  du  sang  répandu 
dans  le  combat,  et  qu'ils  eurent  célébré  le  sabbat. 
Dieu  lui  fit  la  grâce  de  lui  découvrir,  et  à  ses 
gens,  la  vraie  raison  de  la  mort  de  leurs  compa- 
gnons. 

On  a  vu  auparavant,  qu'ils  avaient  brûlé  le 
port  avec  les  vaisseaux  de  la  ville  de  Jamnia. 
Quelques-uns  d'entr'eux,  peut-être  par  avarice, 
avaient  réservé  des  choses  consacrées  aux  idoles 
qu'adoraient  les  habitants  de  Jamnia.  Cependant, 
quoique  le  nombre  de  ceux  qui  étaient  tombés 
dans  cette  faute  fût  très  petit,  Dieu  fit  sentir  sa 
justice  en  punissant  les  coupables  par  une  mort 
temporelle,  et  en  effrayant  tous  les  autres  par 
cette  punition.  Tous  les  Juifs  qui  accompagnaient 
Judas  Maccabée  furent  en  danger  de  périr  par 
la  faute  de  ce  petit  nombre  de  coupables  ;  et  il 
fallut  une  prière  aussi  ardente,  soutenue  par  une 
foi  aussi  vive  que  celle  du  héros  d'Israël,  pour 
attirer  de  nouveau  la  miséricorde  de  Dieu  sur  les 
troupes. 

Que  les  innocents  ne  se  flattent  donc  point  de 
leur  innocence,  comme  s'ils  pouvaient  être  in- 
différents aux  péchés  des  autres.  L'Église  est  un 
corps,  dont  les  membres  qui  sont  sains  doivent 
s'intéresser  aux  membres  malades  comme  à  leurs 
propres  membres.  Dansnotrecorps  naturel, la  main 
qui  se  porte  bien  ne  néglige  point  et  ne  peut 
point  regarder  indifféremment  le  pied  lorsqu'il  est 
malade  ;  parce  que  la  liaison  des  membres   entre 


(1)  Joseph.  Antiq.  t.  un.  c.  1: 
v:a;  aTpacr^YoO. 


Tooylov  os  tou  iîj;  I'au.- 


(2)  Mcnoc.  Usser. 
(?)  i.'Macc.  v.  60. 


2J2 


II.  —  MACCABÉES.  —  XII.  -  CHATIMENT  PROVIDENTIEL 


58.  Judas  autem,  collecto  exercitu,  venit  in  civitatem 
Odollam,  et  cum  septima  dies  superveniret,  secundum 
consuetudinem  purification  eodem  loco  sabbatum  egerunt. 

J9.  Et  sequenti  die  venit  cum  suis  Judas,  ut  corpora 
prostratorum  tolleret,  et  cum  parentibus  poneret  in  se- 
pulcris  patcrnis. 

40.  Invenerunt  autem  sub  tunicis  interfectorum,  de 
donariis  idolorum  quse  apud  Jamniam  fuerunt,  a  quibus 
lex  prohibet  Judaeos;  omnibus  ergo  manifestum  factum 
est  ob  hanc  causam  eos  corruisse. 

41.  Omnes  itaque  benedixerunt  justum  judicium  Do- 
mini,  qui  occulta  fecerat  manifesta  ; 


?8.  Judas  rassembla  ensuite  ses  gens,  et  vint  à  la  ville 
d'Odollam,  où  se  trouvant  le  septième  jour,  il  se  puri- 
fièrent selon  la  coutume,  et  célébrèrent  le  sabbat. 

59.  Le  jour  suivant,  Judas  vint  avec  ses  gens  pour 
emporter  les  corps  de  ceux  qui  avaient  été  tués,  et 
pour  les  ensevelir  avec  leurs  parents  dans  les  tom- 
beaux de  leurs  pères. 

40.  Or,  ils  trouvèrent,  sous  les  tuniques  de  ceux  qui 
étaient  morts  au  combat,  des  choses  qui  avaient  été  con- 
sacrées aux  idoles  qui  étaient  dans  Jamnia,  et  que  la  loi 
interdit  aux  Juifs  :  tout  le  monde  reconnut  donc  claire- 
ment que  ce  fut  la  cause  de  leur  mort. 

41.  C'est  pourquoi  tous  bénirent  le  juste  jugement  du 
Seigneur,  qui  avait  découvert  ce  que  l'on  avait  voulu 
cacher. 


COMMENTAIRE 


eux  fait  sentir  la  nécessité  des  uns  aux  autres. 
Elle  n'est  pas  moindre,  selon  saint  Paul,  entre 
tous  les  membres  du  corps  spirituel  de  1  Église, 
quoiqu'elle  soit  moins  sensible  :  mais  Dieu,  pour 
en  augmenter  le  sentiment,  permet  quelquefois, 
comme  il  fit  alors,  que  les  innocents  souffrent 
effectivement,  et  se  trouvent  en  péril  pour  les 
coupables,  afin  que  la  charité  les  unissant  tous 
ensemble  plus  étroitement,  leur  inspire  une  sainte 
inquiétude  les  uns  pour  les  autres,  et  une  plus 
grande  ardeur  à  s'entr'aider  mutuellement. 

Mais  tout  est  prodigieux  dans  ces  récits.  Com- 
ment une  poignée  de  monde  parvint-elle  à  sortir 
victorieuse  de  tant  de  champs  de  bataille,  sans 
tomber  sous  le  poids  de  ses  lauriers  mômes  ? 
C'était  donc  visiblement  par  un  miraclecontinuel, 
que  ces  Juifs  qui  étaient  tantôt  au  nombre  de 
six  à  sept  mille,  et  tantôt  au  nombre  de  trois 
mille  hommes  seulement,  remportaient  la  victoire 
sans  perdre  de  leurs  frères.  Et  ce  prodige  par 
lequel  ils  étaient  ainsi  conservés  ,  paraissant, 
comme  le  dit  un  des  généraux  d'Antiochus,  invul- 
nérables, n'était  que  l'effet  d'un  autre  miracle 
beaucoup  plus  grand,  par  lequel  l'esprit  de  Dieu 
les  affermissait  d'une  manière  admirable  dans  la 
piété  et  dans  la  foi,  qui  les  rendaient  dignes  de 
combattre  jusqu'à  la  fin  pour  sa  gloire. 

y.  38.  In  civitatem  Odollam.  A  la  pille 
d'Odollam,  située  dans  la  partie  méridionale  de 
Juda  (1),  et  qui  était  peuplée  de  Juifs.  L'armée  de 
Judas  vint  s'y  rafraîchir  et  y  passer  le  sabbat. 
L'Ecriture  remarque  ici,  qu'ils  se  purifièrenl  pour 
célébrer  celle  fête  ;  ils  se  lavèrent  avec  de  l'eau 
d'expiation,  faite  avec  la  cendre  de  la  vache 
rousse,  dont  se  purifiaient  ceux  qui  avaient  tou- 
ché des  corps  morts,   même  à   la  guerre  (2).    La 


loi  ordonnait  que  ceux  à  qui  cet  accident  était 
arrivé  demeurassent  sept  jours  hors  du  camp; 
mais  lorsque  toute  l'armée  avait  été  à  la  bataille, 
on  n'observait  pas  le  nombre  de  jours.  Ils  se  pu- 
rifiaient tous  ensemble,  en  même  temps,  surtout 
lorsque  le  temps  pressait.  Il  est  très  probable  que 
l'armée  de  Judas  n'entra  pas  dans  la  ville  d'Odol- 
lam, de  peur  d'y  communiquer  quelque  souil- 
lure :  elle  put  passer  le  sabbat  près  de  cette 
ville. 

f.  39.  Sequenti  die  venit  cum  suis  Judas.  Le 
jour  suivant  Judas  vint  avec  ses  gens,  pour  empor- 
ter les  corps  de  ceux  qui  avaient  été  tués  dans  le 
combat.  Le  grec  (3)  dit  que,  le  jour  suivant, 
comme  cela  devenait  nécessaire,  Judas  et  les 
siens,  vinrent  pour  donnerlasépulture  aux  morts; 
ils  y  vinrent  dès  le  samedi  au  soir,  où  le  sabbat 
finit,  et  où  il  est  permis  de  travailler  ;  où  ils  vin- 
rent dès  le  matin  du  jour  qui  suivit  le  sabbat. 

In  sepulcris  paternis.  Dans  les  tombeaux  de 
leurs  pères,  ou  plutôt  dans  les  tombeaux  destinés 
aux  hommes  de  leurs  nations,  dans  le  cimetière 
d'Odollam  ;  car  comment  discerner  tous  ces  sol- 
dats morts  dans  la  bataille,  et  commentles porter 
aux  tombeaux  de  leurs  ancêtres,  dans  les  divers 
cantons  de  la  Judée  d'où  ils  étaient  venus  ? 

v.  40.  De  donariis  idolorum.  Ces  Israélites 
avaient  pillé  quelques  uns  des  temples  de  Jam- 
nia, et  y  avaient  pris  des  ex-voto  d'or  et  d'argent 
qui  étaient  consacrés  par  les  païens.  La  bataille 
s'était  peut-être  livrée  aux  environs  de  Jamnia, 
dont  Gorgias  était  gouverneur.  Voyez  plus  haut 
le  commentaire  sur  le  verset  32.  La  loi  défendait 
expressément  de  prendre  aucune  chose  consa- 
crée aux  idoles  (4)  :  Nec  infères  quidquam  ex 
idolo  in  domum  luam. 


(1)  Gènes,  xxxvm.  1. 

(2)  Vide  Num.  xix.  2.  12.  17.  et  xxxi.  19. 


(;)  Tfj  oï  E^ofju'vr]  rjXOov  ôt  r.io\  rôv  I'oùoav  y.aQ'  ov  ypdvov 
(4)  Deut.  vu.  25.  26. 


II.—   MACCABÉES.—  XII.-   PIETE  DE  JUDAS 


233 


4:.  Atque  ita  ad  preces  conversi,  rogaverunt  ut  id 
quod  factum  erat  delictum  oblivioni  traderetur.  At  vero 
t'ortissimus  Judas  hortabaïur  populum  conservare  se  sine 
peccato,  sub  oculis  videntes  qua:  facta  sunt  pro  peccatis 
eorum  qui  prostrati  sunt. 

4;.  Et  facta  collatione,  duodecim  millia  drachmas 
argenti  misit  Jerosolymam,  olferri  pro  peccatis  mortuo- 
rum  sacrificium,  bene  et  religiose  de  resurrectione  co- 
gitans, 

44.  (Nisi  enim  eos,  qui  ceciderant,  resurrecturos  spe- 
raret,  superfluum  videretur  et  vanum  orare  pro  mortuis), 


42.  Et,  se  mettant  en  prières,  ils  conjurèrent  le  Sei- 
gneur d'oublier  le  péché  qui  avait  été  commis  ;  mais  le 
très  vaillant  Judas  exhortait  le  peuple  à  se  conserver 
sans  péché,  en  considérant  ce  qui  était  arrivé  à  cause 
des  péchés  de  ceux  qui  avaient  été  tués. 

4;.  Et,  ayant  recueilli,  d'une  quête  qu'il  fit  faire,  douze 
mille  drachmes  d'argent,  il  les  envoya  à  Jérusalem,  afin 
qu'on  offrît  un  sacrifice  pour  les  péchés  de  ces  personnes 
qui  étaient  mortes  :  bons  et  religieux  sentiments  tou- 
chant la  résurrection. 

44.  (  Car  s'il  n'avait  espéré  que  ceux  qui  avaient  été 
tués  ressusciteraient  un  jour,  il  eût  regardé  comme  une 
chose  vaine  et  surperflue  de  prier  pour  les  morts.  ) 


COMMENTAIRE 


jh    42.   ROGAVERUNT  UT  ID  QUOD    FACTUM    ERAT 
DELICTUM,    OBLIVIONI     TRADERETUR.   Le    grec  (  I  )  : 

Ils  priaient  que  le  péché  commis  fût  entièrement 
effacé.  Le  syriaque:  Ils  prièrent  que,  pour  cela, 
on  ne  leur  confiât  point  un  péché  parfait.  Quel- 
ques anciens  exemplaires  grecs  (2)  :  Ils  prièrent 
qu'à  cause  de  ce  péché,  ils  ne  fussent  pas  entière- 
ment effacés  ;  que  cette  faute  ne  leur  fût  point 
imputée  comme  un  crime  irrémissible.  Ils  ne  dou- 
taient pas  qu'il  n'y  eût  certains  péchés,  dont  les 
morts  pouvaient  obtenir  le  pardon,  dans  leur  vie, 
surtout,  lorsque  les  vivants  s'intéressaient  à  leur 
salut,  et  qu'ils  faisaient  poureux  quelques  actions 
satisfactoires.  Les  Juifs,  dès  le  temps  de  la  capti- 
vité de  Babylone,  ont  commencé  à  prier  pour  les 
morts  (3).  Le  prophète  Ézéchiel  et  Daniel  leur 
découvrirent  sur  l'état  d'une  autre  vie,  et  sur  le 
jugement  dernier,  des  vérités  qu'ils  ne  connais- 
saient point  auparavant  d'une  manière  si  distincte. 
On  voit  depuis  ce  temps-là,  la  résurrection  des 
morts,  le  soin  des  sépulcres,  la  prière  pour  les 
défunts,  beaucoup  plus  clairement  qu'avant  la 
captivité.  Les  docteurs  juifs  (4),  reconnaissent 
une  espèce  de  purgatoire,  oà  se  purifient  les  pré- 
varicateurs d'Israël,  c'est  ainsi  qu'ils  appellent 
ceux  qui  ne  sont  ni  tout-à-fait  méchants,  ni  tout- 
à-fait  bons,  et  qui  meurent  sans  faire  pénitence. 
Ils  croient  que  Dieu, toujours  plus  miséricordieux 
que  sévère,  ne  punira  pas  éternellement  des  fau- 
tes, souvent  assez  légères.  Le  purgatoire  des 
Juifs,  n'est  point  différent  de  l'enfer  ;  les  mêmes 
flammes  brûlent  tous  ceux  qui  meurent  dans  le 
péché  ;  ils  sont  tous  tourmentés  dans  le  même 
lieu  ;  mais  on  peut  en  sortir  après  quelque  temps, 
secourus  des  prières  des  vivants.  Ces  docteurs 
croient  que  le  feu  infernal  respecte  les  Juifs  dam- 
nés, pendant  le  jour  du  sabbat.    Ils  ne    souffrent 


point  ce  jour  là.  Ce  serait  une  légère  consolation 
si  elle  reposait  sur  quelque  chose. 
f.   43.    Facta  collatione,   duodecim   millia 

DRACHMAS  ARGENTI  MISIT  JEROSOLYMAM,  OFFERRI 
PRO    PECCATIS  MORTUORUM  SACRIFICIUM.    Le    grec 

ne  porte  que  deux  mille  drachmes,  et  le  syriaque 
trois  mille  {'-,)  ;  mais  les  exemplaires  latins  por- 
tent unanimement  douze  mille  drachmes,  et  saint 
Prosper  lisait  même  douze  mille  talents  (6).  La 
drachme  valait  environ  0,80.  La  loi  n'ordonnait 
point  de  sacrifices  pour  les  morts,  mais  la  prati- 
que des  Juifs,  autorisée  par  les  prophètes,  et  par 
les  plus  saints  personnages  de  la  Synagogue,  était 
déjà  bien  établie  du  temps  de  Judas  Maccabée. 
On  remarque  dans  l'auteur  de  cet  ouvrage,  une 
attention  particulière,  à  relever  tout  les  endroits 
qui  prouvent  la  résurrection  des  morts  et  les  ré- 
compenses d'une  autre  vie  (7),  pour  les  opposer 
apparemment  aux  saducéens  qui  commençaient 
alors  à  répandre  dans  Israël  leurs  dogmes  perni- 
cieux, contraires  à  ces  vérités.  C'est  ce  qui  lui 
fait  faire  la  réflexion  que,  si  Judas  n'avait  espéré 
que  ceux  qui  avaient  été  tués  ressusciteraient  un 
jour,  il  aurait  regardé  comme  une  chose  vaine  et 
superflue,  de  prier  pour  eux  ;  il  conclut  que  c'est 
une  sainte  et  salutaire  pensée,  de  prier  pour  les 
morts,  afin  qu'ils  soient  délivrés  de  leurs  péchés. 
C'était  donc  la  persuasion  du  commun  des  Juifs. 
C'est  d'eux,  que  l'Église  a  pris  ce  pieux  usage, 
qu'elle  a  conservé  jusqu'aujourd'hui.  Nous  ne 
nous  étendrons  pointàprouverl'antiquité  de  cette 
tradition  parmi  nous;  on  peut  voir  nos  contro- 
versistes  (8).  Nos  adversaires  eux-mêmes  con- 
viennent que  telle  a  été  l'opinion  des  Juifs  et  des 
anciens  chrétiens  ;  mais  ils  se  retranchent  à  nier 
l'antiquité  des  livres  des  Maccabées,  et  à  traiter 
de  superstitions  ce  qui  s'est  pratiqué  si  religieuse- 


(1)  A'fiajoavTe;  iô  yE^ovoç  caj.âpTrju.a  'eXei'oo;  ÈÇa.X£[cp0^vac. 

(2)  Edit.  Aldina  et  Ms.  Arundel.  npud  Usser.  ad  an. 
M.  841.  H"Çt'wo«v  pi)  ocà.  xo  -ysyovo;  â(j.àpTrllua  teX^w; 
ÈijaXEîsOfjvat. 

(5)  Grot.  hic. 

(4)  Bartolocci  Bibliot.  Rabinic.  tome  11.  p.  150.  Basnage, 
Hist.  des  Juifs,  tom.  111,  liv.  îv,  c.  J2,  art.  9  et  suiv.  Léon 


de  Modène,  ve  partie,  c.    10.   Vide  si  placet  et  Cenebr.  et 
BeUar.  et  Serar.  et  Tirin,  et  Est. 

(5)  Ita  Arundelian.  Codex  Grxc.  apud  Usser. 

(6)  Prosper  lib.  de  promissione  parte  2.  c.  Usser. 

(-7)  Voyez  11.  M  ace.  vu.  9.  11.  14,  2j.  29.  ;6.  ctxiv.  46. 
(8)  Vide  Bellarmin.  de  Purgalorio,  et  si  lubet  Serar.  hic. 
Est.  Tir.  alios  passim. 


234 


II. 


MACCABÉES.  —  XII.  -   PRIÈRES  POUR   LES  MORTS 


4>.  Et  quia  considerabat  quod  hi,  qui  cum  pietate 
durmitionem  acceperant,  optimam  haberent  repositam 
gratiam. 

46.  Sancta  ergo  et  salubris  estcogitatio  pro  defunctis 
exorare,  ut  a  peccatis  sovlantur. 


4Ç.  Ainsi  il  considérait  qu'une  grande  miséricorde  était 
réservée  à  ceux  qui  étaient  morts  dans  la  piété. 

46.  C'est  donc  une   sainte  et  salutaire  pensée  de  prier 
pour  les  morts,  afin  qu'ils    soient  délivrés  de  leurs  péchés- 


COM  MENTAIRE 


ment,  depuis  tant  de  s'.ècles,  etdansla  Synagogue 
et  dans  l'Église,  comme  si  les  plus  illustres  pré- 
lats de  l'antiquité  chrétienne  (1),  et  les  plus  pieux 
personnages  de  la  Synagogue  avaient  été  capables 
de  souffrir  et  d'autoriser  la  superstition  ;  comme 
si  l'on  pouvait  faire  ces  mêmes  reproches  à  Jésus- 
Christ  et  aux  apôtres,  qui  ont  trouvé  cette  prati- 
que établie  parmi  les  Juifs,  et  non  seulement 
l'ont  soufferte  sans  l'attaquer,  mais  qui  l'ont  même 
autorisée  par  leur  témoignage,  et  par  leur  appro- 
bation (2). Et  à  l'égard  des  livres  des  Maccabées, 
nouscroyons  avoirbien  montrédansl'introduction, 
qu'ils  ont  tous  les  caractères  de  vérité  et  d'au- 
thenticité, que  l'on  peut  souhaiter.  On  ne  s'arrête 
pointa  réfuter  l'imagination  de  Munster,  qui  a 
soupçonné  ce  passage  d'avoir  été  ajouté  en  cet 
endroit  ;  tous  les  exemplaires  grecs,  latins  et 
syriaques,  tant  imprimés,  que  manuscrits,  portent 
uniformément,  comme  la  Vulgate:  et  les  anciens 
pères  l'ont  cité  et  connu,  sans  aucune  variante,  ni 
aucun  doute. 

jL  45.  Quia,  considerabat  quod  hi,  qui  cum 

PIETATE       DORMITIONEM       ACCELERANT,      OPTIMAM 

haberent  repositam  gratiam.  On  ne  peut  pas 
assurer  que  les  soldats  qui  s'étaient  rendus  cou- 
pables d'une  espèce  de  sacrilège,  en  portant  sur 
eux,  contre  l'ordonnance  de  la  loi,  des  choses 
consacrées  aux  idoles,  soient  morts  dans  la  piété  ; 
mais  Judas  put  charitablement  présumer  qu'ils 
avaient  conçu  du  repentir  de  leur  action  avant 
leur  mort,  et  qu'ils  en  avaient  demandé  pardon  à 
Dieu,  ou  qu'ils  ne  s'étaient  portés  à  enlever  ces 
présents  des  idoles,  que  comme  de  simples 
dépouilles,  sans  aucun  dessein  d'idolâtrie,  ou 
qu'ils  avaient  envie,  après  la  bataille,  de  rapporter 
à   Judas  ces   dépouilles,    pour   être    fondues,   et 


ensuite  distribuées  aux  troupes,  suivant  les  règles 
de  la  guerre.  La  petitesse  de  la  matière,  ou 
d'autres  circonstances,  qui  ne  nous  sont  point 
connues,  purent  faire  juger  à  ce  sage  général, 
que  leur  faute  n'était  pas  de  la  nature  de  celles 
qui  donnent  la  mort  à  l'âme,  et  qui  lui  ôtent  tout 
espoir  de  pardon  après  la  mort  ;  ces  soldats  étaient 
morts  dans  la  foi,  et  dans  une  guerre  juste,  pour  la 
défense  de  la  liberté  et  des  lois  de  leur  pays  :  la 
précipitation,  l'ignorance,  l'avidité  du  gain,  eurent 
sans  doute  beaucoup  de  part  à  leur  action.  Enfin, 
Dieu  ayant  permis  qu'ils  fussent  tués  dans  ce 
combat,  voulait  apparemment  les  châtier  en  cette 
vie,  pour  leur  faire  miséricorde  en  l'autre  ;  c'est 
ainsi  que  la  charité  veut  qu'on  en  juge,  tant  qu'on 
n'a  pas  de  preuves  positives  du  contraire. 

Quoi  qu'il  en  soit  des  soldats  juifs,  on  ne  peut 
nier  que,  d'après  la  pratique  des  siècles,  on  ne 
doive  prier  pour  les  défunts.  Cependant  «  il  y  en 
a  »,  dit  saint  Augustin  (3),  «  à  qui  les  choses  que 
l'on  fait  pour  eux  après  qu'ils  sont  morts,  sont 
tout  à  fait  inutiles  :  et  ce  sont  ou  ceux  dont  la  vie 
a  été  si  méchante,  qu'ils  sont  indignes  d'être  aidés 
par  tous  ces  devoirs  de  la  piété  ;  ou  ceux,  au  con- 
traire, dont  la  vie  a  été  si  pure,  qu'ils  n'ont  point 
besoin  de  ces  assistances.  C'est  donc  par  la 
manière  dont  on  a  vécu,  qu'on  se  rend  digne  ou 
indigne  d'éprouver,  après  sa  mort,  l'effet  salutaire 
de  ce  que  la  piété  fait  faire  pour  nous  aux  fidèles  : 
car  c'est  en  vain  que  l'on  cherche  après  cette  vie 
un  mérite  qui  nous  rende  ces  choses  utiles,  si 
nous  n'avons  pas  eu  soin  d'en  acquérir  pendant 
que  nous  vivions  :  Nain  rmriium  per  quod  isla 
prosinl,  si  nullum  comparalum  est  in  liac  viia. 
frustra  quœrilur  post  hanc  vilain. 


(l)  Vide  Alhanas.  qu.  J4.  ad  Ar.tioch.  -  Na;ian^.  oral,  in 
Ccsar.-  Crrill.  Catheches.  <,.  -  Euscb.  de  viia  Const  l.  v.- 
Epiph.  hceres.  i.xxv.  cl  in  fine  lib.  de  hœres.  -  Chrysost- 
liomil.  xli.  in  i.  ad  Cor.  et  Jiomil.  xi.ix.  ad  popul.  et  alibi 
scepius.  -  7  heodoret.  lit',  v.  c.  26.  -  Damasc.  Ub.  de  us  qui 
in  fuie  migrorunt.  -  Tertull.  de  Corona  militis,  et  Ub.  de 
Monog.  et  lib.  de   Exhort.   castil.  -  Cyprian.  t.   1.    ep.   9.  - 


Ambres,  cp.  ad  Faust,  et  Ora/ionib.  de  obilu  Theodos. 
Valentin.  et  Satyri.  -  Aug.  de  cura  pro  mort.  c.  1.  et  alibi 
scepius,  etc. 

(2)  Vide  Malt.  m.  lJ.etl.C0r.lll.13.14.  15.  c/xv.  29.  - 
1.  Tunol.  1.  16.  18.   Vide  et  Luc.  xvi.  9.  et  24. 

(j)  Augiist.  De  car.  pro  mort,  gerend.  c.  1. 


CHAPITRE    XII 


Les  Juifs  sont  persécutes  par  les  gouverneurs  des  pays  voisins  de  la  Judée.  Expéditions  de 
Judas  contre  les  habitants  de  Joppéet  contre  ceux  de  Jam nia.  Il  marche  contre  Timothée 
au-delà  du  Jourdain.  Il  défait  l'armée  de  Timothée.  Il  revient  à  Scythopolis.  Il  marche 
contre  Gorgias,  et  le  met  en  fuite,  Oblalions  pour  les  Juifs  qui  avaient  été  tués 
dans  ce  combat. 


i.  Mis  f a c t; s  pactionibus,  Lysias  pergebat  ad  regem, 
Judœi  autem  agriculture  operam  dabant. 

2.  Sed  lii  qui  resederant,  Timotheus,  et  Apollonius, 
Gennxi  lilius,  sed  Hieronymus,  et  Demophon  super 
hos,  et  Nicanor  Cypriarches,  non  sinebant  cos  in  silen- 
lio  ogcre  et  quiète. 

;.  Joppita?  vero  taie  quoddam  llagitium  perpetrarunt  : 
rogaverunt  Judaeos,  cum  quibus  habitabant,  ascendere 
scaplias,  quas  paraverant,  cum  uxoribus  et  filiis,  quasi 
nullis  inimicitiis  inter  eos  subjacentibus. 


4.  Secundum  commune  itaque  decretum  civitatis,  et 
ipsis  acquiescenlibus,  pacisque  causa  nihil  suspectum 
habenhbus,  cum  in  altum  processissent,  submerserunl 
non  minus  ducentos. 


<,.  Quam  crudelitatem  Judas  in  suas  gentis  homines 
factam  ut  cognovit,  preecepit  viris  qui  erant  cum  ipso  ; 
et  invocato  justo  judice  Deo, 


1.  Ce  traité  ayant  été  fait,  Lysias  s'en  retourna  vers  le 
roi,  et  les  Juifs  s'occupaient  alors  à  cultiver  leurs 
champs. 

2.  Mais  ceux  qui  étaient  demeurés  dans  le  pays,  Timo- 
thée, et  Apollonius  (11  s  de  Gennéus,  et  de  plus  Jérôme, 
Demophon,  et  Nicanor,  gouverneur  de  Chypre,  ne  les 
laissaient  point  vivre  en  paix  ni  en  repos. 

;.  Cependant  il  arriva  que  les  habitants  de  Joppé 
commirent  alors  une  grande  perfidie  :  ils  prièrent  les 
Juifs  avec  lesquels  ils  habitaient,  de  monter,  avec  leurs 
femmes  et  leurs  enfants,  sur  des  barques  qu'ils  avaient 
préparées,  comme  s'il  n'y  avait  eu  aucune  inimitié  entre 
eux. 

4.  Et  suivant  la  convention  arrêtée  d'une  commune  voix 
dansla  vilie.et  à  laquelle  les  Juifs  mêmes  avaient  adhéré, ils 
n'eurent  aucun  mauvais  soupçon,  à  cause  de  la  paix  qui 
était  entre  eux  :  mais  lorsqu'ils  furent  avancés  en  pleine 
mer,  les  habitants  de  Joppé  noyèreni  les  Juifs  qui  n'é- 
taient pas  moins  de  deux  cents. 

<,.  Lorsque  Judas  eut  appris  cette  cruauté  qu'on  avait 
commise  contre  les  gens  de  sa  nation,  il  donna  ses  ordres 
à  ceux  qui  étaient  avec  lui  ;  et,  après  avoir  invoqué  Diej 
qui  est  le  juste  juge, 


COMMENTAIRE 


f.  1.  His  factis  pactionibus.  Ce  traité  ayant 
été  fait,  Lysias  s'en  retourna  vers  le  roi  à  Antio- 
che.  Il  n'est  pas  bien  clair  par  le  texte,  si  la  paix 
entre  les  Juifs  et  Antiochus,  fut  ratifiée.  On  ne 
sait  si  Lysias  attendit  !a  réponse  du  roi,  ou  s'il 
n'alla  pas  à  Antioche,  pour  y  terminer  lui-  même 
cette  affaire,  car  le  jeune  Antiochus  Eupator  n'é- 
tait point  encore  en  âge  de  gouverner  par  lui- 
même.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  Israélites,  confiants 
en  la  parole  donnée  par  Lysias  et  dans  la  trêve 
dont  on  était  convenu,  se  mirent  à  cultiver 
leurs  terres,  comme  en  pleine  paix. 

f.  2.  Sed  hi  qui  resederant,  Timotheus,  etc. 
Mais  ceux  qui  étaient  demeurés  dans  le  pays,  Ti- 
mothée et  les  autres,  ne  les  laissèrent  pas  tran- 
quilles. Il  y  eut  deux  généraux  du  nom  de  Timo- 
thée. Le  premier  fut  tué  à  Gazara,  avec  son  frère 


Chéréas  (1);  le  second  figure  au  premier 
livre  (2)  et  dans  ce  chapitre.  Son  gouvernement 
était  au  delà  du  Jourdain;  c'est  là  que  Judas  lui  fit 
la  guerre. 

Apollonius  Genn/ei  filius.  Apollonius,  fils  de 
Gennée,  différent  d'un  autre  Apollonius,  fils  de 
Tharsée,  dont  il  est  parlé  ailleurs  (]).  On  ne  sait 
pas  où  il  commandait,  non  plus  que  Jérôme  et 
Demophon  ;  mais  Nicanor  était  gouverneur  de 
Chypre.  Cette  île  avait  été  livrée  à  Antiochus 
Epiphane,  par  Ptolémée,  fils  de  Dorymini  (4). 

f.  .\.  Secundum  commune  decretum  civitatis, 
et  ipsis  acquiescentibus.  D'après  le  grec  (5). 
Les  Juifs  étaient  montés  dans  les  barques,  comme 
n'ayant  aucuns  différents  avec  eux;  mais  selon 
l'accord  fait  avec  la  ville,  et  les  habitants  de  Joppé, 
les  ayant  reçus  dans  leurs  barques,  comme  amis,  et 


(1)  11.  M  ace.  x.  51.  57, 

(?)  1.  Macc.  v.  9.  et  suiv  ;  et  ici  verset  ij  et  suiv. 

(1)  11.  Macc.  m.  Ç.  et  1.  Macc.  x.  69. 

(2)  Supra  1.  Macc.  m.  j8. 


(j)  O'ç  u.7]OEfjua;  évE^rùsr];  Jtpôç  âuTOÙ;  ou?rj.EVE''jc:,  x«à 
oà  t6  y.oivôv  Tïjç  tcÔXewç  iprjaiap.a,  xoci  TOÛfb.v  cTtiOîÇafAcviov 
d>;  av  ètpïjveijsiv  OeXcvtcov,  xa't  [j.rjSÈv  Gt.qtctov  s^o'vtwv, 
Lr.ayQivxuç,  âuioù;  É^uOt'aav. 


236 


II.  —  MACCABÉES.  —  XIII.  -  SUPPLICE   DE  MÉNÉLAUS 


4.  Sed  Rex  regum  suscitavit  animos  Antiochi  in  pecca- 
torem  ;  et  suggerente  Lysia  hune  esse  causam  omnium 
malorum,  jussit,  ut  eis  est  consuetudo,  apprehensum  in 
eodem  loco  necari. 

<,.  Erat  autem  in  eodem  loco  turris  quinquaginta  cubi- 
torum,  aggestum  undique  habens  cineris  ;  haec  prospec- 
tum  habebat  in  prasceps. 

6.  Inde  in  cinerem  dejici  jussit  sacrilegum,  omnibus 
eum  propellentibus  ad  interitum. 

7.  Et  tali  lege  prasvaricatorem  legis  contigit  mori,  nec 
terras  dari  Menelaum  ; 

8.  Et  quidem  satis  juste  :  nam  quia  multa  erga  aram  Dei 
delicta  commisit,  cujus  ignis  et  cinis  erat  sanctus,  ipse 
in  cineris  morte  damnatus  est. 

9.  Sed  rex  mente  elTrenatus  veniebat,  nequiorem  se 
pâtre  suo  Judasis  ostensurus, 

10.  Quibus  Judas  cognitis,  praecepit  populo  ut  die  ac 
nocte  Dominum  invocarent,  quo,  sicut  semper,  et  nunc 
adjuvaret  eos, 


4.  Mais  le  Roi  des  rois  suscita  le  cœur  d'Antiochus 
contre  ce  méchant  homme  ;  et  Lysias  lui  ayant,  dit  que 
c'était  lui  qui  était  cause  de  tous  les  maux,  il  commanda 
qu'on  l'arrêtât,  et  qu'on  le  fit  mourir  dans  le  lieu  même, 
selon  la  coutume. 

<,.  Or,  il  yavait  en  cette  endroit  une  tour  de  cinquante 
coudées  de  haut,  qui  était  environnée  de  toutes  parts 
d'un  grand  monceau  de  cendres,  et  du  haut  de  laquelle 
on  ne  voyait  qu'un  grand  précipice. 

6.  Il  commanda  donc  que  ce  sacrilège  fût  précipité  de 
là  dans  la  cendre  ;  tout  le  monde  le  poussant  à  la  mort. 

7.  Ce  fut  ae  la  sorte  que  Mér.élaïis,  prévaricateur  de 
la  loi,  mourut,  sans  que  son  corps  fut  mis  en  terre  ; 

8  Et  cela,  par  un  jugement  bien  juste  ;  car  comme  il 
avait  commis  beaucoup  d'impiétés  contre  l'autel  de  Dieu, 
dont  le  feu  et  la  cendre  étaient  des  choses  saintes,  il 
fut  lui-même    condamné   à  être   étouffé  dans  la  cendre. 

9.  Cependant  le  roi  s'avança  plein  de  fureur,  dans  le 
dessein  de  se  montrer  encore  plus  violent  que  son  père 
à  l'égard  des  Juifs. 

10.  Judas  en  ayant  été  averti,  commanda  au  peuple 
d'invoquer  le  Seigneur  jour  et  nuit,  afin  qu'il  les  assistât, 
comme  il  avait  toujours  fait. 


COMMENTAIRE 


jf.  4.   HUNC  ESSE  CAUSAM  OMNIUM  MALORUM.    En 

effet,  tous  les  troubles  de  la  Judée  n'étaient  venus 
que  de  la  résolution  qu'Antiochus  Épiphane  avait 
prise,  de  changer  les  lois  et  la  religion  du  pays  ; 
résolution  qui  lui  avait  été  inspitée  par  Jason,  et 
ensuite  par  Ménélaus  (1);  lesquels,  pour  satis- 
faire leur  ambition  et  pour  se  conserver  le  sacer- 
doce, avaient  renversé  tous  les  droits  divins  et 
humains,  et  n'avaient  épargné,  ni  meurtres,  ni 
violences,  ni  sacrilèges. 

Jussit,  ut  est  illis  consuetudo,  apprehensum 
in  eodem  loco  necari.  De  la  manière  dont  ceci 
est  raconté,  il  semblerait  que  Ménélaus  fut  pris  et 
mis  à  mort  dans  quelque  ville,  sur  la  route  de 
Syrie  à  Jérusalem,  pendant  le  voyage  du  roi,  à  la 
tète  de  sen  armée  ;  maisJosèphe(2)  prétend  que  la 
mort  de  Ménélaus  n'arriva  qu'au  retour  de  cette 
guerre.  Lysias  ayant  mis  Antiochus  Eupator  en 
défiance  de  ce  misérable  apostat,  et  l'ayant  dépeint 
comme  l'auteur  de  tous  ces  troubles,  le  roi  le  fit 
prendre,  et,  l'ayant  mené  jusqu'à  Bérée,  il  le  fit 
précipiter  dans  la  cendre,  comme  il  est  porté  ici. 
L'historien  sacré  a  voulu  mettre  tout  de  suite,  ce 
qu'il  avait  à  dire  de  Ménélaus,  pour  ne  pas  trop 
interrompre  le  fil  de  son  récit. 

f.  5.  Turris  quinquaginta  cubitorum,  agges- 
tum UNDIQUE  HABENS  CINERIS  :  H/EC  prospectum 
habebat  in  pr,eceps.  Ce  supplice  de  la  cendre  fut 
inventédans  la  Perse;  ce  fut  Darius, fils  d'Hystape, 
qui  le    mit  le  premier  en  usage  (3)  et  depuis,  l'on 


en  remarque  divers  exemples  dans  l'histoire  des 
Perses.  Valère  Maxime  (4)  nous  décrit  ainsi  ce 
supplice.  On  faisait  remplir  de  cendre  un  enclos 
fermé  de  hautes  murailles  ;  une  longue  poutre 
était  passée  en  travers  au  haut  de  cet  espace,  et 
tenait  d'une  muraille  à  l'autre.  Après  avoir  fait 
bien  boire  et  manger  ceux  qu'on  destinait  à  ce 
supplice,  on  les  plaçait  au  milieu  de  cette  poutre, 
afin  que  les  fumées  du  vin,  ou  le  sommeil,  ou  sim- 
plement la  vue  de  cette  profondeur,  les  fit  tomber 
dans  les  cendres,  qui  étaient  au-dessous,  et  où  ils 
étaient  bientôt  suffoqués. 

L'Ecriture  nous  en  parle  d'une  manière  un  peu 
différente  dans  le  texte  grec  (,)  :  //  y  avait  à 
Bérée  une  tour  de  cinquante  coudées  de  haut,  rem- 
ptie  de  cendre  à  une  certaine  hauleut  ;  au-dessus 
était  une  machine  ronde,  ou  une  roue  qui  portait 
sur  le  précipice  de  cette  tour  :  c'est  de  là  qu'on  pous- 
sait dans  la  cendre,  ceux  qui  s'étaient  rendus  cou- 
pables de  sacrilèges,  ou  de  quelques  autres  crimes. 
Le  syriaque  n'a  point  exprimé  la  manière  de  ce 
supplice  ;  il  passe  les  versets  5  et  6. 

f.  9.  Sed  rex  mente  effr^natus  veniebat.  Le 
grec  lit  (6)  :  Le  roi  venait  avec  des  sentiments  bar- 
bares, résolu  de  traiter  les  Juifs  avec  encore  plus 
de  dureté  que  n'avait  fait  Antiochus  Épiphane, 
son  père. 

$.  10.  PR/ECEPIT  populo  ut  die  ac  nocte 
Dominum  invocarent.  Nous  ne  voyons  point  que 
Judas  se  soit  jamais  mis  en   peine  d'amasser   de 


(1)  Vide  1.  Macc.  1.  12.  ij.    14.  ?/  11.  Macc.  iv.  7.  8.  et 
2j.  24.  20.  27. 

(2)  Joseph.  Anliq.  I.  xu.c.  15.  Vide  Usser.  ad  Mail. . J842. 
(})  \alex.  Max.  I.  îx.  c.  2.  de  crudelit.  extern. 

(4)  Valbr.  Max.  loco  citalo. 

($)  Verset  5.   Ilôpyo;  KevTTJxOVSOC  r.r\/yyi  ^Xrjp»);  arcooou, 


oÎjto;  8s  opyavov  £Ti'/s  ^spiçspÈ;  rcâvioOsv  arcoxpTjuvov  Et?  tt]v 
aTcoîôv.  Verset  6.  E'viaûOa  tôv  upoaiAi'ai;  È'vo-^ov,  f,  xai 
TtvtTiv  aX^o>/  xaxôiv  vKtpoyjr^  JtETCO»jp.^vov  cir.ouiî;  Jipoato- 
Goîa'.v  ècç  oXe'ôpov. 

(6)  Tôt;  os  9povrî(;.aatv  6  [îaaiXsù;  (j£Sap6apo>|.iivO;  rjpyeto. 
Ms.  Alex.  |'ie6apT)(j.svo;.  Mali. 


II.  —  MACCABÉES.  —  XIII.  -   PIÉTÉ   DE  JUDAS 


237 


11.  Quippe  qui  lege,  et  patria,  sanctoque  templo  pri- 
vari  vererentur  ;  ac  populum,  qui  nupcr  paululum  res- 
pirasset,  ne  sineret  blasphemis  rursus  nationibus  subdi. 


12.  Omnibus  itaque  simul  id  facientibus,  et  petentibus 
a  Domino  misericordiam,  cura  iletu  et  jejuniis,  per  tri- 
ci  u  u  m  continuum  prostratis,  hortatus  est  eos  Judas  ut  se 
praspararent. 

Ij.  Ipse  vero  cura  senioribus  cogitavit,  priusquam  rex 
admoveret  exercitum  ad  Judaeam,  et  obtineret  civitatem, 
exire,  et   Domini  judicio  committere  exitum  rei. 


14.  Dans  itaque  potestîtem  omnium  Deo,  mundi  crea- 
tori,  et  exhortatus  suos  ut  fortiter  dimicarent,  et  usque 
ad  mortem  pro  legibus,  templo,  civitate,  patrii,  et  civi- 
bus  starent,  circa  Modin  exercitum  constituit. 


1 1.  Car  ils  avaient  à  craindre  de  se  voir  privés  de  leur 
loi,  de    leur  patrie   et  de  son  saint  temple  ;  et  qu'il    ne 
permit  pas  que  son  peuple,  qui  commençait   seulemen 
à  respirer  quelque  peu,  fût  assujetti  de  nouveau  aux  na- 
tions qui  blasphémaient  son  saint  nom. 

12.  Tous  firent  conjointement  ce  qu'il  leur  avait 
ordonné,  et  implorèrent  la  miséricorde  du  Seigneur  par 
leurs  larmes  et  par  leurs  jeûnes,  se  tenant  toujours  pros- 
ternés devant  lui  durant  trois  jours  :  alors  Judas  les 
exhorta  a  se  tenir  prêts. 

i;.  Et,  ayant  tenu  conseil  avec  les  anciens,  il  résolut 
de  marcher  contre  le  roi,  avant  qu'il  eût  fait  entrer  ses 
troupes  dans  la  Judée,  et  qu'il  se  fût  rendu  maître  de  la 
ville  ;  et  d'abandonner  au  jugement  du  Seigneur  l'issue 
de  cette  entreprise. 

14.  Remettant  donc  toutes  choses  au  pouvoir  de  Dieu, 
Créateur  de  l'univers,  et  ayant  exhorté  ses  gens  à  com- 
battre vaillamment  et  jusqu'à  la  mort  pour  la  défense  de 
leurs  lois,  de  leur  temple,  de  leur  ville,  de  leur  patrie 
et  de  leurs  concitoyens,  il  fit  camper  son  armée  près  de 
Modin. 


COMMENTAIRE 


plus  grandes  troupes  ;  et  la  multitude  de  ses 
ennemis  ne  pouvait  produire  d'autre  effet  sur  lui, 
que  de  ranimer  sa  foi,  de  le  porter  à  redoubler 
ses  prières  et  à  faire,  en  même  temps,  prier  et 
jeûner  tout  le  peuple  d'Israël  :  car  il  savait  que 
le  jeûne,  la  prière  et  l'humiliation  du  cœur  et  du 
corps  étaient  les  armes  les  plus  fortes  d'un  peu- 
ple consacré  à  Dieu.  C'est  pourquoi,  il  est  marqué 
que  les  Juifs  demeurèrent  prosternés  devant  le  Sei- 
gneur trois  jours  durant  :  et  qu'après  qu'ils  eurent 
rendu  cet  hommage  à  Dieu,  Judas  Maccabée  leur 
dit  de  se  tenir  prêts  pour  aller  combattre  ses  enne- 
mis, abandonnant,  dit  l'Écriture,  au  jugement  du 
Seigneur  l'issue  de  son  entreprise,  c'est  à-dire  se 
tenant  en  paix  touchant  le  succès  de  ce  combat, 
et  se  contentant  d'être  assuré  qu'il  combattait 
pour  la  cause  de  Dieu  même,  en  qui  seul  il  met- 
tait toute  sa  confiance. 

La  pureté  de  l'intention  par  laquelle  les  Juifs 
se  conduisaient  dans  ces  guerres  saintes  est  expri- 
mée par  l'Écriture,  lorsqu'elle  témoigne  qu'ils 
invoquaient  l'assistance  du  Seigneur,  dans  la 
crainte  qu'ils  avaient  de  se  voir  privés  de  leur  loi, 
de  leur  patrie,  et  de  son  saint  temple,  et  assujettis 
de  nouveau  aux  nations  qui  blasphémaient  son  saint 
nom.  On  ne  pouvait  désirer  de  plus  saints  motifs. 
Les  Juifs  surpassaient  infiniment  un  grand  nombre 
de  chrétiens  puisque,  dans  la  guerre  comme  dans 
la  paix,  l'accomplissement  de  la  loi  évangélique, 
et  la  gloire  du  saint  nom  de   Dieu   sont   presque 


toujours  les  moindres  motifs  qui  occupent  leur 
esprit.  Leur  cœur,  plus  sensible  à  leurs  intérêts 
temporels,  envisage  plus  la  perte  des  biens  de  la 
terre,  que  celle  des  biens  spirituels  qui  sont 
néanmoins  les  biens  propres  des  enfants  de  Dieu, 
tous  les  autres  ne  leur  étant  qu'étrangers  et  com- 
muns avec  les  enfants  du  siècle. 

f.  13.  Ipse  vero  cum  senioribus  cogitavit. 
Le  grec  (1)  :  Il  se  consulta  en  particulier  avec  les 
sénateurs.  Ils  tinrent  ensemble  un  conseil  parti- 
culier, sans  convocation  du  peuple. 

jh  15.  Dato  signo  suis,  Dei  Victoria.  Après 
avoir  donné  aux  siens  pour  signal  :  La  victoire  de 
Dieu;  ou  Dieu  est  le  maître  de  la  victoire  ;  ou 
une  victoire  divine,  une  victoire  complète,  une 
très  grande  victoire.  Judas  avait  cette  coutume 
de  donner  aux  siens,  pour  mot  d'ordre  une  sen- 
tence pieuse.  Voyez  plus  haut  (2). 

NOCTE   AGGRESSUS   AULAM    REGIAM,     IN    CASTRIS 

interfecit  viros  quatuor  millia.  Ceci  se  passa 
à  Modin,  près  de  Diospolis,  où  Judas  était  campé 
avec  sa  petite  armée.  Il  pénétra  jusqu'à  la  tente 
du  roi  (3),  et  tua  dans  le  camp  quatre  mille  hom- 
mes, suivant  la  Vulgate  et  le  grec  de  l'édition 
romaine  (4).  D'autres  exemplaires  grecs  n'en  por- 
tent que  deux  mille,  et  le  syriaque  trois  mille  : 
les  anciens  exemplaires  de  la  Vulgate  en  portaient 
jusqu'à  quatorze  mille  (<>),  d'autres  douze  mille, 
et  d'autres  deux  mille  (6). 


(1)  KaO'  Èaj-rov  ôè  aùv  tùî;  JTpsiSut'pot;   yf/o^Z'/Q;   Éôou- 

"kiù-J3.X0. 

(2)  u.  Macc.  vin.  2 j. 

({)  L}V:  xr)v  pacjtXix'-.v  «jXrjv.  Ad  prastorium  régis. 


(4)  Ms.  Alex,  et  Edilio  Complut,  et  alla. 
($)  Vide  Nobilii  notas  in  edit.  Sept,  et  édition.  Sixt.   V.  et 
alias  anle  Clem.  VIII. 
(b)   Vide  Lyran.  hic. 


238 


II. 


MACCABEES.  —  XIII.  -  SIEGE   DE  BETHSURA 


15.  Et  dato  signo  suis  :  Dei  victoriae,  juvenibus  for- 
tissimis  electis,  nocte  aggressus  aulam  regiam,  in  castris 
interfecit  viros  quator  mil I ia,  et  maximum  elephantorum, 
cum  his  qui  superpositi  fuerant; 

16.  Summoque  metu  ac  pertubatione  hostium  castra 
replentes,  rébus  prospère  gestis,  abierunt. 

17.  Hoc  autem  faclum  est  die  illucescente,  adjuvante 
eum  bomini  protectione. 

18.  Sed  rex,  accepto  gustu  audaciae  Judasorum,  arte 
difticultatem  locorum  tentabat, 

19.  Et  Bethsuraï,  quae  erat  Judaeorum  praesidium  mu- 
nitum,  castra  admovebat;  sed  fugabatur,  impingebat, 
minorabatur. 

20.  His  autem  qui  intus  erant  ,  Judas  necessaria 
mittebat. 

21.  Enuntiavit  autem  mysteria  hostibus  Rhodocus  qui- 
dam de  Judacio  exercitu,  qui  requisitus  comprehensus 
est,  et  conclusus. 

22.  Iterum  rex  sermonem  habuit  ad  eos  qui  erant  in 
Bethsuris;  dextram  dédit,  accepit,  abiit. 

2;.  Commisit  cum  Juda,  superatus  est. 

Ut  autem  cognovit  rebellasse  Philippum  Antiochiœ, 
qui  relictus  erat  super  negotia,  mente  consternatus, 
Judasos  deprecans,  subditusque  eis.  jurât  de  omnibus 
quibus  justum  visum  est;  et  reconciliatus  obtulit  sacri- 
ficium,  honoravit  templum,  et  munera  pesuit. 


IÇ.  Et,  après  avoir  donné  aux  siens  pour  signa!  la  vic- 
toire de  Dieu, et  pris  avec  lui  les  plus  braves  d'entre  les 
jeunes  hommes,  il  attaqua  la  nuit  le  quartier  du  roi,  et 
tua  dans  son  camp  quatre  mille  hommes  et  le  plus  grand 
des  éléphants,  avec  ceux  qui  le  montaient. 

16.  Ayant  rempli  de  la  sorte  le  camp  des  ennemis 
d'effroi  et  trouble,  ils  s'en  retournèrent  après  cet  heu- 
reux succès. 

17.  Cette  action  se  fit  à  la  pointe  du  jour,  le  Seigneur 
ayant  assisté  Maccabée  de  sa  protection. 

18.  Mais  après  que  le  roi  eut  fait  cet  essai  de  la 
hardiesse  des  Juifs,  il  tachait  de  prendre  des  villes  fortes 
par  stratagème. 

19.  Il  vint  donc  mettre  !e  siège  devant  Bethsura,  une 
des  places  juives  les  mieux  fortifiées  ;  mais  ses  gens 
furent  repoussés  et  renversés  ;  et  ils  soulfrirent  de 
grandes  perles. 

20.  Judas  cependant  envoyait  aux  assiégés  les  choses 
qui  leur  étaient  nécessaires. 

il.  Mais  un  nommé  Rhodocus,  de  l'armée  des  Juifs, 
allait  découvrir  les  secrets  aux  ennemis;  et  après  quel- 
ques recherches  qui  en  furent  faites,  il  fut  pris  et  mis  en 
prison. 

72.  Le  roi  ayant  fait  parler  encore  à  ceux  qui  étaient 
dans  Bethsura,  leur  donna  sa  parole,  la  reçut  d'eux,  et 
se  retira. 

2?.  Mais  il  combattit  auparavant  contre  Judas,  et  il 
fut  vaincu.  Or,  ayant  reçu  la  nouvelle  que  Philippe,  qui 
avait  été  établi  pour  le  gouvernement  de  toutes  les 
affaires,  s'était  révolté  à  Antioche,  il  en  fut  consterné  ; 
et  n'usant  plus  que  de  supplications  et  de  soumissions 
à  l'égard  des  Juifs,  il  jura  de  garder  avec  eux  toutes  les 
conditions  qui  parurent  justes  ;  et  après  cette  réconcilia- 
tion, il  oifrit  un  sacrifice,  honora  le  temple,  et  y  fit  des 
dons. 


COMMENTAIRE 


Et  maximum  elephantorum  ,  cum  his  qui 
superpositi  fuerant.  Le  grec  (1)  peut  s'en- 
tendre autrement  :  et  il  tua  le  commandant  des  élé- 
phants, avec  sa  maison  (2),  ou  ses  domestiques. 
La  charge  de  maître,  ou  de  commandant  des  élé- 
phants, n'était  pas  petite  (3). 

jL  19.  Bethsura  castra  admovebat.  //  vint 
mettre  le  siège  devant  Bethsura.  Voyez  1.  Mac- 
cab.  vi,  3:,  32. 

f.  21.  Rhodocus  quidam  de  judaico  exercitu. 
Un  nommé  Rhodocus  de  Varmée  des  Juifs,  allait 
découvrir  aux  ennemis  les  secrets  de  son  parti; 
ce  traître  était,  ou  de  la  garnison  de  Bethsura  ou 
du  camp  de  Judas,  qui  était  alors  à  Bethzachara, 
près  de  l'armée  du  roi. 

V.   22.   DEXTERAM    DEDIT,     ACCEPIT,    ABIIT.     Cet 

événement  est  raconté  plus  en  détail  dans  le  pre- 
mier livre  des  Maccabées  (4).  Le  roi  ayant  pris 
Bethsura, parce  que  la  garnison  manquait  de  vivres, 
s'avança  vers  Jérusalem  pour  en  faire  le  siège. 


f.  23.  Commisit  cum  Juda,  superatus  est.  // 
combattit  contre  Judas,  et  fut  vaincu  ;  dans  la  jour- 
née où  Éléazar  se  distingua  en  attaquant  le  plus 
bel  éléphant  de  l'armée  ennemie  ($).  Cela  se 
passa  avant  le  siège  de  Jérusalem. 

Utcognovit  rebellasse  Philippum  AntiochI/E. 
Ayant  reçu  la  nouvelle  que  Philippe,  à  qui  Antio- 
chus  Épiphane  avait  donné  la  régence  du  royaume, 
penJant  la  minorité  d'Eupator  (6),  s'était  révolté 
à  Antioche.  L'auteur  appelle  ici  rébellion,  l'action 
de  Philippe,  selon  la  qualification  qui  lui  était 
donnée  à  la  cour  d'Antiochus  Eupator,  où  Lysias 
était  maître  absolu  ;  mais,  au  fond,  Philippe  ne 
demandait  rien  que  de  juste  ;  Lysias  était  usur- 
pateur d'un  emploi  qui  avait  été  donné  à  un  autre; 
il  s'était  rendu  maître  du  gouvernement,  sans 
aucun  droit.  Philippe  s'était  d'abord  rendu  à 
Antioche,  avec  le  secours  du  roi  d'Egypte,  auprès 
duquel  il  s'était  retiré,  en  revenant  de  Perse,  et 
voulait  se  mettre    en   possession   de   la   régence, 


(1)  Kir  iov  TvpojTeicvîa  *<Sv  êXeçivtwVjO&v  tû  x&:' û'.xikv  phantis  quem  indicis  praafecerat.  Item  111.  Macc.i.  1.  2. 

ôjf>>  ouv'é77i«.  (4)«-  Macc.vi.  5;-  4>. 

(2!  lia  Srr.  Grot.  alii  quidam.  (S)  lbi&.  4?-  44-  4<- 

1)   Vide  11.  Macc.   xiv.    12.   Elzza.zâp/jnv.  Tirent.  Ele-  (6;  1.  Macc.  vi.  14.  15. 


II. 


MACCABÉES.  —  XIII.  -   PAIX  AVEC   LA  SYRIE 


2  39 


24.  Machabœum  amplexatus  est,  et  fecit  eum  a  Ptole- 
maide  usque  ad  Gerrenos  ducem  et  principem. 

25.  Ut  autem  venit  Ptolemaidam,  graviter  ferebant 
Ptolemenses  amicitias  conventionem,  indignantes  ne  forte 
fœdus  irrumperent. 

26.  Tune  ascendit  Lysias  tribunal,  et  exposuit  rationem, 
et  populum  sedavit,  regressusque  est  Antiochiam  ;  et  hoc 
modo  régis  profectio  et  reditus  processit. 


24.  Il  embrassa  Maccabée,  et  le  déclara  chef  et  prince 
de  tout  le  pays,  depuis  Ptolémaïs   jusqu'aux  Gîrréni2ns. 

2,.  Lorsqu'Antiochus  fut  entré  dans  Ptolémaïs.  les 
habitants  de  cette  ville,  fort  mécontents  du  l'accord 
qu'il  avait  fait,  en  témoignèrent  leur  indignation,  crai- 
gnant que  leur  aillance  ne  fût  rompue. 

26.  Mais  Lysias,  étant  monté  sur  le  tribunal,  exposa 
les  raisons  de  cet  accord  et  apaisa  le  peuple  ;  et  il 
retourna  à  Antioche.  Ce  fut  ainsi  que  le  roi  entra  Ju  Jéj, 
et  qu'il  s'en  retourna  ensuite. 


COMMENTAIRE 


qui  lui  avait  été  confiée  par  le  feu  roi  ;  Lysias, 
qui  gouvernait  souverainement,  sous  le  nom 
d'Eupator,  fit  comprendre  à  ce  prince,  que,  dans 
la  conjoncture  présente,  ce  qui  pressait  le  plus, 
était  de  mener  promptement  l'armée  en  Syrie, 
pour  éteindre  cet  incendie  naissant  ;  que  le  siège 
de  Jérusalem  tirerait  en  longueur,  que  le  succès 
en  était  fort  douteux,  et  que  l'armée  manquait  de 
vivres  ;  qu'enfin  l'intérêt  de  l'état  voulait  qu'on 
fit  la  paix  avec  les  Juifs,  et  qu'on  tâchât  de  les 
avoir  pour  amis.  Ces  raisons  déterminèrent  le 
roi  à  laire  avec  eux  un  accommodement,  qui  leur 
était  assez  avantageux,  s'il  eût  été  fidèlement 
observé.  On  leur  accordait  la  liberté  de  vivre 
selon  leurs  lois  religieuses  et  civiles  (1);  on  don- 
nait à  Judas  le  gouvernement  de  toute  la  côte, 
depuis  Ptolémaïs  jusqu'aux  frontières  d'Egypte. 
Le  roi  fit  même  des  présents  au  temple,  et  y  offrit 
des  sacrifices,  par  les  mains  des  prêtres  :  mais, 
ayant  considéré  les  murailles,  dont  les  Juifs  avaient 
entouré  le  mont  de  Sion,  il  les  fit  abattre,  et  s'en 
retourna  à  Antioche. 

f.  24.  A  Ptolemaide  usque  ad  Gerrenos. 
Depuis  Ptolémaïs  jusqu'aux  Gerréniens,  toute 
cette  côte  de  la  Palestine,  depuis  Ptolémaïs  au 
nord  ,  jusqu'aux  Gerréniens  au  midi  ,  près  de 
l'Egypte. C'est  là  qu'était  l'ancienneGérare,dont  il 
est  parlé  dans  la  Genèse  (2),  la  même  que  Gerrus, 
ville  dont  parle  Ptolomée.  Les  successeurs  de 
Judas  possédèrent  dans  la  suite  ce  même  gou- 


vernement, avec  quelques  augmentations  (j).  Le 
grec  (4),  et  le  syriaque,  semblent  dire  que  le  roi 
ayant  embrassé  Judas,  partit  pour  Antioche,  et 
laissa  Hégémonide  pour  gouverneur,  depuis  Pto- 
lémaïs jusqu'aux  Gerréniens.  Le  mot  r\  fejioWç  est  le 
féminin  de  SJYEpoSv,  chef,  commandant.  Ce  ne  peut 
guère  être  ici  qu'un  nom  propre,  puisque  le  genre 
empêche  de  l'appliquer  à  Judas,  et  que,  d'ailleurs, 
il  y  a  déjà,  dans  le  même  verset  oTpaTrjyôv  qui  a  le 
même  sens.  A  ce  traité  commence  la  dynastie  des 
Asmonéens.  Jusque-là,  les  Maccabées  étaient 
considérés  comme  des  généraux  d'élite.  Le  traité 
conclu  avec  Antiochus  les  faisait  entrer  au  rang 
des  rois.  Ils  furent  nommés  Asmonéens,  parce 
que  Matthathias  était  petit-fils  d'Asmonée.  La 
domination  des  Asmonéens  dura,  selon  la  remar- 
que de  Josèphe  (5)  cent  vingt-six  ans  (162-37), 
jusqu'à  la  prise  de  Jérusalem  par  Hérode. 

jh  2).  Graviter  ferebant  Ptolemenses  ami- 
citi^e  conventionem.  Les  habitants  de  Ptolémaïs 
avaient  toujours  été  très  opposés  aux  Juifs  (6); 
leur  mécontentement  venait  non  seulement  de  la 
jalousie  et  de  l'antipathie  qui  était  entre  les  deux 
peuples,  mais  principalement  de  ce  qu'on  les  avait 
soumis  au  gouvernement  d'un  Juif.  Le  grec  (7)  : 
Ceux  de  Ptolémaïs  en  étaient  indignés,  c'est  pour- 
quoi ils  voulaient  faire  casser  l'accord  fait  avec  les 
Juifs  (8|,  ou  bien  ils  voulaient  se  départir  de 
l'obéissance  du  roi. 


(1)1.  Macc.  vi.  ^9. 
(  1}  Gencs.  xx.  1. 
(  il  Vide  1.  Macc.  xi.  50. 

(4)  Kxt£X;-c  (rcpatrjyôv   àno  IlîCiXs[jLa;3o;,  £u>; 
prjvùv  îryey.oyiorjv.  Ita  Usser.  ad  an.  M.   584 1. 


Ô5v    Vii- 


(?)  Antïq.  jud.  xiv.  28. 

[G]  Vide  sup.i.  Macc.  v,   15;  xii.  48.  el  il.    Macc.  vi.  î 

'7/  ESs-'vaÇov  yip    &Jtèp   &■/    ^OcXrjiav    àOî-reTv    -x;  o;ao 

(8)  lia  Grot.  el  Syr. 


CHAPITRE  XIV 

Démétrius,  fils  de  Séleucus,  vient  se  remettre  en  possession  du  royaume  de  Syrie.  Alcime 
V irrite  contre  Judas.  Il  envoie  Nicanor  contre  les  Juifs.  Nicanor  fait  la  paix  avec 
Judas.  Alcime  la  trouble.  Démétrius  ordonne  à  Nicanor  de  lui  envoyer  Judas  lié  et 
garotlé;  Judas  se  retire.  Nicanor  blasphème  contre  le  temple.  On  accuse  auprès  de  lui 
Radias.  Mort  glorieuse  de  ce  vieillard. 


i.  Sed  post  triennii  tempus,  cognovit  Judas,  et  qui  cum 
eo  erant,  Demetrium  Seleuci,  cum  multitudine  valida  et 
navibus,  per  portum  Tripolis  ascendisse  ad  loca  oppor- 
tuna, 

2.  Et  tenuisse  regiones  adversus  Antiochum,  et  ducem 
ejus  Lysiam. 

?.  Alcimus  autem  quidam,  qui  summus  sacerdos  fuerat, 
sed  voluntarie  coinquinatus  est  temporibus  commis- 
tionis,  considerans  nullo  modo  sibi  esse  salutem,  neque 
accessum  ad  altare, 

4.  Venit  ad  regem  Demetrium,  centesimo  quinquage- 
simo  anno,  offerens  ei  coronam  auream,  et  palmam, 
super  ha?c  et  thallos,  qui  templi  esse  videbantur;  et  ipsa 
quidem  die  siluit. 


1.  Mais  trois  ans  après.  Judas  et  ceux  qui  étaient  avec 
lui  apprirent  que  Démétrius,  fils  de  Séleucus,  était  venu 
avec  une  puissante  armée  et  quantité  de  vaisseaux,  et 
qu'ayant  pris  terre  au  port  de  Tripoli,  il  s'était  saisi  des 
postes  les  plus  avantageux, 

2.  Et  rendu  maître  d'un  grand  pays,  malgré  Antiochus 
et  Lysias,  général  de  son  armée. 

;.  Or  un  certain  Alcime  qui  avait  été  grand  prêtre,  et 
qui  s'était  volontairement  souillé  dans  le  temps  du  dé- 
sordre, considérant  qu'il  n'y  avait  plus  aucune  ressource 
pour  lui,  et  que  l'entrée  de  l'autel  lui  était  fermée  pour 
jamais, 

4.  Vint  trouver  le  roi  Démétrius  en  la  cent  cinquan- 
tième année,  lui  présenta  une  couronne  et  une  palme 
d'or,  avec  des  rameaux  qui  semblaient  être  du  temple, 
et  ne  lui  dit  rien  pour  ce  jour-là. 


COMMENTAIRE 


jL  1.  Post  triennii  tempus,  cognovit  Judas 
Demetrium  Seleuci,  per  portum  Tripolis,  as- 
cendisse ad  loca  opportuna.  Trois  ans  après  la 
mort  d'Antiochus  Épiphane,  ou  la  troisième  an- 
née du  règne  d'Eupatorson  fils,  ou  enfin  la  troi- 
sième année  après  la  purification  du  temple  (1), 
'an  151  des  Séleucides,  162  ans  avant  Jésus- 
Christ.  Démétrius,  fils  de  Séleucus,  cousin  ger- 
main d'Antiochus  Eupator,  à  qui  le  royaume 
appartenait  de  droit,  s'enfuit  de  Rome,  de  la  ma- 
nière que  nous  l'avons  raconté  ailleurs  (2),  et  vint 
en  Syrie. 

jh  2.  Tenuisse  regiones  adversus  Antiochum. 
Le  grec  (3)  :  //  s'était  rendu  maître  du  pays,  après 
avoir  mis  à  mort  Antiochus  et  Lysias.  En  effet, il  les 
fit  mettre  à  mort  par  leurs  propres  soldats,  qui  les 
avaient  livrés  à  Démétrius  (4). 

jh  3.  Alcimus,  qui  summus  sacerdos  fuerat. 
Il  avait  succédé  à  Ménélaus,  comme  nous  l'avons 
dit  sur  le  premier  livre  des  Maccabées  (5)  ;  mais 
les  Juifs  n'avaient  pas  voulu  le  reconnaître,  et 
avaient  déféré  le  sacerdoce  à  Judas  Maccabée. 
Alcime  s'était  rendu  indigne    de   cette    éminente 


dignité,  parce  qu'il  s'était  souillé  volontairement, 
sans  avoir  souffert  aucune  persécution  de  la  part 
des  païens,  pendantle  temps  des  troubles  ;  Volun- 
tarie coinquinatus  est  temporibus  commistionis  (6), 
dans  les  temps  de  confusion,  et  lorsque  l'on  exer- 
çait la  plus  cruelle  persécution  contre  les  Juifs  : 
ou,  selon  quelques  éditions,  dans  le  temps  que 
l'on  vivait  séparé  et  éloigné  des  gentils  ;  dans  le 
temps  de  la  séparation,  et  avant  la  persécution. 

Palmam,  super  H/Ec  et  thallos  ,  qui  tem- 
pli esse  videbantur.  Une  branche  de  palmier,  et 
des  bâtons  ornés  de  feuillages  d'or,  qu'on  présu- 
mait avoir  été  enlevés  du  temple.  Les  particuliers 
et  les  princes  offraient  au  temple  divers  présents, 
chacun  suivant  son  inclination  et  son  goût,  des 
arbres,  des  plantes,  des  couronnes,  des  boucliers, 
des  armes  d'or  et  d'argent.  Ce  sont  les  monu- 
ments de  la  piété  et  de  la  libéralité  des  personnes 
pieuses,  que  les  apôtres  admiraient  dans  l'Évan- 
gile (7). 

jk  4.  Centesimo  quinquagesimo  anno.  L'au- 
teur du  premier  livre  des  Maccabées  met  une 
année  de  plus.  I.  Macc.  vu,  1. 


(1)  Vide  sup.  ind.  c.  x. 

(2)  Voyez  1.  Macc.  vu.  1.  2. 

(  j)  Ks/.patr]/.Evai  ttj;  "/oipa;,    âveXôiiEvOV  A  \xloyoj  f    /ai 
A  ■j  al  av. 
(4)  1,  Macc.  vu.  4.  Zonar.  ex  Dion, 


(5)  IbiJ.  f.  J. 

(6)  E  -1  toT;  rîjs  ifiiu.iÇfa«  ypôvot;.  lia  edil.  Rom.  sed  alix 
iv  toî;  tri;  àpuÇ/a;  ypdvoi;.    Vide  infra  f.   ;8.; 

{-)  Luc.  xxi.  5.  Quibusdam  dicentibus  de  tempio  quod 
bonis  lapidibus  et  donis  ornatum  esset. 


II.  —  MACCABÉES.—  XIV.-  CALOMNIES  D'ALCIME 


241 


C.  Tempus  autem  opportunum  dementias  suae  nactus, 
convocatus  a  Demetrio  ad  concilium,  et  interrogatus 
quibus  rébus  et  consiliis  Judœi  niterentur, 


6.  Respondit  :  Ipsi  qui  dicuntur  Assidaai  Judseorum, 
quibus  prasest  Judas  Machabasus,  bella  nutriunt,  et  sedi- 
tiones  movent,  nec  patiuntur  regnum  esse  quietum. 

7.  Nam  et  ego  defraudatus  parentum  gloria,  dico 
autem  summo  sacerdotio,  hue  veni  : 

8.  Primo  quidem  utilitatibus  régis  fidem  servans,  se- 
cundo autem  etiam  civibus  consulens;  nam  illorum  pra- 
vitate  universum  genus  nostrum  non  minime  vexatur. 


9.  Sed  oro,  his  singulis,  o  rex,  cognitis,  et  regioni,  et 
generi,  secundum  humanitatem  tuam  pervulgatam  omni- 
bus, prospice  ; 

10.  Nam,  quamdiu  superest  Judas,  impossibile  est 
pacem  esse  negotiis. 

11.  Talibus  autem  ab  hoc  dictis,  et  ceteri  amici,  hosti- 
liter  se  habentes  adversus  Judam,  inflammaverunt  Deme- 
trium. 

12.  Qui  statim  Nicanorem,  prœpositum  elephantorum, 
ducem  misit  in  Judasam, 

Ij.  Datis  mandatis,  ut  ipsum  quidem  Judam  caperet; 
eos  vero  qui  cum  il lo  erant,  dispergeret,  et  constitueret 
Alcimum  maximi  templi  summum  sacerdotem. 


5.  Mais  ayant  trouvé  une  occasion  favorable  pour  exé- 
cuter son  dessein  plein  de  folie,  lorsque  Démétrius  le 
fit  venir  au  conseil,  et  lui  demanda  sur  quels  fonde- 
ments et  sur  qutls  conseils  les  Juifs  s'appuyaient  princi- 
palement, 

6.  11  répondit  :  Ceux  d'entre  les  Juifs  qu'on  nomme 
Assidéens,  dont  Judas  Maccabée  est  le  chef,  entretien- 
nent la  guerre,  excitent  les  séditions,  et  ne  peuvent 
souffrir  que  le  royaume  demeure  en  paix; 

7.  Car  j'ai  moi-même  été  dépouillé  de  la  gloire  que 
je  tenais  de  mes  pères,  c'est-à-dire  du  souverain  sacer- 
doce ;  et  c'est  ce  qui  m'a  obligé  de  venir  ici, 

8.  Premièrement  pour  garder  la  fidélité  que  je  dois  au 
roi  en  ce  qui  regarde  ses  intérêts;  et  puis  pour  procurer 
aussi  l'avantage  de  mes  concitoyens;  car  toute  notre 
nation  est  ailligée  de  grands  maux  par  la  méchanceté  de 
ces  personnes. 

9.  Ainsi  je  vous  prie,  ô  roi,  que  connaissant  tous  ces 
désordres,  vous  vouliez  bien  protéger  les  intérêts  de 
notre  pays  et  de  notre  nation,  selon  votre  bonté,  qui  est 
si  connue  de  tout  le  monde  ; 

10.  Car  tant  que  Judas  vivra,  il  est  impossible  qu'il 
y  ait  aucune  paix  dans  l'état. 

n.  Après  qu'il  eut  parlé  de  la  sorte,  tous  ses  amis 
animèrent  encore  Démétrius  contre  Judas,  dont  ils 
étaient  les  ennemis  déclarés. 

[2.  C'est  pourquoi  il  ordonna  aussitôt  à  Nicanor,  qui 
commandait  les  éléphants,  d'aller  en  Judée  en  qualité  de 
général, 

ij.  De  prendre  Judas  en  vie,  de  disperser  tous  ceux 
qui  seraient  avec  lui,  et  d'établir  Alcime  souverain  pon- 
tife du  grand  temple. 


COMMENTAIRE 


fi.  6.  Assidu  Jud^orum.  Les  Juifs  qu'on 
nomme  Assidéens,  ou  plutôt,  ceux  des  Juifs  qui 
prennent  le  nom  d'Assidéens  (1);  c'étaient  les 
plus  zélés  et  les  plus  courageux  détenseurs  des 
lois  et  de  la  liberté  du  pays.  Alcime,  quelque 
temps  auparavant,  étant  venu  en  Judée,  avec  Bac- 
chide,  en  avait  fait  mourir  soixante,  de  la  manière 
la  plus  perfide  et  la  plus  indigne  (2). 

fi.  7.  Defraudatus  parentum  gloria.  Il  y  a 
plus  d'un  mensonge  dans  le  récit  d'Alcime.  Il  est 
vrai  qu'il  était  de  la  race  d'Aaron  (j);  mais  non 
de  la  race  des  grands  prêtres;  Lysias  l'avait  choisi 
exprès,  d'une  famille  sacerdotale  d'un  rang  infé- 
rieur ,  afin  de  diminuer  l'autorité  des  grands 
prêtres.  Il  n'avait  donc  pas  été  dépouillé  d'une 
dignité  qui  lui  était  due  par  sa  naissance  ;  de  plus, 
il  s'en  était  rendu  lui-même  indigne  par  ses  cri- 
mes; il  était  tombé  dans  des  fautes  qui  devaient 
l'exclure  pour  toujours  du  ministère  sacré. 

fi.  9.  Et  regioni,  et  generi  prospice.  Le 
grec  (4)  :  Veuille^  jeter  un  regard  sur  noire  pays, 
et  sur  noire  nation  assiégée,  affligée,  désolée. 


fi.  1  r.  Talibus  autem  ab  hoc  dictis  et  ceteri 
amici  hostiliter  se  habentes  adversus  Judam, 
inflammaverunt  Demetrium  C'est  bien  là  l'his- 
toire de  l'ambition  humaine.  Elle  ne  recule  devant 
rien  pour  se  satisfaire,  et  n'hésite  pas  à  noircir 
l'innocence  pour  se  donner  des  airs  de  dévoue- 
ment près  de  ceux  qui  sont  au  pouvoir.  Récem- 
ment arrivé  de  Rome,  Démétrius  ignorait  quelles 
étaient  les  dispositions  des  Juifs.  Il  était  naturel 
qu'il  s'en  rapportât  à  Alcime,  que  sa  qualité  de 
grand  prêtre  rendait  vénérable  entre  tous.  C'était 
le  contraire  qui  était  la  vérité,  et  Judas  Macca- 
bée fut  victime  de  ce  misérable  ambitieux. 

fi.  12.  Nicanorem  pr^epositum  elephantorum. 
C'est  peut-être  le  même  Nicanor  (<),  qui,  ayant 
été  battu  par  Judas,  fut  obligé  de  se  sauver  seul 
et  déguisé  à  Antioche. 

fi.  13.  Maximi  templi  summum  sacerdotem. 
D'établir  Alcime  souverain  pontife  du  très  grand 
temple,  du  temple  auguste  de  Jérusalem.  C'est 
l'idée  que  les  païens  eux-mêmes  en  avaient.  Voyez 
plus  bas  verset  3 1. 


(1)  Voyez  1.  Macc.  11.  42. 

(2)  1.  Macc.  vu.  12...  19. 

(5)  1.  Macc.  vu.  14.  et  Joseph.  Antiq.l.xu.c.  $.c/xx.  c.8. 

S.    B.    —  T.   XII. 


(4)  Kal  t%   yojpa,- ,    xal  toù   r.tp;[<s?ct'i{'jo<j  -((•/ou;  tjjjlôjv 
JipovorJOïjU. 

(5)  11.  Macc.  vin.  2$.  24.  jo.   56.  et  1.  Macc.  iv.  8...    i^. 

16 


242 


II.  —  MACCABÊES.  —  XIV.  -  JUDAS  ET  NICANOR 


14.  Tune  gentes,  quae  de  Judaea  fugerant  Judam,  gre- 
gatim  se  Nicanori  miscebant  miserias  et  clades  Judaeo- 
rum,  prosperitates  rerum  suarum  existimantes. 

15.  Audito  itaque  Judasi  Nicanoris  adventu,  et  conventu 
nationum,  conspersi  terra  rogabant  eum  qui  populum 
suum  constituit,  ut  in  aeternum  custodiret,  quique  suam 
portionem  signis  evidentibus  protegit. 


16.  Imperante  autem  duce,  statim  inde  moverunt,  con- 
veneruntque  ad  castellum  Dessau. 

17.  Simon  vero,frater  Judae,  commiserat  cum  Nicanore, 
sed  conterritus  est  repentino  adventu  adversariorum. 

18.  Nicanor  tamen,  audiens  virtutem  comitum  Judae, 
et  animi  magnitudinem,  quam  pro  patriae  certaminibus 
habebant,  sanguine  judicium  facere  metuebat; 

19.  Quamobrem  praamisit  Posidonium,  et  Theodotium, 
et  Matthiam  ut  darent  dextras  atque  acciperent. 

20.  Et  cum  diu  de  his  consilium  ageretur,  et  ipse  dux 
ad  multitudinem  retulisset,  omnium  una  fuit  sententia 
amicitiis  annueie. 

21.  Itaque  diem  constituerunt,  qua  secreto  inter  se 
agerent  ;  et  singulis  sellas  prolatae  sunt,  et  positae. 

22.  Prsecepit  autem  Judas  armatos  esse  locis  oppor- 
tunis,  ne  forte  ab  hostibus  repente  mali  aliquid  oriretur'; 
et  congruum  colloquium  fecerunt. 

2j.  Morabatur  autem  Nicanor  Jerosolymis,  nihilque 
inique  agebat,  gregesque  turbarum,  quae  congregatae 
fuerant,  dimisit. 

24.  Habebat  autem  Judam  semper  carum  ex  animo,  et 
erat  viro  inclinatus. 

25.  Rogavitque  eum  ducere  uxorem,  filiosque  pro- 
creare.  Nuptias  fecit,  quiète  egit,  communiterque  vive- 
bant. 


14.  Alors  les  païens,  que  Judas  avait  fait  fuir  de  Judée 
vinrent  en  foule  se  joindre  à  Nicanor,  regardant  les 
misères  et  les  pertes  des  Juifs  comme  leur  prospérité 
propre  et  le  rétablissement  de  leurs  affaires. 

15.  Les  Juifs  ayant  appris  l'arrivée  de  Nicanor,  et  que 
cette  multitude  des  nations  s'était  unie  contre  eux,  se 
couvrirent  la  tête  de  terre,  et  offrirent  leurs  prières  à 
Celui  qui  s'était  choisi  un  peuple  pour  le  conserver 
éternellement,  et  qui  s'était  déclaré  par  tant  de  marques 
éclatantes  le  protecteur  de  ce  peuple  qu'il  avait  pris 
pour  son  partage. 

t6.  Aussitôt  après,  ils  partirent  du  lieu  où  ils  étaient 
par  l'ordre  de  leur  général,  et  vinrent  se  rendre  près 
du  château   de  Dessau. 

17.  Simon,  frère  de  Judas,  ayant  commencé  à  com- 
battre contre  Nicanor,  fut  effrayé  par  l'arrivée  imprévue 
des  ennemis. 

18.  Nicanor  néanmoins,  connaissant  quelle  était  la  va- 
leur des  gens  de  Judas,  et  la  grandeur  de  courage  avec 
laquelle  ils  combattaient  pour  leur  patrie,  craignait  de 
s'exposer  au  hasard  d'un  combat  sanglant. 

19.  C'est  pourquoi  il  envoya  en  avant  Posidonius,Théo- 
dotius  et  Matthias  pour  donner  la  main  et  la  recevoir. 

20.  Cette  délibération  ayant  duré  longtemps,  et  le 
général  ayant  exposé  lui-même  la  chose  à  toute  l'armée, 
tous  furent  d'avis  d'accepter  l'accord, 

21.  C'est  pourquoi  les  deux  généraux  prirent  un  jour 
pour  en  conférer  entre  eux  en  secret;  et  on  leur  porta 
à  chacun  une  chaise,  où  ils  s'assirent. 

22.  Cependant  Judas  fit  tenir  des  gens  armés  dans  des 
lieux  avantageux,  de  peur  que  les  ennemis  n'entreprissent 
tout  d'un  coup  quelque  chose,  et  la  conférence  qu'ils 
eurent  entre  eux  se  passa  comme  elle  le  devait. 

2j.  Nicanor  demeura  ensuite  à  Jérusalem,  où  il  ne  fit 
rien  contre  l'équité;  et  il  licencia  ces  grandes  troupes 
qu'il  avait  levées. 

24.  Il  aimait  toujours  Judas  d'un  amour  sincère,  et  il 
sentait  une  inclination  particulière  pour  sa  personne. 

2i  II  le  pria  même  de  se  marier  et  de  songer  à  avoir 
des  enfants.  Ainsi  Judas  se  maria';  il  jouit  d'un  grand 
repos  :  et  ils  vivaient  familièrement  l'un  et  l'autre 
ensemble. 


^.14.  Gentes  quje  de  Jud^a  fugerant  Judam. 
Les  étrangers  que  Judas  chassait  des  villes  de 
Judée,  ainsi  que  les  Juifs  prévaricateurs  qu'il 
poursuivait  partout. 

fi.  16.  Castellum  Dessau.  On  n'en  sait  pas  la 
situation  ;  il  n'en  est  pas  parlé  ailleurs. 

).  17.  Conterritus  est  repentino  adventu 
adversariorum.  Le  grec(i)://  souffrit  quelque 
pelil  échec,  à  cause  de  V arrivée  imprévue  de  l'enne- 
mi. D'autres  traduisent  :  Simon  fut  troublé  par 
le  silence  inespéré  des  ennemis.  Il  craignit  que  ce 
silence  ne  fût  un  stratagème,  ou  ne  marquât  quel- 
que embûche  qu'ils  lui  avaient  dressée. 

jL  20.  Cum  ipse  dux  ad  multitudinem  retulis- 
set. Judas  exposa  les  propositions  que  lui  faisait 
Nicanor,  devant  une  assemblée  du  sénat  et  de 
tout  le  peuple  de  Jérusalem. 


COMMENTAIRE 

fi.  21.  Singulis    sellée 


prolat,e  sunt.  Le 
grec  (2)  :  On  posa  des  chaises  différentes  devant 
chacun  d'eux.  On  ne  faisait  cet  honneur  de  pré- 
senter ces  sortes  de  chaises,  qu'à  des  personnes 
de  la  première  distinction. 

fi.  23.  Morabatur  Nicanor  Jerosolymis.  Il 
fit  sa  demeure  dans  la  citadelle  (2).  Par  les  arti- 
cles de  la  paix,  Alcime  ne  fut  pas  reconnu  pour 
grand  prêtre  ;  mais  Nicanor  confirma  Judas  dans 
cette  dignité.  Voyez  le  verset  26.  Alcime  fit  bien- 
tôt éclater  son  mécontentement,  et  contre  Nica- 
nor et  contre  Judas. 

v.  24.  Habebat  Judam  semper  carum  ex  animo. 
Le  grec  (4)  :  //  avait  toujours  Judas  devant  les 
yeux.  La  plupart  l'expliquent  en  bonne  part  (S). 
Il  ne  pouvait  vivre  sans  lui  ;  il  le  vovait  toujours 
volontiers.  Mais  Tirin  veut  que  son  amitié  n'ait 


(1)  Bpa/e'ioî  os  Sià  xrjv  âiWôiov  tûv  xvctnxXcov  âya<j:'av 
ÈTtTainàj;. 
(2;  Ilap'  l/taa'iou  oia-fo'pou;  ïôeuav  Sfypouj. 


())  1.  Macc.  xn.  ??• 

(4)  Ka't  iv/i  xov  I'oûSav  6ta7:avî6;  sv  xrpoawTtp. 

(5)  Ita  Syr.  Nobil.  Grot.  Badvcl.  ald. 


II.  —  MACCABÉES.  -  XIV.  -  TRAHfSON    DE  NICANOR 


U) 


26.  Alcimus  autem,  videns  caritatem  illorum  ad  invicem, 
et  conventiones,  venit  ad  Demetrium,  et  dicebat  Nica- 
norem  rébus  alienis  assentire,  Judamque,  regni  insidia- 
torem,  successorem  sibi  destinasse. 

27.  Itaque  rex  exasperatus,  et  pessimis  hujus  crimina- 
tionibus  irritatus,  scripsit  Nicanori,  dicens,  graviter  qui- 
dem  se  ferre  de  amicitias  conventione,  jubere  tamen 
Machabasum  citius  vinctum  mittere  Antiochiam. 

28.  Quibus  cognitis, .  Nicanor  consternabatur,  et  gra- 
viter ferebat,  si  ea,  quse  convenerant,  irrita  faceret,  nihil 
Issus  a  viro. 

29.  Sed  quia  régi  resistere  non  poterat,  opportunitatem 
observabat  qua  praaceptum  perficeret. 

jo.  At  Machabasus,  videns  secum  austerius  agere  Nica- 
norem,  et  consuetum  occursum  ferocius  exhibentem, 
intelligens  non  ex  bono  esse  austeritatem  istam,  paucis 
suorum  congregatis,  occultavit  se  a  Nicanore. 


51.  Quod  cum  ille  cognovit  fortiter  se  a  viro  prasven- 
tum,  venit  ad  maximum  et  sanctissimum  templum;et 
sacerdotibus  solitas  hostias  offerentibus,  jussit  sibi  tradi 
virum. 

52.  Quibus  cum  juramento  dicentibus  nescire  se  ubi 
esset  qui  quasrebatur,  extendens  manum  ad  templum, 

??.  Juravit,  dicens  :  Nisi  Judam  mihi  vinctum  tradi- 
deriiis,  istud  Dei  fanum  in  planitiem  deducam,  et  altare 
effodiam,  et  templum  hoc  Libero  patri  consecrabo. 

?4.  Et  his  dictis,  abiit.  Sacerdotes  autem,  protendentes 
manus  in  caslum,  invocabant  eum  qui  semper  propu- 
gnator  esset  gentis  ipsorum,  hase  dicentes  : 

!Ç.  Tu,  Domine  universorum,  qui  nullius  indiges,  vo- 
luisti  templum  habitationis  tuas  fieri  in  nobis; 

?6.  Et  nunc,  Sancte  sanctorum  omnium  Domine,  con- 
serva in  asternum  impollutam  domum  istam,  quas  nuper 
mundata  est. 


26.  Mais  Alcime, voyant  l'amitié  et  la  bonne  intelligence 
qui  était  entre  eux,  vint  trouver  Démétrius,  et  lui  dit  que 
Nicasor  favorisait  les  intérêts  de  ses  ennemis,  et  qu'il 
lui  avait  destiné  pour  successeur  Judas,  qui  aspirait  à 
son  royaume. 

27.  Alors  le  roi  étant  fort  aigri  et  irrité  par  les  ca- 
lomnies détestables  de  ce  méchant  homme,  écrivit  à 
Nicanor  qu'il  trouvait  fort  mauvais  qu'il  eût  fait  ainsi 
amitié  avec  Maccabée,  et  que  néanmoins  il  lui  comman- 
dait de  l'envoyer  au  plus  tôt  lié  et  garrotté  à  Antioche. 

28.  Nicanor  ayant  reçu  cette  nouvelle,  en  fut  cons- 
terné, et  il  souffrait  une  grande  peine  de  violer  l'accord 
qu'il  avait  fait  avec  Maccabée,  qui  ne  l'avait  offensé  en 
aucune  sorte. 

29.  Mais  parce  qu'il  ne  pouvait  résister  au  roi,  il  cher- 
chait une  occasion  favorable  pour  exécuter  l'ordre  qu'il 
avait  reçu. 

;o.  Cependant  Maccabée  s'étant  aperçu  que  Nicanor 
le  traitait  plus  durement  qu'à  l'ordinaire,  et  que  lors- 
qu'ils s'abordaient,  il  lui  paraissait  plus  fier  qu'il  n'avait 
coutume,  jugea  bien  que  cette  fierté  ne  pouvait  avoir 
une  bonne  cause  :  c'est  pourquoi  ayant  assemblé  près 
de  lui  quelques-uns  de  ses  gens,  il  se  déroba  à  Nicanor. 

ji.  Lorsque  Nicanor  eut  su  que  Judas  avait  eu  l'habi- 
leté de  le  prévenir,  il  vint  au  très  auguste  et  très  saint 
temple;  et  les  prêtres  offrant  les  victimes  ordinaires,  il 
leur  commanda  de  lui  remettre  Maccabée  entre  les  mains. 

;2.  Mais  ces  prêtres  l'ayant  assuré  avec  serment,  qu'ils 
ne  savaient  où  était  celui  qu'il  cherchait,  il  étendit  la 
main  vers  le  temple, 

j).  Et  jura,  en  disant  :  Si  vous  ne  me  remettez  Judas 
lié  entre  les  mains,  je  raserai  jusqu'à  terre  ce  temple  de 
Dieu  ;  je  renverserai  cet  autel,  et  je  consacrerai  ce  tem- 
ple au  père  Bacchus. 

54.  Après  avoir  parlé  de  la  sorte,  il  s'en  alla.  Or,  les 
prêtres,  étendant  leurs  mains  vers  le  ciel,  invoquaient 
Celui  qui  s'était  toujours  déclaré  le  protecteur  de  leur 
nation,  en  disant  : 

;$.  Seigneur  de  tout  l'univers,  qui  n'avez  besoin  d'au- 
cune chose  ;  vous  avez  voulu  qu'on  bâtit  un  temple  où 
vous  demeurassiez  au  milieu  de  nous. 

jt>.  Maintenant  donc,  ô  Saint  des  saints,  ô  Seigneur  de 
toutes  choses  I  exemptez  pour  jamais  de  profanation 
cette  maison  qui  vient  d'être  purifiée. 


COMMENTAIRE 


été  que  feinte  et  apparente  ;  Diligebal  fade 
tenus. 

f.  26.  Judamque  regni  insidiatorem  succes- 
sorem sibi  destinasse.  Qu'il  lui  avait  destiné  pour 
successeur  Judas,  ou  plutôt  que  Nicanor  avait  éta- 
bli Judas  grand  prêtre,  en  la  place  de  lui  Alcime. 
C'est  le  vrai  sens  du  texte  (2).  Le  syriaque  le 
prend  autrement  :  Nicanor  a  choisi  Judas  pour 
son  ami,  au  préjudice  des  intérêts  du  roi. 

f.  30.  Paucis  suorum  congregatis  occulta- 
vit se.  Le  grec  (3),  et  le  syriaque  lisent  au  con- 
traire, qu'il  assembla  un  nombre  considérable  de 
ses  gens,  et  qu'il  se  retira  avec  eux  ;  et  on  voit 
dans  le  premier  livre  des  Maccabées  (4),  que 
Nicanor  l'ayant  été  attaquer,  fut  obligé  de  se  re- 


tirer à  Jérusalem,  après  avoir  perdu  cinq  mille 
hommes. 

f.  32.  Extendens  manum  ad  templum,  juravit. 
Nicanor  étend  la  main  versle  temple  du  Seigneur, 
pour  le  menacer  qu'il  le  rasera  jusqu'au  niveau 
du  sol  :  et  les  prêtres  étendent  aussi  leurs  mains 
vers  le  ciel,  mais  pour  invoquer  contre  Nicanor 
le  bras  tout-puissant  du  Maître  suprême  de  ce 
saint  temple,  contre  qui  il  blasphémait.  Qui  l'em- 
portera, de  ce  général  qui  s'élève  insolemment 
à  la  vue  des  troupes  dont  il  dispose, ou  de  ces  prê- 
tres qui  s'humilient  profondément  à  la  vue  de 
leur  faiblesse  ?  Ce  sera  sans  doute  l'humilité  qui 
triomphera  de  l'orgueil,  selon  cet  oracle  de  Jésus- 
Christ,  que  celui  qui  s'élève  sera  humilié,   et  que 


(1)  Tov  y*?    érctéouXov    *î\i   PasiXa'aç   I'oôSav    8iiooj(ov 
«vaoc'Biiysv  £auToO. 


(2)  Suat^aç  où*  ôXiyou;  tâiv    Jttpl    lautôv   auvs<pôîU5t<? 
tàv  Ntxâvopa. 
(j)  1.  Macc.  XII.  27...  ?t. 


244 


II.  -•  MACCABEES.  —  XIV.  -   RAZIAS 


57.  Razias  autem  quidam  de  senioribus  ab  Jerosolymis 
delatus  est  Nicanori,  vir  amator  civitatis,  et  bene  audiens, 
qui  pro  aifectu  pater  Judaeorum  appellabatur. 

;8.  Hic  multis  temporibus  continentias  propositum 
tenuit  in  judaismo,  corpusque  et  animam  tradere  con- 
tentus  pro  perseverantia. 

59.  Volens  autem  Nicanor  manifestare  odium  quod 
habebat  in  Judabos,  misit  milites  quingentos,  ut  eum 
comprehenderent; 

40.  Putabatenim,  si  illum  decepisset,  se  cladem  Judaeis 
maximam  illaturum. 

41.  Turbis  autem  irruere  in  domum  ejus,  et  januam 
disrumpere,  atque  ignem  admovere  cupientibus,  cum 
jam  comprehenderetur,  gladio  se  petiit, 


?7.  On  accusa  alors  auprès  de  Nicanor  un  des  anciens 
de  Jérusalem,  nommé  Razias,  homme  zélé  pour  la  ville, 
qui  était  en  grande  réputation,  et  qu'on  appelait  le  père 
des  Juifs,  à  cause  de  l'affection  qu'il  leur  portait. 

38.  Il  menait  depuis  longtemps  dans  le  judaïsme  une 
vie  très  pure,  et  éloignée  de  toutes  les  souillures  du 
paganisme  ;  et  il  était  prêt  à  abandonner  son  corps  et  sa 
vie  pour  y  persévérer  jusqu'à  la  fin. 

39.  Nicanor  voulant  donc  donner  une  marque  publique 
de  la  haine  qu'il  avait  contre  les  Juifs,  envoya  cinq  cents 
soldats  pour  le  prendre  ; 

40.  Car  il  croyait  que,  s'il  séduisait  cet  homme,  il  fe- 
rait aux  Juifs  un  grand  mal. 

41.  Lors  donc  que  ces  troupes  s'efforçaient  d'entrer 
dans  sa  maison,  d'en  rompre  les  portes,  et  d'y  mettre  le 
feu,  comme  il  se  vit  sur  le  point  d'être  pris,  il  se  donna 
un  coup  d'épée, 


COMMENTAIRE 


celui  qui  s'humilie  sera  élevé.  Ce  sera  l'ardente 
prière  des  saints  ministres  du  Dieu  d'Israël,  qui 
humiliera  la  fierté,  et  qui  rendra  inutiles  toutes 
les  menaces  de  leur  ennemi. 

Mais  que  cette  prière  qu'ils  lui  adressent  dans 
un  péril  si  pressant,  est  admirable  et  digne  d'être 
exaucée!  Ils  le  reconnaissent  pour  le  Seigneur  de 
tout  V univers,  et,  par  conséquent,  pour  le  Maître 
souverain  de  tous  les  princes,  qu'ils  regardent 
comme  lui  étant  nécessairement  assujettis.  Ils 
confessent  humblement  que,  n'ayant  besoin  d'au- 
cune chose,  s'il  a  voulu  qu'on  lui  élevât  un  temple, 
c'a  été  pour  l'amour  d'eux-mêmes,  et  pour  de- 
meurer au  milieu  d'eux,  comme  au  milieu  de  son 
peuple,  qu'il  avait  choisi  entre  toutes  les  nations 
par  un  pur  effet  de  sa  bonté,  pour  le  consacrer  à 
son  service,  et  pour  se  rendre  son  protecteur.  Ils 
l'appellent  le  Saint  des  saints,  et  ils  le  conjurent, 
par  cette  considération,  de  conserver  sa  maison 
dans  la  pureté,  sans  permettre  que  des  impies  et 
des  profanes  lui  impriment  quelque  tache,  et  la 
souillent  de  leurs  abominations. 

Ce  que  ces  prêtres  disaient  alors  avec  tant 
d'humilité  et  de  foi  au  sujet  de  ce  temple  maté- 
riel de  Jérusalem,  nous  devrions  tous  le  dire  avec 
encore  plus  d'ardeur  et  plus  de'  reconnaissance 
sur  ce  qui  regarde  la  sainteté  de  l'Eglise  et  la 
pureté  des  temples  vivants  du  Saint-Esprit,  nos 
âmes  rachetées  et  sanctifiées  par  le  sang  cje 
Jésus-Christ.  La  structure  toute  divine  de  cette 
Église  et  de  ces  temples  n'a  point  été  un  ouvrage 
delà  main  des  hommes,  comme  celui  de  Jérusa- 
lem, mais  de  la  toute-puissance  de  Dieu  :  Dei 
œdijicalio  eslis  :  Vous  des,  disait  autrefois  saint 
Paul  aux  fidèles,  l'édifice  que  Dieu  bâtit  :  Vous 
êtes,  leur  disait  encore  le  même  Apôtre  (1),  te 
temple  de  Dieu,  et  l'Esprit  de  Dieu  habile  en  vous. 


Si  quelqu'un  profane  le  temple  de  Dieu,  Dieu  le 
perdra  :  carie  temple  de  Dieu  est  saint,  et  c'est  vous- 
mcmes  qui  êtes  ce  temple.  Le  démon  menace  tous 
les  jours  de  profaner  et  de  détruire  ce  temple  du 
cœur  des  fidèles  consacrés  à  Dieu  :  il  étend  sa 
main  contre  ce  lieu  saint,  sanctifié  par  l'onction 
du  baptême.  Que  pouvons-nous  faire  pour  rendre 
vains  tous  ces  efforts  et  toutes  ces  menaces  de 
notre  ennemi  ?  Ce  que  firent  les  prêtres  de  Jéru- 
salem pour  humilier  l'insolence  de  Nicanor  :  II 
faut  élever  nos  mains  vers  le  ciel  par  la  prière,  et 
humilier  dans  le  même  temps  nos  cœurs  :  il  faut 
reconnaître  par  le  sentiment  d'une  foi  vive,  que 
notre  divin  Protecteur  est  infiniment  plus  puis- 
sant que  notre  ennemi  :  il  faut  confesser  avec 
une  profonde  humilité,  que  le  Seigneur  n'a  aucun 
besoin  de  nous,  et  que  c'est  par  un  excès  de 
bonté,  qu'il  a  bien  voulu  nous  rendre  son  temple, 
et  demeurer  au  milieu  de  nous  :  il  faut  aimer  sa 
sainteté  souveraine,  et  lui  demander  très  instam- 
ment, qu'ayant  été  purifiés  et  rendus  saints  pour 
être  son  temple,  il  nous  conserve  toujours  sans 
tache,  et  ne  souffre  pas  que  sa  maison  soit  pro- 
fanée. 

f.  37.  Razias  autem..  delatus  est  Nicanori. 
On  ne  put  accuser  ce  vertueux  vieillard,  que  d'un 
trop  grand  attachement  aux  lois  de  son  pays. 
On  le  représenta  aussi  apparemment,  comme  par- 
tisan de  Judas,  et  comme  contraire  au  gouverne- 
ment royal. 

jfr.    38.  CONTINENTI/E  PROPOSITUM  TENUIT  IN     Ju- 

daismo.  Le  grec  porte  (2)  :  Dans  les  temps  de 
confusion  qui  avaient  précédé,  il  s'était  montré  fer- 
mement attaché  au  judaïsme,  et  avait  voué  son  corps 
et  son  âme,  avec  une  entière  constance  pour  la  re- 
ligion judaïque.  Il  avait  peut-être  été  accusé  et 
condamné,  comme  observateur  zélé  de    sa    reli- 


(1)  1.  Cor.  m.  9.  16.  17. 


(2)  H*v  yàp  êv  totç  6u.Kpoo0tv  /pôvot;  xrti  âjiiÇi'aç   y.pi'oiv 
étacvrjvEYpivoç  I'ouSataaou. 


II.  —  MACCABÉES.  —  XIV.  -  SA   MORT 


M) 


4:.  Eligens  nobiliter  mori  potius  quam  subditus  fieri 
peccatoribus,  et  contra  natales  suos  indignis  injuriis  agi. 

4j.  Sed,  cum  per  festinationem  non  certo  ictu  plagam 
dedisset,  et  turbae  intra  ostia  irrumperent,  recurrens 
audacter  ad  murum,  praecipitavit  semetipsum  viriliter  in 
turbas; 


42.  Aimant  mieux  mourir  noblement,  que  de  se  voir 
assujetti  aux  pécheurs,  et  de  souffrir  des  outrages  indi- 
gnes de  sa  naissance. 

4?.  Mais  parce  que,  dans  !a  précipitation  où  il  était,  il 
ne  s'était  pas  donné  un  coup  mortel, lorsqu'il  vit  tous  ces 
soldats  entrer  en  foule  dans  sa  maison, il  courut  avec  une 
fermeté  extraordinaire  à  la  muraille,  et  se  précipita  lui- 
même  courageusement  du  haut  en  bas  sur  le  peuple. 


COMMENTAIRE 


gion.  Selon  le  syriaque,  il  avait  déjà  été  appelé 
en  jugement,  comme  empêchant  qu'on  ne  commît 
l'idolâtrie  dans  Israël. 

,v.  42.  Eligens  nobiliter  mori  potius,  quam 
subditus  fieri  peccatoribus.  L'action  de  Razias 
regardée,  selon  le  sentiment  que  les  païens 
avaient  de  la  générosité,  de  la  grandeur  d'âme, 
du  mépris  de  la  mort,  de  l'amour  de  la  liberté, 
est  au-dessus  de  toutes  louanges,  et  constitue  le 
véritable  héroïsme.  Les  Grecs  et  les  Romains, 
aux  plus  beaux  jours  de  leur  histoire,  n'auraient 
point  agi  autrement.  Les  Juifs  mettent  ce  grand 
homme,  au  nombre  de  leurs  plus  illustres  mar- 
tyrs ;  et  prétendent  faire  voir  par  son  exemple, 
par  celui  de  Saùl,  et  par  Samson,  qu'il  est  de 
certains  cas,  où  le  meurtre  volontaire  de  soi- 
même,  est  non  seulement  permis,  mais  même 
louable  et  méritoire.  Ces  cas  sont  produits  par  la 
juste  défiance  de  ses  propres  forces,  et  la  crainte 
de  succomber  à  la  violence  de  la  persécution,  ou 
à  la  rigueur  des  tourments.  Lorsqu'on  prévoit  que, 
si  l'on  tombe  en  vie  entre  les  mains  des  ennemis, 
ils  en  prendront  occasion  d'insulter  au  Seigneur, 
de  blasphémer  son  nom,  de  l'accuser  d'indiffé- 
rence ou  d'impuissance  ;  alors,  disent  ces  docteurs, 
on  peut  se  tuer  soi-même,  pour  éviter  un  plus 
grand  mal,  et  pour  empêcher  que  le  nom  de  Dieu 
ne  soit  déshonoré. 

Mais  le  christianisme  nous  fournit  des  règles 
plus  sûres,  et  des  principes  plus  autorisés,  pour 
juger  de  l'action  de  Razias.  Nous  savons  qu'il 
n'est  pas  permis  de  faire  un  mal,  pour  qu'il  en 
arrive  un  bien  (1),  ni  de  commettre  le  crime, pour 
empêcher  que  les  autres  ne  le  commettent.  S'il 
eût  été  permis  de  se  donner  la  mort,  pour  éviter 
le  danger  de  chanceler  dans  la  confession,  ou  de 
renoncer  à  la  foi  devant  ses  persécuteurs,  et  en 
souffrant  les  plus  affreux  tourments,  combien  de 
martyrs  ne  l'auraient-ils  pas  fait  ?  Et  si,  sous  le 
spécieux  prétexte  de  prévenir  les  blasphèmes  et 
profanations  du  nom  de  Dieu,  de  la  part  des  in- 
fidèles, ils  eussent  cru  qu'on  pouvait  se  tirer  de 
leurs  mains,  par  un  trépas  volontaire  :  combien 
en  aurions-nous  d'exemples  dans  l'histoire r  lis 
étaient  donc  persuadés  que,  dans  la  persécution, 
il  n'y  a  point  d'autre  parti  à  prendre   à  un  chré- 


tien, que  la  patience  et  l'humilité,  la  résistance 
ou  la  fuite.  C'est  ainsi  que  les  sept  frères  Mac- 
cabées  et  leur  admirable  mère,  comme  le  vieillard 
Eléazar,  en  ont  agi  en^  présence  du  roi  persécu- 
teur ;  c'est  ainsi  que  Jésus-Christ,  que  les  apô- 
tres, et  que  les  martyrs  se  sont  conduits. 

Les  Circoncellions,  célèbres  autrefois  dans 
l'Afrique,  avaient  la  fureur  de  se  faire  mourir, 
sous  le  faux  prétexte  de  procurer  la  gloire  de 
Dieu;  ils  se  précipitaient  en  bas  des  rochers,  ils 
se  jetaient  dans  les  flammes,  ils  se  plongeaient 
dans  les  eaux  ;  en  un  mot,  ils  se  faisaient  mourir 
en  mille  manières  cruelles.  Saint  Augustin  em- 
ploya toute  la  force  de  son  raisonnement  et  de 
son  éloquence,  pour  arrêter  cette  manie.  Ces 
êtres  furieux  ne  pouvant  résister  à  la  force  des 
raisons  tirées  de  la  loi  de  Dieu,  qui  défend  si 
expressément  le  meurtre,  se  servaient  de  l'exem- 
ple de  Razias,  pour  autoriser  leurs  crimes;  mais 
saint  Augustin  les  força  dans  ce  retranchement  ; 
il  prétendit  que  l'action  de  cet  homme  n'était  pas 
capable  de  les  mettre  à  couvert.  Il  soutint  que 
l'Écriture  ne  s'étant  point  exprimée  sur  la  qualité 
de  cette  action,  mais  l'ayant  simplement  exposée 
à  nos  yeux,  c'est  à  nous  à  en  juger,  suivant  les 
règles  de  la  vérité  renfermées  dans  les  mêmes 
livres,  qui  nous  rapportent  cet  exemple  (2)  ; 
Quamvis  hofno  isle  Radias,  fueril  laudatus,  faclum 
narration  est,  non  laudalum,  et  judicandum  potius 
quam  imilandum,  quasi  ante  oculos  constilutum, 
non  sane  nostro  judicio  judicandum,  quod  nos  ut 
homines  habere  possemus,  sed  judicio  doctrinœso- 
briœ,  quœ  in  ipsis  quoque  iibris  veteribus  clara  est. 

Le  même  père  avoue  ailleurs  que  l'Écriture 
donne  quelques  louanges  à  Razias;  mais  de  quoi 
le  loue-t-elle  ?  d'avoir  aimé  sa  patrie,  d'avoir  été 
attaché  au  judaïsme,  d'avoir  été  regardé  comme 
le  père  des  Juifs,  de  s'être  précipité  généreuse- 
ment ;  enfin,  d'avoir  invoqué,  en  mourant,  le  sou- 
verain Dominateur  de  la  vie  et  de  l'âme.  Mais 
tout  cela  suffit-il  pour  justifier  une  action  notoi- 
rement contraire  à  la  loi  de  Dieu  r  Ne  peut-on 
pas  trouver  la  même  énergie  dans  un  méchant  ? 
n'en  voit-on  pas  qui  ont  de  la  générosité,  de  la 
force,  de  l'humanité,  du  zèle  pour  des  pratiques 
extérieures ï  Ces  vertus  toutes  humaines  ne  prou- 


(1)  Rom.  m.  8. 


(2)  Aug.  Epist.  lxi.  Vet.  Edit.  num.  cciv.  in  Nov.    cdit 


Ut 


II.  —  MACCABÉES.  —  XIV.  -  OPINION   DE  SAINT  AUCUSTIN 


vent  pas  à  la  rigueur,  que  Razias  nous  ait  donné 
dans  sa  mort  un  exemple  à  imiter.  Quand  ce 
serait  une  action  louable  à  un  chrétien,  si  Ra- 
zias n'est  ni  juste,  ni  innocent,  pourquoi  veut-on 
l'imiter,  dit  saint  Augustin,  et  s'il  est  juste  et 
innocent,  pourquoi  se  tue-t-il  soi-même  (  i)  ?  Saint 
Augustin  pourrait  paraître  excessif  dans  son  juge- 
ment, si  les  raisons  qu'il  donne  et  sa  haute  sain- 
teté ne  le  mettaient  au-dessus  d'un  critique  vul- 
gaire. Il  nous  avertit  d'abord  (2)  que  l'histoire 
des  Maccabées  n'a  pas  été  reçue  inutilement  par 
l'Église,  surtout  à  cause  de  ces  grands  saints  qui 
souffrirent  de  si  horribles  persécutions  pour  la  loi 
de  Dieu  comme  de  véritables  martyrs;  pourvu, 
dit-il,  qu'on  la  lise  avec  précaution,  et  qu'on  l'en- 
tende comme  on  doit  l'entendre  :  Scriplura  quœ 
appellalur  Machabœorum  recepla  est  ab  Ecclesia 
non  inulilitersi  sobrie  legalur  vel  audiatur,  maxime 
propler  illos  Machabœos  qui  pro  Dei  lege,  sicut 
veri  martyres,  a  persecutoribus  iam  indigna  alque 
horrenda  perpessi  sunt.  Le  grand  évêque  a  fait 
cette  remarque  à  cause  de  la  mort  si  surprenante 
de  Razias.  Il  tient  à  prémunir  les  fidèles  contre 
un  enthousiasme  pernicieux. 

Il  cite  d'abord  saint  Cyprien,  pour  faire  voir 
que  ceux  qui,  du  temps  des  persécutions,  préve- 
naient l'arrêt  des  persécuteurs,  et  se  jetaient  dans 
les  flammes  sans  avoir  été  condamnés,  ne  le  fai- 
saient point  par  un  esprit  de  sagesse,  mais  par 
une  folie  pleine  de  fureur  :  Non  est  hoc  consdium, 
sed  fur  or  :  non  est  sapieniia,  sed  amentia.  Il  dit 
que,  quand  le  saint  homme  Job  était  tout  couvert 
depuis  la  tête  jusqu'aux  pieds  d'une  pourriture 
effroyable,  et  qu'il  se  sentait  déchiré  dans  tout  le 
corps  par  les  plus  horribles  douleurs,  il  aurait  pu 
se  délivrer  tout  d'un  coup  d'une  vie  insupportable, 
s'il  l'avait  voulu;  mais  qu'il  n'y  songea  même 
point,  parce  que  la  justice  ne  le  lui  permettait  pas. 

((  Mais  on  nous  objecte,  ajoute  le  saint  doc- 
teur, l'autorité  des  Écritures,  qui  ont  donné  des 
louanges  à  Razias.  Considérons  donc  comment  il 
est  loué  :  Parce  qu'il  aimait  sa  ville,  dit  l'Écri- 
ture. Mais  il  a  pu  le  faire  charnellement  en 
aimant  la  Jérusalem  terrestre  qui  est  esclave  avec 
ses  enfants,  et  non  celle  qui  est  d'en-haut,  qui 
est  libre,  et  notre  vraie  mère.  Il  a  été  loué  comme 
s'élant  conservé  pur  dans  le  judaïsme,  mais  c'est 
ce  que  l'Apôtre  a  regardé  comme  une  déchéance, 
en  comparaison  de  la  justice  chrétienne  (3).  Il 
était  loué,  parce  que  tous  le  nommaient  le  père 
des  Juifs  :  mais  qu'y  a-t-il  d'étonnant  si,  étant 
homme,  il  s'est  élevé  et  flatté  en  lui-même  sur  ce 


sujet,  et  si,  au  milieu  de  cette  gloire  dont  il  jouis- 
sait parmi  ses  concitoyens,  il  a  mieux  aimé  se 
tuer  de  sa  propre  main,  que  de  tomber  dans  une 
honnête  servitude  entre  les  mains  de  ses  enne- 
mis ?  Razias  était  très  éloigné  de  la  disposition 
que  nous  marque  le  Saint-Esprit  par  ces  pa- 
roles (4)  :  Accepte^  tout  ce  qui  vous  arrivera  :  sou- 
tenez-vous dans  votre  douleur,  et  conserve^  la 
patience  dans  votre  humiliation.  Il  fit  paraître,  non 
sa  sagesse  à  choisir  ce  genre  de  mort  volontaire, 
mais  son  impatience  à  ne  pouvoir  souffrir  l'humi- 
liation qui  lui  arrivait. 

11  est  encore  marqué  qu'il  voulut  mourir  noble- 
ment et  courageusement  :  mais  s'ensuit-il,  pour 
cela,  qu'il  l'ait  fait  sagement?  Cette  noblesse  con- 
sistait en  ce  qu'il  ne  voulait  pas  perdre  la  liberté 
de  sa  naissance,  en  tombant  captif  entre  les  mains 
de  ses  ennemis;  et  son  courage,  en  ce  qu'il  eut 
une  si  grande  force  d'âme,  que,  n'ayant  pu  se 
donner  un  coup  mortel  avec  son  épée,  il  alla  se 
précipiter  du  haut  du  mur,  courut  ensuite,  lors- 
qu'il perdait  tout  son  sang,  monta  sur  une  pierre 
escarpée,  et  tirant  ses  entrailles  hors  de  son 
corps,  il  les  jeta  avec  ses  deux  mains  sur  le 
peuple.  Ces  choses  sont  grandes,  ajoute  saint 
Augustin,  mais  elles  ne  sont  pas  bonnes  :  car  il 
ne  s'en  suit  pas  que  tout  ce  qui  est  grand  soit 
bon;  puisqu'il  y  a  aussi  de  grands  maux. 

Ainsi  nous  ne  devons  pas  approuver  légère- 
ment tout  ce  que  les  Écritures  nous  apprennent 
qu'ont  fait  des  personnes  qui  sont  louées  par  le 
témoignage  de  Dieu  même  :  mais  il  faut  l'exami- 
ner avec  un  sage  discernement,  non  en  suivant 
la  lumière  de  notre  propre  autorité,  mais  celle 
même  des  divines  Écritures.  De  quelque  manière 
donc  qu'on  veuille  entendre  les  louanges  qui  sont 
données  en  ce  lieu  à  la  vie  de  Razias,  sa  mort  ne 
peut  être  louée  par  la  Sagesse,  puisqu'elle  n'est 
point  accompagnée  de  la  patience  qui  convient 
aux  vrais  serviteurs  de  Dieu  :  et  c'est  à  lui  qu'on 
doit  appliquer  plutôt  cette  parole  de  la  Sagesse 
même  qui  ne  tend  pas  à  louer  sa  mort,  mais  à  la 
la  faire  détester  :  Malheur  à  ceux  qui  ont  perdu  la 
patience  (<;). 

«  Car  quanta  ce  qui  est  dit,  qu'étant  tout  près 
de  mourir,  il  invoqua  le  Dominateur  de  la  vie  et 
de  l'âme,  afin  qu'il  les  lui  rendît  un  jour  :  ce  qu'il 
demanda  alors  n'est  point  une  chose  qui  puisse 
faire  discerner  les  bons  d'avec  les  méchants  : 
puisque  Dieu  rendra  et  la  vie  et  l'âme  aux  mé- 
chants mêmes,  en  les  faisant  ressusciter,  non 
pour  la  vie  éternelle,  mais  pour  la  condamnation 


(1)  Aug.  Ep.  cciv.  Si  iste  innocens  et  jnstus  non  fuit, 
cur  proponitur  imitandus  '<  Si  autem  innocens  et  justus 
fuit,  quare  interfector  innocentis  et  justi,  id  est  ipsius 
Razii,  insuper  putatur  esse  laudandus  ? 


(2)  August.  corira  Gaudcnl.  lib.  1.  c.  jo.  51.  jj- 
(j)  Plulipp.  m.  7.  -  August' ep.  lxi. 
(4)  Eccli.  11.  4. 
{})  Eccli.  1.  16. 


II.  —  MACCABÉES. 


XIV.-  OPINION   DE  SAINT  AUGUSTIN 


247 


éternelle.  Reconnaissons  donc  que  l'Écriture 
nous  a  plutôt  raconté  la  mort  de  Razias  comme 
un  événement  qui  pouvait  nous  étonner,  qu'elle 
ne  nous  l'a  proposée  comme  un  exemple  louable 
de  sagesse  qu'on  pût  imiter  :  Istam  ejus  mortem 
mirabiliorem  quant  prude nliorem  narravit,  quem- 
admodum  facla  esset,  non  ianquam  facienda  esset, 
Scriplura  laudavit.  Ainsi,  quand  il  est  marqué 
qu'il  choisit  de  mourir  noblement,  il  faut  entendre 
qu'il  aurait  fait  un  meilleur  choix  de  mourir  plus 
humblement,  parce  qu'il  l'eût  fait  utilement; 
et  les  histoires  profanes  ont  coutume  de  se  servir 
de  ces  sortes  d'expressions  pour  louer,  non  les 
martyrs  de  Jésus-Christ,  mais  les  héros  de  ce 
siècle  :  Dictant  est  quod  elegerit  nobiliter  mori  : 
melius  vellet  humilité r  ;  sic  enim  utililer.  Illis  aulem 
verbis  hisloria  genlium  laudare  consuevil,  sedviros 
fortes  hujus  sœculi,  non  martyres  Chrisli.  » 

Saint  Augustin  nous  fait  remarquer  néanmoins, 
que  cet  exemple  de  Razias  ne  laisse  pas  de  pou- 
voir nous  être  utile,  pour  nous  apprendre  ce 
qu'un  chrétien  est  obligé  de  souffrir  de  ses  enne- 
mis en  toute  charité,  puisque  ce  Juif  a  tant  souf- 
fert de  lui-même  par  la  crainte  seule  d'une  humi- 
liation humaine.  Mais  cette  ardeur  de  la  charité, 
dit  le  grand  évêque  d'Hippone,  descend  d'en 
haut,  c'est  en  effet  de  la  grâce  de  notre  Dieu; 
au  lieu  que  la  crainte  d'une  humiliation  tempo- 
relle naît  de  l'amour-propre,  et  du  désir  de  la 
louange  des  hommes.  Aussi  un  chétien  combat 
et  est  victorieux  par  la  force  de  sa  patience  :  au 
lieu  que  ce  Juif  pécha,  et  fut  vaincu  par  son 
impatience.  <>  Qu'aurait  donc  dû  faire  alors  Ra- 
zias, ajoute  le  même  saint  ?  Ce  que  nous  lisons 
dans  le  même  livre  de  l'Écriture,  que  firent  les 
sept  frères  Maccabées.  Étant  pris,  il  aurait  dû 
demeurer  inviolablement  attaché  à  la  loi  sainte 
du  Seigneur  :  accepter  tout  ce  qu'il  lui  serait 
arrivé;  se  soutenir  humblement  dans  sa  douleur, 
et  conserver  la  patience  dans  son  humiliation. 
N'ayant  donc  pu  supporter  la  confusion  de  tomber 
entre  les  mains  de  ses  ennemis,  il  a  donné  un 
exemple  non  de  sagesse,  mais  de  folie,  et  un 
exemple  qui  ne  peut  être  imité  par  les  martyrs  de 
Jésus-Christ.  » 

Saint  Thomas  (1),  et  quelques  autres  commen- 
tateurs,historiens,  théologiens  ou  philosophes  ont 
suivi  saint  Augustin  (2)  et  ont  assez  témoigné 
que  l'action  de  Razias  n'était  nullement  louable 
en  elle-même,  et  qu'il  aurait  mieux  valu  qu'il  fit 
paraître  de  l'humilité  et  de  la  patience,  que  de 
l'emportement  et  de  la  grandeur  d'âme  dans  cette 
occasion.  A  défaut  d'une   mort  violente,  il  pou- 


vait, par  la  grandeur  de  son  courage  et  l'intré- 
pidité de  sa  foi,  taire  trembler  sur  leur  tribunal 
ceux  qui  opprimaient  sa  nation.  Sa  mort  les  débar- 
rassa d'une  victime  gênante. 

Mais  quelques  théologiens  modernes  (3),  ont 
cru  trouver  dans  les  principes  mêmes  de  saint 
Augustin,  et  dans  les  exemples  de  nos  martys, 
et  de  quelques  saints  de  l'Ancien  Testament,  de 
quoi  justifier  Razias.  Ils  supposent  que  cet 
homme  n'agit  en  ceci  que  par  une  inspiration 
particulière  de  Dieu;  après  cela, il  ne  leur  est  pas 
difficile  de  prouver  que  son  action  n'a  rien  d'irré- 
gulier,  ni  de  contraire  à  la  justice  et  à  la  raison. 
Toute  la  difficulté  consiste  à  prouver  cette  ins 
piration;  car  il  ne  suffit  point  de  se  donner  pour 
inspiré,  de  le  croire  même  intérieurement,  si  on 
n'a  de  bonnes  et  solides  preuves,  qui  nous 
en  convainquent,  et  qui  puissent  le  persuader  aux 
autres.  L'Écriture  signale  la  piété  de  Razias,  sa 
prudence,  son  zèle  pour  la  loi,  sa  fermeté  dans 
la  persécution,  la  prière  qu'il  fait  à  Dieu  en  mou- 
rant, sa  ferme  espérance  de  la  résurrection  fu- 
ture; enfin  la  bonté  de  sa  cause,  qui  n'est  autre 
que  celle  de  la  religion,  et  de  la  conservation  des 
lois  de  son  Dieu.  Est-il  croyable  que,  dans  une 
semblable  occasion,  Dieu  ait  voulu  refuser  son 
secours  à  son  serviteur,  à  son  soldat  r  et  n'est-il 
pas  bien  plus  juste  de  croire,  qu'il  lui  inspira  le 
dessein  de  se  donner  la  mort,  comme  quelque 
chose  d'extraordinaire  et  de  nouveau,  dans  la  vue 
de  frapper  d'étonnement  son  persécuteur  ;  au  lieu 
de  lui  donner  la  patience  et  l'humilité,  qui  sont 
des  voies  plus  ordinaires,  et  des  vertus  plus  con- 
nues? On  ajoute  à  tout  cela  l'exemple  de  Sam- 
son,  loué  par  l'Écriture,  et  celui  de  quelques 
vierges  chrétiennes,  qui,  pour  éviter  la  souillure 
de  leurs  corps,  se  jetèrent  dans  une  rivière,  où 
elles  se  noyèrent.  Saint  Augustin  (4),  lui-même, 
convient  que  Samson,  et  que  ces  saintes  vierges, 
ont  pu  s'exposer  au  danger  certain  de  la  mort, 
par  un  mouvement  particulier  de  Dieu;  et  pour- 
quoi n'en  dira-t-on  pas  autant  de  Razias.  Le  mé- 
pris qu'il  fait  de  la  mort  et  de  la  souffrance  a 
néanmoins  son  mérite.  Il  montrait  à  l'ennemi  que 
rien  ne  saurait  abattre  l'énergie  des  Juifs,  et  aux 
Juifs  qu'il  fallait  s'élever  au-dessus  de  tout  pour 
soutenir  la  religion.  A  ce  double  point  de  vue, 
l'action  de  Razias  n'est  pas  le  fait  d'un  déses- 
péré, mais  l'acte  réfléchi  d'un  homme  qui  fait  de 
sa  vie  un  sacrifice  au  Seigneur.  Nous  n'osons  donc 
le  condamner  ni  l'absoudre, nous  nous  contentons 
d'admirer  son  héroïque  courage. 


(i)  D.  Thom.  11.  2.  q.  64.  art.  5.  ad  5.  Esti.  Sacr.  Natal. 
Alex.  hist.  Eccl.  V.  T.  tom.  u.Macc. 
(2)  Aug.  contra  Epist.  Gaudent.  I.  1.  c.  ji. 


(j)  vidi  Lyran.  hic.  Serar.    Francise.  Victoria  rclect/one 
de  Homicidio.  Tir  in. 
(4)  Aug.  loc.  cit.  contra  Gaudent.  et  de  civit.  lib  1.  c.  21. 


248                    II.  —  MACCABÉES.  —  XIV.  -  EFFROYABLE  SPECTACLE 

44.  Quibus  velociter  locum  dantibus  casui  ejus,  venit  44.  Et  tous  s'étant  retirés  promptement  pour  n'être 
per  mediam  cervicem.  pas  accablés  de  sa  chute,  il  tomba  la  tète  la  première. 

45.  Et  cum  adhuc  spiraret,  accensus  animo,  surrexit  ;  4^.  Lorsqu'il  respirait  encore,  il  fit  un  nouvel  effort,  et 
et  cum  sanguis  ejus  magno  fluxu  deflueret,  et  gravissi-  se  releva  ;  et  des  ruisseaux  de  sang  lui  coulant  de  tous 
mis  vulneribus  esset  saucius,  cursu    turbam    pertransiit  ;  côtés,  à  cause  des    grandes  plaies  qu'il  s'était    faites,    il 

passa  en  courant  au  travers  du  peuple  ; 

46.  Et  stans  supra  quamdam  petram  prœruptam,  et  46.  Et  étant  monté  sur  une  pierre  escarpée,  lorsqu'il 
jam  exsanguis  elTectus,  complexusintestina  sua,  utrisque  avait  presque  perdu  tout  son  sang,  il  tira  ses  entrailles 
manibus  projecit  super  turbas,  invocans  dominatorem  hors  de  son  corps,  et  les  jeta  avec  ses  deux  mains  sur  le 
vit»  ac  spiritus,  ut  hsec  i!li  iterum  redderet  ;  atque  ita  peuple,  invoquant  le  Dominateur  de  la  vie  et  de  l'âme, 
vita  defunctus  est.  afin  qu'il  les  lui  rendît  un  jour  :  et  il  mourut  de  la    sorte. 

COMMENTAIRE 

f.  44.  Venit  per  mediam  cervicem.  Le  grec  (i):  tomba  dans  la  rue,  au  milieu  de  la  foule,  qui  avait 

//  tomba  sur  le  milieu  du  ventre  :  ce  qui  fut  cause  fait  place  ;  le  terme  grec  signifie  le  ventre,  où  un 

qu'il  ne  fut  pas  tué  de  sa  chute  ;  autrement  (2),  il  lieu  où  il  n'y  a  point  d'édifice. 


(1)  II'XOe /.arà  piaov  tôv  /svswva.  Edit.  Rom.  /sveojv  hic  non  est  venter,  sed  locus    ab    aedificiis    vacuus, 

(2)  Alice  Edit.  ID.0;  zatà  jji^aov  et;  xov   xewûva.   Grot.       quomodo  et  apud  Nonnum  sumilur. 


CHAPITRE    XV 

Nicanor  veut  attaquer  les  Juifs.  Il  blasphème  contre  le  Seigneur.  Judas  exhorte  les  siens  : 
il  leur  rapporte  une  vision  qu'il  a  eue.  Il  défait  l'armée  de  Nicanor.  Nicanor  est 
trouvé  tué  sur  le  champ  de  bataille;  sa  tête  et  sa  main  sont  suspendues  à  la  vue  de 
tous.  Actions  de  grâces  rendues,  et  fête  instituée  en  mémoire  de  cette  victoire. 


1.  Nicanor  autem,  ut  compcrit  Judain  esse  in  locis 
Samariœ,  cogilavit  cum  omni  impetu  die  sabbati  com- 
mittere  bellum. 

2.  Judœis  vero,  qui  illum  per  necessitatem  sequeban- 
tur,  dicentibus  :  Ne  ita  ferociter  et  barbare  feceris,  sed 
honorem  tribue  diei  sanctificationis,  et  honora  eum  qui 
universa  conspicit, 

;.  llle  infelix  interrogavit  si  est  potens  in  casIo,  qui 
imperavit  agi  diem  sabbatorum. 

4.  Et  respondentibus  illis:  Est  Dominus  vivus  ipse  in 
caslo  potens,  qui  jussit  agi  septimam  diem  ; 

S-  At  ille  ait:  Et  ego  potens  sum  super  terram,  qui  im- 
pero  sumi  arma,  et  negotia  régis  impleri.  Tamen  non 
obtinuit  ut  consilium  perficeret. 

6.  Et  Nicanor  quidem  cum  summa  superbia  erectus, 
cogitaverat  commune  tropheeum  statuere  de  Juda. 

7.  Machabœus  autem  semper  confidebat  cum  omni  spe 
auxilium  sibi  a  Deo  alfuturum. 

8.  Et  hortabatur  suos  ne  formidarent  ad  adventum  na- 
tionum,  sed  in  mente  haberent  adjutoria  sibi  facta  de 
cœlo,  et  nunc  sperarent  ab  Omnipotente  sibi  alîuturam 
victoriam. 


r.  Or,  Nicanor  ayant  appris  que  Judas  était  sur  les 
terres  de  Samarie,  résolut  de  l'attaquer  avec  toutes  ses 
forces  le  jour  du  sabbat. 

2.  Et  lorsque  les  Juifs,  qui  étaient  contraints  de  le  sui- 
vre, lui  dirent  :  N'agissez  pas  si  fièrement,  ni  d'une  ma- 
nière si  barbare,  mais  rendez  honneur  à  la  sainteté  de  ce 
jour,  et  révérez  Celui  qui  voit  toutes  choses  ; 

;.  Ce  malheureux  leur  demanda  s'il  y  avait  dans  le  ciel 
un  Dieu  puissant,  qui  eût  commandé  de  célébrer  le  jour 
du  sabbat. 

4.  Ils  lui  répondirent  :  C'est  le  Dieu  vivant  et  le  puis- 
sant Maître  du  ciel,  qui  a  commandé  qu'on  honorât  le 
septième  jour  ; 

<,.  Il  leur  dit  :  Je  suis  aussi  moi-même  puissant  sur  la 
terre  ;  et  je  vous  commande  de  prendre  les  armes,  pour 
obéir  aux  ordres  du  roi.  Il  ne  put  pas  néanmoins  exécu- 
ter ce  qu'il  avait  résolu  ; 

6.  Car  Nicanor,  dans  le  comble  d'orgueil  où  il  était, 
avait  dessein  d'élever  un  même  trophée  de  Judas  et  de 
tous  ses  gens. 

7.  Mais  Maccabée  espérait  toujours  avec  une  entière 
confiance,  que  Dieu  ne  manquerait  point  de  lui  envoyer 
son  secours. 

8.  Et  il  exhortait  ses  gens  à  ne  point  craindre  l'abord 
de  ces  nations,  mais  à  repasser  dans  leur  esprit  les 
assistances  qu'ils  avaient  reçues  du  ciel,  et  à  espérer  en- 
core présentement  que  le  Tout-Puissant  leur  donnerait 
la  victoire. 


COMMENTAIRE 


f.  1.  In  locis  samarie.  Judas  était  campé  à 
Adarsa,  dans  la  tribu  d'Éphraïm  (1),  à  trente 
stades  de  l'ennemi, n'ayant quetrois  mille  hommes 
avec  lui.  Nicanor  établit  son  camp  à  Béthoron,  et 
ce  fut  près  de  là  que  s'engagea  la  bataille.  L'arabe 
dit  que  Judas  se  retira  à  Sébaste,  ou  autrement 
Samarie. 

f.  2.  JUD/EIS  QUI  ILLUM  PER  NECESSITATEM  SEQUE- 
BANTUR,      DICENTIBUS...      HONOREM      TRIBUE      DIEI 

sanctificationis.  Nicanor  s'iimginait  que  les 
Juifs  de  Judas  Maccabée  refuseraient  de  com- 
battre le  jour  du  sabbat,  ou  du  moins,  qu'il 
pourrait  les  surprendre  ce  jour-là,  qui  est  pour  eux 
un  jour  de  repos  (2).  Il  donna  ses  ordres  en  con- 
séquence ;  mais  comme  il  y  avait  dans  son  armée 
un  certain  nombre  de  Juifs,  qui  le  suivaient  comme 
troupes  auxiliaires,  et  qu'on  contraignait  à  porter 


les  armes  contre  leurs  frères;  ces  troupes  repré- 
sentèrent à  Nicanor,  que  la  loi  leur  défendait  toute 
action  laborieuse  au  jour  du  sabbat,  et  le  prièrent 
d'avoir  égard  à  la  sainteté  de  ce  jour.  Nicanor  n'y 
répondit  que  par  des  blasphèmes. 

jh  5.  Ego  potens  sum  super  terram,  qui 
impero  sumi  arma.  Si  Celui  qui  vous  ordonne  de 
ne  pas  travailler  le  jour  du  sabbat,  est  tout  puis- 
sant dans  le  ciel  ;  je  suis  moi-même  revêtu  d'au- 
torité sur  la  terre,  et  je  puis  vous  faire  des 
commandements  contraires  aux  siens.  Présomption 
aveugle  et  impie,  qui  fait  que  l'homme  superbe 
s'égale  à  Dieu,  et  veut  même  s'élever  en  quelque 
sorte  au-dessus  de  lui. 

;v.  6.  Commune  troph/eum  statuere  de  Juda. 
Les  trophées  étaient  des  monuments  qu'on  éri- 
geait au  lieu  où  l'on  avait  gagné  quelque  victoire. 


[!)  1.  Macc.  vin.  40. 


(2)   Vide  ad  1.  Macc.  11.  j6. 


250 


II.—  MACCABÉES.  —  XV.  -  VISION   DE   JUDAS 


9.  Et  allocutus  eos  de  lege  et  prophetis,  admonens 
etiam  certamina  quae  fecerant  prius,  promptioivs  cons- 
tituit  eos. 

10.  Et  ita  animis  eorum  erectis,  simul  ostendebat  gen- 
tium  fallaciam,  et  juramentorum  prasvaricationem. 

11.  Singulos  autem  illorum  armavit,  non  clypei  et 
hastœ  munitione,  sed  sermonibus  optimis,  et  exhortatio- 
nibus,  exposito  digno  fide  somnio,  per  quod  universos 
laetificavit. 

12.  Erat  autem  huiuscemodi  visus  :  Oniam,  qui  fuerat 
summussacerdos,  virum  bonum  et  benignum,  verecundum 
visu,  modestum  moribus,  et  eloquio  décorum,  et  qui  a 
puero  in  virtutibus  exercitatus  sit,  manus  proter.dentem, 
orare  pro  omni  populo  Judaeorum  ; 

i).  Post  hoc  apparuisse  et  alium  virum  astate  et  gloria 
mirabilem,  et  magni  decoris  habitudine.  circa  illum. 

14.  Respondentem  vero  Oniam  dixisse  :  Hic  est  fra- 
trum  amator,  et  populi  Israël  ;  hic  est  qui  multum  orat 
pro  populo  et  universa  sancta  civitate,  Jeremias,  pro- 
pheta  Dei  ; 


9.  Leur  ayant  aussi  donné  des  instructions  tirées  de  la 
loi  et  des  prophètes,  et  les  ayant  fait  ressouvenir  des 
combats  qu'ils  avaient  auparavant  soutenus, il  leur  inspira 
une  nouvelle  ardeur. 

10.  Après  avoir  relevé  ainsi  leur  courage,  il  leur  re- 
présenta en  même  temps  la  perfidie  des  nations, et  la  ma- 
nière dont  elles  avaient  violé  leur  serment. 

1 1.  Il  les  arma  donc  tous, non  de  boucliers  et  de  dards, 
mais  par  des  paroles  et  des  exhortations  excellentes  ;  et 
leur  rapporta  une  vision  très  digne  de  foi  qu'il  avait  eue 
en  songe,  et  qui  les  combla  tous  de  joie. 

12.  Voici  quelle  fut  cette  vision:  il  lui  sembla  qu'il 
voyait  Onias,  qui  avait  été  grand  prêtre,  étendre  ses 
mains,  et  prier  pour  tout  le  peuple  juif,  Onias,  homme 
vraiment  bon  et  plein  de  douceur,  modeste  dans  son  vi- 
sage, modéré  et  réglé  dans  ses  mœurs,  éloquent  en  ses 
discours, exercé  dès  son  enfoncée  toutes  sortes  de  vertus; 

ij.  Qu'ensuite  avait  paru  un  autre  homme  vénérable 
par  son  âge, éclatant  de  gloire,  et  environné  d'une  grande 
majesté  ; 

14.  Et  qu'Onias  avait  dit  en  le  montrant  :  C'est  là  le 
véritable  ami  de  ses  frères  et  du  peuple  d'Israël  ;  c'est 
là  Jérémie  le  prophète  de  Dieu,  qui  prie  beaucoup  pour 
ce  peuple,  et  pour  toute  la  ville  sainte  ; 


COMMENTAIRE 


Ordinairement  c'était  un  tronc  d'arbre  ébranché 
auquel  on  suspendait  les  armes  de  l'ennemi.  Le 
grec  à  la  lettre  (1)  :  //  résolut  d'ériger  un  trophée 
commun  de  tous  cevx  qui  étaient  avec  Judas.  Le 
syriaque  s'éloigne  assez  de  ce  sens  :  Nicanor 
ayant  appris  que  l'armée  de  Judas  s'était  rassem- 
blée en  un  seul  lieu,  prête  à  combattre,  se  fortifia 
extrêmement. 

}.  10.  Ostendebat  gentium  fallaciam,  et 
juramentorum  prœvaricationem.  1 1  s  en  avaient 
un  exemple  tout  récent,  dans  la  conduite 
d'Antiochus  Eupator,  qui,  après  avoir  été  reçu 
dans  Jérusalem,  fit  abattre  les  murailles  de  Sion  (2). 
Ils  se  souvenaient  de  la  perfidie  des  habitants  de 
Joppé  (3)  ;  ils  avaient  devant  les  yeux  la  malice 
d'Apollonius,  qui  profita  du  jour  du  sabbat,  pour 
tailler  en  pièces  le  peuple  qui  était  venu  à  la 
fête  (4). 

f.  11.  Exposito  digno  fide  somnio.  Judas 
comprit  parfaitement  que  cette  vision  n'était  point 
du  nombre  des  songes  vains,  qui  ne  signifient  rien. 
Il  ne  craignit  point  d'en  faire  le  récit  à  ses  troupes 
et  de  leur  exposer  les  raisons  qu'il  avait  de  croire 
qu'il  était  divin  et  significatif. 

f.  12.  Oniam  qui  fuerat  summus  sacerdos, 
orare  pro  omni  populo.  Il  s'agit  ici  d'Onias  III, 
ce  pontife  loué  dans  l'Ecriture,  et  qui  avait  été 
injustement  mis  à  mort  par  Andronique,  à  la 
sollicitation  de  Ménélaùs  (5 ).  Il  paraît  par  ce  pas- 
sage, et  par  le  verset  i-i,que  les  Juifs  ne  doutaient 
nullement  alors,  que  les  saints,  dans  l'autre  vie,  ne 


priassent  pour  les  vivants,  et  ne  prissent  part  à  ce 
qui  se  passait  ici-bas.  Cette  tradition  venait  sans 
doute  de  plus  haut.  L'Église  a  hérité  de  ces  sen- 
timents des  Juifs,  et  les  a  conservés  dans  leur 
pureté.  Notre  âme,  d'ailleurs, quitte  le  corps  sans 
rien  perdre  de  ses  facultés. Ses  connaissances,  ses 
affections,  ses  sentiments  particuliers  lui  demeu- 
rent, sauf  l'inclination  au  péché.  Délivré  du  poids 
delà  matière,  qui  l'a  asservie  et  comme  appesantie 
pendant  !a  vie  terrestre,  elle  est  plus  active,  plus 
maîtresse  d'elle-même;  aussi  nous  est-il  avan- 
tageux de  mourir,  du  moment  que  nous  sommes 
bien  avec  Dieu,  c'est-à-dire  en  état  de  grâce.  A 
cette  condition,  la  mort  est  pour  nous  une  libéra- 
trice. Nous  devons  l'aimer,  la  désirer  même,  en 
conformité  avec  la  volonté  de  Dieu. 

f.  14.  Jeremias  propheta  Dei.  La  charité  par- 
faite qui  unit  les  saints  après  leur  mort,  les  rend 
incapables  de  jalousie,  et  ce  doit  être  notre  but 
d'y  tendre  par  tous  nos  désirs  et  par  toutes 
nos  prières  tant  que  nous  vivons.  Onias  avait  été 
souverain  pontife;  il  avait  vécu,  dès  son  enfance, 
dans  l'exercice  de  toutes  sortes  de  vertus  ;  il  s'é- 
tait généreusement  acquitté  de  son  ministère, 
jusqu'à  mériter  de  mourir  par  la  main  sacrilège 
des  impies;  enfin, il  est  représenté,  en  cet  endroit, 
comme  digne  de  prier  après  sa  mort  pour  tout  le 
peuple.  Cependant  il  semble  n'apparaître  à  Judas 
Maccabée  que  pour  lui  montrer  et  lui  faire  con- 
naître Jérémie,  mort  plus  de  quatre  cents  ans 
avant  lui,  et  qui    n'avait   été    que  simple  prêtre. 


(1)  Atefvw/Et     xoivov     T'iiv     Jtep'i     I'oûoov     ouTurjaaaôat 
Tpôraiov. 

(2)  1.  Macc.  vi.  62. 


(j)  11.  Macc.  xii.  j. 
(4)  11.  Macc.  v.  2$.  26 
15)  11.  Macc.  iv.  j4. 


II.  —  MACCABÉES.  —  XV.  -  VISION   DE  JUDAS 


251 


25.  Extendisse  autem  Jeremiam  dextram,  et  dédisse 
Judae  gladium  aureum,  dicentem  : 

16.  Accipe  sanctum  gladium,  munus  a  Deo,  in  quo  deji- 
cies  advenarios  populi  mei  Israël. 


15.  Qu'en  même  temps,  Jérémie  avait  étendu  la  main, 
et  donné  à  Judas  une  épée  d'or,  en  disant  : 

16.  Prenez  cette  épée  sainte,  comme  un  présent  que 
Dieu  vous  fait,  et  avec  lequel  vous  renverserez  les  en- 
nemis de  mon  peuple  d'Israël. 


COMMENTAIRE 


Comme  il  n'appartient  qu'à  Dieu  de  connaître 
dans  ses  saints  la  mesure  de  ses  dons,  c'est  lui 
seul  aussi  qui  peut  nous  en  donner  la  connaissance 
quand  il  lui  plaît.  Jérémie  paraît  donc  ici  après 
Onias;  mais  éclatant  de  gloire,  et  environné  d'une 
grande  majesté  :  et  parce  que  Judas  Maccabée 
ne  pouvait  pas  le  connaître  comme  Onias,  qu'il 
reconnut  aisément  pour  l'avoir  vu  plusieurs  fois, 
ce  saint  pontife  lui  déclara,  en  le  lui  montrant, 
qui  il  était,  et,  sans  pouvoir  être  touché  d'aucun 
sentiment  de  jalousie  au  sujet  d'un  simple  prêtre 
qui  lui  fut  beaucoup  inférieur  en  dignité  pendant 
sa  vie,  mais  dont  il  voyait  alors  avec  joie,  dans  la 
lumière  de  Dieu  même,  le  grand  mérite,  il  lui  dit 
ces  paroles  si  remarquables  :  C'est  là  le  véritable 
ami  de  ses  frères  et  du  peuple  d'Israël. 

Quoi  donc!  Onias  que  le  Saint-Esprit  nous 
représente  comme  unhomme  vraiment  bon  et  plein 
de  douceur,  déclare,  en  montrant  Jérémie,  que 
cétail-là  le  véritable  ami  de  ses  frères;  ce  prophète 
que  le  peuple  juif  n'avait  pu  souffrir,  et  que  ses 
concitoyens  avaient  regardé  et  traité  comme  leur 
plus  grand  ennemi  pendant  qu'il  vivait,  parce  qu'il 
ne  leur  parlait  que  des  malheurs,  ne  leur  prédi- 
sait que  des  guerres,  des  incendies  et  des  fami- 
nes, et  usait  presque  toujours  de  la  plus  grande 
sévérité  dans  ses  discours,  cet  homme,  persécuté 
pendant  sa  vie  comme  un  ennemi  de  sa  nation, 
était  son  meilleur  ami  !  Oui  sans  doute,  Onias 
avait  raison  de  le  nommer  de  la  sorte,  puisque  la 
vraie  amitié  consiste  souvent  dans  la  fermeté  avec 
laquelle  on  parle  à  ceux  que  l'on  aime,  quand  on 
voit  que  la  douceur  leur  serait  pernicieuse ,  et 
qu'ils  ont  besoin,  comme  les  malades  dangereu- 
sement blessés,  qu'on  emploie  le  fer  et  le  feu 
pour  les  guérir.  On  a  vu  dans  la  lecture  de  Jéré- 
mie, que,  tant  que  ce  saint  prophète  put  espérer 
que  ses  paroles  procureraient  le  salut  à  quelques- 
uns  de  ses  frères,  il  leur  parla  avec  force,  il  les  me- 
naça, il  les  effraya  par  la  vue  des  plus  terribles 
jugements  de  Dieu;  et  jusqu'alors  il  pouvait  être 
regardé  des  hommes  charnels  comme  un  homme 
dur,  qui  n'était  point  compatissant  aux  maux  de 
son  peuple;  mais  quand  l'arrêt  delà  divine  justice 
eut  été  exécuté  à  l'égard  de  Jérusalem;  que  le 
peuple  de  Juda  eut  été  mené  en  captivité  à  Baby- 
lone,  et  que  l'ennemi  eut  brûlé  le  temple  du  Sei- 
gneur; ce  fut  alors  qu'on  put  bien  connaître  de 


quel  principe  partaient  ces  reproches  si  âpres  qu'il 
leur  avait  faits,  et  cette  rigueur  apparente  qui  avait 
accorpagné  tous  ses  discours.  On  vit  par  ces 
plaintes  remplies  d'une  tendresse  compatissante 
qu'il  fit  sur  tous  leurs  malheurs,  combien  il  brû- 
lait d'amour  pour  ses  ingrats  compatriotes,  dans 
le  temps  même  qu'il  paraissait  les  traiter  si  dure- 
ment; on  vit  qu'il  n'ava't  jamais  été  plus  vérita- 
blement ami  de  ses  frères,  que  lorsqu'ils  le  regar- 
daient et  le  repoussaient  comme  un  ennemi  ;  on 
vit  qu'il  ne  se  rendit  jamais  plus  digne  de  prier 
pour  eux,  que  lorsqu'il  ne  craignait  pas  de  s'ex- 
poser à  leur  fureur,  pour  leur  annoncer  des  véri- 
tés qui  auraient  pu  les  sauver,  si  l'aveuglement  de 
leur  cœur  et  leur  endurcissement  ne  s'y  étaient 
opposé. 

S'il  paraît  clairement,  par  ce  passage  d'un  livre 
cité  par  les  pères  comme  canonique  depuis  l'éta- 
blissement de  l'Église,  et  déclaré  tel  par  l'autorité 
des  conciles,  que  l'utilité  de  l'intercession  des 
saints  en  faveur  de  ceux  qui  vivent  encore,  était 
reconnue  dès  le  temps  de  l'ancienne  loi,  c'est-à- 
dire,  avant  que  ces  saints  fussent  entrés  dans  la 
gloire  avec  Jésus-Christ;  combien  l'Eglise  a  t-elle 
encore  plus  de  raison  de  déclarer  que,  depuis  la 
résurrection  et  l'ascension  du  Sauveur,  les  saints 
qui  jouissent  avec  lui  de  la  parfaite  vision  de  Dieu 
dans  le  ciel,  lui  présentent  leurs  prières  pour  le 
salut  du  peuple  fidèle  qui  combat  encore  ici  sur 
la  terre  ?  Le  texte  sacré  nous  fait  voir,  selon  la 
remarque  d'Estius,  le  fondement  de  cette  doc- 
trine, par  ces  paroles  :  C'est  ici  celui  qui  aime 
véritablement  ses  frères....  et  qui  prie  beaucoup  pour 
ce  peuple.  Étant  donc  uni  à  ses  frères  par  une  vraie 
charité,  il  ne  pouvait  pas  ne  point  prier  pour  ceux 
qu'il  aimait.  Et  c'est  cette  union  sainte  de  tous 
les  membres  du  corps  de  l'Église,  qui  porte  ceux 
qui  sont  déjà  dans  la  gloire  à  prier  pourceux  qui 
sont  encore  exposés  dans  le  péril. 

j^.  1^.  Dédisse  Jud,e gladium  aureum.  //  avait 
donné  à  Judas  une  épée  d'or,  comme  la  portaient 
les  rois  de  Perse,  et  leurs  principaux  officiers  (1). 
Dieu  faisait  connaître  par  cette  vision  à  Judas 
Maccabée,  non  seulement  qu'il  serait  victorieux 
de  ses  ennemis,  mais  qu'il  le  serait  par  la  vertu 
de  cette  épée  d'or  dont  il  lui/disait  présent  :  c'est- 
à-dire  par  une  force  supérieure  à  la  sienne,  qui 
lui  viendrait  d'en-haut.  Ce  fut  Jérémie    qui    lui 


(1)  Xcnophon  lib.  1.  A'v<x6a;.  Vide  Brisson  tib.  1.  de  Reg.       Pers.  p.  128.  129. 


2)2 


II.—  MACCABEES.—  XV.-  SENTIMENTS  DES  JUIFS 


17.  Exhortati  itaque  Judas  sermonibus  bonis  valde,  de 
quibus  extolli  posset  impetus,  et  animi  juvenum  confor- 
tari,  statuerunt  dimicare  et  confligere  fortiter,  ut  virtus 
de  negotiis  judicaret,  eo  quod  civitas  sancta  et  templum 
periclitarentur. 


18.  Erat  enim  pro  uxoribus,  et  filiis,  itemque  pro  fra- 
tribus,  et  cognatis,  minor  sollicitudo  ;  maximus  vero  et 
primus  pro  sanctitate  timor  erat  templi. 

19.  Sed  et  eos  qui  in  civitate  erant,  non  minima  solli- 
citudo habebat  pro  his  qui  congressuri  erant. 

20.  Et,  cum  jam  omnes  sperarent  judicium  futurum, 
hostesque  adessent,  atque  exercitus  esset  ordinatus, 
bestias  equitesque  opportuno  in  loco  composai, 

31.  Considerans  Machabasus  adventtim  multitudinis,  et 
apparatum  varium  armorum,  et  ferocitatem  bestiarum, 
exiendens  manus  in  caslum,  prodigia  facientem  Dominum 
invocavit,  qui  non  secundum  armorum  potentiam,  sed 
prout  ipsi  placet,  dal  dignis  victoriam. 


22.  Dixit  autem  invocans  hoc  modo  :  Tu,  Domine, 
qui  misisti  angelum  tuum  sub  Ezechia,  rege  Juda,  et  in- 
terfecisti  de  castris  Sennacherib  centum  octoginta  quin- 
que  mil  1  ia  ; 

2j.  Et  nunc,  dominator  cœlorum,  mitte  angelum  tuum 
bonum  ante  nos,  in  timoré  et  tremore  magnitudinis 
brachii  tui, 

24.  Ut  metuant  qui  cum  blasphemia  veniunt  adversus 
sanctum  populum  tuum.   Et  hic  quidem  ita  peroravit. 


17.  Étant  donc  excités  par  ces  excellentes  exhortations 
de  Judas,  qui  étaient  capables  de  relever  les  forces,  et 
d'animer  le  courage  des  jeunes  gens,  ils  résolurent  d'at- 
taquer et  de  combattre  vigoureusement  les  ennemis, afin 
que  le  courage  décidât  de  l'issue  de  cette  guerre,  car 
la  ville  sainte  et  le  temple  étaient  exposés  à  un  grand 
péril  ; 

18.  Us  se  mettaient  moins  en  peine  pour  leurs  femmes, 
pour  leurs  enfants,  pour  leurs  frères  et  pour  leurs  pa- 
rents ;  mais  la  plus  grande  et  la  première  crainte  qu'ils 
avaient  était  pour  la  sainteté  du  temple. 

19.  Ceux  qui  demeuraient  dans  la  ville  étaient  aussi 
dans  une  extrême  inquiétude  au  sujet  de  ceux  qui  de- 
vaient combattre. 

20.  Et  lorsque  tous  s'attendaient  à  voir  quel  serait  le 
succès  du  combat,  que  les  ennemis  étaient  en  présence, 
l'armée  en  bataille,  les  éléphants  et  la  cavalerie  rangée 
au  lieu  qui  leur  avait  paru  le  plus  avantageux  ; 

21.  Maccabée  considérant  cette  multitude  d'hommes 
qui  allait  fondre  sur  eux,  cet  appareil  de  tant  d'armes  dif- 
férentes, et  la  furie  de  ces  bêtes  formidables,  étendit  les 
mains  vers  le  ciel,  et  invoqua  le  Seigneur,  qui  fait  des 
prodiges  et  qui  donne  la  victoire,  comme  il  lui  plaît,  à 
ceux  qui  en  sont  les  plus  dignes,  sans  avoir  égard  à  la 
puissance  des  armes. 

22.  11  implora  donc  son  secours  en  lui  parlant  de  cette 
manière  :  C'est  vous,  Seigneur,  qui  avez  envoyé  votre 
ange  sous  Ézéchias,  roi  de  Juda,  et  qui  avez  tué  cent 
quatre-vingt-cinq  mille  hommes  de  l'armée  de  Senna- 
cherib. 

2;.  Envoyez  donc  aussi  maintenant  devant  nous,  ô  Do- 
minateur des  cieux, votre  bon  ange, qui  inspire  la  terreur 
et  l'effroi  de  la  grande  puissance  de  votre  bras  ; 

24.  Afin  que  ceux  qui,  en  blasphémant  votre  nom, vien- 
nent attaquer  votre  peuplesaint, soient  frappés  de  crainte. 
Et  il  finit  ainsi  sa  prière. 


COMMENTAIRE 


donna  cette  épée,  pour  marquer  que  ce  saint  pro- 
phète et  cet  ami  véritable  de  ses  frères  avait  obtenu 
de  Dieu,  par  sa  prière,  ce  présent  qu'il  lui  faisait, 
mais  qui  lui  venait  de  Dieu.  Prene^,  lui  dit-il, 
celle  épée  sainte  comme  un  présent  que  Dieu  vous 
fait;  c'est-à-dire,  ne  regardez  pas  la  main  qui  vous 
la  présente,  mais  Celui  de  la  part  duquel  elle 
vous  est  présentée.  Elle  est  sainte  cette  épée; 
parce  qu'elle  vous  vient  du  Saint  des  Saints, 
parce  qu'elle  est  destinée  à  un  saint  usage,  qui 
est  la  défense  de  son  peuple  et  de  son  temple  ; 
parce  que  vous  ne  devez  pas  vous  l'approprier 
comme  une  chose  qui  serait  à  vous,  mais  comme 
une  chose  qui  est  à  Dieu  ;  parce  qu'enfin  elle 
vous  sanctifiera  vous-même  par  l'usage  que  vous 
en  ferez. 

f.  17.  Animi  juvenum  confortari.  Animer  le 
courage  des  jeunes  gens;  c'est  ainsi  que  les  Hé- 
breux appellent  ordinairement  leurs  soldats. 

Statuerunt  dimicare,  et  confligere  fortiter, 
ut  virtus  de  negotiis  judicaret.  Le  grec  (1): 
Ils  résolurent  de  ne  pas  fortifier  leur  camp,  mais  de 


marcher  généreusement  à  l'ennemi,  et  de  combat- 
tre avec  valeur  pour  décider  l'affaire.  Le  syriaque  : 
Ils  résolurent  de  ne  pas  mettre  leur  confiance  dans 
les  troupes  rangées  en  bataille,  mais  de  se  munir 
de  courage,  et  d'exposer  leur  vie,  dans  celle  extré- 
mité, pour  leur  patrie  et  pour  le  temple. 

,v.  2  1.  Considerans  Machab^usadventum  mul- 
titudinis, etc.  Judas  Maccabée  avait  été  assuré 
de  la  victoire  par  la  vision  que  nous  venons  d'expli- 
quer, et  il  ne  pouvait  douter  du  succès  de  la 
bataille,  après  que  Dieu  même  le  lui  avait  déclaré. 
Cependant,  à  la  vue  de  cette  armée  formidable,  il 
étend  ses  mains  vers  le  ciel  :  H  invoque  le  Seigneur 
qui  fait  des  prodiges,  pour  rendre  un  hommage 
public  à  sa  toute-puissance,  et  reconnaître  devant 
son  armée  que,  s'il  gagnait  la  victoire,  ce  ne 
pourrait  être  que  par  la  vertu  de  Celui  qui,  seul, 
avait  le  pouvoir  de  faire  les  plus  grands  prodiges. 
Mais  il  nous  apprend  encore  par  son  exemple, 
que  toute  la  certitude  qu'on  pourrait  avoir,  comme 
lui,  de  la  victoire,  ne  doit  point  nous  dispenser  de 
la  demander  à  Dieu,  parce  qu'il  ne  veut  l'accor- 


(1)  A'.e'Yvojaav  [a»)  axpatonrjîcÛEoOat^Evvai'io;  oï  i^'fipinOa'. ,       xo'i  |j.e:à  niiT);  iuavopt'a;  i[in\a.niviti  xpîvai  xà  ^payu-aïa. 


II.  —  MACCABÉES.  —  XV.  -  MORT  DE   N1CANOR 


2*53 


2$.  Nicanor  autem,  et  qui  cum  ipso  erant, 
et  canticis  admovebant. 


cum    tubis 


26.  Judas  vero,  et  qui  cum  eo  erant,  invocato  Deo, 
per  orationes  congressi  sunt 

27.  Manu  quidem  pugnantes,  sed  Dominum  cordibus 
orantes,  prostraverunt  non  minus  triginta  quinque  mil  lia , 
prœsentia  Dei  magnifiée  delectati, 

28.  Cumque  cessassent,  et  cum  gaudio  redirent,  co- 
gnoverunt  Nicanorem  ruisse  cum  armis  suis. 

29.  Facto  itaque  clamore,  et  perturbatione  excitata, 
patria  voce  omnipotentem  Dominum  benedicebant. 

}o.  Prœcepit  autem  Judas,  qui  per  omnia  corpore  et 
animo  mori  pro  civibus  paratus  erat,  caput  Nicanoris, 
et  manum  cum  r.umero  abscissam,  Jerosolymam  perferri. 

}I.  Quo  cum  pervenisset,  convocatis  contribulibus,  et 
sacerdotibus  ad  altare,  accersiit  et  eos  qui  in  arce  erant; 

?2.  Et  ostenso  capite  Nicanoris,  et  manu»nefaria, 
quam  extendens  contra  domum  sanctam  omnipotentis 
Dei,  magnifiée  gloriatus  est, 

;?•  Linguam  etiam  impii  Nicanoris  praecisam  jussit  par- 
ticulatim  avibus  dari  ;  manum  autem  démentis  contra 
templum  suspendi. 

54.0mnes  igitur  casli  benedixerunt  Dominum, dicentcs  : 
Benedictus  qui  locum  suum  incontaminatum  servavit  ! 


25.  Cependant  Nicanor  marchait  avec  son  armée  au 
son  des  trompettes,  et  au  bruit  des  chants  qui  animaient 
au  combat. 

26.  Mais  Judas,  et  ceux  qui  étaient  avec  lui,  ayant  in- 
voqué Dieu,  combattirent  par  leurs  prières. 

27.  Ainsi,  priant  le  Seigneur  au  fond  de  leurs  cœurs, 
en  même  temps  qu'ils  chargeaient  les  ennemis  l'épée  à  la 
main,  ils  tuèrent  trente-cinq  mille  hommes,  se  sentant 
comblés  de  joie  par  la  présence  de  Dieu. 

28.  Le  combat  étant  fini,  lorsqu'ils  retournaient  pleins 
d'allégresse,  ils  reconnurent  que  Nicanor  était  tombé 
mort,  couvert  de  ses  armes. 

2Q.  Et  aussitôt,  ayant  jeté  un  grand  cri,  et  un  bruit  de 
voix  confuses  s'étant  élevé,  ils  bénirent  le  Seigneur  tout- 
puissant  dans  la  langue  de  leurs  pères. 

jo.  Judas,  qui  était  toujours  prêt  de  corps  et  d'esprit  à 
donner  sa  vie  pour  ses  concitoyens,  commanda  qu'on 
coupât  la  tète  de  Nicanor,  et  sa  main  avec  l'épaule,  et 
qu'on  les  portât  à  Jérusalem. 

ji.  Lorsqu'il  y  fut  arrivé,  il  fit  assembler  près  de  l'au- 
tel ses  concitoyens  avec  les  prêtres  ;  et  ii  appela  aussi 
ceux  qui  étaient  dans  la  forteresse. 

;:.  Et  leur  ayant  montré  la  tète  de  Nicanor,  et  cette 
main  détestable  qu'il  avait  osé  étendre  contre  la  maison 
sainte  du  Dieu  tout-puissant,  avec  tant  d'orgueil  et  d'in- 
solence, 

;;•  Il  commanda  qu'on  coupâtaussi  en  petits  morceaux 
la  langue  de  cet  impie  Nicanor. et  qu'on  la  donnât  à  man- 
ger aux  oiseaux,  et  qu'on  suspendît  vis-à-vis  du  temple 
la  main  de  ce  furieux. 

Î4.  Tous  bénirent  donc  le  Seigneur  du  ciel,  en  disant: 
Béni  soit  celui  qui  a  conservé  pur  son  temple  saint  ! 


COMMENTAIRE 


der  qu'à  nos  prières  et  à  nos  larmes,  lors  même 
qu'il  nous  l'accorde  par  un  pur  effet  de  sa  bonté 
et  de  son  amour. 

f.  2).  Cum  tubis,  et  canticis  admovebant.  Le 
grec  (1)  :  Au  son  des  trompettes  et  des  cantiques  de 
victoire.  C'est  la  propre  signification  de  >=aiav  ; 
mais  il  se  prend  en  général  pour  toute  sorte 
d'hymne  en  l'honneur  d'Apollon,  et  même  pour 
un  chant  joyeux  et  un  cantique  de  fête.  Grotius 
remarque  après  le  scoliaste  d'Aphtone,  qu'il  y 
avait  deux  sortes  de  raxi*v,  l'un  qu'on  chantait 
avant  le  combat,  pour  invoquer  Apollon,  et  l'autre 
après  la  victoire,  pour  lui  en  rendre  grâces  (2). 

f.  27.  Triginta  quinque  millia.  Josèphe  en 
met  seulement  trente  mille  (3).  L'orgueilleux 
Nicanor  était  vaincu,  malgré  le  nombre  et  la  bra- 
voure de  ses  troupes  ;  l'humble  prière  de  Judas  et 
des  siens,  répondant  au  son  des  trompettes  et  au 
chant  de  victoire  de  l'ennemi,  se  changeait  à  son 
tour  en  hymne  de  triomphe. 

f.  28.  Cum  redirent  cocnoverunt  Nicanorem 
ruisse.  Nicanor  avait  été  tué  au  commencement 
de  la  bataille,  et  ses  troupes  ayant  vu  leur  général 


mort,  avaient  jeté  leurs  armes,  et  avaient  pris  la 
fuite  (4).  Les  soldats  de  Judas  ne  connurent 
qu'après  le  combat  la  mort  de  Nicanor.  On  peut 
voir  dans  le  premier  livre  des  Maccabées,  quel- 
ques circonstances  qui  ne  sont  point  marquées 
ici. 

f.  29.  Patria  voce  omnipotentem  Dominum 
benedicebant.  Ils  bénirent  le  Tout- Puissant,  en  la 
langue  de  leurs  pères,  en  hébreu  ;  ou  bien,  ils 
chantèrent  des  cantiques,  composés  par  leurs 
ancêtres,  pour  rendre  grâces  à  Dieu  de  leur 
victoire. 

f.  30.  Caput  Nicanoris  et  manum  cum 
humero  abscissam.  On  coupa  Nicanorau-dessous 
des  épaules,  on  enleva  son  buste  (5);  sa  tête,  ses 
mains  et  ses  épaules  furent  apportées  à  Jérusalem  : 
on  sépara  sa  main  droite  avec  l'épaule,  du  reste 
du  buste,  et  on  la  pendit  à  un  poteau,  vis-à-vis 
du  temple  (6)  ;  la  tête  avec  le  reste,  fut  pendue 
aux  murailles  de  la  citadelle.  Suspendit  Nicanoris 
caput  in  summa  arce.  Verset  }<,. 

f.  34.  Omnes  igitur  cjeu  benedixerunt 
Dominum.  Le   grec  (7)  :   Élevant  les  mains  au 


(1)  Mexoc  aaXr.lvyyyv  ,  x*l  rcaiavcov  Tîpo-rjyov. 

(2)  flatâve;  ojo  i',aav  ,  évuàXto;,    oxs    rjp/ov,    ô;  xai   jxpô 
Xfjç  fjLa-^r) ;  Èyi'vsxo,    /.ai  ïxspoc,  o:s  ivlxcov, 

(J;  Joseph.  Anliq.  xu.  1", 
(4)  1.  Macc.  vu.  44. 


(5)T/)v  xoû  N'xavopoç  /.eaalrjv  â:roxe;j.dvxa;,  xai  xf|v 
yEîpa  awv  xcô  o\im-  Et  au  verset  75.  Trjv  xoù  Ntxâvopo; 
jxpoxopjv  Ix  xfj;  cupa;. 

(6)  1.  Macc.  vu.  47. 

(7)  O't  8s  Ttivxêç  it;  xôv  oùpavov  euXoYrjaav  xov  érti^*vr| 
Kupfov. 


254  IL-    MACCABÉES.  —  XV.-  FÊTE  ÉTABLIE  A  CETTE  OCCASION 


$Ç.  Suspendit  autem  Nicanoris  caput  in  summa  arce, 
ut  evidens  esset  et  manifestum  signum  auxilii  Dei. 

?6.  Itaque  omnes  communi  consilio  decreverunt  nullo 
modo  diem  istum  absque  celebritate  prasterire, 

37.  Habere  autem  celebritatem  tertia  décima  die 
mensis  Adar,  quod  dicitur  voce  syriaca,  pridie  Mardo- 
chœi  diei. 

j8.  Igitur  his  erga  Nicanorem  gestis,  et  ex  illis  tempo- 
ribus  ab  Hebrœis  civitate  possessa,  ego  quoque  in  his 
faciam  finem  sermonis. 

jo.  Et  si  quidem  bene,  et  ut  historias  competit,  hoc 
et  ipse  velim  ;  sin  autem  minus  digne,  concedendum  est 
mihi. 

40.  Sicut  enim  vinum  semper  bibere,  aut  semper 
aquam,  contrarium  est;  alternis  autem  uti,  delectabile  : 
ita  legentibus,  si  semper  exactus  sit  sermo,  non  erit 
gratus.  Hic  ergo  erit  consummatus. 


;ç.  Il  suspendit  aussi  la  tête  de  Nicanor  au  haut  de  la 
forteresse,  afin  qu'elle  fût  exposée  aux  yeux  de  tout  le 
monde,  comme  un  signe  visiole  du  secours  de   Dieu. 

J6.  Il  fut  arrêté,  d'un  commun  consentement,  qu'on  ne 
devait  point  laisser  passer  ce  jojr  si  célèbre  sans  en  faire 
une  fête  particulière  ; 

?7.  Et  qu'on  la  célébrerait  le  treize  du  mois  appelé 
Adar  en  langue  syriaque,  la  veille  de  celui  de  Mardo- 
chée. 

j8.  Telle  fut  la  fin  de  Nicanor,  après  laquelle  les  Hé- 
breux demeurèrent  les  maîtres  de  la  ville  sainte  ;  et  je 
finirai  aussi  par  là  ma  narration. 

J9.  Si  elle  est  bien,  et  telle  que  l'histoire  le  demande, 
c'est  ce  que  je  souhaite  moi-même  ;  si,  au  contraire,  elle 
est  écrite  d'une  manière  moins  digne  de  son  sujet,  c'est 
à  moi  qu'on  doit  l'attribuer. 

40.  Car  comme  on  a  de  l'éloignement  de  boire  toujours 
du  vin  ou  de  l'eau,  et  qu'il  paraît  plus  agréable  d'user  de 
l'un  et  de  l'autre  successivement  ;  aussi  un  discours  ne 
plairait  pas  aux  lecteurs,  s'il  était  toujours  si  régulier.  Je 
finirai  donc  ici. 


Ciel,  ils  bénirent  tous  le  Seigneur,  qui  leur  était 
apparu,  ou  qui  les  avait  secourus. 
f.  i,y.  Tertia  décima  die  mensis  Adar,  quod 

DICITUR   VOCE    SYRIACA,  PRIDIE    MaRDOCHjEI   DIEI. 

Le  mois  Adar  est  le  douzième  de  l'année  sainte, 
et  le  sixième  de  l'année  civile.  II  répond  en  partie 
à  février-mars  (1).  Le  treizième  jour  d'Adar  est  la 
veille  de  la  fête  des  Sorts,  dont  on  a  parlé  sur 
Esther  (2). 

f.  40.   ITA  LEGENTIBUS,  SI    SEMPER   EXACTUS    SIT 

sermo,  non  erit  gratus.  Aussi  un  discours  ne 
plairait  pas  au  lecteur,  si  le  style  en  était  toujours 
exact;  ou  plutôt  s'il  était  toujours  uniforme  et 
égal  à  lui-même  :  soit  qu'on  écrive  d'un  style 
sublime,  comparé  au  vin,  soit  qu'on  écrive  d'un 
style  plus  simple  et  moins  élevé,  comparé  à  l'eau; 
les  lecteurs  veulent  de  la  variété.  Le  grec  semble 


COMMENTAIRE» 

faire  un  autre  sens  (5):  De  même  qu'il  est  contraire 
à  la  santé  de  boire  du  vin  pur,  ou  de  l'eau  pure,  et 
que  pour  boire  agréablement,  il  faut  mêler  le  vin 
avec  Veau  :  ainsi  la  manière  d'écrire  que  j'ai  suivie 
est  propre  à  faire  plaisir  aux  lecteurs  qui  étudient 
l'histoire.  L'auteur  veut  dire  apparemment  que, 
pour  ne  pas  dégoûter  son  lecteur,  il  a  tâché  de 
régler  son  style  de  manière  qu'il  ne  soit  ni  trop 
pompeux,  ni  rampant.  Cette  excuse  ne  regarde 
que  le  style  et  n'atteint  pas  le  fond  des  choses, 
pour  l'inspiration,  qui  n'exclut  point  l'art  des 
paroles  et  du  style,  ni  l'usage  des  qualités  natu- 
relles ou  acquises,  dans  la  composition  des 
ouvrages  les  plus  sacrés.  Saint  Paul  reconnaît 
qu'il  n'est  pas  habile  dans  l'art  de  bien  dire, 
quoiqu'il  fût  fort  instruit  des  choses  (4)  :  Nam 
et  si  imperilus  sermone,  sed  non  scientia. 


(1)  Voyez  1.  EsJr.  iv.  7.  6et;  rjoù;,  nal  IrtiTSpjtfj  tf,v  -^aptv  âr.ozilî7.,  ouou  y.tx\    to  x*j; 

(2)  Eslk.  îx.  2j.  xaras/eurj;  xo'j  Xo'-fou  tsprcsi  là;  â/.oà;  tàiv  évTUY/avoivTiov  ifj 
(;)  KaBâirsp  yàp  o'ivov  zatafiova;  Ki'vêtv,  (îj^aûta;  os  zal  auviâÇct. 

Coup  7:àX[v,  JzoXi'rj.iov.  0"v  ôs  Tpôitov  (Avo;  iiSatt  cuyxepixs-  (4)  h.  Cor.  xi.  6. 


LIVRE    TROISIEME 


CHAPITRE    PREMIER 


i.  Philopator  autem,  ab  iis  qui  retulerant,  cognita  loco- 
rum  a  se  possessorum  abstractione  facta  ab  Antiocho, 
denuntians  omnibus  exercitibus  suis  et  pedestribus  et 
equestribus, 

2.  Et  sororem  Arsinoen  secum  assumens,  processit 
usqvie  ad  ea  quas  sunt  ad  Raphiam,  loca  ubi  castra  metati 
erant  qui  circa  Anliochum. 

j.  Theodoratus  autem  quidam  complere  insidias  co- 
gitans,  assumens  ex  commissis  suas  custodiae  armis  Pto- 
lemaicis  optima,  contulit  se  noctu  ad  Ptolemasi  taberna- 
culum,  tanquam  solus  interfecturus  eum  ;  et  in  hoc  dis- 
soluturus  bellum. 


4.  Hune  autem  deducens  quidam,  Dositheus  Drimyli 
dicebatur,  gent-re  judasus,  postea  autem  abjiciens  légi- 
tima, et  a  patriis  sanctionibus  alineatus,  ignobilem  quem- 
dam  decunibere  fecerat  in  tabernaculo  quem  contigit 
ferre  illius  supplicium. 

Ç.  Facto  autem  ingenti  praelio,  et  rébus  melius  succe- 
dentibus  Antiocho,  vehementer  Arsinoe  obambulans  ex- 
ercitus  hortabatur  cum  ejulatione.  et  lacrymis,  crinibus 
solutis,  ut  auxiliarentur  sibi  ipsis,  et  filiis.et  uxoribus,  au- 
dacter,  promittens  daturam  se  vincentibus,  cuique  duas 
minas  auri. 


6.  Et  ita  contigit  adversarios  in  conserendis  manibus 
perire,  multos  vero  etiam  captivos  fieri. 

7.  Compos  autem  factus  propositi  statuit  propinquas 
civitates  adiens  consolari.  Quod  cum  fecisset,  et  delu- 
bris  dona  tribuisset,  bono  esse  animo  subditos  fecit. 


8.  Cum  autem  Judasi  misissent  ad  eum  ex  senatu,  et 
senioribus,  salutaturos  eum  et  munera  portaturos,  et 
pro  his  quas  gesta  erant,  congratulaturos  ;  factum  est  ut 
magis  ille  cuperet  quam  citissime  ad  eos  venire. 


9.  Cum  autem  pervenisset  Hierosolymam,  et  sacrificas- 
set  maximo  Deo,  et  eorum,  quas  ordine  sequebantur,  ali- 
quid  ipsi  loco  fecisset, 

10.  Et  jam  advenisset  ad  locum,  et  sedulitate  et  dé- 
core stupefactus  esset,  admiratus  vero  etiam  sacras  aedis 
bonam  dispositionem,  cogitavit  consilium  capere  intro- 
eundi  in  templum. 

il.  His  autem  d'.centibus  non  licere  hoc  fieri,  quia  neque 
his  qui  ex  gente,  liceret  ingredi,  neque  omnibus  sacerdo- 
tibus,  sed  soli  omnium  praefecto  summo  sacerdoti,  et  hoc 
in  anno  semel  ;  ille  vero  nequaquam  acquiescebat, 


1.  Philopator  ayant  appris  par  ses  coureurs  qu'An- 
tiochus  lui  avait  enlevé  plusieurs  de  ses  forteresses, 
rassembla  toutes  ses  forces. 

2.  Et,  suivi  de  sa  sœur  Arsinoi,  il  s'avança  jusqu'à 
Raphia,  où  Antiochus  était  campé  avec  toute  son  armée. 

3.  Alors  un  certain  Théodore  songea  à  exécuter  le 
dessein  qu'il  avait  pris,  de  tuer  Ptolémée,  dans  l'espoir 
que  sa  mort  ferait  enfin  cesser  la  guerre.  Pour  cet  effet 
il  choisit,  parmi  les  troupes  que  ce  prince  lui  avait  con- 
fiées, celles  qui  lui  parurent  les  plus  propres  à  seconder 
son  entreprise,  et,  à  la  faveur  de  la  nuit,  il  s'avança 
jusqu'à  la  tente  de  Ptolémée. 

4.  Mais  Dosithée,  fils  de  Drimyle,  Juif  d'origine,  et 
qui  depuis  avait  renoncé  à  la  loi  et  à  la  religion  de  ses 
pères,  ayant  été  informé  des  complots  secrets  de  Théo- 
dote,  avait  fait  sortir  Ptolémée  de  sa  tente,  et  n'y  avait 
laissé  qu'un  homme  de  basse  condition  qu'ils  tuèrent  au 
lieu  de  ce  prince. 

<,.  Alors  on  se  battit  avec  vigueur  de  part  et  d'autre, 
mais  la  victoire  commençant  à  pencher  du  côté  d'An- 
tiochus,  Arsinoé,  les  cheveux  épars  et  les  yeux  baignés 
de  larmes,  courait  dans  tous  les  rangs,  et  conjurait  les 
soldats  de  combattre  généreusement  pour  leur  propre 
liberté,  et  pour  celle  de  leurs  femmes  et  de  leurs  enfants, 
leur  promenant  à  tous  deux  mines  d'or  par  tète,  s'ils  re- 
venaient victorieux. 

6.  Elle  eut  bientôt  remis  la  victoire  dans  son  parti,  et 
ses  ennemis  ou  périrent  dans  le  combat,  ou  furent  faits 
prisonniers. 

7.  Ptolémée,  échappé  avec  tant  d'avantage  aux  mauvais 
desseins  de  ses  ennemis,  crut  qu'il  devait  se  montrer  aux 
villes  voisines,  et  rassurer  par  ses  discours  ceux  que  la 
crainte  avait  pu  ébranler.  Il  fit  partout  des  présents  aux 
temples  des  dieux  et  releva  l'espérance  de  tous  ses 
sujets. 

8.  Les  ambassadeurs  des  Juifs  arrivèrent  en  ce  temps- 
là  ;  ils  étaient  chargés  de  présents,  et  venaient  au  nom 
de  toute  la  nation  le  féliciter  de  sa  nouvelle  victoire. 
Ptolémée  ne  les  eut  pas  plus  tôt  vus  à  sa  cour,  c,u'il  se 
sentit  enflammé  plus  que  jamais  du  désir  violent  de  passer 
en  Judée, 

9.  Et  sans  délibérer  davantage,  il  vint  à  Jérusalem,  il 
y  sacrifia  au  vrai  Dieu,  et  s'acquitta  de  tout  ce  que  la 
reconnaissance  et  la  sainteté  du  lieu  pouvaient  exiger 
de  lui. 

10.  Étant  ensuite  entré  dans  le  temple,  il  en  admira 
l'excellente  structure,  et  vit  avec  étonnement  l'art  et  la 
magnificence  qui  régnaient  partout.  Alors  la  curiosité 
s'irritant  de  plus  en  plus,  il  déclara  aux  Juifs  l'impatience 
où  il  était  de  pénétrer  jusque  dans  le  sanctuaire. 

11.  Ils  lui  représentèrent  en  vain  que  ce  lieu  auguste 
était  interdit  non  seulement  à  tous  ceux  de  leur  nation, 
mais  même  à  leurs  prêtres,  à  la  réserve  du  souverain 
pontife,  et  qu'encore  n'y  pouvait-il  entrer  qu'une  seule 
fois  l'année.  Toutes  les  raisons  furent  inutiles  contre  un 
désir  si  violent  ; 


2^6  III.  —  MACCABÉES.  -   I.  IMPIÉTÉ  DE  PTOLÉMÉE 

12.  Spretaque  lege  non  cessabat  provehere  se,  intran-  12.  Et  pendant  qu'on  lui  montrait  dans  les  livres  saints 

dum  omnino  dicens  ;  et  si  illi  privati  sunt  hoc  honore  ,  l'endroit  où  ;ette  loi  était  marquée,  il  s'avançait  vers  le 
me  non  oportet.  Et  interrogabat  quam  ob  causam  intran-  sanctuaire,  disant  avec  fierté  :  Qu'aucune  loi  ne  pour- 
tem  ipsum  in  quodcunque  fanum;  nemo  eorum  qui  ade-  rait  lui  en  défendre  l'entrée,  et  que  si  cet  honneur 
rant  prohibuisset.  n'avait  encore  été  accordé  à  personne  avant  lui,  il  était 

d'un   rang  à  devoir    l'obtenir.    Leur    ayant    ensuite    de- 
mandé pourquoi  on  ne    l'avait  empêché  nulle  part  d'en- 
trer dans  les  temples  des  dieux  , 
IJ.  Et  quidam  imprudenter  dixit   maie  hoc  ipsum  pro-  ij.  Et  quelqu'un    lui   ayant  répondu    hardiment  qu'on 

digiosum  esse.  Factum  autem  hoc  fuerit,  inquit,  quavis  l'aurait  dû  faire  :  Eh  bien!  dit-il,  puisqu'on  a  eu  quel- 
de  causa,  nonne  omnino  se  intraturum,  et  volentibus  ques  raisons  de  le  souffrir,  soit  que  vous  y  consentiez 
ipsis,  et  nolentibus  ?  ou  non,  je  vais  à  vos  yeux  satisfaire  ma  curiosité. 

14.  Cum  autem  sacerdotes  cum  omnibus  vestibus  pro-  14.  Alors  les  prêtres  revêtus  de  leurs  ornements  et  le 

cubuissent,  et  orarent  maximum  Deum  auxilium  ferre  visage  prosterné  contre  terre, prièrent  le  Dieu  tout-puis- 
imminenti  necessitati,  et  impetum  maie  irruentis  repri-  sant  de  les  secourir  dans  cette  extrémité  et  d'arrêter  les 
mère,  clamoreque  cum  lacrymis  templum  implerent  ;  qui  efforts  d'un  prince  orgueilleux.  Au  bruit  des  gémisse- 
in  civitate  remanserant,  turbati  exsilierunt,occultum  quid  ments  et  des  cris  dont  ils  remplissaient  le  temple,  toute 
esse,  quod  fiebat,  existimantes  :  la  ville  fut  troublée,  et,  dans  l'incertitude  de  ce  qui  pou- 

vait être  arrivé,  ils  accoururent  en  foule. 
1^.  Et   inclusas    virgines  in    thalamis,  cum  genitricibus  iî.  De  jeunes    filles,  sortant  des  appartements   où   on 

proruperunt,  et  cinere  et  pulvere  aspersis  capitibus,  les  tenait  auparavant  renfermées,  suivaient  leurs  mères, 
gemitibus  et  suspiriis  plateas  implebant.  et,  se    couvrant  la  tète  de  cendre  et  de  poussière,  elles 

faisaient  retentir  partout  d'horribles  clameurs. 
16.  Et  alias    vero,  nuper   astrictœ,  thalamos   ad  occur-  16.    D'autres,    nouvellement     mariées,    quittant    leur 

sum  assignatos,  et  congruum  pudorem  relinquentes,  demeure,  sans  consulter  la  pudeur  et  les  bienséances  de 
cursum  inordinatum  in  civitate  faciebant.  leur  sexe,  couraient  de  tous  côtés  par  la  ville. 

i".  Infantes  autem  filii,  et  cum  his    matres,  et  nutrices  17.  Les    mères  et   les    nourrices    abandonnaient    leurs 

defatigatas  aliter  et  aliter,  has  quidem  per  domos,  hae  enfants  encore  tendres,  les  unes  dans  leurs  maisons,  les 
vero  per  vias  irrevocabiliter  ad  eminentissimum  templum  a.itres  au  milieu  des  rues,  où  elles  n'avaient  plus 
congregabantur.  d'espérance  de   les    retrouver  ;  et    elles   accouraient  au 

temple. 

18.  Varia  autem  erat  eorum  qui    in  illud    conveniebant  18.  Et    là  toute  cette  multitude    rassemblée  sollicitait 
oratio  pro  his  quee  ab  illo  injuste  tentabantur.                          le  ciel  contre  lesenlreprises  d'un  prince  impie  et  orgueil- 
leux. 

19.  Cum  his  autem  nonnulli  excivibus  audaces  facti  non  19.  Quelques-uns  mêmes  plus  hardis  que  les  autres  se 
ferebant  illum  omnino  instantem,  et  propositum  suum  mirent  devant  lui  pour  l'empêcher  d'avancer,  criant 
implerestatuentem.  Clamantes  autem  se  ruituros  ad  arma,  qu'ils  étaient  résolus  de  prendre  les  armes  et  de  corn- 
et audacter  pro  patria  lege  obituros,  magnam  fecerunt  battre  généreusement  pour  la  défense  de  leur  loi,  aux 
in  loco  asperitatem,                                                                         dépens  mêmes  de  leur  propre  vie.  Ces  discours    n'ayant 

fait  qu'augmenter  le  désordre, 

20.  Vixque  a  senibus  et  presbyteris  cohibiti,  ad  20.  Les  anciens  et  les  prêtres  eurent  beaucoup  de 
eamdem  orationis  steterunt  stationem,                                        peine  à  les  contenir  ;  mais  enfin  ils  les  obligèrent   de  se 

retirer  dans  le  liau  où  l'on  fait  la  prière. 

21.  Et  turba  quidem,  ut  antea,  in  his  versabatur  orans.  21.  Et  pour  eux,  ils  environnaient  le  prince,  et  met- 
Seniores  autem,  qui  erant  circa  regem,  multis  modis  taient  tout  en  usage  pour  le  détourner  d'une  entreprise 
conabantur  superbam  ejus  mentem   a    suscepto    consilio       si  téméraire. 

removere. 

22.  Induratus  autem,  et  omnia  abjiciens,  jam  et    irnpe.  22.  Ptolémée    plus  aigri  par  toutes  ces  résistances,  fit 
tum  faciebat,  finem  putans  se  impositurum  rei  praedictas.       quelques  pas  pour  entrer,  croyant  qu'il  en  viendrait  aisé- 
ment à  bout. 

2î.  Hase  igitur  et  qui   circa  illum  erant,  spectantes,  eo  2).  Et  alors  les  officiers  mêmes    de  sa  garde  s'unissant 

se    converterunt,   ut    cum     nostris    invocarent    eum    qui  aux  Juifs,    priaient  ensemble   le    Dieu    tout-puissant    de 

omnem  potestatem    habet,  ut    his    qui  aderant   auxilium  regarder  son  peuple  d'un  œil  favorable,  et  de   ne    point 

ferret,  non  despiciens  iniquum  et  superbum  facinus.  laisser  impuni  un  crime  si  énorme  et  si  détestable. 

24.  Ex  densissima  autem   et   laboriosa    turbarum    col-  24.  Du  milieu  de    cette    multitude    effrayée  sortait    un 

lecta  vociferatione,  incomparabilis  quidam  erat  clamor.  cri  confus  et  épouvantable. 

2Ç.  Existimare  enim    licebat,  non    modo  homines,  sed  2\.  Toutes  les  parties    du  temple    parurent  emprunter 

etiam  muros,  et  totum  solum   resonare,  quasi  jam  omni-  des    voix  et    les  mêler  avec  celles  du  peuple,  pour  con- 

bus  tune  niortem  obeuntibus  pro  loci  contaminatione.  jurer  le  ciel  de  les  anéantir  plutôt  que  de  souffrir  l'abo- 
mination dans  le  lieu  saint. 


CHAPITRE   II 


i.  Alqui  summus  sacerdos  Simon,  ex  adverso  templi, 
flectens  genua,  et  manus  extendens  honeste,  taiem  ora- 
tionem  habebat  : 

2.  Domine,  Domine  rex  cœlorum  ,  et  dominator 
omnis  creatura»,  sancte  in  sanctis,  monarcha,  omnipo- 
tens,  intende  nobis  oppressis  ab  impio,  et  prophano,  qui 
praî  audacia  et  robore  intumuit  : 

J,  Tu  enim  qui  creasti  omnia,  et  omnia  imperio  tenes, 
Dominus,  justus  es  :  et  eos  qui  contumelia  et  superbia 
in  agendo  uluntur,  judicas. 

4.  Tu  illos,  qui  olim  iniquitatem  fecerunt,  inter  quos 
et  gigantes  fuerunt,  robore  et  audacia  freti,  perdidisti 
superinducens  eis  immensam  aquam. 

5.  Tu  superbiam  opérantes  Sodomitas,  conspicuos  ini- 
quitatibus  factos,  igné  et  sulphure  combussisti,  exen\- 
plum  posteris  constituens. 


6.  Tu  confidentem  illum  Pliaraonem,  qui  servitute 
oppresserat  populum  tuum  sanctum  Israël,  cum  variis 
et  multis  suppliciis  exanimasses,  notam  fecisti  potentiam 
tuam  : 

7.  In  quibus  declarasti  magnitudinem  fortitudinis  tuas  : 
et  cum  ille  persequeretur  cum  curribus,  et  turbarum 
multitudine,  obruisti  profundo  mari  :  eos  autem  qui  se 
tibi  crediderant,  qui  omni  creaturas  dominaris,  salvos 
traduxisti.  Qui  etiam  cognoscentes  opéra  manus  tuas  lau- 
daverunt  te  omnipotentem. 

8.  Tu  rex,  qui  creasti  interminatam  immensamque  ter- 
rain, elegisti  Civitatem  hanc,  et  sanctificasti  locum  hune 
ad  nomen  tibi,  nullius  rei  egenti  ;  et  mirum  in  modum 
glorificasti  apparitione  magnifica  commendationem  faciens 
ejus  ad  gloriam  magni  et  honorati  nominis  tui. 

0.  Et  diligens  domum  Israël,  pollicitus  utique  es,  si 
accidat  nobis  adversitas,  et  appréhendai  nos  angustia,  et 
venientes  ad  locum  hune  oremus,  exauditurum  te  oratio- 
nem  nostram. 

10.  Et  quidem  fidelis  es,  et  verax.  Quoniam  autem  saspe 
affiictis  patribus  nostris,  auxilium  tulisti  eis  in  humilitate, 
et  eruisti  eos  de  magnis  periculis  ; 

11.  Ecce  nunc,  sancte  rex,  propter  multa  et  magna 
peccata  nostra  opprimimur,  et  subjecti  sumus  inimicis 
nostris,  et  collabimur  in  infirmitatibus. 

12.  In  nostra  autem  calamitate  audax  hic  et  prophanus 
conatur  afficere  injuria  locum  hune  sanctum  super  ter- 
rain erectum  nomini  gloriae  tuas. 

1?.  Nam  habitaculum  quidem  tuum,  cœlum  cœli  est, 
incomprehensibile  hominibus  :  sed  quoniam  eligisti 
gloriam  tuam  in  populo  tuo  Israël,  sanctificasti  locum 
hune. 

14.  Non  ulciscaris  nos  in  horum  immunditia,  neque 
punias  nos  in  contaminatione  :  ne  glorientur  iniqui  in 
furore  suo,  neque  exultent  in  superbia  linguas  suas, 
dicentes  :  nos  conculcavimus  domum  sanctificationis, 
sicut  conculcantur  domus  abominationum. 


S-  B.  —  T.  XII, 


1.  Alors  Simon,  le  souverain  pontife,  se  prosterna  vers 
le  temple,  et  les  mains  élevées  vers  le  ciel,  il  fit  sa 
prière  en  ces  termes  : 

2.  Seigneur,  Seigneur,  roi  du  ciel,  souverain  maître  de 
toutes  les  créatures,  source  de  toute  sainteté,  Dieu 
tout-puissant,  jetez  un  regard  favorable  sur  votre  peuple 
qui  gémit  sous  l'oppression  d'un  roi  impie,  abominable, 
et  enflé  de  son  audacieuse  puissance. 

;.  Ce  vaste  univers  est  l'ouvrage  de  vos  mains,  vous  le 
gouvernez  par  de  justes  lois,  et  vous  punissez  avec 
rigueur  ceux  qui  font  de  l'orgueil  et  de  la  violence  la 
règle  de  leurs  actions. 

4.  Vous  avez  effacé  par  un  déluge  universel  l'impiété 
des  premiers  hommes,  et  avec  eux  périrent  aussi  les 
géants,  ces  hommes  audacieux  qui  avaient  mis  toute  leur 
confiance  dans  leur  propre  force. 

5.  Vous  avez  consumé  dans  des  torrents  de  soufre  et 
de  feu  les  habitants  de  Sodome,  ces  peuples  si  fameux 
par  leur  orgueil  et  leurs  honteuses  abominations  ;  et 
vous  avez  fait  de  cette  ville  un  exemple  redoutable  à 
tous  les  siècles,  de  la  rigueur  de  vos  jugements. 

6.  Vous  avez  armé  votre  bras  puissant  contre  le  pha- 
raon qui  opprimait  votre  peuple  sous  une  dure  servi- 
tude ;  et, après  avoir  frappé  de  plusieurs  plaies  ce  prince 
endurci, 

7.  Vous  l'avez  enseveli  dans  les  profonds  abîmes  de 
la  mer  avec  ses  chars  de  guerre  et  toute  son  armée  ; 
et  vous  avez  délivré  de  ses  mains  le  peuple  dont  vous 
étiez  toute  l'espérance,  et  qui,  dans  les  transports  de  sa 
juste  reconnaissance,  publia  par  des  cantiques  la  force 
de  votre  bras  tout-puissant. 

8.  Seigneur,  souverain  créateur  d=  ce  vaste  univers, 
vous  avez  choisi  cette  ville;  et  quoique^uffisant  à  vous 
même,  et  n'ayant  aucun  besoin  de  vos  créatures,  vous 
vous  l'êtes  consacrée,  vous  y  avez  paru  dans  tout  l'éclat 
de  votre  gloire,  et  vous  l'avez  rendue  célèbre  par  la 
sainteté  de  votre  nom  redoutable. 

9.  Vous  avez  aimé  la  maison  d'Israël,  et  vous  avez 
promis, que  quand  même  elle  se  serait  éloignée  de  vous, 
et  que,  pour  la  punir  vous  l'auriez  réduite  à  la  plus 
affreuse  misère,  vous  écouteriez  néanmoins  les  prières 
qu'elle  viendrait  vous  offrir  dans  ce  saint  temple. 

10.  Vous  êtes  fidèle  et  véritable  dans  vos  promesses, 
vous  avez  souvent  secouru  nos  pères  dans  leurs  afflic- 
tions ;  et,  touché  de  la  sincérité  de  leurs  larmes,  vous 
les  avez  délivrés  des  maux  extrêmes  qu'ils  souffraient. 

11.  Et  maintenant,  Seigneur,  Dieu  saint,  le  nombre  et 
l'énormité  de  nos  crimes  nous  ont  réduits  dans  une 
affreuse  servitude,  nos  ennemis  triomphent  de  notre  fai- 
blesse ; 

12.  Et  pour  comble  de  misère,  un  roi  hardi  et  mé- 
chant est  sur  le  point  de  profaner  le  seul  endroit  de  la 
terre  qui  soit  consacré  à  la  sainteté  de  votre  nom. 

i;.  Car  vous  habitez  au  plus  haut  des  cieux,  et  ce  lieu 
est  inaccessible  à  des  hommes  mortels.  Mais,  Seigneur, 
parce  que  vous  avez  établi  votre  gloire  au  milieu 
d'Israël,  vous  avez  choisi  cet  endroit  entie  tous  les 
autres  ; 

14.  Ne  vous  vengez  point  sur  nous  de  ces  abomina- 
tions, et  ne  faites  point  retomber  sur  votre  peuple  les 
châtiments  que  nos  ennemis  ont  mérités  ;  de  peur  qu'ils 
ne  se  glorifient  dans  leur  impiété,  et  que,  dans  l'excès  de 
leur  orgueil,  ils  ne  disent  :  Nous  avons  foulé  aux  pieds 
le  lieu  saint,  comme  on  foule  les  lieux  profanes. 

>7 


258 


III.  —  MACCABEES. 


II.   PRIERE  DU  GRAND  PRETRE  SIMON 


15.  Dele  peccata  nostra,  et  dissipa  errata  nostra,  et 
ostende  misericordiam  tuam  in  tempore  hoc.  Cito  préoc- 
cupent nos  miserationes  tuae  :  et  da  laudationes  in  ore 
prostratorum,  et  contritorum  animis,  faciens  nobis  pa- 
cem. 

16.  Hic  omnium  inspector  Deus,  et  ante  oranes  sanc- 
tus  in  sanctis,  exaudita  sancta  supplicatione,  eum  qui 
contumelia  et  audacia  valde  elatus  erat  flagellavit  ;  hinc 
et  inde  vibrans  eum  ut  arundinem  a  vento,  ita  ut  in  solo 
jam  inutilis,  et  membris  resolutus,  neque  loqui  posset, 
justo  implicatus  judicio. 


17.  Quamobrem  amici,  et  corporis  ejus  custodes,  eum 
celerem  et  acutam  vidèrent  eum  apprehendisse  pœnam, 
timentes  ne  et  vita  deficeret,  cito  illum  extraxerunt, 
ingenti  perculsi  timoré. 

18.  Sequenti  autem  tempore  eum  se  collegisset  nequa- 
quam  ad  pœnitentitm  venit,  castigatus  :  sed  eum  amara 
comminatione  discessit. 

19.  Reversus  autem  in  /Egyptum,  et  malitiamadaugens, 
per  compotores,  et  sodales  jam  indicatos  ab  omni  jus- 
tilia  semotos,  non  solum  in  innumerabilibus  libidinibus 
perseveravit,  sed  etiam  eo  temeritatis  processit,  ut 
infanda  in  locis  constitueret,  et  multi  ex  amicis  inten- 
dentes  in  régis  propositum  etiam  ipsi  sequerentur  illius 
voluntatem. 

;o.  Proposuit  autem  publiée  contra  gentem  dissemî- 
nare  vituperationem  :  et  in  turri,  quas  erat  ad  aulam, 
erigens  columnam,  insculpsit  scripturam,  neminem 
eorum  qui  non  sacrificarent,  ad  sacra  eorum  ingredi  , 
omnes  autem  Judasos  in  vulgi  descriptionem  et  servilem 
conditionem  abduci  ;  qui  autem  contradicerent,  vi  abla- 
tos,  vita  privan  : 


21.  Hos  autem  descriptos  signari  etiam  per  ignem  insi- 
gni  liberi,  hederas  folio,  ac  secedere  ob  jam  coercitam 
libertatem. 

22.  Verum  ne  omnibus  infensus  videretur,  subscripsit  : 
sin  autem  ex  eis  aliqui  elegerint  versari  eum  iis  qui 
secundum  Teletas  initiati  sunt,  hos  aequo  jure  cives  eum 
Alexandrinis  esse. 

2j.  Igitur  nonnulli  quidem  in  civitate  civilis  religionis 
gradus  honorantes  facile  seipsos  dederunt,  tanquam  ma- 
gnas cujusdam  gloriaî  participes  futuri  ex  ea  quas  lutura 
esset  eum  rege  conversatione. 

24.  Plerique  autem  generoso  animo  seipsos  confirma- 
verunt,  et  a  pietate  non  secesserunt  :  et  pecunias  pro 
vita  commutantes,  intrépide  conabantur  seipsos  liberare 
a  descriptionibus,  bona  autem  spe  fieti  perstabant,  auxi- 
lium  se  conseculuros  ; 

25.  Et  suos  illos,  qui  recesserant.  abominabantur,  et 
tanquam  hostes  gentis  judicabant,  et  communi  consuetu- 
dine  et  utilitate  privabant. 


iç.  Effacez  nos  péchés,  ne  vous  ressouvenez  plus  de 
nos  iniquités;  et,  dans  l'extrémité  où  nous  nous  trou- 
vons réduits,  faites  éclater  votre  miséricorde.  Hâtez- 
vous,  Seigneur,  de  nous  secourir,  et,  en  nous  rendant  la 
paix  et,  la  tranquillité,  donnez  à  ce  peuple  abattu  et 
humilié  de  justes  sujets  de  vous  offrir  leurs  louanges. 

16.  Alors  Celui  à  qui  tout  est  présent,  Dieu,  la  source 
de  toute  sainteté,  exauça  des  vœux  si  purs.  Il  étendit 
son  bras  vengeur  sur  ce  prince,  qui  allait  ajouter  à 
l'orgueil  de  son  cœur  l'insulte  et  l'emportement  ;  et 
l'agitant  avec  violence,  comme  un  faible  roseau  devenu 
le  jouet  du  vent,  il  le  renversa  par  terre  sans  force  et 
sans  mouvement  ;  en  sorte  qu'accablé  sous  la  main  de 
Celui  qui  le  frappait  avec  tant  de  justice,  il  ne  trouvait 
plus  de  voix  pour  se  faire  entendre. 

17.  En  même  temps,  ses  favoris  et  ses  gardes,  qui 
étaient  les  tristes  témoins  d'un  châtiment  si  subit,  crai- 
gnirent qu'il  n'expirât  à  leurs  yeux  ;  et,  saisis  eux-mêmes 
d'une  vive  crainte,  ils  l'emportèrent  de  ce  lieu. 

18.  Ptolémée  reprit  peu  à  peu  ses  sens,  et,  tout  brisé 
qu'il  était,  il  n'eut  aucun  regret  de  son  crime;  mais, 
en  se  retirant,  il  fit  d'horribles  menaces  à  tous  les  Juifs. 

19.  Lorsqu'il  fut  de  retour  en  Egypte,  il  mit  le  comble 
à  sa  malice,  et,  soutenu  de  ses  alliés  et  de  ses  amis,  qui 
ne  conna  ssaient  pas  plus  que  lui  la  justice  et  l'équité, 
il  s'abandonna  à  toutes  sortes  de  voluptés;  il  poussa 
même  l'audace  et  l'effronterie  jusqu'à  répandre  partout 
les  plus  noires  calomnies  contre  les  Juifs,  et  engagea 
ses  favoris  à  le  soutenir  par  de  lâches  artifices. 

20.  Ayant  donc  résolu  de  flétrir  la  nation  juive  par  une 
infamie  publique,  il  fit  élever  une  colonne  dans  la  tour 
qui  était  près  de  son  palais  ;  elle  portait  par  l'inscrip- 
tion que  personne  n'entrât  dans  les  temples  de  l'Egypte 
sans  y  sacrifier  aux  dieux;  qu'on  fît  un  dénombrement 
exact  de  tous  les  Juifs  qui  se  trouveraient  dans  son  em- 
pire, et  qu'ils  fussent  réduits  au  rang  des  esclaves  :  que 
si  quelqu'un  refusait  de  se  soumettre  à  cet  ordre,  il  fût 
mis  à  mort  ; 

ai.  Que  ceux  qui  seraient  enregistrés  fussent  marqués 
avec  un  fer  chaud  d'une  feuille  de  lierre,  pour  preuve 
de  leur  consécration  à  Bacchus,  et  de  leur  servitude. 

2:.  Mais  pour  ne  point  s'attirer  en  même  temps  la 
haine  de  toute  la  nation,  il  ajouta  que,  si  quelques-uns 
d'entre  eux  voulaient  se  faire  initier  aux  mystères  de  ses 
dieux,  ils  jouiraient  des  mêmes  privilèges  que  les 
citoyens  d'Alexandrie. 

2;.  Plusieurs  Juifs  renoncèrent  aisément. à  la  sainte 
alliance  pour  embrasser  la  religion  du  prince,  dans 
l'espérance  que  ce  changement  leur  ouvrirait  la  voie  à 
toutes  sortes  d'honneurs  et  de  dignités. 

24.  Mais  d'autres,  inébranlables  dans  leur  foi,  s'y  tin- 
rent courageusement  attachés,  et,  rachetant  leur  vie  de 
quelques  sommes  d'argent,  ils  tâchaient  de  se  délivrer 
d'une  honteuse  servitude  ;  ils  avaient  une  ferme  assu- 
rance que  le  ciel  combattrait  enfin  pour  eux. 

25.  Ils  regardaient  avec  abomination  et  comme  les 
véritables  ennemis  de  leur  nation  ceux  qui  les  avaient 
si  indignement  abandonnés,  et  ne  voulaient  avoir  avec 
eux  ni  liaison    ni  commerce. 


CHAPITRE  III 


I.  Quœ  cura  comperisset  impius,  adeo  iratus  est,  ut 
non  solum  iis  qui  ad  Alexandriam  succenseret,  sedetiam 
iis  qui  in  regione  gravius  adversaretur,  et  juberet  festi- 
nantes  congregare  omnes  simul,  et  pessima  nece  vitam 
ipsis  adimere. 


2.  His  autem  constitutif,  fama  inimica  pervulgabatur 
contra  ipsum  genus,  hominibus  consentientibus  ad  male- 
ficium,  occasione  data  ad  constitutionem,  tanquam  eos  a 
legitimis  prohibèrent. 

;.  At  Judasi  erga  régis  quidem  benevolentiam  et  fidem 
immutabilem  conservabant  ;jenerantes  autem  Deum,  et 
ex  ipsius  lege  rempublicam  gerentes  secessionem  in 
aliquibus  faciebant,  et  mutationem  ;  quam  ob  causam  ali- 
quibus  odiosi  videbantur.  Sed  justarumactionum  functione 
conversationem  ornantes,  omnibus  hominibus  probati 
extiterunt. 

4.  Igitur  ipsam  quidem  de  génère  in  omnibus  pervulga- 
tam  recte  agendi  rationem  alienigenœ  nequaquam  recen- 
suerunt,  verum  de  adorationibus  et  cibis  discrimen 
pervulgabant,  dicentes;  neque  régi,  neque  exercitibus 
lœderatos  esse  homines,  sed  esse  odiosos,et  majorem  in 
modum  negotiis  adversari  ;  et  non  mediocrem  excitarunt 
vituperationem. 

5.  Grasci  autem,  qui  erant  in  civitate,  nullis  injuriis 
atïecti  tumultum  inexpectatum  circa  homines  videntes,  et 
concursus  improvisos  fieri  ;  auxiliari  quidem  non  pote- 
rant  (tyrannica  enim  erat  constitutio)  : 


0.  Sed  consolabantur,  et  graviter  ferebant,  et  mutatum 
hase  iri  putabant  :  non  enim  sic  contemnet  talem  consti- 
tutionem, qui  nihil  ignoraverit. 

7.  Jam  vero  et  quidam  vicini,  et  amici,  et  qui  simul 
negociabantur,  secreto  quosdam  accersentes,  fidein 
dabant  contegendo,  et  omnem  diligentiam  ad  defen- 
sionem. 

8.  Igitur  ille  quidem  praesenti  prosperitate  exultans, 
et  non  considerans  maximi  Dei  potestatem,  putans  au- 
tem perpetuo  in  eodem  perseverare  consilio,  scripsit 
contra  eos  epistolam  hanc  : 

9.  Rex  Ptolemaîus  Philopator  iis  qui  per  ^Egyptum  et 
per  loca,  ducibus,  et  militibus,  gaudere  et  valere.  Valeo 
autem  et  ego  ipse,  et  res  nostrse. 


10.  Post  factam  nobis  in  Asiam  expeditionem,  quam 
ipsi  etiam  scitis,  quae  deorum  erga  nos  improviso  con- 
silio, et  fortitudme  etiam  nostra  secundum  rationem  ad 
optimam  finem  perducta  est,  putavimus  non  violentia 
lanceee,  sed,  œquitate,  et  multa  humanitate  indulgenter 
tractare  gentes,  quas  habitant  Ccelesyriam,  et  Phceni- 
cem,  ac  libenter  benefacere. 

11.  Et  cum  templis,  quas  sunt  per  civitates,  tribuisse- 
mus  reditus  multos,  venimus  etiam  Hierosolymam,  as- 
cendentes,  honorare  templum  scelestorum  illorum,  et 
nunquam  desistentium  ab  amentia. 


1.  L'impie  Ptolémée,  instruit  de  toutes  ces  choses, 
entra  dans  une  furieuse  colère  contre  les  Juifs  d'Alexan- 
drie, et,  s'irritant  encore  davantage  contre  ceux  qui 
étaient  répandus  dans  les  autres  endroits  de  l'empire,  il 
ordonna  qu'on  les  assemblât  tous  promptement  dans  un 
même  lieu,  et  qu'on  les  y  fit  mourir  par  les  supplices  les 
plus  redoutables. 

2.  Ces  ordres  ayant  été  donnés,  les  ennemis  des  Juifs 
profitèrent  de  ces  conjectures  si  favorables  à  leur  ani- 
mosité,  et  publièrent  partout  qu'ils  voulaient  s'opposer 
à  l'exécution  des  lois  qu'on  venait  de  faire  contre  leur 
nation. 

;.  Les  Juifs  cependant  étaient  inébranlables  dans 
l'obéissance  et  la  soumission  qu'ils  devaient  aux  puis- 
sances temporelles  ;  mais,  comme  ils  craignaient  Dieu  et 
qu'ils  cherchaient  à  se  conformer  en  toutes  choses  à  ses 
ordonnances,  ils  se  séparaient  et  s'éloignaient  des  enne- 
mis de  son  culte  ;  ce  qui  les  rendait  odieux  à  un  petit 
nombre  de  personnes,  pendant  qu'ils  forçaient  la  mul- 
titude d'admirer  l'innocence  et  la  pureté  de  leur  vie. 

4.  En  effet,  dans  les  bruits  que  leurs  ennemis  répan- 
dirent contre  eux,  ils  épargnèrent  toujours  leurs  mœurs 
et  n'attaquèrent  que  la  singularité  de  leur  culte  et  de  leur 
manière  de  vivre,  disant  que  c'était  une  nation  ennemie 
des  rois  et  des  puissances,  et  toujours  prête  à  troubler 
la  tranquillité  publique. 

<,.  Pour  les  Grecs  d'Alexandrie  qui  n'avaient  aucun 
sujet  d'inimitié  contre  les  Juifs,  ils  virent  avec  douleur 
l'orage  qui  se  formait  contre  eux  et  les  mouvements  qui 
allaient  hâter  leur  perte;  et,  dans  l'impuissance  où  ils 
étaient  de  les  secourir  sous  un  gouvernement  si  tyran- 
nique,  ils  venaient  compatir  à  leurs  malheurs  ; 

6.  Et  par  des  discours  pleins  de  consolations,  ils  leur 
faisaient  espérer  que  cette  entreprise  tomberait  d'elle- 
même,  et  que  Dieu  rendrait  inutiles  les  pernicieux  des- 
seins de  leurs  ennemis. 

7.  Leurs  voisins,  leurs  amis,  ceux  avec  qui  ils  avaient 
quelque  liaison  s'unirent  ensemble  ;  et,  après  en  avoir 
attiré  d'autres,  ils  promirent  tous  avec  serment  de  ne 
rien  négliger  pour  les  secourir. 

8.  Cependant  Ptolémée,  enflé  de  sa  fortune  présente, 
méprisait  la  présence  de  Dieu,  et,  persistant  toujours 
dans  la  résolution  de  se  venger  des  Juifs,  il  écrivit  cette 
lettre  contre  eux. 

9.  Le  roi  Ptolémée  Philopator,  aux  généraux  de  nos 
armées,  et  à  tous  ceux  qui  combattent  sous  leurs  ordres 
dans  l'Egypte  et  dans  les  autres  lieux  de  notre  empire, 
salut  et  prospérité.  Nous  jouissons  nous-mêmes  d'une 
santé  parfaite,  et  le  bonheur  nous  accompagne  en  toutes 
choses. 

10.  Après  que  nous  eûmesentrepris  l'expédition  d'Asie, 
commevousle  savez, et  que,  soutenu  du  puissant  secours 
des  dieux  et  de  la  valeur  de  nos  troupes,  nous  eûmes 
fait  réussir  cette  entreprise  selon  nos  désirs,  nous  ju- 
geâmes que,  pour  soumettre  les  peuples  de  Ccelé-Syrie 
et  de  Phénicie,  nous  n'avions  point  d'autres  armes  à 
employer  que  la  douceur,  l'humanité  et  les  bienfaits. 

il.  Et  après  avoir  offert  dans  tous  les  temples  nos 
vœux  et  nos  dons,  nous  formâmes  le  dessein  d'aller  à 
Jérusalem,  et  d'y  rendre  de  pareils  hommages  à  la  Divi- 
nité de  ces  hommes  perfides  et  insensés. 


2Ô0 


III.—  MACCABÉES.  —  III.   LETTRE  DE   PTOLÊMÈE 


12.  Illi  auterr.  verbo  quidem  nostram  suscipientes 
praesentiam,  re  autem  falso,  volentibus  nobis  introire  in 
templum  eorum,  et  decentibus  ac  pulcherrimis  donis 
honorare,  tumoribus  antiquioribus  agitati  prohibuerunt 
nos  ab  ingressu. 

15.  (Cum  inferiores  essent  nostris  viribus)  ob  eam 
quam  erga  omnes  homines  habemus,  humanitatem.  Suam 
autem  erga  nos  malevnlentiam  manifestam  facientes, 
quippe  soli  prorsus  gentium  contra  reges  et  beneficos 
suos  cervicem  erigentes,  nihil  legitimum  ferre  volunt. 


14.  Nos  autem  cum  horum  amentia  conversati,  et  cum 
Victoria  reversi,  et  in  ^Egypto  omnibus  nationibus  huma- 
niter  occurrentes,  prout  decebat,  fecimus. 

1Ç.  In  his  autem  erga  gentiles  eorum  oblivionem  inju- 
riarum  omnibus  notam  facientes,  propter  societatem,  et 
commissa  eis  antiquitus  cum  simplicitate  sexcenta  ne- 
gotia  aggressi  mutare,  voluimus  Alexandrinorum  etiam 
republica  eos  dignari,  et  participes  semper  sacerdotum 
constituere. 


16.  Illi  autem  in  contrariam  partem  accipientes,  et 
insitaimprobitate  honestum  repellentes,  perpetuo  autem 
ad  malum  proni,  non  solum  cum  ignominia  repudiarunt 
jus  civitatis  ;  sed  etiam  abominantur,  et  verbo  et  silentlo 
paucos  quosdam  ex  eis  erga  nos  légitime  affectos,  sem- 
per suspicantes,  ob  infamem  vitas  rationem  cito  nos 
eversuros  recte  facta. 

17.  Quamobrem  argumentis  etiam  probe  persuasi  hos 
omnibus  modis  contra  nos  maie  sentire,  et  providentes 
ne  forte  repentina  post  hac  turbatione  nobis  imminente 
hos  a  tergo  proditores,  et  barbaros  habeamus  hostes. 

18.  Jussimus,  simul  atque  allata  fuerit  epistola  hase, 
eadem  hora  eos  qui  habitant  cum  uxoribus  et  filiis,  cum 
coniumeliis  et  vexationibus  mittere  ad  nos  vinculis  ferreis 
undique  conclusos,  ad  tetram  et  infamem  inimicis  cor.ve- 
nientem  casdem. 

10.  His  enim  simul  punitis,  putavimus,  in  reliquum 
tempus  perfecte  nobis  res  in  bono  statu  et  optima  dispo- 
sitione  constitutum  iri. 

20.  Quicumque  autem  quempiam  Judœorum  texerit  a 
sene  usque  ad  infa"tem,  usque  ad  lactentes,  turpissimis 
tormentis  occidetur  cum  tota  domo  : 

21.  Qui  autem  indicare  posuerit,  eo  ipso  substantiam 
ejus  qui  incidit  in  pœnam  accipiet,  et  de  regali  argento 
drachmas  bis  mille,  et  libertatem  adipiscetur  et  coro- 
nabitur. 

22.  Omnis  autem  locus,  ubicunque  deprehensus  fuerit 
omnino  tectus  Judaeus,  invius  et  igné  combustus  fiât,  et 
omni  mortali  naturas  ad  omnia  inutilis  extet  in  sempi- 
ternum  tempus.  Et  formula  quidem  epistolae  sic  scripta 
est. 


12.  Ils  parurent  se  réjouir  à  notre  arrivée;  mais 
comme  leur  joie  n'était  point  sincère,  à  peine  nous 
fûmes-nous  avancés  pour  offrir  nous-mêmes  dans  le 
temple  les  riches  dons  que  nous  y  apportions,  que,  rap- 
pelant leur  ancien  orgueil,  ils  nous  en  défendirent  l'en- 
trée. 

ij.  Oubliant  cette  haute  puissance  où  nous  nous 
sommes  élevé  par  notre  humanité  envers  tous  les  hom- 
mes, ils  ne  dissimulent  plus  la  haine  qu'ils  ont  pour 
nous;  et,  comme  s'ils  étaient  les  seuls  maîtres  de  la 
terre,  ils  s'élèvent  avec  insolence  contre  les  rois  leurs 
bienfaiteurs,  et  ne  peuvent  souffrir  aucune  autorité  légi- 
time. 

14.  Outré  donc  de  tous  ces  excès,  nous  revînmes  en 
Egypte  pour  y  goûter  les  fruits  de  nos  victoires,  et 
nous  laissâmes  dans  tous  les  lieux  de  notre  passage  des 
marques  éclatantes  de  notre  bonté. 

iç.  Enfin,  pour  mettre  le  comble  a  notre  générosité 
envers  les  Juifs,  nous  leur  accordâmes  par  un  édit  le 
pardon  général  des  injures  passées,  tant  à  cause  des 
traités  faits  entre  eux  et  nous,  que  pour  la  sûreté  d'une 
infinité  d'affaires  qire  nous  leur  avions  confiées  avec 
trop  de  facilité  :  nous  ne  fîmes  pas  même  difficulté  de 
violer  en  leur  faveur  les  anciens  usages  de  cet  empire, 
en  les  associant  aux  privilèges  des  citoyens  d'Alexan- 
drie et  en  leur  faisant  part  du  sacerdoce  perpétuel. 

16.  Mais  eux  au  contraire,  par  une  méchanceté  natu- 
relle et  plus  forte  que  tous  nos  bienfaits,  ne  se  sont  pas 
contentés  de  rejeter  avec  mépris  le  droit  de  citoyens 
qu'on  leur  offrait.  Ils  regardent  même  avec  abomination 
ceux  de  leur  nation  qui  nous  sont  sincèrement  attachés, 
et  ils  se  flattent  que  les  crimes  dont  ils  nous  croient 
coupable,  arrêteront  enfin  le  cours    de  nos  prospérités. 

17.  Etant  donc  fortement  convaincus  qu'ils  ne  roulent 
que  de  mauvais  desseins  contre  nous,  et  pour  empêcher 
qu'au  premier  signal  de  révolte  nous  ne  trouvions  dans 
ces  hommes  également  traîtres  et  impies,  des  ennemis 
redoutables, 

i3.  Nous  vous  faisons  savoir  qu'aussitôt  que  vous 
aurez  reçu  ces  lettres,  vous  ajoutiez  les  tourments  à 
l'insulte,  et  que  vous  nous  les  envoyiez  chargés  de 
chaînes  avec  leurs  femmes  et  leurs  enfants,  afin  qu'ils 
périssent  par  une  mort  honteuse  et  proportionnée  à 
l'énormité  de  leurs  crimes. 

19.  Car  nous  espérons  que  leur  perte  assurera  pour 
toujours  le  bonheur  et  la  tranquillité  de  notre  empire. 

20.  Quiconque,  grand  ou  petit,  se  rendra  protecteur 
des  Juifs,  sera  puni  avec  toute  sa  maison  par  les  sup- 
plices les  plus  honteux. 

21.  Si  quelqu'un,  au  contraire,  vient  à  déceler  un  Juif  ; 
outre  la  confiscation  de  tous  les  biens  du  coupable,  il 
aura  déplus  avec  la  libertédeux  mille  drachmes  d'argent 
qui  lui  seront  payées  de  nos  trésors. 

22.  Toute  maison  où  l'on  trouvera  un  Juif  caché  sera 
détruite  par  le  feu  et  rendue  à  jamais  inutile  à  quel- 
que usage  que  ce  soit.  Tels  étaient  les  termes  de  la 
lettre  du  roi. 


CHAPITRE   IV 


i.  Ubicunque  autem  promulgatum  fuit  hoc  edictum  ; 
populare  convivium  constitutum  est  gentibus  cum  jubi- 
lationibus  et  gaudio,  tanquam  jam  antiquitus  indurata  in 
eorum  mente,  audacter  simul  se  prodente  inimicitia. 

2.  Judasis  autem  insanabilis  luctus  erat,  et  prorsus 
lugubris  cum  lacrymis  clamor,  gemitibus  undique  inflam- 
mato  ipsorum  corde,  gementibus  improvisam  repente 
sibi  constitutam  perniciem. 

j.  Quas  prasfectura,  aut  civitas,  aut  quis  omnino  habi- 
tatus  locus,  vel  quas  via?  planctu  et  gemitibus  super  his 
non  complebantur  ? 

4.  Sic  enim  acerbo  et  immili  animo,  a  ducibus  qui 
per  civitates  unanimiter  ejiciebantur,  ut  ad  eximia  sup- 
plicia quidam  etiam  ex  inimicis  ante  oculos  sibi  ponen- 
tes  communem  misericordiam,  et  considérantes  incer- 
tam  vitas  mutationem,  fièrent  miserrimam  eorum  expul- 
sionem. 

5.  Agebatur  enim  senum  multitudo  canitie  cooperto- 
rum,  ob  tarditatem  quas  ex  aatate,  pedibus  incurvis,  im- 
petu  violentas  ejectionis,  absque  ullo  pudore  abutentibus 
ad  citam  itionem. 

6.  Quae  autem  nuper  ad  vitas  communionem  conjuga- 
lem  subierant  thalamum  adolescentulas,  pro  delectatione 
translatas  ad  gemitus,  et  pulvere  unguentatam  consper- 
sas  comam,  aperte  autem  ductas  lamentationem  pro 
hymenaeis  unanimiter  incipiebant,  tanquam  laceratae  vexa- 
tionibus  alienigenis.  Vinctae  autem  populares  usque  ad 
ascensum  in  navim  trahebantur  cum  violentia. 

7.  Ipsiqae  horum  conjuges  laqueis  pro  coronis  impli- 
cati  cervicibus  cum  florida  et  juvenili  setate,  pro  con- 
vivio,  et  juvenili  negligentia  reliquos  nuptiarum  dies  in 
lamentis  agebant,  ad  pedes  jam  infernum  videntes  posi- 
tum. 

8.  Abducebantur  autem  ferarum  more  tracti  ferreo- 
rum  vinculorum  necessitatibus  :  hi  quidem  transtris 
navium  aflïxi  collis,  illi  autem  constricti  pedes  insolu- 
bilibus  compedibus,  prasterea  vero  desuper  densa 
tabula  disposita  a  lumine  exclusi,  ut  undique  obtene- 
bratisoculis,  vitam  insidiatorum  in  tota  navigatione  dege- 
rent. 

9.  His  autem  super  dictam  ratem  ductis,  et  naviga- 
tione confecta,  sicut  erat  sancitum  a  rege,  jussit  eos  in 
Hippodromo,  qui  est  ante  civitatem,  castrametari  ;  cu- 
jus  ingens  erat  spatium,  quique  ad  manifestum  oppro- 
brium  valde  erat  opportunus,  propositus  omnibus  qui 
pergebant  in  civitatem,  et  qui  ex  his  in  regionem  profi- 
ciscebantur  peregre  :  ut  neque  exercitibus  ejus  commu- 
nicarent,  neque  mûris  omnino  dignarentur. 

10.  Postquam  vero  id  factum  est,  cum  vidisset  eos 
qui  in  civitate  ejusdem  gentis  essent,  clam  egredientes 
frequentius  lugere  ignominiosam  fratrum  miseriam  ; 
iratus  jussit  et  his  simul  eodem  modo  diligenter  fieri, 
atque  illis,  nihil  minus  ullo  modo  habentibus  illorum 
supplicio  :  describi  autem  omne  genus  ex  nomine, 

11.  Ad  paulo  ante  demonstratam  operum  laboriosam 
servitutem,  tortos  autem  denuntiatis  tormentis  demum 
deleri  sub  unius  diei  tempus. 


1.  Dans  tous  les  lieux  où  ces  ordres  furent  publiés 
éclatait  la  joie  commune  par  des  festins  publics  et  des 
acclamations  générales,  et,  dans  la  licence  de  ces  fêtes, 
se  montrait  enfin  cette  haine  secrète  qu'on  nourrissait 
depuis  longtemps  contre  les  Juifs. 

2.  Pour  eux,  ils  étaient  dans  une  affreuse  désolation, 
et  déploraient  avec  les  larmes  les  plus  arriéres  et  les 
gémissements  les  plus  vifs  la  perte  iuévitable  de  leur 
nation. 

j.  Quelle  province,  quelle  ville,  quelles  places,  quels 
lieux  enfin  un  peu  connus  des  hommes,  ne  retentirent 
point  de  leurs  plaintes  et  de  leurs  gémissements? 

4.  Les  ordres  des  gouverneurs  s'exécutaient  partout 
avec  tant  de  barbarie  et  d'inhumanité,  que  plusieurs 
même  de  leurs  ennemis,  cédant  aux  sentiments  d'une 
compassion  naturelle,  et  frappés  d'une  vive  image  de 
l'instabilité  des  choses  humaines,  ne  pouvaient  s'empê- 
cher d'accuser  la  rigueur  avec  laquelle  on  les  chassait 
de  toutes  les  villes  pour  les  conduire  en  Egypte. 

Ç.  A  la  tête  de  toute  cette  multitude  rassemblée  mar- 
chaient des  vieillards  vénérables  qui,  malgré  leurs  corps 
appesantis  et  courbés,  étaient  obligés  de  hâter  leurs 
pas  pour  éviter  les  traitements  cruels  dont  on  ne  rou- 
gissait point  de  les  menacer. 

6.  De  jeunes  femmes,  enlevées  à  leurs  époux  parmi 
les  réjouissances  de  leur  mariage,  tombaient  tout  d'un 
coup  dans  un  deuil  affreux,  et  changeaient  en  d'horri- 
bles gémissements  leurs  chansons  et  leurs  cantiques. 
Elles  cachaient  sous  la  poussière  dont  elles  se  cou- 
vraient la  tête,  les  ornements  et  les  parfums  de  leurs 
cheveux,  et  toutes  liées  ensemble,  elles  suivaient  jus- 
qu'au rivage  des  conducteurs  barbares  et  inhumains. 

7.  Leurs  nouveaux  époux  quittaient  les  couronnes 
qu'ils  avaient  sur  leurs  têtes,  et,  chargés  de  chaînes 
pesantes,  ils  passaient  dans  l'attente  de  la  mort,  des 
jours  destinés  au  plaisir  et  à  la  joie. 

8. On  les  traînait  avec  violence  comme  des  bêtes  fauves 
jusqu'au  vaisseau  qui  devait  les  transporter, les  uns  étaient 
attachés  par  le  cou  aux  bancs  des  rameurs;  d'autres 
avaient  des  entraves  aux  pieds,  et,  pour  leur  ôter  jusqu'à 
la  vue  de  la  lumière  pendant  tous  les  jours  de  la  naviga- 
tion, on  mit  par-dessus  leurs  têtes  un  plancher  fort 
épais  ;  ils  furent  traités  comme  les  plus  scélérats  de  tous 
les  hommes. 

9.  Les  Juifs  étant  enfin  arrivés  en  Egypte,  le  roi  ne 
voulut  pas  qu'ils  eussent  aucune  communication  avec  les 
habitants  d'Alexandrie,  ni  même  avec  ses  troupes  ;  il 
ordonna  qu'ils  restassent  sous  des  tentes  dressées  dans 
l'Hippodrome,  qui  était  un  lieu  spacieux  et  très  favora- 
ble à  exposer  aux  yeux  de  tous  ceux  qui  entraient  dans 
la  ville  et  qui  en  sortaient,  la  vengeance  qu'il  allait  exer- 
cer sur  toute  cette  nation. 

10.  Ayant  ensuite  été  informé  que  quelques  Juifs 
d'Alexandrie  venaient  souvent  mêler  leurs  larmes  à 
celles  de  leurs  frères,  il  entra  dans  une  étrange  colère, 
et  commanda  qu'on  traitât  ces  derniers  comme  les 
autres,  qu'on  les  punît  des  mêmes  supplices,  et  qu'on 
fît  un  dénombrement  exact  de  toute  la  nation  des 
Juifs, 

11.  Ajoutant  que  la  servitude  à  laquelle  on  les  avait 
déjà  assujettis  ne  les  garantirait  pas  des  tourments  les 
plus  horribles,  jusqu'à  ce  qu'il  eût  enfin  le  plaisir  de  les 
voir  tous  périr  en  un  même  jour. 


2Ô2 


III. 


MACCABEES. 


IV.   RECENSEMENT  DES  JUIFS 


12.  Facta  igilur  est  horum  descriptio  cum  acerbo 
studio,  et  ambitiosa  assessione  a  solis  ortu  usque 
ad  occssum,  nondum  accipiens  finem  ad  dies  quadra- 
ginta. 

i{.  Magnifiée  autem  et  assidue  rex  gaudio  impletus 
convivia  ad  omnia  idola  celebrans,  errante  procul  a  veri- 
tate  mente,  et  prophano  ore,  muta  quidem,  et  quae  non 
possunt  ipsis  loqui,  neque  auxiliari,  laudans,  in  summum 
autem  Deum,  qua2  non  decebat,  loquens. 

14.  Post  prsedictum  autem  temporis  intervallum  nun- 
tiaverunt  scribaî  régi,  non  posse  ulterius  Judaeorum  des- 
criptionem  fieri  propter  immensam  eorum  multitudinem  : 
quippe  cum  adhuc  plures  essent  per  regionem,  hi  quidem 
adhuc  domi  consistentes,  illi  vero  et  per  loca,  ita  ut 
minime  id  prasstari  posset  ab  omnibus,  qui  super  /Egyp- 
tum  ducibus. 

H.  Cum  autem  durius  illis  minatus  esset,  tanquam, 
qui  muneribus  corrupti  essent  ad  machinationem  fugœ, 
contigit  ei  manifesto  de  hac  re  fidem  fieri,  dicentibus 
illis  cum  demonstratione  et  chartam  jam,  et  scriptorios 
calamos  quibus  utebantur,  defecisse. 

16.  Hoc  autem  erat  opus  invictae  e  cœlo  auxiliantis 
Judas  providentiae. 


12.  L'on  fit  donc  ce  dénombrement  avec  beaucoup 
d'exactitude  et  de  diligence,  et,  quoiqu'on  y  travaillât 
régulièrement  depuis  le  lever  du  soleil  jusqu'au  soir, 
il  ne  put  néanmoins  être  achevé  au  bout  de  quarante 
jours. 

1;.  Le  roi,  cependant,  dans  le  transport  de  sa  joie, 
faisait  des  festins  à  toutes  les  idoles,  et,  se  livrant  sans 
réserve  à  l'erreur  de  son  cœur,  il  donnait  des  éloges 
profanes  et  criminels  à  des  dieux  muets  et  incapables 
de  le  secourir:  pendant  qu'il  vomissait  d'horribles  blas- 
phèmes contre  le  Dieu  tout-puissant. 

14.  Enfin,  après  quarante  jours  de  travail,  les  secré- 
taires rapportèrent  qu'ils  ne  pouvaient  plus  suffire  au 
dénombrement  des  Juifs  à  cause  de  leur  nombre  prodi- 
gieux, les  uns  se  trouvant  répandus  dans  diverses  pro- 
vinces, les  autres  se  tenant  cachés  dans  les  maisons;  en 
sorte  que  la  chose  ne  s:rait  pas  même  possible  quand 
tous  les  intendants  de  l'Egypte  s'en  mêleraient. 

i<,.  Le  roi,  peu  satisfait  de  ces  raisons,  leur  fit  des 
menaces  sévères,  et  les  accusa  d'avoir  reçu  des  présents 
pour  soustraire  les  Juifs  à  sa  vengeance.  Cependant  il 
ne  douta  plus  de  leur  rapport  lorsqu'il  eut  vu  de  ses 
propres  yeux  leurs  registres  remplis  et  leurs  plumes 
entièrement  usées  ; 

\lj.  Ce  qui  sans  doute  était  l'ouvrage  de  cette  Provi- 
dence à  qui  rien  ne  résiste,  et  qui,  du  haut  du  ciel  où 
elle  réside,  faisait  éprouver  aux  Juifs  les  effets  de  sa 
protection. 


CHAPITRE  V 


1.  Tune  vocans  Hermonem  praspositum  elephantorum  i.  Ptolémée,  transporté  d'une  colère  furieuse  et  qui 
curas,  gravi  plenus  ira  et  bile,  omnino  immutabilis  jussit,  rien  n'était  capable  de  fléchir,  fit  appeler  Hertnon  qui  avait 
insequerti  die,  largis  pugillis  thuris,  et  vino  multo  puro  l'intendance  sur  cinq  cents  éléphants,  et  lui  ordonna  que, 
omnes  potare  elephantos,  qui  erant  numéro  quingenti  ;  le  lendemain,  l'on  donnât  à  ces  animaux  une  grand; 
et  efferatos  copiosa  potionis  praebitione  immittere  in  quantité  de  parfums  broyés  avec  du  vin  pur,  afin  qu'eni- 
occursum  mortis  Judasorum.  vrés  de  ce  breuvage  violent,  ils  se  tournassent  avec  plus 

de  fureur  contre  les  Juifs. 

2.  Ille  quidem  hase  prascipiens  vertit  se  ad  convivium,  2.  Il  se  rendit  ensuite  au  festin  auquel  il  avait  invité 
congregans  eos  maxime  ex  amicis  et  exercitu,  qui  infensi  ses  courtisans  et  les  généraux  de  ses  armées,  tous  enne- 
erant  Judasis.  Praepositus  autem  elephantorum,  Hermon,  mis  communs  des  Juifs,  hermon  se  hâta  d'exécuter  les 
quod  prasceptum  erat,  apte  perficiebat.  ordres  du  roi. 

;.  Ac  prasterea  ministri  ad  vesperam  exeuntes,    mise-  ?.  Il  envoya  des  gardes  à  l'entrée  de   la  nuit  pour  lier 

rorum    manus    ligabant,  et    reliquam     sibi    moliebantur  les  mains  de  tous  les  Juifs,  et  prit  à  leur  égard  toutes  les 

circa  ipsos  cautionem,  crepusculo  matutino   existimantes  sûretés   imaginables,    assuré  que   le    jour  suivant   serait 

simul  accepturam  gentem  terminum  mortis.  le  dernier  pour  toute  cette  nation. 

4.  Qui  autem   omni    protectione    destituti    videbantur  4.  Ht  en  effet,    leur    perte   paraissait    inévitable    dans 

gentibus  Judasi,  eo  quod  undique  premeret  eos  cum  vin-  l'impuissance  où  étaient  les  Juifs  de  rompre  les  fers  dont 

culis  nécessitas,  omnipotentem    Dominum,    et    omnipo-  on  les  avait  garrottés  ;  en  cet   état,  ils  ne  cessaient  tous 

tentias  dominantem  misericordem  Deum  suum,  et  patrem,  ensemble  d'invoquer  avec  des  larmes  amères  Celui  à  qui 

incessabili    clamore    omnes    cum     lacrymis   invocabant,  appartient  l'empire  et  la  puissance  sur   toutes  les   créa- 

orantes  ut  removeret  impium  quod   contra  se  consilium,  tures,  conjurant  ce  père  tendre,  ce  Dieu  de  miséricorde, 

et  ipsos  liberaret  cum   magnifica  prœsentia,    ex   ea  quas  de  rendre  inutiles  les  desseins  impies  qu'on  avait  formés 

ad  pedes  erat  in  promptu  morte.  contre  eux,  et  de  les    garantir  par   un    secours    éclatant 

d'une  mort  à  laquelle  ils  ne  pouvaient  échapper. 

Ç.   Ergo  horum  quidem  supplicatio  assidue  ascendebat  ?.  Leurs    prières    parvinrent    jusqu'au    ciel  :    Hermon 

in  cœlum  :  Hermon  autem,  cum  immites  elephantos  po-  avait  déjà  eu  soin  d'irriter  la   cruauté   des   éléphants  en 

tasset,  repletos  multa  praebitione  vini.et  thure  saturatos,  leur  faisant  boire  du  vin  mêlé  d'encens,  et  s'était   rendu 

diluculo  ad  aulam  affuit,  ut  haec  nuntiaret  régi.  au  palais  de  grand  matin  pour  en  rendre  compte  au  roi- 

6.  Hanc  autem  ab  asterno  tempore  creaturam  bonam  6.  Mais  Dieu  qui  tient  en  sa  puissance  le  repos  du 
in  nocle  et  die  concessaVn  ab  eo  qui  gratificatur  omnibus  jour  et  de  la  nuit,  ce  présent  plein  de  charmes  qu'il  a 
quibuscumque  ipse  voluerit,  somni  parlem  misit  ad  reeem:  fait  aux  hommes  avec  tant  de  libéralité,  envoya  à  Ptolé- 

mér  un  sommeil  doux  et  profond, 

7.  Et  jucundissima  et  profunda  detentus  operatione  7.  Qui  fit  avorter  ses  projets  funestes,  et  empêcha 
Domini,  injusto  quidem  proposito  valde  fraudatus,  et  ab  l'exécution  des  ordres  qu'il  avait  donnés  le  jour  précé - 
irrevocabili  cogitatione  magnifiée  deceptus.  dent. 

8.  Judasi  autem  prassignatam  horam  fugientes  sanctum  8.  Les  Juifs,  voyant  que  le  temps  marqué  pour  leur 
laudabant  Deum  suum  :  et  iterum  rogabant  eum  qui  facile  supplice  était  passé,  louaient  le  Dieu  de  toute  sainteté, 
reconciliatur,  ut  demonstraret  robustissimas  suae  manus  et  le  conjuraient  de  nouveau  de  faire  éclater  la  puissance 
potentiam  gentibus  superbis.  de  son  bras  aux  yeux  des  nations  orgueilleuses. 

9.  Cum  autem  média  jam  fere  esset  décima  hora,  qui  0.  Vers  le  milieu  de  la  dixième  heure  du  jour,  les 
ad  vocationes  erat  ordinatus,  confertos  videns  vocatos,  courtisans  étaient  assemblés  depuis  longtemps,  lorsqu'un 
pupugit  accedens  regem.  Et,  cum  vix  excitasset,  osten-  officier  entra  dans  la  chambre  du  roi,  et  l'ayant  éveillé 
dit  compotationis  tempus  jam  praslerire,  eam  quas  de  his  avec  assez  de  peine,  lui  représenta  que  l'heure  du  repas 
rébus  solet,rationem  faciens.  Quam  rex  reputans,  et  ver-  était  presque  passée;  le  roi  vint  aussitôt  dans  la  salle 
sus  ad  convivium  jussit  eos  qui  vénérant  ad  compotatio-  du  festin,  et,  après  avoir  fait  asseoir  tous  les  convives  eu 
nem  accumbere  coram  se.  sa  présence, 

10.  Quod  etiam  cum  factum  esset,  hortabatur  ut  epu-  10.  Il  les  exhorta  à  donner  le  reste  du  jour  aux  plaisirs 
lis  sese  dantes  praesentem  compotationis  partem  multum  et  aux  délices  de  la  table. 

célébrantes  in  ïaetitia  insumerent. 

11.  Longius  autem  procedente  convivio,  Hermonem  11.  Sur  la  fin  du  repas,  il  fit  venir  Hermon,  et  lui  de- 
accersens  rex,  cum  acerbis  minis  interrogabat,  quam  ob  manda  d'une  voix  terrible  et  menaçante  pourquoi  on  ne 
causam  permissi  essent  Judasi  praesentem  diem    supers-  l'avait  pas  encore  délivré  des  Juifs. 

tites  agere. 

12.  [îlo  autem  ostendente,  noctu,  quod  prasceptum  12.  Hermon  lui  ayant  répondu  qu'il  avait  employé 
erat,  se  ad  finem  perduxisse,  et  amicis  ei  testimonium  toute  la  nuit  à  exécuter  ses  ordres;  et  les  convives 
dantibus,  ille  deteriorem  Phalaride  crudelitatem  habens,  l'ayant  pleinement  justifié  sur  cela  :  Eh  bien,  dit  ce  roi 
dixit  :  Hodierno  somno  gratiam  habeant  illi.  plus  barbare  que  Phalaris,  si  un  trop  long  sommeil  leur 

a  été  favorable  et  est  cause  que  je  ne  suis  point  encore 

vengé, 

1?.  Sine  dilatione  autem    in   advenientem   diem   simili-  1  j.  Qu'on  prépare   de  nouveau  les  éléphants,  afin  que 

ter  para  elephantos  ad  scelestorum  Judasorum   perditio-  demain,  sans  aucun  délai,  ces  hommes  abominables  ces- 

nem.  sent  enfin  de  vivre. 


26-} 


II 


MACCABÉES.  —  V.   INCONSTANCE   DE  PTOLÉMÉE 


14.  Cum  dixisset  autem  rex,  ultro  omnes  qui  aderant 
cum  gaudio  simul  collaudantes,  in  propriam  domum 
unusquique  reversus  est.  Neque  tam  in  somno  insump- 
ser.int  tempus  noctis,  quam  in  excogitandis  omnis  gene- 
ris  ludibriis  in  eos  qui  miseri    videbantur. 

iç.  Nuper  autem  gallus  cantaverat  matutinus,  et  bes- 
tias  cum  armasset  Hermon, in  magno  porticu  concitabat- 
Turbaî  autem  quae  in  civitate  convenerant  ad  maxime 
miserabile  spectaculum,  expectantes  auroram  cum  avi- 
ditate. 

16.  Judasi  autem  ad  invisibile  tempus  animo  suspensi 
lacrymosa  supplicatione  in  canticis  luctuosis  tendentes 
manus  in  crclum  orabant  summum  Deura,  ut  rursus  ipsis 
auxiliaretur  brevi. 

17.  Nondum  autem  solis  radii  disseminabantur,  et  rege 
amicos  admittente,  Hermon  adstans  vocabat  ad  exitum, 
ostendens  propositum  régis  in  promptu  esse. 

18.  1 1 le  autem,  cum  percepisset,  et  obstupuisset  super 
iniquo  exitu,  ignoratione  prorsus  detentus  interrogabat 
quodnam  negotium  esset,  pro  quo  id  ei  cum  festinatione 
confectum  esset.  Hoc  autem  erat  opus  omnium  domi- 
nantis  Dei,  eorum  quae  antea  ipsi  excogitata  erant,  obli- 
vionem  in  mentem  immittentis. 

19.  Hermon  autem  suggessit,  et  omnes  amici,  bes- 
tias,  et  exercitus  paratos  esse,  o  rex,  juxta  tuum  instans 
propositum. 


20.  Ille  autem  super  his  quae  dicta  erant,  repletus  bile, 
eo  quod  omnis  ejus  de  his  cogitatio  per  Dei  providentiam 
dissipata  esset,  intuens  cum  minjs  dixit  : 

21.  Si  tibi  parentes  essent,  aut  filiorum  fœtus  :  hune 
bestiis  ferocibus  apparasses  copiosum  cibum  pro  incul- 
patis,  et  qui  majoribus  meis  perpetuam  firmam  fidem 
eximie  praestiterunt,Judaeis  ?  atqui,  nisi  intercederet  com- 
munis  educationis  amor,  et  utilitatis  ratio,  vita  pro  his 
privatus  esses. 


22.  Ita  Hermon  improvisam  et  periculosam  subiit 
comminationem,  et  aspectu  et  vultu  demissus  fuit.  Unus- 
quisque  autem  amicorum  mœste  tabescens,  eos  quicon- 
gregati  erant,  dimiserunt  unumquemque  ad  proprium  ne- 
gotium. 

25.  At  Judasi,  cum  audissent  ea  quae  a  rege,  prsesentem 
Deum,  et  regem  regum  laudabant,  hoc  etiam  ipsiusauxi- 
lium  assecuti. 

24.  Verum  secundum  has  ipsas  leges  rex  iterum  cons- 
tituens  convivium,  hortabatur  ad  lastitiam  se  converte- 
rent.  Accersito  autim  Hermone  cum  minis  dixit  ;  quo- 
ties  tibi  de  his  ipsis  praecipiendum  est,  infelicissime  ? 
Elephantos  adhuc  etiam  nunc  arma  in  crastinum  ad  Ju- 
dasorum  perditionem. 

25.  Cognati  autem,  qui  simul  discumbebant,  incons- 
tantem  illius  mentem  admirantes,  proferebant  haec  :  rex, 
usquequo  nos  tanquam  stolidos  pertentas,  praecipiens 
jam  tertio  illos  deleri  et  iterum  in  rébus  ipsis,  mutatione 
dissolvens  ea  quas  tibi  décréta  sunt  ? 

26.  Quamobrem  civitas  propter  expectationem  tumul- 
tuatur,  et  plena  coitionum,  jam  etiam  periciitatur  ssepe 
diripi. 

27.  Quocirca  rex  in  omnibus  Phalaris  impletus  stolidi- 
tate,ei  factas  in  se  ad  visitationem  Judseorum  mutationes 
animi  pro  nihilo  ducens, 

28.  Impium  confirmavit  juramentum,  statuens  hos  qui- 
dem  sine  dilatione  mittere  in  infernum,  genibus  et  pedi- 
bus  (erarum  cruciatos  :  exefeitu  autem  ducto  contra  Ju- 
daeam,  solo  illam  ajquaturum  igné  et  hasta  velociter,    et 


14.  Tous  ceux  qui  étaient  présents  applaudirent  aux 
discours  du  roi,  et  chacun  se  retira  chez  soi,  moins  pour 
s'y  livrer  au  sommeil,  que  pour  employer  le  temps  qui 
leur  restait  à  imaginer  de  nouveaux  genres  d'insultes  et 
d'outrages  contre  ce  peuple  malheureux. 

iç.  Au  chant  du  coq,  Hermon  avait  déjà  rangé  ses 
éléphants  sous  de  vastes  galeries;  toute  la  ville  accou- 
rait en  foule  et  attendait  avec  impatience  que  le  jo-ir 
parût   pour   jouir    de  cet  horrible  spectacle. 

16.  Les  Juifs,  dans  le  peu  de  temps  qui  leur  restait, 
levaient  les  mains  vers  le  ciel,  et, par  des  torrents  de  lar- 
mes et  les  gémissements  les  plus  vifs,  ils  conjuraient  le 
Dieu  tout-puissant  de  leur  accorder  encore  un  prompt 
secours. 

17.  Le  jour  commençait  à  paraître  et  les  grands  avaient 
été  introduits  dans  l'appartement  du  roi,  lorsque  Her- 
mon vint  avertir  qu'il  était  temps  de  sortir  pour  se  pla- 
cer, et  qu'on  allait  exécuter  les  ordres  du  roi. 

18.  Ptolémée,  surpris  de  voir  sortir  tout  le  monde 
avec  tant  d'ardeur  et  de  précipitation,  en  demanda  la 
cause  a  Hermon  ;  car  il  ne  se  ressouvenait  plus  des  or- 
dres qu'il  lui  avait  donnés  le  jour  précédent,  et  Dieu, 
par  un  effet  de  sa  puissance,  avait  elfacé  de  la  mémoire 
de  ce  prince  tous  les  desseins    formés    contre    les  Juifs. 

19.  Alors  Hermon  et  tous  les  grands  de  la  cour  ré- 
pondirent au  roi  qu'on  avait  disposé  les  éléphants  et 
toutes  les  autres  choses  nécessaires  pour  le  supplice  des 
Juifs,  selon  le  vif  désir  qu'il  avait  témoigné  en  avoir  le 
jour  précédent. 

20.  Alors  le  roi,  changé  tout  d'un  coup  par  une  puis- 
sance invisible,  entra  dans  une  furieuse  colère  contre 
Hermon,  et  lui  dit  : 

21.  S'il  eût  été  question  du  supplice  de  quelques-uns 
de  vos  enfants  ou  de  vos  parents,  eussiez-vous  excité 
les  éléphants  avec  autant  de  fureur  que  vous  l'avez  fait 
aujourd'hui  contre  les  Juifs,  qui  ont  toujours  eu  pour 
mes  prédécesseurs  une  fidélité  inviolable?  Sachez  donc 
que,  sans  les  services  que  vous  m'avez  rendus,  et  les  liens 
étroits  qu'une  éducation  commune  a  formés  entre  vous 
et  moi,  je  vous  ferais  mourir  en  leur  place. 

22.  Hermon  fut  extrêmement  troublé  de  ces  menaces 
auxquelles  il  s'attendait  si  peu,  et  les  grands  de  la  cour 
s'étant  retirés  tristes  et  confus  de  devant  le  roi,  ordon- 
nèrent à  tout  le  peuple  de  retourner  chacun  à  leurs  oc- 
cupations ordinaires. 

2;.  Les  Juifs  n'eurent  pas  plutôt  appris  ce  qui  s'était 
passé,  que  tous,  de  concert,  ils  bénirent  le  Dieu  sou- 
verain qui  les  avait  délivrés  d'une  manière  si  écla- 
tante. 

24.  Quelques  jours  après,  Ptolémée  donna  un  second 
festin,  et,  après  avoir  exhorté  les  convives  à  se  réjouir, 
il  fit  appeler  Hermon,  et  lui  dit  d'un  ton  menaçant  :  In- 
digne serviteur,  quand  enfin  respecterez-vous  mes  or- 
dres ?  que  demain  donc,  sans  différer,  les  éléphants 
soient  en  état  de  me  délivrer  des  Juifs. 

2').  Ceux  qui  étaient  à  table  avec  le  roi,  indignés  de 
ces  fréquentes  irrésolutions,  lui  parlèrent  en  ces  termes: 
O  roi,  jusques  à  quand  nous  traiterez-vous  comme  des 
gens  sans  raison  ;  c'est  la  troisième  fois  que  vous  vou- 
lez la  perte  des  Juifs,  et,  chaque  fois,  changeant  de  sen- 
timents, vous  révoquez  ces  premiers  ordres. 

26.  Cependant  toute  la  ville  est  troublée  dans  l'attente 
de  ce  qui  arrivera,  et  les  fréquentes  assemblées  (ont 
craindre  pour  elle  les  derniers    malheurs. 

27.  Alors  ce  roi  rempli  de  la  fureur  de  Phalaris,  sans 
écouter  davantage  ce  que  la  pitié  pouvait  lui  suggérer 
en  faveur  des  Juifs  qu'il  avait  résolu  de  perdre, 

28.  Promit  par  un  serment  irrévocable  qu'il  les  ferait 
tous  périr  sous  les  pieds  des  éléphants;  que,  retournant 
ensuite  en  Judée,  il  mettrait  tout  à  feu  et  à  sang  ;  qu'il 
détruirait  le  temple  dont  on  lui    avait    défendu    l'entrée, 


III.—  MACCABÉES.  —  V.  -   DÉSESPOIR  DES  JUIFS                         265 

invium  illorum  nobis  templum  igné  cito  prostraturum,  et  et  qu'il   empêcherait  qu'on  y  offrit  davantage  des    sacri- 

ab  i II o  sacrificantibus  vacuum  facturum.  fices. 

29.  Tune  lœti  discedentes  amici  et    cognati,    cum  fide  29. Les  courtisans  se  retirèrent  très  satisfaits  de  ce  dis- 

disposuerunt  exercitus  opportunissimis  locis  civitatis  ad  cours,  et,  de  ce  pas,  ils  allèrent  placer  dans  les  endroits 

custodiam.  les  plus  commodes  de    la  ville  des  troupes  capables  d'y 

maintenir  la  tranquillité  et  le  bon  ordre. 

;o.  Elephantorum  autem  prœpositus,  cum  feras,  quasi  ?o.  Hermon,  de  son  côté,  employa   les   breuvages    les 

ut  ita  dicam,  ad  insanam  habitudinem  adduxisset,  odora-  plus  parfumés    et   les   plus  violents    pour   augmenter  la 

tissimis  potionibus  vini  cum  thure  misti  horribilibus  prse-  férocité  naturelle  des   éléphants,  et  voyant  que  le  peuple 

parationibus    praeparatas,    circa    auroram,    civitate    jam  avait  prévenu  l'aurore  pour  s'assembler  à  l'Hippodrome, 

turbis    innumerabilibus   ad     Hippodromum    referta,    in-  il  vint  au  palais,  et  engagea  le    roi    à   voir  enfin  ce  qu'il 

gressus    aulam,  ad    id    quod   propositum   erat,    incitavit  avait  désiré  avec  tant  de  passion, 
regem. 

ji.  Ille  autem  gravi    ira   impletus    impium    cor,    omni  ;i.   Ptolémée,  le  cœur  gonflé  de  colère,  suivit  les  élé- 

mole  cum  leris  exiliit,  volens  immiti  corde,  etiam  pupil-  phants  dans  l'Hippodrome,  pour  y  donner  à  sa  cruauté, 

lis  oculorum  spectareœrumnosam  et  miscram  eorum  qui  dtns   la  ruine   de    tout    un    peuple,   un  spectacle    plein 

jam  dicti  sunt,  subversionem.  d'horreur  et  de  barbarie,  digne  enfin  de  son  impiété. 

J2.  Ut  autem  elephantorum  exeuntium    circa    portam,  52.   Quand    les  Juifs   aperçurent    l'horrible   poussière 

et  subsequentis  armati  exercitus,   et    multitudinis    euntis  qu'excitait  en  l'air  le  concours   d'éléphants,  de  gens  de 

pulverem   viderunt,   et   gravisonum  tumultum    audierunt  guerre    et    de    spectateurs,    ils    se    crurent   au   dernier 

Judaei,  ultimum  îllum    vitse   momentum   finem    sibi    esse  instant  de  leur  vie,  et  à  la  fin  de  leur  triste  attente, 
putantes, 

jj.  Miserrimre  expectationis,  ad  miserationem  et  gémi-  55.  Ainsi,  touchés  d'une  compassion   mutuelle,   et  gé- 

tus  conversi,  osculabantur  se  invicem  complicati  cogna-  missant  sur  leur  disgrâcecommune,  ils  embrassaient  leurs 

tis,  super  colla  procidentes,  parentes   pueris,   et   matres  proches  ;    les    pères,    les  mères,  les  enfants,  s'embras- 

puellis,  saient  pour  la  dernière  fois,  fondant  tous  en  larmes  ; 

J4.  Alias  autem  nuper  genitos  ad    ubera    habentes    in-  54.  Quelques   mères   présentaient  à  leurs  enfants  nou- 

fantes  ultimum  sugentes  lac.  vellement  nés  une  nourriture  dont  ils  allaient  être  bientôt 

privés.  Elles   cessèrent  soudain, 

jç.  Verumtamen  et  quse  sibi   antea  prasbita    essent  de  55.  Car  tous    se   rappelant    ce  que   le   ciel    avait  déjà 

ccelo,  auxilia,  conscii,pronos  unanimiter  se  projicientes,  fait   en  leur    faveur,  se  prosternèrent  contre  terre, 
et  separatis  infantibus  ab  uberibus, 

56.  Exclamaverunt    voce  magna  valde,  omnis  potentiae  ;6.  Et  par  des  cris  éclatants,  ils  conjuraient    le    Dieu 

Dominum  suppliciter  orantes,  ut  ipsorum  cum  prajsentia  tout-puissant  d'avoir  compassion  de  l'état  où   ils  étaient 

miseraretur,  qui  jam  ad  portas  inferni  essent.  réduits,  et  de  les  tirer  des  portes  du   tombeau. 


CHAPITRE    VI 


i.  Eleazarus  autem  quidam,  vir   insignis,  ex  iis,  qui  de  i.  Alors  un  prêtre  nommé  Eléazar,  également  respec- 

regione,  sacerdotibus,  in  senio   jam    œtatem    sorlitus,  et  table  par  son  grand  âge  et  par  toutes   sortes  de   vertus, 

omni  virtute  ad  vitam  pertinente  ornatus,eos  qui  circa  se  fit  cesser  les   cris  des    vieillards    qui  l'environnaient,  et 

cohibens  presbyteros  ab  invocando  sancto  Deo.precatus  s'adressant   au    Dieu    tout-puissant,  il    le    pria    en    ces 

est  haec  :  termes  : 

2.  Rex    magnipotens,  Altissime,  omnipotens  Deus,  qui  2.  Souverain    monarque   du   ciel,  Dieu    tout-puissant, 

creaturam  omnem  in  miserationibus  gubernas,  respice  in  qui  gouvernez  tout  l'univers  avec  tant  de  bonté,  Père  de 

semen  Abraham,  in   filios   sanctificati  Jacob,  sanctificalae  miséricorde,  regardez  favorablement  la  race  d'Abraham, 

portionis   tuae  populum  in    peregrina    terra    peregrinum  les   enfants   du    juste  Jacob,  ce  peuple  choisi,  qui  a  été 

injuste  pereuntem,  pater.  transporté  dans  une  terre  étrangère,  où  il  est  prêt  à  suc- 
comber sous  l'iniustice  de  ses  ennemis. 

h   Tu    Pharaonem    abundantem    curribus,  olim    hujus  5.  Vous  avez  signalé  autrefois  votre  puissance  en  faveur 

/Egypti  Dominum  elatum  iniqua  audacia,  et  lingua  magni-  d'Israël  dans  ce  même  empire,  et   vous  avez  puni  un  roi 

loqua  cum  superbo  exercitu    demersos  ponto   perdidisti  superbe,  cruel    et   endurci,  en    l'ensevelissant   sous    les 

ostenso  lumine  misericordiœ  generi  Israël.  eaux  avec  son  armée  et  ses  chars  de  guerre. 

j.  Tu  innumerabilibus  exercitibus   exultantem   Senna-  4.  Vous  avez  Irappé  Sennachérib,  qui  avait  mis  sa  con- 

cherib  gravem  Assyriorum  regem,  qui    hasta    universam  fiance  dans  le  nombre  de  ses  soldats,  et  qui,  après  avoir 

jam  subjugarat  terram,  et  elatus  super  sanctam  civitatem  soumis  presque  toute  la  terre,  osa  dans  son  orgueil  blas- 

tuam  gravia    loquebatur  fastu,  et    audacia,  Domine,  fre-  phémer  contre  la  ville  sainte,  et  vous  en   avez   fait    aux 

gisti,  manifesto  ostendens  gentibus  multis  potentiam  yeux  des  nations  un  exemple  terrible  de  vos  vengeances, 
tuam. 

ç.  Tu   très  illos,  qui   in  Babylonia,  socios,  qui    sponte  <,.  Vous  avez  versé  une    douce  pluie  sur    la  fournaise 

animam  igni   dederant,  ne  servirent  vanis,  ignitum    irro-  de  Babylone,  et    en  avez    fait  sortir  sans   aucun  mal  ces 

rans  caminum  liberasti  usque  ad  capillum  illassos,  flamma  trois  jeunes  hommes  qui  y  étaient  entrés  avec   joie  pour 

jmmissa  in  omnes  adversarios.  y  mourir,  plutôt  que  de  sacrifier  aux   idoles  ;  mais  vous 

avez  ordonné  aux  flammes  de  se  répandre  contre  les 
ennemis  de  votre  nom. 

6.  Tu  calumniis  invidias  per  terram  leonibus  projectum  0.  Vous  avez  retiré  de  la  fosse  aux  lions  Daniel,  votre 
feris  cibum  Danielem  in  lucem  revocasti  incolumem,  et  serviteur,  que  l'envie  y  avait  fait  descendre  pour  servir 
in.  ventre  ceti  in  mari  educati  dure  liquescentem  Jonam,  de  proie  à  ces  animaux  cruels,  et  avez  rendu  Jonas  à  ses 
illaesum  omnibus  familiaribus  ostendisti,  pater.  frères,  après  l'avoir    retenu  avec   rigueur  dans  le  ventre 

d'un  gros  poisson,  ô  Père. 

7.  Et  nunc  osor  contumeliaî,  multum  misericors,  uni-  7.  Et  maintenant,  Seigneur,  vous  qui  détestez  le  crime, 
versorum  protector,  cito  appareas  his  qui  de  génère  et  qui  protégez  l'innocence,  Dieu  de  miséricorde,  ne 
Israël,  qui  contumcliis  afliciuntur  ab  abominaiis  iniquis  différez  point  de  secouiir  un  peuple  que  des  nations 
gentibus.  abominables  traitent  avec  tant  d'injustice. 

8.  Quod  si  impietalibus  per  ipsam  per-rgrinationem  vita  8.  Si  nous  avons  commis  l'iniquité  dans  cette  terre 
nostra  constricta  est;  cum  erueris  nos  de  manu  inimico-  étrangère,  tirez-nous  des  mains  de  nos  ennemis,  et,  loin 
rum,  prout  elegeris,   Domine,  perde  nos  morte.  de  leurs  yeux,  vengez-vous  vous-même, 

9.  Non  vanis  vana  sapientes  benedicant  super  dilecto-  9  De  peur  que  ces  nations  orgueilleuses  ne  se  vantent 
rum  tuorum  perditione,  dicentes  :  neque  Deus  eorum  d'avoir  anéanti  le  peuple  que  vous  aimiez,  et  qu'ils  ne 
liberavit  eos.  disent  :  Le  Dieu  même  qu'ils  servent  n'a  pu  les  délivrer 

de  nos  mains. 

10.  Tu  autem  qui  omne  robur,  et  potentiam  omnem  10.  Vous  donc,  Seigneur,  qui,  dans  l'éternité  de  votre 
habes,  aeterne,  nunc  respice.  Être,  possédez  la  force  et   la  souveraine  puissance, 

11.  Miserere  nostri,  qui  per  injustam  inimicorum  inju-  11.  Regardez-nous  dans  votre  miséricorde,  nous  qui, 
riam,  e  vita  morte  insidiatorum,  submovemur.  par  l'injustice  et  l'impiété  de  nos  ennemis,  allons  perdre 

la  vie  comme  les  plus  criminels  de  tous  les  hommes. 

12.  Admirentur  autem  gentes  invictam  tuam  potentiam  12.  Que  les  nations  soient  saisies  de  frayeur,  en  voyant 
hodie,  honorate.  qui  potestatem  habes  ad  saluiem  gène-  aujourd'hui  les  effets  d'une  puissance  à  qui  rien  ne  résiste, 
ris  Jacob.  Supplicat  tibi  universa  multitudo  parvulorum,  6  Adorable,  que  votre  force  éclate  enfin  pour  le  salut  de 
et  horum  parentes  cum  lacrymis.  Jacob,  les  enfants  mêlent    leurs   larmes   avec  celles    de 

leurs  parents,  pour  obtenir  de  vous  cette  faveur, 

ij.    Pateat    omnibus    gentibus,    quod      nobiscum     es,  1  ;.  Apprenez  aux  nationsque  vousn'avez  point  détourné 

Domine,  et  non  avertisti  faciem  tuam  a  nobis  :  de  nous  votre  visage,  Seigneur, 

14.    Sed,    sicut    dixisti,   neque    cum    ess.jnt    in    terra  14.  Et  accomplissez  la  promesse  que  vous  fîtes  autre- 

inimicorum     suorum,    ipsos     despecturum,    sic   perfice,  fois  à  votre  peuple,  Seigneur,  en  l'assurant  que  vous  ne 

Domine.  l'abandonneriez  jamais,  quand  même  il  aurait  été  trans- 
porté dans  une  terre  ennemie. 

1^.   Eleazaro    autem    finem  jam  faciente    orationis,  rtx  15.  A  peine  tlcazar  eût-il  cessé  de  prier,  que  Ptolémée 

cum  feris,  et    toto   exercitu    fremitu    ad    HippoJromum  entra  dans  l'Hippodrome, suivi  des  éléphantset  de  toutes 

accedebat.  ses  troupes. 


III.—  MACCABÉES.  —  VI.  DÉLIVRANCE  MIRACULEUSE 


267 


16.  Et  aspicientes  Judœi,  vehementer  exclamarunt  in 
cœlum,  ita  ut  adjacentes  etiam  convalles  simul  sonantes, 
continuum  fletum  facerent  universo  exercitui. 

17.  Tune  magnifiée  gloriosus,  omnipotens,  et  verax 
Deus,  ostendens  sanctam  faciem  suam,  aperuit  cœlestes 
portas  :  e  quibus  inclyti  duo  terribiles  angeli  descende- 
runt,  manifesti  omnibus,  praeterquam  Judasis  : 

18.  Et  ex  adverso  steterunt,  et  exercitum  adversariorum 
impleverunt  turbatione,  et  formidine,  et  immobilibus 
ligaverunt  compedibus.  Atqui  régis  etiam  corpus  f.ictum 
est  horrens,  et  oblivio  gravem  ejus  audaciam  occupavit. 


19.  Et  converterunt  se  bestias  super  subséquentes 
armatos  exerciius ,  et  conculcabant  eos,  et  extermi- 
nabant. 

20.  Et  versa  est  régis  ira  in  misericordiam  et  lacrymas 
pro  his  qua;  antea  molitus  fuerat. 

21.  Audiens  enim  vocilerationem,  et  videns  précipites 
omnes  ad  perditionem,  illacrymatus,  cum  ira  amicis 
minabatur,  dicens  ; 

22.  Regios  transgredimini  mores,  et  tyrannos  superastis 
crudelitate  :  et  me  benefactorem  vestrum  aggredimini  a_ 
principatu    jam   et    spiritu    removere,  clam    machinantes 
quae  non  conferunt  regno. 

25.  Quis  eos  qui  obtinent  nostra  in  fide  munitiones 
regionis,  e  domo  removens,  stulte  congregavit  hue  ? 


24.  Quis  eos  qui  ab  initio  benevolentia  erga  nos  om- 
nibus in  rébus  superant  omnes  gentes,  et  deterrima 
saspe  hominum  susceperunt  pericula,  sic  iniquis  impli- 
cuit  suppliciis  ? 

25.  Solvite,  dissolvite  injusta  vincula  ;  ad  propria  cum 
pace  dimittite,  quae  ante  facta  sunt,  deprecati,  dimittite 
filios  omnipotentis  cœlestis  Dei  viventis,  qui  a  nostris 
majoribus  hujusque  nunc  incolumem  cum  gloria  bonum 
statum  praebet  rébus  nostris. 

26.  Ergo  ille  quidem  hsec  dixit.  Hi  autem  indivisibili 
tempore  soluti  sanctum  Salvatorem  Deum  suum  bene- 
dicebant,  nuper  a  morte  evadentes. 

27.  Deinderex  in  civitatem  reversus,  prœfectum  redi- 
tuum  accersens,  jussit  et  vina  et  cetera  ad  convivium 
necessaria  prœbere  Judaeis  ad  dies  septem,  statuens  eos 
quo  in  loco  pernicieni  subire  putabant,  in  hoc  cum  omni 
laetitia  salutaria  celebrare. 

28.  Tune  qui  antea  ig.tominiosi,  et  prope  infernum 
erant,  quinimo  in  eum  descenderant  ;  pro  acerba  et  lugu- 
bri  morte  convivium  salutare  instruentes,  paratum  ipsis 
ad  ruinam  et  sepulturam  locum  tentoriis  convivalibus 
diviserunt  pleni  gaudio  : 

29.  Ac  desinentes  gemeDundum  lamentationis  canticum, 
resumpserunt  cantum  patrium,  salvatcrem,  et  prodigio- 
rum  factorem  laudantes  Deum:  rîetumque  omnem  et 
planctum  removentes,  choros  constituerunt  pacifie» 
lsetitiae  signum. 

?o.  Eodem  autem  modo  et  rex  pro  his  magno  congre- 
gato  symposio,  sine  intermissione  erga  cœlum  confite- 
batur  magnifiée  pro  inopinata,  quœ  sibi  obvenerat  salute. 

51.  Quique  antea  in  perniciem  et  avium  escam  eos 
futuros  putabant,  et  cum  gaudio  descripserant  ;  gemue- 
runt  confusione  in  seipsis  induti,  et  ignivoma  audacia 
inglorie  extincta  : 

52.  Judaei  autern.  S'eut  prœdiximus,  constituto  prasdicto 
choro,  cum  epulis,  in  confessionibus  hilaribus,  et  psal- 
mis,  degebant  : 


i  16.  A  cet  aspect,  les  Juifs  poussèrent  des  cris  vers  le 
ciel;  tous  les  lieux  voisins  en  retentirent, et  toute  l'armée 
du  roi  en  fut  touchée  jusqu'à  répandre  des  larmes. 

17.  Alors  Celui  à  qui  la  gloire,  la  vérité,  et  la  puis- 
sance appartiennent,  fit  sentir  sa  présence  salutaire  ;  il 
ouvrit  les  portes  du  ciel,  et  il  en  sortit  deux  anges 
revêtus  d'un  éclat  terrible,  et  qui  furent  vus  de  tout  le 
monde,  excepté  des  Juifs. 

18.  Ils  s'avancèrent  vers  les  troupes  ennemies,  et  y 
répandirent  le  trouble  et  la  terreur,  et,  les  garottant  de 
liens  invisibles,  ils  les  rendirent  sans  force  et  sans  mou- 
vement :  le  roi,  saisi  et  troublé  dans  toutes  les  parties 
de  son  corps,  perdit  tout  d'un  coup  la  mémoire  de  ce 
qu'il  avait  résolu  de  faire, 

iq.  Et  les  éléphants  se  tournant  contre  les  troupes  qui 
les  suivaient,  les  foulaient  sous  leurs  pieds  et  les  écra- 
saient, 

20.  Plolémée  lui-même  fut  ébranlé  parles  cris  affreux 
eue  jetaient  les  Juifs,  qui  s'étaient  prosternés  par  terre 
dans  l'attente  de  la  mort, 

21.  11  eut  pitié,  et  se  repentit  de  tout  ce  qu'il  avait  fait 
contre  eux,  et,  s'adressant  à  ses  favoris  avec  une  voix 
menaçante  et  entrecoupée  de  sanglots  : 

22.  Vous  m'avez  trompé,  leur  dit-il,  et,  par  une  cruauté 
plus  noire  que  celle  des  tyrans,  digne  enfin  de  votre 
ingratitude,  vous  avez  cherché  à  m'ôter  en  même  temps 
la  vie  et  la  couronne,  en  formant  secrètement  des  entre- 
prises si  funestes  à  l'état. 

2j.  Par  quel  ordre  injuste  les  Juifs  se  trouvent-ils  ras- 
semblés ici  de  toutes  parts  pour  y  périr  par  de  honteux 
supplices,  eux  qui  n'ont  jamais  troublé  la  tranquillité  de 
cet  empire? 

24.  Et  qui  veut  faire  périr  dans  d'injustes  supplices, 
des  gens  qui  de  tout  temps  nous  ont  témoigné  plus  d'at- 
tachement et  d'affection  qu'aucun  autre  peuple,  [en  s'ex- 
pesant  pour  nous  à  des  périls  extrêmes  et  sans  nombre? 

25.  Rompez  au  plustôt  ces  liens  dont  on  les  a  chargés 
injustement,  et,  pleins  de  regret  de  ce  qui  s'est  passé, 
renvoyez-les  en  paix  dans  leurs  maisons  ;  car  ils  sont  les 
enfants  du  Dieu  tout-puissant,  qui  vit  au  plus  haut  des 
cieux,  et  par  qui  cet  empire  est  resté  inébranlable  de- 
puis le  premier  de  mes  ancêtres  jusqu'à  moi. 

26.  Le  roi  cessa  de  parler,  et  les  Juifs,  se  voyant  dé- 
chargés de  leurs  chaînes,  rendirent  grâces  à  Dieu  du  se- 
cours qu'il  leur  avait  accordé,  en  les  arrachant  à  la  mort. 

27.  Ptolémée  rentra  ensuite  dans  Alexandrie,  et> 
ayant  fait  appeler  l'intendant  de  sa  maison,  il  lui  ordonna 
de  fournir  aux  Juifs  pendant  sept  jours,  du  vin  et  toutes 
les  autres  choses  nécessaires  pour  leur  nourriture,  vou- 
lant qu'ils  célébrassent  leur  délivrance  dans  le  lieu  même 
où  s'étaient  faits  les  tristes  appareils  de  leurs  supplices. 

7.8.  Les  Juifs  échappés  à  tant  de  malheurs  et  à  la  mort 
même, dressèrent  partout  des  tentes  pour  s'y  livrer  à  la 
joie  et  aux  plaisirs  des  festins,  au  lieu  de  périr  ignomi- 
minieusement  d'une  mort  ïi  cruelle  ; 

29.  Et, quittant  les  airs  tristes  et  lugubres,  ils  chantaient 
les  doux  cantiques  de  leur  nation,  et  formaient  des 
chœurs  de  danses  en  signe  de  la  paix  qu'ils  venaient 
d'obtenir  ;  et,  au  milieu  de  toutes  ces  réjouissances,  ils 
publiaient  la  gloire  et  la  puissance  de  Celui  qui  les 
avait  sauvés. 

50.  Ptolémée  donna  aussi  un  grand  festin  aux  premiers 
de  sa  cour,  et  ne  cessait  de  rendre  grâces  au  ciel  du 
salut  inespéré  qu'il  lui  avait  accordé, 

;i-  Pendant  que  ceux  qui  s'apprêtaient  à  triompher 
des  Juifs  et  à  les  donner  en  proie  aux  oiseaux,  ne  rem- 
portaient pour  fruits  de  leur  rage  et  de  leurs  efforts,  que 
la  honte  et  la  confusion. 

52.  Les  Juifs  n'étaient  donc  occupés  qu'à  passer  ces 
jours  dans  les  festins,  les  danses,  les  actions  de  grâces 
et  les  cantiques. 


268  III.  —   MACCABEES.  —  VI.   RECONNAISSANCE  DES  JUIFS 

ÎT.  Et  communi  de  his  lata  lege  ad   omnem   habitatio-  ;?•  Us  en  firent  même  une  loi  pour  les  races  suivantes, 

nem  suam  in  generationes,    praedictos  dies  agendos  de-  et  voulurent  que    ces    jours    de  réjouissance    fussent    à 

creverunt  la;tos,  non  potationis  causa,    et  edacitatis,  sed  jamais  renouvelés,  moins  pour  servir  d'occasion  au  plaisir 

salutis  sibi  per  Deum  datas,  et  à  la   bonne    chère,  que  pour  rappeler  dans    tous  les 

âges  la  mémoire  d'un  si  grand  bienfait. 

J4.  Adierunt  autcm  regem,  dimissionem   suam  ad  pro-  54.  Ayant  ensuite  été  trouver  le  roi,  ils    lui    demandè- 

pria  postulantes.  rent  la  permission  de  retourner  chacun  chez  eux. 

j;.  Describunt  autem  eos  a  vigesima  quinta  niensis  Pa-  55.  Au  reste,  le  dénombrement  des  Juifs  dura  l'espace 
chon  usque  ad  quartum  mensis  Epiphi,  ad  dies  quadra-  de  quarante  jours,  depuis  le  vingt-cinq  du  mois  Pachon 
ginta  :  statuunt  autem  eorum  perditionem  a  quinta  Epi-  jusqu'au  mois  Épiphi,  et  l'on  employa  trois  jours  à  dis- 
phi,  usque  ad  septimam  diebus  tribus,  in  quibus  etiam  poser  toutes  choses  pour  les  perdre,  depuis  le  cinq 
magna  cum  gloria  patefaciens  misericordiam  suam  om-  d'Épiphi  jusqu'au  sept  du  mime  mois  ;  mais  le  Dieutout- 
nium  Dominas,  incolumes  eos  liberavit  simul.  puissant  les  regarda  dans  sa  miséricorde,  et  les  délivra 

par  des  prodiges  éclatants,  des  mains  de  leurs  ennemis. 

;o.   Epulabantur  autem  omnibus  a  rege  preebitis  usque  j6.  Ils  furent  nourris  aux  dépens  du  roi,  jusqu'au  qua- 

ad  quartam  decimam  :  in  qua    etiam    rdierunt  pro  dimis-  torzième  jour  auquel  ils  vinrent  le  trouver  pour  lui  de- 

sione  sua.  mander  à  s'en  retourner. 

J7.  Collaudans  autem    eos  rex,  scripsit  eis  subjectam  57.  Le  roi  le  leur  ayant  accordé  avec  joie,  il  écrivit  des 

epistolam  ad   duces,    qui    per   civitates  ;    qua;    magnam  lettres  très  pressantes  à  tous  les  gouverneurs  de  l'empire  ; 

animi  intentionem  prae  se  ferebat  :  elles  étaient  conçues  en  ces  termes  : 


CHAPITRE    VII 


i.  Rex  Ptolemœus  Philopator  ducibus  per  /Egyptum, 
et  omnibus  negoliorum  praifectis,  gaudere,  et  valere. 
Valemus  autem  et  ipsi,  et  filii  nostri,  prospère  dirigente 
nobis  res  magno  Deo,  sicut  volumus. 

2.  Ex  amicis  quidam  morum  improbitate,  frequentius 
nobis  assistentes,  persuaserunt  nobis,  ut  Judaei,  qui  sub 
regno  sunt,  quod  conjurationem  congregassent,  puniren- 
tur  novis  rebellium  suppliciis, 


5.  Pr&tendentes  nunquam  bono  in  statu  collocatum 
iri  res  nostras,  propter  odium  quod  hi  haberent  erga 
omnes  gentes,  quoadusque  hoc  perficiatur. 

4.  Qui  et  vinctos  adducentes  eos  cum  vexationibus 
tanquam  mancipia  potius  autem  tanquam  insidiatores, 
sine  ullo  judicio,  et  inquisitione  aggressi  sunt  inter- 
ficere,  lege  Scytharum  ferociorem  induti  crudelita- 
tem. 


<,.  Nos  autem  super  his  durius  comminati,  pro  ea 
quam  habemus  erga  omnes  homines  asquitate,  vix  vitam 
eis  condonantes,  et  cœlestem  Deum  agnoscentes,  qui 
tuto  protexerat  Judseos,  tanquam  pater  pro  filiis  assidue 
propugnans,  et  amicitias,  quam  habent  erga  nos  et  ma- 
jores nostros,  stabilem  benevolentiam  recolenies,  juste 
aimisimus,  quolibet  cujusque  causas  modo  : 


6.  Et  praecepimus  cuique,  ut  omnes  ad  propria 
reverterentur,  nemine  usquam  ipsos  prorsus  lœdente, 
neque  exprobrarent  de  iis  quas  praster  rationem  gesta 
essent. 

7.  Scitote  enim  si  quid  contra  hos  machinemur  mali, 
vel  omnino  eos  contristemur  ;  non  hominem  sed  omnis 
potentias  Dominum  Deum  Altissimum  adversarium  nobis 
ad  ultionem  rerum  usquequaque  inevitabiliter  perpetuo 
nos  habituros.  Valete. 

8.  Accepta  autem  epistola  hac,  non  statim  urserunt 
abitionem,  sed  regem  obsecrarunt,  qui  ex  Judœorum 
génère  sanctum  Deum  sponte  deseruissent,  et  ejus 
legem  ;  ii  per  ipsos  debitam  pœnam  reportarent  ; 


9.  Proponentes,  qui  ventris  causa  transgressi  essent 
divinas  leges,  ne  in  régis  quidem  rébus  unquam  bene 
sensuros. 

10.  1 1  le  autem  vere  eos  dicere  confessus,  et  collau- 
dans,  dédit  eis  omnium  potestatem,  ut  eos  qui  trans- 
gressi erant  Dei  legem,  disperderent  per  omnem,  qui 
in  regno  ipsius,  locum  lidentersine  ullaregali  auctoritate 
aut  scientia. 

11.  Tune  bene  precantes  ei,  sicut  par  erat,  qui  ex  his 
erant  sacerdotes,  et  omnis  multitudo  acclamantes  [allé- 
luia, cum  gaudio  abierunt. 


1.  Le  roi  Ptolémée-Philopator,  à  tous  les  gouverneurs 
et  autres  ofliciers  de  l'Egypte;  salut  et  prospérité.  Nous 
et  nos  enfants  jouissons  tous  d'une  santé  parfaite,  le 
Dieu  souverain  ayant  fait  réussir  nos  affaires  selon  nos 
désirs. 

2.  Quelques-uns  de  nos  favoris,  prévenus  d'une  hainî 
injuste  contre  les  Juifs,  avaient  obtenu  de  nous,  après 
plusieurs  instances,  la  permission  de  faire  une  exacte 
recherche  de  tous  ceux  de  ce  peuple  qui  vivent  sous 
notre  domination,  et  de  les  faire  tous  périr,  comme  des 
rebelles,  par  de  nouveaux  genres  de  supplices, 

?.  Ils  prétendirent  qu'il  n'y  avait  que  ce  moyen  qui  pût 
assurer  la  tranquilité  de  l'empire  contre  un  peuple  na- 
turellement ennemi  de  tous  les  autres. 

4.  Après  donc  les  avoir  rassemblés  ici  de  toutes  parts 
avec  une  rigueur  inouie,  et  les  avoir  traités  non  plus 
comme  des  esclaves,  mais  comme  les  plus  criminels  de 
tous  les  hommes,  ils  n'ont  observé  à  leur  égard  aucune 
formalité,  et,  par  une  cruauté  plus  horribleque  n'est  celle 
des  barbares,  ils  ont  tâché  d'assouvir  leur  haine  dans  la 
perte  entière  de  cette  nation. 

(,.  Pour  nous,  au  contraire,  suivant  la  tendresse  pater- 
nelle que  nous  ressentons  pour  tous  les  hommes,  nous 
avons  conçu  une  vive  indignation  contre  les  auteurs  de 
ces  noirs  desseins,  et  leur  avons  fait  à  grand'peine  grâce 
de  la  vie,  car  nous  avons  reconnu  qu'en  toutes  choses 
les  Juifs  étaient  sous  la  protection  du  Dieu  du  ciel,  et 
qu'il  les  défendait  comme  un  père  défend  ses  propres 
enfants.  Ayant  donc  rappelé  la  fidélité  inviolable  qu'ils 
ont  toujours  eue  pour  nous  et  pour  nos  prédécesseurs, 
nous  les   avons  déclarés    innocents. 

6.  Et  nous  avons  ordonné  qu'on  les  laissât  retourner 
dans  les  lieux  ordinaires  de  leur  résidence,  sans  qu'on 
leur  fit  la  moindre  insulte,  ou  qu'on  leur  reprochât 
jamais  les  traitements  qu'ils  avaient  soufferts  avec  tant 
d'injustice. 

7.  Sachez  donc  que  si  nous  formons  contre  eux  quel- 
ques mauvais  desseins,  ou  que  nous  les  inquiétions  en 
quelque  manière  que  ce  soit,  nous  en  répondrons,  non  à 
un  homme,  mais  à  un  Dieu  terrible  et  tout-puissant  qui 
étendra  sur  nous  un  bras  vengeur  sans  que  nous  puis- 
sions l'éviter.  Salut. 

8.  Les  Juifs  ayant  reçu  ces  lettres  ne  se  pressèrent 
point  de  partir  sur  le  champ  ;  mais  ils  vinrent  trouver  le 
roi  pour  lui  demander  qu'il  leur  fût  permis  de  punir  par 
un  juste  supplice  ceux  de  leur  nation,  qui,  sans  y  être 
contraints,  n'avaient  respecté  ni  le  Dieu  tout-puissant,  ni 
la  sainteté  de  sa  loi. 

9.  Il  est  impossible,  ajoutèrent-ils,  que  des  hommes, 
qui,  pour  quelqu'intérèt  temporel,  n'avaient  point  fait 
difficulté  de  violer  les  préceptes  de  leur  Dieu,  res- 
pectassent davantage  les  ordres  d'un  prince  de  la  terre. 

10.  Le  roi  ayant  reconnu  la  vérité  de  ce  qu'ils  lui 
disaient,  les  combla  de  louanges  et  leur  accorda  la  perte 
de  tous  ceux  des  Juifs,  qui,  dans  l'étendue  de  son  em- 
pire, avaient  violé  la  loi  du  Seigneur,  sans  qu'ils  pussent 
jamais  appréhender  aucune  recherche  ni  défense  de  sa 
part. 

it.  Les  prêtres  et  toute  la  multitude  des  Juifs,  après 
s'être  acquittés  d'une  juste  reconnaissance  envers  le  roi, 
sortirent  avec  des  transports  de  joie,  louant  tous  le  Sei- 
gneur à  haute  voix. 


2-0  III.  -  MACCABÉES.  —  VII.   -  RETOUR  DES  JUIFS 

12.  Tune  occurrentem  ex  contaminatis    concivem   per  12.  Alors  ils  se  jetèrent  sur  tous  les  Juifs  impies  qu'ils 

viam  puniebant,  et  exempla  edentes  interficiebant.  rencontraient,  et  les  massacrèrent  en  les  maudissant. 

1?.     llla     autem      die     sustulerunt     supra     trecentos  13.  Ils  en  tuèrent  ce   jour-là  plus   de  trois  cents,  et  se 

viros,  et  egerunt  Isetitiam  cum  gaudio  prophanis  inter-  réjouirent  beaucoup  de  leur  mort, 
fectis. 

14.  Illi  autem  ipsi.  qui  usque  ad  mortem  Deum  reti-  14.  Pour  les  autresqui  avaient  été  fidèles  jusqu'à  défen- 
nuerant,  intégra  salutis  fruitione  percepta,  profecti  dre  leur  foi  au  prix  de  leur  propre  vie,  ils  goûtaient  les 
sunt  e  civitate  cujusqueinodi  optimi  odoris  rloribus  fruits  salutaires  de  leur  piété;  et  couronnés  de  (leurs 
coronati,  cum  lagtitia  et  clamore,  in  laudibus  et  suavissi-  odorantes;  ils  sortirent  de  la  ville  en  formant  des  chœurs 
mis  hymnis  gratias  agentes  Deo  patrum  suorum  asterno  agréables  d'hymnes,  de  cantiques  et  de  cris  de  joie,  pour 
salvatori  Israël.  louer  le  Dieu  de  leurs  pères  du  salut  qu'il  venait  d'ac- 
corder à  Israël. 

15.  Cum  venissent  autem  Ptolemaidam,  quae  propter  15.  Étant  arrivés  heureusement  à  Ptolémaïs  surnom- 
loci  proprietatem  nominatur  Rosifera,  in  qua  expec-  mée  la  Rosière,  à  cause  de  la  nature  de  ce  lieu  qui 
taverat  eos  classis  ex  communi  ipsorum  consilio  dies  sep-  porte  quantité  de  roses,  ils  furent  tous  d'avis  de  différer 
tem.  de  quelques  jours  leur  embarquement, 

16.  Ibi  fecerunt  convivium  salutare,  rege  prœbente  eis  10.  Et  de  passer  sept  jours  entiers  dans  la  joie  et  dans 
bono  animo,  quœ  ad  discessum,  omnia  unicuique  usque  les  festins,  car  le  roi  avait  ordonné  qu'on  leur  fournît 
ad  propriam  domum.  abondamment  tout  ce  qui  leur    serait  nécessaire  pendant 

le  voyage,  jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  de  retour  chacun  chez 
eux. 

17.  Delati  autem  cum  pace  in  confessionibus  decenti-  17.  Voyageant  ainsi  en  paix  au  milieu  des  actions  de 
bus,  si  militer  et  ibi  statuerunt  hos  agere  dies  ad  tempus  grâces,  et  résolus  de  passer  dans  la  joie  les  derniers 
sui  inclatus  laetos,                                                                           jours  de  leur  exil, 

18.  Quos  etiam  consecrantes  in  columna  ad  con-  18.  Ils  érigèrent  en  souvenir,  sur  le  lieu  même  du 
vivii  locum,  confirmantes  votum,  abierunt  illaasi,  liberi,  festin,  une  colonne  votive.  Ils  partirent  ensuite  libres  et 
gaudio  delibuti,  et  per  terram,  et  mare,  et  flumen,  inco-  contents,  et  achevèrent  leur  voyage  avec  beaucoup  de 
lûmes,  régis  jussione,  unusquisque  ad  propriam  sedem  ;  bonheur, surterre, sur  mer  et  sur  lesfleuves.  Aussitôtqu'ils 
et  majorem  quam  antea,  in  inimicos  potestatem  adepti  furent  arrivés  on  exécuta  partout  les  ordres  du  roi  ;  ils 
cum  gloria  et  timoré,  prorsus  a  neminedimoti  de  substan-  furent  rétablis  dans  leurs  biens  et  dans  leurs  maisons,  et 
lia.  devinrent    plus    puissants    et   plus   redoutables    à    leurs 

ennemis  qu'ils  ne  l'étaient  auparavant  ;  ils   ne    perdirent 
pas  la  moindre  partie  de  ce  qui  leur  appartenait  : 

19.  Et  omnia  sua  omnes  reportarunt  ex  descriptione,  19.  Car  tout  leur  fut  rendu  selon  l'inventaire  qui  en 
ila  ut,  qui  ahquid  habebant,  maximo  cum  timoré  eis  avait  été  fait  par  l'ordre  du  roi  ;  en  sorte  que  ceux  qui 
redderent,  cum  magnalia  summus  Deus  fecisset  perfecte  en  avaient  détourné  quelque  partie  l'abandonnaient 
ad  saluiem  ipsorum.                                                                         promptement  dans   la    crainte    d'être  punis.  C'était  ainsi 

que  le  Dieu  souverain  achevait  de  protéger  son  peuple 
par  des  prodiges  de  sa  puissance. 
:o.  Bencdictus  liberator  Israël  in  sempiterna  tempora.  20.  Que  Celui  quia  délivré  Israël  soit  béni  dans  tous 

Amen.  les  siècles.  Ainsi  soit-il. 


LIVRE    QUATRIEME 


CHAPITRE    PREMIER 


i.  In  decretis  fuit  Grsecorum  Ethnicorum  regibus,  sin- 
gulis  annis  mitiere  in  sanctam  civitatem  pecuniam  pluri- 
mam  tradendam  sacerdotibus,  ut  eam  thesauro  domus 
Dei  apponerent,  in  pecuniam  eleemosynarum  pupillis,  et 
viduis. 

2.Eratautem  rex  Seleucus  in  Macedonia:  habebatque 
amicum,  qui  dicebatur  Heliodorus,  ex  ducibus  suis.  Hic 
destinatus  est  ad  expilandum  thesiurum,  accipiondumquc 
quidquid  in  eo  erat  pecuniarum. 

;.  Quod  quidem  cum  divulgatum  esset,  magnum  attulit 
mœrorem  civibus,  timueruntque  ne  ab  hoc  procederet 
Heliodorus  ad  alia,  viribus  nequaquam  sibi  sulïragantibus 
eum  prohibere  a  decretis. 

4.  Quamobrem  ad  Deum  confugiunt  omnes,et  jejunium 
cunctis  decreverunt,  et  supplices  oraverunt  cum  humili- 
tate,  submissione,  planctuque  magno,  induentes  cilicia, 
et  sese  cinere  volutantes  cum  Onia  sacerdote  magno,  ac 
reliquis  principibus,  et  senioribus,  usque  ad  plebem  et 
mulieres,  atque  pueros. 

5.  Cumque  altéra  esset  dies,  venit  Heliodorus  in  do- 
mum  Dei  cum  apparatu,  et  ingressus  est  cum  peditibus 
domum  equo  insidens  ipse,  ac  thesaurum  appetens  ; 

6.  Cui  immisit  Deus  optimus  maximus  vocem  magnam 
terribilem  :  viditque  personam  bellicis  instructam  instru- 
mentis,  incidentem  ingenti  equo,  illum  impetentem  ; 

7.  Quare  timoré  ac  tremore  auctus  est,  adstititque  ei 
persona  illa,  et  avulsit  illum  e  sagmate  ipsius,  atque  in 
terram  percussit.  Quare  mente  perculsus  maximo  opère, 
atque  alienatus  obmutuit. 

8.  Cumautem  vidissent  sui  quod  ei  acciderat,  et  nemi- 
nem  conspexissent  qui  hase  ipsi  intulisset,  festinantes 
detulerunt  eum  in  domicilium  illius  :  mansitque  dies 
aliquos,  neque  loquens,  neque  sumens  alimentum   : 

9.  Quare  convenientes  principes  amicorum  illius,  pro- 
fecti  sunt  ad  Oniam  sacerdotem,  rogantes  eum  ut  propi- 
tiaretur  ei,  ac  Deum  optimum  maximum  deprecaretur,  ne 
illum  supplicio  afïiceret. 

10.  Quod  praestitit  Onias,et  sanatus  est  Heliodorus  ex 
morbo  suo.  Et  vidit  personam  quam  viderat  in  sanctuario, 
praecipientiem  adiré  Oniam  sacerdotem,  et  salutare  eum, 
et  debitos  déferre  ei  honores,  indicantem  ei  Deum  opti- 
mum maximum  illius  exaudisse  preces,  ipsumque  sanasse 
Oniae  rogatu. 

11.  Festinavit  ergo  Heliodorus  ad  Oniam  sacerdotem, 
quem  adorans  salutavit,  et  tradidit  ei  denarios,  et  drach- 
mas,  rogans  ut  apponeret  iis,  quae  sunt  in  thesauro. 

12.  Tum  profectus  est  ex  Jérusalem  inregionem  Mace- 
doniae  :  et  notum  fecit  Seleuco  régi,  quod  sibi  evenerat, 
deprecans,  ne  illum  subrogari  cogeret  in  Jérusalem. 


I.  Les  rois  de  la  Grèce  s'étaient  engagés  à  envoyer 
t  ous  les  ans  à  la  ville  Sainte  une  grande  somme  d'argent 
qui  devait  être  remise  aux  prêtres  pour  être  déposée 
dans  le  trésor  de  la  maison  de  Dieu,  et  servir  à  la  subsis- 
tance des  orphelins  et  des  veuves. 

2.  Seleucus  régnait  alors  en  Macédoine,  et  il  avait 
parmi  les  généraux  de  ses  armées  un  favori  qui  s'appe- 
lait Héliodore  ;  ce  fut  celui  qu'il  chargea  d'aller  piller  le 
temple  et  d'en  enlever  tout  ce  qu'il  y  trouverait  de 
richesses. 

î.  A  cette  nouvelle,  les  Juifs  tombèrent  dans  une 
affreuse  consternation,  et,  se  voyant  hors  d'état  de  s'op- 
poser aux  violences  d'un  roi  sacrilège,  ils  craignirent 
qu'Héliodore  ne  se  portât  à  desexcès  encore  plusgrands. 

4.  Dans  cette  extrémité,  ils  n'attendirent  leur  secours 
que  de  Dieu  seul;  on  qjdonna  un  jeûne  général  :  tout  le 
peuple  sans  exception,  les  tem mes,  les  enfants,  les  princes, 
les  anciens  et  le  grand  prêtre  Onias,  tous  se  mirent  sous 
le  sac  et  la  rendre,  et,  par  des  cris  redoublés,  ils  sollici- 
taient le  ciel  d'exaucer  les  humbles  prières  qu'ils  lui 
présentaient. 

5.  Le  jour  suivant,  Héliodore  vint  au  temple  avec 
main-forte,  et,  y  étant  entré  à  cheval  et  suivi  de  gens 
armés,  il  s'avança  vers  le  trésor  dans  le  dessein  de  s'en 
ouvrir  l'entrée. 

6.  Mais  Dieu  fit  entendre  une  voix  terrible,  et,  dans  ce 
moment,  Héliodore  vit  devant  lui  un  cheval  fort  haut 
sur  lequel  était  monté  quelqu'un  armé  et  prêt  à  le  com- 
battre. 

7.  A  cet  aspect,  sa  frayeur  redoubla  ;  mais  cet  homme 
s'étant  approché  et  l'ayant  renversé  de  dessusson  cheval, 
Héliodore  tomba  par  terre,  et  demeura  privé  de  senti- 
ment et  de  parole. 

8.  Ses  gardes,  le  voyant  en  cet  état,  sans  apercevoir 
la  main  qui  l'avait  frappé,  le  reportèrent  promptement 
dans  sa  maison  où  il  fut  quelques  jours  sans  pouvoir  ni 
parler,  ni  prendre  aucune  nourriture. 

9.  Alors  les  principaux  amis  d'Héliodore,  vinrent  sup- 
plier Onias  d'avoir  pitié  de  lui  et  d'invoquer  le  Très- 
Haut,  de  peur  qu'il  ne  le  fit  mourir. 

10.  Onias  s'étant  renduà  leurs  instances,  Héliodore  fut 
guéri  ;  et  le  même  homme  qu'il  avait  vu  dans  le  temple 
lui  apparut  de  nouveau,  et  lui  ordonna  d'aller  rendre 
grâces  au  grand  prêtre  Onias,  ajoutant  que  ce  n'était 
qu'aux  prières  de  ce  pontife  qu'il  était  redevable  de  sa 
guérison. 

II.  Héliodore  vint  promptement  trouver  Onias,  et, 
après  s'être  prosterné  humblement  en  sa  présence,  il  lui 
présenta  quelques  sommes  d'argent,  le  priant  de  vouloir 
bien  les  accepter  pour  le  trésor. 

12.  Etant  ensuite  parti  de  Jérusalem,  il  revint  en  Macé- 
doine, et  raconta  à  Seleucus  ce  qui  lui  était  arrivé,  le 
conjurant  de  ne  le  point  obliger  davantage  d'aller  à 
Jérusalem. 


272  IV.  —  MACCABEES.  —   I.- HELIODORE 

ij.  Quare  demiratus  est  rex    ea   quas    ineminit    Helio-  ij.  Ce  prince,  étonné  du  récit  d'Héliodore,  lui  ordonna 

dorus:  prascepitque  ea  nota  facere  hominibus.  Et  curavit  de  publier  partout  ces  merveilles  ;  il  fit   même  revenir 

transferri,  ac  dimitti  e  Jérusalem  viros  suos,  augens  ea,  ses  troupes  de  Jérusalem  et  augmenta   la    somme  qu'il 

quae  illuc  singulis  annis    mittebat,  propter  ea,  quaa    eve-  avait  coutume  d'y  envoyer  tous  les  ans. 
neranl  lleliodoro  : 

14.  Atque  magis    addiderunt    reges    pecuniam    deferri  14.  Et,  à  son   exemple,  les  rois    ses    successeurs  aug- 

sacerdotibus,  quae   erogaretur  in  pupillos,  et  viduas  :  et  mentèrent  les  dons  qu'ils  étaient   obligés  d'envoyer   aux 

quae  erogaretur  in  sacrificia.  prêtres  de  la  ville  Sainte  pour  les  sacrifices,  et  pour  la 

subsistance  des  orphelins  et  des  veuves. 


CHAPITRE    II 


i.  Erat  vir  Macedo,  Ptolemœus  nuncupatus,  scientia 
atque  intell igentia  prasditus;  qui  cum  habitaretin  /Egypto, 
constituerunt  eum  ^Egyptii  regem  super  regionem  /Egypti. 

2.  Quare  inquirendarum  scientiarum  amore  auctus, 
oranes  sapientum  libros  undique  collegit. 

j.  Cupiens  autem  viginti  quatuor  libros  sibi  acquirere, 
scripsit  sacerdoti  magno  in  Jérusalem,  ut  sibi  mitteret 
ex  peritioribus  in  istis  libris.  septuaginta  senes  ;  misitque 
epistolam  cum  munere  ad  sacerdotem. 

4.  Perveniente  itaque  epistola  régis  ad  sacerdotem, 
selegit  septuaginta  peritos  viros,  eosque  misit  cum  viro, 
qui  dicebatur  Eleazarus,  prsestans  religione,  scientia, 
atque  disciplina  ;  qui  profectus  est  in  /Egyptum. 

Ç.  Cum  autem  innotuisset  eorum  adventus  régi,  sep- 
tuaginta domicilia  parari,  eosque  ibi  excipi  jussit. 

6.  Prœcepit  praîterea  singulis  destinari  scribam,  qui 
exciperet  horum  librorum  irterpretationem  characteribus 
grascis,  et  graeca  lingua. 

7.  Interdixit  insuper  ne  quis  horum  septuaginta  cum 
socio  conveniret,  ne  conspirarent  in  cujusquam  istorum 
librorum  mutationem. 

8.  Exceperunt  itaque  scribas  ex  singulis  eorum,  viginti 
quatuor  librorum  translationem. 

9.  Et  cum  absolutce  essent  translationes,  illas  obtulit 
régi  Efeazarus,  easque  inter  se  ^pso  présente)  contulit; 
quibus  collatis,  concordare  compense  sunt  ; 

10.  Unde  valde  laetatus  est  rex,  prascepitque  pecuniam 
plurimam  dividi  inter  gentem.  Eleazarum  vero  maxima 
cumulavit  remuneratione  ; 

11.  Dimisit  quoque  ea  die  universam  captivitatem,  quae 
inventa  est  in  vCgypto  de  tribu  Judse,  et  Benjamin  :  ut 
reverterentur  in  suam  regionem  Syriam. 

12.  Erat  autem  numerus  eorum  circiter  centum  et  tri- 
ginta  millia.  Jussit  insuper  pecuniam  distribui  eis,  ita  ut 
singulis  obvenirent  denarii  plures  :  qui  accipientes  pro- 
fecti  sunt  in  regionem  suam. 

ij.  Tum  mensam  magnam  fieri  praicepit  ex  auro  pu- 
rissimo,  quee  totius  regionis  .Cgyptii  imaginis  capaxesset, 
imaginisque  Nili,  ab  origine  ejus  decursus,  ad  illam 
usque,  omniumque  preterea  ipsius  per  illam  divisionum  et 
quomodo  totam  alluit  regionem. 

14.  Prœcepit  quoque  multis  eam  interdistingui  gemmis. 
Et  facta  est  mensa  hœc,  atque  perfecta  ejus  figuratio,  et 
gemmis  interdistincta,  et  delata  est  in  civitatem  Jérusa- 
lem, munus  domui  magnificae.  Quee  intégra  perveniens 
collocata  fuit  in  domo,  secundum  prseceptum  régis.  Et 
sane  similem  non  viderunt  homines  quoad  pulchritudi- 
nem  picturarum,  et  sapientiam  artis. 


1.  Ptolémée,  Macédonien  d'origine,  s'étant  établi  en 
Egypte,  s'y  distingua  tellement  par  son  savoir  et  par 
sa  sagesse,  que  les  Egyptiens  le  choisirent  pour  leur  roi. 

2.  Elevé  sur  le  trône,  il  ne  pensa  qu'à  satisfaire  la  pas- 
sion qu'il  avait  pour  les  sciences,  et,  dans  cette  vue,  il 
amassa  de  tous  côtés  les  livres  des  sages. 

j.  Voulant  encore  enrichir  sa  bibliothèque  des  vingt- 
quatre  livres  de  l'Écriture,  il  écrivit  une  lettre  au  grand 
prêtre  de  Jérusalem  et  l'accompagna  de  riches  présents, 
afin  qu'il  lui  envoyât  soixante-dix  Juifs  recommandables 
par  leur  âge  et  par  leur  intelligence  dans  la  loi. 

4.  Le  grand  prêtre  ayant  reçu  la  lettre  du  roi,  choisit 
soixante-dix  hommes  très  habiles,  et  les  fit  partir  pour 
l'Egypte,  sous  la  conduite  d'un  nommé  Éléazar  que  la 
vertu,  le  savoir  et  la  connaissance  des  livres  saints  dis- 
tinguaient également. 

5.  Ptolémée  ayant  su  leur  arrivée,  les  fit  conduire  dans 
des  celluies  qu'il  avait  fait  préparer  pour  chacun  d'eux, 
au  nombre  de  soixante-dix. 

6.  11  ordonna  outre  cela  qu'ils  eussent  chacun  un  secré- 
taire, pour  écrire  leur  version  en  caractères  grecs  et  en 
langue  grecque  ; 

7.  Et  défendit  à  ces  interprètes  de  conférer  ensemble, 
craignant  qu'ils  ne  convinssent  entre  eux  de  faire  quel- 
que changement  à  leurs  livres. 

8.  Les  secrétaires  écrivirent  donc  les  versions  que 
chacun  de  ces  interprètes  avait  faites  des  vingt-quatre 
livres. 

9.  Et  quand  elles  furent  entièrement  achevés,  Éléazar 
les  présenta  au  roi,  et,  les  ayant  confrontées  devant  lui 
les  unes  avec  les  autres,  elles  se  trouvèrent  toutes  par- 
faitement semblables. 

10.  Ptolémée  extrêmement  satisfait,  fit  de  grands  dons 
à  Eléazar  et  à  tous  les  interprètes.  Éléazar  fut  récom- 
pensé magnifiquement. 

11.  Et  dès  ce  moment,  il  permit  à  tous  les  captifs  des 
tribus  de  Juda  et  de  Benjamin,  qui  étaient  alors  en 
Egypte,  de  s'en  retourner  en  Syrie. 

12.  Ils  s'assemblèrent  donc  au  nombre  d'environ  cent 
trente  mille,  et  se  mirent  en  chemin  après  avoir  reçu 
l'argent  qu'on  leur  distribua  par  ordre  du  roi.  Chacun 
reçut  plusieurs  deniers. 

ij.  Ptolémée  fit  faire  ensuite  une  grande  table  de  l'or 
le  plus  pur,  sur  laquelle  était  représentée  toute  l'Egypte 
et  le  cours  du  Nil,  avec  les  différentes  contrées  qu'il 
arrose,  depuis  sa  source  jusqu'à  l'endroit  où  il  se  jette 
dans  la  mer. 

14.  Tout  cet  ouvrage  était  travaillé  avec  des  pierres 
précieuses.  Quand  cette  table  eut  reçu  toute  sa  perfec- 
tion, elle  fut  portée  à  Jérusalem  et  placée  dans  le  tem- 
ple, comme  une  offrande  que  Ptolémée  faisait  à  l'au- 
guste maison  du  Seigneur,  et  chacun  y  admira  l'excel- 
lence de  l'art,  la  beauté  des  couleurs,  et  la  perfection 
du  dessin. 


S.   B. 


T.  XII 


18 


CHAPITRE   Iil 


1.  Erat  ex  regibus  Macedonum  homo  quidam  qui  An- 
tiochus  dicebatur  ;  inter  cujus  gesta  id  fuit,  ut  cum  de- 
functus  esset  Ptolemaeus  rex  yEgypti  ante  memoratus, 
profectus  est  cum  exercitibus  suis  ad  Ptolemeum  secun- 
dum  oppugnandum  ;  victo  autem  Ptolemaîo,  atquecasso, 
potitus  est  ejus  regione  .4ïgypto  :  eamque  obtinuit. 

2.  Hinc  robur  accipientibus  rébus  ipsius,  majorem  ter- 
ra? subegit  partem,  obedientiam  deferentibus  ei  Persidis 
rege,  aliisque. 

j.  Quare  e'.atum  est  cor  ejus  :  et  superbia  inflatus,idola 
ad  suam  similitudinem  confici  jussit,  ut  eis  déferrent 
homines  adorationem,  in  i  11  i us  magnificentiam,  et  cultum. 

.).  Qua?.  quidem  cum  confecta  fuissent,  misit  in  omnes 
sui  regni  regiones  per  nuncios,  jubentes  ea  coli,  et  ado- 
rari.  His  annuerunt  gentes,  timentes,  alque  metuentes 
tyrannidem  ejus. 

<,.  Erant  autem  eo  tempore  in  Judœa  très  viri  mortalium 
omnium  pessimi  :  et  unicuique  in  eodem  génère  mali  non 
absimilis  erat  familia. 

6.  Quorum  trium  unius  nomen  erat  Menelaus:  secundi, 
Simon  :  tertii,  Alcimus.  Apparuerunt  autem  eo  tempore 
imagines  quaedam,  quas  quadraginta  dierum  spatio  in 
aère  conspexerunt  cives  Jérusalem  :  erant  quidem  ima- 
gines insidentium  equis  igneis  in  sese  decertantium. 

7.  Adiverunt  itaque  impii  isti  Antiochum,  ad  obtinen- 
dam  aliquam  pênes  eum  auctoritatein,  ut  facile  perpe- 
trare  possent  quidquid  vellent  scortationis,  expilationis 
facultatum  hominum,  ac  denique  imperare  reliquis,  item- 
que  coercere. 

8.  Et  dixerunt  ei  :  Rex,  jam  apparuerunt  in  aère  su- 
per Jérusalem  équités  ignei  in  sese  decertantes  :  propte- 
rea  gavisi  sunt  Hebrsei  dicentes,indicem  hase  esse  mor- 
tis  Antiochi. 

9.  Quibus  verbis  prœstans  fidem  rex,  furore  percitus, 
profectus  est  in  Jérusalem  quam  breviori  tempore,  ac 
genti  supervenit  de  nulla  ejus  praemonita;  fama. 

10.  Invaseruntque  eos  viri  illius,  et  gladio  percusse- 
runt,  plurimas  perpétrantes  clades  ;  pluresque  excepe- 
runt  vulneribus  ac  multitudinem  magnam  in  captivitatem 
redegerunt. 

11.  Quidam  vero  fugientes,  sese  in  montes  ae  nemora 
contulerunt,  ubi  diu  morati  sunt,  herbis  vescentes. 

12.  Post  hase  a  regione  abscedere  decrevit  Antiochus. 
At  non  sat  illi  fuit  quod  genti  intulerat  :  verum  subroga- 
vit  virum  nomine  Felicem,  injungens  ei,  eos  cogère  suam 
colère  imaginem,  ac  suillam  edere  carnem. 

U,  Quod  prasstitit  Félix,  gentem  accersens  ad  obe- 
diendum  régi  in  iis,  quae  ipsi  prœceperat.  At  illi  ea,  ad 
quœ  accersiti  fuerunt,  suscipere  negaverunt  :  quare  ma- 
gnam multitudinem  ex  eis  peremit,  servans  pessimos 
illos,  eorumque  familiam,  et  exaltans  eorum  dignita- 
tem. 


1.  Il  y  eut  parmi  les  rois  de  Macédoine  un  prince 
nommé  Antiochus,  dont  on  raconte  ceci  entre  autres 
choses.  Après  la  mort  de  Ptolémée,  roi  d'Egypte,  celui 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  Antiochus  s'avança  à  la  tète 
de  toutes  ses  troupes  pour  combattre  Ptolémée  second; 
il  le  vainquit  et,  après  l'avoir  tué  lui-même  dans  le  com- 
bat, il  se  rendit  maître  de  toute  l'Egypte. 

2.  Et  sa  puissance  augmentant  par  de  continuels  suc- 
cès, il  mit  sous  sa  domination  une  grande  partie  de  la 
terre,  en  sorte  que  le  roi  de  Perse  et  plusieurs  autres 
princes  se  virent  assujettis  à  son  obéissance. 

j.  Son  cœur  s'enfla  de  ces  prospérités,  et,  se  livrant 
enfin  à  son  orgueil,  il  fit  faire  des  idoles  à  sa  ressem- 
blance, afin  que  les  hommes  l'adorassent  et  lui  rendis- 
sent un  culte  digne  de  s    grandeur. 

4.  Quand  ces  figures  furent  achevées,  il  les  fit  porter 
dans  tous  les  lieux  de  son  empire,  avec  ordre  de  leur 
rendre  des  adorations  et  de  leur  offrir  des  sacrifices. Les 
nations  qui  redoutaient  la  colère  et  le  ressentiment 
d'Antiochus  se  rendirent  sans  peine  à  ses  volontés. 

5.  Il  y  avait  alors  en  Judée  trois  Juifs  qui  étaient  les 
plus  méchants  de  tous  les  hommes,  tous  dignes  suppôts 
des  familles  dont  ils  sortaient. 

6.  Le  premier  s'appelait  Ménélaûs,  le  second,  Simon, 
et  le  troisième,  Alcime.  En  ce  temps-là,  toute  la  ville 
de  Jérusalem  vit  pendant  quarante  jours  des  hommes  qui 
couraient  en  l'air  sur  des  chevaux  de  feu,  et  qui  combat- 
taient les  uns  contre  les  autres. 

7.  Alors  ces  hommesimpies  vinrent  trouver  Antiochus, 
et  s'appuyèrent  de  son  autorité,  afin  d'exercer  impuné- 
ment toutes  sortes  d'infamies  et  de  brigandages,  et  de 
décider  eux  seuls  du  sort  de  tous  les  autres. 

8.  Ils  dirent  aussi  au  roi  qu'il  avait  paru  au-dessus  de 
Jérusalem  des  armées  de  feu  qui  combattaient  en  l'air. et 
que  les  Juifs  s'en  étaient  réjouis,  comme  d'un  présage  de 
sa  mort  prochaine. 

9.  Antiochus  prêtant  l'oreille  à  ces  discours  entra 
dans  une  étrange  colère,  et,  sans  perdre  de  temps,  il  se 
mit  en  chemin,  et  arriva  à  Jérusalem  avant  que  les  Juifs 
eussent  eu  le  moindre  soupçon  de  sa  marche. 

10.  Il  tomba  sur  eux  avec  toutes  ses  forces,  il  rem- 
plit tout  de  sang  et  de  carnage  et  fit  un  grand  nombre  de 
prisonniers. 

11.  Quelques  uns,  s'étant  garantis  par  la  fuite,  allèrent 
se  cacher  dans  les  bois  et  dans  les  montagnes,  et  y  vé- 
curent longtemps  des  seules  herbes  qui  y  croissaient. 

12.  Après  cela,  Antiochus  résolut  de  quitter  la  Judée  ; 
et,  ne  croyant  pas  s'être  encore  assez  vengé  par  tous  les 
maux  qu'il  avait  fait  aux  Juifs,  il  laissa  en  sa  place  un 
nommé  Félix,  avec  ordre  de  les  contraindre  d'adorer  ses 
images  et  de  manger  de  la  chair  de  porc. 

ij.  Félix,  pour  exécuter  les  ordres  du  roi,  fit  venir  les 
Juifs  devant  lui  ,  et,  sur  le  refus  i,u'ils  firent  de  s'y  sou- 
mettre, il  en  punit  plusieurs  des  derniers  supplices  pen- 
dant qu'il  épargnait  ces  hommes  impies  avec  toutes  leurs 
familles,  augmentant  même  encore  leur  pussance  et  leur 
crédit. 


CHAPITRF.  IV 


i.Post  hase  captus  est  Eleazarus,  qui  profectus  eratcum 
doctoribusad  Ptolemasum;  et  tune  erat  senex  aetate  provec- 
tus,nonagenarius  ;etconstitutus  estcoram  Felice,cui  ait: 

2.  Eleazare,  equidem  vir  sapiens  es,  ac  prudens,  et 
sane  a  multis  te  dilexi  annis,  nec  propterea  tuam  cupi- 
rem  necem  :  obtempéra  ergo  régi,  et  adora  ejus  imagi- 
nem,  et  de  ejus  immolatis  comede,  et  incolumis  évade. 


j.  Cui  respondit  Eleazarus  :  Profecto  non  sum  deser- 
turus  obedientiam  Dei,  ut  obediam  régi. 

4.  Cui  accedens  Félix  secreto  ait  :  Fac  te  accersere 
quempiam,  qui  afferat  tibi  carnes  de  vestris  immolatis, 
quas  apponito  mensas  meas, 

$.  Et  comede  aliquid  ex  illis,  hominibus  praesentibus, 
ut agnoscant  te  obedivisse  régi  :  et  redîmes  animam  tuam 
nullo  illato  religioni  tuœ  detrimento. 

6.  Huicait  Eleazarus:  Nequaquam  Deo  obsequcr  ullo 
fraudum  génère,  sed  hanc  potius  sustinebo  violentiam. 


7.  Etenim  cum  sim  senex  nonagenarius,  jam  extenuata 
sunt  ossa  mea,  et  corpus  meum  contabuit.  Si  forti  ergo 
animo  feram  ea,  quas  fortissimi  juvenes  metuentes  refu- 
giunt,  me  imitabuntur  fortes  populi  mei,  et  juvenes  meae 
nationis,  et  dicent  : 

8.  Quomodo  non  licet  ea  pati,  quas  passus  est  nobis 
viribus  infirmier,  et  carne  ac  osse  exilior?  Quod  sane 
expeditius  mihi  erit,  quain  fallere  eos,  simulata  régi 
obedientia  : 

9.  Dicent  en i m  :  Si  senex  iste  decrepitus, sapiens, prudens, 
vitae  est  cupidus,  et  rerum  caducarum  dolore  eorripitur, 
suam  abdicans  religionem  ;  nobis  profecto  licebit,  quod 
eilicuit,cumsitsenexacsapiens,etquem  sequi  nosoportet, 

lo.Quare  perire  malo,  relicta  eis  constantia  religionis, 
ac  patientia  adversus  tyrannidem,  quam  vivere  ipsorum 
infirmata  constantia  in  obediendo  Domino  suo,  et  ipsius 
beneplacitis  obsequendo  :  ut  felices  per  me  reddantur, 
non  autem  infelices. 

11. Cum  audisset  itaque  Félix  Eleazari  sententiam,vehe- 
menterin  eumiratusest.jussitqueipsummultissuppliciorum 
generibus  affici  :  ita  quidem,  ut  maximum  inierit  certamen, 

12.  Et  ait,  Deus  utique,  scis,  quod  liberare  potuissem 
memetipsum  ab  iis  in  quas  incidi,  alteri  a  te   obediendo. 


1;.  Quod  quidem  non  prsestiti  :  sed  malui  tibi  obedire  : 
et  facilem  existimavi  omnem  illatam  mihi  vim,  pro  cons- 
tantia in  tua  obedientia. 

14.  Et  nunc  parum  reputo  ea  quas  mihi  evenerunt  secun- 
dum  beneplacitum  tuum,  eaque  sustineo   quantum  valeo. 

15.  Rogo  te  itaque  ut  hoc  accipias  a  me,  et  mori  me 
facias  antequam  infirmior  reddar  in  sustinendo. 

16.  Et  exaudivit  Deus  preces  illius,  et  stalim  obiit. 
Reliquit  autem  populum  suum  cultui  Domini  sui  deditum, 
sanaque  prasditum  fortitudine,  ac  constantia  in  religione, 
et  patientia  adversus  ea  quae  illis  obveniunt. 


1.  Le  vieillard  Éléazar,  âgé  de  quatre-vingt-dix  ans, 
l'un  des  interprètes  envoyés  autrefois  à  Ptolémée,  fut 
pris  et  amené  devant  Félix,  qui  lui  dit  : 

2.  Éléazar,  vous  êtes  un  homme  plein  de  sagesse  et  de 
prudence,  et  il  y  a  longtemps  que  vous  êtes  au  nombre 
de  mes  amis  ;  c'est  pourquoi  je  souhaiterais  conserver 
une  vie  qui  m'est  si  chère  :  obéissez  donc  aux  ordres  du 
roi,  adorez  son  image,  et  mangez  des  viandes  qui  lui  ont 
été  offertes  si  vous  ne  voulez  point  mourir. 

?.  Eléazar  lui  ayant  répondu  qu'il  ne  violerait  jamais 
les  lois  de  son  Dieu,  pour  plaire  au  roi, 

4.  Félix  s'approohant  de  lui,  et,  le  prenant  à  part  : 
Faites  venir,  lui  dit-il,  quelqu'un  qui  vous  apporte  des 
viandes  dont  il  vous  est  permis  d'user,  et  quand  vous  les 
aurez  mises  sur  ma  table, 

5.  Mangez-en  devant  tous  ceux  qui  sont  ici  présents, 
afin  qu'ils  ne  doutent  plusde  votre  soumission  aux  ordres 
du  roi,  et  vous  vous  garantirez  ainsi  de  la  mort,  sans 
intéresseren  aucune  manière  la  saintetéde  votre  religion. 

6.  Mais  Éléazar  lui  répondit  en  ces  termes  :  Une 
pareille  feinte  ne  pourrait  être  agréable  aux  yeux  de 
Dieu  ;  et  plutôt  que  d'y  consentir  je  me  livrerais  avec 
joie  aux  supplices  les  plus  horribles. 

8.  Car  si,  malgré  les  langueurs  et  les  infirmités  d'un 
corps  usé  par  le  grand  âge,  je  soutiens  avec  courage  des 
tourments  qui  ont  coutume  de  triompher  de  la  jeunesse 
la  plus  vigoureuse,  les  forts  de  mon  peuple  et  les  jeunes 
gens  de  ma  nation  m'imiteront  en  disant  : 

8.  Comment  craindrions-nous  des  tourments  qui  n'ont 
pu  ébranler  la  constance  d'un  vieillard  languissant  et 
sans  force  ?  Ce  qui  m'est  incomparablement  plus  avan- 
tageux que  de  les  engager  dans  l'erreur,  en  feignant 
d'obéir  à  des  ordres  sacrilèges. 

9.  Car  ils  ne  manqueraient  pasde  dire  :  Si  ce  vieillard 
sage  et  prudent  a  cru  pouvoir  conserver  sa  vie  aux 
dépens  même  de  sa  religion,  pourquoi  ne  nous  serait-il 
pas  permis  de  l'imiter? 

10.  Ainsi  j'aime  mieux  leur  laisser,  par  ma  mort,  un 
exemple  de  constance  pour  ma  religion,  et  de  patience 
dans  les  tourments,  que  de  leur  apprendre  à  violer  la  loi 
de  Dieu  en  conservant  ma  propre  vie  ;  et  c'est  par  là 
que  je  les  conduirai  à  un  bonheur  véritable. 

11.  Félix  ayant  entendu  le  discours  d'Éléazar,  en  fut 
extrêmement  irrité,  et  commanda  qu'on  le  tourmentât 
par  différents  supplices. 

1  2.  Mais  ce  saint  vieillard  s'écriait  au  milieu  des  plus  rudes 
assauts  :  Seigneur,  vous  connaissez  clairement  que  j'aurais 
pu  me  garantir  des  maux  que  je  souffre, si  j'avais  voulu  violer 
vos  ordonnances  en  consentante  ce  qu'on  exigeait  de  moi; 

ij.  Mais,  Seigneur,  j'ai  mieux  aimé  vous  obéir,et  toute 
la  violence  des  tourments  m'a  paru  aisée  à  supporter 
plutôt  que  de  vous  manquer  de  fidélité  : 

14.  A  présent  même,  je  regarde  comme  peu  de  chose 
tous  les  maux  que  vous  avez  bien  voulu  me  susciter,  et 
je  les  supporte  autant  que  je  le  puis. 

iç.  Mais,  Seigneur,  contentez-vous  de  ce  que  j'ai  déjà 
souffert,  et  faites,  je  vous  prie,  que  je  meure  avant  que 
la  douleur  ait  pu  triompher  de  ma  constance. 

16.  Et   Dieu  exauça  ses   prières,  et  il  mourut   dans  le 
moment,  laissant  un  peuple  tout  dévoué  au  culte  de  son 
Dieu,  animé  d'un   saint  courage,  ferme  dans  la  religion, 
et  patient  dans  les  tourments  auxquels  ils  étaient  expos> 
pour  la  défendre. 


CHAPITRE  V 


1.  Et  capti  sunt  post  haec  septem  fratres,  et  mater  i.  On  prit  ensuite  une  femme  et  ses  sept  enfants,  et 
ipsorum  :  et  missi  sunt  ad  regem  :  non  enim  longe  adhuc  l'on  se  hâta  de  les  faire  conduire  au  roi,  qui  n'était  pas 
recesserat  a  Jérusalem.  Et  cum  deducti  fuissent  ad  regem,  encore  fort  éloigné  de  Jérusalem.  L'un  d'eux  lui  ayant 
introductus  est  unus  eorum  ad  illum  :  cui  propriam  été  présenté,  le  roi  lui  ordonnade  renoncer  à  sa  religion, 
jussit  abdicare  religionem  ; 

2.  Qui  renuens,  ait  illis  :  Si  enim  nos  veritatem  docere  2.  Mais  ce  jeune  homme,  bien  loin  de  lui  obéir,  lui  dit: 
putas,  non  ita  sese  res  habet  ;  quippe  veritas  ea  est,  Prince,  si  vous  prétendez  nous  mener  ainsi  à  la  vérité, 
quam  didicimus  a  patribus  nostris,  et  qua  nosmetipsos  vous  vous  trompez  fort;  car  il  n'y  en  a  point  d'autre  que 
obstrinximus  solius  Dei  amplecti  cultum,  et  constanter  celle  que  nous  avons  reçue  de  nos  pères,  et  par  laquelle 
observare  legem  :  et  ab  hac  nequaquam  recedemus.               nous  nous  sommes  obligés  d'embrasser  le  culte  du   vrai 

Dieu,  et  d'observer  constamment  ses  lois,  et   rien  jamais 

ne  sera  capable  de  nous  faire  changer  de  résolution. 

;.  Et  iratus  est  rex  Antiochus  his  dictis  :  praecepitque  3.  Antiochus,  irrité  de   ces  discours   généreux,  com- 

alTerri   sartaginem'  ferream,  et  igni  admoveri.  Tum  jussit        manda   qu'on    fit  chaulïer  sur  le  feu  une  poêle   de    fer, 

amputari  linguam  juvenis,  et  manus  ac  pedes  proescindi,        qu'on  coupât   la  langue  de    ce  jeune    homme,  qu'on  lui 

et  detrahi  pellem  capitis,  et  imponi  sartagini  :  arrachât   la   peau    de  dessus    la   tète,   qu'on  lui  coupât 

aussi  les  extrémités  des  pieds  et  des  mains,  et  que  toutes 

ces  parties   de  son   corps   fussent  jetées  dans  la  poêle 

ardente. 

4.  Et  factum  est    ei  ita.    Deinde  afferri  praacepit  ollam  4.  Ces  ordres  ayant  été  exécutés,  il    fit    mettre  sur  le 

œneam  magnam,  et  igni  admoveri,  in  quam  projectum  est        feu  une  grande    chaudière    d'airain   dans    laquelle   il  fit 

reliquum  corporis.  jeter  les  restes  de  ce  corps  ainsi  mutilé. 

ç.  Et  cum  prope   morerelur  vir,  jussit  removeri  ab  eo  5.  Et  comme  le  jeune  homme  était  sur  le  point  d'expi- 

ignem,   ut    diutius    cruciaretur  :  intendens    his    matrem        rer  dans  ces  tourments,  le    roi  commanda  qu'on  écartât 
deterrere,  ac  fratres.  le  feu,  afin  que  son    supplice    fût   plus    long,  et  que  sa 

mère  et  ses  frères  en  fussent  intimidés. 

6.  Atsanehoc  fortitudinem  et  robur  religionis  constan-  6.  Mais  ce  spectacle,  tout  horrible  qu'il  était,  ne  ser- 
ter  servandœ  illis  addidit,  ac  sustinendi  ea  omnia  quœ  vit  qu'à  les  rendre  plus  courageux  pour  la  défense  de 
eis  per  tyrannidem  inferri  poterant,                                             leur  loi,  et  plus  patients  au  milieu  des  supplices. 

7.  Mortuo  itaque  primo,  oblatus  ei  secundus.  Cui  qui-  7-  Le  premier  de  ces  frères  étant  mort  de  la  sorte,  on 
dam  puerorum  aiunt  :  Obsequere  iis  quae  rex  tibi  praeci-        fit  venir  le  second  ;  aussitôt  qu'il  parut,  quelques  enfants 
piet,  ne  pereas  sicut  periit  frater  tuus.                                        lui  crièrent  :  Obéissez  au  roi,  de  peur  que  vous  ne  mou- 
riez comme  votre  frère  ; 

8.  Qui  ait  :  Non  sum  fratre  meo  infirmior  corde,  neque  8.  Mais  il  leur  répondit  :  Je  n'ai  ni  moinsde  courage, 
minor  fide.  Afferte  ignem,  et  gladium  :  nec  minuatis  quic-  ni  moins  de  foi  que  mon  frère  ;  préparez  vos  feux  et  vos 
quam  illorum  quae  fecistis  fratri  meo.  Et  factum  est  ei  épées,  et  ne  diminuez  rien  des  tourments  que  vous 
quemadmodum  factum  fuit  fratri  ejus.                                          lui  avez  fait   souffrir.    On    le    traita    aussitôt    comme  on 

avait  traité  son  frère; 

9.  Et  appellavit  regem,  et  dixit  ei  :  Audi,  crudelis  sce-  9-  Et  s'adressant  au  roi,  il  lui  dit  :  O  le  plus  méchant 
lestissime  inter  homines,  ac  scito,  quod  nihil  nostri  obti-  des  hommes,  écoutez-moi,  et  sachez  que  si  vous  êtes  le 
nés,  nisi  corpora  :  spiritus  vero  nostros  nequaquam  maître  de  nos  corps,  vous  n'avez  néanmoins  nul  empire 
obtines  ;  et  paulo  post  pergent  ad  creatorem,  quos  res-  sur  nos  âmes  ;  elles  vont  se  réunir  à  leur  auteur  qui  les 
tituet  corporibus  ipsorum  cum  vivificabit  mortuos  gentis  revêtira  une  seconde  fois  de  leur  corps,  lorsqu'il  vivi- 
SU82,  et  caesos  populi  sui.                                                                fiera  ceux  de  sa  nation   qui  sont  morts,  et   ceux   de  son 

peuple  qui  ont  été  tués.  Il  mourut  enfin; 

10.  Et  deductus  est    tertius,  qui    annuens  manu,  dixit  10.  Et  on  en  amena  un  troisième,  qui,  après  avoir  fait 
régi  :  Cur  terres  inimice  ?  Scito    hoc  de  ccelo  nobis  im-        signe    de    la    main,    parla   ainsi  au  roi  :   Pourquoi  nous 
missum  esse,  quod  et  suscipimus,    gratias    Deo  agentes         menacez-vous,  prince  cruel  r  Sachez  que  c'est  le  ciel  qui 
et  ab  illo  prasmia  nostra  speramus.                                              permet  tous  les  maux  que  vous  nous  faites;    c'est  pour- 
quoi nous    les   acceptons  avec   joie   et  avec   actions  de 
grâces,   et   nous   en  attendons  la  récompense    de   Dieu 
même. 

11.  Et  demiratus  «st  rex,  itemque  adstantes,  fortitudi-  n.  Le  roi  ayant  admiré,  avec  tous  ceux  qui  étaient 
nem  adolescentis,  et  constantiam  mentis,  et  pulchritudi-  présents,  la  constance  inébranlable  de  ce  jeune  homme 
nem  sermonis.  Tum  jussit  ;  et  trucidatus  est.                             et  les  grâces  de    son  discours,  ordonna    qu'il   fût  mis  à 

morl,  ce  qui  s'exécuta  dans  le  moment. 

12.  Et  deductus  est  quartus,  qui  ait  :  Pro  Dei  reli-  12.  On  fit  avancer  le  quatrième,  et  il  dit  :  Nous  aban- 
gione  animas  nostras  venundamus,  ac  locamus,  ut  ab  eo  donnons  nos  vies  pour  notre  sainte  religion,  et  nous  les 
mercedem  exigamus,  ea  die,  cum  nulla  tibi  erit  excusatio  livrons  volontiers  aux  douleurs  les  plus  horribles,  pour 
in  judicio,  neque  sustinebis  cruciatus.                                          en  recevoir  de    Dieu    même    une    juste  récompense  au 

jour  que  vous  paraîtrez  à  son  jugement,  sans  appui  et 
sans  défense;  pour  y  être  condamné  à  des  tourments 
insupportables. 


IV. 


MACCABEES. 


V.  LES  SEPT  FRERES 


77 


t;.  Qui  jussit  ;  et  trucidatus  est.  Et  deductus  est  quin- 
tus,  cui  ait  :  Ne  putes  in  te  ipso,  Deum  nos  derel:- 
quisse  propter  ea  quœ  in  nos  immisit.  Sed  sane  ejus 
voluntas  est,  his  nobis  déferre  honorem,  et  amoiem  ;  et 
ipse  ulciscetur  nos  de  te,  et  de  tua  progenie.  Et  jussit; 
et  trucidatus  est. 


14.  Et  deductus  est  sextus,  qui  ait  :  Equidem  fateor 
Deo  delicta  mea,  credo  tamen  ea  mihi  dimittenda  fore 
mea  nece. 

15.  At  tu  jam  Deo  adversatus  es,  occidendo  eos  qui 
ipsius  amplectantur  religionem  ;  et  certe  rependet  tibi 
secundum  opéra  tua,  et  e  suo  mundo,  te  eradicabit.  Et 
prascepit  in  eum  ;  et  trucidatus  est. 

16.  Et  deductus  est  septimus,  qui  erat  puer.  Tune  sur- 
rexit  mater  ejus  intrepida,atque  imperturbata,  et  inspexit 
cadavera  filiorum.  Tum  ait  : 

17.  Filii  mei,  nescio  profecto  qualiter  concepi  unum- 
quemque  vestrum,  cumillum  concepi.  Neque  potuiappo- 
nere  illi  spiritum  :  neque  educere  in  mundi  hujus  auram  : 
neque  elargiri  illi  forlitudinem,  et  intellectum  :  sed  enim 
Deus  optimus  maximus  ipse  formavit  illum,  secundum 
voluntatem  suam  :  et  imaginem  ipsi  tribuit  secundum 
suum  beneplacitum  : 

18.  Et  eduxit  illum  in  mundum  sua  potentia,  consti- 
tuens  ei  terminum  vitse,  et  bona  statuta,  et  dispensatio- 
nem,  ut  ei  placet. 

10.  Vos  autem  jam  venundastis  Deo  corpora  vestra, 
quas  ipse  fecit,  et  animas  vestras,  quasi  ipse  creavit  :  et 
acquievistis  judiciis  ejus,  quas  decrevit.  Quare  felices  vos 
pro  iis,  quas  felicite.r  obtinuistis  :  ac  beati  vos  pro  iis, 
quas  vicistis. 

20.  Visum  autem  erat  Antiocho,  cum  eam  surrexisse 
vidisset,  ipsam  id  prasstitisse  timoré  perculsam  pro 
parvulo  filio,  et  existimavit  omnino,  illam  ipsi  prascep- 
turam  obedientiam  régi,  ne  pereat,  sicuti  perierunt  fra- 
tres  illius. 

21.  Cum  vero  audisset  verba  ipsius,  eum  puduit,  et 
erubuit. 

22.  Prascepitque  deduci  ad  se  puerum,  ut  hortaretur 
eum,  et  persuaderet  amorem  vitas,  et  deterreret  eum 
morte;  ne  omnes  isti  adversari  viderentur  ejus  imperio, 
et  eorum    sequerentur  exemplum    plurimi   hominum. 

2;.  Deductum  itaque  sermonibus  hortabatur,  et  divi- 
tias  pollicebatur  :  et  juravit  ei,  se  illum  proregem  sibi 
sulTecturum. 

24.  Sed  cum  puer  ad  ejus  verba  nequaquam  converte- 
retur,  neque  ea  curaret  :  conversus  est  rex  ad  matrem 
illius,  et  ait  illi  :  Infelix  mulier,  miserere  filii  tui  hujus, 
quem  solum  superstitem  habes,  et  hortare  eum,  ut  am- 
plectetur  mea  jussa,  et  évadât  ea  quas  evenerunt  fratribus 
ejus. 

!<,.  Quae  ait  :  Deducite  eum  ad  me,  ut  horter  ipsum 
verbis  Dei.  Et  cum  deduxissent  illum  ad  eam,  secessit  a 
turba.  Tum  osculata  est  eum,  et  irrisit  ea,  quas  ab  Antio- 
cho sibi  dicta  fuerunt  ;  deinde  dixit  ei  :  Fili  mi,  âge, 
quod  mihi  obedias,  quoniam  peperi  te,  et  lactavi,  et 
educavi,  et  edocui  te  divinam  religionem  : 

26.  At  aspicito  cœlum  et  terram,  et  aquam  et  ignem  : 
etintellige,  quod  Deus  unus  verus  ipse  creaverit  ea  :  et 
creaverit  hominem  ex  carne,  et  sanguine,  qui  parum  vivit, 
tum  morietur  : 

27.  Quare  time  Deum  verum,  qui  non  moritur  :  et 
obtempéra  veraci,  qui  non  permutât  premissa  :  nec 
timeas  hune  gigantem  vulgarem  :  et  morere  pro  religione 
Dei,  quemadmodum  mortui  sunt  fratres  tui  ; 


1;.  Il  cessa  de  parler  et  expira  dans  les  supplices. 
On  lit  venir  le  cinquième  qui  dit  au  roi  :  Ne  croyez  pas 
que  Dieu  nous  ait  abandonnés  en  nous  rendant  ainsi  le 
jouet  de  votre  puissance  et  de  votre  fureur  :  il  veut  que 
ces  maux  soient  pouF  nous  le  gage  de  son  amour  et  le 
sujet  d'une  gloire  véritable;  mais  il  nous  vengera  lui-même 
sur  vous  et  sur  votre  race.  En  disant  cela,  il  fut  mis  à 
mort  par  l'ordre  du  roi. 

14.  On  amena  le  sixième,  et  il  dit  :  Je  confesse  à  Dieu 
mes  iniquités,  toutefois  j'espère  que  ma  mort  m'en 
obtiendra  le  pardon. 

1;.  Mais  pour  vous,  ô  prince,  vous  vous  êtes  soulevé 
contre  Dieu,  en  faisant  mourir  ceux  qui  le  servent  ;  il 
vous  arrachera  de  dessusja  terre  ;  et,  en  disant  ces  mots 
il  fut  mis  à  mort. 

16.  Quand  on  eut  amené  le  septième,  qui  était  encore 
un  jeune  enfant,  la  mère  se  leva,  et.se  tournant  avec  un 
courage  inébranlable  vers  ces  cadavres  défigurés,  elle 
parla  en  ces  termes  : 

17.  Mes  enfants,  je  ne  sais  point  comment  je  vous  ai 
conçus  dans  mon  sein,  ce  n'est  pas  moi  qui  vous  ai  donné 
l'âme,  la  vie,  la  force  et  l'intelligence;  c'est  le  Très- 
Haut  qui  vous  a  formés  par  sa  volonté  bienfaisante,  et 
qui  vous  a  créés  à  son  image. 


18.  Il  vous  a  mis  au  monde  par  sa  puissance,  il  a  mar- 
qué le  cours  de  votee  vie  et  vous  a  donné  des  biens  pour 
en  jouir  autant  de  temps  qu'il  lui  plaira. 

10.  Vous  venez  de  lui  sacrifier  les  corps  et  les  âmes 
que  vous  aviez  reçus  de  lui,  et  vous  avez  été  fidèles  à  sa 
loi  aux  dépens  de  votre  propre  vie  ;  vous  jouissez  déjà 
de  cette  glorieuse  victoire,  et  elle  fait  dès  à  présenttout 
votre  bonheur. 

20.  Cependant  Antiochus  ayant  vu  cette  femme  se 
lever,  s'était  imaginé,  qu'attendrie  enfin  sur  le  dernier 
de  ses  enfants,  elle  allait  lui  persuader  d'obéir,  afin  qu'il 
ne  pérît  point  comme  ses  frères. 

21.  Mais  quand  il  l'eût  entendu  parler  avec  tant  de 
générosité,   il  rougit  de  honte  et  de  confusion, 

22.  Et  fit  approcher  ce  jeune  enfant  pour  l'exhorter 
lui-même  à  conserver  sa  vie,  craignant  que  l'exemple  de 
tous  ses  frères  n'en  entraînât  plusieurs  autres  dans  le 
mépris  de  ses  ordres. 

25.  Il  employa  pour  le  vaincre  tout  ce  qu'il  y  avait  de 
plus  flatteur;  il  lui  promit  de  grandes  richesses,  et  jura 
même  qu'il  le  ferait  le  plus  grand  de  son  royaume. 

2\.  Mais  ce  jeune  homme  ne  pouvait  être  ébranlé  par 
toutes  ces  promesses,  le  roi  se  tourna  vers  la  mère  et 
lui  dit  :  Malheureuse  mère,  ayez  pitié  du  seul  fils  qui 
vous  reste,  et  portez-le  à  m'obéir,  de  peur  qu'il  n'ait  le 
même  sort  que  ses  frères. 

2^.  Et  elle  dit  :  Qu'on  me  l'amène,  afin  que  je  l'exhorte 
au  nom  même  de  mon  Dieu  ;  et  quand  il  fut  approché, 
elle  le  tira  à  l'écart,  et,  au  mépris  des  ordresdu  roi,  elle 
lui  dit  en  l'embrassant  :  Mon  fils,  obéissez-moi  avec  cou- 
rage ;  puisqu'après  vous  avoir  enfanté,  je  vous  ai  nourri 
de  mon  lait,  je  vou;  ai  élevé  jusqu'à  l'âge  où  vousêtes, 
et  que  je  vous  ai  instruit  de  notre  loi  divine  : 

26.  Je  vous  conjure,  mon  fils,  de  regarder  le  ciel,  la 
terre  et  toutes  les  choses  qui  y  sont  renfermées,  et  de 
bien  comprendre  que  Dieu  les  a  créés  de  rien  aussi  bien 
que  l'homme  qui  est  composé  dï  chair  et  de  sang,  et  qui 
meurt  enfin,  après  avoir  vécu  quelque  temps. 

27.  C'est  pourquoi  craignez  le  vrai  Dieu  qui  jamais  ne 
cessera  d'être  :  obéissez  à  Celui  qui  est  la  vérité  même, 
et  dont  toutes  les  promesses  s'accompliront;  ne  redoutez 
point  ce  tyran  qui  n'est  digne  que  de  vos  mépris,  et 
mourrez  pour  la  défense  de  la  loi  de  Dieu  à  l'exemple  de 
vos  frères. 


278 


IV.—  MACCABÉES.—  V.-  LES  SEPT  FRÈRES 


28.  Si  enim  videres,  fili  mi,  honorem  domicilii  ipso- 
rum,  et  lumen  habitationis  eorum,  et  ad  quantam  perve- 
nerint  glonam,  utique  haud  patereris  non  sequi  eos  : 
equidem  spero  et  ego,  Deum  optimum  maximum  me 
prœparatum,  et  prope  sequor  vos. 


29. Tune  ait  puer  :  Sciatis  quod  obedio  Deo,  et  non 
obediam  Antiochi  praeceptis;  quare  ne  dilTeratis  me 
sequi  fratres  meos,  neque  impediatis  me  abire  quo  abie- 
runt. 

30.  Tum  dixit  régi  :  Vae  tibi  a  Deo,  quo  fugies  ab  eo  ? 
et  quo  confugies?  aut    cujus    implorabis  opem,  ne  sup- 

plicio  te  afiieiat  ? 

jl.  Equidem  benefecisti  nobis,  cum  constituisses  ma- 
lefacere  :  malefecisti  animas  tuas,  et  perdidisti  eam,  cum 
esses  arbitratus  benefacere.  Nos  autem  pergimus  ad 
vitam,  quam  non  sequetur  mors,  et  habitabimus  in 
lumine,  quod  non  removebunt  tenebras. 

52.  At  habitaculum  tuum  in  inferiserit,  cum  vehemen- 
tibus  Dei  suppliciis. 

33.  Ego  vero  confido,  Dei  iram  a  populo  suo  recessu- 
ram  propter  ea  quas  sustinuimus  pro  eo  : 

34.  Et  te  cruciatibus  afficiet  in  hoc  mundo,  et  perdet 
te  pessima  morte  :  et  tandem  ad  perpetuos  cruciatus 
abibis. 

3$.  Et  iratus  est  Antiochus,  videns  puerum  suo 
adversari  imperio  :  quare  jussit  ipsum  alïici  crucia- 
tibus prae  fratribus  ejus.  Et  factum  est  id,  et  mortuus 
est. 

36.  Rogavit  autem  matrem  ipsorum  Deum,  et  depre- 
cata  est  sequi  filios,  et  illico  mortua  est. 

37.  Tum  profectus  est  Antiochus  in  Macedoniam 
regionem  suam  :  et  scripsit  Felici,  et  reliquis  praefectis 
in  Syria,  ut  neci  traderent  Judœos  omnes,  exceptis 
illis,  qui  ejus  amplecterentur  religionem.  Et  obsecuti 
sunt  sui  imperio  ejus,  interficientes  multitudinem  homi- 
num. 


28.  Car  si  vous  pouviezdéeouvrir  quelques  rayons  de 
cette  gloire  qui  les  environne  dans  cet  heureux  séjour, 
dont  ils  sont  déjà  les  augustes  habitants,  vous  ne  pour- 
riez souffrir  qu'on  vous  retînt  ici  plus  longtemps;  et 
moi-même,  j'espère  que  le  Dieu  tout-puissant  m'y 
prépare  une  demeure,  et  que  dans  peu  je  vous  y  suivrai 
tous. 

29.  Alors  ce  jeune  enfant  s'écria  :  Qu'attendez-vous  ? 
Sachez  que  je  n'obéis  point  aux  ordres  d'Antiochus, 
mais  à  la  loi  de  Dieu  ;  ne  m'empêchez  donc  plus 
d'aller  rejoindre  mes  frères  dans  le  séjour  où  ils  sont 
déjà. 

30.  Ensuite  il  dit  au  roi  :  Malheur  à  vous  qui  allez 
tomber  sous  la  main  de  Dieu  !  Comment  vous  cacherez- 
vous  de  devant  sa  face,  et  qui  pourra  vous  garartir  de 
sa  fureur  ? 

31.  Vous  nous  avez  fait  du  bien  en  voulant  nous  nuire, 
et  vous  avez  perdu  votre  âme  en  croyant  la  rendre  heu- 
reuse. Nous  allons  entrer  dans  une  vie  qui  n'a  pour 
bornes  que  l'éternité  môme,  et  bientôt  nous  serons 
revêtus  d'une  lumière  qu'aucune  ombre  n'altérera 
jamais. 

32.  Mais  pour  vous,  ô  roi  impie,  l'enfer  va  ouvrir  son 
sein  pour  vous  recevoir,  et  la  justice  de  Dieu  vous  y 
prépare  des  supplices  sans  nombre. 

3;.  J'ai  cette  confiance  que  Dieu,  satisfait  de  ce  que 
nous  avons  souffert  pour  la  défense  de  sa  loi,  retirera 
enfin  sa  colère  de  dessus  son  peuple. 

34.  Mais  pour  vous,  il  vous  accablera  de  maux  dès  ce 
monde,  et  après  vous  avoir  fait  périr  par  une  mort 
funeste,  il  vous  livrera  à  des  tourments  qui  ne  finiront 
jamais. 

3$.  Antiochus,  irrité  qu'un  enfant  lui  résistât  ainsi, 
ordonna  qu'on  le  traitât  avec  encore  plus  de  rigueur  que 
ses  frères  ;  et  ce  jeune  homme  expira  enfin  au  milieu  des 
tourments. 

36.  Il  ne  restait  plus  que  la  mère,  qui  conjura  Dieu  de 
la  réunir  à    ses  heureux  enfants;  elle  mourut  aussitôt. 

37.  Antiochus  étant  de  retour  en  Macédoine,  écrivit 
à  Félix  et  aux  autres  gouverneurs  de  Syrie,  de  faire 
mourir  tous  les  Juifs  qui  refuseraient  d'embrasser  sa 
religion;  et  ses  ordres  furent  exécutés  avec  une  rigueur 
extrême. 


CHAPITRE  VI 


i.  Fugit  vir  quidam  nomine  Matliathias  filius  Jocha- 
nan,  in  aliquem  montium  munitorum  ;  et  confugerunt  ad 
eum  dispersi  homines,  et  quidam  sese  absconderunt  in 
locis  abditis. 

2.  Postquam  autem  longe  reeessisset  Antiochus  a  re- 
gione,misit  Mathathias  Judam  filium  suum  clam  in  civitates 
Jud«e,  ut  certiores  eos  faceret  de  sua,  suorumque  salute, 
et  ut  pergerent  ad  eum  quotquot  commoventur  fortitu- 
dine,  magnanimitate,  et  zelo  erga  religionem,  uxores  et 
liberos. 

?.  Et  perrexerunt  ad  eum  quidam  de  nobilioribus 
populi,  qui  remanserunt,  qui  eum  adessent  apud  eum, 
ait  illis  : 

4.  Nihil  nobis  restât,  nisi  oratio  ad  Deum,  et  confi- 
dentia  in  eo,  et  praslium  adversus  hostes  nostros,  ut 
forte  concédât  nobis  Deus  opem,  et  victoriam  contra 
eos.  Et  acquievit  populus  opinioni  Mathathias,  et  fece- 
runt  secundum  eam. 

5.  Et  renuntiatum  est  Felici,  et  profectus  est  adversus 
eos  eum  exercitu  magno  ;  et  nuntiatum  est  ei  dum  per- 
geret,  de  populo  Judasorum  esse  circiter  mille  homines 
ex  viris  et  mulieribus  congregatos,  et  in  spelunca  qua- 
dam  commoratos.ut  suam  servare  possent  religionem  ;  et 
declinavit  ad  eos  eum  aliquo  numéro  suorum  mittensduces 
virorum  suorum,cum  reliquo  exercitu  contra  Mathathiam. 

6.  Félix  autem  petiit  ab  iis,  qui  sunt  in  spelunca,  ut 
egrederentur  ad  eum,  et  consentirent  ingredi  suam  reli- 
gionem ;  at  ipsi  recusarunt  : 

7.  Unde  comminatus  est  se  suppositurum  (uitium,  et 
sustinuerunt  id,  et  non  sunt  egressi  ad  eum,  et  supposuit 
eis  fumum,  et  mortui  sunt  universi. 

8.  Cumque  pergerent  duces  exercitus  contra  Matha- 
thiam, et  pervenerunt  ad  eum,  ipso  parato  ad  praelium  : 
accessit  ad  eum  quidam  ex  nobilioribus  ducibus,  propo- 
nens  ei  obedientiam  régi,  et  ut  non  adversetur  ipsius 
imperio,ut  viveret  ipse,etquicum  eo  erant,et  non  périrent. 

9.  Cui  ait  :  Equidem  Deo  obedio  régi  vero  ;  at  vos 
obedite  régi  vestro,et  facite  quascumque  vobis  videntur, 
et  sese  a  loquendo  continuit. 

10.  Et  cceperunt  astruere  ei  insidias.  Et  venit  quidam 
de  pessimis  Judaaorum,  qui  eum  eis  erant,  et  concitavit 
eos  pergere  contra  eum,  et  bellum  constituere. 


11.  Et  irruit  in  illum  Mathathias  stricto  gladio,  et  am- 
putavit  caput  Judsei  ;  tum  percussit  ducem,  quem  Judaeus 
alloquebatur,  et  occidit  eum  quoque. 

12.  Videntes  autem  socii  Mathathiae  quod  fecerat,  fes- 
tinaverunt  ad  eum,  et  irruperunt  in  castra  inimicorum 
trucidantes  ex  eis  multitudinem  plurimam,  et  in  fugam 
verterunt  eos;  deinde  secuti  sunt  fugientes,  donec  inter- 
fecerunt  omnes. 

ij.  Post  haec  cecinit  Mathathias  buccina,  et  indixit 
expeditionem  contra  Felicem.  Et  ingressus  est  ipse,  et 
socii,  regionem  Judaeorum,  et  suscepit  plurimas  ex  civi- 
tatibus  eorum. 

14.  Et  quiescere  eos  fecit  Deus  excelsus  per  manus 
ejus  a  ducibus  Antiochi;  et  reversi  sunt  ad  observantiam 
suae  religionis,  et  recesserunt  ab  eis  manus  hostium 
ipsorum. 


1.  Matthathias  fils  de  Jochanan,  s'étant  enfui  sur  l'une 
des  montagnes  fortifiées,  plusieurs  Juifs  que  la  persé- 
cution avait  dispersés  s'y  retirèrent  avec  lui,  et  d'autres 
se  cachèrent  dans  des  lieux  écartés. 

2.  Lorsqu'Antiochus  fut  suffisamment  éloigné  de  Jéru- 
salem, Matthathias  envoya  secrètement  son  fils  Judas, 
dans  les  villes  de  la  Judée,  pour  les  informer  de  la  santé 
parfaite  dont  ils  jouissaient  lui  et  les  siens,  et  le  chargea 
de  lui  amener  tous  ceux  qui  avaient  assez  de  force  et 
de  courage,  ae  zèle  pour  leur  religion,  et  d'amour  pour 
leurs  femmes  et  leurs  enfants. 

?.  Quelques-uns  des  premiers  du  peuple  se  joignirent 
à  Judas,  et,  s'étant  rendus  auprès  de  Matthathias,  ce 
grand  homme  leur  parla  en  ces  termes  : 

4.  Il  ne  nous  reste  plus  présentement  qu'à  offrir  à 
Dieu  d'humbles  prières,  et  à  marcher  avec  confiance 
contre  un  ennemi  dont  sa  puissance  nous  fera  triompher. 
Cet  avis  plut  à  tout  le  monde,  et  l'on  se  mit  en  devoir 
de  l'exécuter. 

5.  Félix,  averti  de  la  résolution  de  Matthathias,  marcha 
contre  lui  avec  une  armée  nombreuse;  mais,  ayant  appris 
ensuite  qu'environ  mille  Juifs,  tant  hommes  que  femmes, 
s'étaient  enfermés  dans  une  caverne  pour  y  faire  en  paix 
l'exercice  de  leur  religion,  il  s'y  rendit  avec  quelques- 
uns  des  siens,  et  envoya  contre  Matthathias  ses  géné- 
raux avec  le  reste  de  l'armée. 

6.  Félix,  s'étant  approché  de  la  caverne,  exhorta  tous 
ceux  qui  y  étaient  cachés  de  le  venir  trouver  et  d'em- 
brasser sa  religion  ;  mais  ils  le  refusèrent. 

7.  Félix  les  ayant  ensuite  menacés  de  faire  allumer  du 
feu  à  l'entrée  de  la  caverne,  ils  restèrent  inébranlables  et 
périrent  tous  par  ce  supplice  plutôt  que  de  quitter  cet  asile. 

8.  Les  généraux  de  Félix  s'étant  avancés  vers  Mattha- 
thias, et  l'ayant  trouvé  en  état  d'accepter  le  combat  ; 
l'un  des  plus  distingués  d'entre  eux  l'exhorta  à  se  sou- 
mettre aux  ordres  du  roi,  de  peur  qu'il  ne  périt  avec 
tous  les  siens. 

0.  Matthatias  lui  répondit  :  Je  n'obéis  qu'à  Dieu,  le 
seul  et  véritable  souverain  ;  mais  pour  vous,  obéissez  à 
votre  roi  et  faites  tout  ce  qu'il  vous  plaira,  et  il  cessa 
de  parler. 

10.. Après  cela,  ils  commencèrent  à  tendre  des  embû- 
ches à  Matthathias  ;  et  un  de  ces  Juifs  impies,  qui  avait 
embrassé  le  parti  d'Antiochus,  vint  presser  les  généraux 
de  l'armée  de  marcher  contre  Matthathias,  et  d'engager 
le  combat. 

II.  Mais  Matthathias  s'étant  jeté  l'épée  à  la  main  sur 
ce  Juif  insolent,  lui  abattit  la  tète,  et  du  même  coup  tua 
le  général  à  qui  le  Juif  avait  adressé  la  parole. 

13.  Les  gens  de  Matthathias,  prenant  cette  action  gé- 
néreuse pour  le  signal  du  combat,  se  joignirent  promp- 
tenient  à  leur  chef,  et,  pénétrant  avec  lui  dans  le  camp 
des  ennemis,  ils  en  tuèrent  un  grand  nombre,  mirent  les 
autres  en  fuite  et  les  poursuivirent  jusqu'à  ce  qu'ils  les 
eussent  tous  massacrés. 

ij.  Après  ce  premier  avantage,  Matthathias  fit  sonner 
les  trompettes  et  tourna  sa  marche  Wers  Félix.  Et  il 
entra,  lui  et  ses  compagnons,  dans  la  Judée  et  se  rendit 
maître  de  plusieurs  villes. 

14.  Et  le  Très-Haut  délivra  ainsi  les  Juifs  des  géné- 
raux d'Antiochus,  et  ils  recouvrèrent  enfin,  avec  la 
paix  et  la  tranquillité,  la  liberté  de  vivre  dans  l'exercice 
de  leur  religion. 


CHAPITRE    VII 


i.  Mathathias  autem  infirmatus  est,  et  cum  prope  esset 
ut  moreretur,  vocavit  filios  suos,  qui  erant  quinque,  et 
ait  illis  : 

2.  Certe  scio  excitanda  fore  in  regione  Juda  bella 
quamplurima  ac  magna,  causa  eorum  pro  quibus  com- 
movit  nos  Deus  optimus  maximus  ad  bellandum  contra 
hostes  nostros. 

;.  Ego  autem  prœcipio  vobis  ut  timeatis  Deum,  et 
confidatis  in  illo,  et  asmulatores  sitis  legis,  et  sanctuarii, 
et  populi  ipsius,  et  prœparemini  ad  bellandum  contra 
hostes  illius  : 

4.  Nec  timeatis  mortem,  quoniam  omnibus  hominibus 
procul  dubio  décréta  est. 

Ç.  Quod  si  victores  vos  reddiderit  Deus,  jam  obtinuis- 
tis  quod  desiderabatis  :  si  vero  pereatis,  non  amittitur 
id  vobis  apud  illum. 

6.  Et  defunctus  Mathathias,  et  sepultus  est,  et  fecerur.t 
filii  ejus  secundum  quod  praecepit  eis.  Et  consenserunt 
praeficere  sibi  fratrem  suum  Judam. 

7.  Erat  Judas  frater  eorum  omnium  consilio  optimus, 
et  robore  fortissimus.  Et  missus  est  contra  eos  exercitus 
a  Felice  cum  viro  qui  dicebatur  Seron,  quem  fugavit 
Judas  cum  sociis  suis,  et  interfecit  multitudinem  magnam. 

8.  Et  divulgata  est  fjma  Judas,  ac  percrebuit  in  aures 
valde;  et  timuerunt  eum  omnes  gentes,  quas  erant  in 
circuilu  ejus. 

9.  Et  perlatum  est  régi  Antiocho  quidquid  fecerat 
Mathathias,  et  Judas  filius  ejus.  Pervenerunt  hsec  quo- 
que  ad  regem  Persarum,  unde  prasvaricatus  est  in  Antio- 
chum,  deficiens  ab  eo,  sequens  exemplum  Judas.  Quod 
quidem  cum  maximopere  alilixisset  Antiochum. 

10.  Vocavit  ad  se  virum  quemdam  de  domesticis  suis, 
qui  dicebatur  Lysias,  vir  strenuus  ac  fortis,  et  ait  illi  : 

11.  Jam  decrevi  proficisci  in  Persidis  regioneni  ad 
bellandum;  volo  autem  sufficere  post  me  filium  meum 
in  locum  meum,  et  ducere  mecum  dimidiam  partem  exer- 
citus, et  reliquam  partem  relinquere  cum  filio  meo;  et 
ecce  tradidi  gubernationem  filii  mei,  et  gubernationem 
virorum  quos  relinquo  cum  illo. 

1  2.  Et  quidem  scis  quid  fecit  Mathathias  et  Judas  ami- 
cis  meis,  et  viris  meis.  Quare  mitte  in  regionem  Judas 
ducentem  exercitum  potentem  ;  et  jubé  irruere  gladio  in 
regionem  Judas,  et  eradicare  eos,  et  destruere  domicilia 
eorum,  et  ipsorum  vestigia  delere. 

ij.  Dein  profectus  est  Antiochus  in  regionem  Persi- 
dis. Lysias  vero  expedivit  très  duces  strenuos  ac  fortes, 
et  in  bellis  peritos,  quorum  unus  dicebatur  Ptolemasus, 
alter  Nicanor,  tertius  vero  Gorgias.  Misitqje  cum  eis 
de  viris  electis  quadraginta  millia,  etseptem  m illia  equo- 
rum. 

14.  Tune  prascepit  eis  quoque  ut  adducerent  secum 
exercitum  de  Syris,  et  Palasstinis;  et  prascepit  eis  om- 
nino  extirpare  Judasos. 

15.  Et  profecti  sunt,  adducentes  secum  multitudinem 
mercatorum,  ut  venderent  eis  captivitatem,  quam  obten- 
turi  erant  de  Judœis. 


1.  En  ce  temps-là,  Matthathias  tomba  malade,  et  étant 
près  de  mourir,  il  fit  venir  ses  cinq  fils,  et  leur  parla 
en  ces  termes  : 

2.  Je  sais  certainement  qu'il  s'excitera  en  Judée  plu- 
sieurs guerres  importantes,  et  que  les  intérêts  de  notre 
Dieu  vous  mettront  de  nouveau  les  armes  à  la  main. 

;.  Je  vous  conjure  donc,  mes  enfants,  de  craindre  le 
Seigneur  et  de  mettre  en  lui  toute  votre  confiance,  brûlez 
d'un  saint  zèle  pour  sa  loi,  pour  I'honneurde  son  sanc- 
tuaire et  pour  la  défense  de  son  peuple. 

4.  Soyez  toujours  prêts  à  marcher  contre  les  ennemis 
de  son  nom,  et  ne  craignez  point  de  mourir;  puisque 
c'est  le  sort  inévitable  de  tous  les  hommes. 

ç.  Si  Dieu  vous  accorde  la  victoire  sur  vos  ennemis, 
il  ne  vous  restera  plus  rien  à  désirer.  Si,  au  contraire, 
il  permet  que  vous  périssiez  dans  le  combat,  ce  Dieu  ne 
laissera  point  sans  récompense  votre  zèle  et  votre  valeur. 

6.  Après  cela  Matthatihas  mourut  et  fut  mis  dans  le 
tombeau.  Ses  enfants  exécutèrent  ce  qu'il  leur  avait 
ordonné,  et,  d'un  commun  consentement,  ils  mirent  à 
leur  tête  Judas  leur  frère. 

7.  Or  Judas  lessurpassait  tous  en  sagesse  et  en  valeur. 
Alors  Félix  envoya  une  armée  contre  eux  sous  la  con- 
duite de  Séron  ;  mais  Judas  le  mit  en  fuite  après  lui 
avoir  tué  une  partie  de  ses  gens. 

8.  Le  nom  de  Judas  se  répandait  de  tous  côtés  et 
inspirait  la  terreur  à  toutes  les  nations  voisines. 

9.  Le  roi  de  Perse,  encouragé  par  l'exemple,  secoua 
le  joug,  ef  se  mit  en  état  de  soutenir  sa  révolte.  Antio- 
chus, vivement  louché  de  ce  coup  imprévu,  et  instruit 
de  tout  ce  que  Matthathias  et  son  fils  Judas  avait  fait 
contre  lui, 

10.  Fit  appeler  un  officier  de  sa  maison  qui  s'appe- 
lait Lysias,  et  qui  ne  manquait  ni  d'esprit  ni  de  courage, 
et  il  lui  parla  ainsi  : 

11.  J'ai  enfin  résolu  d'aller  porter  la  guerre  en  Perse, 
et,  dans  l'intention  où  je  suis  d'assurer  la  couronne  à 
mon  fils,  je  l'abandonne  à  vos  soins  et  à  votre  conduite, 
aussi  bien  que  la  moitié  de  l'armée  que  je  laisse  auprès 
de  lui. 

12.  Et  vous  n'ignorez  pas  de  quelle  manière  Mattha- 
thias et  Judas  ont  traité  mes  généraux  et  mes  soldats  : 
songez  donc  à  envoyer  en  Judée  une  armée  puissante  ; 
qu'elle  y  entre  le  fer  à  la  main,  qu'elle  extermine  le  peu- 
ple qui  l'habite,  qu'elle  détruise  ses  villes,  et  qu'elle  n'y 
laisse  rien  qui  en  puisse  renouveler  la  mémoire. 

ij.  Antiochus  étant  parti  pour  la  Perse,  Lysias  leva 
une  armée  de  quarante  mille  hommes  d'infanterie  et  de 
sept  mille  chevaux,  toutes  troupes  d'élite,  et  l'envoya 
sous  la  conduite  de  Plolémée,  Nicanor  et  Gorgias,  trois 
généraux  qui  joignaient  à  beaucoup  de  valeur  une  par- 
faite connaissance  de  la  guerre. 

14.  Il  leur  ordonna  en  même  temps  de  grossir  leur 
armée  des  troupes  qu'ils  trouveraient  en  Syrie  et  en 
Phénicie,  afin  d'anéantir  plus  aisément  toute  la  nation 
des  Juifs. 

15.  Ces  généraux  partirent  enfin,  menant  avec  eux 
un  grand  nombre  de  marchands  à  qui  ils  comptaient 
vendre  ceux  des  enfants  d'Israël  qu'on  devait  faire  escla- 
ves. 


IV.  —  MACCABÉES.—  VII.  -  DÉFAITE  DES  SYRIENS                        28! 

16.  Pervenit  autem  fa  ma  ad  Judam  filium  Mathathise,  16.  Judas,  fils  de  Matthathias,  intruit  des  desseins  de 
et  petiit  domum  Dei  optimi  maximi  ;  et  congregavit  ho-  l'ennemi,  vint  au  temple  du  Dieu  souverain  ;  et  y  ayant 
mines,  indixitque  eis  jejunium,  et  orationes,  et  preces  ad  fait  assembler  le  peuple,  il  ordonna  des  jeûnes  et  des 
Deum  optimum  maximum  :  et  ut  eum  deprecarentur  pro  prières  pour  obtenir  la  victoire. 

Victoria  contra  hostes  ;  quod  quidem  prœstiterunt. 

17.  Post  hœc  congregans  Judas  viros  suos,  constituit  17-  H  fit  ensuite  la  revue  de  ses  troupes,  les  divisa  par 
singulis  millibus,  principem  :  et  similiter  singulis  centum,  bandes  de  mille,  de  cent,  de  cinquante  et  de  dix  hom- 
virum  :  et  singulis  quinquaginta  :  et  singulis  decem.  mes,  et  établit  un  officier  pour  chacune  de    ces  bandes. 

18.  Tum  prœcepit  prœcini  in  exercitu  suo,  ut  revertatur  18.  Il  fit  aussi  publier  à  son  de  trompe,  dans  toute 
quisquis  timidus  est,  et  quemcumque  prœcepit  Deus  l'armée,  que  tous  ceux  qui  craignaient  l'ennemi  se  reti- 
dimitti  de  exercitibus.  Et  reversa  est  multitudo  magna  :  rassent,  selon  l'ordre  que  Dieu  en  avait  donné  lui-même  ; 
remanseruntque  cum  illis  septem  milli.i  virorum  stre-  et  de  toute  cette  multitude  nombreuse  il  ne  resta  que 
nuorum  ac  fortium,  et  in  bellis  peritorum,  iisque  assue-  sept  mille  hommes  pleins  de  force  et  de  valeur,  instruits 
torum  :  nec  quispiam  illorum  unquam  novit  fugam  ;  et  aux  travaux  de  la  guerre,  et  qui  jamais  n'avaient  fui  dans 
pr.ofecti  surit  contra  hostes  suos.  les  combats  :  ce  fut  avec   de   telles  troupes    que    Judas 

marcha  aux  ennemis. 

19.  Cum  autem  appropinquassent  eis,  oravit  Judas  ad  '9-  Et  comme  il  était  proche  il  pria  son  Dieu  de  ren- 
Dominum  suum,  rogans  eum,  ut  averteret  a  se  malitiam  verser  leurs  desseins  funestes  e  de  luiaccorderla  victoire 
hostis  sui,  et  ut  opitularetur  ei,  et   victorem  ipsum  red-  par  son  secours. 

deret. 

20.  Deinde  prœcepit  sacerdotibus  canere  buccinis,  20.  En. même  temps,  il  ordonna  aux  prêtres  de  sonner 
quod  prœctiterunt,  et  Deum  invocaverunt  omnes  sui,  et  les  trompettes,  et,  à  ce  signal,  ils  se  jetèrent  tous  au 
in  exercitum  Nicanoris  irruerunt.  nom  du  Seigneur  sur  l'armée  de  Nicanor. 

21.  Et  concessit  illis  Deus  victoriam  contra  eos,  et  21.  Dieu  leur  donna  la  victoire  ;  ils  battirent  Nicanor 
fugaverunt  illum  ac  socios  ejus,  interficientes  ex  illis  avec  toute  son  armée,  lui  tuèrent  neuf  raille  hommes  et 
novem  millia  virorum  ;  reliqui  autem  dispersi  sunt.  obligèrent  les  autres  à  prendre  la  fuite. 

22.  Et  reversus  est  JuJas,  et  amici  ejus  ad  castra  Nica-  22.  Judas,  suivi  des  siens,  rentra  dans  le  camp  des 
noris,  et  deprœdati  sunt  ea,  diripueruntque  bona  merca-  ennemis,  mit  tout  au  pillage,  prit  toutes  les  richesses 
torum  plurima,  et  miserunt  ea  dividenda   inter  infirmos.  des  marchands  et  les  fit  distribuer  à  ceux  qui  étaient  dans 

le   besoin. 

2j.  Hœc    autem    pugna    fuit  feria    sexta  ;   quare  stetit  :?.  Ce  combat  se  livra  le  sixième  jour  de  la  semaine  ; 

Judas,  et  sui,  eodem   in    loco,  donec    pertransiret    dies  c'est  pourquoi  Judas  et  les   siens  restèrent  sur  le  champ 

sabbati.  de  bataille  jusqu'à  ce  que  le  jour  du  sabbat  lût  passé. 

24.  Tum  profecti  sunt  contra  Ptolemaeurn,  et  Gorgiam,  24-  Le  lendemain,  il  joignit  Ptolémée  et  Gorgias,  il  les 
quos  invenientes  expugnaverunt,  et  victoriam  reporta-  vainquit  et  leur  tua  vingt  mille  hommes  :  ces  deux  géné- 
verunt  ex  eis,  occidentes  ex  eorum  exercitu  viginti  millia.  raux  prirent  la  fuite  et 'furent  suivis  par  Judas;  mais, 
Et  fugerunt  Ptolemœus  et  Gorgias,  quos  secutus  est  ayant  SaSné  la  ville  des  deux  idoles,  et  s'y  étant  retran- 
Judas  cum  sociis  :  tamen  eos  comprehendere  non  potuit,  chés  avec  les  débris  de  leur  armée,  ils  échappèrent  de 
quoniam  sese  contulerunt  in  civitatem  duorum  idolorum,  ses  mains. 

et  sese  munierunt  in  ea  cum  reliquis  viris  suis. 

25.  Et  invasit  Judas  Felicem,  et  fugatus  est  ante  eum,  2;.  Judas  marcha  ensuite  contre  Félix,  qui  prit  la  fuite 
quem  secutus  est  Judas.  Qui  veniens  in  domum  quam-  et  se  retira  dans  une  maison  voisine  et  bien  retranchée, 
dam  proximam,  ingressus  est  eam,  et  clausit  januas  ;  erat  dont  il  fit  barricader  la  porte. 

autem  domus  munita. 

26.  Et  prœcepit  Judas,  et  succendit  eam  igni,  et  coin-  26.  Mais  Judas,  qui  l'y  poursuivit,  y  fit  mettre  le  feu, 
busta  est  domus,  combustus  est  Félix.  Sumpsit  ergo  de  et  vengea  par  la  mort  de  Félix  celle  d'Éléazar  et  de  plu- 
eo  Judas  vindictam  Eleazari,  et  aliorum,  quos  interfe-  sieurs  autres  dont  cet  homme  indigne  avait  versé  le  sang, 
cerat  Félix.  Post  hœc  reversus  est  populus  ad  interfec-  Après  cela,  les  soldats  de  Judas  vinrent  visiter  les  morts, 
tos,  et  acceperunt  spolia,  et  arma  ipsorum  :  miserunt  prirent  leurs  dépouilles  et  leurs  armes,  et  envoyèrent  à 
autem  prœstantiora  prœdœ  in  regionem  anctam.  à  la  ville  Sainte  ce  qui  se  trouva  de  plus  précieux  par- 
mi le  butin. 

27.  At  Nicanor  mutato  habitu  ignotus  abivit,  et  rêver-  27-  Nicanor,  ayant  changé  d'habit,  se  sauva  sans  être 
sus  est  ad  Lysiam,  indicavitque  ei  omnia  quœ  sibi  suis-  connu,  et,  s'étant  rendu  auprès  de  Lysias,  il  lui  apprit 
que  evenerant.  quel  était  son  sort  et  celui  de  toute  l'armée. 


CHAPITRE  VIII 


i.  Reversas  est  autem  Antiochus  de  regione  Persidis, 
fugiens  dimisso  exercitu.  Qui  cum  intellexisset  quod  acci- 
dit  exercitui  suo,  quem  miserat  Lysias,  et  omnibus  viris 
suis,  egressus  est  cum  exercitu  magno,  petens  regionem 
Judas. 

2.  Qui  pergens  cum  ad  médium  pervenisset  iter,  per- 
cussit  illum  Deus  telis  maximis  :  at  id  nequaquam  illum 
remorari  potuit  ab  itinere,  sed  institit  iili,  proferens 
omnia  gênera  injuriarum  in  Deum,ac  dicens:  Quod  nemo 
illum  avertere,  aut  impedi  posset  a  decretis  suis  ; 

;.  Quare  percussit  quoque  illum  Deus  optimus  maxi- 
mus  ulceribus  totum  invadentibus  ejus  corpus  :  nec 
tamen  destitit,  aut  corripuit  se  ab  itinere,  sed  auctus  est 
ira,  et  aviditate  percitus  obtinendi  quod  der.reverat,  et 
consequendi  quod  deliberaverat. 

4.  Erant  autem  in  exercitu  ejus  elephanti  quamplurimi. 
Accidit  ergo  ut  quidam  eorum  fugeret,  et  barritum  ede- 
ret  ;  quamobrem  diffugerunt  equi  portantes  lectum  in  quo 
jacebat  Antiochus,  et  excusserunt  illum. 

5.  Cum  autem  esset  corpore  obesus,  debilitata  sunt 
membra  ejus,  et  quœdam  juncturae  divulsae  fuerunt  :  et 
ulcerum  quidem  ejus,  quae  fœtorem  jam  emittabant,adeo 
fcetor  auctus  est,utneque  ipse  sustinere  amplius  posset, 
nec  qui  ad  eum  accedebant. 

ô.Cadentem  itaque  sustulerunt  servi,  et  super  humeros 
portaverunt  :  ingruente  vero  fcetore  projecerunt  illum, 
et  longe  recesserunt. 

7.  Videns  itaque  quae  mala  cum  convenerunt,  pro 
certo  credidit,  id  totum  supplicium  sibi  evenissea  Deo 
optimo  maximo  propter  injuriam,  ac  tyrannidem  Hebrasis 
illatam  et  sanguinis  eorum  effusionem  injuste  perpe- 
tratam. 

8.  Timens  ergo  conversus  est  ad  Deum,  et  peccata  sua 
confitens  dixit  ;  Deus,  utique  mereor  quae  in  me  immi- 
sisti  :  et  quidem  justus  es  in  judiciis  tuis  :  humilias  qui 
exaltatur,  et  diminuis  qui  superbit  :  iibi  vero  est  magni- 
tudo,  et  magnificentia,  et  majestas,  et  fortitudo. 

9.  Vere  inquam,  oppressi  populum  hune,  et  tyrannice 
egi,  et  decrevi  in  ipsos. 

10.  Parce,  quaeso,  Deus  lapsum  hune  meum,  et  dimitte 
peccatum  meum,  et  elargire  mihi  sanitatem  meam  ;  et 
meum  erit  implere  thesauros  domus  tuas  auro,  et  argento: 
et  sternere  domum  sanctuarii  veslimentis  purpureis, 

11.  Et  circumeidi,  et  praeconio  edicere  per  universum 
regnum  meum  te  esse  Deum  verum  solum,non  habentem 
participem,  nec  esse  Deum  praster  te. 

12.  At  nequaquam  exaudivit  Deus  illius  preces,  nec 
orationem  excepit  :  sed  adeo  multiplicata  sunt  mala 
ipsius,  ut  emitteret  viscera  :  et  adeo  creverunt  ulcéra,  ut 
decideret  caro  ejus  a  corpore. 

ij.  Dein  mortuus  et  sepultus  est  in  loco  suo.  Et  regna- 
vit  filius  ejus  loco  ejus,  eratque  nomen  ipsius  Eupator. 


1.  Antiochus  ayant  été  battu  en  Perse,  abandonna  son 
armée  par  une  fuite  honteuse  et  revint  dans  son  royaume; 
mais  lorsqu'il  eût  appris  l'entière  défaite  des  troupes  que 
Lysias  avait  envoyées  contre  les  Juifs,  il  se  mit  à  la  tète 
d'une  puissante  armée  et  marcha  vers  la  Judée. 

2.  Il  avait  fait  à  peine  la  moitié  du  chemin  que  Dieu  le 
frappa  d'une  manière  terrible  :  Antiochus  cependant 
s'obstinait  à  poursuivre  sa  marche  et  vomissait  contre  le 
ciel  les  plus  horribles  blasphèmes,  disant  que  rien  ne 
pourrait  le  détourner  de  son  entreprise,  ni  l'empêcher  de 
l'exécuter. 

5.  Alors  le  Dieu  tout-puissant  le  couvrit  d'ulcères 
depuis  les  pieds  jusqu'à  la  tète;  mais  ces  coups,  bien 
loin  d'arrêter  ce  prince,  ne  firent  qu'irriter  davantage  sa 
colère  et  le  désir  violent  d'achever  sa  première  entre- 
prise. 

4.  11  traînait  après  lui  un  grand  nombre  d'éléphants,  et 
l'un  de  ces  animaux  étant  sorti  de  son  rang  avec  des  cris 
épouvantables,  les  chevaux  qui  traînaient  le  char  où 
reposait  Antiochus  en  prirent  l'épouvante  et  le  renver- 
sèrent par  terre. 

<,.  Ce  prince,  qui  était  gros,  fut  fort  affaibli  de  cette 
chute  et  se  rompit  même  quelques  parties  du  corps  : 
outre  cela,  l'horrible  puanteur  qui  sortait  de  ses  ulcères 
devenait  si  violente,  que  ni  lui  ni  ceux  qui  l'appro- 
chaient ne  la  pouvaient  plus  supporter. 

6.  Cependant  ses  serviteurs  le  relevèrent  et  le  chargè- 
rent sur  leurs  épaules  ;  mais  l'infection  s'augmentant  de 
plus  en  plus,  ils  furent  contraints  de  le  mettre  par  terre 
et  de  s'éloigner. 

7.  Dans  cette  affreuse  situation,  Antiochus  ne  douta 
plus  que  ce  ne  fût  le  Dieu  tout-puissant  qui  se  vengeait 
sur  lui  de  tous  les  maux  qu'il  avait  faits  aux  Juifs,  et  qui 
lui  redemandait  tout  le  sang  qu'il  avait  versé  avec  tant 
d'injustice. 

8.  Alors,  pénétré  de  crainte,  il  se  tourna  vers  Dieu,  et 
confessant  ses  crimes,  il  lui  dit  :  Seigneur,  j'ai  mérité 
tous  ces  châtiments  et  vous  êtes  juste  dans  vos  juge- 
ments, vous  humiliez  celui  qui  s'élève,  vous  abaissez 
celui  qui  s'enfle  d'orgueil,  et  c'est  à  vous  seul  qu'appar- 
tient la  grandeur,  la  magnificence,  la  force  et  la  majesté. 

9.  11  est  vrai  que  j'ai  opprimé  votre  peuple,  que  je  l'ai 
tyrannisé  et  que  j'en  avais  résolu  la  perte. 

10.  Mais,  Seigneur,  retirez  votre  main  de  dessus  moi, 
oubliez  mon  iniquité  et  rendez-moi  la  santé.  Je  remplirai 
d'or  et  d'argent  les  trésors  de  votre  temple.  Je  cou- 
vrirai de  tapis  de  pourpre  le  pavé  de  votre  sanctuaire. 

11.  Je  prendrai  sur  moi  la  marque  de  la  circoncision, 
et  je  ferai  publier  dans  toute  l'étendue  de  mon  empire, 
que  vous  êtes  le  seul  Dieu  véritable  et  qu'il  n'y  en  a 
point  d'autre  que  vous. 

u.  Mais  Dieu  n'écouta  point  les  prières  de  ce  prince, 
et  ses  maux  s'augmentèrent  tellement,  qu'il  jetait  ses 
entrailles;  et  ses  ulcères  s'augmentèrent  au  point  que 
toutes  ses  chairs  tombaient  en  lambeaux. 

1  ?.  Il  mourut  enfin  et  fut  mis  dans  le  tombeau  de  ses 
pères,  laissant  Eupator  son  fils,  héritier  de  sa  couronne. 


CHAPITRE    IX 


i.  Cum  fugasset  Judas  Ptolemasum,  et  Nicanorem,  et 
Gorgiam,  et  occidisset  viros  eorum,  reversus  est  ipse,  et 
viri  ejus  in  regionem  domus  sanctœ. 

2.  Praecepitque  destrui  omnia  altaria  quae  extrui  jus- 
serat  Antiochus,  et  amovit  omnia  idola,  quas  erant  in 
sanctuario,et  éedificarunt  altare  novum,  jussitque  offerri 
sacrificia  super  illud. 

)  Oraverunt  quoque  ad  Deum  optimum  maximum  ad 
educendum  ignem  sanctum  qui  maneret  in  altari  ;  et 
egressusest  ignis  de  quibusdam  lapidibus  altaris,  et  com- 
bussit  ligna  ac  sacrificia  ;  et  ex  eo  remansit  ignis  in 
altari  usque  ad  tertiam  transmigrationem. 

4.  Feceruntque  tune  soiemnitatem  altaris  novi  octo 
diebus,  incipientibus  die  quinta  et  vicesima  mensis  Cas- 
leu.  Tum  autem  posuerunt  panem  super  mensam  domus 
Dei,  et  accenderunt  lucernas  candelabri. 

<,.  Singulis  autem  diebus  horum  octo  conveniebant  ad 
orationem,  et  laudem  :  constitueruntque  prœterea  id  in 
ritum  singulis  annis. 


1.  Judas  étant  revenu  à  Jérusalem  après  avoir  taillé  en 
pièces  l'armée  de  Ptolémée,  de  Nicanor  et  de  Gorgias, 
et  les  avoir  forcés  eux-mêmes  à  prendre  la  fuite,  se  tint 
auprès  du  temple  saint. 

2.  Il  abattit  tous  les  autels  qui  avaient  été  élevés  par 
ordre  d'Antiochus,  ôta  les  idoles  qui  étaient  dans  le 
sanctuaire  et  fit  dresser  un  nouvel  autel  sur  lequel  il  fit 
offrir  des  sacrifices. 

5.  Alors  les  enfants  d'Israël  prièrent  le  Dieu  tout- 
puissant  d'envoyer  du  ciel  le  feu  sacré  et  qu'il  ne  cessât 
jamais  de  brûler  sur  l'autel  ;  et  il  sortit  du  feu  de  quel- 
ques-unes des  pierres  de  l'autel,  et, après  avoir  consumé 
le  bois"  et  les  victimes,  il  s'y  conserva  toujours  depuis 
jusqu'au  temps  de  la  troisième  captivité. 

4.  On  fit  ensuite  la  dédicace  de  ce  nouvel  autel,  et  elle 
dura  huit  jours  ayant  commencé  le  vingt-cinquième  jour 
du  mois  de  Casleu  ;  l'on  mit  aussi  les  pains  de  pro- 
position sur  la  table  de  la  maison  du  Seigneur,  l'on  alluma 
le  chandelier  ; 

?.  Et,  tous  les  jours  de  l'octave,  on  s'assemblait  au 
temple  pour  la  prière  ;  l'on  ordonna  encore  que  cette 
solennité  se  renouvellerait  tous  les  ans. 


CHAPITRE  X 


i.  Post  dies  autem  dedicationis,  profectus  est  Judas  in  i.  Apres  la    fête   de    la   dédicace,  Judas  s'avança  dans 

regionem  Idumasorum,  videlicet  in  montem  Sarah  ;  Gor-  l'idumée  jusqu'au  mont  Sarah  où  était  Gorgias,  qui,  sans 

gias  enim   ibi    morabatur.  Et  egressus  est  contra    ipsum  l'attendre,  en  descendit  et  vint  à  sa  rencontre  avec  une 

Gorgias  cum  exercitu  magno,  et  fuerunt  inter  eos  pugnas  armée  nombreuse.  Ils  se  livrèrent  des  combats  sanglants, 

magnas  perieruntque  de  viris  Gorgias  viginti  millia.  et  Gorgias,  après  y  avoir  perdu  vingt  mille  hommes, 

2.  Et  fugit  Gorgias  ad  Ptolemasum  in  terram  occidentis  2.  Vint  trouver  Ptolémée  dans  les  provinces  de  l'occi- 
(praefecerat  enim  illum  Antiochus  illi  regioni,  moraba-  dent,  où  il  était  par  ordre  d'Antiochus,  et  lui  apprit  la 
turque  ibi),  et  indicavit  ei  quod  sibi  acciderat.  défaite  de  son  armée. 

3.  Quare  egressus  est  Ptolemasus  cum  exercitu,  in  quo  3.  Alors  Ptolémée  se  mit  en  marche  avec  une  armée 
erant  centum  et  viginti  millia  de  viris  Macedonum,  et  de  cent-vingt  mille  hommes,  tant  Macédoniens  qu'occi- 
viris  occidentis.  Profectus  autem  est  donec  pervenit  in  dentaux  ;  et,  s'étant  avancé  jusqu'en  Galaad,  à  Giarès  et 
regionem  Giares,  id  est  Galaad,  et  adjacentia,  et  occidit  aux  environs,  il  immola  partout  un  grand  nombre  de 
ex  Judasis  multitudinem  magnam.  Juifs. 

4.  Scripserunt  itaque  Judas  indicantes  ei  quod  sibi  4.  Ces  peuples  alarmés  firent  aussitôt  savoir  à  Judas  le 
evenit,  invocantes  eum  ad  debellandum  Ptolemasum,  et  triste  sort  de  leurs  frères,  et  le  conjurèrent  de  venir 
depellendum  a  se.  chasser  Ptolémée  de  leur  pays. 

5.  Et  pervenit  ad  eum  epistola  eorum  eodem  tempore,  5.  Judas  reçut  en  même  temps  les  lettres  des  habitants 
quo  pervenit  ad  ipsum  epistola  ab  incolis  montis  Galileas,  de  la  montagne  de  Galilée,  qui  lui  marquaient  les  combats 
indicantibus  quoque  illi,  qualiter  Macedones,  qui  sunt  que  leur  avaient  déjà  livrés  les  Macédoniens  de  Tyr  et 
Tyri  et  Sydone,  jam  convenissent  contra  eos,  et  bello  de  Sidon,  et  le  carnage  qu'ils  faisaient  de  plusieurs  de 
impetivissent,  occidentes  ex  eis.  leurs  habitants. 

6.  Cum  autem  legisset  Judas  utramque  epistolam,  coegit  6.  Après  avoir  communiqué  ces  lettres  aux  siens,  Judas 
viros  suos,  etsignificavit  eis  tenorem  epistolarum,  indixit-  ordonna  des  jeûnes  et  des  prières  ;  il  commanda  ensuite 
que  illis  jejunium  et  orationem.  Post  hase  jussit  fratri  suo  à  son  frère  Simon  de  se  mettre  à  la  tète  de  trois  mille 
Simoni,ut  secum  assumeret  tria  millia  virorum  de  Judasis,  Juifs,  et  d'aller  promptement  à  la  montagne  de  Galilée 
et  festinanter  pergeret  in  montem  Galileas,  et  elfringeret  pour  en  chasser  les  Macédoniens,  pendant  qu'il  irait  lui- 
Macedones,  qui  in  eo  erant  :  même  à  la  rencontre  de  Ptolémée. 

7.  Et  profectus  est  Simon.  Judas  vero  festinavit  in  7.  Simon  étant  parti  sur  le  champ  surprit  les  Macédo- 
occursum  Ptolemasi.  At  Simon  improviso  irruit  in  Mace-  niens,  leur  tua  huit  mille  hommes,  et  rendit  la  tranquillité 
dones,  interfecitque  ex  illis  octo  millia  virorum,  et  attulit  aux  Galiléens. 

quietem  Galilasis. 

8.  Judas  vero  profectus  est  donec  pervenit  ad  Gor-  8.  Pour  Judas,  il  ne  s'arrêta  point  qu'il  n'eût  atteint 
giam,et  Ptolemaeum:  urgens  eos,  ac  obsidens:  et  decer-  Gorgias  et  Ptolémée,  il  les  harcela  et  les  tint  serrés  de 
tarunt,  intercesserunt^ue  inter  eos  accerrimae  pugnas  :  près  ;  il  se  livra  de  rudes  combats. 

<).  Ptolemœus  enim  ducebat  multitudinem  numerosam,  9.  Ptolémée  avait  une  armée   nombreuse    et  aguerrie, 

fortem  ac    strenuam,  Judas  vero  paucissimo  erat   comi-  Judas,  au    contraire,  n'avait   que    très    peu  de    monde  ; 

tatus    numéro;  verumtamen,   cum    populus  qui    cum    eo  cependant  comme  c'était  l'élite  et  toute  la  valeur  d'Israël, 

erat,  constaret  fortissimis  atque  robustissimis.constanter  il  fit  une  longue  résistance.  Le  combat  fut  acharné  et  de 

restitit.  Etdiu  duravit  pugna  inter  eos,  et  invaluit  valde.  longue  durée. 

10.  Quare  exclamavii  Judas  ad  Deum  optimum  maxi-  10.  Alors  Judas  cria  vers  le  Dieu  tout-puissant,  et  le 
mum,  et  invocavit  eum.  Meminit  autem  se  vidisse  quinque  pria  de  l'assister  ;  car  il  avait  vu  cinq  jeunes  cavaliers, 
équités  juvenes  :  e  quibus  très  pugnabant  contra  exerci-  dont  deux  se  tenaient  à  ses  côtés,  et  les  trois  autres  com- 
tum  Ptolemasi,  duo  vero  stabant  secum.  battaient  contre  l'armée  de  Ptolémée. 

11.  Quos  cum  attente  contemplaretur,  visi  sunt  ei  angeli  11.  Et,  les  ayant  considérés  avec  attention,  ils  lui 
Dei.  Quamobrem  confortatum  est  cor  cjus,  et  corda  parurent  être  quelques-uns  des  anges  du  Seigneur.  Ce 
sociorum  :  et  irrumpentes  saspe  in  hostes  fugaverunt  eos,  prodige  rendit  le  courage  à  Judas  et  à  toute  son  armée; 
occidentes  ex  eis  multitudinem  plurimam.  après  plusieurs  eirorts,  il  mit  en  fuite  les  ennemis  et  en 

tua  un  très  grand  nombre, 

12.  Erat  autem  summa  eorum,  qui  interfecti  sunt  de  12.  En  sorte  que  leur  perte,  pendant  toute  la  durée  de 
exercitu  Ptolemasi,  ab  initio  pugnas  hujus  usque  ad  finen-,,  l'action,  se  montait  à  vingt  mille  cinq  cents  hommes, 
viginti  millium  quingentorum.  His  peractis,  fugit  Ptole-  Ptolémée,  après  cet  échec,  se  retira  vers  la  mer  avec  les 
masus,  et  viri  ejusad  oras  niaritimas,  débris  de  son  armée. 

13.  Persequente  eos  Juda,  et  interficiente  ex  illis  13.  Mais  Judas  l'y  poursuivit,  et  lui  tua  encore  tous 
quotquot  ipse  comprehendebat.  Ptolemasus  autem  fugit  ceux  qu'il  put  atteindre  ;  Ptolémée  s'enfuit  enfin  dans 
in  Gazam,  et  moratus  est  in  ea,  et  convenerunt  ad  eum  Gaza  et  s'y  arrêta.  Les  habitants  de  Chahsa  s'avançaient 
viri  Chalisam.  pour  se  jeter  dans  cette  place, 

14. Et  profectus  est  Judasad  eos,  quos  inveniens  expu-  14.  Mais  ils  furent  suivis  par  Judas, qui  les  attaquaet  les 

gnavit:  et  dispersi  sunt  viri  Ptolemasi, qui  confugit  in  Gazam,  contraignit  de  se  retirer  en  désordre  à  Gaza,  où  se  forti- 

ac  ibi  sese  munivit.  Et  persecuti  sunt  viri  Judas  palantein  liait  Ptolémée, et, ayant  été  poursuivis  par  quelques-uns  de 

populum,interfeceruntqueex  illis  multitudinem  plurimam.  ses  gens,  ils  perdirent  encore  un  grand  nombre  des  leurs. 

1$.  Perrexit    vero    Judas,  et    qui  remanserunt  cum  eo  15.  Judass'étant    approché  de  Gaza  avec    ce  qui    lui 

viri  Gazam,    et    castrametatus   est,  et  obsedit  eam.   Ke-  restait  de  troupes, il  mit  le  siège  devant  cette  place  et  fut 

versique  sunt  viri  Judas  ad  eum.  bientôt  rejoint  par  ceuxqui  étaient  allés  après  les  fuyards. 


IV.  —  MACCABÉES.  —  X.      SIÈGE   DE  GAZA                                285 

16.  Et  ascenderunt  qui  superfuerant  cum  Ptoloma;o  iô.  Cependant  les  assiégés  parurent  sur  les  remparts, 
munitionem,  multisque  Judam  injuriis  impetebant  :  per-  et  de  là  vomissaient  mille  injures  contre  Judas  ;  on  se 
duravitque  bellum  inter  eos,  et  viros  Judas  quinque  dies.  battit  cinq  jours  durant. 

17.  Cum  autem  adesset  dies  quintus,  institit  populus  17.  Tout  le  cinquième  jour,  les  gens  de  Ptolémée 
injuriis  ita  inurere  Judam,  et  maledictis  incessere  ipsius  ayant  redoublé  leurs  insultes  contre  Judas  et  leurs  blas- 
religionem  :  phèmes  contre  sa  religion. 

18.  Quamobrem  incaluerunt  de  viris  Judas  viginti  viri,  18.  Vingt  Juifs  ne  pouvant  plus  supporter  ces  outrages, 

qui  acceptis  clypeis    manu  sinistra,    dextera   vero   manu  prirent  leur  bouclier   de  la  main  droite  et  leur  épée  de 

gladiis,  habentes  secum  quemdam  ferentem  scalam,  quam  la  gauche,  et  suivis  d'un  homme  qui  portait  une   échelle 

l'ecerant,  profecti  sunt  donec  pervenerunt  ad  murum  :  qu'ils  avaient  faite,  s'avancèrent  jusqu'au  pied  de  la  mu- 
raille. 

10.  Steteruntque  ex  eis  viri  octodecim  jaculantes  in  eos  19.  Dix-huit  d'entre  eux  jetaient  des  traits  contre  ceux 

qui  erar.t  supra  murum,  duo  vero  festinantes  ad  murum,  qui  en  bordaient  le  haut,  pendant  que  deux  autres,   sans 

erexerunt  scalam,  et  ascenderunt  per  eam.  perdre   de    temps,    l'escaladèrent    avec   l'échelle   qu'ils 

avaient  apportée. 

20.  Animadvertentes  autem  quidam  qui  erant  eo  in  loco  :o.  Quelques-uns  de  ceux  qui  défendaient  la  muraille 
eos  ascendisse,  et  socios  insecutos  fuisse,  et  simul  s'étant  aperçus  que  les  gens  de  Judas  l'avaient  franchie 
descendisse  de  muro  intra  civitatem,  descenderunt  post  et  étaient  entrés  dans  la  place,  vinrent  les  attaquer  par 
eos  de  muro,  quos  expugnaverunt,  caeso  hostium  ma-  derrière;  mais  ils  perdirent  un  grand  nombre  des  leurs- 
ximo  numéro. 

21.  Exercitus  vero  Judai  applicuit  portas  civitatis,  21.  Ces  vingt  Juifs  s'étaient  avancés  jusqu'à  la  porte  de 
accurrentibus  viginti  versus  portam,  ut  earn  aperirent  :  la  place  pour  l'ouvrir  à  leur  armée  qui  les  y  attendait 
at  expellebantur  inde  acerrime  ;  quamobrem  invocabant  avec  Judas;  mais  ayant  été  repoussés  avec  vigueur,  ils 
exclamationibus  magnis.  jetèrent  de  grands  cris  pour  se  faire  entendre  des  leurs. 

22.  Cognovit  ergo  Judas  et  socii  ejus  ipsos  prope  22.  Alors  Judas  comprit  qu'ils  n'étaient  pas  éloignés 
portam  accessisse,  et  invaluit  pugna  extra  portam  et  de  la  porte,  et  enfin  après  un  long  combat  au  dedans  et 
intra;  et  igné  percussit  Judas,  et  socii  portam  quae  ceci-  au  dehors,  Judas  mit  le  feu  aux  portes,  se  rendit  maître 
dit;  et  periit  populus,  et  comprehensi  sunt  qui  Judam  de  la  place,  fit  brûler  en  sa  présence  ceux  qui  l'avaient 
injuriis  inurebant,  quos  adductos  jussit  comburi.  outragé  d'une  manière  si  injurieuse. 

25.  Prœterea   gladio   exierminari    civitatem    prœcepit,  2;.  Il  condamna  tous  les  habitants  à   périr  par  l'épée  ; 

perduravitque    clades   in   ea   duobus    diebus  ;  tum  igné  après  un  carnage  de  deux  jours,  la   ville  fui  réduite    en 

percussa  est.  cendres  par  ses  ordres. 

24.  Ptolemasus  vero  fugit,  nec  innotuit  eo  tempore  24.  Cependant  Ptolémée  trouva  moyen  de  s'échapper 
fama  ejus,  quoniam  mutatis  vestimentis  sese  abdiderat  in  sans  être  aperçu  ;  car  il  avait  changé  d'habits  et  s'était 
quodam  puteorum,  et  latuit  fama  ejus.  caché  dans  un  puits. 

25.  Duo  vero  fratres  ipsius  capti  sunt,  et  ad  Judam  25.  Deux  de  ses  Irères  ayant  été  pris  furent  amenés  à 
addueti  quorum  colla  percuti  gladio  jussit.  Judas  qui  leur  fit  couper  la  tète. 

26.  Post  hase  profectus  est  in  regionem  sar.ctuarii  cum  26.  Il  vint  ensuite  à  Jérusalem  avec  un  grand  butin,  il 
praeda  maxima,  oravitque  in  eo  ipse  et  socii,  gratias  y  offrit  ses  prières,  et  rendit  grâces  à  Dieu  avec  toute 
agentes  Deo  de  acceptis  beneficiis.  son  armée  de  la  protection  qu'il  leur  avait  accordée. 


CHAPITRE  XI 


i.  Erat  nomen  Antiochi,  cujus  prœcessit  mentio,  Epi- 
phanus  ;  nomen  vero  filii  ejus,  qui  regnavit  post  illum, 
Eupator,  qui  et  Antiochus  quoque  nominabatur. 

2.  Cumque  contigissent  prœlia  Judœ  contra  hos  duces, 
scripserunt  de  hoc  Eupatori,  qui  misit  cum  Lysia  fi  1  io 
patruelis  sui  magnum  exercitum,  in  quo  erant  octoginta 
millia  equitum,  et  octoginta  elephanti. 

j.  Qui  pervenientes  ad  urbem,  quœ  appellatur  Bethner, 
castrametati  sunt  circa  eam,  et  obsiderunt,  quippe  urbs 
ampla  erat,  et  in  ea  populus  multus. 

4.  Et  erexit  circa  eam  Lysias  tormenta  bellica,  insti- 
titque  oppugnare  cives. 

5.  Quod  cum  ad  Judam  perlatum  esset,  egressus  est 
ipse  cum  sociis  quosdam  montes  munitos  :  et  morati 
sunt  ibi,  ne  in  aliqua  urbe  morantes  peteret  eam  Lysias, 
et  obsideret,  et  opprimeret  eos. 

6.  Coegit  ergo  Judas  socios  suos,  et  statuit  cum  eis 
proficisci  ad  castra  Lysiœ  postquam  adeuntes  domum 
Dei  obtulerint  in  ea  sacrificia,  rogantes  Deum  optimum 
maximum  ut  averteret  a  se  malitiam  inimicorum  suorum, 
et  victoriam  sibi  in  ipsos  concederel  :  quod  quidem 
praestiterunt. 

7.  Post  hœc  perrexerunt  de  regione  Domus  sanctae  ad 
Bethner.  Statuerant  enim  opprimere  exercitum  impro- 
viso,  illumque  debellare  sine  contentione. 

8.  Ferunt  autem  sibi  apparaisse  personam  quamdam 
inter  ccclum  et  terram,  insidentem  equo  igneo,  haben- 
temque  in  manu  magnam  hastam,  qua  percutiebat  exer- 
citum Grœcorum.  Quare  addidit  eis  quod  viderant 
fortitudinem,  et  animos. 

9.  Et  festinantes  irruperunt  in  exercitum,  interfece- 
runtque  de  viris  ejus  multitudinem  plurimam.  Unde 
commotus  exercitus,  et  perturbatus  est  vehementissime, 
et  totus  in  fugam  promiscue  conversus. 

10.  Et  institit  gladius  Judœ,  et  sociorum  ;  et  occidit 
illis  undecim  millia  virorum,  et  mille  sexentos  équités. 
Fugatus  est  quoque  Lysias,  et  socii  ejus  ad  remotum 
locum  in  quo  tuto  morabatur.  Et  misit  ad  Judam  ut  sub- 
jectus  sit  régi,  salva  ejus,  populique  sui  religione  : 

11.  Cui  in  hoc  moram  congessit  Judas,  dummodo  scri- 
beretur  régi,  et  acciperetur  responsum  illorum  assensu. 
Et  scripsit  Judas  de  hoc  :  scripsit  quoque  Lysias  régi, 
significans  ei  quœ  evenerant,  et  quœ  expertus  est  de  ro- 
bore  et  fortitudine  gentis  ; 

12.  Et  quod  continuatio  bellorum  cum  illis  esset 
exterminatura  viros,  quemadmodum  exterminati  sunt 
prœcedentes  :  et  indicat  ipsi  prœterea  eorum  assensum, 
et  moram  suam,  donec  reciperet  epistolam  de  iis  quœ  sibi 
agenda  sunt. 

Ij.  Cui  respondit,  rectum  sibi  videri  pacem  inire  cum 
génie,  ablato  obice  eorum  exercendœ  religionis  ;  etenim 
hœc  ipsa  eos  induxit  ad  defectiones,  et  oppugnationes, 
prœdecessorum.  Prœcepit  quoque  ei  inire  cum  eis  fidus 
de  pace,  ei  obedientia,  ita  quidem  ut  nullus  opponatur 
illis  obex  in  negotio  religionis. 

14.  Scripsit  etiam  Judœ,  et  omnibus  Judœis,  qui  in  re- 
gione Judœ  secundum  hoc  ;  et  duravit  id  inter  eos  aliquo 
spatio  temporis. 


1.  Antiochus  dont  on  a  déjà  parlé,  s'appelait  Épiphane, 
et  son  fils  qui  lui  succéda  à  l'empire,  outre  le  nom 
d'Eupator,  portait  aussi  celui  d'Antiochus. 

2.  Les  généraux  macédoniens  ayant  été  battus  par 
Judas  en  plusieurs  rencontres,  en  écrivirent  à  Eupator 
qui  leur  envoya  une  puissante  armée  sous  la  conduite 
de  Lysias,  son  cousin  ;  elle  était  composée  de  quatre- 
vingt  mille  chevaux  et  de  quatre-vingts  éléphants. 

3.  Lorsque  ces  troupes  furent  arrivées  à  Bethner,  ville 
très  grande  et  très  peuplée,  elles  y  campèrent  et  l'en- 
vironnèrent de  toutes  parts. 

4.  Après  avoir  disposé  toutes  ses  machines  de  guerre, 
Lysias  commença  ses  attaques  ; 

5.  Mais  Judas  en  ayant  été  informé,  mena  promptement 
sonarmée  surquelquesmontagnes  élevées  et  s'y  retrancha, 
de  peur  que,  restant  enfermée  dans  les  villes,  Lysias  ne 
l'y  vînt  assiéger  et  ne  l'y  réduisît  aux  dernièresextrémités. 

6.  Ensuite  Judas  assembla  ses  gens  et  résolut  avec 
eux  de  forcer  Lysias  jusque  dans  son  camp,  après  qu'ils 
auraient  été  au  temple  du  Seigneur,  pour  y  offrir  des 
sacrifices  et  prier  le  Dieu  tout-puissant  de  leur  accor- 
der la  victoire,  en  rendant  inutiles  les  mauvais  desseins 
de  leurs  ennemis. Quand  ils  se  furent  acquittés  de  ce  devoir, 

7.  Ils  sortirent  de  Jérusalem  et  vinrent  droit  à  Bethner; 
car  leur  dessein  était  de  tomber  sur  l'ennemi  dans  le 
temps  qu'il  s'y  attendait  le  moins,  et  par  là  de  rendre  la 
victoire  plus  aisée. 

8.  Ils  rapportèrent  même  qu'il  y  avait  paru  entre  le 
ciel  et  la  terre  une  figure  humaine  montée  sur  un  cheval 
de  feu,  et  tenant  dans  sa  main  une  longue  pique,  dont 
elle  frappait  l'armée  des  Grecs,  ce  qui  ne  contribua  pas 
peu  à  relever  encore  leur   courage  et  leurs  espérances. 

9.  Alors  sans  différer,  ils  pénétrèrent  dans  le  camp  de 
Lysias,  et  le  remplirent  de  meurtres  et  de  carnage.  Les 
ennemis,  surpris  et  épouvantés,  s'enfuirent  tous  dans  un 
désordre  affreux. 

io.  Mais  Judas,  les  ayant  poursuivis,  leur  tua  onze 
mille  hommes  et  seize  cents  chevaux.  Lysias  contraint 
lui-même  de  se  sauver,  se  retira  dans  un  lieu  écarté, 
d'où  il  envoya  proposer  à  Judas  de  se  soumettre  au  roi, 
lui  accordant  néanmoins  pour  lui  et  pour  son  peuple  le 
libre  exercice  de  leur  religion. 

11.  Judas  répondit  qu'il  acceptait  ces  offres,  pourvu 
qu'on  y  fît  consentir  le  roi;  il  lui  écrivit  même  sur  ce 
sujet,  et  Lysias  en  fit  autant  de  son  côté,  lui  marquant 
les  pertes  qu'il  avait  faites  contre  cette  nation,  les  preuves 
éclatantes  qu'elle  avait  données  de  sa  valeur  en  tant  de 
rencontres, 

12.  Et  qu'il  était  à  craindre, qu'en  continuant  la  guerre, 
il  n'exposât  ce  qui  lui  restait  de  troupes  à  devenir 
comme  les  autres  la  proie  du  vainqueur.  Il  lui  marquait 
de  plus  les  conventions  laites  entre  Judas  et  lui,  et  la 
trêve  qu'ils  avaient  conclue  jusqu'à  ce  qu'il  eût  tait  sa- 
voir ses  ordres. 

ij.  Le  roi  lui  écrivit  qu'il  trouvait  bon  qu'on  fît  la  paix 
avec  les  Juifs,  et  qu'on  reçût  l'offre  qu'ils  faisaient  de  se 
soumettre,  ordonnant  en  même  temps  qu'on  ne  les 
inquiétât  en  aucune  manière  sur  l'exercice  de  leur  reli- 
gion, ce  qui  de  tout  temps  avait  été  le  sujet  et  le  pré- 
texte de  leurs  révoltes. 

1  4.  Le  roi  écrivit  aussi  la  même  chose  à  Judas  et  à  tous 
les  Juifs  ;  et  l'on  employa  quelque  temps  à  ces  négo- 
ciations. 


CHAPITRE  XII 


i.  Hoc  eodem  tempore,  cujus  prsecessit  mentio,  ccepe- 
runt  res  Romanorum  exaltari,  ut  adimpleret  Deus  opti- 
mus  maximus  quod  prasdixerat  Daniel  propheta(cui  pax) 
de  quarto  regno. 

2.  Erat  item  hoc  eodem  tempore  rex  quidam  in  Africa 
munificentissimus,  nomine  Annibal.  Erat  autem  regiae 
regniipsiusCarthago.  Hic  decrevit  Romanorum  occupare 
regionem. 

5.  Quamobrem  ad  oppugnandum  eum  convenerunt,  et 
multiplicata  sunt  bella  inter  eos,  ita  ut  commiserint  octo- 
decim  praslia  spatio  decem  annorum, 

4.  Nec  expellere  illum  valuerunt  de  sua  regione  ob 
innumerum  exercitum,  et  populum  illius. 

<,.  Decreverunt  ergo  cogère  magnum  exercitum  selec- 
tum  ex  omnibus  strenuis,  et  exercitibus,  et  fortissimis 
quibusque  suis,  et  impetere  Annibalem  in  bello,  et  sus- 
tinere,  donec  averterent  a  se  res  ipsius. 

6.  Quod  quidem  prasstiterunt  :  prasfeceruntque  exer- 
citui  duos  viros  praeclarissimos,  unius  nomen  erat  .-Emi- 
lius,  alterius  autem  Varro.  Qui  occurrentes  Annibali, 
commiserunt  cum  eo  bellum,  et  cassa  sunt  de  exercitu 
eorum  nonaginta  millia  virorum  ;  de  exercitu  vero  Anni- 
balis  ceciderunt  virorum  quadraginta  millia.  Interfectus 
quoque  est  /Emilius  eo   in  bello. 

7.  Varro  autem  fugit  in  civitatem  quamdam  maximam, 
munitissimam,  dictam  Venusiam  ;  quem  non  est  perse- 
cutus  Annibal  :  sed  Romam  profectus  est  ad  expiignan- 
dam  eam,  et  ibi  morandum. 

8.  Instititque  contra  eam  per  octo  dies,  cœpitque 
extruere  e  regione  illius  domicilia.  Quod  cum  vidissent 
cives,  deliberarunt  inire  pacem,  et  fcedus  cum  illo,  et 
dedere  regionem. 

9.  Erat  autem  inter  eos  juvenis  quidam  nomine  Scipio 
(erant  quippe  Romani  eo  tempore  sine  rege,  et  tota 
rerum  ipsorum  administratio  committebatur  trecentis 
et  viginti  viris,  quibus  praserat  vir  qui  dicebatur  Se- 
nior :) 

10.  Adest  ergo  eis  Scipio,  qui  Annibali  ejusque  obe- 
dientiœ  nequaquam  fldendum  esse  persuasit. 

11.  Cui  responderunt  se  nequaquam  ipsi  fidere,  nisi 
quod  illi  resistere  nequeant. 

12.  Quibus  ait  :  Regio  Africœ  militibus  omnino  des- 
tituta  est,  quia  omnes  cum  Annibale  sunt  ;  concedite 
ergo  mihi  turmam  de  electis  virorum,  ut  vadam  in  Afri- 
cain : 

ij.  Et  talia  in  ea  perpetrabo  gesta,  quorum  nuntia 
cum  ad  illum  pervenient,  forte  relinquet  vos,  et  libéra  • 
bimini  ab  eo,  et  quiescetis  ;  et  reparatis  rébus  vestris,  et 
roboratis,  si  iterum  pararet  reditum,  adversus  illum  satis 
eritis. 

14.  Quibus  recta  visa  est  Scipionis  sententia  ;  et  tradi- 
derunt  ei  triginta  millia  virorum  de  fortissimis  eorum.  Ft 
profectus  est  in  Afrieam  ;  cui  occurrens  Asdrubal  frater 
Annibalis,  praîliatus  est  cum  eo,  quem  vicit  Scipio  ;  et 
amputavit  collum,  accepitque  caput,  et  portans  cum  reli- 
qua  prasda,  reversus  est  Romam. 

15.  Et  conscendens  munitionem,  vocavit  Annibalem, 
et  ait  illi  :  Quomodo   valebis   contra    regionem  nostram 


1.  En  ce  même  temps-là,  les  Romains  s'élevèrent  à  un 
haut  point  de  grandeur  et  de  puissance,  afin  que  le  Dieu 
tout-puissant  accomplît  ce  que  le  prophète  Daniel 
(avec  qui  soit  la  paix)  avait  prédit  touchant  le  quatrième 
empire. 

2.  Il  y  avait  alors  en  Afrique  un  roi  puissant  nommé 
Annibal,  et  Carthage  était  le  lieu  où  il  tenait  sa  cour  ;  ce 
prince  étant  entré  en  Italie  dans  le  dessein  d'en  faire  la 
conquête, 

5.  Les  Romains  s'avancèrent  pour  le  combattre;  ils  en 
vinrent  souvent  aux  mains  les  uns  avec  les  autres  ;  en 
sorte  que,  dans  l'espace  de  dix  ans,  il  se  livra  dix-huit 
batailles. 

4.  Mais  les  Romains  n'ayant  pu  obliger  Annibal  à  quit- 
ter l'Italie,  et  n'étant  plus  en  état  de  se  soutenir  contre  un 
si  grand  nombre  d'ennemis, 

5.  Résolurent  de  former  une  armée  de  tout  ce  qu'il  y 
avait,  dans  l'empire,  d'hommes  vaillants  et  courageux 
pour  attaquer  Annibal,  ou  du  moins  se  mettre  en  état  de 
lui  résister,  jusqu'à  ce  qu'on  l'eût  contraint  de  renoncer 
aux  espérances  qu'il  avait  sur  l'Italie. 

6.  Quand  ces  troupes  furent  levées,  on  leur  donna  pour 
chefs  deux  hommes  célèbres  dont  l'un  s'appelait  Emilius, 
et  l'autre  Varron  :  ils  marchèrent  aussitôt  contre  Anni- 
bal, et,  lui  ayant  présenté  la  bataille,  ils  la  perdirent  : 
quatre-vingt-dix  mille  Romains  y  périrent  avec  Emilius, 
l'un  des  chefs,  et  les  ennemis  y  perdirent  eux-mêmes  qua- 
rante mille  hommes. 

7.  Varron  se  retira  à  Venuse,  qui  était  une  ville  très 
grande  et  très  forte;  mais  Annibal,  sans  l'y  poursuivre, 
vint  droit  à  Rome,  dans  le  dessein  de  la  prendre  et  d'en 
faire  le  siège  de  son  empire. 

8.  Il  employa  huit  jours  à  la  reconnaître,  et  les  Ro- 
mains, le  voyant  campé  sous  leurs  murs,  résolurent  enfin 
de  demander  la  paix  et  de  faire  alliance  avec  Annibal, 
en  le  rendant  maître  de  l'Italie. 

9.  Les  Romains  n'étaient  point  alors  gouvernés  par 
des  rois;  mais  toute  l'autorité  était  entre  les  mains  de 
trois  cent-vingt  sénateurs  qui  avaient  un  consul  à  leur 
tête.  Un  jeune  Romain  nommé  Scipion,  ayant  su  la  lâche 
résolution  de  ses  citoyens, 

10.  Vint  les  trouver  et  leur  dit  qu'ils  ne  devaient  ni 
se  soumettre  à  Annibal,  ni  compter  sur  la  foi  de  ses 
traités. 

11.  Mais  ils  lui  répondirent  qu'ils  ne  le  faisaient  que 
parce  qu'ils  n'étaient  point  en  état  de  lui  résister. 

12.  Alors  Scipion  leur  dit  :  L'Afrique  est  épuisée  de 
soldats,  Annibal  les  a  tous  amenés  en  Italie;  donnez- 
moi  donc  des  troupes  aguerries,  je  passerai  dans  ces 
pays  abandonnés  : 

1  j.  J'y  causerai  des  pertes  qui  obligeront  bientôt  An- 
nibal de  repasser  la  mer,  et  je  vous  délivrerai  de  cet 
ennemi  terrible;  ou,  s'il  lui  prenait  envie  de  revenir  en 
Italie,  au  moins  aurez-vous  le  temps  de  rétablir  vos 
affaires  et  de  vous  mettre  en  état  de  ne  plus  le  craindre. 

14.  Cette  proposition  ayant  été  reçue  de  tout  le  sénat, 
on  donna  à  Scipion  un  corps  d'élite  de  trente  mille 
hommes.  Il  passa  en  Afrique  avec  cette  armée,  et  mar- 
chant droit  à  Asdrubal,  frère  d'Annibal,  il  lui  présenta 
la  bataille  et  le  vainquit;  il  lui  fit  ensuite  couper  la  tête 
et  l'emporta  à  Rome  avec  le  reste  du  butin. 

i').  Et  s'étant  approché  des  retranchements  d'Annibal, 
il  le  fit  appeler    et   lui   dit  :   Qu'espérez-vous   faire   en 


i88 


IV.-  MACCABÉES.  —  XII.  -  ANNIBAL 


hanc,  cum  non  valeas  cxpellere  me  de  regione  tua,  ad 
quam  profectus  sum  :  destruxi  eam,  et  occidi  fratrem 
tuum.et  attuli  caput  ipsius.  Tum  projecit  ad  illum  caput. 

Quod  cum  Annibali  allatum  esset,  et  illud  cogno- 
visset,  auctus  contra  populum  est  furore,  ac  ira,  juravit- 
que  se  non  discessurum  nisi  expugnata  Roma. 

17.  At  cives  ut  illum  repellerent  a  se,  et  coercerent, 
deliberarunt  remitti  Scipionem.  ut  obsideret,  urgeretque 
Carthaginem.  Keversusqueest  Scipio,  et  exercitus  ejus  in 
Africain  :  et  castrametati  sunt  circumcicca  Carthaginem  ; 
et  obsederunt  eam  obsidioneaccerima. 

18.  Quamobrem  scripserunt  cives  ad  Annibalem,  dicen- 
tes  :  Tu  alienam  cupis  regionem,  quam  nescis  utrum 
obtinere  poteris,  necne  :  ad  regionem  vero  tuam  pro- 
fectus est,  qui  eam  occupare  intentât. 

Quamobrem  si  remoratus  fueris,dedemus  ei  regio- 
nem, et  trademus  domesticos  tuos,  et  omnia  bona  tua. 
et  thesauros  tuos,  ut  incolumes  evadamus  nos  et  bona 
nostra. 

20.  Cum  autem  perlata  ei  fuisset  epistola,  recessit 
Roma,  et  festinavit,  donec  pervenit  in  Africain  ; 

31.  Ad  quem  perrexit  Scipio  et  occurrit  ci,  commisit- 
que  cum  illo  ter  accerrimum  bellum  ;  et  csesi  sunt  de 
viris  ejus  quinquaginta  millia.  Annibal  vero  fugetus  sese 
contuiit  in  regionem  .Kgypti,  quem  insecutus  est  Scipio: 
et  cepit  Annibalem  captivum,et  reversus  est  in  Africain. 

::.  Oimque  esset  ibi,  indignatus  est  Annibal  sic  videri 
ab  Africanis;  quare  sumpto  veneno  inleriit. 

2:.  Et  obiinuit  Scipio  regionem  Africae,  atque  potitus 
est  omnium  bonorum,  et  domesticorum,  et  thesaurorum 
Annitv 

24.  Quamobrem  magnificat.»  est  fama  Romanorum, 
cœperuntque  inde  sumere  incrementuin  res  eorum. 


Italie,  vous  qui  n'avez  pu  m'empêcher  de  passer  en  Afri- 
que. J'ai  désolé  vos  provinces;  Asdrubal  votre  frère  est 
tombé  sous  mes  coups,  et  voilà  sa  tête  que  j'ai  apportée  ; 
et,  en  même  temps,  il  la  jeta  dans  son  camp. 

16.  Quand  Annibal  eut  reconnu  la  tète  de  son  frère,  il 
entra  dans  une  étrange  colère  contre  Rome,  et  jura 
qu'il  ne  quitterait  point  l'Italie  qu'il  n'eût  pris  cette  ville.- 

1;.  Cependant  les  Romains,  pour  se  délivrer  d'Anni- 
bal,  résolurent  de  renvoyer  Scipion  en  Afrique,  afin  qu'il 
fit  le  siège  de  Carthage.  Scipion  s'y  étant  donc  rendu 
avec  son  armée  attaqua  cette  ville  avec  tant  de  vigueur, 

18.  Que  les  habitants  écrivirent  a  Annibal  en  ces  ter- 
mes :  Vous  avez  regardé  l'Italie  comme  une  conquête 
digne  de  votre  ambition,  et  vous  y  faites  une  guerre 
dont  le  succès  est  fort  incertain,  pendant  que  vos  pro- 
pres états  sont  en  proie  à  l'ennemi. 

19.  C'est  pourquoi,  si  vous  différez  davantage  de  nous 
secourir,  nous  le  rendrons  maître  de  tout  le  pays,  et 
nous  lui  livrerons  vos  serviteurs,  vos  biens  et  vos  tré- 
sors, pour  nous  sauver,  nos  personnes  et  nos  biens. 

20.  Annibal,  avant  reçu  ces  lettres,  quitta  Rome  et  se 
hâta  de  repasser  en  Afrique. 

21  Scipion  n'eût  pas  plus  tôt  appris  son  arrivée  qu'il 
alla  à  sa  rencontre,  et  en  trois  combats  lui  défit  cin- 
quante mille  hommes;  il  le  poursuivit  lui-même  en  Egypte 
où  il  s'était  réfugié, et  l'ayant  fait  son  prisonnier,  il  revint 
en  Afrique. 

22.  Mais  Annibal,  ne  pouvant  soutenir  en  cet  état  les 
yeux  de  ses  sujets,  prit  un    poison  et   finit  ainsi  ses  jours. 

2j.  Scipion,  devenu  maître  de  l'Afrique,  s'empara  des 
biens,  des  esclaves  et  de  tous  les  trésors  d'Annibal. 

24.  Cette  conquête  répandit  partout  la  gloire  du  nom 
romain,  et  c'est  alors  que  commença  la  grandeur  de 
Rome  qui  depuis  alla  toujours  en  croissant. 


CHAPITRE    XIII 


i.  A  seniore  et  trecentis  viginti  rectoribus,  ad  Judam 
praefectum  militise,  et  Judeeos,  salus  vobis.  Jam  perla- 
tum  est  ad  nos  de  victoriis,  et  fortudine  vestra,  et  con- 
stantia  in    bellis,  quibus  Isetati  sumus. 


2.  Intelleximus  prasterea  concordiain  vobis  initam  fuisse 
cum  Antiocho.  Nos  scribimus  vobis  secundum  haec,  ut 
sitis  nobis  amici,  non  autem  Graecis,  qui  malefecerunt 
vobis. 

5.  Intendimus  praeterea  petere  Antiochism,  et  inferre 
bellum  civibus  ejus  ;  quare  festinate  indicare  nobis,  qui- 
bus  adversamini,  et  quibuscum  vobis  intercedit  amicitia, 
ut  faciamus  secundum  hoc. 

EXEMPLAR    FŒDERIS 

4.  Hoc  est  fœdus,  a  seniore,  et  trecentis  et  viginti 
ejus  rectoribus,  Juda  praefecto  militiae,  et  Judasis,  ut 
apponerentur  Romanis,  et  concordes  sint  Romani  et 
Judaei  in  bellis  et  victoriis  semper. 

J.  Quod  si  institerit  Romanis  bellum,  auxilium  ferent 
eis  Judas  et  populus  ejus,  nullo  praestito  auxilio  inimicis 
Romanorum,  annona,  sive  ullo  génère  armorum. 

6.  Cum  vero  acciderit  Judaeis  bellum,  auxilium  ferent 
eis  Romani,  quantum  valent  et  possunt,  nullo  praestito 
auxilio  inimicis  eorum  in  ullo  génère  auxilii. 

7.  Quemadmodum  vero  tenentur  Judsei  Romanis,  simi- 
liter  Romani  Judaeis,  sine  ullo  incremento  aut  decre- 
mento.  Et  acceptarunt  îd  Judas  et  populus  ejus  ;  et 
remansit  fœdus,  atque  perduravit  inter  eos,  el  inter 
Romanos  longo  tempore. 


1.  Ils  écrivirent  aux  Juifs  :  Le  consul  romain  et  les 
trois  cent  vingt  sénateurs  aux  Juifs  et  à  Judas  le  général 
de  leurs  troupes,  salut.  Le  bruit  de  vos  victoires  est 
déjà  venu  jusqu'à  nous,  et  nous  avons  appris  avec  joie 
quelle  est  la  valeur  de  votre  nation,  et  sa  constance  dans 
les  travaux  de  la  guerre. 

2.  Nous  savons  aussi  que  vous  avez  fait  alliance  avec 
Antiochus  ;  c'est  pourquoi  nous  vous  écrivons,  afin  que 
vous  nous  accordiez  votre  amitié  plutôt  qu'aux  Grecs, 
qui  vous  ont  fait  tant  de  maux. 

;.  D'ailleurs  nous  avons  résolu  d'aller  faire  la  guerre 
aux  habitants  d'Antioche;  ainsi  faites-nous  savoir  au  plus 
tôt  quels  sont  vos  amis  ou  vos  ennemis,  afin  que  nous 
puissions  prendre  nos  mesures  avec  les  uns  et  les  autres. 

COPIE  DU   TRAITÉ  D'ALLIANCE 

4.  Voici  l'alliance  laite  entre  le  consul  romain  et  les 
trois  cent  vingt  sénateurs,  d'une  part,  les  Juifs  et  Judas, 
leur  général,  de  l'autre,  afin  qu'ils  soient  toujours  unis 
ensemble,  et  dans  la  guerre  et  dans  la  paix. 

$.  S'il  survient  une  guerre  aux  Romains,  Judas  et  les 
Juifs  les  secourront,  et  ne  pourront  fournir  aux  ennemis 
des  Romains  ni  vivres,  ni  aucun  genre  d'armes. 

6.  De  même,  s'il  survient  une  guerre  au  peuple  juif, 
les  Romains  les  assisteront  autant  qu'ils  'e  pourront,  et 
ne  secourront  en  aucune  manière  que  ce  soit  les  enne- 
mis des  Juifs. 

7.  Et  les  conditions  de  l'alliance  seront  réciproques 
pour  les  uns  et  pour  les  autres,  sans  qu'on  puisse  y  ajou- 
ter ou  en  retrancher  la  moindre  chose.  Judas  et  les 
Juifs  acceptèrent  ce  traité,  et  il  subsista  longtemps  entre 
les  deux  nations. 


S.  B.  —  T.  XII. 


19 


CHAPITRE    XIV 


1.  Post  haec  coegit  Ptolemœus  cenlum  viginti  millia  i.  Ptolémée  ayant  rassemblé  une  armée  de  cent-vingt 
virorum,  et  équités  mille,  et  petiverunt  Judam.  Cui  occur-  mille  hommes  et  de  mille  chevaux,  vint  attaquer  Judas, 
rcns  Judas  cum  decem  millibus,  fugavit  illum  et  cecide-  qui,  suivi  seulement  de  dix  mille  hommes,  le  mit  en  fuite 
runt  de  viris  Ptolemasi.  et  lui  tua  une  grande  partie  de  cette  armée. 

2.  Qui  supplex  Judam  rogavit,  atque  deprecatus  est,  ut  2.  Ptolémée  vint  lui-même  se  jeter  aux  pieds  de  Ju- 
superstitem  dimitteret  ipsum,  juravitque  se  nunquam  das  et  le  prier  de  lui  accorder  la  vie,  lui  jurant  que 
amplius  ei  bellum  illaturum;  et  Judseis,  qui  in  cunctis  jamais  il  ne  prendrait  les  armes  contre  lui,  et  qu'il  ferait 
suis  regionibus,  bénéficia  collaturum.  du  bien  à  tous  les  Juifs  qui  étaient  dans  ses  états. 

5.  Cujus  misertus    est   Judas,   et    superstitem    dimisit,  ?•  Judas  eut  pitié  de  ce  prince,  il    lui    donna  la  vie,  et 

stetitque  ut  Ptolemœus  juramento  suo.  Ptolémée  observa  exactement  ce  qu'il  lui  avait  juré. 

4.  Gorgias  vero,  collectis    tribus  millibus    virorum  de  4.  Gorgias  ayant  ramassé  trois  mille  hommes  du  mont 

monte  Sarah,  id  est  Idurnseas,  et  quadringentis  equitibus,  Sarah  en  Idumée,  et  quatre  cents  chevaux,  vint  chercher 

occurrit  Judae,  et  interfecit  ducem   militias  Judae,  et  ali-  Judas,  tua  son  lieutenant  et  quelques  soldats, 
quos  de  viris  ejus. 

<,.  Tum  ad  illos  tetendit    Judas,  et    sui,  et    fugatus  est  5.  Mais  Judas  étant    survenu,  Gorgias   perdit    la    plus 

Gorgias,  et  interfecta    est    major   pars   virorum    ejus,  et  grande  partie  de  ses  troupes  et  prit    lui-môme   la    fuite; 

terga  vertit;  et  quscsitus   est,  et   nullum    de   eo   innotuit  on  le  chercha  sans  qu'on  ait  jamais  pu  en    avoir   aucune 

nuncium  :  fertur  autem  ipjum  cecidisse  in  pugna.  connaissance,  ce  qui  fit  croire  qu'il  avait  été  tué  dans  la 

mêlée. 


CHAPITRE    XV 


i.  Cum  autem  perlatum  esset  Antiocho,  qui  est  Eupa-  i.  Antiochus  surnommé  Eupator, ayant  appris  l'heureuse 

tor,    res    Judae  roboratas   esse,  et    expugnationes   quas  situation   des    affaires   des    Juifs    et    les  victoires  qu'ils 

expugnaverat,  iratus  est  valde,  et  dissolvit   fœdus    quod  avaient  remportées,  entra  dans    une  furieuse    colère,  et, 

inierat  cum  Juda,  et    ccegit   exercitum    magnum,  in    quo  rompant  des  ce  moment   l'alliance  qu'il   avait    faite  avec 

erant  viginti  duo  elephanli  :  Judas,   il  prit  avec  lui  Lysias,  son  cousin,  et,  suivi  d'une 

armée  puissante  et  de  vingt-deux  éléphants, 

2.  Ac  profectus  est  cum  Lysia  filio  patruelis  sui  in  2.  Il  entra  en  Judée  et  vint  mettre  le  siège  devant 
regionem  Judas,  petens  urbem  Bethner,  circa  quam  cas-  Béthner.  Judas  en  ayant  été  informé  se  rendit  au  temple 
trametatus  est,  et  obsedit  eam.  Quod  cum  nuntiatum  avec  tous  les  anciens  des  enfants  d'Israël  ;  et,  après  avoir 
esset  Judas,  convenit  ipse,  et  omnes  seniores  filiorum  offert  tous  ensemble  des  prières  et  des  sacrifices  au  Dieu 
Israël,  et  oraverunt  ad  Deum  optimum  maximum  multa  tout-puissant,  il  prit  avec  lui  l'élite  de  ses  troupes, 
offerentes  sacrificia  :  quibus  peractis  perrexit  Judas  cum 

ducibus  virorum  suorum, 

3.  Et  venit  in  castra  noctu,  et  improviso  irruit  in  ea,  ;.  Se  jeta  dans  le  camp  des  ennemis  à  la  faveur  de  la 
et  occidit  ex  illis  quatuor  millia  virorum,  et  elephantum  nuit,  leur  tua  quatre  mille  hommes  et  un  éléphant,  et 
unum  de  elephantis  :  et  reversus  est  in  c\stra  sua,  donec  retourna  dans  son  camp  en  attendant  que  le  jour  parût, 
illucesceret  diluculum. 

4.  Tune  utraque  acies  ordinata  est,  et  invaluit  pugna  4.  Alors  les  deux  armées  se  trouvant  en  présence,  on 
inter  eor.  ;  viditque  Judas  quemdam  elephantum  cum  donna  le  signal,  et  elles  se  battirent  avec  vigueur  :  Judas 
ornamentis   aureis,  arbitratusque  est  illi  regem  insidere.  ayant   aperçu  un   éléphant  paré   d'ornements    d'or,  crut 

que  le  roi  était  monté  dessus. 

5.  Vocavitque  viros  suos,  et  ait  :  Quis  vestrum  egre-  <,.  Appelant  aussitôt  ses  gens,  il  leur  dit  :  Qui  de  vous 
dietur,  et  occidethunc  elephantum?  s'avancera  pour  tuer  cet  éléphant? 

6.  Et  egressus  est  adolescens  de  domesticis  ejus,  qui  6.  Alors  Eléazar,  qui  était  un  jeune  homme  de  la  mai- 
dicebatur  Eleazarus,  et  irruit  in  aciem  trucidans  dextror-  son  de  Judas,  se  jeta  au  milieu  des  ennemis,  tuant  à 
sum,  et  sinistrorsum,  ita  ut  declinarent  homines  de  cons-  droite  et  à  gauche,  et  écartant  tout  ce  qui  s'opposait  à 
pectu  ejus, et  processit  quousque  pervenit  ad  elephantum:  son  passage  ; 

7.  Cui  supponens  se,  disrupit  ventrem  ejus,  ceciditque  7.  Et  étant  allé  se  mettre  sous  le  ventre  de  l'éléphant, 
elephantus  super  eum,  et  occidit.  il  le  tua,  le,  fit  tomber   par  terre,  et  fut  lui-même  écrasé 

sous  ce  monstrueux  animal. 

8.  Videns  itaque  rex  hœc,  jussit  receptui  canere,  et  8.  Le  roi,  étonné  de  cette  action,  fit  promptement 
factum  est.  Et  fuit  summa  interfectorum  ea  die  de  nobi-  retirer  ses  troupes,  et  le  nombre  de  ceux  qui  furent  tués 
lioribus  exercitus  octingentorum  virorum,  praster  cassos  en  ce  jour-là  se  monta  à  huit  cents  hommes  des  premiers 
ex  vulgo  exercitus,  et  qui  noctu  ceciderant.  officiers,  sans  compter   une  infinité    de   soldats,  ni    ceux 

qui  périrent  à  l'action  de  la  nuit. 

9.  Tune  nunciatum  est  régi,  quod  vir  quidam  de  amicis  9.  L'on  vint  ensuite  dire  à  Antiochus  que  Philippe, l'un 
ejus  nomine  Philippus  defecisset  ab  eo  ;  et  Demetrius  de  ses  amis, l'avait  abandonné,  et  que  Démétrius,  fils  de 
filius  Seleuci  egressus  esset  Roma  cum  exercitu  magno  Séleucus,  était  parti  de  Rome  avec  une  armée  puissante, 
Romanorum,  intendens  regnum  de  manu  illius  eripere.  dans  le  dessein  de  venir  lui  ôter  la  couronne. 

10.  Quibus  valde  perterritus,  misit  ad  Judam  de  ineunda  10.  Antiochus,  extrêmement  troub'.é  de  ces  préparatifs, 
pace  inter  sese  :  cui  assensus  est  Judas,  juravitque  illi  fit  faire  à  Judas  des  propositions  de  paix  ;  et  Judas  les 
Antiochus  et  Lysias  filius  patruelis  ejus,  nequam  se  illi  ayant  acceptées,  Antiochus  et  Lysias,  son  cousin,  lui 
bellum  illaturos  amplius.  jurèrent  que  jamais  ils  ne  lui  feraient  plus  la  guerre. 

11.  Et  exhibuit  rex  magnam  pecuniarum  vim,  et  tra-  11.  Antiochus  lui  donna  outre  cela  une  grande  somme 
didit  eam  Judas  in  munus  domus  Dei.  d'argent  pour  être  offerte  dans  la  maison  du  Seigneur. 

12.  Jussit  prœterea  rex  comprehendi  Menelaum,  unum  12.  Ayant  ensuite  fait  arrêter  Ménélaus,  l'un  de  ces 
trium  iniquorum  Judseorum,  qui  mala  intulerant  Judasis  trois  Juifs  impies  qui  avaient  causé  tant  de  maux  à  leur 
in  diebus  Antiochi  patris  ipsius,  quem  conduci  prœcepit  nation,  il  ordonna  qu'on  le  conduisît  dans  l'endroit  le 
in  excelsum  palatium,  et  inde  prascepitem  agi  quod  qui-  plus  élevé  du  palais,  et  qu'on  l'en  précipitât,  ce  qui  fut 
dem  praestitum  est.  exécuté. 

ij.  Hoc    enim  intendebat  rex  lastitia  afficere    Judasos,  ij.  H  était  ravi    de  pouvoir  obliger   les    Juifs,  en    les 

quandoquidem  fuit  vir  iste  ex  praecipuis   eorum  hoslibus  délivrant  d'un  homme  qu'ils  regardaient  comme   le    plus 

quique  interfecerat  ex  illis  multitudinem  plurimam.  grand  ennemi   de   leur  nation,  et  qui    avait  tant    de  fois 

trempé  ses  mains  dans  le  sang  innocent  de  ses  frères. 


CHAPITRE    XVI 


j.  Post  hase  profecius  est  rex  Eupator  in  regionem 
Macedoniae  :  tum  reversusest  Antiochiam.  Quem  aggres- 
sus  est  Demetrius  cum  exercitu  Romanorum  expugna- 
vitque,ac  interfecit  una  cum  Lysia  filio  patruelis  ejus,  et 
regnavit  Antiochiae. 

2.  Ad  quem  autem  perrexit  Alcimus  princeps  trium 
illorum  iniquorum,  qui  ingressus  ad  eum,  prostravit  sese 
ante  illum,  et  fievit  vehementissimo  fletu,  ac  dixit  : 

;.  O  rex,  jam  Judas  et  socii  ipsius  trucidarunt  e  nobis 
mullitudinem  plurimam.  eo  quod  déficientes  ab  eorum 
relieione,  religionem  régis  amplexati  sumus, 

4.  Quare  adjuva  nos,  rex,  contra  eos,  et  ulciscere  nos 
de  illis.  Tum  egit  Judaeos  ad  eum,  atque  concitavit,  sug- 
gerens  ipsis  ea  quae  provocare  poterant  Demetrium,  et 
irritare,  ut  expediret   exercitum  ad    expugnandum  illum. 


5.  Quibus  morem  gerens,  misit  ducem  nomine  Nica- 
norem  cum  exercitu  magno,  atque  copioso  armorum  ap- 
paratu. 

6.  Cum  autem  pervenisset  Nicanor  in  regionem  sanc- 
tam,  misit  nuntios  ad  Judam  ut  veniret  ad  se,  nec  aperuit 
se  venisse  ad  oppugnandam  gentem,  sed  aperuit  se  ve- 
nisse  solum  ob  initam  interse  et  gentem  pacem,  et  quod 
sint  in  obedientia  Romanorum.  , 

7.  Et  egressus  est  Judas  ad  eum  cum  aliquo  numéro 
suorum,  fortitudine  et  robore  praeditorum  ;  jussitque  ne 
secederent  a  se,  ne  proderet  illum  Demetrius. 


8.  Cum  ita  occurrisset  Demetrio,  salutavit  eum  ac  po- 
sita  unicuique  eorum  sede,  sederunt  ;  collocutusque  est 
Demetrius  ei  quod  voluit  ;  deinde  profectus  est  unus- 
quisque  eorum  in  tabernaculum  quod  ei  tetenderant. 

9.  Et  abiit  Nicanor,  et  Judas  in  civitatem  sanctam,  et 
morati  sunt  in  ea  simul  ;  intercessitque  inter  eos  firma 
familiaritas  : 

10.  Quod  cum  innotuisset  Alcimc,  adiit  Demetrium  et 
irritavit  illum  in  Judam,  ac  induxit  ut  scriberet,  et  prœ- 
ciperet  Nicanori,  ut  Judam  catenis  devinctum  ad  se 
mitteret. 

11.  Innotuit  autem  fama  Judas,  et  egressus  est  de  ci- 
vitate  noctu,  abiitque  Sebesten,  et  misit  ad  socios  ut  ad 
se  venire.nt. 

il.  Quibus  convenientibus  cecinit  buccina,  prœce- 
pitque  eis  sese  parare  ad  oppugnandum  Nicanorem. 

ij.  Nicanorvero  perquisivit  Judam  diligentissime,  nec 
de  illo  quicquam  ei  innotescere  potuit.  Quare  adivit  do- 
mum  Dei,  requirens  a  sacerdotibus,  ut  illum  sibi  trade- 
rent,  ut  catenis  devinctum  ad  regem  mitteret. 

14.  Qui  jura  verunt  nequaquam  ipsum  venisse  in  domum 
Dei.  Quamobrem  injuriis  eos,  et  domum  Dei  incessivit, 
et  oblocutus  est  contra  templum,  atque  comminatus  se 
illud  eversurum  a  fundamentis;  abiitque  indignatus: 

15.  Inquirere  etiam  curavit  domos  universas  sanctae 
civitatis.  Misit  quoque  suos  ad  domicilium  cujusdam  viri 
praeclarissimi,  qui  comprehensus  fuerat  tempore  Antio- 
chi,  et  maximis  affectus  suppliciis  :  mortuo  autem  Antio- 
clio,  exaltaverunt  auctoritatem  illius  Judaei,  et  magnifece- 
runt  eum. 


1.  Eupator  partit  ensuite  pour  la  Macédoine,  et  de  là 
revint  à  Antioche  ;  mais  Demetrius  l'ayant  attaqué  avec 
les  troupes  romaines,  le  tua  aussi  bien  que  Lysias  son 
cousin,  et  se  fit  roi  d'Antioche. 

2.  Alors  Alcime,  le  chef  de  ces  trois  Juifs  impies 
vint  se  jeter  aux  pieds  de  Demetrius,  et,  répandant  des 
torrents  de  larmes,  il  lui  parla  en  ces  termes  : 

5.  O  roi  !  Judas  e\  les  siens  ont  déjà  tué  une  grande 
partie  des  nôtres;  parce  que  nous  avons  abandonné  leur 
religion  pour  embrasser  celle  du  roi. 

4.  C'est  pourquoi,  ô  roi  !  Secourez-nous  et  vengez- 
nous  de  ces  outrages.  Alcime  ne  se  contenta  pas  d'avoir 
parlé  lui-même  au  roi,  il  lui  envoya  quelques  Juifs,  les 
animant  et  leur  suggérant  même  tout  ce  qui  était  capa- 
ble de  l'irriter  et  de  le  porter  à  leur  accorder  une 
armée  contre  Judas. 

<,.  En  effet,  ce  prince  se  laissa  gagner  à  leurs  artifices 
et  envoya  une  armée  nombreuse  et  bien  équipée  sous  la 
conduite  de  Nicanor. 

6.  Ce  général  étant  entré  en  Judée  envoya  prier  Judas 
de  le  venir  trouver,  et  dissimulant  d'abord  ses  mauvais 
desseins,  il  lui  fit  dire  qu'il  n'était  entré  en  Judée  qu'en 
qualité  d'allié  de  sa  nation,  et  comme  étant,  les  uns  et 
les  autres,  sous  la  domination  des  Romains. 

7.  Judas  se  rendit  donc  auprès  de  Nicanor,  n'ayant 
pris  avec  lui  qu'un  très  petit  nombre  de  Juifs,  pleins  de 
force  et  de  valeur,  leur  ordonnant  en  même  temps  de 
ne  point  s'éloigner  de  sa  personne,  de  peur  que  Deme- 
trius ne  le  trahît. 

8.  S'étant  approché  de  Demetrius,  il  le  salua,  et  tous 
deux  s'assirent  ensemble  sur  des  sièges  qu'on  leur  avait 
préparés.  Demetrius  entretint  Judas  sur  tout  ce  qu'il 
avait  à  lui  dire,  et  ils  se  retirèrent  ensuite  dans  la  lente 
qui  lui  avait  été  préparée. 

9.  Après  cela,  Nicanor  et  Judas  vinrent  à  la  ville 
sainte  ;  ils  y  restèrent  quelque  temps  ensemble  et  s'y 
lièrent  d'une  amitié  fort  étroite. 

10.  Alcime  en  ayant  eu  connaissance  vint  trouver  De- 
metrius, et,  n'oubliant  rien  pour  l'irriter  contre  Judas,  il 
l'engagea  à  écrire  à  Nicanor  de  le  lui  envoyer  après 
l'avoir  fait  charger  de  chaînes. 

11.  Judas,  informé  de  tout  ce  qui  se  tramait,  sortit  de 
Jérusalem  pendant  la  nuit,  et  se  jeta  dans  Sébaste,  d'où 
il  envoya  dire  à  ses  gens  de  le  venir  trouver. 

12.  Quand  ses  troupes  furent  rassemblées,  il  fit  sonner 
la  trompette,  et  leur  ordonna  de  se  tenir  prêtes  pour 
aller  attaquer  Nicanor. 

ij.  Cependant  Nicanor  faisait  chercher  Judas  très  ex- 
actement, et  ne  l'ayant  pu  trouver,  il  vint  à  la  maison 
du  Seigneur  et  somma  les  prêtres  de  le  lui  remettre 
entre  les  mains,  afin  qu'après  l'avoir  chargé  de  chaînes, 
il  le  fit  conduire  au  roi. 

14.  Mais  les  prêtres  lui  jurèrent  qu'il  n'avait  point  paru 
dans  le  temple.  Alors  Nicanor,  vomissant  mille  injures 
contre  eux  et  contre  la  maison  de  Dieu,  se  retira  plein 
d'indignation,  et  les  menaça  de  renverser  le  temple  jus- 
que dans  ses  fondements. 

15.  Il  fit  ensuite  chercher  Judas  dans  toutes  les  mai- 
sons de  Jérusalem,  et  envoya  quelques  gardes  chez  us 
Juif  célèbre  qui  avait  souffert  de  très  grands  supplices 
dans  la  persécution  d'Antiochus, et  qui, depuis  !a  mort  de 
ce  prince, avait  acquis  beaucoup  d'autorité  et  de  distinc- 
tion parmi  les  siens. 


IV. 


MACCABÉES.  —  XVI.  -    DÉFAITE   DE  NICANOR 


29  J 


16.  Ad  quem  vero  cum  pervenissent  nuntii  Nicanoris, 
timuit  vir  ne  sibi  inferretur,  quemadmodum  illatum  estei 
ab  Antiocho  :  quare  manus  sibi  conscivit. 

17.  Quod  cum  perlatum  esset  ad  Judam,  contristatus 
est  valde,  et  mcerore  aflectus  ;  misitque  ad  Nicanorem 
dicens  :  Ne  quaaras  me  in  civitate,  etenim  in  ea  non  sum  : 
perge  itaque  ad  me  ut  occurramus  invicem,  sive  in  cam- 
pis  sive  in  montibus,  uti  tibi  libet. 

18.  Et  profectus  est  ad  illum  Nicanor,  et  occurrit  illi 
Judas,  his  dictis  ;  Deus,  tu  es  qui  exterminasti  exercitum 
Sennacherib  régis,  et  quidem  erat  major  isto,  fama,  et 
imperio,  et  multitudine  exercitus. 


[9.  Et  eripuisti  Ezechiam  regem  Judae  ab  eo,  cum  in  te 
confisus  fuisset,  et  ad  te  orasset;  eripe,  quasso,  nos, 
Domine,  a  mal  itia  illi  us,  et  victores  contra  illum  redde  nos. 


20.  Dein  sese  ad  bellum  paravit,  et  expetivit  Nicano- 
rem, dicens  :  Cave  tibi,  ad  te  venio.  Et  terga  vertit  Ni- 
canor fugiens  :  quem  persequens  Judas  percussit  numé- 
ros ejus  quos  secuit  ;  et  fugati  sunt  sui. 


21.  Et  ceciderunt  ex  il  lis  ea  die  triginta  millia  ;  et 
egressi  sunt  incolaa  civitatum  et  occiderunt  eos,  ita  ut 
non  reliquerint  unum  quidem. 

22.  Decreverunt  autem  ut  talis  dies  singulis  annis  sit 
dies  gratiarum  actionis  Deo  optimo  maximo,  ac  dies 
œtitias,    et  comessationis,  et  potus. 

(  Hue  usque  absolutus  est  liber  secundus  ex  transla- 
tione  Hebraeorum). 


16.  Cet  homme,  voyant  les  officiers  de  Nicanor  entrer 
dans  sa  maison,  craignit  qu'on  ne  renouvelât  sur  lui  les 
tourments  qu'il  avait  déjà  soufferts,  et,  dans  ce  moment, 
il  se  donna  la  mort  de  ses  propres  mains. 

17.  Judas  ayant  appris  ce  funeste  accident,  fut  pénétré 
d'une  vive  douleur,  et  sur  le  champ  il  députa  vers  Nica- 
nor, et  lui  fit  dire  :  Ne  me  cherchez  point  dans  Jérusa- 
lem, car  je  n'y  suis  pas  ;  mais  avancez-vous  partout  où 
voudrez,  soit  dans  les  plaines,  soit  sur  les  montagnes, 
afin  que  nous  combattions  l'un  contre  l'autre. 

18.  Nicanor  aussitôt  marcha  vers  Judas,  qui  vint  à  sa 
rencontre  après  avoir  fait  cette  prière  à  Dieu  :  Seigneur, 
c'est  vous  qui  avez  exterminé  autrefois  l'armée  du  roi 
Sennacherib,  qui  était  fort  au-dessus  de  Nicanor  par  sa 
renommée,  par  sa  puissance,  et  par  le  nombre  de  ses 
troupes. 

19.  Cependant  vous  avez  délivré  de  ses  mains  Ezéchias 
roi  de  Juda,  après  que  ce  saint  roi  eût  mis  en  vous  sa 
confiance  et  qu'il  vous  eût  offert  ses  prières.  Délivrez- 
nous,  Seigneur,  je  vous  conjure,  de  la  méchanceté  decet 
ennemi,  et  donnez-nous  la  victoire  sur  lui. 

26.  Judas  s'étant  ensuite  préparé  au  combat,  s'avança 
vers  Nicanor  et  lui  dit  :  Soyez  en  garde  ;  car  c'est  vous- 
même  que  je  cherche.  Nicanor  s'enfuit  aussitôt;  mais 
Judas  l'ayant  poursuivi  le  frappa  de  son  épée  et  lui  sé- 
para les  épaules  en  deux;  toute  l'armée  de  Nicanor 
prit  la  fuite. 

21.  Et  il  en  tomba  en  ce  jour  trente  mille  hommes  ;  or, 
les  habitants  des  villes  voisines  ayant  couru  sur  eux, 
ils  les  tuèrent,  sans  qu'il  pût  échapper  un  seul  de  toute 
cette  armée. 

22.  Après  cela,  les  Juifs  ordonnèrent  que  tous  les  ans, 
à  pareil  jour,  l'on  rendrait  grâces  de  cette  victoire  au 
Dieu  tout-puissant,  et  que  ce  jour  se  passerait  dans  les 
festins  et  les  réjouissances. 

(Ici  finit  le  second  livre  des  Maccabées  'traduit  sur 
l'hébreu).  * 


CHAPITRE    XVII 


i.  Cum  autem  adesset  idem  fere  tempus  vertentis  an-  I.  A  peu  près  dans  ce  même  temps    et   sur  la  fin    de 

ni,  profecms  est  Bacchides  cum  trij^inta  millibus  de  for-  l'année,  Bacchide  se  mit  en  campagne  avec  trente   mille 

tissimis  Macedonum:  et  supervenit  nulla  eorum  innotes-  Macédoniens  des  plus  braves,  et  parut  avant  que   Judas 

cente  ipsi  Judas  fama.  eût  pu  être  informé  de  sa  marche. 

2.  Cuin  esset  in  quadam  urbe,  quas  dicitur  Lalis,    cum  2.  Le  général  juif  était  alors  dans  la  ville  de  Lalis  avec 

tribus  millibus  virorum  ;  quamobrem  plurimi  eorum,  qui  trois  mille  hommes,   mais  l'ennemi  ne  se  fut  pas  plus  tôt 

cum  illo  erant  fugerunt,  remanseruntque  cum  illo    octin-  montré  qu'ils    l'abandonnèrent  tous,  à  la  réserve  de    Si- 

genti  viri,  et  Simeon  ac  Jonathas  fratres  ejus.   Erant  au-  méon  et  Jonathas  ses  frères,  et  de  huit  cents  hommes  des 

tem  qui  remanserant  cum  Juda  robustissimi,   ac    fortlssi-  P'us  forts  et  des  plus  aguerris  qui  lui  avaient  déjà  donné 

mi,  et  qui  jam  multa  sustinuerant  in  caeteris    bellis    quas  des  marques  de  leur  valeur  et  de  leur  constancï  dans  les 

commiserat.  périls  de  la  guerre. 

5.  Et  egressus  est  Judas,  et    socii   ad     Bacchidem,    et  J-  Alors  Judas  s'avança  vers  Bacchide,    qui    partagea 

exercitum   ejus.  Et    divisit    Bacchides    exercitum    suum  son  armée  en  deux  corps,  opposant    quinze    mille    hom- 

constituens  quindecim  millia  ad  dexteram  Judas, et  socio-  mes  à  l'aile  droite  de  Judas  et  quinze  mille  à  l'aile  gau- 

rurn  :  et  quindecim  millia  ad  sinistram  eorum,  che. 

4.  Tum  vociferata  est  utraque  pars    contra  Judam,  et  4-  En  même  temps,  les  troupes  de    Bacchide    jetèrent 

socios.  Qui  considerans  utramque,  nactus  est  robustissi-  de  grands  cris  contre  les  Juifs  et  contre  Judas, qui, voyant 

mos  exercilus,et  fortissimos  ejus  esse  in  dextera,  cogno-  que  les  ennemis  avaient   garni    leur  droite   de    tout    ce 

vitque     Bacchidem  inibi   adesse.     Divisit    quoque   Judas  qu'ils  avaient  de  meilleur,  et  que  Bacchide  lui-même    la 

socios    suos,  et  assumpsit  secum  fortissimos  eorum,  re-  commandait,  partagea  aussi  ce    qu'il    avait    de    monde, 

liquos   vero  tradidit    fratribus.  prenant  l'élite  avec  lui,  et  laissant  le  reste  à  ses  frères. 

<;.  Tum  impetum  fecit  in  eos  qui  erant  in  dextera,    oc-  5-  H  vint  tomber  aussitôt  sur  la  droite  des  ennemis  et 

ciditque  ipse  cum    sociis    circiter    duo    millia    virorum.  leur  tua  environ  deux  mille  hommes;  ayant  ensuite  aperçu 

Dein  conspiciens   Bacchidem  collimavit  oculos,  et  in  il-  Bacchide,  il  le  suivit  des  yeux  et  tourna  contre  lui  tous 

lum  intendit,  interfecitque  fortissimos  quosque,  qui  erant  ses  efforts,  tuant  tout  ce  qu'il  avait  de  braves  autour  de 

circa  illum  :  et  ingruentem    multitudinem    sustinuit   ipse  sa  personne, et  soutenant  avec  le  petit  nombre  des  siens 

cum  sociis,  l'effort  de  toute  l'armée  ennemie. 

0.  Plurimis  ex  illis  prostratis:  accessitque  ad  Bacchi-  6.  Enfin,  après  en  avoir  renversé  un  grand    nombre,  il 

dem.  Quem  cum  vidisset    Bacchides    in    se    intendentem  s'avança   droit    à    Bacchide,    qui,    l'ayant    vu    s'élancer 

tanquam  leonem    stringentum    manu   gladium    ingentem  comme  un  lion, et  tenant  en  main  une  longue  épée  teinte 

sanguine  infeclum,  timuit  illum  timoré    vehementissimo  :  de  sang,   fut    frappé    d'une  vive    crainte    et    ne    songea 

et  contremuit,  ac  fugit  e  conspectu  illius.  qu'à  fuir. 

7.  Quem  persecutus  est  Judas,  et  socii  ipsius,  et  pros-  7-  Mais  Judas  et  les  siens,  l'ayant  poursuivi,  firent 
traverunt  gladio  gentem,  ita  ut  exterminarent  majorem  main  basse  sur  toute  cette  aile  et  en  tuèrent  la  plus 
partem  illorum  quindecim  millium  :  et  fugit  Bacchides  grande  partie,  au  nombre  de  quinze  mille.  Cependant 
usquc  in  Asedod.  Et  secuta  sunt  eum  quindecim  millia,  Bacchide  se  sauva  à  Asedod,  où  il  fut  bientôt  suivi  du 
quas  erant  a  sinistra  Judas,  et  agressa  sunt  Judam,  ad  second  corps  de  ses  troupes  qui  faisaient  front  à  la 
quem  jam  pervenerant  fratres  ipsius,  et  qui  cum  illis  gauche  de  Judas;  Siméon  et  Jonathas  avaient  aussi 
erant  defatigati.  ramené  à  Judas  leurs  troupes  harassées. 

8.  Et  irruerunt  in  eos  quindecim  i I la.  millia,  et  inter-  8.  Lorsque  les  quinze  mille  hommes  de  Bacchide  les 
cessit  inter  ea  et  Judam  pugna  maxima  ;  ceciditque  ex  attaquèrent,  le  combat  fut  très  sanglant,  plusieurs  furent 
utriusque  numerus  aliquis  interfectorum,  in  qua  summa  tués  de  part  et  d'autre,  et  Judas  lui-même  resta  parmi  les 
cassus  est  Judas.  morts. 

').  (,  uem  ferentes  fratres  illius,  sepelierunt  ad  latus  se-  9.  Ses  frères  ayant  emporté  son  corps  le  mirent  dans  le 

pulchri  Mathathias  patris  ejus  (Deus  miseratur  illorum),  sépulcre  de  leur  père,  (Dieu  prenne  pitié  d'eux!)  et  tous 

et  fleverunt  eum  filii  Israël    diebus    multis.    Fuit   autem  les  enfants  d'Israël  le  pleurèrent  plusieurs  jours.  Il  gou- 

tempus  principatus  ejus  septem  annorum.    Et    successit  verna  Israël  pendant  sept  ans,  et  Jonathas,  son  frère,  lui 

rébus  post  illum  Jonathas  frater  illius.  succéda  dans  le  gouvernement  des  affaires. 


CHAPITRE  XVIII 


1.  Et  successif  Jonathas  fratri  suo,  et  contendit  ad  Jor- 
danem  cum  pauco  numéro.  Quod  cum  nuntiatum  esset 
Bacchidi,  profectus  est  ad  eum  cum  exercitu  magno. 

2.  Quem  cum  vidisset  Jonathas,  et  viri  ejus,transierunt 
Jordanem  natando  ;  et  insecutus  est  eos  Bacchides,  et 
exercitus  ejus  ac  circumdederunt. 

j.  Jonathas  autem  irrupuit  in  Bacchidem,  et  cedentibus 
hominibus  Jonathas,  egressusque  est  de  medio  illorum 
ipse,  et  socii,  et  abierunt  in  Bersabee  ;  quem  convenit 
Simeon  frater  illius,  et  morati  sunt  ibi  ;  et  concinnave- 
runt  quidquid  in  munitione  collapsum  erat  :  et  munierunt 
se  ibi. 

4.  At  Bacchides  profectus  est  ad  eos,  et  obsedit  ;  ad 
quem  egressus  Jonathas,  et  frater  ipsius,  et  qui  cum  il- 
lis  erant  viri,  noctu,  interfecerunt  de  exercitu  multitu- 
dinem  virorum,  atque  incenderunt  arietes,  et  tormenta 
bellica, 

1;.  Et  dispersus  est  exercitus,  fugitque  Bacchides  in  de- 
sertum  :  quem  insequens  Jonathas, et  Simeon,  et  qui  cum 
illis  erant  viri,  comprehenderunt  illum. 

6.  Qui  cum  vidisset  eum,  interitum  sibi  omnino  adesse 
cognovit  :  quare  praeconio  indixit  Jonathas  pacem,  jura- 
vitque  se  nunquam  amplius  bellum  ipsi  illaturum,  et  in- 
super restituturum  universam  captivitatem,quam  ceperat 
de  exercitu  Judas. 

7.  Cui  dexteram  porrigens  Jonathas,  recessit  ab  il lo  ; 
nec  intercessit  amplius  post  hase  inter  eos  bellum.  Non 
multum  autem  post  hase  obiit  Jonathas  :  et  successif  Si- 
meon frater  illus. 


1.  Jonathas  ayant  succédé  à  la  place  de  son  frère,  ga- 
gna le  Jourdain  avec  le  petit  nombre  de  troupes  qui  lui 
restait;  Bacchide,  ayant  été  informé  de  ce  mouvement, 
vint  à  lui  avec  une  grosse   armée. 

2.  Et  Jonathas  ne  l'eut  pas  plus  tôt  aperçu  qu'il  passa 
le  Jourdain  à  la  nage  avec  ses  troupes  ;  Bacchide  en  fit 
autant,  et,  l'ayant  atteint  au  delà  du  fleuve, il  l'enveloppa 
de  toute  son  armée. 

?.  Mais  Jonathas  rompit  les  ennemis,  et, se  faisant  jour 
à  travers  les  bataillons,  il  se  retira  avec  ses  compagnons 
à  Bersabee, où  Simeon  son  frère  vint  le  trouver.  Ils  réta- 
blirent les  ouvrages  de  cette  place  et  s'y  fortifièrent. 


4.  Cependant  Bacchide  vint  les  y  assiéger  ;  mais  Jona- 
thas et  son  frère  se  mirent  à  la  tète  de  toutes  leurs  trou- 
pes, et,  pénétrant  dans  le  camp  de  Bacchide  à  la  faveur 
de  la  nuit,  ils  tuèrent  une  grande  partie  de  ses  gens,  et 
brûlèrent  les  béliers  et  tous  les  instruments  qui  servaient 
au  siège. 

<;.  Le  reste  de  l'armée  fut  mis  en  déroute,  et  Bacchide 
lui-même  se  sauva  dans  le  désert,  où  Jonathas  et  Si- 
meon le  poursuivirent  avec  leur  armée  et  le  firent  pri- 
sonnier. 

6.  Bacchide  ayant  aperçu  Jonathas,  ne  douta  plus  que 
sa  perte  ne  fût  certaine  ;  c'est  pourquoi  il  lui  demanda 
la  paix,  avec  serment  que  jamais  il  ne  lui  ferait  la  guer- 
re, et  qu'il  lui  rendrait  tous  les  prisonniers  qu'il  avait 
faits  sur  l'armée   de  Judas. 

7.  Jonathas  lui  ayant  tendu  la  main  pour  marque  de  la 
paix  qu'il  lui  accordait,  se  retira,  et  il  n'y  eut  plus  de 
guerre  entre  eux  depuis  ce  jour-là.  Jonathas  étant  mort 
peu  de  temps  après,  Simeon  son  frère  fut  élu  chef  de 
l'armée. 


CHAPITRE  XIX 


i.  Tum  potitus  est  rerum  Simecn  filius  Malhathias,  et  i.  Siméon  ayant  pris  en  main  le    gouvernement,    ras- 

coegit  quotquot  remanserant  de  exercitu  Judse,  et    inva-  sembla  tout  ce  qui  restait    des    troupes  de  Judas:    il  se 

uerunt  res  ipsius,  debellavitque    omnes,    qui    inimicitias  rendit    redoutable,  se  vengea  de  tous  ceux    qui    avaient 

exercuerant  in  Judasos  post  necem  Judas    fratris    sui,    et  exercé  leur  inimitié  contre  les    Juifs,     traita    le    peuple 

bene  sese  gessit  erga  populum  suum,  et  directa  sunt  ne-  avec  beaucoup  de  douceur,   et  rétablit  les  affaires  de  sa 

gotia  regionis  suas.  nation. 

2.  Quare  expetivit  eum  Antiochus,  et    ipse  est    Deme-  ;.  Antiochus,le  même  que  Démétrius  fils  de  Séleucus, 

trius  filius  Seleuci  :    et    niisit    ad    illum    exercitum    ma-  songea  dès  ce  moment  à  le  traverser,  et,  pour  cet  effet, 

gnum  :  il  envoya  contre  lui  une  armée  nombreuse. 

î.  Ad  quem  egressus  est  Simeon,  et  duo  filii  ejus,    di-  ;.  Siméon,  sans  l'attendre,  se  mit   en    campagne    avec 

visitque  exercitum  suum  duas  in  partes,  quarum  unam  se-  ses  deux  fils,  et,  leur  donnant  la  moitié  de  ses  troupes, il 

cum  retinens  altcram  tradidit  filiis.  Tum    profectus    est  leur  commanda  de  s'avancer  par  un  endroit  pendant  qu'il 

ipse,  et  qui  cum  eo    erant   ad  exercitum,  misilque  filios  irait  par  un  autre,  et  convint  avec  eux  qu'ils  tomberaient 

suos,  et  qui  cum  eis  erant  per  aliam  partem,    et    conve-  sur  l'ennemi  dans  le  temps  qu'il  leur  marqua. 
nit  cum  il  lis,  ut    aggrederentur    exercitum    tempore    eis 
constituto. 

4.  Post  hœc  occurrit  cxercitui  Antiochi,  et  oppugnavit  4.  S'étant  ensuite  avancé  vers  l'armée  d'Antiochus,  il 
illum,  ac  cœpit  illi  praevalere  ;  veneruntque  duo  filii  ejus,  engagea  le  combat  :  on  se  battit  avec  ardeur,  et  la  vie  - 
cuin  jam  commixtum  esset  bellum,  et  pugna  invaluisset,  toire  commençait  déjà  à  pencher  du  côté  de  Siméon, lors- 
et  circumdederunt  lerga  exercitus  :  et  conslitutus  exer-  que  ses  deux  fils  parurent  à  l'arrière-garde  de  l'ennemi, 
citus  Antiochi  inter  duos  exercitus  exterminatus  est,  nec  Les  gens  d'Antiochus  se  trouvant  ainsi  entre  les  deux 
evasit  quispiam  virorum  illius  :  armées  furent  taillés  en  pièces,  sans    qu'il    en    pût    s'en 

échapper  un  seul. 

5.  Nec  reversus  est  amplius  Antiochus  ad  oppugnan-  5.  Antiochus  n'osa  se  présenter  davantage  devant  Si- 
dum  Simeonen  :  et  perduravit  Judasis  pax,  et  quies  Ion-  méon,  et  les  Juifs  jouirent  de  la  paix  et  de  la  tranquillité 
gitudine  dierum  Simeonis.  Fuit  autem  tempus  ipsius  do.  pendant  tout  le  temps  de  son  gouvernement,  qui  fut  de 
minii  per  duos  annos.  deux  ans. 

o.   Dein  irruit  in  illum  Plolemasus  Sororius,  interfecit-  6. Siméon  ayant  ensuite  été  tué  au  milieu  d'un  festin  par 

que  illum  in  quodam  convivio,  cui  aderat.     Et   compre-  Ptolémée  Sororius,  qui  prit  aussi  sa  femme  et  ses    deux 

hendit  uxorem,  et  duos  filios  illius,  et  suffectus  est  filius  fils,  hyrcan,  son  troisième  fils,  fut  mis  en  sa  place. 
Simeonis,  cujus  nomen  erat  Hyrcanus. 


CHAPITRE   XX 


i.  Constituerai  jam  Siineon  (ipso  vivente)  ducem  filium  i.  Simëon,   dès  son  vivant,  avait  établi  son  fils  Jocha- 

suum  Jochanan,  et  aggregatis  ei  viris  quam  plurimis,  mi-  nan  général  de  troupes,  et,    l'ayant   mis   à  la   tête  d'une 

sit  illum    ad  debellandum  virum    quemdam,  qui  in  illum  grosse  armée,  l'avait  envoyé  contre  un    nommé  Hyrcan, 

egressus  erat,  dicebaturque  Hyrcanus.  qui  était  venu  attaquer  la  nation  des  Juifs. 

2.  Eratautem  vir  magnœ  famae,  fortis  robore,  et  vetusti  2.  Cet  Hyrcan  joignait  à  une    haute   réputation    beau- 

principatus.  coup  de  valeur, et  régnait  depuis  longtemps  dans  son  pays 

;.  Cui    occurrens    Jochanan,    proflagravit    illum,  qua-  ;.  Jochanan    s'étant    avancé    pour    le    combattre,    lui 

propter  nuncupavit  Simeon  filium  suum  Jochanan,  Hyr-  défit  toute  son    armée,  le  tua    lui-même  de    sa  main  et 

canum,    ob    occisum    Hyrcanum,    et    victoriam    de    il l o  reçut  de    Siméon,  son  père,  le  surnom  d'Hyrcan,  en  mé- 

reportatam.  moire  de  cette  victoire. 

4.  Cum  autem  audisset  Hyrcanus  iste  Ptolemœum  4.  Hyrcan,  ayant  appris  que  Ptolémée  avait  tué  son 
interfecisse  patrem  ipsius,timuit  Ptolemajum,  fugitque  in  père,  fut  saisi  de  crainte  et  se  sauva  à  Gaza,  où  Ptolé- 
Gazam.quem  insecutus  est  Ptolemœus  cum  pluribus  viris.  mée  le  suivit  avec  plusieurs  de  ses  gens. 

5.  At  opitulati  sunt  cives  Gazas  Hyrcano,  et  clauserunt  s.  Mais  les  habitants,  ravis  de  favoriser  Hyrcan,  fer- 
portas  civitatis,  prohibueruntque  Ptolemœum  pervenire  mèrent  leurs  portes  à  son  ennemi,  et  le  sauvèrent  ainsi 
ad  Hyrcanum.  de  ses  mains. 

6.  Et  reversus  Ptolemasus  abiit  in  Dagon,  habens  se-  6.  Ptolémée,  contraint  de  revenir  sur  ses  pas,  se  re- 
cum  matrem  Hyrcani,  et  duos  fratres  illius.  Habebat  tira  à  Dagon,  menant  avec  lui  la  mère  et  les  deux  frères 
autem  Dagon  tune  arcem  munitissimam.  d'Hyrcan  :  or  Dagon  avait  alors  une  citadelle  très  forte. 

7.  Hyrcanus  vero  profectus  est  ad  domum  sanctam,  et  7.  Hyrcan  cependant  vint  au  temple  de  Jérusalem,  y 
obtulit  sacrificia,  et  successit  patri  suo;  coegitque  exer-  offrit  des  sacrifices,  et  succéda  à  la  dignité  de  son  père; 
citum  magnum,  et  perrexit  ad  Ptolemaeum  :  s'étant    mis  ensuite  à  la  tête  d'une  armée  nombreuse,  il 

s'approcha  des  murs  de  Dagon. 

8.  Quamobrem  clausit  Ptolemaeus  portam  Dagon  super  8.  Ce  qui  obligea  Ptolémée  d'en  fermer  les  portes,  et 
se  et  socios,  et  sese  munivit  in  ea.  de  s'y  retrancher  avec  ce  qu'il  avait  de  monde. 

9.  Et  obsedit  illum  Hyrcanus  fecitque  arietem  ferreum  9.  Hyrcan  l'y  assiégea,  et  fit  suspendre  un  bélier  de 
ad  percutiendum  nuirum,  atque  aperiendum.  1er  pour  battre  la  muraille  et  l'ouvrir. 

10.  Et  diu  duravit  inter  eos  pugna,  et  prasvaluit  Hyr-  10.  Les  assiégés  firent  une  longue  défense  ;  mais  Hyr- 
canus contra  Ptolemasum,  et  accessit  prope  munitio-  can  devenant  de  plus  en  plus  fort,  se  rendait  maître  des 
nem,  et  pêne  eam  obtinuit.  retranchements  et  allait  bientôt  prendre  la  ville; 

11.  Cum  ergo  vidisset  hoc  Ptolemœus,  praecepit  de-  11.  Lorsque  Ptolémée  fit  amener  sur  le  haut  du  mur 
duci  matrem  Hyrcani,  et  duos  fratres  illius  super  murum,  la  mère  et  les  deux  frères  d'Hyrcan,  et  les  fit  tourmenter 
et  supplicio  affici  vehementissimo,  quod  factum  est  illis.  par  d'horribles  supplices. 

12.  Videns  autem  hase  Hyrcanus,  constitit,  et  timens  ne  121  A  ce  triste  spectacle,  Hyrcan  s'arrêta, et,  craignant 
interficerentur,  destitit  a  pugna.  qu'on  ne  les  fit  expirer  à   ses  yeux,    il    ne    songea   qu'à 

s'éloigner  promptement  de  devant  cette  place. 

15.  Quem  interpellavit  mater  illius,  et  ait  :   Fili  mi,  ne  ij.  Mais  sa  mère  l'ayant  appelé,  lui  parla  ainsi  :  Mon 
commovearis  amore  et    pietate  erga    me  et    fratres  tuos  fils,    que  la   tendresse  que  vous  avez  pour  moi  et  pour 
pras  pâtre  tuo,  nec  molliaris  affectibus   propter  captivi-  vos  frères  ne  l'emporte  pas  sur   celle  que  vous  devez  à 
tatem  nostram  ulciscendi  illum,  votre  père,  et  que  la  triste  vue  des  maux  que  nous  souf- 
frons   dans   cette    captivité,  n'étouffez  point    votre  juste 
ressentiment  contre  lemeurtrier  de  votre  père. 

14.  Sed   reposée    vindictam    juris    patris    tui,    et  mei,  14.  Hàte-.-vous  de  le  venger,  et  vengez-moi  aussi  au- 

quantum  vales.  tant  qu'on  doit  l'attendre  de  votre  valeur. 

1  <,  Quod  autem  times  pro  nobis  a  tyranno  isto,  neces-  iç,  Ce  que  vous  craignez  pour  nous  de  la  part   du  ty- 

sario  omnino  nobis  facturus  est  :  quare  insta  oppugnationi,  ran  est  inévitable;  c'est  pourquoi  pressez  la  place  sans 

nulla  iiiterpolatione  data.  aucun  relâche. 

16.  Cum  ergo  audisset  Hyrcanus  verba  parentis  suas,  16.  Hyrcan,  fortifié  par  ce  discours,  redoubla  les  atta- 
institit  oppugnationi  :  quare  auxit  Ptolemasus  supplicia  ques  ;  mais  Ptolémée  fit  tourmenter  avec  plus  de  rigueur 
matri,  et  fratribus  illius  ;  juravitque  se  prascipitaturum  qu'auparavaat  sa  mère  et  ses  frères,  et  jura  qu'il  les 
eos  ex  munitione  deorsum,  quolies  accederet  Hyrcanus  précipiterait  l'un  après  l'autre  du  haut  de  la  muraille  à 
ad  munitionem.  mesure  qu'il  s'en  approcherait  de  plus  près. 

17.  Timuit  itaque  Hyrcanus  ne  causa  esset  necis  eorum,  17.  Alors  Hyrcan,  craignant  de  devenir  la  cause  de 
et  reversus  est  ad  castra  sua,  continuata  obsidione  Pto-  leur  mort,  revint  dans  son  camp,  sans  cependant  inter- 
lemaei.  rompre  le  siège. 

i8.Accidit  autem  ut  adessetsolemnitas  tabernaculorum  18.  Mais  la  fête  des  Tabernacles  étant  proche,  Hyrcan 

quapropter   profectus  est  Hyrcanus  in    civitatem  domus  se  rendit  à  Jérusalem  pour  la  célébrer  et  pour  offrir  des 

sanctœ,utprsesto  esset  festivitati,  et  soient  ni  tati,etsacri  fi  ciis.  sacrifices. 

19.  Cum  ergo   cognovisset  Ptolemœus    concessisse    in  19.  Ptolémée   ayant  donc  su  qu'Hyrcan  était  à  Jéru- 

domum  sanctam,  et  ibi  detineri,  irruit  in  matrem  Hyrcani  salem,  et  qu'il  y  était  occupé  à   la  solennité  d'une  fête, 

et  fratres  illius,  et  occidit  eos,  fugitque  in  locum  ad  quem  se  jeta  sur  sa  mère  et  sur  les  frères  de  ce  prince,  les  tua 

pervenire  non  poterat  Hyrcanus.  de   sa  propre  main,  et  se  sauva  dans  un   lieu  où  Hyrcan 

ne  pouvait  le  forcer. 


CHAPITRE  XXI 


i.  Cum  autem  audisset  Antiochus  Simeonem  occubuisse, 
coegit  exercitum,  et  profectus  est,  donec  pervenit  ad 
civitatem  domus  sanctas  :  et  castrametatus  est  circa 
eam,  et  obsedit,  intendens  illam  expugnare  : 

2.  At  non  valuit  ob  firmitatem  et  altitudinem  mœnium 
ipsius,  et  multitudinem  virorum  bellatorum,  in  ea.  Vo- 
lente  autem  Deo,  coercitus  est  ab  illa  : 

?.  Sese  enim  contulerat  ad  partem  septentrionalem 
civitatis,  et  extruxerat  ibi  e  regione  mûri  centum  triginta 
turres  ;  et  conscendere  fecit  super  eas  viros  ad  oppu- 
gnationem  eorum,  qui  mœnia  civitatis  conscendere  inten- 
tarent. 

4.  Et  constituil  qui  suffoderent  terram  in  quodam  loco, 
donec  perventum  est  ad  fundamentum  mûri  :  quod,  cum 
ligneum  compertum  esset,  igni  incenderunt,  ceciditque 
ex  muro  pnrs  magna  valde. 

<,.  Et  occurrerunt  viri  Hyrcani  ad  eos,  et  prohibuerunt 
ingredi,  custodientes  locum  ruinas,  et  egressus  est  Hyr- 
canus  cum  potiori  parte  virorum  bellatorum  ad  exerci- 
tum Antiochi,  et  multam  intulit  eis  cladem. 

6.  Et  fugatus  est  Antiochus,  et  sui,  quos  persecutus  est 
Hyrcanus  cum  suis,  donec  removissent  a  civitate. 

7.  Tum  reversi  ad  turres  quas  extruxerat  Antiochus, 
destruxerunt  eas,  et  morati  sunt  in  civitate,  et  circa  illam. 

3.  Antiochus  vero  castrametatus  est  in  quodam  loco, 
qui  distabat  a  civitate  domus  Dei  circiter  duo  stadia. 
Adveniente  autem  solemnitate  tabernaculorum,  misit 
legatos  ad  illum  Hyrcanus  de  induciis,  donec  praeteriret 
solemnitas  : 

9.  Quod  concessit  ei,  misitque  victimas,  et  aurum,  et 
argentum  ad  domum  Dei.  Praecepitque  Hyrcanus  sacer- 
dotibus,  ut  susiiperent,  quod  miserat  Antiochus  :  et 
praestiterunt.  Cum  autem  vidisset  Hyrcanus,  et  sacerdo- 
tes  Antiochi  reverentiatn  erga  templum  Dei,  legatos  ad 
eum  misit  de  pace. 

10.  Cui  assensus  est  Antiochus,  et  profectus  est  in 
Jérusalem;  occurrens  ergo  ei  Hyrcanus  ingressi  sunt 
imul  civitatem.  Fecitque  Hyrcanus  Antiocho,  et  princi- 
pibus  ejus  convivium  :  et  comederunt  una,  et  biberunt, 

11.  Et  obtulit  ei  munus,  trecenta  talenta  auri,  et  pepi- 
git  unusquisque  eorum  cum  socio  suo  de  pace,  et  auxilio 
ferendo,  et  abiit  Antiochus  in  regionem  suam. 


12.  Fertur  autem  Hyrcanum  aperuisse  thesaurura,  qui 
fuerat  quibusdam  regibus  de  filiis  David, (cui  pax)  qui 
protulit  inde  pecuniam  plurimam,  et  tantumdem  reliquil, 
restituens  illum  pristinae  occultationi. 

ij.  Tum  construxit  quod  dirutum  erat  ex  muro,  et  re- 
paravit  :  et  gregis  sui  utilitati,  et  commodo,  provide 
consuluit,  et  recte  erga  eos  sese  gessit. 

14.  Cum  autem  pervenisset  Antiochus  in  regionem 
suam,  decrevit  oppugnare  regem  Persidis,  defecerat 
enim  a  tempore  Antiochi  primi  :  et  misit  legatos  ad  Hyr- 
canum, ut  proficisceretur  ad  eum  :  et  profectus  est  cum 
eo  Hyrcanus,  ac  abiit  in  regionem  Persidis. 


1.  Antiochus  ayant  appris  la  mort  de  Siméon,  rassem- 
bla toutes  ses  forces  et  vint  mettre  le  siège  devant  Jéru- 
salem, dans  l'espérance  de  la  prendre. 

2.  Mais  la  hauteur  et  la  solidité  de  ses  murailles,  et  le 
grand  nombre  de  gens  de  guerre  qui  la  défendaient, 
rendirent  inutiles  tous  les  efforts  de  ce  prince,  et  Dieu 
même  renversa  tous  ses  desseins. 

?.  Antiochus  avait  formé  les  attaques  à  la  partie  sep- 
tentrionale de  la  ville,  et  c'était  là  qu'il  avait  fait  éleve- 
cent  trente  tours  remplies  d'hommes  armés,  pour  com- 
battre contre  ceux  des  assiégés  qui  oseraient  se  présen- 
ter sur  le  haut  des  murailles. 

4.  D'autres  furent  chargés  de  creuser  dans  un  certain 
endroit  de  la  terre,  jusqu'à  ce  qu'ils  en  eussent  trouvé 
les  fondements;  et  ayant  enfin  gagné  les  pilotis  qui  les 
soutenaient,  ils  y  mirent  le  feu  et  firent  tomber  une 
grande  partie  de  la  muraille. 

<,.  Mais  les  gens  d'Hyrcan  se  placèrent  sur  la  brèche 
se  présentèrent  aux  travailleurs,  et  les  empêchèrent 
d'entrer  dans  la  ville.  Hyrcan,  prenant  aussitôt  l'élite  de 
ses  troupes,  fit  une  sortie  sur  l'armée  d'Antiochus,  et 
lui  tua  beaucoup  de  monde. 

(>.  Ce  prince  ayant  pris  la  fuite  avec  les  siens,  Hyrcan 
le  poursuivit  jusqu'à  ce  qu'il  l'eût  vu  éloigné  de  Jérusa- 
lem, 

7.  Et,  s'approchant  ensuite  des  tours  qu'Antiochus 
avait  élevées,  il  les  fit  abattre  et  répandit  ses  troupes 
au-dedans  et  au-dehors  de  la  ville. 

8.  Cependant  Antiochus  s'était  campé  dans  un  lieu 
éloigné  d'environ  deux  stades  de  Jérusalem.  La  fête  des 
Tabernacles  étant  proche,  Hyrcan,  lui  envoya  demander 
une  suspension  d'armes  jusqu'à  ce  que  la  solennité  fût 
passée. 

9.  Antiochus  la  lui  accorda,  et  fit  même  offrir  au  tem- 
ple des  victimes  avec  de  l'or  et  de  l'argent  :  Hyrcan  et 
les  prêtres  reçurent  les  dons  de  ce  prince,  et,  voyant  la 
vénération  qu'il  avait  pour  la  maison  de  Dieu,  ils  lui 
envoyèrent  des  ambassadeurs  pour  traiter  de  la  paix. 

10.  Antiochus  accepta  leurs  propositions,  et  s'avança 
vers  Jérusalem;  Hyrcan  vint  au  devant  de  lui, et  ils  en- 
trèrent ensemble  dans  la  ville  :  Hyrcan  fit  un  festin  à 
Antiochus  et  aux  princes  de  sa  cour  ;  et  ils  mangèrent  et 
burent  ensemble. 

11.  Et  après  le  repas,  il  lui  fit  un  présent  de  trois 
cents  talents  d'or.  Ces  princes  ayant  ensuite  conclu  la 
paix  de  part  et  d'autre,  avec  promesse  de  se  secourir 
mutuellement  dans  le  besoin,  Antiochus  retourna  dans 
ses  états. 

12.  On  dit  qu'Hyrcan  ouvrit  un  trésor  amassé  par  quel- 
ques-uns des  successeurs  de  David  (avec  qui  soit  la 
paix!), et  qu'après  en  avoir  pris  une  grande  somme  d'ar- 
gent, il  y  en  laissa  une  pareille  quantité,  et  le  referma 
de  la  même  manière  qu'il  était  auparavant. 

tj.  Il  employa  cet  argent  à  relever  les  murs  de  Jéru- 
salem, à  faire  subsister  ses  troupes,  et  à  procurer  à  son 
peuple  toutes  sortes  d'avantages  et  d'utilités. 

14.  Antiochus  étant  de  retour  dans  ses  états,  résolut 
de  faire  la  guerre  au  roi  de  Perse  qui  avait  rompu  les 
alliances  dès  le  temps  d'Antiochus  premier  :  pour  cet 
effet,  il  envoya  prier  Hyrcan  de  venir  le  trouver,  et  ils 
passèrent  ensemble  dans  la  Perse. 


IV.  —  MACCABÉES.  —  XXI.       MORT  D'ANTIOCHUS  299 

1;.  Cui  occurrens   exercitus   Persarum    congressus  est  15.  L'armée  des  Perses  vint  à   la    rencontre    d'Antio- 

cum  eo,  quos  profligans  Antiochus,  reportavit  victoriam  chus,  mais  il  les  battit,  les  passa  tous  au  fil  de  l'épée,  et 

ex  illis,  etgladio  percussit  eos.  Tum  stetit  in    loco   suo,  fit  élever  sur  le  champ  de    bataille    un   superbe    monu- 

et  construxit  mirabile  œdificium,  ut  esset  ei  in  memoriam  ment,  pour  perpétuer  parmi  les   Perses    le    souvenir  de 

in  regione  eorum.  sa  victoire. 

16.  Et  perrexit  post  aliquod  tempus  in  occursum  régis  16.  Quelques  jours  après,  Antiochus  alla  chercher  le 
Persarum,  et  moratus  est  rétro  Hyrcanus  causa  sabbati,  roi  de  Perse,  laissant  Hyrcan  derrière  lui  à  cause  du 
cui  Pentecoste  instabat.  sabbat  qui  précédait  la  fêle  de  la  Pentecôte. 

17.  Et  sibi  occurrerunt  rex  Persidis  et  Antiochus,  ac  17.  Les  deux  rois  en  étant  venus  aux  mains,  ils  se 
intercessere  inter  eos  bella  maxima,  in  quibus  periit  livrèrent  des  combats  sanglants,  et  Antiochus  y  périt 
Antiochus,  et  plures  de  exercitu  ejus.  enfin  avec  une  grande  partie  de  son  armée 

18.  Perveniente  autem  nuntioad  Hyrcanum,  profectus  18.  Hyrcan  ayant  appris  cette  défaite,  prit  le  chemin 
est  in  regionem  Syrias,  et  oppugnavit  in  itinere  Haie-  de  la  Syrie  :  il  trouva  sur  son  passage  la  ville  d'Halep 
pum  :  cui  sese  dederunt  cives,  déférentes  ei  tributa,  et  et  l'attaqua  ;  mais  les  habitants  s'étant  rendus  et  lui 
rececsit  ab  illis,  reversusque  est  in  civitatem  sanctam,  ayant  apporté  des  tributs,  il  se  retira  et  revint  à  Jéru- 
et  moratus  est  ibi  aliquos  dies.  salem,  où  il  resta  quelque  temps. 

19.  Tum  contendit  in  Samariae  regionem,  et  oppugna-  19.  De  là  il  s'avança  dans  la  Samarie,  et  vint  attaquer 
vit  Neapolim,  quem  prohibuerunt  cives  eam  ingredi.  Naplouse  ;  mais  les  habitants  lui  en  ayant  fermé  les  por- 
Et  destruxit  quidquid  habebant  eedificiorum  in  monte  tes,  il  détruisit  tous  les  édifices  qu'ils  avaient  sur  le 
Jezabel,  et  templum  quod  quidem  fuit  post  ducentos  mont  de  Jézabel,  et  le  temple  même  qui  subsistait  depuis 
elapsos  annos,  ex  quo  asdificaverat  illud  Sanbalat  Sama-  deux  cents  ans,  que  Sanbalat  le  Samaritain  avait  bâti, 
rita. 

20.  Occidit  prasterea  sacerdotes,  qui  erant  in  Sebeste.  20.  Il  tua  outre  cela  les  prêtres  qui  étaient  dans  Sé- 
Et  profectus  est  in  regionem  Idumeas,  id  est,  montes  baste;  et,  étant  venu  dans  l'Idumée  jusqu'aux  montagnes 
Sarah,  et  sese  illi  dederunt  :  quibuscum  convenit,  ut  de  Sarah,  il  reçut  l'hommage  des  habitants  et  leur 
circumciderentur,  et  ingrederentur  religionem  Torah,  accorda  la  paix  à  condition  qu'ils  se  feraient  circoncire, 
seu  legis  Mosaïcae.  et  qu'ils  embrasseraient  la  Thorah  ou  loi  de  Moïse. 

21.  Cui  morem  g*erentes  circumcisi,  et  Judasi  facti  sunt,  2t.  Ainsi  ces  peuples,  pour  lui  plaire,  reçurent  la  cir- 
et  confirmati  fuerunt  in  hoc  usque  ad  destructionem  concision  et  restèrent  incorporés  à  la  nation  des  Juifs 
domus  secundae.  jusqu'à  la  destruction  du  second  temple. 

22.  Et  perrexit  Hyrcanus  ad  omnes  circumvicinas  22.  Hyrcan  parcourut  toutes  les  nations  voisines  :  Elles 
gentes,cui  omnes  in  clientelam  sese  dederunt,  et  inierunt  se  mirent  toutes  sous  sa  protection  et  firent  avec  lui  un 
simul  fredus  de  pace  et  obedientia.  traité  de  paix  et  d'obéissance. 

2j.  Misit    praeterea  legatos    ad    Romanos,  scribens  eis  2;.    Il    envoya    ensuite   des   ambassadeurs  au   peuple 

de  renovatione  fœderis    inter    sese.    Cum    pervenissent  romain,  pour  renouveler  les  traités  d'alliance  :  ils  furent 

itaque    ejus   legati    ad    Romanos,    honoraverunt  eos,  et  reçus  à  Rome  avec    beaucoup  d'honneur  et    de  distinc- 

exaltaverunt  eorum  locum,  et  auscultaverunt  legationcm,  tion,  et  les  Romains,  après  avoir  écouté  leurs  demandes, 

cujus    causa    vénérant    et    fecerunt    negotia    eorum,  ac  y  satisfirent,  et  répondirent  à  la  lettre  d'Hyrcan. 
responderunt  i  11  i us  epistolas. 


CHAPITRE  XXII 


1.  A  seniore,  et  trecentis  viginli  rectoribus  ejus,  Hyr- 
cano  regi  Judoe,  salus.  Jam  pervenit  ad  nos  epistola  tua, 
quam  legentes  gavisi  sumus.  Et  interrogavimus  legatos 
tuos  de  rébus  tuis. 

2.  Agnovimus  item  locum  dignitatis  eoium  in  scientia, 
disciplina,  et  virtutibus  ;  et  honoravimus  eos,  et  sedere 
fecimus  in  praesentia  senioris,  qui  expedire  curavit  omnia 
negotia  illorum,. 


;.  Prascipiens  restitui  vobis  omnes  urbes,  quas  vi 
abstulerat  Antiochus,  et  auferri  omnem  obicem  circa 
exercitium  religionis  vestras,  et  irritum  fieri  quicquid  in 
vos  decreverat  Antiochus. 

4.  Praecepit  quoque,  ut  firmae  maneant  cunctae  civi- 
tates  quas  ipse  expugnaverat.  Mandavit  praeterea  per 
epistolas  omnibus  suis  provinciis  honorari  legatos  tuos, 
atque  cohonestari. 

<,.  Misit  etiam  cum  illis  ad  te  legatum  nomine  Cynaeum, 
habentem  secum  episiolam  ;  cui  et  legationem  injunxit, 
ut  coram  tecum  ageret. 

6.  Cum  ergo  pervenisset  epistola  Romanorum  ad 
Hyrcanum,  rex  nuncupari  ccepit,  cum  antea  sacerdos 
ma'.'nus  nuncuparetur  : 

7.  Coaluerunt  itaque  in  eo  dignitas  regni  et  dignitas 
sacerdotii.  Fuit  autem  primus  qui  nuncupatus  est  rex  ex 
regibus  Judaeorum  tempore  domus  secundae. 


1.  Le  consul,  et  ses  trois  cent-vingt  sénateurs,  à  Hyr- 
can,  roi  de  Judas,  salut  :  Votre  lettre  nous  a  enfin  été 
rendue  et  nous  l'avons  lue  avec  joie  ;  Nous  nous  sommes 
informés  à  vosambassadeurs  de  la  situation  où  vous  étiez. 

2.  Nous  avons  reconnu  combien  ils  étaient  recomman- 
dables  par  leur  science,  par  la  sagesse  de  leur  conduite, 
et  par  une  infinité  d'autres  vertus,  et,  pour  les  honorer 
davantage,  nous  les  avons  fait  asseoir  en  présence  du 
consul  qui  les  a  satisfaits  prompternent  sur  toutes  leurs 
demandes, 

?.  Ordonnant  qu'on  vous  restituât  toutes  les  villes 
qu'Antiochus  vous  avait  enlevées  par  force;  qu'on  ne 
vous  inquiétât  plus  dans  la  suite  sur  l'exercice  de  votre 
religion,  et  qu'enfin  l'onsupprimât  toutes  iesordonnances 
qu'il  avait  publiées  contre  vous. 

4.  Il  a  ordonné  de  plus,  que  toutes  les  villes  qu'An- 
tiochus avait  prises,  rentrassent  sous  votre  obéissance  : 
il  a  encore  écrit  dans  toutes  les  provinces  de  l'empire, 
qu'on  reçût  vos  ambassadeurs  avec  toutes  sortes  d'hon- 
neurs et  de  distinctions. 

<;.  Outre  cela,  il  vous  envoie  avec  eux  un  ambassadeur 
nommé  Cyneus,  il  l'a  chargé  de  lettres  et  l'a  revêtu  de 
tous  les  pouvoirs  nécessaires  pour  traiter  avec  vous  de 
vive  voix. 

0.  Lorsqu'Hyrcan  eut  reçu  la  lettre  des  Romains,  il 
commença  à  prendre  la  qualité  de  roi,  n'ayant  eu  jusque- 
là  que  celle  de  grand  prêtre. 

7.  Il  réunit  ainsi  en  sa  personne  ces  deux  dignités  su- 
prêmes, et  il  fut  le  premier  qui  porta  le  nom  de  roi, 
depuis  que  le  second  temple  eut  été  bâti. 


CHAPITRE  XXilI 


i.  Hyrcanus  autem  contendit    in  Sebesten,    et    obsedit  i.  Hyrcan    s'étant   avancé    vers  Sébaste   assiégea    les 

Samaritas,    qui  erant  in   ea,  longo   tempore  :    donec    eo  Samaritains  qui  étaient  dans  cette  ville,  et  les  réduisit  à 

necessitatis  eos  redegit,  ut  coacti  fuerint  vesci  omni  ge-  une  telle  extrémité  par  la  longueur  du  siège,  qu'ils  furent 

nere  morticinii.  contraints,  pour  vivre,  démanger  toutes  sortes  de  bêtes 

mortes. 

2.   Hœc    nihilominus    aequo    ferebant  animo,    timentes  2.   Mais  la  crainte  qu'ils  avaient    d'Hyrcan,    et   les  se- 

gladium  ejus,  et   fiduciam  habentes   in    Macedonibus,   et  cours  qu'ils  attendaient   de  Macédoine  et  d'Egypte,  leur 

jEgyptiis,  quorum  opem  imploraverant.  firent  supporter  tous  ces  maux  avec  une  grandeconstance. 

j.  Interea  adest  jejunium  majus,  cui  prœsto  esse  debe-  5.  Le  grand   jeûne    des    Juifs    approchait,   et    Hyrcan 

bat    Hyrcanus   in    domo    sancta,    ut    offerret     sacrificia  était  obligé  de  se  trouver  à  Jérusalem    pour  y  offrir  les 

hoc  die.  sacrifices. 

4.  Suffecit  itaque  duos  filios  suos,  nempe   Antigonum,  4.  Il   laissa  donc   le  commandement  de  l'armée  à  ses 

et  Aristobulum  exercitui,  prascipiens  eisobsidere  Sama-  deux  fils  Antigone  et  Aristobule,    les  chargeant  de  pres- 

ritas,  et  in  angustias  redigere.  ser  le  siège  avec  vigueur. 

<,.  Jussit  quoque  exercitui    filiis  suis   obedire,  et  man-  5.   Et,  après  avoir  ordonné  aux  troupes  de  leur  obéir 

datis  eorum  obsequi,  et  profectus  est  in  civitatem  domus  en  toutes  choses,  il  se  rendit  à  la  ville  du  temple  saint, 
sanctœ. 

6.  Perrexit  quoque  Antiochus  Macedo  ad  opem  feren-  6.  Cependant  Antiochus  le  Macédonien  s'avançait  pour 
dam  civibus  Sebestes  ;  et  perlata  est  fama  ejus  duobus  secourir  Sébaste;  les  deux  fils  d'Hyrcan  en  furent  infor- 
filiis  Hyrcani,  qui,  suffecto  qui  Sebestes  obsessioni  ins-  mes,  et  laissant  à  quelqu'un  des  leurs  la  conduite  du 
taret,  obviam  Antiocho  iverunt  :  siège,  ils  marchèrent  au-devant  d'Ar.tiochus, 

7.  Quem  oppugnantes  fugaverunt,  et  reversi  sunt  Se-  7.  Et,  après  l'avoir  mis  en  fuite,  ils  revinrent  à  Sébaste. 
besttn.  Adventavit  praeterea  ex  >Egypto  Lythras  fihus  La  fête  des  Juifs  était  passée  lorsqu'Hyrcan  de  son  côté 
Cleopatras  reginasad  opitulandum  Samaritis.  Hujus  nun-  apprit  que  Lythras,  fils  de  la  reine  Cléopâtre,  amenait 
tium   cum  perlatum  esset  ad     Hyrcanum,    contendit    ad  aux  Samaritains  des  secours  d'Egypte. 

eum  transacta    jam    solemnitate  : 

8.  Cui  occurrens  oppugnavit  accerrime,  occiditque  de  8.  11  vint  à  la  rencontre  de  ce    prince,    l'attaqua   avec 
viris  ejus  quamplures:  et  fugatus  est   Lythras,   nec    re-  vigueur  et   lui    tua    une   grande  partie    de  ses    troupes, 
versi  sunt  posthac  /Egyptii  opem  ferre  Samaritis.  Lythras  fut  contraint  de  s'enfuir,  et    les  Egyptiens  n'en- 
treprirent plus  depuis  de  secourir  les   Samaritains. 

0.  Et  reversus  est  rex  Hyrcanus    Sebesten,    et  institit  9-  Le  roi  Hyrcan,  étant  de  retour  à  Sébaste,  pressa  vi- 

in  eam,  donec  gladio  expugnavit;  et  occidit  qui    reman-  vement  cette  place  jusqu'à  ce  qu'enfin  il  l'eût  emportée 

serant  de   civibus,  et  exterminavit  eam,    et  mœnia   des-  l'épée  à  la   main  ;  il  tua  tout  ce   qui  y  restait  d'habitants, 

truxit.  la  détruisit  entièrement  et  l'ensevelit    sous  les  débris  de 

ses  murailles. 


CHAPITRE  XXIV 


1.  Lythras  quidem  filius  Cleopatrae,  cum  roboratus  I.  Lylhras,  fils  de  Cléopâtre,  ayant  en  main  des  forces 
esset  bonis,  et  viris,  descivit  a  matre  sua  Cleopatra,  considérables  avec  de  grandes  sommes  d'argent,  et  se 
opitulaniibus  ei  prœclarissimls  regni.  voyant    appuyé    des    premiers    de    l'empire,  se    révolta 

contre  sa  mère. 

2.  Accitos  itaque  Cleopatra  duos  viros  de  Judasis,  2.  Alors  Cléopâtre  fit  venir  deux  Juifs  dont  l'un  s'ap- 
quorum  unus  dicebatur  Chelcias,  alter  vero  Hananias,  pelait  Chelcias  et  l'autre  Hananias,  et,  les  préférant  à 
prœposuit  iis,  qui  secum  remanserant  ex  magnatibus  tous  ceux  des  princes  égyptiens  qui  lui  étaient  restés 
/Egyptorum,  ac  prefecit  ambos  copiis  /Egypti.  fidèles,  elle  leur  donna  le  commandement  de  ses  troupes. 

}.  Hi  autem  bene  gerebant  omnia  erga  plebem,  et  sa-  >.  Ces  deux    Juifs    gouvernaient   alors    l'Egypte   avec 

pienter  administrabant  negotia  regni.  beaucoup  de  sagesse,  et  traitaient  les  peuples  avec  une 

grande  douceur. 

4.  Hos  misit  Cleopatra  ad  oppugnandum  Lythram  ;  qui  4.  Ils  s'avancèrent  donc  contre  Lythras  par  ordre,  de 
profecti  ad  eum  inierunt  bellum,  et  fugaverunt  eum,  Cléopâtre,  et,  l'ayant  attaqué,  ils  le  mirent  en  fuite  après 
profligatis  viris  ejus  :  avoir  défait  toute  son  armée. 

5.  Qui  fugit  in  Cyprum,  ibique  morabatiir  cum  paucis,  S.  Lythras  se  sauva  en  Chypre, où  il  resta  avec  le  petit 
qui  secum  remanserant.  nombre  des  siens  Cjui  l'y  avaient  suivi. 


CHAPITRE  XXV 


1.  Erant  Judaeorum  eo  tempore  très  sectse  :  una  Plia-  I.  Il  y  avait  alors  parmi  les  Juifs  trois  sectes  différen- 
risasorum.idest  segregatorum,  seu  religiosorum,  quorum  tes:  la  première  était  celle  des  pharisiens,  c'est-à- 
institutum  erat  asserere  quidquid  in  lege  continetur  dire  d'hommes  séparés,  religieux  et  zélés  défenseurs  de 
secundum  prœdecessorum  expositiones.  'a  'oi,  qu'ils  expliquaient    selon    les    traditions   de  leurs 

pères. 

2.  Secunda  Sadducœorum,  et  sunt  asseclœ  viri  cujus-  2.  La  seconde  était  celle  des  saducéens,  qui  suivaient 
dam  de  doctoribus,  ncmine  Sadoc  ;  quorum  institutum  les  opinions  d'un  certain  docteur  juif  nommé  Sadoc;  ils 
erat  asserere  secundum  ea,  quaî  prsecipiuntur  ex  textu  n'admettaient  rien  qui  ne  fût  tiré  du  texte  de  la  loi,  ou 
legis,  et  de  quibus  demonstratur  ex  ipsa  scnptura,  non  que  l'on  ne  pût  prouver  par  l'Ecriture  même,  et  reje- 
autem  quod  in  textu  non  extat,  nec  demonstratur  ex  eo.  taient  tout  ce  qui  n'était  point  dans  cette  règle. 

j.  Tertia  vero    secta    erat    Hasdanim,    seu    virtutibus  5.  La  troisième  secte  était  celle  des  Hasdanimou  adon- 

operam  novantium  :  nec  meminit  auctor   libri  institutum  nés  à  la  vertu.  L'auteur  du  livre  ne  parle  point  de    leur 

istorum,  sed  quatenus  hoc  elicitur  ex  nomine,  incumbe-  institut;   mais,  autant  qu'on   peut  le  conjecturer  de  leur 

bant   enim    iis  operibus,  quœ  ad    prœstantiores    virtutes  nom,  ils  s'appliquaient  avec  ardeur  à  ce  qui  pouvait  les 

accedebant,  quod  est,  seligere   ex  istis  duobus  institutis  élever   aux  vertus   les  plus  sublimes,    et   prenaient  dans 

quod  est  tutius  in  fide,  securius,  ac  cautius.  les  deux  premières  sectes  ce  qu'il  y  avait  de  plus  sûr  et 

de  moins  dangereux  pour  la  foi. 

4.  Hyrcanus  autem  fuit  primo    ex   Pharisaais,    tum  mi-  4-  Hyrcan  s'était  d'abord  attaché   aux  pharisiens,  mais 

"ravit  ad  Sadducasos  ''  'es  °,u'tta  pour  embrasser  la  secte  des  saducéens, 

°  5.  Eo    quod  dixera't   il  1  i    quidem    Pharisœorum  :    Non  5-  Parce  qu'un  pharisien  lui  dit  un  jour  :  Il  ne  vous  est 

licet  tibi  esse  sacerdotem  magnum,  Point  permis  de  posséder  la  dignité  de  grand  prêtre, 

6.  Quia  mater  tua  captiva  fuit  antequam    te  gigneret  in  6.  Puisque  votre  mère,  avant  que  de    vous  mettre  au 

diebus  Antiochi  ;  filium  vero  captivitatis  non  decet  esse  monde,  a    été    captive   pendant   la  persécution  d'Antio- 

sacerdotem  magnum  chus  ;  et  il  est  honteux   qu'un    fils  de    la    captivité   soit 

souverain  pontife. 

7   Erat  autem  colloquium  hoc  pœsentibus  Pharisseorum  7-  Ce  reproche,    qui  lui  fut  fait  en  présence    des  plus 

principibus.   Quod   quidem    causa    fuit    transmigrations  considérables    d'entre    les    pharisiens,    le    détermina    à 

ejus  ad  institutum  Sadducseorum.  Passer  dans  la  secte  des  saducéens. 

8.  Sadducœi  autem  inimicitias  exercebant  cum  Phari-  8.  Ces  deux  sectes  vivaient  dans  une  inimitié  ouverte, 
saeis;  quare  inter  eos  discordias  nutriebant,  et  eo  indu-  et  les  saducéens  fomentant  à  dessein  ces  discordes, 
xerunt  illum,  ut  interfecerit  de  Pharisasis  multitudinem  obligèrent  Hyrcan  de  sacrifier  à  leur  haine  un  grand 
plurimam  nombre  de  pharisiens. 

9.  Les  choses  en  vinrent   à  une  telle  extrémité   qu'on 

9.  Eoque  devenit  rerum  calamitas,  ut  belia  et  mala  vit  pendant  plusieurs  années  ces  deux  partis  se  faire  une 
multa  inter  eos  longo  annorum  spatio  duraverint.  guerre  cruelle,  et  se   causer  réciproquement   des    maux 

sans  nombre. 


CHAPITRE    XXVI 


1.  Erant  Hyrcano  très  filii,  Antigonus  videlicet,  Aris-  I.  Hyrcan  avait  trois  fils,  Antigone,  Aristobule  et 
tobulus,  et  Alexander.  Diligebat  autem  Hyrcanus  Anti-  Alexandre.  Il  aimait  les  deux  premiers,  et  n'avait  que  de 
gonum,  et  Aristobulum  ;  exosus  vero  erat  ci    Alexander.  la  haine  pour  le  troisième. 

2.  Vidit  autem  aliquando  in  somniis  quod  regnatu-  2.  Ayant  vu  une  fois  en  songe  qu'Alexandre  était  celui 
rus  esset  post  se  de  liliis  Alexander,  quod  moerorem    ei  qui  de /ait  lui  succéder,  il  en  fut  très  affligé. 

attulit. 

j.  Nec  illi  visum  est,  ipso  vivente,prasficere  quempiam  ?.  Cependant,  retenu  par  cette  vision,  il  n'osa  pas  de 

tiliorum  suorum,   quos  diligebat,  propter  visionem  ;  nec  son  vivant  choisir  pour  son    successeur    l'un    des    deux 

Alexandrum  constituere  regem,  quod  invisus  ei  erat.  qu'il  aimait  ;  et  ne  voulut  pas  aussi  se  déclarer  en  fa- 
veur d'Alexandre  à  cause  de  la  haine  qu'il  lui  portait. 

4.  Quare  dimisit  negotium,  ut   eum    haberet    eventum  4-  Ainsi,  il  en  remit  l'événement  entre    les    mains    du 

post  obitum  suum,  qui  Deo  optimo  maximo  erit  in  pla-  Dieu  souverain,  afin  qu'après  sa  mort, il  en  décidât  selon 

citis.  sa  volonté  toute-puissante. 

<,.  Erant  autem  Judrei  tempore  patris    illius,  et  patrue-  5.  Les  Juifs  avaient  toujours  aimé  le  père  d'Hyrcan  et 

lium,  consentientes  in  amore  illorum,  et  propensi  ad  il-  ses  frères  tant  qu'ils  avaient  vécu;  l'éclat  de  leurs  gran- 

lorum  obedientiam,  ob  hostium  suorum  debellationem,et  des  actions  et  les  victoires  qu'ils  avaient  remportées  sur 

res  optime  gestas  ab  eis.  leurs  ennemis  cimentèrent  ces  penchants  naturels. 

6.  Perstiterunt  quoque  conjuncti  in  amore  Hyrcani,do-  0.  Ils  restèrent  encore  unis  dans  les  mêmes  sentiments 
nec  perpretrata  est  ab  illo  caedes  Pharisaeorum,  et  ex  d'amour  pour  Hyrcan,  jusqu'à  ce  qu'il  se  fût  souillé  du 
terminium  Judœorum,  ac  civilia  bella  ob  religionem.  sang  des  pharisiens  et  de   celui   de   toute    la  nation,  et 

qu'il  eûtarmé  ses  sujets  les  uns  contre  les    autres    sous 
prétexte  de  défendre    les  intérêts  de  la  religion. 

7.  Hinc  obortas  sunt  perpétuai  inimici tise,  et  continuata  7.  De  lànaquirent  des  haines  irréconciliables, des  com- 
mala,  et  mullae  clades.  bats  fréquents  et  un  enchaînement  funeste  de  toutes  sor- 
tes de  maux  ; 

8.  Quod  quidem  causa  fuit  multis  detestari  Hyrcanum.  3.  Ce  qui  rendit  Hyrcan  si  détestable  à  plusieurs  de 
Fuit  autem  tempus  regni  illius  triginta,  et  unius  annorum,  ses  sujets.  Ce  prince  mourut  enfin,  après  avoir  régné 
et  defunctus  est.  trente-et-un  ans. 


CHAPITRE  XXVII 


i.  Defuncto  Hyrcano,  regnavit  post  illum  Aristobulus 
filius  ejus,  qui  osientavit  fast'.im,  superbiam,  et  poten- 
tiam,  imponebatque  capiti  suo  magnum  diadema,  in  des- 
pectum  diadematis  sacerdotii  sancti. 

2.  Propensus  autem  erat  in  fratrem  suum  Antigonum, 
quem  prœtulit  omnibus  amicis  suis  ;  Alexandrum  vero 
fratrem  suum  in  vinculis  habuit,  itidem  et  matrem  suam, 
ob  amorem  illius  erga  Alexandruin. 

?.  Et  misit  fratrem  suum  Antigonum,  qui  oppugnavit 
eum,  et  vicit  eum  cum  omnibus  et  copiis,quas  profligavit, 
et  reversus  est  in  civitatem  domus  sanctœ. 

4.  Accidit  autem  hoc,  cum  infirmus  jaceret  Aristobu- 
lus.  Cum  itaque  accederet  ad  civitatem  Antigonus,  nun- 
tiata  est  ei  fratris  aegritudo  :  qui  ingressus  civitatem, adiit 
domum  Dei,  ut  gratias  ageret  de  collato  sibi  beneficio 
liberationis  ab  hoste,  et  efflagitaret  Deum  optimum  ma- 
ximum, ut  fratri  valetadinem   largiretur. 

$.  Petunt  ergo  quidam  de  hostibus  et  osoribus  Antigoni 
Aristobulum,  et  dicunt  :  Utique  aegritudinis  tua=i  nuntium 
fratri  tuo  perlatum  est,  et  ecce  adventat  cum  sociis,  ins- 
tructus  armis, 

6.  Et  jam  perrexit  in  sanctuarium  conciliaturus  sibi 
socios,  ut  irruat  in  te,  et  occidat. 


7.  Et  timuit  rex  Aristobulus  ne  ob  id,  quod  sibi  dictum 
est,  citius  properaret  in  fratrem  suum,  antequam  certior 
fieret  de  relatis. 

8.  Quamobrem  prascepit  universis  pueris  suis,  ut  armis 
instructi  sisterent  in  loco  quodam,  quem  declinare  nequit 
quicumque  ejus  petit  palatium. 

9.  Jussit  prasterea  prœconio  prascini,  ne  quis  ullo  ar- 
morum  génère  instructus,  in  aulam  ad  regem  injussus  ac- 
cederet. 

10.  Post  haec  misit  ad  Antigonum,  prascipiens  ad  se 
venire  :  quare  exutus  est  Antigonus  armis  morem  gerens 
régi. 

11.  Intérim  adventavit  ad  eum  legatus  uxoris  fratris  sui 
Aristobuli  (quippe  exosus  ei  erat)  quas  ait  illi  :  Rex  tibi, 
dicit  :  Jam  nuntiata  mini  est  pulchritudo  habitus  tui 
cum  ingrederens  civitatem,  et  jam  cupio  te  contemplari 
sub  hac  forma  ;  quare  perge  ad  me  in  hune  modum,  ut 
intuens  te  gaudeam. 

12.  Nec  dubitavit  Antigonus  hanc  legationem  esse  a 
rege,  ut  retulerat  legatus,  et  quod  eum  nequaquam  cœ- 
teris  in  armorum  depositione  vellet  sequare  ; 


15.  Et  adivit  illum  eo  modo  et  habitu.  Qui  cum  per- 
venisset  ad  locum  illum,  in  quo  jusserat  rex  Aristobulus 
viros  suos  sistere,  et  occidere  quicumque  illuc  armatus 
adventaret, 

14.  El  vidissent  illum  viri  instructum  armis  suis,  insti- 
terunt  in  illum,  et  illico  occiderunt  ;  et  fluxit  sanguis  ejus 
super  marmora  eo  in  loco. 

15.  Et  invaluit  clamor  hominum,  ac  elevatus  est  eorum 
fletus,  et  ululatus,  condolentes  necem  Antigoni  ob  illius 
speciositatem,  et  sermonis  elegantiam,  et  ea  quae  fe- 
cerat. 


1.  Hyrca.n  étant  mort,  son  fils  Aristobule  lui  succéda, 
et  fit  voir  dans  une  puissance  excessive  beaucoup  de 
faste  et  d'orgueil,  portant  sur  sa  tête  un  grand  diadème, 
méprisant  celui  que  portait  ordinairement  le  souverain 
pontife. 

2.  Il  aimait  naturellement  son  frère  Antigone,  et  le  dis- 
tingua toujours  des  autres  favoris.  Il  fit  charger  de 
chaînes  Alexandre,  son  frère,  aussi  bien  que  sa  mère,  ne 
pouvant  soulîrir  l'affection  qu'elle  avait  pour  ce  fils. 

î.  Il  envoya  contre  lui  son  autre  frère  Antigone,  qui, 
après  l'avoir  vaincu,  avoir  défait  toutes  ses  troupes,  et 
dissipé  son  parti,  revint  à  Jérusalem. 

4.  Aristobule  était  alors  retenu  au  lit  pour  quelque  in- 
firmité. Antigone,  en  arrivant,  apprit  sa  maladie. et  étant 
aussitôt  entré  dans  la  ville,  il  vint  au  temple  pour  ren- 
dre grâces  au  Dieu  tout-puissant  de  la  victoire  qu'il  lui 
avait  accordée  sur  son  ennemi,  et  pour  lui  demander  la 
guérison  de  son  frère. 

5.  Mais  quelques  ennemis  d'Antigone,  profitant  de  ces 
circonstances,  vinrent  trouver  Aristobule  et  lui  dirent  : 
Votre  frère  a  sans  doute  appris  votre  maladie,  il  vient 
d'entrer  dans  Jérusalem  à  main  armée,  et,  suivi  des 
compagnons  de  sa  révolte, 

6.  Il  s'est  déjà  avancé  vers  le  temple  où  il  cherche  à 
grossir  son  parti,  pour  venir  ensuite  vous  forcer  jusque 
dans  votre  palais,  et  vous  ôter  la  vie  de  ses  propres 
mains. 

7.  Aristobule  ne  voulut  rien  précipiter  contre  son 
frère,  avant  d'avoir  été  suffisamment  éclairci  de  la  vérité 
de  cette  accusation. 

8.  C'est  pourquoi  il  ordonna  à  tous  ses  gardes  de  se 
porter  en  armes  dans  un  certain  endroit,  par  lequel  on  ne 
pouvait  éviter  de  passer  en  venant  au    palais. 

q.  Et,  après  avoir  fait  publier  que  personne  ne  parût 
à  la  cour  avec  quelque  arme  que  ce  fût, et  n'y  vint  même 
sans  avoir  été  mandé, 

10.  Il  envoya  chercher  Antigone,  qui  quitta  prompte- 
ment  ses  armes  pour  se  conformer  aux  ordres  du  roi. 
Sur  ces  entrefaites, 

11.  La  femme  d'Aristobule,  qui  cherchait  à  le  perdre, 
lui  envoya  dire  que  le  roi,  son  frère,  ayant  entendu  par- 
ler de  la  magnificence  avec  laquelle  il  était  entré  dans 
Jérusalem,  souhaitait  le  voir  dans  le  même  éclat  et  re- 
vêtu des  mêmes  habits;  qu'il  vint  donc  au  plus  tôt  lui 
donner  cette  satisfaction. 

12.  Antigone,  sur  le  rapport  du  courrier,  ne  douta 
point  que  cet  ordre  ne  lui  fût  envoyé  de  la  part  du  roi, 
et,  s'imaginant  là-dessus  qu'il  n'avait  point  prétendu  le 
comprendre  dans  la  défense  qu'il  avait  faite  de  paraître 
armé  à  la  cour, 

1?.  Il  y  vint  avec  le  même  appareil  et  le  même  habit 
qu'il  avait  en  entrant  dans  Jérusalem.  Lorsqu'il  fut  à  l'en- 
droit où  Aristobule  avait  placé  des  gardes  avec  ordre  de 
tuer  quiconque  y  paraîtrait  armé, 

14.  Et  que  ces  gardes  eurent  aperçu  Antigone  qui 
s'avançait  avec  ses  armes,  ils  se  jetèrent  sur  lui  et  le 
tuèrent  ;  le  marbre  dont  ce  lieu  était  pavé  fut  couvert 
de  son  sang. 

1^.  Ceux  qui  se  trouvèrent  là  poussèrent  aussitôt  des 
cris  mêlés  de  pleurs  et  de  hurlements,  regrettant  ce 
prince  à  cause  de  sa  beauté,  de  la  douceur  de  ses  dis- 
cours et  des  grandes  actions  qu'il  avait  faites. 


S.   B. 


T.  XI! 


20 


5  i6 


V.-    MACCABÊES.—  XXVII.   -   MORT  D'ARISTOBULE 


Ki.  Audiens  itaque  rex  clamorem  hominum  interrogavit 
de  re,  percepitque  Antigonum  csesum  esse  :  quod  sum- 
mum attulit  ei  mcerorem,  tum  propter  amorera  quo  il- 
lum  prosequebatur,  tum  quod  talia  non  merebatur  : 

17.  Et  cognovit  insidias  fratri  tensas  fuisse,  et  excla- 
mavit,  flevitque  lletu  magno,et  continenter  percussit  pec- 
tus  ;  ita  ut  disrumperentur  quœdam  venas  illius  pectoris, 
et  erumperet  sanguis  de  ore  ipsius. 

18.  Accesserunt  autem  ad  illum  pueri,  et  principes 
amicorum  ejus,  consolantes,  et  lenientes,  et  blandientes 
ei,  ut  ipsum  distinerent  ab  hujuscemodi  opère,  veriti  ne 
periret,  cum  esset  aeger,  et  prope  animam  exhalaret 
propter  ea,  quse  ab  ipso  gesta  sunt. 

19.  Acceperunt  autem  catinum  aureum  ad  excipien- 
dum  erumpentem  ex  ore  sanguinem,  et  miserunt  catinum 
cum  sanguine  qui  in  eo  erat  per  quemdam  puerorum  ad 
medicum,  ut  videret  et  consuleret  quid  ei  adhibendum 
esset. 

20.  Et  abiit  puer  cum  catino,  et  cum  advenisset  in 
locum  in  quo  occisus  fuerat  Antigonus,  et  fluxerat  san- 
guis ejus,  prolapsus  est  puer,  et  cecidit,  et  effusus  est 
qui  erat  in  catino  ex  sanguine  régis  super  sanguinem 
fratris  sui  occisi. 

21.  Et  reversus  est  puer  cum  catino,  indicavitque  au- 
licis  quod  acciderat.  Qui  injuriis  et  contumeliis  impetive- 
runt  justificantem,  et  jurantem  id  se  haud  ex  industria, 
vel  sponte  intendisse. 

22.  Cum  autem  audisset  rex  contendentes,  petiit  ut  sibi 
indicarent  quid  loquerentur,  qui  se  continuerunt;  at  ubi 
comminatus  est,  indicaverunt  ei. 

23.  Qui  ait:  Laus  judici  juslo,  qui  effundit  sanguinem 
oppressoris  super  sanguinem  oppressi.  Tum  ingemuit,  et 
mortuus  est  statim  : 

24.  Et  fuit  tempus  regni  illius  unius  exacti  anni.  Et 
flevit  illum  totus  grex  illius, quia  erat  magnanimus,  viclor, 
liberalis  :  et  regnavit  post  illum  frater  illius  Alexander. 


16.  Au  bruit  de  toutes  ces  clameurs,  le  roi  demanda 
quel  en  était  le  sujet,  et  ayant  su  qu'Antigone  venait 
d'expirer,  il  en  fut  vivement  affligé,  tant  à  cause  de 
l'amitié  qu'il  ressentait  pour  iui,  que  parce  qu'il  le  croyait 
digne  d'un  sort  plus  heureux. 

17.  Reconnaissant  alors  qu'on  avait  trompé  son  frère, 
il  criait,  versait  des  torrents  de  larmes  et  ne  cessait  de  se 
frapper  la  poitrine  ;  en  sorte  que,  s'étant  rompu  quel- 
ques veines,  il  vomissait  le  sang  par  la  bouche. 

18.  Les  officiers  du  palais  et  ses  principaux  amis,  crai- 
gnant que  sa  maladie  n'augmentât  et  qu'il  n'expirât  enfin 
au  milieu  de  tous  ses  efforts,  vinrent  pour  le  consoler  et 
l'obliger  par  toutes  sortes  de  raisons  à  modérer  sa  dou- 
leur. 

19.  Ayant  pris  ensuite  un  vase  d'or  pour  recevoir  le 
sang  qui  lui  sortait  par  la  bouche,  ils  chargèrent  un  jeune 
officier  de  le  porter  au  médecin,  afin  qu'il  examinât  ce 
qu'il  y  avait  à  faire. 

20.  L'officier  partit  avec  ce  vase,  et,  quand  il  fut 
arrivé  à  l'endroit  où  Antigone  avait  été  tué,  il  glissa  et 
se  laissa  tomber  ;  en  sorte  que  le  sang  du  roi  se  répandit 
sur  celui  d'Antigone. 

21.  L'officier  revint  aussitôt  avec  le  vase  et  raconta 
aux  amis  du  roi  ce  qui  lui  était  arrivé;  et  quoiqu'il  dit 
pour  se  justifier, en  assurant  que  cet  accident  était  arrivé 
par  hasard  et  sans  aucun  dessein  de  sa  part,  ils  l'acca- 
blèrent d'injures  et  de  reproches. 

22.  Le  roi  ayant  entendu  ces  contestations  voulut  sa- 
voir quelle  en  était  la  cause,  ses  amis  se  turent  d'abord, 
et,  cédant  enfin  aux  menaces  du  roi,  ils  lui  dirent  la 
chose  telle  qu'elle  était. 

2).  Alors  il  leur  répondit  :  Gloire  soit  rendue  au  juste 
juge  qui  a  répandu  le  sang  de  l'oppresseur  sur  celui  de 
de  l'innocent;  et,  après  avoir  poussé  quelques  gémisse- 
ments, il  expira. 

24.  Le  temps  de  son  règne  fut  d'une  année  entière,  et 
le  peuple  le  pleura,  parce  qu'il  était  magnanime  et  libé- 
ral, et  qu'il  avait  remporté  plusieurs  victoires.  Son  frère 
Alexandre  régna  après  lui. 


CHAPITRE  XXVIII 


1.  Postquam  mortuus  est  Aristobulus,  vinculis  solutus 
est  frater  illius  AIexander,et  e  carcere  eductus  successit 
in  regnum. 

2.  Rebellaverat  autem  praefectus  urbis  Acche,  quas  est 
Ptolemais,et  miserat  legatosad  Lythram,lïlium  Cleopatras, 
flagitans  utauxilio  sibi  esset,  reciperetque   in  clientelam, 

j.  Qui  multum  recusavit,  timens  ea  quae  hactenus 
sustinuerat  ab  Hyrcano. 

4.  Cui  animos  addidit  legatus  ob  promissa  auxilia  do- 
mini  Tyri,  et  Sidonis,  aliorumque. 

5.  Etprofectusest  Lythrascum  triginta  millibus  virorum: 
et  perlata  est  fama  Alexandro,qui  antevertit  eum  ad  Pto- 
lemaidem,et  invasit  eam  ;  clauseruntque  cives  Ptolemaidis 
portam  in  faciem   ipsius,  et  prohibere    eum    conabantur. 

6.  Quare  coarctabat  eos  Alexander,  instititquc  obsi- 
dens,  donec  nuntiatum  est  de  profectione  Lythrae  :  tune 
enim  recessit  ab  eis,  adventante  Lythra  eum  suis. 

7.  Erat  autem  inter  Ptolemaidenses  cives  senex  qui- 
dam acceptas  auctoritatis,  qui  persuasit  civibus  ne  Ly- 
thram  ingredi  civitatem  suam  permitterent,  nec  ejus 
obedientiam  admitterent,  eum  sit  alterius  religionis. 

8.  Ait  illis  quoque  :  Conducibilior  quidem  vobis  unde- 
quaque  erit  obedientia  Alexandro,  qui  ejusdem  religio- 
nis est,  quam  obedientia  Lythrae  ; 

9.  Nec  destitit  donec  admiserunt  ipsius  sententiam.  Et 
prohibuerunt  Lythram  ingredi  Ptolemaidem,  negantes  ei 
obedientiam. 

10.  Et  hassit  Lythras  circa  res  suas,  nec  deliberabat 
quid  sibi  agendum  esset.  Et  perlatum  est  hoc  régi  Sido- 
nis, ad  quem  misit  legatos,  ut  ei  auxilio  esset  in  bello 
contra  Alexandrum, 

11.  Vel  ut  expugnarent  illum  aut  aliquas  ejus  civitates, 
et  punirent  eum  in  hoc, 

12.  Et  sic  reverteretur  Lythras  in  regionem  suaro, 
gestis  iis,  quas  illum  timendum  redderent,  quod  sane 
conducibilius  illi  fore,  quam  rébus  infectis  reverti. 


1?.  Et  nuntiatum  est  hoc  Alexandro,  qui  misit  ad 
Lythram  honestam  legationem  eum  pretiosissimo  munere, 
et  statuit  eum  illo,  ne  auxilio  esset  domino  Sidonis. 

14.  Et  acceptavit  Lythras  munus  Alexandri,  annuens 
ejus  petitioni.  Alexander  autem  profectus  est  Sidonem, 
et  oppugnavit  dominum  ejus,  quem  victorem  reddidt 
Deus  adversus  eum, 

15.  Occiditque  multitudinem  plurimam  de  viris  ejus, 
et  ipso  fugato,  obtinuit  illius  regionem. 

16  Post  hase  misit  Alexander  legaîos  ad  Cleopatram, 
ut  proficisceretur  eum  exercitu  ad  Lythram  filium  suum, 
ut  pergeret  et  ipse  eum  exercitu  suo  ad  eumdem,  et  cap- 
tum  traderet  ei. 

17.  Quod  cognoscens  Lythras  abiit  in  moiHem  Galilasas, 
et  occidit  de  incolis  multitudinem  plurimam,  et  decem 
captivorum  millia  abduxit,  et  cassa  est  de  viris  ejus  mul- 
titudo  magna. 


1.  Aristobule  étant  mort,  son  frère  Alexandre  fut  tiré 
des  fers  et  de  la  prison,  pour  être  élevé  sur  le  trône. 

2.  Le  gouverneur  de  la  ville  d'Acchée,  autrement 
Ptolémaïs,  s'était  révolté  et  avait  envoyé  prier  Lythras, 
(Lathyre),  fils  de  Cléopâtre,  de  le  recevoir  sous  sa  pro- 
tection, et  de  se  joindre  à  lui. 

?.  Lythras,  se  ressouvenant  encore  des  pertes  qu'il 
avait  faites  contre  Hyrcan,  refusa  d'abord  de  l'écouter. 

4.  Mais  les  députés  du  gouverneur  agirent  si  bien 
auprès  de  Lythras,  en  lui  représentant  les  secours  que 
les  rois  de  Tyr  et  de  Sidon,  et  d'autres  princes  étaient 
sur  le  point  d'envoyer, 

5.  Qu'il  partit  enfin  avec  trente  mille  hommes.  Alexan- 
dre en  ayant  eu  avis,  le  devança  et  vint  pour  se  jeter 
dans  Ptolémaïs;  mais  les  habitants  refusèrent  de  le  rece- 
voir et  lui  fermèrent  leurs  portes. 

6.  Il  mit  aussitôt  le  siège  devant  la  ville  qu'il  attaqua 
vigoureusement;  et,  ayant  su  enfin  que  Lythras  s'avan- 
çait à  la  tête  de  ses  troupes,  il  se  retira. 

7.  Il  y  avait  dans  Ptolémaïs  un  vieillard  qui,  par  l'auto- 
rité qu'il  avait  acquise  sur  ses  concitoyens,  entreprit  de 
les  détourner  d'ouvrir  leurs  portes  à  Lythras,  et  de  se 
soumettre  à  un  homme  qu'une  religion  étrangère  devait 
leur  rendre  odieux  ; 

8.  Leur  représentant  en  même  temps  qu'il  leur  serait 
bien  plus  avantageux  de  se  donner  à  Alexandre,  qui  était 
de  la  même  religion  qu'eux, 

9.  Et  il  ne  les  quitta  point  qu'il  n'eût  achevé  de  les 
persuader,  et  aussitôt  ils  convinrent  de  ne  point  s'assu- 
jettir à  Lythras,  et  se  mirent  en  devoir  de  lui  refuser 
l'entrée  de  leur  ville. 

10.  Cependant  Lythras  ne  savait  à  quoi  se  déterminer. 
Le  roi  de  Sidon,  informé  de  l'état  où  il  se  trouvait,  fit 
partir  des  ambassadeurs  pour  engager  ce  prince  à  se 
joindre  à  lui  contre  Alexandre, 

11.  Afin  que,  de  concertais  pussent  ou  le  prendre, ou 
du  moins  se  venger  en  lui  enlevant  quelques-unes  de  ses 
villes, 

12.  Et  que  lui-même  ne  reprît  le  chemin  de  l'Egypte 
qu'après  avoir  fait  des  actions  capables  d'inspirer  la 
terreur  à  ses  ennemis  ;  ce  qui  lui  serait  beaucoup  plus 
glorieux  que  de  s'en  retourner  sans  avoir  pu  venir  à  bout 
de  ses  desseins. 

iî.  Alexandre,  averti  de  ce  qui  se  tramait  contre  lui, 
envoya  à  Lythras  des  ambassadeur  de  distinction  char- 
gés de  riches  présents,  et  le  pria  de  ne  point  donner  de 
secours  au  roi  de  Sidon. 

14.  Lythras  accepta  les  présents  d'Alexandre,  et  con- 
sentit à  tout  ce  qu'il  lui  demandait.  Cependant  Alexandre 
vint  attaquer  le  roi  de  Sidon  et  le  vainquit  par  la  protec- 
tion de  Dieu. 

15.  Il  lui  tua  une  grande  partie  de  ses  troupes,  et, 
après  l'avoir  mis  en  fuite,  il  se  rendit  maître  de  son  pays. 

16.  Alexandre  envoya  dire  ensuite  à  Cléopâtre  de 
s'avancer  à  la  tête  de  ses  troupes  contre  Lythras,  qu'il 
marcherait  aussi  de  son  côté,  et  qu'après  avoir  pris  son 
fils,  il  le  lui  remettrait  entre  les  mains. 

17.  Lythras,  ayant  été  informé  de  leurs  desseins,  se 
retira  sur  la  montagne  de  Galilée  ;  il  tua  une  grande 
partie  de  ceux  qui  l'habitaient  ;  il  perdit  lui-même,  beau- 
coup de  monde,  et  emmenant  avec  lui  dix  mille  hommes 
qu'il  avait  faits  prisonniers, 


}o8 


IV. 


MACCABEES.  —  XXVIII.  -    EXPLOITS   D'ALEXANDRE 


18.  Inde  profectus  est  quoadusque  pervenit  ad  Jorda- 
nem,  et  castrametatus  est  ibi,  ut  requiem  caperent  viri, 
et  jumenta  ipsius  ;  deinde  proficisceretur  in  Jérusalem 
ad  oppugnandum  Alexandrum. 

19.  Quod  nuntiatum  est  Alexandre  et  contendit  ad 
illum  cum  quinquagenta  millibus,  e  quibus  sex  millia  vi- 
rnrum  habebant  asneos  clypeos  :  fertur  autem  quod  unus- 
quisque  eorum  aptusesset  resistere  alicui  numéro  virorum. 

20.  Et  invasit  illum  ad  Jordaoem,  et  congressus  est 
cum  illo  ibi;  at  non  obtinuit  victoriam,  quoniam  fidebat 
in  viris  suis,  et  in  eorum  numéro  collocaverat  fiduciam. 

21.  Erunt  autem  cum  Lythra  viri  petitissimi  in  bellis, 
et  instruendis  aciebus  :  qui  illi  consuluerunt,  ut  divideret 
suos  duas  in  partes  ;  ita  quidem,  ut  una  pars  esset  cum 
Lythra,  et  cum  suis  ad  prselia,  altéra  vero  cum  aliquo 
suorum. 

22.  Qui  pugnavit  usque  ad  meridiem,  et  coesa  est  de 
viris  ejus  multitudo  magna.  Et  prodiit  amicus  ejus  cum 
iis,  qui  secum  erant  de  reliquo  exercitu,  integns  viribus, 
contra  Alexandrum,  et  suos  ;  quos  jam  oppresserat  labor, 
et  obtinuit  eos  ut  voluit, 

25.  Occiditque  ex  eis  multitudinem  plurirnam  :  et  fugit 
Alexander,  et  qui  remanserant  cum  eo  viri  in  civitatem 
domus  sanctae. 

24.  Abiit  quoque  Lythras  prope  vesperam  in  oppidum 
quoddam  proximum,  et  occurrerunt  ei  casu  mulieres 
quaadam  de  Judasis,  et  pueri, 

2$.  Mandavitque  occidi  quosdam  eorum,  et  coqui 
carnes,  simulans  intersuos  esse  qui  vescerentur  carnibus 
humanis  ;  intendens  his  incutere  timorem  suorum  incolis 
regionis. 

26.Advertavtt  post  haec  Cleopatra,  quam  excepit  Alexan- 
der, et  indicavit  ei  quod  fecerat  Lythras  suis,  statuitque 
abire  cum  ea  ad  illius  inquisitionem  : 

27.  Quod  cum  perlatum  esset  Lythras,  perfugit  ad  lo- 
cum  ubi  erat  statio  navium  illius,  quas  conscendens  re- 
versus  est  in  Cyprum  ;  Cleopatra  vero  in  /Egyptum  rediit. 

28.  Exacto  autem  anno  profectus  est  Alexander  in 
Gazam,  quippe  dominus  illius  defecerat  ab  illo,  et  mi- 
serai ad  quemdam  reguum  Arabum  nomine  Hartam,  ut 
ei  auxilio  esset  :  cui  annuit,  et  profectus  est  in  Gazam, 
quod  perlatum  est  ad  Alexandrum, 

29.  Qui  relictis  quibusdam  de  viris  suis  contra  Gazami 
profectus  est  ad  Hartam,  et  conseruit  cum  illo  manus, 
et  fugavit  eum.  Dein  réversus  eam,  exacto  anno  expu- 
gnavit. 

jo.  Fuit  autem  expugnationis  hujus  causa  frater  domini 
illius,  qui  irruens  in  illum  occidit.  Hic,  civibus  quseren- 
tibus  illum  occidere,  cogens  amicos,  abiit  ad  poriam 
civitatis,  interpellavitque  Alexandrum,  petens  ut  data 
sibi  suisque  securitate,  ingrederentur  urbem  : 


JI.  Quibus  data  Alexander  dextra  ingressus  est  Gazam, 
et  occidit  cives  ejus,  atque  evertit  lemplum  quod  in  ea 
erat,  ac  succendit  idolum  aureum,  quod  in  templo  erat. 
Quibus  peractis  perrexit  in  civitatem  domus  sanctas, 
ibique  celebravit  festum  tabernaculorum. 

?2.  Exacto  itaque  festo  sese  expedivil  contra  Hartam, 
quem  oppugnavit,  occiditque  de  viris  ejus  multitudinem 
plurirnam  :  et  coarctatae  sunt  valde  res  Hartam,  et  in 
angustiam  redactas,  timuitque  sibi  ultimum  exterminium. 

jj.  Quare  securitatem  ab  Alexandro  poscens,  prsestitit 
illi  obedientiam,  et  tributa  ei  contulit. 

54.  Discessitque  ab  eo  Alexander,  et  profectus  est  in 
Hemat,  et  Tyrum,  et  expugnavit  eas,  et  accepto  tribuio 
a  civibus,  réversus  est  in  civitatem  domus  sanctae. 


18.  Il  s'avança  jusqu'au  bord  du  Jourdain  et  y  campa, 
afin  qu'après  avoir  fait  reposer  ses  toupes  et  toutes  les 
bêtes  de  bagage,  il  fût  en  état  de  venir  attaquer  Alexan- 
dre jusque  dans  Jérusalem. 

19.  Alexandre  partit  aussitôt  avec  cinquante  mille 
hommes,  dont  six  mille  portaient  des  boucliers  d'airain. 
On  rapporte  qu'un  seul  de  ces  hommes  était  en  état  de 
résister  à  plusieurs  autres. 

20.  Il  atteignit  Lythras  sur  le  bord  du  Jourdain  et 
l'attaqua;  mais  il  ne  put  le  vaincre,  parce  qu'il  avait  mis 
toute  sa  confiance  dans  la  valeur  et  dans  le  nombre  de 
ses  soldats. 

21.  Lythras  avait  d'ailleurs  auprès  de  sa  personne  des 
gens  aguerris  et  expérimentés,  qui  lui  conseillèrent  de 
partager  son  armée  en  deux  corps,  dont  l'un  serait  com- 
mandé par  lui,  et  l'autre  par   quelqu'un  de  ses  officiers. 

22.  Lythras  se  battit  donc  jusqu'à  la  moitié  du  jour  et 
perdit  un  grand  nombre  de  ses  troupes,  mais  celui  qui 
commandait  le  second  corps  s  étant  avancé  avec  des 
troupes  fraîches,  tomba  sur  les  ennemis  dont  les  forces 
étaient  déjà  épuisées,  et  les  battit  à  discrétion. 

2;.  Il  en  fit  un  grand  carnage,  et  contraignit  Alexandre 
de  se  sauver  en  la  ville  du  temple  saint  avec  le  petit 
nombre  de  ceux  qui  purent  échapper. 

24.  Lythras  vint,  sur  le  soir,  dans  une  petite  ville  voi- 
sine, où,  ayant  rencontré  par  hasard  quelques  femmes 
juives  avec  leurs  enfants, 

25.  Il  commanda  qu'on  en  tuât  un  certain  nombre  et  fit 
cuire  leurs  chairs  pour  intimider  tout  le  pays,  en  leur 
laisant  croire  que  lui  et  ses  troupes  ne  vivaient  que  de 
chair  humaine. 

26.  Cléopâtre  étant  enfin  arrivée,  Alexandre  la  reçut, 
et,  après  l'avoir  instruite  de  tous  les  maux  que  Lythras 
avait  faits  aux  Juifs,  il  résolut  de  l'aller  chercher  avec 
elle. 

27.  Mais  Lythras  en  ayant  eu  avis  gagna  promptement 
ses  vaisseaux  et  retourna  en  Chypre,  et  Cléopâtre  re- 
prit le  chemin  de  l'Egypte. 

28.  Cependant  le  roi  de  Gaza  s'était  révolté  contre 
Alexandre,  et  avait  envoyé  demander  du  secours  à  un 
certain  roi  des  Arabes  nommé  Harta,  qui  lui  amena  des 
troupes.  Alexandre  partit  au  commencement  de  l'année 
suivante, 

29.  Et  s'étant  approché  de  Gaza,  il  y  laissa  une  partie 
de  son  armée  pour  en  faire  le  siège  pendant  qu'il  irait 
attaquer  Harta  ;  il  lui  livra  bataille,  et,  après  l'avoir  mis 
en  fuite,  il  revint  à  Gaza,  pressa  vivement  cette  place, 
et  la  prit  sur  la  fin  de  cette  année. 

îo.  Il  ne  dut  cette  conquête  qu'à  la  mort  du  roi  de 
Gaza,  qui  fut  tué  par  sou  propre  frère.  Ce  prince,  sa- 
chant que  le  peuple  le  cherchait  pour  venger  sur  sa 
personne  le  meurtre  du  roi,  assembla  ses  amis  et  vint 
à  la  porte  de  la  ville,  d'où  ayant  appelé  Alexandre,  il 
l'invita  d'entrer  en  lui  demandant  grâce  pour  lui  et  pour 
les  siens. 

ji.  Alexandre  lui  tendit  la  main  en  signe  d'amitié,  et, 
s'étant  ainsi  rendu  maître  de  Gaza,  il  tua  les  habitants, 
renversa  le  temple  et  brûla  l'idole  d'or  qu'on  y  adorait. 
Il  se  rendit  ensuite  à  la  ville  sainte  pour  y  célébrer  la 
fête  des  Tabernacles. 

J2.  Après  la  fête,  il  se  prépara  à  marcher  contre  Harta, 
il  l'attaqua  et  tua  une  grande  partie  de  ses  troupes. 
Harta,  voyant  le  mauvais  état  de  ses  affaires,  craignit 
pour  lui  les  derniers  malheurs. 

jj.  C'est  pourquoi,  après  avoir  eu  recours  à  la  bonté 
d'Alexandre,  il  se  soumit  à  sa  domination  et  lui  paya 
des  tributs. 

J4.  Alexandre  se  sépara  d'Harta  et  vint  à  Hémath  et 
à  Tyr  ;  il  prit  ces  villes,  et  après  'es  avoir  contraintes  à 
payer  tribut,  il  revint  à  Jérusalem. 


CHAPITRE    XXIX 


1.  Deinde  contingerunt  mala  inter  Pharisarjos  et  Sad- 
ducasos,  et  perduraverunt  sex  annorum  spatio.  Et  auxilio 
luit  Alexander  Sadducasis  contra  Pharisaeos,  e  quibus 
interfecta  sunt  spatio  sex  annorum    quinquaginta     millia. 

2.  Quare  rerum  status  inter  utramque  sectam  ad  inter- 
necionem  usque  oorruptus  est,  penitus  et  confirmatae 
sunt  inimicitiae . 

j.  Accitos  itaque  Alexander  seniores  utriusque  sectas 
blande  allocutus  est,  ad  reconciliationem  horlatus. 

4.  Cui  responderunt  :  Utique  nece  secundum  nos  di- 
gnus  es,  ob  elTusam  sanguinis  innocentis  copiam  ;  quare 
inter  nos  nihil  interJecedat  nisi  gladius. 

<,.  Tum  post  ha:C  palam  exercere  inimicitias  cœperunt, 
mittentes  legatos  ad  Demetrium  Macedonem,  ut  cum 
exercitu  ad  se  adventaret. 

6.  Pollicitantes  se  illi  auxilio  fore  contra  Alexandrum, 
et  suos  ;  et  Hebrasos  in  Macedonum  obedientiam  reduc- 
turos: 

7.  Ad  quos  profectus  est  Demetrius  cum  exercitu  ma- 
gno.  Quod,  et  Alexandro  nuntiatum  est,  qui  misit  qui 
sibi  conduceret  mercede  sex  milia  virorum  de  Macedo- 
nibus,  quos  viri  suis  adjiciens,  contendit  ad   Demetrium. 

8.  Abierunt  quoque  ad  Demetrium  rmilti  de  Judaeis 
Pharisasis.  Et  misit  Demetrius  clam  ad  Macedones,  qui 
erant  cum  Alexandro,  qui  il  las  avocaret  ab  illo;  at  nequa- 
quam  morem  ei  gesserunt.  Misit  et  Alexander  clam  et 
J  udaeos,  qui  erant  cum  Demetrio,  qui  il  1  os  in  suam  in- 
clinarent  partem  ;   at  neque  hi  morem  gesserunt  ipsi. 

9.  Et  occurrentes  Alexander  et  Demetrius  praelium 
commiserunt,  in  quo  omnes  Alexandri  viri  perierunt,  et 
evasit  ipse  solus  in  regionem  Judas. 

10.  Obaudientibus  autem  suis  quod  incolumis  evasisset, 
et  cognoscentibus  locum  in  quo  erat,  congregata  sunt 
adeum  circiter  sex  millia  virorum  fortissimorum  filiorum 
Israël  ;  et  sese  ei  commiserunt  multi  de  illis,  qui  defece- 
rant  ad  Demetrium. 

11.  Dein  confluxerunt  adeum  homines  undique,  et  re- 
versus  est  ad  oppugnationem  Demetrii  cum  multitudine 
magna,  et  fugavit  eura  :  reversusque  est  Demetrius  in 
regionem  suam. 

12.  Et  contendit  Alexander  contra  illum  in  Antiochiam, 
et  obsedit  eam  tribus  annis;  egredientem  autem  Deme- 
trium ad  pugnam  vicit  Alexander,  et  occidit  : 

15.  Recessitque  ab  urbe,  et  reversus  est  in  Jérusalem 
ad  cives  ;  quem  magnificaverunt,  honorantes  atque  lau- 
dantes  pro  expugnatis  hostibus  : 

14.  Consenseruntque  Judasi  illi  obedire,  et  conquievit 
cor  ejus  ;  misitque  exercitus  suos  ad  universos  hostes, 
quos  profligavit,  et  victoriam  reportavit  de  illis. 


15.  Potitusque  est  montibus  Sarah,  etregione  Ammon, 
et  Moab,  et  regione  Palaestinorum,  et  omnibus  quae 
erant  in  manu  Arabum,  qui  cum  illo  decertabant,  usque 
ad  terminos  solitudinis. 

16.  Et  directas  sunt  res  regni  illius,  et  securum  reddi- 
dit  gregem  suum  et  regionem  suam. 


1.  Les  pharisiens  et  les  saducéens  s'acharnèrent  les 
uns  contre  les  autres  l'espace  de  six  ans,  pendant  les- 
quels ces  derniers,  soutenus  d'Alexandre,  firent  périr 
cinquante  mille  pharisiens. 

2.  Ce  lut  la  cause  que  ces  deux  sectes,  s'affermissant 
dans  des  haines  réciproques,  ne  cherchèrent  plus  qu'à  se 
détruire  mutuellement. 

5.  Alexandre  ayant  donc  assemblé  les  plus  considéra- 
bles d'entre  eux,  les   exhorta  à  se  réconcilier  ensemble. 

4.  Mais  ils  lui  répondirent  en  ces  termes  :  Nous  vous 
croyons  digne  de  mort  à  cause  de  tout  le  sang  que  vous 
avez  versé  si  injustement  ;  ainsi  que  l'épée  seule  décide 
denos  querelles. 

ç.  Et  dès  lors,  commençant  à  exercer  ouvertement  leur 
inimitié,  ils  implorèrent  le  secours  de  Demetrius  le 
Macédonien. 

6.  Lui  promettant  de  s'unir  avec  lui  contre  Alexandre 
et  de  mettre  les  Hébreux  sous  la  domination  des  rois  de 
Macédoine. 

7.  Demetrius  se  mit  donc  en  campagne  avec  une  puis- 
sante armée.  Alexandre  en  ayant  reçu  avis  débaucha  six 
mille  Macédoniens  dont  ilgrossitses  troupes,  et  marcha 
à  l'ennemi. 

8.  Plusieurs  pharisiens  passèrent  aussi  du  côté  de 
Demetrius,  et  chacun  de  ces  deux  princes  tenta  inutile- 
ment de  ramener  ses  troupes  fugitives  sous  leurs  propres 
drapeaux. 


9.  Les  armées  en  étant  venues  aux  mains,  celle  d'A- 
lexandre fut  entièrement  défaite  et  il  se  sauva  tout  seul 
en  Judée. 

10.  Les  Juifs,  sachant  qu'il  était  de  retour  sans  aucun 
accident  et  ayant  appris  le  lieu  où  il  était,  six  mille  Israé- 
lites des  plus  braves  vinrent  l'y  trouver  ;  plusieurs  de 
ceux  qui  d'abord  avaient  suivi  Demetrius  s'y  rendirent 
aussi, 

11.  Et  il  lui  vint  des  troupes  de  tous  côtés;  alors,  se 
mettant  à  la  tète  de  cette  multitude  nombreuse,  il  marcha 
de  nouveau  contre  Demetrius,  le  mit  en  fuite  et  l'obligea 
de  se  retirer  dans  ses  états. 

12.  Il  le  suivit  même  jusqu'à  Antioche  où  il  le  tint 
assiégé  l'espace  de  trois  ans  ;  Demetrius  en  étant  enfin 
sorti  dans  le  dessein  de  se  battre,  Alexandre  le  vainquit 
et    le  tua  ; 

ij.  Et,  ayant  levé  le  siège  de  cette  ville,  il  revint  à 
Jérusalem,  où  il  reçut  de  ses  citoyens  tous  les  honneurs 
et  tous  les  éloges  que  méritait  cette  victoire. 

14.  Les  Juifs  consentirent  même  à  lui  obéir  comme 
à  leur  prince,  et  il  goûta  le  repos  dans  la  joie  de  son 
cœur  ;  il  envoya  ensuite  desarmées  contre  tousles  enne- 
mis de  sa  nation,  il  les  défit  et  la  victoire  le  suivit  par- 
tout. 

15.  Il  se  rendit  maître  des  montagnes  de  Sarah  (Séïr), 
des  pays  d'Ammon,  de  Moab,  de  la  Palestine  et  de  tous 
ceux  qui  étaient  entre  les  mains  des  Arabes,  jusqu'à  l'ex- 
trémité du  désert. 

10.  Il  rendit  son  règne  illustre,  et  rétablit  la  sûreté 
dans  ses  états. 


CHAPITRE  XXX 


i.  Deinde  aegrotavit  Alexander  rex  febri  quartana, 
triennio  integro.  Déficiente  autem  ab  eo  domino  urbis 
Ragaba  nuncupatae,  duxit  illuc  exercitum  fortem,  ha- 
bens  securn  uxorem,  et  familiam,  obseditque  civitatem. 

2.  Cum  autem  prope  esset  ut  expugnaretur,  invaluit 
morbus,  et  vires  collapsœ  sunt  :  omnemque  amisit  uxor 
(quse  Alexandra  dicabatur)  spem  saiutis  ejus  : 

;.  Quae  accedens  ait  illi  :  Jam  scis  quid  intercedit  in- 
ter  te,  et  Pharisseos  ;  duo  vero  filii  tui  parvuli  pueri  sunt, 

4.  Et  ego  mulier,  nec  simul  omnes  valebimus  eis  re- 
sistere  :  quid  ergo  consilii  et  mini,  et  ipsis  dabis? 

5.  Ait  illi  :  Consilium  meum  est  ut  instes  contra  hanc 
civitatem,  donec  expugnabitur,  quod  prope  erit. 

6.  Cum  autem  expugnata  fuerit,  stabilies  res  ejus, 
juxta  quod  stabilitse  sunt  similes. 

7.  Cum  omnibus  tamen  his  simulabis  me  asgrum  jacere, 
et  quodcumque  faciès  ex  meo  consilio  te  facere  simula; 
et  mortem  meam  detege  iis  famulis  quibus  fidis. 


8.  Cum  autem  absolveris  haec,  perge  in  civitatem  do- 
mus  sanctas,  recondito  ante  aromatibus  corpore  meo,  et 
exsiccato,  et  cumula  loculum  meum  multis  aromatibus, 
ne  prodeat  a  me  detestabilis  fœtor. 

9.  Et  cum  regionis  status  stabilitus  fuerit,  tum  profecta 
inde,  involve  me  multis  aromatibus,  et  in  palatium  intro- 
ducito  tanquam  aegrum  : 

10.  Et  cum  ibi  fuero,  accersito  principes  Phariseeo- 
rum,  quos  accedentes  honora,  et  bona  verba  loquere 
eis,  tum  dicito  : 

1 1.  Alexander  jam  mortuus  est,  et  ecce  trado  illum 
vobis,  facile  de  illo  quodcumque  vobis  placuerit  ;  ego 
vero  ero  vobis  posthac,  ut  vobis  lubebit. 

12.  Si  enim  feceris  hoc,  optime  quidem  scio  nihil  eos 
facturos  mihi  et  vobis  nisi  bonum,  quos  sequetur  plebs, 
et  dirigentur  res  tuée  post  me,  et  tu  secure  dominaberis, 
donec  creverint  duo  filii  tui. 


ij.  Post  hase  obiit  Alexander,  cujus  mortem  uxor  ce- 
lavit,  et  expugnata  civitate,  rediit  Jérusalem, 

14.  Et  accitos  principes  Pharisasorumallocuta  est  prout 
monuerat  illam  Alexander. 

15.  Cui  responderunt  illi  Alexandrum  ipsorum  fuisse 
regem,  et  ipsos  gregem  illius;  et  allocuti  sunt  eam  omni 
benevolentia,  pollicitantes  eam  praeficere  rébus  suis. 

16.  Tum  egressi  congregaverunt  homines,  et  accipientes 
corpus  Alexandri,  sumptuose  extulerunt  ad  sepulchrum  : 


17.  Atque  acciverunt  hominesad  constituendam  Alexan- 
dram  in  reginam;  quibus  annuentibus  constituta  est. 
Fuerunt  autem  anni  regni  Alexandri  septem  et  viginti. 


1.  En  ce  temps-là,  Alexandre  fut  attaqué  d'une  fièvre 
quarte  qui  dura  trois  ans  entiers.  Cependant  ayant  ap- 
pris la  révolte  du  roi  de  Ragaba,  il  marcha  à  'a  tète 
d'une  armée  puissante,  et,  suivi  de  sa  femme  et  de  ses 
enfants,  il  vint  mettre  le  siège  devant  Ragaba. 

2.  Il  était  sur  le  point  de  la  prendre, lorsque  sa  maladie 
augmenta,  et  ses  forces  se  trouvèrent  entièrement  épui- 
sées, sa  femme  appelée  Alexandra,  désespérant  alors 
de  sa  vie, 

5.  S'approcha  de  son  lit  et  lui  dit  :  Vous  savez  les  su- 
jets d'inimitié  qu'il  y  a  entre  vous  et  les  pharisiens  ;  les 
deux  fils  que  vous  me  laissez  sont  encore  des  enfants. 

4.  Et,  pour  moi,  je  ne  suis  qu'une  femme.  Nous  ne 
sommes  point  en  état  de  résister  à  nos  ennemis  :  quel 
conseil  avez-vous  donc  à  nous  donner? 

5.  Et  Alexandre  lui  répondit  en  ces  termes  :  Ce  que  je 
vous  conseille  de  faire  est  de  continuer  le  siège  de  cette 
ville,  jusqu'à  ce  qu'elle  tombée  ;  ce  ne  sera  pas  long. 

6.  Et  quand  vous  l'aurez  prise, vous  en  réglerez  lesaffai- 
res  comme  on  a  fait  à  l'égard  de  toutes  les  autres  villes. 

7.  Alors,  de  concert  avec  tous  ceux  qui  sont  ici  pré- 
sents, vous  feindrez  que  je  suis  retenu  au  lit  par  la  ma- 
ladie, et  qu'en  toutes  choses  vous  n'agissez  que  par  mes 
ordres  et  par  mon  conseil  ;  cependant  vous  découvrirez 
ma  mort  à  ceux  de  mes  serviteurs  en  qui  vous  avez  le 
plus  de  confiance  ; 

8.  Ensuite  vous  retournerez  à  la  ville  du  temple  saint, 
ayant  eu  soin  auparavant  d'embaumer  mon  corps  aussi 
bien  que  le  cercueil  où  vous  le  renfermerez,  de  peur 
que  la  pourriture  et  la  corruption  ne  s'y  mettent. 

9.  Vous  partirez  donc  après  avoir  réglé  les  affaires  de 
la  province,  et  vous  me  ferez  porter  en  cet  état  dans  le 
palais,  comme  si  j'étais  encore  malade. 

10.  Lorsque  j'y  serai  arrivé, vous  enverrez  chercher  les 
princes  des  pharisiens,  et,  après  les  avoir  reçus  avec 
honneur  et  avec  amitié,  vous  leur  direz  : 

1 1.  Alexandre  est  mort  et  je  le  remets  entre  vos  mains, 
afin  que  vous  le  traitiez  comme  vous  le  jugerez  à  propos; 
vous  ferez  ensuite  de  moi  tout  ce  qu'il  vous  plaira. 

12.  Car  je  suis  sûr,  ajouta-t-il,  que  si  vous  prenez  ce 
parti,  ils  n'auront  pour  vous  et  pour  moi  que  de  senti- 
ments d'humanité,  et  que  le  peuple  même  imitera  leur 
exemple;  vous  rétablirez  par-là  vos  affaires  et  vous 
régnerez  en  paix  jusqu'à  ce  que  vos  deux  enfants  soient 
en  état  de  me    succéder. 

i).  Après  ce  discours,  Alexandre  mourut;  sa  femme 
tint  sa  mort  cachée,  et  aussitôt  que  la  ville  de  Ragaba 
fut  prise,  elle  revint  à  Jérusalem, 

14.  Où,  ayant  faitassembler  les  princes  des  pharisiens, 
elle  leur  parla  selon  le  conseil  qu'Alexandre  lui  avait 
donné. 

iï.  Mais  ils  répondirent  à  la  reine  avec  beaucoup  de 
soumission  qu'Alexandre  avait  été  leur  roi,  qu'ils  étaient 
son  peuple,  et  ils  lui  promirent  de  la  rendre  maltresse 
des  affaires, 

10.  Étant  en  même  temps  sortis  du  palais,  ils  allèrent 
chercher  quelques-uns  du  peuple,  et,  ayant  enlevé  le 
corps  d'Alexandre,  ils  le  portèrent  au  tombeau  avec 
beaucoup  de  magnificence. 

17.  Ils  convoquèrent  Lensuite  une  assemblée,  et,  d'un 
commun  consentement,  Alexandra  y  fut  déclarée  reine. 
La  durée  du  règne  d'Alexandre  fut  de  vingt-sept  ans. 


CHAPITRE  XXXI 


i.  Cum  autem  regnasset  Alexandra,  accivit  ad  se  prin- 
cipes Pharisasorum,  et  prœcepit  eis  scnbere  ad  universos, 
qui  fugerantex  illis  in  diebus  Hyrcani,  et  in  diebus  Alex- 
andri,  in  ^gyptum,  aliasque  partes,  ut  reverterentur  in 
regionem  Judas. 

2.  Et  indicavit  illis  suam  erga  eos  propensionem,  nec 
sese  opposuit  institutis  eorum,  neque  interdixit  eorum 
cseremonias,  quemadmodum  interdixerant  Alexander,  et 
Hyrcanus. 

?.  Dimisit    quoque   omnes    qui    ex   illis  in    carceribus 

detinebantur.   Et  convenerunt  undequaque,  continuerunt- 

que  se  Sadducaei  illis  nocumenta  inferre.  Et  directae  sunt 

res,et  prosperatusstatus  ipsorum  sublatis  contentionibus. 


4.  Cum  autem  crevissent  Hyrcanus,  Aristobulus,  duo 
filii  Alexandri,  constituit  Hyrcanum  sacerdotem  magnum, 
cum  esset  humilis,  mansuetus,  ac  simplex  : 

5.  Aristobulum  vero  constituit  principem  exercitus, 
erat  enim  strenuus,  fortis,  et  magnanimus,  adjunxitque 
ei  exercitum  Sadducasorum  ;  nec  sibi  visum  est  consti- 
tuer illum  regem,  cum  esset  puer. 

6.  Misit  quoque  ad  eos  omnes,  qui  deferebant  tributa 
Alexandro,  et  accepit  filios  regum  ipsorum,  et  constituit 
eos  pênes  se  obsides,  ac  ]ugiter  praestiterunt  ei  obedien- 
tiam,  déférentes  singulis  annis  iributa. 

7.  Et  recte  ambulavit  cum  populo,  divulgans  justitiam, 
eamque  prœcipiens  populo  suo  facere,  quare  perduravit 
utrisque  pax  :  et  consecuta  est  eorum  amorem. 


r.  Alexandra  ayant  été  reconnue  reine,  fit  venir  les 
princes  des  pharisiens  et  leur  ordonna  de  faire  savoir 
à  tous  ceux  de  leur  secte,  qui,  sous  le  règne  d'Hyrcan 
et  d'Alexandre,  s'étaient  enfuis  en  Egypte,  ou  dans  d'au- 
tres lieux, qu'ils  pouvaient  revenir  en  Judée. 

2.  Elle  leur  témoigna  le  penchant  qu'elle  avait  pour 
eux,  en  ne  les  troublant  ni  dans  leurs  opinions,  ni  dans 
leurs  usages,  comme  avaient  fait  Alexandre  et  Hyrcan. 

?.  Elle  fit  encore  ouvrir  les  prisons  à  ceux  des  phari- 
siens qui  y  avaient  été  enfermés.  Ainsi  ils  se  rassemblè- 
rent de  tous  côtés  sans  que  les  saducéens  fissent  au- 
cune entreprise  contre  eux  ;  en  sorte  qu'ils  se  rendirent 
très  puissants  depuis  que  la  bonne  intelligence  eut  été 
rétablie  entre  les  deux  sectes. 

4.  Les  enfants  d'Alexandre  étant  devenus  grands, 
Alexandra  donna  la  souveraine  sacrificature  à  Hyrcan, 
dont  elle  connaissait  la  bonté,  la  douceur  et  la  simplicité. 

5.  Pour  Aristobule,  comme  il  avait  de  la  force  et  de 
la  valeur,  elle  lui  donna  le  gouvernement  de  l'armée 
qu'elle  augmenta  d'un  corps  de  saducéens  ;  mais  elle 
le  trouvait  encore  trop  jeune  pour  lui  mettre  la  cou- 
ronne sur  la  tête. 

6.  Elle  envoya  ensuite  des  députés  ii  tous  les  rois  qui 
avaient  été  tributaires  d'Alexandre,  ils  donnèrent  leurs 
enfants  pour  servir  d'otages;  et,  fidèles  à  l'obéissance 
qu'ils  lui  devaient,  ils  payaient  tous  les  ans  les  tributs 
ordinaires. 

7.  Alexandra  gouverna  le  peuple  avec  beaucoup  de 
justice,  elle  eut  même  soin  qu'on  la  rendit  partout  exac- 
tement ;  c'est  pourquoi  elle  gagna  l'amour  de  ses  sujets, 
et  elle  fut  en  paix  avec  eux. 


CHAPITRE  XXXII 


i  Erat    Sadducasis    princeps    quidam    praslatus    apud  i.   Les  saducéens   avaient  pour   chef  un  certain  Dio- 

Alexandrum,  nomine  Diogenes,  qui  induxerat  illum  ali-  gène,  qui,  par  son  grand  crédit  auprès  d'Alexandre,  avait 
quando  ad  occidendos  octingentos  viros  de  Pharisaeis.  autrefois  porté  ce  prince  à  faire  mourir  huit  cents    pha- 

risiens. 

2.  Veniunt  ergo  principes    Pharisasorum    ad    reginam,  2.  Alors  les  princes  des    pharisiens  étant  venus  trouver 

et  commémorant  ei,  quod  gesserat  Diogenes,  et  perpe-  la  reine,  lui  représentèrent  tout  ce  que  Diogène  avait 
traverat,  rogantes,  ut  sibi  permitteret  illum  occidere  :  fait  contre  eux  et  lui  demandèrent  la  permission  de  le 
quas  fecit.  tuer,  et  ils  l'obtinrent. 

j.  Quem  accipientes,    et  multos   cum    illo  Sadducasos  j.  Et,  s'étant  saisis  de    Diogène,    ils    le  massacrèrent 

jugularunt.  Quod  multum  aegre  ferentes  Sadducasi,  pro-  avec  plusieurs  de  sa  secte.  Les  saducéens,  sensibles  à 
fecti  sunt  ad  Aristobulum,  et  secum  sumentes,  adiverunt  à  cet  outrage,  allèrent  chez  Aristobule,  et,  le  prenant 
reginam,  et  dixerunt  ei  :  avec  eux,  ils  vinrent  trouver  la  reine  et  lui  parlèrent  en 

ces  termes  : 

4.  Jam  cognovisti  quam  terribilia  ac  magna  sustinui-  4.  Vous  n'ignorez  ni  les  maux  affreux  que  nous  avons 
mus;  et  bella,  ac  plurima  certamina,  quse  gessimus,  soufferts,  ni  les  combats  sans  nombre  auxquels  nous 
opem  ferentes  Alexandro,  et  Hyrcano  patri  ejus  :                    nous   sommes  exposés   pour  la   défense  d'Alexandre    et 

d'Hyrcan,  son  père. 

5.  Nec  propterea  consentaneum  erat  nostra  proterere  5.  Devions-nous  attendre  pour  récompense  de  ces 
jura,  et  extendere  super  nos  manus  inimicorum  nostro-  services  qu'on  foulât  aux  pieds  tous  nos  droits,  qu'on 
rum,  ac  nostras  deprimere  dignitates.                                         soulevât  contre  nous  nos  propres  ennemis  et  qu'on  nous 

enlevât  tous  les  honneurs  attachés  à  notre  secte. 

6.  Hujuscemodi  enim  res  nequaquam  latebit  Hartam,  6.  Une  chose  de  cette  nature  ne  peut  rester  cachée 
et  alios  de  inimicis  vestris,  qui  experti  sunt  nostram  for-  à  Harta,  ni  à  tous  ceux  de  vos  ennemis  qui  ont  cédé  s 
titudinem  nec  resistere  nobis  valuerunt,  et  timoré  nostri  souvent  à  nos  efforts,  et  que  nous  avons  frappés  de 
compléta  sunt  corda  eorum.                                                           crainte  et  de  terreur. 

7.  Quotiesergo  perceperint,  quod  nobis  intulisti,  con-  7.  Ils  ne  d'outeront  point,  en  apprenant  les  maux  que 
cipient,  quod  corda  nostra  te  machinentur  :  qua  de  re  vous  nous  avez  faits,  que  nous  ne  songions  à  nousven- 
cum  certiores  facti  fuerint,  in  te  praevaricaturos  fore,  ger;  mais,  quand  ils  nous  verront  les  armes  à  la  main, 
crede.  Nec  sustinebimus  occidi  a  Pharisseis,  tanquani  soyez  sûre  que,  de  concert  avec  nous,  ils  se  soulèveront 
oves.  contre  vous  ;  nous  ne  souffrirons  point  que  les  phari- 
siens répandent  notre  sang  comme  celui  des  victimes, 

8.  Aut  ergo  coerce  a  nobis  malitiam  eorum,  aut  per-  8.  Ou  défendez-nous  contre  leur  fureur,  ou  permettez- 
mitte  nobis  egredi  de  civitate  ad  aliqua  oppida  Judae.             nous  d'aller  chercher  un  asile   dans  quelque   endroit  de 

la  Judée. 

9.  Quibus  ait  :  Facite  hoc,  ut  arceatur  a  vobis  illorum  9.  La  reine  y  ayant  consenti,  ils  sortirent  de  Jérusalem 
noxa.  Et  egressi  sunt  Sadducasi  de  civitate,  egressique  suivis  de  leurs  princes  et  de  quelques  gens  de  guerre  ; 
sunt  principes  eorum  cum  sequacibus  de  viris  belli,  ac  et,  s'étant  retirés  avec  leurs  troupeaux  dans  les  villes 
profecti  sunt  cum  pecoribus  suis    ad  civitates  quas  ele-        de  Judée  qu'ils  avaient  choisies, 

gérant  de  civitatibus  Juda;, 

10.  Et  habitaverunt  in  eis  :  adjectique  sunt  illis  ope-  10.  Ils  s'y  établirent  et  reçurent  parmi  eux  des  Juifs 
ram  navantes  virtutibus,  hi  Hasdanim.                                          qui  vivaient  dans    la  pratique  de   la  vertu,   et    qui    pour 

cela  s'appelaient  Hasdanim. 


CHAPITRE    XXXIII 


i.  Post  haec  cecidit  Alexandra  in  morbum,  ex  quo 
obiit.  Cujus  cum  prope  desperaretur  salus,  egressus 
est  filius  ejus  Aristobulus  de  Jérusalem  cum  famulo  suo 
noctu  ; 

2.  Abiitque  in  Gabatham  ad  quemdam  virum  de  prin- 
cipibus  Sadducœorum,  de  amicis  suis,  quem  secum 
sumens,  perrexitad  urbes  quas  incolebant  Sadducaei. 

;.  Notamque  fecit  eis  causam  suam,  hortatusque  est 
eos  secum  egredi,  et  opem  ferentes  auxilio  sibi  esse  in 
bello  contra  fratrem  et  Pharisaeos,  et  regem  se  consti- 
tuere. 

4.  Cui  morem  gerentes,  palam  prasvaricati  sunt  in 
Alexandram,  cogentes  virosad  Aristobulum  undequaque. 

5.  Quorum  fama  perveniente  ad  Hyrcanum  sacerdotem 
filium  Alexandras,  et  seniores  Pharisœorum,  adiverunt 
Alexandram,  cum  esset  eo  in  statu,  et  indicaverunt  ei 
rem,  inculcantes  ipsi  magnitudinem  timoris,  quo  sibi 
filioque  Hyrcano  timebant  ab  Aristobulo  et  iis  qui  cum 
eo  erant  : 

6.  Quibus  ait  :  Ego  quidem  sum  prope  interitum, 
quare  asquius  ac  conducibilius  mihi  est  rerum  mearum 
satagere  : 

7.  Quid  ergo  facere  possum  in  tali  constituta  statu  ? 
Viri  autem  nostri,  et  bona  nostra,  et  arma  nostra  pênes 
vos,  et  in  manibus  vestris  sunt  :  dingite  itaque  negotium) 
ut  rectum  vobis, 

8.  Dei  implorantes  opem  pro  rébus  vestris;  rogantes 
ab  eo  liberationem  :  tum  fatis  concessit. 

9.  Fuit  autem  tempus  illius  astatis  septuaginta  trium 
annorum,  tempus  vero  regni  illius,  novem  annorum. 


1.  Après  cela  Alexandra  fut  attaquée  d'une  maladie 
dont  elle  mourut.  Lorsqu'on  eut  presque  perdu  toutes 
les  espérances  de  guérison,  Aristobule,  son  fils,  sortit 
la  nuit  de  Jérusalem,  accompagné  d'un  de  ses  serviteurs  ; 

2.  Et  étant  arrivé  à  Gabatha  chez  un  des  princes  des 
saducéens  qui  était  de  ses  amis,  il  le  prit  avec  lui  et 
parcourut  les  villes  qu'habitaient  les  saducéens. 

j.  Après  leur  avoir  exposé  les  raisons  qui  l'amenaient, 
il  les  exhorta  à  le  suivre  avec  toutes  leurs  forces 
contre  son  frère  et  contre  les  pharisiens,  et  à  le  recon- 
naître pour  roi. 

4.  Les  saducéens,  s'étant  laissés  gagner  par  Aristo- 
bule, se  déclarèrent  ouvertement  contre  Alexandra,  et 
levèrent  des  troupes  de  tous  côtés. 

5.  Les  plus  considérables  d'entre  les  pharisiens  en 
ayant  été  informés,  vinrent  trouver  Alexandra,  qui  était 
malade,  et  l'instruisirent  de  tout  ce  qui  se  passait,  lui 
exagérant  ce  que  son  fils  Hyrcan,le  souverain  pontife,  et 
ce  qu'eux-mêmes  avaient  à  craindre  d'Aristobule  et  de 
son  parti. 

6.  Et  elle  leur  répondit  en  ces  termes  :  Je  suis  près 
de  mourir,  et  il  n'y  a  rien  de  plus  juste  et  de  plus  impor- 
tant pour  moi  que  de  songer  à  mes  propres  affaires. 

7.  Et  d'ailleurs,  que  puis-je  entreprendre  dans  l'état 
où  je  suis  ?  Tout  ce  que  j'ai  de  richesses,  d'armes  et  de 
gens  de  guerre,  est  entre  vos  mains,  servez-vous  en 
selon  que  vous  le  jugerez  à  propos. 

ii.  Mais  surtout  implorez  le  secours  de  Dieu  dans  cette 
entreprise,  et  priez-le  de  vous  délivrer  de  vos  ennemis; 
et  après  ces  paroles  elle  mourut.  * 

9.  Elle  était  dans  la  soixante-treizième  année  de  son 
âge  et  dans  la  neuvième  de  son  règne. 


CHAPITRE   XXXIV 


1.  Cum  egressus  esset  Aristobulus  de  Jérusalem  in 
diebus  Alexandras,  reliquerat  uxorem  et  filios  suos  in 
Jérusalem.  Cum  autem  pervenisset  fama  egressionis  ejus 
ad  Alexandram,  deligavit  eos  in  domo  quadam  posita 
custodia. 

2.  Defuncta  autem  Alexandra,  adduxit  eos  Hyrcanus 
ad  se,  et  benefecit  eis,  atque  servavit,  ut  liberarent  eum 
a  fratre  suo,  si  forte  vinceret  eum. 

?.  Tum  Aristobulus  duxit  exercitum  magnum  usque  ad 
Jordanem,  contra  quem  egressus  est  Hyrcanus  cum 
exercitu  Pharisaeorum. 

4.  Cum  autem  sibi  concurrisset  uterque  exercitus,  inter- 
fecta  est  de  exercitu  Hyrcani  multitudo  magna,  et  fugit 
Hyrcanus  ac  reliquus  exercitus  ejus. 

Ç.  Quos  insequentes  Aristobulus  et  viri  ejus,  occide- 
runt  quemcumque  comprehendebant,  exceptis  iis  qui  sese 
dederant. 

6.  Deinde  secessit  Hyrcanus  in  civitatem  sanctam,  quo 
adventavit  et  Aristobulus  cum  exercitu  suo,  et  concluse- 
runt  eam  castra  undequaque,  intentavitque  arte  destruere 
munitionem. 

7.  Ad  quem  egressi  sunt  seniores  Judas,  et  seniores 
sacerdotum,  et  vetuerunt  eum  perpetrare  quod  machina- 
tus  erat,  rogantes  ut  ex  animo  dimoveret  quidquid  inerat 
contra  fratrem  suum  :  qui  rei  assensus  est. 

8.  Tum  stabilitum  est  inter  eos  ut  Aristobulus  esset 
Rex  super  Judam,  Hyrcanus  vero  sacerdos  magnus  in 
domo  Dei,  et  secundus  a  rege. 

9.  Et  assensus  est  eis  Aristobulus,  atque  ingressus  civi- 
tatem, et  convenit  cum  fratre  suo  Hyrcano  in  domo  Dei, 
et  juraverunt  simul  rata  habere  ea  quas  stabilierant  inter 
se  seniores. 

10.  Regnavitque  Aristobulus,  et  secundus  ab  eo  habi- 
tus  est  Hyrcanus.  Et  conquiverunt  nomines,  ac  directa? 
sunt  res  horum  duorum  fratrum,  et  pacatus  est  status 
gregis,  et  regionis  eorum. 


1.  Lorsqu'Aristobule  sortit  de  Jérusalem  du  vivant  de 
sa  mère,  il  y  laissa  sa  femme  et  ses  enfants;  Alexandra, 
sur  la  nouvelle  de  sa  fuite,  leur  donna  des  gardes  et  les 
tint  enfermés  dans  une  maison. 

2.  Mais  aussitôt  qu'elle  fut  morte,  Hyrcan  les  fit 
venir  auprès  de  lui  et  les  traita  avec  beaucoup  de  dou- 
ceur, afin  que,  si  la  fortune  lui  devenait  contraire,  ils  lui 
fissent  trouver  grâce  devant  son  frère. 

{.  Cependant  Aristobule  s'était  avancé  jusqu'au  Jour- 
dain avec  une  armée  considérable,  et  Hyrcan  l'y  avait 
suivi  à  la  tète  des  pharisiens. 

4.  Les  deux  armées  en  étant  venues  aux  mains,  Hyrcan 
perdit  une  grande  partie  de  la  sienne  et  se  sauva  avec 
le  peu  de  gens  qui  lui  restait. 

v  Mais  Aristobule  les  ayant  poursuivis,  tua  tous  les 
hommes  qu'il  put  atteindre,  à  la  réserve  de  ceux  qui  se 
rendirent  à  lui. 

6.  Hyrcan  se  retira  ensuite  a  Jérusalem  et  s'y  retran- 
cha ;  Aristobule  s'en  étant  approché  avec  ses  troupes, 
mit  son  camp  autour  de  la  ville  et  chercha  des  moyens 
pour  renverser  les  murailles. 

7.  Mais  les  anciens  des  prêtres  et  du  peuple  l'étant 
venu  trouver,  l'empêchèrent  d'exécuter  les  projets  qu'il 
avait  formés  et  le  prièrent  d'avoir  pour  son  frère  des 
sentiments  de  paix  et  d'amitié  ;  ce  prince  y  consentit, 

8.  Et  il  fut  arrêté  entre  eux  qu'Aristobule  régnerait 
sur  la  Judée,  qu'Hyrcan  exercerait  la  souveraine  sacri- 
ficature  dans  la  maison  du  Seigneur,  et  qu'il  serait  le 
premier  après  le  roi. 

9.  Aristobule  y  ayant  consenti  entra  dans  Jérusalem, 
et  s'étant  rendu  au  temple  avec  Hyrcan  son  frère,  ils  y 
ratifièrent  par  des  serments  ce  que  les  anciens  avaient 
résolu  entre  eux. 

10.  Aristobule  fut  ainsi  reconnu  roi,  et  Hyrcan  tint  le 
second  rang  du  royaume.  La  paix  et  la  tranquillité 
furent  rendues  à  toute  la  Judée,  et  les  deux  frères  gou- 
vernèrent fort  heureusement. 


CHAPITRE   XXXV 


1.  Erat  Antipater  vir  de  Judasis,  ac  de  filiis  quorumdam 
eorum  qui  ascenderant  de  Babylonia  cum  Esdras  sacer- 
dote. 

2.  Erat  autem  sapiens,  prudens,  astutus,  strenuus, 
magnanimus,  bonas  indolis,  ber.ignus  ac  familiaris,  dives 
quoque,  ac  multarum  villarum,  facultatum,  et  pecudum. 

;.  Hune  vero  pragfecerat  Alexander  rex  Idumasorum 
regioni,  unde  duxerat  uxorem,  ex  qua  quatuor  suscepit 
filios,  Phaselum  videlicet,  Herodem,  qui  regnavit  super 
Judam,  Pheroram,  ac  Josephum. 

4.  Dein  remotus  a  montibus  Sarah,  id  est  regione  Idu- 
masorum in  diebus  Alexandri,  habitavit  in  civitate  domus 
sanctœ  :  diligebatque  illum  Hyrcanus,  et  erga  ipsum  pro- 
pensus  erat,  quare  voluit  Aristobulus  illum  interficere, 
quod  tamen  assecutus  non  est. 

5.  Timuit  itaque  Antipater  Aristobulum  timoré  vehe- 
mentissimo,  ac  propterea  clam  machinari  cœpit  in  re- 
gnum  Aristobuli.  Adivit  ergo  principes  regni  :  acceptaque 
arcani  celandi  securilate  circa  ea  quœ  proditurus  erat, 

6.  Memorare  eis  cœpit  pessimam  Aristobuli  viam, 
tyrannidem,  impietatem,  et  effusionem  sanguinis  perpe- 
tratam  ab  eo,  et  usurpationem  regni,  quo  dignior  erat 
frater  ejus  major. 

7.  Tum  incussit  eis  timorem  Dei  optimi  maximi  nisi 
amoverent  manum  tyranni,  et  redderent  debitum  Domino 
digno. 

8.  Nec  remansit  quispiam  de  principibus  quem  non 
circumvenerit,  et  inclinaverit  ad  obedientiam  Hyrcani, 
removens  ab  obedientia  Aristobuli,  Hyrcano  nesciente.| 

g.  Sed  hase  ipsi  adscribebat  Antipater,  nolens  indicare 
ei  antequam  id  stabiliret. 

10.  Cum  itaque  stabilivisset  rem  hanc  cum  gente,  adivit 
Hyrcanum,  etaitilli:  Utique  frater  tuus  valde  et  timet, 
eo  quod  videt  res  suas  haudquaquam  securas  esse  dum 
vivis. 

11.  Aucupatur  propterea  tempus  interficiendi  te,  nec 
te  superstitem  passurus  est.  At  Hyrcanus  verbis  ejus 
fidem  non  prasstitit,  ob  bonitatem  et  simplicitatem  cordis 
sui. 

12.  Quare  Antipater  iteravit  illi  sermonem  eumdem 
semel  atque  iterum  :  obtulit  quoque  pecuniam  plurimam 
viris  quibus  fidebat  Hyrcanus,  eisque  acquiescebat,  ut 
loquerentur  ipsi  similia  iis  quas  locutus  fuerat  Antipater, 
dummodo  non  imaginaretur  ipsos  novisse,quod  allocutus 
fuerat  eum  Antipater. 

ij.  Credidit  itaque  Hyrcanus  verbis  eorum,  et  induc- 
tus  moliri  est  aliquid,  quod  liberaretur  a  fratre  suo. 

14.  Cum  ergo  iteraret  illi  Antipater  rem  hujuscemodi, 
significavit  ei  jam  patere  sibi  veritatem  verborum  ejus, 
atque  scire  ipsum  bene  admonuisse,  sciscitatusque  est 
de  consiho  circa  hoc. 

i<,.  Cui  consuluil  Antipater  egredi  de  civitate  ad  ali- 
quem  cui  sese  fideret,  et  ope  atque  auxilio  illi  esse  pos- 
set. 

16.  Et  adiit  Antipater  Hartam,  et  constituit  cum  eo 
ut  venientem  Hyrcanum  exciperet  hospitem,  quoniam 
suspectam  habet  cohabitationem  fratris. 


1.  Antipater  était  Juif  d'origine,  et  descendait  des  en- 
fants de  quelques-uns  de  ceux  qui  revinrent  de  Babylone 
avec  le  prêtre  Esdras. 

2.  Il  était  sage,  prudent,  adroit,  courageux,  magna- 
nime, d'un  heureux  naturel,  libéral,  familier,  et  riche 
enfin  en  terres,  en  argent  et  en  troupeaux. 

}.  Ayant  obtenu  d'Alexandre  le  gouvernement  de 
l'Idumée,  il  épousa  une  femme  du  pays  de  laquelle  il  eut 
quatre  fils,  Phasel,  Hérode  qui  fut  roi  des  Juifs, Phéro- 
ras  et  Joseph. 

4.  Il  avait  quitté  l'Idumée  du  vivant  même  d'Alexandre 
et  était  venu  s'établir  à  Jérusalem.  Aristobule  s'étant 
aperçu  qu'Antipater  était  aimé  d'Hyrcan,  résolut  de  le 
tuer,  mais  il  ne  put  exécuter  ses  desseins. 

5.  Frappé  d'une  vive  crainte,  Antipater  chercha  secrè- 
tement les  moyens  de  se  venger  d'Aristobule  :  pour  cet 
effet,  il  s'attacha  les  grands  de  la  cour,  et  après  leur 
avoir  fait  promettre  le  secret  sur  les  choses  qu'il  avait 
à  leur  dire, 

0.  Il  commença  à  décrier  en  leur  présence  la  vie  indi- 
gne que  menait  Aristobule,  sa  tyrannie,  son  impiété,  sa 
cruauté  qui  l'avait  rendu  l'auteur  de  tant  de  meurtres, 
et  l'usurpation  qu'il  avait  faite  d'une  couronne  dont  son 
frère  aîné  était  plus  digne  que  lui. 

7.  Il  les  menaça  ensuite  de  la  colère  du  Dieu  tout- 
puissant,  s'ils  ne  s'élevaient  contre  le  tyran,  et  s'ils  ne 
vengeaient  les  droits  du  Seigneur. 

8.  Il  n'y  eut  aucun  des  grands  de  la  cour  qu'Antipater 
par  ses  sollicitations  ne  vînt  à  bout  de  détacher  d'Aris- 
tobule, et  d'attirer  ensuite  au  parti  d'Hyrcan,  et,  quoi- 
qu'il n'eût  encore  rien  découvert  de  son  dessein  à  Hyrcan, 

9.  Il  ne  laissait  pas  d'agir  au  nom  de  ce  prince,  se 
réservant  à  lui  faire  part  de  l'entreprise  quand  il  l'aurait 
mise  en  état  de  pouvoir  réussir. 

10.  Enfin  tout  étant  suffisamment  disposé,  Antipater 
vint  trouver  Hyrcan,  et  lui  dit  :  Votre  frère  est  toujours 
en  crainte  contre  vous,  et  croira  sa  couronne  mal  assu- 
rée sur  sa  tète  tant  qu'il  vous  verra  respirer. 

11.  Sachez  donc  qu'il  cherche  à  se  défaire  de  vous,  et 
qu'il  ne  permettra  jamais  que  vous  lui  surviviez.  Mais  la 
bonté  d'Hycan  et  la  simplicité  de  son  cœur  l'empêchè- 
rent d'abord  d'ajouter  foi  à  ces  discours. 

12.  C'est  pourquoi  Antipater  revint  plusieurs  fois  à  la 
charge,  et  engagea  même  par  des  sommes  considérables 
ceux  en  qui  ce  prince  se  confiait  davantage  à  lui  faire  les 
mêmes  rapports,  sans  néanmoins  qu'ils  parussent  rien 
savoir  de  la  conversation  qu'il  avait  eue  avec  lui  en  par- 
ticulier. 

ij.  Hyrcan  les  ayant  entendus,  ne  fit  aucune  difficulté 
de  les  croire,  et  chercha  dès  ce  moment  à  prévenir  les 
mauvais  desseins  de  son  frère. 

14.  Antipater  étant  encore  venu  lui  dire  les  mêmes 
choses  qu'auparavant,  Hyrcan  lui  répondit  qu'il  avait 
enfin  reconnu  la  vérité  de  ses  dispositions,  qu'il  lui  savait 
bon  gré  de  lui  avoir  donné  ces  avis,  et  le  pria  en  même 
temps  de  lui  dire  ce  qu'il  avait  à  faire  en  cette  rencontre. 

15.  Alors  Antipater  lui  conseilla  de  sortir  de  la  ville  et 
de  se  retirer  chez  quelque  personne  de  confiance, qui  fût 
en  état  de  l'aider  d'argent  et  d'autres  secours  nécessaires. 

16.  En  même  temps,  Antipater  alla  trouver  Harta,  et 
l'engagea  à  recevoir  Hyrcan  dans  sa  maison,  et  à  lui 
donner  un  asile  contre  les  entreprises  de  son  frère. 


jiô 


IV.  —   MACCABEES.  —  XXXV.       INTRIGUES  D'ANTIPATER 


17.  Quo  gavisus  est  Hartam,  et  amplexatus  est  hoc: 
pepigitque  cum  Antipatro  se  nequaquam  traditurum  Hyr- 
canum,  et  Antipatrum  hostibus  eorum,  et  auxilio  fore, 
ac  protecturum  eos. 

18.  Et  reversus  est  Jérusalem,  ac  notum  fecit  Hyrcano 
quod  gesserat,  et  statuerat  cum  Hartam  de  profectione 
ad  illum.  Quare  egressi  sunt  ambo  de  urbe  noctu,  et 
profecti  sunt  ad  Hartam,  moratique  sunt  apud  illum  ali- 
quo  tempore. 

19.  Tum  Antipater  persuadere  cœpit  Hartam  ut  duce- 
ret  exercitum  cum  Hyrcano  ad  debellandum,  capien- 
dumque  Aristobulum  fratrem  i  11  i us. 

20.  At  Hartam  renuit  id  prosequi,  timens  ne  impares 
sibi  essent  vires  ad  resistendum  Aristobuio.  Antipater 
vero  nequaquam  destitit  facile  ei  reddere  negotium  Aris- 
tobuli, 

21.  Et  pecuniarum  vi  id  ei  insinuare,  et  magnificentia 
famae,  et  memorias,  donec  acquievit  profïcisci, 


22.'  Ita,  tamen,  ut  restitueret  ei  Hyrcanus  quidquid 
abstulerat  Alexander  pater  ejus  ex  urbibus  et  oppidis 
quas  ad  se  spectabant. 

2).  Quibus  acquiescente  Hyrcano,  et  fœdus  feriente, 
profectus  est  Hartam  et  Hyrcanus  cum  quinquaginta 
millibus  equitum  et  peditum,  contendens  in  regionem 
Judœ: 

24.  Ad  quos  egrediens  Aristobulus,  congressus  est  cum 
eis.  Cumque  invaluisset  pugna,  sese  contulerunt  ad  Hyr- 
canum  de  exercitu  Aristobuli  viri  quamplures. 

2Ç.  Quod  videns  Aristobulus  receptui  cecinit,  et  re- 
versus est  ad  castra,  timens  ne  afflueret  exercitus  totus, 
et  ipse  caperetur. 

26.  Ingruente  autem  nocte,  egressus  est  Aristobulus 
solus  de  castris,  et  contendit  ad  civitatem  sanctam.  Et 
cum  facto  mane  innotuisset  exercitui  profectio  il.ius, 
major  pars  eorum  junxerunt  se  Hyrcano,  reliqui  vero 
palantes  abscesserunt. 

27.  Hyrcanus  vero,  Hartam  et  Antipater  perrexerun1 
ad  civitatem  dor.ius  sanctœ,  ducentes  exercitum  magnum  '■ 
inveneiuntque  Aristobulum  jam  paratum  ol  sidionem 
subire;  clauserat  eiiim  portas  civitatis,  atque  statuerat 
super  raœnia  propugnatores. 

28.  Et  castrametati  sunt  Hyrcanus  et  Hartam  cum 
exercitibus  suis  contra  civitatem,  et  obsederunt  eam. 


17.  Hrrta  accepta  avec  joie  c  :tte  proposition,  jurant 
qu'il  ne  livrerait  jamais  Hyrcan  ni  Antipater  à  leurs  en- 
nemis, et  qu'au  contraire  ils  trouveraient  toujours  auprès 
de  lui  toute  sorte  de  protection. 

18.  An'ipater  revint  aussitôt  à  Jérusalem,  et,  après 
avoir  ins'ruit  Hyrcan  de  toutes  les  mesures  qu  il  avait 
prises  avec  Harta,  ils  sortirent  tous  deux  de  la  ville  pen- 
dant la  nuit,  et  vnrent  chez  Harta,  où  ils  restèrent 
quelque  temp's. 

19.  C'ipendrnt  Antipater  commençi  à  porter  Harta  à 
se  mettre  avec  Hyrcan  à  la  tète  d'une  armée,  pour  atta- 
quer Aristooule,  et  le  prendre. 

20.  Mais  Harta  rejeta  cet  avis,  craignant  de  n'être  pas 
en  état  d'j  résister  à  l'ennemi.  Cepend  int  Antipater  ne 
cessa  p  int  de  lui  aplanir  les  difficultés  de  cette  entre- 
prise, 

11.  Et  de  l'y  engager  à  force  d'argent,  et  en  lui  repré- 
sentant la  gloire  et  le  succès  qu'il  en  devait  attendre, 
jusqu'il  ce  qu'enfin  il  eût  consenti  à  se  meure  er.  campa- 
gne, 

22.  A  condition  qu'Hyrcan  lui  rendrait  toutes  es  villes 
et  toutes  les  places  qu'Alexandre,  son  père,  lui  avait  en- 
levées  injustement, 

2j.  Hyrcan  y  consentit,  et  l'alliance  ayant  été  jurée, 
ils  pai  tirent  tous  deux  à  la  tête  de  cinquante  mille  hom- 
mes, tr\nt  d'infanterie  que  de  cavalerie. 

24.  Aristobule  s'étant  avancé,  on  en  vint  aux  mains,  et, 
après  quelque  temps  de  combat,  une  grand2  r  rtie  des 
gens  d'Aristobule  vint  se  rendre  à  l'armée  d'il    rcan. 

25.  Aristobule,  s'en  étant  aperçu,  fit  senner  la  retraite 
et  se  relira  dans  son  camp,  craignant  que  toutes  ses 
troupes  ne  l'abandonnassent  et  que  lui-même  ne  fût  pris. 

26.  A  l'entrée  de  la  nuit,  il  sortit  seul  de  son  camp  et 
vint  à  la  ville  sainte  ;  le  jour  ayant  enfin  annoncé  sa  fuite, 
la  plus  grande  partie  de  l'armée  passa  du  côté  d'Hyrcan 
et  le  reste  se  retira  en  désordre. 

2-.  Alors  Hyrcan,  Harta  et  Antipater  s'étant  appro- 
chés de  la  ville  du  temple  saint  avec  une  puissante 
armée,  trouvèrent  Aristobule  déjà  prêt  à  soutenir  un 
siège;  car  il  avait  fermé  les  portes  de  la  ville,  et  avait 
rangé  des  gens  armés  sur  le  haut  des  murailles. 

28.  Hyrcan  et  Harta  campèrent  autour  de  Jérusalem, 
et  en  firent  le  siège. 


CHAPITRE   XXXVI 


i.  Accidit  autem  ut  egrederetur  Gneus  princeps  mil!  - 
tiae  Romanorum  ad  Tyrcanem  Armenum  expugnandum  : 
nam  Damasci  cives,  et  Hames,  et  Halepi,  et  reliqui 
Syriaa  qui  referuntur  ad  Armenos,  jam  rebellaverant 
contra  Romanos  : 

2.  Ac  propterea  miserat  Gneus  Scanrum  Damascum, 
et  in  ditiones  illius,  ut  occuparet  eas  :  uuod  quidem  Aris- 
tobulo  Hyrcanoque  perlatum  est. 

j.  Misit  ergo  Aristobulus  ad  Scaurum  legatos,  et  pe- 
cuniam  pluriman:,  rogans  eum  ad  se  veniie  cum  cxercitu, 
ut  sibi  auxilio  esset  contra  Hyrcanum. 

4.  Misit  quoque  Hyrcanus  ad  eum  legatos,  efflagitans 
ejus  opéra  adversus  Aristobulum  ;  sed  non  misit  ei 
munus. 

5.  Scaurus  vero  renuit  proficisci  ad  quempiam  eorum, 
sed  scripsit  ad  Hartam,  prœcipiens  ei  ut  recederet  ab 
urbe  domus  sanctae  cuni  exercitu  suo,  et  prohibuit  eum 
auxilium  ferre  Hyrcano  adversus  fratrem  ejus, 

6.  Et  minatus  est  se  venturum  in  regionem  ejus  cum 
exercitu  Romanorum  et  Syrorum,  nisi  moiera  sibi  ges- 
serit. 

7.  Cum  autem  pervenisset  epistola  ad  Hartam,  statim 
recessit  ab  urbe;  recessit  et  Hyrcanus  quoque,  quos 
insecutus  est  Aristobulus  cum  aliquo  numeio  suorum,  et 
apprehendit  eos  et  conflixit  cum  il  lis  ; 

8.  Occisusque  est  ea  in  pugna  de  Arabibus  magnus 
numerus,  caesique  sunt  de  Judaeis  viri  plurimi,  et  rever- 
sus  est  Aristobulus  io  sanctam  civitatem.  Intérim  adven- 
tavit  Gneus  Damascum,  cui  detulit  Aristobulus  hortum 
et  vineam  ex  auro,  pendentes  omnes  quingenta  talenta 
cum  pretiosissimo  munere,  per  virum  nomine  Nicome- 
dem,  rogavitque  eum  ut  sibi  auxilio  esset  contra  Hyr- 
canum. 

9.  Misit  quoque  Hyrcanus  Antipatrum  ad  Pompeium, 
similia  petens.  Et  incfinatus  est  Pompeius  (et  ipse  est 
Gneus)  ad  auxiliandum  Aristobulo.  Quod  videns  Anti- 
pater,  quasrebat  opportunitatem,  donec  seorsum  conve- 
nu Pompeium,  et  ait  illi  : 

ic.  Utique  quod  habuisti  ab  Aristobulo,  nequaquam 
erit  reslituendum,  etsi  auxilium  ei  non  feras  :  Hyrcanus 
tamen  duplum  tibi  offert  ;  nec  poterit  Aristobulus  sub- 
jicere  tibi  Judasos,  Hyrcanus  vero  id  prasstabit. 


11.  Et  arbitratus  est  Pompeius  rem  se  habere  ut  dixe- 
rat  Antipater,  et  gavisus  est  si  Judasos  sibi  subjicere 
posset.  Quare  dixit  Antipatro  :  Ego  opem  feram  amico 
tuo  contra  Aristobulum,  tametsi  simulem  opitulari  illi 
adversus  vos,  ut  se  mihi  ridât. 

12.  Nam  certus  sum,  quod  quoties  cognovcrit  me  opem 
ferre  fratri  suo  adversus  se,  prasvaricabitur  cum  omni- 
bus viris,  sibique  cavebit,  et  in  longius  protrahentur  res 
illius. 

ij.  Sed  accersam  illum  ad  me,  et  ibo  cum  illo  in  civi- 
tatem sanctam,  et  faciam  tune  ut  amicus  tuus  assequatur 
suum  jus,  cum  hoc  tamen,  ut  déférât  nobis  singulis  annis 
tributum. 

LEGATUS  ARISTOBULI. 

[4.  Post  hase,  accito  Nicomedi,  dixit  :  Vade  ad  domi- 
num  tuum,  et  indica  ei  quod  aciuieverim  ejus  petitioni, 


1.  En  ce  temps-là, Gnéus  (Pompée),  général  des  armées 
romaines,  se  mit  en  marche  pour  attaquer  Tyrcané 
l'Arménien  (Tigrane);  car  les  habitants  de  Damas,  d'Ha- 
mès  et  d'Alep,  et  ceux  de  Syrie  qui  relevaient  de  l'Ar- 
ménie, s'étaient  déjà  révoltés  contre  les  Romains. 

2.  C'est  pourquoi,  Génus  avait  donné  ordre  à  Scaurus 
d'aller  s'assurer  de  Damas  et  de  tous  les  lieux  qui  dé- 
pendaient de  cette  ville.  Le  bruit  s'en  étant  répandu, 

;.  Aristobule  envoya  à  Scaurus  de  grandes  sommes 
d'argent,  et  l'exhorta  par  ses  ambassadeurs  à  venir  le 
secourir  contre  Hyrcan. 

4.  Hyrcan,  de  son  côté,  implora  aussi  la  protection 
de  Scaurus  contre  Aristobule;  mais  il  ne  lui  fit  point  de 
présents. 

<i.  Scaurus  ayant  refusé  également  d'écouter  ces  deux 
frères,  écrivit  à  Harta  de  se  retirer  de  devant  la  ville 
du  temple  saint,  et  de  ne  point  donner  de  secours  à 
Hyrcan  contre  son  frère  ; 

6.  Le  menaçant,  en  cas  de  refus,  d'entrer  dans  son 
pays  à  la  tête  d'une  armée  de  Romains  et  de  Syriens. 

7.  Harta  n'eut  pas  plus  tôt  reçu  ces  ordres  qu'il  obéit; 
Hyrcan  se  retira  aussi  ;  et  Aristobule  les  ayant  pour- 
suivis les  atteignit,  et  se  battit  avec  eux. 

8.  Il  périt  dans  ce  combat  un  grand  nombre  d'Arabes 
et  de  Juifs,  et  Aristobule  revint  enfin  à  la  ville  Sainte. 
Cependant  Gnéus  étant  arrivé  à  Damas,  Aristobule  lui 
envoya  par  Nicomède  un  )ardin  et  une  vigne  d'or  du 
poids  de  cinq  cents  talents;  il  lui  fit  outre  cela  de  riches 
présents  et  le  pria  de  lui  donner  du  secours  contre  son 
frère  Hyrcan. 

9.  Hyrcan  fit  aussi  par  l'entremise  d'Antipater  les 
mêmes  demandes  à  Pompée,  qui  est  le  même  que  Gnéus. 
Pompée  se  détermina  en  faveur  d'Aristobule.  Antipater 
ayant  su  la  résolution  de  Pompée,  vint  le  trouver  secrè- 
tement et  lui  dit  : 

10.  Rien  ne  vous  obligerait  de  rendre  à  Aristobule  ce 
que  vous  avez  reçu  de  lui,  quand  même  à  présent  vous 
refuseriez  de  le  secourir  ;  Hyrcan  cependant  vous  fait 
des  offres  une  fois  plus'grandes,  et  d'ailleurs  il  peut 
vous  rendre  maître  de  la  Judée,  ce  que  vous  ne  deve>. 
jamais  attendre  d'Aristobule. 

11.  Pompée,  flatté  par  l'espérance  de  cette  conquête, 
et  s'imaginant  que  les  choses  étaient  telles  qu'Antipater 
les  lui  disait,  lui  répondit  en  ces  termes  :  J'accorde  mon 
secours  à  votre  ami  contre  son  frère,  quoique  cependant 
je  feindrai  de  favoriser  Aristobule,  pour  attirer  sa  con- 
fiance. 

ij.  Car  je  suis  persuadé  que,  s'il  venait  à  savoir  que 
j'ai  pris  le  parti  de  son  frère  contre  lui,  il  soulèverait 
tout  le  monde  en  sa  faveur,  et  les  mesures  qu'il  pren- 
drait pourraient  faire  traîner  en  longueur  cette  entre- 
prise. 

ij.  Je  l'attirerai  donc  auprès  de  moi,  et,  lorsque  je 
serai  entré  avec  lui  dans  la  ville  Sainte,  je  ferai  en  sorte 
qu'Hyrcan  soit  rétabli  dans  ses  droits,  à  condition 
néanmoins  que  tous  les  ans  il  paiera  un  tribut  à  la  répu- 
blique romaine. 

AMBASSADE    D'ARISTOBULE. 

14.  Pompée  ayant  ensuite  fait  venir  Nicomède,  lui  dit  : 
Retournez  vers  votre    maître,   et  apprenez-lui  que   j'ai 


3 18 


IV.  —  MACCABÉES.  —  XXXVI.   -  ARISTOBULE   ET  POMPÉE 


et  ferto  ei  meam  epistolam,  et  dicito  ei,  ut  festicians 
absque  mora  veniat  ad  me,nam  eum  expecto.  Scripsitque 
Aristobulo  epistolam,  cujus  hoc  est  exemplar  : 

i;.  Ab  Gneo  duce  militiœ  Romanorum  Aristobulo  régi, 
filio  regni,  et  sacerdotii,  salus  tibi. 

16.  Jam  pervcnit  hortus  et  viiis  aurei.  et  accepi  eos, 
et  misi  ad  seniorem  et  rectores,  quos  suscipientes  col- 
locaverunt  in  templo  Romae,  gratias  tibi  agentes. 


17.  Scripserunt  praaterea  ut  auxilio  tibi  essem  et  con- 
stituerem  te  regem  super  Judaos.  Si  ergo  tibi  visum 
fuerit  venire  ad  me  festinanter,  ut  contendam  tecum  ad 
civitatem  sanctam,  et  adimpleam  tua  optata,  faciam 
hoc. 

18.  Et  abiit  Nicomedes  ad  Aristobulum  cum  Gnei  epis- 
tola  ;  reversusque  Antipater  ad  Hyrcanum  indicavit  ei 
promissionem  Gnei,  consulens  ei,  ut  pergeret  Damascum. 

19.  Perrexit  itaque  Hyrcanus  Damascum  :  perrexit 
quoque  Aristobulus,  et  convenerunt  Damasci  in  consis- 
torio  Pompeii,  qui  est  Gneus,  et  dixerunt  Antipater,  et 
seniores  Judasorum  Gneo: 

20.  Scias,  dux  praeclarissime,  quod  Aristobulus  hic  jam 
praevaricaïus  sit  adversus  nos,  et  usurpaverit  gladio  re- 
gnum  fratris  sui  Hyrcani,  qui  dignior  eo  est,  cum  sit 
frater  major,  melioris  quoque,  et  justioris  vitae; 

21.  Nec  sat  illi  fuit  opprimere  fratrem,  atqui  oppressit 
omnes,  quae  in  circuitu  nostro  sunt  gentes,  elTundens 
sanguinem  earum,  et  facultates  injuste  expilans,  atque 
confirmans  inter  nos,  et  eas  inimicitias  a  quibus  abhor- 
remus. 

22.  Tum  steterunt  mille  senes  testantes  veritatem  ver- 
borum  illius.  Et  ait  Aristobulus  :  Sane  frater  hic  meus 
melior  me  est  ; 

2j.  At  non  appetivi  regnum,  nisi  cum  viJissem  uni- 
versos,  qui  fuerant  subjecii  Alexandro  patri  nostro,  jam 
praevaricatos  fuisse  in  nos  post  mortem  illius,  cognos- 
centes  iratris  mei  impotentiam. 

24.  Quae  cum  inspexissem,  cognovi  me  opportere  sus- 
cipere  regnum  eo  quod  melior  eram  ad  bella,  et  aptior 
eo  conservationi  regni  : 


2Ç.  Et  oppugnavi  quicumque  contra  nos  prœvaricati 
sunt,  et  restitui  obedientiœ  :  et  hoc  est  mandatum  patris 
nostri  ante  obitumejus:  statuitque  testes  qui  testarentur 
veritatem  verborum  suorum. 

26.  His  gestis,  discessit  Pompeius  ab  urbe  Damasco, 
petens  domum  sanctam  :  Antipater  vero  clam  misit  ad 
incolas  civitatum,  quas  expugnaverat  Aristobulus,  con- 
citans  eos  ut  conquererentur  apud  Gneum  exponentes 
exercitam  in  se  illius  tyrannidein  :  quod  quidem  prassti- 
terunt. 

27.  Et  prœcepit  ei  Gneus  scribere  libellum  manumis- 
sionis,  et  quod  nequaquam  molestiam  ît  lis  foret  il  la  tu- 
rus  ;  quod  quidem  fecit,  et  exemptas  sunt  gentes  ab 
obedientia  Judasorum.    • 

28.  At  Aristobulus  cum  vidisset  quod  fecerat  sibi 
Gneus,  discessit  ipse,  et  viriejus  de  exercitu  Gnei  noctu, 
ipso  inconsulto,et  profectus  estad  civitatem  domus  sanctas, 
et  insecutus  est  eum  Gneus  donec  pervenit  ad  civita- 
tem domus  sancta;,  circa  quam  castrametatus  est. 

29.  Cum  vero  vidisset  altitudinem  murorum  et  tirmi- 
tatem  aedificiorum  ejus,  et  multitudinem  hominum  qui 
in  ea  erant,  et  montes  ambientes,    cognovit  blanditias  et 


acquiescé  à  sa  demande,  vous  lui  rendrez  cette  lettre  ; 
et  vous  lui  direz  qu'il  vienne  me  trouver  sans  aucun  de- 
lai,  car  je  l'attends  :  et  il  écrivit  à  Aristobule  une  lettre 
dont  voici  la  teneur  : 

15.  Gnéus,  général  des -armées  romaines,  au  roi  Aris- 
tobule, fils  d'un  père  qui  avait  réuni  en  sa  personne  la 
royauté  et  le  sacerdoce.  Je  vous  salue. 

16.  Or  m'a  apporté  de  votre  part  un  jardin  et  une  vigne 
d'or,  et  j'ai  envoyé  l'un  et  l'autre  au  consul  et  aux  séna- 
teurs ;  ils  ont  reçu  ces  dons  avec  des  sentiments  de  re- 
connaissance, et  les  ont  consacrés  dans  le  temple  de 
Rome. 

17.  Ils  m'ont  ordonné  outre  cela  de  vous  donner  du 
secours,  et  de  vous  établir  roi  des  Juifs.  Si  donc  vous 
vous  hâtez  de  me  venir  trouver,  nous  irons  ensemble  à 
la  ville  Sainte,  et  je  remplirai  vos  voeux. 

18.  Nicomède  apporta  cette  lettre  à  Aristobule  :  Anti- 
pater retourna  vers  Hyrcan,  et,  l'ayant  inlormédes  pro- 
messes que  Gnéus  lui  avait  faites,  il  l'exhorta  à  s'avancer 
usqu'à  Damas. 

19.  Hyrcan  et  Aristobule  s'étant  donc  rendus  à  Damas, 
ils  comparurent  tous  deux  devant  Pompée,  qui  est  le 
même  que  Gnéus;  alors  Antipater  et  les  princes  des 
Juifs  parlèrent  en  ces  termes  devant  Gnéus: 

20.  O  illustre  général,  sachez  qu'Aristobule  nous  a 
déjà  fait  une  infinité  de  maux,  et  qu'il  a  usurpé  à  main 
armée  un  royaume  dont  son  frère  Hyrcan  était  plus 
digne  que  lui,  tant  parle  droit  de  l'âge,  que  par  la  bonté 
et  la  droiture  de  ses  mœurs. 

21.  Il  ne  s'est  pas  contenté  d'opprimer  son  frère,  sa 
tyrannie  s'est  étendue  sur  tous  les  peuples  voisins  ;  il  a 
répandu  leur  sang,  il  a  pillé  leurs  biens,  et  a  cimenté 
entre  eux  et  nous  des  inimitiés  que  nous  ne  cherchions 
qu'à  étouffer. 

22.  Ces  accusations  ayant  été  confirmées  par  mille  des 
anciens  du  peuple,  Aristobule  prit  la  parole,  et  dit: 
J'avoue  que  mon  frère   a  plus  de  vertu  que  moi  ; 

2;.  Mais  je  n'ai  songé  à  me  mettre  la  couronne  sur  la 
tête,  que  lorsque  j'ai  vu  les  sujets  d'Alexandre,  notre 
père,  se  soulever  contre  nous  après  sa  mort  ;  parce 
qu'ils  connaissaient  le  peu  de  capacité  qu'avait  mon 
frère  pour  régner  sur  eux.  t 

24.  Dans  ces  funestes  conjonctures,  je  crus  qu'il  était 
de  mon  devoir  de  prendre  en  main  les  rênes  du  gouver- 
nement, parce  que  je  savais  mieux  faire  la  guerre,  et  que 
j'étais  plus  propre  que  mon  frère  à  soutenir  le  poids  d'un 
état  ébranlé. 

25.  J'attaquai  tous  les  rebelles,  selon  que  l'avait  or- 
donné mon  père  avant  de  mourir,  et  je  les  fis  tous 
rentrer  dans  le  devoir.  En  même  temps,  il  produisit  des 
témoins  qui  attestèrent  la  vérité  de  tout  ce  qu'il  venait 
d'avancer. 

26.  Après  cela,  Pompée  partit  de  Damas  et  vint  au 
temple  suint;  cependant  Antipater  envoya  secrètement 
des  députés  aux  habitants  des  villes  dont  Aristobule 
s'était  rendu  maître  par  force,  et  les  porta  à  se  plaindre 
à  Pompée  delà  tyrannie  qu'il  avait  exercée  sur  eux. 

27.  Et  au  sujet  de  ces  plaintes,  Pompée  obligea  Aris- 
tobule de  lui  faire  une  renonciation  par  écrit  de  toutes 
ces  villes,  avec  promesse  qu'il  ne  s'en  vengerait  en  au- 
cune manière  ;  ce  qu'il  exécuta,  et  ces  peuples  furent 
ainsi  délivrés  de  la  domination  des  Juifs. 

28.  Aristobule  faisant  réflexion  à  ce  qu'on  l'avait  obligé 
de  faire,  s'échappa  la  nuit  avec  ses  gens  du  camp  de 
Pompée,  à  l'insu  de  celui-ci,  et  vint  à  la  ville  du  temple 
saint:  Pompée  l'y  suivit  aussitôt,  et  campa  autour  de 
cette  ville. 

29.  Mais  ayant  considéré  la  hauteur  de  ses  murailles, 
la  solidité  de  ses  édifices,  le  nombre  de  ses  habitants,  et 
les  montagnes  qui  lui  servaient  de  rempart,  il  crut  qu'il 


IV.—  MACCABÉES.  —  XXXVI.  -  ARISTOBULE  ET  POMPÉE 


5  »9 


astutiam  in  Aristobulum  conducibiliores  fore,  quam 
irritamenta  : 

jo.  Quare  legatos  ad  eum  misit  ut  ad  se  egrederetur, 
promissa  securitate  ;  et  egressus  est  ad  eum  Aristobulus, 
quem  bénigne  suscepit  Gneus,  nulla  mentione  facta  de 
antegestis  ab  eo. 

ji.  Post  hase,  ait  Aristobulus  Gneo  :  Vellem  ut  auxilio 
mini  esses  adversus  fratrem  meum,  nulla  data  hostibus 
meis  in  me  potestate,  et  pro  hac  re  quodeumque  vis 
habebis. 

?2.  Respondit  Gneus  :  Si  vis  hoc,  defer  ad  me  quic- 
quid  est  in  templo  pecuniarum  et  gemmarum,  et  conse- 
qui  te  faciam  quod  optas  :  cui  ait  Aristobulus  :  Profecto 
'd  faciam. 

53.  Et  misit  Gneus  ducem  nomine  Gabinium  eum  plu- 
rimis  viris  ad  capessendum  quicquid  erat  in  templo  pe- 
cuniarum et  gemmarum  : 

H-  At  cives  et  sacerdotes  renuerunt  permittere  id  : 
quare  obstiterunt  Gabinio,  occidentes  plurimos  de  viris 
et  amicis  ejus,  etexpulerunt  de  urbe. 


;;.  Unde  iratusGneus  in  Aristobulum,  catenis  devinxit. 
Tum  perrexit  eum  exercitu,  ut  irrumperet  in  urbem  et 
ingrederetur  eam.  At  egressi  de  civibus  quamplurimi 
cohibuerunt  eum  ab  hoc,  multis  de  viris  ejus  cassis. 


j6.  Et  quidem  deterruit  illum,  quam  viderat,  multi- 
tudo,  magnanimitas  atque  fortitudo  gentis  :  quibus  ti- 
moré perculsus  secedere  ab  eis  constituerai,  nisi  aborta 
fuissent  mala  in  urbe  inter  amicos  Aristobuli  et  amicos 
Hyrcani. 

J7-  Nam  quidam  eorum  volebant  aperire  Pompeio, 
quidam  vero  ab  hoc  abhorrebant.  Quare  congressi  sunt 
propter  hoc,  et  incrementum  sumente  hoc  rerum  statu, 
perduravit  bellum. 

j8.  Quod  percipiens  Pompeius  se  applicuit  eum  exer- 
citu portas  civitatis,  cui  quidam  ex  populo  januam  ape- 
rientes,  ingressus  occupavit  palatium  régis. 

J9-  At  templum  obtinere  non  potuit,  quoniam  sacer- 
dotes clauserant  januas,  et  aditus  incluserant  viris. 


40.  Ad  quos  misit  Pompeius  qui  oppugnarent  unde- 
quaque,  et  fugaverunt  eos.  Accedentes  autem  amici  ejus 
ad  templum,  ascenderunt  murum,  et  descenderunt  in 
illud;  aperueruntque  portas  ipsius,  interfecta  multitudine 
sacerdotum. 

41.  Venit  autem  Gneus,  donec  ingressus  est  illud,  et 
demiratus  est  pulchritudinem,  et  splendorem  il li us,  quem 
viderat,  et  obstupuit  eum  vidisset  opes  et  gemmas  quas 
in  eo  erant, 

42.  Et  abstinuit  accipere  ex  illo  quicquam  :  manda- 
vitque  sacerdotibus  repurgare  domum  cassis,  et  oti'erre 
sacrificia  juxta  patrios  ritus. 


réduirait  plus  aisément  Aristobule  par  caresse  et  par 
adresse  que  par  des  violences  ouvertes. 

;o.  A  cet  eiret,  il  lui  envoya  dire  de  le  venir  trouver, 
et  lui  donna  un  sauf-conduit.  Aristobule  étant  venu, 
Pompée  le  reçut  avec  beaucoup  de  bonté  et  ne  fit  au- 
cune mention  de  tout  ce  qui  s'était  passé  auparavant. 

ji.  Aristobule  lui  dit  ensuite  :  Je  vous  conjure  de  me 
secourir  contre  mon  frère  et  de  ne  donner  à  mes  enne- 
mis aucun  pouvoir  sur  moi  ;  et  soyez  sûr  qu'il  n'y  a  rien 
dont  je  ne  sois  prêt  à  payer  ce  service. 

?2.  Pompée  lui  répondit  :  Si  vous  êtes  dans  cette  ré- 
solution, livrez-moi  tout  ce  qu'il  y  a  d'argent  et  de  pier- 
reries dans  le  temple,  et  je  ferai  tout  ce  que  vous  me 
demandez.  Aristobule  lui  répondit  :  Certainement  je  le 
ferai. 

}}.  Pompée  envoya  le  général  Gabinius  avec  plusieurs 
soldats,  pour  apporter  tout  ce  qu'il  y  avait  d'argent  et 
de  pierreries  dans  le  temple. 

J4.  Mais  le  peuple  et  les  prêtres  ne  voulurent  jamais 
permettre  qu'on  enlevât  la  moindre  chose  de  ce  lieu 
sacré;  ils  s'opposèrent  à  Gabinius  et  le  chassèrent  de 
Jérusalem,  après  avoir  tué  plusieurs  de  ses  gens  et  de 
ses  amis. 

?<!.  Pompée  déchargea  toute  sa  coll-re  sur  Aristobule 
et  le  fit  lier  de  chaînes  ;  il  s'avança  ensuite  à  la  tète  de 
son  armée  pour  forcer  Jérusalem  et  s'en  ouvrir  l'entrée; 
mais  plusieurs  citoyens  en  étant  sortis  les  armes  à  la 
main,  il  fut  obligé  de  se  retirer  après  avoir  perdu  un 
grand  nombre  des  siens. 

j6.  Il  avait  été  tellement  frappé  de  la  multitude  des 
habitants  et  de  leur  valeur,  qu'il  avait  renoncé  à  son 
entreprise,  et  songeait  même  à  se  retirer,  si  les  dissen- 
sions excitées  dans  la  ville  entre  les  amis  d'Aristobule 
et  ceux  d'Hyrcan  ne  l'eussent  retenu. 

57.  Car  les  uns  étaient  d'avis  de  lui  ouvrir  les  portes, 
et  les  autres  avaient  horreur  de  cette  résolution;  en 
sorte  que,  chacun  prenant  les  armes  pour  la  défense  de 
son  parti,  il  s'excita  entre  eux  une  guerre  sérieuse. 

38.  Pompée,  instruit  de  ces  dissensions,  se  tint  avec 
ses  troupes,  à  la  porte  de  Jérusalem,  et  quelques  hom- 
mes du  peuple  la  lui  ayant  ouverte,  il  y  entra  et  s'em- 
para du  palais  du  roi. 

59.  Mais  il  ne  put  se  rendre  maître  du  temple  auss' 
aisément  ;  parce  que  les  prêtres  en  avaient  fermé  les 
portes,  et  que  les  entrées  en  étaient  gardées  par  des 
hommes  de  guerre. 

40.  Cependant  Pompée  les  fit  attaquer  de  tous  côtés, 
et  ils  furent  mis  en  fuite.  Les  Romains  ayant  enfin  gagné 
le  temple,  quelques-uns  y  entrèrent  par  le  haut,  et  en 
ouvrirent  les  portes  aux  autres,  après  avoir  tué  un  grand 
nombre  de  prêtres. 

41.  Pompée  s'y  rendit  aussitôt,  et  y  étant  entré,  il  en 
admira  la  magnificence  et  la  splendeur,  il  vit  avec  éton- 
nement  les  richesses  et  les  pierreries  qui  y  étaient  em- 
ployées avec  tant  de  profusion, 

42.  Et  refusa  d'en  emporter  la  moindre  chose  ;  en- 
suite il  ordonna  aux  prêtres  d'ôter  du  temple  les  corps 
de  ceux  qui  y  avaient  été  tués,  et  d'y  offrir  des  sacri- 
fices, selon  les  antiques  usages  de  leur  nation. 


CHAPITRE    XXXVII- 


i.  His    peractis,    constiluit    Pompeius    Hyrcanum    in  i.  Après  cela,  Pompée  donna  le   royaume  de  Judée  à 

regem,    abduxitque    fratrem    illius    Aristobulum   catenis  Hyrcan,  et  emmena  à  Rome  Aristobule,  chargé  de  chaî- 

devinctum  ;  mandavit  praeterea  ne  ullam  haberent  Judœi  nés.  Il  défendit  outre   cela   aux   Juifs   d'exercer  aucune 

pctestaterri  ^uper  eos  qui  subacti  erant  a  regibus  eorum  puissance    sur   les    peuples  qui   avaient   été   soumis  par 

ante  ejus  adventum,  leurs  rois  avant  son  arrivée  en  Judée. 

2.  Et  exegit  tributum  ab  urbe  domus  sanctas,   et  con-  :.  Il  imposa    un    tribut    à    la   ville  du  temple  saint,  et 

venit  cum  Hyrcano  ut  inauguraretur  a   Romanis  singulis  convint   avec    Hyrcan    que,  tous    les   ans,    il    enverrait 

annis.  demander  aux  Romains  la  permission  de  régner. 

j.  Et  profectus  est  ducens  secum  Aristobolum,  et  duos  j.  Pompée,    après    avoir    laissé    le  gouvernement    de 

filios,    et    filias    ejus   :    remansitque    ipsi    filius    nomme  Judée  à  Hyrcan,   à  Antipater  et  à  Scaurus,  son  collègue, 

Alexander,  quem  capere  non  potuit  Pompeius,   eo  quod  partit  enfin,  suivi  d'Aristobule,  des  deux  fils  et  des  filles 

fugerat.   Subrogavit  itaque  Pompeius   in   civitate  domus  de  ce  prince,    à    la  réserve  d'Alexandre    qui    échappa  à 

sanctas  Hyrcanum,   et    Antipatrum,  atque  cum  eis  Seau-  Pompée.  Celui-ci  établit  donc  dans  le  gouvernement  de 

rum  collegam  suum.  la  ville  sainte  Hyrcan  et    Antipater,  et    il    leur  adjoignit 

Scaurus,  son  propre  collègue. 


CHAPITRE  XXXVIII 


i.  Cum  profectus  est  Pompeius    Romam,    perrexerunt  i.  Pompée  étant  parti  pour  Rome,  Hyrcan  et  Antipater 

hyrcanus    et    Antipater  ad    Arabes,   ut  subigerent   eos  allèrent  trouver  les  Arabes,    pour   leur   proposer  de  se 

Romanorum  obedientiae.  soumettre  à  la  domination  des  Romains. 

2.    Quod    quidem     praîstiterunt    Arabes,    confidentes  2.  Ils    y  consentirent   aisément    à    cause  des   liaisons 

familiaritati    Antipatri,  et   multum  tribuentes    ejus   con-  qu'ils  avaient  avec   Antipater,    et  du  cas   qu'ils  faisaient 

silio    :    quibus    intendebat    Antipater    sibi    reconciliare  de  ses  conseils,  quoique  Antipater    n'eût  d'autre  vue  en 

Romanos.  tout  cela  que  de  se  réconcilier  avec  les   Romains. 

;.  Cum  ergo    percepisset    Alexander   filius   Aristobuli  5.    Alexandre,    fils    d'Aristobule,    ayant    donc    appris 

expeditionem  Hyrcani,  Antipatri  et  Scauri  contra  Arabes,  qu'Hyrcan,  Antipafr  et  Scaurus,  avaient  pris  leur  route 

et  longe   eos    recessisse    ab    urbe  sancta,  profectus  est  vers  '.es  Arabes,  et  qu'ils  étaient  fort  loin  de  Jérusalem, 

donec  il  lue  adventavit  :  il  y  vint. 

4.  Et  ingressus  regiam,  protulit  inde  pecuniam  in  expen-  4.  Et,  étant  entré  dans  le  palais,  il  en  tira  tout  ce  qu'il 
sas  restaurationis  mûri  civitatis,  quem  exciderat  Pom-  y  trouva  d'argent  pour  l'employer  à  relever  les  murs 
peius.  que  Pompée  avait  abattus. 

5.  Coegitque  sibi  exercitum,  et  firmavit  ea  omnia,  ç.  Il  leva  ensuite  des  troupes,  et  régla  toutes  choses 
quae  voluit,  antequam  reverteretur  Hyrcanus,  et  qui  comme  il  le  voulut,  avant  qu'Hyrcan  et  ses  partisans 
cum  eoerant,  in  civitatem  domus  sanctae  :  revertentibus  fussent  de  retour  à  Jérusalem.  Ayant  su  qu'ils  s'appro- 
vero  obviam  egressus  est,  et  oppugnavit,  atque  profli-  chaient,  il  marcha  à  leur  rencontre  et  les  défit  entière- 
gavit.  ment. 


S.  B.  -  T.  XII  il 


CHAPITRE   XXXIX 


i.  Jam  egressus  erat  Gabinius    Roma,  ut  moraretur  in  i.  Gabinius  était  déjà  parti  de  Rome,  pour  aller  pren- 

terra  Syriae,  ad  illius  curam  gerendam  :  et  nuntiatum  est  dre    possession    du    gouvernement    de   Syrie,    lorsqu'il 

ei  quod  gesserat  Alexander    filius  Aristobuli,  extruendo  apprit  qu'Alexandre  ne  s'était   pas  contenté    de  réparer 

quod  destruxerat  Pompeius,   et    oppugnando    successo-  les  ruines  de  Jérusalem,  qu'il   avait  même    osé  attaquer 

rem  ejus,  atque  occidendo  amicos.  le  successeur   de   Pompée;    et    qu'outre    cela    il   s'était 

défait  des  amis  de  ce  général. 

2.  Quare  perrexit,  donec  venit  Jérusalem  :  et  conten-  2.  C'est  pourquoi  il  vint  promptement  à  Jérusalem,  et 

dit  ad  eum  Hyrcanus,  et  qui  cum  eo  erant.  Quibus  obviam  Hyrcan  se  rendit  auprès  de  lui  avec  son  armée.  Alexan- 

egressus  est  Alexander,  cum  decem  millibus  peditum,  et  dre  étant  venu  à  leur  rencontre  avec    dix   mille  hommes 

mille  quingentis  equitibus,  et  decertavit  contra  eos  ;  d'infanterie  et  quinze  cents    chevaux,    leur  livra  bataille. 

j.  Quem  profligantes  occiderunt  ex    viris  ejus  aliquem  ?.  Il  fut  battu,  et,  après  avoir  perdu  une  partie  de  son 

numerum,     fugitque     in    quamdam   urbem,    quœ   dicitur  armée,    il  se    sauva  dans  une    ville    de   Judée    appelée 

Alexandrium,  in    terra  Judse,    in    qua   sese  munivit   cum  Alexandrie,  où  il  se  retrancha   avec  ce  qui  lui  restait  de 

viris  suis.  troupes. 

4.  Et  profectus  est  ad  eum  Hyrcanus,    Gabinius  quo-  4.  Hyrcan  et    Gabinius    l'y    ayant    suivi,   l'assiégèrent 

que,  et  qui  cum  eis  erant,  et  obsederunt  eum;  et  egres-  dans  cette  place;    mais   Alexandre    fit  une    sortie   dans 

sus   est  ad   eos    Alexander,   decertavitque  cum    eis,  et  laquelle  il  tua  un  grand  nombre  de  ses  ennemis, 
occidit  de  viris  eorum  multitudinem. 

Ç.  Et  processit  ad  eum  Marcus,  qui    nominatur   Anto-  ç.  Alors    Marc   surnommé    Antoine,    s'avança    contre 

nius,  et  fugavit  in  Alexandrium.    Et    egressa    est   mater  Alexandre,  et  l'obligea  de  rentrer  dans  Alexandrie.  Ce- 

Alexandri  ad  Gabinium,  deprecans    atque  rogans  ut  filio  pendant  la  mère  d'Alexandre  vint  trouver  Gabinius,  et  le 

Alexandro  daret  securitatem  ;  supplia  instamment  d'accorder  le  pardon  à  son  fils. 

6.  Cui  acquievit  Gabinius  in  hoc,  et  egressus  est  ad  6.  Il  le  lui  promit,  et,  sur  cette  assurance,  Alexandre  se 
eum  Alexander,  quem  occidit  Gabinius  :  cui  visum  est  rendit  auprès  de  lui  ;  mais  Gabinius  le  tua,  et  partagea 
dividere  regiones  Judas  quinque  in  partes.  toute  la  Judée  en  cinq  régions. 

7.  Una  est  Jerosolymitana  regio,  et  quae  ei  adjacent  :  7.  La  première  comprenait  Jérusalem  avec  ses  dépen- 
et  huic  parti  prœfectus  est  Hyrcanus.  Altéra  vero  pars  dances,  et  Hyrcan  en  fut  fait  gouverneur.  La  seconde 
est  Gadira,  et  quae  ei  subjacent.  Tertia  autem  Jéricho,  comprenait  Gadire  et  ses  environs. 'La  troisième,  Jéricho 
et  campestria.  Quarta  quidem  est  Hemat  in  regione  et  ses  plaines.  La  quatrième,  Hémat  ;  et  la  cinquième 
Judae.  Quinta  tandem  Sephoris.  enfin,  Séphoris. 

8.  Intendit  his  removere  bella,  et  seditiones  a  regione  8.  Gabinius  ne  négligea  rien  pour  bannir  de  Judée  les 
Judae,  sed  nequaquam  remota  sunt.  guerres  et  les  séditions  qui    la  désolaient  ;  mais  il  n'en 

put  venir  à  bout. 


CHAPITRE    XL 


i.  Tum  machinatus  est  Aristobulus,  donec  res  ei  suc- 
cessisset,  et  fugisset  Roma  cum  filio  suo  Antigono,  et 
profectus  esset  in  civitatem  Judas. 

2.  Et  cum  in  publicum  sese  protulisset  Aristobulus, 
affiu\it  ad  eum  muHitudo  magna  virorum,  e  quibus  octo 
millia  selegit,  et  contendit  ad  Gabinium,  et  oppugnavit 
illum,  cœsaque  est  de  exercitu  Romanorum  multitudo 
numerosa  valde  : 

5.  Ceciderunt  quoque  de  viris  ejus  septem  millia, 
mille  vero  evaserunt,  et  insecutus  est  eum  exercitus  ; 
at  non  destitit  eos  oppugnare  ipse  et  qui  cum  eo  reman- 
serant  usque  ad  internecionem  suorum,  nec  superfuit  nisi 
ipse  solus, 

4.  Quipugnavit  acerrime,  donec  vulneribus  aggravatus 
cecidit,  et  captus  est,  et  ductusad  Gabinium,  qui  curari 
eum  jussit,  donec  sanatus  est. 

5.  Tum  catenis  devinctum  Romam  misit,  remansitque 
carcere  inclusus  usque  ad  regnum  Cajsaris,  qui  eductum 
e  carcere  muneribus  cumulavit  atque  beneficiis, 

6.  Adjunctisque  duobus  ducibus  cum  duodecim  mini- 
bus virorum,  misit  eum  in  regionem  Judée,  ut  abduceret 
eos  a  partibus  Pompeii  ad  obedientiam  Csesaris  :  erat 
quippe  Pompeius  tuncpraefectus  super  regionem  .^Egypti. 

7.  Et  pervenit  fama  Aristobuli  et  suorum  ad  Hyrca- 
num,  qui  timuit  valde  :  scripsitque  ad  Antipatrum,  ut 
solutis  machinamentis  averteret  a  se  res  ipsius. 

8.  Misitque  Antipater  viros  de  principibus  virorum 
Jérusalem,  tradens  cuidam  eorum  venenum,  prœcipiens 
ei  astu  preebere  illud  Aristobulo. 

9.  Et  occurrerunt  ipsi  in  terra  Syriae  tanquam  légat' 
civitatis  sanctas  ad  illum  :  quos  suscipiens  lœtatus  est, 
et  comederunt  cum  illo,  atque  biberunt.  Et  machinati 
sunt  viri  illi,  donec  praebuerunt  ei  venenum  illud  ;  et 
mortuus  est,  et  sepultus  in  regione  Syriae. 

10.  Fuit  autem  tempus  regni  illius,  donec  captivus 
abductus  est  prima  vice,  trium  annorum  cum  dimidio  ;  et 
erat  quidem  vir  fortis,  gravis,  optimœ  indolis. 

11.  Jam  vero  scripserat  Gabinius  senatui  ut  dimitteret 
duos  filios  ejus  ad  matrem  suam,  quoniam  id  ipsum  roga- 
verat;  quod  quidem  prasstitit. 

12.  Factum  est  autem  ut  cum  lorge  recessisset  Pom- 
peius a  Jérusalem,  dissolverunt  l'ccdus  obedientiae  Roma- 
nis :  quamobrem  perrexit  ad  eos  Gabinius,  oppugnavit, 
atque  vicit,  Romanorumque  obedientiae  restituit. 

IJ.  Inierea  rebellavit  terra  /Egypti  contra  Ptolemasum, 
et  expulerunt  eum  de  regia  urbe,  récusantes  déferre 
tnbutum  Romanis. 

14.  Qua  de  causa  scripsit  Ptoiemœus  Gabinio  ut  con- 
tendeietsibi  auxiliaturus  adversus  /Egyptios,  ut  reduce- 
ret  eos  ad  obedientiam  Romanorum. 

15.  Et  profectus  est  Gabinius  de  regione  Syrios,  scrip- 
sitque Hyrcano,  ut  sibi  occurreret  cum  exercilu,  ut  con- 
tenderent  ad   Ptolemasum. 


1.  Cependant  Aristobule  mit  tout  en  usage  pour  faire 
réussir  le  dessein  qu'il  avait  de  se  sauver  de  Rome  ;  et, 
s'étant  enfin  échappé  avec  son  fils  Antigone,  il  revint  à 
Jérusalem. 

2.  Aussitôt  qu'il  se  fut  montré  en  public,  tout  le  monde 
accourut  vers  lui  en  foule  :  et  Aristobule  ayant  choisi 
parmi  cette  multitude  huit  mille  hommes,  il  vint  à  leur 
tête  attaquer  Gabinius.  Il  fit  un  grand  carnage  des 
Romains. 

?.  Et  après  avoir  perdu  lui-même  sept  mille  des  siens, 
il  se  sauva  avec  les  mille  hommes  qui  lui  restaient: 
cependant  les  Romains  l'ayant  poursuivi,  il  soutint  leurs 
eil'orts  jusqu'à  ce  qu'il  eût  perdu  le  dernier  de  ses  gens. 

4.  Enfin,  restant  lui  seul  après  une  longue  résistance, 
il  tomba  accablé  sous  le  nombre  de  ses  blessures  ;  et, 
ayant  été  pris  en  cet  état,  il  fut  conduit  à  Gabinius,  qui 
le  fit  traiter  jusqu'à  ce  qu'il  fût  parfaitement  guéri. 

5.  Aristobule  fut  ensuite  mené  à  Rome,  chargé  de 
chaînes,  et  il  y  fut  jeté  dans  une  prison,  où  il  resta  Jus- 
qu'au règne  de  César,  qui,  après  l'en  avoir  tiré,  le  com- 
bla d'honneurs  et  de  bienfaits. 

6.  Il  lui  donna  même  douze  mille  hommes  sous  la 
conduite  de  deux  généraux  romains  ,  pour  aller  en  Judée 
lui  gagner  les  peuples,  en  les  détachant  des  intérêts  de 
Pompée  qui  gouvernait  alors  les  provinces  de  l'Egypte, 
et  les  gagner  à  César. 

7.  Hyrcan  ayant  appris  qu'Aristobule  s'avançait  à  la 
tête  d'une  armée  romaine,  fut  saisi  d'une  grande  crainte, 
et  écrivit  à  Antipater  d'employer  ses  artifices  ordinaires 
afin  de  détourner  cet  orage. 

8.  Pour  cet  effet,  Antipater  fit  partir  quelques  Juifs 
des  plus  distingués  de  Jérusalem,  chargeant  l'un  d'en- 
tr'eux  de  poison,  avec  ordre  de  le  donner  adroitement  à 
Aristobule. 

0.  Ces  Juifs  étant  donc  arrivés  en  Syrie  comme  dépu- 
tés de  la  ville  sainte,  Aristobule  les  reçut  avec  joie,  et 
les  fit  boire  et  manger  à  sa  table,  et  ces  hommes  s'y  pri- 
rent si  bien,  qu'ils  lui  firent  avaler  le  poison.  Il  mourut, 
et  fut  enterré  en  Syrie. 

10.  Le  temps  de  son  règne  jusqu'à  sa  première  prison 
fut  de  trois  ans  et  demi.  Ce  prince  avait  de  la  valeur, 
de  la  dignité  dans  sa  personne,  et  était  d'un  très  bon 
naturel. 

11.  Gabinius  écrivit  aussitôt  au  sénat  de  Rome  de  ren- 
voyer les  deux  fils  d'Aristobule  à  leur  mère,  ainsi  que 
ce  prince  l'avait  souhaité  en  mourant  ;  ce  qui  fut  exécuté. 

12.  Ces  deux  frères  ne  furent  pas  plus  tôt  de  retour  en 
Judée,  que  voyant  Pompée  éloigné  de  Jérusalem,  ils 
secouèrent  le  joug  des  Romains.  Gabinius  marcha  aussi- 
tôt contre  les  rebelles,  et,  les  ayant  vaincus,  il  les  remit 
dans  l'obéissance. 

1  ;.  Cependant  l'Egypte  s'était  révoltée  contre  Ptolémée 
et  l'avait  même  chassé  de  sa  ville  capitale,  refusant  de 
payer  tribut  aux  Romains. 

14.  Ce  prince  en  écrivit  à  Gabinius  et  le  sollicita  de 
lui  amener  du  secours  contre  les  Égyptiens,  afin  qu'il  les 
fit  rentrer  dans  le  devoir. 

15.  Gabinius  étant  donc  parti  de  Syrie,  écrivit  à  Hyr- 
can de  le  venir  trouver  avec  ses  troupes  pour  [aller 
secourir  Ptolémée. 


r-4 


IV.—  MACCABÉES.  —  XL.  -  EXPÉDITION   D'EGYPTE 


16.  Et  profectus  est  Antipater  cum  exercitu  magno  ad 
Gabinium,  et  occurrit  ei  Damasci,  congratulans  ipsi  de 
Victoria  a  Persis  relata  : 

17.  Et  mandavit  ei  Gabinius,  ut  properaret  ad  Ptole- 
maeum,  quod  quidem  praestitit,  et  oppugnavit  /Egyptios, 
occiditque  ex  illis  multitudinem  plurimam. 

18.  Posthasc  adventans  Gabinius,  restituit  Ptolemasum 
in  regnum,  reversusque  in  civitatem  sanctam,  et  innova- 
vit  regnum  Hyrcano,  et  rediit  Romani. 


16.  Alors  Antipater  se  mit  en  marche  avec  une  armée 
considérable,  et,  ayant  joint  Gabinius  à  Damas,  il  le  féli- 
cita de  la  victoire  qu'il  avait  remportée  sur  les  Perses" 

17.  En  même  temps,  il  reçut  ordre  de  Gabinius  de  se 
rendre  promplement  auprès  de  Ptolémée,  et,  lorsqu'il 
fut  arrivé,  il  attaqua  les  Égyptiens  et  en  tua  un  très 
grand  nombre. 

18.  Gabinius  arriva  quelque  temps  après,  et  remit 
Ptolémée  sur  le  trône  ;  étant  ensuite  retourné  à  Jérusa- 
lem, il  confirma  à  Hyrean  le  droit  de  régner,  et  revint  à 
Rome. 


CHAPITRE   XLI 


1.  Reverso  Gabinio  Romain,  prasvaricati  sunt  Persas 
adversus  Romanos  :  et  profectus  est  Cransus  ducens 
magnum  exercitum  in  Syriam,  venitque  Jérusalem,  re- 
quirens  a  sacerdotibus,  ut  traderent  quidquid  est  in  domo 
Dei  pecuniarum. 

2.  Cui  inquiunt  :  Quomodo  hoc  tibi  fas  erit,  cum  Pom- 
peius,  Gabinius,  et  alii,  nefas  arbitrati  sint  ?  Respondit 
autem  :  Omnino  id  mihi  faciendum  est. 

;.  Cui  ait  Eleazarus  sacerdos  :  Jura  mihi  quod  non 
extendes  manum  tuam  ad  quicquam  illius,  et  ego  dabo 
ibi  trecentas  minas  auri. 

4.  Et  juravit  ei,  se  nihil  accepturum  de  pecunia  domus 
Dei,  si  sibi  tradiderit  quod  meminerat. 

5.  Et  tradidit  ei  Eleazarus  laminam  auream  fabrefactam, 
cujus  vertex  parieti  gazophylacii  templi  insertus  erat, 
cui  apponebantur  singulis  annis  exuvias  velaminum  do- 
mus, novis  substitutis. 

6.  Pendebat  autem  lamina  trecentas  minas  auri,  et 
cooperta  erat  adjectis  longo  annorurn  spatio  velaminibus, 
nemini  nota  nisi  Eleazaro. 

8.  Accepta  itaque  Crassus  hac  lamina,  fefellit,  recedens 
ab  initio  cum  Eleazaro  pacto,  accepitque  omnes  thesau- 
ros  templi,  et  expilavit  quidquid  in  eis  erat  pecuniarum, 
quarum  summa  erat  duorum  millium  talentorum  : 

8.  Quoniam  has  pecunias  congregalas  erant  ab  aedifi- 
catione  templi  ad  tempus  illum  usque,  ex  prsedis  regum 
Judae,  et  votis  eorum,  insuper  ex  iis,  quaa  miserant  reges 
gentium,  et  multiplicabantur,  augebanturque  annorurn 
decursu  :  quas  omnes  accepit. 

9.  Tum  contendit  Crassus  iste  cum  pecunia,  et  exer- 
citu  in  (regionem  Persarum,  et  pugnantem  proliigarunt 
cum  ejus  exercitu,  iinterficientes  eos  unica  die,  et  de- 
prsedatus  est  exercitus  Persarum  omne,  quod  erat  in 
castris  Crassi. 

10.  His  peractis  profecti  sunt  in  regionem  Syria;,  quam 
obtinentes  abduxerunt  ab  obedientia  Romanorum.  Quod 
cognoscentes  Romani,  miserunt  prasclarum  ducem  no- 
mine  Cassium  cum  exercitu  magno  : 

11.  Qui  in  Syriae  regionem  adventans,  expulit  qaierant 
in  ea  ex  Persis.  Dein  in  civitatem  sanctam  contendens, 
exemit  Hyrcanum  a  bello  ipsi  illato  a  Judasis,  reconci- 
lians  partes. 

12.  Tum  prsetergrediens  Euphratem,  expugnavit  Per- 
sas,  atque  reduxit  in  Romanorum  obedientiam  :  reduxi 
quoque  in  eorum  obedientiam  viginti  duos  reges,  quos 
subjegerat  Pompeius  :  et  redegit  in  Romanorum  obedien- 
tiam quidquid  erat  in  regionibus  orientis. 


1.  Lorsque  Gabinius  fut  de  retour  à  Rome,  les  Perses 
se  révoltèrent  contre  les  Romains  :  Crassus  passa  alors 
en  Syrie  à  la  tête  d'une  grosse  armée,  et,  étant  venu  à 
Jérusalem,  il  ordonna  aux  prêtres  de  lui  livrer  tout  ce 
qu'il  y  avait  d'argent  dans  les  trésors  du  temple. 

2.  Mais  ils  lui  représentèrent  qu'il  ne  lui  était  point 
permis  de  faire  une  chose  que  Pompée,  Gabinius,  et 
tant  d'autres  avaient  regardée  comme  un  crime.  Crassus 
leur  répondit  qu'il  avait  besoin  de  ces  secours. 

j.  Et  alors  le  prêtre  Éléazar  lui  dit  :  Jurez-moi  que 
vous  ne  porterez  la  main  à  rien  de  ce  qui  est  dans  le 
temple,  et  je  vous  donnerai  trois  cents  mines  d'or. 

4.  Crassus  s'y  engagea  avec  serment,  à  condition  que 
le  grand  prêtre  s'acquitterait  de  sa  promesse. 

5.  Et  en  même  temps,  Éléazar  lui  donna  une  lame  d'or 
travaillée  avec  art  et  qui  tenait  par  unede  ses  extrémités 
à  la  muraille  du  trésor  du  temple  :  C'était  à  cette  lame 
que,  tous  les  ans,  on  attachait  les  voiles  que  l'on  ôtait 
du  temple  après  en  avoir  mis  de  nouveaux. 

6.  Son  poids  était  de  trois  cents  mines  d'or,  et  elle 
était  entièrement  cachée  sous  ces  voiles  dont  on  la  cou- 
vrait depuis  plusieurs  années  ;  en  sorte  qu'Eléazar  était 
le  seul  qui  en  eût  quelque  connaissance. 

7.  Quand  Crassus  eut  reçu  cette  lame,  il  manqua  de 
parole  au  grand  prêtre  ;  et,  n'ayant  aucun  égard  à  l'ac- 
cord fait  entre  eux,  il  s'empara  des  trésors  du  temple  et 
pilla  tout  l'argent,  qui  se  montait  à  deux  mille  talents. 

8.  Ces  richesses,  amassées  depuis  la  fondation  du  tem- 
ple, venaient  des  dépouilles  enlevées  par  les  rois  de 
Juda  sur  les  nations  étrangères,  des  offrandes  de  ces 
princes,  et  de  tout  ce  que  les  rois  des  nations  avaient 
jamais  présenté  au  temple  du  Seigneur;  et  ces  trésors 
grossissaient  tous  les  jours. 

9.  Crassus  s'en  étant  enrichi,  gagna  la  Perse  à  la  tête 
de  ses  troupes.  Les  Perses,  l'ayant  défait  avec  toute 
son  armée  en  une  seule  bataille,  pillèrent  tout  ce  qu'ils 
trouvèrent  dans  son  camp. 

10.  Ils  vinrent  ensuite  en  Syrie  et  affranchirent  tous 
ces  peuples  de  la  domination  des  Romains.  Rome,  infor- 
mée de  ces  pertes,  fit  partir  de  nouvelles  troupes  sous 
les  ordres  d'un  général  nommé  Cassius,  qui  avait  acquis 
beaucoup  de  réputation  dans  la  conduite  des  armées. 

11.  Cassius  étant  arrivé  en  Syrie  en  chassa  tous  les 
Perses;  il  vint  ensuite  à  Jérusalem,  où  il  réconcilia  Hyr- 
can  avec  les  Juifs  qui  avaient  pris  les  armes  contre  ce 
prince. 

12.  De  là  s'avançant  jusqu'à  l'Euphrate,  il  battit  les 
Perses,  les  remit  sous  le  joug  des  Romains,  y  ramena 
aussi  vingt-deux  rois  que  Pompée  avait  déjà  subjugués  ; 
et  acquit  enfin  à  l'empire  toutes  les  provinces  de  l'Orient. 


CHAPITRE    XL1I 


1.  Ferunt  fuisse  Romae  mulierem  quamdam  praegnan- 
tem,  quae  mortua  est  cum  esset  prope  partum,  et  vehe- 
mentioribus  urgeretur  partus  doloribus;  cum  vero  infans 
quateretur,  caesus  est  utérus  macris,  et  inde  eductus 
vixit  atque  crevit, 

2.  Ac  Julius  nuncupatus  estmense  quinto  ;  vocatus  vero 
Caesar,  quoniam  viscera  matns  e  quibus  eductus  est  cassa 
sunt. 

jt.  Cum  autem  misit  senior  Pompeium  in  orientem, 
misit  Cassarem  quoque  in  occidentem  ad  debellandas 
gentes  quasdam,  qiiœ  jam  desciverant  a  Romanis. 

4.  Et  prcfectus  est  Caesar,  et  vicijt,  reduxitque  eas  in 
obedientiam  Romanorum,  atque  réversus  est  Romam 
cum  gloria  magna  : 

5.  Et  invaluit  fama  ejus,  et  res  ipsius  percrebuerunt 
valde,  et  summa  superbia  ipsum  invasit;  quare  petiit  a 
Romanis  ut  regem  nuncuparent  eum. 

6.  Cui  respondit  senior,  et  rectores  :  Utique  patres 
nostri  juraverunt  a  diebus  Tarquinii  régis,  qui  vi  acce- 
perat  uxorem  cujusdam  viri,  quae  manus  sibi  conscivit, 
ne  illa  potiretur;  neminem  eorum,  qui  praeficerentur 
ipsorum  rébus,  nuncupaturos  regem  : 


7.  Propter  quod  autem  juramentum  tibi  satisfacerc  non 
possumus.  Quamobrem  excitavit  seditiones,  et  bellis 
desaeviit  Romae;  multis  cassis,  donec  occupaverit  regnum 
Romanorum,  et  Regem  sese  nuncupavit,  imposito  capiti 
diademate. 

8.  Exinde  appellali  sunt  reges  Romanorum  ex  regno, 
appel lati  quoque  sunt  Caesares. 

9.  Cum  ergo  audisset  Pompeius  nuntium  Cœsaris,  et 
quod  occidisset  trecentos  viginti  rectores,  cogens  exer- 
citus  suos,  profectus  est  in  Cappadociam  : 

10.  Cui  occurrens  Cassar  oppugnavit  eum,  vicit,  atque 
interfecit,  et  obtinuit   universam    Romanorum  regionem. 

11.  Post  hase  Caesar  contendit  in  Syriae  provinciam  : 
cui  obviam  occumt  Mithridates  Armenius  cum  exercitu 
suo,  certiorem  illum  faciens  se  pacifiée  venisse,  atque 
paratum  quoscumque  prœciperet  oppugnare  hostes  : 

13.  Quem  abire  mandavit  in  .Cgyptum  :  et  profectus 
est  Mithridates  donec  pervenit  Ascalonem.  Hyrcanus 
autem  Caesarem  maxime  timebat,  eo  quod  nota  esset 
ejus  obedientia  erga  Pompeium,  quem  interfecerat  Caesar. 

1?.  Quare  festinanter  expedivit  Antipatrum  cum  exer- 
citu forti  in  auxilium  Mithridatis  :  et  profectus  est  Anti- 
pater  ad  eum,  et  auxiliatus  est  adversus  quamdam  civi- 
tatsm  de  civitatibus  ^Egypti,  et  expugnaverunt  eam. 

14.  Inde  vero  abeuntes  invenerunt  exercitum  de  Judaeis 
/Egypti  incolis,  obsistentem  in  aditu  ad  prohibendum 
Mithridatem  ingredi  ^Egyptum. 

15.  Et  protulit  eis  Antipater  epistolam  ab  Hyrcano 
praecipiente  eos  abstinere,  ne  sese  opponerent  Mithri- 
dati  amico  Caesaris,  qui  se  continuerunt. 

16.  Caeterum  prol'ecti  sunt  donec  pervenerunt  ad 
urbem  régis,  eo  tempore  regnantis  :  qui  egressus  est  ad 
eos  cum  omnibus  exercitibus  .■Egyptiorum,  et  congre- 
dientes  cum  eo  vicit  atque  profligavit  : 


1.  On  rapporte  qu'il  y  eut  à  Rome  une  femme  enceinte 
qui,  étant  près  d'accoucher,  expira  au  milieu  des  plus 
vives  douleurs  de  l'enfantement  ;  quand  elle  fut  morte 
on  lui  ouvrit  le  ventre,  et  l'enfant  en  ayant  été  tiré  vécut 
et  grandit. 

2.  Il  fut  nommé  Julius,  parce  qu'il  était  né  le  cin- 
quième mois;  et  César,  parce  qu'on  avait  déchiré  les 
entrailles  de  sa  mère  pour  l'en  retirer. 

;.  Le  consul  romain  ayant  envoyé  Pompée  dans 
l'Orient,  chargea  en  même  temps  César  d'aller  en  Occi- 
dent pour  remettre  sous  le  joug  quelques  nations  qui 
l'avaient  déjà  secoué. 

4.  César  s'élant  avancé  vers  ces  peuples  les  vainquit, 
et,  après  les  avoir  fait  rentrer  dans  le  devoir,  il  revint  à 
Rome  comblé  de  gloire. 

5.  L'éclat  de  ses  victoires  et  la  grandeur  de  sa  répu- 
tation lui  inspirèrent  un  tel  orgueil,  qu'il  demanda  aux 
Romains  de  lui  donner  le  litre  de  roi. 

6.  Mais  le  consul  et  les  sénateurs  lui  répondirent  en 
ces  termes  :  Après  que  le  roi  Tarquin  eut  en- 
levé par  force  la  femme  d'un  citoyen  romain,  et  que, 
pour  se  défendre  de  la  brutalité  de  ce  roi,  cette  femme 
eut  été  contrainte  de  se  donner  la  mort  de  ses  propres 
mains,  nos  pères  s'engagèrent  par  serment  à  ne  jamais 
donner  le  titre  de  roi  à  aucun  de  ceux  qui  seraient  des- 
tinés à  '.es  gouverner. 

7.  C'est  pourquoi  nous  ne  pouvons  vous  accorder  ce 
que  vous  demandez.  Alors  César  ne  gardant  plus  de 
mesures,  excita  des  troubles  et  desséditions  en  sa  faveur  ; 
il  tourna  ses  armes  contre  Rome,  et,  après  l'avoir  inon- 
dée du  sang  de  ses  citoyens,  il  se  rendit  maître  de  l'em- 
pire, et  prit  avec  le  diadème  le  titre  et  le  nom  de  roi. 

8.  Et  depuis  ce  temps-là,  les  Romains  furent  gouver- 
nés par  des  rois  qui  portaient  le  nom  de  Césars. 

9.  Pompée  ayant  appris  les  progrès  de  César  et  le  car- 
nage qu'il  avait  fait  de  trois  cent  vingt  sénateurs,  rassembla 
toutes  ses  troupes  et  prit  le  chemin  de  la  Cappadoce. 

10.  César  étant  venu  à  sa  rencontre,  lui  présenta  la 
bataille,  le  tua,  et  par  cette  victoire  devint  maître  de 
tout  l'empire  romain. 

h.  César  s'avança  ensuite  en  Syrie,  et  Mithridate 
l'Arménien  vint  l'y  trouver  avec  son  armée,  l'assurant 
qu'il  venait  à  lui  dans  des  sentiments  de  paixet  qu'il  était 
prêt  à  combattre  tel  ennemi  à  qui  il  l'opposerait. 

12.  César  lui  ordonna  d'aller  en  Egypte,  et  Mithridate 
s'avança  jusqu'à  Ascalon.  Or  Hyrcan  craignait  fort  que 
César,  après  avoir  tué  Pompée,  ne  vint  enfin  le  punir 
d'avoir  favorisé  le  parti  de  son  ennemi. 

ij.  C'est  pourquoi  il  se  hûta  d'envoyer  Antipater  avec 
une  armée  nombreuse  au  secours  de  Mithridate.  Anti- 
pater ayant  joint  Mithridate,  l'aida  à  faire  le  siège  d'une 
ville  d'Egypte,  et  ils  s'en  rendirent  les  maîtres. 

14  Et,  s'étant  avancés  dans  le  pays,  ils  furent  arrêtés 
par  une  armée  de  Juifs  établis  dans  ces  provinces,  qui 
gardait  les  passages,  pour  empêcher  Mithridate  d'entrer 
en  Egypte. 

i;.Mais  Antipater  leur  ayant  fait  voir  l'ordre  d'Hyr- 
can,  par  lequel  ce  prince  leur  défendait  de  s'opposer  à 
Mithridate  qui  était  l'ami  de  César,  ils  se  retirèrent. 

16.  Mithridate  et  Antipater  s'avancèrent  donc  jusqu'à 
la  ville  du  roi  qui  régnait  alors  en  Egypte.  Mais  ce 
prince  étant  venu  à  leur  rencontre  à  la  tète  de  toute  son 
armée  les  vainquit,  et  les  mit  en  déroute. 


IV.  —  MACCABÉES.  —  XLII.  VICTOIRE  D'ANTIPATER                    327 

17.  Et  terga  verlens  Mithridates  fugit,  quem  yEgyptiis  17.  Mithridate  prit  la  fuite  et  allait  laisser  sa  vie  entre 
copiis  circumseptum  liberavit  Antipater  a  morte  :  et  les  mains  des  Egyptiens  qui  l'avaient  déjà  enveloppé,  si 
constanter  restiterunt  Antipater  et  viri  ejus  in  bcllo  Antipater  ne  l'eût  garanti  de  ce  danger.  Antipater  sou- 
adversus  yEgyptios,  quos  prolligavit,  et  vicit,  expugna-  tenu  des  siens  se  défendit  courageusement  contre  les 
vitque  regionem  ^Egypti  totam.  Égyptiens,   et,    après    les    avoir    entièrement   défaits,  il 

devint  maître  de  toute  l'Egypte. 

18.  Et  scripsit  Mithridates  ad  Caèsarem,  significans  et  18.  Mithridate  fit  aussitôt  savoir  à  César  les  grandes 
quod  gesserat  Antipater,  et  quanta  pertulerat  bella,  choses  qu'Antipater  venait  d'exécuter, les  périls  auxquels 
quantaque  acceperat  vulnera,  et  quod  expugnatio  Anti-  il  s'était  exposé  et  les  blessures  qu'il  avait  reçues,  l'as- 
patri  non  sibi  adscribenda  esset,  et  quod  ille  reduxisset  surant  d'ailleurs  que,  de  sa  part,  il  n'avait  contribué 
/Efyptios  in  obedientiam  Cœsaris.  en    rien    à    cette    conquête,    qu'Antipater  lui    seul   avait 

ramené  les  Égyptiens  à  l'obéissance  de  César. 

19.  Cum  autem  legisset  Caesar  epistolam  Mithridatis,  19.  César  ayant  lu  la  lettre  de  Mithridate,  releva  fort 
commendavit  Antipatri  gesta,  et  illum  praslicere  et  exal-  l'action  d'Antipate-r  et  résolut  môme  de  travailler  à  sa 
tare  constituit.  grandeur  et  à  son  élévation. 

20.  His  gestis  perrexerunt  Mithridates  et  Antipater  ad  20.  Quelque  temps  après,  Mithridate  et  Antipater  vin- 
Caîsarem,  cum  esset  Damasci  :  et  nactus  est  apud  Caesa-  rent  trouver  César  à  Damas;  il  reçut  Antipater  d'une 
rem  quidquid  jucundum  état,  pollicitus  est  ei  quidquid  manière  fort  gracieuse,  et  promit  de  lui  accorder  tout 
optabat.  ce  qu'il  pouvait  souhaiter. 


CHAPITRE    XL11I 


i.  Cseterum  venit  Antigonus  filius  Aristobuli  ad  Cassa-  i.  Antigone,  fils  d'Aristobule,  étant  venu  trouver  César, 

rem,  et  commemoravit  ei  expeditionem  Aristobuli  patris  le  fit  ressouvenir  de  la  guerre  de  son  père  contre  Pom- 

sui  ad  oppugnationem  Pompehet  quantum  obediens  et,  pée,  et  de  l'attachement  sincère   qu'il  avait  toujours    eu 

et  obsequens  erat.  pour  ses  intérêts. 

2.  Tum  ait  illi,  quod  Hyrcanus  et  Antipater  mississent  2.  Hyrcan    et    Antipater,    ajouta-t-il    alors,    l'ont    fait 

clam  ad  pairem  suum,  qui  venenoillum  interimeret,  inten-  empoisonner  dans  !e  dessein  de  favoriser  Pompée  contre 

dentés  auxiliari  Pompeio  adversus  tuos.  vous. 

?.   Accersitum  ergo  Antipatrum  sciscitatus  est    Caesar  5.  César  ayant  donc  fait  venir  Antipater  en  sa  présence 

de    re  :  cui   respondit   Antipater  :  Profecto    obsequebar  lui  demanda  ce  qu'il  avait  à  dire  de  cette  accusation,  et 

Pompeio,  quoniam  rerum  tune  potiebatur,  et  mihi  bene-  Antipater    lui    répondit  en    ces  termes  :   Il  est  vrai   que 

faciebat  :  j'étais  alors  dans  les  intérêts  de  Pompée,  parce  que  je  le 

voyais  maître  des  affaires,  et  que  même  il  me  faisait  du 
bien. 

.4.  At   non    gressi    prœlia   nunc    cum    ^gyptiis   causa  4.  Mais  si,  depuis,  j'ai  combattu  contre  les  Egyptiens, 

Pompeii,  qui  jam  factis    concessit,  neque   sustinui  ardua  et  si,  pour  les   soumettre,  je  me  suis  exposé   à   tant   de 

in  debellandis  iis,atque  restituendis  obedientiae  Pompeii:  périls  et  de  travaux,  ce   n'était    point  pour   l'amour   de 

verum  hoc  feci,  obsequens  Cassari,  et  ut  restituerem  eos  Pompée,  qui    ne   vivait    plus,    mais    pour   vous    seul,  6 

ipsius  obedentiae.  César,  et  pour  mettre  ces  peuples  dans  votre  obéissance. 

ç,  Dein  aperuit  Antipater  caput  et  manus,  ac  ait  :  Hase  ç.  Découvrant  ensuite  sa  tète  et  ses  mains  :  Les  bles- 
vulnera  quas  sunt  in  capite  et  corpore  meo  testantur  sures  dont  je  suis  tout  couvert,  ajouta-t-il,  prouvent 
meum  amorem  erga  Cassarem,  et  obedientiam,  majores  assez  quel  est  celui  que  j'ai  servi  avec  plus  d'attache- 
esse  amore  et  obedientia  mea  erga  Pompeium,  quia  ment  et  de  fidélité,  puisque  jamais  je  n'ai  fait  pour 
nequaquam  me  opposui  in  diebus  Pompeii  iis  quibus  Pompée  ce  que  j'ai  fait  pour  César, 
memet  opposui  in  diebus  Csesaris  régis. 

6.  Et  ait  illi  Caesar  :  Pax  tibi,  fortissime  Judaeorum,  et  f>.  César  lui  dit  alors  :  O  le  plus  courageux  de  tous  les 
omnibus  amicis  tuis  ;  vere  enim  ostendisti  fortitudinem,  Juifs  !  Soyez  en  paix,  vous  et  tous  vos  amis  ;  car  vous 
magnanimitatem,  obedientiam  et  amorem  tuum  erga  nos.  avez  certainement   fait    éclater    en    notre    faveur,    votre 

force,  votre  courage,  votre  soumission  et  votre  zèle. 

7.  Et  auctus  est  Caesar  exinde  amore  erga  Antipatrum,  7.  Depuis  ce  temps-là,  César  se  sentit  encore  plus 
illumque  prastulit  universis  suis,  ac  principem  prasposuit  d'inclination  qu'auparavant  pour  Antipater.  Il  l'éleva 
suis  exercitibus.  et  in  Persarum  regionem  secum  duxit  :  au-dessus  de  tous  les  grands  de  l'empire,  le  fit  généra- 
viditque  ex  ejus  fortitudine  et  rébus  bene  gestis  quod  lissime  de  toutes  ses  troupes,  le  mena  en  Perse  avec 
magis  sibi  insinuavit  ejus  desiderium  et  amorem  :  lui  ;  et,  sentant   croître  de  plus  en   plus  la  passion  qu'il 

avait   pour  un  homme  que    la  valeur  et  les  victoires  lui 
rendaient  si  cher, 

8.  Demum  reduxit  illum  in  regionem  Judae  optime  8.  Il  le  ramena  en  Judée  après  l'avoir  comblé  d'hon- 
cohonestatum,  et  dominio  cumulatum.  Et  profectus  est  neurs  et  de  puissance.  De  là,  César  partit  pour  Rome, 
Caesar  Romain  directis  rébus  Hyrcani,  qui  construxit  ayant  mis  ordre  auparavant  aux  affaires  d'Hyrcan,  qui 
meenia  civitatis  sanctae,et  sese  gessit  erga  populum  opti-  releva  les  murailles  de  Jérusalem  et  gouverna  le  peuple 
mis  moribus  :  avec  beaucoup  de  douceur. 

0.  Erat  enim   bonus,  virtutibus  praeditus,  optimœ  vitae,  9.  Ce   prince  était    bon,  vertueux,  d'une  vie    irrépro- 

verumtamen  ejus  in  bellis  impotentia  omnibus  nota  erat.  chable,  mais   d'une   incapacité  pour   la   guerre  qui  était 

connue  de  tout  le  monde. 


CHAPITRE  XI. IV 


i.  Misit  ergo  Hyrcanus  ad  Cœsarem  legatos  cum 
epistola  de  renovatione  fœderis  quod  erat  inter  se  et 
Romanos. 

2.  Pervenientes  itaque  legâtos  Hyrcani  ad  Cœsarem 
jussit  coram  sedere  :  quod  quidem  nemini  fecerat  lega- 
torum  regum,  qui  ad  eum  adventabant. 

;.  Insuper  benefecit  eis  expediens  negotia  eorum,  jus- 
sitque  responsura  dari  epistolœ  Hyrcani  :  cui  scripsit  et 
fœdus,  cujus  hoc  est  exemplar. 

4.  A  Cœsare  rege  regum  principibus  Romanorum  qui 
sunt  Tyri,  et  Sydoni,  pax  vobis.  Notum  facio  vobis,  quod 
epistolœ  Hyrcani  filii  .  Alexandri,  regum  Judœ,  ad  me 
perlatas  sint. 

5.  Quarum  adventu  sum  lœtatus  ob  tenorem  benevo- 
lentiœ  quam  ipse  et  populus  ejus  erga  me  Romano- 
rucnque  gentem  habere  ferunt. 

6.  Et  quidem  veritatem  verborum  ejus  ex  eo  confir- 
mavi,  quod  misisset  Antipatrum  equitem  Judœorum,  et 
equitatum  eorum  cum  Mithridate  amico  meo  :  quem 
oppugnavere  cohortes  /Egyptiorum,  liberavitque  Mithri- 
datem  a  morte, 

t.  Expugnata  nobis  >Egypti  regione,  atque  reductis 
yEgyptiis  ad  Romanorum  obedientiam,  et  profectus 
est  mecura  in  regionem  Persarum,  contendens  gratuitus 
miles. 

8.  Et  idcirco  prœcipio  ut  déférant  omnes  incolœ  orae 
maritimœ  a  Gaza  usque  ad  Sydonem,  omnia  quœ  debent 
nobis  tributa,  singulis  annis  in  domum  Dei  magni,  quas 
est  in  Jérusalem,  prœter  Sidonios  cives  : 

9.  Nam  hi  déférant  ad  illam  juxta  statutum  tributi 
eorum,  viginti  millia  vibarum  tritici,  et  quingentas  quin- 
quaginta  vibas  singulis  annis. 

10.  Prœcipio  quoque  restitui  Laodiceam,  et  ditiones 
ejus,  ac  omnia  quas  erant  in  manu  regum  Judœ  usque  ad 
ripam  Euphratis,  cum  iis  omnibus  quœ  expugnaverant 
Hasmonœi  a  transitu  Jordanis,  Hyrcano  filio  Alexandri 
régis  Judœ. 

11.  Nam  omnia  hœc  expugnaverant  patres  ejus  gladio 
suo,  at  injuste  alienaverat  et  Pompeius  tempore  Aristo- 
buli  :  quœ  ex  nunc  et  in  posterum  Hyrcano  sunto,  atque 
succedentibus  régis  Judœ. 

12.  Fœdus  autem  hoc  meum  est  pro  me  ac  omni  rege 
de  regibus  Romanorum  post  me  : 

1?.  Quicumque  ergo  dissolverit  quidquam  illius  perdat 
illum  Deus  gladio,  et  deseratur  domus  ejus, et  provincia, 
atque  excidatur. 

14.  Cum  autem  legeritis  epistolatn  hanc  meam,  descri- 
bite  eam  insisis  characteribus  in  tabulis  aeneis  lingua 
Romanorum,  et  characteribus  eorum,  et  lingua  Grœco- 
rum,  et  characteribus  eorum  : 

15.  Et  ponite  tabulas  in  locis  editis  templorum,  quœ 
sunt  Tyri  et  Sydoni,  ut  videre  eos  queat  unusquisque, 
atque  intelligat  quœ  constitui  Hyrcano,  et  Judœis. 


1.  Hyrcan  envoya  donc  à  César  des  ambassadeurs  avec 
les  lettres  touchant  le  renouvellement  de  l'alliance  faite 
entre  lui  et  les  Romains. 

2.  Lorsqu'ils  furent  arrivés  devant  César,  ce  prince  les 
fit  asseoir  en  sa  présence  ;  honneur  qu'il  n'avait  jamais 
accordé  à  aucun  des  ambassadeurs  des  rois  étrangers. 

;.  Il  eut  encore  la  bonté  d'expédier  leur  affaire,  fit 
répondre  à  le  lettre  d'Hyrcan  et  renouvela  avec  lui 
l'alliance,  dont  voici  la  copie. 

4.  César,  roi  des  rois,  aux  princes  de  l'empire  romain, 
qui  sont  à  Tyr  et  à  Sidon,  salut.  Je  vous  fais  savoir  que 
j'ai  reçu  des  lettres  d'Hyrcan,  fils  d'Alexandre,  tous  deux 
rois  des  Juifs. 

<,.  J'y  ai  vu  avec  joie  les  témoignages  de  la  bonne 
volonté  qu'Hyrcan  et  son  peuple  paraissent  avoir  pour 
ma  personne  et  pour  toute  la  nation  des  Romains. 

6.  J'ai  même  reconnu  combien  les  discours  d'Hyrcan 
sont  sincères,  en  ce  qu'ayant  envoyé  Antipater  à  la  tête 
de  la  cavalerie  des  Juifs  pour  secourir  Mithridate,  mon 
allié,  ce  général  a  soutenu  seul  tout  l'effort  des  Égyp- 
tiens, a  garanti  Mithridate  de  la  mort, 

7.  A  conquis  pour  nous  l'Egypte  entière,  et,  après 
l'avoir  remise  sous  le  joug  romain,  est  passé  en  Perse 
avec  moi  sans  rien  exiger  de  tous  ces  services. 

8.  C'est  pourquoi  j'ordonne  que  tous  les  peuples  de  la 
côte  maritime,  depuis  Gaza  jusqu'à  Sidon,  portent  à 
l'auguste  temple  de  Jérusalem  les  tributs  qu'ils  nous 
paient  tous  les  ans,  excepté  les  citoyens  de  cette  der- 
nière ville. 

9.  Car  les  Sidoniens  y  enverront  vingt  mille  mesures 
de  froment,  et,  tous  les  ans,  cinq  cent  cinquante  mesures, 
selon  la  quantité  des  tributs  qu'on  leur  a  imposés. 

10.  Je  veux  encore  qu'on  restitue  à  Hyrcan,  fils 
d'Alexandre,  roi  de  Judée,  Laodicée  avec  ses  dépen- 
dances, et  tout  ce  qui  était  sous  la  domination  des  rois 
de  Judée,  jusqu'à  l'Euphrale  avec  tous  les  pays  dont  les 
Asmonéens  s'étaient  rendus  maîtres  depuis  qu'ils  avaient 
passé  le  Jourdain, 

11.  Car  leurs  pères  les  avaient  conquis  les  armes  à  la 
main,  et  Pompée  les  avait  enlevés  injustement  à  Aristo- 
bule.  Qu'ils  soient  donc,  dès  à  présent  et  dans  la  suite 
à  Hyrcan  et  à  tous  les  rois  ses  successeurs. 

12.  L'alliance  que  je  fais  aujourd'hui  est  pour  moi  et 
pour  tous  les  rois  qui  gouverneront  après  moi  l'empire 
romain. 

ij.  Quiconque  donc  la  rompra,  ou  la  violera  en  quel- 
que chose  que  ce  soit,  que  Dieu  le  fasse  périr  par  l'épée, 
que  sa  maison  et  son  héritage  deviennent  désertset  enfin 
entièrement  détruits. 

14.  Après  que  vous  aurez  lu  la  lettre  que  je  vous  écris, 
faites-la  graver  sur  des  tables  d'airain,  en  grec  et  en 
latin,  et  en  caractères  de  ces  deux  langues. 

15.  Vous  mettrez  ensuite  ces  tables  dans  les  endroits 
élevés  des  temples  de  Tyr  et  de  Sidon,  afin  que  chacun 
les  puisse  voir  et  s'instruire  de  ce  que  j'ai  ordonné  en 
faveur  d'Hyrcan  et  des  Juifs. 


CHAPITRE    XLV 


i.  Erant  cum  Cœsar  duo  viri  de  amicis   Pompei    quo-  i.  César  tenait  auprès  de  sa  personne    deux    hommes 

rum  unus  dicebar  Cassius,  alter  vero  Brutus  ;  qui  moliti  qui  avaient  été  amis  de   Pompée  ;    l'un    s'appelait    Cas- 

sunt  occidere  Caesarem.  sius  et  l'autre  Brutus,  et  ils  conjurèrent  ensemble  la  mort 

de  César. 

2.  Quare  sese  absconderunt  in    templo,  quod  sibi    Ro-  2.  Sur  le  point  d'exécuter  leur  entreprise,   ils    se    ca- 

mas  dicaverat  ad  orandum.  Ad  qund    ergo    cum    perve-  chèrent  dans  le    temple   qu'il   avait    dédié    dans    Rome 

nisset  securus,  tutus,  ac  minime  sibi  cavens,  irruerunt  in  pour  y  prier  :  ce  prince  y    étant   entré    sans    crainte   et 

eum,  atque  occiderunt.  avec  sa  confiance  ordinaire,  ils  se  jetèrent  sur   lui    et    le 

tuèrent. 

j.  Et  potitus  est  Cassius    regno,  coegitque    exercitum  j.  Cassius,  après  s'être  ainsi  emparé  de    la    couronne, 

magnum,  et  transfretavit  mare,  timens  Caesarianos,si  Ro-  mit  sur  pied  une  armée  nombreuse  ;  mais,    craignant    le 

mas  degisset.  ressentiment  de  ceux  qui  étaient    attachés    au    parti    de 

César,  s'il  restait  dans  Rome,  il  passa  la  mer, 

4.  Et  profectus  est  in  terram  Asiae,  et   vastavit    eam  :  4.  Et  il  entra  dans  l'Asie,  et  la   mit    au  pillage;    étant 

inde  perrexit  in  regionem  Judas  :  et  voluit  Antipater  op-  venu  de  là  en  Judée,  Antipater    voulut    lui    faire    résis- 

pugnare  illum,  at  videns  impares  sibi  esse  vires,    pacem  tance  ;  mais,  se  voyant  inférieur  en  troupes,  il  fit  la  paix 

cum  il lo  inivit.  Et  mulctavit  Cassius  regionem  Judae  s"îp-  avec  Cassius,  qui  obligea  le  pays  à  lui  donner  sept  cents 

tingentis  auri  talentis.  talents  d'or. 

<.   Et  sese  obstrinxit  Antipater  fidejussor  pro  pecunia,  Ç.  Antipater  s'étant  rendu  garant   de  cette  somme, or- 

prœcepitque  Herodi  filio  suo    eam    cogère    de   regione  donna  à  Hérode,  son  fils,  de  la  lever  sur    les    peuples 

Judae,  et    déferre  Cassio,  de  Judée   et  de  la  remettre  entre  les  mains  de    Cassius, 

6.  Qui  eam  accipiens  profectus  est  in  regionem  Mace-  6.  Qui,  après  l'avoir  reçue,  se  retira  en  Macédoine, où 

donum,  ibique  moratus  timens  Romanos.  il  resta  par  la  crainte  qu'il  avait  des  Romains. 


CHAPITRE    XLVI 


i.  Jam  inicrant  principes  Judje  consilium  ut  occidcrent 
Antipatrum,  eaque  de  causa  immiserant  in  illum  clanculo 
virum  qui  dicebatur    Malchia. 

2.  Intentaviique  Malchia,  sed  in  longum  protractum 
est  ;  percrebuitque  fania  usque  ad  Antipatrum,  qui  ex- 
petivit  Malchiam  ut  illum   interficeret. 

5.  At  sese  purgavit  Malchia  apud  Antipatrum  de  iis 
quœ  de  se  ad  illum  delata  erant,  juravitque  ei  inanem 
esse  famam  :  cui  credidit  Antipater  remota  a  se  suspec- 
tione. 

4.  At  Malchia  plurima  oblata  pecunia  pincernae  Hyr- 
cani,  statuit  cum  illo  venenum  prsebere  Antipatro  dum 
adesset  in  triclinio  potus,  prsesente  rege. 

<,.  Et  prasstitit  id  pincerna,  mortuusque  est  rex  Anti- 
pater eadem  die  :  nec  id  fuit  ex  Hyrcani  consilio  aut 
scientia. 

6.  Mortuo  autem  Antipatro,  substituit  Hyrcanus  Mal- 
chiam In  locum  ejus. 


1.  Les  princes  de  Judée,  ayant  déjà  formé  entre  eux 
le  dessein  de  tuer  Antipater,  chargèrent  secrètement  un 
nommé  Malchia  du  soin  d'exécuter  ce  complot. 

2.  Malchia  n'attendait  qu'une  occasion  favorable  ;  mais 
la  chose  tirant  en  longueur,  Antipater  fut  informé  de  ce 
qui  se  tramait  contre  sa  personne  et  voulut  faire  mourir 
Malchia. 

j.  Mais  cet  homme  s'étant  justifié  auprès  de  lui  et 
ayant  juré  que  tout  ce  qu'on  lui  avait  rapporté  contre  lui 
était  faux,  Antipater  le  crut  et  cessa  de  le    soupçonner. 

4.  Cependant  Malchia  gagna  à  force  d'argent  l'échan- 
son  d'Hyrcan,  et  convint  avec  lui  qu'il  mettrait  du  poi- 
f.on  dans  la  coupe  d'Antipater  lorsqu'il  serait  à  boire 
avec  le  roi. 

5.  L'échanson  tint  parole,  et  le  roi  Antipater  mourut 
ce  jour-là  même,  sans  qu'Hyrcan  eût  été  averti  de  cet 
attentat,  ni  qu'il  l'eût  conseillé. 

6.  Antipater  étant  mort,  Hyrcan  mit  Malchia  en  !a 
place  de  ce  prince. 


CHAPITRE  XLV1I 


1.  Cum  itaque  certior  factus  esset  Herodes  filius  An-  i.  Hérode,  fi!s  d'Antipater,  instruit  que  Malchia  était 
tipatri,  Malchiam  occidisse  patrem  suum,  deliberavit  ir-  l'auteur  de  la  mort  de  son  père,  résolut  d'aller  sur  le 
ruere  in  Malchiam,  prohibuitque  eum  ("rater  ejus,consu-  champ  lui  ôter  la  vie  ;  mais  son  frère  l'en  détourna  lui 
lens  ut  astu  interficeretur.  conseillant  de  s'en  défaire  adroitement. 

2.  Adivitque  Herodes  Cassium,  et  indicavit  ei  quod  2.  Hérode  vint  donc  trouver  Cassius  et  l'informa  de 
fecerat  Malchia,  cui  ait:  Cum  profectus  fuero  Tyrum,et  l'action  de  Malchia.  Cassius  lui  dit  :  Quand  je  serai  à 
fuerit  apud  me  Hyrcanus  et  cum  eo  Malchia,  irrue  in  Tyr  et  que  Malchia  sera  entré  chez  moi  avec  Hyrcan,  je- 
illum,  et  occide.  tez-vous  sur  lui  et  tuez-le. 

j.  Cum  ergo  profectus  esset  Cassius  Tyrum,  et  perre-  i.  Cassius  étant  donc  arrivé  à  Tyr,  Hyrcan  et  Malchia 

xisset  ad  illum  Hyrcanus  habens  secum  Malchiam,  atque  se  rendirent  au  festin  auquel    Cassius    les    avait    invités 

adstitissent  simul    coram    Cassio    in    convivio    quodam,  avec  tous  ses  amis, 
ad  quod   eos   invitaverat   Cassius,  cum    omnibus    amicis 
suis  : 

4.  (Jam  autem  mandaverat  Cassius  pueris  suis  prass-  4.  Cassius  avait  ordonné  auparavant  à  ses  gens  de  faire 
tare  quicquid  prascepturus  erat  eis  Herodes)  adfuitquo-  tout  ce  qu'Hérode  leur  dirait.  Hérode  s'y  trouva  aussi 
que  Herodes  cum  fratre  suo  imer  sodales  Hyrcani,  et  avec  son  frère  parmi  les  amis  d'Hyrcan.et  convint  avec 
convenit  Herodes  cum  quibusdam  pueris  de  occidendo  quelques-uns  des  serviteurs  qu'à  un  signal  qu'il  leur  fe- 
Malchia,  dato  signo,  oculorum  nutu.  rait  des  yeux  ils  tueraient   Malchia. 

5.  Cum  ergo  comedisset  Hyrcanus,  atque  bibisset  cum  5.  Hyrcan  et  ses  amis  ayant  bu  et  mangé,  ils  s'endor- 
amicis,  dormierunt  tempore  meridiano  :  quibus  exper-  mirent  tous  sur  le  midi,  et  lorsqu'ils  se  furent  réveillés, 
rectis  a  somno,  jussit  Hyrcanus  cuidam  sternere  sibi  Hyrcan  fit  dresser  un  lit  à  l'air  devant  la  salle  du  festin 
stratum  sub  dio  ante  januam  triclinii  in  quo  dormierant  :  où  ils  s'étaient  endormis  ;  il  s'y  reposa  et  y  fit  asseoir 
et  sedit  ipse,  prascepitque  sedere  secum  Malchiam,    se-  auprès  de  lui,  Malchia,  Hérode  et  son  frère. 

dere  quoque  fecit  Herodem,  et  fratrem  illius. 

6.  Adstiteruntque  pueri  Cassii  Hyrcano,  quibus  in-  6.  Les  serviteurs  de  Cassius  se  tenaient  debout  auprès 
nuit  Herodes  contra  Malchiam,  qui  irruentes  in  illum  d'Hyrcan,  et  au  signal  que  leur  donna  Hérode,  ils  se  je- 
statim  occiderunt  :  et  timuit  Hyrcanus  valde  et  sincopem  tarent  sur  Malchia  et  le  tuèrent  :  Hyrcan  fut  saisi  de 
incidit.  frayeur  et  perdit  connaissance. 

7.  Cum  autem  decessissent  pueri  Cassii,  et  sublatus  es-  ".Cependant  les  gens  de  Cassius  se  retirèrent  et 
set  Malchia  caesus,  rediit  ad  se  Hyrcanus  sciscitatusque  emportèrent  le  corps  de  Malchia.  Hyrcan  ayant  re- 
est  ab  Hérode  causam  necis  Malchiœ.  prit  ses  sens  demanda  à  Hérode  pourquoi  l'on  avait  tué 

Malchia. 

8.  Respondit  autem  Herodes  :  Penitus  ignoro,  nec  8.  Et  Hérode  lui  ayant  répondu  qu'il  en  ignorait  en- 
scio  rei  causam,  et  tacuit  Hyrcanus,  nec  quicquam  de  tièremenl  la  raison,  Hyrcan  se  tut  et  n'en  parla  pas  da- 
hoc  iteravit.  vantage. 

9.  Et  profectus  est  Cassius  in  Macedoniam  obviam  Oc-  9.  Cassius  partit  ensuite  poui  la  Macédoine,  où  il  vint 
taviano  filio  fratris  Caesaris,  et  Antonio  duci  miliiiae  ejus:  chercher  Octavien,  fils  du  frère  deCésar,  et  Antoine,  le 
egressi  enim  erant  Roma  cum  exercitu  magno  inquiren-  général  de  ses  troupes;  car  ils  étaient  partis  de  Rome 
tes  Cassium.  et  menaient  contre  Cassius  une  armée   formidable. 


CHAPITRE  XLVIII 


i.  Cum  profectus  esset  Octavianus  in  Macedoniam, 
obviam  exivit  ei  Cassius,  et  conflixit  cum  eo,  fugatusque 
est  Cassius,  quem  persequens  Octavianus  devicit,  atque 
occidit  : 

2.  Regnoque  potitus  est  Octavianus  loco  'patrui  sui 
Cassaris,  et  nuncupatus  est  quoque  Cassar  nomine 
patrui. 

j.  Innotescente  itaque  Hyrcano  casde  Cassii,  misit 
legatos  cum  muncribus,  opibus,  ac  gemmis  Augusto  et 
Antonio;  scripsitque  ei  rogans  de  renovatione  fœderis 
quod  cum  Caesare  habebat, 

4.  Et  ut  prasciperet  dimitti  omnes  qui  sunt  in  regno 
eju:  captivi  de  Judas, et  qui  captivi  ducti  fuerant  in  diebus 
Cassii, 

Ç.  Et  ut  permitteret  omnibus  Judasis  qui  sunt  in 
regione  Grascorum,  et  terra  Asias,  reverti  in  regionem 
Judos,  nullo  requisito  prastio,  aut  redemptione,  vel  obice 
a  quoquam  inferendo. 

6.  Pervenientibus  itaque  cum  epistola  et  muneribus 
Hyrcani  legatis  ad  Augustum,  legatos  honoravit,  et 
suscepit  munera,  acquievitque  omnibus  quas  petierat 
Hyrcanus,  scribens  ei  epistolam,  cujus  hoc  est  exemplar. 

7.  Ab  Augusto  rege  regum,  et  Antonio  collega  ejus, 
Hyrcano  régi  Judas,  salus  tibi.  Jam  pervenit  epistola  tua, 
qua  gavisi  sumus,  et  misimus  ea  quas  optabas  de  renova- 
tione fœderis,  et  scripturas,  ad  universas  provincins  nos- 
tras  quas  sunt  a  regione  Indiarum  usque  ad  oceanum 
mare  occiduum. 

8.  Quod  autem  nobis  in  mora  fuit,  quin  citius  scribe- 
remus  ad  te  de  renovatione  fœderis,  extitit  nostra 
occupatio  in  expugnando  Cassio  fornicario  tyranno,  qui 
impie  agens  in  lumen  orbis  terrarum  Cassarem,  occidit 
illum. 

9.  Unde  totis  viribus  confliximus  contra  eum,  donec 
victorem  nos  reddidit  Deusoptimus  maximus,  et  incedere 
illum  fecit  in  manus  nostras,  quem  occidimus. 

10.  Occidimus  quoque  Brutum  collegam  ejus,  et 
exemimus  regionem  Asias  de  manu  ejus,  postquam  vasta- 
verat  illam,  et  incolas  exterminaverat. 

11.  Nec  stetit  fcederi  ulli,  nec  templum  ullum  honora- 
vit, nec  jus  reddidit  oppresso,  nec  miseratus  est  Judaso, 
vel  cuipiam  de  subditis  nostris  : 

12.  Sed  multa  impie  egit  cum  suis  mala  cunctis  per 
oppressionem,  et  tyrannidem  ;  quamobrem  convertit 
Deus  malitiam  eorum  super  eos,  tradens  illos  cum  con- 
fœderatis. 

1;.  Gaude  ergo  nunc,  o  rex  Hyrcane,  et  casteri 
Judasi,  et  incolas  regionis  sanctas,  ac  sacerdotes  qui 
sunt  in  templo  Jérusalem  :  suscipiantque  munus,  quod 
misimus  ad  templum  gloriosissimum,et  orent  pro  Augusto 
semper. 

14.  Scripsimus  prœterea  omnibus  nostris  provinciis,  ne 
remaneat  in  ulla  earum  quispiam  de  Judasis,  servus  sit 
ille,  vel  ancilla,  sed  dimittantur  omnes  sine  pretio  et  sine 
redemptione  : 

iç.  Et  ne  impediatur  a  quopiam  rediens  in  regionem 
Judas,  et  hoc  ex  mandato  Augusti,  et  Antonii  quoque 
ejus  collega. 


I.  Octavien  étant  entré  en  Macédoine,  Cassius  mar- 
cha à  sa  rencontre  et  ils  en  vinrent  aux  mains.  Cassius 
fut  mis  en  fuite,  et  Octavien  l'ayant  poursuivi  le  défit 
entièrement  et  le  tua. 

'..  Octavien,  par  cette  victoire,  devint  tranquille  pos- 
sesseur de  la  couronne  de  César,  son  oncle,  et  prit, 
comme  lui,  le  nom  de  César. 

j.  Cependant  Hyrcan  ayant  appris  la  mort  de  Cassius, 
envoya  à  Auguste  et  à  Antoine  des  ambassadeurs  char- 
gés de  riches  présents  en  or  et  en  pierreries.  Il  écrivit 
aussi  à  Auguste,  le  priant  de  renouveler  l'alliance  faite 
entre  lui  et  César, 

4.  D'ordonner  aussi  qu'on  mit  en  liberté  tous  ceux 
de  Juda  qui  avaient  été  faits  prisonniers  par  Cassius,  et 
qui  étaient  encore  retenus  dans  son  royaume, 

5.  Et  de  permettre  enfin  à  tous  les  Juifs  qui  étaient 
en  Grèce  et  en  Asie  de  retourner  en  Judée,  sans  qu'on 
pût  exiger  d'eux  aucune  rançon,  ni  apporter  aucun 
obstacle  à  leur  retour. 

6.  Les  ambassadeurs  d'Hyrcan  s'étant  présentés  devant 
Auguste  avec  la  lettre  et  les  présents  de  leur  maître, 
ce  prince  les  reçut  avec  beaucoup  d'honneur,  accepta 
leurs  présents,  et,  ayant  accordé  à  Hyrcan  tout  ce  qu'il 
lui  demandait.il  lui  écrivit  une  lettre  dontvoici  la  teneur  : 

7.  Auguste,  roi  des  Romains,  et  Antoine,  son  collègue 
à  l'empire, à  Hyrcan,  roi  de  Judée  :  Nous  vous  saluons. 
Nous  avons  reçu  avec  plaisir  !a  lettre  que  vous  nous 
avez  écrite,  et  nous  avons  fait  publier  dans  toute  l'éten- 
due de  l'empire,  depuis  l'Inde  jusqu'à  la  mer  d'Occident, 

8.  L'alliance  que  vous  avez  souhaité  de  renouveler 
avec  nous.  Nous  vous  eussions  même  écrit  plus  tôt  sur 
ce  sujet,  si  nous  n'avions  point  été  occupé  à  poursuivre 
Cassius,  cet  infâme  tyran,  qui,  portant  son  impiété  jus- 
que sur  César,  l'empereur  de  toute  la  terre,  l'a  tué  de 
ses  propres  mains. 

9.  C'est  pourquoi  nous  lui  avons  livré  de  grands  com- 
bats; et  le  Dieu  tout  puissant,  après  nous  avoir  fait 
sortir  victorieux,  l'a  fait  enfin  tomber  sous  le  tranchant 
de  notre  épée.   • 

10.  Brutus  son  collègue  a  eu  le  même  sort,  et  nous 
avons  recouvré  l'Asie,  dont  il  avait  ravagé  les  provinces 
et  tué  les  habitants. 

II.  Il  n'a  tenu  aucun  compte  des  alliances,  n'a  res- 
pecté aucun  temple,  n'a  point  rendu  justice  à  l'opprimé, 
n'a  eu  pitié  ni  des  Juifs,  ni  d'aucuns  de  nos  sujets  ; 

12.  Et,  par  une  horrible  impiété,  lui  et  les  siens  ont 
causé  mille  maux  dans  l'empire,  et  l'ont  asservi  à  une 
affreuse  tyrannie  :  mais  Dieu  a  fait  retomber  sur  eux 
leur  propre  malice,  et  les  a  livrés  entre  nos  mains. 

15.  Que  le  roi  Hyrcan,  tous  les  Juifs,  les  peuples  de 
la  terre  Sainte,  et  les  prêtres  qui  sont  dans  le  temple  de 
Jérusalem,  se  réjouissent  donc  ;  qu'ils  reçoivent  les 
offrandes  que  nous  avons  envoyées  à  l'auguste  temple  de 
Jérusalem,  et  qu'ils  y  offrent  sans  cesse  leurs  prières 
pour  nous. 

14.  Nous  avons  de  plus  ordonné  dans  tous  les  lieux  de 
notre  empire  qu'on  n'y  retînt  aucun  Juif,  soit  esclave, 
soit  servante;  mais  qu'ils  fussent  tous  renvoyés  gratui- 
tement et  sans  rançon, 

15.  Et  que  personne  ne  les  empêchât,  de  retourner 
en  Judée,  et  cela  par  ordre  d'Auguste  et  d'Antoine  son 
collègue. 


334  IV.  —  MACCABÉES.  —  XLVIII.  -  INTRIGUES  JUIVES 

16.  Ad  hase  scripsit  amicis  suis,  qui  sunt  Tyri,  et  16.  Auguste  écrivit  encore  à  ses  amis  qui  étaient  à 
Sydoni,  aliisque  locis,  restitui  quidquid  abstulerant  a  Tyr,  à  Sidon,  et  dans  les  autres  lieux,  qu'on  remît  les 
regione  Judae  in  diebus  Cassii  fornicarii,  Juifs  en  possession  de  tout  ce   que  l'infâme  Cassius  leur 

avait  enlevé  en  Judée  ; 

17.  Et  tractare  Judaeos  pacirice,  nec  in  quoquam  illis  17.  Qu'on  les  traitât  avec  douceur;  qu'on  ne  les 
opponi,  ac  facere  illis  quidquid  decreverat  Cassar  insuo  inquiétât  en  rien,  et  qu'on  exécutât  fidèlement  les  traités 
fcederecum  ipsis.  d'alliance  que  César  avait  faits  avec  eux. 

18.  Antonius  vero  moratus  est  in  regione  Syriae,  ad  18.  Antoine,  cependant,  s'était  arrêté  en  Syrie,  et 
quem  profecta  est  Cleopatra  regina  yEgypti,  quam  in  Cléopâtre,  reine  d'Egypte,  l'y  étant  venu  trouver,  il 
uxorem  duxit.  Erat  autem  sapiens,  artium  magicarum  et  l'épousa.  Cette  femme  était  habile,  et  avait  une  parfaite 
proprietatum  perita  :  connaissance  de  la  magie. 

19.  Quare  allexit  eum,  et  corde  ejus  adeo  potita  est,  19.  Elle  s'en  servit  pour  gagner  Antoine,  et  se  rendit 
ut  nihil  ei  omnino  inficiari  posset.  tellement  maîtresse    de    son    cœur,  qu'il  ne   lui  pouvait 

rien  cacher. 

20.  Profecti  sunt  eo  eodem  tempore  centum  viri  de  20.  En  ce  temps-là.  cent  des  principaux  Juifs  vinrent  se 
principibus  Judaeorum  ad  Antonium,  et  conquesti  suntde  plaindre  è  Antoine  d'Hérode  et  de  Phasel  son  frère, 
Herode,  et  fratreejus  Phaselo,  filiis  Antipatri,  dicentes  :  tous  deux  fils  d'Antipater,  et  lui  dirent  que  ces  deux 
Jam  potiti  sunt  omnium  rerum  Hyrcani,  nec  remanet  ei  frères  s'étaient  déjà  emparés  de  toute  l'autorité,  et 
quicquam  de  regno  nisi  nomen.  n'avaient  laissé  à  Hyrcan  que  le  nom  de  roi, 

21.  Et  hujus  rei  occultatio  index  est  captivitatis  domini  21.  Et  qu'une  marque  certaine  de  la  captivité  de  leur 
eorum.  maître  était  le  soin  qu'on  avait  pris  d'empêcher  qu'il  n'en 

fût  informé. 

22.  Cum  autem  sciscitatus  est  Antonius  ab  Hyrcano  22.  Mais  Antoine  ayant  voulu  savoir  d'Hyrcan  même 
veritatem  eorum  quas  meminerant  illi,  mendaces  decla-  la  vérité  de  cette  accusation,  Hyrcan  en  fit  voir  la  faus- 
ravit  eos  Hyrcanus,  removens  ab  Herode  et  fratre  ejus  seté,  et  détruisit  les  soupçons  qu'on  lui  avait  (ait  conce- 
quod  eis  tribuerant.  voir  contre  Herode  et  son  frère. 

2j.  Et  la?tatus  est  his  Antonius;  propensus  quippe  erat  2j.  Antoine  fut  très  aise  d'avoir   été    désabusé,   parce 

in  eos,  atque    eos    diligebat.    Conquesti    praeterea  sunt  qu'il  aimait  naturellement    ces    deux    frères.    Il    se  pré- 

apud  eum  alii    de  Herode,  et    fratre  ejus  alio  tempore,  senta  dans     la    suite  de    nouveaux    accusateurs    contre 

cum  esset  Tyri.  Herode  et  Phasel,  dans  le  temps  qu'Antoine  était  à  Tyr. 

24.  Quorum  non  solum  non  admisit  verba,  sed  occidit  24.  Mais  Antoine,    bien    loin  de   les    écouter,  en  cori- 

quosdam,  reliquos  vero  in   carcerem  detrusit  :  exaltavit-  damna  quelques-uns  à  mort,  et    fit  mettre  les  autres    en 

que  dignitatem  Herodiset  fratris  ejus,  ipsis  benefaciens,  prison.  Il  releva  même    la   dignité  d'Hérode  et  celle  de 

remisitque  in  Jérusalem  magno  cum  honore.  son  frère,'et  les  renvoya  à  Jérusalem  comblés  d'honneurs 

et  de  bienfaits. 

2;.    Antonius    vero    pergens   in     Persarum    regionem  25.  Antoine  étant  ensuite  entré  dans  la  Perse,  il  en  fit 

debellavit  eos,  atque  devicit,  et  Romam  reversus  est.  la  conquête,  et  revint  à  Rome. 


CHAPITRE  XLIX 


i.  Cum  factus  est  Augustus  et  Antonius  Romae,  abiit 
Antigonus  ad  regem  Persarum,  et  promisit  ei  mille 
talenta  auri  signata,  et  octinginta  puellas  de  virginibus 
filiarum  Judas,  et  principum  eorum,  speciosas,  atque 
sapientes, 

2.  Si  mitteret  cum  eo  ducem  ducentem  exercitum 
magnum  in  Jérusalem,  et  prasciperet  ei  ut  illum  consti- 
tueret  regem  super  Judam,  et"  Hyrcanum  patruum  ejus 
caperet,  et  occideret  Herodem,  ac  fratrem  illius. 

5.  Cui  acquiescens,  misit  cum  eo  ducem  cum  exercitu 
magno,  profectique  sunt  donec  venerunt  in  terram 
Syrias,  et  occiderunt  amicum  Antonii,  et  aliquos  de  viris 
Romanorum,  qui  ibi  divertebant. 

4.  Inde  profecti  sunt  in  civitatem  sanctam  simulantes 
securitatem  et  pacem,  et  quod  Antigonus  venisset  tan- 
tum  ut  oraret  in  sanctuario,  et  rediret  ad  suos. 

5.  Et  ingressi  sunt  civitatem.,  in  qua  cum  facti  essent, 
deceperunt,  cœperuntque  occidere  homines  et  depopu- 
lari  civitatem,  juxta  quod  mandaverat  eis  rex  Persarum. 

6.  Et  accurrit  Herodes,  et  viri  ejus  ad  custodiendum 
palatium  Hyrcani  ;  fratrem  vero  suum  misit,  praecepitque 
custodire  viam  quee  ducit  a  mœnibus  ad  palatium. 

7.  Cum  autem  occupavisset  utrumque  locum,  elegit 
quosdam  de  suis,  et  contendit  ad  viros  Persarum  qui 
erant  in  civitate,  quem  insecutus  est  frater  illius  cum 
aliquo  numéro  suorum,  et  occiderunt  majorem  partem 
eorum  qui  erant  in  civitate  ex  Persis  :  cœteri  vero  extra 
urbem  refugeruni. 

8.  Cumque  vidisset  dux  Persarum  sibi  ex  sententia  non 
successisse,  destinavit  legatos  ad  Herodem,  et  fratrem 
ejus  de  pace  ineunda,  significans  eis  :  jam  ea  sibi  cons- 
titisse  de  eorum  virtute  et  fortitudine,  ut  prasferantur 
Antigono  : 

ç.Eaque  de  causa sepersuasurum  suis  auxiliari  Hyrcano 
potius  et  ipsis,  quam  Antigono;  suumque  votum  maxi- 
mis  confirmavit  juramentis  ;  ita  ut  lidem  adhibuerint  ei 
Hyrcanus  et  Phaselus,  non  quidem  Herodes. 


10.  Egressi  itaque  Hyrcanus  et  Phaselus  frater  Herodis 
ad  ducem  Persarum,  significarunt  ei  suam  in  ipsum  fidu- 
ciam  ;  qui  consuluit  eis  collegam  suumadire  qui  Damasci 
morabatur,  et  profecti    sunt. 

11.  Qui  cum  ad  illum  pervenissent,  honoravit  eos 
ostentavitque  se  magni  illos  facere,  atque  comiter  habuit, 
etsi  clam  jusserat,  ut  caperentur. 

12.  Ad  quos  venientes  quidam  de  magnatibus  terra; 
idipsum  indicaverunt,  consulentes  fugam  arripere,  suam 
pollicitantes  operam  pro  liberatione. 

1?.  At  isti  confisi  non  sunt,  timentes  ne  esset  machina- 
mentum  aliquid  in  se,  propterea  morati  sunt.  Cumque 
nox  ingrueret  capti  fuerunt,  Phaselus  quidem  manus  sibi 
conscivit  : 

14.  Hyrcanus  vero  catenis  fuit  devinctus,  et  praeci- 
piente  duce  régis  Persarum,  amputata  est  ipsius  auris,  ne 
esset  unquam  sacerdos,  misitque  in  Herak  ad  Persarum 
regem,  cujus  adventantis  vincula  solvi  jussit,  et  benefecit 
illi. 


1.  Auguste  et  Antoine  étant  de  retour  à  Rome,  Antigone 
vint  trouver  le  roi  de  Perse,  et  lui  promit  mille  talents 
d'or  en  espèces  avec  huit  cents  filles  juives,  belles,  spi- 
rituelles, et  des  premières  maisons  de  Judée, 

2.  S'il  voulait  ordonner  à  un  de  ses  généraux  de  le 
ramener  à  Jérusalem  avec  une  puissante  armée,  et  de  l'y 
établir  roi,  de  prendre  Hyrcan  son  oncle,  et  de  tuer 
Hérode  et  son  frère. 

?.  Le  roi  de  Perse  y  ayant  consenti,  fit  partir  avec 
Antigone  un  de  ses  généraux  à  la  tête  d'une  armée  nom- 
breuse, et,  lorsqu'ils  furent  arrivés  en  Syrie,  ils  tuèrent 
l'ami  d'Antoine,  et  quelques  Romains  qui  s'y  trouvèrent 
alors. 

4.  De  là  ils  s'avancèrent  jusqu'à  Jérusalem,  sous  une 
apparence  de  paix  et  de  bonne  intention,  feignant 
qu'Antigone  n'était  venu  que  pour  faire  sa  prière  au 
temple,  et  s'en  retourner  ensuite  vers  les  siens. 

<,.  Etant  entrés  dans  la  ville,  ils  commencèrent  à  faire 
éclater  leur  mauvais  dessein,  tuant  les  habitants,  et 
mettant  tout  au  pillage,  selon  l'ordre  que  le  roi  de  Perse 
leur  avait  donné. 

6.  Hérode  accourut  aussitôt  avec  ses  gens  pour  défen- 
dre le  palais  d'Hyrcan,  et  donna  ordre  à  son  frère  d'aller 
se  rendre  maître  du  chemin  qui  conduisait  des  murailles 
au  palais. 

7.  S'étant  donc  assuré  de  ces  deux  postes,  il  prit  quel- 
ques troupes  d'élite,  et,  suivi  de  son  frère,  il  vint  cher- 
cher les  Perses  qui  étaient  dans  la  ville  :  ils  tuèrent  la 
plus  grande  partie  des  Perses,  et  obligèrent  les  autres 
de  sortir  de  Jérusalem. 

8.  Le  général  des  Perses  voyant,  contre  son  attente, 
la  mauvaise  issue  de  cette  entreprise,  envoya  faire  des 
propositions  de  paix  à  Hérode  et  à  son  frère,  et  leur  fit 
dire  par  ses  députés  qu'il  savait  depuis  longtemps  com- 
bien ils  l'emportaient  en  force  et  en  valeur  sur  Antigone- 

9.  Et  que,  pour  cette  raison,  il  allait  persuader  à  ses 
troupes  de  s'attacher  à  eux  et  à  Hyrcan  plutôt  qu'à  Anti- 
gone. :  il  confirma  même  par  les  plus  grands  serments 
la  promesse  qu'il  leur  faisait  ;  en  sorte  que,  s'il  ne  put 
gagner  la  confiance  d'Hérode,  il  gagna  celle  d'Hyrcan  et 
de  Phasel. 

10.  Ceux-ci  s'étant  rendus  auprès  du  général  des  Per- 
ses, lui  marquèrent  la  confiance  qu'ils  avaient  en  lui  ; 
mais  le  général  leur  conseilla  d'aller  trouver  son  collè- 
gue qui  était  à  Damas.  Ils  partirent  donc, 

u.  Et  allèrent  trouver  cet  homme,  qui  les  reçut  avec 
des  marques  sensibles  d'estime  et  d'amitié,  quoiqu'il  eût 
déjà  donné  des  ordres  secrets  de  les  arrêter. 

12.  Cependant  quelques  grands  du  pays  vinrent  aver- 
tir Hyrcan  et  Phasel  des  mesures  prises  contre  eux,  et 
leur  conseillèrent  de  prendre  la  fuite,  s'offrant  même  de 
les  aider  à  se  sauver. 

1;.  Mais  ils  rejetèrent  ces  avis,  craignant  que  ce  ne  fût 
un  piège  qu'on  leur  tendît  ;  ainsi  ils  restèrent,  et  à  l'en- 
trée de  la  nuit  ils  furent  arrêtés.  Phasel  se  tua  de  ses 
propres  mains. 

14.  Pour  Hyrcan  il  fut  chargé  de  chaînes,  et  le  général 
des  Perses  lui  fit  couper  une  oreille  pour  le  rendre  à 
jamais  incapable  des  fonctions  du  sacerdoce;  il  l'envoya 
ensuite  à  Hérac  où  était  le  roi  de  Perse,  qui,  à  son  arri- 
vée,lui  ôta  ses  chaînes, et  lui  témoigna  beaucoup  debonté. 


3?6  IV.  —  MACCABÉES.  —  XLIX.  -  HABILETÉ  D'HÉRODE 

15.  Moratusque  in  Herak  cumulatus  honoribus,  donec  IÇ.  Hyrcan  y  resta  comblé  d'honneur,  jusqu'à  ce  que 
requisivit  illum  Herodes  a  rege  Persarum  :  ad  quem  Hérode  l'eût  envoyé  redemander  au  roi  de  Perse.  Et, 
remisso  acciderunt  et  quae  acciderunt.  Post  hase  profec-  depuis  son  retour  vers  Hérode,  il  lui  arriva  les  choses 
tus  est  dux  cum  Antigono  in  civitatem  sanctam  :  que  nous  verrons  dans  la  suite  :  quelque  temps  après,  le 

général  des  Perses  vint  avec  Antigone  à  la  cité  Sainte. 

16.  Et  perlata  sunt  ad  Herodem  quae  circa  Hyrcanum  16.  Hérode  ayant  su  ce  qui  s'était  passé  à  l'égard 
et  Phaselum  gestasunt;  quamobrem  sumpta  Cypn  matre  d'Hyrcan  et  de  Phasel,  prit  à  Chypre  sa  mère,  sa  femme 
ejus,  et  uxore  Marianna  fil ia  Aristobuli  et  ejus  matre  Marianne,  fille  d'Aristobulé,  et  Alexandra  la  mère  de 
Alexandra,  misit  eas  cum  equis  et  multis  impedimentis  sa  femme,  et  les  envoya  avec  une  grosse  escorte  à 
ad  Josephum  fratrero  in  montem  Sarah.  Joseph  son  frère,  qui  était  alors  sur  la  montagne  de  Sarah. 

17.  Ipse  vero  cum  exercitu  mille  virorum  lentius  profi-  17.  Pour  lui,  il  marchait  plus  lentement,  et  attendait, 
ciscebatur,  et  prasstolabatur  eos  qui  ex  Persis  illum  à  la  tête  d'une  troupe  de  mille  hommes,  ceux  des  Perses 
insequi  tentarent.  qui  auraient  la  hardiesse  de  le  poursuivre. 

18.  Et  persecutus  est  eum  dux  Persarum  cum  exercitu  18.  Cependant  le  général  des  Perses  le  suivit  avec  son 
suo,  quos   oppugnans   Herodes  superavit    atque    profii-  armée;  mais  Hérode  lui  présenta  la  bataille   et  le    défit 
gavit  :  post  haîC  persecuti  sunt  quoque  eum  viri  Antigoni,  entièrement;  il    battit    aussi    les   gens    d'Antigone    qui 
et  oppugnarunt  eum    acerrime,  quos  percussit,  occidit-  l'attaquèrent  vivement,  euil  en  tua  un  grand  nombre. 
que  ex  illis  multitudinem  plurimam, 

19.  Tum  protectus    est  in    montes  Sarah  :  invenitque  19.    S'étant    ensuite    avancé   vers    les    montagnes    de 
fratrem    suum    Josephum,    quem    f'amilias    in    tuto   loco  Sarah,  il  y  trouva  son  frère  Joseph  à  qui  il  ordonna  de 
munire,  et  ea  parare    omnia  quae    illis   necessaria  erant,  mettre  dans    un  lieu  sûr   les  personnes    qu'il    lui     avait 
jussit  :  envoyées,  et  de   leur   fournir  toutes    les  choses   néces- 
saires. 

20.  Tradiditque  eis  copiosam  pecuniam,  ut  sibi  alimenta  20.  Il  leur  laissa  même  à  tous  une  grande  quantité  d'ar- 
comparare  possent,  si  res  postularet.  gent,  afin  qu'ils  pussent  ;plus    aisément    se  procurer  les 

nourritures  dont  ils  auraient  besoin. 

21.  Et  relictis  viris  suis  cum  Josepho  fratre,  processit  21.  Ayant  donc  laissé  ses  troupes  à  son  frère  Joseph, 
ipse  cum  paucis  comitibus  in  /Egyptum,  ut  conscenso  il  vint  en  Egypte  avec  un  très  petit  nombre  de  gens, 
mari  pergeret  in  regionem  Romanorum.  dans  le  dessein  de  s'y  embarquer  pour   passer  en  Italie. 

22.  Quem  comiter  suscepit  Cleopatra,  rogavitque  22.  Cléopâtre  le  reçut  avec  amitié,  et  le  pria  de  vou- 
capescere  principatum  suae  militiœ,  atque  administratio-  loir  bien  prendre  le  commandement  de  ses  troupes,  et 
nem  omnium  rerum  suarum  :  cui  notificavit  omnino  l'administration  de  toutes  les  affaires  du  royaume,  mais 
Romam  sibi  proficiscendum  esse.  Hérode    fit   voir    à    cette    reine    qu'il   était  absolument 

nécessaire  qu'il  allât  à  Rome. 

2j.  Quae  tradidit  ei  pecuniam  et  naves  :  profectusque  2j.  Elle  lui  fournit  de   l'argent    et  des  vaisseaux  pour 

est  donec  pervenit  Romam  :  et  divertit  apud  Antonium,  ce  voyage.  Hérode   étant   arrivé    à  Rome,    alla  trouver 

narravitque    ei    quod  fecerat   Antigonus,  et  quee  egerat  Antoine,  et  l'informa   de  ce   qu'Antigone,   soutenu   de  la 

contra  Hyrcanum,  et  fratrem  suum  ope  régis  Persarum  :  faveur  du  roi  de  Perse,  avait  fait  contre  Hyrcan,  et  con- 
tre son  frère  Phasel. 

24.  Et    una  equitavit    Antonius   ad    Augustum,  et    ad  24.  Alors  ces  deux  princes  montèrent  à  cheval,  et  vin- 

senatum,  et  idipsum  illis  narravit.  rent  ensemble  en  informer  Auguste  et  le  sénat. 


CHAPITRE  L 


i.  Percipiens  Augustus,  et  senatus,  quaa  fecerat  Anti- 
gonus,  unanimi  consensu  constituerunt  Herodem  regem 
super  Judaeos,  mandantes  poni  capiti  ejus  diadema 
aureum,  et  equum  conscendere,  atque  prœeuntibus  buc- 
cinis  acclamari:  Regnavit  Herodes  super  Judaeos,  et  Jéru- 
salem civitatem  sanctam  ;  quod  quidem  faotum  est. 

2.  Et  revertens  ad  Augustum,  equitavit  Augustus, 
Antonius,  et  Herodes,  profectique  sunt  in  domum  Anto- 
n i i , qui  invitaveratsenatum  et  universos  romanos principes 
ad  convivium,  quod  paraverat  Antonius. 

i.  Qui  comederunt,  et  biberunt,  atque  gavisi  sunt  in 
Herode  gaudio  magno,  ferientes  cum  illo  fœdus  incisum 
in  tabulis  aereis,  et  collocatum  est  in  templis, 

4.  Et  inscripserunt  diem  illum  primum  regni  Hero- 
dis  ;  et  factus  est  exinde  in  aeram,  ex  qua  tempoia  notan- 
tur. 

5.  His  gestis  perrexerunt  Antonius,  et  Herodes,  per 
mare  cum  exercitu  magno  atque  copioso  ;  qui  perve- 
nientes  Anliochiam,  exercitum  diviserunt,  cujus  sumptam 
partem  duxit  Antonius  in  regionem  Persarum,  quas  est 
Herak,  et  ejus  adjacentia  : 

6.  Herodes  vero,  alia  sumpta  parte  perrexit  donec 
pervenit  Ptolemaidem.  Audiens  itaque  Antigonus,  Anto- 
nium  expeditionem  fecisse  in  regionein  Persarum,  et 
Herodem  adventasse  Ptolemaidem  ;  profectus  est  e 
domo  sancta  in  montem  Sarah  ad  capiendum  Josephum 
fratrem  Herodis,  et  eos,  qui  cum  illo  erant. 

7.  Quos  impetivit,  atque  obsedit,  et  interrupto  canali, 
aquas  ad  illos  decurrentes  intercepit  :  quare  invaluit 
sitis,  et  in  augustiam  res  eorum  redactas  sunt.  Quamo- 
brem  Josephus  decrevit  fugere,  et  familiaa  sese  Anti- 
gono  dedere,  si  Josephus  fugisset,  deliberaverant. 

8.  At  immisit  illis  Deus  copiosam  pluviam,  quae  imple- 
vit  universas  cisternas,  et  vasa  eorum  :  quare  corrobo- 
rata  sunt  corda  eorum,  et  directus  est  status,  perstititque 
Josephus  protelare  Antigonum,  et  suos  ab  arce,  nec 
obt'nere  potuerunt  de  illo  quicquam. 

9.  Herodes  vero  perrexit  in  regionem  Sarah  ad  redu- 
cendum  fratrem  suum,  et  familias,  ac  viros,  qui  cum  illo 
erant,  in  Jérusalem. 

10.  Et  invenit  Antigonum  obsidentem  fratrem  sui'm, 
in  quem  improviso  irruit  :  egressusque  est  ad  eos  Jose- 
phus, et  qui  cum  illo  erant,  et  periit  major  pars  exercitus 
Antigoni,  et  refugit  in  Jérusalem. 

11.  Quem  persecutus  est  Herodes  cum  exercitu  magno 
ex  Judaeis,  qui  ad  illum  convenerant  undique,  cum  per- 
ceperint  ipsum  rediisse,  et  auctus  est  auxiliis,  ut  minus 
indigeret  exercitu  Romanorum. 

12.  Cumergo  pervenisset  Herodes  in  civitatem  sanc- 
tam, occlusit  Antigonus  portas  ejus  in  faciem  ipsius,  et 
pugnavit  contra  eum,  misitque  ad  principes  exercitus 
Romanorum  pecuniam  copiosam,  rogans  eos  ne  opem 
ferrent  Herodi  :  qui  prasstiterunt. 

15.  Quamobrem  diu  bellum  duravit  inter  Antigonum 
et  Herodem,  nemine  eorum  socio  praevalente. 


1.  Auguste  et  le  sénat  n'eurent  pas  plus  tôt  été  infor- 
més de  la  conduite  d'Antigone,  que  d'un  commun  con- 
sentement, Us  donnèrent  à  Hérode  le  royaume  de  Judée, 
ordonnant  qu'on  lui  ceignit  la  tête  d'un  diadème  d'or, 
qu'on  le  fit  monter  sur  un  cheval,  et  qu'au  bruit  des 
trompettes  on  criât  devant  lui  :  Vive  Hérode,  roi  des  Juifs 
et  de  Jérusalem,  la  ville  sainte  !  ce  qui  fut  exécuté. 

2.  Hérode  étant  ensuite  de  retour  auprès  d'Auguste, 
ils  allèrent  ensemble  à  cheval  chez  Antoine,  qui  leur 
avait  fait  préparer  un  festin,  auquel  le  sénat  et  tous  les 
grands  de  Rome  étaient  invités. 

;.  Ils  burent  et  mangèrent,  et,  après  avoir  célébré  ce 
jour  par  toutes  sortes  de  réjouissances,  ils  contractèrent 
une  alliance  avec  Hérode  ;  elle  fut  gravée  sur  des  tables 
d'airain,  et  exposée  dans  tous  les  temples. 

4.  Ce  jour  fut  regardé  comme  le  premier  du  règne 
d'Hérode,  et  devint  dans  la  suite  une  ère  d'où  l'on  com- 
mença à  compter  les  temps. 

<,.  Après  cela,  Antoine    et    Hérode  se  mirent  en  mer 
avec  une  armée  nombreuse,  et,  étant  arrivés  à  Antioche 
ils  la  partagèrent    en  deux  corps.  Antoine    en    prit  un, 
et,  gagnant  la  Perse,  s'avança  jusqu'à  Hérac  et  aux  envi- 
rons. 

6.  Hérode,  de  son  côté,  vint  avec  l'autre  corps  à 
Ptolémaïs.  Lorsqu'Antigone  sut  qu'Antoine  avait  pris 
le  chemin  de  la  Perse,  et  qu'Hérode  était  arrivé  à 
Ptolémaïs,  il  se  rendit  de  Jérusalem  au  mont  Sarah,  dans 
le  dessein  de  prendre  Josèphe,  frère  d'Hérode,  et  tous 
ceux  qui  s'y  étaient  retirés  avec  lui. 

7.  11  les  attaqua  donc  sur  cette  montagne,  et  leur  ôta 
la  communication  des  eaux,  en  coupant  le  canal.  Josè- 
phe, pressé  de  la  soif  et  réduit  à  la  dernière  extrémité, 
songeait  à  se  sauver,  et  ses  gens,  le  voyant  dans  celte 
résolution,  avaient  déjà  délibéréde  se  rendre  à  Antigone. 

8.  Mais  Dieu  fit  tomber  une  pluie  abondante  qui  rem- 
plit toutes  leurs  citernes,  et  tous  leurs  vases.  Alors  ils 
reprirent  courage,  rétablirent  leurs  affaires,  et  Josèphe 
se  défendit  avec  tant  d'opiniâtreté  contre  les  gens 
d'Antigone,  qu'ils  ne  purent  remporter  aucun  avantage 
sur  lui. 

9.  Cependant  Hérode  s'avança  vers  Sarah  pour  rame- 
ner à  Jérusalem  son  frère  Josèphe,  toute  sa  famille  et 
tout  ce  qu'il  y  avait  de  gens  avec  lui  sur  la  montagne. 

ic.  Mais,  l'ayant  trouvé  investie  par  Antigone,  il  fon- 
dit tout  d'un  coup  sur  l'ennemi.  Josèphe  le  joignit  en 
même  temps  avec  toute  sa  troupe,  et  Antigone  rentra 
dans  Jérusalem  après  avoir  perdu  la  plus  grande  partie 
de  son  armée. 

11.  Hérode  le  poursuivit  avec  un  grand  nombre  de 
Juifs  qui  l'étaient  venus  trouver  de  tous  côtés,  aussitôt 
qu'ils  avaient  été  informés  de  son  retour,  et  ses  troupes 
étaient  tellement  grossies,  qu'il  fut  bientôt  en  état  de  se 
passer  de  l'armée  romaine. 

12.  Hérode  étant  donc  arrivé  à  la  ville  sainte,  Anti- 
gone lui  en  fit  fermer  les  portes,  et  se  mit  en  état  de  se 
défendre  ;  il  envoya  même  prier  les  généraux  romains 
de  ne  point  secourir  Hérode,  ce  qu'il  obtint  à  force 
d'argent. 

ij.  En  sorte  que  la  guerre  dura  longtemps  entre  Anti- 
gone et  Hérode,  sans  qu'ils  remportassent  aucun  avantage 
l'un  sur  l'autre. 


S.   B.  —  T.  XII. 


22 


CHAPITRE    LI 


i.  Jam  fures  et  alienis  rébus  inhiantes  multiplicati 
erant  in  diebus  Antigoni,  sese  recipientes  in  speluncas 
quasdam  in  montibus  sitas,  nullo  dato  accessu  nisi  uni 
viro  per  loca  quaedam  ab  ipsis  coaptata,  illisque  solis 
nota. 

2.  Et  si  vero  alii  ea  cognovissent,  conscendere  in 
speluncam  non  poterant,  eo  quod  ad  ostium  prassto 
erat,  qui  vel  minima  re  conscendentem  expellere  facile 
poterat. 

j.  Et  jam  quidam  eorum  sibi  paraverant  ea  in  spe- 
lunca  arma  multa,  alimenta,  atque  potum  ;  et  ea  om- 
nia,  quibus  indigebant,  cum  omnibus  iisquibus  grassando 
obvios  spoliabant,  quasque  per  fas  et  nefas  capiebant. 

4.  Cum  ergo  intellexisset  Hsrodes  res  eorum,  atque 
cognovit  rem  istorum  in  longius  protrahi,  et  quod  scalis 
illuc  ascendere  non  daretur,  neque  scandere  omnino  ; 


5.  Usque  est  arcis  ligneis  magnis  coaptatis, atque  com- 
pactis,  complevitque  eas  viris  (additis  escis  et  aqua)  has- 
tas  falcatas  ac  prolongas  gestantibus  ; 

6.  Jussitque  dimitti  arcas  i  11  as  e  vertice  montium,  in 
quorum  medio  speluncas  illae  erant,  donec  opponerentur 
ostiis  earum  :  quibus  cum  oppositas  fuerint  pugnare  con- 
tra eos  cominus  gladiis,  et  eminus  attrahere  hastis  il  1  ïs  ; 
et  factae  sunt  arcae,  atque  viris  complétas. 

7.  Cumque  dimissas  essent  quasdam  earum,  et  oppositas 
essent  ostiis  illarum  speluncarum,  nulla  innotescente  fama 
degentibus  ibi, 

8.  Irruit  quidam  virorum  qui  erant  in  arca  in  spelun- 
cam, sequentibus  sociis,  et  interfecerunt  latrones  qui  in 
ea  erant  cum  asseclis,  et  deturbarunt  in  subjectas  valles  : 
asmulantibus  hos  cunctis  quos  miserai  Herodes  in  arcis. 

9.  Eosque  claruit  in  hoc  istorum  magnanimitas,  forti- 
tudo,  atque  audacia,  ut  par  nunquam  visa  fuerit  ; 

10.  Et  exterminarunt  cunctos  latrones  ab  omnibus  locis 

mis. 


1.  Il  s'était  formé  du  temps  d'Antigone  des  troupes  de 
voleurs  et  de  gens  avides  du  bien  d'autrui  ;  ils  avaient 
pour  retraites  desca-vernes  creusées  dans  des  montagnes 
inaccessibles,  où  ils  étaient  venus  à  bout  de  pratiquer  un 
sentier  connu  d'eux  seulement,  et  par  lequel  il  ne  pou- 
vait passer  qu'un  seul  homme. 

2.  Et  quand  même  quelqu'autre  qu'eux  en  aurait  eu 
connaissance,  il  ne  serait  jamais  parvenu  jusqu'à  la  ca- 
verne, parce  que  celui  qui  en  gardait  l'entrée,  pouvait 
avec  le  moindre  effort  le  précipiter  en  bas. 

j.  Ces  brigands  avaient  déjà  amassé  de  grosses  provi- 
sions d'armes,  de  vivres,  de  mille  autres  choses  dont  ils 
pouvaient  avoir  besoin,  et  de  tout  ce  qu'ils  enlevaient 
par  force  dans  leurs  courses. 

4.  Hérode  ayant  donc  su  l'état  où  s'étaient  mis  ces 
voleurs,  et  jugeant  qu'on  ne  pourrait  les  réduire  qu'après 
bien  du  temps,  parce  que  les  échelles  et  les  autres 
machines  étaient  devenues  inutiles  pour  grimper  jusqu'à 
eux, 

Fit  construire  de  grands  coffres  de  bois  attachés  les 
uns  aux  autres,  et  les  remplit  d'hommes  armés  de  lon- 
gues piques  faites  en  forme  de  faux;  il  y  fit  mettre  encore 
des  provisions  de  bouche, 

6.  Et  ordonna  que, du  haut  des  montagnes, on  descendit 
ces  hommes  jusqu'à  l'entrée  des  cavernes,  afin  qu'en  cet 
état  ils  attaquassent  les  voleurs,  se  servant  de  leurs 
épces  pour  les  combattre  de  près,  et  de  leurs  longues 
faux  pour  les  atteindre  de  loin. 

7.  Quand  on  les  eut  ainsi  descendus  jusqu'à  l'entrée 
des  cavernes,  sans  que  ceux  qui  les  habitaient  en  eus- 
sent eu  le  moindre  soupçon, 

5.  L'un  de  ceux  qui  étaient  dans  les  coffres  en  sortit 
aussitôt  et  entra  dans  la  caverne  :  tous  les  autres  à  son 
exemple  s'y  étant  jetés,  ils  tuèrent  les  voleurs,  et  tous 
ceux  qu'ils  y  trouvèrent,  et  les  précipitèrent  à  l'envi 
dans    lesvallées  qui  étaient  au  pied  de  la  montagne. 

9.  Ce  fut  par  cette  action  qui  n'eut  jamais  d'exemple, 
que  les  gens  d'Hérode  firent  éclater  leur  valeur,  leur 
force,  et  leur  courage; 

10.  Et  ils  exterminèrent  tous  les  voleurs  qui  s'étaient 
retirés  dans  ces  lieux  inaccessibles. 


CHAPITRE    LU 


i.  Tum  Antonius,  post  relictum  Herodem,  Antiochia 
profectus  est  in  regionem  Persarum,  et  pugnavit  cum 
Persarum  rege,  superavit,  interfecit,  et  obtinuit  illum  : 
et  reductis  ad  Romanorum  obedientiam  Persis,  divertit 
ad  Euphratem. 

2.  Et  nuntiata  Herodi  fama  ejus,  profectus  est  gratula- 
turus  ei  de  relata  Victoria,  atque  rogaturus,  ut  secum 
veniret  ad  regionem  sanctam. 

;.  Et  invenit  turbam  plurimam  collectam,  cupientem 
adiré  Antonium,  cui  sese  opposuerant  plures  turmœ 
Arabum,  eam  adiré  Antonium  impedientes. 

4.  Profectusque  est  Herodes  ad  Arabes,  et  occidit 
eos,  aperiens  viam  cunctis  qui  Antonium  adiré  vellent. 
Et  nuntiatum  est  hoc  Antonio  antequam  adventaret 
Herodes  ; 

;,  Qua  de  causa  misit  illi  diadema  aureum,  et  plurimos 
equos.  Pervenientem  autem  Herodem  comiter  excepit 
Antonius,  collaudans  eum  pro  gestis  contra  Arabes, 

6.  Adjunxitque  ei  Sosium  ducem  militiae  suse  cum 
exercitu  magno,  prascipiens  ei  abire  cum  ipso  ad  civita- 
tem  domus  sanctae,  tradens  insuper  ei  epistolas  ad  cunc- 
tam  regionem  Syriœ,  quas  est  a  Damasco  usque  ad 
Euphratem,  et  ab  Euphrate  usque  ad  regionem  Armenias, 

7.  Dicensei:  Augustus  rex  regum,  et  Antonius  collega 
ejus,  ac  senatus  romanus,  jam  constituerunt  in  regem 
Herodem  super  Judasos,  ipsique  praecipiunt  vobis  ducere 
cum  Herode  universos  viros  vestros  fortes,  opem  illi 
ferentes  : 

8.  Si  ergo  contrarium  feceritis,  nobiscum  vobis  bellan- 
dum  erit.  Deinde  profectus  est  Antonius  in  oram  mariti- 
mam,  et  inde  in  ^îgyptum  ;  Herodes  vero,  et  Sosius, 
una  cum  exercitu  suo  ducebant  exercitum  Syriae. 

9.  Cum  autem  appropinquasset  Herodes  Damascum 
cognovit  Josephum  fratrem  suumegressum  fuisse  e  domo 
sancta  cum  exercitu  Romanorum  ad  obsidendam  Jéricho, 
et  segetes  ejus  metendas, 

10.  Ad  quos  egressus  Pappus  dux  militiae  Antigoni, 
occidit  ex  illis  circiter  triginta  milita,  interfecto  et  Jose- 
pho  tratre  Herodis.et  oblatuin  caput  Antigono  émit  frater 
ejus  Pheroras  quingentis  talentis,  et  sepelivit  in  sepulchro 
patrum  suorum  : 

11.  Et  quod  insuper  Antigonus,  et  Pappus  se  peterent 
cum  exercitu  magno.  Quod  cum  constitisset  Herodi, 
decrevit  expeditionem  facere  in  Antigonum,  et  improviso 
opprimere, 

12.  Et  convenit  cum  Sosio,  ut  acceptis  ex  Romanis 
duodecim  millibus  virorum,et  viginli  millibus  de  Judaeis, 
contenderet  ad  Antigonum,  illevero  cum  reliquo  exercitu 
lentius  vestigia  sequeretur. 

ij.  Profectusque  est  Herodes  cum  collectis  viris,  et 
occurrit  Antigono  in  monte  Galilas  e,et  praeliati  sunt  con- 
tra eum  a  meridie  usque  ad  noctem. 

14.  Tum  divisus  est  exercitus,  et  obnoctavit  Herodes 
cum  quibusdam  de  suisin  domo  quadam,et  corruit  domus 
super  eos,  at  evaserunt  omnes  de  ruina  nemine  mortuo, 
nec  osse  cuiquam  fracto. 

15.  Mox  properavit  Herodes  ad  pugnandum  contra 
Antigonum,  intercessitque  inter  eos  pugna  maxima,  et 
fugit    Antigonus  in    domum  sanctam,  resistente    fortiter 


I.  Antoine,  après  avoir  quitté  Hérode,  était  parti 
d'Antioche,  et  avait  gagné  la  Perse  ;  il  attaqua  le  roi 
de  Perse,  le  vainquit  et  le  tua  ;  et,  ayant  remis  tout  le 
pays  sous  la  domination  des  Romains,  il  s'avança  vers 
l'Euphrate. 

I.  Hérode  n'eut  pas  plus  tôt  appris  les  conquêtes 
d'Antoine,  qu'il  partit  pour  aller  l'en  féliciter  et  le  prier 
en  même  temps  de  l'accompagner  jusqu'à  la  ville  Sainte. 

î.  Après  quelque  temps  de  marche,  il  rencontra  une 
grande  multitude  de  gens  qui  cherchaient  à  joindre 
Antoine  ;  mais  ils  en  étaient  empêchés  par  plusieurs 
troupes  d'Arabes  qui  s'y  opposèrent. 

4.  Hérode  attaqua  ceux-ci,  en  fit  un  grand  carnage  et 
permit  aux  autres  de  continuer  leur  chemin.  Antoine 
ayant  été  informé  de  cette  action  avant  qu'Hérode  se 
fût  rendu  auprès  de  lui, 

5.  Lui  envoya  un  diadème  d'or  et  plusieurs  chevaux  ; 
et,  quand  Hérode  fut  arrivé,  Antoine  lui  fit  beaucoup 
d'accueil  et  leloua  de  ce  qu'il  avait  faitcontre  les  Arabes, 

6.  Ensuite  il  lui  adjoignit  Sosie, général  de  ses  troupes, 
lui  ordonnant  de  remener  Hérode  à  Jérusalem  avec  une 
armée  nombreuse,  et  il  le  chargea  de  lettres  pour  tous 
les  lieux  de  la  Syrie,  depuis  Damas  jusqu'à  l'Euphrate, 
et  depuis  l'Euphrate  jusqu'à  l'Arménie. 

7.  Elles  étaient  conçues  en  ces  termes:  Auguste,  roi  des 
rois,  Antoine,  son  collègue,  et  le  sénat  romain,  ont  établi 
Hérode  roi  de  Judée,  et  ils  vous  ordonnent  de  vous 
rendre  auprès  de  lui  avec  tout  ce  que  vous  avez  de  gens 
de  guerre. 

8.  Sachez  donc  que  si  vous  refusez  d'exécuter  nos 
ordres,  nous  vous  y  obligerons  les  armes  à  la  main. 
Après  cela,  Antoine  s'avança  vers  la  mer  et  passa  en 
Egypte  ;  Hérode  et  Sosie,  de  leur  côté,  entrèrent  ensem- 
ble en  Syrie,  chacun  à  la  tète  d'une  armée. 

o.  Hérode,  s'étant  approché  de  Damas,  apprit  que 
Josèphe,  son  frère,  était  sorti  de  Jérusalem  avec  une 
troupe  de  Romains,  dans  le  dessein  d'assiéger  Jéricho,  et 
de  faire  fourrager  la  moisson  dans  les  campagnes  voisines, 

10.  Que  Pappus,  général  de  l'armée  d'Antigone,  était 
venu  à  sa  rencontre,  lui  avait  tué  environ  trente  mille  hom- 
mes ;  que  Josèphe  lui-même  était  resté  parmi  les  morts,  et 
quesa  tête, vendue  cinq  cents  talentsà  son  frère  Pheroras, 
avait  été  mise  ensuite  dans  le  tombeau  de  ses  pères  ; 

II.  Et  qu'enfin  Pappus  et  Antigone  s'avançaient,  l'un 
contre  l'autre,  chacun  à  la  tête  d'une  armée  formidable. 
Hérode,  ne  pouvant  plus  douter  de  la  vérité  de  ces 
bruits,  résolut  de  marcher  contre  Antigone,  et  de  fondre 
tout  d'un  coup  sur  lui. 

12.  Il  fut  donc  arrêté  qu'il  s'avancerait  contre  Antigone 
à  la  tête  de  douze  mille  Romains  et  de  vingt  mille  Juifs, 
et  que  Sosie  le  suivrait  à  quelque  distance  avec  le  reste 
de    l'armée. 

ij.  Hérode  s'étant  mis  en  marche  avec  ses  troupes, 
rencontra  Antigone  sur  la  montagne  de  Galilée,  ils  se 
battirent  depuis  midi  jusqu'au  soir. 

14.  Les  armées  se  séparèrent,  et  Hérode  s'étant  retiré 
dans  une  maison  avec  quelques-uns  des  siens  pour  y  pas- 
ser la  nuit,  la  maison  tomba  sur  eux  ;  mais  ils  sortirent 
tous  de  dessous  les  ruines  sans  avoir  reç'i  la  moindre 
meurtrissure. 

1^.  Hérode  aussitôt  vint  attaquer  Antigone, et  le  com- 
bat fut  très  sanglant  ;  Antigone  se  sauva  dans  le  temple 
de   Jérusalem,  pendant  que    Pappus    signalait  sa  força 


34o 


IV.  —   MACCABEES.—  LU.  -   HERODE   ET  ANTIGONE 


Pappo,  et  sustentante  pugnam,  erat  quippe  magnanimus 
et  fortissimus. 

16.  Ceciditque  ea  die  major  pars  exercitus  Antigoni, 
cœsus  quoque  est  Pappus,  cujus  caput  ampuiavit  Phe- 
roras,  et  Herodi  detulerunt,  quod  sepeliri  jussit. 

17.  Cum  ergo  nul li,  nisi  aut  captivi,  aut  palantes 
remansissent  ex  Antigoni  exercitu,  prascepit  suis  Herodes 
ut  quietem  caperent,  et  comederent,  atque  biberent. 

18.  Ipse  vero  adivit  balneum  quoddam  quod  erat  in 
proximo  oppido,  inermisque  ingressus  est  balneum.  Jam 
vero  latuerant  in  balneo  très  viri  strenui,  ac  fortes, 
habentes  in  manibus  strictos  gladios  : 

19.  Qui  cum  ingredientes  balneum,  atque  inermem 
vidissent,  festinarunt  egredi  unus  post  alium,  veriti  illum 
et  sic  evasit. 

20.  His  peractis  adventavit  Sosius,  simulque  perrexe- 
runt  ad  civitatem  domus  sanctas,  quam  circumvallentes, 
intercesserunt  bella  plurima  inter  eos  et  Antigonum  : 

21.  Cœsique  sunt  de  Sosii  viris  quamplurimi,  superante 
pluries  Antigono,  at  eos  profligare  non  potuit  ob  cons- 
tantiam  et  tolerantiam  in  eo  sustinendo. 

22.  Tum  prasvaluit  Herodes  contra  Antigonum,  fugit- 
que  Antigonus,  et  ingressus  civitatem,  portas  clausit, 
quem  diu  obsedit  Herodes. 

25.  Quadam  autem  nocte  obdormierunt  quidam  custo- 
des mûri  :  quod  cognoscentes  quidam  Herodiani  viri, 
accurrerunt  viginti  ex  illis,  et  accipientes  scalas,  muro 
applicuerunt,  et  scandentes  occiderunt  custodes. 

24.  Herodes  vero  festinavit  cum  viris  suis  ad  portam 
civitatis,  quaa  e  regione  ipsorum  erat,  et  infringentes 
ingressi  sunt  civitatem.  Quam  capientes  Romani  instige- 
bant  cladem  civibus;  quod  aîgre  ferens  Herodes,  ait 
Sosio  : 

z<i.  Si  consumpseris  populum  meum,  super  quem  me 
constitues  regem?  et  mandavit  Sosius  proclamari  ut  sis- 
teret  gladius  :  nec  cecidit  quisquam  post  proclamationem: 

26.  Duces  autem  Sosii  prasdas  inhiantes  ad  domum  Dei 
depopulandam  accurrerunt  :  at  Herodes  stans  ad  portam 
strictum  habens  in  manu  gladium,  prohibuit  eos  ;  misitque 
ad  Sosium  ut  compesceret  suos,  promissa  pecunia. 

27.  Et  proclamari  mandavit  Socius  ad  suos,  ut  se  con- 
finèrent a  direptione,  et  sese  continuerunt.  Et  quœsitum 
Antigonum  invenerunt,  et  captus  est  Antigonus.  Post 
hase  se  recepit  Sosius  in  /Egyptum  ad  Antonium  Colle- 
gam,  secum  ducens  Antigonum  catenis  devinctum. 

28.  Herodes  vero  misit  Antonio  munus  maximum,  atque 
pulchrum,  rogans  ut  interimeret  Antigonum  :  et  interemit 
illum  Antonius  :  fuit  autem  hoc  anno  tertio  regni  Hero- 
dis,  qui  item  est  annus  tertius  Antigoni. 


et    sa  valeur    en  soutenant  lui  seul    tout  l'effort   de   la 
bataille. 

16.  La  plus  grande  partie  de  l'armée  d'Antigor.e  périt 
en  ce  jour-là  ;  Pappus  resta  lui-même  parmi  les  morts, 
et  sa  tête,  ayant  été  coupée  par  Phéroras,  fut  apportée 
à  Hérode  qui  lui  donna  la  sépulture. 

17.  Tous  ceux  qui  restaient  de  l'armée  d'Antigone 
ayant  été  mis  en  déroute  ou  faits  prisonniers,  Hérode 
exhorta  ses  troupes  à  prendre  quelque  repos,  à  manger 
et  à  boire. 

18.  Pour  lui,  étant  allé  à  la  ville  voisine  dans  le  des- 
sein de  se  baigner,  il  entra  sans  armes  dans  un  bain  ; 
trois  hommes  forts  et  courageux  s'y  étaient  cachés  et 
tenaient  déjà  leurs  épées  pour  !e  frapper. 

19.  Mais  ils  ne  l'eurent  pas  plus  tôt  aperçu  tout  désarmé 
qu'il  était,  que,  saisis  de  frayeur,  ils  se  hâtèrent  de  sortir 
du  bain  ;  ce  fut  ainsi  qu'Hérode  échappa  de  leurs  mains. 

20.  Sosie  étant  arrivé  sur  ces  entrefaites,  ils  marchè- 
rent ensemble  à  Jérusalem  et  l'investirent  de  tous  côtés, 
il  s'y  livra  plusieurs  combats  de  part  et  d'autre. 

2i.  Antigone  tua  un  grand  nombre  de  gens  de  Sosie; 
mais,  malgré  ces  fréquents  avantages,  il  ne  put  vaincre 
leur  opiniâtreté  et  leur  constance. 

22.  Hérode  commençant  enfin  à  devenir  le  plus  fort, 
Antigone  se  sauva,  et,  étant  entré  dans  Jérusalem,  il 
ferma  les  portes  sur  lui  et  soutint  un  long  siège  contre 
Hérode. 

2j.  Mais  il  arriva  que  les  sentinelles  de  la  muraille 
s'étant  une  fois  endormies  pendant  la  nuit,  les  soldats 
d'Hérode  s'en  aperçurent  ;  et  aussitôt  vingt  d'entre  eux 
prenant  des  échelles,  escaladèrent  la  muraille  et  tuèrent 
les  sentinelles. 

24.  Hérode  suivi  des  siens  gagna  promptement  la  porte 
voisine;  et  l'ayant  fait  briser,  ils  entrèrent  tous  dans 
Jérusalem  :  les  Romains,  s'en  étant  rendus  maîtres,  fai- 
saient main  basse  sur  les  citoyens.  Hérode  indigné  de  ce 
cruel  spectacle  dit  à  Sosie  : 

25.  Si  vous  détruisez  ainsi  mon  peuple,  sur  qui  pré- 
tendez-vous m'établir  roi  ?  Alors  Sosie  fit  publier  par 
toute  la  ville  qu'on  épargnât  les  citoyens,  et  aussitôt  le 
carnage  cessa. 

26.  Cependant  les  ofiïciers  de  Sosie,  avides  du  butin, 
accoururent  à  la  maison  de  Dieu  pour  la  piller;  mais 
Hérode,  se  tenant  à  la  porte  du  temple  l'épée  à  la  main, 
les  empêcha  d'avancer  et  envoya  prier  Sosie  de  les  faire 
retirer,  moyennant  une  somme  d'argent  qu'il   promit. 

27.  Sosie  envoya  aussitôt  des  ordres,'  et  le  temple  fut 
garanti  du  pillage.  On  trouva  enfin  Antigone  et  il  lut  fait 
prisonnier;  après  cela,  Sosie  retourna  en  Egypte  auprès 
d'Antoine,  collègue  d'Auguste,  menant  à  sa  suite  Antigone 
chargé  de  chaînes. 

28.  Hérode  envoya  à  Antoine  un  présent  d'un  très 
grand  prix,  le  priant  en  même  temps  de  faire  mourrir 
Antigone,  ce  qu'Antoine  lui  accorda  .  Ceci  se  passa  la 
troisième  année  du  règne  d'Hérode,  |  qui  était  aussi  la 
troisième  de  celui  d'Antigone. 


CHAPITRE    LUI 


i.  Cognita  Herodes  casde  Antigoni,  tutus  habebatur, 
quin  quispiam  ex  familia  Hasmonœi  régis  cum  illo  con- 
tenderet  : 

2.  Quare  operam  dédit  exaltandi  dignitates,  benefa- 
ciendi,  ac  prœponendi  eos,  qui  in  eum  propensi  erant 
atque  obesequebantur. 

j.  Operam  quoque  navavit  eos  interficiendi  una  cum 
familiis,  et  expilandi  pecora,  et  supellectilia  eorum  qui 
obstiterant  ei,  auxilia  contra  illum  prasbentes. 

4.  Et  oppressif  homines,  accipiens  eorum  facilitâtes, 
et  spolians  universos  qui  obedientiam  Judaaorum  ex- 
cusserant,  et  interfecit  sibi  obsistentes,  et  bona  eorum 
diripuit. 

5.  Convenit  quoque  cum  omnibus  ei  obsequentibus,  ut 
pecuniam  illi  déferrent.  Posuit  quoque  ad  portas  civita- 
tis  domus  sanctas  custodes,  qui  scrutarentur  egredientes, 
et  acciperent  quicquid  auri  vel  argenti  cum  aliquo  inve- 
nerint,  et  ad  illum  déferrent  : 

6.  Prascepit  quoque  scrutari  feretra  mortuorum.et  ac- 
cipi  quidquid  pecuniarum  astu  quis  efferre  conaretur. 

7.  Et  congessit  quantum  nullus  regum  ex  regibus  do- 
mus secundae  congesserat. 


1.  Hérode,  ayant  appris  la  mort  d'Antigone,  ne  songea 
plus  qu'à  s'assurer  la  couronne  contre  les  entreprises  que 
pouvaient  former  ceux  de  la  famille  du    roi    Asmonéen. 

2.  C'est  pourquoi  il  fit  tomber  les  dignités,  les  bien- 
faits et  les  honneurs  sur  ceux  qu'il  savait  lui  être  sincè- 
rement attachés. 

j.  Mais  à  l'égard  des  autres  qui  avaient  favorisé  ses 
ennemis,  il  les  fit  mourir  avec  toute  leur  famille,  et 
prit  leurs  troupeaux  et  tout  ce  qu'ils  possédaient. 

4.  Il  exerça  sur  le  peuple  une  horrible  tyrannie,  s'em- 
parant  des  biens  de  tous  ceux  qui  avaient  secoué  la  do- 
mination des  Juifs,  et  sacrifiant  à  sa  cruauté  quelques 
autres  qui  lui  faisaient  ombrage. 

J.  Il  exigea  même  de  l'argent  de  ceux  qui  lui  étaient  le 
plus  dévoués.  Il  mit  des  gardes  aux  portes  de  Jérusa- 
lem avec  ordre  de  fouiller  tous  ceux  qui  sortiraient  de 
la  ville, et  de  lui  apporter  tout  ce  qu'ils  leur  trouveraient 
d'or  ou  d'argent. 

6.  Il  fit  visiter  jusqu'aux  tombeaux,  et  en  fit  enlever 
tout  l'argent  qu'on  y  avait  caché  pour  l'emporter  hors 
de  la  ville,  afin  de  le  dérobera  son  avidité. 

7.  Hérode  amassa  plus  de  richesses  que  n'en  avait 
amassé  aucun  des  rois  qui  étaient  montés  sur  le  trône 
d'Israël  depuis  le  second  temple. 


CHAPITRE    LIV 


i.  Morabatur  Hyrcanus,  postquam  dimiserat  illum 
rex  Persarum  in  HeraUin,  honestissimo  statu,  et  at-so- 
lutissimo  honore:  quamobrem  timuit  Herodes  ne  res 
aliqua  induceret  Persarum  regem,  ut  illum  in  regem 
constitutum  mitteret  in  regionem  Judas. 

2.  Quare  animum  suum  quietum  reddere  volens,  ma- 
chinatus  est  pro  hsc  re,  misitque  ad  regem  Persarum 
maximum  munus,  et  epistolam,  in  qua  meminit  Hyrcani 
in  se  mérita,  et  bénéficia,  etquomodo  profectus  est  Ro- 
main causa  eorum  qua;  illi  intulerat  Antigonus  filius  fra- 
tris  illius, 

j.  Et  quod  regno  potitus,  et  rébus  directis  vellet  re- 
pendere  illi  pro  beneficiis  collatis,  ut  par  ipsi  erat. 

4.  Misit  itoque  rex  Persarum  legatum  ad  Hyrcanum 
dicens  :  Si  vis  reverti  in  regionem  Judas,  revertere  :  sed 
moneo  ut  caveas  ab  Hérode,  et  notum  tibi  facio  illum 
nequaquam  te  requirere  ut  bene  tibi  faciat, 

<,.  Verum  intendit  tutum  sese  reddere,  cum  nullus  re- 
maneat,  quem  timeat  pra.'ter  te  ;  quare  cave  ab  illo  dili- 
gent'ssime,  et  ne  decipiaris. 

6.  Convenerunt  quoque  ad  illum  Judasi  Babylonis,  et 
dixerunt  ei  similia  his.  Rursum  aiunt  illi:  Utique  vir  se- 
nex  es,  nec  aptus  ad  fungendum  sacerdotio  propter  ma- 
culam  qua  te  affecit  filius  fratris  tui  ; 

7.  Herodes  vero  vir  malus  est,  et  sanguinis  effusor  ; 
nec  te  revocat,  nisi  quia  sibi  timet  a  te  :  nec  indiges  apud 
nos  re  aliqua,  ut  sis,  et  es  apud  nos,  ut  par  est. 


8.  Familia  vero  tua  ibi  in  optimo  est  statu  ;  quare 
mane  apud  nos,  nec  auxilio  sis  inimico  tuo  adversus  te 
ipsum. 

0.  At  non  acquievit  Hyrcanus  verbis  eorum  neque 
auscultavit  admonitiones  bene  admonentis.  Et  profectus 
est  donec  pervenit  in  civilatem  sanctam  ob  maximum  de- 
siderium,  quo  affectus  erat  erga  domum  Dei,  familiam, 
et  patriam. 

10.  Cumque  prope  accessisset  ad  urbem.  occurrit  ei 
Herodes  eo  exhibito  honore,  et  magnificentia,  ut  deci- 
peretur  Hyrcanus,  et  sese  confideret. 

11.  Vocabatque  illum  Herodes  in  consistorio  suo,  et 
coram  suis,  patrem  :  nec  tamen  machinamenta  corde 
astruere  desistebat,  dummodo  illi  imputari  non  possent. 

12.  Quare  adeunt  Alexandra  et  Mariamna  fît ia  ejus 
Hyrcanum,  incutientes  illi  timorem  Herodis,  et  persua- 
dentes  ut  sibi  caveat  :  at  neque  acquievit  il  lis,  neque 
fidem  adhibuit,  etsi  iterumatque  iterum  hoc  illi  repetunt, 
consulentes  ei  fugam  arripere  ad  aliquem  regem  ex 
regibus  Arabum  ; 

15.  His  tamen,  omnibus  non  acquiescebat,  donec  com- 
pellentes  adegerunt  illum  repetitis  admonitionibus  et 
terroribus. 

14.  Scripsit  ergo  tuncregi  illi  Arabi  epistolam,  et  accito 
viro  quodam  (cujus  Herodes  interfecerat  fratrem,  et 
bona  proscripserat,  multisque  affecerat  malis). 

1$.  Indicavit  se  velle  aperire  ei  arcanum  quoddam, 
adjurans  ne  indicaret  illud  cuiquam,  et  tradita  ipsi  pecu- 


1.  Hyrcan  était  toujours  à  Hérac,  où  le  roi  de  Perse 
l'avait  envoyé,  et  il  y  était  traité  avec  beaucoup  d'hon- 
neur et  de  distinction  ;  c'est  pourquoi  Hérode,  crai- 
gnant qu'il  ne  prît  envie  au  roi  de  Perse  de  lui  donner  le 
royaume  de  Judée,  et  qu'il  ne  l'aidât  même  à  en  prendre 
possession, 

2.  Songea  à  se  mettre  en  état  de  ne  rien  craindre. 
Pour  cet  effet,  il  envoya  de  grands  présents  au  roi  de 
Perse  et  lui  écrivit  une  lettre  dans  laquelle  il  relevait 
tout  ce  qu'Hyrcan  avait  fait  en  sa  faveur,  et  de  quelle 
manière  il  avait  été  à  Rome  pour  lui  faire  rendre  justice 
contre  Antigone  son  neveu  : 

}.  Qu'étant  enfin  paisible  possesseur  du  royaume,  il 
était  bien  aise  de  reconnaître,  comme  il  le  devait,  des 
services  si  importants. 

4.  Le  roi  de  Perse  ayant  reçu  cette  lettre  fit  dire  à 
Hyrcan  qu'il  pouvait  s'en  retourner  en  Judée,  s'il  le  vou- 
lait, qu'il  l'avertissait  cependant  de  se  méfier  d'Hérode, 
que  ce  n'était  pas  pour  lui  faire  du  bien  que  ce  prince 
le  redemandait  ; 

Ç.  Mais  pour  s'assurer  en  sa  personne  de  celui  seul 
qu'il  pouvait  encore  craindre  ;  ainsi  qu'il  prît  garde  de 
se  laisser  surprendre  dans  le  piège  qu'on  lui  tendait. 

0.  Les  Juifs  de  Babylone  vinrent  aussi  trouver  Hyrcan 
et  lui  dirent  les  mêmes  choses:  Ni  votre  grand  âge, 
ajoutèrent-ils,  ni  l'outrage  que  vous  a  fait  le  fils  de  vo- 
tre frère,  ne  vous  permettent  plus  d'exercer  les  fonctions 
du  sacerdoce. 

t.  Hérode  est  un  homme  plein  de  méchanceté  et  qui 
se  plaît  à  répandre  le  sang;  il  ne  vous  rappelle  à  sa  ccur 
que  parce  qu'il  vous  craint  ;  et  vous  savez  d'ailleurs  que 
nous  ne  vous  laissons  manquer  de  rien,  que  nous  vous 
rendons  tous  les  honneurs  qui  vous  sont  dus, 

8.  Et  que  tous  les  vôtres  sont  ici  dans  l'éclat  et  dans 
l'abondance.  Demeurez  donc  avec  nous  et  n'allez  point 
vous  livrer  vous-même  entre  les  mains  de  votre  ennemi. 

9.  Hyrcan  rejeta  néanmoins  des  avis  si  salutaires,  et 
n'écoutant  que  le  violent  désir  qu'il  avait  de  revoir  la 
maison  sainte,  sa  famille  et  sa  patrie,  il  partit  pour  se 
rendre  à  Jérusalem. 

ro.  Lorsqu'il  en  fut  à  quelque  distance,  Hérode  vint  à 
sa  rencontre  et  le  reçut  avec  beaucoup  d'honneur  et  de 
magnificence,  afin  d'attirer  sa  confiance  ; 

11.  Et  pour  le  mieux  tromper,  il  l'appelait  même  son 
père  dans  les  assemblées  et  en  présence  des  grands 
de  sa  cour,  pendant  qu'en  secret  il  songeait  à  le  perdre 
aussitôt  qu'il  pourrait  échapper  aux  soupçons  de  samort. 

12. Alexandre  et  Mariam ne, sa  fille, qui  savaient  le  dessein 
d'Hérode,  vinrent  trouver  Hyrcan,  et  après  avoir  tâché 
de  fairenaitre  dans  son  cœur  de  la  défiance  pour  Hérode, 
elles  l'engagèrent  en  vain  à  se  tenir  sur  ses  gardes  et  le 
pressèrent  même  plusieurs  fois  de  se  retirer  chez  quel- 
qu'un des  rois  arabes. 

ij.  Mais  il  resta  toujours  inébranlable  et  ne  se  rendit 
enfin  qu'après  bien  des  sollicitations  et  des  instances. 

14.  Hyrcan  écrivit  donc  une  lettre  à  l'un  des  rois 
arabes,  et  ayant  envoyé  chercher  un  homme  dont 
Hérode  avait  tué  le  frère  après  s'être  emparé  de  son 
bien,  et  lui  avait  fait  mille  autres  maux, 

iç.  Il  lui  dit  qu'il  avait  une  chose  à  lui  communiquer  ; 
mais  que  le  secret  devait  être  inviolable  ;  et  lui  donnant 


IV. 


MACCABEES.  —  XLIV.   -  MORT  D'HYRCAN 


?43 


nia,  et  epistola  ad  regem  Arabum,  significavit  ei  quid  in 
epistola  petebat. 

16.  Accepta  itaque  epistola,  ratus  est  legatus  se  ma- 
gnum obtenturum  apud  Herodem  locum,  remoturumque 
a  se  malumquod  ab  illo  semper  timebat,si  rem  detulisset, 

17.  Et  id  utilius  sibi  fore  occultatione  secreti  Hyr- 
cani  :  cum  nec  tutus  esset  quin  res  Herodi  aliquando 
pateret,  et  sui  exterminii  causa  esset. 

18.  Detulit  ergo  epistolam  Herodi,  et  rem  totam  ape- 
ruit,  cui  ait  Herodes  :  Fer  epistolam,  uti  est,  ad  regem 
Arabum,  et  refer  mihi  responsum.ut  sciam  illud  :  indica 
quoque  mihi  locum  virorum  quos  mittet  rex  Arabum,  ut 
abeat  cum  illis  Hyrcanus. 

19.  Profectus  est  autem  nuntius,  et  obtulit  epistolam 
Hyrcani  régi  Arabum,  qui  lœtatus  est,  misitque  viros 
ex  suis,  mandans  abire  ad  locum  quemdam  prope  civi- 
tatem  sanctam,  et  ibi  morari,  donec  adventaret  ad  illos 
Hyrcanus  :  et  adventantem  Hyrcanum  comitarentur 
donec  ad  se  perducerent  :  scripsitque  ad  Hyrcanum  res- 
ponsum  titierarum  ejus,  et  misit  cum  nuntio. 

20.  Profecti  itaque  viri  cum  nuntio  ad  locum  statutum 
ibique  morati  sunt  :  nuntius  vero  attulit  epistolam 
Herodi,  qui  intellexit  tenorem  illius  ;  indicavit  insuper 
locum  virorum, 

21.  Ad  quos  misit  qui  eos  comprehenderent.  Post  hase, 
accitis  de  senioribus  Judasorum  septuaginta  senibus, 
accito  et  Hyrcano,  qui  cum  adesset,  ait  illi  : 

22.  Num  inter  te  et  regem  Arabum  mutua  est  con- 
scriptio  ?  Et  ait  Hyrcanus,  non.  Cui  dixit  :  Num  misisti, 
ut  ad  illum  confugeres  ?  Et  ait,  non. 

25.  Et  prascepit  Herodes  in  médium  adesse  nuntium 
ejus,  et  Arabes,  et  equos,  protulit  quoque  responsum 
epistolas  ejus,  et  lectum  est. 

24.  Tum  praecepit  percuti  collum  Hyrcani,  et  per- 
cussum  est  collum  ejus,  nec  ausus  est  quisquam  alloqui 
pro  eo. 

25.  Jam  vero  liberaverat  Hyrcanus  Herodem  a  ca;de 
merito  illi  décréta  in  consistorio  judicii,  praecipiens 
consistorium  differri  in  crastinum,  dimittens  Herodem 
noctu. 

26.  Hinc  destinatus  est  ut  illum  interficeret,  benefi- 
ciorum  ejus  erga  se  et  patrem  suum  immemor. 

27.  Interfectus  est  autem  Hyrcanus  cum  esset  octoge- 
narius,  et  regnavh  quadraginta  annis  ;  nec  fuit  quispiam 
de  regibus  Hasmonasorum  laudabilioris  viaa,  nec  eo 
honestioris  vitas. 


en  même  temps  une  lettre  et  de  l'argent  pour  le  roi  des 
Arabes,  il  lui  découvrit  tout  le  sujet  de  la  commission  dont 
il  le  chargeait. 

16.  Cet  homme  ayant  reçu  la  lettre  crut  qu'il  obtien- 
drait quelque  récompense  d'Hérode,  ou  du  moins  qu'il 
se  garantirait  des  maux  qu'il  avait  toujours  lieu  d'ap- 
préhender de  sa  part  s'il  allait  lui    découvrir  la  chose  ; 

17.  Et  que  ce  parti  lui  serait  même  beaucoup  plusavan- 
tageux  que  tout  ce  qu'il  avait  à  attendre  d'Hyrcan, 
puisqu'il  pouvait  arriver  que  cette  affaire  vînt  aux  oreil- 
les d'Hérode,  et  qu'en  ce  cas  sa  perte  était  infaillible, 

îK.  Il  vint  donc  lui  remettre  la  lettre  entre  les  mains 
et  lui  découvrit  tout  le  secret;  Hérode  lui  dit  de  porter 
cette  lettre  telle  qu'elle  était  au  roi  des  Arabes,  le  char- 
geant en  même  temps  de  lui  en  rapporter  la  réponse,  et 
de  s'informer  exactement  du  lieu  où  les  troupes  arabes 
devaient  se  trouver  pour  enlever  Hyrcan. 

10.  Cet  homme  s'étant  donc  rendu  auprès  du  roi,  lui 
présenta  la  lettre  d'Hyrcan.  Le  prince  la  reçut  avec 
beaucoup  de  satisfaction,  et  ayant  fait  appeler  quelques- 
uns  des  siens,  il  leur  ordonna  de  se  rendre  en  un  certain 
lieu  qu'il  leur  marqua  aux  environs  de  Jérusalem  et  d'y 
attendre  Hyrcan,  afin  de  lui  amener.  Il  fit  aussi  une 
réponse  aux   lettres  d'Hyrcan  et  la  donna  à  cet  homme. 

20.  Les  gens  du  roi  étant  partis  arrivèrent  enfin  au 
lieu  marqué  et  y  restèrent  pendant  que  le  courrier 
d'Hyrcan  vint  apporter  à  Hérode  la  réponse  du  roi,  et 
lui  indiquer  l'endroit   où  étaient  les  Arabes. 

21.  Hérode  fit  partir  aussitôt  des  troupes  pour  les 
arrêter,  et,  ayant  ensuite  envoyé  chercher  Hyrcan,  il  lui 
parla  aussi  en  présence  de  soixante-dix  des  plus  anciens 
Juifs  qu'il  avait  fait  assembler. 

22.  Y  a-t-il  quelque  intelligence  entre  vous  et  le  roi 
des  Arabes?  Hyrcan  répondit  que  non.  Lui  avez-vous 
envoyé  demander  une  retraite  dans  ses  états?  Hyrcan 
répondit  encore  que  non. 

2j.  Alors  Hérode  fit  paraître  le  courrier  qu'il  avait 
envoyé  au  roi,  aussi  bien  que  les  Arabes  et  les  che- 
vaux ;  il  produisit  aussi  la  réponse  du  roi  et  on  en  fit  la 
lecture. 

24.  Ensuite  il  ordonna  qu'on  coupât  la  tète  à  Hyrcan; 
ce  qui  fut  exécuté  sans  que  personne  osât  parler  en 
faveur  de  ce  prince. 

2Ç.  Hyrcan  avait  autrefois  garanti  Hérode  de  la  mort 
à  laquelle  il  avait  été  justement  condamné  par  un  juge- 
ment juridique  ;  en  remettant  l'assemblée  au  lendemain, 
il  l'avait  fait  sauver  pendant  la  nuit. 

26.  Hérode  était  ainsi  destiné  à  être  un  jour  le  meur- 
trier d'Hyrcan,  au  mépris  des  bienfaits  que  son  père  et 
lui  en  avaient  reçus. 

27.  Hyrcan  fut  tué  la  quatre-vingtième  année  de  son 
âge  et  la  quarantième  de  son  règne  ;  et  il  n'y  eut  aucun 
des  rois  Asmonéens  dont  la  conduite  fût  plus  digne  de 
louange,  ni  dont  les  mœurs  fussent  plus  pures. 


CHAPITRE     LV 


i.  Erat  Aristobulus  filius  Hyrcani,  ejus  speciei  pul- 
chritudinis,  et  perfectae  habitudinis,  et  intellectus,  cui 
par  sane  non  habebatur  : 

2.  Erat  quoque  Manama  soror  ejus  uxor  Herodis,  si- 
milis illi  in  pulchritudine,  erga  quam  propensus  erat 
Herodes  mirum  in  modum. 

j.  Abhorrebat  au'.em  Herodes  constituere  Aristobu- 
lum  in  sacerdotem  magnum  loco  Hyrcani  patris  ejus,  ne 
propensi  in  eum  Judaei  ob  amorem  patris  constituèrent 
aliquando  in  regem, 

4.  Quare  constituit  quemdam  de  turba  sacerdotem, 
qui  non  erat  de  familia    Hasmonaeorum,    in  sacerdotem. 

<,.  Quod  per  quam  œgre  ferens  Alexandra  mater  Aristo- 
buli,  scripsit  Cleopatras,  rogans  obtinere  littcras  ab  An- 
tonio ad  Herodem,  utamoto  sacerdote,  quem  erexerat, 
constitueret  Aristobulum  filium  suum  in  sacerdotem 
magnum  pro  eo. 

6.  Et  prœstitit  Cleopatra,  rogavitque  Antonium,  ut 
litteras  daret  de  hac  re  ad  Herodem,  et  mitteret  cum 
aliquo  pr*:cipuo  servorum.  Scripsit  itaque  Antonius  lit- 
teras, mittens  cum  Gellio  servo  suo  :  et  veniens  Gellius 
ad  Herodem  obtulit  ei  litteras  Antonii. 

7.  At  Herodes  praestare  abstinuit  quod  scripserat  An- 
tonius, asserens  :  non  esse  consuetudinem  apud  Judaeos, 
deponere  sacerdotem  quempiam  de  gradu  ejus. 

8.  Accidit  vero  ut  Gellius  videret  Aristobulum,  et  de- 
miratus  est  pulchritudinem  formas  et  perfectionem  habi- 
tudinis quas  viderat. 

9.  Quamobrem  depinxit  eiïigiem  illius  similitudinis,  et 
misit  ad  Antonium  subdita  effigiei  scriptura,  dicens  : 
haudquaquam  homo  genuit  Aristobulum,  sed  angélus 
congressus  cum  Alexandra  illum  ex  ipsa  genuit. 

10.  Cum  ergo  pervenisset  effigies  ad  Antonium,  vehe- 
mentissimo  desiderio  conflagravit  videndi  Aristobulum. 
Scripsitque  ad  Herodem  epistolam,  commemorans  ei 
quomodo  constituerai  illum  regem,  et  adversus  hostes 
opem  tulerat,  recensens  sua  erga  illum  bénéficia. 

11.  .Ad  hase  addidit  petens  ut  mitteret  sibi  Aristobu- 
lum, et  minatus  est  ei  pro  hac  re  repetitis  verbis.  Cum 
autem  perlata  esset  epistola  Antonii  ad  Herodem,  recu- 
savit  mittere  Aristobulum,  sciens  quid  intendebat  Anto- 
nius, ac  propterea  dedignatus  est  :  et  festinanter  depo- 
suit  sacerdotem  illum  quem  praefecerat,  constituens 
Aristobulum  in  locum  ejus. 

12.  Et  scripsit  ad  Antonium  significans  ei  se  jam  exe- 
cutioni  mandasse,  antequam  perlata  esset  ejus  epistola, 
quod  scripserat  sibi  ante  de  sufficiendo  Aristobulo  loco 
patris  ejus. 

ij.  Quod  quidem  eo  distulerat,  quia  opportuit  rem 
cum  aliquibus  sacerdotibus,  et  Judœis  tractare,  aliquo 
dierum  intervallo,  cum  esset  res  praeter  consuetudinem  : 
at  re  sibi  ex  sententia  succedente,  statim  praafecit  illum. 

14.  Nec  fas  esse  ipsi  jam  suffecto,  egredi  de  Jerosoly- 
mis,  cum  non  sit  rex,  sed  sacerdos  addictus  ministerio 
templi  :  et  quoties  vellet  illum  cogère  ut  egrederetur, 
recusarent  Judaei,  nec  permutèrent  illi,  etsi  majorem 
eorum  partem  intenmeret. 

15.  Perveniente  ergo  epistola  Herodis  ad  Antonium, 
destitit  petere  Aristobulum  :  et  factus  est  Aristobulus 
Sacerdos  magnus. 


1.  Aristobule  était  fils  d'Hyrcan  et  effaçait  tout  le 
monde  par  sa  beauté,  et  par  mille  autres  perfections  de 
l'esprit  et  du  corps. 

2.  Il  avait  une  sœur  nommée  Mariamne  qui  n'était  pas 
moins  belle  que  lui  et  qui  avait  épousé  Hérode,  dont 
elle  était  éperdument  aimée. 

j.  Cependant  Hérode  ne  voulut  point  donner  à  Aris- 
tobule la  souveraine  sacrificature,  de  peur  que  les  Juifs 
ne  rappelassent  l'attachement  qu'ils  avaient  eu  pour  le 
père  de  ce  prince, et  ne  vinssent  à  lui  déférer  la  couronne. 

4.  C'est  pourquoi  il  éleva  à  cette  dignité  un  simple 
prêtre,  qui  n'était  point  de  la  famille  des  Asmonéens. 

5.  Alexandra,  mère  d'Aristobule,  vivement  offensée  de 
cette  préférence,  écrivit  à  Cléopâtre  et  la  pria  d'engager 
Antoine  à  demander  à  Hérode  la  souveraine  sacrificature 
pour  son  fils,  à  l'exclusion  de  celui  que  ce  prince  en 
avait  déjà  revêtu. 

6.  Cléopâtre  pria  Antoine  d'écrire  une  lettre  à  Hérode 
sur  ce  sujet,  et  de  la  lui  envoyer  par  un  de  ses  prin- 
cipaux officiers.  Gellius  eut  ordre  de  partir  prompte- 
ment,  et,  étant  arrivé  à  la  cour  d'Hérode,  il  lui  présenta 
les  lettres  d'Antoine. 

7.  Hérode  refusa  d'abord  d'exécuter  ce  qu'on  lui  de- 
mandait, protestant  que  le  moindre  de  leurs  prêtres  ne 
pouvait  être  déposé  du  souverain  sacerdoce  quand  une 
fois  on  l'y  avait  élevé. 

0.  Cependant  Gellius  ayant  vu  Aristobule  fut  frappé  de 
sa  beauté  et  des  grâces  qui  éclataient  dans  toute  sa  per- 
sonne. 

9.  Et  sur  le  champ  il  fit  faire  un  portrait  de  ce  prince 
et  l'envoya  à  Antoine,  avec  cette  inscription  qu'il  mit 
au  bas  :  Ce  n'est  point  un  homme  qui  est  le  père  d'Aris- 
tobule, mais  un  ange  qui  l'a  eu  d'Alexandra. 

10.  Antoine  n'eut  pas  plus  tôt  vu  ce  portrait  qu'il  se 
sentit  enflammé  d'un  violent  désir  de  voir  Aristobule  ; 
il  écrivit  donc  aussitôt  une  lettre  à  Hérode,  dans  laquelle 
il  lui  rappelait  le  souvenir  de  tout  ce  qu'il  avait  fait 
pour  l'élever  sur  le  trône  et  l'y  maintenir  contre  les  en- 
treprises de  ses  ennemis. 

11.  Il  le  priait  ensuite  de  lui  envoyer  Aristobule,  et 
lui  faisait  même  plusieurs  menaces  en  cas  de  refus. 
Hérode,  ayant  reçu  la  lettre  d'Antoine,  eut  horreur 
d'exécuter  ce  qu'il  lui  demandait,  sachant  bien  quel  était 
son  dessein,  et  sur  le  champ  il  ôta  la  souveraine  sacri- 
ficature au  prêtre  qu'il  en  avait  revêtu  et  la  donna  à 
Aristobule. 

12.  Il  écrivit  ensuite  à  Antoine,  qu'avant  qu'il  eût  reçu 
sa  seconde  lettre  il  avait  déjà  disposé  du  souverain  sa- 
cerdoce en  faveur  d'Aristobule,  comme  il  l'avait  sou- 
haité d'abord. 

1;.  Qu'il  n'avait  différé  d'exécuter  ses  ordres  que  parce 
que  l'affaire  devait  être  communiquée  à  quelques  prê- 
tres et  à  quelques  autres  Juifs  en  raison  de  sa  nou- 
veauté ;  mais  que  tout  ayant  réussi  selon  ses  désirs,  il  avait 
enfin  nommé  Aristobule  à  la  dignité  de  grand  prêtre. 

14.  Qu'à  présent  Aristobule  ne  pouvait  plus  sortir  de 
Jérusalem,  puisqu'il  n'était  point  roi,  mais  grand  prêtre, 
et  en  cette  qualité  attaché  au  ministère  du  temple  ;  et 
quand  même  il  voudrait  le  contraindre  d'aller  à  Rome, 
les  Juifs  soulfriraient  la  mort  plutôt  que  de  le  permettre. 

15.  Antoine  ayant  reçu  la  lettre  d'Hérode  ne  fit  plus 
d'instance  pour  obtenir  Aristobule,  et  celui-ci  jouit  pai- 
siblement de  sa  nouvelle  dignité. 


ÏV. 


MACCABEES.  —  LV.  -  MORT  D'ARISTOBULE 


!4) 


iO.  Tuin  adfît  solemnitas  tabernaculorum,  et  congre- 
gati  homines  ad  domum  Dei,  viderunt  Aristobulum  ves- 
tibus  sacerdotalibus  indutum,  stantem  ad  altare,  et  au- 
dierunt  eum  sibi  benedicentem, 

17.  Et  placuit  hominibus  adeo,  ut  mirum  in  raodura  in 
illum  suam  ostcntarent  propensioncm. 

18.  Quod  quidem  plene  recognoscens  Herodes  con- 
tristatus  est,  et  timuit  ne  rébus  Aristobuli  robur  acci- 
pientibus,  requireret  ab  illo  regnum,  si  in  longius  protra- 
herentur  dies  ejus  : 

19.  Quare  casdem  illius  machinati  crepit.  Erat  autem 
regibus  in  more  positum,  egredi  post  solemnitatem  ta- 
bernaculorum ad  loca  quasdam  voluptatis  in  Jéricho, 
quas  fecerant  priores  reges  : 

20.  Et  sunt  horti  multipliées  sibi  contigui,  in  quibus 
erant  piscinas  aquarum  latas,  ac  profundœ,  ad  quas  con- 
duxerant  aquas,  et  pulchra  construxerant  prseterea  in 
illis  hortis  :  construxerant  prœterea  in  Jéricho  pulchra 
palatia  et  asdificia  speciosa. 

ai.  Refert  autem  auctor  libri,  arbores  balsami  copiosas 
provenisse  in  Jéricho,  etnullibi  fuisse  nisi  in  ea,  et  reges 
multos  translulisse  ex  illis  in  suam  regionem, 

22.  At  nullaî  creverunt,  nisi  quœ  in  yEgyptum  fuerunt 
translatas,  nec  defecisse  ex  Jéricho,  nisi  destructa  domo 
secunda,  tune  enim  aruerunt,   nec    germinarunt  posthac. 


2j.  Egressus  est  itaque  Herodes  ad  Jéricho  volupta- 
tatem  venans,quem  secutus  est  Aristobulus.  Quibus  per- 
venientibus  Jéricho,  mandavit  Herodes  famulis  quibus- 
dam,  ut  descendentes  in  piscinas  luderent  juxta  morem  : 

24.  Quod  si  vero  descenderit  ad  eos  Aristobulus,  lu- 
dant  cum  eo  tempus  aliquod,  tum  mergant  illum.  Sedit 
autem  Herodes  in  triclinio,  quod  sibi  constituerai  ad  se- 
dendum  :  et  accitum  Herodes  Aristobulum,  ad  latus  se- 
dere  fecit  : 

25.  Sederunt  quoque,  et  principes  puerorum  et  ami- 
corum  ejus  coram  eo,  afferrique  jussit  cibos,  et  potum, 
et  comederunt  et  biberunt,  et  lastati    sunt, 

2b.  Et  properarunt  pueri  ad  aquas  secundum  morem, 
et  luserunt.  Et  peroptavit  Aristobulus  descendere  cum 
eis  ad  aquas,  prœvalente  eis  potu  :  pro  qua  re  facultafem 
petiit  ab  Herode,  cui  respondit:  Hoc  neque  tibi  con- 
venu, nec  decet   tui  similem  : 

27.  Ultro  vero  instantem  hortabatur,  et  prohibebat  : 
at  cum  iterasset  illi  sermonem  Aristobulus,  ait  illi  :  Fac 
ut  tibi  lubet.  Inde  surgens  Herodes  petit  quoddam  pa- 
latium,  ut  cubaret  ibi. 

28.  Et  descendit  Aristobulus  ad  aquas,  lusitque  diu 
cum  pueris  :  qui  cum  cognovissent,  quod  jam  lassus,  at- 
que  defatigatus  ascendere  vellet,  merserunt  illum,  inter- 
fecerunt  et  extulerunt  inde  mortuum  : 

29.  Invaluitque  tumultus  hominum,  et  clamor,  atque 
fletus  elatus  est.  Et  accurrens  Herodes,  egressus  est  ad 
videndum  quid  acciderat  :  qui  cum  vidisset  Aristobulum 
mortuum,  miseratus  est  ejus,  et  flevit  super  eum  tenerri- 
me  fletu  vehementissimo. 

50.  Tum  jussit  deportari  in  civitatem  sanctam,  et  co- 
mitatus  est  eum,  donec  venit  in  civitatem,  coegitque  ho- 
mines adesse  funeri  illius,  nec  quicquam  summi  honoris 
prsetermisit,  quod  ei  non  prasstiterit.  Obiit  autem  cum 
esset  filius  sexdecim  annorum,  et  fuit  pontificatus  ejus 
paucorum  dierum. 


16.  La  fête  des  Tabernacles  arriva  et  les  Juifs  s'étaient 
assemblés  dans  le  temple  du  Seigneur,  quand  ils  virent 
Aristobule,  se  tenant  debout  à  l'autel  et  revêtu  des  or- 
nements sacrés,  et  qu'ils  lui  entendirent  prononcer  les 
bénédictions  sur  le  peuple  ; 

17.  Ils  furent  tellement  charmés,  qu'ils  ne  purent  s'em- 
pêcher de  faire  connaître  le  penchant  qu'ils  avaient 
pour  ce  prince. 

18.  Hérode  s'en  étant  aperçu  en  fut  très  consterné, 
et,  craignant  qu'Aristobule  ne  se  mît  en  état  de  lui  rede- 
mander la  couronne  s'il  lui  en  donnait  le  temps, 

19.  Il  songea  dès  ce  moment  à  s'en  défaire.  Les  rois 
des  Juifs  avaient  coutume  d'aller,  après  les  fêtes  des  Ta- 
bernacles, à  certaines  maisons  de  plaisance  qu'ils  avaient 
à  Jéricho,  et  qui  étaient  l'ouvrage  des  rois  leurs  prédé- 
cesseurs. 

20.  C'étaient  plusieurs  jardins  qui  se  tenaient  ensemble 
et  où  l'on  avait  creusé  de  vastes  et  profondes  piscines 
toutes  remplies  d'eau.  On  y  avait  bâti  de  belles  mai- 
sons, et  Jéricho  était  elle-même  ornée  de  palais  et 
d'édifices  somptueux. 

si.  L'auteur  du  livre  rapporte  qu'il  y  avait  beaucoup 
d'arbres  balsamiques  à  Jéricho,  et  qu'il  n'en  croissait  pas 
ailleurs,  et  que  plusieurs  rois  en  avaient  transplantés 
dans  leur  pays, 

22.  Mais  qu'ils  étaient  tous  morts,  excepté  ceux  qui 
avaient  été  transportés  en  Egypte,  et  que  ceux  de  Jéri- 
cho s'étaient  toujours  conservés  jusqu'à  la  destruction 
du  second  temple  ;  car  alors  ils  séchèrent  et  ne  poussè- 
rent plus  depuis  ce  temps-là. 

2j.  Hérode  partit  donc  pour  Jéricho, 'et  Aristobule  l'y 
accompagna  ;  lorsqu'ils  y  furent  arrivés, Hérode  ordonna 
à  quelques  uns  de  ses  serviteurs  d'aller  se  divertir  à 
l'ordinaire  sur  les  piscines, 

24.  Et  en  cas  qu'Aristobule  y  descendit,  de  s'y  réjouir 
quelque  temps  avec  lui  et  de  le  noyer  ensuite.  Hérode 
cependant  s'assit  dans  un  lieu  qu'il  avait  fait  préparer  à 
ce  dessein  :  il  fit  mettre  Aristobule  auprès  de  lui. 

25.  Et  les  principaux  de  ses  serviteurs  et  de  ses  amis 
s'assirent  aussi  en  sa  présence.  Le  roi  ayant  fait  appor- 
ter des  viandes,  ils  se  livrèrent  à  tous  les  plaisirs  de  la 
table  ; 

26.  Et  ensuite  les  serviteurs  du  roi  coururent  aux  pis- 
cines et  y  prirent  les  exercices  ordinaires.  Aristobule, 
après  qu'ils  eurent  bien  bu,  voulut  aller  se  réjouir  avec 
eux,  et  en  demanda  la  permission  à  Hérode,  qui  lui  ré- 
pondit que  cela  ne  convenait  nullement  à  une  personne 
de  son  rang  et  de  son  caractère, 

27.  Et  l'empêcha  même  d'abord  malgré  tout  ce  qu'il 
put  lui  dire  pour  l'obtenir  ;  mais,  cédant  enfin  à  ses  vives 
instances,  il  lui  dit  qu'il  pouvait  faire  ce  qu'il  lui  plai- 
rait, et,  se  levant  aussitôt,  il  passa  dans  un  de  ses  ap- 
partements pour  s'y  reposer. 

28.  Et  Aristobule  descendit  aux  piscines  et  s'y  divertit 
longtemps  avec  les  autres.  Cependant  les  serviteurs  du 
roi  s'étant  aperçus  qu'il  était  déjà  las  et  fatigué,  et  qu'il 
songeait  à  se  retirer,  ils  le  plongèrent  dans  l'eau  et  l'en 
retirèrent  mort. 

29.  Dans  le  moment,  il  s'excita  parmi  le  peuple  un 
grand  tumulte  accompagné  de  cris  et  de  pleurs  ;  Hérode 
accourut  lui-même  pour  voir  ce  qui  était  arrivé, et  ayant 
trouvé  Aristobule  en  cet  état,  il  déplora  son  sort,  en 
parut  atl:n.!ri,  et  versa  sur  son  corps  des  torrents  de 
larmes. 

;o.  Ensuite  il  le  fit  porter  à  la  ville  Sainte  où  il  l'ac- 
compagna. Il  ordonna  que  tout  le  monde  se  trouvât  à  ses 
funérailles,  et  n'épargna  rien  pour  en  relever  la  pompe. 
Aristobule  mourut  à  l'âge  de  seize  ans, après  un  pontifi- 
cat de  quelques  jours. 


J46  IV.  -   MACCABÉES.  —  LV.   -    MARIAMNE 

?I.  Quamobrem  creverunt  inimicitiae  inter  Alexandram  ji.  Depuis  ce  temps  là  les  inimitiés  s'augmentèrent  en- 

matrem  ejus,  et  filiam  ejus  Mariama  uxorem  Herodis,  et        tre  Alexandra,  mère  d'Axistobule,  et  Mariamne   sa    fille 
inter  matrem  Herodis  et  sororem  ejus.  et  femme  d'Hérode,  d'une  part,  et  lanière  etla  sœur  de 

ce  prince,  de  l'autre. 

?2.  Nota  autem  erant  maledicta  et  opprobria  quae  Ma-  J2.  Les  injures  et»les  opprobres  que  Mariamne  répan- 

riama  in  eas  congerebat,  quae  quidem,  licet  ad  Herodem        dait  contre    ces    princesses    n'étaient  que    trop    publi- 

pervenirent,  non  prohibebat  eam,  neque  reprehendebat,        ques,  et  quoique  Hérode  en  fût  lui  même  instruit  il   les 

pras  nimio  illius  erga  eam  amore  ;  souffrit  néanmoins,  et  ne    songea    pas  à    en    arrêter    le 

cours  à  cause  de  la  passion  violente  qu'il  avait   pour  sa 
femme. 
j  ;.  Timebat  insuper  ne  animo  conciperet,    illum    erga  ;j-  11  craignait  même   outre    cela    que    Mariamne   ne 

eas  esse  propensum  :  hinc  perduraverunt  hase  inter    has        s'imaginât  qu'il  eût  quelque  penchant  pour  ces    princes- 
mulieres.  ses,  et  c'est  ce  qui  nourrit  si  longtemps    ces    mésintelli- 

gences entre  elles. 
?4.  Ccepitque  soror  Herodis  (maxima  quippe    maligni-  j4.  La  sœur  d'Hérode   qui    possédait   à  un  souverain 

tate  et  vehementi  fraude  prœdita  erat)  machinari    contra        degré  la  malignité  et  la  fourberie,  commença     à    tramer 
Mariama.  contre  Mariamne. 

?5.  Mariama  vero  religiosa  erat,  pura,   pudica,    atque  }$.  Quant  à  Mariamne,  c'était  une  princesse    religieu- 

honesta  ;  verum  tangebatur  aliquantulum  superbia,  fastu,        se,  chaste,  vertueuse,  et  d'une    conduite    irréprochable, 
et  odio  erga  maritum.  niais  un  peu  vaine,  pleins  de  hauteur  et   désaffectionnée 

contre  son  mari. 


CHAPITRE   LVI 


i.  Erat  Cleopatra  regina  ^Egypti  uxor  Antonii  :  eosque 
adinveniebat  ornandi  modos,  rationesque  fucandi,  quib'js 
homines  pellicere  feminaî  assolent,  quales  femina  ulla 
in  orbe  adinvenit  ; 

2,  lia  quidem,  ut  cum  esset  mulier  astate  provecta, 
virguncula  puella  videretur,  immo  delicatior,  et  pul- 
chrior. 

j.  Nactusque  est  in  ea  Antonius  eos  pulchritudinum 
modos,  et  rationes  voluptates  conciliantes,  quales  mini- 
me nactus  fuit  in  multiplici  mulierum  numéro,  quibus 
fruebatur. 

4.  Quare  adeo  potita  est  corde  Antonii,  ut  nullus  su- 
perfuerit  in  eo  locus  alieni  amoris.  Induxit  ergo  illum  ad 
expugnandos  reges  quosdam  Romanorum  subditos,  pri- 
vatis  suadentibus  rationibus  ; 

5.  Qui  morem  gessit  ei  in  his,  occidens  quosdam  reges 
ipsa  suadente,  quosdam  vero  superstites  reliquit,  eadem 
prascipiente,  constituens  eos  in  famulos,  et  servos  illi. 

6.  Et  perlatum  est  id  Augusto,  qui  scripsit  ei,  detestans 
ha?c  ac  prohibens,  ne  similia  rursum  perpetrarel. 


7.  Indicavitque  Antonius  Cleopatrae  quod  scripserat 
sibi  Augustus  ;  quas  deficere  ab  Augusto  consilium  illi 
dédit,  remque  reddidit  ei  perfacilem, 

8.  Cujus  sententiae  morem  gerens,  palam  prasvaricatus 
est  in  Augustum,  coegitque  exercitus,  et  apparatus,  ut 
pergeret  per  mare  Antiochiam  indeque  pergeret  per 
terram  ad  occurendum  Augusto,  ubicumque  casus  sese 
obtulerit. 

9.  Accivitque  Herodem,  ut  secum  proficisceretur,  et 
profectus  est  ad  illum  Herodes,  cum  validissimo  exercitu, 
absolutoque  apparatu, 

10.  Qui  cum  pervenisset  ad  illum,  ait  ei  Antonius  : 
Recta  ratio  suadet,  ut  expeditionem  faciamus  in  Arabes, 
et  congrediamur  cum  illis  :  nam  nequaquam  tuti  sumus, 
quin  irrumpant  in  Judasos,  et  regioni  ^Egypti,  quoties 
terga  eis  verterimus. 

1 1.  Et  profectus  est  Antonius  per  mare  :  Herodes  vero 
expeditionem  fecit  in  Arabes  :  misitque  Cleopatra  ducem 
nomine  Athenionem  cum  exercitu  magno  ad  opem  feren- 
dam  Herodi  in  debellandis  Arabibus  :  mandavitque  ei  ut 
constitueret  Herodem,  et  viros  ejus  in  prima  belli  acie, 
et  statueret  cum  rege  Arabum,  ut  concludentes  simul 
Herodem  et  viros  ejus  exterminarent. 

12.  Eam  autem  ad  id  induxerat  cupido  obtinendi  quod 
Herodes  possidebat  :  Alexandra  quoque  ïampridem  roga- 
verat  eam  ut  induceret  Antonium  ad  occidendum  Hero- 
dem, quod  quidem  prœstiterat  :  at  id  perpetrare  Antonius 
renuit. 

ij.  Ad  haec  accessit  quod  Cleopatra  jam  appetiverat 
Herodem  et  concubitum  illius  poposcerat  aliquando, 
qui  sese  continuit,  quoniam  pudicus  erat  ;  et  has  quidem 
sunt  causae  quae  illam  induxerant  ad  praestandum  hase. 

14.  Perveniens  ergo  Athenio  ad  Herodem,  juxta  man- 
datum  Cleopatra?  misitad  statuendum  cum  rege  Arabum, 
ut  illum  concluderet.  Occurrentibus  autem  Herode  et 
suis  Arabibus,  et  bellum  committentibus,  aggressus  est 
Athenio, et  viri  ejus  Herodem, qui  inclusus  est  inter  utrum- 
que  exercitum,et  ingruitpugna  contra  eumanteet  rétro. 


1.  Cléopâtre,  reine  d'Egypte,  était  femme  d'Antoine  ; 
cette  princesse  entendait  mieux  que  personne  l'art  des 
parures,  et  tous  les  artifices  que  les  femmes  ont  coutume 
d'employer  pour  se  faire  aimer  des  hommes; 

2.  En  sorte  que,  dans  un  âge  avancé,  elle  paraissait 
néanmoins  telle  qu'elle  avait  été  dans  sa  première  jeu- 
nesse, et  même  encore  plus  belle  et  plus  gracieuse. 

;.  Antoine  trouvait  en  elle  plus  d'attrait  et  de  charmes, 
qu'il  n'en  eût  pu  trouver  dans  le  grand  nombre  de  fem- 
mes qui  servaient  à  ses   plaisirs. 

4.  C'est  pourquoi  il  lui  livra  tellement  son  cœur,  qu'il 
n'y  restait  plus  de  place  à  une  nouvelle  passion.  Cette 
reine  l'ayant  engagé, par  des  intérêts  particuliers, à  la  dé- 
faire de  quelques  rois  qui  relevaient  de  l'empire  Romain, 

5.  Antoine  marcha  contre  eux,  en  tua  quelques-uns 
dont  elle  lui  demanda  la  mort,  et  en  réserva  d'autres 
qu'elle  voulait  mettre  au  rang  de  ses  esclaves  et  de  ses 
serviteurs. 

6.  Ces  choses  vinrent  jusqu'aux  oreilles  d'Auguste, qui 
en  écrivit  à  Antoine,  lui  marquant  à  quel  point  il  détes- 
tait ces  excès,  et  l'avertissant  de  prendre  garde  qu'il 
arrivât  rien  de  semblable  dans  la  suite. 

7.  Antoine  ayant  fait  voir  à  Cléopâtre  ce  qu'Auguste 
lui  mandait,  elle  lui  conseilla  de  se  tirer  de  servitude, 
et  lui  aplanit  même  toutes  les  difficultés  que  cette  entre- 
prise pouvait  avoir. 

8.  Antoine,  cédant  à  ses  conseils,  se  déclara  ouverte- 
ment, assembla  dis  troupes,  et  se  disposa  à  se  rendre 
par  mer  à  Antioche,  pour  s'avancer  de  là  par  terre  et 
marcher  contre  Auguste  en  quelque  endroit  qu'il  fût. 

9.  Il  sollicita  Hérode  de  l'accompagner  dans  cette 
expédition,  et  ce  prince  partit  aussitôt  à  la  tête  d'une 
armée  nombreuse,  et  pourvue  de  toutes  les  choses 
nécessaires. 

10.  Lorsqu'Hérode  l'eut  joint,  Antoine  lui  dit  :  La  pre- 
mière chose  que  nous  avons  à  faire  est  d'attaquer  les 
Arabes,  et  de  nous  assurer  de  ces  peuples,  car  nous  ne 
pourrions  autrement  les  empêcher  d'entrer  en  Judée  et 
en  Egypte,  dès  que  nous  aurions  quitté  ces  provinces. 

11.  Antoine  s'embarqua,  et  Hérode  marcha  contre  les 
Arabes.  Aussitôt  Cléopâtre  lui  envoya  une  puissante 
armée,  sous  la  conduite  d'un  général  nommé  Athénion, 
à  qui  elle  ordonna  de  mettre  Hérode  au  front  de  la 
bataille,  et  de  convenir  avec  le  roi  des  Arabes  de  l'enve- 
lopper de  concert,  et  de  l'exterminer  lui  et  tous  les  siens. 

12.  Cléopâtre  espérait  par  là  se  rendre  maîtresse  des 
états  d'Hérode,  et  d'ailleurs  Alexandra  la  sollicitait 
depuis  longtemps  de  porter  Antoine  à  faire  mourir  ce 
prince  ;  mais  Antoine  n'y  avait  jamais  voulu  consentir. 

1?.  Cléopâtre,  outre  cela,  avait  voulu  autrefois  inspirer 
de  la  passion  à  Hérode  ;  mais  comme  il  était  chaste,  il 
avait  toujours  rejeté  les  avances  de  cette  reine,  et  ce 
furent-là  les  raisons  qui  lui  firent  prendre  alors  ce  parti. 

14.  Athénion  n'eut  pas  plus  tôt  joint  Hérode,  qu'il 
envoya  traiter  avec  le  roi  des  Arabes  selon  les  ordres 
qu'il  avait  reçus  de  Cléopâtre.  Les  Arabes  ayant  livré  le 
combat,  Athénion  se  tourna  contre  Hérode  qui  se  trouva 
tout  d'un  coup  entre  deux  armées  ennemies,  en  sorte 
qu'il  eut  à  combattre  en  même  temps  et  devant  et  derrière. 


?48 


IV.  —  MACCABEES. 


LVI.  -  VALEUR  D'HÉRODE 


IÇ.  Videns  autem  Herodes  quod  acciderat,  collegit 
suos,  et  pugnavit  accerrime  donec  evaserunt  utruitique 
exercitum,  maximum  post  laborcm,  et  reversus  est  in 
domum  sanctam. 

16.  Et  accidit  terrae  motus  magnus  in  regione  Judas, 
qualis  non  accidit  a  tempore  Harbœ  régis,  quo  periit 
multitudo  magna  hominum,  etanimalium. 

17.  Et  perterruit  hoc  Herodem,  ac  timorem  illi  valde 
incussit,  fregitque  animum  illius.  Inivit  ergo  consilium 
cum  senioribus  Judœ  de  concordia  ineunda  cum  omnibus 
gentibus,  quaî  in  circuitu  eorum  erant,  intendens  pacem, 
et  tranquillitatem,  et  remotionem  beliorum,  ac  sanguinis 
effusionis. 

18.  Misit  itaque  legatos  de  his  ad  gentes,  quaî  omnes 
amplexatœ  sunt  pacem,  ad  quam  eas  invitaverat,  excepto 
Arabum  rege,  qui  jussit  occidi  legatos,  quos  miserat  ad 
illum  Herodes, 

19.  Arbitratus  namque  est,  Herodem  id  fecisse  ob 
deperditos  viros  suos  in  terras  motu,  ac  propterea  debi- 
litatem,  conversum  esse  ad  pacem  ineundam. 

20.  Quare  decrevit  bellum  inire  cum  Herode,  coacto- 
que  magno,  ac  copiosissimo  exercitu,  profectus  est  ad 
eum.  Et  perlatum  est  id  Herodi,  et  contristatus  est  valde 
duabus  de  causis,  una  propter  necem  legatorum  suorum 
quod  nullus  regum  hactenus  perpetraverat  : 

21.  Altéra  quoniam  ausus  est  contra  illum,  concipiens 
animo  illius  infirmitatem  et  virorum  paucitaiem. 

22.  Voluit  autem  ,'ostendere  rem  aliter  se  habere,  ut 
cognoscerent  omnes  ad  quos  legatos  miserat  de  ineunda 
pace  illum  id  nequaquam  prœstitisse  ob  tùnorem  aliquem, 
aut  debilitatem. 

2j.Sed  beneficiorum  atque  boni  desiderio,  ne  quispiam 
auderet  in  Judœos,  aut  infirmitatem  animo  versaret. 


24.  Voluit  prœterea  vindictam  sumere  suorum  lega- 
torum de  rege  Arabum  ;  decrevit  propterea  festinanter 
expeditionem  contra  illum.  Coegit  ergo  homines  de 
regione  Judœ,  et  ait  illis  ; 

25.  Jam  scitis  illatam  ab  Arabe  isto  nostris  legatis 
cœdem,  quod  nullus  regum  hactenus  perpetravit  : 

26.  Existimat  enim  nos  infirmatos  esse,  atque  impo- 
tentes effectos,  aususque  est  nos  impetere,  oinniaque 
sua  optata  de  nobis  seconsecuturum  putat  :  nec  desistet 
quidem  nobis  bellajugiter  inferre. 

27.  Quare  obtendendum  voDis  est  in  ardua,  ut  ves- 
tram  palam  faciatis  fortitudinem,  et  subju^etis  hostes 
vestros,  et  prœdas  eorum  referatis;  quanquam  res  ali- 
quando  secunda,  aliquando  vero  adversa  sese  nobis 
exhibuerit,  secundum  mundi  hujus  morem  et  solitas  vi- 
cissitudines. 

28.  Profecto  expeditio  vobis  modo  facienda  est  ad 
sumendam  oppressorum  istorum  vindictam,  et  compes- 
cendam  audaciam  cunctorum,  qui  vos  floccifaciunt. 

29.  Si  vero  dixentis  :  Terras  motus  hic  infirmavit  corda 
nostra,et  multitudinem  plurimam  ex  nobis  perdidit;  scitis 
profecto  quod  nullum  ex  bellatoribus  viris  exterminavit, 
sed  quosdam  alios. 

30.  Nec  a  ratione  distare  existimandum  nobis  est,  eum 
perdidisse  pessimos  gentis,  optimos  vero  superstites 
reliquisse.  Haud  dubium  quoque  est,  hune  meliora  red- 
didisse  corda  vestra,  et  conscientias  vestras. 

51.  Partes  autem  illius,  quem  exemit  Deus  a  perdi- 
tione,  et  ab  exterminio  li'oeravit,  exigunt  ut  ei  obediat, 
faciatque  quod  bonum  ac  rectum  est. 

5:.  Et  quidem  nulla  obedientia  honoratior,  aut  glo- 
riosior  est,  quam  repetere  jus  oppressi  ab  oppressore, 
et  hostes  Dei,  ac  religionis    ejus,   et    gentis    debellare, 


15.  Hérode,  dans  cette  extrémité,  rassembla  ses  trou- 
pes, se  battit  avec  une  valeur  extrême,  et,  après  une 
longue  résistance,  il  se  fit  jour  à  travers  les  deux  armées 
et  revint  à  la  ville  Sainte. 

16.  En  ce  temps  là,  il  y  eut  en  Judée  un  grand  tremble- 
ment de  terre  dans  lequel  périt  un  grand  nombre 
d'hommes  et  d'animaux,  et  il  n'en  était  point  arrivé  de 
semblable  depuis  le  roi  Harbas. 

17.  Hérode  en  fut  fort  effrayé,  et,  dans  le  trouble  où 
cet  événement  l'avait  jeté,  il  proposa  aux  anciens  de 
Juda  d'offrir  la  paix  aux  nations  voisines,  afin  de  rétablir 
partout  le  bonheur  et  la  tranquillité,  en  arrêtant  le  cours 
de  la  guerre  et  des  meurtres. 

18.  Dans  cette  vue,  il  envoya  des  ambassadeurs  à  ces 
nations  qui  acceptèrent  toutes  la  paix  qu'on  leur  offrait 
à  la  réserve  du  roi  des  Arabes,  qui  fit  mourir  les  ambas- 
sadeurs qu'Hérode  lui  avait  envoyés, 

19.  S'imaginant  que  ce  prince  ne  voulait  la  paix  que 
parce  qu'il  n'était  plus  en  état  de  soutenir  la  guerre, 
après  avoir  perdu  une  grande  partie  de  ses  sujets  dans 
un  tremblement  de  terre  : 

20.  C'est  pourquoi  il  résolut  de  lui  faire  la  guerre,  et 
marcha  contre  lui  avec  une  armée  formidable.  Hérode, 
ayant  appris  ces  nouvelles,  fut  extrêmement  affligé  que, 
contre  un  droit  qu'aucun  roi  n'avait  encore  violé,  l'on 
eût  mis  à  mort  ses  ambassadeurs, 

21.  Et  que,  sur  une  fausse  assurance  de  sa  faiblesse  et 
du  petit  nombre  de  ses  forces,  le  roi  des  Arabes  eût  osé 
former  le  dessein  de  lui  faire  la  guerre. 

22.  Il  voulut  donc  effacer  ces  préventions,  et  faire  con- 
naître à  tous  les  peuples  à  qui  il  avait  fait  offrir  la  paix, 
que,  s'il  la  recherchait,  ce  n'était  point  qu'il  fût  frappé  de 
quelque  crainte  ou  qu'il  manquât  de  soldats  ; 

2;.  Qu'il  n'avait  d'autre  vue  que  celle  de  leur  procurer 
du  bien  :  Il  le  fit  afin  qu'aucun  d'eux  n'osât  prendre  les 
armes  contre  les  Juifs,  dans  l'espérance  qu'ils  ne  seraient 
point  en  état  de  leur  résister. 

24.  Il  songea,  outre  cela,  à  venger  la  mort  de  ses 
ambassadeurs,  et  résolut  de  marcher  promptement  contre 
le  roi  des  Arabes.  Il  assembla  donc  les  peuples  de  Judée, 
et  leur  parla  en  ces  termes  : 

25.  Vous  savez  de  quelle  manière  le  roi  des  Arabes  a 
fait  mourir  nos  ambassadeurs,  en  violant  les  droits  que 
tous  les  rois  avaient  jusque  là  respectés. 

26  II  se  persuade  que  nous  sommes  affaiblis,  et  hors 
d'élat  de  lui  résister  :  il  a  osé  nous  attaquer,  et  ne  ces- 
sera de  nous  faire  la  guerre  qu'il  n'ait  remporté  sur  nous 
les  avantages  dont  il  se  flatte. 

27.  C'est  pourquoi  il  faut  tout  entreprendre,  et  signaler 
votre  valeur  à  triompher  de  vos  ennemis,  et  à  vous  en- 
richir de  leurs  dépouilles,  quoique,  selon  les  vie  issitudes 
ordinaires,  nous  ayons  éprouvé  tour  à  tour  la  bonne  et 
la  mauvaise  fortune. 

28.  Il  s'agit  donc  maintenant  de  venger  la  mort  de  nos 
ambassadeurs,  et  d'aller  réprimer  l'audace  de  ceux  qui 
nous  traitent  avec  mépris. 

;9.  Si  cependant  vous  alléguez  que  ce  dernier  tremble- 
ment de  terre  vous  a  ôté  le  courage  en  vous  enlevant 
un  grand  nombre  de  vos  frères,  sachez  qu'aucun  de  nos 
hommes  de  guerre  n'y  a  péri. 

;o.  Et  d'ailleurs,  n'avons-nous  pas  lieu  de  croire  qu'en 
abîmant  les  plus  méchants  de  la  na'ion,  il  a  épargné  les 
gens  de  bien,  et  qu'il  vous  a  portés  à  purifier  de  plus  en 
plus  vos  cœurs  et  vos  consciences. 

ji.  Ainsi,  il  est  juste  que  ceux  que  Dieu  a  garantis  du 
péril  et  de  la  mort  lui  obéissent,  en  pratiquant  le  bien 
et  la  justice  : 

32.  Et  certes,  l'obéissance  la  plus  éclatante  et  la  plus 
glorieuse  est  de  prendre  en  main  la  défense  des  oppri- 
més et  de  soumettre  les  ennemis  de  Dieu,  de  sa  religion 


IV. 


MACCABEES.  —  LVI.  -  SES  VICTOIRES  SUR  LES  ARABES 


349 


opem  ferendo  iis,  qui   obedientiam  atque   obsequium  illi 
exhibent. 

;j.  Nec  vos  latet,  quid  nobis  jam  accidit  cum  Arabibus 
istis,  quando  nos  incluserant  cum  Athenione,  et  quomodo 
Deus  optimus  maximus  opitulatus  nobis  est  contra  eos, 
nosque  ab  eis  eripuit. 

J4.  Timetc  itaque  Deum,  sequentes  antiquum  morem 
vestrum,  prœdecessorumque  vestrorum  laudabilem  mo- 
rem, et  expedite  vos  contra  hostem  hune  antequam  sese 
expédiât  contra  vos,  et  prœveniat  :  et  Deus  suppedi- 
tabit  vobis  auxilium,    et  opem  contra  inimicum  vestrum. 

?).  Audita  itaque  Herodis  oratione,  responderunt 
homines  se  ad  expeditionem  paratos  esse,  nec  remoratu- 
ros. 

j6.  Et  gratias  egit  Deo  et  illis  pro  re,  prcecepitque 
mulla  offerri  sacrificia  :  item  exercitum  cogi  mandavit, 
et  coacta  est  multitudo  magna  de  tribu  Judse,  et  Benja- 
min. 

??.  Et  profectus  ad  regem  Arabum,  occurrit  illi  Hero- 
des,  invaluitque  pugna  inter  eos,  interlectisde  Arabibus 
quinque  milhbus  virorum. 

38.  Rursus  commissum  est  praîiium,  et  cassa  de  Arabi- 
bus quatuor  millia  :  quare  reversi  sunt  Arabes  ad  sua 
castra,  moratique  sunt  ibi,  nec  potuit  contra  eos  I  lerodes 
quicquam  ;  quippe  munitus  erat  locus  : 

59.  Verum  perstitit  cum  exercitu  suo,  obsidens  eos 
eodem  in  loco,  atque  exire  prohibens.  Et  manserunt  in 
hoc  statu  quinque  dies,  invasitque  eos  vehementissima 
sitis  :  miserunt  ergo  ad  Herodem  legatos  cum  pretiosis- 
simo  munere,  rogantes  inducias,  et  facultatem  hauriendi 
aquas  ad  bibendum  : 

40.  Verum  nequaquam  illis  acquievit,  sed  eodem  in 
furore  perstitit.  Tune  ergo  dixerunt  Arabes  :  Egrediamur 
adgentemjnam  aut  vincere,  aut  mori,  conducibilius 
nobis  est  quam  periresiti. 

41.  Et  egressi  sunt  ad  eos,  quos  superantes  Hero- 
diani,  interfecerunt  ex  illis  novem  millia  virorum,  et 
fugientes  Arabes  secutus  est  Herodes  cum  suis,  inter- 
empta  multitudine  plurima  :  et  obsedit  eorum  civlta- 
tes,  atque  expugnavit. 

42.  Quamobrem  petunt  sibi  securitatem  prœstita  ei 
obedientia  ;  quibus  acquiescens  recessit  ab  eis,  et  rever- 
sus  est  in  domem  sanctam. 

4;.  Arabes  quidem  memorati  in  hoc  libro  sunt  Arabes, 
qui  habitabant  a  regione  Sarah  usque  ad  Hegiaz,  et  adja- 
cer.tia  ;  erantque  magnae  famœ,  et  multitudinis. 


et  de  son  peuple,  en  secourant  ceux  qui  lui  rendent  un 
culte  plein  de  soumission. 

J2.  Et  vous  n'ignore/  pas  ce  qui  nous  est  déjà  arrivé  à 
l'égard  des  Arabes,  lorsque,  de  concert  avec  Athénion, 
ils  nous  avaient  enveloppés  de  leurs  troupes,  et  comment 
le  Dieu  très  bon  nous  tira  de  leurs  mains  par  son  secours 
tout  puissant. 

i4.  Craignez  donc  le  Seigneur,  comme  vous  l'avez 
toujours  craint  à  l'exemple  de  vos  pères;  armez-vous 
contre  l'ennemi  avant  qu'il  ait  eu  le  temps  de  former  des 
desseins  contre  vous,  prévenez-le,  et  Dieu  vous  en  fera 
triompher  par  la  protection  qu'il  vous  accordera. 

;;.  Quand  Hérode  eut  cessé  de  parler,  ils  répon- 
dirent tous  qu'ils  étaient  prêts  à  marcher  à  l'ennemi,  et 
que  rien  ne  retarderait  en  eux  l'ardeur  de  combattre. 

;6.  Après  avoir  rendu  grâces  à  Dieu,  et  les  avoir 
remerciés  de  leur  bonne  volonté,  Hérode  ordonna  qu'on 
oïl'rit  plusieurs  sacrifices  :  il  fit  faire  en  même  temps  des 
levées  de  soldats,  et  il  s'en  trouva  un  grand  nombre 
dans  les  tribus  de  Judaet  de  Benjamin. 

37.  S'étant  aussitôt  avancé  vers  le  roi  des  Arabes,  il 
lui  livra  bataille;  l'on  se  battit  vivement  de  part  et 
d'autre,  et  les  Arabes  y  perdirent   cinq   mille  des  leurs. 

38.  11  y  eut  un  second  combat  où  ils  en  perdirent 
encore  quatre  mille  ;  c'est  pourquoi  ils  rentrèrent  dans 
leur  camp  et  s'y  tinrent  renfermés  sans  qu'Hérode 
pût  rien  entreprendre  contre  eux  à  cause  de  la  nature 
du  lieu. 

59.  Cependant  il  investit  leur  camp  avec  toute  son 
armée  et  leur  ôta  la  liberté  d'en  sertir;  il  y  avait  cinq 
jours  qu'ils  étaient  en  cet  état,  lorsque,  pressés  d'une 
soif  très  violente,  ils  envoyèrent  des  ambassadeurs  à 
Hérode  avec  de  riches  présents,  le  conjurant  de  leur 
accorder  quelque  trêve  et  la  liberté  d'aller  puiser  de 
l'eau  pour  éteindre  l'ardeur  de  leur  soif. 

40.  Mais  Hérode,  sans  rien  relâcher  de  sa  colère, 
n'écouta  point  leurs  prières  ;  alors  les  Arabes  se  dirent 
l'un  à  l'autre  :  Allons  nous  faire  jour  à  travers  les  enne- 
mis ;  car  il  vaut  beaucoup  mieux  s'exposer  à  vaincre  ou 
à  mourir  que  de  périr  ici  par  la  soif. 

41.  Ils  sortirent  aussitôt  de  leur  camp,  et  furent  vain- 
cus par  les  Juifs,  qui  en  tuèrent  neuf  mille.  Hérode 
poursuivit  ensuite  les  fuyards,  en  fit  un  grand  carnage,  il 
assiégea  les  villes  des  Arabes  et  s'en  rendit  maître. 

42.  Et,  après  leur  avoir  accordé  la  sûreté  qu'ils  lui 
demandèrent  avec  toute  sorte  de  soumission,  il  les  quitta 
et  revint  à  Jérusalem. 

4J.  Or  les  Arabes  dont  il  est  parlé  dans  ce  livre  sont 
ceux  qui  habitaient  depuis  Sarah,  jusqu'à  Hégiaz  (Hedjaz) 
et  auxenvirons,  etils  étaient  célèbres,et  engrand  nombre. 


CHAPITRE  LVII 


i.  Cum  profectus  esset  Antonius  ex  >*£gypto  in  regio- 
nem  Romanorum,  et  occurrisset  Augusto,  commissa 
sunt  inter  eos  maxima  prœlia,  in  quibus  victoria  cessit 
Augusto,  et  periit  Antonius  in  bello  ;  obtinuitque  Augus- 
tus  castra  illius,  et  quicquid  in  eis  erat. 

2.  Hisperactis,  perrexit  in  Rhodum,  ut  ex  inde  con- 
scenso  mari,  proficisceretur  in  /Egyplum.  Et  perlatum 
est  nuntium  Herodi,  anxiatusque  est  valde  de  interitu 
Antonii,  et  timuit  Augustum  timoré  vehementissimo,  de- 
crevitque  adiré  illum  salutaturus,  atque  gratulaturus. 

î.  Quare  misit  matrem  suam,  et  sororem  cum  fratre 
suo  ad  arcem,  quam  habebat  in  monte  Sarah  ; 

4.  Misit  quoque  uxorem  suam  Mariamam,  et  matrem 
ejus  Alexandram  cum  Joseplio  Tyrio  in  Alexandrium, 
adjurans  eum  occidere  uxorem  et  matrem  illius,  quoties 
nuntiatus  illi  fuerit  ejus  obitus. 

<,.  Post  hase  adiit  cum  pretiosissimo  munere  Augustum. 
Jam  autem  decreverat  Augustus  occidere  Herodem, 
quod  fuisset  amicus  Antonii,  et  fautor  illius,  quod  et 
jam  deliberasset  proficisci  cum  i  11  o  contra  Augustum. 

6.  Cum  ergo  nuntiatus  esset  Augusto  adventus  Hero- 
dis,  eum  coram  adesse  mandavit  cum  regio  habitu,  quem 
habebat,  excepto  diademate,  deponendum  namque  e 
capite  jusserat. 

7.  Qui  cum  coram  eo  adstitisset,deposito  e  capite  dia- 
demate, ut  praeceperat  Augustus,  ait  :  O  rex,  forte  ob 
amorem  meum  erga  Antonium  excanduisti  adversus  me, 
ut  deponeres  diadema  a  capite  meo,  an  alia  de  causa  ? 

8.  Quando  quidem  si  excandescis  adversus  me,  obse- 
quii  mei  causa  erga  Antonium,  vere  inquam,  illi  obse- 
quebar,  quoniam  benemeritus  est  de  me,  et  imposuit 
capiti  meo  diadema  quod  tu  deposuisli  a  me. 

9.  Et  quidem  imploraverat  opem  meam  contra  te 
quam  exhibui  ei,  quemadmodum  exhibuit  et  ipse  mini 
pluries  opem  suam;  at  mihi  non  contigit  adfuisse  prœlio, 
quod  in  te  commisit,  nec  strinxi  gladium  meum  contra 
te,  neque  conflixi  :  quod  sane  in  causa  fuit  mea  occu- 
patio  in  debellandis  Arabibus. 

10.  Attamen  haudquaquain  prœtermisi,  quin  illi  suppe- 
ditassem  opem  virorum,  et  armorum,  et  commeatuum, 
prout  exigebar.t  ejus  amicitia,  et  mérita  erga  me. 

11.  Et  profecto  mœreo  me  illum  deseruissse,  ne  con- 
ciperent  homines  me  dereliquisse  amicum  cum  mei  indi- 
geret. 

ir.  Equidem  si  cum  illo  fuissem,  pro  viribus  illi  opem 
tulissem,  et  animos  addidissem  si  timuisset,  et  corrobo- 
rassem  si  infirmatus  fuisset,  et  élevassent  si  cecidisset, 
donec  sanxisset  Deus  qua2  sibi  placuissent. 

Ij;  Et  sane  hoc  mihi  levius  fuisset,  quam  ut  concipe- 
retur,  me  defuisse  illi,  qui  meam  imploraverat  opem,  in- 
deque  fiet,  ut  Mocci  haberetur  mea  amicitia. 

14.  Mea  quidem  sententia  suo  ipsius  periit  malo  con- 
silio,  acquiescendo  Cleopalrœ  magae,  quam,  consule- 
rain  ei,  ut  occideret,  et  amoveret  a  se  malitiam  ejus  ; 
verum  non  acquievit. 


1.  Antoine  étant  passé  d'Egypte  en  Italie  marcha  à  la 
rencontre  d'Auguste,  et  il  y  eut  entre  eux  des  combats 
sanglants,  Antoine  y  laissa  sa  vie;  et  Auguste,  étant  en- 
tré victorieux  dans  le  camp  ennemi,  se  rendit  maître  de 
tout  ce  qui  y  était. 

2.  Il  vint  ensuite  à  Rhodes  dans  le  dessein  de  passer 
la  mer  et  d'aller  en  Egypte.  Hérode,  ayant  appris  la  mort 
d'Antoine,  en  fut  extrêmement  troublé,  et,  craignant  le 
ressentiment  d'Auguste,  il  résolut  de  venir  trouver  ce 
prince,  pour  le  saluer  et  le  féliciter  de  sa  victoire. 

5.  Dans  cette  vue,  il  envoya  sa  mère  et  sa  sœur  sous 
la  conduite  de  son  frère,  dans  la  forteresse  qu'il  avait 
sur  le  mont  Sarah  ; 

4.  Et  chargea  Josèphe  leTyrien  de  conduire  à  Alexan- 
drie Mariamne  sa  femme,  et  Alexandra  la  mère  de  cette 
princesse,  le  conjurant  en  même  temps  de  les  tuer  toutes 
deux  aussitôt  qu'il  aurait  appris  sa  mort. 

5.  Hérode  partit  ensuite  avec  de  riches  présents  et  se 
rendit  auprès  d'Auguste,  qui  avait  déjà  pris  la  résolution 
de  le  faire  mourir,  parce  qu'il  avait  été  l'ami  d'Antoine, 
qu'il  s'était  attaché  à  son  parti,  et  qu'il  s'était  môme  dé- 
cidé à  le  suivre  en  Italie. 

6.  Auguste,  ayant  su  l'arrivé  d'Hérode,  voulut  que  ce 
prince  parût  en  sa  présence  avec  toutes  les  marques  de 
la  royauté,  à  la  réserve  du  diadème  qu'il  lui  fit  ordon- 
ner de  quitter. 

7.  Hérode  se  présenta  donc  devant  Auguste,  sans  dia- 
dème selon  l'ordre  qu'il  en  avait  reçu,  et  parla  en  ces 
termes  :  O  roi  !  serait-ce  l'attachement  que  j'ai  eu  pour 
Antoine,  ou  quelque  autre  raison  qui  a  excité  votre  co- 
lère contre  moi  et  vous  a  porté  à  m'ôter  le  diadème  ? 

8.  Il  est  vrai  que  je  me  suis  attaché  aux  intérêts  d'An- 
toine, parce  qu'il  était  mon  bienfaiteur  ;  et  c'est  lui  qui 
m'a  mis  sur  la  tête  le  diadème  que  vous  m'ôtez  aujour- 
d'hui. 

9.  Je  n'ai  pu  lui  refuser  le  secours  qu'il  me  demandait, 
puisqu'il  m'avait  si  souvent  accordé  le  sien  ;  mais  je  ne 
me  suis  pas  trouvé  au  combat  qu'il  vous  a  livré,  et  je  n'y 
ai  point  paru  combattant  contre  vous  l'épée  à  la  main, 
j'étais  alors  occupé  à  soumettre  les  Arabes. 

10.  Cependant  je  n'ai  rien  négligé  pour  fournir  à  An- 
toine des  secours  d'hommes,  d'armes  et  de  vivres, 
comme  l'exigeaient  les  droits  de  l'amitié  et  la  reconnais- 
sance de  ses  bienfaits; 

11.  Et  certes  je  regrette  de  l'avoir  abandonné;  je  crains 
qu'on  ne  s'imagine  que  j'ai  manqué  à  mon  ami  lorsqu'il 
avait  besoin  de  moi. 

12.  Car  si  je  me  fusse  trouvé  alors  auprès  de  lui,  je 
l'aurais  secouru  de  tout  mon  pouvoir  ;  j'aurais  dissipé  ses 
terreurs,  fortifié  ses  faiblesses  et  réparé  ses  pertes,  jus- 
qu'à ce  que  Dieu  en  eût  enfin  ordonné,  selon  sa  volonté 
toute-puissante, 

ij.  Et  cela  m'aurait  paru  beaucoup  plus  supportable 
que  le  peu  de  cas  qu'on  fera  désormais  de  mon  amitié, 
depuis  qu'on  a  pu  croire  que  j'ai  manqué  à  un  ami  qui 
implorait  mon  secours. 

14.  Je  suis  cependant  convaincu  qu'Antoine  n'a  péri 
que  par  sa  propre  faute,  en  acquiesçant  aux  conseils 
enchanteurs  de  Cléopâire,  dont  je  lui  demandais  la 
mort,  comme  l'unique  moyen  qui  lui  restait  de  se  garan- 
tir de  la  malice  de  cette  femme  ;  mais  il  refusa  de 
m'écouter. 


IV.  —  MACCABEES.  —  LVII.       AUGUSTE     ET    HERODE 


35' 


i$.  Nunc  vero  si  removisti  a  capite  meo  diadema, 
certe  non  removebis  a  me  intellectum,  et  fortitudinem 
meam,et  qualis  sum,  ero  amicus  amicis,  et  hostis  hosti- 
bus  meis. 

iô,  Cui  ait  Augustus  :  Utique  superavimus  Antonium 
viris  nostris,  te  vero  superavimus  allicientes  te,  et  ut 
duplicior  sit  erga  nos  amor  tuus  mediantibus  beneficiis 
nostris  in  te,  curabimus,  quoniam  his  dignus  es. 


17.  Et  quemadmodum  praavaricatus  est  Antonius  con- 
silio  Cleopatrae,  pari  ratione  ingratus  se  gessit  erga  nos, 
rependens  pro  beneficiis  nostris  mala,  et  pro  gratiis 
rebellionem. 

18.  Nos  vero  acceptum  habemus  bellum  quod  in- 
tulisti  Arabibus,  qui  sunt  hostes  nostri  :  nam  quicuroque 
vobis  hostis  est,  iste  nobis  est  ;  qui  autem  vobis  obse- 
quitur,  idem  et  nobis  prasstat. 

19.  Tum  prascepit  Augustus  poni  capiti  Herodis 
aureum  diadema,  ac  totidem  provincias,  quot  possidebat, 
ipsi  addi. 

20.  Et  profectus  est  Herodes  cum  Augusto  in  ACgyptum, 
traditaque  sunt  ei  omnia  quaa  Antonius  decreverat  Cleo- 
patras. 

21.  Et  abiit  Augustus  Romam  ;  Herodes  vero  reversus 
est  in  civitatem  sanctam. 


1^.  Maintenant  donc  si  vous  m'ôtez  le  diadème,  du 
moins  ne  m'ôterez-vousni  mes  sentiments,  ni  ma  valeur  ; 
et,  quelle  que  soit  ma  condition,  je  serai  l'ami  de  mes 
amis,  et  l'ennemi  de  mes  ennemis. 

16.  Auguste  répondit  à  Hérode  en  ces  termes  :  Nous 
avons  triomphé  d'Antoine  par  la  force  de  nos  armes, 
mais  nous  n'emploierons  contre  vous  que  des  caresses  ; 
et  par  des  bienfaits,  dont  vous  n'êtes  que  trop  digne, 
nous  vous  forcerons  d'avoir  pour  nous  plus  d'attache- 
ment que  vous  n'en  avez  eu  pour  Antoine, 

17.  Et  s'il  a  été  assez  ingrat  que  de  préférer  les  con- 
seils de  Cléopâtre  aux  vôtres,  il  ne  l'a  pas  été  moins 
envers  nous,  en  nous  rendant  le  mal  pour  le  bien, 
et  en  se  servant  de  nos  bienfaits  pour  se  soulever  contre 
nous. 

18.  Nous  approuvons  la  guerre  que  vous  avez  faite 
aux  Arabes  ;  nous  les  regardons  comme  nos  ennemis, 
puisqu'ils  sont  les  vôtres,  et  désormais  vous  déciderez 
de  ceux  que  nous  devons  mettre  au  rang  de  nos  amis  et 
de  nos  ennemis, 

19.  Alors  Auguste  ordonna  qu'on  mit  un  diadème  d'or 
sur  la  tête  d'Hérode,et  lui  donna  une  fois  autant  de  pro- 
vinces qu'il  en  possédait  déjà. 

20.  Hérode  étant  passé  en  Egypte  avec  Auguste,  reçut 
de  la  libéralité  de  ce  prince  tout  ce  qu'Antoine  avait 
destiné  à  Cléopâtre. 

21.  Auguste  reprit  ensuite  le  chemin  de  Rome,  et 
Hérode  s'en  revint  à  la  ville  sainte. 


CHAPITRE    LVIII 


1.  Jam  vero  revelaveral  Josephus  maritus  sororis  He- 
rodis  Manama?,  quod  Herodes  sibi  praecepisset  :  illam 
cura  matie  interficere.  quoties  ipse  occubuisset  in  sua 
profectione  ad  Augustum. 

2.  Et  quidem  ipsa  odio  jampridem  habebat  Herodem, 
ex  quo  interfecit  patrem,  et  fratrem  illius  ;  his  non  minor 
facta  est  odii  accessio,cum  innotuisset  ei  quod  mandave- 
rat  contra  illam. 

?.  Cum  ergo  adventassct  ex  /Egypto  Herodes,  reperit 
illam  odiis  eiga  se  quam  maxime  ebriam  :  quod  sane 
perquam  aagre  ferens,  aggressus  est  illam  sibi  reconci- 
liare  omnibus,  quos  poterat,  modis. 

<.  Venit  autem  soror  ejus  quadam  die,  post  conten- 
tiones  quaa  intercesserant  inter  illam  et  Mariamam,  et 
dixit  ei  :  Utique  Josephus  maritus  meus  secessit  cum 
Mariama. 

5.  Herodes  vero  non  acceptavit  verba  illius,  sciens 
quam  pura  esset  Mariama  atque  pudica.  Post  hase  in- 
visit  Herodes  Mariama  ca  nocte,  quae  hune  sequitur 
diem,et  blar.ditus  est  ei.  atque  assentatus,  commemorans 
suum  erga  illam  amorem,  mulla  de  his  insinuans  : 

6.  Cui  illa  ait  :  Num  vidisti  aliquem  amare  quempiam, 
et  praccipere  illum  occidi  ?  et  num  osor  nisi  talia  prass- 
tat  - 

7.  Tune  cognovit  Herodes,  Josephum  jam  aperuisse 
Mariamae  arcanum  quod  illi  crediderat,  et  quod  id 
nequaquam  prœstitisset,  nisi  illa  ipsi  sui  copiant  fecis- 
set  : 

8.  Et  credidit  ea  quœ  sibi  soror  de  hac  re  detulerat, 
et  illico  recedens  a  Mariama,  odio  illam  habuit,  atque 
detestatus. 

9.  De  qua  re  certior  facta  soror  ejus,  adiit  pincernam, 
et  ob'.ata  pecunia,  tradidit  ei  non  nihil  veneni,  et  ait  : 
Hoc  ferto  régi,  et  dicito  illi  :  Mariama  uxor  régis  tradi- 
dit mihi  hoc  venenum,  et  pecuniam  hanc,  mandans  im- 
misceri  potui  régis  : 


10.  Quod  prasstitit  pincerna.  Videns  autem  rex  vene- 
num, haud  hassit  de  veritate  rei  :  quare  mandat  illico 
percuti  collum  Josephi  sororii, 

11.  Mandat  prœterea  Mariamam  vinculis  haberi,  donec 
adessent  septuaginta  senes,  et  justam  proferrent  in  eam 
sententiam. 

12.  Timuit  itaque  soror  Herodis  ne  revelaretur  quod 
molita  erat,  et  periret  ipsa,  liberata  Mariama  ;  et  ait  illi  : 
Rex,  si  distuieris  necem  Mariamœ  in  crastinum,  nequa- 
quam id  assequi  poteris  : 

ij.  Nam  quoties  innotuerit,quod  illam  occidere  velles, 
conveniet  tota  domus  patris  ejus  et  omnes  servi,  ac 
propinqui  eorum,  et  sese  interponent,  nec  pervenire 
valebis  ad  illius  necem,  nisi  niagnos  post  furores: 

14.  Et  ait  Herodes  :  Facile  quod  vobis  videtur.  Et  fes- 
tinanter  misit  soror  Herodis  qui  educeret  Mariamam  ad 
locum  candis, agens  in  illam  ancillas  suas,  aliasque  mulieres 
ut  injuriis  eam  aflicerent,  et  objicerent  omr.e  genus 
obscenitatis  : 


1.  Josèphe  avait  déjà  découvert  à  Mariamne  sa  belle- 
sœur,  femme  d'Hérode,  l'ordre  que  ce  prince  lui  avait 
donné  en  partant  pour  se  rendre  auprès  d'Auguste, lors- 
qu'il le  chargea  de  la  tuer,  elle  et  sa  mère,  aussitôt  qu'il 
aurait  appris  sa  mort. 

2.  Et  d'ailleurs  Mariamne  ne  pouvait  souffrir  Hérode 
depuis  qu'il  avait  fait  mourir  son  père  et  son  frère; 
mais  sa  haine  devint  encore  plus  furieuse  quand  elle  sut 
les  ordres  barbares  qu'il  avait  donnés  contre  elle. 

;.  Hérode,  à  son  ictour  d'Egypte,  la  trouva  dans  ces 
affreuses  dispositions  à  son  égard,  et  ne  pouvant  sup- 
porter ses  ressentiments,  il  chercha  par  toutes  sortes 
de  moyens  à  se  réconcilier  avec  elle. 

4.  Cependant  sa  sœur  vint  le  trouver  au  sujet  de  quel- 
ques contestations  survenues  entre  elle  et  Mariamne,  et 
l'avertit  que  Josèphe,  son  mari,  s'était  trouvé  seul  avec 
cette  princese  dans  un  lieu  écarté. 

5.  Mais  Hérode  ne  la  crut  point,  parce  qu'il  connais- 
sait la  pudeur  et  la  sagesse  de  Mariamne.  La  nuit  sui- 
vante,il  se  rendit  auprès  d'elle  et  employa  toutes  sortes 
de  caresses  et  de  complaisances  pour  lui  témoigner  à 
quel  point  il  l'aimait. 

6.  Mais  elle  n'y  répondit  que  par  des  reproches:  Est- 
ce  aimer  une  personne,  lui  répondit-elle,  que  de  donner 
des  ordres  pour  la  faire  mourir,  et  n'est-ce  pas  plutôt  la 
haïr  véritablement  ? 

7.  Hérode  reconnut  alors  que  Josèphe  avait  découvert 
à  Mariamne  le  secret  qu'il  lui  avait  confié,  et  que  cette 
confidence  ne  pouvait  même  être  que  le  prix  des  fa- 
veurs qu'il  avait  reçues  de  cette  princesse. 

3.  Ainsi  ne  doutant  plus  de  la  vérité  des  choses  que  sa 
sœur  lui  avait  rapportées,  il  se  sépara  sur  le  champ 
de  Mariamne,  et  n'eut  plus  pour  elle  qu'une  haine  af- 
freuse. 

9.  Cependant  la  sœur  d'Hérode,  instruit  de  tout  ce 
qui  s'était  passé,  vint  trouver  le  grand  échanson  du  pa- 
lais, et,  lui  mettant  entre  les  mainr,  de  l'argent  et  du  poi- 
son, elle  le  chargea  de  porter  l'un  et  l'autre  au  roi  et  de 
lui  dire  que  Mariamne,  sa  femme,  avait  voulu  le  corrom- 
pre par  cet  argent  et  l'engager  à  mettre  ce  poison  dans 
la  coupe  où  il  buvait. 

10.  L'échanson  exécuta  cet  ordre,  et  Hérode,  voyant 
de  ses  propres  yeux  le  poison,  crut  que  l'accusation 
n'était  que  trop  prouvée  :  c'est  pourquoi  il  ordonna  sur 
le  champ  qu'on  coupât  la  tète  à  Joseph  son    beau-frère, 

il.  Et  fit  mettre  Mariamne  dans  les  fers,  jusquà  ce  que 
le  sénat  des  soixante-dix  fût  assemblé  pour  décider  de 
la  peine  que  méritait  son   crime. 

12.  Alors,  la  sœur  d'Hérode,  craignant  qu'on  ne  dé- 
couvrit ses  complots,  et  que,  pour  les  expier,  elle-même 
ne  fut  mise  à  mort  en  la  place  de  Mariamne,  dit  au  roi  : 
Si  vous  attendez  jusqu'à  demain  à  vous  venger  de  Ma- 
riamne, sachez  qu'il  ne  sera  plus  temps. 

1  ;.  Car  aussitôt  qu'on  saura  que  vous  êtes  dans  la  réso- 
lution de  la  faire  mourir,  la  maison  de  son  père,  ses  ser- 
viteurs, ses  parents,  tous  s'armeront  pour  sa  défense  ;  et, 
avant  de  la  voir  expirer  dans  les  supplices,  il  vous  faudra 
surmonter  bien  des  obstacles. 

14.  Hérode  lui  ayant  donc  permis  de  faire  ce  qu'elle 
jugerait  à  propos,  elle  ordonna  sur  le  champ  qu'on  la 
conduisit  au  supplice,  excitant  contre  elle  ses  servantes 
et  ses  femmes  qui  la  suivaient 'en  l'accablant  d'injures, 
et  en  lui  reprochant  toutes  sortes  d'obscén'tés. 


IV.—  MACCABÉES.  —  LVIII.  -   MORT  DE  MARIAMNE  353 

1^.  At  ipsa  nulli  earum  quicquam  respondit,  nec  apicem  15.  Mais  Mariamne,  insensible  u  ces  outrages,  ne    leur 

quidem  protulit  :  nec  his  omnibus  mutaïus  est  color  ejus,  répondit  pas  la  moindre  chose  ;  elle    ne  changea  point 

nec    timor   ullus   apparuit  in    ea,  aut  perturbatio,  neque  de  couleur,  et,  sans  faire  paraître  aucun  trouble  ni  aucune 

incessus  mutatus  est,  sed  so'ito  more  processif  ad  locum,  altération  dans  toute  sa  personne,  elle  s'avança  avec  sa 

quo  ducta  est,  ut  occideretur,  tranquillité   ordinaire  jusqu'au  lieu  où  elle  allait  perdre 

la  vie. 

16.  Quaa  tlexis  genibus  cervices  ultro  extendit  ;  disces-  16.  Elle  se  mit  à  genoux  et  présenta  d'elle-même  sa 
sitque  a  mundo,  religione  atque  pudicitia  insignis,  nullo  tète  ;  elle  mourut  dans  une  haute  réputation  de  pudeur 
notata  scelere  aut  crimine  inusta  ;  verum  superbia  non  et  de  vertu,  et  sans  qu'on  pût  lui  reprocher  aucun  autre 
caruit  juxta  morem  generis  sui.  crime  que  la  fierté  qui  était  naturelle  aux  personnes  de 

sa  maison. 

17.  Nec  minus  in  causa  fuit,  Herodis  erga  illam  obse-  17.  Les  complaisances  et  les  hommages  que  sa  beauté 
quiorum  cultus  ac  propensio,  ob  venustatem  formas,  lui  attiraient  de  !a  part  d'Hérode  ne  contribuèrent  même 
unde  nihil  erga  se  mutationis,  suspicabatur.                                 pas  peu  à  nourrir  en  elle  ;cette  faiblesse,  et   à   lui   faire 

croire  que  ce  prince  ne  serait  jamais  capable  de  changer 
à  son  égard. 

18.  Jam  autem  genuerat  ex  illa  Herodes  duos  filios,  18.  Hérode  avait  eu  de  cette  princesse  deux  fils, 
Alexandrum  nempe  et  Aristobulum,  qui  degebant  cum  Alexandre  et  Aristobule,  qui  étaient  alors  à  Rome  où  il 
occisa  est  mater  eorum,  Romae  :  illuc  quippe  miserat  les  avait  envoyéspour  apprendre  la  langue  et  lessciences 
eos,  ad  ediscendas  Romanorum  litteras  et  linguam.                 des  Romains. 

iy.   Post    haec    pœnituit    Herodem    uxorem    occidisse  19-   Hérode  ne    fut    pas    longtemps   sans    se    repentir 

suam,  eoque   mœrore  ob   illius    obitum  affectus   est,  ut  d'avoir  fait  mourir  sa  femme,  et  il  en  fut  même  tellement 

inde  morbum  contraxerit,  quo  prope  perierat.  accablé  de  douleur  qu'il  en  pensa  perdre  la  vie. 

20.  Occumbente  Mariama  molita  est  Alexandra  mater  20.  Après    la  mort    de    Mariamne,  Alexandra    sa  mère 

ejus  Herodem  occidere,  quod  cum  illi  constitisset,  ipsam  songea  à   se  venger  d'Hérode   en   le  faisant  périr;  mais 

interemit.  ce  prince,  ayant  su  ses  desseins,  la  condamna  au  dernier 

supplice. 


S.  D.  -    T.  XII 


CHAPITRE  LIX 


i.  Cum  perlatum  esset  Alexandro  et  Arislobulo  nun- 
tium  necis  ab  Hcrode  matri  ipsorum  illatse,  maximo 
alTecti  sunt  mœrore, 

2.  Et  discedenles  Roma,  venerunt  in  civitatem  sanctam, 
nullo  exhibito  Herodi  parenti  honore,  utantea  consueve- 
rant,  ob  conceptum  in  eorum  animis  odium  causa 
maternas  necis. 

j.  Et  jam  Alexander  in  uxorem  duxerat  filiam  Archelaï 
régis  ;  Aristobulus  vero  duxerat  filiam  sororis  Herodis. 
Cum  ergo  vidisset  rex  Herodes  eos  minime  sibi  défé- 
rentes honorem,  cognovit  se  iilis  exosum  esse, 

4.  Et  devitavit  eos  ;  nec  id  fugit  pueros,  et  familiam 
ejus. 

5.  Rex  autem  Herodes  liabebat  uxorem  ante  Maria- 
mam,  nomine  Dosithasam,  ex  qua  susceperat  filium, 
nomine  Antipatrum. 

6.  Cum  ergo  constitisset  Herodi  de  duobus  filiis  suis, 
quod  ante  memoratum  est,  transtulit  uxorem  suam  Dosi- 
thœam  ad  palatium  suum, 

7.  Adjunxitque  sibi  Antipatrum  filium  suum,  commit- 
tens  illi  universa  negotia  sua,  et  sibi  successorem  ex 
testamenlo  instituit. 

8.  Et  insectatus  est  Antipater  iste  fratres  suos,  Alexan- 
drum  et  Aristobulum,  intendens  tranquillitatem  sibi  com- 
parare,  pâtre  vivente,  ne  post  obitum  illius  ullum  haberet 
competitorem. 

9.  Quare  ait  patri  :  Utique  fratres  mei  hsereditatem 
adeunt  ob  matris  eorum  familiam,  quia  nobilior  est 
familia  matris  meas,  prùpterea  potioris  sunt  juris  quam 
sum  ego,  ad  ea,  quibus  dignum  adjudicavit  me  rex  ; 

10.  Hic  moliuntur  interficere  te,  mox  me  quoque  : 

1 1.  Et  hase  sœpe  repetebat  Herodi,  submittens  quoque 
qui  ea  insinuarent  ipsi,  quas  majus  odium  erga  eos  apud 
illum  concitarent. 

12.  Interea  proficiscitur  Herodes  Romam  ad  Augus- 
tum,  inducens  filium  suum  Alexandrum.Qui  cum  ades- 
set  coram  Augusto,  conquestus  est  apud  eum  Herodes 
de  filio,  rogans  ut  illum  corriperet. 

ij.  Ait  autem  Alexander  :  Profecto  mœrorem  meum 
ob  interfectam  sine  crimine  matrem  non  inficior,  nam  et 
animalia  ipsa  excellentius  hominibus  in  matris  pietatem 
exhibent  et  diligunt  eas. 


14.  At  machinamentum  parricidii  penitus  nego,  memet- 
que  apud  Deum  justifico  ;  iisdem  enim,  quibus  teneor 
versus  matrem,  teneor  et  versus  patrem  ;  nec  ejus  sum 
conditionis,  ut  citius  mihi  congeram  crimina  in  parentem, 
ac  prarsertim  cruciatus  asternos. 

15.  Mox  Ha  vit  Alexander  fletu  amaro  atque  vehemen- 
tissimo,  misertus  est  illius  Augustus,  fleveruntque  omnes 
adstantes  Romanorum  principes. 

16.  Tum  rogavit  Augustus  Herodem,  ut  in  pristinam 
reconciliaret  fi'ios  benignitatem  atque  familiaritatem  ; 
prœcepitque  Alexandrum  paternos  exosculari  pedes  '■ 
qui  preestitit.  Preecepit  quoque  Herodi  ut  amplecteretur 
illum,  et  osculo  exciperet  quod  obsecutus  est  Herodes- 


1.  Alexandre  et  Aristobule,  ayant  appris  qu'Hérode 
avait  fait  mourir  leur  mère,  furent  pénétrés  d'une  vive 
douleur, 

2.  Et,  partant  aussitôt  de  Rome,  ils  arrivèrent  à  Jéru- 
salem sans  rendre  aucun  honnejr  à  Hérode  (comme  ils 
avaient  coutume  de  faire  auparavant),  à  cause  de  la 
haine  qu'ils  lui  portaient  depuis  qu'il  était  devenu  le 
meurtrier  de  leur  mère. 

J.Alexandre  avait  déjà  épousé  la  fille  du  roi  Arche- 
laus,  et  Aristobule  celle  de  la  sœur  d'Hrode.  Hérode 
s'étant  donc  aperçu  que  ses  enfants  n'avaient  manqué  à 
lui  rendre  leurs  devoirs  que  parce  qu'ils  le  haissaient, 

4.  Evita  de  les  voir,  ce  qu'ils  n'ignorèrent  pas  non 
plus  que  tout  le  reste  de  sa  famille. 

Ç.  Or,  Hérode  avait  épousé  avant  Mariamne  une  femme 
nommée  Dosithée,  de  laquelle  il  avait  eu  Antipater. 

6.  Ne  doutant  donc  plus  de  l'animosité  desesdeux  fils, 
il  logea  sa  femme  Dosithée  dans  son  palais. 

7.  Il  attacha  aussi  à  sa  personne  Antipater  son  fils,  lui 
confia  la  conduite  de  toutes  ses  affaires,  et  il  l'établit 
par  son  testament  l'héritier  de  sa  couronne. 

8.  Antipater,  pour  se  l'assurer  du  vivant  de  son  père 
et  n'avoir  personne  qui  la  lui  disputât  après  sa  mort, 
chercha  par  toutes  sortes  de  calomnies  à  se  défaire  de 
ses  frères. 

9.  Dans  cette  vue,  il  dit  à  son  père:  Certainement 
mes  frères  songent  à  faire  valoir  contre  moi  la  noblesse 
de  leur  mère  ;  car,  quoique  vous  m'ayez  jugé  digne  de 
vous  succéder  au  trône,  ils  y  ont  cependant  plus  de  droit 
que  moi,  et  pour  y  monter  plus  assurément, 

10.  Ils  en  veulent  à  votre  vie  et  à  la  mienne  en- 
suite. 

11.  Antipater  ne  se  contentait  pas  de  redire  souvent 
ces  choses  à  Hérode, il  avait  encore  auprès  de  ce  prince 
des  personnes  qui  l'aigrissaient  de  plus  en  plus  contre 
ses  frères. 

12.  Cependant  Hérode  vint  à  Rome  avec  son  fils 
Alexandre,  et  s'étant  présenté  devant  Auguste,  il  éclata 
en  accusations  contre  son  propre  fils,  et  demanda  qu'il 
fût  puni  rigoureusement. 

1  j.  Alors  Alexandre  prenant  la  parole  :  Je  ne  dissimule 
point,  dit-il,  l'accablement  où  m'a  précipité  la  mort  in- 
juste qu'on  a  fait  souffrir  à  ma  mère  ;  puisque  les  ani- 
maux font  éclater  plus  fortement  que  les  hommes  mê- 
mes, leur  amour  et  leur  reconnaissance  envers  ceux  de 
qui  ils  tiennent  la  naissance. 

14.  Mais  je  nie  que  j'aie  attenté  aux  jours  de  mon 
père,  et  je  prends  Dieu  à  témoin  de  mon  innocence  ;  car 
je  n'ai  pas  moins  d'attachement  pour  mon  père  que  j'en 
avais  pour  ma  mère,  et  je  craindrais,  en  portant  sur  lui 
une  main  parricide,  de  me  précipiter  dans  des  supplices 
éternels. 

1  ;.  Alexandre  n'ayant  interrompu  ce  discours  que  par 
des  pleurs  entrecoupés  di  sanglots,  Auguste  fut  tou- 
ché de  compassion,  et  tous  les  grands  qui  étaient  pré- 
sents ne  purent  davantage  retenir  leurs  larmes. 

16.  Alors  Auguste  pria  Hérode  de  rendre  à  ses  en- 
fants son  amitié  et  ses  bonnes  grâces  ;  il  ordonna  en- 
suite à  Alexandre  de  se  jeter  aux  pieds  de  son  père,  et 
au  père,  d'embrasser  son  fils  ;  ce  qu'ils  firent  l'un  et 
l'autre. 


IV.—  MACCABÉES.  —  LIX.  -   INTRIGUES  D'ANTIPATER 


355 


17.  Mox  mandavit  rex  Augustus  m  as:  ni  fi  eu  m  munus 
Herodi,  et  delatum  est  ei  ;  et  post  transactos  apud  illum 
dies  aliquos,  reversus  est  Herodes  in  domum  sanctam  et 
advocatis  senioribus  Juda;,  ait: 

18.  Sciatis  Antipatrum  meum  esse  filium  primoge- 
nitum,  filiorumque  meorum  majorem,  sed  mater  ejus 
ignobilis  est  familia  ;  Alexandri  vero,  et  Aristobuli  fi- 
liorum  meorum  mater  de  familia  sacerdotum  et  regum 
est. 

19.  Ad  hase  dilatavit  Deus  regnum  meum,  et  manum 
meam  extendit  ac  propterea  mihi  visum  est,  très  liberos 
hos  meos  constituere  asqualiter,  ita  ut  nullum  habeat 
Antipater  in  fratres  suos  imperiuin,  neque  fratres  ejus  im- 
perium  in  illum  habeant. 

?o.  Obsequimini  itaque,  o  cœtus  hominum,  omnibus 
tribus,  nec  interponatis  vos  nisi  in  iis,  quse  eorum  corda 
componere  valeant,  neque  proponatis  quicquam,  quod 
corruptionem  et  dissidium  inter  eos  pariât,  neque  com- 
potetis,  neque  nimium  confabulemini  cum  eis. 

21.  Inde  enim  fiet,  ut  aliquis  eorum  vobis  efïutiat, 
quas  in  fratrem  molitur  ;  ad  quœ,  ut  eos  vobis  concilietis 
consequituré'vestra  assentatio,  apud  unumquemque  eorum 
secundum  placita  ejus,  et  perdetis  eos  ac  perdemini  vos 
quoque. 

22.  Vestrum  quidem  est,  filii  mei,  Deo  obsequi,  et 
mihi,  ut  diutius  vivatis,  et  prosperentur  res  vestras.  Mox 
amplectens  eos  exosculatus  est,  praecepitque  homines 
abire. 

2;.  Sed  nullum  prosperum  successum  habuit  quodfecit 
Herodes,  neque  filiorum  composita  sunt  corda.  Quan- 
doquidem  Antipater  rem  totam  sibi  deferri  volebat,  prout 
pridem  constituerai  pater  ejus  :  fratribus  vero  minime 
œquum  videbatur,  illum  asqualem  sibi  haberi. 

24.  Antipater  autem  prœditus  erat  tolerantia,  ac  omni 
prava  amicitia,  atque  simulata  :  fratres  vero  non  item. 


25.  Constituit  ergo  Antipater  speculatores  in  fratres, 
qui  sibi  déferrent  nuntia  eorum  :  alios  quoque  posuit, 
qui  vana  nuntia  de  il  Lis  Herodi  déferrent. 

26.  Quando  autem  apud  regem  aderat  Antipater,  au- 
diebatque  aliquos  similia  de  fratribus  déférentes,  ea  ab 
ipsis  amovebat,  mendaces  declarans  auctores,  rogabatque 
regem  ne  hase  cTederet. 

27.  Quas  quidem  pntstabat  Antipater,  ne  dubitationem, 
aut  suscipionem  aliquam  de  se  injiceret.  régi.  Hinc  nul- 
lum inhassit  régi  dubium  quin  esset  propensus  in  fratres, 
nullum  optans  illis  malum  : 

28.  Quod  cognoscens  Antipater,  inclinavit  Pheroram 
patruum,  et  amitam  (hi  enim  inimicitias  exercebant  cum 
fratribus  causa  matris  eorum), 

29.  Ofîerens  Pheroras  patruo  pretiosissimum  munus, 
rogans  ut  deferret  régi,  quod  Alexander  videlicet  et 
Aristobulus  moliti  essent  occidere  regem. 

?o.  (Herodes  autem  propensus  erat  in  Pheroram  fra- 
trem, et  ipsius  sententiam  excipiebat  ;  deferebat  illi 
quippe  is,  singulis  annis,  copiosam  pecuniam  ex  provin- 
ciis,  quibus  praeerat  ad  ripam  Euphratis), 

}i.  Et  prasstitit  id  Pheroras.  Post  hase  adiit  Antipater 
Herodem,  et  ait  illi  :  O  rex,  ulique  tratres  mei  moliti 
sunt  me  occidere. 

J2.  Insuper  tradidit  Antipater  pecuniam  tribus  eunuchis 
régis,  ut  dicerent  :  Alexander  obtulit  nobis  pecuniam,  ut 
nobis  abuteretur,  et  ut  occideremus  te,  et  abhorrentibus 
nobis  caîdem  minatus  est. 


17.  Enfin  il  fit  donner  à  Hérode  un  présent  magnifi- 
que, et  ce  prince,  après  avoir  passé  quelques  jours  à  la 
cour  d'Auguste,  s'en  retourna  à  la  ville  Sainte.  Il  n'y  fut 
pas  plus  tôt  arrivé  qu'il  assembla  les  anciens  de  Juda  et 
leur  tint  cediscours  : 

18.  Sachez  qu'Antipater  est  le  premier-né  de  mes 
enfants  et  le  plus  accompli  d'entre  eux  ;  maissa  mère  est 
d'une  famille  obscure,  au  lieu  que  la  mère  d'Alexandre 
et  d'Aristobule  descend  d'une  maison  où  le  sacerdoce 
était  uni  avec  la  royauté. 

19.  Cependant  Dieu  m'a  donné  un  vaste  royaume  et  je 
l'ai  encore  agrandi  par  mes  conquêtes  ;  c'est  pourquoi 
j'ai  résolu  de  le  partager  également  entre  mes  trois  fils, 
en  sorte  néanmoins  qu'Antipater  n'ait  aucun  empire  sur 
ses  frères  non  plus  que  ses  frères  sur  lui. 

20.  O  vous  donc  que  j'ai  assemblés  ici,  ne  vous  mêlez 
des  affaires  de  ces  trois  princes  qu'autant  qu'il  s'agira 
d'établir  entre  eux  la  concorde  ;  ne  leur  proposez  rien 
qui  puisse  ni  la  rompre,  ni  même  la  troubler;  évitez 
encore  de  vous  trouver  ensemble  à  des  repas,  et  d'avoir 
avec  eux  des  entretiens  trop  longs. 

21.  Car  ils  ne  seront  pas  longtemps  sans  vous  décou- 
vrir leurs  secrètes  intrigues  pour  se  détruire  l'un  l'autre, 
et  par  d'indignes  ménagements,  ou  de  lâches  complai- 
sances pour  toutes  leurs  volontés,  vous  les  précipiterez 
dans  des  malheurs  où  bientôt  vous  seriez  vous-mêmes 
enveloppés. 

22.  Pour  vous,  mes  enfants,  il  est  de  votre  devoir 
d'obéir  à  Dieu  et  à  moi,  afin  que  vos  jours  soient  longs 
sur  la  terre  et  qu'il  fasse  réussir  toutes  vos  entreprises  ; 
les  ayant  ensuite  embrassés,  il  les  baisa  et  congédia 
l'assemblée. 

2j.  Cependant  toutes  les  mesures  d'Hérode  furent 
inutiles,  et  ses  enfants  vécurent  toujours  dans  la  mésin- 
telligence ;  car  Antipater,  suivant  les  premières  intentions 
de  son  père,  voulut  attirer  à  lui  toute  l'autorité,  et  ses 
frères  avaient  de  la  peine  à  supporter  qu'Hérode  leur 
père  l'eût  entièrement  égalé  à  eux. 

24.  Antipater  paraissait  insensible  aux  outrages  ;  mais, 
sous  les  dehors  d'une  amitié  sincère,  il  cachait  la  malice 
et  la  dissimulation:  pour  ses  frères  ils  étaient  d'un  carac- 
tère tout  opposé. 

25.  Antipater  chargea  donc  quelques  personnes  d'épier 
la  conduite  de  ses  frères  et  de  lui  en  rendre  compte,  et 
en  choisit  d'autres  pour  aller  faire  à  Hérode  de  faux 
rapports  contre  eux. 

26  Mais  lorsqu'il  se  trouvait  auprès  du  roi,  et  qu'en  sa 
présence  on  parlait  mal  de  ses  frères,  il  prenait  ouver- 
tement leur  défense,  traitant  de  mensonge  tout  ce  qu'on 
en  disait  et  conjurant  le  roi  de  n'y  point  ajouter  foi; 

27.  Ce  qu'il  faisait  afin  que  le  roi  ne  le  soupçonnât 
d'aucune  inimitié  contre  ses  frères  ;  et  en  effet,  Hérode 
ne  douta  plus  qu'il  ne  les  aimât  sincèrement  et  qu'il  ne 
fût  très  éloigné  de  leur  souhaiter  du  mal. 

28.  Étant  venu  ainsi  à  bout  d'abuser  Hérode,  il  cher- 
cha à  mettre  dans  ses  intérêts  Pheroras  son  oncle,  et  sa 
tante,  qui  tous  deux  haïssaient  Alexandre  et  Aristobule, 
à  cause  de  leur  mère. 

29.  Il  offrit  donc  un  présent  très  considérable  à  Phe- 
roras son  oncle,  s'il  voulait  dire  à  Hérode  qu'Alexandre 
et  Aristobule  cherchaient  à  lui  ôter  la  vie, 

?o.  Or  Hérode  aimait  fort  son  frère  Pheroras  et  défé- 
rait en  tout  à  ses  sentiments  ;  car  Pheroras  lui  rendait 
tous  les  ans  des  sommes  considérables  qu'il  tirait  des 
provinces  de  l'Euphrate,  dont  il  avait  le  gouvernement. 

51.  Quand  Pheroras  eut  exécuté  ce  qu'il  avait  promis, 
Antipater  vint  trouver  Hérode  et  lui  dit  :  O  roi,  certai- 
nement mes  frères  ont  juré  ma  perte. 

32.  Ensuite  il  corrompit  trois  eunuques  du  roi,  afin 
qu'ils  allassent  dire  à  ce  prince  qu'Alexandre  leur  avait 
offert  de  l'argent  pour  lui  ôter  la  vie,  et  que,  sur  leur 
refus,  il  les  avait  menacés  de  les  tuer. 


3)6 


IV.—  MACCABÉES.  —  LIX.  -  TRIBULATIONS  D'HERODE 


33.  Et  iratus  est  rex  in  Alexandrum,  jussitque  in  vin- 
cula  injici  :  captosque  cunctos  Alexandri  pueros  tormen- 
tis  subjici  mandavit,  donec  faterentur  ea,  quee  sciebant 
circa  illa,quas  Alexander  machinatus  esset  de  cœde  ipsius. 

34.  Quorum  plures  licet  vi  tormentorum  succubuissent, 
nequaquam  in  Alexandrum  mentili  sunt  ;  quidam  vero 
vim  cruciatus  minime  sustinere  valentes,  falsa  ementiti 
sunt  liberationis  libidine,  asserentes  Alexandrum  et  Aris- 
tobulum  molitos  fuisse  irruere  in  regem,atq'je  occidere, 

55.  Et  Romam  arripere  fugam,  et  accepto  ab  Augusto 
exercitu  proficisci  in  domum  sanctam,  ad  occidendum 
Antipatrum  fratrem,  et  regnum  Judae  occupandum. 

36.  Et  mandavit  rex  comprehendi  Aristobulum,  et  vin- 
culis  devinciri  :  et  devinctus  est,  atque  constitutus  cum 
fratre.  Cum  autem  perlatum  esset  nuntium  Alexandri  ad 
Archelaum  ejus  socerum,  profectus  est  ad  Herodem, 
furorem  prae  se  ferens  adversus  Alexandrum  : 

37.  Ac  si,  perlato  sibi  machinamento  parricidii,  venisset 
consulto  ad  videndum,  utrum  filia  sua  uxor  Alexandri 
conscia  esset  facti,  illudque  sibi  non  aperuisset,  ut  illam 
occideret  ;  si  vero  conscia  non  esset  cujusquam  rei  hu- 
jus,  dirimeret  illam  Alexandro,  et  ad  se  duceret. 

38.  Erat  autem  Archelaus  iste  vir  prudens,  sapiens, 
atque  disertus.  Cum  autem  audisset  Herodes  verba  ejus, 
eique  constitisset  de  prudentia  et  virtute  illius,  mirum  in 
raodum  corde  ejus  potitus  est,  et  sese  ei  credidit,  atque 
confisus  est  nullo  inhasrente  ei  dubio. 

39.  Cognoscens  ergo  Archelaus  Herodis  erga  se  pro- 
pensionem,  diuturnam  post  familiaritatem,ait  illi  quadam 
die  cum  simul  successissent  : 

40.  Profecto  pensitando  res  tuas,  o  rex,  compertus 
sum  te  constitutum  in  senectute  magis  indigere  mentis 
ranquillitate,  et  ut  lasteris  in  filiis  tuis,  ubi  e  contra  con- 
raxisti  ex  illis  mœrorem,  et  sollicitudinem. 


41.  Pensitavi  praeterea  circa  hos  duos  filios  tuos,  nec 
reperio  te  defuisse  de  illis  bene  merendo,  nam  praefe- 
cisti  eos,  et  reges  constituisti,  nec  quicquam  praetermi- 
sisti,  quod  illos  impie  adigat  ad  tuam  necem,  nec  ullam 
circa  rem  hanc  causam  habent. 

42.  Sed  forte  id  provenit  a  maligno  homine,  astruente 
tibi  et  illis  mala  :  aut  ob  invidiam,  vel  inimicitiam  induxit 
te  ad  detestandos  eos. 

43.  Si  igitur  iste  lui  potitus  est,  cum  esses  senex,scien- 
tia,  atque  cognitione  prasditus  et  rerum  experienlia, 
transferens  te  a  paterna  clementia  ad  crudelitatem  et 
furorem  in  filios  : 

44.  Quanto  ergo  magis  potitus  fuisset,  cum  sint  juve- 
nes  inexperti,  imprudentes,  ac  nullius  scientiae  circa  ho- 
mines,  et  fraudes  eorum,  quapropter  nactus  est  pênes 
eos  quod  optabat  circa  heec. 

45.  Considéra  itaque,  o  rex,  res  tuas,  et  ne  procbeas 
aures  verbis  delatorum,  nec  propercs  in  filios  tuos,  et 
inquire,  quis  sit  ille  qui  mala  tibi  et  illis  astruxit. 


46.  Cui  respondit:  Res  profecto  se  liabet,  ut  meministi, 
utinam  sciam  quis  induxit  ecs  ad  haïe.  Cui  ait  Archelaus: 
Hic  est  Pheroras  frater  tuus. 


47.  Cui  respondit  rex  :  Fieri  potest  rem  ita  se  habere. 
Post  haec  mutatus  est  rex  maximopere  contra  Pheroram. 
Quod  animadvertens  Pheroras  timuit    illum,  veniensque 


33.  Hérode,  transporté  de  colère  contre  Alexandre,  le 
fit  charger  de  chaînes  et  ordonna  qu'on  tourmentât  tous 
ses  serviteurs,  jusqu'à  ce  qu'ils  eussent  avoué  tout  ce 
qu'ils  savaient  des  mauvais  desseins  d'Alexandre. 

14.  Plusieurs  d'entre  eux  défendirent  jusqu'à  la  mort 
l'innocence  de  leur  maître  ;  mais  quelques-uns,  pour  se 
délivrer  des  tourments  dont  ils  ne  pouvaient  plus  sup- 
porter la  violence,  déposèrent  faussement  qu'Alexandre 
et  Aristobule  avaient  résolu  de  tuer  le  roi, 

3$.  Et  de  se  sauver  à  Rom  et  qu'ils  devaient  ensuite 
revenir  à  Jérusalem  après  avoir  obtenu  une  armée  d'Au- 
guste, avec  laquelle  ils  espéraient  se  défaire  de  leur 
Irère  Antipater  et  s'emparer  du  royaume  de  Judée. 

36.  Hérode  fit  aussitôt  arrêter  Aristobule,  et  ce  prince, 
après  avoir  été  chargé  de  chaînes,  fut  jeté  dans  la  prison 
où  était  déjà  son  frère.  Archelaus,  beau-père  d'Alexandre, 
ayant  appris  celte  nouvelle  vint  à  la  cour  d'Hérode  et 
parut  dans  une  fureur  étrange  contre  son  gendre, 

37.  Comme  s'il  eût  été  dans  le  dessein  de  (aire  mourir 
sa  fille  en  cas  qu'elle  se  trouvât  complice  de  quelque 
crime,  sans  l'en  avoir  averti,  ou  l'ôter  des  bras  de  son 
mari  et  la  reprendre,  si  elle  était  entièrement   innocente. 

38.  Or,  Archelaus  était  sage,  prudent  et  s'énonçait 
avec  beaucoup  d'éloquence  ;  dès  qu'Hérode  l'eut  en- 
tendu parler  et  qu'il  eut  des  preuves  incontestables  de 
la  sagesse  et  de  la  vertu  de  ce  prince,  il  se  sentit  une 
torte  inclination  pour  lui,  et,  depuis  ce  temps-là,  il  le  vit 
sans  aucune  réserve. 

50.  Archelaus,  après  un  assez  long  commerce  d'amitié 
entre  Hérode  et  lui,  ne  pouvant  plus  douter  des  dispo- 
sitions de  ce  prince  à  son  égard,  lui  dit  un  jour  qu'ils  se 
promenaient  ensemble  à  l'écart  : 

40.  O  roi!  Lorsque  je  considère,  et  la  situation  de  vos 
affaires  et  l'âge  avancé  ou  vous  êtes,  je  me  persuade  que 
vous  avez  plus  d'intérêt  que  jamais  de  vivre  tranquille 
et  de  trouver  votre  joie  dans  vos  enfants  ;  quoiqu'au 
contraire  il  paraisse  qu'ils  soient  devenus  pour  vous  un 
sujet  de  tristesse  et  d'inquiétude. 

41.  Et,  jetant  ensuite  les  yeux  sur  vos  deux  fils,  je 
trouve  que  vous  avez  épuisé  pour  eux  tous  vos  bienfaits 
en  les  établissant  rois  par  un  partage  égal  de  vos  états  ; 
et  qu'a-t-il  échappé  à  votre  tendresse  pour  qu'ils  se  por- 
tassent avec  tant  d'impiété  à  vous  ôter  la  vie  ?  Certaine- 
ment vous  ne  leur  en  avez  donné  aucun  sujet  ; 

42.  Mais  peut-être  qu'un  homme  plein  de  malignité  et 
poussé,  ou  par  l'envie,  ou  par  quelque  haine  secrète,  a 
cherché  à  vous  aigrir  contre  vos  enlants  pour  faire  tom- 
ber sur  eux  et  sur  vous-mêmes  des  maux  funestes. 

4;.  Si  donc  un  tel  homme  est  venu  à  bout  de  vous  ob- 
séder, malgré  l'âge,  les  lumières  et  la  lo"hgue  expérience 
que  vous  avez  acquise,  et  qu'il  ait  pu  même  vous  obliger 
de  changer  en  cruauté  et  en  fureur  la  clémence  et  la 
tendresse    qu'un    père  doit  naturellement  à  ses  enfants  ; 

44  Est-il  surprenant  qu'il  ait  pu  surprendre  des  princes 
encore  jeunes,  sans  prudence,  sans  expérience  et  peu 
versés  dans  la  science  des  hommes  et  de  leurs  fourbe- 
ries ;  c'est  ainsi  qu'il  les  a  trouvés  disposés  et  tels  qu'il 
les  souhaitait  pour  ses  desseins. 

4i.  Considérez  donc,  ô  roi,  ce  que  vous  avez  à  faire, 
ne  précipitez  rien  contre  vos  enlants,  ne  prêtez  point 
légèrement  l'oreille  à  leurs  accusateurs,  et  examinez 
quel  est  celui  qui  a  formé  contre  eux  et  contre  vous  des 
complots  si  funestes, 

46.  Hérode  lui  répondit  :  Les  choses  sont  certainement 
telles  que  vous  le  dites,  et  plût  à  Dieu  que  je  pusse 
connaître  celui  qui  a  donné  de  tels  conseils  à  mes  en- 
fants. Alors  Archelaus  lui  dit  :  c'est  Pheroras  votre 
frère. 

47.  Cela  pourrait  être,  répondit  Hérode  ;  et,  depuis  ce 
moment,  il  cessa  de  regarder  Pheroras  de  bon  œil.  Phe- 
roras s'en  étant  aperçu,  commença  à  craindre  Hérode, et 


IV.  —  MACCABEES. 


LIX.  -  SAGESSE   D'ARCHELAUS 


537 


ad   Archelaum,  ait  ei  :  Video   jam    regem  mutaUim    esse 
in  me, 

48.  Quamobrem  rogo  te  ut  mihi  reconcilies  cor  illius, 
removens  ea  quai  in  animo  fovet  adversus  me.  Cui  res- 
pondit  Archelaus  :  Faciam  profecto  si  promiseris  aperire 
régi  veritatem  circa  ea,  quœ  in  Alexandrum  et  Aristobu- 
lum  molitus  es  ;  et  assensus  est  ei  de  hoc. 

49.  Cumque  esset  aliquos  post  dies,  dixit  Archelaus 
régi  :  O  rex,  sane  cognati  hominis  instar  membrorum  ei 
sunt,  quemadmodum  vero  homini  convenit, 

50.  Si  membrum  aliquod  illius  corrumpatur  ob  acci- 
dentem  morbum,  medicamentis  illum  reparare,  etiam  si 
dolorem  id  incutiat,  nec  convenit  illud  resecare,  ne  au- 
geatur  dolor,  debililetur  corpus,  et  deficiant  membra 
atque  privatione  illius  membri  pluribus  careat  commodis: 

5t.  Sed  sustineat  dolores  medicamentorum,  ut  melius 
sese  habeat  membrum,  et  sanetur,  redeatque  corpus 
illius  ad  pristinam  perfectionem,  et  firmitatem. 

$2.  Ita  illi  convenit,  quoties  mutatus  fuerit  :n  eum 
aliquis  cognatorum,  quacumque  de  re  abominabili,  ut 
ipsum  sibi  conciliet,  pelliciens  ad  obsequia,  et  amicitiam, 
excusationes  admittens,  et  dimittens  crimina  :  nec  in 
illius  necem  festinus  properet,  nec  diutius  a  se  longe 
r  emoveat. 

$;.  Nam  cognati  hominis  sunt  fautores  illius,  et  adju- 
tores,  ac  in  iis  consistit  décor  illius,  et  gloria  ;  ac  per 
eos  consequitur  quod  alioquin  consequi  non  potuisset. 

54.  Pheroras  quidem  frater  régis  est,  ac  filius  patris, 
et  matris  illius  :  suumque  fatetur  crimen,  regem  depre- 
cans,  ut  sibi  parcat,  dimittatque  lapsum.  Et  respondit 
rex  :   Faciam  id  quidem.  Jussitque  adesse  Pheroram, 

55.  Qui  cum  coram  adstitisset,  ait  illi:  Jam  peccavi 
Deo  optimo  maximo  et  régi,  astruens  ma'a,  et  quœ  res 
ejus,  ac  filiorum  corrumpere  potuissant,  ementitis  men- 
daciis. 

$6.  Quod  vero  ad  hase  me  induxit,  est,  quia  rex  abs- 
tulit  a  me  meam  talem  concubinam,  separavitque  inter 
me  et  illam. 

57.  Dixit  rex  Archelao  :  Jam  peperci  Pherorœ,  ut  ro- 
gasti  me  ;  etenim  comperio  te  medelam  attulisse  corrup- 
tioni,  quœ  rébus  nostris  acciderat,  tuis  lenimentis,  que- 
madmodum medetur  pius  medicus  corruptionibus  cor- 
poris  œgroti. 

^8.  Quare  rogo  te,  ut  parcas  Alexandro,  reconcilians 
filiam  tuam  marito  ;  nam  eam  instar  filias  habeo,  cum 
sciam  eam  ipso  prudentiorem  esse,  illumque  a  multis 
rébus  avertere  sua  prudentia,  atque  adhortationibus. 
Unde  quaeso  te  ne  sépares  inter  eos,  et  perdas  illum  : 

59.  Ipse  namque  illi  acquiescit,  et  ex  ejus  directione 
multa  capit  commoda. 

60.  Respondit  aulem  Archelaus  :  Filia  quidem  mea, 
ancilla  est  régi  :  at  ipsum  jam  detestata  est  anima  mea, 
ob  malum  ejus  consilium. 

01.  Permittat  ergo  rex  quœso,  ut  separem  inter  illum 
et  filiam  meam,  quam  copulet  rex  cuicumque  vult  servo- 
rum  suorum. 

62.  Cm  respondit  rex:  Inio  ne  prastergrediaris  pre- 
ces  meas,  maneatque  filia  tua  cum  illo,  nec  mihi  con- 
tradicas. 

6j.  Et  ait  Archelaus  :  Utique  prœstabo,  nec  contradi- 
cam  régi  in  quoquam  eorum,  quas  mihi  prascipiet.  Mox 
mandat  Herodes  solvi  Alexanarum  et  Aristobulum  vin- 
culis,  et  coram  se  venire  :  qui  cum  adstitissent,  sese 
ante  illum  prostraverunt,  crimina  sua  confitentes,  excu- 
santes se,  ac  veniam  et  remissionem  deprecantes. 

64.  Quos  stare   jussit,  et  ad  se  accedere  faciens  exos- 


aussitôt  il  vint  trouver  Archelaus,  et  lui  dit  :  Je  m'aperçois 
que  le  roi  n'est  plus  le  même  à  mon  égard  ; 

48.  C'est  pourquoi  je  vous  prie  de  détruire  les  soup- 
çons qu'il  nourrit  contre  moi  et  de  me  remettre  dans  ses 
bonnes  grâces.  Archelaus  s'engagea  de  lui  rendre  ce 
service,  pourvu  qu'il  lui  promît  de  découvrir  au  roi  la 
vérité  de  tout  ce  qu'il  avait  tramé  contre  Alexandre  et 
Aristobule,  et  Pheroras  y  consentit. 

49.  Quelques  jours  après  Archelaus  dit  à  Hérode  : 
O  roi  !  Nous  devons  regarder  comme  nos  propres  mem- 
bres, ceux  qui  nous  sont  unis  par  les  liens  du  sang. 

t,o.  Et  de  même  que,  si  l'un  de  nos  membres  vient  à 
être  attaqué  de  quelque  infirmité,  nous  nous  gardons  bien 
de  le  retrancher,  de  crainte  que  la  douleur  n'augmente, 
que  le  corps  ne  s'affaiblisse,  et  qu'en  le  privant  d'un  de 
ses  membres,  nous  ne  le  privions  en  même  temps  de  plu- 
sieurs commodités, 

(I.  Mais,  au  contraire,  nous  avons  recours  aux  remè- 
des quelque  douloureux  qu'ilssoient,  afin  que  le  membre 
malade  se  rétablisse  et  que  tout  le  corps  reprenne  sa 
première  intégrité  et  sa  vigueur  ordinaire, 

$2.  De  môme  devons-nous  nous  comporter  à  l'égard 
des  nôtres  quand  ils  nous  ont  offensés  ;  et,  de  quelques 
crimes  qu'Us  soient  coupables,  ne  rien  précipiter  contre 
eux  et  ne  point  faire  durer  trop  longtemps  leur  disgrâce. 

<,  h  Car  l'homme  n'a  point  de  plus  ferme  appui  que  ses 
proches,  il  trouve  en  eux  des  gens  toujours  prêts  à  le 
secourir  ;  ils  sont  son  ornement  et  sa  gloire,  et  il  obtient 
par  leur  moyen  ce    qu'il    n'aurait  pu  espérer  autrement. 

$4.  Pheroras  est  le  frère  du  roi  et  le  fils  de  son  père 
et  de  sa  mère,  il  avoue  son  crime  et  conjure  le  roi  de 
le  lui  pardonner.  Hérode  y  consentit  et  ordonna  qu'on 
fît  venir  Pheroras. 

î$.  Ce  prince  s'étant  présenté  devant  le  roi  son  frère, 
lui  dit:  J'ai  péché  contre  le  Dieu  tout-puissant  et  contre 
mon  roi,  et  par  d'horribles  mensonges  j'ai  tramé  contre 
l'État  et  contre  vos  enfants  des  desseins  funestes. 

56.  Mais  si  je  me  suis  porté  à  ces  excès,  ce  n'est  que 
parce  que  le  roi  m'a  enlevé  une  telle,  ma  concubine,  et 
qu'il  nous  a  séparés  l'un  de  l'autre. 

57.  Alors  le  roi  dit  à  Archélaiïs  :  J'ai  déjà  pardonné  à 
Pheroras  en  votre  considération  ;  car,  comme  un  sage 
médecin  vous  avez  guéri  nos  maux  par  des  remèdes 
pleins  de  douceur. 

58.  C'est  pourquoi  je  vous  conjure  à  mon  tour  de  par- 
donner à  Alexandre,  et  de  lui  rendre  votre  fille  que  je 
regarde  comme  la  mienne  même;  parce  que  je  sais  qu'elle 
est  plus  prudente  que  lui,  et  que  par  ses  sages  conseils 
elle  peut  le  garantir  de  mille  fausses  démarche*.  Ainsi, 
pour  éviter  sa  perte,  je  vous  prie  de  ne  point  les  séparer. 

$9.  Car  il  défère  en  toutes  choses  aux  avis  qu'elle  lui 
donne,  et  il  en  retire  même  de  très  grands  avantages. 

60.  Archelaus  répondit:  Ma  fille  est  la  servante  c£j 
roi  ;  mais  pour  Alexandre  je  le  regarde  avec  horreur 
depuis  qu'il  a  été  capable  d'écouter  de  mauvaisconseils 

61.  Que  le  roi  permette  donc  que  je  rompe  le  lien 
qui  l'unissait  avec  ma  fille,  et  qu'il  la  donne  ensuite  à 
celui  de  ses  serviteurs  qu'il  en  voudra  gratifier. 

62.  Ne  rejetez  point  mes  prières,  répondit  le  roi  :  que 
mon  fils  soit  toujours  l'époux  de  votre  fille,  et  ne  vous 
opposez  point  à  mes  volontés. 

6;.  J'y  consens,  dit  Archelaus,  et  j'obéirai  au  roi  en 
tout  ce  qu'il  exigera  de  moi.  Aussitôt  Hérode  ordonna 
qu'on  tirât  des  fers  Alexandre  et  Aristobule,  et  qu'on 
fît  venir  ces  princes.  Quand  ils  se  furent  présentés  de- 
vant lui,  ils  se  prosternèrent  à  ses  pieds,  et,  après  avoir 
fait  un  aveu  de  leur  crime,  ils  s'excusèrent  et  lui  deman- 
dèrent pardon. 

64.  Hérode   leur  dit  de  se  relever,  et    les  ayant    fait 


?$8      IV.  — MACCABÉES.  —   LIX.  -  NOUVELLES  INTRIGUES  D'ANTIPATER 


culatus  est,  mandavitque  abire  in  domos  suas  in  cras- 
tinum  reversuros.  Qui  adfuerunt  cibis,  et  potui  ipsius, 
restituitque  eos  prœstantiorem  in  locum. 

6Ç.  Rependitque  Archelao  septuaginta  talenta,  et  au- 
reum  lectum,  prascipiens  quoque  cunctis  principibus  ami- 
corum  suorum  pretiosa  mimera  offerre  Arcl.elao  :  qui 
fecerunt. 

66.  His  gestis,  discessit  Archelaùs  ab  urbe  domus 
sanctae  in  regionem  suam,  quem  comitatus  est  Herodes, 
ac  demum  vale  dicto,  reversus  est  in  domum  sanctam. 

67.  Nec  tamen  prastermisit  Antipater  machinationes 
in  fratres  suos,  ut  exosos  eos  redderet.  Accidit  autem, 
ut  adventaret  ad  Herodem  vir  quidam,  habens  pretiosa 
quaedam,  ac  speciosa,  quibus  expeti  soient  reges, 

68.  His  regem  donavit,  quas  ab  ipso  accipiens, rependit 
ei  pro  illis,  ac  optimum  obtinuit  locum  vir  in  corde 
ejus,  illiusque  famulatui  adscriptus  potitus  est  corde 
ipsius:  dicebaturque  is  Eurycles. 

69.  Cum  ergo  animadvertisset  Antipater  virum  istum 
plane  cor  patris  sui  occupasse,  obtulit  ei  pecuniam, 
rogans  ut  dextere  insinuaret  cordi  Herodis,  atque  con- 
finnaret,  quod  duo  filii  ejus  Alexander,  et  Aristebulus 
casdem  illius  molirentur  : 

70.  Quod  pollicitus  est  ei  vir.  Mox  adivit  Alexandrum, 
adeoque  ejus  consuetudine,  et  familiaritate  est  usus,  ut 
notus  haberetur  in  ejus  amicitia.  compertumque  esset 
régi  illum  de  ipsius  esse  familiaribus. 

71.  Post  hase  secessit  cum  rege,  et  ait  illi  :  Certe  id 
erga  me  juris  habes,  o  rex,  ut  nihll  profecto  me  distinere 
debeat,  quin  te  bene  admoneam  :  et  quidem  mihi  est 
negotium  quod  regem  scire  oportet,  tibique  illud  aperire 
debeam. 

72.  Cui  rex  ait  :  Quid  habes  ?  respondit  ei  vir  :  Audivi 
Alexandrum  dicentem  ;  Utique  Deus  distulit  vindictam 
de  pâtre  meo  ob  necem  matris,  meas  avi,  et  meorum 
sine  ullo  crimine,  ut  id  fiât  per  manum  meam  :  speroque 
me  sumpturum  eorum  vindictam  de  ipso. 


75.  Et  jam  statuit  cum  ducibus  irruere  in  te,  voluitque 
me  immiscere  his  quas  deliberaverat  :  at  nefas  id  existi- 
mavi,  ob  régis  in  me  benemerita,  atque  liberalitatem. 

74.  Intentio  autem  mea  est  illum  bene  admonere,  reque 
haec  ad  eum  déferre,  ipse  vero  habet  oculos  et  consi- 
lium.  Cum  itaque  audisset  rex  verba  ejus,  nequaquam  ea 
aspernatus  est,  sed  mox  investigare  cœpit  de  eorum 
veritate  :  verum  nihil  est  compertus,  cui  inniteretur 
praster  ementitam  epistolam  nomine  Alexandri,  et  Aris- 
tobuli,  ad  principem  oppidi  cujusdam. 

75.  Erat  autem  in  epistola  :  Volumus  occidere  patrem 
nostrum,  et  confugere  ad  te,  quamobrem  para  nobis  lo- 
cum, in  quo  maneamus,  donec  congregentur  ad  nos  viri, 
et  dirigantur  res  nostrae. 

76.  Quod  quidem  régi  confirmatum  est,  et  verisimile 
visum  :  quare  captum  principem  oppidi  illius  tormentis 
subdidit,  ut  fateretur  ea  quas  in  epistola  contexta   erant. 

77.  Quod  negavit  vir  il  le,  sese  justificans,  nec  appro- 
batum  est  contra  eos  quicquam  de  his,  aut  aliis,  quas 
imposuit  eis  tanquam  vera  delator. 


78.  Jussitque  eos  comprehendi,  et  catenis,  atque  com- 
pedibus  devinciri.  Dein  profectus  est  Tyrum,  et  Tyro 
Caesaream  eos  devinctos  secum  ducens. 


approcher,  il  les  embrassa  et  leur  ordonna  de  se  retirer 
chez  eux;  le  lendemain  ,  il  les  fit  manger  avec  lui  à  sa 
table  et  les  éleva  à  des  honneurs  encore  plus  grands 
que  ceux  dont  ils  jouissaient  auparavant. 

65.  Hérode,pour  reconnaître  les  services  d'Archélaûs, 
lui  donna  soixante-dix  talents  et  un  lit  d'or,  et  ordonna 
à  ses  principaux  amis  de  faire  à  ce  prince  de  riches  pré- 
sents,'ce  qui  fut  exécuté, 

66.  Après  cela,  Archélaûs  partit  de  la  ville  Sainte  pour 
s'en  retourner  dans  ses  états;  Hérode  l'accompagna 
quelque  temps,  et,  ayant  enfin  pris  congé  de  lui,  il  re- 
vint à  Jérusalem. 

67.  Cependant  Antipater  mettait  tout  en  usage  pour 
prévenir  de  nouveau  Hérode  contre  ses  frères.  II  vintà  la 
courd'Hérode  un  certain  Eurycles,  qui  avait  de  ces  bijoux 
rares  et  précieux  avec  lesquels  on  a  coutume  de  s'insi- 
nuer auprès  des  rois. 

68.  Cet  homme  en  fit  présent  à  Hérode  qui  les  lui 
paya,  et  lui  donna  en  même  temps  ses  bonnes  grâces, 
en  sorte  qu'ayant  été  admis  dans  la  familiarité  du  roi, 
il  se  fut  bientôt  rendu  maître  absolu  de  son  esprit. 

69.  Antipater  s'en  étant  aperçu,  offrit  de  l'argent  à  cet 
homme  et  le  pria  d'insinuer  adroitement  à  Hérode,  et  de 
lui  persuader  même  que  ses  deux  fils,  Alexandre  et  Aris- 
tobule,  cherchaient  à  lui  ôter  la  vie. 

70.  Eurycles  promit  à    Antipater   d'exécuter   ce    qu'i 
lui  demandait,  et  s'insinuant  dès-lors  auprès  d'Alexandre, 
il  voyait  ce  prince  avec  tant  de  liberté  et  de  familiarité 
que  leur    liaison    était  connue    de  tout    le    monde,    et 
qu'Hérode  même  ne  l'ignorait  pas. 

71.  Eurycles,  après  avoir  ainsi  ménagé  les  choses,  vint 
trouver  le  roi  et  lui  dit  :  O  roi  !  nulle  raison  ne  peut 
m'empècher  de  vous  donner  des  avis  pour  votre  propre 
sûreté,  et  vous  êtes  en  droit  de  l'exiger  de  moi.  J'ai  cer- 
tainement une  chose  très  importante  à  vous  dire  et  je 
ne  dois  point  vous  la  cacher. 

72.  Le  roi  lui  demanda  de  quoi  il  s'agissait;  alors  Euri- 
clès  lui  répondit  :  J'ai  entendu  Alexandre  qui  disait  : 
Dieu,  sans  doute,  n'a  différé  de  punir  mon  père  de  la 
mort  injuste  qu'il  a  fait  souffrir  à  ma  mère  et  à  mon 
aïeule,  que  parce  qu'il  me  destinait  à  les  venger,  et  j'es- 
père faire  bientôt  retomber  leur  sang  sur  celui  qui  l'a 
répandu. 

75.  Alexandre  a  déjà  résolu  de  s'avancer  contre  vous 
à  la  tête  de  son  parti,  et  il  a  même  voulu  me  rendre  com- 
plice de  son  crime  ;  mais  j'ai  cru  devoir  reconnaître  au- 
trement vos  bontés  et  vos  bienfaits. 

74.  Je  viens  donc  vous  donner  ces  avis  importants,  et 
je  laisse  à  votre  sagesse  et  à  votre  prudence  à  faire  le 
reste.  Hérode  ayant  entendu  ces  choses  songea  dès  ce 
moment  à  en  découvrir  la  vérité;  mais  il  ne  trouva  rien 
sur  quoi  l'on  pût  fonder  ses  soupçons,  sinon  une  lettre 
écrite  au  nom  d'Alexandre  et  d'Aristobule,  et  adressée 
au  gouverneur  d'une  certaine  place. 

75.  Elle  était  conçue  en  ces  termes  :  Nous  avons  résolu 
de  tuer  notre  père  et  de  nous  réfugier  ensuite  auprès 
de  vous;  préparez-nous  donc  un  lieu  où  nous  puissions 
nous  retirer,  jusqu'à  ce  que  notre  parti  se  soit  grossi  et 
que  nous  ayons  mis  nos  affaires  en  état  de  réussir. 

76.  Le  roi, croyant  que  la  chose  pouvait  être  telle  qu'on 
la  lui  assurait,  donna  ordre  qu'on  arrêtât  ce  gouverneur, 
et  qu'on  le  tourmentât  jusqu'à  ce  qu'il  eût  avoué  tout 
ce  qui  était  contenu  dans  la  lettre. 

77.  Mais  le  gouverneur  se  justifia  sur  tous  ces  chefs 
en  les  niant,  et  l'on  ne  put  prouver  contre  Alexandre  et 
Aristobule  aucune  de  ces  accusations,  ni  toutes  les  autres 
que  le  délateur  forma  contre  eux  avec  autant  de  fausseté 
que  les  premières. 

78.  Cependant  Hé>ode  les  fit  charger  de  chaînes  et 
d'entraves  :  il  alla  ensuite  à  Tyr  et  deTyr  à  Césarée,  les 
menant  partout  avec  lui  en  cet  état. 


IV.  —  MACCABÉES.  —  LIX.  -  LEURS  TRISTES  CONSÉQUENCES 


559 


79.  Et  miserati  sunt  eorum  cuncti  duces,  cuncique 
milites  :  at  nullus  intercedere  pro  illis  apud  regem  aude- 
bat,  ne  de  se  pro  veris  approbaret,  quae  dixerat  delator. 

80.  Erat  autem  in  exercitu  senex  quidam  de  viris  belli, 
habens  filium  in  famulatu  Alexandri  :  cum  ergo  vidisset 
senex  ille  pessimum  statum  duorum  filiorum  Herodis, 
vices  eorum  mirum  in    modum  miseratus  est, 

81.  Exclamavitque  quam  alta  potuit  voce  :  Periit  mise- 
ratio,  defecit  bonitav,  et  pietas,  ablata  est  veritas  de 
mundo. 

82.  Tum  ait  régi  :  O  immisericors  in  filios,  hostis  ami- 
corum,  et  amicus  hostium,  amplectens  verba  delatorum, 
et  eorum  qui  tibi  bonum  minime  exoptant. 


8j.  Ad  quem  accurrerunt  hostes  Alexandri  et  Aristo- 
buli,  et  increpaverunt  eum,  dixeruntque  régi  :  O  rex, 
nequaquam  virum  hune  induxit  anior  erga  te,  et  filios 
tuos  ista  loqui, 

84.  Sed  effutire  voluit  odium  quod  in  corde  adversus 
te  fovebat,  atque  obloqui  de  concilio,  et  administratione 
tua  tanquam  amicus  admonitor. 

85.  Et  quidem  nobis  de  ipso  detulerunt  observatores 
quod  jam  convenisset  cum  tonsore  régis,  ut  dum  illum 
tonderet,  novacula  jugularet. 

86.  Et  jussit  rex  comprehendi  senem,  et  filium  ejus,  et 
tonsorem,  et  virgis  caîdi  senem  et  tonsorem  donec  fate- 
rentur. 

8;.  Et  virgis  cassi  sunt  quam  acerbissime,  ac  tormen- 
torum  multlplici  generi  subjecti  :  at  nihil  eorum  fassi 
sunt  quœ  non  fecerant. 

88.  Cum  ergo  vidisset  filius  senis  pessimum  patrissui 
statum,  et  ad  quae  devenerat,  miseratus  est  ejus,  atque 
arbitratus  illum  liberatum  iri.si  ipse  fateretur  de  eo.qua; 
il  1  ï  imputabantur,  post  acceptam  a  rege  pro  illo  securi- 
tatem. 

89.  Quare  ait  régi  :  O  rex,  concède  milii  et  patri  meo 
securitatem,  ut  indicem  tibi,quas  quasris.  Et  ait  rex:  Sit 
tibi  hoc.  Cui  dixit  :  Jam  statuerat  Alexander  cum  pâtre 
meo,  ut  te  occideret  :  pater  vero  meus  statuit  cum  ton- 
sore, ut  tibi  relatum  est. 

90.  Tum  jussit  rex  occidi  senem  illum,  et  filium  ejus, 
et  tonsorem,  mandavit  insuper  deduci  ambos  filios  suos, 
Alexandrum  et  Aristobulum  Sebasten,  ibique  occidi,  et 
patibulo  affigi  :  qui  [deducti,  occisi,  et  patibulo  ibi  affixi 
sunt. 

91.  Alexander  autem  duos  superstites  reliquit  filios, 
Tyrcanem  videlicet,  et  Alexandrum  ex  filia  Archelai  ré- 
gis :  Aristobulus  vero  très  reliquit  filios,  Aristobulum 
nempe,  Agrippam,  et  Herodem.  Historiée  autem  Anti- 
patri  filii  Herodis  jam    prsecessit  descriptio    in    prsenar- 

ratis. 

Finis,  et  laus  Deo. 


79.  Tous  les  chefs  de  l'armée  et  tous  les  soldats  plai- 
gnirent le  sort  de  ces  princes  ;  mais  aucun  n'osait  parler 
au  roi  en  leur  faveur  dans  la  crainte  qu'Euryclès  ne  le 
rendit  aussitôt  suspect. 

80.  Il  v  avait  parmi  les  officiers  de  l'armée  un  certain 
vieillard  dont  le  fils  était  au  service  d'Alexandre,  ce 
vieillard,  voyant  le  déplorable  état  où  étf.ient  réduits  les 
deux  enfants  d'Hérode,  en  fut  très  vivement  touchée; 

81.  Et,  élevant  la  voix  autant  qu'il  pût,  il  s'écria  :  Il 
n'y  a  plus  de  compassion  sur  la  terre,  la  bonté  et  la 
piété  en  sont  bannies,  et  la  vérité  ne  s'y  trouve  plus. 

82.  Se  tournant  ensuite  vers  le  roi,  il  lui  dit  :  O  père 
cruel  et  sans  pitié  pour  vos  enfants, vous  qui  êtes  l'en  ne  m 
de  vos  amis,  l'ami  de  vos  ennemis, et  qui  prêtez  aisément 
l'oreille  aux  discours  des  délateurs  et  de  ceux  qui  vous 
haïssent  véritablement. 

8j.  Aussitôt  les  ennemis  d'Alexandre  et  d'Aristobule 
accoururent  à  ce  vieillard  et  l'ayant  repris,  ils  dirent  au 
roi  :  O  prince  !  Ce  n'est  par  aucun  attachement,  ni  pour 
vous,  ni  pour  vos  enfants,  que  cet  homme  a  parlé  ainsi. 

8.|.  Il  n'acherché  qu'à  faire  éclater  la  haine  qu'il  nour- 
rit contre  vous,  sous  le  spécieux  prétexte  de  vous  don- 
ner des  avis  désintéressés  pour  la  conduite  et  le  gouver- 
nement de  vos  affaires, 

85.  Et  l'on  nous  a  même  rapporté  qu'il  avait  déjà 
engagé  votre  barbier  à  vous  couper  la  gorge  dans  le 
temps  qu'il  vous  raserait. 

86.  Le  roi  fit  aussitôt  arrêter  le  vieillard  et  son  fils,  et 
le  barbier,  et  ordonna  que  le  vieillard  et  le  barbier 
fussent  battus  de  verges,  jusqu'à  ce  qu'ils  eussent  con- 
fessé !a  vérité. 

87.  Cela  fut  exécuté  avec  une  rigueur  extrême,  et  on 
les  éprouva  par  toutes  sortes  de  supplices  sans  qu'on 
pût  jamais  venir  à  bout  de  leur  faire  avouer  des  crimes 
dont  ils  n'étaient  point  coupables. 

88.  Le  fils  du  vieillard,  ayant  vu  l'état  affreux  où    son 
père  était  réduit,  en  fut  extrêmement  touché,  et  s'imagi 
nant  qu'il  le  délivrerait  si,  après  s'être  assuré  de  sa  grâce 
auprès  du  roi,  il    l'avouait    coupable    des  ^crimes    qu'on 
lui  imputait, 

89.  Il  dit  au  roi  :  O  Prince  !  Sauvez-nous  mon  père  et 
moi,  et  je  vous  découvrirai  les  choses  que  vous  voulez 
savoir;  et  le  roi  y  ayant  consenti,  le  fils  du  vieillard  lui 
dit  :  Alexandre  était  déjà  convenu  avec  mon  père  de 
vous  ôter  la  vie,  et,  dans  cette  vue,  mon  père  avait  pris 
avec  votre  barbier  les  mesures  qu'on  vous  a  dites. 

90.  A  cette  parole,  le  roi  ordonna  que  le  vieillard,  son 
fils  et  le  barbier  fussent  mis  à  mort  sur  le  champ;  et  il 
fit  conduire  à  Sébaste  ses  deux  fils,  Alexandre  et  Aris- 
tobule,  pour  y  souffrir  une  mort  honteuse  et  être  ensuite 
attachés  en  croix,  ce  qui  fut  exécuté. 

91.  Alexandre  laissa  deux  fils  qu'il  avait  eus  de  la  fille 
d'Archélaùs,  Tyrcan  et  Alexandre.  Aristobule  en  laissa 
trois,  Aristobule,  Agrippa  et  Hérode.  Nous  avons  rap- 
porté plus  haut  l'histoire  d'Antipater  fils  d'Hérode. 


Fin,  et  louange  a  Dieu. 


NOTES  SUR  LES  LIVRES  APOCRYPHES 


DE 


L'ANCIEN   TESTAMENT 


Dans  les  volumes  qui  précèdent,  nous  avons 
reproduit,  suivant  l'ordre  des  faits,  quelques-uns 
des  livres  apocryphes  de  l'Ancien  Testament  :  La 
prière  de  Manassé  (i),  les  ni*  et  ive  livres  d'Es- 
dras  (2)  et  les  m"  et  iv°  livres  des  Maccabées(}). 

La  qualification  d'Apocryphe  n'offre  pas  un 
sens  fixe.  On  l'a  appliqué  avec  la  signification 
d'anonyme,  au  temps  de  saint  Jérôme.  Dans  une 
décrétale  du  pape  Gélase,  il  a  le  sens  d'hérétique. 
Les  protestants  donnent  ce  nom  indistinctement 
aux  livres  deutér o-cano niques  et  aux  ouvrages  reje- 
tés de  tous  comme*  faux  et  supposés.  C'est  dans  ce 
dernier  sens  que  l'Église  catholique  l'entend  tou- 
jours. 

Les  livres  apocryphes  de  l'Ancien  Testament 
sont  très  nombreux  ;  beaucoup  ont  péri  sans 
que  leur  perte  excite  aujourd'hui  aucun  regret. 
De  ce  nombre  sont  Y  Évangile  d'Eve,  les  Pro- 
phéties d'Eve,  l'Échelle  de  Jacob,  le  Miroir  de 
Joseph,  Y  Apocalypse  d'Élie,  le  Grand  Ordre 
d'Élie.  Ceux  qui  restent,  à  peu  d'exceptions  près, 
n'ont  aucune  valeur  même  littéraire.  C'est  un 
ramas  de  rêveries  incohérentes  où  se  retrouve  un 
fond  de  gnosticisme  ou  de  kabbalisme. 

Le  Livre  d'Adam,  admis  encore  chez  des  sec- 
taires chaldéens,  les  Mandaïtes,  mieux  connus 
sous  le  nom  de  Sabéens  et  de  chrétiens  de  saint 
Jean,  est  le  produit  d'une  imagination  déréglée, 
qui  a  rempli  le  ciel,  l'air  et  la  terre,  des  scènes  les 
plus  fantasmagoriques.  Les  planètes,  les  étoiles, 
les  signes  du  zodiaque  y  jouent  un  rôle  actif.  Les 
deux  principes  de  vie,  Fira  et  Ayar,  ont  produit 
d'innombrables  émanations  célestes,  à  la  tête  des- 
quelles se  trouve  la  Mana,  ou  intelligence  sou- 
veraine et  glorieuse.  Mais  la  révolte  agite  une 
partie  de  ces  émanations  personnifiées.  Our,  prince 
des  ténèbres,  se  met  à  la  tète  des  révoltés  ;  il  lutte 
avec  un  esprit  céleste,  sorte  de  généralissime  des 
troupes  de  Mana,  et  sur  le  point  de  succomber, 
il  se  hâte  d'engloutir  la  terre.  Il  y  aurait  réussi, 
s'il  n'eût  été  aussitôt  vaincu  et  enchaîné.  Gabriel 
opère  une  nouvelle  création.  A  la  vue  de  sa  splen- 


deur, Our  s'agite  dans  sa  prison  ;  la  terre  menace 
de  se  disloquer.  L'envoyé  de  Mana  s'en  irrite  et 
lui  fend  le  crâne  d'un  coup  de  massue.  Mais 
pour  être  atteint  dans  son  chef,  l'esprit  de  révolte 
n'est  pas  détruit  ;  les  génies  célestes  et  les  esprits 
de  ténèbres  se  partagent  le  monde.  Ces  derniers 
mettront  tout  en  œuvre  pour  perdre  Adam  ;  mais 
le  génie  céleste  Manda-di-haï,  connaissance  de  la 
vie,  l'encourage  et  le  fortifie.  Il  lui  recommande 
surtout  de  se  mettre  en  garde  contre  les  sept 
planètes  et  ceux  qui  les  adorent.  Il  lui  révèle  que 
la  mort  est  entrée  dans  le  monde,  parce  que  les 
sept  planètes  se  sont  partagé  le  zodiaque.  Chacun 
des  douze  signes,  en  prononçant  'une  conjuration 
secrète,  a  produit  des  animaux,  des  végétaux,  des 
maladies  et  des  influences  également  nuisibles. 
Ainsi  s'expliquent  le  mal  et  le  bien  dans  le  monde. 
Les  Mandaïtes  croient  à  la  vie  future,  heureuse 
pour  les  bons,  malheureuse  pour  les  méchants. 

Un  autre  livre  attribué  aussi  à  un  patriarche 
anté-diluvien,  le  Livre  d'Hénoch,  a  une  tout  autre 
importance;  on  lui  donna  même  autrefois  une 
sorte  de  caractère  sacré,  parce  que  l'apôtre  saint 
Jude  l'avait  cité.  Mais,  selon  la  remarque  du  savant 
archevêque  de  Cashel,  traducteur  du  Livre  d'Hé- 
noch, «  la  citation  d'un  simple  passage  faite  par  saint 
Jude,  ne  prouve  pas  plus  son  approbation  du 
livre  entier,  que  les  citations  empruntées  par  saint 
Paul  à  certains  poètes  païens  ne  prouvent,  de  la 
part  de  l'apôtre,  l'approbation  de  chaque  partie 
des  ouvrages  auxquels  il  fait  ces  emprunts  (4).  » 

Ce  livre  étrange  fut  composé,  selon  toute  proba- 
bilité, dans  la  seconde  moitié  du  11e  siècle  avant 
Jésus-Christ.  Il  renferme  cent-cinq  chapitres.  On 
y  raconte  la  chute  des  anges,  leurs  relations  avec 
les  filles  des  hommes,  d'où  sortent  les  géants. 
Cinq  anges  expliquent  à  Hénoch  les  mystères  du 
monde  visible  et  invisible,  de  la  terre  et  du  ciel, 
le  règne  messianique,  le  bonheur  des  élus,  le  mal- 
heur des  réprouvés.  Le  chapitre  lviii6  mentionne 
les  deux  monstres  qui  doivent  servir  de  nourriture 
au  banquet  des  élus  :  le  Béhémoth  et  le  Léviathan. 


(1)  Tome  iv,  page  54}.— (2)  Tome  v,  page  nj  et  suiv. 
(j)  Tome  xii,  page  255. 


(4)  Richard  Laurence,    the    book  of  Enoch,    Prelemin. 
dissert.  xxvi. 


;62 


NOTES  SUR   LES  LIVRES   APOCRYPHES 


C'est  un  précieux  indice  pour  montrer  que,  déjà, 
couraient  ces  traditions  folles  qui  ont  si  fort 
échauffé  l'imagination  des  rabbins.  Et  il  y  avait  de 
quoi,  en  vérité,  puisqu'un  bateau  naviguant  sur  le 
dos  du  Léviathan,  mettrait  trois  jours  à  aller  d'une 
nageoire  à  l'autre.  Se  peut-il  rien  de  plus  extraordi- 
naire ?LeL(Vedr/^noc/inenousdonnepascemenu 
détail,  mais  il  figure  en  toutes  lettres  dans  le  Thal- 
mud.  Le  chapitre  lxviii  donne  pareillement  en 
détail  les  noms  et  les  fonctions  des  mauvais  anges. 
Ensuite,  nous  assistons  à  an  cours  d'astronomie 
absolument  fantastique,  où  il  y  a  des  choses  étour- 
dissantes. Puis,  du  chapitre  lxxxiv  au  xci,  nous 
assistons  à  un  cours  d'histoire  où  figurent  Noé  et 
ses  enfants,  Abraham,  Isaac,  Esaù  et  Jacob,  les 
douze  patriarches,  Joseph,  Moïse,  Aaron,  les 
Juges,  Samuel,  Saùl,  David,  Salomon,  les  peuples 
étrangers,  les  prophètes,    Zorobabel  et  Néhémie. 

Mais  si,  pour  les  sciences  naturelles,  la  géogra- 
phie ou  l'histoire,  le  Livre  d'Hénoch  n'est  qu'une 
rêverie  rabbinique,  sa  morale  est  toujours  très 
élevée,  et  l'auteur  parle  avec  une  conviction  pro- 
fonde de  nos  destinées  futures.  Quand  il  traite 
ce  sujet,  son  style  s'élève,  sa  pensée  s'échauffe,  et 
le  texte  est  digne  d'être  comparé  aux  livres  saints. 
Malheureusement,  ces  passages  sont  rares. 

Bien  qu'arrivant  après  le  déluge,  Noé  fut  moins 
heureux  qu'Hénoch.  Les  compositions  qui  paru- 
rent sous  son  nom  sont  perdues. 

Abraham  était  trop  célèbre  pour  ne  point  avoir 
reçu  le  patronage  de  quelque  folie  de  ce  genre. 
On  lui  attribua  de  nombreux  écrits,  mais  il  ne  nous 
en  reste  qu'un  seul,  le  Sépher  Jecirah.  C'est  un 
ouvrage  kabbalistique.  Quelques  auteurs  l'attri- 
buent avec  assez  de  vraisemblance  au  célèbre 
rabbin  Akiba,  mis  à  mort  à  Césarée,  sous  le  règne 
d'Adrien,  lors  de  la  révolte  générale  des  Juifs. 

L'Echelle  de  Jacob  est  perdue  ;  en  revanche  nous 
avons  le  Testament  des  dou^e  Patriarches.  Le  nom 
de  testament  lui  vient  de  ce  que,  aux  approches 
de  la  mort,  chacun  des  enfants  de  Jacob  adresse 
à  ses  enfants  des  sentences  remplies  de  sagesse, 
et  même  y  joint  des  prophéties.  Il  y  a  de  fort  bel- 
les choses,  mais  aussi  de  fort  drôles.  Ainsi  cette 
confession  de  Ruben,  trouvant  Bala  ivre  et  endor- 
mie, puis  abusant  d'elle,  bien  qu'elle  fût  la  femme 
de  son  père.  Un  ange  indiscret  révéla  le  crime  à 
Jacob,  et,  à  partir  de  ce  moment,  Ruben  n'osa 
plus  regarder  son  père  en  lace  jusqu'à  sa  mort, 
ni  adresser  la  parole  à  aucun  de  ses  frères.  A  part 
ce  détail  scabreux,  ces  testaments  renferment  des 
conseils  moraux  empreints  d'une  grande  sagesse, 
mêlés  à  des  songes  et  à  des^visions. 

Le  testament  de  Lévi  pourrait  être  encore  d'une 
certaine  utilité,  puisqu'il  roule  sur  le  sacerdoce  et 
l'orgueil.  Que  de  prêtres,  malheureusement,  fiers 
d'être  élevés  à  cette  haute  dignité,  oublient  la 
retenue  qui  sied  à  leur  caractère,  et  deviennent 


d'un  incommensurable  orgueil  !  Ils  s'arrogent  tous 
les  droits,  se  croient  des  potentats  et  osent  même 
critiquer  leurs  supérieurs  ou  leurs  égaux  qui,  plus 
judicieux,  plus  instruits,  plus  religieux,  se  tiennent 
dans  une  modeste  réserve.  Ils  portent  la  tête 
haute,  parce  qu'elle  est  vide,  comme  un  épi  droit 
au  temps  de  la  moisson  ;  ils  donnent  tout  à  l'ap- 
parence, parce  qu'il  n'y  a  rien  au-dedans.  Ils  se 
font  plus  de  tort  qu'ils  ne  pensent.  Ce  ne  serait 
encore  que  demi  mal  s'ils  ne  nuisaient  qu'à  leurs 
intéressantes  personnes  ;  mais  ils  exposent  à  la 
critique  cette  religion  sainte  qu'ils  devraient  mieux 
servir. 

Si  le  testament  de  Lévi  concerne  spécialement 
les  prêtres,  celui  de  Joseph  peut  servir,  à  son 
tour,  d'instruction  aux  hommes  du  moi.de.  «  Le 
soir  que  je  fus  vendu  par  mes  frères,  »  fait -on 
dire  au  patriarche  Joseph,  «  les  Ismaélites  me 
demandèrent  qui  j'étais,  et  moi,  pour  ne  pas  ac- 
cuser ni  humilier  mes  frères,  je  répondis  que  j'étais 
leur  esclave.  Alors  le  chef  de  la  troupe  me  re- 
garda et  me  dit  :  «  Tu  n'étais  point  leur  esclave, 
ton  visage  te  dément.  »  Et  il  me  menaça  de  la 
mort,  si  je  ne  lui  disais  la  vérité.  «  J'étais  leur 
esclave,  »  répondis-je,  et  je  me  tus.  » 

Joseph  est  vendu  à  Putiphar. Sa  femme,  frappée 
de  son  extrême  beauté,  veut  le  séduire.  Elle  met 
tout  en  œuvre  pour  l'engager  dans  le  crime,  et  le 
jeune  Hébreu  résiste,  sans  manquer  pour  cela 
d'égard  envers  sa  maîtresse;  le  combat  journalier 
dura  sept  ans.  «  Que  de  fois,  •  fait-on  dire  au 
patriarche,  «  elle  me  menaça  de  la  mort  !  Puis,  à 
peine  avait-elle  ordonné  de  me  punir,  elle  envoyait 
un  contre-ordre,  et  me  rappelait  auprès  d'elle 
pour  me  menacer  encore.  Elle  me  disait:  «  Tu 
seras  mon  maître,  le  maître  de  tous  mes  biens, 
tu  seras  mon  seigneur  et  mon  roi.  »  Mais  moi, 
je  me  souvenais  des  commandements  de  mes  pè- 
res, et,  rentrant  dans  ma  chambre,  je  priais  le 
Seigneur  et  jeûnais. 

((Un  jour  elle  me  dit  :  a  Tu  ne  veux  pas  m'ai- 
mer  ?  Eh  bien  !  je  tuerai  mon  mari,  et  alors  je 
t'épouserai.  »  Quand  j'entendis  ces  paroles,  saisi 
de  douleur,  je  déchirai  mes  vêtements,  et  je  dis  : 
a  Femme,  respecte  le  Seigneur,  et  ne  fais  point 
cette  méchante  action  :  ne  perds  pas  ton  âme. 
Si  tu  persistes,  je  dénoncerai  ta  pensée  impie  à 
tout  le  monde.  »  Elle  me  pria  en  grâce  de  ne 
point  révéler  sa  faute,  et  elle  s'éloigna.  Puis  elle 
m'envoya,  pour  m'apaiser,  des  présents.  Son 
mari,  la  voyant  ainsi  abattue,  lui  dit  :  «  Pourquoi  ton 
visage  est-il  désolé  ?  »  Elle  répondit:  «J'ai  ma 
au  cœur  ;  je  me  sens  étouffée.  »  A  peine  était-i 
sorti  qu'elle  accourut  à  moi  :  «  Si  tu  ne  m'aimes 
pas,»  me  dit-elle,  «je  vais  m'étrangler  ou  me  jeter 
dans  un  puits,  dans  un  précipice.  Je  la  regardai  ; 
l'esprit  de  Bélial  la  possédait.  Je  priai  le  Seigneur, 
et  je  dis  à  l'Égyptienne:  «  Pourquoi  es-tu  troublée 


DE   L'ANCIEN   TESTAMENT 


?63 


et  hors  de  toi  ?  Tes  péchés  t'aveuglent.  Souviens- 
toi  que,  si  tu  te  tues,  Sétho,  la  concubine  de  ton 
mari,  frappera  tes  enfants,  et  détruira  ta  mémoire 
dans  ta  maison.  »  —  «  Ah  I  »  répondit-elle,  «  tu 
m'aimes,  puisque  tu  prends  intérêt  à  ma  vie  et  à 
mes  enfants.  » 

«  Ceci  me  semble  sublime,  dit  Saint-Marc  Gi- 
rardin(i):  Vos  enfants  auront  une  belle-mère  ! 
Cette  seule  parole  renverse  toutes  les  idées  de 
l'amante  désespérée.  Voilà  son  cœur  changé  :  ses 
enfants  seront  frappés  par  Sétho  !  Quel  discours, 
quelle  éloquence  contre  le  suicide  ont  valu  ce 
mot  là  ?  Cette  femme  qui  venait  furieuse,  possédée 
par  l'esprit  d'impureté,  un  mot  l'a  attendrie,  un 
mot  l'a  guérie  ;  elle  se  souvient  qu'elle  est  mère, 
elle  ne  veut  plus  mourir,  elle  se  reprend  à  aimer 
la  vie,  elle  espère  encore,  elle  espère  même  que 
Joseph  l'aimera  un  jour,  et  pourquoi?  C'est  qu'il 
a  pris  intérêt  à  sa  vie  et  à  ses  enfants.  Ce  mé- 
lange des  sentiments  divers  qui  l'agitent,  est  na- 
turel et  touchant  ;  elle  est  mère  à  la  fois,  et 
amante. 

«  L'Égyptienne  était  belle,  c'est  Joseph  lui- 
même  qui  le  dit,  et  cela  à  son  lit  de  mort,  à  cent 
dix  ans,  entouré  de  ses  enfants,  et  les  exhortant 
à  la  chasteté.  Homère  n'a  fait  nulle  part  un  plus 
grand  éloge  de  la  beauté  d'Hélène  qu'en  mon- 
trant les  vieillards  de  Troie,  ravis  d'admiration 
quand  ils  la  voient  passer.  N'est-ce  rien,  pour 
témoigner  de  la  beauté  de  la  femme  de  Putiphar, 
que  ce  souvenir  de  Joseph  mourant  à  cent-dix 
ans?»  L'Egyptienne  fut  guérie  de  son  idée  de 
suicide,  mais  elle  n'en  aima  Joseph  que  devan- 
tage,  et  on  connaît  le  reste. 

Le  livre  du  Testament  des  dou^e  Patriarches  a 
dû  être  écrit  par  un  chrétien  judaïsant,  dans  le 
but  de  convertir  sa  nation. 

Cinquante  ans  environ  avant  Jésus- Christ,  un 
Juif  composa  la  Petite  Genèse,  sous  la  forme 
d'une  révélation  faite  à  Moïse.  C'est  une  sorte 
de  révélation  chronologique  où,  à  chaque  année 
jubilaire,  sont  groupés  les  faits  qui  se  rattachent 
à  cette  période.  Cet  ouvrage,  écrit  en  hébreu 
ou  en  araméen,  avait  été  traduit  en  grec,  dès 
les  premiers  siècles  du  christianisme,  avant  saint 
Jérôme.  L'Apocalypse  de  Moïse  et  l'Assomp- 
tion de  Moïse  sont  des  apocryphes  de  la  même 
époque,  écrits  par  quelques  pieux  faussaires, 
dans  le  but  de  réveiller  la  ferveur  du  peuple  juif. 

Salomon  a  donné  son  nom  à  de  nombreux 
ouvrages,  sans  parler  des  Clavicules.  Les  dialogues 
avec  un  certain  Marcoulf  sont  d'une  telle  crudité 
qu'il  serait  impossible  de  les  reproduire  même 
dans  un  langage  inconnu.  C'est   une  composition 


du  moyen  âge,  comme  l'indique  le  nom  même  de 
Marcoulf.  Nous  ne  nous  arrêterons  pas  à  ces 
publications  obscènes  ;  elles  ne  sont  de  mise  ni 
ici,  ni  ailleurs.  Peut-être  ont-elles,  cependant 
servi  de  guide  à  l'imagination  de  Rabelais.  Encore, 
le  curé  de  Meudon  y  a-t-il  mis  les  adoucissements 
que  comportait  notre  langue,  même  de  son  temps. 

Dans  un  ordre  plus  sérieux,  on  attribue  à  Sa- 
lomon dix  huit  Psaumes,  composés  probablement 
à  l'époque  de  la  conquête  de  la  Palestine  par 
Pompée.  Ils  ne  seraient  pas  hors  de  place  dans 
le  recueil  des  Psaumes. 

L'Ascension  d'fsaïe  a  une  telle  autorité  chez  les 
chrétiens  d'Abyssinie,  qu'ils  mettent  ce  livre  apo- 
cryphe parmi  les  écrits  canoniques.  Le  livre  est 
d'origine  mixte.  Une  partie  paraît  juive,  et  l'autre 
chrétienne  ;  il  a  pu  être,  comme  le  Testament  des 
dou^e  Patriarches,  écrit  par  un  chrétien  judaïsant. 
C'est  de  cette  source  qu'est  venue  la  tradition  du 
martyre  d'Isaïe, scié  en  deux  par  ordredeManassé. 
On  y  raconte  encore  une  vision  concernant  le 
crucifiement  et  l'Ascension  de  Jésus-Christ.  Il 
semble,  en  parcourant  ces  divers  ouvrages  apo- 
cryphes, que  le  Dante  et  Milton  leur  aient  fait 
quelques  emprunts. 

Tous  ces  livres  ont  été  rejetés  par  l'Église 
comme  apocryphes,  et  sont  à  peu  près  tombés 
dans  l'oubli.  Il  n'en  est  pas  de  même  de  la  Prière 
de  Manassê,  des  me  et  ivc  livres  d'Esdras  et  des 
deux  derniers  livres  des  Maccabées. 

L'oraison  ou  la  Prière  de  Manassé,  ne  contient 
rien  en  soi  que  de  très  édifiant  ;  et  l'on  ne  conçoit 
point  d'autre  raison  qui  l'ait  fait  rejeter  par  la 
Synagogue,  et  ensuite  par  l'Église  du  canon  des 
livres  saints,  sinon  qu'on  n'a  pas  trouvé  de  preuves 
assez  certaines  pour  assurer  qu'elle  fût  véritable- 
ment de  ce  prince,  ou  que  l'on  n'a  pas  cru  que 
les  livres  où  elle  se  trouvait  méritassent  par  eux- 
mêmes,  ou  par  leurs  auteurs,  d'être  mis  au  même 
rang  que  les  livres  divins.  Il  est  dit,  n  Paralip. 
cap.  xxxiii,  versets  12  et  13,  que  Manassé,  fils 
d'Ezéchias,  vingtième  roi  de  Juda,  ayant  été  em- 
mené, chargé  de  chaînes,  à  Babylone,  la  vingt- 
deuxième  année  de  son  règne,  et  étant  en  pri- 
son réduit  en  une  extrême  misère,  reconnut 
ses  crimes  ;  s'adressant  alors  au  Seigneur,  il  lui 
fit  une  prière,  et  il  est  dit  également  aux  ver- 
sets 18  et  iq  du  même  chapitre,  que  cette  prière 
est  rapportée  dans  les  livres  d'Hosaï  et  dans 
les  Annales  des  rois  d'Israël,  ou  pour  mieux  dire 
de  Juda,  comme  porte  le  verset  17  du  chapitre  xxi 
du  quatrième  livre  des  Rois  ;  mais  il  ne  s'ensuit 
pas  que  celle  qu'on  rapporte  ici  soit  la  nîjme  que 
celle  de  ces  livres  cités  par  l'Ecriture.  Ceux  qui 


(1)  Saint-Marc    Girardin,    Essai    de    littérature    et   de      morale,  1.  109. 


3^A 


NOTES  SUR  LES  LIVRES  APOCRYPHES 


soutiennent  la  vérité  de  l'antiquité  de  cette 
prière,  prétendent  que  c'est  la  môme,  et  disent, 
mais  sans  preuves,  qu'elle  a  été  traduite  en  grec 
sur  l'hébreu.  Mais  l'on  ne  trouve  plus  ce  texte 
original  hébreu,  ni  cette  version  grecque  faite  sur 
ce  prétendu  original.  Il  est  vrai  que  l'auteur  des 
Constitutions  apostoliques,  qui  vivait  vers  la  fin 
du  troisième  siècle  ou  environ,  a  donné  en  grec 
cette  prière,  qu'il  a  insérée  au  verset  13  du  cha- 
pitre xxxiii  des  Paralipomènes  ;  mais  il  paraît  évi- 
dent que  c'est  une  version  grecque  faite  après 
coup  sur  le  latin,  par  l'auteur  même  des  Consti- 
tutions. Voyez  le  livre  11  des  Constitutions,,  cap. 
xxii,  tom.  1,  Concil.p.  254,  où  cette  prière  est  im- 
primée en  grec  et  en  latin  :  elle  se  trouve  aussi  en 
quelques  exemplaires  grecs  et  latins  à  la  fin  du 
deuxième  livre  des  Paralipomènes,  et  elle  est  citée 
par  quelques  pères  latins. 

On  a  donné  au  troisième  livre  d'Esdras  le  nom 
qu'il  porte,  parce  qu'à  la  réserve  du  chapitre  pre- 
mier, qui  est  copié  sur  le  trente-cinquième  chapi- 
tre et  sur  les  vingt-un  premiers  versets  du  chap. 
xxxvi  du  second  livre  des  Paralipomènes,  presque 
tout  le  reste  n'est  qu'une  répétition  des  mêmes 
choses  rapportées,  à  quelques  expressions  près, 
mot  pour  mot,  dans  le  premier  livre  d'Esdras 
et  dans  les  treize  premiers  versets  du  chapitre 
huitième  du  second  livre  du  même  nom  ;  mais  ce 
qui  a  déterminé  le  plus  grand  nombre  des  anciens 
pères  à  le  rejeter,  nonobstant  cela,  hors  du  canon 
des  livres  sacrés, c'est  que  l'histoire  rapportéedans 
le  troisième  et  le  quatrième  chapitre ,  à  l'occa- 
sion du  retour  des  Israélites  de  la  captivité,  et  de 
la  permission  qui  leur  fut  accordée  par  Darius  de 
rebâtir  le  temple  et  la  ville  de  Jérusalem, avait  tout 
l'air  d'une  fable,  quoiqu'elle  soit  racontée  aussi 
par  Josèphe.  Il  n'était  pas  possible  de  l'accorder 
avec  ce  que  l'auteur  même  avait  emprunté  et  ex- 
trait du  premier  livre  d'Esdras.  Ils  ont  trouvé  en 
outre,  dans  ce  que  cet  auteur  a  copié  ou  extrait 
de  l'écrivain  sacré,  des  méprises  si  grossières  et 
si  fréquentes  sur  les  faits  historiques,  et  à  l'égard 
des  noms  propres  de  ceux  qui  revinrent  à  Jéru- 
salenf,  dont  il  transcrit  la  liste,  qu'ils  n'ont  pu 
s'empêcher  d'en  attribuer  la  faute,  ou  au  mauvais 
original  dont  l'auteur  s'était  servi,  ou  à  l'ignorance 
de  ses  copistes,  ou  enfin  à  celle  des  traducteurs. 

Les  Grecs  ont  conservé  ce  livre  dans  leur  ca- 
non, et  l'ont  mis  même  avant  celui  qui  passe  chez 
nous  pour  le  premier  d'Esdras.  Les  exemplaires 
grecs  les  plus  anciens  et  les  plus  estimés,  comme 
celui  de  Rome,  mettent  d'abord  celui  que  nous 
appelons  le  troisième  livre  d'Esdras,  puis    Néhé- 


mie,  et  en  troisième  lieu  celui  qui  est  le  premiei 
d'Esdras  dans  nos  bibles  latines.  Il  est  vrai  que 
quelques  éditions  grecques  (1)  mettent  à  part  le 
troisième  livre  d'Esdras,  et  le  rejettent  après  le 
cantique  des  trois  jeunes  hommes  dans  la  four- 
naise, lequel,  dans  ces  éditions,  se  trouve  détaché 
de  la  prophétie  de  Daniel,  où  ce  cantique  est 
communément  placé.  Dans  d'autres  éditions  grec- 
ques (2),  on  ne  lit  point  du  tout  le  troisième  livre 
d'Esdras.  Mais  ce  qui  est  incontestable,  suivant 
la  remarque  de  Sixte  de  Sienne  (3),  c'est  que  les 
pères  grecs  ont  tenu  pour  canonique  le  troisième 
livre  d'Esdras,  et  l'ont  mis  avant  Néhémie. 

Les  anciens  manuscrits,  et  les  éditions  latines 
ou  grecques,  ne  sont  pas  uniformes  sur  cet  arti- 
cle. Nous  avons  quelques  manuscrits  (4)  où  l'on 
trouve  tout  de  suite  le  premier  livre  d'Esdras, 
Néhémie,  et  le  second  d'Esdras  ;  car  c'est  ainsi 
qu'ils  intitulent  celui  que  nous  appelons  le  troi- 
sième. Dans  d'autres  manuscrits,  on  ne  trouve 
pas  le  troisième  livre  d'Esdras,  mais  seulement  le 
premier  d'Esdras  et  Néhémie.  D'autres  manus- 
crits plus  anciens,  sont  encore  bien  plus  éloignés 
de  nos  éditions  latines.  Dans  une  très  ancienne 
bible  de  Saint-Germain-des-Près,  après  avoir  mis 
tout  de  suite,  et  sans  distinction,  les  deux  livres 
canoniques  d'Esdras,  on  a  placé  immédiatement 
l'histoire  des  trois  gardes  du  corps  de  Darius,  et 
du  problème  qu'ils  proposèrent  à  ce  prince  ;  après 
cela,  on  trouve  le  commencement  du  quatrième 
livre  d'Esdras,  qui  commence  par  ces  paroles  : 
Incipil  liber  Esdrœ  prophetœ  secundus  ;  il  n'y  a 
d'abord  que  les  deux  premiers  chapitres  de  ce 
livre  ;  on  lit  ensuite  tout  le  troisième  livre  d'Es- 
dras, à  l'exception  de  l'histoire  des  trois  officiers 
de  Darius  ;  puis  recommence  le  quatrième  d'Es- 
dras, avec  ce  titre  :  Liber  E^rœ  quarlus,  anno  tri- 
cesimo  mince  civilalis,  eram  in  Babylone  ego  Sala- 
thiel,  qui  et  E\ra,  et  continue  jusqu'à  la  fin.  On  y 
voyait  un  autre  manuscrit  côté  773,  où  le  qua- 
trième livre  d'Esdras  ne  commence  qu'au  chapi- 
tre 111. 

Le  Fèvre,  précepteur  de  Louis  XIII,  avait 
trouvé  un  quatrième  livre  d'Esdras  si  différent  des 
imprimés,  qu'il  jugea  à  propos  d'en  envoyer  les 
diverses  leçons  au. cardinal  Baronius.  Dans  les 
anciennes  bibles  latines  imprimées,  on  lit  ordi- 
nairement les  trois  livres  d'Esdras  de  suite,  c'est- 
à-dire  le  premier  d'Esdras,  celui  de  Néhémie,  et 
le  troisième  d'Esdras,  ou,  comme  portent  quel- 
ques exemplaires,  le  second  d'Esdras.  Cet  ordre 
s'est  continué  jusqu'à  la  bible  de  Sixte  V.  Depuis 
ce  temps,  on  a  mis  à  part  les  troisième  et   qua- 


(1)  Editio  grœca  Francofurt.  an.i^j.et  Basilen.  an. 1545. 

(2)  Editio  Mil.   Venet.  an  1518. 
(j)  Sixt.  Senens.  1. 1.  pag.  8. 


(4)  Manuscrit  du  monastère  de  Saint-Michel,  en  Lor- 
raine, et  deux  autres  du  Monastère  de  Saint-Germain- 
des-Prés. 


DE   L'ANCIEN  TESTAMENT 


?65 


trième  livres  d'Esdras,  hors  du  rang  des  écritures 
canoniques. 

Les  Hébreux  ne  faisaient  qu'un  livre  des  deux 
premiers  d'Esdras,  ou,  si  l'on  veut,  du  premier 
livre  d'Esdras  et  du  livre  de  Néhémie.  Les  Grecs 
les  imitaient,  mais  avec  cette  différence  que  le 
premier  livre  d'Esdras,  dans  les  exemplaires  grecs 
et  dans  plusieurs  exemplaires  latins,  était  celui 
que  nous  appelons  le  troisième.  Les  pères  les  ci- 
tent suivant  cet  ordre,  comme  on  le  voit  dans 
Origène,  sur  la  fin  de  l'homélie  neuvième  sur  Jo- 
sué,  dans  saint  Athanase,  ou  l'auteur  de  la  Sy- 
nopse  citée  sous  son  nom,  dans  saint  Augustin(i) 
et  saint  Cyprien  (2).  Ce  dernier,  de  même  que 
saint  Augustin,  cite  l'histoire  du  problème  pro- 
posé par  les  trois  gardes  du  corps  de  Darius, 
comme  étant  du  vrai  Esdras.  Cela  n'est  pas  ex- 
traordinaire pour  saint  Athanase,  puisque  c'était 
l'opinion  commune  des  Grecs,  et  que  leurs  exem- 
plaires les  plus  anciens  et  les  meilleurs  lisaient  ce 
problème  dans  le  premier  livre.  Josèphe  (3.),  plus 
ancien  que  tous  ces  pères,  le  lisait  de  même  ; 
ainsi,  on  peut  assurer  qu'avant  la  traduction  de 
saint  Jérôme,  la  plupart  des  églises  tenaient  le 
troisième  livre  d'Esdras  pour  authentique,  puis- 
qu'elles suivaient  ou  les  exemplaires  grecs,  dans 
lesquels  ce  livre  tenait  le  premier  rang,  ou  des 
exemplaires  latins  traduits  sur  la  version  grecque. 
Et  quand  les  pères  et  les  conciles  (4)  des  pre- 
miers siècles  ont  déclaré  les  deux  livres  d'Esdras 
canoniques,  ils  l'entendaient  suivant  leurs  exem- 
plaires, qui  ne  faisaient  qu'un  livre  du  premier 
d'Esdras  et  de  Néhémie.  et  qui  comptaient  pour 
premier  d'Esdras  celui  qui  est  le  troisième  dans 
nos  bibles. 

Les  mêmes  pères  grecs  (5)  et  latins  (6)  citent  le 
livre  que  nous  appelons  troisième  d'Esdras,  quel- 
quefois même  contre  les  hérétiques,  et  dans  des 
matières  contentieuses,  sans  témoigner  le  moindre 
scrupule  sur  son  autorité.  Enfin,  ce  troisième  li- 
vre ne  contenant  que  ce  qu'on  lit  dans  le  premier 
livre  d'Esdras,  à  l'exception  de  quelques  change- 
ments et  de  l'histoire  du  problème  proposé  par  les 
trois  gardes  du  corps  de  Darius  (7),  il  semblerait 
trop  dur,  dit-on,  de  le  ranger  absolument  parmi 
les  apocryphes,  surtout   quand   l'Église  grecque 


le  reçoit  pour  canonique.  D'ailleurs  il  ne  contient 
rien  de  contraire  ni  à  la  foi,  ni  aux  bonnes  mœurs; 
et  l'histoire  du  problème  dont  on  a  parlé  est  re- 
çue par  les  pères,  et  par  plusieurs  auteurs  ecclé- 
siastiques, comme  contenant  le  récit  d'un  événe- 
ment certain.  Ce  sont  ces  raisons  qui  ont  déter- 
miné Génébrard  (8j  à  soutenir  la  canonicité  de  ce 
111e  livre.  Les  Juifs  ne  le  mettent  pas,  à  la  vérité, 
au  nombre  des  proto-canoniques  ;  mais  ils  le  reçoi- 
vent dans  les  deutéro-canoniques.  Voilà  ce  qu'on 
dit  en  faveur  de  ce  livre. 

Mais  l'Église  latine  l'ayant  rejeté, et  placé  parmi 
les  apocryphes,  est-il  encore  permis  de  proposer 
comme  une  question  soutenable  s'il  est  du  nom- 
bre des  livres  canoniques  ?  Le  sentiment  et  la 
pratique  des  Grecs  sont-ils  une  loi  pour  nous, 
surtout  depuis  le  concile  de  Florence,  où  l'on  ne 
reçut  pour  canoniques  que  ces  deux  livres  d'Es- 
dras et  de  Néhémie  ?  La  plupart  des  anciens  pè- 
res, qui  l'ont  cité  comme  authentique,  pouvaient 
ignorer,  et  ignoraient  apparemment,  que  ce  ut0 
livre  fût  fort  différent  de  l'hébreu.  S'ils  l'eussent 
su,  ils  n'auraient  eu  garde  de  le  recevoir,  puis- 
qu'en  tant  d'endroits  ils  déclarent  ne  recevoir 
pour  authentiques  que  les  livres  qui  sont  dans  le 
canon  des  Hébreux. 

Saint  Jérôme, 'qui  était  plus  instruit  dans  ces 
matières,  rejette  les  troisième  et  quatrième  livres 
attribués  à  Esdras,  comme  des  ouvrages  fabuleux 
et  remplis  de  fictions  :  Nec  apocryphorum  teriïi  et 
quartï  (Esdrœ)  somniis  quisquam  delectelur  (9). 
Tout  ce  qui  n'est  point  dans  les  exemplaires  hé- 
breux, ajoute-t-il,  et  qui  ne  vient  pas  des  vingt- 
quatre  vieillards  (10), ne  mérite  aucune  croyance. 
Si  l'on  objecte  l'autorité  des  Septante,  la  variété 
qui  se  remarque  dans  leurs  exemplaires  montre 
assez  qu'ils  sont  incohérents  à  ce  sujet.  On  ne 
peut  établir  ni  assurer  la  vérité  d'un  écrit  si  plein 
de  variantes,  et  qui  s'accorde  si  peu  avec  les  ori- 
ginaux :  Nec  potest  ulique  verum  asseri,  quod  di- 
version est.  Saint  Jérôme  reconnaît  donc  que  les 
Grecs  recevaient  ce  111e  livre  ;  mais  il  ne  laisse  pas 
de  le  rejeter,  comme  étant  différent  du  texte  hé- 
breu. Quand  il  n'y  aurait  que  le  problème  pro- 
posé par  les  trois  gardes  du  roi  Darius,  il  suffirait 
pour  taire  regarder  tout  le  livre  comme  fabuleux. 


(s)  Augusl.  de  Civit.  Dei.  lib.  xviu.  cap.  56.  Nisi  forte 
Esdras  in  eo  Christum  prophetasse  intelligendus  est, 
quod  inter  juvenes  quosdam  orta  quasstione,  quid  amplius 
valeret  in  rébus,  cum  regem  unus  dixisset,  alter  virum, 
tertius  mulieres,item  tamen  tertius  veritatem  super  omnia 
demonstravit  esse  victricem. 

(2)  Cyprian.  Ep.  lxxiv.  ad  Pompeiam..  Apud  Fsdram 
veritas  vincit. 

(j)  Joseph.  Antiq.  I.  xi.  c.  j. 

(4)  Concil.Carthag.  1u.can.4y.-  Canones.  Apostol.  ctfrt.84.- 
Laodice.  c.  ult.-D.  Augus.  de  Doctrin.  Ckrisl.  t.  11.  c.  8. - 


Innoc.  1.  ep.  m.  art.  7. 

(<)  Athanas.  oral.  m.  contra  Arlanos.  ■*  Justin,  martyr. 
Dialog   cum  Tryphon.  p.  297.  et  atii  passim. 

(6)  August.  de  Civit.  t.  xvm.  cap.  36.-  Cyprian.  ad  Pom- 
peiam. -  Opus  imperfcctum  in  Malth.  Homil.  1. 

(7)  Esdr.  m.  îv.  v. 

(8)  Genebrard.  in  Chronico  an.  j7,'o.  pag.  95.  96. 

(9)  Hieron.  epist.  ad  Domnion.  et  Rogatian. 

(1)  Saint  Jérôme  entend  par  là  les  vingt-quatre  livres 
qui  composent  le  canon  des  Hébreux.  Voyez  le  Prolo- 
gus  Galcatus. 


366 


NOTES  SUR   LES   LIVRES  APOCRYPHES 


Quant  à  l'auteur  du  in°  livre  d'Esdras,  on  peut 
assurer  qu'il  est  ancien,  quoique  inconnu,  puisque 
Josèphe  et  les  anciens  exemplaires  grecs  lisent 
l'histoire  du  problème,  qui  est  rapportée  dans  son 
livre.  Ce  ne  peut  être  qu'un  Juif  helléniste,  qui  a 
voulu  embellir  la  vie  de  Zorobabel  par  une  cir- 
constance qui  lui  est  glorieuse,  et  qui  d'ailleurs 
est  divertissante  pour  le  lecteur.  Nous  ne  vou- 
drions point  absolument  l'accuser  d'avoir  fait 
cette  addition  de  mauvaise  foi  :  il  crut  peut-être 
qu'elle  manquait,  l'ayant  apparemment  trouvée 
bien  établie  dans  la  tradition  du  peuple  ;  mais  ces 
traditions  populaires  ne  sont  pas  toujours  fondées 
sur  la  vérité,  et  souvent  une  action  véritable  est 
gâtée  par  les  circonstances  fabuleuses  qu'on  y 
mêle.  On  peut  croire  que  c'est  ce  qui  est  arrivé 
à  celle-ci.  La  fausseté  s'y  trahit  elle-même  ;  et  on 
ne  peut  excuser  l'auteur  d'avoir  modifié  plusieurs 
circonstances  du  véritable  Esdras,  pour  appuyer 
son  roman,  et  pour  empêcher  qu'on  ne  s'aperçût 
de  sa  fraude. 

Le  iiic  livre  d'Esdras  (i)  commence  par  la  des- 
cription de  la  Pâque  magnifique  qui  fut  célébrée 
sous  le  roi  Josias.  Il  rapporte  ensuite  la  mort  de 
ce  prince,  et  l'histoire  de  ses  successeurs,  jusqu'à 
la  ruine  entière  de  Jérusalem.  Tout  cela  est  tiré 
des  deux  derniers  chapitres  des  Paralipomènes. 
Le  second  chapitre  raconte  la  manière  dont 
Cyrus  mit  les  Juifs  en  liberté,  et  leur  rendit  les 
vases  sacrés;  l'opposition  que  les  ennemis  des 
Juifs  apportèrent  à  la  construction  du  temple;  leur 
lettre  à  Artaxerxès,  et  la  réponse  de  ce  prince(2). 
Le  troisième  chapitre  raconte  que  Darius  ayant 
fait  un  grand  festin  à  tous  les  officiers  de  sa  cour, 
à  tous  les  magistrats  de  la  Médie  et  de  la  Perse, 
et  à  tous  les  autres  qui  gouvernaient  les  cent 
vingt-sept  provinces  de  ses  états,  après  le  souper, 
le  roi  s'endormit,  et  les  trois  gardes  qui  étaient 
de  service  auprès  de  sa  personne  se  dirent  :  Pro- 
posons chacun  quelque  chose,  et  celui  qui  sou- 
tiendra le  mieux  son  sentiment  sera  richement 
récompensé  par  le  roi  ;  il  portera  la  pourpre,  boira 
dans  une  coupe  d'or,  aura  un  lit  d'or,  un  chariot 
traîné  par  des  chevaux  ornés  de  brides  d'or,  un 
collier  précieux,  le  bonnet  de  byssus,  nommé 
Cydaris  (qu'on  n'accordait  qu'aux  personnes  du 
premier  rang]  :  il  sera  assis  à  la  seconde  place 
après  Darius,  et  sera  nommé  le  parent  du  roi. 
Alors  chacun  d'eux  écrivit  sa  proposition,  et, 
l'ayant  cachetée,  ils  la  mirent  sous  le  chevet  du 
roi.  L'un  dit  que  la  chose  du    monde  la  plus  forte 


est  le  vin  ;  le  second,  que  c'est  le  roi  ;  le  troi- 
sième, que  ce  sont  les  femmes,  mais  que  la  vérité 
l'emporte  sur  tout  cela.  Le  roi  se  leva,  et  ils  lui 
présentèrent  leurs  écrits. 

Alors  Darius  assembla  tous  ses  officiers  et  les 
gouverneurs  de  ses  provinces.  On  lut  en  leur  pré- 
sence les  propositions  des  trois  gardes  du  roi,  et 
on  les  fit  entrer  dans  la  salle  pour  soutenir  leur 
sentiment.  Le  premier  parla  de  la  force  du  vin,  et 
fit  voir  ses  effets  sur  l'esprit  et  le  cœur  des  hom- 
mes ;  ôtant  aux  uns  le  souvenir  de  leur  misère, 
inspirant  aux  autres  la  joie  et  le  courage,  la  har- 
diesse, la  libéralité,  et  quelquefois  la  colère  et  la 
fureur.  Le  second  parla  sur  la  puissance  du  roi, 
qui  s'étend  sur  les  mers  et  les  terres,  qui  fait 
trembler  les  nations,  et  qui,  par  le  moyen  de  ses 
armées,  abat  les  montagnes,  les  tours  et  les  mu- 
railles, tue,  ravage,  terrasse,  pardonne,  rétablit, 
soutient:  les  peuples  soumis  lui  apportent  le  fruit 
de  leurs  travaux  ;  ses  ennemis  le  redoutent  ;  tout 
le  monde  le  respecte. 

Zorobabel,  qui  était  le  troisième,  exagéra  le 
pouvoir  des  femmes.  Elles  dominent,  dit-il,  et  le 
roi  et  les  sujets  ;  elles  donnent  la  naissance  aux 
grands  comme  aux  petits  ;  ceux  qui  cultivent  la 
vigne  et  ceux  qui  boivent  le  vin  ne  feraient  pas 
sans  les  femmes.  Ce  sont  elles  qui  leur  donnent 
des  habits  et  des  ornements  précieux.  L'homme 
quitte  ses  parents,  ses  amis  et  sa  patrie,  pour 
s'attacher  à  sa  femme.  Elle  adoucitles  plus  farou- 
ches ;  elle  gagne  les  plus  violents.  Le  roi,  tout 
puissant  qu'il  est,  se  laisse  quelquefois  maltraiter 
familièrement,  et  par  amitié,  d'une  femme.  J'ai 
vu  Apémée,  fille  de  Besace,  assise  à  la  droite  du 
roi,  lui  ôter  le  diadème,  se  le  mettre  sur  la  tête 
et  frapper  le  roi  de  sa  main  gauche. 

Mais,  ajouta-t-il,  la  force  de  la  vérité  l'emporte 
encore  sur  les  caresses  et  les  attraits  de  la  femme. 
Toutes  les  nations  révèrent  et  invoquent  la  vérité, 
le  ciel  la  bénit  ;  toute  la  terre  la  craint  et  la  res- 
pecte. Le  vin,  le  roi  et  les  femmes,  peuvent  tom- 
ber dans  le  désordre  et  dans  l'injustice  ;  mais  la 
vérité  est  incorruptible  et  éternelle.  Sa  force  n'est 
ni  passagère  ni  sujette  au  changement.  Elle  ne 
fait  acception  de  personne  ;  elle  ne  s'égare  point 
dans  ses  jugements  ;  elle  fait  toute  la  force,  la 
beauté,  la  puissance  de  tous  les  siècles.  Béni  soit 
le  Seigneur  de  la  vérité.  Il  se  tut,  et  toute  l'as- 
semblée s'écria  :  La  vérité  est  grande  ! 

Alors  le  roi  le  déclara  vainqueur,  et  lui  dit  qu'il 
lui    accordait  non  seulement  ce   qui  était  porté 


(1)  Esdr.  i.  C'est  la  même  que  celle  dont  il  est  ques-  le  même  jusqu'au  verset  16,  que  le  premier  du  premier 
tion  dans  les  deux  derniers  chapitres  des  Paralipo-  livre  ;  et  depuis  le  verset  16  jusqu'à  la  fin,  il  est  le 
mènes.  même    que    le   quatrième  du    premier     livre,    verset   7 

(2)  Le  second  chapitre  du  troisième  livre  d'Esdras,est  et  suivant. 


DE   L'ANCIEN  TESTAMENT 


}67 


dans  leur  écrit,  mais  de  plus  qu'il  lui  permettait 
de  lui  faire  la  demande  qu'il  voudrait.  Zorobabel 
le  supplia  très  humblement  de  se  souvenir  du  vœu 
qu'il  avait  fait,  lorsqu'il  parvint  à  la  royauté,  de 
faire  rebâtir  le  temple  qui  avait  été  brûlé  par  les 
Iduméens,  lorsque  les  Chaldéens  prirent  la  ville 
de  Jérusalem,  et  d'y  renvoyer  tous  les  vases  que 
Cyrus  avait  mis  à  part,  lorsqu'il  prit  Babylone, 
pour  les  faire  reporter  à  Jérusalem;  que  c'était  la 
seule  grâce  qu'il  lui  demandait.  Darius  l'embrassa, 
lui  accorda  sa  demande,  et  écrivit  aux  gouver- 
neurs des  provinces  d'au-delà  de  l'Euphrate  de 
ne  point  inquiéter  les  Juifs;  de  les  laisser  jouir, 
eux  et  leur  pays,  d'une  pleine  et  entière  immu- 
nité ;  de  contraindre  les  Iduméens,  qui  s'é- 
taient emparés  de  leurs  terres  et  de  leurs  villes,  à 
les  abandonner;  de  faire  conduire  à  Jérusalem  les 
bois  du  Liban  nécessaires  pour  les  constructions; 
de  fournir  aux  lévites  et  aux  ministres  du  temple 
la  nourriture  et  l'habit  dont  ils  se  servent  dans 
les  cérémonies,  jusqu'à  ce  que  la  ville  et  le  tem- 
ple fussent  entièrement  rebâtis. Il  veut  aussi  qu'on 
donne  vingt  talents  de  son  domaine  par  an  pour 
contribuer  à  la  reconstruction  du  temple,  et  dix 
autres  talents  pour  les  frais  des  sacrifices,  qu'on 
offrira  tous  lesjours  soir  et  matin  ;  enfin  il  permet 
au  peuple  de  Juda  de  rebâtir  Jérusalem,  et  leur 
accorde  une  parfaite  liberté,  à  eux,  à  leurs  prê- 
tres, et  à  leurs  successeurs  à  perpétuité.  Zoroba- 
bel revint  à  Jérusalem  avec  ces  ordres  et  ces 
pouvoirs,  qu'il  communiqua  et  qu'il  signifia  aux 
gouverneurs  des  provinces  ;  et  ramena  avec  lui 
quarante-deux  mille  trois  cent  quarante  Juifs, 
outre  un  grand  nombre  d'esclaves.  Voilà  en  abrégé 
ce  qu'on  lit  dans  les  chapitres  ni,  iv  et  v  du  troi- 
sième livre  d'Esdras.  C'est  ce  qui  se  fait  le  plus 
remarquer  dans  ce  livre,  et  ce  qui  fait  sa  princi- 
pale différence  d'avec  le  premier  livre  d'Esdras. 
Quant  à  l'histoire  des  trois  gardes  du  corps  de 
Darius,  i°  elle  ne  s'accorde  nullement  avec  l'his- 
toire d'Esdras,  qu'on  lit  dans  les  livres  hébreux 
et  dans  les  exemplaires  canoniques.  Si  Darius, 
en  renvoyant  les  Juifs  avec  Zorobabel  à  Jérusa- 
lem, eût  écrit  à  ses  officiers  d'au-delà  de  l'Eu- 
phrate en  leur  faveur,  ces  officiers  auraient-ils  eu 
la  hardiesse  de  venir  leur  demander  pourquoi 
ils  bâtissaient  le  temple  (i)?  Ne  savaient-ils  pas 
les  ordres  du  roi,  et  n'étaient-ils  pas  eux-mêmes 


obligés  de  contribuer  à  ce  bâtiment  (2)  suivant  le 
faux  Esdras  r  Zorobabel  aurait-il  été  contraint  de 
recourir,  comme  il  le  fit  (3),  à  l'ancienne  permis- 
sion accordée  par  Cyrus  aux  Juifs  de  rebâtir  le 
le  temple  ?  20  L'auteur  suppose  que  Zorobabel  ne 
revint  pas  le  premier  en  Judée,  lorsque  Cyrus  y 
renvoya  les  Juifs;  et  il  suppose  cela  contre  la  vé- 
rité de  l'histoire  (4).  }°  11  ne  met  la  consécration 
de  l'autel  (5)  et  le  renouvellement  des  sacrifices 
que  dans  la  seconde  année  de  Darius,  ce  qui 
répugne  encore  au  vrai  Esdras,  qui  nous  apprend 
que  cela  arriva  au  septième  mois  (dans  la  pre- 
mière année  du  retour  des  Juifs),  sous  le  règne  de 
Cyrus,  et  avant  qu'Artaxerxès  eût  défendu  de  con- 
tinuer la  reconstruction  du  temple  (6).  40  II  donne 
à  Esdras  la  qualité  de  grand  prêtre  (7)  dans  une 
circonstance  où  nous  savons  par  Néhémie  (8) 
qu'Esdras  n'était  que  simple  prêtre.  $°  Il  avance 
sans  aucune  preuve  deux  faits  insoutenables  : 
l'un,  que  Zorobabel  était  garde  du  corps  de  Da- 
rius (en  Perse)  (9),  pendant  que  le  même  Zoro- 
babel était  sûrement  à  Jérusalem  (10);  l'autre  fait, 
aussi  incroyable  que  le  premier,  est  que  Darius, 
lorsqu'il  fut  élevé  à  l'empire,  fit  vœu  de  rebâtir 
le  temple  de  Jérusalem  (1 1).  Si  cela  était,  qu'était- 
il  besoin  de  faire  fouiller  dans  les  archives,  pour 
savoir  si  Cyrus  l'avait  autrefois  permis  (12)?  6°  Il 
fait  dire  à  Darius  qu'il  donne  aux  Juifs  une  en- 
tière immunité  de  toutes  sortes  de  charges  (ij); 
et  nous  savons  par  Néhémie  que  les  Hébreux 
étaient  surchargés  de  tributs  (14).  70  II  distingue, 
ce  semble,  Néhémie  d'Athersatha  (1  <.),  quoique, 
selon  l'opinion  commune,  Aihersalha  soit  simple- 
ment le  nom  de  l'office  d'échanson  (16),  que  Né- 
hémie avait  eu  auprès  d'Artaxerxès  :  ou  plutôt, 
s'il  n'a  pas  prétendu  les  distinguer,  il  confond  cet 
Athersatha,  dont  il  est  parlé  au  temps  de  Zoro- 
babel,avec  Néhémie,  qui  ne  revintque  longtemps 
après  Zorobabel.  8°  L'auteur  avance  une  fausseté 
manifeste,  et  tombe  dans  une  contradiction  visible 
contre  lui-même,  lorsqu'il  dit  que  Zorobahel  pria 
Darius  de  renvoyer  à  Jérusalem  les  vases  sacrés, 
que  Cyrus  avait  préparés  à  cet  effet  (17),  comme 
si  Cyrus  n'eût  pas  exécuté  ce  dessein  ;  ce  qui  est 
tout  opposé  à  ce  qu'en  dit  le  véritable  Esdras,  et 
à  ce  que  l'auteur  même  en  a  écrit  au  chapitre  11, 
versets  10,  11,  12.  90  11  charge,  contre  toute 
apparence,  les  Iduméens  du  crime  de  l'incendie 


(1)  m.Esdr.  vi.  it. 

(2)  Ibid.  iv.  48. 
(j)  Ibid.  vi.  17. 

(4)  1.  Esdras.  11.  1.  et  seq. 

(5)  1.  Esdr.  v.  47.  et  seq. 

(6)  1.  Esdr.  m.   t.  et  seq. 

(7)  m.  Esdr.  ix.  $9,40-50. 

(8)  11.  Esdr.  vin.  1,2-9. 


(9)  m.  Esdr.  m.  4-;. 

(10)  1.  Esdr.  v.   1.  1. 

(11)  m.  Esdr.  iv.  45. 

(12)  Ibid.  vi.  2j. 
(1?)  m.   Esdr.  iv.  50. 

(14)  11.  Esdr.  v.  4.  et  ix.  37. 

(15)  ni.  Esdr.  v.  40. 

(iô)  11.  Esdr.  vin.  9.  —  (17)  m.  Esdr.  iv.  44.  e/57. 


3  68 


NOTICE  SUR  LES  LIVRES  APOCRYPHES 


du  temple  (1),  lorsque  Jérusalem  fut  prise  par 
les  Chaldéens.  io°  Il  renverse  l'ordre  des  temps 
et  des  événements,  en  voulant  réunir  ensemble 
toute  l'histoire  d'Esdras.  Il  place  à  la  fin  de  son 
dernier  chapitre  (?)  une  circonstance  qui  n'arriva 
que  sous  Néhémie,  et  qui  n'est  rapportée  que 
dans  le  livre  de  ce  dernier  (3).  n°  Il  dit  que 
Darius  donna  aux  Juifs,  qui  s'en  retournaient  à 
Jérusalem,  une  escorte  de  mille  chevaux,  pour 
les  conduire  eu  paix  et  en  sûreté  (4)  ;  précaution 
assez  inutile  pour  escorter  une  troupe  de  près  de 
cinquante  mille  hommes.  120  Enfin  il  donne  à  son 
récit  l'air  d'une  fable  en  disant  que  ces  trois  offi- 
ciers se  partagent  les  honneurs  (5),  et  prescrivent 
en  quelque  sorte  au  roi  les  récompenses  dont  il 
doit  honorer  celui  qui  aura  gagné  le  prix.  De 
plus,  ces  récompenses  sont  excessives,  c'est  tout 
ce  que  pourrait  prétendre  un  général  qui  aurait 
gagné  des  batailles  et  conquis  des  provinces. 

Le  reste  du  livre,  du  moins  ce  qu'il  y  a  de  vrai 
et  de  bien  lié,  est  tiré  du  premier  livre  d'Esdras. 
presque  mot  pour  mot.  Nous  croyons  donc  que 
l'auteur  du  troisième  livre  est  un  Juif  helléniste 
qui,  pour  donner  cours  à  l'histoire  du  problème 
que  nous  avons  vu,  a  jugé  à  propos  d'ajuster  à  sa 
narration  le  vrai  texte  d'Esdras.  Mais  il  n'était 
point  assez  habile  pour  une  entreprise  si  délicate; 
il  est  tombé  dans  des  fautes  si  grossières,  que  son 
ouvrage  a  été,  avec  raison,  rejeté  des  églises;  et 
l'on  s'en  est  tenu  au  texte  hébreu  des  Juifs,  et 
aux  anciens  exemplaires  grecs  qui  n'avaient  pas 
reçu  cette  addition. 

Le  quatrième  livre  d'Esdras  est  beaucoup  plus 
important.  Ce  livre  a  été  originairement  écrit  en 
hébreu,  et  traduitensuite  engrec,  mais  de  cesdeux 
textes, il  nenousresteaujourd'hui  qu'une  version  la- 
tine remplie  de  fautes  parla  négligence  des  copistes. 
L'auteur  est  un  Juif  qui,  sous  le  nom  d'Esdras,  a 
tâché  de  consoler  ses  frères  dans  l'extrême  déso- 
lation où  ils  lurent  réduits  par  les  Romains,  dans 
les  dernières  guerres  qu'ils  eurent  sous  le  règne 
de  Titus  et  de  Vespasien.  On  ne  peut  pas  douter 
que  cet  ouvrage  ne  soit  en  effet  d'un  Juif  hébreu. 
i°  Par  les  fréquents  hébraïsmes  qui  s'y  rencon- 
trent, et  par  des  expressions  singulières  qui  ne 
conviennent  qu'à  la  langue  hébraïque.  2°  Parce 
que  l'auteur  copie  très  souvent  les  paroles  et 
l'idiome  des  prophètes  ;  que  les  comparaisons 
dont  il  se  sert  sont  entièremnnt  conformes  au 
style  et  au  génie  des  Hébreux.  30  Que  les  fictions 
dont  cet  auteur  orne  son  discours  approchent  fort 
de  celles  des  thalmudistes  et  des  rabbins  moder- 
nes. Telles  sont  les   apparitions   fréquentes  des 


anges  Uriel  et  Jérémiel;  tel  est  le  passage  mira- 
culeux de  l'Euphrate;  telle  est  la  supposition 
d'une  création  d'hommes  faite  tout  à  la  fois,  des 
eaux  n'occupant  que  la  septième  partie  de  la  terre, 
et  ce  qu'il  dit  de  Béhémoth  et  de  Léviathan,  des 
trente  années  que  les  Juifs  furent  sans  sacrifices 
avant  que  Salomon  eût  bâti  le  temple  ;  du  par- 
tage des  années  du  monde  en  douze  âges  diffé- 
rents, dont  les  dix  premiers  âges  et  demi  s'étaient 
déjà  écoulés  de  son  temps  ;  enfin  de  la  restitution 
miraculeuse  des  livres  de  l'Écriture,  après  leur 
prétendue  perte  entière. 

On  ne  peut  pas  non  plus  douter  que  cet  auteur 
n'ait   été  chrétien,   puisque   dans   cet  ouvrage   il 
parle  clairement  et  nommément  de  Jésus-Christ, 
qu'il  le  reconnaît  pour  le  fils  de    Dieu,  qu'il    an- 
nonce sa  venue  et  sa  mort,    la  conversion   des 
gentils,  la  prédication  des  douze  apôtres  et  l'éta- 
blissement  de  l'Église:   qu'il    reconnaît    que    le 
péché  d'Adam  a  corrompu    toute  sa  postérité  ; 
qu'il  établit  la  nécessité  des  secours  de   Dieu,  le 
petit  nombre  des  élus    et   le  grand  nombre  des 
réprouvés,  la  résurrection  des  morts  et  le  juge- 
ment dernier  ;  qu'enfin  il    emprunte  les  propres 
termes  des  évangélistes,   de  l'apôtre  saint   Paul, 
et  surtout  de  saint  Jean  dans  son   Apocalypse    : 
d'où  l'on  doit  conclure  que  l'auteur  de  ce  livre   a 
vécu  ver?  la  fin  du  premier,  ou  au  commencement 
du  second  siècle  de  l'Église  :  on  croit  même  qu'il 
vivait  encore  sous  l'empereur  Domitien;  quelques 
interprètes  prétendent  qu'il  a  parlé  clairement  de 
ce  prince  et  de  ses  prédécesseurs  au  chapitre  xn, 
verset  14  et  suivants.    En  effet,  il  paraît   dès  le 
temps    même   de  saint  Irénée,  de  saint  Clément 
d'Alexandrie   et  de  Tertullien,  que  ce  livre  apo- 
cryphe avait  déjà  reçu  quelque  autorité,  puisque 
c'est  sans  doute  sur  la  foi  de  cet  auteur  que  les 
premiers  pères  de  l'Église  ont  cru  que   le  vérita- 
ble Esdras  avait  recouvré  les  saintes   Écritures 
qu'ils  prétendaient  avoir  été  brûlées  et  entière- 
ment perdues  dans  l'embrasement  de  Jérusalem, 
sous  le  règne  de  Nabucodonosor. 

Quoique  l'auteur  de  ce  livre  ne  soit  pas  le  vé- 
ritable Ésdras,  comme  il  paraît  évidemment  par 
tout  ce  que  l'on  vient  de  dire,  et  qu'il  soit,  vrai 
qu'il  a  affecté  d'emprunter  un  nom  qui  ne  lui  ap- 
partient pas  ;  qu'il  ait  à  ce  dessein  daté  son  livre 
de  la  trentième  année  de  la  captivité  de  babylone, 
et  qu'il  ait  même  emprunté  le  nom  de  ce'prophète, 
on  ne  doit  pas  absolument  le  regarder  comme  un 
faussaire;  car  si  l'on  considère  le  génie  et  le  ca- 
ractère de  la  nation  juive,  on  ne  sera  plus  surpris 
que  cet  auteur  ait  pris  le  style  prophétique   pour 


(i;  m.  Esdr.  iv.  45.  —  (2)  m.  Esdr,  i.x   }'.  et  seqq. 

(!)  11.  Esdr.  vin.  1.  cl  seqq. 


\   (4)  111.  Esdr.  v.  2.  et  s:qq. 
(5)  111.  Esdr.  m.  v.  et  seq, 


DE   L'ANCIEN  TESTAMENT 


369 


s'insinuer  plus  aisémentdans  l'esprit  de  ses  frères, 
dont  il  désirait  la  conversion,  et  qu'il  se  soit  con- 
formé à  leur  goût,  dans  le  dessein  qu'il  avait  de 
rendre  ses  instructions  plus  efficaces.  Il  pouvait  ainsi 
les  porter  plus  aisément  à  embrasserla  religion 
de  Jésus-Christ,  et  les  disposer,  parleurs  bonnes 
œuvres,  et  par  la  patience  dans  leurs  maux, à  pro- 
fiter des  nouvelles  lumières  qu'il  leur  offrait,  afin 
d'éviter  la  colère  de  Dieu  au  dernier  jour  de  ses 
vengeances.  Tel  est  en  effet  le  but  de  cet  ouvrage 
qui  est  rempli  de  force,  d'énergie  et  de  belles  ins- 
tructions. C'est  ce  qui  a  déterminé  les  fidèles  à 
ne  pas  le  rejeter  absolument,  comme  un  écrit  en- 
tièrement faux  et  fabuleux  ;  mais  à  le  séparer  du 
canon  de  la  Bible,  et  à  l'imprimer  en  caractères 
différents,  afin  d'avertir  les  fidèles  de  la  distinc- 
tion qu'ils  doivent  mettre  entre  les  Écritures  divi- 
nement inspirées,  et  les  écrits  des  simples  particu- 
liers qui  n'ont  pas  reçu  la  même  autorité. 

Quant  aux  111e  et  iv°  livres  des  Maccabées, 
le  premier  est  parfaitement  étranger  au  nom 
qu'il  porte. 

L'auteur  est  absolument  inconnu,   et   le    sur- 
nom de  troisième  livre  des   Maccabées   qu'on    a 
donné  à  son  ouvrage  ne  lui  convient  point  ;  puis- 
qu'il  n'y  est   pas  dit  un  seul  mot  de  ces  illustres 
et  vaillants  défenseurs  des  lois    de    Dieu  et   de 
celles  de  leur  nation  ;   que  les   faits  qui    y    sont 
décrits  ne  conviennent  point  au  temps   auquel   ils 
ont  vécu,  et  qu'ils  regardent  uniquement  les  cir- 
constances delà  délivrance  miraculeuse  des  Juifs 
captifs  et  prisonniers  sous  le  règne  d'un  des  Pto- 
lémées.  A  l'égard  de  la  vérité  de  l'histoire  qui  fait 
le  sujet  de  ce  livre,  on  n'en  peut  pas  douter,  puis- 
qu'elle est  rapportée  par  Josèphe,  contre  Appion, 
livre  11,  mais  avec  cette  différence,  que  l'auteur  de 
ce  livre  dit  qu'elle  s'est  passée  sous  Ptolémée  Phi- 
lométor,  ou,  selon  la  version  syriaque,  Philopator, 
lorsqu'après  avoir  remporté  la  victoire   sur  Antio- 
chus,  roi  de  Syrie,    il    vint    voir  par  curiosité   le 
temple  et  la  ville  de  Jérusalem,    et    que   l'entrée 
du  sanctuaire  lui  ayant  été  refusée,  il  prit  la  réso- 
lution de  se  venger  de  cet  affront   sur  tous  ceux 
de  cette  nation  qui  demeuraient  dans  son  royaume. 
Josèphe,  au  contraire,  dit  que  ce  fut  sous   Ptolé- 
mée Physcon,  après  la  mort  de  Ptolémée   Philo- 
métor  son  frère,  et  à  l'occasion  de  la  guerre  que 
le  grand  prêtre  Onias  entreprit  contre   ce    prince 
au  sujet  de  Cléopâtre,  qu'il  voulait  chasser  de  son 
trône  aussi  bien  que  ses  enfants.  Ces  deux  auteurs 
ne   s'accordent  point  dans  ces  circonstances  non 
plus  que  dans  quelques  autres  ;    mais   cependant 
ils  conviennent  également  du  miracle  de  la   déli- 
vrance des  Juifs  ;  le  dernier  même  s'en  est  servi 
contre  Appion,  pour  lui  prouver  que,  dans  cette 
guerre  contre  Physcon,    les   Juifs  n'avaient  rien 
S.  B.  —  T.  XII. 


fait  contre  la  fidélité  qu'ils  devaient  aux  princes 
alliés  ;  puisque  Dieu  même,  en  prenant  leur 
défense,  les  avait  miraculeusement  justifiés. 

Ce  livre  est  écrit  en  grec  par  un  Juif  helléniste, 
d'un  style  assez  élégant  ;  il  est  imprimé  dans  plu- 
sieurs éditions,  et  surtout  dans  les  polygottes,  où 
l'on  a  même  ajouté  une  version  syriaque  fidèle- 
ment traduite,  à  quelques  différences  près,  sur  le 
f^rec  ;  et  comme  cet  ouvrage  ne  contient  rien  que 
de  très  édifiant,  qu'il  a  même  été  inséré  entre  les 
livres  canoniques  par  le  84e  ou  le  dernier  des 
canons  vulgairement  appelés  des  Apôtres  ;  que 
l'auteur  de  la  Synopse,  ou  de  l'abrégé  des  écri- 
tures, attribuée  à  saint  Athanase,  l'a  compris  au 
nombre  des  livres  de  l'Ancien  Testament,  dont 
l'autorité  est  douteuse  ;  on  a  cru  de  tout  temps 
qu'il  était  à  propos  de  l'imprimer  avec  les  autres 
livres  apocryphes,  pour  ne  rien  omettre  de  tous 
ce  qui  peut  servir  à  l'éclaircissement  et  à  l'intel- 
ligence de  l'histoire  sainte.  Malheureusement  la 
traduction  latine  est  très  défectueuse. 

A  l'égard  du  temps  auquel  on  doit  placer  cette 
histoire  dans  la  chronologie,  les  interprètes  et  les 
historiens  paraissent  ne  pas  convenir  entre  eux, 
parce  qu'on   ignore  sous  lequel   des   Ptolémées 
elle  est  arrivée;  si  c'est  sous  Ptolémée  Physcon, 
surnommé   aussi     Évergète,    ou    sous   Ptolémée 
son    frère,  surnommé  Philométor  ;  si  cette  cap- 
tivité   des    Juifs    dont    ils    furent    miraculeuse- 
ment délivrés  fut  la  suite  de  la  guerre  qu'eut  le 
grand  prêtre  Onias  au  sujet  de   Cléopâtre,  ou  si 
ce  fut  du  refus  que  les  Juifs  firent  à  ce  Ptolémée 
de  le  laisser  entrer  dans  le  sanctuaire,  lorsqu'après 
avoir  remporté  la  victoire  sur  Antiochus,  il  vint 
voir  la  ville  et  le  temple  de  Jérusalem.  L'auteur 
en  fixe  l'époque  sous  la  grande  sacrificature  de 
Simon,  fils  d'Onias,  cap.  m,  v.  1,  par  conséquent 
'  vers  l'an  144  avant  Jésus-Christ.  D'autres  placent 
la  rédaction  de  ce  livre  bien  antérieurement  au 
temps  où,  selon    Polybe,  Ptolémée   attaqua  An- 
tiochus près  de  Raphia  ;   d'autres  lui  attribuent 
la  date  de  70  ans  avant  Jésus-Christ  ;  d'autres 
vont  même  jusqu'à  l'an  40. 

Le  iv°  livre  a  reçu  le  nom  des  Maccabées  parce 
qu'il  contient  l'histoire  de  ces  illustres  défen- 
seurs des  libertésde  leur  patrieetde  la  foi  de  leurs 
pères.  En  effet,  ce  quatrième  livre,  au  moins 
par  rapport  à  la  première  partie,  n'est  au  fond 
qu'une  copie  ou  un  extrait  des  deux  premiers 
livres  qui  portent  le  même  nom.  Mais  la  seconde 
partie,  qui  commence  au  chapitre  xvn,  poursuit 
l'histoire  des  Juifs  jusqu'en  l'an  11  avant  Jésus- 
Christ. 

Ces  deux  parties  contiennent  donc  l'histoire 
sommaire  de  ce  qui  s'est  passé  de  plus  considé- 
rable chez  les  Juifs  pendant  près  de  deux  cents 
ans,  c'est-à-dire,  depuis  les   Maccabées  jusqu'au 

24 


*/' 


NOTICE  SUR  LES  LIVRES  APOCRYPHES 


dénombrement  de  tous  les  sujets  de  l'empire  ro- 
main, qui  fut  exécuté  dans  la  Judée  peu  de  temps 
avant  la  naissance  de  Jésus-Christ.  On  ne  sait 
point  qui  est  l'auteur  de  ce  livre,  ni  dans  quel 
temps  il  a  été  écrit,  car,  à  en  juger  par  les  bornes 
qu'il  lui  donne,  il  paraîtrait  qu'il  l'a  composé 
vers  la  quatrième  année  du  règne  d'Auguste  ;  et, 
selon  cette  supposition,  il  serait  antérieur  à  Josè- 
phe,  qui  a  continué  son  histoire  jusqu'au  règne 
de  Domitien  :  mais  comme  cet  auteur  dit  lui- 
même,  chapitre  îx,  verset  3, que  Judas  Maccabée 
ayant  fait  dresser  un  autel,  il  en  sortit  un  feu  qui 
consuma  les  victimes  qu'on  y  avait  offertes  au 
Seigneur,  et  que  ce  feu  s'y  conserva  depuis  jus- 
qu'au temps  de  la  troisième  captivité,  usque  ad 
terliam  transmigrationem,  qui  ne  peut  être  autre 
que  celle  qui  arriva  sous  Titus  et  Vespasien,  il 
paraît  évident  qu'il  vivait  à  peu  près  dans  le  même 
temps  que  Josèphe  :  ainsi,  il  pourrait  bien  se 
faire  qu'il  eût  copié  Josèphe,  et  ce  pourrait  être 
Josèphe  qu'il  cite  sans  le  nommer,  chapitre  xxv, 
verset  3,  par  ces  paroles  :  nec  meminil  auctor  libri, 
et  ces  autres  du  chapitre  lv,  verset  21,  refert  au- 
iem  auclor  libri.  Sixte  de  Sienne  prétend  aussi  que 
son  style  convient  assez  à  celui  de  Josèphe,  à  la 
réserve,  dit-il,  de  quelques  hébraïsmes  ;  mais  il 
nous  paraît  impossible  de  rien  décideràcet  égard, 
puisque  nous  n'avons  point  le  texte  original,  mais 
seulement  une  version  arabe.  Il  est  vrai  toutefois 
que  plus  ordinairement  il  semble  suivre  l'ordre 
de  la  narration  de  Josèphe,  et  le  copier  souvent 
presque  mot  à  mot  ;  cependant  il  y  ajoute  quel- 
quefois ou  en  retranche  quelque  chose,  et  sem- 
ble n'en  donner  que  des  extraits:  il  n'est  pas  tou- 
jours aussi  de  son  sentiment,  car  il  n'admet  pas 
les  éloges  qu'il  donne  à  Antipater  :  il  favorise  les 
saducéens  et  les  esséniens,  et  très  peu  les  phari- 
siens :  il  n'est  pas  non  plus  d'accord  avec  Josèphe 
et  Aristée  sur  le  nombre  des  interprètes  grecs  de 
l'Écriture,  ni  sur  celui  de  leurs  cellules  et  de  leurs 
secrétaires  ;  ainsi  on  pourrait  croire  que  c'est  un 
auteur  original,  au  moins  à  l'égard  de  la  seconde 
partie,  et  qu'il  a  composé  son  récit  aussi  bien  que 
Josèphe  sur  les  ouvrages  ou  mémoires  d'Hérode, 
de  Nicolas  de  Damas,  de  Strabon,de  Tite-Live,et 
d'autres  auteurs  que  Josèphe  cite  souvent,  et  sur- 


tout Anliq.  xiv,  cap.  8,  liv.  xv,  cap.  9,  liv.  xvi, 
cap.  1 1. 

A  l'égard  de  la  première  partie,  quelques  au- 
teurs ont  cru  que  c'était  le  même  ouvrage  qui  est 
cité  dans  le  premier  livre  canonique  des  Macca- 
bées,  chapitre  xvi,  verset  24,  ou  un  autre  intitulé 
les  Fastes  d'Hyrcan.  Nous  ne  le  pensons  pas. 

Dans  l'une  et  dans  l'autre  des  deux  parties  de 
ce  livre,  il  se  rencontre  des  fautes  très  grossières 
et  des  méprises  considérables,  dont  les  unes 
paraissent  venir  de  l'auteur,  et  les  autres  s'y  être 
glissées  par  l'erreur  des  copistes,  comme  on  peut 
le  voir  à  l'égard  de  ce  qui  est  dit  d'Eléazar, 
chap.  iv,  verset  1,  et  de  Félix,  que  l'auteur  prend 
pour  Apollonius,  chap.  vu,  verset  7  ;  de  ce  qu'il 
attribue  à  Ptolémée  au  lieu  de  Timothée,  ch.  x, 
verset  12;  en  ce  qu'il  alu  Bethner  pour  Bethsura, 
chap.  xi,  verset  3,  et  xv, verset  2,  Lalis  pour  Laïs, 
Asoth  pour  Asa,  chap.  xvn,  verset  2,  Arta  pour 
Aretas,c/2a/?.  xxxvi, verset  5,  Nicomède  pour  Nico- 
dème,  chap.  xxxv,  verset  18  ;  en  ce  qu'il  fait  tuer 
Alexandre  par  Gabinius,  au  lieu  que  Josèphe  dit 
que  ce  fut  par  l'ordre  de  Scipion,  chap.  xxxix, 
verset  6;  et  enfin  par  rapport  à  ce  qu'il  dit  sur  les 
circonstances  particulières  de  la  naissance  de 
Jules  César,  et  plusieurs  autres  fautes  très  con- 
sidérables. 

Ce  livre  est  cité  par  l'auteur  de  la  Synopse, 
comme  nous  l'avons  fait  remarquer  précédemment, 
et  il  le  met  à  la  fin  de  son  abrégé  au  nombre  de 
ceux  dont  on  doute.  De  iis  qui  ex  veteri  instru- 
menta sunt  quitus  conlradicilur  sunl  Sapientia  Salo- 
monis,  etc.  Islis  connumeraniur  M 'achabœorum  libri 
quatuor  :  ainsi  il  distingue  ce  iv"  livre  aussi  bien 
que  les  trois  autres,  et  la  Sagesse  de  Salomon, 
etc.,  de  ceux  qui  sont  absolument  rejetés  et  mis 
au  nombre  des  apocryphes,  et  c'est  peut-être  de 
ce  livre  que  parle  Clément  d'Alexandrie,  Strom. 
liv.  v.  Il  le  cite  sous  le  nom  d' Epitome, ou  abrégé 
de  ce  qui  s'est  passé  sous  les  Maccabées.  Ce 
livre  a  été  confondu  avec  un  autre  dont  le  titre  est 
rhpî  aÔ7o/.pa:op;  My:iu.w ,  de  l'empire  ou  de  la  sou- 
veraineté de  la  raison  ;  mais  ce  n'est  pas  le  même 
ouvrage.  On  peut  voir  ce  dernier  dans  les  œuvres 
de  Josèphe. 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA   NATION  JUIVE 


Parvenus  à  la  fin  de  l'Ancien  Testament,  il 
n'est  pas  sans  utilité  de  synthétiser  la  vie  reli- 
gieuse et  sociale  du  peuple  juif,  de  considérer 
sur  quelles  bases  était  fondée  cette  nation  extraor- 
dinaire, qui  menait  une  existence  en  désaccord 
avec  tous  lesautres  peuples.  Heureuse  tant  qu'elle 
pratiquait  ses  lois  et  était  fidèle  à  ses  usages,  elle 
tombait  dans  l'infortune  dès  qu'elle  s'en  écartait. 
Tout  changement  lui  était  préjudiciable. 

Le  but  de  Moïse  fut  évidemment  d'isoler  le 
peuple  hébreu,  pour  lui  permettre  d'accomplir  ses 
destinées  providentielles.  Tout  mélange  avec  les 
autres  peuples  aurait  compromis  sa  mission.  De 
là  ces  préceptes  exclusifs  qui  parurent  aux  païens 
haine  de  l'humanité. 

Ce  jugement  formulé  par  Tacite  avait  une 
apparence  de  réalité,  bien  qu'il  fût  complètement 
faux  dans  son  principe.  Les  païens  en  auraient  eu 
une  tout  autre  opinion,  s'ils  avaient  connu  l'en- 
semble de  cette  législation  admirable,  la  plus 
douce  et  la  plus  morale  incontestablement  de 
toute  l'antiquité. 

Nous  allons  l'étudier  brièvement  pour  en  avoir 
une  vue  d'ensemble. 

Religion,  Gouvernement,  Lois,  Coutumes,  Sciences, 
Arts,  et  Commerce  des  Juifs. 

Moïse  représente  Dieu  comme  le  fondateur 
de  la  religion  et  de  la  république  des  Juifs.  Aussi 
Josèphe  distingue-t-il  le  gouvernement  de  ce 
peuple  de  tous  les  autres  gouvernements  du 
monde,  par  le  mot  de  théocratie  (i);  car  quoique 
cette  théocratie  ait  souvent  varié  sous  Moïse,  les 
Juges,  les  Rois  et  les  grands  prêtres,  Dieu  fut 
toujours  regardé  comme  le  Monarque  des  Israé- 
lites. Sous  Moïse,  cet  Etre  suprême  était  le  Di- 
recteur de  tous  les  événements  importants,  et 
Celui  de  l'autorité  duquel  émanaient  toutes  les 
lois.  Quoique  Josué  ne  reçût  point  les  ordres  di- 
vins de  la  bouche  de  Dieu  même,  il  avait  pour- 
tant le  privilège  de  consulter  Dieu,  quand  il  en 
était  besoin,  par  le  moyen  de  l'ourim.  Les  Juges 
étaient  des  hommes  vaillants  et  sages,  que   Dieu 


avait  choisis  pour  gouverner  les  Israélites,  et 
pour  les  délivrer  de  temps  en  temps,  de  l'état  de 
servitude  que  leurs  fréquentes  rébellions  leur 
attiraient.  C'était  à  cela  que  se  bornait  leur  com- 
mission. 

Lorsque  Josué  eut  délivré  les  Israélites  du  joug 
des  Madianites,  et  que  le  peuple  eut  offert  de  le 
reconnaître,  lui  et  ses  descendants,  pour-  souve- 
rains, il  répondit  sagement,  que  ce  ne  serait  ni 
lui  ni  ses  fils,  mais  Dieu  qui  dominerait  sur 
eux  (2). Quand,  dans  la  suite  des  temps,  leur  envie 
d'avoir  un  roi  fut  devenue  si  forte,  que  tous  les 
reproches  de  Samuel  ne  purent  la  modérer,  Dieu 
trouva  bon  de  nommera  la  royauté  Saùl,  et,  après 
lui,  DaVid,  et  de  rendre  cette  dignité  héréditaire 
dans  la  maison  de  ce  dernier,  en  se  réservant 
néanmoins  le  pouvoir  d'altérer  l'ordre  de  la 
succession,  en  transportant  la  couronne  dans 
une  branche  cadette,  quand  il  le  jugerait  à 
propos,  comme  il  arriva  à  l'égard  de  Salomon. 
On  peut  même  dire  que  Dieu,  prévoyant  com- 
bien ils  seraient  portés  pour  le  gouvernement 
monarchique,  se  réserva  le  choix,  et  régla  par 
des  lois  la  conduite  de  ceux  entre  les  mains 
desquels  devait  être  remise  la  puissance  sou- 
veraine (3);  et,  toutes  les  fois  que  les  rois  ou 
le  peuple  refusaient  de  suivre  ses  conseils  ou 
d'obéir  à  ses  ordres,  cette  conduite  était  aussitôt 
suivie  de  quelque  châtiment,  qui  leur  rappelait  le 
souvenir  de  leur  devoir  et  de  leur  dépendance. 

A  la  vérité,  les  rois  d'Israël,  après  leur  sépa- 
ration d'avec  Juda,  s'arrogèrent  un  pouvoir  plus 
arbitraire  ;  mais  leurs  efforts  pour  secouer  le  joug 
de  Dieu,  fut  une  source  féconde  de  maux  pour 
les  tribus  rebelles,  jusqu'à  ce  qu'enfin  les  exhor- 
tations et  les  menaces  des  prophètes  étant  deve- 
nues des  moyens  aussi  impuissants  pour  les  ra- 
mener à  l'obéissance  que  les  plus  sévères  punitions, 
Dieu  les  rejeta  entièrement,  et  les  condamna  à 
une  éternelle  captivité.  Il  paraît  par  là  que  le 
royaume  de  Juda  et  même  celui  d'Israël,  tout 
corrompus  et  tout  idolâtres  qu'ils  étaient, restèrent 
soumis  à  la  théocratie  jusqu'à  leur  dissolution. 

La  plus  grande  partie  de  leurs  lois  fut  donnée 


(1)  Contr.  Appion, 


(i)  Jug.  VIII  f.  22.  2J. 


(j)  Deut.  xvn.  f.  14.  et  suiv. 


17 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


à  Moïse  sur  la  montagne  du  Sinaï,  et  les  autres 
en  différents  temps,  suivant  que  l'occasion  l'exi- 
geait. 

Soit  donc  que  nous  les  considérions  comme  le 
le  premier  corps  de  lois  qui  ait  jamais  été  com- 
pilé, pendant  que  d'autres  peuples  ignoraient  jus- 
qu'au nom  de  loi  (i),  soit  que  nous  supposions (2) 
que  les  Égyptiens  et  les  autres  peuples  avaient 
déjà  des  lois,  et  que  Dieu  permit  à  Moïse  de 
former  les  siennes  sur  ce  modèle,  en  y  faisant  les 
changements  nécessaires,  il  est  clair  que  la  plus 
grande  partie  en  fut  dictée  par  Dieu  lui-même,  et 
que  Dieu  mit  aux  autres,  sinon  la  dernière  main, 
du  moins  le  sceau  de  son  approbation. 

Si  nous  faisons  attention  que  ces  lois  s'éten- 
daient à  tous  les  devoirs  et  à  tous  les  cas  moraux, 
politiques  ou  cérémoniels;  que  les  lois  morales 
obligeaient  éternellement  ;  que  la  durée  des  lois 
politiques  devait  égaler  celle  de  l'état  des  Juifs  ; 
que  la  plupart  des  lois  cérémonielles  étaient  ty- 
piques ou  figuratives,  et  devaient  par  cela  même 
subsister  au  moins  jusqu'à  la  venue  du  Messie  : 
si  nous  considérons  que  les  rois  et  les  prêtres 
n'étaient  que  de  simples  dépositaires  de  ces  lois, 
et  qu'il  leur  était  défendu,  sous  peine  de  mort  et 
de  la  malédiction  divine,  d'y  faire  le  moindre 
changement,  nous  trouverons  naturel  que  Moïse 
leur  ait  donné  un  air  si  respectable,  tant  à  l'égard 
de  leur  importance  que  de  leur  durée,  puisque 
Dieu  en  avait  été  l'auteur. 

Des  exégètes  et  des  historiens  ont  voulu  dis- 
tinguer ces  lois  en  morales,  politiques  et  céré- 
monielles, et  rapporter  chacune  d'elles  à  quel- 
qu'une de  ces  trois  classes,  surtout  parce  que 
cette  distinction  est  généralement  reçue,  et  que 
bien  des  gens  prétendent  la  fonder  sur  les  trois 
différents  termes  que  Moïse  emploie  :  lois  ou 
préceptes,  jugements  et  statuts  (3). 

Mais  si  nous  considérons  que  Moïse  emploie 
d'autres  termes  encore  pour  exprimer  les  mêmes 
choses,  et  qu'il  désigne  les  mêmes  lois  tantôt  par 
un  de  ces  mots,  et  tantôt  par  un  autre;  et  enfin 
que  cette  distinction  ne  saurait  être  appliquée  à 
plusieurs  de  ces  lois,  qui  sont  en  partie  morales 
et  en  partie   cérémonielles    et   politiques,    nous 


aurons  lieu  d'être  convaincus  que  le  législateur 
hébreu  n'avait  pas  une  pareille  distinction  en  vue. 
C'est  ainsi,  par  exemple,  que  la  loi  concernant 
le  jour  du  sabbat  est  en  partie  cérémonielle  et 
typique,  et  en  partie  politique  et  morale,  en  ce 
qu'elle  était  destinée  à  procurer  aussi  bien  le 
repos  des  serviteurs  et  des  esclaves  que  celui  des 
maîtres  (4).  Ajoutons  à  cela,  que  ces  lois  diffé- 
raient pareillement  par  rapport  au  temps  pendant 
lequel  elles  obligeaient.  Quelques-unes  d'elles, 
comme  celles  qui  étaient  relatives  à  la  construc- 
tion du  Tabernacle,  et  aux  bénédictions  et  malé- 
dictions prononcées  sur  la  montagned'Hébal  etde 
Garizim,  devaient  être  observées  une  fois  pour 
toutes;  d'autres  devaient  être  abrogées  au  temps 
du  Messie,  et  d'autres  enfin,  subsister  jusqu'à  la 
la  fin  du  monde.  Il  suit  de  là,  que  tous  les  en- 
droits de  l'Ancien  Testament,  où  il  est  commandé 
aux  Juifs  d'observer  toutes  les  lois  et  les  ordon- 
nances de  Moïse,  ne  demandent  point  une  obéis- 
sance actuelle,  mais  un  souvenir  constant  de  ces 
lois,  et  une  ferme  disposition  à  les  accomplir  dès 
qu'elles  redeviendraient  en  vigueur, car, dans  l'exil 
et  la  captivité,  plusieurs  d'entre  elles  devenaient 
impraticables. 

Les  rabbins  partagent  ces  lois  en  affirmatives 
et  en  négatives  (5),  à  l'imitation,  du  Décalogue, 
qui  contient  en  tout  huit  préceptes  négatifs,  et 
seulement  deux  affirmatifs. 

Les  lois  négatives,  suivant  leur  calcul,  montent 
à  trois  cent  soixante-cinq;  et  les  affirmatives  à 
deux  cent  quarante-huit;  en  tout  six  cent  treize. 
Et  comme  ils  ont  une  dextérité  merveilleuse  à 
trouver  des  mystères  partout,  ils  n'ont  pas  manqué 
d'appliquer  le  premier  de  ces  nombres  aux  jours 
de  l'année,  et  le  second  au  nombre  des  parties 
qui  composent  le  corps  humain;  ils  assurent 
ensuite  que  Dieu  a  voulu  apprendre  par  là,  que 
nous  ne  devons  point  passer  un  seul  jour  sans 
faire  de  ses  lois  l'objet  de  notre  méditation,  ni 
employer  les  membres  de  notre  corps  à  aucun 
autre  usage  qu'à  son  service,  suivant  cette  maxime 
de  l'Écclésiaste  :  Crains  Dieu  et  garde  ses  com- 
mandements, car  c'est  là  tout  l'homme. 

Telles  sont  quelques-unes  decespieusesrêveries 


(1)  Spencer,  deLeg.  Rituat.  Jud.  pass.-  Le  Clerc,  et  ai. 

(2)  Cont.  Appion. 

Josèphe  a  tâché  de  le  prouver  contre  son  savant 
antagoniste,  par  les  ouvrages  d'Homère,  le  plus  ancien 
écrivain,  dans  lesquels  le  mot  de  nomos  (loi)  ne  se  trouve 
pas  une  seule  fois, 

(j)  Basnag.  Rep.  Heb.  I.  1.  c.  18. 

(4)  Cf.  Excd.  ,\x.  cum  Dcut.  v.  y.   i<). 

(5)  C'est  ce  qu'ils  appellent,  conformément  au  génie 
de  la  langue  hébraïque  nwyn  n4  rmSD,  Mitsvoth  lo  ta-as- 
sçeh.  et  ruuy  mise,  Miisvolh  'assceh,  c'est-à-dire,  com- 
mandements que  lu  feras  ou  que  tu  ne  feras  pas,  ou,  sui- 
vant notre  manière  de   traduire,    négatifs  et  affirmatifs. 


Ils  font,  relativement  à  ces  commandements,  cette  dis- 
tinction, que  si  quelqu'un  pèche  contre  les  derniers,  sa 
faute  peut  lui  être  pardonnée,  s'il  s'en  repent  ou  s'il  l'ex- 
pie :  mais  s'il  pèche  contre  un  précepte  négatif,  il  ne 
suffit  pas,  pour  que  sa  faute  lui  soit  pardonnée,  qu'il  s'en 
repente,  mais  il  doit  attendre  jusqu'au  jour  de  l'Ex- 
piation. Celui  qui  commet  un  péché  digne  de  mort,  ne 
saurait  en  obtenir  le  pardon  le  jour  de  l'Expiation,  mais 
doit  essuyer  quelques  châtiments  de  la  part  de  Dieu  : 
enfin  ceux  qui  profanent  ou  blasphèment  le  nom  de  Dieu, 
ne  peuvent  expier  ce  crime  qu'en  souffrant  la  mort  pour 
l'avoir  commis. 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA  NATION  JUIVE 


1 


qu'ils  ont  épuisées  dans  leur  kabbale  ou  tradition 
orale.  Cependant  il  faut  avouer  que  les  Caraïtes, 
ancienne  secte  juive,  ont  toujours  rejeté  cette 
tradition,  et  se  sont  uniquement  appliqués  à 
l'étude  du  texte  sacré;  mais  ceux-ci  sont  en  petit 
nombre,  en  comparaison  des  autres  qui  les  haïs- 
sent mortellement  (  i). 

Il  est  nécessaire  d'observer  ici,  que,  quoique 
cette  kabbale  judaïque,  ou  tradition  orale,  soit 
rejetée  avec  raison  par  tous  les  chrétiens,  comme 
remplie  d'une  quantité  de  notions  ridicules,  il  y  a 
cependant  une  autre  kabbale,  qui, reçue  par  quel- 
ques-uns des  anciens  pères,  est,  jusqu'à  ce  jour, 
fortement  défendue  par  plusieurs  savants  moder- 
nes. Cet  ouvrage  contient  le  sens  mystique  de 
l'Ancien  Testament,  d'après  l'interprétation  que 
les  écrivains  chrétiens  judaïsants  y  ont  attachée, 
sens  qu'ils  affirment  leur  avoir  été  transmis  depuis 
Moïse  parles  prophètes,  nonpartradition  humaine, 
mais  par  inspiration  divine,  comme  étant  quelque- 
fois diamétralement  opposé  au  sens  littéral.  C'est 
ce  qui  paraît  clairement,  disent-ils,  par  l'interpré- 
tation que  saint  Matthieu  et  saint  Paul  donnent 
de  différentes  prophéties  qu'ils  citent,  et  particu- 
lièrement de  celles  que  nous  indiquons  (2);  ils  les 
prennent  dans  un  sens  si  éloigné  du  littéral,  qu'il 
n'y  a  pas  moyen,  disent  ceux  dont  nous  rappor- 
tons le  sentiment,  de  justifier  leurs  explications, 
sans  avoir  recours  à  cette  kabbale  chrétienne, 
et  c'est  ainsi  qu'ils  l'appellent. 

Lois  contre  l'idolâtrie,  et  pour  maintenir  dans 
toute  sa  pureté  le  culte  du  vrai  Dieu. 

Tu    n'auras   point   d'autres    dieux    devant    ma 
face  (5). 

Vous  ne  profanerez  point,  ou  ne  prendrez  point 


en  vain  (4),  mais  vous  sanctifierez  le  saint  nom 
de  Dieu  (5). 

Vous  détruirez  entièrement  les  images  taillées,, 
les  autels,  les  bocages  et  les  autres  monuments 
de  l'idolâtrie  cananéenne  (6). 

Vous  ne  tenterez  point  l'Éternel,  votre  Dieu, 
comme  vous  avez  fait  au  désert  (7). 

Vous  ne  ferez,  ni  image  taillée,  ni  aucune 
ressemblance  des  choses  qui  sont  là-haut  aux 
cieux,  ni  ici-bas  sur  la  terre,  ni  aux  eaux  sous  la 
terre  (8). 

Tu  ne  te  prosterneras  devant  aucune  idole,  et 
tu  ne  la  serviras  point  (9). 

Quiconque  voudra  engager  un  autre  à  se  ren- 
dre coupable  de  l'idolâtrie,  sera  lapidé,  s'il  en  est 
convaincu  (  10). 

Le  butin  d'une  ville  idolâtre  ne  sera  point 
conservé,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit, 
mais  brûlé  en  public.  Les  habitants  de  cette  ville 
passeront  par  le  tranchant  de  l'épée,  et  la  ville  ne 
sera  point  rebâtie,  mais  restera  éternellement  un 
monceau  de  ruines  (11) 

L'argent,  l'or,  et  les  autres  ornements  pré- 
cieux, appartenant  aux  idoles,  seront  détruits 
avec  horreur  (1 2). 

Quiconque  sacrifiera  sa  lignée  à  Moloch,  soit 
Israélite, soit  étrangerdans  le  pays, sera lapidé(i  3). 

Il  y  a  plusieurs  autres  lois,  données  dans  les 
mêmes  vues,  et  qu'on  trouve  en  plusieurs  endroits 
des  quatre  derniers  livres  de  Moïse.  De  ce  genre 
sont  aussi  celles  qui  défendent  d'avoir  commerce, 
et  de  s'allier  par  mariage  avec  des  nations  idolâ- 
tres, afin  de  ne  pas  s'exposer  au  risque  d'imiter 
leur  idolâtrie  ;  du  même  genre  encore  étaient 
celles  qui  condamnaient,  sous  peine  de  mort  (14), 
les  enchantements,  les  pronostics  (15),  la  magie, 
et   autres   choses  semblables  ;   comme  aussi  de 


(1)  Entre  mille  autres  preuves  de  cette  aversion,  nous 
nous  contenterons  d'en  citer  une.  Les  Caraïtes  sont 
tous  fort  riches  ;  et  comme  ils  se  voient  souvent  dans 
l'embarras  de  trouver  une  femme  parmi  eux,  ils  seraient 
quelquefois  charmés  d'épouser, à  quelque  prix  que  ce  fût, 
quelqu'une  des  filles  de  leurs  frères  les  thalmudistes  ; 
mais  ces  derniers,  quoique  très  intéresses,  n'ont  jamais 
pu  se  résoudre  à  contracter  des  alliances  avec  de  si 
abominables  hérétiques. 

(2)  Malt.  11.  y.  \S.  17-  2;.  Rom  x.  y.  6  et  suiv.  comp. 
avec  Dcut.  xxx.  y.  12.  Et  Ephcs.  v.  f.  ji.  avec  Gen.  11. 
y.  24.  Hèbr.  11.  y.  6.  avec  Psaum.  vin,  y.  6,  7,  8.  et  al. 

(  ;)  Exod.  xx.  y.  j. 

(4^  Les  Juifs  l'expliquent,  avec  assez  de  justesse,  en 
donnant  ce  nom  à  des  idoles,  comme  fit  Aaron,  lorsqu'il 
dit  au  jeune  taureau  :  Ce  sont  ici  les  dieux  qui  ont  fait 
sortir  Israël  d'Egypte.  C'est-là  un  des  péchés  qui,  suivant 
eux,  ne  sauraient  être  expiés  que  par  la  mort  du  cou- 
pable, et  pour  lequel  Aaron  aurait  dû  mourir,  si  Moïse 
n'avait  point  intercédé  en  sa  faveur. 

(5)  Exod.  xx.  y.  7.-  Lévit.  xxn.  y.  52.  et  passim. 

(ù)  Deut.  xii.  f.  2.  et  suiv. 

(7)  Deut.  vi.  y  16.  Ils  entendent  ce    précepte  de  ceux 


qui  servent  seulement  Dieu  dans  l'espérance  de  quelque 
avantage  temporel,  ce  qui  est,  dans  leur  idée,  une  espèce 
d'idolâtrie  mineure. 

(8)  Exod.  xx.  y.  4.-  Deut.  iv.  pass.  et  v.  y.  8. 

(9)  Exod.  xx.  y.  5.  -  Deut.  y.  9.  et  alib.  Un  homme, 
suivant  les  rabbins,  ne  doit  pas  se  baisser  devant  une 
idole,  quand  ce  serait  pour  s'ôter  une  épine  du  pied,  ou 
pour  ramassr  quelque  chose  qui  serait  tombé,  ou  même 
pour  puiser  un  peu  d'eau  dans  le  dessein  d'étancher  une 
soif  ardente,  J3  peur  que  quelqu'un  qui  en  seraittémoin 
ne  prît  cette  action  pour  un  témoignée  de  respect  : 
c'est  pourquoi,  dans  toutes  les  occasions  de  ce  genre, 
ils  doivent  s'asseoir  à  terre,  et  tourner  le  dos  à  l'idole. 
Cependant  aucune  idolâtrie  ne  passait  pour  capitale,  à 
moins  qu'elle  ne  fût  accompagnée  de  quelqu'une  de  ces 
quatre  actions,  savoir,  de  dresser  un  autel,  d'offrir  un 
sacrifice,  de  l'encens,  ou  d'adorer. 

(10)  Dcut.  xiu.  y.  6  et  suiv.  et  pass. 

(11)  Ibid.  y.  15.  et  suiv. 

(12)  Ibid.  vu.  y.  2Ç.  26. 
(1  j)  Lévit.  xx.  y.  2. 

(14)  Deut  xvm.  y.  9.  et  suiv. 

(15)  Lévit.  xix.  y.  26.  ji  et  passim. 


574 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


tondre  en  rond  les  coins  de  la  tête,  de  couper  les 
coins  de  la  barbe,  de  se  faire  des  incisions  pour 
un  mort,  de  graver  quelques  caractères  sur  le 
corps  (i),  et  enfin  de  se  revêtir,  à  l'exemple  des 
Cananéens,  d'autres  habits  que  de  ceux  qui  con- 
viennent à  chaque  sexe  (2). 

Lois  positives,  concernant  le  culte  du  vrai  Dieu. 

L'Éternel,  qui  donna  sa  loi  aux  Israélites  sur 
la  montagne  du  Sinaï,  est  le  seul  Dieu  du  ciel  et 
de  la  terre  (3). 

Lui  seul  doit  être  aimé  par  eux  de  tout  leur 
cœur,  de  toute  leur  âme  et  de  toute  leur  puis- 
sance (4)  ;  lui  seul  doit  être  craint  par-dessus 
toutes  choses  (5),  et  son  nom  doit  être  sanc- 
tifié. 

Les  parents  doivent  graver  ses  lois  dans  leurs 
cœurs,  les  enseigner  à  leurs  enfants,  et  aux  en- 
fants de  leurs  enfants  (6),  les  porter  comme  des 
fronteaux  entre  les  yeux, et  les  écrire  sur  les  por- 
tes et  autres  endroits  de  leurs  maisons  (7). 

Ils  circonciront  leurs  cœurs  aussi  bien  que  leur 
chair,  et  ne  seront  plus  rebelles  à  Dieu,  mais  le 
serviront  sincèrement,  s'attacheront  à  lui, et  jure- 
ront uniquement  par  son  nom  (8). 

La  loi  entière  sera  lue  par  les  prêtres  à  tout  le 
peuple,  hommes,  femmes  et  enfants,  tous  les  sept 
ans,  à  la  fête  des  Tabernacles  (9)  ;  chaque  Israé- 
lite en  apprendra  par  cœur  la  substance, et  chaque 
roi  d'Israël  en  écrira  une  copie  desa  propre  main, 
sur  l'exemplaire  que  Moïse  a  donné  en  garde  aux 


(1)  Lcvit.  xix.  fi.  2~  et  suiv. 

(2)  Deut.  xxii.  fi.  5.  et  et  suiv. 

(  j)  Exod.  xx.  fi.  H.  —  Deut.  vu  fi.  4. 

(4)  Ibid.  fi.  5. 

(5)  Ibid.  fi.  13. 

(6)  Deut.  vi.  fi.  6.  7. 

(7)  Ibid  fi.  6.  et  suiv. 
(8j  Deut.  x.  fi.  16,  20. 

(9)  Ibid.  xxxi.    fi.  9.  et  suiv. 

(10)  Deut.  xvii.   fi.  18.  et  suiv. 

(  1 1  )  Ce  commandement  de  remercier  Dieu  de  ses  bien- 
faits, est  étendu  par  les  Juifs  à  l'obligation  d'adresser  à 
Dieu  une  prière,  du  moins  avant  le  repas.  Ils  observent 
cette  loi  avec  tant  d'exactitude,  que,  s'il  arrivait  à  quel- 
qu'un d'eux  d'oublier  à  s'en  acquitter,  il  serait  tenu,  même 
après  être  sorli,  de  revenir  chez  lui  pour  réparer  cette 
omission.  Ils  fondent  sur  le  même  précepte  la  nécessité 
de  se  laver  les  mains  avant  de  manger,  et  alfirment 
que  celui  qui  mange  avec  des  mains  qui  ne  sont  pas 
nettes,  commet  un  péché  aussi  grand  que  celui  qui  man- 
gerait de  quelque  meis  impur.  Ils  ont  encore  plusieurs 
autres  délicatesses  supertmeuses,  en  faveur  desquelles 
cependant  ils  avouent  n'avoir  aucun  commandement 
positif  dans  la  loi  écrite,  ni  dans  la  loi  orale,  excepté 
celui  qui  leur  prescrit  de  se  soumettre  aux  ordres  de 
leurs  docteurs.  Ainsi,  c'est  avec  raison  que  notre  Sau- 
veur leur  reproche  si  souvent  d'observer  plus  exactement 
des  commandements  d'hommes,  que  les  choses  les  plus 
importantes  de  la  loi  de  Dieu,  la  justice,  la  miséricorde, 
etc.  Malt.  xv.  fi,  j.  et  suiv. 
(12)  Deut.  vin.  pass. 


lévites,  afin  de  la  lire  continuellement,  et  d"en 
être  plus  fidèle  observateur  (io). 

Toutes  les  bénédictions  seront  reçues  avec  re- 
connaissance, comme  venant  de  Dieu  (1 1),  et  tou- 
tes les  punitions  avec  soumission,  comme  étant 
des  châtiments  paternels,  ou  des  épreuves  de 
leur  obéissance  (12). 

La  loi  sera  gravée  sur  des  pierres,  et  dressée 
sur  un  autel,  et  les  bénédictions  promises  à 
l'obéissance,  et  les  malédictions  annoncées  à  la 
rébellion, seront  publiquement  érigées  surles  mon- 
tagnes d'Hébal  et  de  Garizim,pour  en  perpétuer 
la  mémoire  (13). 

Sans  l'aveu  et  le  vif  sentiment  de  leurs  fautes, 
les  Israélites  ne  devront  pas  se  flatter  d'en  obte- 
nir le  pardon,  ni  de  voir  cesser  les  maux  qu'elles 
leur  avaient  attirés  (14), 

Les  holocaustes,  les  dîmes,  les  sacrifices,  etc., 
ne  devront  être  offerts  en  aucun  autre  endroit  que 
celui  qu'il  plaira  à  Dieu  d'indiquer  (1 5). 

Lois  positives  et  négatives,  concernant  le  sabbat, 
la  Pâque,  les  autres  jours  solennels. 

Le  sabbat,  ou  septième  jour,  sera  sanctifié  (  1 6). 
Ni  maître,  ni  serviteur,  ni  esclave,  ni  étranger, 
ni  bétail,  ne  fera  en  ce  jour  aucune  œuvre  ser- 
vile  (17).  On  n'allumera  point  de  feu  (18),  et  on 
ne  vendra  ni  n'achètera  rien.  Aucune  personne 
ne  sera  mise  à  mort,  quelque  crime  qu'elle  puisse 
avoir  commis,  et  personne  n'entreprendra  de 
voyage   ce  jour-là  (19). 


(13)  Deut.  xvii.  j.  4.  ad.  fin.  et  xxvin.  pass. 

(14)  Ibid.  xxx.  pass. 

(ici  Ibid.  xn.  fi.  ç.  et  suiv. 

(16)  Exod.   xxni.   fi.   12.  xxxiv.  fi.   21. -Deut.  xvi.  y.  14. 
et  passim. 

(17)  Exod.  xx.  fi.  10.  et  suiv. -Deut.  v.  fi.  14.  et  suiv. 

(18)  Exod.  xxv.  fi.  j. 

(19)  Exod.  xvi.  fi.  29.  Quoique  le  texte  dise  expressé- 
ment qu'ils  ne  devaient  point  quitter  leur  place,  le  sens 
de  cette  défense  ne  saurait  regarder  que  l'action  d'aller 
rassembler  de  la  manne  ;  car  il  est  clair  qu'ils  étaient 
obligés  de  se  rendre  au  Tabernacle  de  tous  les  endroits 
du  camp,  et  dans  la  suite  au  temple  des  divers  quartiers 
de  Jérusalem  (/  cvil.  xxnt.  fi.  5.)  Cependant  les  Juifs  l'en- 
tendent de  l'action  de  sortir  de  sa  place,  pour  quelque 
raison  d'intérêt  ou  de  plaisir.  Il  ne  leur  était  pas  permis 
de  faire  d'autre  chemin  que  celui  qu'ils  appellent  le  che- 
min d'un  sabbat.  A  la  vérité,  ni  Moïse,  ni  aucun  prophète 
n'en  ont  fixé  la  longueur  ;  mais  quelques  rabbins  la  fixent 
à  deux  mille  coudées.  Quoiqu'ils  ne  soient  pas  d'ac- 
cord sur  la  longueur  de  ce  chemin,  ils  ne  laissent  pas 
de  convenir  que  le  plus  sûr  est  de  ne  point  excéder 
deux  mil  le  pas  médiocres,  {Maint. Tract,  row.c.  5.  Sec  t.  27. 
Goodwin's  Moses  et  Aar.  I.  m.  c.  j.  S-  10.)  ce  qui  parait 
avoir  été  la  distance  entre  Jérusalem  et  la  montagne  des 
Oliviers,  que  saint  Luc  appelle  le  chemin  du  sabbat, 
[Act.  \. fi. 12.)  Celui  néanmoins  qui  excédait  cette  distance, 
n'était  pas  considéré  comme  violateur  du  sabbat,  mais  en 
était  quitte  pour  quelque  légère  punition,  au  lieu  que  le 
violateur  du  sabbat  était  lapidé  (V.  Maimon.  ubi  sup). 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA   NATION  JUIVE 


375 


Le  violateur  du  sabbat  sera  lapidé  (i). 
Nous  omettons  plusieurs    autres    lois  relatives 
au  même  sujet,  mais  moins  importantes. 

Lois  concernant  les  trois  grandes  fêles,  la  Pàque, 
la  fêle  des  Semaines  et  la  fêle  des  Tabernacles. 

Trois  fois  par  an,  tous  les  enfants  mâles  d'Is- 
raël comparaîtront  devant  Dieu,  à  l'endroit  qu'il 
aura  choisi  ;  savoir,  à  la  fête  des  pains  sans  levain, 
ou  de  la  Pâque  ;  à  celle  des  Semaines,  et  à  la 
fête  des  Tabernacles.  Ils  ne  viendront  pas  de- 
vant lui,  les  mains  \ides  ;  mais  chacun  offrira  à 
l'Éternel,  à  proportion  des  biens  qu'il  lui  aura 
accordés  (2). 

De  la    Pâque. 

L'obligation  d'observer  cette  fête,  était  perpé- 
tuelle, tant  pour  les  Israélites  que  pour  les  prosé- 
lytes circoncis  (5). 

Aucun  circoncis,  soit  descendant  d'Abraham, 
soit  admis  dans  l'alliance  faite  avec  ce  patriar- 
che,«à  moins  d'en  être  empêché  par  maladie,  par 
voyage,  ou  par  quelque  impureté  légale,  ne 
devait  manquer  à  la  célébration  annuelle  de  cette 
fête,  sous  peine  d'être  retranché  du  peuple 
d'Israël  (4). 

Aucun  serviteur,  ni  étranger,  ne  mangeait  de  la 
Pàque,  à  moins  qu'il  n'ait  été  circoncis  (<,). 

La  fête  commençait  le  soir  du  quatorzième 
jour  du  mois  d'Abib,  ou,  comme  il  y  a  dans  l'ori- 
ginal, entre  les  deux  vêpres  (6),  auquel  temps 
l'agneau  pascal  était  tué;  et  la  fête  se  continuait 
jusqu'au  soir  du  vingt-et-unième  jour  du  même 
mois. 

Le  premier  et  le  dernier  jour  étaient  sanctifiés 
par  une  exception  générale  de  tout  travail,  de 
même  que  le  jour  du  sabbat  avec  cette  exception 


simplement, qu'au  premier  et  au  dernier  jour  dont 
il  s'agit,  il  était  permis  d'apprêter  à  manger,  ce 
qui  était  absolument  défendu  le  jour  du  sab- 
bat (7).  Les  mêmes  deux  jours  devaient  être  so- 
lennisés,  par  une  convocation  sainte  (8). 

Aucun  levain  n'était  employé  ni  gardé  dans  les 
maisons  pendant  ces  sept  jours,  quiconque  se 
serait  servi  de  levain  ce  jour-là, aurait  été  retranché 
d'Israël  (9).  Ainsi  tout  levain  était  ôté  des  maisons 
avant  que  l'agneau  pascal  fût  tué  (10). 

Le  premier  jour  de  la  Pàque,  on  offrait  un  ho- 
locauste de  deux  jeunes  taureaux,  d'un  mouton 
et  de  sept  agneaux  d'un  an,  avec  quelques  autres 
offrandes  de  moindre  valeur  (11);  et  le  second 
jour  de  la  fête,  on  offrait,  outre  les  sacrifices  or- 
dinaires, une  poignée  de  fruits  de  la  moisson  de 
l'année;  on  ne  mangeait  d'aucun  nouveau  blé 
avant  que  la  première  poignée  eût  été  présentée  à 
l'Éternel  (12). 

Quelques  autres  lois,  concernant  ces  fêtes,  se 
trouvent  répandues  dans  le  Pentateuque  ;  nous 
les  omettons  comme  moins  importantes. 

De  la  fête  des  Semaines  ou  de  la  Penlecôte. 

Cette  fête  fut  instituée  en  mémoire  de  la  loi 
donnée  sur  la  montagne  du  Sinaï,  cinquante  jours 
après  la  sortie  d'Egypte,  et  afin  d'obliger  le  peu- 
ple à  comparaître  devant  l'Éternel,  pour  offrir  les 
prémices  de  la  moisson  (13),  comme  un  aveu  de 
leur  dépendance  et  du  droit  souverain  qu'il  avait 
sur  eux  et  sur  les  productions  de  leur  pays. 

On  comptait  sept  semaines,  ou  cinquante  jours, 
depuis  le  seizième  jour  du  mois  d'Abib  ou  Nisan, 
qui  était  le  second  jour  de  la  Pâque, et  le  cinquan- 
tième jour,  qui  était  le  premier  de  cette  fête  (14). 

Les  sacrifices  prescrits  pour  ce  jour,  étaient, 
outre  les  deux  pains,  sept  agneaux  d'un  an,  un 
jeune  taureau  et  deux  moutons,  en  forme  d'holo- 


(1)  Excd.  xxxi.  jh  14.  15. 

(2)  Dcut.  xvi.  f.  iù,  17.-  Exod.  xxii.  y.  2;.  et  passim, 
(î)  Exod.  xii.  y.  14,  24.  et  passim. 

(4)  Nomh.  îx.  f.  12,  1  ;,  14. 
(<)  Exod.  xii.  y.  4j,  et  suiv. 

(6)  Ibid.  y  6.  ' 

(7)  Comp.  Exod.  xii.  y.  16  avec  xxxv.  y.  ?. 

(8)  lbid.  y.  16. 

(O)  Ibid.  f.  iç.  19.  Cette  malédiction  s'étendait  seule- 
ment à  la  personne  qui  mangeait  quelque  chose  où  il  y 
avait  du  levain,  et  non  à  celle  qui  gardait  du  levain  dans 
sa  maison.  Ce  dernier  péché  devait  seulement  être  puni 
d'un  certain  nombre  de  coups  :  mais,  sur  le  premier  cas, 
les  docteurs  juifs  sont  si  sévères,  qu'ils  défendent  de 
manger  un  oiseau  dans  le  gosier  duquel  se  serait  trouvé 
un  seul  grain  de  blé,  parce  que  ce  grain  a  de  la  disposi- 
tion a  fermenter  dès  qu'il  rencontre  la  moindre  humilité. 
Ils  ont  aussi,  relativement  aux  liqueurs  plus  ou  n  oins 
propres  à  fermanter,  des  distinctions  pius  délicates  que 
solides,  et   qui,  par  cela  même,  ne   méritent  guère    que 


nous  nous  y  arrêtions.  (Munster.  Prsec.    neg.  7-.  et  seq. 

(10)  Exod.  xxxiv.  y.    25.  et  alib.  Vid.  Prae.  affirm.    548. 

(  1 1)  Nomb.  xxvin.  y.  19  et  suiv. 

(12)  Lé  vit.  xxiii.  y.   10.  et  suiv. 

(1?)  Quelques  commentateurs  pensent  que  chaque 
famille  était  oh'igée  d'offrir  deux  pains  faits  de  nouveau 
froment  :  mais  il  est  plus  probable  qu'il  n'y  en  avait  que 
deux  en  tout,  offerts  au  nom  de  tout  le  peuple,  comme 
la  première  poignée  d'orge.  Ces  pains  étaient  faits  de 
froment,  parce  que  la  moisson  du  froment  finissait  vers 
le  temps  de  cette  fête. 

(14)  Ni  le  texte  sacré,  ni  Josèphe,  ni  aucun  écrivain 
hébreu,  ne  nous  disent  si  cette  fête  durait  sept  jours, 
comme  celle  de  la  Pâque  et  des  Tabernacles.  Les  Juifs 
modernes  ne  l'observent  que  pendant  deux  jours,  durant 
lesquels  tout  ouvrage  servile,  excepté  l'apprêt  du  man- 
ger, est  interdit.  Ceux  qui  voudront  savoir  les  autres 
cérémonies  qu'on  pratiquait  ce  jour-là,  pourront  con- 
sulter Léon  de  Modène  (Cérémon.  Jud.  part,  ni    c.  4.) 


576 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


causte,  avec  les  gâteaux  et  leurs  aspersions. Outre 
cela,  les  Israélites  devaient  sacrifier  un  jeune  bouc 
en  offrande  pour  le  péché,  et  deux  agneaux,  en 
hostie  pacifique  ou  de  prospérité  (i).  Aucun  ou- 
vrage servile  ne  devait  être  fait  ce  jour-là,  que 
celui  qui  avait  rapport  aux  victimes;  et  la  procla- 
mation de  la  sainte  convocation, avait  lieu  comme 
dans  les  autres  fêtes  solennelles  (2). 

De  la  fêle  des  Tabernacles. 

Cette  fête  était  instituée  en  mémoire  du  séjour 
de  quarante  ans  que  les  Israélites  firent  dans  le 
désert.  On  l'appelait  la  tête  des  Tabernacles  ou 
des  Tentes,  parce  qu'ils  vécurent  sous  des  tentes 
durant  tout  ce  temps,  et  que  la  fête  même  devait 
être  célébrée  sous  des  tentes  faites  de  branches 
de  différents  arbres,  comme  palmiers,  oliviers, 
saules  et  autres,  entrelacées  ensemble  d'une  ma- 
nière à  la  fois  artistique  et  convenable  (3). 

C'était  la  troisième  grande  fête,  égale  en 
solennité  aux  deuxautres, excepté  ce  que  l'agneau 
de  la  Pâque  pouvait  avoir  de  typique.  Elle  com- 
mençait le  soir  du  quinzième  jour  du  septième 
mois,  nommé  Thischri,  qui  était  le  premier  de 
l'année  civile,  et  qui  répondait  à  une  partie  de 
notre  mois  de  septembre;  leur  moisson  recueillie 
et  serrée,  leur  donnait  occasion  d'en  rendre  de 
solennelles  actions  de  grâces  à  Dieu  (4).  Elle 
devait  durer  sept  jours,  dont  le  premier  et  le  der- 
nier étaient  observés  avec  la  plus  grande  exacti- 
tude. On  se  rendait  au  Tabernacle  ou  au  temple, 
des  branches  de  palmier  ou  de  quelque  autre 
arbre  à  la  main  ;  on  faisait  le  tour  de  l'autel  ;  on 


chantait  les  louanges  de  Dieu  ;  on  offrait  des 
sacrifices  particuliers  à  cette  solennité,  outre  les 
sacrifices  ordinaires,  et  on  s'abstenait  de  toute 
œuvre  servile,  excepté  de  ce  qui  avait  rapport 
aux  offrandes  (<,). 

Ils  étaient  pareillement  obligés  de  manger,  de 
boire,  de  coucher,  en  un  mot,  de  passer  les  sept 
jours  entiers  dans  ces  tentes,  à  moins  qu'ils 
n'en  fussent  dispensés  par  quelque  ordonnance 
légale  (6). 

Les  sacrifices  particuliers  à  cette  fête  étaient, 
le  premier  jour,  treize  jeunes  taureaux,  deux 
moutons,  quatorze  agneaux  d'un  an,  avec  les 
offrandes  ordinaires,  qui  consistaient  dans  une 
certaine  quantité  de  farine,  mêlée  avec  de  l'huile 
et  du  vin.  A  ces  sacrifices  était  ajouté  celui  d'un 
bouc,  comme  une  offrande  faite  au  nom  et  pour 
l'expiation  des  péchés  de  tout  le  peuple  ;  outre 
les  sacrifices  ordinaires  du  soir  et  du  matin,  qui 
ne  devaient  jamais  être  omis,  et  ceux  qui  pou- 
vaient être  offerts  par  un  principe  de  dévotion 
particulière. 

Le  second  jour,  on  offrait  douze  jeunes  tau- 
reaux, quatorze  agneaux,  avec  les  gâteaux  qui  en 
dépendaient,  et  un  bouc,  comme  le  premier 
jour.  Les  mêmes  sacrifices  étaient  répétés  le  troi- 
sième, le  quatrième,  le  cinquième,  le  sixième  et 
le  septième  jour,  avec  cette  différence,  que  cha- 
que jour  il  y  avait  un  jeune  taureau  de  moins,  de 
manière  qu'on  n'en  immolait  que  sept  le  dernier 
jour  (7)  :  les  autres  offrandes  restaient  constam- 
ment les  mêmes. 

Le  huitième  ou  dernier  jour,  qui  était  le  plus 
solennel  de  tous,  et  pendant  lequel  les  Israélites 


(1)  Il  y  a  quelque  différence  entre  les  sacrifices  ordon- 
nés pour  cette  fête,  dans  le  Lévitique  et  dans  le  livre 
des  Nombres  (Comp.  Lévit.  xxiii.  f.  18,  19.-  Noinb.  xxvtii. 
f.  2?.)  Josèphe  les  joint  tous  ensemble  (Antiq.  lib.in.c.  10. 
Cependant,  si  on  compare  les  deux  passages,  on  sera 
tenté  de  croire  que,  par  rapport  à  l'un  ou  l'autre,  il  y  a 
eu  quelque  erreur  de  copiste.  Buxtorf  nous  apprend  que 
les  Juifs  avaient  tellement  peur  de  se  tromper  dans  le 
calcul  de  cette  lête  et  de  celle  de  la  Pâque,  qu'ils  l'obser- 
vaient deux  jours,  au  lieu  d'un.  Il  cite  un  passage  du 
livre  de  Judith  (Judith,  vin.  je.  6.)  qui  parait  favoriser  son 
assertion,  et  répond  par-là  à  la  difficulté  qu'on  a  pro- 
posée au  sujet  de  la  Pâque  que  Jésus-Christ  parait  avoir 
célébrée  un  jour  plus  tôt  que  le  reste  des  Juifs.  [Srnag. 
Jad.v.  et  Cyril.  Alex,  in.  Job.  xin.-  Chrysost.Hom.il.  lxxxii.- 
Epiphan.Eutym.  Paul.  Burg.  P.  de  Midclb.  Scalig.  Janscn. 
Maldon.  et  al.  mult.) 

(2)  Lévit.  xxiii.  y.  15.  16.  18.  19.-  Exod.  xxiv.  y.  22.  - 
Nomb.  xxvin.  y.  27.  et  alib. 

(j)  Lèvit.  xxiii.  y.  40.  et  suiv.  et  passim. 

(4)  Exod.  xxiii.  f.  16. 

(<;)  Nom.  xxix.  f.  12.  et  passim. 

(6)  Lévit.  xiii.  f  42. 

(7)  Les  Juifs  prétendent  que  le  nombre  des  jeunes 
taureaux  diminuait  d'un  chaque  jour,  parce  que  le  nom- 
bre total  de  ceux    qui   étaient    offerts   durant  ces    sept 


jours,  montait  à  soixante-dix,  ce  qui  est  précisément, 
disent-ils,  le  nombre  des  nations  en  faveur  desquelles 
ces  sacrifices  étaient  offerts,  afin  que  l'une  après  l'autre 
elles  se  soumissent  à  l'empire  du  Messie,  qui  est  ap- 
pelé par  excellence,  le  désiré  des  Nations.  (Aggée,  11. 
y.  7.  Vid.  Hospin,  Orig.  Fest.  -  GooJwin's,  Mos.  et 
Aar.  lib.  m.  c.  6.  §  8).  Ceux  qui  ont  nommé  ce  huitième 
jour  le  Hosannah  rabbah, :  Good\v\n  ubi  sup.-Ca!m.in  voc. 
Tabernacle),  sont  contredits  par  tous  les  Juifs,  qui  affir- 
ment que  c'était  le  septième,  qu'on  désignait  sous  ce 
titre.  (Voir  à  ce  sujet  Schulchan,  Haruch  ,  Arbah 
Thurim,  étal.)  Quant  à  l'assemblée  qui,  suivant  plusieurs 
versions,  devaient  se  tenir  ce  huitième  jour,  le  mot  hé- 
bren  ms?  'etsereth,  signifie  l'action  de  retenir  ou  celle 
de  contraindre  ;  ce  qui  a  donné  lieu  d'assurer  qu'après 
que  le  septième  jour  était  passé,  le  peuple  était  obligé 
de  rester  encore  un  jour.  (v.  Munst.  ibid.  Meyer,de 
Fest.  c.  xvi  S.  15.)  C'est  ce  jour-là  que  les  Juifs  finis- 
sent la  dernière  Paraschah  ou  Section  du  Pentateuque, 
et,  immédiatement  après,  ils  commencent  la  première, 
afin  qu'il  ne  semble  pas  qu'ils  soient  plus  charmés  de  fi- 
nir cette  tâche  que  de  la  commencer  (Buxtorf.  in  Ab- 
breviat.  et  Synaj:.  Jud.  c.  28.  v.  et  Abarb  in  Deut.  v.  ;i. 
et  c'est  pour  cette  raison  que  la  fête  est  appelée  ;n 
min  nnoar,  la  Fête  de  joie  de  ta  Loi  [Exod  xxiii.  y.  i0,  et 
xxxiv.  y.  22.I 


SUR   L'ORGANISATION   DE   LA  NATION  JUIVE 


;;7 


devaient  s'abstenir  de  tout  travail  servile,  on 
n'offrait  qu'un  jeune  taureau,  qu'un  mouton  et 
septagneaux,  outre  le  bouc,  etles  sacrifices  accou- 
tumés ou  volontaires  (i);  le  nombre  de  ces  der- 
niers augmentait  ou  diminuait,  suivant  que  la 
moisson  avait  été  plusou  moins  abondante.  Enfin, 
en  ce  jour,  les  prémices  des  fruits  les  plus  tardifs 
étaient  apportées  et  présentées  à  Dieu  ;  et  il  arri- 
vait quelquefois  que  le  nombre  de  ceux  qui  s'ac- 
quittaient de  ce  devoir  était  si  grand,  que  la  fête 
était  prolongée  d'un  jour  (2). 

De  la  fêle  des  Trompettes  et  des  nouvelles  Lunes. 

Nous  avons  déjà  observé  que  le  mois  de  This- 
chri  était  le  premier  de  l'année  civile,  comme 
celui  d'Abib  ou  de  Nisan  l'était  de  l'année  ecclé- 
siastique. Le  premier  et  le  second  jour  de  ce 
mois  étaient  destinés  à  la  célébration  de  la  fête 
des  Trompettes.  Elle  devait  être  proclamée  par 
le  son  des  trompettes,  observée  en  s'abstenant 
de  tout  travail  servile,  et  distinguée  des  au- 
tres nouvelles  lunes,  par  des  sacrifices  particu- 
liers (3). 

Comme  l'Écriture  ne  marque  en  aucun  endroit 
la  raison  de  l'institution  de  cette  fête,  les 
exégètes  sont  partagés  sur  ce  sujet.  Les  Juifs 
croient  que  c'est  en  mémoire  de  la  création,  qui 
arriva  en  ce  même  mois  (4).  Quelques  rabbins  pen- 
sent que  cette  fête  fut  aussi  instituée  en  mémoire 
de  la  délivrance  d'Isaac,  et  du  bélier,  qui  fut 
retenu  par  les  cornes,  et  substitué  à  sa  place  (5). 
Quelques  pères  ont  cru  que  c'était  en  mémoire 
de  la  loi  donnée  sur  la  montagne  du  Sinaï  (6), 
parce  qu'à  cette  occasion  on  entendit  le  sondes 
trompettes  et  du  tonnerre  :  d'autres  enfin,  à 
cause  de  quelques  cérémonies  observées  par  les 
Juifs,  comme  une  préparation  à  cette  fête,  ont 
avancé,  qu'elle  fut  instituée  afin  de  rappeler  au 
genre  humain  le  souvenir  de  la  résurrection,  qui 
doit  se  faire  au  son  de  la  trompette  (7)  :  mais  le 
but  le  plus  vraisemblable  de  cette  fête,  et  de 
l'usage  de  proclamer  par  des  trompettes  le  com- 
mencement de  l'année  civile,  était,  suivant  toutes 
les  apparences,  de  donner  à  ce  commencement 
un   caractère  plus   remarquable,  parce  que  tous 


les  contrats,  marchés,  hypothèques,  aussi  bien 
que  les  années  sabbatiques  et  les  jubilés,  étaient 
réglés  par  là  (8)  ;  ce  qui  faisait  que  les  trom- 
pettes ne  cessaient  de  sonner,  depuis  le  lever 
jusqu'au  coucher  du  soleil  (9). 

Les  sacrifices  particuliers  à  cette  solennité, 
étaient  un  jeune  taureau,  deux  moutons,  et  sept 
agneaux,  offerts  en  holocaustes,  avec  les  accom- 
pagnements ordinaires  de  rieur  de  farine,  et  de 
vin,  au  nom  de  tout  le  peuple,  sans  compter  le 
bouc,  qui  devait  servir  d'offrande  pour  le  péché, 
et  les  sacrifices  journaliers  (10). 

Des  Néoménies  ou  nouvelles  Lunes. 

Les  Israélites  avaient  ordre  d'observer  le  pre- 
mier jour  dechaque  mois  ou  lune,  et  d'offrir,  outre 
les  sacrifices  ordinaires,  un  holocauste  de  deux 
jeunes  taureaux,  d'un  agneau  et  de  sept  moutons, 
avec  la  quantité  accoutumée  de  fleur  de  farine,  de 
vin  et  d'huile  (11).  La  plus  solennelle  de  ces  nou- 
velles lunes,  était  celle  du  mois  de  Thischri,  dont 
nous  venons  de  parler,  et  qui  était  plus  solennelle- 
ment sanctifiée  pour  des  raisons  particulières. 
Les  autres  nouvelles  lunes  n'avaient  rien  qui  les 
distinguât  des  jours  ordinaires,  à  l'exception  des 
sacrifices  qui  viennent  d'être  indiqués,  et  qui 
étaient  accompagnés  du  son  des  trompettes.  Il 
y  a  lieu  de  présumer  aussi  que  les  Israélites  fai- 
saient alors  meilleure  chère  qu'à  l'ordinaire,  et 
formaient  des  assemblées  religieuses  particulières 
à  ces  jours-là.  A  la  vérité,  nous  ne  trouvons  aucun 
ordre  à  cet  égard,  dans  les  écrits  de  Moïse;  mais 
il  semble  qu'on  peut  conclure  le  premier  article 
de  l'excuse  que  David  allégua  pour  s'absenter  de 
la  table  de  Saiil  le  premier  jour  du  mois,  et  du 
ressentiment  que  Saùl  en  témoigna  (12);  et  le  der- 
nier de  ce  que  l'époux  de  la  Sunamite  lui  dit  pour 
la  dissuader  d'aller  trouver  le  prophète  Elisée, 
que  ce  n'était  ni  la  nouvelle  lune,  ni  le  sabbat  (13). 

Cependant,  quoiqu'à  tous  autres  égards  ce  jour 
fût  comme  unjourordinaire,  les  Juifs  l'observaient 
fort  scrupuleusement  ;  et,  comme  l'espace  pen- 
dant lequel  la  lune  sort  des  rayons  du  soleil, 
appartient  moitié  à  la  vieille  et  moitié  à  la  nou- 
velle lune,  et  qu'ils  manquaient  de  méthode  pour 


(1)  Ibid.  v.  y.  14.  ad  fin. 

(2)  Cf.  Sigonius,  Bertrand, Cunœus,Meyer,Goodw. et  al. 
(;)  Lèvit.  xxiii.  y.  24.  -  Nombr.  xxix.  y.  1.  et  suiv. 

(4)  La  Ghémare  affirme  positivement  que  ^lyn  n-qs 
'"i»n2  le  monde  fut  créé  au  mois  de  Thischri.  ce  qui  donna 
lieu  à  l'année  civile;  elle  remarque  que  la  fête  des  Taber- 
nacles devait  être  observée,  n;wn  nspns,  au  retour,  ou, 
selon  d'autres  versions,  à  la  fin  de  l'année  (Maim.  Kid- 
dush.  Haqodesh.  c.  9.)  La  Mishnah  ajoute  que  le  pre- 
mier jour  de  ce  mois  est  aussi  le  premier  de  l'année,  et 
que  c'est  par  ce  jour  qu'il  faut  commencer  le  calcul    de 


la  septième  année  ou  du  Jubilé.  [Tract,  rov  u/nt    c.    i.  — 
Lèvit,  xxv.  y.  5,  5,  6. 
(5I  R.Sal.  Cf.  Fag.  Munst.  et  al.  in  Levit.  xxm. 

(6)  Cf.  Basil  in  Psalin.Lxxxi.- Théodoret,qu.  ,'2. in  Levit. 

(7)  Cf.  Goodvvin,  ubi  supr.  §.  0. 

(8)  Id.  ibid.  §.  5. 

(9)  Cf.  Shindler,  sub  voc.  isw. 
(  10)  Nomb.  xxix.  y.   j.  et  suiv. 
(m)  Ibid.  xxvm.  jf.  11.   12,  et  suiv. 
(12)  1.  Rois  xx.  y.  5.  18.  27. 

(15)  iv.  Rois  iv.  y.  2j. 


/ 


37S 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


en  faire  le  calcul  avec  exactitude,  ils  observaient 
deux  jours  :  savoir,  le  dernier  jour  de  la  vieille, 
et  le  premier  jour  de  la  nouvelle  lune,  pour  être 
sûrs  de  leur  fait.  Cette  coutume  est  d'un  usage 
très  ancien,  à  en  juger  par  l'histoire  de  Sai.il ,  qui, 
après  avoir  excusé  l'absence  de  David  le  premier 
jour,  ne  témoigna  son  ressentiment,  que  quand  il 
ne  le  vit  point  à  sa  table  le  lendemain. 

Cette  irrégularité  de  la  lune  obligeait  aussi  les 
■Juifs  à  transporter  quelques  jours  du  mois,  afin 
de  fixer  le  commencement  de  celui  de  Thischri, 
aussi  bien  que  des  autres  mois;  les  transpositions 
étaient  basées  sur  plusieurs  raisons.  La  première, 
d'ordre  chronologique,  était  de  ne  point  célébrer 
la  nouvelle  lune  avant  que  la  vieille  fût  expirée  ; 
la  seconde  était  d'éviter  que  deux  sabbats  ou  jours 
de  repos  se  suivissent.  Il  pouvait  s'y  mêler  aussi 
d'autres  raisons  secondaires.  Mais  nous  ne  sau- 
rions déterminer  avec  certitude  le  commencement 
de  ces  transpositions.  Tout  ce  que  nous  savons, 
c'est  que  Scaliger  a  pris  des  peines  infinies  pour 
les  trouver  et  pour  les  rectifier,  et  qu'elles  ont  été 
depuis  d'un  grand  usage  en  plusieurs  cas  (i). 

Ce  sontlà  tous  les  jours  de  fête,  qui  furent 
institués  par  la  loi  de  Moïse.  Les  Juifs  en  ajou- 
tèrent plusieurs  autres  dans  la  suite,  en  mémoire 
de  quelque  grâce  signalée,  comme,  par  exemple, 
la  fête  nommée  Pourim,  qui  était  destinée  a  con- 
server le  souvenir  du  bonheur  qu'ils  avaient  eu 
d'échapper  à  la  cruauté  d'Aman  (2),  celle  de  la 
dédicace  du  temple,  et  plusieurs  autres,  telles  que 
la  purification  du  temple  sous  les  Maccabées. 
Tout  ce  que  nous  devons  ajouter,  est,  qu'il  y  avait 
un  commandement,  en  vertu  duquel  tout  ce  qui 
restait  des  sacrifices  offerts  durant  ces  solennités, 
après  le  premier  et  le  second  jour,  ou  même  avant, 
si  la  chair  des  victimes  avait  contracté  quelque 
souillure,  ou  acquis  quelque  mauvaise  odeur, 
devait  être  réduit  en  cendres  (3). 

Loi  concernant  l'année  sabbatique,  et  celle  du 
Jubilé. 

L'année  sabbatique  ou  la  septième  année,  et 
celle  du  Jubilé,  qui  n'arrivait  que  tous  les  sept 
fois  sept  ans,  doivent  aussi  être  considérées 
comme  des  espèces  de  solennités.  Dieu  les  avait 
destinées  au  repos  et  à  la  joie  ;  et,  comme  elles 
avaient  une  analogie  bien  marquée  avec  le  sabbat, 
ou  septième  jour,  il  est  juste  de  leur  donner  place 
parmi  les  fêtes  solennelles  des  Juifs. 


La  loi  mosaïque  distingue  quatre  sortes  d'an- 
nées :  i°  l'année  civile,  qui  réglait  tout  ce  qui 
concernait  la  police,  consistait  en  douze  mois 
solaires,  et  dans  la  suite  lunaires  :  elle  commen- 
çait par  le  mois  de  Thischri  ou  de  septembre. 
20  L'année  ecclésiastique  commençait  au  mois  de 
Nisan  ou  de  mars,  qui  était  le  septième  de  l'année 
civile,  et  réglait  tout  ce  qui  avait  rapport  aux 
cérémonies  religieuses  ;  de  la  Pàque,  qui  tombait 
au  milieu  de  ce  mois,  dérivait  le  comput  établis- 
sant la  date  de  toutes  les  autres  fêtes.  30  L'année 
sabbatique,  ou  la  septième  ;  et  40  la  cinquantième 
année,  ou  celle  du  Jubilé,  qui  était  célébrée  à  la 
fin  de  sept  semaines  d'années. 

L'année  sabbatique  devait  être  observée  chaque 
septième  année,  et  cette  observation  comprenait 
principalement  : 

1"  La  cessation  totale  de  tout  ce  qui  a  rapport 
à  l'agriculture  (4). 

2°Toutceque  la  terre  produisait  devait  être 
abandonné  aux  pauvres,  aux  orphelins  et  aux 
étrangers  (5). 

jo  Tous  les  esclaves  hébreux  devaient  être  relâ- 
chés, àmoinsqu'ils  ne renonçassentvolontairement 
à  la  liberté  qui  leur  était  offerte,  et  ne  se  déter- 
minassent à  rester  chez  leurs  anciens  maîtres. 
Dans  ce  cas,  ils  devaient  être  amenés  devant  les 
juges,  et  avoir  les  oreilles  percées  en  leur  pré- 
sence, pour  marquer  qu'ils  embrassaient  librement 
une  servitude  perpétuelle,  ou  du  moins  jusqu'à 
l'année  du  Jubilé  (6). 

4"  Les  Israélites  étaient  obligés  de  se  remettre 
l'un  à  l'autre  toutes  leurs  dettes  ;  mais  ce  béné- 
fice ne  s'étendait  point  aux  étrangers  (7). 

Elle  commençait  et  finissait  au  mois  de  Thischri 
ou  de  septembre,  afin  que  les  Israélites  eussent 
le  temps  nécessaire  pour  recueillir  tous  les  fruits 
de  cette  année,  pour  ensemencer  la  terre  pour 
l'année  suivante,  et  que  leur  pays  ne  restât  pas 
en  friche  deux  ans  de  suite  (8). 

Nous  trouvons  quelques  autres  lois  relatives  à 
cette  année  ;  par  exemple,  que  les  esclaves,  qui 
seraient  remis  en  liberté,  recevraient  une  récom- 
pense en  quelque  sorte  proportionnée  à  leurs  ser- 
vices (9)  ;  que  les  Israélites  ne  refuseraient  pas 
l'assistance  dont  leurs  frères  pauvres  pourraient 
avoir  besoin,  sous  prétexte  que  la  septième  année 
n'était  plus  guère  éloignée  (10).  Il  y  a  encore 
quelques  autres  lois,  relatives  à  l'époque  à  la- 
quelle on  devait  ouvrir  les  champs,  les  vergers, 
et   les  vignes  au    public  .  Parmi  ces  lois,  il  y  en 


(1)  De    EmcnJot.   Teint?.  -  Hospin.    Orig.    Fesl.    Buxt. 
Goodw.  Mer.  Usser.  et  Munster  et  al.  mult. 

(2)  Eslher.    ix    f.  20.  et  suiv. 

(j>  Lévil.  vu.  y.  1 5.  et  seq.  Prœc.  aff.  207.  et  208. 
(4)  Lévil.  xxv    y.  4.  —  (<,)  Ibid.  v.  y.  6. 


(<>    Exod.  xxi.  2.  y.  et  suiv.  et  passim. 
(?)  Deut.  xv.  y.  1.  et  suiv. 
8    Lévit.  xxv.  y.  9. 

(9)  Dent,  xv.  y.  1  j.  et  suiv. 

(10)  Ibid.  y.  7.  et  suiv. 


SUR   L'ORGANISATION    DE  LA    NATION  JUIVE 


379 


avait  une  bien  remarquable.  Elle  consistait  à  lire 
la  loi  devant  tout  le  peuple,  le  jour  de  la  Pente- 
côte. Comme  les  Israélites  devaient  s'abstenir  de 
tout  ouvrage  qui  eût  rapport  à  l'agriculture,  il 
est  à  présumer  que  le  concours  pour  entendre 
cette  lecture,  devait  être  beaucoup  plus  grand 
qu'aucune  autre  année. 

Il  serait  bien  inutile  d'insister  longtemps  à 
prouver  l'excellence  de  ces  lois,  aussi  bien  que 
de  celles  qui  concernent  le  Jubilé.  Qu'y  avait- 
il  de  plus  propre  à  inspirer  à  un  peuple  ingrat 
et  rebelle,  des  sentiments  de  soumission  aux 
ordres  de  la  Providence  et  de  charité  envers 
leurs  frères,  leurs  serviteurs  et  leurs  esclaves,  que 
le  souvenir  de  la  servitude  d'Egypte,  qui  est  don- 
née comme  une  des  raisons  de  cette  institu- 
tion (i)?  Nous  pouvons  y  ajouter  un  autre  motif, 
c'était  l'avantage  que  procurait  au  terrain  une  année 
de  repos. 

Cependant  la  plupart  des  Juifs,  et  plusieurs 
chrétiens,  tant  anciens  que  modernes,  ont  re- 
gardé cette  institution  comme  un  type  du  repos 
dont  on  jouira  pendant  le  règne  de  mille  ans,  dont 
parle  l'Apocalypse,  car,  comme  le  Pentateuque 
consacre,  outre  le  septième  jour,  la  septième 
année  et  la  sept  lois  septième,  ils  en  concluent 
que  le  monde  subsistera  six  mille  ans  dans  l'état 
où  nous  le  voyons,  ou,  comme  le  R.  Élie  s'ex- 
prime dans  le  thalmud,  deux  mille  ans  sans  loi, 
deux  mille  sous  la  loi,  et  deux  mille  sous  le 
Messie  (2)  ;  après  quoi  vient  le  grand  sabbat  de 
mille  ans. 

Lois  concernant  le  Jubilé. 

Cette  solennité  est  la  dernière,  et  la  plus  con- 
sidérable de  celles  que  Dieu  prescrivit  aux  Israé- 
lites. Elle  devait  être  célébrée  chaque  cinquan- 
tième année  (5),  et  avait  cet  avantage,  qu'elle 
procurait  la  liberté  à  tous  les  esclaves  qui  avaient 


refusé  d'être  libres  la  septième  année.  Cette  fête 
acquittait  d'ailleurs  toutes  les  dettes,  rendait  à 
chacun  ses  terres,  ses  maisons,  sa  femme,  ses  en- 
fants, en  un  mot,  ses  possessions,  de  quelque 
manière  qu'elles  pussent  avoir  été  aliénées  (4) 
pendant  ces  cinquante  ans.  C'est  pour  celte  rai- 
son, que  nous  croyons  avec  plusieurs  commen- 
tateurs, que  cette  solennité  s'appelait  Jubilé  ou 
Yobel,  parce  qu'elle  rétablissait  chaque  chose 
dans  son  premier  état  (5). 

Il  faut  observer  cependant  que  ces  privilèges 
ne  s'étendaient  qu'aux  Israélites  de  naissance,  ou 
à  ceux  qui  avaient  été  incorporés  à  leur  religion 
ou  leur  république,  par  le  moyen  de  la  circon- 
cision. Ces  deux  sortes  d'hommes  avaient  droit 
aux  avantages  du  Jubilé,  quand  môme  par  sen- 
tence du  grand  sanhédrin  (6),  en  punition  de 
quelque  crime,  ils  auraient  été  vendus  pour 
esclaves  ;  mais  les  gentils  en  étaient  entièrement 
exclus  (7). 

Il  y  a  des  auteurs  qui  croient  que  les  Israélites 
avaient  coutume  de  compter  par  jubilés,  comme 
les  Grecs  faisaient  par  olympiades,  les  Romains 
par  lustres  et  les  chrétiens  par  indictions  (8).  Ce 
sentiment  nous  paraît  d'autant  plus  vraisemblable, 
qus  les  Israélites  devaient  toujours  avoir  égard  à 
cette  année,  dans  tous  leurs  marchés  de  maison, 

de    terres,    etc ,    lesquels    rendaient    plus   ou 

moins,  suivant  la  proximité  ou  la  distance  du  Ju- 
bilé (9).  11  y  avait  quelque  différence  par  rapport 
à  la  vente  des  maisons  situées  dans  les  villes  mu- 
rées ;  elles  pouvaient  être  rachetées  dans  l'espace 
de  douze  mois,  en  payant  toute  la  somme  de 
l'achat  ;  mais  si  elles  ne  l'étaient  point  dans  cet 
intervalle,  elles  ne  pouvaient  pas  revenir,  même 
l'année  du  Jubilé,  à  leur  premier  possesseur  (10). 

Les  possessions  des  prêtres  et  des  lévites 
avaient  leurs  immunités  et  leurs  privilèges  (1 1), 
dont  nous  parlerons  ailleurs. 

Pendant    l'espace    de    l'année    entière,    toute 


(1)  Deul.  xv.  y.  iç. 

(2)  Tract.  Sankedr.  §.  Hclcc.  -  Hospin.  Mer.  Good<». 
Munst.  et  al. 

(?)  Lé  vit  xxv.  y.  8.  et  suiv. 

(4)  Ibid.  y.  28.  41.  et  passim. 

($)  Les  exégètes  ont  donné  différentes  étymologies  de 
ce  mot  ;  les  uns  le  font  dériver  du  mot  hébreu  'ijv  Jobel, 
qui  signifie  une  trompette  faite  de  cornes  de  bélier.  Ce 
nom  vient  à  son  tour  du  mot  arabe  jobelali,  un  bélier,  parce 
que  le  jubilé  était  proclamé  au  son  de  cet  instrument 
(Rabbin,  mu.lt.  Kun'h.  in  Rad.  sub.  voc.  73l>  Goodw.  Mer. 
Munst.  etc.)  D'autres  croient  que  ce  ternie  a  été  fait  à 
l'imitation  du  sondes  instruments  (Bocharl,  Hieron.  Beckius, 
Annot.  in  Maïmon.  Shcmitah  Veyobct.  Note  v.);  d'autres 
enfin  pensent  que  ce  mot  vient  de  Jubal,  premier  inven- 
teur desinstruments  de  musique  (Goodwin,  Hotting,  etc.  )  : 
mais  nous  préférons  l'éiymologie,  d'aprèc  laquelle  ce 
terme  vient  de  la  racine  ~o>  Yabal,  en  hiphil,  "oin  hobil, 
qui  signifie  rappcller,  rétablir,  etc....  ce  qui  était  précisé- 
ment l'effet  du  jubilé.  Nos  lecteurs  pourront   trouver  ce 


terme  en  plusieurs  endroits  de  l'Écriture,  et  particulière- 
ment dans  le  Livre  des  Psaumes,  comme  par  exemple, 
nitsS  >w  i'îov  Yobilou  schai  lammora,  apporte-  des  pré- 
sents à  celui  qui  doit  être  craint.  (Psaumes  lxxvk.  vers, 
penult.  et  Job.  x.  y.  19;  xxi.  y.  jo,  p.-  Jérém.  xxxi.  jî^.  9. 
et  alib.) 

\b)  Lévit.  xxv.  y.  40. 

17)  lbid.  Cf.  y.  46.  Cf.  Maimon.  Tract.  QH3>  c.  9. 

(8j  Hospin.  Orig.  Fest.  c.  9.  Goud<p.  Hotting. 

(<))  Lévit.  xxv.  y.  27  et  suiv. 

(10)  Lévit.  Jbui.  f.  29.  50.  Les  rabbins  ajoutent  uneautre 
exception,  sans  que  nous  puissions  deviner  sur  quelle 
autorité  elle  était  fondée  :  ceux  qui  vendaient  leurs 
maisons,  leurs  terres,  etc....,  afin  d'employer  l'argent 
à  quelque  trafic,  en  un  mot,  à  quelqu'autre  usage  que 
celui  de  subvenir  aux  besoins  de  la  vie,  étaient  exclus  du 
bénéfice  accordé  par  la  loi  du  Jubilé.  (Maïmon.  Schemit. 
Verobct.  c.  xn.) 

(u)  Lévit.  lbid.  y\  j2  et  suiv. 


380 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


sorte  d'agriculture  était  expressément  défendue  ; 
les  pauvres  recueillaient  ce  que  la  moisson  et  la 
vendange  pouvaient  produire  ;  et,  par  rapport  à 
toutes  les  autres  productions  de  la  terre,  on  sui- 
vait les  mêmes  lois  qui  avaient  lieu  pendant  l'an- 
née sabbatique. 

Par  un  ordre  exprès  de  Dieu,  le  commence- 
ment du  Jubilé  était  fixé  au  mois  de  Thischri  (1), 
c'est-à-dire  vers  le  temps  de  l'équinoxe  d'au- 
tomne ;  mais  nous  ne  saurions  déterminer  avec 
certitude  l'époque  à  laquelle  cette  solennité  fut 
célébrée  pour  la  première  fois,  ni  si  elle  était  cé- 
lébrée au  commencement  de  la  quarante-neuvième 
ou  de  la  cinquantième  année. 

Quoi  qu'il  en  soit,  cette  solennité  devait  être 
célébrée  avec  de  grandes  marques  de  joie,  parce 
qu'elle  était  destinée  à  rappeler  aux  Israélites  le 
souvenir  de  la  servitude  d'Egypte,  et  à  empêcher 
qu'ils  ne  fissent  subir  à  leurs  frères  un  traitement 
pareil  à  celui  qu'ils  avaient  essuyé.  Mais  quelque 
contentement  que  les  maîtres  et  les  possesseurs 
des  terres  pussent  faire  paraître,  il  n'y  a  aucun 
lieu  de  douter  que  la  satisfaction  des  esclaves  et 
des  pauvres  ne  fût  plus  sincère,  à  l'approche  du 
temps  qui  allait  les  rétablir  dans  leur  premier 
état. 

11  est  bien  vrai  que  cette  faveur  ne  leur  était 
accordée  que  le  dixième  du  mois,  autrement  ap- 
pelé le  jour  d'expiation  ;  mais,  pendant  les  neuf 
jours  précédents,  les  esclaves  étaient  entièrement 
exempts  de  l'obligation  de  travailler  pour  leurs 
maîtres  ;  ils  passaient  ce  temps  à  boire,  à  manger 
et  à  se  divertir  ;  ils  portaient  des  guirlandes  sur 
leurs  têtes,  à  peu  près  comme  chez  les  Romains, 
pendant  la  fête  des  Saturnales,  et,  dès  que  le 
dixième  jour  était  venu,  le  sanhédrin  faisait  son- 
ner de  la  trompette  dans  tout  le  pays  ;  alors  les 
esclaves  étaient  remis  en  liberté,  et  ceux  qui 
avaient  aliéné  leurs  possessions,  en  redevenaient 
les  propriétaires  (2). 

Le  but  de  cette  ordonnance  était  d'empêcher 
que  les  pauvres  ne  fussent  opprimés  et  détenus 
dans  un  éternel  esclavage,  et  que  les  riches  ne 
s'emparassent  de  toutes  les  terres. Par  ce  moyen, 
le  législateur  établissait  parmi  les  Israélites  une 
espèce  d'égalité,   infiniment  propre  à   leur  faire 


aimer  une  patrie,  dans  laquelle  leur  postérité  ne 
pouvait  être  privée  de  son  patrimoine,  tout  au 
plus  que  l'espace  d'un  demi-siècle.  S'il  était  ques- 
tion de  prouver  que  la  loi,  dont  nous  parlons, 
devait  naturellement  produire  cet  effet,  nous 
pourrions  citer,  entre  plusieurs  autres  exemples, 
celui  de  Naboth,  qui  aima  mieux  s'exposer  à  la 
colère  du  roi  d'Israël,  que  de  renoncer  à  une 
petite  portion  de  son  héritage.  Le  ressentiment 
de  Jézabel  lui  fit  expier  cette  marque  de  fermeté, 
par  la  perte  de  sa  vie  et  de  son  bien  (3). 

Le  jour  de  l'Expiation. 

C'est  ici  le  dernier  jour  solennel  d'institution 
divine.  Il  différait  de  tous  les  autres,  en  ce  qu'ils 
étaient  des  jours  de  joie  et  d'actions  de  grâce, 
au  lieu  que  celui  qui  forme  le  sujet  de  cet  article, 
était  un  jour  de  jeûne  et  d'humiliation,  et  le  seul 
de  ce  genre  établi  par  ordre  de  Dieu  (4).  Nous 
devons  en  excepter  cependant  celui  qui  avait  été 
prescrit  aux  Israélites.,  après  leur  idolâtrie  du 
veau  d'or  (<).  Mais  Moïse  ne  dit  point  qu'il  dût 
être  annuel  ;  et  il  ne  fut  observé  annuellement  par 
les  Juifs,  qu'après  leur  retour  de  la  captivité,  qui 
les  avait  rendus  si  religieux,  qu'ils  établirent 
autant  de  fêtes  qu'ils  avaient  commis  de  fautes, 
ou  essuyé  de  malheurs,  de  sorte  qu'ils  remplirent 
presque  la  quatrième  partie  de  leur  calendrier  (6). 

Quelques  auteurs  conjecturent  que  ce  jour 
d'expiation  était  établi  en  mémoire  de  l'idolâtrie 
du  veau  d'or;  mais  il  paraît  plutôt  institué  pour 
expier  les  péchés  de  toute  la  nation,  tant  publics 
que  particulier?,  et  surtout  ceux  de  l'année  pré- 
cédente. C'est  ce  qu'on  peut  inférer  clairement 
du  nom  que  Moïse  lui  donne  (7),  aussi  bien  que 
de  la  confession  des  péchés  et  autres  cérémonies 
remarquables,  qu'il  fallait  observer  ce  jour-là, 
et  dont  nous  allons  parler.  Nous  ne  dirons  rien 
de  la  relation  figurative  que  cette  journée  avait 
avec  la  grande  expiation  qui  devait  être  faite  par 
le  Messie,  parce  que  cette  discussion  est  étran- 
gère à  notre  dessein. 

Ce  jour  commençait,  comme  les  autres  jours 
solennels,  le  soir  du  neuvième  jour  du  septième 
mois,  et  durait  jusqu'au  soir  du  dixième.  Pendant 


(1)  Ibid.  y.  8.  9. 

(2)  Maimon,  Halak.  Schemitah  Veyobel. 
(?)  m.  Rois.  xxi.  pass. 

(4)  Lévit.  xxni.  y.    26.  et  suiv. 
(î)  Exod.  xxiii.  y.  ■;.  et  suiv. 

(6)  Miskn.MégiLlath,Tha'jniih.  per tot.Lamy,Calmet.et al. 

(7)  L'original  appelle  cette  fêta  cmsDn  av  Yomhakki- 
phourim,lc jour  des  expiations,  parce  qu'elle  était  destinée 
à  expier  les  péchés  commis  par  tout  le  peuple  l'année 
précédente;  c'est  ce  qui  fait  que  le  thalmud  la  nomme 
par  excellence  ndv  Yoma,  le  jour,    et  peut-être   aussi  à 


cause  d'une  tradition  reçue  parmi  les  Juifs,  que  ce  fut 
ce  jour-là  qu'Adam  commença  à  se  repentir  de  son 
péché,  et  que  Dieu  le  lui  pardonna  (Rab.  Elea^ar.  in 
Talmud.  Vid.  Abarbanel.  Comment,  in  Levit.  xxiii).  Le 
monde,  et  par  conséquent  nos  premiers  parents,  suivant 
eux,  furent  créés  le  premier  jour  de  ce  mois;  leur 
péché  et  le  châtiment  qu'il  leur  attira  vinrent  immédia- 
tement ensuite,  et  furent  suivis  de  près  de  leur  repentir. 
C'est  ce  qui  a  fait  croire  à  quelques-uns  d'entre  eux  que 
ce  jour  était  établi  en  mémoire  de  la  chute  de  nos  pre- 
miers parents.  Imaginations. 


SUR  L'ORGANISATION   DE    LA   NATION  JUIVE 


î»i 


cet  espace  de  temps,  les  Israélites  étaient  obligés 
de  s'abstenir  de  tout  ce  qu'on  appelle  travail  ou 
plaisir,  et  de  se  mortifier,  sous  peine  d'être  re- 
tranchés d'entre  le  peuple.  Ils  devaient  aussi 
avoir  ce  jour-là  une  convocation  sainte,  confesser 
leurs  péchés,  et  offrir  pour  eux-mêmes  certains 
sacrifices  particuliers  par  le  feu  (i). 

Le  ministère  du  grand  prêtre  avait  alors  quel- 
que chose  de  plus  redoutable  encore  qu'à  l'or- 
dinaire. Il  ne  lui  était  permis  que  dans  cette  cir- 
constance, d'entrer  dans  le  lieu  très  saint,  ce  qui 
lui  était  défendu  en  tout  autre  temps,  sous  peine 
de  mort  (2)  ;  pour  cet  effet,  il  devait  se  préparer 
à  cette  grande  cérémonie,  par  un  ordre  exprès 
de  Dieu,  de  la  manière  suivante  : 

Il  était  obligé  d'abord  de  se  laver,  non  seule- 
ment les  mains  et  les  pieds,  comme  en  d'autres 
temps,  mais  aussi  tout  le  corps.  Le  thalmud 
ajoute  qu'il  devait  s'abstenir  durant  huit  jours  de 
tout  commerce  matrimonial,  et  de  tout  ce  qui 
pouvait  lui  causer  quelque  pollution  accidentelle, 
et  le  rendre  par  là  inhabile  à  s'acquitter  de  sa 
charge  pendant  la  solennité  (j).  En  second  lieu,  il 
ne  se  servait  point  ce  jour-là  de  sa  tiare,  de  son 
pectoral,  ni  de  ses  autres  ornements  pontificaux  ; 
il  ne  devait  porter  qu'un  ceinturon  de  lin,  autour 
d'un  vêtement  de  la  même  étoffe.  Il  était  obligé, 
en  troisième  lieu,  aussitôt  qu'il  entrait  dans  le 
lieu  saint,  d'offrir  un  jeune  taureau  en  sacrifice 
pour  le  péché,  et  un  mouton  en  holocauste,  pour 
lui-même  et  pour  toute  sa  maison.  Après  cela,  il 
recevait  de  quelques  chefs  de  la  congrégation 
deux  chevreaux  et  un  mouton  pour  être  immolés. 
Ensuite  deux  boucs  étaient  amenés  devant  le 
Tabernacle  :  le  grand  prêtre  jetait  le  sort  sur 
eux,  pour  savoir  lequel  des  deux  devait  être  sa- 
crifié, et  lequel  devait  être  renvoyé;  ce  der- 
nier s'appelait  'Azazel.  Le  pontife  entrait  alors 
dans  le  lieu  très  saint,  son  encensoir  dans  une 
main,  et  dans  l'autre  une  grande  quantité  de 
l'encens  le  plus  précieux,  extrêmement  con- 
densé, afin  que  la  fumée  en  pût  tellement 
remplir  le  lieu,  que  le  propitiatoire  fût  par 
ce  moyen  comme  dérobé  aux  regards.  Aussitôt 
qu'il  avait  mis  l'encensoir  sur  l'autel,  il   sortait, 


trempait  les  doigts  dans  le  sang  du  jeune  taureau 
qu'il  avait  immolé  pour  lui-même,  et  faisait  as- 
persion de  ce  sang  par  sept  fois,  au  devant  du 
propitiatoire,  vers  l'orient.  Il  tuait  ensuite  le 
bouc  qui  devait  servir  d'offrande  pour  les  péchés 
du  peuple,  et  arrosait  le  propitiatoire  du  sang  de 
cette  victime,  dans  le  dessein  de  purifier  par  là 
le  Tabernacle  de  la  pollution  qu'il  aurait  pu  con- 
tracter au  milieu  d'un  peuple  coupable.  Pendant 
toute  cette  cérémonie,  c'est-à-dire,  avant  que 
l'expiation  des  péchés  des  prêtres  et  du  peuple 
eût  été  solennellemenl  faite,  il  n'était  permis  à 
personne  de  venir  dans  l'enceinte  du  Tabernacle, 
ni  même  de  ses  parvis. 

Les  aspersions  étant  achevées,  et  les  prêtres, 
aussi  bien  que  le  peuple,  étant  purifiés,  le  bouc, 
qui  devait  être  relâché,  était  mené  au  grand  prê- 
tre, qui  mettait  les  mains  sur  sa  tète,  et  faisait 
confession  de  ses  propres  péchés,  et  de  ceux  de 
tout  le  peuple,  en  ces  termes  :  O  Éternel  !  ton 
peuple,  la  maison  d'Israël,  a  péché  contre  loi  ;  et  à 
présent,  ô  Éternel,  je  te  prie,  pardonne-leur  les 
péchés  par  lesquels  ils  font  offensé,  ainsi  qu'il  est 
écrit  dans  la  loi  de  Ion  serviteur  Moïse  :  en  ce  jour, 
il  fera  expiation  pour  vous,  il  vous  nettoiera,  et 
vous  sere\  purifiés  de  tous  vos  péchés,  en  présence 
de  l'Éternel  (4).  La  confession  étant  finie,  il  re- 
mettait le  bouc  'Azazel  à  un  homme,  choisi  ex- 
près, qui  conduisait  cet  animal  dans  un  lieu  dé- 
sert, et  l'y  remettait  en  liberté,  suivant  quelques 
auteurs  ;  suivant  d'autres,  on  le  jetait  du  haut 
d'un  précipice  escarpé. 

Après  cette  cérémonie,  le  grand  prêtre  se  lavait 
en  entier,  et,  après  avoir  changé  d'habits,  ou,  ce 
qui  paraît  plus  vraisemblable,  après  avoir  pris 
l'éphod,  la  tiare,  le  pectoral,  et  les  autres  orne- 
ments sacerdotaux,  il  offrait  un  holocauste  de 
deux  moutons,  l'un  pour  lui-même,  et  l'autre  pour 
le  peuple.  Celui  qui  avait  conduit  le  bouc,  était 
considéré  comme  souillé,  jusqu'à  ce  qu'il  se  fût 
baigné  et  qu'il  eût  lavé  ses  habits.  La  même  obli- 
gation était  imposée  à  ceux  qui  emportaient  la 
chair,  les  entrailles,  et  le  sang  du  jeune  taureau, 
ainsi  que  le  bouc  offert  en  sacrifice  expiatoire,  pour 
être  brûlés  hors  du  camp  (5). 


(1)  Liv'd.  xxiii.  f.  27  et  suiv.  —  (1)  Ibid.  xvi.  f.  2. 

(?)  Pnvc.  affirm.  209. 

(4)  Lèvit.  xvi.  f.  30.  Il  devait  aussi  faire  quelque  autre 
confession  pareille,  quand  il  offrait  le  jeune  taureau  pour 
lui-même  et  pour  sa  famille,  avant  d'oser  entrer  dans  le 
lieu  très  saint  :  toute  la  différence  qu'il  y  avait  entre 
ces  deux  confessions,  c'est  qu'au  lieu  de  la  maison 
d'Israël,  il  faisait  mention  de  celle  d'Aaron.  Cette  con- 
fession se  trouve  dans  la  Mishnah. 

D'après  les  cérémonies  qu'il  devait  accomplir,  il  paraît 
que  le  grand  prêtre  était  obligé  d'entrer  quatre  fois  dans 
le  lieu  très  saint.  i°  Pour  allumer  l'encens;  car  il  y  entrait 


les  deux  mains  pleines  d'encens  (Lcvit.  xvi.  f.  12.  15). 
20  Pour  y  porter  une  partie  du  sang  du  jeune  taureau 
offert  pour  lui-même  {Ibid.  f.  14).  ?°  Pour  y  porter  une 
partie  de  celui  qui  était  offert  pour  le  peuple  (verset  15). 
4°  Pour  en  emporter  l'encensoir  et  le  feu.  Le  thalmud 
ajoute  qu'il  aurait  payé  de  la  vie  la  témérité  d'y  entrer 
pour  la  cinquième  fois.  Ainsi,  lorsque  l'Apôtre  dit  qu'il 
y  rentrait  une  fois  par  an  (Hebr.  îx.  f.  7;,  il  est  clair 
qu'il  a  suivi  la  version  de!  Septante,  qui  rendent  les  mots 
n;-ù;3  inN,  A'had  beshanah,  par  txr.aÇ  toù  iyiauxoû  au  lieu 
qu'il  aurait  fallu  traduire  un  jour  en  un  an. 
(5)  Lcvit.  xvt.  f.  2ù.  27.  28.  V.  Fag.  in  toc.  Hotiing.  et  al. 


3«2 


COUP    D'ŒIL  RETROSPECTIF 


Le  même  jour,  le  grand  prêtre  donnait  au  peu- 
ple la  bénédiction  solennelle  prescrite  par 
Moïse  (i),  et  prononçait  l'ineffable  nom  de  Dieu; 
car,  suivant  les  Juifs  (2),  la  prononciation  de  ce 
nom  était  défendue  en  toute  autre  occasion, 
comme  une  espèce  de  blasphème  (3).  Quoi  qu'il 
en  soit  à  cet  égard,  la  prononciation  de  ce  nom 
formidable,  jointe  à  ce  que  le  lieu  même  avait  de 
respectable,  devait  naturellement  exciter  des  sen- 
timents de  crainte  dans  l'àme  du  grand  prêtre, 
qui  sortait  de  ce  lieu  redoutable  le  plus  tôt  qu'il 
pouvait,  de  peur  d'être  frappé  de  mort  pour  quel- 
que inadvertance  commise  pendant  le  peu  de  sé- 
jour qu'il  y  faisait  (4). 

Toutes  ces  cérémonies  devaient  prendre  un 
temps  assez  considérable  :  le  reste  du  jour  était  em- 
ployé en  prières  et  en  autres  œuvres  de  mortifica- 
tion. Les  Juifs  craignaient  si  fort  de  l'abréger, qu'ils 
le  commençaient  une  demi-heure  plus  tôt,  et  le 
finissaient  une  demi-  heure  plus  tard  que  les  autres 
jours  de  fête  ;  mais  la  trompette  indiquait  tou- 
jours que  la  solennité  était  expirée.  Dès  qu'ils  en 
avaient  entendu  le  son,  ils  s'habillaient  de  blanc, 
ou  du  moins  changeaient  de  linge,  et  n'attendaient 
pas  longtemps  à  rompre  leur  jeune.  Le  repas 
qu'ils  faisaient  en  cette  occasion,  était  ordinaire- 
ment somptueux  et  accompagné  de  sentimen's  de 
joie  de  ce  que  leurs  péchés  étaient  expiés.  Mais 
celui  qui  témoignait  le  plus  de  satisfaction,  était 
le  grand  prêtre,  qui  avait  rempli  l'emploi  solennel 
et  dangereux  de  cette  grande  journée,  et  qui  était 
sorti  du  lieu  très  saint  (5). 

Lois  concernant  les  expiations. 

Avant  de  quitter  la  matière  des  expiations,  il 
nous  parait  nécessaire  de  dire  un  mot  de  quelques 
autres,  qui  étaient  prescrites  par  Moïse,  pour 
servir  de  remèdes  à  certaines  fautes  commises  à 
dessein,  ou  par  ignorance,  et  à  des  souillures 
légales,  comme  celle  d'une  femme  après  ses  cou- 
ches, ou  d'un  homme  qui  aurait  touché  un  cada- 
vre, un  lépreux,  etc.  Dans  ces  sortes  de  cas,  on 
contractait  une  souillure,  dont  on  ne  pouvait  être 


purifié,  qu'en  offrant  les  sacrifices  ordonnés  par  la 
loi  (6)  ;  et  cette  purification  devait  se  faire  de  la 
manière  suivante: 

La  personne  qui  avait  commis  une  faute  volon- 
tairement ou  par  ignorance,  devait  amener  à  la 
porte  du  Tabernacle  une  victime,  qui  était  un 
jeune  taureau,  ou  un  bouc,  si  c'était  pour  un  prê- 
tre; et  un  bouc,  un  mouton,  un  chevreau,  ou  un 
agneau,  si  c'était  pour  un  laïque  :  si  la  personne 
était  trop  pauvre  pour  offrir  quelque  victime  pa- 
reille, deux  pigeons,  ou  même  un  peu  de  fleur  de 
farine,  pouvaient  être  substitués  à  la  place.  Un 
ou  plusieurs  de  ces  animaux,  suivant  la  nature  de 
la  faute  et  les  facultés  du  coupable,  étaient  ame- 
nés au  sacrificateur  ;  la  personne  qui  devait  être 
purifiée  amenait  sa  victime,  et,  après  avoir  con- 
fessé son  péché  et  mis  ses  mains  sur  la  tête  de 
l'animal,  le  tuait  et  l'offrait.  Le  sacrificateur  en 
prenait  ensuite  un  peu  de  sang  avec  ses  doigts,  et 
l'appliquait  aux  cornes  de  l'autel  des  holocaustes 
et  versait  le  reste  au  pied  de  cet  autel.  Après 
quelques  autres  cérémonies,  et  une  prière  adres- 
sée à  Dieu  en  faveur  du  coupable,  il  le  prononçait 
absous  de  son  péché.  La  chair  d'une  victime, 
ainsi  offerte,  appartenait  au  sacrificateur  seul,  et 
personne  n'avait  droit  d'en  manger   que    lui    (7). 

Cette  cérémonie  se  faisait  avec  plus  de  solen- 
nité, quand  le  roi,  le  grand  prêtre,  ou  tout  le 
peuple,  avaient  commis  quelque  faute  ;  mais,  au 
fond,  c'était  à  peu  près  la  même  chose. 

Par  rapport  aux  pollutions  légales,  on  ne  pou- 
vait en  être  purifié  sans  les  cendres  d'une  jeune 
vache  rousse.  Voici  de  quelle  manière  on  s'y  pre- 
nait pour  tuer  et  pour  brûler  cette  vache  (8).  Le 
grand  prêtre  devait  prendre  garde  qu'elle  n'eût  ni 
tache,  ni  défaut,  et  que  jamais  elle  n'eût  porté  de 
joug.  Le  sacrificateur  devait  la  mener  hors  du 
camp,  la  tuer  en  cet  endroit,  et  faire  avec  ses 
doigts  sept  fois  aspersion  du  sang  vers  le  sanc- 
tuaire ;  après  quoi  on  jetait,  en  présence  du  peu- 
ple, la  victime  avec  sa  peau  et  ses  entrailles,  et 
une  certaine  quantité  de  bois  de  cèdre,  d'hysope, 
et  de  l'étoffe  écarlate,  dans  un  grand  feu,  où  le 
tout  était  réduit  en  cendres.  Ces  cendres  étaient 


(1)  Ncmb.  vi.  f.  t\.  et  suiv 

(2)  Pliilon.  Vie  de  Moïse,  lib.  m.-  Joseph.  Thalmud   et  al. 
(j)  Liait,  xxiv.  y.  10.  et  suiv. 

(4)  Il  sortait  à  reculons,  ayant  le  visage  tourné  du  côté 
du  propitiatoire  et  la  tète  baissée  vers  la  terre. 

(<,)  Mislinah.  Tract.  Ynma'h.  -  Maïmon.  Tract'.  Yen. 
Hakephur.  -  Mcver.  c.  xv.  s  9.  Les  Juifs  ajoutent  plusieurs 
autres  particularités  relatives  à  ce  jour,  que  nous  n'ose- 
rions assurer  avoir  été  en  usage  pendant  que  le  premier 
temple  a  subsisté  ;  ils  disent  que  le  bouc  'A\a^el  était 
escorté  pendant  tout  le  chemin  par  des  prêtres  et  des 
laïques  jusqu'à  l'endroit  marqué.  Entre  le  temple  et  cet 
endroit,  il  y  avait  une  chaussée  faite  exprès,  et  à  dix 
étages  de  hauteur  :  aussitôt  que  le  bouc  était  jeté  du 
haut  en    bas    du    précipice,  et   brisé  par   la  chute,    le 


peuple,  qui  attendait  impatiemment  cette  nouvelle,  en 
était  aussitôt  averti  par  certains  signaux. 

(oj  II  ne  nous  parait  pas  nécessaire  d'observer  ici  que, 
dans  le  langage  de  l'Ancien  Testament,  toutes  les  trans- 
gressions, avant  d'être  expiées,  étaient  comparées  à  une 
souillure  contractée  par  le  transgresseur.  Par  la  même 
raison,  le  pardon  qui  accompagne  l'expiation  y  est  repré- 
senté comme  une  ablution  ou  purification.  Voilà  pourquoi 
les  Septante  ont  rendu  les  mots  isio  et  1B3  koplier, 
kaphar,  comme  aussi  ceux  de  "înis  et  mon  tahar,  'hatah, 
quand  ces  derniers  expriment  un  pardon,  par  ceux  de 
xa(Jao'.<jr.io;  et  de  jtafioept'Çstv  ;  et  c'est  dans  le  même  sens 
que  les  écrivains  du  Nouveau  Testamentassurent  que  le 
sang  de  Jésus-Christ  nous  purifie  de  nos  péchés. 

(7)  Lévit.  iv.  v.  vi.  pass.  —  (8)  Nomb.  xix. 


SUR  L'ORGANISATION    DE    LA   NATION  JUIVE 


583 


ensuite  rassemblées  et  conservées  avec  soin,  et 
tous  ceux  qui  avaient  prêté  la  main  à  cette  céré- 
monie, étaient  censés  impurs  jusqu'au  soir. 

Toutes  les  fois  qu'un  homme  contractait  une 
souillure  qui  le  rendait  impur  pendant  sept  jours, 
on  faisait  aspersion  sur  lui,  le  troisième  et  le  sep- 
tième jour,  de  l'eau  dans  laquelle  avait  été  mise 
une  partie  des  cendres  ;  et,  par  ce  moyen,  il 
était  purifié.  S'il  négligeait  cette  aspersion  le  troi- 
sième jour,  il  ne  pouvait  être  purifié  que  le 
dixième. 

Cette  loi  était  si  sévère  contre  ceux  qui  s'étaient 
souillés  par  l'attouchement  d'un  corps  mort,  ou 
en  entrant  dans  une  tente  ou  dans  un  apparte- 
ment où  il  y  avait  quelque  cadavre,  que,  s'ils 
osaient  paraître  devant  le  Tabernacle,  avant 
d'avoir  été  purifiés,  ils  étaient  retranchés  du  peu- 
ple, comme  ayant  souillé  le  sanctuaire.  Les  vases 
qui  se  trouvaient  dans  l'endroit  sansètre couverts, 
aussi  bien  que  l'endroit  même  où  avait  été  le 
corps,  étaient  pareillement  souillés,  jusqu'à  ce 
qu'ils  fussent  arrosés  par  les  eaux  de  séparation, 
comme  lé  texte  les  appelle. 

Les  exégètes  ne  sont  pas  d'accord  entr'eux  sur 
le  nombre  de  fois  que  cette  grande  cérémonie  a 
été  répétée,  depuis  le  temps  de  Moïse  jusqu'à 
celui  de  la  captivité. Quelques-uns  prétendent  que 
la  jeune  vache  rousse  qui  fut  brûlée  par  Éléazar, 
fils  d'Aaron,  lournit  des  cendres  durant  tout  cet 
espace  ;  d'autres  assurent  qu'on  en  brûlait  une 
chaque  année,  et  qu'on  envoyait  une  partie  des 
cendres  à  chaque  ville  et  à  chaque  bourgade  d'Is- 
raël (1). 

Les  exégètes,  tant  juifs  que  chrétiens,  sont 
aussi  divisés  sur  la  question  de  savoir  si  ce  sacri- 
fice doit  être  rangé,  ou  non,  dans  la  classe  des  ho- 
locaustes qu'on  offrait  pour  toute  la  nation. Mais, 
sans  entrer  dans  cette  discussion,  il  est  certain 
que  l'auteur  de  Tépître  aux  Hébreux  considérait 
cette  vache  comme  une  figure  de  Jésus-Christ, 
qui,  pour  cette  raison,  souffrit  hors  des  portes  de 
la  ville,  comme  la  victime  dont  nous  parlons  fut 
brûlée  hors  du  camp  (2).  Son  sang  est  bien  plus 
efficace  pour  purifier  les  hommes  de  leurs 
péchés,  que  celui  des  taureaux  et  des  boucs,  que 
les  cendres  d'une  vache,  en  un  mot,  que  tous  les 
sacrifices  lévitiques. 

Lois  concernant  quelques  autres  sacrifices  et  obla- 
lions,  dont  il  nest  pas  fait  mention  dans  les  ar- 
ticles précédents. 

Les  sacrifices  et  les  oblations  dont  il  nous  reste 
encore  à  parler,  sont:  i°  le  sacrifice  journalier; 


2°  les  sacrifices  pacifiques  ;  yu  les  offrandes  de 
vin,  d'huile  et  de  fleur  de  farine  ;  40  les  offrandes 
de  purification  ;  ç°  les  prémices  des  fruits  de  la 
terre  ;  6°  les  premiers-nés  et  ~°  les  dîmes. 

Outre  ces  sacrifices,  il  y  en  avait  d'autres  oc- 
casionnels, dont  les  uns  étaient  ordonnée  par  des 
prophètes,  comme  ceux  qui  furent  prescrits  par 
Samuel  (3)  et  par  Élie  (4),  et  les  autres  en  usage 
dans  certaines  familles.  Ces  derniers  étaient  plu- 
tôt des  fêtes  que  des  sacrifices,  si  on  en  juge  par 
le  prétexte  que  David  allégua  pour  ne  point  se 
trouver  à  la  table  de  Saùl  (',),  et  par  plusieurs 
autres  exemples  dont  il  est  inutile  de  faire  l'énu- 
mération. 

i°  Le  sacrifice  journalier,  ou,  comme  il  y  a  dans 
l'original,  le  sacrifice  continuel,  consistait  avant 
toutes  choses,  à  brûler  une  certaine  quantité 
d'encens  sur  l'autel  d'or,  après  quoi  on  offrait 
deux  agneaux  d'un  an,  et  sans  défaut,  comme  un 
holocauste  perpétuel  pour  toute  la  nation.  Ces 
holocaustes  étaient  brûlés,  le  matin  et  le  soir,avec 
un  feu  moins  violent  qu'à  l'ordinaire,  afin  de  faire 
durer  davantage  la  cérémonie.  On  offrait  pa- 
reillement une  certaine  quantité  de  vin  et  de  fleur 
de  farine  mêlée  avec  de  l'huile.  Ce  sacrifice  avait 
été  prescrit  par  Dieu  lui-même  sur  la  montagne 
du  Sinaï  (6)  ;  il  est  appelé  continuel,  parce  que 
l'oblation  n'en  pouvait  être  interrompue  par  au- 
cune autre  solennité,  comme  nous  l'avons  vu  dans 
l'article  de  chaque  fête  en  particulier. 

20  Les  sacrifices  pacifiques  étaient  destinés  à 
remercier  Dieu  des  faveurs  qu'il  avait  accordées, 
ou  à  solliciter  de  nouvelles  grâces,  ou  simplement 
à  honorer  Dieu,  ou  enfin  à  s'acquitter  de  quelque 
vœu.  Tous  ces  sacrifices  étaient  volontaires  ;  au- 
cune loi  n'y  obligeait  les  Israélites,  à  l'exception 
de  celle  qui  dit  qu'ils  ne  comparaîtraient  point  les 
mains  vides  devant  l' Éternel,  mais  qu'ils  témoigne- 
raient leur  générosité  par  ces  sortes  de  sacrifices,  à 
proportion  que  Dieu  les  aurait  bénis. 

Il  dépendait  aussi  d'eux  d'offrir  les  animaux 
qu'ils  voulaient,  sans  distinction  d'âge  ni  de  sexe, 
pourvu  qu'ils  fussent  purs  et  exempts  de  défauts. 
Celui  qui  offrait  le  sacrifice,  devait  amener  la 
victime  à  la  porte  du  Tabernacle, mettre  les  mains 
sur  sa  tète,  et  la  tuer.  Le  prêtre  prenait  alors  une 
partie  du  sang,  en  répandait  sur  l'autel  et  tout 
autour,  et  versait  le  reste  au  pied  de  l'autel. 
Toute  la  graisse  de  la  victime  et  les  rognons  étaient 
brûlés  sur  l'autel.  La  poitrine  et  l'épaule  de  la 
victime  appartenaient  au  prêtre  qui  avait  officié, 
et  le  reste  au  propriétaire,  qui  pouvait  en  faire  un 
repas  avec  qui  il  lui  plaisait,  comme  s'il  avait  tué 
l'animal  dans  sa  propre  maison  (7). 


(1)  S.  Jérôme,  lett.  xxvii. 

(2)  Hebr.  xin.  fi.  11.  12. 

(-?)  1.  Rois.  îx.  p.  ij;  xii.  fi.  9;  xvi.  fi.  2.  et  suiv. 


(4)  m.  Rois.  xvin.  fi.  50.  et  suiv.—  (5)  1.  Rois.  xx.  fi.  29, 

(6)  Exod.  xxix.  fi.  jb.  -  Nombr.  xxvin.  fi.  û.  et  suiv. 

(7)  Lèfit.  111.  pass. 


COUP   D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


3°  Nous  avons  déjà  eu  occasion  de  parler  des 
offrandes  de  fleur  de  farine,  de  vin  et  d'huile, 
parce  qu'elles  accompagnaient  toujours  les  holo- 
caustes de  chaque  fête,  les  sacrifices  journaliers, 
et  tous  les  autres  sacrifices  faits  par  le  feu.  Ces 
offrandes  étaient  proportionnées  à  la  victime  à  la- 
quelle elles  servaient  d'accompagnement  fi). Ou- 
tre ces  offrandes,  il  y  en  avait  quelques  autres  de 
même  nature, qui  devaient  être  faites  par  des  pau- 
vres hors  d'état  de  donner  davantage. 

4"  Nous  avons  parlé  de  quelques-unes  des  of- 
frandes de  purification,  dans  l'article  des  expia- 
tions. Mais  nous  devons  dire  un  mot  :  r  de  celle 
de  deux  pigeons  qu'une  femme  relevée  de  cou- 
ches devait  offrir  pour  sa  purification,  dans  le  cas 
où  elle  ne  pourrait  point  fournir  un  agneau  :  si  sa 
pauvreté  la  mettait  hors  d'état  de  donner  deux 
pigeons,  elle  pouvait  y  suppléer  par  un  peu  de 
fleur  de  farine  et  d'huile  (2);  et  2°  de  celle  de  deux 
passereaux,  que  le  lépreux  offrait  après  sa  guéri- 
son,  pour  sa  propre  purification  (]),  et  pour  celle 
de  sa  maison  (4). 

Dans  les  deux  cas,  l'un  des  oiseaux  tenait  lieu 
de  l'agneau  qui  devait  être  présenté  en  holo- 
causte, et  l'autre  de  sacrifice  expiatoire.  Le  pre- 
mier oiseau  devait  être  tué  dans  un  vase  de  terre, 
au-dessus  d'une  eau  vive  ;  après  quoi  le  prêtre 
prenait  l'autre,  le  trempait  avec  un  peu  de  bois  de 
cèdre,  d'écarlate  et  d'hysope,  dans  le  sang  de 
celui  qui  avait  été  immolé.  Du  tout  ainsi  mouillé, 
il  faisait  sept  fois  aspersion  sur  la  personne  ou  sur 
la  maison  souillée,  et  les  déclarait  ensuite  nettes 
et  pures,  en  permettant  au  passereau  vivant  de 
s'envoler. 

La  personne  souillée  était  aussi  tenue  d'ajouter 
une  certaine  quantité  de  fleur  de  farine  et  d'huile, 
dont  on  faisait  des  gâteaux  qui  devaient  être  of- 
ferts à  Dieu.  Quelques-uns  de  ces  gâteaux  étaient 
faits  d'orge,  d'autres  de  rieur  de  froment;  d'autres 
étaient  pétris  avec  du  levain,  et  par  conséquent  ne 
pouvaient  pas  approcher  de  l'autel  (s);  mais  tous 
avaient  plus  ou  moins  de  sel.  Les  uns  étaient 
offerts  volontairement,  et  d'autres  pouvaient  ne 
pas  l'être  ;  les  uns  préparés  d'une  manière,  et  les 
autres  d'une  autre. 

11  nous  reste  à  parler  des  pains  de  proposition, 
qui  sont  appelés  dans  l'original  les  pains  de  la  face, 
parce  qu'ils  devaient  toujours  être  devant  l'Éter- 
nel sur  la  table  d'or  dans  le  lieu  saint.  Ils  devaient 
être  faits  du  froment  le  plus  pur,  au  nombre  de 
douze,  un  pour  chacune  des  douze  tribus  d'Israël 


Les  prêtres  étaient  obligés  d'avoir  soin  d'en  ap- 
porter de  frais,  encore  chauds,  le  matin  de  chaque 
jour  de  sabbat,  emportant  en  même  temps  les 
vieux,  qui  ne  pouvaient  être  mangés  que  par  eux. 
On  en  formait  deux  rangs,  chacun  de  six  l'un  sur 
l'autre. 

Les  Juifs  assurent  qu'il  y  avait  de  doubles  pla- 
tines d'or  entre  chaque  pain,  pour  les  empêcher 
de  moisir.  Cette  offrande  était  accompagnée  d'en- 
cens, dont  les  pains,  auxquels  il  n'était  pas  per- 
mis de  mettre  le  moindre  levain,  devaient  être 
parfumés.  Quelques  commentateurs  prétendent 
qu'une  certaine  quantité  de  vin  devait  être  offerte 
avec  les  pains  ;  mais  le  texte  ne  fait  mention  que 
d'encens  et  de  sel  (6).  Ces  pains  étaient  appelés 
sacrés,  par  opposition  aux  autres  pains,  dont  il 
était  permis  à  tout  le  monde  de  manger  (7). 

s.  Nous  avons  déjà  parlé  des  prémices  qu'on 
offrait  à  la  Pâque,  à  la  Pentecôte,  et  à  la  fête  des 
Tabernacles,  au  nom  de  toute  la  nation  ;  mais 
chaque  particulier  était  de  plus  obligé  d'apporter 
les  premiers  fruits  de  ses  champs,  de  ses  vergers 
et  de  ses  vignes  au  Tabernacle,  et  dans  la  suite 
au  temple,  comme  un  aveu  que  c'étaient  des  pré- 
sents de  la  libéralité  de  Dieu. 

Comme  la  loi  ne  prescrivait  ni  le  temps  ni  la 
quantité,  le  peuple  choisissait  le  temps  qui  lui  était 
le  plus  commode,  et  les  lévites  fixaient  la  quantité, 
de  manière  cependant  que  chacun  était  libre  de 
donner  plus  ou  moins.  Ainsi,  quoiqu'on  fût  con- 
venu en  quelque  sorte  qu'on  n'était  obligé  d'offrir 
que  la  soixantième  partie  de  ce  qu'on  pouvait  se 
flatter  de  recueillir,  quelques-uns  en  offraient  la 
cinquantième,  et  d'autres  même  la  quarantième 
partie  (8).  Après  la  construction  du  temple,  les 
Juifs  furent  obligés  d'y  apporter  leurs  prémices, 
et  cette  cérémonie  se  faisait  de  la  manière  sui- 
vante : 

Aussitôt  que  celui  qui  venait  les  offrir  était  par- 
venu au  parvis  des  prêtres,  les  lévites  entonnaient 
le  psaume  xxxi,  après  lequel  la  personne  faisait 
cette  confession  :  Je  déclare  aujourd'hui  à  l'Éter- 
nel ton  Dieu,  que  je  suis  parvenu  au  pays  que 
l Éternel  a  juré  à  nos  pères  de  nous  donner.  Pen- 
dant qu'il  prononçait  ces  paroles,  un  des  prêtres 
lui  aidait  à  ôter  la  corbeille  de  dessus  ses  épaules; 
et  tous  deux  soutenant  cette  corbeille,  il  termi- 
nait sa  confession  par  ces  mémorables  paroles  (9): 
Mon  père  a  été  un  misérable  S/rien,  et  il  est  des- 
cendu en  Egypte  avec  un  petit  nombre  de  gens,  et 
il  y  a  séjourné,  et  il  est  devenu  une  grande  nation, 


(I)  Nombr.  xxvm.  pass.  —  (2)  Lé  vit.  xn. 

(?)  Ibid.  xiv.  f.  4.  et  suiv. 

(4/  Ibid.  y.  49.  et  suiv. 

(S)  Ibid.  11.  jk  II. 

(ûj  Exod.  xxv.  j}-.  jo.  -  Lépit,  xxiv.  %.   5.  et  suiv. 


(7)  t.  Rois.  xxi.  f.  ;.  4. 

(8)  V.  Miskn.    Tract.  Thercumah.  et  Bikkourim,  et  Corn- 
ment,    et  Maïm.  in  toc. 

(9)  Deut.  xxvi.  f.4.  et  suiv.  -  V.  Munst.   Jun   et  al.   in 
Lcvit.  xxii.  et  xxiii.  et  Deut.  xxvi. 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA  NATION  JUIVE 


385 


forle  et  nombreuse  :  puis  les  Égyptiens  nous  ont 
maltraités  et  nous  ont  affligés,  et  ils  ont  imposé  sur 
nous  une  dure  servitude.  El  quand  nous  avons  crié 
à  l'Éternel  le  Dieu  de  nos  pères,  il  a  exaucé  nos 
prières,  et  a  regardé  noire  affliction,  noire  travail 
et  notre  oppression.  El  l'Éternel  nous  a  lires  hors 
d'Ég/pte  avec  un  grand  effroi,  et  avec  des  signes 
et  des  miracles.  El  de  puis, il  nous  a  amenés  en  ce  lieu, 
el  il  nous  a  donné  ce  pays  qui  découle  de  lait  et 
de  miel.  Maintenant  donc,  voici  que  j'ai  apporté 
les  prémices  des  fruits  de  la  terre  que  l'Éternel 
m'a  donnée. 

Après  cela,  la  corbeille  était  posée  devant 
l'Éternel  à  côté  de  l'autel  ;  et  celui  qui  avait  pro- 
noncé les  paroles  qu'on  vient  de  lire,  offrait 
l'holocauste  et  le  sacrifice  pacifique,  qui  devaient 
toujours  accompagner  les  prémices.  Ensuite,  il  lui 
était  permis  d'aller  manger  avec  ses  amis  sa  portion 
du  sacrifice,  pourvu  qu'il  en  fît  part  à  quelques 
lévites,  à  des  veuves  ou  des  orphelins.  Et  c'est  ce 
qui  était  d'autant  plus  aisé  aux  riches,  qu'il  leur 
était  défendu  de  laisser  jusqu'au  lendemain,  des 
restes  du  jeune  taureau  qu'ils   avaient  offert  (1). 

Nous  pouvons  ranger  dans  la  même  classe  le 
gâteau  qui  servait  de  prémice  à  chaque  morceau 
de  pâte,  dont  une  portion  devait  être  mise  à  part, 
et  donnée  aux  lévites  (2),  afin  de  sanctifier  le 
reste.  Comme  Moïse  n'en  avait  point  déterminé  la 
quantité,  elle  fut  laissée  à  la  discrétion  de  chaque 
père  ou  mère  de  famille,  jusqu'à  ce  que  les  rab- 
bins assignèrent  la  vingt-quatrième  partie  de  la 
pâte  qui  était  pétrie  pour  chaque  maison,  et  la 
quarante-huitième  de  celle  qui  devait  être  exposée 
en  vente  (3). 

6.  Nous   avons  indiqué,   en  sixième  lieu,   les 


premiers-nés.  La  loi  de  Moïse  les  partageait  en 
trois  classes  :  les  premiers-nés  des  hommes,  ceux 
des  animaux,  et  les  prémices  des  productions  de 
la  terré  (4).  Les  premiers-nés  des  hommes  étaient 
de  droit  consacrés  à  Dieu,  mais  leurs  parents  les 
rachetaient  moyennant  une  légère  somme  d'argent. 
Nous  observerons  donc  seulement  ici,  que  le  mot 
de  premier-né  des  hommes  ne  doit  point  être  res- 
treint au  fils  aîné  :  car  il  pourrait  être  l'aîné,  et 
cependant  n'être  pas  le  premier-né.  C'est  pour- 
quoi Moïse  ajoute  l'épithète  d'ouvrant  la  matrice  : 
d'où  il  suit  que  chez  les  Juifs,  auxquels  la  poly- 
gamie était  permise,  un  seul  et  même  homme 
pouvait  avoir  plusieurs  premiers-nés,  chacun  des- 
quels était  racheté  pour  cinq  sicles  aussitôt  qu'il 
avait  trente  jours.  On.  les  présentait  alors  au 
prêtre,  et  ia  mère  offrait  en  même  temps  le  sacri- 
fice de  sa  purification,  dont  nous  avons  fait  men- 
tion ;  et  ce  n'était  qu'après  que  le  prix  du  rachat 
de  l'enfant  avait  été  payé,  qu'il  commençait  à 
appartenir  à  ses  parents  ($). 

Les  premiers-nés  des  animaux  purs,  comme 
veaux,  agneaux,  chevreaux  et  autres,  étaient  aussi 
consacrés  à  Dieu  ;  mais  avec  cette  différence,  qu'ils 
ne  pouvaient  pas  être  rachetés,  mais  devaient 
être  amenés  au  Tabernacle,  et  dans  la  suite  du 
temps  au  temple,  pour  y  être  tués.  Le  sang  de 
ces  victimes  était  versé  au  pied  de  l'autel,  la 
graisse  en  était  brû'lée,  et  la  chair  en  appartenait 
au  sacrificateur,  avec  cette  restriction  néanmoins, 
que  si  l'animal  avait  quelque  défaut  naturel, 
comme  d'être  aveugle  ou  privé  de  quelque  mem- 
bre, etc. . .  il  ne  devait  point  être  sacrifié.  Le  prêtre, 
en  ce  cas,  le  menait  chez  lui,  l'y  tuait,  et  en  faisait 
un  repas,  auquel  il  lui  était  permis  d'inviter  qui  il 


(1)  Lèvit.  vu  f.  15.  et  alib. 

(2)  Nomb.  xv.  f.  19  et  suiv. 

(j)  V.  Mish.  Tract.  'Hallali,  c.  1.  Les  Juifs  portaient  si 
loin  le  scrupule  à  cet  égard  que,  quand  ils  ne  pouvaient 
trouver  ni  prêtres,  ni  lévites,  ils  jetaient  la  portion  dont 
il  s'agit  dans  le  four  et  la  réduisaient  en  cendres,  avant 
d'y  mettre  le  pain  (Mishn.  Tract.  'Hallali.  -  Philo  de 
Prcem.  Sacerd.  -  Hicron.  in  cap.  xlv.  E^ech.  -  Maïm.  Léo 
de  Moden.  et  al).  C'était-là  une  des  trois  choses  qui 
étaient  confiées  au  soin  des  femmes  ;  elles  devaient 
prononcer  un  certain  formulaire  de  bénédiction  dans  le 
temps  qu'elles  séparaient  de  la  pâte  la  portion  sacrée, 
et  cette  obligation,  disent  les  rabbins,  s'étendait  au  pain 
fait  de  froment,  de  seigle,  d'orge  ou  d'avoine. 

(4)  Le  mol  ■'.13; ,  becor,  que  nous  avons  rendu  par  pre- 
mier-né, signifie  proprement  ce  qu'il  y  a  de  principal 
dans  une  chose  ou  créature,  tant  dans  un  bon  que  dans 
un  mauvais  sens.  C'est  ainsi  que  Dieu  s'exprime,  parlant 
de  David  :  Je  ferai  de  lui  mon  premier-né,  plus  élevé  que 
les  rois  de  la  terre  (Psalin.  lxxxviii,  y.  28;;  le  mot  de  pre- 
mier-né est  certainement  pris  dans  un  sens  métaphorique. 
D'un  autre  côté,  une  mort  très  cruelle  est  appelée  dans 
Job  ma  1133,  becor-maveth,  le  premier-né  de  la  mort 
(Job.  xvin.  f.  ij),  et  Isaie  nomme  les  plus  pauvres,  ou 
plutôt  les  plus  faibles  de  tous,  33'bi  ni33  ,  becorè-dallim, 
les  premiers-nés  des  faibles  (Isaie.   xiv.  f.  jo).  Il  est,  par 

S.   B.  —  T.  XII. 


conséquent,  probable  que  ce  mot  était  appliqué  dans 
un  sens  figuré  aux  premiers-nés,  pour  désigner  leur 
excellence  en  force  et  en  dignité,  conformément  à 
l'expression  de  Jacob,  relativement  à  Ruben,  son  fils 
aîné  (Gènes,  xlix.  f.  j). 

(;)  Exod.  xiii.  f.  2.-Nombr.  xvm.  y.  15  el  alib.  En  consé- 
quence de  cette  loi,  la  Vierge  Marie  rachela  son  fils 
Jésus  (Luc.  11.  22.  2?;.  Cependant  on  a  beaucoup  disputé 
s'il  était  sujet  ou  non  à  cette  loi,  quoiqu'il  ait  été  incon- 
testablement le  premier-né  de  sa  mère.  11  y  en  a  qui 
prétendent  qu'il  ne  l'était  pas,  parce  qu'il  ne  rompit  pas 
le  sceau  de  la  virginité  de  sa  mère  (Cm/.  Hierosol.  H  omit, 
de  Occurs.  Domin).  D'autres,  croyant  que  chaque  mâle 
ouvrant  la  matrice  est  équivalant  à  chaque  premier-né, 
soutiennent  que  Jésus-Christ  devait  être  racheté  (Cornet, 
à  Lapid.  in  Exod.  xm,  et  Auct.  ab  eo  citai  j.  Mais  quel- 
ques pères  ont  poussé  encore  plus  loin  cette  idée,  et 
ont  affirmé  qu'à  la  rigueur,  la  loi  dont  il  s'agit  était 
uniquement  applicable  à  notre  Sauveur,  qui,  à  propre- 
ment parler,  est  le  seul  enfant  mâle  qui  ait  ouvert  la 
matrice  de  sa  mère,  les  autres  femmes  ayant  la  matrice 
ouverte  dans  le  temps  même  qu'elles  conçoivent.  Ce  rai- 
sonnement leur  a  fait  conclure  que  cette  loi  était  entiè- 
rement figurative  par  rapport  à  Jésus-Christ.  (Origen. 
Terlul.Ambros.elal.  ap.  Calm.  Diction. sub.i>oc.Premier~nû). 


2i 


j  86 


COUP  D'ŒIL   RETROSPECTIF 


voulait.  Si  la  bête  était  impure,  comme  un  âne,  un 
chien,  etc.,  le  propriétaire  était  libre  de  la  racheter 
en  substituant  à  la  place  un  agneau,  ou  en  payant 
cinq  sicles,  ou  la  mettait  à  mort  (i). 

Quant  aux  premières  productions  des  arbres, 
il  faut  remarquer  que  chaque  arbre  nouvellement 
planté  était  censé  incirconcis  et  impur  pendant 
les  trois  premières  années  ;  il  n'était  pas  permis 
d'en  cueillir,  bien  moins  encore  d'en  manger  le 
fruit.  Tout  ce  que  l'arbre  produisait  la  quatrième 
année  appartenait  à  l'Éternel,  et  était  par  cela 
même  donné  aux  prêtres,  dont  cependant  il  était 
permis  de  le  racheter, en  donnant  l'équivalent  (2). 
Mais  ce  temps  expiré,  le  propriéraire  pouvait  en 
disposer  comme  de  ses  vieux  arbres  (5). 

7.  Les  dîmes  jointes  aux  prémices  et  à  ce  que 
rendait  le  rachat  des  premiers-nés,  formaient  le 
revenu  le  plus  sûr  et  le  plus  important  des 
prêtres  et  des  lévites.  De  ces  tributs,  le  plus 
considérable  était  certainement  celui  des  dîmes. 
Nous  nous  bornerons  uniquement  à  celles  qui  fu- 
rent prescrites  par  Moïse.  Ce  législateur  avait 
ordonné  qu'aucun  des  animaux  purs  qui  seraient 
offerts  comme  dîmes,  ne  serait  racheté,  mais  qu'ils 
seraient  tous  sacrifiés  à  l'Éternel  ;  que  celles  qui 
consistaient  en  produits  de  la  terre, comme  grains, 
fruits,  etc.,  ne  seraient  point  rachetées,  à  moins 
que  les  propriétaires  n'ajoutassent  un  cinquième 
de  plus  à  la  valeur  intrinsèque  (4).   Il  n'est  pas 


nécessaire  de  remarquer  ici  que  les  dîmes  étaient 
données  aux  lévites  et  aux  prêtres,  comme  un  dé- 
dommagement de  ce  que,  dans  îe  partage  du  pays, 
aucune  portion  ne  leur  était  assignée  avec  le  reste 
du  peuple  (î). 

Ces  dîmes  étaient  de  quatre  sortes  :  1 .  Celles 
qui  étaient  assignées  à  la  tribu  de  Lévi  (6).  2.  Les 
dîmes  de  ces  dîmes,  qui  étaient  destinées  aux 
prêtres  ;  car  ces  derniers  ne  rassemblaient  pas  les 
dîmes  eux  mêmes  :  cet  office  appartenait  aux 
lévites,  qui  n'en  touchaient  pas  la  moindre  partie, 
avant  d'avoir  envoyé  à  Jérusalem  la  portion  qui 
était  due  aux  prêtres  (7).  3.  Après  qu'un  laïque 
avait  payé  ses  premières  dîmes  aux  lévites,  il  était 
obligé  de  mettre  à  part  une  seconde  dîme,  ou 
d'en  donner  l'équivalent  en  argent,  en  y  ajoutant 
le  cinquième  de  la  valeur,  et  il  devait  porter  le 
tout  à  Jérusalem,  et  donner  dans  cette  ville  un 
festin  auquel,  avec  ses  amis  et  ses  parents,  étaient 
invités  les  prêtres  et  les  lévites  (8).  4.  La  dernière 
espèce  de  dîmes,  prescrite  par  Moïse,  revenait 
tous  les  trois  ans,  et  était  employée  en  festins 
domestiques,  auxquels,  par  une  loi  expresse,  de- 
vaient assister  les  lévites,  les  orphelins,  les  pau- 
vres, les  veuves  et  les  étrangers  (9). 

Il  est  vrai  qu'il  est  parlé  d'une  autre  sorte  de 
dîme,  au  profit  du  roi,  quand  Samuel  prédit  aux 
Israélites  qu'il  les  en  chargerait,  s'ils  persistaient 
dans  le   dessein  d'en  avoir  un  (10).  Mais  comme 


(1)  Nomb.  xvin.  f.  1^  et  suiv.  -  Exod.  xm.  y.  1?.-  Deut. 
xv.  p.  20  et  suiv.  Nicolas  de  Lyre,  savant  Juif  converti, 
assure  que  les  chiens  et  autres  animaux  semblables  qui 
n'ont  aucune  valeur,  ne  doivent  point  être  rachetés,  mais 
mis  à  mort,  en  vertu  d'une  loi  du  Deutéronome,  qui 
défend  d'apporter  dans  la  maison  de  l'Éternel,  ni  le  sa- 
laire d'une  impudique,  ni  le  prix  d'un  chien.  [Deut.  xxm. 
18.)  Cette  opinion  a  été  adoptée  par  Bochart  et  plusieurs 
autres.  (V.  Mishn.  Ma'im.  et  al.  cl  M  un  st.  in  loc.)  Mais 
nous  doutons  très  fort  que  la  plupart  des  Juifs  aient  été 
forts  exacts  à  observer  lequel  de  ces  animaux  sortait  le 
premier  ;  nous  avons  plus  de  penchant  à  croire  que 
pour  plus  de  sûreté  ils  les  détruisaient  tous. 

(?)  Prcec.  ajfinn.  ij-. 

(?)  Lévit.  xix.  f.  2?. 

(4)  Lévit  xxvii.  f.  ;o.  et  suiv. 

15)  Une  des  raisons  de  cet  arrangement  pourrait  bien 
avoir  été  le  dessein  de  les  rendre  plus  religieux  obser- 
vateurs de  la  loi  de  Dieu,  au  militu  d'un  peuple  fort  en- 
clin à  la  désobéissance  ;  leurs  revenus  devant  naturelle- 
ment augmenter  ou  diminuer  à  proportion  que  les  Israé- 
lites étaient  plus  ou  moins  dociles  et  vertueux. 

(ô)  Nomb.xMu.  y.  20.  et  suiv.-  Deut. xiv.  f.  22.  eialib.  Cf. 
et  11.  Parai  p.  xxxi.  jh  j.  et  suiv.  Quelques  auteurs  croient 
que  chaque  homme  était  obligé  d'apporter  ou  d'envoyer 
ces  premières  dîmes  à  Jérusalem  [Joseph.  Antiq.  lib.  iv. 
c.  8.  Cf.  Six.  Amant,  de  Uecim.  cl  Aucl.ab  eo  cilat.,;  mais 
ils  ne  donnent  aucune  preuve  de  cette  assertion  :  il  sem- 
ble plutôt,  par  les  secondes  dîmes  que  les  lévites  de- 
vaient envoyer  à  Jérusalem  (Comp.  Deut.  xiv.  y.  12,  2j. 
avec  JSchcm.  x.  y.  J4  et  suiv.)  aux  prêtres,  que  les  pre- 
mières se  payaient  sur  les  lieux,  ou  du  moins  dans  les 
villes  appartenant    aux    lévites.   Et    en    effet,    c'eût   été 


un  grand  embaras, particulièrement  pour  ceux  qui  demeu- 
raient à  une  distance  considérable  de  Jérusalem,  s'il 
avait  fallu  les  envoyer  si  loin  .  Si  l'on  objecte  que 
c'était  au  fond  la  même  chose  pour  les  lévites,  la  réponse 
s'offre  d'elle-même  :  il  était  bien  plus  commode  d'en- 
voyer à  Jérusalem  une  dixième  partie  que  le  tout,  pour 
remporter  ensuite  les  neuf  autres  dixièmes  chez  eux. 

(7)  Nomb.  xviii.  y.  2;.  et  suiv. 

(8)  Deut.  xii.  jh  17.  18.  xiv.  y.  22.  2J.  Cette  dîme  était 
différente  de  la  première,  qu'on  payait  aux  lévites, 
quelque  chose  qu'aient  pu  dire  certains  commentateurs 
pour  prouver  le  contraire  :  i°.  parce  que  la  première 
était  un  droit  héiéditaire  de  la  tribu  de  Lévi  qui  aurait 
péri  de  faim  sans  cela,  au  lieu  que  celle  dont  il  s'agit 
ici  était  consommée  par  les  propriétaires  et  par  leurs 
amis.  20.  Les  lévites  étaient  tenus  de  rendre  la  dixième 
partie  des  premières  aux  prêtres,  au  lieu  qu'ils  n'étaient 
que  convives  à  l'égard  des  autres.  j°.  Les  premières  se 
payaient  par  toute  la  Judée,  et  les  autres  seulement  à 
Jérusalem. 

(0)  Deut.  xiv.  p.  :8.  29.  Il  est  cependant  plus  probable 
que  cette  dernière  dîme  différait  uniquement  de  la  troi- 
sième, en  ce  que  chacun  la  consommait  chez  soi  chaque 
troisième  année,  l'autre  étant  consommée  à  Jérusalem 
les  deux  autres  années,  si  bien  qu'il  pourrait  n'y  avoir  eu, 
à  proprement  parler,  que  trois  espèces  de  dîmes,  celle 
des  lévites,  celle  des  prêtres,  et  ce'te  dernière,  qui 
n'étaient  au  fond  qu'un  repas  eucharistique,  appelé 
pour  cette  raison  par  les  Juifs  >jy  is/ya ,  par  les  Grecs, 
TCTw-ioosnixtr),  ta  d'une  des  pauvres,  et  par  Tobie  la  troi- 
sième dîme  (Tob.  y.  1.  8.) 

(ioj  1.  Rois.  vin.  y.  15.  et  suiv. 


SUR   L'ORGANISATION   DE   LA  NATION  JUIVE 


;87 


Moïse  ne  parle  en  aucune  manière  d'un  pareil 
droit  dans  les  règles  qu'il  établit  pour  la  conduite 
de  leurs  rois  futurs  (1),  il  y  a  apparence  que  ce 
prophète  leur  apprend,  non  ce  que  ces  princes 
feraient  en  droit,  mais  ce  qu'ils  seraient  capables 
de  faire. 

Il  n'est  pas  facile  de  déterminer  en  quoi  con- 
sistait la  première  espèce  de  dîmes  qui  étaient 
destinées  à  l'entretien  des  prêtres  et  des  lévites  ; 
c'est-à-dire,  si  c'était  en  gros  et  en  menu  bétail, 
et  en  d'autres  sortes  d'animaux,  ou  bien  en  grains 
et  en  fruits  ;  ou  enfin  si  c'était  seulement  en  une 
partie  de  ces  objets. 

Les  Juifs,  si  nous  en  croyons  quelques-uns  des 
plus  savants  d'entr'eux  (2),  assurent  que  la  chair 
de  tous  les  animaux  qui  étaient  décimés,  appar- 
tenait uniquement  aux  propriétaires  ;  et  Obad  de 
Barthenora  ajoute  qu'il  n'y  a  pas,  dans  toute  la 
loi,  un  seul  passage  qui  prouve  que  les  prêtres  et 
les  lévites  y  eussent  le  moindre  droit  (3).  Quant  à 
la  manière  dont  le  bétail  était  ordinairement  dé- 
cimé, elle  était  réglée  par  l'usage,  suivant  Mai- 
monide  (4)  :  «  Un  homme  »,  dit-il,  «  qui  de  dix 
agneaux  en  aurait  mis  à  part  un,  par  exemple,  ou 
dix  de  cent,  ne  serait  pas  réputé  en  avoir  payé  la 
dîme.  Voici  donc  comment  il  fallait  s'y  prendre. 
On  renfermait  tous  les  agneaux,  chevreaux  ou 
jeunes  taureaux  dans  une  étable,  qui  avait  une 
porte  si  étroite,  que  deux  de  ces  animaux  n'y 
pouvaient  point  passer  de  front.  Après  cela,  on 
amenait  les  mères  devant  la  porte,  afin  que  les 
jeunes,  entendant  leur  voix,  s'empressassent  de 
sortir,  conformément  à  ce  texte  du  Lévitique, 
xxvn,  3  2,  tout  ce  qui  passe  sous  la  verge  du  Pasteur. 
Il  fallait  outre  cela  que  ces  jeunes  sortissent 
d'eux-mêmes,  et  sans  y  être  forcés  ;  et  à  mesure 
qu'ils  sortaient  l'un  après  l'autre,  ceux  qui  se  te- 
naient auprès  de  la  porte,  comptaient  un,  deux, 
trois,  et  ainsi  de  suite,  jusqu'à  dix  ;  ce  dixième 
était  sur  le  champ  marqué  de  rouge,  et  qu'il  fût 
mâle  ou  femelle,  avec  ou  sans  défaut,  le  proprié- 
taire disait  :  Celui-ci  sera  consacré  A  payer  les 
dîmes. 

«  Si  l'animal  avait  les  conditions  requises,  il 
était  sacrifié  à  Dieu,  sinon,  il  était  permis  au  pro- 
priétaire de  le  tuer,  et  de  !e  manger  où  il  voulait  ; 
car  il  était  défendu  de  le  racheter  ou  de  le  chan- 
ger pour  un  autre  (5).   » 


A  ces  sortes  d'offrandes,  nous  pouvons  en  ajouter 
quelques  autres,  comme  celle  de  l'encens  que  les 
prêtres  devaient  brûler  chaque  jour  sur  l'autel  des 
parfums,  avant  le  sacrifice  du  soir  et  du  matin,  et 
celui  que  le  grand  prêtre  portait  une  fois  l'an  dans 
le  sanctuaire.  Il  ne  nous  reste  qu'une  remarque 
générale  sur  les  sacrifices.  Comme  Jérusalem 
devint  dans  la  suite  pour  les  Juifs  ce  que  le  camp 
avait  été  pendant  leur  séjour  dans  le  désert,  les 
victimes  qui  devaient  être  brûlées  hors  du  camp, 
le  furent  hors  des  murailles  de  la  ville,  après  la 
construction  du  temple. 

Lois  concernant  les  vœux. 

Les  vœux  formant  une  partie  solennelle  du  culte 
et  des  offrandes  des  Juifs,  nous  pouvons  les  join- 
dre comme  un  supplément  à  ces  offrandes  ;  mais, 
comme  ils  étaient  libres  et  arbitraires,  on  ne  peut 
pas  les  placer  dans  le  même  rang.  Il  paraît  par 
l'exemple  de  Jacob,  qui  voua  les  dîmes  de  toutes 
ses  acquisitions,  lorsqu'il  alla  en  Padan-Aram,que 
les  vœux  ont  été  de  bonne  heure  en  usage.  Nous 
nous  bornerons  à  ceux  qui  ont  eu  lieu  sous  la  dis- 
pensation  mosaïque;  ce  législateur  établit  diverses 
règles,  pour  en  diriger  et  en  assurer  l'accomplis- 
sement (6). 

Il  y  avait  deux  sortes  de  vœux  :  1.  Ceux  qui 
dévouaient  la  chose,  homme,  bête,  argent,  au 
service  de  Dieu  (7).  2.  Ceux  qui  dévouaient 
les  mêmes  choses  à  une  entière  destruction  (8). 
Par  rapport  aux  vœux  de  la  première  espèce,  il 
est  clair  que  ceux  qui  avaient  droit  de  disposer 
d'eux-mêmes,  pouvaient  se  dévouer  eux  ou  leurs 
enfants,  ou  une  partie  de  leurs  possessions  à 
Dieu.  Nous  disons,  qui  pouvaient  disposer  d'eux- 
mêmes,  parce  que  les  vœux  d'un  fils,  d'une  fille, 
d'une  femme  ou  d'un  esclave,  n'obligeaient  qu'au- 
tant qu'ils  étaient  approuvés  par  ceux  à  l'autorité 
desquels  ces  personnes  étaient  soumises  (9),  de 
manière  qu'un  père,  un  époux,  ou  un  maître,  s'il 
entendait  le  vœu  qu'on  venait  de  faire,  ou  s'il  en 
était  informé  dans  la  suite,  était  libre  de  le  con- 
firmer, ou  de  l'annuler  ;  mais  s'il  prenait  ce  der- 
nier parti,  il  était  obligé  de  le  faire  le  jour  même, 
suivant  le  texte,  ou  dans  l'espace  de  vingt-quatre 
heures,  suivant  les  docteurs  juifs. 

Nous  ne  trouvons   aucun   exemple   formel  de 


(1)  Deul.  xvii.  f.  14.  et  seq. 

(2)  Mainion.  in  Bechoroth.  c.  6. 

(j)  Barthenor  in  Zcbachim.  c.  5.  et  al. 

(4)  Maim.  ubi  supr. 

(5)  Basnag.  Rep.  Héb.  Tom.  III.  lib.  xxxm.  c.  4. 

(6)  Livil.  xxvn.  passim. 

(7)  Jbid.  vers.  2  et  siuv. 

(8)  Ibid.  vers.  28.  29.  L'original  les  distingue  par  le 
mot  lia  ,  njdar,  qui  signifie  vouer  dans  le  premier  sens, 
et  de  :=-in  ,    'hâram,  qui  veut  dire  soumettre  une  chose 


ou  une  personne  à  l'anathème,  ou  la  vouer  à  la  des- 
truction. Plusieurs  savants  commentateurs  rejettent  ce 
dernier  sens  appliqué  aux  hommes,  et  croient  que  les 
personnes  ainsi  vouées  devenaient  entièrement  et  pour 
toujours  consacrées  à  Dieu  (V.  Munsi.  Grot.  Le  Clerc. 
Pagnin.  Jun.  Cahn.)  ;  mais  l'histoire  de  Jephté,  et  l'immo- 
lation des  peuplades  ou  des  habitants  des  villes  vouées 
à  l'anathème,  ne  permet  pas  d'adopter  cette  opinion 
sans  réserve. 
(9)  Nombr.  xxx.  passim. 


388 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


personnes  qui  se  soient  vouées  elles-mêmes  en  ce 
sens  ;  mais  nous  en  avons  un  remarquable  d'un 
enfant  voué,  dans  l'histoire  de  Samuel,  qui  fut 
consacré  à  Dieu  par  le  vœu  de  sa  mère,  ratifié, 
à  ce  qu'il  y  a  lieu  de  supposer,  par  son  époux  (i); 
et  qui,  en  conséquence  de  ce  vœu,  fut  employé 
pendant  tout  le  temps  de  sa  vie,  au  service  de 
Dieu.  Cependant,  dans  ces  sortes  de  cas,  la  loi 
de  Moïse  permettait  qu'on  rachetât  la  personne 
vouée  pour  une  certaine  somme  d'argent,  qui  était 
plus  ou  moins  grande,  suivant  l'âge  et  le  sexe  de  la 
personne  vouée.  La  taxe  qui  fut  établie  à  cet 
égard,  et  la  manière  d'en  agir  par  rapport  à 
ceux  qui  étaient  trop  pauvres  pour  fournir  la 
somme  qu'il  aurait  fallu  payer,  se  trouvent  dans  le 
Lévitique  (?). 

Il  en  était  autrement  du  bétail,  des  terres,  ou 
de  leurs  productions.  Ces  objets  ne  pouvaient  être 
ni  rachetés,  ni  changés  en  aucun  cas.  à  moins 
que  l'animal  voué  n'eût,  avant  d'être  offert,  con- 
tracté quelqu'imperfection  légale  qui  le  rendit 
incapable  d'être  sacrifié  :  car,  en  ce  cas,  il  fallait 
en  substituer  à  la  place  un  autre  sans  défaut  ; 
et  si  la  bête  qu'un  homme  avait  vouée  était  impure, 
il  devait,  outre  l'équivalent,  donner  encore  la  cin- 
quième partie  de  la  valeur,  comme  une  espèce 
d'amende  (}).  La  même  chose  devait  être  observée 
.si  c'était  une  maison,  un  champ,  ou  quelqu'autre 
bien  pareil.  Les  premiers-nés  du  bétail  ne  pou- 
vaient point  être  voués,  parce  qu'ils  appartenaient 
déjà  à  Dieu  (4). 

Il  n'en  était  pas  de  même  des  choses  qui  étaient 
vouées  à  la  destruction  ;  elles  ne  pouvaient  être 
rachetées  à  aucun  prix  (5)  :  ce  qui  avait  vie  devait 
être  mis  à  mort,  et  ce  qui  était  inanimé  devait  être 
détruit  par  le  feu,  ou  de  quelqu'autre  manière. 
Nous  en  trouvons  dans  l'histoire  des  Juifs  plu- 
sieurs exemples,  dont  nous  rapporterons  les  plus 
remarquables. 

Nos  lecteurs  se  souviennent  sans  doute,  que 
Jes  enfants  d'Israël  vouèrent  à  la  destruction  tout 
le  royaume  d'Arad,  et  que  toutes  les  villes  des 
Cananéens  furent  soumises  au  mêmeanathème(6), 
et  en  particulier  celle  de  Jéricho  :  cette  malédic- 
tion enveloppa  Achan  et  tout  ce  qu'il  avait,  parce 
qu'il  avait  conservé  une  partie  du  butin  de  cette 
ville  (7),  dévouée  à  une  totale  destruction. 

Les  Israélites,  assemblés  à  Masphath,  vouèrent 
à  la  destruction  ceux  qui  n'avaient  point  aidé  à 
punir  la  tribu  de  Benjamin,  du  crime  commis 
envers  la  femme  du  lévite  (8)  ;  et  Saùl  aurait 
voulu   sacrifier   son    propre    fils  Jonathas,    pour 


avoir  encouru,  sans  le  savoir,  la  malédiction  pro- 
noncée contre  ceux  qui  mangeraient  ou  qui  boi- 
raient pendant  qu'il  serait  occupé  à  poursuivre  sa 
victoire,  et  il  l'aurait  fait  si  toute  l'armée  ne  s'y 
était  pas  fortement  opposée  :  ces  exemples, 
entre  plusieurs  autres,  prouvent  que  la  mort 
n'était  pas  toujours  le  partage  de  ceux  qui  étaient 
l'objet  de  ces  sortes  de  vœux. 

Les  exégètes  partisans  de  l'opinion  modérée, 
que,  quand  il  s'agissait  de  victimes  humaines, 
leur  dévouement  n'avait  d'autre  effet  que  de  les 
consacrer  au  service  de  Dieu  durant  tout  le  temps 
de  leur  vie,  objectent,  à  la  vérité,  l'horreur  que 
Dieu  témoigne  contre  toutes  sortes  de  sacrifices 
humains.  Mais  qu'il  nous  soit  permis  d'observer 
qu'il  n'est  point  question  ici  de  sacrifices,  mais  de 
vœux,  et  que  ces  vœux  étaient  tels,  qu'il  n'était 
permis  à  aucun  particulier  de  les  faire,  mais  seu- 
lement à  toute  la  nation,  comme  dans  l'exemple 
du  pays  d'Arad,  ou  aux  rois  et  aux  juges,  comme 
dans  les  autres  exemples  que  nous  venons  de 
rapporter. 

'  De  plus,  tous  ces  vœux  semblent  relatifs  à  ces 
nations  idolâtres  que  les  Israélites  allaient  subju- 
guer, et  dont  les  crimes,  parvenus  à  leur  comble, 
avaient  déjà  engagé  Dieu  à  prononcercontre  elies 
unesentencededestruction;  un  vœu  solennel  d'exé- 
cuter cette  sentence  pouvait  alors  servir  à  mettre 
les  Israélites  plus  en  état  de  s'acquitter  de  cette 
commission.  Aussi  les  trouvons-nous  à  cet  égard 
d'une  exactitude  extraordinaire  quand  la  destruc- 
tion était  prononcée,  et  fort  relâchés  quand  elle 
ne  l'était  pas.  Sans  cela,  auraient-ils  laissé  subsis- 
ter tant  de  nations,  dont  le  commerce  séducteur 
les  rendit  plus  d'une  fois  coupables  d'idolâtrie  ? 

Il  paraît  par  là  que,  s'il  était  d'une  si  grande 
importance  pour  eux  d'être  garantis  de  pareils 
pièges,  nous  ne  devons  pas  nous  étonner  de  voir 
les  Israélites  fortifier  par  un  vœu  une  obligation 
qui  leur  était  déjà  imposée.  Mais  après  tout,  le 
vœu  dont  il  s'agit  peut,  fort  bien  être  considéré 
comme  un  renouvellement  de  celui  que  Moïse 
exigea  de  tout  le  peuple,  un  peu  avant  sa  mort. Ce 
vœu  consistait  à  observer  tous  les  commande- 
ments de  Dieu  :  l'un  d'eux  était  d'extirper  toutes 
ces  nations  avec  tous  les  monuments  de  leur  ido- 
lâtrie ;  et,  dans  ce  cas,  le  sens  de  ces  paroles  sera 
simplement  que,  comme  ils  avaient  fait  solennel- 
lement ce  vœu  à  Dieu,  ils  ne  devaient  point  pré- 
tendre dans  la  suite  s'exempter  de  l'exécuter,  sous 
quelque  prétexte  que  ce  pût  être. 

Si  Saûl   se   fût  rappelé  ce  vœu,  il   n'eût  point 


(i)  1.  Rois.  1.  f.  21.  et  suiv. 

(2)  Lêuit.  xxvii.  f.  ].  et  suiv. 

(j)  Ibid.  y.  ij. 

(4)  Ibid.  y.  14  et  suiv.  —  (5)  Ibid.  y.  28.  29. 


(0)  Nombr.  xxi.  y.  1.  et  suiv.  -  Deut.  vu.  y .  2j.  et  suiv.  ; 
xx.  y.  15.  et  suiv. 
(j)  Jos.  vi.  et  vu.  passim. 
(8)  Jug.  xx,  y.  5. 


SUR  L'ORGANISATION   DE  LA    NATION  JUIVE 


389 


sauvé  le  roi  d'Amalec  et  la  meilleure  partie  du 
bétail  et  du  butin  (1).  Aussi,  lorsque  ce  prince 
allégua  la  puérile  excuse  qu'il  destinait  le  butin  et 
le  bétail  pour  en  faire  une  offrande  à  Dieu,  Samuel 
le  reprit  avec  raison,  en  lui  montrant  combien  il 
était  insensé  de  vouloir  expier  la  violation  d"un 
précepte  de  Dieu  en  en  violant  un  autre. 

L!Écriture  ne  marque  pas  quelle  sorte  de  ma- 
lédiction Jonadab,  fils  de  Récab,  donna  à  ses 
descendants,  s'ils  n'obéissaient  pas  aux  préceptes 
arbitraires  qu'il  leur  avait  prescrits,  surtout  à 
celui  de  s'abstenir  de  boire  du  vin,  de  planter  et 
de  semer;  mais  il  paraît,  par  la  réponse  qu'ils 
firent  à  Jérémie,  lorsque  ce  prophète  les  invita  à 
boire  du  vin,  qu'ils  ne  s'en  écartèrent  point  (2). 

Nous  finirons  cet  article  en  disant  un  mot  des 
Naziréens,  dont  il  est  souvent  fait  mention  dans 
l'Ancien  Testament.  C'étaient  des  personnes  qui 
se  vouaient  elles-mêmes,  ou  qui  étaient  vouées 
par  leurs  parents  à  l'observation  des  lois  du  nazi- 
réat.  Cette  obligation  était  quelquefois  limitée 
à  un  espace  de  temps  assez  court,  comme  un  mois 
ou  une  semaine,  et  quelquefois  ne  finissait  qu'avec 
la  vie  ;  et  c'était  ordinairement  le  sort  de  ceux 
qui  avaient  été  consacrés  au  naziréat  par  leurs 
parents.  Tels  étaient,  entr'autres,  Samson  et  Sa- 
muel(]).  Tout  ce  que  nous  trouvons  de  particulier 
dans  leur  manière  de  vivre,  c'est  qu'ils  devaient 
s'abstenir  de  vin  et  de  toute  liqueur  capable  d'eni- 
vrer, et  laisser  croître  leurs  cheveux  sans  jamais 
les  couper. 

Tant  que  le  naziréat,  dont  la  durée  était  bor- 
née à  un  certain  temps,  subsistait,  il  était  défendu 
au  naziréen  d'entrer  dans  une  maison  où  il  y  au- 
rait un  mort,  parce  qu'il  contractait  par  là  une 
souillure  qui  l'obligeait  à  recommencer  de  nou- 
veau (4).  Les  femmes,  aussi  bien  que  les  hommes, 
pouvaient  s'obliger  parce  vœu.  Dès  que  le  temps 
assigné  à  la  durée  du  naziréat  était  expiré,  les 
naziréens  se  présentaient  à  la  porte  du  Taber- 
nacle ou  du  temple,  et  ils  y  offraient  les  sacrifices 
prescrits  par  Moïse  en  pareil  cas(<;);  ensuite  le 
prêtre,  après  leur  avoir  fait  raser  la  tète,  et  jeter 
leurs  cheveux  dans  le  feu,  qui  était  au  dessous  du 
sacrifice,  les  déclarait  libres  de  leur  voeu. 

Ceux  qui  vivaient  à  une  si  grande  distance 
du  temple,  qu'il  leur  était  impossible  de  s'y 
rendre  vers  la  fin  de  leur  naziréat,  pouvaient  se 
raser  la  tête  en  quelque  endroit  qu'ils  se  trou- 
vassent, pourvu  qu'ils  missent  en  même  temps  à 
part  l'équivalent  de  leurs  sacrifices,  dans  le  dessein 
de  l'envoyer  ou  de  le  porter  au  temple  à  la  pre- 


mière occasion.  C'est  ce  que  nous  lisons  relative- 
ment à  saint  Paul,  qui,  ayant  fait  vœu  à  Corinthe, 
se  rasa  la  tète  à  Cenchrée,  et  partit  aussitôt  après 
pour  Jérusalem,  afin  d'y  terminer  son  naziréat 
par  l'offrande  ordinaire. 

Lois  concernant  les  prêtres,  les  lévites  et  les 
Ndhinim  ou  Nathinéens. 

Les  deux  derniers  articles  qui  restent  à  exami- 
ner relativement  au  culte  de  Dieu,  sont:  1.  les 
personnes,  et  2.  les  choses  qui  étaient  pareille- 
ment destinées  à  ce  culte.  Dans  la  première  classe 
étaient  les  prêtres,  les  lévites  et  les  Nethinim  ; 
dans  la  seconde,  le  Tabernacle  et  dans  la  suite  le 
temple,  avec  tout  le  pompeux  appareil  d'usten- 
siles prescrits  par  Dieu  lui  même  à  Moïse  sur  la 
montagne,  afin  de  rendre  la  religion  plus  respec- 
table aux  yeux  de  ce  peuple  charnel. 

Avant  que  la  tribu  de  Lévi  fût  consacrée  au 
service  de  Dieu,  la  prêtrise  ou  sacrificature  appar- 
tenait au  premier-né,  suivant  toutes  les  apparences; 
et  lorsque  Moïse  ratifia  l'aliiance  entre  Dieu  et 
le  peuple  sur  la  montagne,  ce  législateur  fit  la 
fonction  de  grand  prêtre,  et  choisit  un  certain 
nombre  de  jeunes  hommes  pour  officier  sous 
lui  (6).  Mais,  après  que  la  tribu  de  Lévi  eût  été 
choisie  pour  le  service  inférieur,  et  la  famille  d'Aa- 
ron  pour  les  fonctions  plus  relevées  du  ministère, 
ce  fut  un  crime  capital  pour  les  autres  tribus, 
de  s'y  ingérer;  et  la  vengeancede  Dieu  éclata  mi- 
raculeusement dans  la  punition  des  premiers  vio- 
lateurs de  cette  loi,  Coré,  Dathan  et  Abiron,  et 
confirma  par  un  prodige  la  prêtrise  dans  la  maison 
d'Aaron  (7). 

Il  n'est  pas  aisé  de  concilier  ce  qui  est  dit  des 
lévites,  que  leur  choix  était  fondé  sur  le  zèle 
qu'ils  avaient  témoigné  en  exterminant  les  adora- 
teurs du  veau  d'or  (8),  avec  l'élévation  d'Aaron  à 
la  dignité  de  souverain  pontife,  lui  qui  avait  si 
lâchement  consenti  à  leur  idolâtrie.  Tout  ce  que 
nous  avons  à  répondre  à  cette  difficulté,  c'est 
qu'il  faut  attribuerce  choix  de  Dieu  à  cette  même 
liberté  souveraine,  qui  porta  cet  Etre  suprême  à 
choisir,  préférablement  à  d'autres,  Seth,  Noé, 
Sem,  Abraham,  Jacob,  David,  pour  les  instru- 
ments de  sa  miséricorde.  Quoi  qu'il  en  soit  à  cet 
égard,  Moïse  dit  dans  un  endroit,  que  Dieu  prit 
les  lévites  à  la  place  des  premiers-nés  d'Israël, 
pour  être  sa  tribu;  et  il  est  remarquable  que, 
quand  le  recensement  des  uns  et  des  autres  fut 
fait,  et  que  le  nombre  des  derniers  se  trouva  plus 


(1)1.  Rois.  x.  f.  9,  et  suiv. 

(2)  Jérem.  xxxv.  passim. 

(;)  Jug.  xui.  f.  5.  -  1.  Rois.  1.  f.  u. 

(a)  Nomb.  vi.  f.  14.  et  suiv. 


(5)  Ibid.  f.  1  j.  et  suiv. 

(6)  Exod.  xxiv.  f.  5.  et  suiv. 

(7)  Nomb.  xvii.  et  xvn.  passim. 

(8)  Deut.  xxxiii.  f.  8.  et  suiv,  et  Exod.  x,xu.f.  26.  et  suiv. 


390 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


grand  que  celui  des  premiers,  Dieu  commanda 
que  le  surplus  serait  racheté  à  cinq  sicles  par  tète, 
et  que  la  somme  qui  viendrait  de  ce  rachat,  serait 
donnée  à  Aaron  et  ses  fils  (i).  Ainsi  il  est  clair 
qu'il  y  avait  une  substitution  actuelle  de  la  tribu 
de  Lévi  à  la  place  des  premiers-nés,  que  Dieu 
s'était  réservés  pour  prix  des  premiers-nés  d'Israël 
qu'il  avait  épargnés,  lorsqu'il  détruisit  ceux  d'E- 
gypte; et  il  avait  accordé  une  supériorité  à  la 
famille  d'Aaron  sur  tout  le  reste  de  la  tribu  de 
Lévi,  probablement  en  considération  de   Moïse. 

i.  Des  prêtres. 

Cette  tribu  était  composée  de  trois  branches 
distinguées  par  leurs  principaux  chefs;  savoir  : 
Gerson,  Caath  et  Mérari.  Mais  la  prêtrise  fut 
donnée  à  la  seule  famille  d'Aaron,  qui  n'était 
qu'une  petite  branche  de  celle  de  Caath,  et  toutes 
les  autres,  même  les  fils  de  Moïse,  demeurèrent 
dans  le  rang  de  simples  lévites,  et  ne  furent  admis 
qu'aux  fonctions  subalternes,  soit  du  Tabernacle, 
soit  du  temple;  c'est  pourquoi  les  lévites  furent 
toujours  sujets  aux  prêtres. 

A  la  tête  du  sacerdoce  était  le  souverain  sacri- 
ficateur, ou  grand  prêtre, qui  était  aussi  le  chef  de 
l'Église  judaïque,  et  le  juge  suprême  de  toutes 
les  controverses,  tant  au  sujet  de  la  religion,  qu'à 
l'égard  de  l'administration  ordinaire  de  la  justice. 
Moïse  ordonna  au  peuple,  d'avoir  recours  aux 
prêtres  dans  toutes  les  difficultés  de  cette  nature, 
de  s'en  tenir  à  leur  décision,  sous  peine  de 
mort  (2);  et  c'est  en  ce  sens  que  Josèphe,  Phi- 
Ion,  et  la    plupart  des  rabbins  entendent  ce  pas- 


sage (3).  Cependant,  dans  ces  sortes  d'occasions, 
le  grand  prêtre  agissait  moins  comme  tel  qu'en 
qualité  de  juge  civil.  Nous  pouvons  dire  la  même  • 
chose  des  prêtres  subalternes  et  des  lévites,  qui 
avaient  ordinairement  droit  de  séance  dans  les 
cours  inférieures  de  justice  (4);  car  il  est  évident 
qu'ils  n'avaient  été  séparés  des  autres  tribus,  que 
pour  bénir  le  peuple  et  offrir  à  Dieu  l'encens  et 
les  sacrifices  prescrits  par  la  loi,  exclusivement  à 
toutes  les  autres,  sous  des  peines  très  sévères  (5). 
Les  lois  concernant  le  grand  prêtre  peuvent  être 
rangées  sous  trois  classes  :  celles  qui  regardent  sa 
charge  ;  celles  qui  ont  rapport  à  sa  consécration  ; 
et  celles  qui  sont  relatives  à  ses  habits. 

Lois  relatives  à  la  charge  de  grand  prêtre. 

Le  grand  prêtre  avait  le  pouvoir,  quand  il  lui 
plaisait,  de  remplir  les  fonctions  des  prêtres  infé- 
rieurs; mais  il  était  seul  en  possession  de  l'oracle 
divin  de  l'Ourim  et  Thoummin.  Il  avait  seul  la 
permission  d'entrer  dans  le  lieu  très  saint,  et  de 
prononcer  la  bénédiction  solennelle  le  grand  jour 
de  l'Expiation.  Tous  ces  privilèges  étaient  res- 
treints à  sa  personne,  et  transmis  ensuite  à  celle 
de  son  successeur,  soit  que  ce  fût  son  fils,  ou 
quelqu'un  de  sa  famille.  C'est  ainsi  que  nous 
trouvons  les  deux  branches,  c'est-à-dire,  celle 
d'ÉIéazar  et  d'Ithamar,  fils  d'Aaron,  revêtues  de 
la  souveraine  sacrificature,  en  différents  temps 
jusqu'à  la  captivité,  pendant  que  l'autre  branche 
était  revêtue  d'une  prêtrise  inférieure. 

Le  texte  sacré  ne  dit  pas  à  la  suite  de  quel  évé- 
nement la  ligne  de  Phinéès  fut  exclue  du  premier 


(1)  Nomb.  m.  y.  12.  I}.  4;.  et  suiv. 

(2)  Deut.  xvn.  y.  8  et  suiv.  ;  xix.  f.  17;  xxi.  f.  <,;  xxn. 
y.  10;  xxxiii.  y.  20.  et  E\ech.  xliv.  y.  24.  Voici  comment  le 
législateur  s'exprime(De«/.  xvu.  y.  8.  et  suiv.)  :  «  Quand  il 
sera  trop  difficile  pour  toi  de  juger  entre  le  meurtre  et  le 
meurtre,  entre  la  cause  et  la  cause,  entre  la  plaie  et  la 
plaie,  et  autres  affaires  ou  procès  en  ces  portes  (ce  qui 
signifie  clairement,  si  la  décision  du  procès  paraît  trop 
difficile  aux  juges  de  la  ville  dont  dépendent  les  parties): 
en  ce  cas  tu  te  lèveras  et  monteras  au  lieu  que  l'Éternel 
ton  Dieu  aura  choisi,  et  tu  viendras  aux  prêtres  qui  sont 
de  la  race  de  Lévi,  et  au  juge  qui  sera  en  ce  temps-là,  — 
et  tu  feras  exactement  ce  qu'ils  t'auront  déclaré,  —  sans 
te  détourner  de  ce  qu'ils  auront  déclaré,  ni  à  droite,  ni 
à  gauche  ;  et  l'homme  qui,  par  fierté,  n'aura  pas  voulu 
obéir  au  prêtre  qui  assiste  pour  servir  là  ;l'Éternel  ton 
Dieu,  ou  aux  juges,  sera  mis  à  mort.  » 

(;)  Contr.  Appion.  et  ahb.  Pkil.  Ma'imon.  Seldcn  dé 
Sr.icdr.  vet.  Hxbr.  et  al. 

(4)  Nombr.  xvi.  y.  8.  et  alib. 

(5)  Ceci  ne  doit  pas  être  cependant  entendu  h  la  der- 
nière rigueur,  parce  qu'il  est  certain  que  plusieurs  rois, 
juges  et  prophètes  se  sont  chargés  de  cet  emploi,  quoi- 
qu'ils ne  fussent  pas  de  la  tribu  de  Lévi.  C'est  ainsi  que 
nous  lisons  dans  un  passage  que  Samuel,  qui  était  de  la 
tribu  d'Éphraïm,   était  attendu  pour   bénir  le   sacrifice 


(1.  Rois.  îx.  I2\  et  dans  un  autre  qu'il  offrit  un  agneau  en 
holocauste  (1.  Rois.  vu.  9),  quoique  ces  deux  fonctions 
appartinssent  proprement  aux  prêtres.  C'est  ainsi  encore 
qu'on  dit  que  Saùl,  Élie  et  David,  offrirent  des  holo- 
caustes à  Dieu  (i.  Roii.  xm.  9.  et  suiv  ;  m  Rois.  xvm.  jo. 
et  suiv.),  et  que  David,  aussi  bien  que  son  fils  Salomon, 
donnèrent  la  bénédiction  au  peuple  au  nom  de  l'Éternel 
(11.  Rois.  vi.  17.  18.  et  111.  Rois.  vui.  55.  et  suiv.)  A  la 
vérité,  suivant  l'opinion  commune,  ils  donnaient  ordre 
aux  prêtres  de  s'acquitter  d"  celle  fonction  pour  eux  ; 
mais  cette  explication  est  forcée  et  incompatible  avec  le 
sens  de  l'original.  Ainsi  iil  nous  paraît  plus  vraisemblable 
que  ceux  que  nous  venons  de  nommer  ont  pu,  moins  en 
qualité  de  chefs  du  peuple,  que  comme  prophètes,  bénir 
le  peuple  et  offrir  des  sacrifices  dans  de  certaines  occa- 
sions, pour  ajouter  à  la  cérémonie  plus  de  solennité. 
Saùl  fut  pendant  quelque  temps  doué  de  l'esprit  de 
Dieu,  et  Samuel  déclara  à  ce  prince  qu'il  pourrait  en 
suivre  la  direction  dans  toutes  les  occasions  (1.  Rois.  x. 
7.  et  suiv.);  ainsi,  lorsque  ce  prophète  blâma  son  indis- 
crétion (Rois.  xm.  ij),  ce  fut  moins  parce  qu'il  avait 
offert  in  holocauste,  que  parce  qu'il  l'avait  fait  contre 
son  avis,  et  par  une  frayeur  déplacée,  de  peur  d'être 
surpris  par  ses  ennemis  ;  car  ce  prince  ajoute  :  Je  me 
suis  fait  violence  à  moi-même,  c'est-à-dire,  ma  frayeur 
m'a  porté  à  cette  action  comme  malgré  moi. 


SUR  L'ORGANISATION   DE  LA  NATION  JUIVE 


39' 


rang;  mais  les  imperfections  légales  qui  empochaient 
qu'un  homme  fût  propre  à  remplir  cette  première 
dignité,  étaient  si  nombreuses,  qu'il  y  a  apparence 
que  cette  raison  transféra  la  souveraine  sacrifica- 
ture  dans  la  branche  cadette  d'Héli,  dans  la  mai- 
son duquel  elle  resta  jusqu'au  temps  de  Saùl.  Il 
arriva  encore  un  ou  deux  changements  au  temps 
de  David,  jusqu'à  ce  que  Salomon,  mécontent 
d'Abiathar,  rétablit  Sadoc,  de  la  famille  de  Phi- 
néès,  dans  le  premier  rang,  qu'elle  conserva 
jusqu'à  la  fin.  Il  paraît  par  là,  qu'Abiathar  fut 
moins  déposé  par  ce  prince,  que  réduit  au  rang 
primitif  de  sa  branche.  Voilà  pourquoi  nous  le 
trouvons  désigné,  après  sa  prétendue  déposition, 
comme  immédiatement  inférieur  à  Sadoc  :  «  Et 
Sadoc  et  Abiathar  étaient  prêtres  (:).  » 

Il  y  avait  quelque  chose  de  si  sacré  dans  la 
dignité  de  souverain  pontife,  qu'il  était  obligé 
d'observer  différentes  lois,  auxquelles  les  autres 
prêtres  n'étaient  point  soumis. 

Il  ne  lui  était  pas  permis  d'épouser  une  veuve, 
une  femme  répudiée,  ou  d'une  conduite  déréglée  ; 
la  personne  avec  laquelle  il  se  mariait,  devait  être 
une  vierge  pure,  et  de  sa  propre  tribu.  Il  lui  était 
défendu  de  porter  le  deuil  de  quelqu'un  de  ses 
parents,  et  d'entrer  dans  une  maison  où  il  y  avait 
un  corps  mort  (2)  :  il  était  obligé  de  s'abstenir  de 
tout  commerce  matrimonial,  durant  les  fêtes  dans 
lesquelles  il  devait  officier,  ainsi  que  de  tout  ce 
qui  pouvait  causer  quelque  souillure.  Il  devait, 
comme  tous  les  autres  prêtres,  être  exempt  des 
défauts  indiqués  par  Moïse  (3),  et  n'avoir  ni  scor- 
but, ni  gale,  ni,  en  un  mot,  la  moindre  imperfec- 
tion par  rapport  à  quelqu'un  de  ses  membres.  Les 
fonctions  sacerdotales  étaient  absolument  inter- 
dites à  tous  ceux  qui  avaient  quelqu'un  de  ces  dé- 
fauts, et  il  leur  était  défendu  d'entrer  dans  le 
saint  lieu,  et  d'offrir  les  pains  de   proposition  (4). 

Lois  relatives  A  la  consécration  du  grand  prêtre. 

La  cérémonie  de  la  consécration  du  grand  prê- 
tre, fut  prescrite  par  Dieu  lui-même,  sur  la  mon- 
tagne^), et  exécutée  par  Moïse  à  l'égard  d'Aaron, 
avec  une  solennité  proportionnée  à  l'éminence  de 
la  charge  dont  elle  était  l'objet.  Cette  cérémonie 
consistait  en  six  choses  : 

1.  Avant  tout,  il  fut  présenté  à  l'Éternel  à  la 
porte  du  Tabernacle,  en  présence  de  tout  le  peu- 
ple. 2.  Il  se  lava  tout  le  corps  dans  l'eau  pure 
tirée  d'un  grand  vase  placé  près  de  l'autel.  3  Immé- 
diatement après,  on  le  revêtit  de  ses  vêtements 


pontificaux,  du  pectoral  et  de  l'ourim.  4.  Ensuite 
il  offrit  certains  sacrifices  marqués,  c'est-à-dire, 
un  jeune  taureau  en  sacrifice  expiatoire,  un  mou- 
ton en  holocauste,  et  un  autre  pour  sa  consécra- 
tion. 5.  Du  sang  de  cette  dernière  victime,  Moïse 
oignit  le  bout  de  l'oreille  droite  d'Aaron,  ainsi 
que  le  pouce  de  sa  main  droite,  et  l'orteil  de  son 
pied  droit.  6.  La  dernière  partie  de  la  cérémonie 
fut  de  l'oindre  de  l'huile  sacrée,  dont  la  compo- 
sition avait  aussi  été  prescrite  par  Dieu  (6),  et  ne 
devait  servir  à  aucun  autre  usage. 

Ces  cérémonies  étaient  répétées  sept  jours  de 
suite,  au  moins  en  ce  qui  avait  rapport  à  l'onction, 
et  à  l'obligation  de  se  laver  et  d'offrir  des  sacri- 
fices ;  mais  il  ne  paraît  pas  que  cette  répétition 
eût  lieu  à  l'égard  de  la  nécessité  de  se  revêtir  des 
ornements  sacerdotaux  (7V  Pendant  tout  ce  temps, 
Aaron  et  ses  fils  devaient  rester  dans  le  Taber- 
nacle. Ils  s'y  nourrissaient  des  victimes  offertes 
pour  leur  consécration  ;  victimes  qu'il  était  dé- 
fendu de  garder  jusqu'au  lendemain  ;  tous  les 
restes  devaient  être  brûlés  la  nuit  môme. 

Le  huitième  jour,  Aaron  entra  dans  l'exercice 
de  sa  charge,  par  un  double  sacrifice  :  l'un  pour 
lui-même,  et  l'autre  pour  le  peuple,  qu'il  bénit 
pour  la  première  fois.  Son  installation  fut  honorée 
par  la  gloire  de  Dieu,  qui  se  manifesta  à  tout  le 
peuple,  et  par  un  feu  sacré  qui  descendit  des 
cieux  (8).  Ce  feu  fut  conservé  depuis  ce  temps-là 
jusqu'à  la  destruction  du  premier  temple,  parce 
qu'il  fut  défendu  expressément,  sous  peine  de 
mort,  d'en  employer  quelqu'autre  dans  le  minis- 
tère sacré. 

Ce  qui  mérite  d'être  observé  dans  cette  pre- 
mière consécration,  c'est  que,  non  seulement 
Aaron,  mais  aussi  ses  fils,  furent  consacrés  dans 
le  même  temps  et  avec  les  mêmes  cérémonies, 
quoique  ces  derniers  dussent  rester  dans  le  rang 
des  prêtres  inférieurs.  C'est  peut-être  pour  cette 
raison,  qu'il  est  dit  qu'Éléazar  fut  installé  dans 
la  souveraine  sacrificature  en  revêtant  les  vête- 
ments de  son  père,  sans  aucune  autre  cérémonie; 
ce  qui  a  donné  lieu  à  quelques  commentateurs 
de  conclure  que  les  autres  cérémonies  ne  devaient 
plus  être  employées  dans  l'installation  des  grands 
prêtres. 

Il  est  vrai  que  le  texte  de  Moïse  n'offre  rien 
qui  nous  mette  en  état  de  réfuter  cette  notion  ; 
mais  si  nous  en  croyons  les  anciens  Juifs,  qu'on 
peut  regarder  comme  juges  aussi  compétents  que 
qui  que  ce  soit  sur  cette  matière,  l'onction  accom- 
pagna toujours  l'investiture  jusqu'à  la  destruction 


(1)  Comp.  m.  Rois.  y.  1.  26.  27.  et  iv.  y.  j. 

(2)  Lévit.  xxi.  y.  10.  et  suiv. 
(j)  Ibid.  xix.  y.  16.  et  suiv. 

(4)  Ibid.  xxi.  y.  22.  et  suiv. 


(<,)  Exod.  xl.  y.  12.  et  suiv. 

(6)  Ibid.  xxx.  y.  22.  et  suiv. 

(7)  Lcvit.  vin.  f.   1.  et  suiv. 

(8)  Ibid.  iv.  pass.  v.  y.  2j  et  24. 


Î9^ 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


du  premier  temple.  A  cette  époque,  Josias  dé- 
posa l'huile  sacrée  dans  un  lieu  si  secret,  qu'il  ne 
fut  plus  possible  de  la  trouver  après  le  retour  de 
la  captivité  de  Babylone.Ce  ne  fut  que  depuis  ce 
temps, que  les  grands  prêtres  furent  installés  sans 
onction  (i). 

Quoi  qu'il  en  soit  à  cet  égard,  il  nous  paraît 
vraisemblable  que  Moïse  eut  ordre  de  consacrer 
les  deux  fils  d'Aaron,  Éléazar  et  Ithamar,  dans 
cette  auguste  cérémonie,  comme  étant  les  chefs 
des  deux  branches  auxquelles  la  souveraine  sa- 
criiicature  était  bornée.  Ce  législateur  consacra 
également  les  habits  sacerdotaux,  le  Tabernacle, 
et  tous  les  ustensiles  sacrés,  qui,  dans  la  suite, 
devaient  être  consacrés  pour  toujours  au  service 
de  Dieu  (2). 

Lois  relatives  aux  paiements  du  grand  prêtre. 

Les  vêtements  sacerdotaux  dont  le  grand  prêtre 
devait  se  servir,  avaient  été  désignés  par  Dieu 
même,  et  étaient  composés  de  tout  ce  qui  pouvait 
les  rendre  riches  et  vénérables.  Les  pierres  pré- 
cieuses de  différentes  sortes,  l'or,  l'argent,  la 
pourpre,  l'écarlate  et  le  fin  lin  y  étaient  employés  ; 
mais,  quant  à  la  forme  des  ornements,  on  n'en 
peut  absolument  rien  dire  que  par  conjecture, 
parce  que  Moïse  ne  nous  en  a  donné  que  les 
noms,  sans  y  ajouter  aucune  description. 

Josèphe,  à  la  vérité,  est  entré  dans  un  plus 
grand  détail  (3);  mais  sa  description  ne  repré- 
sente fidèlement  que  les  habits  des  grands  prêtres 
de  son  temps  ;  ce  qui  ne  donne  aucune  idée  de 
ceux  que  portaient  les  mêmes  pontifes  plusieurs 
siècles  auparavant.  Les  rabbins  en  ont  donné  une 
description  différente  de  la  sienne,  et  celle  de 
saintJérôme  ne  s'accorde  avecaucune  desdeux(_|). 
Nous  pouvons  donc  dire  avec  raison  que  les 
auteurs  modernes  qui  nous  ont  retracé  ces  habits 
avec  tant  d'exactitude,  tant  par  écrit  qu'en  taille- 
douce,  n'ont  enrichi  le  monde  que  d'habits  de 
leur  invention.  Voici  cependant  ce  qu'on  peut 
dire  de  plus  certain  sur  ce  sujet  [(!). 

Il  y  avait  des  habits  de  deux  sortes.  L'un  était 
de  lin,  et  commun  au  grand  prêtre  et  aux  autres 
prêtres  ;  il  ne  différait  qu'en  ce  que  celui  du  grand 
prêtre  était  d'un  plus  riche  tissu,  et  fait  d'un  lin 
plus  fin. 

Les  habits  qui  lui  étaient  particuliers,  et  qu'il 
devait  porter  les  jours  solennels,  étaient  si  riches 
et  si    magnifiques,    que  les  Juifs  les  nommaient 


béged  \ahab,  vêlements  a"or,  et  que  Moïse  les 
désigne  par  l'épithète  de  gloire  ou  ornement 
d'Aaron  (6). 

Le  premier  était  une  robe  violette  ou  de  couleur 
de  pourpre,  qu'il  mettait  pardessus  sa  tunique 
de  lin.  Cet  habit  n'avait  ni  manches  ni  couture, 
suivant  Josèphe;  il  était  tissu  précisément  comme 
la  robe  du  Sauveur,  et  n'avait  qu'une  ouverture 
pour  y  passer  la  tête.  Le  bord  qui  venait  presque 
jusqu'à  terre,  était  garni  d'une  riche  frange,  à 
laquelle  étaient  attachées  alternativement  de  pe- 
tites sonnettes  et  des  pommes  de  grenade  curieu- 
sement travaillées  en  or,  à  une  égale  distance 
l'une  de  l'autre,  afin  que  le  son  qu'elles  rendaient 
en  s'entrechoquant,  servît  à  annoncer  le  grand 
prêtre.  Autour  de  cet  habit  était  un  riche  cein- 
turon qui  faisait  deux  fois  le  tour  de  son  corps,  et 
dont  les  bouts  pendaient  devant  lui  à  une  longueur 
convenable. 

Au-dessus  de  cet  habit,  il  en  avait  un  troisième 
nommé  l'éphod ,  artistement  travaillé  en  or  et 
en  broderie,  et  qui  n'avait  que  deux  pieds  en  lon- 
gueur. A  la  partie  supérieure  de  ce  vêtement, 
étaient  attachées  deux  pierres  précieuses  enchâs- 
sées en  or,  sur  lesquelles  étaient  gravés  les  noms 
des  douze  tribus,  six  sur  chacune,  afin  qu'il  ne 
perdît  jamais  le  souvenir  de  ceux  qui  étaient  con- 
fiés à  ses  soins. 

Sur  le  devant,  à  l'endroit  de  la  poitrine,  s'ap- 
pliquait une  sorte  de  plastron  carré,  large  et 
long  d'un  palme  ,  que  l'on  appelait  pectoral  ou 
rational.  C'était  une  pièce  de  la  même  étoffe 
que  l'éphod,  mais  plus  épaisse  que  le  reste,  à  la- 
quelle étaient  attachées  douze  pierres  précieuses 
enchâssées  en  or,  sur  chacune  desquelles  était 
gravé  le  nom  d'une  tribu.  Ces  pierres  étaient  dispo- 
sées en  quatre  rangs,  chacun  de  trois,  et  le  tout 
tenait  à  l'éphod  par  deux  rubans  couleur  jacinthe 
qui  avaient  aussi  deux  crochets  d'or,  de  manière 
que  le  pectoral  pouvait  être  attaché  à  l'éphod, sans 
qu'il  y  eût  aucun  risque  qu'il  vînt  à  tomber. 

L'éphod  et  le  pectoral  ne  devaient  jamais  être 
séparés  ;  et  les  Juifs  assurent  que,  s'il  arrivait  au 
grand  prêtre,  volontairement  ou  par  ignorance,  de 
mettre  l'éphod  sans  le  pectoral,  il  en  était  puni. 
Cet  ornement  est  appelé  pour  cette  raison  Mémo- 
rial, afin  de  lui  rappeler  combien  devaient  lui  être 
chères  les  tribus  dont  il  portait  les  noms  sur  sa  poi- 
trine. Il  est  aussi  appelé  le  pectoral  du  jugement, 
parce  que  l'oracle  divin  y  était  attaché.  C'est  ainsi, du 
moins,  que  la  plupart  des  commentateurs  ont  en- 


(1)  Selden.    de  Succession   ad  Pontificat,   lib.    11.  c.  9-  - 
Basnag.  Rcp.  Hcb.  t.  I.  I.  11.  c.  7. 

(2)  Lcvit.  vin.  f.   10.  et  suiv.  ad  jo.  ix.  pass. 
(  j)  Antiq.  jud.  ni.  c.  7. 


(4)  S.  Jérôme  à  Fabiola. 

(5)  Antiq.  1.  m.  c.  7.  Cunœus,    Basnag.   Lamy.   C.almcl 
Munk. 

(0)  Exod.  XXVIII.  $.  2. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA   NATION  JUIVE 


93 


tendu  le  commandement  que  Dieu  donna  à  Moïse 
d'attacher  l'ourim  et  le  thoummim  au  pectoral  (i), 
comme  si  c'étaient  des  choses  entièrement  dis- 
tinctes. 

Nous  avons  vu  en  quoi  cet  oracle  consistait, 
et  de  quelle  manière  il  était  consulté  ;  il  nous 
reste  maintenant  à  examiner  quelle  en  était  la 
forme.  Mais  l'obscurité  qui  enveloppe  ce  sujet, 
est  si  grande,  que  nous  aurions  besoin  d'un  nou- 
vel ourim  pour  la  dissiper.  Aucun  écrivain  sacré 
ne  nous  fournit  à  cet  égard  la  moindre  clarté  ;  et 
ceux  qui  nous  ont  fait  part  de  leurs  conjectures, 
semblent  avoir  tellement  donné  l'essor  à  leur  ima- 
gination, qu'on  en  trouve  à  peine  deux  ou  trois 
qui  soient  d'accord  entr'eux  sur  un  seul  article. 

Suivant  quelques  anciens,  il  y  avait  dans  le 
pectoral  une  treizième  pierre  dont  le  lustre  ex- 
traordinaire et  supérieur  à  celui  de  toutes  les 
autres  pierres,  marquait  au  grand  prêtre  les  inten- 
tions de  Dieu  relativement  aux  demandes  qu'on 
faisait  (2).  Et  quoique  saint  Augustin  ait  claire- 
ment prouvé  qu'il  n'y  a  aucun  argument  solide  en 
faveur  de  l'existence  de  cette  pierre  surnumé- 
raire (3),  quelques  modernes  n'ont  pas  laissé  d'en 
ajouter  encore  une  autre,  afin  que  le  thoummim 
eut  la  sienne  aussi  bien  que  l'ourim  (4). 

Un  ancien  père,  dont  l'opinion  a  été  adoptée 
par  un  grand  nombre  de  modernes,  pense  que  ces 
deux  mots  étaient  gravés  sur  une  lame  d'or  atta- 
chée au  pectoral,  ou  bien  brodée  dessus  (î).  La 
plupart  des  Juifs  croient  que  c'était  le  nom 
ineffable,  qui  était  écrit  sur  une  lame  d'or,  ou 
attaché  au  pectoral  de  quelqu'autre  manière  (6)  ; 
et  le  Clerc  croit  que  Ourim  et  Thoummim  étaient 
lesnomsdedeux  pierres  précieuses, attachéesà une 
chaîne  d'orque  le  grand  prêtre  portait  au  cou,  et 
qui  descendait  jusqu'à  sa  poitrine  (7).  Nous  avons 
donné  au  chapitre  xxvm  de  l'Exode  les  diverses 
opinions  concernant  ce  sujet  ;  nous  n'avons  point 
à  y  revenir  ici,  dans  cette  récapitulation. 

Le  dernier  ornement  particulier  au  souverain 
pontife,  était  la  tiare.  Moïse  ne  dit  pas  jusqu'à  quel 
point  elle  différait  de  celle  de  simples  prêtres; 
mais  il  y  a  lieu  de  supposer  qu'étant  désignées 
par  des  noms  différents,  celle  du  grand  prêtre 
l'emportait  sur  les  autres,  du  moins  en  beauté  et 


en  richesse.  En  tout  cas,  quels  que  fussent  les 
points  de  ressemblance  ou  de  différence  qu'il  y  eût 
entre  elles,  la  tiare  pontificale  était  distinguée  des 
tiares  communes,  par  la  lame  d'or,  sur  laquelle 
étaient  gravés  en  hébreu,  ces  mots  :  La  Sainteté 
à  l'Éternel  (8).  Cette  lame  était  appelée,  dans 
d'autres  endroits,  une  couronne  (9),  et  était  atta- 
chée à  la  partie  antérieure  de  la  tiare  par  deux 
rubans  couleur  jacinthe. 

La  sentence,  à  ce  qu'assurent  les  Juifs,  s'éle- 
vait en  relief  au-dessus  de  l'or  (10)  :  mais  cette 
assertion  est  réfutée  par  les  paroles  de  Moïse, 
qui  dit  expressément,  qu'ils  devaient  être  gravés 
en  forme  de  cachet.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  n'y  a 
aucun  lieu  de  douter  qu'ils  ne  servissent  à  expri- 
mer la  sainteté  du  caractère  de  celui  qui  les  por- 
tait ;  sainteté  si  absolue,  que  la  moindre  souillure, 
quoiqu'involontaire,  le  rendait  inhabile  à  remplir 
sa  charge,  jusqu'à  ce  qu'il  en  eût  été  légalement 
purifié. 

Les  Juifs  rapportent  à  cet  égard  une  particu- 
liarité  singulière  ;  quoique  Moïse  n'en  fasse  aucune 
mention,  elle  mérite  bien  de  trouver  place  ici, 
parce  qu'elle  n'est  aucunement  destituée  de  vrai- 
semblance. 

Ils  disent,  d'après  le  thalmud  (  1  :),  que,  comme 
le  grand  prêtre  devait  officier  le  jour  de  l'expiation, 
et  comme  il  était  très  possible  que  ce  pontife  con- 
tractât quelque  souillure  qui  le  mît  hors  d'état  de 
s'acquitter  de  sa  charge,  on  avait  coutume  de  lui 
donner  un  vicaire,  la  veille,  pour  officier  à  sa  place 
en,  cas  de  besoin.  Ce  vicaire  n'était  ni  oint,  ni 
consacré,  quoique  la  solennité  l'obligeât  à  entrer 
dans  le  lieu  très  saint.  Ils  ajoutent  qu'aussitôt  que 
le  pontife  était  purifié,  il  rentrait  dans  l'exercice 
de  sa  charge,  et  que  son  vicaire  rentrait  dans  le 
rang  de  prêtre  ordinaire,  avec  cette  différence 
seulement,  qu'il  avait  une  sorte  de  supériorité  sur 
ses  confrères,  et  que,  si  le  grand  prêtre  venait  à 
mourir  avant  lui, il  succédait  de  droit  à  cette  dignité. 

Josèphe  confirme  cette  assertion  par  l'exemple 
du  grand  prêtre  Matthias,  qui,  s'étant  souillé  en 
songe  la  nuit  qui  précéda  le  jour  de  l'Expiation, 
fut  remplacé  par  Joseph,  fils  d'EIie  (12),  un  de  ses 
proches  parents. 

Le  grand  prêtre  pouvait  être  souillé  de  tant  de 


(1)  Exod.  xxvm.  y.  ;o. 

(2)  Epiphan.  Tract,  de  xn.   Cemmis.  Suidas,  in  Etpoo. 
(?)  Quest.  in  Exod.  cxvn. 

(4)  Arr.  Mont,  et  ot. 

(5)  Cyrill.  Exposit.  Srmbol. 

(6)  Rabbini  plures,  rabbi  Salomon.    V.  Egub.   et  Munst. 

(7)  C'est  probablement,  dit-il,  à  l'imitation  des  Égyp- 
tiens, dont  les  principaux  magistrats  portaient  une  chaîne 
d'or,  au  bout  de  laquelle  pendaient  les  figures  de  la 
Justice  et  de  la  Vérité,  gravées  sur  quelques  pierres 
précieuses  (Diod.  de  Sic.  11.  ;.-  Elicn.  Var.)  Un  voyageur 


nous  apprend,  dans  une  lettre  datée  du  Caire,  qu'il 
avait  vu  en  Egypte  une  très  ancienne  momie,  laquelle 
a'vait  un  large  collier  qui  lui  descendait  jusqu'à  la  poi- 
trine et  au  bout  duquel  était  attaché  un  oiseau  gravé  en 
or  {Pietro  delta  Valle,  epist.  xi.). 

(8)  Exod.  xxvm.  f.  j6. 

(q)  Exod.  xxix.  y.  6;  xxxix.  f.  ;o.  -  Lêvit.  vin.  f.  9. 

(10)  Maim.  Ket.  Hammikd.  c.  ix.  §.  1. 

(11)  Idem.  In  Massic.  in  Yoma. 

(12)  Ant.  iib.  xviii.  c.  8. 


;94 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


manières  différentes  et  imprévues,  et  il  courait  un 
si  grand  danger,  si,  étant  impur,  il  entrait  dans  le 
lieu  très  saint,  qu'il  est  plus  que  probable  qu'on 
désignait  quelqu'un  pour  remplir  sa  place,  s'il 
était  nécessaire.  Mais  nous  n'oserions  décider 
quel  était  ce  substitut,  ni  par  qui,  et  comment  il 
était  établi  ;  il  est  à  présumer  que  c'était  le  chef 
de  la  branche,  non  actuellement  en  exercice  (i). 
Pour  ce  qui  concerne  la  personne  qui  nommait 
ce  grand  prêtre  de  circonstance,  ou  la  cérémonie 
par  laquelle  il  était  choisi,  Moïse  n'a  laissé  par 
écrit  aucun  éclaircissement  à  cet  égard;  il  ne  dit 
rien  non  plus  du  choix  d'un  successeur  à  la  dignité 
pontificale,  quand  l'héritier  immédiat  était  inha- 
bile à  remplir  cette  charge  éminente. 

Lois  concernant  les  prêtres. 

Quoique  Moïse  ne  fasse  mention  que  d'Éléazar 
et  d'Ithamar,  comme  étant  les  chefs  des  deux 
principales  branches  de  la  sacrificature  ,  il  serait 
absurde  d'inférer  de  là  qu'ils  étaient  les  deux 
seuls  qui  officiassent  sous  leur  père  ;  car  il  paraît 
que  Phinéès  avait  déjà  atteint  l'âge  viril,  par  le 
zèle  qu'il  témoigna  dans  une  occasion  impor- 
tante (2),  et  probablement  il  y  en  avait  plusieurs 
autres  assez  âgés  pour  s'acquitter  des  fonctions 
sacerdotales.  Ceux-ci  étant  subordonnés  au  grand 
prêtre,  et  d'un  rang  supérieur  à  celui  des  lévites, 
peuvent  être  considérés  par  rapport  à  leur  consé- 
cration, à  leur  emploi,  et  à  leur  habillement. 

Leur  consécration,  si  nous  en  exceptons  celle 
des  fils  d'Aaron,  se  faisait  avec  peu  ou  point  de 
cérémonie.  D'abord,  on  examinait  soigneuse- 
ment s'ils  étaient  exempts  d'imperfections  natu- 
relles et  d'impuretés.  Dès  qu  ils  étaient  trouvés 
tels,  on  les  introduisait  dans  le  parvis  du  Taber- 
nacle ou  du  temple  ;  ils  s'y  lavaient  eux-mêmes 
avec  de  l'eau  pure,  gardée  pour  cet  usage;  après 
quoi,  étant  revêtus  de  leur  habit  sacerdotal,  on 
les  amenait  au  souverain  sacrificateur,  qui  les 
présentait  à  l'Éternel. 

Les  sacrifices  ordinaires,  prescrits  par  Moïse, 
étant  achevés,  le  pontife,  ou  le  prêtre  officiant, 
les  sanctifiait,  ou,  comme  il  y  a  dans  l'original 
remplissait  leurs  niains.ceqm  signifie  qu'ils  étaient 
chargés  d'une  partie  des  fonctions  de  leur  nou- 
veau ministère.  Au  reste,  ces  cérémonies  ne  sont 


pas  détaillées  spécialement  ;  on  en  juge  d'après 
celles  qu'on  employait  à  la  consécration  des 
lévites  ());  car,  comme  ces  derniers  étaient  d'un 
rang  inférieur,  il  est  raisonnable  de  supposer  que 
les  prêtres  n'étaient  pas  consacrés  avec  moins  de 
solennité  qu'eux  ;  mais,  dans  cette  supposition 
même,  on  doute  si  quelques-uns  d'eux,  à  l'excep- 
tion seulement  des  deux  ou  trois  premiers,  ont 
été  jamais  employés,  sinon  dans  les  cas  de  quel- 
que défection  signalée, comme  il  n'arriva  que  trop 
souvent  sous  les  règnes  des  rois  impies  qui  désho- 
norèrent le  trône  de  Juda(4). 

Leur  emploi,  déterminé  par  le  sort  dès  qu'ils 
entraient  en  fonction,  était,  ou  de  brûler  de  l'en- 
cens le  matin  et  le  soir  dans  le  lieu  saint,  ou  d'of- 
frir le  sacrifice  journalier,  ou  d'autres  sacrifices 
particuliers  à  la  journée,  de  verser  le  sang  au  pied 
de  l'autel,  d'entretenir  un  feu  continuel  sur  l'au- 
tel des  holocaustes,  d'allumer  les  lampes,  de  faire 
et  d'offrir  les  pains  de  proposition  sur  la  table 
d'or,  et  de  s'acquitter  de  quelques  autres  devoirs 
de  même  nature,  dont  nous  avons  eu  occasion  de 
parler  dans  les  articles  des  sacrifices,  des  pré- 
mices et  des  purifications. 

Ils  étaient  en  fonctions  depuis  un  sabbat  jus- 
qu'au sabbat  suivant,  par  quartier,  suivant  leurs 
classes  :  l'âge  auquel  ils  devaient  commencer  leur 
ministère,  était  fixé  par  Moïse  à  environ  vingt- 
cinq  ou  trente  ans,  et  ils  sortaient  de  charge  à 
cinquante  environ  (5)  ;  mais,  du  temps  de  David, 
ils  entraient  dès  l'âge  de  vingt  ans  dans  l'exercice 
de  leurs  charges  (6). 

Ceux  qui,  soit  par  vieillesse,  soit  par  infirmité, 
étaient  hors  d'état  de  s'acquitter  des  devoirs  de 
leurs  emplois,  étaient  entretenus  des  offrandes 
de  l'autel,  et  autres  revenus  du  sacerdoce  ;  et  si 
quelque  lévite  s'offrait  volontairement  à  servir 
dans  ie  temple  toute  sa  vie,  il  était  admis  à  jouir 
du  même  privilège  (7),  comme  nous  le  verrons 
dans  la  suite. 

Les  autres  parties  importantes  de  l'office  des 
prêtres,  étaient  d'instruire  le  peuple  (8),  de  pro- 
noncer sur  certaines  controverses  et  disputes  (9), 
de  juger  de  la  lèpre  et  des  autres  pollutions  (lu), 
des  causes  du  divorce,  des  occasions  où  il  1  allait 
employer  les  eaux  de  jalousie  (u),  des  vœux,  des 
victimes,  de  sonner  de  la  trompette,  soit  quand 
il  était  question  d'aller  à  la  guerre,  soit  pour  pro- 


(1)  C'est  vraisemblablement  de  ce  personnage  qu'il 
est  parlé  dans  le  dernier  chapitre  de  Jércmie,  où  il  dit 
que  le  capitaine  de  la  garde  emmena  Saraïas  le  grand  sacri- 
cateui,  cl  Sopkonie  le  second  sacrificateur  (y.  24)  Plusieurs 
savants  croient  que  c'est  dans  le  même  sens  que  saint 
Luc  dit  qu'Anne  et  Caïphe  étaient  grands  prêtres  la 
même  année  (Luc,  m.  y.  2-  Vid.  Cas.iub .  adv.  Baron-  Jos. 
Scaliger.  prolog.  in  Euseb.  -  Hotting.  in  Goodivin's  Mos 
cl  Art.  lib.  I,  c.   ;.  Note  19  et  al.) 


(2)  Nomb.  xxv.  y\  7.  et  suiv. 
(?)  Nomb.  vin.  f.  5.  et  suiv. 

(4)  iv.  Rois.  11.  y.  <,.  7. 

(5)  Nomb.  iv.  y.  ?;  vm.  y.  24. 

(6)  1.  Paralip.  xxui.  y.  24;  11.  Paralip.  xxxi.  y.  17. 

(7)  Deut.  xviii.  y.  6. 

(8;  Léu.  x.  y.  u.  -  Malack.  11.  7. 

(9)  Deut.  xvn.  y.  8. 

(io)  Lévit.  xi»,  xiv.  xv. —  (il)  Nombr.  v.  y.  12 


SUR   L'ORGANISATION   DE  LA   NATION  JUIVE 


59< 


clamer  le  sabbat  et  les  fêtes  solennelles,  et  pour 
encourager  les  combattants.  Mais,  leur  fonction 
la  plus  sacrée  était  de  porter  l'Arche,  d'être  dépo- 
sitaires de  la  loi,  et  de  bénir  le  peuple  au  nom  de 
l'Éternel  (i). 

Il  y  avait  aussi,  relativement  à  leurs  charges, 
certaines  défenses,  dont  les  unes  étaient  expres- 
ses, et  les  autres  implicites.  L'usage  de  quelque 
feu  étranger  (2)  leur  était  interdit,  et  ils  ne  pou- 
vaient boire  du  vin  ou  quelque  liqueur  capable 
d'enivrer,  lorsqu'ils  devaient  s'acquitter  de  quel- 
que partie  de  leur  charge  (3).  Il  leur  était  pareil- 
lement défendu  de  commencer  aucune  fonction 
sacerdotale,  avant  de  s'être  lavé  les  mains  et  les 
pieds  (4).  Ils  devaient  ne  remplir  aucune  de  leurs 
fonctions  sans  avoir  leurs  habits  sacerdotaux,  et 
ne  point  paraître  en  public  avec  des  habits  déchi- 
rés, parce  que  c'était  une  marque  de  deuil,  ou 
avec  des  cheveux  trop  longs,  ou  la  tête  décou- 
verte. 

A  ces  défenses,  les  thalmudistes  en  ont  ajouté 
quelques  autres,  comme  de  s'asseoir  quand  ils 
remplissaient  quelque  partie  de  leur  charge  (5)  ; 
de  se  servir  de  la  main  gauche  au  lieu  de  la  droite, 
parce  que  les  oreilles  droites  et  les  pouces  droits 
d'Aaron  et  de  ses  fils  étaient  sanctifiés  par  le 
sang  des  victimes;  et  d'autres  prohibitions  de 
moindre  conséquence  (6). 

Du  temps  de  David,  les  deux  familles  d'EIea- 
zar  et  d'Ithamar  furent,  par  des  raisons  d'ordre, 
partagées  en  vingt-quatre  classes,  suivant  l'impor- 
tance de  chaque  famille  ;  la  première,  qui  était  la 
plus  nombreuse,  était  divisée  en  seize,  et  la  der- 
nière, en  huit  classes.  Elles  avaient  leur  tour  dans 
le  ministère,  suivant  qu'il  leur  était  assigné  par  le 
sort  jeté  ordinairement  en  présence  du  roi,  du 
grand  prêtre,  et  d'autres  personnes  de  distinction, 
afin  d'éviter  la  fraude  et  la  confusion  :  ces  classes 
empruntaient  leurs  noms  de  leurs  chefs,  et  con- 
tinuèrent à  être  ainsi  appelées  jusqu'à  la  fin  ;  de-là 
vint  que  les  chefs  de  ces  classes  portèrent  dans 
la  suite  le  titre  de  princes  des  prêtres.  Voilà  pour- 
quoi nous  trouvons  dans  deux  évangélistes  (7) 
une  assemblée  de  ces  grands  prêtres  ou  souve- 
rains sacrificateurs,  prêtres  suprêmes,  summi  sacer- 
doles,  qu'il  faut  bien  distinguer  du  grand  prêtre 
qui  remplissait  les  hautes  fonctions  du  souverain 
pontificat  et  de  son  suffragant. 


Le  costume  des  prêtres  consistait  en  une  tuni- 
que, un  caleçon,  une  ceinture  et  une  tiare,  le 
tout  de  lin  ;  la  tiare  ressemblait,  suivant  Josèphe, 
à  un  casque  ou  turban  pointu.  Leur  ceinture,  sur 
laquelle  différentes  fleurs  fit  diverses  figures 
étaient  représentées,  était  tissue  de  manière 
qu'elle  ressemblait  à  une  peau  de  serpent.  On 
prétend  que  la  tunique  était  sans  couture,  depuis 
le  haut  jusqu'au  bas.  Quelques  auteurs  nous 
en  ont  donné  le  dessin  aussi  exactement  que 
s'ils  l'avaient  vue  (8).  Il  faut  tenir  compte  plus 
de  leur  bonne  volonté,  que  de  leurs  rensei- 
gnements. 

Il  n'était  permis  à  aucun  prêtre  de  laisser 
acquérir  à  ses  cheveux  toute  leur  longueur;  mais 
il  était  obligé  de  se  les  couper,  du  moins  quand  il 
allait  entrer  en  fonction  (9).  Les  prêtres  n'étaient 
tenus  de  porter  leurs  habits  de  cérémonie  que 
quand  ils  officiaient. 

Rien  n'était  abandonné  au  hasard;  toutes  les 
circonstances  avaient  été  prévues  de  manière  à 
éviter  tout  conflit.  Malgré  leur  position  subal- 
terne, la  situation  des  lévites  n'était  pas;  plus  que 
le  reste,  laissée  à  l'arbitraire. 

Lois  concernant  tes  lévites. 

Les  lois  réglaient,  ou  leur  emploi,  ou  leurs 
privilèges  et  leurs  revenus.  A  leur  consécration, 
on  employait  Veau  lustrale  en  usage  pour  purifier 
ceux  qui  avaient  contracté  quelque  souillure 
légale  ;  ensuite  on  leur  rasait  tout  le  corps,  on 
lavait  tous  leurs  habits,  et  ils  étaient  présentés 
parle  peuple  au  grand  prêtre  (10). 

Leur  habillement  était  le  même  que  celui  des 
autres  Israélites,  Moïse  ne  leur  en  ayant  point 
assigné  de  particulier. 

Avant  que  David  les  eût  partagés  en  classes, 
leur  ministère  était  en  commun,  et  ils  le  rem- 
plissaient tour-à-tour,  par  semaines,  comme  les 
prêtres.  L'emploi  des  uns  était  d'apporter  l'eau, 
le  bois,  et  les  autres  choses  dont  les  prêtres 
avaient  besoin  ;  d'autres  tenaient  le  parvis  du  sanc- 
tuaire, et  tous  les  ustensiles  qui  étaient  hors  du 
Tabernacle,  dans  un  état  de  décence  et  de  pro- 
preté; d'autres  étaient  de  garde,  pendant  la  nuit, 
devant  le  Tabernacle.  De  même,  quelques-uns 
étaient  destinés  à  chanter  et  à  jouer  de  certains 


(1)  Ibid.  vi.  f.  2j. 

(2)  Livil.  x.  f.   1. 

(  j)  Ibid.  verset  9. 
(4)  Exod.  xxxi.  y.  ïi. 

(«)  Quelques-uns  de  leurs  rabbins  ont  été,  à  la  vérité, 
plus  relâchés,  et  ont  permis  aux  prêtres  de  s'asseoir 
pendant  qu'ils  n'officiaient  point;  mais  les  thalmudistes, 
bien  loin  d'avoir  une  pareille  condescendance,  ont  pré- 
tendu qu'ils  devaient  se  tenir  debout,  même  en  se  lavant 


les  pieds  :  fondés  sur  ces  paroles  de  Moïse  :  l'Eternel  l'a 

choisi  pour   assister,   etc {Deut.  xvm.  j^.  5.  -  R.  Salom. 

Jar'hi.  in  Deut.   xvm.    <,.  et  al). 

<b)  V.  Maimon.  Biath  Hammickdash.  c.  1.  seq.-  Bas<iag. 
R.   H    t.  III.  1.  11.  c.  4. 

(7)  Matin,   xxvi,  fi.  j.  -  Marc.  xv.  fi.  2. 

(8)  Josèphe,  Lamr,  Calme/  et  autres. 

19)  Comp.  Lêuit.  xxi.  fi.  5.  et  É\éch.  xliv.  y.  20. 
(10)  Nombr.  vm.  fi.  7  et  suiv. 


596 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


instruments;  d'autres  à  étudier  la  loi  et  à  l'expli- 
quer au  peuple,  comme  aussi  à  assister  aux  cours 
inférieures  de  justice  ;  et  il  y  a  apparence  que  les 
talents  particuliers  de  chacun  décidaient  de  la 
manière  de  l'employer.  Mais  après  que  David 
eût  fixé  l'Arche  à  Jérusalem,  et  eût  formé  le 
vaste  projet  de  bâtir  le  temple;  ce  sage  monarque 
fit,  relativement  à  leurs  fonctions,  plusieurs  règle- 
ments, qui  subsistèrent  jusqu'à  la  dissolution  du 
gouvernement  des  Juifs. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  les  lévites  étaient 
partagés  en  trois  familles:  celle  de  Gerson,  de 
Caath  et  de  Mérari.  Moïse  subdivisa  chacune 
d'elles  en  diverses  classes,  qui  devaient  se  suc- 
céder tour-à-tour.  Comme  les  fonctions  de  cha- 
cune ne  devaient  durer  qu'une  semaine,  ce  légis- 
lateur assigna  ce  qu'elle  aurait  à  faire  de  la 
manière  suivante  : 

La  première  devait  assister  les  prêtres  au  minis- 
tère du  Tabernacle,  et  les  aider  à  préparer  la 
fleur  de  farine,  les  gâteaux,  le  vin  et  l'huile,  en  un 
mot,  tout  ce  qui  avait  rapport  aux  sacrifices. 
L'emploi  de  la  seconde,  était  de  chanter  et  de 
jouer  de  quelques  instruments  de  musique  à  de 
certaines  fêtes,  ou  à  l'occasion  de  certaines  par- 
ties du  service  divin;  et  la  troisième  devait  mon- 
ter constamment  la  garde  autour  du  Tabernacle, 
et  dans  la  suite  aux  environs  du  temple. 

Chacune  de  ces  classes  était  gouvernée  par  des 
officiers  pris  de  son  propre  corps",  et  choisis  à 
cause  de  leur  mérite.  !!  fit  choix  pareillement, 
parmi  eux,  de  quelques  hommes  distingués  par 
leur  savoir  et  par  leur  piété,  pour  instruire  les 
jeunes  lévites  dans  ce  qui  concernait  leurs  fonc- 
tions, et  pour  expliquer  la  loi  au  peuple;  sans 
compter  ceux  qu'il  destina  à  remplir  des  places 
de  magistrats  dans  chaque  ville.  Or,  de  toutes 
ces  fonctions,  il  n'y  en  avait  aucune  qu'un  homme, 
âgé  de  plus  de  cinquante  ans,  ne  fût  parfaite- 
ment capable  de  remplir,  si  nous  en  exceptons 
celle  de  chanter,  parce  que  la  voix  perd  une 
grande  partie  de  son  agrément  à  un  certain 
âge(i). 

Salomon  distingua  ces  chantres  de  leurs  frères, 
en  leur  permettant  de  porter  une  robe  ou  surplis 
de  fin  lin,  quand  ils  étaient  en  [onction  (2);  mais 
les  autres  n'obtinrent  ce  privilège  que  sous  le 
règne  d'Agrippa,  quelques  années  seulement 
avant  la  destruction  du  second  temple.  Josèphe(3) 
ajoute  que  les  prêtres  ne  purent  voir  de  pareils 
changements  sans  en  être  indignés,  et  qu'ils  entraî- 
nèrent presque  toujours  après  eux  des  châtiments 


exemplaires.  En  donnant  le  nom  de  chantres  aux 
lévites  dont  il  parle,  il  est  tombé  dans  une 
erreur  manifeste,  qu'il  est  peut-être  plus  simple 
de  rejeter  sur  l'inattention  des  copistes  :  il  est 
certain  que  l'espèce  de  privilège  dont  nous  par. 
Ions,  fut  dans  toute  son  activité,  même  du  temps 
de  Salomon,  et  que  les  chantres  n'avaient  rien  à 
obtenir  d'Agrippa,  à  cet  égard.  Le  roi  juif  ne  fit 
probablement  qu'étendre  ce  privilège  à  d'autres 
lévites. 

Il  serait  inutile  de  traiter  séparément  des  reve- 
nus des  lévites  et  de  ceux  des  prêtres,  car  les 
mêmes  biens  leur  étaient  pour  ainsi  dire  communs. 
On  se  rappelle  sans  cloute,  que,  selon  la  pro- 
phétie de  Jacob,  la  tribu  de  Lévi  devait  être 
incorporée  dans  toutes  les  autres  tribus  (4),  et 
que,  par  une  loi  consacrée  dans  le  Deutéro- 
nome  (5),  les  lévites  ne  devaient  vivre  dans  la 
terre  Promise,  que  des  dîmes,  des  offrandes,  et  du 
rachat  des  premiers-nés,  qu'ils  représentaient. 
Arrivés  aux  plaines  de  Moab,  vis-à-vis  de  Jéricho, 
Dieu  leur  désigna  leurs  possessions  :  elles  s'éten- 
daient sur  quarante-huit  villes  avec  leurs  fau- 
bourgs ;  treize  d'entr'elles  furent  le  partage  des 
prêtres  ;  les  trente-cinq  autres  restèrent  à  la  tribu 
de  Lévi  (6). 

La  plupart  des  villes  qui  appartenaient  aux 
prêtres,  étaient  placées  dans  les  tribus  de  Juda 
et  de  Benjamin,  voisines  de  Jérusalem;  mais  le 
sort  avait  seul  présidé  à  la  situation  de  celles  qui 
étaient  échues  aux  lévites  ;  ces  dernières  étaient 
élevées  indistinctement  des  deux  côtés  du  Jour- 
dain, et  se  trouvaient  enclavées  dans  différentes 
tribus.  En  accomplissant  la  malédiction  de  Jacob 
sur  Lévi,  le  législateur  la  changea,  pour  ainsi  dire, 
en  bénédiction;  car  cette  dispersion  des  prêtres 
et  des  lévites,  communiqua  au  peuple  l'amour  de 
l'étude  et  la  connaissance  de  la  vraie  religion.  Ce 
serait  faire  des  recherches  aussi  vaines  que  péni- 
bles, que  de  vouloir  faire  la  description  des  diffé- 
rentes villes  dont  on  vient  de  parler  :  on  ne  les 
connaît  guère  que  par  les  noms  qu'elles  ont  por- 
tés; et  nous  avons  émis  sur  plusieurs  d'entre  elles 
les  conjectures  les  plus  vraisemblables  ;  mais  nous 
pouvons  examiner  ici  quels  étaient  leurs  droits, 
leurs  privilèges,  leurs  exemptions  et  leurs  revenus. 

Les  propriétaires  des  villes  lévitiques  avaient 
non  seulement  la  jouissance  des  revenus  annuels 
qu'elles  produisaient,  mais  encore  le  privilège 
particulier  de  les  vendre  ou  de  les  aliéner.  A  ce 
dernier  droit  s'en  joignait  un  plus  particulier 
encore,  celui  de  les  racheter  quand  ils  le  juge- 


(1)  V.  Obaci.  Barlhenor.   Trait.  Cholin.  c.  1.  S-  6. 

(2)  11.  ParaLip.  v.  f.  12 
(j)  Antiq.  1.  xv.  c.  8. 


(4)  Gcncse.  xlix.  f.  7. 
($)  Ibid.  xviii.  passim. 
(0)  Nomb.  xxxv.  f.  1.  et  suiv.  -  Jos.  xxi.  f.  10.  et  suiv. 


SUR  L'ORGANISATION   DELA   NATION   JUIVE 


39: 


raient  à  propos,  et  d'en  reprendre  possession 
l'année  du  jubilé.  Les  laïques  au  contraire,  s'ils 
vendaient  une  maison  située  dans  une  ville  murée, 
en  perdaient  pour  jamais  la  propriété,  si,  comme 
nous  l'avons  observé  ailleurs,  ils  n'exerçaient  le 
retrait  avant  que  l'année  de  la  vente  fût  révo- 
lue (1).  Le  lévite  était  donc  attaché  à  sa  pos- 
session d'un  lien  plus  fort  que  le  particulier  ne 
l'était  à  la  sienne;  aussi  celle  du  premier  est-elle 
désignée  dans  l'Écriture  sous  le  nom  d'héritage  (2). 
Cependant  il  ne  faut  pas  croire  que  le  lévite  eût 
la  faculté  d'aliéner  le  territoire  dépendant  des 
villes;  un  pareil  droit  n'appartenait  à  personne  (j). 
Les  terres  ainsi  placées  produisaient  des  pâtu- 
rages communs,  et  auxquels  chacun  avait  un  droit 
égal.  Lorsque,  par  un  consentement  unanime,  un 
territoire  commun  devait  être  partagé  pour  en 
former,  soit  des  champs,  soit  des  vergers  parti- 
culiers, on  observait  scrupuleusement  que  l'éten- 
due des  parts  fût  proportionnée  au  nombre  des 
individus  qui  formaient  chaque  famille,  et  leur  sub- 
sistance étant  inséparable  de  ces  sortes  de  pos- 
sessions, il  est  évident  qu'elles  ne  pouvaient  être 
aliénées. 

Quoiqu'à  l'époque  du  partage  des  terres  il  n'y 
en  eût  aucune  d'assignée  aux  lévites,  on  ne  peut 
cependant  douter  qu'ils  n'eussent  la  faculté  d'ac- 
quérir et  de  posséder  :  l'Écriture  en  fournit  assez 
d'exemples.  On  y  lit,  à  l'article  des  vœux,  que  si 
un  particulier  consacrait  sa  maison  ou  son  pays  à 
l'Éternel,  sans  avoir  l'intention  ou  le  moyen  de 
les  retirer  à  l'avenir,  ils  restaient  voués  à  Dieu  (4), 
c'est-à-dire,  que  les  prêtres  en  devenaient  les 
propriétaires.  On  sait  que  le  grand  prêtre  Abia- 
thar  fut  exilé  (>)  par  Salomon  dans  une  terre  qui 
lui  appartenait;  et  que,  du  temps  de  saint  Paul,  le 
lévite  Barnabe,  Cypriote  de  nation,  se  défit  d'un 
bien-fonds  pour  en  mettre  la  valeur  aux  pieds  des 
apôtres  (6).  Ajoutons  à  ces  divers  témoignages, 
celui  que  nous  fournit  Maimonide  :  il  dit  que  la 
tribu  de  Lévi  possédait  de  droit  la  douzième 
partie  de  tous  les  pays  conquis  l'épée  à  la  main(7). 
Ne  voilà-t-il  pas  des  preuves  suffisantes  que  les 
lévites  étaient  habiles  à  posséder  des  terres  ? 
Quant  aux  privilèges  d'en  acquérir  de  nouvelles, 


(1)  Lêv.  xxv.  f.  29.  et  suiv. 

(2)  Ibid.  f.  jj- 
(5)  Ibid.  f.  m- 

(4)  Léoit.  xxvii.  p.  14.  et  suiv. 

(5)  m.  Rois.  11.  f.  ai. 
(O)  Ad.  iv.  y.  56.  J7. 

(7)  Halak,  Shemltah  Veyobel.  V.  Bisnag.  ubi  sup. 
(S)  Versets  7  et  suiv. 

(9)  Nombr.  xxv.  f.  4,  5. 

(10)  V.  Comm.  in  Exod.  xm.-Nomb.  xxxv.  y.  6.-  Deul.iv. 
y.  ai.  et  xix.  y.  2. 

(11)  Voyez  les  citations  faites    par    Basnage    dans   ses 
Antiquités  judaïques,  I,  liv.  1.  c,  7. 


il  est  également  démontré  par  le  chapitre  trente- 
deuxième  du  prophète  Jérémie  ;  on  y  trouve  le 
détail  assez  curieux  de  toutes  les  formalités  qu'il 
fallait  remplir  dans  l'acquisition  d'une  terre  (8).  _ 
Chaque  ville  qui  appartenait  aux  lévites,  était 
entourée  de  ses  faubourgs,  dont  les  limites 
avaient  été  fixées  par  ordre  de  Dieu  (9)  ;  mais  il 
est  extrêmement  difficile  de  déterminer  le  sens 
que  Moïse  a  voulu  donner  à  ses  paroles,  quand 
il  traite  cette  matière.  Les  Juifs  disent  que  l'éten- 
due de  ces  faubourgs  devait  former  trois  mille 
coudées,  en  prenant  les  mesures  en  dehors  des 
muriilles  (10). Selon  eux, on  ne  devait  ni  planter, ni 
semer  dans  l'étendue  des  mille  coudées  les  plus 
rapprochées  du  centre, parce  qu'elles  devaient  être 
entièrement  consacrées  à  produire  des  pâturages. 
On  ne  doit  pas  omettre  qu'il  leur  était  spéciale- 
ment défendu  d'enterrer  leurs  morts  dans  les 
villes  et  dans  les  faubourgs.  Les  Juifs  préten- 
dent que  le  peuple  leur  accordait  pour  cet  usage 
une  pièce  de  terre  placée  hors  de  l'enceinte.  On 
ne  s'étendra  point  ici  davantage  sur  les  droits  et 
les  prérogatives  de  ces  villes.  Les  Juifs  nous 
racontent  à  ce  sujet  une  foule  d'anecdotes  fabu- 
leuses que  les  amateurs  de  fictions  pourront  con- 
sulter à  loisir  dans  Maimonide  (  1 1),  et  dans  les 
commentaires  de  quelques  rabbins  sur  le  Penta- 
teuque  (12);  disons  seulement  que  le  nombre  des 
villes  fournies  aux  lévites  par  chaque  tribu, 
n'était  pas  égal,  mais  relatif  au  nombre  des  cités 
qu'elles  possédaient;  par  exemple,  la  tribu  de 
Juda,  comme  puissamment  riche,  en  céda  neuf, 
tandis*  que  celle  de  Benjamin,  qui  l'était  infini- 
ment moins,  n'en  fournit  que  quatre  (14».  Le 
hasard  décida  du  partage  qui  s'en  fit  aux  lévites, 
comme  il  avait  présidé  à  la  distribution  de  tout 
le  pays  ;  moyen  qui  n'avait  été  employé  que  pour 
prévenir  les  différends  qui  auraient  pu  s'élever  à 
ce  sujet  (14). 

Lois  concernant  les  six  villes  de  refuge. 

On  choisit  ces  villes  parmi  les  quarante-huit 
dont  jouissait  la  tribu  de  Lévi.  C'étaient  des  asiles 
sacrés  destinés  à  protéger  l'innocence  contre  la 


(12)  Rab.Salom.  in  los.  Ci",  et  Mos.  de  Coi-i,  Munst. 
Jun.  et  al.  in  loc. 

(  1  j)  Job.  xxi.  passim. 

(14)  On  régla  par  le  sort,  que  les  tribus  de  Juda,  de 
Siméon  et  de  Benjamin,  fourniraient  les  treize  villes 
destinées  aux  prêtres,  et  que  celles  d'Éphraïm,  de  Dan, 
et  la  demi-tribu  de  Manassé  au-delà  du  Jourdain,  en 
céderaient  dix  aux  Caathites.  Les  Gersonites  en  reçurent 
treize,  deux  de  l'autre  demi-tribu  de  Manassé,  trois  de 
Neph'thali,  et  huit  d'Issachar  et  d'Aser.  Enfin  les  Méra- 
rites  en  eurent  douze,  dont  les  tribus  de  Ruben,  de 
Zabulon  et  de  Gad,  en  fournirent  quatre  chacune  (V. 
Jo$.  xxi.  passim.) 


v>'>, 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


sévérité  des  lois,  dans  les  cas  de  meurtres  invo- 
lontaires; aussi  ne  doit-on  pas  les  comparer  à 
ceux  des  Grecs  et  des  Romains,  qui  trop  souvent 
devenaient  la  retraite  des  vrais  coupables. 

Le  livre  de  l'Exode  renferme  le  commande- 
ment formel  d'arracher  même  de  l'autel,  et  de 
mettre  à  mort  le  scélérat  coupable  d'un  meurtre 
volontaire  ( i);  ainsi  le  Tabernacle  fut  l'asile  de 
l'innocent,  non  seulement  pendant  le  séjour  des 
Israélites  dans  le  désert,  mais  même  pendant  tout 
le  temps  qu'ils  habitèrent  le  pays  de  Canaan. 
Joab,  se  réfugiant  dans  le  temple,  justifie  la  der- 
nière partie  de  cette  assertion,  mais  son  crime 
était  de  nature  à  le  priver  du  bienfait  qu'il  y  cher- 
chait (2).  La  loi  était  si  sévère  contre  le  meur- 
trier, que,  s'il  l'était  devenu,  soit  dans  une  que- 
relle, soit  en  châtiant  un  serviteur,  ou  enfin  dans 
quelques-unes  des  circonstances  qui  peuvent  pro- 
duire ce  que  nous  appelons  un  meurtre  involon- 
taire, le  coupable  n'en  était  pas  moins  puni  (5); 
et  s'il  était  prouvé  que  l'action  fut  réellement 
involontaire,  bien  que  Dieu  voulût  conserver 
l'innocent,  il  fallait  qu'il  se  retirât  dans  quelqu'une 
des  villes  de  refuge.  Quoique  l'Éternel  se  char- 
geât, pour  ainsi  dire,  de  la  faute  du  coupable,  il 
ne  laissait  pas  de  le  condamner  à  une  espèce  de 
bannissement, qui  ne  finissait  qu'à  la  mort  du  grand 
prêtre  alors  en  exercice  (4);  et  si,  dit  Josèphe, 
pendant  cet  exil  il  avait  l'imprudence  de  sortir 
de  l'enceinte  à  laquelle  il  devait  la  conservation 
de  ses  jours  (5),  il  était  libre  au  premier  parent 
du  défunt  qui  le  rencontrait,  ou  de  lui  arracher 
lui-même  la  vie,  ou  de  le  livrer  à  toute  la  sévérité 
de  la  justice,  qui  n'hésitait  point  à  le  faire  punir 
de  mort. 

Ces  villes  étaient  également  privilégiées,  et  en 
faveur  des  Israélites,  et  en  faveur  des  étrangers 
qui  vivaient  parmi  eux;  mais  l'orgueil  juif  voulait 
que  ce  bienfait  ne  pût  s'étendre  qu'aux  prosély- 
tes (6).  Nous  l'avons  déjà  dit.  Moïse  avait  voulu 
que  trois  ces  villes  fussent  situées  sur  chacun 
des  côtés  du  Jourdain  (7).  Il  paraît  difficile  de 
saisir  la  raison  qui  détermina  une  pareille  division; 
car  on  ne  comptait  que  deux  tribus  et  demie  de 
l'un  des  côtés  de  ce  fleuve,  tandis  que  l'autre  en 
contenait  neuf  et  demie.  C'est  à  la  nécessité  où 
l'on  était  sans  cesse  de  se  défendre  contre  d'in- 
justes agresseurs,  disent  les  Juifs,  que  l'on  doit 
attribuer  cette  inégalité.  En  effet,  où  l'on  est 
continuellement  les  armes  à  la  main,  les  meur- 
tres doivent  être  plus  fréquents  qu'ailleurs.    La 


raison  que  donne  Nachman  de  cette  singulière 
distribution,  nous  paraît  encore  plus  vraisembla- 
ble. Il  a  observé  que  les  deux  tribus  et  demie  pos- 
sédant une  étendue  de  terrain  tout  aussi  considé- 
rable que  les  neuf  autres  et  demie  ensemble,  on 
ne  devait  plus  être  surpris  que  le  nombre  des 
villes  de  refuge  fût  égal  des  deux  côtés.  Dieu 
cependant  fit  espérer  aux  tribus  d'au-delà  du 
Jourdain,  que  le  nombre  de  leurs  villes  de  refuge 
serait  augmenté  sitôt  que,  par  des  conquêtes, 
elles  auraient  reculé  les  bornes  de  leur  pays  (8). 
La  conduite  des  Juifs,  malheureusement,  ne  se 
trouvant  presque  jamais  d'accord  avec  la  loi  de 
Dieu,  ce  nouveau  bienfait  n'exista  point;  et  ils  ne 
l'obtiendront  de  l'Éternel,  disent  leurs  descen- 
dants, qu'à  la  venue  du  Messie  qu'ils  attendent. 
Ni  le  texte,  ni  les  commentateurs  ne  nous  appren- 
nent clairement  de  quelle  manière  on  s'y  prenait 
pour  instruire  le  procès  de  l'homicide,  quels 
étaient  les  juges  compétents,  ou  en  quel  lieu  se 
faisait  l'instruction.  Il  ne  s'agissait  d'abord  que 
de  savoir,  si  l'accusé  devait  jouir  ou  non  du  pri- 
vilège attaché  aux  villes  de  refuge.  Dom  Cal- 
met(o)  a  cru  voir  dans  une  expression  du  Deuté- 
ronome  et  du  livre  de  Josué  (10), que  l'instruction 
devait  se  faire  en  deux  endroits  différents;  savoir, 
devant  les  magistrats  de  la  ville  de  refuge,  et, 
devant  ceux  du  lieu  où  le  meurtre  avait  été  com- 
mis ;  mais  nous  croyons  que  ce  dernier  tribunal 
ne  prononçait  que  quand  l'accusateur  en  appelait 
de  la  sentence  rendue  par  les  magistrats  de  la 
ville  de  refuge.  Il  résulte  de  tous  ces  détails, 
qu'un  malheureux,  coupable  d'un  assassinat  invo- 
lontaire, s'acheminait  en  grande  hâte  vers  la  ville 
de  refuge  qui  se  trouvait  le  plus  à  sa  portée  ;  et 
pour  qu'aucun  obstacle  ne  pût  s'opposer  à  la 
rapidité  de  sa  marche,  Dieu  avait  ordonné  que 
les  routes  fussent  toujours  maintenues  en  bon 
état.  Le  coupable  arrivait  donc  à  la  ville  la  plus 
proche,  se  présentait  aux  juges,  leur  déclarait  le 
sujet  de  son  arrivée,  et  racontait  toutes  les  cir- 
constances du  crime  qu'il  avait  eu  le  malheur  de 
commettre.  Du  plus  ou  du  moins  de  vraisem- 
blance de  son  récit,  dépendait  le  premier  juge- 
ment, par  lequel  on  ordonnait  que  l'accusé  joui- 
rait on  non  de  la  protection  accordée  par  la  loi. 
Si  l'accusateur,  et  c'était  toujours  le  plus  proche 
parent  du  mort,  venait  demander  qu'on  lui  rendît 
justice,  son  témoin  et  lui  étaient  entendus  des 
juges,  et  ceux-ci  ou  confirmaient  la  sentence,  ou 
remettaient    l'accusé  entre  les  mains  des  bour- 


(1)  Exod.  xxi.  f.  14. 

(1)  11.  Rois.  11. -jh  28. 

(j)  Exod.  xxi.  f.  12.  20. 

(4,  Nombr.  xxxv.  f.  25.  et  9uiV. 

(5)  An.iq.  I.  iv.  c.  7. 


(6    V.  Nomb.  xxxv.  jr.  1;. 

(7j  Ilnd.  verset  14.  -  Deut.  xix.  pass. 

(8)  lbid.  verset  9. 

(9)  Calmet,  Diction,  biblique,  art.  Refuge. 

^10)  Deut.  xix.  f.  11.  12.  Comp.  avec  Jos.  xx.  f.  6.  9. 


SUR   L'ORGANISATION    DE   LA   NATION  JUIVE 


399 


reaux,  s'il  était  prouvé  que  le  crime  avait  été 
commis  volontairement.  Dans  le  premier  cas,  on 
le  confiait  à  la  garde  de  satellites  vigilants  qui  le 
ramenaient  à  la  plus  prochaine  ville  de  refuge  :  là 
il  était  à  couvert  de  toute  espèce  de  poursuite  ;  et 
à  la  mort  du  grand  prêtre  alors  en  exercice,  il 
pouvait  en  toute  sûreté  s'en  retourner  au  sein  de 
sa  famille.  Telles  sont  les  particularités  qui  résul- 
tent des  divers  textes,  dans  toutes  les  circons- 
tances qui  viennent  d'être  rapportées.  Cependant, 
comme  le  récit  de  Moïse,  où  sont  consignés  tous 
ces  détails,  ne  nous  paraît  pas  aussi  clair  qu'il 
pourrait  l'être,  et  qu'il  semble  que  les  villes  de 
refuge  étaient  quelquefois  à  une  si  grande  dis- 
tance de  L'endroit  où  le  meurtre  avait  été  commis, 
que  l'homicide  pouvait  facilement  être  atteint 
avant  d'y  être  arrivé,  nous  croyons  plus  raison- 
nable de  penser  qu'il  se  rendait  d'abord  vers  les 
juges  de  la  plus  prochaine  ville,  et  que,  s'étant 
justifié  devant  eux,  il  était  conduit  par  leur  ordre 
à  la  ville  de  refuge  la  moins  éloignée,  et  que  le 
tribunal  qui  siégeait  dans  celle-ci,  examinait  de 
nouveau  la  première  procédure,  dont  il  confirmait 
ou  annulait  le  jugement. 

Ce  n'était  pas  seulement  dans  les  villes  de 
refuge  que  le  coupable  trouvait  son  salut;  le 
Tabernacle,  et,  dans  la  suite,  le  temple,  et  surtout 
l'autel  des  holocaustes  avaient  le  privilège  d'assu- 
rer de  même  les  jours  d'un  accusé  (i).  Quand  les 
rabbins  assurent  que  l'autel  ne  communiquait  ce 
privilège  qu'aux  seuls  prêtres,  ils  ne  réfléchissent 
pas  que  Joab  leur  en  a  donné  un  exemple  con- 
traire, et  qu'il  est  prouvé  par  son  histoire,  qu'un 
meurtrier  volontaire  était  entraîné  de  force  loin 
de  l'autel,  pour  subir  la  peine  qu'il  avait  méritée  ; 
aussi  des  juges  particuliers  s'occupaient-ils  soi- 
gneusement des  procès  de  cette  nature,  et  obser- 
vaient-ils de  faire  conduire  l'innocent,  sous  une 
bonne  escorte,  à  l'une  des  villes  de  refuge  (2). 
Moïse  passe  sous  silence  une  foule  de  cas,  qui, 
en  même  temps,  serviraient  de  preuves  à  ce  que 
nous  venons  de  dire,  et  nous  instruiraient  des 
formalités  que  l'on  observait  en  ces  occasions.  Il 
ne  nous  fait  point  remarquer,  par  exemple,  quelle 
conduite  les  juges  avaient  à  tenir  quand  le  meur- 
tre  précédait  immédiatement  la  mort  du  grand 
prêtre  ;  il  ne  nous  dit  point  si  alors  la  sen- 
tence qui  absolvait  l'accusé  n'était  rendue  qu'a- 
près la  mort  du  grand  prêtre,  ni  quelle  diffé- 
rence apportait  un  interrègne  dans  la  forme  de 


la  procédure,  ni  enfin  comment  le  grand  prêtre 
lui-même  devait  être  traité, s'il  se  rendait  coupable 
d'un  homicide.  Les  thalmudistes  ont  fait  de  très 
longues  dissertations  sur  ces  diverses  circons- 
tances ;  il  se  trouve  même  dans  leurs  écrits  des 
réflexions  assez  judicieuses  sur  cette  matière  ; 
mais  nos  lecteurs  nous  sauront  gré  de  leur  en 
épargner  la  lecture. 

Nous  avons  déjà  dit  que  les  Nathinéens  étaient 
employés  au  service  de  Dieu.  Ils  ne  descendaient 
pas  des  enfants  d'Israël,  mais  des  Gabaonites  qui 
les  avaient  adroitement  forets  à  conclure  la  paix, 
et  qu'ensuiteJosuécondamnaàremplir  lesemplois 
les  moins  distingués  et  les  plus  pénibles  du  Taber- 
nacle, comme  à  puiser  l'eau  et  à  couper  le  bois  {3). 
Ils  ne  portèrent  ce  nom  de  Nathinéens,  à  ce  qu'il 
parait,  qu'après  la  captivité,  dans  le  temps  que 
quelques-uns  d'entre  eux  revinrent  de  Babylone 
avec  Esdras.  Leur  nom  signifie  donnés,  et  l'on 
apprend  par  les  livres  d'Esdras,  que  David  et 
d'autres  rois,  ses  successeurs,  les  destinèrent  à 
servir  dans  le  temple,  où  ils  étaient  subordonnés 
aux  lévites  (4).  Dans  un  autre  passage,  ils  les 
appellent  les  enfants  des  serviteurs  deSalomon  (<). 
Il  faut  cependant  observer  qu'ils  n'étaient  pas  les 
seuls  connus  sous  cette  dénomination,  puisque 
les  Cananéens,  subjugués  et  convertis,  la  parta- 
gèrent avec  eux  (6).  L'emploi  dévolu  plus  tard  aux 
Gabaonites  subsistait  déjà  du  temps  de  Moïse.  Ce 
législateur  en  fait  mention  dans  le  discours  si 
pathétique  qu'il  adressa  aux  Israélites  quelque 
temps  avant  sa  mort  :  Vous  comparaisse^  tous 
aujourd'hui,  leur  dit-il,  devant  l'Éternel....  tous, 
dis-je,  vos  jeunes  gens  et  vos  femmes,  et  l'étranger 
qui  est  dans  votre  camp,  depuis  celui  qui  est  chargé 
de  couper  le  bois  jusqu'à  celui  qui  puise  Veau  (7). 
C'est  sans  doute  aux  occupations  des  Nathinéens, 
qu'il  faut  attribuer  la  longue  durée  du  séjour  que 
rirent  la  plupart  d'entr'eux  dans  les  lieux  de  leur 
captivité  ;  car  l'Écriture  ne  parle  que  de  deux 
cent-vingt  qui  s'en  retournèrent  avec  Esdras  (8), 
et  de  trois  cent  quatre-vingt  douze  avec  Zoro- 
babel,  nombre  insuffisant  pour  remplir  l'espèce  de 
fonction  dont  ils  étaient  chargés  dans  le  temple, 
puisque, selon  Josèphe,quandlesJuifs  instituèrent 
la  fête  Xylophone,  le  peuple  fut  obligé  de  porter 
lui-même  dans  le  temple  une  partie  du  bois  qui 
devait  être  consumé  sur  l'autel  des  holocaus- 
tes (9).  Il  est  vraisemblable  aussi  que,  le  dernier 
jour  de  la  fête  des  Tabernacles,  il  puisa  à  la  fon- 


(1)  Philon.  Légat,  ad  Cai. 

(2)  Maint.  Tract.  u?sa  miDïr  mm  cap.  Ci  V;  Hotting.  in 
Goodwin.  lib.  xi.  c.  5.  Note  2  et  commentaire  sur  les 
Namb.  xxxv. 

[])  Jos,  îx.  f,  2J.  27. 


(4)  1   Esdr.  vin.  jjr.  20. 

1 5)  lbid.  11.  fi  ^b. 

(0)   m.  Rois,  ix,  f.  2d  2t.  et  alibi. 

(7)  Deut.  xix.  f.  1 1. 

(8j  1.  Esdr.  vin.  f.  20.  —(6)  Guerre  des  Juifs,  lib.  it.  C.  17, 


400 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


taine  de  Siloé  une  partie  de  l'eau  nécessaire  à  la 
cérémonie.  C'estauprophèteZacharie  queJosèphe 
attribue  l'institution  de  la  fête  Xylophone. 

Des  objets  consacrés  au  service  divin. 

Le  Tabernacle,  l'Arche,  les  deux  autels,  le 
chandelier,  et  tout  ce  qui  en  dépendait,  la  table 
des  pains  de  proposition,  et  enfin  le  parvis,  avec 
ce  qu'il  renfermait,  étaient  autant  d'objets  spécia- 
lement consacrés  au  service  de  Dieu.  Ce  n'est  pas 
sans  étonnement  que  l'on  voit  Moïse  donner 
autant  d'étendue  à  la  description  du  Tabernacle 
et  de  tout  ce  qui  en  dépendait,  qu'à  l'histoire  de 
la  création  même  du  monde  ;  et  cependant,  il  est 
de  fait  que  l'on  n'en  peut,  pour  ainsi  dire,  parler 
que  d'après  de  simples  conjectures,  parce  que 
nous  avons  perdu  la  signification  d'un  nombre 
infini  de  mots  qui  caractérisaient  ou  les  différentes 
parties  de  ces  objets,  ou  les  matériaux  qu'on  avait 
employés  à  leur  construction  ;  toutefois  nous 
observerons  soigneusement  de  ne  rien  avancer 
qui  ne  soit  établi  sur  les  principes  les  plus  sûrs. 

Dieu  lui-même  avait  donné  le  plan  et  présidé  à 
la  construction  du  Tabernacle  ;  il  voulait  demeurer 
au  milieu  de  son  peuple  (i).  Les  Israélites  ayant 
mérité,  par  leurs  murmures  et  leurs  fréquentes 
désobéissances,  que  leur  entrée  dans  le  pays  de 
promission  fût  différée,  le  Tabernacle  où  devait 
être  rendu  le  culte  le  plus  solennel,  fut  fait  de 
manière  à  pouvoir  être  démonté  et  transporté  faci- 
lement d'un  lieu  à  un  autre  ;  aussi,  entr'autres 
dénominations,  est-il  le  plus  souvent  désigné  dans 
les  écrits  de  Moïse  par  le  mot  ^n  ohel,  qui 
signifie  tente.  Cette  tente  était  magnifique,  les 
matériaux  les  plus  précieux  étaient  entrés  dans  sa 
construction,  et  il  était  l'ouvrage  des  ouvriers  les 
plus  habiles.  Tant  de  précautions  avaient  été 
prises,  pour  inspirer  aux  Israélites  et  aux  autres 
peuples  le  respect  le  plus  profond  pour  tout  ce 
qui  tient  à  la  Divinité.  Les  effets  les  plus  précieux 
apportés  de  l'Egypte  et  des  autres  royaumes  con- 
quis par  les  entants  d'Israël,  furent  destinés  à 
l'ornement  du  Tabernacle  :  rien  ne  fut  épargné  de 
tout  ce  que  l'art  et  la  nature  pouvaient  produire 
de  plus  admirable. 

Le  Tabernacle  avait  la  forme  d'un  carré,  long 
de  trente  coudées,  sur  dix  de  large,  et  sa  hauteur 
était  égale  à  sa  largeur.  Quatre  colonnes  de  bois 
de  sittim  revêtues  d'or  massif,  et  placées  sur  des 
piédestaux  d'argent,  partageaient  le  Tabernacle 
en  deux  parties. 

On  ne  voit  point  dans  les  écrits  de  Moïse  si  les 


colonnes  du  Tabernacle  étaient  rondes  ou  carrées  ; 
mais  il  est  vraisemblable  qu'elles  avaient  cette 
dernière  forme.  Comme  le  Tabernacle  devait 
être  fréquemment  changé  de  place,  elles  étaient 
moins  fragiles  et  plus  commodes  à  transporter. 
Du  sommet  de  ces  colonnes  descendait,  suspendu 
à  des  crochets  d'or,  un  rideau  superbement  tra- 
vaillé. Il  formait  une  séparation  entre  le  lieu  saint 
et  le  lieu  très  saint  ou  sanctuaire,  ou  le  saint  des 
saints.  Cette  dernière  portion  n'ayant  que  dix 
coudées  de  profondeur,  présentait  un  carré  par- 
fait ;  la  première  contenait  vingt  coudées,  et  son 
entrée  vers  le  côté  occidental  était  fermée  par  un 
second  rideau  appuyé  sur  cinq  colonnes,  dont  les 
piédestaux  n'étaient  que  d'airain.  L'usage  de  ce 
rideau  était  de  dérober  à  l'œil  du  peuple  l'inté- 
rieur du  lieu  saint.  Le  premier,  qu'on  appelait  le 
voile,  et  qui  séparait  le  lieu  saint  d'avec  le  lieu 
très  saint,  était  de  la  plus  grande  richesse.  Il  pré- 
sentait, relevés  en  bosse,  des  chérubins,  des 
festons,  et  d'autres  ornements  de  cette  nature. 
Les  côtés  du  nord,  de  l'ouest  et  du  midi,  étaient 
fermés  par  des  planches  de  sittim  recouvertes 
d'or,  et  jointes  les  unes  aux  autres  aux  deux  extré- 
mités. Chacune  de  ces  planches  avait  dix  coudées 
de  longueur  sur  une  coudée  et  demie  de  largeur  ; 
de  manière  que  chacun  des  côtés  n'en  contenait 
que  vingt,  et  le  bout  occidental,  huit  seulement. 
Toutes  étaient  encore  liées  ensemble  par  une 
barre  qui  traversait  un  nombre  considérable  degros 
anneaux  revêtus  d'or  comme  la  tringle  qui  les 
tenait  assujettis.  Le  côté  qui  regardait  l'orient 
n'était  point  fermé  par  des  planches,  mais  seule- 
ment par  un  voile  semblable  à  ceux  dont  nous 
avons  déjà  parlé  ;  à  cette  seule  différence  près, 
qu'il  n'offrait  que  des  feuilles  et  des  fleurs  tra- 
vaillées à  l'aiguille  (2).  On  ne  sait  trop  jus- 
qu'où descendait  le  voile.  Selon  les  uns,  il  laissait 
un  vide  de  cinq  coudées,  par  lequel  le  peuple 
pouvait  voir  ce  qui  se  passait  dans  le  lieu  saint  (3). 
Selon  les  autres,  il  descendait  jusqu'à  terre,  et 
ne  permettait  de  rien  apercevoir  dans  l'intérieur. 
Le  ciel  du  Tabernacle  était,  comme  les  côtés, 
formé  de  planches.  Ce  n'étaient  pas  des  plaques 
d'or  qu'il  présentait  à  la  vue,  examiné  de  l'inté- 
rieur ;  mais  de  riches  étoffes  de  couleur  pourpre, 
écarlate,  cramoisie,  et  parsemées  de  chérubins 
comme  le  voile  (4).  Sa  partie  extérieure  était  cou- 
verte de  peaux  de  moutons  teintes  en  rouge,  et 
recouvertes  de  peaux  demoutonsd'un  bleucéleste. 
Ces  deux  couvertures  semblaient  n'avoir  été 
employées  que  pour  mettre  l'édifice  à  l'abri  des 
injures  du  temps,  et  empêcher  que  la   poussière 


(i)  Exod.  xxv.  et  allb.  pass. 

^ 2 j   Exod.  XXVI.  f.   JÙ. 


(1)  Joseph.  Antiq.  lib.  III.  c.  (>. 
(4)  Exod.  xxvi.  f.  i. 


SUR   L'ORGANISATION   DE    LA  NATION  JUIVE 


40  [ 


n'y  pénétrât  ;  aussi  avait-on  eu  soin  de  les  (aire 
descendre  des  trois  côtés  jusqu'à  fleur  de  terre, 
pour  ne  laisser  à  découvert  que  le  voile  qui  en 
fermait  l'entrée  du  côté  de  l'orient.  Nous  ne 
trouvons  nulle  part  qu'on  eût  ménagé  dans  la  cons- 
truction de  ce  lieu  sacré  des  passages  à  la  lumière; 
ainsi  il  devait  régner  dans  son  enceinte  une  obscu- 
rité complète,  si  l'on  n'excepte,  à  l'égard  du  saint 
des  saints,  le  jour  de  l'Expiation,  où  le  feu  de 
l'encensoir  en  éclairait  les  différentes  parties.  Dieu 
avait  voulu  qu'un  chandelier  d'or  à  plusieurs 
branches  éclairât  pendant  la  nuit  la  première  par- 
tie de  l'édifice  ;  c'est-à-dire  le  lieu  saint  seulement. 

Rien  de  ce  qui  pouvait  concourir  à  inspirer  la 
vénération  n'avait  été  épargné  dans  l'intérieur  du 
Tabernacle,  d'ailleurs  aussi  facile  à  transporter 
qu'il  était  solidement  construit  (1). 

Le  premier  objet  qui  frappait  les  yeux  dans  le 
Tabernacle,  c'était  le  propitiatoire  ;  il  servait 
d'enveloppe  àl'Arche;  de  là  vient  que  quelques  in- 
terprètes ont  traduit  le  mot  Kapporeih  par  couver- 
cle ;  mais  la  plupart  des  traducteurs  rendent 
cette  expression  de  Moïse  par  Propilialoire  (2); 
d'autres  par  Oracle  (2)  ;  d'autres  par  Siège  de  mi- 
séricorde. En  effet,  on  trouve  dans  plusieurs  en- 
droits de  l'Écriture,  que  c'est  là  que  les  enfants 
de  Dieu  lui  adressent  leurs  prières,  qu'il  rend  les 
oracles,  et  qu'il  habite  au  milieu  de  ses  chéru- 
bins. Les  Juifs,  pénétrés  de  la  présence  réelle  de 
la  Divinité  en  ce  lieu  qu'il  avait  choisi  pour  être 
son  séjour  immédiat,  le  regardaient  comme  la 
plus  sainte  de  toutes  les  habitations,  et  punis- 
saient des  plus  terribles  châtiments  le  téméraire 
qui  osait  s'en  approcher  (4)  Le  propitiatoire,  à 
ce  que  l'on  croit,  n'était  point  de  bois  de  sittim 
doublé  d'or  comme  l'Arche;  la  table,  et  les  autres 
meubles  sacrés,  mais  d'or  massif,  conformément 
à  l'ordre  que  Moïse  en  avait  reçu  de  l'Éternel  (;). 
Il  avait  deux  coudées  et  demie  de  longueur  sur 
une  coudée  et  demie  de  largeur  ;  de  manière  que 
les  dimensions  répondaient  exactement  à  celles 
de  l'Arche.  Les  chérubins  placés  à  chacune  de 
ses  extrémités  (6),  étaient  d'or  aussi  ;  mais  on 
ignore  s'ils  avaient  été  jetés  dans  le  même  moule 
d'où  était  sorti  le  propitiatoire,  où  s'ils  avaient 
été  fondus  séparément.  Quelles  étaient  la  forme 
et  l'attitude  de  ces  chérubins  ?  D'après  les  paroles 
de  Moïse,  quelque  peu  lumineusesqu'elles  soient, 
il  paraît  que  leurs  ailes  étaient  étendues  et  cou- 
vraient le  propitiatoire  dans  toute  sa  longueur,  et 


qu'ils  paraissaient  occupés  à  le  contempler  (7) 
dans  une  attitude  respectueuse.  Un  passage  du 
psalmiste  vient  encore  à  l'appui  de  cette  conjec- 
ture. Après  avoir  dit  que  Dieu  est  assis  au  milieu 
des  chérubins,  après  avoir  parlé  de  sa  majesté,  de 
sa  justice  et  de  sa  puissance,  il  ajoute  :  Prosler- 
ne^-vous  devant  son  marchepied  (8).  Ce  n'est  pas 
tout  encore  :  l'apôtre  saint  Pierre,  en  parlant  du 
mystère  de  la  rédemption,  semble  faire  allusion  à 
cette  attitude,  quand  il  dit  que  les  anges  mêmes 
désirent  le  voir  dans  toute  sa  profondeur  (9). 
Quant  à  leur  stature,  elle  est  assez  facile  à  déter- 
miner par  la  règle  de  la  proportion,  si  l'on  con- 
vient que  leurs  ailes  se  rencontraient  vers  le 
milieu  du  propitiatoire.  Mais  quels  fruits  retire- 
rait-on de  pareilles  recherches  r 

De  l'Arche. 

L'Arche  avait  la  forme  d'un  coffre  ;  elle  était  de 
bois  de  sittim  revêtu  d'or  dans  toute?  ses  parties, 
En  donnant  les  dimensions  du  propitiatoire,  on 
a  décrit  celles  de  l'Arche;  il  n'y  avait  point  de  dif- 
férence entre  la  largeur  et  la  hauteur.  Le  nom 
d'Arche  d'alliance,  et  d'Arche  de  témoignage 
qu'elle  portait,  était  une  allusion  au  pacte  d'al- 
liance que  Dieu  avait  fait  avec  son  peuple,  au 
traité  écrit  sur  les  Tables,  qu'elle  renfermait, 
ainsi  que  le  vase  d'or  plein  de  manne  et  la  verge 
miraculeuse  d'Aaron.  A  chacun  de  ses  côtés  pen- 
daient deux  anneaux  d'or,  qui  recevaient  deux 
barres  dorées,  pour  en  faciliter  le  transport.  Le 
droit  de  la  changer  de  place  appartenait  exclusi- 
vement aux  prêtres.  L'Arche  était  placée  en  long 
au  milieu  du  saint  des  saints.  Moïse  ne  nous  dit 
point  si  elle  était  soutenue  par  des  pieds,  ou  pla- 
cée sur  une  base  quelconque  ;  seulement  il  n'est 
guère  vraisemblable  qu'elle  touchât  la  terre. 
Outre  ce  meuble  sacré,  on  voyait  encore  à  côté 
le  livre  de  la  Loi,  que  les  lévites  y  avaient  déposé 
par  l'ordre  de  Moïse  (10).  On  ne  sait  pas  précisé- 
sément  si  la  place  qu'il  occupait  était  dans  l'inté- 
rieur ou  en  dehors  de  l'Arche  ;  mais  cette  der- 
nière opinion  nous  paraît  la  plus  vraisemblable(  1 1  ). 
Si  saint  Paul  n'en  fait  aucune  mention  dans  la 
liste  qu'il  nous  a  laissée  des  meubles  sacrés  (12), 
sans  doute  c'est  que  le  fait  dont  il  s'agit  était  de 
son  temps  assez  notoire.  On  lit  ailleurs,  que  l'Ar- 
che ne  contenait  que  les  deux  tables  de  pierre  que 
Moïse  y  avaient  placées  sur  la  montagne  d'Ho- 


(1)  Exod.  p.  tût. 

(3)  Les  Septante. 

(?)  Saint  Jérôme,  Vulgat.  Exod.  xxxvn,  6  et  al. 

(4)  Jug-  v.  passim.  vi.  y.  19.  -  n.  Rois,  vi  et  suiv. 

(5)  Exod.  xxv.  f.  17. 

(6)  Ibid.  verset  11. 

S.   B.  —  T.  XII. 


(7)  Ibid.  verset  >o. 

(8)  Psaume  xcvm.  y.   1  et  suiv. 

{r>)  Première  épître  de  saint  Pierre,  1.  y.  1  2. 

(10)   Deut.  m.  y.  26. 

(11;  V.  Prid,  Conneet.  part.  I.  lib.  1:1. 

(12)  Comp.  in  Rois  vin.  y.  0  avec  Hcb.  ix. 


26 


402 


COUP  D'ŒIL   RÉTROSPECTIF 


reb  (i)  ;  et  cependant  il  est  certain  que  l'on  y 
tenait  enfermés,  et  le  vase  d'or  et  la  verge  d'Aa- 
ron.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces  contradictions  appa- 
rentes ne  nous  paraissent  pas  mériter  toutes  les 
peines  que  l'on  s'est  données  pour  les  concilier  (2). 
Il  ne  faut  pas  croire  que  le  livre  dont  nous  par- 
Ions  fût  unique,  c'est-à-dire,  que  l'on  n'en  eût 
tiré  aucune  copie,  car  alors  on  n'aurait  pu  s'en 
servir  que  le  jour  de  l'Expiation  ;  et  la  lecture  en 
devenait  nécessaire  à  la  fête  des  Tabernacles. 

Nous  pensons  donc,  et  c'est  l'opinion  des  Juifs, 
qu'on  avait  tiré  différentes  copies  du  texte  origi- 
nal. On  ne  le  conservait  avec  tant  de  soin  que 
pour  être  à  portée  de  rectifier  les  erreurs  qui  au- 
raient pu  se  glisser  dans  les  copies.  Quand  on 
rapporta  l'Arche  du  pays  des  Philistins,  on  mit  à 
ses  côtés  le  coffret  avec  les  souris  d'or,  ainsi  que 
les  images  des  hémorrhoïdes  (5). 

On  voyait  dans  le  lieu  saint  l'autel  des  parfums, 
le  chandelier  d'or  et  la  table  des  pains  de  propo- 
sition. Souvent  le  premier  était  désigné  sous  le 
nom  d'autel  d'or  ;  en  effet,  quoique  construit  de 
bois  de  sittim.  on  avait  mis  tant  d'art  à  le  revêtir 
de  plaques  de  ce  métal,  qu'on  l'eût  pris  pour  un 
massif.  Si  on  l'appelait  quelquefois  l'autel  inté- 
rieur, ce  n'était  que  pour  ne  pas  le  confondre 
avec  celui  des  holocaustes  qui  était  placé  hors  du 
Tabernacle. 

On  brûlait  soir  et  matin  l'encens  sur  cet  autel, 
que  l'on  arrosait  ensuite  du  sang  des  victimes  im- 
molées, pour  obtenir  la  rémission  des  péchés 
commis  par  l'ignorance  des  prêtres  nu  même  du 
peuple  (4J.  Il  n'avait  en  carré  qu'une  coudée,  et 
deux  en  hauteur  ;  ainsi  la  fumée  pouvait  s'élever 
jusqu'à  la  hauteur  de  huit.  Cet  autel  était  mobile 
comme  l'Arche,  et  l'on  employait  aussi  les  mêmes 
moyens  quand  on  voulait  le  déplacer.  Une  espèce 
de  couronne  d'or  couvrait  sa  surface,  et  quatre 
cornes  revêtues  d'or,  attachées  à  chacun  des  an- 
gles, lui  servaient  d'ornement.  Une  difficulté  nous 
arrête  ici  :  nous  ne  savons  ce  que  l'on  doit  en- 
tendre par  le  dessus  de  l'autel  (:);  nous  ne  sa- 
vons comment  il  était  possible  que  cette  surface, 
quoique  doublée  d'or,  fût  à  l'épreuve  du  feu. 
Saint  Jérôme,  que  cette  réflexion  a  aussi  décon- 
certé, veut,  avec  quelques  autres,  que  ce  ne  fût 
qu'un  simple  grillage  qui  laissait  passer  entre  ses 
branches  les  cendres  et  les  charbons  (6)  ;  mais 
cette  opinion  est  absolument  opposée  à  l'idée 
que    l'on     nous    a   donnée   de   la    construction 


de  cet  autel.  Josèphe  l'appelle  tout  simplement 
un  brasier  ;  mais  pour  que  cette  dénomination 
lui  convînt,  il  faudrait  lui  supposer  une  épaisseur 
extraordinaire .  Quel  qu'il  fût ,  nous  pensons 
qu'il  est  plus  simple  de  donner  à  cette  espace  de 
toit  une  élévation  suffisante  pour  le  rendre  inac- 
cessible à  l'action  du  feu. 

L'Écriture  n'indique  pas  clairement  la  place 
qu'occupait  l'autel  des  parfums  dans  le  lieu  saint; 
elle  laisse  entrevoir,  il  est  vrai,  qu'il  était  posé 
devant  le  voile(7).  Josèphe  cependant,  dont  l'opi- 
nion a  acquis  un  crédit  universel,  veut  qu'il  ait  été 
entre  le  chandelier  et  la  table  des  pains  de  pro- 
position (8).  Le  contraire  n'est  pas  facile  à  dé- 
montrer :  mais  ne  serait-il  pas  plus  simple  et  plus 
conforme  aux  lois  de  la  symétrie,  de  placer  le 
chandelier  entre  l'autel  des  parfums  et  la  table 
dont  nous  venons  de  parler  >  Selon  l'auteur  du 
second  livre  des  Maccabées,  Jérémie,  aux  ap- 
proches de  la  captivité,  transporta  cet  autel  et 
l'Arche  sur  la  montagne  de  Nébo,  et  les  cacha 
avec  tant  de  soin  dans  le  fond  d'une  caverne 
dont  il  mura  l'entrée,  que  depuis  on  les  chercha 
vainement  (9).  Le  même  fait  est  rapporté  parles 
thalmudistes  d'une  manière  un  peu  différente. 
Josias,  selon  eux,  instruit  par  quelques  prophètes, 
que  tous  les  vases  du  sanctuaire  seraient  trans- 
portés à  Babylone,  déposa  le  feu  sacré,  l'Arche, 
le  vase  d'or,  la  verge  d'Aaron,  le  pectoral  et 
l'autel  des  parfums,  dans  un  souterrain  que  Salo- 
mon  avait  fait  pratiquer  dans  ce  dessein  ;  et  les 
mesures  furent  si  bien  prises  pour  que  le  secret 
ne  transpirât  pas,  qu'en  effet  ils  furent  inutilement 
cherchés  au  retour  de  la  captivité.  Les  thalmudis- 
tes ajoutent  que  cette  heureuse  découverte  n'aura 
lieu  qu'à  la  venue  du  Messie.  Mais  ces  traditions 
ne  sont  pas  sans  souffrir  des  difficultés.  Ce  qu'il 
y  a  de  positif,  c'est  la  perte  qu'il  y  eut  alors  de  ces 
objets,  puisque  les  Juifs  en  firent  construire  de 
nouveaux  (10). 

Il  n'y  avait  rien  dans  le  sanctuaire  de  plus  riche 
que  le  chandelier  ;  il  était  d'or  massif  et  pesait  un 
talent,  poids  du  sanctuaire  (i;).  Du  pied  qui  lui 
servait  de  soutien,  sortaient  six  branches;  la  tige 
du  milieu  formait  la  septième.  Elles  étaient  toutes 
ornées  de  plateaux,  de  pommes  et  de  (leurs,  et 
portaient  chacune  une  lampe  dont  on  ne  peut 
mieux  comparer  la  forme  qu'à  celle  des  aman- 
diers. Elles  étaient  susceptibles  d'être  démontées 
et  replacées  à  volonté  (12).  Chacune  de  ses  lampes 


(1)  111  Rois  vin.  9. 

(2)  Goodwin.  ubi  sup.  §.  18  ad  24.  1  Rois  vi.  et  alib.  Vid. 
Prid.  ubi  sup. 

(?)  1  Rots  vi.  cl  alib. 

(4)  Livit.  îv.  'f.  j.  et  7.  ij.  et  18. 

(5)  Exod.  xxx.  f.  h 

{(>)  Chald.  Paraphr,  Jagius  in  loc. 


(7)  Exod.  xxx.  fr.  6. 

(8)  Anliq.  lib.  ni.  c.  6.  ad  fin. 

(9)  11  Maccab.  11.  f.  1  et  suiv. 

(io)  V.  Buxtorf.  de  Arc.  c.    21.    22.  -   R.   J.nhut.  Prid. 
Conn.  part.  1.  lib.  m.  Cunœ.  Basnag.  et  al. 
(iij  Exod.  xxv.  f.  51  et  suiv. 
(12)  Comp.  Exod.  xxv.  f.  37,  avec  Nomb.  iv.  y.  9. 


SUR  L'ORGANISATION    DE    LA   NATION  JUIVE 


!  ■■: 


était  garnie  de  ses  mouchettes  et  de  son  creuset 
d'or.  Les  prêtres  qui  veillaient  dans  le  sanctuaire 
les  allumaient  tous  les  soirs  quand  on  faisait  brû- 
ler les  parfums,  et  les  éteignaient  le  lendemain 
pendant  la  même  cérémonie.  Moïse  ne  détermine 
pas  la  hauteur  du  chandelier;  quelques-uns  la 
portent  jusqu'à  cinq  coudées;  d'autres  la  font 
égale  à  celle  de  l'autel  des  parfums.  Dans  ce  cas, 
il  n'aurait  donc  que  très  faiblement  éclairé  la 
table  des  pains  de  proposition;  et  dans  l'autre, 
non  seulement  il  aurait  fallu  le  secours  d'une 
échelle  pour  y  atteindre,  mais  la  fumée  qui  s'en 
exhalait  aurait  nécessairement  noirci  la  partie  su- 
périeure des  rideaux  dont  il  n'eût  été  qu'à  très 
peu  de  distance.  Pourquoi  ne  supposerait-on  pas 
plutôt  qu'il  avait  une  hauteur  proportionnée  à 
celle  des  hommes,  environ  cinq  ou  six  pieds? 
Nous  n'avons  pas  plus  de  renseignements  certains 
touchant  sa  forme  et  sa  largeur,  que  sur  la  place 
qu'il  occupait.  Ce  n'est  pas  qu'un  grand  nombre 
de  commentateurs  n'aient  beaucoup  écrit  sur 
cette  matière  ;  mais  la  diversité  de  leurs  opinions 
n'a  fait  que  l'envelopper  d'un  voile  plus  épais  (i). 
On  sait  positivemeut  qu'après  la  construction  du 
temple,  Salomon  fit  placer  dix  chandeliers  dans 
le  lieu  saint,  et  qu'ils  étaient  tous  du  môme 
métal  (2).  Celui  de  Moïse  entrait-il  dans  le  nom- 
bre des  dix,  ou  bien  en  formait-il  un  onzième? 
C'est  encore  un  problème.  Ce  dernier  sentiment 
paraît  cependant  le  plus  vraisemblable,  parce  que 
le  lieu  saint  était  d'une  bien  plus  vaste  étendue 
dans  le  temple  que  dans  le  Tabernacle,  et  que 
tout  ce  qu'il  contenait  ayant  des  proportions 
exactes,  le  chandelier  de  Moïse  aurait  détruit 
cette  uniformité. 

On  a  déjà  parlé  des  pains  de  proposition.  La 
table  qui  les  soutenait,  était  de  bois  de  sittim  re- 
vêtu d'or;  elle  avait  une  coudée  et  demie  de  hau- 
teur, deux  de  longueur  et  une  de  largeur.  Elle 
était  surmontée  d'un  bord  massif,  semblable  à 
celui  de  nos  tables  à  thé  (3).  Selon  Josèphe,  ses 
pieds  avaient  beaucoup  de  ressemblance  avec 
ceux  qui  servaient  d'appui  aux  lits  des  Doriens  (4)  : 
mais  il  serait  difficile  d'entendre  ce  que  cet  his- 
torien a  voulu  dire  par  là.  Par  un  verset  de 
Moïse,  il  paraît  que  cette  table  était  ornée  d'un 
second  bord,  que  quelques  interprètes  confondent 
néanmoins  avec  le  premier;  au  reste,  supposé 
qu'il  existât,    ce   n'était   vraisemblablement    que 


vers  le  bas  de  la  table,  et  pour  lui  donner  plus  de 
solidité.  Du  bord  supérieur  pendaient  de  chaque 
côté  deux  anneaux,  en  tout  quatre  ;  ils  étaient, 
comme  on  l'a  déjà  souvent  remarqué  en  parlant 
d'objets  semblables,  destinés  à  en  faciliter  le 
transport.  Outre  les  pains  de  proposition,  on 
voyait  encore  sur  la  môme  table  quelques  ré- 
chauds d'or,  où  l'on  brûlait  l'encens,  et  plusieurs 
autres  meubles,  à  la  description  desquels  nous 
ne  nous  arrêterons  point,  parce  que  nous  n'en 
avons  rien  de  certain  à  dire  (5).  Salomon  fit  rem- 
placer cette  table  par  une  autre  (6),  et  celle-ci, 
selon  Josèphe  (7),  était  beaucoup  plusgrande  :  on 
avait  voulu  sans  doute  la  rendre  plus  conforme  à 
l'étendue  du  lieu.  Le  livre  des  Paralipomènesnous 
apprend  que  le  même  prince  en  fit  construire  dix 
autres,  qu'on  les  plaça  en  nombre  égal,  au  nord 
et  au  midi  du  lieu  saint,  et  qu'elles  servaient  à 
soutenir  les  vases  sacrés  (8).  Josèphe  atteste 
qu'on  en  voyait  encore  une  infinité  d'autres,  de 
diverses  constructions,  et  qu'elles  étaient  char- 
gées de  vingt  mille  coupes  d'or  et  quarante  mille 
vases  d'argent  (9). 

Il  ne  nous  reste  plus  à  parler  que  du  parvis  du 
Tabernacle,  et  des  effets  qu'il  contenait.  On  nom- 
mait parvis,  un  espace  oblong  qui  avait  cent  cou- 
dées de  longueur  sur  cinquante  de  largeur.  Il 
était  fermé  de  toutes  parts,  excepté  vers  l'orient; 
et  là  une  ouverture  de  vingt  coudées  laissait 
passer  les  prêtres,  les  lévites  et  le  peuple,  lors- 
qu'ils allaient  présenter  leurs  offrandes.  Toute- 
fois, le  parvis  n'étant  même  fermé,  de  trois;côtés, 
que  par  des  voiles  qui  n'interceptaient  point  la 
lumière,  chaque  spectateur,  placé  en  dehors, 
pouvait  aisément  observer  tout  ce  qui  s'y  passait. 
Moïse  donne  un  nom  particulier  à  ces  rideaux, 
pour  ne  pas  les  confondre  avec  ceux  du  Taber- 
nacle, destinés  à  un  usage  tout  différent.  Les 
voiles  du  parvis  étaient  appuyés  contre  des  co- 
lonnes de  bois  de  sittim,  élevées  sur  des  pié- 
destaux d'airain,  dont  les  chapiteaux  étaient  or- 
nés de  filets  d'argent  (10).  Moïse  n'ayant  rien  dit 
de  leur  hauteur,  les  commentateurs  n'ont  pu 
leur  en  assigner  ;  on  sait  seulement  qu'elles 
étaient  au  nombre  de  cinquante-six  ;  savoir,  vingt 
sur  chacun  des  longs  côtés,  dix  à  l'occident,  et 
six  à  l'orient,  parmi  lesquelles  ne  sont  point 
comptées  celles  qui  soutenaient  le  rideau  bleu 
suspendu  à  l'entrée  du  parvis.  Ce  rideau    se    ti- 


fi)  Joseph,    ubi   sup.  saint  Jérôme.    Art.   Mont.    Villalp 
Basnag. 

{2)  m  Rois  vu.  f.  49.  -  11.  Paralip.  iv.  y.  7. 
(j)  Exod.  xxv.  y.  j2.  et  suiv. 

(4)  Antiq.  lib.  ni.  c.  6. 

(5)  Exod.  verset  29  et  alib. 


(ô)  111  Rois  vu.  y.  48.  et  suiv. 

(7)  Antiq.  lib.  vin.  c.  2. 

(8j  1  Paralip.  îv.  y.  3. 

(<3    Antiq.  toc.  cit. 

(10)  V.  Exod.  xxxviii.  v.  23. 


404 


COUP  D'ŒIL    RÉTROSPECTIF 


rait  également  de  droite  à  gauche,  et  de  gauche 
à  droite,  ou  bien  se  levait  de  bas  en  haut,  comme 
l'assurent  les  Juifs  (i). 

Le  circuit  du  parvis  était    de    trois    cents  cou- 
dées ;  il  est  difficile  de   concevoir   que    le   voile 
dont  on  a  parlé   ne  fût    que    d'une   seule    pièce. 
Comment  les  enfants  de  Gerson,  chargés  de  le 
porter  dans  les  voyages,  auraient-ils  pu  le  replier 
suffisamment  sur  lui-même,   s'il   n'eût    été  formé 
que  d'une  seule   partie  ?    Ajoutons  à  cela,   que 
dans  les  occasions  où  Moïse  en  parle,  il  emploie 
toujours  le    pluriel   (2).    Quoique    la    forme    du 
parvis  fût  égale  à  celle  du  Tabernacle,  et  que  les 
côtés  de  l'un  fussent  parallèles  à  ceux  de  l'autre, 
il  ne  s'ensuit  point   que   le  Tabernacle  occupât 
précisément  le  milieu  du  parvis.  On    ne  voit  pas, 
par  exemple,  qu'il  fût    nécessaire   que    l'espace, 
qui  se  trouvait  entre  les  deux  lignes  de  l'occident, 
fût  de  la  môme  étendue  que  celui    des  côtés  op- 
posés ;  d'autant  mieux  qu'il  renfermait  beaucoup 
moins  d'effets.  On  voyait  dans  celui-ci  l'autel  des 
holocaustes,  la  cuve  d'airain,  et  plusieurs  autres 
objets  dont   nous  parlerons   bientôt.    Malgré  le 
silence  de  Moïse  sur  les  mesures  de  cet  espace, 
on  a  cru   qu'il  pouvait  former  un  carré  parfait, 
dont  chacun  des  côtés  avait  cinquante  pieds  ;  en 
effet,  une  grandeur  moindre  n'eût  pu  ni  recevoir 
tout  ce  qu'elle  paraitavoir  contenu,  ni  donner  aux 
prêtres  la  facilité  de  vaquer  librement  à  toutes  les 
fonctions  de  leur   ministère;  car  c'est  là  qu'on 
immolait  les  victimes,  et  qu'on  apportait  la  mul- 
titude des  offrandes.    Les  Juifs  et   les   chrétiens 
n'ont  été  d'accord  ni  sur  le  nombre  ni  sur  la  qua- 
lité des  personnes  qui  pouvaient  y  pénétrer.  Les 
premiers  ont  soutenu  que  les  personnes  qui  ame- 
naient  les    victimes,    avaient    la    faculté  de    les 
accompagner   jusqu'au  pied   de  l'autel,   de    leur 
imposer  elles-mêmes  les  mains,  et  enfin  d'assister 
à  toute  la  cérémonie,  comme  la  loi  semblait  l'exiger. 
Les  chrétiens,  au  contraire,  pensent  que  les  prê- 
tres ou  les  lévites  venaient   recevoir  les  victimes 
à  l'entrée  du   parvis,   que    ceux  qui  les    avaient 
amenées  leurimposaient  les  mains  en  ce  moment, 
et  se  retiraient  ensuite  vers  l'un  des   côtés   exté- 
rieurs, d'où  ils  ne  pouvaient  voir  ce  qui  se  passait, 
qu'à  travers  le  voile  dont  on  a  parlé.  En  supposant 
que  l'opinion  des  Juifs  soit  vraie,  il  faut  convenir 
qu'il  paraît  difficile   de  concevoir  que  le  parvis  ait 
pu  contenir  en  certain  temps  le  grand  nombre  des 
assistants  qui  devaient    se   présenter  :  il  faudrait 
supposer  alors  que   la  qualité  de  ceux    qui  pou- 
vaient  être  admis  dans  l'intérieur,   était    déter- 
minée par  quelque  règle  particulière.  Nous  ne 


chercherons  point  ici  à  rendre  raison  du  motif  qui 
avait  fait  placer  l'entrée  du  parvis  du  côté  de 
l'occident;  la  raison  qu'en  donnent  les  Juifs  nous 
paraît  assez  plausible  :  c'est,  disent-ils,  pour  se 
trouver  en  opposition  avec  les  païens,  qui  étaient 
dans  l'usage  de  se  tourner  vers  l'orient,  dans  le 
culte  qu'ils  rendaient  à  leurs  faux  dieux.  Les 
interprétations  mystiques  de  quelques  théolo- 
giens chrétiens  ne  nous  arrêteront  point,  parce 
qu'elles  sont  étrangères  à  notre  sujet. 

C'est,  comme  on  l'a  déjà  remarqué,  à  l'extré- 
mité orientale  du  parvis  qu'était  placé  l'autel  des 
holocaustes,  et  vraisemblablement  à  une  distance 
assez  considérale  du  Tabernacle,  pour  que  ni  la 
fumée  du  feu  qui  était  sans  cesse  allumé,  ni  celle 
des  victimes  qu'on  y  brûlait,  ne  pussent  endom- 
mager le  voile.  On  appelait  quelquefois  cet  autel 
Y  Autel  extérieur,  pour  le  distinguer  de  celui  des 
parfums  renfermé  dans  le  sanctuaire.  Le  premier 
était  de  bois  de  sittim,  doublé  de  cuivre  :  c'était 
un  carré  de  cinq  coudées  de  face,  sur  trois  de 
hauteur.  On  le  transportait  comme  l'autre,  par  le 
moyen  d'anneaux  et  de  bâtons,  aussi  doublés  de 
cuivre.  De  chacun  de  ses  angles  paraissaient 
s'échapper  des  cornes  dont  la  figure  nous  est  in- 
connue. Une  large  grille  le  traversait  dans  le 
milieu,  et  laissait  passer  à  travers  ses  barreaux 
les  cendres  et  le  charbon.  Cette  grille  occupait 
une  place  au-dessous  de  la  partie  que  nos  versions 
appellent  l'enceinte  de  l'autel  (3).  Les  savants  qui 
ont  cherché  à  prouver  comment  il  avait  été  pos- 
sible d'allumer  de  grands  feux  sur  un  autel  de 
bois,  sans  le  réduire  en  cendres,  ont  eu  une  foule 
de  sentiments  particuliers.  Le  moins  invraisem- 
blable, à  notre  avis,  appartient  à  l'auteur  des 
Discours  historiques  sur  le  Pentaleuque  (4).  Voici 
les  expressions  de  cet  écrivain.  «  Cet  autel  était 
peut-être  entièrement  creux,  et,  dans  sa  cavité. 
devaient  être  suspendus,  par  quatre  gros  anneaux 
d'airain,  le  grillage  ainsi  que  le  grand  vaisseau  fait 
pour  recevoir  la  chair  des  victimes  offertes  en  sa- 
crifices. La  grille  soutenait  le  feu,  et  n'était  point 
adhérente  à  l'autel.  Il  est  à  présumer  que  la 
grille  et  le  vase  pouvaient  être  détachés  pour  faci- 
liter le  nettoiement,  ou  le  transport  de  l'autel.  » 
Telle  est  l'opinion  de  Saurin  :  en  consultant  son 
ouvrage,  on  verra  qu'elle  est  fondée  sur  des  rai- 
sons assez  plausibles. 

C'est  sur  cet  autel  que  devait  être  continuelle- 
ment entretenu  ce  feu  sacré,  descendu  du  ciel  à 
l'époque  de  la  consécration  du  Tabernacle.  Mais, 
dira-t-on,  comment  pendant  les  courses  des 
Israélites,  le  feu  sacré  ne  s'éteignit-il  pas  ?  Car, 


(1)  Ibid.  xxvii.  f.  9.  ad  fin. 

(2)  Ibid.  versets  9,  io,   12  et  suiv. 


(5)  Exod.  xxvn.  f.  1  et  suiv. 

(4)  Saurin,  Discours  sur  le  Pcntatcuquc.    Dis.  liv. 


SUR    L'ORGANISATION   DE  LA  NATION  JUIVE 


40  ) 


vraisemblablement,  l'autel,  avec  tout  ce  qu'il 
contenait,  était  enveloppé  de  différentes  couver- 
tures, qui  devaient  être  consumées  elles-mêmes, 
ou  du  moins  mettre  obstacle  à  l'action  de  l'air, 
sans  lequel  le  feu  ne  peut  exister.  Pour  trouver 
une  réponse  à  cet  argument,  nous  n'imiterons 
point  l'exemple  des  rabbins,  qui,  dans  cette  occa- 
sion, comme  dans  beaucoup  d'autres,  se  tirent 
d'affaire  en  alléguait  le  pouvoir  d'un  miracle. 
Puisque  le  vase  qui  contenait  le  feu  devait  être 
dégagé  de  l'autel,  pendant  les  marches,  pour- 
quoi ne  croirait-on  pas  qu'alors  il  pouvait  être 
transporté  de  manière  que  le  feu  ne  s'éteignît  pas? 

On  ne  doit  pas  oublier  d'observer  :  i°Que  cet 
autel  des  holocaustes,  dont  nous  venons  de  par- 
ler, n'est  pas  le  même  que  cet  autre  autel  im- 
mense que  Salomon  fit  élever  dans  la  suite  ;  et 
2°  Qu'on  avait  toujours  soigneusement  évité  de 
placer  les  autels  sur  des  degrés,  afin  de  prévenir 
tout  ce  qui  aurait  pu  approcher  de  la  plus  légère 
indécence  (  1  '. 

Le  dernier  des  effets  considérables  qui  se 
voyait  dans  le  parvis  du  Tabernacle,  était  la  cuve 
d'airain.  Elle  était  placée  à  une  certaine  distance 
de  l'extrémité  occidentale  du  parvis  et  de  l'autel 
des  holocaustes.  Moïse  ne  nous  a  laissé  aucun 
détail  sur  sa  forme,  non  plus  que  sur  sa  grandeur. 
Mais  nous  savons  qu'elle  était  consacrée  à  deux 
usages  principaux  :  au  lavement  des  pieds  et  des 
mains  des  prêtres,  cérémonie  dont  ils  ne  pou- 
vaient se  dispenser,  sans  encourir  de  sévères 
punitions,  avant  de  commencer  les  moindres  fonc- 
tions de  leur  ministère  (2),  et  au  nettoiement  des 
entrailles  des  victimes  (3).  Quelques  Juifs  assu- 
rent qu'un  second  réservoir  était  destiné  à  ce 
dernier  usage  (4)  ;  et  cette  assertion  ne  paraît  pas 
sans  fondement,  quand  on  se  rappelle  qu'en  eiïet, 
dans  le  temple  de  Salomon,  la  mer  d'airain  ne 
servait  qu'à  l'usage  des  prêtres,  tandis  que  dix 
autres  cuves  étaient  employées  à  la  purification 
des  victimes  (5).  Cependant  on  peut  croire  que 
l'eau  était  puisée  dans  la  cuve  d'airain,  et  trans- 
portée dans  d'autres  vases  pour  le  lavement  des 
holocaustes.  On  croit  que  ce  lavoir  était  garni, 
dans  son  contour,  de  plusieurs  robinets  qui  lais- 
saient tomber  l'eau  dans  des  bassins  où  les  prê- 
tres se  baignaient  les  pieds,  après  avoir  reçu  l'eau 
sur  leurs  mains  (6).  Les  lévites  étaient  chargés  de 
tenir  cette  cuve  toujours  pleine  d'eau  (7),  et  l'on 
croit  que  les  Nathinéens  la   leur  apportaient  jus- 


qu'à l'entrée  du  parvis.  Moïse  dit  assez  claire- 
ment, que  ce  vase  et  son  pied  ressemblaient  aux 
miroirs  des  femmes  qui  s'assemblaient  en  foule  à 
la  porte  du  Tabernacle  (8)  ;  ce  passage  a  donné 
lieu  à  une  infinité  de  conjectures.  D'après  ces 
paroles  de  l'historien  sacré,  quelques  interprêtes 
ont  voulu  que  cette  cuve  fût  d'acier  plutôt  que 
d'airain  (y),  comme  si  le  poli  de  plusieurs  autres 
métaux  n'aurait  pas  pu  leur  mériter  la  même 
dénomination.  Quant  à  notre  avis  particulier, 
c'est  que  les  vases  dont  il  s'agit  étaient  indiffé- 
remment, tantôt  de  cuivre,  tantôt  d'argent  ou 
d'étain,  et  quelquefois  même  d'une  composition 
de  ces  métaux  réunis  ;  toutefois,  il  est  vrai,  et 
Pline  n'a  pas  oublié  d'en  faire  la  remarque,  que 
ceux  d'argent  ou  d'airain  étaient  les  plus  esti- 
més (10)  :  disons  donc  que  le  lavoir  et  son  pied 
répandaient  un  éclat  pareil  à  celui  des  miroirs 
dont  les  femmes  se  servaient  à  leur  toilette. 

C'est  aux  prêtres  et  aux  lévites  qu'était  confiée 
la  garde  de  la  cuve  d'airain,  et  de  tous  les  effets 
conservés  dans  le  Tabernacle.  Ceux-ci  étaient 
spécialement  chargés  d'envelopper  et  d'emballer, 
quand  on  devait  transporter  d'un  lieu  à  un  autre, 
la  tente  du  Seigneur.  Il  est  bien  extraordinaire 
que  Moïse  n'ait  parlé  nulle  part  des  tapis  que  l'on 
étendait  dans  le  Tabernacle  ;  car  il  n'est  guère 
vraisemblable  que  les  effets  riches  et  précieux 
qu'il  renfermait,  fussent  tout  simplement  posés 
sur  la  terre  :  c'est  cette  omission  qui  a  fait  soup- 
çonner que  l'historien  n'a  décrit  que  les  objets 
construits  avant  l'élévation  du  Tabernacle.  Si  l'on 
considère  d'une  part  le  grand  nombre,  et  de  l'autre 
la  variété  de  ces  différents  meubles,  la  richesse  des 
matières  entrées  dans  leur  composition,  l'art  avec 
lequel  ils  avaient  été  exécutés,  et  le  court  espace 
de  cinq  mois  qu'on  y  avait  mis  (11),  on  sera  sans 
doute  étonné  d'un  telle  diligence  de  la  part  des 
Israélites.  Mais  quand  il  s'agit  du  temple  de  Salo- 
mon, plusieurs  de  ces  objets  sans  changer  de 
nature  et  de  destination,  furent  faits  dans  de  plus 
notables  proportions.  Le  lecteur  en  a  vu  le  détail 
dans  les  livres  historiques,  et,  comme  nous 
n'avons  d'autre  but  dans  cette  étude  que  de  réca- 
pituler ce  qui  faisait  le  fond  de  la  religion  et  de 
la  vie  civile  des  Juifs,  nous  n'avons  à  mentionner 
que  les  règlements  et  les  objets  qui  en  faisaient  la 
base,  laissant  de  côté  le  luxe  qui  était  de  subro- 
gation. L'enveloppe  extérieure  du  Tabernacle 
était  remplacée  par  le  somptueux   édifice  du  tem- 


(1)  Exod.  xx.  f.  26. 

(2)  Exod.  xxx.  f.  20. 
(j)  Lêvit.  xix. 

(4)  Kim'hi  in  hune  loe. 

{<,)  11.  Paralip.  iv.  f.  6. 

(6)  Mishn.  ap.  Arr.  Montan.  in  loc. 


(7)  N.  de  Lyrain  loc. 

(8)  Exod.  xxxvin.  f.  8. 

(9)  V.  Tremel.  in  hune  loc. 

(10)  Hist.  Nat.  lib.  xxxm.  c.  9. 

(11)  ItaJudxi.  V.  Sedar.  Olam.  Munst.Cun.  Usser.  Ann. 
p.  16  et  al. 


406 


COUP  DŒ!L  RETROSPECTIF 


pie  ;  mais  les  objets  du  culte  et  la  liturgie  ne 
subisaient  point  de  dérogation  aux  lois  ou  règle- 
ments laissés  pas  Moïse. 

Tous  les  détails  qu'on  vient  de  lire  étaient  rela- 
tifs au  culte,  et  se  rapportaient  expressément  aux 
lois  de  la  première  Table.  Avant  de  passer  à 
celles  de  la  seconde,  il  ne  sera  pas  inutile  de  par- 
ler des  règlements  qui  concernaient  les  prosé- 
lytes. 

Par  ordre  exprès  de  Dieu,  tout  étranger  qui 
paraissait  désirer  d'être  admis  à  célébrer  lapâque, 
devait  être  circoncis.  Après  cette  cérémonie, 
non  seulement  il  pouvait  participer  à  cette  fête, 
mais  encore  il  était  habile  à  jouir  de  toutes  les 
prérogatives  accordées  aux  Israélites.  On  compta 
parmi  ces  étrangers,  un  grand  nombre  ou  de  ceux 
qui  étaient  venus  d'Egypte,  ou  de  ceux  qui 
avaient  habité  le  pays  de  Canaan,  après  qu'Israël 
en  eut  fait  la  conquête.  Les  circoncis  jouissaient 
d'une  préférence  si  marquée  sur  les  autres,  qu'il 
n'est  pas  surprenant  qu'en  très  peu  de  temps  leur 
foule  ne  se  soit  considérablement  ;  ugmentée.  On 
en  comptait  de  deux  espèces  :  les  prosélytes  de 
la  porte,  et  les  prosélytes  de  justice.  Les  pre- 
miers, uniquement  assujettis  à  l'observation  des 
préceptes  de  Noé,  n'étaient  point  obligés  de  se 
faire  circoncire  ;  aussi  les  traitait-on  à  peu  près 
comme  des  esclaves.  Du  temps  de  Salomon,  on 
en  comptait  plus  de  cent  cinquante-trois  mille, 
tous  employés  aux  travaux  les  plus  serviles  (i).  Il 
était  assez  naturel  qu'ils  travaillassent  à  améliorer 
leur  sort,  en  se  conformant  en  tout  à  la  religion 
judaïque.  Cependant,  nous  apprenons  des  rab- 
bins que,  du  temps  de  David  et  de  ses  successeurs, 
on  prenait  les  plus  grandes  précautions  pour  les 
initier  au  culte  du  vrai  Dieu  (2).  Moïse  permit 
aux  Israélites  de  les  nourrir  de  la  chair  des  bêtes 
qui  mouraient  de  mort  naturelle  (3)  ;  mais  cet 
ordre  ne  s'accorde  guère  avec  le  précepte  de  Noé, 
le  seul  dont  Moïse  ait  fait  mention,  qui  défendait 
de  manger  la  viande  avec  le  sang  (4).  Quant  aux 
prosélytes  de  justice,  une  fois  incorporés  dans  la 
famille  d'Israël,  ils  étaient  forcés  d'observer  rigou- 
reusement la  loi.  Avant  la  circoncision,  ils  subis- 
saient un  long  examen;  on  leur  exposait  d'abord, 
combien  était  pénible  la  tâche  qu'ils  allaient 
s'imposer,  la  difficulté  d'observer  la  loi,  les  dan- 
gers qu'ils  courraient  en  la  violant;  enfin  on  leur 


demandait  un   courage  capable  de  braver  le  mé- 
pris, la  haine  et  les  persécutions.  S'ils  persistaient, 
on  leur  administrait  la  circoncision,  et  dès  que  la 
plaie  était  cicatrisée,  ils  recevaient  le  baptême. 
Cette  dernière  cérémonie  usitée  dans  les  derniers 
temps, étant  regardée  comme  une  espèce  de  con- 
trat judiciaire,  elle  se  faisait  devant  trois  juges,  et 
ne  pouvait  être  renouvelée  pas  même  dans  le  cas 
d'apostasie.  Les  enfants  nés    de   pères  baptisés, 
n'étaient  point  assujettis  à  cette  formalité  ;  on  les 
circoncisait  simplement  comme   les  enfants  d'Is- 
raël. Dans  le  cas  où  les  prosélytes  avaient   reçu 
le  jour  chez  des  peuples  où  la  circoncision  était 
en     usage,     tels    que   les     Ismaélites,     les     Idu- 
méens,  etc.,  on  se  contentait  de  leur  tirer,  avec 
une  lancette,  quelques  gouttes  de  sang  à  l'endroit 
où   se  faisait  la   circoncision,   et  ensuite  on   les 
baptisait  :  les  femmes  n'étaient  sujettes  qu'à  cette 
dernière  cérémonie.  Moïse  établit  encore  quelque 
différence  entre  ces  nations  :  toutes  n'étaient  pas 
également  admises  à  la  congrégation  de  l'Éter- 
nel (5)  :  par  exemple,  les  Iduméens,  que  les  Juifs 
nommaient  leurs  frères,  ainsi  que  les  Egyptiens, 
parce  qu'Israël  avait  habité  en  Egypte,  pouvaient 
prétendre  à  l'admission,  quand  leur   grand    père 
seulement    s'était    fait    circoncire  ;    mais    il    n'en 
était  pas  de  même  des   Moabites  et  des  Ammo- 
nites ;  ceux-ci  ne  pouvaient  être  reçus  qu'après 
la  dixième  génération,  et,   selon  quelques  inter- 
prètes, ce  délai  était  même  trop  court.  Tant  de 
sévérité,    de    la    part   des    Israélites,   avait    pris 
sa  source,  non  seulement  dans  le  refus  qu'avaient 
fait  les  Moabites  et  les  Ammonites, de  leur  donner 
l'hospitalité;  mais  surtout  dans  la  malédiction  de 
Balaam,  qu'ils  avaient  appelée    contre    eux.   Les 
bâtards,  les   Amalécites   et   les  ennuques  (6),  de 
quelque  nation  qu'ils  fussent,    étaient    naturelle- 
ment privés  de  l'adoption  ;  les  premiers, parce  qu'ils 
étaient    frappés    d'anathème  (7),   et    les    autres, 
parce  qu'on  envisageait   leur  condition    comme 
une  imperfection  légale  (8).  Les  exégètes  ne  sont 
point  d'accord  sur  le  sens  qu'il  faut  donner  à  ces 
mots   :    Ne  pas   entrer  dans   la  congrégation  de 
V Etemel.  Quelques-uns  pensent  que  c'est  l'inha- 
bilité à  être  incorporé  à  la  république  d'Israël  par 
la  circoncision;    d'autres  n'y  voient  que  l'exclu- 
sion aux  premières  places  du  gouvernement. Cette 
dernière   opinion  est  la   plus  généralement  reçue 


(1)  11  Paralip.  11.  y.  18. 

(2)  Le  thalmud  compare  ces  prosélytes  ou  à  des 
ulcères,  ou  à  la  rouille  qui  ronge  le  fer.  On  était  dans 
l'usage  de  leur  refuser  jusqu'à  trois  lois  la  faveur  de  la 
circoncision  ;  s'ils  persistaient,  ils  recevaient  la  circon- 
cision, ensuite  le  baptême,  et  enfin  on  les  obligeait  à 
offrir  des  sacrifices  expiatoires  (V.  Basnag.  R.  H.  t.  Il- 
lib.  1.  c.  1. 

(j)  Deut.xw.  y.  21.—  {4)  Gènes,  ix.f.  4. 


(<;)  Deut.  xxiu.  j!\  1  et  suiv.-  Selden  de  jure,  11,  2,  j. 

(6)  L'expression  de  l'original  signifie  un  homme  qui  a 
quelque  défaut  dans  les  parties  destinées  à  la  génération  . 
On  remarquera  à  celte  occasion  qu'il  ne  se  trouve,  dans 
les  livres  sactés,  aucun  terme  pour  les  nommer.  Les 
Juifs  attribuent  cette  omission  à  la  pudeur  de  la  langue 
sainte.  Mais  il  y  aurait  des  réserves  à  faire  à  cet  égard. 

(7)  Exod.  xvn.  y.   14  et  suiv. 

(8)  Lêint.  xxi  y.  20. 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA   NATION  JUIVE 


407 


parles  interprètes  chrétiens:  mais  les  Juifs  reten- 
dent jusqu'à  la  défense  de  contracter  des  mariages 
avec  les  femmes  d'Israël,  conformément  à  cette 
maxime,  qui  est  chez  eux  dans  toute  sa  vigueur, 
que  les  enfants  participent  à  la  qualité  de  leur 
mère.  On  imposait  à  chaque  prosélyte  de  justice 
l'obligation  de  circoncire  tous  les  enfants  mâies, 
et  b'aptiser  toutes  les  filles  de  sa  famille,  qui 
n'avaient  pas  atteint  leur  treizième  année;  car 
alors  ils  étaient  libres,  ou  de  se  soumettre  à  la 
loi,  ou  de  persister  dans  leur  ancienne  religion. 
Lesenfants,  avant  l'âge  de  treize  ans,  ne  pouvaient 
être  reçus  prosélytes  sans  l'aveu  de  leurs  parents  ,' 
mais  quand  le  refus  de  ceux-ci  était  constaté,  il 
suffisait  aux  postulants  de  s"y  faire  au  oriser  par 
deux  ou  trois  juges,  et  alors  leur  admission  était 
regardée  par  les  Juifs,  comme  une  régénération, 
une  naissance  nouvelle  ;  en  un  mot,  ils  devenaient 
étrangers  à  leurs  parents  ;  les  Juifs  allaient  même 
jusqu'à  supposer  une  âme  nouvelle  aux  convertis 
de  cette  espèce  (1).  Voilà  pourquoi  Jésus-Christ 
pat  ut  étonné  de  ce  que  Nicodème,  docteur  en 
Israël,  ne  comprenait  rien  de  ce  qu'il  disait  au 
sujet  d'une  nouvelle  naissance  (2).  A  vrai  dire,  ce 
n'était  pas  une  nouvelle  naissance, mais  une  régé- 
nération d'ordre  spirituel.  Le  thalmud  et  quelques 
autres  ouvrages  juifs  renferment  des  détails  sur 
les  prérogatives  de  ces  prosélytes,  auxquels  nous 
ne  nous  arrêterons  point,  parce  qu'ils  ressemblent 
trop  à  des  fictions  Comment  croire,  par  exemple, 
à  la  loi  qui  voulait  que  les  enfants  nés  après  le 
baptême  de  leur  père,  héritassent  exclusivement 
de  ses  biens,  au  préjudice  de  ceux  qui  avaient  vu 
le  jour  avant  cette  époque  ?  Et  comment  ajouter 
foi  au  règlement  qui  laissait  au  premier  occupant, 
contre  le  droit  ordinaire  du  fils,  la  succession  d'un 
prosélyte  mort  sans  enfants  ? 

Lois  de  la  seconde  Table  :  usages  et  coutumes  qui 
y  ont  rapport. 

Nous  suivrons  ici.  dans  l'énumération  de  ces 
lois,  l'ordre  qu'on  leur  a  donné  dans  le  Décalo- 
gue.  Les  premiers  qui  se  présentent  renferment 
les  devoirs  des  enfants  envers  leurs  parents,  ce 
mot  pris  au  sens  naturel  et  au  sens  politique.  Les 
familles  s'étant  subdivisées  à  l'infini,  le  gouverne- 
ment patriarcal  devenait  insuffisant  :  Dieu  cepen- 
dant voulait  que  son  peuple  obéit  à  un  seul  chef, 
vécût  dans  une  même  religion,  et  n'eût  qu'un  seul 
code  de  lois  civiles  ;  mais  les  préceptes  de   Noé, 


ou  plutôt  ceux  de  la  nature,  étant  tombés  dans 
l'oubli,  ou  bien  ayant  été  altérés  pendant  la  ser- 
vitude.  Dieu,  voulant  prévenir  les  murmures 
d'une  nation  ingrate  et  lâche,  déclara  aux  Israé- 
lites que  désormais  il  serait  lui-même  leur  roi  ; 
que  de  temps  à  autre  il  susciterait  parmi  eux  des 
hommes  qui  les  gouverneraient  en  son  nom, 
et  dont  l'autorité,  respectée  des  chefs  de  famil- 
les, ferait  revivre  ses  lois  dans  toute  leur  vigueur. 

Moïse  fut  le  premier  à  qui  Dieu  confia  cet  ho- 
norable emploi.  L'Écriture  y  fait  allusion,  quand 
elle  dit  qu'i7  donna  une  loi,  c'est-à-dire  un  corps 
de  législation  et  un  héritage  {}). 

Josuéet  les  Juges  succédèrent  à  Moïse.  La 
preuve  la  plus  évidente  qu'il  fallait  changer  la 
forme  de  leur  gouvernement,  se  tire  des  actes  de 
rébellion  et  d'idolâtrie  dont  chaque  interrègne 
fournit  des  exemples  sans  nombre;  aussi  l'histo- 
rien sacré  remarque-t-il,  qu'alors  chacun  d'eux 
faisait  ce  qui  paraissait  juste  à  ses  propres  yeux, 
quoique  déplaisant  à  ï  Élernel(4).Lapumùons>u\vant 
toujours  de  très  près  leur  désobéissance,  ils  pa 
rurent  se  lasser  enfin  de  la  captivité  ;  ils  deman- 
dèrent à  Dieu  un  roi  qui  pût,  en  même  temps,  et 
veiller  sur  eux,  et  les  protéger  contre  leurs  enne- 
mis. Ce  premier  monarque  fut  Saùl  ;  et  à  l'époque 
de  son  avènement  au  trône,  Israël  perdit  son 
nom  de  république  pour  prendre  celui  de  royau- 
me. Dans  le  code  de  législation  qui  leur  fut 
donné,  on  trouve  fort  peu  de  choses  relatives  à 
l'obéissance  qu'ils  devaient  à  leur  nouveau  roi, 
tandis  que  la  défense  faite  à  celui-ci  d'opprimer 
le  peuple,  s'y  présente,  pour  ainsi  dire,  à  chaque 
page.  La  pusillanimité  des  Israélites,  on  peut 
même  dire  leur  lâcheté,  et  le  dessein  qu'ils  avaient 
formé  de  prendre  pour  modèles  les  nations  les 
plus  soumises,  n'avaient  point  nécessité  qu'on 
leur  prescrivît  des  règles  de  soumission  ;  mais 
l'étendue  du  pouvoir  que  donnait  alors  la  dignité 
royale,  voulait  nécessairement  qu'elle  fût  dirigée 
par  de  sages  règlements,  dont  le  monarque  ne 
pût  s'écarter  sans  se  rendre  coupable.  L'histoire 
même  de  Saûl,  leur  premier  roi,  ne  nous  fournit- 
elle  pas  un  exemple  frappant,  et  du  despotisme 
des  princes  de  ce  temps,  et  de  la  lâche  soumis- 
sion des  Israélites  ?  Nous  voulons  parler  du  mas- 
sacre de  quatre -vingt  cinq  sacrificateurs,  et  de 
celui  de  tous  les  habitants  de  Nobé,  où  les  ani- 
maux, et  même  les  enfants  à  la  mamelle  ne  furent 
pas  épargnés  ('-,).  On  peut  ajouter  que  si  les  rois 
d'alors  n'eussent  pas  exercé  la  plus  infâme  tyran- 


(1)  Seldcn.  ubi  sup.  et  de  J.  N.  et  G.  -  Jac.  Atling. 
Disputée  Proselyt.-  R.  Mos.  Kot\.  R.  Mos.  Egypt.  Issur. 
Biatk.  Perek.  Serrar.  Trithœres.  lib.  11.  c.  2.  -  Drus,  de 
Trib.  Sect.  Fag.  In  Exod.  xxn.  f.  21  et  al.  in  Deut  xxm.  et 
Prce.  neg.  nj  et  suiv.  -  Léo  de  Moden.  t.    V.   chap.  ni. - 


Calmet.  Diction,  art.  Prosélyte,  etc. 
(2)  S.  Jean.  m.  f.  1  et  suiv. 
(?)  Deut.  xxxiii.  f.  4.  5. 
(4)  V.  Jug.  n  et  suiv. 
(5)1  Rois  xxn.  f.  18.  19. 


4o3 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


nie  sur  les  nations  qui  leur  étaient  soumises,  Sa- 
muel n'aurait  pas  fait  une  peinture  si  vive  de  tous 
les  maux  qu'entraîne  après  lui  le  pouvoir  absolu. 
Au  reste,  quel  qu'ait  été  le  motif  qui  a  dirigé  la 
conduite  du  Tout-Puissant,  il  est  de  fait  que, 
dans  le  premier  code  judaïque,  on  ne  trouve  d'au- 
tre précepte  concernant  l'obéissance  due  aux 
princes  par  les  peuples,  que  celui  d'honorer  son 
père  et  sa  mère  (i),  et  la  défense  de  maudire  les 
gouverneurs  du  peuple  (2).  Mais  on  y  voit  au 
contraire  une  foule  d'ordonnances  faites  pour 
contenir  l'autorité  royale  dans  de  justes  bornes, 
et  protéger  les  peuples  contre  l'oppression. Telles 
sont  celles  qui  ne  permettent  à  aucun  étranger  de 
parvenir  à  cette  dignité  (3)  ;  qui  détendent  qu'un 
roi  d'Israël  accumule  trop  de  richesses,  et  aug- 
mente d'une  manière  démesurée  le  nombre  de  ses 
femmes  et  de  ses  chevaux.  Le  prince  de  cette 
nation  était  obligé  de  copier  de  sa  propre  main, 
le  livre  de  la  Loi,  de  le  lire,  de  le  méditer,  de  le 
prendre  pour  règle  unique  de  sa  conduite,  et  de 
ne  s'en  écarter  jamais  (4),  enfin  de  ne  confier  les 
emplois  de  judicature  qu'à  des  hommes  d'une 
sagesse  et  d'une  probité  reconnues  (ç).  Mais 
comme  ces  rois  ne  devaient  compte  qu'à  Dieu 
seul  de  la  transgression  des  préceptes,  on  voit 
dans  leur  histoire,  qu'ils  ne  craignirent  guère  de 
les  enfreindre,  même  dans  les  circonstances  les 
plus  importantes.  L'étendue  de  leur  puissance  ne 
laissait  qu'aux  seuls  prophèles  que  Dieu  en  avait 
spécialement  chargés,  le  droit  de  leur  faire  des 
représentations  ;  et  la  précieuse  prérogative 
dont  ils  jouirent  pendant  un  certain  temps,  d'être 
sacrés  par  un  prophète,  et  établis  par  lui,  souve- 
rains du  peuple  ou  sacrificateurs  royaux  (6),  leur 
donnait  une  autorité  presqu'absolue,  tant  en  ma- 
tière civile  qu'à  la  tète  des  armées  et  dans  les 
affaires  de  religion.  Plusieurs  théologiens,  il  est 
vrai,  révoquant  en  doute  ce  dernier  point,  pen- 
sent que  ce  n'est  pas  comme  rois  d'Israël,  mais 
comme  prophètes  et  homme  inspirés,  tels  que 
David  et  Salomon,  qu'ils  avaient  une  influence 
marquée  dans  le  gouvernement  ecclésiastique.  Il 
est  facile  de  leur  répondre,  car  Ezéchias,  Josa- 
phat,  Josias,  etc, n'étaient  point  prophètes;  et  ce- 
pendant quelle  réforme  ne  firent-ils  pas  dans  la 
religion  ?  Non  seulement  ils  pouvaient,  mais  ils 
devaient  consulter,  dans  les  occasions  délicates, 
et  l'oracle  de  l'ourim  et  le  grand  sanhédrin  auquel 


ils  présidaient  quand  ils  jugeaient  à  propos  de  s'y 
trouver  (7).  David,  après  avoir  été  sacré  roi,  con- 
sulta l'oracle  divin,  du  temps  même  de  Saùl,  sur 
le  succès  de  son  entreprise  (8).  Ces  rois  s'étaient 
arrogé  un  pouvoir  de  vie  et  de  mort  sur  leurs  su- 
jets, et  l'on  voit  qu'ils  l'exercèrent  souvent  au 
mépris  de  la  loi,  qui  défendait  qu'aucun  homme 
ne  fût  mis  à  mort  sans  avoir  été  jugé  selon  les 
formes  judiciaires.  L'exemple  de  Miphiboseth  et 
de  son  serviteur  Siba  (9)  prouve  assez  que  les 
propriétés  n'étaient  pas  plus  respectées.  Il  paraît 
que,  dans  certaines  circonstances,  les  biens  des 
coupables  condamnés  à  mort  retournaient  au  fisc. 
Voyez  ce  que  l'Écriture  dit  à  ce  sujet  de  Na- 
both  (10). Pour  avoir  une  idée  du  profond  respect 
qu'imprimait  la  dignité  royale,  il  suffit  de  réfléchir 
aux  expressions  qu'on  employait  quand  on  parlait 
au  roi  (  1 1  ),  et  à  l'humble  contenance  de  ceux  qui 
l'abordaient.  N'a-t-on  pas  vu  des  reines  et  des 
prophètes  se  prosterner  devant  eux  jusqu'à  tou- 
cher la  terre  de  leur  front  t  Nathan  et  Bethsabée 
n'approchèrent-ils  pas  David  dans  cette  posture 
humiliante  ?  et  que  ne  doit-on  pas  penser  des  pré- 
tentions de  son  (ils  Salomon,  à  cet  égard,  lui  qui 
porta  si  loin  l'orgueil  du  trône?  Selon  les  Juifs, 
le  grand  prêtre  était  obligé  de  se  tenir  debout 
devant  le  roi  ;  et  celui-ci  ne  gardait  cette  attitude 
en  présence  du  grand -prêtre,  que  quand  il  con- 
sultait l'oracle  de  l'ourim  (12).  Le  roi  seul  avait  le 
droit  de  s'asseoir  dans  le  parvis  du  temple,  et 
même  à  la  place  destinée  aux  prêtres,  pourvu  tou- 
tefois qu'il  fût  du  sang  de  David  (13). La  richesse 
de  leurs  vêtements  ne  contribuait  pas  peu  à  leur 
attirer  les  hommages  respectueux  de  leurs  sujets; 
et  quoique  l'on  ne  trouve  rien  ni  dans  les  livres 
de  Moïse,  ni  dans  aucun  autre  écrivain  sacré,  sur 
la  forme  et  la  matière  de  ces  habits,  il  est  suffi- 
samment prouvé,  par  le  passage  où  l'on  dit  que 
Josaphat  garda  ses  vêtements  pendant  qu'Achab 
se  revêtit  d'un  habit  commun  (14),  qu'il  y  avait 
quelque  différence,  soit  dans  la  manière  dont  ils 
étaient  faits,  soit  dans  l'éclat  et  la  richesse  des 
étoffes,  soit  enfin  par  les  joyaux  qui  peut-être  ser- 
vaient d'ornements  à  la  couronne.  On  trouve  dans 
Josèphe  (i<),  que  Salomon  portait  d'ordinaire  un 
habit  blanc  ;  mais  cette  couleur  était  commune 
aux  prêtres  et  aux  personnes  de  la  première  dis- 
tinction ;  de  sorte  qu'il  pouvait  bien  n'y  avoir 
d'autre  distinction  entre  les  habits  de  ceux-ci  et 


(1)  Exod.  xx.  y.  12  e(  passim. 

(2)  Ibid.  xxii.  y.  18. 

(j)  Deut.  xvn.  y.   14.  1$. 

(4)  Ibid.  f.  18  et  suiv.   et  Proie.    Neg.   2:1  et  suiv. 

(4)  Deut.  xvi.  18  et  suiv.-  Cf.  et  Prce.c.  Affîrm.  96  et  suiv. 

(6)  Exod.  xix.  f.  6  et  alib. 

(7)  Maim.  Halak.  Mclaldm.  c.  2. 

(8)  1  Rois.  xxx.  y.  7  et  8.  -  Basnag.  ubi  sup. 


(9)  11  Rois.  .xix.  fr.  29. 

(10)  m  Rois.  y.  xxi.  passim. 

(11)  1  Rois.  xxv.  f.  2j  et  suiv.    et 
passim.  xxiv.  y.  j  et  ahb. 

(1  2)  Maïtn.  ubi  sup. 

(  1  j)  Idem.  Halak.  Bclli.  Habsar. 

(14)  m  Rois.  xxii.  y.  }o. 

(15)  Joseph,  lib.  vin. c.  2. 


y.  40.  -   Il   Rois.    xiv. 


SUR  [-"ORGANISATION   DE    LA    NATION  JUIVE 


409 


ceux  du  roi,  que  dans  la  beauté  de  la  soie  ou  la 
finesse  du  lin.  Quoi  qu'il  en  soit,  comme  ils 
n'étaient  obligés  par  aucune  loi  à  se  vêtir  d'un 
habit  plutôt  que  d'un  autre,  il  est  à  présumer 
qu'ils  se  conformaient  à  la  coutume  des  autres 
pays,  et  qu'à  certaines  fêtes  ils  revêtaient  des 
habits  plus  riches  que  de  coutume  (1).  On 
trouve  dans  le  psalmiste  une  belle  description 
de  l'habillement  des  reines  :  il  paraît  qu'il  l'em- 
portait encore,  par  la  magnificence,  sur  celui  des 
rois. 

Des  Tribunaux  ou  Cours  de  Justice. 

Les  Israélites,  depuis  le  temps  de  Josué  jus- 
qu'à celui  de  Saùl,  furent  gouvernés  par  des 
hommes  extraordinaires  que  Dieu  plaçait  de 
temps  en  temps  au  milieu  d'eux,  et  dont  lui-même 
prenait  soin,  dans  les  circonstances  les  plus  déli- 
cates, de  diriger  l'esprit.  Ces  personnages  privi- 
légiés portaient  le  nom  de  Juges:  l'autorité  su- 
prême leur  était  confiée  pendant  toute  leur  vie; 
et  leurs  charges  ne  différaient  de  celles  des  rois, 
que  parce  qu'elles  étaient  personnelles  et  point 
héréditaires,  et  ceux  qui  en  étaient  revêtus  ne 
cherchaient  point  comme  les  autres  à  en  imposer 
par  des  titres  fastueux  et  par  une  pompe  orgueil- 
leuse. Ils  étaient  les  arbitres  de  la  paix,  ou  fai- 
saient prendre  les  armes  à  volonté  ;  en  outre  ils 
avaient  le  droit  de  consulter  l'oracle  de  l'ourim. 
Eux  seuls  jugaient  le  peuple  d'Israël,  et  chaque 
année  ils  se  transportaient  dans  certains  cantons, 
pour  prononcer  sur  les  différends  qui  avaient  pu 
s'élever  (2).  On  ignore  s'ils  prononçaient  alors 
sur  des  cas  purement  douteux,  ou  bien  s'ils  con- 
firmaient ou  annulaient  les  jugements  des  tribu- 
naux inférieurs.  Indépendamment  de  ces  premiers 
magistrats,  Moïse,  et,  après  lui,  ceux  qui  gou- 
vernèrent la  République,  eurent  ordre  de  choisir 
dans  chaque  ville  un  certain  nombre  d'hommes 
sages  et  vertueux,  pour  prononcer  en  première 
instance  dans  les  causes  qui  se  présentaient.  Ces 
juges  devaient  connaître  à  fond  la  loi  de  Moïse  ; 
on  exigeait  qu'ils  eussent  donné  des  preuvesd'im- 
partialité  et  d'horreur  pour  le  crime,  enfin  qu'ils 
parussent  disposés  à  protéger  l'innocence,  la 
veuve,  l'orphelin,  le  pauvre  et  l'étranger  (3).  Ceux 
qui,  se  laissant  corrompre  par  des  vues  d'intérêt 
dans  l'administration  de  la  justice,  avaient  l'au- 
dace de  violer  la  loi,  devaient  être  punis  des  plus 
sévères  châtiments  ;  mais  comme  ils  étaient  nom- 


més par  les  rois,  leur  conduite  fut  presque  tou- 
jours conforme  à  celle  des  princes.  Samuel,  dont 
l'intégrité  reconnue  lui  mérita  le  respect  et  la 
vénération  des  peuples,  laissa  deux  fils,  qui  s'écar- 
tèrent sensiblement  de  la  voie  qu'il  leur  avait  tra- 
cée. David  fut  un  monarque  pieux  ;  mais  son  fils 
Absalom  regrettait  de  n'avoir  pas  occupé  la 
place  de  juge,  sans  doute  parce  qu'elle  lui  aurait 
fourni  l'occasion  de  commettre  un  plus  grand 
nombre  d'injustices  (4).  Les  tribunaux  dont  on 
parle,  siégeaient  à  la  porte  des  villes;  avec  le  temps 
ils  se  multiplièrent  beaucoup.  On  a  fait  d'inutiles 
recherches,  parce  que  l'Écriture  ne  fournit  aucun 
éclaircissement  à  cet  égard,  pour  savoir  de  com- 
bien de  juges  chaque  tribunal  était  composé  : 
s'ils  étaient  tous  revêtus  de  la  même  autorité,  ou 
enfin  si  les  uns  étaient  subordonnés  aux  autres. 
On  sait  cependant  que,  durant  le  séjour  des  Is- 
raélites dans  le  désert,  Moïse  établit  un  chef  sur 
mille  individus  ;  un  second  devait  avoir  l'œil  sur 
la  conduite  de  cent  personnes;  un  troisième  en 
observait  cinquante,  et  dix  étaient  surveillés  parun 
quatrième  (5).  Selon  toutes  les  apparences,  il 
devait  y  avoir  une  sorte  de  subordination  entre 
ces  chefs  eux-mêmes.  On  ne  sait  jusqu'à  quel 
point  ce  règlement  fut  mis  en  vigueur  dans  le 
pays  de  Canaan.  On  croit  pouvoir  supposer  que 
les  tribunaux  n'étaient  d'abord  composés  que  d'un 
trèspetit  nombre  de  personnes,  puisque,  du  temps 
même  de  Josué,  il  n'est  fait  mention  que  de  qua- 
tre dignités  ;  savoir,  celles  des  anciens,  des  chefs, 
des  juges  et  des  officiers  (6).  Il  n'est  guère  pos- 
sible de  déterminer  les  différentes  fonctions  qu'ils 
avaient  à  remplir;  mais  il  paraît  que  ceux  qui 
étaient  connus  sous  la  dénomination  d'officiers, 
n'étaientquedesimples  agentsde  police. Quoi  qu'il 
ensoit,  leur  nombre  s'accrut  infinimentsousles  rè- 
gnes de  David  etdeSalomon(7),etils  portèrent  en- 
suite la  dépravation  des  mœurs  jusqu'à  mériter 
que  les  prophètes  leur  adressassent  les  repro- 
ches les  plus  durs.  L'un  d'eux,  député  vers  Josa- 
phat,  lui  fit  une  telle  peinture  de  la  vengeance 
de  Dieu  prête  à  éclater  contre  de  si  criants  abus, 
que  ce  bon  roi  entreprit  sur  le  champ  une  réforme 
presque  entière  de  la  magistrature.  Il  choisit 
de  nouveaux  juges  dans  chaque  ville  murée,  et 
leur  recommanda  de  réparer,  par  leur  vigilance 
et  leur  intégrité,  les  crimes  de  ceux  qui  les  avaient 
précédés  :  plusieurs  d'entre  ces  nouveaux  élus 
appartenaient  à  la  tribu  de  Lévi.  Le  même  prince 
érigea  deux  tribunaux  dans  la  ville  de  Jérusalem  ; 


(1)  1  Rois,  xxviii.  y.  8.-  m  Rois.  xxn.  y.  10.  jo.  -  Joseph. 
Antiq.  lib.  vi.  c.  20  et  passim.  Rase,  et  al. 

(2)  Jug.  îv.  y.  5.-  1.  Rois.  m.  y.  20;  iv.  1;  vu.  t.  iî.  et 
suiv.  et  passim. 

(j)  Exod.  xxiii.  y.  3.  et  suiv.-  Deut.  xvi.  y.  18.  el  suiv.  - 


xix.  pass.  xxtv.  y.  16.   et  suiv.  ;  xxv.  y.    1.    et   suiv.  ;   et 
alib.  passim.  -  E-éch.  xliv.  y.  24.  -  Prec.  affir.  97.  8. 

(4)  11  Rois.  xv.  y.  2.  et  suiv. 

(5)  Exod.  xviii.  y.  24.  et  suiv. 

(6)  Jos.  xxiv.  y.  1.  —  (7)  1.  Paralip.  xxm.  et  suiv. 


4io 


COUP  D'ŒIL    RETROSPECTIF 


l'un,  composé  de  prêtres  et  de  lévites,  jugeait  des 
matières  de  religion  ;  l'autre,  formé  de  chefs  de 
familles,  jugeait  les  causes  en  matière  civile.  Telles 
furent,  à  ce  que  l'on  croit,  les  cours  de  judicature 
jusqu'au  temps  de  la  captivité  ;  époque  où  la  cor- 
ruption des  juges  et  des  rois  les  fit  chasser  les 
uns  et  les  autres.  Josèphe  et  les  thalmudistes  ont 
fait  de  longues  dissertations  sur  ce  sujet  ;  mais 
comme  leurs  opinions  sont  tout  à  fait  différentes, 
on  ne  peut  s'y  arrêter.  Après  la  captivité,  un 
même  tribunal  prenait  connaissance  de  toutes  les 
causes  tant  au  civil  qu'au  criminel.  Celles  même 
delà  religion  y  ressortissaient  quand  il  était  ques- 
tion de  sortilège,  d'idolâtrie,  de  blasphème,  de 
sacrilège,  etc.  :  aussi  les  prêtres  et  les  lévites  y 
étaient-ils  appelés.  Après  les  magistrats,  les  pères 
et  les  mères  étaient  revêtus  de  toute  l'autorité  ; 
la  loi  voulait  qu'on  les  honorât  et  qu'on  leur 
obéit,  pour  ainsi  dire,  aveuglément  (i).  Saint  Paul 
a  remarqué,  qu'à  l'observation  de  ce  commande- 
ment a  été  attachée  la  première  promesse  de  ré- 
compense que  Dieu  ait  faite  à  son  peuple  (2).  Les 
enfants  étaient  punis  de  mort,  non  seulement 
pour  avoir  maudit  ou  frappé  leurs  parents  (]), 
mais  pour  avoir  refusé  de  leur  obéir.  Dans  ce 
dernier  cas,  ceux-ci  étaient  autorisés  à  leur  infli- 
ger eux-mêmes  toute  sorte  de  châtiments,  les 
peines  capitales  seules  exceptées.  Si  les  correc- 
tions étaient  devenues  inutiles,  ils  étaient  auto- 
risés à  citer  leurs  enfants  devant  les  tribunaux,  et 
sitôt  qu'on  avait  la  preuve  du  crime,  le  coupable 
était  condamné  à  la  mort  (4).  C'est  ici  le  lieu  de 
parler  des  différentes  sortes  de  châtiments  ordon- 
nés par  la  loi  de  Moïse,  et  usités  avant  la  cap- 
tivité. 

On  comptait  parmi  les  peines  légères  les  amen- 
des, par  lesquelles  on  dédommageait  le  proprié- 
taire du  bien  qui  lui  avait  été  dérobé  ;  et  les 
Juifs  faisaient  observer  cette  loi  avec  tant  de  sé- 
vérité que,  s'il  se  trouvait  une  seule  pièce  de  bois, 
une  pierre  volée  dans  la  construction  d'ure  mai- 
son, on  renversait  l'édifice,  s'il  n'y  avait  pas 
d'autres  moyens  de  les  restituer  au  maître.  Les 
débiteurs  insolvables  subissaient  le  joug  de  l'es- 
clavage, et  le  prix  de  la  vente  de  l'individu  était 
consacré  au  dédommagement  du  créancier.  La 
loi  primitive  du  talion  était  aussi  dans  toute  sa 
vigueur  ;  on  avait  grand  soin  de  faire  payer  œil 
pour  œil,  dent  pour  dent,  etc.  Le  fouet  était  fré- 
quemment une  des  punitions  en  usage  chez  eux, 


mais  le  nombre  des  coups  m  devait  pas  excéder 
celui  de  quarante  ($),  On  y  comptait  aussi  quatre 
sortes  de  peines  capitales.  Les  criminels  étaient 
ou  lapidés,  ou  brûlés,  ou  décapités,  ou  enfin 
étranglés  (6).  La  lapidation  était  le  genre  de  sup- 
plice le  plus  ordinaire  ;  et  quand  la  loi  condam- 
nait un  coupable  à  mort,  sans  spécifier  le  genre 
de  supplice  qu'il  devait  subir,  c'était  toujours 
celui  dont  nous  parlons  qu'il  subissait.  On  l'em- 
ployait surtout  contre  l'inceste,  la  sodomie, 
la  bestialité,  le  blasphème,  la  violation  du  sabbat, 
la  magie,  l'idolâtrie,  la  désobéissance  envers  les 
parents,  le  dévouement  d'une  postérité  à  Moloch, 
et  plusieurs  autres  de  la  même  espèce.  Parmi  les 
crimes  que  nous  venons  de  nommer,  il  y  en  a 
quelques-uns  qui  faisaient  suspendre  à  un  gibet  le 
corps  du  coupable  déjà  lapidé.  La  plupart  de  ces 
exécutions  se  faisaient  hors  de  la  ville  ;  et,  pen- 
dant le  séjour  des  Israélites  dans  le  désert,  on 
transportait  toujours  le  criminel  hors  du  camp, 
pour  lui  faire  subir  la  punition  à  laquelle  il  avait 
été  condamné.  Dès  qu'il  avait  fait  l'aveu  de  sa 
faute,  les  témoins  imposaient  les  mains  sur  sa  tête, 
et  criaient  à  haute  voix:  Que  Ion  sang  soil  sur  toi! 
Ils  lançaient  alors  eux-mêmes  les  premières  pier- 
res, et  tous  les  spectateurs,  imitant  leur  exemple, 
hâtaient  le  dernier  moment  de  l'accusé  (7).  En 
quelques  circonstances  le  blasphémateur,  l'ido- 
lâtre, l'adultère,  subissaient  la  mort  sans  aucune 
forme  de  procès.  On  donnait  à  ces  dernières  exé- 
cutions le  titre  spécieux  de  jugement  de  zélé, 
auquel  on  se  croyait  autorisé  par  l'exemple  de 
Phinéès  consacré  dans  le  Deutéronome.  C'est  à 
une  réminiscence  biblique  de  cette  nature  qu'est 
due  la  loi  du  lynch,  aux  États-Unis. 

Par  la  condamnation  que  prononça  Juda  con- 
tre sa  belle-tille,  il  paraît  que  le  supplice  du  feu 
était  en  usage  avant  Moïse  (8).  C'est  sans  le 
moindre  fondement  que  quelques  interprètes  ont 
avancé  qu'elle  aurait  seulement  été  marquée  au 
front  d'un  fer  chaud,  pour  punition  de  son  incon- 
tinence. Les  filles  des  prêtres  reconnues  coupables 
de  ce  crime,  étaient  condamnées  au  feu  par  la 
loi  de  Moïse  (9)  ;  et  Achan,  accusé  de  sacrilège, 
fut  condamné  à  être  lapidé  et  brûlé  (10).  On  ne 
trouve  point  dans  l'Écriture  d'autre  exemple  de 
cette  sorte  de  châtiment;  cependant  les  Juifs 
prétendent  que  quelques  crimes  encore,  et  surtout 
un  certain  genre  d'inceste,  était  expié  par  le 
feu  (n).  Par  ces  mots,  supplice  du  feu,  on  enten- 


(1)  Exod.  xx.  f.  1  2.  -  Dcut.  v.  y.  16.  et  alibi. 

(2)  Ephïs.  VI.  y.  2. 

(?)  Exod.  xxi.  y    rç.   17.  -  Lcuit.  xx.  y.  0. 

(4)  Dcut.  xxi.  y.  18.  et  suiv. 

(5)  Ibid.  xxv.  y.  ?. 

(6)  Lévtxxw.  f   14  et  Nomb.  xv.  y  ?$.-  m. Rois  xxi.y.  1?. 


(7)  De  ut.  xvn.  f.  7. 

(8)  Genès.  xxxvm.  y.  24. 
(9}  Lé  vit.  xxt.  y.  9. 

(10)  Josue  vu.  y.   25. 

(11)  V.  Mos.   Kot^.  in  T-  act.  Sanhedr  c.  1.  -  Goodwin's, 
Mos.  et  Aar.  lib.  V.  c.  vu.  §.  ij. 


SUR   L'ORGANISATION    DE   LA   NATION  JUIVE 


411 


dait  ou  le  bûcher  sur  lequel  on  laissait  consumer 
le  corps  du  coupable,  ou,  selon  les  thalmudistes, 
le  plomb  fondu  qu'on  lui  faisait  avaler  comme 
boisson. 

Les  docteurs  juifs  assurent  que  la  décollation 
était  réservée  aux  meurtriers  et  aux  habitants  des 
villes  coupables  d'idolâtrie.  Rien  ne  nous  apprend 
que  ce  supplice  ait  été  pratiqué,  du  moins  judi- 
ciairement, avant  la  captivité  ;  car  il  paraît  qu'au- 
cune procédure  ne  fut  faite,  ni  quand  Abimélech 
fit  décapiter  ses  soixante-dix  frères  (1),  ni  quand 
les  habitants  de  Samarie  envoyèrent  au  nou- 
veau roi  d'Israël  les  soixante-dix  tètes  des  fils 
d'Achab  (2).  On  trouve  quelques  exemples  de 
coupables  frappés  de  mort  par  le  glaive  :  Samuel 
tua  d'un  coup  d'épée  le  roi  des  Amalécites  (3)  ; 
le  messager  qui  porta  la  nouvelle  de  la  mort  de- 
Saùl,  perdit  ainsi  la  vie  par  l'ordre  de  David  (_|)  ; 
et  par  celui  de  Salomon,  Adonias,  Joab,  Séméï, 
furent  mis  à  mort  de  la  même  manière  :  l'un  d'eux 
expira  même  sur  les  marches  de  l'autel  (5). 

L'Écriture  n'entre  dans  aucun  détail  sur  le  sup- 
plice de  ceux  qui  étaient  étranglés  ;  mais  les 
thalmudistes  comptent  parmi  ceux  à  qui  on 
infligeait  cette  peine,  les  enfants  qui  frappaient 
leur  père,  les  ravisseurs,  les  prêtres  rebelles  aux 
décisions  de  la  cour,  les  faux  prophètes,  les 
adultères  et  les  séducteurs  des  filles  des  prêtres. 
Pour  faire  subir  le  châtiment  dont  nous  parlons 
aux  criminels,  on  les  ensevelissait  dans  un  tas 
de  fumier  jusqu'aux  genoux,  et  deux  bourreaux, 
après  leur  avoir  passé  un  linge  autour  du  cou,  le 
tordaient  jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  suffoqués.  Le 
jour  même  du  supplice,  on  mettait  le  défunt  dans 
une  sépulture  isolée,  où  l'on  enfermait  avec  lui 
tous  les  instruments  qui  avaient  servi  à  lui  arra- 
cher la  vie,  la  politique  voulant  sans  doute  faire 
perdre,  s'il  était  possible,  jusqu'au  souvenir 
des  choses  inanimées  qui  auraie.  t  pu  rappe- 
ler le  scélérat  à  la  mémoire  de  ses  concitoyens  (6). 

De  toutes  les  peines  connues  chez  les  Juifs,  il 
n'en  était  point  de  plus  terrible  que  l'excommu- 
nication. Il  en  était  une,  entre  autres,  qu'on 
appelait  nnNcw  Schemallhah  :  elle  répondait  au 
Maran-Atha  dont  parle  saint  Paul  (7).  Ces  mots 
signifient:  Voici  le  Seigneur. Enoch  passe  pour  être 
l'inventeur  de  cette  malédiction,  et  saint  Jude  lui 
attribue  ces  paroles  :  Voici  le  Seigneur;  il  vient 


avec  ses  sainls,  ils  sonl  des  millions  ;  il  vient  pour 
prononcer  le  jugement  (8).  Ces  mois,  sans  doute, 
font  allusion  à  quelque  tradition  reçue  parmi  les 
Juifs  :  ceux-ci  prétendent  voir  très  clairement  le 
type  de  l'excommunication  dans  cette  phrase  de 
Moïse  :  Celte  âme  étant  retranchée  d'Israël,  lu 
auras  ôlé  le  mal  du  milieu  de  loi-même,  et  plus 
clairement  encore  dans  ces  expressions  du  canti- 
que de  Déborah  :  Maudisse^  Mero^,  a  dit  l'ange 
de  l'Eternel,  maudisse\-en  tous  les  habitants  (9). 
Sans  s'arrêter  à  l'examen  de  toutes  ces  étymolo- 
gies,  qui  sont  pour  le  moins  aussi  subtiles  que 
solides,  on  peut  passer  à  ui.e  preuve  plus  certaine 
de  l'existence  du  genre  de  peine  dont  nous  par- 
lons :  c'est  l'excommunication  formelle,  consignée 
dans  Esdras  et  dans  Néhémie  (10). 

On  y  voit  qu'ils  infligèrent  ce  châtiment  à  tous 
ceux  qui  refusèrent  de  répudier  les  étrangères 
qu'ils  avaient  épousées  ;  on  y  voit  encore  qu'ils 
obligèrent  le  peuple,  sous  la  foi  du  serment,  à  fuir 
toute  espèce  de  liaisons  avec  elles.  Josèphe  nous 
fournit  encore  de  nouvelles  preuves  qui  viennent 
à  l'appui  de  celles-ci  :  il  dit  que  l'on  confisquait 
au  profit  du  trésor  public,  les  biens  des  personnes 
frappées  de  cet  anathème  (1 1).  Après  la  captivité, 
il  est  sûr  que  la  peine  d'excommunication  avait 
encore  lieu  ;  car  on  lit  qu'avant  et  après  ce  temps, 
cette  cérémonie  se  pratiquait  conformément  aux 
lois  de  l'Eternel.  Nous  ignorons  quelle  espèce  de 
formule  était  employée  dans  ces  occasions  ;  car 
on  ne  peut  guère  s'en  rapporter  qu'à  ce  que 
dit  Buxtorf  sur  ce  sujet  (12),  et  il  semble  qu'il  a 
puisé  ses  opinions  dans  les  ouvrages  des  thalmu- 
distes; mais,  si  on  l'en  croit,  les  imprécations  qu'il 
rapporte  sont  telles,  qu'on  ne  peut  même  les  lire 
sans  frémir.  Le  psaume  cvm  paraît  en  avoir  fourni 
quelques-unes,  maison  y  a  ajouté  des  malédic- 
tions horribles,  qui  ne  portent  pas  moins  sur 
l'éternité  que  sur  la  vie  présente.  L'usage  de 
l'excommunication  passa  des  Juifs  aux  chrétiens. 
Saint  Paul  rapporte  quelques-unesdesexpressions 
dont  on  se  servait  dans  la  primitive  église  (13); 
et  le  motif  qu'il  donne  à  ce  châtiment  [la  mortifi- 
cation de  la  chair,  afin  que  V esprit  puisse  être  sauvé 
au  jour  du  Seigneur),  prouve  du  moins  qu'alors  les 
chrétiens  n'avaient  pas  l'intention  de  faire  de  ce 
châtiment  une  punition  éternelle. 


(x)  Jug.  ix.  f.  5. 
(2)  iv.  Rois  X.  f.  7. 
(  j)  1.  Rois  xv.  f.   ?j. 

(4)  n.  Rois  1.  f.  15. 

(5)  in.  Rois  u.  f.  2;.  50.  et  40. 

(6)  Tract.  Sanhedr.  ubi  sup. 

(7)  1.  Cor.  xvi.  f.  22. 


(8)  Ibid.  v.  #.  14. 

(9)  Jud.  v.  f.  2J. 

(10)  Esdr.x.  f.  7.  et  suiv.  Nèhcm.  xm.  f.  25. 
(h)  Antiq.  lib.  xi.  c.  <,. 

(12)  Buxtorf.  Lex  Talinud.  p.  J28. 
(ij)  1.  Cor.  v.  jh  5. 


4'2 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


Lois  contre  le  meurtre. 

Quelle  qu'ait  été  la  punition  du  meurtrier  avant 
le  déluge,  il  est  sûr  que,  depuis,  les  lois  voulu- 
rent qu'il  fût  puni  de  mort  (:);  Dieu  qui  avait  ce 
crime  en  horreur,  non  seulement  le  défendit  dans 
le  Décalogue  (2),  mais  établit  des  hommes  spécia- 
lement chargés  de  punir  le  coupable,  partout  où 
il  se  trouverait  (3),  dût-on  môme  l'arracher  de 
l'asile  le  plus  sacré  (4);  il  défendit  encore  très 
expressément,  et  aux  juges  et  aux  garants  du 
sang,  de  se  laisser  gagner,  en  quelque  occasion 
que  ce  fût  (5).  Ces  lois  s'étendaient  aux  Israéli- 
tes et  aux  étrangers  qui  habitaient  parmi  eux  (6). 
Voici  les  seules  circonstances  où  l'homicide  pou- 
vait obtenir  son  pardon  :  c'était  quand  le  garant 
du  sang  rencontrait  un  meurtrier  hors  de  l'en- 
ceinte de  la  ville  de  refuge  ;  lorsque,  pour  défen- 
dre sa  propre  vie,  il  avait  fallu  la  ravir  à  un  assas- 
sin ;  ou  bien  encore  dans  la  circonstance  où  l'on 
avait  à  protéger  la  vie  d'un  Israélite.  On  pouvait 
encore  priver  de  la  vie  un  enfant  qui  mettait  en 
danger  celle  de  sa  mère  ;  mais  jamais  celle-ci  ne 
pouvait  être  sacrifiée  à  l'existence  de  son  enfant. 
Les  Juifs  avaient  encore,  comme  nous  l'avons 
déjà  indiqué  plus  haut,  un  droit  sur  la  vie  des  hom- 
mes; ils  le  nommaient  le  droit  du  ~cle  :  il  leur 
permettait  de  tuer  sur  le  fait  la  personne  sur- 
prise commettant  un  crime  énorme,  comme  en 
blasphémant  ou  en  dévouantsa  postérité  à  Moloch. 
C'est  par  une  suite  de  ce  droit,  que  les  lévites 
passèrent  au  fil  de  l'épée  trois  mille  adorateurs  du 
veau  d'or,  et  que  Phinéès  immola  l'audacieux 
Zambri  et  la  Madianite  Cozbi.  On  peut  rappor- 
ter ici  les  détails  d'une  institution  judaïque,  bien 
propre  à  inspirer  au  peuple  la  plus  grande  hor- 
reur pour  le  meurtre  volontaire.  Quand  l'auteur 
d'un  assassinat  était  inconnu,  les  officiers  du  tri- 
bunal le  moins  éloigné  de  la  famille  du  mort, 
ordonnaient  aux  anciens  de  la  plus  prochaine 
ville,  d'amener  une  jeune  vache,  qui  n'eût  jamais 
porté  le  joug,  dans  une  vallée  qu'on  leur  dési- 
gnait, et  de  l'y  décapiter.  Après  cette  cérémonie, 
les  citoyens  les  plus  âgés  se  lavaient  les  mains 
dans  le  sang  de  la  génisse,  et  faisaient  entendre 
ces  belles  paroles  :  «  Nos  mains  n'ont  point  ré- 
pandu de  sang,  et  nos  yeux  ne  Vont  point  vu  répan- 
dre. Eternel  !  sois  propice  à  ton  peuple,  et  ne  lui 
impute  point  l'effusion  du  sang  de  l'innocent  (7).  » 


Cette  cérémonie  se  faisait  avec  une  solennité 
pour  le  moins  aussi  propre  à  donner  de  l'horreur 
pour  le  meurtre,  que  les  lois  dont  nous  venons  de 
parler,  à  faire  craindre  de  s'en  rendre  coupable. 
Ce  n'est  pas  tout  :  ils  avaient  divers  règlements 
établis  pour  les  détourner  de  tout  ce  qui  peut 
avoir  quelque  trait  à  la  cruauté  :  par  exemple,  il 
leur  était  défendu  de  faire  bouillir  un  agneau  ou 
un  chevreau  dans  le  lait  de  sa  mère,  de  prendre 
un  nid  d'oiseaux,  dans  lequel  la  mère  se  trouve- 
rait avec  ses  petits,  et  de  muselerle  bœuf  au  temps 
de  la  récolte.  Par  ces  points  de  discipline,  la  loi 
avait  voulu  inspirer  au  peuple  juif  des  sentiments 
d'humanité,  et  le  prémunir  contre  les  inclinations 
sanguinaires  que  lui  eût  infailliblement  données 
l'habitude  de  massacrer  des  nations  entières. 

Loi  contre  l'adultère;  eaux  de  jalousie  ;  règlements 
concernant  le  mariage  et  le  veuvage. 

11  est  évident  que,  par  ces  mots  :  Tu  ne  com- 
mettras point  d'adultère  [3],  on  a  dû  entendre  toute 
espèce  de  commerce  illégitime  ;  car  la  bestialité, 
la  sodomie,  le  rapt  et  l'inceste  étaient  punis  de 
mort,  comme  l'adultère  (9).  Quoique  la  luxure  en 
elle-même  ne  fût  pas  regardée  comme  un  crime 
capital,  elle  n'en  était  pas  moins  sévèrement  dé- 
fendue par  les  lois  (10). On  lapidait  la  femme  qui 
s'était  donnée  pour  vierge  à  un  époux,  quand  il 
était  prouvé  qu'elle  l'avait  trompé  (11):  mais 
l'homme  qui  déshonorait  une  vierge,  se  mettait  à 
l'abri  de  toute  espèce  de  punition,  en  lui  donnant 
cinquante  sicles  d'argent,  et  en  l'épousant  ;  toute- 
fois il  est  vrai  qu'il  avait  perdu  le  droit  de  pouvoir 
jamais  la  répudier  (12).  On  punissait  de  mort 
l'adultère,  soit  que  les  deux  coupables  fussent 
liés  parle  serment  du  mariage,  soit  que  la  femme 
fût  seule  engagée  ;  mais  nous  ne  sommes  pas 
assurés  que  l'homme  marié  encourût  la  même 
peine,  quand  il  s'en  était  rendu  coupaple  avec  une 
personne  libre.  Alors,  en  effet,  l'action  devient 
bien  moins  funeste  pour  la  société  ;  d'ailleurs  on 
ne  doit  pas  oublier  que  Moïse  se  crut  obligé 
d'employer  la  plus  grande  indulgence  dans  des 
circonstances  non  moins  graves,  telles  que  le 
divorce  et  la  polygamie,  si  sévèrement  condamnés 
depuis  par  l'Évangile. 

L'usage  des  eaux  de  jalousie  fut  établi  par 
Moïse,  pour  maintenir  les  femmes  dans  l'accom- 


(1)  Gcnès  ix.  y.  6. 
{2)  Exod.  xx.  y.  1  j  ;  xxi.    y.  12. 
xxiv.  17.  et  passim. 
(?)  Noinb.  xxxv.  y.  19. 

(4)  Exod.  xxi.   f.  4. 

(5)  Nonib.  xxxv.  y.   ji.  J2. 
(b)  Lcvit  xxiv.  f.  21. 


Dcut.  v.  y.  17.  -  Lcvit. 


(7)  Deul.  xxi.  y.  1.  et  suiv. 

(8)  Exod.  xx.  y.   14.  -  Dcut.  v.  y.  18. 

(9)  Lcvit.    xvm.    pass.   Ibid.   xx.   y.    10  et  suiv. 
xxii.  y.  15. 

(ioj  Ibid.  xxiil.  f.  17.  18.  -  Lé  vil.  xxi.  y.  7. 
lit)  Dcut.  xxii.  y.  20.  ?i. 
(12)  Ibid.  y.  28.  29. 


Dcut. 


SUR  L'ORGANISATION   DE    LA   NATION  JUIVE 


4»3 


plissement  de  leurs  devoirs  envers  leurs  époux, 
et  détruire  les  injustes  soupçons  d'infidélité  qu'ils 
auraient  pu  concevoir  contre  elles.  Voici  les 
détails  de  cette  cérémonie  (:). 

Un  époux  soupçonnait-il  la  fidélité  de  sa 
femme,  il  devait  remettre  entre  les  mains  du 
sacrificateur  une  offrande  qui  n'était  autre  chose 
qu'un  gâteau  de  farine  d'orge  :  l'huile  et  l'encens 
n'entraient  pour  rien  dans  cet  acte  de  religion. 
Le  mari  amenait  avec  lui  son  épouse,  et  faisait 
le  récit  des  circonstances  qui  avaient  fait  naître 
ses  doutes.  Le  prêtre  conduisait  ensuite  l'accusée 
devant  l'Éternel,  soit  au  Tabernacle,  soit  dans  le 
temple,  lui  découvrait  la  tête,  déposait  l'of- 
frande entre  ses  mains,  prenait  de  l'eau  sainte,  à 
laquelle  le  mélange  de  quelques  plantes  avait 
communiqué  de  l'amertume,  et,  après  y  avoir 
avoir  introduit  quelques  grains  de  la  poussière 
qui  couvrait  le  pavé,  il  prononçait  sur  ce  breuvage 
une  formule  de  malédiction,  qui  disait  en  subs- 
tance, que  si  la  femme  avait  souillé  la  couche  de 
son  mari,  ces  eaux  lui  enflassent  le  ventre,  et  lui 
fissent  tomber  la  cuisse.  On  avait  soin  de  la  pré- 
venir que,  si  elle  était  innocente,  elle  n'éprouve- 
rait aucun  mal.  Après  cet  avertissement,  si  elle 
persistait  dans  le  dessein  de  s'exposer  à  l'épreuve, 
en  répondant  Amen,  on  effaçait  avec  l'eau  amère 
les  paroles  de  la  malédiction,  qui  étaient  tracées, 
disent  les  Juifs,  avec  de  l'encre  sans  vitriol  ;  puis 
le  prêtre  lui  présentait  la  coupe  d'une  main, 
en  prenant  de  l'autre  le  gâteau  de  jalousie, 
qu'il  faisait  tourner  dans  sa  main,  et  dont  il  brû- 
lait une  partie  sur  l'autel.  Si  la  femme  était  cou- 
pable, à  peine  l'eau  de  jalousie  était-elle  avalée, 
que  son  ventre  s'enflait  jusqu'à  forcer  la  peau  de 
de  s'entr'ouvrir  :  était-elle  innocenter  non  seule- 
ment elle  n'éprouvait  aucune  douleur,  mais  ce 
breuvage  affermissait  sa  santé,  la  rendait  plus 
féconde  ;  et  l'épreuve,  en  un  mot,  imposait  au 
mari  l'obligation  de  redoubler  d'égards  envers 
une  épouse  d'une  chasteté  si  authentiquement 
avérée.  Nous  venons  d'analyser  succinctement 
tout  ce  qu'a  dit  Moïse  sur  ce  sujet.  Les  thamul- 
distes  y  ont  ajouté  diverses  autres  circonstances 
dont  nous  n'oserions  garantir  la  vérité,  non  seule- 
ment parce  que,  de  leur  propre  aveu,  l'usage  des 
eaux  de  jalousie  était  aboli  plusieurs  siècles  avant 
eux,  ce  qui  peut-être  n'avait  pas  peu  contribué  à 
rendre  l'adultère  plus  fréquent  de  leurs  temps, 
mais  aussi  parce  que  ni  les  livres  apocryphes,  ni 
aucun  autre  ouvrage,  ne  fait  mention  des  additions 
dont  ils  parlent;  de  là,  notre  incrédulité  à  cet 


égard.  Les  Juifs  prétendent  que  les  eaux  de 
jalousie  ne  produisaient  aucun  effet  sur  la  femme 
la  plus  coupable,  quand  le  mari  s'était  mis  secrè- 
tement dans  le  cas  de  mériter  les  mêmes  repro- 
ches (;).  Ils  affirment  aussi  que  le  complice,  quel- 
que éloigné  qu'il  fût  du  lieu  où  se  passait  l'épreuve, 
en  recevait  dans  son  corps  le  contre-coup  au  point 
d'en  mourir.  Que  cette  opinion  soit  vraie  ou 
fausse,  elle  n'en  est  pas  moins  curieuse,  en  ce 
qu'elle  atteste  déjà  la  croyance  aux  phénomènes 
désignés  aujourd'hui  sous  le  nom  de  télépathie. 
Nous  ne  savons  si  les  Israélites  avaient  emprunté 
cette  coutume  aux  Égyptiens  ou  à  quelque  autre 
nation  ;  il  est  certain  seulement  que  ces  sortes 
d'épreuves  devinrent  par  la  suite  fort  à  la  mode 
chez  presque  tous  les  peuples,  qu'ils  les  employè- 
rent, ou  pour  détruire  ou  pour  confirmer  les  dou- 
tes qu'on  pouvait  avoir  sur  l'incontinence  des 
femmes,  et  aussi  dans  tous  les  cas  où  les  soupçons 
d'un  crime,  quelconque  ne  paraissaient  pas  abso- 
lument dénués  de  vraisemblance. 

C'est  à  Moïse  que  l'on  doit  la  plupart  des  lois 
contre  l'adultère.  Avant  ce  législateur,  les  Israé- 
lites avaient  la  liberté  de  contracter  des  mariages 
entre  parents,  et  cela,  pour  prévenir  les  alliances 
qu'ils  auraient  pu  faire  avec  les  nations  idolâtres 
répandues  au  milieu  d'eux.  L'exemple  d'Abraham, 
qui  choisit  dans  sa  famille  une  épouse  à  Isaac(j), 
fut  suivi  par  sa  postérité  (4)  ;  mais  Moïse  abolit 
cet  usage,  parce  que,  de  son  temps, le  nombre  des 
enfants  de  Dieu  s'étant  prodigieusement  accru, 
ils  pouvaient  trouver  parmi  eux  des  femmes 
israélites  dans  des  familles  étrangères  aux  leurs. 
L'inceste  était  puni  de  mort.  L'on  regardait 
comme  incestueux,  le  mariage  de  l'enfant  avec  le 
père  ou  la  mère,  le  beau-père  ou  la  belle-mère,  le 
frère  ou  la  sœur  de  son  père  ou  de  sa  mère,  le 
petit-fils  ou  la  petite  fille,  l'oncle  ou  la  tante,  les 
deux  frères  ou  les  deux  sœurs  du  côté  maternel 
seulement,  parce  que,  selon  les  Juifs,  la  mère 
ayant  plus  de  part  encore  que  le  père  à  la  géné- 
ration, la  liaison  du  sang  est  plus  intime  du  côté 
maternel  que  de  l'autre  (Ç).  C'était  encore  un  in- 
ceste que  de  se  marier  avec  un  beau-frère  ou  une 
belle-sœur,  l'époux  ou  l'épouse  d'un  oncle  ou 
d'une  tante,  enfin  avec  le  père  ou  le  fiis,  ou  la 
mère  et  \a  fille,  soit  qu'elles  vécussent  encore 
l'une  et  l'autre,  soit  après  la  mort  de  l'une  des 
deux  (6).  Quant  aux  autres  lois  relatives  au  ma- 
riage, elles  ont  toutes  été  calquées  sur  la  conduite 
qu'avaient  tenue  les  patriarches  :  on  peut  en  citer 
pour  preuve  la  défense  que  fit  Moïse  de  déshériter 


(1)  Nombr.  v.  f.  24  et  sulv, 

(2)  Scld.  de  Syncdr.  et  Uxor.  Hœbr.  Buxlorf.  Muns'.  in 
Num.  Basnag.  Rcp.  Hœbr.  lib.  1.  c.  12.  Calmct.  art. 
Adult.  et  al.  inult.  pest  Rab. 


(?)  Genis.  xiv  et  suiv. 

(4)  Ibid.  xxvi.  f.  J4,   55  ;  xxvm.  f.   1  cl  alib. 

(5)  Philo  de  Spcc.  Leg.  Clem.  Alex.  Slrcm.   11. 

(6)  Lévit.  xviii.  f.  6  et  suiv. 


AH 


COUP  D'ŒIL    RETROSPECTIF 


l'aîné  de  ses  enfants,  par  faiblesse  pour  une  se- 
conde femme,  dont  on  aurait  eu  d'autres  enfants, 
et  jamais  il  n'était  permis  de  ravir  l'hérédité  au 
premier-né  pour  en  favoriser  les  enfants  d'une 
mère  plus  chérie  (i)  :  telle  avait  été  la  conduite 
d'Abraham,  lorsqu'instituant  Isaac  son  héritier,  il 
assigna  une  dot  rarticulière  à  chacun  de  ses  autres 
fils  (2).  On  ne  trouve  d'autre  différence  entre  le 
conduite  d'Abraham  et  la  règle  établie  par  Moïse 
à  cet  égard,  si  ce  n'est  que  celui-ci  accorda  une 
double  portion  à  l'aîné  (}).  L'exemple  du  même 
patriarche  autorisait  un  homme  à  avoir  deux 
femmes  ;  et  Moïse  veut  que  le  mari  qui  en  épou- 
serait une  seconde,  lût  obligé  de  continuer  à 
pourvoir  au  besoin  de  la  première,  à  la  nourrir,  à 
l'habiller,  et  à  s'acquitter  envers  elle  des  devoirs 
du  mariage  (4).  Laban  avait  exigé  les  mêmes  con- 
ditions de  la  part  de  Jacob,  lorsqu'il  consentit  au 
mariage  de  celui-ci  avec  Rachel  (5). 

Nous  avons  à  parler  ici  d'une  loi  particulière 
concernant  le  veuvage.  Elle  obligeait  un  homme 
dont  le  frère  était  mort  sans  postérité,  à  épouser 
sa  veuve  (6).  Du  temps  même  de  Juda,  on  avait 
vu  pratiquer  cette  coutume  (7)  ;  mais  Moïse  n'en 
fit  pas  un  précepte.  Si  le  beau-frère  refusait  de 
s'y  soumettre,  la  veuve  le  citait  au  tribunal  des 
anciens,  et  là,  s'il  persistait  dans  son  refus,  elle 
lui  détachait  un  de  ses  souliers,  et,  lui  crachant 
au  visage,  l'injuriait  par  ces  paroles  :  Ainsi  sera 
fait  à  V homme  qui  n'édifiera  point  la  femme  de  son 
frère.  Et  il  restait  à  cet  homme  le  sobriquet 
de  déchaussé  qu'il  portait  toute  sa  vie. 

Les  Juifs  étaient  obligés  de  payer  la  virginité 
de  la  fille  qu'ils  épousaient  (8).  Abraham  combla 
de  présents  celle  qu'il  destinait  à  son  fils  (9). Jacob 
n'obtint  ses  deux  femmes  qu'au  prix  d'une  ser- 
vitude de  quatorze  années;  et  quand  Hémor 
vint  demander  en  mariage  la  fille  de  ce  même 
patriarche  pour  son  fils  Sichem,  il  le  laissa  maître 
de  régler  le  prix  ou  mohar  (10).  Lorsque  David 
avoua  que  sa  fortune  ne  lui  permettait  pas  de  payer 
un  mohai  proportionné  au  mérite  et  à  la  naissance 
de  la  fille  de  Saiil,  celui-ci  l'en  tint  quitte  pour 
cent  prépuces  de  Philistins.  Le  prophète  Osée 
n'acheta-t-i!  pas  une  femme  pour  quinze  pièces 
d'argent  et  quelques  mesures  d'orge  (11)?  Les 
rabbins  disent  que  le  père  de  la  prétendue  était 
aussi  dans  l'usage  de  lui  faire  quelques  présents, 
de  lui  donner  un   trousseau  et  une  somme   d'ar- 


gent qui,  d'ordinaire,  n'excédait  pas  la  valeur 
d'environ  une  trentaine  de  francs.  Nous  avons 
trouvé  dans  les  mêmes  sources,  des  détails  sur  la 
manière  dont  se  contractaient  les  mariages.  Les 
deux  familles  se  réunissaient  ;  et  aussitôt  que  l'on 
était  d'accord  sur  les  conditions,  il  était  permis  à 
l'époux  de  voir  la  femme  qui  lui  était  destinée. 
Un  certain  nombre  de  témoins  assistaient  au 
contrat,  et  la  nouvelle  mariée  demeurait  encore 
quelque  temps  dans  la  maison  paternelle,  même 
après  la  consommation  du  mariage  ;  ensuite 
on  choisissait  une  nuit  pour  la  mènera  la  demeure 
de  son  époux.  Cette  dernière  cérémonie,  à 
laquelle  sans  doute  fait  allusion  la  parabole  des 
dix  Vierges  (12),  étaient  accompagnée  de  cris  de 
joie  et  du  bruit  de  divers  instruments  de  musique. 
Souvent  les  Juifs  avaient  l'habitude  d'enchaîner 
leurs  enfants,  très  jeunes  encore,  par  les  liens  du 
mariage  :  c'est  ce  qu'ils  appelaient  proprement 
épouser.  Les  jeunes  époux  habitaient  la  maison 
paternelle  jusqu'à  ce  qu'ils  eussent  atteint  l'âge 
de  ratifier,  en  se  réunissant,  l'engagement  qu'on 
leur  avait  fait  contracter.  Que  les  filles  fussent 
épousées  ou  non,  on  avait  grand  soin  de  les  tenir 
éloignées  de  la  société  des  hommes.  C'est  à 
l'aventure  de  Dina,  à  ce  qu'il  nous  semble,  qu'il 
faut  attribuer  l'origine  de  cette  coutume  en  usage 
chez  les  Israélites,  plutôt  qu'à  l'exemple  de  leurs 
voisins  ;  il  parait,  en  effet,  que  ceux-ci  remet- 
taient sans  scrupule  à  leurs  filles  le  soin  de  mener 
paître  leurs  troupeaux  :  on  peut  en  citer  pour 
exemple  l'histoire  de  la  sœur  et  des  filles  de 
Laban, de  même  que  celle  des  filles  de  Jéthro  (13). 
Cette  précaution  de  soustraire  les  filles  aux 
regards  des  hommes,  avait  acquis  aux  premières 
le  surnom  d'Almah,  cachée.  Nous  avons  déjà  parlé 
d'une  loi  particulière  aux  héritières  ou  filles  uni- 
ques, et  qui  n'assujettissait  en  aucune  manière  les 
autres  femmes,  la  défense  expresse  de  prendre 
d'époux  h  rs  de  leur  propre  tribu  (u).Les  hom- 
mes, au  contraire,  avaient  la  liberté  de  se  choisir 
une  compagne  dans  l'une  des  douze  tribus  indis- 
tinctement, ou  même  chez  un  autre  peuple, 
pourvu  qu'il  fût  du  nombre  de  ceux  qui  se  sou- 
mettaient à  la  circoncision,  tels  que  les  Madiani- 
tes,  les  Ismaélites,  les  lduméens,  les  Moabites  et 
les  Égyptiens.  Israël  trouva  cette  loi  dans  les 
paroles  des  fils  de  Jacob  aux  Sichémites  :  «  Il  ne 
nous  est  point  permis  de  donner  notre  sœur  à  un 


(1)  Deut.  xxi.  jK  15.  et  suiv. 

(3)  Gencs.  xxv.  y.  5,  6. 
())  Deut.  xxi.  y.  17. 

(4)  Exod.  xxi.  f.  10. 
15)  Gen.  xxxi.  y.  50. 

(6)  Deut.  xxv.  f    ç  et  suiv. 
(7;  Gen.  xxxviii.  y.  û  et  suiv. 


(B)  Maini.  in  Iskolh.  c.  j.  S.   t- 

(9)  Gen.  xxiv.  pass. 

(10)  Ibid.  xxxiv.  f.  12  et  suiv. 

(11)  1  Rois,  xviii.  -  Osée,  m.  y.  2. 

(12)  Matlk.  xxv.  f.  1  et  suiv. 

(ij)  Gen.  xxiv.  y.  25  et  suiv.;  xxix.  y.  9.-  Exod.  li.y.  6. 
(14)  Nomb.  xxxvi.  pass, 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA   NATION  JUIVE 


4''. 


incirconcis  (i)  ».  Ce  n'était  que  dans  un  seul  cas 
qu'il  était  libre  à  un  Juif  d'entretenir  quelque 
commerce  avec  une  femme  païenne.  S'il  arrivait 
qu'un  soldat  hébreux  en  fit  une  prisonnière,  alors 
il  pouvait  coucher  une  fois  avec  elle  avant  de 
l'épouser  (2);  si  elle  ne  lui  avait  pas  plu,  il  était 
maître  de  la  renvoyer,  toutefois  après  lui  avoir 
accordé  sa  liberté,  que  l'on  regardait  comme  une 
récompense  de  l'intime  familiarité  qu'il  avait  eue 
avec  elle.  Une  servante,  quoique  convertie  au 
judaïsme,  ne  pouvait  se  marier  pendant  son  escla- 
vage ;  mais  le  paiement  de  sa  rançon  levait  sur  le 
champ  cet  obstacle  (3).  Une  preuve  que  le  ma- 
riage d'une  femme,  encore  assujettie  à  l'esclavage, 
n'avait  pas  le  même  degré  de  validité  que  si  elle 
eût  été  entièrement  libre,  c'est  que,  pour  être 
surprise  dans  l'adultère,  elle  n'était  point  punie  de 
mort,  mais  seulement  fustigée  (4). 

Moïse  n'a  prescrit  aucune  règle  pour  la  célé- 
bration des  mariages  ;  on  trouve  seulement  épars 
dans  quelques  endroits  de  l'Écriture,  des  détails 
sur  cette  cérémonie  ;  le  reste  est  consigné  dans 
les  écrits  des  rabbins.  Nous  n'avons  vu  nulle  part, 
que  l'on  employât  en  cette  occasion  aucun  rite 
religieux  ;  par  exemple,  que  l'on  se  rendît  au 
Tabernacle  ou  au  temple,  que  l'on  offrît  des  sa- 
crifices, ni  môme  que  l'on  eût  besoin  du  ministère 
d'un  prêtie.  Quand  Isaac  épousa  Rébecca  ;  Booz, 
Ruth  ;  Tobie,  Sara,  les  parents  et  les  amis  réunis 
firent  des  vœux  pour  la  prospérité  de  la  nouvelle 
union.  Une  semaine  entière  était  consacrée  à 
donner  des  festins  et  à  procurer  différentes  sortes 
de  divertissements  :  les  noces  de  Samson  durèrent 
sept  jours  (5);  et  le  beau-père  de  Tobie  voulut 
que  celles  de  son  gendre  se  prolongeassent  jus- 
qu'à quinze  (6)  ;  sans  doute  parce  qu'il  prévoyait 
qu'ils  ne  se  reverraient  plus.  On  peut  se  faire  une 
idée  de  la  magnificence  de  ces  fêtes,  par  la  belle 
comparaison,  qu'a  faite  le  Psalmiste,  du  soleil  avec 
un  époux  qui  sort  de  la  chambre  nuptiale  (7).  Le 
même  prophète  emploie  ailleurs  les  expressions 
les  plus  élégantes  pour  décrire  les  ornements 
d'une  épouse,  et  les  particularités  d'une  semblable 
fête  (8).  Dans  le  même  psaume  et  dans  le  Can- 
tique des  Cantiques,  il  parle  du  paranymphe  et 
des  compagnes  de  l'épouse.  Il  y  avait  encore  un 
certain  nombre  d'amis  ou  de  parents  qui  restaient 
avec  les  mariés  jusqu'à  la  clôture  de  la  fête  :  aux 


noces  de  Samson,  on  en  compta  jusqu'à  trente 
de  cette  espèce  (9).  Il  ne  faut  pourtant  pas  croire 
que  les  hommes  et  les  femmes  se  trouvassent 
réunis  dans  les  mêmes  appartements  :  jamais 
une  telle  familiarité  ne  fut  permise  chez  les 
peuples  de  l'Orient.  L'occupation  des  femmes 
était  de  chanter,  de  danser,  ou  de  jouer  de 
quelques  instruments  de  musique  :  les  hommes 
de  leur  côté,  s'amusaient  sans  doute  à  des  exer- 
cices plus  sérieux,  et,  dans  les  moments  de 
repos,  ils  se  proposaient  mutuellement  des  énig- 
mes ;  on  accordait  une  récompense  à  ceux  qui 
avaient  le  talent  de  les  deviner  avec  le  plus 
de  promptitude  et  de  précision  :  tels  sont  les  dif- 
férents plaisirs  que  l'on  goûta  aux  noces  de  Sam- 
son (10).  Les  thalmudistes  ajoutent  qu'ils  étaient 
de  même  en  usage  à  tous  les  mariages (1 1)  :  selon 
eux  encore,  l'époux  et  l'épouse  avaient  la  tète 
ornée  d'une  couronne  pendant  tout  le  temps  de  la 
solennité,  et  ce  ne  fut  qu'après  la  destruction  du 
second  temple  que  cette  coutume  fut  abolie  (12). 
La  mère  de  Salomon  présenta  à  ce  prince  une 
couronne  nuptiale  ;  mais  on  ne  voit  nulle  part 
qu'une  pareille  décoration  couvrit  les  cheveux  de 
son  épouse.  D'après  les  rabbins,  les  Juifs  auraient 
eu  autrefois  trois  manières  de  se  fiancer  à  une 
femme  :  i°  par  contrat  écrit:  20  par  consente- 
ment verbal  avec  tradition  d'une  pièce  de  mon- 
naie; j°  par  un  commerce  charnel. Cette  dernière 
méthode,  par  trop  primitive,  fut  abolie  très  an- 
ciennement à  cause  des  désordres  qui  en  résul- 
taient. Mais  la  cérémonie  principale  était  l'intro- 
duction de  l'époux  dans  la  chambre  nuptiale,  bien 
que  le  mariage  pût  n'être  pas  consommé  à  cause 
des  impuretés  légales. 

La  pluralité  des  femmes  n'était  point  une 
charge  pour  les  Juifs,  qui  vivaient  en  général  avec 
la  plus  grande  frugalité,  et  qui  n'affichaient  dans 
leurs  maisons  aucune  espèce  de  luxe.  Tandis 
qu'ils  vaquaient  aux  laborieuses  occupations  du 
dehors  (13),  leurs  femmes  prenaient  soin  de  tous 
les  détails  domestiques  ;  elles  élevaient  leurs 
enfants,  apprêtaient  les  mets,  et  filaient.  Quand 
un  époux  voulait  se  séparer  de  sa  femme,  il  re- 
courait à  la  loi  du  divorce.  On  ne  voit  pas  cepen- 
dant qu'aucun  patriarche  l'ait  mise  en  usage. 
Voici  les  expressions  de  l'Écriture,  qui  ont  au- 
torisé les  Juifs    à    rejeter   de  leurs    maisons    la 


(i)  Gen.  xxxiv.  f.  14. 
(2)  Deut.  xxi.  Ï.  io  et  suiv. 
(})  SeU.  Jus  Nat.  et  Gent.  lib.  v.  c.  1;, 
c.  8.  -  Cartton's  Concord.  part.  !,  c.  7. 

(4)  Lèvit.  xix.  f.  20. 

(5)  Jug.  xiv.  v.  17, 

(6)  To'-i.  vin.  f.  19,  20. 
(7j  Psa'm,  xviii.  f.  6. 


(8)  Psalm.  xliv.  et  Isai.  xli.  p.  10. 

(9)  Jug.  xiv.  f.   n. 
Joseph,  lib.  iv.           (10)  Ibid.  pass. 

in)  Pirké  Aboth. 

(12)  Ibid.  et  SeLd.  Vx .  Hccbr.  Lib.  11.  c 
Srnag.  et  al. 

(15)  1.  Rois.  11.  f.  19.  -  11.  Rois,  vin  f.  1; 
y.  ij.  et  suiv.  et  passim. 


i<.    Buxtorf. 
-  Prou,  xxxi, 


4l6 


COUP  D'ŒIL   RÉTROSPECTIF 


femme  dont  ils  croyaient  avoir  à  se  plaindre  (i)  : 
Celui  qui  aura  pris  une  femme  en  mariage,  laquelle 
n'aura  point  trouvé  grâce  devant  ses  yeux,  parce 
qu'il  aura  remarqué  quelque  chose  de  repréhensible 
en  elle,  lui  écrira  une  lettre  de  divorce,  et  la  ren- 
verra  hors  de   sa  maison  :    quand   elle    en  sera 
sortie......  elle  pourra  se  marier  à  un  autre   mari,  et 

si  son  second  mari  la  prend  en  haine,  et  lui  adresse 

une  lettre  de  divorce....  ou   s'il  vient  à  mourir 

elle  ne  pourra  repasser  à  son  premier  mari.  On 
présume  que  la  principale  raison  que  l'on  pouvait 
alléguer  pour  être  autorisé  à  renvoyer  ainsi  sa 
femme,  était  prise  dans  un  défaut  naturel,  ou 
même  un  accident  qui  inspirait  du  dégoût  au 
mari.  Jésus  Christ  désapprouva  cette  loi  du  di- 
vorce, soit  parce  que  l'on  en  usait  trop  fréquem- 
ment, et  qu'on  se  le  permettait  dans  les  plus 
légères  circonstances  (2),  soit  parce  qu'aux  yeux 
de  Dieu  le  divorce  n'est  légitime  que  dans  le  cas 
d'infidélité.  Les  Juifs,  donnant  à  cette  loi  un  sens 
plus  étendu  que  celui  dont  elle  était  susceptible, 
employaient  la  formule  suivante,  quand  ils  répu- 
diaient leurs  femmes.  La  date  étant  rci.plie: 
«  Moi  »,  disait  le  mari,  «  qui  en  ai  le  droit,  de  ma 
pleine  et  libre  volonté,  je  te  répudie,  t'éloigne 
de  moi,  et  te  remets  en  liberté  ;  te  permettant 
d'aller  désormais  partout  où  il  te  plaira,  et  d'é- 
pouser qui  bon  te  semblera.  Cette  lettre  est  ma 
lettre  de  divorce  que  je  t'adresse,  conformément 
à  la  loi  de  Moïse  et  d'Israël.  »  Cet  écrit  devait 
être  signé  de  deux  témoins,  et  remisa  son  adresse, 
en  présence  de  deux  autres  (3).  Dès  ce  moment, 
l'épouse  répudiée  jouissait  d'autant  de  liberté 
que  si  elle  eût  été  veuve.  L'une  et  l'autre  cir- 
constance l'obligeaient  également,  selon  les  rab- 
bins, à  laisser  écouler  un  espace  de  quatre-vingt- 
dix  jours,  avant  de  convoler  à  de  secondes  noces, 
pour  s'assurer  qu'elle  n'était  point  enceinte. 

Des  lois  contre  le  vol. 

Par  ces  mots  du  Décalogue  :  Tu  ne  déroberas 
point  (4),  les  Juifs  entendaient  seulement  qu'il 
leur  était  défendu  de  ravir  aucune  personne  ; 
et  dans  ceux-ci,  lu  ne  covvoileras  point,  ils 
croyaient  trouver  la  défense  de  s'approprier 
ou  d'usurper,  soit  en  fraude,  soit  de  force,  les 
biens  et  les  droits  d'autrui.  Nous  traiterons  ces 
deux  sujets  dans  un  même  article. 


D'après  le    code   de  Moïse,  on  n'appelait  vol 
capital,    que    l'action    de   dérober   des   hommes. 
Que  le  ravisseur  eût  déjà  vendu  sa  proie,  ou  qu'elle 
se  trouvât   encore  entre  ses   mains,  il  était  puni 
de  mort  (5).  Quand  il   n'était  question   que  d'un 
vol  d'effets,  on   condamnait  seulement  le  voleur 
à  la  restitution,  et   à  une  amende  proportionnée 
à  la  valeur  du  larcin.  Si   un  voleur  était  surpris 
pendant  la  nuit  dans  une  maison,  il   était  permis 
de  le  tuer;  si  c'était  le  jour,  le  propriétaire  n'avait 
plus    le   même  droit  (6).  Celui  qui  dérobait    un 
bœuf  en  restituait  cinq  ;  pour  une  brebis  ou  une 
chèvre  on  en   restituait   quatre  (7)  ;  et  si  l'objet 
était  encore  vivant,  et  entre  les  mains  du  voleur, 
il  en  était  quitte  pour  restituer  le  double  (8).  Quand 
le  voleur  n'avait  pas  en    sa  possession  de  quoi 
dédommager,  conformément  à   l'esprit  de  la  loi, 
celui  qu'il  avait  volé,  il  était  permis  à  l'offensé, 
pourvu  toutefois  qu'on  le  comptât  au  nombre  des 
Israélites, de  vendre  le  coupable  à  un  autre  Israé- 
lite :  ce  privilège  ne  s'étendait  point  aux  prosélytes. 
Le  ravisseur  avait-il  femme  et   enfants,  l'offensé 
pouvait  ou  les  vendre  ou  les  retenir  en  esclavage  ; 
et  les  Juifs  en  ont  usé  de  cette  manière  envers 
leurs  débiteurs,  quoique  Moïse   paraisse    n'avoir 
autorisé  cette  servitude  qu'en  cas  de  vol.  L'inter- 
prétation qu'ils  ont  donnée  à  ce  passage,  peut  être 
justifiée  par  les  paroles   du  prophète   Elisée  (9), 
adressée  à  la  veuve,  et  par  la  parabole  rapportée 
dans  l'Évangile,    où    le    créancier    ordonne  que 
la  femme  et  les  enfants  de  son   débiteur  soient 
vendus  avec  lui  (10). Dès  que, par  letemps  de  leur 
servitude,  ils  avaient  dédommagé  leur  maître  de 
la  perte  qu'ils  lui  avaient  causée,  la  liberté  leur 
était  rendue  (1  ij.  Si  le  voleur  était  célibataire,  et 
prenait   une    femme    pendant    son    esclavage,  les 
enfants  qui  naissaient  de  cette  union  appartenaient 
de  droit  au  maître.  De  cette  loi  naquit  un  usage 
abominable  :  il  arrivait  quelquefois  que  l'on  per- 
mettait à  un  esclave  déjà  marié  d'avoir  commerce 
avec  d'autres  femmes  que  la  sienne,  parce  que  le 
nombre  des    enfants  qu'il   en    avait    était  compté 
en  diminution  sur  l'espace  de  temps  qu'il  aurait  dû 
passer  en  esclavage  ;  cependant  sa  femme  légitime 
n'en  restait  pas  moins  en  possession  de  tous  ses 
droits,  dont  elle  pouvait  se  départir  autant  de  fois 
et  comme   bon   lui    semblait.    Le  larcin    était-il 
d'une   très    petite  valeur,  la  loi,   très  indulgente 
alors,  ne  voulait  point  qu'on  regardât    le  voleur 


(1)  Deut.  xxiv.  jh  1.  et  suiu. 

(2)  Joseph.  Antiq.  lib.  iv,  c.  8  et  Lib.  de  Vtta  Sua  ad  fin. 
et  Phit.  de  spécial.  Legib.  prsec.  6  et  8. 

(j)    Mos.    Ko!-    fol.     rjji    et     Mos .  JE?rpt.   part,    il, 
fol.  59.  -  Scld.  Buxiorf  et  Coodw.  ubi  sup. 
^4)  Exod.  xx.  y.   15. 
(S)  Exod.  xxi.  y.  16, 


(6)  Ibid.  xxh.  JK  2. 

(7)  Ibid,  verset  1. 

(8)  ibid.  v.  f.  4. 

(9)  îv.  Rois.  iv.  y.  1. 

(10)  Matlh.  xviii.  y.  25. 

(11)  Lèvit.  xxi.  }■.  J. 


SUR  L'ORGANISATION   DELA   NATION   JUIVE 


417 


comme  infâme  ;  elle  se  trouvait  en  cela  conforme 
à  ce  passage  de  Salomon  :  «  On  ne  doit  pas 
mépriser  un  voleur  qui  n'a  dérobé  que  pour  apaiser 
sa  faim.  S'il  est  surpris  pendant  l'action,  il  en  sera 
quitte  pour  rendre  une  valeur  septfoisplus  grande 
que  celle  du  vol  (1).  »  Cependant  Moïse,  loin 
d'approuver  de  pareils  larcins,  avait  voulu  que  le 
pauvre,  pour  se  tirer  de  la  misère  extrême,  se  ven- 
dit à  un  maître  pour  un  certain  nombre  d'années  ; 
par  exemple  jusqu'au  temps  du  Jubilé  (2).  Un 
malheureux  de  cette  espèce  pouvait  môme  aliéner 
la  liberté  de  sa  fille  non  mariée,  à  la  condition 
cependant,  ou  qu'elle  pouvait  être  rachetée  par 
l'homme  qui  se  présenterait  pour  l'épouser,  ou 
même  par  l'acquéreur  quelconque  qui  en  offrirait 
le  plus  (3).  N'avait-on  que  de  simples  soupçons 
sur  un  voleur,  celui  qui  l'accusait  pouvait  le  citer 
au  tribunal  avec  les  complices  qu'il  lui  suppo- 
sait, et  le  serment  alors  les  absolvait  tous  ;  mais 
si,  par  la  suite,  ils  étaient  convaincus  de  parjure, 
on  les  condamnait  sur  le  champ  à  la  mort,  non 
comme  voleurs,  mais  pour  s'être  parjurés.  La 
même  loi  s'étendait  aussi  aux  receleurs;  du  moins 
c'est  le  sens  que  les  Juifs  attachaient  à  ces 
paroles  :  Ils  seront  chargés  de  leur  iniquité  (4).  On 
portait  ces  sortes  de  procès  devant  les  juges 
du  lieu  où  l'action  avait  été  commise  ;  et  ceux-ci 
fixaient  les  amendes,  où  désignaient  les  châti- 
ments suivant  la  nature  du  délit.  Si  le  voleur 
s'accusait  lui-même  et  restituait  le  vol,  il  n'était 
plus  sujet  à  aucune  punition,  parce  que,  disent 
les  Juifs,  il  s'était  condamné  lui-même  (5).  Moïse 
prescrivit  aussi  des  lois  concernant  les  dépôts  et 
les  effets  engagés,  tels  que  les  bestiaux,  les  meu- 
bles, les  habits,  au  cas  qu'ils  fussent  perdus  ou 
endommagés  (6).  La  personne  offensée,  ou  son 
héritier  direct,  avait  seul  droit  à  la  satisfaction 
qui  devait  être  faite  ;  et  si  la  première  mourait 
sans  laisser  d'héritier,  son  droit  était  substitué 
aux  prêtres.  Moïse  défendit,  non  seulement  les 
faux  poids  et  les  fausses  mesures  (7),  mais  aussi 
toutes  les  fraudes  que  l'on  peut  employer,  soit 
dans  le  commerce,  soit  dans  les  traités  particu- 
liers (8)  ;  même  s'il  était  prouvé  que,  dans  un 
marché  que  l'on  avait  fait,  le  prix  excédât  d'un 
sixième  la  valeur  intrinsèque  de  l'objet  acquis,  le 
vendeur  pouvait  obliger  l'acheteur  à  la  restitution 


du  surplus.  Un  Israélite  ne  pouvait  se  permettre 
la  plus  légère  usure  envers  un  autre  des  enfants 
de  Dieu,  que  ce  fût  en  argent,  en  grain  ou  en 
bétail  ;  mais  la  seule  peine  de  l'usurier  se  bornait 
à  la  restitution  de  ce  qu'il  avaitinjustementacquis- 
Les  Israélites  étaient  tenus,  selon  la  loi,  à  assister 
ceux  de  leurs  frères  tombés  dans  l'indigence,  et 
n'avaient  d'autre  avantage  à  espérer  de  leur  cha- 
rité, que  la  bénédiction  de  Dieu  qui  leur  était 
promise  (9).  La  loi  qui  défendait  l'usure  n'était 
presque  point  observée  envers  les  étrangers  (10), 
c'est-à-d're  les  gentils:  cependant  il  n'était  pas 
permis  d'user  de  vexations  à  leur  égard.  Dieu 
voulait  même  que,  dans  ces  circonstances,  ils  par- 
tageassentles  avantages  de  la  veuve  et  de  l'orphe- 
lin, dont  il  se  déclarait  le  protecteur  immédiat, 
menaçant  ceux  en  général  qui  manqueraient  aux 
devoirs  de  l'humanité  et  de  l'hospitalité  (1 1).  Il 
défendait  encore  d'opprimer  les  serviteurs  et  les 
ouvriers,  de  retenir  leur  salaire,  ne  fût-ce  que 
l'espace  d'une  nuit  (  1 2), de  leur  refuser  les  aliments 
et  le  repos  nécessaires  (1 3),  d'écarter  un  aveugle 
de  la  voie  qu'il  voulait  suivre,  de  disperser  le 
bétail  de  son  voisin,  de  reculer  les  bornes  de  sa 
propriétéauxdépens  de  celle  d'autrui(i4)de  creu- 
ser une  fosse  sans  la  couvrir  (1^)  :  ceux  qui  se 
rendaient  coupables  de  cessortesde  crimes  subis- 
saient des  châtiments  dans  ce  monde,  et  s'ils 
échappaient  à  la  justice  humaine,  ils  encouraient 
le  malheur  des  plus  terribles  malédictions.  Nous 
ne  devons  pas  oublier  non  plus,  que  les  Israélites 
ne  pouvaient  recevoir  certains  gages  de  la  part 
des  plus  pauvres  d'entre  eux  ;  ils  ne  pouvaient 
accepter  les  effets  les  plus  indispensables  aux 
besoins  de  la  vie,  tels  que  leurs  vêtements,  les 
draps  de  leurs  lits,  et  autres  objets  semblables. 

Des  /aux  témoins. 

Tu  ne  rendras  point  de  faux  témoignage  contre 
ton  prochain  (16).  Ces  expressions  du  décalogue 
sont  le  fondement  des  lois  dont  nous  parlons  ; 
mais  il  faut  observer  que  le  Verbe  njy  'ânâh  que 
les  traducteurs  ont  rendu  par  dire,  signifie  propre- 
ment répondre  dans  un  interrogatoire.  Les  juges 
étaient  tenus  de  motiver  leurs  jugements  dans  les 
causes  capitales,  d'après  la  déposition  de  deux  ou 


(1)  Proverb.  vi.  f.  50,   ji„ 

(2)  Lévil.  xxv.  f.  19. 

(?)  Exod.  xxi.  f.  7  et  suiv. 

(4)  Lévil.  v.  '$.  1. 

(5)  Maïm.  Tract.  Genoubah.  lib.  1.  ex  Exod.  xxii.  f.  9. 

(6)  Exod.  xxii.  f.  5  et  suiv. 

(7)  Doit.  xxv.  j).  1  j  et  suiv. 

(8)  Lévit.  xix.  jt,  11;  xxv.  p.  15.  et  alib. 

(9)  Exod.  xxii.  jr.  25  et  suiv.  -  Lévit.  xxv.  jj\  ;6  et  suiv. 
Dcut.  xxui.  f.  19. 


(10)  Ibid.  f.  20. 

in)  Exod.  xxi.  j!'.  20;    xxiii.   f.  2.  -  Lévit.  xix.  p.  jj  et 
alib.  passim. 
(12)  Lévit.  xix.  f.  iç.  -  Deut.  xxiv.  p.  14,  16. 
(ij)  Ibid.  y.  p.  14;  xxv.  p.  4. 

(14)  Lévit.  xix.  f,  14.  -  Deut.  xix.  f.  14;  xxvn.  f.  17  et 
alib.  passim. 

(15)  Exod.  xxi.  jK  j  j. 

(10)  Exod.  xx.  ,v.  16  ;  xxiii.  f.  2.  -  Deut.  v.  je.  20. 


S.   B. 


T.  XII, 


COUP  D*ŒIL  RÉTROSPECTIF 


trois  témoins  ;  car  celle  d'un  seul  était  toujours 
insuffisante  (i).  Pour  mettre  donc,  autant  qu'il 
était  possible,  un  frein  à  la  malice  des  méchants, 
la  loi  voulait  que  le  faux  témoin  subit  la  peine  que 
l'on  aurait  infligée  à  l'innocent  si  la  religion  du 
juge  eût  été  surprise  (2)  ;  et  cette  peine  allait 
toujours  jusqu'à  la  mort,  quand  le  faux  témoin 
s'était  parjuré.  Les  juges  devaient  apporter  la 
plus  grande  attention  à  l'examen  des  témoins  (?), 
pour  prévenir  tout  jugement  injuste.  Les  thalmu- 
distes  ont  réuni  les  diverses  lois  éparses  dans  les 
livres  de  Moïse,  concernant  les  devoirs  des  juges; 
ils  y  ont  ajouté  des  commentaires  judicieux  que  le 
lecteur  peut  consulter  dans  les  livres  spéciaux  qui 
traitent  de  ce  sujet  (4). 

Lois  qui  défendaient  de  convoiter  le  bien  dy  autrui. 

Le  type  de  celte  loi  est  renfermé  dans  ce  pré- 
cepte, le  dixième  du  décalogue:  Tu  ne  convoiteras 
point  la  maison  de  ton  prochain  (5);  elle  est  en  même 
temps,  selon  les  docteurs  juifs,  le  fondement  de 
toutes  cellesde  la  seconde  table, et  de  nature  à  ne 
pouvoir  être  observée  strictement,  sans  entraîner 
après  elle  l'observation  de  toutes  les  autres. 
Nous  ignorons  si  l'on  donnait  à  ce  précepte  le 
sens  rigoureux  que  l'Évangile  y  attache,  ou  si 
l'on  ne  doit  le  regarder  que  comme  la  défense  de 
se  procurer  injustement  une  possession.  Les  thal- 
mudistes  prétendent  que  cette  loi  étend  sa  force 
jusqu'à  la  condamnation  du  désir  quand  on  s'y 
complaît  (6). 

Des  aliments,  des  habits,  des  actions  de  planter  et 
de  semer,  de  la  décence,  de  la  propreté,  des 
maladies  qui  excluaient  les  hommes  de  la  société. 

Le  sang  est  le  premier  aliment  défendu  aux 
Juifs,  puisque  cette  défense  remonte  jusqu'au 
temps  du  déluge  (7).  Selon  l'opinion  générale, 
au  moment  où  Noé  et  ses  enfants  sortirent  de 
l'arche,  Dieu  leur  permit  de  se  nourrir  de  la 
chair  de  toutes  sortes  d'animaux  ;  mais  il  leur 
interdit  en  même  temps,  sous  les  peines  les  plus 
sévères,  le  sang,  même  la  chair  où  le  sang  se 
trouverait  mêlée,  c'est-à-dire,  celle  de  tout  ani- 
mal étranglé,  ou  qui  aurait  reçu  la  mort  autre- 
ment que  par  l'effusion  de  son  sang.  Moïse 
réitéra  le  même  commandement  en  plusieurs 
endroits;   il    devait  être  observé  sous    peine  de 


mort,  et  il  n'était  point  particulier  aux  Israélites, 
car  les  étrangers  qui  demeuraient  parmi  eux 
étaient  aussi  tenus  de  s'y  conformer  (8).  Dieu 
sembla  même  regarder  d'un  œil  égal,  et  la  viola- 
tion de  cette  loi,  et  le  dévouement  d'une  posté- 
rité à  Moloch  :  cette  menace  de  mettre  sa  face 
contre  les  Iransgresseurs,  est  commune  aux  coupa- 
bles de  l'un  et  de  l'autre  de  ces  deux  crimes,  et 
paraît  ne  devoir  être  employée  que  dans  ces  deux 
circonstances  seulement.  Le  sang,  ou,  ce  qui  est 
la  même  chose,  la  vie  de  la  victime,  étant  destiné 
à  l'expiation  du  péché  (9),  servait  à  purifier  le 
Tabernacle  et  tous  les  objets  consacrés  au  culte; 
par  lui  était  ratifiée  l'alliance  entre  Dieu  et  son 
peuple,  et  sans  lui,  point  de  rémission  à  espé- 
îer  (10). L'Apôtre  applique  ces  différents  passages 
à  la  mort  de  Jésus-Christ  (11). 

Non  seulement  les  Israélites  devaient  s'abste- 
r.ir  de  sang,  mais  aussi  de  la  chair  d'un  grand 
nombre  d'animaux,  parmi  lesquels  se  trouvent  des 
oiseaux,  des  poissons  et  des  reptiles,  que  cette 
prohibition  a  fait  réputer  animaux  impurs. Cepen- 
dant il  n'est  guère  vraisemblable  que  la  distinc- 
tion établie  entre  les  animaux  purs  et  les  ani- 
maux impurs  ait  tiré  son  origine  de  la  loi  de 
Moïse,  puisque  cet  historien  en  fait  mention  en 
parlant  du  déluge  (12);  autrement  il  faudrait  sup- 
poser qu'il  en  a  parlé  par  anticipation,  ce  qui  est 
dénué  de  toute  espèce  de  probabilité.  Nous  ne 
croyons  pas  qu'il  soit  nécessaire  de  faire  une  lon- 
gue énumération  de  tous  les  animaux  dont  il  était 
défendu  aux  Israélites  de  se  nourrir.  Nous  avons 
donné  dans  le  texte  tous  les  détails  que  le  sujet 
comporte.  Nous  nous  contenterons  d'indiquer 
seulement  les  différentes  marques  désignées  par 
Moïse,  pour  distinguer  les  animaux  purs  des  ani- 
maux impurs  (n).  Dans  la  première  classe  sont 
tous  ceux  qui  ruminent,  et  dont  le  pied  est  four- 
chu ;  mais  ceux  qui  ne  réunissent  pas  ces  deux 
qualités,  comme  le  pourceau  qui  a  le  pied  four- 
chu, mais  qui  ne  rumine  pas,  le  chameau,  le  lapin 
et  le  lièvre  qui  ruminent, et  dont  le  pied  est  divisé 
en  plusieurs  parties,  formaient  la  classe  des  ani- 
maux impurs.  Tous  les  oiseaux  de  proie,  l'aigle, 
le  vautour,  etc.,  et  les  quadrupèdes  volants,  tels 
que  la  chauve-souris,  etc.,  appartenaient  à  la 
dernière  classe.  On  permettait  l'usage  des  pois- 
sons  pourvus  en   même   temps    de  nageoires  et 


(1)  Deuter.  xvu.  y.  6. 

(2)  Deut.  xix.  f.  1;,  16  et  suiv. 

(j)  Conformément  à  un  passage  de  l'Exode,  les  Juifs 
ne  recevaient  le  témoignage  ni  des  mineurs,  ni  de  ceux 
qui  s'étaient  rendus  coupables  d'un  crime  qui  leur  avait 
mérité  le  châtiment  du  fouet,  ni  des  usuriers,  ni  môme 
des  voleurs  qui  avaient  restitué  le  vol. 

(4)  Tract.  Sanhcdr.  Maim.in  emnd.  Prœc.Mg.194  e'  218. 

(<)  Excd.  xx.  f.  17.  -  Dcut.  v.  f.  21. 


(6)  Prxc.  ncg.  158. 

(7)  Gencs.  îx.  y.  4  et  suiv. 

(8)  Léuit.  xvu.  p.  10  et  suiv.  -   Dcut.  xu.  y.  2;  et  suiv- 

(9)  Liv'd.  loc.  cit.  jh  11. 

(10)  Hebr.  ix.  y.  22  et  alibi. 
(11  )  Ibid.  y.  ij  et  suiv. 

(12)  Gcn.  vu.  y.  2. 

(1  j)  Lèvil.  xi.  y.  1  et  suiv. 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA    NATION  JUIVE 


419 


d'écaillés  ;  ceux  qui  étaient  privés  de  ces  deux 
avantages,  étaient  défendus.  On  comptait  au  nom- 
bre des  animaux  purs  les  insectes  ailés;  ceux  qui 
rampent  sur  la  poussière  étaient  rejetés.  Il  y  avait 
encore  une  exception  parmi  les  animaux  purs, 
car  on  pouvait  en  manger  la  chair,  mais  non  la 
graisse.  Ce  n'est  pas  que  cette  substance  fût  répu- 
tée impure,  ni  que  le  législateur  eût  pour  motif, 
comme  le  prétendent  quelques  auteurs,  d'inter- 
dire aux  Israélites  une  nourriture  difficile  à  digé- 
rer, car  la  vie  active  et  laborieuse  de  ces  peuples 
contribuait  assez  à  fortifier  leur  tempéramment  ; 
mais  parce  que  la  graisse  était  réputée  appartenir 
à  Dieu,  et  qu'on  la  faisait  brûler  sur  son  autel  (  1  ). 
Il  paraît  toutefois  que  la  prohibition  de  la  graisse 
ne  concernait  que  la  graisse  des  bœufs,  des  mou- 
tons et  des  boucs.  Encore  est-il  douteux  que 
cette  défense  atteigne  d'autres  animaux  que  ceux 
qui  étaient  offerts  en  sacrifice,  et  toute  bête 
morte  d'elle-même  ou  déchirée.  La  chair  des 
animaux  mis  en  pièces,  et  celle  des  animaux  morts 
naturellement,  était  aussi  défendue  (2).  On  ne 
se  souillait  point  pour  toucher  vivant  un  animal 
impur;  mais,  s'il  était  mort,  la  personne  qui  le 
touchait  devenait  impure  jusqu'au  soir.  Les 
liqueurs  mêmes  et  les  vases  dans  lesquels  tom- 
baient par  hasard  un  de  ces  animaux,  ne  pou- 
vaient être  employés  à  aucun  usage,  qu'ils  n'eus- 
sent été  purifiés.  Si  le  hasard  voulait  que  l'animal 
se  précipitât  dans  un  puits,  dans  une  fontaine,  ou 
dans  quelque  vaste  bassin,  la  liqueur  n'en  était 
point  réputée  impure,  mais  seulement  la  personne 
chargée  de  l'en  retirer  (1). 

On  ne  trouve  dans  Moïse  aucune  loi  particu- 
lière sur  le  vêtement  des  Israélites  en  général, 
mais  seulement  sur  celui  des  prêtres  ;  nous  en 
avons  déjà  parlé.  Il  donne  à  la  vérité  aux  laïcs 
l'ordre  de  border  leurs  vêtements  d'une  bande  de 
couleur  pourpre,  pour  leur  rappeler  sans  cesse 
l'obligation  que  Dieu  leur  avait  imposée ,  de 
n'avoir  désormais  d'autre  volonté  que  la  sienne  (4). 
Parmi  les  lois  négatives  qui  avaient  rapport  aux 
vêtements,  voici  les  plus  remarquables  :  Un  sexe 
ne  devait  point  porter  les  habits  de  l'autre  (<;), 
et  la  même  étoffe  ne  pouvait  être  formée  d'un 
mélange  de  laine  et  de  lin  (6).  Il  paraît  que  Dieu 
avait  voulu  prévenir,  par  la  première,  les  abus  et 
la  licence  qui  pouvaient  résulter  de  la  conformité 
des  habits  entre  les  deux  sexes.  Le  motif  de  la 
seconde  était  d'empêcher  toute  espèce  de  confu- 
sion entre  les   productions  de  la   nature.   Par  la 


même  raison,  un  même  champ  ne  pouvait  rece- 
voir des  semences  de  différentes  espèces,  ni  des 
arbres  de  diverses  sortes,  ni  même  être  labouré 
avec  des  animaux  d'une  espèce  étrangère  l'une  à 
l'autre,  comme  le  bœuf  et  l'âne  (7). 

Bien  qu'il  paraisse  inutile  de  recommander  la 
propreté  dans  un  climat  où  l'extrême  chaleur  en 
fait  naturellement  une  loi,  elle  fut  cependant 
prescrite  par  Moïse  sous  des  peines  très  sévères. 
Par  exemple,  toute  espèce  de  commerce  charnel 
était  interdit  par  la  loi,  pendant  un  certain  temps, 
entre  un  mari  et  une  femme  qui  venaient  de  voir 
s'augmenter  leur  progéniture.  Il  en  était  de 
même  dans  quelques  autres  circonstances  qui 
n'ont  pas  besoin  d'être  décrites,  parce  qu'elles  se 
font  assez  présumer  d'elles-mêmes.  Tout  ce  que 
touchaient  les  hommes  et  surtout  les  femmes, 
dans  ces  occasions,  par  exemple  une  chaise,  un 
lit,  une  table  ou  quelqu'autre  meuble,  de  quelque 
nature  qu'il  fût,  était  réputé  impur  aux  yeux  de 
la  loi.  Les  deux  sexes  étaient  également  souillés, 
quand  il  leur  arrivait  de  toucher  un  cadavre  ; 
mais  rien  n'était  plus  immonde  aux  yeux  des  Juifs 
que  la  lèpre.  On  obligeait  ceux  qui  en  étaient 
infectés,  de  vivre  séparés  de  leurs  frères  jusqu'à 
leur  entière  guérison.  Les  rois  mêmes  n'étaient 
pas  exempts  de  cet  assujettissement,  comme  le 
prouve  l'exemple  d'Osias  (8).  Ce  monarque  ayant 
été  subitement  frappé  de  la  lèpre,  pour  avoir 
voulu  s'immiscer  dans  les  fonctions  sacerdotales, 
fut  dépouillé  de  la  royauté,  et  obligé  de  passer 
dans  la  retraite  le  reste  de  ses  jours.  Sans  doute 
s'il  ne  remonta  pas  sur  le  trône,  c'est  qu'il  ne  put 
être  guéri  de  cette  maladie  contagieuse,  et  contre 
laquelle  on  ne  pouvait  prendre  trop  de  précau- 
tions. Les  infortunés  qui  mouraient  de  cette 
maladie,  étaient  inhumés  dans  une  sépulture  par- 
ticulière et  séparée  de  celle  de  leurs  frères. 
C'était  aux  prêtres  qu'appartenait  le  droit  d'exa- 
miner ces  sortes  de  maladies,  et  de  prononcer  sur 
la  guérison  de  ceux  qui  en  avaient  été  atteints, 
afin  d'en  avertir  le  peuple  assemblé  dans  le  temple. 
Moïse  leur  donna  différentes  instructions  à  ce 
sujet  ;  il  ne  paraît  pas  qu'il  leur  ait  prescrit  aucune 
recette  contre  cette  maladie.  C'est,  disent  les 
Juifs,  parce  que  le  législateur  ne  voulut  pas 
détruire  le  châtiment  dont  Dieu  avait  voulu  punir 
le  coupable  dès  ce  bas  monde  (9).  On  peut  tirer 
les  mêmes  conséquences  du  raisonnement  qu'ils 
font  sur  la  lèpre  des  maisons  et  sur  celle  des 
habits;  maladie  qui,  selon  eux,  était  particulière 


(1)  Lèvit,  vu.  y-  2;.  et  suiv. 

(2)  Exod.  xii.  y.  5 1.  -  Lèvit.  xvn.  y.  15, 
0)  Lèvit.  xi.  f.  J2  et  suiv. 

(4)  Nomb.  xv.  y.  38,  jç>.  -  Dcut.  xxn.  y.  12. 


(6)  Ibid.  y.  11. 

(7)  Ibid.  y.  10. 

(8)  Comp.  iv  Rois.    xv.    y.    5.  et  11  Paralip.  xxv.  y.  8  et 
suivants. 

(9)  lia  Rabbin,  fer.  omn.  et  Theodor.  Quxst.  18  in  Lèvit. 


420 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


aux  Israélites  (i),  parce  que  Dieu  leur  avait  dé- 
claré qu'ils  ne  cesseraient  d'y  être  assujettis  que 
dans  le  temps  où  ils  observeraient  fidèlement  ses 
préceptes  (2). 

Lorsqu'un  particulier  avait  été  déclaré  par  les 
prêtres  infecté  de  la  lèpre,  non  seulement  il  était 
exclu  de  la  société,  mais  il  ne  pouvait  se  montrer 
que  tête  nue,  couvert  d'habits  déchirés,  et  por- 
tant au-dessus  de  la  lèvre  supérieure  une  espèce 
de  bande  de  toile,  sans  doute  pour  recevoir  son 
haleine  impure,  et  empêcher  qu'elle  n'infectât  les 
passants.  Selon  toutes  les  apparences,  on  leur 
assignait  pour  demeure  des  lieux  particuliers  et 
destinés  uniquement  à  les  recevoir  ;  car,  lorsque 
Samarie  éprouva  les  horreurs  de  la  famine,  quatre 
hommes  atteints  de  cette  affreuse  maladie,  sorti- 
rent ensemble  de  l'un  des  quartiers  de  cette  ville, 
et  se  rendirent  au  milieu  du  camp  des  Assy- 
riens (j).  Ne  lisons-nous  pas  dans  l'Évangile,  que 
dix  lépreux  vinrent  en  corps  trouver  Jésus-Christ, 
et  le  prier  de  les  guérir  (4)  ?  Quand  un  lépreux 
était  parvenu  à  sa  guérison,  il  devait  recourir  aux 
prêtres  pour  se  faire  purifier.  Les  maisons  même 
ne  pouvaient  être  habitées  et  les  vêtements  servir, 
quand  on  avait  eu  des  raisons  de  soupçonner 
qu'ils  n'avaient  pas  été  à  l'abri  de  la  contagion, 
qu'au  préalable  ils  n'eussent  aussi  été  purifiées  par 
la  main  des  prêtres.  Nous  avons  déjà  parlé  des 
sacrifices  qu'on  offrait  dans  ces  occasions  ;  quant 
aux  autres  cérémonies  prescrites  par  Moïse,  on 
peut  consulter  le  Lévitique.  Avant  de  finir  cet 
article,  nous  rapporterons  une  histoire  que  Mané- 
thon,  et  après  lui,  plusieurs  autres  écrivains  du 
paganisme,  ont  rapportée  sans  doute  pour  jeter 
du  mépris  et  du  ridicule  sur  la  nation  juive  (5). 
Quoiqu'elle  soit  diversement  racontée,  voici  le 
sens  que  nous  avons  cru  pouvoir  en  général  lui 
donner.  Bocchoris,  roi  d'Egypte,  voyait  son 
royaume  en  proie  aux  ravages  de  la  lèpre  ;  il  alla 
consulter  l'oracle,  et  en  reçut  pour  toute  réponse, 
le  conseil  d'envoyer  tous  les  lépreux  de  ses  états 
dans  le  désert,  où  la  faim  et  la  misère  les  auraient 
bientôt  entièrement  détruits.  Cet  avis  fut  suivi, 
et  les  lépreux  se  mirent  en  route.  Arrivés  dans  le 
désert,  Moïse  qui  était  du  nombre,  observa,  en 
suivant  les  traces  d'un  âne  sauvage,  un  endroit 
d'où,  pour  peu  que  l'on  creusât,  devait  jaillir  une 
source  qui  désaltérerait  ces  infortunés.  Un  ser- 
vice de  cette  importance  détermina  sur  le  champ 
les  lépreux  à  confier  à  Moïse  le  soin  de  les  gui- 
der, et  il  les  conduisit  en  Canaan  dans  le  court 
espace  de  sept  jours.  En  mémoire  de  cet  heureux 
établissement,  il  ordonna  que  le   septième  jour 


fût  consacré  au  repos.  Il  défendit  en  même  temps 
que  l'on  fît  usage  de  la  chair  du  pourceau,  animal 
si  sujet  à  la  lèpre.  Il  voulut  aussi,  par  reconnais- 
sance pour  l'âne,  leur  premier  bienfaiteur,  celui 
qui  leur  avait  sauvé  la  vie, qu'une  tète  d'animal  de 
cette  espèce  fût  placée  dans  le  temple,  et  qu'elle 
y  reçut  les  hommages  de  l'adoration.  Cette  his- 
toire n'est  qu'une  fable  ridicule  que  Josèphe  a 
très  bien  réfutée.  Les  règlements  que  fit  alors 
Moïse  concernant  cette  maladie,  prouvent  assez 
qu'à  la  sortie  d'Egypte  la  plupart  des  Israélites 
en  étaient  exempts.  Si  tous  en  eussent  été  infec- 
tés, il  n'aurait  pas  fait  séparer  les  lépreux  d'avec 
les  autres  ;  il  n'aurait  pas  enjoint  à  ces  derniers 
d'évitertoute  espèce  de  communication  avec  leurs 
frères. 

Telles  sont  les  lois  que  Moïse  rédigea  par 
l'ordre  de  Dieu.  Nous  en  avons  omis  plusieurs 
parce  qu'elles  nous  ont  paru  d'une  très  médiocre 
importance.  Ce  code  sacré,  non  seulement  por- 
tait la  défense  expresse  d'y  rien  ajouter  ou  d'en 
retrancher  un  seul  mot  (6),  mais  il  menaçait  des 
plus  terribles  châtiments,  et  flattait  des  plus 
attrayantes  promesses  les  uns  et  les  autres,  pour 
déterminer  la  nation,  aussi  ingrate  qu'indocile, 
d'Israël,  à  l'entière  observation  des  préceptes 
qu'il  renfermait. 

Des  coutumes,  des  arls,  des  sciences,  et  du 
commerce  des  Juifs. 

Les  coutumes  religieuses  ou  civiles  des  Israé- 
lites, étant  fondées  en  général  sur  les  lois  dont 
nous  venons  de  parler,  il  ne  nous  reste  que  peu 
de  choses  à  dire  sur  ce  sujet,  d'autant  plus  aride, 
qui;  très  peu  d'écrivains  dignes  de  foi  se  sont 
donné  la  peine  de  le  traiter.  Nous  avons  déjà  fait 
mention  des  plaisirs  et  des  fêtes  qui  accompa- 
gnaient leurs  noces  ;  nous  décrirons  ici  succinc- 
tement ce  qui  était  en  usage  à  la  naissance  de 
leurs  enfants,  et  nous  parlerons  de  même  en 
abrégé  de  leurs  jeux,  de  leurs  enterrements,  de 
leurs  différents  genres  de  divinations,  des  actes 
d'idolâtrie  dont  ils  se  rendaient  coupables,  soit 
dans  leurs  vergers  ou  sur  les  montagnes,  ou  enfin 
dans  les  autres  endroits  qu'ils  avaient  consacrés  à 
un  culte  superstitieux. 

La  loi  de  la  circoncision  n'était  point  fondée 
sur  l'ordre  de  Moïse,  mais  sur  un  commandement 
exprès  de  l'Éternel  à  Abraham.  Il  n'y  était  point 
fait  mention  de  la  qualité  de  la  personne  qui  de- 
vait présider  à  cette  cérémonie,  ni  de  la  manière 
dont  elle  devait  être  faite  ;  seulement  il  y  était 
dit,  en  termes  positifs,  que  le  prépuce  de  l'enfant 


(1)  Mos.  Gcrund.  Racanat.  Abr.  Sepharad.  étal. 

(2)  Munst.  in  Levit.  xm. 

(?)  iv  Rois  vu.  f.  j,  8.  —  (4)  S.  Luc.  xvn.  fi,  12. 


(5)  Mancth.    apud  Joseph,  contr.    Appion.    Tacil.    Just. 
PLutarq.  et  al. 

(6)  Deul.  îv.  f.  2;  xii.  f.  j2. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA   NATION  JUIVE 


421 


serait  retranché  le  huitième  jour  après  sa  nais- 
sance ;  d'où  nous  concluons  que  le  père  pouvait 
lui-même  s'acquitter  de  ce  devoir,  ou  en  charger 
quelqu'un  de  ses  amis,  qui  eût  assez  d'adresse 
pour  faire  cette  opération  sans  inconvénient.  On 
se  servait  d'ordinaire  d'un  couteau  ou  d'un  rasoir 
fait  d'une  certaine  pierre  que  l'on  croyait  moins 
dangereuse  que  l'acier.  Peut-être  en  avaient-ils 
emprunté  l'usage  des  Égyptiens,  qui  s'en  ser- 
vaient pour  les  embaumements  (1).  Rien  n'obli- 
geait à  faire  porter  l'enfant  au  temple,  ni  même  à 
la  synagogue.  On  pouvait  le  circoncire  dans  la 
maison  paternelle.  Le  père  ou  un  ami  tenait  l'en- 
fant dans  ses  bras,  et  celui  qui  faisait  l'opération, 
prenant  la  prépuce  d'une  main,  le  retranchait  de 
l'autre  avec  de  petites  pinces  destinées  seulement 
à  cet  usage,  et  un  troisième  témoin  recevait  dans 
un  bassin  rempli  de  sable  le  sang  qui  sortait  de 
la  blessure.  Appliquant  ensuite  sa  bouche  sur  la 
plaie,  il  la  suçait  par  trois  fois,  et  laissait  couler  le 
sang  qu'il  en  avait  tiré  dans  un  vase  rempli  de  vin. 
Celui  qui  avait  fait  l'opération  mettait  ensuite  une 
poudre  styptique  sur  la  blessure,  et  la  couvrait 
aussitôt  d'une  bande.  Selon  toutes  les  apparences, 
il  y  avait  une  formule  usitée  dans  ces  sortes  d'oc- 
casions. Après  la  cérémonie,  la  personne  qui  y 
avait  le  plus  contribué,  approchait  des  lèvres  de 
l'enfant  le  vase  rempli  de  vin  mêlé  de  sang,  et 
proférait  ces  paroles  d'un  prophète  :  «  Vis  en  ton 
sang»  (2).  Il  récitait  aussi  le  psaume  cxxvn,  et 
souhaitait  aux  parents  le  plaisir  d'assister  un  jour 
aux  noces  du  nouveau-né  (3).  Tels  sont  les  dé- 
tails de  cette  cérémonie,  rapportés  par  les  auteurs 
juifs  ;  mais  nous  n'oserions  assurer  qu'ils  aient  été 
observés  dès  les  premiers  temps  :  disons  seule- 
ment qu'ils  étaient  accompagnés  de  toutes  les  ex- 
pressions de  la  joie,  et  que  l'on  choisissait  ce 
moment  où  les  parents  et  les  amis  étaient  réunis 
pour  donner  un  nom  au  nouveau-né  (4). Ces  noms, 
qui  ne  disent  rien  à  notre  intelligence,  faisaient 
ordinairement  allusion  à  quelque  qualité  particu- 
lière à  l'enfant  ou  à  ses  parents  ;  souvent  ils 
étaient  relatifs  à  quelque  circonstance,  à  quelque 
événement  remarquable.  Nous  en  avons  cité 
plusieurs  exemples  en  parlant  des  noms  des  pa- 
triarches. Les  Juifs,  se  piquant  d'être  de  tous  les 
peuples  le  plus  attaché  à  l'Etre  suprême,  avaient 
coutume  de  joindre  les  noms  de  Dieu  Jah  et  El 
à  ceux  de  leurs  enfants,  comme  Abyah,  qui  veut 
dire,  Dieu  mon  père  ;  Zachariah,   qui  signifie  le 


mémorial  de  V Etemel  ;  Uriel  et  Daniel  dont  le 
sens  est  également  la  lumière  ou  le  jugement  de 
Dieu.  Quelquefois  ils  les  tiraient  des  créatures 
vivantes.  Ainsi  Sephorah,s\gn\ûe un  oiseau, Oreb  un 
corbeau  ;  Rachel,  une  brebis  ;  Nahasson,  un  ser- 
pent ;  Thamar,  un  palmier.  Nous  trouvons  ce- 
pendant quelques  noms  qui  ne  présentent  pas  un 
sens  fort  honorable;  tels  sont,  Ishboshelh,  l'homme 
de  honte,  Méphibosheth,  honte  de  la  bouche.  Quant 
à  ceux  qui  avaient  rapport  à  quelques  événe- 
ments, nous  lisons  que  la  belle-fille  d'Héli,  ap- 
prenant que  l'Arche  avait  été  prise  par  les  Phi- 
listins, appela  son  fils  Ichabod,  qui  veut  dire,  où, 
est  la  gloire  (Çj  }  On  donnait  aussi  un  nom  aux 
filles;  mais  comme  on  leur  administrait  point 
la  circoncision,  c'était  sans  aucune  cérémonie. 
Les  prêtres  seulement,  lorsque  la  mère  était  pu- 
rifiée, prononçaient  certaines  bénédictions  en 
faveur  de  l'enfant,  comme  c'est  encore  aujour- 
d'hui l'usage  parmi  les  Juifs  (6). 

Les  Israélites  ne  faisaient  ordinairement  d'au- 
tres festins  que  ceux  qui  leur  étaient  prescrits  par 
la  loi  aux  solennités  annuelles,  à  leurs  mariages, 
à  la  naissance  de  leurs  enfants.  Le  luxe  était 
presque  toujours  écarté  de  leurs  repas  particu- 
liers, même  aux  fêtes  qui  revenaient  souvent, 
et  se  renouvelaient  pendant  plusieurs  jours  de 
suite.  Voi'ci  quelques-unes  des  cérémonies  qui 
étaient  en  usage  parmi  eux  dans  ces  occasions, 
et  qui  semblent  avoir  quelques  rapports  avec 
certains  passages  de  l'Evangile.  Le  maître  de  la 
maison  saluait  ses  convives  à  leur  arrivée,  et  les 
oignait  d'huile.  Lorsqu'on  était  à  table,  il  bénis- 
sait la  coupe,  rompait  le  pain,  et  en  taisait  la  dis- 
tribution. A  la  fin  du  repas,  il  prononçait  une  ac- 
tion de  grâces,  et  reconduisait  les  invités.  Le 
salut  n'était  point  le  même  entre  un  supérieur  et 
un  inférieur.  On  saluait  le  premier  en  s'inclinant 
jusqu'à  terre,  comme  firent  Abraham  et  Loth, 
quand  ils  reçurent  leurs  hôtes  célestes  (7).  Entre 
égaux,  le  baiser  était  l'unique  salutation  que  l'on 
connût.  La  formule  d'invitation,  et  le  lavement 
des  pieds  qui  eut  lieu  de  la  part  de  Joseph  envers 
ses  frères,  lorsque,  pour  la  première  fois,  ils 
dinèrent  avec  lui  en  Egypte, confirment  la  distinc- 
tion que  nous  venons  d'observer  (8).  Cette  cou- 
tume de  laver  les  pieds,  était  une  marque  d'hon- 
neur que  le  chef  de  famille  rendait  à  ses  convives. 
On  sait  la  réponse  que  fit  Abigaïl  aux  serviteurs  de 
David  qui  venaient  la  demander  en  mariage  pour 


(0  Hérodote,  1.  1.  c.  86. 

(2)  E\ech.  xvi.  f.  6. 

(j)  V.  Frag.  in  Deut.  x.  -  Mos.  Koi\.  in  Tract,  de  Cir- 
cumcis.  fol.  115.  -  Maim.  Tract.  Circum.  c.  1  et  2.  -  Bux- 
torj.  Syn.  c.  4.  -  Quandt.  de  Cuttris  Circum.  Hœbr. 

(4)  S.  Luc.  1.  jr.  49. 


(5)  1  Rois  iv.  f.  21. 

(6)  Léon  de  Modene,  Cérém.  Jud.  part.  iv.  c.  8.-  Goodiv. 
Mos.  et  Aar.  1.  vi.  c.  1. 

(7)  Gen.  xvni.  f.  2;  xix.  ji'.  1. 

(8)  Gen.  xli.i.  24. 


4?2 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


leur  maître  :  «  Que  sa  servante,  »  leur  dit-elle, 
«  soit  chargée  de  laper  les  pieds  des  serviteurs  de 
mon  Seigneur  (i).  »  Sans  doute  le  psalmiste  fait 
aussi  allusion  au  lavement  des  pieds,  lorsqu'il 
appelle  Moab  le  bassin  où  il  se  lavera  (2).  La 
cérémonie  d'oindre  la  tète,  quoique  pratiquée  gé- 
néralement dans  tout  l'Orient,  paraît  n'avoir  été 
consignée  que  dans  l'Évangile  (3).  Ces  paroles  du 
psalmiste  :  «  Tu  as  dressé  ma  table....  tu  as  oint 
ma  tête  d'huile  (4),  »  ne  sont  que  de  simples  allu- 
sions à  cette  coutume.  Si  au  nombre  des  convives 
il  ne  se  trouvait  ni  étranger  ni  aucun  personnage 
supérieur  en  dignité,  c'était  le  maître  delà  maison 
qui  bénissait  les  mets  (<,).  Si  au  contraire,  il  était 
honorée  d'une  pareille  visite,  il  priait  la  per- 
sonne de  distinction  de  vouloir  bien  s'acquit- 
ter de  ce  devoir  (6).  Le  maître  prenait  ensuite 
une  coupe  remplie  de  vin,  invoquait  le  Créateur 
de  la  vigne,  goûtait  à  la  liqueur  et  remettait  la 
coupe  à  son  plus  proche  voisin,  qui,  de  même,  la 
faisait  passer  aux  autres  convives,  jusqu'à  ce 
qu'elle  eût  fait  le  tour  de  la  table.  Les  Juifs  ap- 
pellent cette  cérémonie  la  bénédiction  du  vin. 
Selon  le  rapport  de  saint  Luc,  c'est  ainsi  que 
Jésus-Christ  commença  son  dernier  repas  (7),  et 
qu'il  fit  précéder  la  bénédiction  et  la  fraction  du 
pain  par  cette  cérémonie  (8). 

Au  sortir  de  table,  celui  qui  avait  prononcé  la 
bénédiction  rendait  aussi  les  grâces;  ensuite  il 
faisait  encore  passer  de  main  en  main  une  seconde 
coupe  de  vin  ;  et  on  appelait  cette  dernière  céré- 
monie la  bénédiction  de  l'abondance.  C'est  à  ce 
dernier  moment,  selon  l'opinion  commune,  que  le 
Sauveur  institua  le  sacrement  de  l'Eucharistie  (9); 
quoique,  selon  toutes  les  apparences,  cette  béné- 
diction n'eût  lieu  que  dans  les  grandes  cérémo- 
nies, aux  jours  des  grandes  fêtes,  surtout  à  celle 
de  Pâque.  On  croit  que  l'autre  était  d'un  usage 
ordinaire.  Il  est  incertain  si  les  Juifs  prenaient 
leurs  repas  assis  ou  couchés  ;  mais  nous  sommes 
portés  à  croire  que  la  première  de  ces  attitudes 
était  en  usage  parmi  eux,  au  moins  avant  la  capti- 
vité ;  car  nous  lisons,  que  Joseph  fit  asseoir  ses 
frères  pour  prendre  le  repas  qu'il  leur  donna  en 
Egypte  (10),  et  que  David  dit  à  Jonathas  :  De- 
main   je  devrais  m'asseoir  auprès  du  roi  pour 

manger  (11).  »  Si  on  trouve  dans  l'Évangile  que 
les  convives  avaient  coutume  de  se  coucher,  il  en 


faut  conclure  que  l'ancienne  habitude    avait  été 
changée. 

Il  est  aussi  très  vraisemblable  qu'ils  étaient 
leurs  souliers  ou  leurs  sandales  avant  de  prendre 
leurs  repas,  puisque  Dieu  leur  commanda  d'être 
chaussés  quand  ils  mangeraient  l'Agneau  pascal. 
La  lecture  de  ces  différents  usages  amène  natu- 
rellement une  réflexion  ;  c'est  que  la  libéralité  et 
l'hospitalité  leur  avaient  été  tellement  recomman- 
dées par  leur  législateur  et  par  les  exemples 
d'Abraham,  de  Loth,  et  de  quelques  autres  patri- 
arches, qu'ils  paraissent  y  avoir  été  toujours  fidè- 
les. Ils  avaient  grand  soin  d'inviter  à  leurs  repas 
solennels  les  lévites, les  veuves,les  orphelins  et  les 
étrangers  ;  ou,  s'ils  ne  les  y  invitaient  pas,  du  moins 
leur  faisaient-ils  passer  quelque  portion  du  festin. 

Disons  un  mot  à  présent  de  l'idolàtriedes  Israé- 
lites. Ils  nommaient  hauts-lieux  les  endroits  où  ils 
offraient  des  sacrifices  particuliers,  soit  au  vrai 
Dieu, en  faisant  brûler  de  l'encens  en  son  honneur, 
soit  à  quelque  fausse  divinité.  Les  uns  et  les 
autres  se  multiplièrent  tellement,  et  acquirent 
tant  d'influence  sur  l'opinion  commune,  que  peu 
de  rois  eurent  la  hardiesse  d'en  entreprendre  la 
destruction.  Plusieurs  même  de  ces  princes,  dont 
le  zèle  et  la  piété  leur  ont  mérité  des  éloges,  ne 
laissèrent  pas  de  tolérer  ce  dangereux  abus.  Les 
hauts-lieux  ou  l'on  adorait  le  Très-Haut,  quoi- 
qu'autorisés  en  quelque  sorte  par  les  exemples 
de  Samuel,  de  David,  d'Elisée,  et  de  quelques 
autres  personnages  inspirés,  étaient  expressément 
défendus,  si  ce  n'est  dans  le  cas  où  il  avait  plu  à 
Dieu  d'y  mettre  une  exception.  Quant  aux  der- 
niers, uniquement  consacrés  à  l'idolâtrie,  on  con- 
çoit aisément  combien  ils  étaient  abominables  aux 
yeux  de  l'Éternel  ;  en  effet,  aucune  sorte  de  crime 
ne  fut  punie  avec  plus  de  sévérité.  Cependant, 
vingt  ans  après  la  mort  de  Josué,  vers  le  temps 
d'Othoniel,  les  Israélites  se  livrèrent  sans  réserve 
à  l'idolâtrie  (  1 2  };  et  ce  désordre  augmenta  au  point 
qu'il  serait  impossible  de  fixer  le  nombre  des  di- 
vinités qu'ils  adoraient,  et  de  déterminer  celuides 
lieux  consacrés  à  leur  culte.  Ils  adoptèrent  les 
idoles  de  toutes  les  nations  parmi  lesquelles  ils 
avaient  vécu,  et  ils  leur  élevèrent  des  autels  sur 
le  sommet  de  chaque  montagne.  C'est  de  là  que 
vint  le  mot  hauts-lieux.  Le  soleil,  la  lune  et  les 
étoiles  étaient  autant  de  dieux   qu'ils  honoraient 


(1)  1  Rois  xxv.  f.  41.  —  (2)  Psaum.  cvn.  f.  10. 
(j)  S.  Matth.  xvi,  f.  7.  -  S.  Luc.  vu.  f.  44. 

(4)  Psaum.  xxii,  f.  5. 

(5)  1  Rois  ix.  f.  1  j. 

(6)  Il  n'était  permis  de  s'y  refuser  sous  aucun  prétexte  ; 
l'opinion  commune  voulait  qu'on  en  fût  puni  dans  ce 
monde  par  une  mort  plus  prochaine. 


(7)  S.  Luc.  xxii.  J'.  17. 

(tf)  Drus,  in  Nov.  Test.   pars.    ut.    et   Goodw.   ubi   sup. 
I.  III.  c.  11,  §.  15. 

(9)  V.  Frag.  in  Prœc.  Hœbr. 

(10)  Cen.  xliii.  ji'.  jj- 

(11)  1  Rois  xx.  f,  5. 

(uj  Juges,  m.  f.  5  et  suiv. 


SUR   L'ORGANISATION    DE   LA  NATION  JUIVE 


4^3 


du  culte  le  plus  fervent  ;  cependant  il  vint  un 
temps  où  ils  en  rougirent,  et  alors  ils  cherchèrent 
à  envelopper  ce  même  culte  de  l'ombre  des 
bois  (1).  Ce  lut  Salomon,  au  rapport  de  l'Écri- 
ture, qui  porta  le  crime  de  l'idolâtrie  à  son  dernier 
période,  par  la  multitude  des  femmes  étrangères 
qu'il  adopta  ;  et  ce  ne  fut  qu'environ  trois  cent 
soixante  ans  après,  sous  le  règne  de  Josias,  que 
cette  coupable  habitude  fut  entièrement  déra- 
cinée (2). 

Plongés  de  plus  en  plus  dans  l'idolâtrie,  les  Is- 
raélites ne  tardèrent  pas  à  se  familiariser  à  la  pra- 
tique des  divinations  qui  leur  avaient  été  si  for- 
mellement défendues  par  Moïse.  On  en  connais- 
sait de  plusieurs  sortes  ;  la  plupart  sont  désignées 
dans  les  paroles  suivantes  (3)  «  Il  ne  s'en  trouvera 
parmi  vous  aucun  qui  fasse  passer  par  le  feu  son 
fils  ou  sa  fille  ;  il  ne  s'y  trouvera  ni  de  devin  qui 
fasse  usage  de  divination,  de  prédiction,  d'enchan- 
tement, ni  qui  présage  le  temps  à  venir  ;  ni  de 
sorcier  qui  consulte  les  esprits  de  Python,  ni  de 
diseur  de  bonne  aventure,  ni,  en  un  mot,  qui  que 
ce  soit  qui  interroge  les  morts.  »  Les  prophètes, 
outre  ces  différentes  superstitions,signaIent  encore 
celle  par  qui  l'on  veut  connaître  l'avenir  en  con- 
sultant les  entrailles  des  victimes  (4),  l'usage  de  la 
baguette  (5),  et  enfin  une  foule  d'autres  sortilèges 
presque  tous  défendus  sous  peine  de  mort  ;  mais 
leur  envie  démesurée  de  connaître  les  événements 
futurs,  leur  fit  mettre  en  usage  toutes  les  prati- 
ques impies  ou  folles  qu'ils  croyaient  propres  à 
les  leur  dévoiler. 

Quant  aux  jeux,  si  l'on  en  juge  par  le  silence 
de  l'Écriture,  ils  n'imitèrent  point  leurs  voisins 
sur  ce  point.  Par  ces  mots,  rire,  jouer,  se  diver- 
tir, ils  n'entendirent  jamais  que  des  amusements 
innocents;  et  Salomon  lui-mètre,  qui  avait  imité, 
ou  plutôt  surpassé  tous  les  autres  rois  par  sa  ma- 
gnificence, lui  qui  avait  attiré  à  sa  cour  des  chan- 
teurs et  des  cantatrices,  et  qui  s'était  livré  à  tous 
les  excès  de  l'orgueil  et  de  la  vanité,  qu'il  nomme 
les  délices  des  hommes  (6),  Salomon,  ne  parle 
d'aucune  sorte  de  représentations  théâtrales,  ni 
de  jeux  de  hasard.  Il  semble  que  la  solennité  de 
leurs  fêtes  leur  tînt  lieu  seule  de  spectacles  et  de 
divertissements  ;  et  l'on  n'en  sera  pas  étonné, si  on 
réfléchit  que  ces  fêtes  revenaient  tous  les  ans,  et 
qu'il  s'en  trouvait  un  grand  nombre  dans  le  cou- 
rant de  chaque  année.  Ajoutons  qu'à  leur  multi- 


plicité se  mêlait  encore  une  pompe  et  une  magni- 
ficence étonnantes  ;  aussi  les  anciens  pères,  en- 
tr'autres  Tertullien  (7)  et  saint  Cyprien  (8),  attes- 
tent que  jamais  les  représentations  théâtrales  ne 
furent  en  usage  parmi  les  Israélites.  Selden  nous 
apprend  que  les  jeux  môme  de  hasard,  comme 
celui  des  dés,  étaient  réputés  une  espèce  de  vol  ; 
ils  regardaient  encore  comme  injuste  le  gain  que 
plusieurs  se  procuraient  en  excitant  un  animal  à 
se  battre  contre  un  autre,  pour  savoir  lequel  des 
deux  sortirait  vainqueur  du  combat  (9). 

En  général,  les  divertissements  que  les  Israé- 
lites aimaient  le  plus,  étaient  la  musique,  la  danse 
et  les  repas.  Il  paraît  du  moins  que  ce  fuient  ces 
plaisirs  dont  le  sage  Berzellai  regretta  le  plus  la 
douceur;  mais  les  excès  qui  s'y  introduisirent 
dans  la  suite  leur  attirèrent  les  plus  vifs  reproches 
de  la  part  des  prophètes.  La  simplicité  du  bonheur 
est  souvent  représentée dansrÉcriture,parl'image 
d'une  famille  qui  mange  et  qui  boittranquillement, 
assise  à  l'ombre  de  sa  vigne  et  de  son  figuier. 
Ils  jouissaient  surtout  de  ces  sortes  de  plaisirs 
dans  les  néoménies  et  les  fêtes  qui  étaient  très 
nombreuses,  ou  dans  le  temps  de  la  moisson 
et  des  vendanges;  autrement  ils  n'auraient  pas  eu 
assez  de  loisir  pour  vaquer  à  leurs  occupations  or- 
dinaires. Il  n'est  pas  bien  certain  si  la  chasse  et  la 
pêche  étaient  en  usage  parmi  eux,  ou  comme  de 
simples  plaisirs,  ou  comme  des  moyens  de  fournir 
leurs  tables  de  certains  mets  extraordinaires. Tout 
ce  que  nous  savons  sur  cet  objet,  c'est  que  les 
auteurs  sacrés  parlent  souvent  des  filets,  de  piè- 
ges, de  chasseurs  et  d'oiseleurs. 

Si  nous  en  exceptons  les  jours  de  fêtes,  leurs 
aliments  ordinaires  étaient  toujours  très  simples. 
L'Écriture  dit  de  Booz,  homme  extrêmement 
riche,  qu'il  pria  Ruth  de  boire  de  la  même  eau, de 
manger  du  même  pain,  et  de  le  tremper  dans  le 
même  vinaigre  que  lui  (10).  Le  présent  de  vivres 
qu'Abigaïl  envoya  à  David  même,  et  aux  guerriers 
qui  l'accompagnaient,  lorsqu'il  était  forcé  de  fuir 
dans  les  forêts  la  colère  de  Saùl,  était  composé 
de  grain  rôti,  de  pain  et  de  raisins  secs,  de  miel, 
de  beurre,  de  fromage,  d'huile,  et  de  quelques 
bètes  grasses  (11).  Leur  pain  était  fait  d'avoine  ou 
de  froment;  ils  le  pétrissaient  en  forme  de  gâteau, 
et  le  faisaient  cuire  dans  un  fourou  dans  une  poêle, 
avec  de  l'huile,  ou  simplement  à  sec.  Leur  miel 
était  renommé  pour  un  des  mets  les  plus  exquis 


(1)  111  Rois  m.  y.  2  et  suiv.  ;  xn.  y.  ij,  28  et  suiv.;  xiv. 
jt.  2;,  24,  et  alib. 

(2)  Comp.  m  Rois  xi  et  iv  Rois  xxui. 
(?)  Dcut.  xviii.  y.  10,  11. 

(4)  E^éch.  xxi.  y.  21. 

(5)  Osée  iv.  y.  12. 

(6)  Ecclésiast.  11.  y.  1. 

(7)  Lib.  de  Spectacut  et  Apolog.  c.  58. 

(8)  Epit.  à  Donat.  —  De  théâtre  proprement  dit,  il  est 


certain  qu'il  n'y  en  eut  pas  chez  les  Hébreux,  au  moins 
jusqu'à  ces  grands  prêtres  sacrilèges  qui  introduisirent  en 
Judée  les  mœurs  des  Gentils.  Mais  des  Juifs  qui  font 
autorité,  comme  S.  Munk,  croient  que  le  mot  danse  pou- 
vait renfermer  <*  une  pantomine  très  animée  ». 

(9)  Jus  Nat.  cl  Gent.LVl,  c.  xi. 

(10)  Ruth.  11.  y.  0,14. 

(11)  1  Rois  xxv.  y.    18.  -  11   Rois  xvl.  y.   1;   xvn.  f.  28, 
29,  et  alib. 


4^4 


COUP  D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


que  l'on  connût  alors  (i).  La  laine  de  leurs 
troupeaux  et  le  lait  de  leurs  chèvres,  dans  les 
maisons  gouvernées  avec  une  sage  économie, 
suffisaient  pour  la  nourriture  et  pour  le  vête- 
ment, tant  des  maîtres  que  de  tous  les  servi- 
teurs (2). 

Les  grands  titres  leur  étaient  inconnus,  si  nous 
en  exceptons  les  noms  attachés  à  certains  emplois 
distingués,  tels  que  ceux  de  général,  de  trésorier, 
de  secrétaire,  etc.  La  noblesse  et  la  gloire  parmi 
eux  étaient  fondées  principalement  sur  la  généa- 
logie. Aussi  trouve-t-on  souvent  dans  l'Écriture, 
les  noms  de    certains    hommes   accompagnés  de 
ceux  de  cinq  ou  six  de  leurs  ancêtres.  Ils   avaient 
aussi  égard  à  la  distinction  des  tribus  et  des    fa- 
milles.  Par  exemple,    c'était  un    honneur   d'être 
sorti  de  la  tribu  de  Lévi,  parce  qu'elle   était  con- 
sacrée au  culte  de  l'Éternel  ;  de    celle    de   Juda, 
parce  que  le  sceptre  lui  avait  été  promis, et  de  celle 
d'Éphraïm,  à  cause  du  respect  religieux  que   l'on 
l'on  avait  toujours  conservé  pour  la   mémoire  de 
Joseph.  Dans  chaque  tribu,  ceux  qui    en   étaient 
les  chefs,  et  en  général  toutes  les  branches  aînées, 
jouissaient  des  mêmes    prérogatives.    Après    les 
chefs,  les  vieillards,  de  quelque  tribu  ou  de  quel- 
que branche  qu'ils  fussent, étaient  les  plus  respec- 
tés. Le  nom  de  vieillard    ou  d'ancien,    selon  nos 
versions, semble,  dans  l'Écriture,  présenter  quel- 
que idée  de  dignité,  par  la  raison,  sans  doute, que 
la  gravité  et  l'expérience  d'un  homme  âgé  le  ren- 
dent capable  de  prononcer   un   jugement    solide 
sur  les  questions  les  plus  importantes.  Mais  cette 
dignité  ne  donnait    aucun  titre  particulier  d'hon- 
neur. La  seule  distinction  qu'il  y  eût  entre  un  vieil- 
lard et  un  homme  moins  âgé,  consistait  seulement 
dans  l'attention  et  le  respect  que  l'on   témoignait 
au  premier,    et  la    manière  humble  dont    on  lui 
parlait.  On  employait  pour  cela  une  formule  par- 
ticulière à  la  langue  hébraïque,  dans  laquelle  celui 
qui  veut  s'exprimer  poliment  se  sert  de  la  troisiè- 
me personne  en  parlant  de    soi-même,   et   de    la 
seconde  en  parlant  à  celui   à    qui    il    s'adresse  ; 
comme,    par   exemple  :    que  ton  serviteur  parle, 
pour  dire,  que  je  parle  :   voici  ton  serviteur  ou  la 
servante,  pour  dire  :  me  voici.  Les  femmes  surtout, 
soit  à  cause  de  leur  timidité  naturelle,  soit  parce 
qu'elles  sont  plus  douces  et  plus  insinuantes  que 
les     hommes,    se    distinguaient    par    l'affabilité 
de  leurs  manières  et  la  modestie  de  leurs  expres- 
sions (3). 


La  vie  frugale  et  laborieuse  des  Israélites,  et 
l'air  pur  qu'ils  respiraient  dans  la  Palestine,  les 
mettaient  à  couvert  de  toutes  ces  maladies  dange- 
reuses, fruits  de  la  paresse  et  de  la  volupté,  qui 
depuis  ont  infecté  presque  toute  l'espèce  hu- 
maine. Rarement  les  auteurs  sacrés  parlent  de 
maladies,  et  plus  rarement  encore  de  médecins  : 
ils  font  mention  seulement  de  ceux  que  nous  dé- 
signons sous  le  nom  de  chirurgiens,  et  qui  étaient 
appelés  médecins  parles  Grecs  aussi  bien  que  par 
les  Hébreux.  Nous  lisons,  par  exemple,  que  la 
loi  de  Moïse  condamne  celui  qui  blesserait  quel- 
qu'un, à  payer  le  salaire  du  médecin.  Dans  un 
autre  passage,  le  roi  Aza  est  blâmé  d'avoir  recher- 
ché avec  trop  de  confiance  des  médecins  pour  le 
guérir  d'une  incommodité  qu'il  avait  aux 
pieds  (4).  L'art  de  ces  chirurgiens  en  général  ne 
s'étendait  qu'à  des  maladies  extérieures  ;  car, 
dans  les  livres  sacrés,  il  n'est  jamais  parlé  de  pur- 
gations,  de  vomitifs  et  d'autres  remèdes  sembla- 
bles, mais  seulement  de  cataplasmes,  de  banda- 
ges, etc.  C'est  peut-être  la  raison  principale  pour 
laquelle  les  Israélites  avaient  de  si  longs  jours, des 
enfants  si  nombreux,  et  une  santé  si  parfaite. 
Mais  on  ne  vit  pas  toujours,  et  l'heure  vient  pour 
tous  de  mourir. 

Le  deuil  se  prenait  à  la  mort  des  plus  proches 
parents,  ou  à  l'occasion  de  quelque  malheur 
public  ou  particulier.  Dans  l'un  et  l'autre  cas,  ils 
l'exprimaient  à  peu  près  de  la  même  manière  ;  ils 
ne  se  bornaient  pas  simplement,  comme  aujour- 
d'hui, à  des  formalités  extérieures,  maisils.tâchaient 
de  montrer  toutes  les  marques  d'une  tristesse, 
vive  et  profonde.  Dans  le  premier  moment  de 
leur  douleur,  ils  déchiraient  leurs  habits,  se  frap- 
paient la  poitrine,  s'arrachaient  les  cheveux  et  la 
barbe  ;  ensuite  ils  se  couvraient  lecorps  d'un  sac, 
et  la  tête  de  cendres  mêlées  avec  de  la  boue,  s'in- 
terdisaient l'usage  des  parfums  durant  tout  le 
temps  du  deuil,  marchaient  pieds  nus,  et  cou- 
chaient sur  la  dure  (■}).  Ces  austérités  étaient 
encore  surpassées  par  celles  des  nations  voisines 
qui,  pour  faire  éclater  plus  vivement  leurdouleur, 
se  faisaient  des  meurtrissures,  et  des  incisions  à 
la  peau.  Mais  une  cruauté  si  extravagante  était 
défendue  expressément  par  la  loi  de  Moïse  (6). 
Les  jours  destinés  à  ces  premiers  transports  étant 
écoulés,  ils  quittaient  le  sac  dont  ils  s'étaient  enve- 
loppés, et  se  revêtaient  de  leurs  habits  les  moins 
propres  et  les  plus  déchirés.  Lorsqu'ils  sortaient 


(1)  Psaum.  xvin.  f.  10  et  passim. 

(2)  Prov.  xxvii.  f.  26,  27. 

())  Ruth.  11.  j^.  \).  -  1  Rois  i.f,  15.  16;    xxv.   f.   2?,  et 
alibi  passim. 


(4)  La    plupart    des    commentateurs    prétendent   que 
cette  maladie  était  la  goutte. 

(5)  11  Rois  1.  f.  11,  12;  xn.  jî\    16;  xiii.  f.  ji.-    E^eck. 
xxiv.  f.  16,  17. 

(6)  Lcvit.  xix.  ji'.  28.  -  Deut.  xix.  f.  1. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA   NATION  JUIVE 


» i 


de  leurs  maisons,  ils  se  couvraient  le  visage  de  la 
partie  supérieure  de  leur  manteau,  pour  cacher 
leurs  pleurs,  et  ils  jeûnaient  jusqu'au  coucher  du 
soleil.  Alors  ils  prenaient  quelque  nourriture  sim- 
ple et  peu  propre  à  flatter  le  goût.  Pendant  le 
repas,  ils  gardaient  un  profond  silence,  qu'ils 
n'interrompaient  que  par  leurs  soupirs  ou  leurs 
plaintes  (i).  Quelques-uns  mêmes  se  couchaient 
sur  la  cendre  ou  sur  du  fumier,  et  semblaient  ne 
pouvoir  supporter  la  lumière.  La  durée  de  ce 
deuil  était  plus  ou  moins  longue,  selon  la  gran- 
deur du  sujet  qui  l'avait  causé.  Lorsqu'il  était 
occasionné  par  la  mort  de  quelque  chef  de  la 
nation,  il  durait  un  mois  entier;  tel  fut  celui  qui 
fut  observé  à  la  mort  de  Moïse  et  d'Aaron  (2). 
Mais,  pour  la  mort  d'une  personne  ordinaire  ou 
d'un  proche  parent,  il  était  borné  à  l'espace 
d'environ  une  semaine.  Lorsque  le  pays  était 
affligé  par  une  calamité  publique,  le  peuple  mon- 
tait sur  les  toits  des  maisons,  pour  donner  un  plus 
libre  essor  à  sa  douleur.  Les  paroles  qu'un  pro- 
phète adresse  à  Jérusalem  :  «  A  quoi  te  sert 
maintenant  d'avoir  monté  sur  les  toits  r  (3)  »  et 
cette  terrible  prédiction  que  le  même  prophète 
prononça  contre  les  Moabites  :  «  Chacun  pous- 
sera des  hurlements,  et  fondra  en  larmes  dans  les 
rues  et  sur  les  toits  (4)»,  semblent  faire  allusion 
à  cette  coutume. 

L'appareil  de  leurs  funéraillesofîrait  un  specta- 
cle qui  n'était  pas  moins  lugubre.  Dès  qu'une 
personne  avait  rendu  le  dernier  soupir,  tous  les 
parents,  en  habits  de  deuil,  s'assemblaient  dans 
l'appartement  du  mort.  Ensevelis  dans  un  morne 
silence,  ils  s'asseyaient  à  terre,  tandis  que  des 
pleureuses  qui  étaient  mandées  exprès,  faisaient 
retentir  tout  le  reste  de  la  maison  de  cris  lamen- 
tables, et  du  son  de  quelques  instruments  propres 
à  jeter  dans  l'âme  une  profonde  tristesse.  Ces 
lamentations  duraient  pendant  toute  la  cérémonie 
funèbre,  et  lorsqu'elle  était  achevée,  les  parents 
se  replongeaient  dans  leur  mélancolie  :  ils  man-' 
geaient  couchés  à  terre,  et  ne  parlaient  jamais 
que  pour  répondre  à  ceux  qui  leur  adressaient  la 
parole.  Les  mets  dont  ils  se  servaient  étaient  cen- 
sés impurs,  et  souillaient  les  personnes  qui  en 
touchaient.  Ils  cessaient  de  faire  leurs  lits,  de 
prendre  des  bains,  et  de  se  couper  les  ongles  : 
enfin  ils  se  refusaient  tout  ce  qui  pouvait  leur 
causer  le  plus  léger  plaisir.  Cependant  ils  don- 
naient une  espèce  de  festin  que  les  prophètes 
appellent  la  coupe  de  consolation'^).  Mais  alors  les 


tables  mêmes  n'étaient  couvertes  que  de  plats  de 
bois  ou  d'argile,  et  les  convives  ne  pouvaient  y 
prendre  que  dix  verres  de  vin,  trois  avant  le 
repas,  trois  pendant  le  repas,  et  quatre  après.  On 
avait  dessein  d'empêcher  par  là  qu'une  trop 
grande  quantité  de  cette  liqueur  ne  les  excitât  à 
témoigner  une  joie  indécente,  et  peu  conforme  à 
la  situation  où  ils  se  trouvaient  (6). 

Tandis  que  les  parents  étaient  ainsi  plongés 
dans  la  douleur,  d'autres  personnes  s'occupaient 
à  faire  .tous  les  préparatifs  nécessaires  pour  que 
le  corps  fût  en  état  d'être  mis  dans  un  sépulcre. 
C'était  un  devoir  sacré  et  indispensable  pour  le 
plus  proche  parent,  de  fermer  les  yeux  du  défunt. 
Cette  coutume  tirait  son  origine  de  la  promesse 
qui  fut  faite  par  l'Eternel  au  père  des  douze 
patriarches,  que  son  fils  Joseph  s'acquitterait 
envers  lui  de  ce  devoir  (7).  Si  le  défunt  était  d'un 
rang  distingué,  on  l'embaumait;  s'il  n'était  que 
d'une  condition  obscure,  on  se  contentait  de  le 
laver.  Quelquefois  aussi  on  enveloppait  le  corps 
de  certains  aromates  propres  à  retarder  la  cor- 
ruption, ou  on  les  brûlait  à  côté  du  mort,  dans  la 
salle  où  il  était  placé.  C'est  ainsi  qu'aux  funé- 
railles d'Asa  on  fit  brûler,  en  grande  abondance, 
sur  le  corps  de  ce  monarque,  les  parfums  pré- 
cieux dont  lui-même  avait  fait  remplir  le  lit  de 
parade  sur  lequel  il  fut  exposé  après  son  décès  (8). 
Ce  prince  ne  fut  pas  le  seul  pour  lequel  on 
observa  cette  cérémonie  ;  elle  était  commune  aux 
rois  de  Juda,  et,  par  cette  raison,  elle  fut  promise 
à  Sédécias  (9),  et  refusée  à  Joram  (10).  La  manière 
dont  l^s  Israélites  portaient  leurs  morts  au  sépul- 
cre, est  un  point  sur  lequel  nous  ne  pourrions 
donner  une  décision  certaine.  La  loi  ne  prescrit 
aucune  règle  sur  ce  sujet,  non  plus  que  sur  les 
autres  détails  relatifs  aux  funérailles.  Nous  pou- 
vons cependant  avancer,  comme  une  conjecture 
assez  vraisemblable,  que  la  cérémonie  était  plus 
ou  moins  brillante,  selon  la  richesse  des  person- 
nes qui  en  faisaient  les  dépenses,  et  selon  les 
usages  qui  étaient  observés  alors.  On  n'était  pas 
obligé,  par  la  loi,  d'accompagner  le  corpsjusqu'au 
lieu  de  la  sépulture,  mais  on  le  faisait  toujours 
par  un  motif  de  considération  :  non  seulement  les 
plus  proches  parents,  les  amis,  les  voisins  sui- 
vaient le  convoi  funèbre,  mais  tous  ceux-mêmes 
qui  le  rencontraient  se  joignaient  à  eux.  Les  prê- 
tres seuls  pouvaient  se  dispenser  de  ce  devoir, 
exceptédanslescas  où  lemort  étaitun deleursplus 
proches  parents.  Nous  pouvons  nous  figurer  l'or- 


(1)  11  Rois  1.  f.  17.  et  suiv. 

(2)  Nombr.  xx.  f.  30.  -  Deut.  xxiv.  f.  8. 
(5)  Isaie  xxii.  f.  1. 

(4)  lbid.  xv.  f.  j. 

(5)  E\cch.  xxiv.  f.  17.  -  Jcrém,  xvi.  f.  7. 


(6)  In  Tract.  A  bel.  c.  4. 

(7)  Gen.  xlvi.  f.  4. 

(8)  11  Paralip.  xvi.  f.  14. 

(9)  Jcrém.  xxxiv.  y.  5. 

(10)  11  Paralip.  xxi.  f.  19. 


426 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


dre  qui  était  observé  dans  un  enterrement,  par  la 
description  que  l'Écriture  fait  de  celui  d'Abner, 
un  des  braves  de  David  (1).  Les  serviteurs  du  roi 
ayant  Joab  à  leur  tète,  et  revêtus  de  sacs  et  d'ha- 
bits déchirés,  précédaient  le  cercueil  ;  le  roi 
venait  ensuite  :  il  suivit  ainsi  le  convoi  jusqu'à 
Hébron,  qui  était  le  lieu  de  sépulture.  Lorsqu'on 
y  fut  arrivé,  David  fit  l'éloge  funèbre  du  défunt, 
et  tous  les  assistants  y  répondirent  par  des  pleurs 
et  des  sanglots.  Au  surplus,  il  paraît  que  cette 
cérémonie  se  fit  peu  de  temps  après  la  naissance 
du  jour,  puisque  David,  lorsqu'elle  fut  achevée, 
se  voyant  sollicité  par  ses  serviteurs  de  prendre 
quelque  nourriture,  fit  serment  qu'il  ne  mange- 
rait ni  ne  boirait  qu'après  le  coucher  du  soleil  (2). 
Les  Israélites  éprouvaient  une  si  grande  hor- 
reur à  la  seule  pensée  que  leurs  corps  ou  ceux  de 
leurs  parents  fussent  exposés  aux  injures  de  l'air 
après  leur  mort,  qu'ils  ne  refusaient  la  sépulture 
qu'aux  suicidés  ;  encore  n'était-ce  que  pour  quel- 
ques heures.  Ils  avaient  des  sépulcres  destinés 
aux  étrangers,  et  à  ceux  qui  avaient  été  punis  de 
mort  pour  quelque  crime  capital.  Les  soins 
extraordinaires  que  les  patriarches  s'étaient  don- 
nés pour  procurer  un  sépulcre  à  leurs  descen- 
dants, et  plusieurs  menaces  contenues  dans  les 
Livres  sacrés  à  ce  sujet,  sous  des  expressions  qui 
présentent  des  images  effrayantes,  leur  faisaient 
regarder  le  bonheur  d'être  enterrés  avec  leurs 
ancêtres  comme  une  faveur  du  ciel,  et  la  priva- 
tion de  la  sépulture  comme  la  plus  terrible  malé- 
diction (3).  C'est  pourquoi  ceux  qui  avaient  hérité 
de  leurs  pères  un  sépulcre,  le  conservaient  soi- 
gneusement a  leur  postérité,  et  ceux  qui  n'en 
avaient  point  n'épargnaient  ni  soins  ni  dépenses 
pour  s'en  procurer.  La  loi  n'ayant  rien  statué  sur 
les  lieux  où  ces  sépulcres  devaient  être  bâtis,  il 
leur  était  fort  indifférent  que  ce  fût  un  jardin,  un 
verger,  un  champ,  une  montagne  ou  un  rocher, 
pourvu  que  la  possession  leur  en  fûtassurée.  Il  ne 
parait  pas  que  l'usage  d'inscrire  des  épitaphes  sur 
les  tombeaux  ait  été  pratiqué  parmi  eux  ;  il  est 
vraisemblable  cependant  que  le  sépulcre  de  cha- 
que famille  était  reconnu  par  quelque  marque 
distinctive,  puisque  la  loi  leur  avait  imposé  l'obli- 
gation de  distinguer  les  sépulcres  destinés  à  ceux 
qui  étaient  morts  impurs,  de  peur  qu'on  ne  se  souil- 
lât en  y  passant.  On  peut  aussi  présumer,  avec 
autant  de  vraisemblance,  que  les  sépulcres  des 
personnes  d'un  rang  éminent,  se  discernaient  par 
des    caractères    particuliers.     Ainsi    le   tombeau 


enfermé  sous  cet  autel  de  Béthel,  dont  un  pro- 
phète avait  prédit  la  destruction,  fut  reconnu  trois 
cents  ans  après  par  quelque  inscription  ou  autre 
marque,  lorsque  la  prédiction  dont  il  s'agit  fut 
accomplie  par  Josias  (4).  Les  sépulcres  des  rois 
de  Juda  étaient  placés  dans  le  quartier  de  Jérusa- 
lem, où  le  temple  était  situé  (5).  Le  prophète 
Ézéchiel  semble  insinuer  qu'ils  étaient  taillés 
dans  le  roc,  sous  le  temple  même,  lorsqu'il  dit  : 
La  demeure  de  V Éternel  ne  sera  plus  souillée  par 
les  cadavres  de  leurs  rois  (6).  Tous  les  princes  dont 
nous  parlons  furent  enterrés  dans  le  même 
endroit,  excepté  Manassé  qui  eut  sa  sépulture 
dans  le  jardin  d'Oza,  situé  tout  près  de  son 
palais  (7).  Le  sépulcre  de  David  se  montre  encore 
de  nos  jours,  hors  des  murs  de  Jérusalem  ;  mais, 
selon  toute  apparence,  il  était  placé  ancienne- 
ment dans  l'enceinte  de  cette  ville.  Il  est  incer- 
tain s'il  fut  construit  en  tout  ou  en  partie  par 
David  lui-même,  ou  par  Salomon,  ou  enfin  par 
quelques-uns  de  leurs  successeurs. 

Ce  fut  dans  le  lieu  même  où  était  cette  tombe 
royale,  selon  le  témoignage  de  Josèphe  (7),  que 
Salomon  cachaun immense  trésorqui  ne  futretrou- 
vé,  dit-on,  ou  du  moins  employé  que  par  le  grand 
prêtre  Hircan.  Ce  pontife  en  tira  trois  mille 
talents,  dont  il  envoya  une  partie  à  Antiochus, 
pour  l'engager  à  lever  le  siège  de  Jérusalem.  Le 
même  historien  ajoute  qu'Hérode  y  trouva  aussi 
un  trésor  d'une  grande  richesse,  mais  qu'il  ne  put 
jamais  découvrir  les  ossements  de  David,  qui 
avaient  été  enterrés  trop  profondément  dans  la 
terre  (81.  Les  rois  d'Israël  qui  régnèrent  à  Sama- 
rie  après  la  révolte  de  Jéroboam,  avaient  leurs 
sépulcres  dans  cette  ville.  Ces  derniers  monu- 
ments, selon  toutes  les  apparences,  n'étaient  pas 
aussi  magnifiques  que  ceux  des  rois  de  Juda,  dont 
la  richesse  surpassait  de  beaucoup  celle  des  rois 
d'Israël.  Le  trône  de  ceux-ci  d'ailleurs  n'était 
point  héréditaire,  puisqu'une  même  famille  n'y 
.  régnait  que  trois  ou  quatre  générations.  Les 
tombeaux  des  autres  familles  durent  être  plus  ou 
moins  riches,  à  proportion  de  la  qualité  et  de 
l'opulence  de  leurs  possesseurs.  On  avait  soin 
toujours  de  les  faiie  tailler  dans  le  roc  ;  ce  qui 
pouvait  être  exécuté  sans  beaucoup  de  dépense, 
dans  un  pays  aussi  pierreux  que  la  Judée.  Selon 
les  thalmudistes  (9!,  ces  sépulcres  devaient  avoir 
six  coudées  en  longueur,  quatre  en  largeur  et 
sept  en  hauteur.  Us  fondent  apparemment  ces 
règles  sur  la  forme  des  anciens  tombeaux  bâtis 


(1)  11  Rois  m.  y.  ji  et  suiv. 

(2)  Ibid.  y    j5. 

(?)  Jérém.  vm.  y.  2;xxn.  y.  19.-  Ecclcsiast.  vi.  y.  j  et  al. 
(4)  Comp.  m  Rois  xiu.  f.  l  et  suiv.  et  iv  Rots  xxm.  y.  17. 
(<,)  m  Rois  11.  f.  10;  xi.  y.  4?  et  alib. 


(6)  Chapitre  xliu.  f.  7,  9. 

(7)  iv  Rois  xxi.  f.  18,  2Û. 

(8)  Anliq.  lib.  vu,  c.  12. 

(9)  Tract.  Baba  Baihra,  c.  vi,  f.  2.  V.  Closs.  Barten.  ad 
Tract.  Mohed  Qalon.  c.  1. 


SUR   L'ORGANISATION   DE  LA   NATION  JUIVE 


4^7 


avant  la  captivité.  Huit  petites  niches  (quelques- 
uns  en  mettent  treize)  destinées  à  placer  les  corps 
morts,  étaient  taillées  dans  l'intérieur  du  sépulcre, 
dont  l'entrée  se  fermait  par  une  grande  pierre 
qu'on  appelait  galgal.  On  avait  soin  de  blanchir 
souvent  cette  pierre,  afin  que  les  passagers  pus- 
sent l'apercevoir  de  loin.  La  même  coutume  se 
pratiquait  à  l'égard  des  monuments  érigés  en 
l'honneur  de  quelques  personnages  distingués.  La 
comparaison  que  fait  Jésus-Christ  des  pharisiens 
avec  les  sépulcres  blanchis,  prouve  assez  que,  de 
son  temps,  on  s'appliquait  à  les  décorer  ou  du 
moins  à  en  soigner  l'extérieur  (  1).  Il  existe  encore 
aujourd'hui  certains  monuments  que  l'on  désigne 
sous  les  noms  de  tombeaux  d'Abraham,  de  Ra- 
chel,  d'Absalom,  d'Elisée,  quoique  ce  soit  une 
question  assez  problématique,  s'ils  appartiennent 
réellement  à  ces  personnages.  Mais  si  cette  sup- 
position est  vraie,  comme  on  le  soutient,  quels 
soins  n'a-t-on  pas  prodigués,  et  quelles  dépenses 
n'a-t-il  pas  fallu  faire  pour  les  conserver  pendant 
un  si  grand  nombre  de  siècles  ?  En  général,  on 
peut  dire  que  les  tombeaux  étaient  l'objet  d'au- 
tant de  soins  que  les  maisons. 

Les  maisons  des  Israélites  étaient  sans  sculp- 
ture, fort  peu  élevées,  et  couvertes  d'une  plate- 
forme environnée  de  balustrades,  afin  d'empêcher 
qu'on  pût  tomber.  Les  salles  étaient  sans  che- 
minée et  sans  fenêtre,  ainsi  que  l'exigeait  la 
nature  d'un  climat  où  la  fraîcheur  était  recherchée 
comme  un  des  premiers  agréments  de  la  vie.  On 
n'employait  les  tapisseries  que  pour  s'y  asseoir, 
y  prendre  ses  repas,  ou  y  goûter  les  douceurs  du 
sommeil.  Ils  se  servaient  de  rideaux  faits  d'une 
gaze  très  fine,  pour  se  garantir  seulement  de  la 
piqûre  des  moucherons.  Il  paraît  que  leurs  lits 
étaient  élevés  à  une  hauteur  considérable  de  terre, 
si  nous  en  jugeons  par  le  terme  monter,  dont  ils 
faisaient  usage  lorsqu'ils  voulaient  dire,  aller  se 
coucher  (2).  Les  riches  se  servaient  quelquefois 
délits  d'ivoire;  le  prophète  Amos  ne  manqua  pas 
de  leur  en  faire  de  vifs  reproches  (3).  Ils  les  déco- 
raient de  divers  ornements,  et  les  remplissaient 
de  parfums  précieux:  c'est  ainsi  qu'est  représentée 
la  couche  de  la  femme  impudique  dans  le  livre  des 
Proverbes  (4).  11  est  probable  que  les  femmes 
étrangères  de  Salomon  apportèrent  avec  elles  ce 
luxe,  qui  fut  reçu  et  imité  dans  la  suite,  chez  les 
enfants  de  Jacob,  avec  le  plus  vif  empressement. 
Mais  les  plus  sages  et  les  plus  fervents  préférèrent 
toujours  à  cette  mollesse  voluptueuse,  la  coutume 
de  coucher  sur  la  dure,  comme  plus  convenable  à 
la  chaleur  du  climat,  et  plus  conforme  à  la  sim- 
plicité de  leurs  ancêtres.  Si  nous  pouvons  juger 


du  reste  de  leurs  meubles  par  ceux  que  la  Suna- 
mite  plaça  dans  la  chambre  du  prophète  auquel 
elle  donna  l'hospitalité,  nous  aurons  lieu  de  croire 
qu'ils  ne  donnèrent  dans  aucun  excès  à  cet  égard, 
soit  pour  la  superfluité,  soit  pour  la  richesse.  En 
effet,  on  peut  observer  qu'en  général  nos  livres 
sacrés  parlent  bien  plus  souvent  de  vases  de  bois 
et  de  terre,  que  de  ceux  formés  d'une  autre 
matière  plus  rare  ou  plus  précieuse. 

La  description  que  l'Ecriture  fait  de  la  chambre 
du  prophète  dont  nous  venons  de  parler,  et  de 
son  ameublement,  nous  fournit  encore  deux  remar- 
ques. i°  Il  paraît  que  les  chambres  à  coucher 
étaient  élevées  à  quelque  distance  de  terre, 
puisque  le  mot  qui  les  exprime  emporte  l'idée  de 
monter,  et  répond  à  ce  que  nous  appelons  chambre 
haute.  Peut-être  les  élevait-on  ainsi,  pour  éviter 
les  mauvaises  exhalaisons,  qui  ne  pouvaient 
qu'incommoder  ceux  qui  couchaient  à  terre,  sur- 
tout dans  un  appartement  où  il  n'y  a  aucune 
ouverture.  20  Quoique  les  Juifs  n'eussent  pas 
adopté  la  coutume  que  l'on  observe  aujourd'hui 
de  faire  de  la  nuit  le  jour,  ils  se  servaient  cepen- 
dant d'une  lumière  artificielle;  c'étaient  des  lampes 
à  huile,  qui  avaient  plus  ou  moins  de  branches, 
selon  l'usage  auquel  elles  étaient  destinées.  C'est 
ainsi  que,  dans  les  Proverbes  de  Salomon,  une 
bonne  ménagère  est  représentée  se  levant  avant 
le  jour,  à  la  lueur  obscure  de  sa  lampe,  et  distri- 
buant de  l'ouvrage  à  ses  domestiques. 

La  grandeur  des  maisons,  et  le  nombre  des 
appartements  qu'elles  contenaient,  étaient  vrai- 
semblablement proportionnés  à  l'opulence  des 
familles  et  au  nombre  de  personnes  dont  elles 
étaient  composées.  Les  femmes  avaient  leur 
appartement  particulier,  soit  parce  qu'elles 
vivaient  séparées  du  commercedeshommes, selon 
la  coutume  des  peuples  orientaux,  soit  parce  que 
leurs  infirmités  légales  les  empêchaient,  pendant 
un  certain  temps,  de  communiquer  avec  le  reste 
de  leur  famille  ;  il  était  alors  défendu  à  toute 
personne  de  se  servir  de  leurs  meubles.  Dans  ces 
sortes  de  circonstances,  la  loi  obligeait  toutes  les 
femmes  de  se  conduire  avec  la  plus  grande  cir- 
conspection; les  plus  pauvres  même  ne  pouvaient 
se  dispenser  de  ce  devoir,  malgré  les  embarras 
qu'il  devait  traîner  à  sa  suite.  C'est  pour  cela  prin- 
cipalement, et  pour  plusieurs  autres  raisons  parti- 
culières, qu'elles  avaient,  dans  l'intérieur  de  leur 
maisons,  des  endroits  cachés,  pour  y  prendre  les 
bains.  La  vie  laborieuse  des  Juifs,  aussi  bien  que 
la  grande  chaleur  qui  régnait  dans  leur  pays,  leur 
imposait  la  nécessité  de  se  laver  souvent  ;  mais 
comme  le  bain  sèche  un    peu    trop   la   peau,  ils 


(1)  S.  Matth.  xxin.  %  27. 

(2)  Psaume  cxxxi.  f.  j.  -  iv  Rois  1  f.  16. 


(?)  Chap.vi.  f.  4. 
(4)  Chap.  vu.  f.  16. 


428 


COUP  D'ŒIL   RETROSPECTIF 


s'oignaient  ou  avec  de  l'huile  ou  avec  quelqu'autre 
liqueur,  dont  le  prix  était  proportionné  à  l'éten- 
due de  leurs  moyens.  Il  était  rare  cependant  qu'ils 
n'y  mêlassent  pas  des  parfums. 

Dans  la  vie  sociale,  les  arts  dans  lesquels  les 
Israélites  se  distinguaient  le  plus ,  étaient  la 
guerre,  l'agriculture,  la  poésie  et  la  musique.  Le 
premier  leur  était  en  quelque  sorte  naturel.  Nous 
ne  déciderons  pas  si  Moïse,  conjointement  avec 
la  nation  dont  il  était  le  conducteur,  l'avait  appris 
en  Egypte.  Mais  si  l'on  fait  attention  à  l'ordre 
régulier  des  campements,  des  combats  et  des 
retraites,  exécutés  par  les  Hébreux,  on  sera  forcé 
de  convenir  que  leur  chef  ne  le  cédait  en  habileté 
à  aucun  général  de  son  temps,  et  que  ses  soldats 
entendaient  la  profession  des  armes  aussi  bien 
que  les  peuples  qui  s'y  étaient  acquis  alors  le  plus 
de  célébrité.  Ils  n'employèrent  que  l'espace  de  six 
ans  à  conquérir  les  terres  de  Canaan,  malgré  les 
forces  naturelles  de  ce  pays,  et  les  efforts  réunis 
des  peuples  les  plus  courageux.  Cette  intrépide 
valeur  se  fortifia  encore  dans  la  suite,  par  les 
guerres  continuelles  qu'ils  eurent  à  soutenir 
contre  leurs  voisins,  depuis  le  temps  de  Josué, 
jusqu'au  règne  de  Salomon  :  car,  durant  tout  cet 
espace  de  temps,  le  plus  long  repos  dont  la  Judée 
pût  jouir,  fut  de  quarante  années  (i),  ce  que  les 
Israélites  regardèrent  comme  une  espèce  de  mer- 
veille. Un  auteur  du  siècle  dernier  (2)  assure  que 
les  Juifs  étaient  une  nation  naturellement  guer- 
rière, et  il  le  démontre,  non  seulement  par  les 
exemples  remarquables  de  valeur  consignés  dans 
les  livres  saints,  mais  aussi  par  le  grand  nombre 
de  termes  deguerre  qu'il  a  tirésdesmêmes  livres. 
Nous  renvoyons  les  lecteurs  à  l'ouvrage  même 
de  l'auteur.  Nous  nous  contenterons  d'observer 
que  les  écrivains  dans  lesquels  il  a  puisé  ses 
observations,  n'étaient  conduits  ni  par  un  amour- 
propre  aveugle,  ni  par  une  prévention  ridicule 
pour  leur  pays,  mais  qu'ils  racontaient  les  faits 
dont  ils  avaient  été  les  témoins,  avec  cette  can- 
deur et  cette  simplicité  qui  est  le  caractère  dis- 
tinctif  des  hommes  vraiment  inspirés.  Chaque 
page  des  livres  historiques  retrace  les  actions  glo- 
rieuses des  généraux,  des  juges,  des  princes  et 
des  officiers  qui  étaient  les  premiers  de  l'état. 
Quant  au  peuple  nous  croyons  qu'il  fut  géné- 
ralement instruit  de  la  discipline  militaire  jusqu'au 
règne  de  David  ;  car  nous  ne  lisons  pas  qu'avant 
cette  époque,  on  se  soit  servi  de  troupes  régu- 
lières et  séparées  du  gros  de  la  nation.  Dès  que 
les  chefs  de    la    république    avaient    résolu    une 


guerre  offensive  ou  défensive,  on  en  instruisait 
les  douze  tribus  ;  et  ceux  qui  étaient  en  état  de 
combattre  se  mettaient  en  chemin  pour  venir  au 
rendez-vous  général.  Ils  apportaient  avec  eux 
leurs  armes  et  des  provisions  pour  un  mois.  Lors- 
que tous  étaient  rassemblés,  on  choisissait  le 
nombre  d'hommes  nécessaire  pour  le  besoin  pré- 
sent, et  le  reste  était  renvoyé  (3).  L'expédition 
étant  achevée,  les  soldats  reprenaient  à  l'instant . 
le  chemin  de  leurs  maisons,  ce  qui  arrivait  quel- 
quefois le  jour  même  qu'ils  en  étaient  partis  ;  car 
leur  pays  n'était  pas  d'une  grande  étendue,  et  il 
se  trouvait  souvent  une  très  petite  distance  entre 
eux  et  leurs  ennemis.  Les  plus  longues  marches 
que  leurs  armées  fussent  obligées  de  faire,  étaient 
seulement  de  trois  journées,  et  par  conséquent 
elles  pouvaient  subsister  toujours  avec  une  grande 
facilité.  D'après  ces  observations,  nous  pouvons 
considérer  tout  le  peuple  d'Israël,  comme  un 
corps  de  milice,  composé  de  plusieurs  autres 
petits  corps  employés  tour  à  tour,  pendant  la 
guerre,  à  repousser  les  fréquentes  incursions  des 
ennemis,  et  pendant  la  paix,  appliqués  constam- 
ment aux  travaux  de  l'agriculture.  Ils  avaient  à 
leur  tête  un  général  qui  les  commandait.  Parmi 
ceux  qui  occupèrent  ce  rang,  les  uns  furent  établis 
par  Dieu,  comme  Othoniel,  Gédéon,Samson  (4); 
les  autres  furent  choisis  par  le  peuple,  comme 
Jephté  (5)  ;  quelques-uns  enfin  ne  durent  leur 
élévation  qu'à  la  trahison  et  à  la  cruauté,  comme 
Abimélech  (6).  Ces  généraux,  particulièrement  les 
deux  derniers,  n'étaient  guère  respectés  que  par 
ceux  qui  avaient  contribué  à  leur  élection  :  de  là 
vinrent  les  mécontentements  des  uns  etdes  autres. 
Aussi,  pour  terminer  toute  dispute,  aimèrent-ils 
mieux  confier  les  rênes  du  gouvernement  à  un 
monarque  qui  fût  en  état  de  les  défendre  contre 
leurs  ennemis. 

Leurs  armes  étaient  comme  celles  des  autres 
nations,  offensives  ou  défensives.  De  la  première 
espèce  étaient  les  lances,  les  javelines,  les  frondes, 
les  arcs  et  les  flèches.  Leurs  épées  étaient  petites, 
courbées,  larges  et  fort  pointues;  ils  avaient  cou- 
tume de  les  ceindre  sur  la  cuisse  (7).  Nous  lisons 
aussi  qu'ils  avaient  des  épées  à  deux  tranchants(8). 
Leurs  javelines  paraissent  avoir  été  des  piques 
courtes,  telles  que  Saùl  en  lança  une  contre  David. 
La  fronde  était  une  des  armes  dont  ils  se  servaient 
avec  le  plus  d'adresse,  comme  le  prouve  la  mort 
de  Goliath,  et  ce  qu'un  auteur  sacré  dit  des  habi- 
tants de  Gabaa,  qui  atteignaient  un  cheveu  avec 
la  pierre  lancée  par  une  fronde(9).  Nous  pouvons 


(1)  Juges  v.  y.  52. 

(2)  FoLard,  Dissert,  sur  la  Tactiq.  des  Hébr. 
(?)  1  Rois  Xi.  pass.  XIII.  y.  2  et  alib. 

(4)  Juges  ni,  v  et  vi,  pass. 


(<,)  Ibid.  xi.  y.  6  et  suiv. 

(6)  Ibid.  ix. 

(7)  Exod.  xxxii.  y.  27.  -  Psaume  xliv.  y.  j;  lv.  y.  4. 
(8}  Psaume  cxlix.  y.  6.  —(9)  Juges  xx.  y.  16. 


SUR  L'ORGANISATION  DE   LA  NATION  JUIVE 


429 


ajouter  que,  dans  la  suite,  Osias,  roi  de  Juda, 
employa  à  Jérusalem  des  machines,  d'une  nou- 
velle invention,  par  le  moyen  desquelles  on  lan- 
çait, du  haut  des  tours  et  des  murailles,  des 
flèches  et  des  pierres  énormes  qui  allaient  tomber 
à  une  distance  considérable  (1).  La  coutume  de 
porter  une  épée,  dans  d'autres  temps  que  celui  de 
la  guerre,  n'était  pas  en  usage  chez  les  Israélites, 
même  parmi  les  guerriers  ;  car  l'Écriture  emploie 
souvent  cette  expression  :  Que  chacun  ceigne 
son  épée;  et  nous  lisons  que  David,  tandis  qu'il 
était  fugitif  et  exposé  au  danger  continuel  de 
tomber  sous  la  main  de  son  persécuteur,  adres- 
sait souvent  les  mêmes  paroles  aux  fidèles  com- 
pagnons de  son  infortune  (2).  Saùl  est  le  seul 
guerrier  dont  l'Écriture  remarque  qu'il  avait  tou- 
jours sa  javeline  près  de  lui  (3)  et,  selon  toutes 
les  apparences,  ce  prince  n'usait  de  cette  précau- 
tion que  pour  se  prémunir  contre  le  ressentiment 
de  David,  qu'il  croyait  toujours  prêt  à  l'attaquer. 
Les  armes  défensives  étaient  le  casque,  le  bou- 
clier, la  cuirasse  et  la  cotte  de  mailles.  Les 
jambières  même  étaient  alors  en  usage,  comme 
on  peut  le  voir  dans  rémunération  des  armes  de 
Goliath  (4).  Mais,  selon  toute  apparence,  avant 
le  règne  de  David,  ces  armes  étaient  moins 
employées  par  les  Israélites,  que  par  leurs  voisins; 
car  Débora  dit,  dans  son  cantique,  que  les  qua- 
rante mille  hommes  qui  défirent  l'armée  de  Sisara 
n'avaient  ni  bouclier,  ni  javeline  (5).  Cette  disette 
d'armes  était  un  trait  de  politique  de  la  part  de 
leurs  ennemis,  qui,  lorsqu'ils  pouvaient  les  vaincre, 
non  seulement  les  dépouillaient  de  celles  qu'ils 
avaient  prises,  mais  leur  étaient  les  moyens  d'en 
forger  de  semblables.  C'est  ce  qui  fut  cause,  sans 
doute,  qu'un  jour  où  les  Israélites  livrèrent  un 
combat,  il  ne  se  trouva  ni  épée,  ni  javeline  dans 
l'armée  de  Saùl,  excepté  celles  de  ce  prince  et  de 
son  fils  Jonathas  (6)  ;  mais  elles  devinrent  beau- 
coup plus  communes  sous  les  règnes  de  David 
et  de  Salomon  ;  et,  dans  la  suite,  Osias  en 
put  fournir  suffisamment  à  une  armée  composée 
de  trois  cent  mille  hommes  (7).  La  plupart  de  ces 
armes  étaient  faites  d'airain,  quelquefois  de  fer, 
d'acier  et  d'autres  métaux  (8).  Job  fait  allusion  à 
des  armes  de  fer,  et  des  arcs  d'airain  (9).  Le 
psalmite  fait  aussi  mention  de  cette  dernière 
arme.  11  est  vrai  que,  dans  plusieurs  versions,  on 
trouve,  arcs  d'acier  :  mais  le  texte,  dans  les  deux 


passages  que  nous  venons  de  citer,  est  également 
susceptible  de  deux  sens.  L'Écriture  parle  aussi 
du  bouclier  d'or  et  d'airain.  On  ne  peut  entendre, 
par  ces  mots,  que  les  boucliers  faits  d'un  bois 
léger,  revêtu  de  ces  sortes  de  métaux  ;  car  autre- 
ment ces  armes  eussent  été  un  fardeau  très  incom- 
mode pour  ceux  qui  auraient  voulu  s'en  servir. 
Les  motsdu  prophète  Isaïe(io)  oindre  le  bouclier, 
ont  fait  croire  à  quelques  savants,  que  les  boucliers 
des  Juifs  étaient  couverts  de  cuir  ou  de  peaux 
non  préparées  (11).  Mais  ne  pourrait-on  pas 
admettre  qu'il  était  nécessaire  d*oindre  l'airain 
pour  le  rendre  plus  luisant  ?  Quoi  qu'il  en  soit, 
comme  alors  lescombats  étaient  plutôt  des  escar- 
mouches, que  des  batailles  livrées  avec  ordre,  ils 
s'appliquaient  principalement  à  manier  avec  dexté- 
rité ces  sortes  d'armes,  qui  blessent  à  une  certaine 
distance,  comme  l'arc,  la  fronde  et  la  javeline. 

La  cavalerie,  qui  ne  peut  être  employée  que 
dans  les  pays  froids,  où  il  faut  faire  de  longues 
marches,  était  inutile  dans  la  Judée,  qui  est  située 
sous  un  climat  chaud,  et  dont  le  sol  peu  étendu 
est  couvert  de  montagnes.  Absalon  fut  le  premier 
qui  en  fit  usage, dans  sa  révolte  contre  David  (12)'? 
aussi  ne  put-il  remporter  la  victoire  ;  elle  ne 
rendit  d'autres  services  à  ses  troupes,  que  de 
leur  faciliter  une  fuite  honteuse  et  précipitée  (13). 
Salomon,  il  est  vrai,  fit  venir  d'Egypte  un  nombre 
considérable  de  chevaux  et  de  chars,  mais  ce  fut 
moins  par  un  motif  d'utilité,  que  par  un  principe 
de  vaine  ostentation.  Les  dépenses  qu'il  fallait 
faire  pour  l'entretien  des  chevaux,  excédaient 
tellement  les  services  qu'on  en  pouvait  retirer, 
que  les  successeurs  de  Salomon  préférèrent 
s'adresser  aux  Égyptiens,  pour  en  louer  dans  les 
cas  de  nécessité  :  voilà  pourquoi  le  rabsarés  lança 
contre  Ézéchias  cette  raillerie  mordante  :  J'offre, 
disait-il  au  roi  de  Juda,  de  lui  prêter  deux  mille 
chevaux,  pourvu  qu'il  soit  en  état  de  fournir  un 
pareil  nombre  d'hommes, capables  de  les  monter (4). 
Ce  trait  prouve  évidemment  que  ni  les  chevaux, 
ni  les  chars  n'étaient  pas  fort  recherchés  par  les 
Israélites.  Il  est  certain  cependant,  qu'ils  avaient 
vu  des  chars  en  Egypte,  et  que  les  Cananéens, 
contre  lesquels  ils  livrèrent  tant  de  combats,  se 
mettaient  rarement  en  compagne  sans  en  amener 
un  nombre  considérable  avec  eux.  Le  général 
Sisara  en  avait  neuf  cents  dans  son  armée  (5),  et, 
ce  qui  doit  paraître  bien  plus  étonnant,  les  Philis- 


(1)  11  Paralip.  xxvi.  f.  15. 

(2)  1  Rois  xxv.  f.  ij. 

(3)  Ibid.  xvi.  f.  7;  xvin.  f.  11. 

(4)  1  Rois  xvn.  f.  5  et  suiv. 

(5)  Juges  v.  f.  8. 

(6)  1  Rois  xiii.  f.  19  et  suiv. 

(7)  11  Paralip.  xxvi.  f.  ij,  14. 


(8)  Calm.  Dissert,  sur  la  Milice  dss  Hébreux. 

(9)  Job.  xx.  f.  24. 

(10)  Isaie  xxi.  f.  5.  d'après  l'hébreu. 

(11)  Calm.  et  Folard  ubi  sup. 

(12)  11  Rois  xv.  f.  1, 

(ij)  Ibid.  xviii.  f.  6  et  suiv. 

(14)  iv  Rois  xviu  f.2).  —  (15)  Juges  iv.  f.  j,  ij. 


430 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


tins,  dans  une  bataille  qu'ils  livrèrent  à  Saùl,  en 
employèrent  jusqu'à  trente  mille  (i)  ;  nombre  si 
prodigieux,  qu'on  serait  fondé  à  croire  qu'il  a  dû 
se  glisser  une  faute  dans  le  texte.  Il  est  vrai 
cependant  que  ces  chars  étaient  très  petits  :  car 
ils  ne  pouvaient  contenir  qu'un  ou  deux  hommes 
tout  au  plus,  et  n'étaient  traînés  que  par  deux 
chevaux  (2).  L'Écriture  les  nomme  chariots  de 
fer,  parce  que  les  roues  étaient  années  de  faux, 
composées  de  ce  métal.  Lorsque  les  Israélites 
entrèrent  dans  la  terre  promise,  la  tribu  de  Juda 
employa  plus  de  temps  que  les  autres  à  faire  la 
conquête  des  villes  situées  dans  la  plaine  (3),  parce 
que  les  Cananéens  s'y  servaient  principalement 
de  chars,  qui  étaient  d'un  grand  secours  dans 
un  pays  plat.  Ils  les  mettaient  ordinairement  à  la 
tête  de  leurs  armées,  soit  pour  inspirer  la  terreur 
à  l'ennemi,  soit  pour  rompre  les  rangs  contre 
lesquels  ils  précipitaient  leur  course.  Le  meilleur 
parti  que  l'on  pût  prendre  pour  prévenir  un  effet 
si  terrible,  c'était  ou  de  tuer  les  chevaux  lorsqu'ils 
s'approchaient,  ou  de  leur  ouvrir  un  passage, 
Vraisemblablement  les  Israélites  entendaient  par- 
faitement l'une  et  l'autre  de  ces  ruses,  puisque, 
sans  avoir  recours  aux  machines  de  guerre  dont 
nous  parlons,  ils  remportèrent  des  victoires  si 
nombreuses  et  si  éclatantes  sur  les  peuples  qui 
s'en  étaient  servis  contr'eux. 

Avant  Saùl,  les  Hébreux  n'entretenaient  pas 
d'armée  sur  pied.  Ce  prince  commença  à  établir 
quelques  troupes  réglées  ;  mais  elles  étaient  en 
petite  quantité,  en  comparaison  du  nombre  pro- 
digieux auquel  David  les  porta  dans  la  suite  ;  car 
il  entretint  une  armée  composée  de  plus  de  deux 
cent  mille  hommes(4)  outre  les  Cérélhi  et  les  Phé- 
lélhi.  étrangers  qu'il  avait  aussi  à  sa  solde  ^5). 
Salomon  non  seulement  continua  à  maintenir 
toutes  ces  troupes  dans  le  même  état  où  son  père 
les  lui  avait  laissées,  mais  il  leur  joignit  encore 
une  quantité  considérable  de  chevaux  et  de  chars. 
L'auteur  du  Livre  des  rois  rapporte  que  sa  cava- 
lerie était  composée  de  douze  mille  chevaux,  et 
qu'il  avait  quatre  mille  écuries  pour  ceux  qu'on 
attelait  à  ses  chars  de  guerre,  dont  la  quantité 
était  immense  (6).  L'histoire  de  ses  successeurs 
fait  aussi  mention  d'armées  extrêmement  nom- 
breuses. Ainsi,  dans  le  combat  sanglant  que  se 
livrèrent  Abias,  roi  de  Juda,  et  Jéroboam,  premier 
roi  d'Israël,  l'armée  du  premier  était  composée 


de  quatre  cent  mille  hommes,  et  celle  du  second 
de  huit  cent  mille  (7),  dont  cinq  cent  mille  furent 
taillés  eh  pièces  par  l'armée  de  Juda (8).  De  même 
le  roi  Asa,  successeur  d'Abias,  leva  une  armée 
d'environ  six  cent  mille  combattants,  avec  laquelle 
il  défit  celle  de  Zara,  roi  d'Ethiopie,  qui  montait 
à  un  million  d'hommes  (9).  Mais  la  plus  grande 
armée  dont  l'Ecriture  fasse  mention,  est  celle  que 
Josaphat  entretint  pendant  son  règne;  il  avait  sur 
pied  onze  cent  mille  hommes  d'élite,  sans  com- 
prendre dans  ce  nombre  les  troupes  qui  veillaient 
à  la  garde  des  villes  (10). 

On  ne  trouve  aucun  passage,  dans  l'Écriture, 
qui  puisse  indiquer  la  manière  dont  ils  rangeaient 
de  si  grands  corp^.  en  ordre  de  bataille.  Quelques 
phrases  seulement  paraissent  y  faire  allusion. 
Mais  si  nous  considérons  l'ordre  exact  avec  lequel 
ils  divisaient  leurs  troupes:  i°en  douze  corps, 
selon  le  nombre  des  tribus  :'  20  chacun  de  ces 
corps  en  plusieurs  régiments  composés  de  mille 
hommes  :  30  enfin,  chaque  régiment  en  compa- 
gnies ou  dizaines,  avec  des  officiers  à  la  tête  de 
chaque  division  ;  si  nous  faisons  attention  surtout 
à  la  méthode  admirable  qu'ils  observaient  dans 
leurs  marches  et  leurs  campements,  et  dont  nous 
avons  déjà  parlé  ailleurs,  nous  ne  pourrons  douter 
aucunement  qu'ils  n'exécutassent,  avec  le  même 
ordre,  leurs  attaques,  leurs  évolutions,  leurs  re- 
traites, et  leurs  autres  mouvements  militaires. 
Selon  les  auteurs  juifs,  ils  rangeaient  leur  armée 
sur  une  seule  ligne,  qui  avait  environ  vingt  ou 
trente  hommes  de  profondeur.  Au  front  de  cette 
ligne,  on  plaçait  les  soldats  qui  se  servaient  le 
plus  adroitement  de  l'arc  ou  de  la  fronde.  C'étaient 
ceux-là  ordinairement  qui  commençaient  l'attaque, 
en  jetant  de  grands  cris,  et  en  faisant  pleuvoir  sur 
les  ennemis  une  nuée  de  flèches  et  de  pierres, 
qui  les  mettaient  en  désordre,  et  empêchaient 
l'arrivée  de  leurs  chars.  Souvent  même  ils  tuaient, 
dans  ce  premier  choc,  et  les  chevaux  et  leurs 
conducteurs.  Il  est  assez  probable  que  les  Israé- 
lites commencèrent  à  suivre  cette  méthode  dans 
leurs  combats,  puisqu'elle  fut  celle  de  tous  les 
peuples  de  l'Asie.  David  avait  à  sa  solde  un  nom- 
bre considérable  d'hommes  qui  se  servaient  éga- 
lement bien  de  la  main  droite  et  de  la  main  gauche 
pour  lancer  des  pierres  et  des  flèches.  L'auteur 
sacré  ajoute  qu'ils  avaient  la  force  et  la  fierté  des 
lions,  la  souplesse  et  la  légèreté  des  cerfs  (11). 


(1)  1.  Rois.  xiii.  fr.  5.  —  (2)  SUwch.  in  Veget.  de  re  milit. 

(?)  Juges  1.  f.  16. 

(4;  Le  livre  des  Paralipomènes  dit  qu'il  était  servi  par 
vingt-quatre  mille  hommes  qui  se  relevaient  chaque  mois, 
et  qui  étaient  commandés  par  leurs  officiers  respectifs. 
Or  24,000  multipliés  par  12  font  288,000. 

{))  1.  Paralip.  xvm.  f.  17. 


(6)  iu.  Roisw.  fi.  26.  x.  y.  26. Le  texte  porte  quarante 
mille  :  erreur. 

(7)  11.  Paralip,  xm.  f.  j. 

(8)  Ibid.  f.  17. 

(9)  lbid.  xiv.  fi.  8  et  suiv. 

(10)  Ibid.  xvii.  fi.  14.  et  suiv. 

(11)  Paralip.  xvn.  f.  1  et  suiv. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA   NATION  JUIVE 


45' 


Quant  à  la  manière  de  ranger  la  cavalerie,  lors- 
qu'elle fut  en  usage  chez  les  Israélites,  vraisem- 
blablement ils  suivirent  la  méthode  qu'ils  avaient 
vu  pratiquer  aux  Egyptiens,  qui  étaient  d'excel- 
lents cavaliers  ;  elle  consistait  à  placer  sur  les 
deux  ailes,  des  escadrons  de  six  à  huit  cents 
chevaux  (i).  Mais  soit  qu'ils  eussent  de  la  cava- 
lerie ou  non,  ils  est  certain  qu'ils  ne  redoutaient 
guère  celle  de  l'ennemi  :  pleins  d'un  ferme  cou- 
rage, ils  s'ouvraient  hardiment  un  passage  au 
milieu  d'elle,  et  regardaient  une  pareille  entreprise 
comme  le  moyen  le  plus  infaillible  de  remporter 
la  victoire.  Ainsi  l'on  ne  doit  pas  être  étonné  s'ils 
furent  si  rarement  vaincus  par  leurs  ennemis, 
quoique  ces  derniers  eussent  des  chars  et  des 
chevaux,  et  leur  fussent  souvent  supérieurs  en 
nombre. 

Leur  méthode  d'attaquer  l'ennemi,  en  parta- 
geant l'armée  en  différents  corps,  paraît  aussi 
ancienne  qu'Abraham,  qui  divisa  en  petits  pelo- 
tons ses  trois  cent  dix-huit  domestiques,  et  défit 
à  leur  tète  l'armée  des  quatre  rois  confédérés  (2). 
Abimélech,  dans  la  suite,  employa  avec  succès  le 
même  moyen  contre  les  Sichémites  (3),  et  Saùl 
contre  les  habitants  de  Jabès  (4).  Nous  passerons 
sous  silence  plusieurs  autres  coutumes  militaires, 
qui  leur  étaient  communes  avec  les  autres  na- 
tions, comme  de  marcher  à  l'ennemi,  ou  de  le 
combattre  au  son  des  trompettes,  et  de  haranguer 
les  soldats  avant  que  de  livrer  bataille. 

Leurs  guerres  étaient  ou  ordonnées  par  Dieu, 
comme  celles  qu'ils  firent  aux  Amalécites  et  aux 
sept  nations  de  Canaan,  ou  entreprises  par  leurs 
princes  et  leurs  chefs.  La  loi  de  Moïse  leur  per- 
mettait de  déclarer  la  guerre  à  une  nation,  pourvu 
qu'ils  y  fussent  fondés  par  des  raisons  légitimes. 
Ils  commençaient  par  proposer  certaines  condi- 
tions d'accommodement  à  leurs  ennemis;  si 
ceux-ci  jugeaient  à  propos  de  les  rejeter,  la 
guerre  était  déclarée  (5).  Quand  ils  avaient  pour 
but  de  recouvrer  quelques  terres  envahies,  ils  les 
redemandaient  avant  d'agir  contre  les  usurpateurs. 
S'ils  se  voyaient  eux-mêmes  attaqués  sans  cause, 
ils  envoyaient  un  héraut  à  l'ennemi  pour  lui  faire 
des  reproches,  et  lui  demander  raison  de  sa  con- 
duite (6).  Cependant  ils  ne  laissèrent  pas  que 
de  déclarer  la  guerre  sans  aucun  motif  raison- 
nable, comme  on  en  peut  juger  par  cette  décla- 


ration :  «  Viens,  et  que  nous  nous  voyons  l'un 
l'autre  en  face  (7)  ».  Le  défi  qu'un  roi  d'Assyrie 
fit  à  un  roi  de  Juda,  était  plus  injurieux  encore  : 
«  Ton  argent,  ton  or,  tes  femmes  et  tes  enfants 
sont  à  moi  (8)  ».  Mais  l'Écriture  remarque  que 
le  succès  de  l'un  et  de  l'autre  de  ces  messages 
devint  funeste  à  ceux  qui  le  firent.  Les  rois  hé- 
breux commandaient  toujours  leurs  armées  en 
personne,  et  le  peuple  était  si  accoutumé  à  leur 
présence,  que,  dans  le  dernier  combat  livré  par 
Achab,  ce  prince  ayant  été  mortellement  blessé 
par  les  Syriens,  quelques-uns  de  ses  serviteurs 
furent  obligés  de  le  soutenir  sur  son  char,  afin 
d'empêcher  que  la  nouvelle  de  sa  mort  ne  répan- 
dît le  trouble  et  le  désordre  dans  son  armée.  Ce 
stratagème  trompa  les  soldats  pendant  quelques 
moments  ;  mais  dès  qu'on  aperçut  le  sang  qui 
ruisselait,  on  fit  crier  dans  le  camp,  que  chacun 
s'en  retournât  chez  soi,  quoique  Josaphat,  roi  de 
Juda,  qui  était  allié  d'Achab,  s'y  trouvât  pour 
seconder  les  efforts  de  son  parent  (9).  Au  com- 
mencement de  la  monarchie  des  Juifs,  leurs  rois 
ne  combattaient  qu'à  pied,  comme  avaient  fait  les 
Juges  avant  eux  ;  car  l'Écriture  ne  parle  de  che- 
vaux et  de  chars  que  longtemps  après  ;  et  il  est 
très  probable  que  l'usage  n'en  fut  introduit  parmi 
eux  qu'à  l'occasion  des  alliances  que  les  rois  de 
Juda  et  d'Israël  furent  obligés  de  contracter  avec 
les  Égyptiens,  les  Syriens,  et  d'autres  peuples. 
Ces  dernières  circonstances  leur  imposèrent 
l'obligation  de  paraître  à  la  tète  de  leurs  armées 
avec  une  pompe  égale  à  celle  de  leurs  confédérés. 
Les  officiers  qui  commandaient  sous  eux,  étaient  : 
i°  le  chef  ou  le  général  de  l'armée  (10):  2°  les  chefs 
ou  généraux  de  chaque  tribut  ces  deux  ordres 
formaient  sans  doute,  avec  le  roi,  la  haute  dignité 
du  schalischin  (11):  30  ceux  qui  étaient  préposés 
sur  mille  hommes:  4°  sur  cent  :  50  sur  cinquante  : 
6"  sur  dix  :  70  les  commissaires  qui  faisaient  pas- 
ser les  troupes  en  revue  :  8°  enfin,  les  inspecteurs, 
ou,  selon  d'autres,  les  prévôts  de  l'armée.  Après 
la  campagne,  chacun  rentrait  chez  soi  et  s'adon- 
nait à  ses  travaux  agricoles.  11  ne  restait  dans  les 
rangs  que  ceux  que  les  princes  attachaient  à  leur 
service. 

L'agriculture  faisait  presque  toute  l'occupation 
privée  des  Israélites.  Rien  n'était  plus  propre  à 
les  rendre  parfaitement  heureux,  que  l'entière  ob- 


(i)  Folard.  ubi  sup. 

(2)  Gen.  xiv.  f.  ij  et  suiv, 

(?)  Juges  îx.  f.  J4. 

(4)  1.  Rois,  xi,  f.  11. 

Ci!  Deut.  xx.  f.  18,  et  suiv. 

(6,  Jug.  xi.  f.  12.  et  suiv. 

^7)  iv.  Rois  xiv.  f.  8. 


(8)  m  Rois  xx.  f.  2.  et  suiv. 

(9)  m  Rois  xxn.  f.  J4.  et  suiv. 

(10)  On  appelait  cet  officier  N3JI  ~iW  S(ar  Tsabd,  ôU 
prince  de  l'armée.  C'est  ainsi  qu'Abner  fut  nommé  sous 
Saùl,  Joab  sous  David,  et  Bénaïah  sous  Salomon. 

(11)  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  de  cette  dignité  au 
chapitre  xiv.  f.  7.  de  notre  commentaire  sur  l'Exode. 


432 


COUP    D'ŒIL  RETROSPECTIF 


servation  des  règlements  établis  par  Moïse.  Cha- 
que particulier  était  obligé  de  vivre  de  son  propre 
travail,  sans  luxe  et  sans  ambition  ;  ainsi,  ni  le 
danger  de  tomber  dans  une  extrême  infortune,  ni 
le  désir  d'acquérir  de  grandes  richesses,  ou  de 
parvenir  à  des  postes  éminents,  ne  pouvait  trou- 
bler la  paix  de  leur  âme.  Chacun  cultivait  son 
champ  ou  son  verger,  et  après  avoir  affronté  les 
périls  de  là  guerre,  lorsque  l'occasion  s'en  était 
présentée,  il  s'en  revenait  dans  sa  maison,  où  il 
coulait  des  jours  paisibles  à  l'ombre  de  sa  vigne 
et  de  son  figuier.  Ils  aimaient  ce  genre  de  vie,  et 
le  préféraient  à  tout  autre,  non  seulement  pour  se 
conformer  à  l'exemple  que  leur  en  avaient  donné 
les  anciens  patriarches,  mais  aussi  pour  s'attirer 
les  bénédictions  qui  leur  avaient  été  promises  lors- 
qu'ils seraient  fidèles  à  la  loi.  Dieu  ne  s'était  point 
engagé  à  leur  procurer  de  l'or,  de  l'argent,  des 
pierres  précieuses,  des  maisons  magnifiques,  ni  de 
superbes  ameublements,  mais  des  pluies  bien- 
faisantes dans  la  première  et  la  dernière  saison, 
des  récoltes  abondantes  en  blé,  en  vin  et  en  huile  ; 
de  plus,  des  femmes  et  des  troupeaux  féconds,  et 
enfin,  la  victoire  sur  leurs  ennemis.  L'appât  de 
ces  promesses,  et  la  fertilité  naturelle  du  pays, 
leur  donnèrent  de  si  puissants  encouragements 
pour  l'agriculture,  que  nous  ne  connaissons  aucun 
peuple  qui  s'y  soit  plus  entièrement  et  plus  géné- 
ralement livré  que  les  Israélites.  Aussi  trouvons- 
nous  que  les  mêmes  travaux  occupaient  également 
toutes  les  familles  ;  les  plus  indigents  de  la  tribu 
de  Juda  ensemençaient  les  champs,  battaient  le 
blé,  ou  menaient  paître  leurs  troupeaux  comme 
faisaient  les  plus  riches  de  la  tribu  de  Benjamin. 
Cette  coutume  fut  constamment  observée  jusqu'au 
temps  de  Salomon.  Le  luxe  introduit  dans  l'état 
par  ce  prince,  enfanta  le  commerce  et  les  manu- 
factures. 

Chacun  était  obligé  de  cultiver  la  portion  de 
terre  que  le  sort  avait  assignée  à  ses  ancêtres. 
C'était  son  patrimoine,  qu'il  ne  pouvait  changer 
ni  aliéner,  sans  faire  tort  à  ses  enfants,  et  se  dés- 
honorer lui-môme.  Les  juges  et  les  rois  obser- 
vaient aussi  la  coutume  de  faire  valoir  leurs  ter- 
res ;  ce  qui  les  distinguait  seulement  en  cela  des 
particuliers,  c'est  qu'ils  possédaient  un  plus  grand 
nombre  de  troupeaux,  et  un  pays  plus  étendu. 
Dans   l'énumération    des    richesses    de    David, 


l'Écriture  fait  mention  principalement  de  ses  pâ- 
turages, de  ses  troupeaux  de  bœufs,  de  chameaux, 
de  brebis  et  d'ânes,  de  ses  greniers  à  blé,  de  ses 
celliers  de  vin  et  d'huile  (i).  Salomon  le  surpassa 
encore  en  richesses,  comme  il  le  dit  lui-même  (2)  ; 
et  l'on  doit  d'autant  plus  s'en  rapporter  à  son 
témoignage,  qu'il  est  de  fait  qu'il  entretenait  un 
nombre  infini  de  femmes,  de  concubines  et  de 
serviteurs. 

Si  nous  considérons  le  peu  d'étendue  de  la  Ju- 
dée, et  le  nombre  des  habitants  qu'elle  contenait, 
nous  aurons  peine  à  concevoir  comment  ce  pays, 
qui  devait  se  reposer  tous  les  sept  ans,  quoique 
cultivé  avec  tout  le  soin  et  toute  l'industrie  dont 
les  Juifs  étaient  capables,  pouvait  fournir  à  la 
subsistance  de  tant  de  monde.  Cependant  il  est 
certain  qu'ils  en  retiraient  au-delà  du  nécessaire, 
puisqu'ils  transportaient  à  Tyr  du  froment,  du 
miel  et  de  l'huile,  tant  pour  les  vendre  aux  étran- 
gers qui  s'y  rendaient  de  toutes  parts  (3),  que  pour 
les  céder  à  titre  d'échange  à  Hiram,  dont  ils  four- 
nissaient la  table  (4).  Ils  avaient,  outre  cela,  une 
grande  quantité  de  riz,  d'orge  et  d'autres  grains, 
et  différentes  sortes  d'aliments  en  légumes,  en  ra- 
cines et  en  fruits  ;  du  nombre  de  ceux-ci  étaient 
les  dattes,  les  figues  et  les  grenades.  Leurs  vignes 
mêmes,  qui  étaient  très  nombreuses,  leur  fournis- 
saient une  nourriture  solide  et  une  boisson  agréa- 
ble ;  ils  n'employaient  point  toutes  les  grappes  à 
faire  du  vin  ;  ils  en  faisaient  sécher  une  grande 
partie.  Ajoutons  à  toutes  ces  productions  natu- 
relles du  pays,  la  quantité  de  bétail,  que  non  seu- 
lement ils  nourrissaient  eux-mêmes,  mais  qu'ils 
tiraient  aussi  des  pays  étrangers,  comme  on  peut 
le  voir  par  le  tribut  de  cent  mille  agneaux, et  d'au- 
tant de  moutons  avec  leur  laine  (5)  que  le  roi  de 
Moabpayaà  Achab.  Les  Arabes  fournirent  aussi 
un  grand  nombre  de  troupeaux  de  cette  espèce  à 
Josaphat  (6).  Nous  pouvons  conclure  de  là,  que 
toutes  les  nations  tributaires  des  Juifs  payaient 
leurs  tributs  en  nature,  des  productions  dont  leur 
pays  abondait,  et  qui  pouvaient  servir,  soit  à  la 
nourriture  soit  au  vêtement.  On  doit  se  ressou- 
venir d'ailleurs  que  le  pays  de  Canaan  n'avait  ni 
bois,  ni  parcs,  ni  terres  incultes.  Les  anciens 
Cananéens,  qui  étaient  extrêmement  nombreux 
et  très  resserrés  sur  le  sol  qu'ils  habitaient,  n'en 
laissèrent  aucune  partie  en  friche.  Leurs  maisons 


(1)  1.  Paralip.  xxvn.  te.  suiv.  f.  25. 

(2)  Eccl.  11.  v.  5.  et  suiv. 

L'endroit  de  l'Ecclésiaste,  que  nous  avons  cité,  prouve 
que  les  jardins  et  les  vergers  de  Salomon  renfermaient 
principalement  de  ces  sortes  d'arbres  et  de  plantes  qui 
sont  plus  pour  l'usage  que  pour  l'ornement,  et  qui  de- 
mandent un  soin  particulier.  Aussi  recommande-t-il 
beaucoup  la  diligence  ;  et  dans  presque  tous  les   chapi- 


tres du  livre  des  Proverbes,  il  en  t'ait  l'éloge.  Cependant 
lui-même,  dans  la  suite,  devint  infidèle  h  ces  sages  ma- 
ximes, qui  étaient  fondées  sur  les  lumières  les  plus  rares 
de  la  raison  et  d'une  vraie  politique. 

(jl  Eyéch.  xxvn.  et  xxvm. 

(4)  m  Rois  v.  f.  II. 

(s)  iv  Rois  m.  jr.  4. 

(6)  11  Paralip.  xvn.  jh  11. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA  NATION  JUIVE 


4ÏÎ 


n'étaient  pas  plus  spacieuses  que  ne  l'exigeait 
l'étendue  de  leurs  familles  ;  leurs  jardins,  leurs 
vergers,  leurs  champs  et  leurs  vignes,  contri- 
buaient également  à  leur  subsistance.  Ainsi,  lors- 
que les  Israélites  arrivèrent,  quoiqu'ils  eussent 
oublié  en  grande  partie  l'agriculture  chez  les 
Égyptiens,  où  ils  avaient  eu  d'autres  occupations, 
et  dans  le  désert  où  ils  avaient  passé  quarante  ans 
sous  des  tentes,  voyant  un  pays  si  bien  cultivé  et 
si  bien  entretenu  de  toutes  parts,  ils  furent,  en 
quelque  sorte,  forcés  d'imiter  l'activité  et  l'indus- 
trie des  premiers  habitants. 

Après  tous  les  avantages  dont  nous  venons  de 
parler,  il  n'est  pas  étonnant  que  le  commerce  et 
les  manufactures  fussent  si  peu  en  usage  parmi 
eux  avant  les  temps  de  David  et  de  Salomon.  Ils 
n'y  eurent  recours  que  dans  les  cas  d'une  absolue 
nécessité.  Les  hommes  construisaient  eux-mêmes 
leurs  propres  maisons.  Les  femmes  et  les  domes- 
tiques filaient  et  faisaient  les  habits,  cuisaient  le 
pain,  préparaient  à  manger,  en  un  mot,  faisaient 
l'office  de  tisserands,  de  tailleurs,  de  cordonniers, 
de  boulangers  et  de  cuisiniers.  La  délicatesse  des 
mets,  la  somptuosité  des  meubles,  leur  étaient 
entièrement  inconnues  ;  et  ils  ne  sentirent  la  né- 
cessité du  commerce,  que  quand  ils  éprouvèrent 
les  besoins  du  luxe,  qui  leur  fut  communiqué  par 
les  rois.  Ils  avaient  pu  jusqu'alors  se  passer  faci- 
lement de  manufactures,  portant  toujours  des 
vêtements  de  la  plus  grande  simplicité.  La  matière 
en  était  commune  et  la  forme  sans  art.  Nous 
ne  pourrions  en  donner  une  description  fort 
exacte,  parce  que  les  modèles  de  leurs  différents 
habits  n'ont  pas  passé  à  la  postérité,  comme  ceux 
des  vêtements  des  Grecs  et  des  Romains.  Mais 
en  rassemblant  tout  ce  que  l'Écriture  fournit  sur 
ce  sujet,  nous  en  offrirons  du  moins  des  esquisses. 
Selon  toutes  les  apparences,  ils  portaient  immé- 
diatement sur  la  peau  une  tunique  et  des  cale- 
çons de  toile,  qu'ils  recouvraient  d'un  manteau 
quand  ils  sortaient.  Ils  faisaient  consister  la  beauté 
de  ces  habits  dans  la  finesse  de  l'étoffe,  ou  dans 
la  richesse  de  la  couleur.  Le  jaune  ou  le  bleu, 
le  pourpre  ou  l'écarlate,  étaient  les  plus  précieu- 
ses des  teintures,  et  la  couleur  blanche  était  la 
moins  chère  et  la  plus  ordinaire,  parce  qu'elle 
supporte  plus  aisément  le  blanchissage,  et  que 
cette  qualité  en  avait  fait  recommander  l'usage 
par  Salomon  (i).  La  chaleur  du  climat  exigeait 
que  l'on  changeât  souvent  d'habits.  C'est  de  là 
que  vint  l'habitude  établie  parmi  eux  de  se  faire 
des  présents  de  vêtements  (2)  ;  car  probablement 
chaque  personne  en  avaient   plusieurs  qui   diffé- 


raient en  beauté  en  la  couleur.  Les  plus  beaux, 
sans  doute,  étaient  réservés  pour  les  jours  de 
fêtes  et  les  grandes  solennités.  Les  jeunes  gens 
de  l'un  et  de  l'autre  sexe,  selon  toutes  les  appa- 
rences, portaient  des  robes  rayées  ou  parsemées 
de  fleurs  :  telles  étaient  celles  de  Joseph,  de 
Thamar,  et  de  toutes  les  filles  non  mariées  de 
David  (3).  Les  habits  d'hommes  semblent  n'avoir 
été  distingués  des  autres  que  par  un  seul  orne- 
ment, qui  consistait  en  des  franges  attachées  à  un 
cordon  de  pourpre  qui  formait  le  bord  de  l'étoffe. 
La  loi  leur  ordonnait  de  porter  cette  marque  dis- 
tinctive  pour  leur  rappeler  que  la  félicité  à  la- 
quelle ils  avaient  droit  de  prétendre,  dépendait  de 
leur  soumission  aux  commandements  de  Dieu  '4). 
Nous  ignorons  entièrement  qu'elle  était  la  forme 
de  leur  bonnet,  chapeau  ou  coiffure,  ainsi  que  la 
matière  et  la  forme  de  leurs  bas,  si  toutefois  ils 
en  faisaient  usage.  Leurs  souliers,  ou  plutôt  leurs 
sandales,  étaient  des  semelles  de  bois  ou  de  cuir, 
attachées  à  la  partie  supérieure  du  pied,  par  des 
espèces  de  courroies.  Cette  chaussure  leur  faci- 
litait le  moyen  de  se  laver  les  pieds,  ce  qui  leur 
arrivait  très  fréquemment. 

Les  femmes,  surtout  les  femmes  riches,  met- 
taient dans  leurs  habits  plus  d'art  et  d'ornement 
que  le  commun  de  leur  sexe  :  c'était  le  plus  sou- 
vent en  broderies  qu'elles  travaillaient  elles- 
mêmes.  Elles  portaient  des  joyaux  d'or  et  d'ar- 
gent, qui,  la  plupart,  étaient  venus  d'Egypte,  et 
dont  le  nombre  dut  naturellement  s'augmenter  à 
mesure  que  les  Israélites  étendirent  leurs  con- 
quêtes. Il  est  très  probable  d'ailleurs,  que  Tyr  leur 
fournissait  plusieurs  de  ces  joyaux,  aussi  bien  que 
des  étoffes,  qu'ils  échangeaient  contre  leur  blé, 
leur  baume,  et  les  autres  productions  de  leur 
pays.  Ce  commerce  se  fit,  surtout  après  le  temps 
de  Salomon,  lorsque  l'orgueil  et  le  luxe  furent 
parvenus  à  un  si  haut  point,  que  le  prophète 
Isaïe  employé  un  chapitre  presqu'entier  (<;)  à  faire 
l'énumération  des  magnifiques  ajustements,  dont 
se  paraient  les  femmes  de  son  temps.  Ce  chapitre 
nous  serait  d'une  grande  utilité,  relativement  à 
l'objet  que  nous  traitons,  si  le  texte  en  était  in- 
telligible; mais  il  n'est  presque  pas  possible  de  le 
débrouiller.  La  seule  observation  que  nous  puis- 
sions en  tirer,  c'est  que  les  femmes  juives  pla- 
çaient la  plus  grande  partie  de  leurs  parures  à  la 
tête,  aux  bras  et  aux  pieds,  et  qu'elles  portaient 
à  la  jambe  une  espèce  d'ornement,  qui  rendait 
un  son  agréable  lorsqu'elles  marchaient.  L'Ecri- 
ture remarque  qu'Holopherne  tut  charmé  des 
sandales  de  Judith  (6).    Les  autres  ornements  de 


1(1)  Ecclès.  îx.  jK'  8. 

{7)  Gen.  xlv.  f.  22.-  iv.  Rois  v.  f.  5, 

i(j)  11.  Rois.  xiii.  f.  18. 

S.  B.  —  T.  XII. 


2J. 


(4)  Nomb.  xv.  f.  j8. 

(<)  Cliap.  m.  f.  16.  et  suiv. 

(6)  Judith  xvi.  f.  11. 


28 


434 


COUP   D'ŒIL  RÉTROSPECTIF 


cette  héroïne  pourraient  nous  donner  une  idée 
complète  de  la  parure  des  femmes  Israélites;  mais 
on  soupçonne  qu'il  s'y  trouve  quelque  mélangedes 
ajustements  babyloniens;  aussi  aimons-nous  mieux 
recourir  au  prophète  Ézéchiel,  qui  nous  fournira, 
sur  cet  article,  une  description  plus  claire  et  moins 
suspecte  d'altération.  C'est  à  l'endroit  (i)  où  il 
compare  les  Juifs  à  une  femme  pauvre,  nue  et 
abandonnée  :  Dieu,  dit-il,  ému  de  pitié,  la  revêtit 
de  soie  et  de  fin  lin,  mit  à  ses  pieds  des  sandales, 
des  bracelets  à  ses  bras,  un  collier  à  son  cou,  des 
pendants  à  ses  oreilles,  une  bague  sur  son  front, 
et  une  couronne  sur  sa  tête.  A  ces  divers  orne- 
ments ajoutons  le  voile,  dont  l'Écriture  fait  sou- 
vent mention,  et  qui  était,  dans  un  pays  si  chaud, 
très  nécessaire  aux  femmes,  tant  pour  garantir 
leur  teint  des  ardeurs  du  soleil,  que  pour  obéir  à 
une  loi  de  modestie,  qui  leur  défendait  de  paraître 
en  public  à  visage  découvert.  Ces  voiles  étaient- 
ils  faits  d'une  étoffe  assez  transparente  pourqu'elles 
pussent  voir  à  travers,  et  en  même  temps  faire 
apercevoir,  jusqu'à  un  certain  point,  la  richesse 
de  leurs  ornements  et  l'éclat  de  leur  beauté  ?  C'est 
une  question  sur  laquelle  nous  ne  pouvons  donner 
aucune  réponse  décisive.  Quant  au  luxe  excessif 
que,  par  la  suite,  elles  mirent  dans  leur  parure, 
et  dont  les  prophètes  se  plaignent  dans  plusieurs 
endroits,  il  ne  paraît  pas  qu'elles  s'y  soient  livrées 
a^ant  la  fin  du  règne  de  David. 

Jusqu'à  ce  temps,  les  Juifs  menèrent  constam- 
ment une  vie  laborieuse  et  frugale  ;  et  c'est  de  là 
que  nous  présumons  si  favorablement  de  leur 
valeur,  de  leur  force,  de  leur  légèreté,  et  en  géné- 
ral des  exploitsextraordinaires  que  l'Écriture  attri- 
bue aux  forts  de  David  et  à  ses  troupes.  Mais  ce 
monarque  ayant  amassé  d'immenses  trésors,  et 
voulant  en  consacrer  une  partie  à  Dieu,  en  taisant 
élever  en  son  honneur  un  temple  magnifique,  fut 
obligé  d'introduire  dans  ses  états  un  grand  nom- 
bre d'ouvriers  (2)  en  métaux,  en  bois,  en  pierres, 
comme  des  sculpteurs,  des  maçons,  des  menui- 
siers, des  orfèvres,  des  fondeurs,  etc.  qui,  à  leur 
tour,  en  rendirent  nécessaires  d'autres  dont  ils 
ne  pouvaient  se  passer.  Salomon  exécuta  les  pro- 
jets de  son  père,  et  fit  bâtir  de  superbes  palais. 
La  pompe  et  la  grandeur  qu'offraient  ces  diffé- 
rents édifices,  inspirèrent  à  ses  sujets  le  goût  de 
l'architecture,  et  par  là  augmentèrent  encore  le 
nombre  des  artistes  et  des  artisans.  La  révolte 
des  dix  tribus,  qui  arriva  après  le  règne  florissant 


de  ce  prince,  par  la  nécessité  de  fortifier  Jérusa- 
lem et  plusieurs  autres  villes,  contribua  aussi  à 
les  multiplier.  Il  leur  fallut  construire  des  chariots 
de  guerre,  et  forger  de  nouvelles  armes  ;  et  nous 
trouvons  dans  le  livre  des  Paralipomènes  que  la 
tribu  de  Juda  possédait  une  vallée,  qu'on  nom- 
mait ordinairement  la  vallée  des  Ouvriers,  parce 
qu'elle  n'était  habitée  que  par  des  gens  de  mé- 
tier (3).  On  peut  juger  jusqu'à  quel  point  ils 
s'étaient  augmentés,  par  le  nombre  de  ceux  que 
Nabucodonosor  emmena  de  la  seule  ville  de  Jé- 
rusalem (4)  à  Babylone.  Cependant,  malgré  le 
vif  empressement  que  les  Juifs  témoignèrent 
d'abord  pour  les  arts,  ils  restèrent  toujours  atta- 
chés à  leurs  travaux  champêtres,  et  continuèrent 
à  cultiver  leurs  terres  avec  la  même  vigilance  et 
la  même  activité.  Le  prophète  Ézéchiel,  en  par- 
lant des  objets  dont  les  Juifs  faisaient  commerce 
avec  les  étrangers,  fait  mention  seulement  des 
productions  naturelles  du  pays. Salomon  lui-même, 
qui  donna  une  si  grande  faveur  au  commerce  et  à 
tout  ce  qui  tient  au  luxe,  était  si  éloigné  de  penser 
que  l'agriculture  fut  une  occupation  méprisable, 
que  non  seulement  il  s'y  appliqua  lui-même,  mais 
qu'il  la  recommanda  fortement  à  ses  sujets,  comme 
l'un  des  plus  sûrs  moyens  d'acquérir  des  richesses, 
de  conserver  la  santé,  et  d'obtenir  des  jours  longs, 
paisibles  et  heureux.  On  trouve  ces  vérités  expri- 
mées dans  plus  d'un  endroit  du  livre  des  Prover 
bes.  Nous  pouvons  même  ajouter  que  la  perfec- 
tion de  l'agriculture  fut  un  des  plus  puissants  mo- 
tifs qui  engagèrent  ce  prince  à  favoriser  le  com- 
merce et  la  navigation.  Mais  ces  deux  derniers  arts 
s'élevèrent  et  périrent  en  quelque  sorte  avec  lui. 

Heureux  dans  leurs  héritages,  au  sein  de  leur 
famille,  de  leurs  troupeaux  et  de  leurs  terres,  il 
n'est  pas  surprenant  que  les  Hébreux  se  fussent 
livrés  à  la  poésie  avec  l'ardeur  propre  aux  Orien- 
taux. Tout  le  monde,  plus  ou  moins,  était  poète  ; 
mais  nous  regrettons  de  n'avoir  plus  que  des 
chants  sacrés.  Il  eût  été  intéressant  de  connaître 
ces  romances  populaires  :  La  Biche  de  l'Aurore, 
Colombe  des  chênes  lointains,  Ne  détruis  pas, 
dont  les  premiers  mots  seuls  sont  parvenus  inci- 
demment jusqu'à  nous.  Mais  si  cette  perte  nous 
afflige,  en  compensation,  nous  avons  d'admirables 
spécimens  de  la  poésie  religieuse  dans  ce  qu'elle 
a  de  plus  suave  ou  de  plus  majestueux. 

La  plupart  étaient  inspirés  par  l'Esprit divin,qui 
dictait,  en  quelque   sorte,   leurs   ouvrages,    dont 


(1)  E^éch,  Ch.xvi.  ji\   10.  et  suiv. 

(2,  L'Écriture  dit  en  deux  endroits,  que  SaiOmon  fit 
demander  à  Hiram  des  ouvriers  habiles  dans  l'art  de 
travailler  les  métaux,  le  bois  et  la  pierre,  et  qu'immédia- 
tement après,  il  employa  trente  mille  hommes  à  la  conti- 
nuation de  l'ouvrage.  Il  paraît  par-là,   que   les    hommes 


envoyés  per  Hrem  étaient  dest:nés  principalement  à 
apprendre  aux  ouvriers  de  Salomon  les  différents  arts 
nécessaires  pour  la  construction  de  l'édifice  immense 
que  ce  grand  prince  voulait  consacrer  à  l'Éternel. 

(j)i  Paralip.  îv.  f.  14. 

(4)  tv  Rois.  xxtv.  jr.  14,  16. 


SUR   L'ORGANISATION   DE    LA   NATION  JUIVE 


43^ 


l'objet  principal  était  de  célébrer  la  grandeur  de 
Dieu,  ou  ses  bienfaits.  Il  n'est  donc  pas  étonnant 
que,  non  seulement  leur  saint  législateur,  mais 
aussi  leurs  juges,  leurs  monarques,  leurs  prêtres 
et  leurs  prophètes,  de  l'un  et  de  l'autre  sexe, aient 
composé  des  poèmes  immortels,  où  l'on  trouve 
les  plus  sublimes  idées  sur  la  Divinité.  Tels  sont 
les  deux  inimitables  cantiques  de  Moïse,  ceux  de 
Débora  et  d'Anne,  le  livre  des  Psaumes,  le  Can- 
tique des  Cantiques,  l'action  de  grâce  d'Ézéchias, 
le  livre  de  Job,  une  grande  partie  des  révélations 
d'Isaïe,et  tout  le  livre  des  Lamentations  et  la  plu- 
part des  prophètes.  Quelle  hardiesse  de  figures  ! 
Quelle  sublimité  d'expressions  !  Quelle  beauté 
d'images,  et  quelle  profondeur  de  sentiment  ! 
Ces  qualités  conviennent  à  tous  leurs  poèmes, qui 
présentent  d'ailleurs  d'excellents  préceptes  de 
morale,  et  des  instructions  proportionnées  à  tous 
les  âges  et  à  toutes  les  conditions.  Cependant  ils 
renferment  encore  un  grand  nombre  de  beautés 
que  nous  ne  pouvons  pas  sentir,  parce  que,  par 
un  malheur  commun  à  toutes  les  pièces  d'une 
haute  antiquité,  ils  font  fréquemment  allusion  à 
des  circonstances  ou  à  des  coutumes  qui  nous 
sont  inconnues.  On  y  trouve  aussi  plusieurs  mots 
dont  on  ne  peut  déterminer  le  sens  que  par  con- 
jecture, parce  qu'ils  ne  sont  répétés  dans  aucun 
autre  endroit.  Combien  donc  les  traductions  des 
poésies  sacrées  en  des  langues  modernes, qui  sont 
déjà  si  imparfaites,  doivent  être  au  dessous  de 
l'original,  soit  pour  la  beauté,  soit  pour  l'énergie! 
Nous  ne  pouvons,  pour  ainsi  dire,  qu'apercevoir 
les  tours  et  les  expressions  de  la  langue  sainte, 
parce  que,  d'un  côté,  leur  éclat  nous  éblouit,  et 
que,  de  l'autre,  leur  profondeur  nous  échappe  : 
c'est  ainsi  que  paraît  en  juger  Gildon  :  «  Rien  n'est 
si  doux,  »  dit-il,  «  si  tendre,  si  pathétique,  et  en 
même  temps  si  grand,  si  majestueux  et  si  terrible 
que  la  partie  poétique  de  la  Bible.  Combien  la 
comparaison  avec  les  poèmes  païens  fait  paraître 
ceux-ci  mesquins  et  rampants  !  »  Nous  pouvons 
ajouter  que  rien  n'est  si  vrai  que  ce  jugement  porté 
par  un  homme  exempt  de  tout  scrupule  religieux. 
Mais  si  tous  les  savants  reconnaissent  unani- 
mement la  supériorité  de  l'ancienne  poésie  des 
Hébreux  sur  celle  des  autres  peuples,  ils  ne  s'ac- 
cordent pas  de  même  pour  déterminer  quelle  était 
la  mesure,  la  cadence  et  les  règles  de  cette  poé- 
sie. Plusieurs  auteurs  se  sont  applaudis  d'avoir 
fait  sur  ce  sujet  les  plus  heureuses  découvertes  ; 
mais,  ou  ils  ont  eu  la  prudence  de  les  tenir  secrè- 
tes (i),  ou  s'ils  ont  eu  la  témérité  de  les   mettre 


au  jour,  ils  n'ont  fait  que  donner  occasion  à  quel- 
que sage  antagoniste,  de  démontrer  le  peu  de 
fondement  et  la  vanité  de  leur  présomption  (2). 
En  effet,  tous  ceux  qui  ont  voulu  résoudre  cette 
difficulté,  ont  été  obligés  de  transporter  et  d'al- 
térer l'ordre,  les  mots,  la  ponctuation,  et  quel- 
quefois le  sens  même,  pour  les  ramener  à  leur 
système.  C'est  ce  qu'un  savant  du  xvnc  siècle  a 
osé  faire  dans  une  dissertation  destinée  à  prouver 
que  les  vers  hébraïques  étaient  rimes,  comme  les 
vers  français  et  ceux  de  la  plupart  des  langues 
modernes  (3).  Pour  donner  un  air  de  vérité  à  son 
sentiment,  il  allonge  ou  raccourcit  les  vers  et  les 
syllabes  comme  il  le  juge  à  propos,  et  fait  en 
sorte  que  le  même  son  se  trouve  au  bout  des  li- 
gnes qu'il  a  ainsi  décousues,  sans  y  mettre  d'autre 
proportion.  Mais  par  une  telle  méthode  on  pour 
rait  venir  à  bout  de  mettre  en  rimes,  nous  ne  di- 
sons pas  avec  dom  Calmet  (4),  quelques  haran- 
gues de  Cicéron,  mais  tout  l'Ancien  Testament  ; 
car  dans  les  pièces  de  poésie  dont  nous  parlons, 
non  seulement  la  rime  était  purement  acciden- 
telle, ainsi  que  l'a  observé  le  savant  commenta- 
teur,mais  elle  était  encore  absolument  inévitable, 
ou  il  aurait  fallu  que  les  auteurs  se  fussent  donné 
des  peines  infinies  pour  n'y  pas  tomber. Ceux  qui 
ont  appris  les  éléments  de  la  langue  hébraïque, 
savent  qu'entre  les  terminaisons  des  verbes  et 
même  des  noms  au  pluriel,  et  l'addition  des  pro- 
noms possessifs  à  ces  noms  et  à  ces  verbes,  il  se 
trouve  une  si  grande  ressemblance,  qu'il  serait 
beaucoup  plus  difficile  de  composer  en  cette  lan- 
gue un  poème  non  rimé, qu'un  poëmetouten  rimes. 
Les  règles  de  la  poésie  hébraïque  sont  à  la  fois 
plus  larges  et  plus  compliquées.  La  première  règle 
était  le  parallélisme  des  idées  : 

«  Ma  doctrine  distillera  comme  la  pluie, 
Ma  parole  dégouttera  comme  la  rosée, 

<c  Comme  l'averse  sur  la  verdure, 
Comme  la  giboulée  sur  l'herbe.  » 

L'antithèse  tenait  lieu  de  parallélisme  : 

-c  Les  coups  de  l'ami  sont  fidèles  ; 

Les  baisers  de  l'ennemi  sont  perfides.  » 

«  L'arc  des  forts  est  brisé  ; 

Les  faibles  se  ceignent  de  force.  » 

Quant  à  la  facture  matérielle,  elle  offrait  un 
large  champ  au  génie  des  poètes  hébreux.  Indé- 
pendamment des  strophes  et  des  refrains,  ils  pou- 
vaient diversifier  leurs  poésies  par  la  rime,  l'asso- 
nance, l'allitération,  et  même  l'acrostiche  (5). 


(1)  Fr.  Vatabl.  ap.  Mcrccr.  in  Job  in.  Meibom.  Cf.  Jour- 
nal des  Savants  1699-  et  al. 

{2)'  Coinan.  Lrra,  David.  Th.  Herbert.  Cf.  Capel.  cont. 
Gonum.  Bedfort  contra  le  Clerc. 


(■})  Bibliolh.  univers.  Mai  io38. 
(4)  Comment,  in  Exod.  xv.  et  alib. 
{<,)  Lowlh,  Herder,  Munk,  Vigouroux. 


436 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


La  musique  des  Israélites  ne  nous  est  point 
aussi  connue  que  leur  poésie.  Rien  ne  nous  a  été 
transmis  de  ce  qui  aurait  pu  nous  faire  juger  si 
cet  art  monta  parmi  eux  au  même  degré  de  per- 
fection que  celui-ci.  Nous  ne  pouvons  guère  for- 
mer là-dessus  que  des  conjectures.  Cependant 
s'il  est  permis  d'apprécier  l'un  de  ces  arts  par 
l'autre,  et  si  les  phrases  les  plus  harmonieuses, 
composées  sur  les  plus  sublimes  sujets,  fournis- 
sent au  musicien  des  thèmes  mélodieux,  pourrait- 
on  croire  que  leur  musique  ne  réunit  pas  la  dou- 
ceur, l'élégance  et  une  heureuse  variété,  quoique 
toujours  accompagnée  d'une  gravité  noble  et  ma- 
jestueuse ?  La  musique  et  la  poésie  sont  sœurs,  et 
supposent  à  peu  près  les  mêmes  talents.  Nous 
sommes  bien  éloignés  d'admettre  le  sentiment  de 
certains  auteurs, qui  font  une  description  fort  peu 
avantageuse  des  instruments  de  musique  qui 
étaient  eh  usage  parmi  les  Hébreux.  Nous  nous 
sommes  suffisamment  étendu,  dans  l'introduc- 
tion au  livre  des  Psaumes  sur  chacun  de  ces 
instruments  en  particulier  pour  n'avoir  rien  à  y 
ajouter  ici.  Qu'il  nous  suffise  de  faire  remarquer 
que  l'art  musical  devait  être  assez  avancé, puisque 
nous  trouvons  réunis  les  instrumentsà  ventet  à  per- 
cussion sous  les  formes  de  métal,  bois  et  cordes. 
Si  nous  voulons  même  un  exemple  de  la  beauté 
de  cette  musique,  rappelons-nous  les  effets  qu'elle 
avait  coutume  de  produire  non  seulement  sur 
Saùl  (i),  mais  aussi  sur  tous  les  prophètes  dont 
elle  animait  ou  calmait  les  esprits,  et  qu'elle  ren- 
dait susceptibles  des  inspirations  divines  (2).Nous 
serons  obligés  alors  de  reconnaître  sa  supériorité 
sur  celle  de  tous  les  peuples  anciens,  et  même 
d'avouer  qu'elle  devait  au  moins  égaler  tout  ce  que 
nous  connaissons  de  plus  harmonieux.  En  effet, on 
ne  doit  pas  être  surpris  qu'elle  ait  atteint  un  si 
haut  degré  de  perfection,  si  l'on  considère  que, 
depuis  Moïse,  elle  fut  constamment  employée  par 
les  Juifs,  et  dans  leurs  fêtes  publiques  et  religieu- 
ses, et  dans  leurs  réjouissances  particulières.  Ils 
s'en  servirent  même  dans  les  cérémonies  funèbres; 
ainsi  le  cantique  de  David  sur  la  mort  de  Saùl  et 
de  Jonathas  (})  et  les  lamentations  deJérémiesur 
la  mort  de  Josias,  furent  composés  pour  être  mis 
en  musique.  Combien  ne  dut-elle  pas  se  perfec- 
tionner sous  le  règne  de  David,  qui  était  en  même 
temps  excellent  poète  et  très  bon  musicien?  L'in- 
clination qu'un  souverain  témoigne  pour  un  art, en 
favorise  à  coup  sûr  les  progrès.  Combien  n'en  du- 
rent point  faire  les  quatre  mille  lévites  qui  s'y  ap- 
pliquaient uniquement  sous  la  direction  de  deux 


cent  quatre-vingt-huit  maîtres,  ayant  à  leur  tète 
Asaph,  Héman,  et  Idithun  (4)  ?  La  loi  ayant 
pourvu  à  leur  subsistance,  rien  ne  pouvait  les  em- 
pêcher de  donner  tout  leur  soin  et  toute  leur  at- 
tention à  l'étude  d'un  art  si  agréable.  Au  surplus, 
les  femmes  s'adonnaient  aussi  à  la  musique,  tant 
vocale  qu'instrumentale,  comme  celles  dont  parle 
le  psalmiste.  Ajoutons  que  les  rois  de  Juda  et 
d'Israël  eurent  constamment  à  leurs  cours  des  mu- 
siciens de  l'un  et  de  l'autre  sexe  (<j).  Dans  pres- 
que toutes  les  occasions,  les  Juifs  faisaient  usage 
de  musique;  et  nous  pouvons  affirmer, sans  crainte 
d'être  contredit,  qu'aucun  peuple  ne  témoigna 
pour  elle  autant  de  goût  et  d'attachement.  Au 
sortir  de  la  captivité  de  Babylone,  quoique  la 
tristesse  dans  laquelle  les  Israélites  avaient  été 
plongés  leur  eût  fait  négliger  cet  art,  puisque,  se- 
lon le  psalmiste,  ils  avaient  suspendu  aux  saules 
leursharpes  et  leurs  instruments,  ils  ne  laissèrent 
pas  d'amener  avec  eux  deux  cents  musiciens  de 
l'un  et  de  l'autre  sexe  (6). 

Après  tout  ce  que  nous  venons  de  dire  de  1  an- 
tiquité, de  l'usage  presque  général  et  des  effets 
étonnants  de  la  musique  chez  les  Hébreux,  peut- 
on  s'imaginer  qu'elle  était  si  imparfaite  el  si  gros- 
sière, que  le  principe  unique  sur  lequel  elle  était 
fondée,  consistât  simplement  dans  la  variété  des 
voix  et  des  instruments,  sans  aucune  combinaison 
de  basse  et  de  dessus,  ainsi  que  des  autres  parties 
qui  sont  comme  l'âme  de  la  musique  ?  Le  hasard 
pouvait-il  manquer  de  leur  faire  observer  l'har- 
monie de  certaines  notes  composées  pendant  un 
espace  de  temps  si  considérable  et  dans  un  con- 
cours si  nombreux  de  voix  et  d'instruments  de 
toutes  les  espèces  ?  Les  admirables  effets  de  cette 
musique  pourraient-ils  se  concevoir  et  s'expliquer 
par  le  moyen  de  quelques  tons  simples,  malgré 
toute  la  mélodie  qu'on  veuille  leur  supposer? 
Nous  ne  croyons  pas  qu'il  soit  possible  d'admet- 
tre un  pareil  sentiment. Une  observation  que  nous 
ne  devons  pas  laisser  échapper,  c'est  que  le  style 
de  plusieurs  psaumes  et  les  fréquentes  transitions 
qu'on  y  remarque  de  la  première  à  la  troisième 
personne,  semblent  prouver  que  les  personnes 
qui  chantaient  ces  cantiques,  se  répondaient  en 
chœurs.  Quant  aux  progrès  que  les  Juifs  ont  pu 
faire  dans  la  musique,  à  d'autres  égards,  nous 
sommes  obligé  d'avouer  que  nous  n'avons  aucune 
connaissance  certaine  sur  cet  objet. 

On  tâche  ordinairement  de  décrier  la  musique 
des  Hébreux,  en  objectant  la  rudesse  de  leur 
langue,  qui  abonde   en    consonnes,  en  gutturales 


(1)1  Rois  xvi  y.  2).  Cf.  el  xix.  y.  2j.  et  suiv. 

(2)  iv.  Rois  111.  y.  15. 

{},  11.  Rois.  1,  y.  17.  et  suiv. 


(-1)  11  Pcralip  xxxv.  y.  iç.  et  alibi,  passim. 

{<,)  11  Rois  xix.  y.}<).~Ecclési.  11.  y. 9  -11.  Paralip  xxxvj'.  35. 

(6)  Esd.  11.  y.  65. 


SUR  L'ORGANISATION    DE   LA  NATION  JUIVE 


437 


et  en  monosyllabes,  et  qui,  par  cela  même,  dit- 
on,  n'était  pas  susceptible  des  charmes  de  l'har- 
monie. Si  cette  supposition  était  vraie,  elle  réfu- 
terait tout  ce  que  nous  venons  de  dire.  Mais  nous 
croyons  avoir  suffisamment  démontré  le  contraire 
Nous  pouvons  même  ajouter  que  tout  juge  impar 
tial  peut  se  convaincre,  par  quelques  pièces  hé- 
braïques qui  ont  été  mises  en  musique,  que  cette 
objection  est  entièrement  fausse  et  vient,  ou  du 
peu  d'attention  qu'on  fait  à  une  langue  aussi  an- 
cienne et  aussi  négligée  que  l'hébreu,  ou  de  l'atta- 
chement excessif  de  notre  siècle  à  la  musique 
italienne, telle  qu'elle  est  aujourd'hui.  Il  est  à  noter 
cependant  que  depuis  deux  siècles,  les  Juifs  ont 
composé  des  chefs-d'œuvre  qui  rivalisent  avec  les 
plus  belles  compositions  italiennes  ou  allemandes. 
Quand  il  n'est  pas  dominé  par  la  soif  de  l'or  et  du 
commerce,  le  Juif  possède  des  talents  artistiques 
qu'il  serait  puéril  de  lui  refuser. 

Ce  que  nous  avons  dit  de  la  musique  des  Hé- 
breux, peut  aussi  s'appliquer  à  leurs  danses. 
Celles  qui  avaient  rapport  à  leurs  solennités  reli- 
gieuses,devaient  s'exécuter  sans  doute  avec  beau- 
coup de  gravité  et  s'accorder  avec  la  musique  et 
les  paroles.  Nous  ignorons  absolument  quelles 
étaient  les  règles  observées  dans  ces  danses  ;  si 
elles  avaient  quelque  conformité  avec  les  nôtres, 
ou  si  elles  étaient  simplement  des  danses  en  rond. 
Peut-être  reproduisaient-elles  des  figures  géo- 
métriques convenues  à  l'avance.  Ainsi,  sans  nous 
arrêter  à  faire,  sur  ce  sujet,  de  vaines  recherches, 
nous  passerons  à  un  autre  sujet  sur  lequel  nous 
avons  des  connaissances  plus  certaines. 

Du  langage,  de  l'écriture  el  des  connaissances 
des  Hébreux. 

La  langue  hébraïque  se  parlait  anciennement 
dans  la  Judée,  telle  qu'on  la  trouve  dans  les 
écrits  de  Moïse  et  de  quelques  autres  auteurs 
sacrés.  Plus  tard,  elle  se  corrompit  et  devint  un 
dialecte  araméen  tenant  à  la  fois  du  syriaque  et 
du  chaldaïque  greffés  sur  l'hébreu  primordial. 
L'âge  d'or  de  la  littérature  part  de  David  jusqu'au 
septième  siècle  avant  Jésus-Christ.  Mais  le  règne 
de  Salomon  en  fut  le  point  culminant. 

On  a  beaucoup  décrié  l'hébreu  comme  une  lan- 
gue pauvre.  Ce  reproche  est  vrai  en  grande  par- 
tie, surtout  si  on  le  compare  au  grec.  Les  termes 
scientifiques,  philosophiques  et  psychologiques, 
font  généralement  défaut.  On  ne  pourrait  rendre 
en  hébreu  toutes  nos  idées  modernes.  Mais  à 
l'exception  du  grec,  n'en  est-il  pas  un  peu  de 
même  du  latin  ?  Que  de  mots  la  théologie  a  dû  for- 
muler pour  rendre  les  idées  abstraites.  Et  pour- 
tant des  génies  de  premier  ordre  avaient  parlé 
cette  langue.  Cicéron  et  Sénèque,  pour  ne  citer 
qu'eux,  n'étaient  pas  des  philosophes  sans  intelli- 


gence. Mais  le  latin,  langue  positive,  n'avait  pas  à 
sa  disposition  l'étonnante  variété  de  la  syntaxe 
grecque.  Nous  en  dirons  autant  de  l'hébreu.  La 
langue  suffisait  aux  besoins  civils  et  religieux.  Elle 
exprimait  toutes  les  idées  reçues;  sa  richesse  était 
appropriée  à  son  usage. 

Mais  si  nous  devons  en  juger  par  le  pej  de  li- 
vres hébreux  qui  nous  restent,  et  selon  les  .lumiè- 
res que  nous  avons  acquises  sur  cet  objet,  nous 
affirmerons,  sans  crainte  de  porter  un  jugement 
hasardé,  que  le  génie  en  est  pur,  naturel,  et  con- 
forme à  la  simplicité  primitive  des  anciens  patriar- 
ches. Ses  mots  sont  concis,  énergiques,  et  dérivés 
d'un  petit  nombre  de  racines.  Cette  langue  a, 
dans  ses  verbes,  une  étonnante  fécondité,  qui  naît 
principalement  des  modes  extrêmement  variés  de 
ses  conjugaisons,  dont  plusieurs  expriment  une 
phrase  entière.  Aussi  lorsqu'on  veut  les  traduire 
en  une  autre  langue,  est  on  forcé  nécessairement 
d'employer  des  paraphrases.  Ainsi  par  exemple, 
aimer,  être  aimé,  aimer  avec  ardeur, lire  aimé  avec 
ardeur,  se  faire  aimer  el  s'aimer  soi-même,  sont  ex- 
primés par  le  même  verbe,  avec  quelque  légère 
variation  dans  les  points, ou  tout  au  plusdans  une 
ou  deux  lettres.  De  même  un  verbe,  par  le  chan- 
gement de  conjugaison,  peut  signifier  deux  cho- 
ses directement  opposées  ;  tel  par  exemple,  que 
bénir  et  maudire,  honorer  Ket  déshonorer,  faire  pren- 
dre racine  et  déraciner.  Les  pronoms  et  les  prépo- 
sitions sont  de  simples  lettres,  dont  la  différence 
consiste  en  ce  que  celles  qui  désignent  les  pro- 
noms sont  placées  à  la  fin  des  mots,  et  celles  qui 
marquent  les  prépositions  au  commencement.  La 
grammaire  est  simple,  aisée  et  naturelle.  Les 
noms  ne  varient  jamais,  que  pour  exprimer  le 
genre  et  le  nombre.  On  trouve  la  même  simpli- 
cité dans  tous  les  modes  et  les  temps  des  verbes. 
Les  mots  se  suivent  naturellement  dans  les  phra- 
ses, sans  transposition,  ni  longues  périodes  qui 
suspendent  le  sens,  ou  lui  donnent  de  l'obscurité. 
Ces  différentes  qualités,  que  les  philologues  sa- 
vent si  bien  apprécier,  attestent  que  le  styfe  des 
livres  sacrés  dut  paraître  toujours  net,  clair  et  in- 
telligible, tant  que  la  langue  des  Hébreux  fut  vi- 
vante. Si,  dans  quelques  endroits,  nous  trouvons 
des  passages  difficiles,  c'est  parce  que  nous  ne 
comprenons  pas  un  grand  nombre  de  mots  dont 
nous  sommes  obligés  d'aller  chercher  la  significa- 
tion dans  le  chaldéen,  le  syriaque  ou  l'arabe,  sou- 
vent sans  aucun  succès, parce  que  nous  ignorons  les 
usages  et  les  coutumes  auxquels  plusieurs  de  ces 
passages  font  allusion.  Les  Hébreux  ont  aussi 
dans  leur  langue  des  tours  et  des  expressions  qui 
nous  paraissent  fort  étranges  ;  mais  si  nous  les 
examinons  attentivement,  non  seulement  nous  y 
trouverons  de  la  justesse  et  de  l'exactitude,  mais 
même  de  la  noblesse  et  de  l'élégance.  Telle  est  la 
coutume  de  leurs  historiens,  de  faire  parler,  d'in- 


438 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


troduire  dans  leurs  narrations  les  personnes  dont 
ils  rapportent  les  faits,  comme  on  peut  le  voir  dans 
les  phrases  suivantes  :  El  Dieu  dit  à  Abraham:  Je 
suis  Ion  bouclier  et  ta  grande  récompense  ;  pour 
dire,  Dieu  d'il  à  Abraham  qu'il  était  son  bouclier. 
El  Abraham  dit  :  Oh!  qulsmaël  vive,  au  lieu  de  il 
demanda  qulsmaël  fût  conservé.  Tout  le  monde 
sait  que  ce  langage  est  particulier  à  tous  les  au- 
teurs de  l'Ancien  Testament.  Si  ces  manières  de 
s'exprimer  ne  nous  paraissent  pas  fort  naturelles, 
du  moins  ne  saurait-on  disconvenirqu'elles  ont,  je 
ne  sais  quel  air  de  simplicité  antique  qu'on  ne 
trouve  pas  même  dans  le  chaldéen,  moins  encore 
dans  le  syriaque,  l'arabe  et  les  autres  langues  an- 
ciennes. 

L'écriture  des  Hébreux  est  un  point  qui  a  donné 
matière  à  beaucoup  de  difficultés.  Quoique  leur 
coutume  d'écrire  de  droite  à  gauche  soit  aussi  ai- 
sée et  aussi  naturelle  que  celle  qui  va  de  gauche 
à  droite,  nous  ne  pouvons  pas  nous  dissimuler  que 
leur  écriture  ne  paraisse  difficile  et  embarrassée. 
Les  exégètes  s'accordent  aujourd'hui  à  penser  que 
l'ancien  caractère  était  celui  que  nous  appelons 
aujourd'hui  samaritain.  Au  retour  de  la  captivité, 
Esdras  lui  substitua  l'alphabet  carré  actuel,  beau- 
coup plus  simple,  emprunté  aux  Chaldéens. 

Les  caractères  samaritains,  quoique  conformes 
à  ceux  des  anciens  phéniciens,  seraient  entière- 
ment perdus,  s'ils  n'avaient  été  conservés  dans  le 
Pentateuque  samaritain.  C'est  par  leur  moyen 
qu'on  est  venu  à  bout  de  déchiffrer  non  seulement 
l'inscription  des  sicles  du  temps  des  Macca- 
bées,  mais  aussi  les  légendes  de  quelques  médail- 
les phéniciennes  qui  ont  servi  à  éclaircir  plusieurs 
points  importants  de  l'histoire  ancienne. 

Les  voyelles  des  Hébreux  ont  occasionné  une 
autre  dispute  fameuse  entre  les  savants.  L'objet 
de  cette  dispute  est  de  savoir  si  les  Hébreux 
avaient  des  voyelles,  ou  si  ce  qu'on  appelle  au- 
jourd'hui les  points,  leur  a  été  substitué  ;  et,  dans 
cette  dernière  supposition, si  ces  points  sont  aussi 
anciens  que  Moïse,  ou  s'ils  ont  été  inventés  par 
Esdras  ou  par  les  massorètes.  Nous  n'avons  pas  le 
dessein  d'entrerdansces  immenses  discussions,  ni 
de  rapporter  tout  ce  que  les  philologues  ont  dit  de 
part  et  d'autre  sur  une  matière  si  obscure.  Nous 
tâcherons  seulement  d'exposer  avec  précision  les 
sentiments  adoptés  par  la  plus  grande  partie  des 
auteurs  sur  ces  deux  questions. 

On  est  généralement  d'accord  sur  la  première 
question  ;  et  l'on  ifirme  que  les  Hébreux  avaient 
des  voyelles,  qui  étaient  1'  n  aleph,  le  n  hé,  le  i 
vau,  le  '  iod  et  1'  y  ain,  quoiqu'elles  fussent  de 
temps  en  temps  sous-entendues.  Elles  avaient 
aussi  plusieurs  variations  dans   la  manière  d'être 


prononcées,  et  servaient  quelquefois  de  conson- 
nes comme  autrefois  le  i  (j)  et  le  u  (v).S'il  n'est  pas 
absolument  décidé  que  les  Hébreux  n'eussent  que 
ces  voyelles,  il  est  au  moins  hors  de  doute  que  les 
Samaritains  n'en  admettaient  pas  d'autres,  quoi- 
qu'ils pussent  lire  facilement  le  Pentateuque  hé- 
breu, à  l'aide  de  leur  propre  alphabet.  Nous  pou- 
vons dire  la  même  chose  des  Chaldéens,  des  As- 
syriens et  des  Arabes.  Les  derniers  n'ont  com- 
mencé à  faire  usage  des  points-voyelles  que  plu- 
sieurs siècles  après  Jésus-Christ, et  les  Juifsmême 
ne  les  ont  jamais  employés  dans  leurs  synagogues. 
Ainsi,  malgré  toutes  les  objections  qui  ont  été 
faites,  et  celles  que  l'on  pourrait  faire,  il  paraît 
certain  que  le  texte  hébreu  peut  se  lire  faci- 
lement sans  le  secours  des  points,  qui  n'ont  été 
inventés  que  pour  rendre  cette  langue  plus  in- 
telligible, et  pour  en  conserver  la  vraie  pronon- 
ciation. 

Nous  devons  observer  que  les  mêmes  lettres 
hébraïques,  telles  qu'on  les  voit  aujourd'hui  dans 
les  livres  sacrés,  sont  d'un  caractère,  tantôt  plus 
fin,  tantôt  plus  gros.  Quelques-unes  sont  placées 
au  dessus  de  la  ligne,  d'autres  au  dessous,  quel- 
ques autres  enfin  sont  tournées  d'une  manière  ex- 
traordinaire. Ces  variations  ne  sont  point  des 
tautes  d'impression  ;  car  elles  existaient  plusieurs 
siècles  avant  que  l'imprimerie  fût  inventée, et  nous 
ont  été  religieusement  transmises  par  les  Juifs, 
tant  dans  les  volumes  écrits  à  la  main,  dont  ils  se 
servent  encore  aujourd'hui  dans  leurs  synagogues, 
que  dans  leurs  livres  imprimés.  Ils  prétendent 
qu'elles  ont  été  faites  à  dessein  par  quelque  au- 
teur inspiré,  soit  pour  indiquer  quelque  profond 
mystère,  soit  pour  exprimer  un  sentiment  de  vé- 
nération si  .la  lettre  est  plus  grande,  et  de  mépris 
si  elle  est  plus  petite,soit  enfin  pour  avertir  le  lec- 
teur d'en  lire  les  paroles  avec  plus  d'attention  ; 
mais  tout  cela  est  bien  vague,  aussi  n'en  tient-on 
guère  de  cas  en  dehors  des  recherches  kabba- 
listiques. 

Nous  ajouterons  une  autre  observation.  Les 
auteurs  sacrés  n'ont  jamais  exprimé  les  nombres 
par  des  lettres  numériques,  mais  ils  les  ont  tou- 
jours désignés  par  des  mots.  Ceux  que  l'on  place 
dans  l'alphabet  hébreu,  vis-à-vis  de  chaque  lettre, 
sont  seulement  les  nombres  dont  les  Juifs  se  sont 
servis  de  temps  immémorial.  Il  est  important  de 
faire  cette  remarque,  parce  que  certains  chrono- 
logistes  ont  prétendu  fixer  des  dates,  et  rectifier 
des  époques  par  le  moyen  des  lettres  numériques; 
à  peu  près  comme  quelques  Juifs,  entêtés  de 
leurs  chimères,  ont  voulu  trouver  le  poids  et  la 
mesure  de  certaines  choses  par  le  moyen  de  ces 
mêmes  caractères  (i).  Les  premiers,  par  exemple, 


(i)  Basnag.   Hist.  des  Juifs,  t.   vi.   1.    xix.    c.    8.   20  et      suiv. 


SUR  L'ORGANISATION   DE   LA  NATION  JUIVE 


439 


prétendent  que  la  lettre  qui  signifie  i  ou  iooo,se 
trouve  six  fois  dans  le  premier  vers  de  la  Genèse; 
ce  qui  veut  dire,  selon  eux,  que  le  monde, restera 
six  mille  ans  dans  l'état  où  il  est  aujourd'hui,  et 
qu'ensuite  il  sera  renouvelé  ;  mais  ces  opinions 
chimériques  ne  sont  appuyées  sur  aucune  preuve, 
et  blessent  entièrement  la  vraisemblance. 

La  seconde  question  que  nous  avons  proposée, 
regarde  l'antiquité  et  l'autorité  des  points  dont  il 
s'agit.  Les  Juifs  ont  eu  divers  sentiments  à  ce 
sujet  ;  les  uns  en  ont  attribué  l'invention  à  Moïse, 
et  leur  ont  accordé  la  même  authenticité  qu'au 
reste  du  texte  ;  les  autres  à  Esdras  et  aux  mem- 
bres de  la  Synagogue.  Cette  diversité  d'opinions 
a  subsisté  jusqu'au  temps  où  Élie  (i),  savant  Juif 
allemand,  qui  vivait  à  Rome  vers  le  milieu  du 
seizième  siècle,  démontra  qu'on  n'avait  commencé 
à  s'en  servir  que  depuis  la  compilation  du  thal- 
mud.  Son  livre  lui  suscita  d'abord  une  foule  d'ad- 
versaires, tant  parmi  ses  compatriotes,  que  parmi 
les  chrétiens.  Du  nombre  de  ces  derniers,  furent 
les  deux  Buxtorfs,  qui  produisirent  quelques 
livres  d'une  grande  antiquité,  dans  lesquels  se 
trouvaient  les  points  qui  faisaient  l'objet  de  la 
dispute  ;  ces  deux  auteurs  furent  combattus  par 
Cappelet  quelques  autres  critiques.  Enfin  Morin 
ayant  examiné,  avec  la  plus  grande  attention,  les 
raisonnements  des  deux  partis,  se  déclara  en 
faveur  de  la  première  opinion,  et  composa,  sur  ce 
sujet,  une  savante  dissertation,  à  laquelle  on  n'a 
jamais  rien  pu  répondre  de  solide.  Aussi  l'opinion 
d'Élie  fut-elle  généralement  adoptée  par  les  écri- 
vains des  siècles  suivants.  On  voit,  par  cette  dis- 
sertation, que,  ni  Origène,  ni  saint  Jérôme,  ni  les 
compilateurs  du  thalmud ,  qui,  selon  Morin, 
n'était  pas  encore  achevé  au  commencement  du 
septième  siècle,  ni  enfin  les  rabbins  qui  écrivirent 
durant  le  huitième  et  le  neuvième,  n'avaient  pas  la 
moindre  connaissance  des  pomts  dont  on  parle. 
Selon  Cappel,  on  en  trouve  les  premières  traces 
dans  les  écrits  des  rabbins  Aaron  Ben-Asher 
et  Moïse  Ben-Naphthali,  chefs  de  l'école  orien- 
tale et  occidentale,  c'est-à-dire,  environ  vers  le 
milieu  du  dixième  siècle.  Ainsi  on  peut  faire 
remonter  l'origine  des  points  au  neuvième  siè- 
cle (2).  Munk  pense  qu'ils  ont  commencé  à  être 
usités  au  sixième  siècle  ;  mais  nous  ne  croyons 
pas  que  cette  opinion  puisse  s'appuyer  sur  des 
preuves  assez  solides,  pour  échapper  à  toute-ob- 
jection. 

Ce  fut  dans  le  même  temps  que  ces  rabbins 
s'appliquèrent  à  déterminer  les  endroits  où  devait 


être  placé  un  point  ou  une  virgule,  afin  de  parta- 
ger les  versets  et  les  périodes,  qui,  jusqu'alors, 
avaient  été  confondus,  non  seulement  dans  les 
livres  sacrés,  mais  aussi  dans  tous  les  livres 
hébreux.  Cette  entreprise  fut  certainement  d'une 
grande  utilité,  quoique  peu  d'interprètes  chré- 
tiens se  soient  astreints  à  leurs  divisions.  Pres- 
que toutes  les  versions  s'en  sont  écartées,  lors- 
que la  clarté  du  sens,  la  liaison  des  périodes, 
ou  les  lois  de  l'analogie,  paraissaient  le  demander. 
Il  est  même  fort  probable,  si  l'on  voulait  faire  une 
nouvelle  version  de  l'Ancien  Testament,  que  la 
ponctuation  des  massorètes  serait  changée  en 
beaucoup  plus  d'endroits  qu'elle  ne  l'a  encore  été. 
Il  y  aurait  donc  beaucoup  à  dire  et  sur  les  points- 
voyelles  et  sur  les  points  grammaticaux. Toutefois 
les  peines  qu'ils  se  sont  données,  tant  pour  les 
points-voyelles  que  pour  les  points  grammaticaux, 
méritent  certainement  la  reconnaissance  de  tous 
les  savants  qui  s'appliquent  à  l'étude  de  la  langue 
sainte.  Les  autres  additions  qu'ils  ont  faites, 
quoiqu'elles  supposent  également  un  grand  tra- 
vail, ont  moins  d'utilité.  Ils  ont  inventé,  par 
exemple,  un  grand  nombre  d'autres  points,  dont 
les  uns  avaient  rapport  à  la  musique,  les  autres  à 
la  rhétorique,  d'autres  enfin  à  la  critique.  Par  les 
premiers,  ils  voulaient  fixer  le  ton  et  là  vraie 
cadence  de  la  langue  hébraïque,  et,  par  les  der- 
niers, déterminer  à  leur  manière  le  sens  des  pas- 
sages équivoques.  Ils  ont,  en  outre,  calculé  le 
nombre  des  versets,  et  même  des  lettres  renfer- 
mées dans  chaque  livre,  aussi  bien  que  le  nombre 
de  fois  que  chaque  lettre  s'y  trouve.  Le  but  de 
ce  travail  était  de  prévenir  les  additions  et  les 
omissions  qu'on  aurait  pu  glisser  dans  le  texte  ; 
ce  qui  prouve  que  de  pareilles  altérations  s'y 
étaient  déjà  glissées,  et  qu'ils  n'avaient  peut-êtrepu 
eux-mêmes  éviter  cet  inconvénient,  malgré  la 
scrupuleuse  exactitude  avec  laquelle  ils  faisaient 
ce  travail. 

La  matière  dont  étaient  faites  les  planches  sur 
lesquelles  les  Hébreux  écrivaient,  et  les  instru- 
ments dont  ils  se  servaient  relativement  à  cet 
objet,  nous  sont  connus,  du  moins  en  partie,  par 
certains  passages  de  l'Écriture.  Nous  savons  que 
le  Décalogue  fut  tracé  sur  des  tables  de  pierre. 
Vraisemblablement  Moïse  se  servit  d'une  matière 
moins  pesante  et  moins  embarrassante,  comme, 
par  exemple,  de  bois  de  sitiim,  pour  tracer  ses 
autres  lois.  Cette  méthode  d'écrire  sur  des  tablet- 
tes, était  en  usage,  non  seulement  du  temps 
d'Isaïe  ()),  mais  même  du  temps  de  Jésus-Christ. 


(1)  EU  Lévit.  Prcefat.  j.  in  Masoran  Hammasor. 

(2)  Morin.  Disser/.  Blblic.  Cappell.  Arcan.  Punct.  et 
Diarrib.  Wallon  Prolegemen.  Dupin.  Voff.  Wasmuth  cl  al. 
mult. 

(?)  Isaï.  xxx.  jh  8.  Les  Septante  traduisent  les  paroles 
de  ce  prophète  par  ces  mots,  écris  le  exî  7iuSj'!ou,  sur  une 


table  de  buis.  Ce  qui  prouve  qu'on  se  servait  de  ce  bois 
pour  écrire  avant  leur  temps.  Le  thalmud  de  même  nous 
apprend  que  le  sort  des  deux  boucs  qui  devaient  être  pré- 
sentés au  grand  prêtre  [Lévit  xvi.  f.  8.j  le  jour  de  l'Ex_ 
piation,  devaient  être  tracé  sur  deux  petites  tables  de 
buis. 


440 


COUP  D'ŒIL  RETROSPECTIF 


Les  psaumes,  le    livre    de  Job   et  les  prophètes, 
parlent  aussi    très   souvent    de  certains  rouleaux 
sur  lesquels  les  Juifs  écrivaient,  et    qui  probable- 
ment étaient  faits   de  peaux  ou  de  quelque  autre 
matière  facile  à  plier,  et  propre  éprendre  la  forme 
d'un  rouleau   :   c'est  l'idée   qu'en  donne  l'origi- 
nal fi).   Ce   sentiment   est  conforme  à  l'opinion 
d'Hérodote  et  de  Diodore  de  Sicile  (2),  qui  assu- 
rent que  les  Ioniens  et  les  Perses  se  servaient  de 
peaux  de  boucs  et  de  brebis  pour  tracer  leur  écri- 
ture, plusieurs  années  avant   le    roi  de  Pergame. 
Ce  prince,  par  conséquent,    n'inventa  pas  l'usage 
du  parchemin,  comme    on    l'a  cru  ;    mais  il  ne  fit 
que  le  perfectionner.    Ces    rouleaux  étaient  plus 
ou  moins  longs,    selon  la  grandeur  du  sujet  qu'on 
voulait  traiter,  et  le  caractère  que  l'on  employait. 
Quelques-uns  étaient   formés  de  plusieurs  peaux 
cousues  l'une  à  l'autre.   Les   Juifs    en  ont  encore 
de  semblables  dans  leurs  synagogues.    Les  lignes 
n'étaient  pas  prolongées   jusqu'à   l'extrémité  de 
chaque  peau,   encore  moins   de  tout  le   rouleau, 
mais  elles  étaient  disposées  en  forme  de  colonnes- 
C'est  ce  que  signifie   le    mot  feuilles,   que   l'on 
trouve  dans  un  passage  du  prophète  Jérémie  (3), 
où  le  roi  coupe   en   pièces   le  rouleau,  après  en 
avoir  lu  trois  ou  quatre  pages  (4).   Le  livre  de  la 
loi  que  le  grand  prêtre   trouva  sous  le  règne  de 
Josias  (5),    était  probablement  fait  de  la    même 
nu  tière  et  avait  la  même  forme. 

Par  une  conséquence  naturelle  de  ce  que  nous 
venons  de  dire,  nous  pouvons  supposer  que  les 
Juifs  avaient  deux  sortes  d'instruments  pour  tra- 
cer leurs  caractères  ;  l'un  destiné  à  graver  leurs 
lettres  sur  la  pierre  ou  le  bois  ;  et  l'autre  sur  des 
peaux  d'animaux.  Le  premier,  vraisemblablement, 
était  d'acier  ou  de  quelque  autre  métal  dur. 
L'une  de  ses  extrémités  devait  être  aiguisée,  et 
l'autre  arrondie,  de  manière  cependant  qu'on  pût 
s'en  servir  pour  effacer  ce  qui  avait  été  gravé  si  on 
voulait  le  retoucher.  C'est  de  là  qu'est  venue  la 
phrase  latine  inverlere  slylum.  L'Écriture  parle, 
dans  quelques  endroits,  de  cette  sorte  d'instru- 
ment (6).  Sa  figure  néanmoins  ne  nous  est  connue 
que  par  la  ressemblance  que  nous  lui  supposons 
avec  ceux  des  autres  nations.  Le  second,  qui 
devait  servir  à  tracerdes  caractères  sur  des  peaux, 
nous  est  de  même  absolument  inconnu  relative- 
ment à  sa  forme  ;  et  la  seule  chose  que  nous  trou- 
vions, dans  l'Écriture,  qui   y  ait  rapport,  est  un 


canif  de  secrétaire,  avec  lequel  le  roi  Joachim 
coupa  en  pièces  le  rouleau  qui  lui  avait  été 
envoyé  par  Jérémie. 

Nous  ne  trouvons  dans  aucun  des  livres  sacrés, 
que  les  Juifs  aient  eu  des  écoles  publiques  pour 
l'instruction  de  la  jeunesse,  si  nous  en  exceptons 
les  écoles  des  prophètes,  dont  l'objet  était  diffé- 
rent, ainsi  que  nous  le  dirons  dans  la  suite.  La 
langue  hébraïque  n'a  même  aucun  terme  pour 
exprimer  ce  que  nous  entendons  par  le  mot  de 
collège  ;  mais  il  est  probable  qu'il  y  avait  dans 
chaque  localité  des  lévites  qui  initiaient  les  jeunes 
Hébreux  aux  premiers  rudiments  des  lettres. 
Ceux  qui  ne  pouvaient  pas  assister  à  ces  leçons, 
les  recevaient  dans  leur  famille.  Mais  d'études 
plus  étendues,  il  n'y  en  avait  pas  pour  le  commun 
du  peuple  :  c'étaient  les  prérogatives  des  prêtres 
et  des  lévites.  Cette  particularité  ne  doit  pas  nous 
surprendre,  car  si  nous  considérons  leur  manière 
de  vivre  et  d'élever  leurs  enfants,  nous  verrons 
que  les  écoles  ne  pouvaient  leur  être,  pour  ainsi 
dire,  d'aucune  utilité.  Ils  avaient  coutume  d'oc- 
cuper les  jeunes  garçons  à  des  exercices  cor- 
porels, qui  leur  donnassent  un  tempérament 
robuste  et  vigoureux,  propre  également  à  sou- 
tenir les  fatigues  de  la  guerre  et  les  travaux  de 
l'agriculture.  Mais  ils  laissaient  aux  filles  le  soin 
du  ménage,  et  ne  leur  donnaient  d'autre  connais- 
sance que  celles  de  la  religion  et  de  leurs  lois. 
Les  parents  devaient  s'acquitter  de  ce  dernier 
devoir,  principalement  le  jour  du  sabbat.  Loin  de 
chercher  à  connaître  les  langues  étrangères,  ils 
avaient  pour  elles  une  forte  aversion,  et  celui, 
parmi  eux,  qui  savait  bien  parler  et  bien  écrire  sa 
propre  langue,  aussi  bien  du  moins  que  le  com- 
mun de  ses  compatriotes,  se  croyait  assez  savant. 
La  grammaire  leur  était  inconnue  ;  la  coutume 
leur  servait  de  règles.  Toute  autre  histoire  que 
celle  des  livres  saints,  leur  paraissait  indigne  de 
la  moindre  attention.  En  effet,  ils  trouvaient  dans 
l'Écriture  tout  ce  qu'on  peut  savoir  de  plus  inté- 
ressant, la  création  du  monde,  le  déluge,  l'origine 
et  la  dispersion  des  hommes;  ils  y  voyaient 
d'ailleurs  leur  propre  histoire,  leur  généalogie, 
leur  délivrance  de  la  captivité  d'Egypte, et  tous  les 
prodiges  que  Dieu  avait  opérés  en  leur  faveur  ; 
prodiges  si  nombreux  et  si  éclatants,  qu'on  ne 
doit  pas  être  surpris  que  les  Juifs,  enivrés 
d'àmour-propre,  aient  toujours  affecté  un  orgueil 


(i^  Le  mot  n*îJO  Megilah  est  dérivé  de  Su,  gâlal,  qui 
signifie  plier  un  rouleau,  comme  volumen  vient  de  vobere. 
C'est  dans  le  même  sens  que  les  mots  de  «TÙÇa;  et 
d'ivaTTiô-ja;  sont  employés  par  un  évangéliste  pour  desi- 
gner l'action  d'ouvrir  et  de  fermer  un  livre. 

(2)  Herod,  1.  v.-Diod.  I.  II. 

(;)  Jérem.  xxxvi.  jL  2?. 

(4)  Le  mot  de  l'original  est  mn"n  Dalthotk,  qui  signifie 


proprement  une  porte.  Mais  dans  le  passage  que  nous 
citons,  il  veut  dire  une  page  ou  une  colonne,  parce  que 
ces  deux  choses  ont  beaucoup  de  ressemblance  avec 
une  porte.  Le  feuillet  d'un  livre  a  bien  aussi  la  n  Orne 
ressemblance,  surtout  quand  il  est  entouré  d'un  filet, 
comme  dans  certaines  éditions  de  luxe. 

(<,)  iv  Rois  xxii.  f.  8. 

(0)  Job.  xix.  je.  24. -Psaume  xliv.  jr.  2.  et  alib. 


SUR  L'ORGANISATION   DE  LA  NATION  JUIVE 


44' 


méprisant  envers  les  autres  nations.  Outre  le 
Pentateuque  et  l'histoire  de  Josué,  des  Juges  et 
des  Rois,  que  chaque  Israélite  devait  savoir,  ils 
possédaient  encore  plusieurs  autres  livres  qui  ne 
nous  ont  pas  été  transmis.  Tels  sont  le  Livre  des 
guerres  du  Seigneur,  celui  des  Justes,  et  particu- 
lièrement celui  des  rois  de  Juda,  et  des  Chroni- 
ques des  rois  de  Juda  et  d'Israël  :  le  livre  des 
Paralipomènes  et  celui  des  Rois,  que  nous  avons 
encore,  font  mention  de  ce  dernier  en  plusieurs 
endroits.  Mais  vraisemblablement  ces  ouvrages 
ne  se  trouvaient  pas  entre  les  mains  de  tout  le 
monde,  et  n'étaient  ouverts  qu'aux  rois,  et  à  ceux 
qui,  par  état,  devaient  s'appliquer  à  l'étude  de  la 
politique. 

Tous  les  objets  relatifs  à  la  religion  et  à  la  mo- 
rale, étaient  traités  dans  les  livres  de  Moïse,  et 
en  divers  endroits  des  écrivains  sacrés.  Ainsi  les 
Psaumes,  les  Proverbes,  l'Ecclésiaste,  les  Pro- 
phètes, le  livre  de  Job,  sans  parler  de  plusieurs 
écrits  de  Salomon,  qui  ne  sont  point  parvenus 
jusqu'à  nous,  sont  autant  d'ouvrages  moraux,  qui 
souvent  rappellent  et  expliquent  les  préceptes  du 
Pentateuque.  Les  Juifs  apprenaient,  dès  leur  plus 
tendre  enfance,  ce  que  ces  livres  contenaient  de 
plus  important  ;  et  les  prêtres  ou  les  lévites  leur 
en  faisaient  l'explication  les  jours  de  sabbat.  Les 
peintures  effrayantes  qu'ils  leur  faisaient  de  la 
théologie  païenne,  durent  sans  doute  leur  ôter 
tout  désir  de  la  connaître.  Ce  fut  un  trait  de  la 
prudence  éclairée  de  leur  législateur,  qui  leur 
défendit,  sous  des  peines  sévères,  de  s'instruire, 
en  aucune  manière,  de  la  religion  et  des  sciences 
des  nations  infidèles,  parce  qu'il  savait  parfaite- 
ment bien  à  quels  dangers  une  pareille  connais- 
sance pourrait  exposer  un  peuple  si  facile  à 
séduire,  et  qui  éprouvait  un  penchant  si  vio'ent 
à  la  corruption. 

Cette  défense,  vraisemblablement,  était  la  cause 
principale  de  l'extrême  mépris  qu'ils  témoignaient 
pour  les  sciences  et  les  arts  profanes,  dont  l'élude 
faisait  rejaillir  tant  de  gloire  sur  les  nations  voi- 
sines. Cependant  il  est  probable  que  leurs  négo- 
ciants firent  quelques  progrès  dans  l'arithmétique. 
Quant  à  la  navigation  et  à  l'astronomie,  leur 
histoire  nous  fournit  plus  d'une  preuve  que  ces 
deux  sciences  leur  étaient  absolument  inconnues. 
Les  tribus  qui  habitaient  le  long  des  côtes  de  la 
mer,  se  bornaient  à  faire  le  commerce  avec  les 
marchands  étrangers  qui  venaient  dans  leurs  ports  ; 


mais  elles  ne  songeaient  en  aucune  manière  à 
l'étendre  hors  de  leur  pays.  Aussi  lisons-nous  que 
Salomon  ayant  formé  le  dessein  d'envoyer  quel- 
ques vaisseaux  dans  des  pays  éloignés,  ce  prince 
fut  obligé  de  prendre  à  sa  solde  des  matelots, 
qu'il  fit  venir  des  contrées  voisines  pour  l'aider  de 
leurs  connaissances  astronomiques.  Pour  se  con- 
vaincre de  leur  profonde  ignorance  à  cet  égard, 
il  suffit  de  se  rappeler  ce  que  nous  avons  dit  sur 
les  ridicules  moyens  qu'ils  employaient  pour 
trouver  leurs  nouvelles  lunes.  Au  surplus,  ils 
étaient  si  éloignés  de  connaître  la  nature  d'une 
éclipse,  qu'ils  n'ont  pas  même  de  terme  pour 
l'exprimer.  Peut-être  les  regardaient-ils  comme 
des  effets  miraculeux,  ou  des  signes  de  la  colère 
céleste  (1),  et  par  conséquent  comme  des  objets 
impénétrables  à  l'esprit  humain. 

Leur  manière  de  compter  l'année  solaire  et 
l'année  lunaire,  le  changement  du  mois  de  trente 
jours  en  un  mois  irrégulier,  composé  de  vingt-neuf 
et  trente,  la  distinction  des  sept  jours  de  la  se- 
maine en  premier,  deuxième,  troisième  jour 
depuis  le  sabbat  inclusivement,  la  division  du  jour 
et  de  la  nuit,  non  en  douze  parties  égales,  selon 
la  méthode  vraisemblablement  suivie  par  les 
Egyptiens  longtemps  auparavant,  mais  du  jour  en 
quatre  parties,  et  de  la  nuit  en  quatre  veillées  ; 
toutes  ces  divisions  du  temps  si  opposées  à  celles 
qui  étaient  en  usige  chez  les  Egyptiens  et  chez 
les  nations  voisines,  semblent  prouver  que  le 
législateur  les  avaient  établies  de  cette  manière, 
afin  de  les  empêcher  de  s'appliquer  à  l'étude  de 
l'astronomie,  qui  aurait  pu  les  conduire  à  celle  de 
l'astrologie.  Cette  science,  vaine  et  souvent 
puérile,  était  trop  dangereuse  pour  un  peuple 
naturellement  porté  à  la  superstition.  Nous  igno- 
rons s'ils  se  servaient  des  clepsydres  des  Égyp- 
tiens, des  cadrans  solaires,  ou  de  quelque  autre 
machine  semblable  pour  mesurer  le  temps.  L'écri- 
ture, à  la  vérité,  fait  mention  du  cadran,  ou, 
comme  dit  l'original,  des  degrés  d'Achaz  (2). 
Mais  quand  même  on  supposerait  que  c'était  un 
véritable  cadran,  on  serait  toujours  fondé  à  croire 
que  ce  fut-  plutôt  l'ouvrage  d'un  astronome 
étranger,  qu'une  invention  connue  alors  parmi 
les  Juifs;  car  Achaz, grand  amateur  de  nouveautés, 
ne  se  faisait  aucun  scrupule  d'en  introduire  d'une 
nature  beaucoup  plus  dangereuse  que  celle-ci. 
C'est  ainsi  qu'il  fit  construire  un  autel  sur  le  mo- 
dèle de  celui  de  Damas  (■}).  D'ailleurs,  comme  ils 


f  l)  Selon  toutes  les  apparences  ;  ils  avaient  puisé  cette 
idée  dans  ces  expressions  figurées  de  Job  :  II  couvre  la 
lumière  de  ses  mains,  et  semble  interposer  quelque  chose 
entre  elle  (Job  xxxvi.  f.  j2.)  car  [c'est-là  le  sens  littéral 
du  texte  et  de  la  version  des  Septante.  Ce  passage  a 
beaucoup  de  conformité  avec  la  terrible    description  de 


la  journée  du  Seigneur  dans  le  prophète  Joël,  et  avec  la 
prédiction  de  la  chute  des  Égyptiens,  et  de  quelques 
autres  nations,  annoncée  dans  plusieurs    prophètes. 

(2)  haie,  xxxvin.  j^.  8 

(?)  îv  Rois  xvt.  f.  10.  et  suiv.. 


442 


COUP  D'GEIL   RÉTROSPECTIF 


partageaient  le  jour  en  quatre  parties,  dont  les 
deux  premières  renfermaient  l'espace  de  temps 
qui  s'écoule  depuis  le  lever  du  soleil  jusqu'à  ce 
qu'il  ait  atteint  le  méridien,  et  les  deux  dernières, 
celui  qui  se  passe  depuis  midi  jusqu'à  l'entrée  de 
la  nuit,  il  ne  leur  était  pas  difficile  de  déterminer 
les  autres  divisions  du  temps,  par  des  observa- 
tions faites  sur  l'ombre  des  arbres,  des  maisons, 
ou  même  de  leurs  corps,  comme  font  la  plupart 
des  peuples  nomades.  Ils  pouvaient  se  servir  de 
même  du  mouvement  apparent  des  étoiles,  pour 
faire  la  division  des  quatre  veillées  de  la  nuit. 

11  serait  aussi  inutile  de  vouloir  trouver  chez 
les  Juifs  d'autres  sciences  que  celles  dont  nous 
venons  de  parler,  que  de  faire  les  mêmes  recher- 
ches chez  les  Goths  et  les  Vandales.  Ils  n'eurent 
jamais  d'universités.  Non  seulement  ils  mépri- 
saient également  et  les  sciences  et  les  nations 
qui  les  cultivaient,  mais  ils  les  regardaient  même 
comme  dangereuses  et  ennemies  de  la  loi  de 
Dieu.  Leur  zèle  ou  plutôt  leur  haine  contre  elles, 
loin  de  s'affaiblir  après  le  retour  de  la  captivité 
de  Babylone,  où  ils  avaient  vu  fleurir  les  sciences 
et  les  ans,  semblait  au  contraire  avoir  pris  de 
nouvelles  forces.  Elle  s'accrut  à  un  tel  point, 
que  leur  grande  chronique,  intitulée  Juchasin, 
rapporte  un  anathème  lancé  du  temps  d'Hyrcan 
et  d  Aristobule,  contre  ceux  qui  feraient  appren- 
dre à  leurs  enfants  quelques-unes  des  sciences 
enseignées  par  les  Grecs.  Salomon,  il  est  vrai, 
fut  un  grand  naturaliste  ;  mais  loin  de  recom- 
mander aux  hommes  l'étude  de  la  nature,  il  ap- 
pelle les  recherches  qu'il  avait  faites  à  cet  égard, 
vanité  et  affliction  de  l'esprit.. C'est  peut-être  la 
raison  pour  laquelle  les  Juifs,  peu  tentés  d'imiter 
l'exemple  de  ce  prince,  ont  laissé  dans  l'oubli 
tout  ce  qu'il  avait  écrit  sur  cette  matière.  A  une 
aversion  si  forte  pour  toutes  les  connaissances 
des  nations  étrangères,  ils  joignirent  la  plus  scru- 
puleuse attention  à  leur  dérober  tout  ce  qu'ils 
savaient  eux-mêmes,  et  particulièrement  à  ce  que 
les  livres  sacrés  ne  pussent  jamais  tomber  entre 
leurs  mains.  Ils  témoignèrent  la  plus  grande 
affliction  lorsque  Ptolomée  eut  obtenu  une  version 
de  ces  livres  en  grec  ;  et,  en  mémoire  de  cet  évé- 
nement, qu'ils  regardèrent  comme  un  grand  mal- 
heur, ils  établirent  le  huitième  et  le  neuvième  jour 
du  mois  de  Tébeth  ou  décembre,  un  jeûne  so- 
lennel, qui,  dans  la  suite,  devait  être  observé  tous 
les  ans. 


La  principale, ou  plutôt  l'unique  étude  desJuils, 
était  donc  l'écriture  sainte.  Ils  s'y  appliquaient, 
dès  leur  enfance,  avec  le  plus  grand  soin.  Nous 
ignorons  s'ils  avaient  des  synagogues  avant  la 
captivité,  quoique  cela  nous  paraisse  assez  pro- 
bable, quand  on  considère  l'éloignement  où  plu- 
sieurs étaient  du  temple  auquel  ils  ne  devaient  se 
rendre  tout  au  plus  que  trois  fois  par  an.  Mais  il 
est  certain  qu'ils  avaient  d'autres  endroits  consa- 
crés à  la  prière  et  à  l'instruction,  particulière- 
ment les  écoles  des  prophètes,  où  ils  pouvaient 
s'assembler  les  jours  de  fêtes,  de  nouvelle  lune  et 
de  sabbat  (i).  Nous  n'entendons  pas  seulement 
ici  par  prophètes,  ceux  que  l'on  désigne  sous  ce 
nom,  ces  hommes  doués  du  don  de  prophétie, 
mais  leurs  disciples,  ou,  dans  le  style  hébraïque, 
les  fils  des  prophètes.  Les  premiers  élevaient  eux- 
mêmes  leurs  disciples,  et  les  rendaient  propres  à 
enseigner  le  culte  de  la  Divinité  et  la  pratique  de 
la  vertu.  Ils  étaient  presque  toujours  consultés 
par  les  rois,  les  prêtres  et  les  anciens  du  peuple, 
soit  sur  les  devoirs  de  la  religion,  soit  sur  les 
affaires  de  l'état  (2). 

Les  enfants  des  prophètes  demeuraient  ordi- 
nairement à  la  campagne;  ils  formaient  entre  eux 
une  espèce  de  société,  et  avaient  pour  chefs  un 
ou  plusieurs  prophètes,  auxquels  ils  donnaient  le 
nom  de  père  {}).  Leurs  maisons  étaient  très  sim- 
ples :  ils  avaient  coutume  de  les  construire  eux- 
mêmes  (4),  Leur  nourriture  était  toujours  un  po- 
tage fait  aux  herbes  (5),  excepté  lorsque  le  peuple 
leur  envoyait  des  mets  plus  délicats,  comme  du 
pain,  des  gâteaux,  du  miel  ou  des  fruits  secs  (6). 
Ils  ne  se  revêtaient  que  d'habits  grossiers,  qu'ils 
serraient  autour  de  leur  corps  avec  une  ceinture 
de  cuir  (7).  Ayant  peu  de  besoins  à  satisfaire,  ils 
pouvaient  facilement  y  suppléer  par  leur  travail, 
et  consacrer  le  reste  du  temps  à  l'étude  et  à  la 
prière.  Ils  préféraient  leur  état  de  pauvreté  au 
vain  éclat  des  richesses.  Ainsi  le  prophète  Elisée, 
non  seulement  refusa  d'accepter  les  présents  de 
Naaman,  mais  encore  il  fit  une  sévère  réprimande 
à  son  serviteur  Giézi,  pour  en  avoir  reçu  secrète- 
ment une  partie  (8).  Cette  vie  retirée,  sobre  et 
laborieuse,  et  surtout  la  simplicité  de  leurs  habits, 
leur  donnaient  quelquefois  un  air  d'insensés  aux 
yeux  des  enfants,  et  de  quelques  hommes  habi- 
bitués  à  la  mollesse  de  la  cour  (9).  La  liberté  ex- 
traordinaire avec  laquelle  ils  reprenaient  les  mau- 
vaises actions  des  souverains,  les  exposait  souvent 


(  1)  iv  Rois  IV.  f.  2J. 

(2)  m  Rois  xxii.  f.  5,  7. -iv.  Rois  xix.  y.  2,    20   et   suiv.- 
Jcrem.  xxvii.  f.  j.  et  suiv.  -  Esdras  v.  f.  1  et  suiv.  et  alib 
(j)  1  Rois.  x.  y.  12.  -  iv  Rois  xiii.  y.  14.  et  suiv. 
(4)  lbid.  vi.  y.  2.  j.  et  4. 


(5)  iv.  Rois.  iv.  y.  ;8  et  suiv. 

(6>  111  Rois  xiv.  y.  j.  et  suiv.  -  iv  Rois  iv. 

(7)  Zach.   xiii.  y.  4.  -  iv.  Rois.  1.  y.  8. 

(8j  iv  Rois  îv.  pass. 

(9)  lbid.  11.  f,  2_j;  ix.  10. 


y-  42- 


SUR  L'ORGANISATION   DE  LA  NATION  JUIVE 


443 


aux  persécutions,  et  quelquefois  même  à  la  mort: 
c'est  ce  qui  arriva  principalement  sous  les  règnes 
de  quelques  princes  méchants,  tels  qu'Achab  et 
Manassé.  Mais  la  plus  sage  partie  de  la  nation 
leur  témoignait  toujours  beaucoup  de  respect,  et 
les  regardait  comme  des  hommes  dignes  de  la 
plus  haute  considération  (i). 

Telles  sont  les  particularités  que  l'Écriture  nous 
apprend  touchant  ces  communautés  religieuses, 
et  leur  manière  de  vivre.  Quelques  auteurs  sont 
entrés  dans  de  plus  grands  détails  sur  ce  sujet, 
et  prétendent  que  les  fils  des  prophètes  faisaient 
vœu  de  chasteté,  de  pauvreté  et  d'obéissance  (2); 
mais  ils  seraient  fort  embarrassés  de  donner  des 
preuves  convaincantes  de  ce  qu'ils  avancent.  Nous 
ne  lisons  pas,  il  est  vrai,  qu'ils  aient  eu  des  fem- 
mes parmi  eux  ;  quelques-uns,  au  contraire,  s'in- 
terdisaient môme  de  les  voir.  Ainsi  lorsque  la 
Sunamite  vint  annoncer  la  mort  de  son  fils  à  Eli- 
sée, il  envoya  vers  elle  son  serviteur  Giézi,  au 
lieu  d'y  aller  lui-même.  Mais  il  n'est  pas  moins 
certain  que  plusieurs  prophètes  furent  mariés,  et 
eurent  des  enfants,  comme  Samuel,  Isaïe.  dont  la 
femme  est  appelée  la  prophétesse  (5  ),  Ezéchiel  (4) 
et  Osée  (<,).  Ce  fut  à  la  veuve  d'un  des  fils  des 
prophètes,  qu'Elie  augmenta  miraculeusement 
l'huile,  pour  empêcher  que  les  enfants  de  cette 
veuve  fussent  vendus  aux  créanciers  de  son  mari 
délunt  (A).  Les  prophétesses  se  mariaient  aussi, 
puisque  Débora  fut  la  femme  de  Lapidoth  (7),  et 
Holda,  que  le  roi  Josias  alla  consulter,  fut  celle 
de  Sallum.  Tant  que  ces  personnages  inspirés 
instruisirent  la  Judée, comme  ils  avaient  toutesles 
qualités     né<  essaires    pour    expliquer    la  loi    de 


Moïse,  ils  furent  toujours  un  ferme  rempart  con- 
tre l'hérésie.  Mais  dès  que  le  don  de  prophétie 
cessa  de  se  manifester, les  Juifs  se  partagèrent  en 
diverses  sectes,  et  se  permirent  tant  d'opinions 
nouvelles,  que,  de  l'aveu  des  thalmudistes,  Élie 
même  n'aurait  pas  été  capable  de  répondre  à 
toutes  les  difficultés  qu'ils  élevèrent  les  uns  et 
les  autres  sur  les  points  fondamentaux  de  leur 
religion  (8). 

Les  thalmudistes  comptent,  depuis  Abraham 
jusqu'à  Malachie,  quarante-huit  prophètes  et  dix 
prophétesses.  Plusieurs  des  premiers  ne  nous  sont 
connus  que  par  leurs  noms.  Seize  d'entre  eux  ont 
laissé  des  livres  de  prophéties.  Observons  encore 
ici,  que  Dieu  se  manifestait  à  eux  de  plusieurs 
manières.  Il  apparaissait  aux  uns  sous  quelque 
forme  visible,  comme  à  Abraham  et  à  Moïse, 
adressait  simplement  la  parole  à  d'autres,  comme 
à  Samuel,  à  Jérémie  et  à  Osée  (9).  Quelquefois  il 
leur  apparaissait  dans  des  visions,  comme  aux 
trois  grands  prophètes,  Isaïe,  Ezéchiel  et  Da- 
niel, et  d'autres  fois  par  des  songes,  mais  presque 
toujours  en  agissant  d'une  manière  immédiate  sur 
l'âme  des  prophètes  (  10).  C'est  ainsi  que  les  auteurs 
des  livres  des  Psaumes,  Moïse,  David,  Salomon, 
les  trois  fils  de  Coré,  Asaph,  et  plusieurs  autres, 
durent  sentir  ses  divines  impressions  lorsqu'ils 
composèrent  leurs  admirables  cantiques  (11). 

Voilà  ce  que  fut  le  peuple  juif  dans  sa  vie  so- 
ciale et  religieuse.  L'avènement  du  Messie  devait 
lui  procurer  une  gloire  et  des  prérogatives  immen- 
ses; mais  il  le  méconnut,  et  tomba,  par  son  aveu- 
glement, au  dernier  degré  de  l'infortune.  C'est  ce 
que  nous  verrons  dans  le  Nouveau  Testament. 


'1)  m  Rois  xvm.  j^.  7  et  suiv.  -  îv.  Rois  1.  j^.  ij  ;  xiu. 
f.  14.  et  alib. 

(2)  Int.  al.  Boulduc.  Eccl.  ant.  leg.  Calm.  sub  voce  Pro- 
phètes. 

(j)  /sot  vm.  jr.  ;. 

;4)  Ezéchiel  xxiv.  f.  18. 

15)  Osée  1.  f,  2.  et  suiv. 


(6)  iv  Rois.  iv.  y.  1  et  suiv. 

(7)  Jug.iv.  f.  4. 

(8)  Tract.  MegiUak. 

(o)  1  Rois  m.  v.  4.  et  suiv.- Jér.  1.  y.  4.  et  alib.  -  Osée  i, 

(10)  Dan.  11.  y.  10.-  Malth.  11.  jh  20  et  al.-  Act.  xvi.  y.  9. 
(ii)  Saint  Jérôme,  préface  des  Psaume*. 


FIN   DES  MACCABÉES  ET  DU  TOME  DOUZIÈME  DE    LA   BIBLE 


ANALYSIS    BIBLICA 


AUCTORE    KILBER 


EMENDATA    ET    PER    SUCCESSIONEM    CAPITUM 


A  J.A.    PETIT   ORDINATA 


LIBRl  DUO  MACHAB^EORUM 

HISTORIA      POPULI     A     DEO     ELECTI      POST 

HIEROSOLYMAM    RESTAURATAM 

ET  TEMPLUM   SECUNDUM    ERECTUM 


Pas- 


INTRODUCTIO 

PR^EFATIO 

Ie  Argumentum  scribendoruin  exhibet 
Lib.  ii,  cap.  ii,  y.  20-23. 

11°  Forma  m  scribendi  exponit  et  coin- 
mendat.  24-30. 

III0  Brevitaiem  ium  scriptionis  tuin 
prœfalionis  excusât.  31-33. 

PARS   I 

HISTORIA  A  TEMPORIBUS  ALEXANDRI 

MAGNI    USQUE 

AD    BELLA   MACHAB£ORUM 

SECTIO    I 

STATUS  JUD£ORUM  VAR1US   SUB 

ALEXANDRI 

MAGNI   SUCCESSORIBUS 

§  I.  EPITOME  HISTORICA 

7°  Alexandri  magni 

I.      Victoria?  et  dominatus.  Lib.  i.  c.  i. 


106 


16- 


17 


Pag. 

II.  Morbus,  dispositio  extrema,  et  mors 
cum  annorum  regni  annotatione. 
6-8.  19 

11°  Successorum  Alexandri 

I.  Aditus  in  suas  cujuslibet  provincias. 

9.  20 

II.  Regnum,  posteritas  et  bella.  10.  » 

§11.  STATUS  JUD^ORUM  COMVVS  SELEUCO 

1°  Prius  prosper 

I.  Ob  pietatem  populi.  Lib.  11, cap.  ni, 

y.  1  108 

II.  Ob    honorem  templo  sancto  etiam 

a  regibus  gentilibus  habitum.   2.  « 

III.  Ob    sumptus    sacrorum   a   Seleuco 

subministratos.  3.  » 

11°  Postea  perlurbalus, 

I.  Simone    Benjamita  turbas   ciente  , 

per  injectam  Apollonio,et  ab  hoc 
Seleuco  spem  occupandi  thesau- 
ros  templi.  4-7.  169 

II.  Heliodoro  régis  commissario 

i°  De  tliesauris  Hierosolimas   inquirente  ; 

8,  9.  .. 

20  Oniam   veras   et  tenues    depositi    con- 

ditiones   enarrantem   non   exaudiente  ; 

10,    [J.  " 

3°  Pecunias  jam  attrectare  parante.  14.  17c 

III.  Hierosolyma  tota  trepidente,nempe 
i°  Sacerdotibus  ante    altare    prostratis  et 

Deunï  deprecantibus,   14,  1}.  » 

2°  Pontince  summum  animi  dolortm  et  me- 
tum,  externis  etiam  rnœstitiae  et  hor- 
roris  indiciis,  prodente  ;    16,  17.  » 

j°  Viris,  fœminis  et  universo  populo,  per 
varios  deprecationis,  pœnitentiaî  et 
sollicitudinis  actus,  gravissimam  afflic- 
tionem  probantibus.   18-22.  171 


446 


ANALYSIS    BIBLICA 


Pag. 

777°  Subin  compositus, 

I.  Deo  ausus    Heliodori  reprimente. 

23-24.  I"1 

i°  Per  equitem  armatum  immissum,  qui, 
impactis  equi  calcibus,  Heliodorum 
prosternit;   2$.  » 

2°  Per  duos   juvenes   succedentes    pros- 

tratum   flagellantes  ;  26.  172 

j°  Per  ejectionem  Heliodori  sensibus  pri- 
vât! extra  templum,  et  manifestatio- 
nem  divinae  tum  potentias  lum  cura  pro 
templi  sanciitate.   27-;o.  » 

II.  Onia,  ad  deprecandum  pro  Helio- 

dori salute 
i°  Per  hujus  amicos  rogato,  Jl-  >> 

20  Ad    declinandam    malignitatis  suspicio- 

nem,  hostiam  salutarem  olferente  ;  J2.  » 

5°  Salutem    eidem,  duobus    illis  juvenibus 

rem  contestantibus,  obtinenle;  jj>   !4-  " 

III.  Heliodoro,  pro   sua  erga  Deum  et 

Oniam  gratitudine, 

i°  Beneficium  sibi  factum  ubique  di vul- 
garité ;  J5,  j6.  17J 

2°  Régi  repetitionem  ausus  dissuadente  ; 
?7,  '8. 

3°  Dei  potentiam  contra  sacrilegos  incul- 

cante.  59,  40.  » 

7  V°  Rursus  inquielus, 

I.  Simone  eodem 

i°  Calumnias    contra    Oniam    spargente  ; 

lib.  11,  cap.  iv,  y.   i,  2.  174 

2°  Per  suos  caedes  patrante.  j.  » 

II.  Onia,  pro  avertendo  periculo,  4.  " 
Detersis  calumniis,  medelam  malo  per  re- 

giam  auctoritatem  captante.  5.  6.  » 

SECTIO  II. 

STATUS  JUD/EORUM  PERVERSUS  SUB 

PRIMORDIA 

ANTIOCHI  EPIPHANIS. 

§   I.  DEFECT10  JUD^ORUM  AD  SUPERSTITIONEM 
GENTILEM, 

7°  Occasionem  prœbcn'e 

I.  Perversa  indole  novi  régis  Antiochi 

illustris.  Lib.  1,  cap.  1,  y  1  i  2° 

II.  Ambitiosa    aspiratione   Jasonis    ad 

pontificatum.    Lib.    Il',    cap.    iv, 

III.  Insano  multorum  consilio  ad   pro- 

curandatemporalia.  Lib.  1,  cap.  1, 

y  12,  13,  21 

77°  Initium  faciente 

I.  Jasone,  per  pecunia;  oblationem  pro 

facultate    gymnasii    ethnici    obti- 
tinenda.  Lib.  11,  cap.  îv,  y  9.  '75 

II.  Factione  Judseorum,per  legationem 

ob  eumdem  finem  ad  regem  mis- 

sam.  Lib.  1,  cap.  i,  y  14.  22 


176 


22,176 


Pag. 

IIP  Jncremenluin  addenle  ulroque, 

I.  Per  subsfitutas  sacris  ritibus  et  piis 

institutisprofanasnovitates.Lib.il, 
cap.  iv,  y  10,  1 1. 

II.  Per    erectionem    gymnasiorum    et 

usum  lupanarium.  Lib.  1,  cap.  1, 
y  1 5  ;  lib.  n,  cap.  iv,  ^  1 2 

III.  Per  neglectamapopularibuscircum- 

cisionem,  et  a  sacerdotibus  sacri- 
ficationem.  Lib.  1,  cap.  1,  j^  16; 
lib.  11,  cap.  iv,  ^13,14.  » 

IV.  Per  universam  ad  gentilium  mores 

conformationem.     Lib.    1,    ibii  ; 

lib.  11,  cap  iv,  y.  14-17.  " 

V.  Per  pecuniam  in    sacrificium   Her- 

culis  a  Jasone  submissam,  in  usus 
tamen  bellicos  bajulorum  rogatu 
impensam.  Lib.  11,  cap.  iv,  y  18-20.      '77 


§  II.  Variatio  psf.udopontificum 

FACINOROSA. 

7°  Epocha    his/oriœ,  prima   Antiochi 
expeditio  in  ÂLgYplum, 

I.  Sub  initium  felix, 

i°  Occupato  regno  ;  lib.  1,  cap.  1,  y  17,  18. 
2°  Profligato  Ptolemaeo  ;  19. 
}°  Expugnatis  munitionibus  et  captis  spo- 
liis.  20. 

II.  Sub  progressum  difficilis,  ob  suspi- 

cionem  eripiendae  legitimo  haeredi 
coronae  motam.  Lib.  11,  cap.  iv, 
^21. 

III.  Sub  finem    irrita,  a  Jasone   tamen, 

reducem  Antiochum  Jerosolymis 
magnifiée  excipiente,celebrata.  2  2. 

11°  Translatio  pontificatus 

I.  Imprudenter  initiata  a  Jasone,  Me- 

nelaum  negotiorum  causa legatum 
ad  regem  mittente.  23. 

I I.  Perfide  pertractata  a  Menelao,  pon- 

tificatum sibi  pro  majore  pecunia 
régi  oblata  mercato.  24. 

III.  Ferociter  usurpata,   Menelao  pon- 

tificatum et  Jérusalem  involante, 
Jasone  extruso  et  in  Ammanitem 
profugo.  25,  26. 


77/°  Menclai  facinora  : 

I.  Perfidia  in  regem, 

i°  Nonsatisfaciens  promissispecuniariis,2  7. 
2°  Punita,  trans'ato  in  Lysimachum  ponti- 
til'iL'alu.   28,  29. 

II.  Rapacitas  sacrilega, 

i°  Tentata  ex  occasione  discessus  Antiochi 
ad  domandos  seditiosos  ;  ?o,  ji 

20  Exercita  et  conversa  ad  emendam  An- 
dronici  amicitiam,  et  augendum  pro- 
prium  lucrum  ;  j  2. 

5°  Reprehensa  ab  Onia.  jj. 


24 


178 


179 


180 


ANALYSIS    BIBLICA 


Pag. 
180 
181 


III.  Oniae  occisio, 
i°  Opéra  Andronlci  perpetrata  ;  34. 
2°  Damnata  ab  omnibus,   et    delata  ad  re- 

gem  ;  jj,  ?6. 
j°  Vindicata    infami    Andronici     supplicio. 

?7,  j8.  » 

IV.  Consilium  diripiendi  sacra, 

i°  Lysimacho  a  Menelao  suggestum  ;   39.  182 

2°  Executori  funestum  ;  40-42.  •> 

3°  Datori  periculosum.  4},  44.  » 

V.  Impunitas  sceleris, 

i°  Obtenta    interventu    Ptolemaei    promis- 

sionibus  empti  ;  45-47.  » 

20  Conversa    in  cladem  innocentum  accu- 

satorum  ;  48-49.  » 

3°  Aucta   subsidio  pecunias  ad  ampliorem 

nocendi  potesiatem.  50.  » 

/  V°  Jasonis  exlrema  : 

I.  Occasio  facinoris, 

i°  Expeditio  Antiochi  a'.tera  in  /Egyptum  ; 

lib.  11,  cap.  v,  jfr  1.  18 j 

v-  Portenta  in  aère  observata  ;  2-4.  » 

3°  Rumor  de  Antiochi  morte  sparsus.  5.  » 

I I.  Perfidia  in  patriam 

i°  Edita  a  Jasone,  facto  in    Hierosolymam 

assultu  ;  5  » 

2°  Exasperata,  promiscua  civiumcœde;  6.  184 

3°  Frustrata    eventu,    et   versa  in   turpem 

auctoris  fugam.  7.  »• 

III.  Discursatio  extorris, 

i°  Urgente    undique  et   per    plures   urbes 
insectante  Arabiae  rege,    in   /Egyptum 
projecta  ;  8. 
:°  Hinc  in  Lacedœmoniam  deflexa  ;  9.  » 

3°  Ibidem   finita    morte,  non    lacrimis    nec 

sepulcro  honestata.  10.  » 

SECTIO  III 

STATUS    JUD^EORUM    AFFLICTUS    POST 

^EGYPTIACAS 

ANTIOCHI    EXPEDITIONES. 

§     I.     IMPIA     TYRANNIS     EXERCITA. 

1°  Ab  Antiocho  ipso  ex  Mgypto  re- 
duce; qui, 

I.  Suspicione    et    ira    plenus,    invadit 

Hierosolymam.    Lib.    1,    cap.    1, 

f  2i,  22  ;  lib.  11,  cap.  v,  y  1 1.  24. '8; 

II.  Stragem    maximam    edit   in    cives. 

Lib.    1,    cap.  1,   jf  26-29;  l'b-   "i 

cap.  v,  y  12-15  25'" 

III.  Diripit    sanctuarium,    Deo  permit- 

tente  inJudaeonm  sceleratorum 
pcenam.  Lib.  1,  cap.  1,  f  23,  24  ; 
lib.  11,  cap.  v,  f  1 5-20  "," 

IV.  Relinquit     discedens     oppressores 

gentis  Philippum,  Andronicum, 
et  Menelaum.  Lib.  11,  cap.  v, 
j^  21-23.  1O6 


//.  Ab  Appollonio,  ad  Antiochi  man- 
datum  cuin  copiis  in  Judœam 
appulso,  qui, 

I.  Pacem  simulans,  in  sabbato  trucidât 

plurimos,  flammas  sedibus,et  vin- 
cula  fœminis  injicit.  Lib.  1,  cap.  t. 
$  34-40  ;  lib.  11,  cap.  v,  jfr  24-26. 

II.  Arcem  Sion  munit  et  implet  praesi- 

diariis,  ad  turbanda  Judaeorum 
sacra  intentis.  Lib.  1, cap. 1,  ^35-39. 

III.  Inducit  desolationem  sacrorum,  Ju- 

da?is  partim  quaquaversum  dilap- 
sis,  partim  cum  Machabaeo  in 
desertum  receptis ,  gentilibus 
autem  in  urbem  confluentibus. 
Lib.  1,  cap.  1,  'f  40-^2,  et  56  ; 
lib.  11,  cap.  v,  jfr  27. 

111°  A  Sene  Antiocheno,  itidem  per 
Antiochiim  submisso;  sub  quo 

I.  Promulgatur,  sancita  mortis  pœna, 

lex  de  abolenda  Judaeorum,  et 
universim  adoptanda  gentilium 
religione.  Lib.  1,  cap.  1,  ^43-52; 
lib.  11,  cap.  vi,  jî1  1. 

II.  Statuitur  in  templo  sancto  idolum 

Jovis  olympii,  et  ubique  eriguntur 
aras  idolatrae.  Lib.i,  cap.i,  ^57,58; 
lib.  11,  cap.  vi,  jt-  2-5. 

I I I.  Adiguntur   ad    idololatrica   Judaei, 

librique  sacri  flammis  traduntur; 
mulctantur  pcenisaut  morte  cons- 
tantes in  religione.  Lib.  1,  cap.  1, 
Jh3-$<>i  et  )9"67'>  lib.  11,  cap.  vi, 
j^  6-  1 1 . 

§  II.  RELIGIOS/C  FORTITUDINIS   SPECIMINA. 

1°  Proloquium  his/orici 

I.  Prœoccupans  sinistram  lectbris  opi- 

nionem  ;  lib.  11,  cap.  vi,  v.  12. 

II.  Exponens   inrlictas  Judaeis  plagas, 

velut  indicia  divinae  erga  gentem 
hanc  misericordise  ;  13-16. 

III.  Concludens  hanc  prœnotationem,  et 

transiens  ad  narrationem.  17. 
11°  Malurq  Elea\ari  virius.  Describi- 

tur  herois  hujus 
Dignitas,  aetas,  et  tentatio  ad  vio- 

landam  legem.  18. 
Propositum  moriendi  potius  quam 

delinquendi,    19,  20. 

III.  Sollicitatio  ab  amicis  ad  simulandam 
saltem  transgressionen;.  21,  22. 

IV.  Repuisa  iisdem  data,  opposito  argu- 
mento 


447 
Pag. 


25,187 


26 


».,t38 


27,189 


191 


I. 


IL 


192 


448 


ÀNALYSIS    BIBLICA 


i°  Ex  propria  viri  conditione  ;   2j. 

2°  Ex  secuturo  aliorum  scandalo  ;  24,  25. 

5°  Ex  timenda  Dei  vindicta  ;  26. 

40  Ex  honestatis  et  religionis  officio,27,  28. 

V.  Contemptus  tormentorum  et  odii,  a 

repulsis  sustinendi.  28,  29. 

VI.  Contestatio  ad   Deum,   pro  morte 

religionis  ergo  acceptanda.  30. 
VII. Mors  secuta,  et  cedens  ad  univer- 
sae  gentis  exemplum.  ji. 

///"  Martynum  septem  fratrum  et  ma- 
ins, ad  escam  Garnis  porcinœ 
sollicitatorum .  Li b .  1 1 ,  cap .  v 1 1 , 

y  ■• 

I.  Certamen  sex  priorum  : 

1"  Primus.  contestatus  verbis  oblïrmatum 
pro  lege  contra  tenlationem  et  mortem 
animum,  2. 

1.  Ab  Antiocho  efferato  immaniter    tor- 

quetur,  abscissione  linguae,  abstrac- 
tione  cutis,  amputatione  summarum 
manuum  ac  pedum,  ac  corporis  lor- 
tione  ;  3-5. 

2.  Adhortatione  mutua  fratrum  et  matris 

ad    fortiter    pro     Deo    moriendum 
excitatur  ;  5,  6. 
20  Secundus  abstracta  capitis  cute  et  pro- 
posais   majorum    pœnarum    minis,    ad 
manducationem  vetitam  incitatus,  7. 

1.  Generose   renuit,    et    hinc    torquetur 

amptius  ;  8. 

2.  Sub   extremum    spiritum,    exprobata 

régi  tyrannide,  spem  mercedis  alter- 
nas sibi  propositam  déclarât  ;  9, 

3°  Tertius,  linguam  postulâtes,  eamdem 
cum  manibus  protendit  ;  reparationem 
damni  a  Deo  faciendam  contestatus, 
tortores  ipsos  in  admirationem  rapit  ; 
10-12. 

4°  Quartus,  tertio  defuncto  succedens,  et 
tortus,  eamdem  sibi  fixam  fiduciam, 
régi  autem  pœnam  denuntiat  ;    1  ;,  14. 

$°  Quintus,  similia  subiens,  similia  verbis 
exaggerat  ;  15-17. 

6°  Sexius  asqualia  pra?stat.  18,  19. 

II.  Comparatio  matris  huic  scenae  prae- 

sentis  :  haec, 
i°  Spe  in  Deo    concepta,  mortem  filiorum 

le rt  eequo  animo  ;  20. 
2°  Sapientia  et  fortitudine  ultra    fœminam 

pra?stans,  sermone  pat  ri  o,  h.  e.  hebraeo, 

eosdem  cohortatur  ;  21. 
)°  Proposita    Dei,    in    hominis   formatione 

et    rcsuscitatione  omnipotcntis,  remu- 

ner-itioni  animât.   22,   25. 

III.  Certamen  postremï  adolescenlioris, 

et  matris  : 
i°  Antiochus,  nisi  audiretur  pudore  se  suf- 
/'undendum  metuens, 

1  Promissis  amplissimis  juniorem  aggrc- 

ditur  ;  24. 

2  Ab  hoc  neglectus,    matrem    ad    fiiium 

peisuadcndum  sollicitât  ;    25. 

3  Ab  eadem  legre,  et    simulato    quidem, 

obsequii  assensum  obtinet.  20. 


Pag. 
192 

I9J 


Paz 


195 


196 


197 


198 


'99 


2°  Mater  sermone  patrio  fiiium  ad  CôTlstâri-" 
tiam  et  martyrium  adhortatur,  postu-- 
lans  id 

1  Tamquam    gratitudinis ,   pro    maternis 

suis  officiis,  fflunus  ;    27. 

2  Tamquam   debitum    conditori  omnium 

Deo  obsequium  ;  28. 

3  Tanquam   laudabilem   fraterni  exempli 

imitationem.  29. 
3°  Filius,  matris  sermonem  interpellans, 

1  Postulat    maturari   sibi    mortem     pro 

lege  ;  90. 

2  Déclarât  persecutionem  gentis  prassen- 

tem  peccatis  quidem  meritam,  sed 
Dei  misericordia  prope  finiendam  ; 
?2,  H- 

3  Exprobrat  persecutori  crudelitatem  et 

minatur  futuram  Dei  vindictam  ;  ;i, 
>4,  ?î. 

4  Repetit  eamdem  confessionem  et  spem, 

ac  e  contra  exprobrationem  et  com- 
minationem.  j6-j8. 

IV.  Catastrophe  praecedentis  scenae  : 

i°  Antiochus  ob  factam  sibi  illusionem  atro- 
cius  furit  ;  59. 

20  Juvenis  difficillimum  mortis  genus  ge- 
nerose subit  ;  40. 

3°  Mater  filiorum  sorti  gaudens  postrema 
adjungitur.  41. 

Clausula  sermonem  de  idolo- 
latriaet  tyrannide  finiens.  42. 

PARS   II 

DE    MACHAB^EIS    EORUMQUE    BELLIS 


SECTIO    I 

DE    MATHATHIA    DUCE    MACHAB/EORUM 
§   I.   MATHATHIA   INITIA 


1°  Noho  personalis 


I.  Genealogica  :  sacerdos  ex  filiis  Joa- 

rib.  Lib.  1,  cap.  11,  jfr.  r. 

II.  Topographica  :    habitans   in    Mo- 

din.  1. 

III.  QEconomica:  paterquinque  filiorum, 

nempe  Joannis  Gaddis,  Simonis 
Thasi,  Judae  Machabaei,  Elea- 
zari  Abaram,  Jonathae  Apphus. 
2-?- 

IV.  Synchronica  :  coaevus  persecutioni 

ab  Antiocho  excitatae.  6. 
II"  Zelus  religionis 

I.  Contestatus  afiectu  ;  quem    prodit 

i°  Oratio  querula, 

1.  Afllictam  religionis  conditionem  tristis- 

sime  depingens  ;  8-12. 

2.  Vitam  ideo    sibi  molestam  enuntians;. 

7,  1J. 
:°  Signum  multiplex  doloris  et  tristitias,  14. 

II.  Declaratus  professione;  quam  edit 
i°  Contra  Modinensium  defectionem    reli- 

giosa  constahtia  ;  15,  16. 


n 


u 


ANALYSIS     BIBLICA 


449 


Pag, 

2°  Contra  eivKSsanoruiri  s.'llicitaiionem,  ra- 
tions et  promisso  defectionem  suaden- 
tijm,  responsio  17,   18.  )-! 

1.  Prava  aliorum  exempta  damnans  ;  19, 

20.  » 

2.  Utilitatem  defectionis  refutans  ;  21.  » 
;.  Obedientiam  sacrile0'am  palam  detrec- 

tans  21.  » 

III.    Illustratus     ausu     triplici  ;     quem 
perficit 

i°  Interrempto    super    aram  Judœo  i Jo lis 

sacrificante  ;  2  ;,  24.  » 

2e  Occiso  similiter,  cum  aras  eversione, 
Antioclii  emissario  :  utrobique  l'aeta  ad 
Phinees  exemplum  imitatione  ;  2;,  20  55 

;°  Indicto  et  facto  cum  multis  secessu  in 
desertum,  ad  religionis  exercilium  avi 
et  oppressione  liberandum,  27-50.  » 

§11.  GESTA  EJUSDEM  RELIQUA 

1°  Sapiens  divuuv  legis  inierpretaiio. 

I.  Casus  dubius  de  feriatione  sabba- 

tina,  ortus  ex  praslio  in  diem  sab- 
bati  ab  insectatoribus  constituto, 
contra  Judasos  in  desertum  di- 
gressos.  31  -34.  f6 

II.  Religiositas  minus  prudens  Judaso- 

rum,  ex  sabbati  veneratione,  re- 
pugnare  non  ausorum,  seque  ma- 
gno  numéro  occidi  sinentium. 
55  -  38.  » 

III.  Décréta,    ex    Mathathias    consilio, 

et  ponderato  excidii  universalis 
periculo,  sententia  vim  vi  etiam 
in  sabbato  repellendi."  39-41 .  » 

11°  Félix  ejusdem  defensio, 

I.  Conflato  ex  viris  fortissimis  et  reli- 

giosissimis,  sponte  accurentibus, 
exercitu.  47,43.  i7 

II.  Illata  apostatis   caede,  et   aris  ever- 

sione. 44,  4..  38 

I I I.  Inducto  rursus  circumeisionis   ritu, 

et    legum  usu  contra   adversantes 
vindicato.  46-48.  » 

111°  Sollici/a  commendatio,  qua  Ma- 
thathias  morti  proximus  (ilios 
adlegiscustodiamadhortatur, 

I.  Desumpto  a  necessitate  temporis  et 

utilitate  rei  argumento.  49-'  1.  39 

II.  Addito  in  confirmationem  multiplici 

patriarcharum  praemia  consecuto- 

rum  exemplo.  5  2-6I.  » 

II I.  Subjuncto  de  inani   adversariorum 

contentione  documento.  62,  63.  j0 

IV.  Repetito  ad  commendationem  tncul- 

candam  glorias  incitamento.  64.  » 

/  V°  Ullima  disposilio 

I.      De  Simone,  tanquam    pâtre   colen- 

do .  6  5 .  » 

S.   B.  —  T.  XII. 


Pag. 


40 


I I .  De  J  uda,  tanquam  belli  duce  sequen- 

do.  66. 

III.  De  Judasis  colligendis  et  vindican- 

dis,  de  gentilibus  castigandis,  de 
legibus  colendis.  67,  68. 
V"  Mors placida, 

I.  Post    impertitam    liliis    benedictio- 

nem  secuta.  69. 

II.  Anno  Grsecorum  146  notata,  70. 

III.  Sepultura  et  luctu  honorata.  70. 

SECTIO    II 


GESTA    JUD.E   MACHAB/EI    CO/EVA   REGNO 
ANTIOCHI    EPIPIIAMS 

ij     I.     PR/ELUDIA     BELLICA 

1°  Prcefectura  miliiaris  post  patris  obi- 
tum  a  Juda  assumpla, 

I.  SufTragantibus  fratribus  et   antiquis 

belli  sociis.  Lib.  1,  cap.  m,  y  1 ,  2.  41 

II.  Correspondentibus  tum   prasstanti- 

bus  corporis  armis,  tum    heroicis 
animi  dotibus.  J,  4.  » 

II0  Apparalus  adbellum  faclas, 

I.  Conscriptis    ad    militiam    et    extra 

gentilium  urbes  clanculum    educ- 

tis  Judasis.  Lib.  n,  cap.  vin,  y  1.  203 

II.  Fusis  ad  Deum  precibus  pro    res- 

tauratione  gentis,  templi  et  civita- 

tis,     ad    ultionem    innocentum,  et 

peenam  blasphemantium.  2-4.  » 

///"  Excursiones  improvisa1,  noclurnœ 

et   disparates,  in   hostiles  sta- 

iiones  faclœ,  5-7.  » 

I.      Cum  multa  hostium  strage  et    ter- 


rore.  Lib.  1,  cap.  ni,  y  5,  6. 

II.  Cum    Judas   ab     impiis    purgatione, 

gentis  suas  laetitia,  et  proprii  no- 
minis  gloria.  7-9. 

§   IL   PR/ELIA  CUM  ANTIOCH!  DUC1BUS  COMMISSA 

I"  Cum  Apollonio,  quem  bellum  pa- 
r,antem  Judas  opprimit,  fun- 
dit,  spoliât  inter  caetera  gla- 
dio,  posthac  Judai  servituro. 
10-12. 

Il"  Cum  Serone  :  ubi  narratur 

I.      Seronis  consilium,  apparatus  et  pro- 

gressio.  13-16. 
IL  Judas    occursus,   et   oratio    excitans 
animos    suorum,    ob    paucitatem 
timentium.  16-22. 

III.  Seronis  clades  et  fuga,  Judas  Victo- 

ria et  fama.  23-25. 

29 


40 


4" 


42 


4J 


4)0 


ANALYSIS    B1BLICA 


Il i°  Cum  sudordinatis  Lysiœ  ductori- 
bus  :  hic  occurrunt 

I.  Régis    Antiochi,    gestorum    nuntio 

excitati, 
i°  Apparatus  ad  bellum,  collecto  universo 

rogni    exercitu    et    datis     stipendiis   ; 

26-28. 
2°  Cura  asrarii.ad  sumptus  haud  sufficientis, 

aliunde  reficiendi  ;  29- Jl. 
j°  Mandatum  Lysias    daium   de   tutela   sui 

filii,  belloque  contra  Judasos  gerendo, 

et  gente  hac  penitus  exscindenda  ;  ji- 

5Û. 
40  Discessus  ad  expilandam  Persidem.  57. 

II.  Ductores  Ptolemaeus,    Nicanor    et 

Gorgias, 
i°  Delecti  a  Lysia,  et  magno  exercitui  pras- 

fecti  ;  ;K,  J9. 
20  Progressi  Emmauntem  usque  ;  40. 
j°  Conventi    a    mercaloribus,  prasvie    jam 

judaira    mancipia  licitantibus.  41. 

III.  Judœ  et  fratrum, 

i°    Propositum     defensionis     capiend.as   ; 

4244. 
2°   Conventiis    cum    populo    in    Maspha   ; 

45,  4<>- 
5e  Supplicatio  ad    Deum,  susceptis  jejunio 

et  pœnitentia,  celebratis  ritibus  sacris, 

et  fusis  ad  cœlum  precibus  et  tubarum 

clangonbus  ;  47-54. 
4°  Ordinatio  exercitui  officiales  prasfiniens, 

et   vulgus    inutile    domum   remittens  ; 

55.  56. 

5"  Eductio  et  instructio  exercitus  contra 
hostes  pugnaiuri.  57-60. 

IV.  P ugna  Gorgiœ  : 

i°  Consilium  Gorgias,  Judasos  in  castris 
opprimere  cogitantis,  elusum  a  Juda, 
populo  in  castra  needum  inducto  ; 
lib.  1,  cap.  iv,  y  1-5. 

2°  Cohors  Gorgias  armata  in  fugam  dis- 
jecia  et  caesa  a  minore  et  inermi 
Judseorum  cohorta,  adhortatore  et  ani- 
mos  inspirante  Juda;  6-15. 

j°  Exercitus  Judœorum,  a  spoliis  detentus 
et  ad  prasiium  in  campo  applicatus, 
eminus  procedentem  Gorgias  exer- 
cit,um,  de  clade  accepta  suspicantem, 
terret  et  in  fugam  verlit  ;  16-22. 

40  Judas i  nunc  ad  spolia  versi  ditantur,  et 
benedicunt  Deum  pro  acespta  salute  ; 
2J-25. 

50  Lysia=,  sinistro  Gorgiœ  eventu  territus, 
hoc  anno  quiescit.  26,  27. 

V.  Expeditio  Nicanoris  : 

i°  Nicanor,  Philippi  monilu,  Ptolemasi 
mandato,  missus  cum  exercku  ad  inhi- 
bendos  Judas  progressus,  spe  victorias 
plenus,  capienda  Judasorum  mancipia 
jam  venum  proponit  ;  lib.  11,  cap.  vm, 
>   8   11. 

20  Judasi,  audito  Nicanoris  adventu,  partim 
in  fugam,  partim  in  desperationem 
abeunt  ;   1 2-1  ;. 

5°  Judas,  inspirala  ultione,  promisso  Dei 
auxilio,  et  laudato  patrum  experimento 
adjunctum  si bi  exercitum  erigit  ad 
constantiam,  et  in  turmns  distributum 
committit  ductoribus  ;  16-22. 


44 


45 
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47 


48 


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50 


52 
5J 


204 


54 


Pag-  Pag. 

4°  Confligitur,  facto  per  Judam  initio, 
secuta  Nicanoris  clade  et  fuga,  pecu- 
niis  mercatorum  victori  in  spolium 
cedentibus  ;  2J.-2Ç.  206 

5°  Sabbato  inteneniente,  cessatur  ab  hos- 
tium  persecutione  ;  transacto  autem, 
distribuuntur  spolia,  data  etiam  viduis 
et  indigentibus  portione  :  utroque  tem- 
pore  solvuntur  Deo  grates  et  vota  ; 
26-70.  207 

6°  Effectus  cladis  in  Nicanore,  humiliatio 
et  confusio,  prasterea  agnitio  divina= 
potentias  et  tutelas  pro  Judaeis.  J4- J6.  » 

IV  Cum  ipso  Lysia  : 

I.  Adventus  ejusdem  cum  ingenti  exer- 
citu  ad  Bethoron.  Lib.  1,  cap.  iv, 
}  28,  29.  5ï 

II.  Occursus  Judœ  cum  copiis  multo 
paucioribus,sedprecibusad  Detim 
ardentissimis.  29- 3  3 . 

III.  Prœlium  commissum,  vincenteJuda, 
victo  Lysia,  et  regresso  Antio- 
chiam  ad  restaurandum  exerci- 
tum. 34,  35. 

S    III.    COROLLARIA.   VICTORIARUM 

J°  Expialio  templi 

I.  Parata, 
i°  Cummunicato  a  Juda  cum  suis  consilio, 

et  adducto  in  Sion  exercitu  ;  56,  57. 

20  Occupatis  urbe  et  lemplo  ;  hb.  11,  cap.  x, 

y  t.  214 

j"  Concepto  ad  triste  loci  deformati  spec- 
taçulum  dolore  et  luctu  ;  lib.  1,  cap.  iv, 
'f  58-40.  54 

4°  Destructis  aiis    sacrilegis   et   delubris  ; 

iib.  s,  cap.  x,  f  2.  214 

50  Opposito  contra  prassidiarios  arcis  mi- 
lite obsessore.  Lib.  1,  cap.  iv,  p  41.  55 

II.  Suscepta, 

*  l°  Sacerdotibus    mundis    lapides   contami- 

natos  e  templo  dimoventibus  ;  42,  4;.  » 

2°  Altaris  holocaustorum,  ob  profanationem 
ex  prudenti  considcatione  destructi, 
lapidibus  intérim  in  loco  apto  sepo- 
sitis  ;  44-46.  » 

5°  Alteroad  prioris  formam  constructo,  et 
domus  sanctae  interioribus  ac  atriis 
restauratis  et  sanctificatis  ;  47,  48.  56 

4°  Vasis  novis  conliatis,  omnibusque  sacro- 
rum  supellectilibus  templo  illatis.ador- 
natiset  usurpatis.49-5 1,  lib.  2,cap.x,  jt'  j.       >- , 2 1 4 

II"  Dedicalio  altaris  celebrata 

I.  Solemni  inauguratione  ; 
i°  Sacrifiais  primis,  die  2;  mensis  Casleu, 

profanationis  anniversario,  iterum  obla- 
i;s  ;  lib.  1,  cap.  iv,  y  52-54  ;  lib.  11, 
cap.  x,  f  5.  56,-1 

20  Gratiis  Deo  actis,  et  precibus,  ad  simi- 
lem  castigationem  avertendam,  adjunc- 
lis.  I.ib.i,  cap.iv,  ^  55  ;  lib  11,  c&p.  x,  ^4.  57," 

II.  Festiva  commemeratione 

i°  Ociiduana  prassenti,  ad   tabernacularum 
I est  1  rituin  et    pompam   lucundissimam 
exacta;  lib.  1,  cap.  iv,  y-  56-58;  lib.  11, 
205  cap.  x,  y  6,  7.  ",215 


ANALYSIS    BIBLICA 


2°  Anniversaria,  simili  festivitate  in  eum- 
dem  diem  unn'erso  populo  constiluia. 
Lib.  i,  cap.  îv,  f  ',9  ;  lib.  11,  cap.  x,  y  8. 

111°  Sec.uritas  urbis  firmala, 

I.  Arce  prœsidiaria  in   Sion,  ex  oppo- 

site» arcis  hoslilis,  constructa. 
Lib.  1,  cap.  iv,  y  60. 

II.  Munitione  alia,  ex   Idumsese  oppo- 

sito,  Bethsurœ  adjecta.  61. 

§  IV.  BELLUM  CUM  VICINIS  GENTIBUS 

1"  Expeditio  meridionalis. 

I.  Occasio,   gentilium   aemulatio  con- 

tra sacrorum  restaurationem,  et 
conspiratio  in  Judaeorum  exci- 
dium.  Lib.  1,  cap.  v,  y.  1,  2. 

II.  Successus  secundus. 

i°  Idumasis  prassertim  Acrabathaneis  cas- 
sis ;   ?. 

20  Beanitis,  cum  suo  turrium  receptaculo, 
exustis  igné  et  deletis  ;  4,   5. 

5°  Ammon'.tis,  cum  duce  Timotheo,  repe- 
tita  clade  attritis,  et  urbe  Gazer  hu- 
jusque  pago  mulctatis.   6-8. 

//   Expeditio  orientalis  et  septentriona- 

lis. 

I.  Occasio  : 

i°  Galaaditarum,  sub  duce  Timotheo, con- 
silia  et  facta  hostilia  contra  Judœos  ; 
horum  in  Datheman  profugorum  Hue- 
ras, auxilium  a  Juda  postulantes.  9  15. 

2°  Judaeorum  e  Galilasa  nuntii  idem  de 
Ptolemaiditis,  Tyriis  et  Sidoniis  con- 
tra se  agentibus  referentes  et  rogan- 
tes.  14,  1 $. 

II.  Dispositio  : 

1°  Decretum  de  subsidio  vexatis   ferendo  ; 

16. 
20  Expeditio  in  Galilaeam  Simoni  commissa 

in  Galaaditidem  Judas  et  Jonathas    re- 

servata  ;  17. 
;°  Custodia      Hierosolymas     Josepho      et 

Azaria?    crédita,  cum    mandato    absti- 

nendi  abomni  excursione  ;   18,  19. 
4°  Divisio  exercitus  ex  prasscripto,  20. 

III.  Successus  in  Galilœa  : 

l°  Hostium  numerosa  clades,   et    infestatio 
ad  portam  Ptolemaidis  usque  ;   21,  22. 
2°  Liberatio  et  translatio  Judasorum  in  Ju- 
dasam.  2j. 

IV.  Successus  in  Galaaditide  :  Judas, 

i°  Trajecto  Jordane,  excipitur  pacifice  a 
Nabathasis,  et  de  Galaaditarum  contra 
Judaeos  factis  et  consiiiis  instruitur  ; 
24-27. 

20  Converso  itinere,  occupât  Bosor,  occi- 
sis  incolis  ;  28. 

j°  Vicinam  munitionem,  Judasorum  asy- 
lum,  oppugnantes  sub  Timotheo  hos- 
tes  die  altéra  obruit,  et  magna  strage 
édita  fugat  ;  29-  J4. 

5°  Succedentibus  aggressionibus,  urbes 
Maspha,  Casbon,  Mageth  et  a'.ias  ca- 
pit,  succendit,  et,  masculis  occisis, 
exspoliat  ';  jç,  ;0 


Pag. 


.» ,  2 1 6 


V> 


60 


61 


62 


6J 


S"  Timotheum  cum  restaurato  exercitu  et 
Arabum  auxilio  regressum,  contra  il- 
lius  omen,  invadit,  vincit,  et  Carnaiin 
usque  fugat,  eamque  urbem  cum  fano 
tandem  exusto  occupât;   ;;-44- 

6°  Cum  emigrantibus  secum  Judœis  re- 
dux,  innoxio  per  Rphronem  transitu 
negato  offensus, urbem,  occisis  civibus, 
dévastât  ;  4.  s  -  5 1. 

7°  Relecto  Jordane,  nullo  amisso  regres- 
sus,  grates  in    monte    Sion    persolvit. 

111°  Expeditio  occidentalis . 

I.  Tentata  a  Josepho  et  Azaria, 

i°  Tempore  absentis  Juda;,  studio  captan- 

dae  glorias  ;    55-58. 
20  Sorte  sinistra   et  clade  per    Jamnienses 

illata,  Judasis   in  fugam    conjectis  ;  59, 

60,  67. 
5°  Documento    inobedientias   castigatas,  et 

negotii  sine  divina  vocatione    infelici- 

ter  suscepti  relicto.  61,  62. 

II.  Resumpta  a  Juda, 

1°  Post  fautas    populi    acclamationes  ;  6j, 

64. 
.1°  Initio  (acto  contra   Idumœos    australes 

et  urbem  Chebron  ;  65. 
j°  Bello  per  Samariamin  Philistasorum  re- 

gionem    et     Azotum     translato,     cum 

clade   hostium  utrobique  édita.  66, 08. 

§  V.  FATA  ANTIOCHI  POSTREMA. 

1°  Deprœdatio  Persepolis  urbis  et  tem- 
pli, 

I.  Ob  ingentes  divitias,    ab    Antiocho 

tentata.  Lib.  1,  cap.  vi,  y.    1-3  ; 
lib.  11,  cap.  ix,  y.  2. 

II.  A  civibus,   prœvia    moliminis    fama 

jam  excitatis,  vi  et  armis  prohi- 
bita.  Lib.  i,  cap.  vi,  f.  },  4. 

III.  In  fugam,  dedecus  et  dolorem   An- 

tiochi  conversa.   Lib.  1,   cap.   vi, 
y.  4  ;  lib.  11,  cap.  ix,  y.  1,  2. 
Il"  Nuntia  ad  Antiochum   in    Perside 
délai  a. 

I.  Exponentia  clades  tribus  ejus  duci- 
bus  illatas,  Jérusalem  autem  cum 
templo,  et  Bethsuram  a  Judaeis 
recuperatas.  Lib.  1,  cap.  vi,  y. 
5  9  ;  lib.  11,  cap.  ix,  y.  3. 

IL  Injicientia  animo  ejus  terrorem, 
mœstitiam,  ac  tandem  ultionis 
furorem.  Lib.  1,  cap.  vi,  y.  8  ;  lib. 
11,  cap.  ix,  v.  4, 

III.  Afferentia,  Deo  puniente,  corpori 
sœvum  viscerum  dolorem,  mem- 
brorum  collisionem,  vermium  e 
carne  nascentium  cruciatum  et 
fœtorem.    Lib.  1,  cap.  vi,  y.  8  ; 


45  « 
Pag. 


<>4 


65 


66 


6," 


68,209 


69,209 


64 


lib.  11,  cap.  ix,  y.  y 


[O. 


4)2 

111° 

I. 


ANALYS1S    BIBLICA 


II 


11 


IV 
I. 

Il 
11 


Pcvmïudo  de  factis  contra  Judœos 

Concepta  animo, 
i°  Commoto,  dolorum  continuatione  et  ve- 

hementia,  ad  agnoscendum  Dei  domi- 

nium,   sine    desideratas    tamen    salutis 

consecutione  ;  lib.  u,  cap.  ix,  y.  ii-ij. 
i°  Pollicito  Hierosolymas    liberta'.em,    Ju- 

dasis  autonomiam,  et  templo   sumptus 

ac  reverentiam  ;  14-16. 
)°  Professo  se  Judasum    etiam,   ac   poten- 

tias  divins;  prasconem  futurum  ;  17. 
.    Declarata,  habito  ad  suos  sermone, 

quo  exponit 
1°  Corporis  animique  sui   afflictam    condi- 

tionem  ;  lib.  1,  cap.  vi,  y.  9-1 1. 
2°  Confessionem  considerationis  suas,  hase 

mala  tanquam  mei  itam  suis  contra  Ju- 

daeos  factis  pœnam  agnoscentis.  12, ij. 
I.  Consignata  litteris  ad  Judœos    de- 

precatoriis.  Lib.  Il,  cap.  îx,  17. 
H  arum  litterarum 
1°  Inscriptio  gratiosa  est  Antiochi    ad    Ju- 

daeos  ;  18. 
2e  Exordium  constestatur  benevolenliam  ; 

10. 
j°  Narratio  exponit    valetudinis    conditio- 

nem,  et  suam  de  subditorum   felicilate 

sollicitudinem  ;  20,  21. 
4°  Propositio    continet,  declarari  a  se,  ad 

similis  a  paire  facti  imitationem,  filium 

suum  regni  successorem  ;  22-25. 
5"  Postulatio  exigit  fidelitalem  sibi  et  filio 

prasstandam.  20,  27. 

Fala  ultima  : 

Constitutio  Philippi 
i°  In  curatorem  regni  ;  lib.  1,  cap.  vi,  y.  14. 
20  In  tutorem  filii  régis.  1  ;. 
.    Mors,  annotato  anno,  loco,  et  mé- 
rite Lib.  1,  cap.  vi,  v.  16  ;  lib.  11, 
cap.  îx,  f.  ?H. 
I.  Cura  funeris  et  digressio   curantis. 
Lib.  11,  cap.  ix,  f.  20. 


Ptg. 


SECTIO   III. 

GESTA     JUD/E     MACHAB/EI 

CO-CVA     REGNO 

ANTIOCHI      EUPATORIS 

S    I.  1URB/E    SUB    REGNI    AUSPICIA 

7°  Prœfatio  hislorici  ad  enarrationem 
faclorum  sub  Eupaiore.  Lib. 
11,  cap.  x,  y.  10. 

11°  Turbœ  ex  parle  Syrorum: 

I.  Lysias,  digresso    Philippo,    procu- 

rator  regni  ab  Eupatore  constitu- 
as. 1 1  ;  lib.  1,  cap.  vi,  y.  17. 

II.  Ptolemaeus,  ob  favens   Judœis  stu- 

dium  ad  Eupatorem  delatus,  ve- 
neno  se  ipsum  perimens.  Lib.  11, 
cap.  x,  f,  12,  1 }. 


111"  Ex  parle  Judœorum  : 

I.  Gorgiœ  et  Idumseorum,  accedenti- 

bus  gentilibus  et  apostatis  aucto- 
rum,  excursiones, a  Juda  fréquen- 
ce tatis  cladibus  repressœ.  13-17.  217 

II.  Hostilium  turrium  expugnandarum 

negotium, 
mi 

i°Simoni,  Josepho,    et    Zachaso   commis- 

sum  ;   18,  19.  » 

2#  A  Simonis  sociis,  pro    pecunia   aliquos 

inclusorum    elabi  sinentibus,  prodito- 

rie  neglectum  ;  20.  » 

5°  Proditione  hac  supplicio  cas'igata,  de- 

69  mum  a  Juda  confectum.  21-2J.  » 

III.  Gravior  belli  aléa 

i°  Jacla  a  Timotheo,  exarcilum  potentissi- 

70  r 

mum  adducente  ;  24  210 

2e  Excepta  a  Juda,  post  imploratum    riti- 
212  bus  solemnibus    Numen,    occurrente  ; 

:°  Decisa,  post  pugnam  ambiguam,  a  vins 
„  de  cœlo  in  Judas  tu'.elam  et  subsidium 

missis.  28-;o.  2  1  (, 

"  IV.  Victoriae  hujus  supplementa  ; 

i°  Strages  hostium  ingens  et   Timothei   in 

Gazaram  fuga  ;  j  1 ,   j  2.  » 

20  Asyli  hujus  obsessio  a  Juda  per  qua- 
triduum  coiitinuata,  ab  obsessis  male- 
dicentius  subsannata  ;   i!-J4.  » 

5"  Conscensus  murorum  a  juvenibus  ah- 
quot  die  quinta  tentatus,  mox  exem- 
plum  imitanlibus  pluribus,  injecto  in 
turres  et  portas   igné,  completus  ;   J5, 


4°  Interitus  Timolhei  latebras  quasrentis, 
item  Chaereas  et  Apollophanis,  irium- 
phus  Judas  et  sociorum  ;  J7,   58.  220 

5"  Comportalio  spoliorum,  et  epinicia  in 
Jérusalem  ;  rœna  Philarchi  socio  Ti- 
molhei et  Cal listheni  incendiario  irro- 
gata.  Lib.  11,  cap.  vin,  y.  ji-jj.  208 

$  II.  VIC1SS1TUDINES  SUB  REGNI  PROGRESSUM 

/•  Bellum  geslum  : 

I.      Lysiae,  rébus  Judœorum   prosperis 

!ib.  II,  cap. xi, y.  1,  2.  2:1 


2'J 


21  î 


216 


offensi, 

1°  Apparatus  ingens 

20  Consilium  adversum  ;  2,  j. 

j°  Confidentia  praesumpti'osa  ;  4. 

4°  Marhinatio  contra    Beihsuram    prospé- 
ra, s- 
II.    Judae.  hostili  hac  irruptione  ad  de- 
fensionem  excitati, 

i°  Preces  ad  Deum,  et  adhortatio  ad  so- 
cios  ;  6,  7. 

2°  Cumitatus  Angeli  a  Deo  datus,  et  forii- 
tudo  animi  divinitus  indita  ;  8,  9. 

>°  Irruplio  fortissima  in  hostes,  cladem  et 
fugam  iisdem   injiciens.  19-12. 

11°  Pax   in  Ha  : 

I.      Negotium  pacis  tractatum, 

i°  Lysia  victo,  fugato,  suarumque  et  Ju- 
daicarum  rerum  statum  prudenter  di- 
menso,  propositionem  faciente,  12-14. 


ANALYSIS    BIBLICA 


2°Juda,  sub  postulatis  a  Lysia  et  promis- 
sis  a  rege  conditionibus,  propositio- 
nem  acceptante,  15. 

I!.    Documenta  tractatus  litteris    consi- 
gnata : 

1°  Epistola  Lysiae,  inscripta  Judaeis,  16. 

1.  Narrât  postulata  legatorum  Judaeorum 

régi    proposita,    et   ab    eodem  con- 
cessa  ;  17,  18. 

2.  Promittit,  supposita  Judaeorum  l'uieli- 

tate,  reciprocum  favorem  ;  19. 
j.  Significat  reliqua  per  legatos  a  se  mis- 

sos  complananda  ;  2u. 
4.  Finit  apprecatione  et  anni    notatione, 
21. 
20  Epistola  Eupatoris,  inscripta  Lysiae,   22. 

1.  Exponit  suum    commodis   subditorum 

faventem  animum,ab  initio  regni  jam 
susceptum  ;  2î. 

2.  Recenset  postulatam  a  se  facultalem, 

qua  liceat  Judaeis    proprio  suo    ins- 

tituto,  non  autem   ritibus   graecis  vi- 

vere  ;  24. 
;.  Decernit,  pro  sua  in  Judaeos  benevo- 

lentia,  iisdem  templum  et    sacrorum 

libertatem  restitui  ;  2^. 
4.  Mandat  rem  hanc  cum  Judaeis  commu- 

nicari,  et  componi,  jo. 
j°  Epistola  ejusdam,  inscripta  Judaeis, 27. 
t.  Habet  initialem  benevolentiae    formu- 

lam  ;  28. 
2.  Memorat  relatam  per  Menelaum  pos- 

tulationem  Judaeorum,  pro    facultate 

invisendi  suos  in  Syria  ;  29. 
j.  Concedit  il  lis  liberum  commeatum  ad 

quindecim  dies.et  usum  rituum  pro- 

priorum  ;  ;o,  ;  r. 

4.  Notât  Menelaum  a  se  missum  ad  trac- 

tandum  cum  ipsis  ;  52. 

5.  Subdit   apprecationis    clausulam,    et 

anni,  mentis,  ac  diei  notam,  j;. 
4°    Epistola    Romanorum    legatorum      Q. 
Memmii  et  T.  Manlii, inscripta  Judaeis, 
Ï4- 

1.  Dat  assensum   transactis  cum    Lysia; 

>  i- 

2.  Monet  de  mittendis  legatis,  negotia  a 

Lysia  ad  regem  remissa   tractaturis  ; 
jo. 
J.  Petit  accel(eratum    responsum  et    vo- 

luntatis  declarationem  ;   )7. 
4.  Claudilur  communi    veto    pt    epocha 
scriptionis,  58. 
III.  Quies     utrinque    capta    et    culta. 
Lib.  11,  cap.  xii,  f.  1. 
III"  Quies  interlurbata, 

I.  Infestatione  frequenti   regiorum   in 

vicinia  prsesidum.  2. 

II.  Proditorio  facinore, 

i°  A  Joppitis  contra  Judœos  concives  sub- 

mersione  perpetrato  ;  î,  4. 
20  AJuda  scapharum  exustione  et  reorum 

occisione  castigato  ;  <,,  6. 
j°  A  Jamnitis  contra  eamdem   gentem  de- 

creto,  a  Juda  autem  praeoccupato,7-9. 

III.  Occursu  Arabum, 

i°  Evocatorum  a  Timotheo  ;  10. 
2°  Victorum  a  Juda  praelio  ;  1 1. 


Pag. 


22J 


4Î5 
Pag. 


2?4 


226 


229 


j°  Residuorum,  pro  oblatis  pascuis,  liber- 
tatem sibi  et  pacem  pactorum,  12. 

IV.  Ferocia  incolarum  urbis  Casphin, 
1°  Deditionem  contemptu  et  maledictis  re- 

cusantium  ;  1  ;,  14. 
2e  A  Juda,  post    preces  ad     Deum    fusas, 

expugnatorum  ;  1  ;. 
î°  Plena  sanguinis  strages  deletorum,  16. 

V.  Expeditiono  contra  Timotheum, 

i°  Cœpta  per  nbsidionem  urbis  Characae, 
quam,  dilapso  hinc  Timotheo,  Judas 
urgendam  comm'ttit  Dosilheo  et  Sosi- 
patro  ;   1  "- 19. 

2"  Promota  per  progressum  utriusque 
exercitus  ad  pugnam  ;  20,  il. 

j°  Decisa  per  terrorem  divinitus  injectum, 
et  cladem  ingentem  a  Juda  inllictam 
copiis  Timothei  ;  22,  2;. 

4°  Finita,  Timotheo  ftitercepto  primum.ad 
preces  et  promissa  dein  per  Dosi- 
theum  et-Sosipatrum  dimisso,  Carnione 
autem  praecipuo  Timothei  prœsidio 
per  Judam  devicto  ;  24-20. 

5°  Coronata  monumento  triplici 

1.  Fortitudinis  quidem,  quia  lïphron    ur- 

bem  praesidio  et  machinis  munitissi- 
mam  Judas  expugnat,  27,  28. 

2.  Mansueludinis  dein,  qua  idem  Scytho- 

poli  ad  Judaeorum,  de  incolis  sibi 
hactenus  faventibus  testantium,  pre- 
ces parcit  29,  ;o. 
?.  Religionis  denique,  qua  Judas,  inter- 
rupto  victoriarum  cursu,  Hieroso- 
lymam  abit  ad  Pentecosten  celé- 
brandam,   ;i. 

VI.  Excursione  in  Idumceam, 

i°  Excepta  occursu  Gorgiae    et   conflictu; 

n-u- 

20  Notata  periculo  ejusdem,  captivitatem 
vixelapsi;  j;. 

j°  Interpolata  tum  conliictu,  per  fugam 
hostium  precibus  Judae  aegre  obtentam 
finito,  tum  reducto  Odollam  exercitu, 
sabbatoque  ibidem  celebrato  ;  j6-;8. 

4°  Consignata  documento  triplici, 

1.  Imprimis  experientiae,  qua  innotuit 
aliqualis  cladis  acceptae  causa,  scili- 
cet  donaria  idolorum  sub  prostra- 
torum  tunicis  reperta  ;  39-41. 

2.  Tum  ritus   relipiosi,  quo   preces   fun- 

duntur  et  sacrificia  offeruntur  pro 
defunctorum  peccatis;  42,  4). 
j.  Demum  observationis  historicae,  qua, 
ex  factis  relatis,  veritas  resurrec- 
tionis  et  sanctitas  orationis  pro  de- 
functis  colligitur,  44. 

§  III.  CONVERSIONES  SUB  REGNI  FINEM, 

/°  Obsidio  arcis  Sion 

I.  Suscepta  a  Juda, 

i°  Ob    fréquentes    praesidiariorum    sacra 
turbantium  excursiones,  lib.  1,  cap.  vi, 
y.  18. 
2°  Cum  populi  consensu    et    machinarum 
apparatu.  19,   20. 

II.  Denuntiata  Antiocho   ab  apostatis, 

21. 
1°  Postulantibus  auxilium  ;  22. 


229 


2?I 


2J2 


2JJ 


4)4 


ANALYSIS    B1BLICA 


Pas 


î°  Criminanjibus  Judam  de  illata  sibi,  ob 
paganismi  cultum,  vi  et  oppressione  ; 
25-25. 

5°  Exaggerantibus  periculum  ex  hacmachi- 
natione  secuturum.  26,  27. 

III.  Turbata  ab  Antiocho, 

1°  Ad  hoc  nuntium  maximam  contra  Ju- 
dœos  expeditionem  decernente;  28- 30. 

20  Exercitum  Bethsurae  admovente  et  prae- 
sidiarios  fortins  urgente,  ji. 

IV.  Soluta  a  Juda,  ad  auxilium   Bethsu- 

raeis  ferendum.  32. 
Il"  Ambitio  Menebi 

I.  In  spem  maximam  assurgens, 

i°  Occasione  expeditionis  contra  Judasos 
instructas  ;     lib.  11,    cap.  xin,  f.  1,   2. 

20  Opportunitate  comitivaa  et  colloquii  cum 
Antiocho  concessi.»  3. 

II.  In  interitum  dejecta, 

1°  Morte  eidem  décréta,  Deo  disponente, 

Lysia    suggerente,    et     Antiocho     ju- 

ber.te  ;  4. 
20  Executione  per  prœcipitationem  e  turri 

in  cineris  cumulum  facta  ;  5,  6. 
3°  Atrocitate   pœnas    ad    culpas    meritum 

accommodata.  7,  8. 

IIP  Prœlium  decrclorium  : 

I.  Apparatus  ingens 
1°  Ex  parte  Eupatoris, 

1.  Festinato  e  castris  motu;  lib  1,  cap.  vi, 

>'  ??,  J4- 

2.  Instructo  tum  elephantorum,  tum  mili- 

tum  ordine  ;  35-}8. 

3.  Ordinato    ad    pompam    et    terrorem 

exercitus  in  aciem  progressu.  59-41. 
2°  Ex  parte  Machabaji, 

1.  Indictisgenti  univers*  precibus  ;  lib.  u, 

cap.  xiii,  v  9-1 1. 

2.  Dato   militibus  mandato  et  senioribus 

consilio  ;  12,  13. 

3.  Copiis  versus  Modin  promotis.  14. 

II.  Conflictus  memorabilis, 

ir  Ob  factam,  sub  Juda;  classico,  noctur- 
nam  in  hostes  irruptionem  ;  15. 

2°  Ob  stragem  inter  illos  editam  ;  16,  17; 
lib.  1,  cap.  vi,  y  42. 

3°  Ob  heroicuni  factum  Eleazari 

1.  Elephantem  generoso  consilio  et  ausu 

aggredientis  ;  45-45. 

2.  Eumdem    quidem    sternentis,    sed    se 

simul  sub  eodcm  sepelientis,  46. 

III.  Proventus  certaminis  neutri  secun- 

dus, 
i°  Judasis  retrogradis  partes  meras  defen- 

sionis  eligentibus;  47. 
2"  Eupatore   non  vi  sed  arte  duntaxat  sibi 

agendum  intelligente.  Lib.  11,  cap.  xiu, 

y  18. 

/  V"  Caiaslasis  obsidionalis  : 

I.      Munimenti  Bethsurœ 

i"  Oppugnatio  a  rege  incassum  repetita  ,  19. 
20  Diflicultas  annonaria  a  Juda  aliquamdiu, 

donec    res    a    Rhodoco     proderetur, 

sublevata  ;  20,  21. 
j°  Libertas  et    cura  alimoniae  ad    pacem   a 

rege  promulgatam  capta;  lib.  1,  cap.  vi, 

$  48,  49- 


7i 
» 


72 


4°  Occupatio  perfida  a  rege  contra  pacis 
leges  usurpata;  ibid.  50;  lib.  11,  cap.  XIII, 
f.  22,  2J. 

II.     Urbis  Hierosolymee 

i°  Impugnatio  ab  Eupatore,  et  propugnatio 

a  Juda?is  diu  ac    fortiter  gesta  ;  lib.  1, 

cap.  vi,  f  51,  <,2. 
20  Penuria  ciborum   ex  anno   sabbatico  et 

paucitaspraesidiariorum  hinc  orta;  5  ?,  54 
?°  Pax,  ob  Philippi  motus,  a  Lysia  propo- 

sita,    a    rege  et    principibus    probata, 

Judasis   oblata,  ab   utrisque  juramento 

firmata  ;  55-61. 
4°  Denudatio,  destructis  mûris  a  rege  fœdi- 

frago  urbem  ingresso.  62. 

V°  Pericope  Eupatoris  finalis  : 
2,5  I.      InJudaea 

i*  Discit  modestiam,  accepta  per  Judam 
clade,  et  audito  de  Antiochia  per 
Philippum  captanuntio;  lib.  11,  cap.  xiu, 

y  2;. 

2°  Captât  Judaeorum  amicitiam,  fide  meliori 

2*  data,  muneribus    templo   oblatis,  Juda 

vicinasprovinciae  prasside  creato;  2),  24. 

3°  Lenit  commotos   Ptolemensium  animos, 

reddita  per  Lysiam  factorum  ratione; 

discedit  in  Syriam.  2^,  :6. 

II.    In  Syria 

i°  Appulsus,  Antiochiae   Philippum  aggre- 

ditur,    vincit,    ex    urbe    ejicit  ;    lib.   1, 

cap.  vi,  ^.  6?. 
20  Anno    altero,    oppressus    per    Demetrii 

Roma    Tripolim    advecti    exercitum, 

capitur;  lib.  1,   cap.  vu,  f  i,  2  ;  lib.  n, 

cap.  xiv,  ^1,2. 
3°  Demetrio  conspectum  negante,  ac   sen- 

tentiam  ferente,  idem  cum  Lysia  occi- 

ditur.  Lib.  1,  cap.  vu,  y  3,  4. 


Pag. 


",2?8 


72 
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236 
237 

2?8 

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j.38 


76 


77 


238 


239 


78,240 


SECTIO   IV 

GESTA  JUD/E     MACHAB^I     CO/EVA    REGNO 
DEMETRII     SOTERIS 

§     I.     1NQUIS1TIO     INSIDIOSA 

7°  Adornaia  ab  Alcimo, 

I.  Demetriumregno  potitum  pro  recu- 

perando  pontificatu,  cum  amplis- 
simis  muneribus  adeunte.  Lib.  1, 
cap.  vu,  ^  5   ;  lib.  11,  cap.  xiv, 

h)4-  79,240 

II.  Ad  eumdem, accepta  opportunitate, 

habente  orationem,  qua 

i°  Calumniatur  Assidœos  et  Judam  turba- 
rum  et  oppressionum  in  Juda.a  aucto- 
res;  lib.  1,  cap.  vu,  y  6;  lib.  11,  cap.  xiv, 
y  5,  6.  «,241 

20  Queritur  se  régis  et  regni  studiossis- 
simum  ab  iisdem  iniquissime  vexatum; 
lib.  11,  cap.  xiv,  f  7,  8.  » 

3°  Consulit  his  malis  atïerri  remedium, 
misso  homine  fido,  qui  in  factum  inqui- 
rat,  et  reos  plectat  ;  lib.  1,  cap.  vu, 
y  5  ;  lib.  11,  cap.  xiv,  y  9.  v> 

4°   Monet,   superstite   Juda,  res   componi 

non  posse.  Lib.  11,  cap.  xiv,  y  10.  » 


ANALYSIS    B1BL1CA 


Pag. 


», 2 4  I 


80 


III.  Accipiente  hujus   consilii    assenta- 
toresomnes Judée  adversarios.  1 1. 
II"  Decrela  a  rege, 

<s     1 

I.  Deligente  Bacchidem  ad  hoc  nego- 

tium.  Lib.  1,  cap.  vu,  ,v  8. 

II.  Adjungente  Alcimum,   utpote  pon- 

tificem  a  se  nominatum,  et  vindi- 
cem  Judaeorum  constitutum.  9.  » 

III0  Institula    a  Bacchide  et  Alcimo, 
Judœam  ingressis,   10. 

6 

I.  Dolosa  ad  conventum  invitatione,  » 
i°  Neglecta  a  Juda  et  sociis,  ob  conceptam 

ex  adducto  simul  exercitu  suspicio- 
nem  ;  1 1.  » 

20  Honorata  accessu  scribarum  et  Assi- 
dasorum,  nihil  mali  aut  doli  ob  Alcimi 
sacerdotium  suspicantium.  12-14.  „ 

II.  Mendaci  pacis  promissione,  15.  81 
i°  Violata  mox  per  sexaginta  ex  his  credu- 

lis  hominum  necem,  a  Davide  praesi- 
gnatam  ;    16,  17.  » 

20  Excepta  a  populo  hanc  perfidiam 
experto,  cum  metu,  contemptu,  et 
detestatione.  18.  » 

IV0  Terminata  ab  utroque, 

I.  Bacchide'  qu'idem,    Antiochiam    re- 

gresso,  post  mota  ad  Bethzecham 
castra,  ac  iram  in  dilapsas  con- 
ventus  reliquias  et  populares 
quosdam  effusam.   19,  20.  82 

II.  Alcimo   autam    militia    sibi    relicta 

munito,  ab  improborum  acces- 
sione  aucto,  et  ferociter  in  pa- 
triam  grassato.  21,  22.  » 

V°  Vindicata  a  Machabœo, 

I.  Malis    per    grassatores     apostatas 

gravioribus  ilbtis  excitato,  13.  » 

II.  Pœna  his  desertoribus  captis  irro- 

gata,  securitatem  regionis  conse- 

cuto.  24.  » 

§    II.  MACHINATIO  MULTIPLEX   PALAM    ADVERSA 

1°  Aggressio  velitaris, 

I.  Sollicitata   ab    Alcimo  calumnioso 

Judae  accusatore.  Lib.i,  cap.  vu, 

f.  2<,.  » 

II.  Commissa  Nicanori  Judaeorum  hos- 

ti,  26  ;  Hb.  u,  cap.  xiv,  f.  12,13.      «,241 

III.  Praeparata   utrinque,  gentilibus  ad 

Nicanorem  affluentibus,  Judaeis 
preces  ad  Deum  fundentibus. 
Lib.  11,  cap.  xiv,  f.  14,  i).  242 

IV.  Tentata  ad    castellum   Dessau,  Si- 

mone Judœ  fratre  ob  subitam 
hostium  irruptionem  meticulosius 
agente,  Nicanore  tamen  per  hoc 
experimentum  virtutem  Judaeo- 
rum  discente  et  reverente.  16-18.  » 


V.    Conversa  in  amicitiam,  quam 

i°  Nicanor  probanlibus  consiliariis  conci- 

liaturus,    proponit.   congressum    cum 

Juda  secretum  ;  19-21. 
2°   Judas   acceptaturus     proviJc    pcriculo 

omni  praecavet  ;  22. 
?"  Uterque  contractam   colit,   pr»ter   alia 

documenta     nuptias    etiam     Nicanore 

suadente  et  Juda  ineunte.  25-25. 

11°  Insectatio  hosïrfis 

I.  Concitata  rursus, 

i°  Actore  Alcimo,  memoratam  amicitiam 
déférente  et  perfidiae  insimulante  ;  26. 

20  Dictatore  rege.  Judam  vinctum  Antio- 
chiam mitti  imperante  ;  27. 

3°  Executore  Nicanore  constituto,  invito 
quidem  ob  Judas  innocentiam,  obse- 
quiose  tamen  ob  régis  metum  agente. 
27-29. 

II.  Declinata  a  Juda, 

i°  Ex  mutata  in  asperius  agendi  ratione, 
mutatum  Nicanoris  animum  arguente, 
et  hinc  se  occultante;    ;o. 

20  Ex  structis,  sub  assumpto  arnicas  visita- 
tionis  simulacre  insidiis  evadente,  et 
Nicanorem  posthac  évitante.  Lib.  1, 
cap   vu,  i\  27-;o. 

III.  Exerta  conflictu, 

i°  Ob  elusas  insidias,  per  Nicanorem 
Judas  ad  Capharsalama  il  lato  ;  ji. 

20  Clade  quinquies  mille  Syrorum  et  fuga 
reliquorum  finito.  ?2. 

IV.  Translata  ad  sacerdotes, 

i°  Sub  honorificum  occursum  a  Nicanore 
contemptim  habitos  ;  ;?,  34. 

2°  Ab  eodem,  sub  intenninatione  templi 
profanandi  ac  evertendi,  jussos  sistere 
Judam  ;  55  ;  lib.  11,  cap.  xiv,  £•.  ;i-jj- 

3°  Regressos  in  templum,  hujusqu'e  con- 
servationem,  hostis  autem  internecio- 
nem  precatos  ;  lib.  1,  cap.  vu,  y  ;6- 
j8  ;  lib.  11,  cap.  xiv,  y.  j4-;6. 

V.  Effusa  in  Raziam  : 

Describitur   hujus  viri 
i°  .-Estimatio  apud    omnes,  virtute  ac  reli- 

gione  comparata;  lib.   11,   cap.   xiv,  y. 

H,  ?8. 
2°    Periculum    a    Nicanore   Judasis    asgre 

facturo  paratum  ;   59,  40. 
j°  Suicidium    ad    captivitatem  avertendam 

tentatum  ;  4iv  42. 
4°  Prascipitatio    sui    jam  graviter  saucii  in 

m-edias  turbas  secuta  ;  4;,  44. 
50  EfTusio  viscerum  cum  precibus  et  morte 

conjuncta.  45,  46. 

III0  Expeditio  internecina. 

I.  Castra 

i°  Nicanoris  Hierosolymis  translata  ad 
Bethoron,  et  aucta  exercitu  Syrias  ; 
lib.  1,  cap.  vu,  J\  $9. 

20  Judas  posita  in  Adarsa  cum  tribus  dun- 
taxat  millibus.  40. 

II.  Nicanoris  consNium  pugnandi   sab- 

bato 
î"  A  Judasis  ad  sequelam  coactis  detrecta- 
tum  ;  lib.  11,  cap.  xv,  f.  1,2. 


4V-) 
Pag. 


«,743 


>4? 


84,24! 


244 


245 
248 


84 


249 


456                                                          ANALYSIS  BIBLICA 

Pag.  Pag. 

2"  Ab   eodem,    blasphemis    contra    Deum  5°  In  publico   conspectu    et    jubilo  convo- 

sabbati  auctorem  quœsitis  et  responsis,  catorum  Judacorum,  Nicanoris    lingua 

obfirmatum;  j,  ç.                                                 249  prœcisa,  et   avibus    particulatim    pro- 

3°  Elîectu  tamen,  contra   arrogantem  blas-  jecta  ;  dextera  ex  templi  opposito  sus- 

phemi  opinionem,  frustratuni.   5,  6.                    >j  pensa,  capite  in  arcis  summitate  prœ- 

!II.  Judœ,  inunoDei  auxilio  confiden-  flxo;  lib.  i,  «p.  ni,  f47."48;Hb.  ix, 

cap.  xv,  v  Ji-35.  85,» 


tis, 


Constituta    in    diem     decimum    tertium 


1°  Exhorta  io  animorum  excitatoria  ad  mi-  mensis    Adar    anniversaria     memoriœ 

lites,  qua  festivitate  ;    lib.    1,    cap.    vu,   y    49; 

1.  Monet  ab    homine  timendnm  nihil,  a  lib.  it,  cap.  xv,  y  36.   >?.                              ",-',A 

Deo  speranda  omnia  ;  7.8.  »                    ço    Qujete    per    tempus    aliquod     secuta 

2.  Memorat    legis  promissa   et    prophe-  Lib.  1,  cap.  vu,  £•  50.                                     »,» 

tarum  vaticinia  ;  9.  250 

j.   Recenset  gentium  perfidiam  et  perju-  g    III.  ACTA  1VUJK  POSTREMA 

ria.  10  » 

1°  N:rratio  confirmatoria  somnii,   qua  ex-  /"  GlOUOSCL  .' 

ponitvisum  sib.  j       Concepta   de    Romanis    opinio,  ex 

1.  Oniam  pro  Judœis  deprecantem,  cum  vulgata  fama 

viro  alio  insigni  ;  n-ij.  »                        _       »        .                   ...     ... 

.    _    .     ,  i°  De  eorumdem  notentia  et  lacilitate  erga 

2.  Hune  al.um,  declaratum  ab  Onia  Jere-  exteros     ,ih       cap    TII|j  f  r_                             g6 

miam  phophetam,  esse  similiter  pro  2„  De  victricibus  eorum  eXpeditionibus 

genteeturbesanctasolhdtumpreca-  ,    In  Galatiam,    Hispaniam,  et  extremas 

torem  !  '*■  "                              provincias:  2-4.                                                 87 

}.  Jeremiam  tradidisse  Judœ  gladium  au-  2.  Contra  Philippum,  Persen,    et  Antio- 

reum,    victoriœ  de    hostibus  repor-  chum  ;   <,-'.                                                        88 

tandas  certum  instrumenlum.   15,  16.  251                       ?.  Adversus  Indos,  Medos,  Lydos,  Grœ- 

IV.  Militum  oratione  Judas  animatorum  cos,  aliosque  insularum  et  regnorum 

decretum  fortiter  pugnandi,  D  _  '^0,as'  8-":          ....                             8'> 

„                                      r    °         .  .           ,.  ;°  De  fidaerga  socios  amicitia  et  impensa 
1°  Conceptum  maxime  pro    tuenda  templi 

sanctitate;    .7,   18.  252                          <utela  <  ,2J  '»■       . 

....                    .,  4°  De  eorumdem  modestia,  ser.atu  et  con- 

2°  Adiutum  sol  icitudine  et  precibus  com-  ,  .             , 

1          .        .         ,             h  sulatu.  14-16.                                                          90 

morantium  in   urbe  sancta    19.  »              T_       .            ,       .     .          . 

,,      ,-,          ,    ,           ...  .  II.    Leeatio  Judse,    Iratrum,    et   populi 

V.  Praeambula  pra?ln  :  °                  '                '         r  r 

10  Acies  u.rinque  instruc.a;  20  »                            Judœorum  ad   RomatlOS, 

2"  Judœ  periculum  considérants  et  manus  '°  Commissa  Eupolemo  et  Jasoni;  17. 

incoclum  extendentis  oratio,  21.  <>                   :°    Destinata    ad    ineundam  cum  Romanis 

,,,!-,.                   c            ,       ,  amiciliœ,  et  contra  Graecorum  oppres- 

1.  Ut  Ezechiœ  contia  Sennachenb   erat  ' !     ,     .                                    ,, 

,  .                    ...                  »,.             _  sioncs,  fœderis  societatem  ;  17,  18.                    » 

datum,    ita    sibi    contia    Nicanorem  '                          .           ?" 

;°  Delata    Romam,    et    in   curia     negotio 


submitti  Angeium  percussorem  ;  22, 


rite  deluncta  ;  19.  20. 


2;  ;  lib.  1,  cap.  vu,  v  41.  «,85 

,.   .  .  ,      .  .      ...  ,  4"  Consecuta  postulatam  pacem  ac  socie- 

Metum  et  stragem  inferri  hostibus  ad  ^  ,p,.       .  F   .      .         . 

,  ,        ,  ...  ,.,  .,  tatem,  tabuhs  etiam  aereis    inscriptam, 

blasphemiœ  ultionem  ;  lib.i,  cap.  vu  .     ;  r 

et  in  Jérusalem  deferendam.  21,  22. 


III.  Formula  fœderis 


y  42  ;   lib.   11,    cap.  xv,  y  24.  85,252 
)°  Nicanoris  signa  data  ad  pugnam.  Lib.  11, 

cap.  xv,  %■  25.  25;                   i°    Precatur    Romanis    et  Judœis,   ubique 

VI.    Prœliumdie    décima    tertia    mensis  prosperitalem,  et  ab  hostibus  immuni- 

tatem  ;  ?;. 

Adar  COmmissum,  2o    pr£escribit    Judœis,  ut  Romanis  aut  so- 

1°  Judœis  oratione    non  minus  quam  manu  ciis  bello  lacessitis  auxilium,  hostibus 

pugnar.tibus;    lib.  1,    cap.    vu,    y   41;  autem  nulla  ratione    subsidium    prœs- 

lib.  Il,  cap.  xv,  y    20,  27.  8î,»                          tent;  24-26. 

2°  Syrorum    triginta    quinque    millibus    et  3°  Obligat  Romanos    ad   reciprocum  in  si- 

inter  primos  Nicanore  cœsis  ;  ibid.  »,»                          mili    casu   Judœis  prœstandum  ;  27-29. 

j°  Hostili  exercitu  abjectis  armis  fugiente,  4°  Permittit  utrisque,  ex    muluo  consensu, 

et  per  integri    diei   iler  ab  inhœrenti-  his    tabulis    addere   vel  demere  quœ- 

bus  victoribus  conciso;  lib.  1.  cap.  vu,  cumque  visa  fuerint  ;  jo 

a,  , .    .,  „                      <,"  Addit,    Judœorum  causa,  datas  ad   De- 

„»,   ,..."..                            .                ,.  metrium    litteras      dehortatorias,      et 

4°Reliqunsdispersis,  per  excitatos  undique  ,             ,    ...        r>           •     ■   t 

n           M.  .  .     \    ,     'K       ,    .               .    M  comminatonas    bel  1 1    a  Romanis  infe- 
e    vicinia    Judœos.    ad    internecionem 


rendi.  jt,  32. 

II"  F  une  si  a  : 


delelis.  45,  46.  » 
VII. Victoria  celebrata, 

i°  F.piniciis  in  laudem  Dei  eiïusis;  lib.  ii,  I-       Expeditio    bellica,    Nicanoris    cla- 

cap.  xv,  y  28,  29.  »                      dem  reparatura, 

20    Spoliis    lectis,    et,      rescissis    ad    Judœ  1°  Demandaia    Bacchidi  et    Alcimo  a  De- 

jussa,  capite  et  brachio  Nicanorisdextro  metrio;lib    1,  cap    u,  y  1. 

Hierosolymam   delatis  ,    lib.  1,  cap,  vu,  20  Auspicata,  castris  ad    Masaloth  positis, 

y  47  ;  lib.  il,  cap.  xv,  y  ;o.  »,»                          et  édita  multorum  strage  ;  2. 


94 


ANALYSIS    BIBLICA 


4v 


Pa? 


Pas 


5°  Continuata  stati vis  ad  Jérusalem  pro'a- 
tis,  et  parte  copiarum  ad  Bcream  de- 
ducta,  j,  4. 

II .  Statio  Juda?  in  Laisa, 

i°  Sub  initium  tribus  virorum  millibus  de- 
finita,  mox  ad  octingentos  redacla,  et 
spe  addendi  plures  restituta  ;  5-7. 

2°  Ex  sociorum  quidem  consilio  deserenda, 
sed  a  Juda,  illos  ad  pugnam  animante, 
et  se  ad  mortem  fortiter  oppetendam 
ofl'erente,  retenta  ;  8-10. 

5°  Ad  egressum  hostium  e  castris  et  expli- 
caiionem  aciei  opposita.   11. 

III.  Pra?Iium, 

l°  Datis  utrinque  signis,  cœptum,  et  per 
diem  integrum  protractum  ;  12,  1  î. 

20  Juda  cum  selecta  manu  in  cornu  dextrum 
pugnacius  incumbenle,  féliciter  hac  ex 
parle  depugnatum  ;  14,  1;, 

;°  Cornu  autem  sinislro  in  tergum  Judas 
inveclo  resiauraHim,  casuque  Juda1  ac 
luga  reliquorum  finitum.   1 6- 1 8. 

IV.  Posthuma  Judas  : 

l°  Translatio    cadaveris    a  fratribus  in  se- 

pulcrum  patrium  ;  10. 
20  Planctus    populi  et  elogium    defuncti  ; 

20,  ïi. 
}°     Confessio    historici      testantis      datant 

Judœ  biographiam  ob  factorum  multi- 

tudinem  mancam.  ::. 

V.  Consectaria  cladis: 

l°  Apostatarum  recrudescens  (erocia  :  2;. 

2°  Judaeœ  per  famem  aillictio,  et  sub  Bac- 
chidis jugum  deditio  :   24. 

50  Bacchidis,  per  constitutos  praafectos 
apostatas,  instituta  contra  Judœ  ami- 
cos  persecutio  ;  2ï,  26. 

40  Tribulatio  totius  Israelis  excedens  prio- 
rum  temporum    angustias.   27. 

SECTIO    V. 

DE    JONATHA     JUD/E    SUCCESSORE 

§   I.   MAG1STRATUS  JONATHA  PATRIUS 

1°  Ad  Uns  adeumdem 

I.  Datus  a  Judaeorum.  congregatione, 

i°  Deligente  Jonatham  ob  virtutem  bel- 
licam  ;  lib.   1,  cap.  ix.  y  28,  29. 

2°  Déférente  eidem  principatum  et  praa- 
fecturam   militarem.   50. 

II.  Captus    a  Jonatha   in  locum  Judse 

succedente.  -,  1. 

III.  Infestatus  a  Bacchide, 

l°  Mortem  Jonathas  minitante;  )2. 

2°  Eumdem  cum  suis  ad    recessum  in    de 

sertum  adigente  ;    ;  j. 
;°  Recedentes  trans  Jordanem  persequente. 

U- 

IV.  Funestatus  a  Jambritis, 

i°  Joannem  Macchabaeum,  ad  Nabuthaeos 
pro  apparalu  deponendo  missum,  in- 
tercipientibus  et  perimeniibus  ;  j$,  ;6. 

2°  Similiter  a  Jonatha  ultore  in  solemi  i 
sponsae  deductione  interceptis,  spo- 
liatis,  et  partim  occisis,  partira  dis  - 
persis.  jr-42. 


00 


97 


V.     Communitus  praelio 

i°  Inito  ad  Jordanis  ripam,  inlcr  Bf.cchidem 

94  aggressorem  et  Jonatham  defensorem, 

suorumqus  hortatorem  ;  4.-46. 

20  Finiio    post  editam  mille   hostium  stra- 

gem,    Jonatha  Jordanem    tranante,  et, 

o^  post  praesentissimum  periculum  dr-'er- 

sione  declinatum,   Bacchide    Hieroso- 

Ivmam  revertente.  47-49. 

11°  Posscsssio  e  jus  de  ni 

I.  Quieta  per  biennium, 

»  t°  Syris  ad    reliquam    Judaeam  munimentis 

sibi  lirmandam,  et  Israelem,  auctis  cus- 
todiis,  acceplisque  obsidibus,  in  fide 
continendum  conversis  ;  ^o-;?. 
ï°  Alcimo  destruendis  domussanctœ  mûris 
interioribus  jam  intento,  sed  paralysi 
subita  dissoluto  et  inter  dolores  maxi- 
mos  exstincto  ;  ^-sô. 
1°  Bacchide  Antiochiam  digresso.   57. 

II.  Tentata  per  insidias 

l°  Ab  apostatis  suggestas  ;   \8,   îo. 
20  A   Bacchide    structas,  sed    détectas  ;  60. 
;"  In  aucloribus  punitas  ;  01. 
4"  A  Jonatha  in  Bethbe;sen  digresso  decli- 
natas.  02. 

Fil.  Turbata  per  vim  et  arma, 

i°  A   Bacchide    urbi    B^thbessen    admota  ; 
"  6;,  64. 

20  A  Jonatha    in    hostilem   regionem   cum 
..  caedibus  illata  ;  6:,  66. 

5°  A  Simone,  facta  felici  eruptionc,  contra 
r)3  oppugnatores  versa  et  victricia.  67,  ù8. 

IV.   Ratihabita  per  pacem, 

i°  Prassumptam  ex    supplicio    de    consilii 
"  auctoribus  sumpto,   et  reditu    Bacchi- 

dis decreto  ;  09. 
20  Propositam  a    Jonatha,    adjecta    capti- 
vorum  sibi    reddendorum    conditione  ; 
70. 
5°  Concessam    a  Bacchide,  addita  jurisju- 

randi  fide  et  redditis  captivis  ;  71-72. 
4"  Stabilitam  subsequa  Bacchidis  perpétua 
ab  his  terris  absentia,  et  Jonaih.e  libéra 
sui  muneris  facullate.  72,  7;. 

§  ÏI.  AUCTORITAS  JONATH/C  EXTRANEA 

/°  Ex  regum,  amiciliam  Jonathœ  cap- 
lanlium,  sludiis  conspicua. 

1.      Studia  Demetrii, 

l°  Concepta  animo, 

1.  Ex  occasione  instaniis  cum  Alexandro 

Bala    appulso    contentionis  ;     lib.   1, 
"  cap.  x,  $  i,  2. 

2.  Ex  spe   praeveniendi  officia  Alexandri 

aemula  ;  4. 
;.  Ex    metu    ullionis   a    Jonatha  injuria- 
"  r.jin  memori  alias  sumendae.  5. 

2°  Exposita  opère, 

t.  Datis  ad  Jonatham  lilteris  honoritîcis;  5. 
2.  Concessis    eidem    facultate   armorum, 
99  societate  fœderis,  et  remissione  ob- 

sidum  ;  6. 
;.  Praslectis  in  Jérusalem    regiis    lilteris 
ac  reverenter  exceptis.  7,  8. 
»  j°  Percepta  usu, 


îo; 

lot 

» 


45< 


ANALYSIS    BIBLICA 


i.  Parentibus  proies  obsides  recipien- 
tibus  ;  9. 

2.  Jonatha  Jérusalem  inhabitante,  inno- 
vante et  muniente  ;  10,  11. 

;.  Alienigcnis  plerisque  difTugientibus , 
paucis  in  Bethsura  remanentibus  12-14 

I I.  Studia  Alexandri 

i°  Constituta,  perspectis  Demetrii  ambitu, 
Jonathae  merito  ,  et  proprio  com- 
modo  ;   1  ;,    16. 

20  Impensa,  delatis  Jonathas  per  litteras 
pontificatus  honoribus,  additisque  pur- 
puras et  coronae  aureaedonis,  17-20. 

;°  Rata  habita,  Jonatha  ad  scenopegiae 
solemnitatem  stolam  sanctam  usur- 
pante, et  exercitum  colligente.  21. 

III.  Sollicitatio  altéra 

i°  Resumpta  a  Demetrio,  initam  Alexandri 
cum  Jonatha  amicitiam  aegerrime  fe- 
rente  ;  22-24. 

20  Proposita  litteris, 

1.  Factum  Jonathae  novissimum  dissimu- 

lantibus,  et  prioris  contractus  cons- 
tantiam  dumtaxat  repetentibus;  25-27. 

2.  In    hujus  officii    compensationem    tri- 

buts varia  remittentibus  ;  28-ji. 
?.  Item    sacrorum   jus  proprium,    facul- 
tatem    et    immunitatem  ,     privilégia 
etiam  militaria  et   civilia  indulgenti- 
bus  ;  ; 2-  J7. 
4.  Denique  pontifici   possossionem   ci vj- 
tatum   et  reditus,    sacerdotibus    sti- 
pendia et  pecunias,  templo  jus  asyli, 
œdibus    sacris     et     mœnibus    urbis 
sumptus    pro   rcstauratione    donan- 
tibus;   38-45. 
3°  Rej^cta  a  Jonatha  et    populo,    Alexan- 
drum  Demetrio  gemina  ex  causa  pras- 
ferentibus.  46,  47. 

11°  Ex  Alexandri  Jonalham  honoran- 
iis  magnificcntia  illusfris. 

I.  Victoria  Alexandri,  copiis  Judaicis 

aucti, 

ir'  Post  praelium  cum   Demetrio  initum  ;  48. 
20  Post  idem  cum  eodem  fugitivo  renova- 

tum  ;  49. 
î°  Post  Demetrii  in  pugna  csedem  ac  mor- 

tem.  50. 

II.  Amicitia  cum    Ptolerrueo   Philome- 

tore,  et    nuptise   cum    Cleopatra 

hujus  fil  ta 
i°  Expetitae    ab   Alexandro,    per    legatos 

victoriam    et    regni    adilum    nuntiante, 

et  dona  spondente  ;  51-54. 
2"  Promissae     a     Ptolemaeo,     conventum 

tamen  prœvium  postulante;  55,  JO. 
3°  I n itae   et  célébrât»    ingenti  cum  pompa 

in  Ptolemaida.  57,  58. 

III  Jonathae  ad  hanc  cclebritatem  invi- 
tati  et  cum  ampiissimis  muneribus 
accurrentis 

1"  Exceptioab  utroque  regegratiosa;  59,60. 

2°  Vestitus  et  concessus  regius  ab  Alexan- 
dro, invidos  interpellatores  non  au- 
diente,  datus  ;  Ci,  C:. 


Pag. 
104 


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109 


3°  Deductio  per  urbem  et  administratio 
prior  testimonio  regio  comprobata,  et 
ab  obtrectatorum  jam  fugientium  ausu 
vindicata  ;  Cî,  64.  1 1 1 

4°  Annumeratio  inter  reg:s  amicos,    duces 

et  principes  ;  C5.  » 

5°  Reditus  in    urbem   pace   et   lastitia  re- 

pletus    66.  1, 

111°  hx  merito  in  Alexandri  commo- 
dum  redundante  amplificafa. 

I.  Periculum  ortum 

i°  Ex  armato  Demetrii  Nicatoris  in  Syriam 

adventu  ;  C7.  » 

20  Ex  Alexandri  conterriti  recessu  ad  me- 

tropolim  ;  C8.  » 

4°  Ex  immisso  ad  Jamniam  exercitu  hostili 

sub  duce  Apollonio  :  69.  » 

5»  Ex  evocatione  Jonathaj  vel  ad  defectio- 
nem,  vel  ad  pugnam  in  campo  aperto, 
facta  p2r  Apollonium  superbe  insul- 
tantem.  70-7;.  1 1  2 

I I.  Bellum  gestum, 

i°  Initio  facto  per  Jonathae  cum  Simone 
juncti  in  campestria  descensum,  et  Jop- 
pes  cinctionem,  oppugnationem  ac  de- 
ditionem  ;   74-76.  >> 

20  Progressu  dato, 

1.  Per  stratagema  Apollonii ,  copias  ver- 

sus   azotum     moventis     et     insidias 

circa  Jamniam  relinquentis  ;  77,  79.  113 

2.  Per  consilium  Jonatœ   in  Apollonium 

excurrentis,    peditatu   autem    relicto 

insidias  cohibentis  ;  78,80,81.  •> 

;.  Per    virtutem    Simonis  adversam   le- 

gionem    invadentis,  caadentis  et  dis- 

pergentis  ;  82. 
}°  Fine  imposito,  per  expilationem  Azoti 
cum  vicinis  urbibus,  et  exustionem 
templi  Dagon  cum  omnibus  eo  pro- 
fugis,  clademque  universam  octo  mil- 
lium.  85-85.  » 

III.  Fructus  collectus 

i°  Ex  hostibus,  Ascalon  in  deditionem  ac- 
cepta et  spolia  plurima  ;  8û,  87.  » 

20  Ab  Alexandro,  augmentum  glorias, 
signum  cognationis  regias,  possessio 
Accaronis  cum  regione  subjecta.  88,89.  " 

§   III.  INVARIATA  JONATHAE  FORTUNA  INTER 
FUNESTAS  REGUM  VARIATiONES 

1°  Aucloritas  Jonafha',  inlcr  damno- 
sas  A  lexandn  Balœ  et  Plole- 
mœi  Philometoris  mulaliones, 
illœsa . 

I.  Ptolemœi  ambitio 

i°  Intenta  occupando  Alexandri  regno;  lib.i, 

cap.  xi,  f  ia  115 

:°  Polita,  sub  amioi  ingressus  specie,  civi- 

tatibus  multis  ;   2,  3.  » 

3°  Sollicitata  malevolis  sermonibus  contra 

Jonatham,  ad  Azoti  conspectum.  4,  5.  » 

II.  Jonathae  œconomia  prudens, 

i°  Officiosa    ad     Ptolemaeum    excursione 

adhibita  ;  û.  116 


ANALYSIS    BIBLICA 


2°  Comitaui  eidem  ad  extremos  Judœœ 
limites  praestito  continuata  ;  7. 

j°  Regressu  dein  in  Jérusalem  opportune 
finita.  7. 

III.  Ptolemeei  machinatio  perfida, 

i°  Occupatisjam  maritimisstationibus  erup- 

tura  ;  8. 
20  Demetrio,  oblatis  Cleopatra    Alexandri 

conjuge  in  sponsam,  et  regno  patrio  in 

possessionem,  sub  mendaci  colore  pro- 

posita  ;  9,  10. 
3°  Alexandro  ambitum  exprobrante,  et  Pto- 

lemaso    Cleopatram    transferente  pro- 

dita  ;  11,  12. 
4°  Contra    Demetrium    asque    ac    Alexan- 

drum    a    Ptolemœo,    Asias    et    /Ggypti 

coronas  conjungente,  manifestata.   13. 

IV.  Alexandri  oppositio 

i°  Nuntio  in  Ciciliam  delato  excita;   14. 
2°  Inito  praelio  tentata  ;  1 5. 
;°  Capta  post  cladem  acceptam  in  Arabiam 
fuga,  frustrata  ;   16. 

V.  Utriusque  catastrophe, 

Ie  Alexandri  quidem,  resecto  per  Zabdiel 
Arabem  capite,  tragica  ;  17. 

2°  Ptolemaei  autem,  triduo  post  allatuin 
illud  caput,  mortui  importuna  ;  18. 

3°  Demetrii  tandem, Syris  /Egyptios  ubique 
opprimentibus,  elevati  inopinata;  18,19. 

//o  Virtus  Jonathœ  ex  alternante  De- 
metrii Nicanoris  conditione 
illustrior. 

I.  Sub  regni  aditum,  ubi 

l°  Demetrius,  ad  delatam  invidiosius  obsi- 
dionem  arcis  in  mpnte  Sion,  iratus, 
Jonatham  desistere  et  coram  adesse 
jubet  ;  20-25. 

20  Jonathas,  omisso  primo,  alterum  cum 
seniorum  comitatu  et  donorum  delectu 
executus 

1.  Excipitur  a  rege  bénigne  ;  2?,  24. 

2.  Contra     accusantium      vota     habeiur 

amice  ;  25,  26. 

3.  Secundum  morem  pristinum  confirma- 

tur  sacerdotio  et  principatu.  27. 

II.  Sub  conversationem  eamdem, 

1e  Jonathas,  promissis  joo  talentis,  immu- 
nitatem  Judreas  et  adjectarum  topar- 
chiarum  paciscitur  ;  28, 

20  Demetrius  addicit,  Jonathas  datis  litteris 
continentibus  e.xemplar  epistolse,  Lys- 
t heni  primario  ministro  inscriptse;  29-  32. 
In  qua 

1.  Prsemittitur   ratio    motiva    concessio- 

nis  ;  33. 

2.  Tribuitur  immunitas  petita  ;  54. 

3.  Additur     remissio    tnbutorum     alio- 

rum  ;  35. 

4.  Stabilitur  concessionis  perpetuitas;  36. 

5.  Mandatur    communicatio    rescripti    a 

Jonatha  custodiendi.  57. 

III.  Sub  tempus  quietis, 

i°  Demetrius,  retento  milite  extero,  exauc- 
torat  exercitum  patrium  cum  subdito- 
rum  offensa  ;  38. 


Pag, 

IlO 


119 


2°  Tryphon,  occasione  hincarrepta,  Emal- 
chuel  Arabem  Antiochi  nutritium  sol- 
licitât ad  hune  tanquam  regem  produ- 
cenJum  ;  39,  40. 

j°  Jonathas  facultatem  pro  arce  Sion 
expugnanda  urgens,a  Demetrio  majora 
pollici ta  rogatus,  submittit  ter  mille 
armatos  Antiochiam.   41-4}. 

IV.  Sub  seditionem  Antiochiae,  ortam, 
I"  Rex  ab  Antiochenis  in  aula  obsessus  im- 
plorât Judasorum   submissorum   auxi- 
lium  ;  4?-47, 

2°  Judœi  civibus  stragem  ingentem,  civitati 
incendium  inl'erunt  ;  47,  43. 

3°  Cives,  viribus  Judœorum  compulsi,  de- 
ponunt  arma  et  precanturpacem,  49-5  r. 

V.  Sub  tranquillitatem  redditam, 

l°  Judasi  gloria  et  spoliis  divites  reverlun- 

tur  Hierosolymam  ;    ;r. 
2°  Demetrius  pacato  regno  fruitur  ;  52. 
3°  Mox  tamen  ingratus  fidem  datam  negli- 

git,  Jonatham  spernit,  Judasos  vexât. $3. 

111°  Fama  Jonathœ  sub  Antiochi  Dei 
initia  celebrior  : 

I.  Ex  a  iditis  ab  Antiocho   honoribus, 

qui, 
i°  Tryphonis  opéra  renuntiatus   rex,  fugat 

Demetrium    et    occupât    Antiochiam  ; 

54-56. 
2°  Jonath»  pristinas  dignitates  et  immuni- 

tates  confirmât,  additis  donis    et   insi- 

gnibus  ;   57,   ',8. 
3°  Simonem   ejus  fratrem  ducem    regionis 

Tyro  et  /Egypto  interjectas  créât.  59. 

II.  Ex  suscepto  contra  perfidi  Deme- 

trii partes  bello,  quo  Jonathas 
i°  Ascalonem  sponte    cedentem    occupât, 

Gazam  ad  deditionem  cogit.omnemque 

regionem     Damascum    usque    subigit  ; 

60-62. 
20  Contra  Demetrii  copias  in  Cades  Gali- 

lasas     excurrit  ,    relicto    in     provincia 

Simone,   et  per   eum  expugnata  Beth- 

sura  ;  63-66. 
3°  Promoto  ad  aquasGenesar  et  campum 

Asor  exercitu,  in  ostium  insidias  inci- 

dit  ;  67,  68. 
4°  Facto  prajlio,  exceptis   turmis   duabus, 

deseritur  ab  omnibus;  69,  70. 
5°  Implorata    divina    misericordia  et   ope, 

restaurât     praelium,     vincit,    fugat,    et 

usque  Cades  cum  desertoribus  rever- 

sis  persequitur  hostes  ;  71-7?." 
6°  Caesis   ter  mille   hostibus  victor  Hiero- 

solyman  redit.  ^4. 

III.  Ex   renovatis    amicitiae   fœderibus, 

quae 
1°  J„iidlhas,  opportuno   nunc   tempore    et 

missis    legatis    ac    litteris,  meditatur  ; 

lib.  1,  cap.  xii,  f  1,  2. 
2°  .Romani,  auditis   legatis  et  datis  vicissim 

litteris  commendatitiis,   probant;  3,    4. 
3°  Epistola  Spartiatis  a   Jonatha    inscripta 

exhibet  ;  5,  6. 
Cujus  argumentum 


459 
Pag. 

119 


12; 


400 


ANALYSIS    BIBLICA 


Pag. 

t.  Memorat  olim  per  litteras  ab  Ario 
postulatam  Judasorum  amicitiam,  et 
hanc  ab  Onia  Spartiatis  promis- 
sam  ;  7,  8.  i  24 

2.  Proponit  renovationem  a  Judaais  of- 
ferri  necessitate  nulla  urgente,  sed 
temporisdiuturnitatesuadente;  o,  io.  12; 

;.  Significat  Spartiatarum  memoriam  fieri 

semper  a  Judaeis  in  sacrificiis  :   it.  » 

-|  Indicat  sortem  Spartiatarum  hactenus 
laetani,  Judaeorum  aulem  tristem  ob 
bellorum  turbas  ;  12,  ij.  » 

Ç.  Addit  Judaeostamen  abstinuissea  pos- 
tulandis  socioruni  subsidiis,  cum 
divinum  auxilium  praesto  fueri;  ij,  1}.  » 

6.  Exponit  legatorum  nomina  et  mandata 

illis  data  ;  16,  17.  •> 

7.  Petit  responsum  reddi.  18.  126 
*  Exemplar   epistolas   olim   ab  Ario  ad 

Oniam  datae,  19,  20.  » 

Qua  Arius 
a.  Renuntiat,   ex    Scriptura   innotuisse 

de  utriusque  gentis   cognatione  et 

descensu  ex  Abraharoo  ;  21.  » 

ô.  Cupit  edoceri  de  Judasorum  prospe- 

ritate  ;  22.  » 

y.  Offert  et  addicit   suorum   cum    illis 

amicitiam.  2J.  » 

IV.  Ex  repetitis  expeditionibus 

l°  Conira   Demetrianos, 

1.  Ad  bellum  regressos,  sed  extra  Judasam 

adhuc   a    Jonatha  occurrente  occu- 

patos  ;  24,  2^.  » 

2.  A  nocturna  aggressione  vigilantia  Jona- 

thae  prohibitos  ;  26-28.  127 

?.  Ope  focorum  accensorum  dissimulata 
fuga  elapsos,  nec  a  Jonatha  inse- 
quente  comprehensos  ;  29,  jo.  » 

20  Contra  Arabes  Zabadasos  caesos  et  spo- 

liatos  ;   ji.  » 

}°  Contra  Damascum  etregionem  vicinam, 
militari  percursione  suD  jugo  retentam; 

?2.  9 

4°  Contra  oram  maritimam  et  Joppem, 
quam  postremam,civibusad  Demetrium 
inclinantibus,  Simon  occupât  et  prae- 
sidio  continet  ;  j  ),  54.  » 

V.  Ex  paratis  defensionibus,  quarum 

i°  Consilium  et  ideam    Jonalhas    Hieroso- 

lymam  redux  senioribus  proponit;  ;î,  ;0  » 

20    Executionem     consentientes     seniores 

reparatione  Hierosolymae  prasstant;  )~.  » 

j°  Amplificationem  Simon  asdificatione  mu- 

nitionum  in   Adiada  facit.   i8.  128 

ij    IV.    INGLORIUS     JONATH/E    EXITUS    CUM 
STRENUO    SIMONIS    IN1TIO 

I"  Proditoria  Jonathœ  interceplio. 


Pas. 


Machinatio  Tryphonis 


i°  Habens  pro  fine  regnum,  submoto 
Anliocho,  occupandum  ;  pro  medio 
comprehensionem  et  necem  Jonathae, 
facinus  alias  impedituri  ;   jg,   40. 

2°  Ccepta  ingressu  in  Bethsan,  sed  inter- 
rupta  adventu  Jonathae  cum  exercitu"; 
40-42. 

j°  Artificiose  tecta  honorum  testi fica tio- 
nibus  largitionibus  et  obsequii  prass- 
tationibus  ;  4;. 


40  Dolose  promota,  propositis  tum  pro 
remittendo  exercitu  rationibus,  tum  de 
Ptolemaide  tradenda  promissionibus. 
44,  45- 

II.  Imprudentia  Jonathae 

1 n  Ex  credulitate  nimia  exercitum  dimit- 
tentis  ;  46. 

20  Ex  prasfidentia  temeraria,  remissis  duo- 
bus  millibus,  socios  duntaxat  mille 
retinentis  :  47. 

)°  Ex  ingressu  Ptolemaidis  incauto  a  suis 
abscissi,et,  sociis  omnibus  interemptis 
capti.  48. 

III.  Consectaria  hujus  infortunii  : 

1°  Periculum  agminis  postremo  retiissi  ab 
insequentibus  Tryphonianis  structum, 
sed  ageneroso  illius  ad  occumbendum 
fortiter  aut  vincendum  apparalu  dis- 
jectum  ;  49-51. 

20  Planctus  reversi  in  Judasam  agminis  et 
universi  Israelis  de  Jonathaet  sociis;  52. 

j°  Conspiratio  hostilis  vicinarum  geniium 
contra  Judasos,  duce  jam  destitutos. 
5!,  U- 

II"  Ducalus   ad    Simonen   translalio. 
Hujus 

I.  Nécessitas  agnita 

i°  Ex  parata  a  Tryphone  in  Judaeam  expe- 
ditione  ;  lib.  1,  cap.  xm,  f  1. 

2°  Ex  timoré  ac  perturbatione  populi 
judaici.  2. 

II.  Opportunitas  data,  Simone  ad  con- 

gregatum  Hierosolymae  populum 
i°  Recensente  patris  et  fratrum  pro  lege  ac 

gente  tum  facta  tum  tolerata  ;  j,  4. 
2°  Offerente  suum  similitercaput  pro  iisdem 

contra  ingruentes  undique  hostes.  5,6. 

III.  Dignitas  delata  a  populo, 

i°    Simonem    ducem    unanimiter    procla- 
mante ;  7,  8. 
2°  Eidem  obedientiam  spondente.  9. 

IV.  Functio  inita, 

i*  Consummatis    ad    Hierosolymae    muni- 

tionem  meeniis  ;  10. 
2°  Ejectis   ex   Joppe    hostium  reliquiis,    et 

illic  admotis  sub  Jonathano  copiis  ;  il. 
j°  Oppositis    contra   Addus    castris,    dum 

Tryphon,    Jonatham    secum     irahens, 

movet  Ptolemaidam.  12,  ij. 

1 11°  Repehta  Tryphonis  prœvaricaho 

I.  Contra  honorem  ac  familiam  Jona- 

thae, quem 
i°  Captum  propter  débita  et  régis  negotia, 

missis  ad  Simonem  ante  praelium  para- 

tum  legatis,  Tryphon  criminatur;  14,  1  î. 
20  Liberandum,  muneratis   centum  argenti 

talentis  et  duobus  liliis  obsidibus  datis, 

idem  pollicetur  ;  16. 
3°  Redimendum    sibi    hoc    pretio    Simon, 

licetperfidiam  subodoratus,  arbitratur 

ad  invidiam  declinandam  ;   17,  18. 
4°  Redemptum  praestitis  omnibus  Tryphon 

captivum  retinet.  19. 

I I.  Contra  vitam  ejusdem,  dum  Tryphon 
i°  Ingressus  in  Judaeam  a  Simone  ubique 
ad  latus  hasrente  a  vi  prohibetur;  20. 


ANALYSIS    BIBLICA 


461 


rag. 

2°  Rogatus  a  prœsidiariis  arcis  in  Sion  ad 
annonam  deferendam,  nive  copiosa 
impeditus  excluditur  ;  21,  ?3.  1  î  2 

jo  Reversurus  in  Syriam,  et  occasione 
actae  fraudis  poslhac  caiïturus,  Jona- 
iham  et  filios  trucidât.  2;,  24.  i;j 

1  V°  Fanas  Joua/ha'  curalum, 

I.  Ossibus    defuncti    acceptis,    et    in 

Modin  in  sepulcro  familia;  repo- 

sitis.  2î.  » 

II.  Planctu  universi  Israelis  per  multos 

dies  continuato.  26.  » 

III.  Mausolaeo  pro  Machabaeorum  fami- 

lia  e  poli tis  lapidibus  erecto, 
atque  pyrar.iidibus,  columnis,  ad- 
ditisque  armorum  et  navium 
simulacris,  ad  œter.iam  memo- 
riam  exornato.  2"-  30.  » 

SECTIO   VI 

DE     SIMONE     ALTERO     WDJE 
SUCCESSORE 

§    I.    RERUM  SUB  SIMONE   GESTARUM  CLASS1S 
PRIOR 

Ie  Principaius  Simoni  slabdilus 

I.  Sapienti  delectu,  quo  is 

i°  Abstinet  a  Tryphone,  Syria,  post  Antio- 
chum  alumnum  suum  inlerfeclum, 
tyrannice  poiito  ;  31,  ;2.  134 

2°  Convertit  operam  ad  lirmanJam  pras- 
sidiis,  munitionibus,  et  alimoniis  Ju- 
dœam;   3;.  » 

t°  Quaerit    Demetrii   amicitiam,  missis    ad 

eum  legatis.  ,'4.  » 

II.  Indulgenti    gratia     Demetrii,    qui, 

per  epistolam  Simoni  et  Judaeis 
inscriptam,  3<,  36.  î;; 

i°  Acceptatis  gratanter  muneribus,  vicissim  » 

remittit  decretum  de  sancienda  pace 
et  societate  ;   57.  » 

20  Déclarât  liberam    et    proprii    juris  Ju- 

daeam  ;  ;8.  » 

3°  Concedit  amnestiam,  et  facultatem  miK- 

tiam  regiam  sequendi.  59,  40.  » 

III.  Plena  libertate 

i"  Vindicata  a  jugo  gentiuni    et  dominatu 

alieno  ;  41.  1  ;6 

2°  Signata  et  expressa  postmodum  in  tabu- 

lis  et  actis  publicis.  42.  » 

IV.  Aucta  securitate, 
i°  Per  urbem  Gazam 

1.  Valida    aggressione    prope    expugna- 

tam;4î,44. 
:.  Ad  supplices   civium  preces   non  qui- 

dem  eversam,  45,  46.  » 

5.  Pur^atam  tamen    penitus  ab   infideli- 

bus,  et  fidelibus  commissam,    muni- 

tamque.  47,  -)B.  » 

2"  Per  arcem  Sion, 


1.  Inlerclusa  annona    et    faîne  urgente, 

ad  deditionem  adactam  ;   49,  î°. 

2.  Ejectis   inde    habitatonbus,    occupa- 

tam  cum  sumtna  laetitiae  ;    stalo  te  m  • 
pore  renovandœ,  contestatione  ;  s1» 

î2- 

3.  Adjectis  ad  templi  montem  munimen- 

tis,  a  Simone  et   sociis  inliabitatam  ; 
52.  Sh 
j°  Per  Joannem  Simonis  filium,  virum  lor- 
tissiinum,  militiae   ducem  constitutum. 
54- 

11°  Prosperilas  reipublicœ ,  facta 

I.  Indemnis  inter  turbas,  queis 

i°  Demetrius  Tryplxonem  impetiturus  Me- 

20    Arssces    Médise  rex    incitatus    Deme- 

trium  praslio  victumaddicit  captivitati  ; 

2,  h 

j°  Simon  abstinens  fruitur  pace  et  amore 
populi.  4. 

II.  Accrescens   inter    molitiones,  queis 

Simon 
i°  Joppen    subactam    aptat   ad    commer- 

cium  maritimum  ;  5. 

diam  ingreditur;  lib.  i,  cap.    xiv,  v.  1. 
20  Provinciae  fines  amplificat  ;  6. 
;°  Civitates  mundat  et  locupletat,  incolis  e 

caplivitate  liberatis.  7. 

III.  Elflorescens    inter    studia    pacis, 

queis 
i°  Cives  excolunt    agros,  seniores    consu- 

lunt  familiis,  juvenes  discunt  honesta- 

tem  et  militiam  ;  8,  9. 
20  Providetur    de    necessariis    pro   bello, 

laeta   agitur    tranquillitas,    et    curaïur 

securitas  ;  10-1  ;. 
jc  Custodia  legis  défendit  bonos  etcoercet 

malos  ;  honor  et  lib^rali tas  promovet 

sacrorum  cultum.  14,  15. 

II 1°  Amicitia  et  socielas  culta 

I.  A  Romanis, 

i°  Coniristatis  de  casu  Jonathae  ;  16. 

20  Gratulantibus  de  successione  Simonis  ; 

>7- 
î°  Curantibus    tabulas,    ad    eumdem    pro 
fotdere  renovando  missas,  et  Hieroso- 
lymas  in  synedrio  lectas.  18,  19. 

II.  A  Spartiatis,  litteras  ad  Simonemet 

gentem  judaicam  dantibus.  19,20. 
Earum  formula 
i°   Memorat    legationem    a   Judasis  nuper 

missam,      a     Spartiatis     cum    gaudio 

exceptam  ;  21. 
20    Récitât    senatusconsultum,     postulatas 

amicitiae  renovaticni  consentiens  :  22. 
30  Communicat  decreti  hujus  transumptum 

Simoni.  23. 

III.  A  Judœis, 

i°  Numenium  cum  clypei  aurei  dono  Ro- 
main iegantibus;  24. 

20  Gratitudii.is  signiiïcationem,  et  Simonis 
laudes  ibidem  celebratas  audienlibus  ; 
25,  26. 

30  Testimonium  de  agnita  Judaeorum,  nu!- 
lius  dominio  obnoxiorum,  libertate 
recipientibus.  20. 


•57 


|J6 


158 


140 


M' 


46: 


ANALYSIS   BIBLICA 


/  V°  Memoria  Simonis  celebrata  monu- 
mento,  sub  tcrtium  princi- 
patus  annum  ,  a  Judaeis 
eidem  erecto,  et  tabulis 
œreis  inscripto.  26-28. 
In  hac  scriptura 

I.  Prremittitur 
i°  Eloaium  brève  omnium  Mathathiae  filio- 

rum  ;  29. 
2°  (,'ompendiaria  de  Jonatha  notitia  ;  30. 
3°  Epitome  hostilium  contra  Judaeam   ma- 

chinationum,  ji. 

II.  Recensetur multiplex  Simonis  cura, 

impensa 
i°  Ad  conscribendos,  armandos  et  alendos 

sua  e  gente  milites  ;   52. 
20  Ad  urbes  judaeas  muniendas  ;  33. 
5°  Ad  munitionesphilistasas  prœsidiis  asse- 

rendas.   34. 

III.  Exhibetur 
i°  Redditum  his  curis  a  populo  prsemium, 

principatus  nempe  et  summum  sacer- 

dotium  ;   ;$. 
20  Redundans   inde  fructus,   per  extermi- 

nationem    hostium    ex    arce    Sion    et 

vicinia  auctus  ;  36. 
5°  Accedens  securitas,    per    Hierosolymas 

prœsidiarios    et    muros  additos  conci- 

liata.  37. 

IV.  Refertur  accessus  Demetrii 
1°  Summum    sacerdotium    Simoni    confir- 

mantis;  38,  ?9. 
2°  Praeviam  Romanorum  amicitiam  imitan- 

lis  ;  40. 
30  Electionem  Judœorum  approbantis.  41. 

V.  Describiturauctoritatis  collatœ  am- 

plitudo, 
i°  In  constituendis  tum  magistratibus  civi- 

libus,  tum  prasfectis  militaribus  ;  42. 
2°  In  stabilienda    ex    Simonis    nomine  au- 

thentia  omnium  tabularum  ;  4;. 
3°  In  imponenda  omnibus  sine   exceptione 

obediendi  necessitate    44,  45. 

VI.  Subjicitur  relatio 
i°  Desecuto  populi  in'prsemissa  consensu  ; 

46. 
2°  De    siiicepto   a    Simone    principatu    et 

summo  sacerdotio  ;  47. 
}°  De  dato  mandato,  formulas  hujus  exem- 

p!ar  alterum  suspendendi    in    publiCD, 

alterum  asservandi   in    Simonis  archi- 

vio.  48,  49. 

§    II.   RERUM  SUB  SIMONE  GESTARUM  CLASSIS 
POSTERIOR 

1°   Pax    et    tranquilhias    aliquandiu 
conlinuata, 

I.  Antiocho  Sedcte,  sub  regni  auspi- 
cia,  datis  ad  Simonem  et  Judaeos 
litteris,  lib.  1,  cap.  xv,  y.  1,  2. 

l°  Significante  suum  \injicandi  regni  patrii 
animum,  et  ad  insequendos  hostes 
transitum  per  Judccam  ;  3,  4. 


Pag.  Pag. 

2°   Confirmante   concessa    Judias  a    suis 

praedecessoribus     privilégia,     adjecta 

insuper    monetas   cudendi    facultate  ; 

Ç-8.  146 

?°  Promittente  ,  post  regnum  occupatum, 

ampliora  dona  et  bénéficia.  9.  » 

»'  II.    Tryphone  regni   usurpatore 

i°  Deserto  a  suorum  plerisque  ;  10.  » 

20  Doram,  cum  nihil  superesset,  profugo  ; 

11,  12.  » 

3°  Obsesso    ibidem   terra  marique    ab  An- 
142  tiocho,  fugientem  insecuto,  13,  14.  » 

"  III.Numenio    Judajorum    legato    cum 

litteris  Romanis  ad  reges  et  pro- 
vincias  datis  reverso.  1$.  147 

Harum  litterarum  exemplar,  a 
Lucio    Romanorum  consule 
»  Ptolemœo  inscriptum,  16.  » 

i°  Narrât  legatio-nem  pro  renovanda  so- 
cietate  a  Simone  missam,  et  clypeum 
aureum  dono  oblatum  ;  17,  18.  » 

2°  Exhibet  decretum  Romanum  de  dandis, 
pro     Judœorum    tranquillitate    asse- 
renda,    ad    vicinas    gentes    mandatis, 
»  deque   admittendo  clypei   oblali    mu- 

nere  ;  19,  20.  » 

3°  Mandat  transfugas,  si  qui  fuerint,  Simoni 
14?  ad  poenam  sumendam  tradi.  21.  » 

IV.     Litteris  iisdem  missis 

i°  Ad  Demetrium,  Attalum,  aliosque    re- 
ges ;  22.  » 
20  In  provincias  magnas  Graecias  plerasque 

nominatas  ;  2  3.  » 

"     •  3"  Ad  Simonem  etiam  in  transumpto.  24.  148 

»     F  Amiciluv  fœdus  ab  Anliocho  viola- 
"  tum, 

I.  Dato  alienati  animi  indicio,  dum, 
sub  obsidionem    Dorae  continua- 

„  tam,  missas  a  Simone  copias  auxi- 

liares  ac   donationes   respuit,   et 
M4  pacta  rescindit.  25-27.  » 

II.  Postulato  per  Athenobium,  ab  An- 
tiocho  missum,  a  Simone  magni- 
fiée exceptum,  proposito,  28,  p..        149 

»  Quo 

t°  Detentio  Joppes,  Cizaras  et  arcis  Sion 
"  aliorumque  locorum  declaratur  iniqua  ; 

29.  » 

2"  Repetitur  eorumdem  restitutio  cum  tri  - 

butis  perceptis  ;  ;o.  » 

"  30  A  Jditur  condhio,  nisi  malit  Simon  loco 

utnusque  solvere  mille  talenta  :  si 
neutrum  fecerit,  indicitur  bellum.  31.  >< 

III.  Responso  ad  postulatum 
i°  Dato    a    Simone,   proprietatem  urbiufm 

Judasaa  sibi  asserente  ;  pro  redemp- 
tione  aliarum,  extra  Judœam  defensio- 
nis  titulo  occjpatarum,  centum  talenta 
olferenté  ;  3  i-j^.  » 

20  Relato    ad    Antiochum    ab   Athenobio, 
145  nihil  cor<im  obloquente,   sed    irato,   et 

Simonis  magnificenuam  in.idiosius 
exaggerante,   35,  36.  » 

<•  )°  Excepto  cum  indignatione  Antiochi.  ;6.  >> 


ANALYSIS    BIBLICA 


46  j 


IV.  Infestatione  Judaeae  hostili, 

i°  Demandata  Cendebaeo,  constitutoexpe- 
ditionis  duci,  dum  Antiochus  Try- 
phonem  Dora  elapsum  persequeretur  ; 
Î7-Î9- 
20  C'cpta  ab  hoc  duce  per  vicinae  ad 
Janmiam  provinciaa  vexationem,  et 
Cedronis  munimenti  œdificationem  ;  40. 
5°  Parata  amplius  per  collocatos  ibidem 
excursuros  in  Judaaam,  41. 

III0    Defensio    contra    Ahtiochi   vim 

hostile  m 
I.      Delata  filiis  a  Simone, 

i°  Irruptionem  hostilem  audiente  ;  lib.  1, 
cap.  xvi,  f.  1. 

2°  Ob  senium,  post  facta  olim  gloriosa, 
nunc  ellcetum,  sibi  Judam  et  Joannem 
lïlios  natu  majores  substituente  ;  2,  ;. 

j°  Eosdem  ad  pugnandum  sub  Dei  adju- 
torio  animante,  et  cura  viginti  millibus 
ac  equi  ta  t  u  contra  hostes  mit  tente,  },  4. 
Iï.    Suscepta  ab  iisdem, 

i°  Oppositis  contra  CenJebaei  castra  cas- 
tris;  ç. 

2°  Transmisso  fortiter  torrente  interme- 
dio ;  6. 

?°  Acie  praelii  ordinata.  7. 
III.  Gesta  féliciter, 

i°  Hostibus  prœlio  victis,  caesis  pluribus, 
reliquis  Cedronem  profugis  ;  8. 

2°Joanne,  cum  Judas  vulneraretur,  eos 
Cedronem  usque   persequente  ;  9. 

5°  Eodem  hinc  etiam  in  turres  Azoto  con- 
terminas  dilapsos  urgente,  turribus  in- 
censis  confidente,  in  Judaaam  denique 
cum  pace  reverso.  10. 

I  V°  Facinus atrox  Ptotcmœi filii Abob, 

I.  Ortum  ex  ambitione  hujus  viri, 
i°  Dignitati  et  divitiis  ornati  ;   11. 
2°Aflinitale  cum  Simone  conjuncti  ;  12. 

j°  Ampliori  fortunée  et  soceri  atîiniumque 
vitas  insidiali.  ij. 

II.  PatratumdissimuIataproditione,qua 
i°  Simonem  cum  filiis  Judaeam  lustrantem, 

ad  descensum  in  Jéricho,  invitât  in 
Doch  suam  munitiunculam  ;    14. 

20  Ibidem,  parato  convivio,  et  disposilis 
clam  sicariis,  excipit;  1$. 

J°  Sub  finem  convivii  armatus  invadit  et 
penmit  ,  casde  simul  quibusdam  -ser- 
vis, noxa  aulem  universo  Israeli  illata. 
16,  17. 

III.  Auctum  multiplici  perfidia, 

t°  Contra  patriam,  evocando   Ptolemaeum 

/Egyptium  ;  18. 
2°  Contra      jura,       machinando       mortem 

Joanni,  et  sollicitando  tribunos  ;  19. 
j°  Contra    sacra,    mittendo     occupaturos 

Hierosolymam  et  templum.  20. 

IV.  Inhibitum  ab  ulteriore  progressu, 

i°  Prrccursore  nuntio    Joannem     rnonente 

de  facinore  et  insidiis  ;  21. 
2°  Jeanne  immisos  contra  se  sicarios  prœ- 

veniente  et  occidente  ;  22. 
)°  Eod^m  in   pontricatum  succedente,    ac 

de;nceps  claro  gtstis  tum  bellicis,  tum 

politicis,   in  libro    sacerdolii   ejusdem 

consignais.  2),  24. 


Pas 


154 


II 


EPILOGUS 

I.      Narrationem  scriptoris  cum    Nica- 

noris  epocha  finitam  pronunciat. 

Lib.  11,  cap.  xv;  f.  ]8. 
Sciiptum  probari  optât;   scriptionis 

elegantiam  forsan  minorem    non 

dissimulât.  30. 
III.  Eamdem  tamen  excusât, scriptorum 

varietate  pro  more  in  aliis    solito 

placitura,  finemque  libro  imponit. 

40. 

APPENDIX 

EPISTOLAS  DUAS    EXTRA  NARRATIONIS 

SERIEM 

POSITAS  SUBNECTENS 

EPISTOLA   PRIOR 

I.  Inscribitur   Judaeis    per   vEgyptum 

sparsis  a  Judaeis  Hierosolymam 
et  Judaeam  incolentibus,  salutem 
et  pacem  praemittentibus.  Lib.'ii, 
cap.  1,  ji>.  1. 

II.  Apprecatur  a  Deo 

l°  Bénéficia    patriarchis   olim    et    omnibus 

tidelibus  promissa  ;   2. 
20  Gratiam  ad    divinum    cultum    et    obse- 

quium,  legisque    observantiam    magno 

et  lubenti  animo  prasstandam  ;   ?,  4. 
5°  Annutum  orantibus,  indulgentiam  pœni- 

tentibus,  et  opem  patientibus.   5. 

III.  Certiores  facit  de    memoria   eorum 

in  precibus  fieri  solita.  6. 

IV.  Piovocat  ad  litteras,  anno   Graeco- 

rum  centesimo  nono    scriptas,  de 
gravissimis  malisaJasone  illatis.7. 

V.  Adjicit,  sublatis    nunc   iisdem,    sa- 

crorum  usum  frequentatum.  8. 

VI.  Invital  ad  festum  scenopegiae  cele- 

brandum.  9. 

EPISTOLA    POSTERIOR 

7°  Inscriptio  consignatur  anno  Grse- 
corum  centesimo  octogesi- 
mo  octavo,  fit  a  Juda,  sena- 
tu,  populoque  Judœorum  in 
Judtea,  dirigitur  ad    Aristo- 

ma- 
ac 

Juda'os  in  /Egypto,  preca- 
tur  salutem  et  sanitatem.  io. 

Il"  Exordium 

I.  Exhibet  gratiarum  actionem  Ju- 
daeorum  pro  liberatione  ab  An- 
tiocho  Sedete,  pessimo  Israelis 
hoste  in  Pers-ia    demum   sublato. 


bulum  régis   Ptolem.ci 
gistrum    et  sacerdotem, 


Pas. 


254 


156 


1)8 


4<*4 
I! 


ANALYSIS    BIBLICA 


II 


IV 


Pag. 
.  Describit  breviter  simulatam  An- 
tiochi  procationem  Naneœ  in 
sponsam,  ingressum  in  hujus  fa- 
num,  cœdem  a  sacerdotibus  ex 
occuho  aditu  irrumpentibus  fao 
tam.  14-16. 
I;  Instaurât  rcdditas  a  Judaeis  pro  hoc 

beneficio  Deo  laudes.  17.  1^9 

Propositio  enuntiat  decretam  ab 
Hierosolymitanis  purificatio- 
nem    templi    in    vigesimam 
quintam    Casleu,   exhortatur 
^Egyptios     ad    celebrandam 
scenopegiam    et   memoriam 
reperti  a  Nehemia  ignis  sa- 
cri.   18. 
Narralionis  pars  prima  de    igné 
cœlitus  dato. 
Factum  antecedens  : 

l°  Sub  transmigrationis  Bjbylonicas  ini- 
iium,sacerdoles  ignem  de  altari  trans- 
latum  abscondunt  in  vallis  puteo,  alto, 
sicco  et  igno'o  ;  10.  » 

2°  Post  annos  plures  et  reditum  Nehemias, 
inquiritur  ab  illorum  nepolibus  ignis 
iste,  sed  nonnisi  aqua  crassa  inveni- 
lur  ;  20.  n 

)"  Nehemia;  jussu,  hac   aqua  asperguntur 

sacnficia  et  ligna  apposita  ;  21.  >. 

40  Alliilgente  sole,  aceendilur  magnus  in 
altari  holocaustorum  ignis,  miramibus 
omnibus,  et  preces  fundentibus  sacer- 
dotibus ;  22,  2 j.  iùo 
.  Oratio  Nehemiae  intercedens,  qua 
Deum 

i°  Invocat,  atlributis  Dei  enumeratis  ; 
2-t.  2;. 

2°  Rogat,  suscepto  hoc  sacrificio,  et  po- 
pulo tum  sanctificato  tum  reducto, 
maniftstare  gloriam  suam  ;  20,  27.  » 

)°  Postulat  vinlictam  de  hostibus  et  pos- 
sessionem  loci  sancti,a  Moyse  praedic- 
lam  ;  28,  29.  » 

II.  Factum  consequens  : 

i°  Sacerdotes,  consumptis  inter  hymnos  a 
se  continuât  os  sacrificiis,  jubentur  aqua 
residua  lapides  majores  perfunJere  ; 
50,  il. 

i°  Ignis  hinc  etiam  accensus  consumitur  a 

tlamma  de  altari  progressa.  ;2.  161 


50  Fama  hujus  rei,  in  Persidem  perlata, 
exercitatus  rex,  pott  diligens  examen 
agnoscit  miraculum,  in  memoriam  eri- 
git   templum,  sacerdotibusdonat  varia; 

40  Nomen  memoriale  loco  a  Nehemia 
adjicitur.  ;6. 

V"  Narrationis  pars  aller  a,  ex  Jere- 
mise  commentariisdesumpta, 

I.  De  igné  sacro,  quem  Jeremiasjus- 

sit  a  transmigrantibus  assumi, 
additis  monitis  de  vitando  idolo- 
rum  cultu,  et  iege  sancita  colenda. 
Lib.  11,  cap.  11,  y  1-). 

II.  De     arca,    tabernaculo,    et    altari 

thymiamatis,  qu«3 
i°  Jeremias  a  Deo  jussus  in  spelunca  mon- 

tis  Nebo  abscondit  ;  4,  ç. 
2°  Indagatores  pone  sequentes    non    inve- 

niunt,  ob  curiositatem  hanc  reprehensi 

a  propheta.  6,  7. 

III.  De  oraculo  Jeremise 

i°  Prajnuntiantis  locum  hune  fore  ignotum 
usque  ad  secuturam  populi  Dei  congre- 
gationem  ;  3. 

3°  Describentis  futuram  tum  majestati.s 
divinas  manifestationem  ;  9. 

3°  Probantis,  ex  Moysis  et  Salomonis 
exemplo,  necessariam  devotionis  excel- 
lentiam  pro  impetranda  hujusmodi 
gratia.  10-12. 

VI°  Narrationis  pars  Icr/ia  breviter 
notât, 

I.  Eadem  fuisseconscripta  a  Nehemia, 

bibliothecam  adornante  ;  15. 

II.  Sacros  codices  per  bella  dissipatos 

simili  cura  a  Juda  collectos  ;  14. 

III.  Horum  transumpta  posse  commu- 

nicari  desiderantibus.  15. 

Vil0  Epilogtts  repetit 

I.  Exhortationem    ad    celebrandum 

festum  tabernaculorum  et  memo- 
riam ignis.  16. 

II.  Grates  et  laudes  Deo  pro  restitutis 

sacris  débitas.  17. 
IlI.Augurium     de     omnimoda     populi 
reparatione,    ex    beneficio    parti 
Judœorum  jam  praestito.  :B,  19. 


Pas 


161 


162 


10; 


16; 


TABLE  DES  MATIÈRES 


LES   MACCABEES 


Page 


Introduction 

Concordance    des  deux 
Maccabées. 


livres    canoniques   des 


Livre  i.  —  Chapitre  1er.  —  Victoires  d'Alexan- 
dre le  Grand.  Sa  mort.  Partage  de  ses  états.  Des 
Juifs  impies  se  séparent  de  l'alliance  sainte.  Antio- 
chus  Épiphane  ravage  la  Judée  et  pille  le  temple. 
Jérusalem  est  désolée  par  ses  ordres.  Il  veut  con- 
traindre les  Israétes  d'abandonner  leur  loi.  Il  fait 
dresser  une  idole  dans  le  temple. 

Chap.  h.  —  Matthathias, touché  des  maux  de  son 
peuple,  se  retire  à  Modin.  Il  refuse  de  sacrifier 
aux  idoles  ;  il  tue  un  Juif  qui  s'avançait  pour  sacri- 
fier, et  l'officier  qui  l'y  contraignait.  Plusieurs  Juifs 
se  retirent  dans  le  désert.  Ils  se  laissent  tuer  de 
peur  de  violer  le  sabbat. Matthaihias  avec  un  corps 
d'armée  entreprend  de  détruire  le  culte  des  idoles: 
il  exhorte  ses  enfants  ;  il  meurt. 

Chap.  m.  —  Judas  Maccabée  succède  à  Mattha- 
thias, son  père.  Il  défait  et  tue  Apollonius.  Il  mar- 
che contre  Séron  et  le  défait.  Les  victoires  de 
Juda  irritent  Antiochus.  Lysias  envoie  une  armée 
nombreuse  contre  les  Juifs.  Judas  et  les  siens  se 
préparent  à  combattre   les  ennemis. 

Chap.  iv.  —  Judas  Maccabée  attaque  séparé- 
ment Nicanor  et  Gorgias,  et  les  met  en  déroute. 
Il  remporte  la  victoire  sur  Lysias.  Il  va  à  Jérusa- 
lem, purifie  les  lieux  saints  et  fortifie  la  montagne 
de  Sion. 

Chap.  v.  —  Guerres  de  Judas  contre  les  Idu- 
méens  et  contre  les  Ammonites.  Expéditions  de 
Simon  dans  la  Galilée,  et  de  Judas  dans  le  pays  de 
Galaad.  Joseph  et  Azarias  laissés  en  Judée,  s'avan- 
cent témérairement  contre  Gorgias,  et  sont  vaincus. 
Judas  revenu  en  Judée,  marche  contre  les  Idumé- 
ens  et  contre  les  Philistins. 

Chap.  vi. —  Mort  d'Antiochus  Épiphane;  son  fils 
Eupator  lui  succède.  Eupator  vient  en  Judée  avec 
une  puissante  armée.  Prise  de  Bethsura.  Les  Juifs 
sont  assiégés  dans  le  temple.  Paix  entre  Eupator 
et  les  Juifs. 

Chap.  vu.  —  Démétrius,  fils  de  Séleucus,  vient 
en  Syrie  et  fait  mourir  Antiochus  Eupator  et  Ly- 
sias. Il  envoie  en  Judée  Bacchide  pour  établir 
grand  prêtre  l'impie  Alcime.  Bacchide  tache  en 
vain  de  surprendre  Judas  ;  il  se  retire.  Nicanor 
est  envoyé  contre  Judas;  il  est  tué  et  son  armée 
entièrement  défaite. 

Chap.  viii.  —  Le  nom  des  Romains  vient  à  la 
connaissance  de  Judas  Maccabée.  Il  envoie  des 
ambassadeurs  à  Rome  pour  faire  alliance  avec  eux. 
Formules  et  conditions  de  cette  alliance. 


i 


16 


4i 


50 


59 


68 


80 


Chap.  ix.  "—  Bacchide  et  Alcide  reviennent  en 
Judée.  Judas  est  tué  dans  !e  combat.  Jonathas,  son 
frère,  lui  sucède.  Bacchide  le  poursuit.  Jean,  frère 
de  Jonathas,  est  tué.  Jonathas  traverse  le  Jourdain 
à  la  vue  de  l'ennemi.  Alcime  meurt  frappé  de  Dieu. 
Bacchide  se  retire  ;  il  revient,  et  est  défait  par  Jo- 
nathas.  Paix  entre  Jonathas  et  Bacchide. 

Chap.  x.  —  Alexandre  Balas  s'élève  contre  Dé- 
métrius Soter.  Ils  recherchent  l'un  et  l'autre  l'ami- 
tiéde  Jonathas.  Celui-ci  se  déclare  pour  Alexandre 
qui  le  comble  d'honneurs.  Alexandre  défait  et  tue 
Démétrius.  Il  épouse  la  fille  de  Ptolémée  Philo- 
métor.  Il  fait  venir  Jonathas  à  Ptolémaïs,  et  l'élève 
en  gloire.  Dé.nétrius  Nicanor  envoie  Appollonius 
contre  les  Juifs    Jonathas  défait  Apollonius. 

Chap.  xi.  —  Ptolémée  Philométor  envahit  le 
royaume  d'Alexandre  Balas.  Combat  entre  ces 
deux  princes.  Alexandre  se  sauve  ;  on  lui  tranche 
la  tète.  Ptolémée  meurt.  Démétrius  Nicanor  monte 
sur  le  trône,  comble  d'honneurs  Jonathas,  accorde 
plusieurs  privilèges  aux  Juifs.  Entreprise  de  Try- 
phon.  Soulèvement  à  Antioche.  Les  Juifs  sauvent 
Démétrius.  Ingratitude  de  ce  prince.  Antiochus 
Théos  est  mis  sur  le  trône  et  recherche  i'amitié  de 
Jonathas.  Guerre  de  Jonathas  contre  les  troupes 
de  Démétrius. 

Chap.  xu.  —  Jonathas  renouvelle  l'alliance  avec 
les  Romains  et  avec  les  Lacédémoniens.  Il  met  en 
fuite  l'armée  de  Démétrius.  Il  tourne  ses  armes 
contre  les  Arabes  et  les  Syriens.  Simon  étend  ses 
conquêtes  jusqu'à  Joppé.  Jonathas  est  pris  à  Pto- 
lémaïs par  Tryphon. 

Chap.  xiii.  — -  Simon  succède  à  Jonathas.  Il  s'op- 
pose aux  entreprises  de  Tryphon.  Mort  de  Jona- 
thas. Simon  bâtit  un  sépulcre  pour  son  père  et  ses 
frères.  Tryphon  tue  le  jeune  Antiochus  et  règne  à 
sa  place.  Simon  recherche  l'amitié  de  Démétrius 
Nicanor,  et  obtient  l'affranchissement  de  son  pays. 
Il  assiège  et  prend  Gaza.  La  forteresse  de  Jérusa- 
lem lui  est  rendue.  Il  met  Jean  Hyrcan,  son  fils,  à 
la  tète  de  l'armée. 

Chap.  xiv.  —  Guerre  de  Démétrius  contre  les 
Parthes  ;  il  est  fait  prisonnier.  Bonheur  du  gouver- 
nement de  Simon.  Les  Romains  et  les  Lacédémo- 
niens renouvellent  l'alliance  avec  lui.  Les  Juifs 
lui  confirment  par  un  acte  solennel  la  souveraine 
autorité. 

Chap.  xv.  —  Offres  avantageuses  d'Antiochus 
Sidète  à  Simon.  Tryphon,  abandonné  de  ses  trou- 
pes, est  assiégé  dans  Dora.  Les  Romains  écrivent 
en  faveur  des  Juifs  aux  rois  et  aux  peuples  voisins. 
Antiochus  se  brouille  avec  Simon.  Tryphon  se 
sauve  de  Dora.  Antiochus  le  poursuit,  après  avoir 
donné  l'ordre  à  Cendébée  de  marcher  contre  les 
Juifs  avec  une  puissante  armée. 


Page 


94 


10? 


'M 


'2; 


1)0 


466 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Chap.  xvi.  —  Guerre  de  Cendébée  contre  les 
Juifs.  Il  est  mis  en  fuite  par  les  fils  de  Simon.  Si- 
mon est  tué  par  Ptolémée,  son  gendre.  Jean  Hyr- 
can  succède  à  Simon  son  père. 

Livre  h.  —  Chapitre  Ier.—  Lettre  des  Juifs  de 
Judée  à  ceux  d'Egypte,  pour  leur  recommander  de 
célébrer  la  fôte  de  la  nouvelle  dédicace  du  temple. 
Autre  lettre  antérieure  à  laprécédente.  Les  Juifs 
de  Judée  exhortent  ceux  d'Egypte  à  célébrer  avec 
eux  la  fête  de  la  nouvelle  dédicace  du  temple  et 
celle  du  recouvrement  du  feu  sacré. 

Chap.  ii.  —  Suite  de  la  lettre  précédente  où  se 
trouvent  diverses  particularités  arrivées  au  temps 
de  la  transmigration  des  Juifs  à  Babylone.  Préface 
oii  l'auteur  de  ce  livre  expose  son  dessein. 

Chap.  m.  —  Bonheur  des  Juifs  sous  le  pontificat 
d'Onias  III.  Simon,  préfet  du  temple,  fait  savoir 
:'i  Séleucus,  roi  de  Syrie,  qu'il  y  a  de  grands  tré- 
sors dans  le  temple.  Héliodore  est  envoyé  pour 
les  enlever.  Dieu  le  châtie  par  la  main  des  anges. 

Chap.  iv.  —  Calomnies  de  Simon.  Jason  obtient 
à  prix  d'argent  la  souveraine  sacrillcature.  Il  com- 
met toutes  sortes  d'impiété.  Antiochus  est  reçu  à 
Jérusalem.  Ménélaïis  supplante  Jason.  Il  est  accusé 
devant  Antiochus,  et  laisse  à  sa  place  Lysimaque. 
Onias  reprend  Ménélaiis  et  est  tué  par  Andronique. 
Antiochus  venge  la  mort  d'Onias.  Lysimaque  est 
tué  par  le  peuple.  Ménélaiis  rachète  sa  vie  pour 
une  somme  d'argent. 

Chap.v. —  Antiochus  se  prépare  à  marcher  contre 
l'Egypte.  Prodiges  effrayants  qui  paraissent  dans 
l'air  au  dessus  de  Jérusalem.  Expédition  de  Jason 
contre  Jérusalem  ;  sa  fuite  et  sa  fin  malheureuse. 
Antiochus  marche  contre  Jérusalem.  Expédition  de 
Jason  contre  Jérusalem  ;  sa  fuite  et  sa  fin  malheu- 
reuse. Antiochus  marche  contre  Jérusalem  ; 
violences  qu'il  y  exerce.  Il  envoie  Apollonius,  qui 
y  exerce  de  nouvelles  cruautés  ;  Judas  Maccabée 
se  retire  dans  le  désert. 

Chap. vi. —Antiochus  force  les  Juifs  d'abandonner 
!es  lois  de  Dieu  pour  embrasser  le  culte  des 
idoles.  Profanation  du  temple.  Cruautés  exercées 
contre  les  Juifs  fidèles  à  la  loi  du  Seigneur.  Dessein 
de  Dieu  en  permettant  ces  maux.  Martyre  du  saint 
vieillard  Éléazar. 

Chap.  vu.  Martyre  des  sept  frères  Maocabées  et 
de  leur  mère. 

Chap. vin. —  Judas  Maccabée  fortifie  son  parti  et 
fait  des  courses  sur  les  ennemis.  Nicanor  et  Gorgias 
sont  envoyés  contre  lui.  Il  exhorte  les  siens  à  com- 
battre avec  courage.  Il  met  en  fuite  l'armée 
ennemie.  Il  continue  de  remporter  de  grands  avan- 
tages. Nicanor  s'enfuit  à  Antioche. 

Chap.  ix.— Antiochus  revient  de  Perse.il  apprend 
que  ses  généraux    ont  été  défaits  par    les  Juifs.  Il 


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jure  la  perte  de  ce  peuple.  Dieu  !e  frappe,  et  le 
force  de  confesser  sa  propre  faiblesse.  Vaines 
protestations  d'Antiochus.  Lettre  qu'il  écrit  aux 
Juifs.  Il  meurt  misérablement.  Philippe  transporte 
son  corps. 

Chap.  x.  —  Purification  du  temple  par  Judas 
Maccabée.  Lysias  régent  du  royaume  de  Syrie  sous 
Antiochus  Eupator.  Mort  de  Ptolémée  Macron. 
Courses  de  Gorgias  sur  les  Juifs.  Victoires  de 
Judas  sur  les  Iduméens.  Délaite  de  Timothée. 
Prise  de  Gaza. 

Chap.  si.—  Lysias  rient  en  Judée  avec  une  armée 
nombreuse.  Les  Juifs  invoquent  le  Seigneur  et 
remportent  la  victoire.  Lysias  leur  demande  la  paix  : 
Judas  l'accorde.  Lettre  de  Lysias  aux  Juifs.  Lettres 
d'Antiochus  Eupator  à  Lysias  et  aux  Juifs.  Lerftre 
des  Romains  aux  Juifs. 

Chap.  su.  Les  Juifs  sont  présentés  par  les  gou- 
verneurs des  pays  voisins  de  la  Judée.  Expéditions 
de  Judas  contre  les  habitants  de  Joppé  et  contre 
ceux  de  Jammia.  Il  marche  contre  Timothée  au- 
delà  du  Jourdain.  Il  délait  l'armée  de  Timothée.  Il 
revient  à  Scythopolis.  Il  marche  contre  Gorgias, 
et  le  met  en  fuite.  Oblations  pour  les  Juifs  qui' 
avaient  éié  tués  dans  ce  combat. 

Chap. xni. —Antiochus  Eupator  marche  contre  les 
Juifs  avec  une  puissante  armée.  Il  fait  mourir 
Ménélaiis.  Judas  jette  le  trouble  dans  le  camp  des 
ennemis.  Siège  de  Bjthsura.  Paix  entre  Eupator 
et  les  Juifs. 

Chap  xiv.—  Démétrius,  fils  de  Séleucus,  vient  se 
mettre  en  possession  du  royaume  de  Syrie.  Alcime 
l'irrite  conire  Judas.  Il  envoie  Nicanor  contre  les 
Juifs.  Nicanor  fait  la  paix  avec  Judas.  Alcime  la 
trouble.  Démétnus  ordonne  à  Nicanor  de  lui 
envoyer  Judas  hé  et  garrotté  ;  Judas  se  retire. 
Nicanor  blasphème  contre  le  temple.  On  accusé 
auprès  de  lui  Razias.  Mort  glorieuse  de  ce 
vieillard. 

Chap.  xv.  —  Nicanor  veut  attaquer  les  Juifs.  Il 
blasphème  contre  le  Seigneur.  Judas  exhorte  les 
siens  :  il  leur  rapporte  une  vision  qu'il  a  eue.  Il 
détail  l'armée  de  Nicanor.  Nicanor  est  trouvé  tué 
sur  le  ciiamp  de  bataille  ;  sa  tète  et  sa  main  sont 
suspendues  à  la  vue  de  tous.  Actions  de  grâces 
rendues,  et  fêtes  instituées  en  mémoire  de  cette 
victoire. 

Livre  III. 
Livre  iv. 

Notice  sur  les  livres  apocryphes  de  l'ancien 
Testament. 

Coup-d'œil  rétrospectif  sur  l'organisation  de 
la  nation  juive. 

ANALYSIS    BlBLICA. 


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■  hap.tre  x.n  du  «•  hvre  des    Maccabées  se  trouve  page       livre  des  Maccabées  qui  se  trouve  page  2JS. 


Alias    -   imprimée  SUEUR-CHARRL'I-  Y,    rue  des  Balances,   16. 


La  Bibliothèque 
Université  d'Ottawa 
Echéance 


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Unîversîty  of  Ottawa 
Date  Due 


a  39 00 3     000  39  39  6_6b 
BS  493  •    P    4  1869  V    1     2 

PETITt  J.  P# 

LP  SPINTE  BIBLE  PVEC 


CE    BS       CAS  3 
,P4    1889    S/012 
COO       PETIT,     J- 
ACC*     1043288 


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