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Full text of "L'assassinat de François de Lorraine due de Guise: 18 février, 1563"

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L'ASSASSINAT 



DE 



FRANÇOIS DE LORRAINE 

DUC DE GUISE 

18 février 1563 

PAB 

LE BARON DE BUBLE 

Membre de lInstitut 



PARIS 

EMILE PAUL ET FILS ET GUILLEMLN 

Libraires de la Bibliothèque Nationale 
28, RUE DBS BONS-BNFANTS, 28 

1897 



L'ASSASSINAT 



1)J? 



FUANCOIS DE LORRAINE 



DUC DE GUISE 



«M 




HARVARD 
COLLEGE 
L I B R A R Y 



Fr \^^o,^ 




(( Je vie fais un dewir de retracer fidèhmnt 
celle mort pieuse et sincère d'un grand homme, au 
terme d'une vie forte et glorieuse, mêlée de bien et 
de mal, sans que le inal y eut étouffé le bien. Ce 
puissant et consolant mélange est le caractère des 
hommes éminents du xw"^ siècle, catholiques ou 
protestants, guerriers ou magistrats; et c'est un 
spectacle bon à offrir dans des temps où le doute 
et V affaiblissement moral est la maladie commune, 
même des bons esprits et des lionnêles gens. y> 

(GuizoT, Histoire de France^ t. III, p. 303). 



PKOLOGUE 



François de Lorraine ^ duc de Guise. — Règne 
de François IL — Rivalité de Guise et de Coli- 
gny. — Troubks de la Réforme. — Massacre de 
Vassy (i^"" mars i562.) — Entrée du duc de 
Guise à Paris {16 mars.) — Rôle du duc de 
Guise dans la première partie de la guerre de 1562. 

Parmi les questions que les guerres de la 
Réforme, au xvi* siècle, ont léguées à nos 
polémiques, il n'en est pas de plus grave 
que celle de l'assassinat de François de 
Lorraine, duc de Guise, par Poltrot de Meré. 
Par qui fut armé le bras de l'assassin? Coli- 
gny est-il vraiment coupable d'avoir préparé 
le crime, d'avoir conseillé, payé et dirigé le 
criminel? Ce n'est point une simple question 
de fait, car elle a eu d'immenses conséquen- 
ces. Après avoir été discutée avec passion, 
même les armes à la main, pendant la durée 
du règne de Charles IX, elle a enfanté le 
plus grand forfait de notre histoire, le mas- 
sacre de la Saint-Barthélémy. 



— 2 — 

Qu'était le duc de Guise? Quelle était son 
importance à la date de la première guerre 
civile ? Quel intérêt le parti réformé pouvait- 
il avoir à se défaire de lui? 

François de Guise était le fils aîné d'un 
prince lorrain qui, après de graves démêlés 
avec le chef de sa maison, avait servi 
en France et avait épousé Antoinette de 
Bourbon. Né à Bar, le 17 février 1519, il 
porta d'abord le nom de comte d'Aumale et 
fit ses premières armes en 1542. Il n'avait que 
26 ans quand il reçut, pendant le siège de Bou- 
logne, une blessure au visage qui lui laissa 
le surnom de Balafré. Duc d'Aumale et pair 
de France en 1547 *, il devint gouverneur du 
Dauphiné et prit part à toutes les campagnes 
du règne de Henri II. Après le désastre de 
Saint-Quentin (10 août 1557), il sauva la 
France par la conquête de Calais, de Thion- 
ville et d'Arlon. Jamais prince n'avait été 
doué de qualités plus brillantes : une bra- 
voure qui entraînait les soldats ; un coup d'œil 
toujours juste sur les champs de bataille; 
une prudence infaillible; par-dessus tout 
cet art de commander, propre à fanatiser les 
hommes, qui est le privilège des grands 

1. — Les lettres patentes qui érigent le comté 
d'Aumale en duché pairie, sont de juillet 1547 (coll. 
Dupuy, vol. 484.) 



— 3 — 

capitaines. Son application au travail lui 
permettait d'étudier les moindres affaires 
par lui-môme, de lire toutes ses lettres et de 
corriger de sa main toutes les minutes qu'il 
devait signer*. L'ambition, l'orgueil gâtaient 
ces qualités. Généreux, ce magnifique x> 
comme pas un seigneur de France, sa mai- 
son était montée comme celle d'un roi ^; il 
entretenait une cour nombreuse, une garde, 
une clientèle de gentilshommes qui l'auraient 
suivi au bout du monde; ses flatteurs le 
disaient issu de Charlemagne, et il faisait 
volontiers étalage de sa prétendue origine 
impériale ; il signait habituellement François, 
prérogative que les princes du sang de 
France et à plus forte raison les princes 
étrangers ' laissaient toujours au roi *. 

L'avènement de François 11(10 juillet 1559) 
porta au comble la faveur e.t l'autorité du 
duc de Guise ^. Oncle de Marie Stuart et 
tout puissant sur l'esprit du roi, aussi 



i. — Commentaires de Biaise de Monluc^ (édit. 
de la Soc. de THist. de France, t. II, p. 258.) 

2. ~ Voyez aux Pièces justificatives une note sur 
Tëtat de sa maison. . 

3. — Notamment les princes de la maison de Savoie 
et de Clèves établis en France. 

4. — Voyez Antoine de Bourbon et Jeanne 
d*Albret, t. II, p. 9, note 3. 

5. — Son père était mort le 12 avril 1550 et il avait 
pris aussitôt le titre de duc de Quise. 



_ 4 — 

• 

capable, aussi fort que Tenfant couronné 
était faible et borné, il régna réellement 
pendant les dix-sept mois que le a petit roy » 
passa sur le trône. La Réforme avait grandi 
à la faveur des guerres étrangères, sous 
François I" et sous Henri II, et les réformés 
troublaient déjà le royaume. Le duc de 
Guise rallia les forces du parti catholique et 
en devint le chef. Gaspard de Coligny, ami- 
ral de France, neveu du connétable de 
Montmorency, avait embrassé la religion 
nouvelle. Dès lors commença leur rivalité. 
Guise et Coligny avaient été longtemps com- 
pagnons d'armes. Sous François PS sous 
Henri II *, ils entretenaient de cordiales 
relations '^. L'ambition et la religion les 
séparèrent ^. Coligny sentit que le duc de 
Guise serait toujours hostile aux réformés. 



i. — Coligny n'avait que deux ans de plus que lo 
duc de Quise. 

2. — On conserve dans le volume 20.461 du fonds 
français un gros recueil de lettres de Coligny à 
Guise, originales ou autographes, qui prouvent une 
assez grande intimité et un parfait accord. Il est à 
remarquer que Coligny l'appelle toujours Monsei- 
gneur. — Ces lettres datent de la seconde moitié du 
règne do Henri II. 

3. — Presque tous les historiens du temps attri- 
buent les débuts de Tinimitié de Guise et de Coligny 
à des reproches que celui-ci aurait adressés à son 
rival à l'occasion du mariage de Claude de Lorraine 
avec une des filles de Diane de Poitiers. Voyez 
Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, t, II, p. 50. 



5 



et le duc de Guise que Coligny était son 
adversaire personnel. Les événements pous- 
sèrent les deux rivaux à se faire face, 
la conjuration d'Amboise, l'assemblée de 
Fontainebleau, le procès du prince de Condé. 
Tous deux se montrèrent tels que leurs par- 
tisans les attendaient : Guise l'ennemi impla- 
cable, Coligny, l'appui de la réforme jusqu'à 
la mort. 

François II mourut le 5 décembre 1560, 
et le duc de Guise fut précipité du pouvoir. 
Après une courte retraite^ qui donna à 
Catherine de Médicis le temps de reconnaî- 
tre qu'elle ne pouvait se passer du chef du 
parti catholique, François de Lorraine repa- 
rut à la cour. Il ne dirigeait plus les affaires 
du royaume, mais il était l'idole de la majo- 
rité des sujets du roi, dont il incarnait les 
croyances religieuses. Membre du triumvirat 
catholique avec le connétable et le maréchal 
Saint-André, il usa modérément de son 
ascendant. Il laissa la régente se livrer à 
des expériences, l'édit do juillet 1561, le 
colloque do Poissy, l'assemblée de Saint- 
Germain, l'édit dé janvier 1562, avec la 
confiance que son intervention deviendrait 
indispensable et qu'il reconquerrait le pou- 
voir en un jour. Les événements l'aidaient 
d'eux-mêmes. Favorisés par la reine, qui 



— 6 - 

tremblait devant eux, les réformés mettaient 
à feu et à sang une partie du royaume. Mal- 
heur, dans les provinces où ils étaient les 
plus forts, en Dauphiné, en Provence, en 
Languedoc, en Guyenne, en Poitou, malheur 
aux cathédrales, aux églises paroissiales, 
aux chapelles, aux pauvres prieurés, à tous 
les sanctuaires vénérés des fidèles, aux prê- 
tres, aux couvents, aux monastères. Ils 
étaient pillés, détruits, assassinés, violés. 
A ces crimes, les exaltés du parti catholique 
ripostaient par d^s actes de vengeance aveu- 
gle, des meurtres et des massacres. Les 
passions étaient si ardentes au commence- 
ment de 1562, les pillages, les assassinats 
si nombreux, les rancunes, les haines si 
vives que la guerre civile devait éclater au 
premier signal. 

A la fin de février 1562, le duc de Guise 
visita sa mère à Joinville. La vieille duchesse 
se plaignait des ministres qui évangélisaient 
ses vassaux. L'un d'eux, Léonard Morel, 
établi dans une des villes du douaire de 
Marie Stuart, à Vassy, aux confins du Bar- 
rois, était particulièrement signalé comme 
l'ennemi de la duchesse. Il la désignait dans 
ses sermons sous le nom de mère des tyrans, 
et animait les paysans contre elle. Antoi- 
nette de Bourbon, fatiguée de ce voisinage. 



•— 7 — 

de ces insultes, de ces excitations hebdoma- 
daires contre les droits seigneuriaux, envoya 
Tévéque de Châlons, Jérôme de Bourges, à 
Vassy. L'évéque s'efforça vainement de dis- 
soudre la nouvelle église. Il restait des catho- 
liques en Barrois, mais ils étaient terrifiés 
par l'insolence du ministre et avaient déserté 
la lutte. Menacé par les nouveaux croyants, 
l'évéque fut heureux de prendre la fuite. 

Telle était la situation quand, au sortir de 
Joinville, le dimanche l®"" mars 1562, le duc 
de Guise passa à Vassy. Il était accompagné 
de sa femme, Anne d'Est, grosse de plu- 
sieurs mois, de son frère, le cardinal Louis 
de Guise, de quelques-uns de ses enfants, 
dont l'ainé avait à peine onze ans, et des 
femmes do la duchesse. Un cortège ainsi 
composé ne témoignait pas d'intentions belli- 
queuses. Le duc était suivi, il est vrai, de sa 
compagnie d'ordonnance et de serviteurs qui 
portaient les armes *. Mais il venait de 
Saverne en Alsace et un prince de ce rang, 
traversant un pays troublé par les séditions, 
ne pouvait voyager sans escorte. Malheu- 
reusement les gens de sa maison, poussés 
par ceux de la duchesse, songeaient peut- 



\, — Voyez les comptes de la maison de François 
de Lorraine aux Pièces justificatives. 



— 8 — 

ôtre à tirer une vengeance éclatante des 
injures (le Léonard Morel. 

Aussitôt arrivé à Vassy, Guise se rend à 
la messe. L'église était détruite, mais un 
pauvre prieuré avait survécu. Le duc entend 
l'appel d'une cloche et apprend du prieur 
que la cloche était celle du proche. Décidé A 
adresser des représentations, au ministre, il 
lui envoie le fds de son lieutenant, Jacques 
de la Brosse, avec deux pages allemands. 
Gomment les trois messagers s'acquittèrent- 
ils de leur mission? G'est un des mystères 
de cette tragédie. D'après les récits protes- 
tants, ils se présentèrent en ennemis, repous- 
sèrent les fidèles les armes à la main et 
interrompirent le service. D'après les anna- 
listes catholiques ils furent accueillis aux 
portes du temple par des vociférations insul- 
tantes et chassés sans avoir pu présenter 
leur message. Débordés par le grand nom- 
bre, ils tirent l'épée et se mettent en défense. 
Ils ripostent aux injures par des menaces. 
Le bruit attire les soldats et les valets du 
cortège. Les protestants sont refoulés dans 
le iomplo. Jac([ues do la Drosse, d'après les 
uns, est renversé et foulé aux pieds; d'après 
les autres accablé de coups et retenu prison- 
nier dans l'intérieur du prêche. On rapporte 
à son père, lieutenant de la compagnie, 



— 9 — 

qu'il a été massacré sur les marches du por- 
tail. Le duc accourt sans armes et sans 
cuirasse. Déjà les gens d'armes ont entamé 
le siège du temple. Il s'approche des com- 
battants et tâche de parler aux assiégés. 
Ceux-ci, grimpés sur un large échafaud le 
long des murs, accablent les assaillants de 
pierres et de projectiles. Jacques de la 
Brosse, le père, est frappé ;* Guise lui-même, 
atteint au bras et au visage, se couvre de 
sang. A la vue de leur chef blessé, les sol- 
dats n'écoutent plus ses appels pacifiques. 
La porte était barricadée ; elle vole en éclats, 
et les arquebusades sifflent dans l'enceinte 
du prêche. Hommes, femmes, enfants tom- 
bent sous les balles. Ceux qui ont échappé 
s'enfuient, les plus agiles par la toiture, les 
autres par les fenêtres. Au dehors, les arque- 
busiers abattent les fuyards sur les toits ou 
les poursuivent de coups de feu jusques au 
seuil de leurs maisons. 

Au bruit des détonations, la duchesse 
de Guise avait envoyé prier son mari 
d'épargner au moins les femmes enceintes. 
Celui-ci s'employait à faire cesser cette 
exécution sanglante. Il parvient à rallier 
ses gens et fait comparaître le ministre. 
Léonard Morcl avait été blessé et empri- 
sonné. « Qui le fait si hardy de séduire 



- 10 - 

a co peuple? — Monsieur, répond le minîs- 
cc.tre, je ne suis point séditieux, mais j'ay 
« prêché l'Evangile de Jésus-Christ. » La 
réponse accroît la fureur du prince, a Mort- 
ce Dieu, dit-il, l'Evangile prêche-t-il sédi- 
cc tion? Tu es cause de la mort de ces gens, 
a Tu seras pendu tout maintenant. Çà, pré- 
ce vôt, qu'on dresse une potence pour pendre 
<L ce bouc. » Le ministre, plus mort que vif, 
balbutie quelques mots de défense; le duc 
lui fait grâce de la vie et l'envoie aux 
prisons de Saint-Dizier. Il s'en prend au 
gouverneur de la ville, Claude Tondeur, un 
de ces capitaines, indifférents par eux- 
mêmes, que les tergiversations de la reine 
laissaient dans l'ignorance de leurs devoirs, 
et lui reproche d'avoir autorisé l'exercice de 
la réforme. Tondeur répond que Léonard 
Morel s'était conformé aux dispositions de 
l'édit de Poissy. Guise, d'autant plus furieux 
qu'il avait tort, le qualifie de traître et 
l'emmène prisonnier. Il écrit à la reine et au 
roi de Navarre, commande une enquête et 
ordonne le départ *. 

Le soir même il couche à Eclaron, à une 
étape de Vassy, et y passe deux jours 

1. — Voyez aux Pièces justificatives sur les sour- 
ces historiques de notre récit du massacre de Vassy, 
une note trop développée pour figurer au bas des 
pages. 



- 11 - 

dans Fattente. La province était terrifiée 
par la sanglante exécution du !•' mars. Le 
récit du massacre volait de bouche en bou- 
che et s'aggravait, à chaque narrateur, de 
détails effrayants : le duc do Guise était 
arrivé avec une armée; la ville avait été 
détruite et les habitants massacrés jusqu'au 
dernier. Le duc s'alarmait d'autant plus du 
retentissement de cette triste journée qu'il 
ne pouvait, au fond de sa conscience, excu- 
ser l'entrafnemeut de ses gens. Quelle serait 
l'impression de la reine et du roi de Navarre? 
Allait-il échanger sa renommée de grand 
capitaine pour celle d'un bourreau de femmes 
et d'enfants? 

Sans doute il n'avait rien épargné pour 
arrêter le carnage. 11 n'avait pas ménagé sa 
personne et s'était lui-môme e^tposé aux 
jcoups pour sauver les victimes. Mais cet acte 
de générosité se perdait dans l'horreur du 
fait principal. Les meurtriers seuls pouvaient 
en témoigner. Le désir de dégager sa res- 
ponsabilité lui dicta plusieurs messages à la 
reine, au roi de Navarre, à ses collègues du 
triumvirat. Le mémo souci le poursuivit dans 
le reste de sa carrière. Il le montra au par- 
lement de Paris, le 13 avril suivant \ en 

i, — Procès-verbal de la séance du parlement du 



— 12 - 

demandant une instruction judiciaire. Il 
le montra encore à une heure où les hom- 
mes ne mentent pas, à Theure de sa mort : 
a Je vous prie croire, dit-il aux seigneurs 
« qui entouraient son chevet, que Tinconvé- 
ce nient advenu à ceux de Vassv est advenu 
« contre ma volonté; car je n'y allay onc- 
(k ques avccques intention do leur faire 
a aucune offence. J'ay esté deffendcur, non 
a aggresseur; et, quand Tardeur de ceux qui 
« estoient avec moy, me voyant blessé, leur 
(c fit prendre les armes, je fey tout ce que je 
a peus pour parer leurs coups et garder que 
ce ce peuple ne receust aucun outrage *. » 

Le 4 mars, il reprit sa marche à petites 
journées. Vitry-le- François avait fermé ses 
portes et les habitants Tattendaient à coups 
d'arquebuse. Châlons-sur-Marne ouvrait les 
siennes de si mauvaise grâce que le duc 
craignit une embuscade. Le J2, il arriva au 
château de Nanteuil et y reçut la visite du 
connétable de Montmorency et du maréchal 
Saint-André. Ces deux seigneurs apportaient 
d'importantes nouvelles. Le roi était h 



13 avril 1562, dans les Mémoires de Condé, t. III, 
p. 276. 

1. — Lettre de l'évêque do Riez, au roi, contenant 
les actions et propos de M. do Guise depuis sa bles- 
sure jusques à son trépas (Mémoires de Condét t. IV, 
p. 258). 



— 13 — 

Monceaux-en-Brio, à la merci du parti 
huguenot. Le prince de Condé commandait 
en maître à Paris. Chargé par la reine d'y 
faire exécuter Tédit de janvier, il y organi- 
sait sa propre domination et se préparait à 
commencer les hostilités par la surprise de la 
capitale du royaume. La guerre civile, une 
guerre de vie et de mort sans merci, s'an- 
nonçait presque pour le lendemain. Tandis 
que le duc de Guise pesait la gravité de ces 
informations, qui faisaient oublier le massacre 
de Vassy, il reçut de la reine mère Tordre 
« de venir droit en cour sans armes, attendu 
« que tout estoit en paix *. » 

Le duc partit le lendemain et entra à 
Paris le lundi 16 mars, à trois heures de 
l'après-midi, avec le connétable, le maré- 
chal de Saint-André et une troupe armée de 
3.000 hommes. Une foule immense l'atten-v 
dait à la porte Saint-Denis et le salua de ses 
acclamations. A mesure qu'il se rapprochait 
des riches quartiers, l'enthousiasme se tra- 
duisait par de plus chaleureux vivats. Jamais 
roi n'avait reçu telle ovation. Le prince, vêtu 
de satin blanc, suivant sa coutume, répon- 



1. — Nous avons raconté ces faits avec beaucoup 
plus de détail qu'il ne nous est permis d'en insérer 
Ici, dans Antoine de Bourbon el Jeanne d^Albret, 
t. IV, p. H3 et suiv. 



- 14 - 

dait galamment aux cris du peuple par un 
salut de son épée. Bourgeois et manants «e 
sentaient à Tabri de la guerre civile et 
garantis des dangers que le prince de Condé, 
à Taide d'une poignée de sectaires, faisait 
courir à la ville la plus catholique du 
'royaume *. 

La confiance du parti catholique, la poli- 
tique a ondoyante et diverse » de la reine 
mère, les soupçons que la faiblesse de cette 
princesse laissait se développer autour d'elle, 
consacraient la prépondérance du prince 
lorrain. Nous avons raconté ailleurs com- 
ment il dépassa les espérances de ceux qui 
le reconnaissaient pour chef ^. La prise d'Or- 
léans par le prince de Condé (2 avril 1562), 
les nouvelles et inutiles négociations de 
Catherine de Médicis sous les murs d'Orléans, 
la campagne du roi de Navarre sur les bords 
de la Loire (juillet), le siège et la prise do 
Bourges (août) . et de Rouen (octobre) par 
l'armée royale, donnèrent au duc de Guise 
l'occasion de développer ses grandes qualités 
militaires. Bien que la jalousie du roi de 
Navarre et du connétable eut réduit son 



i. — Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, 
t. IV, p. H8. 

2. — Antoine de Bourbon et Jeanne d^Albret, 
t. IV, chap. XVII et suivants. 



- 18 — 

rôle officiel, François de Lorraine reprit le 
premier rang dans les circonstances diffici- 
les. Aucun des deux partis n'était trompé par 
Teffacement de ce prince, et les réformés 
moins que les autres. S'il ne commandait en 
chef ni à Bourges ni à Rouen, il dirigeait les 
opérations. Aussi Gondé et Coligny, habi- 
tués à le redouter plus qu'un autre, inscri- 
vaient-ils sur leurs manifestes que le roi était 
prisonnier du duc de Guise et de ses acolytes 
du triumvirat, qu'il combattaient pour ren- 
dre la liberté au jeune monarque et que la 
guerre civile « estoit la querelle de Monsieur 
« de Guise ^ » 



1. — Voyez les manifestes du prince de Condé au 
nom du parti réformé, 8 avril, 25 avril, 19 mai et 
24 juin 1562, que nous avons analysés dans le chapi- 
tre XVIII et suivants du tome IV de Antoine de 
Bourbon et Jeanne d'Albret. 



CHAPITRE PREMIER 



Condé se met en campagne (7 novembre 1562.) 

— Bataille de Dreux {i5 décembre 1562.) — Le 
duc de Guise se remet en campagne {26 décembre.) 

— Dénuement de V armée royale. — Prise du por- 
tereau d'Orléans (6 février 1563.) — Attentat de 
Poltrot de Méré {18 février.) — Mort du duc de 
Guise {24 février.) — Obsèques du duc de Guise 
{19 mars.) — Arrestation de Poltrot de Méré 
(20 février.) — Premier interrogatoire de Poltrot 
{21 février.) — Second interrogatoire {27 février.) 
Cœur de Roy est conduit à Paris (6 mars.) — 
Troisième interrogatoire de Poltrot (7 mars.) — 
Poltrot disculpe Vamiral Coligny {15 mars.) — 
Condamnation de Poltrot {18 mars.) — Derniers 
interrogatoires et supplice de Poltrot. 

Le duc de Guise n'avait encore été que le 
chef du parti catholique; il était destiné à 
devenir le plus grand capitaine de Tarmée 
royale. 

Depuis le commencement de la guerre 
civile, le prince de Condé et Coligny concen- 



- 18- 

traient à Orléans les forces éparses de la 
Réforme, la noblesse calviniste, les secours 
que les princes allemands avaient promis 
moyennant finance, les bandes soudoyées 
par la reine de Navarre, les mécontents, les 
ennemis du duc de Guise. Le 7 novembre, 
Gondé a se mit aux champs )), parut le 24 sous 
les murs de Paris, terrifia les bourgeois par 
ses rodomontades sans autre résultat que 
d'augmenter la haine des Parisiens contre son 
parti, et, le 10 décembre, reprit la campa- 
gne. L'armée royale était commandée par le 
connétable de Montmorency, et en second, 
par le maréchal de Saint-André. Le duc de 
Guise n'exerçait aucune autorité nominale 
et combattait en volontaire avec sa com- 
pagnie, ce Les huguenots, dit Castelnau, 
« prétendoient que c'estoit sa querelle et 
« qu'il estoit le motif de la guerre, dont il 
« vouloit oster l'opinion *. » Voilà pourquoi 
il n'avait accepté aucune charge officielle. 

Aussitôt que le prince de Condé eut 
décampé, l'armée royale se mit à sa pour- 
suite et l'atteignit le 19 décembre dans les 
plaines de Dreux ^. 



i. — Mémoires de Castelnau, liv. IV, chap. V. 

2. — Nous avons raconté ces faits, avec plus détails 

Sue nous no pouvons en donner ici, dans Jeanne 
'Albret et la guerre civile^ 1. 1. p. 3G7. 



- 19 - 

Les forces de Tannée protestante s'éle- 
vaient à dix ou douze mille hommes, dont un 
tiers de bonne cavalerie française. L'armée 
royale était plus nombreuse, mais moins 
« riche » en noblesse. Le 19 décembre, au 
lever du jour, les deux partis étaient en pré- 
sence. Le prince de Gondé et Tamiral Goli- 
gny, chacun à la tête d'une forte colonne, 
incertains de Tattaque, entamèrent un mouve- 
ment do retraite vers Ghateauneuf en Thime- 
rais. Le connétable avait pris position sur 
un coteau élevé au-dessus d'une plaine 
étendue que les réformés devaient traverser. 
Au moment où l'avant-garde ennemie parut 
devant son front de bataille, il commit la 
faute de quitter la colline boisée, où la 
cavalerie huguenote ne pouvait le forcer, et 
descendit dans la plaine pour lui barrer le 
passage. Le duc de Guise et le maréchal de 
Saint -André gardèrent les hauteurs de 
Nuisement. 

Aussitôt que l'avant-garde protestante 
arrive à portée, le connétable dirige sur elle 
un feu nourri de 14 pièces d'artillerie et la 
met en désordre. Il fait alors avancer les 
3.000 Suisses et les dispose en carré. Le 
prince de Condé entre en ligne et lance- suc- 
cessivement contre eux les colonnes de sa 
cavalerie. Trois attaques, vigoureusement 



- 20 - 

conduites par les meilleurs capitaines de 
Tarmée protestante, enfoncent le carré. Trois 
fois les Suisses se rallient et resserrent leurs 
rangs. Enfin le prince ramasse tous ses 
cavaliers épars, allemands et français, et 
fond sur cette infanterie invincible. Les 
Suisses, rompus sans être mis en fuite, se 
forment en pelotons et se replient en bon 
ordre auprès du duc de Guise. 

L'amiral charge à Tarme blanche les com- 
pagnies du connétable. Montmorency riposte 
vigoureusement. Son cheval est tué; il en 
monte un autre. Les réformés faiblissent. 
Montmorency prend Toffensive et se précipite 
sur les Allemands. Son fils, Gabriel de Mont- 
morency Montberon, est tué ^ Il est lui- 
même blessé d'un coup de pistolet au visage 
et tombe au milieuMes ennemis. Ses troupes, 
démoralisées par la prise de leur chef, se 
débandent et s'enfuient. Plusieurs chevau- 
légers piquèrent jusqu'à Paris et apportèrent 
au roi la nouvelle de la défaite. La victoire 
de Coligny était complète à l'aile gauche. 
Quelques lansquenets du régiment de Mouy 
s'avancèrent jusqu'à la maison que le duc de 
Guise avait occupée la veille et se parta- 

• 

1. — Le moment de la mort de Montberon est dif- 
féremment précisé. Nous suivons le récit de Castel- 
nau {Mémoires, liv. IV, chap. 5.) 



— 21 — 

gèrent ses bagages et son argenterie. Déjà 
les capitaines huguenots félicitaient Tamiral 
(le son triomphe. Coligny leur désigna le 
corps d'armée du duc de Guise, qui n'était 
pas encore descendu sur le champ do 
balaillo. « Nous nous trompons, dit-il, car 
a bientôt nous verrons cette grosse nuée 
ce fondre sur nous *. » 

L'aile droite de Tarmée royale était 
commandée nominalement par le maréchal 
Saint-André. Le duc de Guise, qui s'était 
modestement effacé dans la distribution des 
grands rôles pour ne pas paraître faire la 
guerre en son nom, et qui savait laisser à 
d'autres l'honneur du premier rang, sauf à les 
diriger secrètement, avait gardé ses positions 
sur le- coteau; il avait abrité sa cavalerie 
dans le village de Blainville, caché son infan- 
terie dans un bois et poussé la précaution 
jusqu'à faire agenouiller ses gens de pied 
derrière un pli de terrain. Du haut de son 
observatoire, il avait assisté au désastre du 
connétable. Plusieurs, capitaines blâmaient 
cet excès de prudence « et l'accusaient jà de 
« timidité 2. » Le duc attendait son heure. 

1. — Mémoires de la Noue, chap. X. 

2. — Montaigne, dans un passage admirable, a 
relaté ces accusations. « Coulx qui Re favorisen- 
pas fort la réputation de M. de Guy se mettent voient 
tiers en avant qu'il ne se pcult excuser d'avoir fait 



- 22 - 

L'armée huguenote se dispersait à la pour- 
suite des fuyards et plus d'un hobereau 
protestant courait après un riche prisonnier 
catholique. Le duc saisit Theure de cet 
éparpillement général. Il fait avancer le 
maréchal Saint-André et lance les gens de 
pied sur le front de l'infanterie victorieuse. 
Les Gascons abordent l'ennemi à l'arme blan- 
che pendant que l'artillerie royale foudroie 
l'aile droite. L'impétuosité de leur choc, aidée 
de la déclivité du terrain, repousse les Alle- 
mands en désordre. Les Espagnols les atta- 
quent avec leur fermeté habituelle et les 
empêchent de se reconnaître. Un régiment de 
1.200 reîtres, mis en déroute aux premières 
décharges, dépose les armes et ne reprend 
ses lignes que pour se retirer derrière le duc 
de Guise. Condc aperçoit l'ébranlement de 
ses gens de pied et fait sonner le ralliement 
de sa cavalerie. Mais les gens d'armes, 
décimés dans leurs attaques contre les Suis- 



alte et temporisé avecques les forces qu'il comman- 
doit, cependant qu*on enfonçoit monsieur le connes- 
table, chef do l'armée, et qu'il valoit mieux se 
hazurdor, prenant l'ennemy par Uanc, que, altondant 
l'advantage do le veoir en queue, souitrir une si 
lourde i)erte. Mais, oultre ce que l'issue en témoi- 
gna, qui en desbattra sans passion me confessera 
aysément, à mon advis, que le but et la visée, non 
seulement d'un capitaine, mais de chaque soldat, 
doibt regarder la victoire en gros. » (Essais, liv. I, 
chap. XLV.) 



- 23 — 

ses ou dispersés à la poursuite des gentils- 
hommes du connétable, n'entendent pas ou 
ne veulent pas entendre Ids ordres du prince. 
Il ne rassemble qu'une faible troupe de sol- 
dais dévoués et entre avec eux au plus fort 
de la mêlée. Aussitôt les Gascons et les 
Espagnols, victorieux des Allemands, se 
retournent contre lui. Il est entouré, et telle- 
ment pressé par le grand nombre des assail- 
lants que ses cavaliers ne peuvent le dégager. 
Il est blessé à la main. Son cheval, frappé 
d une arquebusade à Tépaule gauche, s'abat 
sous le cavalier. Il tombe au milieu des gens 
d'armes du maréchal Damville et est entraîné 
loin du champ de bataille. 

Le maréchal Saint-André accoste brave- 
ment les troupes de Condé. Les soldats de sa 
compagnie et ceux du prince portaient- la 
casaque blanche et ne différaient les uns des 
autres que par un liseré vert peu apparent. Le 
maréchal, victime de sa myopie et poussé par 
son ardeur, s'avance au milieu des combat- 
tants. Entouré de soldats vôlus de blanc, il 
se croit toujours au milieu des siens et frappe 
d'estoc et de taille les reîtres qu'il peut join- 
dre. Bientôt reconnu à la richesse de ses 
armes, il est assailli par des forces supérieu- 
res, fait prisonnier et l&chcmcnt assassiné à 
quelques pas du champ de bataille par un do 



— 24 — 

ses ennemis personnels, Jean de Perdrier de 
Baubigny *. 

Pendant que le maréchal s'acharnait contre 
les débris, allemands ou français, du corps 
d'armée de Condé, Coligny, vainqueur du 
connétable à Taile gauche, s'élance au secours 
du prince aussi rapidement que le permettait 
la distance. Les Suisses, qui ont pu reformer 
leurs carrés, l'arrêtent au milieu de sa course. 
Il les charge deux fois; il s'efforce au moins 
de s'ouvrir un passage à travers leurs files 
inébranlables. Les Suisses, appuyés par les 
gens d'armes de la compagnie du duc de 
Guise, qui n'avaient pas encore paru sur le» 
champ de bataille, se raidissent contre l'ami- 
ral, et lui opposent un front qu'il ne peut 
entamer. De haut de sa colline, le duc gra- 
due habilement les efforts de ses gens, les 
retient et les lance en avant suivant les mou- 
vements de l'amiral. Témoin de la prise du 
maréchal, il met en ligne la réserve de sa 
compagnie et le reste des vieilles bandes 
des arquebusiers; il rappelle les soldats de 
Saint-André, démoralisés par la défaite de 
leur chef, et descend sur le champ de bataille. 
Il prend en flanc le corps d'armée de Coli- 



i. — Sur les causes et les circonstances de cet 
assassinat voyez Jeanne d'Albrel et la Guerre civile, 
t. I, p. 379. 



— 28 — 

gny, Tentame à Taide de sa cavalerie et l'en- 
veloppe d'un feu nourri: L'amiral se retourne 
contre ce nouvel ennemi. Il fait avancer ses 
dernières réserves et ramasse par des appels 
désespérés les reîtres fugitifs dans la plaine. 
Débordé par le nombre, il est assailli do 
trois côtés par les Suisses, par la cavalerie 
de Guise et par les arquebusiers. Déjà la 
fermeté de ses troupes est ébranlée. Soldats 
et capitaines hésitent et la résistance s'affai- 
blit. Dans quelques minutes il sera entouré. 
Il fait alors sonner la retraite. En vain le duc 
de Guise l'accable de charges et d'arquebu- 
sades. L'amiral recule sans rompre ses rapgs 
jusqu'à la Neuville. La nuit suspend la 
poursuite. L'amiral se retire en bon ordre et 
le duc de Guise reste maître du champ de 
bataille. Après s'être assuré par les courses 
de ses éclaireurs que la retraite de l'ennemi 
n'était pas une feinte, il ramène ses troupes 
en arrière et les fait camper sur la lisière des 
bois'. 

Le prince de Condé, prisonnier d'un des 
hommes d'armes du maréchal Damville, avait 
été remis au duc de Guise, devenu le chef de 
l'armée catholique, dans un pauvre logis du 



i. — Voyez aux Pièces justificatives une note 
bibliographique et un récit inédit de la bataille de 
Dreux. 



— 26 — 

village do Blainville, à la ferme de Nuise- 
ment. L*entrevue fut froide. Au môme 
moment un gentilhomme apporta la première 
cornette blanche enlevée aux réformés et le 
vainqueur la reçut en exaltant la valeur du 
présent. Les bagages avaient été pillés par 
les reîtres. Après avoir soupe « assez mai- 
ce grement, » dit de Bèze, on trouva un lit que 
le duc, avec « toute gracieuseté, » offrit à 
son prisonnier. Condé le refusa, et, sur de 
nouvelles instances, le partagea avec son 
rival. « Mon cousin, dit le duc de Guise, je 
« vous prie de me dire quelle chère et traic- 
« tement vous m*eussicz faict si je feusso 
« tombé prisonnier entre vos mains. » Le 
prince refusa de répondre. « Mon cousin, 
a reprit le vainqueur, je vous prie de vous 
<c resjouir et faire bonne chère tant que vous 
a serez entre mes mains, èsquelles vous 
« n'aurez aucun mal, et vous promectz que, 
« si ce n'estoict le debvoir que je doibs au 
« Roy pour luy rendre compte de ma charge, 
«je vous délivrerois présentement. » La 
situation n'était pas sans grandeur. Les deux 
princes avaient passé trois ans à se poursui- 
vre d'une haine acharnée et reposaient 
ensemble sur le grabat d'un paysan. 

Dès le premier jour de sa défaite, le 
prince de Condé formula une étrange reven- 



— 27 — 

dication. Le roi de Navarre, son frère aîné, 
ayant été lieutenant général du royaume, il 
se prétendait investi de la môme dignité par 
droit de succession et protestait sérieuse- 
ment contre sa captivité au milieu de Tarméc 
royale. Malgré cette prétention, la cordialité 
du duc de Guise, ses égards pour son pri- 
sonnier, sa générosité vis-à-vis de quelques 
gentilshommes protestants qui partageaient 
la mauvaise fortune de leur chef, amenèrent 
un peu de détente entre les deux rivaux. 
Quelques jours après, Condé prouva au vain- 
queur qu'il n'avait pas de rancune. Le duc 
avait fait broder trois mandils de velours 
cramoisi pour le connétable, pour le maréchal 
Saint-André et pour lui. Le matin do la 
bataille, il donna le sien avec son meilleur 
cheval à son écuyer Spagny. Les réformés 
savaient que leur plus redoutable ennemi 
porterait sur sa cuirasse un mandil cramoisi. 
Pendant l'action, un reitre courut sur Spa- 
gny et le tua d'un coup de pistolet, croyant 
tuer le duc de Guise. Le duc regretta son 
cheval autant peut-être que son écuyer. Le 
prince de Condé s'employa à le lui faire 
rendre. Le comte de la Rochefoucauld l'avait 
acheté. Guise en offrit 2.000 écus. La propo- 
sition ayant été déclinée. Guise demanda à 
l'échanger contre le ministre Pérussel, prê- 



— 28 — 

cheur du prince de Condé, qui avait été fait 
prisonnier avec son maître. La Rochefoucauld 
représenta au prince que le ministère do 
Pérussel lui serait indispensable en prison et 
refusa d'accepter rechange. La restitution 
du cheval fut ajournée jusqu'à la paix ^ 

La nouvelle de la victoire de Dreux fut 
apportée à Paris le dimanche soir, 20 décem- 
bre, par le maréchal de camp du duc de 
Guise, Jean de Beaulieu de Losses. Le 
22 décembre, la reine mère donna au prince 
lorrain la dignité de lieutenant général du 
roi. C'en élait fait de Téquilibre qu'elle avait 
si péniblement maintenu entre les deux par- 
tis depuis le commencement des troubles. 
Le duc de Guise était le maître de la France ^. 
Il vint lui-môme à Paris recueillir des ova- 
tions. « Il est entré victorieux, écrit Pas- 
ce quier, avec un applaudissement général 
« de tout le peuple. Jamais prince n'y fut 
« accueilli de meilleur œil qu'il a esté ^. » 

i. — Mémoires de Mergey^ édit. Buchon, p. 265. 

2. — Coll. du parlement, vol. 556, f. 274. — Jour- 
nal de 1562 dans la Revue rétrospective, t. V, p. 209. 
Registres municipaux de la ville de Paris publiés 

Ear la ville. — Mémoires de Condé, t. IV, p. 194. — 
ettres de Pasquier dans les Œuvres complètes, 
t. II, p. 103. — Coll. Brienne, vol. 206, f. 177. — 
Mémoires de Tavannes, coll. Pelitot, t. 24, p. 380. 

3. — Il est assez piquant qu'un des premiers 
emplois de son autorite souveraine fut de faire 
signer au roi la nomination de Jacques de Savoie, 



— 29 — 

Il inaugura son pouvoir souverain en impo- 
sant au roi des lettres de clémence en faveur 
de tous les séditieux qui déposeraient les 
armes *. 

Le lendemain de la Ijataillo de Dreux, le 
duc de Guise prit enfin le commandement de 
Varmée catholique. La fortune de la guerre 
comblait Tambition de ce prince. Le roi de 
Navarre, qui lui avait barré le chemin de la 
lieutcnancc générale, était mort le J 8 novem- 
bre ; le connétable, victime de son impéritic 
militaire, était prisonnier des réformés; le 
maréchal de Saint- André avait été assassiné. 
Des chefs du parti catholique il restait seul 
auprès du roi, seul et avec Tauréole d'une 
victoire. Il conçut un plan de campagne 
capable de détourner pour longtemps, peut- 
être pour toujours, les passions qui avaient 
soulevé le parti réformé. Il voulait d'abord 
déloger les huguenots d'Orléans, puis lancer 
toutes les forces du royaume contre les 
Anglais campés au Havre et contre leurs 
alliés en Normandie. Il comptait sur la haine 
traditionnelle du soldat français pour l'insu- 

duc de Nemours, Tamant bien connu h la cour de la 
duchesse de Guise, comme gouverneur général du 
Lyonnais (Lettres patentes du 25 décembre i562; 
copie du temps; f. fr., vol. 3213, f. 65.) 

L — Une copie de cet acte daté du 24 décem- 
bre 1562, est conservée dans la coll. do Brienne, 
vol. 206, f. 477. 



— so- 
laire et sur un mouvement national qui aurait 
étouiïé les querelles religieuses ^ Ce plan 
fut entamé avec vigueur. Le duc de Guise fit 
signer au roi un édit d^aliénation des biens 
de TEglise jusqu'à concurrence de 100 mille 
livres de rente et convoqua pour le 10 mars 
le ban et Tarrière ban de toutes les milices ^. 
L'argent et les troupes allaient abonder à la 
fois. Quant au siège d'Orléans, l'habile lor- 
rain prétendait le diriger seul, ce du bout 
ce de son épée. » 

Le 26 décembre, le duc de Guise met 
l'armée en marche vers Orléans; le 27 il 
campe à Bouglainval, près Maintenon, le 5 
janvier, à Maisons, près Chartres ^ le 8, à 
Cormainville, près Chateaudun *. Le 11, il 
gagne le pont de Baugency et s'établit forte- 
ment sur les deux rives de la Loire ^. Coligny 



1. — Mémoires de Castelnau, liv. IV, chap. IX. 

2. — L'édit, daté de février i562 (1563), est con- 
servé en copie aux Archives nationales (Heffistre Z, 
f. 359, v.). Le duc de Guise voulut que son frère, le 
cardinal de Guise, le portât lui-même au parlement 

Î>our en presser l'enregistrement (Lettré du roi et de 
a reine du 9 février 4562 (1563) au parlement; Mé- 
moires de Condé, t. IV, p. 237.) 

3. — Lettre du duc de Guise au s. d*Humières, de 
cette date (Orig., f. fr., vol. 3.187. f. 5.) 

4. — Lettre du duc de Guise à la dame de Mont- 
morency, du 27 décembre 1562 et du 8 janvier 1563 
(Delaborde, Eléonore de Roye, p. 153 et 159.) 

5. — Lettre du duc de Guise à Gonnor, s. 1., 
il janv. 1562 (1563) (V de Colbert, vol. 24.) 



- 31 — 

avait conduit Tarmée protestante dans les 
plaines fertiles de Villefranche-sur-Cher. 
L'approche du duc de Guise le fit décamper. 
Il se retira à Orléans et y passa les derniers 
jours de janvier *. Le 1" février, laissant ù 
Orléans son frère Dandelot avec une forte 
garnison, il se dirigea du côté de la Norman- 
die, au devant des secours et des subsides de 
la reine d'Angleterre. 

Les troupes royales *^ étaient bien armées, 
aguerries par une longue campagne et par de 
fréquentes marches, enorgueillies de leurs 
récents triomphes, pleines de confiance dans 
leur chef, mais elles manquaient de vivres, 
de vêtements, de chaussures, de toutes les 
(( commodités » qui entretiennent la santé 
des soldats. Le 20 décembre, avant de quit- 
ter le champ de bataille de Dreux, le duc 
avait demandé à la reine la somme nécessaire 
à la solde des troupes. L'argent était toujours 
difiicile à obtenir. Au xvi" siècle, le roi trouT 
vait des soldats, des capitaines héroïques, 
décidés à mourir sur le champ de bataille, 
même pour une cause qu'ils ne comprenaient 

1. — Lettres de Colign^r publiées par le comte 
Delaborde (Gaspard de Coligny, t. II, p. 183 et suiv.) 

2. — A la date du 20 février 1563, l'armée royale 
comptait 8.000 hommes de pied et 4.000 cavaliers 
(Lettres do Chantonay du 20 février; Mémoires de 
Condé, t. II, p. 132.) 



- 82 — 

pas, mais son trésor était toujours vide ; et, 
le plus souvent, soldats et capitaines étaient 
obligés de s'armer, de se vêtir, de se nourrir 
à leurs frais ou aux dépens du bonhomme. 
Le 25 décembre 1562, le 10 janvier 1563, le 
duc de Guise adresse au roi de plus pressantes 
instances K Le M janvier, il écrit à Gonnor : 
a Nos soldats sont tous nuds par ce froid qui 
a est pire *. » Artus de Cossé Gonnor, frère 
du maréchal de Brissac, chargé de Tintcn- 
dance des finances, avait ordre de réserver 
toutes les ressources du royaume au paiement . 
des reîtrcs et ne pouvait envoyer un écu à 
Tarmée du roi. Aussi, écrit le secrétaire 
Robertet, a tout le monde y meurt quasi de 
a faim ^. » La cassette royale n'était pas mieux 
fournie que celle de l'armée. « Pour dix escuz, 
a quand il faut faire un voyage, dit Robertet, 
« on va les emprunter çà et là *. » La Répu- 
blique de Venise avait prêté 25 mille écus au 



, 1. — Lettres du duc de Guise à Ârtus de Cossé 
Gonnor, du 20 et du 25 décembre 456*2 (Orig., V* de 
Colbert, vol. 24, f. 19(5 et 198.) — Autre du 10 jan- 
vier 1562 (1563) (Orig. avec p. s. autographe; V« de 
Colbert, vol. 24, f. 21.) 

2. — Lettre du duc de Guise à Gonnor, du 11 jan- 
vier 1562 (1503) (Orig. V de Colbert, vol. 24.) 

3. -— Lettre de Robertet au duc de Nemours, Char- 
tres. 13 janvier 1562 (1563) (Orig., f. p., vol. 3.180, 
f. 47.) 

4. — Lettre de Robertet au duc de Nemours, Blois, 
8 février 1562 (1563) (Autog., f. fr., vol. 3.180, f. 54.) 



- 33 — 

roi payables en deux traites par des ban- 
quiers d'Anvers '. La somme fut enlevée en 
route par un parti protestant, peut-être avec 
la connivence d'un des ofiiciers du roi ^. 
« Nous sommes en une telle panoche, écrit 
a Robertet, que vous ne sauriez croire '. » 

Le 17, le duc de Guise renouvelle ses 
demandes au profit des Suisses ^ soldats 
héroïques, mais intéressés. Le 10 janvier, il 
avait emprunté sur sa propre signature une 
somme de 6.000 livres. Le 30, il passe une 
montre au camp de Messas, réduit par éco- 
nomie les gens de pied à 30 enseignes et 
distribue 100 écus à chaque compagnie. Le 
3 février, il écrit triomphalement à Gonnor 
qu'il n'a plus d'argent, mais que les Suisses 
ont reçu leur solde *. 

Malgré la misère des troupes, le duc de 
Guise prend vigoureusement l'offensive. Le 



1. — Lettre de Robertet au duc de Nemours, Blois, 
12 février 1562 (1563) (Autog., f. fr., vol. 3.180, f. 57). 

2. — Correspondance du nonce de Sainte-Croix 

i Archives curieuses^ de Cimber et Danjou, l»"» série, 
. VI, p. 135). Catherine n'était pas sans soupçonner 
Tofiicier chargé de la conduite du trésor {Lettres de 
Catherine, t. I, p. 523). 

3. — Lettre de Robertet au duc de Nemours^ 
Blois, 19 février 1562 (1563); Orig.. f. fr., vol. 3.180, 
f. 59). 

4. — Lettres du duc de Quise des 10. 17, ?0 janvier 
et 3 février 1562 (1563). (Orig., V« de Oolberl, vol. 24, 
f. 21, 37, 55 et 58). 



— 34 — 

5 février, il s'établit à Olivet, aux portes 
d'Orléans, et, le lendemain, à huit heures du 
matin, avec 1500 arquebuziers, français ou 
espagnols, et 1.200 corcelets S il donne 
l'assaut au Portereau, faubourg de la rive 
droite. Les Gascons et les Béarnais de Gra- 
mont défendent courageusement leurs retran- 
chements et l'armée royale est repoussée. 
Guise ramène les troupes sur la brèche. Au 
moment de donner le signal, il s'aperçoit que 
les lansquenets huguenots ont dégarni les 
postes dangereux. Aussitôt il pointe toute 
son artillerie sur eux. Pris de face et de flanc 
les lansquenets se troublent et se débandent. 
Guise lance alors ses soldats, sous le com- 
mandement de Philibert de Marcilly de 
Cypierre, contre les Gascons et les Béarnais. 
Ceux-ci, voyant leur aile découverte et leur 
retraite menacée, reculent à leur tour jusqu'à 
la tête dû pont. Le passage est encombré de 
soldats affolés, de blessés, de femmes et 
d'enfants, poursuivis l'épée dans les reins 
par les gens de Cypierre. Quelques radeaux, 
amarrés sur la rive droite, reçoivent les fugi- 
tifs, a Je vis des lanskenettes, dit d'Aubigné, 
a ne pouvans avoir place au bateau, jettcr 



i. — Lettre du duc de Quise au maréchal de Mont- 
morency du 7 février i562 (1563). (Mémoires de Condé, 
t. II, p. 224). 



— 35 — 

a leurs enfants dedans et elles se faire traîner 
« dans Teau, où plusieurs furent noyées ^ » 
Au milieu de cette foule confuse, les sol- 
dats catholiques se faisaient place à grands 
coups d'épée et allaient franchir la herse avec 
les fuyards, quand François d'Andelot, peu 
confiant dans la solidité des Allemands, 
accourt au bruit du canon. Il avait la fièvre 
quarte « non au cœur », dit d'Aubigné, et 
n'avait pu prendre part au premier engage- 
ment. Il arrive sur le champ de bataille et 
voit les défenseurs du Portereau en pleine 
déroute. Il s'établit dans les tourelles à la 
tête du pont, ramasse ses gentilshommes : 
(( Que la noblesse me suive, dit-il, car il faut 
(c rechasser les ennemis ou mourir. Ils ne 
« peuvent venir à nous que par une voye et 
a non plus que dix hommes de front. Avec 
(K cent des nôtres, nous en combattrons mille 
« des leurs. Courage et allons ^. » La plupart 
des soldats catholiques s'amusait au pillage 
du faubourg. Une charge vigoureuse refoule 
les plus hardis à quelques pas de la porte. 
D'Andelot relève le pont-levis et concentre le 
feu de ses arquebusiers sur le pont. Les vain- 
queurs, décifhés à petite distance du haut 

1. — Aubigné, Histoire univerçalle, t. II, p. 124; 
édition de ia Société de l'histoire de France. 

2. — Mémoires de La Noue, chap. xi. 



— 36 - 

des murs et par les meurtrières, battent ou 
retraite vers le faubourg et s'y barricadent 
de crainte d'un retour ofTensif. 

Les catholiques avaient presque remporté 
la victoire. Encore quelques instants de lutte 
au pied des Tourelles et ils prenaient la 
ville. La facilité du succès surprit les capi- 
taines. Plusieurs avouèrent plus tard à Fran- 
çois de La Noue qu'ils avaient été a estonnés 
a de se voir si soudain victorieux de tant de 
a gens :o et qu'ils n'avaient pas osé profiter de 
leurs avantages de crainte d'embuscades à la 
tôte du pont ^ 

Pendant la durée du combat, le duc de 
Guise, à ch(3val dans la grande rue du fau- 
bourg, dirigeait lui-même les assaillants. 
Bientôt reconnu par les assiégés, il devint 
le point de mire de l'artillerie et se mit à 
couvert dans une maison. Il fit venir un pri- 
sonnier et apprit que d'Andelot avait la fièvre 
quarte, a Voilà, dit-il, une bonne médecine 
« pour la guérir ^. » Après avoir mis ses 
troupes en lieu sûr, il passa le reste de la 
journée à visiter les campements, distribuant 
généreusement de l'argent aux blessés, 
encourageant les plus braves et leur prédi- 
sant la prise de la ville. 

4. —Mémoires de La Noue^ chap. xi. 

2. — Mémoires de Castelnau^ liv. IV, chap. ix. 



- 37 — 

Il attribuait Finsuccès de la journée à 
la faiblesse de son artillerie. Le lendemain il 
écrivit à Artus de Cossé Gonnor : a Mon 
a bonhomme, je me mange les dois de pan- 
ce ser que si j'eusse eu VI canons et pour 
« en tirer II mille coups, ceste ville estoit à 
a nous. Ils n'àvoient qu'un seul parapet qui 
« vaille, et ne Ton guarni que de toneaux ^ » 
Il se plaignit à la reine et celle-ci commanda 
à Gonnor d'envoyer « dix canons et toute 
« leur séquelle », 4.000 boulets, 40 milliers 
de poudre ; « que Ton les fasse voler, s'il est 
« possible ^. y> 

Michel de Castelnau raconte qu'il avait été 
chargé par le maréchal de Brissac de décider 
le duc de Guise à lever le siège d'Orléans et 
à conduire l'armée royale en Normandie. Il 
arriva le matin de la prise du Portereau et 
assista au combat. Le maréchal de Brissac, 
lui dit le duc de Guise j regretterait « de voir 
a nos gens de pied partir d'icy sans mettre 
« M. le connétable en liberté et desnicher le 



1. — Lettres du duc de Ouise à Gonnor et à 
François de Montmorency du 7 février 1562 (1563) 
(Mémoires de Condé, l. IV, p. 224 et 225). — Les 
originaux de ces deux lettres sont conservés dans les 
Vc do Colbert, vol. 24, f. 64, et dans le fonds français, 
vol. 3.194, f. 10). Montmorency répondit au duc de 
Guise le 13 février suivant (Copie, f. fr., vol. 3.197, 
f. 67). 

2. — Lettre de Catherine de Médicis, t. I, p. 500. 



— 38 — 

€ magazin des Huguenots, d Trois jours 
après, sur Tinsistance de Gastelnau, le duc 
réunit un conseil de guerre et exposa ses 
plans. Tous les capitaines, même Gastelnau, 
reconnurent à la nécessité de prendre Orlé- 
ans avant de précipiter les forces royales sur 
les Anglais en Normandie ^ Le 9 février, 
une surprise habile fait tomber aux mains de 
l'armée catholique le fort des Tourelles, 
sorte de donjon situé à la tète du pont ^. 
Quelques soldats, profitant de la négligence 
de la garnison, Tescaladèrent presque sans 
coup férir et s y établirent si fortement que 
d'Andelot ne put les déloger ^. 

Le duc de Guise occupa les journées sui- 
vantes à resserrer le blocus, à augmenter et 
renforcer son armée, à recevoir et à mettre 
en batterie la grosse artillerie envoyée par la 
reine, à creuser autour d'Orléans de profondes 
tranchées ei) cas du retour de Goligny, à 
détourner un bras de la Loire qui protégeait 

1. — Mémoires de Gastelnau, liv. IV, chap. ix. — 
— Une lettre de François de Montmorency approuve 
lo plan do campagne du duc de Guise (Copie; f. fr., 
vol. 3.107, f. C7). 

2. — M. Collin, inspecteur général des ponts et 
chaussées, a publié en 1895 dans les Mémoires de la 
Société archéol. et hist. de l'Orléanais une savante 
étude sur Je pont des Tourelles à Orléans, qui aide à 
comprendre les péripéties du siège. 

3. — Lettre de Robertet au duc de Nemours du 
13 février 1562 (1563) (Orig., f. fr., vol. 3180, f. 57). 



— 39 - 

les approches de la ville, à adresser à la reine 
mère et à Gonnor de nouvelles prières en 
faveur du bien être des soldats \ à demander 
au parlement Taliénation d'une partie du 
temporel du clergé^. Il fixa Tassant à la nuit 
du 18 au 19 février. La chute de la ville 
paraissait assurée; elle était même escomp- 
tée par le Parlement ' et par la reine mère : 
« Il y an aura, écrit-elle, qui se repantiron 
« d'estre parti et conestron qui ne faict pas 
« bon se mocquer de son roy *. » Une catas- 
trophe imprévue, un crime odieux retarda le 
triomphe du parti catholique. 

Le 18 janvier, après avoir inspecté une 
dernière fois les batteries et les positions 
de Tarmée royale, le duc de Guise attendit 
au Portcreau deux parlementaires que la 
reine mère avait envoyés au connétable '\ 



1 . — Le roi venait de contracter à Gênes un emprunt 
de 25 mille écus (Lettre de Robertet au duc de 
Nemours, Blois, 12 février 4562 (4563) ; f. fr., vol. 3.480, 
f.,57). 

2. — Lettres du duc de Quise et du card. de Quise 
à Gonnor et à la reine, des 42, 43, 16 et 47 février 4562 
(4563) (Orig., Vc de Colbert, vol. 24, f. 74, 76, 81 et 87). 

3. — Arrêt du parlement contre certains habitants 
d'Orléans, 43 février 4562 (1563); Mémoires de Condé, 
t. IV, p. 232. 

4. — Lettres de Catherine de Médicis, t. I, p. 496 
et 509. 

5. — Sébastien de TAubespine, évoque de Limoges, 
et Henri Olutin d'Oysel avaient été envoyés au con- 



— w - 

Ne les voyant pas revenir, il leur fit donner 
rendez-vous à son logis, au château des 
Vaslins *, près d'Olivet, et, à la tombée de 
la nuit ^, il partit à cheval, sans cuirasse. Il 
était accompagné d'un officier de finance, 
Tristan de Rostaing, messager de la reine, 
d*un page, François Racine de Villegom- 
blain^, et de quelques serviteurs. La duchesse 
de Guise, Anne d'Esté, envoyée par la reine 



nétable à Orléans, le 13 février (Lettre de révêque 
de Riez dans les Mémoires de Condé, t. IV, p. 245). 

1. — Il y a doute sur le lieu où habitait le duc de 
Guise. Les documents du temps, et notamment le 
récit de la mort de Ouise, par Lancelot de Carie, 
évêque de Riez, disent qu'il habitait le ôhâteau de 
Cornay. M. Edouard Fournier, dans les notes qu'il a 
ajoutées à l'interrogatoire de Poltrot (Variétés his- 
toriques et littéraires, tom. Vill, p. 17, Collection 
Elzév), dit qu'il occupait la maison des Vaslins. 
M. Baguenault de Puchesse partage la même opi- 
nion (article publié dans le Contemporain, février 
et mars 1867). Le château de Cornay, commune de 
8aint-Cyr-en-Val, est en Sologne, à quatre lieues au 
&ud (l'Orléans. La maison des Vaslins, commune do 
Saint-liilaire, est plus rapprochée de la ville. Il 
serait possible que le duc cle Guise ait habité Cornay 
au commencement du siège, et que la nécessité do 
se rapprocher du camp l'ait décidé à se transporter 
à la maison des Vaslins. MM. Fournier et Baguenault 
de Puchesse s'appuient sur une inscription du temps 

3ui existe encore sur le porche d'une maison proche 
es Vaslins : 

Hic prope Guiseus dux vitœ fata peregit, 

2. — Vers six heures du soir, écrit le secrétaire 
Anglais Smith (Calendars, 1563, p. 148). 

3. — Villegomblain a écrit des Mémoires (2 vol. 
in-12, 1667) mais il n'y parle pas des événements de 
1562. 



- 41 - 

mère pour sauver du pillage les habitants 
d'Orléans, était arrivée dans la journée au 
château. Le duc lui expédia en avant un 
de ses gentilshommes, le s. de Grénay, 
<c celui qui Taccompagnoit et couchoit ordi- 
<c nairement en sa chambre. i> Crenay tra- 
versa le Loiret en bateau et rencontra sur 
l'autre rive un jeune homme qu'il put recon- 
naître, car ce jeune homme était un des 
familiers de la maison de Guise : Poltrot de 
Méré. Poltrot lui demanda <k quand Mon- 
<c sieur viondroit. » Crenay lui répondit 
a qu'il esloit bien près. » Poltrot s'en assura 
en le voyant débarquer, et, sans l'attendre, 
sauta sur un genêt d'Espagne qu'il tenait en 
bride ^ 

Là nuit tombait. Le duc de Guise, en pour- 
point de bufle, la plume blanche au chapeau, 
s'engage au pas de son cheval sur le chemin 
du ch&teau, s'entretenant avec Tristan de 
Rostaing de la pacification si laborieusement 
poursuivie par la reine mère, quand une' 
détonation retentit au carrefour des deux 
routes •. Le duc est frappé au côté, au-des- 
sous du bras droit, d'un coup de pistolet 

\. — Brantôme, t. IV, p. 255. — Interrogatoire de 
Poltrot de Méré (voyez plus loin). 

2. — Ce carrefour des deux routes est marqué sur 
la carte de Gassini. 



- 42 >- 

tiré à la distance de six ou sept pas derrière 
une haie K a L'on me devoit celle là, dit-il, 
« mais je crois que ce ne sera rien 2. » 
Cependant il perd connaissance^ s'affaisse 
sur l'encolure de son cheval, tâche en vain 
de se relever et de tirer son épée. « Il luy 
a sembloit que l'espaule luy estoit emportée 
« de ce coup. » On le transporte au château 
des Vaslins; on lui donne des soins. Déjà 
le héros blessé a repris ses sens et c'est lui 
qui rend courage à la duchesse et à son fils 
atné, le prince de Joinville, qui pleurent en 
silence au pied de son lit. Il les embrasse 
tous deux. « Que Dieu, dit-il au jeune prince, 
« te fasse la grâce de devenir homme de 
a bien. y> 

Les chirurgiens de la reine mère. M* Ho- 
noré Castellan^ et M*'Vincent, aussitôt appe- 
lés, jugèrent que la blessure était sans 
gravité. La balle (Pollrot avoua plus tard 
qu'il y en avait trois) avait transpercé le 
corps du prince, mais a sans toucher aux os 



1. — L*assassin observa plus tard que, croyant lo 
duc cuirassé, il avait visé au défaut de la cuirasse, 
sous le bras (laterr. de Poltrot). 

2. — Brantôme qui rapporte ces paroles (t. IV, 
p. 256) faisait partie de 1 armée catholique (ibid., 
p. 259). 

3. — Maître Castellan est cité par Brantôme comme 
un des médecins de la reine (t. IX^ p. 569). 



- 43 — 

« ny entrer dedans le coffre ^ i> On <k charma y> 
la plaie pour conjurer les sortilèges qui pou- 
vaient y être attachés ^. La cour partageait 
les espérances des médecins. Florimond 
Robertet, secrétaire d^élat, écrivit au cardinal 
de Guise et au duc de Nemours» le 19 et le 
20 février, que Castellan et Vincent assu- 
raient que le duc <k n'en aiira que le mal et qu'il 
« n'est en aucun danger de mourir. — Si 
a vous le voyez, ajoute Robertet, vous ne 
oc le trouveriez point changé do visage, ni 
« de sa constance et de sa résolution accou- 
« tumée ^. » Le duc ne se croyait pas grave- 
ment atteint. Sébastien de l'Aubespine et 
d'Oysel, qu'il avait attendus aux portes 
d'Orléans jusqu'à l'entrée de la nuit, enten- 
dirent, en traversant le Loiret, la détonation 
du pistolet de Poltrot et arrivèrent aux Vas- 
lins quelques instants après l'attentat. Ils 
entretinrent le prince des négociations de la 
reine, sans que la blessure enlevât au chef 
catholique la moindre lueur de sa présence 
d'esprit. 

1. — Lettres de Catherine de MédiciSy t. I, p. 512. 

2. — Lettre de Chantonay du 20 février 1563 
(Mémoires de Condéy t. II, p. 133). — Lettre de 
Smith & la reine d'Angleterre de même date {Calen- 
dars, 1563» p. 148). 

3. — Lettres de Robertet au cardinal de Guise, 
19 février 1562 (1563). (Orig. Vc de Colbert, vol. 24, 
f. 97) et au duc de Nemours, du 20 février (ibid.) 



— 44 — 

Le cardinal de Guise^ frère cadet du duc, 
était alors à Paris, en mission auprès du 
parlement ^ Il accourut le soir du lundi, 
22 février, et constata le bon état du blessé. 
Cependant la fièvre persistait. Les méde- 
cins jugèrent qu'elle était entretenue par un 
corps étranger, peut-être par une balle, et 
proposèrent au duc d'élargir et de sonder 
la blessure. Le duc y consentit avec cou- 
rage ^. Ils reconnurent la présence d'un abcès 
intérieur et essayèrent de le cautériser avec 
une lame d'argent surchauffée, de crainte de 
poison ^. Ils retirèrent deux balles et un mor- 
ceau de fil de fer qui avait servi à les atta- 
cher *. Après cette opération. Guise éprouva 

i. — Le cardinal de Guise fut informé de la bles- 
sure de son frère par une lettre de la reine du 
19 février (Lettres de Catherine de Médicis, t. I, 

f). 512). — A Chartres il rencontra un courrier qui 
ui donna de bonnes nouvelles du blessé (Lettres du 
card. de Guise à Gonnor, Mémoires de Castelnau, 
i731, t. II, p. 174). 

2. — Cette opération, au moins inutile et très dou- 
loureuse, écrit l'ambassadeur d'Espagne, fut faite le 
22 février, à minuit (Lettre de Chantonay et de son 
secrétaire, Francès de Alava, à Philippe II; orig. 
espagnol; Arch. nat., K. 1500, n» 50). — Le secrétaire 
de l'ambassadeur anglais dit aussi que cette opéra- 
tion était inutile (Smith à la reine, 26 février 1563; 
Calendars, 1563, p. 156). 

3. — Lettre de Chantonay au roi d'Espagne du 22 
et du 24 février 156a (Arch. nat. K. 1500, n» 50). — 
Mémoires, journaux de Guise dans la coll. Michaud 
et Poujoulat, p. 507. 

4. — Occurences en France, pièce datée du 26 fé- 
vrier (Calendarsj 1563, p. 162). 



— 48 — 

un peu de soulagement. Le samedi» la reine 
mère était venue le visiter. Elle revint le 
mardi 23 et se retira sans plus de souci que 
Tavantrveille *. Sur le soir, la fièvre augmenta 
« avec une sueur froide, non sans quelque 
(c débilitation de Tentcndement du blessé. » 
L'évêque de Riez s'efforça do le ranimer et 
lui fit prendre un peu de repos. Cependant 
le mal s'aggravait et le cardinal de Guise 
s'imposa la triste mission d'avertir son frère. 
Le duc reçut l'avertissement sans faiblesse 
et demanda à mettre ordre à sa conscience. 
Il se confessa, et fit ses derniers adieux à sa 
femme ^ et à son fils. Il avait retrouvé toute 



1. — Lettre du 23 février {Lettres de Catherine de 
Médicie, t. I, p. 515). L'évéque de \\\ez, à roccasion 
de cette visite, prête au blessé un long discours de 
fantaisie (Mémoires de Condé, t. IV, p. 249). 

2. — Les derniers adieux du duc de Ouise à sa 
femme ont été racontés dans une pièce, que nous 
avons citée plus haut, par Lancelot de Carie, évéqae 
de Riez. Les diverses éditions de ce récit contiennent 
des variantes dignes de remarque. Dans la première, 
le duc fait à la duchesse Taveu de ses faates et 
« fragilltez de jeunesse, n et ajoute : c Je vous plia 
« m'en vouloir excuser et me les pardonner, comme 
« je vous pardonne. Combien que mes offensée 

« soient beaucoup plus grandes que les vô'res * 

Ces mots n'étaient pas neureux. I>e doc n'fgnomii 
certainement pas que le roi Henri ]] et le doc de 
Nemours étalent entrés fort avant dans les bonnes 
grâces dé la dochesse, mais le loi rappeler soleo^ 
Bellement avant de moorirf AossI le récit de Tévéqoe 
de Riez fat-ll réimprimé avec la suppression des 
mois qoe noos avons soulignés. Dans nne troisième 
édition ils forent rétablis, mais on y ajouta. ce tOT- 



- 46 — 

sa connaissance et passa la nuit à rappeler 
les. souvenirs de sa vie glorieuse. Une de 
ses dernières déclarations mérite d'être 
citée. L'affaire de Vassy avait été appelée 
au parlement le 12 février et jugée le 13 *• 
« Je vous prie croire que Tinconvénient 
a advenu à ceux de Vassy est advenu contre 
(c ma volonté, dit-il, car je n'y allay onques 
a avec intention de leur faire aucune offense. 
« J'ay esté défendeur, non aggresseur, et 
« quand Tardeur de ceulx qui estoient avec 
ce moy, me voyans blessé, leur fit prendre 
« les armes, je fey tout ce que je peu pour 
« parer leurs coups et garder que ce peuple 
ce ne receut aucun outrage 2. » 

Le lendemain matin, il dicta son testa- 
ment ^. Il voulut être enseveli à Joinville 
auprès de son père, et demanda que Técu 
do Jérusalem, rapporté par Godefroy do 



rectif : sans jaYnais entrer en aucun soupçon de 
vous. Secousse {Mémoires de Condé, t. IV, {). 265 et 
696), après de Beze, après Le Duchat (Satyre Menip- 
pée, 1752, t. II, p. 229) relaie ces différences de texte. 

1. — Mémoires de Castelnau, t. I, p. 794. — 
Mémoires de Condé, t. IV, p. 230, note. 

2. — Mémoires de Condé, t. IV, p. 258. 

3. — Copie du temps, f. fr.. vol. 3176, f. 82. Le 
testament porte les signatures, en qualité de témoins, 
de Tristan de Rostaing, de Michel de Vialart, maître 
des requêtes, et do Saulches de Foissy, maître 
d'hôtel du testateur. Il est daté du 24 février 1562 
(1563). 



- 47 - 

Bouillon, fut sculpté sur sa tombe avec 
Texergue : a Je veulx monstrer ce qui est 
ce venu de Dieu comme venu de Dieu. » Il fit 
d'amples donations à la duchesse de Guise, 
désigna son frère, le cardinal do Lorraine S 
comme son exécuteur testamentaire et le 
pria de favoriser le mariage de sou fils aine 
avec Catherine d'Albon, unique héritière du 
maréchal Saint-André ^. Cependant le blessé 
s'affaiblissait d'heure en heure. 11 entendit la 
messe et reçut Textrême-onction des mains 
du cardinal de Ferrare ^. Entre dix et onze 
heures du matin, il rendit le dernier soupir ^. 

1. — Le cardinal de Lorraine était alors au concile 
de Trente. 

2. — Pour assurer ce mariage, la dame de Ouise, 
malgré l'opposition de la maréchale de Saint-André, 
obtint que Catherine d*Albon serait élevée auprès 
d'elle (Lettre de Chantonay au roi d*E^pagno, 22 
avril 1563: orig. espagnol; Arch. nat., K. 4499, n» 56). 
M. Clément Simon et M. Tamizev de Larroçiue viennent 
de publier sur cette jeune Olle, convoitée pour sa 
fortune par les plus grands seigneurs de son temps, 
d'intéressantes études dans la nevue des questions 
historiques, janvier 4896, et dans la Revue de l'Age- 
nais, mars 4896. • 

3. — Pièce du temps dans les Mémoires journaux 
de GuisCt p. 517. 

4. — Dans notre récit nous avons principalement 
suivi la Lettre de Vévêque de Riez au Roy, conte- 
nant les actions et propos de M. de Guy se depuis 
sa blessure jusques à son trespas, récit officiel 
puisque Lancelot de Carie, évêque de Riez, était le 
confesseur du duc de Guise et l'assista iusques à sa 
dernière heure. Ce récit a souvent été réimprimé. 
Nous avons suivi la version des Mémoires de Condé, 
t. IV, p. 243. 



— 48 - 

Les regrets de la reine, de la cour et de 
Tarmée furent aussi sincères, aussi unanimes 
que le méritait la victime K Le roi lui-même 
« pleura longtemps et tendrement ^. » 
« Nous avons fait eune grant perte en cet 
ce homme, » écrit Catherine à sa belle-sœur, 
Marguerite de France, duchesse de Savoie, 
la seule personne de la cour de Henri II. à 
qui elle témoignât de la confiance, ce car 
ce c*estoit le plus grant cappitayne qui souit 

« en ce royaume ^. » Florimond Rober- 

tet se fait Tintcrprète des courtisans auprès 
du duc de Nemours : « Je ne scay par quel 
a cousté je dois commencer ceste lettre, 
a estant si affligé que je ne puis respirer. » 
Et il raconte les regrets des princes et des 
princesses, Teffarement des secrétaires d'Etat 
chargés d'aviser aux affaires du roi. En cor- 
respondant fidèle, il n'oublie pas la duchesse 
de Guise, qu'il savait être plus chère au duc de 
Nemours que tout le reste de la cour : ce C'est 
« pityé que de veoir ceste pouvre dame, car 

1. — Le 18 mars, Pie IV adressa une bulle de condo- 
léance au cardinal de Lorraine (Annal. Raynaldi, 
t. XXI, 1563, no 53). 

2. — Lettre de liarbaro à la république do Venise, 
2 mars 1563 {Despalchns of Suriano and Barbara, 
1891, in-4o). Le roi écrivit à Philippe II une lettre 
autographe qui est publiée dans le Musée des 
Archives^ p. 375. 

3. — Lettres de Catherine de Médicis^ 1. 1, p. 517. 



- 49 — 

a jamais on ne vit tel dueil, et a bien besoin 
a d'estre consollée ^ » Les capitaines, les 
gens d'armes, les simples archers de Tarmée 
catholique, beaucoup de vétérans de Tarmée 
protestante, qui avaient fait la guerre sous 
le règne de Henri II, « plourèrcnt, dit Bran- 
« tome, le duc de Guise comme leur père 
« nourrisson ^. x) Le tforps du prince, vêtu 
avec magnificence, <r ganté, les yeux presque 
<r clos x>, couché sur le lit de damas noir do 
la reine, fut mis en chapelle ardente et exposé 
aux regards des soldats ^. L'armée royale 
presque entière défila devant le catafalque de 
son chef. Catherine s'évanouit en lui jetant 
de Teau bénite *. Le 27 février, en présence 
des compagnies alignées, enseignes basses, 
pendant que ce les tabourins sonnaient le des- 
cc confort », le corps fut enseveli dans un 



1. — Lettre de Robertet au duc de Nemours, IBloîs, 
26 février 15G2 (1563). — Dans une autre lettre, 
21 mars, Robertet insiste sur la douleur de la duchesse 
de Quise, qui a n'a que un seul reconfort, c'est de 
« s'assurer que ses amis se souviendront un jour bien 

« à propos de venger son injure » Ces deux lettres 

ont été publiées par M. le comte Baguenault de 
Puchesse dans le Éulletin de la Soc. arch, et hisL de 
VOrléanais, t. X, n» 152. 

2. — Brantôme, t. VI!, p. 66. 

3. — Smith à la reine d'Angleterre, 26 février 1563 
(Calendars, 1563, p. 156). 

4. — Lettre do Barbare à la république de Venise, 
2 mars 1562 Despatches of Suriano and Darbaro, 
1891. 

4 



- 80 - 

côiïre de plomb et porlé en baleau à Blois K 
Depuis que la nouvelle de la mort du héros 
était connue à Paris, les services mortuaires 
se succédaient dans les églises de la ville. 
Le 18 mars, le cortège, suivi d*un régiment 
do Suisses, arriva au faubourg Saint- 
Michel et fut reçu au monastère des Char- 
treux^. Le 19, les funérailles solennelles ^ 
furent célébrées à Notre-Dame de Paris 
avec des honneurs royaux *. Le Parlement 
y assista ^. La désolation générale, les 
regrets unanimes des bourgeois et du 
peuple étaient le plus bel ornement de la 
cérémonie. <c Jamais, écrit l'ambassadeur 



i. — Pièce du temps dans les Mémoires journaux 
de Guise, coll. Michaud et Poujoulat, p. 507. 

2. - Félibien, Histoire de Paris, t. V, p. 393. — 
Voyez surtout les Registres de la ville de Paris, t. V, 
p. 203. 

3. — Les cérémonies des obsèques durèrent jus- 
qu'au lundi suivant, 22 mars. 

4. — Les documents sur les obsèques du duc de 
Guise sont très abondants. Nous signalerons seule- 
ment les pièces conservées au département des 
imprimés de la Bibliothèque nationale (Catalogue, 
1. 1, p. 259), une pièce réimprimée dans les Archives 
curieuses de Cimoer et Danjou, t. V, p. 207. un extrait 
des registres du Parlement (coll. du parlement, vol. 
556, f. 55), une autre pièce (r. fr., vol. 4.047, f. 4), un 
extrait du cérémonial de l'hôtel de ville (f. fr., 18.528, 
f. 30 vo) et enfin les Registres des délibérations de la 
ville de Paris, t. V, p. 203. 

5. — Arrêt du parlement du 3 mars 1562 (1563) 
(Mémoires de Condé, t. IV, p. 279). — Lettre de de 
Thou du 18 mars. Voyez aux Pièces justificatives. 



- 81 - 

« vénitien, corps de roi ni même d'empereur 
a n'a été accompagné d'autant de grandeur 
« ni d'autant de démonstration de douleur 
« universelle *. » On remarqua cependant 
que le maréchal François de Montmorency, 
fils aîné du connétable et gouverneur de 
Paris, n'assista pas aux obsèques ^. Les jours 
suivants, nouveaux services jusqu'au trans- 
port du corps à Joinville. Les prédicateurs de 
chaque paroisse prononcèrent des sermons, 
des panégyriques, des oraisons funèbres où 
s'étalaient largement les prétentions gé- 
néalogiques de la Maison de Lorraine ^. 
« C'est, dit un des panégyristes *, la fin 
« d'un prince (chrétien ; c'est la fin d'un Ro- 
« land ; c'est la fin d'un roy saint Loys, de 
(( la race duquel il est descendu ^. » A ces 
éloges venus d'un catholique, un protestant, 
un ennemi ajoute des traits glorieux : « Il 
« était le meilleur général de la France, 



i. — Lettre de Marc Antoine Darbaro au doge de 
Venise, 23 mars 1653 (Despatclies of Suriano ànd 
Darbaro, ia-4«, 1891). 

2. — Lettre de Chantonay au roi d'Espagne 22 avril 
1553 (Orig. espagnol: Arch. nac, k. 1499, n» 56). 

3. — Voyez Labitte, Les prédicateurs de la Ligue, 
1866, p. 91. 

4. — Pièce publiée dans les Mémoires de Condé, 
t. IV, p. 270. 

5. — Le duc de Quise était fils d'une princesse de 
la Maison de Bourbon. 



— 52 - 

ce d'autres diront de la chrétienté, car il 
a avait toutes les qualités qu'on peut désirer 
a dans un général, un esprit prompt, un 
a corps inaccessible à la souffrance, un grand 
« courage, de l'expérience pour conduire 
(( une armée, de la courtoisie pour entretenir 
« les gens, de l'éloquence pour exprimer sa 
« pensée, de la générosité pour les satis- 
« faire *. » 

Aussitôt après le coup de pistolet de Pol- 
trot de Meré, Tristan de Rostaing, laissant 
le duc aux mains de ses serviteurs, avait 
.couru après l'assassin. Malgré les ombres de 
la nuit, il l'aperçut galopant dans la cam- 
pagne, et l'entendit crier a prenez-le I pre- 
nez-le ! » après un cavalier imaginaire qu'il 
feignait de poursuivre •. Rostaing, monté 
sur un petit mulet, ne put l'atteindre et le 
perdit de vue. D'après une autre version, 
Rostaing tira l'épée et voulut arrêter le meur- 
trier; mais celui-ci était bien armé; il fondit 
sur l'agresseur et d'un coup de revers faillit 
lui trancher la tête. Le cavalier qui servait de 
guide au duc de Guise dégagea Rostaing. 
L'assassin prit la fiiiitc au galop de son che- 
val et disparut ^. 

1. — Smith à la reine d'Angleterre, 26 février 1563 
(Calendars, 1563, p. 156). 

2. — Brantôme, t. IV, p. 256. 

3. — Pièce datée du 27 février {Calendars, 1563, 



- K3 - 

Poltrot courut toute la nuit, tout le.jour 
et toute la nuit, suivante *, presque sans, 
prendre de nourriture et de repos. Troublé 
j)ar le forfait qu'il venait de commettre, il 
ne sut diriger ses pas et perdit son temps 
et ses forces en détours dans les bois. Le 
surlendemain du crime, au point du jour, il 
ne s'était pas éloigné de l'armée royale. Il 
rencontra un corps de garde suisse et fut 
hêlé par la sentinelle : « Ho! wer da? x) 
Aussitôt il reprit sa course et ne s'arrêta quo 
lorsque son cheval fut épuisé de fatigue. Il 
descendit aux portes ce d'une censé h isolée, 
entre Olivet et Gergeau ^. Le roi, par une 
ordonnance de la veille, avait mis à prix la 
tête de l'assassin ^. Le samedi matin, 20 fé- 
vrier, arrivèrent à la censé « quatre arque- 
(( buziers, qui estoient sortis comme pluzieurs 

p. 162). G*est là que Tun des gens de Rostaing put 
apercevoir la couleur du manteau du cavalier. 

1. — Cette course prodigieuse est expliquée avec 
détails dans un éloge du duc de Guise. (Coll. Dupuy, 
vol. 844, f. 94, et f. fr., vol. 17305, f. 1). 

2. — Censé, ferme louée. C'est l'expression même 
dont se sert l'assassin. 

3. _ Premier interrogatoire de Poltrot de Meré. 
Voyez aux Pièces justificatives, 

4. — Récit du temps. (Mémoires journaux de 
Guise, coll. Michaud, p. 500), confirmé par tous les 
historiens. — Lettre de Chantonay du 22 et du 24 fé- 
vrier déjà citée. — Cette somme est élevée à 10, 
20 et 30 mille écus par certains Mémoires. 



- 5i - 

« autres en cherche du mal facteur, et deman- 
« darent en la maison de ce paysan s*il avoii 
« veu ung capitaine après lequel ilz alloient. 
« Il respondit que là dedans il avoit ung 
« homme qui faisoit repaistre son cheval, 
« qui estoit fort las ^ » D'après Castelnau, 
le secrétaire du duc de Guise, Le Seurre, 
conduisait les soldats. Il ne connaissait pas 
Poltrot, mais, frappé du trouble de l'étran- 
ger, il eut des soupçons qu'augmentèrent 
ses réponses. Aussitôt il le fit arrêter ^. 

L'accusé fut conduit au camp le samedi 
dans la journée, et, sans délai, la duchesse 
de Guise commanda à Michel de Yialart, 
maitre des requêtes, de l'interroger. Vialart 
se fit accompagner par Beaulieu de Losses, 
maréchal de camp, et par un secrétaire du 
duc. Aux premières questions, Poltrot de 
Meré repoussa l'accusation et jura qu'il 
n'était pas coupable. En vain Yialart lui 
représenta qu'un des laquais de Tristan de 
Rostaing avait' distingué dans l'obscurité la 
couleur de son saye ^ et le harnais en cuir 

1. — Lettre de Chantonay du 23 février I5(i3. 
{Mémoires de Condé, t. Il, p. 135). 

2. — Mémoires de Castelnau, liv. IV, chap. x. — 
D'après une lettre de Tambassadeur d'Espagne, le 
prisonnier, réveillé en sursaut, perdit contenance et 
avoua son crime. (Lettre de Chantonay du 22 et du 
24 février 1563, déjà citée). 

3. — Saye, manteau. 



— 8B - 

blanc de son cheval, qu'on Tavait vu le matin 
accompagner le duc de Guise au Portereau 
et Tattendre le soir au passage du Loiret, 
(ju'il n'avait pas reparu le soir aux Vaslins, 
bien qu'il y eut donné rendez-vous aux gens 
de Casteinau et payé d'avance son souper. 
L'interrogatoire dura de 8 heures du soir à 
minuit. Poltrot ne voulut rien confesser. 
Pressé de questions, impuissant à justifier de 
l'emploi de son temps depuis l'heure de l'at- 
tentat, il promit de dire la vérité à la reine K 
A la première nouvelle du crime, Cathe- 
rine de Médicis avait montré Une émotion, 
une colère trop vives pour être simulées. 
« Je suis si faschaye, écrit-elle à son confi- 
« dent ordinaire, Artus de Cessé Gonnor, 
« que je nay se que je vous dois dyre, sinon 
« qui me coûtera tout set que ha le Roy, 
« mon fils, pour savoyr qui ha fait fayre sete 
« mechanseté *. » Le jour même de l'arres- 
tation de l'assassin, elle arriva au camp 
avec le cardinal de Bourbon, Jean de Drosses 
d'Estampes, Sébastien de Luxembourg de 
Martigues, Ludovic de Gonzague de Nevers, 
le comte de Gruyères, Prévost de Sansac, 

1. — Discours sur l'examen de Poultrot (copie du 
temps: f. fr., vol. 22429, f. 170), pièce d'autant plus 
importante qu'elle est écrite dans l'esprit protestant 
comme on le verra plus loin. 

2. — Lettre de Catherine de Médicis, t. I, p. 512. 



— m - 

Philibert de Marcilly de Cypierre, Jean de 
Beaulieu de Losse et Sébastien de TAu- 
bespine, évoque de Limoges. Elle se logea 
dans la maison de Caubray S paroisse d'OIi- 
vet, et, le 21 février, en présence des 
seigneurs qu'elle avait amenés, elle fit 
comparaître Taccusé. Jean Poltrot, s. de 
Meré, était âgé de 26 ans. Né en Angou- 
mois, près d'Aubeterre, il avait été page du 
vicomte d'Aubeterre ^, puis de la reine ^. 
Après avoir passé une année en Espagne *, 
il revint en France et prit du service dans 
les compagnies protestantes de Jean de Par- 
thenay Soubise ^ en Lyonnais. Sa bravoure, 
son énergie, la résolution et le dévouement 
dont il faisait parade, l'avaient fait employer 
dans des missions de confiance. Coligny lui 

1. — Le souvonir du séjour de la reine à Caubray 
est conservé par une inscription latine oui a été 
reproduite dans les notes de l'interrogatoire de Poltrot. 
(Variétés historiques et littéraires de la coll. elzévi- 
rienne, t. VIII, p. iS). 

2. — François Bouchard, vicomte d'Aubeterre, 
seigneur de Saint-Martin*de-la-Ooudre, en Saintonge, 
avait pris part, d'après Brantôme, à la conjuration 
d'Amboise et avait été sauvé de la potence par le duc 
do Guise. (Brantôme, t. IV, p. 251). 

3. — Lettre de Ghantonay du 23 février 1563. 
(Mémoires de Condé, t. II, p. 134). 

4. — L'Histoire ecclésiastioue dit qu'il en avait 
gardé le surnom de CEspagnolet. (Hist. eccles., 1882, 
t. I, p. 627). 

5. — Jean de Parthenay Soubise était le beau-père 
du vicomte d'Aubeterre. 



- 87 — 

reconnut de rintelligence et résolut de l'uti- 
liser comme espion K Poltrot se présenta 
comme Espagnol et vint trouver le duc de 
Guise au camp de Messas. Il fut bien accueilli 
et s'attacha à ce seigneur ^. Il le suivit à 
BloiSy au Portereau, à Cornay, aux Vaslins 
et ne le quitta plus jusqu'au jour de l'assas- 
sinat ^. 

Aux premières demandes de la reine, Pol- 
trot de Meré avoua que pendant Tété précé- 
dent, à Orléans, Jean de Paz de Fcuquières 
et Brion, capitaines protestants, et surtout 
Coligny lui avaient conseillé de tuer le duc 
de Guise, que, au mois de janvier, Coligny 
l'avait envoyé chercher à Lyon et avait tâché 
de « luy donner hardiesse pour exécuter 
(( lad. entreprise, » qu'il lui avait donné 
20 écus, puis 100 écus pour acheter un che- 
val (( si le sien n'estoit assez bon pour se 
« sauver après avoir fait le coup, x) que, 
après plusieurs conférences avec l'amiral, 
avec Théodore de Bèze * et le ministre Jean 



i. — Réponse de Coligny à rinterrogatoire de Pol- 
trot. (Dti Bouchet, Preuves de VHistoire de la Maison 
de Coligny, p. 522). 

2. — Brantôme raconte que Poltrot, pour se faire 
bien venir, se présentait comme un désabusé du culte 
protestant. (Brantôme, t. IV, p. 255). 

3. — Premier interrogatoire de Poltrot de Meré. 

4. — - Il est à remarquer que tous les narrateurs, 
accusent de Bèze d*avoir encouragé Tassassin. (Smith 



— »8 — 

de LespineS malgré ses hésitations, malgré 
ses refus, il avait été tellement encouragé 
a à faire la chose la plus belle qui fust 
a oncques faite » qu'il n'avait pas su résis- 
ter. Puis il raconta l'exécution du crime, les 
détails de sa fuite avec une franchise incons- 
ciente qui prétait à sa parole l'accent de la 
vérité 2. 

Catherine de Médicis lui proposa, moyen- 
nant une forte récompense, « d'entreprendre 
(L d'en faire aultant aud. s. admirai. » Pol- 
trot prit la proposition au sérieux et répondit 
affirmativement. La reine a se print à soubz- 
« rire, disant qu'il vouldroit bien estre quitte 
ce et eschapper par là ^. » Vialart dirigeait 
l'interrogatoire, posait les questions et tirait 
les conséquences des réponses. Lorsque 
l'accusé se perdait en divagations inutiles, il 
le ramenait au point de départ. Ainsi pressé, 
Poltrot de Meré ajouta que le parti réformé 

à la reine Elisabeth, 2G février, Calendars, 1563, 
p. 156; occurrences» de France, ibid., p. 162); à plus 
forte raison les ambassadeurs catholiques. Barbare, 
ambassadeur de Venise, et Chantonay, ambassadeur 
d*Espagne. Voyez plus loin l'indication de leurs 
dépêches. * 

1. — Cet autre ministre, que Poltrot de Meré ne 
nomme pas, est Jean de Lespine, dit Spina (Lettres 
de Calherine de Médicis, t. I, p. 517). 

2. — Vojrez le premier interrogatoire de Poltrot 
aux Pièces justificatives. 

3. - Discours sur Texamen de Poultrot déjà cité. 



~ 89 — 

avait des séides résolus à frapper tous les 
capitaines du parti catholique, les princes, la 
reine, le roi lui-même. Il désignait notam- 
ment un a homme de moïenne taille, aiant 
<r barbe rousse, portant chausses rouges et 
« ung collet de cuir déchiqueté, » qu'il avait 
vu à Orléans auprès de Tamiral et qu'il avait 
retrpuvé à Blois au jeu du roi *. 

Catherine fut accablée par ces révélations * 
L'assassinat du duc de Guise ne se présentait 
plus comme un forfait isolé ; c'était le premier 
anneau d'une chaine de crimes qui devait 
atteindre le roi lui-même. Elle prescrivit des 
recherches et, sur le signalement décrit par 
Poltrot, on arrêta (x. un rousseau d dans la 
cour du château de Blois ^. 

L'interrogatoire s'était fait au logis du 
duc de Guise. Ni greffier, ni clerc n'avait 
enregistré les réponses. La séance terminée, 
la reine commanda à Vialart de rédiger la 
déposition. Vialart se mit à l'œuvre et, pour 
fixer ses souvenirs, retourna auprès du pri- 
sonnier avec Beaulieii de Losses, le prévost 
des maréchaux, Dumas, et un autre prévôt. 
Le lendemain Claude de l'Aubespine donna 



!. — Déposition de Poltrot de Meré. 

'2. — Lettre de Catherine du 25 février Ï5G2 (1503) 
{Lettres de Catherine de Médicis:, 1. 1, p. 5i7). -Lettres 
de Sainte-CroiXf in-i?, p. 2H. 



^ ()0 — 

lecture au conseil de la rédaction de Vialart. 
Plusieurs conseillers prirent la parole et 
Sébastien de TAubespine « feit quelques con- 
« tradictions. x> Toutefois les modifications 
furent peu importantes. Le lieutenant du 
prévôt de Thotel et son greffier, Malvaut, 
portèrent le procès-verbal à Pollrot do Meré 
qui le signa. Malvaut, qui n*avait pas assisté 
à l'interrogatoire, le signa aussi et certifia 
qu'il avait été dressé en présence de la reine 
et de son conseil. 

Le document qui nous raconte une partie 
de ces faits nouveaux constate que cette 
procédure était irrégulière, que Vialart 
appartenait à la maison du duc de Guise, 
qu'il n'avait aucun mandat pour instruire 
une affaire criminelle, qu'il s'écoula au moins 
quelques beures entre les réponses de l'ac- 
cusé et la rédaction du procès-verbal, et que, 
en raison de ces vices judiciaires, les premiers 
aveux de Poltrot pouvaient être frappés de 
suspicion ^ 

Le 23 février, Poltrot de Meré fut conduit 
à Paris et écroué à la Conciergerie. Il subit 
un second interrogatoire le 27 février, mais 

4. ~ Discours sur rexamen de Poultrot déjà cité. 
— Lo nonce, Prosper de Sainte-Croix avait su que 
Poltrot n'avait signé sa déposition que le lendemain 
(Lettres de Sainte-Croix, in-4o, p. 208). 



-m — 

il ne fit aucune révélation nouvelle. Il con- 
firma seulement sa déposition du 21 pré- 
cédent et demanda à parler au roi et à la 
reine. Son insistance, le ton mystérieux avec 
lequel il annonçait des déclarations impor- 
tantes, intriguèrent la reine mère. N'osant 
sans doute conférer avec lui de crainte d'être 
soupçonnée de lui avoir dicté certaines dénon- 
ciations, elle commanda à de Thou de le voir, 
de l'interroger, do lui arracher son secret. 
De Thou n'eut pas de peine à pénétrer le 
mystère. Poltrot de Meré redoutait les 
tourments de la question, les fureurs du 
peuple de Paris, la rigueur du supplice qui 
l'attendait et cherchait à gagner dii temps. 
Il accusa le duc de Guise des désastres de la 
guerre et prédit de plus grandes calamités. 
L'Allemagne protestante, disait-il, attend 
l'heure de fondre sur la France et la mort du 
duc de Guise sera le signal attendu. Malheur 
aux capitaines qui ramasseront le bâton de 
commandement du duc de Guise; ils auront 
le môme sort que lui. Quant au roi, le 
dévouement des « associés » est tellement 
désintéressé qu'ils se résigneront à lui 
« obéir entièrement, jusques à s'en aller 
« hors du royaume s'il le leur commande. » 
En attendant la majorité du roi, ils exigent 
seulement l'exécution de l'édit dé janvier. 



— (tt - 

Ces rodomontades étaient débitées avec assu- 
rance, mais sur un ton de résignation digne 
de Tapôtre d'une bonne cause : a Quant à 
« luy, disait-il, qui n'attend que la mort et 
ce la gràcQ et miséricorde de Dieu, quand il 
« ne sera plus en ce monde on cognoistra 
« qu'il a dit la vérité en tout et partout *. » 
La gravité des accusations formulées par 
Poltrot épouvantait les officiers de justice. 
Le premier président du parlement de Paris, 
Christophe de Thou, le père du grand his- 
torien, catholique ardent, était eiïrayé de sa 
responsabilité. Provoquer des révélations qui 
jetaient à un parti de princes ou de grands 
dignitaires le plus sanglant des outrages, 
celui de diriger une bande d'assassins, était 
une tâche au-dessus de son courage. Aussi 
ne voulait-il interroger Poltrot de Meré qu'en 
présence du greffier et seulement à certaines 
heures, probablement à cause de la présence 
des conseillers de la chambre criminelle, pour 
né pas être accusé de lui avoir suggéré les 
réponses •. Il use d'une autre précaution qui 



1. — Seconde déposition de Poltrot de Meré, 
27 février 1562 (1563). Voyez aux Pièces justificatives, 

2. — Lettre de de Thou à la reine. 27 février 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives, La lettre fut 
confiée à Claude Marcel. (Lettre de Christophe de 
Thou à la reine, 2 mars 1562 (1563); autographe; f. 
fr., vol. 6615, f. 8). 



- 03 — 

semble puérile : jamais il ne prononce ou 
n'écrit le nom du coupable. Il le désigne par 
un vocable indiiïérent, comme a le person- 
<K nage d ou a le prisonnier j>. Le greffier 
et les autres magistrats montrent la môme 
circonspcclion. 

Le ce rousscau » que Poltrot avait dénoncé 
à la reine comme un des sicaires apostés 
pour tuer le roi avait élé signalé aux prévôts 
de la cour. On arrêta à Blois un tapissier * 
« de ce poil », nommé Etienne Cueur de Roy, 
qui avait longtemps servi le connétable et 
était passé au service de Henri II vers le 
temps du traité de Cateau-Cambrésis. Con- 
duit à la Conciergerie de Paris le 6 mars, 
Cueur de Roy fut interrogé le lendemain. Il 
prouva qu'il était catholique, étranger à 
toute intrigue et quil n'était arrivé à 
Blois que le jour même de l'assassinat de 
Guise 2. Le premier, président confronta 
les deux accusés; ils ne se reconnurent 
pas ^. Les dates et l'alibi, dont Cueur de 
Roy fournissait la preuve, démontraient qu'ils 



1. — Sainte-Croix lui donne la qualité de maître de 
la garde robe du roi. {Lettres de Sainte-Croix, in-4», 
p. 211). 

2. — Interrogatoire de Etienne Cœur de Roy, 
7 mars 1562 (15G3). Voyez aux Pièces justificatives. 

3. — Troisième interrogatoire de Poltrot do Meré, 
7 mars 1562 (1563). Voyez aux Pièces justificatives. 



— 64 - 

n'avaient pu se rencontrer à Blois. De Thou 
le fit mettre en liberté ^ Sa ressemblance 
avec un prétendu complice de Poltrot était 
une coïncidence fortuite. Poltrot fut de nou- 
heau pressé de questions. Il confirma pour 
la seconde fois ses accusations précédentes 
contre Coligny et contre les autres chefs de 
la réformé, parla de la nécessité de la paix, 
des dangers qui menaçaient le royaume et 
fit grand étalage do confidences qu'il s'en- 
gageait à faire, a quand il seroit en liberté », 
au roi et à la reine. 

Les bourgeois et le peuple de Paris, en- 
flammés d'admiration pour le duc de Guise 
et d'indignation pour le meurtrier, s'éton- 
naient de la longueur de l'instruction. Aussi- 
tôt après le crime, le prévôt des marchands 
avait lancé une protestation vengeresse 
ce contré le malheureux outrage proditoire- 
« ment fait à Monseigneur ^. » L'émotion du 
peuple augmenta à la nouvelle de la mort 
du duc, à l'arrivée de l'assassin à la Con- 
ciergerie, aux services solennels qui furent 
célébrés dans toutes les églises en l'honneur 
de la victime ^. La populace parisienne faisait 

1. — Lettre de de Thou à la reine, 7 mars 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives. 

2. — Uettre du prévôt des marchands à la reine, 
21 février 1562 (1563); coll. Brienne, vol. 205, f. 317. 

'3. —L'un de ces services est mentionné dans un 



— 68 — 

entendre chaque jour autour de la Concierge- 
rie les plus menaçantes vociférations. Quel- 
ques sceptiques, bons juges de la duplicité 
de Catherine, répandirent le bruit de l'éva- 
sion de Taccusé; d'autres racontaient qu'on 
l'avait égorgé secrètement pour étouffer ses 
révélations. De Thou s'inquiétait de ces 
calomnies. « J'ay parlé au geôlier, écrit-il 
(( à la reine, lequel m'a dit qu'il respond sur 
(( sa vie qu'il n'adviendra aucun inconvénient 
(( à la personne du prisonnier. » La santé de 
ce misérable devint un des soucis du pre- 
mier président. « Le geôlier m'a dict, ajoute- 
(( t-il, qu'il se porte bien, est sain et dispos*. » 
Poltrot, plein d'illusion, se flattait de pro- 
longer sa détention par des offres de révé- 
lation et d'être amnistié à la paix. <ic II se 
a porte mieux que ne faisoit, écrit encore do 
« Thou, et n'est empiré par la prison. Mais 
« si luy advenoit quelque chose, comme il 
a pourrait advenir, je serois en grande 
« peine ^. » 
L'agitation devint si menaçante que de 

arrêt du parlement du 3 mars 1562 (1563). {Mémoires 
de Conde, t. IV, p. 279). Plusieurs autres sont annon- 
cés dans la lettre de de Thou du 6 mars. (Voyez aux 
Pièces justificaUves). 

1. Lettre de de Thou à la reine, 6 mars 1562 (1563). 
Voyez aux Pièces justificatives. 

2. — Lettre de de Thou à la reine, 7 mars 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives. 

6 



^ -66- 

Thou pria la reine d'amener le roi à Paris, 
« pour obvier à la perte et ruyno do cesto 
« ville, écrit-il à la reine', que Ton estime 
a approcher, s'il n'y est promptement se- 
a couru *. » Catherine était en pleine négo- 
ciation avec le prince de Condé et ne pouvait 
se déplacer. Cependant les troubles s'aggra- 
vaient. Pas de jour qui ne fut marqué par 
un mouvement dans les rues. Les bourgeois 
les plus pacifiques s'impatientaient des len- 
teurs de la justice vis à vis d'un aussi grand 
coupable, a On crie fort qu'il n'est despeché, 
a dit do Thou, et que l'on n'en faict prompte 
a justice. La garde n'en vault rien ^. » lit 
le lendemain : ce La garde n'en vault pas 
« beaucoup, comme l'on crye ^. » 

Avant d'autoriser le prononcé de l'arrêt et 
le supplice, Catherine de Médicis attendait la 
signature de la paix d'Amboise et la sou- 
mission des chefs huguenots. Jusques là la 
vie de l'assassin, les révélations que l'on 
pouvait tirer de sa bouche étaient une menace 
permanente pour les rebelles encore insoumis. 

Le premier président n'entrait pas dans 

1. — I^ettre de de Thou à la reine, 5 mars i562 
(1563) (copie; f. fr., vol. 6621, f. 52). 

2. — Lettre de de Thou à la reine, 6 mars 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives, 

3. — Lettre de de Thou à la reine, 7 mars 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives» 



- 67 - 

ces considérations. Le 15 mars, il devient 
plus pressant. D*étranges rumeurs se répan- 
daient dans la ville, a La garde du person- 
« nage, écrit-il à la reine, ne vault à autre 
a chose, sinon à faire crier et scandaliser le 
« peuple jusques à me menacer. » Person- 
nellement mis en cause, le premier président 
tremble pour lui-même. Il dénonce à la reine 
« les outrages » dont il est abreuvé. On 
dit, écrit-il, a que Ton le vcult garder pour 
« le faire varricr et desdirc. Et si ainsi 
« estoyt qu'il varriast... je vous laisse à 
a penser ce que Ton pourra dîre^ » 

Le jour même où de Thou écrivait cette 
lettre, quelques moments peut-être après 
qu'il Teut expédiée, un retour inattendu don- 
nait raison à ses craintes. 

L'instruction était terminée. L'assassin 
avait contesté le crime et révélé les circons- 
tances qui l'avaient accompagné; il avait 
accusé l'amiral Coligny de lui avoir donné 
l'idée et les moyens de le commettre ; il avait 
avoué tout ce qu'il savait et peut-être plus 
encore, puisqu'il avait dénoncé un ce rous- 
« seau » qui avait prouvé son innocence 
par un alibi irréfutable. Deux fois depuis son 
premier interrogatoire, il avait formellement 

1. — Lettre de de Thou à la reine du i5 mars 1562 
(1563). Voyez aux Pièces justificatives. 



-- 68 - 

confirmé sa déposition, quand, le 15 mars, 
h la suite d une visite du premier président 
de Thou et d'une séance à la chapelle, c'est- 
à-dire à la chambre de la question, il rétracta 
ses précédents aveux. 

Le J7 mars, deux jours après la rétracta- 
tion de Poltrot de Meré, peut-ôtre à Tinsu 
du premier président, le greffier du parle- 
ment, Jean du Tillet, en informa la reine. 

A la royne 

Madame, je feroys tort à mon devoir si je vous 
celloys que, lundy dernier *, Mons. le premier prési- 
dent et moy cogneusmes que le prisonnier chargé du 
meurtre de feu Monsieur de Guise a eu coehertion ^ 
et branle pour se desdire de ce qu'il a confessé devant 
Yostre Maiesté. C'est ce que la question apporte, 
laquelle ne peult servir 3, car son crime le rend si 
responsable que, s'il n'y a aultre tesmoignaige que 
le sien, ce sera peu. . 

Madame, je sUpply le créateur (|u'il vous doin ot 
bonne santé et hmguo vyc. 

A Paris, le xvn jour de mars 1562^. 

Du TlLLET. 

1. — Lundi dernier était le 15 mars. 

2. — Coehertion, coercition, terme de pratique 
judiciaire au xvi« siècle. 

3. —Voici comment DousÎDterprétoDS cette phrase : 
l'accusé commence à se dédire; c'est ce que la ques- 
tion apporte; mais sa rétractation ne peut servir à 
rien; son cHme le rend personnellement si respon- 
sable que, s'il n'y a pas d autres témoignages que le 
sien, on ne peut accuser personne. 

4. — Autographe de du Tillet, 17 mars 1562 (1563) 



— 60 r- 

Quels mobiles déterminaient Taccusé à se 
démentir? D'après les défenseurs de Coligny, 
Poltrot de Meré n'osa persister dans un faux 
témoignage qui lui aurait été suggéré, sinon 
imposé, le Ipndemaîn du crime; la vérité lui 
aurait été arrachée pour la première fois par 
les rigueurs de la torture. Les accusateurs 
de Coligny se tiennent dans le vague et la 
plupart même ignorent ou feignent d'ignorer 
les variations de Poltrot. Il est certain que 
la vérité fut peu répandue et que, parmi les 
contemporains, les seuls initiés aux mystères 
dé la Conciergerie purent la connaître. Seul, 
Perrenot de Chantonay, représentant de 
Philippe II, le mieux informé de tous les 
ambassadeurs étrangers, mais aussi le plus 
malveillant pour les grands personnages de 
la cour, présente une explication que nous 
allons exposer pour la première fois. 

La ville de Paris et le gouvernement de 
risle de France étaient alors administrés 
par le maréchal François de Montmorency, 
fils aîné du connétable. Montmorency était 
catholique, mais il appartenait à la nuance 
la plus rapprochée du parti réformé ^ . Aussi 



(f. fr., vol. G610, f. 32). On a le droit do s'étonner 
qu'une nouvelle aussi importante n'ait dté transmise 
a la reine que le 17 mars. Voyez plus loin. 

). -^ Nous rappellerons seulement ici le fameux 



- 70 - 

était-il presque aussi impopulaire à Paris 
que Coligny lui-même ^ . François de Mont- 
morency, comme tous les seigneurs de sa 
maison, s'était ligué avec Coligny, son 
cousin germain, contre Tinfluence des Lor- 
rains ^. Depuis la mort du duc de Guise, il 
avait de nouveaux sujets de haine contre le 
rival de son père. François II avait dépouillé 
le connétable de la charge de grand-mattre 
de la maison du roi au profit de Toncle de 
Marie Stuart ^. Le vieux Montmorency se 
flattait, à la mort de Guise, de faire revenir 
cette dignité à son fils ^ ; mais le premier 
mot de la reine, après l'attentat de Poltrot, 
fut d'assurer au prince de Joinville, fils atné 
de la victime, toutes les charges de son 
père^. François de Montmorency, frustré 

procès des politiques qui faillit lui coûter la vie. 
voyez le savant ouvrage de M. Décrue : Le parti des 
Politiques, in-8, 1892. 

1. — Lettre de Ghantonay du 22 avril 1563. Voyez 
plus loin. 

2. — Voyez Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, 
t. II, chap. VI. A la nouvelle de l'assassinat de Guise, 
il écrivit à la reine une lettre pleine de bons senti- 
ments pour le duc de Guise (21 février 1562 (1563); 
copie, coll. Brienne, vol. 205, r. 319). Mais on ne peut 
tirer aucune conséquence des ternies d'une lettre 
officielle. 

3. — Marie Stuart était fille de Marie de Lorraine, 
propre sœur du duc de Guise. 

4. — M. Décrue, dans son savant ouvrage sur Anne 
de Montmorency, p. 362, donne des détails. 

5. — Lettre de Gatherine au Gonnétable. {Lettres de 



— 71 ~ 

dans ses espérances, conçut un vif dépit. II 
était resté à Paris pendant la guerre civile ; 
on le voit figurer dans une séance du parle- 
ment le 5 mars précédent ^ C'est là que le 
trouvèrent les graves nouvelles de la fin de 
février i563, la mort de Guise, Téchec de 
ses prétentions à la dignité de grand-mattre, 
les accusations deshonorantes portées contre 
Goligny, son cousin et son ami. Il conçut 
alors, d'après l'ambassadeur d'Espagne, un 
projet romanesque, mais qui n'est pas extra- 
ordinaire dans une cour où régnait le- ma- 
chiavélisme des Médicis. Tout puissant à 
Paris, même à la Conciergerie, en face d'un 
premier président effrayé de la moindre res- 
ponsabilité, il s'introduisit en personne ou 
fit introduire un adldé auprès de Poltrot de 
Meré et promit de lui sauver la vie, quelque 
fût l'arrêt du parlement, à la condition qu'il 
disculperait Coligny, et qu'il persisterait 
dans sa rétractation a même sur l'écha- 
« faud. » Chantonay assure même qu'il signa 
cette promesse et qu'il la remit, comme 



Catherine de Médicis, t. I, p. b\3). — Lettre de la 
même à Saint-Sulpice, ambassadeur en Espagne 
(ibid., t. II, p. 36). — Chantonay, dans sa lettre du 
22 avril 156à, donne d'autres détails. (Ârch. nat., K. 
i499, no 56). 

i. — Lettre de de Thou à la reine, 5 mars 1562 
(i563); copie, f. fr., vol. 6621, f. 52. 



— 72 - 

un acte officiel, aux mains de Poltrot^ 
Cette explication paraît avoir été ignorée 
de tous les contemporains. Elle n'est pas 
moins^ acceptable et s'accorde fort bien 
avec la politique du connétable et particu- 
lièrement avec les tendances du maréchal do 
Montmorency ^. Comme il n'est pas de feu 
sans fumée, les habitants de Paris soupçon- 
naient une intrigue et accusaient le maré- 
chal de la diriger secrètement. L'ancienne 
impopularité des Montmorency, aiguisée par 
menées du parti lorrain, s'accrut de la 
méfiance qu'inspirait le maréchal. Plus d'une 
fois,, en parcourant la ville, il entendit des 
cris de désapprobation. Appelé par la reine 
quelques jours après, pendant les négocia- 
tions du traité d'Amboise, il partit en grand 
équipage et reçut une « telle conduite » 
qu'il jura, en passant devant la garde de la 
porte, de se venger des Parisiens ^. 

Le jour- même où le greffier du Tillet 
informe mystérieusement la reine du démenti 
que Poltrot de Meré inflige à ses propres 
dépositions, le parlement en corps supplie 

i. — Lettre de ChantoDay au roi d'Espagne du 
22 avril 15()3. (Orig. espagnol; Arch. nat., K, 1499, 
n» 56). 

2. — Nous avons exposé ci-dessus qu'il refusa d'as- 
sister aux obsèques du duc de Guise. 

8. — Lettre de Ghantonay du 22 avril 1563 déjà citée. 



- 73 - 

la régente de laisser un libre cours à la jus- 
tice ^ De Thou écrit à la reine sans lui par- 
ler des variations de Taccusé : a La cryerie 
(( sur ce prisonnier est cent mille foys plus 
a grande que je ne le pourroys ny dire ni 
a escripre ^. Les obsèques du duc de Guise 
avaient été fixées au i9 mars et le peuple 
exigeait que le supplice de l'assassin pré- 
cédât la pompe funèbre, a La présence dudit 
« corps, écrit le greffier du Tillet à la reine 
ce au nom du parlement, animera si fort ledit 
« peuple contre le meurtrier, que nous pré- 
« voyons, par les menaces qu'en a cy-devant 
« faictes icelluy peuple, qu'il forcera la Con- 
« ciergerie pour en faire un massacre; et 
« vous pouvez penser le péril qui sera sur 
(( les autres prisonniers, et après d'une sédi- 
« tion publique, apportant la ruine de lad. 
« ville telle ou plus grande que si l'enncmy 
« la forçoit^. » 

Les lettres du parlement et du premier 
président à la reine venaient d'être expédiées 
au camp de Saint-Mesrain, quand arriva 
l'ordre de juger et d'exécuter le prisonnier. 



1. — Mémoires de Condét t. IV, p. 308. 

2. — Lettre do de Thou à la reine, 17 mars 1562 
(15G3). Voyez aux Pièces justificatives, 

3. — Lettre du parlement dé Paris* signée du Tillet, 
17 mars 1502 (1503). Voyez aux Pièces justificatives. 



- 74 — 

L'ordre était du 15 mars ^ A cette date la 
paix était faite et la reine mère tenait en main 
depuis trois jours les actes de soumission dos 
chefs du parti réformé. Elle ne connaissait 
pas encore les variations de Poltrot, mais 
qu'importaient désormais à sa politique les 
aveux ou les désaveux de ce misérable. Do 
Thou aurait pu suspendre Texécution, mais 
il avait hâte d'en finir. Le lait principal étant 
mis hors de contestation par les aveux du 
coupable, l'instruction judiciaire pouvait être 
close. Le 18 mars, à l'audience du matin, 
dc ledit Jehan Poltrot, soy disant s. de Meré d 
fut condamné à « e&tre tenaillé de fer chaud 

* 

ce en quatre endroits de son corps et, apprès, 

« estre tiré à chevaux jusqu'à ce que mort 

« naturelle s'en ensuive; ce faict, la teste 

« dud. Poltrot couppée et mise au bout d'une 

« lance qui sera plantée devant l'hostel de 

(( ceste ville de Paris; les quatre membres de 

(( son corps mis en quatre potences, qui 

« seront dressées hors les quatre portes 

« principales de ceste dite ville et le tronc 

ce de son corps bruslé en ladite place do 

(( Grève ^. » 

1. — Cette lettre de la reine, datée du 15 mars, n'a 
pu être retrouvée. Nous n'en connaissons l'existence 
que par la lettre de de Thou du 18 mars. Voyez aux 
Pièces justificatives. 

2. — L'ari'êt.datédu 18 mars 1562 (1563) est imprimé 



~ 78- 

Aussitôt après le prononcé de Tarrêt, le 
condamné fut soumis à la question extraor- 
dinaire a sur le petit traiteau d à Teau et 
devant le feu. Interrogé successivement en 
présence du président Achille de Ilarlay, de 
M* Jean Neveu, clerc au greffe criminel, et 
du premier président, après de longues 
divagations sur ses relations avec les chefs 
du parti huguenot, il rétracta expressément 
les déclarations qu'il avait faites au début de 
rinslructiôn, déchargea l'amiral et Théodore 
de Bèze de l'initiative de l'assassinat et 
déposa qu'il ne les avait accusés que pour 
prolonger sa misérable existence. Sommé de 
révéler le mobile de son crime, il répondit 
a que ce qu'il avoit fait estoit à cause du 
a tyran qui persécutoit les enfants de Dieu ^ . » 
Ainsi l'accusé, renonçant à sa première ver- 
sion, s'en tenait à la seconde, celle qu'il 
avait produite pour la première fois le 
15 mars. 

• 

dans les Mémoires de Condé, t. IV, p. 309. La minute 
oflicielle de Tarrêt est conservée dans les registres 
du parlement. (Ârch. nat. X* A, 130). L'expédition 
authentique sur velin, signée du greffier criminel, 
Malon, est conservée dans le f. fr., vol. 6610, f. 34. 

1. — Ces trois interrogatoires sont publiés dans 
y Histoire ecclésiasitique, 1881, t. I, p. 648. On con- 
serve dans les fonds français (vol. 6610. f. 37. 68 et 
69) une copie authentique, contresignée Bourdin (pro- 
cureur général), de ces trois interrogatoires. Cette 
copie est probablement celle que de Thou adressa à 
la reine. 



— 76 -^ 

L'interrogatoire terminé, le premier pré- 
sident et les conseillers assistants se reti- 
rèrent et le prisonnier fut remis aux mains 
du lieutenant criminel, Martin de Bragelonne, 
assisté de ses greffiers. Poltrot, sentant que 
sa dernière heure était proche « supplia 
a qu'on luy baillast patience jusques à 
« demain afm de penser à plusieurs autres 
(( choses . » Bragelonne, sans tenir compte 
de sa prière, le fit monter dans un tombereau 
et le conduisit en place de Grève vers les 
trois ou quatre heures de l'après-midi ^. La 
place était couverte d'une foule immense 
avide de se repaître des cris de douleur du 
condamné et de la vue de son supplice ^. 

Sur l'échafaud Poltrot de Meré montra 
une grande fermeté. Son regard assuré 
défiait la foule et fouillait les rues voisines 
pour chercher, dit Chantonay, le secours que 
le maréchal de Montmorency lui avait promis. 
Un moine l'assistait de ses exhortations. 
Poltrot lui ferma la bouche en disant qu'il ne 
serait pas supplicié. Le moine lui représenta 

i. — Uisloire ecclésiastique ^ 1881, 1. 1, p. G55. 

2. — Pièce du temps dans les Archives curieuses 
pour servir à Vhisloire de France de Cimber et 
Danjou, t. V, p. 213. 

3. — Lettre de l'ambassadeur vénitien du 23 mars 
I5G3. {Despalches of Suriano and Darbaro, in-4®. 
1801, curieux recueil imprimé en Angleterre par les 
soins de M. Layard pour ihe huguenot Society. 



— 77 - 

qu'il était environné de gens armés chargés 
de prêter main-forte à la justice et de Tégor- 
ger sur place plutôt que de le laisser échap- 
per. Poltrot hésita, demanda un moment de 
répit et dénonça, comme instigateurs du 
crime, ce Soubise et quelques autres *. » 
Déshabillé et garrotté au poteau, il fut 
tenaillé aux quatre membres avec un fer 
rouge, puis lié par les pieds et les mains à 
des cordes tirées par quatre chevaux. Mais 
en vain les chevaux furent excités a pour son 
« plus grand tourment. y> Ils ne purent le 
démembrer. « Dans sa torture, il supplia 
« qu'on s'arrêtât, parce que, pour soulager 
« sa conscience, il voulait révéler de grands 
« secrets. » Ici, l'ambassadeur vénitien, 
Barbaro, place un récit d'une importance 
capitale ^. Dans une longue narration apolo- 
gétique, dit-il, Poltrot raconta « l'assassinat 
« du commencement à la fm. Si je voulais 
<K en redire tous les détails, cela serait trop 
« long. Mais le résumé est qu'il y a presque 
« une année que cet acte a été projeté, et 
(( que il (Poltrot) s'est offert à M. de Sou- 

i. — Lettre de Chantonay au roi d'Espagne du 

22 avril 1563. (Orig. espagnol; Arch. nat., K, 1499, 
no 56). Chantonay ne désigne que Soubise et ne homme 
pas Coligny. 

2. — Lettre de Barbaro au doge de Venise du 

23 mars 1563. (Despatches of Suriano and Barbaro, 
in.40, 1891). 



— 78-^ 

« bise pour Texécuter; lequel en a écrit à 
a M. de Chastillon; que, à ce moment Chas- 
(( tillon ne paraissait pas disposé à approuver 
(c cette scélératesse; mais que, depuis la 
« rupture du camp (la défaite de Dreux), il 
ce avait écrit à Soubise pour lui demander 
<c de lui envoyer Thomme qui s'était offert 
ce pour commettre cet acte. Il y alla et le 
« remplit d'espérance, et, ayant reçu de 
<c l'argent, des armes et des chevaux, il vint 
ce s'établir dans le camp du roi, prétendant 
a être mal satisfait de ceux de l'autre parti ; 
<( et ainsi il commit l'assassinat ^ » Ce récit 
terminé, les bourreaux remirent les chevaux 
en mouvement. Le condamné demanda grâce 
encore une fois « parce qu'il voulait dire des 
<( choses d'une plus grande importance, 
« c'est-à-dire qu'il fallait faire entendre à la 
a reine qu'elle ait à se bien garder, ainsi 
« que ses fils, parce qu'il y avait des complots 
<c formés contre eux. Ces révélations furent 
« mises publiquement en écrit par les offi- 
ce ciers de justice qui étaient présents. Pour 
« finir la tragédie, les chevaux furent de 
(( nouveau excités ; mais comme ils ne purent 
« lui arracher les membres, il fut ainsi tor- 



i. — Il est à remarquer gue ces détails s'accordent 
avec ceux que Poltrot de Meré avait révélés dans son 
premier interrogatoire. 



- 79 - 

I 

(( turé pcndaut quelque temps. Il vivait 
(c encore quand le bourreau, à coups de 
« hache, lui détacha les membres, don- 
« nant ainsi plus de facilité aux chevaux 
« pour l'achever . Toute la population, pré- 
(( sente à ce spectacle, fit de si grandes 
(( démonstrations de ressentiment de la 
(( mort du duc qu'il est impossible de les 
« décrire. » 

Le registre du conseil du parlement, beau- 
coup plus sommaire, confirme le récit do 
13arbaro. Arrivé sur la place de Grève, porte 
le registre, Poltrot de Meré « deschargea, 
« en parlant au peuple, ceux qu'il avoit 
« chargez. » Sans doute le misérable atten- 
dait le secours que le maréchal de Montmo- 
rency lui avait promis jusques au pied de 
Téchafaud. ce Mais, ayant senti le premier 
« traict des chevaux, [il] dit que, avant 
a que mourir, il vouloit dire toute la vérité, 
<K et, devant aucuns capitaines, chargea 
« les auteurs qu'il avoit premièrement nom- 
ce mes et en nomma d'autres qu'il avoit 
<c excusés *. » Le grand historien -du 
xvi" siècle, Jacques- Auguste de Thou, était 
alors enfant ^ ; mais il avait pu recueillir de 

i. — Registre du conseil du parlement; Arch. nat., 
XiA, 1604, f. 618 v°. 

2. •— Jacques Auguste de Thou était né eh i553. 



— 80 — 

la bouche de son père * des révélations 
importantes. Voici comment il raconte les 
derniers moments de Pollrot : « Il parut 
<c effrayé et comme hors de lui-même et ne 
ce sachant ce qu'il disait par l'appréhension 
<K du supplice; il déchargea Tamiral, puis le 
a chargea de nouveau dans le temps qu'on 
« l'exécutoit, de mesme que d'Andelot, son 
« frère. Après avoir soutenu de longs inter- 
« rogatoires et d'affreux tourments, il 
« expira ^. » 

Il est inutile de signaler la gravité du récit 
* de l'ambassadeur vénitien . Marc-Antoine 
Barbaro était catholique, mais il ne se 
montre jamais, dans sa correspondance, par- 
ticulièrement hostile à Coligny ^. Son témoi- 
gnage des aveux et du supplice de Poltrot 
est d'autant plus important que le procès- 
verbal officiel, relevé par les greffiers de 
Bragelone, est perdu ^. VA cependant celte 
pièce a existé; elle a été envoyée par de 



1. — Christophe de Thou ne mourut que le 
!«' novembre 1582. 

2. — Ilist. universelle, liv. XXIV. 

3. — Barbaro, à la suite do sa mission en France, 
écrivit un rapport général qui a été publié dans les 
Relations des ambassadeurs véniliens, t. II. p. i. 

4. — Ce procès-verbal devrait se retrouver dans le 
registre de la Tournelle. Mais le volume de cette 
date a disparu. Par qui a-t-il été enlevé, probablement 
par celui qui a fait aisparaitre le procès-verbal. 



— 81 — 

Thou à la régente, a Tout ce qu'il (Poltrot) 
à a dit, tant à la question à la chapelle que 
a au supplice, écrit de Thou à la reine, jus- 
ce qu'au dernier soupir, a esté fidèlement mis 
« par cscrit. On vous en pourroit escripre 
a en diverses sortes, mais je vous supplie 
« n'en vouloir croire autre chose que ce que 
« vous en verrez par escript*. » Le procès- 
verbal était entre les mains de la duchesse 
de Guise lorsqu'elle fut sommée par le con- 
seil du roi d'énumérer les pièces qu'elle 
enteildait produire dans son instance contre 

Coligny ^ : « le procès- verbal de la 

a question et des confessions par luy (Pol- 
« trot) faites en icelle depuis l'arrêt contre 
ce luy donné, autres confessions faites par 
« led. Poltrot après lad. question devant le 
ce premier président et plusieurs conseillers 
ce d'icelle court, les procès-verbaux de ses con- 
ce fessions faites au supplice ^ ;> . Le procès- 
verbal existait encore en 1566, après la 
réconciliation que, à l'assemblée de Moulins, 
le roi avait imposée aux Guises et aux Coli- 
gny *. 11 fut probablement enlevé des archives 
du Parlement en vertu d'une commission du 

1. — L^ttre de de Thou à la reine du 18 mars. 
Voyez Pièces justificatives. 

2. — Voyez le chapitre suivant. 
3. — F. fr., vol. 6,610, f. 141. 

4. — Voyez le chapitre suivant. 

6 



^ 82 - 

roi, datée du i6 juillet 1566, adressée à 
M^ Nicolas Halle, s. du Marais, notaire et 
secrétaire du roi, laquelle portait ordre de 
se transporter au greiïe et de se faire 
fic exhiber les arrêts, sentences, jugemens, 

a informations et procédures.., pour le 

fic faict de la religion et dcsd. troubles, pour 
ce estre, lesd. arrêts et jugemens, rayez, 

ce trassez, eiïacez sur lesd. registres 

a Et, quant aux dictons, informations et 
fic procédures, estre par vous mises et res- 
(c serrées en un coffre à part pour estre 
a envoyées par devers nous ^ . » 

i. — Coll. Brienne, vol. 206, f. 252. 



CHAPITRE SECOND 



Ije premier président de Thou. — Le duc d'An- 
maie envoie la déposition de Poltrot au camp de 
V amiral {22 février 1563). — Réponse de Coli- 
gny {12 mars). — Le duc d'Aumak demande 
justice de l'assassinat {fin avril). — Sfèonde apo- 
logie de Coligny {5 mai). — Requête de la duchesse 
de Guise à Meulan {26 septembre). — Assassinat 
de Charry {31 décembre 1563). — Arrêt du 
conseil privé qui évoque Vaffaire de Coligny et ren- 
voie le jugement à trois ans {5 janvier 1564). — 
Départ de la cour pour le voyage en France {24 jan- 
vier 1564). — Echauffourée du 8 janvier 1565 
à Paris. — Catherine résolue à régler la que-- 
relie des Guises. — Arrivée de la courra Moulins 
{22 décembre 1565). — Première séance du con- 
seil {12 janvier 1566). — Arrêt qui clôt Vins-' 
truction {17 janvier). — Arrêt du conseil qui 
renvoie Coligny des fins de la plainte {29 janvier). 
— Réconciliation apparente des Guises et des Coli- 
gny. — Henri de Lorraine, duc de Guise, en 
Hongrie. — Seconde et troisième guerre civile. — 



- 84 — 

Coligny revient à la cour {i2 septembre 1571). — 
Coligny pousse le roi à envahir les Flandres. — 
Haine des Guises pour Coligny. — Arrêts dit 
conseil relativement à la réconciliation des deux 
maisons {27 mars et 1" mai 1572). — Le duc 
de Guise se soumet à l'arrêt de Moulins {12 mai). 

On s'étonne de l'attitude du premier pré- 
sident, Christophe de Thou, dans l'ins- 
truction de l'assassinat du duc de Guise. Ce 
magistrat, qui porte un grand nom, un nom 
plus illustre par le génie du fils^ que par 
l'indépendance du père, appartenait au parli 
catholique. En 1560, dans le procès du 
prince de Condé ^, il avait montré de la ser- 
vilité aux Guises. En 1663, il cherche à 
accabler Coligny. Récapitulons ses actes. 

Le 27 février, il reçoit Poltrot de Meré à 
la Conciergerie. Les interrogatoires se mul- 
tiplient, mais toujours en présence du gref- 
fier. De ce chef on ne peut l'accuser que de 
timidité. 

Le 15 mars, Poltrot se rétracte. De Thou 
écrit à la reine que l'accusé maintient ses 

i. — Jacaues- Auguste dô Thou, le plus grand des 
historiens français s'il eut écrit dans sa langue, était 
le troisième fils du premier président Christophe de 
Thou. 

2. — Novembre 1560. Voyez Antoine de Bourbon 
et Jeanne d'Albret^ t. Il, chap. x. 



- 85 - 

dépositions précédentes; mais il suppose 
qu'il « peut varrier et desdire. » Nous 
admettons, pour Thonneur du premier pré- 
sident, que sa lettre a été expédiée avant la 
séance de torture. 

Le 17 mars, le greffier du Tillet informe 
la reine des c: variations j> de Poltrot. Le 
même jour, de Thou écrit à la reine et ne 
lui en dit pas un mot. 

Le 18 mars, le meurtrier est condamné à 
mort. Au sortir de la chambre criminelle, il 
est soumis à la question ; il subit successive- 
ment trois interrogatoires et trois fois il 
désavoue les accusations qu'il a fait peser 
sur Coligny. Cependant de Thou assure à 
la reine, que, devant le parlement, Pol- 
trot a oc confessé le cas et que tout ce qu'il 
« avoit dit tant en la présence de Vostre 
« Magesté que par devant moy estoit véri- 
a table ^ x) II oublie les quatre démentis 
que Poltrot, du 15 au 18 mars, s'est infligés 
à lui-même. 

L'alternative se pose : ou les rétractations 
de Poltrot de Meré sont un mensonge inventé 
par le parti huguenot pour blanchir Coligny 
et de Bèze; ou de Thou a essayé de les 
dissimuler à la reine. La première conjecture 

i. — Toutes ces lettres de de Thou sont publiées 
aux Pièces justificatives. 



- 86 - 

pouvait se soutenir autrefois puisque les 
trois dépositions du 18 mars ne sont connues 
que par VHistoire ecclésiastique et que Ton 
pouvait soupçonner Tauteur de les avoir 
inventées ou gravement falsifiées au profit 
de la mémoire de ses chefs. Aujourd'hui il 
n'en est plus de même. Les dernières ver- 
sions de Poltrot de Meré ou du moins le fait 
principal qu'elles contiennent, la décharge 
de Coligny, sont certifiées par des docu- 
ments que nous avons mis au jour pour la 
première fois, la lettre de du Tillet du 
15 mars, les dépêches détaillées de Barbaro 
(23 mars) et de Chantonay (22 avril), citées 
plus haut. Reste la seconde conjecture : de 
Thou voulait-il cacher la vérité à la reine 
pour rendre plus certaine la culpabilité de Coli- 
gny. C'est la seule explication de sa conduite. 
Il est plus difficile de juger le rôle des 
chefs protestants dans l'instigation du crime ^ 
Nous ne parlerons ni de Brion, ni de Feu- 
quières, ni de Soubise^, ni de Théodore do 

i. —Nous ne mentionnons que pour mémoire un 
article, très ingf^nieux mais sans fondement, do 
M. Marcks (Bulletin de la Soc, du Prot. français, 
1891. p. 144) aux termes duquel ce serait i)eut-être 
Catherine ae Ménicis qui aurait armé le bras de 
l'assassin. Cependant une note de Tambassadeur 
d'Angleterre rapporte que ce bruit courait dans le 
camp des réformés. {Calendars, 1563, p. 162). 

2. — Soubise, dans ses Mémoires, repousse l'accu- 
sation en termes vraisemblables et donne des détaUs 



- 87 — 

Bëze S personnages secondaires. L'intérêt 
ne se porte que sur Tamiral Goligny. 

D'après Tambassadeur d'Espagne, le duo 
de Guise et soixante seigneurs ou magistrats 
avaient été condamnés à mort, l'année pré-^ 
cédente, dans une assemblée de sectaires 
tenue à Heidelberg au palais de l'électeur 
palatin. Seul, le duc de Wurtemberg se 
serait élevé contre cette fanfaronnade crimi* 
nelle^. Que cet arrêt ait été rendu; rien 
n'est plus incertain. Mais que le bruit s'en 
âoît répandu dans les rangs du parti, rien 
n'est plus vraisemblable. Les grandes com- 
motions politiques ou religieuses donnent 
toujours naissance à de sombres rumeurs^ 
souvent sans fondement, qui prédisent des 
catastrophes ou des forfaits. Barbaro raconte 
que le prince de Condé avait prié son frère, 
le cardinal de Bourbon, d'inviter le duc de 
Guise à se tenir sur ses gardes, et, le jour 
même de l'assassinat, arriva de Guyenne une 
lettre de Biaise de Monluc qui portait les 

sur les antécédents de Poltrot. {Mémoires de Sou- 
bise, publiés par M. Bonnet, 4870, p. 70). 

1. — Théodore de Bèze est le plus incriminé de 
tous (lettre de Tambassadeur d'Angleterre citée dans 
ravant-dernière note; — lettre de Barbaro du 2 mars ; 
— lettre de Chàntonay du 2 mars. — Nous avons cité 
ces documents plus haut). 

2. — Lettre de Ghantonay au roi d'Espagne, 
22 avril 1563 (orig. espagnol; Arch. nat., K. 4499, 
n» 56). 



— 88 - 

mêmes avertissements. Le duc de Guise ne 
put la lire qu'en revenant du Portereau*. 
Ici se place une coïncidence qui donnerait à 
penser que Condé était informé de la date 
du crime. Après avoir mis sa conscience en 
repos par ses avis, il aurait pris ses mesures 
pour profiter de la mort de son rival. Le 
18 au soir, déguisé en paysan, il tenta une 
évasion. Déjà il avait passé devant le front 
du premier et du second corps de garde, 
quand il fut reconnu au trojsième. Montrao- 
rency-Damville, son gardien, fit exécuter les 
complices du prisonnier, et la reine le trans- 
féra du château d'Onzain au château d'Am- 
boise^. 

Le 12 et le 13 février, le parlement de 
Paris avait déchargé le duc de Guise de 
toute responsabilité dans le massacre de 
Vassy ^. Cet arrêt porta au comble Tirritation 
du parti réformé. Est-ce dans un mouvement 
de colère que les meneurs résolurent de se 
faire justice eux-mêmes? Poltrot de Meré 
n'était pas à Orléans, mais, à la courte 

• 1. — Lettre de Barbare du 2 mars 1563, citée plus 
haut. — Lettre de Chantonay du 2 mars (id.). 

2. — Lettre de Chantonay du 22 et du 24 février 1563 
au roi d'Espagne (orig. espagnol; Arch. nat., K. 1500, 
n» 50). Voyez Jeanne d'Albret et la guerre civile, 
t. I, p. 389. 

^t. — Ces arrêts sont imprimés dans les Mémoires 
de Condé, t. IV, p. 230. 



— 89 — 

distance où il se trouvait, il était facile à. 
ses chefs dé lui envoyer un message. 

On a lu le récit de Tassassinat et Tana- 
lyôe des aveux de l'assassin . Le 21, le 
27 février et le 7 mars, il accuse Coligny 
de lui avoir conseillé le crime. Le 16 et le 
18 mars, il rétracte ses dépositions. Le 18, 
à rheure du supplice, il renouvelle ses pre- 
miers aveux. 

Quelles conclusions peut-on tirer de ces 
variations? 

L'imputation portée par Poltrot de Meré 
contre Coligny ne supporterait pas la dis- 
cussion si elle ne reposait que sur le témoi- 
gnage de l'assassin. Outre l'indignité du 
témoin, son inconstance enlève tout crédit 
à sa parole. D'ailleurs quelle confiance 
accorder ù des déclarations arrachées par la 
crainte d'être égorgé sur place, par la tor- 
ture, par les affres du supplice. La question 
semble donc absolument indécise , mais 
l'amiral se défendit mal, presque en cou- 
pable. Oubliant l'adage Is fecil cui profecit, il 
crut s'abaisser en discutant des allégations 
moins invraisemblables qu'il ne semblait le 
croire. Condamné par les apparences, il 
chercha des circonstances atténuantes en 
inventant des complots dirigés contre sa vie 
par les chefs du parti catholique. Il se trahit 



— 90 - 

par son attitude ; ainsi il montra une joie au 
moins déplacée et applaudit à l'assassinat 
comme à un .bienfait de la Providence. Il 
n'en fallait pas davantage pour donner du 
corps à Taccusation. 

Le lendemain de l'interrogatoire de Poltrot 
de Meré, présidé par la reine-mère au camp 
de Saint-Hilaire, le 22 février, Claude de 
Lorraine, duc d'Aumale, frère du duc de 
Guise, avait proposé au conseil d'envoyer 
une copie authentique du procès-verbal aux 
reitres de Coligny, dans l'espoir que « l'in- 
(( dignité d'un tel fait pratiqué par M. l'ad- 
a mirai les mutineroit tous et les feroit tous 
« révolter, et si (aussi) promectoit qui (qu'ils) 
a se saisiroient de la personne de mond. s. 
ce l'admirai et le mectroient entre les mains 
a de la royne pour en faire justice. » 
D'Aumale avait fait prisonnier à la bataille 
de Dreux et gardé à son service un reître 
qui paraissait propre à cette mission *. Les 
princes allemands se disaient les alliés du 
roi et prétendaient n'avoir envoyé leurs 
troupes que pour délivrer le roi de ses 
oppresseurs. Déjà, un mois auparavant, une 
protestation du roi, de la reine et do tous 
les princes du sang^, y compris le prince de 

1. ~ Discours sur l'examen de Poltrot déjà cité. 

2. — Cette pièce, datée du 24 janvier 1562 (1563), 



- 9i - 

Navarre *, contre Tentrée des retires en 
France avait ébranlé la fidélité de ces troupes^. 
Que ne pouvait-on espérer en convainquant 
d'assassinat le chef du parti huguenot? Le 
serviteur du duc d^Aumale, nanti de plusieurs 
copies de la pièce accusatrice, partit pour la 
Normandie et alla trouver Jean de Nogaret 
de la Valette, qui guerroyait contre Tarrière- 
garde de Tamiral '. De là il passa au camp 
huguenot '. 

Coligny lut la déposition de Poltrot ^ et y 
répondit sur le champ, article par article. 
Sa réponse fut probablement rédigée par 
Théodore de Bèze, « le rhétoricien » du 
parti, dont elle porte la signature à côté de 
celle de François de la Rochefoucauld^. On 
y trouve des démentis, des protestations inu- 
tiles et des aveux graves. Il reconnaît qu'il 
a vu Poltrot de Meré, qu'il Ta envoyé comme 

est imprimée dans les Mémoires de Condé, t. IV, 
p. 205. 

i. — Lé prince de Navarre, Henri de Bëarn, était 
élevé, presque retenu prisonnier, à la cour de Fraàce. 

2. — ^ Lettre de Robertet au duc de Nemours, 
4 février 1562 (1563). (Orig., f. fr., vol. 3180, f. 51). 

3. — Lettre de Coligny à la reine, Gaen, 12 mars 
1562 (1563), imprimée avec la réponse de Coligny. 
Voyez la note 1 de la page 93. 

4. — Coligny avait déjà reçu, le 28 février, une 
lettre de d'Andelot qui lui annonçait la mort du duc 
de Guise. {Calendars, 1563, p. 170). 

5. — L'original est conservé dans le f. fr., vol. 6610, 
f. 13. 



— 02 - 

espion au camp royal, qu'il lui a donné 
20 écus, puis 100 écus pour se monter, qu'il 
a reçu, a sans insister sur ce propos, d'au- 
a tant qu'il l'estimoit pour chose du tout 
« frivole », la confidence des intentions cri- 
minelles de l'assassin. Il avoue que, depuis 
le commencement des troubles, il a été 
informé de plusieurs conjurations contre la 
vie de Guise ; il assure qu'il a toujours blâmé 
^ ce crime, mais que, ayant appris que sa pro- 
pre vie était menacée par les ôicaires du duc 
et du maréchal Saint-André (ce dont il ne 
peut donner aucune preuve), « quand il a 
« ouy dire à quelqu'un que, s'il pouvoit, il 
ce tueroit le duc de Guise jusques en son 
ce camp, il ne l'en a destourné. » Jamais, 
dit-il par deux fois, a sur sa vie et sur son 
a honneur, il ne se trouvera que jamais il 
ce ait recherché, induit ni sollicité quelqu'un 
(( à le faire, ni de paroles ni d'argent, par 
ce soy ni par autruy, directement ni indi- 
ce rectement ^ ; » mais il a encouragé les 
sicaires qui voulaient frapper Je nouvel 

i. — Réponfie à VinterrogatoirefaitàJean Poltrot 
Bur la mort du duc de Guise, Caen, 12 mars 1562 

il563). Pièce très souvent imprimée, ^u Bouchet, 
list. de la maison de Coligny, in-fol., p. 523. — 
Mémoires; de Condé, t. IV, p. 285. — Hist, eccl., 
1881. t. I, p. 638). Cette réponse avait paru pour la 

Srermière rois en 1563, in-4<>, puis dans les petits 
iémoires de Condé^ 1565^ t. II, p. 725. 



— 93 — 

Holopherne. a II n'a practiqué personne pour 
« cet éiïect », mais a il estime que ce soit 
a le plus grand bien qui pouvoit arriver à ce 
« royaume ^ » Poltrot lui représente a qu'il 
<K seroit aisé de tuer led. s. de Guise »; 
aussitôt Coligny lui donne cent écus pour se 
monter. Cet acte de générosité ressemble à 
un conseil. Il nie avoir soudoyé Tassassin, 
mais il avoue avoir approuvé le crime et 
fourni les moyens de le commettre. La 
nuance n'est pas assez tranchée pour Thon* 
' neur de sa mémoire. 

Ce n'est pas ainsi que pensait Jeanne d'Al- 
bret ; elle traite la mort de Guise de <ic piteux 
a événement ^. » Le prince de Condé est 
aussi formel. Le 25 février il parle à la 
duchesse de Guise de son mari a qui a esté 
« fort misérablement blessé ^ ; » et après 
la mort a ..... qui a esté si misérablement 
a tué. y> Ces généreux sentiments sont cer- 

i. — Lettre de l'amiral à la reino en lui envoyant 
la i)rote8tation cy-dessns, i2 mars i562(1563); Mé- 
moires de Condé, t. IV, p. 303. Cette lettre est 
toujours publiée avec la protestation. (Voyez la note 
précédente). 

2. — Voyez la lettre de Jeanne d*Albret que nous 
avons publiée dans Jeanne d*Albret et la guerre 
civile, t. I, p. 348. La modération sereine avec 
laquelle elle parle de l'assassinat de Guise est d'au- 
tant plus digfie d'être remarquée qu'elle avait de i)lus 
grands griefs contre ce prince. Voyez les Mémoires 
de Jeanne d'Alhret, 

3. — Dolaborde, Eléonore de Roye^ p. 177. 



-94- 

tifiés par le prince de la Roche-sur- Yon : 
M. le prince, dit-il, a a autant pris à cueur 
« la mort de M, de Guise que de son propre 
« frère, estant mort son amy, et qu'à son 
a fils ils ne le pardonneroit , désirant sa 
« punition, où n'y espargnera sa propre vye 
a au chastiment de si meschant acte ^ d 
L'ambassadeur d'Espagne, l'ennemi né du 
parti réformé, porte un témoignage inattendu 
de la noblesse de cœur du prince. Condé, 
écrit-il à son mattre, a dit ce que cet acte 
<( était tellement criminel que, s'il savait que 
<( la princesse ^ y eut consenti, il ne pourrait 
« plus jamais la voir ^. » 

En terminant son apologie, Goligny 
demande à la reine à être confronté avec 
l'accusé et jugé « par devant juges non sus- 
ce pects », à l'exclusion de tous les parle- 
ments. La confrontation n'était pas un moyen 
d'arriver à la connaissance de la vérité. Il y 
avait trop d'inégalité entre un aventurier, 
inconscient de son forfait, et un grand digni- 
taire de France. Elle était d'ailleurs impos- 



i. — Duc d'Aumale, Histoire des Condé, t. I^ 
p. 398 et 399. 

2. -^ Eléonore de Roye, princesse de Condé, était 
alors à Orléans: 

3. — Lettre de Ohantonay au roi d'Espagne, 22 et 
24 février 1563. (Orig. espagnol; Arch. nat., K. 1500, 
n« 50). 



— 95 — 

sible. Poltrot de Meré était sous les verroux 
et Tamiral à la tête de son armée en Nor- 
mandie. Pour mettre les deux accusés face à 
face, il fallait donc attendre de longs jours 
et suspendre le cours de la justice jusqu'à la 
paix. La paix môme ne rendait pas la 
confrontation plus eflicace puisqu'elle devait 
entraîner, selon les mœurs des temps, une 
amnistie générale, et que Ton savait bien que 
la reine, pour éclaircir une question de 
complicité sans sanction possible, ne rouvri- 
rait pas les dangereuses querelles de la 
veille. Ces diflicultés étaient connues de 
Tamiral, mais il n'en demandait pas moins 
la confrontation avec d'autant plus d'insis- 
tance qu'il la savait impraticable. 

Catherine de Médicis ne doutait pas de la 
culpabilité de Coligny. Poltrot de Meré, 
écrit-elle à sa belle-sœur, Marguerite de 
France, duchesse de Savoie, ce m'a dist, san 
a qu'il est aysté menacé, que l'amiral luy a 
a donné sant ayceu (écus) pour fayre set 
a meschant coup » Plus loin, elle rap- 
porte, avec plus de précision que le procès- 
verbal du 21 février, les complots de l'amiral 
contre la vie du roi et conclut en ces termes : 
« Velà, Madame, come set homme de bien, 
« qui dist qu'i ne fest ryen que pour la reli- 
(K gion, y nous veult despécher ; néanmoins 



- 96 - 

<ic cela, je suis après à reguarder de fayre 
<ic heunne pays, car je voy bien que, durant 
ce sesy, y me teuret à la fin mes enfans ^ d 
Tel est le premier mouvement de Catherine de 
Médicis, celui qu'elle laisse échapper dans les 
angoisses de la première heure. Si l'amiral 
Coligny avait été fait prisonnier, il aurait 
payé cher ses dons à Poltrot. Mais il se passa 
quelques jours. La paix fut signée le 12 mars, 
et promulguée le 19. Condé ne contenait pas 
sa joie de rentrer à la cour, de reprendre son 
rôle de premier prince du sang et peut-être 
de recevoir la lieutenance générale à laquelle 
il se croyait des droits; les simples capitaines 
se félicitaient de terminer une campagne 
aussi pénible, aussi sanglante que les guerres 
d'Italie. Coligny se soumettait, il est vrai, de 
mauvaise grâce et comme par contrainte; il 
gardait l'attitude d'un combattant qui attend 
de meilleurs jours pour reprendre la guerre ; 
mais la reine se flattait de le retenir par la 
crainte d'un procès. On voit poindre cette 
évolution dans une lettre autographe et sans 
date qu'elle écrit à Philippe II vers le 
-15 mars ^. Elle y déplore la mort du duc de 



1. — - Lettres de Catherine de Médicis, t. I, p. 517. 
Lettre de la reine à Marguerite de France, duchesse 
de Savoie, du 25 février 1562 (1563). 

2. — Cette lettre fut reçue le 23 mars. (Note de 



— 97 — 

Guise; elle ne parle plus de Coligny ^ Et 
cependant nulle part Tannonce d'un procès 
criminel, une parole de plainte ou de 
menace contre Tamiral n'auraient été accueil- 
lies avec plus d'approbation. 

Il n'y eut pas d'instruction judiciaire offi- 
ciellement dirigée contre l'amiral Coligny. 
La paix d'Àmboise (19 mars 1563) amnistiait 
légalement les crimes et les forfaits les plus 
odieux. C'eut été déchirer le traité fjue de 
rechercher Coligny. Le parlement était donc 
désarmé, mais non pas la maison de Guise. 
Il restait aux Lorrains le droit de recours à 
titre privé, le droit de citer, en leur nom 
personnel, les meurtriers du chef de leur 
maison et de poursuivre les coupables. Ils 
n'y manquèrent pas. Ni le supplice de Pol- 
trot, ni le traité d'Amboise, ni le temps, ni 
la guerre, ni les ordres du roi n'étouffèrent 
leurs requêtes. A la fin d'avril, le duc d'Au- 
male ^ vint à Paris et annonça publiquement 
qu'il allait traduire l'amiral devant le parle- 



chancellerie jointe à la lettre). Elle fut donc écrite 
environ huit jours auparavant. 

i. — Lettres de Catherine de Médicis, t. I, p. 520. 

2. — Chantonay mentionne ces démarches, et cons- 
tate que le duc d'Aumale était généralement consi- 
déré, depuis la mort du duc de Ouise, comme le chef 
du parti catholique. (Lettre au roi d'Espagne, 22 avril 
1563, déjà citée). Voyez aussi la lettre de Chantonay 
du 2i avril dans les Mémoires de Condét t. II^ p. 153. 

7 



- 98 — 

ment comme tuteur de Henri de Lorraine, fils 
aîné de la victime. 11 attendait la duchesse 
de Guise encore retenue par son grand deuil. 
La citation fut lancée suivant les formas 
légales * le 26 avril 1563. Elle devait être 
appuyée, dit Chantonay, par un mouvement 
militaire du duc de Lorraine et des seigneurs 
catholiques. Goligny s'était retiré à Ghas- 
tillon avec ses amis et s'y fortifiait publique- 
ment. Mais le duc d'Aumale exerçant les 
fonctions de gouverneur titulaire de la Bour- 
gogne et de gouverneur intérimaire de la 
Champagne pendant la minorité de son neveu, 
le parti catholique espérait forcer « le re- 
« paire du coupable^. » 

L'amiral résolut de prendre l'initiative. Il 
fit imprimer une nouvelle apologie ^, plus 
habile, plus vraisemblable, plus modérée que 
la première, corrigée des paroles haineuses 
qui déparaient sa première défense. 11 
demanda à la reine l'autorisation de la lire 
au conseil, et, sans attendre la réponse, 
il se mit en route avec une compagnie de 
300 chevaux, qu'il devait grossir en route. 
A cette nouvelle, Catherine fut frappée de 

1. — Cabinet historique, t. III, p. 53, première 
partie. 

2. — Lettre de Ohantonay du 22 avril déjà citée. 

3. — Cette pièce, datée du 5 mai 1563, est imprimée 
dans les Mémoires de Condé, t. IV, p. 339. 



— 99 — 

terreur. Nul doute que Coligny ne se présen- 
tât avec une puissante suite et que la maison 
de Guise, alors à la cour, ne convoquât le 
ban et l'arrière ban de ses partisans. Un 
combat pouvait s'engager et la guerre civile 
se rallumer sous les yeux du roi. La cour 
était à Saint-Germain. Catherine rappela 
les Suisses, qui se préparaient à regagner 
leurs piontagnes, et, dans la nuit du 
7 au 8 mai et les jours suivants, le château 
fut occupé comme en temps de guerre. La 
rçine envoya chercher le prince de Gondé et 
le supplia de détourner Tamiral d'un dessein 
si redoutable. Cependant Coligny s'avançait _ 
à petites journées. Beaucoup de capitaines 
armés le suivaient. Le 11, François d'Andelot 
le rejoignit avec une troupe de 200 cavaliers. 
Le 12, ils rencontrèrent le prince de Gondé à 
Essonne et entrèrent en conférence. Gondé 
représenta que la reine redoutait leur 
arrivée à la cour, que leur vie serait peut- 
être en danger et la paix générale certaine- 
ment compromise K II avait môme pour 
mission, écrit Catherine à d'Hebrard de 
Saint-Suplice, de faire entendre à l'amiral 
qu'elle a ne trouvoit bonne ceste grande 
« compagnie et que, s'il venoit plus avant, 

i. — Occurencos de France. (CalendArs, 1563, 
p. 340). 



— 100 — 

a elle feroit approcher une si bonne force 
ce que le roy demeureroit le plus fort et se 
« feroit obéir par amour ou par force *. » 
Quelles promesses, quels accords secrets 
furent la contre partie de ces menaces? les 
documents ne les révèlent pas. 

Les trois chefs huguenots couchèrent h 
Essonne. Coligny voulait marcher en avant, 
mais la nuit lui porta conseil. Le len4cmain, 
13 mai, Condé et d*Andelot partirent pour 
Saint-Germain et Coligny reprit la route de 
Chastillon-sur-Loing. Deux jours après, le 
15 mai, la reine réunit les membres de son 
conseil. Le secrétaire d'état Bourdin donna 
lecture d'une déclaration hautaine, par 
laquelle Coligny offrait de prouver son inno- 
cence par ce voie de justice par devant juges 
« toutesfois non suspects. » Condé se 
porta garant de gon oncle ^; François de 
Montmorency, garant de son cousin germain ; 
François d'Andelot, de son frère ^. 

La reine avait probablement connu d'a- 



1. ^Lettres de Catherine de Médicis (mai 1563), 
t. II, p. 35. 

2. — EléoDore de Roye, princesse de Condé^ était 
la nièce de Coligny; François de Montmorency, son 
cousin-germain. 

3. — Le récit de cette séance du conseil est impri- 
mé dans les Mémoires de Condé, t. V, p. 17. Il avait 
été publié en 1563, in-S® de 8 p. Il fut envoyé au roi 
d'Espagne. (Àrch. nat., K. 1500, no 65). 



- !0! - 

vance et approuvé le texte de ce manifeste. 
Le lendemain, le roi, sur avis conforme du 
conseil privé, défendit « tant à ceux de la 
« maison de Guyse que de Chastillon, de ne 
« s'oiïcnccr ni faire offencer les uns les 
« autres, par voye de fait ou de force » sous 
peine de désobéissance au roi *. Le conné- 
table allait assiéger le Havre, que T Angle- 
terre retenait depuis le mois de septembre de 
Tannée précédente, et il importait à la reine 
de ne pas compliquer une guerre étrangère 
d'une guerre intestine. 

Le débat recommença après la prise du 
Havre (28 juillet 1563), mais la reine inventa 
de nouveaux moyens dilatoires. Elle, fit 
entendre aux Guises que le roi aurait plus 
d'autorité que sa mère pour imposer aux 
parties un arrêt équitable, que Theure de sa 
majorité était proche, qu'il était donc de 
rintérêt des deux maisons de laisser dormir 
leur querelle ^. Charles IX avait treize ans 
accomplis. A cet âge, suivant les traditions 
do Tancienne monarchie, la majorité des rois 
pouvait être prononcée. Le jeune prince fit 

1. — L'arrêt est imprimé par du Bouchet, Hist. de 
la maison dé Coligny, p. 537. L'ordonnance d'exé- 
cution est conservée en copie dans le f. fr., vol. 3320, 
f. 37. 

2. — Discours sur l'instruction du faict de la mort 
de M. de Guise; f. fr., vol. 6610, f. 80. 



- 102 — 

une entrée solennelle à Rouen, le 12 août \ 
et, le 17, dans un lit de justice tenu au parle- 
ment, il se déclara majeur ^. Le même jour il 
inaugura a son métier de roi y> par une lettre 
à Damville en faveur de la paix ^. 

La duchesse de Guise se préparait à enta- 
mer une action judiciaire, quand un accident 
arriva à la reine. A la suite d'une partie de 
chasse, à Mantes ^, a sa haquenée en beau 
« chemin tomba assez lourdement sous 
a elle. y> Catherine se blessa à la tôte et au 
bras ^. Le mal empira et elle subit une inci- 
sion à la tôte. Déjà le bruit do sa mort se 
répandait à Paris et les partis se disposaient 
à conquérir le pouvoir de haute lutte. La 
reine-mère avait été transportée à Meulan. Le 
duc d'Aumale y accourut avec les fidèles de 
la maison de Guise, décidés à enlever le roi 
de gré ou de force et à le ramener à Paris ^. 



1. — Récit de l'entrée solennelle conservé dans le 
f. fr., vol. 4318, f. 131. 

2. — La déclaration de majorité a été souvent 
imprimée. On la trouve notamment dans les 
Mémoires de Condé, t. IV, p. 574. 

3. — Cette lettre est conservée dans le f. fr., vol. 
3191, f. 68. 

4. — La chute eut lieu entre le 10 et 14 septembre 
1563, dates extrêmes du séjour do la cour à Mantes. 

5. — Lettres de Catherine de Médicis, t. II, p. 98. 

6. — Pièce du temps dans les Mémoires de Condé, 
t. V, p. 23. 



- 103 - 

La reine s'était déjà remise et avait repris 
le gouvernement. ' 

L'heure n'était pas favorable aux revendi- 
cations des Guises. Catherine ne pouvait 
pardonner au duc d'Aumale son empresse- 
ment à se rendre à Meulan. Fidèle au sys- 
tème qui lui avait cependant si mal réussi 
avant la guerre, elle s'efforçait de plaire à 
tout le monde et passait, suivant les circons- 
tances, de l'un à l'autre parti. Chacun prenait 
à son tour le premier rang dans sa faveur. 
Au mois de mars, elle soutient les Guises; 
au mois de septembre, elle se livre aux 
conseils du prince de Condé et du cardinal 
de Chastillon K Elle en était là quand 
les Guises furent convoqués à la cour. 
Un ajournement qui eût coïncidé avec un 
retour de crédit eût convenu aux impétrants ; 
mais ils ne pouvaient l'attendre. L'occasion 
s'offrait; il fallait la saisir. Le dimanche, 
26 septembre, à l'issue des vêpres, la vieille 
duchesse de Guise, Antoinette de Bourbon, 
la veuve de François de Lorraine, Anne 
d'Esté, accompagnées des enfants et des 
frères du héros catholique, en grand deuil, se 
jetèrent aux pieds du roi et lui demandèrent 

1. — Lettre de ChantoDay à Grandvelle, 47 août i563, 
publiée dans les Lettres de Catherine de Médicis, 
t. II, p. 84, note. 



— 104 — 

Tautorisation « de faire poursuite du meurtre 
a commis *. » Le roi convoqua le conseil 
privé et un arrêt ouvrit Tinstance^ Aussitôt, 
le cardinal de Ch'astillon demanda au conseil 
la récusation du Parlement de Paris. Cathe- 
rine ne se souciait pas, plus que le cardinal, de 
livrer une affaire politique, autour de laquelle 
gravitaient la paix et la guerre, à des magis- 
trats civils, capables « de foire tel esclandre 
ce qu'on ne le scauroit aisément réparer. » 
Elle prétexta que Tinstance était contraire à 
Tédit de pacification ^ ; la requête du cardi- 
nal « fut trouvée si raisonnable » que la cause 
« fut évoquée à la personne du roy et ren- 
« voyée au grand conseil ^. » 

Le parti des Guises, arrêté dans son droit, 
protesta solennellement contre l'évocation. 
Le 30 septembre, à sept heures du matin, les 
deux duchesses, escortées de leurs enfants, 
de tous les princes de la maison de Lorraine 

1. — r Cette requête est imprimée dans les Mémoires 
de Condé, t. IV, p. 667. — La réponse des trois 
Goligny, datée du & octobre 1563, est imprimée dans 
les Lettres de Catherine de Médicis,, t. II, p. 101. 

2. — Ces arguments sont reproduits dans un mémoire 
remis à la reine probablement par le chancelier de 
L'IIospital. (Mémoires de Condi, t. IV, p. 493). 

3. — Les lettres d'évocation datées du 28 septembre 
1563, sont reproduites dans une pièce du temps; f. fr., 
vol. 6610, f. 108. — Le 18 octobre, le roi raconta au 
s. de Saint-Suplice, son ambassadeur à Madrid, toute 
cette procédure pour en informer Philippe II {Lettres 
de Catherine de Médicis, t. II, p. 105, note). 



— 108 — 

et de 200 gentilshommes, se présentèrent 
inopinément au palais de justice. L'audience 
n'était pas ouverte. Les dames attendirent 
riieure à la Sainte-Chapelle et les seigneurs 
dans le jardin. A huit heures, ils furent 
appelés à la grand'chambre, et leurs avo- 
cats, Saint-Meloir et Versoris, présentèrent 
à la cour une demande d'information contre 
les assassins du duc de Guise. Coligny 
n'était point désigné et il n'était fait aucune 
allusion aux dépositions de Poltrot K C'était 
une requête tout autre que celle de Meulan, 
et qui réservait à l'instruction la découverte 
des coupables. A Meulan, les Guises avaient 
porté plainte contre Coligny; à Paris, ils 
imploraient seulement justice sans accuper 
personne. Par cet artifice de procédure, 
Versoris échappait aux lettres d'évocation du 
roi et pouvait engager l'instance. 11 plaida 
longuement et prononça un éloquent éloge 
de la victime ^. La a chiquanerie » réussit. 
Le parlement, sans entendre les gens du roi, 
retint l'affaire et nomma deux conseillers 
pour rinstruire ^. 

1. •— Ce moyen est exposé dans un récit de la pro- 
cédure (f. fr., vol. 6610, f. 80). 

2. — Ce mémoire est conservé dans la coll. Dupuy, 
vol. 500. 

. 3. — Récit du temps, f. fr., vol. 6610, f. 80. Voyez 
aussi la lettre de Chantonay dans les Mémoires de 



- !06 - 

Alors s'engagea une interminable procé- 
dure, au grand profit des « chicanons » que 
de si illustres plaideurs traînaient avec eux. 
La duchesse de Guise supplie le roi d'an- 
nuler les lettres d'évocation. Un procès 
s'engage d'abord sur la validité de la signi- 
fication, puis sur la communication de l'arrêt 
de Meulan K Requête de la duchesse de Guise 
pour obtenir que l'instance soit portée devant 
le parlement de Toulouse, ou de Bordeaux, 
ou de fjouen, ou de Dijon (27 octobre 1563) ^. 
Le roi décide de soumettre ce choix à Coli- 
gny. La duchesse de Guise signifie qu'elle 
n'entend point se porter partie contre l'ami- 
ral (23 novembre) ^. L'amiral déclare que, 
puisque la duchesse renonce à se porter par- 
tie, il n'a plus besoin de répondre à sa requête 
(24 novembre) *. Arrêt du conseil privé qui 
autorise le parlement à retenir l'action judi- 
ciaire, mais qui maintient l'évocation en ce 

Coudé, t. II, p. 180, et le journal du chaDoine Brus- 
lard {ibid., t. I. p. i36). 

1. — Ce procès, qui n'apprend rien de nouveau, est 
raconté dans une pièce du temps; f. fr., vol. 6610, 
f. 108. 

2. — Cette pièce est conservée en copie du temps 
dans le f. fr., vol. 6610, f. 78. 

3. — Récit du temps, f. fr., vol. 6610, f. 80. La pro- 
testation de la duchesse de Quise y est reproduite 
intégralement. 

4. — Pièce originale signée de Couligny, f. fr., 
vol. 6610. f. 124. 



— 107 — 

quî concerne Coligny (25 novembre) ^ La 
cour» se jugeant trop liée» se désaisit 
(3 décembre) '. La duchesse représente au roi 
que les lettres d'évocation empêchent la cour 
d'en connaître. L'amiral riposte que, pour ce 
qui le regarde, il s'en tient à ces lettres. Pro- 
testation de la duchesse. Le roi propose aux 
parties de reconnaître la compétence de l'un 
des quatre parlements, précédemment nom- 
més, auxquels se joindront les membres du 
conseil privé. L'amiral ne renonce pas aux 
lettres et ajoute que, si la duchesse a est 
<K recevable en sad. accusation », il prétend 
aussi introduire une instance « contre la 
« mémoire du feu s. de Guise. » Dans cette 
pièce, Coligny fait allusion aux complots 
dont il avait accusé son rival ^. 

L'agitation du parti catholique, malheu- 
reusement justifiée par les requêtes, protesta- 
tions, surtout par les dénis de justice vis à 
vis des enfants de Guise, et habilement 
entretenue par les meneurs, avait franchi 
l'enceinte du parlement. Le 13 août 1563, 

1. — Copie du temps: f. fr., vol. 6610, f. 126. 

2. — Copie du temps, f. fr., vol. 6610, f. 128. 

3. — Pièces des 8, 18 et 28 décembre (Orig. et copies, 
f. fr., vol. 6610, f. 130 et 94). — Autres pièces non 
datées mkis analysées, dans les deux énoncés de 
procédure (f, fr., vol. 6610, f. 80 et 164). — Le récit 
contenu dans les Mémoires de Condé, t. V, p. 17 est 
beaucoup plus abrégé. 



— 108 — 

le premier président de Thou s'applaudit de 
(t quinze jours de tranquillité K » Ces quinze 
jours furent les derniers. Bien que la 
grand'chambre, à chaque audience, ordon- 
nât le huis-clos, la salle était envahie par 
une foule tumultueuse qui accueillait de ses 
vociférations les actes de défense de Coli- 
gny ^. Les séjours du roi n'étaient pas plus 
paisibles. Pendant les trois mois que dura 
rinstance, les Guises allaient et venaient à 
la cour, toujours avec une troupe qui 
ressemblait à une armée. Lés Coligny gar- 
daient la retraite à Chastillon, mais ils y 
faisaient de telles levées que le roi leur 
adressa des reproches ^. Il était impossible 
que la paix publique résistât longtemps à de 
telles secousses. Ordres et défenses, pro- 
messes et menaces n'offrant plus de garan- 
tie, le roi fit signer aux deux parties 
rengagement de n'employer, dans leur 
différend, que les voies judiciaires ^. 



1. — Lettre autographe de do Thou à la reine de 
cette date (f. fr., vol. 06 15, f. 36). 

2. - Pièce du temps, f. fr., vol, 22429, f. 192. 

3. — Lettre du roi du 5 octobre 1563 publiée par le 
comte Delaborde. (Gaspard de Coligny, t. 11^ p. 593). 

4. — L'engagement des Guises, signé de presque 
tous les princes de cette Maison et daté du 5 octobre, 
est conservé en copie du temps dans le volume 20401 
du fonds français, f. 73. — L'engagement des trois 
Coligny est publié avec d'autres pièces sur le même 



— 109 — 

Au milieu de novembre, le roi vint à 
Fontainebleau ; Coligny monta à cheval pour 
aller le saluer. Aussitôt la reine lui manda 
de retourner à Chastillon. Coligny lui répon- 
dit « qu'il ne pouvait rebrousser chemin 
« qu'il n'eut baisé les mains du roy; autre- 
ce ment ce luy seroit faire un grand tort et 
« déshonneur et pour la seconde îoys. » 
Catherine, terrifiée de l'approche d'un visi- 
teur si menaçant, partit en hâte pour Paris. 
Coligny rattrapa le cortège royal à Chailly. 
L'entrevue fut aussi amicale que le permet- 
taient les souvenirs de la guerre civile et 
vainqueurs et vaincus feignirent d'avoir tout 
oublié * . La cour arriva à Paris le 20 novem- 
bre, à l'improvisle, et s'installa sans ordre, 
mais à couvert des surprises que le roi 
pouvait redouter hors de sa capitale. L'amiral 
reprit avec empressement son service de 
gentilhomme de la chambre, comme s'il eut 
toujours été un fidèle serviteur du roi, et 
logea au Louvre. La jalousie des Guises fut 
telle que le duc d'Aumale déserta ses fonc- 
tions de grand maître et se retira à l'hôtel 



sujet par le comte Delaborde. Coligny, t. II, p. 295. 
— Voyez aussi un ordre du roi aux Guises et aux 
Coliguy qui nous parait se rapporter à la même 
période (minute sans date; f. fr., vol. 6610, f. lOi). 

1. — Pièce du temps dans dans les Mémoires de 
Condé, t. V, p. 27. 



— no — 

de Guise avec tous les siens. Sa retraite 
donnait tout à craindre. Le roi se fit remettre 
le rôle des suivants des deux rivaux, en 
réduisit le nombre et chassa de la ville 
ceux qui n'y étaient point domiciliés *. Le 
28 novembre, il convoqua au Louvre tous 
les gentilshommes présents à Paris, et, dans 
une allocution solennelle, sans désigner 
personne, il leur commanda de restreindre 

leur suite à ce leur train ordinaire » 

Les contrevenants, dit le roi, ceux qui 
prendraient les armes les uns contre les 
autres seront « chastiés si vivement que Ton 
oc cognoistra que je veux estre aussi bien 
ce obéy en Taage où je suis que si j'avois 
ce cinquante ans ^. » 

Cette allocution ne produisit pas plus 
d'effet que les innombrables ordonnances 
qui, depuis trois ans, s'entassaient dans les 
archives de la chancellerie. Le 31 décem- 



1. — Lettre de la reine à Saint-Suplice, 23 no- 
vembre 1563 {Lettres de Catherine, t, II, p. 408). — 
Registres du bureau de la ville de Paris, t. V, p. 329. 

2. — Le sommaire des propos que le roy a tenus à 
sa noblesse qu'il a faict assembler en la salle de son 
château du Louvre à Paris, le dimanche 28 no- 
vembre 1563, Placard in folio destiné à être affiché, 
imprimé chez Robert Etienne s. 1. n. d. Nous n*en 
.connaissons qu'un seul exemplaire, qui est conservé 
aux Archives, K. 4500, n» 99. Il s'en trouve une copie 
dans la coll. Dupuy, vol. 755, f. 136. 



— m — 

bre 1563, un nouveau crime faillit donner 
le signal de la guerre. 

Parrtii les capitaines de la maison du roi, 
aucun ne montrait plus de haine aux réfor- 
més que Jacques Prévost de Charry . Créature 
des Guises ^ il s'était si bien distingué par 
sa bravoure que Catherine le choisit pour le 
commandement de la garde du roi. Dès ce 
jour Charry a parla un peu trop haut. » 
D'Andelot était colonel général de Tinfante- 
rie. Charry refusait de lui obéir. Ils eurent 
de graves disputes à la cour, presque jusqu'à 
se défier. Charry « bravoit toujours. » Le 
31 décembre 1563, entre 8 et 9 heures du 
matin, Charry, accompagné d'un capitaine 
et d'un soldat, allait prendre son service au 
Louvre, quand, en passant devant le pont 
Saint- Michel , il fut assailli par trois 
hommes d'armes, embusqués chez un 
armurier. L'un d'eux, Chastelier Portant, se 
précipite sur Charry : ce Te souvient-il du 
oc tort que tu me tiens? Mets la main à 
« l'épée. » Avant que Charry fut en garde, 
il reçut deux coups de pointe et un troi- 
sième que l'assassin a lui tortilla par deux 
« fois dans le corps. » Charry tomba mort à 
côté de ses deux compagnons. Les assassins 

4. — Journal de Bruslard dans les Mémoires de 
Condé, 1. 1, p. 140. 



— 112 — 

s'enfuirent par le faubourg Saint-Germain et 
sortirent de Paris avant que la nouvelle du 
crime arrivât au Louvre. 

La reine était en conférence avec les 
Chastillons, et d'autres seigneurs. Avertie 
par un page, elle se tourna vers d'Andelot 
et son premier mouvement fut de Faccuser. 
La présence de Tun des assassins, nommé 
Constantin, semblait le compromettre. Il fit 
« un peu la mine d'estre esmeu » et répon- 
dit : ce Madame, Constantin estoit ast'heure 
a icy et est entré dans la salle avec moy. » 
Il feignit de l'appeler et l'envoya chercher 
par un archer. Coligny lui-môme n'était pas 
moins compromis. Chastelier Portant était 
de sa compagnie, son favori et son commen- 
sal. Le matin du crime, il avait eu avec son 
chef un entretien secret de deux heures. 
Devant ces charges, qui s'accumulaient de 
minute en minute, les Chaslillons « firent 
« bonne mine, car de leur naturel, ils 
ce estoyent si posez que malaisément s'émou- 
cc voient-ils. » L'un d'eux raconta à la reine, 
que,' quatorze ans auparavant, en Italie, 
Charry avait eu une affaire d'honneur avec 
un des frères de Chastelier Portant. La que- 
relle, réglée depuis longtemps, était oubliée 
à la cour; le parti des Chastillons s'efforçait 
de la réveiller pour justifier le meurtre de la 



— «3 — 

veille. La reine aiïecta de se laisser tromper. 
Tous les courtisans Timitèrent, mais chacun 
garda ses soupçons ^ 

La régente avait décidé un grand voyage 
en France, qui dans sa pensée devait rele- 
ver le prestige de la royauté au milieu des 
provinces les plus troublées par la guerre 
civile, en Provence, en Languedoc, en 
Guyenne et se terminer par une entrevue 
avec Philippe II à Bayonne. Elle avait besoin 
de paix, de tranquillité au moins apparente, et 
redoutait d'engager, même par une simple 
instruction judiciaire, un procès qui pourrait 
découvrir de trop puissants coupables. Le 
crédit des trois Chastillons ne fut même 
pas ébranlé par Tassassinat de Gharry. 
« Ghaque soir, écrit Ghanlonay, quand les 
« courtisans se retirent de la chambre de la 
« reine, les Ghastillons y demeurent jusqu'à 
« ce qu'elle commence à se dévêtir. De là 
a ils entrent à la chambre du roi et y restent 
(( jusqu'à ce que le roi se couche et que les 
« rideaux soient tirés pour dormir *. » Le 



1. — Brantôme, t. V, p. 341 et suivantes. — Le 
laboureur, Mémoires de Castelnau, t. II, p. 284 et 
628. — La Popelinière, 1581, 1. 1. p. 374, v. — Lettre 
de Chantonay à Philippe II, 3 janvier 1564. (Arch. 
nat., K. 1501, no 5). 

2. — Lettre de Chantonay au roi d'Bspaçne, 3 jan- 
vier 1564. (Orig. espagnol; Arch. nat., K. 1501, n'» 5). 

8 



— «4 — 

roi combla de bienfaits les chefs du parti 
réformé. Gondé reçut une assignation, de 
50 mille écus sur le trésor de l'épargne; 
Coligny, d'Andelot et La Rochefoucauld un 
don de 60 mille livres ^ 

Mais il était dangereux de traiter avec la 
même indifférence l'assassinat du duc do 
Guise. Catherine imagina une combinaison 
qui, sans blesser personne, assurerait au roi 
troiff ans de repos. . 

Quatre jours après la mort de Charry, 
le 4 janvier 1564, la duchesse de Guise pré- 
sente une nouvelle requête. D'accord avec la 
reine, elle soumet au roi la querelle de 
ses fils contre Coligny et s'engage à 
reconnaître l'arrêt ^. Le lendemain, au 
conseil privé, le roi déclare que ce l'affaire 
ce requiert le sage conseil d'un prince plus 
ce expérimenté et de plus grand âge que le 
(( sien » et ajourne sa décision à trois ans ^. 
Le même jour, Coligny et d'Andelot signent 
la promesse de n'attenter à ce la vie et hon- 
<( neur de MM. les ducs de Guise, d'Aumale, 

1. — Lettre de Chantonay au roi d*Espagne, 27 jan- 
vier 1564. (Orig. espag., Arch. nat., K. 150i, n» 40). 

2. — L'original de* cette requête est conservé dans 
le fonds français, vol. 6640. f. 97, 

3. — Imprimé dans les Mémoires de Condé, t. IV, 
p. 495. Voyez la lettre de Catherine du 12 janvier 1564 
a révêque de Rennes, ambassadeur à Vienne (Le//res 
de Catherine de Médicis, t. II, p. 137). 



— 118 — 

« leurs frères, neveux et parents ' » . Les ducs 
de Guise et d'Aumale souscrivent le même 
engagement ^. Le marquis d'Eibœuf, alors 
absent, signe quelques jours plus tard ^. 
Satisfaite d'avoir assoupi une affaire aussi 
périlleuse, la reine mère pressa les apprêts 
du départ. 

Catherine de Médicis comptait sur le temps, 
qu'un autre personnage, de race italienne 
comme elle, le cardinal Mazarin, mettait au 
premier rang de ses collaborateurs pour la 
résolution des affaires embarrassantes. Mais 
le temps ne lui rendit pas les services qu'elle 
attendait, La cour partit de Paris le 24 jan- 
vier 1564 et visita successivement les pro- 
vinces de l'Est et du Midi. Au commencement 
de janvier 1565 elle était en Languedoc. Elle 
fut surprise à Garcassonne par de menaçantes 
nouvelles. 

Le cardinal Charles de Lorraine était le 
prélat de France le plus haï des huguenots. 
La science, l'éloquence, dont il avait donné 
des preuves dans la lutte théologique avec 

1. — Original; f. fr., vol. 6610, f. 91. II est à remar- 

3uer que les deux frères ont signé de Coullignyy 
ette pièce est imprimée dans le Cabinet historique, 
t. III, !«•• partie, p. 61. 

2. — Copie moderne, f. fr., vol. 6610, f. iOl. — 
Imprimé dans le Cabinet hislorique, t. III, i'^ partie, 
p. 61. 

3. — Original; f. fr., vol. 6610, f. 88. 



— 116 — 

Théodore de Bèze au colloque de Poissy, et 
plus tard au concile de Trente *, son âpreté 
à rintrigue avaient fait échouer leurs tenta- 
tives pacifiques, comme Thabileté du duc de 
Guise avait fait échouer leurs efforts mili^ 
taires. fin 1564 ils avaient contre lui de nou- 
veaux griefs. Le cardinal avait cru deviner la 
jalousie de Condé contre Coligny. Armé de 
ce secret, il s'efforçait de détacher le prince 
de la faction huguenote ^. Condé était veuf 
depuis le 23 juillet 1564. Au mois de 
décembre, le cardinal le visita à Soissons et 
lui proposa d'abandonner les réformés, les 
Montmorency, le parti des mécontents et 
d'épouser une des filles du duc de Guise. La 
charge de lieutenant général du royaume 
devait être le prix de pette évolution ^. 

Condé refusa, mais la négociation s'ébruita. 
Coligny accourut à Chantilly. Vers la fin 
du mois do décembre, un jour de chasse. 



i. — Le cardinal de Lorraine était au concile de 
Trente lorsque le duc de Guise fut assassiné. Voyez 
un beau passage des Essais de Montaigne, liv. I, 
chap. H. 

2. — Un long récit du temps, conservé dans le 
fonds français, vol. 5791, raconte les eiïorts du parti 
catholique pour détacher Condé de la cause protes- 
tante. 

3. — Lettre de Francès de Âlava, ambassadeur 
d'Espagne à Philippe II, 18 janvier, 7 février, 
2 mars 1565. (Orig. espag., Arch. nat. K 150o, n© 33, 
46 et 53). 



- 117 - 

la maréchale de Montmorency lui donna 
rendez-vous dans les bois. L'amiral monta 
dans le coche de sa cousine Qt vint secrète- 
ment à Paris. Logé à Thôtel de Montmorency, 
il eut des conférences avec le maréchal, le 
prince de Porciau et quelques capitaines du 
tiers parti ^ Là, furent arrêtées de graves 
décisions pour humilier le plénipotentiaire 
mitre du parti catholique. 

Après la négociation secrète de Soissons, 
le cardinal résolut de faire une entrée solen- 
nelle à Paris. Dans quel but? on Tignore. 
Peut-être obéissait-il simplement à un sen- 
timent de vanité qui lui était ordinaire. Il par- 
tit de Soissons vers la fin de décembre (1664), 
s'arrêta à Tabbaye de Saint-Denis et y con- 
voqua de nombreux amis de sa maison, les 
s. de Lignières, le dénonciatejir de la conju- 
ration d'Amboise, de Crenay, le compagnon 
du duc de Guise aux Vaslins et une foule 
d'autres. Une ordonnance royale toute 
récente, du 13 décembre 1564,^ défendait aux 
seigneurs de se montrer à Paris avec un cor- 
tège armé ^. Le cardinal ne l'ignorait pas, 



1. — Lettre de Francès de Alava au roi d'Espagne, 
23 janvier 1565. (Orig. espag.. Arch. nat. K 1503, n» 35). 
La lettre est écrite de Toulouse, ce qui explique le 
retard de certains détails. 

. 2. — Rapport à l'ambassadeur d'Espagne, 9 jan- 
vier 1565. (Orig. espag., Arch. nat., K. 1505, n» 3i). 



- 118 — 

mais il n'en tint compte ou se crut dans son 
droit, car il avait obtenu, quelques années 
auparavant, l'autorisation d'entretenir une 
garde de cinquante arquebusiers *. Le lundi 
8 janvier 1565, il se préparait à paraître 
triomphalement à Paris. Le gouverneur de 
Paris, François de Montmorency, son ennemi, 
informé de ses desseins, lui signifia à Saint- 
Denis l'ordonnance du 13 décembre précé- 
dent. Le prélat méprisa le message, et, pour 
marquer sa supériorité sur les lieutenants 
de roi, refusa do communiquer son exemption 
au messager ^. C'était un vrai défi. Le gou- 
verneur se rendit au parlement à l'ouverture 
de l'audience et déclara à la cour qu'il ne 
« comporteroit pas que le cardinal de Lor- 
« raine entrât à Paris avec sa garde d'har- 
« quebusiers ^. » 

Déjà l'orgueilleux Lorrain était aux portes 
de la ville. Sommé par un prévôt de faire 
déposer les armes à ses arquebusiers, il 

1. — De Thou. liv. XXVIII. — Felibien, HisL de 
Paris, t. II, p. 1092. 

2. — Lettre de Suriano, ambassadeur Vénitien, au 
doge de Venise, 2 février 1564 (1565). Suriano n'était 
pas à Paris mais il suivait la cour et y recueillait ses 
informations. Son récit est d'autant plus intéressant 
qu'il est inspiré par le cardinal d'Armagnac. (Bibl. 
nat., f. ital., vol. 1724, f. 247). 

3. — Lettre du maréchal de Montmorency à Jeanne 
d'Albret, 11 janvier 1565. (Copie du temps, Arch. nat. 
K.1503, no2y 



— «9 - 

dédaigne de répondre. Les sergents de jus- 
tice essaient dé procéder au désarmement. 
Ils sont battus et mis en fuite. Le maréchal 
les rallie au Louvre et les renvoie au-devant 
du cardinal avec une compagnie de quinze 
arquebusiers. Les deux troupes se choquent 
dans la rue Saint-Denis et les gens du maré- 
chal sont enfoncés. Montmorency accourt 
avec une nombreuse garde « de Tune et de 
« l'autre religion » et rencontre le cortège 
au coin de la rue Saint-Honoré. D'après les 
récits officiel qu'il envoya au roi, il adrqsse 
une dernière sommation au cardinal; les 
soldats du prélat y répondent par une 
arquebusade qui tue un des gentilshommes 
du prince de Porcian ^ D'après les narra- 
teurs du parti catholique, Montmorency, de 
prime abord, commande une décharge. 
Charles de Lorraine défend la riposte à ses 
gens. Le cortège se disperse et s'enfuit au 
galop. Le cardinal se réfugie avec ses 
neveux dans une boutique entrouverte. Un 
serviteur, en repoussant la porte, reçoit une 
arquebusade et tombe mort à ses pieds. 
L'ambassadeur espagnol raconte que Mont- 
morency lui-même s'élance sur les fuyards, 



\. — Lettre de François de Montmorency à la reine 
publiée par nous dans le tome VI des Mémoires de la 
Société de VHistoire de Paris et de Vlsle de France. 



- 120 — 

arrête de sa main un seigneur qui res- 
semblait au cardinal : « Tu vas mourir, 
ce cardinal^ meurs, dit -il. » fit il le 
tue d'un coup de pistolet. Le jeune duc 
dô Guise, l'épée à la main, voulait conti- 
nuer le combat et charmait par son attitude 
martiale les partisans de sa maison. Il 
s'attaque au maréchal et Montmorency ne 
réussit à lui échapper qu'en se jetant à bas 
de son cheval *. 

La nuit venue, le cardinal sortit de sa 
retraite et se retira à l'hôtel de Cluny. Il y 
trouva le duc d'Aumale qui, averti de la 
mésaventure de son frère, était entré secrète- 
ment par la porte du Louvre. Les deux 
Lorrains passèrent la nuit dans l'angoisse. 
Le lendemain le cardinal communiqua au 
maréchal les lettres du roi qui l'autorisaient 
à avoir une garde. Que ne l'avait-il fait la 
veille I Le mercredi, H janvier, à deux heures 
du matin, les deux frères, en petit équipage, 
armés seulement de lanternes, se retirèrent 

i. — Tous les historiens protestants présentent 
cette affaire dans un sens favorable à Montmorency. 

— De Thou, qui détestait les Guises, donne à son 
récit la même couleur (liv. XXXVIII). — Journal de 
Bruslard dans les Mémoires de Condé, t. I, p. 151. 

— Rapport adressé à l'ambassadeur d'Espagne et 
communiqué à Philippe II. (Arch. nat. K. 1503, n» 28 
et 35). Nous avons publié aans le tome VI des Mé- 
moires de la Soc. de l*Hisl. de Paris les parties les 
plus saillantes de cette pièce. 



- 121 - 

à Meudon et; bientôt le cardinal à Reims 
et le duc à Saint-Denis. 

Après le combat, Montmorency se rendit 
au parlement et présenta les événements du 
jour comme une exécution de justice. La 
cour, en majorité composée de magistrats 
dévoués aux Lorrains, n'osa protester. Le 
premier président répondit que a ce n'estoit 

(( rien mais qu'ils désiroient pour la 

« continuation du repos qu'on n'en vint 

« plus avant » Christophe de Thou, s'il 

en avait eu le courage, aurait pu ajouter que 
le maréchal avait durement abusé de son 
droit ; Summum juSy summa injuria. 

Le soir môme, François de Montmorency 
écrivit à la reine, puis è Jeanne d'Albret, au 
duc de Montpensier, probablement à tous 
les princes, pour atténuer la gravité du 
combat *. Catherine fut consternée. Elle 
apprit bientôt que le duc d'Aumale, escorté 
de quelques aventuriers, faisait, aux environs 
de Paris, des courses plus dangereuses pour 
les bourgeois do Tlsle de France que pour 
le gouverneur de la province, que le maré- 
chal avait massé autour de Paris les compa- 
gnies de Charles de Montmorency-Meru et 

1. — Ces trois lettres» la base principale du récit 
de cette afTaire, ont été publiées dans le tome VI des 
Mémoires de la Société de l'Histoire de Paris. 



- 122 - 

de Coligny, que Tamiral lui-même était venu 
à Paris, le 22 janvier, que le maréchal avait 
tenu en sa présence un conseil de guerre S 
que le prince de Gondé s'était rapproché de 
Paris et avait engagé aux .portes de la ville 
une lutte où le prévôt avait été tué 2, que le 
duc d'Aumale se faisait le promoteur d'une 
ligue catholique destinée à combattre les 
huguenots ^. Ces nouvelles aggravaient la 
situation au moment môme où la paix était 
plus nécessaire à la reine, à la veille de son 
entrevue avec le roi d'Espagne. Catherine 
crut la guerre ouverte dans l'Isle de France. 
Son premier mouvement fut de l'empôcher 
de s'étendre en province ^, son second 
d'éloigner de Paris Condé et l'amiral ^. Le 

i. — Lettre d'Alava à Philippe II, 4 février i565- 
(Arch. nat., K. 1503. n» 44). — Papiers d*estat de 
Granvelle, t. VIII. p. 656. — Lettre de Suriano au 
doge, ii février 1564 (1565) (f. itel., vol. 1724, f. 251). 
— DeThou, liv. XXXVlII. — Discours du voyage fait 
à Paris par M. l'admirai du mois de janvier dernier, 
petit in-8<», s. 1. n. d., pièce du temps fort rare, écrite 
au point de vue protestant, presque textuellement 
reproduite par de Thou. 

2. — Lettre d* A lava au roi d'Espagne, 4 février 1565. 
(Orig. espagnol; Arch. nat., K. 1503 n« 44). — Autre 
du 26 avril (ibid., n» 76). 

3. — Lettre du duc d'Aumale au marquis d'Elbeuf, 
24 février 1565. (Mémoires de Gondé, t. V, p. 272). * 

4. — Circulaire du roi à tous les lieutenants de roi, 
17 janvier 1565. (Minute; f. fr., vol. 15880, f. 99). 

5. — Lettre du roi au maréchal de Montmorency, 
2 février 1565. (Orig., f. fr., vol. 3204, f. 71). — L'ordre 
fut renouvelé au mois de mai. 



- 123 - 

prince désobéit et vint à Paris le 7 mai. Sa 
présence fut encore une fois là cause de 
quelques désordres ^ Aussitôt le roi lui com- 
manda de sortir de la ville, et, pour éviter 
tout conflit ou tout accord avec une popula- 
tion impressionnable et fanatique, il étendit 
la défense d'y entrer aux ducs de Guise, 
d'Aumale, de Nevers, à tous les chefs de 
Tune et de Tautre faction dont l'arrivée 
pouvait remuer le peuple ^.^ 

Ces troubles, ces allées et venues en armes, 
qui sonnaient le tocsin de la guerre, rappe- 
laient à la reine que l'assassinat du duc de 
Guise n'avait pas reçu de répression. On se 
querellait à la cour ^, on se battait dans les 
rues de Paris pour ou contre l'honneur de 
Coligny. Dans un pays, où les chefs arrivent 
si rapidement à incarner les principes, où 
les questions de personnes passionnent plus 
profondément les partis que les idées abs- 

i. — Journal de Bruslard dans les Mémoires de 
Condé, 1. 1, p. 155 et suiv. 

2. — Lettre du roi à François de Montmorency, 
Mont-de-Marsan, 21 mai 1565. (Orig., f. fr., vol. 3194, 
f® 60). — Roole particulier de ceulx que le roi ne 
veuit entrer en sa ville de Paris jusques à son retour 
en lad. ville. (Deux pièces, orig., f. fr., vol. 3194, 
f. 49 et 51). 

3. — Un espion espagnol, don Juan Martinez Des- 
curra parle au secrétaire d'état Erasso d'une grave 

Suerelle à la cour entre Condé et Nemours au sujet 
e la mort de Guise (Lettre du 19 juillet 1563; Arch. 
nat., K. 1499, n« 81). 



traites, catholiques et protestants faisaient 
bon marché do leurs disputes religieuses et 
se partageaient entre accusateurs et défen- 
seurs de Tamiral. Le procès ne pouvait rester 
éternellement en suspens et servir éternelle- 
ment de plate-forme à la lutte. Des trois 
années de délai que le roi avait imposées aux 
demandeurs par son arrêt du 5 janvier 1564, 
lés deux premières touchaient à leur fin. 
Catherine résolut d'utiliser la troisième à 
rendre un arrêt défmitif et à le faire 
accepter par les deux maisons ennemies. 

Après avoir visité la Provence, le Lan- 
guedoc, la Guyenne, après l'entrevue de 
Bayonne, la cour avait lentement traversé 
les Landes, TAngoumois, le Poitou, l'Anjou, 
la Touraine, le Berry et était arrivée le 
22 décembre à Moulins ^ C'est là qu'allait 
se jouer la comédie dont la reine espérait 
tirer un dénouement si avantageux à sa 
politique. 

Le roi convoqua à Moulins les Guises et 
les Coligny, et, le 7 janvier 1566, il édicta 
un règlement minutieux sur Tordre qui devait 
être gardé pendant le séjour de la cour ^; 

1. — Journal d'Âbel Jouan dans le tome I des Pièces 
fugitives du marquis d'Âubais. 

2. — Original daté du 7 janvier 1566, contresigné 
par Claude de TAubespine; f. fr., vol. 3207, f. 5. 



— 428 — 

défense aux seigneurs calvinistes de célébrer 
les cérémonies de leur culte, de s'armer, 
de s'entourer de gardes, etc. La sévérité 
de ces ordres souleva quelques soupçons; 
Soubise craignait que la reine mère eut 
attiré ses compagnons d'armes dans un 
piège K II connaissait bien peu la politique 
de la reine à cette date. L'amiral arriva le 
premier» au rendez-vous ". Le cardinal de 
Lorraine entra à Moulins le H janvier 
escorté d'une foule do seigneurs que la reine 
mère avait envoyés au devant de lui, le duc 
de Montpensier et son fils, le prince de Condé 
et son fils, le maréchal de Bourdillon, le 
duc de Longueville et d'autres. Le roi et la 
reine le reçurent avec tout l'honneur qu'il 
eut su « désirer ^. » La duchesse de Guise 
était à la cour; le jeune duc ne vint pas *. 

i. — Mémoires de Soubise, 1879, p. 93. Le comte 
de la Perrière a réfuté ces soupçons. {Lettres de Ca- 
therine de Médicis, t. II, introduction, p. 105). 

2. — Lettre de Coligny. du 11 janvier, publiée par 
le comte Deiaborde, Ùoiigny, t. II, p. 396. 

3. — Propos d'accomodement fait par la reine au 
cardinal de Lorraine et ses réponses touchant la mort 
de son frère. Cette pièce, oont il existe de nom- 
breuses copies à la Bibliothèque nationale, a été 
imprimée par du Bouchot, Hist, de la maison de 
Coligny, p. 538. 

à. — L'absence du duc de Quise est constatée par 
la relation que nous signalons dans la note précé- 
dente, ainsi que par Gastelnau, Mémoires^ liv. VI, 
cliap. n. 



- 126 - 

Aussitôt commencèrent de sourdes intri- 
gues. Le connétable tenait résolument le 
parti de son neveu de Coligny. En crédit 
auprès du roi et de la reine, plus qu'on ne 
le croyait à la cour *, il ne cessait de 
rappeler son dévouement éprouvé sous 
quatre rois et de l'opposer à la courtisane- 
rie récente de ces petits princes lorrains, qui 
n'avaient pris du service en France que pour 
exploiter les faveurs royales. Les Guises 
étaient puissants, peut-être plus puissants 
que le connétable, à cause de l'appui que 
prétait à leur cause l'unanimité des catho- 
liques, mais ils n'étaient pas absolument 
d'accord entre pux. Les ducs d'Aumale et 
d'Elbeuf, esclaves de leur propre fortune, 
avaient des ambitions étrangères et souvent 
môme opposées aux intérêts du chef de leur 
maison. Le cardinal de Lorraine travaillait 
à se rapprocher du prince do Condé par 
haine des Montmorency. Au milieu de 
ces menées, la reine mère, fidèle à son 
système, flattait les uns et les autres et s'ef- 
forçait de convaincre chaque seigneur qu'elle 
était de cœur avec lui. L'ambassadeur d'Es- 
pagne, qui se croyait tout puissant à la cour 
depuis l'entrevue de Bayonne, blâmait très 

1. ^ Lettre d'Âlava à Philippe II, Moulins, 19 jan- 
vier 1566. (Arch. nat., K. 1505, n» 67). 



— 127 — 

haut les tergiversations de la reine. Un jour 
il Taccusa de diviser pour régner. Catherine 
lui répondit que le désir d'éviter la guerre 
était le secret de sa politique, et, comme 
Tambassadeur citait les faveurs accordées à 
Tamiral, ce elle se mit, dit-il, à me rire au nez 
ce d'une manière telle qu'il me sembla qu'elle 
a traitait de sottise ce que je lui disais. » 
Blessé de la raillerie, Françès de Alava 
répondit aigrement. Catherine riposta plus 
aigrement encore qu'elle connaissait mieux 
qu'un étranger les aiïaires de sa maison K 

Le lendemain de l'arrivée du cardinal de 
Lorraine, après dîner, le roi tint un grand 
conseil. Tous les seigneurs étaient présents, 
excepté le chancelier de l'Hospital, ce qui le 
<K malin avait pris médecine. y> La reine parla 
la première, et, dans un discours étudié, 
représenta au cardinal que ce on ne pouvoit 
a pourvoir aux aiïaires du royaume ne au 
« repos public des sujets d'iceluy, que, pre- 
(( mièrement, on n'eut apaisé les querelles 
(( particulières, et qu'il y en avoit deux prin- 
ce cipales qui le concernoient ; l'une en sa 
a propre personne contre le maréchal de 
(c Montmorency, l'autre pour l'homicide 
(( commis en la personne de feu M. de Guise, 

4. — Lettres d' Alava à Philippe II, 19 janvier et 
3 février 1566. (Arch. nat., K, 1505, n»» 67 et 71). 



— 128 — 

* • 

<i que le roy et elle et toute la compagnie le 
« prioient d'adviser de leur estre aydant à 
a trouver quelque moyen d*en faire bon 

a accord :!> Ce discours était habile. Il 

élevait le cardinal à la dignité d'arbitre; il 
soumettait à sa décision la question de la 
paix et de la guerre. La comparaison de 
l'assasinat de Guise avec TéchaufTourée du 
8 janvier n'était pas moins flatteuse. Quelle 
importance la reine attribuait-elle au cardinal 
puisqu'elle comparait l'attaque de Mont- 
morency, une simple ofl^ense, avec le crime 
de Poltrot, un forfait qui avait décapité le 
parti catholique. 

A ce début, bien propre à caresser l'amour- 
propre du cardinal, la reine mère ajouta 
l'énumération des moyens de défense de 
l'amiral. Coligny se soumettait ce à toute 
« bonne raison »; il proposait de jurer 
a qu'il n'est aucunement coupable de cet 
ce homicide » ; il vouait le coupable aux 
a gémonies; il appelait ses accusateurs en 
champ clos. La démonstration de l'amiral 
n'était pas péremptoire; moins de pro- 
testations et plus d'arguments eussent 
mieux démontré son innocence; il deman- 
dait à être jugé, mais par des juges de 
son choix; il n'ofl'rait réellement que son 
serment et son démenti l'épée à la main. 



— 129 — 

Lo cardinal de Lorraine répondit à la 
reine que « tels accords ne se jetoient au 
« moule », que sa dignité ecclésiastique 
lui défendait de tirer Tépée, qu'il subirait 
les volontés du roi relativement à Coligny, 
mais que, si le châtiment des coupables 
était refusé à la mémoire du chef de sa 
maison, « avec le temps, tels accords, 
« dit- il, ne garderoient point que mes 
a frères et nepveux et, à faulte d'eux, ceulx 
(( qui m'atlouchent de quelque parenté, ne 
(( fissent mourir Tadmiral. » Ce discours 
donnait tout à craindre. Il contenait en germe 
de sanglantes luttes, des représailles achar- 
nées, le massacre de la Saint-Barthélémy, 
toutes les horreurs de la guerre civile. La 
querelle était plus menaçante que la reine ne 
l'avait jugée puisque l'hostilité des deux. 
maisons résistait aux tentatives les plus 
conciliantes. Le roi décida que le duc de 
Guise ne serait convoqué à la cour qu'après 
le prononcé de l'arrêt, que la duchesse de 
Guise enverrait chercher à Paris les pièces 
du procès, et prit délai jusqu'aux fêtes de 
Pâques (14 avril) pour étudier le dossier. 
La reine mère espérait que trois mois lui 
sufliraient pour nouer un accord définitif ^ 

1. — Propos d'accomodement fait par la rekie 

pièce citée dans l'avant-dernière note. 





— «30 — 

Après cette déclaration le roi leva la séance 
et rentra dans son cabinet. Il commanda 
immédiatement certaines mesures de pru- 
dence; il renouvela Tacte d'évocation au 
conseil privé * ; il défendit aux deux parties 
« de se provoquer, insulter, ne mesdiro de 
a faict ni de parole... et à ccstc fin les met et 
ce baille en garde les ungs aux autres... ^. » 

11 fit signer cet engagement par le cardinal 
de Lorraine et la duchesse de Guise ^, et par 
Coligny *. Le duc d'Aumale et François 
d'Andelot étaient absents ; le roi leur envoya 
un messager et exigea leur assentiment 
sans réserve ^. 

L'affaire devait être solennellement plaidée. 
Le cardinal de Lorraine et la duchesse de 
Guise se préparaient à présenter les témoi- 
gnages qu'ils avaient rassemblés et s'effor- 
çaient d'en trouver de nouveaux. Ils obtinrent 

1. — Une copie moderne de cet acte^ datée du 

12 janvier 1566, est conservée dans f. fr., vol^ 6621, 
f. H9. 

2. — Original sur parchemin, daté du 12 jan- 
vier 1566, contresigné de TAubespine; f. fr., vol. 
6610, f. i:i9. 

3. •— Original signé du cardinal de Lorraine et de 
Anne d'Est, 12 janvier 1566; f. fr., vol. 6610, f. 135. 

4. — Copie du temps, 12 janvier 1566; f. fr., 
vol. 20461, f.49. 

5. — La promesse du duc d'Aumale est datée d*Anet 
et du 19 janvier 1566 (Oriç., f. fr., vol. 6610. f. 146). 
Celle tie d'Andelot porte Ta même date, s. 1. (Orig , 
ibid., f. 150). 



— 431 — 

un répit pour la production des pièces '. 
L'amiral se tenait sur la réserve, ne faisait 
•aucune recherche et gardait Tattitude d'un 
innocent injustement poursuivi. La cour 
s'attendait A des cnquôtes, contre enquêtes, 
citations et dépositions de témoins, inter- 
rogatoires de l'accusé, aux incidents d'ins- 
truction que la procédure du xvi" siècle, 
plus verbeuse encore que la nôtre, entassait 
dans les instances criminelles. 

Tout d'un coup le roi changea de dessein. 
Au lieu d'apporter à l'information la lenteur 
et le soin que comportait un si grave débat, 
il brusqua la solution 2. Le délai accordé aux 
(( plaignants » fut supprimé et la duchesse 
sommée de produire sur l'heure les pièces 
dont elle entendait se servir. La duchesse 
obéit et le roi lui répondit, le 17 janvier, que 
l'instruction était close ^. Quel intérêt avait la 
reine à abréger le délai de trois mois? Avait- 
elle été frappée des dangers qu'une longue 
instance pouvait faire courîr î\ la paix 



1. — Voyez le texte de l'arrêt clans du Bouchet, 
Ilist. de la maison d€ Colignyy p. 542. 

2. — Une lettre du roi à du Ferrier, ambassadeur à 
Venise, nous apprend combien il avait hâte de ter- 
miner cette affaire. (Copie du temps, 27 janvier 15G6; 
f. fr., vol. 10735, f. 128). 

3. — Original ou copie authentiquée sur parche- 
min, 17 janvier 156G, signée de TAubespine; f. fr., 
vol. 6610, f. 141. 



— 132 - 

publique et prétendait-elle remplacer par un 
jugement précipité, par une mesure incom- 
plète sans doute, mais immédiate, une solu- 
tion judiciaire qu'aucune puissance humaine 
n'aurait la force de maintenir? 

Après l'arrêt du 17 janvier, le procès 
pouvait être considéré comme jugé. En vain 
la duchesse de Guise souleva un interlocu- 
toire pour gagner du temps. Elle demanda 
au roi l'autorisation de poursuivre devant le 
Parlement les auteurs du meurtre sans les 
désigner *. La compétence de la cour de 
Paris avait été plusieurs fois repousséc et 
tout récemment par l'acte d'évocation du 
12 janvier. Le roi répondit le 26 janvier par 
un arrêt qui réservait l'affaire à son conseil ^. 

Trois jours après, le 29 janvier, le roi 
réunit le conseil privé. Etaient présents : 
Henri de Valois, duc d'Anjou, plus tard 
Henri III, le cardinal Charles de Bourbon, 
le prince de Condé, le duc de Montpensier 
et son fils, les ducs de Longueville et de 
Nevers, le connétable de Montmorency, le 
chancelier de l'Hospital, les maréchaux de 

1. — Cette requête est imprimée dans le Cabinet 
historique^ t. III. p. 64, i"'' partie. 

2. — La requête de la duchesse est sans date. L'ar- 
rêt du roi est du 26 janvier. (Orlg. ou expéditon 
authentique, signée de l'Aubespme, f. fr., vol. 6610 
L 154). 



— 133 — 

Vieilleville et de Bourdillon, Jean de Mor- 
villiers, évéque d'Orléans, et Jean de Mon- 
luc, évéque de Valence, Antoine de Crussol 
d'Ûzès, Artus de Cossé Gonnor, Sébastien 
de TAubespine, évéque de Limoges, Louis 
do Saint-Gelais Lansac, le s. de Chaulnes, 
le baron Escalin de La Garde, Christophe 
de Thou et Pierre Seguier, du parlement de 
Paris, Claude de TAubespine, secrétaire 
d'Etat, Jacques du Faur, abbé de la Gazcdieu, 
Baptiste du Mesnil, avocat général au Parle- 
ment de Paris ^ et plusieurs autres ^. Sur 
cette longue liste ne figure aucun magistrat 
indépendant. Le duc d'Anjou était un enfant . 
de quatorze ans; le cardinal de Bourbon, le 
duc de Montpensier et son fils, les ducs de 
Longueville et de Nevers, les maréchaux de 
Vieilleville et de Bourdillon, dépendaient 
trop directement du roi pour conserver leur 
liberté. Condé était protestant; le conné- 
table et le chancelier, du tiers parti. Les 
autres étaient des agents de la reine mère. 
Les trois membres du parlement auraient pu 
éclairer leurs collègues, mais ils manquaient 
de cette fermeté qui porte un juge à 

1. — Cette liste figure à là suite de Tarrét. Voyez 
l'arrêt dans du Bouchet, p. 542. 

2. — Une lettre do l'ambassadeur d'Espagne, que 
nous analysons plus loin, cite plusieurs magistrats 
dont la signature ne figure pas au procès-verbal. 



-" 134 - 

rendre des arrêts plutôt que des services. 

Le chancelier donna lecture des actes de 
la procédure depuis la requête présentée par 
la duchesse de Guise le 26 septembre 1563, 
et Coligny fut introduit. Interrogé par le 
roi, il ce affirma et déclara devant Sa Majesté 
« comme devant Dieu qu'il n'avoit faict ni 
a faict faire ni approuvé ledit homicide. y> 

Les parties furent admises à exercer leur 
droit de récusation. Le représentant de la 
duchesse de Guise S probablement l'avocat 
Versoris, récusa le connétable, le chance- 
lier, plusieurs autres conseillers, et enfin le 
prince de Condé, qui, malgré une maladie 
grave, 3'était fait porter dans la chambre du 
conseil. Coligny, plus fier et plus habile, ne 
récusa personne. L'avocat général, Baptiste 
du Mesiiil, prit la parole et requit Tacquit- 
tement de l'amiral. Puis commença le défilé 
des votçs individuels. Le premier président 
du Parlement de Paris, Christophe de 
Thou, engagé par ses déclarations précé- 
dentes, exposa timidement a qu'il ne trou- 
ce vait rien dans le procès de l'amiral qui 
« permit de le proclamer innocent » et 
conseilla d'instruire l'accusation. Dix-neuf 
conseillers, princes, seigneurs ou magis- 

1. — Alava, le seul narrateur de cette séance, ne 
le nqmme pas. 



— 138 — 

trats, inféodés à la politique de la reine, 
se prononcèrent pour l'acquittement. .Le 
maréchal de Bourdillon dit que les questions 
de droit lui étaient étrangères et supplia le 
roi de le dispenser de rendre un arrêt, 
prétexte mal fondé mais ingénieux dans la 
bouche d'un vieux capitaine. Le duc de 
Nemours allégua « l'amitié qu'il professait 
(( pour M. de Guise et toute sa maison h 
afin de ne point opiner. Le cardinal de 
Bourbon et le duc de Monlpensier représen- 
tèrent « qu'ils chargeraient leurs cons- 
« ciences en adoptant les conclusions des 
« autres juges et demandèrent au roi 
a l'autorisation de s'excuser. » En résumé, 
dit l'ambassadeur d'Espagne, le seul narra- 
teur de cette audience mémorable, sur 
24 conseillers présents, 19 s'étaient pro- 
noncés pour l'acquittement, un pour l'ins- 
truction judiciaire, quatre s'étaient récusés^. 
Le chancelier compta les voix et le roi 
déclara Tamiral « purgé et deschargé et 

i. — Le duc de Nemours courtisait ouvertement la 
duchesse de Guise et Tépousa quelques semaines 
après. 

2. — Lettre d'Alava à Philippe II, Moulins, 3 fé- 
vrier 1566 (Arch. nat., K. 1505, n» 71). — Suriano, 
ordinairement très bien informé, ne paraît pas avoir 
connu le détail de l'assemblée de Moulins aussi com- 
plètement que son collègue d'Espagne. Il est vrai 
qu'il était à Bourbon rArchambault. (Lettre de 
Suriano du 30 janvier 1566, f. ital., vol. 1724, f. 316). 



- 136 — 

ce innocent du fait dud. homicide y> et 
commanda aux parties « de vivre en amitié 
(n sous son obéissance, :!> sous peine de 
crime de lèse-majesté *. 

Restait à imposer une obéissance au 
moins apparente aux parties. Le roi et la 
reine firent venir la duchesse de Guise, et, 
dans le cours d'une longue conférence, 
mêlée de caresses et de menaces, ils s'effor- 
cèrent d'obtenir son assentiment sans réser- 
ves à l'arrêt du 29 janvier. Mais en vain ils 
la pressèrent; la duchesse, sous les dehors 
d'une femme faible, cachait une force de 
résistance invincible. Le roi et la reine, dit 
Alava, ne « parvinrent qu'à la faire pleurer. » 
Elle supplia le roi de se contenter de sa 
soumission sans lui imposer, pour l'avenir, 
d'engagements au sujet ce de la vengeance 
ce que réclamait un si grand crime. » Le 
cardinal de Lorraine se montra aussi ferme. 
Un jour, la reine le rencontra dans un 
jardin, ce Sur votre vie, lui dit-elle, prenez 
(( en bonne part ce qui s'est fait en voyant 
(( que cela nous convient ainsi, et avec le 
« temps vous verrez des choses qui vous 
a satisferont beaucoup. » Le cardinal répli- 

i. — Arrêt du 29 janvier 1566 dans du Bouchet, 
p. 542. L'original de cet acte, sur parchemin; signé 
de Gilles Bourdin, est conservé dans le f. fr., 
vol. 6610, f. 158. 



— 137 — 

qua sèchement qu'il n'avait pas à s'expliquer 
sur Tarrêt, mais qu'il devait à la mémoire 
de son frère, d'informer les souverains 
catholiques de la partialité des juges, et des 
dangers qu'elle faisait courir à la foi 
orthodoxe en Franco. Celte allusion ù 
l'intervention de Philippe II en France, 
troubla la reine. « Vous ne devez point faire 
une telle démarche », dit-elle. Le cardinal 
insista et présenta des excuses qui laissèrent 
la reine sans réponse *. 

Coligny se montra de plus facile composi- 
tion; il n'avait pas grand mérite puisque le 
roi était son défenseur. Le roi l'appela dans 
son cabinet avec la duchesse de Guise et le 
cardinal ; il leur commanda de sacrifier leurs 
ressentiments à sa volonté et de vivre ensem- 
ble pacifiquement, en serviteurs fidèles, sinon 
en amis, à la suite de la cour. Le cardinal 
de Lorraine répondit qu'il obéirait toujours 
aux ordres de son maître. Coligny remercia 
Dieu et le roi d'avoir fait éclater son inno- 
cence, et ajouta « qu'il avait toujours ouy 
« dire que la cause pour laquelle le cardinal 
ce de Lorraine et les siens luy vouloient mal, 
« c'estoit qu'ils avoient opinion qu'il fut 
(( cause de la mort de M. de Guise; que 

\. — Lettre d'Alava à Philippe II, 3 février 1566 
(Arc. nat., K, 1505, no71). 



- 138 — 

a maintenant le contraire leur apparaissoit ; 
a et que, s'il pouvoit prendre seureté qu'ils 
a eussent perdu leur mauvaise volonté et 
a qu'ils ne luy voulussent plus de mal, il 
ce leur voudroit faire service * » . 

Goligny avait été accusé et acquitté; il 
n'avait pas été jugé. C'est le sort des crimes 
politiques d'être réprimés, amnistiés ou 
glorifiés au nom de la politique. Quelquefois 
même, suivant les passions dominantes, ils 
passent par ces trois phases et sont glorifiés 
après avoir été justement punis. Qui de 
nous n'a vu les plus odieux forfaits qualifiés 
d'actes héroïques? Cependant l'assassinat du 
duc de Guise ne trouva d'apologistes que 
chez les plus fanatiques chansonniers du 
temps ^. Parmi les historiens, les mémoria- 
listes, les pamphlétaires même du parti 
réformé (et les bibliophiles seuls en connais- 
sent le nombre) pas un écrivain n'a tenté 
la justification de Poltrot de Méré. 

L'innocence ou la culpabilité de l'amiral 
Coligny est une de ces questions obscures 
qui rallument périodiquement d'ardentes 

i. — Pièce ajoutée & Tarrêt dans du Boucheti 
Histoire de la maison de Coligny, p. 545. Plusieurs 
historiens ajoutent que le cardinal et la duchesse, 
sur la demande du roi> s'embrassèrent. Du Bouchet 
n'en dit rien. 

2. — Tarbé, Recueil de poésies calvinistes, in-8<», 
1866, d'après le recueil de Hasse des Nœuds. 



- 139- 

querelles historiques. Beaucoup de démons- 
trations ont été tentées; beaucoup d'autres 
le seront encore sans éclaircir lé mystère ^ 
Il est certain que l'innocence n'est pas 
évidente, mais la culpabilité n'est pas 
prouvée. Coligny est accusé par certaines 
circonstances; il n'est convaincu par aucune. 
Dans le doute, aux termes du droit crimi- 
nel, s'impose l'acquittement de l'inculpé. 
Le grand de Thou ne se prononça pas ^. 
Estienne Pasquier, témoin intègre et sérieux, 
Brantôme, courtisan sagace et pénétrant, 
tous deux catholiques modérés, hommes 
d'esprit et très bien informés, ont rendu 
peut-être un arrêt sans appel. — Pasquier : 
« Il (l'amiral) n'advoue pas franchement 
« avoir conscnty à ceste mort, mais aussy 
« s'en défend-il si froidement que ceux qui 
« luy veulent du bien souhaiteroient ou que 
(( du tout il se fust teu ou qu'il se fust 
cf mieux défendu ^. » — Brantôme : « Un 
(( mot luy (à l'amiral) nuisit fort, quand il 
a disoit souvent : Je n'en suis l'autheur 

i. — Nous avons mentionné cy-dessus (p. 86) un 
mémoire de M. Erich Marckz qui attribuait à Cathe- 
rine de Médicis l'initiative du crime. Le mémo érudit 
a publié dans Hisloriche Zeitschrift, neue folge^ 
t. XVI, p. 42, une habile apologie de Coligny. 

2. — Histoire universelle^ liv. XXXIX. 

3. — Lettre de Estienne Pasquier à M. de Fous- 
somme (Œuvres complètes, 1723, t. II, col, 108). 



- HO - 

a nullement et no Tay point faict faire et 
« pour beaucoup ne le voudrois avoir faict 
(n faire; mais je suis pourtant fort aise de sa 
ce mort. 2> Et ailleurs : ce Pour fm, jamais 
« ne se peut-il tant purger qu'il n'en fust 
ce fort accusé et soupçonné, x) Et Brantôme 
ajoute avec un sens rare : a..... ce qui luy 
ce cousta la vie par amprès K » Allusion 
transparente au massacre de la Saint- 
Barthélémy, 

Dans la préparation d'un crime, il y a un 
genre de complicité que les juges ne peuvent 
peser, c'est la complicité par suggestion. 
Coligny avait une immense autorité sur les 
soldats. Ce n'était pas du dévouement, 
c'était du fanatisme qu'il inspirait à ses 
fidèles. De son propre aveu il avait dit et 
probablement souvent répété que le duc de 
Guise était le plus redoutable adversaire du 
parti réformé et que le hardi soldat qui le 
frapperait de mort serait un héros. Quel 
effet devaient faire de telles excitations, tom- 
bant de la bouche d'un chef vénéré, sur une 
ûme mystique, peu clairvoyante, sans dis- 
cernement du bien ou du mal, mais animée 
du plus grand courage et passionnée pour 
les entreprises extraordinaires. De l'excita- 

1. •— Brantôme, t. IV, p. 253. 



tion à Texhortatioii il y a peu de distance. 
Un esprit faible peut confondre ces nuances. 
Depuis le commencement de la guerre, 
Poltrot disait qu'il assassinerait le duc de 
Guise *. S'il est vrai qu'il eut ce dessein, 
les anatlièmcs de Coligny contre l'ennemi 
commun devaient lui paraître des encourage- 
ments venus du ciel ce à faire la chose la 
« plus belle qui fust oncques faite ^. » 

Le jeune Henri de Lorraine, duc de Guise, 
n'était pas venu à Moulins ^. Son absence était 
préméditée. Prévoyant que le roi forcerait 
la main à son oncle et à sa mère, il se 
réservait et gardait le droit, suivant les 
circonstances, d'accepter ou de repousser la 
réconciliation des deux maisons. Le roi avait 
décidé que tous les Guises souscriraient Icd 
mômes engagements. Mais divers événe- 
ments retardèrent cette conclusion* Le 
5 mai 1566, le duc de Nemours épousa la 
duchesse de Guise au mépris des serments 
jurés ù Françoise de Uohan, qui lui avait 
donné un fils *. Françoise de Rohan était 

i. — Soubise, qui avait eu Poltrot à son service, 
cite ce mot dans ses Mémoires^ avec de nombreux 
traits d'audace de Poltrot de Meré, in-S», 1879, p. 72. 

2. — Premier interrogatoire de Poltrot. 

3. — Voyez cy-dessus, p. 125. 

, 4. — Nous avons publié un volume sur cet incident 
galant de la cour des Valois, Jacques de Savoie et 
Françoise de Rohan, 



- 142 - 

protestante et cousine-germaine do Jeanne 
d'AIbret. Ses droits et la félonie de Nemours 
avaient passionné la cour en sens divers et 
avivé la haine qui divisait les deux partis. 
L'occasion n'était pas favorable à la reprise 
des négociations de Moulins. L'aiTaire fut 
ajournée. Catherine n'avait que trop de 
dispositions à attendre. Mais, au mois de 
mai 1566, elle fut bien inspirée. 

Au mois de juillet le duc de Guise partit 
pour la Hongrie avec une foule de gentils- 
hommes français. Soliman s'avançait avec 
une armée de quatre-vingt mille hommes. 
Incapable de lui tenir tête, l'empereur Maxi- 
milieu reculait à chaque marche des Turcs. 
Heureusement pour le Saint Empire, Soliman 
taourut d'une attaque d'apoplexie. L'hivçr 
approchait. Le nouveau sultan, Selim, rentra 
à Constantinople et le duc de Guise en 
Franco au commencement do 1567. 

Son retour fut fêté par le parti catholique 
comme le retour d'un héros. Bien qu'il 
n'eût guère remporté que des succès per- 
sonnels à la cour de Vienne, ses partisans 
feignirent de croire qu'il avait repoussé les 
Turcs. On publia des récits, des mémoires 
où le fils de François de Lorraine était 
représenté en sauveur de la Chrétienté K 

1. — Voyez lô Père Lelong, ann. i566 et 1567. 



— 143 — 

Les souvenirs du moyen-âge donnaient au 
jeune prince Tauréole d'un croisé. Cathe- 
rine sentit qu'elle devait compter avec le 
nouveau chef du parti catholique. Le roi 
s'efforça de lui inspirer des sentiments 
pacifiques à l'égard des ennemis de son père. 
La paix, toujours précaire, régnait en France, 
mais la moindre étincelle pouvait rallumer 
la guerre. « Vous ne voudriez, écrit le -roi, 
« estre cause de la ruyne de mon royaume, 
« laquelle dépend do l'accord d'entre vous 
« et M. l'admirai... K » Cette lettre plongea 
le duc de Guise dans unp profonde perplexité. 
Il manquait de conseils. Son beau-père, le 
duc de Nemours, était un exalté; son oncle, 
le duc d'Aumale, un soldat borné; tous les 
deux incapables de le guider ; le cardinal de 
Lorraine, un conseiller habile, mais prison- 
nier de ses propres intrigues. Il s'adressa à 
Louis de Gonzague, duc de Nevers, person- 
nage modéré, fidèle au roi et très circons- 
pect. Nevers lui répondit que, s'il voulait 
s'en tenir au contrat de Moulins, il fallait 
expliquer sa conduite, afin « que la Chrétienté 
ce ne pensât pas, dit-il, que eussiez le cueur 
« si lasche que de endurer telle injure. » ÎSi, 
au contraire, le duc de Guise croyait à la 

4. — Veyez la lettre du duc do Nevers citée dans 
la note suivante. 



— !H - 

complicité de ramiral, a j'estimerois, écrit 
« Nevers, bien diflicile que Ton peult 
a embrasser un tel personnage et, de 
a mesme, que Ton n'en feist la vengeance 
a ou se mettre en devoir de le faire ^ j> Ces 
deux alternatives laissaient le jeune Guise 
dans le mémo embarras. 

La seconde guerre civile (septembre 1567) 
le dispensa de prendre une décision. La 
paix fut signée le 25 mars 1568, mais Tabtme 
se creusait tous les jours davantage entre 
les deux partis. L'amiral ne venait plus à la 
cour, môme dans les intervalles de tranquil- 
lité relative que les historiens décorent du 
nom de paix de Longjumeau. Retiré à Clias- 
tillon, entouré de gentilshommes plus ardents 
que lui, il attendait, il espérait, il pressait 
rheure de reprendre les hostilités. Sur- 
vinrent la troisième guerre civile, les batailles 
de Jarnac et de Moncontour. La reine no 
pouvait commander au duc de Guise, à un 
de ses plus fidèles serviteurs, de sacrifier sa 
vengeance, de se réconcilier avec le chef 
des ennemis du roi, de signer avec celui qu'il 
considérait comme le meurtrier do son père 
une paix que le roi lui-môme ne pouvait 
obtenir. La fortune de la guerre pouvait 

i. ~T Minute de lettre du duc de Nevers au duc de 
Guise, s. 1. u. d.; f. fr., vol. 3353, f. 74. 



— 148 — 

amener ces deux seigneurs en face Tun de 
Tautre sur le champ de bataille et la que- 
relle des deux maisoi^s se dénouer par les 
armes. L^hypotlièse ne déplaisait pas à 
Tesprit aventureux do la reine mère. 

Ce ne fut qu'après le traité de Saint- 
Germain (8 août 1570) que les pourparlers 
entre les maisons de Lorraine et de Chas- 
tillon furent sérieusement repris. Lé roi liait 
le succès de la réconciliation à un traité 
encore plus important, celui d'une paix géné- 
rale et durable avec les réformés, dont le 
mariage du prince du Béarn avec Marguerite 
de Valois, la sœur du roi, devait être le 
gage. François de Montmorency, le chef des 
Politiques, avait proposé celte union, et le 
maréchal de Cossé s'employait activement ù 
la faire réussir. De longues négociations, 
traversées par les hésitations des intéressés, 
retardèrent la conclusion. Enfin le mariage 
fut arrêté et Coligny invité à revenir à la 
cour. 

Un secrétaire d'Etat, Claude Pinart, homme 
lige de la reine mère, nanti de pouvoirs illi- 
mités, s'était mis en campagne en faveur de 
« Tappointement » des deux maisons rivales. 
Avec une fertilité d'esprit digue de plus de 
succès, il rédigeait projets sur projets et 
multipliait les correspondances avec le duc 



10 



- 146 — 

de Guise. Un gentilhomme, François de 
Cûsillac' de Cessac, était le porte parole de 
Pinart auprès du chef des catholiques. Mais 
le premier élément de toute convention, la 
sincérité, la bonne foi manquait à Tune 
des parties. Le duc de Guise n'était pas 
décidé à capituler, môme devant les ordres 
du roi. Il cherchait, il trouvait des prétextes 
pour ne rien signer et se dérobait habilement 
quand il n'avait plus de prétextes. Michel 
de la Iluguerye, secrétaire de François de 
Bricquemaiflt, tenait l'amiral au courant des 
péripéties. Coligny était à Chaslillon. Sans 
crainte sur sa destinée et pressentant que le 
retour de son crédit était proche, il ne mon- 
trait ni empressement ni mauvaise volonté. 
« Il ne recula jamais de sa part de dire, 
(c écrit la Iluguerye, qu'encore que les 
« armes luy eussent acquis ce droit, pratiqué 
« de tout temps entre ennemys, de se servir 
« de tous moyens pour parvenir à une vic- 
« toire, si est-ce qu'il ne l'a jamais pratiqué 
« et ne le vouldroit avoir jamays faict ni 
« faict faire *. » Remarquons la gravité de 
cette déclaration. Si l'on doit prendre au 
pied de la lettre le récit de la Iluguerye, 
l'amiral affirme qu'il avait le droit de faire 

4. — Mémoires de la Huguei^yef t. I, p. 35 et suiv. 
et surtout p. 90. 



— 147 — 

assassiner le duc de Guise, mais qu'il ne Ta 
fait ni fait faire. 

Lassé des subterfuges de son ennemi, 
Coligny se mit en route pour Blois. Aussitôt le 
duc de Guise quitta la cour K L'amiral entra 
à Blois le 12 septembre 1571 et reçut du roi, 
de la reine, des ducs d'Anjou et d'Alençon, 
l'accueil le plus flatteur^ Le roi lui donna 
200 mille livres par une traite sur Lyon, 
50 mille livres sur l'arriéré de ses appointe- 
ments et une pension de 20 mille. « On lui 
ce 'fait tant de régal, écrit l'ambassadeur 
« d'Espagne, on lui accorde tant de faveurs 
« qu'il semble vraiment qu'on veuille lui 
« créer des engagements. Du moins il y a de 
« quoi le soupçonner ^. » L'amiral répondait 
à ces avances par une raideur inflexible. Il 
entra un jour dans la chambre de la reine 
sans demander audience. Un prêtre disait la 
messe. Il s'accouda sur un bahut, le cha- 
peau sur la tête, sans se découvrir, même 
à l'élévation. Après la cérémonie la reine 
lui dit en riant : « Vous . êtes attentif à 
« notre messe. — Madame, répondit-il, la 
ce messe ne me fait point de mal. y> Cette 

1. — Mémoires de VEstat de France sous 
Charles neuf^ 1. 1, p. 85. 

2. — Lettro d'Alava au duc d'Albo, 3 octobre 1571. 
(Espagnol; Arch. nat., K. 1522, n"* 41). 



— lis — 

réponse, diclée par rindiffôrenco, fut ûutrc- 
mcnt interprétée, et, à quelques jours 
de là, le roi Tinvita à assister à sa messe. 
Il y alla et affecta, pendant là durée de 
rolïïce, de rester couvert comme pour 
braver les catholiques ^ 

Malgré ces rudesses, malgré le refus de 
rendre la Rochelle au roi ^, Coligny, logé au 
château, prit rapidement de Tinfluence sur 
Tesprit de Charles IX. Il assistait à tous les 
conseils et les présida plusieurs fois en Tab- 
sence du roi. Alors commence la plus belle 
partie de sa vie, celle qu'il faut louer sans 
réserve, celle qui Télève au rang des plus 
grands politiques. Averti par le spectacle 
des passions qui s'enflammaient au moindre 
incident, il avait reconnu que le maintien 
de la paix intérieure était impossible, à 
moins d'offrir un puissant dérivatif aux 
sectaires, aux capitaines, aux soldats qui 
ne pouvaient vivre que les armes à la main. 
Les Flandres, en 1572, frémissaient sous 
la domination de Philippe II. Plusieurs 
tentatives de révolte avaient été noyées 
dans le sang, mais le feu couvait sous la 

4. — Lettre d'Alava au duc d'Albe, 5 octobre 1571. 
(Espag., Arch. nat., K. 1522, n» 22). 

2. — Grands détails sur cette affaire dans la lettre 
d'Alava à Philippe II, 6 novembre 1571. (Orig. espa- 
gnol; Arch. nat., K. 1522, n^ G8). 



— 149 — 

cendre, et il paraissait évident que la moin- 
dre intervention française seçait la ruine 
des armées espagnoles. Rejeter sur les 
Flandres, prêtes à se soulever, cette tourbe 
de gens de guerre sans emploi, les détour- 
ner de leurs querelles religieuses, de leurs 
rancunes passionnées par une campagne 
patriotique entre toutes, était un dessein de 
génie qui sauvait la France et doublait ses 
richesses K 

Le roi hésitait à rompre sans motifs avec 
son (( fidèle allié » d'Espagne. La reine qui 
ne comprenait les œuvres de la grande 
politique que pour faire monter ses enfants 
sur des trônes étrangers ^, hésitait plus 
encore que son fds. Avant de s'engager dans 
une campagne aventureuse, qui pouvait 
aussi bien mener la dynastie des Valois à 
une victoire, comme celle de Cérisoles, qu'à 
un désastre, comme celui de Saint-Quentin, 
le roi voulut mettre fin à la querelle de Guise 
et de Goligny. 

1. — Tous les historiens soat UDanimes à attribuer 
cette politique à Golicny. La Popelinière lui prête 
une harangue au roi (i58l, t. 111, f. 44). On on con- 
serve une autre dans le fonds français, vol. 23335, 
pièce 3. 

2. — La reine songeait même à faire du duc d'An- 
jou un roi d'Alger sous la suprématie du Sultan. 
Voyez un article de M. le comte Fremy dans la Revue 
diplomatique f 1888, p. 593. 



^ 180 — 

Le prince lorrain ne respirait que la 
vengeance. Le roi lui commanda de venir à 
Blois et de se réconcilier avec son rival K Le 
duc ne vint pas. Il arma ses partisans pour 
surprendre Tamiral. Celui-ci, retiré à Ghas- 
tillon, arma les siens, et chaque parti se tint 
sur ses gardes ^. Guise continuait à bouder 
loin de la cour et guettait son ennemi ^. Le 
14 janvier 1572, il demanda au roi, de con7 
cert avec son oncle, le duc d'Aumale, et son 
frère, le marquis du Maine ^, ou l'autorisa- 
tion de provoquer Goligny en duel, « en 
a chemise, Tépée au poing » ou celle de faire 
appel à l'arbitrage d'un conseil composé des 
frères du roi et des maréchaux de France ^. 
La demande était peu réfléchie. Une ren- 
contre entre un jeune homme alerte de 
21 ans et un vieux capitaine de 55 ans ^, 

1. — Sommaire de chancellerie des lettres d'Agui- 
lon, avant le 27 novembre 1574. (Copie espag., Arch. 
nat.,K. 1524, no44). 

2. — Lettres publiées par le comte Delaborde, 
Coligny» t. III, p. 364 et suiv. 

3. — Lettre du secrétaire Aquilon au duc d*Albe, 
17 décembre 1571. (Orig. espagnol; Arch. nat., K, 
1524, n» 55). 

4. — Plus tard duc de Mayenne. 

5. — Lettre de l'ambassadeur esi)agnol citée et 
traduite par M. Henri Martin, Histoire de France, 
t. IX, p. 288, note (édit. de 1858). — Lettre de l'am- 
bassadeur du duc de Savoie. (La Perrière, Le 
XVI* siècle et les Valois; p. 318). 

6. — - Le duc de Guise était né le 31 décembre 1550 
et Coligny le 16 février 1517. 



- 151 — 

perclus de goutte, n'avait rien de chevale- 
resque. Quant à Tarbitrage, il impliquait la 
nullité de Tarrêt de Moulins, et le roi ne 
pouvait désavouer un de ses actes judiciaires 
les plus importants. 

Cependant l'ambition de régner sur les 
. Flandres, le pays le plus riche de l'Europe 
au XVI® siècle, mordait le cœur du roi. Il 
autorisa secrètement un corps de volontaires 
à franchir la frontière, et les villes de Mons 
et de Valenciennes furent prises sans coup 
férir. Il fit des armements considérables ; il 
signa un traité avec la reine d'Angleterre. 
Avant de se mettre en campagne, il fallait en 
finir avec les Guises. Le 27 mars 1672, il 
déclara par lettres closes que l'honneur de 
la veuVe et des enfants du duc de Guise 
n'était point attaché aux poursuites dirigées 
contre Goligny '. La déclaration était sans 
portée; la veuve et les enfants de Guise 
auraient pu répondre qu'ils étaient seuls 
juges de leur honneur. Le 1" mai il confirma 
les dispositions de l'arrêt de IVloulins *^ et 
chargea un seigneur de la cour, Gaspard de 
la Ghastre de Nançay, de signifier aux deux 
parties la défense de se poursuivre mutuelle- 
ment. Nançfly se mit en route le 6 mai et 

1. — Coll. Brienne, vol 206. f. 516. 

2. — CoU, Brienne, vol. 206, f. 518, 



visita d'abord les Guises à Reims, puis Coli- 
gny à Ghastillon. Les ordres du roi étaient 
si formels que personne n'osa résister ouver- 
tement ^ Mais avant de signer, les Guises 
essayèrent d'un subterfuge qui leur avait 
réussi à Moulins. A la première nouvelle do 
l'arrêt du 1" mai, le marquis du Maine, 
frère cadet du duc de Guise, partit précipi- 
tamment pour l'Italie sans prendre l'autori- 
sation du roi. Aussitôt le roi se plaignit 
au cardinal de Lorraine de la désobéissance 
de son neveu et expédia au duc de Nemours, 
à Lyon, un courrier chargé de retenir le 
voyageur ^. Celui-ci n'était pas éloigné et 
rebroussa chemin. 

Quelques jours après, Nancay rapporta au 
roi une série de pièces qui semblaient clore 
le débat : les procès-verbaux de la significa- 
tion du mandement du premier mai aux 
princes de la maison de Lorraine, à Coligny 
et au cardinal de Lorraine ^, et enfin l'acte 
d'assentiment des Guises à l'arrêt de Moulins. 

a Nous, enffans, frères et nepveus de feu 

1. -— Lettre de Nancay au s. du Bouchage, Dlois, 
5 mai 1572. (Orig., f. fr., vol. 3188, f. 27). 

2. — Lettre du roi au cardina} de Lorraine, 
8 mai 1572. (Minute originale; f. fr., vol. 15554, 
f. 123). 

3. — Actes datés du 12 mai 1572; coll. Brieunc, 
vol. 206, f. 520. 



— 183 - 

a Monsieur le duc de Guîse^ soubsignés, 
« certifions que Tarrest donné par le roy en 
a son conseil privé à Moulins, le xxiv" jour 
a de janvier mil-cinq-cent-soixanle-six, sur 
a le malheureux acte advenu de la mort 
« dudict deffunct, nostre père, frère et oncle, 
a à la descharge de Monsieur l'admirai, 
a nous a esté ce jourd'huy signiffié, et sem- 
<K blablement la déclaration de Sa Majesté 
a pour l'observation d'icelluy, faicte à Bloys, 
a estant en son dit conseil privé, le xxvii" jour 
(( de mars passé; et de tout baillé copie, 
a signée Pinart; et ce par le sieur de Nan- 
« çay, chevalier de l'ordre et cappitayne des 
« gardes de sa dicte Majesté. A laquelle 
« promectons de jamais ne contrevenir aux- 
c( dits arrest et déclaration, directement ou 
a indirectement, sur les peines y co)itenus. 
(c En tesmoing de ce, nous avons signé ces 
ce présentes de nos mains et fait sceller des 
ce cachets de nos armes. A Reims le dou- 
« ziesme jour de may, l'an mil-cinq-cent- 
« soixante-douze *. » 

« G. car. de Lorrraine. — Henry de 



i. — L'original de cette pièce, muni de tous les 
sceaux des princes lorrains, était conservé à la 
Bibliothèque du Louvre dans le fonds français, 
vol. 209, f. 37, et a péri dans l'incendie do cette 
bibliothèque. 11 avait été imprimé dans le Cabinet 
historique^ t. III, l""» partie, p, 68. 



— 154 — 

a Lorraine. — Claude de Lorraine. — 
a Charles de Lorraine. — Loys de Lorraine. 
a — Charles de Lorraine. — Charles do 
a Lorraine *. » 

Le roi montra sa satisfaction à' la cour, 
aux ambassadeurs étrangers, à ses propres 
représentants ^. Il feignait de croire, il 
croyait peut-être en effet que la paix était 
assurée. D'un côté la guerre des Flandres 
détournait sur l'Espagnol les passions reli- 
gieuses; de l'autre le mariage du prince de 
Navarre avec Marguerite de Valois était un 
gage pacifique assez important pour assu- 
rer la paix. Le roi pouvait se faire illusion 
de bonne foi. Mais les témoins clairvoyants 
ne s'abusaient pas. Le duc de Guise et l'ami- 
ral revinrent à la cour, le premier au mois 
de mai, le second au mois de juin^ et, dès les 
premiers jours, leur attitude réciproque per- 
mit de prévoir l'avenir. Le 21 juin 1572, 
l'ambassadeur du duc de Savoie écrit à son 

• 

maître : « L'amiral et le duc de Guise se 



1. — Charles, cardinal de Lorraine, frère du duc 
do Guise. — Henri de Lorraine, duc do Guise. — 
Olaudo de Lorraine, duc d*Aumale. — Charles do 
Lorraine, marquis du Maine. — Louis do Lorraine, 
cardinal de Guise. — Charles de Lorraine, fils du 
duc d'Àumale. 

2. — Lettre du roi à Noailles, évêque de Dax, 
il mai 1572. Chambord. (Copie du xvu* siècle: f. fr., 
VoL 21009, f. 233). 



— 188 — 



« voient, mais ne se parlent pas; Tamiral se 
ce trouble de ce qu'il lui semble que Mon- 
« sieur, frère du roy, porte le duc de Guise. 
« Tout n'est pas encore bien rapaisé ^ » 



1. — Fragment rapporté des Archives do Turin par 
M. le comte de la Perrière, Le XV/« siècle et tes 
Valois, p. 318. 



ÉPILOGUE 



Coligny et la guerre des Flandres. — Attentat 
de Maurevel (22 août 1572). — Massacre de la 
Saint-Barthélémy (24 août) * . 

Catherine de Médicis s'était toujours 
opposée à la guerre des Flandres. Déjà 
jalouse du crédit de Tamiral, elle n'entre- 
voyait dans une campagne, môme victo- 
rieuse, qu'une diminution d'influence pour 
elle et pas un avantage pour le duc d'An- 
jou, son fils préféré. A force de reproches 
et de plaintes, de prières et de larmes, elle 
sut jeter le roi dans l'incertitude. Alors 
intervinrent les mauvais conseillers, les 
courtisans vendus au roi d'Espagne, et 
bientôt la cour apprit que la campagne des 
Flandres était indéfinitivement ajournée. 
Coligny éprouva un vif dépit. Habitué à 
ne point trouver de contradicteurs autour de 

i. — Nous n'annotons pas ce récit qui fera l'objet 
d'une publication beaucoup plus développée. 



lui, il ne sut modérer son humeur; Son 
insistance devint insupportable au roi, sa 
présence odieuse à la reine et au duc 
d'Anjou. C*est le moment que les Guises 
attendaient pour assouvir leur vengeance. 

Le vendredi, 22 août, quatre jours après 
le mariage du roi de Navarre, vers onze 
heures du matin, Coligny sortait du Louvre 
et rentrait à son logis de la rue de Béthisy. 
En passant le long des murs de l'hôtel de 
Bourbon, il reçut une arquebusade à la main 
droite et au bras gauche. Il désigna froide- 
ment la fenêtre d'où le coup était parti et dit 
à ses compagnons : a Voyez quel est celui qui 
ce a tiré. » La maison, une masure inhabitée, 
était fermée. La porte fut forcée, mais l'as- 
sassin avait disparu par une seconde issue 
sur le cloître Saint-Germain-l'Auxerrois. Le 
roi jouait à la paume avec le duc de Guise 
quand on lui apporta la nouvelle. Vivement 
ému, il jeta sa raquette et remonta dans ses 
appartements. Le duc de Guise, bientôt après 
la reine mère et le duc d'Anjou, plusieurs 
seigneurs de la cour le rejoignirent pour 
l'arracher aux conseils de leurs adversaires. 
Le roi ne savait encore sur qui jeter se? 
soupçons et personne n'osait prononcer un 
nom. On découvrit que la maison suspecte 
appartenait au s. de Chailly, intendant du 



— 189 — 

duc de Guise, que le coupable, François 
Louviers, dit Maurevel, un assasin à gages, 
y avait passé trois jours en embuscade et 
qu'il s'était enfui sur un cheval qu'on lui 
tenait à la main depuis le matin. Des 
gentilshommes huguenots, qui avaient pour- 
suivi le meurtrier sans l'atteindre, rappor- 
tèrent qu'il avait changé deux fois de 
monture, à la porte Saint-Antoine et au 
pont de Charcnlon. Là, ils avaient perdu 
SCS traces, mais ils avaient retrouvé les 
deux premiers chevaux et reconnu qu'ils 
sortaient des écuries du duc de Guise. 

Le soir le roi visita l'amiral, en compa- 
gnie de ses frères et de sa mère. Tandis 
qu'il examinait la balle de Maurevel, Cathe- 
rine observa froidement : o: Devant Orléans, 
« on n'avait pas pu extraire la balle de 
« M. de Guise. » Le roi avait juré de venger 
l'amiral, mais Catherine de Médicis connais- 
sait les moyens de retourner cette àme tour 
à tour molle et violente. Le lendemain, elle 
et ses familiers, le duc d'Anjou, Tavannes, 
Retz, Birague, le chevalier d'Angoulême, 
assaillirent le faible prince de plaintes et de 
rapports alarmants. Les capitaines réformés, 
rassemblés à Paris pour le mariage du roi 
de Navarre, étaient en force aux portes du 
Louvre ; les conseils ôe succédaient au che- 



— 160 — 

vet de Coligny; Tamiral prétendait disposer 
de la couronne de France en faveur du roi 
de Navarre; déjà Mongonmery rassemblait 
des compagnies dans le faubourg Sainte 
Germain; il était dangereux de laisser 
aux conjurés le temps de combiner leurs 
desseins; il fallait les prévenir par une 
détermination hardie ; le salut du roi justi- 
fiait leur mort ; le succès était assuré à celui 
qui prendrait Tavance. Vaincu par les larmes 
de sa mère, par les objurgations de son 
frère, par les prétendues informations de ses 
conseillers, le roi donna, puis révoqua et 
enfin renouvela les ordres de massacrer les 
réformés jusqu'au dernier. 

Dans la nuit du 23 au 24 août, avant le 
lever du jour, le tocsin de Saint-Germain- 
TAuxerrois donne le signal. Le duc de Guise, 
le marquis du Maine, le duc d'Aumale et 
plusieurs seigneurs de leur parti arrivent à 
cheval à Thôtcl de la rue de Bethisy. L'un 
des assassins frappe au nom du roi ; la porte 
s'çuvre et le suisse de garde est égorgé. 
Les portes intérieures étaient barricadées et 
un combat s'engage. Les assaillants des- 
cellent la grille d'une fenêtre et pénètrent 
dans l'hôtel. Les Suisses du roi de Navarre 
se font tuer sur les marches de l'escalier. 
Un Allemand, nommé Bcsme, au service du 



— 161 — 

duc de Guise, suivi de deux Italiens et de 
quelques soldats de la garde du roi, force 
la^ porte de la chambre de l'amiral . Coligny 
était en prière. Les assassins le saisissent 
pour le jeter par la fenêtre. Comme il résis- 
tait, Tun d'eux lui tire un coup de pistolet ; 
les autres le lardent de coups d'épée et le 
précipitent dans la cour aux pieds du duc 
de Guise. Le duc s'approche de sa victime, 
fait étancher le sang qui couvrait le visage 
et, suivant quelques relations, le frappe du 
pied. La foule, attirée par le bruit du com- 
bat, remplit la cour. Le corps est lié par les 
pieds sur une claye, et trafné dans les rues 
de la ville. Un bourreau lui coupe la tête et 
des cavaliers promènent le sinistre trophée 
au bout d'une épéc, aux applaudissements de 
cette Iftche multitude que la vengeance des 
Guises avait ameutée contre le chef du parti 
réformé. * 

Ainsi se termina la querelle des Guises 
et des Coligny, si toutefois on peut considé- 
rer comme terminée une lutte qui devait 
engendrer d'autres forfaits. Les réformés 
accusaient le duc de Guise d'avoir ouvert 
les hostilités au commencement de 156^ 
par le massacre de Vassy ; moins d'un an 
après, Poltrot de Meré venge les victimes 
de Vassy. Les Guises accusent l'amiral de 

I! 



complicité dans l'attentat de Poltrot et la 
reine refuse de laisser juger le procès; ils se 
vengent eux-mêmes à la Saint-Barthélémy. 
La série criminelle ne s'arrête pas en 1572. 
Le 23 décembre 1588, à Blois, Henri de 
Guise est assassiné par ordre de Henri III. 
Le 1" août suivant, Henri III est poignardé 
par un sectaire du parti lorrain. L'histoire 
est une chaîne dont les anneaux se tiennent 
par une soudure infrangible. Les violences 
amènent des violences ; les crimes appellent 
les crimes; le sang attire le sang. C'est la 
loi du talion. Plaise au ciel que ce récit 
rappelle cette loi inéluctable aux Français 
du xix° siècle, qui vivent dans un temps 
aussi troublé que la seconde moitié du 
xvi° siècle. 



PIÈCES, JUSTIFICATIVES 



I 



Etat de maison du duc de Guise 

!•' janvier 15G0 (i56l) au 31 décembre 15Gt 

Chambellans : François de Bien- 
court, s. de Potrincourt, aux 
gages de 3oo livres. 

Bastien de Neufchastel, s. de. 
Plancy 3oo — 

François des Boues, s. du 

Mesnil 200 — 

Maîtres d'hôtel : Gaucher de 

Foissy, s. de Creney. ... ; 3oo — 

JehandeBeaufils, s.deVulpian 3oo — 

Franc. deVilliers, s.deChailly 3oo — 
Gentilshommes de la chambre : 

Charles de Hangest, s. de Mar- 
dilly 200 — 

Bertrand de Foissy, s. de Cre- 
ney 200 — 

Simon de Grammont 200 — 

Ecuyers : Charles du Tissier, s. 

de Maisons 200 — 

Hector de Montenar, s. de 
Talaru 200 — 



— i64 — 

Huit gentilshommes servants 

aux gages de 160 livres. 

Huit gentilshommes pension- 
naires à 100 — 

Deux maréchaux des logis à: . . 160 — 

Un aumônier (Nicole de Chan- 

terayne) 1 5o — 

Un trésorier (Guillaume de 

Champagne) 1200 — 

Quatre secrétaires à 120 — 

Deux contrôleurs à 160 — 

Médecins : Louis de Mandreville 120 — 
Simon Balangier 120 — 

Chirurgien ; Pierre AUbert, chi- 
rurgien 200 — 

Nicolas Griison, apothicaire. . 200 — 

Dix valets de chambres, à différents gages. 

Trois valets de garde-robe. 

Huit officiers pensionnaires, dont un orga- 
niste et un géographe. 

Trois fouriers. 

Un maître de fourière. 

Trois sommeliers de panneterie. 

Quatre sommeliers d'échansonnerie. 

Deux écuyers de cuisine. 

Six maître-queux, dont trois galopins. 

Quatre gardes-vaiselle. 

Deux muletiers. 

Un maréchal de la petite écurie. 

Deux palefreniers. 

Quatre aides d*écurie. 



- i65 - 

Trois charretiers. 

Un valet des pages. 

Un lavendier. 

Deux huissiers de salle. 

Deux portiers. 

Un fourbisseur. 

Huit autres officiers pensionnaires. 

(Copie du XVII* siècle; f. fr., vol. 22429, f. 161). 



II 



Le tumulte de Vassy 

<•' mars 1562 (1563) 



Après le crime de la Saint-Barthélémy, il n'est 
pas d'événement, dans Thistoire du xvi* siècle, qui 
ait été le sujet de discussions plus passionnées que 
le massacre de Vassy. Le parti huguenot avait tant 
d'intérêt à grossir le massacre pour justifier sa 
prise d'armes, le parti catholique tant d'intérêt à 
le pallier pour aggraver la culpabilité de ses enne- 
mis que l'histoire a été dénaturée. La polémique 
dure encore et se prolongera, suivant toute vrai- 
semblance, tant que souillera le feu des passions 
religieuses. Nous allons examiner les témoignages 
et les récits contemporains. 

Les ambassadeurs étrangers ne sont pas des 
témoins impartiaux; ils obéissent toujours aux 
passions de leur cour; cependant leurs rares 
appréciations méritent d'être enregistrées. — Le 
cardinal de Ferrare ne mentionne le massacre de 
Vassy qu'à l'occasion de la plainte que de Beze 
porta à la reine et ne donne point de détail 
(Negoc, du card. de Ferrare^ in-4*'» p. 112). — Le 
nonce, cardinal de Sainte-Croix, n'y avait d'abord 
attaché aucune gravité. Lorsque le prince de 
Condé s'en fit une arme, le cardinal écrivit à 
Rome : « Je vous dirai qu'il a été beaucoup 
« plus grand qu'on ne l'avait dit. Les huguenots 
« de ce pays en font de grosses plaintes et sont 
« allés demander justice à la reine, qui a envoyé 



— 167 — 

« un commissaire pour faire des enquêtes. Ceiix 
<r de la famille de M. de Guise se justifient en 
« disant que les autres ont été les aggresseurs et 
« qu'ils ont tellement blessé M. de la Brosse qu'il 
« faut le trépaner. » (Correspondances du nonce 
Prosper de Sainte-Croix, Archives curjeuses pour 
servir à PHist. de France^ t. VI, p. 46). 

Tornabuoni, ambassadeur de Toscane [Négoc, 
de la France avec la Toscane^ t. III), Michel 
Suriano et Marc-Antoine Barbaro, ambassadeurs 
vénitiens (Despatches of Michèle Suriano and 
Marc- Antonio Bar baro^ Lymington, in-4% 1891), 
Throckmorton {Calendars ofstate papers, 1 562), 
Perrenot de Chantonay (Arch. nat., K. 1496 et 
1497), les uns pour cause d'absence, les autres par 
indifférence, sont muets ou presque muets sur la 
journée de Vassy. 

Les dépositions de Taccusé principal, le duc de 
Guise, soot intéressantes à relever. Dans les 
derniers jours de février il avait écrit à La Motte 
Gondrin son lieutenant en Dauphiné. Il ajouta un 
post-scriptum à sa lettre le lendemain de son 
passage à Vassy : « De mes voisins et sujets m'ont 
<c voulu depuis trois jours faire une braverie, où 
« ils m'ont blessé une douzaine de gentils- 
« hommes, de quoy ils se sont trouvés marchands. 
« Voilà leurs belles évangiles. » La lettre est 
publiée par V Histoire ecclésiastique^ 1882, t. II, 
p. 402. Que le duc de Guise ait été insulté et 
« bravé » à Vassy, ce n'est pas extraordinaire; 
mais qu'il ait été attaqué, c'est plus difficile à 
croire. Le prince lorrain gâte sa défense en vou-^ 
lant trop prouver. Le duc de "Wurtemberg l'avait 
accusé (Lettre sans date; Mémoires de Condéj 



— i68 — 

t. III, p. 372). Le duc lui répondit le 10 avril : 
a J'espère, avec l'aide de Dieu justifier toutes mes 
« actions. Vous avez vu par ma lettre ce que je 
« vous ay mandé qui est advenu à mon gran 
« regret, en quelque façon que Ton my ait forcé. 
« Mais vous jugerez, s'il vous plest, et tous prinses 
« vertueux et bien nez, que d'offendre il est blâmé 
« et permis de se deffendrc. » (Lettre publiée 
d'après les originaux conservés dans les Archives 
de Stuttgard; Bull, de la Soc de Vhist, du Prot. 
français^ t. XXIV, p. 5oi). La déclaration du duc 
à l'article de la mort (voyez cy-dessus, p. 46) nous 
ipspire plus de confiance que l'agression des 
paysans de Vassy ne nous parait vraisemblable. 

Le lendemain du jour où il signe cette lettre, le 
1 1 avril, le duc de Guise, cité au parlement, pro- 
c)uit un argument qui a plus de valeur. « Il passa 
<c à Vassy, portent les analyses des registres de la 
«•cour, ayant avec luy M. le cardinal de Guise, 
a son frère cadet, sa femme grosse et ung aultre 
a sien fils de sept ans. » Ce n'est pas l'équipage 
d'un capitaine qui vient mettre une ville à feu et à 
sang. Aussi le greffier est-il fondé à ajouter que 
le duc a n'avait volunté ne compaignie pour 
« offenser personne. » {Mémoires-journaux de 
Guise, p. 490). 

Les correspondances du temps aident ordinaire- 
ment à éclaircir les mystères historiques, mais ici 
elles manquent absolument. Ce silence ne peut 
surprendre. Le massacre de Vassy est un événe- 
ment qui s'est passé loin de la cour, sans témoins 
autorisés. Dans les premiers jours il fut considéré 
comme une échauffourée sans conséquence et ne 
prit de l'importancQ que lorsque le prince de 



— i69 — 

Condé se mit en campagne pour venger les 
victimes. La seule lettre que nous puissions citer 
contient un témoignage de Renée de France en 
faveur du duc de Guise. « L'on sait bien, écrit-elle 
« à Calvin, qu'il s'estoit retiré en sa maison, d'où 
(( il ne vouloit bouger, et les lettres et messages 
« qu'il eut pour l'en faire partir... » {Lettres de 
Calvin^ t. II, p. 55o, note). 

Le silence des correspondances nous oblige à 
étudier les récits historiques. Les relations origi- 
nales du massacre de Vassy sont toutes également 
suspectes. Les écrivains du parti réformé s'effor- 
cent de démontrer que le massacre était prémédité 
et que le duc de Guise y prit une part active; 
ceux du parti catholique, que la lutte fut engagée 
par les huguenots et que le duc fit de vains efforts 
pour l'arrêter. 

Historiens protestants, — I. — Très peu de 
jours après le massacre, dans le courant du mois 
de mars (cette date est certifiée par une lettre 
publiée dans les Mémoires de Condé ^ in-4'*, t. III, 
p. 220) parut à Caen un récit abrégé qui a 
servi dé thème à tous les autres. C'est un de 
ces nombreux « pasquils » sans signature que 
les huguenots publièrent dans le cours de l'an* 
née i562. L'auteur représente le duc de Guise 
arrivant à Vassy avec 1 idée préconçue d'égorger 
les calvinistes et excitant lui-même, l'épée à la 
main, ses gens au meurtre des fidèles. Ce récit 
est sans mouvement, mais semble avoir été 
dressé par un témoin oculaire. Il se termine 
par une liste des morts et des blessés. Il a été 
reproduit dans l'édition in-4® des Mémoires de 
Condé (t. III, p. m), dans les Archives curieuses 



— 170 — 

pour servir à l'Histoire de France de Ciniber et 
Danjon (t. IV, p. io5), dans les Mémoires de 
,Çuise (coll. Michaud et Poujoulat, p. 471). 
Théodore de Bèze alla à Caen vers le 10 mars 
(Lettre de Bèze à sir Cecil du 10 mars; Bull, de la 
Soc. de Vhist. du Prot, français j t. VIII, p. 5 10). 
Cependant nous n'osons lui attribuer la rédaction 
de ce libelle; il est trop inférieur à son talent. 

II. — La seconde relation du massacre de Vassy 
semble un développement du précédent. Il parut 
sans nom d'auteur, avec quelques autres pièces 
au service de la même cause, dans un Recueil de 
divers mémoires (Paris, 1 562, in-8°). C'est une 
histoire complète de l'église de Vassy depuis sa 
fondation. Le chroniqueur raconte longuement la 
visite de l'évêque de Châlons à Vassy, quelques 
mois avant le i^*^ mars. Il accuse le duc de Guise 
d'avoir prémédité l'attaque et d'y avoir pris part 
lui-même de sang-froid. La duchesse de Guise au 
contraire aurait cherché à sauver les victimes. 
Déjà, à l'occasion de la répression de la conjura- 
tion d'Ambroise, Régnier de la Planche avait 
signalé les sentiments d'humanité de la duchesse. 
Cette idée avait cours dans le parti réformé, peut- 
être parce que Anne d*Est était la fille de Renée 
de France. L'auteur de cette pièce est inconnu. 
La complaisance avec laquelle il raconte les tristes 
aventures du ministre de Vassy, Léonard Morel, 
permet de supposer que l'auteur est Léonard 
Morel lui-même ou qu'il a écrit sous l'inspiration 
de ce ministre. Ce récit, le plus développé, le 
mieux déduit de tous les récits protestants, a été 
réimprimé dans l'édition de i565 des Mémoires 
de Condé (t. II, p. 1 18), dans le Martyrologe de 



— 171 — 

Crespin (in-fol. i582, f. 563 et suiv.), dans Tédi- 
tion des Mémoires de Condé, de Secousse (t, III, 
p. 124), dans les Archives curieuses pour servir à 
l'Histoire de France de Cimber et Daujon (f. IV, 
p. 122), dans les Mémoires-journaux de Guise 
(coll. Michaud et Poujoulat, p. 477). 

Ht. — Relation en latin et en allemand imprimé 
en i562 sans nom d'auteur, reproduit dans Tédi- 
tion in-4® des Mémoires de Condé (t. III, p. 122) 
dans les Mémoires de Guise, p. 476, et par 
Mayer, Galerie philosopha du XVh siècle, t. I, 
p. 184. Ce récit est fort abrégé. Il a été écrit, dit 
Secousse dans une note, pour être envoyé aux 
princes d'Allemagne. Peut être est-il de Hubert 
Languet, alors à Paris, correspondant en titre de 
rélecteur de Saxe. 

IV. — Jean de Serres, le premier en date 
des grands historiens protestants du règne de 
Charles IX, présente dans De statu religioniSy 
II"'o partie, f. 14 et suiv., une narration qui con- 
tient quelques circonstances nouvelles. Jean de 
Serres était à Lausanne et pouvait avoir recueilli 
des témoignages oculaires. L'édition originale de 
son livre est si rare que l'exemplaire de notre 
bibliothèque passe pour unique. (Voir la biogra- 
phie de Jean de Serres écrite par M. Dardier dans 
la Revue historique^ juillet i883). Cette considéra- 
tion, jointe à l'autorité de l'écrivain, nous engage 
à présenter ici la traduction du passage où il 
raconte le massacre de Vassy. 



Le premier jour de mars se trouvait un 
dimanche. Le duc de Guise sachant que ce 



— 172 — 

jour-là les fidèles se réunissaient en plus 
grand nombre, se rendit, à la première 
aube, au bourg de Dammartin, d*où il prit, 
après avoir entendu la messe, le chemin de 
Vassy. A peine efatré dans la ville, il apprend 
que les huguenots sont assemblés : aussitôt 
|1 se rend au lieu de la réunion. Plus de 
quinze cents fidèles, en effet, occupaient déjà 
Tenceinte, et le ministre, après les prières 
d'usage, inaugurait la séance. — Le duc de 
Guise, suivi de son frère, le cardinal de 
Guise, appelle quelques habitants, le prieur, 
appelé prêtre, et aussi le capitaine de la ville, 
et il entre avec eux dans l'église catholique, 
non loin duquel était le lieu de réunion des 
fidèles- Il les entretient alors de ses projets, 
et, ce fait, leur ordonne de se rendre en 
toute hâte à l'assemblée des huguenots. Les 
soldats entrent et jettent des traits dans la 
foule. Les fidèles de s'étonner d'abord de la 
nouveauté du fait. Quelques uns sont tués 
incontinent. Alors les partisans de Guise se 
jettent en nombre sur les assistants à la 
réunion. Le duc de Guise lui-même, ayant 
fait fermer toutes les issues, se tient à la 
porte l'épée à la main, remplit l'air de cris 
menaçants, et excite ses soldats au carnage. 
Ceux-ci, encouragés de la sorte, s'élancent 
sur cette foule tremblante, parcourent en 
divers sens le lieu de la réunion, massacrent 
ceux qui s'y trouvent, tirent au plus épais 



— 173 — 

de la foule, et abattent de la même manière 
ceux qui, placés dans les tribunes, essaient 
de fuir par le toît. Hommes, femmes, sans 
distinction ni d'âge ni de sexe, sont impi- 
toyablement massacrés. Toutes les issues 
avaient été fermées et ainsi toute voie de 
salut enlevée aux membres de l'assemblée. 
On entendait les cris de ceux qui essayaient 
de fuir, les soupirs des mourants, à travers 
les sons de la trompette retentissant au loin 
pendant le massacre. 

A ce moment, la duchesse de Guise, épouse 
du duc de Guise, passait sous les murs de 
la ville. Effrayée par les cris, elle dépêche un 
messager auprès de son époux et lui fait 
demander en grâce de cesser le massacre de 
ces infortunés, d'épargner les femmes en état 
de grossesse et de ne leur faire subir aucune 
violence. Aussitôt le duc de Guise, en réalité 
troublé par un tel crime,, fait cesser le 
meurtre. Le ministre est amené devant lui* 
On lui fait subir plusieurs tourments; Guise 
lui-même l'accable d'injures, et le commet à 
la garde d'un soldat. Les gens 'de Guise 
n'avaient pu dans leur fureur achever le car- 
nage. Les rues de la ville devinrent le thé- 
âtre de meurtres nombreux dont le souvenir 
remplit d'horreur. 

Le carnage terminé, on se livre au pillage 
du lieu. Les sièges sont mis en pièces; les 
livres sont arrachés des bibliothèques et 



- 174 - 

foulés aux pieds par les soldats, qui estiment 
la parole de Dieu être d'une moindre impor- 
tance (c'est le texte même de leurs paroles) 
que les hardes et l'argent. Il n'est pas possi* 
ble de dire de quels blasphèmes l'Evangile 
est l'objet. Le cardinal de Guise avait entre 
les mains la Bible qui avait été trouvée dans 
la chaire. Le duc de Guise lui demande quel 
était ce livre. « La Sainte-Ecriture » répond 
le cardinal. « Cette Sainte-Ecriture, dit le 
duc, en regardant la première page, a été 
faite, je crois, il y a deux ans à peine? » Il 
donnait la mesure de ses connaissances en 
matière de religion. 

(De statu religionis^ 1571, 2' partie, f. 14 et suiv.). 

V. — V Histoire ecclésiastique (1882, t. II, 
p. 391) fond ensemble en les abrégeant le second 
récit et celui de Jean de Serres. La préméditation 
du massacre reprochée au duc de Guise, la fureur 
des assassins, la résignation des victimes y sont 
présentées avec une abondance de détails roma- 
nesques. A la fin figure une liste des morts et des 
blessés qui diffère de la liste contenue dans les 
^autres pièces. 

La Popelinière (Hisi, de France^ i58i, in-fol., 
1. 1, p. 284). L'histoire dite des quatre rois (Recueil 
des choses mémorables avenues en France sous les 
règnes de Henri //, François //, Charles IX et 
Henri HI^ iSgS, f. 68). Le véritable inventaire de 
V Histoire de France par Jean de Serres, (1648, 
t. I, p. 692), D'Aubigné {Histoire universelle^ 



« — 1^5 — 

t. II, p. 6, édit. de la Soc. de THist. de France)^ 
racontent révénement sans détail. La Noue, 
avant tout homme d'honneur, se rapproche* de la 
vérité plus qu^aucun autre historien de son parti. 
11 qualifie le massacre de « le désordre de Vassy ». 
Il est vrai qu'il dit plus loin « l'exécution de 
Vassy ». {Mémoires, édit. Petitot, t. XXXIV, 
p. 122). 

Historiens catholiques. Au premier récit que 
nous avons analysé plus haut, la maison de 
Lorraine riposta par une prétendue lettre du duc 
de Guise, dans laquelle l'auteur, s'adressant à un 
de ses partisans, raconte les provocations dont ses 
gens, ses soldats et lui-même avaient été l'objet 
de la part des réformés de Vassy. A l'appui de la 
non préméditation du massacre, le duc fait valoir 
qu'il voyageait en famille, avec sa femme, son 
frère, le cardinal de Guise, et ses. petits enfants. 
Il affirme qu'il fit de grands efforts pour arrêter 
la colère de ses gens et que sa blessure lui enleva 
les moyens de se faire écouter. Cet écrit apologé- 
tique, imprimé à Paris chez Guillaume Morel 
en i562, fut répandu à profusion. Il a été réim- 
primé dans les Mémoires de Condé[éA\x, Secousse, 
t. III, p. II 5), dans les Archives curieuses de 
Cimber et Danjou (t. IV, p. m) et dans les 
Mémoires de Guise (p. 473) et fut envoyé au duc 
de Wurtemberg avec une lettre du duc de Guise 
{Bulletin de la Soc. de Phist, du Prot, français, 
t. XXIV, p. 21 3). 

Il n'existe pas d'autre récit original, écrit dans 
le sens catholique, de la journée de Vassy. M. le 
pasteur Gourjon a cru trouver une relation nou- 
velle, mais M. Bonnet a établi {Bulletin delà Soc. 



. — 176 *- 

de l'Hist. du Prot. français, t. XXXIII, p. 143) 
que cette relation n'est que Tabrégé du récit de 
Crespin. 

Le chanoine Bruslard reproduit les principaux 
traits du récit de Guise {Mémoires de Condé, in-4®, 
t. I, p. 74). — Claude Haton pousse le soin 
de Tapologie du duc jusqu'à Tinvraisemblance 
{Mémoire de Claude Haton, \, I, p. 204). — Le 
Frère de Laval accuse les réformés d'avoir engagé 
la lutte « en injuriant vilainement la suite » du 
prince lorrain {La vraye et entière histoire des 
troubles, in-8®, 1 578, f. 1 1 1 , v°). — Piguerre a litté- 
ralement copié ce passage {Histoire françoise de 
nostre temps, in-fol., i58i, f. 403). — Davila est 
le plus modéré des historiens catholiques (in-fol., 
t. I, p. lOl). 

Nous pourrions citer plusieurs autres auteurs. 
Etienne Pasquier (Lettres dans les Œuvres corn- 
plètes, in-fol., t. II, col 95), Brantôme, historien 
plus exact qu'on ne le dit (t. IV, p. 235, édit. de la 
Soc. de l'hist. de France), htWtïovQsx [Les grandes 
Annales, in-fol., 1579, t. II, f. 1627, v°), Jacques 
de Charron {Hist, univ,, 1621, p. 1232), Pierre 
Mathieu (Hist, de France, in-fol., i63i, t. I, 
p. 254), Dupleix (i/wf. de France, in-fol., t. III, 
p. 65 1), sont trop éloignés de l'événement ou 
ne nous apprennent rien de nouveau. 

De grandes autorités historiques du xvi® siècle 
nous autorisent à conclure en faveur de l'accusé. 
De Thôu, d'autant plus digne de créance qu'il est 
moins bien disposé pour les Lorrains^ repousse 
toute préméditation de la part du duc de Guise 
{Hist. univ. liv. XXIX, 1740, t. III, p. 129). — 
Castelnau, autre catholique indépendant et 



- 177 — 

modéré, qualifie le massacre de «r un accident » 
(MémoireSyi. I, p. 8i et 82, 173 i,in-fol.).— -Enfin, 
un modeste mémorialiste du parti réforfné, Jean 
de Mergey, dit aussi .« Taccident de Vassy » 
(Mémoires de Mergey^ coll. Petitot, t. XXXIV, 
p. 40). Le mot nous parait juste. Le duc de Guise 
arrivait à Vassy sans dessein, mais depuis long- 
temps le fanatisme des deux partis avait préparé 
la lutte; une simple rixe entre les soldats de Tes- 
éorte et les fidèles du prêche donna le signal. 



4i 



III 



La bataille de Dreux 

19 décembre 1562 



La bataille de Dreux, par son effet moral et par 
ses conséquences, est un si grand événement qu'il 
est utile d'étudier les relations contemporaines de 
ce fait d'armes. Elles appartiennent à deux sources^ 
les récits des vainqueurs et les récits des vaincus. 

Il faut reléguer dans le domaine de la fantaisie 
les harangues que la Popeliniëre prête au connéta- 
ble, à Condé, au duc de Guise et à Coligny [Hist, 
de France^ in-fol., t. I, f. 344, v% et suiv.). 

Le recueil de Tortorel et Perissin contient six 
gravures qui représentent en perspective cavalière 
les diverses phases de la bataille. Un ancien officier 
de notre armée, le commandant de Coynart, les a 
étudiées sur les lieux, et certifie la parfaite concor- 
dance des six gravures et des récits originaux. Il 
les a reproduites dans une intéressante brochure 
Vannée i562 et la bataille de Dreux ^ in-8**, 1894. 
On trouve dans les Mémoires de Condéj t. IV. 
p. 178 et 687 deux autres dessins de ce combat, 
qu'il faut comparer avec les planches 19 et 20 du 
tome V des Monuments de la monarchie française 
de Montfaucon. 

Les deux récits les plus importants sont ceux 
du duc de Guise et de l'amiral Coligny. Le 
premier passe pour avoir été écrit par le vainqueur 



— Ï79 - 

lui-même et n'est pas indigne de lui être attribué. 
Il prend les événements au début de la campagne 
de Condé, mais il ne s'étend que sur la bataille. 
Il dût être publié vers i563; cependant nous n'en 
avons pas vu d'édition antérieure à i5y6. Il a été 
reproduit dans les Mémoires de Condé (t. IV, 
p. 685), dans les Archives curieuses de Cimber et 
Danjou (t. V, p. 97), dans les Mémoires journaux 
de Guise (p. 496). On en trouve, parmi les manus- 
crits de la Bibliothèque nationale, au moins deux 
copies du temps; Tune dans le vol. 704, f. 16 du 
fonds français, l'autre dans le vol. 21 491, f. i, du 
même fonds. 

La relation de Coligny ne contredit guères celle 
du duc de Guise, mais elle est beaucoup plus abré- 
gée. L'amiral accuse de la défaite l'infanterie fran- 
çaise et allemande, « qui s'y porta laschement. » Il 
énumère avec complaisance les grandes pertes des 
vainqueurs et parle même de la mort probable du 
duc dé Guise, que les soldats croyaient avoir tué 
en tuant le malheureux Spagny. Le récit, adressé 
à la reine d'Angleterre, a pour objet d'obtenir des 
secours et présente le parti réformé comme prêt 
à prendre sa revanche. Il a d'abord été publié dans 
l'ancienne édition des Mémoires de Condé (t. II, 
p. 6 1 9), puis dans la nouvelle publiée par Secousse 
(t. IV, p. 178), dans les Archives curieuses (t. V, 
p. 75). M. le comte de La Perrière a trouvé en 
Angleterre l'original signé et a ainsi prouvé la 
paternité de l'auteur. Il l'a réimprimé avec d'autres 
documents, notamment deux importantes lettres 
de Coligny, dans Le XVI^ siècle et les Valois {p, 89). 
M. Buet {V amiral Coligny^ p. 389) et le comte 
Delabordc (Co/ïg'/i^, t. II, p. 178), ont reproduit 



— i8o — 

quelques-unes de ces pièces, qui complètent le 
rapport ofliciel de Tamiral. 

Le lendemain et le surlendemain de la bataille, 
le roi écrivit à ses officiers, à $es alliés à l'étranger, 
pour les associer au triomphe de Tarmée royale. 
Ces lettres se ressemblent et paraissent inspirées 
par le récit du duc de Guise. Plusieurs ont été 
publiées : lettre du roi à Saint-Suplice, ambassa- 
deur en Espagne (notes des Lettres de Catherine 
de MédiciSy t. I, p. 453; lettre adressée à la 
République Helvétique (Histoire militaire des 
Suisses^ par Zurlauben, t. VII, p. 384). Dans Tune 
d'elles, adressée à Burie et qui fut officiellement 
communiquée au parlement de Bordeaux et à la 
reine de Navarre, le roi formule Tespérance que le 
combat de Dreux amènera la paix (Minute sans 
date; f. fr., vol. 15877, f. 439). (Autre lettre du roi, 
f. fr., nouv, acquis., vol. i235, f. 189). Catherine, 
de son côté, informa l'ambassadeur de France à 
Vienne (Mémoires de CastelnaUy t. II, p. 66). 

Divers personnages écrivirent des relations qui 
toutes ajoutent quelques traits au récit : deux 
capitaines espagnols, Juan de Ayala et Hernando 
de Campo (Mémoires de Condé, t. IV, p. i83 et 
186, et Archives curieuses, t. V, p. 84); le s. de 
Chaulnes (Mi^mo/re^ de Condé^ t. IV, p. 189, et 
Archives curieuses, t. V, p. 94). Les deux premières, 
assez étendues, sont consacrées à faire valoir les 
services que les compagnies espagnoles rendirent 
à la cause catholique; la troisième est très abré- 
gée. — Le cardinal de Lorraine à l'évéque de 
Rennes {Mémoires de Castelnau, t. II, p. 70); 
— Florimond Robertet, secrétaire d'état, peut-être 
le rédacteur de la relation attribuée au duc de 



— i8i — 

Guise (lettre très curieuse; Cabinet historique, 
r« partie, t. VIII, p. 140). 

Plusieurs mémorialistes sont également dignes 
d'être signalés. 

Le récit de Théodore de Bèze dans le livre IV 
de VHistoire ecclésiastique offre d'autant plus 
d'intérêt que Tauteur faisait partie de tous, les 
conseils du prince de Condé et assistait à la 
bataille. On sait que VHistoire ecclésiastique est 
une sorte de mosaïque composée avec d^autres 
ouvrages, mais, de l'avis de plusieurs critiques, le 
tableau de la campagne de i562 appartient à de 
Bèze lui-même. II n'en présente que plus d'auto- 
rité. L'auteur y montre une impartialité rare au 
XVI' siècle. De Thou lui a donné créance dans le 
livre 34 de son Histoire universelle et le suit pas 
à pas. 

François de La Noue (Mémoires, chap. X), 
consacre un chapitre entier à la bataille, mais il 
l'emploie plutôt à signaler les fautes stratégiques 
des deux chefs d'armée qu'à raconter la défaite de 
son parti. 

Les Mémoires de Jean de Mergey contiennent 
peu de détails. 

Michel de Castelnau (Mémoires, liv. IV, 
chap. V), capitaine catholique, confirme presque 
en tous points Théodore de Bèze. 

La Noue, Mergey et Castelnau faisaient tous 
trois partie, les deux premiers de l'armée réformée, 
l'autre de l'armée catholique. 

Gaspard de Saulx Tavannes (Mémoires, coll. 
Petitot, t. XXIV, p. 377), n'était pas présent. 
Cependant, les combattants étant tous ses compa- 



^ 183 — 

gnons d'armes, il a dû recueillir les témoignages 
les plus authentiques. 

Pres(jue toutes les relations ou mémoires que 
nous avons cités énumèrent les capitaines morts 
ou blessés. La liste la plus complète figure dans 
le journal du chanoine Bruslard (Mémoires de 
Condéj t. I, p. 106). 

Nous ne mentionnons aucun auteur de seconde 
main, non plus que les modernes. Nous devons 
cependant nommer trois généraux, MM. Favé, 
Ambert, Monseigneur le duc d'Aumale, un com- 
mandant, M. de Coynart, un capitaine, M. Hardy, 
(^ui ont raconté la bataille de Dreux avec une 
compétence professionnelle. 

Aux analyses ci-dessus nous ajouterons une 
relation inédite, qui contient quelques détails nou- 
veaux sur la bataille, les déplacements de la cour, 
les intrigues, les négociations qui précédèrent la 
paix d*Amboise. 

La bataille feust donnée en la plaine de 
Mesunes près Dreux le sabmedy xix"^ de 
décembre 1S62. 

L'armée de Monsieur le Prince estoyt 
environ six milles cinq cens chevaux et huict 
milles hommes de pied ou trente et trois 
enseignes : à savoir, douze d'Allemans, unzc 
de Gascons et dix de Provenceaux. 

Celle de Monsieur de Guyse estoyt de 
cent deux enseignes de gens de pied, qui 
faisoient nombre de dix sept milles hommes; 
savoir est : vingt et deux enseignes de 



— i83 — 

Suysses, dix d'AUemans, quatorze de Bre- 
tons, quatorze d*HespaignoIz et de Gascons, 
dix sept des légionaires de Picardie et Cham- 
paigne, et le reste des compaignies francoises 
qui ont suyvi des le commencement des 
guerres. 

Oultre ce il avoyt trente neuf compaignies 
de gendarmerie et quelques compaignies de 
chevaux légiers. Faisoit en tout noniibre de 
troys milles chevaux et. davantaige, avec 
vingt huict pièces d'artillerie. 

Les escarmouches . attachées, la bataille 
s'esmeust, où Monsieur l'Admirai, avec sa 
cornette et quelques autres gentilhommes, 
donnèrent au flanc de la bataille de l'ennemy, 
sur un squadron de six compaignies de 
gendarmerie conduict par le Sieur de Sansac, 
qui fust soudain rompu et mis en route et 
une partie occis. Puis porsuivit la force 
dedans la bataille des Suisses ou i fist rue 
et passaige, auquel les reistres qui le suy- 
voient accoruz, les Suysses furent soudain 
ralliés, puys rompus, puys ralliés. Les 
Bretons et une partie .des François qui 
estoient avec eux furent rompus. Et en fin 
tout ce qui estoit en la bataille fust mis en 
routte, les uns occis et les aultres ayans pris 
la fuitte jusques à Paris, Montfort, Rennes 
et autres lieux. 

L'avant garde, conduicte par Monsieur de 
Guyse, estoit demeurée entière, qui chargea 



— i84 — 

les gens de pied de mondict seigneur le 
prince, qui furent tous mis en route. La 
nuict survint, qui empescha que la mort et 
occision ne fust plus grande d'une part et 
d'aultre. 

Une partie des reistres se desbandèrent 
après le pillaige du bagaige du camp du dict 
sieur de Guise, qu'ilz ont gaigné ou la plus- 
part; qui fust cause que leur artillerie qui 
estoit gaignée fust laissée et quatre pièces de 
campaignes de mondict sieur le. prince 
perdues. 

En ceste bataille sont mortz d'une part et 
d'autre cinq mil hommes : ascavoir, du costé 
de mondict sieur le Prince soixante reistres 
perduz et environ vingt cinq chevaux franr 
cois, quatre cens François, gens de pied, 
mortz, et environ quatre cens lansquenetz; 
sans en ce comprendre treze cens qui furent 
prisonniers après qu'ils eurent levé leur bois, 
et mis leurs armes par terre sans vouloir 
combatre; lesquelz ledict sieur de Guyse a 
fait renvoyer sans armes en leur pays, leur 
faisant dresser estappes par le pays du 
Roy. 

Du costé dudict sieur de Guyse sont mortz 
environ huyct cens chevaux, en plus de sept 
ou huict cens qui prindrent la fuitte, plus 
de deux mil Suysses mortz, et bien six cens 
Bretons et de Francoys; Gascons, Alleman?, 
Espaignolz environ pareil nombre. 



— i85 — • 

Du costé de mondict sieur le prince sont 
prisonniers : 

La personne de mondict seigneur, 

Monsieur de Mouy, 

Monsieur de la Curée, 

La Claiette, 

Chandieu, mort ou prisonnier. 

De Ligneres, mort ou prisonnier. 

Mortz. 

Monsieur d'Arpajon, 

Capitaine Bouchaison, 

Et ne scait on le nombre des autres. 

Monsieur Perrocely, prédicant de Mon- 
sieur le Prince, prisonnier; lequel ledict sieur 
de Guise a offert rendre en luy rendant son 
cheval. 

Du costé du sieur de Guyse, prisonniers : 

Monsieur le Connestable, chevalier de 
Tordre, 

Monsieur de Rochefort, chevalier de Tordre, 

Monsieur de Beauvays, chevalier de l'ordre. 

L'un des seigneurs d'Achon, 

Et jusques au nombre de six vingt quatre 
gentilhommes François ayans tous casaques 
de veloux. 

Les reistres ont tué les autres. 

Mortz. 

Le maréchal Saint- André, chevalier de 
Tordre, 

La Brosse, chevalier de Tordre. 

Annebault, chevalier de Tordre. 



— i86 -- 

Gyvry, frère de Monsieur de Beaumesnil, 
chevalier de l'ordre. 

Monsieur de Nevers blessé à la cuisse, 
duquel il ne s'espère vie. 

Mombron, quatriesme filz du cpnnestable, 

Des Bordes, lieutenant de Monsieur de 
Nevers. 

Vauvillier, lieutenant de Monsieur d'Au- 
malle, 

Boullan Vitry, enseigne de Monsieur de 
Guise, 

Espaigny, son escuyer. 

Et le bon cheval de Monsieur de Guyse, 
sur lequel ledict escuyer estoyt monté, pris 
et achepté des reistres par Monsieur de la 
Rochefoucault trois cens escuz. 

Seize cappitaines des Suysses mortz et une 
infinité d'autres dont on ne scait les noms. 

Le jour mesmes de la bataille, Monsieur 
l'admirai coucha à demie lieue, près du lieu 
où la bataille s'estoit donnée. Et le lendemain 
présenta la bataille audict sieur de Guise, 
mays il ne voulust l'accepter pour aultant, 
disoit l'on, qu'il n'avoit pas mille chevaux 
avec luy; et pour ce que les gens de pied 
estoient en route, il estoit impossible de 
l'assaillir dedans son fort. 

Les reistres ont remonstré à mondict sieur 
l'Admirai le debvoir auquel ils s'estoient 
mys le jour de la bataille et le refuz que 
faisoit ledict sieur de Guyse de combattre, 



— 187 — 

avec ce que il i avoyt trois moys qu'ils 
estoient sortis de leur, maison sans avoir un 
seul jour dé rafraischissement; prièrent 
ledict sieur d'avoir quelque temps pour se 
reposer et panser les hommes et chevaux 
blessés, ce qu'il leur a accordé; et les meine 
pour refraischir à Romorantin en Berry et 
aux environs. 

Mondict sieur l'Admirai a continué les 
premières capitulations avec eux pour tout 
le moys de janvier; attendant qu'il ayt nou- 
velles de mondict sieur le Prince,, avec la 
promesse qu'il a desdits reistres qu'ilz iront 
trouver l'ennemy par tout là où il sera. Et 
n'eust esté ledict refreischissement, l'on eust 
bien empesché que ledict sieiir de Guyse 
n'eust approché Estampes comme il a faict. 
Monsieur de Duraz estoit dedans, auquel on 
a mandé de l'abandonner par ce que c'est 
une grande ville qui n'est aucunement 
forte et ne peust estre gardée que par un 
camp. 

Il i a aujourd'huy en l'armée dudict sieur 
de Guyse environ douze mil hommes de 
pied, deux mil chevaux, compris deux cens 
chevaux italiens, qui sont arrivés depuys la 
bataille, et environ troys cens aultres chevaux 
que Monsieur de Montpencier avoyt levés en 
Poictou et en Anjou. 

Il est sorty de Parys deux mil hommes de 
pied Parisiens et encor quatre cens chevaux 



— i88 — 

pour conduire quelques munitions au camp 
dudict sieur de Guyse. 

Monsieur le Prince est prisonnier à un 
chasteau qui est à une lieue de Chartres, 
ayant pour garde Monsieur de Damville, 
avec le reste de sa compaignie et trois cens 
arquebuziers. 

La Royne est à Chartres avec le premier 
président de Thou et quelques conseilliers. 
L'on dict que c'est pour traicter quelque 
appoinctement. Elle n'a point encor veu 
mondict sieur le Prince. Le Roy partit de 
Paris le mardy cinquiesme de Janvier et alla 
coucher à Trapes, pour aller trouver la 
Royne à Chartres. 

Mondict sieur le Prince insiste qu'il ne 
peust estre prisonnier en France par ceux 
qui se disent serviteurs du Roy, d'aultant 
qu'il est son lieutenant général, représentant 
sa personne; et a donné plus d'estonement à 
ses ennemys en sa prison qu'il n'avoit fait 
en sa liberté. Il a parlé à Monsieur le cardi- 
nal de Bourbon, son frère, qui n'a sceu rien 
dire de qui il estoit prisonnier. Monsieur 
l'Admirai luy a faict entendre comme, dès le 
moys de may ou de juin, l'on publia soubz 
le nom du Roy une lettre patente, conte- 
nant que l'armée que Sa Majesté mectoit, 
sinon estoit pour délivrer son très cher et 
aymé cousin le prince de Condé, qui estoit 
retenu par force à Orléans, et que, -se ladicte 



armée estoit levée pour le délivrer, Ton ne 
debvoit aujourd*huy le tenir prisonnier, ains 
le mectre en liberté. 

Le lieutenant du gouverneur de la citadelle 
de Dieppe a tué ledict gouverneur, nommé 
Riguarville. Ceux de la ville ont chassé les 
soldatz papistes. Monsieur le comte de 
Montgomeri i est entré avec quelques forces. 
Monsieur de Vielleville i a esté envoie sans 
forces pour parlementer avec eux. L'on ne 
scait encor quelle responce il a eue. 

Les Anglais bnt pris le chasteau de 
Tancreville et fortifié Quillebœuf. Monsieur 
l'Admirai a receu lettres de la Royne 
d'Angleterre, par lesquelles luy faict entendre 
comme aussi il est bien asseuré qu'il i a par 
deçà six mil Anglois, gens de pied, et liuict 
cens chevaux. Oultre cela elle a mande à 
mondict sieur l'Admirai qu'elle faisoit embar- 
quer aultres dix mille hommes avec de 
l'argent, et qu'elle donneroit secours à mon- 
dict sieur le Prince jusques au dernier de ses 
hommes et dernier escu de ses finances. La 
Royne a proveu aux estats vacquans, un jour 
ou deux après la bataille, sans attendre 
ledict sieur de Guyse, qui luy avoit mandé 
qu'elle attendit leur première veue. Lojt dict 
quelle a estée sollicitée de ce fayre; et 
approuvera aux estat^ aussi. Monsieur de 
Bordillon et Monsieur de Vielleville sont 
faictz mareschaux de France, qui n'est pas 



— 190 — 

sans grand mescontentement de Monsieur de 
Tavanes, qui pensoit bien que cela ne iuy 
deust manquer si ledict sieur de Guyse en 
eust eu la nomination. 

Monsieur lé prince de la Roche-sur-Ion a 
le gouvernement du Lionnois tout ainsi que 
Tavoit le mareschal de Saint-André. Mon- 
sieur de Nemours ccluy d'Orléans et de 
Berry, qu'avoit Monsieur de la Roche-sur- 
Ion. Monsieur le Prince de Navarre celuy 
de Guyenne, et pour son lieutenant, durant 
sa minorité, Monsieur de Montpencier. 
Monsieur le mareschal de Brissac a la réserve 
de celuy de Champaignc advenant la mort 
de Monsieur de Nevers. 

Copie du temps sans nom d'auteur; coll. Moreau, vol. 740. f. 141). 



IV 



Première déposition de Poltrot de Méré 

21 février 1562 (i563) 



Nous avions résolu de joindre cette pièce aux 
Pièces justificatives y mais elle a été si souvent 
imprimée qu^il paraît inutile de la reproduire 
encore une fois. Elle a été publiée d'abord en i563 
en une plaquette de quelques pages, puis dans la 
réponse de Tamiral du 12 mars que nous citons 
plus loin, puis dans la Germanià il/ustrata^ t. III, 
f. 21 16 (ad. 21 33), puis dans {'Histoire de la 
monarchie française de Guillaume Marcel (t. IV, 
p. 517), et enfin dans le tome VIII des Variétés 
historiques et littéraires de la Bibl. elzev., p. 5. 
— L'original ou une expédition authentiquée par 
la signature du greffier Maloii est conservé dans 
le fonds français, vol. 6610, f. 62. 



V 



Seconde déposition de Poltrot de Méré 

27 février 1562 (1563) 

Du samedi vingt- septième et pénultième 
jour de février mil cinq cent soixante deux 
après disner. 

Par devant Messire Christofle de Thou, 
chevallier, premier président de la cour du 
parlement de Paris, au cabmet du greffe 
civil du dit parlement, a été admené Jean de 
Poltrot, soy disant s. de Méré, natif d'An- 
goulème, prisonnier, et, après serment par 
luy fait de dire vérité, luy a esté lue, par 
mondit s. le premier président, sa confession 
faite par devant la Royne, au camp de Saint- 
Hilaire près Sainct-Mesmyn ; en laquelle il 
a persisté et dit qu'elle contenait vérité. - 
Après a esté enquis s*il savoit aultre chose 
et admonesté de n'en rien celer pour sa 
descharge; et luy a esté remonstré qu'il avoit 
déclaré à un des gens du s. de Losse que, si 
la Royne luy vouloit donner audience, il luy 
diroit plus qu'il n'avoit confessé. Pour ce, 
elle avoit mandé au dit sieur premier prési- 
dent parler à luy et scavoir que c'estoit. 

A respondu que ce qu'il vouloit dire à la 
dite dame estoit qu'elle fit de bref une paix 
et qu'il estoit très nécessaire; autrement il 



— !93 — 

estoit à craindre qu'il advint grande ruine 
en ce royaume. Quand la dite paix seroit 
faite, icelle dame entendroit toutes autres 
choses au vrai et par le menu. A^adjousté 
que les associés n'en veulent au Roy et à 
elle, mais au s. de Guise et aux siens, esti- 
mant qu'il empeschoit que la paix ne feust 
faite, et pour ce qu'il avoit pris la charge 
principale de l'armée contre eux; que qui- 
conque la prendroit après luy se devra bien 
garder, car s'ils peuvent ils luy en feront 
faire autant qu'ils ont fait faire au dit s. de 
Guise; ont résolu que, quand le Roy sera 
devenu majeur, ils luy obéiront entièrement 
jusques à s'en aller hors du Royaume s'il le 
leur commande. Jusques là veulent que 
l'édit de Janvier tienne, et, qui ne leur 
accordera n'3^ aura paix. Les AUemagnes 
sont à leur dévotion et preste en seront 
secourus pour donner une bataille. Quoiqu'il 
advienne, sera peuple et Royaume destruit. 
Par quoy ladite paix est très nécessaire. A 
demandé à mon dit s. le premier président 
qu'il feust moyen qu'il puisse parler au Roy 
et la Royne; lequel luy a accordé que sar dite 
requeste fut escrite afin que leurs Majestés la 
lussent. 

Davantage a dit que le dit s. de Guise 
estant mort, ils trouveront soixante Alle- 
mands au lieu d'un qu'ils avoierit, et que les 
juges qui condamnent pour la religion se 

13 



— «94 — 

doivent bien tenir sur leurs gardes, car il les 
a ouï fortement menacer. Quant luy, qui 
n'attend que la mort et la grâce et miséri- 
corde de Dieu, ne sera plus en ce monde, on 
connaîtra qu'il a dit vérité en tout et partout. 

Aussi a dit qu'ils en veulent fort à ceux 
de ceste ville; toutefois pense que, si la dite 
paix se fait, tout se portera bien; et qu'il a 
protesté devant Dieu et ses anges, que, s'il 
advenoit qu'il feust constitué prisonnier 
comme il est, qu'il ne diroit ce qu'il a sur le 
cœur que au Roy et à la Royne; mais dira 
bien à ses juges ce qui touche le fait, bien 
et repos du Ro) aume. 

Et encore dit qu'il estoit présent quand 
l'on excusoit devant Monsieur l'Admirai 
mon dit sieur le premier président des 
jugements donnés pour la Religion sur les 
menaces que la populace luy avoit faites. 
Sans cela ne fut maintenant en vie. 

Admonesté derechef de bien penser et tout 
déclarer, a respondu qu'il y penseroit volon- 
tiers, et s'il luy souvenoit de quelque autre 
chose il la diroit, si elle concernoit le repos 
et le bien du Royaume. 

A tant a esté renvoyé en sa maison. 

Ainsi signé Méré. 

Signé Du Tillet. 

(F. fr., vol. 6610, f. 4; autographe de du Tillel). 



VI 



Lettre de Christophe de Thou a la reine 



77 février 1562 (1503) 



Madame, je vous ay escript comme le 
personnage estoyt logé au lieu où les présens 
porteurs l*ont veu mettre. Je n'ay fally à le 
bien recommander et le recommande tous 
les jours pour en faire seure guarde. Présen- 
tement, j'ay parlé au personnage, présent 
Mons. le greffier du Tillet, car seul ne le 
povoys faire, et ce à heure extraordinaire. Il 
désyre fort parler au Roy et à vous et craint 
infiniment la rigeur de la justice et sur toutes 
choses la furie du peuple. Ce que j'ay plus 
apris de luy c'est qu'il fault faire une paix et 
qu'elle sera maintenant aisée à faire. Dieu 
la nous veuille donner bien bonne en l'hon- 
neur de luy premièrement et pour le bien 
du Roy et de ses pauvres subjects. Je vous 
envoyray ce qu'il nous a dict si tost qu'il 
sera mis au nect pour, l'ayant veu, com- 
mander ce qu'il vous plaira. 

Madame, je prieray nostre créateur vous 
donner sa grâce et en parfaite santé très 
bonne, très longue, très heureuse vie.» 



— 196 — 

A Paris, ce 27 jour de Janvier i562. 
Vostre très humble et très obéissant servi- 
teur et subject. 

Christofle de Thou. 

(Autographe; f. fr,, vol. 6615, f. 6).. 



vil 

Lettre de Christophe de Thou a la reine 

6 mars 1562 (1063) 

Madame, pour responce à vostre lettre du 
4 de ce moys, j'ay parlé présentement au 
geollier, lequel m'a dict qu'il respont sur sa 
vie qu'il n'adviendra aucun inconvénient à la 
personne du prisonnier et qu'il se porte bien, 
est sain et dispos. Je suys délibéré de le veoir 
cejourd'huy pour savoir s'il s'est advisé de 
quelque chose, dont ne fauldray vous adver- 
tir incontiilent ; sans oublier à vous escripre 
que l'on crye fort qu'il n'est despêché et que 
l'on n'en faict prompte justice; et dict l'on 
que la garde n'en vault rien. J'ay îaict par- 
ticipans ceux de nosfre compaignie du sur- 
plus du contenu en vostre lettre et les suys allé 
trouver particulièrement en leurs chambres, 
dont ils m'ont faict signification d'estre fort 
joyeux et contents. Dieu par sa grâce nous 
veuille donner une bonne paix, si non à telles 
conditions que nous pourrions désirer, pour 
le moins à conditions tolérables eu esgard à 
la calamité du temps, plus tost que de veoir, 
ce qu'est à craindre sur les grands prépara- 
tifs qui se font et l'envye que l'on nous porte, 
mesmes à ceste ville, la totalle destructi 
et éversion de ce royaume. Sur toutes chose 



- 198 - 

nous désyrons pardeçà la présence du Roy 
et la vostre. Et si d*adventure nous vous en 
escripvons souvent, comme nous ferons, 
vous donnerez cela, s*il vous plaist, à une 
affection singulière, que nous avons, et 
laquelle ne nous pourra jamais estre ostée. 
Ceux de Tesglise de Paris font ung service 
pour feu Mons. de Guise lundy prochain; 
ceux de la Saincte Chapelle mardy. La court 
a délibéré de s'y trouver pour honorer la 
mémoire du défunct, qui ne sera jamais assez 
honorée. 

Madame, je prieray nostre Créateur vous 
donner sa grâce et en parfaite santé très 
bonne, très longue et très heureuse vye. 

A Paris, ce 6® jour de mars i562. 

Vostre très humble et très obéissant servi- 
teur et subject, 

Christofle de Thou. 

(Autographe; f. fr., vol. 6015, f. 10). 



VIII 

Troisième déposition de Poltrot de Meré 

' 7 mars 1562 (1563) 

Du Dimanche 7« jour de mars i562, du 
matin. 

Par devant Messire Christofe de Thou, 
chevalier^ premier président de la cour de 
Parlement de Paris, au cabinet du greffe 
civil a este amené Jean de Poltrot, soi-disant 
s. de Meré, prisonnier, auquel a esté, après 
serment par luy faict de dire vérité, relue 
par moy, Jean du Tillet, procureur et secré- 
taire du roy, greffier civil de sa cour du 
Parlement, sa confession faite par devant la 
Roinc au camp près Saint-Mesmin et celle 
despuis faite au dit cabinet le samedi, pénul- 
tième jour de février dernier, par devant 
mon dit sieur le premier président; des- 
quelles deux confessions il a derechef per- 
sisté et dit qu'elles contenoient vérité. 

Ce fait, mon dit s. le premier président 
lui a demandé s'il avait pensé à ce qu'il 
luy avoit dernièrement remonstré, et il a 
respondu qu'il ne sait autre chose que ce 
qu'il a dit et que la paix est fort nécessaire; 
quand elle sera faite et il sera en liberté, il 
dira tout au Roy et à la Roine. 

Sur ce enquis, a dit qu'il voit que les can- 



200 



tons de ce Royaume sont du tout accordés, 
qui sera la ruyne si la paix n'est faite. 

Enquis si le personnage, duquel il a parlé 
en sa dite première confession et dit qu'il l'a 
veu au jardin de Blois, près du Roy, qui 
jouoit au paille maille, luy estoit monstre 
s'il le reconnaîtroit, a répondu que oui. 

Ainsi signé Meré. 

Après a esté mandé Estienne Cœur de 
Roy, natif de 'Sermizelles, au bailliage d'Au- 
xois, duché de Bourgogne, prisonnier, lequel, 
après serment fait de dire vérité, enquis de 
son état, a dit qu'il est tapissier du Roy. A 
auparavant servi M. le Connétable. Estoit 
avec luy durant sa prison en Flandre, qui 
le donna au feu Roy Henry, et a esté continué 
en Testât. 

Enquis s'il a esté à Blois, depuis que le 
Roy y est de ce dernier voyage, a respondu 
qu'il avoit esté en ceste ville un temps pour 
un procès qu'il gaigna et faire taxer ses 
dépens. Monsieur de Chambon avoit esté son 
rapporteur. Partit de ceste dite ville pour 
aller servir son quartier, et arriva au dit 
Blois le jeudy gras dernier au soir; feust en 
la compaignie d'une damoiselle, femme d'un 
secrétaire du Roy, nommée La Berce, laquelle 
il trouva à Saint-Cler. Et le jour de carême 
prenant, Monsieur de Jars, maître d'hôtel du 
Roy, luy demanda la certification de son curé. 



— 20I 



luy disant qu'il avoit esté ordonné que tous 
les officiers domestiques les eussent. A quoi 
il fist response qu'il n'en avoit, mais l'iroit 
volontiers quérir et l'auroit bien. Lors le dit 
s. de Jars luy dit qu'il allast parler à Mon- 
sieur de la Trousse, prévôt de l'hôtel. Et y 
alla en la conduite de deux archers des 
gardes. Ledit prévôt le bailla en garde à l'un 
de ses archers. C'est la façon comme il a 
esté constitué prisonnier; n'en sait la cause; 
se fie en son innocence. 

Enquis si, durant que Monsieur de Guise 
estoit audit Blois, il est allé au jardin du dit 
Blois, le Roy y jouant au paille maille, a dit 
qu'il feust deux fois au dit jardin, mais non 
durant que le dit s. de Guise estoit audit 
Blois; car les nouvelles vinrent de sa bles- 
sure le lendemain que luy qui parle arriva 
au dit Blois, et le dit s. de Guise en estoit 
party auparavant. 

Enquis s'il a esté à Orléans, a dit qu'il n'y 
feust despuis que le feu roy François second 
y estoit; ne se trouvera qu'il y ait despuis 
mis le pied. 

Ainsy signé. Cœur de Roy. 

Ce fait, a esté remandé ledit Poltrot, auquel 
a esté monstre le dit Cœur de Roy, et, après 
serment par chacun d'eux fait de dire vérité, 
a esté enquis le dit de Poltrot s'ils connais- 
soit le dit Cœur de Roy, qui a dit que non et 



— 202 — 

qu'il ne l'avoit jamais vu auparavant cette 
fois. 

Et enquis. si c*estoit celuy duquel il a 
parlé en sa première confession, a dit que 
ce n'est luy. Et le dit Cœur de Roy enquis, a 
semblablement dit qu'il n'avoit oncques veu 
et ne connaissoit aucunement le dit de 
Poltrot. 

A tant ont esté renvoyés en leur prison. 

Ainsi signé, Cœur de Roy et Meré. 

Signé, Du Tillet. 

(ÀDtog., de du Tillet, f. fr., vol. G610, f. 8.) 



IX 



Lettre de Christophe de Thou a la reine 

7 mars 1562 (I5G3) 

Madame, suyvant ce qu'il a pieu à Vostre 
Majesté me commander et ordonner, ce jour- 
d'huy, sur les huict heures du matin, en 
présence de Monsieur le greffier du Tillet, , 
j'ay parlé au personnage, tapissier du Roy, 
Jequel fust hyer, de vostre ordonnance, 
amené prisonnier en la Conciergerye du 
Palais par les archers du prévost de Thostel. 
Et iceluy confronté à Taultre prisonnier, 
auquel auparavant j'avoys parlé et tuy avoys 
demandé s'il recongnoistroit bien celui dont 
il avoit parlé par sa depposition faicte par 
devant vous, ayant barbe rousse et chausses 
rouges, et nous ayant faict responce qu'il le 
recongnoistroit s'il le veoyait; l'ayant veu a 
dict que ce n'estoit celuy dont il avoit parlé, 
tellement que par là ce tapissier demeure 
entièrement descharge; qui a esté cause qu'il 
m'a semblé, son innocence congneue, devoir 
ordonner qu'il fust mis au préau; ce que par 
mon ordonnance le geollier a faict, entendu 
que par vostre commandement et ordonnance 
il soit eslargy à pur et à plain. Sur quoy il 
vous plaira me commander vostre intention 
et bon vouloir, afin de vous obéyr. Ayant 



— 204 — 

faict veoir ce qui a esté faict et ckessé par 
escript, je vous ay escript, quant à l'aultre, 
que la garde n'en vault pas beaucoup, comme 
l'on crye de sa longue détention. Grâces à 
Dieu, il se porte mieux qui ne faisoit quand 
il a esté amené, et n'est empiré par la prison 
ne se plainct du traictement. Mais si luy 
advenoit quelque chose, comme il pourroit 
advenir, je seroys en grande peine. Je me 
suys saulvé le mieux que j'ay peu jusques à 
présent. Le personnage désire fort la paix et 
dict qu'elle est plus que nécessaire; et de la 
paix il est en espérance de se veoir en liberté, 
en laquelle grâce il promet de dire vérité. 

Madame je. prieray nostre créateur vous 
donner sa grâce et en parfaicte santé très 
bonne, très longue et très heureuse vye. 

Présentement au Palais, ce 7^ jour de 
mars 1662. 

Vostre très humble et très obéissant servi- 
teur et subject, 

ChristoHe de Thou. 

(Autographe, f. fr.. vol. COIû, f. lî). 



X 



Réponse a l'interrogatoire qu'on dit avoir 
esté fait à un nommé Jean de Poltrot, soy- 
disant seigneur de Merey sur la mort du feu 
duc de Guyse; par M. de Chastillon, admi- 
rai d8 France et autres nommez aud. inter- 
rogatoire. 

(12 mars 1562 (1563) 



Première dérense de Coligny, plusieurs fois 
imprimée, d'abord en plaquette, petit în-i2, i563, 
puis dans le Sommaire recueil des choses mimo^ 

râbles , 1564, petit in-12, p. 5oz, puis dans les 

Petits Mémoires de Condé, i565, t. II, p. 725, 
puis dans VHistoire ecclésiastique^ i58o (réim- 
pression de 1882, t. I, p. 638), dans les Mémoires 
de Condé^ in-4, t. IV, p. 285, dans les Mémoires- 
journaux de Franqois de Lorraine^ p. 5 1 8, dans 
VHistoire de la maison de Coligny par du Bouchet, 
p. 523, et depuis. L'original, envoyé à la reine et , 
signé Chastillon y La Rochefoucault et Th, de Bè\e^ 
est conservé dans le f. fr., vol. 6610, f. i3. 



XI 



Lettre de Christophe de Thou a la reine 

15 mars i5G2 (1563) 



Madame, j'ay parlé présentement au pri- 
sonnier en la présence de M. le greffier du 
Tillet. Je ne puys apprendre autre chose de 
luy sinon qu'il veult parler au Roy et à vous. 
Je vous supplie très humblement vouloir 
denner ordre à ce que il soit procédé au 
jugement ainsi qu'il appartiendra par raison; 
car, comme je vous ay escript et suys encore 
contrainct de vous escripre, la garde du per- 
sonnage ne vault à aultre chose si non à faire 
crier et scandaliser le peuple, jusques à me 
menasser et dire de grands oultrages, et que 
Ton le veult garder pour le faire varrier et 
desdire. Et si ainsy cstoyt qu'il varriast, 
après avoir esté ouy par vous, avoir persisté 
par devant nous à ce qu'il avoist dict, je vous 
laisse à penser ce que l'on pourra dire et la 
peine infiniment grande en laquelle je me 
veoys prest à tomber, et quel destriment 
pourra estre, non seulement par deçà mais 
hors de ce Royaulme. 

Madame, je prieray nostre créateur vous 
donner sa grâce et, en parfaicte santé, très 
bonne, très longue et très heureuse vye. 



— 207 — 

A Paris, ce i5*^ jour de mars i562. 
Vostre très humble et très obéissant servi 
teur et subject. 

Christofle de Thou. 

(Aulographei f. fr., vol. 0615, f. 14). 



XII 



Lettre du Parlement de Paris a là reine 

17 mars 1562 (1563) 



Nostre souveraine dame, tant et si très 
humblement que possible nous est, à vostre 
bonne grâce nous recommandons. 

Nostre souveraine dame, ayans ce matin 
entendu que ceste ville, suyvant ce qu'il a 
pieu à Vostre Majesté escripre aux Prévost 
des marchans et eschcvins, a délibéré faire 
honneur au corps de feu nostre très honoré 
seigneur le duc de Guyse, que Dieu absolve, 
chose louable et exemplaire pour les mérites 
des grandz et bons serviteurs des Roys très 
crestiens; mais, ayans considéré les clameurs 
publiques du peuple pour la dilation de la 
punition de celluy qui est chargé avoir 
meurtry le défunct, lequel il vous a pieu 
envoyer en la conciergerie de ce palais, nous 
avons advisé faire entendre à Vostre dicte 
Majesté que la présence dudict corps animera 
si fort ledict peuple contre le meurtrier que 
nous préveoyons, par les menaces qu'en a 
cydevant faictes ycelluy peuple, qu'il forcera 
ladicte consiergerie pour en faire ung mas- 
sacre. Et vous pouvez penser, nostre souve- 
raine dame, le péril qui sera sur les autres 



— 20() — 

prisonniers, et après d'une sédition publique, 
apportant la ruine de ladicte ville telle ou 
ou plus grande que si Tennemy la forçoit. 
Car peuple esmeu, pour cause tant petite 
soit-elle, poursu3't ordinairement sa fureur et 
ne le peult-bn retenir. Par quoy avons mandé 
lesdicts Prévost des marchans et eschevins 
pour surseoir ledict honneur, et advisé vous 
envoyer ce porteur exprès en diligence, afin 
de vous advertir des inconvénients que nous 
tenons certains si ledict prisonnier n'est pre- 
mièrement jugé; la punition duquel précé- 
dente satisfera tout et rendra ledict honneur 
paisible. La garde de tel homme n'apportera 
aucun proufict. Il vous plaira, nostre souve- 
raine dame, sur ce nous mander voz vouloir 
et commandement pour y obéyr et prendre 
en bonne part ce que pour nostre debvoir 
vous escripvons. 

Nostre souveraine dame, nous pryons le 
benoyst rédempteur qu'il vous donne en 
très bonne santé très longue V3^e. 

Escript à Paris en parlement soubz le 
signe d'icelluy le xvii*^ jour de mars i562. 

Vos très humbles et très obéyssants sub- 
jectz et serviteurs. 

Les gens tenans le parlement du Roy. 

Du Tillet. 

(Original; f. fr.» vol. 661b, f. 41). 



U 



XIII 



Lettre de Christophe de Thou a la reine 

17 mars 1562 (1563) 



Madame, je vous ay par plusieurs foys 
escript touchant le prisonnier estant en la 
Conciergerie du palays par yostre ordon- 
nance, à ce qu'il vous pleust comander que 
Ton en feist la justice, mesme que Ton crye 
infiniment de sa longue détention, que Ton 
n'estime povoîr ou devoir apporter aucune 
chose. Ce jourd'huy Ton en a fait grande 
plaincte en nostre compaignie par occasion 
de la pompe funèbre que Ton entend faire 
en ceste ville et porter le corps présent en 
Tesglise de Paris. Il a semblé que Ton debvoit 
surceoir la pompe du corps mort du défunct 
jusques à ce que la justice eust esté faicte du 
corps vivant de celuy qui est es prison détenu 
pour le parricide par luy proditoirement et 
inhumainement commis. Et de faict il a esté 
ainsi ordonné, pour crainte de veoir advenir 
le plus grand trouble et scandale que oncques 
advint en ceste ville de Paris, dont Mes- 
sieurs de la cour du Parlement vous ont 
bien voulu advertir et envoyer personnaige 
exprès par devers vous pour cest efFect. Et 
de ma part, pour le service que je doibs à 



-— 211 



Vostre Majesté et pour le désir que j'ay que 
les choses se portent bien hors de tout 
tumulte, sédition et esmotion, je vous en ay 
bien voulu escrîpre particulièrement; vous 
supplyant vouloir croyre que la cryerie sur 
ce prisonnier est cent mille foys plus grande 
que je ne le pourroys ny dire ny escripre, 
et que, vostre responce ouye, la conclusion 
et résolution est prise d'en faire bonne, 
brefve et prompte justice et telle que le cas 
le requiert. 

Madame, je prieray nostre créateur vous 
donner sa grâce en santé très bonne, très 
longue et très heureuse vye. 

A Paris, au Parlement, ce 17* jour de 
mars i562. 

Vostre très humble et très obéissant servi- 
teur et subject, 

Ghristofle de Thou. 

(Autographe^ f fr., vol. 6615, C. 16.) 



XIV 



Lettre de Christophe de Thou a la reine 

18 mars 1562 (1508) 



Madame, ce jourd*huy ayant assemblé 
Messieurs les présidents et conseillers de la 
grand*chambre du conseil et de la Tournelle, 
je leur ay faict entendre ce qu'il vous avoit 
pieu de m'escripre, par vostre lettre du quin- 
zième de ce mois, touchant le prisonnier 
estant en la conciergerie pour le fait de la 
mort de feu Monsieur de Guise, et comme 
vostre intention estoit que Ton en feist bonne 
justice et telle que le cas le requéroit; dont 
la compaignie a esté merveilleusement con- 
tente et satisfaite. Auparavant la réception 
de vostre lettre, j'estois en bien fort grande 
peine à ne pouvoir contenter ceux qui, sans 
cause et sans occasion, crioient à rencontre 
de moy. Sur l'heure a esté lue toute la charge 
qui estoit à l'encontre du prisonnier; lequel 
a esté mandé, et ayant confessé le cas et que 
tout ce qu'il avoit dit, tant en la présence de 
Vostre Majesté que par devant moy, estoii 
véritable, a esté condamné à estrc tiré à 
quatre chevaux en la place de Grève et estre 
tenaillé en quatre parties de son corps et que 
auparavant il auroit la question; ce qui a 



— ai3 — 

esté faict et exécuté. Et tout ce qu*il a dit 
tant à la question à la chapelle que au sup- 
plice, jusqu'au dernier soupir, a esté fidèle- 
ment mis par escript. On vous en pourroit 
escripre en diverses sortes, mais je vous 
supplie n'en vouloir croire autre chose que 
ce que vous en verrez par escript. 

ït H esté' advisë, par ce que nous n'avions 
lettres dé vous, que nous n'irions au devant 
du corps de Monsieur de Guise, mais que 
samedi nous irons au service, qui se fera en 
l'esglise de Paris; et se lèvera la cour à 
neuf heures. 

Madame, je prie le créateur vous donner 
sa grâce en très bonne, très longue^ très 
heureuse vie. 

A Paris, ce 18* mars i562. 

Vostre très fidèle et très obéissant subject, 

Cristofle de Thou. 

(Urlg., f. fr., vol. 6610. f. 50). 



XV 

I 

Quatrième déposition de Poltrot de Meré 

10 mars 1562 (1553) 



Trois interrogatoires. Le premier en présence 
du président Harlay, le second en présence de 
Jean Neveu, clerc au greffe criminel, le troisième 
en présence du premier président de Thou, et des 
présidents de Saint-André, Baillet, Seguier et de 
Harlay, de trois maîtres des requêtes et de 
20 conseillers. Ces trois interrogatoires sont 
imprimés dans Y Histoire ecclésiastique (édit. 
de 1882, 1. 1, p. 648). Les originaux ou une expé- 
dition authentiquée par le procureur générai 
Bourdin sont conservés dans le f. fr., vol. 6610, 
f. 37, 68 et 69. 



XVI 



AUTRE DÉCLARATION DUD. SEIGNEUR ADMIRAL, 

quant à son fait particulier, sur certains 
points, desquels aucuns ont voulu tirer des 
conjectures mal fondées. 

5 mai 1563 



Seconde défense de Coligny, souvent imprimée 
à la suite de la première. On la trouve notamment 
dans les Mémoires de Condé, în-4®, t. iv, p. 3?9. 



XVIl 



Abrêt coj. .conseil privé par lec^el l'amiral 
de Chastillbn est déclaré innocent de la mort 
du duc de Guise. 

29 jaoYier 1560 



Imprimé par du Bouchet, Histoire de la maison 
rf^ Cp/jg7y^,.in-fol., p, 542. — : L*originaJ pu une 
expédition . sur parchemin authentiquée par fie 
procureur général. Bbùrdih est conservée dans 
le f. fr., vol. 6610, f. i58. 



Notes pour servir a l*Histoire 
DE François de Lorraine, duc de Guise 



Nous réunissons sous ce titre une suite de notes 
bibliographiques, tirées de recueils manuscrits, 
qui pourront être de quelque utilité aux biograpKes 
du duc de Guise. Nous ne prétendons pas épuiser 
le sujet, c^èst-à-diré offrir un tableau complet des 
indications qu'il est possible de réunir sur la' vie 
de ce grand capitaine. Mais nous espérons avoir 
effleuré Tœuvre. D'autres pourront la compléter 
et Tutiliser pour une étude digne de Thomme 
dont elle racontera la vie. 

Ouvrages généraux : 

La collection de Lorraine, conservée au dépar- 
tement des manuscrits de la Bibliothèque natio- 
nale, occupe 984 volumes. La première série 
(n** là 725) contient des titres extraits pour la plu- 
part du trésor des chartes de Lorraine. La seconde 
série (n®" 726 à 970) comprend les papiers du 
prince de Vaudemont, fils de Charles IV, la plupart 
se rapportant aux campagnes d'Italie de la guerre 
de succession au xviii.^ siècle. La troisième, série 
(n*** 971 à 984) se compose de chartes originales 
provenant du dépouillement des établissements 
ecclésiastiques de la Lorraine. Cette vaste coUec 
tion ne contient aucun document sur Thistoire 
de François de Lorraine et très peu sur les princes 



- 2l8 - 

de sa maison. Nous signalerons seulement les 
vol. 22, 27 et 3o, qui présentent quelques pièces 
sur Antoinette de Bourbon, mère de François de 
Guise, le cardinal Jean de Lorraine, son oncle, le 
cardinal Charles de Lorraine, son frère, le cardinal 
Charles II de Lorraine, son fils. Ces volumes sont 
catalogués dans le Cabinet historique^ t. u, i856 ; 
2"»« partie, p. 175. 

Il faut entrer dans le Fonds français pour trouver 
des documents sur le duc François de Guise. 

F. fr., vol. 5798, 5799, 58ooet 58oi. — Histoire 
de la maison de Guise par Oudin, ouvrage du 
xvu* siècle. Le premier volume conduit le lecteur 
jusqu'en 1 5 5o, le second jusqu'en 1 563, le troisième 
jusqu'en 1589, le quatrième jusqu'au milieu du 
XVII* siècle. 

F. fr., vol. 58o2 et 58o3. -— Histoire de la 
maison de Guiçe ou la vérité de l'histoire de France 
de j5o5 à 1596 par Pierre-Pol Fornier, advocat 
au parlement; deux très gros manuscrits de près 
de 1000 pages chacun. Le premier traite le sujet 
jusqu'à la mort du duc d'Anjou en 1 584, le second 
jusqu'à la soumission de Mayenne en 1596. A la 
suite vient le récit de la pompe funèbre de Claude 
de Lorraine, premier duc de Guise. — Ouvrage 
de la seconde moitié du xvii® siècle. — Manuscrit 
autographe. 

F. fr., vol. 22425 à 22444. — Recueil généalogi- 
que sur la maison de Lorraine et les familles qui 
en sont issues, Guise, Mercceur, etc. au xv", xvi« 
et xvii* siècle. — Copies et originaux. 

Les vol. 22425 à 22428 contiennent des pièces 
sur les ducs de Lorraine. 



— 219 -- 

22429* sur le duc François de Guise (voyez plus 
loin). 

22430 à 22432, sur les successeurs de François 
Guise. 

22433, comptes de Guillaume de Champagne 
(voyez pliis loin). 

22434, dissertation avec pièces à Tappui sur la 
descendance de la dynastie Carlovingienne à 
laquelle prétendait la maison de Guise. 

22435, description de la Lorraine. 

22436, cardinal Charles de Lorraine, frère de 
François de Guise. — Copie d'une histoire de la 
maison de Guise. 

22437, le duc François de Guise (voyez plus 
loin). 

22438 à 22440, maisons de Lorraine et de 
Vaudemont. 

22441, affaires financières, fortune, inventaires 
de succession de la maison de Guise. 

22442 à 22444, pièces intéressant la maison de 
Guise postérieurement à François de Guise. 

F. fr., vol. 81 81 et 8182. — Recueils de copies 
de comptes, de testaments, de contrats de mariage, 
d'achats ou ventes de terre, de transactions de 
toute sorte, de la maison de Guise depuis l'arrivée 
de Claude de Lorraine à la cour de France 
jusqu'au milieu du xvii^ siècle. — Gros manuscrits 
in-folio. — Copies. 

F. fr., vol. 22389. — Recueil de pièces sur 
l'ancien hôtel de Clisson, aujourd'hui l'hôtel des 
Archives nationales^ et sur l'hôtel de Laval, rue 
du Viel-Braque, qui, vers le milieu du xvi* siècle 
furent réunis et formèrent l'hôtel de Guise. 

F. fr., vol. 2758. — Recueil d'arrêts et d'ordon- 



— 220 — 



nances rendus par Charles IX et Henri lil à 
Toccasion du procès de préséance pendant entre 
les ducs de Guise et de Montpensier. 

F, fr., vol. 22222. — Recueil de pièces concer- 
nant les hommes illustres recueillies par Gai- 
gnières, notamment François de Lorraine, duc 
de Guise, ses frères et ses fils. 

F. fr., vol, 23236. — Gros manuscrit de 
565 feuilles qui contient une partie des Mémoires 
de François de Lorraine, duc de Guise, jusqu*au 
27 septembre 1557. Ces mémoires, recueil de 
pièces conservées par le duc de Guise, ont été 
publiés par M. Champolion dans.la coll. Michaud 
et Poujoulat, d'après un autre manuscrit conserve 
en province, mais avec un profond désordre. Nous 
n'en citerons qu'un exemple : l'éditeur ignore 
que, au xvi® siècle jusqu'en 1 564, l'année commen- 
çait à Pâques et classe les documents suivant la 
date qu'ils portent, non pas suivant celle qu'ils 
devraient porter. 

F. fr., vol. 4741, f. i38. — Age, naissance et 
dates concernant les enfants de François de 
Lorraine; extrait d'un livre (de raison) de Mad. de 
Nemours. 

F. fr., vol. 3i23, 3i32, 20441, 20471; coll. 
Clairembault, vol. 349 et 35o. — Lettres de 
François de Lorraine signéesFrançoi^. M. Berriat 
Saint-Prix a publié dans les Mémoires dé la 
Société des Antiquaires de France, t.. iv, p. i33 
et 485, un mémoire sur ces signatures du duc de 
Guise. Il y trouve la preuve de l'extrême ambition 
de ce prince. 



221 — 



Recueils de lettres. . 

F. fr., vol. 2982. — Mémoire du .duc de Guise 
envoyé au roi par le capitaine Peloux pendant le 
siège de Metz, .10 sept. i552. 

F. fr,, vol. 3095. — Deux lettres de François 
de Lorraine à la connétable, Tune de Boisgency, 
29 janvier (règne de François premier), l'autre de 
Saint-Trevier, 4 oct. 1541 (orig.). 

F. fr., vol. 3 114. — Pouvoir donné par le roi 
au duc de Guise pour le commandement de Tarmée 
d'Italie i555 (f. 54). — Lettre du duc de Guise au 
parlement de Paris en faveur de l'établissement 
de l'Inquisition en France, 24 octobre i555. 

F. fr., vol. 3ii5. — Même pouvoir que cy- 
dessus Jf. 41). — , Le même en italien daté du 
14 novembre 1 556 (f. 93). — Pouvoir de lieutenant 
général après la défaite de Saint-Quentin, io sep- 
tembre 1557 (f. 47 et io5). 

F. fr., vol. 3ii8. — Trois* lettres originales du 
duc de Guise à Jacques de Savoie, duc de Nemours ; 
deux pendant la campagne de la Sainte-Ligue 
(i5 et 18 mars i556 (1557) f. 3o et 3i); une après la 
paix de Cateau-Cambrésis, Beauvais, 5 nov. i558. 
Lettres familières; les deux premières relatives à 
des dispositions militaires. 

F. fr., vol. 3 123. — Quarante-deux lettres du 
duc de Guise à Jacques d'Humières, gouverneur 
de Péronne, la plupart écrites pendant la campagne 
de i558. •— Copie de l'acte de capitulation de 
Thionville, du 22 juin i558 (f. 179),- 

F. fr., vol. 3 125. — Une lettre autographe de 
Guise au connétable, 16 juillet (fin du règne de 
Henri II) (f. 7). . 



— 222 — 

F. fr., vol. 3 126. — Deux lettres de Guise au 
roi, 3o mai et 10 juin (i557), relatives à la cam- 
pagne d'Italie. 

F. fr., vol. 3i32. — Articles du duel de Jarnac 
et de la Chasteigneraye, signés de Guise en qualité 
de témoin (f. 9). 

F. fr., vol. 3i36. — Trois lettres de Guise au 
duc de Nevers, i557, i558 et i56o. 

F. fr., vol. 3i38. — Lettre de Guise à la reine 
relative au siège de Marienbourg, i^' juillet 1554. 

F. fr., vol. 3143. — Recueil de pièces originales 
sur les campagnes de i55y et de i558; copie des 
mémoires attribuées à Robertet; service de la 
marine pendant la campagne de 1557; état de 
l'artillerie; gages du duc de Guise et des autres 
capitaines; service des munitions. — Lettre de 
Guise à Nemours, 6 mars i558 (iSSg). 

F. fr., vol. 3149. — Quatre lettres du duc de 
Guise au s. d'Humières, trois en i557, une en 
i558, relative à la campagne dirigée par le duc 
quand il eut été nommé lieutenant général (orig.). 

F. fr. vol. 3i5i. — Recueil de lettres originales 
adressées au duc de Guise par le prince de Condé, 
le roi de Navarre, Marie de Lorraine, reine 
d'Ecosse, etc. — Lettre de Guise au roi en i558. 

F. fr., vol. 3157. — Règne de François IL — 
Dix lettres de Guise au connétable, dont deux sur 
la conjuration d'Amboise. — Une lettre de Guise 
à Henri de Montmorency-Damvile. — Rapports 
au connétable ^ur les intrigues des Guises pendant 
ce règne. 

F. fr., vol. 3i58. — Correspondance du conné- 
table pendant le règne de François II. — Une 



— 223 — 

lettre de Guise au connétable, 12 novembre i56o 
(orig,). 

F. fr., vol, 3i59. — Règne de François II et 
commencement du règne de Charles IX. — Une 
lettre de Guise à d'Humières du 7 octobre i56o. 

F. fr., vol. 3176, f. 82. — Copie du testament 
du duc de Guise daté du 24 février i562 (i563). 
(Cette pièce a été publiée par le marquis de Bouille. 

— Plusieurs lettres du dut de Guise, dont Tune 
au duc de Wurtemberg avant le massacre de Vassy. 

— Interrogatoire de Poltrot de Meré. 

F. fr., vol. 3179. — Trois lettres de Guise à 
Mad. la connétable écrites après la bataille de 
Dreux et donnant des nouvelles des préparatifs du 
siège d'Orléans. 

F. fr., vol. 3187. — Deux lettres de Guise à 
d'Humières, dont une 5 janvier i562 (i563) écrite 
pendant les préparatifs du siège d'Orléans. 

F. fr., vol. 3194. — Correspondance de Mont- 
morency. — Une lettre de Guise au connétable, 

7 février i562 (i563), relative au siège d'Orléans. 
F. fr., vol. 3197. — Règne de Charles IX. — 

Une lettre de Guise au connétable, Doullens, 

8 décembre i56i. 

F. fr., vol. 3219. — Correspondance d'Artus de 
Cossé Gonnor, frère du maréchal de Brissac, 
chargé de la superintendance des finances. — Trois 
lettres de Guise à Gonnor pendant les approches 
du siège d'Orléans et pendant le siège, japvier et 
février i563 (orig.). 

F. fr., vol. 3223. — Correspondance de René 
de Bastarnay, comte du BoUchaige. — Lettres du 
duc de Guise relatives au don de deux terres en 
Daùphiné concédées par le roi au s. du Bouchaigc. 



F. fr., vol. 3225. — Une lettre de Guise à 
Nemours, camp près Amiens, i5 octobre i558. 

F. fr., vol. 3410. — Une lettre de Guise au-duc 
François de Montmorency, gouverneur de Paris, 
i5 janvier i56i (i562). 

F. fr., vol. 3919. -=- Une lettre de Guise au roi 
relative à la campagne dltaiie, i*' août i55j. 

F. fr., vol. 3951, f. 48. — Pamphlet contre le 
duc de Guise en 1 56o. 

• F. fr., vol. 4047. — Convoi funèbre du duc de 
Guise, 19 mars 1592 (i563). 

F. fr., vol. 4129. — Ambassade du s. de la 
Vigne à Constantinople en 1557 et i558. — Trois 
lettres de Guise à La Vigies : Tune en i557 pen- 
dant la campagne d'Italie; l'autre en 1 558, au 
début de la négociation de Cateau Cambrésis; 
Tautre le 8 avril i559 après la signature du traité. 

— Récit, par 'e duc de Guise, des opérations de 
son armée autour de Civitella au royaume de 
Naples, 23 mai 1557. 

F. fr., vol. 4638, — Correspondance de Guil- 
laume de Saulx de Villefrancon, lieutenant de roi 
en Bourgogne en Tabscnce de Tavanncs. — Une 
lettre de Guise à Villefrancon, 17 décembre i558. 

F. fr., vol. 4639. — Correspondanée de Claude 
de Lorraine duc d'Aumale. — Une lettre de Guise 
au duc d'Aumale, 29 août i557, relative à la cam- 
pagne d'Italie. 

F. fr., vol. 4640. - Correspondance de Tavannes. 

— Quinze lettres du duc de Guise à Tavannes de 
1557 à r56i. — Minute d'une lettre de Tavannesà 
Guise. 

F. fr., vol. 5676. — Recueil de pièces sur la 
campagne de la Sainte-Ligue en Italie en 1557. — 



— 223 — 

Lettres du duc de . Guise aux ambassadeurs de 
France à Rome ou aux ministres du roi à la cour, 
principalement pendant cette campagne. 

F. fr., vol. 5780 et 5781. — Recueil de pièces 
relatives à la défense de Metz en i552. 

F. fr., vol. 6610. — Recueil de pièces originales 
sur l'assassinat du duc de Guise par Poltrot de 
Meré; la plupart sont accompagnées d'une copie 
en écriture moderne. 

F. fr., vol. 6622. — Recueil de lettres auto- 
graphes de princes et princesses écrites pendant 
les règnes de François !•% Henri II et François II. 

— Lettre autographe du duc François de Guise au 
roi, recontant la blessure qu'il vient de recevoir 
au siège de Boulogne. 

F. fr., vol. 6626. — Règnes de François II et 
de Charles IX jusqu'à la (in de i563; concile de 
Trente. — Correspondances intéressant le duc de 
Guise. 

F. fr., vol. 6632. — Règne de Henri II, i558. 

— Quelques lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 6637. — Règne de François premier ; 
Correspondance de Montmorency. — Deux lettres 
de François de Guise. 

F. fr„ vol. 10395. — Campagne de la Sainte- 
Ligue en Italie, en 1 557, commandée par le duc de 
Guise. — Pièces de comptabilité; montres des 
compagnies, etc. 

F. fr., vol. 1 587 1 , 72, 73, 74, 75, 76 et 77. ■— Ces 
recueils ont été formés par les Bénédictins et font 
partie de la collection de documents rassemblés 
par les pères de cet ordre pour écrire l'histoire de 
la Guyenne. Chacun d'eux contient deux à trois 
cent pièces, la plupart originales ou minutes, dont 

15 



— 220 — 

beaucoup ont été publiées dans le cours de ces 
dernières années. On y trouve un grand nombre 
de lettres et de minutes de lettres du duc de Guise 
aux officiers du roi dans la haute et basse Guyenne, 
Saintonge, Angoumois, Provence, Languedoc, 
Bretagne et Poitou. 

Le vol. 15871 contient des documents de i56o 
et de 1559. 

Le vol. 15872 contient des documents de 1SS9. 

Le vol. 15873 contient des documents de i56o 
et des mélanges postérieurs. 

Le vol. 15874 contient des documents de i56i. 

Le vol. 15875 contient des documents depuis le 
1*' juin i56i. 

Le vol. 1 5876 contient des documents du 1*' ma! 
au I*' septembre i562. 

Le vol. 1 5877 contient des documents du i*' juin 
au 3i décembre i562. 

F. fr., vol. 17286, — Requête des Etats de 
France opprimés par la tyrannie de Guise, pam- 
phlet contre le duc de Guise, qui fut imprimé sous 
François IL — Autre copie W^ de Colbert, vol. 28, 

f. 32. 

F. fr., vol. 17305. — Récit de la mort du duc 
de Guise sous les murs d'Orléans. 

F. fr., vol. 17870. — Mémoire sur les affaires 
d'Italie envoyé au roi par le duc de Guise et 
apporté à la cour par le s. de Vineulx pendant la 
campagne de la Sainte*Ligue, camp de Saint- 
Bencdict, 3 juin 1557. 

F. fr., vol. 201 53. — Siège d'Orléans par le duc 
de Guise en i563. 

F. fr., vol. 20441 . — Correspondance du conné- 
table et de Lansac relative aux affaires d'Italie au 



— 227 — 

commencement du règne de Henri II. — Une 
lettre du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20449. ■" Administration du Dau- 
phiné au commencement du règne de Henri II. — 
Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20450. — Règne de Henri II ; affaires 
d'Italie, de i554 à i556. — Deux lettres du duc 
de Guise. 

F. fr., vol. 20454. — Expédition dltalie en 1557. 

— Vingt lettres ou environ, la plupart en minutes, 
du duc de Guise au roi et à divers officiers, sur- 
tout au connétable et à un commissaire des guerres, 
nommé Binet, pendant la campagne de la Sainte- 
Ligue. — Notes diverses sur cette campagne. — 
Instruction du duc de Guise au maréchal Strozzi. 

— Une lettre de d'Andelot au duc de Guise, 1557. 
F. fr., vol. 20458. — Deux lettres du duc de 

Guise. — Une lettre de François II à Guise racon- 
tant la mission en Ecosse de Jean de Monluc, 
évêque de Valence. 

F. fr., vol. 20459. — Correspondance de Claude 
Gouffier de Boissy, grand écuyer de France sous 
Charles IX. — Quatre lettres de Guise. — Pièces 
sur la défense de Metz en i552. — Lettres de 
Gonnor, de d'Humières et de Montmorency à 
Guise. 

F. fr., vol. 20461. — Recueil de pièces, la plu- 
part en copies du temps sur la mort du duc de 
Guise et sur la complicité de Coligny. — Protes- 
tation de Coligny. — Procès-verbal de la récon- 
ciliation de Moulins. — Procès de Poltrot de 
Meré. — Supplique de la duchesse de Guise. — 
Déclaration de Condé du i5 mai i563. — Lettres 
du duc de Guise (copies du temps). 



— 228 — 

F. fr., vol. 20462, f. 211. — Minute d'une lettre 
du duc de Guise à Biaise de Monluc. (Monluc dit 
dans ses Commentaires, t. II, p. 258, que le duc 
de Guise écrivait de sa main les minutes de ses 
lettres. C'est ici le lieu de le rappeler). 

F. fr., vol. 20465. Règne de Henri II. — Cor- 
respondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20468. — Correspondance du duc 
François de Guise, de son père et de plusieurs 
membres de sa famille, principalement sous 
François premier. 

F. fr., vol. 20469. — Lettres adressées au duc 
de Guise alors qu'il n'était que duc d'Aumale, 
relativement à l'administration du Dauphiné en 
1548 et 1549. 

F. fr., vol. 20470. — Règne de Henri II, de 
i552à i555. — Correspondance et lettres du duc 
de Guise. 

F, fr., vol, 20471. — Recueil de la correspon- 
dance de Guise en 1557 et i558. — Cinq lettres 
de Guise. — Plusieurs lettres adressées à ce prince. 
— Récit de la prise de Thionville (f. 141). 

F. fr., vol. 20483. — Mélanges. — Lettres du 
duc de Guise et de sa mère Antoinette de Bour- 
bon. 

F. fr., vol. 2o5io. — Correspondance du duc 
d'Estampes depuis le milieu du règne de François 
premier jusqu'à la fin du règne de Charles IX. — 
Une lettre de Guise (f. 86) (règne de François II). 

F. fr., vol. 2o5ii. — Lettres adressées au duc 
d'Aumale, depuis duc de Guise, relatives à Tud- 
ministration du Dauphiné, à la répression de Bor- 
deaux et autres évèvements du commencement du 
règne de Henri II, 



— 229 — 

F. fr., vol. 2o5i3. — Correspondance et lettres 
du duc de Guise pendant la guerre de iSSj en 
Italie ou la guerre du nord de la France en i558. 

F. fr., vol. 2o5i4^ 2o5i5, 2o5i6, 20517. — 
Administration du Dauphiné dans les premières 
années du règne de Henri II. — Correspondance 
de François de Lorraine, duc de Guise, et de sa 
mère, Antoinette de Bourbon. 

F. fr., vol. 20519. — Défense de Metz en i552. 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 2o52o, 2o522, 20526, 20529. — 
Campagne de la Sainte-Ligue en Italie, en i557. 

— Correspondance du duc de Guise. 

F. fr., vol. 2o53o. — Administration du Dau- 
phiné sous Henri II. — Guerre d^Italie, etc.* — 
Correspondance de François de Lorraine. 

F. fr., vol. 2o533, 20534. — Administration du 
Dauphiné au commencement du règne de Henri II . 

— Correspondance du duc de Guise. 

F. fr., vol.' 2o535. — Correspondance du duc 
de Guise, i557 et i558. 

F. fr., vol. 2o536. — Défense de Metz; campagne 
de 1557. — Correspondance du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20537. — Règne de Henri II. — 
Correspondance du duc de Guise. 

F. fr., vol. 2o538, 20541, 20542, 20543. — 
Dauphiné au commencenxent du règne de Henri II. 

— Correspondance du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20544. — Correspondance du duc de 
Guise, i553. 

F. fr., vol. 20545. — Règne de Henri II, i554. 
Correspondance du duc de Guise. 

F. fr.,vol. 20548, 20549, 2o55o, 2o55i, 2o552, 
2o553, 20554, 2o555. — Administration du Dau- 



— 23o — 

phiné de 1647 à i553. — Correspondance de 
François de Lorraine. 

F. fr., vol. 20S77. — Correspondance du duc de 
Guise pendant le règne de Henri II. — Dauphiné. 

— Insurrection de Bordeaux. — Défense de Metz. 

— Campagne de la Sainte-Ligue. — Lieutenance 
générale. — Lettres du duc de Guise ou à lui 
adressées par Paul IV, Henri II, le cardinal de 
Ferrare, Marie d^Ecosse, le cardinal Louis de 
Guise, Diane de Poitiers, Coligny, Lansac, de 
Selve, Raince, etc. (Copies de la main du seerétaire 
de Gaignières rangées en ordre). 

F. fr., vol.- 20640. — * Règne de Henri II (1548- 
1549). — Quelques lettres du duc de Guise. 
F. fr., vol. 20644. — Règne de Henri II (i556). 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20645. — Règne de Henri II (i557). 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20646. — Règne de Henri II (i558). 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20647. — Règne de Henri II (i557). 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., vol. 20648. — Correspondance et lettres 
de Boisy sous Henri IL — Lettres du duc de 
Guise. 

F. fr., vol. 22429. — Etats de la maison du 
duc de Guise. — Recueil de pièces sur ses démêlés 
avec Coligny, sur sa mort, sur la plainte de la 
duchesse au parlement. 

F. fr., vol. 22433. — Comptes de Guillaume de 
Champagne, trésorier de Guise en i562 et 63 
(orig.). 

F. fr., vol. 22437. — Recueils de mandements, 
quittances, etc. du duc de Guise, la plupart origi- 



naux sur parchemin. — Etats de la maison de ce 
prince (f. 42 à 91). 

F. fr., vol. 23191. — Règne de Henri II (1557- 
i558). — Correspondance et lettres du duc de 
Guise. 

F. fr., vol. 23192.— Règne de Henri II(i558). 

— Correspondance et lettres du duc de Guise. 

F. fr., nouv. acquis., vol. i233. — Recueil de 
copies de lettres par M. Bertrand. ■— Règnes de 
François I" et de Henri II. — Les orîginanx sont 
conservés à la Bibliothèque de Saint-Pétersbourg. 

— Quelques lettres du duc de Guise. 

F. fr., nouv. acquis., vol. 1234. — Suite du 
même recueil. — Règne de François II. — Quel- 
ques lettres du duc de Guise. 

F. fr., nouv. acquis., vol. 601 1. — Suite du 
même recueil. — Copies de la Bibl. nationale. — 
Lettres du duc de Guise. 

Coll. Dupuy, vol. 44. — Une lettre du duc de 
Guise. 

Coll. Dupuy, vol. 86. — Pièces sur la campagne 
de la Sainte Ligue en Italie (iSSj). — Don au duc 
de Guise d'une maison à Calais. — Copie de 
pamphlets contre le duc de Guise. — La plupart 
de CCS pièces se retrouvent dans le vol. 283i et 
395 1 du fonds français. 

Coll. Dupuy, vol. 324. — Récit des obsèques 
du duc de Guise, copie prise sur le cérémonial de 
la Cour des Comptes. 

V^ de Colbert, vol. 23. — Lettres du duc de 
Guise à d'Humières (i553-i558) (f. 102 à 160) 
(copies du xvii® siècle. 

V« de Colbert, vol. 24. — Quatre lettres du duc 
de Guise à Gonnor écrites à la fin de i562 et au 



— 232 - 

commencement de i563 au sujet des munitions et 
de la solde de l'armée royale sdus les murs 
d'Orléans. 

Y^ de Colbert, vol. 27. — Correspondances 
originales touchant les préludes de la guerre civile 
en Guyenne, Perigord, Saintonge, Poitou, Pro- 
vence, Bretagne, depuis le i" octobre i56o jus- 
qu'au i" avril i56i. — Lettres du duc de Guise 
aux officiers du roi. 

W^ de Colbert, vol. 28. — Règne de François IL 
— Pamphlets contre le duc de Guise. — Corres- 
pondance et lettres du duc de Guise (orig.). 

V*^ de Colbert, vol. 84. — Onze lettres du duc 
de Guise à Gonnor relatives aux besoins de l'armée 
royale, fin 1 562 et commencement de 1 563 (copies 
du xYii' siècle. Les originaux sont en partie dans 
le vol. 24 de la même collection). 

V** de Colbert, vol. 391. — Lettres originales du 
duc de Guise (1554 a i56i)à Bernardin Bochetel, 
évéque de Rennes, ambassadeur du roi auprès de 
l'empereur d'Allemagne, touchant principalement 
les préludes du concile de Trente. 

Coll. Moreau, vol. 833. — Lettres du duc de 
Guise au parlement de Dijon et autres pièces. 

Coll. Clairembault,vol. 345. — Correspondance 
et lettres du duc de Guise du 4 octobre i552 au 
i"juilleti 553 (orig.). 

Coll. Clairembault, vol. 346. — Défense de 
Metz par le duc de Guise, i552 (orig. et copies). 

Coll. Clairembault, vol. 347. — Correspondance 
du duc de Guise du i®"^ juillet i553 au 17 décem- 
bre 1 554 (orig. et copies). 

Coll. Clairembault, vol. 348. — Correspondance 



— 233 — 

du duc de Guise du 17 décembre 1554 l'usqu'à la 
fin de i556 (orig. et copies). 

Coll. Clairembault, vol. 349. — Correspondance 
et lettres du duc de Guise en i556 et 1 557 (orig. 
et copies). 

Coll. Claîrembault, vol. 35o. — Correspon- 
dance et lettres du duc de Guise pendant les six 
premiers mois de 1557. 

Coll. Claîrembault, vol. 35 1. — Correspon- 
dance et lettres du duc de Guise pendant les six 
derniers mois de i557 et les quatre premiers de 
i558 (orig. et copies). 

Coll. Claîrembault, vol. 352. — Correspon- 
dance et lettres du duc de Guise de mai à décem- 
bre i558 (orig. et copies). 

• Coll. Claîrembault, vol. 353. — Quelques lettres 
du duc de Guise écrites en i558, *i559 et i56o. 

Coll. Claîrembault, vol. iii3. — Recueil de 
Tordre du Saint Esprit, t. III. — Lettres du duc 
de Guise en i553. 

Arch. nat., K. 1492. — Correspondance du duc 
de Guise avec Philippe II ou son ambassadeur en 
France, Perrenotde Chantonay, du i" août i558 
au I" janvier i56o (Orig.). 

Arch. nat., K. 1493. — Règne de François II. 
— Même composition du carton. 

Arch. nat., K. 1494. — Année i56i. — Même 
composition du carton. 

Arch. nat., K. 1495. — Année i56i. — Même 
composition du carton. 

Arch. nat., K. 1496. — Années i56o, i56i et 
surtout i562. — Même composition du carton. 

Arch. nat., K. 1497. — Année i562. — Même 
composition du carton. 



— 234 



Arch. nat., K. 1498. — Année i562,du i*'juin 
au 3 1 décembre. — Même composition du carton. 

Arch. nat., K. 1499. — Année i563, premier 
semestre. — Même composition du carton. 

Arch. nat., K. i5oo. — Année i562 et i563. — 
Même composition du carton. 



TABLE DES MATIÈRES 



PROLOGUE 

François de Lorraine, duc de Guise. — Règne de 
François II. — Rivalité de Guise et de Coligny. 

— Troubles de la Réforme. — Massacre de 
Vassy (!•' mars 1562). — Entrée du duc de 
Guise à Paris (16 mars). — Rôle du duc de Guise 
dans la première partie de la guerre dé 1562. . . i 

CHAPITRE PREMIER 

Condé se met en campagne (7 novembre 1562). — 
Bataille de Dreux (19 décembre 1562). — Le 
duc de Guise se remet en campagne (26 dé- 
cembre). — • Dénuement de Tarmée royale. — 
Prise du Portereau d'Orléans (6 février 1563). 

— Attentat de Poltrot de Meré (18 février). — 
Mort du duc de Guise (24 février). ' — Obsèques 
du duc de Guise (19 mars). — Arrestation de 
Poltrot de Meré (20 février). — Premier inter- 
rogatoire de Poltrot (21 février). — Second 
interrogatoire (27 février). — Cœur de Roy est 
conduit à Paris (6 mars). — Troisième interro- 
gatoire de Poltrot (7 mars). — Poltrot disculpe 
Tamiral Coligny (15 mars). — Condamnation de 
Poltrot (18 mars). — Derniers interrogatoires 

et supplice de Poltrot 17 

CHAPITRE SECOND 

Le premier président de Thou. — Le duc d'Au- 
male envoie la déposition de Poltrot au camp 



— 236 — 

de l*amlral (22 février 1563). — Réponse de 
Coligny (12 mars). — Le duc d*Auniale demande 
justice de l'assassinat (fin avril). — Seconde 
apologie de Coligny (5 mai). — Requête de la 
duchesse de Guise à Meulan (26 septembre). -:-> 
Assassinat de Charry (31 décembre 1563). — 
Arrêt du conseil privé qui évoque l'affaire de 
Coligny et reovoie le jugement à trois ans 
(5 janvier 1564). — Départ de la cour pour le 
voyage en France (24 janvier 1564). — Echauf- 
fourée du 8 janvier 1565 à Paris. — Catherine 
résolue à régler la querelle des Guises. — Arri- 
vée de la cour à Moulins (22 décembre 1565). 
Première séance du conseil (12 janvier 1566). — 
Arrêt qui clôt l'instruction (17 janvier). — Arrêt 
du conseil qui renvoie Coligny des fins de la 
plainte (29 janvier). — Réconciliation apparente 
des Guises et des Coligny. — Henri de Lorraine, 
duc de Guise, en- Hongrie. — Seconde et troi- 
sième guerre civile. — Coligny revient à la 
cour (12 septembre 1571). — Coligny pousse le 
roi à envahir les Flandres. — Haine des Guises 
pour Coligny. — Arrêts du conseil relativement 
à la réconciliation des deux maisons (27 mars 
et ic mai 1572). — Le duc de Guise se soumet 
à l'arrêt de Moulins (12 mai) 83 

ÉPILOGUE 

Coligny et la guerre des Flandres. — Attentat de 
Maurevel (22 août 1572). — Massacre de la 
Saint-Barthélémy (24 août) 157 

PIÈCES JUSTIFICATIVES 

I. Etat de maison du duc de Guise 163 

II. Le tumulte de Vassy 166 

III. La bataille de Dreux 178 



— 237 — 

IV. Première déposition de Poltrot de Meré . 191 

V. Seconde déposition de Poltrot de Meré. 192 

VI. Lettre de de Tliou à la reine, 27 février 

1563 195 

VII. Lettre de de Thou à la reine, 6 mars 1563. 197 

VIII. Troisième déposition de Poltrot de Meré. 199 

IX. Lettre de de Thou à la reine, 7 mars 1563. 203 

X. Première réponse de Çoligny 205 

XI. L-ettre de de Thou à la reine, 15 mars 

1563 206 

XII. Lettre du parlement à la reine, 17 mars 

1563 •• 208 

XIII. Lettre de de Thou à la reine, 17 mars 

1563 • 210 

XIV. Lettre de de Thou à la reine, 18 mars 

1563 212 

XV. Quatrième déposition de Poltrot de Meré. 214 

XVI. Seconde réponse de Coligny '. . . 215 

XVII. Arrêt d'acquittement de Coligny 21b 

XVIII. Notes pour servir à l'histoire du duc de 

Guise 217 



Brrtiix. — Imprlinorls d« l'Bnre, L. OdlouTre, 4 bia, rus da Uellct. 



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Austin 1993