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Full text of "Le connétable de Richemont (Artur de Bretagne) (1393-1458)"

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LE  CONNÉTABLE 

DE  RIGHEMONT 


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.lommiers.  -  Imp.  P-  BRODARD  et  GALLOIS. 


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^l^^"^  LE  CONNÉTABLE  '  '  '' 

DE   RICHEMONT 

(ARTUR  DE  RRETAGNE) 
(1393-1458) 


PAR 

E.^  COSNEAU 

/// 

PROFESSEUR   AGRÉGÉ   d'hISTOIRE  AU   LYCÉE   HENRI    IV 
DOCTEUR   ES    LETTRES 


563535 

PARIS 

LIBRAIRIE    HACHETTE    ET    G'° 

79,    BOULEVARD      SAINT-GERMAIN,    79 

1886 

Droiti  de  proprtéU  et  de  trailuclion  réMrT^a 


A  MONSIEUR 

J.  J.   BAILLEUL 

DOTEN  DE  l'ordre   DES  AVOCATS  A   LA  COUR  DE  PARIS 


Ce  livre  est  dédié, 

comme  un  faible  témoignage  de  profonde  reconnaissance 

et  de  respectueuse  affection. 


E.  GOSNEAU. 


\H\ 


PRÉFACE 


En  moins,  d'un  siècle  (1370-1458),  pendant  une  des  pé- 
riodes les  plus  critiques  de  notre  histoire,  la  Bretagne  a 
donné  trois  connétables  à  la  France,  du  Guesclin,  sous 
Charles  Y,  Olivier  de  Glisson,  sous  Charles  VI,  Artur  de 
Bretagne,  comte  deRichemont,  sous  Charles  VII.  Le  moins 
connu  des  trois  est  le  connétable  de  Richement.  Il  n'a  pas 
laissé  un  nom  populaire,  comme  plusieurs  de  ses  compa- 
gnons d'armes,  Dunois,  La  Hire',  Saintrailles,  et  pourtant  il  fut 
un  des  personnages  les  plus  considérables  de  son  époque. 

Issu  d'une  famille  souveraine  et  alliée  aux  maisons 
royales  de  France,  d'iVngleterre,  d'Ecosse,  de  Navarre  *  ; 
élevé  par  Philippe  le  Hardi  et  par  le  duc  de  Berry,  frères  de 
Charles  V;  jeté,  dès  l'adolescence,  au  milieu  des  guerres 
civiles  qui  suivirent  l'assassinat  de  Louis  d'Orléans  ;  fami- 
lier du  dauphin  Louis,  duc  de  Guyenne,  dont  il  épousa  plus 
tard  la  veuve,  Marguerite  de  Bourgogne  ;  beau-frère  du 
régent  Bedford  et  de  Philippe  le  Bon  ;  neveu  d'Amédée  VIII, 
duc  de  Savoie;  connétable  de  Charles  VII  pendant  trente- 
trois  ans,  et  enfin  duc  de  Bretagne,  Richement  semblait 
destiné  à  fixer  l'attention  de  ses  contemporains  et  celle  de 
la  postérité.  Ses  principales  actions  sont  rapportées  par  les 
chroniqueurs;  sa  vie  a  même  été  racontée  par  son  écuyer, 
Guillaume  Gruel,  qui  vécut  longtemps  auprès  de  lui  et  qui 

1.  Voir  le  tableau  généalogique  des  ducs  de  Bretagne  de  la  maison  de 
Dreux  et  les  autres  tableaux  (ci-dessous,  p.  639  et  suiv.). 


VHI  PRÉFACE 

le  suivit  dans  ses  campagnes;  mais  ces  informations  sont 
incomplètes  sur  bien  des  points.  Gruel  déclare  lui-même 
qu'il  «  a  mis  en  escript /)ar^ee  des  faits  du  bon  duc  Artur'  ». 

Richement  a  joué  un  rôle  assez  important  pour  qu'on 
désire  le  bien  connaître;  or  ni  les  chroniques,  ni  les  his- 
toires générales  de  la  France,  ni  même  les  histoires  parti- 
culières de  la  Bretagne,  ni  celles  du  règne  de  Charles  YII 
ne  peuvent  satisfaire  pleinement  cette  curiosité.  La  diver- 
sité des  jugements  qu'on  trouve  dans  les  chroniqueurs  et 
dans  les  historiens  est  une  autre  cause  d'embarras.  Pour  les 
uns,  le  connétable  de  Richement  est  un  grand  homme, 
sinon  le  plus  grand  homme  de  son  siècle;  pour  d'autres, 
il  n'est  qu'un  ambitieux  sans  scrupules,  un  général  inca- 
pable, un  ministre  hautain,  impérieux,  dur,  qui  voulait  impo- 
ser au  roi  ses  services  despotiques,  sans  justifier  ses  pré- 
tentions par  de  véritables  talents  ^ 

Raconter  sa  vie  d'une  manière  plus  complète  et  plus 
exacte,  à  l'aide  de  documents  nouveaux;  faire  ressortir 
davantage  son  rôle  ;  montrer  la  part  qu'il  eut  dans  la  déli- 
vrance et  la  régénératioQ  de  notre  pays;  exprimer  un  juge- 
ment aussi  éloigné  d'une  admiration  irréfléchie  que  d'une 
malveillance  passionnée  :  tel  est  le  but  de  ce  travail. 

L'auteur  n'a  pas  la  satisfaction  d'avoir  trouvé  tous  les 
renseignements  dont  il  avait  besoin  ',  ni  la  prétention  d'avoir 
dit  le  dernier  mot  sur  un  sujet  aussi  important.  Il  s'esti- 
mera heureux  si,  par  ses  efforts,  il  a  fourni  un  utile  contin- 
gent à  l'histoire  d'un  prince  trop  peu  connu  et  d'un  règne 
qu'on  ne  pourra  jamais  trop  connaître. 

1.  Gruel,  p.  229.  —  Voy.  Appendice  I, 

2.  Voy.  Appendice  II. 

3.  Il  tient  à  réitérer  ici  l'expression  de  sa  vive  gratitude  à  ceux  qui  ont 
bien  voulu  l'aider  dans  ses  recherches,  à  MM.  A.  Pauly,  Déprez,  U.  Ro- 
bert, de  la  Bibliothèque  nationale;  à  M.  P.  Guérin,  des  Archives  natio- 
nales; à  M.  de  Ribier,  archiviste  au  ministère  des  Affaires  étrangères;  à 
M.  le  D''  Giraudet,  de  Tours  ;  à  MM.  Maître,  Quesnet,  Vaesen,  Flourac, 
archivistes  de  la  Loire-Inférieure,  de  l'Ille-et- Vilaine,  de  la  ville  de  Lyon, 
des  Basses-Pyrénées;  à  M,  A.  Dupuy,  professeur  à  la  Faculté  de  Rennes; 
à  M.  J.  Flammermont.  Il  accueillera  encore  avec  la  même  gratitude  les 
observations  et  les  renseignements  qu'on  voudra  bien  lui  adresser. 


PRINCIPALES  SOURCES 


I.  —  MANUSCRITS. 

1>>  A  la  Bibliothèque  nationale. 

Fr.  5037  (c.-à-d.  manuscrit  français  5037),  fos  43  et  suivants.  -^Chro- 
nique d'Artur  III,  duc  de  Bretagne,  par  Guillaume  Gruel;  manuscrit  du 
XV*  s.  (Voy.  ci-dessous,  p.  291,  note  2,  et  p.  471). 

Fr.  8818  et  8819.  —  Comptes  de  Robin  Denisot,  receveur  du  conné- 
table de  Richemont  à  Fontenay-le-Comte  (1428-1435). 

Fr.  23018  (ancien  Ms.  Cordeliers  16).  —  Chronique  finissant  à  l'an- 
née 1431.  La  partie  relative  au  règne  de  Charles  VI  a  été  publiée  par 
M.  Douët  d'Arcq,  dans  le  t.  VI  de  son  édition  de  Monstrelet. 

Fr.  1371,  —  Chronique  Antonine. 

Duchesne  48  (c.-à-d.  t.  48  de  la  collection  Duchesne).  Ce  manus- 
crit contient  une  copie  de  la  Chronique  d'Alençon  «  escripte  par  Per- 
CEVÀL  DE  Caigny,  cscuier  d'escuierie  du  duc  d'Alençon  (fo^  63-110).  Elle 
finit  au  10  décembre  1438.  La  partie  relative  à  Jeanne  d'Arc  a  été 
publiée  par  J.  Quicherat,  dans  la  Bibliothèque  de  TÉcole  des  Chartes, 
2e  série,  t.  II,  p.  171  et  suiv. 

Fr.  26038-26085.  —  Volumes  de  documents  classés  par  ordre  chrono- 
logique, faisant  partie  de  la  riche  collection  des  Quittances  et  pièces 
diverses. 

Fr.  25709-25712  —  Recueil  de  Chartes  royales  classées  dans  l'ordre 
chronologique. 

Fr.  25776-25778.  —  Recueil  de  Montres  de  gens  d'armes  classées 
dans  l'ordre  chronologique. 

Collection  Clairambault.  —  Titres  scellés,  documents  originaux 
classés  dans  l'ordre  alphabétique. 

Pièces  originales.  —  Collection  très  volumineuse  de  documents 
classés  par  ordre  alphabétique. 

Collection  Bréqdigny-Moreau.  —  Copies  de  documents  relatifs  à 
l'Angleterre  et  à  la  France  (surtout  les  t.  80-83,  désignés  ainsi  :  Bré- 
quigny  80-83,  ou,  mieux,  Moreau  704-707). 

Portefeuilles   Fontanieu.  —  Copies  et  indications  de  documents, 


X  PRINCIPALES   SOURCES 

classées  dans  l'ordre  chronologique,  avec  quelques  originaux;  t.  105- 
106  et  suiv.  jusqu'au  t.  121-122. 

Collection  de  Bourgogne.  —  Copies  de  documents  relatifs  à  la  Bour- 
gogne; surtout  les  t.  96-103. 

Collection  de  Picardie^  ou  titres  de  D.  Grenier;  surtout  les  t.  20, 
20  bis,  96,  100.  Copies  de  documents  relatifs  à  la  Picardie. 

Collection  de  Lorraine;  t.  292-295,  etc.;  comprenant  beaucoup  de 
documents  originaux. 

Collection  Dupuy.  —  Copies  de  documents,  avec  quelques  titres 
originaux. 

Collection  de  Brienne.  —  Copies  de  documents,  avec  quelques  titres 
originaux. 

Collection  Doat.  —  Copies  de  documents,  relatifs  surtout  aux  pays 
du  S.-O.  de  la  France. 

Trésor  généalogique  de  D.  Villevielle.  —  Indications  et  analyses 
de  documents,  classées  dans  l'ordre  chronologique. 

Fr.  4054  (ancien  Ms.  Baluze  9037).  —  Recueil  précieux  de  docu- 
ments originaux,  relatifs  à  l'Angleterre  et  à  la  France,  publiés,  en 
grande  partie,  par  J.  Stevenson  dans  les  Letters  and  papers  illustra- 
tive,  ou  par  M.  de  Beaucourt  dans  son  édition  de  M.  d'Escouchy,  t.  III. 

Fr.  5909.  —  Formulaire  du  temps  de  Charles  YII,  avec  copies  de 
documents  importants  de  cette  époque. 

Fr.  5022,  2701.  —  Discours  de  J.  Jouvenel  des  Ursins. 

Fr.  11542.  —  Copies  de  comptes  relatifs  à  la  Bretagne. 

Fr.  20684.  —  Copies  de  comptes. 

Fr.  4484.  —  Comptes  d'Andry  d'Espernon,  trésorier  des  guerres. 

Fr.  4485,  4491,  4488.  — Comptes  de  P.  Sureau,  receveur  général  en 
Normandie,  pour  les  années  1424,  1425,  1428. 

Lat.  6024  (c.-à-d.  manuscrit  latin  6024),  comprenant  aussi  des  docu- 
ments français  d'une  grande  valeur. 

2°  Aux  Archives  nationales. 

K  54-K  72.  —  Cartons  des  rois.  Ces  cartons  contiennent  beaucoup 
de  documents  originaux,  classés  par  ordre  chronologique,  sur  les 
règnes  de  Charles  VI  et  de  Charles  VII.  —  L'inventaire  de  cette  col- 
lection a  été  publié  par  M.  Tardif,  sous  ce  titre  :  Monuments  histori- 
ques. Cartons  des  Rois.  Paris.  Claye,  1866,  in-4o. 

JJ  156-JJ  187.  —  Registres  du  trésor  des  Chartes,  contenant  des 
copies  de  chartes  royales  de  la  même  époque,  classées  dans  l'ordre 
chronologique. 

J  166-J  647.  —  Autres  documents  divers,  relatifs  aux  grandes  famil- 
les et  aux  provinces  de  France,  aux  États  étrangers,  dans  les  cartons 
J  166,  J  171,  J  183-J  188,'J  241,  J  245,  J  274,  J  293,  J  355,  J  359,  J  368-J  371, 
J  378,  J  382,  J  396,  J  409,  J  475,  J  647,  etc. 

X'*  1478-Xi"  1483.  —  Registres  civils  du  Parlement  de  Paris  (Conseil) 
pendant  les  années  1400-1458  (avec  une  lacune  de  1443"  à  1452).  Ils 
relatent  les  délibéi-ations  du  Conseil,  les  noms  des  membres  du  par- 
lement et  même  les  principaux  événements  contemporains. 


MANUSCRITS  XI 

Xi*  4789-Xia  4800.  —  Registres  civils  du  Parlement  de  Paris.  Ma- 
tinées (Plaidoiries). 

X»*  9190-X"  9201.  —  Registres  du  Parlement  de  Poitiers. 

X**  20-X''  27.  —  Registres  criminels  du  Parlement  de  Paris. 

X'»  8602-X*a  8603.  —  Ordonnances  royales,  indiquées  quelquefois 
sous  le  titre  de  Ordinationes  Barbinse  (Oi'donnances  IJarbines),  notam- 
ment le  volume  X'*  8605. 

KK  47,  50-36,  243-244,  250-269,  402-404,  553,  etc. 

Comptes  de  la  maison  royale  et  d'autres  maisons  princières  de 
France  (maisons  d'Orléans,  d'Anjou,  de  Berry,  domaine  de  la  ville  de 
Paris,  etc.). 

Z''  3-Z'a  18.  —  Registres  de  la  Cour  des  aides. 

yi-Y'.  —  Livres  de  couleur  du  Châtelet,  appelés,  chacun  séparé- 
ment. Livre  rouge,  Livre  vert,  Livre  jaune,  etc.  Ils  comprennent  des 
ordonnances  relatives  à  la  ville  de  Paris,  aux  corporations  et  à  leurs 
bannières,  aux  métiers,  à  la  voirie,   et  aussi  d'autres  documents 
comme  des  traités  de  paix,  etc. 

Y  3220-Y  3232.  —  Registres  civils  de  la  Prévôté  de  Paris. 

P  2529-P  2332.  —  Mémoriaux  de  la  Cour  des  comptes.  Copies  mo- 
dernes. 

PP  118.  —  Table  des  mémoriaux  de  la  Cour  des  comptes. 

LL216-LL218,414.  —  Registres  capitulaires  de  Notre-Dame  de  Paris. 

3"  A  la  Bibliothèque  de  l'Institut. 

La  collection  Godefroy.  L'inventaire  de  cette  collection  a  été  publié 
par  M.  L.  Lalanne. 

4°  A  la  Bibliothèque  de  l'Arsenal. 

Le  Ms.  3059  (Histoire),  c.-à-d.  le  Jouvencel  de  J.  de  Bueil,  avec  le 
commentaire  de  G.  Tringant. 

5»  Au  Ministère  des  Affaires  étrangères. 

Les  t.  I,  VII,  XII,  XX,  XXI  (F'rance),  etc.,  contenant  des  copies  de 
documents  relatifs  à  la  France,  à  la  Bourgogne,  à  la  Bretagne,  etc. 

6"  Archives  départementales  de  la  Loire-Inférieure. 

Ce  dépôt  est  très  riche  en  documents  originaux.  Les  documents 
employés  dans  ce  volume  sont  indiqués  en  note  au  bas  des  pages. 

7°  Archives  municipales  de  Lyon. 

Elles  contiennent  notamment  des  lettres  du  connétable  de  Riche- 
mont  et  de  Charles  VII,  qui  sont  indiquées  dans  les  notes  ou  données 
en  appendices. 

8°  Archives  des  Basses-Pyrénées. 
9"  Archives  de  l'Ille-et- Vilaine. 


XII  PRINCIPALES   SOURCES 


II.    —   IMPRIMES. 

G.  Gruel.  —  Histoire  d'Artur  III ^  duc  de  Bretagne,  comte  de  Riche- 
mont,  dans  la  collection  Michaud  et  Poujoulat,  t.  III.  Paris,  1837, 
in-40. 

La  chronique  de  G.  Gruel  se  trouve  aussi  dans  Vllistoire  de  Char- 
les VII  de  D.  Godefroy,  dans  le  Panthéon  littéraire  et  dans  la  Collec- 
tion Petitot,  t.  VIII. 

Religieux  de  Saint-Denis.  —  Chronique  du  Règne  de  Charles  VI. 
Edit.  L.  Bellaguet  (dans  la  collection  des  documents  inédits  sur  l'His- 
toire de  France). 

JuvÉNAL  DES  Uhsins  (ou  Jouveuel  des  Ursins),  dans  YHistoire  de 
Charles  VI,  par  D.  Godefroy;  Paris,  1653,  in-f . 

P.  Fenin.  —  Mémoires.  Edit,  de  Mlle  Dupont  (Société  de  l'Histoire 
de  France). 

Le  Bourgeois  de  Pauis.  —  Journal.  Edit.  A.  Tuetey.  Paris;  Cham- 
pion, 1881,  in-4o. 

Berry.  —  Histoire  chronologique  de  Charles  VII,  dans  l'Histoire  de 
Charles  VII,  par  D.  Godefroy.  Paris,  1661,  in-fo. 

J.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy.  —  Chronique.  Edit,  F.  Morand  (Société 
de  l'Histoire  de  France). 

Enguerrand  de  Monstrelet.  —  Chronique.  Edit.  Douët  d'Arcq(M). 

Mathieu  d'Escouchy.  —  Chronique.  Edit.  du  Fresne  de  Beaucourt  [Id.). 

Jean  Chartier.  —  Chronique  de  Charles  VIL  Edit.  Vallet  de  Viriville. 
Paris,  Janet,  1858,  in-16. 

CousixoT.  —  Geste  des  nobles.  Chronique  de  la  Pucelle.  Chronique  nor- 
mande de  P.  Cochon.  Edit.  Vallet  de  Viriville.  Paris,  A.  Delahaye, 
1859,  in-18. 

T.  Basin.  —  Histoire  de  Charles  Vil  et  de  Louis  XI.  Edit.  J.  Quicherat 
(Société  de  l'Histoire  de  France). 

J.  de  Wayrin.  —  Anchiennes  Cronicques  d'Engleterre.  Edition  de 
Mlle  Dupont  (Société  de  l'Histoire  de  France). 

J.  Quicherat.  —  Procès  de  Jeanne  d'Arc  (Société  de  l'Histoire  de 
France). 

A.  Hellot.  —  Les  Cronicques  de  Normandie.  Rouen,  1881,  in-S». 

SiMÉON  Luge.  —  Chronique  du  Mont-Saint-Michel,  t.  I  (Société  des 
anciens  textes  français). 

Chronique  Martinienne.  Edit.  gothique  d'Anthoine  Vérard. 

Ch.  Robillard  de  Beaurepaire.  —  Chronique  normande  de  P.  Cochon. 
Rouen,  1870,  grand  in-80. 

J.  Maupoint.  —  Journal,  publié  par  M.  Fagniez  dans  le  t.  IV  de  la 
Société  de  l'Histoire  de  Paris. 

M.artial  d'Auvergne.  —  Les  Vigiles  de  Charles  VIL  Edit.  Coustelier. 
Paris,  1724,  2  vol.  in-12. 

Olivier  de  la  Marche.  —  Mémoires.  Edit.  du  Panthéon  littéraire. 

J.  DU  Clercq.  —  Mémoires  {Id.). 

G.  Ghastellain.  —  Œuvres.  Edit.  Kervyn  de  Lettenhove.  Bruxelles, 
1863,  8  vol.  in-8".  Chronique  de  J.  deLalain  dans  le  Panthéon  littéraire. 


IMPRIMES  XIH 

Kervyn  de  Lettenhove.  —  Chroniques  Belges  (voy.  les  t.  II,  III). 

De  Smet.  —  Chroniques  de  Flandre  (voy.  le  t.  III). 

Nicole  Gilles.  —  Les  Cronicques  et  annalles  de  France.  Edit.  gothique 
de  1520. 

Meyer.  —  Commentarii,  sive  annales  rerum  FlandHcarum.  Antverpiae, 
la61. 

Th.  Rymer.  —  Fœdera  et  Conventiones,  etc.  Hagœ  Coraitis,  1739-1735 
(voy.  les  t.  in,  IV,  V;  le  t.  X  est  un  abrégé  des  neuf  précédents). 

Gallia  Christiana. 

Ordonnances  des  rois  de  France. 

A.  Champollion-Figeac.  —  Lettres  de  rois  et  reines,  efc.  '  (Collection 
des  documents  inédits  sur  l'Hist.  de  France). 

J.  Delpit.  —  Collection  générale  des  documents  français  qui  se  trou- 
vent en  Angleterre.  Paris,  1847,  in-4''. 

Vandenbrœck.  —  Extraits  analytiques  des  anciens  registres  des  Con- 
saux  de  Tournay.  Tournay,  1861-1863,  in-8». 

M.  Canat.  —  Documents  inédits  pour  servir  à  VHîstoire  de  Bourgogne. 
Chalon-sur-Saône,  1863,  in-B». 

Gachard.  — Rapport  sur  les  archives  de  Dijon.  Bruxelles,  1843,  in-8". 

Catalogue  des  archives  de  Joursanvault.  Paris,  Techener,  1838,  in-8°. 

L.  Redet.  —  Catalogue  des  chartes  de  D.  Fonteneau.  Paris,  1839,  in-8«>. 
(Se  trouve  aussi  dans  le  t.  IV  des  mémoires  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  l'Ouest). 

V.  Varin.  —  Archives  de  Reims  (Collection  des  documents  inédits  sur 
l'Hist.  de  France). 

Lepage.  —  Documents  sur  l'histoire  de  Lorraine.  Nancy,  18S3,  in-S". 

Alain  Bouchard.  —  Les  Cronicques  annales  d'Angleterre  et  de  Bre- 
taigne.  Edit.  goth.  de  1341,  in-f". 

P.  Le  Baud.  — Histoire  de  Bretagne.  Edit.  d'Hozier.  Paris,  1638,  in-f^. 

B.  d'Argentré.  —  Histoire  de  Bretagne.  Editions  de  1618  et  de  1668. 
D.  G.  A.  Lobineau.  —  Histoire  de  Bretagne.  Paris,  1707,  2  vol.  in-fo, 
D.  P.  H.  MoRicE.  —  Histoire  ecclésiastique  et  civile  de  Bretagne.  Paris, 

1730-1736,  5  vol.  in-f",  dont  trois  de  Preuves  (le  t.  II  est  de  D.  Tail- 
landier). 

D.  Plancher.  —  Histoire  générale  et  particulière  de  Bourgogne.  Dijon, 
1739-1781  ;  4  vol.  in-I»  (le  4«  volume  est  de  D.  Salazard). 

D.  Calmet.  —  Histoire  de  Lorraine.  Nancy,  1747-1733  (voy.  le  t.  V). 

D.  Félibien  ET  D.  Lobineau.  —  Histoire  de  Paris.  Paris,  1723,  in-f». 

H.  Sauval.  —  Histoire  et  recherches  des  Antiquités  de  la  ville  de 
Paris.  Paris,  1724,  in-f°. 

D.  Vaissete.  —  Histoire  générale  de  Languedoc.  Paris,  1730-1743 
(voy.  les  t.  IV,  V). 

La  Thaumassière.  —  Histoire  de  Berry.  Bourges,  1689,  in-f". 

Du  Boulai  (C.  Egassius  Bulœus).  Historia  JJniversitatis  Parisiensis. 
Paris,  1663-1673,  in-f»  (voy.  le  t.  V). 

G.  A.  DE  La  Roque.  —  Histoire  généalogique  de  la  maison  de  Har- 
court.  Paris,  1662,  in-f. 

S.  Guichenon.  —  Histoire  généalogique  de  la  royale  maison  de  Savoye. 
Lyon,  1660,  in-f». 


XIV  PRINCIPALES    SOURCES 

S.  GuicHENON.  —  Histoire  de  Bresse  et  de  Bugey.  Lyon,  1650,  in-f». 

Le  p.  Daniel.  —  Histoire  de  France.  Paris,  1753,  111-4°  (voy.  le 
t.  VII). 

Le  p.  Daniel.  —  Histoire  de  la  milice  française.  Paris,  1721 , 2  vol.  in^". 

Le  p.  Anselme  et  Dufourny.  —  Histoire  généalogique  et  chronologi- 
que de  la  maison  royale  de  France.  Paris,  1726-1733,  9  vol.  in-f". 

D.  Martène.  —  Veterum  scriplorum,  etc.,  amplissima  collectio.  Paris, 
1733,  in-fo. 

L'Art  de  vérifier  les  dates,  par  un  religieux  bénédictin  de  la  Congré- 
gation de  Saint-Maur.  Paris,  1783-1787,  3»  édition,  3  vol.  in-f''. 

SiMÉON  LucE.  —  Histoire  de  Bertrand  du  Guesclin,  t.  I.  Paris,  Ha- 
chette, 1876,  in-8'>. 

Valletde  Viriville.  — Histoire  de  Charles  VII.  Renouard,  1863-1865. 
3  vol.  in-8». 

G.  DU  Fresne  de  Beaucourt.  —  Histoire  de  Charles  VII.  Paris,  Li- 
brairie de  la  Société  bibliographique,  t.  I  et  II,  in-8o,  1881,  1882. 

H.  Wallon.  —  Jeanne  d'Arc.  Paris,  Hachette,  1873,  2  vol.  in-18. 

J.  Quicherat.  —  Rodrigue  de  Villandrando.  Paris,  Hachette,  1879, 
in-8''. 

L.  Delisle.  —  Histoire  du  château  et  des  sires  de  Saint-SoMveur-le- 
Vicomte.  Paris,  A.  Durand,  1867,  ia-8°. 

A.  Tuetey.  —  Les  Ecorcheurs  sous  Charles  Vil.  Montbéliard,  1874, 
2  vol.  in-8°. 

J.  Flammermont.  —  Les  Institutions  municipales  de  Sentis,  dans  le 
45°  fascicule  de  la  BibUothèque  des  Hautes-Études. 

Lecoy  de  La  Marche.  — Le  roi  René.  Paris,  Didier,  1873,  2  voL  in-8». 

Ant.  Thomas.  —  Les  Etats  provinciaux  de  la  France  centrale.  Paris, 
Champion,  1879,  2  vol.  in-8°. 

Kervyn  de  Lettenhove.  —  Histoire  de  Flandre.  Bruxelles,  1847-1855; 
6vol.in-8o. 

Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes. 

Bulletin  de  la  Société  de  VHistoire  de  France. 

Mémoires  et  Bulletin  de  la  Société  de  VHistoire  de  Paris. 

Le  Cabinet  historique. 

La  Revue  historique. 

La  Revue  des  questions  historiques,  etc.,  etc. 


OUVRAGES  ANGLAIS 

Harris  Nicolas.  —  Proceedings  and  ordinances  of  the  Privy  council 
of  England,  edited  by  sir  Harris  Nicolas,  under  the  direction  of  the 
commissioners  on  the  public  records  of  the  Kingdom.  London,  1834- 
1837,  7  vol.  gr.  in-8o. 

Rolls  of  Parllvment  (ou  Rotuli  parliamentorum),  7  vol.  in-f°,  dont 
le  7"  est  un  Index  (voy.  les  t,  III,  IV,  V). 

Fr.  Devon.  —  Issues  of  Ihe  Exchequef,  temp.  Henry  III  to  Henry  VI, 
frona  the  Pell  records.  London,  1837,  gr.  in-8°. 


OUVRAGES   ANGLAIS  XV 

Collection  des  rerum  Britannicarum  Scriptores  medii  œvi  : 

J.  Stevenson.  —  Letters  and  papers  illustrative  of  the  wars  of  the 
English  in  France  during  the  reign  of  Henry  the  Sixth.  London,  Long- 
man,  1861-1864,  3  vol.  gr.  in-S". 

J.  Stevenson.  —  Narrative  of  the  expulsion  of  the  English  from  Nor- 
mandy.  Ce  volume  contient  l'ouvrage  latin  de  Robert  Blondel  intitulé 
De  rednctione  Normanniœ;  la  partie  de  la  Chronique  du  héraut  Berry 
l'elative  au  recouvrement  de  la  Normandie  et  les  Conférences  entre 
les  ambassadeurs  de  France  et  d'Angleterre,  en  1449;  gr.  in-8''. 

J.  DE  Waurin,  seigneur  de  Forestel.  —  Cronicques  de  la  Grant  Bre- 
taigne,  edited  by  S.-W.  Hardy.  London,  Longman,  1864-1879,  in-8''. 

Th.  Walsingham.  —  Historia  Anglicana.  London,  Longman,  1864, 
2  vol.  in-8». 

Tn.  Walsingham.  —  Ypodigma  Neustriae,  edited  by  H.-T.  Riley,  Lon- 
don, 1876,  1  vol.  in-8o. 

J.  Capgrave.  —  The  Chronicle  of  England,  edited  by  F.-C.  Hinges- 
ton.  London,  1838,  in-8"'. 

J.  Capgrave.  —  Liber  de  illustribus  Henricis,  edited  by  F.-C.  Hinges- 
ton.  London,  1838,  in-8'>. 

Ch.  a.  Cole.  —  Memorials  of  Henry  the  flfth.  London,  1838,  in-8». 

J.  Endell  Tyler.  —  Henry  of  Monmouth  (or  Memoirs  of  Henry  the 
flfth).  London,  1838,  2  vol.  in-8''. 

Polydore  Vergil.  —  Three  hooks  of  Polydore  VergiVs  English  history, 
edited  by  sir  Henry  Ellis.  London,  1844,  in-S"  (Works  of  the  Camden 
Society). 

Holinshed.  —  Chronicles  of  England.  London,  1377,  2  vol.  in-f". 

Grafton's  Chronicle.  London,  1809,  2  vol.  in-4°. 

H  vll's  Chronicle  (History  of  England) ,  edited  by  H.  Ellis.  Lon- 
don, 1809,  in-4". 

W.  Dugdale.  —  The  Baronage  of  England  (ou  Baronagium).  Lon- 
don, 1673,  2  vol.  in-fo. 

Sharon  Tiirner.  —  History  of  England  in  the  middle  âge.  London, 
1823,  ia-4o(voy.  le  t.  HI). 

S.  Harris  Nicolas.  —  History  of  the  battle  of  Agincourt,  2®  édition, 
London,  1832,  in-8°. 

M''s  A.  Strickland.  —  Lifes  of  the  queens  of  England.  London,  H.  Col- 
burn,  1844,  10-8"  (voy.  le  t.  III). 

N.  B.  —  Les  autres  indications  de  documents  manuscrits  ou  d'ou- 
vrages imprimés  se  trouvent  en  notes,  au  bas  des  pages. 


LE  CONNÉTABLE 

DE  RIGHEMONT 


PREMIERE  PARTIE 

ENFANCE  ET  DÉBUTS   D'ARTUR  DE  BRETAGNE 


CHAPITRE  PREMIER 

ENFANCE    ET   ADOLESCENCE   d'aRTUR   DE    BRETAGNE    (1393-1410) 

Naissance  d'A.  de  Bretagne.  —  Sa  famille.  —  Mort  de  sou  père.  —  Enfance 
d'Artur.  —  Il  reçoit  le  titre  de  comte  de  Richemont.  —  Sa  mère  épouse 
Henri  IV  et  va  en  Angleterre.  —  Artur  est  élevé  par  le  duc  de  Bourgogne, 
puis  par  le  duc  de  Berry.  —  Il  réprime  une  sédition  à  Saint-Brieuc.  — 
Il  entre  dans  le  parti  Armagnac,  après  l'asssasinat  de  L.  d'Orléans.  — 
Nouvelle  querelle  entre  les  Montfort  et  les  Penthièvre.  —  Traité  de 
Chartres.  Ligue  de  Gien.  —  Esprit  du  temps.  —  Influences  qui  agissent 
sur  le  caractère  d'Artur. 

Artur  de  Bretagne,  comte  de  Richemont,  naquit  au  château 
de  Succinio  \  près  de  Vannes,  le  24  août  1393  ^  Il  était  le  second 
fils  de  Jean  IV,  le  Conquérant,  duc  de  Bretagne,  et  de  sa  troi- 
sième femme,  Jeanne  de  Navarre  *.  Rien  ne  pouvait  faire 
prévoir  que  cet  enfant  serait  un  jour  Tun  des  plus  fidèles  cham- 
pions de  la  France  contre  l'Angleterre.  Sa  mère  était  fille  de  ce 

1.  Canton  de  Sarzeau,  arrondissement  de  Vannes  (Morbihan).  On  voit 
encore  les  ruines  grandioses  de  ce  château.  Rosenzweig,  Répertoire  archéol. 
du  Morbihan,  article  Sarzeau,  p.  219-228. 

2.  Voy.  Gruel,  p.  185.  D.  Lobineau,  t.  II,  col.  8S0. 

3.  Il  eut  pour  nourrice  Annette  de  Lesteno  {Preuves  de  Vhist.  de  Ureta- 
!pie,  t.  II,  col.  900). 

Richemont.  1 


2  FAMILLE   D  ARTUR 

Charles-le-Mauvais,  roi  de  Navarre  ',  qui  avait  été  l'ennemi 
acharné  de  la  France  pendant  les  règnes  de  Jean -le -Bon  et 
de  Charles  V.  Jean  de  Monlfort,  l'aïeul  paternel  d'Artur,  avait 
été  secouru  par  les  Anglais,  quand,  après  la  mort  de  son  frère, 
Jean  III,  duc  de  Bretagne,  il  avait  disputé  sa  succession  à  sa 
nièce,  Jeanne  de  Penthièvre  (1341);  il  avait  fait  hommage  à 
Edouard  III  ;  il  était  mort  en  combattant  contre  le  roi  de 
France,  Philippe  VI,  qui  soutenait  Jeanne  de  Penthièvre  et  son 
mari,  Charles  de  Blois  (1345).  Jean  IV  ^,  fils  de  Jean  de  Monlfort, 
avait  été  élevé  en  Angleterre  ;  il  avait  eu  pour  tuteur  Edouard  III  ; 
il  avait  épousé,  en  premières  noces,  une  de  ses  filles  ^  ;  c'est  avec 
son  aide  qu'il  avait  pu  disputer  le  duché  de  Bretagne  à  Jeanne 
de  Penthièvre  ;  c'est  grâce  au  capitaine  anglais  J.  Ghandos  qu'il 
avait  gagné  la  bataille  d' Aurai,  où  Charles  de  Blois  avait  perdu 
la  vie  et  Du  Guesclin  la  liberté  (28  septembre  1364).  En  vain 
Charles  V,  pour  détacher  Jean  IV  de  l'Angleterre,  l'avait  re- 
connu duc  de  Bretagne  par  le  traité  de  Guérande  (12  avril  1365)  '*; 
il  n'en  était  pas  moins  resté  l'allié  d'Edouard  III.  Chassé  en  1372 
par  Du  Gucschn,  rétabli  en  1380,  reconnu  de  nouveau  par 
Charles  VI  (1381),  mais  obUgé  de  continuer  la  lutte  contre  Jean 
de  Blois,  fils  de  Charles  de  Blois  et  de  Jeanne  de  Penthièvre,  il 
avait  toujours  gardé  la  même  sympathie  pour  l'Angleterre,  la 
même  racune  contre  la  France  ^.  Le  mariage  de  Jean  de  Blois 
avec  Marguerite  de  Clisson,  fille  du  connétable  de  Charles  VI, 
avait  encore  irrité  Jean  IV  (20  janvier  138').  Peu  après,  il  avait 
fait  traîtreusement  arrêter  Clisson,  et  on  croit  qu'il  n'avait  pas 
été  étranger  à  une  tentative  d'assassinat  dirigée  contre  lui, 
en  1392,  par  P.  de  Craon  \ 

1.  Charles  II,  dit  le  Mauvais,  roi  de  Navarre,  mort  le  l^"'  janvier  1387 
(voy.  Anlselme,  I,  452;  Secousse,  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  de 
Charles  II,  roi  de  Navarre,  Paris,  1758,  ia-4'',  t.  I,  p.  250). 

2.  Ce  prince  est  aussi  appelé  Jean  V  par  divers  auteurs;  mais  les  vieux 
historiens  de  la  Bretagne,  Le  Baud,  d'Argentré,  et  les  bénédictins  D.  Lo- 
bineau,  D.  Moriçe  n'admettent  au  nombre  des  ducs  ni  Jean  de  Montfort 
ni  Charles  de  Blois  (D.  Lobineau,  I,  337;  A.  Dupuy,  Réunion  de  la  Breta- 
gne à  la  France,  Hachette,  1880,  in-8°,  I,  18,  21,  22). 

3.  Voir  le  tableau  généalogique. 

4.  J,  241b,  n»  45.  Jean  IVrend  hommage  à  Charles  V  en  1366  (J,  241i>,  n"  47, 48). 

5.  Sur  la  guerre  de  la  succession  de  Bretagne,  voir  :  les  Vrayes  chroni- 
ques de  Jehan  Le  Bel,  éd.  Polain,  Bruxelles,  1863,  2  vol.  in-8»,  I,  p.  225- 
249,  277  et  suiv,  ;  II,  p.  5-23.  Froissart,  éd.  S.  Luce,  II,  87  et  suiv.;III,  ch. 
LI-LIV;  t.  VI,  ch.  LXXXIX,  puis  l'édit.  du  Panthéon  littéraire.  D.  Morice,  I, 
245-254,  271  et  suiv.  S.  Luce,  Hist.  de  B.  du  Guesclin,  I,  ch.  II,  V,  VII,  J, 
242,  n»»  56  et  57  «-  3,  t.  Le  Religieux  de  Saint-Denis,  I,  57-63,  127,  285. 
D'Argentré,  720. 

6.  Froissart,  dans  le  Panth.  litt.,  III,  116  et  suiv.  Religieux  de  Saint- 
Denis,  I;  481  et  499,  II,  5,  9,  11. 


MORT  DE  JEAN   IV   (1399)  3 

A  l'époque  où  naquit  Artur  de  Bretagne  (1393) ,  Jean  IV  et 
P.  de  Graon  faisaient  une  guerre  acharnée  aux  Penthièvre  et  à 
Glisson  *.  Un  traité  conclu  en  1395  ^  termina  la  guerre  sans 
opérer  une  réconciliation  véritable.  Le  duc  de  Bretagne  mourut 
quatre  ans  après  (2  novembre  1399)  ^.  On  crut  qu'il  avait  été 
empoisonné.  Glisson  et  surtout  sa  fille  Marguerite,  comtesse  de 
Penthièvre,  furent  soupçonnés.  On  dit  aussi  qu'elle  excita  son 
père  à  faire  périr  les  enfants  de  Jean  IV,  pour  donner  à  son 
mari,  Jean  de  Blois,  le  duché  de  Bretagne,  mais  que  Glisson 
repoussa  ses  sollicitations  avec  horreur  *. 

Artur  était  donc  tout  enfant  quand  il  perdit  son  père;  il  n'avait 
que  six  ans.  Outre  son  frère  aîné,  Pierre,  qui  devint  alors  duc  de 
Bretagne,  sous  le  nom  de  Jean  V,  il  avait  deux  autres  frères, 
Gilles  et  Richard,  et  trois  sœurs,  dont  l'une,  Marie,  était  fiancée 
à  Jean  I"  comte  d'Alençon  ^.  La  mort  de  Jean  IV  laissa  tout  à  la 
fois  ses  enfants  et  son  duché  à  la  merci  d'ambitions  rivales.  Le 
duc  de  Bourgogne,  Philippe-le-Hardi,  frère  de  Gharles  V,  et  le 
duc  d'Orléans,  Louis,  frère  de  Gharles  VI,  qui  se  disputaient  le 
gouvernement  du  royaume  pendant  la  démence  du  roi,  se  dispu- 
tèrent aussi  la  garde  du  duché  de  Bretagne  et  des  petits  princes 
bretons.  Le  duc  d'Orléans,  protecteur  de  Glisson  et  des  Pen- 
thièvre, fit  intervenir  Gharles  VI,  qui  avait  marié,  en  1396,  une 
de  ses  filles,  Jeanne,  au  jeune  duc  de  Bretagne  ^.  Le  roi  de  France 
écrivit  à  la  veuve  de  Jean  IV  pour  la  prier  de  confier  le  gou- 
vernement du  duché  à  Olivier  de  Glisson.  Le  duc  d'Orléans  vint 
même  à  Pontorson  %  avec  des  gens  d'armes  et  voulut  se  faire 
remettre  les  fils  de  Jean  IV;  mais  les  Etats  de  Bretagne  n'y  con- 
sentirent pas  '.  Ils  déférèrent  à  Jeanne  de  Navarre  la  tutelle  de 
ses  enfants  et  le  gouvernement  du  duché  '.  C'est  alors  que  le 
nouveau  duc  de  Bretagne,  Jean  V,  donna  le  comté  de  Riche- 
mont  à  son  frère  Artur***  (1399). 

Ce  fief,  situé  en  Angleterre,  appartenait  depuis   longtemps 

1.  Religieux  de  Saint-Denis,  t.  II,  p.  31-33,  101-103. 

2.  D'Argentré,  693.  Religieux  de  Saint-Denis,  II,  113-117.  D.  Lobineau,  II, 
col.  790-791. 

3.  D.  Morice,  I,  427. 

4.  Alain  Bouchard,  f»  149. 

5.  Voir  le  tableau  généalogique. 

6.  Religieux  de  Saint-Denis,  II,  443,  531.  Charles  VI  promit  une  dot  de 
300  000  écus  d'or,  qui  ne  fut  payée  que  plus  tard.  {Archives  de  la  Loire- 
Inférieure,  cass.  3,  E.  9,  et  Portefeuille  Fontanieu,  113-114,  aux  2  et  3  dé- 
cembre 1423.  —  D.  Lobineau,  II,  col  868-869.) 

7.  Arrondissement  d'Avranches. 

8.  Appendice  III. 

0.  Le  Baud,  403.  D'Argentré,  703.  D.  Lobineau,  II,  col.  804,  805. 
10,  Le  Religieux  de  Saint-Denis,  II,  p.  733. 


4  JEANNE   DE   NAVARRE 

aux  ducs  de  Bretagne.  Les  rois  anglais  le  leur  avaient  enlevé, 
puis  rendu  plusieurs  fois  ;  mais  les  ducs  n'avaient  jamais  cessé 
de  le  revendiquer  et  d'ajouter  à  leurs  titres  celui  de  comtes  de 
Richemont.  La  jouissance  de  ce  fief  obligeait  à  l'hommage  envers 
le  roi  d'Angleterre.  Il  semble  certain  qu'Artur  de  Bretagne  n'en 
eut  jamais  la  possession  ;  néanmoins,  depuis  son  enfance,  il  fut 
toujours  appelé  comte  de  Richemont,  et  c'est  sous  ce  titre  anglais 
qu'est  surtout  connu  le  prince  qui  devait  devenir  l'ennemi  le 
plus  déterminé  des  Anglais.  Pour  le  moment,  Henri  IV  venait  de 
reprendre  le  comté  de  Richemont,  que  Richard  II  avait  restitué 
à  Jean  IV  en  1398  «. 

Cependant  Jeanne  de  Navarre,  pour  éviter  de  nouvelles  con- 
testations, conclut  un  arrangement  avec  Glisson  et  les  Penthièvre 
(janvier  1400)  ^.  Cette  fois,  la  réconciliation  parut  plus  sincère, 
et  ces  mortels  ennemis  des  Montfort  accompagnèrent  même  le 
jeune  duc  Jean  V,  lors  de  son  entrée  solennelle  à  Rennes,  le 
22  mars  1400  ^.  Le  lendemain,  on  vit,  dans  une  cérémonie  tou- 
chante, le  vieux  Clisson  armer  chevaliers  les  petits  princes 
bretons,  Jean,  Artur  et  Gilles,  devant  le  maître  autel  de  l'église 
Saint-Pierre.  Ainsi,  le  frère  d'armes  de  B.  Du  Guesclin  *,  l'an- 
cien connétable  de  Charles  VI  ouvrait  au  futur  connétable  de 
Charles  VII  la  carrière  où  il  devait  plus  tard  marcher  sur  les 
traces  de  ces  glorieux  devanciers. 

Toutefois  les  événements  semblèrent  d'abord  prédestiner  le 
jeune  comte  de  Richemont  à  servir  l'Angleterre  bien  plus  que 
la  France.  Sa  mère,  Jeanne  de  Navarre,  épousa  Henri  IV  de  Lan- 
castre  ^,  qui  avait  renversé,  en  1399,  et  fait  périr,  en  1400, 
Richard  II,  gendre  de  Charles  VI  ".  En  cas  de  guerre  avec  la 
France,  Henri  IV  tenait  beaucoup  à  l'alliance  de  la  Bretagne. 
On  craignit  qu'il  ne  voulût  faire  venir  en  Angleterre  les  fils  de 
Jean  IV,  avec  leur  mère.  Les  seigneurs  bretons  s'en  émurent;  ils 
avertirent  la  cour  de  France,  où  était  encore  la  jeune  fiancée  de 
Jean  V.  Le  duc  de  Bourgogne,  Philippe-le-Hardi,  protecteur  et 
proche  parent  des  Montfort  ^,  vint  en  Bretagne.  Il  prodigua  les 

1.  Appendice  l\. 

2.  D.  Lobineau  (I,  p.  499;  IF,  col.  803-804)  donne  la  date  du  3  janvier  et 
D.  Morice  celle  du  l'^''  janvier  {Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  701). 

3.  D.  Morice,  I,  p.  430.  Le  Baud,  p.  437;  d'Argentré,  p.  706;  D.  Lobineau, 
II,  col.  872-874. 

4.  Anselme,  VI,  p.  201,  202.         .    " 

5.  Voy.  Appendice  V. 

6.  H.  Wallon,  Richard  II,  Paris,  Hachette  1864,  2  vol.  ia-S",  surtout  les 
livres  XI,  XII,  XIII,  t.  II,  p.  244  et  suiv.  Voir  aussi  p.  113  et  suiv.  Frois- 
sart,  p.  320  et  suiv.  Religieux  de  Saint-Denis,  II,  p.  707. 

7.  Jeanne  de  Navarre,  mère  de  Jean  V  et  de  Richemont,  était,  par  sa 


ARTUR  AVEC   PHILIPPE-LE-HARDI    (1402)  5 

présents  *,  se  concilia  d'utiles  sympathies  et  sut  mener  à  bonne 
fin  des  négociations  difficiles.  Il  conclut,  le  19  novembre  1402, 
un  traité  par  lequel  Jeanne  de  Navarre  lui  laissait  la  régence  du 
duché,  la  tutelle  de  ses  enfants  et  l'autorisait  à  les  emmener 
avec  lui,  à  condition  qu'il  les  présenterait  en  Bretagne  toutes  les 
fois  qu'il  en  serait  requis  ^. 

Cet  arrangement  déplut  aux  Penthièvre  et  à  leurs  partisans. 
Des  seigneurs  bretons,  notamment  Glisson,  voulurent  s'opposer  au 
départ  des  enfants.  Il  fallut  que  le  duc  de  Bourgogne  fît,  pour 
ainsi  dire,  enlever  les  jeunes  princes  (3  décembre  1402).  Quelques 
jours  après,  la  veuve  de  Jean  IV  quittait  Nantes  (26  décembre) 
et  s'embarquait  au  port  de  Crozon  ^,  le  13  janvier  1403,  pour 
l'Angleterre  *.  Son  mariage  avec  Henri  IV  eut  lieu  le  7  février 
suivant.  On  peut  dire  que  le  petit  Artur  perdit  alors  sa  mère.  11 
ne  la  revit  plus  qu'à  de  rares  et  courts  intervalles.  Il  devenait, 
en  quelque  sorte,  orphelin.  Il  n'avait  guère  que  neuf  ans. 

Cependant  Philippe  le  Hardi  conduisait  à  Paris  Jean  V,  Artur 
et  Gilles  (décembre  1402).  Richard  restait  seul  en  Bretagne. 
Artur  et  Gilles  étaient  encore  si  petits  qu'ils  ne  pouvaient  guère 
chevaucher  et  qu'il  fallait  mener  leurs  chevaux  par  la  bride  ■'. 
Si  ces  enfants  éprouvèrent  du  chagrin  en  quittant  leur  mère,  leur 
frère  Richard,  leurs  sœurs,  leur  pays,  ils  devaient  d'ailleurs  suivre 
sans  répugnance  un  parent  généreux,  qui  leur  avait  donné  de 
beaux  cadeaux,  des  colliers  d'or,  garnis  de  rubis  et  de  perles. 
Charles  VI  reçut  avec  bonté  les  jeunes  princes  ^.  Il  y  eut,  à  la 

mère,  Jeanne  de  France,  nièce  de  Philippe-le-Hardi.  Voy.  tableau  gé- 
néal. 

'  1.  Arch.  du  minisiére  des  aff.  étrangères,  t.  XXI  (France),  f"  22.  D.  Plan- 
cher, III,  18o,  186. 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  2,  E  5.  —  Les  fils  du  duc  de  Bour- 
i-'ogne,  Jean,  comte  de  Nevers,  et  Antoine,  comte  de  Rethel,  prirent  le 
même  engagement. 

3.  Arrondissement  de  Ghâteaulin. 

4.  D.  Lobineau,  II,  col.  878.  Jouvenel  des  Ursins,  150,  ap.  Godefroy. 
Walsingham,  Ypodigma  Neustrise,  éd.  H.-T.  Riley,  London,  1876,  p.  397. 
J.Stevenson,  II,  2' partie,  p.  7o8.Fr.  Devoii,  Ixsues  of  the  Exchequer. London, 
1837,  p.  292.  Voy.  la  vie  de  Jeanne  de  Navarre  dans  Agnès  Slrickland,  Lires 
of  the  queens  of  England,  London,  1844,  p.  43-113,  t.  III,  in-S".  H.  Vanden- 
broeck,  Extraits  analytiques  des  anciens  registres  des  Consaux  de  Tournai, 
Tournai,  1861-1863,  t.  I,  32. 

5.  Gruel.,  186.  Ciairambault,  t.  116,  f»  9037,  et  D.  Lobineau,  II,  col. 
808,  809. 

6.  D.  Lobineau.  II,  col.  808.  D.  Plancher.  III.  186,  188.  Monstrelct.  I. 
33.  Jouvenel  des  Ursins,  130.  Religieux  de  Saint-Denis,  III,  41.  Pendant  que 
le  duc  de  Bourgogne  était  à  la  cour  de  France  furent  stipulés  plusieurs 
mariages,  celui  de  Louis,  duc  de  Guyenne,  avec  Marguerite  de  Bourgogne, 
fille  de  Jean,  comte  de  Nevers,  celui  de  Michelle  de  France,  cinquième 


6  ENFAÎSCE   d'arTUR 

cour,  des  fêtes  où  Artur  vit  les  enfants  du  roi  et  ceux  de  Philippe- 
le-Hardi.  Alors  furent  célébrées  les  noces  de  Jean  V  et  de  Jeanne, 
troisième  fille  du  roi  ;  puis  Artur  et  Gilles  accompagnèrent  en 
Flandre  Philippe  le  Hardi,  pendant  que,  leur  frère  aîné,  le  duc 
de  Bretagne,  restait  à  la  cour  de  France. 

On  ne  sait  presque  rien  sur  ces  premières  années  d'Artur  de 
Bretagne.  «  Au  plustost  qu'il  peut  avoir  congnoissance,  dit  son 
biographe,  luy  fut  baillé,  pour  le  gouverner,  un  notable  escuyer 
du  pays  de  Navarre,  nommé  Péronit,  qui  très  bien  le  traicta  et 
conduisit,  tellement  que  plusieurs  fois  l'ay  ouy  se  louer  et  dire 
beaucoup  de  bien  de  luy  \  »  Il  n'est  guère  possible  de  deviner 
quelles  influences  avaient  jusqu'alors  agi  le  plus  fortement  sur 
l'esprit  du  jeune  Artur,  mais  on  ne  saurait  expliquer  par  les 
impressions  si  profondes  et  si  durables  de  l'enfance  l'attache- 
ment qu'il  montra  dans  la  suite  pour  la  France.  Il  était  trop 
jeune  quand  il  perdit  son  père  pour  avoir  hérité  de  sa  haine 
contre  la  France,  mais  des  liens  puissants  l'attachaient  aux 
maisons  d'Angleterre  et  de  Bourgogne,  qui  furent  ennemies  de 
Charles  VII.  Ni  ses  sentiments  de  Breton,  ni  les  traditions  de  sa 
famille,  ni  l'exemple  de  son  père,  ni  les  leçons  de  sa  mère,  la 
fille  de  Gharles-le-Mauvais,  la  femme  de  Henri  IV,  ni  la  poli- 
tique changeante  de  son  frère  Jean  V,  ni  les  conseils  de  son 
grand-oncle,  Philippe-le-Hardi,  ou  ceux  de  son  cousin,  Jean-sans- 
Peur,  ne  pouvaient  le  préparer  au  rôle  que  lui  réservait  l'avenir; 
surtout  à  une  époque  où  l'idée  de  la  patrie  française  n'existait 
pas  encore,  où  «  le  désordre  était  dans  chaque  Etat,  dans 
chaque  famille,  où  dans  chaque  cœur  d'homme  il  y  avait  une 
guerre  civile  ^.  » 

Il  put  voir  dans  son  berceau  royal  l'enfant  qui  devait  s'ap- 
peler Charles  VII,  né  le  22  février  1403  ^,  car  il  vint  à  Paris  tout 
juste  à  cette  époque,  n'étant  pas  demeuré  longtemps  en  Flandre. 
Le  jeune  duc  Jean  V,  qui  avait  atteint  sa  quinzième  année,  fut 
déclaré  majeur  *  et  rendit  hommage  à  Charles  VI,  le  12  jan- 

fille  de  Charles  VI,  avec  Philippe,  fils  aîné  du  comte  de  Nevers,  et  celui 
de  Jean,  duc  de  Tonraine,  40  fils  du  roi,  avec  une  fille  du  comte  de  Nevers. 
Le  8  mai,  le  duc  de  Bourgogne  reçut  à  dîner  le  roi,  la  reine  et  divers 
princes  et  princesses,  notamment  la  duchesse  de  Bretagne,  auxquels  il  fit 
de  riches  présents.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr.,  t.  21  (France),  h  22.  D. 
Plancher,  111,196-198,  et  Preuves,  p.  ccxi-ccxvi.  Portef.  Fontanieu,  103-106, 
f  336  et  suiv.  J,  409,  n"»  45,  47,  48. 

1.  Gruel,  183. 

2.  Michelet,  Hist.  de  Fr.,  Paris,  Librairie  internat.,  1871-73,  V,  p.  2-T. 
Vallet  de  Viriville,  Histoire  de  Charles  VU,  Ij  23-27. 

3.  G.  du  Fresne  de  Beaucourt,  Histoire  de  Charles  VII,  Paris,  iSSi,. 
lib.  de  la  Soc.  bibliogr.,  t.  I,  p.  3. 

4.  Le  duc  de  Bourgogne  garda  le  gouvernement  du  duché  de  Bretagne 


MORT  DE  PHILIPPE-LE-HARDI    (1404)  7 

vier  1404.  Artur  et  Gilles  revinrent  sans  doute  en  France  à  ce 
moment,  puis  Jean  V  retourna  en  Bretagne  *.  Gilles  fut  placé 
auprès  du  dauphin  Louis,  duc  de  Guyenne,  et  resta  désormais  à 
la  cour  de  France  ^.  S'il  fallait  en  croire  le  Religieux  de  Saint- 
Denis,  Artur,  envoyé  alors  en  Angleterre,  aurait  obtenu  le 
comté  de  Richemont  et  en  aurait  fait  hommage  à  Henri  IV;  mais 
il  semble,  au  contraire,  prouvé  par  les  documents  que  ce  fief 
resta  au  comte.de  Westmoreland  et  passa  ensuite  au  duc  de 
Bedford  ^.  Artur  était  auprès  de  Philippe-le-Hardi,  quand  ce 
prince,  atteint  d'une  épidémie,  mourut  à  Hal,  le  27  avril  1404  *. 
Son  corps  fut  conduit  à  Dijon,  pour  être  inhumé  aux  Chartreux, 
près  de  cette  ville.  Après  avoir  assisté  aux  derniers  moments  de 
son  grand-oncle,  Artur  ne  cessa  de  suivre  et  de  garder  pieuse- 
ment sa  dépouille  mortelle,  en  compagnie  de  ses  fils.  Le  funèbre 
cortège  séjourna  dix  jours  à  Douai,  du  5  au  14  mai,  et  dix-huit 
jours  à  Saint-Seine  ^,  en  attendant  le  nouveau  duc  de  Bour- 
gogne, Jean,  qui  était  allé  à  Paris,  rendre  hommage  à  Charles  VL 
Le  15  juin,  il  partit  de  Saint-Seine  pour  Dijon,  où  l'inhumation 
eut  lieu  le  lendemain.  Artur,  tout  vêtu  de  noir,  chevauchait  à 
côté  de  ses  cousins,  Jean-sans-Peur  et  Philippe,  qui  condui- 
saient le  deuil.  Il  était  encore  si  petit  qu'il  fallait  mener  son 
cheval  par  la  bride.  Le  17  juin,  il  assista  aussi  à  l'entrée  solen- 
nelle du  nouveau  duc  de  Bourgogne  dans  sa  ville  de  Dijon  *. 

Ainsi  le  jeune  comte  de  Richemont  vécut  de  bonne  heure 
dans  l'intimité  de  cette  puissante  maison  de  Bourgogne,  à  la- 
quelle devaient  l'unir  des  liens  encore  plus  étroits  ;  il  connut  les 
fils  de  Philippe-le-Hardi  ;  il  partagea  les  jeux  de  ses  petits-en- 
fants, un  peu  plus  jeunes  que  lui,  Philippe  ^,  qui  devint  duc  de 
Bourgogne  en  1419,  et  Marguerite,  qui  devint  comtesse  de  Riche- 

jusqu'en  1404.  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  21  (France),  f"  20.  Le  13  janvier  1404 
il  n'avait  plus  ce  gouvernement.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  2,  E.  5, 
et  Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II,  col.  735-740. 

1.  D'Argentré,  713-715,  donne  la  date  du  7  janvier,  mais  on  trouve  celle 
du  12  dans  une  pièce  des  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  33,  E,  90,  et 
dans  le  Portef.  Fontanieu,  105-106,  f^  442.  —  Religieux  de  Saint-Denis, 
t.  III,  p.  129. 

2.  Religieux  de  Saint-Denis,  t.  III,  p.  131.  Malgré  le  témoignage  de  D.  Mo- 
rice  (I,  434),  il  est  très  peu  probable  qu'Artur  soit  allé  en  Angleterre  à  cette 
époque.  Il  était  auprès  de  Philippe-le-Bon.  —  D.  Lobineau  (I,  505)  ne  men- 
tionne pas  ce  détail. 

3.  Voy.  Append.,  IV. 

4.  Monslrelet,  I,  87.  Religieux  de  Saint-Denis,  I,  145.  —  Hal,  en  Belgi- 
que, sur  la  Senne,  au  S.  de  Bruxelles. 

5.  Arrondissement  de  Dijon. 

6.  D.  Plancher,  III,  200-203,  211,  212.  Gruel,  186. 

7.  Philippe,  l'aîné  des  enfants  de  Jean-sans-Peur,  était  né  le  30  juin  1396. 


b  ARTUR  AVEC  LE  DUC  DE  DERRY 

mont,  après  avoir  perdu  son  premier  mari,  le  dauphin  Louis, 
duc  de  Guyenne  ;  il  put  même  contracter  avec  le  petit  Philippe 
de  Bourgogne  une  de  ces  amitiés  d'enfance  qui  laissent  des  sou- 
venirs ineffaçables.  Ces  circonstances  fortuites  expliquent  peut- 
être,  en  partie,  des  faits  de  la  plus  haute  importance,  comme  le 
mariage  d'Artur  avec  la  sœur  de  Philippe-le-Bon  et  la  réconci- 
liation de  ce  prince  avec  Charles  VIL 

Peu  après  les  obsèques  de  son  père,  Jean-sans-Peur  revint  à 
Paris,  au  mois  d'août  1404.  Artur  y  trouva  ses  oncles,  Charles  III, 
roi  de  Navarre,  et  Pierre,  comte  de  Mortain  *,  avec  la  reine  de 
Navarre  ^.  Le  31  août,  à  l'hôtel  Saint-Paul,  devant  une  brillante 
assemblée  de  princes  et  de  grands  seigneurs,  fut  célébré  le  ma- 
riage de  Marguerite  de  Bourgogne  avec  le  dauphin  Louis  ^. 
Artur  de  Bretagne  y  assista  sans  doute.  Il  était  loin  de  prévoir 
que  cette  princesse,  encore  enfant  à  cette  époque,  serait,  vingt 
ans  plus  tard,  comtesse  de  Richemont. 

Autre  particularité  notable.  Après  la  mort  de  Phihppe-le- 
Hardi ,  Artur  de  Bretagne  fut  confié  au  vieux  duc  de  Berry, 
qui  était  aussi  son  grand-oncle  maternel.  Or  le  duc  de  Berry  fut 
également  chargé  de  l'éducation  du  Dauphin  *,  qui  était  d'un 
an  plus  jeune  qu'Artur  et  qui  avait  déjà  pour  compagnon 
son  frère,  Gilles  de  Bretagne.  Charles  de  Bourbon,  comte  de 
Clermont,  et  Bernard  d'Armagnac,  comte  de  Pardiac,  étaient 
élevés  chez  le  duc  de  Berry  ^.  Artur  se  lia  d'amitié  avec  eux.  Le 
premier  devint  plus  tard  son  beau-frère  ;  le  second  resta  tou- 
jours un  de  ses  plus  fidèles  amis.  Placé  ainsi  auprès  du  dauphin 
de  France,  sous  la  diret;tion  d'un  prince  éclairé,  libéral,  ami  des 
lettres  et  des  arts,  dans  un  milieu  où  il  rencontra  l'aimable  et 
brillant  duc  Louis  d'Orléans  ^  et  son  fils  Charles,  le  gracieux 
poète,  Artur  fut  sans  doute  instruit  avec  autant  de  soin  que  pou- 
vaient l'être,  à  cette  époque,  les  enfants  des  familles  royales.  Le 
duc  de  Berry  «  luy  bailla  bonne  ordonnance  en  sa  maison  et 


1.  P.  2297,  f"  333. 

2.  Eléonore,  fille  de  Henri  II,  roi  de  Caslille. 

3.  D.  Plancher,  III,  215,216.  Religieux  de  Saint-Denis,  III,  213. 

4.  Monstrelet,  I,  114.  D.  Morice,  I,  437.  Le  Dauphin  Louis  était  né  le  22 
janvier  1397.  Il  eut  en  1400  le  titre  de  duc  de  Guyenne.  Le  duc  de  Berry 
avait  la  lientenance  de  Guyenne  et  Languedoc.  (J.,  369,  n"*  2,  3  bis,  11. 
P.  2297,  f<"  325,  703,  817,  821.) 

5.  Titres  de  la  maison  de  Bourbon,  P.  1373  *,  cote  2153. 

6.  Chron.  de  Jean  de  Saint-Paul,  p.  68,  publiée  par  A.  de  La  Borderie, 
Nantes,  1881,  in-8°.  —  Artur  put  aussi  connaître  les  nombreux  officiers 
et  familiers  du  duc  de  Berry,  comme  M.  Gouges  de  Gharpaignes,  Arnaud 
Guilhem  de  Barbazan,  etc.,  qu'il  devait  retrouver  plus  tard  auprès  de 
Charles  VII  (KK.  51,  f"  14-16). 


JEAN  V  s'allie  avec  l.  d'orléans  (1406)  9 

commença  à  avoir  estât  '  ».  De  son  côté,  Jean  V  lui  donna  la 
seigneurie  du  Gavre  *.  En  gardant  auprès  de  lui,  à  la  cour  de 
France,  Artur  et  Gilles,  le  duc  de  Berry  voulait  détacher  la  Bre- 
tagne de  l'alliance  anglaise  et  peut-être  aussi  de  l'influence 
bourguignonne  '.  Vers  le  même  temps  (1405),  il  envoyait  à 
Jean  V  sa  femme,  fille  de  Charles  VI  *.  Le  jeune  duc  ne  parta- 
geait pas  la  haine  de  son  père  pour  la  France.  D'ailleurs,  il  y 
avait  toujours  en  Bretagne  un  parti  français  ^,  et  les  Bretons  com- 
battaient volontiers  les  Anglais  sur  terre  et  sur  mer  ^  ;  mais  il  y 
avait  un  autre  parti  qui  voulait  ménager  l'Angleterre,  de  sorte 
que  la  politique  de  Jean  V  flotta  toujours  indécise  entre  ces 
impulsions  tour  à  tour  prépondérantes. 

Il  avait  aussi  à  se  préoccuper  des  Penthièvre,  qui  ne  renon- 
çaient pas  à  leurs  espérances.  Le  nouveau  duc  de  Bourgogne, 
Jean-sans-Peur,  au  lieu  de  rester,  comme  son  père,  allié  des 
Montfort,  prit  parti  pour  les  Penthièvre,  en  mariant  sa  fille  Isa- 
belle avec  Olivier  de  Blois,  fils  aîné  de  Jean  de  Blois  et  de 
Marguerite  de  Glisson  (juillet  1406)  ^  De  son  côté,  Jean  V  fit 
alliance  avec  le  duc  Louis  d'Orléans  *,  jadis  protecteur  des  Pen- 
thièvre, mais  ennemi  déclaré  de  Jean-sans-Peur.  Afin  de  se 
tenir  prêt  à  toute  éventualité,  il  conclut  une  trêve  avec  Henri  IV 
(11  juillet  1406)  ^  Il  se  donna  d'autres  alliés  en  mariant,  par 

\.  D.  Morice,  I,  437.  Gruel,  186.  Dans  un  compte  du  3  novembre  1405, 
on  trouve  Lyonnel  Renis  et  Armel  de  GMteaugiron,  écuyers  du  c.  de  Ri- 
chemont  (D.  Lobineau,  II,  811).  A.  de  Châteaugiron  était  un  des  officiers 
du  duc  de  Berry  (KK,  250,  f«»  14-16). 

2.  Arrondissement  de  Saint-Nazaire. 

3.  Le  l'"'  décembre  1403,  alliance  entre  la  reine  de  France  Isabeau  et  les 
ducs  de  Berry  et  d'Orléans  (K.  35,  n"  36).  Le  17  février  1406,  Isabeau  de 
Bavière  écrit  au  duc  de  Bretagne  et  lui  promet  de  le  favoriser,  défendre 
et  garder  tant  qu'elle  vivra.  —  Portef.  Fontanieu,  107-108,  f"  109. 

4.  Le  Baud,  440.  D'Argentré,  715. 

5.  A.  Dupuy,  Réunion  de  la  Bretagne  à  la  France,  t.  I,  14-19. 

6.  La  France  soutenait  le  prince  gallois  Owen  Glendowr  contre  Henri  IV, 
qui  avait  renversé  Richard  II,  gendra  de  Charles  VI  {Portef.  Fontanieu, 
105-106,  p.  433  et  suiv.,  surtout  p.  488  et  .326;  t.  107-108,  p.  83,  109. 
P.  2297,  f»  341.  Monstrelet,  I,  69,  72,  73,  81,  114,  Religieux  de  Saint-Denis, 
III,  105-111,  113-115,  171-181,  197-201,  223,  317-329,  K.  35,  n»  32.  Rymer,  IV, 
l'c  partie,  69.  —  Le  s.  de  Penhoet,  Guillaume  et  Tanguy  du  Ghastel,  le  mar. 
de  Rieux,  etc.,  se  signalèrent  dans  ces  combats  (1403-1403). 

7.  Religieux  de  Saint-Denis,  III,  397.  Jouvenel  des  Urs.,  185.  D.  Morice, 
I,  438.  Jean  de  Blois  était  mort  en  janvier  1404.  Ses  filles  étaient  allées 
ensuite  à  la  cour  de  Bourgogne  {Arch.  des  aff.  étr.,  t.  21,  France,  f-'  117- 
119,  120,  123.) 

8.  Par  un  traité  conclu  à  Tours  le  29  décembre  1406  (orig.  aux  Arch. 
nat.,  K.  37,  n«  1). 

9.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  casa,  il,  E,  121.  Portef.  Fontanieu,  107-108,  ^  195. 
Rymer,  IV,  P«  partie,  114,  117,  121,  137,  135. 


40  ASSASSINAT  DE   L.    d'ORLÉANS   (1407) 

l'entremise  du  duc  de  Berry,  sa  sœur  Blanche  avec  Jean  d'Arma- 
gnac (30  juillet  1406)  *,  et  sa  plus  jeune  sœur,  Marguerite,  avec 
Alain  de  Rohan,  comte  de  Porhoet,  fils  du  vicomte  de  Rohan  ^ 
et  petit-fils  de  Glisson  (23  avril  1-407).  Le  vieux  connétable 
mourut,  dit-on,  le  jour  même  où  fut  conclu  ce  mariage  ^,  qui 
enlevait  aux  Penthièvre  leur  plus  solide  appui  en  Bretagne.  Sa 
mort  fut  le  signal  d'une  nouvelle  guerre  entre  les  Montfort  et 
les  Penthièvre. 

Cette  rivalité  sans  cesse  renaissante,  ces  alliances  des  Pen- 
thièvre avec  Jean-sans-Peur  et  des  Montfort  avec  les  ducs  de 
Berry,  d'Orléans  et  le  comte  d'Armagnac  devaient  avoir  une 
influence  manifeste  sur  la  destinée  du  comte  de  Richemont.  Vers 
cette  époque,  il  alla  en  Bretagne,  et,  les  habitants  de  Saint-Brieuc 
s'étant  mutinés,  Jean  V  l'envoya  réprimer  cette  révolte  *.  Il 
commença  ainsi  l'apprentissage  du  commandement,  sous  la 
direction  de  quelque  capitaine  expérimenté,  et  il  le  continua 
pendant  les  tristes  guerres  qui  suivirent  l'assassinat  de  Louis 
d'Orléans  (23  novembre  1407)  ^.  L'auteur  de  ce  crime,  Jean- 
sans-Peur,  vit  se  déclarer  contre  lui  les  ducs  de  Berry  et  de 
Bourbon  ^,  les  comtes  d'Alençon  et  d'Armagnac  et,  avec  eux,  le 
duc  de  Bretagne  et  le  comte  de  Richemont. 

Attaché  par  des  liens  de  famille  à  Charles  VI  et  à  Henri  IV, 
aux  maisons  d'Orléans  et  de  Bourgogne,  possesseur  d'un  Etat  à 
peu  près  indépendant,  auquel  sa  situation  même  entre  la  France 
et  l'Angleterre  assignait  un  rôle  considérable,  le  duc  de  Bretagne 
devait  être  sollicité  par  des  influences  contraires,  sans  pouvoir 
se  tenir  dans  la  paisible  neutralité  qu'il  eût  préférée.  Il  fut,  pour 
ainsi  dire,  condamné  à  une  politique  incertaine,  hésitante,  dont 
ses  frères,  Artur  et  Gilles,  subirent  les  contre-coups. 

Entraîné  d'abord  dans  le  parti  Armagnac  ou  des  princes 
d'Orléans,  Jean  V  vint  deux  fois  à  Paris,  en  1408  \  pour  pro- 


1 .  Fils  aîné  du  fameux  Bernard  YII  d'Armagnac  et  de  Bonne  de  Berry, 
fille  aînée  du  duc  de  Berry.  —  D.  Morice,  I,  439,  et  Preuves,  II,  771-774. 
Anselme,  III,  420.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  3,  E.  9. 

2.  Alain  VIII,  vicomte  de  Rohan,  avait  servi  sous  Du  Guesclin  et  sous 
Glisson.  Il  avait  épousé  Béatrix  de  Glisson,  fille  du  connétable.  Il  mourut 
en  1429  (Anselme,  IV,  S6-57). 

3.  D.  Morice,  I,  439,  44X),  et  Preuves,  II,  col.  783-786.  D'après  Anselme,  VI, 
202,  Glisson  mourut  le  6  février  1407,  au  château  de  Josselin. 

4.  Cruel,  186.  D'Argentré,  718. 

5.  Xia  1479,  P  2  V.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr.,\.  21,  f  83  v». 

6.  Jean  I*"",  qui  avait  épousé  Marie  de  Berry. 

7.  A  la  fin  de  février  (Y*,  f»  251  v»,  253;  Monstrelet,  I,  167,  173-176),  puis 
en  août  (X»a  1479,  f»  40  v°,  41,  42  v"  et  43).  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  37, 
Y2,  f"  199. 


QUERELLE  ENTRE  LES  MONTFORT  ET  LES  PEISTHIÈVRE    (1407)      11 

léger  la  reine  Isabeau  contre  le  duc  de  Bourgogne,  qui  conti- 
nuait de  soutenir  Olivier  de  Blois.  Il  conclut  des  traités  d'alliance 
avec  Valentine  Visconti  *,  veuve  de  Louis  d'Orléans,  avec  son 
fils  aîné  Charles  et  avec  le  comte  Bernard  d'Armagnac,  le 
véritable  chef  du  parti  qui  s'apprêtait  à  combattre  Jean-sans- 
Peur  *. 

Artur,  âgé  de  quatorze  ans  en  1407,  se  trouva,  lui  aussi,  mêlé 
aux  événements  dramatiques  de  cette  époque.  Il  put  voir  le 
ca'davre  mutilé  de  Louis  d'Orléans  ;  Valentine  Visconti  venant 
demander  justice  à  Charles  VI,  avec  ses  enfants  et  sa  bru,  Isa- 
belle de  France,  veuve,  à  dix  ans,  du  roi  Richard  II  ^  ;  Jean 
Petite  justifiant  le  duc  de  Bourgogne,  puis  l'abbé  de  Sérisy,  pro- 
nonçant contre  l'assassin  un  long  réquisitoire  ;  la  cour  obligée 
de  fuir  deux  fois  devant  Jean-sans-Peur,  sous  la  protection  des 
troupes  bretonnes  ;  scènes  émouvantes,  qui  durent  laisser  dans 
sa  mémoire  une  impression  profonde  *.  Il  s'associa  même  aux 
protestations  que  souleva  le  crime  de  Jean-sans-Peur^. 

En  même  temps,  l'interminable  querelle  des  Montfort  et  des 
Penthièvre  était  ranimée  par  une  contestation  relative  à  la  sei- 
gneurie de  Moncontour  ®,  que  le  duc  de  Bretagne  voulait  donner 


1.  Fille  de  Jean  Galeas  Visconti,  duc  de  Milan,  née  en  1370,  morte  en 
1408. 

2.  Traité  de  Jean  V  avec  Val.  Visconti  le  17  mai  1408  (voy.  Portef.  Fonta- 
7neu,  107-108,  f»»  273  et  277;  K,  S7,  n»  1). 

Traité  de  Jean  V  avec  le  duc  d'Alençon  le  4  juin  1408  [Arch.  du  minis- 
tère des  aff.  étr.,  t.  362,  France,  f  39  v"). 

Traité  avec  le  c.  d'Armagnac,  le  4  septembre  (Arch.  de  la  Loire-Inf., 
cass.  76,  E,  181,  et  Arch.  du  min.  des  aff.  étr.,  ibid.,  f  •  40-41). 

Autre  traité  conclu  à  Paris  avec  Val.  Visconti  et  Ch.  d'Orléans,  le  18 
septembre  {Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  75,  E,  177,  et  Arch.  du  min.  des 
aff.  étr.,  ibid.). 

3.  Elle  avait  épousé  Ch.  d'Orléans,  fils  aîné  de  Louis,  et  mourut  en  1409, 
à  l'âge  de  vingt  ans  (K.  55,  n-  27-31). 

4.  Jouvenel  d.  U.,  p.  190-191;  Relig.  de  Saint-Denis,  III,  749-753,  767; 
Monstrelet,  1, 177,  268-348,  388.  Portef  Fontanieu,  108-109,  f°  259.  Le  corde- 
lier  J.  Petit,  qui  osa  faire  l'apologie  de  l'assassinat  de  L.  d'Orléans  le  8 
mars  1408,  avait  été  nommé  conseiller  du  duc  de  Bourgogne,  à  100  1.  t.  de 
pension  par  an,  le  20  février  précédent  [Arch.  des  Aff.  étr.,  France,  t.  XXI, 
f-  82  V,  83,  85  v). 

5.  Le  nom  d'Artur  de  Bretagne  figure,  avec  ceux  des  ducs  d'Orléans, 
de  Berry,  de  Bourbon,  etc.,  dans  une  protestation  de  ces  princes  contre  le 
duc  de  Bourgogne,  assassin  de  L.  d'Orléans  (J.  Tardif,  Cartons  des  Rois, 
p.  430,  n°  1842.  Ce  document  ne  se  trouve  plus  dans  le  carton  K,  56, 
n»  20). 

6.  Arrondissement  de  Saint-Brieuc. —  Par  lettres  du  12  septembre  1408, 
le  roi  défend  à  tous  ses  sujets  d'aller  en  Bretagne  prendre  part  à  la  que- 
relle entre  le  duc  et  la  comtesse  de  Penthièvre  {Portef.  Fontanieu,  107-108, 
f«  293). 


12  THAITÉ   DE   CHARTRES    (1409) 

à  son  frère  Artur.  Jean  V  conclut  une  nouvelle  trêve  avec 
Henri  IV  ;  il  lui  rendit  hommage  pour  le  comté  de  Richemont  et 
fut  secondé  par  des  troupes  anglaises  dans  la  guerre  qu'il  fît  au 
comte  de  Penthièvre  *. 

Enfin  Artur  de  Bretagne  faillit  prendre  part  à  une  autre 
guerre  entre  le  duc  de  Bourbon,  qui  était  Armagnac,  et  le  comte 
de  Savoie,  Amédée  VIII  ^,  beau-frère  et  allié  de  Jean-sans-Peur. 
Pour  défendre  le  Beaujolais,  le  duc  de  Bourbon  avait  appelé  à 
son  secours  les  comtes  de  la  Marche,  de  Vendôme  ^  et  de  Riche- 
mont  ;  mais  il  entama  des  négociations  avec  Amédée  VIII,  et 
l'expédition  n'eut  pas  lieu  *. 

D'ailleurs  les  occasions  de  guerroyer  ne  manquèrent  pas.  Le 
9  mars  1409,  il  y  eut,  à  Chartres,  une  réconciliation  apparente 
entre  les  princes  d'Orléans  et  l'assassin  de  leur  père  ".  Riche- 
mont  assista  sans  doute  à  cette  cérémonie,  avec  le  roi  de  Navarre 


1.  Ch.  de  Blois  avait  autrefois  donné  la  seignearie  de  Moncontour  à 
J.  de  Beaunianoir  et  à  sa  femme  Marg.  de  Rohan,  qui  l'avait  laissée  à  son 
petit-fils  Roland  de  Dinan;  celui-ci  l'avait  donnée  à  son  frère  puîné  Robert; 
enfin  Robert  de  Dinan  avait  cédé  cette  terre  au  c.  de  Penthièvre  pour 
celle  d'Avangour  {9  mai  1407).  Jean  V,  après  avoir  approuvé  cet  échange, 
par  l'acceptation  du  droit  de  rachat,  avait  ensuite  déterminé  Roland  de 
Dinan  à  donner  la  seigneurie  de  Moncontour,  pour  celle  du  Gàvre,  au  comte 
de  Richemont,  le  4  février  1409.  Le  c.  de  Penthièvre  voulut  empêcher 
les  Bretons  d'occuper  Moncontour.  Jean  V,  après  avoir  fuit  hommage  à 
Henri  IV  pour  le  comté  de  Richemont,  appela  les  Anglais,  qui  enlevèrent 
l'île  de  Bréhat  au  c.  de  Penthièvre.  La  duchesse  de  Bretagne  ayant  repro- 
ché à  son  mari  cette  alliance  avec  les  Anglais,  Jean  V  s'emporta,  dit-on, 
jusqu'à  la  frapper.  A  cette  nouvelle,  la  reine  Isabeau,  irritée,  voulut  en- 
voyer contre  son  gendre  le  duc  de  Bourgogne,  avec  qui  elle  s'était  récon- 
ciliée, en  novembre  1409.  Jean  V  les  apaisa  par  des  négociations.  (D.  Morice, 
Preuves,  II,  col.  789-791,  805-806,  827.  X">  8602,  î"  230-233.  D'Argentré,  426- 
427.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  65,  E,  163.  Portef  Fontanieu,  107- 
108,  f°  401.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  31S-317.  Monstrelet,  II,  35,  36,  59, 
64.  Pièces  orig.,  t.  245,  dossier  504  [Beaumanoir],  no  18.) 

2.  Fils  d'Amédée  VII  (+  1391),  et  de  Banne  de  Berry,  qui  fut  mariée  en- 
suite au  fameux  Bernard  VII  d'Armagnac,  en  1393.  Amédée  VIII  fut  le 
premier  duc  de  Savoie.  Il  avait  épousé,  en  1393,  Marie  de  Bourgogne, 
fille  de  Philippe-le-Hardi. 

3.  Jacques  de  Bourbon,  c.  de  la  Marche  et  Louis  de  Bourbon,  son  frère 
cadet,  c.  de  Vendôme,  tous  deux  fils  de  Jean  F*",  comte  de  la  Marche  et  de 
Vendôme  (-j-  1393).  — Jacques  de  Bourbon  épousa  Beatrix  de  Navarre,  fille 
du  roi  Charles  III,  puis  la  fameuse  Jeanne  II,  reine  de  Naples  (Anselme, 
I,  321,  322). 

4.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  241-249.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr., 
t.  21,  f°»  109  v»,  117.  Le  connétable  d'Albret  fut  envoyé  dans  le  Beaujolais 
au  secours  du  duc  de  Bourbon  [Pièces  orig.,  t.  24,  n°  109). 

5.  X*»  1479,  f«  65.  Ici,  le  greffier  du  parlement  écrit,  en  marge  :  «  pax, 
pax....  et  non  est  pax!  »  -^  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  191-203.  Mons- 
trelet, I,  396-397.  Moreau.  1423,  n»'  48,  50,  51. 


LIGLE   DE   GIEN   (1410)  13 

et  les  ducs  de  Berry  et  de  Guyenne  *.  Un  an  plus  tard,  la  rup- 
ture était  complète,  et  le  duc  de  Bretagne  entrait  dans  la  ligue  de 
Gien,  formée  par  les  Armagnacs  contre  Jean-sans-Peur,  qui  tenait 
en  son  pouvoir  le  roi,  la  reine  et  le  dauphin  (15  avril  1410)  *. 

Jean  V  promettait,  pour  sa  part,  mille  hommes  d'armes  et 
mille  hommes  de  trait.*;  mais  il  montra  une  duplicité  qu'expli- 
quent d'ailleurs  l'incertitude  des  événements,  la  politique  égoïste 
et  les  mœurs  de  cette  époque.  Voyant  son  alliance  recherchée 
par  les  deux  partis,  il  tint  une  conduite  équivoque  et  s'inspira 
surtout  de  ses  intérêts.  Sans  rompre  avec  les  coalisés  de  Gien,  il 
écouta  les  propositions  avantageuses  de  Jean-sans-Peur,  qui 
voulait,  en  gagnant  le  duc  de  Bretagne,  enlever  à  la  ligue  son 
plus  puissant  auxiliaire  *.  Par  l'intermédiaire  de  Charles  III,  roi 
de  Navarre  et  de  son  frère  Pierre,  comte  de  Mortain,  oncles  de 
Jean  V,  le  duc  de  Bourgogne  fît  conclure,  à  Paris,  un  traité  entre 
le  duc  de  Bretagne  et  les  Penthièvre,  qui  renoncèrent  à  leurs 
prétentions  sur  Moncontour  (8  août  1410)  ^  ;  enfin  il  signa  lui- 
même  avec  le  duc  de  Bretagne  un  autre  traité  qu'il  fit  approuver 
par  le  roi.  Jean  V  reçut  20  000  écus  pour  payer  les  gens  d'armes 
qu'il  devait  envoyer  au  duc  de  Bourgogne  ^. 


1.  A  cette  époque,  le  duc  de  Berry  donnait  à  Gilles  de  Bretagne  un  petit 
ours  d'or,  émaillé  de  blanc,  garni  de  pierres  précieuses  (KK,  230,  f»  46).  — 
La  duchesse  de  Bretagne  venait  de  faire  cadeau  d'une  riche  houppelande 
h  Artur  et  à  ses  deux  frères,  Gilles  et  Richard.  Un  peu  plus  tard,  le  duc 
de  Berry  en  fit  un  semblable  à  son  neveu  Artur  (Voy.  Append.,  VI). 

2  Relig.  de  Saint- Denis,  IV,  317-319.  Monstrelet,  II,  59,  65.  X'»  1479.  f«  98  ; 
Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  34,  E,  93.  Ms.  du  Puy,  564,  P  549.  J.  369. 
n»  9,  10,  11.  Jouvenel  d.  U.,  p.  203.  —Le  18  avril  1410,  Bern.  d'Arma- 
gnac mariait  sa  fille,  Bonne  d'Armagnac,  avec  Charles,  duc  d'Orléans.  Arch. 
des  aff.  étr.  (France),  t.  XXI,  f  108  v».  K,  553,  n»  6.  Monstrelet,  II,  65,  66. 
Traité  conclu  dès  1409  entre  Jean  V  et  Bern.  d'Armagnac.  Arch.  de  la 
Loire-Inférieure  (cass.  76,  E,  181).  Autre  traité,  en  1410,  avec  le  c.  de  Cler- 
mont  (iôideyn,  et  P.  13582  n°  548).  — Autres  traités  entre  les  ducs  d'Orléans, 
de  Bourbon  et  le  c.  d'Armagnac  (K36,  n°'  25  *-  "'  6,  7,  8).  Le  14  mai  est  conclu 
le  mariage  de  Jean,  fils  du  c.  d'Alençon,  avec  Jeanne,  fille  de  Ch.  d'Orléans, 
née  en  1409  (K,  553,  n°  7). 

3.  Portef.  Fontanieu,  107-108,  f»»  459-467.  D.  Lobineau,  II,  col.  881. 
Jean  V  étoit  venu  à  Gien  sous  prétexte  de  faire  la  paix  avec  les  Penthièvre 
(Moreau,  1424,  n"  61). 

4.  Jean  V  était  à  Paris  le  30  juin  1410  (P.  2297,  f°  1087). 

5.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  835-840.  Le  traité  fut  ratifié 
par  la  comtesse  de  Penthièvre  le  11  décembre  et  par  le  duc  de  Bretagne 
le  23  décembre  1410.  —  Le  Baud,  p.  446. 

6.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  75,  E,  177.  Portef.  Font.,  107-1 08, f-  485- 
490  et  501-523.  X<«  1479.  f»  129,  au  3  septembre  Monstrelet,  II,  80.  Le  14 
août,  Charles  VI  écrit  au  duc  de  Bretagne,  pour  le  prier  de  venir  à  Paris 
avec  le  plus  grand  nombre  possible  de  troupes  {Arch.  de  la  Loire -hiférieure, 
cass.  38,  E,  104).  Le  même  jour,  le  roi  casse  les  alliances  conclues  entre 


14  ESPRIT   DU   TEMPS 

Si  secrètes  que  fussent  ces  négociations,  les  coalisés  de  Gien  en 
eurent  connaissance.  Ils  chargèrentle  comte  d'Armagnac*  d'aller 
trouver  le  duc  de  Bretagne,  pour  lui  rappeler  ses  engagements. 
Dans  cette  situation  embarrassante,  Jean  V  eut  l'adresse  de  mé- 
nager les  deux  partis.  Il  déclara  qu'il  n'avait  jamais  eu  l'intention 
de  combattre  le  duc  de  Bourgogne,  et  il  refusa  d'aller  lui- 
même  au  secours  des  princes  d'Orléans;  mais,  cédant  aux  ins- 
tances du  comte  d'Armagnac,  il  permit  que  son  frère  Artur 
amenât  au  duc  de  Berry  tous  les  Bretons  qui  voudraient  le  sui- 
vre ,  ce  qui  ne  l'empêcha  pas  d'envoyer  son  autre  frère  Gilles  au 
duc  de  Bourgogne  ^.  Il  fut  convenu  que  Richemont  irait  se 
joindre  aux  Armagnacs  avec  6000  hommes,  parmi  lesquels  se 
trouvaient  des  Anglais  !  Jean  V  recherchait  alors  les  faveurs  du 
roi  d'Angleterre  et  faisait  de  nouvelles  démarches  pour  obtenir 
la  restitution  de  son  comté  de  Richemont  ^. 

Quel  désordre,  quelle  confusion  dans  les  idées,  dans  les  esprits, 
dans  les  événements  !  Un  roi  fou  et  un  dauphin  encore  enfant 
jouets  d'ambitions  rivales  ;  une  reine  impopulaire  et  méprisée, 
s'alliant  avec  l'assassin  du  prince  qu'elle  avait  aimé*;  les  oncles 
de  Charles  VI  se  disputant  le  pouvoir  par  tous  les  moyens  ;  l'in- 
térêt et  l'égoïsme  inspirant  seuls  la  politique;  des  haines  féroces 
et  des  réconciliations  menteuses;  des  revirements  soudains  et 
monstrueux  °;  le  crime  hautement  avoué,  glorifié,  triomphant, 
puis  flétri  et  condamné;  des  partis  implacables.  Armagnacs 
contre  Bourguignons,  Penthièvre  contre  Montfort;  tel  est  le  spec- 
tacle que  présente  alors  la  France.  C'est  au  milieu  de  cette 
époque  si  troublée,  de  ces  événements  tragiques,  de  ces  familles 
si  divisées,  dans  ce  royaume,  dans  cette  cour  en  proie  à  la  dis- 
corde, que  le  jeune  comte  de  Richemont  passa  ses  premières 
années  et  que  son  caractère  se  forma.  La  rudesse  et  la  dureté 
qu'on  lui  reprocha  plus  tard,  la  tendance  à  employer  les  moyens 
violents  tenaient  peut-être  à  des  dispositions  naturelles,  mais 

les  ducs  d'Orléans,  de  Berry,  de  Bretagne,  etc.  {Arch.  de  la  Loire-Infé- 
rieure, cass.  7b,  E,  177,  et  Portef.  Font.  107-108,  f-  493.) 

1.  Bernard  VII,  qui  avait  épousé  Bonne  de  Berry,  fille  du  duc  de  Berry 
et  veuve  d'Amédée  VII,  c.  de  Savoie. 

2.  Gilles  se  trouva  ainsi  en  compagnie  d'Olivier  de  Blois,  l'ennemi  de 
sa  maison. 

3.  Relig.  de  Saint-Denis,  IV,  236.  D.  Lobineau,  I,  516,  et  II,  col.  833,  834. 
Appendice  IV. 

4.  Vallet  de  Viriville,  Isabeau  de  Bavière.  Paris,  Techener,  1859,  in-8'', 
p.  9,  13,  16. 

5.  Le  9  mars  1408,  Charles  VI  déclare  le  duc  de  Bourgogne  innocent  de 
l'assassinat  de  L.  d'Orléans,  puis,  mieux  informé,  il  annule  la  précédente 
déclaration,  le  2  juillet  1408  (K,  56,  n»  17«,  Ms.  Moreau,  1423,  n»  48).  Faveur, 
disgrâce  et  exécution. de  Jean  de  Montaigu  (J.  369,  n"  3-8). 


INFLUENCES   ET   EXEMPLES  15 

s'expliquent  aussi  par  les  influences  et  les  exemples  au  milieu 
desquels  il  grandit.  Il  n'avait  pas  dix  ans  quand  sa  mère  le  quitta, 
et  les  caresses,  les  douces  leçons  qui  auraient  assoupli  sa  i*udo 
nature  manquèrent  trop  à  son  enfance.  Le  vieux  duc  de  Berry, 
pour  lequel  il  paraît  avoir  eu  de  l'affection,  n'était  pas  un  mo- 
dèle de  désintéressement  et  de  loyauté  ;  le  duc  de  Bretagne 
montrait  une  duplicité  précoce  ;  le  duc  de  Bourgogne  subordon- 
nait cyniquement  le  droit  à  la  force;  la  cour  de  France  n'était 
pas  une  école  de  bonnes  mœurs  *.  Enfin,  quand  Artur,  dès  l'âge 
de  dix-sept  ans,  se  trouva  jeté  au  milieu  de  la  guerre  civile,  ce 
fut  pour  voir  sans  cesse  des  scènes  de  pillage,  de  meurtre  et  les 
abominables  excès  des  soldats  des  deux  partis,  tous  également 
haïs,  redoutés  et  maudits  par  le  peuple.  Dans  ce  chaos  effroya- 
ble de  convoitises,  de  vengeances  et  de  haines,  d'alliances  éphé- 
mères, de  luttes  toujours  renaissantes,  où  chacun  songeait  à  soi 
et  personne  à  la  France,  comment  distinguer  la  bonne  cause  et 
marcher,  d'un  pas  sûr,  dans  la  voie  du  devoir?  Pourtant  ces 
exemples  ne  furent  pas  aussi  funestes  qu'on  le  pourrait  croire  au 
jeune  comte  de  Richemont;  sa  ferme  raison  triompha  de  ces  in- 
fluences mauvaises,  et,  plus  tard,  il  se  souvint  de  ce  qu'il  avait 
vu  dans  ces  jours  néfastes,  quand,  devenu  connétable,  il  réprima 
si  vigoureusement  les  désordres  des  routiers  et  les  révoltes 
féodales. 

1.  A.  Sarradin,  Etude  sur  Eust.  des  Champs,  Versailles,  Cerf  et  fils,  1878, 
in-8°,  p.  156  et  suiv. 


CHAPITRE  II 

RÔLE  DE  RICHEMONT  DANS    LA    GUERRE   ENTRE   LES    ARMAGNACS 
ET   LES    BOURGUIGNONS.    BATAILLE   d'azINCOURT  (1410-1415) 


Artur  de  Bretagne  amène  des  troupes  aux  Armagnacs.  —  Traité  de  Bicêtre. 
—  Nouvelle  guerre  civile.  —  Richement  prend  Saint-Denis.  —  Il  va  en 
Bretagne,  puis  avec  le  c.  d'Alençon.  —  Alliance  des  Armagnacs  avec 
les  Anglais.  —  Richemont  est  chargé  de  recevoir  les  Anglais.  —  Traités 
de  Bourges  et  de  Buzançais.  —  Les  Armagnacs  au  pouvoir.  —  Artur  est 
mis  auprès  du  dauphin,  dont  il  devient  le  favori.  —  Troisième  guerre 
civile.  —  Richemont  reçoit  un  commandement.  —  Grande  démonstration 
militaire  à  Paris  contre  les  Bourguignons.  —  Jean-sans-Peur  devant 
Paris.  —  Richemont  lieutenant  du  dauphin.  —  Il  prend  part  aux  sièges 
de  Compiègne,  de  Soissons,  d'Arras.  —  Premier  traité  d'Arras.  —  Riche- 
mont reçoit  le  gouvernement  du  duché  de  Nemours.  —  Le  dauphin 
s'empare  du  pouvoir.  —  Il  donne  à  Richemont  la  lieutenance  de  la 
Bastille  et  la  seigneurie  de  ParLhenay.  —  Richemont  va  combattre  le 
sire  de  Parthenay,  —  Invasion  de  Henri  V.  —  Bataille  d'Azincourt.  — 
Richemont  prisonnier. 

Le  hasard  des  événements  voulut  qu'au  début  de  sa  carrière 
militaire  Richemont  combattît  le  roi  de  France,  ou  plutôt  les 
Bourguignons,  qui  tenaient  alors  Charles  VI  en  leur  puissance, 
comme  il  combattra  plus  tard  Charles  VII,  ou  plutôt  les  favoris 
auxquels  il  voudra  l'arracher.  Au  milieu  des  vicissitudes  qui 
livraient  tour  à  tour  le  pouvoir  royal  au  parti  le  plus  fort,  il  put 
voir  trop  souvent  qu'on  ne  respectait  guère  la  volonté  du  roi, 
surtout  quand  il  n'agissait  pas  dans  la  plénitude  de  sa  raison  ou 
de  sa  liberté.  Ainsi,  en  1410,  le  jeune  Richemont,  en  prenant 
l'écharpe  des  Armagnacs  * ,  s'enrôlait  dans  un  parti  rebelle , 
avec  les  ducs  de  Berry,  d'Orléans  et  de  Bourbon,  les  comtes 
d'Alençon  et  d'Armagnac,  pendant  que  le  roi,  c'est-à-dire  le 
duc  de  Bourgogne,  ordonnait  à  tous  les  vassaux  fidèles  de  s'armer 

1.  «  Si  portèrent  pour  enseigne  bendes  étroites  qui  estoient  de  linge  sur 
leurs  espaules  pendans  au  senestre  bras,  de  travers,  ainsi  que  porte  un 
diacre  une  étole,  en  faisant  le  service  d'église.  »  (Monstrelet,  II,  90.) 


ARTUR  AVEC  LES  ARMAGNACS  17 

contre  eux.  Le  dernier  survivant  des  oncles  de  Charles  VI,  le 
vieux  duc  de  Berry,  croyait  avoir,  tout  autant  que  Jean-sans-Peur, 
le  droit  de  gouverner  l'Etat;  il  ne  voulait  point  reconnaître  la 
volonté  royale  dans  les  ordres  que  le  duc  de  Bourgogne  publiait 
au  nom  du  roi  *. 

Le  2  septembre  1410,  les  princes  réunis  à  Tours  rédigèrent 
des  lettres,  où,  en  protestant  de  leur  respect,  de  leur  dévoue- 
ment pour  le  roi,  ils  déclaraient  qu'ils  voulaient  lui  rendre  la 
liberté,  l'exercice  réel  de  son  autorité  souveraine  et  «  pourveoir 
au  bon  gouvernement  du  peuple,  de  son  royaume  et  de  la  chose 
publicque  ».  Le  nom  du  comte  de  Richemont  était  joint  à  ceux  des 
princes  qui  avaient  signé  ce  manifeste  ^.  Charles  VI  eut  beau 
enjoindre  aux  rebelles  de  renvoyer  leurs  troupes  et  de  venir  vers 
lui  «  en  leur  simple  estât  »,  ils  n'en  tinrent  aucun  compte.  Après 
avoir  attendu  quelque  temps  les  renforts  que  Richemont  devait 
leur  amener,  les  Armagnacs  s'avancèrent  jusqu'à  Montlhéry  ^  et 
vinrent  se  loger  aux  environs  de  Paris. 

Le  duc  de  Bourgogne  avait  aussi  rassemblé  à  Saint-Denis  et 
dans  le  voisinage  une  puissante  armée.  Tous  ces  gens  de  guerre, 
Armagnacs,  Brabançons,  Lorrains,  Bourguignons,  commettaient 
d'horribles  ravages,  sans  épargner  «  les  églises,  ni  les  personnes 
d'églises  ».  Il  y  avait  dans  l'armée  bourguignonne  un  grand 
nombre  de  Bretons,  amenés  par  le  comte  de  Penthièvre  *.  En 
vain  le  roi  confisqua  les  biens  des  rebellés  et  leur  enjoignit 
encore  de  renvoyer  leurs  troupes;  ils  persistèrent  dans  leur  at- 
titude et  vinrent  s'établir  à  Bicêtre,  à  Gentilly,  à  Vitry,  à  Saint- 
Marcel,  aux  portes  mêmes  de  Paris.  La  désolation  et  l'effroi 
régnaient  dans  la  ville  ;  les  vivres  n'y  pouvaient  plus  parvenir.  Les 
Parisiens  prirent  les  armes  pour  se  garder  eux-mêmes  et  allu- 
mèrent partout  de  grands  feux  pendant  la  nuit. 

Cependant  les  Bretons  de  Richemont  n'arrivaient  pas ,  bien 

1.  D'après  le  Relig.  de  Saint-Denis  (IV,  319),  ce  fut  le  duc  de  Berry  qui 
forma  la  ligue  de  Gieu.  Jeau-sans-Peur  l'en  accusait  formellement  (Moreau, 
1424,  n"  61). 

2.  X<»  8602,  f»  228,  229.  Relig.  de  Saint-Denis,  IV,  429.  X^a  1479,  f  130. 
D.  Félibien,  II,  749,  et  IV,  554.  Le  roi  était  rentré  à  Paris  le  mardi  16  sep- 
tembre X»a  1479,  f°  131  v°. 

3.  Arrondissement  de  Corbeil. 

4.  X»»,  4789,  f»  2.  Arch.  des  aff.  élr.  (France),  t.  XXI,  fos  108  v»,  111  y-,  112, 
117.  Monstrelet,  I,  398,  397.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  p.  21.  Le  Bourgeois 
de  Paris,  p.  7-10.  Le  Religieux  de  Saint-Denis  (témoin  oculaire  de  ces  faits), 
IV,  327,  329,  337,  331.  Xii  1479,  f  137,  au  12  novembre.  Le  duc  de  Berry 
arriva  le  lundi  avant  la  Saint-Denis,  c'est-à-dire  vers  le  commencement 
d'octobre,  à  son  château  de  Bicêtre  (Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  377). 
Gilles  de  Bretagne  était  alors  à  Paris.  Il  assistait  au  Conseil  du  roi  le 
8  octobre  (X»*»  8602,  fos  251,  252). 

Richemont.  2 


18  TRAITÉ   DE   BICÊTRE   (1410,    2   NOVEMBRE) 

qu'ils  fussent  prêts  à  partir  avant  la  fin  de  septembre.  Des  en- 
voyés des  ducs  de  Berry,  d'Orléans  et  de  Bourbon  étaient  même 
allés  en  Bretagne  leur  payer  leur  solde  *.  Jean  V  cherchait  à 
gagner  du  temps  par  des  lenteurs  calculées.  Vers  le  milieu  d'oc- 
tobre, le  duc  d'Orléans  envoya  encore  en  Bretagne  un  de  ses 
conseillers,  Nicolas  Le  Dur,  pour  hâter  le  départ  de  Richemont  ^. 
Celui-ci  put  enfin  partir,  avec  un  grand  nombre  de  jeunes  sei- 
gneurs, de  chevaliers  et  d'écuyers.  Il  arriva  bientôt  à  Bicêtre^ 
«  excusant  son  frère  tellement  quellement  ».  Il  amenait  au  moins 
6000  chevaux  K 

Les  Armagnacs  serrèrent  Paris  de  plus  près.  Richemont  occu- 
pait, avec  ses  troupes,  le  village  de  Genlilly.  Il  venait,  avec  les 
autres  princes,  à  Bicêtre,  où  le  duc  de  Berry  avait  un  somptueux 
château.  C'est  là  que  fut  conclu,  le  dimanche  2  novembre  1410, 
un  traité  qui  suspendit  à  peine  pour  quelques  mois  la  guerre 
civile  ^.  L'arrivée  de  Richemont  avait  vraisemblablement  hâté 
la  conclusion  de  la  paix. 

Les  deux  partis  continuaient  de  s'observer  avec  défiance.  Le 
duc  d'Orléans  ne  pouvait  ni  oublier  ni  pardonner  le  meurtre  de 
son  père;  il  reprochait  au  duc  de  Bourgogne  de  conserver  le 
pouvoir,  contrairement  au  traité  de  Bicêtre,  et  Jean-sans  Peur 
accusait  le  duc  d'Orléans  de  ne  point  désarmer.  Le  18  juillet  1411, 
les  trois  fils  de  Louis  d'Orléans  ^  adressaient  un  défi  au  duc  de 
Bourgogne,  et  bientôt  la  guerre  se  rallumait  ^. 

Les  choses  se  passèrent  à  peu  près  comme  l'année  précédente. 
Le  roi  publia  encore  contre  les  rebelles  des  mandements  dont 
on  ne  tint  nul  compte,  et  le  duc  de  Guyenne  écrivit  à  Jean-sans- 
Peur  de  venir,  avec  autant  de  troupes  qu'il  en  pourrait  amener. 


J.  Append,,  VIL 

2.  Append.,  VIII. 

3.  Cagny,  dans  le  manuscrit  Duchesne,  48,  f"'  74,  75.  Berry  ap.  Godefroy, 
421.  D.  Lobineau,  II,  col.  881.  Monstrelet,  II,  95.  Jouv.  des  U.,  p.  207. 
Les  Armagnacs-  restèrent  environ  un  mois  devant  Paris  [Pièces  orig., 
t.  2156,  n»  456). 

4.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  379-385.  Catalogue  Joursanvault,  t.  I, 
p.  43,  D"  316.  Moreau,  1424,  n"»  53  et  61.  Le  duc  de  Berry  devait  avoir 
«  le  gouvernement  »  du  duc  de  Guyenne,  conjointement  avec  le  duc  de 
Bourgogne,  qui  se  l'était  déjà  fait  donner  par  lettres  du  27  décembre  140^ 
(Moreau,  1423,  n»  52  et  1424,  n»  33). 

5.  Charles,  duc  d'Orléans;  Philippe,  comte  de  Vertus;  Jean,  comte  d'An- 
goulême. 

6.  K,  56,  no  18.  K,  57,  n»  1.  X'>  1479,  f»  1,  v».  Jouvenel  des  U.,  217.  Reli- 
gieux de  Saint-Denis,  IV,  387,  401,  407,  411,  435-439.  Le  duc  dOrléans 
avait  fait  broder  sur  ses  panonceaux  et  sur  ses  étendards  le  mot  justice^ 
d'un  côté,  en  lettres  d'or,  de  l'autre,  en  lettres  d'argent.  Catal.  Joursanvault 
t.  rr,  p.  15,  n»  99. 


NOUVELLE   GUERRE  CIVILE   (1411)  19 

le  servir  contre  le  due  d'Orléans  et  ses  alliés.  Pour  comble  de 
désordre  et  de  honte,  les  Anglais  furent  sollicités  d'intervenir 
dans  ces  querelles.  Il  en  vint  de  Calais  avec  les  Bourguignons 
et  du  Bordelais  avec  les  Armagnacs,  Jean-sans-Peur  se  dirigea 
sur  Paris  avec  une  armée  forte  d'au  moins  60  000  hommes  *.  Le 
duc  d'Orléans  marcha  aussi  sur  Paris  avec  des  troupes  parmi  les- 
quelles se  trouvaient  Richemont  et  ses  Bretons,  bien  que  le  roi 
eût  écrit  au  duc  de  Bretagne  pour  lui  demander  encore  des 
secours  ^  (H  septembre  1411). 

Ainsi,  deux  fois  en  moins  d'un  an,  le  jeune  comte  de  Richemont 
se  trouvait  mêlé  à  ces  horribles  guerres  civiles  où  «  frères  ger- 
mains estoient  l'un  contre  l'autre  et  le  fîlz  contre  le  père  ^  »,  où 
tout  sentiment  de  patriotisme  se  serait  afffaibli  s'il  eût  déjà 
existé,  où  s'allumaient  des  haines  ardentes  et  tenaces.  Quand, 
vingt -cinq  ans  plus  tard,  Richemont  chassa  les  Anglais  de 
Paris  et  ramena  les  soldats  de  Charles  VII  dans  cette  ville,  où  les 
Armagnacs  avaient  laissé  de  si  odieux  souvenirs  \  il  y  trouva 
encore  des  défiances  et  des  rancunes  qui  entravèrent  longtemps 
ses  efforts.  En  1411,  comme  l'année  précédente,  il  fut  exposé  à 
combattre  son  frère  Gilles,  qui  était  «  continuellement  en  com- 
pagnie du  Dauphin,  duc  de  Guyenne,  »  et  servait  auprès  de  lui 
les  intérêts  du  parti  bourguignon,  Gilles  se  trouvait  même  à 
Paris.  Le  Conseil  royal,  présidé  par  le  duc  de  Guyenne,  publia 
un  mandement  qui  menaçait  des  peines  les  plus  rigoureuses 
tous  les  alliés  des  princes  d'Orléans  et  qui  les  déclarait  rebelles, 
adversaires  du  roi  et  de  son  royaume.  Parmi  les  noms  qu'on 
voit  au  bas  de  ces  lettres  figure  celui  de  Gilles  de  Bretagne  ^ 


1.  K,  57,  n»sH,  12.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  461,  463,  467,  469- 
473,  475,  477,  523.  Jouv.  des  U.,  p.  230,  231,  233,  Henri  IV  envoya  le 
comte  d'Arondel  au  duc  de  Bourgogne,  Ai'ch.  des  aff.  étr.  (France),  t.  XXI, 
f°«  118  et  142.  —  Glairambault,  t.  39,  P  2933,  et  t.  35,  f»  4185.  Fr.  23709, 
nO'  668,  669.  K  72,  n»  56*.  De  Sraet,  Chron.  de  Flandre,  III,  241.  Le  Fevre 
(le  Saint-Remy,  t.  I,  30,  36.  Fr.  26038,  nos  4533^  4534.  Monstrelet,  II,  189, 
202,  J   339,  n»  28.  ~  E.  Giraudet.  Histoire  de  Tours,  1873,  in-S»,  I,  193. 

2.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  481-483.  Le  22  juin,  Richemont  était 
à  Bourges  avec  le  duc  de  Berry  et  le  comte  d'Eu  (J  186b,  n»  78).  En  juin 
et  juillet,  le  duc  de  Bretagne  était  à  Paris,  avec  le  Dauphin  (JJ.  165,  f>s  215 
v,  131  \o,  242  V".  Clair.,  218,  f»  9881.  Fr.  23709,  n"  636,  p.  2297,  f  1087. 
La  lettre  du  roi  au  duc  de  Bretagne  est  aux  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  38, 
E,  104.  Voir  aussi  Preuves  de  D.  Morice,  t.  II,  col.  858-860.  Le  9  septembre 
procession  à  Paris  pour  la  paix  (X^a  1479,  f*  172). 

3.  Monstrelet,  II,  203. 

4.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  10-12. 

5.  Monstrelet,  II,  190,  191.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  138,  E,  104  (let- 
tres du  15  avril,  du  18  mai,  du  11  septembre),  X»»  8602,  f»*  286  v»,  288  V. 
K  57,  nos  13  et  13  bis.  Moreau,  1424,  n»  54. 


20  RICHEMONT  PREND   SAINT- DENIS    (1411) 

(3  et  14  octobre).  Son  frère  Artur  resta  néanmoins  avec  les 
rebelles.  D'ailleurs,  sans  changer  de  parti,  il  se  trouvera  bientôt, 
avec  le  roi  et  le  duc  de  Guyenne,  contre  Jean-sans-Peur,  devenu 
rebelle  à  son  tour. 

Les  Armagnacs  voulaient  entrer  dans  Paris,  pour  s'emparer 
de  Charles  VI,  «  car  c'estoit  leur  désir  »  ;  mais,  cette  fois  encore, 
les  Parisiens  firent  bonne  garde.  Le  duc  d'Orléans  s'établit  à 
Saint- Ouen  et  dans  les  villages  voisins,  pour  observer  la  capi- 
tale, et  il  chargea  Richemont  d'assiéger  Saint-Denis  (4  octo- 
bre 1411).  Les  Bretons  commencèrent  par  s'emparer  du  fau- 
bourg de  Saint-Remy,  puis  ils  livrèrent,  pendant  plusieurs  jours, 
des  assauts  terribles  à  la  porte  de  Seine,  moins  forte  que  les 
autres,  mais  ils  furent  repoussés  par  Jacques  de  Vienne.  Alors 
ils  construisirent  des  machines,  notamment  des  mantelets  qui 
les  préservaient  des  projectiles  lancés  par  les  assiégés.  Ils  em- 
ployèrent à  ces  travaux  les  charpentes  des  constructions  élevées 
pour  la  foire  du  Lendit  ;  ils  se  mirent  à  combler  les  fossés;  ils 
détournèrent  le  Grould,  qui  rendait  inabordable  une  partie 
de  l'enceinte.  Après  un  nouvel  assaut,  ils  forcèrent  Jean 
de  Châlon,  prince  d'Orange,  à  capituler,  le  11  octobre.  Ce 
fut  là  le  premier  succès  militaire  du  jeune  comte  de  Riche- 
mont  \ 

L'armée  orléanaise  continua  de  bloquer  Paris,  arrêtant  les 
vivres,  pour  accroître  la  disette,  et  commettant,  sur  les  proprié- 
tés et  sur  les  personnes,  les  plus  affreux  excès.  Les  Bretons  ne 
se  signalaient  pas  moins  au  pillage  qu'au  combat.  Ils  voulurent 
même,  avec  les  Gascons,  piller  la  riche  abbaye  de  Saint-Denis. 
L'archevêque  de  Sens,  Jean  de  Montaigu^,  qui  «  pour  dalmatique 
portoit  le  haubert  et  pour  crosse  une  hache  ^  »,  eut  grand'peine 
à  contenir  ces  forcenés. 

Dans  la  nuit  du  14  au  15  octobre,  le  comte  d'Armagnac,  avec 
les  sires  de  Gaucourt  *,  de  Gombour  et  des  Bretons,  surprit  le 
pont  de  Saint-Gloud,  que  leur  livra  Golinet  de  Puiseux.  La  garde 

1.  Voy.  le  Religieux  de  Saint-Denis,  témoin  oculaire  de  ces  événements 
et  bien  placé  pour  les  connaître,  t.  IV,  p.  495-505.  Jouv.  des  U.,  p.  272. 
Clair.,  t.  5,  f»  187;  t.  66,  f"  5093;  t.  93,  f<'7223;  t.  99,  f°  7711;  t.  111;  fos  8689, 
8701,  8709;  t.  105,  f"  8165;  t.  112;  f^  8775.  Fr.  25709,  n°  669. 

2.  Frère  du  grand  maître  d'hôtel  du  roi,  exécuté  en  1409  (le  Bourg,  de 
Paris,  6,  16). 

3.  Monstrelet,  II,  192.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  507,  513,  517-519. 
Xia  8602,  fos  286-288.  JJ  165,  f»  116. 

4.  Raoul  V  de  Gaucourt,  un  des  hommes  les  plus  remarquables  de  ce 
temps.  Il  était  attaché  aux  ducs  de  Berry  et  d'Orléans  {Pièces  oing.,  1. 1292, 
dossier  29110  (Gaucourt),  n°^  8,  13,  16-18,  etc.  La  Thaumassière,  Hist.  de 
Berry,  Bourges,  1689,  in-f»,  p.  586  et  suiv. 


JEAN-SAIN S-PEUR  REPREND   SAINT-CLOUD   (1411)  21 

de  ce  poste  important  fut  confiée  à  Richemont,  qui  y  mit  le  sire 
de  Combour  et  Guillaume  Bataille  *. 

Saint-Gloud  et  Saint-Denis  donnaient  aux  Armagnacs  les  deux 
rives  de  la  Seine.  De  là,  ils  menaçaient  Paris.-  Ils  poussaient,  tous 
les  jours,  des  courses  jusqu'aux  murs  de  la  ville  et  dans  les  envi- 
rons. Les  Bretons  avaient  même  un  autre  poste  plus  rapproché, 
à  la  Chapelle  Saint-Denis.  Les  Parisiens  faisaient  des  sorties. 
C'est  ainsi  qu'ils  allèrent,  avec  le  boucher  Legoix,  incendier  le 
magnifique  château  de  Bicêtre  2. 

La  haine  des  partis  s'envenimait.  A  Paris,  on  publia,  dans  les 
carrefours,  de  par  le  roi,  un  arrêt  de  bannissement  contre  les 
ducs  de  Berry,  d'Orléans  et  leurs  alliés;  on  lut  dans  toutes  les 
églises,  «  à  cloches  sonnées  et  chandelles  allumées  »,  une  bulle 
d'Urbain  V,  prononçant  contre  les  rebelles  l'excommunication 
et  l'anathème.  Ils  en  furent  d'abord  troublés,  puis  courroucés, 
et  ils  ne  mirent  que  plus  d'acharnement  à  continuer  la  guerre  ^. 

Cependant  le  duc  de  Bourgogne  arrivait  à  Pontoise  (16  octo- 
bre), où  il  fut  rejoint  par  le  comte  de  Penthièvre,  son  gendre.  A 
peine  entré  à  Paris,  il  fit  attaquer  le  poste  de  La  Chapelle,  où  les 
Bretons  s'étaient  fortifiés  de  leur  mieux.  Il  y  eut  là  une  vive  es- 
carmouche. Les  Bourguignons,  soutenus  par  les  archers  anglais, 
avaient  l'avantage  ;  mais  ils  reculèrent,  quand  ils  surent  que  les 
Armagnacs  de  Saint-Denis,  de  Montmartre  et  des  endroits  voi- 
sins s'avançaient  pour  leur  couper  la  retraite  *. 

Jean-sans-Peur  voulut  réparer  cet  échec  et  dégager  Paris. 
Dans  la  nuit  du  8  au  9  novembre,  il  sortit,  par  la  porte  Saint- 
Jacques,  avec  un  corps  de  10  000  hommes,  où  se  trouvaient  les 
Bretons  du  comte  de  Penthièvre  et  les  Anglais.  Il  assaillit  le 
pont  de  Saint-Cloud,  vers  huit  heures  du  matin.  Surpris  par  cette 
brusque  attaque,  les  Bretons  et  les  Gascons  se  défendirent  vigou- 
reusement, mais,  accablés  par  le  nombre,  ils  furent,  pour  la 
plupart,  tués  ou  pris  et,  parmi  ces  derniers,  le  sire  de  Combour 
et  Guill.  Bataille.  La  tour  du  pont  tenait  encore.  Les  Armagnacs 
de  Saint-Denis  vinrent  se  ranger  en  bataille  le  long  de  la  Seine, 
en  face  des  Bourguignons,  de  sorte  que  le  fleuve  séparait  seul 
les  deux  armées.  Les  Armagnacs,  voyant  qu'il  n'y  avait  rien  à 

1.  Xia  i479,  f»  179  V».  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  12,  note  5.  Religieux  de 
Saint-Denis,  IV,  509.  Jouv.  des  U.,  228.  Monstrelet,  II,  192.  Le  Baud,  447. 
D'Argentré,  727.  Félibien,  I,  753.  Berry,  422,  423. 

2.  Monstrelet,  II,  197.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  521. 

3.  Il  s'agit  d'une  des  bulles  qu'Urbain  V  avait  publiées  contre  les 
grandes  compagnies,  de  1364  à  1369.  —  Monstrelet,  II,  239.  Religieux  de 
Saint-Denis,  IV,  533-551.  X*'^  8602,  f»  241. 

4.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  515,  527.  Monstrelet,  II,  198.  Le  Bourg, 
de  Paris,  14.  Clair.,  t.  XXI,  f»  1519. 


22  GUERRE   DA?JS   LES  PROVINCES   (1412) 

faire,  rentrèrent  à  Saint-Denis  et  s'éloignèrent  dès  le  lendemain. 
Comme  les  défenseurs  de  Saint-Cloud  étaient  excommuniés, 
leurs  cadavres  restèrent  sans  sépulture  dans  la  campagne,  où 
les  chiens  venaient  les  dévorer  '. 

Cet  échec  des  Armagnacs  devant  Paris  ne  termina  pas  la 
guerre;  elle  continua  dans  les  provinces^.  Jean-sans-Peur  pour- 
suivit de  tous  les  côtés  les  princes  d'Orléans  et  leurs  alliés, 
dans  l'Ile-de-France,  dans  le  Maine,  la  Normandie  et  le  Perche, 
dans  le  Poitou,  dans  le  Berry,  dans  le  Nivernais  et  jusque  dans 
le  Beaujolais.  Le  comte  de  Richemont  alla  secourir  son  beau- 
frère,  le  comte  d'Alençon,  contre  Waleran  de  Luxembourg  ', 
que  le  duc  de  Bourgogne  avait  fait  nommer  connétable,  en 
place  de  Gh,  d'Albret  *,  destitué  comme  rebelle.  Il  reprit  aux 
Bourguignons  quelques  places  dont  ils  s'étaient  emparés,  no- 
tamment Saint- Remy-au-Plain,  vers  la  fin  de  1411  &, 

L'hiver  interrompit  à  peine  les  opérations  militaires.  Au  prin- 
temps, elles  devaient  recommencer  avec  plus  de  vigueur.  Le  duc 
de  Bourgogne  avait  résolu  d'assiéger  Bourges,  pour  frapper  un 
coup  décisif,  et,  dans  ce  but,  il  réunissait  des  forces  considéra- 
bles. Les  Armagnacs  étaient  décidés  ù  emploj^er  tous  les  moyens 
de  résistance,  même  à  s'allier  avec  le  roi  d'Angleterre.  Ils  écri- 
virent au  duc  de  Bretagne  et  envoyèrent  auprès  de  lui  son  frère 
Artur,  pour  solliciter  de  nouveaux  secours.  Jean  V,  qui  craignait 
d'attirer  la  guerre  dans  ses  Etats,  continuait  de  se  montrer  tout 
à  la  fois  Armagnac  et  Bourguignon.  11  promettait,  en  même 
temps,  ses  services  au  roi  et  aux  princes  d'Orléans;  il  écrivait  à 
Charles  VI  qu'il  ne  permettrait  à  personne  de  lever  des  troupes 

1.  Xia  1479,  f"  174  v°.  Le  Bourg,  de  Paris,  13.  Religieux,  IV,  557-563. 
Jouv.  des  U.,  233.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  1,  39,  40.  Gruel,  186.  Mons- 
trelet,  II,  202  et  suiv.  —  Ypodigma  Neustrise,  p.  433,  et  Historia  anglicana 
(Walsingham),  II,  283,286,  London,  1863-64,  in-S».  Clair.,  t.  87,  f-  6895. 
JJ  165,  f-  70  v°,  250.  JJ.  166,  f«s  14,  16,  23,  26,  77,  100.  Félibien,  I,  756. 
Catal.  Joursanvault,  II,  220,  n"  3376.  D.  Lobineau,  II,  col.  881-882.  D.  Gre- 
nier, 89,  f"  233.  Fr.  5024,  f"  201. 

2.  Voy.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  p.  43  et  suiv.  Religieux,  IV,  569,  579, 
603,  611,  613,  615,  619.  Félibien,  I,  759,  760.  JJ  160,  f^  250.  Fr.  26038, 
n»  4584.  Clair.,  t.  55,  f"  4185.  Le  12  mars  1412,  le  roi  donne  à  Olivier  de 
Blois,  comte  de  Penthièvre,  les  comtés  de  Blois  et  de  Dunois,  confisqués 
sur  le  duc  d'Orléans  rebelle  (JJ  166,  f»  107  v«). 

3.  Waleran  III  de  Luxemburg,  fils  de  Guy  de  Luxembourg,  comte  de 
Ligny  et  de  Saint-Pol  [Pièces  orig.,  t.  1778,  dossier  Luxembourg,  n<>s  21,  22; 
P.  Fenin,  29,  note  1  ;  Anselme,  III,  723  et  suiv.,  VI,  223). 

4.  Charles  I"  d'Albret  (-j-  1415)  [Anselme,  VI,  203  et  suiv.].  Pièces  orig., 
t.  24.  Il  était  attaché,  depuis  longtemps,  à  la  maison  d'Orléans  (Pièces  orig., 
t.  24,  nos  85,  109,  111,  121). 

5.  Jouvenel  des  U.,  p.  236.  Monstrelet,  II,  235.  Religieux  de  Saint-Denis, 
IV,  673-675.  Saint-Remy-au-Plain,  arrondissement  de  Mamers  (Sarthe). 


RICllEMOrîT  EN  BRETAGNE    (1412)  '23 

•en  Bretagne  pour  le  compte  des  princes  révoltés,  et  il  informait 
le  duc  de  Berry  que  le  comte  de  Richemont  allait  partir,  avec  un 
grand  nombre  de  gens  d'armes,  pour  aller  à  son  aide.  Le  bailli 
du  Maine  ayant  intercepté  l'argent  que  les  chefs  armagnacs 
envoyaient  pour  payer  ces  troupes  de  Richemont,  leur  départ 
fut  ainsi  retardé  *.  Autre  mésaventure  fâcheuse.  La  lettre  de 
Jean  V  au  duc  de  Berry  fut  également  saisie  et  envoyée  au  roi. 
Charles  VI  écrivit,  le  17  mars,  au  sire  de  Montfort,  pour  le  char- 
ger d'exprimer  tout  son  mécontentement  au  duc  de  Bretagne  et 
à  son  frère  Artur,  et  de  les  exhorter  à  venir  le  servir  «  le  mieux 
accompaignés  et  le  plus  hastivement  que  faire  se  pourra  ^  ». 
Cette  curieuse  lettre,  qui  montre  si  bien  la  duplicité  de  Jean  V, 
ne  produisit  aucun  effet.  Alors  le  duc  de  Guyenne  envoya  Gilles 
en  Bretagne  négocier  avec  le  duc,  son  frère,  pour  le  détacher 
du  parti  Armagnac.  Gilles  essaya  aussi  de  gagner  son  autre 
frère  Artur;  il  lui  fit  de  vifs  reproches,  «  et  eurent  grandes  pa- 
roles ensemble;  »  mais,  quoi  qu'en  dise  le  Religieux  de  Saint- 
Denis  ^,  il  ne  réussit  pas  mieux  auprès  du  comte  de  Richemont 
qu'auprès  du  duc  de  Bretagne  ;  les  événements  le  prouvent  assez. 

A  ce  moment,  Jacques  de  Heilly  *,  maréchal  du  Dauphin,  et 
Jean  Larchevèque,  seigneur  de  Parthenay,  faisaient  la  guerre 
aux  Armagnacs  dans  le  Poitou,  Ils  assiégeaient  Ghizé  ^.  Riche- 
mont allait  marcher  au  secours  de  cette  place  quand  Jacques  de 
Dreux,  qui  apportait  un  mois  de  solde  à  ses  troupes,  fut  pris 
dans  le  Maine,  avec  son  argent,  comme  on  vient  de  le  voir.  Ce 
«contre-temps  arrêta  Richemont,  et  la  garnison  de  Ghizé  fut  ré- 
■duite  à  capituler*.  Cet  incident  ne  mériterait  guère  d'être  remar- 
qué, si  Artur  de  Bretagne  n'avait  eu  à  combattre,  un  peu  plus 
tard,  ce  même  Jean  Larchevèque,  dont  les  biens  confisqués  de- 
vaient lui  être  donnés  par  le  duc  de  Guyenne. 

jQuant  au  duc  de  Bretagne,  non  seulement  il  n'abandonna  pas 
les  Armagnacs,  mais  encore  il  les  servit  de  tout  son  crédit  pour 
leur  faire  obtenir  l'alliance  de  Henri  IV.  Vers  le  commencement 
d'avril  (1412),  des  envoyés  des  ducs  d'Orléans,  de  Berry,  de 
Bourbon  et  du  comte  d'Alençon  furent  aussi  arrêtés  dans  le 

1.  D.  Morice,  I,  450.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  611-613. 

2.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  867,  868. 

3.  «  Cornes  de  Dive  Monte...  monitis  fratris  sui,  domini  Egidii,  quena 
dominus  dux  Guiennae  ad  ducem  fratrem  miserai,  gracia  fœderis  compo- 
nendi,  cum  vicissitudine  rerum  mutans  propositum,  ducem  Aurelianis  ad 
tempus  relinquere  dignum  duxit.  »  (P.  614.)  Gruel,  186.  Le  6  avril,  (iiltes 
•était  encore  à  Paris  (Monstrelet,  11^  237). 

4.  Clairambault,  28,  f»  2033. 
3.  Arrondissement  de  Malle. 

5.  Religieux  de  Saint-Denis,  t.  lY,  p.  611-613.  Jouv.  des  U.,  p.  237. 


24  RICHEMONT  AVEC   LE  COMTE  d'ALENÇON 

Maine,  pendant  qu'ils  se  dirigeaient  vers  la  Bretagne,  pour 
passer  de  là  en  Angleterre.  On  saisit  sur  eux  des  lettres  adressées 
au  roi  et  à  la  reine  d'Angleterre,  au  duc  de  Bretagne  et  au  comte 
de  Richemont.  Avec  eux  se  trouvait  un  chambellan  de  Jean  V  *. 

Le  6  avril,  à  l'hôtel  Saint-Paul,  dans  un  grand  conseil  auquel 
assistaient  les  rois  de  France  et  de  Sicile  ^,  les  ducs  de  Guyenne 
et  de  Bourgogne,  le  chancelier  du  Dauphin  lut  les  lettres  et  les 
instructions  remises  par  les  princes  rebelles  à  leurs  envoyés. 
On  y  vit  qu'ils  devaient  demander  à  Henri  IV  300  lances  et  3000 
archers.  Pour  mieux  exciter  la  colère  de  Charles  VI,  le  chance- 
lier déclara  que  les  rebelles  avaient  fait  serment  «  de  détruire 
le  roi  et  le  duc  d'Aquitaine,  le  royaume  de  France  et  la  bonne 
ville  de  Paris!  »  Le  pauvre  roi  fondait  en  larmes.  Il  voyait  bien 
que  ces  mauvais  traîtres  en  voulaient  à  lui,  à  tout  le  royaume  et 
à  ses  fidèles  amis.  Il  leur  demanda  aide  et  conseil.  Aussitôt  le 
roi  de  Sicile,  le  Dauphin,  le  duc  de  Bourgogne  et  les  autres  sei- 
gneurs, s'agenouillant  devant  le  roi,  s'engagèrent  à  le  servir  de 
tout  leur  pouvoir.  Parmi  ces  seigneurs  se  trouvait  Gilles  de  Bre- 
tagne, qui  jurait  ainsi  de  combattre  les  rebelles,  c'est-à-dire  ses 
deux  frères,  le  duc  Jean  V  et  Artur  ^. 

Malgré  les  remontrances  du  roi,  le  comte  de  Richemont  avait 
réuni  «  une  très  belle  et  grande  compaignée  •»  de  1600  cheva- 
liers et  écuyers,  qui,  par  affection  pour  lui,  s'enrôlaient  volon- 
tairement sous  ses  ordres  *.  Parmi  eux,  on  remarquait  le  vicomte 
de  La  Belière,  Armel  de  Ghâteaugiron,  Eustache  de  La  Houssaye, 
Alain  de  Beaumont  et  Guillaume  de  La  Forest,  vieux  capitaines 
dont  l'expérience  et  les  conseils  pouvaient  être  utiles  à  leur 
jeune  chef.  Ce  ne  fut  point  le  duc  de  Berri  qu'il  alla  d'abord  re- 
joindre, mais  le  comte  d'Alençon,  qui  avait  fort  à  faire  pour 
défendre  ses  domaines  contre  le  connétable  de  Saint-Pol  et 
Louis  II  d'Anjou,  roi  de  Sicile.  Richemont  et  son  beau-frère  pri- 
rent alors  Sillé-le-Guillaume  et  Beaumont  ^  Laigle  **  et  plusieurs 
autres  places  ''.  —  Ils  s'approchaient  ainsi  des  côtes  de  Norman- 

1.  Monstrelet,  II,  236-238.  Religieux  de  Saint-Denis,  IV,  625-629.  De  La 
Barre,  itfe'wi.  potir  servir  à  l'hist.  de  France  et  de  Bourg.  Paris,  1729,  in-4% 
p.  126.  Catal.  Joursanvault,  I,  IS,  n"  103.  Le  Fèvre  de  Saint-Ilemy,  I,  50. 

2.  Louis  II  d'Anjou,  roi  de  Sicile  (+  1417),  fils  de  Louis  P""  d'Anjou  et 
petit-fils  du  roi  de  France  Jean  II,  le  Bon.  Louis  II  avait  épousé,  en  1400, 
Yolande  d'Aragon  (Anselme,  I,  231  et  suiv.). 

3.  Monstrelet,  II,  237-254.  Religieux,  IV,  625-631.  Gilles  était  aussi  au 
conseil  le  l-"-  avril  (JJ  166,  f»  102). 

4.  Gruel,  186. 

5.  Arrondissements  du  Mans  et  de  Mamers  (Sarthe). 
6  Arrondissement  de  Mortagne  (Orne). 

7.  Religieux,  IV,  635.  Monstrelet,  II,  249,  233.  Gruel,  186.  JJ  166,  fos  123» 
129  V»,  136.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  54. 


ILS  VONT  RECEVOIR  LES  ANGLAIS  (1412)  25 

die,  pour  attendre  les  troupes  que  le  roi  d'Angleterre  allait 
envoyer  au  secours  des  Armagnacs.  Ceux-ci  avaient,  en  effets 
signé,  à  Bourges,  le  8  mai  1412,  un  traité  avec  Henri  IV,  qui 
chargea  aussitôt  son  second  fils,  Thomas,  duc  de  Clarence,  de 
conduire  en  France  une  petite  armée  *. 

Le  moment  était  décisif.  Le  duc  de  Bourgogne  faisait  les  plus 
grands  efforts  pour  accabler  les  Armagnacs  avant  l'arrivée  des 
Anglais.  Il  emmenait  alors  le  roi,  avec  le  Dauphin,  au  siège  de 
Bourges  2.  L'armée  royale  arriva  devant  cette  ville  le  11  juin,  mais 
elle  éprouva  une  résistance  énergique.  Bientôt  une  chaleur 
excessive,  des  pluies  torrentielles,  les  émanations  des  marais, 
l'odeur  que  répandaient  de  nombreux  cadavres  de  chevaux  en- 
gendrèrent une  épidémie  qui  fit  beaucoup  de  victimes,  notam- 
ment P.  de  Navarre,  oncle  de  Richemont.  Enfin,  le  duc  de  Cla- 
rence débarquait,  avec  environ  8000  Anglais,  à  la  Hougue  Saint- 
Vaast  ',  dans  le  Cotentin.  Le  comte  de  Richemont  et  le  comte 
d'Alençon  allèrent  au  devant  d'eux  et  «  d'un  cuer  joyeux  les 
receurent  *  ».  Ils  se  dirigèrent  aussitôt  vers  Bourges,  en  repous- 
sant le  duc  d'Anjou  et  le  comte  de  Penthièvre,  qui  lui  avait 
amené  des  renforts.  Leur  approche  détermina  le  duc  de  Bour- 
gogne à  traiter.  Les  Anglais  étaient  parvenus  jusqu'à  Vendôme 
quand  le  comte  de  Richemont  fut  informé  que  la  paix  venait 
d'être  conclue  à  Bourges,  le  15  juillet  1412  ^. 


1.  Monstrelet,  II,  339,  chap.  CGI.  Le  Fèvre  de  Saiat-Remy,  I,  58-62. 
Rymer,  IV,  2e  partie,  4,  5,  8,  12-15,  16,  17,  18,  20-22.  Ypodigma  Neustrix, 
434-437,  Proceedings,  II,  28-31.  Le  duc  de  Bretagne,  qui  négociait  lui- 
même  avec  les  Anglais,  ne  fut  pas  étranger  à  ce  traité.  Ai^ch.  de  la  Loire- 
Inf.,  cass.  47,  E,  121.  Arch.  des  aff.  ét>\,  t.  362,  f»'  47  v*»,  48.  Rymer,  8,  10, 
15.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  863-864.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  337-338. 
Le  duc  de  Bourgogne  fit  aussi  son  possible  pour  avoir  l'alliance  des  Anglais. 
Proceedings,  II,  19-24.  Rymer,  3,  6.  Fr.,  25709,  n»  677.  Walsingham,  Histo- 
ria  anglicana,  II,  288.  Graftoii's  Chronicle,  London,  1809,  in-4».  I,  503. 
Fr.  20416,  f»  38.  JJ  166,  f»  246.  Il  y  eut  certainement  des  Anglais  dans 
l'armée  royale  pendant  cette  campagne  (Clair.,  62,  f»  4823). 

2.  X>"  1479,  f-  204  v». 

3.  Arrondissement  de  Valogues. 

4.  Monstrelet,  II,  291. 

5.  Fr.  26038,  n^^  4603,  4615.  Xi»  8602,  f"  257  V.  Clair.,  t.  20,  fo^  1389-1392 
et  1403,  1411  ;  t.  23,  f"  1691,  1692.  X>*  1479,  f"  204  v-,  JJ  166,  f  =  161,  168  v», 
174.  Fr.  25709,  n"^  681,  682,  687.  KK  250,  f»^  10  et  11.  Religieux,  IV,  641- 
645,  651-657,  663,  675-679,  683-689,  693-701,  705,  719-725.  Monstrelet,  II, 
271-293.  Berry,  424.  Proceedings,  II,  33.  Cagny,  f»  77.  Gruel,  186.  Le  Fèvre 
de  Saint-Remy,  t.  I,  68,  69.  Grafton,  I,  504-505.  Xi*  4785,  f»'  317  v,  321. 
D.  Félibien,  I,  760;  III,  527-530.  Moreau,  1424,  n»'  56,  61.  K  60,  n"  3.  K  72, 
n*  56'*.  La  paix  fut  jurée  le  22  août,  à  Auxerre.  X"  1479,  f»'  210,  212,  215  v». 
X"  8602,  fos  272  v°,  277.  H.  Vandenbroeck,  Consaux,  I,  92,  93.  Voy.  Âp- 
pend.,  IX. 


26  MORT  DE   GILLES   (1412) 

Avant  d'aller  rejoindre  les  ducs  de  Berry  et  d'Orléans,  il  se 
rendit  à  Vannes,  où  se  négociait  le  mariage  de  sa  nièce  Anne, 
fille  aînée  de  Jean  V,  avec  Charles  de  Bourbon,  fils  aîné  du  duc 
Jean  de  Bourbon.  Dans  le  traité  de  mariage,  on  trouve  certaines 
clauses  qui  établissent  dès  lors  les  droits  éventuels  d'Artur,  de 
Gilles  et  de  Richard  au  duché  de  Bretagne.  Le  duc  et  la  du- 
chesse s'engageaient,  en  outre,  à  dédommager  les  jeunes  princes 
de  la  part  qu'ils  devaient  avoir  dans  la  dot  de  la  reine  leur 
mère  et  à  leur  assigner  des  revenus  en  compensation. 

Ce  traité  fut  signé  à  Rennes,  le  19  juillet  1412.  Artur  le  ratifia, 
en  son  propre  nom  et  au  nom  de  ses  frères,  Gilles  et  Richard  *.  Le 
même  jour,  Gilles  de  Bretagne  mourait,  à  Gosne,  de  l'épidémie  qui 
avait  fait  tant  d'autres  victimes  pendant  le  siège  de  Bourges  ^. 
C'était  un  jeune  prince  de  grand  avenir,  fort  aimé  du  Dauphin, 
sur  lequel  il  exerçait  une  véritable  influence.  Sa  mort  si  préma- 
turée fut  un  malheur  pour  le  duc  de  Bourgogne,  auquel  il  était 
dévoué,  car  son  frère  Artur  allait  bientôt  le  remplacer  auprès 
du  Dauphin,  pour  servir  les  intérêts  du  parti  armagnac. 

Dans  la  guerre  qui  venait  de  finir,  Richemont,  quoique  bien 
jeune,  avait  eu  un  rôle  important.  Malheureusement  ces  discor- 
des civiles,  ces  déplorables  alliances  ne  lui  donnaient  que  de 
mauvais  exemples.  II  eût  mieux  valu  qu'il  apprît  le  métier  des 
armes  en  combattant  contre  les  Anglais  qu'en  marchant  avec 
eux  contre  le  duc  de  Bourgogne,  son  cousin,  contre  P.  de 
Navarre,  son  oncle,  contre  Gilles  de  Bretagne,  son  frère,  contre 
le  roi  de  France  et  contre  des  Français. 

En  quittant  Rennes,  il  alla  retrouver  les  ducs  de  Berry,  d'Or- 
léans et  les  autres  princes  qui  accompagnaient  le  roi.  Il  y  eut  à 
Melun  de  grandes  fêtes,  par  lesquelles  Armagnacs  et  Bourgui- 
gnons célébrèrent  une  réconciliation  qui  ne  devait  pas  être  de 
longue  durée.  On  fit  approuver  le  traité  de  Bourges  par  Char- 
les VI,  qui  se  trouvait  alors  dans  un  meilleur  état  d'esprit.  Il 
pardonna  aux  rebelles,  les  reçut  en  bonne  paix  et  leur  rendit 
leurs  biens  '. 

Cependant  les  Anglais,  irrités  d'un  dénouement  auquel  ils 
avaient  contribué,  sans  en  tirer  profit,  devenaient  fort  gênants 
pour  leurs  alliés,  qui  les  avaient  abandonnés  avec  si  peu  de  scru- 
pules. Ils  réclamaient  le  prix  de  leur  intervention  et  s'étaient 
avancés  jusque  dans  la  Touraine  et  l'Orléanais,  ravageant  tout 

1.  Preuves  de  thist.  de  Bret.,  t.  II,  col.  871-874.  Anne  mourut  peu  après 
(Ans.,I,  456). 

2.  X»'  1479,  fo  210. 

3.  XI'  8602,  f<"  274,  277.  Religieux,  IV,  719-721.  Monstrelet,  II,  293. 


LES  ARMAGNACS  AU  POUVOIR  (1413)  27 

sur  leur  passage.  Après  avoir  fait  mine  de  les  vouloir  combat- 
tre, il  fallut  s'entendre  avec  eux,  aux  conditions  les  plus  dures. 
Le  duc  d'Orléans  conclut  le  traité  de  Buzançais  *  avec  le  duc  de 
Clarence,  qui  emmena  ses  troupes  en  Guyenne,  non  sans  com- 
mettre de  nouveaux  ravages  (14  novembre  1412)  ^.  On  eut 
•encore  la  velléité  de  faire  la  guerre  aux  Anglais.  Le  duc  de 
Bretagne  lui-même  semblait  disposé  à  y  participer,  quand  la 
mort  de  Henri  IV  (22  mars  1413)  et  le  départ  de  Clarence  pour 
l'Angleterre  retardèrent  les  hostilités  ^. 

Il  eût  pourtant  mieux  valu  combattre  l'étranger  que  de 
retomber  dans  les  discordes  qui  allaient  livrer  aux  coups  de 
Henri  V  la  France  affaiblie,  mais  la  fureur  des  partis  ranima 
bientôt  la  guerre  civile.  Les  Armagnacs  ne  pouvaient  se  résoudre 
à  laisser  au  duc  de  Bourgogne  le  pouvoir  qu'il  avait  su  garder, 
même  après  le  traité  de  Bourges.  En  déchaînant  les  bouchers 
ei  la  populace  de  Paris,  il  restait  maître  de  la  capitale,  du  Dau- 
phin, du  roi,  du  gouvernement.  Cette  domination  violente  pro- 
duisit bientôt  une  réaction  favorable  aux  Armagnacs  *.  Le  duc  de 
Berry  en  profita  pour  conclure,  à  Pontoise,  un  traité  qui  empêcha 
une  nouvelle  guerre  (12  janvier  1413)  et  réduisit  Jean-sans-Peur 
à  quitter  Paris  (23  août).  Les  Armagnacs  devinrent  à  leur  tour 
maîtres  de  la  capitale  et  du  pouvoir  ^.  Artur  de  Bretagne  revint 
à  Paris,  avec  ses  frères,  au  commencement  de  septembre  ^. 

C'est  alors  que  le  duc  de  Berry,  pour  mieux  tenir  le  Dauphin 

1.  Arrondissement  de  Châteauroux. 

2.  K  S9,  n<'  2,  3,  4.  K  72,  n»  56».  KK  250,  f-  10  v°,  11,  63,  89,  124.  KK  238, 
f»'  13,  45,  56  V»,  69,  118  v°.  Fr.  1182,  f°»  3,  4  v%  6.  Clair.,  t.  13,  f»  855;  t.  46, 
fo  3405;  t.  49,  f»  3713  ;  t.  62,  f°  4823;  t.  83,  f  6703  ;  t.  97,  f  7567  ;  t.  98, 
f»  7639;  t.  100,  f»  7729;  t.  102,  f°  7899;  t.  104,  f»  8183.  —  Moreau,  1424, 
n"  61.  A.  Champollion-F.,  Louis  et  Ch.  d'Orléans,  Paris,  1844,  ia-80,  I, 
290,  310,  317,  318.Moaslrelet,  II,  303,  339.  Religieux,  IV,  721,  733-737.  Catal. 
Joursanvault,  I,  81,  n"  552:  II,  220-222,  n»»  3376-3379,  3382.  JJ  167,  f"  364. 
La  rançon  du  c.  d'Angoulême  n'était  pas  encore  entièrement  payée  en 
1447.  K  72,  n«  56i3.  a.  Ghanipollion-F.,  Lettres  des  rois  et  reines,  II,  328-332. 

3.  Moustrelet,  II,  337.  Religieux,  IV,  769.  Jouvenel  des  U.,  266.  Le  Fèvre  de 
Saint-Remy,  t.  I,  73,  74.  X'«  1479  f»  237  v°.  Fr.  26039,  n°  4750.  Clair.,  t.  27, 
f«  1979;  t.  93,  f»  7243. 

4.  P.  Les  Essarts,  prévôt  de  Paris,  depuis  le  12  septembre  1411,  fut  déca- 
pité aux  halles,  le  samedi  1"  juillet  1413  (Xi»  1479,  f°»  172  v»,  247). 

5.  K  58,  n»  5.  Rymer,  IV,  2"  partie,  47  et  suiv.  Moreau,  1424,  n"»  37,  58. 
Monslrclet,  II,  chap.  Cil  et.  suiv.  Religieux,  V,  1-67,  75,  81,  83-93,  95-121, 
149,  153,  161.  Jouv.  des  U.,  257-264.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  I,  88-107. 
X»'  1479,  f"  248-250,  251  v».  254.  K  950,  n«  15.  Fr.  23018,  f  346  v».  Féli- 
bien,  I,  771-772;  IV,  557-558.  Fr.  1182,  f-  3.  GataL  Joursanvault,  I,  16, 
n»  211.  LL  214,  f»  187.  Fr.  2832,  f-  296.  Le  5  septembre  1413,  le  roi  révoque 
les  lettres  de  confiscation  et  de  bannissement  publiées  auparavant  contre 
les  Armagnacs  (LL  214,  f»-  232-237;  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  110-116). 

6.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  117.  Monstrelet,  II,  403.  Cousinot,  150. 


28  RICIIEMOINT  AUPRÈS   DU   DAUPHIIN    (1413) 

SOUS  son  influence,  plaça  auprès  de  lui  le  comte  de  Richemont. 
Dans  l'état  d'esprit  où  était  habituellement  le  roi,  le  Dauphin 
devenait  l'auxiliaire  le  plus  précieux  pour  le  parti  qui  voulait 
gouverner  la  France;  mais  ce  prince,  d'un  caractère  faible,  fri- 
vole, versatile,  avait  besoin  d'être  surveillé  et  dirigé  *.  Louis, 
duc  de  Guyenne,  avait  alors  près  de  dix-sept  ans  ;  Artur  de  Breta- 
gne en  avait  vingt;  l'âge,  sinon  le  caractère  et  les  goûts,  facilita 
une  liaison  qui  semble  avoir  été  très  intime.  Dès  lors,  le  comte  de 
Richemont  assista  souvent  aux  délibérations  du  conseil  et  s'ini- 
tia aux  affaires  du  gouvernement.  C'est  ainsi  qu'on  le  voit  figu- 
rer, avec  les  ducs  d'Anjou,  de  Berry,  d'Orléans,  de  Bourbon,  les 
comtes  d'Alençon  et  de  Vertus,  dans  la  séance  où  fut  décidé  le 
bannissement  des  chefs  du  parti  bourguignon  (18  septembre 
1413)  \ 

Devenu  le  favori  du  Dauphin,  il  eut,  dans  sa  maison,  une 
situation  brillante.  Ce  changement  exerça  sur  tout  le  reste  de 
sa  carrière  une  influence  qu'il  ne  pouvait  soupçonner  à  cette 
époque.  Il  put  vivre  alors  dans  l'intimité  de  la  duchesse  de 
Guyenne,  qu'il  épousa  plus  tard,  et  son  mariage  avec  cette  prin- 
cesse, sœur  de  Philippe-le-Bon,  contribua  grandement  à  sa  for- 
tune ^ 

Un  détail  assez  curieux  montre  bien  que  des  relations  ami- 
cales s'établirent  promptement  entre  le  duc  de  Guyenne  et 
Artur  de  Bretagne.  Le  Dauphin,  qui  aimait  beaucoup  les  joyaux, 
les  objets  d'art,  désirait  voir  les  merveilleux  bijoux  que  possé- 
dait le  duc  de  Berry  *.  Il  partit,  un  jour,  avec  le  comte  de  Riche- 
mont, incognito  et  vêtu  de  manière  à  se  dissimuler  parmi  les 
gens  de  sa  suite.  Le  duc  de  Berry  avait  fait  prévenir  les  officiers 
de  sa  maison  que  le  comte  de  Richemont  allait  à  Bourges;  il 
leur  avait  recommandé  de  le  recevoir  et  de  le  fêter  comme  lui- 
même,  de  lui  montrer  tous  ses  bijoux  et  tout  ce  qu'il  voudrait 
voir.  Les  jeunes  princes  passèrent  quelques  jours  à  Bourges  ^. 


1.  Voir  son  portrait  dans  Félibien,  IV,  567-561.  Relig.,  V,  17,  587-588. 
Monst.,  II,  334. 

2.  Depuis  le  mois  de  septembre  1413,  on  voit  souvent  Richemont  au 
Conseil.  K  58,  n°  5,  et  X"  8602,  f"'  286  v°,  300,  301.  P  2298,  f»  30.  Fr.  21405, 
fos  56,  58,  61,  63.  Ordonn.  X,  184.  Fr.  25709,  n»»  706,  708.  JJ  167,  f»  397,  557. 
Jouv.  des  U.,  272-274.  Religieux,  V,  183.  Monstrelet,  t.  II,  464;  VI,  123.  D. 
Plancher,  III,  397.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  921.  —  Moreau,  1424,  n"  68. 

3.  Gruel,  186. 

4.  Voir  KK  258.  Il  y  a  dans  ce  registre  l'énumération  d'une  quantité 
incroyable  de  bijoux.  On  trouve  souvent,  en  marge,  les  noms  de  ceux  à 
qui  ces  bijoux  ont  été  donnés  et,  entre  autres,  le  nom  du  duc  de  Guyenne. 

5.  Gruel,  186.  L.  Pannier,  Les  joyaux  du  duc  de  Guyenne,  Paris,  Didier, 
1873,  in-8°. 


RICHEMONT   AUPHÈS   DU   DAUPHIN    (1413)  29 

Pendant  ce  temps,  la  duchesse  de  Bretagne  arrivait  à  Paris. 
Jean  V  fut  très  mécontent,  quand  il  apprit  que  son  frère  et  son 
beau-frère  venaient  de  partir.  Il  crut  que  le  Dauphin  avait  fait 
ce  voyage  pour  ne  point  voir  sa  sœur,  la  duchesse  de  Bretagne, 
et  il  trouva  une  préméditation  blessante  dans  un  acte  qui  n'était 
qu'une  fantaisie  déjeune  homme.  Il  fut  d'ailleurs  détrompé  par 
le  prompt  retour  d'Artur,  qui  se  hâta  de  ramener  le  Dauphin  à 
Paris.  Ce  prince  fit  un  accueil  cordial  à  sa  sœur.  La  jeune 
duchesse  reçut  de  riches  présents.  Le  duc  de  Berry  lui  donna  le 
magnifique  rubis  de  la  Caille,  qui  appartenait  jadis  à  la  maison 
de  Bretagne  '. 

Le  mariage  de  L.  de  Bavière,  frère  de  la  reine  de  France, 
avec  Catherine  d'Alençon,  veuve  de  P.  de  Navarre  et  tante  de 
Richemont  ^,  donna  lieu  à  de  grandes  fêtes  {i^'  octobre  1413). 
On  y  vit  paraître  le  duc  d'York  et  d'autres  ambassadeurs 
anglais,  qui  venaient  négocier  le  mariage  du  nouveau  roi 
d'Angleterre  avec  Catherine  de  France,  la  plus  jeune  fille  de 
Charles  VI.  Les  Armagnacs  voulaient  prévenir  en  cela  le  duc  de 
Bourgogne,  qui  songeait  aussi  à  marier  une  de  ses  filles  avec 
Henri  V,  pour  avoir  l'alliance  de  l'Angleterre  ^ 

Richemont  eut  le  regret  de  voir  éclater  alors  entre  son  frère, 
Jean  V,  et  le  duc  d'Orléans,  une  querelle  de  préséance.  Le 
comte  d'Alençon  prit  parti  pour  le  duc  d'Orléans  et  s'emporta 
jusqu'à  dire  au  duc  de  Bretagne,  son  beau-frère,  a  qu'il  avoit 
au  cuer  un  lion  aussi  grand  qu'un  enfant  d'un  an  *.  »  Le  roi 
donna  raison  au  due  d'Orléans,  et  Jean  V  quitta  Paris  très 
mécontent  ;  toutefois  il  laissa  son  frère  Artur  à  la  cour.  Il  avait 
besoin  de  ses  bons  offices  pour  obtenir  la  restitution  de  Saint- 
Malo.  Richemont  fît  auprès  du  Dauphin  et  du  Conseil  de  si  vives 
instances  qu'on  lui  promit  de  rendre  cette  ville  à  son  frère  *^. 

Il  eut,  à  cette  époque,  l'occasion  de  voir  souvent  le  jeune 
Charles,  comte  de  Ponthieu,  qui  fut  roi,  neuf  ans  après,  sous  le 
nom  de  Charles  VII.  Il  put  aussi  connaître  la  reine  de  Sicile, 
femme  de  Louis  II  d'Anjou,  Yolande  d'Aragon  ",  qui  vint  pas- 
ser quelques  semaines  à  Paris,  pour  assister  aux  fiançailles  de 

1.  Gruel,  187.  Fr.  26040,  n»  48ol.  Catal.  Joiirsanvaull,  I,  97,  no  624.  Clair., 
t.  123,  f»  531.  Monstrelet,  II,  403. 

2.  Le  roi  avait  donné  le  comté  de  Mortain  au  Dauphin,  qui  le  donna 
ensuite  à  L.  de  Bavière  (J  369,  n»»  19,  20). 

3.  Religieux,  V,  205.Jouv.  des  tJ.,26o.  Arch.  des  aff.  étr.  (France),  t.  21, 
fo  134. 

4.  Monstrelet,  II,  409. 

3.  Gruel,  187.  Saint-Malo  ne  fut  rendu  à  Jean  V  que  le  9  octobre  1415 
(Arch.  des  aff.  étr.,  t.  6,  France,  fo  42  ;  JJ  169,  fo  1). 
6.  Fille  de  Jean  I*',  roi  d'Aragon. 


30  TROISIÈME   GUERRE   CIVILE   (1414) 

sa  fille,  Marie  d'Anjou,  avec  le  comte  de  Ponthieu  (décembre 
1413).  Yolande  repartit  bientôt,  avec  les  jeunes  fiancés  (5  février 
1414);  mais  Richemont  n'oublia  pas  cette  princesse,  qui  lui  ren- 
dit plus  tard  de  si  grands  services  ^ 

La  lutte  entre  les  Armagnacs  et  les  Bourguignons  allait  re- 
commencer. Le  roi  de  Sicile  venait  d'abandonner  le  duc  de  Bour- 
gogne, pour  s'allier  avec  les  Armagnacs  et  de  lui  faire  une  mor- 
telle injure,  en  lui  renvoyant  sa  fille,  Catherine,  fiancée  à  son 
fils  aîné  Louis  d'Anjou  (novembre  1413)  ^.  Alors  Jean-sans-Peur 
rassembla  des  troupes,  malgré  la  défense  réitérée  du  roi,  et  il 
essaya  d'agir  auprès  de  son  gendre,  le  Dauphin;  mais  les  Arma- 
gnacs se  tenaient  sur  leurs  gardes.  Le  12  janvier,  les  ducs  de 
Berry,  d'Orléans  et  d'Anjou,  d'accord  avec  la  reine  Isabeau, 
firent  arrêter,  au  Louvre,  plusieurs  serviteurs  du  Dauphin,  gens 
dévoués  au  duc  de  Bourgogne  et  qui  exerçaient  une  influence 
fâcheuse  sur  l'esprit  faible  et  inconstant  du  jeune  prince.  Son 
nouvel  ami,  le  comte  de  Richemont,  ne  pouvait  sans  doute  pré- 
valoir contre  cette  influence,  car  le  Dauphin  avait  écrit  trois  fois 
au  duc  de  Bourgogne  pour  le  prier  de  venir  au  plus  vite  l'arra- 
cher à  sa  captivité  (4,  13,  22  décembre  1413).  Dès  le  lende- 
main, par  un  revirement  auquel  Richemont  contribua  peut- 
être,  il  défendit  à  son  beau-père  de  rassembler  des  troupes  et 
de  venir  vers  lui,  ce  qui  n'empêcha  pas  Jean-sans-Peur  de  mar- 
cher sur  Paris  avec  toutes  ses  forces^. 

La  guerre  civile  allait  donc  encore  désoler  ce  malheureux 
royaume,  qui  en  avait  déjà  tant  soufl'ert.  Cette  fois,  sans  changer 
de  parti,  Richemont  se  trouvait  parmi  les  défenseurs  de  la  cause 
royale.  Le  22  janvier  1414,  le  roi  le  retenait  à  son  service,  avec 
100 hommes  d'armes  et  130  hommes  de  trait*. Le  26  et  le 31  jan- 
vier, Artur  prit  part  aux  conseils  où  l'on  décida  de  combattre  le 
duc  de  Bourgogne  ^.  Sur  ces  entrefaites,  on  apprit,  à  Paris, 
l'approche  de  Jean-sans-Peur.  Une  grande  agitation  se  manifesta 


i.  De  Beaucourt,  Charles  VU,  I,  15-16.  —  Religieux,  V,  161. 

2.  Monstrelet,  II,  414.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  123-126.  D.  Plancher, 
III,  397.  Moreau,  1424,  n"  61.  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  21,  fos  108  \o,  117  v», 
131  v,  133  v°. 

3.  Arch.  des  aff.  étr  ,  t.  21,  f'IoS.  Religieux,  V,  233-241.  xMonstrelet,  II,  421, 
425,  430,  440-441;  VI,  137.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  I,  138-142.  D.  Plan- 
cher, III,  Preuves,  p.  cclxxxvhi.  Ces  revirements  soudains  excitaient  des 
murmures.  Le  12  décembre  1413,  Charles  VI  donne  au  comte  de  Vertus 
la  maison  de  G.  Barrau,  notaire  et  secrétaire  du  roi,  qui  avait  désapprouvé 
la  paix  d'Auxerre  et  «  étoit  indigné  que  les  choses  qui  auparavant  étaient 
déclarées  mauvaises  revinssent  à  droit  et  équité.  »  (JJ  167,  f*  395.) 

4.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  902. 

5.  Fr.  25709,  n°  707. 


DÉMONSTRATION  A  PARIS   (1414)  31 

aussitôt  dans  la  ville,  le  dimanche  4  février.  Le  Dauphin  dînait 
chez  un  chanoine,  au  cloître  Notre-Dame,  quand  on  vint  l'avertir 
de  ce  qui  se  passait.  Bientôt  arrivèrent  le  roi  de  Sicile,  les  princes 
d'Orléans,  les  comtes  d'Eu  ',  d'Armagnac  et  do  Richemont,  avec 
une  multitude  de  gens  de  guerre,  toute  une  armée,  que  Mons- 
trelet  évalue  à  14000  hommes.  Les  Armagnacs  voulaient  faire  un 
grand  déploiement  de  forces,  pour  prévenir  une  tentative  de 
soulèvement,  car  le  duc  de  Bourgogne  avait  de  nombreux  parti- 
sans à  Paris,  surtout  dans  le  quartier  des  Halles,  Il  fallait  asso- 
cier le  Dauphin  à  cette  manifestation,  pour  montrer  au  peuple 
que  le  Bourguignon  agissait  sans  l'aveu  de  son  gendre  et  qu'il 
était  véritablement  rebelle.  Le  duc  de  Guyenne  se  prêta,  sans  ré- 
sistance, à  cette  humiliante  comédie.  On  le  fit  monter  à  cheval 
et  on  le  mit  à  la  tète  du  principal  corps  de  troupes,  avec  le  roi 
de  Sicile  et  le  duc  d'Orléans  ^. 

Le  comte  de  Richemont  conduisait  l'avant-garde ,  avec  les 
comtes  d'Eu  et  de  Vertus.  Ils  chevauchaient  tous  trois  en  tête 
de  leurs  gens.  Bernard  d'Armagnac  menait  l'arrière-garde.  Ceux 
des  Parisiens  qui  étaient  du  parti  d'Orléans,  bourgeois,  gens  de 
robe  et  gens  d'Eglise,  montés  et  armés,  faisaient  cortège  au  Dau- 
phin ' . 

Cette  armée  alla  d'abord  se  ranger  devant  l'hôtel  de  ville  ;  les 
trompettes  sonnèrent,  et  le  chancelier  de  Guyenne  dit  à  haute 
voix  que  le  Dauphin  remerciait  le  peuple  de  Paris  de  son  bon 
vouloir  et  de  sa  loyauté.  Il  l'exhorta  vivement  à  résister  au  duc 
de  Bourgogne,  qui  enfreignait  la  volonté  royale  et  violait  la  paix, 
en  s'autorisant  de  prétendues  lettres  écrites  par  son  gendre.  Or 
le  Dauphin  ne  lui  avait  pas  écrit  ;  son  chancelier  l'affirmait,  et  le 
jeune  prince  déclara  hautement  qu'il  disait  bien  la  vérité.  On 
se  rendit  ensuite  à  la  croix  du  Trahoir,dans  le  quartier  des  Hal- 
les, où  il  y  eut  une  répétition  de  la  même  scène,  puis  on  laissa 
le  duc  de  Guyenne  rentrer  au  Louvre,  et  le  duc  de  Berry  alla 
l'y  visiter,  pour  le  maintenir  dans  ses  bonnes  dispositions.  Le  len- 
demain et  les  jours  suivants,  les  seigneurs  parcoururent  fré- 
quemment les  rues.  Les  conseillers  du  parlement  et  de  la  cour  des 
comptes  furent  obligés,  quoi  qu'il  leur  en  coûtât,  de  chevaucher, 
avec  leurs  gens  armés,  pour  maintenir  l'ordre  dans  la  ville  *. 

1.  Ch.  d'Artois,  comte  d'Eu.  Né  en  1393,  il  avait  le  même  âge  que  Riche- 
mont. Il  était  fils  de  Phil.  d'Artois,  comte  d'Eu  (-}-  1397),  et  de  Marie  de 
Berry,  fille  du  duc  de  Berry,  mariée  ensuite,  en  1400,  à  Jean  l",  duc  de 
Bourbon. 

2.  Moiistrelet,  II,  429.  Xi»  1479  f»%  283  V  et  284.  X**  4790,  f  38  v».  D.  Plan- 
cher, III,  397.  Moreau,  1424,  n»  61. 

3.  X»"  4790,  fo  38  v». 

i.  Monstrelet,  II,chap.  GXV,  p. 428. Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  1. 1, 142-14i.  Il 


32  JEAN-SANS-PEUR   DEVANT   PARIS   (1414) 

Le  7  février,  le  duc  de  Bourgogne  vint  s'établir  à  Saint-Denis, 
d'où  il  envoya  son  roi  d'armes,  Artois,  avec  des  lettres  pour  le 
roi,  la  reine,  le  duc  de  Guyenne  et  les  Parisiens.  On  ne  le  laissa 
pas  entrer  dans  Paris,  et  le  comte  d'Armagnac  lui  déclara  que,  si 
lui,  ou  un  autre  envoyé  du  duc  de  Bourgogne,  pénétrait. dans  la 
ville,  on  lui  couperait  la  tête.  Le  samedi,  10  février,  Jean-sans- 
Peur  rangea  ses  troupes  en  bataille  sur  les  hauteurs  de  Mont- 
martre. Il  espérait  que  cette  vue  encouragerait  les  Parisiens  à 
prendre  les  armes.  Ses  coureurs  parurent  jusque  dans  le  mar- 
ché aux  porcs;  Enguerrand  de  Bournonville*  s'avança  jusqu'au- 
près de  la  porte  Saint-Honoré,  avec  400  hommes;  mais  les  Pari- 
siens, contenus  par  la  crainte  que  leur  inspirait  le  terrible  comte 
d'Armagnac,  n'osèrent  répondre  à  ce  pressant  appel  ^. 

Le  même  jour,  le  duc  de  Bourgogne  et  ses  partisans  furent 
déclarés  rebelles,  ennemis  du  bien  public,  et  le  roi  appela  aux 
armes  tous  ses  vassaux  pour  combattre  leurs  criminelles  entre- 
prises. Le  lendemain,  pendant  la  nuit,  Jean-sans-Peur  fît  atta- 
cher aux  portes  de  Notre-Dame  et  du  palais  et  en  divers  autres 
endroits  des  lettres  où  il  se  plaignait  des  Armagnacs,  qui  tenaient 
le  roi  et  le  Dauphin  «  en  servage  »  et  où  il  affirmait  son  bon  droit, 
avec  la  ferme  volonté  de  le  défendre.  Il  quitta  Saint-Denis  dans  la 
nuit  du  15  au  16  février,  pour  aller  dans  ses  Etats  réunir  de  plus 
grandes  forces.  Le  dimanche,  25  février,  au  parvis  Notre-Dame, 
devant  l'Université,  l'évêque  de  Paris  et  le  peuple,  on  brûla  le 
discours  de  J.  Petit.  Enfin,  dans  un  conseil  tenu,  le  2  mars,  à 
l'hôtel  Saint-Paul,  il  fut  décidé  que  Charles  VI  irait  combattre 
les  rebelles,  et  tous,  même  le  Dauphin,  jurèrent  qu'ils  poursui- 
vraient le  duc  de  Bourgogne,  jusqu'à  ce  que  lui  et  les  siens 
fussent  détruits,  ou  au  moins  humiliés,  et  remis  en  l'obéissance 
du  roi.  Le  comte  de  Richemont  assistait  à  ce  conseil  et  jura  aussi 
la  ruine  de  Jean-sans-Peur  ^. 

est  étonnant  que  le  bourgeois  de  Paris  ne  parle  point  de  cette  démonstra- 
tion. Voir  p.  47,  48.  Xi»  4790,  f»  38.  D.  Félibien,  I,  774,  775;  IV,  539.  H.  Van- 
denbroeck,  Consaux,  I,  107. 

1.  Capit.  de  la  garde  du  duc  de  Bourgogne  {Arch.  des  aff.  étr.,  t.  21, 
fo  134). 

2.  Religieux,  V,  243-247.  Monstrelet,  II,  432.  X«'  1479,  f»  285.  «  Ce  dit  jour, 
environ  neuf  heures  avant  disner,  se  sont  les  seigneurs  de  la  court  levez 
et  partiz  de  la  chambre,  pour  ce  que  l'on  a  rapporté  que  le  duc  de  Bour- 
goigne  estoit,  à  grant  effort  de  gens  d'armes,  ordonnez  comme  en  bataille, 
entre  la  porte  Saint-Honoré  et  la  porte  Saint-Deniz,  tenant  les  champs 
devant  Paris  ;  et,  pour  en  savoir  quelque  chose,  je  montay  au  plus  hault 
de  la  tour  criminelle  de  céans  et  viz  lesdits  gens  d'armes  es  champs 
d'entre  le  Rôle  et  Montmartre.  «  (Xi»  4790,  f»  40.)  «^ 

3.  D.  Plancher,  111,  398-402.  D.  Félibien,  IV,  p.  559.  K  60,  nos  4^  5.  Reli- 
gieux, V,  249-269  et  271-279,  287.  Monstrelet,  II,  438,  439,  441-457,  464;  VI, 


RICHEMOÎST  LIEUTENANT  DU  DAUPHIN   (1414)  33 

Une  maladie  épidémique  retarda  quelque  temps  le  départ  du 
roi;  mais  une  partie  de  l'armée,  avec  le  connétable  d'Albret,  alla 
d'abord  asssiéger  Gompiègne.  Le  mercredi  4  avril  1414,  le  roi 
partit  de  Paris,  avec  un  brillant  cortège  de  princes,  de  seigneurs 
et  une  multitude  de  gens  de  guerre.  Tous,  même  le  roi,  por- 
taient la  bande  ou  écharpe  d'Armagnac,  au  lieu  de  la  «  noble 
et  droite  croix  blanche,  que  lui  et  ses  prédécesseurs  avaient  tou- 
jours portée  en  armes  *  ».  Il  laissait  à  Paris  les  ducs  de  Berry  et 
d'Anjou. 

Il  avait  retenu,  le  31  mars,  à  son  service,  aux  gages  de  600  li- 
vres tournois  par  mois,  le  comte  de  Richemont,  avec  50  hommes 
d'armes.  Par  lettres  datées  du  même  jour,  il  avait  ordonné  que 
le  jeune  prince  breton  fût  attaché  à  la  personne  du  Dauphin,  duc 
de  Guyenne,  sous  lequel  il  commandait,  à  1000  livres  de  gages 
par  mois,  3000  hommes  d'^armes  et  1500  hommes  de  trait.  Il  y 
avait  dans  cette  compagnie  des  capitaines  comme  l'amiral  Gli- 
gnet  de  Brebant,  David  de  Rambures,  miître  des  arbalétriers, 
Arnauld  Guilhem  de  Barbazan.  —  Parmi  les  Bretons  que  Riche- 
mont  conduisait,  on  remarque  Jean  de  Gambout,  son  maître 
d'hôtel,  et  Jean  de  Ghâteaugiron,  son  secrétaire  et  trésorier  ^. 

L'armée  royale,  réunie  à  Senlis,  alla  continuer  le  siège  de 
Gompiègne,  avec  le  connétable.  Le  comte  de  Richemont,  qui 
était,  pour  ainsi  dire,  le  lieutenant  du  Dauphin,  se  trouvait  déjà 
au  premier  rang  parmi  les  chefs  de  l'armée.  Il  fut  chargé  de 
bloquer  la  ville  d'un  côté,  avec  le  duc  d'Orléans  et  les  comtes 
d'Eu  et  d'Alençon,  pendant  que  le  duc  de  Bar  '  et  le  comte  d'Ar- 
magnac la  bloquaient  de  l'autre.  Gompiègne  ne  tarda  pas  à  capi- 
tuler (7  mai  1414)  *  et  l'armée  alla  aussitôt  assiéger  Soissons.  Gette 
forte  place  fut  vaillamment  défendue  par  un  des  capitaines  les  plus 
renommés  du  parti  bourguignon,  Enguerrand  de  Bournonville. 

139-144;  221.  X»"  1479,  fo^  285  v»,  286  v».  X'»  4790,  f»'  40,  41  v",  44.  Fr. 
n»  708.  25709,  P.  Fenin,  édition  Dupont,  35.  Clair.,  t.  82,  f"  6453.  —  Arch.  du 
min.  des  aff.  étr.,  t.  21,  f»  132  v».  H.  Vandenbroeck,  Consaux,  I,  108-110. 

1.  Monstrelet,  II,  p.  466.  JJ  167,  f-  557.  X»»  4790,  f»^  49  V,  50. 

2.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  904  et  suiv.  —  Préparatifs  contre  le  duc 
de  Bourgogne.  Fr.  25709,  n"^  706-708,  711.  Fr.  26040,  n"  4862.  Clair.,  t.  20, 
l'o  1409;  t.  31,  f»  2341;  t.  33,  f»  2429;  t.  81,  f»  6355;t.  96,fo  7479;  1. 100,  f»  111  ; 
t.  113,  f»'  8879-8381.  LL,  214,  f»  273.  D.  Grenier,  89,  f»  238.  X'"  1479,  f'^  287, 
289.  JJ  167,  fo'^  607-608.  Le  Bourg,  de  P.,  49,  50.  Jouv.  des  U.,  267,  272. 
Monstrelet,  II,  465.  Religieux,  V,  281.  Berry,  427.  Moreau,  1424,  nos  62,  62', 
62^.  De  Smet,  Chroniques  de  Flandre,  t.  III,  p.  345  et  suiv.  Le  Fèvre  de 
Saint-Remy,  I,  158  et  suiv.  X»»  4790,  f»»  36,  120  v». 

3.  Edouard  III,  fils  de  Robert,  duc  de  Bar,  et  de  Marie  de  France, 
deuxième  fille  du  roi  Jean  le  Bon  et  de  Bonne  de  Luxembourg. 

4.  Fenin,  39.  Religieux  de  Saint-Denis,  V,  303-305.  Jouvenel  des  U.,  275. 
Monstrelet,  III,  p.  1-3. 

Richemont.  3 


34  SIÈGES  DE  SOISSONS  ET  d'ARRAS    (1414) 

Le  lundi  21  mai,  avant  l'assaut,  le  comte  de  Richemont  fut  fait 
chevalier,  avec  Louis  de  Bavière  et  plusieurs  autres  seigneurs. 
Après  un  combat  terrible,  les  assaillants  allaient  être  encore  re- 
poussés, quand  des  Anglais  de  la  garnison  '  ouvrirent  une  porte 
à  d'autres  Anglais  qui  se  trouvaient  dans  l'armée  royale.  En- 
guerrand  de  Bournonville  fut  pris  tout  sanglant,  couvert  de 
blessures.  La  ville  subit  toutes  les  horreurs  de  la  guerre.  Ni  les 
maisons,  ni  les  monastères,  ni  les  églises  ne  furent  épargnés. 
Au  milieu  du  pillage  et  du  massacre,  les  soldats  assouvissaient 
encore  leurs  fureurs  bestiales.  Les  chroniqueurs  s'accordent  à 
flétrir  ces  atrocités.  «  11  n'est  point  chrestien  qui  n'eust  pitié  de 
voir  l'horrible  et  très  misérable  désolacion  qui  fut  faicte  en 
icelle  ville.  »  Ces  hideuses  scènes  durent  faire  une  impression 
profonde  sur  l'esprit  du  jeune  comte  de  Richemont,  qui  fut 
aussi  impuissant  que  les  autres  chefs  à  contenir  la  frénésie  de 
ses  Bretons  ^. 

L'armée  royale  marcha  ensuite  contre  le  duc  de  Bourgogne. 
Richemont  suivait  toujours  le  Dauphin.  Il  assista  au  conseil  où 
fut  agité  le  sort  de  la  ville  de  Bapàume  ^,  qui  s'était  rendue.  Le 
roi  fit  grâce  aux  habitants  *.  Le  siège  d'Arras,  qui  fut  la  der- 
nière opération  de  cette  campagne,  dura  environ  cinq  semaines 
(28  juillet-4  septembre).  Le  duc  de  Bourbon  et  le  connétable  ar- 
rivèrent le  28  juillet,  avec  l 'avant-garde.  Derrière  eux  vint  se 
placer,  en  deuxième  ligne,  le  comte  de  Richemont,  avec  les  Bre- 
tons. Les  assiégés,  commandés  par  Jean  de  Luxembourg^,  se  dé- 
fendirent vaillamment.  Ils  avaient  des  arquebuses,  ou  canons  à 
main,  d'invention  nouvelle,  qui  firent  beaucoup  de  mal  aux 
troupes  royales.  Le  roi  avait  une  bonne  artillerie,  mais  il  parait 
qu'elle  ne  fut  pas  toujours  bien  dirigée,  parce  que  les  Bourgui- 
gnons avaient  gagné  le  chef  des  canonniers.  Du  côté  où  com- 
mandait Richemont,  il  y  avait  une  grosse  pièce,  nommée  la 
Bourgeoise,  qui  d'abord  produisit  de  grands  ravages  dans  la 
place  et  devint  bientôt  inoffensive.  Richemont  en  fut  averti.  Il 
menaça  de  mort  le  traître,  s'il  ne  faisait  son  devoir;  mais  cet 


1.  Le  duc  de  Bourgogne  négociait  alors  avec  Henri  V.  Ces  négociations 
aboutirent  à  la  convention  de  Leicester  (23  mai),  qui  fut  confirmée  par  le 
traité  d'Ypres  (de  Beaucourt,  Charles  VU,  I,  132-134). 

2.  Monstrelet,  III,  1-11.  Le  Religieux,  témoin  oculaire,  V,  303-327,331. 
X'»  1479,  f»  296.  D.  Félibien,  II,  776.  Bourg,  de  P.,  52,  53,  note  2.  X'»  4790, 
f»  81  vo.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  165-166,  370.  Fr.  25709,  no  708. 

3.  Arrond.  d'Arras. 

4.  JJ  167,  f«s  556,  557. 

5.  Jean  II  de  Luxembourg,  seigneur  de  Beaurevdr.  Richemont  épousa 
en  troisièmes  noces  sa  nièce  Catherine,  en  1445. 


TRAITÉ  d'aRRAS    (1414,    4   SEPTEMBRE)  35 

homme  s'enfuit  dans  la  ville  et  donna  aux  assiégés  des  rensei- 
gnements dont  ils  profitèrent. 

De  part  et  d'autre  on  se  fatiguait  du  siège,  quoique  des  joutes, 
des  festins ,  des  chevauchées  dans  le  voisinage  apportassent 
quelques  diversions  aux  ennuis  de  cette  campagne.  Enfin,  là, 
comme  devant  Bourges,  la  dyssenterie  faisait  beaucoup  de  vic- 
times. Tout  cela  détermina  le  roi  et  le  duc  de  Guyenne  à  écouter 
les  propositions  que  la  comtesse  de  Hainaut  *,  le  duc  de  Bra- 
bant  ^  et  les  députés  des  trois  états  de  Flandre  vinrent  apporter, 
au  nom  du  duc  de  Bourgogne.  Un  traité  fut  conclu,  grâce  à  l'insis- 
tance du  Dauphin  (4  septembre  1414).  Le  duc  de  Bourgogne  fît 
remettre  au  roi  les  clefs  de  la  ville  et  de  la  cité  d'Arras  ;  les 
Armagnacs  ôtèrent  leur  écharpe,  les  Bourguignons  leur  croix  de 
Saint-André,  et  les  partis  semblèrent  réconciliés  encore  une  fois^. 

Un  grave  accident  hâta  le  départ  de  l'armée  royale.  Le  feu, 
ayant  pris  au  logis  du  comte  d'Alençon,  gagna  tout  le  camp, 
dans  l'espace  d'un  quart  d'heure.  Il  fallut  s'enfuir  précipi- 
tamment. Des  prisonniers,  des  malades  laissés  dans  les  tentes, 
périrent  au  milieu  des  flammes.  Au  retour,  le  roi  s'arrêta  quel- 
que temps  à'Senlis  *.  Le  29  septembre,  il  retint  à  son  service  le 
comte  de  Richeraont,  avec  500  hommes  d'armes  et  100  hommes 
de  trait,  à  cheval,  pour  être  continuellement  en  sa  compagnie 
et  en  celle  du  duc  de  Guyenne  ^.  Artur  revint  à  Paris  le  14  octo- 
bre, avec  le  roi  et  le  Dauphin.  Le  duc  de  Berry  vint  à  leur  rencon- 
tre. Sur  le  passage  du  cortège,  la  foule  criait  ;  «  Noël!  vive  le  roi 
et  son  fils,  le  haut  duc  d'Aquitaine  ''!  » 

Cependant,  le  malheureux  Charles  VI  était  retombé  dans  sa 
maladie  ordinaire.  Le  Dauphin  gouvernait  ',  mais,  à  cause 
de  son  humeur  versatile,  il  était  toujours  surveillé  par  les  princes 
du  parti  armagnac.  Le  vieux  duc  de  Berry  cherchait  d'ailleurs  à  se 
l'attacher  par  sa  générosité.  Il  lui  donna  son  beau  château  de 

1.  Marguerite  de  Bourgogne,  fille  de  Philippe-le-Hardi,  mariée  à  Guil- 
laume IV  de  Bavière^  comte  de  Hainaut. 

2.  Antoine  de  Bourgogne,  fils  de  Philippe-le-Hardi. 

3.  Monstrelet,  III,  18,  24,  30-32;  VI,  164  et  siiiv.  Religieux,  V,  347,  361- 
363,  371-399.  P.  Fenin,  48-50.  Jouv.  des  U.,  276-278.  Bourg,  de  P.,  55.  Gruel, 
187.  D.  Mor.,  I,  456.  D.  Plancher,  ïll,  413-418.  P.  2298,  P^  133-150.  Xi»  1479, 
fo  304.  Xia  8602,  fos  291,  292.  Fr.  23709,  n»  710.  Moreau,  1424,  n»  64.  —  De 
Beaucourt,  Charles  VII,  I,  134,  135  note  2.  —  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I, 
181  et  suiv. 

4.  Religieux,  V,  381,  445.  Monstrelet,  III,  34.  Bourg  de  P.,  55. 

5.  Preuves  de  D.  Mor.,  II,  col.  908.  Richemont  était  au  Conseil  le  6  oc- 
tobre (Fr.  21 403,  f»  63).  Appendice  X. 

6.  Monstrelet,  III,  47.  Religieux,  V,  447. 

7.  Le  22  septembre,  à  Senlis,  le  roi  lui  avait  donné  le  gouvernement. 
i,Xia  8602,  f-  291.) 


36  RICFIEMOM   FAVORI   DU   DAUPHIN 

Mehun-sur-Yèvre  •  et  de  riches  joyaux.  Néanmoins,  le  Dauphin, 
las  de  la  surveillance  qui  pesait  sur  lui,  tenta  de  s'y  soustraire, 
avec  Taide  des  Bourguignons  qui  étaient  encore  à  Paris.  Un 
complot  fut  tramé  pour  chasser  les  chefs  armagnacs  de  la  capi- 
tale. Les  gens  du  quartier  des  Halles  devaient  prendre  les  armes, 
mettre  le  duc  de  Guyenne  à  leur  tête  et  tuer  tous  ceux  qui  s'op- 
poseraient à  leur  entreprise.  Dans  ce  danger,  les  bons  offices  de 
Richemont  ne  furent  sans  doute  pas  inutiles  à  ses  amis  les  Arma- 
gnacs. Les  ducs  d'Orléans  et  de  Bourbon,  prévenus  à  temps, 
entourèrent  le  Louvre  de  troupes,  pour  garder  le  Dauphin,  et 
chassèrent  de  Paris  quiconque  était  soupçonné  d'être  attaché  au 
parti  bourguignon. 

Le  comte  de  Richemont  était  alors  occupé  à  licencier  300 
Bretons  de  sa  compagnie,  qui  étaient  restés  aux  environs  de  la 
capitale,  où  ils  vivaient  de  pillage,  en  attendant  leur  solde.  Par 
lettres  du  24  octobre,  il  lui  fut  alloué  900  livres,  afin  qu'il  pût 
payer  ses  gens  d'armes  et  les  renvoyer  en  Bretagne  ^,  Vers  la  fin 
de  ce  même  mois,  le  Dauphin  quitta  brusquement  Paris,  comme 
s'il  eût  voulu  s'enfuir,  et  se  dirigea  vers  le  Berry.  Aussitôt  Riche- 
mont partit,  avec  le  comte  de  Vertus,  pour  l'aller  rejoindre,  soit 
que  cela  eût  été  convenu  entre  eux  et  le  Dauphin,  soit  plutôt 
parce  que  les  ducs  de  Berry  et  d'Orléans  craignaient  qu'il  ne 
se  rendit  auprès  de  Jean-sans-Peur.  En  tout  cas,  les  deux  jeunes 
princes  étaient  chargés  de  ramener  à  Paris,  le  plus  tôt  possible, 
le  duc  de  Guyenne.  Ils  allèrent  à  Bourges,  puis  au  château  de 
Mehun-sur-Yèvre,  et  revinrent  tous  les  trois  à  Paris,  vers  le 
commencement  de  décembre  ^. 

Soit  que  la  surveillance  dont  Richemont  entourait  le  Dauphin 
fût  adroitement  dissimulée,  soit  qu'il  fût  d'accord  avec  lui  pour 
tromper  les  Armagnacs,  il  n'avait  jamais  joui  d'une  faveur  plus 
complète,  et  il  en  reçut  alors  une  preuve  éclatante.  Par  lettres 
du  29  décembre  1414,  le  roi  lui  donna  le  gouvernement  du 
duché  de  Nemours  *,  qui  appartenait  à  Charles  III,  roi  de  Na- 
varre. Ce  prince,  bien  différent  de  son  père,  Charles  le  Mauvais, 
était  d'un  caractère  doux,  pacifique  et  loyal.  Très  attaché  au 
duc  de  Bourgogne,  il  l'avait  soutenu  pendant  la  guerre  civile, 
et  il  se  trouvait  compromis  après  sa  défaite,  comme  tous  ses 


1.  Arrondissement  de  Bourges. 

2.  Religieux,  V,  449.  J.  de  Cambout,  maître  d'hôtel,  et  J.  de  Château- 
giron,  trésorier  de  Richemont,  reçurent  du  roi  chacun  100  I.  t.  en  récom- 
pense de  leurs  services  (Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  909). 

3.  Monstrelet,  III,  53.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  195,  196. 

4.  Nemours,  arrondissement  de  Fontainebleau. 


IL  A   LE   GOUVERNEMENT   DU   DUCHÉ   DE   NEMOURS  37 

autres  partisans  *.  On  n'alla  pas  jusqu'à  confisquer  son  duché 
de  Nemours,  mais  le  roi,  c'est-à-dire  le  duc  de  Guyenne,  déclara 
qu'il  en  reprenait  possession  et  en  donnait  le  gouvernement, 
jusqu'à  nouvel  ordre,  au  comte  de  Richemont. 

Il  y  avait  là  une  sorte  d'adoucissement  à  la  mesure  rigoureuse 
qui  frappait  le  roi  de  Navarre.  Nul  ne  pouvait  gouverner  ses  do- 
maines avec  des  soins  plus  dévoués  que  son  neveu  Artur  de 
Bretagne,  et  ces  considérations  avaient  déterminé  le  choix  du 
roi.  S'il  en  eût  été  autrement,  si  Richemont  avait  profité  de  son 
crédit  pour  se  faire  donner,  d'une  manière  déguisée,  les  biens 
de  son  oncle,  il  eût  montré  par  là  une  ambition  peu  scrupuleuse  ; 
mais  il  est  bien  plus  vraisemblable  que,  ne  pouvant  obtenir  pour 
lui  une  amnistie  complète,  il  chercha  ainsi  à  lui  rendre  ser- 
vice ^ 

Il  ne  quitta  guère  Paris  pour  exercer  les  nouvelles  fonctions 
que  le  roi  lui  confiait.  Il  usa  sans  doute  du  droit  de  nommer  un 
lieutenant,  chargé  de  gouverner,  à  sa  place,  le  duché  de  Ne- 
mours, car  il  assista,  le  3  janvier  1413,  au  service  solennel  qui 
fut  célébré  à  Notre-Dame,  en  l'honneur  de  Louis  d'Orléans,  puis 
à  deux  autres  services  semblables,  dans  la  chapelle  des  Géles- 
tins  et  dans  celle  du  collège  de  Navarre.  Il  put  entendre  le 
célèbre  Gerson  faire  l'apologie  de  Louis  dOrléans  et  demander 
que  son  meurtrier  fût  poursuivi,  humilié,  obligé  de  confesser 
son  crime  et  de  faire  réparation.  11  alla  peut-être  voir  son  frère 
le  duc  Bretagne,  et  sa  belle- sœur,  qui  étaient  venus  à  Mon- 
targis  auprès  de  la  reine  Isabeau;  mais  on  le  retrouve  encore 
à  Paris  le  26  janvier,  au  conseil  du  roi,  avec  les  ducs  d'Orléans 
et  de  Berry.  A  ce  moment,  Jean  V  était'  déjà  revenu  à  Nantes  ^ 

Au  commencement  de  février,  une  nouvelle  ambassade,  con- 
duite par  le  comte  de  Dorset  *,  oncle  de  Henri  V,  vint  à  Paris, 
pour  négocier  le  mariage  de  Catherine  de  France  avec  le  roi 
d'Angleterre.  Richemont  assista  probablement  aux  fêtes  que  le 
roi  donna  en  l'honneur  des  ambassadeurs  anglais;  mais  on  ne 
voit  pas  qu'il  ait,  comme  le  duc  d'Alençon  ^  et  plusieurs  autres 


1.  Alain  Bouchard,  f"  \M.  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  21  (France),  f»»  123, 
124  v%  125  V.  Xi<^  4789,  f»  206  v". 

2.  Voy.  Append.fXI.  Le  roi  de  Navarre  avait  beaucoup  de  dettes.  Il  devait 
notamment  une  somme  considérable  au  duc  de  Bretagne  et  à  ses  frères, 
à  cause  du  mariage  de  leur  mère  (Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  871-874). 

3.  Monstrelet,  III,  So-57.  Pièces  orig.,  t.  2157,  n»  494.  —  Arch.  de  la 
Loire-Inf.,  cass.  33,  E,  90. 

4.  Thomas  Beaufort,  frère  de  Henri  IV. 

5.  Le  comté  d'Alençon  fut  érigé  en  duché  le  1"  janvier  1415,  en  faveur 
de  Jean  I"  (X»»  8602,  f»  201  v»). 


38  LE  DAUPHIN   s'empare   UU   POUVOIR   (1415) 

princes,  rompu  des  lances  devant  la  reine  et  la  duchesse  de 
Guyenne.  Enfin,  le  13  mars,  il  jura  la  paix  d'Arras,  qui  venait 
d'être  ratifiée,  après  de  nouvelles  négociations  avec  la  comtesse 
de  Hainaut  *. 

Peu  après  la  confirmation  du  traité  d'Arras,  le  Dauphin 
accomplit  un  petit  coup  d'Etat  auquel  Richemont  ne  resta  pas 
étranger,  quoiqu'il  fût  contraire  aux  intérêts  de  son  parti.  Le 
duc  de  Guyenne  voulait  exercer  lui-même,  sans  tutelle,  le  pou- 
voir, dont  on  ne  lui  laissait  que  l'apparence.  Au  commencement 
d'avril  lilS,  comme  la  reine  Isabeau  était  à  Melun,  le  Dauphin 
l'y  alla  voir.  Les  autres  princes,  qui  étaient  à  Paris,  furent  in- 
vités par  la  reine  et  son  fils  à  se  rendre  auprès  d'eux  Pendant 
qu'ils  étaient  occupés  de  différentes  affaires  avec  la  reine,  le 
Dauphin  partit  secrètement  et  revint  à  Paris.  Il  fit  fermer  les 
portes  de  la  capitale  et  ordonna  aux  princes  de  se  retirer  cha- 
cun dans  ses  domaines  et  de  ne  point  venir  à  Paris,  sans  y  avoir 
été  appelés  par  le  roi  ou  par  lui-même.  Ils  obéirent  et  s'en 
allèrent,  le  duc  de  Berry  à  Dourdan  ^,  le  duc  d'Orléans  à  Orléans, 
le  duc  de  Bourbon  dans  son  duché.  Jean-sans-Peur  était  alors 
dans  ses  États,  le  roi  était  malade  à  l'hôtel  Saint-Paul,  et  le 
duc  de  Guyenne  se  trouva  enfin  maître  absolu  du  gouverne- 
ment •'. 

On  peut  croire  qu'Artur  de  Bretagne  l'avait  bien  secondé 
dans  toutes  ces  circonstances.  Car  il  était  auprès  de  lui  et  jouis- 
sait de  sa  faveur  la  plus  complète.  Après  s'être  fait  nommer  ca- 
pitaine de  la  bastille  Saint-Antoine  (9  avril),  en  place  de  Louis 
de  Bavière,  le  Dauphin  en  confia  aussitôt  la  garde  au  comte  de 
Richemont,  qu'il  prit  pour  lieutenant  (10  avril)  *. 

Il  était  facile  d'exploiter  la  bienveillance  d'un  prince  aussi 
prodigue  que  le  duc  de  Guyenne.  L'occasion  était  bonne  ;  Ri- 
chemont sut  en  profiter.  Il  ne  refusait  au  Dauphin  aucun  ser- 
vice. «  Et  adonc  le  duc  d'Aquitaine,  accompaigné  du  conte 
de  Richemont,  estant  au  Louvre,  osta  sa  femme  de  la  compai- 
gnie  de  la  Royne  et  la  fist  mestre  à  Saint-Gerraain-en-Laye  ^.  »• 

1.  Monstrelet,  III,  59,  60,  62,  et  pièces  justif.,  VI,  164-173.  Rellg.,  V,  403- 
413,  415,  421-437.  X>»  8602  fos  296-299  et  300-301.  Bourg,  de  P.  59.  Le  Fèvre 
de  Saint-Remy,  I,  205-212.  K  57,  no  10.  —  Moreau,  1424,  nos  63,  66.  D.  Plan- 
cher, III,  419-421.  Pièces  orig.  (Orléans,  t.  VII),  n"  496.  D.  Félibien,  I, 
778,  779. 

2.  Arrondissement  de  Rambouillet. 

3.  Monstrelet,  III,  67,  70.  Xi»  8602,  f»  300.  «  Ainsi  demoura  le  duc  de 
Guienne  fort  asseulé  du  sang  royal  et  ne  demora  avec  lui  que  le  conte 
de  Richemont.  »  (Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  I,  214.) 

4.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.,  902  et  suiv. 

5.  Monstrelet,  t,  III,  p.  70.  Le  Dauphin  tenait  alors  auprès  de  lui,  aa 


IL  DONNE  PARTHENAY  A  RICHEMONT   (4415)  39 

Il  voulait,  en  l'éloignant  ainsi,  se  livrer,  sans  contrainte,  à  son 
goût  pour  les  plaisirs.  Jean-sans-Peur  fut  très  irrité  de  cette 
offense,  mais  sa  fille  n'en  garda  pas  un  ressentiment  implacable 
au  comte  de  Richemont.  Quant  au  Dauphin,  il  lui  prodiguait  les 
marques  de  sa  faveur.  Non  content  de  l'avoir  fait  nommer  gou- 
verneur du  duché  de  Nemours  et  lieutenant  de  la  bastille  Saint- 
Antoine,  il  lui  donna  encore  la  seigneurie  de  Parthenay  et 
d'autres  terres  qui  venaient  d'être  enlevées,  par  confiscation,  à 
Jean  Larchevêque,  un  des  plus  puissants  seigneurs  du  Poitou  *. 

Jean  II  Larchevêque,  après  avoir  pris  parti  pour  les  ducs  de 
Berry  et  d'Orléans,  en  1410,  les  avait  abandonnés,  en  1413,  pour 
se  joindre  aux  Bourguignons.  Quand  Jean-sans-Peur  fut  vaincu 
et  humilié  à  son  tour,  ses  partisans  furent  punis  avec  toute  la 
rigueur  qu'il  avait  lui-même  montrée  auparavant  à  l'égard  des 
Armagnacs.  Non  seulement  Jean  Larchevêque  se  vit  enlever  sa 
charge  de  sénéchal  du  Poitou,  mais  encore  le  roi  confisqua  ses 
terres,  pour  cause  de  rébellion  et  de  félonie,  par  lettres  du  6 
mai  1415.  Ces  biens  furent  d'abord  donnés  au  duc  de  Guyenne, 
par  lettres  du  14  mai  suivant,  et  celui-ci  en  gratifia  aussitôt  son 
favori  Artur  de  Bretagne  ^  (23  mai  1415).  Les  domaines  des 
Larchevêque  comprenaient  une  grande  partie  de  la  Gâtine  du 
Poitou,  c'est-à-dire  les  baronies  de  Parthenay,  Secondigny  ^, 
Béceleuf  *,  Coudray-Salbart  ^,  avec  les  nombreux  fiefs  qui  en 
dépendaient,  et,  en  outre,  d'autres  seigneuries,  comme  Vou- 
vant  ®,  Merveut  '  dans  le  Bas-Poitou,  Ghâtelaillon  ^.  Richemont 
devenait  ainsi  possesseur  de  grands  domaines  ;  mais ,  avant 
d'en  avoir  la  jouissance  incontestée,  il  lui  fallut  surmonter  bien 
des  obstacles  ". 

Jean  Larchevêque  ne  se  laissa  pas  dépouiller  sans  résistance. 
Comme  il  était  puissant,  on  dut  envoyer  des  troupes  contre  lui  *". 

Louvre,  une  jeune  fille  nommé  la  Gassinelle  (Jouv.  des  U.,  manuscrit 
Fr.,  S020,  f"  118,  v).  Guill.  Cassinel,  père  de  cette  jeune  fille,  faisait  alors 
partie  du  Conseil  du  roi  {Fr.  25709,  n»  721). 

1.  Bélisaire  Ledain,  Hùt.  de  la  ville  de  Parthenay,  Paris,  A.  Durand, 
1838,  in-S",  p.  202  et  suivantes. 

2.  Appendice,  XII. 

3.  Arrondissement  de  Parthenay. 

4.  Arrondissement  de  Niort. 

5.  Id. 

6.  Arrondissement  de  Fontenay. 
1.  Id 

8.  Arrondissement  de  La  Rochelle. 

9.  Bélisaire  Ledain,  p.  13  et  14. 

10.  Ghron.  de  J.  Raoulet  dans  le  3«  vol.  de  J.  Chartier,  édition  Vallet  de 
V.,  p.  134.  —  Richemont  était  encore  à  Paris  à  la  fin  de  mai  (Fr.  21405, 
^  64,  et  Clair.,  t.  V,  f»  91). 


40  RICIIEMONT   CAPITAINE   GÉNÉRAL   (1415) 

Le  roi  donna  le  commandement  de  ces  troupes  au  comte  de 
Richemont,  avec  le  titre  de  capitaine  général,  en  le  chargeant 
de  réduire  à  la  soumission  le  sire  de  Parthenay  et  ses  alliés  '. 
Cette  petite  armée  se  trouva  réunie  vers  la  fin  de  juin.  On  y 
remarquait  Charles  de  Mauny  et  Guillaume  de  La  Forest,  che- 
valiers, Guillaume  Baron,  Jean  de  Dercé,  David  Tanac,  Jacob  du 
Fou  et  beaucoup  d'autres  écuyers,  dont  les  noms  se  retrouvent 
dans  les  documents  de  cette  époque.  Richemont  avait  hâte  de 
partir  pour  cette  expédition  qui  l'intéressait  personnellement, 
car  la  guerre  avec  les  Anglais  était  imminente,  et  la  France  allait 
avoir  besoin  de  toutes  ses  forces^.  Il  s'empara  promptement  des 
places  de  Jean  Larchevèque  ;  celle  de  Vouvant  lui  fut  livrée  par 
la  femme  même  de  ce  seigneur^.  Parthenay,  qui  était  une  des  plus 
fortes  villes  du  Poitou  "*,  avait  été  mise  en  état  de  défense  et 
pouvait  résister  longtemps.  Richemont  en  faisait  le  siège,  quand 
il  fut  rappelé  par  des  lettres  pressantes  du  roi  et  du  Dauphin. 
Henri  V  avait  envahi  la  France  (août  1415),  pris  Harfleur  ^,  qui 
était  alors  le  principal  port  de  la  Normandie  ^  (14  septembre), 
et  il  s'avançait  vers  Calais. 

Richemont  leva  aussitôt  le  siège  de  Parthenay  et  se  hâta  d'al- 
ler rejoindre  le  duc  de  Guyenne  (octobre  1415).  Il  emmenait  une 
nombreuse  compagnie,  qui  comprenait  plus  de  500  chevaliers 
ou  écuyers  bretons,  entre  autres  le  sire  du  Buisson,  qui  portait 
sa  bannière,  Bertrand  de  Montauban,  Edouard  de  Rohan,  etc.  De 
son  côté,  le  duc  de  Bretagne  marchait,  à  la  tête  10  000  hommes, 
au  secours  du  roi  de  France,  son  beau-père,  qui  était  à  Rouen, 
avec  le  Dauphin,  le  duc  deBerry  et  le  duc  d'Anjou.  Le  Dauphin  ' 
prit  pour  lieutenant  le  comte  de  Richemont  et  lui  donna  le  com- 
mandement de  ses  gens  d'armes,  ainsi  que  son  enseigne.  L'armée 
française,  avec  le  connétable  d'Albret,  les  ducs  d'Orléans,  de 
Bourbon  et  d'Alençon  le  comte  de  Vendôme,  le  maréchal  de 
Boucicaut  %  s'avança  jusqu'à  la  Somme,  pour  y  arrêter  les  An- 
glais, comme  avant  la  bataille  de  Crécy.  Elle  se  réunit  d'abord 
à  Abbeville.  Parmi  les  grands  seigneurs  qui  la  commandaient, 

1.  Append.,  XIII. 

2.  Appendices,  XII,  XIII. 

3.  Xia4791,  fos273  v»,  274. 

4.  Bélis.  Ledain,  p.  5,  12  et  207,  208. 

5.  Arrondissement  du  Havre. 

6.  Monstrelet,  III,   83.  Bourg,   de  Paris,  61,  62.  Religieux,  V,  337-543. 
Gruel,  187.  Fenin,  38,  Fr.  26040,  nos  4989-4991. 

7.  Le  Dauphin  avait  été  nommé,  le  26  avril  1415,  lieutenant  et  capitaine- 
général  pour  le  fait  de  la  guerre  (J,  369,  n°  22). 

8.  Jean  le  Meingre  de  Boucicaut,  maréchal  de  France,  un  des  capi- 
taines les  plus  illustres  de  cette  époque. 


OVASION  DE  HENRI  V   (1415)  41 

se  trouvait  Artur  de  Bretagne.  Il  avait  enfin  l'occasion  de  com- 
battre, non  plus  pour  un  parti,  mais  pour  la  France  *. 

Henri  V  passa  la  Somme,  le  19  octobre,  sur  les  ponts  de 
Voyennes  ^  et  de  Béthencourt  %  que  les  habitants  de  Saint- 
Quentin  n'avaient  pas  rompus,  malgré  les  ordres  du  roi.  Le  len- 
demain, dans  un  conseil  tenu  à  Rouen,  il  fut  décidé  qu'on  livre- 
rait bataille  aux  Anglais,  contrairement  à  l'avis  du  vieux  duc  de 
Berry,  qui  n'avait  pas  oublié  le  désastre  de  Poitiers.  Il  obtint  du 
moins  que  le  roi  n'assisterait  pas  à  la  bataille. 

Le  jeudi  24  octobre,  l'armée  française  se  concentra  tout  en- 
tière près  d'Azincourt  ■*,  où  les  Anglais  devaient  passer  le  lende- 
main, pour  aller  à  Calais.  Le  roi  d'Angleterre  s'était  logé  dans 
le  petit  village  de  Maisoncelles,  à  environ  trois  portées  d'arc  des 
Français.  Dans  la  nuit,  le  duc  d'Orléans  fit  appeler  le  comte 
de  Richemont,  et  ils  allèrent,  avec  2000  hommes,  jusqu'auprès 
du  camp  des  Anglais.  Ceux-ci,  craignant  une  attaque,  sortirent 
de  leurs  retranchements.  Une  escarmouche  s'engagea;  mais, 
après  avoir  fait  une  simple  reconnaissance,  le  duc  d'Orléans  et 
Richemont  ramenèrent  leurs  gens  au  camp.  Il  n'y  eut  rien  de 
plus  cette  nuit-là. 

Le  lendemain,  vendredi  25  octobre,  au  point  du  jour,  les  Fran- 
çais commencèrent  à  se  ranger  en  bataille.  Ils  formaient  trois 
corps  de  troupes.  Le  comte  de  Richemont  était  à  l'avant-garde, 
avec  le  connétable  d'Albret,  les  ducs  d'Orléans  et  de  Bourbon, 
le  comte  d'Eu  et  le  maréchal  de  Boucicaut  ^.  Ils  attendirent  les 
Anglais  jusque  vers  dix  heures.  Le  roi  d'Angleterre  envoya 
200archers,  qui,  dérobant  leur  marche  par  une  adroite  manœuvre, 
entrèrent  à  Tramecourt  ®  et  vinrent  s'établir  dans  un  pré ,  tout 
à  côté  de  Tavant-garde  française ,  sans  avoir  été  aperçus.  En- 
suite l'armée  anglaise  s'avança  tout  entière,  en  belle  ordonnance, 
les  archers  en  avant.  Les  Français,  beaucoup  plus  nombreux  que 
leurs  ennemis,  les  attendaient  avec  confiance,  comptant  sur  une 
victoire  assurée.  Les  Anglais  s'approchèrent  en  poussant  un  cri 
terrible,  et  aussitôt  les  archers,  qui  étaient  cachés  tout  près  de 
l'avant-garde  française,  se  mirent  à  lancer  des  traits.  Les  autres, 
au  nombre  d'environ  3000,  s'avançaient  avec  le  reste  de  l'armée 

1.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  921.  D'Argentré,  729.  Le  Baud,  450. 
Monstrelet,  III,  98.  Religieux  de  Saint-Denis,  V,  547.  Fr.  25709,  n»s  726,  727. 
Clair.,  t.  17,  f  1171.  Alain  Bouchard,  f»  152. 

2.  Arrondissement  de  Péronne. 

3.  Id. 

4.  Arrondissement  de  Saint-Pol  (Pas  de-Calais). 

5.  Clair.,  t.  39,  f»  2939. 

6.  Arrondissement  de  Saint-Pol,  c.  du  Parcq, 


4^  BATAILLE  d'aziiscourt  (141o,  25  octobre) 

anglaise,  en  tirant  du  plus  loin  qu'ils  pouvaient,  de  toutes  leurs 
forces.  Les  Français  étaient  tellement  serrés  les  uns  contre  les 
autres,  qu'ils  pouvaient  à  peine  lever  le  bras  pour  frapper.  Les 
traits  lancés  sur  cette  masse  compacte  y  firent,  en  peu  de  temps, 
d'effroyables  ravages.  Un  corps  d'élite,  composé  de  800  hommes 
d'armes  à  cheval  et  commandé  par  l'amiral  Clignet  de  Brebant, 
était  charge  de  rompre  les  archers  anglais;  mais  120  hommes 
seulement  s'élancèrent  avec  Guillaume  de  Saveuse,  qui  fut  aussi- 
tôt précipité  à  terre  et  percé  de  coups.  Les  autres,  incapables  de 
gouverner  leurs  chevaux  au  milieu  d'une  grêle  de  traits,  recu- 
lèrent en  désordre  sur  l'avant-garde,  la  rompirent  en  plusieurs 
endroits  et  la  refoulèrent  dans  des  terres  nouvellement  remuées. 
Dès  lors,  la  déroute  commença.  Ceux  qui  tinrent  pied  furent  mas- 
sacrés par  les  archers  anglais,  qui,  jetant- leurs  arcs  et  leurs 
flèches,  frappaient  avec  les  épées,  les  haches,  les  maillets.  Après 
avoir  enfoncé  Pavant-garde ,  ils  pénétrèrent  jusqu'au  centre  , 
qui  fut  également  rompu.  Sur  le  faux  bruit  quelesFrançaisavaient 
pris  son  camp  et  allaient  tomber  sur  ses  troupes  par  derrière, 
Henri  V  donna  l'ordre  de  tuer  les  prisonniers.  Sa  victoire  fut 
complète.  Le  connélable  d'Albret,  les  ducs  d'Alençon,  de  Bra- 
bant,  de  Bar  et  une  foule  d'autres  grands  seigneurs  périrent  dans 
cette  funeste  journée.  Parmi  ceux  qui  gisaient  sur  cet  horrible 
champ  de  carnage,  on  trouva  le  jeune  comte  de  Richemont 
sous  un  monceau  de  cadavres.  On  le  reconnut  à  sa  cotte  d'armes, 
bien  qu'elle  fût  toute  souillée  de  sang.  On  le  crut  mort,  mais  il 
n'était  que  blessé,  peu  grièvement.  Il  resta  prisonnier,  avec  les 
ducs  d'Orléans,  de  Bourbon,  les  comtes  d'Eu,  de  Vendôme  et  le 
maréchal  de  Boucicaut.  Parmi  les  Bretons  de  sa  compagnie,  plu- 
sieurs furent  aussi  faits  prisonniers,  Edouard  de  Rohan,  Olivier  de 
La  Feillée,  Jean  Giffart  et  le  seigneur  du  Buisson  ;  d'autres  furent 
tués,  comme  Jean  de  Ghâteaugiron,  son  secrétaire  et  son  tréso- 
rier, Guillaume  de  La  Forest,  son  maréchal,  Bertrand  de  Mon- 
tauban,  Jean  de  Goetquen,  Geoffroy  de  Malestroit,  Guillaume 
Le  Veer,  etc.  *. 

1.  Sur  la  bataille  d'Azincourt,  voir  :  Fr.  de  Kausler,  Atlas  des  balailles, 
Mersebourg,  1839,  Atlas,  feuille  IX.  J.  de  Waurin,  édition  anglaise  de 
W.  Hardy,  193,  205-221,  230.  Le  Bourgeois  de  Paris,  p.  64,  65.  Le  Fèvre 
de  Saint-Remy,  I,  240-238,  269.  Harris  Nicolas,  History  of  the  battle  of 
Azincourt,  London,  1832,  in-8»,  2»  édition,  notamment  p.  108,  110,  138  et 
les  cartes.  Walsingham,  Ypodigma  Neustris,  464-467.  Historia  Anglic,  II, 
311-314.  C.-A.  Gole,  Memorials  of  Henry  the  fifth,  London,  1858,  in-8", 
p.  46,  122,  123.  Chronicle  of  J.  Harding  (témoin  oculaire),  Londini,  1543, 
fo  210.  Holinshed,  Chronicles  of  England,  II,  551.  Rolls  of  Parliament,  IV, 
70,  85,  94,  106.  J.  Stevenson,  II,  2»  partie,  759.  Graftori's  chronicle,  I, 
518.  J.  Endell  Tyler,  Henry  of  Monmouth,  London,  1838,  2  vol.  in-S",  11^ 


RICHEMONT  PRISONNIER  43 

Le  duc  de  Bretagne  apprit  bientôt  ces  tristes  nouvelles.  Il 
s'était  avancé  jusqu'à  Amiens,  avec  le  désir  de  prendre  part  à 
la  bataille,  bien  qu'on  lui  ait  reproché  son  inaction.  Il  avait  in- 
sisté pour  qu'on  acceptât  aussi  le  secours  de  Jean-sans-Peur, 
qui  voulait  venir;  mais  les  Armagnacs  n'y  avaient  point  con- 
senti. Quoi  qu'il  en  soit,  on  ne  peut  que  maudire  encore  les 
funestes  rivalités  dont  les  conséquences  se  faisaient  si  cruelle- 
ment sentir  ^  Les  troupes  des  ducs  de  Bretagne  et  de  Bour- 
gogne auraient  peut  être  empêché  le  désastre  d'Azincourt,  et 
même,  à  en  croire  un  auteur  breton  ^,  les  Anglais  ont  avoué 
qu'ils  auraient  abandonné  le  champ  de  bataille  si,  épuisés 
comme  ils  l'étaient,  ils  avaient  eu  à  combattre  de  nouveaux 
ennemis. 

Richemontfut  «  mené  au  roi  d'Angleterre,  qui  fut  plus  joyeux 
de  sa  prinse  que  de  nul  des  autres,  car  il  avoit  ja  oye  la  rumeur 
de  luy  et  creoit  (aussi  font  tous  Anglois)  les  prophéties  de  Mer- 
lin, qui  dient,  ainsi  qu'ils  trouvent  en  leurs  escripts,  qu'un  prince 
nommé  Artur,  né  de  la  Bretagne  armoricane,  portant  un  sangler 
en  son  enseigne,  si  comme  faisoit  ledit  comte  de  Richemont, 
doibt  conquérir  Angleterre,  et,  après  ce  qu'il  en  aura  débouté  la 
génération  des  Anglois,  la  repeuplera  du  lignage  breton  ^  »  Ce 
serait  pour  ce  motif  que,  du  vivant  de  Henri  V,  on  ne  put  jamais 
obtenir  le  rachat  du  comte  de  Richemont  ^. 

Sans  attacher  autant  d'importance  à  cette  tradition  et  à  l'effet 
qu'elle  avait  pu  produire  sur  l'esprit  de  Henri  V,  on  remarquera 
que  ce  prince  ne  voulut  jamais  consentir  à  la  libération  définitive 
de  son  captif.  Ainsi  Richemont  perdit  la  haute  situation  qu'il 
occupait  déjà,  malgré  sa  jeunesse,  à  la  cour  de  France.  Sa  car- 
rière, si  brillamment  commencée,  allait  être  interrompue  par 
une  longue  captivité.  Il  n'avait  encore  que  vingt-deux  ans. 

163  et  suiv.  P.  Fenin,  62-66.  Religieux  de  Saint-Denis,  V,  553-571,  573-581. 
Monstrelet,  III,  95,  120.  Berry,  430.  Jouv.  des  U.,  312-314.  Gruel,  187,  188. 
Cagny,  f°  80  v°.  A.  Cliampollion,  Lettres  des  rois,  II,  338.  H.  Vaudenbroeck, 
Consaux,  I,  124.  E.  Hardy,  Origines  de  la  tactique  française,  Dumaine, 
1879,  in-8°,  t.  I,  467-476. 

1.  Jouv.  des  U.,  p.  297-300  et  308-310.  JJ  160,  f»  1.  Toutefois  beaucoup 
de  seigneurs  bourguignons  combattirent  à  Azincourt.  Deux  fils  de  Phi- 
lippe-le-Hardi,  Antoine,  duc  de  Brabant  et  Philippe,  comte  de  Nevers,  y 
furent  tués.  Quant  à  Jeaa-sans-Peur,  il  resta  en  relations  avec  Henri  V 
pendant  cette  désastreuse  campagne  (de  Beaucourt,  Charles  Vtl,  I, 
134-137). 

2.  Le  Baud,  p.  451.  P.  Fenin,  66,  Monstrelet,  III,  102. 

3.  Le  Band,  p.  451. 

4.  D'Argentré,  p.  730. 


DEUXIEME  PARTIE 

LA    CAPTIVITÉ    ET    LA    DÉLIVRANCE 
1415-1425 


CHAPITRE  PREMIER 

LA    CAPTIVITÉ    DE    RIGHEMONT    (1415-1422) 

Artiir  en  Angleterre.  —  Il  revoit  sa  mère.  —  Guerre  contre  J.  Larchc- 
vêque.  —  Convention  d'Angers.  —  Invasion  de  Henri  V  en  France.  — 
Massacre  des  Armagnacs.  —  Artur  vient  en  France.  —  Assassinat  de 
Jean-sans-Peur.  —  Emprisonnement  de  Jeanne  de  Navarre.  —  Richemont 
retourne  en  Angleterre.  —  Jean  V  s'allie  avec  Philippc-le-Bon.  —  Il  est 
arrêté  par  les  Pentliièvre.  —  La  duchesse  de  Bretagne  demande  la  déli- 
vrance de  Richemont.  —  Traité  de  Troyes.  —  Traité  de  Corbeil.  — 
Richemont  revient  en  France.  —  Condamnation  des  Penthièvre.  — 
Artur  reçoit  de  Henri  V  le  comté  dTvry.  —  Bataille  de  Baugé.  —  Jean  V 
s'allie  avec  le  Dauphin.  —  Richemont  ramène  Jean  V  à  l'alliance  anglaise. 

—  Il  va  avec  Henri  V  à  Meaux  et  à  Paris.  —  Il  retourne  en  Bretagne. 

—  Il  songe  à  épouser  la  duchesse  de  Guyenne.  —  II  fait  accepter  à  Jean  V 
le  traité  de  Troyes.  —  Mort  de  Henri  V.  —  Situation  d' Artur.  —  Mort 
de  Charles  VI.  —  Avènement  de  Henri  VI  et  de  Charles  VII. 

Après  la  bataille  d'Azincourt,  Henri  V  se  rendit  à  Calais,  où  il 
séjourna  jusque  vers  le  milieu  de  novembre.  Richemont  vit 
arriver  dans  cette  ville  plusieurs  seigneurs  français,  notamment 
L.  d'Estouteville  et  Raoul  de  Gaucourt,  qui  avaient  défendu 
Harfleur  et  qui  venaient,  fidèles  à  leurs  engagements,  se  consti- 
tuer prisonniers.  Le  roi  d'Angleterre  partit  de  Calais,  le  16  no- 
vembre, avec  ses  captifs,  par  une  sombre  et  triste  journée.  Ils 
débarquèrent  à  Douvres  au  milieu  d'une  tempête  de  neige.  Sept 
jours  après,  ils  arrivaient  à  Londres,  où  se  trouvait  Jeanne  de 
Navarre,  veuve  du  roi  Henri  IV  et  mère  de  Richemont  *. 

1.  Monstrelet,  II,  82,  94, 111, 123.  Elmhami  liber  metricus  de  Henrico  Quinto, 
ap.  Ch.-A.  Cole  {Memorials  of  Henry  the  fifth),  p.  112,  113,  124.  Ypodigma 


46  RICHEMONT   CAPTIF  EN   ANGLETERRE 

Henri  V  était  irrité  contre  Artur  de  Bretagne,  qui  avait  com- 
battu dans  les  rangs  de  ses  ennemis.  Il  se  plaignait  aussi  de  son 
frère  Jean  V,  qui,  au  lieu  d'observer  une  stricte  neutralité,  n'avait 
pas  empêché  les  Bretons  de  servir  la  France  et  avait  même  offert 
de  se  joindre  aux  Français  avantla  bataille  d'Azincourt.  Jusqu'ici, 
Henri  V  avait  néanmoins  traité  sa  belle-mère  avec  déférence.  La 
journée  d'Azincourt  fut,  pour  Jeanne  de  Navarre,  le  commence- 
ment de  cruelles  épreuves.  Son  gendre,  le  duc  d'Alençon,  qui 
avait  frappé  Henri  V  dans  la  mêlée,  avait  été  tué;  son  fils  Artur 
était  prisonnier.  Malgré  son  chagrin,  elle  avait  dû  aller,  en  pro- 
cession solennelle,  à  Wetminster,  rendre  grâces  à  Dieu,  pour  une 
victoire  qui  la  blessait  dans  ses  plus  chères  affections  *. 

Quand  elle  apprit  que  son  fils  était  à  Londres,  elle  obtint  laper- 
mission  de  le  voir.  Ily  avait  bientôt  treize  ans  qu'elle  était  séparée 
de  lui.  Elle  voulut  l'éprouver  et  savoir  si,  après  cette  longue  sépa- 
ration, il  reconnaîtrait  encore  sa  mère.  Au  moment  de  l'entrevue, 
elle  mit  à  sa  place  une  de  ses  dames  d'honneur,  qu'elle  chargea 
de  le  recevoir,  et  se  confondit  elle-même  parmi  les  autres.  Bientôt 
les  gardes  amenèrent  le  comte  de  Richemont.  H  alla  s'incliner 
devant  celle  des  dames  qu'il  prit  pour  la  reine,  croyant  saluer  sa 
mère.  Elle  s'entretint  quelques  instants  avec  lui  sans  qu'il  soup- 
çonnât la  supercherie,  puis  elle  lui  dit  d'aller  saluer  les  autres 
dames.  La  reine,  quand  il  s'arrêta  devant  elle,  ne  put  contenir 
davantage  son  émotion.  «  Mauvais  fils,  ne  me  reconnaissez-vous 
pas,  »  dit-elle  en  versant  des  larmes?  A  ces  mots,  à  cette  vue, 
Richemont,  saisi  d'attendrissement,  embrassa  en  pleurant  sa 
pauvre  mère,  et  ils  échangèrent  les  plus  affectueuses  caresses  *. 

Le  bonheur  de  retrouver  sa  mère  apporta  un  adoucissement 
à  sa  captivité.  Elle  lui  donna  des  habits  et  mille  pièces  d'or,  qu'il 
partagea  généreusement  avec  ses  compagnons  et  avec  ses  gar- 
diens; mais,  dans  la  suite,  il  ne  put  la  voir  autant  qu'il  le  dési- 
rait. Henri  V  était  vindicatif;  il  ne  permit  pas  souvent  ces  en- 
trevues du  fils  et  de  la  mère,  comme  s'il  eût  voulu  les  punir 
l'un  et  l'autre  de  leur  sympathie  pour  la  France.  D'ailleurs 
Artur  de  Bretagne  et  les  autres  captifs  les  plus  illustres  ne  trou- 
vèrent pas,  à  ce  qu'il  semble,  auprès  de  Henri  V,  ces  égards, 
cette  courtoisie,  ces  distractions  qui  jadis  avaient  charmé  la 
captivité  du  roi  Jean  à  la  cour  d'Edouard  HL  Le  comte  de  Riche- 
mont ne  put  conserver  qu'un  seul  valet  de  chambre,  nommé 

Neustrise,  p.  459,  461,  467,  et  Historia  Anglic,  p.  307-309,  314.  B.  Williams, 
Henrici  V  gesta.  London,  1850,  in-8,  p.  58-60.  Gruel,  188.  Bullet.  de  la 
Soc.  de  l'HisL  de  France,  t.  Il  (1835),  p.  260. 

1.  A.  Strickland,  t.  TU,  96-98,  et  suiv. 

2.  Gruel,  188. 


ÉVÉNEMENTS   DE   FRANCE    (1415-1416)  47 

Janin  Gatuyt.  Put-il  du  moins  rester  avec  ses  compagnons  d'in- 
fortune et  tromper  ainsi  les  ennuis  d'une  inaction  forcée,  qui 
devait  peser  à  sa  jeunesse?  On  l'ignore,  car  son  biographe  se 
borne  à  dire  qu'il  demeura  prisonnier  jusqu'en  1420.  Depuis  le 
15  juin  1418  jusqu'au  27  février  1420,  il  fut,  ainsi  que  le  comte 
d'Eu  et  le  tnaréchal  de  Boucicaut,  sous  la  garde  de  Th.  Burton  ; 
mais  on  ne  voit  pas  s'il  leur  était  permis  de  vivre  en  commun 
ou,  du  moins,  d'avoir  des  relations  fréquentes.  Ils  furent  détenus 
dans  le  château  de  Fotheringay,  où  devait  languir  Marie  Stuart  '. 

Pendant  la  captivité  de  Richemont  s'accomplirent,  en  France, 
des  événements  qui  durent  augmenter  encore  sa  peine.  Le  dau- 
phin Louis  mourut  le  18  décembre  1415,  à  l'âge  de  dix-huit  ans. 
Ce  jeune  prince  ne  méritait  pas  de  vives  sympathies  ;  mais  il 
avait  été  le  bienfaiteur,  l'ami  de  Richemont  ^.  Six  mois  après,  le 
vieux  duc  de  Berry  mourut  aussi,  le  15  juin  1416  ^.  Ce  fut  un 
nouveau  deuil  pour  Artur  de  Bretagne,  qu'il  avait  toujours 
traité  comme  un  fils. 

Il  éprouvait,  en  outre,  la  contrariété  de  ne  pouvoir  défendre 
lui-même  ses  intérêts,  gravement  compromis  par  son  absence 
et  par  la  mort  de  ses  plus  puissants  protecteurs.  Obligé  de  quit- 
ter la  Gàtine  avant  d'avoir  soumis  J.  Larchevêque,  il  avait 
laissé  des  troupes  dans  les  places  qu'il  avait  occupées,  sous  le 
commandement  de  son  frère  Richard  de  Bretagne;  mais  J.  Lar- 
chevêque, appuyé  sur  Parthenay,  résistait  avec  succès.  Pour 
mettre  fin  à  une  guerre  qui  désolait  la  Gâtine,  une  convention 
fut  conclue  entre  Charles  VI  et  Jean  Larchevêque  (12  août  1416). 
Celui-ci  recouvra  ses  biens  confisqués  en  1415,  mais  à  condition 
de  les  vendre  au  roi  et  au  dauphin  pour  141  000  écus  d'or,  en 
se  réservant  toutefois  l'usufruit.  Le  roi  s'engageait,  de  son  côté, 
à  lui  faire  rendre  les  places  occupées  par  les  gens  du  comte  de 
Richemont  *. 

A  vrai  dire,  il  n'y  avait  là  qu'une  de  ces  mesures  d'apaise- 
ment dont  les  Armagnacs  avaient  eux-mêmes  bénéficié  pendant 
les  vicissitudes  des  guerres  civiles;  mais  Artur  de  Bretagne  n'en 
fut  pas  moins  irrité  qu'on  profitât  de  son  absence  pour  le  dé- 
pouiller, sans  compensation.  Il  protesta;  il  invoqua  les  droits 
que  lui  conféraient  les  lettres  de  mai  1415;  il  maintint  ses  gar- 
nisons dans  les  places  qu'elles  occupaient,  et  la  guerre  continua 

1.  Proceedings,  t.  III,  119,120,  132.  Insues  of  the  Exchequer,  p.  338,  339. 

2.  Religieux  de  Saint-Denis,  V,  588.  Monstrelet,  III,  131,  dit  que  «  fut 
commune  renommée  qu'il  avait  été  empoisonné.  »  D.  Félibien,  IV,  560, 
361.  Le  Bourgeois  de  Paris,  66,67. 

3.  Monstrelet,  III,  145. 

4.  Bel,  Ledain,  Hist.  de  Parthenay,  p.  209,  210,  214,  213. 


48  GUERRE  CONTRE  J.  LARCHEVÊQUE  (1416) 

dans  la  Gâtine,  malgré  l'inlervenlion  de  commissaires  royaux, 
chargés  de  faire  cesser  les  hostilités  '.  Le  pays  fut  cruellement 
ravagé  par  les  Bretons  de  Richemont  et  par  les  Picards  que  le 
duc  de  Bourgogne  avait  envoyés  au  secours  de  J.  Larchevéque^. 
Ces  derniers  ayant  pris,  saccagé  et  brûlé  le  château  de  la 
Roche-Faton  (près  de  Parthenay),  de  nouvelles  plaintes  s'éle- 
vèrent contre  ces  dévastations.  Le  dauphin  Charles  ^,  comte  de 
Poitou,  se  trouvait  alors  dans  l'Ouest.  Il  réunit  à  Saumur  les 
Etats  du  Poitou,  au  mois  de  juin  1417.  Les  députés  de  Poitiers 
«  furent  chargés  d'exposer  au  prince  les  maux  infinis  que  ces 
pilleries  et  roberies  causaient  aux  populations  et  de  le  supplier 
d'y  porter  un  remède  prompt  et  efficace  "*  ». 

Celte  affaire  présentait  plus  de  difficultés  qu'elle  n'en  parait 
comporter  de  prime  abord .  Elle  se  rattachait  à  cette  intermi- 
nable lutte  des  Armagnacs  et  des  Bourguignons,  qui,  aux 
périls  de  la  guerre  étrangère,  ajoutait  ceux  des  discordes  ci- 
viles. Jean  Larchevêque,  encouragé,  soutenu  par  le  duc  de  Bour- 
gogne, avait  tout  intérêt  à  s'en  tenir  à  la  convention  du  12  août 
1416,  qu'il  n'avait  point  refusé  d'exécuter.  Pour  le  satisfaire, 
il  fallait  donc  sacrifier  le  comte  de  Richemont.  Le  nouveau 
dauphin  Charles,  qui  n'avait  pas  encore  quinze  ans,  n'était  pas 
en  état  de  résoudre  cette  question  ;  mais  il  était  habilement 
dirigé  par  sa  belle-mère  Yolande  d'Aragon,  tandis  que  le  comte 
d'Armagnac,  devenu  connétable,  exerçait  le  pouvoir  à  Paris. 

Veuve  du  roi  de  Sicile,  Louis  II  d'Anjou  ^  Yolande  consacrait 
aux  intérêts  de  ses  enfants  une  active  sollicitude  et  toutes  les 
ressources  d'un  esprit  supérieur.  Elle  négociait  alors  le  mariage 
de  son  fils  aîné,  Louis  III  d'Anjou,  avec  Isabelle,  fille  aînée  du 
duc  de  Bretagne.  Elle  profita  de  cette  circonstance  pour  oble- 

1.  Lettres  du  10  septembre  1416,  par  lesquelles  le  roi  ordonne  à  L.  d'Am- 
boise,  à  Guill.  Thoreau,  à  Guill.  de  Luce  d'aller  en  Poitou,  pour  y  faire 
cesser  les  hostilités  entre  le  sire  de  Parthenay  et  ses  adversaires  {Arch. 
de  la  Loire-Inf.,  cass.  38,  E,  104.) 

2.  Bel.  Ledain,  p.  211. 

3.  Son  frère  Jean,  duc  de  Touraine,  2»  dauphin,  était  mort  à  Compiègne 
le  5  avril  1417.  Monstrelet  prétend  qu'il  fut  aussi  empoisonné,  comme  le 
duc  de  Guienne  (III,  168),  et  P.  Fenin  (p.  70)  exprime  le  même  soupçon. 
Les  écrivains  bourguignons  ont  sans  doute  accrédité  ce  bruit.  (Vallet 
de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  I,  24;  de  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VU, 
t.  I,  20-22.) 

4.  Bel.  Ledain,  Hist.  de  Parthenay,  p.  211. 

5.  Louis  II  d'Anjou,  roi  de  Sicile,  mourut  le  29  avril  1417.  Il  avait 
épousé  en  1400  Yolande  d'Aragon,  fille  de  Jean  I""",  roi  d'Aragon.  Leurs 
enfants  étaient  Louis  III,  René,  Charles  (comte  du  Maine),  Marie  (femme 
de  Charles  VII)  et  Yolande,  qui  épousa  François  de  Bretagne,  fils  aîné  de 
Jean  V  et  neveu  de  Richemont  (Anselme,  I,  231,  232,  235). 


CONVENTION  d'angers  (1417)  49 

nir  de  Richemont,  par  l'entremise  de  Jean  V,  les  concessions 
dont  on  avait  besoin  *.  Artur  consentit  à  traiter  avec  le  Dauphin 
et  donna  pleins  pouvoirs  au  duc,  son  frère.  Par  une  convention 
conclue  le  2  juillet  1417,  à  Angers,  entre  le  Dauphin  et  Jean  V, 
il  fut  stipulé  que  Richemont  garderait  en  toute  propriété  la  sei- 
gneurie de  Châtelaillon,  mais  qu'il  renoncerait  à  tous  les  autres 
domaines  confisqués  sur  J.  Larchevèque  en  1415;  qu'il  retirerait 
ses  garnisons  des  forteresses  où  elles  étaient  et  que  le  sire  de 
Pouzauges  en  prendrait  possession,  au  nom  du  roi  ou  du  Dau- 
phin, excepté  les  places  de  Mervent  et  de  Goudray-Salbart,  pour 
lesquelles  le  statu  quo  était  maintenu;  enfin  qu'une  amnistie 
pleine  et  entière  serait  accordée  aux  partisans  du  comte  de  Ri- 
chemont et  de  son  frère  Richard,  ainsi  qu'à  leurs  adversaires. 
Toutefois  J.  Larchevèque,  considéré  comme  rebelle,  de  même 
que  le  duc  de  Bourgogne,  fut  exclu  de  celte  amnistie.  Il  résista 
aux  troupes  du  roi  et  ne  posa  les  armes  qu'au  mois  d'août, 
quand  Jean-sans-Peur  eut  lui-même  fait  la  paix  avec  le  Dauphin 
(traité  de  Pouilly,  11-19  juillet  1419).  Le  sire  de  Parthenay 
obtint  des  conditions  honorables,  pour  lui  et  pour  ses  partisans 
(31  août).  Après  l'assassinat  de  Jean-sans-Peur,  il  ne  persévéra 
pas  dans  son  attachement  au  parti  bourguignon;  il  confirma 
même,  par  un  nouveau  contrat  du  19  novembre  1419,  la  vente 
de  ses  domaines  au  Dauphin  ^. 

En  ce  qui  concernait  Richemont,  cette  afi'aire  semblait  défini- 
tivement réglée  par  la  convention  du  2  juillet  1417,  mais  elle 
était  loin  de  toucher  à  sa  fin.  Des  événements  qui  intéressaient 
à  d'autres  titres  le  captif  s'accomplirent  à  cette  époque.  Le 
3  juillet  1417  fut  stipulé,  à  Angers,  le  mariage  de  sa  nièce  Isa- 
belle avec  Louis  d'Anjou  ^.  Ces  relations,  qui  rapprochaient  plus 
intimement  les  maisons  de  Bretagne  et  d'Anjou,  ne  devaient  pas 
être  sans  influence  sur  la  destinée  de  Richemont.  Dans  la  suite, 
Yolande  et  ses  enfants  furent  pour  lui  de  précieux  auxiliaires. 

Vers  la  même  époque,  Henri  V  fit  une  nouvelle  expédition  en 
France,  et,  s'il  faut  en  croire  le  témoignage  de  Le  Baud  ^,  il  avait 

1.  De  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  Vif,  I,  70. 

2.  Bel.  Ledaim,  Hist.  de  Parthenaij,  212-221.  Le  principal  épisode  de  celte 
guerre  fut  le  siège  de  Parthenay  par  le  comte  de  Vertus,  Phil.  d'Orléans, 
■qui  commandait  l'armée  royale  (mai-septembre  1419).  Gousinot,  176.  J,  183, 
n»  135.  J  186,  n»  86,  f  15.  Fr.  21405,  f»  90. 

3.  Les  fiancés  étant  encore  enfants,  le  mariage  ne  devait  avoir  lieu  que 
plus  tard,  mais  il  ne  se  ût  pas,  et  Isabeau  de  Bretagne  épousa,  le  le  octo- 
bre 1430,  Guy  de  Laval.  (D.  Morice,  I,  463,  et  Preuves,  II,  col.  947.  Anselme, 
I,  456,  457.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  4,  E,  10,  et  cass.  76,  E,  179,  avec 
la  signature  de  Yolande.) 

4.  Le  Baud,  p.  452,  455.  —  Ce  témoignage  unique  n'est  pas  probant.  Aucun 

RiCHKMONT.  i 


50  INVASION    DE   HENRI   V   (1417) 

amené  son  prisonnier  avec  lui.  Richemont  aurait  donc  assisté^ 
spectateur  forcé,  à  cette  campagne,  pendant  laquelle  les  Anglais 
s'enfoncèrent  plus  profondément  au  cœur  de  la  France;  il  aurait 
été  témoin  de  l'horrible  carnage  et  des  exécutions  qui  signalèrent 
la  prise  de  Gaen  par  Henri  V  (4  septembre  1417).  Le  duc  de  Bi-e- 
tagne,  voyant  les  Anglais  maîtres  du  Gotentin,  craignit  pour  ses 
Etats.  Il  conclut  une  trêve  avec  le  roi  d'Angleterre  et  prit  l'en- 
gagement de  rappeler  tous  les  Bretons  qui  étaient  au  service  de 
la  France  (16  novembre)  '.  Par  son  entremise,  le  jeune  duc  d'An- 
jou et  sa  mère  firent,  le  même  jour,  une  trêve  semblable  pour 
le  Maine  et  l'Anjou,  avec  la  permission  du  roi  ^. 

La  France,  ainsi  abandonnée  de  tous,  envahie  par  les  Anglais, 
était  encore  attaquée  par  le  duc  de  Bourgogne.  Depuis  la  bataille 
d'Azincourt^  le  duc  de  Bretagne  avait  essayé  plusieurs  fois  de  le 
réconcilier  avec  le  Dauphin  et  avec  les  Armagnacs,  qui  gouver- 
naient en  son  nom.  Après  avoir  enlevé,  à  Marmoutier ',  Isabeau 
de  Bavière,  qui  s'alliait  maintenant  avec  lui,  pour  échapper  au 
joug  du  connétable  d'Armagnac  (2  novembre  1417),  Jean-sans- 
Peur,  opposant  la  reine  au  Dauphin,  continua  la  guerre.  Alors 
Richemont  put  voir  se  creuser  de  plus  en  plus  l'abîme  où  la 
France  allait  s'engloutir.  Les  Bourguignons  entrèrent  à  Paris, 
dans  la  nuit  du  28  au  29  mai  1418,  et  massacrèrent  les  Arma- 
gnacs. Il  y  eut  dès  l(jrs  deux  gouvernements,  celui  du  Dauphin 
et  celui  de  Jean-sans-Peur.  Bientôt  Henri  V  s'empara  de  Rouen 
(19  janvier  1419)  et  continua  la  conquête  de  la  Normandie  *. 
Jamais  la  France  n'avait  couru  de  si  grands  périls. 

Le  duc  de  Bretagne,  qui  jouait  le  rôle  de  médiateur  entre  le 
Dauphin,  le  duc  de  Bourgogne  et  le  roi  d'Angleterre  ^,  alla  trou- 
ver ce  prince  à  Rouen,  vers  la  fin  de  février.  Il  conclut  avec  lui 
une  trêve  pour  la  Bretagne  (19  mars)  et  travailla,  sans  grand 
succès,  au  rétablissement  de  la  paix  générale  ^.  Il  profita  de  ses- 

document  ne  le  confirme.  D.  Morice  (I,  463)  et  D.  Lobineau  n'en  ont  tenu 
aucun  compte,  —  Walsingham,  Hisloria  anglic.,  II,  321,  et  Monstrelet,  III, 
188,  n'en  parlent  pas  davantage. 

1.  Rymer,  IV,  3^  partie,  24,  25.  Toutefois  le  duc  de  Bretagne  permit 
encore  à  ses  sujets  d'aller  servir  le  Dauphin,  et  beaucoup  de  compagnies 
bretonnes  firent  montre  à  Chinon,  à  Bourges,  à  Poitiers,  aux  ordres  du 
Dauphin.  (D.  Morice,  I,  463). 

2.  Rymer,  IV,  3^  partie,  23,  24.  Autorisation  donnée,  à  Paris,  "par  le  roi, 
le  10  novembre  1417  {Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  76,  E,  177). 

3.  Près  de  Tours. 

4.  Monstrelet,  III,  260,  283.  Fenin,  p.  90. 

5.  K  60,  nos  10,  12.  X»»  8603,  fos  36-43.  —  De  Beaucourt,  Charles  VII, 
t.  r,  77,  103,  109,  295,  443. 

6.  D.  Lobineau,  I,  336,  et  t.  II,  col.  927.  D.  Morice,  I,  470.  De  Beaucourt,. 
I,  293,  296.  —  Archives  de  la  Loire-Inf,,  cass.  47,  E,  121. 


AUTUR  VIENT  EN  FRANCE  (1419)  51 

entrevues  avec  Henri  V  pour  lui  parler  aussi  de  son  frère  Artur, 
qui  aspirait  ardennment  à  redevenir  libre  *.  Le  roi  d'Angleterre 
tenait  trop  à  gagner  l'alliance  de  la  Bretagne  ^  pour  opposer 
à  Jean  V  un  refus  absolu.  Il  permit  donc  à  Richemont  de  venir 
en  Normandie,  avec  Gh.  d'Artois,  comte  d'Eu,  pour  traiter  de 
sa  rançon.  Dès  la  fin  d'avril,  les  deux  captifs  étaient  prêts  à 
quitter  l'Angleterre  ^  mais  c'est  seulement  vers  le  20  août  qu'ils 
partirent  de  Southampton  pour  Harfleur,  où  ils  espéraient  ren- 
contrer Henri  V. 

Combien  de  temps  Richemont  resta-t-il  en  France?  Alla-t-il 
en  Bretagne?  Quels  furent  ses  pourparlers  avec  Henri  V?  Il  sem- 
ble impossible  de  répondre  à  ces  questions,  mais  on  peut  du 
moins  affirmer  qu'il  n'obtint  pas  sa  liberté.  Des  événements  qui 
l'intéressaient  à  plus  d'un  titre  s'accomplissaient  alors  en  France. 
Les  Anglais,  après  avoir  pris  Avranches  et  Pontorson,  avaient, 
malgré  la  trêve,  fait  des  courses  en  Bretagne.  Jean  V  dut  rap- 
peler les  troupes  qu'il  avait  envoyées,  avec  son  frère  Richard, 
dans  le  Poitou,  seconder  celles  du  Dauphin  contre  J.  Larche- 
vêque,  toujours  soutenu  par  le  duc  de  Bourgogne  *.  Cette 
nouvelle  guerre,  suspendue  par  le  traité  de  Pouilly  &  (11  juillet), 
fut  terminée  par  celui  de  Parthenay-le-Vieux  (31  août).  En  ce 
qui  concerne  Richemont,  il  n'y  eut  par  là  rien  de  changé  à  la 
convention  d'Angers  du  2  juillet  1417  ^  Il  est  probable  qu'il  était 
encore  en  France  quand,  après  des  négociations,  auxquelles 
avait  participé  le  duc  de  Bretagne,  Jean-sans-Peur  fut  assassiné 

1.  11  ea  était  de  même  pour  les  autres  captifs.  Dès  1417,  L,  de  Bourbon, 
comte  de  Vendôme,  avait  traité  avec  Henri  V  et  donné  comme  garants  les 
ducs  d'Orléans  et  de  Bourbon,  et  le  comte  de  Richemont;  mais  Henri  V 
exigea  une  fançon  trop  forte  (Rymer,  IV,  2«  partie,  p.  196;  J.  Stevenson, 
t.  II,  2«  partie,  p.  377).  Pour  le  duc  d'Orléans,  voir  K  64,  n»»  37'',  37*. 

2.  Le  12  mars,  Henri  V,  sur  la  demande  du  Dauphin,  accorde  un  sauf- 
conduit  à  Simon  Vernis,  envoyé  par  le  duc  de  Bretagne  à  son  frère  Artur, 
en  Angleterre  (Rymer,  IV,  3"  partie,  90).  Le  9  mars,  sauf-conduit  pour 
deux  envoyés  qui  vont  vers  le  comte  d'Eu.  En  même  temps,  le  Dauphin 
négociait  avec  Henri  V  {Idem,  97,  98). 

3.  Ils  étaient  alors,  avec  le  maréchal  de  Boucicaut,  à  Fotheringay,  sous 
la  garde  de  s.  Th.  Burton  {Issues  of  the  Exchequer,  p.  338,  359,  379; 
J.  Stevenson,  I,  392-394).  Avant  le  3  mai,  ils  déclarent  qu'ils  vont  aller 
trouver  Henri  V  en  Normandie,  pour  traiter  de  leurs  rançons  (Delpit, 
Doc,  français  qui  sont  en  Angletetre,  p.  226).  Ils  partirent  vers  le  20  août 
de  Southampton  {Issues  of  the  Exch.,  p.  360,  361). 

4.  D.  Lobineau,  I,  336;  II,  col.  905.  D.  Morice,  I,  470,  471.  Le  Fèvre  de 
Saint-Remy,  I,  370  et  suiv. 

5.  Près  de  Melun  (le  Bourg,  de  Paris,  126).  Voir  ci-dessus,  p.  49. 

6.  B.  Ledain,  Hist,  de  Parthenay,  p.  214-220.  Moreau,  1425,  nos  77a,  b.^  78, 
79.  X'»  8604,  fos  38,  39.  De  Beaucourt,  I,  143-152.  Arch.  du  mitiislère  des 
aff.  étr.,  t.  20,  f-  308  v».  JJ  171,  fos  90  V,  92,  94.  Le  Bourgeois  de  Paris,  126. 


52  ASSASSINAT  DE  JEAN-SANS-PEUR   (1419) 

sur  le  pont  de  Montereau  *  par  les  conseillers  du  Dauphin 
(10  septembre).  Prémédité  ou  non  par  les  Armagnacs,  ce  crime 
aggrava  la  situation  déjà  si  triste  de  la  France.  Le  nouveau  duc 
de  Bourgogne,  Philippe-le-Bon,  voulut  venger  son  père,  dût-il 
livrer  aux  Anglais  le  royaume  de  ses  ancêtres  ^ 

En  présence  de  ce  danger,  le  Dauphin  et  ses  conseillers  de- 
mandèrent des  secours  en  Espagne,  en  Ecosse,  en  Bretagne.  Ils 
comptaient  sur  Jean  V,  mais  celui-ci  ne  voulut  pas  envoyer  de 
troupes  à  son  beau-frère,  soit  que  le  crime  de  Montereau  eût 
excité  son  indignation,  soit  qu'il  redoutât  le  duc  de  Bourgogne 
et  le  roi  d'Angleterre,  unis  maintenant  par  une  étroite  alliance  '. 
Les  Anglais  menaçaient  toujours  la  Bretagne.  Pour  comble  de 
malheur,  le  duc  apprenait  alors  que  sa  mère,  Jeanne  de  Navarre, 
accusée  d'avoir  eu  recours  à  des  maléfices,  dans  le  but  de  nuire 
à  son  beau-fils  Henri  V,  avait  été  emprisonnée.  Comme  son  père, 
Gharles-le-Mauvais,  elle  passait  pour  pratiquer  la  sorcellerie.  A 
cette  époque,  une  accusation  de  ce  genre,  si  peu  fondée  qu'elle 
fût,  était  toujours  dangereuse  *.  Jean  V  envoya  l'évêque  de 
Nantes,  J.  de  Maleslroit,  avec  une  ambassade  auprès  du  roi  d'An- 
gleterre, pour  solliciter  la  mise  en  liberté  de  sa  mère  ^.  Ce  n'était 
donc  pas  le  moment  d'irriter  Henri  V  en  s'alliant  contre  lui  avec 
le  Dauphin.  Quant  à  Richemont,  on  ne  sait  quelle  fut  son  atti- 
tude dans  ces  circonstances  difficiles.  Il  était  peut-être  retourné 
déjà  en  Angleterre,  où  on  le  retrouvera  bientôt  ^. 

Jean  Louvet,  Pierre  Frotier,  Tanguy  du  Ghastel,  Guillaume 
d'Avaugour,  hommes  déterminés  et  peu  scrupuleux,  étaient  alors 
les  principaux  conseillers  du  régent.  Tandis  qu'ils, cherchaient 
de  tous  côtés  des  secours,  le  duc  de  Bourgogne  envoyait  des 
mandements  royaux  qui  défendaient  de  donner  aide  ou  conseil 
au  Dauphin  et  qui  ordonnaient  même  de  lui  résister.  On  dit  que 
la  reine  Isabeau  aurait  alors  écrit  au  duc  de  Bretagne,  son 

1.  Montereau-faut-Yonne,  arrondissement  de  Fontainebleau. 

2.  Sur  l'assassinat  de  Jean-sans-Peur,  voir  de  Beaucourt,  Hist.  de  Char- 
les VU,  t.  I,  eh.  V,  p.  159-178;  t.  II,  631-658.  Moreau,  1425,  nos  82-86.  — 
23  décembre  1419,  traité  entre  Henri  V  et  le  duc  de  Bourgogne.  (Moreau, 
nos  91^  92.  Xia  8604,  f»  41  v».  Voir  aussi  f»  45  et  suiv.  X»»  8603,  fos  55,  56. 
59-61.  K  60,  no  15.) 

3.  D.  Morice,  I,  472.  D.  Lobineau,  I,  540. 

4.  Agnès  Strickland,  t.  III,  101.  —  Walsingham,  Historia  anglic,  t.  II, 
p.  331.  —  Issues  ofthe  Exch.,  p.  362. 

5.  D.  Morice,  t.  I,  473. 

6.  Un  document  classé  à  tort  parmi  ceux  de  1419,  dans  les  Preuves  de 
l'hist.  de  Bretagne  (II,  col.  995-997),  pourrait  faire  croire  que  le  duc  de 
Bretagne  eut,  après  le  crime  de  Montereau,  une  entrevue  à  Saumur  avec 
le  Dauphin,  et  que  Richemont  y  assistait;  mais  cette  pièce  se  rapporte  aux 
conférences  de  Saumur  en  1425, 


ARRESTATION  ET  CAPTIVITÉ  DE  JEAN  V  (1420)  53 

gendre,  pour  le  dissuader  de  secourir  son  fils.  Quoi  qu'il  en  soit, 
Jean  V  ne  voulut  pas  se  déclarer  pour  le  régent  contre  le  duc 
de  Bourgogne  *.  Les  Armagnacs,  irrités,  ourdirent  alors  un  com- 
plot avec  les  Penthièvre  contre  le  duc  de  Bretagne,  pour  lui 
opposer  Olivier  de  Blois,  petit-fils  de  Charles  de  Blois,  le  com- 
pétiteur de  Jean  de  Montfort.  Jean  de  Blois,  seigneur  de  Laigle, 
frère  d'Olivier,  était  auprès  du  Dauphin.  Les  conseillers  du  jeune 
prince  promirent  aux  Penthièvre  de  les  soutenir,  s'ils  parve- 
naient à  s'emparer  de  Jean  V,  et  le  Dauphin  les  y  aurait  même 
autorisés  par  lettres  scellées  de  son  sceau  ^ 

La  vieille  Marguerite  de  Glisson,  qui  haïssait  toujours  les  Mont- 
fort,  stimula  son  fils  Olivier  avec  son  énergie  habituelle  et  pré- 
para le  guet-apens  où  elle  voulait  attirer  Jean  V.  Cela  était  d'au- 
tant plus  facile  que  la  réconciliation  entre  les  Montfort  et  les 
Penthièvre  semblait  alors  complète.  Le  duc  de  Bretagne,  invité 
par  Olivier  de  Blois  et  par  sa  mère  à  une  fête  au  château  de 
Ghamptoceaux  ^,  fut  arrêté  traîtreusement,  avec  son  frère  Ri- 
chard, par  le  comte  de  Penthièvre  et  Ch.  d'Avangour  *,  le  13  fé- 
vrier 1420.  Quelques  semaines  après,  le  Dauphin,  qui  était  alors 
à  Carcassonne,  écrivait  à  Jean,  comte  de  Penthièvre,  et  à  son 
frère  Charles,  pour  leur  recommander  de  bien  garder  le  duc  de 
Bretagne  et  Richard  (16  mars  1420)  ^ 

Cet  événement,  qui  coïncide  avec  l'époque  la  plus  sombre  de 
notre  histoire,  marque  une  nouvelle  phase  dans  la  vie  de  Riche- 
mont.  Ses  deux  frères  captifs,  leur  héritage  menacé,  c'était  à  lui 
qu'il  appartenait  de  prendre  en  mains  leurs  intérêts  communs, 
de  punir  les  Penthièvre  et  de  délivrer  les  prisonniers  ;  mais,  captif 
lui-même,  que  pouvait-il  faire  ?  Cette  difficulté  ne  découragea 
pas  sa  belle-sœur,  la  duchesse  de  Bretagne,  qui,  comme  autrefois 
Jeanne  de  Flandre,  comtesse  de  Montfort,  montra  un  courage 

1.  Monstrelet,  t.  III,  p.  357-3S8.  Vallet  de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  I, 
p.  190.  Jean  V  conclut  même  un  traité  avec  Phllippe-le-Bon,  le  9  décembre 
1419  (de  Beaucourt,  I,  202,  note  2). 

2.  Monstrelet,  IV,  29.  D.  Morice,  t.  I,  473.  Le  Baud,  p.  453.  D'Argentré, 
p.  736.  Vallet  de  V.,  Ilist.  de  Charles  VII,  t.  I,  p  140,  197.  De  Beaucourt, 
Hist.  de  Charles  VII,  I,  202  et  suiv.  Charles  VI  accusa  lui-même  le  Dau- 
phin de  complicité  avec  les  Penthièvre;  mais  ce  pauvre  roi  était  alors 
entre  les  mains  des  Anglais,  qui  voulaient  brouiller  Jean  V  avec  le  Dauphin, 
et  cette  accusation  a  ici  fort  peu  de  valeur  (voy.  Append.  XYII).  En  tout 
cas,  il  semble  certain  que  le  Dauphin  se  déclara  plus  tard  contre  les  cou- 
pables et  les  traita  comme  tels  (X»»  9200,  fos  269  v»,  270). 

3.  Arrondissement  de  Cholet. 

4.  Monstrelet,  IV,  29-31.  D.  Morice,  I,  473,  et  Preuves,  II,  col.  998-1003, 
1070-1080.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr.,  t.  II,  France,  à  1420  (non  paginé). 
Ch.  de  Blois,  seigneur^d'Avangour,  frère  d'Olivier  de  Blois. 

5.  Voy.  Append.  XIV. 


54  OÎN   DEMANDE   LA   DÉLIVRANCE   d'ARTUR   (1420) 

tout  viril,  tandis  que  Jean  V  s'abaissait  aux  prières  et  deman- 
dait qu'on  lui  laissât  la  vie,  même  au  prix  de  sa  couronne  '.  La 
duchesse  convoqua  les  Etats  de  Bretagne  à  Vannes,  se  présenta 
au  milieu  d'eux,  avec  ses  jeunes  enfants,  François  et  Pierre, 
toucha  l'assemblée  par  ses  larmes  et  la  conjura  de  prendre  au 
plus  tôt  les  mesures  nécessaires  pour  délivrer  les  captifs.  En 
même  temps,  elle  envoyait  une  ambassade  au  Dauphin,  son  frère  *, 
pour  lui  demander  s'il  avait  autorisé  le  crime  des  Penlhièvre; 
elle  obtenait,  par  l'influence  de  Tanguy  du  Ghastel ,  qull  ne 
leur  donnât  plus  de  secours;  elle  leur  faisait  une  rude  guerre, 
grâce  au  dévouement  des  seigneurs  bretons  fidèles  à  leur  duc. 
Dans  la  séance  du  23  février  1420,  les  Elats  décidèrent,  d'un 
commun  accord,  qu'on  poursuivrait  la  délivrance  du  comte  de 
Richemont  avec  toute  la  diUgence  et  par  toutes  les  voies  possi- 
bles ^.  Il  fallait  un  chef  qui,  par  son  rang,  sinon  par  ses  talents, 
pût  commander  à  tous,  sans  conteste.  La  duchesse  écrivit  plu- 
sieurs fois  au  roi  d'Angleterre,  et  lui  envoya  des  ambassadeurs 
pour  le  prier  de  consentir  à  la  délivrance  de  son  beau-frère,  le 
comte  de  Richemont,  ou,  tout  au  moins,  «  de  le  prêter  pour  un 
temps  à  elle  et  au  pays  de  Bretagne.  »  Ainsi,  dit-elle,  dans  sa 
lettre  du  5  avril  1420,  «  vous  me  alégerez  fort  de  ma  trislaicie 
et  doleur  et  espoir  me  garderez  de  mort,  car,  par  ce,  je  aure 
espérance  a  brief  recovrer  la  personne  de  mondit  seigneur  et 
espoux,  et,  en  outre,  ferez  audit  paiis  un  tel  plaisir  qu'il  ne  sera 
jamais  oubliz.  »  La  fille  de  Charles  VI  en  était  réduite  à  implo- 
rer l'assistance  d'un  roi  ennemi,  qui  combattait  le  Dauphin,  son 
frère,  pour  lui  enlever  son  héritage  ''. 

Le  26  mars,  Henri  V  avait  déjà  fait  aux  précédentes  lettres  de 
la  duchesse  une  réponse  obligeante.  Il  se  montrait  disposé  à  né- 
gocier avec  ses  envoyés  ^,  mais  il  traîna  les  choses  en  longueur. 
Richemont  écrivit  aussi  à  Henri  V,  le  12  avril.  Il  pria  le  roi 
de  permettre  qu'il  allât  vers  lui  pour  traiter  de  sa  délivrance. 
«  Et,  si  Dieux  plaist,  dit-il,  quand  je  seray  par  devers  vous,  je 
feray  tant,  mon  honneur  gai^dé,  que  vous  devrez  être  content;  en 
vous  suppliant  avoir  mondit  seigneur  et  frère  pour  recommand 

1.  D.  Morice,  I,  475. 

2  En  mars,  Adam  de  Cambray  est  envoyé  par  le  Dauphin  en  Bretagne 
(aair.,  24,  MTSSj. 

3.  D.  Morice,  I,  476,  et  Preuves,  II,  col.  1001.  Monstrelet,  IV,  32.  Montres 
des  troupes  levées  pour  délivrer  Jean  V,  col.  1008-1016. 

4.  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1016-1017.  Rymer,  IV,  3«  partie, 
163-164.  Moreau,  704  (Bréquigny,  80),  f»  159. 

5.  Voy.  la  lettre  de  J.  Le  Brun,  secrétaire  du  duc  de  Bretagne,  à  Henri  V, 
dans  Moreau,  704  (Bréquigny,  80),  P^  182  et  187,  et  dans  Champollion-F. 
{Lettres  des  rois,  II,  381). 


résista:sce  de  henri  v  55 

€t  en  desplaisance  la  mauvaise  traison  qui  li  a  esté  faitte... 
Vostre  humble  parent  et  prinsonnier  :  Le  conte  de  Richemont 
Artur.  » 

Le  lendemain,  il  écrivit  au  dauphin  Charles,  pour  le  prier  de 
punir  «  celui  de  Painthèvre  »,  dans  le  cas  où  il  serait  en  sa  puis- 
sance. Il  invoquait  «  la  proximité  de  lignaige  »  qui  unissait  le 
régent  aux  duc  de  Bretagne  et  à  ses  frères  '.  Il  est  probable  que 
le  Dauphin  répondit  à  cette  lettre.  Quant  à  Henri  V,  malgré  toutes 
les  solUcitations,  il  ne  voulut  pas  consentir  au  rachat  de  Riche- 
mont,  non  pas,  comme  le  dit  d'Argentré,  à  cause  des  prophéties 
de  Merlin,  «  qui  lui  donnaient  peur  de  cet  homme  ^  »,  mais  parce 
qu'il  voulait,  en  gardant  ce  précieux  otage,  s'assurer  la  neutra- 
lité, sinon  l'alliance  de  la  Bretagne.  Peut-être  aussi  les  accusa- 
tions dirigées  contre  Jeanne  de  Navarre  avaient-elles  indisposé 
Henri  V  contre  son  fils,  en  lui  faisant  supposer  qu'ir n'était  pas 
étranger  à  ses  prétendues  machinations  ^.  En  tout  cas,  il  est  à  re- 
marquer que  Richemont  fut  alors  détenu  à  la  Tour  de  Londres, 
sous  la  surveillance  de  Roger  Ashton,  lieutenant  du  g;ouverneur 
de  la  Tour.  Néanmoins,  le  roi  d'Angleterre  envoya  des  secours  à 
la  duchesse  de  Bretagne,  pour  l'aider  à  combattre  les  Penthièvre. 
Elle  l'en  remercie  dans  une  lettre  datée  du  20  mai  1420  *. 

Henri  V  était  alors  au  comble  de  la  fortune.  Après  de  nou- 
veaux succès  militaires,  il  avait  conclu  le  traité  de  Troyes,  qui 
lui  donnait  l'héritage  du  royaume  de  France,  avec  la  main  de 
Catherine,  fille  de  Charles  VI  (21  mai  1420)  ^  Il  avait  le  plus 
grand  intérêt  à  faire  ratifier  par  Jean  V  ce  traité,  car  la  duchesse 
de  Bretagne,  sœur  aînée  de  Catherine,  pouvait,  à  plus  forte  rai- 
son, invoquer  les  mêmes  droits  à  la  succession  de  Charles  VI. 
Cette  préoccupation  manifeste  de  faire  accepter  par  la  Bretagne 
le  traité  de  Troyes  contribua  probablement  à  la  délivrance  de 
Richemont. 

Dans  sa  lettre  du  20  mai,  la  duchesse  de  Bretagne  se  borne  à 


1.  Ces  deux  lettres  sont  dans  les  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1017, 
1018;  dans  Ryuier,  IV,  3°  partie,  166,  167;  dans  les  Lettres  des  rois  et  reines, 
publiées  par  A.  Champollion-F.,  Paris,  1848,  t.  11,373,  377;  dans  Moreau, 
704  (Bréquigny,  80),  f»s  165  et  167.  Il  faut  bien  remarquer  que  la  seconde 
n'est  pas  adressée  à  Henri  V,  comme  le  croit  D.  Morice. 

2.  D'Argentré,  739.  Alain  Bouchard,  f*  153. 

3.  B.  Williams,  Henrici  V  gesta,  préface,  p.  xix. 

4.  Proceedings,  II,  274-273.  Lettres  des  rois,  et  II,  392.  Preuves  de  l'hist. 
de  Bret.,  t.  II,  col.  1019-1021,  et  Rymer,  IV,  3«  partie,  170,  171.  Voir  aussi 
Moreau,  704  (Bréquigny,  80),  f»  172. 

5.  Rymer,  IV,  3°  partie,  171-177.  Ordonn.,  XI,  86-90,  91  ;  XII,  284.  Vallel 
de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  1,  233,  236.  JJ  171,  f"'  74-76.  Rolls  of  Pari. 
IV,  133.  Xia  8603,  fo61. 


56  HENRI   V   CÈDE   (1420) 

remercier  Henri  V  de  ses  secours,  sans  lui  parler  de  son  beau- 
frère,  mais  elle  lui  adresse  une  prière  discrète,  en  demandant 
que  le  roi  continue  de  la  secourir.  Peu  après,  elle  chargea  le 
chancelier,  Jean  de  Malestroit,évêque  de  Nantes,  et  Guil.  de  Mon- 
tauban  d'aller  faire  une  nouvelle  tentative  auprès  de  Henri  V  en 
faveur  de  Richemont  (15  juin  1420)  *. 

C'était  le  moment  où  le  roi  anglais,  après  avoir  célébré  son 
mariage  avec  Catherine  de  France  (2  juin),  s'emparait  de  Sens, 
de  Montereau  (juin)  ^  et  assiégeait  Melun,  avec  le  duc  de  Bour- 
gogne, Pendant  ce  siège  mémorable,  que  la  vaillance  de  Bar- 
bazan  devait  prolonger  plus  de  quatre  mois  (juillet-no vembre)^ 
Henri  V  avait  amené  à  Gorbeil  le  malheureux  Charles  VI,  ainsi 
que  la  reine  Isabeau  et  sa  fîlle  Catherine.  C'est  à  Corbeil  que  se 
rendirent  les  envoyés  bretons  J.  de  Malestroit,  G.  de  Montauban 
et  Raoul  le  Sage,  tandis  que  leur  compagnon,  J.  Le  Brun,  se- 
crétaire de  Jean  V,  allait  demander  au  comte  de  Salisbury  ^  des 
secours  contre  les  Penthièvre  et,  au  besoin,  contre  le  Dauphin, 
puis  passait  en  Angleterre,  auprès  de  Richemont  *. 

Les  ambassadeurs  trouvèrent  sans  doute  un  auxiliaire  puis- 
sant dans  la  jeune  reine  d'Angleterre,  dont  l'éclatante  beauté 
avait  produit  une  impression  profonde  sur  le  cœur  du  conqué- 
rant. Il  est  vraisemblable  que  la  duchesse  de  Bretagne  sut  inté- 
resser sa  sœur  Catherine  à  la  réussite  de  ses  démarches.  En  tout 
cas,  Henri  V  finit  par  se  laisser  fléchir.  Il  permit  que  Richemont 
fût  amené  en  France,  "et,  en  attendant  son  arrivée,  il  commit  les 
évêques  de  Worcester  et  de  Rochester  pour  régler,  avec  les  en- 
voyés bretons,  les  conditions  de  son  élargissement  (12  juil- 
let 1420) ^ 

A  cette  date,  le  duc  de  Bretagne  n'était  plus  captif.  Acca- 
blés par  des  revers  continuels,  abandonnés,  au  milieu  du  péril, 
par  ces  mêmes  ministres  du  Dauphin  qui  les  y  avaient  con- 
duits ^,  les  Penthièvre  avaient  été  forcés  de  relâcher  leur  pri- 

1.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1019-1021. 

2.  II  est  certain  que  Richemont  n'était  pas  auprès  de  Henri  V,  au  siège 
de  Montereau,  comme  on  le  pourrait  croire  d'après  un  fragment  de  chro- 
nique donné  pfft"  Vallet  de  V.,  dans  son  édition  de  J.  Chartier  (III,  245). 

3.  Thomas  de  Montagu,  comte  de  Salisbury. 

4.  Monstrelet,  III,  410,  412.  X^^  1480,  f»  224.  Lettre  de  J.  Le  Brun  (21 
juin),  dans  Moreau,  704  (Bréquigny.  80),  fo^  182  et  187,  et  dans  les  Lettres 
des  rois  et  reines,  t.  II,  p.  381. 

5.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1023.  Rymer,  IV,  3«  partie, 
182,  183.  —  Le  même  pour  (12  juillet),  ordre  au  trésorier  de  l'Echiquier  de 
payer  8  1.  9  s.  2  d,  à  Roger  Ashton  (lieut.  du  gouverneur  de  la  Tour  de 
Londres),  pour  les  dépenses  faites  par  Artur  de  Bretagne  et  ses  gens,  pen- 
dant qu'ils  étaient  sous  sa  garde  [Proceedings,  II,  274,  275). 

6.  Le  Dauphin  ordonna  au  sénéchal  du  Poitou  de  procéder,  par  voie  de 


TRAITÉ   DE   CORBEIL  (1420,    22  JUILLET)  57 

sonnier,  le  5  juillet.  On  ne  pouvait  donc  plus  invoquer,  pour 
obtenir  la  délivrance  de  Richemont,  le  motif  que  la  duchesse 
avait  fait  valoir.  Il  semblerait  qu'elle  mit  une  lenteur  calculée  à 
informer  des  derniers  événements  le  roi  d'Angleterre  et  les 
envoyés  bretons,  comme  si  elle  eût  craint  de  nuire  au  succès  de 
négociations  qui  pouvaient  aboutir  d'un  moment  à  l'autre. 
Quatre  jours  après  la  mise  en  liberté  de  Jean  V,  ces  envoyés 
écrivaient  au  roi  que  leur  duc  était  encore  enfermé  dans  le  châ- 
teau de  Gouldray-Salbart,  que  sa  délivrance  n'était  pas  pro- 
chaine et  qu'ils  avaient  grand  besoin  de  mener  promptement 
leur  mission  à  bonne  fin  *.  Le  15  juillet,  Henri  V  était  encore 
dans  la  même  ignorance,  puisqu'il  nommait  des  commissaires 
chargés  de  négocier  avec  Alain  de  Rohan,  lieutenant  du  duc  en 
Bretagne,  au  sujet  du  traité  de  Troyes.  Enfin  le  duc  envoya 
01.  d'Ust  et  le  héraut  Hermine  auprès  du  roi  d'Angleterre,  pour 
lui  annoncer  sa  délivrance  et  son  intention  de  l'aller  voir  lui- 
même.  Le  20  juillet,  Henri  V  accorda  au  duc  le  sauf-conduit 
qu'il  demandait  ^.  Deux  jours  après,  fut  signé,  à  Gorbeil,  un 
traité  qui  stipulait  l'élargissement  d'Artur  de  Bretagne  aux 
conditions  suivantes  : 

Le  comte  de  Richemont  promettra,  par  lettres  patentes, 
signées  et  scellées  de  son  sceau,  et  jurera,  sur  les  saints  Evangi- 
les, en  les  touchant,  sur  son  honneur,  sur  l'obligation  de  tous 
ses  biens  meubles  et  immeubles,  qvHà  la  Saint-Michel  de  Vannée 
i422  il  comparaîtra,  en  personne  et  publiquement,  à  Londres, 
et  se  présentera,  comme  prisonnier,  au  roi  d'Angleterre,  ou  à 
son  héritier,  ou  à  son  lieutenant,  ou  au  chancelier,  ou  au  maire 
de  Londres. 

Pendant  toute  la  durée  de  son  élargissement  et  jusqu'à  ce 
qu'il  se  soit  rendu  prisonnier,  il  ne  fera  aucune  alliance  avec 
celui  qui  se  dit  dauphin  du  Viennois  ;  il  n'entreprendra  rien,, 
directement  ni  indirectement,  contre  le  roi  d'Angleterre  ou  ses 
héritiers,  ou  contre  le  duc  de  Bourgogne,  ni  contre  aucun  de 
ceux  qui  obéissent  au  roi  de  France  et  au  roi  d'Angleterre,  héri- 
tier et  régent  du  royaume  de  France. 

Pendant  son  élargissement,  le  roi  d'Angleterre  aura,  comme 
gage  et  garantie,  le  comté  de  Montfort,  etc.  —  Ce  n'était  pas  la 
délivrance  complète,  car  aucune  rançon  n'était  stipulée.  Riche- 
mont était  libre  sur  parole.  Jusqu'à  la  fin  de  septembre  i422, 
mais  il  ne  cessait  pas  d'être  le  prisonnier  du  roi  d'Angleterre. 

justice,  contre  les  Penthièvre,  qui  furent  cités  à  comparaître  devant  lui  et 
déclarés  coupables  du  crime  de  lèse-majesté  (X*»  9200,  f-  270). 

1.  Rynier,  IV,  3»  partie,  p.  182. 

2.  D.  Morice,  I,  476-479  et  Preuves,  II,  1038.  Rymer,  IV,  3'  partie,  182-184. 


58  RICHEMOINT   REVIENT   EN   FRANCE   (1420,    OCTORRE) 

C'est  là  ce  qu'il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  pour  comprendre  et 
juger  la  conduite  du  futur  connétable  *. 

Ce  fut  seulement  un  mois  et  demi  après  le  traité  de  Gorbeil 
que  Richemont  quitta  l'Angleterre  pour  n'y  plus  revenir  (sep- 
tembre 1420).  Sa  joie  ne  fut  pas  sans  mélange,  car  il  laissait  sa 
mère  dans  une  situation  inquiétante.  Enfermée  au  château  de 
Pevensey,  Jeanne  de  Navarre  fut  alors  dépouillée  de  tous  ses 
biens.  On  croirait  que  le  roi  d'Angleterre  voulait  se  réserver  les 
moyens  d'agir,  au  besoin,  par  la  crainte,  sur  les  fils  de  Jeanne. 
Il  tenait  surtout  à  faire  jurer  au  duc  de  Bretagne  le  traité  de 
Troyes,  qui  enlevait  la  couronne  de  France  au  Dauphin,  beau- 
frère  de  Jean  V  ^. 

Enfin  le  duc  de  Glocester  ^  et  le  conseil  du  roi  chargèrent 
W.  Meryng  de  conduire  Richemont  en  France.  Le  5  septembre, 
Meryng  reçut  le  prisonnier.  Il  se  rendit  par  Pontoise,  Paris  et 
Corbeil,  auprès  de  Henri  V,  qui  était  alors  à  son  camp  devant 
Melun.  C'est  là  qu'il  remit  Artur  de  Bretagne  entre  les  mains  du 
roi  d'Angleterre  (28  octobre  1420)  *.  Il  y  avait  dans  le  camp 
anglais  un  autre  captif  de  distinction,  Jacques  V^,  roi  d'Ecosse. 
Artur  put  ainsi  nouer  des  relations  avec  ce  prince,  qui  fut  un 
ami  de  sa  famille  et  un  fidèle  allié  de  la  France.  Il  revit  aussi 
le  duc  de  Bourgogne,  qui  lui  fit  un  accueil  affectueux.  Avant  de 
partir,  les  envoyés  bretons  laissèrent  à  Richemont  Robert 
Rouxel,  Gervasic  et  l'écuyer  tranchant  Raoul  Gruel,  serviteur 
habile  et  dévoué,  qui  mérita  bientôt  toute  la  confiance  de  son 
nouveau  maître  et  lui  rendit  de  notables  services.  On  peut 
remarquer  qu'à  partir  de  cette  époque,  le  biographe  Guil.  Gruel, 
parent  et  peut-être  frère  de  Raoul,  est  beaucoup  mieux  informé 
qu'auparavant  ^. 

Après  la  capitulation  de  Melun  ^  (17  novembre),  Richemont 
suivit  probablement  Henri  V  à  Paris  et  à  Rouen  '.  Il  resta  en 


1.  Ce  traité,  qui  est  en  latin,  se  trouve  dans  les  Pr.  de  Bret.,  Il,  col.  1033- 
1037,  et  dans  Rymer,  IV,  3'  partie,  184-186.  Dès  le  30  mai,  la  duchesse  de 
Bretagne  avait  donné  à  ses  ambassadeurs  le  pouvoir  de  promettre  en 
gage  à  Henri  V  le  comté  de  Montforl.  Registre  Turnus  Brutus,  aux  Arch. 
de  la  Loire-Inf.,  fos  95,  171  y". 

2.  Proceedings,  II,  277-279.  A.  Strickland,  III,  105.  D.  Lobineau,  I,  560. 
Rymer,  p.  187,  et  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1037,  1038. 

3.  Humplirey  de  Lancastre,  duc  de  Glocester,  quatrième  fils  de  Henri  IV. 

4.  Proceedings,  II,  277-279,  et  Issues  of  the  Exchequer,  367.  Religieux  de 
Saint-Denis,  VI,  447. 

5.  Monstrelet,  III,  412.  Walsingham,  Hist.  anglic.,  II,  335.  Gruel,  ISS' 
et  189. 

6.  Xia  4792,  fo  234  v°.  JJ  171,  fo  134.  Rymer,  IV,  3«  partie,  192. 

7.  Le  Bourg,  de  Paris,  144. 


CONDAMNATION  DES  PENTHIÈVRE  (1421)  59 

Normandie,  sous  la  surveillance  du  comte  de  Suffolk  ',  après 
avoir  juré  de  ne  pas  quitter  ce  pays,  sans  l'autorisation  du  roi. 
Un  jour  que  le  comte  de  SufTolk  l'avait  emmené  dans  la  cam- 
pagne, pour  tirer  de  l'arc,  ils  allèrent  jusqu'à  Pontorson,  petite 
place  située  sur  la  frontière  même  de  la  Normandie  et  de  la 
Bretagne.  Là,  beaucoup  de  seigneurs  bretons  vinrent  voir  le 
frère  de  leur  duc,  et,  comme  ils  étaient  plus  nombreux  que  les 
Anglais,  ils  lui  proposèrent  de  le  délivrer.  Il  refusa,  ne  voulant 
pour  rien  manquer  à  sa  parole  *. 

Cette  loyauté  inspira  au  comte  de  Suffolk  assez  de  confiance 
pour  qu'il  permît  à  Richemont  de  voir  le  duc  de  Bretagne.  Les 
deux  frères,  émus  jusqu'aux  larmes,  s'embrassèrent  avec  effu- 
sion, heureux  de  se  retrouver  après  une  séparation  si  longue  et 
de  si  cruelles  épreuves.  Il  est  peu  vraisemblable  que  le  duc  ait 
eu  l'intention  d'enlever  alors  son  frère,  comme  semblent  le 
croire  quelques  auteurs.  G.  Gruel  dit  simplement  que  Riche- 
mont  revint  auprès  du  roi  d'Angleterre  et  que  ce  prince  lui  sut 
bon  gré  d'avoir  tenu  sa  parole.  Quant  à  Jean  V,  il  retourna  en 
Bretagne,  pour  châtier  les  Penthièvre.  Ils  furent  condamnés 
à  mort,  par  contumace,  aux  états  de  Vannes,  le  16  février  1421. 
Le  comte  de  Penthièvre,  Olivier  de  Blois,  parvint  à  gagner  sa 
terre  d'Avesnes,  dans  le  Hainaut,  où  il  vécut  obscurément  jus- 
qu'en 1434.  Son  frère  Guil.  d'Avangour  fut  détenu  au  château 
d'Auray  ^  ;  son  autre  frère,  Jean,  seigneur  de  Laigle,  se  réfugia 
■dans  le  Limousin,  servit  fidèlement  la  France  contre  les  Anglais 
et  se  réconcilia  plus  tard  avec  le  duc  de  Bretagne,  par  l'entre- 
mise de  Richemont.  Jean  V  et  ses  frères  se  partagèrent  les 
biens  que  les  Penthièvre  possédaient  en  Bretagne.  Artur  eut, 
pour  sa  part,  l'île  de  Bréhat  *. 

Avec  les  Penthièvre  disparaissait  le  principal  obstacle  qui 
s'opposait  à  la  réconciliation  de  Jean  V  et  du  Dauphin.  Celui-ci, 
dans  sa  détresse,  sollicitait  l'alliance  et  le  secours  de  la  Breta- 
gne, mais  le  duc  hésitait  encore  entre  Henri  V,  qui  s'efforçait 

1.  Will.  de  La  Pôle,  c.  de  Suffolk. 

2.  Xia  1480,  f"  224.  Rymer,  IV,  3«  partie,  192.  Gruel,  189.  Le  Baud, 
458,  459. 

3.  Sa  captivité  dura  vinpt-sept  ans  (d'Argentré,  p.  752).  Quant  à  son  frère 
Charles,  il  était  certainement  mort  avant  la  fin  de  1431  (Xi^  9200,  f»  4  v<>; 
X*"  9194,  f»  14;  Anselme,  VI,  103).  Auray,  arrondissement  de  Lorient. 

4.  Gruel,  189.  Le  Baud,  459.  D'Argentré,  741-736.  D.  Morice,  I,  435 
et  Preuves,  II,  col.  1069-1080.  D.  Lobineau,  I,  556.  Richard  de  Bretagne 
eut  aussi  une  partie  de  ces  biens  (Ibid.,  col.  1043-1046),  ceux  de  Ch.  de 
Blois,  seigneur  d'Avangour,  et  de  sa  femme  Isab.  de  Vivonne,  que  lui 
donna  le  Dauphin  lui-même.  De  là  un  long  procès  entre  Isab.  de  Vivonne 
et  Richard  de  Bretagne  après  la  mort  de  Ch.  de  Blois  (X'»  9200,  fos  4  v', 
30,  38,  251,  269  V  386,  X"»,  9193,  f»  125). 


60  ARTUR  REÇOIT  LE  COMTÉ  d'IVRY  (1421) 

de  Tattirer  à  lui,  et  son  beau-frère,  le  Dauphin  *.  On  regrette  de 
voir,  dans  celte  crise  suprême,  le  captif  d'Azincourt  prendre  le 
parti  de  l'Angleterre  triomphante  contre  la  France  abattue. 
Préoccupé  surtout  de  ses  intérêts  personnels,  il  ne  cherchait 
qu'à  plaire  à  Henri  V.  Il  se  rendit  auprès  de  lui,  à  Rouen,  où  les 
envoyés  des  comtes  de  Foix  ^,  d'Albret^  d'Armagnac  *  venaient 
aussi  vendre  l'alliance  de  leurs  maîtres  (janvier  1421).  Riche- 
mont  fut  traité  par  Henri  V  avec  une  bienveillance  qui  ne  pou- 
vait lui  paraître  désintéressée.  Il  reçut  le  comté  d'Ivry  %  en  Nor- 
mandie, pour  lequel  il  fit  hommage  au  roi  d'Angleterre,  dans 
la  grande  salle  du  château  de  Rouen.  Avant  de  quitter  Rouen 
pour  retourner  à  Londres,  le  roi  promit  à  Richemont  de  lui 
donner  la  liberté  complète,  pourvu  qu'il  observât  strictement  le 
traité  de  Gorbeil  jusqu'au  mois  de  septembre  d422,  et  il  le  dis- 
pensa de  porter  les  armes  contre  son  frère  le  duc  de  Bretagne, 
dans  le  cas  où  les  Anglais  lui  feraient  la  guerre  (17  janvier  1421). 
Quand  Richemont  se  liait  ainsi  envers  l'Angleterre,  il  savait 
combien  la  situation  de  la  France  était  critique.  On  peut  dire 
qu'il  travaillait  sciemment  à  la  ruine  de  cette  cause  qu'il  devait 
plus  tard  faire  triompher  ^. 

Un  brusque  revirement  de  fortune  suivit  de  près  le  départ  de 
Henri  V.  Le  Dauphin  avait  reçu  5  à  6  000  Ecossais,  sous  les  ordres 
du  comte  de  Buchan  et  de  Jean  Stuart  comte  de  Dernley.  Ces 
troupes,  réunies  aux  Français  commandés  par  La  Fayette, 
vainquirent,  à  la  bataille  de  Baugé  \  Thomas  de  Lancastre,  due 
de  Clarence,  qui  fut  tué  dans  la  mêlée,  avec  beaucoup  d'autres 
grands  seigneurs  (22  mars  1421)  ^  Ce  succès  encouragea  les  par- 
tisans du  Dauphin  ^  et  contribua  sans  doute  à  décider  le  duc  de 


1.  Il  y  avait  alors  des  négociations  entre  le  duc  et  les  Anglais  (Le  Baud, 
p.  460;  Rymer,  IV,  4»  partie,  6,  7,  18). 

2.  Jean  de  Grailly,  c.  de  Foix  (Anselme,  III,  370). 

3.  Charles  II  d'Albret,  fils  aîné  du  connétable  (Anselme,  VI,  205  et  suiv.). 

4.  Jean  IV  d'Armagnac,  fils  aîné  du  connétable  (III,  420  et  suiv.). 

5.  Arrondissement  d'Evreux.  Il  n'est  pas  probable  que  Richemont  ait 
pris,  à  cette  époque,  Montfort,  pour  Henri  V  (voir  Raoulet,  ch.  13,  dans  le 
t.  III  de  J.  Chartier). 

6.  Vallet  de  V.,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  I,  241.  Rymer,  IV,  3"  partie,  199. 
Fenin,  153.  Grafton's  chronicle,  1,  543.  Gh.  de  Beaurepaire,  Les  Étals  de 
Normandie  sous  la  dominatio?i  anglaise,  Rouen,  1870,  in-4o,  p.  15.  Cronicques 
de  Normandie,  édit.  Hellot,  Rouen,  1881,  in-8°,  p.  64.  D.  Morice,  I,  486,  et 
Preuves,  II,  col.  1001. 

7.  Le  Vieil-Baugé,  arrondissement  de  Baugé,  Maine-et-Loire. 

8.  Monstrelet,  IV,  24,  37-39.  Fenin,  153-155.  Walsingham,  Hist.  anglic, 
II,  338-39.  Coll.  Moreau,  t.  247,  f»  223,  etc.  X'»  1480,  f-  231  v». 

9.  Villiers  de  l'Isle-Adam  est  renfermé  à  la  bastille  Saint-Antoine  le 
8  juin  1421,  parce  qu'il  est  soupçonné  d'avoir  voulu  mettre  dans  la  ville 


JEAN   V   s'allie   avec  LE   DAUPHIN  (1421)  61 

Bretagne  en  sa  faveur.  Il  rompit  les  négociations  entamées  avec 
les  Anglais  et  vint  trouver  le  dauphin  à  Sablé,  où  il  conclut  avec 
lui  un  traité  d'alliance,  le  8  mai  1421  *. 

Le  Dauphin  promit  de  renvoyer  ses  conseillers  armagnacs  et 
désavoua  le  crime  des  Penthièvre.  Le  duc  de  Bretagne  prit  l'en- 
gagement de  secourir  le  Dauphin  contre  le  roi  d'Angleterre  et 
contre  le  duc  de  Bourgogne.  Il  déclara  que  l'usurpation  de 
Henri  V  était  un  attentat  criminel,  portant  préjudice,  non  seu- 
lement au  Dauphin,  mais  encore  à  ses  parents,  qui  pourraient 
succéder  au  trône  de  France  et  spécialement  à  lui,  Jean,  duc  de 
Bretagne,  qui  avait  épousé  une  fille  du  roi  Charles  VI.  Il  con- 
damnait donc  hautement  le  traité  de  Troyes  et  se  rangeait  à 
côté  du  Dauphin  pour  repousser  l'usurpateur.  Ce  rôle  n'était 
pas  sans  danger  pour  le  duc  de  Bretagne,  mais  il  n'était  pas  non 
plus  sans  profit.  Le  régent  Charles  donna  le  comté  d'Etampes  ^ 
à  Richard,  le  jeune  frère  d'Artur,  avec  plusieurs  seigneuries  du 
Poitou,  qui  appartenaient  aux  Penthièvre. 

Deux  mariages  furent  alors  conclus,  pour  consolider  cette 
nouvelle  alliance  entre  le  Dauphin  et  les  princes  bretons.  Ri- 
chard épousa  Marguerite  d'Orléans,  fille  du  malheureux'Louis 
d'Orléans  ^;  Jeanne  d'Orléans,  fille  du  duc  Charles,  le  captif 
d'Azincourt,  fut  fiancée  au  jeune  duc  d'Alençon  *,  Jean  II,  ne- 
veu de  Richemont.  Les  États  de  Bretagne  ratifièrent  avec  em- 
pressement le  traité  de  Sablé,  «  car  l'alliance  anglaise  leur  dé- 
plaisait fort  ^,  »  et  Richard,  comte  d'Etampes,  alla  se  mettre, 
avec  une  troupe  de  Bretons,  au  service  du  Dauphin  ^. 

les  gens  du  Dauphin  (X»»  1480,  f"  234  v»,  et  Félibien,  Preuves,  II,  585,  586; 
Le  Baud,  460;  Rymer,  III,  4«  partie,  18). 

1 .  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1091.  Le  Baud,  460.  D'Argentré,  757. 

2.  Voy.  Append.  XV.  Autres  dons  (KK  53,  fos  72  v,  73). 

3.  Née  en  1406. 

4.  On  a  vu  que  ce  mariage  avait  été  stipulé  dès  1410. 

5.  D'Argentré,  757. 

6.  Alain  Bouchard,  f"'  157  v»,  158.  D.  Morice,  I,  487,  et  Preuves,  II,  col. 
1090  et  1091.  Lettres  du  Dauphin  du  8  mai  1421,  confirmées  par  Charles  VII 
en  octobre  1425,  aux  Archives  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  11,  E,  31,  et 
cass.  38,  E,  105.  Monstrelet,  IV,  41.  Le  G.  de  Buchan  avait  été  envoyé 
par  le  Dauphin  à  Vannes  {Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1164).  Richard 
de  Bretagne  eut  le  commandement  de  4000  h.  d'armes  et  de  1500  h.  de 
trait  (Glairambault,  t.  96,  f  7495  ;  Fr.  26044,  nos  5670-5672).  Voir  aussi 
des  comptes  royaux  au  t.  III  de  J.  Chartier,  p.  315.  Il  semble  certain 
que  Richemont  était  en  France  à  l'époque  du  traité  de  Sablé;  mais  il  est 
moins  certain  qu'il  ait  assisté,  avec  ses  frères,  aux  conférences  de  Sablé, 
comme  le  dit  M.  de  Beaucourt  [Hist.  de  Charles  VII,  t.  I,  p.  224).  Ni  D. 
Morice  (t.  I;  472,  486),  ni  D.  Lobiueau  (t.  I,  557;,  ni  Gruel  (189),  ni  les 
comptes  du  Dauphin  (KK  oO,  f»  3;  KK  53,  fos  72,  106)  ne  mentionnent  ici 
le  nom  de  Richemont. 


62  RICHEMOIST   EN    BRETAGISE    (1421) 

A  cette  époque,  la  conduite  de  Richemont  contraste,  de  la  ma- 
nière la  plus  malheureuse,  avec  celle  de  ses  frères.  Il  cherche  à  les 
détacher  du  Dauphin.  Pendant  qu'ils  défendent  la  France,  il  se 
donne  tout  entier  à  l'Angleterre.  Sa  liberté  sans  doute  était  à  ce 
prix,  mais  sa  délivrance  n'était  plus  nécessaire  à  son  pays  ni  à 
sa  famille,  et,  sans  parler  des  autres  considérations,  l'exemple 
de  ses  frères  aurait  dû  lui  inspirer  plus  de  réserve  et  de  dignité. 

Henri  V,  voyant  que  sa  présence  en  France  était  indispen- 
sable, débarqua  le  10  juin  à  Calais  avec  de  puissants  renforts  *. 
Sous  sa  direction,  les  Anglais  reprirent  l'avantage.  Comme  il 
trouvait  partout  des  Bretons  parmi  les  troupes  du  Dauphin,  il 
essaya  de  lui  ôter  l'appui  de  la  Bretagne.  Le  comte  de  Riche- 
mont  ne  rougit  pas  d'accepter  alors  une  mission  des  moins  ho- 
norables. Il  se  rendit,  avec  le  comte  de  Suffolk,  auprès  de  son 
frère,  pour  lui  porter  les  propositions  de  Henri  V  et  l'engager  à 
rompre  le  traité  de  Sablé  ^.  ' 

Jean  V  accueillit  avec  joie  son  frère  et  avec  courtoisie  les 
autres  envoyés  du  roi  ;  il  leur  donna  des  fêtes  à  Vannes  ;  mais 
Richemont  ne  put  le  déterminer  à  quitter  l'alliance  du  Dauphin. 
Il  eut  beau  lui  représenter  que  celui-ci,  en  gardant  auprès  de  lui 
les  Armagnacs,  avait  violé  ses  engagements;  il  ne  put  même 
pas  obtenir  une  simple  promesse  de  neutralité  ^  Toutefois  Jean  V 
réunit  à  Rennes  les  États  de  Bretagne  pour  les  consulter.  Les 
avis  furent  partagés;  mais  le  parti  français  l'emporta,  malgré 
le  mécontentement  causé  par  la  mauvaise  foi  du  Dauphin. 
Henri  V  permit  à  Richemont  de  rester  encore  quelque  temps  en 
Bretagne,  dans  l'espoir  qu'il  amènerait  enfin  son  frère  à  chan- 
ger de  résolution  *. 

i.  Monstrelet,  IV,  43.  Walsingham,  Hùt.  anglic,  II,  340. 

2.  «  Et  bien  tost  après  (Richemont)  eust  congé  de  venir  veoir  le  duc 
Jehan,  son  frère,  et  l'amena  le  conte  de  Suffolk.  Et  la  cause  pour  quoy  il 
eut  congé  ce  fut  pour  relarder  ^on  frère  d'Etampes  et  les  Bretons  d'aller 
servir  le  Dauphin.  »  (Gruel,  189.) 

3.  Dans  les  instructions  données  par  le  Dauphin  aux  ambassadeurs 
qu'il  envoie  auprès  des  rois  de  Castille  et  de  Léon,  il  est  dit  que  le  duc 
•de  Bretagne  est  déterminé  à  servir  le  régent;  qu'il  a  envoyé  vers  lui  son 
frère  Richard.  «  Et,'  combien  que  le  conte  de  Richemont,  autre  frère  du 
dit  duc  de  Bretaigne,  soit  venu  audit  pais,  pour  cuidier  avoir  gens  d'armes 
en  faveur  de  l'adversaire  d'Engleterre,  il  n'y  a  riens  fait.  »  (Lat.  6024, 
n»  12.  Ce  document  est  classé  à  tort  sous  la  date  1419.  Voir  aussi 
Fr.  20977,  f»  257.) 

4.  Monstrelet,  IV,  43,  69-72.  Walsingham,  Hist.  anglic,  II,  340.  Le 
Baud,  461 .  Richemont  vit  probablement  Henri  V  et  le  duc  de  Bourgogne, 
soit  à  Mantes,  soit  à  Paris  (Gruel,  189,  et  Monstrelet,  IV,  48).  Au  mois 
d'août,  il  était  en  Bretagne.  Le  7  août,  la  duchesse  fit  un  présent  au 
comte  de  Richemont,  «  nouvellement  venu  de  sa  prison  »  [Preuves  de  l'hist. 
dcBret.,  II,  col.  1164). 


IL   DÉTACHE  JEAN  V  DE  LA  FRANCE   (1421)  63 

Il  eut  alors  l'occasion  de  se  rendre  plus  utile  à  son  pays. 
La  ville  de  Rennes  était,  à  cette  époque,  la  plus  impor- 
tante de  toute  la  Bretagne  *;  elle  avait  une  industrie  active,  un 
commerce  florissant,  une  population  nombreuse.  Des  Nor- 
mands, chassés  par  la  guerre,  étaient  déjà  venus  s'établir  dans 
les  faubourgs  de  Rennes,  qui  étaient  peu  à  peu  devenus  trois 
fois  plus  grands  que  la  ville  elle-même.  Artur  avait  été  reçu  à 
Rennes  mieux  que  partout  ailleurs.  Il  témoigna  sa  reconnais- 
sance aux  habitants  en  s'occupant  de  leurs  intérêts.  Il  conseilla 
au  duc  d'agrandir  l'enceinte  fortifiée  et  d'y  enfermer  les  fau- 
bourgs, qui,  en  temps  de  guerre,  étaient  exposés  à  tous  les 
ravages  et  pouvaient  être  ainsi  un  danger  pour  la  ville.  Le  duc 
lui  laissa  toute  liberté  d'action.  Il  semblait  impossible  que  ce 
travail  fût  achevé  aussi  promptement  qu'il  en  était  besoin;  mais 
le  jeune  prince  communiqua  son  ardeur  aux  habitants  de  la 
ville  et  du  pays,  qui  l'aidèrent  avec  empressement. 

Aussitôt  il  traça  la  nouvelle  enceinte  ;  il  fit  creuser  des  fossés 
larges  et  profonds,  élever  des  palissades,  et,  en  quelques  mois, 
la  ville  fut  ainsi  fortifiée,  en  attendant  qu'on  bâtît  les  murs  et  les 
tours.  Ce  fut  un  véritable  bienfait  pour  Rennes.  Jean  V  promit 
des  lettres  de  naturalisation  aux  étrangers  qui  viendraient  s'éta- 
blir dans  cette  ville.  Beaucoup  de  familles  normandes  répon- 
dirent à  son  appel,  et  cet  accroissement  de  population  fut  aussi 
un  accroissement  de  prospérité  ^. 

Ces  soins  ne  faisaient  pas  oublier  à  Richemont  la  mission  dont 
l'avait  chargé  Henri  V  et  qui  motivait  seule  son  séjour  prolongé 
en  Bretagne.  Il  rappelait  sans  cesse  à  son  frère  que  le  Dauphin 
était  toujours  gouverné  par  ses  conseillers  armagnacs.  C'était  le 
meilleur  moyen  d'irriter  Jean  V  et  de  mettre  fin  à  ses  hésita- 
tions. Le  duc  n'avait  plus  aucun  scrupule  à  rompre  le  traité  de 
Sablé,  mais  il  ne  pouvait  s'alher  avec  le  roi  d'Angleterre  qu'en 
approuvant  le  traité  de  Troyes.  Là  était  la  cause  de  son  embar- 
ras, d'autant  plus  qu'il  savait  la  répugnance  des  Etats  de  Breta- 
gne à  suivre  cette  politique  anti-française.  Richemont  l'emporta, 
et,  soit  que  Henri  V  le  pressât  d'en  finir,  soit  qu'il  voulût  faire 
preuve  de  zèle,  il  partit  avec  un  grand  nombre  de  gens  d'armes 
pour  aller  annoncer  cette  bonne  nouvelle  au  roi  d'Angleterre 
et  pour  se  mettre  à  son  service  '. 

i ,  Dupuy,  Mémoire  sur  l'industrie  et  le  commerce  en  Bretagne  à  la  fin 
du  XV*  siècle,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  académique  de  Brest,  année  1879, 
p.  50  et  suiv.  Fr.  26046,  n»  1. 

2.  Gruel,  189.  D'Argentré,  758,  7S9.  D.  Morice,  I,  488.  Arch.  muuicip.  de 
Rennes,  travée  3,  n»^  134  et  suiv.,  notamment  le  n"  136. 

3.  A  cette  époque,  les  Dauphinois  ayant  pris  Avranches,  le  c.  de  Salis- 


64  ARTUR  AU   SIÈGE   DE  MEAUX   (1421-1422), 

Henri  V  assiégeait  alors  la  ville  de  Meaux,  vaillamment  dé- 
fendue par  le  fameux  bâtard  de  Vaurus  *.  Pendant  ce  siège  mé- 
morable, qui  dura  sept  mois  (du  6  octobre  1421  au  2  mai  1422), 
Catherine  de  France,  reine  d'Angleterre,  mit  au  monde,  au  châ- 
teau de  Windsor  (6  décembre  1421),  un  fils  dont  la  faible  tête 
devait  bientôt  porter  deux  couronnes.  C'est  aussi  durant  ce 
siège  que  Richemont  arriva  au  camp  anglais  devant  Meaux.  Il  y 
trouva,  comme  à  Melun,  l'infortuné  Charles  VI,  le  jeune  roi 
d'Ecosse,  Jacques  I",  puis  le  duc  de  Bourgogne,  qui  vint  passer 
quelques  jours  auprès  de  Henri  V,  au  mois  de  janvier  1422. 

Ainsi,  pendant  que  des  Français  défendaient  héroïquement 
la  ville  de  Meaux,  le  comte  de  Richemont  combattait  contre 
eux  dans  les  rangs  anglais,  enlevait  au  Dauphin  l'appui  de  la 
Bretagne  et  travaillait  de  toutes  ses  forces  à  l'asservissement 
de  la  France!  Après  avoir  abandonné  la  ville  proprement  dite 
(le  3  mars),  la  garnison  se  retira  dans  le  Marché,  où  elle  capitula 
(le  2  mai)  ^. 

Henri  V  passa  encore  quelques  semaines  à  Meaux,  puis  il  se 
dirigea  vers  Paris,  où  il  fit  une  entrée  solennelle,  avec  les  deux 
reines,  Catherine  et  Isabeau,  le  roi  Charles  VI  et  un  nombreux 
cortège,  dans  lequel  figurait  sans  doute  le  comte  de  Richemont 
(le  samedi  30  mai  1422)  ^  Celui-ci  assista  aux  fêtes  qui  signa- 
lèrent ce  retour  triomphal;  il  vit  trôner  au  Louvre,  au  milieu 
d'une  cour  brillante,  le  conquérant  anglais,  véritable  maître  de 
la  France,  pendant  que  le  pauvre  vieux  roi  Charles  VI  languis- 
sait tristement  dans  son  abandon  et  dans  sa  folie  à  l'hôtel  Saint- 
Pol;  spectacle  lamentable,  dont  gémissaient  tous  les  bons  Fran- 
çais et  qui  inspire  au  chroniqueur  bourguignon  Monstrelet  un 
invincible  sentiment  de  pitié.  «  Et  pour  lors,  le  dit  Roy  ne  gou- 
vernoit  point  sondit  royaume,  mais  estoit  gouverné  et  mis  à 
néant,  ou  regard  de  sa  grande  et  noble  puissance  qu'il  avoit 

bury,  gouverneur  de  Normandie,  leur  reprit  bientôt  cette  ville.  Cet  évé- 
nement, qui,  d'après  Monstrelet,  coïncide  avec  le  départ  de  Richemont 
pour  Meaux,  explique  peut-être  ce  départ  et  la  détermination  de  Jean  V. 
«  En  ce  mesme  tems,  ou  environ,  Artur,  conte  de  Richemont,  frère  au 
duc  de  Bretaigne,  vint,  à  tout  grant  nombre  de  gens  d'armes,  au  dit  siège 
de  Meaux,  servir  ledit  roy  d'Angleterre;  ouquel  service  il  demoura  durant 
la  vie  d'icelluy  roy  »  (Monstrelet,  IV,  81  ;  Fr.  26044,  nos  5678,  5679). 

1.  Monstrelet,  IV,  71  et  suiv.  P.  Fenin,  172  et  suiv.  Le  Bourg,  de  Paris, 
157,  160,  164,  166-172. 

2.  X^^  1480,  fos  241,  244,  248  V  et  251,  et  Félibien,  Pr.,  II,  586.  Walsin- 
gham,  Hist.  anglic,  II,  342.  Gruel,  189.  Monstrelet,  IV,  81,  93,  96.  P.  Fé- 
nin,  172.  D.  Toussaints  du  Plessis,  Hist.  de  l'Église  de  Meaux,  I,  286-288. 
X'a  1481,  fos  248,  231.  J.  Waurin,  édit.  anglaise,  391,  392.  Chronique  ano- 
nyme à  la  suite  de  Monstrelet,  VI,  309.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  49. 

3.  Xia  1480,  P  253.  Monstrelet,  IV,  96,  99. 


RICHEMONT  AVEC   HENRI  V  A  PARIS   (1422)  65 

autrefois  eue  durant  son  règne.  Pour  lesquelles  choses  plusieurs 
François  bons  et  loyaulx  avoient  au  cuer  grant  tristesse,  et  non 
pas  sans  cause  ^  »  Non,  certes,  pas  sans  cause,  car  la  France, 
délaissée  comme  son  roi,  semblait,  comme  lui,  prête  à  succom- 
ber, et  ses  nouveaux  maîtres  étaient  en  liesse.  Le  comte  de  Ri- 
chemont  était  avec  eux. 

Le  31  mai,  jour  de  la  Pentecôte,  il  y  eut  au  Louvre  un  festin 
splendide;  le  mardi  et  le  mercredi,  2  et  3  juin,  grande  repré- 
sentation théâtrale  à  l'hôtel  de  Nesle.  Le  mercredi  3  juin,  il  y 
eut  aussi,  à  l'hôtel  de  Nesle,  un  conseil  auquel  Richemont  assis- 
tait, avec  les  ducs  de  Bedford  *  et  d'Exeter  ^,  le  comte  de  March  * 
et  révoque  de  Beauvais,  P.  Gauchon.  A  la  même  époque,  la 
ville  de  Gosne  était  assiégée  par  les  troupes  du  Dauphin,  parmi 
lesquelles  se  trouvait  Richard,  comte  d'Etampes  ^ 

La  conduite  de  Richemont  et  de  Jean  V  pourrait  s'excuser,  en 
tenant  compte  de  l'esprit  du  temps,  si  elle  s'expliquait  par  le 
désir  d'adoucir  le  sort  de  leur  mère.  En  tout  cas,  il  faut  remar- 
quer que  Henri  V  rendit  à  Jeanne  de  Navarre  ses  biens,  le  13  juin, 
et  que,  s'il  ne  lui  rendit  pas  en  même  temps  la  liberté,  il  amé- 
liora du  moins  sa  situation.  Le  9  juin,  le  roi  d'Angleterre  avait 
envoyé  à  Jean  V  un  sauf-conduit  pour  les  ambassadeurs  bretons 
qui  devaient  venir  jurer  le  traité  de  Troyes.  Richemont  re- 
tourna en  Bretagne  pour  terminer  cette  affaire  importante  et 
pour  entretenir  son  frère  d'un  projet  tout  personnel,  dont  il 
avait  déjà  parlé  au  duc  de  Bourgogne  ®. 

Ils  désirait  épouser  une  sœur  de  Philippe-Ie-Bon,  Marguerite, 
qui  était  revenue  en  Bourgogne,  après  la  mort  de  son  mari,  le 
Dauphin  Louis  '.  En  cela  il  n'était  pas  guidé  par  son  seul  in- 
térêt; il  obéissait  à  un  sentiment  plus  tendre,  car  il  n'avait 
jamais  oublié  cette  jeune  princesse,  qu'il  avait  vue  pendant  plu- 
sieurs années,  avant  que  la  captivité  le  séparât  d'elle.  Quand  il 

1.  Monstrelet,  IV,  100.  Même  sentiment,  p.  22.  Grafton^s  chronicle,  I,  347. 

2.  Jean  de  Lancastre,  troisième  fils  de  Henri  iV. 

3.  Thomas  Beaufort,  frère  de  Henri  IV  (+  1424), 

4.  Edmond  Mortimer ,  arrière-petit-fils  de  Lionel ,  deuxième  fils 
d'Edouard  III  (+  1424). 

5.  X»a  1480,  fos  232  v»,  253,  et  Félibien,  Preuves,  II,  387.  Monstrelet, 
!V,  106. 

6.  A.  Strickland,  III,  106,  107.  Gruel,  189.  D.  Morice,  I,  488,  et  Preuves,  II, 
col.  1109-1112.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  p.  40  et  suiv. 

7.  Elle  était  arrivée  à  Dijon  le  23  janvier  1417  (Arch.  des  aff.  étr.  [France], 
t.  XXI,  fos  241,  230,  265).  Le  16  janvier  1420,  elle  s'était  jointe  à  ses  soeurs, 
Anne  et  Agnès,  et  à  la  duchesse  de  Bourgogne,  pour  demander  au  roi 
justice  contre  les  meurtriers  de  Jean-sans-Peur  (de  La  Barre,  Mémoires 
■pour  servir  à  Vhist.  de  France,  Paris,  1729,  in-4'',  p.  344-347).  Voir  aussi 
Moreau,  1425,  n«  103. 

Richemont.  5 


66  JEAN   V   ACCEPTE   LE   TRAITÉ   DE   TROYES    (1422) 

avait  confié  ses  intentions  et  ses  espérances  au  duc  de  Bour- 
gogne, celui-ci  avait  accueilli  ces  confidences  avec  un  empresse- 
ment de  bon  augure.  Philippe-le-Bon,  de  même  que  Riche - 
mont,  désirait  unir  par  de  nouveaux  liens  les  deux  maisons  de 
Bourgogne  et  de  Bretagne,  qui,  de  tout  temps,  avaient  été  alliées. 
Il  avait  même  déclaré  au  prince  breton  qu'il  se  faisait  fort  de 
lui  donner  à  choisir  entre  deux  de  ses  sœurs,  Anne  et  Agnès, 
bien  que  l'une  fût  déjà  promise  au  comte  de  Clermont,  fils  aîné 
du  duc  de  Bourbon.  Quant  à  Mme  de  Guyenne,  il  ne  pouvait 
rien  promettre  sans  avoir  son  consentement,  mais  il  s'engageait 
du  moins  à  employer  tout  son  crédit  pour  l'obtenir.  Il  ajouta 
enfin  qu'il  n'y  avait  qu'à  le  laisser  faire.  Quand  il  retourna  en 
Bourgogne,  il  emmena  même  avec  lui,  à  Dijon,  un  fidèle  et 
adroit  serviteur  du  comte  de  Richemont,  Raoul  Gruel,  qui 
devait  prendre  part  à  cette  négociation.  Le  duc  de  Bourgogne 
ayant  transmis  à  sa  sœur  la  demande  du  comte  de  Richemont, 
elle  répondit  d'abord  qu'elle  ne  voulait  point  être  mariée  à  un 
prisonnier,  mais  que,  quand  le  roi  d'Angleterre  lui-  voudrait 
rendre  la  liberté,  elle  ferait  ce  que  ses  amis  lui  conseilleraient. 
Grâce  au  duc  de  Bourgogne,  Raoul  Gruel  put  parler  plusieurs 
fois  à  Mme  de  Guyenne.  Il  fut  d'ailleurs  secondé  par  d'au- 
tres personnes  influentes,  qui  désiraient  aussi  ce  mariage.  Lors- 
qu'il revint  en  Bretagne,  il  put  donner  à  son  maître  des  nou- 
velles qui  le  comblèrent  de  joie  et  d'espérance  ^. 

Cependant  Richemont  continuait  de  servir  auprès  de  son  frère 
les  intérêts  de  Henri  V.  Il  désirait  plus  que  jamais  avoir  sa 
liberté  complète,  mais  il  fallait  bien  la  mériter  et,  pour  cela, 
faire  jurer  le  traité  de  Troyes  par  le  duc  et  par  les  Etats  de  Bre- 
tagne. Jean  V  était  maintenant  tout  gagné  à  l'Angleterre,  mais 
les  Etats,  mus  par  de  plus  nobles  sentiments,  ne  voulaient  point 
trahir  la  France.  Désespérant  de  pouvoir  vaincre  leur  obstina- 
tion généreuse,  le  duc  envoya  néanmoins  aux  rois  de  France 
et  d'Angleterre  des  ambassadeurs  chargés  de  jurer  le  traité  de 
Troyes;  mais,  au  lieu  de  pouvoirs  réguliers,  consentis  par  les 
Etats,  ils  n'eurent  qu'une  simple  procuration  de  Jean  V,  signée 
par  quelques  prélats ,  par  ses  commensaux  et  ses  officiers 
(26  juin  1422)  ^  11  était  grand  temps  que  cette  laborieuse  négo- 
ciation aboutit,  pour  que  le  roi  d'Angleterre  eût  la  preuve  de  la 
bonne  volonté  de  Richemont.  Henri  V  touchait  à  sa  fin.  Il  mar- 
chait au  secours  de  la  ville  de  Cosne,  quand  la  maladie  qui 

i.  Gruel,  189,190.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  40  et  suiv. 

2.  D.  Morice,  I,  et  Pr.,  II,  col.  112,  113.  J,  244»  n»^  94  et  96.  Voir  aussi 
Porlef.  Font.,  111-112,  f°  238.  Les  ambassadeurs  bretons  arrivèrent  à  Paris 
le  lundi  27  juillet  (X»a  1480,  f°  235  v°,  et  Félibien,  Preuves,  II,  587;. 


MORT  DE  HENRI  V  (1422,  31  AOUt)  67 

allait  l'emporter,  à  la  fleur  de  l'âge,  le  contraignit  à  revenir  au 
Bois  de  Vincennes,  où  il  arriva  le  mardi  7  juillet.  Trois  semaines 
après,  le  lundi  27  juillet,  les  ambassadeurs  bretons  étaient  à 
Paris. 

Pendant  ce  temps,  le  comte  de  Richemont  s'occupait  de  ses 
propres  affaires  en  Bretagne,  avec  l'espoir  d'être  bientôt  libre. 
Il  obtint  de  son  frère  un  partage  qui  devait  faciliter  son  ma- 
riage avec  la  duchesse  de  Guyenne  et  lui  permettre  de  tenir 
un  état  en  rapport  avec  son  rang.  Le  duc  de  Bretagne  lui  pro- 
mit 5000  livres  de  rentes  sur  le  comté  de  Montfort-l'Amaury  *, 
et  lui  constitua  trois  autres  mille  livres  sur  les  châtellenies  du 
Gâvre,  de  Ghâtelaudren,  de  Paimpol,  de  LanvoUon,  de  La  Roche- 
Derrien  et  de  Ghâteaulin-sur-Trieux  (7  août  1422).  Deux  jours 
auparavant,  le  comte  de  Richemont  avait  fait  hommage  au  duc 
son  frère,  comme  baron  de  Bretagne,  c'est-à-dire  comme  comte 
de  Goello,  ou  baron  d'Avangour  ^  A  quelque  temps  de  là, 
comme  il  se  trouvait  au  Gàvre,  il  reçut  la  nouvelle  de  la  mort 
du  roi  d'Angleterre.  «  Dieu  sçait  s'il  en  fut  bien  joyeux,  ajoute 
naïvement  son  biographe,  car,  ceste  fois,  il  fut  quitte,  et  homme 
n'avoit  plus  que  lui  demander  ^.  » 

Revenu  au  Bois  de  Vincennes  le  jeudi  13  août,  Henri  V  y  était 
mort  le  lundi  31.  Cet  événement  allait  changer  bien  des  choses. 
La  fin  si  prématurée  du  vainqueur  d'Azincourt  (il  n'avait  que 
trente-quatre  ans)  fut  peut-être  le  salut  de  la  France.  Henri  VI, 
fils  de  Henri  V  et  petit-fils  de  Charles  VI,  à  peine  âgé  de  neuf 
mois,  fut  proclamé  roi  d'Angleterre  et,  bientôt  après,  roi  de 
France.  Les  ducs  de  Bedford  et  de  Glocester,  tous  deux  frères  de 
Henri  V,  exercèrent  lé  pouvoir  au  nom  de  leur  neveu,  Bedford 
en  France  avec  le  titre  de  régent,  Glocester  en  Angleterre  avec 
le  titre  de  protecteur.  Quant  au  soi-disant  dauphin  Charles,  qui 
portait  aussi  le  titre  de  régent,  les  Anglais  espéraient  bien  l'em- 
pêcher de  succéder  à  son  père  et  lui  enlever  les  provinces  qu'ils 
n'avaient  pas  encore  soumises.  Henri  V  eût  été  capable  de  réa- 
liser ce  dessein;  mais,  lui  mort,  il  n'y  eut  plus  cette  concentra- 


1.  C'est  sans  doute  en  vertu  de  ce  partage  qu'Artur  prit  le  titre  de 
comte  de  Montfort.  Il  porte  ce  titre  dans  les  documents  relatifs  aux  négo- 
ciations d'Amiens,  en  avril  1423;  mais  il  ne  le  prend  guère  qu'à  cette 
époque  et  seulement  dans  cette  circonstance,  à  ce  qu'il  semble.  Montfort- 
l'Amaury,  arrondissement  de  Rambouillet.  Voir  ci-dessus  p.  60,  note  S. 

2.  Voy.  Append.,  XVL 

3.  Gruel,  190.  D'Argentré,  758-761.  D.  Morice,  I,  489,  et  Preuves,  II, 
col.  1115-1117.  D.  Lobineau,  I,  561.  X»»  1480,  fos  254,  255,  256.  Félibien, 
Preuves,  II,  587.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  I,  E,  1;  cass.  69,  E,  155. 
Registre  Turnus  Brulus,  I,  87  V  et  95  v". 


68  SITUATION   d'ARTUR 

tion  de  pouvoir,  cette  unité  de  vues  et  de  direction  qui  auraient 
pu  assurer  le  triomphe  de  l'Angleterre  ^. 

En  ce  qui  concerne  Artur  de  Bretagne,  la  mort,  de  Henri  V 
avait  aussi  des  conséquences  importantes.  Il  se  crut  dégagé  de 
toute  obligation  envers  le  nouveau  roi;  son  biographe  l'af- 
firme, et,  après  lui,  d'autres  auteurs  acceptent,  sans  aucune 
réflexion,  cette  manière  de  voir  2.  On  ne  peut  oublier  pourtant 
que  Richemont  s'était  formellement  engagé,  par  le  traité  de 
Corbeil,  à  se  présenter  à  Londres,  au  mois  de  septembre  1422, 
devant  Henri  V,  ou  devant  son  héritier,  ou  son  lieutenant,  ou  le 
chancelier  d'Angleterre,  ou  le  maire  de  Londres,  pour  se  con- 
stituer de  nouveau  prisonnier.  Si  aucune  convention  posté- 
rieure n'avait  modifié,  sur  ce  point,  le  traité  de  Corbeil,  on  ne 
comprend  pas  comment  Richemont  pouvait  soutenir,  de  bonne 
foi,  qu'il  ne  s'était  engagé  qu'envers  Henri  V  personnellement 
et  que  la  mort  de  ce  prince  lui  rendait  son  entière  liberté*. 
H  n'était  probablement  pas  aussi  convaincu  de  son  bon  droit 
qu'il  le  voulait  paraître,  mais  il  sut  profiter  des  circonstances. 
D'ailleurs,  n'était-iL  pas,  comme  le  duc  de  Bretagne,  ami  de 
l'Angleterre?  Les  ambassadeurs  bretons  chargés  de  jurer  le 
traité  de  Troyes  étaient  alors  à  Paris.  Bedford  se  gardait  bien 
d'oublier  une  affaire  aussi  importante.  H  tenait  à  la  terminer 
avant  la  mort  de  Charles  VI.  Le  roi  et  la  reine  de  France  re- 
vinrent de  Sentis  à  Paris  le  samedi  19  septembre.  Peu  après,  le 
jeudi  8  octobre,  les  ambassadeurs  bretons  jurèrent  le  traité  de 
Troyes,  devant  Charles  VI  lui-même. 

Le  vieux  roi,  stylé  par  Bedford,  répéta  aux  ambassadeurs 
que  le  soi-disant  dauphin  de  Viennois  avait  dirigé  le  complot 
des  Penthièvre,  fait  emprisonner  Jean  V  et  même  ordonné  de  le 
tuer;  il  promit  de  ne  jamais  traiter  avec  le  Dauphin,  ni  avec 
ceux  de  son  parti,  sans  l'aveu  du  duc  de  Bretagne;  enfin  il 
lui  accorda,  par  lettres  patentes  du  même  jour  (8  octobre), 
15  000  livres  de  rentes,  en  considération  des  dépenses  qu'il  pour- 
rait avoir  à  faire  pour  soutenir  le  traité  de  Troyes  et  il  prit  l'en- 
gagement de  le  secourir  contre  quiconque  lui  voudrait  nuire 
à  l'occasion  de  ce  traité.  Quel  spectacle  plus  triste  que  celui  de 
ce  roi  insensé,  presque  moribond,  accusant,  reniant  son  fils, 

1.  X'a  1480,  f»s  2o6  V»,  237  v. 

2.  Gruel,  190.  Le  Baud,  p.  468.  D'Argentré,  759.  Cousinot,  231.  Tou- 
tefois D.  Plancher  (IV,  67)  le  considère  toujours  comme  prisonnier,  et 
D.  Morice  dit  aussi  ([,  491)  qu'il  n'avait  pas  encore  ses  lettres  d'élargis- 
sement après  son  mariage. 

3.  Il  pouvait,  tout  au  plus,  alléguer  les  promesses  de  Henri  V  (voir  ci- 
dessus,  p.  60). 


MORT  DE  CHARLES  VI  (1422,  21  OCTOBRE)  69 

pour  assurer  à  un  prince  anglais  l'héritage  du  trône  de  France  *? 
C'est  probablement  dans  ces  circonstances  que  Richemont, 
pour  prix  de  ses  services,  reçut  de  Charles  VI,  ou  plutôt  de 
Bedford,  le  titre  de  duc  de  Touraine,  qu'il  porta  pendant  quel- 
ques années,  avec  celui  de  comte  d'Ivry  ^.  N'avait-il  pas  bien 
mérité  cette  distinction  en  déterminant  son  frère  à  jurer  le 
traité  de  Troyes,  quand  la  mort  de  Henri  V  aurait  pu  faciUter 
au  duc  de  Bretagne  la  rupture  d'une  alliance  impopulaire  et 
peu  honorable?  Tout  au  contraire,  Jean  V  donna  aux  Anglais 
une  nouvelle  preuve  de  fidélité,  en  essayant  de  leur  livrer  l'im- 
portante ville  de  La  Rochelle,  dont  le  gouverneur  était  un 
Breton,  Henri  de  Pluscalec.  Pour  déjouer  cette  dangereuse  ten- 
tative, le  Dauphin  dut  aller  à  La  Rochelle,  où  il  failHt  périr 
victime  d'un  accident  qui  coûta  la  vie  à  plusieurs  personnes  de 
sa  suite.  H  repartit  le  14  octobre  pour  Mehun-sur-Yèvre,  où  il 
arriva  le  24.  Là,  il  apprit  que  Charles  VI  était  mort  à  l'hôtel 
Saint-Paul,  le  mercredi  précédent,  21  octobre,  vers  sept  heures  du 
matin.  Le  vendredi  30  octobre,  le  Dauphin  prit  le  titre  de  roi  de 
France  au  château  de  Mehun-sur-Yèvre.  Le  règne  de  Charles  VII 
commençait.  On  eût  beaucoup  étonné  le  nouveau  roi,  si  on  lui 
eût  dit  alors  qu'Artur  de  Bretagne  deviendrait,  trois  ans  plus 
tard,  son  connétable,  et  l'aiderait  puissamment  à  chasser  les 
Anglais  de  son  royaume  '. 

-1.  Du  Tillet,  Recueil  des  rois  de  France,  Paris,  1602,  gr.  ia-S",  t.  II, 
Traitez,  p.  233.  Portef.  Fontanieii,  111-112,  f"  283,  288.  Preuves  de  Vhist. 
de  Bretagne,  II.  col.  1112,  1113,  1119.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  CdiSS.  34, 
E,  93,  et  cass.  47,  E,  21.  J  244»,  nos  94^  96.  Le  17  octobre,  Jean  V  s'engage 
à  ne  point  traiter  avec  le  Dauphin  sans  le  consentement  de  Bedford 
(Portef.  Godefroy,  164,  f»  99,  n°  93,  à  la  bibliothèque  de  l'Institut;  Fr. 
26044,  n»  3781 .  Voy.  Append.,  XVII). 

2.  Anselme,  I,  439.  Rymer,  IV,  4«  partie,  91,  Gruel,  228,229.  Dans  un 
procès  que  Richemont  eut  devant  le  parlement  de  Paris,  on  lui  donne  le 
titre  de  duc  de  Touraine  fX'*  1480,  f*  310,  au  mardi  14  novembre  1424). 

3.  Arcère,  Hist.  de  la  Rochelle,  La  Rochelle,  1736,  2  vol.  in-4»,  I,  269. 
Cagny,  f  83  v».  Monstrelet,  IV,  132,  et  VI,  324.  De  Beaucourt,  Hist.  de 
Charles  VII,  I,  240.  KK  54,  f»  22.  Fr.  25710,  n»  46.  Fr.  6749,  f"  2.  X'»  1480, 
fo  239  V.  KK  53,  f  loi  v°.  Sur  Pluscalec,  voir  :  J  183,  nos  136-141;  [Glai- 
rambauU,  t.  86,  à  la  fin,  et  t.  87;  D.  Lobineau,  I,  563. 


CHAPITRE  II 


RICHEMONT  SE  SÉPARE  DES  ANGLAIS  ET  DEVIENT 
CONNÉTABLE  DE  FRANCE  (1422-1425) 


Entrevue  et  traités  d'Amiens.  —  Richemont  épouse  la  duchesse  de  Guyenne. 

—  Il  négocie  avec  Amédée  VIII^  ami  de  la  France  et  de  la  Bourgogne. 

—  Deuxième  entrevue  d'Amiens.  —  Richemont  voit  la  reine  Yolande  en 
Bretagne.  —  Il  rompt  avec  Bedford.  —  Défaite  des  Français  à  Ver- 
neuil.  —  Détresse  de  Charles  VII.  —  Il  fait  proposer  l'épée  de  con- 
nétable à  Richemont.  —  Inquiétudes  des  conseillers  armagnacs  de 
Charles  VII.  —  Richemont  se  rend  à  Angers  auprès  du  roi.  —  Philippe- 
le-Bon,  irrité  contre  les  Anglais,  autorise  Artur  à  s'entendre  avec 
Charles  VII.  —  Engagement  de  Richemont  envers  les  conseillers  du 
roi.  —  Il  reçoit  l'épée  de  connétable. 


La  mort  de  Henri  V  et  de  Charles  VI  ne  changea  rien,  tout 
d'abord,  aux  relations  entre  la  Bretagne  et  le  gouvernement 
anglais.  Le  duc  de  Bedford,  régent  de  France  pour  son  neveu 
Henri  VI  *,  avait  le  plus  grand  intérêt  à  conserver  l'alliance  des 
ducs  de  Bretagne  et  de  Bourgogne.  En  cela,  il  suivait  la  politique 
de  Henri  V  et  ses  dernières  recommandations  ^  Philippe-le-Bon 
et  Jean  V  furent,  avec  lui,  les  exécuteurs  testamentaires  de 
Charles  VI  ^  Le  pape  Martin  V  *  ayant  envoyé  en  France,  un 
peu  avant  la  mort  de  Charles  VI,  des  légats  chargés  de  rétablir 
la  paix  entre  les  deux  royaumes,  les  ducs  de  Bedford  et  de  Bour- 

1.  Henri  VI  fut  proclamé  roi  de  France  et  d'Angleterre  le  11  novembre. 
Le  jeudi  19  novembre,  le  Parlement,  l'Université,  les  prévôts  de  Paris  et 
des  marchands,  etc.,  jurent  fidéUté  à  Henri  VI  et  à  Bedford.  Le  soi-disant 
dauphin  Charles  est  déclaré  incapable  de  succéder,  etc.  (X^*  1480,  ps  261, 
262  V.) 

2.  Monstrelet,  IV,  110,  111. 

3.  XI*  14S0,  f"  259  V. 

4.  Othon  Colonna,  pape  sous  le  nom  de  Martin  V  (1417-1431).  Voir  de 
Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  p.  315  et  suiv. 


ARTUR  MÉNAGE  BEDFORD   (1422)  71 

gognc  déclarèrent  qu'ils  ne  pouvaient  rien  faire  sans  le  duc  de 
Bretagne  et  invitèrent  Jean  V  à  venir  à  Paris,  pour  s'entendre 
avec  eux.  L'évèque  de  Beauvais,  Phil.  de  Morvilliers,  premier 
président  du  parlement,  et  Renier  Pot,  seigneur  de  La  Roche, 
allèrent  solliciter  Jean  V  de  se  rendre  à  cette  invitation.  Le  duc 
répondit  qu'il  partirait  pour  Paris  le  10  décembre  *.  Dans  l'in- 
tention de  Bedford,  il  s'agissait,  en  réalité,  beaucoup  moins  de 
rétablir  la  paix  que  de  conclure  de  nouveaux  traités  qui  lieraient 
plus  étroitement  à  l'Angleterre  les  ducs  de  Bourgogne  et  de  Bre- 
tagne. Deux  mariages  devaient  resserrer  encore  ces  liens,  celui 
de  Bedford  et  celui  de  Richemont  avec  deux  sœurs  de  Philippe- 
le-Bon.  Guillaume  Gruel  avoue  qu'on  se  fût  bien  passé  de  Bedford, 
si  l'on  eût  pu.  Les  Etats  de  Bretagne,  assemblés  à  Dinan,  con- 
seillèrent au  duc  de  ne  point  aller  à  cette  entrevue  et  d'envoyer 
auprès  de  Philippe-le  Bon  le  comte  de  Richemont,  ou  quelque 
autre,  pour  conclure  ce  mariage  et  faire  un  traité  d'alliance  avec 
lui  ^  Ce  n'était  pas  là  le  compte  de  Bedford.  Secondé  par  Philippe- 
le-Bon  et  par  Richemont,  il  fît  en  sorte  que  le  duc  de  Bretagne 
se  décidât  à  venir  négocier  avec  lui,  malgré  la  répugnance  que 
les  Bretons  montraient  à  servir  l'Angleterre  ^.  Dans  un  traité 
d'alliance  signé  le  dernier  jour  de  décembre  1422,  entre  le  duc  de 
Bourgogne  et  les  Etats  de  Bretagne,  on  voit  que  Philippe  exigea 
la  présence  de  Jean  V  pour  conclure  le  mariage  de  Richemont 
avec  la  duchesse  de  Guyenne.  D'autre  part,  il  aurait  alors  écrit 
à  sa  sœur  une  lettre  pressante  pour  faire  valoir  le  mérite  d'Artur, 
et  la  duchesse  aurait  répondu  que  le  comte  devait  être  complète- 
ment libre  avant  de  faire  de  nouvelles  démarches.  Celui-ci  n'en 
mit  que  plus  d'ardeur  à  hâter  les  négociations  et  le  moment  de 
sa  délivrance  *. 


1.  Le  n  novembre,  les  ambassadeurs  écrivaient  de  Nantes  au  Parlement 
pour  annoncer  ces  nouvelles.  Leur  lettre  fut  reçue  au  Parlement  le  ven- 
dredi 4  décembre  (Xi*  1480,  f"  265). 

2.  XI»  1480,  fos  259  v»  et  265.  Gruel,  190.  D.  Morice,  I,  p.  490,  et 
Preuves,  II,  col.  1125. 

3.  Le  monstrueux  traité  de  Troyes  avait  soulevé  des  protestations 
indignées.  "Voir  par  exemple  dans  La  Barre  (p.  315-322)  la  Réponse  d'un 
loyal  François  au  peuple  de  France  de  tous  Estais,  Il  y  a  là  comme  iin 
premier  éveil  de  patriotisme.  Les  Preuves  de  D.  Morice  (II,  col.  1120  et 
suiv.)  montrent  que  T.  du  Chastel,  «  mareschal  des  guerres  de  Mgr  le 
Régent,  »  prenait  en  Bretagne  des  troupes  pour  le  service  de  ce  prince. 
(Voir  aussi  Portef.  Fontanieu,  113-114,  au  23  mars  1423,  et  Glairambault, 
t.  71,  f°  5515,  au  mot  Marcille). 

4.  D.  Morice,  I,  491,  &i  Preuves,  II,  col.  1125-1128.  Hist.  de  Bourg,  IV,  67,  68. 
Richemont  était  à  Dinan  le  l"  janvier,  à  Fougères  le  24,  à  Reunes  le 
18  février,  à  Dinan  le  20  mars  {Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II,  col.  1129  et 
suiv.).  Le  13  décembre,  Bedford,  à  Vernon,  signe  un  sauf-conduit  pour 


72  ENTREVUE  d'amiens  (1423,  avril) 

Le  samedi  13  février  1423,  Jean  de  Chénery,  Henri  Camu  et 
Raoul  Gruel,  ambassadeurs  du  duc  de  Bretagne  et  du  comte  de 
Richemont,  présentèrent  leurs  lettres  de  créance  au  parlement 
de  Paris,  en  affirmant  «  la  bonne  volonté  »  qu'avaient  le  duc  et 
le  comte  d'entretenir  la  paix.  Enfin  il  fut  convenu  que  les  trois, 
ducs  se  rendraient  à  Amiens.  Richemont  parvint  à  emmener  son 
frère,  malgré  les  Etats  de  Bretagne.  Pour  prix  de  ce  nouveau 
service,  il  espérait  obtenir  de  Bedford  sa  libération  définitive. 
Jean  V  et  Artur  partirent  après  Pâques,  c'est-à-dire  après  le 
4  avril  1423,  avec  une  suite  nombreuse.  Ils  arrivèrent  le  12  avril 
à  Amiens,  où  Philippe-le-Bon  les  reçut  avec  sa  magnificence 
ordinaire.  Il  semble  que  les  trois  princes  ne  furent  pas  fâchés  de 
conférer  ensemble  avant  que  Bedford  fût  là.  Malgré  toutes  les 
apparences  de  bonne  entente,  il  y  avait  déjà  dans  l'âme  du  prince 
bourguignon  des  germes  de  mécontentement  et  de  défiance  qui 
allaient  se  développer  de  plus  en  plus  *. 

II  était  très  irrité  contre  le  duc  de  Glocester,  frère  de  Henri  V 
et  de  Bedford,  qui  venait  d'épouser  Jacqueline  de  Bavière,  com- 
tesse de  Hollande,  de  Zélande  et  de  Hainaut  ^  (mars  1423).  Cette 
jeune  femme,  veuve,  à  seize  ans,  du  second  dauphin,  Jean,  duc 
de  Touraine  (1417),  avait  ensuite  élé  mariée,  par  le  duc  de 
Bourgogne,  à  son  cousin  Jean,  duc  de  Brabant  ',  prince  débile 
et  disgracieux,  qu'elle  n'aimait  pas.  Lasse  d'une  union  qu'elle 
subissait  avec  répugnance,  elle  s'était  enfuie  en  Angleterre 
dès  1420.  Glocester,  épris  de  cette  princesse  jeune,  belle  et  riche, 
voulut,  d'accord  avec  elle,  faire  rompre  son  mariage,  pour 
l'épouser;  mais  Henri  V  l'avait  empêché  de  donner  suite  à  ce 

Jean  V,  afin  qu'il  vienne  traiter  de  la  paix  et  du  mariage  du  comte  de 
Richemont  (Arch.  de  la  Loire -Inférieure,  cass.  47,  E,  121,  et  Arch.  des 
aff.  étr.,  t.  362,  France,  fo^  69  v",  70).  Bedford  envoie  alors  en  Bretagne 
Bérard  de  Montferrand  (pièces  orig.  2019,  dossier  46270,  nos  14, 13).  Bedford 
va  ensuite  assiéger  Meulan,  en  février  et  mars  1423  (Fr.  26046,  n°  36). 
Il  n'est  pas  probable  que  Richemont  ait  alors  aidé  les  Anglais  à  faire 
capituler  Meulan,  comme  le  dit  Raoulet  (à  la  suite  de  J.  Chartier,  édition 
Vallet  de  V.,  III,  188).  Meulan  capitule  le  1"  mars  1423  (X'"  1480,  f»  270). 

1.  Xi"  1480,  f»  269  v%  et  Félibien,  Preuves,  II,  589.  Preuves  de  l'hist. 
de  Brei.,  II,  col.  1139,  1140,  1173.  Giairumbault,  t.  53,  f'  4013.  Portefeuille 
Fontanieu,  113-114,  au  12  et  au  25  février  1423,  et  Arch.  de  la  Loire-Infé- 
rieure, cass.  33,  E,  93,  et  cass.  47,  E,  121.  Le  7  avril,  traité  d'amitié  et 
d'alliance  entre  les  États  de  Bretagne  et  le  duc  de  Bourgogne,  à  condi- 
tion qu'il  consente  au  mariage  de  Richemont  avec  la  duchesse  de  Guyenne 
(Gachard,  Rapport  sur  les  archives  de  Dijon,  Bruxelles,  1843,  in-8'', 
p.  56,  57). 

2.  Fille  de  Guillaume  IV  de  Bavière  et  de  Marguerite  de  Bourgogne, 
sœur  de  Jean-saus-Peur. 

3.  Jean  IV,  duc  de  Brabant,  fils  d'Antoine  de  Bourgogne,  frère  de  Jean- 
sans-Peur. 


CONTRAT  d'aRTUR  ET  DE  MARGUERITE  73 

projet,  dans  la  crainte  de  mécontenter  son  puissant  allié,  le  duc 
de  Bourgogne.  Après  la  mort  de  Henri  V,  Glocester,  malgré 
Bedford,  avait  continué  ses  démarches  et  fait  annuler,  par  l'an- 
tipape Benoît  XIII,  le  second  mariage  de  Jacqueline.  Devenu  son 
mari,  Glocester  voulut  prendre  possession  de  ses  immenses  do- 
maines. Phillippe-le-Bon,  craignant  de  perdre  ce  riche  héritage, 
soutint  avec  ardeur  le  duc  de  Brabant,  et  ainsi  éclata,  entre  les 
ducs  de  Bourgogne  et  de  Glocester,  une  querelle  qui  devait  tour- 
ner au  grand  profit  de  la  France  *. 

Dans  ces  dispositions,  Philippe  attachait  plus  de  prix  que 
jamais  à  l'alliance  de  la  Bretagne,  et  le  mariage  de  sa  sœur 
Marguerite  avec  Richemont  lui  convenait  à  tous  les  égards.  Il 
avait  ses  raisons  pour  laisser  croire  que  la  duchesse  de  Guyenne, 
veuve  d'un  dauphin  de  France,Oiiettait  peu  d'empressement  à 
devenir  comtesse  de  Richemont,  quand  sa  sœur  Anne  allait  deve- 
nir duchesse  de  Bedford.  Il  savait  bien  qu'en  réalité  Marguerite 
désirait  ce  mariage  et  il  exploita  la  situation  de  manière  à  rendre 
les  futurs  époux  peu  exigeants  sur  la  dot^.  Il  fut  convenu  que, 
si  Philippe-le-Bon  mourait  sans  héritier,  la  princesse  Marguerite 
aurait  le  duché  de  Bourgogne,  à  moins  qu'elle  n'aimât  mieux 
entrer  en  partage  avec  ses  sœurs;  que,  s'il  avait  des  héritiers, 
une  somme  de  100  000  livres  serait  payée,  soit  avant,  sflit  après 
sa  mort,  à  sa  sœur  ou  à  son  mari;  que,  le  mariage  fait,  il  cons- 
tituerait à  sa  sœur  une  rente  de  5  000  livres  sur  le  duché  de 
Bourgogne  ;  qu'elle  garderait  son  droit  à  la  moitié  des  meubles 
du  dauphin  Jean  et  au  douaire  qui  lui  était  dû  pour  son  premier 
mariage;  enfin  qu'elle  renoncerait,  au  profit  du  duc  de  Bour- 
gogne, à  toutes  les  promesses  d'argent  et  de  terres  qui  lui 
avaient  été  faites  lors  de  ce  premier  mariage  et  à  sa  part  dans  la 
succession  de  son  père  et  de  sa  mère.  En  somme,  Philippe-le- 
Bon  promettait  beaucoup  plus  pour  l'avenir  que  pour  le  présent. 
Le  contrat  fut  signé  dès  le  14  avril.  Ensuite  les  trois  princes 
envoyèrent  des  ambassadeurs,  avec  de  riches  présents,  à  la 

1.  Anselme,  I,  249.  Monstrelet,  IV,  171.  Kervyn  de  Leltenhove,  Hist.  de 
Flandre,  Bruxelles,  1846-1830,  7  vol.  in-8»,  t.  IV,  224  et  suiv. 

2.  Dans  son  testament,  la  duchesse  de  Guyenne  dit  que,  quand  elle 
voulut  épouser  le  comte  de  Richement,  elle  abandonna  au  duc  de  Bour- 
gogne, sur  sa  demande,  la  somme  de  100  000  écus  d'or  qui  lui  avaient 
été  promis,  lors  de  son  mariage  avec  le  Dauphin  :  qu'elle  n'a  rien  recueilli 
de  l'héritage  de  son  père  et  de  sa  mère,  etc.  {Arch.  de  la  Loire-Inf., 
cas3.  9,  E,  24.)  Avant  son  second  mariage,  la  duchesse  de  Guyenne  n'avait 
reçu  de  son  frère  Philippe  que  1  200  livres  de  rente,  en  attendant  qu'il 
pût  lui  faire  un  établissement  sortable  [Hist.  de  Bourg,  IV,  53).  Il  fallut 
encore  de  longues  négociations  et  plusieurs  arrangements  pour  arriver 
au  règlement  complet  de  la  dot  (Coll.  de  Bourgogne,  t.  96,  p.  537-544^. 
S89-594,  621-626.  Fr.  4628  ;  f"»  621  et  suiv.) 


74  LES  TRAITÉS  d'amiens  (1423,  avril) 

duchesse  de  Guyenne.  Elle  reçut  gracieusement  ces  envoyés  et 
leur  donna  pour  son  futur  mari  un  diamant  rare,  de  la  plus 
grande  valeur  i. 

Cependant  le  duc  de  Bedford  était  aussi  arrivé  à  Amiens.  Le 
duc  de  Bourgogne  donna  des  fêtes  somptueuses  en  son  honneur  ; 
mais  le  régent  anglais  voulut  garder  dans  la  munificence  le 
rang  qu'il  occupait  dans  la  politique.  Il  défraya  Jean  V  et  Riche- 
mont  de  toutes  leurs  dépenses.  Les  négociations,  commencées 
depuis  longtemps,  aboutirent  à  plusieurs  traités,  le  17  avril  1423. 
L'un  stipule  une  triple  alliance  entre  les  ducs  de  Bedford,  de 
Bourgogne  et  de  Bretagne,  l'autre  une  alliance  particulière 
entre  Bedford  et  Jean  V,  pour  le  service  du  roi  d'Angleterre, 
l'autre  enfin  les  mariages  de  Bedford  et  d'Artur  de  Bretagne, 
duc  de  Touraine,  comte  de  Montfort  et  d'Ivry,  avec  Anne  et 
Marguerite  de  Bourgogne  ^.  Enfin,  le  18  avril,  fut  signé,  entre  les 
ducs  de  Bourgogne  et  de  Bretagne,  un  autre  traité  particulier, 
qui  ne  fut  peut-être  pas  connu  de  Bedford,  bien  que  son  nom  y 
soit  aussi  mentionné.  On  y  prévoit  la  possibilité  d'une  réconci- 
liation entre  Charles  YII  et  le  duc  de  Bourgogne.  Il  y  avait  là, 
en  germe,  la  dissolution  de  cette  triple  alliance  formée  si  labo- 
rieusemgit  par  Bedford.  L'entrevue  d'Amiens  finit  le  18  avril. 
Jean  V  revint  en  Bretagne  et  Bedford  à  Paris,  pendant  que 
Richemont  allait,  avec  le  duc  de  Bourgogne,  à  Arras  (20  avril). 
Il  semble  certain  que  le  régent  n'avait  pas  voulu  lui  accorder 
cette  liberté  entière  qu'il  espérait  obtenir,  pour  prix  de  ses  bons 
offices  envers  l'Angleterre.  Il  tenait  à  garder  le  plus  longtemps 
possible  sous  sa  dépendance  un  otage  qui  pouvait  lui  garantir 
la  fidélité  de  Jean  V  ^. 

En  attendant  son  mariage,  Richemont  resta  plusieurs  mois 
auprès  de  Philippe-le-Bon,  resserrant  ainsi  les  liens  d'une  amitié 
qui  devait  être  plus  utile  encore  à  la  France  qu'à  lui-même. 


1.  Gruel,  190.  D.  Plancher,  t.  III,  Preuves,  cccxii,  et  t.  IV,  68-70.  Gachard, 
Arch.  de  Dijon,  32,  57.  Collect.  de  Bourg.,  t.  96,  p.  533-536,  545-547. 

2.  X'a  1480,  f°  273.  Mariage  de  Bedford  avec  Anne  de  Bourgogne  (Collect. 
de  Bourg.,  t.  96,  p.  507-532). 

3.  Originaux  signés  et  scellés  des  traités  du  17  avril,  aux  Arch.  de  la 
Loire-Infér.,  cass.  47,  E,  121,  et  cass.  75,  E,  177.  Gruel,  190.  U.  Plan- 
cher, III,  Preuves,  cccxni  et  suiv. ;  IV,  69-71,  et  Preuves,  xxvii.  D.  Morice, 
I,  491,  et  Preuves,  II,  col.  1136  et  suiv.,  1173  et  suiv.  Xi»  1480,  f"  273. 
Ms.  Brienne  197,  f»  299.  Portef.  Fontanieu,  113-114,  au  17  avril  1423. 
P.  Fenin,  199-202.  Monstrelet,  IV,  147-149.  Inventaire  des  archives  du 
départ  du  Nord,  I,  338.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  74-75.  Le  Bourg,  de 
Paris,  185.  —  Le  nom  de  Jean  V  et  celui  de  Richemont  figurent  dans  deux 
documents  du  18  avril  (J.  Stevensom,  I,  1,  7).  Ce  sont  des  lettres  de  Bed- 
ford au  comte  de  Foix,  qui  s'alliait  aussi  avec  l'Angleterre. 


ARTUR  ÉPOUSE  LA   DUCHESSE   DE   GUYENNE   (1423,  OCTOBRE)        75 

Pendant  leur  séjour  à  Arras,  ils  présidèrent  à  une  joute  brillante 
entre  Poton  de  Saintrailles  et  Lionnel  de  Wandonne  i.  Ils  allè- 
rent ensuite  à  Gand  ^,  démasquer  l'imposture  d'une  religieuse  de 
Cologne,  qui  se  faisait  passer  pour  la  duchesse  de  Guyenne,  et 
revinrent  à  Arras,  d'où  ils  repartirent  le  21  août.  Six  jours 
après,  ils  arrivaient  à  Paris  (le  vendredi  27  août)  ^  Le  duc  de 
Bedford  s'avança  jusqu'à  la  Chapelle  Saint-Denis  à  leur  ren- 
contre, leur  fit  un  accueil  empressé  et  les  conduisit  à  l'hôtel  de 
la  reine  de  France.  Ils  séjournèrent  à  Paris  jusqu'au  9  sep- 
tembre, puis  se  rendirent  à  Dijon  (23  septembre).  C'est  là,  dans 
la  chapelle  du  palais  ducal,  que  fut  célébré  le  mariage  du  comte 
de  Richemont  avec  la  duchesse  de  Guyenne,  le  10  octobre  1423. 
L'archevêque  de  Besançon  donna  la  bénédiction  nuptiale  aux 
époux.  Ainsi  Marguerite  de  Bourgogne,  que  son  premier  ma- 
riage avec  le  Dauphin  semblait  destiner  au  trône  de  France, 
devint  comtesse  de  Richemont.  Toutefois,  elle  continua  de 
s'appeler  duchesse  de  Guyenne  *. 

Les  fêtes  qui  suivirent  cette  cérémonie  n'étaient  pas  encore 
terminées  quand  arrivèrent  à  Dijon  des  envoyés  d'Amédée  YIII, 
chargés  de  faire  des  démarches  auprès  de  Philippe-le-Bon,  pour 
l'amener  à  un  rapprochement  avec  Charles  VII.  Le  duc  de 
Savoie,  petit-fils  du  duc  de  Berry  par  sa  mère  ^,  avait  une 
grande  sympathie  pour  la  France,  et  il  ne  cessa  de  travailler  à 
une  réconciliation  entre  Charles  VII  et  le  duc  de  Bourgogne. 
Gendre  de  Philippe-le-Hardi,  il  était,  par  sa  femme  ^,  oncle  de 
Philippe-le-Bon  et  d'Artur  de  Bretagne.  Cette  proche  parenté 
donnait  plus  de  poids  à  sa  médiation.  Déjà,  au  mois  de  jan- 
vier 1423,  il  avait  fait  une  tentative  auprès  de  son  neveu  Phi- 
lippe '.  Cette  fois,  ses  envoyés  trouvèrent  le  duc  de  Bourgogne 
moins  hostile  au  roi  de  France.  Ils  sondèrent  aussi  les  inten- 
tions de  Richemont,  qui  était,  comme  son  beau-frère  Philippe, 

1.  Celui  qui  prit  Jeanne  d'Arc  (Monstrelet,  IV,  1S2;  P.  Fenin,  202). 

2.  Du  moins  le  duc  de  Bourgogne  y  alla,  avec  la  duchesse  de  Guyenne. 
La  fausse  duchesse  disait  qu'elle  avait  dû  s'enfuir,  pour  n'être  pas  forcée 
d'accepter  un  époux  d'un  rang  inférieur  à  celui  de  son  premier  mari. 
Pour  détromper  les  Gantois,  il  fallut  que  Philippe-le-Bon  leur  montrât  la 
véritable  duchesse  de  Guyenne  (Kervyn  de  L.,  Ilist.  de  Flandre,  IV,  233-37; 
Hist.  de  Bourgogne,  IV,  79). 

3.  X<»  1480i  f»  281.  Le  Bourg,  de  Paris,  189. 

4.  X<«  1480,  fo  281  v°.  Hist.  de  Bourg,  IV,  80,  81.  Le  8  septembre,  Bedford 
donne  au  duc  de  Bourgogne,  sa  vie  durant,  Péronne,  Roye,  Montdidier, 
Tournay,Saint-Amand,Mortagne,  etc.  (Moreau,  1423,  n°"  i  16-1 18;  Grue!,  190.) 

5.  Bonne  de  Berry,  qui  avait  épousé  Amédée  VII,  comte  de  Savoie. 

6.  Marie  de  Bourgogne,  fille  de  Philippe-le-Hardi.  Elle  mourut  en  1428. 

7.  Il  y  eut  alors,  à  Bourg,  des  conférences  importantes,  que  M.  de  Beau- 
court  a  bien  exposées  [Charles  VU,  t.  Il,  p.  318-329). 


76  CONFÉRENCE   DE   CIIALON    (1423,    DÉCEMBRE) 

mécontent  des  Anglais.  Fatigué  de  l'obstination  avec  laquelle 
Bedford  lui  refusait  sa  liberté,  il  commençait  à  entrevoir  la  pos- 
sibilité d'une  rupture  avec  lui  et  l'avantage  qu'il  aurait,  dans  ce 
cas,  à  se  tourner  vers  Charles  YII.  A  la  même  époque  (novem- 
bre 1423),  la  reine  Yolande,  revenue  du  Midi,  depuis  quelques 
mois,  était  à  Nantes,  plaidant  auprès  de  Jean  V  la  cause  du  roi 
de  France  *,  tandis  que  les  ambassadeurs  d'Amédée  VIII  agis- 
saient auprès  de  Philippe-le-Bon.  Ils  déterminèrent  Philippe  à 
se  rendre,  avec  son  beau-frère  Artur,  à  Chalon-sur-Saône,  où 
ils  eurent  des  conférences  avec  le  duc  de  Savoie,  du  l'^''  au  20  dé- 
cembre 1423. 

Après  cette  entrevue,  qui  marque  le  commencement  d'une 
évolution  capitale  dans  sa  vie  politique,  Richemont  revint  au- 
près de  sa  femme,  à  Montbard  ^.  La  duchesse  de  Guyenne  rési- 
dait alors  dans  cette  ville,  que  son  frère  lui  avait  donnée  ^.  Le 
duc  Philippe  alla  tenir,  à  Dijon,  les  Etats  de  Bourgogne  (jan- 
vier 1424),  et  vint  ensuite  retrouver  sa  sœur  et  son  beau-frère  à 
Montbard.  Sur  la  nouvelle  que  la  duchesse  douairière  de  Bour- 
gogne ''  était  gravement  malade,  ils  partirent  pour  se  rendre 
auprès  d'elle  ;  mais,  en  chemin,  ils  apprirent  sa  mort  et  revin- 
rent à  Dijon.  Philippe-le-Bon,  ses  affaires  réglées,  se  hâta  de 
retourner  à  Paris,  pour  réclamer  l'intervention  de  Bedford  dan& 
son  différend  avec  Glocester  et  Jacqueline  de  Hainaut.  Le  comte 
de  Richemont  accompagnait  encore  le  duc  de  Bourgogne  dans 
ce  voyage  ^. 

1.  Elle  était  aussi  en  relations  avec  le  duc  de  Bourgogne  (de  Beaucourt, 
t.  II,  p.  353  et  note  1).  Peu  après,  le  duc  de  Bretagne  recevait  dans  ses 
ports  des  Écossais  qui  venaient,  avec  Douglas  et  Buchan,  se  mettre  au 
service  de  Charles  VII,  en  février  1424  (Cousinot,  19S,  221  ;  Berri,  370; 
Preuves  de  D.  Morice,  II,  1164;  Rymer,  IV,  4«  partie,  107-114;  Grafton,  I, 
553-S54;  Rolls  of  Parliament,  IV,  210;  J  183,  n"  141  ;  Fr.  4483,  f"»  348,  334; 
D.  Lobineau,  I^  563;  de  Beaucourt,  II,  339).  En  même  temps,  Richard  de 
Bretagne  entrait  dans  une  ligue  conclue  entre  les  rois  de  France  (Charles  VII), 
de  Castille  et  d'Ecosse,  les  ducs  de  Milan  et  de  Savoie  et  beaucoup  de 
grands  seigneurs  français,  par  le  traité  d'Abbiate-Grasso,  le  26  février  1424 
(Vallet  de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  I,  392-393). 

2.  Arrondissement  de  Semur. 

3.  Le  23  octobre,  à  Dijon,  Richemont  promet  au  duc  de  Bourgogne  de 
lui  rendre  les  château,  ville  et  châtellenie  de  Montbard  (à  lui  accordés 
sur  les  6000  livres  de  rente  promises  à  Marguerite,  sa  femme),  quand  il 
lui  donnera,  en  France,  des  terres  de  même  revenu  (Gachard,  Arch.  de 
Dijon,  p.  58).  Cet  engagement  est  ratifié  le  23  octobre  par  Marguerite  de 
Bourgogne  [Ilnd.;  Collect.  de  Bourg,  t.  96, -p.  537-339). 

4.  Marguerite  de  Bavière,  veuve  de  Jean-sans-Peur. 

5.  Hvtt.  de  Bourgogne,  IV,  84-86.  X'»  1480,  f»  290.  Il  n'est  pas  inutile  de 
signaler  ici  la  duplicité  de  Bedford,  qui  agissait  auprès  du  pape  en  faveur 
de  son  frère,  tout  en  paraissant  blâmer  celui-ci  devant  le  duc  de  Bour- 
gogne (J.  Stevenson,  II,  2"  p.,  388). 


TRAITÉ   DE  NANTES   (1424,    18  MAl)  77 

Ils  arrivèrent  à  Paris  le  10  février  1424.  Bedford  n'y  étant 
pas.  ils  repartirent,  le  23,  pour  Amiens,  où  ils  devaient  avoir 
une  conférence  avec  lui  et  avec  plusieurs  conseillers  de  Henri  VI. 
Les  envoyés  des  ducs  de  Glocester  et  de  Brabant  s'y  trouvèrent 
aussi  ;  mais  on  ne  put  rien  conclure,  et  il  fut  seulement  convenu 
qu'on  se  réunirait  à  Paris,  vers  la  Trinité  *. 

Avant  de  retourner  à  Paris,  le  comte  de  Richemont  se  rendit 
€n  Bretagne  ^,  où  se  poursuivaient  des  négociations  qui  l'inté- 
ressaient au  plus  haut  point.  La  reine  Yolande  était  revenue 
auprès  de  Jean  V,  avec  le  chancelier  de  France  ^  et  plusieurs 
autres  ambassadeurs  de  Charles  VII.  Le  18  mai  fut  signée,  à 
Nantes,  une  convention  qui  posait  les  premières  bases  d'un 
traité  de  paix  entre. le  roi  de  France  et  le  duc  de  Bourgogne  ^. 
La  reine  de  Sicile  et  le  duc  de  Bretagne  devaient  être  les  média- 
teurs et  le  duc  de  Savoie  le  conservateur  de  la  paix.  Cette  con- 
vention devait  être  jurée  par  les  princes  qui  étaient  auprès  du  roi 
et  de  Philippe-le-Bon,  notamment  par  le  comte  de  Richemont 
et  par  son  frère  Richard,  dont  le  nom  figure  officiellement 
parmi  ceux  des  serviteurs  de  Charles  VIL  II  était  stipulé  que  les 
médiateurs  pourraient  mettre  auprès  du  roi,  «  en  son  hôtel  et 
en  son  service,  de  leurs  gens  bien  notables  et  en  tel  et  si  bon 
nombre  qu'il  devra  suffire  pour  être  à  son  conseil  »  ;  enfin  le 
duc  de  Bretagne  suppliait  le  roi  de  faire  aux  Anglais  des  offres 
dont  ils  seraient  contents,  pour  arriver  à  la  paix  générale.  Ainsi 
la  reine  Yolande,  qui  était,  qui  devait  rester  l'âme  de  cette  poli- 
tique, faisait  un  grand  pas  dans  la  voie  où  le  comte  de  Riche- 
mont devait  bientôt  la  suivre  et  la  seconder.  Il  est  très  probable 

1.  Bedford  alla  de  Rouen  à  Amiens,  d'où  il  revint  à  Paris,  le  23  mars 
<Fr.  4485,  f<>s  350-353,  355,  357,  369;  JJ  172,  fos  241,  303).  Cette  deuxième 
entrevue  d'Amiens  n'est  pas  mentionnée  par  les  historiens  (D.  Salazard,  de 
Barante,  Vallet  de  V.,  de  Beaucourt),  mais  elle  est  attestée  de  la  manière 
la  plus  précise  par  les  registres  du  Parlement  (X'a  1480,  f"  290  et  291).  Le 
jeudi  9  mars,  la  cour  reçoit  une  lettre  de  Bedford,  écrite  d'Amiens,  le 
4  mars,  et  annonçant  la  reddition  du  Crotoy  (f»  291  v).  Le  10  mars,  Salis- 
bury  part  de  Paris  pour  aller  au  Conseil  tenu  dans  la  ville  d'Amiens  par 
les  ducs  de  Bedford  et  de  Bourgogne  et  le  comte  de  Richemont  (f  291  v°). 
Monstrelet  (IV,  175)  parle  de  cette  conférence,  mais  il  la  place  inexacte- 
ment en  janvier  1423  a.  st.  —  Voir  aussi  Gachard.  Arch.  de  Dijon,  124-134. 

2.  Le  14  mai,  le  duc  de  Bourgogne  ordonnait  de  payer  2300  francs  au 
comte  de  Richemont,  pour  les  dépenses  d'un  voyage  qu'il  allait  faire  en 
Bretagne  (de  Beaucourt,  t.  II,  353,  note  3). 

3.  M.  Gouges  de  Charpaigne,  évoque  de  Clermont,  qui  avait  été  chan- 
celier du  duc  de  Berry  et  du  duc  de  Guyenne  et  qui  avait  bien  connu 
Richemont  (Anselme,  VI,  396-397;  Pièces  originales,  t.  47,  dossier  Char- 
paigne, n"  31-33  et  suiv.).  Il  était  déjà  allé  en  Bretagne  en  1420  (Clair.,  54, 
f»  4107). 

4.  Il  est  intéressant  de  le  rapprocher  du  traité  d'Arras  conclu  en  143S. 


78         QUERELLE  ENTRE  ARTUR  ET  BEDFORD  (1424) 

qu'il  n'arriva  en  Bretagne  qu'après  la  conclusion  du  traité  de 
Nantes  et  que  la  reine  de  Sicile  essaya  de  le  gagner,  comme  ses 
frères,  à  la  cause  de  Charles  VII,  en  ouvrant  à  son  ambition  de 
larges  perspectives  *. 

Au  mois  de  juin  suivant,  il  était  à  Paris,  avec  le  duc  de  Bour- 
gogne. Il  put  lui  rendre  compte  de  ce  qui  s'était  passé  en  Bre- 
tagne, sonder  ses  intentions  et  s'entendre  avec  lui  sur  la  conduite 
qu'ils  devaient  tenir  à  l'égard  de  Bedford,  Philippe-le-Bon  n'était 
pas  encore,  il  s'en  faut,  décidé  à  rompre  avec  l'Angleterre; 
mais  il  ne  semble  pas  qu'il  ait  conseillé  à  son  beau-frère  Artur 
une  fidélité  inébranlable.  Las  d'une  situation  incertaine  et  ob- 
scure, impatient  de  jouer  un  rôle  plus  actif  et  plus  digne  d'un 
prince  breton  mari  de  la  duchesse  de  Guyenne,  travaillé  par 
des  désirs  ambitieux  qui  pouvaient  trouver  leur  satisfaction 
auprès  du  roi  de  France  tout  aussi  bien  qu'au  service  de  l'Angle- 
terre, Richemont  voulut  arriver,  d'un  côté  ou  de  l'autre,  à  une 
solution  avantageuse.  Il  est  probable  qu'il  ne  sut  ni  dissimuler 
cette  disposition  d'esprit  à  l'œil  pénétrant  de  Bedford,  ni  adoucir 
par  des  formes  adroites  le  caractère  impérieux  d'une  mise  en 
demeure  qui  devait  le  froisser  ^. 

A  cette  époque,  les  environs  de  Paris  étaient  infestés  par  des 
routiers  qui  portaient  de  tous  côtés  leurs  ravages,  depuis  que 
Charles  VII  les  avait  licenciés,  pour  ne  garder  que  des  soldats 
étrangers.  Les  Parisiens  demandaient  qu'on  prît  de  promptes 
mesures  pour  éloigner  ces  pillards.  Alors  le  comte  de  Richemont 
sollicita  le  commandement  d'une  petite  armée  anglaise  destinée 
à  protéger  Paris,  en  promettant  d'y  joindre  un  corps  considé- 
rable de  troupes  bretonnes.  S'il  faut  en  croire  une  tradition  bien 
accréditée,  Bedford,  qui  d'ordinaire  était  prudent  et  circons- 
pect, aurait  mortellement  offensé  Richemont  par  un  refus  brutal 
et  par  des  réflexions  blessantes.  On  dit  même  qu'il  en  résulta 
une  violente  altercation  et  que  le  régent  s'emporta  jusqu'à  frap- 
per son  interlocuteur  ^  Il  est  probable  que  la  défiance  de  Bed- 

1.  Le  traité  de  Nantes,  du  18  mai  1424,  a  été  mentionné  pour  la  pre- 
mière fois  et  analysé  par  M.  de  Beaucourt  dans  sa  savante  Hist.  de 
Charles  VII,  t.  II,  353-356,  d'après  les  Archives  de  Turin. 

2.  Le  duc  de  Bourgogne  était  à  Paris  du  3  juin  au  5  juillet  {Hist.  de 
Bourgogne,  IV,  87).  Bedford  tint  souvent  conseil,  à  cette  époque,  avec 
Robert  Le  Sage  et  l'abbé  du  Mont-Saint-Michel,  qui  l'avaient  accompagné 
à  Amiens  au  mois  de  février  et  qu'il  avait  mandés  tout  exprès  à  Paris 
(Fr.  4485,  f-  350-352,  355). 

3.  «  En  ce  temps  vint  d'Engleterre  Artur,  conte  de  Richemont,  frère 
du  duc  de  Bretaigne,  lors  tenant  le  parti  des  Anglois,  lequel,  en  parlant 
au  duc  de  Bethfort,  régent  en  France,  olrent  aucun  estrif  de  paroles  où 
l'en  dit  que  ledit  duc  lui  donna  une  buffe;  parquoy,  de  despit,  il  alla 


ARTUR  SE   SÉPARE   DES  ANGLAIS   (4424)  79 

ford  était  en  éveil  depuis  les  conférences  de  Ghâlon  et  qu'il  était 
encore  plus  irrité  contre  le  duc  de  Bretagne  et  contre  son  frère 
Arlur,  depuis  qu'il  connaissait  leur  tendance  à  se  rapprocher 
de  Charles  VII.  Il  se  garda  bien  de  manifester  son  mécontente- 
ment au  duc  de  Bourgogne,  dont  il  avait  grand  besoin.  Pour 
lui  montrer  qu'il  avait  tout  profit  à  rester  l'allié  des  Anglais, 
il  lui  donna  même  les  comtés  de  Mâcon,  d'Auxerre  et  la  châtel- 
lenie  de  Bar-sur-Seine  (20  juin);  mais  il  crut  inutile  de  prendre 
des  ménagements  envers  son  autre  beau-frère,  qui  était  encore 
son  prisonnier.  Ce  fut  une  faute  qui  coûta  cher  à  l'Angleterre. 
Dès  lors,  Richemont  tourna  d'un  autre  côté  son  ambition  déçue 
et  chercha  le  moyen  de  travailler  en  même  temps  à  sa  vengeance 
et  à  sa  fortune  *. 

Il  dissimula  d'abord  ses  projets,  dans  l'intérêt  de  sa  sécurité 
personnelle.  Il  voulut  aussitôt  retourner  en  Bretagne,  mais  il 
jugea  prudent  de  ne  point  passer  par  la  Normandie,  occupée  par 
les  Anglais.  Il  gagna  secrètement  la  Flandre  et  s'embarqua  dans 
un  port  de  ce  pays,  tandis  que  ses  gens,  avec  le  sire  de  Beau- 
manoir,  traversaient  la  Normandie,  en  répétant  partout  que 
leur  maître  les  suivait.  Il  arriva  sans  accident  à  Saint-Malo.  Il 
avait  rompu  pour  toujours  avec  les  Anglais  *. 

Ainsi,  sans  le  refus  de  Bedford,  Artur  de  Bretagne  aurait 
porté  les  armes  contre  la  France,  au  lieu  de  la  défendre,  et  cette 
conversion  s'expHque  par  l'ambition,  le  dépit,  la  soif  de  ven- 
geance !  On  voudrait,  pour  son  honneur,  qu'elle  eût  été  déter- 
minée par  de  plus  nobles  inspirations  ;  mais  les  antécédents  et 
la  conduite  de  Richemont  depuis  sa  captivité  sont,  malheureu- 
sement, de  nature  à  faire  croire  qu'il  eût  combattu  contre  la 
France,  si  Bedford  avait  su  contenter  ses  désirs.  Cette  grande 
situation  que  le  gouvernement  anglais  lui  refusait,  il  allait  la 
trouver  auprès  du  véritable  roi  de  France  ;  il  en  avait  déjà  le 
secret  espoir  quand  il  avait  rompu  avec  le  régent. 

Yolande  continuait  d'employer  tous  ses  efforts  à  réconcilier 


devers  le  roy  Gtiarles.  »  (Fr.  1371,  Chrou.  Martinienne,  f"  253;  P.  Fenin. 
204  et  note  3;  Hist.  de  Bourg.,  IV,  87,  88). 

1.  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando,  Hachette,  1879,  in-S",  p.  23  et  211. 
Vallet  de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  I,  428;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  87,  88, 
Pr.  xli.  Fr.  1371  (Chronique  Martinienne),  f"  253.  Grafton,  I,  333.  Le 
21  juin,  sur  la  demande  du  duc  de  Bourgogne  et  du  f^rand  Conseil  de 
France,  le  Maine  et  l'Anjou  sont  donnés  à  Bedford  (JJ  172,  f°  290).  Ce 
coup  était  dirigé  contre  la  reine  Yolande;  c'était  la  réponse  du  régent  au 
traité  de  Nantes. 

2.  Gruel,  190.  C'est  en  juin,  et  non  en  mars,  qu'il  faut  placer  cette  rup- 
ture entre  Bedford  et  Richemont  et  le  retour  de  celui-ci  en  Bretagne,  car 
il  ne  serait  pas  revenu  à  Paris  en  juin,  si  la  rupture  avait  eu  lieu  en  mars. 


80  SIÈGE  d'ivry  (1424) 

Charles  VII  avec  les  maisons  de  Bretagne  et  de  Bourgogne.  Elle 
avait  repris  un  grand  ascendant  à  la  cour  de  son  gendre,  et,  à 
travers  des  obstacles  qui  semblaient  insurmontables,  elle  suivait 
obstinément  une  politique  dont  le  succès  pouvait  seul  sauver 
Charles  VII  et  la  France.  La  reine  de  Sicile  était  secondée  par 
le  chancelier  Martin  Gouge,  évéque  de  Clermont;  elle  s'enten- 
dait avec  Amédée  VIII  et  avec  le  duc  de  Bretagne.  De  son  côté, 
Bedford  négociait  avec  Jean  V,  dont  il  craignait  la  défection; 
néanmoins,  quand  Richemont  revint  en  Bretagne,  il  trouva  le 
duc  son  frère  bien  disposé  à  l'égard  de  Charles  VII.  Les  efforts 
de  Yolande  et  les  circonstances  firent  le  reste  *, 

Les  conseillers  du  roi,  qui  redoutaient  un  rapprochement  de 
leur  maître  avec  Jean  V  et  Philippe-le-Bon  2,  avaient  eu  recours 
à  des  princes  étrangers.  Ils  avaient  fait  venir  en  France,  outre  les 
Ecossais  ^,  des  Lombards  et  des  Espagnols,  pour  remplacer  les 
routiers  récemment  licenciés.  Profitant  des  embarras  de  Bedford, 
ils  voulaient  diriger  une  attaque  vigoureuse  contre  les  Anglais  ; 
mais  le  régent  de  France  avait  eu  le  temps  d'appeler  des  ren- 
forts, et  il  prit  l'offensive  en  faisant  assiéger  Guise  *,  Gaillon  °, 
Ivry.  Cette  dernière  place,  nommée  alors  Ivry-la-Chaussée  '',  avait 
été  donnée  par  Henri  V  à  Richemont,  avec  le  comté  d'Ivry  ;  mais 
un  capitaine  gascon,  au  service  de  Charles  VII,  Girault  de  La 
Pallière,  s'en  était  emparé  en  1423  ''.  Le  comte  de  SufTolk, 
chargé  par  Bedford  d'assiéger  la  ville  et  le  château  d'Ivry 
(juin  1424),  réduisit  bientôt  Girault  à  capituler  et  à  promettre 
qu'il  rendrait  la  place  le  15  août,  s'il  n'était  pas  secouru  avant 

1.  Une  lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais,  du  2  juin  1425,  prouve  que 
la  reine  Yolande  fut  l'âme  de  toutes  ces  négociations.  (Voir  la  Revue  du 
Lyonnais,  t.  19,  année  1859,  p.  327).  Le  21  octobre  1424,  à  Angers,  Charles  VII 
fit  un  don  à  Guil.  Eder,  doyen  de  Nantes,  son  conseiller  et  conseiller 
aussi  du  duc  de  Bretagne,  pour  les  services  rendus  au  roi  «  mesmement 
depuis  le  commencement  des  choses  pourparlées  audit  pais  de  Bretaigne, 
pour  le  bien  de  la  paix  »  (Fr.  20387,  n"  32). 

2.  H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  27. 

3.  Il  y  avait  des  Écossais  en  France  dès  1419  et  1420  (Clairambault, 
t.  9,  f"  513,  et  t.  41,  f  3093;  Fr.  25710,  n"'  3,  5).  Nouvelle  alliance  avec 
l'Ecosse,  gouvernée  alors  par  le  duc  d'Alliany,  pendant  la  captivité  du  roi 
(J  186b,  f«  16). 

4.  Arrondissement  de  Vervius. 

5.  Arrondissement  de  Louviers. 

6.  Auj.  Ivry-la-Bataille,  arrondissement  d'Evreux  (Fr.  4485,  f"*  292-295). 

7.  Et  non  en  1424,  comme  le  dit  Vallet  de  V.,  I,  409.  Dès  les  mois  de 
novembre  et  décembre  1423,  les  Anglais  s'occupent  du  recouvrement 
d'Ivry  (Ms.  fr.  26046,  n"»  154,  174-181,  205,  231  et  Ms.  fr.  4485,  fos  1-7).  Cette 
place  avait  même  dû  être  prise  dans  les  premiers  mois  de  1423  (J  172 
fo  314).  La  prise  d'Ivry  par  Girault  de  la  Pallière  est  mentionnée  au 
registre  JJ  173,  f"  45.  Voy.  aussi  f«  102  v°. 


BATAILLE  DE  VERNEUIL   (1424,    17   AOUT)  81 

ce  temps.  Le  roi  de  France  fit  marcher  son  armée  dans  cette 
direction.  Au  lieu  d'attaquer  les  Anglais,  fortement  retranchés 
devant  Ivry,  cette  armée  alla  s'emparer  de  Verneuil  *.  Bedford, 
après  avoir  pris  possession  d'Ivry  au  jour  fixé  (15  août),  s'avança 
jusqu'auprès  de  Verneuil,  où  se  livra,  le  jeudi  17  août,  une 
bataille  décisive.  Cette  fois  encore,  la  science  militaire  et  la 
discipline  l'emportèrent  sur  le  courage  et  sur  le  nombre;  les 
Anglais  ajoutèrent  un  nouveau  triomphe  à  ceux  de  Crécy,  de 
Poitiers  et  d'Azincourt  *. 

Cette  armée,  que  les  conseillers  de  Charles  VII  avaient  réu- 
nie avec  tant  de  peine,  était  maintenant  détruite  ;  plus  de 
7  000  hommes  avaient  été  tués  3,  et,  parmi  eux,  le  comte  de  Bu- 
chan,  connétable  de  France,  et  Archibald  Douglas,  duc  de  Tou- 
raine;  beaucoup  d'autres  seigneurs  étaient  prisonniers,  comme 
le  duc  d'Alençon  et  le  maréchal  de  La  Fayette.  Ce  nouveau  dé- 
sastre, après  la  défaite  éprouvée  à  Cravant-sur- Yonne  l'année 
précédente  (31  juillet  1423)  *,  pouvait  achever  la  ruine  de  la 
France.  Bien  que  la  victoire  eut  coûté  cher  aux  Anglais  ^,  Bed- 
ford pouvait  en  tirer  un  grand  profit,  avant  que  ses  adversaires 
eussent  le  temps  de  reprendre  des  forces.  Il  chargea  Fastolf  ®, 
avec  Th.  de  Scales  et  J.  de  Montgommery  de  réduire  les  villes 
et  forteresses  du  Maine  ;  il  fît  assiéger  Nogent-le-Rotrou,  Senon- 
ches',  Rambouillet,  Rochefort  %  le  Mont-Saint-Michel  et  diverses 
autres  places.  Guise  capitula  (18  septembre).  LaHire  %  faute  de 
secours,  dut  abandonner  Vitry-en-Perthois  et  les  autres  forte- 
resses qu'il  tenait  en  Champagne.  Le  faible  Charles  VII,  étreint 
par  ces  deux  ennemis  formidables,  Bedford  et  le  duc  de  Bour- 

1.  Arrondissement  d'Evreux. 

2.  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando,  23-25,  Monstrelet,  IV,  183-196. 
Fenin,  214-216,  219-222.  Cousinot,  196-198,  222-226.  Sharon  Turner,  III, 
14-16.  Rolls  of  Pari,  IV,  423.  K  62,  n»  12.  X'»  1480,  f  305  r»  et  V.  Fr. 
26047,  nos  251,  257,  303,  342-344,  366.  Fr.  4485,  fo^  7-9,  280-307,  369,  412. 
Clairamb.,  t.  188,  f»  7127.  Fr.  4491,  f»  40.  X»»  4793,  f  468  v».  JJ  172,  f  324. 
Martial  d'Auvergne,  Poésies,  Paris,  1724,  2  vol.  petit  in-12,  I,  p.  o3-55. 

3.  De  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  16  et  note  3. 

4.  Xia  1480,  f»  279  v».  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  58.  Gravant, 
arrondissement  d'Auxerre. 

5.  Beaucoup  de  Normands  avaient  quitté  l'armée  anglaise,  pour  ne  pas 
combattre  contre  Charles  VII  et  avaient  répandu  dans  les  environs  le 
bruit  que  "Bedford  avait  été  vaincu  (Monstrelet.  IV,  197;  P.  Fenin,  222; 
Ck)usinot,  226,  et  surtout  JJ  172,  f»^  324,  334,  348-54,  et  JJ  173,  f»  13). 

6.  On  trouve  ce  nom  écrit  de  différentes  manières.  La  signature  originale 
est  Ffastolf  (Qairamb.,  t.  46,  f"  3409).     . 

7.  Arrondissement  de  Dreux. 

8.  Arrondissement  de  Rambouillet. 

9.  Etienne  de  Vignoles,  plus  connu  sous  le  nom  de  La  Hire,  fameux  capi- 
taine de  routiers. 

RiCHEMONT.  6 


82  l'épée  de  connétable  offerte  a  artur  (1424) 

gogne,  allait  être  écrasé.  Quand  il  apprit  la  «  douloureuse  jour- 
née »  de  Verneuil,  «  la  destruction  de  ses  princes  et  de  sa  cheva- 
lerie »,  le  pauvre  roi  «  eut  au  cuer  si  grant  tristesse  et  telle  que 
plus  n'en  povoit,  et  fut  par  longtemps  en  grand  ennui,  voyant 
que  de  toutes  parts  ses  besongnes  lui  venoient  au  contraire  *.  » 

Cette  défaite  ne  fut  pas  moins  désastreuse  pour  ses  favoris. 
Ils  essayèrent  bien  encore  de  recourir  aux  étrangers,  à  l'Ecosse, 
à  la  Gastille  ;  mais  leur  impuissance  était  si  manifeste  qu'ils  ne 
purent  empêcher  le  roi  de  prêter  une  oreille  plus  docile  aux 
conseils  de  sa  belle-mère.  Yolande  redoubla  d'efforts,  stimulée 
aussi  par  ses  propres  intérêts.  Henri  VI  n'avait-il  pas  donné 
récemment  à  Bedford  le  Maine  et  l'Anjou?  Elle  avait  donc  à 
défendre  tout  à  la  fois  la  couronne  de  son  gendre  et  les  domaines 
de  ses  enfants.  Malgré  la  défiance  des  favoris,  malgré  la  répu- 
gnance de  Jean  Y  et  l'inertie  du  roi,  son  adresse  féminine,  par- 
fois exempte  de  scrupules,  sut  mener  à  bonne  fin  une  entreprise 
aussi  ardue  ^ 

Quand  la  mort  de  Buchan,  tué  à  la  bataille  de  Yerneuil,  eut 
laissé  vacante  la  charge  de  connétable,  Yolande  obtint  que 
cette  haute  dignité  fût  proposée  au  comte  de  Richemont.  C'était 
un  moyen  d'intéresser  ce  prince  à  la  réussite  de  ses  projets.  S'il 
avait  eu  assez  d'influence  sur  son  frère  pour  lui  faire  jurer  le 
traité  de  Troyes,  il  pourrait  bien  l'amener  aussi  à  une  nouvelle 
réconciliation  avec  le  roi  de  France.  Pourtant  une  rupture  avec 
l'Angleterre,  au  moment  même  où  cette  puissance  était  si  re- 
doutable, mettait  la  Bretagne  en  péril,  et  il  était  bien  difficile 
que  les  négociations,  si  secrètes  qu'elles  fussent  ^,  échappassent 
à  Bedford.  Regrettant  peut-être  l'imprudence  qu'il  avait  com- 
mise en  offensant  Richemont,  il  avait  envoyé  auprès  de  Jean  V 
un  de  ses  conseillers,  Bérard  de  Montferrant,  qui  resta  plu- 
sieurs mois  en  Bretagne  *.  Sa  présence  n'empêcha  point  Yolande 
et  Richemont  de  continuer  leurs  pourparlers. 


1.  Monstrelet,  IV,  198.  Le  Bourg,  de  P.,  194-199.  Fr.  26047,  n"^  342-344, 
Fr.  26048,  n»  548.  Fr.  4485,  fs  307-319.  JJ,  173,  f"'  157,  282  v.  Portef.  Fon- 
ianieu,  113-114,  au  4  octobre  1424.  K,  62,  n"  11*  et  11'3.  Ilist.  de  Bour- 
gogne, IV,  92. 

2.  J.  Quicherat,  R.  de  Villandrando,  26,  et  note  1.  Fr.  20684,  f-  541. 
Ms.  Lat.  6024,  n"  13.  K  62,  n"  ll's.  JJ  172,  f"  290.  JJ  173,  f"  15Î  v».  Portef^ 
Fontanieu,  au  21  octobre  1424.  Le  1»'  juillet  1423,  Louis  III,  roi  de  Sicile, 
qui  était  alors  à  Rome,  avait  donné  à  sa  mère  Yolande' l'administration 
de  ses  domaines  de  France  [Arch.  des  aff.  étr.,  t.  362,  France,  fos  71-74). 

3.  Dès  le  mois  de  septembre  on  savait,  à  Tournai,  qu'un  traité  se  négo- 
ciait avec  le  duc  de  Bretagne;  que  ses  barons  avaient  juré  de  servir  Char- 
les VII  (H.  Vandenbroeck,  Consaux,  II,  106). 

4.  De  juillet  à  octobre.  Pièces  orig.,  2019,  dossier  46270,  n"  16.  (Mont- 


INQUIÉTUDE  DES  FAVORIS  DU  ROI   (1424)  83 

Il  fallait  profiter  de  la  querelle  qui  s'envenimait  de  plus  en 
plus  entre  les  ducs  de  Bourgogne  et.  de  Glocester,  malgré  tous 
les  efforts  du  régent  de  France.  Richemont  correspondait  aussi 
avec  sa  femme,  qui  était  à  Montbard,  et  avec  Philippe-le-Bon  *. 
La  duchesse  de  Guyenne  désirait  que  son  mari  s'élevât  au  plus 
haut  rang,  et  Philippe-le-Bon  ne  désapprouvait  pas  les  intentions 
de  son  beau-frère  Artur.  Restait  à  décider  le  duc  de  Bretagne. 
Yolande  envoya  d'abord  une  nouvelle  ambassade  avec  son  jeune 
fils  Charles  ^  lui  annoncer  que  le  roi  avait  l'intention  de  nom- 
mer son  frère  Artur  connétable  de  France.  Le  duc  Jean  accueillit 
assez  favorablement  ces  ouvertures,  mais  l'intervention  inquiète 
des  favoris  faillit  tout  perdre. 

Le  plus  compromis  de  ces  conseillers  armagnacs,  Louvet, 
conduisit  lui-même  l'ambassade  chargée  de  porter  au  duc  les 
offres  officielles  de  Charles  VII.  Il  tenait  à  prendre  ses  pré- 
cautions et  ses  garanties  contre  le  ressentiment  de  Jean  V.  Il 
espérait  que  l'entremise  de  Richemont  arrangerait  cette  affaire 
délicate  '.  D'ailleurs  cette  mission  avait  été  prévue  et,  pour 
ainsi  dire,  sollicitée  lors  du  traité  de  Nantes;  mais  elle  n'al- 
lait pas  sans  quelques  inconvénients.  Jean  V  et  ses  conseil- 
lers voyaient  dans  Louvet  le  principal  complice  des  Penthièvre, 
le  fauteur  même  de  l'attentat  *.  Celui-ci  commit  sans  doute 
quelque  grave  maladresse,  car  il  reçut  l'ordre  de  quitter  immé- 
diatement la  Bretagne.  Il  aurait  même  été  en  grand  danger  de 
sa  personne.  Heureusement  que  la  reine  Yolande  sut  réparer  ce 
malencontreux  incident,  grâce  à  Tanguy  du  Chastel.  Ce  rude 
Breton,  dévoué  corps  et  âme  à  Charles  VII,  qui  lui  témoignait 
beaucoup  d'affection  et  de  reconnaissance,  était  accusé  d'avoir 
pris  part  à  l'assassinat  de  Jean-sans-Peur;  mais  il  n'était  point 
suspect  au  duc  de  Bretagne,  et,  seul  parmi  les  conseillers  arma- 
gnacs, il  était  prêt  à  se  sacrifier  aux  intérêts  de  son  maître. 


ferrand).  Fr.  4489,  f"  336,  337,  410,  Voir  aussi  JJ  172,  f'  261  v.    K  62, 
no  1112. 

1.  D.  Morice,  I,  493.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  91.  Stevenson,  t.  II,  2«  par- 
tie, p.  386-396. 

2.  Charles  d'Anjou,  troisième  fils  de  Louis  III  d'Anjou  et  de  Yolande 
d'Aragon,  n'avait  encore  que  dix  ans.  Il  était  né  le  14  octobre  1414  (An- 
selme, I,  231,  232,  233). 

3.  L'engagement  du  8  mars  1423  prouve  que  Yolande  et  Richemont 
ivaient  fait  des  promesses  aux  favoris  pour  les  rassurer.  Voir  aussi  le 
dossier  Louvet,  à  la  date  du  6  octobre  1424,  dans  le  t.  1763  des  pièces 
orig.,  dossier  40822,  n»  5.  Voy.  ci-dessous,  p.  89-90. 

4.  On  s'explique  difficilement,  à  cause  de  cela,  que  Jean  V  ait  désiré 
voir  venir  en  Bretagne  Louvet,  qu'il  détestait  (voir  l'article  17  du  traité 
de  Nantes,  ap.  de  Beaucourt,  t.  II,  336). 


84  YOLANDE  d'aRAGON  VA  EN   BRETAGNE   (1424) 

La  reine  de  Sicile  et  Tanguy  se  rendirent  en  Bretagne 
et  surent,  par  leurs  instances,  leurs  promesses,  calmer  l'irri- 
tation de  Jean  V  et  obtenir  son  consentement  *.  Les  Etats 
de  Bretagne ,  convoqués  pour  cette  affaire ,  furent  divisés 
d'opinion;  mais  le  parti  français  l'emporta  encore  une  fois, 
et  ils  décidèrent  que  le  comte  de  Richemont  irait  trouver  le  roi, 
si  le  duc  de  Bourgogne  ne  désapprouvait  pas  cette  démarche. 
Aussitôt  Raoul  Gruel  et  Philibert  de  Vaudrey  furent  envoyés 
auprès  de  Philippe-le-Bon,  avec  mission  de  lui  demander  s'il 
trouverait  bon  que  le  comte  de  Richemont  allât  vers  le  roi  de 
France,  pour  travailler  à  la  paix  entre  lui  et  la  maison  de  Bour- 
gogne. Philippe  négociait  alors  avec  Charles  VII,  sous  la  média- 
tion d'Amédée  VIII.  Il  était  tellement  irrité  contre  le  duc  de 
Glocester  et  les  Anglais  qu'il  consentit  à  ce  que  Richemont  lui 
demandait  *. 

Dès  que  les  ambassadeurs  furent  revenus  en  Bretagne,  le  comte 
fit  ses  préparatifs  pour  se  rendre  auprès  du  roi,  mais  il  ne  partit 
pas  avant  d'avoir  reçu  toutes  les  garanties  que  le  duc  et  les  Etats 
avaient  exigées  pour  la  sûreté  de  sa  personne  ^  ;  c'est-à-dire  que 
le  roi  dut  livrer  comme  otages  le  bâtard  d'Orléans,  Guillaume 
d'Albret  et  les  quatre  places  de  Chinon,  Loches,  Mehun-sur-Yè- 
vre  et  Lusignan  *.  Ces  conditions  humiliantes  montrent  assez  la 
détresse  de  Charles  VII,  qui  alors,  comme  le  dit  un  vieil  histo- 
rien breton,  «  estoit  réduit  au  petit  pied  ^  ». 

L'entrevue  du  roi  et  de  Richemont  devait  avoir  lieu  chez  la 
reine  de  Sicile,  à  Angers.  Après  avoir  imploré  l'assistance  di- 
vine pour  le  succès  de  son  voyage  ^,  Artur  partit  avec  une  escorte 
d'environ  200  hommes  d'armes  et  les  seigneurs  de  Laval ,  de 

i.  D.  Morice,  I,  493;  Cousinot,229,  230;  d'Argentré,  766;  Le  Baud,  464,465. 

2.  Gruel,  190;  Le  Baud,  464,  465;  d'Argentré,  763-765.  Aux  conférences 
de  Cliambéry,  une  trêve  de  cinq  mois  est  conclue  entre  Charles  VII  et 
Philippe-le-Bon,  par  l'entremise  d'Amédée  VIII,  le  28  septembre.  —  Hist. 
de  Bourgogne,  IV,  Preuves,  p.  xliv;  de  Beaucourt,  II,  357,  358. 

3.  «  Toutesfois  il  doutoit  fort  de  venir  devers  le  roy,  s'iln'avoit  aucunes 
seuretez,  ny  sou  frère,  le  duc  de  Bretagne,  ne  le  vouloit  souffrir,  veu  que 
le  dit  duc  avoit  autresfois,  comme  il  estoit  renommée,  fait  serment  au  roy 
d'Angleterre  et  le  dit  de  Richemont  servy  le  dit  roy.  »  (Cousinot,  231.) 

4.  Arrondissement  de  Poitiers. 

5.  D'Argentré,  765;  Gruel,  190;  Cousinot,  231-232.  Ms.  fr.  20382,  n»  26. 
Le  bâtard  Jean  d'Orléans,  fils  naturel  de  Louis  l"'  d'Orléans,  si  connu 
sous  le  nom  de  Duuois.  Il  donna  une  épée  de  Turquie  au  duc,  quand  il 
vint  à  Nantes  tenir  otage  pour  monseigneur  de  Richemont  {Preuves  de 
Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1163).  Il  était  gendre  de  Louvet.  Il  avait  épousé 
sa  fille,  Marie  Louvette,  en  1422.  —  Guill.  d'Albret,  seigneur  d'Orval, 
deuxième  fils  du  connét.  d'Albret. 

6.  Le  7  octobre,  il  fonde  trois  messes  en  l'église  Saint-Pierre  de  Nantes 
(Turuus  Brutus,  I,  f*  177,  V). 


ARTUR   VOIT   CHARLES  VII  A  ANGERS   (1424,    OCTORRE)  85 

Porhoet  \  de  Châteaubriant,  de  Montauban,  de  Beaumanoir,  J.  de 
Chàteaugiron,Jean  de  Penhoet,  amiral,  et  Bertrand  de  Dinan,  ma- 
réchal de  Bretagne,  Guill.  Gruel,  Raoul  Gruel,  Philibert  de  Vau- 
drey,  etc.  ^.  Charles  VII  était  Angers  dès  le  16  octobre ,  avec  le  pré- 
sident de  Provence,  Guill.  d'AvaAgour,  bailli  de  Touraine  ^,  le  "^t 
vicomte  de  Thouars  '*,  le  dauphm  d'Auvergne  ^,  etc.  La  reine  ' 
de  Sicile  lui  fit,  le  19,  une  réception  magnifique.  Il  logeait  à  la 
célèbre  abbaye  de  Saint-Aubin  ^.  Le  vendredi  20  octobre,  Ri- 
chemont  arriva  lui-même  à  Angers.  Plusieurs  grands  seigneurs 
de  la  suite  du  roi  allèrent  à  sa  rencontre  et  l'accompagnèrent 
à  Saint-Aubin.  Le  roi  le  reçut  dans  les  jardins  de  l'abbaye.  Il 
lui  fit  un  accueil  amical  %  où  ne  perçait  aucun  ressentiment  de 
la  conduite  que  Richemont  avait  tenue  auparavant.  Artur  lui 
dit  qu'il  «  s'offrait  à  son  service,  comme  celui  auquel  le  courage 
et  la  volonté  n'avaient  oncques  changé  ou  mué,  depuis  le  jour 
qu'il  avoit  esté  pris  à  la  bataille  d'Azincourt,  quelques  feintes 
que  sagement  il  eust  faites,  pour  procurer  sa  délivrance  et  comme 
contraint*.  »  Après  quelques  instants  d'entretien,  le  roi  lui  pro- 
posa la  charge  de  connétable.  Le  comte  s'excusa  d'abord,  en 
alléguant  sa  jeunesse  et  son  manque  d'expérience,  puis  il  finit 
par  déclarer  qu'il  ne  pouvait  accepter  cette  offre  sans  avoir  ob- 
tenu le  consentement  des  ducs  de  Bourgogne  et  de  Savoie,  outre 
celui  de  son  frère  le  duc  de  Bretagne.  Le  roi  souscrivit  avec 
empressement  à  cette  condition  ^. 

Le  21,  le  roi,  la  reine  de  Sicile  et  Richemont  conclurent  un 
traité  pour  le  mariage  de  Louis  d'Anjou,  le  fils  aîné  d'Yolande, 
avec  Isabelle  de  Bretagne,  fille  aînée  de  Jean  V,  mariage  déjà  sti- 
pulé en  1417.  Le  roi  prit  l'engagement  de  payer  les  100  000  fr, 

1.  Alain  de  Rohan,  comte  de  Porhoet,  beau-frère  de  Richemont,  qui  le  fit 
ensuite  nommer  chambellan  de  Charles  VII  (Preuves  de  Vhist.  de  Bret., 
II,  col,  1176). 

2.  Voy.  Append.,  XVIII. 

3.  Guill.  d'Avangour,  d'une  noble  famille  du  Maine.  Avec  T.  du  Chastel, 
il  avait  sauvé  le  Dauphin  lors  de  l'entrée  des  Bourguignons  à  Paris,  en 
1418.  (X'a  9200,  f  293  V). 

4.  Louis  d'Amboise,  vie.  de  Thouars,  comte  de  Benon,  seigneur  de  Tal- 
mout,  etc. 

5.  Béraud,  dauphin  d'Auvergne  et  comte  de  Sancerre  (Clairambault, 
t.  8,  f  467). 

6.  Sur  l'emplacement  de  la  préfecture  actuelle  (G.  Port.,  Dictionnaire  de 
Maine-et-Loire,  Dumoulin,  1878,  in-8,  I,  62). 

7.  Le  roi,  dit  Grafton  (I,  555),  fut  plus  content  de  sa  venue  que  s'il  avait 
gagné  100  000  couronnes. 

8.  Cousinot,  p.  232.  —  La  sincérité  de  cette  déclaration,  si  elle  fut  faite, 
peut  sembler  contestable. 

9.  Gruel,  190;  D.  Morice,  I,  494,  et  Preuves,  II,  col,  1147  et  suiv.;  d'Ar- 
genlré,  765;  P.  Fenin,  204. 


86  ASSENTIMENT  DE  PHILIPPE-LE-BON    (1424) 

que  le  duc  de  Bretagne  avait  promis  pour  la  dot  de  sa  fille  et 
de  céder  à  Yolande  la  jouissance  du  duché  de  Touraine  ',  excepté 
la  ville  de  Ghinon.  Le  dimanche  22,  Richement  dîna  au  château 
d'Angers  avec  la  reine  de  Sicile,  le  comte  de  Vendôme  et  le  vi- 
comte de  Thouars.  Quant  au  roi,  il  partit  le  même  jour,  entraîné 
par  ses  favoris,  impatients  de  le  soustraire  à  des  influences  qu'ils 
redoutaient.  Cette  entrevue  d'Angers  n'en  eut  pas  moins  des  con- 
séquences définitives,  et  on  peut  la  considérer  comme  un  des  faits 
les  plus  importants  du  règne  de  Charles  VII  ^. 

Le  jour  même  où  avait  lieu  l'entrevue  d'Angers,  le  20  oc- 
tobre, le  duc  de  Bourgogne  revenait  à  Paris,  où  Bedford  avait 
réuni  les  Etats  de  l'Ile-de-France  et  de  Normandie  ^.  Ce  voyage, 
pendant  lequel  s'aggrava  le  mécontentement  de  Philippe  contre 
les  Anglais,  tourna  encore  au  profit  de  Richemont.  Il  y  avait  alors 
■  à  Paris  une  sédition  que  le  retour  du  régent  victorieux  n'avait 
pu  apaiser.  La  présence  de  Philippe-le-Bon  y  mit  fin,  et  Bedford 
en  éprouva  un  secret  dépit.  Le  duc  de  Bourgogne  donna  des 
fêtes  brillantes  pour  le  mariage  de  son  grand  maître  d'hôtel, 
Jean  de  La  Trémoille,  seigneur  de  Jonvelle  *,  avec  Jacque- 
line d'Amboise.  Pendant  ces  fêtes,  il  poursuivit  de  ses  assiduités 
provocantes  la  belle  comtesse  de  Salisbury  "  et  se  fit  un  ennemi 
mortel  de  son  mari,  qui  était  un  des  principaux  conseillers  de 
Bedford.  Enfin,  à  ce  moment  même,  le  duc  de  Glocester  était  à 
Calais,  où  il  venait  de  descendre  avec  sa  femme  Jacqueline  et  une 
armée  de  5  à  6000  hommes ,  pour  conquérir  le  Hainaut.  Phi- 
lippe se  plaignit  de  cette  agression  et  prit  des  mesures  pour  la 
repousser.  De  son  côté,  Glocester  aurait  écrit  à  Bedford,  pour 
accuser  Philippe  le  Bon  de  favoriser  les  menées  de  Richemont, 

1.  Xia  8604,  f"  69  V.  J  409,  n°  49.  J  ISôb,  n"  86,  f»  16  V;  Preuves  de 
l'hist.  de  Bretagne,  II,  1149-1151.  Le  duché  de  Touraine  avait  été  donné 
par  Charles  VII  à  l'Écossais  Archibald  Douglas,  tué  à  la  bataille  de  Ver- 
neuil.  On  sait  que  Richemont  avait  aussi  reçu  de  Charles  VI,  le  duché  de 
Touraine,  et  on  voit  dans  les  registres  du  Parlement  de  Paris,  à  la  date  du 
14  novembre  1424,  que  les  Anglais  lui  donnaient  encore  le  titre  de  duc  de 
Touraine  (Xi»  1480,  f-  310).  Gruel  dit  (p.  228)  que  Charles  VII  voulut 
confirmer  ce  don  à  Richemont,  mais  que  celui-ci  n'y  consentit  pas. 

2.  Cousinot,  232;  Labbe,  Eloges  hist.,  Paris,  1651,  in-4'',  706,  707;  J.  de 
Bourdigné,  Chroniques  d'Anjou,  édition  Quatrebarbes,  t.  11^  155.  Vallet 
de  V.,  Hist.  de  Charles  VII,  I,  429-431;  de  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II, 
77,  note  3,  et  p.  348,  note  1. 

3.  X»»  1480,  f»  308  v».  Fr.  4485,  f-  7-9,  363-365.  Fr.  6200,  f-  53-59. 
Hist.  de  Bourgogne,  IV,  95. 

4.  J.  de  La  Trémoille,  seigneur  de  Jonvelle,  fils  de  Guy  VI  de  La  Tré- 
moille et  de  Marie  de  Sully,  et  frère  du  fameux  Georges  de  La  Trémoille, 
le  futur  favori  de  Charles  VII.  Jacqueline  d'Amboise  était  sœur  de  L.  d'Am- 
boise, vie.  de  Thouars  (Anselme,  IV,  164;  Pièces  orig.,  t.  50,  n»  466), 

5.  Eléonore,  fille  de  Thomas,  comte  de  Kent.. 


PHILIPPE-LE-BON  ET   GLOCESTER   (1424)  87 

•dont  la  défection  n'était  plus  douteuse.  Il  lui  aurait  même  con- 
seillé de  faire  arrêter  le  duc  de  Bourgogne,  et  les  deux  princes 
anglais  auraient  été  jusqu'à  comploter  la  mort  de  leur  puissant 
allié.  Richemont  avait  un  intérêt  évident  à  la  rupture  de  Bedford 
et  de  Philippe-le-Bon  ;  mais,  pour  la  provoquer,  s'abaissa-t-il 
jusqu'à  faire  usage  de  fausses  lettres?  Ses  ennemis  l'en  accusè- 
rent dans  la  suite,  pour  se  disculper  auprès  de  Philippe-le-Bon, 
quand  il  connut  cette  correspondance,  vraie  ou  fausse,  de  Glo- 
cester  avec  son  frère  ^.  Il  semble  malheureusement  impossible 
de  porter  sur  ces  machinations  ténébreuses  une  lumière  assez 
vive  pour  y  découvrir  la  vérité.  Ce  qu'on  peut  affirmer,  c'est  que 
la  conduite  de  Glocester  à  cette  époque  blessa  profondément  le 
duc  de  Bourgogne.  La  rancune  de  Philippe-le-Bon  suffît  pour 
expliquer  l'adhésion  qu'il  donna  aux  projets  de  son  beau-frère 
Artur,  surtout  si  l'on  considère  qu'auparavant  il  avait  encouragé 
les  efforts  d'Amédée  VIII  et  approuvé  l'entrevue  d'Angers. 

Le  duc  de  Bourgogne  était  donc  fort  mal  disposé  envers  les 
Anglais  quand  il  quitta  Paris  pour  se  rendre  à  Moulins-Engilbert*, 
où  il  épousa,  le  30  novembre  i424.  Bonne  d'Artois,  fille  aînée  de 
Phil.  d'Artois,  comte  d'Eu,  et  de  Marie  de  Berry  ^.  Veuve  d'un 
frère  de  Jean-sans-Peur,  Philippe  de  Bourgogne,  comte  de  Ne- 
vers,  tué  à  la  bataille  d'Azincourt,  sœur  de  Charks  d'Artois, 
comte  d'Eu,  encore  prisonnier  en  Angleterre,  cousine  d'Amé- 
dée VllI,  la  nouvelle  duchesse  de  Bourgogne  devait  aussi 
plaider  auprès  de  son  mari  la  cause  de  Charles  VII  *.  C'était  Ri- 
<îhemont,  le  compagnon  de  captivité  du  comte  d'Eu,  qui  avait 
ménagé  ce  mariage.  Les  Anglais  en  furent  d'autant  plus  irrités 
•contre  lui.  Ils  disaient  même  qu'il  devait  aller  combattre  Glo- 
cester dans  le  Hainaut,  avec  une  armée  composée  de  troupes 
fournies  par  Charles  VII,  Philippe-le-Bon,  Amédée  VIII  et  Jean  V. 
Il  n'en  fut  rien,  car  Richemont,  après  avoir  assisté  avec  sa 
femme  au  mariage  de  son  beau-frère,  se  rendit  à  Mâcon^  où  de- 
vait avoir  lieu  une  nouvelle  conférence  ^. 


1.  A.  Desplanque,  Projet  d'assassinat  de  Philippe-le-Bon  par  les  Anglais, 
Bruxelles,  1867,  iii-4,  p.  9,  10.  Voy.  Append.,  XIX.  En  novembre  et  décem- 
bre, Bedford  envoie  plusieurs  fois  des  messagers  à  son  frère  (Ms.  fr. 
4485,  p.  362-366). 

2.  Arrondissement  de  Château-Ghinon  (Nièvre). 

3.  Marie  de  Berry,  veuve  de  Philippe  d'Artois,  avait  épousé  Jean  le',  duc 
de  Bourbon.  Michelle  de  France,  fille  de  Charles  VI  et  première  femme 
■de  Philippe-le-Bon,  était  morte  le  8  ^'uillet  1422. 

4.  Malheureusement,  cette  princesse  mourut  peu  après,  le  17  septembre 
1425. 

5.  Anselme,!,  238;  Monstrelet,  IV,  209,  210;  Fenin,  226;  Hist.  de  Bour- 
gogne, IV;  Preuves,  p.  Iv.  —  Desplanque,  Projet  d^assassinat  de  Philipitc- 


88  NÉGOCIATIONS  AVEC  PIIILIPPE-LE-BON   (1424-1425) 

Dès  les  premiers  jours  de  décembre,  une  assemblée  nombreuse 
était  réunie  à  Mâcon,  sous  la  médiation  d'Amédée  VIII.  On  y 
voyait,  outre  le  duc  de  Savoie,  le  duc  de  Bourgogne,  le  comte 
de  Richemont,  avec  des  envoyés  de  Jean  V,  Charles  de  Bourbon, 
comte  de  Glermont  *,  avec  l'archevêque  de  Reims  ^  et  les  évo- 
ques de  Chartres  et  du  Puy,  ambassadeurs  du  roi  de  France. 
Philippe  accueillit  avec  sa  courtoisie  habituelle  les  envoyés  de 
Charles  VII,  mais  il  déclara  énergiquement  qu'une  réconcilia- 
tion était  impossible,  tant  que  les  meurtriers  de  son  père  reste- 
raient auprès  du  roi.  On  se  sépara  sans  avoir  pu  s'entendre 
(5  décembre),  le  duc  de  Savoie  pour  aller  en  Bresse,  le  duc  de 
Bourgogne  pour  se  rendre  à  Dijon  (7  décembre).  Le  comte  de 
Richemont  l'accompagnait;  quelques  jours  après,  il  assistait, 
avec  sa  femme,  à  l'entrée  solennelle  de  la  nouvelle  duchesse 
dans  la  capitale  de  la  Bourgogne  (15  décembre).  Avant  de  quitter 
son  beau-frère,  il  fit  auprès  de  lui  de  nouvelles  instances,  et  il! 
emmena  même  des  envoyés  de  Charles  VII  et  de  Philippe-le-Bon 
à  Montluel  ^,  où  se  trouvait  le  duc  de  Savoie  •*.  On  y  reprit  les 
négociations  pour  la  paix  (janvier  1425]  ;  on  parla  de  marier  une 
fille  d'Amédée  VIII  au  dauphin  Louis  ^  et  une  autre  à  François  de 
Bretagne,  fils  aîné  de  Jean  V;  on  décida  la  prolongation  des 
trêves  entre  la  France  et  la  Bourgogne,  le  mariage  du  comte  de 
Glermont  avec  Agnès,  sœur  de  Philippe-le-Bon  ^.  Artur  de  Bre- 
tagne fut  autorisé  à  accepter  la  charge  de  connétable;  enfin  les 
ducs  de  Bretagne  et  Savoie  s'entendirent  pour  prendre  auprès 
de  Charles  VII  la  direction  du  gouvernement  ''. 

Dans  le  même  temps,  le  duc  de  Bourgogne  se  préparait  à  re- 

le-Bon,  p.  9  et  59;  de  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II,  p.  79.  Richemont  était 
à  Tours  le  27  octobre.  On  l'attendait  à  Lyon  le  12  novembre  {Idem,  p.  80, 
note  7). 

1.  Fils  de  Jean  I*"",  duc  de  Bourbon,  et  de  Marie  de  Berry.  II  venait  d'être 
nommé  lieutenant  général  du  roi  dans  le  Dauphiné.  P.  13582,  cote  1376. 

2.  Regnault  de  Chartres,  qui  fut  nommé  chancelier  de  France  le  28 
mars  1425.  Anselme,  VI,  399,  400. 

3.  Arrondissement  de  Trévoux  (Ain). 

4.  Richemont  était  avec  le  chancelier  de  France  et  le  comte  de  Ven- 
dôme, mis  récemment  en  liberté.  Ils  passèrent  par  Lyon  le  10  janvier  1425 
(de  Beaucourt,  t.  II,  360-361). 

5.  Le  dauphin  Louis  (Louis  XI)  était  né  le  3  juillet  1423,  à  Bourges 
(Fr.  5024,  f  203;  Xi"  9197,  f»  224  V;  KK  56,  f°  27  v). 

6.  Le  traité  fut  conclu  le  4  février  1425.  Parmi  les  signatures,  on  remar- 
que celle  de  Georges  de  La  Trémoille.  Le  mariage  ne  fut  célébré  que  le 
5  août  1425  (Collect.  de  Bourgogne,  U  96,  p.  497-504,  565-574,  605-610}. 

7.  Voir  la  lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais  (2  juin  1425),  déjà  indiquée, 
et  la  convention  conclue  à  Montluel  par  le  duc  de  Savoie  et  Artur  de 
Bretagne  (de  Beaucourt,  II,  81-84,  361;  H.  Vandenbroeck,  Consaux  de 
Tournai,  II,  157-160). 


ARTUR  ET  LES   CONSEILLERS   DU   ROI   (1425)  SO» 

pousser  par  les  armes  l'invasion  de  Glocester.  Les  circonstances 
n'avaient  jamais  été  plus  favorables  aux  projets  de  Richemont. 
Il  allait  sortir  de  l'inaction  à  laquelle  sa  jeunesse  était  réduite 
depuis  dix  ans;  l'œuvre  qu'il  allait  entreprendre  était  digne  de 
l'ambition  la  plus  haute  et  la  plus  noble.  Il  retourna  en  Bre- 
tagne le  cœur  plein  d'espoir  *. 

Vers  la  fin  de  février,  Artur  se  rendit  à  Ghinon,  où  se  trou- 
vait le  roi,  qui  revenait  d'Auvergne.  Restait  une  difficulté  à 
vaincre  et  non  la  moindre,  l'obstination  des  favoris.  Quand 
Charles  VII  avait  promis  à  Jean  V  de  les  éloigner,  pour  obtenir 
son  alliance,  ils  ne  l'avaient  point  empêché  de  prendre  cet 
engagement  ^,  sachant  bien  qu'ils  l'empêcheraient  de  le  tenir; 
mais,  cette  fois,  leurs  craintes  étaient  plus  vives.  Il  ne  s'agis- 
sait plus  seulement  de  tromper  Jean  V;  le  duc  de  Bourgogne 
réclamait  aussi  leur  renvoi,  et  ils  sentaient  bien  que  tous  le& 
efforts  du  nouveau  connétable  tendraient  à  réconcilier  le  roi 
de  France  avec  ce  puissant  ennemi.  Ancien  Armagnac,  Riche- 
mont  aurait  pu  s'entendre  avec  eux,  n'eussent  été  le  crime  de 
Montereau  et  l'enlèvement  de  Jean  V.  Il  lui  fallut  donc  dis- 
simuler, sous  peine  d'échouer  au  dernier  moment.  Encore 
n'est-il  pas  certain  qu'il  eût  réussi,  même  avec  l'appui  de 
Charles  VII,  s'il  n'avait  été  soutenu  par  Yolande,  par  T.  du 
Chastel,  par  le  chancelier  Martin  Gouges,  probablement  par 
G.  d'Avangour,  et  enfin  s'il  ne  se  fût  résigné  à  une  transaction 
des  moins  honorables  ^.  Il  jura  et  promit  «  sur  les  saints  Evan- 

1.  Le  Baud,  466.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  96-98.  Monstrelet,  IV,  2H,  212. 
Desplanque,  p.  24,  note  2.  D.  Lobineau,  I,  564.  Kervyn  de  Lett.,  IV,  239, 
et  dans  la  Revue  du  Lyonnais,  année  1839,  t.  19,  la  lettre  du  2  juin  1425. 
Pendant  que  Richemont  était  en  Bretagne,  Richard,  comte  d'Etampes,  fit 
son  testament,  le  2  février  1423,  et  nomma  exécuteurs  testamentaires  ses 
frères  Jean  et  Artur  {Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  9,  E,  24). 

2.  D'après  Gruel,  le  roi  fit  la  même  promesse  à  Richemont.  «  Et,  avant 
qu'il  prist  l'espée,  le  roy  luy  promist  et  jura  d'envoyer  hors  de  son  royaume 
tous  ceulx  qui  avoient  esté  cause  de  la  mort  de  monseigneur  de  Bourgon- 
gne  et  consentans  de  la  prise  du  duc  Jehan  de  Bretaigne.  »  (Gruel,  191.) 

3.  Il  est  probable  que  ces  pourparlers  donnèrent  lieu,  dans  le  Conseil  du 
roi,  aux  plus  vives  discussions,  et  que  Tanguy  du  Ghâtel  prit,  avec  sa  vio- 
lence habituelle,  le  parti  de  Richemont  contre  Louvet,  car  on  lit  dans  le 
registre  du  Parlement  de  Paris  {X*^  1480,  f»  317),  à  la  date  du  3  mars  : 
«  Ce  jour  viûdrent  nouvelles  de  la  mort  du  comte  Daulphin,  que  on  disoit 
avoir  esté  tué  par  Tanguy  du  Chastel  en  ung  conseil  tenu,  présent  le  Dau- 
phin ;  et  de  ce  avoit  le  duc  de  Bedford  reçu  lettres  du  duc  de  Bretaigne, 
faisant  mention  de  ce,  ainsi  que  disoient  ceulx  qui  avoient  veu  et  leu  les- 
dites  lettres.  »  Il  s'agit  ici  de  Bcraud  III,  Dauphin  d'Auvergne,  mais  le 
fait  avait  été  fort  exagéré,  car  Béraud  ne  mourut  qu'en  1426.  —  Richemont 
devait  être  alors  à  la  cour.  Le  26  février,  il  était  à  Tours,  allant  à  Chiaon 
avec  le  c.  de  Vendôme  (de  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  81,  note  2). 


90  ENGAGEMENT  d'ARTUR   (1425,   MARS) 

giles  de  Dieu,  par  le  baptême  qu'il  apporta  des  saints  fonts,  par 
sa  part  de  paradis  et  sur  son  honneur,  »  de  laisser  et  d'assurer 
au  roi  le  libre  et  entier  exercice  de  son  pouvoir;  d'aimer,  soute- 
nir et  protéger  ses  serviteurs,  à  savoir  :  T.  duGhastel,  prévôt  de 
Paris,  le  président  Louvet,  le  sire  de  Giac,  Guill.  d'Avangour  et 
Pierre  Frotier;  de  ne  consentir,  pour  aucun  motif  et  sous  aucun 
prétexte,  à  leur  éloignement,  et  même  de  s'y  opposer  si  l'on  venait 
à  le  demander;  enfin  de  s'en  rapporter  au  roi  pour  les  gens 
d'armes  qu'il  voudrait  tenir  auprès  de  lui  et  en  sa  compagnie 
(8  mars  1425)  K 

Ce  document  curieux  ne  prouve  pas  seulement  la  toute-puis- 
sance des  favoris  et  l'imbécillité  de  ce  roi  de  vingt-deux  ans  qui 
subissait  leur  tutelle,  il  montre  aussi  combien  il  était  nécessaire 
de  mettre  fin  à  cette  domination  insolente,  égoïste,  incapable 
de  sauver  la  France-  En  prenant  des  engagements  aussi  solen- 
nels, Richemont  savait  bien  qu'il  ne  les  tiendrait  pas.  Pouvait- 
il  aimer,  soutenir,  protéger  les  complices  des  Penthièvre,  les 
meurtriers  de  Jean-sans-Peur?  Au  contraire,  n'était-il  pas  d'ac- 
cord avec  son  frère,  le  duc  de  Bretagne,  avec  son  beau-frère,  le 
duc  de  Bourgogne,  avec  la  reine  de  Sicile,  avec  le  duc  de  Savoie 
pour  chasser  les  ministres  qui  étaient  leurs  ennemis  communs  ? 
Leur  présence  seule  n'était-elle  pas  un  obstacle  insurmontable  à 
sa  politique  d'apaisement  et  de  réconciliation  ?  Sans  doute  ses 
scrupules  furent  combattus  par  la  reine  Yolande  ;  mais,  si  légi- 
time que  fût  son  ambition,  il  est  regrettable  qu'il  n'ait  pu  la 
satisfaire  qu'aux  dépens  de  sa  loyauté.  Cette  fois,  il  n'agissait 
plus  contre  la  France,  comme  à  l'époque  où  il  déterminait  son 
frère  à  jurer  le  traité  de  Troyes  ;  toutefois  il  convient  de  ne  pas 
oublier  davantage  cette  conduite  nouvelle,  pour  comprendre  et 
juger  l'homme  qui  va  désormais  tenir  une  si  grande  place  dans 
l'histoire  du  règne  de  Charles  VII. 

Quand  Richemont  eut  conclu  ce  marché  humiliant,  il  put 
enfin  en  recevoir  le  prix.  Le  7  mai's  1425,  s'accomplit  dans  la 
prairie  de  Chinon  une  cérémonie  imposante.  Le  roi  s'y  rendit, 
entouré  de  toute  sa  cour.  Dans  ce  brillant  cortège,  on  remar- 
quait Louis  de  Bourbon,  comte  de  Vendôme,  l'évêque  de  Cler- 
mont,  chancelier  de  France,  qui  avait  pris  une  part  des  plus 
actives  à  toutes  ces  négociations,  les  archevêques  de  Reims  et 
de  Sens,  l'évêque  d'Angers,  le  maréchal  de  Sévérac  et  les 
envoyés  d'Amédée  VIII,  Jean  de  Beaufort  et  Gaspard  de  Mont- 
mayeur,  l'un  chancelier,  l'autre  maréchal  de  Savoie.  Artur  de 
Bretagne,  comte  de  Richemont,  reçut  des  mains  de  Charles  VII 

i.  \oy.  Append.,XK. 


ARTUR  REÇOIT  l'kPÉE  DE  CONNÉTABLE   (1425,    7   MARS)  91 

l'épée  de  connétable  «  et  fit  les  serments  au  roy  et  au  royaume 
en  la  forme  et  manière  accoustumée  »  ^  Il  jura  «  le  Dieu  créa- 
teur, par  la  Foi  et  la  Loi,  et  sur  son  honneur  »  qu'il  servirait 
le  roi  envers  et  contre  tous,  qu'il  lui  obéirait  en  toutes  choses 
«  sans  rien  épargner,  jusqu'à  la  mort,  inclusivement  ^.  » 

Les  lettres  par  lesquelles  Charles  VII  institue  le  comte  de 
Richemont  connétable  de  France  débutent  par  des  considéra- 
tions remarquables  : 

«  Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  etc.  Comme, 
depuis  que  l'office  de  connestable  de  France  a  esté  derrenière- 
ment  vacant,  n'ayons  pourveu  à  iceluy  office,  par  quoy  et  par 
default  de  chief  principal  sur  le  fait  de  nostre  guerre,  se  soient 
ensuiz  plusieurs  inconveniens,  au  grant  préjudice  de  nous  et  de 
nostre  seigneurie,  et  aussi  se  soient  faictes  sur  nostre  peuple  plu- 
sieurs pilleries  et  autres  oppresions,  à  nostre  très  grant  desplai- 
sance ;  savoir  faisons  que  voulons,  pour  ce,  pourveoir  au  dit  office 
de  connestable  de  personne  qui  sur  nos  gens  d'armes  et  de  trait 
puisse  et  doye  mectre  et  entretenir  tel  ordre  et  justice,  que  ce 
soit  au  bien  de  nous  et  à  la  cessacion  de  tous  maulx,  et  qui 
aussi  soit  de  tele  auctorité,  entreprise  et  vaillance,  que,  par  son 
moyen  et  conduit,  noz  affaires  puissent  estre  bien  adreciez.  Con- 
siderans  que,  pour  ces  choses  faire  et  exercer  ainsi  puissamment 
que  besoign  en  est,  seroit  très  propice  et  convenable,  pour  plu- 
sieurs considérations,  nostre  très-chier  et  amé  cousin,  Artur  de 
Bretaigne,  conte  de  Richemont,  frère  germain  de  nostre  très- 
chier  et  très-amé  frère,  le  duc  de  Bretaigne,  attendu  les  grans 
sens,  industrie,  prouesse,  preudommie  et  vaillance  de  sa  per- 
sonne, tant,  en  armes  que  autrement,  la  prochaineté  dont  il 
nous  attaint,  et  la  maison  dont  il  est  issu  ;  ayans  regard  mesme- 
ment  à  ce  que,  pour  nostre  propre  fait  et  querele,  il  exposa  et 
habandonna  moult  honnorablement  sa  personne  à  l'encontre  de 
noz  ennemis  à  la  journée  d'Azincourt,  à  laquelle  il  combattit 
vaillamment,  et  jusques  àlaprinse  de  sa  dicte  personne;  vou- 
lans  ces  choses  envers  lui  recognoistre  en  honneurs,  bienfi'aiz, 
et  autrement,  comme  bien  nous  y  sentons  tenuz;  et  pour  l'en- 
tière confiance  que  nous  avons  de  lui,  lui  commectre  et  bailler 
le  soing,  curanson  et  charge  de  nos  plus  haulx  afl"aires,  qui  sont 
le  fait  et  conduicte  de  nostre  dicte  guerre,  espérans  que,  par 

1.  Ck)usinot,  232.  Gruel,  191.  Monstrelet,  IV,  175.  Fenin,  204.  Grafton,  561. 
Cougny,  Notice  sur  le  château  de  Chinon,  édition  de  1874,  p.  56.  De  Beau- 
court,  Charles  VII,  t.  II,  84,  note  2.  Fr.  5024,  î»  203.  Martial  d'Auvergne,  J,  55. 

2.  Formule  du  serment  du  connétable,  ap.  Daniel  Milice  française,  t.  I, 
185.  D'après  La  Thaumassière,  Hist.  de  Berry,  p.  46,  Richemont  reçut 
alors  le  gouvernement  du  Berry. 


92  ARTUR   REÇOIT  L'ÉPÉE  DE   CONNÉTABLE  (1425,    7   MARS) 

moyen  de  lui  et  des  siens,  qui  sont  grans  et  puissans,  pourront 
estre  faiz  à  nous  et  à  nostre  dicte  Seigneurie  telz  et  si  proufitables 

services,  que  ce  sera  à  perpétuel  mémoire 

iceluy  nostre  cousin 

avons,  pour  les  causes  devant  touchées  et  autres  à  ce  nous 
mouvans,  espécialement  pour  l'évident  bien  et  proutît  de  nous 
et  de  nostre  dict  royaume,  fait,  ordonné,  constitué  et  estably, 
faisons,  ordonnons,  constituons  et  estab lissons  connestable  de 
France  et  chief  principal,  après  nous  et  soubz  nous,  de  toute 
nostre  guerre,  etc.  i.  » 

On  ne  saurait  mieux  faire  ressortir  les  motifs  qui  avaient 
déterminé  le  choix  du  roi,  les  devoirs  qui  incombaient  au  nou- 
veau connétable  et  les  services  qu'on  attendait  de  lui.  On  dirait 
qu'il  y  a  là  un  programme  dicté  par  un  sentiment  profond  de 
la  situation  présente  et  une  vue  prophétique  de  l'avenir.  Telle 
était  bien  la  difficile  et  glorieuse  carrière  qui  s'ouvrait  devant 
Artur  de  Bretagne  et  où  nous  allons  le  suivre. 

1.  Xia  8604,  fos  72,  v  73.  Ces  lettres  se  trouvent  aussi  à  la  suite  de 
Gruel,  édition  Michaud,  p.  229,  230,  et  dans  Godeîroj,  Hist.de  Charles  Vil. 
11  est  à  remarquer  que  les  noms  de  Louvet,  P.  Frotier  et  P.  de  Giac  ne 
se  trouvent  pas  parmi  ceux  des  conseillers  de  Charles  VII  qui  ont  contre- 
signé ces  lettres  (voir  de  Beaucourt,  t.  II,  85).  J.  Bouchet,  Les  Annales 
d'Aquitaine,  Poictiers,  1644,  gr.  in-4'',  p.  243. 


TROISIÈME  PARTIE 

LA  LUTTE  CONTRE  LES  FAVORIS  DE  CHARLES  VII 

1425-1433 


CHAPITRE  PREMIER 

LES  PREMIÈRES  ANNÉES  DE  POUVOIR  (1425-1427) 

État  de  la  France  en  1423.  —  Plan  de  Richement.  —  Difficultés  de  sa 
tâche.  —  Droits  du  connétable.  —  Essais  de  réformes  militaires.  — 
Louvet  attaque  Richement,  qui  parvient  à  le  renverser.  —  Le  conné- 
table prend  la  direction  du  gouvernement.  —  Nouveaux  embarras.  —  Il 
amène  le  duc  de  Bretagne  à  s'allier  avec  Charles  VII  par  le  traité  de 
Saumur.  —  Il  s'efforce  .vainement  de  réconcilier  le  duc  de  Bourgogne 
avec  le  roi.  —  Les  Anglais  attaquent  la  Bretagne.  —  Le  connétable 
échoue  devant  Saint-James-de-Beuvron.  —  Il  s'en  prend  au  chancelier 
de  Bretagne.  —  Guerre  dans  le  Maine  et  l'Anjou.  —  Richement  excite 
les  ducs  de  Bretagne  et  de  Bourgogne  contre  les  Anglais.  —  11  est  obligé 
de  lutter  contre  P.  de  Giac,  —  Il  le  fait  exécuter.  —  Bedford,  revenu 
d'Angleterre,  pousse  vivement  les  hostilités.  —  Les  Anglais  reprennent 
Pentorson.  —  Grands  efforts  du  connétable  peur  leur  résister.  —  Camus 
de  Beaulieu,  successeur  de  Giac,  est  assassiné.  —  Il  est  remplacé  par 
Georges  de  La  Trémeille,  qui  travaille  à  supplanter  Richement.  —  Dé- 
faite des  Anglais  devant  Mpntargis.  —  Le  duc  de  Bretagne  fait  la  paix 
avec  l'Angleterre.  —  Richemont  ne  peut  renverser  La  Trémeille.  —  Il 
se  retire  à  Parthenay. 

Le  biographe  de  Richemont  indique,  en  quelques  mots,  l'œu- 
vre du  connétable.  «  Il  trouva  le  royaume  le  plus  au  bas  que 
jamais  fût  et  le  laissa  le  plus  entier  qui  fût,  passé  à  quatre  cents 
ans  '  .»  11  résume  aussi,  dans  ces  lignes,  tout  le  règne  de  Char- 
les VII,  et,  s'il  exagère  le  rôle  de  son  connétable,  en  attribuant  à 
lui  seul  ce  glorieux  résultat,  on  peut  dire  qu'il  y  eut  du  moins 
une  large  part.  En  effet,  la  France  n'était  paS  dans  une  situation 
moins  désespérée  qu'à  l'époque  du  traité  de  Troyes.  Son  roi 

1.  Gruel,  191. 


94  ÉTAT   DE   LA   FRANCE   EN   1425 

n'était  pas,  comme  Charles  VI,  entre  les  mains  des  Anglais^ 
mais  il  n'avait  qu'une  partie  du  royaume,  et  il  semblait  incapa- 
ble de  gouverner,  de  défendre  et  de  conserver  le  reste  *.  Il  avait, 
directement  ou  indirectement,  ^Orléanais,  la  Touraine,  une  par- 
tie du  Maine  et  de  l'Anjou,  de  la  Saintonge,  de  la  Picardie,  de 
la  Champagne  et  de  l'Ile-de-France,  le  Bourbonnais,  l'Auver- 
gne, le  Limousin,  la  Marche,  le  Forez,  le  Lyonnais,  le  Dau- 
phiné,  le  Languedoc,  TAunis  et  l'Angoumois,  le  Poitou,  le 
Berry;  mais  ces  provinces  étaient  les  unes  occupées  en  partie, 
les  autres  menacées  par  les  Anglais  ou  par  les  Bourguignons,, 
leurs  alliés  ^. 

Henri  VI  possédait  presque  toute  l'Ile-de-France,  avec  Paris,, 
la  Normandie,  la  Picardie,  la  Champagne,  une  partie  du  Maine 
et  de  l'Anjou,  de  la  Guyenne  et  Gascogne  ^,  Le  duc  de  Bedford, 
régent  de  France,  était,  par  ses  talents  politiques  et  militaires, 
égal,  sinon  supérieur  à  son  frère  Henri  V.  Il  est  vrai  qu'il  ne 
tenait  pas,  comme  lui,  dans  sa  main  toutes  les  forces  de  l'Angle- 
terre, que  Glocester  lui  causait  de  graves  embarras,  qu'il  ne 
trouvait  plus  dans  le  duc  de  Bourgogne  un  allié  aussi  sûr,  aussi 
âpre  à  la  vengeance;  mais  il  disposait  toujours  d'une  armée  dis- 
ciplinée, aguerrie,  commandée  par  d'excellents  capitaines,  et,  si 
l'on  considère,  d'un  côté,  cette  formidable  puissance  des  Anglais,, 
de  l'autre,  la  chétive  situation  du  petit  roi  de  Bourges,  on  pen- 
sera qu'en  prenant  le  pouvoir  dans  des  conjonctures  aussi  criti- 
ques, le  nouveau  connétable  élevait  son  ambition  à  la  hauteur 
de  toutes  les  épreuves  *. 

Pour  affermir  le  trône  chancelant  de  Charles  VII,  pour 
sauver  le  royaume,  sur  le  point  de  «  cheoir  à  totale  des- 
truccion  ^  »,  que  fallait-il?  Un  gouvernement  plus  sage,  plus 
respecté,  plus  fort,  une  armée  disciplinée,  solide,  et  surtout  de 
puissantes  alliances  **.  Voilà  ce  que  ne  pouvaient  procurer  au 

1.  Sur  l'anarchie  et  le  mépris  de  l'autorité  royale,  voir  D.  Neuville,  le 
Parlement  royal  à  Poitiers,  dans  le  t.  VI"  de  la  Revue  histor.  (1878),  ch.  VI, 
p.  301  et  suiv. 

2.  Voy.  A.  Longnon,  Les  limites  de  la  France  à  l'époque  de  Jeanne  d'ArCr 
dans  la  Revue  des  questions  hist.,  t.  XVIII,  année  1875,  p.  500  et  501. 

3.  Le  Ms.  fr.  4491  indique  les  places  occupées  par  les  Anglais,  en  1423y 
dans  leurs  provinces  françaises  du  Nord,  le  nom  des  capitaines,  l'effectif 
des  garnisons  (Fr.  4491,  f"»  46  et  suiv.). 

4.  Sharon  Turner,  III,  p.  12  et  suiv.  Voir  dans  Chastellain,  sur  l'état 
de  la  France  efi  1422,  un  passage  remarquable,  qui  pourrait  s'apphquer 
aussi  bien  à  1425  (Chastellain,  VII,  323,  édition  Kervyn  de  Lettenhove, 
Bruxelles,  1863-1866,  8  vol.  in-S"). 

5.  Lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais,  du  2  juin  1425,  dans  la  Revue  du 
Lyonnais,  1859,  p.  327-331. 

6.  C'est  là  ce  que  fait  ressortir  Charles  VII  lui-même,  dans  ses  lettres 


PLAN  DE  RICHEMONT  95 

jeune  roi  ses  ministres  impopulaires;  voilà  ce  que  le  connétable 
de  Richemont  voulait  donner  à  la  France.  Il  tenait  surtout  à  ré- 
concilier Charles  VII  avec  Philippe-le-Bon.  C'était  là  le  plus 
grand  service  qu'on  pût  rendre  à  la  France  ;  de  là  dépendait  son 
salut  ou  sa  ruine.  Tant  qu'elle  avait  à  combattre  l'Angleterre 
et  la  Bourgogne,  elle  pouvait  obtenir  des  succès  passagers,  mais 
point  de  victoire  décisive;  avec  l'alliance  de  la  Bourgogne,  elle 
devait  triompher.  Le  principal  mérite  de  Richemont,  c'est  d'avoir 
compris  cette  politique,  de  l'avoir  suivie  avec  une  constance 
inébranlable  ;  un  de  ses  principaux  titres  de  gloire,  c'est  d'avoir 
préparé,  négocié  le  traité  d'Arras  (1435).  Pour  arriver  à  ce  but, 
il  dut  lutter  pendant  dix  ans  contre  des  difficultés  qui  auraient 
pu  abattre  une  âme  moins  forte.  Réorganiser  l'armée^  soutenir 
la  guerre  contre  les  Anglais,  poursuivre  les  négociations  avec 
les  ducs  de  Bretagne,  de  Bourgogne  et  de  Savoie,  déjouer  les  intri- 
gues des  favoris,  résister  à  leurs  attaques,  arracher  le  roi  à  leur 
influence  malfaisante,  à  son  apathie,  à  son  oisiveté,  le  rappeler 
au  sentiment  de  ses  devoirs  et  de  son  rôle,  l'entraîner  à  la  tête 
des  troupes,  l'aider  à  reconquérir  son  royaume,  à  fortifier  son 
pouvoir,  le  défendre  contre  les  coalitions  féodales,  telle  fut  la 
tâche  que  Richemont  accomplit,  avec  line  énergie,  une  fidélité, 
une  constance  que  ne  découragèrent  ni  les  échecs,  ni  les  humi- 
liations, ni  les  disgrâces. 

Quand  il  prit  l'épée  de  connétable,  il  avait  près  de  trente- 
deux  ans,  l'âge  où  l'ardente  activité  de  la  jeunesse  est  guidée 
par  la  réflexion  et  l'expérience.  Sans  être  un  homme  d'Etat  et 
un  capitaine  de  premier  ordre,  il  avait,  pour  le  gouvernement 
et  pour  la  guerre,  des  qualités  précieuses  :  la  justesse  d'esprit,  la 
sagacité,  qui  font  distinguer  nettement  le  but  et  les  moyens  de 
l'atteindre,  l'initiative,  la  persévérance  qui  mène  tôt  ou  tard  au 
succès,  la  force  d'âme  et  de  volonté  qui  surmonte  les  obsta- 
cles. Outre  ces  qualités  personnelles,  il  possédait  d'autres  avan- 
tages qui  expliquent  le  choix  de  la  reine  Yolande  :  une  haute 
naissance,  des  liens  de  parenté  avec  plusieurs  maisons  royales, 
avec  celle  de  Savoie  et  avec  les  plus  puissantes  familles  du 
royaume,  celles  de  Bourgogne,  d'Orléans,  d'Anjou,  d'Alençon, 
de  Bourbon,  d'Armagnac,  l'appui  de  Jean  V,  et,  ce  qui  valait 
mieux,  les  sympathies  du  parti  français  de  Bretagne.  Il  y  avait 
en  effet  dans  ce  pays  un  parti  très  attaché  à  la  France.  Du  Gues- 
clin  était  dans  toutes  les  mémoires;  sa  veuve,  Jeanne  de  Laval, 


du  23  mars  au  c.  de  Foix,  qui  était  rentré  dans  le  devoir  et  qui  avait  été 
récemment  nommé  lieutenant  général  du  roi  dans  le  Languedoc  (de 
Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  88). 


^6  DROITS  DU  CONNÉTABLE 

vivait  encore;  le  jeune  André  de  Laval,  plus  tard  seigneur  de 
Lohéac  et  maréchal  de  France,  petit-fils  de  Jeanne,  avait  com- 
battu avec  l'épée  de  l'illustre  connétable,  au  combat  de  la 
Broussinière  *,  où  des  Bretons  et  des  Français  avaient  vaincu 
les  Anglais,  le  26  septembre  1423.  La  mort  de  Glisson  était, 
pour  ainsi  dire,  récente.  Les  Bretons,  fiers  du  nouveau  choix 
qui  appelait,  pour  la  troisième  fois,  un  des  leurs  à  la  plus -haute 
dignité  du  royaume,  étaient  disposés  à  servir  Charles  VIL  Leur 
dévouement,  soutenu  d'ailleurs  par  Fintérèt,  était  une  garantie 
plus  sûre  que  FalHance  du  versatile  Jean  V  ^. 

Le  connétable  de  France  avait  des  pouvoirs  qui  l'égalaient 
presque  au  roi  lui-même,  en  ce  qui  concernait  la  guerre  et  l'ar- 
mée. Il  faisait  partie  «  du  plus  étroit  et  secret  conseil  du  roi  »  '. 
Dans  les  questions  relatives  à  la  guerre,  on  ne  pouvait  rien  dé- 
cider sans  avoir  pris  l'avis  du  connétable.  A  l'armée,  il  avait  1& 
commandement  général,  même  quand  le  roi  était  présent.  C'est 
lui  qui  prenait  toutes  les  dispositions,  ordonnait  tous  les  mou- 
vements, assignait  à  chacun  son  rang  et  sa  place.  Au  combat, 
il  était  d'ordinaire  à  l'avant-garde  ou  au  premier  rang  du  corps 
de  bataille,  dans  la  retraite,  au  dernier.  Sa  bannière  était  portée 
après  celle  du  roi.  Quand  une  place  était  prise,  si  le  roi  était 
absent,  c'est  la  bannière  du  connétable  qu'on  y  mettait  la  pre- 
mière. Une  partie  du  butin  lui  appartenait.  Il  prélevait  une  jour- 
née de  solde  sur  le  payement  des  troupes,  A  la  guerre,  il  était  dé- 
frayé de  ses  dépenses  et  de  ses  pertes  par  le  roi.  Les  jours  d'assaut 
ou  de  bataille,  il  avait  double  solde.  Il  connaissait  de  tous  les  cri- 
mes et  délits  commis  par  les  gens  de  guerre.  Les  gens  de  sa  maison 
n'étaient  justiciables  que  de  lui  seul.  Le  siège  de  sa  juridiction 
s'appelait  la  Table  de  marbre  ;  il  pouvait  y  déléguer  un  lieute- 
nant *.  Quand  il  entrait  pour  la  première  fois  dans  une  ville,  il 
avait  le  droit  de  grâce  ^.  Il  présidait  aux  duels,  donnait  le  signal 
du  combat  et  le  faisait  cesser  à  son  gré.  Il  avait  logement  à  la 
cour.  Il  assistait  au  sacre  ;  c'est  lui  qui  portait  la  Sainte  Am- 
poule. Enfin,  un  crime  contre  le  connétable  était  considéré 
comme  un  crime  de  lèse-majesté  ®. 

Si  grands  que  fussent  les  pouvoirs  du  connétable,  Richemont 


1.  Arrondissement  de  Laval. 

2.  Le  Baud,  463.  D'Argentré,  762.   Cousinot,  214.  Vallet  de  V.,  I,  400. 
D.  Morice,  I,  492.  S.  Luce,  Hist.  de  du  Guesdin,  I,  129,130,  noie  2. 

3.  Daniel,  Hist,  de  la  milice  française,  t.  I,  173. 

4.  X2a  22,  an  10  juin  1437  et  au  4  décembre  1441.  X^a  23,  f»'  2  y,  3  v. 
Xia  9193,  f°  263  \°.  Xia  1483,  f"s  89  v%  209. 

3.  X2a  22,  fos  1  v»,  4. 
6.  Voy.  Appendice,  XXL 


ESSAIS   DE  RÉFORMES   MILITAIRES   (1425)  97 

voulut  étendre  son  rôle  encore  plus  loin  ;  il  voulut  être  un  pre- 
mier ministre,  au  risque  de  mécontenter  les  favoris,  jusque-là  tout- 
puissants.  On  ne  connaît  pas  toutes  les  mesures  qui  suivirent 
son  arrivée  aux  affaires,  mais  on  en  pourrait  citer  plusieurs 
qui  attestent  une  direction  nouvelle,  comme  sa  correspondance 
avec  les  principales  villes  du  royaume  \  des  changements  dans 
l'administration  financière  et  dans  les  hauts  emplois,  l'établisse- 
ment d'une  cour  des  aides  à  Poitiers  (22  octobre  1425),  la  convo- 
cation des  Etats  généraux  pour  le  l^""  octobre,  l'envoi  d'une  am- 
bassade à  Montluel,  où  devait  s'ouvrir,  le  16  avril,  une  confé- 
rence entre  les  représentants  de  la  France,  de  la  Bourgogne,  de 
la  Bretagne,  sous  la  médiation  d'Amédée  VIII,  enfin  des  efforts 
plus  louables  qu'heureux  pour  réprimer  les  excès  des  gens  de 
guerre  *. 

Outre  les  négociations  avec  le  duc  de  Bourgogne,  le  principal 
soin  du  connétable  fut  la  réorganisation  de  l'armée.  Etablir  la 
discipline,  faire  cesser  «  les  pilleries  et  roberies  »,  c'était  là  cer- 
tainement la  plus  urgente,  mais  aussi  la  plus  difficile  des  réfor- 
mes. Le  mal  était  si  répandu,  si  invétéré,  qu'il  semblait  impossi- 
ble d'y  apporter  un  remède  efficace  ^  Néanmoins  Richeraont  se 
mit  à  l'œuvre  sans  retard,  après  avoir  obtenu  du  roi  la  promesse 
formelle  que  justice  serait  faite.  Des  lettres  patentes  de  Char- 
les Vil  et  du  connétable  ordonnèrent  à  tous  les  capitaines  de 
gens  d'armes  et  de  trait  de  se  rendre  à  Selles  en  Berry  *,  pour  y 
être  passés  en  revue.  Richemont  voulait  faire  un  choix  parmi 
eux,  envoyer  les  bons  aux  frontières  et  les  autres,  «  non 
passables,  à  leur  labour  ou  mestier  »  ^.  Afin  de  pouvoir  payer 
les  troupes  qui  seraient  conservées  et  licencier  les  autres,  on  fît 
un  emprunt  de  30  000  1.  t.,  auquel  contribuèrent  différentes 
villes,  notamment  Lyon.  Toutes  d'ailleurs  se  seraient  imposé 
des  sacrifices  pour  qu'on  débarrassât  la  France  d'un  pareil  fléau  ; 
mais  ce  n'était  pas  la  première  fois  qu'on  en  faisait  la  promesse. 
Le  connétable  voulait  sincèrement  tenir  la  sienne  ^  et,  comme 

1.  Notamment  avec  Lyon.  Au  mois  d'août,  il  charge' son  conseiller  J.  de 
Chenery  de  dire  aux  habitants  de  Tournai  qu'il  les  voudrait  bien  con- 
naître. Le  conseil  décide  alors  qu'on  enverra  im  député  vers  le  roi  et  le 
connétable  {Consaux  de  Tournai,  II,  187). 

2.  De  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  p.  88,  618,  625,  637,  638, 
647-649.  Voir  Appendice,  XXII  (lettre  du  roi  aux  Lyonnais). 

3.  Voir  D.  Neuville,  le  Parlement  à  Poitiers,  dans  le  t.  VI"  de  la  Revue 
hist.  (1878),  ch.  V,  p.  291  et  suiv. 

4.  Selles- sur-Cher,  arrondissement  de  Romorantin. 

5.  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais,  dans  le  t.  19  de  la  Revue  du 
Lyonnais,  année  1859,  p.  327-331;  Fr.  20684,  f»s  565-566. 

6.  C'est  sa  préoccupation  constante,  comme  le  prouvent  ses  lettres  aux 
Lyonnais . 

Richemont.  7 


98  RICHEMONT  LÈVE   DES  TROUPES  EN  BRETAGNE 

il  savait  bien  que  celte  mesure  allait  provoquer  une  vive  résis- 
tance, non  seulement  parmi  les  gens  de  guerre,  mais  encore  chez 
les  favoris  du  roi,  il  alla  chercher  en  Bretagne  des  troupes  sur 
lesquelles  il  pût  compter,  pour  mettre  à  la  raison  tous  les  récal- 
citrants. 

Outre  sa  charge  de  connétable,  Richemont  avait  reçu,  le 
9  mars,  commission  d'entretenir  à  la  solde  du  roi  2  000  hommes 
d'armes  et  1  000  hommes  de  trait  K  Cette  troupe,  dont  il  avait 
le  commandement  direct,  devait  former  le  noyau  de  la  nouvelle 
armée.  Non  seulement  il  put  faire  en  Bretagne  les  levées  dont  il 
avait  besoin,  mais  encore  il  obtint  que  son  frère  mît  sur  pied 
les  gens  des  communes,  pour  être  en  mesure  de  faire  face  à  toute 
éventualité.  Le  nom  du  connétable  figure  dans  une  ordonnance 
que  Jean  V  rendit  à  Nantes,  le  20  mars,  et  qui  donne  de  curieux 
détails  sur  l'armement  des  milices  communales.  Instruit  par  son 
séjour  en  Angleterre,  Richemont  songeait,  dès  cette  époque, 
aux  institutions  mihtaires  qu'il  réalisa  plus  tard  en  France.  Nul 
doute  qu'il  n'ait  aussi  profité  de  ce  voyage  en  Bretagne  pour 
attirer  Jean  V  au  parti  français  et  pour  continuer  les  négocia- 
tions avec  Phihppe-le-Bon,  car  un  nouveau  traité  d'alliance  fut 
conclu  le  25  mars  entre  les  deux  ducs  ^.  C'était  le  temps  où  le 
duc  de  Bourgogne  provoquait  Glocester  à  un  combat  singulier 
(3  mars)  et  où  la  guerre  commençait  dans  le  Hainaut  entre  les 
Bourguignons  et  les  Anglais.  Bedford,  consterné  de  cette  que- 
relle, qui  l'empêchait  de  poursuivre  ses  conquêtes  en  France, 
était  obligé  de  laisser  à  Charles  VII  un  répit  dont  il  fallait  pro- 
fiter. Dans  ces  circonstances,  une  victoire  sur  les  Anglais  pou- 
vait détacher  d'eux  le  duc  de  Bourgogne  lui-même  et  sauver  le 
royaume.  Quel  début  c'eût  été  pour  le  nouveau  connétable  et 
quelle  occasion  d'imiter  l'illustre  Breton  du  Guesclin,  qui  avait 
laissé  de  si  grands  exemples! 

Pendant  que  Richemont  était  ainsi  occupé  en  Bretagne,  les 
favoris  travaillaient  à  sa  perte.  Ils  ne  pouvaient  se  résigner  à 
subir  sa  prépondérance.  Convaincus  que,  malgré  toutes  ses  pro- 
messes, il  ne  tarderait  pas  à  les  chasser  de  la  cour,  afin  de  don- 
ner satisfaction  aux  ducs  de  Bretagne  et  de  Bourgogne  ^,  ils 


1.  Ms.  fr.  20684,  f"  542,  et  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1164-66. 

2.  Preuves  de  l'hist.  de  Bj'etagne,  II,  col.  1166-1169;  Fwf.  de  Bourgogne,  IV, 
preuves  xlix-1;  Fr.  4628,  f»'  106,  S73. 

3.  Ces  intentions  rassortent  clairement  du  traité  de  Montluel  (ci-dessus 
p.  88).  D'ailleurs,  Tanguy  du  Chastel  ayant  été  envoyé  par  le  roi  demander 
à  Jean  V  «  qu'il  le  voulust  ayder  et  secourir  »,  le  duc  répondit  «  qu'il  n'y 
entendroit  en  rien,  sinon  que,  préalablement  et  avant  tout  œuvre,  le  roy 
mist  hors  de  sa  compagnie  et  de  son  hostel  tous  ceux  qui  estoient  con- 


JEAN   LOUVET  99 

voulurent  se  mettre  en  garde  contre  lui,  avant  qu'il  fût  devenu 
assez  fort  pour  imposer  ses  volontés.  C'était  là  l'inévitable  con- 
séquence de  la  situation  fausse  dans  laquelle  il  s'était  mis,  en 
prenant  vis-à-vis  d'eux  des  engagements  qu'il  ne  pouvait  tenir. 

Le  plus  audacieux  et  le  plus  redoutable  de  ces  conseillers  du 
roi,  c'était  Jean  Louvet,  seigneur  de  Mirandol,  dit  le  président 
de  Provence  '.  Ce  fut  lui  surtout  qui  engagea  et  qui  soutint 
avec  le  plus  d'acharnement  cette  lutte  contre  Richemont.  Les 
autres,  G.  d'Avangour,  P.  Frotier,  le  médecin  J.  Cadart,  Tan- 
guy du  Ghastel  et  même  le  sire  de  Giac,  étaient  moins  dangereux. 
Il  n'eût  sans  doute  pas  été  impossible  de  s'entendre  avec  eux, 
pour  les  éloigner,  en  leur  assurant  de  bonnes  compensations, 
mais  Louvet  se  cramponnait  au  pouvoir  et  les  excitait  à  résister 
avec  lui.  Il  n'avait  rien  négligé  pour  se  ménager  des  moyens 
d'influence.  Il  avait  marié  une  de  ses  filles,  Marie,  au  bâtard 
d'Orléans  (1422);  une  autre,  Jeanne,  àL.  de  Joyeuse,  et  celle-ci, 
qui  était,  comme  sa  sœur  et  sa  mère,  dame  d'honneur  de  la 
reine,  jouissait,  dit-on,  d'une  grande  faveur  auprès  du  roi  ^. 
Ainsi  soutenu  et  capable  de  tout  oser,  Louvet  crut  pouvoir 
triompher  du  connétable  et  de  la  reine  Yolande  elle-même,  qui 
pourtant  avait  eu  sur  lui  jusque-là  un  certain  ascendant  '.  Nous 
avons  des  lettres  du  connétable,  de  son  frère  Jean  V,  de 
Yolande  *  et  quelques  autres  documents  authentiques  qui  per- 
mettent de  suivre  les  principaux  incidents  de  cette  lutte  et  qui 
rejettent  tous  les  torts  sur  Louvet.  Il  faut  dire  aussi  que  ce  der- 
nier pouvait  invoquer  le  pacte  du  8  mars  et  que,  de  son  côté, 
nous  n'avons  pas  les  mêmes  sources  d'information  ^. 

Parmi  les  conseillers  du  roi,  quelques-uns,  comme  Martin 
Gouges   de  Charpaigne,   évêque   de  Clermont,   chancelier  de 

sentans  de  sa  prise,  et  les  nomma.  »  Le  duc  de  Savoie  fit  une  réponse 
semblable  pour  lui-même  et  pour  le  duc  de  Bourgogne  (Cousinot,  p.  229). 

1.  Mirandol  est  sans  doute  Âlérindol,  commune  de  l'arrondissement  d'Apt 
ou  de  l'arrondissement  de  Nyons.  Louvet  avait  été  président  de  la  Chambre 
des  comptes  d'Aix.  (Voy.  l'article  Louvet,  par  Vallet  de  V.,  dans  la  Biogra- 
phie Didot,  et  Pièces  orig.,  t.  1763,  dossier  40822,  nos  i^  2,  etc.). 

2.  Voir  toutefois  de  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II,  18i-183. 

3.  Louvet  avait  été  au  service  de  la  maison  d'Anjou.  Il  était  venu  à 
Paris  avec  Marie  d'Anjou,  femme  de  Charles  VII,  en  1416,  et  n'avait  sans 
doute  pas  connu  Richemont,  comme  M.  Gouge  et  T.  du  Chastel,  par 
exemple  {Biographie  Didot  \  de  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  I,  64,  6S). 

4.  Elles  sont  conservées  aux  Archives  municipales  de  Lyon.  Huit  de 
ces  lettres  (1425-1427)  ont  été  publiées  par  M.  J.-P.  Gauthier,  archiviste 
du  Rhône,  dans  la  Revue  du  Lyonnais,  t.  19,  nouvelle  série,  année  1859, 
p.  326  et  suiv.  Les  autres  sont  données  ici  en  appendices. 

5.  Sur  Louvet,  Frotier  et  T.  du  Chastel,  voy.  du  F.  de  Beaucourt, 
Charles  VII,  t.  II,  p.  65-70. 


100  LOUVET  ATTAQUE  RICHEMONT  (1425) 

France,  Jean  de  Gomborn,  seigneur  de  Trignac  *,  le  comte  de 
Pardiac  ^  et  Jean  de  Torsay,  maître  des  arbalétriers,  étaient 
d'accord  avec  Richemont  pour  travailler  à  la  réconciliation 
entre  le  roi  et  le  duc  de  Bourgogne.  Louvet  les  écarta.  Il  fit 
nommer  chancelier  l'archevêque  de  Reims,  Regnault  de  Char- 
tres, en  place  de  Martin  Gouge,  par  lettres  du  28  mars  ^,  et 
P.  Frotier,  sénéchal  de  Poitou,  en  place  de  J,  de  Torsay.  Il 
accusa  Richemont  d'être  l'ennemi  du  roi,  le  plus  grand  obstacle 
au  bien  de  la  paix  ;  il  essaya  d'entamer  des  négociations  avec 
les  Anglais  ;  il  exploita  la  rancune  des  gens  de  guerre,  empêcha 
l'exécution  de  l'ordonnance,  fît  venir  à  Poitiers  une  foule  de 
soldats  étrangers  «  et  autres  pillards,  larrons  et  robeurs,  »  leva 
des  impôts,  détourna  l'argent  à  son  profit  particulier  et  poussa 
Charles  Vil  à  marcher  contre  le  connétable  *,  s'il  voulait  venir 
vers  lui,  comme  il  y  était  tenu,  pour  remplir  les  devoirs  de  sa 
charge.  Il  aurait  même  tenté  de  le  faire  tuer.  Telles  sont  les 
accusations  portées  contre  Louvet  dans  les  lettres  de  Richemont 
et  de  Jean  V  aux  Lyonnais,  et  elles  n'ont  rien  que  de  très  vrai- 
semblable ^. 

Le  connétable  agit  avec  promptitude  et  habileté,  soit  de  sa 
propre  initiative,  soit  à  l'instigation  de  son  alliée,  la  reine  de 
Sicile  ^.  Avec  les  troupes  bretonnes  qu'il  avait  amenées,  il  se 
dirigea  sur  Bourges  ;  mais  Louvet,  craignant  de  n'être  pas  le 
plus  fort,  était  parti  avec  lé  roi,  pour  que  le  connétable  ne  le 
pût  rencontrer.  Richemont  trouva  là  sa  femme,  la  duchesse  de 
Guyenne,  dont  l'influence  personnelle'pouvait  lui  être  utile  dans 
ces  circonstances  (mai).  Il  fît  alors  appel  à  l'opinion  publique, 
afin  d'avoir  pour  lui  cette  force  morale  qui,  dès  cette  époque, 
n'était  point  à  dédaigner.  Il  s'adressa  aux  habitants  de  la  ville 
de  Bourges,  qui  était  alors  la  capitale  de  Charles  VII;  il  leur 

1.  Clairambault,  t.  XXXIIl,  f»  2487. 

2.  Bernard  d'Armagnac,  c.  de  Pardiac,  deuxième  fils  du  connét.  d'Arma- 
gnac. 

3.  Il  prit  possession  de  celte  charge  le  5  avril  (Anselme,  VI,  396-400).  Le 
même  jour,  P.  Frotier  est  nommé  sénéchal  du  Poitou,  en  remplacement 
de  Jean  de  Torsay,  puis  retenu  le  7  mai  à  200  h.  d'armes.  Il  fut  aussi 
nommé  capitaine  de  Poitiers  {Pièces  orig.,  t.  125,  dossier  Frotier,  nos  70-76). 

4.  C'est  le  duc  de  Bretagne  qui  écrit  cela  aux  Lyonnais,  le  14  juin 
{Revue  du  Lyonnais,  p.  332).  L'inventaire  des  Arch.  munie,  de  Lyon  men- 
tionne même  (AA.  68)  un  projet  d'assassinat  de  Louvet  contre  le  conné- 
table, mais  ce  document  a  été  égaré.  D'ailleurs  Richemont  dit  lui-même, 
dans  un  autre  document,  qu'il  a  été  eu  danger  de  mort  {Hist.  de  Bouv' 
gogne,  IV,  p.  Iviij-lxj). 

5.  Voir  ces  deux  lettres  dans  la  Revue  du  Lyonnais,  p.  327-332. 

6.  Pendant  la  seconde  moitié  d'avril,  Yolande  resta  auprès  du  roi  à 
Poitiers  (de  Beaucourt,  t.  Il,  92,  note  4). 


LUTTE  CONTRE  J.   LOUVET   (1425,   MAl)  101 

exposa  la  situation  et  sa  volonté  formelle  de  «  débouler  le  mau- 
vais traître,  président  de  Provence ,  de  la  compaignie  et  con- 
versacion  du  roi.  »  Il  écrivit  aux  bonnes  villes  du  royaume,  aux 
gens  d'Eglise,  bourgeois  et  manants,  afin  de  leur  expliquer  sa 
conduite  et  de  les  faire  juges  dans  la  lutte  qu'il  soutenait  pour 
le  bien  de  l'Etat  et  du  roi.  Il  les  pria  de  «  le  conseiller,  se- 
courir et  aider.  »  La  reine  de  Sicile  et  le  duc  de  Bretagne  écrivi- 
rent des  lettres  semblables  *.  Non  seulement  les  villes,  à  com- 
mencer par  les  plus  importantes,  Bourges,  Tours,  se  prononcè- 
rent pour  lui  contre  des  ministres  détestés  ^,  mais,  en  outre,  la 
noblesse  accourut,  tant  du  Poitou,  du  Berry  et  de  l'Auvergne 
que  de  la  Bretagne,  avec  Richard,  comte  d'Etampes,  pour  sou- 
tenir le  connétable  contre  ces  gens  «  de  bas  et  petit  lieu  '  ».  De 
son  côté,  la  reine  Yolande  servait  activement  la  cause  de  Riche- 
mont,  et  le  duc  de  Bretagne  se  préparait  à  marcher,  avec  de 
nouvelles  forces,  au  secours  de  son  frère.  Il  était  bien  difficile 
que  Louvet,  malgré  sa  puissance  et  son  audace,  pût  l'emporter 
longtemps.  Dès  le  mois  de  mai,  un  bourgeois  de  Lyon,  qui  allait 
à  Bourges,  entendait  dire  publiquement  que  Louvet,  Frotier, 
Giac  étaient  traîtres  au  roi  et  devaient  bientôt  quitter  la  cour  *. 
Cependant  les  conseillers  du  roi,  après  avoir  réuni  des  soldats 
étrangers,  Ecossais,  Lombards  et  autres,  s'avançaient  vers  le 
Berry,  tout  en  annonçant  qu'ils  voulaient  la  paix  et  l'union; 
qu'ils  étaient  prêts  à  s'expliquer  devant  le  duc  de  Bretagne  et  à 
donner  ensuite  satisfaction  au  connétable,  s'il  y  avait  lieu.  En 
même  temps,  ils  sommaient  les  villes  d'obéir  au  roi  et  de  rece- 
voir ses  officiers.  De  leur  côté,  la  reine  de  Sicile,  le  duc  de  Bre- 
tagne, le  connétable  encourageaient  les  villes  à  la  résistance. 


i .  Revue  du  Lyonnais,  332-334. 

2.  Le  30  mai,  le  conseil  de  la  ville  de  Tours  décide  que  les  habitants 
de  cette  ville  «  obéiront  à  la  royne  de  Sicile,  duchesse  de  Touraine,  et, 
par  conséquent,  à  Mgr  le  connestable,  et  seront  adjoins  et  adhérez  avec 
eulx,  sous  l'obéissance  et  subgeccion  souveraine  du  roy.  »  (Registre  des 
délibérations,  cité  par  M.  de  Beaucourt,  t.  II,  92,  note  6.) 

3.  Lettre  de  Jean  V  aux  Lyonnais  {Revue  du  Lyonnais,  p.  332,  et  Ap- 
pend.,XX\).he  clergé  n'était  pas  plus  favorable  au  président  de  Provence, 
qui,  pour  avoir  l'appui  du  pape,  lui  avait  fait  donner  la  collation  des 
bénéfices  ecclésiastiques,  par  une  ordonnance  rendue  sans  le  consente- 
ment du  Conseil,  des  prélats  et  du  parlement,  le  10  février  1425  (Vallet 
de  V.,  I,  416,  et  Ms.  lat.  17184,  fos  102,  103).  A  en  juger  par  l'exemple  de 
Lyon,  on  peut  croire  que  d'autres  bonnes  villes  écrivirent  au  roi,  à  la 
reine  de  Sicile,  au  chancelier  de  France,  pour  plaider  en  faveur  du  con- 
nétable. Yolande  informe  le  28  juin  les  Lyonnais  qu'elle  a  vu  les  lettres 
adressées  par  eux  au  roi,  à  elle-même  et  au  chancelier  de  France  {Revue 
du  Lyonnais,  p.  332-334). 

4.  Revue  du  Lyonnais,  p.  326. 


102  LUTTE  CONTRE  LOUVET  (JUIN-JUILLET) 

Yolande,  qui  était  duchesse  de  Touraine  *,  écrivit  plusieurs  fois 
aux  habitants  de  Tours,  pour  leur  recommander  de  n'ouvrir 
leurs  portes  ni  aux  officiers  du  roi,  ni  au  roi  lui-même,  tant 
qu'il  aurait  Louvet  en  sa  compagnie  ^.  La  guerre  allait-elle 
éclater  entre  le  roi,  excité  par  ses  favoris,  et  le  connétable,  sou- 
tenu par  la  reine  de  Sicile?  On  put  croire  que  Charles  VII  allait 
marcher  sur  Bourges.  Avait-il  seulement  l'intention  d'aller  à 
Mehun,  pour  conclure  un  arrangement  avec  sa  belle-mère  Yo- 
lande, comme  il  le  disait,  ou  bien  voulait-il  recourir  aux  armes? 
Il  est  probable  que  Louvet  n'eût  pas  reculé  devant  ce  moyen 
extrême,  s'il  se  fût  senti  le  plus  fort.  En  tout  cas,  il  ne  crut  pas 
devoir  s'avancer  plus  loin  que  Vierzon,  et  il  emmena  le  roi  à 
Selles-sur-Cher  ^. 

Cette  étrange  situation  ne  pouvait  se  prolonger.  Tanguy 
du  Chastel,  moins  opiniâtre  que  les  autres  favoris,  s'entendit 
avec  Yolande,  avec  le  connétable  et  déclara  qu'il  ne  voulait  pas 
empêcher  par  sa  présence  un  aussi  grand  bien  que  celui  de  la 
paix  entre  le  roi  et  le  duc  de  Bourgogne.  Il  fît  plus;  il  aida  la 
reine  Yolande  à  pénétrer  jusqu'à  son  gendre,  malgré  Louvet  ; 
il  força  les  autres  conseillers  à  se  retirer  '*  comme  lui  et  s'en  alla 
bientôt  à  Beaucaire.  P.  Frotier,  G.  d'Avangour,  le  médecin 
J.  Cadart  partirent  aussi,  pourvus  d'ailleurs  d'argent,  de  pen- 
sions, d'oflîces  lucratifs  (juin-juillet  1425). 

Louvet  lui-même  dut  s'éloigner.  Ses  derniers  agissements,  à 
cette  époque,  semblent  prouver  qu'il  croyait  ne  faire  qu'une 
absence  momentanée  et  qu'il  espérait  bien  reprendre  toute  son 
autorité.  Chargé  d'une  mission  dans  le  Dauphiné,  il  eut  soin  de 
se  faire  donner  par  le  roi,  sans  délibération  du  conseil,  des 
lettres  patentes  qui  lui  conféraient  des  pouvoirs,  «  déraison- 
nables et  excessifs,  tant  sur  le  fait  des  finances  que  autrement  », 
par  exemple  l'administration  de  toutes  les  finances  du  Langue- 
doc, de  la  Guyenne  et  du  Dauphiné,  le  pouvoir  général  de 
traiter,  au  nom  dé  Charles  YII,  avec  qui  bon  lui  semblerait. 


1.  Depuis  le  mois  d'octobre  1424  (Xia,8604,f''69  V IV.  Voy.  ci-dessus,  p.  86).. 

2.  Voir  une  lettre  de  Jean  V  aux  habitants  de  Tours,  datée  du  13  juin 
[Appendice,  XXIII). 

3.  Ces  deux  villes  étaient  les  seules  qui  obéissent  à  Louvet  (Berry,  373).^ 
Vierzon,  arrondissement  de  Bourges. 

4.  «  Et  si  aida  à  mettre  hors  ceux  qui  s'en  dévoient  aller  et  fit  tuer 
par  ses  archers  devant  lui  un  capitaine,  lequel  faisoit  trop  de  maux  et 
ne  vouloit  obéir.  »  (Gruel,  191.)  Sur  cette  lutte  entre  Richemont  et  Louvet,. 
voir  de  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  90-98  et  notes.  Guill. 
d'Avangour  fut  remplacé,  comme  bailli  de  Tours,  par  Baudoin  de  Tucé. 
Il  eut  ensuite  le  gouvernement  du  Dauphin  (X^a  4798,  f»s  328,  329,  336- 
337,  340  V,  341). 


RICHEMONT  TRIOMPHE    (1425,   JUILLET)  103 

tant  amis  que  ennemis.  Il  emporta  ces  lettres  patentes  avec 
d'autres,  scellées  en  blanc  du  grand  sceau,  et  certains  bijoux  du 
roi  1,  comme  gage  de  sommes  qu'il  prétendait  lui  avoir  prêtées. 
Les  lettres  qui  octroyaient  au  président  de  Provence  ces  pou- 
voirs «  excessifs  et  déraisonnables  »  furent  données  à  Selles-en- 
Berry  le  12  juin  1425  2. 

Quelques  jours  après,  Charles  YII  rentrait,  avec  la  reine  de 
Sicile  et  le  connétable,  dans  cette  ville  de  Bourges,  qui  s'était 
déclarée  si  résolument  contre  ses  anciens  ministres  et  contre  lui- 
même.  Des  seigneurs,  des  capitaines,  des  représentants  des 
bonnes  villes,  «  nobles  et  non  nobles,  »  y  furent  alors  réunis. 
Devant  cette  assemblée,  le  roi  déclara  «  qu'il  connaissait  bien  le 
mauvais  conseil  qu'il  avait  eu  au  temps  passé;  que  dorénavant  il 
se  voulait  conduire  par  bon  conseil  et  faire  tout  ce  que  son  loyal 
frère  de  Bretagne  et  son  connétable  lui  voudraient  conseiller  *.  » 
Il  fallait  que  la  conduite  de  Richemont  fût  approuvée  devant 
ceux  qui  l'avaient  soutenu  ;  mais  n'est-il  pas  incroyable  qu'un  roi 
ait  pu  se  résigner  à  cet  humiliant  aveu  de  sa  propre  faiblesse  et 
de  sa  nullité?  Ce  sentiment  unanime  de  réprobation  contre  Lou- 
vet,  cette  manifestation  populaire  en  faveur  du  connétable  at- 
teignaient trop  le  roi  lui-même  pour  qu'il  n'en  fût  pas  froissé, 
sourdement  irrité.  Il  ne  pardonna  pas  à  Richemont  d'avoir  été 
vainqueur  dans  cette  lutte  et  de  n'avoir  pas  usé  plus  discrètement 
de  sa  victoire.  Il  se  hâta  de  quitter  Bourges,  sans  emmener  avec 
lui  le  connétable,  dont  la  présence  lui  était  importune,  mais  il 
n'écarta  pas  de  même  sa  belle-mère,  qui  le  suivit  à  Poitiers.  Le 
28  juin,  elle  écrivait,  de  cette  ville,  aux  Lyonnais,  pour  les  infor- 
mer que,  sur  ses  instances  et  sur  celles  du  connétable,  le  roi 
avait  mis  «  hors  de  sa  compaignie  »  le  président  de  Provence  et 
autres,  «  qui  avoient  perturbé  le  bien  de  la  paix  *  ». 

Non  contente  d'avoir  éloigné  Louvet,  Yolande  voulut  con- 
sommer sa  disgrâce  et  lui  ôter  tout  moyen  de  nuire.  Bientôt 
Charles  VII  déclara  qu'après  avoir  pris  l'avis  de  la  reine  de  Sicile, 
du  grand  conseil,  du  parlement,  il  annulait  toutes  les  lettres 
octroyées  «  légèrement  »  au  président  de  Provence,  afin  d'obvier  à 
l'abus  qu'il  en  pourrait  faire,  dans  son  intérêt  particulier,  et  aux 
«  dangers  irréparables  »  qui  en  pourraientrésulter  (5  juillet  1425). 

1.  Un  des  fleurons  de  la  couronne,  un  collier  garni  de  perles,  un 
grand  diamant,  une  perle  appelée  la  «  perle  de  Navarre  ».  (Voy.  la  réponse 
de  Louvet  dans  le  Ms.  fr.  9665,  ou  Legrand,  VI,  p.  5-8.) 

2.  Voir  une  lettre  du  roi  dans  VHist.  de  Charles  VII,  par  M.  de  Beau- 
court,  II,  97. 

3.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  Preuves,  p.  Ixij-lxiij. 

4.  Revue  du  Lyonnais,  p.  332-334.  J.  Bouchet,  Annales  d'Aquitaine,  244,, 


104  RICHEMONT  REVIENT  AUPRÈS  DU   ROI   (1425,   JUILLET) 

Rien  de  plus  accablant  pour  Charles  VII  et  pour  son  favori 
que  cette  lettre  de  révocation  '.  Elle  prouve  autant  la  déso- 
lante faiblesse  du  prince  que  l'audace  éhontée  de  son  ministre 
et  la  nécessité  de  les  séparer.  Louvet  se  rendit  d'abord  à  Avi- 
gnon, puis  il  se  retira  dans  sa  seigneurie  de  Mirandol.  C'est  là 
que  le  trouva  (août  1425)  l'huissier  d'armes  du  roi  chargé  de 
lui  signifier  la  lettre  de  révocation  du  5  juillet  et  de  la  faire 
exécuter.  Louvet  se  soumit  aux  ordres  de  Charles  VII.  Sa 
femme,  ses  deux  filles,  le  bâtard  d'Orléans,  son  gendre,  l'avaient 
suivi  dans  cet  exil,  très  supportable  du  reste,  où  les  bienfaits  du 
roi  vinrent  encore  le  trouver  ^. 

La  reine  de  Sicile  exerça  dès  lors  une  plus  grande  influence 
sur  son  gendre  ^;  toutefois  ce  ne  fut  pas  sans  peine  qu'elle 
apaisa  le  ressentiment  dont  il  était  animé  envers  le  connéta- 
table.  Richemont  s'était  avancé  jusqu'à  Ghâtellerault  "*,  où  il 
attendait  que  Yolande  eût  aplani  toutes  les  difficultés. 

Après  des  démarches  réitérées,  il  obtint  enfin  la  permission 
de  revenir  auprès  de  Charles  VII.  Il  se  rendit  alors  à  Poitiers  (10 
juillet)  ^.  On  vit  reparaître  à  la  cour  ses  amis  disgraciés,  comme 
le  sire  de  Trignac  et  l'évêque  de  Clermont,  qui  fut  rétabli,  le  6 
août,  dans  la  charge  de  chancelier.  La  crise  était  terminée.  Le 
connétable  reprit  son  œuvre,  entravée,  dès  le  début,  par  des 
obstacles  qui,  malheureusement,  allaient  bientôt  renaître  ^. 

1.  Append.,  XXIV. 

2.  Fr.  966o,  fo^  2  et  suiv.  Gruel,  191.  Berry,  373.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  100, 
101.  De  Beaucourt,  t.  II,  102,  103.  Append.,  XXIV. 

3.  Charles  VII  donne  alors  au  jeune  Charles  d'Anjou  le  comté  de  Mortain, 
qu'il  avait  donné  auparavant  au  bâtard  d'Orléans  (Xi"  8604,  f"  119  v"), 

4.  Le  9  juillet,  il  écrivait,  de  Ghâtellerault,  aux  habitants  de  Tours  que, 
«  pour  parvenir  au  bien  de  la  paix,  le  connestable  de  France  a  esté  em- 
pêché par  le  président  de  Prouvence  et  autres  du  Conseil  du  roy,  par  quoy 
il  n'y  a  peu  parvenir.  »  Comme  il  a  dû  s'imposer  de  très  grandes  dépenses, 
il  demande  que  les  habitants  de  Tours  «  voulsissent  lui  prêter  la  somme 
de  2000  1. 1.  et  les  bailler  promptement  à  ses  chiers  et  bien  amez  M«  Jehan 
de  Chasteaugiron,  son  secrétaire  et  argentier,  et  à  Milet  de  Champressy, 
lesquels  en  bailleront  ses  lettres  pour  la  seureté  des  bourgeois,  etc.  »  Reg. 
des  délibérât,  du  conseil  de  la  ville  de  Tours,  séance  du  11  juillet  1425 
(communication  du  D""  Giraudet).  Voir  aussi  de  Beaucourt,  Charles  VH, 
t.  II,  101,  note  3. 

3.  Le  23  juillet,  le  roi  écrivait  aux  habitants  de  Lyon  qu'il  avait  mandé 
auprès  de  lui,  à  Poitiers,  la  reine  de  Sicile  et  le  connétable  fde  Beaucourt, 
t.  II,  104).  Le  28  juillet,  Richemont  annonçait  aux  Lyonnais  son  retour 
auprès  du  roi  (voy.  Append.,  XXV). 

6.  De  Beaucourt,  t.  II,  p.  99-102  et  notes.  Richemont  fit  aussi  nommer 
chambellan  du  roi,  le  30  juillet,  Alain  de  Rohan,  c.  de  Porhouet,  son 
beau-frère  [Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1176-1177).  L.  d'Esco- 
railles.  Christ.  d'Harcourt,  Béranger  d'Arpajon  furent  spécialement  attachés 
au  service  du  connétable  par  le  roi  (Fr.  20684,  fos  564,  365). 


LE  CONNÉTABLE  PREND  LE  POUVOIR  105 

Il  était  sorti,  non  sans  peine,  de  l'impasse  où  il  s'était  jeté 
lui-même  en  signant  l'engagement  du  8  mars,  mais  il  avait 
irrité  Charles  VIL  Louvet  n'avait  pas  eu  de  peine  à  faire  passer 
pour  un  rebelle  audacieux  ce  connétable  qui  osait  marcher, 
avec  des  troupes,  contre  le  roi  lui-même.  D'ailleurs,  Richemont 
aurait  pu,  sans  être  un  courtisan  servile,  se  montrer  plus  souple 
et  plus  conciliant.  Son  énergie,  parfois  trop  violente,  son  carac- 
tère impérieux,  sa  rudesse  inspirèrent  des  sentiments  d'aversion 
et  de  crainte  au  jeune  roi,  qui  se  sentit  dominé,  humilié.  Le 
crédit  du  connétable  ne  reposait  donc  pas  sur  des  bases  bien 
soHdes. 

Toutefois,  on  sent  alors  une  direction  plus  énergique  '.  Au  mois 
de  juillet  1425,  on  tint,  à  Poitiers,  d'importants  conseils,  aux- 
quels assistèrent  le  roi,  la  reine  de  Sicile  et  le  connétable,  son  frère 
Richard,  comte  d'Etampes,  son  beau-frère  le  comte  de  Cler- 
mont.  Le  roi,  en  écrivant  aux  bonnes  villes  ^,  pour  les  informer 
des  derniers  événements,  leur  annonçait  que  tout  était  «  en 
bonne  union  et  concorde  »,  qu'il  aurait  désormais  autour  de  lui 
des  princes  de  son  sang  et  autres  conseillers  «  preudommes  et 
loyaux  ». 

On  avait  hâte  de  réparer  le  temps  perdu  en  misérables  intri- 
gues. On  s'occupa  des  finances,  de  la  guerre,  des  négociations 
avec  les  ducs  de  Savoie  et  de  Bourgogne.  Dès  le  26  juillet,  il  fut 
décidé,  sur  l'avis  de  la  reine  Yolande  et  du  connétable,  que  les 
Etats  de  Languedoil  et  de  Languedoc  seraient  réunis  à  Poitiers 
le  1*'  octobre,  et  qu'en  attendant,  on  lèverait  une  aide  de 
120  000  livres  tournois  pour  faire  face  aux  besoins  les  plus  ur- 
gents ^.  Comme  s'il  eût  compris  tout  de  suite  qu'il  ne  pouvait 
compter  sur  le  roi,  Richemont  chercha  manifestement  à  se  con- 
cilier le  peuple,  à  lui  montrer  qu'il  prenait  souci  de  ses  vérita- 
bles intérêts,  sans  jamais  faire,  au  détriment  de  l'État,  la  moin- 
dre concession  pour  acquérir  la  popularité.  La  convocation  des 
Etats  généraux  était  une  mesure  de  la  plus  haute  importance, 
car  on  réunissait  rarement  ces  grandes  assemblées,  où  étaient 
représentés  tous  les  pays  de  Languedoil  et  de  Languedoc.  Le 

1.  En  quelques  jours,  le  connétable  écrit  trois  fois  aux  habitants  de 
Lyon.  Il  écrivait  probablement  à  d'autres  villes.  (Voir  Append.,  XXV, 
]K^VI,  XXVII,  et  Consaux  de  Tournai,  II,  187).  On  remarque  aussi  dans 
les  lettres  du  roi  une  grande  fermeté.  Voir  la  lettre  du  31  août  aux  Lyon- 
nais {Appendice  XXVIII). 

2.  Lettres  du  23  juillet  et  du  le'  août,  publiées  par  M.  de  Beaucourt, 
t.  II,  p.  104-106. 

3.  D'après  M.  de  Beaucourt  (t.  II,  584),  cette  mesure  fut  due  à  l'initiative 
du  connétable.  L'aide  aurait  été  de  260  000  1.  et  non  de  120  000.  Il  paraît 
qu'à  Lyon  on  l'appelait  l'aide  de  Mgr  le  connestable. 


106  EFFORTS   DE   RICHEMONT 

connétable  écrivit  encore  aux  bonnes  villes,  aux  habitants  des 
provinces,  pour  leur  annoncer  cette  convocation  et  pour  les  prier 
de  payer  le  plus  tôt  possible  les  impôts  qu'on  leur  réclamait, 
afin  qu'il  pût  envoyer  aux  frontières  les  gens  d'armes  qui  vi- 
vaient sur  les  champs  et  «  faire  cesser  les  pilleries  et  roberies  » 
dont  souffraient  les  sujets  du  roi  *. 

La  paix  avec  le  duc  de  Bourgogne  était  aussi  la  grande  préoc- 
cupation du  connétable.  Ses  envoyés  partirent  aussitôt,  avec 
ceux  du  roi,  pour  aller  vers  le  duc  de  Savoie,  dont  la  médiation 
était  toujours  prête.  D'autres  ambassadeurs  de  Charles  VII,  de 
Yolande  et  de  Jean  V  devaient  partir  un  mois  plus  tard,  avec 
mission  de  conclure  la  paix.  Enfin  le  connétable  envoya  auprès 
de  Philippe-le-Bon  un  de  ses  conseillers  les  plus  habiles,  Jean  de 
Ghénery,  qui  devait  jouer  un  rôle  très  actif  dans  ces  négocia- 
tions ^. 

La  guerre  réclamait  aussi  les  soins  du  connétable;  mais  tout 
manquait  pour  la  faire,  l'argent  plus  encore  que  les  troupes. 
Par  bonheur,  les  Anglais  ne  profitaient  pas  de  ce  dénûment  au- 
tant qu'ils  l'eussent  fait,  si  Bedford  eût  été  plus  libre  d'agir.  Il 
lui  fallait  s'interposer  entre  Glocester  et  le  duc  de  Bourgogne, 
empêcher  que  Salisbury  et  les  autres  capitaines  anglais  allas- 
sent en  Flandre  au  secours  de  leurs  compatriotes  ^.  Toutefois,  il 
était  loin  de  négliger  la  guerre.  Les  Anglais  avaient  fait  capitu- 
ler Guise  *  Vitry,  et  quelques  autres  forteresses;  ils  assiégeaient 
Moynier  ^,  qui  résistait  vaillamment. 

Les  Français  avaient  essayé  de  prendre  le  château  de  Pleurs,, 
près  de  Sézanne  ^.  En  Normandie,  les  Anglais,  depuis  le  mois  de 

1.  Voy.  les  lettres  du  connétable  aux  Lyonnais  (lettre  du  30  juillet,. 
Append.,  XXVI;  lettre  du  3  août,  Append.,  XXVII,  et  une  lettre  du  roi 
datée  du  31  août,  Append.,  XXVIII).  Voir  A.  Thomas,  les  États  généraux 
sous  Charles  VII,  dans  le  t.  24  du  Cabinet  historique,  année  1878.  D'après 
M.  A.  Thomas,  qui  n'est  d'accord  sur  le  nombre  des  sessions  ni  avec  M.  Picot, 
ni  avec  M.  Vallet  de  V.  {Bib.  de  l'école  des  Chartes,  t.  XXXIII,  année  1872, 
p.  27-30)  une  seule  assemblée,  jusqu'en  1439,  réunit  les  députés  des  pays 
de  Languedoil  et  de  Languedoc;  ce  fut  celle  de  septembre  1428,  à  Chinon. 
Les  autres  assemblées  ne  sont  réellement  que  des  Etats  de  Languedoil. 

2.. Revue  du  Lyonnais,  ibid.,  p.  334  (lettre  du  vicaire  de  l'archev.  de 
Reiras).  De  Beaucourt,  t.  II,  p.  88  et  note  5,  p.  94,  106.  Le  6  août,  J.  de 
Chenery,  envoyé  par  le  connétable  vers  le  duc  de  Bourgogne,  recevait  ses 
lettres  de  créance  {Consaux  de  Tournai,  II,  187).  Remarquer  que  ces  lettres 
ne  peuvent  être  datées  de  Provins.  L'éditeur  aura  lu  Provins  au  lieu  de 
Poitiers. 

3.  Sharon  Turner,  III,  18.  Collect.  de  Bourgogne,  t.  99,  p.  223-228. 

4.  Vitry-le-François  (Marne). 

5.  Ou  Moymer,  château  très  fort,  près  de  Vertus,  arrondissement  de 
Châlons-sur-Marne  (le  Bourg,  de  Paris,  212,  note  2). 

6.  Arrondissement  d'Épernay.  JJ  173,  f"  96. 


PROGRÈS   DES  ANGLAIS   (1424-1425)  107 

septembre  1424,  assiégeaient  le  Mont-Saint-Michel,  par  terre  et 
par  mer,  avec  un  acharnement  que  surpassait  encore  l'héroïsme 
des  défenseurs  de  cette  forteresse  *  ;  mais  c'était  principalement  le 
Maine  et  l'Anjou  qui  attiraient  les  ennemis.  Depuis  la  victoire  de 
Verneuil,  ils  ne  songeaient  qu'à  faire  la  conquête  de  ces  pays. 
Dès  le  1"  octobre  1424,  ils  avaient  réduit  Olivier  le  Forestier  à 
capituler  dans  Sillé-le-Guillaume;  ils  avaient  pris  Senonches  ^, 
Nogent-le-Rotrou,  et,  bien  qu'ils  eussent  perdu  Montfort  ^,  dans 
le  voisinage  du  Mans,  forteresse  à  laquelle  ils  attachaient  une 
grande  importance,  ils  faisaient  des  progrès  inquiétants  *. 

En  1425,  Bedford  dirigea  des  troupes  nombreuses  vers  le 
Maine,  sous  les  ordes  de  Salisbury,  de  Suffolk,  de  lord  Scales,  de 
Fastolf,  auxquels  se  joignirent  d'autres  capitaines  renommés, 
R,  Willoughby,  G.  Oldhall,  Glasdale,  J.  de  Montgomery,  Mathieu 
Goth  ^.  Le  Vendomois  et  l'Orléanais  étaient  également  menacés, 
par  l'occupation  de  Marchenoir  ^.  Enlever  les  positions  d'où  ils 
pourraient  envelopper  le  Maine,  surveiller  la  Bretagne  et  assurer 
leurs  communications  avec  Paris  et  Rouen,  leurs  principaux 
centres  d'action,  tel  était  le  plan  des  Anglais.  Nogent-le-Rotrou, 
Mortagne,  Alençon,  Fresnay-le-Vicomte  "^ ^  Sillé-le-Guillaume 
étaient  pour  eux  autant  de  postes  avancés,  d'où  ils  allaient  diri- 
ger leurs  forces  sur  la  capitale  du  Maine.  La  prise  d'Etampes 
et  de  Rambouillet  par  le  comte  de  Salisbury  leur  permit  de 
s'avancer  plus  librement  dans  le  Maine.  Fastolf,  gouverneur 
d' Alençon,  fit  capituler  Tennie  ^.  Salisbury  assiégea  Beaumont- 
sur-Sarthe,  puis  il  vint  mettre  le  siège  devant  la  ville  du  Mans 
(juillet)  ». 

t.  Sur  le  siège  du  Moat-Saint-Michel  :  Siméon  Luce,  Chronique  du 
Mont-Saint-Michel,  Paris,  1879,  t.  I,  in-S";  Fr.  6965,  f  9;  Fr.  4491,  fas  17-41, 
100  V;  Fr.  23767,  n"  122;  Fr.  26047,  nos  370,  371,  335;  Fr.  26048,  n»  523; 
K  62,  n-s  182-6. 

2.  Arrondissement  de  Dreux. 

3.  Arrondissement  du  Mans. 

4.  Portef.  Font.,  113-114,  au  29  août  1425,  aux  17  et  18  octobre  1424. 
JJ  173,  fs  50,  71,  96;  K  62,  n»  14;  Fr.  10449  [Hist.  manusc.  de  Charles  VII, 
par  Fontanieu),  f»  142  v»;  Fr.  23018,  f<»  452-456;  Mém.  de  la  Soc.  archéol.  de 
Touraine,  année  1859,  p.  327.  Vallet  de  V.,  II,  8  etsuiv.  Fr.,  26048,  rx"  422. 

5.  JJ  173,  f«s  130  V,  191  v,  192. 

6.  Arrondissement  de  Blois  (JJ,  173,  f»  36  v»). 

7.  Arrondissement  de  Mamers. 

8.  Arrondissement  du  Mans  et  non  Tanis  près  de  Pontorson  (Cousinot, 
226,  n°  2.  Le  Corvaisier  de  Courteilles,  Hist.  des  êvesques  du  Mans,  Paris, 
1548,  m-'io,  p.  684). 

9.  K  62,  n"  18''.  Sur  les  progrès  de  la  domination  anglaise  depuis  le 
commencement  du  règne  de  Charles  VII,  voir,  dans  la  Revue  des  questions 
histor.,  t.  XVIII,  année  1875,  p.  467  et  suiv.,  le  savant  travail  de  M.  A. 
Longnon,  les  Limites  de  la  France  à  l'époque  de  Jeanne  d'Arc. 


108  LES  ANGLAIS  PRENNENT  LE  MANS   (1425,   AOUT) 

Yolande  et  Richemont  redoublèrent  d'efforts,  mais  on  avait 
perdu  trop  de  temps  à  lutter  contre  Louvet,  et  il  n'était  plus 
possible  d'opposer  aux  Anglais  une  prompte  résistance.  Le  con- 
nétable obtint  que  son  frère  Jean  V  prêtât  de  l'argent  au  roi, 
afin  de  pourvoir  aux  besoins  les  plus  pressants  '  ;  il  réunit  des 
troupes  à  Angers,  à  Gennes,  près  de  Saumur,  à  Sablé  ^.  Son 
jeune  frère ,  Richard  ,  comte  d'Etampes,  avec  des  capitaines 
bretons,  Maurice  de  Pluscalec,  Bertrand  de  Dinan,  maréchal  de 
Bretagne  ^,  J.  de  Dinan,  seigneur  de  Beaumanoir,  Robert  de 
Montauban,  le  sire  de  Graville  *,  maître  des  arbalétriers  de 
France,  J.  Stewart  ^,  connétable  des  Ecossais,  furent  alors  re- 
tenus au  service  du  roi  et  vinrent  se  mettre  sous  les  ordres  de 
Richemont  (août-septembre  1425)  *'.  Ces  troupes  ne  purent  être 
rassemblées  assez  tôt  pour  sauver  Le  Mans.  Elles  furent  mises 
en  garnison  dans  diverses  places  sur  les  frontières  de  l'Anjou 
et  du  Maine,  où  elles  rendirent  peu  de  services,  parce  qu'elles 
n'étaient  point  payées.  Les  gens  d'armes  que  le  comte  de  Foix 
avait  amenés  du  Midi  ne  firent  guère  que  commettre  des  ravages, 
faute  de  solde.  Le  connétable  avait  bien  envoyé  J.  Girard  au  se- 
cours du  Mans  (juillet) ,  mais  il  n'avait  pu  lui  donner  qu'un 
petit  nombre  de  soldats.  Les  Anglais,  servis  par  une  artillerie 
formidable,  firent  capituler  la  place,  le  2  août,  et  en  prirent 
possession  le  10  ^. 

Salisbury  alla  ensuite  assiéger  Sainte-Suzanne  *  et  Mayenne, 
qui  avaient  pour  capitaines,  la  première  Ambroise  de  Loré,  l'un 
des  plus  vaillants  hommes  de  guerre  de  cette  époque,  et  l'autre 
Pierre  Le  Porc,  qui  s'était  récemment  signalé  dans  un  combat 


1.  Richemont  resta  jusqu'au  10  août  à  Poitiers  (de  Beaucourt,  t.  Il,  110, 
et  note  8).  Yolande  prit  à  sa  charge  la  défense  de  l'Anjou  et  du  Maine. 
Pour  cela,  le  roi  lui  promit  30  000  1.  par  an,  outre  les  finances  de  ces  pays 
(Marchegay,  Archives  d'Anjou,  p.  308,  et  P.  1341,  f"  38;  Registre  Turnus 
Brutus,  I,  96;  P.  Clément,  J.  Cœur,  Didier,  1866,  p.  50). 

2.  Arrondissement  de  La  Flèche. 

3.  Nommé  par  Yolande  capit.  gén.  du  Maine  et  de  l'Anjou  (Fr.  20684, 
f»  122  y). 

4.  Jean  Malet,  seigneur  de  Graville. 

5.  Il  avait  reçu,  en  mars  1423,  la  seigneurie  d'Aubigny,  pour  sa  belle 
conduite  à  la  bataille  de  Baugé  (X>a  8604,  f"  78). 

6.  Fr.  20684,  i"  342.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  1164-1166. 

7.  Fr,  29684,  f»  543;  K  62,  n-  18^;  Fr.  4491,  f«s  2,  28  v,  33,  34  v°,  40; 
Fr.  26048,  nos  432,  433.  Le  Corvaisier  de  C,  681-684.  Vallet  de  V.,  II, 
10,  11.  Xia,  1480,  fo  330.  Les  Anglais  dans  le  Maine  et  l'Anjou  :  Portef. 
Font.,  113-114,  passim.  K  62,  nos  hiô-îo,  15,  152^  17,  {^i,  12,  i4,i9-2i;  Fr.  4491, 
fos  23-28,  41;  Fr.  25767,  nos  116,  120,  121,  124;  Fr.  26047,  n"  395;  Fr.  26048j 
nos  461,  475,  492-496,  525.  J.  Stevenson,  II,  2«  partie,  411. 

8.  Arrondissement  de  Laval. 


NÉCESSITÉ   DE   l'ALLIANCE   BRETONNE    (1425)  109 

contre  les  Anglais  '.  Le  connétable,  faute  d'argent,  n'était  pas  en 
mesure  d'envoyer  des  secours  à  ces  places,  qui,  battues  par  les 
grosses  bombardes  des  Anglais,  allaient  être  bientôt  obligées  de 
capituler,  malgré  le  courage  de  leurs  défenseurs.  Il  mit  néan- 
moins en  état  de  défense  la  ville  de  Sablé,  que  la  perte  du  Mans 
exposait  aux  attaques  des  ennemis  ^.  En  même  temps,  Bedford 
essayait  d'apaiser  la  querelle  entre  son  frère  et  le  duc  de  Bour- 
gogne ^  et  d'empêcher  la  défection  de  Jean  V  *. 

Le  connétable,  désolé  des  échecs  qu'il  éprouvait  de  toutes 
parts,  comprenait  de  plus  en  plus  qu'il  ne  sortirait  jamais  d'une 
situation  aussi  critique  sans  l'aide  d'un  allié  puissant,  et  il  pres- 
sait son  frère  de  se  déclarer  pour  Charles  VIL  Yolande  aussi 
réclamait  l'intervention  de  Jean  V.  Ne  devait-il  pas  être  le  beau- 
père  de  Louis  d'Anjou  et  laisserait-il  dépouiller  ses  propres  en- 
fants, sans  rien  faire  pour  les  défendre  ^?  Le  roi  Charles,  après 
le  départ  de  ses  favoris,  avait  envoyé  les  sires  de  La  Suze  ^  et  de 
Trêves  ''  dire  au  duc  de  Bretagne  que  les  amis  des  Penthièvre 
avaient  été  chassés  et  l'inviter  à  remplir  ses  devoirs  envers  la 
couronne  de  France.  D'un  autre  côté,  Jean  V  était  retenu  par  la 
crainte  que  lui  inspiraient  les  Anglais.  Rendre  hommage  à 
Charles  VII,  c'était  le  reconnaître  comme  le  seul  roi  légitime  de 
la  France  et  renier  hautement  le  traité  de  Troyes,  qu'il  avait  juré 
naguère,  à  l'instigation  de  Richemont  lui-même  ;  c'était  attirer 
sur  la  Bretagne  la  vengeance  de  Bedford.  Malgré  ces  hésitations 
bien  concevables,  Jean  V   céda  aux  instances  d'Artur  et  de 

1.  Cousinot,  226-229.  Polydore  Vergil,  édition  H.  Hellis,  London,  1864, 
in-8°,  p.  10. 

2.  Cousinot  de  M.,  226-229.  Le  Corvaisier  de  C,  661  et  suiv.,  680.  JJ,  173, 
fo  217VO;  Fr.  26048,  n»  486;  Fr.  4491,  f»s  2  v»,  29,  33.  Voir  Append.,  XXIX. 

3.  Il  alla  trouver  le  duc  à  Hesdin.  C'est  pendant  ce  voyage  qu'il  faillit 
être  attaqué,  près  de  Péronne,  par  Sauvage  de  Fermainville  (Vallet  de  V.,  I, 
475;  JJ,  173,  f»  349).  C'est  alors  aussi  que  Bedford  aurait  essayé  d'attirer 
le  duc  de  Bourgogne  dans  un  guet-apens  (Desplanque,  33,  62)  Négocia- 
tions avec  les  ducs  de  Bourg,  et  de  Glocester  :  Fr.  4485,  f»»  367^  427;  Fr.  4491, 
fos  17,  18,  19,  20,  31.  X<«  1480,  f  333;  Fr.  26048,  n"  478.  Portef.  Font.,  113, 
iU,passim.  3.  Stevenson,  II,  2«  partie,  409,  412.  Hist.  de  Bourgogne,  IV, 
preuves  lii-liij. 

4.  Fr.  4491,  f<"  18,  33;  Fr.  26048,  n»  419. 

5.  Lauis  TII  d'Anjou,  qui  était  dans  le  royaume  de  Naples,  envoyait 
alors  procuration  à  J.  de  Craon,  seigneur  de  La  Suze,  d'épouser  pour  lui 
Isabeau  de  Bretagne  (très  belle  pièce  des  Arch.  de  la  Loire-Inférieure, 
cass.  4,  E,  10). 

6.  René  de  Laval,  seigneur  de  La  Suze,  frère  du  fameux  Gilles  de  Laval, 
seigneur  de  Raiz,  maréchal  de  France  (Anselme,  III,  632). 

7.  Rob.  Le  Maçon,  chancelier  de  France  de  1416  à  1422.  Auparavant,  il 
avait  été  conseiller  de  Louis  II  d'Anjou,  et  il  avait  rendu  de  grands  ser- 
vices au  Dauphin  (de  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  I,  212). 


110      JEAN  V  SE  REND  AUPRÈS  DE  CHARLES  VII. (1425) 

Yolande  et  peut-être  aux  exigences  de  l'opinion.  Depuis  que 
son  frère  était  connétable,  le  parti  français  en  Bretagne  se  pro- 
nonçait avec  plus  de  force  pour  Charles  VII.  Les  Bretons  con- 
couraient à  la  défense  du  Mont-Saint-Michel ,  qui  bravait  tou- 
jours la  fureur  des  Anglais,  et,  quand  le  duc  consulta  les  Etats,  à 
Nantes,  ils  lui  conseillèrent,  sinon  de  faire  alliance  avec  le  roi, 
du  moins  d'aller  lui  rendre  hommage.  Jean  V  se  décida  enfin  à 
demander  une  entrevue  à  Charles  VII  i.  Le  connétable,  informé 
de  cette  résolution,  alla  trouver  le  roi  à  Poitiers  (25  septembre), 
obtint  qu'il  s'avançât  jusqu'à  Saumur  et  le  quitta  en  chemin, 
pour  aller  au-devant  de  son  frère.  Il  s'arrêta  en  passant  à  Chi- 
non,  où  résidait  alors  la  duchesse  de  Guyenne,  qui  s'était  rap- 
prochée de  la  cour,  depuis  que  son  mari  était  redevenu  maître 
du  pouvoir.  Il  repartit  aussitôt  pour  Angers,  pendant  que  la 
comtesse  de  Richemont  se  rendait  à  l'abbaye  de  Saint-Florent, 
près  de  Saumur  ^. 

Charles  VII  arriva  le  30  septembre  à  Saumur,  avec  le  comte  de 
Clermont,  beau-frère  du  connétable  et  du  duc  de  Bourgogne,  le 
comte  de  Vendôme,  grand  maître  d'hôtel,  le  comte  de  Foix,  lieu- 
tenant-général du  roi  dans  le  Languedoc,  venu  récemment  du 
Midi  3,  avec  son  frère  le  comte  de  Comminges,  le  sire  d'Albret  et 
beaucoup  d'autres  seigneurs.  Le  duc  de  Bretagne  amenait  aussi 
une  suite  nombreuse  :  son  jeune  frère,  Richard,  comte  d'Etampes, 
les  sires  de  Laval,  de  Porhoet,  de  Châteaubriant,  de  Rieux.  Re- 
joint à  Angers  par  le  connétable,  il  se  dirigea  vers  l'abbaye  de 
Saint-Florent,  pour  voir  sa  belle-sœur,  la  duchesse  de  Guyenne, 
et  se  rendit  ensuite  à  Saumur,  auprès  du  roi,  qui  le  reçut  avec 
un  empressement  affectueux,  plutôt  comme  un  beau-frère  et  un 
allié  que  comme  un  vassal.  La  reine  de  Sicile  était  venue  aussi  à 
Saumur,  pour  assister  aux  conseils  qu'on  allait  tenir  *. 

Depuis  le  commencement  de  son  triste  règne,  Charles  VII 
n'avait  jamais  eu  une  cour  aussi  brillante.  Au  milieu  de  tous  ces 
grands  seigneurs,  que  son  connétable  avait  réunis  autour  de  lui, 
il  put  se  croire  véritablement  roi  ;  il  put  mesurer  toute  la  diffé- 
rence qu'il  y  avait  entre  Artur  de  Bretagne  et  les  favoris  dont  il 
était  maintenant  débarrassé.  D'ailleurs  lesdéhbérations  politiques 
ne  firent  point  oublier  les  fêtes  que  le  jeune  roi  aimait  tant.  Le 

1.  Berry,  373,  374.  Ce  chroniqueur  assista  au  conseil  où  fut  prise  cette 
résolution,  et  le  duc  le  chargea  même  d'écrire  au  roi. 

2.  Lat.,  6024  (Ms.  Baluze),  n"  18.  Gollect.  de  Bourgogne,  t.  99,  p.  227,  228. 
D'Argentré,  768.  Gruel,  191.  D.  Lobineau,  I,  566.  De  Beaucourt,  t.  II;,  p.  111 
et  note  5. 

3.  D.  Vaissète,  IV,  464.  Lat.  6024,  n»  18.  J  334,  nos  41.43, 

4.  Gruel,  191,  192. 


TRAITÉ  DE   SAUMUR   (1425,    7    OCT.)  dll 

3  octobre,le  duc  de  Bretagne  alla  chercher  la  duchesse  de  Guyenne, 
pour  la  conduire  au  château  de  Saumur,  où  elle  fut  accueillie 
avec  les  honneurs  dus  à  une  princesse  de  Bourgogne,  qui  avait 
été  la  femme  d'un  dauphin  de  France.  Le  lendemain,  le  roi,  avec 
toute  la  cour,  alla  rendre  visite  à  la  comtesse  de  Richemont,  qui 
donna  une  fête  magnifique  à  ses  hôtes  illustres  dans  l'abbaye  de 
Saint-Florent.  Les  jours  suivants  furent  consacrés  aux  affaires,  et, 
le  7  octobre,  fut  signé  un  traité  dont  l'importance  n'a  pas  assez 
frappé  les  historiens  de  notre  temps  *. 

Le  roi  promit  de  se  conduire  désormais  par  les  conseils  du 
duc  de  Bretagne  ;  de  se  confier  entièrement  à  lui  ;  de  lui  laisser 
l'administration  financière  des  pays  de  Languedoil  ;  de  s'unir 
avec  les  princes  du  sang  et  surtout  avec  le  duc  de  Bourgogne, 
à  qui  des  offres  satisfaisantes  seraient  faites  ;  d'observer  fidèle- 
ment les  articles  du  traité  préparé  par  la  reine  de  Sicile,  le  duc 
de  Savoie,  le  duc  de  Bretagne  et  approuvé  par  lui  à  Chinon  ; 
enfin  de  soutenir  le  duc  de  Bretagne  contre  les  Anglais  et  contre 
les  Penthièvre.  Les  comtes  de  Glermont,  de  Foix,  de  Vendôme, 
de  Comminges,  les  seigneurs  d'Albret  et  d'Orval  s'engagèrent, 
par  un  acte  particulier,  à  soutenir  aussi  le  duc  de  Bretagne 
contre  les  Anglais  et  contre  les  Penthièvre.  De  son  côté,  Jean  V 
jura  d'aider  le  roi  à  chasser  les  Anglais  dii  royaume  ^,  puis  il 
fît  hommage,  dans  la  forme  accoutumée,  pour  son  duché 
et  pour  les  terres  qu'il  tenait  en  France.  Tel  fut  le  traité  de 
Saumur^  (7  octobre  1425).  C'était  la  fin  de  la  révolution  de  palais 
inaugurée  par  l'éloignement  de  Louvet.  Le  roi  semblait  abdiquer 
toute  autorité  entre  les  mains  de  Jean  V  et  du  connétable'';  mais, 

1.  Michelet,  dans  son  récit  parfois  trop  rapide,  n'en  fait  pas  la  moindre 
mention;  M.  H.  Martin  semble  ne  l'avoir  pas  connu  (t.  VI,  p.  108  de  la 
4e  édit.);  de  Barante  ne  l'indique  pas  (édition  Furne,  1860,  III,  237-39); 
Yallet  de  V.  {Hist.  de  Ch.  VII,  I,  479)  en  parle  brièvement;  pourtant  D. 
Lobin^au  (I,  566,  67),  et  D.  Morice  (II,  1180-1181)  analysent  ce  traité,  dont 
ils   donnent  le  texte  dans  leurs  preuves;  Fontanieu   en  parle  dans  son 

^Histoire  manicscrite  de  Charles  VII  (Fr.  10449)  f"  142,  et  M.  du  Fresne  de 
Beaucourt  en  a  fait  pleinement  ressortir  l'importance  dans  le  t.  IX  de  la 
Revue  histor. 

2.  Fr.  2858,  f»  87. 

3.  L'original  signé  et  scellé  est  aux  Arch.  nat.,  J  244»,  n»  97.  Preuves 
de  Bret.,  II,  col.  1180,  1181. 

4.  Jean  V  se  fit  donner,  pour  un  temps,  le  produit  de  la  taxe  de  20  s.  t. 
par  pipe  de  vin  sortant  de  l'Anjou  et  du  Maine.  11  nomma  vérificateur  de 
cette  taxe  le  c.  de  Richemont,  qui  reçut  en  novembre,  500  1.  t.,  plus  200  1. 
pour  équiper  un  certain  nombre  d'archers  (Fr.  26048,  nos  490,  508,  509, 
528;  Append.  XXX,  XXXI).  Le  roi  voulait  ainsi  aider  Jean  V  à  supporter 
les  grandes  dépenses  qu'il  avait  à  faire  pour  résister  aux  Anglais,  qui 
menaçaient  la  Bretagne,  du  côté  du  Maine  et  de  la  Basse-Normandie 
(Fr.  23710,  n»  34).  On  voit  en  effet  que  cet  argent  fut  employé  à  subvenir 


112  ÉTATS  DE  POITIERS   (1425,  OCT.) 

dans  la  pratique,  était-il  possible  de  l'obliger  à  tenir  strictement 
ses  promesses?  Il  eût  fallu,  pour  cela,  le  soustraire  à  toute 
influence  corruptrice,  l'entourer  de  conseillers  moins  disposés  à 
flatter  ses  penchants  qu'à  travailler  au  bien  de  l'Etat.  Malheu- 
reusement, il  y  avait  encore  à  la  cour  de  «  mauvaise  semence 
que  le  président  y  avait  laissée  *  ».  Le  sire  de  Giac,  ami  de 
Louvet,  allait  bientôt  remplacer  celui-ci  dans  la  faveur  du  roi 
et  devenir  assez  fort  pour  faire  beaucoup  de  mal  ^. 

Pour  le  moment,  du  moins,  le  connétable  semblait  maître  de 
la  situation;  mais  il  assumait  ainsi  une  lourde  responsabilité, 
sans  avoir  grande  chance  de  réussir.  L'argent  manquait.  Depuis 
deux  mois,  les  troupes  qui  gardaient  les  places  du  Maine  et  de 
l'Anjou  n'avaient  pas  reçu  un  denier  et  menaçaient  d'aban- 
donner leurs  postes,  ce  qui  eût  amené  «  la  perdition  totale  de 
ces  pays  '  ». 

Après  avoir  reconduit  son  frère  jusqu'à  la  frontière  de  Bre- 
tagne, Richemont  se  hâta  de  revenir  auprès  du  roi,  à  Poitiers, 
où  se  réunissaient  les  Etats  de  Languedoil  *.  Ces  Etats  votè- 
rent un  subside  de  800  000  livres,  ressource  précieuse  dans  une 
pareille  détresse  s'il  eût  été  possible  de  lever  sans  retard  cette 
somme  tout  entière.  Malheureusement,  soit  gêne,  soit  mauvaise 
volonté,  les  populations  se  montraient  peu  empressées  à  payer 
l'impôt  et  répondaient  aux  réclamations  du  connétable  par  des 
demandes  de  délais  et  de  dégrèvements  ^. 

aux  dépenses  de  la  guerre  sur  les  frontières  de  Bretagne  (Fr.  26048, 
n'  490;  Fr.  26049,  n°^  562,  S72,  579). 

1.  Lettre  du  connét.  aux  Lyonnais,  du  3  août  li25.  Yoir  Append.,  XKVll. 

2.  Est-il  bien  certain  que,  dans  ces  conditions,  «  la  réalité  comme  la 
responsabilité  du  pouvoir  passent  aux  mains  du  connétable?  »  (De  Beau- 
court,  t.  II,  115.)  Dès  le  mois  de  novembre,  le  sire  de  Giac  parlait  déjà  bien 
haut.  {Idem,  p.  117;  Cousinot,  p.  237.)  Dans  les  instructions  que  Richemont 
donne  à  ses  envoyés  qui  vont  auprès  de  Philippe-le-Bon,  il  engage  celui-ci 
à  se  prononcer  sans  délai,  de  peur  que,  pour  trop  attendre,  il  ne  soit  lui- 
même  «  ruez  jus  ».  {Hist.  de  Bourgogne,  IV,  Ixij.) 

3.  Lettre  du  connét.  aux  Lyonnais,  du  15  octobre  {Append.,  XXXII). 

4.  Ces  États,  convoqués  pour  le  1"  octobre,  ne  se  réunirent  que  le  16. 
Le  roi  promit  de  faire  des  réformes;  il  révoqua  les  aliénations  du  do- 
maine et  les  dons  faits  par  lui  pendant  sa  régence  et  depuis  son  avène- 
ment (Déclaration  du  18  octobre  :  P  2298,  fos  473-477,  483-488).  Voir,  sur  ces 
États  de  Languedoil,  Fr.  26048,  n"  318;  Pièces  orig.,  t.  1320,  n-  34,  dos- 
sier Giac;  lettre  de  Richemont  du  24  octobre,  datée  de  Poitiers;  et  l'art, 
de  M.  A.  Thomas  dans  le  Cab.  hist.,  t.  24,  p.  160-162.  Voy.  Append.,  XXXIII. 
Les  États  de  Poitiers  votèrent  un  subside  de  800,000  1.,  dont  une  taille  de 
450  000 1.  payable  en  trois  termes.  Le  reste  devait  être  fourni  par  le  clergé 
(100  000  1.)  et  par  une  aide  d'un  onzième  pendant  un  an  sur  toutes  les 
marchandises  (de  Beaucourt,  t.  II,  585-588).  A  cette  même  époque  fut 
créée  une  cour  des  aides  (22  octobre)  qui  s'établit  à  Poitiers  {Id.,  p.  618). 

5.  Voy.  les  lettres  du  connét.  aux  Lyonnais.  De  Beaucourt,  t.  II,  p.  611-612. 


NOUVELLE  DONATION   DE  PARTHENAY   (142o)  113 

Il  ne  paraît  pas  que  Richemont  ait  pu  s'occuper  alors  de  la 
guerre  autant  qu'il  l'eût  fallu  ;  pourtant  on  voit  qu'il  donna 
ordre  d'approvisionner  Montargis  et  de  réparer  les  fortifications 
de  cette  place,  située  dans  un  pays  frontière,  tout  environné 
d'ennemis  *.  Cette  sage  prévoyance  eut  plus  tard  d'heureux 
résultats.  La  ville  de  Montargis  appartenait  alors  à  la  comtesse 
de  Richemont.  Charles  VII  la  lui  avait  donnée  pour  son  douaire, 
avec  Dun-en-Berry  *,  Gien-sur-Loire  et  Fontenay-le-Comte  en 
Poitou,  le  9  mars  1423,  à  la  requête  de  son  mari  '.  D'ailleurs 
Richemont  n'oubliait  pas  ses  propres  intérêts.  Par  lettres  du 
24  octobre  1423,  il  se  fît  donner  une  seconde  fois  les  domaines  de 
Jean  Larchevêque.  Ce  seigneur,  fort  avancé  en  âge,  approuva 
cette  donation  et  reconnut  comme  son  héritier  le  comte  de  Ri- 
chemont, qui  eut  alors  l'espoir  de  recueiUir  bientôt  une  riche  . 
succession  *. 

Le  connétable  ne  perdait  pas  de  vue  la  réorganisation  de 
l'armée.  Il  avait  ordonné  aux  capitaines  de  compagnie  de  venir 
le  retrouver  à  Chinon  vers  la  fin  d'octobre  ^,  mais  l'argent 
manquait  toujours.  Les  Etats  de  Languedoc,  qui  se  réunirent 
le  l"""  novembre  à  Mehun-sur-Yèvre ,  votèrent  une  aide  de 
250000  liv.  t.  et,  en  outre,  une  somme  de  12  000  livres  pour 
le  roi  ®. 

Ces  subsides  avaient  été  accordés  trop  tard  pour  que  le  con- 
nétable pût  arrêter  les  progrès  des  Anglais  dans  le  Maine,  où 
Salisbury  enleva  Sainte-Suzanne  et  Mayenne  (octobre).  Dans 
rile-de-France,  les  troupes  de  Charles  VII  prirent,  perdirent  et 
reprirent  Rochefort-en-Yveline  ^  En  Champagne,  Moynier  résis- 
tait toujours  aux  Anglais  ^.  Il  eût  fallu  envoyer  aussi  des  renforts 

1.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  II,  col.  1183. 

2.  Arrondissement  de  Saint-Amand-Montrond. 

3.  Le  roi  lui  donna  ces  biens  pour  son  douaire,  à  la  requête  du  conné- 
table, attendu  qu'il  «  a  tout  abandonné  ce  que,  tant  à  cause  de  luy  que 
de  nostre  dite  suer,  sa  femme,  il  povoit  avoir  autre  part  en  nostre 
royaume,  mêmement,  au  regart  des  pais  que  de  présent  occupent  les 
Anglois,  nos  anciens  ennemis,  etc.  »  C'est  évidemment  là  une  compensa- 
tion à  la  perte  du  duché  de  Touraine  et  du  comté  d'Ivry  (X'»  8604,  f«s  80 
V»,  81;  P  2298,  fo^  473-477;  Fr.  21405,  f"  91). 

4.  X'a  8604,  fo  125  v;  K  184,  liasse  1,  n»  21.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure, 
cass.  38,  E,  105.  B.  Ledain,  224,  Append.  XII. 

o.  Preuves  de  Phist.  de  Bretagne,  II,  1183. 

6.  Pièces  orig.,  t.  1320,  dossier  Giac,  nos  32,  33.  K,  62,  n»  33.  Fr.  21403, 
f"  91. 

7.  Arrondissement  de  Rambouillet. 

8.  Les  auteurs  modernes  ne  font  pas  mention  de  ce  siège  de  Moynier, 
qui  doit  être  important,  puisque  Bedford  lui-même  y  alla,  en  novembre 
(JJ  173,  f-  213  V;  Fr.  4491,  f"  35  V;  le  Bourg,  de  Paris,  212;  Cousi- 
not,  200). 

Richemont.  8 


114  RICHEMONT   SOLLICITE   PHILIPPE-LE-BON 

dans  rile-de-France  et  en  Champagne.  Le  comte  de  Foix,  qui 
était  alors  auprès  de  Charles  VII,  donna  l'ordre  de  réunir  des 
gens  d'armes  dans  le  Languedoc  et  la  Guyenne,  dont  il  avait  le 
gouvernement  *,  et  le  duc  de  Bretagne,  pour  exécuter  le  traité  de 
Saumur,  fit  des  préparatifs  militaires.  Bedford  aurait  sans  doute 
mieux  profité  du  désarroi  où  étaient  les  Français,  s'il  n'avait  été 
obligé  d'aller  en  Angleterre,  pour  apaiser  une  querelle  entre  le 
duc  de  Glocester  et  l'évèque  de  Winchester  ^,  son  oncle. 

Il  laissa  la  conduite  de  la  guerre  à  des  lieutenants  dignes  de 
le  remplacer,  le  comte  de  Warwick  ^  dans  l'Ile-de-France,  le 
Vermandois,  le  Gâtinais,  la  Champagne  et  la  Brie  ;  le  comte  de 
Salisbury,  dans  la  Normandie,  l'Anjou,  le  Maine,  le  Vendomois, 
le  pays  Chartrain  et  la  Beauce  ;  et  le  comte  de  Suffolk,  dans  la 
basse  marche  de  Normandie.  D'autre  part,  il  avait  apaisé  le  duc 
de  Bourgogne,  en  faisant  conclure  une  trêve  entre  lui  et  Glocester, 
qui  était  retourné  en  Angleterre,  sans  emmener  Jacqueline  de 
Hainaut,  et  il  avait  su  flatter  l'orgueilleux  Philippe,  en  déclarant 
qu'il  serait  le  chef  du  grand  conseil,  quand  il  lui  plairait  d'y 
assister  *. 

Il  devenait  bien  plus  difficile  pour  le  connétable  d'amener  le  duc 
de  Bourgogne  à  conclure  la  paix  avec  Charles  VII  ;  néanmoins  il 
ne  se  découragea  pas.  Dès  le  commencement  d'août,  il  avait  an- 
noncé au  duc  de  Savoie  sa  réconciliation  avec  le  roi,  puis  Nicolas 
Brifl'aut,  secrétaire  et  trésorier  de  la  duchesse  de  Guyenne  ^, 
avait  été  envoyé  par  Jean  V  et  par  le  connétable  vers  le  duc  de 
Bourgogne,  pour  lui  dire  que  Charles  VII  n'avait  plus  auprès  de 
lui  ces  mauvais  conseillers  dont  la  présence  avait  empêché  trop 
longtemps  une  réconciliation  si  désirable.  Après  l'entrevue  de 
Saumur,  le  duc  de  Bretagne  chargea  Simon  Deloye  et  Philibert 
de  Vaudrey  d'aller  informer  Philippe-le-Bon  des  arrangements 
qui  venaient  d'être  conclus  et  du  sincère  désir  qu'avait  le  roi  de 
faire  la  paix  avec  lui.  Ne  fallait-il  pas  considérer  la  grande 
jeunesse  du  Dauphin  à  l'époque  du  crime  de  Montereau,  les 


1.  K  62,  nos  20  et  22.  Fr.  26048,  n»  510.  Charles  VII  lui  donna  le  comté 
de  Bigorre,  la  châtellenie  de  Lourdes  et  la  vicomte  de  Lautrec,  le  18  no- 
vembre (J  334,  nos  u,  44*,  45,  46). 

2.  Henri  Beaufort,  frère  de  Henri  IV,  cardinal  eu  1427. 

3.  Richard  Beauchamp,  c.  de  Warwick. 

4.  X»"  8603,  f»  90.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  100,  101.  Collect.  de  Bourgogne, 
t.  99,  p.  224-228. 

5.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  preuves  Ivi-lvij.  Collect.  de  Bourg.,  t.  99,  p.  227. 
Le  28  décembre,  Jean  V  ordonne  de  payer  à  Nie.  Briffaut  150  1.  t.  à  valoir 
sur  «  plus  grande  somme  de  chevance  que  nous  lui  devons,  pour  certaines 
causes  que  ne  voulons  estre  exprimées  en  ces  présentes.  »  (Fr.  26048, 
a»  530.) 


RICHEMONT   SOLLICITE   PHILIPPE-LE-BON  115 

mauvais  conseils  auxquels  son  caractère  si  faible  ne  savait 
pas  résister  et  la  perversité  de  ces  hommes  qui  l'excitaient 
contre  ses  proches  *,  sans  même  épargner  sa  propre  mère?  Ainsi 
qu'il  avait  été  convenu  par  le  traité  de  Saumur,  le  duc  de  Bre- 
tagne envoya  des  députés  en  Angleterre  porter  des  propositions 
de  paix,  et  il  pria  même  le  duc  d'Orléans  de  négocier  un  arran- 
gement. Les  exigences  de  Bedford  rendirent  toute  négociation 
impossible.  Il  voulait  que  Henri  VI  fût  reconnu  préalablement 
comme  roi  de  France.  Jean  V  renouvela  plusieurs  fois  ses  pro- 
positions, sans  aucun  succès.  Il  ne  tarda  pas  à  voir  que  son 
alliance  avec  Charles  VII  avait  fort  irrité  le  gouvernement  an- 
glais et  qu'il  allait  être  lui-même  traité  en  ennemi.  C'était  une 
raison  de  plus  pour  insister  auprès  de  Philippe-le-Bon.  Il  le 
pria  instamment  de  ne  point  l'abandonner  au  milieu  du  péril 
et  de  signifier  aux  Anglais  qu'il  défendrait  le  duc  de  Bretagne, 
son  alUé,  contre  quiconque  l'attaquerait  '. 

De  son  côté,  Richemont  ne  cessait  de  solliciter  le  duc  de  Bour- 
gogne. Il  écrivait  aussi  aux  seigneurs  de  son  conseil.  Il  lui  répé- 
tait que  ceux  qui  pouvaient  lui  déplaire,  dans  l'entourage  de 
Charles,  avaient  été  chassés,  que,  s'il  y  en  avait  d'autres,  il  était 
prêt  à  les  «  jeter  hors  »  ;  qu'il  tenait  maintenant  le  Dauphin 
entre  ses  mains  ;  qu'il  était  prêt  à  faire  tout  ce  que  lui  comman- 
derait Phihppe-le-Bon,  mais  qu'il  ne  pouvait  réussir  sans  son 
aide  et  qu'il  fallait  battre  le  fer  pendant  qu'il  était  chaud  ^.  Le 
duc  avait  promis  au  connétable  de  lui  donner  une  réponse  dont  il 
serait  satisfait,  quand  il  aurait  chassé  les  favoris  de  Charles  VII. 
Richemont  eut  beau  lui  rappeler  cette  promesse,  Philippe  ne  se 
hâta  pas  d'en  tenir  compte.  Bien  qu'il  eût  encore  à  combattre 
les  troupes  de  Glocester  en  Hollande,  il  n'était  pas  décidé  à 
rompre  avec  les  Anglais.  Il  laissa  seulement  le  duc  de  Savoie 
prolonger,  le  2  décembre,  jusqu'à  la  Chandeleur,  la  trêve  con- 
clue, à  la  fin  du  mois  de  janvier  précédent,  entre  la  France  et  la 
Bourgogne.  Elle  fut  prolongée  à  trois  reprises  en  1426.  A  la  fin 
de  1425,  Alain  Chartier,  secrétaire  du  roi,  et  G.  de  La  Trémoille 
furent  encore  envoyés  auprès  de  Philippe-le-Bon,  qu'ils  rejoi- 
gnirent à  Bruges  au  mois  d'avril  *. 

1.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  995.  Hist.  de  Bourgogne,  IV, 
p.  Ivi-lvij. 

2.  Preuves  de  D.  Morice,  II,  col.  1183-1186.  D.  Plancher,  IV,  preuves, 
liij-lv  (Instructions  du  23  décembre  1425). 

3.  Voy.  les  instructions  données  par  Richemont  à  ses  envoyés  {Hist.  de 
Bourgogne,  YV,  Ixij-lxiij).  C'est  un  document  sans  date  et  dont  l'orthographe 
semble  bien  fautive.  Il  est  à  remarquer  que  le  mot  dauphin  est  toujours 
employé  au  lieu  de  roi. 

4.  Fr.  26048,  n»  541.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  preuves,  liij,  lis,  Ix.  De 


116  PRÉPARATIFS  EN  BRETAGNE  (1426) 

Richemont  ne  perdait  pas  de  vue  les  autres  intérêts  de 
Charles  VIL  II  encourageait  les  partisans  de  ce  prince  à  lui 
conserver,  sous  la  domination  étrangère,  un  attachement  iné- 
branlable; il  excitait,  comme  une  flamme  précieuse,  ce  senti- 
ment national  qui  animait  déjà  bien  des  cœurs  et  qui  devait 
tant  contribuer  au  salut  de  la  France.  Le  14  décembre  1425,  le 
roi  mandait  au  connétable  d'observer  et  de  faire  observer  des 
lettres  de  rémission  qu'il  accordait  aux  habitants  de  Rouen,  en 
considération  du  courage  avec  lequel  ils  avaient  défendu  leur 
ville  en  1*418  contre  Henri  V  et  parce  que  «  leurs  cuers  et  affec- 
tions sont  et  demeurent  en  leur  vraye  et  persévérante  loyauté  » 
envers  lui  «  qu'ilz  cognoissent  estre  leur  naturel  et  souverain 
seigneur  »  *.  C'était  l'époque  où  le  duc  d'Alençon  refusait  noble- 
ment la  liberté  que  lui  proposait  Bedford  et  préférait  une  capti- 
vité glorieuse  à  l'humiliation  de  reconnaître  Henri  VI  comme  roi 
de  France.  Le  comte  de  Richemont  n'avait  pas  montré  cette  fîère 
attitude,  mais  il  travaillait  du  moins  à  faire  oublier  sa  conduite 
passée.  Il  avait  hâte  de  commencer  lui-même  la  guerre  contre  les 
Anglais.  11  se  rendit  en  Bretagne  auprès  de  son  frère,  le  duc, 
qui  rassemblait  alors  une  armée  pour  attaquer  les  frontières  de 
la  Normandie  ^  (janvier  1426).  Une  campagne  heureuse  de  ce 
côté  pouvait  déterminer  une  révolte  dans  cette  province,  encore 
française  de  cœur,  et  délivrer  le  Maine,  dont  les  ennemis  pour- 
suivaient la  conquête  '.  Le  connétable  voulait  signaler  ses  dé- 


Beaucourt,  t.  II,  373  et  note  1.  On  lit  dans  des  instructions  données,  le 
2o  mars  1426,  à  des  ambassadeurs  envoyés  en  Castille  par  Charles  VII,  que 
le  roi  est  tout  disposé  à  faire  la  paix  avec  le  duc  de  Bourgogne,  et  que 
les  ducs  de  Bretagne  et  de  Savoie  s'y  emploient,  «  qui  sont  très  conve- 
nables moyens  de  la  y  mectre,  attendu  l'alliance  qu'ils  ont  au  roy  et  au 
duc  de  Bourgogne;  que  tout  le  peuple,  tant  d'un  côté  que  d'autre,  est 
très  enclin  à  ce,  »  etc.  (Lat.  6024,  n»  18.)  Il  n'est  pas  possible  que  Riche- 
mont soit  allé  à  Montluel  à  la  fin  de  1425  ou  en  janvier  1426,  comme  le 
croit  M.  de  Beaucourt  {Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  372).  S'il  y  alla,  ce  fut 
en  janvier  1427.  Quant  à  G.  de  La  Trémoille,  il  fut  arrêté  le  30  décembre 
1423,  puis  remis  en  liberté,  moyennant  rançon,  par  Perrinet  Grasset,  qui 
gardait,  malgré  le  duc  de  Bourgogne,  et  d'accord  avec  les  Anglais,  la  ville 
de  La  Charité-sur-Loire  {Hist.  de  Bourgogne,  IV,  119,  et  preuves,  Ix-lxj  ;  de 
Beaucourt,  t.  II,  373-375;  Consaux  de  Tournai,  p.  191,  194,  196,  203,  204; 
JJ  177,  fo  159). 

1.  Fr.  2861,  fos  219  v»  222. 

2.  Le  27  décembre,  le  connétable  était  encore,  avec  le  roi,  à  Mehun-sur- 
Yèvre,  où  s'étaient  réunis  les  États  de  Languedoc,  qui  avaient  voté,  en 
novembre,  250  000  1.  t.  Il  assistait,  le  27  décembre,  à  la  réconciliation  du 
sire  d'Arpajon  et  du  maréchal  de  Sévérac  (Vallet  de  V.,  I,  451).  11  était  à 
Malestroit  (arrondissement  de  Ploërmel),  avec  Jean  V,  le  14  janvier  1426 
(Fr.  26048,  n»  534). 

3.  Ils  assiégeaient  La  Ferté-Bernard,  c.  L  de  c.  de  l'arrondissement  de 


I,ES   AISGL4IS  ATTAQUENT  LA   BRETAGNE  117 

buts  par  des  succès  éclatants  ;  il  en  avait  besoin  pour  justifier 
les  espérances  qu'on  avait  mises  en  lui,  pour  accroître  son 
autorité  à  la  cour  et  enfin  pour  agir  plus  efficacement  sur  le 
duc  de  Bourgogne.  Il  communiquait  son  ardeur  à  l'entourage 
du  roi.  On  voulait  réunir  des  forces  considérables,  et  Yolande 
rappelait  d'Italie  son  fils  Louis  d'Anjou,  afin  qu'il  vînt  lui- 
même  défendre  ses  domaines  *.  Jean  V  avait  convoqué  le  ban 
et  l'arrière-ban  de  Bretagne  pour  la  défense  du  pays.  Malheu- 
reusement son  armée,  composée,  en  grande  partie,  de  recrues 
peu  exercées,  mal  disciplinées,  était  bien  inférieure  aux  troupes 
anglaises,  aguerries  par  de  longues  campagnes  2. 

Les  hostilités  avaient  commencé  dès  la  fin  de  l'année  1425. 
Olivier  de  Mauny  et  le  sire  de  Goetquen  avaient  échoué  dans 
une  attaque  sur  le  Parc-de-l'Evêque,  place  qui  appartenait  à 
l'évêque  d'Avranches.  Douze  cents  Anglais,  sous  le  commande- 
ment de  Suffolk  et  de  Thomas  Rampston,  avaient  ravagé  la  Bre- 
tagne jusqu'aux  portes  de  Rennes  et  étaient  revenus  chargés  de 
butin  en  Normandie,  puis  Rampston  avait  fait  réparer  le  châ- 
teau de  Saint-James-de-Beuvron  '  et  s'y  était  établi  fortement  ''. 
Les  Anglais  avaient  aussi  pris  Pontorson.  Il  fallait  d'abord  les 
chasser  de  ces  positions,  d'où  ils  menaçaient  de  trop  près  la 
Bretagne  °. 

Laissant  Jean  V  à  Rennes,  Richement  alla  prendre  le  com- 
mandement de  l'armée  bretonne,  qu'il  réunit  à  Antrain  ^.  Du 
Maine,  de  l'Ile-de-France  et  même  de  la  Normandie,  d'autres 
combattants  étaient  venus,  à  son  appel,  se  joindre  à  lui,  dans 
l'espoir  de  faire  une  belle  campagne  contre  les  Anglais.  Richard, 
comte  d'Etampes,  avait  suivi  son  frère  Artur,  avec  le  sire  de 


Mamers  (Cousiaot,  230.  Fr.  4491,  f°  26  v).  Danois  était  alors  à  Chartres 
avec  des  troupes  (Fr.  26048,  n»  .540). 

1.  Bib.  de  l'Éc.  des  Chartes,  111,  2»  série,  p.  141.  Pièces  orig.,  t.  699,  au 
mot  Châteauneuf.  «  Comme  pour  résister  à  nos  ennemis  et  autres  rebelles 
et  désobéissans,  soyons  délibérez  nous  mettre  sus,  ceste  saison  nouvelle, 
à  grant  puissance...  »  (18  février  1426).  Le  roi  était  alors  à  Issoudun.  Sur 
Louis  III  d'Anjou  voy.  Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  4,  E,  10.  Fr.  20417,  n"  3. 

2.  «  Et  fut  faite  une  grande  armée  par  le  connestable  au  pays  de  Bre- 
taigoe.  Aucuns  disoient  qu'icelle  compagnée  estoit  pour  la  pluspart  de 
gens  qui  oncques  mais  n'avoient  esté  en  guerre.  »  (Cousinot  de  M., 
p.  240  et  241.) 

3.  Arrondissement  d'Avranches. 

4.  C'est  l'époque  où  auraient  été  écrites  les  lettres  attribuées  à  Suffolk. 
La  première  est  datée  du  7  février,  l'autre  du  13  (voy.  Desplanque,  pièces  IV 
et  V,  p.  63,  64).  Il  y  est  question  de  l'armée  bretonne,  de  «  la  fortifica- 
cion  »  de  Saint-James  et  du  siège  imminent  de  cette  place. 

5.  Cousinot,  233.  Monstrelet,  IV,  284.  D'Argentré,  769.  Fr.  10449,  ^•  143-144. 

6.  Arrondissement  de  Fougères. 


118  SIÈGE  DE   SAINT-JAMES-DE-BEUVRON   (1426) 

Porhoet  et  beaucoup  d'autres  seigneurs.  Le  connétable  s'em- 
para d'abord  de  Pontorson.  En  représailles  des  ravages  qu'ils 
avaient  exercés,  tous  les  Anglais  qui  se  trouvaient  dans  cette 
place  furent  mis  à  mort  (février  1426).  Les  murailles  furent 
abattues  ^ 

L'armée  bretonne  marcha  aussitôt  sur  Saint-James-de-Beuvron 
dont  le  siège  présentait  de  bien  plus  grandes  difficultés.  Cette 
place,  située  tout  près  de  la  Bretagne  et  du  Mont-Saint-Michel, 
était  un  poste  très  utile  pour  les  Anglais,  qui  l'avaient  solidement 
réparée  et  munie  de  tous  les  moyens  de  défense.  Suffolk  y  avait 
mis  une  bonne  garnison,  avec  des  officiers  habiles,  ïh.  Ramp- 
ston,  Phihppe  Branch,  Nicolas  Burdet;  et  lui-même  réunissait 
un  corps  de  troupes  assez  considérable  dans  Avranches,  afin  de 
pouvoir  secourir  Saint-James-de-Beuvron  *. 

Richemont  avait  hâte  d'agir  ;  tout  relard  diminuait  ses 
chances  de  succès.  A  son  approche,  les  Anglais  de  la  garnison 
s'avancèrent  pour  reconnaître  ses  forces  et  pour  essayer  de  l'ar- 
rêter ;  mais  un  vif  combat  les  refoula  dans  la  place,  qui  fut 
bientôt  investie  de  toutes  parts  et  battue  par  l'artillerie.  Re- 
poussés dans  plusieurs  sorties,  après  de  rudes  escarmouches, 
les  assiégés  auraient  été  réduits  à  capituler,  malgré  leur  cou- 
rage, si  l'investissement  avait  été  maintenu  assez  longtemps, 
mais  Richemont  se  trouvait  dans  une  situation  fort  embarras- 
sante. L'argent  lui  manquait ,  soit  qu'on  n'en  eût  pas  à  lui 
donner,  soit  qu'on  en  différât  l'envoi,  dans  l'intention  de  lui 
nuire;  ses  troupes  mécontentes  avaient  commencé  à  déserter 
dès  le  début  du  siège  ;  on  craignait  l'arrivée  de  Sulfolk  ^  ;  il 
fallait  prendre  un  parti.  Depuis  une  semaine  que  le  siège  durait, 
le  canon  avait  pratiqué  assez  de  brèches  pour  que  l'assaut  fût 
possible.  Avec  des  troupes  aussi  peu  solides,  l'entreprise  était 
hasardeuse;  mais  valait-il  mieux  se  laisser  attaquer  par  Salis- 
bury  et  par  Suffolk?  Toutes  les  éventualités  furent  longuement 


1.  Cousinot,  237,  240.  Le  Baud,  469.  Fr.  10449,  f»  144.  Gruel,  192.  J.  Stuart 
d'Aubigny,  J.Girard,  J.  Ouschard,  etc.,  étaient  avec  le  connétable  (Fr.  20684, 
f»  48  vo). 

2.  11  n'est  guère  possible  de  donner  le  chiffre  exact  de  la  garnison  de 
Saint-James,  des  autres  troupes  de  Suffolk  et  de  l'armée  de  Richemont, 
avcc'les  seules  indications  que  fournissent  les  chroniqueurs.  A  les  en 
croire,  la  garnison  comptait  environ  700  hommes,  la  petite  armée  de 
Suffolk  environ  1500  et  celle  de  Richemont  13  à  16  000  hommes.  Grafton 
va  jusqu'à  40  000  hommes! 

3.  L'attaque  de  Saint-James  avait  beaucoup  inquiété  les  Anglais.  Le 
comte  de  Salisbury,  qui  assiégeait  alors  La  Ferté-Bernard,  voulut  même 
laisser  une  partie  de  ses  troupes  devant  cette  place  et  marcher  au  secours 
de  Saint-James.  Voy.  Append.,  XXXIV. 


DÉROUTE   DE   SAINT-JAMES-DE-BEUVRON    (1426,    6   MARS)  119 

discutées  dans  un  conseil  de  guerre,  et  on  résolut  d'assaillir  la 
place.  Près  des  murs,  il  y  avait  un  étang  et  un  boulevard  qui 
séparaient  en  deux  l'armée  assiégeante.  D'un  côté  se  trouvaient 
les  Bas-Bretons,  de  l'autre  les  troupes  dirigées  par  le  connétable 
en  personne.  Le  boulevard,  bien  défendu  par  Nicolas  Burdet, 
communiquait  avec  la  ville  par  une  poterne. 

Le  6  mars,  l'attaque  commença  sur  les  deux  points  où  les 
brèches  rendaient  l'assaut  moins  difficile.  Les  assiégés,  encou- 
ragés par  l'espoir  d'être  bientôt  secourus,  se  multipliaient  pour 
repousser  les  assaillants.  On  combattait  depuis  trois  ou  quatre 
heures  avec  un  égal  acharnement,  quand,  du  haut  de  leurs  rem- 
parts, les  Anglais  aperçurent  les  premiers^  dans  le  lointain,  un 
corps  de  troupes  qui  s'avançait.  Croyant  que  c'étaient  leurs  com- 
patriotes qui  arrivaient  à  leur  secours,  ils  sortent  par  la  poterne 
voisine  de  l'étang,  se  joignent  à  Nie.  Burdet  et  tombent  avec 
impétuosité  sur  les  Bas-Bretons,  en  criant  :  Salisbury  et  Suf- 
folk!  Attaqués  ainsi  par  derrière,  déconcertés  par  ces  cris, 
«ffrayés  par  l'approche  de  ces  autres  soldats,  qu'ils  aperçoivent 
et  qu'ils  prennent  pour  les  Anglais  de  Suffolk,  les  Bas-Bretons 
quittent  précipitamment  les  fossés  et  fuient  en  désordre  vers 
leur  camp.  Les  Anglais,  profitant  de  cette  panique,  les  criblent 
de  traits,  les  poursuivent  à  grands  coups,  les  précipitent  dans 
l'étang  et  les  massacrent  ou  les  noient.  Les  Bretons  perdent  là 
environ  600  hommes,  50  prisonniers,  18  étendards  et  une  ban- 
nière. 

De  l'autre  côté  de  la  ville,  le  connétable,  ignorant  ce  désastre, 
«continuait  l'assaut,  quand  on  lui  apporte  la  nouvelle  de  la  dé- 
route. Les  troupes  dont  l'arrivée  fortuite  avait  tant  contribué  à 
ce  malheureux  résultat  étaient  celles  qu'il  avait  envoyées  dans 
la  direction  d'Avranches,  pour  observer  les  Anglais  et  qui  reve- 
naient sans  avoir  rien  vu  d'alarmant.  Alors  le  connétable,  com- 
prenant qu'il  est  inutile  de  prolonger  la  lutte,  n'a  plus  qu'à 
faire  sonner  la  retraite  et  à  rallier  les  fuyards,  qui,  après  avoir 
abandonné  leur  camp,  viennent  chercher  dans  le  sien  un  refuge 
■contre  leur  propre  terreur.  Tout  n'était  pas  encore  perdu,  car 
les  Anglais,  malgré  leur  victoire,  étaient  fort  affaiblis,  blessés 
pour  la  plupart;  mais  que  pouvait  faire  le  connétable  avec  ses 
troupes  démoralisées?  Pendant  la  nuit,  nouvelle  panique.  Au 
milieu  d'un  désordre  inexplicable,  chacun  s'enfuit  par  les  che- 
mins qu'il  connaît.  Le  feu  est  mis  aux  tentes,  et  on  vient  avertir 
le  connétable  et  son  frère  qu'ils  vont  être  brûlés  s'ils  ne  se  reti- 
rent promptement.  A  la  lueur  des  flammes  qui  dévorent  le  camp, 
Richemont  voit  ses  gens  se  sauver  de  toutes  parts.  Il  s'élance 
À  cheval,  suivi  de  ses  frères,  au  milieu  de  la  cohue  tumul- 


120  ntCIlEMONT   ACCUSE   J.    DE   MALESTROIT 

tueuse,  pour  arrêter  cette  fuite  insensée;  nul  ne  veut  l'écouter; 
nul  ne  s'arrête.  Ses  reproches,  ses  exhortations,  ses  ordres,  ses 
menaces,  se  perdent  au  milieu  du  bruit;  il  est  renversé  à  terre, 
et  c'est  à  grand'peine  qu'on  empêche  qu'il  soit  foulé  aux  pieds. 
Vainement  il  veut  retourner  au  camp,  pour  emmener  au  moins 
son  artillerie.  Il  est  abandonné  de  tous  et  obligé  de  suivre,  dans 
un  morne  désespoir,  la  déroute  qui  l'enti-aîne.  Ainsi  son  armée 
fuyait,  vaincue  par  un  ennemi  vingt  fois  moins  nombreux  ;  ainsi 
se  terminait,  par  l'échec  le  plus  lamentable,  une  expédition  dans 
laquelle  il  avait  mis  toutes  ses  espérances.  Au  point  du  jour,  les 
fuyards  atteignirent  Antrain.  Là  ils  se  rallièrent  pour  se  diriger 
sur  Rennes,  où  était  le  duo  de  Bretagne.  Il  garda  seulement  une 
partie  de  ces  troupes  pour  garnir  la  frontière,  et  il  congédia  le 
reste  *. 

On  ne  connaît  pas  assez  les  détails  de  cette  malheureuse  af- 
faire pour  être  en  mesure  d'affirmer  que  toute  la  responsabilité 
doit  retomber  sur  le  connétable;  mais  il  ne  semble  pas  qu'il  ait 
montré  dans  cette  entreprise  toutes  les  qualités  d'un  bon  géné- 
ral 2.  Quoi  qu'il  en  soit,  ce  fut  un  grand  malheur  pour  lui  et 
aussi  pour  la  France.  Son  autorité,  déjà  fort  précaire  à  la  cour, 
en  fut  gravement  compromise.  Gomment  croire  désormais  à  ses 
talents  militaires?  Quelle  confiance  pouvait-il  inspirer  au  roi, 
au  duc  de  Bourgogne,  au  duc  de  Bretagne,  à  tous  ceux  qui 
avaient  compté  sur  lui  et  qui  l'auraient  secondé  avec  plus  d'em- 
pressement, s'il  avait  réussi  dans  ses  premières  tentatives? 
Désormais  ses  projets,  ses  efforts  allaient  être  entravés  pour 
longtemps,  et  il  lui  fallut  toute  sa  ténacité  bretonne  pour  persé- 
vérer dans  la  tâche  ingrate  qu'il  avait  entreprise. 

Il  voulut  d'abord  châtier  ceux  qu'il  considérait  comme  ses  en- 
nemis et  comme  les  auteurs  de  son  échec.  Le  principal  était 
Jean  de  Malestroit,  chancelier  de  Bretagne.  Richemont  l'accusait 
de  s'être  vendu  aux  Anglais  et  d'avoir  causé  la  déroute  de  Saint- 
James,  soit  en  n'envoyant  pas  l'argent  nécessaire  au  payement 
des  troupes,  soit  en  machinant  d'autres  trahisons  ^.  Avant  de  re- 
venir auprès  du  roi,  vers  les  fêtes  de  Pâques,  le  connétable  passa 
par  Nantes,  fît  enlever  le  chancelier  dans  sa  maison  de  la  Tou- 


1.  Gruel,  192.  Cousinot,  199  et  239.  Monstrelet,  IV,  p.  284.  D.  Morice, 
Pr.,  II,  col.  1188,  ou  D.  Lobineau,  II,  col.  1005.  Fr.  26048,  n"  531.  Fr.  26049, 
n»»  So3,  554,  557,  559,  562.  Grafton,  1,  561,  562.  Polydore  Vergil,  édit. 
Hellis,  p.  12. 

2.  C'est  ce  qui  paraît  résulter  du  récit  de  B.  d'Argentré.  Or  cet  auteur 
n'est  pas  défavorable  à  Richemont. 

3.  Gruel,  192.  Nicole  Gilles,  Les  cronicques  et  annalles  de  France,  édition 
de  1520,  2«  vol.,  f»  75.  Le  Bourg,  de  P.,  207,  208. 


JEAN   V   SIGNE   UNE  TRÊVE  AVEC   SUFFOLK  121 

che  et  le  conduisit  à  Chinon,  où  il  le  retint  prisonnier.  Quand  il 
parut  devant  Charles  VII,  pour  rendre  compte  de  sa  désastreuse 
expédition,  il  se  plaignit  vivement  d'avoir  été  trahi,  mais  sans 
pouvoir  produire  des  preuves  convaincantes  '. 

Voulait-il  se  disculper  à  tout  prix,  même  aux  dépens  d'un  inno- 
cent?Une  pareille  conduite  eût  été  criminelle  et  odieuse  ;  mais  rien 
n'autorise  cette  supposition.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  le  conné- 
table avait  des  ennemis  plus  disposés  à  profiter  de  ses  embarras, 
pour  précipiter  sa  disgrâce,  qu'à  lui  faciliter  les  moyens  de  dé- 
gager sa  responsabilité.  D'ailleurs  le  biographe  d'Artur  de  Bre- 
tagne n'est  pas  seul  à  reproduire  les  bruits  de  trahison;  on  en 
retrouve  l'écho  jusque  dans  le  journal  du  Bourgois  de  Paris,  qui 
ne  saurait  être  suspect  de  partialité  pour  Richemont.  En  tout 
cas,  J.  de  Malestroit,  grâce  aux  amis  qu'il  avait  à  la  cour,  obtint 
sa  délivrance.  Afin  de  montrer  qu'il  n'était  point  d'accord  avec 
les  Anglais,  il  u  promit  de  faire  merveilles  »  pour  réconcilier  le 
duc  de  Bourgogne  avec  Charles  VII.  Richemont  relâcha  enfin 
le  chancelier,  qui  retourna  en  Bretagne,  d'où  il  se  rendit  plus 
tard  auprès  du  roi,  de  Philippe-le-Bon  et  d'Amédée  VIII. Il  resta 
néanmoins  un  ennemi  dangereux  pour  Richemont,  qui,  de  son 
côté,  s'efforça  de  lui  nuire  2. 

Deux  jours  après  la  déroute  de  l'armée  bretonne,  le  comte  de 
Suffolk  était  arrivé,  avec  1  500  combattants,  devant  Saint-James- 
de-Beuvron.  Ne  trouvant  aucune  résistance,  il  s'était  avancé,  en 
ravageant  le  pays,  jusqu'à  Dol  ',  avec  l'intention  de  s'y  établir. 
Si  cette  démonstration  avait  pour  but  d'effrayer  Jean  V,  elle  eut 
un  plein  succès.  Il  craignait  aussi  de  voir  les  Anglais  soutenir 
contre  lui  les  Penthièvre.  Il  savait  que  Jean  et  Olivier  de  Blois 
étaient  en  Angleterre  auprès  de  Bedford  et  qu'ils  n'avaient  point 
abandonné  leurs  prétentions  sur  la  Bretagne.  Jean  V  demanda 
une  trêve  de  trois  mois;  Suffolk  la  lui  accorda  moyennant 
4500  francs  et  revint,  chargé  de  butin,  à  Saint- James-de-Beu- 
vron  ''.  C'était  là  un  nouvel  échec  pour  Richemont.  Son  impuis- 
sance en  devenait  plus  manifeste,  mais  du  moins  cette  trêve  lui 
laissait  quelque  répit.  Il  redoubla  d'efforts  pour  faire  face  à  tous 

1.  «  Rien  n'en  vint  à  notice,  •  dit  Le  Baud,  p.  470. 

2.  Les  auteurs  sont  très  partagés  sur  cette  question  de  la  culpabilité 
du  chancelier  de  Bretagne.  Gruel  (p.  192),  Cousinot  (p.  199),  M.  de  Beau- 
court,  Vallet  de  V.  l'accusent  formellement;  D.  Morice,  Fontanieu  (Ms. 
fr.  10449,  f°  144  v")  et  D.  Lobineau  disent  qu'il  prouva  son  innocence.  D'Ar- 
gentré  et  Le  Baud  ne  se  prononcent  pas.  Il  est  probable  qu'il  n'y  a  pas  de 
preuves.  Voir  l'article  de  M.  de  Beaucourt  dans  la  Revue  des  questions  his- 
tor.,  t.  IX,  année  1870,  p.  396,  et  son  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  p.  24. 

3.  Arrondissement  de  Saint-Malo. 

4.  .Monstrelet,  IV,  386,  387.  D.  Lobineau,  I,  568. 


122  ETATS    DE    MONTLUÇON    ET   DE    SAUMUR    (1426) 

les  besoins.  Des  ambassadeurs  allèrent  en  Castille,  demander  au 
roi  Jean  II,  le  premier  «  et  le  plus  principal  »  allié  de  Char- 
les VII,  un  secours  de  2  000  hommes  d'armes  ou,  tout  au  moins, 
de  5  à  600  hommes  d'abord,  soudoyés  pour  six  mois  ^  Une  nou- 
velle assemblée  des  Etats,  convoquée  à  Angers  pour  le  samedi 
13  avril,  se  tint  à  Montluçon  ^  ;  une  autre  eut  lieu  à  Saumur ',  où 
se  rendit  le  connétable  (1"  mai)  ;  des  troupes  furent  réunies  à 
Sablé,  à  Craon  *,  pour  défendre  le  Maine,  l'Anjou  et  la  Bretagne. 
Le  12  juin,  sur  l'avis  de  la  reine  de  Sicile,  des  comtes  de  Cler- 
mont,  de  Richemont  et  de  Foix,  Charles  VII  révoqua  certains 
dons,  afin  de  pourvoir  aux  frais  de  la  guerre,  sans  grever  autant 
le  peuple,  qui  ne  pouvait  suffire  au  payement  des  impôts.  Mal- 
heureusement, ces  bonnes  résolutions  duraient  peu.  Les  courti- 
sans continuaient  d'exploiter  la  libéralité  du  roi  et  détournaient 
à  leur  profit  les  deniers  publics  ^. 

Il  y  avait  bien  d'autres  désordres,  que  le  connétable  ne  pou- 
vait empêcher.  Les  routiers  ravageaient  les  provinces  épargnées 
par  l'ennemi,  rançonnaient  les  campagnes  et  les  villes.  C'est 
ainsi  qu'au  mois  de  mai  1426  les  Etats  de  la  Marche  durent 
payer  510  livres  à  T.  de  Valperga,  Alain  Giron  et  autres  capi- 
taines de  gens  d'armes,  pour  qu'ils  s'engageassent  à  ne  plus 
dévaster  le  pays.  Et  combien  d'autres  faits  de  ce  genre  se  pro- 
duisaient ailleurs!  Ces  marchés,  ou  appâtis,  qui  débarrassaient 
momentanément  un  pays  des  routiers,  n'avaient  d'autre  ré- 
sultat que  d'exposer  aux  mêmes  déprédations  les  pays  voisins. 
Les    ressources   de  la   France  étaient   ainsi    gaspillées ,   faute 

1.  Lat.  6024,  n"  18.  Original  sur  parchemin,  signé  Charles.  On  voit,  au 
n"  19,  que  Jean  II  promit  d'envoyer  des  secours  quand  les  troubles  de  la 
Castille  seraient  apaisés,  et  il  est  probable  qu'il  en  envoya,  car  on  trouve, 
en  1427,  des  troupes  castillanes  parmi  celles  de  Charles  Vil  (voy.  de  Beau- 
court,  t.  II,  391-394). 

2.  Cette  assemblée  se  tint,  non  à  Angers,  mais  à  Montluçon.  Elle  vota 
une  taille  de  230  000  1.  (de  Beaucourt,  t.  II,  588-589).  Voy.  Append.,  XXXV. 

3.  Le  i"  mai,  les  élus  de  Tours  décident  «  d'envoyer  promptement  et 
hastivement  à  Saumur,  pour  les  trois  estats  assemblez  et  mandez  à  au- 
jourd'hui par  Mgr  de  Richemont  »,  bien  que  Tours  n'ait  pas  reçu  de 
lettres  de  convocation.  Dans  la  séance  du  7  mai,  Jehan  Garnier,  revenu 
de  Saumur,  fait  son  rapport  sur  l'assemblée  des  États  ordonnée  par  le 
connestable,  assemblée  à  laquelle  ne  sont  venus  «  aucunes  gens  des  villes, 
que  d'Angiers  et  plusieurs  barons  et  gens  d'Église  du  pays  de  Poictou, 
qui  ont  tenu  conseil  avec  le  connestable  par  trois  jours.  »  (Arch.  munie, 
de  Tours,  Registre  des  délibérations,  t.  III,  f"*  84,  85.  Communication  du 
Dr  Giraudet.) 

4.  Arrondissement  de  Château-Gontier. 

3.  Fr.,  21403,  fo^  91,  92.  Xi»  8604,  f»  83.  Fr.  4491,  f"  83.  P  13722,  cotes 
2069  et  2103.  De  Beaucourt,  t.  II,  119,  120,  129.  —  Giac  se  fit  donner  le 
comté  d'Auxerre  {Idem,  p.  129). 


R1CHEM0^•T   RÉSISTE  AUX  ANGLAIS    (1426)  123 

d'une  organisation  régulière  et  d'un  gouvernement  sage,  éco- 
nome et  tort*. 

Cependant  les  Anglais  menaçaient  toujours  la  Bretagne,  ainsi 
que  le  Maine  et  l'Anjou,  dont  ils  voulaient  achever  la  conquête. 
Richard  Beauchamp,  comte  de  Warwick,  lieutenant  général  de 
Henri  VI  «  pour  le  fait  de  la  guerre  »  dans  ces  provinces,  avait 
appelé  auprès  de  lui,  pour  cette  campagne,  plusieurs  capitaines 
renommés,  Robert  Willoughby,  J.  Salvain,  Guill.  Glasdale, 
J.  de  Montgomery,  Th.  Burgh  ^.  Il  y  eut  alors  beaucoup  de 
sièges  et  de  combats  qui  sont  mentionnés  par  les  chroniqueurs 
d'une  manière  trop  confuse  pour  qu'il  soit  possible  de  les  indiquer 
tous  dans  l'ordre  chronologique.  Avec  des  troupes  tirées  des 
garnisons  du  Maine  et  de  l'Anjou,  le  connétable,  secondé  par 
J.  Stuart  et  par  un  grand  nombre  de  seigneurs  bretons,  s'em- 
para de  la  forteresse  de  Galerande  ^,  occupa  Fougères  et  Pon- 
lorson,  où  il  fit  faire  des  travaux  considérables,  pour  opposer  à 
Saint-James-de-Beuvron  une  place  solidement  fortifiée  * .  Pen- 
dant que  ses  lieutenants,  Ambroise  de  Loré,  les  sires  de  Raiz  et 
dcBeaumanoir,Guil.deMauny,Alainde  La  Chapelle  continuaient 
de  tenir  les  Anglais  en  échec,  il  alla  voir  son  frère  Jean  V  en 
Bretagne  ^,  pour  calmer  ses  craintes  et  exciter  son  indignation 
contre  les  Anglais.  Il  lui  dit  queBedford  voulait  faire  momenta- 
nément la  paix  avec  lui,  pour  accabler  le  duc  de  Bourgogne  et 
s'emparer  ensuite  de  la  Bretagne.  Il  lui  révéla  les  projets  crimi- 
nels des  princes  anglais  et  la  connivence  du  chancelier  J.  de  Ma- 
lestroit.  Faut-il  croire  que,  pour  mieux  convaincre  son  frère, 
il  usa  de  fausses  lettres  de  Suffolk  et  mit  Jean  V  en  rapport 
avec  le  faussaire  lui-même?  Il  semble  certain  que  des  lettres 
d.!   Suffolk,  authentiques   ou   non,  furent  communiquées  au 


1.  Fr.,  20387,  n»  36.  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrodo,  p.  14-16.  Le  con- 
nétable ne  pouvait  empêcher  ces  pillages  là  même  où  il  était.  Le  comte 
de  Foix  avait  fait  venir  du  Midi  des  troupes  qui  ne  servirent  guère,  selon 
Gruel,  qu'à  ravager  les  environs  de  Saumur  (K  62,  n°»  27,  28,  33  ;  Fr.  25767, 
no»  159-193;  Fr.  23768,  n°  240).  Afin  de  pouvoir  rester  à  la  cour,  le  comte 
de  Foix  avait  imaginé  «  de  prendre  paty  et  abstinence  de  guerre  pour 
un  an  et  demi  »  avec  les  chefs  anglais  en  Guyenne,  moyennant  3000  1.  t. 
(Fr.  20387,  n°  33). 

2.  Fr.  23767,  n"'  143,  146,  155,  156.  K  62,^»  25*.  8, 16. 

3.  Arrondissement  de  La  Flèche.  Ce  château  a  été  bien  restauré. 

4.  Cousinot,  241-243.  Gruel,  193,  194.  Le  Baud,  470.  Fr.  20684,  f»  349. 
D'après  Grafton  (l,  539,  560),  les  Anglais  auraient  alors  pris  Saint-Calais, 
Malicorne,  Louplande,  Montsurs,  La  Suze  et  plus  de  quarante  châteaux; 
mais  l'exactitude  de  ces  détails  est  fort  douteuse,  les  événements  mili- 
taires des  années  1426-1428  étant  mal  connus. 

3.  Le  connétable  était  le  26  juillet  au  château  de  l'Hermine,  à  Vannes 
(Fr.  26049,  n"  605). 


124  MISSION   DE  J.    DE  MALESTROIT   (1426) 

duc  de  Bretagne,  comme  le  prouvent  les  instructions  qu'il  remit 
un  peu  plus  tard  à  son  chancelier,  en  le  chargeant  de  dévoiler 
au  duc  de  Bourgogne  les  menées  perfides  de  Bedford  et  de  Glo- 
cester  1. 

Vers  lé  milieu  de  septembre,  le  chancelier  de  Bretagne  partit 
pour  se  rendre  auprès  de  Philippe-le  Bon.  Après  l'avoir  informé 
de  la  trahison  que  les  Anglais  machinaient  depuis  longtemps 
contre  lui-même  et  contre  le  duc  de  Bretagne,  «  ainsi  que  bien 
à  plein  le  pourra  savoir  et  voir  par  les  lettres  du  comte  de  Suf- 
folk,  signées  de  sa  main  2,  »  il  devait  lui  dire  que  Bedford  et 
Glocester  voulaient  amener  Jean  V,  par  les  négociations  ou  par 
les  armes,  à  entrer  dans  une  ligue  contre  tous  les  ennemis  de 
l'Angleterre,  y  compris  le  duc  de  Bourgogne  ;  que,  dans  ce  dan- 
ger commun,  le  duc  de  Bretagne  désirait  s'unir  à  Philippe-le-Bon 
par  une  étroite  alliance,  afin  «  qu'ils  pourveussent  au  relèvement 
de  ce  royaulme  »  ;  que  le  roi  se  voulait  régler  et  gouverner  par 
eux,  qu'il  était  résolu  à  toutes  les  concessions  compatibles  avec 
«  l'onneur  de  la  couronne  »,  et  qu'il  ferait  tout  ce  que  les  ducs 
de  Bourgogne,  de  Bretagne,  de  Savoie  et  le  comte  de  Richement 
en  voudraient  ordonner'. 

On  ne  comprend  pas  bien  pourquoi  le  duc  de  Bretagne  confia 
cette  mission  à  J.  de  Malestroit,  que  Richemont  lui  avait  signalé 
comme  un  traître  vendu  aux  Anglais  *.  Il  est  vrai  que  le  chan- 
celier, voulant  dissiper  les  soupçons  dont  il  était  l'objet,  avait 
promis  «  de  faire  merveilles  »,  et  qu'il  affectait  un  grand  zèle 
pour  la  réussite  de  ces  négociations.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  conné- 
table n'avait  en  lui  aucune  confiance,  car  il  envoj^a  auprès  de 
Philippe-le-Bon  J.  de  Ghénery  et  le  prieur  de  La  Celle,  chargés 
secrètement  par  lui  de  mettre  le  duc  en  garde  contre  ce  que 


1.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  preuves  Ixiv-lxv  (Instructions  du  15  septembre 
1426).  Desplanque,  p.  43,  46  et  les  pièces  IV,  V,  VI,  p.  63-69,  et  surtout  le 
commencement  de  la  pièce  Vllf,  p.  74.  C'est  à  ce  moment  que  J.  de  Che- 
nery  aurait  conduit  auprès  de  Jean  V,  à  Redon,  Guill.  Benoît,  l'ancien 
secrétaire  de  Sufifolk  (p.  66).  S'il  faut  considérer  comme  fausses  les  pièces 
produites  par  G.  Benoît  et  comme  mensongères  ses  dépositions,  on  recon- 
naîtra qu'elles  renferment  d'ailleurs  beaucoup  de  détails  exacts  (voy.  VAp- 
pend.,  XIX). 

2.  Desplanque,  p.  74. 

3.  Voy.  les  mémoires  et  instructions  au  chancelier  de  Bretagne,  ap.  Des- 
planque, p.  74-77  et  p.  51.  Hisi.  de  Bourgogne,  IV,  p.  Ixiv-lxv.  Peu  après, 
un  autre  envoyé  partit  de  Bretagne  avec  des  instructions  presque  sem- 
Ijlables  {Hist.  de  Bourgogne,  IV,  Ixvj-lxviij. 

4.  Il  est  certain  que  le  chancelier  de  Bretagne  était  alors  en  pourparlers 
avec  les  Anglais;  mais  c'était  par  l'ordre  de  Jean  V,  qui  employait  le 
même  ambassadeur  à  exciter  contre  eux  Philippe-le-Bon!  (de  Beaucourt, 
Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  378,  note  2). 


FAIBLESSE   DE  CHARLES  VII   (1426)  i25 

pourrait  dire  ou  faire  le  chancelier  de  Bretagne.  Celui-ci  alla 
trouver  Philippe  à  Dordrecht,  et  un  traité  de  paix  entre  Char- 
les VII  et  le  duc  fut  alors  projeté  *. 

Le  connétable  avait  d'autres  sujets  d'inquiétude  et  de  mécon- 
tentement. Il  avait  commis  la  faute  de  ne  point  éloigner  le  sire 
de  Giac,  qui  avait  promis  «  de  bien  faire  la  besogne  *  »,  mais 
qui  faisait  tout  le  contraire.  Il  avait  bientôt  remplacé  Louvet 
dans  la  faveur  du  roi  et  exerçait  sur  lui  une  influence  non  moins 
funeste.  A  ce  moment  même  (août  1426),  il  faisait  arrêter,  en 
vertu  d'ordres  arrachés  à  la  faiblesse  de  Charles  VII,  Robert  le 
Maçon,  seigneur  de  Trêves,  ancien  chancelier  de  France  et  l'un 
des  serviteurs  les  plus  dévoués  de  ce  prince.  Richemont  portait 
intérêt  au  seigneur  de  Trêves,  qui  avait  contribué  à  réconcilier 
le  roi  avec  le  duc  de  Bretagne;  néanmoins  il  ne  put  empêcher 
Giac  de"  retenir  en  prison  pendant  trois  mois  l'ancien  chance- 
lier, qu'il  ne  relâcha  que  moyennant  une  grosse  rançon,  fournie 
en  partie  par  Charles  VII  '.  D'autres  fois,  c'étaient  des  délais 
accordés  aux  villes  pour  le  payement  des  sommes  assignées  au 
connétable,  ce  qui  l'empêchait  de  pourvoir  aux  dépenses  de  la 
guerre.  Il  était  alors  réduit  à  exiger  quand  même  l'argent  dont 
il  avait  si  grand  besoin,  sans  tenir  compte  des  réclamations  que 
le  roi  autorisait.  On  trouve  la  preuve  de  cette  situation  singu- 
lière dans  deux  lettres  adressées,  l'une  par  le  roi,  l'autre  par  le 
connétable  aux  Lyonnais. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis  les  bourgois  et  habitans 
de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis, 

Nous  avons  sceu  comment  monseigneur  le  Roy  a  mandé  au 
recepveur  de  Lion  retarder  le  paiement  de  nostre  assignacion 
que  prenons  pardella  jusques  à  deux  moys,  et  tout  à  voz  suppli- 
cacions  et  requestes,  comme  l'on  nous  a  rapporté,  et,  par  ce, 
n'a  peu  ne  peut  recevoir  le  receveur  de  pardella  l'argent  de  la 
taille,  pour  nous  contenter  de  nostre  dite  assignacion;  de  la- 
quelle chose  nous  nous  donnons  grant  merveille  et  nous  semble 

1.  Desplanque,  p.  52.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  Ixv-lxvj.  J.  de  Chenery  et 
le  prieur  de  La  Celle  étaient  conseillers  de  Richemont  (Fr.  20684,  f»  573;  de 
Beaucourt,  t.  II,  387;  Consaux  de  Tournai,  II,  227-229,  233). 

2.  Gruel,  191.  Giac  était  au  conseil,  quand  furent  révoqués  les  pou- 
voirs de  Louvet  (Fr.  21405,  f  90). 

3.  V.  Tari.  Le  Maçon  dans  la  Biographie  Didot,  t.  XXX;  M  450,  liasse  3, 
nos  1,  2,  3,  et  surtout  K  65,  n»  4, 


126  FAIBLESSE  DE  CHARLES  VII   (1426) 

que  vous  avez  peu  de  considéracion  à  la  charge  que  nous  avons 
pour  le  fait  de  la  guerre  es  frontières  de  pardeça,  que  tout  re- 
vient sur  nous,  et,  supposé  que  mondit  seigneur  eust  fait  ladite 
deffense  de  soy  mesmes^  sans  intercession  (Taulre,  si,  deussiez- 
vous,  nonobstant  ce,  nous  faire  bailler  l'argent  de  nostre  dite 
assignacion,  car,  sans  ce,  vous  povez  bien  considérer  que  le  fait 
de  la  guerre,  sans  l'aide  de  vous  et  des  autres  bonnes  villes  de 
mondit  seigneur,  ne  se  peut  conduire.  Pourquoy  vous  prions, 
très  chiers  et  grans  amis,  tant  et  si  affectueusement  comme  plus 
povons,  que  vous  vueillez  faire  avancer  de  cueillir  et  lever  l'ar- 
gent de  nostre  dite  assignacion,  par  manière  que  briefment  en 
puissons  estre  paiez,  car,  en  vérité,  si  nous  avions  de  quoy  le 
faire  et  du  nostre  propre,  nous  ne  vous  en  oppresserions  pas 
tant.  Très  chiers  et  bons  amis,  le  Sainct  Esprit  soit  garde  de 
vous.  Escript  au  Pont-de-Scé,  le  XIII^  jour  de  septembre. 

Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France^ 
Artur. 

Chevalier  '. 

(Archives  de  l'a  ville  de  Lyon,  AA,  77.) 

Richemont  avait  eu  soin  de  faire  écrire  par  le  roi,  quelques 
jours  auparavant,  la  lettre  qui  suit  : 

A  noz  chiers  et  bien  amez  les  conseilliers^  manans  et  habitans 
de  nostre  bonne  ville  de  Lyon. 

De  par  le  Roy. 
Chiers  et  bien  amez, 

Nous  vous  avons  nagaires  escript  que,  pour  aucunes  causes, 
vous  délayssiez  le  derrenier  terme  de  l'aide  à  nous  octroie  en 
octobre  derrenier  passé,  en  nostre  ville  de  Poictiers,  jusques  à 
deux  moys;  et,  pour  ce  que,  depuis,  nostre  très  chier  et  amé 
cousin,  le  conte  de  Richemont,  connestable,  nous  a  fait  dire  et 
exposer  que  ledit  derrenier  terme  nous  lui  avions  assigné  et 
ordonné  pour  le  fait  de  la  guerre  et  que,  se  rompture  y  avoit, 
ce  lui  pourroit  tourner  à  grant  charge  et  dommage  et  à  nous 
aussi,  considéré  la  grant  charge  qu'il  a  es  frontières  d'Anjou  et 
du  Mayne,  et  que  desjà  il  a  empruncté  l'argent  de  sa  dite  assi- 

1.  Il  ne  peut  s'agir  ici  que  d'Etienne  Chevalier,  qui  fut  longtemps  un 
des  secrétaires  du  connétable  avant  d'être  un  des  plus  célèbres  conseil- 
lers de  Charles  VII.  Voir  aussi  l'Append.  XXXIX. 


FAIBLESSE   DE  CHARLES   VII  (1426)  127 

gnacion  sur  gaiges,  lesquelz  il  pourroit  perdre  se  par  nous  ne 
lui  estoit  pourveu  de  remède;  pour  ce  est-il  que  nous  vous  man- 
dons bien  expressément,  par  ces  présentes,  sur  tant  que  désirez 
eschever  à  venir  contre  nostre  plaisir,  et  sur  peine  de  recouvrer 
sur  vous  ce  que  derrenier  vous  en  avons  remis,  qui  estoit  à  celle 
fin  que  plus  tost  paissiez  ledit  derrenier  terme,  que,  incontinent 
et  sans  aucun  delay,  vous  mectez  sus  et  imposez  ledit  derrenier 
terme  et  les  deniers  d'icellui  faites  baillier  et  délivrer  incontinent 
au  commis  ou  receveur  ordonné  à  recevoir  ledit  aide,  pour 
iceulx  deniers  convertir  ou  paiement  de  nostre  dit  cousin  et  con- 
nestable  et  des  autres  assignez.  Et  ce  faictes  en  telle  manière 
que  nous  n'ayons  plus  cause  d'en  escripre  par  devers  vous,  ou 
quel  cas  nous  y  pourverrions  par  manière  qui  ne  vous  sera  pas 
agréable.  Donne  à  Mehun,  le  VII«  jour  de  septembre, 

Charles. 

Fresnoy. 

♦  (Archives  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  68.) 

D'autres  lettres  '  prouvent  que  Richemont  savait  atténuer  la 
rigueur  de  ses  ordres  par  des  formes  courtoises  et  même  affec- 
tueuses, au  lieu  de  montrer  habituellement  la  rudesse  mena- 
çante ^  qui  lui  fut  reprochée  un  peu  plus  tard  par  ses  «  très 
chers  et  bons  amis  »  les  habitants  de  Lyon.  Ces  résistances,  ces 
embarras  qu'il  rencontrait  sans  cesse  étaient  bien  faits  pour  l'irri- 
ter, et  plus  d'un,  à  sa  place,  ne  se  fût  pas  montré  plus  patient  ^. 

En  même  temps,  le  connétable  soutenait  la  guerre  aussi  acti- 
vement que  possible.  Les  sires  de  Raiz,  de  Beaumanoir  et  Amb. 
de  Loré  reprirent  Rennefort*  et  Malicorne  ^.  Un  autre  capitaine, 
nommé  du  Coing,  fut  défait  dans  un  combat  aux  environs  du 
Mans,  par  Guill.  Oldhall,  et  les  Anglais  prirent  Bonneval  ^  et 
Mondoubleau  ''.  Néanmoins  les  Français  assiégèrent  La  Ferté- 
Bernard  %  envahirent  le  Perche,  menacèrent  Verneuil  ^  et  ré- 

1.  V.  Append.,  XXXVI,  XXXVII,  XXXIX,  XL,  XLII,  XLII  bis. 

2.  Dès  le  mois  de  novembre  1426,  il  est  obligé  d'avoir  recours  aux  me- 
naces. Voir  Append.,  XXXVIII. 

3.  Il  ne  refusait  pas  d'ailleurs  de  transiger  avec  Lyon,  en  accordant  des 
réductions  considérables  (voy.  Append.,  XXXVII,  XLI).  Il  est  probable  qu'il 
en  était  de  même  avec  d'autres  villes,  et  cela  explique  aussi  a  continuelle 
pénurie  du  trésor  royal. 

4.  Arrondissement  de  Mamers. 

5.  Arrondissement  de  La  Flèche. 

6.  Arrondissement  de  Châteaudun. 

7.  Arrondissement  de  Vendôme. 

8.  Arrondissement  de  Mamers. 

9.  Arrondissement  d'Evreux. 


128  GRANDS   EFFORTS   DU   CONNÉTABLE    (1426) 

pandirent  l'alarme  dans  les  pays  voisins.  En  Champagne,  ils 
avaient  repris  Vertus  *  et  défendaient  toujours  la  forteresse  de 
Moynier  contre  les  attaques  réitérées  de  Salisbury.  Ces  détails, 
à  défaut  d'autres,  qui  restent  ignorés,  prouvent  assez  que  le 
connétable  employait  de  son  mieux  les  faibles  ressources  dont  il 
disposait  ^ 

Il  tenait  surtout  à  empêcher  le  duc  de  Bretagne  de  faire  la 
paix  avec  les  Anglais,  qui  ne  négligeaient  rien  pour  le  ramener 
à  eux.  Au  mois  d'octobre,  il  fit  donner  le  comté  de  Mantes  à  son 
jeune  frère  Richard,  qui  était  pour  ainsi  dire  le  chef  du  parti 
français  en  Bretagne,  et  Jean  Stuart,  connétable  des  Ecossais, 
s'engagea  formellement  à  secourir  Jean  V  envers  et  contre  tous  ^. 
Néanmoins  le  duc,  qui  ne  se  sentait  pas  assez  protégé  contre  les 
Anglais,  ni  assez  sûr  de  l'appui  de  Philippe-le-Bon  *,  entrait  en 
pourparlers  avec  Warwick  et  se  préparait  même  à  envoyer  des 
ambassadeurs  en  Angleterre,  à  la  fin  de  142:6.  Ne  voulant  rien 
décider  sans  avoir  consulté  le  duc  de  Bourgogne,  il  l'informa  de 
ce  qui  se  passait.  Comme  les  Anglais  se  plaignaienrsurtout  des 
travaux  de  défense  faits  à  Pontorson,  Jean  V  déclarait  qu'il  con- 
sentait à  mettre  cette  place  entre  les  mains  de  Philippe-le-Bon 
ou  à  la  démanteler,  si  les  Anglais  faisaient  de  même  pour  Saint- 
James-de-Beuvron  ^. 

Le  connétable  avait  donc  le  plus  grand  intérêt  à  gagner  tout 
au  moins  l'appui  moral  et  les  bons  offices  de  son  beau-frère,  en 
attendant  qu'il  obtînt  son  alliance,  mais  il  ne  pouvait  tout  pré- 
voir ni  tout  empêcher.  Or,  à  cette  époque,  le  bâtard  de  LaBeaume 
et  quelques  autres  capitaines  français  s'emparèrent  de  Mailly-le- 
Château  en  Auxerrois  ".  Cet  acte  d'hostilité,  qui  faillit  rallumer 
la  guerre  entre  la  France  et  la  Bourgogne,  créa  les  plus  graves 
embarras  à  Richemont  ^  Voulant,  à  tout  prix,  empêcher  la  rup- 

1.  Arrondissement  de  Châlons-sur-Marne. 

2.  Cousinot,  243.  Le  Baud,  470.  Fr.  26049,  n»  625;  Fr.  4484,  fos  36-39. 
Portef.  Fontanieu,  115-116,  au  12  octobre;  Fr.  20417,  n»  7;  Fr.  23018, 
fos  469  v,  473.  JJ  173,  f"  203  v,  et  JJ  174,  f"  43.  G.  Ménage,  Hist.  de  Sablé, 
2»  partie,  publiée  en  1845,  au  Mans,  p.  41,  47,  48.  K  62,  n»  25»3.  K,  62, 
n»  25»6.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  i.  II,  p.  24. 

3.  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  11,  E,  n»  31,  et  registre  Turnus 
Brutus,  I,  91. 

4.  Voir  une  lettre  de  Jean  V  à  Philippe,  en  date  du  15  septembre 
(Coll.  de  Bourgogne,  99,  f"  229). 

5.  Instructions  données  le  20  décembre  1426  à  S.  Deloye  {Hist.  de  Bour- 
gogne, IV,  p.  Ixviij). 

6.  Thibault  de  Thermes,  Denis  de  Chailly  et  le  bâtard  de  La  Baume 
prirent  cette  place  le  10  décembre  1426  (d'après  le  t.  100  de  la  collection 
de  Bourgogne,  p.  218,  221).  Mailly-le-Château,  arrondissement  d'Auxerre. 

7.  11  se  rendit  peu  après  à  Monlluçon,  où  les  Etats  de  Languedoil  étaient 


NÉGOCIATIONS  AVEC   PHILIPPE   LE   BON    (1427)  429 

ture  des  trêves  et  apaiser  Philippe  le  Bon,  il  se  rendit  à  Moulins, 
ainsi  que  le  comte  de  Glermont,  son  beau-frère  *,  pour  négocier 
avec  le  conseil  de  Bourgogne  et  avec  le  maréchal  de  Toulongeon, 
pendant  que,  non  loin  de  là,  des  conférences  avaient  lieu  à 
Bourbon-Lancy  2,  entre  les  envoyés  de  France  et  de  Bourgogne 
{janvier  1427).  Le  comte  de  Glermont  et  le  connétable  s'adressè- 
rent directement  à  leur  beau-frère,  Philippe  le  Bon,  et  à  ses  en- 
voyés, car  le  conseil  de  Bourgogne  aimait  mieux  traiter  avec 
eux  qu'avec  les  représentants  de  Charles  VII,  dont  l'entourage 
ne  leur  inspirait  aucune  confiance.  Les  deux  princes  conjurèrent 
encore  Philippe  de  ne  pas  différer  davantage  les  négociations 
pour  la  paix;  ils  désavouèrent  le  bâtard  de  La  Beaume  et  of- 
frirent au  duc  la  restitution  de  Mailly.  Enfin  on  conclut,  à 
Bourbon-Lancy,  des  arrangements  relatifs  à  la  trêve,  qui  furent 
confirmés  le  20  janvier  1427,  à  Montluel,  par  le  duc  de  Sa- 
voie ^. 

Il  est  vraisemblable  que  la  perte  du  sire  de  Giac  fut  décidée 
pendant  ce  voyage  des  deux  beaux-frères  à  Moulins  *.  Le  favori 
avait  bien  essayé  de  gagner  le  comte  de  Glermont  en  lui  faisant 
donner  le  duché  d'Auvergne,  mais  une  semblable  protection 
nétait-elle  pas  humiliante  pour  un  prince  de  la  famille  royale, 
et  pouvait-elle  l'emporter  sur  les  considérations  que  Richemont 
dut  faire  valoir  auprès  de  son  beau-frère?  En  tout  cas,  si  le 
comte  de  Glermont  ne  voulut  pas  être  l'auxiliaire  du  connétable 
contre  le  sire  de  Giac,  il  ne  fit  rien  pour  sauver  ce  favori,  qui  ne 
méritait  d'ailleurs  ni  sympathie  ni  pitié  ^. 

P.  de  Giac  '^  avait  la  plus  mauvaise  réputation.  Dix  ans  aupa- 
ravant, quand  il  était  préposé,  avec  L.  de  Bosredon,  à  la  garde 
d'Isabeau  de  Bavière,  il  s'était  déjà  signalé  par  une  conduite 
scandaleuse.  On  n'ignorait  point  qu'il  avait  empoisonné  sa  pre- 


réunis  (décembre  1426).  Voy.  le  Cab.  hist.,  t.  24,  p.  63-66,  et  une  lettre  du 
connét.  aux  Lyonnais  [Append.  XL).  On  créa  quatre  grands  commande- 
ments. Celui  de  l'Anjou  fut  donné  au  connétable,  mais  il  paraît  que  cette 
organisation  ne  fut  pas  réalisée  (de  Beaucourt,  II,  131  et  note  4,  et 
p.  648,  649). 

1.  Richemont  était  à  Moulins  en  janvier  1427,  Il  écrit  de  là  aux  Lyon- 
nais le  20  janvier.  Voir  Append.  XXXIX. 

2.  Arrondissement  de  Charolles. 

3.  CoUect.  de  Bourgogne,  t.  99,  f»  233-235.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  118  et 
Preuves,  p.  Iviij-lx.  De  Beaucourt,  II,  384-386. 

4.  De  Beaucourt,  II.  132,  note  2. 

.5.  X»a  8604,  fos  77,  78.  P.  2298.  f»»  453-459,  517,  593.  J.  186,  n"  86.  Gruel, 
193.  Vallet  de  V.,  I,  452,  note  4. 

6.  Fils  de  L.  de  Giac  et  de  Jeanne  du  Peschin,  et  petit-fils  de  P.  de  Giac, 
chancelier  de  France  (Anselme,  VI,  343  ;  X»»  9200,  f»  192  v"). 

Richemont.  9 


130  LE  SIRE   DE   GlAC 

raière  femme,  Jeanne  de  Naillac  *,  pour  épouser  Catherine  de 
risle-Bouchard,  veuve  du  comte  de  Tonnerre,  Hugues  de  Ghâ- 
lons.  Conseiller  et  chambellan  de  Jean  sans  Peur,  il  avait,  ainsi 
que  sa  mère,  joué  un  rôle  équivoque  dans  les  circonstances  qui 
précédèrent  le  crime  de  Montereau  ^.  Devenu  ensuite  conseiller 
intime  et  premier  chambellan  du  roi,  qui  tenait  à  Tavoir  «  conti- 
nuellement autour  de  sa  personne,  de  jour  et  de  nuit  '  »,  parvenu 
au  comble  de  la  faveur,  il  montrait  une  insolence  et  une  avidité 
sans  bornes.  Aux  Etats  de  Mehun-sur-Yèvre  (en  décembre  1425), 
l'évêque  de  Poitiers,  Hugues  de  Gombarel,  ayant  soutenu  les 
députés  qui  se  plaignaient,  comme  toujours,  des  gens  de  guerre,, 
le  sire  de  Giac  osa  dire  que,  si  on  l'en  croyait,  on  jetterait  l'évê- 
que à  la  rivière,  avec  tous  ceux  qui  étaient  de  son  opinion.  H  dé- 
tournait à  son  profit  une  partie  des  sommes  votées  par  les  Etats. 
Tout  en  se  faisant  beaucoup  d'ennemis  à  la  cour,  il  avait  eu 
l'adresse  de  mettre  dans  ses  intérêts  quelques  grands  seigneurs, 
comme  le  comte  de  Foix  et  son  frère,  le  comte  de  Gomminges,. 
qui  ne  dédaignaient  point  ses  services  *. 

A  la  fin  de  janvier  1427,  la  cour  était  à  Montluçon,  où  s'étaient 
réunis  les  Etats  de  Languedoil.  Le  sire  de  Giac  ne  pressentait  pas 
encore  le  danger  qui  le  menaçait.  En  l'absence  du  connétable, 
il  fît  rembourser  au  connétable  de  Foix  la  somme  de  3  000  livres 
tournois  que  celui-ci  disait  avoir  payée  aux  Anglais  «  des  deniers 
de  ses  finances  »  (29  janvier  1427)  et  donner  au  comte  de  Gom- 
minges 2  OOOlivres  tournois.  Néanmoins,  il  ne  semble  pas  que  Jean 
et  Mathieu  de  Foix  aient  fait  de  grands  efforts  pour  sauver  le  sire 
de  Giac.  Hs  étaient  d'ailleurs  surveillés  par  les  comtes  d'Arma- 
gnac et  de  Pardiac ,  dévoués  au  connétable ,  qui  eut  même 
l'adresse  de  conclure  un  traité  d'alliance  avec  le  comte  de  Foix 
(6  janvier  1427)  ^ 

De  Montluçon,  le  roi  se  rendit  à  Issoudun,  où  le  connétable 
vint  le  rejoindre,  après  avoir  terminé  les  affaires  qui  l'avaient 
appelé  à  Moulins.  H  revenait  plus  irrité  que  jamais  contre  le 
favori,  qui  s'opposait  à  la  paix  avec  le  duc  de  Bourgogne,  dans 
la  crainte  de   perdre  sa  situation.  D'autres  seigneurs   avaient 

1.  Fille  de  Guill.  de  Naillac  et  tante  des  femmes  de  P.  Frotier  et  de. 
11.  de  Gaucourt  (Xi^  9200,  f"  242). 

2.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr.,  t.  21,  fos  305,  306,  310. 

3.  Pièces  orig.,  t.  1320,  dossier  Giac,  n"  31. 

4.  Pièces  orig.,  t.  1320,  dossier  Giac,  no^  31-36.  Fr.  7858,  f»  9.  Cousinot, 
237,  238.  Anselme,  VI,  343  et  345.  Biographie  Didot,  article  Giac.  J.  334, 
nos  41-45.  De  Beaucourt,  II,  124-125,  128. 

5.  Cabinet  hist.,  t.  24,  p.  164, 165.  Fr.  20587,  n»  33.  Le  c.  de  Foix  retourna 
vers  cette  époque  en  Languedoc.  Voy.  Append.,  XLIII  (Alliance  entre  lea 
c.  de  Richemont  et  de  Foix). 


ENLÈVEMENT  DU   SIRE  DE   GIAC   (1427,    8  FÉVRIER)  131 

aussi  des  griefs  contre  lui,  notamment  Georges  de  La  Trémoille, 
qui,  à  la  suite  d'une  querelle,  avait  dû,  pour  sa  propre  sûreté, 
quitter  un  instant  la  cour  *,  avec  son  frère  utérin  Charles  d'Al- 
bret  ^.  Tous  deux  se  montrèrent  empressés  à  servir  les  projets 
du  connétable,  par  intérêt  et  par  vengeance.  De  plus,  La  Trémoille 
entretenait  avec  Catherine  de  ITsle-Bouchard  des  relations  qui 
font  supposer  une  certaine  complicité  de  cette  femme  dans  le 
complot  tramé  contre  son  mari  ^.  La  reine  de  Sicile  et  la  plu- 
part des  seigneurs,  moins  les  comtes  de  Clermont  et  de  Foix,  y 
entrèrent  également.  L'entreprise  fut  préparée  en  si  grand 
secret  que,  malgré  le  retour  du  connétable,  le  roi  et  son  favori 
n'avaient  conçu  aucun  soupçon. 

Dans  les  premiers  jours  de  février,  tout  fut  prêt.  Richemont 
avait  hâte  d'en  finir,  car  les  Anglais  menaçaient  toujours  la  Bre- 
tagne, et  il  avait  d'autres  soucis.  La  veille  du  jour  fixé  pour 
l'exécution  du  complot,  il  se  fit  remettre  les  clefs  de  la  ville, 
sous  prétexte  qu'il  voulait  se  rendre  de  très  grand  matin  à  Notre- 
Dame  de  Bourg-de-Déols  *,  et  il  recommanda  qu'on  l'avertît  dès 
qu'il  serait  temps.  Le  lendemain,  samedi,  8  février  ^,  avant  l'aube, 
comme  il  était  dans  la  chapelle,  on  vint  le  prévenir,  au  moment 
même  où  la  messe  allait  commencer.  Laissant  là  le  prêtre  tout 
seul,  il  alla  rejoindre  ses  gens,  qui  l'attendaient  avec  les  sires  de 
la  Trémoille  et  d'Albret  et  avec  ses  archers.  A  cette  heure  ma- 
tinale, tout  reposait  encore  dans  le  château.  Richemont  s'avan- 
çait silencieusement  avec  sa  petite  troupe.  Le  sire  de  Giac  était 
au  lit,  avec  sa  femme.  Il  fut  réveillé  par  des  coups  violents  qui 
ébranlaient  la  porte.  «  Qui  est  là,  demanda-t-il? —  Le  connéta- 
ble. —  Ah  !  je  suis  un  homme  mort.  »  —  «  Sa  femme  se  leva  lors 


1.  C'est  ce  que  dit  Cousinot  (p.  238),  mais  une  lettre  du  roi  semble 
prouver  que  La  Trémoille  était  revenu  à  la  cour.  En  tout  cas,  un  document 
de  janvier  1427  (sans  date  de  jour)  montre  que  La  Trémoille  était  alors 
au  conseil  avec  les  c.  de  Clermont,  de  Richemont,  de  Foix,  de  Comminges, 
de  Vendôme,  etc.  Don  du  comté  d'Évreux  à  J.  Stuart  (X'»  8604,  f»  100). 

2.  Charles  II  d'Albret  était  fils  du  connétable  Charles  I"  d'Albret  et  de 
Marie  de  Sully,  qui  était  aussi  la  mère  de  Georges  et  de  Jean  de  La  Tré- 
moille. Veuve  de  Guy  de  La  Trémoille,  elle  avait  ensuite  épousé  Charles  I" 
d'Albret.  Charles  II  d'Albret  avait  épousé  une  fille  du  connétable  Ber- 
nard VII  d'Armagnac  et  devint  plus  tard  beau-père  ide  Richemont  (Anselme, 
VI,  205,  210-213). 

3.  Voy.,  dans  la  Revue  des  questions  hist.  (t.  IX,  396-397),  une  curieuse 
lettre  de  Charles  VII,  relative  à  l'enlèvement  de  Giac  et  citée  par  M.  de 
Beaucourt.  La  Trémoille  passait  pour  avoir  fait  périr  le  sire  de  Giac  afin 
d'épouser  sa  femme  (Xia  9200,  f»  192  v). 

4.  Arrondissement  de  Châteauroux. 

5.  M.  de  Beaucourt  a  fait  connaître  cette  date  d'une  manière  précise, 
d'après  les  registres  de  Tours  {Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  132,  note  5). 


132  EXÉCUTION   DU   SIRE  DE  GIAC  (1427,   FÉVRIER) 

toute  nue  '  ;  et  ce  fut  pour  sauver  la  vesselle  »,  dit  le  chroni- 
queur *.  Giac  n'eut  le  temps  de  mettre  que  sa  robe  de  nuit  et  ses 
bottes.  Les  gens  de  Richemont  le  saisirent,  l'entraînèrent  dans 
cet  état,  puis,  l'ayant  fait  monter  sur  une  petite  haquenée,  l'em- 
menèrent à  la  porte  de  la  ville  '. 

Cependant  tout  ce  bruit  avait  jeté  l'alarme  dans  le  château,  et 
le  roi  apprit  bien  vite  ce  qui  s'était  passé.  Il  se  leva  aussitôt  et 
envoya  les  gens  de  sa  garde  à  la  porte  ;  mais  le  connétable  leur 
commanda  de  s'en  aller,  en  disant  «  que  ce  qu'il  faisoit  estoit  pour 
le  bien  du  roi  »  ;  et  ils  obéirent.  En  même  temps  parurent  Alain 
Giron,  Robert  de  Montauban  et  beaucoup  d'autres  serviteurs  de 
Richemont,  qui  s'étaient  tenus  jusque-là  en  embuscade,  avec 
cent  lances,  près  de  la  porte.  Le  connétable  se  rendit  à  Bourges 
avec  le  sire  de  La  Trémoille  ;  mais  il  envoya  son  prisonnier  à 
Dun-le-Roi  *,  qui  appartenait  à  la  duchesse  de  Guyenne,  et  char- 
gea le  bailli  de  cette  ville  de  lui  faire  son  procès.  On  accusa  Giac 
d'avoir  détourné  l'argent  du  trésor  et  d'avoir  fait  mourir  sa  pre- 
mière femme.  Il  avoua  tous  les  crimes  qu'on  lui  imputait,  a  II 
confessa  tant  de  maux  que  ce  fut  merveilles,  entre  lesquels  la 
mort  de  sa  femme  toute  grosse  et  le  fruit  dedans.  Et  oultre,  con- 
fessa qu'il  avoit  donné  au  diable  l'une  de  ses  mains,  afin  de  le 
faire  venir  à  ses  intentions.  Quand  il  fut  jugé,  il  requéroit  pour 
Dieu,  qu'on  luy  couppast  la  dicte  main,  avant  le  faire  mourir.  Et 
offroit  à  Mgr  le  connestable,  s'il  luy  plaisoit  de  luy  sauver  la 
vie,  de  lui  bailler  comptant  100  000  escus,  et  lui  bailler  sa  femme, 
ses  enfants  et  ses  places  à  ostages,  de  jamais  n'approcher  du  roi 
de  vingt  lieues  ^.  »  Richemont  fut  inexorable.  Rien  ne  lui  était 
plus  odieux  que  la  sorcellerie  et  les  sorciers.  Il  répondit  qu'il  ne 
laisserait  pas  aller  le  sire  de  Giac,  pour  tout  l'or  du  monde, 
puisqu'il  avait  mérité  la  mort,  et  il  envoya  un  bourreau  de  Bourges 
pour  le  faire  exécuter.  Giac  fut  jeté  dans  l'Auron  et  noyé.  Son 
corps  fut  retiré  de  l'eau  et  remis  à  quelques-uns  de  ses  gens, 
qui  l'inhumèrent  ^. 

Cet  acte  audacieux  avait  causé  au  roi  la  plus  vive  indignation. 
La  reine  de  Sicile  et  les  autres  amis  de  Richemont  employèrent 
tous  leurs  efforts  à  calmer  le  courroux  du  prince,  en  lui  repré- 


1.  Vallet  de  V.,  t.  I,  4o3,  note  1,  fait  remarquer  qu'au  xv»  siècle   on 
couchait  nu.  Cette  note  est  confirmée  par  le  registre  JJ  176,  f"  296. 

2.  Gruel,  193.  Fr.  3037,  f»  55. 

3.  Gruel,  193.  Berry,  374. 

4.  Arrondissement  de  Saint-Amand-Mont-Rond. 

5.  Gruel,  193. 

6.  Voy.  Gruel,  193.  Cousinot,  239.  Berry,  374.  J.  Chartier,  I,  22,  23,  54.  Ce 
fait  est  placé  d'une  manière  inexacte  en  1426  par  D.  Morice  (I,  499). 


RICHEMOIST  APAISE   LE   COURROUX  DU   ROI  433 

sentant  combien  le  sire  de  Giac  était  coupable,  combien  il  était 
indigne  de  sa  confiance,  et  nuisible  à  ses  intérêts  et  à  ceux  de 
l'Etat.  En  même  temps,  le  connétable  cherchait  un  appui  dans 
l'opinion  publique,  comme  à  l'époque  de  sa  lutte  contre  Louvet. 
Le  11  février  (1427),  il  écrivait  de  Bourges,  «  à  ses  très  chers  et 
bons  amis  »  les  habitants  de  Lyon,  que,  pour  mettre  fin  au 
mauvais  gouvernement  qui  était  auprès  du  roi,  «  il  avait  débouté 
à  toujours  de  sa  compaignie  »  le  sire  de  Giac,  à  cause  de  ses 
trahisons  et  pour  le  bien  du  ro3'aume.  Il  les  priait  d'écrire  au 
roi,  afin  qu'il  ôlât  de  son  cœur  tout  courroux  et  qu'il  lui  plût 
ft  mettre  autour  de  lui  notables  gens  preudommes  »  ;  enfin  il  leur 
demandait  aide  et  bon  conseil.  Il  écrivit  aussi  aux  habitants  de 
Tours*. 

Tout  en  recherchant  ainsi  l'appui  des  bonnes  villes,  Riche- 
mont  ne  faisait  rien  pour  se  rendre  populaire  aux  dépens  des 
intérêts  publics.  Il  exigeait  d'une  façon  parfois  menaçante  les 
sommes  qui  lui  étaient  assignées  pour  les  dépenses  de  la  guerre, 
quand  le  payement  en  était  trop  difl^éré,  comme  il  arrivait  trop 
souvent.  Au  moment  même  où  il  demandait  ainsi  à  ses  très 
chers  amis  les  habitants  de  Lyon  leurs  bons  offices,  il  les  me- 
naçait de  s'en  prendre  au  premier  d'entre  eux  qu'il  trouverait, 
s'ils  ne  lui  payaient  pas  3300  francs  qu'ils  lui  devaient  encore. 
Comme  les  Lyonnais  se  plaignaient  du  ton  menaçant  de  cette 
lettre  et  supposaient  que  le  connétable  l'avait  signée  sans  la 
lire,  Richemont  leur  répondit  qu'il  en  connaissait  parfaitement 
le  contenu  et  qu'il  avait  le  droit  d'agir  comme  il  l'avait  dit.  Il 
ne  demandait  pas  mieux  d'ailleurs  que  de  s'entendre  avec  les 
habitants  de  Lyon  ^,  et  il  les  priait  encore  d'écrire  au  roi  rela- 
tivement à  l'exécution  du  sire  de  Giac,  quoique,  «  Dieu  merci, 
dit-il,  il  est  bien  apaisé,  et  bien  content  de  nous.  »  Bien  content 
de  lui  après  une  pareille  humiliation  !  Ce  trait  de  légèreté  in- 
croyable est  également  attesté  par  l'historiographe  Jean  Ghar- 
tier  '.  Il  est  vrai  que  Charles  VII  avait  déjà  un  nouveau  favori, 
Camus  de  Beaulieu,  qui  lui  faisait  oublier  le  sire  de  Giac  et  qui 
ne  valait  pas  mieux  que  lui  *.  Ainsi  réconcilié  avec  le  roi,  le 

1.  Revue  du  Lyonnais,  t.  19,  p.  335-337.  De  Beaucourt,  II,  135,  note  1. 

2.  Un  arrangement,  conclu  à  cette  époque  (mars-avril)  avec  la  ville  de 
Lyon,  prouve  que,  si  le  connétable  était  ferme,  il  était  loin  d'être  intrai- 
table. (De  Beaucourt,  t.  II,  138,  note  6,  et  Appendices  XXXVII,  XLI.) 

3.  Revue  du  Lyonnais,  p.  337-343.  J.  Ghartier,  I,  54.  «  De  la  mort  duquel 
le  roy  fut  fort  courrouché  et  doUent;  mais,  après  ce  qu'il  cuit  esté  informé 
du  fait  du  dit  Giac,  fut  content  dudit  connestable.  • 

4.  G.  de  La  Tréraoille  ne  fut  pas  moins  satisfait  que  le  roi,  car  la  veuve 
de  Giac  lui  donna  ses  bijoux,  le  suivit  au  château  de  Gençay  et  l'épousa 
cinq  mois  après  la  mort  tragique  de  son  premier  mari  ;  et  ils  eurent  plusieurs 


134  BEDFORD    REVIENT   EN   FRANCE    (1427) 

connétable  mit  auprès  de  lui  L.  de  Chalançon,  qui  remplaça 
P.  de  Giac  comme  premier  chambellan  *,  puis  il  quitta  la 
cour,  pour  s'occuper  de  défendre  Pontorson,  assiégé  par  les 
Anglais. 

Le  duc  de  Bedford,  après  avoir  rétabli  l'ordre  en  Angleterre, 
était  revenu  en  France,  au  commencement  de  1427.  Main- 
tenant qu'il  avait  mis  fin  à  la  querelle  entre  Glocester  et 
Philippe  le  Bon,  il  voulait  regagner  le  duc  de  Bretagne,  pour 
accabler  Charles  VII,  réduit  à  ses  seules  forces  ^.  La  soumission 
de  la  Bretagne  était  donc  la  première  partie  du  plan  qui  devait 
bientôt  conduire  les  Anglais  sur  la  Loire,  devant  Orléans.  C'est 
là  ce  qu'il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  pour  comprendre  l'impor- 
tance des  événements  qui  vont  s'accomplir.  Il  y  a  peut-être 
quelque  exagération  à  dire,  comme  les  écrivains  anglais,  que  les 
querelles  de  Glocester  avec  le  duc  de  Bourgogne  puis  avec 
l'évêque  de  Winchester,  avaient  sauvé  deux  fois  la  France  ^  ;  mais 
il  est  certain  que  l'absence  de  Bedford  lui  avait  laissé  un  moment 
de  répit  et  que  son  retour  allait  rendre  la  situation  bien  plus 
périlleuse.  Le  régent  savait  à  la  fois  négocier  et  .combattre. 
C'est  ainsi  qu'il  agit  avec  Jean  V,  dont  l'attachement  à  l'alliance 
française  était  déjà  fort  ébranlé. 

Revenu  d'Angleterre,  avec  des  renforts  considérables  et  une 
puissante  artillerie,  Bedford  chargea  aussitôt  le  comte  de  War- 
wick  d'aller  assiéger  Pontorson.  Il  mit  sous  ses  ordres  600  hommes 
d'armes  et  1800  archers,  commandés  par  d'excellents  capitaines, 
Fastolf,  Talbot,  Th.  de  Scales,  G.  Glasdall,  Th.  Rampston, 
Th.  Bourgh;il  lui  fournit  toutes  les  munitions,  tous  les  engins 
nécessaires  pour  un  siège  *  ;  il  ordonna  que  les  garnisons  anglaises 
des  places  voisines  lui  envoyassent  des  secours  en  cas  de  besoin  ; 
enfin  il  obtint  des  villes  de  Normandie  un  don  de  50,000  livres  tour* 
nois  pour  subvenir  aux  frais  de  l'entreprise.  Tous  ces  préparatifs 

beaux  enfants,  dit  le  chroniqueur  (Cousinot,  p.  239).  Dès  le  mois  de  jan- 
vier 1434,  L.  de  Giac  intenta  un  procès  criminel  à  Georges  de  La  Trémoille, 
qu'il  accusait  de  la  mort  de  son  père.  Ce  procès  durait  encore  en  1U8 
(voy.  Xia  9200,  f  192  v,  au  12  janvier  1433  v.  st.,  et  X^»  24,  aux  lundi 
20  décembre,  jeudi  27  janvier  1445  a.  st.,  lundi  2  mai  1446,  puis  en  1447 
et  1448,  notamment  aux  jeudi  27  juin,  lundi  o  août  1448,  etc.). 

1.  Voir  Append.  XLIV.  L.  de  Chalançon  était,  dès  1420,  conseiller  et 
chambellan  du  régent  Charles  (Ptèee*  orig.,  647,  dossier  15244  [Chalançon], 
fo  19). 

2.  J.  Stevenson,  I,  Préface,  p.  Ixj,  dit  que  Bedford  revint  en  avril,  mais 
on  trouve  dans  le  Als.  fr.  25768,  n"  227,  un  ordre  du  régent  daté  de  Paris, 
7  janvier.  D'après  D.  Morice,  il  déclara  la  guerre  au  duc  de  Bretagne  le 
15  janvier. 

3.[J._Stevenson,  I,  Préface,  p.  xxx,  xlvij,  Ix. 
4.  Voy.  Append.  XLV. 


IL   ORDONNE   LE   SIÈGE   DE  PONTORSON   (1427)  435 

prouvent  assez  que  le  régent  attachait  la  plus  grande  importance 
à  cette  opération  militaire,  qui  fut  certainement  une  des  plus 
considérables  de  l'année  1427  *. 

La  garnison  que  le  connétable  avait  laissée  dans  Pontorson 
était  composée  de  Bretons  et  d'Ecossais,  qui  ne  vivaient  pas 
dans  la  meilleure  intelligence.  Autre  malheur,  le  sire  de  Ros- 
trenen,  capitaine  de  la  ville,  avait  été  battu  et  pris,  avec  bon 
nombre  des  siens,  dans  une  course  sur  Avranches  *.  Il  avait  été 
remplacé  par  Bertrand  de  Dinan,  sire  de  Châteaubriant,  que  son 
frère,  le  maréchal  de  Bretagne,  et  beaucoup  d'autres  chevaliers 
bretons  dévoués  au  comte  de  Richemont,  vinrent  seconder, 
malgré  la  répugnance  de  Jean  V.  Pontorson  ne  pouvait  résister 
longtemps  qu'à  condition  d'être  secourue.  Le  connétable  tenait 
à  conserver  cette  place.  C'était  sa  première  conquête  ;  elle  lui 
rappelait  le  souvenir  et  l'exemple  de  l'illustre  Du  Guesclin,  qui  en 
avait  été  capitaine  en  1357,  vers  le  début  de  sa  glorieuse  car- 
rière *.  Le  duc  de  Bretagne  y  tenait  beaucoup  moins,  soit  qu'elle 
lui  parût  trop  difficile  à  défendre,  comme  il  le  disait,  soit  qu'il 
fût  déjà  décidé  à  ne  point  continuer  la  guerre. 

Après  avoir  vainement  demandé  l'appui  de  Philippe  le  Bon, 
le  duc  Jean  V  reculait  devant  la  lutte  redoutable  dont  Bed- 
ford  menaçait  la  Bretagne.  Il  faut  avouer  que  ses  craintes 
étaient  légitimes  et  que  l'alliance  de  Charles  VII  ne  pouvait  alors 
inspirer  qu'une  conflance  médiocre.  L'échec  de  Saint-James-de- 
Beuvron  était  trop  récent  pour  que  les  exhortations  et  les  pro- 
messes du  connétable  lui-même  pussent  l'emporter  sur  les  con- 
seils de  la  prudence.  Dans  ces  dispositions  d'esprit,  le  duc  de 
Bretagne  mit  une  mauvaise  volonté  manifeste  à  défendre  Pon- 
torson. Sous  prétexte  que  la  place  n'était  pas  tenable,  il  voulait 
qu'on  l'abandonnât;  mais  les  sires  de  Châteaubriant  et  de  Beau- 
manoir,  qui  l'avaient  fortifiée  de  leur  mieux,  s'obstinèrent  géné- 
reusement, avec  beaucoup  d'autres  Bretons,  «  à  la  tenir  et 
garder  pour  le  conte  de  Richemont,  connestable  de  France  ». 
Après  avoir  délibéré  sur  le  parti  à  prendre,  ces  braves  gens 
convinrent  qu'ils  résisteraient  jusqu'à  la  dernière  extrémité,  et 
ils  invitèrent  tous  ceux  qui  ne  voudraient  pas  rester  avec  eux  à 
quitter  la  ville  avant  qu'elle  fût  assiégée.  Jean  Ouschard,  capi- 
taine des  Ecossais,  partit  aussitôt,  avec  une  nombreuse  compagnie. 


1.  Fr.  26049,  n»»  689,  690.  Stevenson,  Préface,  p.  hj.  Portef.  Fontanieu, 
410-116,  au  6  janvier.  K  62,  n"  32.  Fr.  25768,  n"  227. 

2.  Gruel,  194.  Cousinot,  253. 

3.  Portef.  Fontanieu,  115-116,  au  6  janvier  1427.  S.   Luce,  Hist.  de  du 
Guesclin,  1,  248,  522. 


136  WARWICK   ASSIÈGE    PONTORSON    (14:27,    FÉVRIER) 

Cette  défection  n'affaiblit  pas  le  courage  des  Bretons;  ils  atten- 
dirent résolument  l'ennemi  '. 

Le  comte  de  Warwick  vint  mettre  le  siège  devant  Pontorson 
vers  la  fin  de  février  1427  *.  Ni  le  nombre  des  assiégeants,  ni  la 
renommée  de  leurs  capitaines,  ni  l'artillerie  formidable  qu'ils 
tournèrent  contre  la  place,  n'intimidèrent  la  vaillante  garnison. 
Elle  fit  des  sorties  et  repoussa  plusieurs  assauts,  dans  lesquels 
les  Anglais  perdirent  beaucoup  de  monde.  Elle  espérait  être 
bientôt  secourue,  sinon  par  le  duc  de  Bretagne,  du  moins  par  le 
connétable.  Richemont  s'était  rendu  en  Bretagne,  avec  J.  Stuart, 
le  maréchal  de  Boussac,  plusieurs  autres  capitaines  français  et 
bon  nombre  de  gens  d'armes  '.  Il  voulait  obtenir  de  son  frère 
d'autres  troupes  et  aller  au  secours  de  Pontorson.  Le  duc  était  à 
Dinan,  où  il  avait  appelé  toute  la  noblesse  de  Bretagne,  ban  et 
arrière-ban,  comme  s'il  avait  eu  l'intention  de  combattre.  Une 
armée  se  trouva  réunie  dans  la  lande  de  Vaucouleur,  où  elle 
fut  passée  en  revue,  puis  Jean  V  en  congédia  la  plus  grande 
partie,  sous  prétexte  que  Pontorson  était  trop  peu  de  chose 
pour  qu'il  aventurât  ainsi  sa  noblesse.  Beaucoup  de  seigneurs 
bretons  ne  demandaient  qu'à  marcher  au  secours  de  leurs  com- 
patriotes, et  nul  doute  qu'ils  eussent  suivi  avec  ardeur  le  conné- 
table, s'il  avait  voulu  les  mener  contre  les  Anglais. 

Pourquoi  donc  n'agissait-il  pas  avec  résolution?  Sans  doute  il 
craignait  de  mécontenter  son  frère,  et  il  n'avait  pas  confiance 
dans  ces  troupes  indisciplinées  qui  l'avaient  si  mal  secondé 
l'année  précédente;  mais  un  nouvel  échec  était-il  moins  préju- 
diciable à  ses  intérêts  et  à  son  honneur  que  celte  inaction  inex- 
plicable? En  conserverait-il  mieux  Talliance  de  la  Bretagne,  et 
n'avait-il  pas  le  devoir  de  secourir  ceux  qui  se  dévouaient  pour 
lui?  Au  contraire,  un  succès,  même  léger,  pouvait  relever  l'in- 
fluence du  parti  français,  empêcher  la  défection  de  Jean  V  et 
donner  plus  d'autorité  au  connétable.  La  courageuse  résistance 
des  défenseurs  de  Pontorson  fait  supposer  que  leurs  efforts, 
joints  à  ceux  d'une  armée  de  secours,  auraient  mis  les  assié- 
geants dans  une  situation  critique. 

Le  comte  de  Warwick,  instruit  du  rassemblement  de  troupes 


1.  Gruel,  194.  Cousinot,  233.  Le  Baud,  472.  D'Argentré,  773. 

2.  Le  27  février,  d'après  Gruel  et  D.  Morice,  et  non  le  H  janvier.  Voir 
aussi  la  Chron.  du  Mont  Saint-Michel,  publiée  par  S.  Luce,  I,  p.  29, 
note  1,  et  p.  256,  note  1. 

3.  Il  semblerait  même  qu'on  leva  le  ban  et  l'arrière-ban  pour  Xa.  journée 
de  Pontorson,  «  par  vertu  de  certain  mandement  général  par  nous  fait  que 
tous  nobles  et  autres,  suivans  la  guerre,  alassent  à  la  journée  qui  devoit 
estre  à  Pontorson,  »  lit-on  dans  des  lettres  royaux  (X?»  9193,  f°  276). 


CAPITULATION   DE   POiNTORSON   (1427)  137 

qui  se  faisait  dans  le  voisinage,  n'était  point  rassuré.  II  s'atten- 
dait à  être  attaqué  par  le  duc  de  Bretagne,  par  le  connétable, 
par  le  roi  de  France  lui-même.  Le  17  et  le  19  mars,  il  écrivait 
précipitamment  à  J.  Salvain,  bailli  de  Rouen,  pour  lui  or- 
donner d'envoyer,  sans  aucun  retard,  tous  les  soldats  qu'il 
pourrait  trouver  dans  le  pays  *.  Les  craintes  de  Warwick  ne  se 
réalisèrent  pas.  Th.  de  Scales,  capitaine  de  Saint-James-de- 
Beuvron,  eut  tout  le  temps  de  réunir  à  Avranches  des  troupes 
pour  couvrir  le  siège,  et  il  devint  plus  difficile  de  secourir  Pon- 
torson.  Cependant  cette  ville,  qui,  selon  le  duc  de  Betagne,  ne 
valait  pas  la  peine  d'être  défendue,  résistait  toujours,  et  la  gar- 
nison ne  perdait  pas  espoir.  Un  baron  normand,  Jean  de  La 
Haye,  seigneur  de  Coulonces-,  qui  s'était  déjà  distingué  à  Saint- 
James-de-Beuvron,  alla  chercher  des  renforts  en  Bretagne,  pour 
tendre  une  embuscade  aux  Anglais  d'Avranches,  qui  devaient 
amener  des  vivres  à  l'armée  de  Warwick.  Cette  année-là,  les 
vivres  étaient  fort  chers  '  et  les  assiégés  commençaient  à  en 
manquer.  Le  connétable  leur  envoya  d'Angers  et  de  Nantes  quel- 
ques troupes,  avec  1000  1.  t.  que  leur  porta  Guill.  Vendel,  son 
maître  d'hôtel,  mais  ce  n'était  là  qu'un  secours  bien  insuffisant 
et  ils  furent  obligés  de  demander  d'autres  ressources  à  leur 
propre  courage. 

Le  jeudi  saint,  17  avril,  le  baron  de  Coulonces,  avec  ses  com- 
pagnons, attaqua  Th.  de  Scales,  dans  un  lieu  appelé  les  Bas- 
Courtils,  entre  Pontorson  et  Avranches,  sur  les  grèves  du  mont 
Saint-Michel.  Il  fut  vaincu  et  tué.  Les  seigneurs  de  La  Hunau- 
daye,  de  Ghâteaugiron  périrent  aussi;  beaucoup  d'autres  furent 
pris,  comme  le  vicomte  de  Bellière  et  Jean  Gruel  *.  Th.  de  Scales 
alla  ensuite  rejoindre  Warwick.  Malgré  ce  désastre,  les  assiégés 
tinrent  encore  plus  de  trois  semaines  et  ne  cédèrent  qu'à  la 
famine,  quand  ils  eurent  perdu  tout  espoir  d'être  secourus. 
Lo  8  mai,  ils  sortirent  honorablement,  avec  leurs  bagages,  de 
cette  ville,  qu'ils  avaient  si  bien  défendue.  «  C'étaient  à  la  vérité 
de  vaillants  et  résolus  soldats,  qui  dussent  bien  avoir  été  nommés 
par  leurs  noms  et  surnoms,  pour  être  représentés  à  la  mémoire 
de  la  postérité  pour  le  grand  devoir  qu'ils  firent*.  »  Il  est  certain 

1.  Fr.  23189,  f»»  10  et  40.  Les  deux  lettres  sont  dans  Stevenson,  t.  II, 
68,  71-73.  —  Voir  aussi  Fr.  20587,  n»  9. 

2.  Voy.  Append.,  XLVI. 

3.  JJ  174,  f^  31. 

4.  Voir  la  Chronique  du  Mont  Saint-Michel,  publiée  par  Siméon  Luce 
(Société  des  anciens  textes),  t.  I,  p.  29,  257-264,  JJ  174,  f'>  145,  n»  338.Mon8- 
trelet,  IV,  288. 

5.  D'Argentré,  774.  Sur  le  siège  de  Pontorson,  voy.  Gruel,  194;  Cousinot, 
p. 253;  Le  Baud,  p.  472-73;  d'Argentré,  p.  774;  J.  Chartier,  I,  60.  Fr.  20684, 


138  ACTIVITÉ   DE  BEDFORD    (1427) 

que  Richemont  avait  réuni  des  troupes  à  Angers  pour  secourir 
Pontorson  \  et  il  est  difficile  de  comprendre  pourquoi  il  ne  les 
conduisit  pas  lui-même  contre  les  ennemis.  Le  cas  en  valait  la 
peine.  Sans  doute  il  n'aurait  pas  été  secondé  par  son  frère 
Jean  V,  mais  il  n'en  allait  pas  moins  perdre  entièrement  son 
appui.  D'autre  part,  après  Saint-James-de-Beuvron,  ce  nouvel 
échec  n'était  guère  propre  à  relever  son  prestige.  Il  eût  donc 
mieux  valu,  pour  lui,  montrer  dans  cette  circonstance  l'audace 
dont  il  fit  preuve  en  d'autres  cas. 

Il  n'avait  pas  attendu  la  fin  du  siège  de  Pontorson  pour  revenir 
à  la  cour,  où  l'appelaient  d'ailleurs  les  devoirs  de  sa  charge.  Il  est 
juste  de  reconnaître  que  la  direction  de  la  guerre  n'avait  jamais 
été  aussi  difficile,  depuis  qu'il  avait  pris  l'épée  de  connétable. 
L'impulsion  de  Bedford  se  faisait  partout  sentir.  Il  avait  donné 
au  comte  de  Salisbury  les  biens  qui,  en  dehors  de  la  Bretagne, 
appartenaient  à  Jean  V  ^  ;  il  faisait  lever  en  Normandie  et  dans 
les  autres  pays  soumis  180,000  livres  tournois  pour  acheter  des 
canons,  des  munitions  de  guerre,  pour  payer  1200  lances,  avec 
les  archers  destinés  à  la  conquête  du  Maine  et  de  l'Anjou 
(4  mai)  ^;  il  nommait  le  comte  de  SufFolk  capitaine  général  dans 
le  Vendômois,  le  pays  Chartrain,  la  Beauce  et  le  Gâtinais,  avec 
ordre  de  combattre  partout  les  Français  ;  il  voulait  prendre  Ven- 
dôme et  Montargis,  afin  de  s'ouvrir  le  chemin  de  la  Loire  et  de 
préparer  le  siège  d'Orléans  *. 

Le  connétable  avait  fort  à  faire  pour  tenir  tête  à  un  ennemi 
aussi  actif.  Il  semble,  d'après  un  document  anglais,  qu'il  fit,  de 
son  côté,  les  plus  louables  efforts.  Dans  les  lettres  par  lesquelles 
Henri  VI  nomme  Suffolk  capitaine  général  pour  le  fait  de  la 
guerre  dans  le  Vendômois,  la  Beauce,  le  pays  Chartrain  et  le 
Gâtinais,  on  lit  que  les  Français  occupent  plusieurs  villes  et  châ- 
teaux de  ces  pays,  «  où  ils  se  multiplient  et  se  mettent  sus  en 
puissance  de  jour  en  jour  »  (20  mai  1427)  ^.  D'autres  documents 


f»  549.  Fr.  25767,  n»s  i97,  199,  211,  216,  217.  Fr.  25768,  n°'  219,  223,  225,  227, 
232.  Fr.  26049,  nos  555,  687,  689-699,  709,  712,  715,  718,  719.  Fr.  26050,  n»»  740, 
746,  749.  Fr.  26274,  n°^  103,  104.  JJ  174,  f»  7  v».  Clairamb.,  t.  11,  f"  683. 
Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  H65-H66, 1206.  Clwon.  du  Mont  Saint- 
Michel,  253-258.  A  celte  époque,  des  marins  bretons  avaient  menacé  les 
côtes  du  Devonshire  (Moreau,  705,  ou  Bréquigny,  81,  f"'  50,  53). 

1.  Au  mois  d'avril,  il  avait  réuni  à  Angers,  pour  le  secours  de  Pontor- 
son, des  troupes  écossaises,  castillanes,  françaises,  qui  reçurent  même 
leur  solde.  P.  Bessonneau  devait  conduire  l'artillerie  (Fr.  20684,  f-  549). 

2.  JJ  173,  f"  316  (28  avril). 

3.  Fr.  26049,  n"  712. 

4.  Fr.  26049,  n°  724. 

5.  Fr.  26049,  no  724. 


RICHEMONT  RÉSISTE  AUX   ANGLAIS   (1427)  139 

de  même  provenance  nous  apprennent  qu'il  y  avait  eu  à  Rouen 
une  nouvelle  conspiration  contre  les  Anglais  et  qu'un  bourgeois, 
nommé  J.  Aubert,  avait  essayé,  avec  ses  complices,  de  livrer 
cette  ville  aux  Français,  pendant  la  semaine  sainte  *.  Si  l'on  consi- 
dère que  des  troupes  de  Charles  VII  avaient  paru,  à  cette  même 
époque,  dans  le  voisinage  d'Evreux,  on  peut  supposer  qu'elles 
étaient  plutôt  destinées  à  favoriser  la  tentative  de  J.  Aubert 
qu'à  secourir  Pontorson,  La  guerre,  dont  nous  ignorons  les 
détails,  se  fit  aussi  dans  la  Normandie,  l'Ile-de-France,  le 
Maine,  l'Anjou,  partout,  en  un  mot,  où  Charles  VII  avait  encore 
des  partisans  *,  et,  si  l'attaque  fut  impétueuse,  la  résistance  fut 
certainement  très  vive.  La  ville  de  Rambouillet,  dont  les  murs 
avaient  été  détruits,  fut  occupée  et  remise  en  état  de  défense; 
Laval  et  Montargis  furent  munis  de  vivres  et  de  troupes  avec  une 
«âge  prévoyance,  et,  s'il  est  regrettable  que  Richemont  n'ait  pas 
fait  plus  d'efforts,  pour  délivrer  Pontorson,  il  faut  bien  recon- 
naître qu'il  avait  d'autres  soucis  et  d'autres  devoirs,  auxquels  il 
ne  faillit  point  '. 

Les  forces  du  Midi  devaient  aussi  concourir  à  la  défense  des 
provinces  du  Nord,  sous  le  commandement  du  comte  de  Foix,  qui 
aimait  mieux  rester  auprès  de  Charles  VII  que  d'aller  combattre 
les  Anglais  dans  son  gouvernement  de  Guyenne  et  Languedoc. 

Il  eût  peut-être  mieux  valu  faire  une  diversion  de  ce  côté  que 
de  payer  fort  cher  l'inaction  des  Anglais  et  l'évacuation  de  quel- 
ques places;  mais  le  comte  de  Foix  et  le  comte  de  Coraminges, 
son  frère,  trouvaient  sans  doute  leur  avantage  à  ne  point  s'éloi- 
gner de  la  cour  '%  car  il  était  facile  d'obtenir  les  faveurs  du  roi, 
quand  on  savait  lui  plaire.  Maintenant  c'était  Camus  de  Vernet  % 

1.  Ms.  Fr.  26049,  n»  731.  —  J.  Aubert,  avec  ses  complices,  s'enfuit  à 
Bruges  et  les  magistrats  de  cette  ville  refusèrent  de  les  livrer  à  J.  Pigache, 
sergent  de  Henri  VI  (n"  731). 

2.  Dans  la  Champagne  et  le  Soissonnais,  par  exemple  (voy. Stevenson,!, 
p.  23).  On  voit  dans  JJ  174,  f»  43,  que  Henri  VI  donna  le  4  février  1428,  à 
J.  Talbot,  les  terres  qui  appartenaient  à  Rob.  StalTord,  écuyer,  capitaine 
des  ville  et  château  de  La  Ferté-Bernard,  parce  que,  peu  auparavant,  celui- 
■ci  avait  laissé  prendre  ladite  ville  et  le  château.  Une  autre  pièce,  du  8  mai 
4427,  mentionne  «  latrayson  den'enièrement  faicte  et  conspirée  de  la  prinse 
de  Pethiviers  »  par  les  Français  (JJ  174,  f"  63,  n»  loi).  Cette  ville  avait  été 
livrée  aux  Anglais  auparavant,  et  G.  de  La  Trémoilie  n'aurait  pas  été  étran- 
ger à  cette  trahison,  d'après  Cousinot,  p.  201. 

3.  Fr.  26050,  n"  771.  Fr.  20684,  f-  546. 

4.  Fr.  20587,  n"  33,  34.  Fr.  25767,  n"»  194,  196,  204-210.  Fr.  23768, 
n"  221,  222,  234-237,  244.  Fr.  26049,  n"  680,  686.  Fr.  26030,  n"  732,  733, 
733,  737.  Portef.  Fontanieu,  113-116,  aux  19  et  29  janvier,  18  aoi^t,  13  sep- 
tembre 1427.  K  62,  n»  33. 

5.  «  Sachent  tuit  que  je,  Camus  de  Vernet,  dit  de  Beaulieu,  escuier  des- 
«uierie  du  roi  •  etc.,  avec  signature  (Pièces  orig.,  dossier  Vernet,  n»  2).  Voir 


140  ASSASSINAT  DE  BEAULIEU   (1427,   JUIN) 

dit  de  Beaulieu,  simple  écuyer  commandant  une  compagnie  de 
la  garde  du  corps,  qui  tenait  le  premier  rang  dans  ses  bonnes 
grâces.  Il  était  parvenu,  bien  mieux  que  L.  de  Chalançon,  à 
remplacer  le  sire  de  Giac  et  «  faisait  encore  pis  *  ».  Tous  ceux 
dont  il  craignait  l'influence,  il  les  écartait  du  roi,  sans  en  excepter 
le  connétable,  auquel  il  devait  sa  situation  *. 

La  reine  de  Sicile  et  les  principaux  seigneurs,  mécontents  de 
ce  nouveau  favori,  portèrent  leurs  plaintes  à  Richemont,  qui 
n'était  pas  d'humeur  à  tolérer  longtemps  l'outrecuidance  d'un 
si  mince  personnage.  Jean  de  Brosse,  seigneur  de  Boussac  et  de 
Sainte-Sévère,  qui  avait  peut-être  des  griefs  personnels  contre  le 
favori,  se  chargea  de  le  faire  disparaître.  Pour  cela,  il  s'entendit 
avec  un  gentilhomme  appelé  Jean  de  La  Granche,  ami  intimé  de 
de  Beaulieu  '.  La  cour  se  trouvait  alors  à  Poitiers  (juin).  Un 
jour  que  Camus  de  Vernet  et  Jean  de  La  Granche  se  promenaient 
seuls  sur  les  bords  du  Glain,  dans  une  prairie  voisine  du  châ- 
teau, survinrent  cinq  à  six  compagnons  apostés  près  de  là  par 
Boussac,  Le  roi,  qui  regardait  par  une  fenêtre,  vit  alors  une 
scène  horrible.  Les  assassins  frappaient  à  grands  coups  d'épée 
le  malheureux  Beaulieu,  qui  tomba  la  tête  fendue  ;  ensuite,  ils  lui 
coupèrent  une  main,  comme  on  avait  fait  au  sire  de  Giac,  et, 
quand  ils  se  furent  assurés  que  leur  victime  avait  cessé  de  vivre, 
ils  prirent  la  fuite.  Le  roi,  saisi  d'horreur,  sut  bientôt  que  c'était 
son  favori  qu'on  venait  de  tuer  si  audacieusement  sous  ses  yeux, 
quand  il  vit  Jean  de  la  Granche  ramener  au  château  le  mulet  de 
son  compagnon.  Il  ordonna  qu'on  poursuivît  les  assassins,  pour 
les  livrer  à  la  justice;  ses  gardes  montèrent  à  cheval,  fouillèrent 
les  environs,  mais  on  ne  put  découvrir  ceux  qui  avaient  fait  le 
coup  *  (fin  de  juin  1427).  Les  chroniqueurs  du  xv"  siècle  racon- 

aussi  Pièces  orig.,  t.  553,  dossier  Beaulieu.  Camus  était  alors  capitaine  de 
Poitiers,  premier  écuyer  et  grand  maître  de  l'écurie  (Anselme,  VIII,  488; 
Gruel,  194;  Cousinot,  247,  248). 

1.  Gruel,  194. 

2.  J.  Chartier,  I,  23. 

3.  11  est  à  remarquer  que  ni  Cousinot,  p.  200,  247,  248,  ni  Gruel  ne 
mettent  en  cause  le  connétable  dans  l'assassinat  de  Beaulieu.  Peut-être 
Boussac  avait-il  à  se  plaindre  personnellement  de  Beaulieu.  —  J.  Chartier 
dit  que  Beaulieu  fut  tué  par  des  gens  du  connétable,  sans  ajouter  d'autres 
détails.  D'Argentré,  Le  Baud,  D.  Morice  attribuent  l'initiative  au  conné- 
table. D'Argcntré  ajoute  cette  réflexion  :  «  tant  faisoit  mal  s'attaquer  là.  » 

4.  Gruel,  194.  Cousinot,  200,  248.  J.  Chartier,  I,  54,  III,  189.  Le  lundi 
7  juillet  1427,  le  Parlement,  après  informations,  ordonna  de  k  prendre  aux 
corps,  en  lieu  sainct  et  dehors,  un  appelle  Baugiz,  cappitaine  de  Roche- 
corbon,  un  autre  appelle  Le  Borgne  et  un  antre  appelle  Loys  Mignot,  les- 
quelx,  par  lesdictes  informacions,  la  court  a  trouvé  chargez  de  la  dicte 
mort  (de  feu  Jehan  Le  Vernet,  dit  le  Camus  de  Beaulieu)  [X2a21,  f°  76  v«]. 


G.   DE  LA  TRÉMOILLE   (1427)  441 

tent  ou  mentionnent  brièvement  ce  crime,  qu'ils  attribuent  plutôt 
à  Boussac  qu'à  Richemont,  et  cela  sans  aucun  blâme,  comme  s'il 
s'agissait  du  fait  le  plus  simple  et  le  plus  naturel.  Il  est  probable 
qu'à  cette  époque  l'assassinat  de  Beaulieu  n'excita  pas  la  répro- 
bation que  soulèverait  aujourd'hui  un  acte  pareil  ;  mais  on  peut 
dire  que,  si  le  connétable  en  avait  ordonné  plusieurs  autres  de  ce 
genre,  il  aurait  moins  mérité  le  surnom  de  justicier  que  celui 
de  bourreau  *. 

Richemont  eut  alors  l'idée  malheureuse  de  remplacer  Camus 
de  Vernet  par  Georges  de  La  Trémoille,  qui  l'avait  si  bien  secondé 
dans  sa  lutte  contre  P.  de  Giac. 

Georges  de  La  Trémoille  ^,  comte  de  Guines,  de  Boulogne  et 
d'Auvergne,  baron  de  Sully,  de  Graon,  de  Saint-Hermine,  de 
l'Isle-Bouchard,  était  un  riche  et  puissant  seigneur;  mais  jusque- 
là  son  rôle  n'avait  pas  été  à  la  hauteur  de  sa  fortune  et  de  son 
ambition.  Attaché  d'abord  au  parti  bourguignon,  premier  cham- 
bellan de  Jean  sans  Peur,  en  1407,  il  avait  ensuite  embrassé  le  parti 
armagnac  et  avait  été,  comme  Richemont,  un  des  familiers  du 
vieux  duc  de  Berry  et  du  Dauphin,  duc  de  Guyenne.  Il  avait  su 
plaire  à  la  duchesse  de  Berry,  comme  Artur  de  Bretagne  à  la 
duchesse  de  Guyenne.  Pris  aussi  à  la  bataille  d'Azincourt,  il 
n'avait  pas  tardé  à  se  racheter,  et,  peu  après  la  mort  du  duc  de 
Berry,  il  avait  épousé  (16  novembre  1416)  sa  veuve,  Jeanne, 
comtesse  de  Boulogne  et  d'Auvergne  ',  qui  était  morte  sans  en- 
fants (1422),  en  lui  laissant  l'usufruit  de  ses  domaines. 

A  ce  moment  même  (2  juillet  1427),  il  se  remariait  avec  la 
veuve  de  Giac,  Catherine,  dame  de  l'Isle-Bouchard,  de  Roche- 
fort-sur-Loire,  de  Doué,  de  Gençay  *.  G.  de  La  Trémoille  était  un 


1.  Beaulieu  fut  assassiné  vers  la  fin  de  juin  1427.  Vallet  de  V.  (t.  I,  455, 
note  1)  dit  que  le  bâton  de  maréchal  fut,  e«  14^7  pour  Sainte-Sévère 
(Boussac)  le  prix  de  cette  mission,  et  il  renvoie  à  Cousinot,  ch.  221.  Or, 
dans  son  édition  de  Cousinot  (p.  200,  note  5),  Vallet  de  V.  dit  que  Sainte- 
Sévère  fut  maréchal  de  France  le  H  juillet  143i6.  La  Thaumassière  {Hist. 
du  Berry,  654-655)  donne  la  même  date  du  17  juillet  1426,  ainsi  que  le 
P.  Anselme  (VII,  71).  M.  de  Beaucourt  donne  aussi  la  date  de  juillet  1426, 
dans  son  Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  568. 

2.  Né  vers  1385,  fils  de  Guy  VI  de  La  Trémoille  (-f  1398)  et  de  Marie  de 
Sully.  Il  avait  environ  quarante  ans  en  1427  (Anselme,  IV,  164;  VI,  345; 
Riog.  Didot,  article  La  Trémoille,  t.  29).  Il  est  à  remarquer  qu'il  signe 
toujours  George  de  La  Tremoylle,  tout  au  long  (voy.  Clairamb.,  t.  204  et  205). 

3.  Il  l'avait  traitée  si  durement  qu'elle  fut  obligée  de  le  quitter  (X*"  9200, 
f*  385  V»  ;  voir  aussi  X»»  9197,  f  192  v), 

4.  Anselme  dit,  par  inadvertance  (t.  IV,  164),  le  2  juillet  1425,  au  lieu 
de  1427.  On  a  vu  que  Giac  fut  exécuté  en  février  1427.  Des  lettres  de 
rémission  sont  accordées  le  9  septembre  1427,  par  Henri  VI,  à  Anne, 
femme   de   Jean  Hoste,  bourgeois  de  Bruges,  âgée   d'environ   vingt  et 


142  FAVEUR   DE   G.    DE   LA   TUÉMOILLE    (1427) 

des  conseillers  du  roi.  Son  frère,  Jean  de  La  Trémoille,  seigneur 
de  Jouvelle,  avait  auprès  de  Philippe  le  Bon,  dont  il  était  le  pre- 
mier maître  dhôtel,  un  crédit  que  le  connétable  espérait  peut- 
être  utiliser.  Il  l'avait  déjà  chargé  d'une  mission  diplomatique 
auprès  de  Philippe  le  Bon  •.  Habile,  audacieux,  cprrompu,  G.  de 
La  Trémoille  pouvait  être  un  auxiliaire  précieux,  mais  aussi  un 
ennemi  redoutable.  Richemont  devait  le  connaître  assez  ^  pour- 
savoir  qu'il  ne  trouverait  pas  en  lui  un  de  ces  conseillers  sages  et 
honnêtes  dont  il  aurait  voulu,  disait-il,  entourer  le  roi;  mais  il 
croyait  sans  doute  qu'en  maintenant  La  Trémoille  sous  sa  direc- 
tion, il  tirerait  parti  de  ses  relations  et  de  ses  talents.  En  tout 
cas,  on  ne  peut  supposer  qu'il  ait  fait  un  choix  aussi  important 
sans  avoir  consulté  la  reine  de  Sicile,  et  il  est  certain  qu'ils  ne 
soupçonnaient  ni  l'un  ni  l'autre  la  dangereuse  ambition  de  leur 
protégé  ^. 

Quant  à  Charles  VII,  il  avait,  mieux  que  personne,  deviné  le 
véritable  caractère  de  La  Trémoille,  et  il  éprouvait  peut-être  quel- 
que répugnance  à  recevoir  dans  son  intimité  celui  qui  avait 
conspiré  la  perte  du  sire  de  Giac  *  ;  mais  «  le  connestable  luy  dist 
que  c'estoit  un  homme  puissant  et  qui  le  pourroit  bien  servir.  Et 
le  Roy  luy  dist  :  Beau  cousin,  vous  me  le  baillez,  mais  vous  en 
repentirez,  car  je  le  congnois  mieux  que  vous  ^  »  Richemont  eut 
tort  de  ne  pas  croire  à  cet  avertissement,  et  la  prédiction  du  roi 
se  réalisa  bientôt.  C'est  ainsi  que,  par  la  volonté  du  connétable, 
G.  de  La  Trémoille  devint  le  favori  de  Charles  VIL  II  en  profita 
pour  devenir  le  maître  de  la  France  ^. 

uu  ans,  qui  s'est  enfuie  de  Bruges,  le  lendemain  de  la  Pentecôte  1426, 
avec  Georges  de  La  Trémoille,  et  qui  est  encore  en  sa  compagnie,  mais 
qui  demande  à  revenir  en  Flandre  (JJ  174,  f  22).  La  Trémoille,  arrêté  le 
30  décembre  1423,  par  Perrinet  Grasset,  capitaine  de  La  Charité,  puis  relâ- 
ché, moyennant  rançon,  était  allé  à  Bruges  trouver  le  duc  de  Bourgogne 
(de  Beaucourt,  t.  II,  128,  373,  373;  Collect.  de  Bourgogne,  t.  100,  f»  213;  Con- 
saux  de  Tournay,  II,  196,  203,  204).  Voy.  ci-dessus,  p.  113  et  note  4, 

1.  C'est  en  parlant  pour  cette  mission  qu'il  avait  été  arrêté. 

2.  Il  avait  dû  connaître,  avant  la  bataille  d'Azincourt,  La  Trémoille,  qui 
était  aussi  un  des  familiers  des  ducs  de  Berry  et  de  Guyenne.  Une  lettre 
du  connétable  prouve  qu'en  1427  il  était  dans  les  meilleurs  termes  avec 
La  Trémoille  (voir  ^p/jend.,  XLVU). 

3.  Redet,  Catalogue  de  D.  Fonteneau,  1839,  in-8,  p.  323.  Arch.  des  aff. 
étrangères,  t.  21,  France,  f"  76  v  et  s.uiv.  Fr.  2140a,  f"  33.  Bib.  de  l'Ecole 
des  chartes,  t.  XXXIII,  1872,  p.  30. 

4.  Toutefois  La  Trémoille,  homme  de  plaisir  et  qui  était  un  des  fami- 
liers du  roi,  avant  sa  brouille  avec  le  sire  de  Giac,  ne  devait  pas  être  anti- 
pathique à  Charles  VII,  qui  lui  pardonna  facilement.  Dès  le  mois  de  mai 
G.  de  La  Trémoille  était  revenu  à  la  cour. 

5.  Gruel,  194. 

6.  «  En  1427  entra  en  court  le  sire  de  La  Trémoille  et  de  Sulli,  qui,  en 


LA   TRÉMOILLE   ATTAQUE    RICHEMONT    (1427)  143 

Il  ne  tarda  pas  à  exercer  l'empire  le  plus  absolu  sur  le  roi,  qui 
semblait  avoir  conscience  de  sa  propre  faiblesse,  quand  il  enga- 
geait Richement  à  faire  un  autre  choix.  La  ïrémoille  n'ignorait 
pas  l'antipathie  que  le  connétable  inspirait  au  roi,  et  il  travailla 
perfidement  à  précipiter  la  disgrâce  de  son  protecteur,  dès  qu'il 
n'eut  plus  besoin  de  son  appui.  Il  sut  écarter  Yolande  *,  dont 
l'influence  l'eût  gêné.  D'ailleurs,  il  fut  trop  bien  servi  par  les 
circonstances.  Le  duc  de  Bretagne,  qui  avait  continué  ses  négo- 
ciations avec  Bedford,  allait  enfin  obtenir  la  paix  qu'il  sollicitait. 
Le  3  juillet  1427,  Henri  VI  chargeait  ses  ambassadeurs  de  con- 
clure un  traité  avec  le  duc  de  Bretagne,  selon  les  ouvertures  que 
celui-ci  avait  faites  au  régent^.  Par  lettres  du  12  juillet,  le  comte 
de  Huntingdon  recevait  les  «  conté,  terre,  seigneurie  et  baronnie 
d'Yvry,  »  dont  Henri  V  avait  gratifié  jadis  Artur  de  Bretagne  et 
qui  étaient  maintenant  confisqués,  pour  la  rébellion,  désobéis- 
sance et  autres  crimes  de  lèse-majesté  commis  par  lui  envers  le 
roi  d'Angleterre  ^.  Le  connétable  de  Charles  VII  n'avait  qu'à  se 
féliciter  de  cette  décision;  mais  il  ne  put  que  déplorer  amèrement 
la  rupture  du  traité  de  Saumuretlaperte  de  l'alliance  bretonne. 
Enfin  les  Anglais  assiégeaient  Montargis  et  faisaient,  par  mer, 
une  tentative  sur  La  Rochelle  *. 

Comme  si  ce  n'eût  pas  été  assez  d'avoir  à  repousser  toutes  ces 
attaques  avec  des  ressources  très  insuffisantes,  Richement  éprou- 
vait encore  d'autres  contrariétés,  en  voyant  que  le  nouveau 
favori  ne  cherchait  qu'à  lui  nuire.  Le  roi  enleva  d'abord  au  con- 
nétable le  gouvernement  du  Berry  ^  pour  le  donner  à  G.  de  La 
Trémoille.  C'était  là  un  acte  dont  la  signification  n'était  pas  dou- 
teuse; c'était  le  commencement  d'une  lutte  qui  allait  durer 
six  ans  et  ajouter  aux  périls  de  la  guerre  étrangère  les  malheurs 
d'une  guerre  civile.  La  cour  fut  bientôt  divisée  en  deux  partis, 
celui  du  connétable  et  celui  de  La  Trémoille.  Outre  son  alliée 

tout  cas,  et  devant  tous,  prinst  auctorité  et  gouvernement,  qui  à  plusieurs 
tourna  à  grant  desplaisance,  pour  tant  que  entour  le  duc  de  Bourgoigne 
furent  tous  ceux  de  son  parenté  ;  avec  ce  que  lui-mesme  avoit  le  roi  guer- 
royé et  par  son  moyen  avoit  esté  mis  es  mains  du  seigneur  de  Rochefort, 
sou  pronchain  parent,  qui  le  parti  tint  des  Anglois,  le  chastel  d'Estampes, 
avec  Penthviers  et  autres  places,  dont  il  faisoit  au  roi  guerre.  Néant- 
moins  nul  ne  fut  qui  contredire  l'osast.  »  (Gousinot,  p.  201  ;  voir  aussi  la 
note  3.) 

1.  De  Beaucourt,  t.  Il,  146,  153. 

2.  Arch.  de  la  Loire-lnf.,  cass.  47,  E,  111.  Portef.  Fontanieu,  113-116,  au 
3  juillet. 

3.  Vov.  Append.  XLVIII.  Voy.  ci-dessus,  p.  60. 

4.  Fr.'20a83,  f»  63.  Vallet  de  V.,  Charles  F//,  t.  Il,  24. 

5.  Voy.  La  Thaumassière,  p.  46.11  indique  la  date  1426,  mais  ce  doit  être 
1427. 


144  LLTTE   ENTRE   RICHEMONT   ET   LA   TRÉMOILLE   (1427) 

fidèle,  la  reine  Yolande,  Richemont  eut  encore  pour  lui  les 
grands  seigneurs,  comme  les  comtes  de  Glermont,  de  la  Marche, 
d'Armagnac,  de  Pardiac;  mais  La  ïrémoille,  qui  disposait  des 
faveurs  royales,  qui  avait  par  lui-même  une  grande  fortune  et 
de  hautes  relations,  put  attirer  et  retenir  dans  son  alliance  tous 
ceux  que  l'ambition  et  l'intérêt  poussaient  à  partager  sa  fortune, 
Regnault  de  Chartres,  Guill.  d'Albret,  R.  de  Gaucourt,  J.  deHar- 
pedenne,  seigneur  de  Belleville  \  qui  avait  épousé  Marguerite 
de  Valois,  sœur  naturelle  de  Charles  VII,  etc.  ^  Combattre  les 
Anglais  et  lutter  contre  La  ïrémoille  soit  pour  le  renverser,  soit 
pour  déjouer  ses  machinations  incessantes,  telle  fut  désormais 
la  double  tâche  du  comte  de  Richemont,  rôle  ingrat  et  déplorable, 
où  il  usa  vainement  toutes  ses  forces,  où  il  se  trouva  réduit,  par 
la  malignité  de  son  adversaire,  à  prendre  l'attitude  d'un  rebelle, 
quand  il  ne  voulait  que  se  consacrer  au  service  du  roi  et  de  la 
France  ! 

Le  connétable  conclut  d'abord  un  pacte  d'alliance  avec  les 
comtes  de  Glermont  et  de  Pardiac  «  au  bien  et  prouffît  de  mon- 
seigneur le  Roi  et  de  Sa  Seignorie  »  contre  ceux  qui  feraient  ou 
voudraient  «  faire  ou  procurer  le  dommaige,  desplaisir  ou  déshon- 
neur de  mon  dit  seigneur  le  Roi  et  de  Sa  Seignorie  ^  »  (4  août  1427). 
Ce  traité  ne  fut  pas  suivi  d'un  effet  immédiat,  car  il  fallut  aupa- 
ravant s'occuper  des  Anglais.  Ils  échouèrent  dans  leur  tentative 
sur  La  Rochelle  (août  1427)  *  et  ils  subirent  un  autre  échec  en- 
core plus  grave  devant  Montargis.  Bedford  attachait  la  plus 
grande  importance  à  la  prise  de  cette  ville,  dont  la  possession 
lui  eût  ouvert  le  chemin  de  la  Loire.  Il  avait  envoyé  devant 

1.  De  Beaucourt,  t.  II,  lo8-lo9.  Jeaa  Harpedenue  réclamait  le  château  de 
Mervent  à  Richemont  et  lui  avait  intenté  uu  procès  (X'a  9200,  f"  36,  147; 
Zu  16,  fo»  126  V»,  143;  Fr.  20416, f»  22).  R.  de  Gaucourt  était,  par  sa  fename, 
beau-frère  de  P.  Frotier  (X"»  9200,  f*  242);  il  revenait  alors  de  captivité. 

2.  11  semble  que  Bedford  ait  voulu  brouiller  G.  de  La  Trémoille  avec 
son  frère,  Jean  de  La  Trémoille,  seigneur  de  Jouvelle,  en  donnant  à  ce 
dernier  tous  les  biens  provenant  de  la  succession  de  leur  mère  et  actuel- 
lement en  possession  de  son  frère  Georges  (lettres  du  24  juillet  1427,  dans 
le  registre  JJ  173,  f-  346  v»,  n"  716). 

3.  Preuves  de  Ihist.  de  Bretagne,  II,  col.  1199.  Le  comte  de  Pardiac  conclut 
ensuite  à  Ebreuil,  le  dernier  jour  d'août,  avec  le  comte  de  Glermont,  un 
autre  traité,  dans  lequel  étaient  compris  son  frère  le  comte  d'Armagnac  et 
son  beau-père  Jacques,  roi  de  Hongrie,  de  Sicile  et  de  Jérusalem,  comte  de 
la  Marche  et  de  Castres.  (P  1373  ',  cote  215S  ;  de  Beaucourt,  Charles  VU, 
t  II,  p.  150  et  note  4).  Jean  IV  d'Armagnac  était  beau-frère  du  connétable 
(voy.  Anselme, III,  420  et  suiv.).  Les  comtes  de  la  Marche  et  de  Pardiac  étaient 
ennemis  personnels  de  La  Trémoille,  pour  avoir  donné  asile  à  sa  première 
femme,  la  duchesse  de  Berry,  qui  leur  avait  laissé  une  partie  de  ses  biens 
(X»a  9200,  f"»  121  v»,  135  V,  169,  385  V). 

4.  Fr.  20583,  f»  63. 


SIÈGE  DE  MONTARGIS   (1427)  145 

Montargis  les  troupes  destinées  d'abord  au  siège  de  Vendôme 
avec  Guiil.  de  La  Pôle,  comte  de  Suffolk  et  de  Dreux,  le  comte 
de  Warwick,  Talbot,  et  Simon  Morbier,  prévôt  de  Paris  (juillet 
1427)  *. 

Richemont  comprenait  également  la  nécessité  de  défendre 
une  place  dont  la  prise  eût  découvert  Orléans  et  facilité  les  com- 
munications des  Anglais  avec  la  capitale.  Il  envoya  une  première 
fois  des  secours  à  Montargis,  avec  Jean  Girard,  en  juillet  1427, 
mais  sans  succès  ^,  puis,  quand  il  sut  que  le  siège  était  poussé 
avec  acharnement  et  que  la  ville  allait  être  réduite  par  la  famine 
à  capituler  %  il  voulut  la  sauver  à  tout  prix.  Malgré  les  obsta- 
cles qui  l'arrêtaient,  il  réunit  à  Gien  et  à  Jargeau  *  tous  les  gens 
d'armes  qu'il  put  trouver  :  le  connétable  d'Ecosse,  le  bâtard 
d'Orléans,  La  Hire,  Saintrailles,  les  sires  de  Gaucourt  et  de  Gui- 
try, Giraud  de  La  Pallière,  Alain  Giron,  Guillaume  d'Albret,  sei- 
gneur d'Orval,  J.  Girard,  Gauthier  de  Brusac,  les  sires  de  Gra- 
viile  et  d'Arpajon,  etc.  ^. 

Le  connétable  n'avait  pas  reçu  assez  d'argent  pour  payer  ces 
troupes,  et  elles  refusaient  de  marcher.  Pénétré  de  l'importance 
de  l'entreprise,  il  emprunta  une  somme  considérable  à  un  négo- 
ciant de  Bourges,  nommé  J.  Besson,  en  lui  laissant  comme  gage 
une  couronne  d'or,  enrichie  de  pierreries  et  qui  valait  au  moins 

10  000  écus  ^.  Après  avoir  ainsi  satisfait  les  gens  d'armes  et 
réuni  des  approvisionnements  ^,  il  les  voulut  conduire  lui-même 
à  Montargis;  mais  «  tous  les  capitaines  et  gens  de  grand  estât 
l'en  destournèrent  et  luy  dirent  que  ce  n'estoit  pas  le  faict  d'un 
homme  de  telle  maison  et  connestable  de  France  d'aller  avitailler 
une  place  ;  et,  quand  il  iroit,  ce  debvroit  estre  pour  attendre  la  ba- 
taille, et  il  n'avoit  pas  des  gens  pour  ce  faire  '.  »  Il  chargea  le  bâ- 
tard d'Orléans  et  La  Hire  de  diriger  l'expédition.  Ces  vaillants  ca- 
pitaines surprirent  les  ennemis,  firent  entrer  un  convoi  de  vivres 

1.  Fr.  26030,  n"  746,  807.  Fr.  4484,  f<>»  43  v»,  47,  48,  50-65,  68-73,  176. 
Voir  ^^/)endîce,  XHX.  Jean,  seigneur  de  Talbot  et  de  Fournival,  avait  déjà 
une  grande  réputation  militaire.  Bedford  lui  donna  de  vastes  domaines. 

11  était  le  parrain  de  son  fils  (JJ  174,  î°'  45,  47,  63). 

2.  Fr.  20684,  f"  546  v».  «  A  la  première  fois  ne  firent  rien,  puis  ils  y 
retournèrent  une  autre  fois.  »  (Gruel,  195.) 

3.  Les  habitants  furent,  pendant  deux  mois  ou  environ,  «  tenus  en 
grant  détresse  et  nécessité  et  telement  qu'ilz  n'avoient  plus  de  quoi 
vivre  »  {Ordonn.  XIII,  p.  152). 

4.  Arrondissement  d'Orléans. 

5.  Fr.  26084,  P»  550.  Gruel,  195.  Cousinot,  243-247. 

6.  Gruel,  195. 

7.  Les  vivres  étaient  alors  fort  chers,  et  les  Anglais  eux-mêmes  éprou- 
vaient de  la  difQculté  à  s'en  procurer  (JJ  174,  i°  31). 

8.  Gruel,. 195. 

Richemont.  10 


146  DÉFAITE  DES  ANGLAIS  A  MONTARGIS   (1427,   5   SEPT.) 

dans  Montargis,  et,  secondés  par  les  habitants  et  la  garnison,  ils  mi- 
rent les  assiégeants  en  pleine  déroute.  Les  Anglais  éprouvèrent 
de  grandes  pertes  et  se  retirèrent,  abandonnant  leurs  approvi- 
sionnements, leurs  bagages,  leur  artillerie  (5  septembre  1427)  '. 

Richemont,  qui  était  à  Jargeau,  fut  informé  promptement 
de  ce  succès.  Il  l'apprit  avec  une  joie  enthousiaste,  et,  sans 
attendre  un  rapport  circonstancié  sur  cette  journée,  il  se  hâta 
de  publier  partout  cette  bonne  nouvelle.  Dès  le  lendemain 
(6  septembre),  il  écrivit  lui-même  de  Jargeau  aux  Lyonnais,  pour 
leur  annoncer  la  victoire  que  ses  gens  venaient  de  remporter  sur 
les  Anglais.  Dans  sa  précipitation,  il  ne  prit  pas  le  soin  de  con- 
trôler les  premiers  renseignements  qu'il  avait  reçus.  Il  répétait 
que  beaucoup  d'ennemis  avaient  été  tués  ou  pris,  notamment 
leurs  principaux  chefs,  Warwick  et  SufTolk  ^.  Malgré  l'inexacti- 
tude et  l'exagération  de  ces  derniers  détails,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  que  cette  défaite  des  Anglais  devant  Montargis  était  un  très 
grand  succès  pour  les  armes  françaises.  C'était  la  première  vic- 
toire remportée  depuis  le  commencement  de  ce  règne  *;  elle 
pouvait  relever  les  courages;  elle  jetait  un  rayon  d'espoir  sur 
la  sombre  tristesse  de  ces  jours  d'épreuves. 

C'est  au  bâtard  d'Orléans  qu'en  revint  le  principal  honneur, 
et  c'était  justice,  bien  que  La  Hire  eût  puissamment  contribué  à 
la  défaite  des  Anglais.  Il  semble  même  que  le  roi,  ou  plutôt  La 
Trémoille,  ait  mis  une  complaisance  calculée  à  exalter  cet  exploit 


i.  Gruel,  193.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  130-131.  Cousinot,  201,  243- 
24T.  Monstrelet,  IV,  271-275.  Raoulet,  à  la  suite  de  J.  Charlier,  III,  191, 
192.  Ordonn.  XIII,  132,  167.  Fr.  2603O,  n»  807,  Ms.  latin  6024,  n»  26,  Fr. 
4484,  f"  11  V",  176,  178-183,  204.  Ms.  3Qod ,  {Histoire)  à  la  bibliothèque  de  l'Ar- 
senal,  f"  116.  (C'est  le  Jouvencel  de  J.  de  Bucil,  avec  le  commentaire  de 
G.  Triûgant).  Le  Bonrg.  de  Paris,  p.  217,  note  4  et  p,  221.  Martial  d'Au- 
vergne, édition  Goustelier,  Paris,  1724,  t.  I,  p.  90.  Chron.  Martinienne,  édit. 
golh.,  f''  ccLxxvi,  Médaille  commémorative  dans  Mézeray, //wf .  de  Fr.,  édit, 
de  1646,  in-f",  II,  84,  n»  4.  Pour  récompenser  de  leur  belle  conduite  les 
habitants  de  Montargis,  le  roi  accorda  de  nombreux  privilèges  à  cette 
ville  (voir  Ordonn.  et  X'*  8604,  f'  104).  Longtemps  on  célébra  la  fête  aux 
Anglais  sur  le  pâtis  où  avait  eu  lieu  le  combat  et  où  l'on  avait  élevé  la 
croix  aux  Anglais  (de  Girardot  et  D'  Ballot,  Documents  sur  Montargis  ; 
Montargis,  1833,  in-8).  J.  Dupuis,  Mémoire  sur  le  siège  de  Montargis, 
Orléans,  1833,  gr,  in-8.  Append.  L.  Bedford  voulut  ensuite  recommencer  le 
siège  de  Montargis.  (Fr.  26050,  n»  771,  et  Fr.  26057,  n»  2106.) 

2,  Revue  du  Lyonnais,  343.  La  lettre  est  peut-être  olographe. 

3.  «  Le  premier  et  principal  eur  que  ayons,  en  tel  cas,  eu  sur  nos 
ennemis,  et  comme  le  commencement  de  la  recouvrance  depuis  par  nous 
faicte  de  plusieurs  nos  pays,  etc.  »  {Ordonn.  XIII,  p.  167).  Toutefois  c'est  en 
septemhjre  1427  que  fut  levé  le  siège  de  Montargis  et  non  en  1426,  comme 
le  dit  la  préface  du  t.  XIIl  des  ordonnances  (p.  xv),  sans  doute  d'après 
Monstrelet  et  Cagny. 


AUTRES  SUCCÈS  DES  FRANÇAIS  (1427)  147 

du  bâtard,  comme  s'il  avait  eu  la  secrète  intention  de  rabaisser 
ainsi  le  connétable.  En  tout  cas,  il  eût  mieux  valu,  quoi  qu'en 
disent  Gruel  et  d'autres  auteurs,  que  Richemont  eût  dirigé  lui- 
même  cette  expédition  et  qu'il  en  eût  recueilli  toute  la  gloire  *. 

Dans  sa  lettre  du  6  septembre  aux  Lyonnais,  il  les  informait 
encore  que  ses  troupes  avaient  pris  Marchenoir  *  et  Mondou- 
bleau  ^,  où  elles  avaient  gagné  une  belle  artillerie,  que  les  enne- 
mis y  avaient  laissée  pour  le  siège  de  Vendôme.  Enfin,  le  jour 
même  où  était  levé  le  siège  de  Montargis,  Ambr.  de  Loré  avait 
battu  à  Ambrières  *  un  capitaine  anglais,  H.  Branch,  qui  était, 
avec  Fastolf,  à  Sainte-Suzanne  ^.  Le  9  septembre,  L.  d'Estoute- 
ville,  capitaine  du  Mont- Saint-Michel,  infligea  aux  ennemis  une 
défaite  qui  leur  coûta  2  000  hommes.  Dans  cette  mémorable 
semaine,  la  victoire  souriait  partout  aux  Français  ®.  Richemont 
avait  aussi  fait  occuper  et  fortifier  Rambouillet  ''  et  d'autres 
places  de  la  Beauce;  partout  en  un  mot,  il  avait  opposé  aux 
Anglais  une  résistance  honorable  et  quelquefois  victorieuse.  On 
en  trouve  la  preuve  dans  un  document  anglais.  Le  22  sep- 
tembre de  cette  même  année,  Bedford  ordonnait  qu'on  envoyât 
promptement,  par  eau,  de  Harfleur  à  Paris,  quatre  gros  canons, 
dont  il  avait  besoin  pour  recommencer  le  siège  de  Montargis,  ces 
canons  ne  se  pouvant  trouver  ailleurs  aussitôt  qu'il  le  fallait,  «  à 
cause  de  la  grant  multitude  qui  en  a  esté  rompue  aux  sièges  qui 
ont  esté  mis  pour  le  recouvrement  des  places  occupées  par  les 
ennemis  dans  la  Normandie,  la  France,  l'Anjou,  le  Maine  et 
autre  part  *  ». 

Pendant  que  le  connétable  faisait  de  si  louables  efforts  pour 
relever  la  cause  de  Charles  VII  et  la  fortune  de  la  France  ^, 
il  était  sans  cesse  harcelé  par  La  Trémoille  ,  et  il  appre- 
nait que  son  frère,  le  duc  de  Bretagne,  signait  la  paix  avec 
l'Angleterre  (8  septembre  1427),  moins  de  deux  ans  après  ce 
traité  de  Saumur,  qui  avait  paru  établir  d'une  manière  si  solide 


1.  Fr.  20382,  n»»  18  et  19.  Fr.  20379,  f"'  133,  13i. 

2.  Arrondissement  de  Biois. 

3.  Arrondissement  de  Vendôme. 

4.  Arrondissement  de  Mayenne. 

5.  Arrondissement  de  Laval. 

6.  Revue  du  Lyonnais,  343,  et  Fr.  26050,  no  807.  Cousinot,  248.  Vallet  de 
V.,  Charles  Vil,  t.  II,  5. 

7.  Fr.  26030,  n»  801.  Enfin,  d'après  Cousinot,  les  Français  recouvrèrent 
Nogent-le-Rotrou,  La  Ferté-Bernard,  Nogent-le-Roi,  Châleauneuf-en-Thi- 
merais,  Béthencourt  et  autres  places  {Geste  des  nobles,  p.  202). 

8.  Voy.  Append.  LI. 

9.  Il  semble  que  M.  du  Fresne  de  Beaucourt  se  montre  bien  sévère 
pour  Richemont  {Uist.  de  Charles  VU,  t.  II,  p.  29). 


148      DÉFECTION  DU  DUC  DE  BRETAGNE  (1427,  SEPT.) 

l'union  de  la  France  et  de  la  Bretagne.  La  victoire  de  Montargis, 
remportée  plus  tôt,  aurait  peut-être  empêché  la  défection  de 
Jean  V;  mais  il  était  alors  trop  engagé  avec  les  Anglais  pour 
reculer.  Ceux-ci,  abandonnant  Saint-James-de-Beuvron,  qu'ils 
avaient  démantelé,  venaient  d'occuper  fortement  Pontorson, 
dont  Talbot  avait  été  nommé  capitaine  ^  De  là,  ils  surveillaient 
et  menaçaient  encore  de  plus  près  la  Bretagne.  Le  8  septembre 
et  les  jours  suivants,  le  duc,  les  Etats,  le  comte  de  Montfort,  fils 
aîné  de  Jean  V,  Richard,  comte  d'Etampes,  et  beaucoup  de  sei- 
gneurs bretons  jurèrent  le  traité  de  Troyes  et  promirent  hom- 
mage à  Henri  VI,  malgré  la  répugnance  qu'éprouvaient  plusieurs 
d'entre  eux  2, 

Ce  nouveau  coup  de  la  mauvaise  fortune  terrassa  le  conné- 
table dans  l'instant  même  où  il  commençait  à  se  relever.  Le  roi 
et  La  Trémoille  ne  gardèrent  plus  de  ménagements  envers  lui, 
après  la  défection  de  son  frère.  C'est  tout  au  plus  si  la  victoire 
de  Montargis  ne  tourna  pas  à  son  détriment.  Quels  services 
avait-il  rendus?  Quels  services  pouvait-on  maintenant  attendre 
de  lui?  N'avait-on  pas  le  bâtard  d'Orléans?  On  n'osa  pas  aller 
jusqu'à  lui  enlever  sa  charge  de  connétable,  mais  on  fit  du 
moins  tout  ce  qu'on  put  pour  l'empêcher  de  l'exercer.  Riche- 
mont  s'obstina,  malgré  tout,  à  remplir  ses  devoirs,  avant  de  ré- 
pondre aux  provocations  de  La  Trémoille. 

Vers  la  fin  de  septembre,  le  duc  de  Bedford  ayant  rassemblé 
sur  les  marches  du  Maine,  à  Domfront,  des  troupes  qu'il  avait  fait 
venir  du  pays  de  Gaux,  les  envoya,  sous  le  commandement  de 
Fastolf,  attaquer  plusieurs  petites  places  situées  aux  environs  de 
Laval  ^.Fastolf  prit  par  composition  Saint-Ouen *, Montsurs  ^,  Mes- 
lay  °  ;  puis  il  assiégea  le  château  de  la  Gravelle  ''.  Le  connétable, 
avec  tout  ce  qu'il  put  trouver  de  gens  d'armes,  s'empressa  d'aller 
au  secours  du  comte  de  Laval.  Quelle  que  fût  sa  diligence,  il  ne  put 
arriver  assez  tôt  pour  empêcher  la  capitulation  de  la  Gravelle. 


1.  Fr.  26030,  n«  761.  Talbot  fut  remplacé  par  Th.  de  Scales  (Fr.  4488, 
f»82). 

2.  Le  comte  de  Porhoet,  beau-frère  de  Jean  V  et  de  Richemont,  jure  le 
9  septembre  et  proteste  le  10  contre  sa  propre  signature.  Son  père,  le 
vicomte  de  Rohan,  proteste  aussi  contre  cette  signature  (D.  Morice,  1, 
502,  et  Preuves,  II,  col.  1200-1204).  K  168,  n°  68.  J  244,  n°  98.  J  244b,  n"  99, 
996,6,  "•.  Xia  8605,  f»'  1-7.  Fr.  26050,  n»s  768,  769,  775,  Lat.  6024,  n"  26, 
28.  Voy.  Appendice  L. 

3.  Fr.  26030,  n*  774.  Gruel,  195.  Cousinot,  249. 

4.  Arrondissement  de  Laval. 

5.  Id. 

6.  Id. 

7.  Id. 


LUTTE  ENTRE   RICHEMONT  ET  LA  TRÉMOILLE   (1427)  149 

Toutefois,  comme  les  défenseurs  de  la  place  n'avaient  promis  de 
la  rendre  que  s'ils  n'étaient  pas  secourus  avant  un  jour  fixé, 
Richemont  envoya  Guill.  Vendel  avec  ses  archers.  Cette  troupe 
parvint  à  pénétrer  dans  la  Gravelle,  et  quand,  au  jour  désigné, 
Bedford  vint  réclamer  la  reddition  du  château,  la  garnison  resta 
sourde  à  toutes  ses  sommations.  Le  régent  eut  la  cruauté  de  faire 
couper  la  tête  aux  otages  qu'on  lui  avait  livrés,  puis  les  Anglais 
levèrent  le  siège  de  la  Gravelle  *. 

Le  connétable  s'en  vint  ensuite  à  Laval,  d'où  il  se  rendit,  par 
Craon  et  Angers,  à  Loudun,  pour  aller  trouver  les  comtes  de  Cler- 
mont  *  et  de  La  Marche.  A  Londun  il  apprit  que  ces  deux  seigneurs 
devaient  aller  à  Ghâtellerault,  environ  huit  jours  avant  la  Tous- 
saint, et  qu'ils  lui  donnaient  rendez-vous  dans  cette  ville,  pour 
aviser  ensemble  aux  moyens  de  renverser  La  Trémoille.  Averti  de 
ce  qui  se  tramait  contre  lui,  La  Trémoille  en  conçut  une  haine 
mortelle  et  ne  recula  pas  devant  une  lutte  qui  avait  été  si  funeste 
à  ses  prédécesseurs.  Instruit  par  leur  défaite,  il  prit  mieux  ses  pré- 
cautions. Il  n'eut  pas  de  peine  à  persuader  au  roi  que  le  connéta: 
ble  et  ses  alliés  étaient  des  rebelles,  qui  attentaient  à  son  autorité. 
«  Incontinent  il  fit  défendre  de  par  le  Roy  que  homme  ne  fut  si 
hardy  de  les  mettre  en  ville  ny  chasteau,  ny  de  leur  faire  ouver- 
ture en  nulle  place  que  ce  fust  ^  ».  Richemont  envoya  ses  fourriers 
à  Ghâtellerault;  mais,  quand  il  arriva  lui-même, ils  étaient  encore 
à  la  porte  de  la  ville,  dont  on  leur  avait  refusé  l'entrée.  Le  con- 
nétable ne  fut  pas  plus  heureux  ;  on  ne  tint  compte  ni  de  ses 
ordres  ni  de  ses  menaces.  Il  dut  se  retirer,  après  avoir  lancé  sa 
masse  d'armes  par-dessus  la  barrière,  pour  montrer  son  courroux. 

1.  Gruel  n'indique  pas  ce  fait  ;  il  dit  seulement  que  la  place  fut  sauvée 
par  G.  Vendel.  C'est  Gousinot  qui  donne  ce  détail,  p.  249.  M.  de  Beaucourt 
fait  un  crime  à  llichemont  d'avoir  ainsi  introduit  ses  archers  dans  la  Gra- 
velle, au  mépris  de  la  capitulation  (Revue  des  questions  hist.,  IX,  p.  399, 
note  5)  ;  mais  était-ce  là  un  moyen  déloyal  et  illicite?  Fontanieu,  qui  ne 
saurait  être  soupçonné  de  partialité  pour  Richemont,  dit  (Ms.  fr.  10449, 
anc.  sup'.  fr.  4805,  f"  151)  que  le  cas  était  nouveau;  mais  il  n'accuse 
point  Richemont  de  déloyauté,  et  il  blâme  la  barbarie  de  Bedford.  Enfiu, 
les  contemporains  de  G.  Vendel  lui  faisaient  de  cette  action  un  titre  de 
gloire  (X'a  1479,  f-  61  v»). 

2.  Le  comte  de  Clermont  venait  de  terminer  (29  septembre)  par  une 
transaction,  moyennant  indemnité,  sa  querelle  avec  l'évoque  de  Clermont, 
et  d'obtenir  l'absolution  des  censures  prononcées  contre  lui  par  le  pape 
(P  1373",  cotes  2181  et  2181  bis),  pour  avoir  arrêté  et  retenu  prisonnier, 
en  mars  1427,  M.  Gouges  de  Charpaigne,  évêque  de  Clermont  et  chance- 
lier de  France.  Toutefois  le  comte  de  Clermont  exigea  de  M^Gouges  une  forte 
rançon,  qui  fut  aussi  payée  en  partie  par  le  roi,  comme  celle  du  sire  de 
Trêves,  l'année  précédente  (Anseluae,  VI,  396-397;  Biographie  Didot,  art. 
Gouges;  de  Beaucourt,  t.  11,  148.)  Voy.  ci-dessus,  p.  12o. 

3.  Gruel,  195. 


150  LUTTE   ENTRE    KICHEMOÎNT   ET   LA   TRÉMOILLE    (1427) 

Il  alla  «  loger  aux  champs»  environ  deux  lieues  plus  loin,  entre 
Ghâtellerault  et  Chauvigny  i,  puis  il  se  dirigea  vers  cette  der- 
nière ville  en  suivant  les  bords  de  la  Vienne.  Chemin  faisant,  il 
aperçut  des  gens  d'armes  qui  chevauchaient  en  belle  ordonnance 
de  l'autre  côté  de  la  rivière.  Il  fit  alors  sonner  les  trompettes,  et, 
cette  troupe  s'étant  approchée,  il  reconnut  avec  joie  les  comtes  de 
Clerraont  et  de  La  Marche.  Ils  convinrent  de  se  réunir  le  lende- 
main à  Chauvigny  et  se  séparèrent.  Le  connétable  trouva  un 
asile  chez  un  gentilhomme  du  voisinage,  mais  les  deux  autres 
princes  «  couchèrent  cette  nuict  sur  les  champs  ^  ».  Le  lendemain, 
ils  tinrent  conseil  à  Chauvigny  pour  arrêter  ce  qu'ils  avaient  à 
faire,  puis  ils  se  rendirent  à  Chinon  avec  «  le  maréchal  de  Boussac 
^t  plusieurs  autres  capitaines  et  gens  de  grand  estât».  La  duchesse 
de  Guyenne  résidait  alors  dans  la  ville  de  Chinon,  que  le  roi  lui 
avait  donnée;  elle  accueillit  avec  empressement  son  mari  et  ses 
alliés,  et  «  ils  firent  grande  chère  ^  ». 

Cependant  La  Trémoille,  inquiet,  envoyait  à  Chinon  l'arche- 
vêque de  Tours  et  R.  de  Gaucourt,  qui,  de  la  part  du  roi,  représen- 
tèrent au  connétable  et  à  ses  amis  les  dangers  que  leur  conduite 
factieuse  faisait  courir  à  l'Etat.  De  leur  côté,  les  princes,  pour  se 
justilîer  à  l'égard  du  roi,  lui  envoyèrent  des  députés.  Ils  auraient 
voulu  se  rendre  eux-mêmes  auprès  de  lui  ;  mais  La  Trémoille,  tou- 
jours défiant,  sut  les  tenir  à  l'écart,  et  il  fut  impossible  de  s'en- 
tendre. L'entreprise  ne  pouvait  donc  être  poursuivie  que  par  la 
voie  des  armes,  puisqu'on  avait  épuisé  tous  les  moyens  de  conci- 
liation. Il  n'est  pas  douteux  que  Richemont,  soutenu  par  les 
maisons  d'Anjou,  de  Bourbon,  d'Armagnac,  le  maréchal  de  Bous- 
sac,  le  connétable  des  Ecossais  et  une  grande  partie  de  la  haute 
noblesse,  eût  été  en  mesure  de  soutenir  la  lutte  s'il  n'avait  eu  de- 
vant lui  que  La  Trémoille;  mais  il  ne  le  pouvait  combattre  sans 
paraître  se  révolter  contre  le  roi  lui-même  et  sans  nuire  à  la 
France.  Les  Anglais  faisaient  de  nouveaux  efforts  pour  terminer 
la  conquête  du  Maine  et  de  l'Anjou  ;  ils  assiégeaient  Rambouillet. 
Était-ce  le  moment  de  pousser  aux  dernières  extrémités  une  que- 
relle qui  ne  pouvait  se  prolonger  sans  entraîner  dans  la  guerre 
civile  un  pays  déjà  si  malheureux  et  si  menacé?  Ces  considéra- 
tions l'emportèrent  dans  le  cœur  de  Richemont  sur  ses  griefs 

1. Arrondissement  de  Montmorillon. 

2.  Gruel,  196. 

3.  Gruel,  1%.  Vallet  de  V.  {Hist.  de  Charles  VU,  t.  I,  439)  dit  que  le 
roi  était  alors  au  château  de  Lusignan.  Il  dut  aussi  aller  à  Poitiers,  où  il 
y  eut  une  assenablée  des  États  de  Languedoc  (en  novembre  1427)  qui  oc- 
troyèrent une  aide  de  200  000  fr.  (voir  K  63,  n°  5). 

4.  Fr.  25768,  n"  260.  Fr.  26050,  n"*  79o,  797,  799,801,  841.  Fr.  4488,  f»6^. 


RICHEMONT   SE   RETIRE  A  PARTHENAY   (1427,    NOV.)  151 

personnels.  Et  pourtant  il  était  banni  de  la  cour,  privé  de  sa  pen- 
sion, empêché  d'exercer  sa  charge,  lui  qui  n'aspirait  quand 
même  qu'à  servir  le  roi  et  la  France.  Humilié,  mais  non  vaincu, 
frémissant  de  ne  pouvoir  continuer  la  lutte,  il  recula  devant  La 
Trémoille.  Laissant  la  duchesse  de  Guyenne  à  Ghinon,  sous  la 
garde  d'un  capitaine  nommé  Guill.  Bélier,  qui  lui  inspirait  toute 
confiance,  Richemont  alla,  dans  les  premiers  jours  de  novem- 
bre, prendre  possession  de  sa  seigneurie  de  Parthenay  *. 

Jean  II  Larchevêque  était  mort  au  commencement  de  1427  *, 
après  avoir  reconnu  comme  héritier  Artur  de  Bretagne,  qu'il 
avait  autrefois  combattu.  Au  moment  de  mourir,  il  avait  appelé 
auprès  de  lui  tous  ses  vassaux,  tous  les  capitaines  de  ses  places; 
il  leur  avait  fait  jurer  qu'ils  seraient  à  l'avenir  bons  et  loyaux 
sujets  du  connétable  et  lui  obéiraient  comme  à  leur  seigneur  na- 
turel. Quand  Richemont  arriva  dans  ses  nouveaux  domaines,  il 
y  fut  accueilli  avec  un  empressement  et  une  joie  qui  adoucirent 
un  peu  l'amertume  de  sa  disgrâce.  Il  prit  en  affection  la  ville  de 
Parthenay,  puissante  forteresse  féodale,  située  dans  la  région  si 
pittoresque  du  Bocage,  et  toujours,  dans  la  bonne  comme  dans  la 
mauvaise  fortune,  il  en  fit  son  séjour  de  prédilection  ^. 

Telle  était  la  situation  à  la  fin  de  l'année  1427,  situation 
cruelle  pour  le  comte  de  Richemont  et  non  moins  triste  pour 
la  France.  Après  deux  ans  et  demi  d'efforts,  il  n'avait  pu  re- 
pousser les  Anglais,  ni  obtenir  l'alliance  de  Philippe  le  Bon,  ni 
même  conserver  celle  de  la  Bretagne;  mais  est-il  juste  de  faire 
tomber  sur  le  connétable  seul  toute  la  responsabilité  de  ces  échecs? 
Est-il  vrai  qu'il  ait  disposé  de  tout  pendant  deux  années  ?  *  Est-il 
vrai  que  toute  son  œuvre  se  soit  réduite  à  faire  tuer  deux  favoris 
et  à  se  faire  chasser  par  le  troisième"?  Faut-il  plutôt  le  blâmer 
que  le  plaindre  d'avoir  consumé  ses  forces  dans  des  intrigues  in- 
cessantes ?  Si  l'histoire  doit  reconnaître  qu'il  y  a  «  des  situations 

1.  Par  lettres  du  15  novembre,  il  institue  receveur  ordinaire  et  particu- 
lier de  son  domaine  de  Fontenay-le-Comte  Robin  Denisot,  qui  commence 
ses  fonctions  aux  environs  de  la  Toussaint  (Fr.  8818,  f»  1).  Par  lettres 
données  à  Parthenay,  le  20  novembre,  il  institue  H.  Blandin  son  receveur 
général  (Fr.  8818,  f"  89  v°).  Richemont  résida  le  plus  souvent  à  Parthenay, 
et  quelquefois  à  Fontenay-le-Gomte,  que  le  roi  avait  donné  à  la  duchesse 
de  Guyenne  (Fr.  8818,  f»  98). 

2.  Bel.  Ledain,  p.  225.  Le  19  janvier,  le  roi  modère  une  imposition  de 
3000  1.  que  J.  Larchevêque  ne  voulait  pas  payer  (Fr.  21302,  au  19  janvier 
1426,  a.  st.).  J.  Larchevêque  était  alors  en  procès  avec  J.  Harpedenne, 
seigneur  de  Belleville,  au  sujet  de  Mervent.  Richemont  eut  à  soutenir  ce 
procès  (Xi=>  9200,  fo»  36,  42). 

3.  Gruel,  196.  B.  Ledain,  p.  225  et  suiv. 

4.  De  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  197. 

5.  H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  37-38. 


152  RESPONSABILITÉ  DE  RICHEMONT 

plus  fortes  que  les  hommes  et  que  le  génie  seul  peut  triompher 
de  certains  obstacles  *  »,  cette  réflexion  s'appliquerait-elle  moins 
justement  à  Richemont  qu'à  Charles  VII  ?  Il  est  des  comparai- 
sons qui  en  appellent  d'autres.  Certes,  Richemont  n'était  pas  un  du 
Guesclin,  mais  le  roi  qu'il  servait  était  encore  moins  un  Charles  V, 
et,  s'il  n'est  pas  téméraire  de  supposer  qu'un  du  Guesclin  eût 
triomphé  d'une  situation  «  plus  forte  que  les  hommes  »,  il  est 
permis  de  croire  qu'un  Charles  V  n'eût  pas  sacrifié  un  Riche- 
mont à  un  La  Trémoille  ^. 

1.  De  Beaucourt,  dans  la  Revue  des  questions  histor.,  IX,  400,  404.  Voir 
aussi  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  p.  200-201. 

2.  Si  M.  de  Beaucourt  est  indulgent  pour  Charles  VII,  il  ne  l'est  guère 
pour  le  connétable  (voir  Yllist.  de  Charles  VII,  notamment  le  chapitre  III 
du  deuxième  vol.,  p.  142-143,  153,  1S6,  etc.). 


CHAPITRE  II 

DISGRACE    DE    RICHEMONT    ET   LUTTE    CONTRE   LA  TRÉMOILLE 
(1428-1433) 


Richement,  poursuivi  par  La  Trémoille,  demande  secours  au  due  de  Bre- 
tagne. —  Il  est  soutenu  par  les  comtes  de  Clermont  et  de  Pardiac.  —  Us 
font  appel  au  pays.  —  Richement  retourne  à  Partbenay.  —  La  Trémoille 
chasse  de  Chinon  la  duchesse  de  Guyenne.  —  Les  princes  réclament 
les  Etats  généraux.  —  Ils  occupent  Bourges;  mais  le  connétable  ne  peut 
les  rejoindre,  et  ils  traitent  avec  La  Trémoille.  —  Les  Etats  généraux  de 
Chinon  demandent  en  vain  le  rappel  du  connétable.  —  Siège  d'Orléans. 
—  Jeanne  d'Arc.  —  Le  duc  d'Alençon,  —  Richement  lui  envoie  des  ren- 
forts et  rejoint  l'armée  royale,  malgré  la  défense  du  roi.  —  Il  contribue 
à  la  prise  de  Beaugency  et  à  la  victoire  de  Patay.  —  Jeanne  d'Arc  ne 
peut  obtenir  qu'il  reste  à  l'armée.  —  Il  combat  les  Anglais  en  Norman- 
die. —  La  Trémoille  empêche  Jeanne  d'Arc  et  le  duc  d'Alençon  d'aller  en 
Normandie.  —  Jeanne  d'Arc  est  abandonnée  et  prise.  —  Richemont  re- 
tourne à  Parthenay.  —  La  Trémoille,  après  avoir  échoué  du  côté  de  la 
Bourgogne,  se  tourne  vers  la  Bretagne.  —  Il  s'entend  avec  Jean  V,  mais 
non  avec  Richemont.  —  Il  fait  arrêter  et  condamner  L.  d'Amboise  elles 
autres  envoyés  du  connétable.  —  La  guerre  continue  dans  le  Poitou.  — 
Yolande  d'Aragon  interpose  en  vain  sa  médiation.  —  Le  duc  d'Alençon, 
excité  par  La  Trémoille,  enlève  le  chancelier  de  Bretagne.  —  Jean  Vfait 
la  guerre  au  duc  d'Alençon.  —  Richemont  les  réconcilie.  —  Charles  VII 
conclut  avec  Jean  V  et  Richemont  le  traité  de  Rennes.  —  La  Trémoille 
continue  néanmoins  la  lutte  contre  Richemont.  —  Guerre  contre  les 
Anglais.  —  Eugène  IV  essaie  inutilement  de  faire  conclure  la  paix.  —  La 
Trémoille  attaque  Yolande  d'Aragon  et  laisse  les  Anglais  reprendre  Mon- 
targis.  —  Indignation  générale.  —  Complot  contre  La  Trémoille.  —  En- 
lèvement de  La  Trémoille.  —  Conséquences  de  cet  événement. 


Durant  sa  disgrâce  même,  le  connétable  continua  de  servir  la 
France  et  le  roi,  dans  la  mesure  de  ses  moyens,  par  ses  négocia- 
tions avec  les  ducs  de  Savoie,  de  Bourgogne  et  de  Bretagne. 
Amédée  VIII,  qui  était  alors  à  Yenne  *,  renouvela,  le  26  novembre, 
la  trêve  précédemment  conclue  entre  Charles  VII  et  le  duc  de 

1.  Arrondissement  de  Chambéry. 


154  LA  TRÉMOILLE  POURSUIT   RICHEMONT   (1428) 

Bourgogne.  Il  chargea  Richemont  de  délivrer  des  sauf-conduits  au 
nom  du  roi  par  lui-même  ou  par  deux  lieutenants  qu'il  enverrait, 
l'un  à  Lyon,  l'autre  à  Bourges  *. 

Cependant  il  ne  suffisait  pas  à  La  Trémoille  d'avoir  fait  disgracier 
et  bannir  le  connétable;  il  le  poursuivait  partout  de  sa  haine  et 
l'obligeait,  par  ses  attaques,  à  se  tenir  sans  cesse  sur  la  défensive. 
La  ïrémoille  avait  lui-même  des  domaines  dans  le  Poitou,  Melle 
que  le  roi  lui  avait  donné  en  1426,  Ste-Hermine,  tout  près  de  Fonte- 
nay  *,  sans  parler  des  seigneuries  que  sa  femme,  Gath.  de  L'Ile-Bou- 
chard,  avait  aussi  dans  cette  province,  comme  celle  de  Gençay  ^. 
Par  ses  relations,  par  sa  richesse  *,  par  sa  puissance,  il  avait  donc 
un  parti  nombreux  dans  le  Poitou,  et  rien  ne  lui  était  plus  facile 
que  de  harceler  Richemont  jusque  dans  la  retraite  où  il  s'était 
réfugié.  Il  lança  notamment  contre  lui  un  seigneur  nommé  Jean 
de  La  Roche,  qui  commit  de  grands  ravages,  et  Jean  de  Penthiè- 
vre,  sire  de  Laigle,  qu'il  avait  rappelé  et  fait  entrer  au  conseil  du 
roi  ^.  De  son  côté,  Richemont  essaya  de  faire  enlever  La  Trémoille 
comme  auparavant  le  sire  de  Giac.  La  Trémoille  fut  même  pris 
au  château  de  Gençay,  mais  il  se  tira  de  ce  mauvais  pas  en  don- 
nant à  ceux  qui  avaient  fait  le  coup  dix  mille  écus  d'or,  que  le 
roi  lui  remboursa  bientôt  '^. 

Le  connétable,  ne  pouvant  trouver  accès  auprès  de  Charles  VU, 
essayait  de  lui  faire  parvenir  ses  plaintes,  en  envoyant  vers  lui 
son  secrétaire  Robin  Denisot,  avec  frère  Guillaume  Josseaume  et 
Jean  de  Ghénery  (novembre  et  décembre  1427)  ^,  En  même 
temps,  il  donnait  mission  à  Guillaume  Giffart  d'aller  en  Bre- 

1.  La  trêve  devait  durer  jusqu'à  la  Saint-Jean  de  l'année  1428  {Porte f^ 
Fontanieu,  115-116,  au  26  novembre  1427;  Hist.  de  Bourgogne,  t.  IV, 
Preuves,  p.  lxxii-lxxv.  Voy.  ci-dessus,  p.  129.) 

2.  Fr.  8818,  f-  94.  Sainte-Hermine,  arrondissement  de  Fontenay.  JJ  177^ 
fo»  122,  126,  128. 

3.  Arrondissement  de  Civray.  On  trouve  dans  le  Ms.  fr.  23710,  n*  31, 
une  pièce  du  9  janvier  142u,  qui  prouve  que  Charles  VII  avait  donné, 
avant  cette  époque,  la  terre  de  Chatelaillon,en  Saintonge,  àCath.  de  L'Isle- 
Bouchard,  alors  femme  du  sire  de  Giac.  Cette  terre  de  Chatelaillon  est  pro- 
bablement celle  qui  était  comprise  dans  l'héritage  que  Jean  Larchevêque 
avait  laissé  à  Richemont  et  que  celui-ci  avait  dû  reprendre.  Cela  explique 
peut-être  pourquoi  La  Trémoille  était  excité  par  sa  femme  contre  le  con- 
nétable. 

4.  Vallet  de  V.,  Uist.  de  Charles  VII,  I,  482-483. 

5.  Voy.  Ordonn.,  XIII,  133-134.  Jean  de  Penthièvre  est  au  conseil  le 
2  décembre  1427.  Çollect.  de  Languedoc,  89  (Mss.  de  D.  de  Vie),  f-  64,  67. 
Quant  à  J.  de  La  Roche,  il  était  parent  de  J.  Harpedenne,  seigneur  de  Bel- 
leville,  un  des  ennemis  de  Richemont  (X^a  9200,  f»  359;  JJ  178,  f"  2,  r»  et  v»). 

6.  Gairamb.,  204,  f»  8763.  La  participation  indirecte  de  Richemont  à 
cette  tentative  n'est  point  indiquée,  mais  elle  semble  fort  probable. 

7.  Fr.  8818,  f»  100. 


RICHEMOM    EN   APPELLE   AU   PAYS    (1428)  185 

tagne,  informer  le  duc  de  tout  ce  qui  s'était  passé  à  la  cour  et 
des  machinations  que  La  ïrémoille  tramait  avec  Jean  de  Blois^ 

Si  Jean  V  fut  peu  touché  des  griefs  personnels  de  son  frère,  il 
ne  put  apprendre  sans  inquiétude  le  retour  d'un  Penthièvre  à  la 
cour.  Il  chargea  son  jeune  frère  Richard,  comte  d'Etampes,  de 
porter  au  connétable  ses  condoléances,  de  lui  exposer  les  motifs 
qui  l'avaient  déterminé  à  traiter  une  deuxième  fois  avec  les 
Anglais  et  de  s'entendre  avec  lui  sur  les  mesures  à  prendre  dans 
leur  intérêt  commun  contre  La  Trémoille  et  ses  agents  ^  Riche- 
mont  était  profondément  irrité  contre  le  duc  de  Bretagne,  dont 
la  défection  avait  été  la  principale  cause  de  sa  disgrâce,  mais 
la  prudence  l'obligeait  à  cacher  son  ressentiment.  Il  accueillit 
d'ailleurs  avec  plaisir  son  frère  Richard,  qui  lui  apportait  des 
consolations  et  des  encouragements.  Il  continuait  de  se  tenir  en 
rapport  avec  ses  alliés,  la  reine  Yolande,  les  comtes  de  La  Marche, 
deCIermont,  d'Armagnac  et  de  Pardiac,  qui  avaient  réuni  des 
troupes  à  Ghinon  dès  le  mois  de  décembre,  pour  résister  aux 
attaques  de  La  Trémoille  ^  Au  mois  de  janvier  1428,  il  se  rendit 
lui-même  à  Ghinon,  où  était  restée  la  duchesse  de  Guyenne, 
qui,  en  se  tenant  ainsi  près  de  la  cour,  pouvait  être  plus  utile  à 
son  mari  qu'en  le  suivant  à  Parthenay. 

Le  connétable  voulut  alors  faire  ce  qui  lui  avait  si  bien  réussi 
en  1425,  dans  sa  lutte  contre  Louvet,  c'est-à-dire  en  appeler  au 
pays.D'accord  avec  les  comtes  de  Glermont  et  de  Pardiac,  il  adressa 
au  parlement  de  Poitiers,  aux  bonnes  villes  du  royaume  un  long 
manifeste  dans  lequel  les  trois  princes  annonçaient  leur  intention 
d'enlever  le  pouvoir  à  La  Trémoille,  afin  de  remédier  aux  maux 
de  l'Etat.  Ils  demandaient  au  parlement  et  aux  villes  leur  adhésion 
et  leur  appui  dans  cette  entreprise  *.  Le  parlement  décida  qu'il 
ne  ferait  aucune  réponse;  les  habitants  de  Lyon  firent  dire  aux 
princes  qu'ils  n'obéiraient  qu'aux  ordres  du  roi;  la  ville  de  Tours, 
dont  la  défection  était  à  craindre,  en  raison  de  son  dévouement 
à  la  reine  Yolande,  reçut  défense  de  laisser  entrer  dans  ses  murs 
aucun  des  princes  ou  de  leurs  adhérents  ^.  Geux-ci  se  tournèrent 
alors  vers  le  duc  de  Bretagne  et  lui  demandèrent  des  secours - 
Jean  V  consentait  bien  à  envoyer  des  gens  d'armes  et  de  trait; 
mais,  comme  il  craignait  de  mécontenter  Bedford  '^,  il  exigeait 

1.  D.  Morice,  I,  504.  Vallet  de  V.,  I,  460  et  note  2.  JJ  177,  f«  139-140. 

2.  D.  Morice,  I,  505. 

3.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  159-160. 

4.  Fr.  21302,  au  14  janvier  1427,  a.  st.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II, 
156-157. 

5.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  157,  159-160. 

6.  C'est  le  28  janvier  que  Henri  YI  ordonne  de  publier  en  Angleterre  la 


156  ALLIÉS  DE  RICHEMONT  ET  DE  LA  TRÉMOILLE 

qu'on  ne  les  employât  qu'à  combattre  son  mortel  ennemi  «  Jean 
de  Blois,  ses  complices  et  ses  adhérents.  »  Le  30  janvier  1428, 
les  comtes  de  Glermont,  de  Richemont  et  de  Pardiac,  unis  pour 
résister  à  J.  de  Blois,  soi-disant  seigneur  de  Laigle,  qui  voulait 
leur  nuire  par  lui-même  et  par  ses  alliés  et  complices,  jurèrent 
solennellement  de  ne  point  se  servir  contre  le  roi  d'Angleterre 
des  troupes  que  leur  enverrait  le  duc  de  Bretagne  ^  Les  princes 
allèrent  ensuite  se  concerter  avec  la  reine  de  Yolande,  qui  leur 
conseilla  probablement  d'attendre  un  moment  favorable,  car  ils 
se  séparèrent,  et  Richemont  revint  à  Parthenay  (février). 

Voilà  donc  à  quoi  en  était  réduit  le  connétable  de  France, 
et  cela  quand  les  Anglais  approchaient  d'Orléans  *  I  Combien  il 
eût  mieux  valu  pour  lui,  pour  ses  alliés  consacrer  toutes  leurs 
forces  à  la  défense  du  royaume,  et  combien  déplorable  était 
l'aveuglement  de  Charles  VII,  qui,  dans  une  pareille  détresse,  ne 
savait  pas  même  dominer  de  mesquines  rancunes,  pour  utiliser 
tous  les  services  ! 

Quant  à  La  Trémoille,  plus  préoccupé  de  combattre  ses  en- 
nemis personnels  que  les  ennemis  de  la  France,  il  s'acharnait  à 
poursuivre  Richemont,  comme  s'il  eût  voulu,  par  ses  provoca- 
tions continuelles,  le  pousser  à  une  rupture  irréparable.  La  fidé- 
lité du  connétable  déjoua  ces  perfides  calculs.  Obligé  de  prendre 
les  armes  contre  La  Trémoille,  il  ne  voulut  pas  abandonner  le 
roi  de  France  ;  il  le  servit,  malgré  lui,  aussi  souvent  qu'il  en  put 
trouver  l'occasion.  Telle  fut  pendant  six  années  l'étrange  et 
cruelle  situation  que  la  haine  de  La  Trémoille  et  la  faiblesse  du 
roi  créèrent  au  connétable  (1427-1433).  Ce  fut  la  guerre  civile  au 
milieu  de  la  guerre  nationale,  crise  suprême,  pendant  laquelle  le 
favori  de  Charles  VII  éloigna  trop  souvent  les  plus  vaillants  ca- 
pitaines français  des  champs  de  bataille  où  se  jouaient  les  des- 
tinées de  la  France. 

Rejetant  sur  Richemont  tout  l'odieux  de  cette  lutte  exécrable, 
La  Trémoille,  qui  disposait  des  libéralités  royales,  sut  gagner 
des  auxiliaires  puissants  ou  habiles,  comme  le  comte  de  Foix, 
avec  lequel  il  conclut  une  alliance  le  28  février  ;  le  duc  d'Alençon, 
qui  avait  grand  besoin  d'argent^  ;  Raoul  de  Gaucourt,  qu'il  en- 
paix  conclue  avec  le  duc  de  Bretagne  (Rymer,  t.  IV,  4»  partie,  p.  132).  Elle  fut 
publiée  en  Normandie  à  la  fin  de  septembre  (Fr.  26030,  n"  768,  769,  773). 
4.  Fr.  2715,  f"  63.  Voy.  Append.  LII.  Le  3  mars,  Artur  de  Bretagne  renou- 
vela son  serment  de  féautéà  Jean  V  (T.  Brutus,  I,  fo  141  v»). 

2.  Henri  VI  avait  chargé  Warwick  d'assiéger  Malesherbes  avant  le  13  fé- 
vrier (Fr.  26050,  no  839). 

3.  Le  duc  d'Alençon,  neveu  du  connétable,  était  revenu  (octobre  1427) 
de  captivité,  mais  sa  liberté  lui  coûtait  cher  (de  Beaucourt,  II,  138,  163; 
Cagny,  ap.  Ms.   Duchesne,  48,  p.  86).   En  1427  et  1428,  R.  de  Gaucourt 


LA  TRÉMOILLE  ENLÈVE  CHINON  AU  CONNÉTABLE   (1428)         lo7 

voya  plus  lard  dans  le  Poitou  ;  Regnault  de  Chartres,  archevêque 
de  Reims.  D'abord  il  voulut  enlever  à  son  ennemi  la  ville  de 
Chinon  ',trop  voisine  des  endroits  où  se  tenait  ordinairement  la 
cour.  Après  le  départ  du  connétable,  vers  le  c'ommencement  de 
mars,  il  se  présenta  devant  cette  place,  avec  le  roi,  Guillaume 
d'Albret,  l'archevêque  de  Reims,  Robert  Le  Maçon,  le  sire  de 
Belleville  et  plusieurs  autres  seigneurs.  Le  capitaine  de  Chinon, 
Guillaume  Béher  2,  soit  qu'il  eût  été  gagné  d'avance,  soit  qu'il  fût 
intimidé  par  la  présence  du  roi,  livra  la  place  qu'il  avait  juré  de 
défendre.  Cet  événement  soudain  causa  d'abord  les  plus  vives 
inquiétudes  à  Mme  de  Guyenne,  mais  le  roi  lui  tint  un  langage 
rassurant  et  même  lui  permit  de  demeurer  à  Chinon,  ou  dans 
telle  autre  ville  du  royaume  qu'elle  voudrait  choisir,  pourvu 
qu'elle  s'engageât  à  n'y  point  recevoir  le  connétable.  La  fille  de 
Jean  sans  Peur  repoussa  cette  proposition  comme  injurieuse  et 
répondit  noblement  «  que  jamais  elle  ne  voudrait  demourer  en 
place  où  elle  ne  peust  voir  monseigneur  son  mary  ^.  »  Vainement 
le  roi  lui  fit  faire  de  grandes  remontrances  par  l'archevêque  de 
Reims  ;  elle  persista  dans  sa  résolution  et  chargea  de  sa  réponse 
Jean  de  Troissi,  bailli  de  Sens,  «  qui  parla  le  mieux  que  oncques 
l'on  oùyt  en  telle  nécessité  *.  »  Le  roi  permit  alors  à  la  duchesse 
de  se  retirer.  Elle  alla  aussitôt  à  Saumur,  puis  à  Thouars,  sous 
la  protection  des  Ecossais  qui  tenaient  les  champs.  De  là,  elle  se 
rendit  à  Parthenay  auprès  de  son  mari  ^. 

Cette  nouvelle  injure  de  La  Trémoille  ne  changea  rien  aux 
résolutions  du  connétable  ;  il  continua  de  se  tenir  sur  la  défen- 
sive dans  le  Poitou,  sans  vouloir  pousser  plus  loin  les  hostilités. 

Il  fit  même  de  nouveaux  efforts  pour  obtenir  la  prolongation 
de  la  trêve  renouvelée  au  mois  de  novembre  précédent  entre  le 
roi  de  France  et  le  duc  de  Bourgogne.  Il  pria  le  duc  de  Savoie  et 
le  comte  de  Clermont  de  l'aider  auprès  de  Philippe  le  Bon,  qui 
consentit  à  prolonger  les  trêves  d'abord  jusqu'à  la  Toussaint  de 


reçut  plusieurs  libéralités  du  roi  (voy.  Pièces  orîqin.,  dossier  Gaucourt, 
t.  1292,et  surtout  LaThaumassière,  Hist.du  Beiry,  p.  587  :  de  Beaucourt,  II,  139). 

1.  Importance  de  cette  ville  avec  ses  trois  châteaux,  ses  faubourgs  (JJ 
167,  f"  173). 

2. 11  fut  ensuite  capitaine  de  Chinon  pour  le  roi,  et  il  eut  la  garde  de  la 
Pucelle  (H.  Wallon,  /.  d'Arc,  I,  111.  GougQy,  Notice  sur  le  château  de  Chi- 
non, édit.  de  1874,  p.  57-58.)  Il  assista  au  sacre  de  Charles  VII  (Fr.  7838, 
f»  37).  Le  connétable  ne  lui  garda  pas  rancune,  car  il  devint  bailli  de  Troyes 
(en  1434  et  années  suiv.),  quand  Richemont  avait  le  gouvernement  de  la 
Champagne  {Collect.  de  Champagne,  t.  63,  f»  3). 

3.  Gruel,  196. 

4.  Gruel,  196. 

5.  Richemont  était  à  Fontenay  le  18  mars  (Ms.  fr.  8818,  f»98). 


158  MÉMOIRE  ADRESSÉ   AU  ROI   (1428) 

l'année  1428,  puis  pour  les  trois  années  suivantes,  c'est-à-dire 
jusqu'au  l^""  novembre  1431.  Ces  négociations  furent  ratifiées 
le  22  mai  et  le  22  juin  ^ 

Cependant  Richemont  et  ses  alliés  cherchaient  toujours  le 
moyen  de  rentrer  en  grâce  auprès  de  Charles  VIT,  soit  qu'il  leur 
parût  urgent  d'en  finir  au  plus  vite  avec  La  Trémoille,  pour  n'avoir 
plus  à  s'occuper  que  des  Anglais,  soit  que  le  duc  de  Bretagne  se 
sentît  menacé  par  le  favori  *  et  voulût,  dans  son  propre  intérêt, 
mettre  fin  à  une  situation  dangereuse.  Le  connétable  et  ses  alliés 
comptaient  sur  l'impopularité  de  La  Trémoille,  sur  l'opinion  pu- 
blique, sur  l'appui  de  la  nation.  Ils  ne  craignaient  pas  d'en  ap-^ 
peler  aux  Etats  généraux,  dont  la  réunion ,  toujours  reculée  , 
semblait  nécessaire  dans  des  conjonctures  aussi  critiques.  Ils 
voyaient  que  la  France  avait,  plus  que  jamais,  besoin  de  tous 
ses  défenseurs,  au  moment  où  Bedford,  pour  mieux  profiter  de 
ces  discordes,  faisait  venir  d'Angleterre  une  nouvelle  armée  avec 
le  comte  de  Salisbury  ^. 

Le  connétable,  les  comtes  de  Clermont  et  de  Pardiac,  inspirés  par 
la  reine  de  Sicile,  tentèrent  donc  un  suprême  effort  pour  tirer  le 
roi  de  son  aveuglement.  Ils  lui  adressèrent  un  mémoire,  dont  le 
ton  solennel  s'accorde  bien  avec  la  gravité  des  circonstances. 

Ils  priaient  le  roi  de  déposer  le  ressentiment  qu'il  pouvait  avoir 
contre  les  seigneurs  de  son  sang,  contre  ses  officiers,  et  de  faire 
cesser  toute  voie  de  fait  *  ;  ils  demandaient  leur  réconciliation  avec 
le  sire  de  La  Trémoille,  le  seigneur  de  Trêves  et  les  autres  mem- 
bres du  conseil;  ils  sollicitaient  surtout,  comme  une  mesure  in- 
dispensable, la  convocation  des  Etats  généraux  à  Poitiers,  avec 
la  liberté  pour  chacun  de  dire  ce  que  bon  lui  semblerait,  et  des 
garanties  efficaces  contre  toute  tentative  d'oppression  ou  de  vio- 
lence ;  enfin  ils  proposaient  que  la  reine  de  Sicile  fût  investie  des 
pouvoirs  nécessaires  pour  assurer  la  sécurité  de  tous.  Les  me- 
sures de  précaution  qu'ils  indiquent  dans  la  suite  du  mémoire 
montrent  combien  ils  redoutaient  pour  eux-mêmes,  pour  leurs 
partisans,  pour  les  membres  de  la  future  assemblée  l'audace  et  la 

1.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  126.  Portef.  Fontanieu,  HS-H6,  au  22  juin.  A 
la  fin  de  mai,  Richemont  était  à  Parthenay  (Fr.  8818,  f»  94). 

2.  11  savait  peut-être  que  le  roi  voulait  lui  opposer  non  seulement  J.  de 
Blois,  mais  encore  le  roi  de  Gastille.  Voir  dans  le  Ms.  latin  602i,  n»  26, 
les  instructions  écrites  données  par  Charles  VU  aux  ambassadeurs  qu'il 
envoie  en  Gastille.  Ils  devront  prier  le  roi  de  Gastille  d'envoyer  40  ou  SO 
vaisseaux  contre  le  duc  de  Bretagne,  pour  le  réduire  à  la  soumission. 

3.  J.  Stevenson,  I,  404  et  suiv.,  11,  76.  Fr.  20908,  n»  86. 

4.  Le  10  mars,  Richemont  écrivait  aux  habitants  de  Poitiers  «  touchant 
la  vuidange  des  gens  d'armes  »  qui  étaient  dans  le  Poitou.  (Aixh.  hist.  du 
Poitou,  Poitiers,  1872,  in-8°,  I,  146.) 


TENTATIVE  DES  PRINCES   SUR  BOURGES    (1428)  159 

perfidie  de  La  Trémoille  '.Celui-ci  ne  pouvait  accueillir  qu'avec 
répugnance  des  propositions  aussi  sages.  Il  craignait  de  perdre 
son  pouvoir  si  le  connétable  et  ses  amis  rentraient  à  la  cour.  Il 
savait  bien  que  les  Etats  se  prononceraient  en  leur  faveur,et,  quoi- 
qu'il y  allât  peut-être  du  salut  de  la  France,  il  ne  voulut  ni  con- 
sentir à  une  réconciliation  si  désirable,  ni  se  prêter  à  la  réunion 
d'une  assemblée  importune.  On  ne  sait  quelle  réponse  le  roi  fit  au 
mémoire  du  connétable  et  de  ses  alliés,  ni  même  s'il  y  répondit; 
mais  les  événements  montrent  assez  que  cette  tentative  pacifique 
ne  changea  rien,  dans  le  moment,  à  la  situation.  La  Trémoille 
continua  les  hostilités  dans  le  Poitou.  Charles  VII  convoqua  bien 
les  Etats  pour  le  18  juillet;  mais  il  ne  se  pressa  pas  de  les  réu- 
nir, sachant  bien  qu'ils  voudraient  s'occuper  du  gouvernement*. 

Alors  le  connétable  et  ses  amis  résolurent  d'agir.  Sûrs  de  trou- 
ver un  concours  sympathique  dans  la  population  de  Bourges, 
ils  voulurent  s'établir  dans  cette  grande  ville  et  déterminer  ainsi 
un  mouvement  qui  serait  assez  puissant  pour  obhger  le  roi  à 
faire  des  concessions  ^.  Instruit  de  ce  projet,  La  Trémoille  fit 
défendre,  par  lettres  patentes,  aux  habitants  de  Bourges  et  aux 
officiers  royaux  de  recevoir  dans  la  ville  les  seigneurs  qui  se  pré- 
paraient à  y  venir.  Les  habitants  promirent  de  se  conformer  à 
cette  défense  ;  les  sires  de  Prye  et  de  Bonnay  *,  commis  à  la  garde 
de  la  place,  reçurent  même  leurs  serments  solennels. 

Néanmoins,  quand  les  comtes  de  Clermont  et  de  Pardiac  se 
présentèrent,  les  habitants,  les  officiers  royaux  eux-mêmes  les 
aidèrent  à  entrer  dans  la  ville.  Alors  les  deux  princes  réunirent 
les  gens  d'Eglise,  les  bourgeois  et  autres  habitants;  ils  leur  expo- 
sèrent les  motifs  et  le  but  de  leur  entreprise;  ils  leur  dirent 
qu'ils  voulaient  «  travailler  au  bien  du  roi  »  et  délivrer  le  Berry 
des  garnisons  qui  le  pillaient;  enfin  ils  demandèrent  leur  aide, 
qui  leur  fut  promise.  Le  sire  de  Prye  et  le  sire  de  La  Borde,  capi- 
taine de  la  grosse  tour  de  Bourges,  ne  voulurent  pas  prendre 
part  à  cette  manifestation.  Ils  se  retirèrent,  avec  quelques  troupes, 
dans  la  grosse  tour,  où  ils  furent  aussitôt  assiégés  par  les  comtes 

1.  Voy.  Append,  LUI. 

2.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  163.  L'assemblée  convoquée  pour  le 
18  juillet  n'eut  pas  lieu  (Picot,  Hist.  des  Etats  généraux,  I,  311-313;  D.  Vais- 
selle, Hist.  du  Languedoc,  IV,  471). 

3.  Le  comte  de  Pardiac  avait  alors  à  son  service  Rod.  de  Villandrando, 
le  fameux  capitaine  de  routiers  (J.  Quicherat,  R.  de  Villandrando,  30  et 
i^uiv.).  Le  comte  de  Clermont  avait,  de  son  côté,  obtenu  l'adhésion  de 
Guil.  de  Chalançon,  évèque  du  Puy,  de  son  frère  Armand  de  Chalançon  et 
de  Louis  de  Chalançon,  premier  chambellan  du  roi,  fils  d'Armand  et 
neveu  de  Guillaume  (de  Beaucourt,  t.  II,  164.  Voy.  ci-dessus,  p.  134). 

4.  Fr.  20684,  f-  546. 


i60  TENTATIVE   DES   PRINCES   SUR   BOURGES    (1428) 

de  Clermont  et  de  Pardiac,  aidés  par  ceux  de  la  ville  et  même  par 
les  officiers  du  roi.  Ils  s'emparèrent  de  la  monnaie,  des  greniers 
à  sel,  firent  percevoir  des  taxes;  en  un  mot, ils  organisèrent  là  un 
autre  gouvernement.  Ils  firent  alors  savoir  au  comte  de  Richemont 
le  résultat  de  leur  entreprise,  en  le  pressant  de  venir  au  plus  tôt 
se  joindre  à  eux,  avec  tout  ce  qu'il  pourrait  rassembler  de  gens 
d'armes. 

La  situation  devenait  fort  inquiétante  pour  La  Trémoille.  Il 
voulut  arrêter,  par  tous  les  moyens  possibles,  ce  mouvement,  au- 
quel adhéraient  déjà  beaucoup  de  prélats,  de  barons,  d'officiers 
royaux  et  plusieurs  autres  bonnes  villes,  sans  parler  des  comtes 
de  La  Marche  et  d'Armagnac  * .  Il  envoya  Gaucourt  dans  le  Poitou, 
en  le  chargeant  de  ramener  avec  lui  Jean  de  La  Roche,  pour  mar- 
cher ensuite  vers  Bourges  *.  Lui-même,  après  avoir  réuni  à  la 
hâte  un  grand  nombre  de  gens  d'armes,  se  rendit  avec  le  roi 
devant  Bourges. 

Le  sire  de  Prye  avait  été  tué,  mais  le  sire  de  La  Borde  tenait 
encore  dans  la  grosse  tour.  Le  roi  eut  beau  signifier  aux  rebelles 
sa  volonté  par  son  premier  héraut,  Montjoye,  en  leur  comman- 
dant, sous  les  peines  les  plus  rigoureuses,  de  vider  la  place;  ils 
n'en  persistèrent  pas  moins  dans  leur  résistance,  avec  le  concours 
de  la  population.  En  même  temps,  le  connétable  essayait  de 
s'avancer;  mais,  comme  il  fallait  pour  cela  livrer  bataille  aux 
troupes  que  La  Trémoille  lui  opposait  dans  le  Poitou  ^,  il  fit  un 
détour  vers  Limoges,  avec  l'intention  de  passer  par  l'Auvergne, 
ce  qui  retarda  beaucoup  sa  marche.  La  Trémoille  sut  profiter 
habilement  de  ce  répit,  pour  négocier  avec  les  comtes  de  Clermont 
et  de  Pardiac,  avant  que  l'arrivée  du  connétable  rendît  la  situation 
plus  critique.  Il  leurfit  comprendre  que,  assiégés  eux-mêmes  dans 
Bourges,  ils  ne  pouvaient  rien  sans  le  secours  de  Richemont,  et 
que,  n'ayant  plus  à  compter  sur  lui,  ils  s'exposaient  à  de  cruelles 
déceptions.  Il  dut  aussi  invoquer  auprès  d'eux  le  misérable  état 
de  la  France,  leur  montrer  les  Anglais  profitant  de  ces  fatales 
discordes  et  Orléans  déjà  menacé  *.  Continuer  la  guerre  civile 
dans  un  pareil  moment,  c'était  vouloir  la  ruine  totale  de  la  France. 
On  peut  supposer  que  ces  considérations  touchèrent  les  comtes 
de  Clermont  et  de  Pardiac  ;  d'ailleurs  ils  obtinrent  des  concessions 
et  des  promesses  qui  pouvaient  leur  faire  espérer  d'autres  avan- 
tages. D'abord  le  roi  leur  accorda  rémission  complète  à  eux  et  à 
tous  leurs  adhérents,  sans  en  excepter,  comme  on  l'a  dit  à  tort,  le 

1.  De  Beaucourt,  ifîs<.  de  Charles  VU,  t.  II,  164,  note  2. 

2.  La  Thaumassière,  Hist.  de  Berry,  Bourges,  1689,  in-f",  p.  386-587. 

3.  J.  Quicherat,  R.  de  ViUandrando,  p.  30.  Le  Baud,  p.  475. 

4.  Fr.  4488,  f  209. 


LES  PRINCES  TRAITEKT  AVEC   LA  TRÉMOILLE   (1428)  161 

comte  de  Richemont  (17  juillet)  *  ;  ensuite,  quand  il  fut  entré  dans 
Bourges,  il  convoqua,  par  lettres  du  22  juillet,  les  Etats  géné- 
raux, pour  le  10  septembre,  à  Tours  ;  enfin,  le  même  jour  (22  juil- 
let), La  Trémoille  s'engagea  formellement  à  ne  rien  faire  ou 
laisser  faire  au  préjudice  du  comte  de  Clermont  et  à  le  défendre 
contre  quiconque  lui  voudrait  nuire  *. 

Il  ne  faudrait  pas  croire  que  Charles  de  Bourbon  trahissait  son 
beau-frère  et  allié,  Artur  de  Bretagne,  en  se  réconciliant  avec  La 
Trémoille.  Tout  porte  à  supposer,  au  contraire,  que,  ne  pouvant 
plus  le  seconder  par  les  armes,  il  préparait  son  retour  en  grâce 
par  d'autres  moyens,  c'est-à-dire  en  faisant  accepter  les  conclu- 
sions du  mémoire  adressé  précédemment  au  roi.  Ainsi  les  lettres 
par  lesquelles  les  Etats  généraux  sont  convoqués  ordonnent  aux 
députés  de  venir,  toutes  excusations  cessantes,  pour  délibérer  sur 
les  grandes  affaires  du  royaume,  et  il  est  bien  entendu  que  cha- 
cun aura  franche  liberté  de  dire  tout  ce  que  bon  lui  semblera. 
Ces  lettres  patentes  ^,  publiées  sur  l'avis  du  duc  d'Alençon,  des 
comtes  de  Clermont  et  de  Pardiac,  des  prélats,  barons  et  autres 
notables  gens  en  grand  nombre,  sont  conformes  aux  demandes 
contenues  dans  le  mémoire;  elles  prouvent  que  la  tentative  des 
princes  sur  Bourges  n'avait  pas  été  stérile  et  que  Richemont  com- 
ptait sur  l'influence  des  Etats  pour  obtenir  son  rappel.  Quant  à 
La  Trémoille,  il  fit  sans  doute  toutes  les  promesses  que  les  comtes 
de  Clermont  et  de  Pardiac  lui  demandèrent  ;  il  était  assez  adroit 
pour  trouver  le  moyen  d'éluder  ses  engagements.  Il  feignit  même 
de  donner  suite  à  ces  promesses,  en  se  prêtant  à  quelques  négo- 
ciations ;  maisil  n'en  était  pas  moins  décidé  à  empêcher  le  retour 
du  connétable.  Celui-ci  était  à  Limoges  quand  il  apprit  ces  nou- 
velles. Il  revint  à  Parthenay,où  il  attendit  les  événements. 

C'est  l'époque  où  la  France  semble  condamnée  à  périr  sous 
les  coups  de  Bcdford;  où  les  Anglais,  partout  victorieux,  ont 
pris  Laval  et  repris  Le  Mans,  un  instant  délivré  (mai)  *  ;  où  le 

1.  Ces  lettres  d  abolition  sont  dans  le  registre  P  1358*,  n»  Jj74.  Rien  n'y 
indique  l'exclusion  du  connétable  ;  en  outre,  elles  sont  du  17  et  non  du 
27  juillet,  comme  le  dit  Vallet  de  V.  (I,  463),  d'après  La  Thaumassière 
(p.  158-159).  Les  lettres  de  convocation  des  États,  données  à  Bourges,  sont 
du  22  juillet,  d'après  D.  Vaissète,  IV,  471.  Charles  VII  commet  le  26  juillet, 
à  la  défense  de  Bourges,  Jacques  de  Bonnay,  qui  avait  défendu  la  grosse 
tour  avec  J.  de  La  Borde  (Fr.  20684,  f»  546). 

2.  Musée  des  arch.  nat.,  n»  445,  ou  P  1373  »,  cote  2156. 

3.  On  en  trouve  deux  copies  dans  le  t.  99  de  la  collection  de  Languedoc, 
fi»  72  et  74  (Mss.  de  D.  de  Vie).  Voy.  aussi  f"'  73  et  82.  D,  Vaissète,  IV,  471  ; 
G.  Picot,  Etats  généraux,  t.  1,  311-313;  Biblioth.  de  l'école  des  Chartes, 
année  1872,  t.  XXXlll,  36,  37. 

4.  Fontanieu  dit  que  Talbot,  ap7-ès  avoir  repris  Le  Mans,  reprend  Laval 
Richemont.  11 


162  ÉTATS   GÉNÉRAUX  DE   CHINON   (1428,    SEPT.) 

comte  de  Salisbury,  récemment  arrivé  d'Angleterre  avec  une 
nouvelle  armée  (juin),  s'avance  sur  Orléans,  en  s'emparant  des 
villes  du  voisinage,  tandis  que  Jean  de  Luxembourg  achève  la 
conquête  de  la  Champagne  *.  La  détresse  financière  était  com- 
plète, et  ce  fut  sans  doute  le  principal  motif  qui  obligea  La  Tré- 
moille  à  ne  pas  retarder  plus  longtemps  la  réunion  des  Etats 
généraux  2.  Cette  assemblée,  qui  devait  avoir  lieu  à  Tours,  d'après 
les  lettres  de  convocation  du  22  juillet,  se  réunit  peut-être  dans 
cette  ville;  mais  elle  fut  bientôt  transférée  à  Chinon,  car  les 
Anglais,  déjà  maîtres  de  Meung  et  de  Beaugency,  villes  situées 
sur  la  Loire  au-dessous  d'Orléans,  auraient  pu  faire  des  courses 
jusqu'à  Tours.  Ce  furent  de  véritables  Etats  généraux.  On  y  vit 
non  plus  seulement  les  députés  des  pays  de  Languedoil,  m^is 
encore  ceux  des  pays  de  Languedoc,  qui,  d'ordinaire,  tenaient 
des  sessions  séparées,  les  uns  dans  le  centre,  les  autres  dans  le 
midi  de  la  France.  On  eût  dit  que  la  nation  entière,  entraînée 
par  le  sentiment  du  péril  commun,  voulait  opposer  un  rempart 
infranchissable  à  l'invasion  anglaise.  Jamais,  sous  le  règne  de 
Charles  VII,  il  n'y  eut  d'assemblée  aussi  nombreuse  ^;  jamais  il 
n'y  en  eut,  jusqu'en  1789,  qui  se  soit  réunie  dans  des  circon- 
stances plus  solennelles. 

Dès  le  mois  de  septembre,  les  Etats  votèrent  une  aide  de 
500  000  francs  qui  devait  être  affectée  exclusivement  à  repousser 
les  Anglais  et  à  secourir  Orléans  *,  puis,  usant  de  la  liberté 

sans  coup  férir  (voy.  Ms.fr.  10449,  f"  155);  mais  il  suit  Cousinot  de  Montreuil 
dont  la  chronologie  est  très  incertaine.  Voir  aussi  Fr.  15512,  f»  1.  Fr.  2S710, 
n"  57.  Clairamb.,  t.  23,  f°  1669;  t.  28,  î"^  2053;  2055,  t.  43,  f»  3201;  t.  95, 
f"  7369  ;  1. 107,  f"  8349.  Cousinot,  251-254.  Le  Bourgeois  de  Paris,  p.  225-226. 
Ms.  3039  de  l'Arsenal,  f"'  116  v°,  117.  —  A  cette  même  époque  (11  mai),  les 
nobles  de  la  baronnie  de  Craon  s'engagent  à  payer  à  G.  de  La  Trémoille 
1200  écus  d'or,  à  condition  qu'il  leur  fasse  avoir  «  seurté  et  toute  abstinence 
de  guerre  avec  les  Anglais  et  leurs  alliez  »,  le  tout  garanti  par  des  lettres 
du  roi,  de  la  reine  de  Sicile  et  des  Anglais,  avant  la  Toussaint  [Chartrier 
de  Thouars,  publié  par  L.  de  La  Trémoille,  Paris,  1877,  in-4,  p.  16-17). 

1.  Ms.  Fr.  10449,  i"^  153-159.  Cousinot,  203-204  et  251-260.  Ms.  Fr.  4484, 
passim,  notamment  f»»  1-8,  18-33,  73,  75,  76,  79-83,  94,  102,  161-166,  203, 
216  et  suiv.  Porte  f.  Fontanieu,  115-116,  au  3  février.  H.  Wallon,  Jeanne 
d'Arc,  I,  39  et  suiv.  A.  Longnon,  Les  limites  de  la  France,  etc.,  p.  487. 

2.  Il  avait  prêlé  beaucoup  d'argent  au  roi  cette  année-là  et  s'était  fait 
donner  en  gage  la  châtellenie  de  Cbinon  (août),  qui  était  auparavant  à  la 
duchesse  de  Guyenne,  puis,  en  place  de  la  châtellenie  de  Chinon,  celle  de 
Lusignan,  par  leltiîes  du  29  octobre.  {Chartrier  de  Thouars,  p.  17-20.)  De 
Beaucourt,  Revue  des  questions  histor.,  t.  IX,  p.  401-403.  J  183,  a's  142, 143, 
144.  Lusignan  était  «  la  plus  notable  place  »  du  Poitou.  Portef.  Godefroy-, 
163,  f  223  V  (à  la  bibliothèque  de  l'Institut). 

3.  Voy.  A.  'Thomas,  les  Etats  généraux  sous  Charles  VU,  dans  le  t.  24 
(année  1878)  du  Cabinet  historique.  De  Beaucourt,  t.  II,  p.  170-173,  592-593. 

4.  Fr.  26051,  n»  1035.  Collect.  de  Languedoc,  t.  99,  f<"  70,  71,  73,  82.  Por- 


ÉTATS  GÉNÉRAUX  DE  CHINON  (1428,    OCT.   NOV.)  163 

qu'on  leur  avait  accordée,  ils  demandèrent  les  réformes  indis- 
pensables pour  que  '(  les  affaires  se  pussent  dores  en  avant  con- 
duire en  bonne  police  et  justice  ».  Non  contents  d'avoir  inscrit 
ces  requêtes  dans  leurs  cahiers  de  doléances,  les  députés  les 
exprimèrent  devant  le  roi  lui-même,  afin  qu'il  ne  pût  les  ignorer 
(H  novembre  1428).  Ils  le  supplièrent  d'attirer  à  lui,  par  tous 
les  moyens  possibles,  tous  les  seigneurs  de  son  sang,  de  faire  la 
paix  avec  le  duc  de  Bourgogne,  enfin  de  recevoir  «  en  bon 
amour  et  obéissance  et  en  son  service  monseigneur  le  connes- 
table  et,  pour  ce  faire,  de  continuer  les  ambassades  et  traités 
qui  ont  été  commencés.  »  Le  roi  répondit  que  cela  n'avait  pas 
tenu  et  ne  tiendrait  pas  à  lui,  ni  à  ceux  qui  étaient  autour  de  lui  ; 
que  de  grandes  diligences  en  avaient  été  faites,  comme  on 
l'avait  déjà  exposé  aux  Etats,  et  qu'il  en  serait  fait  encore  de 
nouvelles  *.  Ainsi  les  députés  de  tous  les  pays,  aussi  bien  de 
Languedoc  que  de  Languedoil,  et  le  parlement  demandaient  le 
rappel  de  Richemont  comme  une  des  mesures  les  plus  urgentes  ; 
mais  La  Trémoille  sut  empêcher  le  roi  de  tenir  ses  promesses. 
Toutefois,  cette  grande  manifestation  ne  fut  pas  inutile  au  con- 
nétable; elle  lui  montra  qu'il  n'avait  pas  eu  tort  de  compter  sur 
les  Etats,  qu'il  avait  pour  lui  l'opinion  publique;  elle  releva  son 
courage  et  entretint  ses  espérances. 

Au  mois  d'octobre,  pendant  que  les  Etats  siégeaient  à  Ghinon 
et  que  Salisbury  commençait  le  siège  d'Orléans  (12  octobre)  % 
le  connétable  s'était  rendu  en  Bretagne,  on  ne  sait  dans  quel 
but.  Il  est  vraisemblable  qu'il  voulait  obtenir  de  son  frère  les 
secours  dont  il  pouvait  avoir  besoin,  afin  d'être  prêt  à  toute  éven- 
tualité. Le  14  octobre,  il  était  à  Redon,  où  il  fit  un  testament  en 
faveur  de  son  neveu,  Pierre,  deuxième  fils  de  Jean  V,  pour  le 
cas  où  il  mourrait  sans  héritiers.  De  son  côté,  le  duc  donna 


tef.  Fonlanieu,  115-116,  à  septembre  1428.  Fr.  '4488,'f<'  8.  Le  7  septembre,  les 
Étals  de  Rouen  accordent  aussi  à  Henri  VI  un  subside  pour  le  siège  d'Or- 
léans (Fr.  26051,  008  982-990,  1042, 10o8,  et  Fr.  26052,  n"'  1133,  1170)  et  pour 
le  siège  du  Mont-Saint-Michel,  que  les  Anglais  continuaient  avec  acharne- 
ment (Fr.  4-488,  f^'lH,  121). 

1.  Le  Mss.  lat.  9177  contient  une  copie  de  ces  requêtes,  exposées  d'abord 
dans  le  cahier  de  doléances,  puis  oralement  par  les  députés  des  pays  de 
Languedoc,  d'accord  avec  ceux  des  pays  de  Languedoil,  comme  on  le  voit 
dans  la  septième  demande,  relative  au  rappel  du  connétable.  On  y  lit  aussi 
les  réponses  du  roi  (Voy.  append.  LUI  bU).  Le  2  novembre,  le  parlement 
de  Poitiers  décide  qu'on  écrira  aux  comtes  de  Clermont,  de  Richemont  et 
de  Pardiac  «  pour  le  secours  de  la  ville  d'Orléans  »  (Fr.  21302,  à  la  date). 

2.  Sur  l'expédition  de  Salisbury  et  le  siège  d'Orléans,  les  documents 
abondent.  Voir  Fr.  4484,  f»»  106-129, 176,  177  v»,  201,  202.  Fr.  4488,  f»^  76-89, 
101,  209.  K63,  no'  19,i2,  4.  Fr.  26030,  o»'  909,  912.  Fr.  26031,  n"'  976,  996,  997. 


164  LES   ANGLAIS  ASSIÈGENT  ORLÉANS   (1428-1429) 

3  000  livres  à  Richemont,  outre  une  autre  somme  de  5  000  livres 
qu'il  lui  devait  pour  son.  apanage  ^ 

Le  connétable  eût  été  heureux  d'employer  ces  ressources  au 
service  de  la  France  *  ;  mais  La  Trémoille  le  tenait  toujours  à 
l'écart  et  ne  cessait  même  pas  les  hostilités  contre  lui  dans  le 
Poitou.  Durant  son  absence,  la  duchesse  de  Guyenne,  qu'il  avait 
laissée  à  Parthenay,  était  obligée  de  rester  sur  la  défensive  et 
d'envoyer  des  renforts  à  Fontenay  «pour  certaines  présomptions 
de  péril  ^  ».  J.  de  La  Roche  continuait  ses  ravages  dans  le  Poitou 
avec  des  forces  assez  considérables  pour  y  entretenir  une  véri- 
table guerre.  Il  fallut  même  que  Richemont,  revenu  à  Parthenay, 
envoyât  contre  lui  quelques  troupes  avec  son  lieutenant  Jean 
Sevestre,  qui  assiégea  le  château  de  Sainte-Néomaye  '*.  J.  de  La 
Roche  étant  parvenu  à  ravitailler  la  place,  Sevestre  se  retira  et 
le  connétable  «  ne  bougea  toute  cette  saison  d'entour  Par- 
thenay ^  ».  Sa  disgrâce  et  son  inaction  ne  lui  furent  jamais  plus 
intolérables  que  pendant  ce  funeste  hiver  de  1428-1429,  quand 
il  apprit  que  son  neveu,  le  duc  d'Alençon,  son  beau-frère  le 
comte  de  Clermont,  J.  Stewart,  le  maréchal  de  Boussac,  l'amiral 
de  Culant,  le  bâtard  d'Orléans,  La  Hire  étaient  appelés  à  secourir 
Orléans  ®  ;  que  les  Français  avaient  été  défaits  par  Fastolf  à  la 
batailUe  de  Rouvray  ^  (12  février)  ;  qu'après  ce  dernier  désastre 
tout  semblait  perdu,  et  que  Charles  VII,  désespéré,  songeait  à  se 
réfugier  dans  le  Dauphiné  ou  même  en  Espagne  *. 

Richemont  résolut  d'aller,  lui  aussi,  au  secours  d'Orléans;  mais, 
avant  qu'il  eût  terminé  ses  préparatifs,  il  apprit  une  nouvelle  extra- 
ordinaire. Une  pauvre  fille  des  champs,  qui  se  disait  envoyée  de 
Dieu  pour  sauver  la  France,  était  parvenue  jusqu'au  roi  (6  mars), 
malgré  les  efforts  de  La  Trémoille.  On  la  nommait  simplement 
Jeanne  la  Pucelle,  et  ce  nom,  déjà  populaire,  courait  de  bouche 
en  bouche  dans  tous  les  pays  au  nord  et  au  sud  de  la  Loire.  Puis 
ce  furent  d'autres  prodiges.  Jeanne,  soutenue  par  la  reine  de 

1.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  9,  E,  24.  Richemont  donne  quittance 
des  deux  sommes  le  24  octobre  (Registre  Turnus  Brutus,  I,  141  v»;  Preuves 
de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  1209-1212). 

2.  Pendant  ce  temps,  Charles  VII  implorait  le  secours  du  roi  d'Ecosse, 
eçi  hii  promettant  le  duché  de  Berry  ou  le  comté  d'Evreux,  au  lieu  de  la 
Saintonge,  qu'il  lui  avait  donnée  (Ms.  Brienne,  54,  f»'  59-60j. 

3.  Fr.  8818,  f"  96  v.  KK  269,  f"  52  v,  S3. 

4.  Arrondissement  de  Niort. 

5.  Gruel,  197.  B.  Ledain,  231. 

6  Sur  le  siège  d'Orléans,  voir  :  Fr.  4488,  f»'  12-15,  155,  173,  176,  etc. 
J.  Stevenson,  t.  II,  89,  92.  Fr.  7838,  fos  48-50. 

7.  On  l'appela  la  «  journée  des  Harens  «  (JJ  177,  f»  78  v»). 

8.  H.  'Wallon,  Jeanne  d'Arc,\,  58-62,  106. 


LE   DUC  d'ALENÇON  LIEUTENANT-GÉINÉRAL   (1429) 

Sicile,  avait  obtenu  qu'on  réunît  des  troupes  à  Blois  ;  elle  était 
entrée  dans  Orléans,  le  29  avril,  et,  quelques  jours  après,  cette 
ville  était  délivrée  (8  mai)  *.  La  renommée  proclamait  partout 
le  nom  de  la  Pucelle  et  ses  merveilleux  exploits  :  l'espérance, 
l'enthousiasme  faisaient  battre  tous  les  cœurs.  Richemont  ne 
fut  pas  le  dernier  à  s'émouvoir.  Commue  beaucoup  d'autres,  à  ce 
moment,  il  ne  savait  que  penser  de  cette  bergère,  qui  prétendait 
accomplir  une  mission  divine  %  mais  il  voyait  que  les  Anglais 
étaient  battus,  qu'un  élan  général  soulevait  la  nation  et  qu'il 
fallait  profiter  des  circonstances  pour  accabler  les  ennemis  dé- 
concertés. Après  avoir  fait  des  travaux  de  défense  à  Fontenay  ^, 
il  retourna  en  Bretagne,  afin  d'y  lever  des  troupes  et  d'envoyer 
des  renforts  à  son  neveu,  le  duc  d'Alençon,  en  attendant  qu'il 
pût  marcher  lui-même  contre  les  Anglais  *. 

Jean  II  d'Alençon  était  fils  de  ce  vaillant  duc  qui  avait  suc- 
combé si  héroïquement  à  la  bataille  d'Azincourt  et  d'une  sœur 
de  Richemont,  Marie  de  Bretagne.  Pris  lui-même  à  la  bataille 
de  Verneuil,  en  1424,  il  était  resté  captif  en  Angleterre,  jusqu'au 
mois  d'octobre  1427  et  n'avait  obtenu  sa  liberté  qu'au  prix  d'une 
énorme  rançon  ^.  Pour  payer  cette  somme  et  pour  être  en  état 
de  mieux  servir  Charles  VII,  il  avait  vendu,  non  sans  regret,  la 
baronnie  de  Fougères  à  son  oncle  Jean  V,  duc  de  Bretagne.  Bien 
qu'il  fût  neveu  du  connétable,  La  Trémoille  ne  l'avait  point 
écarté,  et  le  roi  avait  accueilli  avec  empressement  ce  chevale- 
resque et  fidèle  serviteur,  qui  ne  demandait  qu'à  lui  consacrer 
sa  fortune  et  sa  vie  °.  Nul  ne  fut  plus  prompt  à  se  déclarer  pour 

1.  Le  dimanche  8  mai.  Voy.  X'a  1481,  f»  12,  à  la  date  du  mardi  10  mai. 
C'est  la  première  fois  que  les  registres  du  parlement  font  mention  de  la 
Pucelle. 

2.  Voir  par  exemple  le  Ms.  3039  de  l'Arsenal,  f"  117. 

3.  Fr.  8818,  ^  96.  Le  Baud,  476.  Peut-être  J.  de  La  Roche  avait-il  reçu 
l'ordre  de  ne  plus  combattre  Richemont  et  de  venir  au  secours  d'Orléans, 
car  on  voit  dans  une  lettre  de  Guy  de  Laval  que  J.  de  La  Roche  s'avançait 
aussi  vers  Selles,  en  même  temps  que  le  connétable  (voir  Preuves  de  Bret., 
t.  II,  col.  1224-1226);  à  moins  que  ce  ne  fût  pour  le  surveiller. 

4.  Le  parlement  de  Poitiers  avait  décidé,  le  2  novembre  1428,  d'écrire  au 
comte  de  Richemont,  pour  l'engager  à  secourir  Orléans  (voy.  ci-dessus, 
p.  163,  note  1). 

5.  Gagny  {Ms.  Duchesne,  48,  f^  86).  Il  paya,  pour  sa  rançon,  200  000  1., 
c'est-à-dire  plus  de  deux  millions  de  monnaie  actuelle,  d'après  M.  Wallon 
(I,  110,  note  1).  D'après  le  contrat  de  vente  (31  décembre  1428),  le  duc  de 
Bretagne  s'engage  à  payer  au  duc  de  Bedford  80  000  saluts  d'or,  que  le  duc 
d'Alençon  doit  encore  pour  sa  rançon,  à  obtenir  la  mise  en  liberté  des 
otages,  etc.  {Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  4,  E,  12,  et  cass.  7o,  E  178; 
Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  1213-1222.  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  V,  France, 
f"  223  v«  224;  Anselme.  I,  272-273). 

6.  En  octobre  1428,  il  avait  essayé  d'entrer  dans  la  ville  d'Argentan,  que 


166       RICHEMONT  ENVOIE  DES  TROUPES  AU  ROI  (1429) 

la  Pucelle,  plus  ardent  à  soulcnir  sa  cause  et  à  seconder  ses 
entreprises.  Après  la  délivrance  d'Orléans,  Charles  VII  avait 
nommé  le  jeune  duc  d'Alençon  lieutenant  général,  en  le  char- 
geant d'aller,  avec  Jeanne  d'Arc,  chasser  les  Anglais  des  places 
qu'ils  occupaient  encore  sur  la  Loire  K 

Richemont  crut  que  c'était  le  moment  de  rentrer  en  scène.  Il 
n'avait  pas  eu  de  peine  à  trouver,  en  Bretagne,  dans  le  parti 
français,  des  seigneurs  tout  disposés  à  le  suivre,  comme  le  comte 
Guy  de  Laval,  le  sire  de  Lohéac,  son  frère,  et  le  sire  de  Raiz,  qui 
n'avaient  pas  voulu  prêter  serment  de  fidélité  au  roi  d'Angle- 
terre ^.  Après  les  avoir  envoyés  au  duc  d'Alençon,  avec  une  nom- 
breuse troupe  de  gens  d'armes,  il  partit  lui-même  pour  prendre 
part  aux  opérations  qui  continuaient  sur  la  Loire.  Il  emmenait 
400  lances  et  8G0  archers,  qu'il  avait  levés  tant  en  Bretagne  que 
dans  ses  terres  du  Poitou,  avec  nombre  de  notables  chevaliers 
et  écuyers,  comme  le  comte  de  Pardiac,  les  seigneurs  de  Beau- 
manoir  et  de  Rostrenen,  Robert  de  Montauban,  Guillaume  de 
Saint-Gilles,  Alain  de  La  Feuillée,  en  un  mot  une  belle  et  bonne 
compagnie,  qui  pouvait  rendre  de  grands  services  *.  On  peut 
croire,  en  outre,  que,  pendant  son  séjour  en  Bretagne,  il  avait 
fait  de  nouveaux  efforts  auprès  de  Jean  V  pour  le  détacher  de 
l'alliance  anglaise,  en  lui  montrant  combien  cette  alliance 
deviendrait  dangereuse,  si  les  Français  continuaient  d'avoir  le 
dessus.  Ces  considérations  agirent  assez  sur  le  timide  et  prudent 
Jean  V  pour  le  déterminer  à  renouer  quelques  relations  avec 
Charles  YII  et  à  ne  point  refuser  d'autres  secours  *. 

Ces  nouveaux  services  rendus  au  roi  par  Richemont,  la  certi- 
tude qu'il  en  pouvait  rendre  encore  d'autres  ne  changèrent  rien 
aux  sentiments  haineux  de  La  Trémoille.  Quand  il  apprit  que  le 
connétable  était  en  marche,  il  ne  songea  qu'à  l'arrêter.  Il  envoya 
au-devant  de  lui  le  sire  de  La  Jaille,  pour  lui  signifier  l'ordre  de 
ne  pas  avancer.  On  était  dans  les  premiers  jours  de  juin.  On 
sait,  par  une  lettre  du  comte  de  Laval  ^  datée  du  8  , qu'on  parlait 

les  habitants  voulaient  lui  livrer  (J.  Stevenson,  II,  p.  85);  mais  le  complot 
avait  été  éventé.  En  juin  1429,  la  rançon  du  duc  n'était  pas  encore  entière- 
rement  payée.  Il  avait  dû  laisser  comme  otages  plusieurs  seigneurs  qui 
furent  alors  conduits  de  Calais  à  Rouen  par  Ricliard  Widville  (Fr.  26032, 
n»  1107).     - 

1.  Vallet  de  V.  Charles  VII,  II,  81.  Fr.  10448,  f"  50. 

2.  Voy.  Append.  L,  vers  la  fin. 

3.  Gruel,  197.  Le  Baud,  466.  J.  Quicherat,  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  66, 178. 

4.  Voir  une  lettre  du  comte  de  Laval  [Preuves  de  Bretagne,  II,  col.  1224). 

5.  Preuves  de  Bretagne,  II,  1224.  Jeanne  était  à  Selles  le  4  juin;  elle  en 
partit  le  6  pour  Orléans,  le  jour  même  où  le  duc  d'Alençon  arrivait  à 
Selles  (H.  Wallon,  J.  d'Arc,  1, 187-188).  Monstrelel  ne  connaît  pas  les  intri- 


RICHEMONT  REJOINT   l'aRMÉE   (1429,   JUIN)  167 

de  l'approche  du  connétable  parmi  les  troupes  que  le  duc  d'Alen- 
çon  avait  réunies  à  Selles  en  Berry,  avec  le  bâtard  d'Orléans,  le 
comte  de  Vendôme,  Boussac,  La  Hire  et  Gaucourt,  pour  aller 
rejoindre  Jeanne  d'Arc  à  Orléans.  Le  sire  de  La  Jaille  rencontra 
le  prince  breton  à  Loudun.  Alors,  le  prenant  à  part  :  «  Monsei- 
gneur, lui  dit-il,  le  roi  vous  ordonne  de  retourner  à  la  maison, 
et,  si  vous  êtes  si  hardi  de  passer  outre,  il  vous  combattra. 
—  Ce  que  j'en  fais,  répondit  simplement  Richemont,  est  pour  le 
bien  du  royaume  et  du  roi;  et  je  verrai  qui  me  voudra  combat- 
tre. —  Il  me  semble,  Monseigneur,  que  vous  ferez  très  bien,  » 
ajouta  le  sire  de  La.  Jaille  ^ 

Le  connétable  continua  donc  sa  marche.  Il  traversa  la  Vienne 
à  gué  et  arriva  jusqu'à  Amboise,  où  commandait  Regnault  de 
Bours,  qui  lui  permit  d'entrer  dans  la  ville  pour  passer  la  Loire. 
Il  avait  appris  ^,  chemin  faisant,  que  la  Pucelle  avait  emporté 
Jargeau  et  fait  prisonnier  le  comte  de  SufTolk  '  (12  juin),  A 
Amboise,  on  lui  dit  qu'elle  avait  aussi  pris  le  pont  de  Meung 
(mercredi  15  juin)  et  qu'elle  était  venue,  le  même  jour,  mettre 
le  siège  devant  Beaugency  *.  A  celte  nouvelle,  il  se  hâta  de  mar- 
cher, par  la  rive  droite  du  fleuve,  sur  Blois  et  de  là  sur  Beau- 
gency. 

Quand  il  fut  près  de  cette  ville,  il  envoya  le  sire  de  Rostrenen 
et  Le  Bourgeois  "  demander  un  logement  aux  capitaines  de 
l'armée  royale.  On  vint  lui  dire  que  la  Pucelle  s'avançait,  avec 
ceux  du  siège,  pour  le  combattre.  Use  contenta  de  répondre  que, 
s'ils  venaient,  il  les  verrait,  et  il  continua  sa  route.  Cependant 
la  situation  était  des  plus  graves.  La  Trémoille,  très  inquiet  à 
rapproche  du  connétable,  dont  il  redoutait  l'audace,  avait  quitté 
Chinon  pour  aller  à  Tours,  puis  à  Loches,  à  Saint-Aignan,  près 
de  Selles,  et  enfin  il  s'était  retiré  dans  sa  ville  de  Sully  '',  où  il 
était  à  l'abri  de  toute  surprise.  Il  avait  eu  soin  d'emmener  avec 

pues  de  la  cour,  ni  la  situation  du  connétable  à  cette  époque.  Il  dit,  en 
effet,  qu'après  la  délivrance  d'Orléans  le  roi  manda  le  connétable,  le  duc 
d'Alen(;on,  etc.  (Monstrelet,  IV,  32i). 

1.  Gruel,  197. 

2.  Ilichemont  était  sans  doute,  tenu  au  courant  par  les  Bretons  qui  se 
trouvaient  à  l'armée  avec  Jeanne  d'Arc.  Ainsi  Le  Bourgeois  était  à  Jargeau, 
d'où  il  revint  probablement  vers  le  connétable,  pour  l'informer  des  dispo- 
sitions du  duc  d'Alcnçon  à  son  égard  (voir  Quicherat,  Procès  de  Jeanne 
d'Arc,  IV,  li,  170). 

3.  II.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  190-192.  Cousinot,  303,  304.  Xia  1481,  fo  13.  Jar- 
geau, arrondissement  d'Orléans. 

4.  Arrondissement  d'Orléans. 

5.  Le  Bourgeois,  envoyé  au  secours  d'Orléans,  était  allé  re.trouver  Riche- 
mont  (Fr.  7838,  f°  50  ;  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  170). 

6.  Arrondissement  de  Gien. 


168  RICHEMONT  REJOINT  l'aRMÉE   (1429,   JUIN) 

lui  le  roi  *,  pour  être  bien  sûr  qu'on  n'arracherait  à  sa  faiblesse 
aucune  concession  fâcheuse  et  pour  continuer  de  commander 
en  son  nom.  Il  est  certain  que  la  Pucelle  et  les  chefs  de  l'armée 
avaient  reçu  l'ordre  formel  d'éloigner,  par  tous  les  moyens,  le 
connétable  ^  et  rien  ne  prouve  mieux  la  scélératesse  du  favori 
tout-puissant  que  sa  conduite  dans  cette  circonstance.  Qu'allait- 
il  arriver,  si  ses  ordres  étaient  exécutés?  Les  intentions  géné- 
reuses de  Richemont  n'allaient-elles  donc  aboutir  qu'à  jeter  la 
discorde  dans  l'armée  ?  Les  défenseurs  de  la  France  allaient- 
ils  maintenant  se  combattre  eux-mêmes  et  donner  aux  en- 
nemis ce  spectacle  qu'un  général  ancien  déclarait  digne  des 
dieux  ? 

Cependant  la  nouvelle  de  l'arrivée  de  Richemont  avait  mis 
toute  l'armée  en  émoi.  Parmi  les  chefs,  les  uns,  comme  le  duc 
d'Alençon  et  la  Pucelle,  voulaient  qu'on  obéît  aux  ordres  du 
roi;  les  autres,  comme  la  Hire,  Girault  de  La  Pallière,  le  sire  de 
Guitry,  disaient  qu'il  serait  insensé  de  refuser  un  secours  dont 
on  avait  si  grand  besoin,  au  moment  même  où  Talbot  et  Fastolf 
s'avançaient  avec  des  renforts  considérables  ^.  D'autre  part,  si 
l'on  admettait  le  connétable,  ne  faudrait-il  pas  lui  laisser  le  com- 
mandement de  l'armée,  auquel  sa  charge  lui  donnait  droit?  Le 
duc  d'Alençon,  qui  tenait  du  roi  ce  commandement  et  qui  en 
avait  toute  la  responsabilité,  déclara  qu'il  s'en  irait,  si  l'on  rece- 
vait le  connétable  *.  Déjà  il  montait  à  cheval,  ainsi  que  Jeanne 
d'Arc  et  plusieurs  autres  capitaines.  Alors  ceux  qui  avaient  pris 
le  parti  de  Richemont  demandèrent  à  Jeanne  ce  qu'elle  voulait 
faire,  et,  comme  elle  était  d'avis  de  combattre  le  connétable,  ils 
répondirent,  s'il  faut  en  croire  Gruel,  «  que,  si  elle  y  alloit,  elle 
trouveroit  bien  à  qui  parler,  et  qu'il  y  en  avoit  en  la  compaignie 
qui  seroient  plustost  à  luy  qu'à  elle,  et  qu'ils  aimeroient  mieux 
luy  et  sa  compaignie  que  toutes  les  pucelles  du  royaume  de 
France  ^  »  Cette  déclaration,  même  formulée  d'une  manière 
moins  discourtoise,  ne  pouvait  manquer  de  produire  un  grand 
effet.  Lutililé  du  secours  qui  s'offrait  si  à  propos  et  lit  trop 

1.  M.  Vallet  de  V.  ne  paraît  pas  avoir  compris  la  situation,  quand  il  dit 
qu'à  la  nouvelle  de  la  prise  de  Jargeau,  Charles  VII  fit  un  pas  marqué  vers 
Reims,  selon  les  conseils  de  la  Pucelle,  en  venant  s'établir  à  Sully-sur^ 
Loire.  {Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  83.) 

2.  H.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  197. 

3.  Fastolf  amenait  5000  h.  de  Paris.  Ne  pas  oublier  que,  malgré  lès  succès 
de  Jeanne  d'Arc,  on  redoutait  encore  les  Anglais,  si  longtemps  invincibles 
(Wallon,  /.  d'Arc,  l,  189). 

4.  Le  duc  (i'Alençon  avait  d'ailleurs  fait  alliance  avec  La  Trémoille  en 
1428  (de  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  163). 

fi.5.  Gruel,  197. 


JEANNE  d'arc  ACCUEILLE   LE  CONNÉTABLE   (1429,   16  JUIN)      169 

évidente  pour  qu'on  la  pût  contester  *.  Fallait-il  sacrifier  aux 
rancunes  de  La  Trémoille  les  intérêts  les  plus  sacrés?  Touchée 
de  ces  considérations,  la  Pucelle  détermina  le  duc  d'Alen^on  lui- 
même  à  suivre  le  parti  le  plus  sage,  et  ce  redoutable  incident  se 
termina  de  la  façon  la  plus  heureuse  (jeudi  16  juin). 

On  marcha  donc  au-devant  de  Richemont.  Bientôt  on  aperçut 
sa  petite  armée,  qui  s'avançait  en  belle  ordonnance.  Les  deux 
troupes  s'abordèrent  près  d'une  maladrerie  voisine  de  Beau- 
gency.  Alors  le  duc  d'Alençon,  le  bâtard  d'Orléans,  Guy,  André 
de  Laval  et  d'autres  capitaines,  s'approchant  de  Richemont,  «  lui 
firent  grande  chère  »;  puis,  selon  le  récit  de  Gruel,  Jeanne  des- 
cendant de  cheval  devant  le  connétable,  qui  mit  aussi  pied  à 
terre,  vint  lui  embrasser  les  genoux.  «  Et  lors  il  parla  à  elle  et 
luy  dit  :  «  Jeanne,  on  m'a  dit  que  vous  me  voulez  combattre  ;  je 
ne  scay  si  vous  estes  de  par  Dieu  ou  non.  Si  vous  estes  de  par 
Dieu,  je  ne  vous  crains  en  rien,  car  Dieu  sait  mon  bon  vouloir  ; 
si  vous  estes  de  par  le  diable,  je  vous  crains  encore  moins  ^.  »  Il 
ajouta  qu'il  n'avait  d'autre  intention  que  de  servir  le  roi  loyale- 
ment, qu'il  n'avait  rien  fait  pour  mériter  sa  disgrâce,  mais  qu'il 
avait  été  victime  de  rapports  perfides  ;  enfin  il  supplia  Jeanne 
«  de  le  recevoir  pour  le  roi  au  service  de  sa  couronne,  pour  y 
employer  son  corps,  sa  puissance  et  toute  sa  seigneurie,  en  luy 
pardonnant  toute  offense  ^  »  Dans  ce  moment,  où  il  s'agissait  de 
sauver  la  France,  aucun  sacrifice  d'amour-propre  ne  coûtait  à 
Richemont.  Ce  rude  et  fier  Breton,  qui  d'ordinaire  ne  pliait 
devant  personne,  ce  connétable  qui  avait  le  droit  de  commander 
à  tous,  se  fût  humilié  devant  La  Trémoille  lui-même,  pour  avoir 
seulement  la  permission  de  combattre,  comme  un  simple  capi- 
taine, parmi  les  autres  défenseurs  de  la  France  !  La  Pucelle 
reçut  le  serment  du  connétable  ;  les  autres  chefs  se  portèrent 
garants  de  sa  fidélité,  puis  tous  ensemble  se  rendirent  au  camp 
devant  Beaugency  *. 


1.  II  amenait  1000  à  1200  combattants,  «  qui  estoit  graat  secours  et  aide; 
et  en  est  ledit  connestable  bien  à  recommander,  car  ycy  et  en  plusieurs 
aultres  lieux  a  fait  de  grans  services  au  roy.  »  C'est  J.  Chartier,  l'histo- 
riographe de  Charles  VII,  qui  parle  ainsi  (Procès  de  Jeanne  dArc,  IV,  66). 
D'après  une  chronique  du  siège  d'Orléans  {ihid.,  p.  178),  Richemont  ame- 
nait 1500  combattants. 

2.  Gruel.  197. 

3.  Cousinot.  304-303. 

4.  Gruel,  197.  Cousinot,  304-303.  Le  Baud,  476.  D'Argentré,  777.  D.  Mo-, 
rice,  I,  507.  H.   Wallon,  I,  196-197.  Vallet  de  V.,  II,  83-84.  J.   Quicherat, 
Procès  de  Jeanne  d'Arc.  IV,  14,  66.  J.  de  Waurin,  Croniques   de  la  grant 
Rretaigne,  édition  W.  Hardy,  London,  1879,  t.  V,  p.  286.  J.  Chartier,  III, 
209.  Fr.  10448,  î"  53  v,  54,  57,  58. 


170  CAPITULATION   DE   BEAUGENCY    (1429,   18   JUIN) 

Les  Anglais  avaient  évacué  la  ville  pour  défendre  le  pont  et  le 
château,  que  l'artillerie  française  battait  depuis  le  matin.  On  ne 
donna  pas  de  logement  au  conn;'table  ;  on  décida  qu'il  ferait  le 
guet  pendant  cette  nuit,  soin  qui  incombait,  selon  l'usage,  aux 
nouveaux  venus.  Il  y  consentit  de  grand  cœur,  et,  dit  son  bio- 
graphe, «  ce  fut  le  plus  beau  guet  qui  eût  esté  fait  en  France 
passé  il  y  a  longtemps  ^  » 

Cependant  Fastolf,  qui  avait  amené  5  000  hommes  de  Paris, 
avait  fait  sa  jonction,  à  Janville  ^,  avec  Th.  de  Scales  et  Talbot. 
Celui-ci  fit  prévaloir  impétueusement  sa  résolution  de  secourir 
Beaugency.  A  cette  nouvelle,  les  Français  décidèrent  d'aller  au 
devant  de  l'ennemi,  puisque  l'arrivée  du  connétable  permettait 
de  faire  cette  démonstration,  sans  trop  dégarnir  le  siège.  Le  duc 
d'Alençon  et  la  Pucelle,  avec  un  corps  d'environ  6000  hommes, 
s'avancèrent  donc  vers  Meung  '.  Arrivés  sur  une  hauteur,  à 
quelque  distance  de  cette  ville,  ils  aperçurent  l'armée  anglaise, 
qui  déjà  se  rangeait  en  bataille,  mais  ils  conservèrent  prudem- 
ment leur  position,  sans  se  laisser  entraîner  dans  la  plaine  par 
ce  courage  téméraire  qui  avait  déjà  causé  tant  de  malheurs.  Les 
Anglais  eurent  beau  les  défier  au  combat.  «  Allez  vous  loger  pour 
maishuy  (aujourd'hui),  leur  fit  répondre  la  Pucelle,  car  il  est 
tard;  mais  demain,  au  plaisir  de  Dieu  et  de  Nostre-Dame,  nous 
nous  verrons  de  plus  près  *  »  (vendredi  17  juin).  Déconcertés 
par  cette  attitude  et  sachant  d'ailleurs  que  leurs  adversaires, 
avaient  reçu  des  renforts,  les  chefs  anglais  et  Talbot  lui-même 
n'osèrent  s'aventurer  plus  loin;  ils  retournèrent  à  Meung,  pen- 
dant que  les  Français  revenaient  à  Beaugency. 

En  apprenant  cette  tentative  infructueuse,  les  Anglais  qui 
défendaient  encore  le  pont  et  le  château  de  Beaugency  perdirent 
tout  espoir  d'être  secourus.  Vers  le  milieu  de  la  nuit,  le  bailli 
d'Evreux,  leur  chef,  fit  proposer  à  la  Pucelle  une  capitulation, 
qu'elle  accorda,  et  le  samedi  matin,  dès  l'aube,  les  ennemis,  au 
nombre  de  500,  se  retirèrent  avec  armes  et  bagages,  en  s'enga- 
gsant  à  ne  pas  combattre  de  dix  jours  (samedi  18  juin)  ^. 

Pendant  cette  même  nuit,  Talbot  et  Fastolf  avaient  assailli  le 
pont  de  Meung;  mais  les  Français  qui  l'occupaient,  ayant  reçu 
du  connétable  un  secours  de  vingt  lances  avec  les  archers,  résis- 

1.  Grael,  197.  Journée  du  vendredi  47  juin. 

2.  Arrondissement  de  Chartres. 

3.  Il  semble  résulter  du  silence  de  Waurin  et  de  Gruel  que  Richemont 
ne  prit  pas  part  à  cette  reconnaissance  et  qu'il  resta  devant  Beaugency, 
Meung,  arrondissement  d'Orléans. 

4.  H.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  199. 

5.  Gousinot,  303.  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  173. 


RICHEMONT  POURSUIT   LES   ANGLAIS  171 

tèrent  à  toutes  les  attaques.  Néanmoins,  ils  n'auraient  pu  tenir 
longtemps  contre  l'armée  anglaise,  si  la  capitulation  do.  Beau- 
geney  n'eût  permis  de  venir  promptement  à  leur  aide.  De  grand 
matin,  quand  les  Anglais  eurent  évacué  Beaugency,  la  Piicelle 
et  tous  les  capitaines  de  l'armée  montèrent  à  cheval,  pour  mar- 
cher sur  Meung.  Instruits  de  leur  approche,  Fastolf  et  Talbot, 
qui  venaient  d'apprendre  la  capitulation  de  Beaugency,  résolu- 
rent d'abandonner  aussi  la  ville  de  Meung.  Dès  qu'ils  aperçu- 
rent l'avant-garde  française,  ils  gagnèrent  précipitamment  les 
champs,  pour  réunir  toutes  leurs  troupes,  sans  même  emporter 
leurs  vivres  et  leurs  bagages,  et  commencèrent  leur  retraite  en 
bon  ordre  K 

L'avant-garde  française  revint  aussitôt  vers  le  gros  de  l'armée, 
en  disant  que  les  Anglais  s'en  allaient,  et  on  tourna  bride  pour 
rentrer  à  Beaugency.  Déjà  chacun  se  dirigeait  vers  son  loge- 
ment, quand  le  sire  de  Rostrenen  vint  avertir  le  connétable  que 
beaucoup  de  capitaines  brûlaient  de  poursuivre  les  ennemis. 
«  Si  vous  faites  tirer  votre  estendard  en  avant,  dit-il,  tout  le 
monde  vous  suivra  ^.  »  Richemont  ayant  approuvé  cet  avis,  la 
Pucelle  et  le  duc  d'Alençon  décidèrent  qu'on  allait,  sans  plus  de 
retard,  poursuivre  les  Anglais  et  les  attaquer,  puisqu'on  était  en 
nombre.  On  ne  mit  à  l'avant-garde  que  des  cavaliers,  tous  bien 
montés,  avec  Saintrailles,  La  Hirc,  Ambroise  de  Loré,  le  sire 
de  Beaumanoir,  Girault  de  La  Pallière.  Le  corps  de  bataille  était 
conduit  par  la  Pucelle,  le  duc  d'Alençon,  le  connétable,  les 
sires  de  Laval,  le  maréchal  de  Raiz,  le  bâtard  d'Orléans  et  Gau- 
court.  L'armée  s'avança  rapidement  à  travers  la  Beauce,  dans  la 
direction  de  Janville,  impatiente  de  rencontrer  ces  Anglais  qu'on 
n'osait  plus  affronter  auparavant  en  rase  campagne.  Jeanne  com- 
muniquait à  tous  l'ardeur  et  la  confiance  qui  l'animaient  ;  elle 
prédisait  une  victoire  comme  le  roi  n'en  avait  pas  eu  depuis  long- 
temps. «Ah!  beau  connétable,  disait-elle,  vous  n'êtes  pas  venu  de 
par  moi  ;  mais,  puisque  vous  êtes  venu,  vous  serez  bienvenu.  » 

Après  avoir  chevauché  l'espace  d'environ  cinq  lieues,  l'avant- 
garde  aperçoit  les  Anglais,  qui  s'étaient  arrêtés  dans  un  endroit 
situé  entre  le  hameau  de  Ligaerolles  et  le  village  de  Coinces,  au 
sud-est  de  Patay  ^.  Entraînée  par  La  Hire,  elle  culbute  dans  une 
charge  impétueuse  l'arrière-garde  des  Anglais.  Tout  le  reste  de 
l'armée  française  se  précipite,  avant  que  Fastolf  ait  pu  rallier 
les  fuyards.  Talbot  veut  résister,  avec  les  redoutables  archers 


1.  Gousinot,  306.  Gruel,  197-198.  X*"  1481,  P  14. 

2.  Gruel,  198. 

3.  Arrondissement  d'Orléans. 


172  BATAILLE  DE  PATAY  (1429,    18  JUIN) 

qui  avaient  gagné  tant  de  batailles  ;  il  est  entouré,  fait  prisonnier. 
Fastolf,  avec  le  principal  corps,  essaie  vainement  de  faire  face 
et  de  rétablir  l'ordre;  il  ne  peut  arrêter  la  déroute.  Accablé  de 
désespoir  et  de  honte,  il  veut  s'élancer  au  milieu  des  ennemis 
pour  se  faire  tuer,  et  c'est  à  grand'peine  qu'on  le  détermine  à  se 
retirer.  Le  vainqueur  de  Rouvray  est  forcé  d'abandonner  vaincu 
le  champ  de  bataille,  pour  diriger  la  retraite.  Poursuivi  par  les 
Français  jusqu'à  Janville,  il  voit  celte  place  lui  fermer  ses  portes, 
et  il  est  obligé  d'emmener  les  débris  de  ses  troupes  à  Etampes, 
puis  à  Gorbeil.  Les  Anglais  avaient  perdu  plus  de  2  200  hommes 
et,  parmi  eux,  quelques-uns  de  leurs  capitaines  les  plus  re- 
nommés, le  fameux  Talbot,  pris  par  les  archers  de  Saintrail- 
les,  H.  Branch,  pris  par  le  sire  de  Beaumanoir,  Th.  de  Scales, 
Th.  Ramston,  Hungerford.  Ils  avaient  perdu  plus  encore,  leur 
réputation  d'adversaires  invincibles,  la  confiance  en  leur  supé- 
riorité, le  prestige  qui  faisait  leur  force.  C'était  donc  là  une 
grande  victoire  pour  les  Français  ;  ils  étaient  maintenant  capa- 
bles de  tout  entreprendre,  si  l'on  avait  voulu  tout  oser.  Nul  n'était 
plus  joyeux  de  ces  éclatants  succès  que  le  connétable.  Pour  lui 
c'était  une  revanche  de  Pontorson,  l'espoir  d'une  réconciliation 
avec  le  roi,  le  commencement  d'une  période  nouvelle,  où  il  en- 
trevoyait d'autres  victoires  ^  (samedi  18  juin). 

Après  cette  glorieuse  bataille,  les  Français,  accablés  par  la 
chaleur  et  la  fatigue,  prirent  une  nuit  de  repos  à  Patay,  où 
couchèrent  la  Pucelle,  le  duc  d'Alençon,  le  connétable  et  le 
comte  de  Vendôme.  Le  lendemain  matin  (dimanche  19  juin), 
l'armée  victorieuse  fit  son  entrée  dans  Orléans,  au  milieu  d'ac- 
clamations enthousiastes.  Les  habitants  croyaient  que  le  roi 
allait  venir  et  faisaient  déjà  des  préparatifs  pour  le  recevoir; 
mais  La  Trénioille  craignait  trop  de  perdre  son  influence  despo- 
tique pour  le  conduire  dans  un  milieu  où  il  aurait  pu  céder 
à  l'entraînement  général.  Il  le  retint  dans  son  château  de  Sully, 
pour  lui  dicter  toutes  ses  volontés.  11  sut  l'exciter  encore  contre 
Richemont,  en  ne  faisant  ressortir  à  ses  yeux  que  sa  désobéis- 
sance. Quand  la  Pucelle  vint  elle-même,  avec  le  duc  d'Alençon 
et  d'autres  grands  seigneurs,  implorer  pour  le  connétable  la 
faveur  de  servir  loyalement  le  roi  et  la  France,  elle  essuya  un 
refus  blessant  *.  Richemont,  qui  attendait  à  Beaugency  le  ré- 

1.  Cousinot,  307.  Gruel,  198.  H.  Wallon,  I,  202-205.  Fr.  16286,  f»^  36a 
V,  364.  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  III,  p.  11;  IV,  13,  16,  67,  68.  Consaux  de 
Tournay,  II,  334-333.  Ms.  3039,  f-  117  v%  118,  à  la  blb.  de  l'Arsenal.  Mar- 
tial d'Auv.,  I,  p.  101.  Chron.  Martinienne,  f»  cclxxvi  v°.  Fr.  10448,  î"^  53,  56. 

2.  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  178-179.  De  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II, 
p.  222-223.  Martial  d'Auv.,  I,  p.  103. 


RICHEMONT  EST   RENVOYÉ  DE  l'ARMÉE   (1429)  173 

sultat  de  celte  démarche,  reçut  l'ordre  formel  de  s'en  retourner. 
Il  s'humilia  jusqu'à  envoyer  auprès  de  La  Trémoille  les  sires  de 
Beaumanoir  et  de  Rostrenen,  pour  le  prier  de  permettre  qu'il 
restât  à  l'armée.  Ils  lui  dirent  que  Richemont  «  feroit  tout  ce 
qu'il  luy  plairoit,  et  fust  jusques  à  le 'baiser  aux  genoux,  mais 
oncques  n'en  voulut-il  rien  faire,  et  luy  fît  mander  le  roi  qu'il 
s'en  allast  et  que  mieulx  aimeroit  jamais  n'estre  couronné  que 
mondit  seigneur  y  fust.  »  Le  même  ordre  fut  signifié  au  comte 
de  Pardiac  K 

Jamais  La  Trémoille  ne  fit  plus  de  mal  à  la  France  qu'à  cette 
époque,  où  il  ne  cessa  d'entraver  les  efforts  de  Jeanne  d'Arc  et 
de  ceux  qui  voulaient,  comme  elle,  profiter  de  l'enthousiasme 
général  pour  hâter  la  libération  du  pays.  Trop  bien  secondé  par 
quelques  autres  conseillers  du  roi,  notamment  par  le  chancelier 
Regnault  de  Chartres,  archevêque  de  Reims,  il  fit  échouer  tout 
ce  qui  contrariait  son  monstrueux  égoïsme  et  ne  recula  peut- 
être  devant  aucune  trahison  ^.  S'il  n'avait  pas  éloigné,  par  dé- 
fiance, beaucoup  de  ceux  qui  accouraient  en  foule  offrir  leurs 
services  au  roi;  s'il  n'avait  pas  arrêté  le  merveilleux  élan  donné 
par  Jeanne  d'Arc  à  la  nation  entière,  on  eût  peut-être  entraîné 
la  Bretagne,  la  Bourgogne  et  délivré  la  France  de  la  domination 
anglaise.  Tant  qu'il  resta  au  pouvoir,  cette  œuvre  fut  impos- 
sible ^. 

Quand  La  Trémoille  n'eut  plus  à  craindre  la  présence  de 
Richemont,  il  consentit  à  ce  que  Jeanne  d'Arc  marchât  sur 
Reims,  et  il  la  suivit  avec  le  roi,  qu'elle  voulait  faire  sacrer.  Le 
connétable  eut  donc  la  douleur  de  ne  point  prendre  part  à  cette 
campagne  glorieuse.  Il  voulut  utiliser  ses  troupes  en  chassant 
de  l'Orléanais  les  Anglais  et  les  Bourguignons  qui  s'y  trouvaient 
encore  et  mettre  le  siège  devant  Marchenoir,  près  de  Blois. 
Alors  les  défenseurs  de  cette  place  envoyèrent  vers  le  duc 
d'Alençon  pour  traiter  avec  lui;  mais,  quand  Richemont,  sur 
l'invitation  de  son  neveu,  se  fut  éloigné,  ils  refusèrent  de  tenir 
leur  serment.  Et  ce  ne  fut  pas  le  seul  cas  dans  lequel  on  eut  à 
regretter  l'éloignement  des  comtes  de  Richemont  et  de  Par- 
diac *. 

Après  avoir  quitté  le  duc  d'Alençon,   qui   allait  rejoindre 

1.  Gruel,  198.  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando ,  37-38.  Le  comte  de 
Pardiac  eût  amené  la  bande  de  Rodrigo,  qui  alla  ravager  le  Midi.  Sur 
cette  campagne  de  Richemont,  voir  aussi  Fr.  10448,  f"»  53-38;  Fr.  10449, 
f«  174-175. 

2.  H.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  211,  note  1. 

3.  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  70,  71.  Cousinot  309,  313. 

4.  Ck)usinot,  309.  H.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  213. 


174  CAMPAGNE  DE  RICHEMONT  EN  NORMANDIE   (1429) 

Jeanne  d'Arc,  le  connétable  revint  à  Parthenay  *,  toujours 
poursuivi  par  la  haine  de  La  Trémoille.  On  lui  fermait  les  villes, 
les  passages  ;  a  et  luy  firent  tout  le  pis  qu'ils  peurent,  pour  ce 
qu'il  avoit  faict  tout  le  mieulx  qu'il  avoit  peu  ^  »  Il  eut  la  mor- 
tification de  ne  point  assister  au  sacre  de  Charles  VII,  où  l'épée 
que  le  connétable  de  France  devait  porter  devant  le  roi  fut  tenue 
par  Gh.  d'Albert  (17  juillet)  ^  Quant  à  La  Trémoille,  il  reçut 
alors,  pour  prix  de  ses  services,  le  titre  de  comte  *,  Ces  offenses 
réitérées  n'empêchèrent  point  Richemont  de  se  rendre  utile. 
Au  lieu  de  rester  inaclif  à  Parthenay,  où  il  ne  dut  faire  qu'un 
séjour  de  courte  durée,  il  employa  ses  troupes  à  combattre  en 
Normandie  contre  les  Anglais,  pendant  que  la  Pucelle  marchait 
de  Reims  sur  Paris  (juillet-septembre)  ^. 

Cette  campagne  de  Richemont  en  Normandie  est  fort  peu 
connue;  son  biographe  n'en  dit  pas  un  mot,  et  les  chroniqueurs 
n'en  parlent  pas  assez  ^  pour  qu'on  en  puisse  bien  indiquer  les 
détails,  mais  on  entrevoit  là  un  concert  arrêté  secrètement  avec 
quelques  chefs  de  l'armée  royale,  sans  doute  avec  le  duc 
d'Alençon,  Il  est  certain  qu'une  diversion  en  Normandie  pouvait 
avoir  les  effets  les  plus  heureux  et  hâter  la  ruine  des  Anglais. 
Malgré  son  habileté,  Bedford  était  aux  abois.  Manquant  d'hom- 
mes et  d'argent,  réduit  aux  expédients  les  plus  arbitraires  \ 
il  ne  pouvait  ni  arrêter  la  marche  victorieuse  de  la  Pucelle  à 
travers  la  Champagne,  la  Picardie,  l'Ile-de-France,  ni  empêcher 
les  défections  qui  se  multipliaient;  il  sentait  grandir  en  Nor- 

i.  «  Il  retourna  en  son  ostel  de  Partenay,  lie  et  joyeulx  de  la  journée 
(de  Patay)  que  Dieu  avoit  donnée  pour  le  roy  et  très  marry  de  ce  que  le 
roy  ne  vouloit  prendre  en  gré  son  service.  »  (Gagny,  dans  le  Procès  de 
Jeanne  d'Arc,  IV,  16.) 

2.  Gruel,  198. 

3.  XiM481,f''  16. 

4.  Gilles  de  Raiz  fut  fait  maréchal  et  Guy  de  Laval  créé  comte,  danè  cette 
même  circonstance  (Xi"  8604,  î"  108  vo;  Vallet  de  V.,  Charles  VII,  II,  99). 
Gilles  de  Raiz  avait  promis  fidélité  à  La  Trémoille  (Redet,  Catal.  de  D.  Fou- 
teneau,  329).  C'est  à  tort  que  la  chronique  du  Ms,  fr.  23018  indique  le  comte 
de  Richemont,  en  premier,  parmi  ceux  qui  assistaient  au  sacre  (voir  des 
fragments  de  cette  chronique  publiés  par  M,  J.  Quicherat  dans  le  t.  19 
de  la  Revue  historique,  p.  '74). 

5.  D'après  d'Argentré  (p.  778),  le  roi,  «  pour  déguiser  son  intention  devers 
le  connétable,  lui  envoya  une  commission  pour,  cependant  qu'il  serait  à 
son  sacre,  prendre  garde  de  la  frontière  de  Normandie  ».  Le  comte  de 
Pardiac  fut  envoyé  en  Guyenne  comme  gouverneur  et  lieutenant  du  roi. 
La  Trémoille  voulait  ainsi  les  séparer.  Le  connétable  ne  s'y  trompa  pas, 
mais  il  aima  mieux  accepter  que  de  ne  rien  faire.  {Procès  de  Jeanne  dArc, 
IV,  46.  Fr.  10148,  f°  S6  v.) 

6.  Monstrelet,  IV,  p.  333-336  et  333.  Procès,  IV,  30,  48. 

7.  Fr.  4488,  f"  12-13,  133.  Xi»  1481,  f»  18. 


PROGRÈS  DES  FRANÇAIS  (1429)  "  17S 

mandie  une  agitation  inquiétante  ;  il  craignait  de  voir  Rouen 
menacé  en  même  temps  que  Paris  '■  ;  enfin  il  savait  que  le  duc 
de  Bourgogne,  toujours  sollicité  par  le  duc  de  Savoie^  négociait 
avec  Charles  VII  ^ 

Après  avoir  reçu  d'Angleterre  o  000  hommes,  amenés  à  grand 
peine  par  le  cardinal  de  Winchester  ^  (25  juillet),  Bedford  essaya 
vainement  d'arrêter  les  progrès  de  Jeanne  d'Arc  et  faillit  même 
livrer  bataille  près  de  Senlis.  S'il  n'est  pas  certain  que  la  pré- 
sence de  Richemont  eût  alors  permis  à  l'armée  française  d'atta- 
quer Bedford  dans  ses  positions,  à  Monlépilloy  *,  le  15  août,  on 
voit  que  les  nouvelles  de  Normandie  causaient  au  régent  les 
plus  vives  alarmes,  puisqu'il  se  rendit  dans  ce  pays,  au  mo- 
ment même  ou  la  Pucelle  arrivait  à  Saint-Denis  (26  août)  ^. 

Ces  nouvelles  étaient  en  effet  très  graves  ;  Cherbourg  avait 
voulu  se  donner  aux  Français  ^;  ils  menaçaient  Evreux  et  plu- 
sieurs places  des  environs,  Beaumont,  Romilly,  Couches  '  ;  au 
delà  de  la  Seine,  ils  occupaient  ou  allaient  prendre  Dangu, 
Etrepagny,  le  château  d'Aumale,  Blangy,  Beaucamp,  d'où  ils 
pouvaient  faire  des  courses  dans  l'Ile-de-France  et  la  Picardie  ^; 
ils  avaient  des  intelligences  dans  les  grandes  villes,  à  Paris  ",  à 
Rouen,  et  Bedford  ne  savait  comment  défendre  à  la  fois  et  la 
Normandie  et  la  capitale.  Il  fit  venir  à  Vernon  (fin  d'août)  des 
troupes,  qu'il  dirigea  sur  Paris  en  toute  hâte  '",  et  pourvut  de 
son  mieux  à  la  défense  de  la  Normandie  ^* . 

Ce  qui  sauva  les  Anglais,  plus  encore  que  l'habileté  du  ré- 
gent, ce  fut  la  coupable  conduite  de  Charles  VII  et  de  ses  conseil- 
lers. Non  contents  d'avoir  fait  échouer  la  tentative  de  Jeanne 

1.  H.  WaUon,  I,  271.  K  63,  uo»  T'e  25^  s  et  8  bis.  J.  Stevenson,  t.  II,  p.  111 
et  suiv.,  141. 

2.  XiaSeOS,  fo»  13,  J4.  Revue  histor.,  t.  XIX,  p.  76-79.  De  Beaucourt,  Char- 
les VU,  t.  II,  p.  404  et  suiv. 

3.  Fr.  4488,  f  199,  et  Xi»  1481,  f"  16,  17.  J.  Stevenson,  II,  111  et  suiv. 

4.  Arrondissement  et  canton  de  Senlis.  Gruel,  198.  Cousinot,  328-331. 

5.  JJ  174,  n»  339. 

6.  Voy.  Fr.  26052,  n"  1120-1127,  U4i.  En  avril,  les  Anglais  assiégeaient 
Château-Gaillard.  Voir  des  détails  curieux  sur  ce  siège  dans  Fr.  26031, 
n"'  1053,  1068,  1070,  1079,  1081.  Fr.  23189,  n°  3.  JJ  175,  n»  16. 

7.  Voy.  Fr.  26051,  n»  1130,  et  Fr.  2G052,  n»'  1164, 1188, 1190,  1192,  1194,  1195, 
1202,  1205,  1209,  1212,  1213,  1290.  P.  Cochon.  457-461,  465.  Fr.  14S46,  anc. 
S.  F.  3795,  f»  33  V.  Beaumont-le-Roger,  Romilly,  Conches  sont  dans  l'Eure. 

8.  Fr.  26053,  n^  1326.  JJ  175,  n-  86,  191,  230.  Aumale  et  Blangy,  arron- 
dissement de  Neufchâtel;  Beaucamp,  Dangu,  Etrepagny,  arrondissement 
des  Andelys. 

9.  XI»  1481,  f»  18.  JJ  175,  n°  83.  .Moreau,  705,  f"  65.  Chéruel,  Hist.  de 
Rouen.  Rouen,  1840,  in-S,  p.  8i,  92,  93. 

10.  K  63,  nos  716^  725. 

11.  Fr.  26032,  u"  H6i,  et  Fr.  14346,  f»  33  v». 


176        CONDUITE  ODIEUSE  DE  LA  TRÉMOILLE  (1429) 

d'Arc  sur  Paris  (jeudi  8  septembre)  *,  ils  l'empêchèrent  de  mar- 
cher, avec  le  duc  l'AIençon,  sur  la  Normandie,  prête  à  se  sou- 
lever 2.  C'est  que  La  Trémoille  craignait  de  voir  la  Pucelle  et  le 
duc  d'Alençon  se  joindre  au  connétable  pour  réduire  la  Nor- 
mandie; il  aimait  mieux  laisser  aux  Anglais  cette  province, 
dont  la  conquête  semblait  certaine,  que  de  mettre  en  péril  ses 
propres  intérêts  ^.  Il  est  vrai  que  Charles  VII  négociait  alors 
avec  le  duc  de  Bourgogne  et  même  avec  Bedford,  mais  sans 
succès  *.  Si  les  affaires  de  la  France  avaient  été  mieux  con- 
duites, si  le  roi  n'avait  eu  auprès  de  lui  que  des  conseillers  in- 
tègres, unis  dans  une  même  pensée,  habiles  à  utiliser  tous  les 
moyens  de  réussite,  les  négociations  avec  Je  duc  de  Bourgogne, 
appuyées  par  les  victoires  de  Jeanne  d'Arc  et  par  l'influence 
personnelle  du  connétable,  auraient  pu  aboutir  à  de  tout  autres 
résultats.  Philippe  le  Bon  était  fort  mécontent  des  Anglais  ^  ;  la 
Bretagne,  qui  était  toujours  française  "  et  fournissait  déjà  des 
secours,  n'eût  pas  été  difficile  à  ramener;  le  duc  Jean  V  lui- 
même  eût  cédé  à  l'entraînement  général;  mais  Bedford,  at- 
tentif à  profiter  des  moindres  fautes,  sut  regagner  Philippe  le 
Bon,  et  tout  fut  encore  compromis  '^  (octobre). 

Sans  renoncer  aux  prérogatives  de  la  régence,  Bedford  eut 
l'adresse  de  rejeter  une  partie  du  fardeau  qui  l'accablait  sur 
le  duc  de  Bourgogne,  en  lui  donnant,  avec  le  titre  de  lieute- 
nant général  du  roi  Henri  VI,  la  garde  et  le  gouvernement 
de  Paris  et  de  la  plupart  des  pays  soumis  à  la  domination  an- 
glaise, moins  la  Normandie  (13  octobre).  Il  retourna  aus- 
sitôt après  dans  cette  province  (17  octobre)  %  pour  reprendre 
les  villes  que  les  Anglais  avaient  perdues  ",  pendant  que  Jeanne 


1.  Xia  1481,  fois. 

2.  Voy.  Fr.  23189,  no  3.  On  voulait  livrer  Argentan  au  duc  d'Alençon. 

3.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  307-308. 

4.  J.  Stevenson,  t.  II,  p.  126.  Moreau,  705,  f^  71.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  131-133, 
et  Preuves,  lsxvui-lxxxi  ;  Coltecl.  de  Bourgogne,  t.  99,  f»»  241-243,  249-251. 
Les  négociations  avec  le  duc  de  Bourgogne  furent  poussées  assez  loin, 
mais  il  ne  voulut  pas  traiter  sans  les  Anglais. 

5.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  127-133, 

6.  H.  Wallon,  /.  d'Arc,  I,  309  et  445.  Le  comte  de  Montfort,  fils  aîné  du 
duc  de  Bretagne,  devait  amener  des  troupes  à  Charles  VII  {Arch.  de  la 
Loire-Inf.,  cass.  38,  E,  103). 

7.  Négociations  avec  Philippe  le  Bon.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  127-133,  et  Pr. 
H.  Wallon,  I,  270-273,  277-278,  287-288,  et  surtout  Xi»  8605,  f-^  13  et  14. 

8.  Philippe  le  Bon,  arrivé  à  Paris  le  30  septembre,  repartit  le  18  octobre, 
pour  aller  en  Flandre  recevoir  sa  fiancée,  Isabelle,  fille  de  Jean  I""-,  roi  de 
Portugal.  On  sait  que  sa  seconde  femme,  Bonne  d'Artois,  était  morte  en 
1425  (Xia  1481,  f"  18). 

9.  Fr.  26032,  n«  1192,  1194,  1202,  1203,  1209-1213,  1221,  1290. 


JEANNE   d'arc   EST  PRISE   (1430,   24  MAl)  1T7 

d'Arc,  retenue  malgré  elle  sur  la  Loire  et  presque  abandonnée, 
échouait  devant  La  Charité  K 

La  guerre  continua  donc  en  Normandie  et  dans  le  Maine,  où 
les  Français  avaient  recouvré  Laval  (le  25  septembre)  ^  Mais  on 
ne  sait  quelle  part  y  prit  le  connétable  \  Il  échoua  dans  une  ten- 
tative sur  Fresnay-le-Vicomte  *  et  s'en  retourna  dans  le  Poitou. 
En  revenant  à  Parthenay,  il  faillit  être  assassiné  par  un  émis- 
saire de  La  Trémoille,  un  Picard,  qui  chevauchait  auprès  de 
lui,  en  le  regardant  sans  cesse.  Richemont,  ayant  remarqué  les 
allures  suspectes  de  cet  homme,  le  fit  arrêter,  l'interrogea  et  le 
détermina,  par  une  promesse  de  pardon,  à  confesser  que  La 
Trémoille  lui  avait  promis  de  l'argent  pour  le  tuer.  «  Allez,  lui 
dit  le  connétable,  en  lui  donnant  un  marc  d'argent;  allez  et 
n'acceptez  plus  de  telles  commissions  ^.  » 

Richemont  se  tint  donc  sur  ses  gardes  et  continua  de 
lutter  contre  les  attaques  et  les  intrigues  de  La  Trémoille.  Il 
semble  impossible  de  pénétrer  ces  menées  ténébreuses  ^,  mais 
on  voit  que  le  nouveau  maire  du  palais  n'a  point  de  préoc- 
cupation plus  constante  que  celle  de  maintenir  son  autorité 
despotique.  Il  écarte  ou  renverse  quiconque  lui  porte  om- 
brage; il  essaye  de  suffire  à  tout  par  lui-même  ;  il  laisse,  pour 
ainsi  dire,  à  leurs  propres  ressources  les  capitaines  qui  com- 
battent toujours  en  Normandie,  en  Picardie,  en  Champagne, 
comme  le  duc  d'Alençon,  La  Hire,  le  comte  de  Clermont,  le 
chevaleresque  Barbazan  ;  il  abandonne  et  trahit  peut-être  Jeanne 
d'Arc,  qui  est  prise  en  défendant  Compiègne  (24  mai)  '  ;  il  pour- 

1.  H.  Wallon,  J.  d'Arc,  I,  312-313.  JJ  174,  n°  339.  Qair.  8,  fo  437.  La  Cha- 
rité, arrondissement  de  Cosne. 

2.  Fr.  15512,  f©  l.Cousinot,  337.  Il  y  avait  à  Laval  «  une  belle  et  notable 
forteresse  »  que  les  ennemis  n'avaient  pu  prendre  (X*"  9201,  fo»  22-23). 

3.  La  Hire  prit  d'assaut  Louviers,  dans  la  nuit  du  7  décembre  (Fr.  26060, 
no  2717,  et  P.  Coclion,  463,  à  la  suite  de  Cousinot).  Les  Français  échouèrent 
devant  Falaise  et  firent  des  courses  jusqu'à  Caen  (Fr.  26052,  n<"  1206  et 
1217). 

4.  Arrondissement  de  Mamers  (Sarthe). 

5.  Gruel,  198. 

6.  Du  F.  de  Beaucourt  {Revue  des  questions  hist.,  livraison  du  l^'  juillet 
1872,  p.  81).  Pour  l'année  1430,  on  trouve  fort  peu  de  renseignements  sur 
Richemont.  Gruel  ne  dit  presque  rien,  et  sa  chronologie  n'est  pas  assez 
précise  pour  qu'on  puisse  bien  voir  la  suite  des  événements.  La  guerre 
continuait  dans  le  Poitou  (X»»  9201,  f"  8). 

7.  H.  Wallon,  \,  330-337,  432-453.  Valletde  V.,  II,  132-155.  X^»  1481,  f-  27. 
Voir  toutefois  de  Beaucourt,  II,  232  et  suiv.  Les  principales  opérations 
militaires  de  1430  sont  :  les  sièges  de  Château-Gaillard,  de  Torcy  (canton  de 
Longueville,  arrondissement  de  Dieppe),  de  Louviers.  Elles  sont  fréquem- 
ment indiquées  dans  J.  Stevenson,  II,  128, 130, 136  et  surtout  dans  lesMss, 
Fr.  25768,  n"»  371,  403  et  suiv.  Fr.  25769,  n"  458,  471  et  suiv.,  500  et  suiv. 
Fr.  26052,  n»  1225  et  suiv.  Fr.  26053,  n"  1284,  1298  et  suiv.,  1374,  1401  et 

Richemont.  12 


178    LA  TRÉMOILLE  SE  RAPPROCHE  DE  LA  BRETAGNE  (1430) 

suit  de  stériles  négociations  avec  le  duc  de  Bourgogne,  avec 
Sigismond  d'Autriche,  au  lieu  de  diriger  ou  seulement  de  suivre 
le  généreux  élan  qui  soulève  les  populations  contre  les  Anglais, 
à  Paris  \  à  Rouen,  dans  toute  la  Normandie,  à  Chartres  ^;  mais 
il  ne  perd  pas  de  vue  ses  ennemis  personnels,  et,  comme  il  sent 
peser  sur  sa  fortune  insolente  la  ténacité  du  connétable,  c'est 
surtout  contre  lui  qu'il  tourne  ses  efforts. 

Après  avoir  échoué  dans  ses  négociations  avec  le  duc  de  Bour- 
gogne ^,  La  Trémoille  se  retourna  du  côté  de  la  Bretagne,  soit 
qu'il  désirât  sérieusement  arriver  à  une  entente  avec  le  duc 
Jean  V  et  avec  Richemont,  soit  qu'il  voulût  attirer  celui-ci  dans 
un  piège  •*.  Le  roi  envoya  donc  en  Bretagne,  vers  le  commence- 
ment de  1430;,  l'archevêque  de  Tours,  Philippe  de  Goetquis, 
Renaud  Girard,  son  maître  d'hôtel,  et  Richard  Pocaire,  bailli  de 
Sentis  °,  pour  proposer  un  arrangement  avec  le  comte  de  Riche- 
mont,  sans  doute  aussi  pour  obtenir  des  secours  de  Jean  V  et  le 
détacher  des  Anglais.  C'était  vers  le  temps  où  Jeanne  d'Arc  écri- 
vait aux  habitants  de  Reims,  le  28  mars,  que  toute  la  Bretagne 
était  française  et  que  le  duc  devait  envoyer  au  roi  3000  combat- 
tants payés  pour  deux  mois  ^.  Après  avoir  consulté  son  frère 
Artur,  le  duc  envoya  aussi  des  ambassadeurs  auprès  du  roi,  qui 
était  alors  à  Jargeau.  Il  fut  convenu  que  Richemont  et  La  Tré- 
moille auraient  une  entrevue  entre  Poitiers  et  Parthenay;  mais 
le  connétable,  craignant  quelque  mauvais  dessein,  ne  jugea  pas 
prudent  d'aller  à  cette  conférence.  Il  y  envoya  ''  trois  de  ses  plus 
dévoués  partisans,  Louis  d'Amboise,  vicomte  de  Thouars,  Ant. 
de  Vivonne  et  André  de  Beaumont,  seigneur  de  Lezay. 

suiv.  K  63,  nos  lo,  12,  12  bis.  Le  siège  du  Mont- Saint-Michel  continuait 
(mêmes  sources  et  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  publiée  par  S.  Luce). 

1.  P.  13382,  fo  353.  J.  Stevenson,  I,  34.  Xi»  1481,  fo  25  v».  Après  la  prise 
de  la  Pucelle,  le  roi  et  ses  conseillers  «  se  trouvèrent  plus  abessiez  de  bon 
vouloir  que  par  avant  ».  Ils  ne  songeaient  qu'à  traiter  avec  le  duc  de 
Bourgogne  et  avec  l'Angleterre  (Cagny,  dans  le  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  IV,  37) . 

2.  Fr.  26053,  no»  1313,  1425. 

3.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  401  et  suiv.  Consaux  de  Toumay,  II, 
343-343, 

4.  D.  Morice,  I,  309. 

5.  Xia  8604,  fo  102  v».  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  1226. 

6.  Procès  de  Jeanne  d'Arc,  V,  160-162.  H.  Wallon,  /.  d'Arc,  I,  445.  Les  An- 
glais ménageaient  beaucoup  le  duc  de  Bretagne,  car  Henri  Vil  rendit 
des  terres  voisines  de  Paris  et  l'hôtel  de  la  Petite-Bretagne,  à  Paris,  donnés 
au  comte  de  Salisbury  et  revenus,  après  sa  mort,  au  domaine  royal  (Porfe/". 
Font.,  115-116,  au  10  juin).  Henri  VI  était  en  France  depuis  le  23  avril  (J.  Ste- 
venson, II,  140  ;  XI»  1481,  f-  26). 

7.  Probablement  vers  la  fin  de  juin.  Le  30  juin,  payement  fait  à  un  mes- 
ager  envoyé  par  le  roi,  de  Jargeau,  au  vicomte  de  Thouars  (Fr.  26  033, 

■  n»  1365). 


MANŒUVRES   DE   LA  TRÉMOILLE    (1430)  179 

Ces  envoyés  suivirent  la  cour  à  Gien,  à  Sens,  puis  encore  à 
Gien  (juillet-octobre  1430)  %  moins,  peut-être,  pour  négocier  sincè- 
rement que  pour  trouver  l'occasion  de  tenter  quelque  entreprise 
contre  le  mortel  ennemi  du  connétable.  S'il  faut  ajouter  foi  aux 
accusations  portées  plus  tard  contre  eux,  ils  auraient  essayé, 
plusieurs  fois,  d'enlever  La  Trémoille  et  même  de  le  tuer;  bien 
plus,  ils  auraient  voulu  s'emparer  de  la  personne  du  roi,  le  con- 
duire à  Amboise,  ville  qui  appartenait  au  vicomte  de  Thouars,  et 
rendre  ainsi  le  pouvoir  au  comte  de  Richemont.  Ces  accusations, 
pour  être  exagérées,  ne  sont  pas  tout  à  fait  invraisemblables. 
Il  est  fort  possible  que  les  amis  de  Richemont  aient  tramé  un 
complot  contre  La  Trémoille;  mais  celui-ci  était  trop  défiant  pour 
ne  pas  les  faire  arrêter,  s'il  eût  soupçonné  la  moindre  tentative 
de  leur  part.  Et  puis,  il  leur  manqua  peut-être  le  concours  le 
plus  indispensable,  celui  de  la  reine  Yolande. 

Cette  princesse  était  fort  irritée  contre  le  duc  de  Bretagne,  qui, 
après  avoir  obtenu  la  dissolution  d'un  mariage  antérieurement 
arrêté  entre  sa  fille  Isabelle  et  le  jeune  roi  de  Sicile  *,  donnait 
alors  la  main  d'Isabelle  à  Guy  de  Laval  (l^'  octobre).  On  peut 
supposer  que  La  Trémoille  ne  fut  pas  étranger  à  cette  affaire. 
Il  craignait  et  détestait  la  reine  de  Sicile  ;  il  avait  intérêt  à  for- 
tifier en  Bretagne  le  parti  de  Charles  VII,  en  se  créant  d'utiles 
alliances.  La  maison  de  Laval  était  dévouée  au  roi^  elle  était 
puissante,  et  Guy  de  Laval,  devenu  le  gendre  de  Jean  V,  pouvait 
neutraliser  l'influence  de  Richemont.  Yolande  et  ses  fils  (René 
et  Charles),  gravement  offensés,  songèrent  d'abord  à  la  ven- 
geance. Malgré  les  protestations  de  Jean  V,  ils  furent  sur  le  point 
de  lui  déclarer  la  guerre.  Il  fallut  que  le  connétable  vînt  lui- 
même  à  Champtocé,  avec  son  frère  Richard,  pour  apaiser  le 
ressentiment  de  sa  protectrice  et  faire  prévaloir  les  considéra- 
tions poUtiques,  en  préparant  une  autre  alliance  de  famille  entre 
les  maisons  d'Anjou  et  de  Bretagne  ^.  On  continua  donc  de  s'ob- 
server, de  jouer  au  plus  habile.  Le  duc  de  Bretagne  travailla 
encore  au  rétablissement  de  la  paix  générale.  Il  envoya  vaine- 
ment des  ambassadeurs  au  roi  d'Angleterre,  aux  ducs  de  Bour- 
gogne et  de  Savoie  *.  En  outre,  il  fut  décidé  qu'on  essayerait  de 

1.  Le  30  août  1430,  Richemont  est  àFontenay  (Fr.  8819,  f»  37). 

2.  Fr.  11542,  f»'  6,  9,  11.  Guy  XIII,  comte  de  Laval,  fils  de  J.  de  Mont- 
fort  et  d'Anue  de  Laval  (Anselme,  I,  456;  YII,  74).  Voir  ci-dessus,  p.  49  et 
note  3. 

3.  D.  Lobineau,  I,  584.  Fr.  11542,  P^  9,  10.  Vers  cette  époque,  le  8  sep- 
tembre, Henri  VI  donne  à  Bedford  le  duché  d'Anjou,  le  comté  du  Maine 
et  la  vicomte  de  Beaumont-le-Roger  (Xi''  1481,  f»  34  vo  et  Xi»  8605,  fo  15). 

4.  Le  duc  de  Bourgogne,  qui  avait  reçu  de  Henri  VI  la  Champagne  et  la 
Brie  (JJ  174,- fo  53  ;  X^»  8605,  fo  15),  n'était  pas  encore  satisfait  des  Anglais 


180  LA  TREMOILLE  VA  EN  BRETAGNE  (1431) 

s'entendre  avec  La  Trémoille  et  qu'on  le  ferait  venir  en  Bretagne. 
Le  soupçonneux  ministre,  tout  en  désirant  cette  entrevue,  n'y 
consentit  qu'en  exigeant  les  garanties  les  plus  rassurantes,  c'est- 
à-dire  des  otages,  comme  Richard^  comte  d'Etampes,  Alain  de 
Rohan,  L.  de  Laval  *,  et  des  sauf-conduits  signés  par  le  duc  de 
Bretagne,  le  comte  de  Richemont,  le  comte  de  Laval,  etc.  *.  Ces 
concessions,  ces  démarches,  qui  devaient  flatter  l'orgueil  de  La 
Trémoille,  montrent  bien  que  le  duc  de  Bretagne  et  le  conné- 
table désiraient  une  réconciliation.  Maintenant  que  Jeanne  d'Arc 
était  prisonnière,  Richemont  aspirait  plus  que  jamais  à  reprendre 
son  commandement,  pour  atténuer  la  gravité  de  ce  désastre. 

Vers  la  fin  de  1430  ou  le  commencement  de  1431,  La  Trémoille 
partit  en  magnifique  appareil,  avec  les  sires  de  Trêves  et  d'Ar- 
genton  et  Poton  de  Saintrailles,  pour  conduire  en  Bretagne 
l'ambassade  dont  il  était  le  chef  ^.  Il  ne  s'aventura  pas  bien  loin, 
car  c'est  à  Ghamptocé  *,  sur  les  frontières  de  la  Bretagne  et  de 
l'Anjou,  qu'il  eut  une  conférence  avec  Jean  V.  Il  fut  convenu  que 
le  comte  de  Laval  irait  servir  le  roi  avec  un  certain  nombre  de 
gens  d'armes  et  de  trait,  qu'il  couvrirait  les  marches  de  l'Anjou 
et  du  Maine  et  que  le  duc  contribuerait  à  la  solde  de  ces  troupes  ^. 
A  la  suite  de  cette  conférence,  il  y  eut  même  un  traité  par  lequel 
Jean  V  et  La  Trémoille  s'engagèrent  à  se  défendre  et  à  s'aider 
réciproquement  (22  février  1431)  ®.  On  ignore  les  autres  détails 
de  cette  entrevue,  notamment  en  ce  qui  concerne  la  réconcilia- 
tion avec  Richemont. 

Il  est  impossible  que  cette  question  n'ait  pas  été  abordée  pen- 
dant la  conférence  de  Ghamptocé;  mais  il  faut  croire  qu'elle  ne 
put  être  résolue  à  la  satisfaction  de  La  Trémoille,  car  il  ne  tarda 
pas  à  donner  au  connétable  de  nouvelles  preuves  de  sa  haine. 
Revenu  auprès  de  Charles  VII,  à  Saumur,  La  Trémoille  fit  enlever 

(J.Stevenson,  II,  136,  16i-181;  Hist.  de  Bourgogne ,\y  ;  Preuves,ixxxy-i.xyi\y\\; 
D.  Morice,  I,  512). 
i.  Frère  de  Guy  et  d'André  de  Laval. 

2.  Jean  V  envoya  demander  au  connétable,  à  Parthenay,  le  sauf-conduit, 
que  rapporta  aussitôt  le  héraut  Montfort  (Fr,  11342,  f«s  10,  11;  D.  Lobi- 
neau,  I,  383).  Voir,  dans  les  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne  (II,  1230),  la 
lettre  de  La  Trémoille  demandant  des  otages.  (Voir  aussi  Portef.  Fontanieu, 
113-116,  au  3  décembre,  et  Fr.  2714,  fo  103).  Le  3  décembre,- Charles  VII 
donne  un  sauf-conduit  pour  les  otages  ;  le  6,  La  Trémoille  s'engage  à  les 
mettre  en  liberté  dès  qu'il  sera  revenu  de  Bretagne  {Arch.  de  la  Loire-Inf., 
cass.  34,  E,  93,  et  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  362,  f^  76  v»,  77).  Ces  otages  furent 
gardés  au  château  de  Loches  par  Jacques  de  Pons  (Fr.  20684,  P  547). 

3.  Clairambault,  t.  203,  f»  8773,  8773.  Fr.  11542,  fos  10,  11. 

4.  Canton  de  Saint-Georges  sur-Loire,  arrondissement  d'Angers. 

5.  Fr.  11542,  f»  24. 

6.  L'original  est  aux  Arch.  de  la  Loire-Inf,,  cass.  76,  E,  181. 


CONDAMNATION   DE  L.    d'AMBOISE    (1431,   MARS)  181 

à  Richemont  la  terre  de  Dun-le-Roi,  qui  avait  été  donnée  en 
douaire  à  sa  femme,  puis  il  emmena  la  cour  à  Poitiers,  et,  là,  il 
fit  arrêter  L.  d'Amboise,  Ant,  de  Vivonne  et  André  de  Beaumont 
(mars  1431)  *.  On  sait  déjà  de  quels  crimes  ils  furent  accusés.  Le 
parlement,  réuni  en  présence  du  roi  au  château  de  Poitiers,  les 
condamna  tous  les  trois  à  la  peine  capitale,  comme  criminels  de 
lèse-majesté  (8  mai  1431).  André  de  Beaumont  et  Antoine  de 
Vivonne  furent  décapités  aussitôt;  quant  à  L.  d'Amboise,  on  lui 
fît  grâce  de  la  vie.  Après  examen  de  la  cause  dans  le  grand  con- 
seil, où  furent  appelés  les  présidents  et  «  conseillers  laiz  »  du  par- 
lement, un  arrêt  prononcé  en  présence  du  roi,  au  château  de 
Poitiers,  releva  L.  d'Amboise  de  la  peine  de  mort;  mais  ses  biens 
meubles  et  immeubles  furent  confisqués.  Enfermé  dans  son  propre 
château  d'Amboise,  puis  au  château  de  Ghâlillon-sur-Indre,  où  il 
fut  très  durement  traité  pendant  neuf  mois  environ,  il  n'obtint 
sa  liberté  que  pfus  tard,  avec  une  partie  de  ses  biens,  sur  les  solli- 
citations de  la  reine  Yolande  et  de  son  fils  Charles  d'Anjou  *. 

Louis  d'Amboise,  vicomte  de  Thouars,  comte  de  Benon,  sei- 
gneur de  Talmont,  d'Olonnes,  de  Mauléon,  de  Montrichard,  de 
l'île  de  Ré,  de  Marans  ',  etc.,  était  un  riche  et  puissant  seigneur, 
ayant  de  grands  domaines  dans  la  Touraine,  le  Poitou,  la  Sain- 
tonge,  et,  certainement,  un  des  plus  précieux  alliés  du  connétable. 
André  de  Beaumont  et  Ant.  de  Vivonne  *  avaient  aussi  combattu 
dans  le  Poitou  contre  La  Trémoille.  En  les  frappant,  c'était  bien 
Richemont  lui-même  qu'il  voulait  atteindre,  comme  le  prouve 
d'ailleurs  l'arrêt  rendu  contre  André  de  Beaumont  ^.  «  Iceluy  de 
Beaumont  a  eu  congnoissance  que  Vun  de  nos  officiers  de  grant 

1.  Ordou.  XVI,  464-466.  X»»  8604,  fos  121-122.  J  366,  n"  l,  2,  3.  Fr.  21302, 
au  28  mars  1430,  a.  st.  On  laissa  du  moins  au  connétable  les  revenus  de 
la  seigneurie  de  Dun-le-Roi  (Xi*  8604,  f»s  104,  V  105). 

2.  Les  lettres  de  restitution  furent  données  à  Tours  en  septembre  1434 
(XI»  8604,  fos  121-122;  P  2298,  fo^  689-693). 

3.  Il  était  fils  d'Ingerger  II  d'Amboise,  et  il  avait  épousé  Marie  de  Rieux, 
fille  de  Jean  III  de  Rieux,  dont  il  eut  trois  filles,  Françoise,  Péronnelle  et  Mar- 
guerite d'Amboise  (Anselme,  Vil,  122;  Pièces  orig.^  t.  47,  dossier  Amboise, 
nos  57^  62,  63).  Voir  aussi  H.  Imbert,  Histoire  de  Thouars,  Niort,  1871, 
gr.  in-8,  p.  155-156. 

4.  X2»  21,  fo  136  v». 

5.  Cet  arrêt  est  le  plus  curieux  des  trois.  André  de  Beaumont  y  est 
encore  accusé  d'avoir  fait  la  guerre  dans  le  Poitou,  d'avoir  pillé,  robe,  etc., 
d'avoir  tenu  des  gens  d'armes  dans  son  château  de  la  Roche  de  Nesle  et 
d'avoir  recommencé  la  même  conduite,  après  avoir  obtenu  des  lettres  de 
rémission  par  l'entremise  de  Barbazan  (J  366,  no  1  ;  voir  aussi  les  n^s  2  et  3; 
Fr.  16534,  f"s  51-71,  J  186b,  fo  20).  André  de  Beaumont,  baron  de  La  Haye, 
écuyer  et  chambellan  du  roi,  avait  épousé  Jeanne  de  Torsay,  dame  de 
Lezay,  fille  de  J.  de  Torsay,  maître  des  arbalétriers  (cabinet  des  titres  ; 
Trésor  généalog.  de  D.  Villevieillc,  t.  11,  f"  126  v»). 


482  CONDAMNATION  DE   L.    d'AMBOISE   (1431,   MARS) 

authorité  a  eu,  dès  longtemps,  voulenté  et  affection  d'entre- 
prendre le  gouvernement  de  nous  et  de  nostre  royaume  et,  pour 
parvenir  à  ce,  de  prendre  ledit  seigneur  de  La  Trémoille  et 
iceluy,  avec  ses  adhérans  estans  en  nostre  service,  mettre  hors 
de  nostre  compaignie,  etc.  »  A.  de  Beaumont  a  su  encore  que 
«  ce  grant  officier  »,  avant  la  venue  de  la  Pucelle,  a  voulu  mettre 
des  gens  d'armes  en  une  place  près  de  Loches,  pour  prendre  La 
Trémoille,  qu'ensuite  il  a  voulu  soustraire  la  Pucelle  de  la  com- 
pagnie du  roi,  etc.  *.  Ne  croirait-on  pas  que  c'est  le  connétable 
lui-même  qui  est  en  cause  dans  ce  jugement?  Quant  à  La  Tré- 
moille, la  veille  du  jour  où  ses  trois  victimes  furent  condamnées 
à  mort,  il  s'était  fait  donner  par  le  roi  des  lettres  de  rémission 
qui  l'absolvaient  de  tous  ses  méfaits  antérieurs  et  le  mettaient, 
pour  l'avenir,  à  l'abri  de  toute  poursuite  ^  Il  pouvait  maintenant 
s'enrichir  des  dépouilles  du  prisonnier,  ainsi  que  son  frère  Jean 
de  La  Trémoille,  seigneur  de  Jonvelle,  qui  avait  épousé  une  sœur 
de  L.  d'Amboise  ^  Il  fit  donner  d'abord  à  son  frère  ce  qu'il  lui 
plut  de  réclamer  au  nom  de  sa  femme  *,  et  il  se  réserva  la  garde 
des  places  qui  devaient  revenir  au  seigneur  de  Jonvelle,  pour 
faire  plus  facilement  la  guerre  dans  le  Poitou  ^. 

La  condamnation  des  amis  de  Richemont  ranima  la  guerre 
entre  lui  et  l'impudent  ministre,  qui  venait  de  lui  jeter  ce  nouveau 
défi.  La  ville  de  Thouars  ayant  été  livrée  au  roi  dès  le  14  mai 

1.  Fr.  16334,  fo  61  et  suiv. 

2.  JJ  177,  no  180,  De  Beaucourt,  Revue  des  quest.  histor.,  livraison  de 
juillet  1872,  p.  83,  note  1,  et  Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  p.  274-273.  A  cette 
époque,  G.  de  La  Trémoille  et  sa  femme  sont  gorgés  de  dons  par  le  roi 
(voir  dossier  La  Trémoille,  aux  dates  du  10  décembre  1429  et  du  10  février 
1431  a.  st.  ;  Clairambault,  t.  204,  fo»  8763,  8763,  et  t.  203,  P^  8767-8779,  et  de 
Beaucourt,  p.  79,  note  3.  En  outre,  G.  de  La  Trémoille,  grand  chambellan 
du  roi,  avait  une  pension  ordinaire  de  12  000  écus  par  an.  (Voir  Clairam- 
bault, t.  203,  fo  8779;  Xi»  9192,  fos  26  vo  et  27). 

3.  Voir  dossier  La  Trémoille,  à  la  date  du  8  décembre  1429;  Ms.  fr. 
7838,  fos  8  et  9.  Anselme,  Vil,  121.  Pièces  orig.,  t.  50,  no  466. 

4.  Fr.  2293,  à  l'année  1431.  J  183,  nos  142-146.  X^a  9194,  fo»  8  et  24  v». 
PP  118,  fo»  20,  21.  Pièces  orig.,  t.  47,  dossier  Amboise,  n"  63.  Voy.  Ap- 
pend.  LIV. 

5.  C'est  à  sa  haine  contre  Richemont  et  à  la  cupidité  qu'il  faut  attribuer 
la  conduite  de  Georges  de  La  Trémoille  envers  L.  d'Amboise  tout  autant 
qu'au  ressentiment  de  n'avoir  pu  obtenir  pour  son  fils  aîné  la  main  de 
Françoise  d'Amboise,  fille  de  L.  d'Amboise.  En  effet,  le  fils  aine  de  La  Tré- 
moille, Louis  de  La  Trémoille,  était  né  vers  1431  (Anselme,  IV,  166,  G).  En 
tout  cas,  il  ne  pouvait  avoir  que  deux  ou  trois  ans,  puisque  sa  mère,  Cathe- 
rine de  L'Isle-Bouchard,  la  veuve  du  sire  de  Giac,  ne  s'était  remariée  avec  La 
Trémoille  que  vers  la  fin  de  1427.  Plus  tard,  le  fils  aîné  de  La  Trémoille  épousa 
une  fille  de  L.  d'Amboise,  mais  ce  fut  sa  troisième  fille,  Marguerite  d'Am- 
boise, et  ce  mariage  n'eut  lieu  qu'en  1446,  le  22  aoiit,  trois  mois  après  la 
mort  de  Georges  de  La  Trémoille  (Anselme,  IV,  163  et  166,  et  VII,  122). 


RIGHEMOÎST  PROTÈGE  LA  FAMILLE   DAMBOISE   (1431)  183 

par  son  capitaine,  Jacques  de  Montberon  ^  la  femme  de  Louis 
d'Amboise,  Marie  de  Rieux,  fut  chassée  de  cette  ville  et  s'enfuit 
à  Mauléon  ^.  Elle  implora  le  secours  du  connétable,  qui  donna 
aussitôt  asile  à  sa  malheureuse  parente  au  château  de  Parthenay . 
Il  sut  intéresser  aussi  le  duc  de  Bretagne  à  la  cause  de  la  famille 
d'Amboise  ;  il  acheva  la  réconciliation  de  Jean  V  avec  la  maison 
d'Anjou,  par  un  traité  entre  le  duc  et  Charles,  comte  de  Mor- 
tain,  fils  (de  Yolande  (4  mai)  ;  il  appela  auprès  de  lui  des  seigneurs 
bretons,  Rostrenen,  Beaumanoir,  avec  un  grand  nombre  de  che- 
valiers et  d'écuyers,  et  se  prépara  sans  retard  à  une  guerre  inévi- 
table ^.  Pour  protester  contre  la  condamnation  de  L.  d'Amboise 
et  le  couvrir  d'une  protection  puissante,  il  fît  conclura  le  mariage 
de  Françoise  d'Amboise,  fille  aînée  du  vicomte  de  Thouars,  avec 
Pierre  de  Bretagne,  second  fils  de  Jean  V  et  qui  devint  lui-même 
duc  en  1430.  Le  traité  de  mariage  fut  signé  le  21  juillet.  Par  ce 
même  acte,  le  connétable  institua  son  neveu  Pierre  de  Bretagne 
héritier  de  la  plus  grande  partie  de  ses  terres,  pour  le  cas  où  il 
mourrait  sans  enfants  légitimes  *. 

Pierre  de  Bretagne,  né  le  7  juillet  1418,  n'avait  encore  que 
treize  ans  ;  Françoise  d'Amboise,  née  le  9 mai  1427,  n'en  avait  que 
quatre  °.  Bien  que  la  guerre  exigeât  la  présence  de  Richemont 
dans  le  Poitou,  il  conduisit  lui-même  en  Bretagne  la  jeune  fiancée. 
Il  voulait  aussi  terminer  une  autre  afi'aire  à  laquelle  il  attachait  la 
plus  haute  imporlanee,  le  mariage  de  son  neveu  François,  comte 
de  Montfort,  fils  aîné  de  Jean  V  et  héritier  présomptif  de  la  cou- 
ronne de  Bretagne,  avec  Yolande  d'Anjou,  fille  puînée  du  roi  de 
Sicile,  Louis  II.  Une  première  convention  avait  été  conclue  à  Re- 
don, le  13  mars.  Le  traité  définitif  fut  signé  le  14  août  à  Angers,  par 
la  reine  Yolande,  et  le  20  à  Nantes  par  le  duc  Jean  V  ^.  Le  ma- 
riage fut  célébré  à  Nantes  quelques  jours  après,  avec  une  grande 

1.  Anselme,  VII,  17,  E. 

2.  Aujourd'hui  CMtillon-sur-Sèvre,  ch.-l.  de  cant.  de  l'arrondissement 
de  Bressuire.  Voir  Expilly,  Dict.  géog.,  aux  mots  Mauléon-en-Poitou  et 
Chatillon  (t.  IV,  630  et  II,  328). 

3.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  76,  E,  179,  et  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  362, 
f"»  77-78.  Fr.  8819,  f»  3  vo.  Fr.  11542,  f»  13.  X'»  8,  au  7  avril  1431.  JJ  177,'; 
fos  122,  126.  Jean  V  continuait  encore  les  négociations  avec  le  roi  et  avec 
La  Trémoille  {Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  3i,  E,  93;  D.  Lobineau,  I,  387; 
Fr.  11342,  fûs  11,  12,  13,  15). 

4.  Fr.  11342,  fo'  6,  12.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  4,  E,  10. 

3.  On  trouve  ces  renseignements  dans  le  magnifique  livre  d'Heures  de 
P.  de  Bretagne  (Ms.  lat.  1139,  P  173).  . 

6.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  A,  E.  10,  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II, 
col.  1237  et  s.  Du  9  au  17  août,  Richemont  est  encore  à  Parthenay  (Fr.  8819 , 
^^49  et  54).  Ce  mariage  n'eut  pas  lieu   à  Amboise,  comme  le  dit  M.  dte  ^ 
Beaucourt,  t.  II,  283. 


184  GUERRE  DANS  LE  POITOU  (1431) 

magnificence.  Le  comte  de  Richemont  y  assistait,  avec  son  frère, 
Richard,  comte  d'Etampes,  et  le  duc  d'Alençon  *.  Peu  aupara- 
vant, Richard  avait  donné  sa  fille  aînée,  Marie  de  Bretagne,  à  P.  de 
Rieux,  dit  de  Rochefort,  maréchal  de  France  et  oncle  de  la  vicom- 
tesse de  Thouars.  Jean  de  Rieux,  le  frère  aîné  de  Pierre,  avait 
servi  sous  le  connétable  ^,  qui  s'attacha  davantage  cette  famille, 
en  lui  procurant  cette  union  brillante  avec  une  princesse  de  sa  mai- 
son. Après  avoir  ainsi  resserré  le  faisceau  d'alliances  que  La  Tré- 
moille  avait  failli  rompre,  Richemont  revint  dans  le  Poitou, 
emmenant  avec  lui  son  neveu  P,  de  Bretagne  àParthenay,  où  le 
jeune  prince  demeura  longtemps  avec  sa  belle-mère,  la  vicom- 
tesse de  Thouars,  et  la  duchesse  de  Guyenne. 

Après  le  mariage  de  sa  fille,  la  reine  Yolande,  accompagnée 
des  envoyés  de  Jean  V,  alla  trouver  le  roi  à  Saumur,  pour  essayer 
encore  de  le  réconcilier  avec  Richemont  ^  ;  mais  le  moment  n'était 
pas  opportun  (septembre).  La  guerre  sévissait  plus  que  jamais 
dans  le  Poitou  et  la  Saintonge.  La  vicomtesse  de  Thouars  avait 
d'abord  recouvré  Marans,  Benon  et  l'île  de  Ré,  où  se  logèrent  les 
seigneurs  deRostrenen  etdeBeaumanoir;  mais  La  Trémoille  avait 
envoyé  le  sire  d'Albret  comme  lieutenant  général  du  roi,  avec 
l'amiral  de  Gulant,  un  grand  nombre  de  Gascons,  des  Écossais 
et  autres  gens  d'armes  qui  entrèrent  d'emblée  dans  «  l'île  de  Ma- 
rans *  ».  Beaumanoir  et  Rostrenen,  n'ayant  que  des  forces  insuf- 
fisantes, durent  se  retirer  à  Fontenay-le-Gomte.  Marans  °  et 
Benon  *  furent  repris  sans  grande  résistance,  par  le  sire  d'Albret, 
qui  alla  ensuite  à  La  Rochelle,  pour  assiéger  une  place  voisine, 
Chatelaillon,  appartenant  au  connétable.  Elle  fut  rendue,  trop 
facilement  à  ce  qu'il  semble,  par  son  capitaine,  car  Richemont 
lui  fit  couper  la  tête  pour  s'être  mal  défendu  '. 

Ces  échecs  avaient  été  compensés  par  la  prise  de  Gençay,  et 
cette  guerre  civile  continuait  partout  entre  les  places  de  La  Tré- 
moille et  celles  du  connétable,  sans  résultat  profitable  pour  eux, 


1.  Fr,  11542,  fo  13.  D.  Lobineau,  T,  587. 

2.  Anselme,  VII,  765,  766,  806,  807.  Jean  et  Pierre  de  Rieux  étaient  fils  de 
Jean  II  de  Rieux  et  de  J.  de  Rochefort,  baronne  d'Ancenis,  —  Jean  III  de 
Rieux  mourut  en  1432.  Sa  fille  Marie  était  femme  de  L.  d'Amboise.  Voir 
ci-dessus,  p.  181,  note  3. 

3.  D.  Lobineau,  I,  588.  Fr.  11542,  fo  13. 

4.  Fr.  20684.  fo-  556  vo,  557,  559.  La  ville  de  Marans  était  entourée  de 
marais  qui  en  faisaient  pour  ainsi  dire  une  île  (voir  Corneille,  Diction, 
univ.,  Paris,  1708,  in-f»,  t.  II,  599). 

5.  Arrondissement  de  La  Rochelle. 

6.  Id. 

7.  Portef.  Fontanieu,  115-116,  au  24  septembre.  Fr.  20684,  f»'  547,  569, 
571.  JJ  178,  ^'2,  3. 


MÉDIATION   INUTILE  DE   LA  REINE  YOLANDE   (1431)  185 

mais  au  grand  détriment  de  la  France.  Avec  les  forces  qu'on 
usait  de  part  et  d'autre  dans  cette  lutte  odieuse,  on  aurait  peut- 
être  délivré  Jeanne  d'Arc,  qu'on  avait  laissé  brûler  à  Rouen 
(30  mai  1431)  ^  On  aurait  pu  sauver  Louviers,  repris  par  les  An- 
glais (25  octobre)  après  un  siège  mémorable,  qui  est  le  plus 
grand  fait  militaire  de  l'année  1431  ^.  Au  lieu  de  cela,  on  favorisait 
les  progrès  de  l'ennemi.  Abattus  par  les  désastres  soudains  que 
lui  avait  infligés  la  Pucelle,  les  Anglais  s'étaient  relevés,  grâce  à 
La  Trémoille,  et  ils  reprenaient  l'avantage  avec  les  troupes  que 
Bedford  '  avait  récemment  fait  venir  d'Angleterre  (avril).  La 
reine  de  Sicile,  dont  l'influence  était  trop  souvent  annulée  par 
celle  du  favori,  obtint  enfin  du  roi  un  arrangement  d'après  lequel 
Châtelaillon  devait  être  rendu  au  connétable,  Gençay  à  La  Tré- 
moille et  la  ville  de  Mauléon  mise  en  séquestre  entre  les  mains 
de  Prigent  de  Goëtivy.  La  Trémoille,  mécontent  de  ces  condi- 
tions, fit  attaquer  Marans.  Richemont,  croyant  la  guerre  finie, 
avait  renvoyé  en  Bretagne  les  troupes  que  son  frère  lui  avait 
prêtées  ;  il  dut  lui  demander  de  nouveaux  secours.  Le  duc  fit 
partir  le  sire  de  Penhoet,  amiral  de  Bretagne,  qui  débarqua  dans 
l'île  de  Ré  avec  des  forces  considérables.  Richemont  s'étant  aussi 
avancé  pour  secourir  Marans,  les  assiégeants  se  retirèrent  *. 

Au  milieu  de  tous  ces  troubles  Richemont  reçut  une  lettre 
de  son  frère  Jean  V,  qui  l'appelait  en  Bretagne,  pour  combattre 
le  ducd'Alençon,  leur  neveu.  Ce  jeune  prince,  alors  âgé  de  vingt- 
deux  ans,  était  d'un  caractère  généreux,  mais  ardent  et  téméraire. 
Il  réclamait  depuis  longtemps  au  duc  de  Bretagne  30  000  écus 
qui  restaient  encore  à  payer  sur  la  dot  de  sa  mère,  Marie  de  Bre- 
tagne, duchesse  d'Alençon.  Jean  V  s'était  obligé  à  verser  cette 
somme,  le  3  juin  1431  ^.  Comme  il  tardait  trop  à  tenir  ses  engage- 
ments, le  duc  d'Alençon  chercha  un  moyen  de  l'y  contraindre.  Il 

1.  On  faillit  bien  s'emparer  de  Rouen  l'année  suivante  (Fr.  20384,  n"  19). 
J.  Stevenson,  II,  202.  Fr.  26033,  n^^  1738,  1768,  1772,  1791.  Le  Bourgeois 
de  Paris,  281. 

2.  Ms.  Fr.  20877,  n»  32.  Sur  le  siège  de  Louviers,  voir  Fr.  23769,  n"'  393- 
600.  Fr.  23570,  n<"  612,  652.  K  63,  n»  13^2  et  s.  JJ  173,  n»»  132,  148.  Fr.  26034, 
n<"  1548,  1558,  1339,  1377,  1381-1630.  Fr.  26033,  n«'  1664,  1679,  1686.  J.  Ste- 
venson, II,  188.  Clair.,  67,  fo  5213.  Le  Bourgeois  de  Paris,  p.  273.  Autres 
faits  militaires  :  J  173,  n"  13,  n»  354.  K  63,  n^  13*.  Fr.  26034,  n»»  1578,  1593, 
1606,  1612,  1642.  Fr.  26055,  n^»  1665,  1682,  1689,  1691,  1699,  1701,  1768, 
1769.  Vallet  de  V.,  Charles  F//,  t.  II,  245  et  s. 

3.  Fr.  23769,  nos  537,  388,  393-597.  Fr.  23770,  n°  617.  Fr.  26054,  m»  1584, 
1385. 

4.  D.  Mor.,  I,  514,  et  D.  Lobineau,  I,  388.  Fr.  11342,  fos  13,  16,  17,  18.  Il  y 
eut  même  des  Anglais  que  le  duc  de  Bretagne  envoya  pour  défendre  l'île 
de  Ré  et  qu'il  rappela  ensuite  pour  le  siège  de  Pouaucé  (Fr.  11342,  fo  30^\ 

5.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  4,  E,  10.  Anselme,  I,  272,  273. 


186    LE  DUC  d'ALENÇON  enlève  J.   de  MALESTROIT   (1431,    SEPT.) 

paraît  qu'il  forma  d'abord  le  projet  d'enlever  son  cousin  François 
de  Bretagne,  comte  de  Montfort,  quelque  temps  après  avoir  assisté 
à  son  mariage,  mais  qu'il  n'en  put  trouver  l'occasion.  Ayant  ap- 
pris que  J.  de  Malestroit,  évêque  de  Nantes  et  chancelier  de  Bre- 
tagne *, revenait  de  son  ambassade  auprès  de  Charles  VII,  il  l'at- 
tendit un  soir  dans  la  lande  de  Garquefou,  à  environ  deux  lieues 
de  Nantes,  l'arrêta,  lui  et  les  autres  envoyés,  et  après  les  avoir  frap- 
pés, blessés,  dépouillés,  les  conduisit,  pendant  la  nuit,  à  son  châ- 
teau de  Pouancé,  où  il  les  retint  en  prison  (29  septembre)  ^. 
On  voit  encore  ici  la  main  de  La  Trémouille.  Il  n'avait  pas  réussi  à 
gagner  le  duc  de  Bretagne  ;  il  n'avait  pu  l'empêcher  d'envoyer  des 
secours  à  Richemont  dans  le  Poitou,  et  on  sait  s'il  était  incapable 
de  conseiller  une  action  déloyale  ^.  Il  est  à  remarquer  que  plus 
tard,  pour  se  disculper,  le  duc  d'Alençon  prétendit  avoir  agi 
d'après  les  ordres  de  Charles  VII  *.  Il  est  vrai  qu'il  fut  en  cela  hau- 
tement désavoué  par  le  roi;  mais  ce  qui  n'est  pas  moins  certain, 
c'est  que  La  Trémoille  promit  et  donna  au  jeune  duc  des  se- 
cours, à  condition  qu'il  ne  traiterait  pas  avec  Jean  sans  la  per- 
mission du  roi  ^. 

Après  avoir  plusieurs  fois  exhorté  son  neveu  à  remettre  ses 
prisonniers  en  liberté  ®,  le  duc  de  Bretagne  comprit  qu'il  ne  triom- 
pherait de  son  obstination  que  par  la  force,  et,  comme  il  savait 
bien  que  le  duc  d'Alençon  serait  soutenu  par  le  roi  de  France  *', 
il  s'adressa,  de  son  côté,  au  roi  d'Angleterre.  Cette  querelle  prit 
ainsi  des  proportions  inattendues.  Bedford,  qui  craignait  de  voir 
la  Bretagne  lui  échapper,  accueillit  avec  empressement  la  de- 


1.  Alain  Bouchard  dit  que  le  chancelier  était  «  moult  riche  d'or  et  d'ar- 
gent »  (édition  gothique  de  1S41,  fo  166). 

2.  Monstrelet,  V,  H,  12.  Gruel,  199. 

3.  Le  chancelier  revenait  alors  de  l'ambassade  pendant  laquelle  il  s'était 
joint  à  la  reine  de  Sicile,  pour  traiter  de  la  paix  entre  le  roi  et  le  conné- 
table, avec  P.  Eder,  J.  Prigent,  Alain  Coaynon  et  le  roi  d'armes  Malo  (Ms. 
fr.  11342,  f«  13).  Cette  arrestation  du  chancelier,  qui  devait  amener  une 
guerre  entre  les  ducs  de  Bretagne  et  d'Alençon,  coïncide  avec  la  tentative 
faite  sur  Marans.  On  voit  quel  intérêt  avait  La  Trémoille  à  susciter  une 
diversion  dans  ce  moment,  puisque  le  connétable  dut  envoyer  au  duc  Oli- 
vier de  Cleux,  pour  lui  annoncer  que  ses  forteresses  étaient  en  voie  de 
perdition  (Fr.  11512,  fo  17). 

4.  «  Eodem  duce  de  Alençonio  dicente  et  asserente  predicta  fecisse  et 
perpétrasse  de  mandato  predicti  régis  Francité.  »  {Arch.  du  marquis  du 
HaÛay-Coetquen,  Paris,  1831,  in-8,  p.  xvii,  31,  60.) 

3.  Portef.  Font.,  113-116,  janvier  1432.  JJ  227,  no  84. 

6.  Il  envoya  pour  cela  plusieurs  fois  Alain  Coaynon  près  de  lui  (Fr.  11542, 
f"  16). 

7.  Le  duc  envoya  aussitôt  vers  Charles  VII  et  Yolande  annoncer  l'arres- 
tation du  chancelier  (Fr.  11542,  fo^  13  et  18). 


JEAN   V  COMBAT  LE   DUC   D^ALENÇON   (1431)  187 

mande  de  Jean  V  et  lui  envoya,  dès  le  mois  de  décembre  1431, 
des  troupes  commandées  par  Fastolf,  Th.  de  Scales  et  Wil- 
loughby  '.  Des  forces  considérables,  auxquelles  se  joignirent  les 
Anglais,  furent  réunies  à  Ghâteaubriant,  sous  le  commandement 
du  comte  de  Laval,  gendre  et  lieutenanl  général  de  Jean  V.  Malgré 
la  rigueur  d'un  hiver  très  froid, l'armée  bretonne  alla  mettre  le 
siège  devant  Pouancé-,  vers  la  fin  de  décembre  1431,  ou  dans  les 
premiers  jours  de  janvier  1432.  Le  duc  d'Alençon  s'y  était  enfermé, 
avec  sa  mère,  sa  sœur  et  sa  femme,  qui  faisait  alors  ses  couches  s. 
Quand  il  vit  que  la  place  était  sérieusement  menacée,  il  laissa  le 
commandement  au  bâtard  de  Bourbon  et  s'enfuit  pour  aller  à  Châ- 
teau-Gonthier,  réunir  d'autres  troupes  et  presser  Charles  VII  de 
lui  fournir  les  secours  promis.  Il  demandait  2  000  combattants  et 
s'engageait  à  faire  en  personne  la  guerre  à  son  oncle  et  à  ne 
point  traiter  avec  lui  sans  l'autorisation  du  roi  \La  Trémoille  lui 
envoya  des  troupes  commandées  par  deux  capitaines  des  plus 
renommés,  le  bâtard  d'Orléans  et  Raoul  deGaucourt,  qui  entrè- 
rent dans  Pouancé,  pour  défendre  cette  place  '^. 

Cependant  le  connétable,  avec  le  comte  d'Etampes,  était  aussi 
venu  au  siège,  moins  pour  y  prendre  une  part  active  que  pour 
essayer  de  mettre  fin  à  cette  déplorable  querelle  **.  La  contrariété 
de  se  trouver  à  côté  des  Anglais,  l'affection  qu'il  portait  à  sa 
sœur,  la  duchesse  d'Alençon,  et  à  son  neveu,  le  désir  de  déjouer 
cette  nouvelle  machination  de  La  Trémoille  activaient  ses  efforts 
et  ses  démarches. La  garnison  de  La  Guerche  ',  place  qui  appar- 
tenait au  duc  d'Alençon,  ayant  pris  et  incendié  le  Plessis-Guérif  *, 

JLFr.  26056,  no  1994.  (Payement  fait  par  le  duc  de  Bretagne  à  Fastolf  et  à 
Willoughby.)  Voir  aussi  Fr.  11542,  f*  16,  17,  18,  21,  22.  Henri  VI  envoya 
encore  le  bâtard  de  Salisbury,  J.  Herpelay,  bailli  de  Caen,  etc.  (Fr.  11342, 
fos  26  et  27).  II  y  avait  même  des  Écossais  à  ce  siège  [ib.). 

2.  Arrondissement  de  Segré  (Maine-et-Loire). 

3.  Marie  d'Orléans,  fille  de  Cli.  d'Orléans.  Elle  mourut  peu  après. 

4.  Voy.  AppencL,  LV. 

3.  C.  Port,  Inventaire  des  archives  de  la  mairie  d'Angers,  Paris,  1861, 
in-8,  p.  180.  Fr.  11342,  f»»  13,  16,  17,  18,  21,  22,  23-29.  Preuves  de  Bretagne, 
H,  1234.  J  227,  no  84.  Fr.  26036,  n"  1994.  JJ  173,  no  186.  Pièces  orig.,l.  1292, 
dossier  Gaucocrt,  29110,  n"  34  (Lettres  patentes  de  Charles  VII  ordonnant 
de  payer  3000  florins  à  R.  de  Gaucourt,  pour  les  dépenses  qu'il  a  faites,  à 
cause  d'un  certain  nombre  de  gens  darmes  et  de  trait  que,  par  le  com- 
mandement du  roi,  il  a  menés  vers  le  duc  d'Alençon  «  pour  le  secourir  à 
rencontre  des  Anglois  et  Bretons  qui  estoient  à  siège  devant  ses  ville  et 
chastel  de  Pouencey,  où  estoient  mesdames  sa  mère  et  sa  femme  »). 

6.  Au  siège  de  Pouancé,  Richemont  n'avait  que  13  hommes  d'armes  el 
13  hommes  de  trait  (Fr.  11342,  fo»  28,  29  ;  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne, 
II,  1233). 

7.  Arrondissement  de  Vitré. 

8.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1232-53. 


188    RICHEMONT   RÉCONCILIE   JEAN   V   ET   LE    DUC    d'ALENÇON    (1432) 

OÙ  se  trouvaient  des  Anglais  et  des  Bretons,  Jean  V  envoya  des 
renforts  et  le  siège  fut  poussé  plus  vivement.  Le  duc  d'Alençon 
essaya  de  secourir  Pouancé,  mais  il  fut  battu  et  mis  en  fuite. 
Alors  Richemont  usa  de  toute  son  influence  pour  faire  différer 
l'assaut  et  pour  déterminer  son  neveu  à  s'entendre  avec  le  duc 
de  Bretagne ,  en  lui  proposant  sa  médiation.  Il  fît  entrer  dans 
ses  vues  le  brave  Ambroise  de  Loré,  capitaine  de  La  Guerche  \ 
qui  avait  toute  la  confiance  du  jeune  duc  et  qui  sut  triompher 
de  ses  hésitations.  Celui-ci  chargea  Loré  d'aller  négocier  avec  le 
duc  de  Bretagne  à  Ghâteaubriant  ^  et  de  lui  porter,  avec  une  lettre 
respectueuse,  des  propositions  acceptables.  De  leur  côté,  Riche- 
mont  et  le  comte  d'Etampes  faisaient  les  plus  vives  instances  au- 
près de  Jean  V.  Ce  prince  craignait  de  mécontenter  les  Anglais  ; 
pourtant  il  finit  par  céder  aux  sollicitations  de  ses  frères.  Il  par- 
donna au  duc  d'Alençon,  qui  vint  auprès  de  lui  à  Châteaubriant. 
Un  traité  fut  conclu  le  19  février  1432  ;  le  chancelier  et  les  autres 
prisonniers  furent  mis  en  liberté,  et  le  siège  fut  levé  dès  le  22  fé- 
vrier. Un  mois  après,  le  29  mars  1432,  le  duc  d'Alençon  fit 
amende  honorable  au  chancelier  dans  la  cathédrale  de  Nantes 
et  fut  absous  du  sacrilège  qu'il  avait  commis.  Ainsi  se  termina 
une  querelle  qui  aurait  pu  avoir  des  suites  beaucoup  plus  graves, 
sans  l'heureuse  intervention  du  connétable  ^. 

En  même  temps,  le  duc  de  Bretagne  et  le  comte  de  Richemont 
faisaient  une  nouvelle  tentative  pour  traiter  avec  Charles  VII,  qui 
avait  soutenu  le  duc  d'Alençon,  afin  que  la  paix  fût  entièrement 
rétablie  *.  Cette  fois,  La  Trémoille  ne  put  pas  ou  ne  voulut  pas  y 
mettre  obstacle.  Il  continuait  de  négocier  avec  le  duc  de  Bour- 
gogne, et  il  savait  que  ce  prince  n'abandonnerait  pas  le  duc  de 
Bretagne  ^  Il  avait,  en  somme,  échoué  dans  le  Poitou  et  la  Sain- 


1.  Fr.  11542,  P  19.  Nicole  Gilles,  t.  II,  fo  93  vo. 

2.  Fr.  11542,  f»  28. 

3.  Voir  surtout  la  curieuse  pièce  latine  publiée  dans  la  brochure  intitu- 
lée :  Archives  du  marquis  du  Hallay-Coètquen,  Paris,  18S1,  in-8,  p.  xviï  de 
la  notice  et  p.  51-60  des  textes.  Voir  aussi  D.  Lobineau,  I,  589-591.  D. 
Morice,  I,  514-516,  e.i  Preuves,  u,  1248-1250.  Du  Tillet,  Recueil  des  roys  de 
France,  II,  350.  Le  Baud,  482.  D'Argentré,  783.  Le  duc  de  Bretagne  dut 
payer  à  Bedford  le  service  des  troupes  anglaises  (Fr.  11542,  f»  23). 

4.  Ils  s'entendirent  d'abord  avec  Gaucourt  et  de  Brusac,  qui  vinrent  à 
Rennes  (Fr.  11542,  f»  30). 

5.  Sur  les  négociations  avec  le  duc  de  Bourgogne,  voir  Hist.  de  Bour- 
gogne, IV,  154-156,  159-62  et  Preuves,  Ixxxv-cvni.  Par  un  traité  conclu  le 
13  décembre  1431  avec  Charles  VII,  Philippe  le  Bon  consent  à  une  trêve, 
mais  en  se  réservant  le  droit  de  fournir  500  lances  au  duc  de  Bedford  et 
500  au  duc  de  Bretagne  {Hist.  de  Bourgogne,  IV,  156,  et  Preuves,  cvui-cix; 
J.  Stevenson,  II,  196;  Collection  de  Bourgogne,  t.  99,  fo«  273-279,281-290, 
293-307  ;  de  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  p.  439  et  suiv.,  notamment  p .  442.  Le 


BEDFORD  VEUT  GAGNER   RICHEMONT   (1432)  189 

tonge,  où  Richemont  et  Jean  V  étaient  soutenus  par  la  plupart 
des  nobles  et  des  villes  '.  Enfin  il  n'ignorait  pas  que  Bedford  était 
disposé  à  faire  les  plus  grands  sacrifices  pour  retenir  dans  son 
alliance  Philippe  le  Bon  et  Jean  V,  et  qu'il  songeait  même  à  ga- 
gner Richemont  et  le  comte  d'Etampes  ^  «  Il  semble  que  l'on 
devroit  très  diligemment  envoier  devers  le  duc  de  Bretagne,  afin 
de  le  entretenir  et  qu'il  se  veuille  déclarier  et  emploier  à  la  voye 
de  guerre  et  aussi  de  retraire  le  comte  de  Richemont,  Richard 
de  Bretaigne  et  leurs  subgiez  qui  ont  esté  et  sont  au  service  du 
dauphin  '.  »  Cet  avis,  donné  après  beaucoup  d'autres  *,  au  gou- 
vernement anglais  par  le  duc  de  Bourgogne,  n'est  pas  la  seule 
preuve  de  l'importance  que  Bedford  et  Philippe  le  Bon  attachaient 
à  cette  question.  D'autres  documents  ^  nous  révèlent  tout  un  plan 
dont  l'exécution  eût  été  funeste  à  Charles  VII.  Former  une  union 
plus  étroite  avec  les  ducs  de  Bourgogne  et  de  Bretagne  et  leurs 
frères  et  alliés;  donner  à  Jean  V  le  Poitou,  qui  est  voisin  de  son 
pays  ;  faire  en  sorte  que  le  comte  de  Richemont  résigne  son  office 
de  connétable  de  Charles  VII,  pour  devenir  le  connétable  de 
Henri  VI,  en  lui  offrant  «  le  duché  de  Touraine,  le  conté  de 
Saintonge,  le  pays  d'Aunis  et  la  ville  de  La  Rochelle,  avecques 
les  terres  et  seignories  que  tient  le  seigneur  de  La  Trémoille  au 
pays  de  Poitou,  de  Saintonge  et  autres  choses  ;  »  établir  ainsi  des 
communications  faciles  avec  les  Anglais  de  Guyenne  ;  attaquer 
les  Français  à"  l'ouest  et  au  nord,  en  confiant  3  000  hommes  à 
Richemont,  tandis  que  le  duc  de  Bourgogne  opérerait  à  l'est  vers 
le  Berry  ;  contraindre  Charles  VII  à  s'enfuir  dans  le  Languedoc 
et  à  n'être  même  plus  le  petit  roi  de  Bourges  ;  tels  étaient  les  pro- 
jets de  Bedford  ^. 

Si  secrets  qu'ils  fussent,  La  Trémoille  ne  pouvait  les  ignorer," 
puisque  son  frère  le  sire  de  Jonvelle  le  tenait  au  courant  de  tout 
ce  qui  se  passait  à  la  cour  de  Bourgogne.  Il  est  certain  que 
Philippe  le  Bon  fut  chargé  par  Bedford  de  sonder  Jean  V  et  son 
frère  Artur  et  de  leur  faire  des  propositions  séduisantes,  «  en  y 
gardant  toujours  les  meilleurs  termes,  à  l'onneur  desdiz  seigneurs 
de  Bretaigne  et  de  Richemont  que  faire  se  pourraif^  » .  Déjà  Henri  VI 

duc  de  Bourgogne  avait  envoyé  Jean  Tirecoq  auprès  du  duc  de  Bretagne 
et  du  comte  de  Richemont  (de  Beaucourt,  t.  II,  444,  note  5). 

1.  Voy.  Append.,  LVI. 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  47,  E,  121,  et  Portef.  Font.,  113-116,  à  la 
date  du  7  janvier  1431-32. 

3.  Ms.  fr.  1278,  f»  46  v. 

4.  Voir  par  exemple  Fr.  1278,  f»»  12-14. 

5.  Voy.  Append.,  LVI. 

6.  Voy.  Append.,  LVI. 

■  7.  J.  Stevenson,  II,  l'"  partie,  227,  229. 


190  TRAITÉ  DE  REiNNES   (1432,   5   MARS) 

avait  donné  le  Poitou  au  duc  de  Bretagne  (7  janvier  1432),  en 
considération  des  bons  services  -que  celui-ci  promettait  de  lui 
faire  ^;  déjà  Th.  de  Scales,  qui  était  à  Rennes,  avec  un  millier 
de  combattants,  se  préparait  à  entrer  dans  le  Poitou  ^,  et  Gilles 
de  Bretagne,  le  troisième  fils  de  Jean  V.  allait  se  rendre  en  An- 
gleterre ^.  Si  Richemont  n'avait  consulté  que  l'ambition  et  la 
vengeance,  s'il  avait  accepté  les  offres  du  gouvernement  anglais 
il  aurait  pu  faire  à  la  France  un  mal  incalculable.  La  Trémoille 
n'osa  le  pousser  à  bout.  Il  chargea  Raoul  de  Gaucourt  et  Re- 
gnauld  Girard,  seigneur  de  Bazoges,  d'aller  s'entendre  avec 
Jean  V  et  avec  le  connétable,  pour  mettre  fin  à  tous  les  débats  et 
«  apaisier  toute  voie  de  fait  w  dans  la  Bretagne  et  le  Poitou  *.  Dès 
le  5  mars,  les  clauses  du  traité  furent  arrêtées  à  Rennes.  Voici 
les  principales  : 

Le  comte  de  Richemont  et  ses  gens,  officiers,  vassaux,  servi- 
teurs «  demeureront  paisibles  »  et  pourront  aller  librement,  en 
toute  sécurité,  par  tout  le  royaume. 

Tous  procès  pendants  en  la  cour  de  Poitiers  contre  le  comte 
de  Richemont  demeureronten  état  jusqu'à  la  Saint-Martin  d'hi- 
ver 1433  ^ 

Le  comte  de  Richemont  aura  les  aides  qui  seront  mises  sur  ses 
terres  deParthenay  et  de  Fontenay,  pendant  deux  ans  entiers,  en 
déduction  et  payement  de  ses  gages. 

Il  cessera  de  faire  battre  monnaie  en  la  ville  de  Parthenay  et 
ailleurs. 

On  lui  rendra  «  réellement  et  de  fait»  la  châtellenieet le  châ- 
teau de  Châtelaillon  et  les  autres  places  fortes  de  la  seigneurie 
de  Fontenay  qui  lui  ont  été  prises  ;  mais  il  sera  tenu  de  rendre 
le  château  de  Gençay  au  sire  de  La  Trémoille,  «  auquel  l'en  dit 
ledit  chastel  appartenir.  » 

1.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  47,  E,  121.  Preuves  de  l'hist.  de  Bre- 
tagne., II,  col.  1247.  —  Jean  V  s'engage,  le  20  mars,  à  rendre  le  Poitou  à 
l'Angleterre  contre  200  000  1.  (Fr.  2858,  f»  93). 

2.  Fr.  11542,  f»  30.  Th.  de  Scales  ne  fit  pas  cette  expédition  dans  le 
Poitou. 

3.  Issues  of  the  Excheq.,  p.  419.  Fr.  11542,  f»  23.  Rymer,  IV,  4'=  partie, 
p.  184.  Moreau,  705,  f"s  95-96. 

4.  Fr.  11542,  f-s  20,  30. 

5.  Xia  9200,  f"  42.  11  y  avait  alors  un  procès  devant  le  parlement  de 
Poitiers  entre  J.  Harpedenne,  seigneur  de  Belleviile,  et  Artur  de  Bre- 
tagne. Le  parlement  avait  déclaré,  le  14  mars,  que  messire  Artur  viendrait 
défendre  au  lendemain  de  Quasimodo,  «  toutes  exeusationsce&sans  et  soubz 
peine  d'être  décheu  de  défenses  »  (X^a  9194,  f»  9  v°).  Richard  de  Bre- 
tagne, qui  avait  un  procès  avec  Jacques  de  Surgières  et  un  autre  avec 
Isabelle  de  Vivonne,  veuve  de  Cli.  d'Avangour,  aura  aussi  un  délai  d'un  an 
(Xia  9194,  fo  2;  J  245,  n<>  102;  Xi»  9200,  f»'  42,  155  v). 


TRAITÉ   DE   RENNES   (1432,   MARS)  191 

Les  villes  et  châtellenies  de  Gien,  Montargis,  Dun-le-Roi,  ap- 
partenant, à  cause  de  douaire,  à  Mme  de  Guyenne,  et  qui  sont 
actuellement  en  la  main  du  roi  seront  restituées  au  comte  de  Ri- 
cheraont,  à  moins  que  le  roi  ne  préfère  lui  en  donner  d'autres  de 
même  valeur,  ce  qu'il  ne  pourra  faire  que  sur  l'avis  et  ordon- 
nance de  la  reine  de  Sicile,  du  duc  de  Bretagne  et  du  bâtard 
d'Orléans . 

On  rendra  réciproquement  aux  serviteurs  et  sujets  du  roi,  du 
duc  de  Bretagne  et  du  comte  de  Richemont  ce  qui  leur  a  été  pris, 
et  ils  ne  seront  point  inquiétés  pour  les  faits  passés. 

Le  roi  s'engage  à  faire  savoir  au  comte  de  Richemont  tout  ce 
qu'on  pourrait  dire  pour  exciter  son  indignation  contre  lui,«  afin 
qu'il  s'en  puisse  excuser  et  désblâmer.  » 

Quant  au  mariage  de  P.  de  Bretagne  avec  la  fille  de  L.  d'Am- 
boise,  dont  La  Trémoille  demandait  la  rupture,  le  duc  promet 
de  ne  point  l'accomplir  sans  l'avis  et  assentiment  du  roi.  Ladite 
fille  est  loin  d'être  en  âge  de  contracter  mariage,  et,  s'il  lui  vient 
quelque  succession,  le  duc  ne  souffrira  pas  que,  pour  cette  cause, 
ses  gens  fassent  la  guerre  au  roi  ni  à  ses  pays. 

Prigent  de  Goëtivy  aura  la  garde  de  la  forteresse  de  Mauléon, 
de  par  le  roi,  auquel  il  fera  serment  de  la  tenir  eu  son  obéissance 
et  de  n'y  mettre  ou  laisser  entrer  aucunes  gens  qui  fassent  la 
guerre  au  pays,  ou  à  Marie  de  Rieux,  ou  au  duc  de  Bretagne,  ou 
au  comte  de  Richemont. 

Le  roi  n'y  pourra  mettre,  avant  dix  ans,  aucun  autre  capitaine 
que  Goëtivy. 

Marie  de  Rieux  pourra  résider  dans  la  seigneurie  de  Mauléon, 
et  elle  en  aura  les  revenus. 

Enfin  le  roi,  le  ducde  Bretagne  et  le  comte  de  Richemont  s'en- 
gagent réciproquement  à  ne  se  faire  aucune  guerre,  aucun  dom- 
mage, non  plus  qu'à  leurs  serviteurs,  sujets  et  alliés. 

Signé  le  5  mars  à  Rennes  par  Jean  V  et  par  Richemont,  ce  traité 
fut  ratifié  le  25  mars,  à  Redon,  par  le  duc  de  Bretagne,  qui  ex- 
prima, en  outre,  l'intention  que  la  reine  de  Sicile,  le  duc  d'Alen- 
çon,  les  comtes  d'Armagnac  et  de  Pardiac  y  fussent  compris  ^ 
Cet  arrangement  si  avantageux  pour  Richemont  semble  présager 
la  fin  de  sa  disgrâce.  Il  avait  eu  gain  de  cause  pour  lui-même  et 
pour  ses  alliés  ;  il  était,  plus  que  jamais,  soutenu  par  la  maison 
d'Anjou,  dont  l'influence  grandissait;  il  gagnait  de  nouveaux 
partisans,  comme  R.  de  Gaucourt,  qui  lui  rendra  bientôt  de  plus 
grands  services;  enfin  il  évitait  de  se  compromettre  avec  les  An- 
glais, que  Jean  V  voulait  envoyer  dans  le  Poitou. 

1,  Voy.^ppend.jLVII. 


192  TRAITÉ   DE   RENNES   (1432,    MARS) 

Quant  à  La  Trémoille,  s'il  ne  viola  pas  lui-même  les  engage- 
ments pris  par  le  roi,  il  ne  les  fît  pas  respecter  par  Jean  de  La 
Roche  ^  Déjà,  au  mois  de  mars  1432,  un  traître,  nommé  JeanBe- 
luteau,  avait  été  décapité,  puis  pendu  au  gibet  de  Fontenay,pour 
avoir  voulu  livrer  ou  faire  prendre  la  ville  de  Mervent.  Il  avait 
été  arrêté  par  H.  de  Villeblanche. 

En  juin,  Prigent  de  Goëtivy  fût  envoyé  de  Redon  à  Angers  par 
le  duc  Jean  V,  pour  obtenir  que  les  frontières  de  Bretagne  ne 
fussent  plus  inquiétées  par  les  routiers  de  J.  de  La  Roche  *.  Alors 
celui-ci,  avec  Pierre  Regnaud  de  VignoUes,  frère  de  La  Hire,  sur- 
prit Mervent  le  jour  de  la  Pentecôte  (8  juin  1432)  3,  Le  connétable, 
prévenu  aussitôt,  réunit  toutes  ses  forces  à  Vouvant.  Huit  jours 
après,  Mervent  était  assiégée  par  Prigent  de  Goëtivy,  lieutenant 
de  Richemont,  et  réduite  à  capituler  ^.  Ce  fut  un  des  derniers  épi- 
sodes de  cette  guerre,  qui,  par  la  faute  de  La  Trémoille,  avait 
trop  longtemps  désolé  la  Saintongeet  le  Poitou  ". 

Retiré  à  Parthenay  ^,  où  il  resta  longtemps,  le  connétable 
avait  toujours  les  mêmes  préoccupations,  hâter,  par  tous  les 
moyens  possibles,  la  chute  de  La  Trémoille  et  la  conclusion  de 
la  paix  entre  Charles  VII  et  le  duc  de  Bourgogne,  deux  projets 
dont  la  réalisation  n'était  point  facile. 

La  situation  de  La  Trémoille,  bien  que  battue  en  brèche  par 
Yolande,  semblait  encore  assez  forte  pour  défier  toutes  les  atta- 
ques. En  Normandie,  dans  le  Maine,  dans  l'Ile-de-France,  les 
capitaines  de  Charles  VII  résistaient  à  Willoughby  et  au  comté 
d'Arondel  '  ;  ils  défendaient  vaillamment  les  places  que  Bedford 
voulait  reprendre,  Lagny,  Bonsmoulins,  Saint-Evroult,  Chail- 
loué,  0,  Saint-Géneri,  d'où  Amboise  de  Loré  les  harcelait  sans 

i.  J.  de  La  Roche,  seigneur  de  Barbezieux,  avait  été  nommé  sénéchal  du 
Poitou  le  23  novembre  1431  (Xia  8604,  f»  111  ;  J.  Quicherat,  Rod.  de  Vil- 
landrando,  115;  JJ  178,  f»  62).  Le  mardi  27  novembre,  le  Parlement  décide 
que  J.  de  La  Roche,  nommé  sénéchal  de  Poitou,  sera  reçu  à  prêter  ser- 
ment en  cette  qualité  devant  la  cour,  malgré  l'opposition  de  J.  de  Com- 
born,  seigneur  de  Trignac  (voir  X*»  9194,  f»  2  v°). 

2.  Fr.  8819,  f»  ol  v».  Fr.  11542,  f»  20. 

3.  Le  capitaine  de  Mervent  était  L.  Moisen  (Fr.  8819,  f»''  1,  51  v«).  Mer- 
vent, arrondissement  de  Fontenay-le-Comte. 

4.  Fr.  8819,  f»  47  v.  Prigent  VII,  seigneur  de  Goëtivy,  était  fils  d'Alain  III 
de  Goëtivy,  qui  avait  servi  sous  le  connétable  et  avait  été  tué  au  siège  de 
Saint-James-de-Beuvron,  en  1425.  Olivier  de  Goëtivy,  frère  puîné  de  Prigent, 
servit  aussi  sous  le  connétable.  Quant  à  Prigent,  il  avait  été  nommé,  le 
21  avril  1431,  capitaine  de  Rochefort-sur-Gharente  (Anselme,  VII,  842,  44, 
45). 

5.  JJ  177,  f»  163.  JJ  178,  fo  13. 

6.  Fr.  8819,  f»  55  r-  et  v. 

7.  Fr.  26055,  n»  1733.  Fr.  26056,  n<"  1861,  1918,  1969,  1983,  1987.  JJ  175, 
nos  142,  265. 


GUERRE   CONTRE   LES   ANGLAIS   (1432)  193 

cesse,  depuis  Alençon  jusqu'à  Gaen;  ils  avaient  pris  Rambures  *t 
d'où  ils  faisaient  des  courses  dans  le  pays  de  Gaux  *  ;  ils  avaient 
enlevé  par  surprise  le  château  de  Rouen,  qu'ils  avaient  bientôt 
perdu,  il  est  vrai  (février-mars)  ^;  mais  le  bâtard  d'Orléans  et 
Gaucourt  s'étaient  emparés  de  Ghartres  (12  avril)  *,  et  le  régent 
lui-même,  en  couvrant  le  siège  de  Lagny,  commencé  depuis  plus 
de  trois  mois,  avait  été  complètement  vaincu,  le  10  août  ^,  En 
même  temps,  le  duc  d'Alençon  reprenait  les  armes  et  assiégeait 
Laigle  ^.  La  prise  de  Montargis  par  les  Anglais  (août  1432)  '  ne 
fut  pour  eux  qu'une  compensation  bien  insuffisante,  mais  ce  fut 
une  nouvelle  perte  pour  Richemont,  car  le  roi,  d'après  le  traité 
de  Rennes,  devait  lui  rendre  cette  ville.  Jean  de  Villars,  qui 
en  était  le  capitaine,  avait  laissé  surprendre  le  château,  peu 
après  le  traité  du  5  mars  *.  On  supposa  que  cette  place  eût  été 
mieux  défendue,  si  elle  n'avait  pas  dû  être  restituée  au  mortel 
ennemi  de  La  Trémoille. 

On  peut  dire  qu'en  somme  la  fortune  de  l'Angleterre  bais- 
sait peu  à  peu.  Loin  d'être  relevée  par  la  mort  de  Jeanne  d'Arc, 
elle  avait  subi  une  nouvelle  atteinte,  et  ce  «  meurtre  judiciaire 
avait  été  le  prix  de  la  rédemption  de  la  France  ^  ».  A  mesure 


1.  Sur  ces  faits,  voir  :  Fr.  25770,  n»'  647,  687,  691,  710.  Fr.  11542,  f«  24, 
K  63,  n-  1912,  1915.16.  Fr.  26035,  no»  1723,  1728,  1734,  1749,  1760-1778,  1783, 
1803,  1813,  1833-1848.  Fr.  26036,  n»»  1903-1909,  1924,  1953,  1990,  2004,  2020. 
Portef.  Fon<.,  113-116,  au  27  mai  1432.  J.  Chartier,  1,150.  S.  Luce,  Chronique 
du  Mont-Saint-Michel,  l,  ^S,  noie  3.  Lagny,  arrondissement  de  Meaux.  Bons- 
moulins,  arrondissement  de  Mortagne.Ily  avait  là  un  des  plus  beaux  et  des 
plus  forts  châteaux  de  la  Normandie  (Fr.  23712,  n»  310).  Saint-Evronlt  et 
0,  arrondissement  d'Argentan.  Chailloué,  Saint-Géneri,  arrondissemeai 
d'Alençon.  Rambures,  arrondissement  d'Abbeville. 

2    Fr.  26033,  n<"  1768,  1769. 

3.  Fr.  26035,  n"  1758,  1772,  1791.  Fr.  20584,  n»  19.  J.  Stevenson,  11,202. 
Ms.  Duchesne,  79,  f»  348  v». 

4.  Monstrelet,  V,  21-25.  Le  Bourg,  de  Paris,  282.  E.  de  Lépinois,  Hist. 
de  Chartres,  1854-1858,  2  vol.  in-8,  t.  II,  81-84. 

5.  Sur  le  siège  de  Lagny,  voir  JJ  173,  n»  133.  J  183,  n»  142.  Fr.  26035, 
n»8  1826,  1844,  1847,  1850,  1853,  1856,  1837,  1863,  1873.  K  63,  n»  19i*.  Fr. 
1968,  f»  148.  Meyer,  Commentarii,  179.  Le  Bourg,  de  Paris,  285-287. 

6.  Fr.  26033,  n<"  1890,  1978, 

7.  Montargis  fut  pris  par  François  Surienne,dit  I'Aragonais,et  parPerrinet 
Grasset.  Fr.  Surienne  reçut  10  000  saluts  d'or  que  Bedford  lui  avait  pro- 
mis, s'il  prenait  cette  place  (voir  J.  Stevenson,  t.  II,  2°  partie,  p.  427-429). 
Les  Anglais  entrèrent  par  le  château,  qui  était  confié  à  la  garde  des  habi- 
tants. Ceux-ci  avaient  envoyé  chercher  «  les  gens  du  roy,  qui  ne  furent 
les  plus  forts  »  (Z»a  14,  f»  109  r«  et  v»).  En  1438,  Surienne  vendit  Mon- 
targis à  Charles  VII. 

8.  Peu  après,  les  Anglais  prirent  aussi  Provins  (le  Bourg,  de  Paris,  288- 
289). 

9.  By  putting  to  death  J.  Darc,  the  duke  of  Bedford  terminated  the  En^ 

Richemont.  13 


194  DISPOSITIONS  DU  DUC  DE  BOURGOGNE 

que  la  guerre  était  moins  Heureuse,  elle  devenait  de  plus  en  plus 
impopulaire  au  delà  du  détroit.  Le  Parlement  anglais  ne  voulait 
plus  accorder  ni  troupes  ni  argent  ^  Une  courte  apparition  du 
jeune  roi  Henri  YI  (novembre  1431-janvier  1432),  son  couron- 
nement à  Paris  (16  décembre  1431)  n'avaient  pas  rendu  aux 
Anglais  le  prestige  qu'ils  avaient  perdu  ^.  Si  la  France,  malgré 
ses  divisions,  donnait  encore  ces  preuves  de  vitalité,  que  ne 
pourrait-elle  faire  avec  un  gouvernement  meilleur,  et  surtout 
quand  elle  n'aurait  plus  à  combattre  le  duc  de  Bourgogne? 
En  attendant  qu'il  pût  trouver  l'occasion  de  renverser  La 
Trémoille,  le  connétable  continuait  donc  d'agir  auprès  de  Phi- 
lippe le  Bon,  pour  le  décider  à  faire  la  paix  avec  Charles  VII. 

De  ce  côté,  les  circonstances  paraissaient  assez  favorables. 
Le  duc  de  Bourgogne  trouvait  que  la  reconnaissance  de  l'An- 
gleterre n'était  pas  à  la  hauteur  des  services  qu'il  lui  rendait;  il 
disait  qu'elle  laissait  trop  lourdement  peser  sur  lui  et  sur  ses 
sujets  le  fardeau  de  la  guerre  ;  il  s'en  plaignait  au  roi  Henri  VI. 
Bedford,  tout  en  essayant  de  satisfaire  au?^  exigences  d'un  allié 
indispensable,  éprouvait  une  irritation  mal  dissimulée.  Philippe 
le  Bon  n'ignorait  pas  ces  dispositions,  et  il  comprenait  aussi  que 
la  guerre  deviendrait  de  plus  en  plus  ruineuse  pour  lui,  à  me- 
sure que  la  France  reprenait  des  forces.  Dans  ces  dernières  an- 
nées, il  n'avait  pas  eu  que  des  succès.  Son  allié  Louis  de  Ghâlon, 
prince  d'Orange  ',  soutenu  aussi  par  le  duc  de  Savoie,  avait  été 
battu  à  Anthon  *  par  R.  de  Gaucourt,  en  voulant  faire  la  con- 
quête du  Dauphiné  (11  juin  1430);  les  Bourguignons  avaient  dû 
lever  le  siège  de  Gompiègne  ^  ;  ils  avaient  encore  été  défaits  pai" 
Barbazan  près  de  Ghappes  ^,  par  Saintrailles  près  de  Germigny  ^ 


glish  ascendency  in  France.  The  judicial  murder  of  Joan  is  the  price  of 
the  rédemption  of  France  (J.  Stevenson,  t.  I,  Préf.,  p.  lxui). 

1.  J.  Stevenson,  I,  Préf.,  p.  lxiv.  Rolls  of  parliament,  IV,  390.  Le  Parle- 
ment de  Paris  réclamait  en  vain  plusieurs  années  de  gages  qu'on  ne  lui 
payait  pas  et  refusait  parfois  de  rendre  la  justice  (X^a  1480,  f»  341  ;  X^»  1481 , 
fos  22  v,  34,  35,  40,  44  v,  46,  49,  50  v»,  51,  54,  55,  60,  65,  95). 

2.  Henri  VI  fit  son  entrée  à  Paris  le  dimanche  2  décembre  1431  (le  BoUrg. 
de  Paris,  p.  274-279).  Xia  1481,  f»  46  v».  Fr.  26055,  n«s  1690,  1736.  Le  gouver- 
nement anglais  voulait  le  faire  couronner  à  Reims,  mais  il  fallait  d'abord 
prendre  cette  ville.  La  question  fut  examinée  plusieurs  fois  (Fr.  1278,  f"  12; 
Moreau,705,f»«  85,92  ;  Fr.  5037,  f»'  143-152;  Delpit,  Documents  français,  239-244). 

3.  Fils  de  Jean  III  de  Ghâlon,  prince  d'Orange. 

4.  Arrondissement  de  Vienne. 

5.  Philippe  le  Bon  se  plaignit  de  n'avoir  pas  été  secondé  comme  il  devait 
l'être  par  les  Anglais  durant  ce  siège  (voir  t.  99  de  la  coUect.  de  Bour- 
gogne, p.  392-99). 

6.  Arrondissement  de  Bar-sur-Seine. 
-  7.  Arrondissement  d'Auxerre. 


EUGÉINE  IV  VEUT  FAIRE  CONCLURE  LA  PAIX   (1432)  198 

(1430,  décembre),  et,  s'ils  avaient  vaincu  et  pris  à  Bulgnéville  * 
(2  juillet  1431)  le  jeune  René  d'Anjou,  en  faisant  triompher 
Antoine  de  Vaudemont,  son  compétiteur  au  duché  de  Lorraine, 
ils  n'avaient  pu  empêcher  le  comte  de  Clermont,  Ch.  d'Albret,  le 
bâtard  d'Orléans,  le  maréchal  de  Boussac  d'attaquer,  par  le 
Bourbonnais,  les  Etats  de  Philippe  le  Bon  ®. 

A  cette  époque,  le  nouveau  pape,  Eugène  IV  ^  (1431-1447), 
comme  son  prédécesseur  Martin  V,  faisait  les  plus  louables 
efforts  pour  amener  le  rétablissement  de  la  paix  générale.  Dès 
les  premiers  temps  de  son  pontificat,  il  avait  écrit  dans  ce  but 
au  duc  de  Bourgogne  *,  et  son  légat,  Nicolas  Albergati,  cardinal 
de  Sainte-Croix,  le  secondait  avec  un  zèle  vraiment  infatigable  ^. 
S'adressant  à  la  fois  à  Charles  MI,  à  Henri  VI,  à  Philippe  le 
Bon,  il  les  pressait  d'entamer  des  négociations;  il  obtenait  que 
des  conférences  fussent  ouvertes  à  Auxerre  au  mois  de  juillet 
1432.  Déjà  le  duc  de  Bourgogne  avait  consenti  à  mettre  en  liberté 
provisoire  René  d'Anjou  "^  (6  avril  1431);  il  avait  conclu  des 
trêves  avec  le  comte  de  Clermont  et  avec  Charles  VII  (8  et  24 
septembre  et  13  décembre  1431)  ;  il  avait  même  écrit  au  roi  d'An- 
gleterre (29  décembre  1431)  '  pour  l'engager  à  faire  la  paix.  Le 
duc  de  Savoie,  après  les  échecs  qu'il  avait  éprouvés  en  soute- 
nant le  prince  d'Orange,  était  revenu  à  son  rôle  pacifique  de 
médiateur;  il  s'était  rapproché  de  Charles  VII,  en  mariant  sa 
deuxième  fille,  Marguerite,  à  Louis  III  d'Anjou,  roi  de  Sicile, 
fils  aîné  de  Yolande;  enfin  Louis  de  Châlon  avait  aussi  traité 
avec  le  roi  de  France  et  promis  de  mettre  à  son  service  le 
crédit  dont  il  jouissait  auprès  de  Philippe  le  Bon  (22  juin)  ^. 

Tout  semblait  donc  faciliter  un  rapprochement,  sinon  avec 

1.  Arrondissement  de  Neufchâteau  (Vosges). 

2.  Après  la  mort  de  Charles  II,  duc  de  Lorraine  (23  janvier  li3l),  René 
d'Anjou,  mari  de  sa  fille  Isabelle,  lui  succéda;  mais  Antoine  de  Vdtide- 
mont,  neveu  de  Charles  II,  réclama  le  duché  de  Lorraine  et  fut  soutenu 
par  Philippe  le  Bon.  Cette  querelle  de  la  succession  de  Lorraine,  n'était, 
au  fond,  que  la  grande  lutte  de  la  France  contre  l'Angleterre  et  la  Bour- 
gogne. Hist.  de  Bou)'gog7ie,  IV,  142-iS3.  Lecoy  de  La  Marche,  Le  roi  René, 
Didier,  187.J,  2  vol.  in-8,  t.  I,  78,  85-92;  J.  Quicherat,  R.  de  Villandrando, 
41-50.  Fr.  1968,  f"  147.  Fr.  26053,  n»  1746.  Le  Fôvre  de  Saint-Rèmy,  II, 
258-262. 

3.  Élu  du  3  ail  6  mars  1431  {Art  de  vérif.  les  dates,  1,  324); 

4.  La  lettre  est  dans  YUist.  de  Bourgogne,  IV,  Preuves,  pi.  Lxxxvll. 

5.  De  Beaùcourt,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  II,  p.  438  et  sùiv. 

6.  Lecoy  de  La  Marche, Le  roi  René,  I,  96-97.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  157. 

7.  La  lettre  est  dans  YHist.  de  Bourgogne,  IV,  Preuves,  ex. 

8.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  133,  160,  et  Preuves.  Collect.  de  Bourgogne, 
t.  99,  f»*  273-307.  Fr.  2858,  f"  94.  J  186i>,  f»  20.  Pjirtef.  Font.,  115-116,  au  22 
juin  et  au  8  juillet. 


196      NÉGOCIATIONS  AVEC  HENRI  IV  ET  PHILIPPE  LE  BON  (1432) 

l'Angleterre,  du  moins  avec  la  Bourgogne.  Le  duc  de  Bretagne 
et  Richement  s'y  employèrent  activement,  celui-ci  auprès  de  son 
beau-frère,  celui-là  auprès  de  Philippe  le  Bon  et  de  Henri  VI. 
D'accord  avec  Amédée  VIII,  ils  rédigèrent  un  projet  de  paix 
générale.  Leurs  envoyés  assistèrent  aux  négociations  entre  le 
duc  de  Bourgogne  et  La  Trémoille  \  puis,  sur  l'invitation  da 
cardinal  de  Sainte-Croix,  les  ambassadeurs  de  Bretagne  prirent 
part  aux  conférences  d'Auxerre  (nov.  1432).  On  ne  put  ni  s'en- 
tendre avec  les  Anglais,  ni  obtenir  de  Philippe  le  Bon  un  traité 
de  paix  définitif;  mais  l'idée  d'un  réconciHation  entre  Charles  VII 
et  le  duc  de  Bourgogne  faisait  des  progrès,  et  on  peut  dire  que 
ces  conférences  furent  comme  le  prélude  du  congrès  d'Arras. 
Les  médiateurs  ne  se  découragèrent  pas;  ils  firent  décider  que 
de  nouvelles  conférences  auraient  lieu  à  Corbeil  ou  à  Melun,  au 
mois  de  mars  de  l'année  suivante  *.  Malheureusement,  l'égoïsme 
de  La  Trémoille  et  ses  menées  occultes  suscitaient  sans  cesse  de 
nouvelles  difficultés.  Ainsi,  le  2  octobre,  on  découvrit  un  com- 
plot tramé,  disait-on,  par  les  agents  de  La  Trémoille,  pour  sur- 
prendre la  ville  de  Dijon  3. 

En  même  temps,  La  Trémoille  s'attaquait  à  la  maison  d'Anjou 
avec  une  audace  qui  montrait  une  fois  de  plus  de  quoi  il  était 
capable ,  quand  il  croyait  ses  intérêts  menacés .  La  reine 
Yolande  était  parvenue  à  maintenir  dans  l'entourage  intime  du 
roi  son  troisième  fils,  Ch.  d'Anjou,  qu'il  avait  vu  naître  et  que 
<  dès  l'eure  de  sa  nativité  elle  lui  avait  donné  en  espéciale  re- 
commandacion  *.  »  L'habile  princesse  fondait  sur  l'aff'ection  du 
roi  pour  ce  jeune  homme  tout  un  plan  qui  ne  put  échapper  à  la 
perspicacité  ombrageuse  de  La  Trémoille.  Ch.  d'Anjou  avait 


1.  D.  Morice,  I,  517.  Moreau,  705,  f<"  93-96,  109-112.  Pièces  orig.,  t.  693. 
nos  70,  71.  Fr.  11542,  f»»  7,  20.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  Preuves,  cxvi.  Bedford 
avait  accepté  la  médiatioa  du  cardinal  de  Sainte-Croix.  II  avait  proposé 
qu'on  choisît,  pour  les  conférences,  une  ville  appartenant  à  Henri  VI  «  ou 
à  l'adversaire  »,  et  que  celte  ville  fût  mise  aux  mains  des  ducs  de  Bour- 
gogne, de  Bretagne,  de  Savoie  ou  de  leurs  commissaires,  etc.  (X^a  8604, 
fo«  21-22).  Les  Anglais  voulaient  faire  de  grands  progrès  avant  la  journée 
d'Auxerre,  pour  mieux  en  tirer  profit.  Ils  voulaient  aussi  demander  l'al- 
liance des  rois  d'Aragon,  de  Portugal,  de  Navarre,  des  ducs  de  Savoie,  de 
Milan,  de  Lorraine  (Fr.  1278,  f»»  45-46). 

2 .  Sur  ces  conférences,  voir  Hist.  de  Bourg.,  IV,  166-168,  et  Preuves,  cxxvii, 
cxxvm.  Rymer,  IV,  2"  partie,  175, 178-179  et  187,  et  collect.  de  Bourg.,  t.  99, 
p.  293  et  suiv.  Fr.  11542,  f»^  21  et  22.  De  Beaucourt,  II,  p.  451  et  suiv. 

3.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  164,  166,  184.  Collect.  de  Bourgogne,  t.  99,  f»*  309- 
312.  Pièces  orig.,  t.  542,  dossier  Bbusac,  n»  2.  Vallet  de  V.,  Charles  VII, 
t.  H,  302.  De  Beaucourt,  t.  II,  295,  459-461. 

4.  JJ  176,  f»  121.  Ch.  d'Anjou  était  né  le  14  octobre  1414,  au  château  de 
Montils-lès-Tours  (Anselme,  I,  231-232,  235). 


LA  TRÉMOILLE  ET  CHARLES  d'aNJOU  197 

alors  dix-huit  ans;  son  ambition  s'éveillait.  Beau-frère  de 
Charles  VII,  qui  avait  pour  lui  une  affection  paternelle,  il  pou- 
vait aspirer  à  tout  et,  sous  la  direction  de  sa  mère,  devenir  un 
rival  dangereux  pour  La  Trémoille.  Déjà  le  roi  lui  avait  donné 
le  comté  de  Mortain  et  l'avait  nommé  son  lieutenant  général 
dans  le  Maine  et  l'Anjou  *.  L'impudent  favori  voulut  à  tout 
prix  l'éloigner  de  la  cour.  Il  avait  précisément  sous  la  main 
le  plus  redoutable  de  ces  routiers,  qui  portaient  la  dévasta- 
tion dans  les  pays  épargnés  par  les  Anglais,  le  chef  castillan 
Rodrigue  de  Villandrando.  Toujours  prêt  à  saisir  l'occasion 
de  faire  fortune  et  à  combattre,  selon  ses  intérêts,  pour  ou 
contre  le  roi,  Rodrigue,  après  s'être  mis  au  service  des  comtes 
de  La  Marche  et  de  Pardiac,  avait,  pour  son  propre  compte, 
ravagé  les  Gévennes  et  le  Languedoc,  puis  il  s'était  donné  à 
La  Trémoille,  qui  tolérait  ses  déprédations  et  lui  assurait  l'impu- 
nité. Habile  capitaine  d'ailleurs,  il  avait  contribué  brillamment 
à  la  victoire  d'Anthon,  à  la  délivrance  de  Lagny  *. 

Pour  s'attacher  un  pareil  auxiliaire  La  Trémoille  lui  avait 
fait  donner  la  seigneurie  de  Puzignan  ',dans  le  Dauphiné  (1431, 
7  mars),  et  la  châtellenie  de  Talmont-sur-Gironde  *,  qui  appar- 
tenait à  L.  d'Amboise  (3  avril  1432)  ^.  Il  voulait  le  détacher 
entièrement  des  comtes  de  La  Marche  et  de  Pardiac,  amis  du 
connétable.  Alors  La  Trémoille  osa  lancer  sur  l'Anjou  ce  dan- 
gereux routier,  et  on  vit  ainsi  un  des  capitaines  de  l'armée 
royale  ravager  des  pays  qui  appartenaient  à  la  belle-mère  et  aux 
beaux-frères  du  roi  1  Battu  aux  Ponts-de-Gé  "  par  Jean  de 
Bueil,  lieutenant  de  Gharles  d'Anjou,  malgré  la  supériorité  de  ses 
forces,  Rodrigue  se  mit  à  piller  la  Touraine  ^  puis  il  se  dirigea 


1.  Pièces  orig.,  t.  549,  dossier  Bdeil,  n»  108.  X*»  9194,  f»  90.  Voir  aussi 
Fr.  20385,  n»  1. 

2.  JJ  176,  f»  288  v. 

3.  Arrondissement  de  Vienne  (Isère). 

4.  Arrondissement  de  Saintes. 

5.  Voir  J.  Quicherat,  Rodrigue  de  Villandrando,  notamment  aux  p.  33, 
33,  37,  50,  37,  64,  67,  75,  78. 

6.  Arrondissement  d'Angers. 

Il  est  probable  que  la  Bretagne  fut  aussi  menacée  par  Rodrigue  ou 
quelque  autre  capitaine  au  service  de  La  Trémoille,  car  on  voit,  dans  le 
.Ms.  11342,  que  Jean  V  craint  d'être  attaqué  (septembre  1432),  qu'il  envoie 
le  chancelier  à  Angers  vers  la  reine  de  Sicile  et  Ch.  d'Anjou,  et  qu'en 
novembre  il  paye  une  certaine  somme  à  Ch.  d'Anjou  «  pour  les  plaisirs  et 
services  faits  au  duc  pour  la  défense  du  pais  de  Bretaigne  à  l'encontre 
d'aucuns  ennemis  »  (Fr.  11542,  f»  23). 

7.  J.  de  Bueil,  formé  à  l'art  de  la  guerre  par  le  vicomte  de  Narbonne, 
puis  par  La  Hire,  était  un  habile  capitaine.  Sa  vie  est  racontée,  sous  des 
noms  de  pure  invention,  dans  le  Jouyencel,  ouvrage  écrit  par  trois  de  ses 


198      LES   ANGLAIS  PERDENT  ET  REPRENNENT  MONTARGIS  (1432)  ' 

vers  le  Languedoc,  peut-être  pour  aller  combattre  le  comte  de 
Foix,  soupçonné,  lui  aussi,  de  vouloir  supplanter  La  ïrémoille. 
Pour  ces  beaux  exploits,  Rodrigue  eut  encore  les  titres  de  con- 
seiller et  chambellan  de  Charles  VII  *. 

Vers  le  même  temps,  les  sires  de  Graville  et  de  Guitry  repri- 
rent la  ville  de  Montargis  2.  Ils  y  restèrent  cinq  semaines,  atten- 
dant les  renforts  et  l'artillerie  dont  ils  avaient  besoin  pour  s'em- 
parer du  château,  toujours  occupé  par  les  Anglais.  La  Tré- 
moille,  qui  savait  si  bien  trouver  des  troupes  pour  attaquer 
Richemont  ou  Gh.  d'Anjou,  ne  fit  rien  pour  conserver  à  la 
France  une  ville  dont  le  nom  rappelait  de  si  glorieux  souvenirs. 
Il  est  vrai  que  cette  ville  appartenait  au  connétable. 

Cette  fois,  l'indignation  générale  éclata  contre  l'indigne  mi- 
nistre, qui  trahissait  ainsi  la  France  ^.  Tous  ceux  qui  suppor- 
taient avec  une  secrète  impatience  ce  joug  honteux,  tous  ceux 
qui  avaient  à  cœur  les  intérêts  du  pays  se  montrèrent  dis- 
posés à  seconder  la  reine  de  Sicile,  son  fils  et  le  connétable. 
Plusieurs  personnages  d'importance  vinrent  trouver  Richemont 
à  Parthenay,  pour  lui  offrir  leur  concours.  Il  se  forma  contre  La 
Trémoille  une  véritable  conspiration  dont  faisaient  partie  Jean 
de  Bueil  *,  dévoué  depuis  longtemps  à  la  maison  d'Anjou,  son 
beau-frère,  Pierre  d'Amboise  ",  seigneur  de  Ghaumont,  cousin  du 
vicomte  de  Thouars,  Prigent  de  Goëtivy,  Raoul  de  Gaucourt  et 


serviteurs.  Un  autre,  Guill.  Tringant,  a  laissé  un  commentaire  et  un  ré- 
sumé du  Jouvencel  dans  le  Ms.  Fr.  3059  de  la  bib.  de  l'Arsenal.  Voir  les 
f"»  US  et  suiv.,  notamment  115  v,  116,  117  v». 

1.  J.  Quicherat,  Rodrigue  de  Villaadrando,  78-84.  Pièces  orifj.,  t.  549,  dos- 
sier Bueil,  n»  108.  Ms.  Fr.  3059  à  la  bib.  de  l'Arsenal,  f°  119.  K  63,  n«  261-5. 
De  Beaucourt,  Eevue  des  questions  hist.,  liv.  de  juillet  1872,  p.  86-88,  et 
Eist.  de  Charles  VU,  t.  II,  287  et  s.  Fr.  26057,  n»*  2082,  2084,  2123,  2132.  2141, 
2200,  2229. 

2.  Jean  Jlalet  V,  seigneur  de  Graville  et  de  Marcoussis,  avait  succédé, 
comme  maître  des  arbalétriers,  à  Jean  de  Torsay,  le  le'  août  1 425.  11  avait 
défendu  Montargis  en  1426  (Anselme,  VIII,  86  G.  et  Vil,  869  G,  D,  E;  Glair., 
t.  55,  f»  4183).  Guill.  de  Ghaumont,  seigneur  de  Guitry  ou  Quitry,  général 
réformateur  des  eaux  et  forêts  (Anselme,  VIII,  885,  et  886  E  et  887  G). 

3.  «  La  perte  de  Montargis  fut  cause  de  mettre  le  seigneur  de  La  Tré- 
moille hors  du  gouvernement.  »  (Berry,  ap.  Godefroy,  p.  386;  Martial  d'Au- 
vergne, I,  135.)  Sur  les  agissements  de  La  Trémoille,  voir  de  Beaucourt, 
t.  II,  p.  287  et  s.,  notamment  p.  293-296.  Xi»  9200,  f°  209.  Il  levait  des 
péages  onéreux  sur  les  marchands  de  la  Loire  (Xi*  4799,  f"  244  v). 

4.  Le  26  octobre  1430,  J.  de  Bueil,  lieutenant  de  Ch.  d'Anjou,  comte  de 
Mortain,  prête  serment  de  fidélité  et  obéissance,  comme  capitaine  de  Sablé, 
à  la  reine  Yolande  et  à  ses  enfants  {Pièces  orig.,  t.  549,  dossier  de  Bcèil, 
u»  108). 

5.  P.  d'Amboise  avait  épousé  en  1428  Anne  de  Bueil,  sœur  de  Jean  de 
Bueil  (voir  Anselme,  VII,  849  A). 


COMPLOT  CONTRE  LA  TRÉMOILLE   (1433)  199 

Pierre  de  Brézé  ',  seigneur  de  La  Varenne,  destiné  à  jouer  bientôt 
un  rôle  si  remarquable.  La  reine  Yolande,  son  fils  Charles,  sa 
fille  Marie  d'Anjou,  reine  de  France,  n'attendaient  qu'une  occa- 
sion pour  soustraire  enfin  Charles  VII  à  l'esclavage  dans  lequel 
il  semblait  se  complaire,  mais  il  n'était  pas  facile  de  surprendre 
le  favori.  II  fallut  préparer  de  longue  main  cette  entreprise. 

En  attendant,  Richemont  et  le  duc  de  Bretagne  avisaient,  avec 
le  duc  de  Savoie,  aux  moyens  de  mettre  auprès  du  roi  «  de  leurs 
gens  pour  le  conseiller  et  aider  »,  afin  d'arriver  à  la  conclusion 
de  la  paix  générale.  De  nouvelles  conférences  qui  eurent  lieu, 
comme  il  avait  été  convenu,  entre  Corbeil  et  Melun,  au  petit  vil- 
lage de  Saint-Port  (21  mars  4433),  n'amenèrent  aucun  rappro- 
chement entre  Charles  VII  et  Henri  VI,  malgré  les  efforts  du 
cardinal  de  Sainte-Croix.  Le  duc  de  Bretagne  envoya  vainement 
des  ambassadeurs  auprès  de  Bedford  et  à  la  cour  d'Angleterre, 
où  son  fils  Gilles  était  depuis  plusieurs  mois  *.  Quant  au  duc  de 
Bourgogne,  il  conseillait  aussi  à  Henri  VI  de  faire  la  paix,  mais  il 
n'était  pas  encore  disposé  à  la  faire  lui-même  séparément  avec 
Charles  VII,  comme  le  désirait  Richemont. 

Philippe  le  Bon  était  cependant  très  irrité  contre  Bedford,  qui, 
peu  de  mois  après  la  mort  de  sa  première  femme,  Anne  de  Bour- 
gogne ',  avait  épousé,  sans  même  l'avoir  consulté,  Jacqueline  de 
Luxembourg,  fille  du  comte  de  Saint-Pol  *,  son  vassal  (20  avril). 
Le  cardinal  de  Winchester  avait  essayé  de  les  réconcilier,  en  les 
amenant  tous  deux  à  Saint-Omer.  Le  régent  et  Philippe  avaient 
quitté  cette  ville  sans  s'être  vus  ;  ni  l'un  ni  l'autre  ne  voulant  faire 
la  première  démarche.  Richemont  espérait  bien  profiter  de  ces 
dissentiments;  mais  il  fallait  pour  cela,  qu'il  ne  fût  plus  en  dis- 
grâce. Au  lieu  de  ménager  Philippe  le  Bon,  La  Trémoille  recom- 
mençait la  guerre  contre  lui,  malgré  les  trêves;  il  mariait  sa 
sœur  Isabelle  au  sire  de  Châteauvillain,  l'un  des  plus  puissants 
seigneurs  de  Bourgogne,  et  le  gagnait  ainsi  à  Charles  VII  (fé- 
vrier). Pour  réussir  auprès  de  Philippe  le  Bon,  il  fallait  donc 
d'abord  se  débarrasser  de  La  Trémoille  ^. 

1.  Pierre  II  de  Brézé  était  fils  de  Jean  II  de  Brézé  et  de  Marg.  de  Bueil, 
tante  de  Jean  de  Bueil  (Anselme,  VIII,  270  E  et  271  B). 

2.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  169,  et  Preuves,  cxvi.  Fr.  11542,  f<>»  23,  24.  Mo- 
reau,  t.  703,  f-s  9;i,  96,  127. 

3.  Sœur  de  Philippe  le  Bon,  morte  le  vendredi  14  novembre  1432  (voir  X'* 
1481,  fo  63;  Meyer,  Commentarii  sive  annales  rerum  Vlandricarum,  Antver- 
piœ,  1561,  in-4»,  p.  279). 

4.  Pierre  l"  de  Luxembourg,  comte  de  Saint-Pol.  Voy.  le  Bourgeois  d« 
Paris,  293.  Monstrelet,  V,  36.  Anselme,  III,  723-726.  Richemont  épousa  plus 
tard  une  sœur  de  Jacqueline. 

5.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  168-170.  On  disait  que  La  Trémoille  avait  conseiUé 


200  ENLÈVEMENT  DE  LA   TRÉMOILLE   (1433,   JUIN) 

Tout  était  prêt  pour  l'exécution  du  complot.  Afin  de  n'éveiller 
aucun  soupçon,  le  connétable  se  tenait  ostensiblement  à  Par- 
Ihenay  *,  tandis  que  la  cour  était  à  Ghinon  2,  mais  il  avait  envoyé 
dans  cette  ville  un  de  ses  écuyers,  J.  de  Rosnivinen,  qui  lui  était 
entièrement  dévoué.  Gaucourt,  capitaine  de  Ghinon,  et  Olivier 
Frétard,  son  lieutenant,  n'inspiraient  aucune  défiance  à  La  Tré- 
moille;  pourtant  ils  étaient  du  complot,  et  ils  pouvaient  seuls  en 
assurer  la  réussite.  Vers  la  fm  de  juin  ^,  pendant  la  nuit,  Frétard 
introduisit  dans  le  château  du  Gouldray  les  sires  de  Bueil,  de 
Brézé,  de  Ghaumont,  de  Goëtivy,  avec  leurs  gens  d'armes,  sur 
Fôrdre  de  Charles  d'Anjou.  La  Trémoille,  surpris  dans  son  lit, 
comme  autrefois  le  sire  de  Giac,  faillit  avoir  le  même  sort.  «  Il  faut 
croire  qu'ils  ne  firent  pas  tout  ce  qui  leur  estait  commandé,  car 
messire  Jean  de  Rosnevinen,  joignant  ledit  de  La  Trémoille,  lui 
donna  un  coup  de  dague  dans  le  ventre,  pensant  pis  faire  quil 
ne  fist  *.  »  On  peut  croire,  avec  d'Argentré,  avec  Gruel  lui-même, 
que  La  Trémoille  «  fut  en  grant  danger  de  mort,  qui  ne  l'eust 
rescous  ^  ».  J.  de  Bueil,  qui  était  son  neveu,  et  les  autres  conjurés 
voulaient,  non  pas  le  tuer,  mais  seulement  l'empêcher  de  reve- 
nir à  la  cour.  Il  dut  s'estimer  heureux  que  l'expédition  eût  été 
dirigée  par  Ch.  d'Anjou,  au  lieu  de  l'être  par  le  connétable  en 
personne  ^. 

Le  roi  habitait  aussi  le  château.  Réveillé  par  ce  tumulte  noc- 
turne, craignant  quelque  danger  pour  lui-même,  il  envoya  cher- 
cher J.  de  Bueil,  P.  de  Brézé,  Goëtivy  et  leur  demanda  «  si  le 
eonnestable  y  estoit  ».  Ils  répondirent  que  non,  puis  ils  calmè- 
rent  ses   inquiétudes    et  son    irritation    en    protestant    qu'ils 

wi  bâtard   d'Orléans   d'arrêter  le   duc   de  Bourgogne   (J.    Stevenson,  II, 
l'e  partie,  245). 

1.  Il  y  était  le  22  juin  (Fr.  8819,  f»  56). 

2.  H  y  avait  alors  grande  mortalité  à  Poitiers  (Xi»  9194,  f»  52). 

3.  Le  1er  juin,  \q  roi  est  à  Amboise  avec  La  Trémoille  (Fr.  25710,  n»  76"! . 
Le  3  juin  1433,  Charles  VII  (à  Amboise)  ordonne  de  payer  (sur  l'aide  der- 
nièrement levé  en  Poitou  pour  la  vidange  des  Bretons)  15  000  1.  au  sire  de  La 
Trémoille,  en  remboursement  de  pareille  somme  qu'il  a  dépensée  «  pour 
le  fait  et  vuidange  desdiz  Bretons  »  (K  63,  n»  27).  Des  ambassadeurs  bour- 
guignons revenant  d'Angleterre  en  France  écrivaient,  le  18  juillet,  qu'ils 
avaient  entendu  dire  que,  depuis  huit  jours,  La  Trémoille  n'était  plus  au- 
près de  Charles  VII,  et  que  le  comte  de  Kichemont  y  devait  venir.  (J.  Ste- 
venson, II,  1"  partie,  245). 

4.  D'Argentré,  791.  Le  Baud,  483. 

5.  Gruel,  200. 

6.  Voir  Cougny,  Notice  sur  le  château  de  Chinon,  édit.  de  1874,  p.  33, 
36-37.  Vallet  de  V.,  Charles  VU,  t.  II,  305.  J.  Bouchet,  les  Annales  d'Aqui- 
taine, Poictiers,  1644,  gr.  in-4°.  p.  250-251.  Il  est  à  remarquer  que  les  au- 
teurs contemporains  attribuent  à  Ch.  d'Anjou  et  non  à  Richement  l'enlè- 
vement de  La  Trémoille  (J.  Chartier,  I,  170-172  ;  Monstrelet,  V,  73-74). 


CONSÉQUENCES  DE  CET  ÉVÉNEMENT  201 

n'avaient  agi  que  dans  son  intérêt  et  pour  le  bien  du  royaume. 
Il  semble  incroyable  que,  dans  cette  circonstance,  Charles  VII 
n'ait  pas  fait  acte  d'autorité  pour  secourir  un  ministre  qui  lui 
était  si  cher;  mais  il  faut  pourtant  bien  croire  qu'il  ne  donna 
aucun  ordre  pour  le  délivrer,  ou  qu'il  ne  fut  pas  obéi.  Cepen- 
dant on  emmenait  La  Trémoille  au  château  de  Montrésor,  qui 
appartenait  à  J.  de  Bueil  *.  Il  y  resta  prisonnier  jusqu'à  ce  qu'il 
eût  pris  l'engagement  de  payer  à  son  neveu  4000  moutons  d'or, 
de  rendre  toutes  ses  places,  de  ne  plus  venir  à  la  cour,  de 
renoncer,  en  un  mot,  à  toute  ingérence  dans  le  gouvernement. 
Charles  VII  n'oublia  pas  son  ancien  ministre;  il  lui  accorda 
encore,  comme  à  Louvet,  bien  des  libéralités,  mais  il  ne  le  rap- 
pela pas  dans  ses  conseils  2.  Le  règne  de  La  Trémoille  était  fini; 
le  rôle  de  Richement  allait  bientôt  recommencer. 

Dans  les  Etats  monarchiques,  ces  révolutions  de  palais  ont 
souvent  de  grandes  conséquences;  celle-ci  en  eut  d'incalculables, 
et,  bien  qu'elles  n'aient  pas  échappé  aux  historiens,  peut-être  ne 
les  ont-ils  pas  encore  fait  assez  ressortir.  La  Trémoille  ne  pou- 
vait maintenir  son  autorité  qu'en  continuant  de  faire  beaucoup 
de  mal  par  ses  intrigues,  par  son  égoïsme,  par  ses  querelles  avec 
le  connétable  et  avec  la  maison  d'Anjou  ;  son  éloignement  lais- 
sait la  place  libre  à  ceux  qui  voulaient  et  pouvaient  relever  la 
France  '.  Il  n'y  avait  pas  à  compter  sur  lui  pour  faire  la  paix 
avec  le  duc  de  Bourgogne,  et  là,  encore  une  fois,  était  le  seul 
moyen  de  salut.  A  ce  moment  même,  Philippe  le  Bon  avait  à 
Londres,  où  se  trouvait  aussi  Bedford  *,  des  ambassadeurs  qui 
demandaient,  ou  la  conclusion  de  la  paix  avec  la  France,  ou  de 
nouveaux  secours  pour  continuer  la  guerre  contre  Charles  VII, 
puisque  les  trêves  n'étaient  pas  observées.  Il  conseillait  au  gou- 
vernement anglais  de  gagner  les  principaux  seigneurs  de  France, 
en  leur  donnant  des  terres  et  de  l'argent  ;  il  se  chargeait  d'agir 
lui-même  auprès  d'Amédée,  duc  de  Savoie,  et,  le  7  juillet,  le 
cardinal  de  Winchester,  au  nom  de  Henri  VI,  priait  Philippe  le 
Bon  de  bien  vouloir  «  toujours  entretenir  les  besoignes  entre  les 
ducs  de  Savoie  et  de  Bretaigne  et  le  comte  de  Richemont  et 

1.  Anselme,  IV,  165  A.  Montrésor,  arrondissement  de  Loches. 

2.  Le  31  juillet  1433,  le  comte  de  Foix  fait  encore  payer  à  Louvet 
BOO  moutons  d'or  (voir  Portef.  Font.,  117-118,  à  la  date).  Par  lettres  du 
26  septembre  1435,  Charles  VII  conserve  à  La  Trémoille  ses  appointements 
{Anselme,  IV,  165;  J  475,  n»  91).  Même  après  sa  disgrâce,  La  Trémoille 
commit  encore  de  grands  abus  et  était  très  redouté  [X^'  20,  f»  60;  Clai- 
ramb.,120,  f»  9149;  X2*  21,  au  l"  février  1436  [a.  st.];  X2»  23,  f»»  19  v,  20). 

3.  De  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II,  291. 

4.  Le  chancelier,  L.  de  Lu.\embourg,  évêque  de  Thérouenne,  gouvernait 
en  l'absence  de  Bedford  (X»«  8605,  f»  23  v). 


202  CH.  d'anjou  remplace  la  trémoille  (1433) 

y  faire  le  mieux  possible,  pour  le  bien  du  roi  *.  »  Peu  après, 
des  négociations  entre  Charles  VII  et  les  Anglais  étaient  rom- 
pues ^.  D'autre  part,  le  duc  d'Orléans,  fatigué  de  sa  longue  cap- 
tivité, s'employait  avec  ardeur  au  rétablissement  de  la  paix.  Il 
répondait  aux  ambassadeurs  bourguignons  que  «  les  ducs  de 
Bourgogne  et  de  Bretagne  y  pouvoient  plus,  après  les  parties 
principales,  que  prince  qui  vive  ».  Il  voulait  s'entendre  avec 
Philippe  le  Bon  et  avec  Jean  V.  Pour  recouvrer  sa  liberté,  il  était 
prêt  à  tout,  même  à  trahir  Charles  YII  et  la  France,  même  à  se 
reconnaître  vassal  de  Henri  VI  ^.  Il  avait  déjà  négocié  le  mariage 
de  son  frère,  le  comte  d'Angoulême,avec  Jeanne  de  Rohan  *,  fille 
d'Alain  IX,  nièce  de  Jean  V  et  de  Richemont,  pour  avoir  l'appui 
de  la  Bretagne;  des  ambassadeurs  bretons,  qui  étaient  aussi  à 
Londres,  travaillaient  à  sa  délivrance  ^;  enfin  il  protestait  de 
son  amitié  pour  le  duc  de  Bourgogne  et  proposait  de  lui  écrire. 
Toutes  ces  complications  pouvaient  avoir  des  résultats  fu- 
nestes pour  la  France.  N'était-il  pas  à  craindre,  par  exemple, 
que  Richemont,  las  d'être  en  butte  aux  persécutions  de  La  Tré- 
moille, ne  finît  par  accepter  les  offres  du  gouvernement  anglais? 
que  le  duc  d'Orléans  n'essayât  d'accomplir  ses  dangereux  des- 
seins, et  que,  par  cette  union  de  l'Angleterre  avec  les  plus  puis- 
santes maisons  de  France,  Charles  VII  ne  fût  réduit  à  se  con-^ 
tenter  d'un  simple  apanage  dans  le  royaume  de  Henri  VI  ?  Certes 
la  chute  de  La  Trémoille  ne  suffisait  pas  à  écarter  tous  ces 
périls,  mais  elle  allait  permettre  à  Yolande,  à  Richemont  et  à 
leurs  amis  d'employer  librement  tous  les  moyens  propres  à  les 
surmonter  *.  Charles  d'Anjou  remplaça  La  Trémoille  auprès  de 
Charles  VII  et  jouit  bientôt  de  toute  sa  faveur.  Dirigé  par  sa 
mère,  soutenu  par  sa  sœur,  la  reine  de  France,  il  put,  malgré 
sa  jeunesse,  rendre  des  services  '. 

1.  J.  Stevenson,  II,  l"""  partie,  2il  (Lettre  de  H.  de  Lannoi  et  autres  ambasr 
sadeurs  bourguignons  à  Piiilippe  le  Bon  et  réponses  de  Henri  VI,  p.  218-262). 

2.  Le  Bourgeois  de  Paris,  II,  294. 

3.  J.  Stevenson,  II,  !'«  partie,  241  et  suiv.  Voir  le  traité  conclu  par  L. 
d'Orléans  avec  Henri  VI,  le  14  août  1 433  (Rymer,  IV,  4"  partie,,  p.  197-199  ; 
de  Beaucourt,  Charles  VU,  II,  463). 

4.  Anselme,  IV,  p.  57  A.  —  Jeanne  de  Rohan  avait  donné  procuration  à 
Richemont  et  à  Jacq.  de  Dinan,  seigneur  de  Montafilant.  pour  traiter  de 
son  mariage.  Le  traité  de  mariage  fut  conclu  le  30  décembre  1432,  mais  le 
mariage  n'eut  pas  lieu  {Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col,  12o4-12o5, 
1237).  J.  d'Angoulême  épousa,  en  1449,  Marguerite  de  Rohan,  sœur  de 
Jeanne  (Anselme,  IV,  57). 

5.  J.  Stevenson,  ibid. 

6.  De  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II,  48-49.  Le  comte  de  Pardiac  et  La 
Fayette  reparurent  bientôt  à  la  cour  (Fr.  23710,  n°'  79  et  81). 

7.  A  en  croire  G.  Tringant,  qui  exprime  sans  doute  en  cela  l'opinion  de 


YOLANDE  RECOUVRE   SON   INFLUENCE   (1433)  203 

En  somme,  ce  fut  Yolande  qui  prit  la  direction  du  gouverne- 
ment. Dans  les  Etats  de  Languedoil,  réunis  à  Tours  (août-octo- 
bre '),le  chancelier  de  France,  Regnault  de  Chartres,  qui  n'avait 
point  partagé  la  disgrâce  de  La  Trémoille,  désavoua  haute- 
ment son  ancien  collègue,  en  présence  du  roi,  pour  approuver 
Gh.  d'Anjou,  J.  de  Bueil,  Prigent  de  Goëtivy  et  P.  de  Brézé,  qui 
assistaient  à  cette  séance  *.  On  peut  affirmer  que  cette  solen- 
nelle approbation  fut  ratifiée  par  les  Etats  et,  pour  mieux  dire, 
par  la  France  entière.  On  comprit  que  c'était  le  commencement 
d'une  ère  nouvelle  et  que  les  plus  mauvais  jours  étaient  passés^. 

J.  de  Bueil,  Ch.  d'Anjou  «  n'avoit  rien,  fors  qu'il  estoit  de  grant  maison 
du  sang  royal  »  (Ms.  3059,  f»  119  v»,  à  l'Arsenal). 

1.  Ces  Etats  (août-octobre  1433)  octroyèrent  au  roi  40  000  1.  (voir  K  63, 
no»  29  et  36;  Fr.  26037,  n»»  2191,  2233,  2246;  Fr.  26039,  n»  2432;  Fr.  20886, 
n»  113). 

2.  J.  Chartier,  I,  171. 

3.  «  Grâce  à  Dieu,  le  règne  des  intrigants  et  des  traîtres  était  fini  ;  Char- 
les VII  s'appartenait  enfin  (de  Beaucourt,  t.  II,  298).  Désormais  il  est  en- 
touré de  serviteurs  intègres  et  dévoués.  »  {Idem,  p.  299.) 


QUATRIÈME  PARTIE 

LES    ANNÉES    FÉCONDES 
1435-1458 


CHAPITRE  PREMIER 

LE     TRAITÉ     d'aRRAS     (1435) 

Richemont  assiste  aux  funérailles  de  la  duchesse  de  Bretagne.  —  II  va 
dans  le  Maine  pour  soutenir  le  due  d'Alençon  et  Amb.  de  Loré.  —  La 
journée  de  Sillé.  —  Le  connétable  rentre  en  grâce  auprès  de  Char- 
les VII.  —  Il  arrête  un  plan  de  campagne  pour  obliger  le  duc  de  Bour- 
gogne à  faire  la  paix.  —  États  de  Vienne.  —  Campagne  de  Richemont 
dans  la  Picardie,  la  Champagne  et  le  Barrois.  —  Il  conclut  une  trêve 
de  six  mois  avec  Philippe  le  Bon,  réprime  les  brigandages  des  routiers 
et  oblige  Robert  de  Sarrebrûck  à  se  soumettre  à  René  d'Anjou.  —  Le  duc 
de  Bourgogne  se  montre  disposé  à  la  paix.  —  Richemont  se  rend  aux 
conférences  de  Nevers,  où  est  décidé  le  congrès  d'Arras.  —  Rôle  de 
Richemont  au  congrès  d'Arras.  —  Les  Anglais  rejettent  les  propositions 
de  Charles  VII,  mais  le  duc  de  Bourgogne  fait  la  paix.  —  Traité  d'Ar- 
ras. —  Mort  de  Bedford.  —  La  guerre  continue  avec  l'Angleterre. 

Le  connétable  n'essaya  pas  de  reparaître  à  la  cour  aus- 
sitôt après  l'enlèvement  de  La  Trémoille  ;  il  jugea  prudent 
d'attendre  que  ses  amis  eussent  atténué  l'aversion  qu'il  inspi- 
rait au  roi.  Il  se  rendit  à  Vannes,  pour  assister  aux  obsèques 
de  sa  belle-sœur,  Jeanne  de  France,  femme  de  Jean  V,  qui  était 
morte  le  20  septembre  1433  *.  C'était  là  un  malheur  doublement 
déplorable,  car  cette  princesse,  sœur  de  Charles  VII,  servait  en 
Bretagne  les  intérêts  de  la  France.  Richemont  se  proposait  d'aller 
ensuite,  vers  le  15  octobre,  à  Calais,  où  devaient  se  tenirde  nouvel- 
les conférences  pour  la  paix, sous  lamédiation  de  Ch.  d'Orléans; 
mais  ces  conférences  n'eurent  pas  lieu  *.  Les  négociations  de- 

\.  Anselme,  I,  455.  Gruel  (p.  199)  place  un  an  trop   tôt  la  mort  de  la 
duchesse  de  Bretagne. 
2.  Dans  le  traité  du  14  août  (voy.  ci-dessus,  p,  202,  note  3),  le  duc  d'Or- 


206  AMBROISE  DE  LORÉ  A   SAINT-CÉNERI   (1433) 

valent  être  reprises  à Bâle,  sous  la  médiation  du  concile,  qui  était 
réuni  dans  cette  ville  depuis  le  mois  de  mai  1431. 

En  attendant,  la  guerre  continuait  de  tous  côtés,  au  nord  contre 
Willoughby  ^  et  le  comte  d'Arondel  ^,  au  sud  contre  le  duc  de 
Bourgogne,  qui  reprenait  Avallon  le  20  octobre  '.  Le  régent  avait 
envoyé  en  Normandie  *  et  dans  le  pays  de  Gaux  des  renforts 
considérables,  malgré  les  difficultés  croissantes  qu'il  trouvait  à 
obtenir  des  subsides  du  parlement  ^. 

Au  mois  de  décembre  1433,  le  comte  d'Arondel  assiégeait  l'im- 
portante forteresse  de  Saint-Céneri  '',  qui  bravait  depuis  long- 
temps tous  les  efforts  des  Anglais.  Le  duc  d'Alençon  en  avait 
confié  la  garde  à  Ambroise  de  Loré,  qui,  de  là,  inquiétait  sans 
cesse  les  places  voisines,  Fresnay,  Alençon,  harcelait  les  garni- 
sons ennemies  et  leur  infligeait  de  fréquentes  défaites  ''. 

Plusieurs  fois  déjà,  les  Anglais  avaient  essayé  de  prendre  Sainl- 
Céneri.  L'année  précédente,  Willoughby  en  avait  encore  fait  le 
siège  sans  plus  de  succès  ^.  Le  comte  d'Arondel  ne  voulait 

léans  avait  stipulé  qu'on  ferait  venir  à  Calais  là  reine  de  Sicile,  Ch.  d'Anjou, 
Jean  V,  Artur  et  Richard  de  Bretagne,  le  duc  d'Alençon,  etc.  Le  13  août, 
Henri  VI  donne  des  sauf-conduits  aux  personnes  ci-dessus  désignées  (Rymer, 
IV,  4°  partie,  p.  197-199;  Moreau  705,  p.  145-146).  Le  duc  de  Bretagne  fit 
tout  son  possible  pour  que  la  conférence  eût  lieu,  mais  il  ne  réussit  pas 
(D.  Lobineau,  I,  594;  D.  Morice,  I,  519;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  182-183). 

1.  Rob.  de  Willoughby  était  lieutenant  du  roi  et  du  régent  sur  lé  fait 
de  la  guerre  eiltre  les  rivières  de  Seine,  Oise,  Somme  et  la  mer  (K  63, 
n»  242). 

2.  Jean,  c.  d'Arondel,  seigneur  de  Mautravers,  lieutenant  de  Henri  VI 
entre  la  Seine,  la  Loire  et  la  mer  (K  63,  n»»  243  et»;  jj  175_,  n"  233;  Fr. 
26036,  n"2032,  2131,  2134,  2140,  2146,  et  Fi-.  25770,  n"  T36). 

3.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  183.  Le  bâtard  d'Orléaris  avait  été  envoyé  en 
Champagne  [Pièces  orig.,  t.  364,  dossier  Blanchet,  7869,  n"  36). 

4.  Il  y  eut  encore  une  tentative  pour  livrer  Rouen  et  Dieppe  aux  Fran- 
çais (Fr.  26056,  n"  2000  et  2062).  Sur  la  guerre  en  Normandie,  voir  :  JJ 
173,  n»'  2^3,  276;  Fr.  26056,  n»s  2007,  2010,  2011,  2028-2032.  Fr.  26037, 
n"'  2067,  2074-75,' 2086-2093,  2101,  21i7,  2131,  2134,  2140,  2146,  2190;  Fr. 
26060,  n»  2735;  Fr.  25771,  n»»  817-823. 

3.  Ilsoudoie,pour4mois,  1600  h.  sous  le  comte  de  Saint-Pol,  pour  repren- 
dre Saint-Valery;  il  envoie  1200  h.  sous  le  comte  de  Huntington  en  Basse- 
Normandie,  900  h.  sous  le  comte  d'Arondel.  Voir  la  réponse  de  Henri  VI  et 
du  conseil  d'Angleterre  aux  ambassadeurs  de  Bourgogne,  ap.  J.  Stevenson, 
t.  II,  p.  249-262.  Voy.  aussi,  sur  la  prise  de  Saint-Valery,  JJ  175,  n"''  250-237. 

6.  Canton  ouest  d'Alençon.  Fr.  26056,  n»  2201. 

7.  Fr.  26056,  n»  2201.  Append.,  LVHI.  J.  Chartier,  t,  147,  150-134.  Voir 
aussi,  sur  Loré,  Nie.  Gilles,  édit.  gothique  de  1320,  2'  vol.,  f°»  90,  92,  93,  94. 

8.  J.  Chartier,  I,  110,  118,  134,  140.  Fr.  11342,  f»  21.  Chron.  du  Mont- 
Saint-Michel,  I,  33,  et  note  3.  —En  1431, pendant  qu'ils  assiégeaient  Saint- 
Céneri,  Loré  les  avait  battus  à  Vivoin,  près  de  Beaumonl-sur-Sarthe,  ar- 
rondissement de  Mamers  (Cagny,  ap.  Duchesne,  48,  f  124;  Ms.  3059,  fll9, 
à  la  bib.  de  l'Arsenal). 


LES  ANGLAIS  ASSIÈGENT   SILLÉ-LE-GUILLAUME   (1434)  207 

pas  s'exposer  à  un  nouvel  échec.  Bien  pourvu  d'artillerie,  de 
munitions,  de  troupes*,  il  poussa  le  siège  avec  la  plus  grande 
activité.  Loré  ne  montrait  pas  moins  d'ardeur  à  défendre  une 
forteresse  qui  était  sa  principale  place  d'armes,  la  résidence  de 
sa  femme  et  de  ses  enfants;  mais,  abandonné  à  ses  seules  forces, 
il  devait  infailliblement  succomber. 

Richemont,  sollicité  par  le  duc  d'Alençon,  résolut  d'aller  se- 
courir ce  vaillant  capitaine,  qui  leur  avait  rendu  service  à  tous 
deux,  lors  du  siège  de  Pouancé  *.  Il  réunit  à  Saumur  les  troupes 
dont  il  disposait  et  se  mit  en  marche,  avec  le  duc  d'Alençon. 
Malheureusement,  ce  secours  venait  trop  tard.  Le  connétable 
et  son  neveu  n'étaient  pas  encore  à  moitié  chemin,  quand  ils 
furent  informés,  à  Durtal  ^,  que  le  comte  d'Arondel  avait  fait 
capituler  Saint-Géneri  ''  (1434.  janvier), Ils  revinrent  à  Saumur,  où 
ils  apprirent  bientôt  que  le  comte  d'Arondel  était  allé  assiéger 
Sillé-le-Guillaume",  petite  ville  assez  mal  fortifiée,  et  que  Aimeri 
d'Anthenaise,  lieutenant  du  sire  de  Bueil,  s'était  engagé,  en  don- 
nant des  otages,  à  livrer  cette  place  s'il  n'était  pas  secouru  avant 
six  semaines.  D'après  cette  convention ,  les  Anglais  devaient 
rendre  les  otages  si,  au  jour  fixé,  les  Français  se  trouvaient 
près  d'un  orme,  dans  une  lande  voisine  de  Neuvillalais  ",  et  s'ils 
étaient  les  plus  forts. 

Le  connétable  résolut  de  paraître,  avec  des  forces  imposantes, 
à  cette  journée,  moins  pour  délivrer  Sillé-le-Guillaume  que  pour 
inaugurer  par  une  grande  démonstration  militaire  la  reprise  de 
son  commandement.il  se  rendit  à  Parthenay  ^  (février  1434),  pen- 
dant que  le  duc  d'Alençon  et  les  autres  seigneurs  allaient  chercher 
de  leur  côté  toutes  les  troupes  qu'ils  purent  trouver.  Deux  jours 
avant  l'expiration  du  délai  convenu,  toute  une  armée  se  trouva 

i.  Voir  Append.,  LVIII.  G.  Rygmayden,  lieutenant  d'Alençon,  Jean  Sal- 
vain,  bailli  de  Rouen,  vinrent  aider  le  comte  d'Arondel  à  ce  siège  (Fr.  23771, 
n»'  810,  831  et  849);  le  bailli  de  Cotentin,  les  troupes  d'Essai  (Fr.  26057, 
n»*  2222,  2233),  le  bailli  de  Gaen,  Guill.  Breton  (id.,  n"  2225  et  2226)  y  vin- 
rent aussi. 

2.  Voy.  ci-dessus,  p.  187-188. 

3.  Arrondissement  de  Baugé. 

4.  Sur  le  siège  de  Saint-Géneri,  voir  Append.,  LVIII,  et  Fr.  26057,  nos  2222, 
2225,  2226,  2227,  2233.  Le  siège  fut  terminé  avant  le  26  janvier  (n"  2227),  J. 
Chartier,  I,  134-137.  Berry,  387.  Gruel,  200.  Fr.  26038,  n»  2336.  Les  Anglais 
démolirent  ensuite  Saint-Géneri  et  d'autres  forteresses  prises  également 
par  le  comte  d'Arondel,  comme  Houdan^  Montfort-l'Amaury,  Rambouillet, 
Bonsmoulins.  Fr.  23771,  n»«  817-823  et  848-853,  858,  860,  861.  Fr.  26037, 
n"  2227,  2229,  2231,  2232,  2243,  2233,  2254.  Fr.  26038,  n"  2268. 

5.  Arrondissement  du  Mans. 

6.  Arrondissement  du  Mans;  canton  de  Gonlie;  non  loin  de  Sillé. 

7.  Il  y  était  le  22  février  (Fr.  8819,  f»  48  v»). 


208  LA  JOURNÉE   DE   SILLÉ    (1434) 

réunie  à  Sablé  K  La  reine  Yolande  y  avait  envoyé  son  fils, 
Charles  d'Anjou,  avec  les  gens  de  la  maison  du  roi  qui  avaient 
voulu  le  suivre.  Les  sires  de  Bueil,  de  Brézé,  de  Coëtivy,  de 
Ghaumont,  le  vicomte  de  Thouars,  récemment  sorti  de  sa  pri- 
son *,  avaient  répondu  à  l'appel  du  connétable,  qui  amenait  les 
maréchaux  de  Raiz  et  de  Rieux,le  sire  de  Rostrenen  et  plusieurs 
chevaliers  et  écuyers  de  Bretagne  et  du  Poitou. 

Partie  de  Sablé,  cette  armée  campa,  le  lendemain  soir,  près  de 
l'endroit  où  devait  avoir  lieu  la  rencontre.  Le  connétable  prit 
les  plus  sages  mesures  pour  faire  reposer  ses  troupes  en  sécurité 
pendant  la  nuit.  Avant  l'aube,  à  la  lueur  des  torches,  il  les  con- 
duisit sur  le  champ  de  bataille.  Au  soleil  levant,  l'armée  française 
était  rangée  en  bon  ordre  près  d'une  petite  rivière.  Les  maré- 
chaux de  Raiz  et  de  Rieux  commandaient  l'avant-garde  ;  une 
des  ailes  était  conduite  par  le  sire  de  Bueil,  l'autre  par  le  vidame 
de  Chartres  ^  Le  connétable,  le  duc  d'Alençon,  Charles  d'Anjou 
étaient  au  centre  avec  le  sire  de  Lohéac  et  d'autres  seigneurs  qui 
les  avaient  rejoints  au  passage.  Les  Anglais,  au  nombre  d'en- 
viron 8000  combattants,  étaient  établis  en  belle  ordonnance  au 
delà  de  la  rivière.  Le  comte  d'Arondel  les  commandait.  Pendant 
de  longues  heures,  les  deux  armées  s'observèrent,  immobiles, 
sans  oser  s'attaquer.  Ch.  d'Anjou  pria  Richemont  de  lui  con- 
férer la  chevalerie,  et,  comme  celui-ci,  modestement,  lui  disait 
qu'il  valait  mieux  la  demander  au  duc  d'Alençon,  le  jeune  prince 
déclara  qu'il  ne  la  voulait  tenir  que  du  connétable.  Après  avoir 
reçu  cette  dignité,  Ch.  d'Anjou  fit  à  son  tour  beaucoup  d'autres 
chevaliers,  notamment  les  sires  de  Bueil,  de  Coëtivy,  de  Chau- 
mont,  tandis  que  le  connétable  conférait  le  même  honneur  à 
divers  officiers  de  sa  maison  *. 

Enfin  les  Anglais,  quittant  les  premiers  la  lande  du  grand 
Orme,  se  retirèrent  dans  un  village  voisin,  où  ils  se  fortifièrent. 
Comme  ils  n'avaient  pas  été  les  plus  forts  avant  l'heure  de  midi, 


1.  Arrondissement  de  La  Flèche. 

2.  D.  Morice,  I,  519.  Cet  élargissement  eut  lieu  après  une  conférence  que 
La  Trémoille  eut,  à  Nantes,  avec  le  chancelier  de  Bretagne,  P.  Eder,  Ro- 
bert d'Espinay,  et  où  il  fut  parlé  du  mariage  des  demoiselles  de  Laval  et 
d'Etampes  avec  les  fils  de  La  Trémoille  et  du  sire  d'Albret  (D.  Lobineau,  I, 
597).  La  Trémoille  fit  ensuite  promesse  de  bon  et  loyal  service  au  duc  de 
Bretagne,  en  faveur  du  mariage  accordé  entre  Yolande  de  Laval  et  son  fils, 
Jean  de  La  Trémoille.  L'original  est  aux  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  57, 
E  144,  avec  signature  et  sceau  de  G.  de  La  Trémoille.  En  septembre  1434, 
Charles  VII  restitua  au  vicomte  de  Thouars  ses  biens  confisqués  (X<>  8604, 
f«  122). 

3.  Jean  de  Vendôme  (H.  de  Lépinois,  Hist.  de  Chartres,  II,  614). 

4.  Voy.  Gruel,  200. 


RICHEMONT  RENTRE  EN  GRACE  (1434,   AVRIL)  209 

le  connétable  les  fit  sommer  de  rendre  les  otages,  qu'ils  renvoyè- 
rent aussitôt  Ml  tint  ensuite  un  conseil  de  guerre,  pour  examiner 
s'il  fallait  attaquer  les  ennemis.  Tout  le  monde  fut  d'avis  qu'il  y 
aurait  imprudence  à  tenter  une  pareille  aventure,  car  ils  occu- 
paient une  forte  position,  dans  le  voisinage  de  plusieurs  places  qui 
leur  appartenaient,  tandis  que  les  Français  n'avaient  que  Sablé, 
éloigné  d'environ  dix  lieues.  D'ailleurs  les  vivres  manquaient,  car 
on  n'en  avait  apporté  que  pour  trois  jours.  Quant  à  la  ville  de 
Sillé-le-Guillaume,  «  qui  ne  valait  rien,»  Richemont  voulait  qu'on 
l'abandonnât,  qu'on  y  mît  le  feu  et  qu'on  fit  couper  la  tête  à 
Aimeri  d'Anthenaise,  pour  le  punir  d'avoir  capitulé.  Beaucoup 
furent  de  cette  opinion,  excepté  le  sire  de  Bueil.Il  protesta  contre 
un  arrêt  aussi  cruel  et  promit  que  son  lieutenant  défendrait  bien 
cette  place.  L'armée  revint  alors  à  Sablé.  Aussitôt  après,  les  An- 
glais attaquèrent  de  nouveau  la  ville  de  Sillé  ;  ils  donnèrent  l'as- 
saut le  9  mars,  et  le  comte  d'Arondel  reçut  les  habitants  à  com- 
position le  12.  Cette  perte  fut  largement  compensée  par  l'honneur 
d'avoir  offert  la  bataille  aux  ennemis,  «  car  il  n'estoit  de  mémoire 
d'homme  qu'à  une  journée  assignée  les  Français  fussent  compa- 
rus jusques  à  ce  jour^.» 

Le  connétable  put  ensuite  se  présenter  à  la  cour.  Ses  amis 
étaient  parvenus  à  calmer  le  ressentiment  du  roi,  qui  lui  fit  bon 
accueil  '.  Il  semble  que  dès  lors,  par  une  sorte  de  convention 
tacite,  le  roi  et  le  connétable  aient  résolu  de  vivre  en  bonne  in- 
telligence, l'un  en  dominant  son  antipathie,  l'autre  en  montrant 
moins  d'exigences  et  de  rudesse. 

On  prit  aussitôt  des  résolutions  importantes  qui  attestent  une 
direction  nouvelle  et  un  plan  arrêté.  Il  fut  convenu  que  Char- 
les VII  irait  dans  le  Dauphiné,  tenir  les  Etats  de  cette  province 
(car  on  avait  grand  besoin  d'argent)  et  rassembler  des  troupes 
pour  menacer  le  Charolais,  tandis  que  le  duc  de  Bourbon 
et  le  seigneur  de  Châteauvilain  attaqueraient  aussi  les  domaines 
du   duc   de  Bourgogne.  Quant   au   connétable,  il   fut  chargé 

1.  La  journée  de  Sillé  est  rappelée  dans  les  registres  JJ  185,  f»  204,  n'295, 
et  JJ  187,  f"  153,  n»  286. 

2.  Gruel,  201.  Fr.  25711,  n»  843;  JJ  175,  no  360.  J.  Charticr,  I,  165,  169  ; 
Berry,  387.  Martial  d'Auvergne,  I,  137. 

3.  On  ne  sait  oii  celte  réconciliation  eut  lieu.  Gruel  (p.  201)  dit  que 
Richemont  vit  le  roi  avant  son  départ  pour  Lyon  et  Vienne.  Au  moment 
de  la  journée  de  Sillé,  Charles  VII  était  à  Montluçon  le  8  mars  (K  63,  n*  32), 
à  Montfaucon  en  Auvergne  le  18  mars;  le  l*'  avril  à  Vienne;  en  avril  et 
mai  à  Vienne  (voy.  Fr.  25710,  n"*  80-86).  Le  roi  se  rendit  à  Vienne  (Berry, 
p.  387)  par  Le  Puy  et  probablement  par  Lyon.  C'est  peut-être  au  Puy  que 
le  connétable  alla  le  voir.  En  tout  cas,  Richemont  était  à  Vienne  dès  le  6 
ou  le  7  avril,  et  il  était  encore  à  Sablé  le  12  mars. 

Richemont.  14 


210      ON  ARRÊTE   UN  PLAN   DE   CAMPAGNE  A  VIENNE   (1434,   AVRIL) 

d'aller,  avec  le  bâtard  d'Orléans,  au  delà  de  la  Seine,  pour  se- 
courir le  pays  et  les  bonnes  villes,  tant  contre  les  ennemis,  c'est- 
à-dire  contre  les  Anglo-Bourguignons  ^,  que  contre  «  les  gens  du 
roy  »,  c'est-à-dire  contre  les  routiers.  Tout  en  combattant  Phi- 
lipe  le  Bon  sur  divers  points,  en  Picardie,  dans  la  Bourgogne  et 
le  Charolais,  on  devait  faire  de  nouvelles  tentatives  auprès  de 
lui,  auprès  d'Amédée  VIII,  pour  négocier  un  traité  définitif,  et  la 
guerre  ne  devait  être  qu'un  moyen  de  hâter  la  conclusion  de  la 
paix  *.  Tel  est  l'esprit  dans  lequel  Richemont  allait  entreprendre 
cette  campagne.  Il  suivait  avec  plus  d'ardeur  que  jamais  cette 
politique,  dont  il  avait  pris  l'initiative  dès  1425,  avec  la  reine  de 
Sicile.  Cette  princesse  devait  seconder  les  opérations  militaires 
par  une  diplomatie  féconde  en  ressources. 

Une  fois  ce  plan  arrêté,  la  cour  se  rendit  à  Vienne,  où  les  Etats 
de  Languedoc  et  ceux  du  Dauphiné  devaient  se  réunir^.  Il  y  eut 
là,  pendant  les  mois  d'avril,  de  mai,  de  juin,  une  réunion  bril- 
lante *  et  des  fêtes  comme  les  aimait  le  jeune  roi,  mais  elles  ne 
firent  point  oublier  les  intérêts  politiques.  Les  cardinaux  d'Arles 
et  de  Chypre  ^,  ambassadeurs  du  concile  de  Bâle,  la  reine  de 
Sicile,  son  fils  Charles  d'Anjou,  Charles  de  Bourbon,  devenu  ré- 
cemment duc,  par  la  mort  de  sorr  père,  le  connétable,  le  bâtard 
d'Orléans,  le  maréchal  de  La  Fayette,  Gaucourt,  l'amiral  de  Cu- 
lant,  Christophe  d'Harcourt,  Hugues  de  Noyers  et  d'autres  con- 
seillers '^  de  Charles  VII  purent  examiner  ensemble  les  questions 
qui  les  préoccupaient.  Le  concile  faisait,  comme  le  pape,  de  cons- 
tants efforts  auprès  des  rois  de  France  et  d'Angleterre,  pour  ré- 
tablir la  paix  générale.  La  réponse  de  Charles  VII  aux  cardi- 
naux fut  très  bienveillante  ''  ;  mais  ce  qu'on  voulait  surtout,  ce 

1.  Ceux-ci  se  préparaient  également  à  la  guerre  (voir  Hist.  de  Bourgogne^ 
IV,  cxxxvii  et  9ui\.,  cxu-cxuii). 

2.  Le  connétable  était  toujours  en  relations  avec  le  duc  de  Bourgogne 
(de  Beaucourt,  Charles  VU,  II,  p.  306,  note  2). 

3.  V.  D.  Vaissète,  IV,  482,  et  Preuves,  p.  438-439.  Voir  aussi  les  Etats  gé- 
néraux sous  Charles  VU,  par  A.  Thomas,  dans  le  Cab.  hist.,  t,  24,  année 
1878. 

4.  "Du  moins  une  partie  de  juin,  car,  dans  ce  mois,  Charles  VII  alla  aussi 
à  Lyon  et  à  Saint-Symphorien-d'Auzon  (Fr.  23710,  n»  86,  et  Fr.  20877,  n»  34; 
D.  Marlène,  Amplissima  Collectio,  VIII,  719-720). 

5.  L.  Aleman,  archev.  d'Arles,  cardinal  de  Sainte-Cécile,  -|-  1430  (Gallia 
christ.  I,  382-584,  615).  —  Hugues  de  Lusignan,  fils  de  Jacques  I"  de  Lusi- 
gnan,  roi  de  Chypre,  de  Jérusalem  et  d'Arménie  (Art  de  vérifier  les  dates, 
1,  466). 

6.  Tous  ces  noms  sont  dans  des  lettres  datées  de  Vienne  et  citées  par 
D.  Vaissète  (t.  IV,  p.  482).  Voir  aussi  Fr.  23710,  n"  81-85.  Fr.  20877,  n»  34. 
Fr.  20385,  n»  1.  M.  Canat,  p.  342,  et  Ordonn.  XIII,  194-204.  De  Smet, 
Chron.  de  Flandre,  III,  418.  Berry,  387. 

7.  Le  10  juin,  Charles  VII  écrit  au  concile  de  Bâle  qu'il  est  prêt  à  faire 


LES  ÉTATS  DE  VIENNE   (1434)  211 

n'était  point  la  paix  avec  les  Anglais,  car  on  savait  que  leurs 
exigences  la  rendraient  impossible  ;  c'était  la  réconciliation  avec 
le  duc  de  Bourgogne.  René  d'Anjou,  sur  les  conseils  de  sa  mère, 
alla  voir  ce  prince,  pour  sonder  ses  intentions,  et  se  rendit  en- 
suite à  Vienne,  auprès  du  roi,  puis  à  Ghambéry  \  où  se  trouvaient 
alors  le  duc  de  Savoie  et  sa  fille  Marguerite,  femme  du  jeune  roi 
de  Naples,  Louis  III  d'Anjou.  Secondé  par  sa  belle-sœur,  René 
sut  gagner  Amédée  VIII,  bien  que  ce  dernier  fût  irrité  contre  le 
duc  de  Bourbon,  qui  refusait  de  lui  rend  re  hommage  pour  cer- 
tains fiefs  *. 

Amédée  VIII  consentit  à  reprendre  son  rôle  de  médiateur  et 
exhorta  encore  Phifippe  le  Bon  à  faire  la  paix  avec  Char- 
les VII'.  René  conduisit  ensuite  à  Vienne  sa  belle-sœur,  la  reine 
de  Naples.  Elle  reçut  un  accueil  empressé  à  la  cour.  Le  roi  donna 
une  fête  en  son  honneur  et  dansa  longuement  avec  elle.  Le  con- 
nétable, qui  était  rentré  complètement  en  grâce,  prit  part  à  ces 
réjouissances,  et  ce  fut  lui  qui  présenta  les  épices  au  roi  de  France 
et  à  la  reine  de  Naples^. 

Cependant  les  Etats  de  Languedoc  avaient  voté  une  aide  de 
170  000  moutons  d'or,  ceux  du  Dauphiné  une  aide  de  30000  flo- 
rins ^.  Avec  ces  ressources, ^on  pouvait  continuer  la  guerre.  Le 

la  paix  {Amplissima  Collectio,  VIII,  719-720),  Le  concile  s'adressa  aussi  au 
roi  d'Angleterre  (Rymer,  V,  l'»  partie,  p.  9,  10,  12,  15). 

1.  René  d'Anjou  avait  déjà  vu  les  ducs  de  Bourgogne  et  de  Savoie  à 
Chambéry,  en  février,  lors  du  mariage  du  comte  de  Genève,  fils  aîné  d'Amé- 
dée  VIII,  avec  Anne,  fille  du  roi  de  Chypre  et  nièce  du  cardinal.  Il  est  pro- 
bable que  le  cardinal  de  Chypre  avait  profité  de  son  séjour  à  Chambéry 
pour  remplir  sa  mission  de  médiateur  (Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  87-97). 
En  tout  cas,  Amédée  VIII  avait  écrit  à  Bedford  et  continué  ses  démarches 
auprès  de  PhiUppe  le  Bon  (de  Beaucourt,  Charles  VU,  t.  II,  p.  506-508.) 

2.  Le  duc  de  Bourbon  opposait  le  même  refus  au  duc  de  Bourgogne 
pour  d'autres  fiefs.  Amédée  VIII  et  Philippe  le  Bon  s'étaient  même  alliés 
le  12  février,  à  Chambéry,  pour  contraindre  le  due  de  Bourbon  à  leur  ren- 
dre hommage  (M.  Canat,  p.  340). 

3. T.  99  delà  Coll.  de  Bourgogne,  f»'  410416.  Lecoy  de  La  M.,  t.  I,  105-107. 

4.11  était  certainement  à  Vienne  le  6  ou  le  7  avril  et  le  4  mai  (voy.  Fr.  25710, 
n»  85),  avec  le  duc  de  Bourbon,  le  maréchal  de  La  Fayette,  l'amiral  de 
Culant,  le  sire  de  Gaucourt,  etc.  Voy.  aussi  D.  Vaissète,  IV,  p.  482.  Berry,387. 
Martial  d'Auvergne,  I,  138-139.  Le  roi  écrivit,  le  26  avril,  aux  habitants  de 
Lyon,  pour  réclamer  le  payement  d'une  ancienne  créance  du  connétable 
(de  Beaucourt,  Charles  Vil,  II,  304,  note  2).  C'était  annoncer  par  là  même 
son  retour  en  grâce. 

5.  D.  Vaissète,  IV,  p.  482,  et  Preuves,  p.  438-39.  Fr.  20417,  n»  H.  Fr, 
25710,  n»  86.  Portef.  Fontanieu,  117-118,  aux  dates  du  19  mai  et  du  l*-"  juin. 
Fr.  20877,  n»  34,  et  K  63,  n»  37.  R.  de  Gaucourt  reçut  3  000  florins  pour 
payer  les  troupes  qu'il  devait  conduire  au  secours  du  duc  de  Bourbon  et 
du  sire  de  Châteauvillain  contre  le  duc  de  Bourgogne  (K  63,  n»  37;  Portef, 
Fontanieu,  117-118,  au  26  septembre). 


212  CAMPAGNE  DE  RICHEMOMT  EN  PICARDIE   (1434) 

connétable  eut  spécialement  sous  sa  charge  300  hommes  d'ar- 
mes et  GOO  hommes  de  trait  ^  Ainsi  réconcilié  avec  le  roi,  il  prit 
congé  de  lui  et  revint  à  Parthenai  pour  lever  ses  troupes  et  se 
préparer  à  la  campagne  qu'il  allait  commencer  MI  apprit  alors 
que  Talbot,  envoyé  par  Bedford  dans  l'Ile-de-France,  avait  obligé 
La  Hire  à  évacuer  Beaumont-sur-Oise  '  et  attaqué  la  ville  de 
Greil,  où  le  frère  de  La  Hire  avait  été  tué  *  (juin).  Richemont  ne 
put  partir  assez  tôt  pour  sauver  Greil,  car  il  dut  attendre  au 
moins  trois  semaines  à  Blois  le  bâtard  d'Orléans,  qui  avait  été 
chargé  de  réunir  200  hommes  d'armes  et  300  hommes  de  trait  ". 
Il  se  dirigea  ensuite,  avec  le  bâtard  d'Orléans,  le  maréchal  de 
Rieuxet  le  chancelier  de  France,  vers  Gompiègne,  en  passant  par 
Orléans,  Melun,Lagny  et  Senlis,  dont  lecapitaine  était  Alain  Giron. 
Pendant  qu'il  était  à  Gompiègne  (août)  *,  Saintrailles  et  La 
Hire  vinrent  lui  demander  deux  cents  lances,  avec  les  archers, 
pour  ravitailler  et  dégager  Laon,  où  ils  étaient  serrés  de  près 
par  les  troupes  de  Jean  de  Luxembourg  ^  qui  tenaient  toutes  les 
places  du  voisinage  et  même  le  mont  Saint- Vincent,  à  un  trait 
d'arc  de  la  ville.  Le  connétable  envoya  au  secours  de  Laon 
Gilles  de  Saint-Simon  et  Jamet  de  ïillay.  Ces  deux  capitaines 
s'attendaient  à  rencontrer  l'ennemi  près  d'Assis-sur-Serre  *  ; 
mais  ils  purent  s'avancer  en  toute  liberté.  Après  avoir  fait  capi- 

1.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1267. 

2.  Richemont  était  alors  en  procès  avec  J.  de  Rochechouart,  seigneur  de 
Mortemart,  au  sujet  d'une  rente  de  200  1.  t.  sur  Châtelaillon,  réclamée 
p^ar  ce  seigneur.  Le  connétable  obtint  un  délai,  en  opposant  des  lettres 
d'Etat  (Xi"  9200,  i»  243  v). 

3.  Arrondissement  de  Pontoise.  Fr.  260S7,  n»  2243.  Fr.  26058,  n»'  2331, 
2287.  JJ  173,  nos  312,  313,  348.  La  capitulation  de  Beaumont  fut  conclue 
avec  Talbot  le  14  juin,  par  Georges,  bâtard  de  Seneterre,  et  ratifiée  par 
Henri  VI  le  28  juin.  Le  roi  d'Angleterre  créa  Talbot  comte  et  lui  donna  le 
comté  de  Clermont  en  Beauvoisis,  en  récompense  de  ses  services  (JJ  173, 
n?  318). 

4.  Voy.  Portef.  Fontanieu,  117-118,  à  la  date  du  28  juin,  et  Fr.  25771, 
n"  872.  Gruel  appelle  Amadoc  ce  frère  de  La  Hire  (Gruel,  201).  Greil,  arron- 
dissement de  Senlis. 

5.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1267.  Le  bâtard  d'Orléans  avait 
peut-être  levé  des  troupes  en  Bretagne.  Le  18  juin,  il  fait  alliance  avec  le 
vicomte  de  Rohan  {Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II,  col.  1263).  Jeanne,  fille 
d'Alain  IX,  vicomte  de  Rohan,  avait  été  promise  à  Jean,  comte  d'Angou- 
lême  en  1432  (Anselme,  IV,  p.  57  A,  et  ci-dessus,  p.  202). 

6.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  313,  note  1. 

7.  Jean  II  de  Luxembourg,  comle  de  Ligny,  frère  de  P.  de  Luxembourg, 
comte  de  Saint-Pol  (-f-  le  31  août  1433,  après  avoir  repris  aux  Français 
Saint-Valery),  et  de  L.  de  Luxembourg,  chancelier  de  France  pour  Henri  VI. 
C'est  ce  J.  de  Luxembourg  qui  avait  pris  J.  d'Arc  à  Gompiègne  (Anselme, 
III,  723-26;  Pièces  orig.,  t.  1778,  dossier  Luxembourg,  n"  40;  JJ  175,  n»  356). 

8.  Arrondissement  de  Laon. 


LES  FRANÇAIS  PRENNENT  HAM  (1434)  213 

tuler  Saint- Vincent  en  accordant  à  ceux  qui  l'occupaient  un  sauf- 
conduit  du  connétable,  ils  ravitaillèrent  Laon  et  firent  des  courses 
sur  les  pays  qui  obéissaient  à  Philippe  le  Bon.  Celui-ci  venait 
alors  de  Picardie  avec  3  000  hommes.  Il  passa  tout  près  des  lieu- 
tenants de  Richemont,  à  Crécy-sur- Serre  *  (7  août)  :  mais  il  ne 
les  poursuivit  pas,  et  il  continua  sa  route  vers  la  Bourgogne, 
pour  aller  combattre  le  duc  de  Bourbon  *. 

A  ce  moment,  le  connétable  apprit  qu'il  y  avait  grand  danger 
de  perdre  Beauvais.  LaHire  commandait  dçins  cette  ville.  C'était 
un  vaillant  capitaine,  mais  aussi  un  pillard  redoutable,  qui  s'était 
fait  détester  par  son  caractère  violent  et  cruel.  Les  habitants  se 
révoltaient  contre  lui,  et  les  Anglais,  qui  occupaient  Verberie  ', 
Greil,  Beaumont,  profitaient  de  son  embarras  pour  venir  l'atta- 
quer. Richemont,  laissant  à  Compiègne  le  chancelier,  le  bâtaM 
d'Orléans  et  le  maréchal  de  Rieux,  alla  lui-même  à  Beauvais,  où 
il  rétablit  promptement  le  bon  ordre.  Revenu  à  Compiègne,  il 
rappela  les  troupes  qu'il  avait  envoyées  à  Laon  et  les  diri- 
gea sur  Ham  *,  qui  appartenait  au  duc  de  Bourgogne  (septem- 
bre). Le  connétable  les  suivit  de  près,  avec  le  bâtard  d'Orléans,  le 
maréchal  de  Rieux,  Saintrailles,  La  Hire,  Blanchefort  et  le  gros 
de  son  armée,  car  il  savait  que  Jean  de  Luxembourg  n'était 
pas  loin. 

Quand  ils  arrivèrent  à  Ham,  la  ville  et  le  château  étaient  déjà 
pris  d'assaut  par  l'avant-garde  ^,  et  ils  trouvèrent  leurs  loge- 
ments tout  préparés.  Richemont  délivra  les  prisonniers,  excepté 
ceux  qui  étaient  Anglais  ou  au  service  de  l'Angleterre,  et  il 
fit  rendre  aux  habitants  de  la  ville  la  moitié  de  leurs  biens.  !1 
épargna  aussi  les  marches  de  Picardie,  malgré  le  mécontente- 
ment des  capitaines  et  des  soldats,  qui  ne  comprenaient  pas  la 
guerre  sans  pillage.  II  laissa  seulement  le  bâtard  d'Orléans  faire 
une  course  jusqu'à  Chauny  ^,  où  il  rencontra  Jean  de  Luxem- 
bourg quand  il  croyait  n'avoir  affaire  qu'à  ceux  de  la  ville .  Il  y 
eut  là  «  une  belle  escarmouche  ». 

Le  bâtard  et  La  Hire  soutinrent  le  choc  avec  leur  vaillance 
habituelle.  Averti  par  eux,  le  connétable  s'avança  aussitôt  à  leur 
secours,  mais,  à  trois  lieues  de  Chauny,  il  les  trouva  qui  revenaient 
en  bon  ordre,  sans  avoir  rien  perdu.  Il  conclut  alors  (17  septem- 

1.  Arrondissement  de  Laon. 

2.  11  arriva  le  13  août  à  Dijon  (M.  Ganat,  p.  258,  et  Itinéraire  de  Philippe 
le  Bon,  ibid.,  p.  489;  de  Smet,  Chron.  de  Flandre,  III,  p.  418-419;  Gruel,  201). 

3.  Arrondissement  de  Senlis. 
"4.  Arrondissement  de  Péronne. 

5.  Martial  d'Auvergne,  I,  139. 

6.  Arrondissement  de  Laon. 


214  TRÊVE  DE  HAM  (4434,  47  septembre) 

bre)  une  trêve  de  six  mois  avec  le  comte  d'Etampes,  lieutenant 
du  duc  de  Bourgogne  ^  Il  rendit  Ham  à  Jean  de  Luxembourg,  à 
condition  que  celui-ci  payerait  60  000  saints,  qu'il  empêcherait 
Bruyère  *,  Aulnois  '  et  autres  places  voisines  de  faire  la  guerre  à 
la  ville  de  Laon,  et  que  Blanchefort  évacuerait  Breteuil  ■'.  Si  le 
connétable  montrait  tant  de  modération,  c'est  que  «  toujours  il 
taschoit  et  désiroit  faire  la  paix  entre  le  roy  et  Mgr  de  Bourgon- 
gne  ^.  »  Philippe  accepta  volontiers  cet  arrangement  et  fit  déli- 
vrer la  somme  convenue.  Richemont  s'en  servit  pour  payer  ses 
gens  d'armes,  il  partagea  ce  qui  restait  aux  capitaines  et  sei- 
gneurs de  son  armée,  ne  gardant  pour  lui  que  1500  saluts.  Il 
retourna  ensuite  à  Compiègne  ®. 

De  là,  il  se  rendit  à  Reims  et  parcourut  la  Champagne,  faisant 
partout  prompte  justice  des  pillards  et  larrons  qui  désolaient 
cette  province  ''.  Près  de  Troyes,  il  réduisit  à  capituler,  en  moins 
de  deux  jours,  une  place  dont  la  garnison  faisait  beaucoup  de  mal 
dans  le  pays  *.  Il  nettoya  ensuite  les  environs  de  Châlons  et  alla 
lui-même  assiéger  la  ville  de  Maure  *,  que  tenaient  les  Anglais. 
En  trois  jours  il  réduisit  celte  place  à  se  rendre,  puis  il  fît  le  siège 
de  Hans  *",  René  d'Anjou  se  trouvait  alors  tout  près  de  là,  dans 
les  environs  de  Sainte-Menehould.  Sur  son  invitation,  le  con- 
nétable alla  le  voir  et  revint,  dès  le  lendemain,  s'emparer  de 
Hans,  11  continua  sa  route  par  Vitry-en-Perthois  **,  fit  encore  ca- 
pituler une  petite  place  que  les  ennemis  fortifiaient  près  d'Arzil- 
lières  **  et  retourna  aussitôt  à  Châlons,  où  il  fit  pendre  un  capi- 
taine de  routiers,  nommé  H.  Bourges,  qui  s'avoua  lui-même 
coupable  des  excès  les  plus  odieux. 

A  Châlons,  il  vit  arriver  Robert  de  Sarrebruck  ^^  damoiseau  ou 

1.  Voy.  Append.,  LIX. 

2.  Arrondissement  de  Laon. 

3.  Arrondissement  de  Laon. 

4.  Arrondissement  de  Clermont  (Oise). 

5.  Gruel,  202.  Monstrelet  (t.  V,  93-96}  dit  aussi  :  «  Et  la  cause  pour  quoy 
lesdîz  traictiés  furent  conduis  en  doulceur,  si  fut  l'espérance  de  venir  à 
paix  finable  entre  le  roy  Charles  de  France  et  le  duc  de  Bourgogne  ».  Les 
mêmes  considérations  sont  formellement  exprimées  dans  le  traité  qui  sti- 
pule la  trêve  de  six  mois  (voy.  Append.,  LIX). 

6.  De  Smet,  Chron.  de  Flandre,  III,  419. 

7.  Ed.  de  Barthélémy,  Hist.  de  Châlons,  p.  184.  Il  avait  sans  doute  avec 
lui  Tristan  Lermite,  qu'il  avait  nommé  prévôt  des  maréchaux  (Fr.  20684, 
fo  662,  el  Bib.  de  l'Ec.  des  chartes,  t.  XXXIII,  p.  76). 

8.  Gruel,  202.  Il  ne  donne  pas  le  nom  de  cette  place. 

9.  Gruel,  202.  Maure,  arrondissement  de  Vouziers. 

10.  Canton  de  Sainte-Menehould. 
.  H.  Aujourd'hui  Vitry-le-François. 

12.  Arrondissement  de  Vitry-le-François. 

13.  Sur  Rob.  de  Sarrebruck,  voir  Anselme,  VIII,  533. 


RICHEMONT   DANS   LA    CHAMPAGNE   ET   LE   BARROIS  215 

seigneur  de  Commercy,  qui  était  alors  en  guerre  avec  René  d'An- 
jou \  les  Messins  et  le  comte  de  Vaudemont.  Sous  prétexte  de  ser- 
vir Charles  VII,  Robert  exerçait  de  grands  ravages  sur  les  ter- 
ritoires voisins.  René  d'Anjou  et  les  Messins,  alliés  contre  lui, 
assiégeaient  alors  sa  ville  deCommery,  pendant  que  le  comte  de 
Vaudemont  attaquait  une  autre  de  ses  places  -.  Le  connétable 
envoya  Saintrailles,  La  Hire  et  Gilles  de  Saint-Simon,  avec  400 
lances,  au  secours  du  damoiseau  contre  le  comte  de  Vaudemont, 
qui  tenait  le  parti  de  Bourgogne  et  d'Angleterre.  Ils  chassèrent 
les  gens  du  comte  de  Vaudemont,  délivrèrent  la  place  assiégée,  et 
après  avoir  ravagé  le  comté  de  Ligny-èn-Barrois,  occupé  par 
les  Anglais,  ils  s'en  retournèrent  à  Ghâlons. 

Pendant  ce  temps,  le  connétable  avait  déterminé  René  d'An- 
jou et  les  Messins  à  lever  le  siège  de  Commercy,  sous  certaines 
conditions  acceptées  par  eux,  dans  une  entrevue  à  Châlons,  le 
6  septembre  1434  ^  Robert  de  Sarrebruck  s'en  remit  à  l'arbitrage 
de  Richemont  et  de  l'archevêque  de  Reims.  Il  signa  le  19  octo- 
bre, à  Vitry,  le  compromis  conclu  par  eux  avec  René  d'Anjou  et 
les  Messins  et  laissa  son  fils  en  otage  au  roi  de  Sicile*.  Le  conné- 
table croyait  cette  affaire  terminée,  quand  il  apprit,  à  Vitry-en- 
Perthois,  que  le  damoiseau  refusait  d'obéir  au  duc  de  Bar  et  de 
tenir  ses  engagements.  Sur  les  plaintes  de  René  d'Anjou,  il  fit 
arrêter  Robert  de  Sarrebruck  ^  et  le  donna  en  garde  à  Gilles  de 
Saint-Simon  et  à  Guillaume  Gruel,  puis  il  le  fît  élargir,  à  con- 
dition qu'il  ne  s'éloignerait  point  sans  y  être  autorisé. 

Un  jour,  comme  le  connétable  jeûnait,  on  lui  fit  observer  que 
le  damoiseau,  qui  se  trouvait  auprès  de  lui,  ne  jeûnait  pas.  Ri- 
chemont lui  dit  alors  d'aller  souper.  «  Puisqu'il  vous  plaît,  avec 
votre  congé,  monseigneur,  »  répondit  le  damoiseau  et,  sautant 
surson  cheval,  qui  l'attendait  à  la  porte,  il  s'enfuit  à  Etrepy*,  puis 
à  Commercy.  Irrité  de  cette  félonie,  le  connétable  envoya  aussi- 
tôt 40  lances  à  la  poursuite  de  Robert,  et  il  partit  pour  assiéger 


i.  René  d'Anjou  avait  épousé,  en  1420,  Isabelle,  fille  de  Charles  l"', 
duc  de  Lorraine,  mort  en  1431.  René  était  alors  duc  de  Lorraine  et  de 
Bar. 

2.  Gruel  (p.  202)  appelle  cette  place  Nercy.  C'est  Narcy,  arrondissement 
de  Vassy. 

3.  Voir  la  cliron.  du  doyen  de  Saint-Thiébault  de  Metz  dans  D.  Galmet, 
Hist.  de  Lorraine,  II,  Preuves,  col.  ccxvui-xix. 

4.  D'après  le  doyen  de  SaintrThiébault,  Richeoïont  aurait  eu  20  000  saluts 
pour  avoir  ménagé  cet  arrangement  (D.Calmet,  11,788  elPreiivps,eo\.  ccxviii- 
ccxix.  Voir  aussi  Dumont,  Hist.  de  Commercy,  i3ar-le-t)uc,  1843,  iu-8,  t.  I, 
p.  232). 

3.  Probablement  à  Revigny  (Meuse,  arrondissement  de  Bar-le-Duc). 
6.  Arrondissement  de  Vitry-le-François. 


216  RICHEMONT  DANS  LE  BARROIS  (1434) 

Gommercy  avec  René  d'Anjou.  Alors  le  damoiseau  vint  trouver 
le  connétable,  fît  sa  soumission  et  jura  de  tenir  tous  ses  engage- 
ments envers  lui  et  envers  le  duc  de  Bar. 

En  se  dirigeant  vers  Saint-Mihiel  %  où  était  René  d'Anjou,  le 
connétable  apprit  que  les  Anglais,  qui  tenaient  garnison  à  Ligny  *, 
s'étaient  avancés  jusqu'à  Bar-le-Duc  et  ravageaient  tout  le  pays 
voisin.  Il  détacha  10  lances  pour  les  arrêter  et  s'avança  lui-même 
dans  le  Barrois.  Ses  éclaireurs  rencontrèrent  les  Anglais  comme 
ils  revenaient  à  Ligny,  traînant  après  eux  des  chariots  chargés  de 
butin.  A  la  vue  des  gens  du  connétable,  les  ennemis,  quoique 
bien  supérieurs  en  nombre,  prirent  la  fuile,  laissant  là  tous  leurs 
bagages.  Les  Français  les  poursuivirent  jusqu'aux  portes  de 
Ligny,  puis  ils  allèrent  à  Bar  et  à  Saint-Mihiel,  où  les  attendait 
René  d'Anjou.  C'est  là  que  le  damoiseau  de  Gommercy  vint  faire 
sa  soumission  au  duc  de  Bar  (14  décembre)  '.  On  était  au  milieu 
de  décembre  ;  l'hiver  était  très  froid  ;  les  chevaux  avaient  grand'- 
peine  à  marcher  sur  les  chemins  couverts  de  neiges  et  de  glaces. 
Néanmoins  Saîntrailles  et  Gilles  de  Saint-Simon,  après  avoir  ral- 
lié en  passant  la  petite  troupe  qui  était  à  Saint-Mihiel,  firent  une 
course  devant  Metz,  pour  rançonner  le  pays  (décembre  et  janvier). 
Plusieurs  de  ces  routiers  furent  pris  ou  tués  ;  mais  Saîntrailles, 
après  avoir  exercé  de  cruels  ravages,  ramena  un  grand  butin. 
On  ne  s'explique  pas  comment  Richemont,  qui  réprimait  ordi- 
nairement les  excès  des  gens  de  guerre,  permit  cette  incursion 
sur  le  territoire  d'une  ville  alliée  de  René  d'Anjou.  Saîntrailles 
s'autorisait  des  ordres  du  connétable,  ce  qui  n'empêcha  pas  plu- 
sieurs des  gens  d'armes  de  murmurer  quand  ils  virent  la  guerre 
qu'il  leur  faisait  faire  *. 

Après  cette  course,  ils  allèrent  retrouver,  dans  le  Barrois,  le 
connétable,  qui  avait  pris,  par  composition,  la  place  d'Epense  ^. 
Le  15  décembre,  il  était  à  Ghâlons,  où  il  délia  le  damoiseau  de 
ses  engagements  antérieurs,  à  la  prière  de  René  d'Anjou  ^. 


i.  Arrondissement  de  Gommercy. 

2.  Arrondissement  de  Bar-le-Duc. 

3.  Collect.  de  Lorraine,  t.  294,  n»  21. 

4.  Gruel,  203.  D.  Calmet,  II,  Preuves,  col.  ccxix. 

5.  Arrondissement  de  Sainte-Menehould, 

6.  Voy.  Append.,  LX.  Cette  campagne  de  Richemont  en  1434  est  racontée 
par  Gruel  avec  une  abondance,  une  exactitude  et  une  précision  de  détails 
qu'on  chercherait  vainement  ailleurs.  On  voit  qu'il  y  a  pris  part.  Son  récit 
est  confirmé,  sur  tous  les  points  essentiels,  soit  par  des  documents  authen- 
tiques, soit  par  les  chroniqueurs,  soit  par  les  historiens  (voy.  D.  Morice,  I, 
521,  qui  ne  raconte  pas  d'ailleurs  toute  cette  campagne;  D.  Lobineau,I,  601, 
qui  donne  plus  de  détails;  D.  Calmet,  t.  II,  p.  782-788,  et  les  Preuves  déjà 
indiquées;  le  t.  226  de  la  collect.  de  Lorraine,  n»  9;  Monstrelet,  t.  V,  p.  95, 


GUERRE  ET  NÉGOCIATIONS    (1434)  217 

Durant  cette  campagne  du  connétable,  la  guerre  s'était  faite 
aussi  à  l'ouest  entre  le  comte  d'Arondel,  Charles  d'Anjou,  le 
duc  d'Alençon,  Ambroise  de  Loré  ;  au  sud ,  entre  le  duc  de 
Bourgogne,  le  duc  de  Bourbon,  les  sires  de  Gaucourt  et  de 
Château villain  *.  Malgré  quelques  succès,  comme  la  prise  de 
Grancey  *  (15  août),  de  Chaumont^  et  de  Belleville  *  (septem- 
bre), Philippe  le  Bon  n'était  pas  sans  inquiétude  sur  l'issue  de 
cette  lutte.  Trop  peu  secondé  par  les  Anglais,  il  n'était  point 
soutenu  par  le  duc  de  Savoie,  qui,  au  lieu  de  lui  fournir  les 
secours  promis  par  le  traité  de  Chambéry  (du  12  février  1434), 
l'engageait  à  faire  la  paix  avec  le  duc  de  Bourbon  ;  le  roi  appe- 
lait contre  lui  la  noblesse  du  Midi  ^  ;  enfin  il  était  menacé  par 
l'empereur  Sigismond,  qui  s'était  prononcé  en  faveur  de  René 
d'Anjou  et  avait  fait  alliance  avec  Charles  VII  ^.  Sans  tenir 
compte  des  plaintes  et  des  reproches  de  Philippe  ',  Amédée  VIII 
avait  conclu  la  paix  avec  le  duc  de  Bourbon  (21  novembre  1434), 
et  il  offrait  avec  insistance  sa  médiation  pour  ménager  un 
accommodement  entre  les  deux  beaux-frères.  Enfin  le  duc  de 
Bourgogne  entra  dans  la  voie  où  Richemont  le  voulait  amener 
depuis  si  longtemps  *.  Il  fit  un  premier  pas  en  signant  une  trêve 
à  Pont-de-Veyle  ^  avec  le  duc  de  Bourbon  (4  décembre).  Il  fut 
convenu  qu'ils  auraient  une  conférence  à  Nevers,  pour  arriver 

111;  J.  Chartier,  1, 175-177;  De  Smet,  Chroniques  de  Flandre,  t.  III,  418-419  ; 
la  chronique  d'Adrien  de  Buts,  un  contemporain,  dans  la  Collect.  des  chro- 
niques belges  de  M.  Kervyn  de  Letlenhove,  I,  239-240;  l'Abrégé  chronol.  du 
règne  de  Charles  VII,  ap.  Godefroy,  p.  337-338  ;  Berry,  ibid.,  p.  388  ;  Lecoy 
de  La  Marche,  René  d'Anjou,  I,  p.  109-111,  G.-E.  Dumont,  Hist.  de  Corn- 
mercy,  Bar-le-Duc,  1843,  in-8,  t.  I,  p.  228-232i. 

1.  Sur  la  guerre  avec  les  Anglais,  voir  K  63,  n<"  34,  34^,  37;  Fr.  26038, 
n«s  2273,  2323,  2334,  2340,  2331,  2356,  2394,  2418.  Portef.  Fontanieu,  117-118, 
à  la  date  du  21  décembre.  JJ  173,  n»  333.  Le  8  septembre,  Henri  VI  donna 
au  comte  d'Arondel  le  duché  de  Tou raine  et  des  terres  en  Normandie,  en 
récompense  de  ses  services  (JJ  175,  n*  366).  Sur  la  guerre  contre  le  duc 
de  Bourgogne,  voir  M.  Canat,  p.  338-361. 

2.  Arrondissement  de  Dijon. 

3.  Ghaumont-la-Guiche  (arrondissement  de  Gharolles),  qui  avait  été  prise 
par  Rod.  de  Villandrando,  beau-frère  du  duc  de  Bourbon,  dont  il  avait 
épousé  une  sœur  bâtarde  (J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando,  p.  90, 109). 

4.  Arrondissement  de  Villefranche. 

5.  Les  comtes  de  Foix,  de  Gomminges,  d'Armagnac,  d'Astarac,  etc.  (D. 
Vaissète,  IV,  482). 

6.  T.  99  de  la  collect.  de  Bourg.,  f-  392-399.  J.  186^,  àladate  du  17  juin 
1434,  f»  21.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  482483. 

7.  Voir  ses  instructions  du  2  Juin  à  ses  envoyés  (t.  99  de  la  coll.  de  Bourg. , 
f.8  410-416). 

8.  Pendant  cette  campagne  de  1434,  Richemont  était  toujours  en  rela- 
tions avec  le  duc  de  Bourgogne  (de  Beaucourt,  t.  II,  514,  not^  1). 

9.  Arrondissement  de  Bourg  (Ain). 


218  CONFÉRENCES   DE   NEVERS    (1435) 

à  une  entente  définitive.  Le  concile,  le  pape,  les  ducs  de  Bre- 
tagne ^  et  de  Savoie  sollicitaient  toujours  le  duc  de  Bourgogne 
de  se  prêter  à  la  conclusion  de  la  paix  générale.  Le  27  décembre, 
les  ambassadeurs  bourguignons  déclarèrent  au  concile  que  Phi- 
lippe cédait  à  ses  instances  ^. 

Richemont  apprit  ces  nouvelles  avec  la  plus  vive  joie.  Bientôt 
il  reçut  des  lettres  de  ses  beaux-frères,  les  ducs  de  Bourgogne 
et  de  Bourbon,  qui  l'invitaient  à  venir  auprès  d'eux  à  Nevers.  Il 
passa  quelques  jours  à  Troyes  ^,  «  pour  faire  justice  et  mettre 
police  au  pays  *,  »  puis  il  alla  voir,  à  Dijon,  la  duchesse  de 
Bourgogne,  qui  le  reçut  avec  de  grands  honneurs  (janvier)  ^. 
De  là,  par  Beaune,  Autun,  Decize,  il  se  rendit  à  Nevers.  Il  y 
trouva  le  duc  de  Bourgogne,  le  duc  et  la  duchesse  de  Bourbon, 
qui  lui  firent  l'accueil  le  plus  cordial.  Les  conférences  étaient 
commencées  depuis  le  20  janvier.  Le  duc  de  Bretagne,  le  roi  de 
France  y  avaient  aussi  envoyé  leurs  ambassadeurs,  le  chan- 
celier, archevêque  de  Reims,  Christ,  de  Harcourt,  le  maréchal  de 
La  Fayette  ^.  Déjà  un  traité,  conclu  à  Nevers,  avait  terminé  le 
différend  entre  le  duc  de  Bourbon  et  le  duc  de  Bourgogne.  Ce 
traité  fut  signé  par  Richemont  le  5  février  et  par  les  deux  autres 
princes  le  lendemain  '',  mais  il  restait  beaucoup  plus  à  faire. 

Il  fallait  maintenant  décider  Philippe  le  Bon  à  se  réconcilier 
avec  Charles  VII.  Le  connétable,  secondé  par  le  duc  et  la 
duchesse  de  Bourbon,  fut  enfin  assez  heureux  pour  réussir  dans 
ces  importantes  négociations.  Comme  Philippe  ne  voulait  pas 
traiter  sans  le  roi  d'Angleterre,  il  fut  bien  spécifié  qu'on  s'effor- 
cerait de  faire  la  paix  générale.  C'était  là  d'ailleurs  le  désir  et 
l'intention  de  Charles  VII  ;  ses  ambassadeurs  le  répétaient  ;  il 


1.  Jean  V  avait  aussi  envoyé  des  ambassadeurs  à  Henri  VI,  pour  l'enga- 
ger à  faire  la  paix  (Moreau,  705,  f-*  133-142). 

2.  Sur  la  guerre  avec  le  duc  de  Bourgogne  et  les  négociations,  voir": 
Amplissima  Collectio,  VIII,  785-786  ;  Inventaire  des  arch.  de  la  Gôte-d'Or, 
t.  I,  27,  253;  t.  II,  39,  61,  62  et  71,  et  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando, 
p.  103-113,  et  pièces  justifie,  p.  247;  Hist.  de  Bourgcgne,  IV,  189-193,  et 
Preuves,  cxlui-cxlvi;  CoUect.  de  Bourgogne,  t.  99,  f"»  402-423;  M.  Canat, 
258-260  et  338-362;  D.  Calmet,  II,  col.  783-784  ;  Porfe/l  Fo}it.,  117-118,  au  26 
septembre;  K  63,  n"  37;  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  II,  p.  268,  287,  297, 303. 

3.  Le  13  janvier,  le  duc  de  Bourgogne  écrit  de  Moulins-Engilbert  au 
comte  de  Richemont  à  Troyes  (M.  Canat,  p.  364). 

4.  Gruel,  203. 

5.  De  Beaucourt,  Charles  Vil,  II,  514,  note  1,  à  la  fin.  Il  est  probable  que 
Richemont  était  encore  à  Dijon  le  25  janvier. 

6.  Les  conférences  devaient  avoir  lieu  à  Decize,  mais  on  préféra  Nevers. 
Ilist.  de  Bourg.,  IV,  195,  et  Preuves,  cxun-cxLV.  Porief.  Fontanieu,  117-118, 
au  12  janvier.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  303-304.  De  Beaucourt,  11^  515. 

7.  M.  Canat,  p.  361.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  Preuves,  cxlv-cxlyi. 


COÎNVENTION  AVEC  PHILIPPE  LE  BON    (1435,   6   FÉVRIER)        219 

avait  chargé  le  comte  de  Vendôme  d'en  informer  le  duc  de 
Bretagne,  qui  avait  écrit  au  duc  de  Bourgogne,  pour  joindre  ses 
instances  à  celles  de  son  frère  Artur.  Il  fut  donc  convenu  qu'il 
y  aurait  «  une  journée  »,  le  l"""  juillet,  à  Arras  ;  que  le  roi  de 
France  ferait  à  Henri  VI  «  des  offres  raisonnables  »  ;  que,  si  le 
roi  d'Angleterre  ne  voulait  pas  les  accepter,  le  duc  de  Bourgo- 
gne ferait  tout  son  possible,  son  honneur  sauf,  pour  s'entendre 
avec  Charles  VII.  On  alla  plus  loin  :  on  arrêta,  le  6  février,  les 
bases  d'un  traité  particulier,  par  lequel  Charles  VII  céderait  à 
Philippe  le  Bon,  dans  le  cas  où  celui-ci  se  séparerait  de  Henri  VI, 
les  villes  de  la  Somme,  le  Ponthieu,  Montreuil,  Doullcns,  Saint- 
Riquier,  avec  faculté  de  rachat,  moyennant  une  somme  de 
400000  écus  d'or,  payables  en  deux  fois,  par  moitié.  Il  fut  même 
question  d'un  mariage  entre  une  fille  du  roi  de  France  et  le  fils 
du  duc  de  Bourgogne,  Charles,  comte  de  Charolais,  qui  n'avait 
guère  qu'un  an  *.  Enfin,  il  fut  entendu  que  le  pape  et  le  concile 
seraient  invités,  comme  le  roi  d'Angleterre,  à  envoyer  leurs 
ambassadeurs  à  la  journée  d'Arras  et  que  le  duc  de  Bourbon  et 
le  comte  de  Richemont  y  représenteraient  le  roi  de  France  *. 

Après  avoir  ainsi  préparé  ce  grand  résultat,  qu'il  poursui- 
vait depuis  dix  ans,  la  réconciliation  de  Philippe  le  Bon  avec 
Charles  VII,  le  connétable  prit  congé  de  ses  beaux-frères,  pour 
revenir  à  la  cour.  Chemin  faisant,  il  apprit,  à  Dun-Ie-Roi,  qu'il 
y  avait  alors  à  Bourges  un  capitaine  de  routiers,  Jacques  de 
Pailly  ',  surnommé  Forte-Epice,  dont  il  avait  grandement  à 
se  plaindre.  Forte-Epice  avait  promis,  l'année  précédente,  de 
suivre  Richemont  en  Champagne,  avec  40  lances;  il  avait  même 
reçu  un  cheval,  de  l'argent  pour  lui  et  pour  ses  gens,  puis,  au 
moment  du  départ,  il  s'en  était  allé  d'un  autre  côté,  «  car  il  ne 
demandait  que  pillerie,  »  et  il  savait  bien  que  le  connétable  ne 
tolérait  pas  ces  déprédations  *.  Le  routier  eût  été  pendu,  si  les 


i.  Né  à  Dijon,  le  10  novembre  1433  [Hist.  de  Bourg.,  IV,  183). 

2.  Hist.  de  Bourg.,  IV,  193-195,  et  Preuves,  cxliii-cxlvi ;  Delpit,  Doc.  fran- 
çais, etc.,  251-252  (lettre  du  duc  de  Bourgogne):  le  t.  99  de  la  coll.  de  Bour- 
gogne, f"'  418-421  ;  Bréquigny,  81  (Moreau,  705),  f«  149-150;  Berry,  388,  et 
une  lettre  du  card.  de  Sainte-Croix  dans  le  Ms.  lat.  9868  (S.  F.  3031),  f  2  V; 
le  t.  III  des  Chron.  belges,  p.  149;  Monstrelet,  V,  107-109;  Lettre  de  Phi- 
lippe le  Bon,  en  date  du  16  mars,  aux  Pères  du  concile  de  Bdle,  dans  le 
t.  254  de  la  collection  Godefroy,f-  51  (à  la  biblioth.  de  l'Institut);  de  Beau- 
court,  II,  518  et  notes;  Append.,  LXI  (déposition  du  connétable). 

3.  Y\  f°  45  v.  On  trouve  rarement  le  vrai  nom  de  ce  routier  fameux. 

4.  Pendant  ce  temps,  il  avait  pris  au  duc  de  Bourgogne  Coulanges-la- 
Vineuse  (Yonne),  qu'il  ne  rendit  que  moyennant  une  forte  somme.  Dans 
le  Poitou  même,  les  gens  du  comte  de  Foix,  du  comte  d'Harcourt,  etc., 
commettaient  les  plus  graves  abus  (X^a  21,  au  4  janvier  1434,  a.  st.). 


220  ON   SE   PRÉPARE  AU  CONGRÈS  d'ARRAS 

habitants  de  Bourges  auxquels  il  avait  rendu  quelques  services, 
n'eussent  intercédé  en  sa  faveur'. 

Le  connétable  alla  ensuite  à  Tours,  où  il  trouva  le  roi  René, 
puis  à  Chinon,  où  était  alors  Charles  VII,  qui  lui  fit  bonne  chèi'e 
(2  mars)  '^.  Il  rendit  compte  des  négociations  qui  avaient  eu  lieu 
à.Nevers.  Il  fît  décider  que  le  roi  réunirait  à  Tours,  vers  Pâques, 
les  seigneurs  de  son  sang,  pour  délibérer  sur  la  journée  d'Arras 
et  arrêter  les  résolutions  qu'il  conviendrait  de  prendre.  Après 
avoir  passé  quelques  jours  à  Parthenay,  où  résidait  habituel- 
lement la  duchesse  de  Guyenne ,  il  revint  auprès  du  roi ,  à 
Tours.  Le  duc  de  Bourbon,  Charles  d'Anjou,  le  chancelier  de 
France,  le  comte  de  Vendôme,  l'archevêque  de  Vienne,  le  bâtard 
d'Orléans,  les  maréchaux  de  Rieux  et  de  La  Fayette,  les  sires 
de  Graville,  de  Gaucourt,  de  Bueil,  plusieurs  évêques  et  beau- 
coup d'autres  seigneurs  étaient  aussi  arrivés  à  la  cour.  Le  9  avril, 
Charles  VII  confirma  encore  une  fois  la  donation,  déjà  faite  au 
connétable,  des  terres  de  Parthenay,  Mervent,  Vouvant,  Le  Goul- 
dray-Salbart ,  Secondigny,  Ghâtelaillon ,  Matefelon,  etc.,  et 
ordonna  qu'on  lui  en  laissât  la  jouissance,  nonobstant  le  procès 
pendant  en  la  cour  du  Parlement  '. 

Le  roi  regrettait  maintenant  que  Richemont  eût  été  si  long- 
temps éloigné  de  lui  «  par  le  moyen  et  pourchaz  d'aulcuns  ses 
malveillans  »  ;  il  reconnaissait  hautement  ses  grands  services.  Le 
lendemain,  jour  des  Rameaux,  le  comte  de  Richemont  fit  hom- 
mage au  roi  pour  ces  seigneuries.  On  s'occupa  surtout  de  la 
journée  d'Arras,  du  choix  des  ambassadeurs  qui  devaient  accom- 
pagner le  duc  de  Bourbon  et  le  connétable,  des  opérations  mili- 
taires, qu'il  fallait  activer,  pour  donner  plus  de  poids  aux  négo- 
ciations. Le  duc  de  Bourgogne  se  trouvait  alors  à  Paris,  où  il  était 
toujours  très  populaire.  Les  Parisiens  le  supplièrent  de  faire  la 
paix,  et  il  encouragea  leurs  espérances  par  de  bonnes  promesses  *. 
Peu  après,  le  comte  de  Richemont  lui  écrivit  que  le  roi  acceptait 
la  journée  d'Arras.  Philippe  s'empressa  d'annoncer  cette  nou- 
velle aux  Parisiens.  En  même  temps,  il  envoya  une  ambassade 
en  Angleterre,  pour  informer  Henri  VI  de  ses  intentions,  comme 
il  en  avait  déjà  informé  le  Conseil  anglais  à  Paris  ^ 

1.  Gruel,  203-204. 

2.  Le  jour  de  carême  prenant,  d'après  Gruel  (p.  204),  c'est-à-dire  le  2 
mars,  Pâques  tombant  le  17  avril. 

3.  X»a  8604,  f<"  125  V,  126.  X'»  8605,  f»»  204  v»,  203.  Le  Parlement  fit, 
comme  il  arrivait  souvent,  des  difficultés  pour  entériner  les  lettres  du 
9  avril  (Xi»  9194,  f»  126  v). 

4.  Arrivé  à  Paris  le  jeudi  14  avril,  avec  la  duchesse  de  Bourgogne  et  le 
comte  de  Charolais,  il  en  partit  le  jeudi  21  avril  (Xi"»  1481,  f»  99  v). 

5.  Xia  1481,  f"  99  v\  Collect.  de  Bourgogne,  t.  99,  f<"  422-428;  Procee- 


GUERRE  ACTIVE   CONTRE   LES  ANGLAIS   (1435)  221 

Tout  en  négociant,  le  connétable  poussait  vivement  la  guerre 
contre  les  Anglais,  surtout  en  Normandie,  car  il  importait  de 
montrer  au  duc  de  Bourgogne  que  la  France  n'était  pas  encore 
abattue,  comme  ceux-ci  le  prétendaient  '.  Les  populations  de 
la  Normandie,  nobles  et  gens  du  commun,  s'insurgeaient  de  tous 
côtés  contre  la  domination  anglaise,  dans  le  Bessin,  dans  le  pays 
de  Caux,  et  le  duc  d'Alençon,  avec  Ambroise  de  Loré,  continuait 
de  guerroyer  dans  le  Cotentin  *. 

Le  bâtard  d'Orléans  fut  chargé  d'attaquer  la  Normandie  vers 
le  sud,  tandis  que  La  Hire  et  Saintrailles  faisaient  des  courses 
vers  le  pays  de  Caux  et  que  d'autres  troupes  étaient  dirigées  sur 
Paris.  Le  bâtard  d'Orléans  alla  prendre  Houdan  '  et  menacer 
Evreux  (mai-juin)*;  J.  de  Brézé,  lieutenant  du  maréchal  de 
Rieux,  s'empara  de  Rue  ^  et  du  Crotry  ^  avec  l'aide  d'un  brave 
officier,  Charles  des  Marets,  qui  jadis  avait  été  capitaine  de 
Dieppe  '  ;  La  Hire  et  Saintrailles,  envoyés  par  le  connétable  pour 
occuper  et  fortifier  Gerberoy  %  vainquirent,  près  de  là,  le  comte 
d'Arundel,  qui  fut  blessé,  pris,  et  mourut,  au  bout  de  quelques 
jours,  à  Beauvais^;  enfin,  dans  la  nuit  du  30  au  31  mai,  les 
capitaines  français  de  Melun  et  de  Lagny  entrèrent  par  surprise 

dings,  t.  IV.  préface,  p.  lxxxii;  Hist.   de  Bourg.,  IV,  196-197,  et  Preuves; 
Delpit,  Docum.  français,  etc.,  231-252. 

1.  Charles  VII  avait  renouvelé  son  alliance  avec  la  Castille  fX**  9193, 
fo  103  v).  De  son  côté,  le  duc  de  Bourgogne  avait  demandé  à  Henri  VI  l'en- 
voi d'une  puissante  armée  (coll.  de  Bourgogne,  t.  99,  f  «  422-428). 

2.  Les  insurgés  normands  assiègent  Caen  au  mois  de  janvier  (Fr.  26039, 
no"  2433  et  2445.  JJ  187,  f°  74).  Le  duc  d'AIençon  assiège,  en  février,  Avran- 
ches,  d'où  il  est  repoussé  par  le  comte  d'Arondel  et  Th.de  Scales  (Fr.  26059, 
no»  2438,  2465,  2469),  puis  il  va  se  joindre  aux  insurgés  du  Bessin,  pour 
ravitailler  le  Mont-Saint-Michel  (Fr.  26039,  n-  2468,  K  63,  n»  34i6).  Simon 
Morbier,  prévôt  de  Paris,  est  envoyé  contre  les  rebelles  du  Cotentin  (Fr. 
26039,  n"  2461  et  2462).  Les  Anglais  sont  chassés  de  la  bastille  d'Ardenon, 
et  la  garnison  du  Mont-Saint-Michel  fait  des  courses  ruineuses  dans  le  pays 
voisin  (Fr.  26059,  n"  2300).  Les  Français  menacent  Valognes  en  avril  (Fr, 
26039,  n°  2317).  Voir  aussi  L.  Puiseux,  Les  insurrections  populaires  en  Nor- 
mandie, Caen,  1831,  in-4. 

3.  Arrondissement  de  Mantes.  Martial  d'Auvergne,  I,  141. 

4.  Fr.  26039,  n"»  2542,  2343,  2344,  2346. 
3.  Arrondissement  d'Abbeville. 

6.  Arrondissement  d'Abbeville. 

7.  Th.  Basin  dit  que  c'était  un  simpleouvrier  terrassier.  (Th. Basin,I,  p.  IH  ; 
Vallet  de  V.,  Charles  VU,  II,  340,  note  2,  X2«  24,  au  jeudi  11  février  1444,  a.  st.) 

8.  Arrondissement  de  Beauvais. 

9.  Monstrelet,  V,  119-123,  Berry,  388-389  et  le  Bourg,  de  Paris,  275,  don- 
nent la  date  du  mois  de  mai;  Gruel,  203,  celle  du  mois  d'octobre.  J.  Pillet, 
Uist.  de  Gerberoy,  Rouen,  1679,  in-4,  p.  222.  Martial  d'Auvergne,  1,140-141. 
En  août  «t  septembre,  des  gens  d'armes  anglais  reçoivent  l'ordre  d'aller  se 
mettre  à  la  disposition  du  comte  d'Arondel  (Fr.  26059,  n»»  2382,  2602, 
2618).  Voy.  aussi  Fr.  5022,  f»  40  v«. 


222         LES   FRANÇAIS  PRENNENT   SAINT-DENIS   (1435,    30   MAl) 

dans  la  ville  de  Saint-Denis  *.  C'était  un  succès  important.  De  là, 
on  pouvait  observer  et  inquiéter  Paris.  Peu  après,  le  bâtard 
d'Orléans  s'empara  de  Pont-Sainte-Maxence  (juin)  ^  Toute  la 
Normandie  s'agitait;  de  nouveaux  troubles  éclataient,  et  Bedford, 
effrayé  des  rassemblements  de  troupes  qu'on  lui  signalait  de 
toutes  parts,  prescrivait  des  mesures  de  défense  qui  dénotent 
les  inquiétudes  du  gouvernement  anglais  ^. 

Le  connétable  ne  pouvait  diriger  en  personne  ces  expéditions  ; 
il  estimait  que,  dans  les  circonstances  actuelles,  il  devait  s'occu- 
per surtout  de  la  paix.  Il  alla  en  Bretagne,  au  mois  de  mai  *,  puis  il 
revint  encore,  pour  quelques  jours,  à  Parthenay,  où  devaient  se 
rendre  aussi  la  reine  de  France  et  la  reine  de  Sicile ,  qui  étaient  à  La 
Rochelle  ^.  Guillaume  Gruel,  le  biographe  d'Artur  de  Bretagne, 
vint  alors  lui  annoncer  que  la  comtesse  d'Etampes  "  était  accou- 
chée d'un  beau  fils.  Le  connétable  en  éprouva  une  joie  très  vive, 
car  il  n'avait  pas  d'enfant  légitime,  et  il  aimait  beaucoup  son 
frère  Richard,  comte  d'Etampes,  qui  soutenait  fidèlement,  en 
Bretagne,  le  parti  français.  Richemont,  à  cette  époque,  ne  sup- 
posait guère  qu'il  deviendrait  duc  de  Bretagne  et  qu'il  aurait 
pour  successeur  ce  même  enfant  qui  venait  de  naître  ''. 

Ses  préparatifs  terminés,  il  revint  à  la  cour^  pour  se  rendre  à 
la  journée  d'Arras.  Par  lettres  données  à  Amboise  le  6  juillet  *, 

1.  On  lit  dans  le  registre  X**  1481,  au  f»  101,  à  la  date  du  mardi  31  mai  : 
«  Ce  jour,  après  minuit,  par  faute  de  bon  guet,  entrèrent  en  la  ville  de 
Saint-Denis  les  capitaines  de  Melun  et  de  Laigny,  accompagnés,  comme  on 
disoit,  de  300  à  400  combatans,  gens  de  guerre.  »  Voy.  le  Bourg,  de  Paris, 
305-306.  La  date  du  17  juin,  donnée  par  Yallet  de  V.  (II,  312),  est  donc 
inexacte.  Gruel  (p.  204)  dit  que  la  ville  de  Saint-Denis  fut  prise  par  Mahé 
Morillon,  J.  Foucaut,  L.  de  Vaucourt  et  Regnault  de  Saint-Jean  ;  mais  il 
place  inexactement  ce  fait  à  l'époque  du  congrès  d'Arras.  J.  Foucaut  était 
capitaine  de  Lagny.  "Voy.  aussi  Fr.  26039,  n"^  2344,  2346.  Berry,  p.  389,  attri- 
bue ce  succès  au  bâtard  d'Orléans. 

2.  D.  Grenier,  XX  bis,  liasse  9,  f»  17.  Martial  d'Auvergne,  I,  141.  Pont- 
Sainte-Maxence,  dans  l'arrondissement  de  Senlis.  Ce  fait  et  la  prise  de 
Saint-Denis  et  de  Rue  sont  relatés  dans  des  instructions  du  13  juillet, 
adressées  à  Regnault  Girart  et  à  Martineau,  envoyés  de  Charles  VII  en 
Ecosse.  Ce  document  intéressant  est  égaré  parmi  des  pièces  du  xvi°  siècle, 
dans  le  Ms.  fr.  17330,  où  il  figure  sous  le  n»  9  (non  folioté). 

3.  Fr.  26039,  n<"  2338,  2340,  2554. 

4.  Richemont  assista  au  mariage  d'Alain,  fils  du  vicomte  de  Rohan,  avec 
Yolande  de  Laval,  le  21  mai  1433,  à  Vannes  [Preuves  de  Vhist,  de  Bret.,  II, 
col.  1272-1273). 

5.  Fr.  8819,  f°  30.  Le  15  juin,  Richemont  était  à  Parthenay. 

6.  Marguerite  d'Orléans,  comtesse  de  Vertus,  femme  de  Richard  de  Bre- 
tagne, comte  d'Etampes. 

7.  Ce  fut  François  11,1e  dernier  duc  de  Bretagne. 

8.  Voir  le  n»  406  de  la  galerie  des  Chartes  à  la  Bibl.  nationale,  et  Bré- 
quigny,  81,  f"*  177-179  (Moreau,  705).  Collect.de  Bourgogne,  95,  p.  848-851. 


RICHEMONT  VA  AU  CONGRÈS   d'ARRAS    (1435,   JUILLET)  223 

Charles  VII  avait  désigné  comme  ambassadeurs  le  connétable,  le 
duc  de  Bourbon,  le  comte  de  Vendôme,  le  chancelier  de  France 
Christophe  d'Harcourt.  le  maréchal  de  La  Fayette,  Theaulde 
de  Valperga,  bailli  de  Mâcon,  Adam  de  Cambray,  premier  pré- 
sident du  Parlement,  J.  Tudert,  doyen  de  Paris,  et  beaucoup 
d'autres  *.  Ils  passèrent  par  Reims,  Laon,  Saint-Quentin  et  Cam- 
bray, oti  ils  arrivèrent  le  29  juillet  *,  le  jour  même  où  le  duc 
de  Bourgogne  faisait  son  entrée  dans  Arras  ^ 

Le  dimanche  31  juillet,  ils  s'acheminèrent  enfin  vers  cette 
ville.  Le  duc  de  Bourgogne  avec  le  duc  de  Gueldre  *  et  un  nom- 
breux cortège  de  chevaliers,  l'évêque  d'Auxerre  ^,  l'abbé  de  Saint- 
Vaast,  le  maire  et  les  échevins,  suivis  d'une  grande  multitude 
de  peuple,  vinrent  au-devant  d'eux,  jusqu'au  bois  de  Moufflaine, 
à  une  lieu  d'Arras,  leur  souhaiter  la  bienvenue.  Les  trois  beaux- 
frères  s'embrassèrent  avec  les  démonstrations  les  plus  amicales, 
et  chevauchèrent  au  pas  jusqu'au  pelit  marché  de  la  ville,  au 
milieu  d'une  foule  joyeuse,  qui  garnissait  les  rues,  les  fenêtres  et 
même  les  toits.  Partout  retentissaient  les  cris  de  Noëll  Noël!  car 
ce  bon  accord  des  princes  était  d'un  heureux  augure  pour  la  paix 
que  tout  le  monde  désirait.  On  remarqua  l'absence  des  ambas- 
sadeurs anglais,  l'archevêque  d'York,  l'évêque  de  Norwich,  le 
comte  de  SufTolk,  etc.,  qui  étaient  arrivés  depuis  plusieurs  jours, 
et  on  disait  qu'ils  ne  voyaient  pas  sans  mécontentement  cette 
courtoisie  bienveillante,  avec  laquelle  le  duc  de  Bourgogne  ac- 
cueillait les  envoyés  de  V adversaire  ^.  Les  jours  suivants,  ceux-ci 
allèrent  visiter  le  cardinal  de  Chypre,  Hugues  de  Lusignan  ', 
légat  du  concile,  puis  le  cardinal  de  Sainte-Croix  *,  légat  du 

1.  Monstrelet,  V,  134-136.  J.  Charlier,  I,  186-187.  X"»  9200,  f  370. 

2.  Le  lundi  18,  le  parlement  de  Poitiers  est  informé  que  le  connétable, 
toujours  en  procès  avec  L.  de  Rochechouart,  a  des  lettres  d'état,  parce 
qu'il  est  à  Arras  (X»*  9200,  f"  370).  Sa  présence  à  Arras  est  encore  men- 
tionnée à  la  date  du  2  septembre  (fo  386). 

3.  D'autres  ambassadeurs  étaient  arrivés  depuis  longtemps  :  trois  envoyés 
anglais  dès  le  l»' juin,  le  cardinal  de  Chypre  le  8  juillet, le  cardinal  de  Sainte- 
Croix  le  12  (le  14,  d'après  la  relation  latine  dans  Bréquigny,  t.  81,  f-  131), 
la  plupart  des  ambassadeurs  anglais  (l'archevêque  d'York,  l'évêque  de 
Norwich,  le  comte  de  Suffolk),  le  23  juillet.  Le  26,  l'archevêque  d'York  pro- 
nonce un  discours  devant  les  cardinaux  (Relation  latine  dans  Bréquignv, 
t.  81,  f»»  132-160;  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  II,  305-310;  Journal  français 
de  la  paix  d'Arras,  par  A.  de  Le  Taverne,  Paris,  1631,  in-12,  p.  27). 

4.  Adolphe,  duc  de  Berg  et  de  Gueldre  {Art  de  vérifier  les  dates,  III,  181). 

5.  Laurent  Pinon,  confesseur  de  Philippe  le  Bon. 

6.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  201.  Monstrelet,  V,  134-135.  Le  Fèvre  de  Saint- 
Remy,  t.  II,  310-311. 

7.  Relat  française,  p.  171.  Voir  ci-dessus,  p.  210,  note  5. 

8.  Nicolas  Albergati,  évêque  de  Bologne  (Garnefeldt,  Vita  Albergali, 
Cologne,  1618,  in-4,  p.  36,  60,  97-99;  de  Beaucourt,  Charles  VII,  II,  520). 


224         OUVERTURE  DU  CONGRÈS  d'arras  (1435,  5  août) 

pape  (l*""  et  2  août).  Le  mercredi  3,  arriva  la  duchesse  de  Bour- 
gogne *.  Les  ambassadeurs  de  France  et  d'Angleterre,  avec  tous 
les  autres  seigneurs,  allèrent  à  sa  rencontre;  mais  ceux  d'Angle- 
terre «  prirent  congié  à  elle  aux  champs  %  »  tandis  que  ceux  de 
France  l'escortaient  jusqu'à  l'hôtel  de  la  Cour-le-Comte,  où  de- 
meurait le  duc  de  Bourgogne.  Le  duc  de  Bourbon,  le  conné- 
table, le  comte  de  Vendôme,  le  duc  de  Gueldre  chevauchaient 
à  côté  de  la  litière  où  était  la  duchesse.  Ils  furent  accueillis  de 
la  façon  la  plus  gracieuse  par  Philippe  le  Bon,  qui  leur  fit  «  très 
joyeuse  chère  en  son  hôtel  »  '. 

Le  vendredi  5  août  *,  le  congrès  tint  sa  première  séance  à 
l'abbaye  de  Saint- Vaast,  dans  une  salle  ornée  de  draps  d'or  et 
de  tapisseries  magnifiques.  Jamais  assemblée  aussi  nombreuse 
et  aussi  brillante  ne  s'était  réunie  pour  négocier  un  traité.  On  y 
voyait  les  ambassadeurs  de  presque  tous  les  Etats  et  souverains 
de  l'Europe,  avec  ceux  du  concile  de  Baie,  de  l'Université  de 
Paris,  des  ducs  d'Anjou,  de  Bretagne  et  de  plusieurs  villes  de 
France  ;  tant  on  s'intéressait  partout  au  grand  débat  qui  allait 
s'ouvrir  ^.  Les  cardinaux  qui  présidaient  le  congrès,  presque 
tous  les  ambassadeurs  laïques  ou  ecclésiastiques  voulaient  sin- 
cèrement la  paix;  le  peuple  l'implorait  à  grands  cris;  les  An- 
glais eux-mêmes  la  désiraient  secrètement,  car  la  guerre  com- 
mençait à  leur  peser;  mais,  enorgueillis  par  vingt  ans  de  succès 
et  de  domination,  ils  apportaient  aux  conférences  une  morgue 
et  des  exigences  qui  rendaient  l'accord  à  peu  près  impossible. 

Après  des  difficultés  de  pure  forme,  soulevées  par  les  ambas- 
deurs  français,  qui  trouvaient  que  les  commissions  des  ambassa- 
deurs anglais  n'étaient  pas  en  règle  %  les  négociations  commen- 
cèrent. Selon  les  engagements  qu'ils  avaient  pris  à  Nevers,  le 
duc  de  Bourbon  et  le  comte  de  Richemont  firent  des  ofl'res 
justes  et  raisonnables,  car  ils  ne  voulaient  pas  qu'on  pût  mettre 
les  torts  de  leur  côté.  Dès  les  premiers  jours,  on  comprit  qu'il 


1.  Isabelle  de  Portugal,  fille  de  Jean  !«"•  et  de  Philippine  de  Lancastre 
(Anselme,  I,  241,  E). 

2.  Monstrelet,  V,  137. 

3.  Monstrelet,  V,  137.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  II,  303-304.  Le  soir, 
entre  trois  et  quatre  heures,  après  dîner,  les  ducs  de  Bourgogne  et  de 
Bourbon  firent  une  partie  de  paume  à  laquelle  assistait  le  connétable  {Re- 
lut, franc.,  p.  38). 

4.  Le  4,  d'après  la  relation  latine  (Bréquigny,  t.  81,  f*  161).  Discours  de 
l'évêque  de  Vexio,  ambassadeur  du  roi  de  Dacie,  après  que  le  cardinal  de 
Chypre  a  lu  les  lettres  du  saint  concile. 

3.   Le  duc  de  Savoie,  Amédée  VIII,  n'envoya  pas  d'ambassadeurs.  Il 
venait  de  se  retirer  à  Ripaille. 
6.  Bréquigny,  t.  81,  f»  170  (journée  du  7  août). 


ARRIVÉE  DU  CARDINAL  DE  WINCHESTER  (23  AOUT)      225 

serait  impossible  de  s'entendre  sur  le  point  capital,  la  renoncia- 
tion de  Henri  VI  à  la  couronne  de  France;  néanmoins  les  négo- 
ciations continuèrent,  entremêlées  de  fêtes,  de  réjouissances  *. 
Le  11  et  le  12,  il  y  eut  une  belle  joute  entre  un  chevalier  espagnol, 
Jean  de  Merle,  et  un  chevalier  de  Bourgogne,  P.  de  Beauffremont, 
sire  de  Gharny,  devant  les  princes  et  les  autres  seigne^irs  ^ 

Le  lundi  15  août,  jour  de  l'Assomption,  les  ambassadeurs 
français  allèrent ,  en  grande  cérémonie  ,  entendre  la  messe  à 
l'église  Notre-Dame  d'Arras,  avec  le  duc  de  Bourgogne.  Cette 
intimité,  qui  s'.affîrmait  de  plus  en  plus,  entre  Philippe  le  Bon  et 
ses  beaux-frères,  déplaisait  fort  aux  Anglais,  car  ils  craignaient 
qu'on  ne  machinât  un  traité  à  leur  préjudice.  Henri  V  avait 
nommé  Philippe  le  Bon  commissaire  général  et  principal  pour 
la  négociation  du  traité;  mais  le  duc  s'était  excusé.  Il  valait 
mieux,  disait-il,  dans  l'intérêt  même  de  cette  affaire,  qu'il  n'en 
fût  pas  chargé  ^  Le  cardinal  de  Winchester  *,  chef  de  l'ambassade 
anglaise,  n'arriva  que  le  23  août.  Le  duc  de  Bourgogne  alla  au- 
devant  de  lui  avec  les  seigneurs  de  sa  maison,  mais  les  ambas- 
sadeurs français  ne  l'accompagnèrent  pas  ^ . 

Après  l'arrivée  du  cardinal  de  Winchester,  on  put  discuter  sé- 
rieusement les  conditions  de  la  paix.  Un  incident  des  plus  fâcheux 
interrompit  alors  les  travaux  du  congrès.  Le  jeudi  25  août,  le 
comte  de  Richemont  était  avec  le  duc  de  Bourbon  et  le  comte  de 
Vendôme  à  l'hôtel  du  duc  de  Bourgogne,  où  ils  avaient  dîné, 
quand  ils  apprirent  que  La  Hire  et  Saintrailles  avaient  passé  la 
Somme,  ravagé  le  pays  jusqu'à  Doullens  et  fait  un  énorme  butin  '. 
Cette  agression  impudente  mit  les  ambassadeurs  français  dans  un 
cruel  embarras.  Le  duc  de  Bourgogne  et  les  seigneurs  de  son  entou- 
rage en  étaient  indignés.  Dans  la  nuit,  les  comtes  d'Etampes  ', 

1.  Le  10,  Richemont  soupa  chez  le  duc  de  Bourgogne,  avec  le  duc  de 
Bourbon  et  le  comte  de  Vendôme. 

2.  Le  14,  Richemont  va  entendre'  la  messe  à  l'église  Saint-Vaast. 

3.  Voy.  Bréquigny,  81,  f°  161.  Monstrelet,  V,  144. 

4.  Henry  Beaufort,  fils  de  Jean  de  Lancastre  et  oncle  de  Henri  V, 
Voy.  Sandford,  Genealogical  hisiory,  p.  260-262.  H  appuyait  résolument  en 
Angleterre  la  politique  de  Bedford  (Green,  Hist.  ofthe  English  people.  I,  350- 
551). 

5.  Le  comte  de  Huntingdon  était  arrivé  le  22  août  (le -23,  d'après  la  relation 
latine,  f»  180  v).  Monstrelet  (V,  144)  donne  ici  la  date  du  29  et  diffère,  sur  ce 
point,  de  la  relation  française,  mais  il  s'accorde  avec  elle  d'une  manière  re- 
marquable sur  la  plupart  des  autres  et  notamment  sur  les  plus  importants. 

6.  Quelque  temps  auparavant,  le  duc  de  Bourgogne  avait  payé  4  200  sa- 
lut» d'or  à  La  Hire,  pour  qu'il  rendît  la  ville  de  Breteuil  (Ms.  Moreau, 
1423,  no»  126-128). 

1.  Jean  de  Bourgogne,  fils  de  Philippe,  comte  de  Nevers  et  petit-fils  de 
Philippe  le  Hardi  (Anselme,  I,  238). 

Richemont.  '  15 


226  EXIGENCES   DES  ANGLAIS 

de  Ligny,  de  Saint-Pol,  les  sires  de  Groy,  de  Lalain  et  des  sei- 
gneurs anglais,  liégeois,  brabançons  partirent,  avec  plus  de 
12O0  chevaux,  pour  se  mettre  à  la  poursuite  des  routiers.  Ils 
les  trouvèrent  entre  Corbie  *  et  Heilly  ^  faisant  bonne  conte- 
nance; mais  le  connétable  avait  eu  le  temps  d'envoyer  Théaulde 
de  Valperiga  ^  vers  La  Hire  et  Saintrailles,  pour  leur  ordonner 
de  ne  point  combattre  et  de  se  retirer,  en  abandonnant  prison- 
niers et  butin.  Ils  obéirent,  non  sans  répugnance,  et,  grâce  à 
cette  sage  précaution,  l'affaire  n'eut  pas  d'autre  suite.  L'expédi- 
tion rentra  dans  Arras  le  27  au  matin  *. 

Ce  jour-là  et  les  jours  suivants,  il  y  eut  d'importantes  confé- 
rences entre  les  ambassadeurs  français  et  anglais,  par  l'inter- 
médiaire des  cardinaux.  De  concession  en  concession,  les  Français 
en  vinrent  jusqu'à  offrir  de  laisser  à  Henri  VI,  sous  condition 
d'hommage,  la  Normandie  et  la  partie  de  la  Guyenne  occupée 
par  les  Anglais,  pourvu  qu'il  renonçât,  à  tout  jamais,  au  titre 
de  roi  de  France.  Il  aurait  en  mariage  une  fille  de  Charles  V  I, 
mais  sans  aucune  dot;  le  duc  d'Orléans  serait  mis  en  liberté 
moyennant  rançon  °.  Les  ambassadeurs  du  concile  et  du  pape, 
le  duc  de  Bourgogne  lui-même  trouvaient  ces  offres  justes  et 
raisonnables  ^  ;  mais  les  Anglais  se  montrèrent  beaucoup  plus 
exigeants.  Ils  ne  voulaient  accorder  à  Y  adversaire  que  les  pays 
occupés  par  les  Français  au  nord  et  au  sud  de  la  Loire,  en  ré- 
servant à  Henri  VI  le  titre  de  roi  de  France.  Vainement  les  am- 
bassadeurs français  leur  offrirent  encore  un  délai  de  plusieurs 
mois  ',  pour  que  Henri  VI  eût  tout  le  temps  de  délibérer.  Avant 
de  donner  une  réponse  définitive,  les  Anglais  déclarèrent  que,  si 
Charles  ne  renonçait  pas  à  la  couronne  de  France,  il  était  inu- 
tile de  continuer  les  négociations  *. 

1.  Arrondissement  d'Amiens. 

2.  Id. 

3.  Bailli  de  Mâcon,  sénéchal  et  capitaine  de  Lyon  (M.  Canat,  368). 

4.  Chron.  Martinienne,  f»  cclxxxi.  Gruel,  204. 

5.  Telles  sont  les  principales  conditions  formulées,  le  7  septembre,  dans 
un  document  signé  par  les  ambassadeurs  de  France.  Le  roi  d'Angleterre 
devait  signifier  son  acceptation  avant  le  1"^  septembre  1436.  Ces  offres 
furent  ensuite  portées  à  Henri  "VI  par  le  roi  d'armes  Saint-Remy.  L'ori- 
ginal est  à  la  Bib.  nat.,  Mélanges  de  Colbert,  353,  n»  202.  Le  Fèvre  de 
Saint-Remy,  550.  Voir  aussi  le  Thésaurus  novus  anecdotorum,  I,  1784-1789, 

6.  Quœ  oblationes  nobis  vis£B  sunt  magnœ,  rationabiles  et  merito  accep- 
tandœ.  (Voy.  les  lettres  du  card.  de  Chypre  et  du  duc  de  Bourgogne  à 
Henri  VI  dans  V Amplissima  Collectio,  VIII,  col.  861-864.) 

7.  Ils  proposèrent  même  de  ne  conclure  le  traité  définitif  qu'au  bout  de 
sept  ans,  quand  le  roi  d'Angleterre  serait  en  âge  «  de  délibérer  plus  à 
plain  et  avoir  bon  conseil  ».  Fr.  9868,  f»  4  v°.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy, 
II,  376.  Append.,  LXII. 

8.  Oblationem  partis  alterius  (c.-à-d.  Charles  VII),  habentes  derisorium 


RÔLE  PARTICULIER  DE  RICHEMONT  227 

Cette  arrogance  excitait  un  grand  mécontentement  dans  le  con- 
grès et  parmi  le  peuple,  qui  désirait  que  le  duc  de  Bourgogne  se 
séparât  des  Anglais,  On  s'irritait  contre  ceux  qui  conseillaient  à 
Philippe  le  Bon  de  n'en  rien  faire,  comme  le  comte  de  Ligny,  Hu- 
gues de  Lannoy  et  quelques  autres  ^  En  général,  la  noblesse  bour- 
guignonne, jalouse  des  Anglais,  souhaitait  que  le  duc  fit  la  paix 
avec  Charles  VII  sans  plus  tarder,  mais  il  n'en  était  pas  de  même 
des  communes  de  Flandre.  Elles  ne  voulaient  que  la  paix  générale, 
sachant  bien  qu'une  rupture  entre  l'Angleterre  et  la  Bourgogne 
serait  funeste  à  leurs  intérêts  commerciaux.  Les  ambassadeurs 
anglais  croyaient  que  cette  seule  considération  suffirait  à  empê- 
cher Philippe  le  Bon  de  traiter  séparément;  mais,  d'autre  part, 
il  était  tenté  par  les  avantages  que  lui  promettait  Charles  VII. 

Richemont,  habilement  secondé  par  Raoul  Gruel,  avait  su  se 
conciher  l'appui  des  seigneurs  qui  avaient  le  plus  d'influence 
sur  le  duc  de  Bourgogne,  comme  le  chancelier  Nie.  Raulin, 
son  confesseur,  Laurent  Pinon,  évêque  d'Auxerre,  et  surtout  son 
premier  chambellan,  Antoine  de  Groy,  auquel  il  promit  une 
rente  de  3  000  livres  ou  30  000  écus  d'or  au  nom  du  roi  *.  La 
nuit,  quand  tout  le  monde  était  retiré,  le  connétable  allait  voir  se- 
crètement son  beau-frère  Philippe  et  ceux  de  ses  conseillers  qui 
étaient  bien  disposés  pour  la  France  ^  ;  il  s'efforçait  de  leur  prou- 
ver qu'un  traité  séparé  avec  le  duc  de  Bourgogne  était  le  meil- 
leur moyen  de  hâter  la  conclusion  de  la  paix  avec  l'Angleterre*. 
Un  docteur  éminent.  Th.  Sarzana,  élève  et  secrétaire  du  cardinal 
de  Sainte-Croix  et  qui  fut  plus  tard  le  pape  Nicolas  V  ^,  em- 
ployait aussi  toute  son  habileté  à  préparer  la  réconciliation  de 
Philippe  le  Bon  avec  Charles  VII  •.  Les  Anglais,  sentant  qu'ils 

indignati  recedebant  {Bréquigny,  81,  f»  173, 180  et  226;  Rolls  of  Parliament, 
IV,  481). 

1.  Append.  LXI  (déposition  de  La  Fayette). 

2.  P  2531,  fo*  169  v°,  177.  Z>«  14,  f»»  33,  34. 

3.  Gruel,  204.  Relut,  française,  p.  75.  Append.,  LXI,  déposition  de  la 
Fayette. 

4.  Appendice  LXI  (Déposition  du  connétable). 

5.  Sur  T.  Parentucelli,  dit  Thomas  de  Sarzane,  voir  Garnefeldt,  Vita  Al- 
bergati,'p.  110-112,  118-119;  Muratori,  t.  XXV,  p.  271. 

6.  Comme  les  deux  légats  ne  s'entendaient  guère  eux-mêmes,  ce  fut 
Th.  Sarzana  qui  «  seorsum  inter  Phillippum  et  Garolum  de  concordia  egit, 
illumque  tandem  suo  régi  conciliavit  et  a  jurejurando  quod  Anglico  praes- 
titeral,  auctoritate  primte  sedis,  absolvit;  satius  esse  arbitratus  ex  duobus 
regnis  alterum  salvare,  Francis  inter  se  pacatis,  quam  perseverantibus 
odiis  utrumque  perdere  »  {PU  II  Commentarii,  Romœ,  1584,  in-4,  p.  289-90). 
Pourtant,  le  IG  juillet  1435,  le  pape  Eugène  IV,  répondant  à  une  lettre  de 
Henri  VI,  qui  lui  demandait  s'il  avait  délié  certains  princes  de  leur  ser- 
ment, affirmait  qu'il  n'en  avait  rien  fait  et  qu'il  n'en  avait  pas  été  prié;  Il 


228       DÉPART  DES  AMBASSADEURS  ANGLAIS  (6  SEPT.) 

perdaient  du  terrain,  rappelaient  au  duc  le  crime  de  Montereau, 
le  traité  de  Troyes,  la  faiblesse  et  la  déloyauté  de  l'adversaire  *. 

Le  d"  septembre,  après  un  dîner  qu'il  avait  donné  aux  am- 
bassadeurs anglais,  le  duc  eut  avec  le  cardinal  de  Winchester 
un  entretien  très  animé  pendant  plus  d'une  heure.  Le  cardi- 
nal «  s'eschauffoit  tellement  qu'il  suoit  à  grosses  gouttes  ^  ». 
"Les  jours  suivants,  il  y  eut  encore  des  conférences  entre  les  am- 
bassadeurs de  Charles  VII  et  ceux  de  Henri  VI,  sans  plus  de 
résultats.  Le  duc  de  Bedford,  malade,  près  de  mourir,  ne  vou- 
lait rien  rabattre  de  ses  exigences  ;  il  prescrivait  aux  ambassa- 
deurs de  rejeter  les  propositions  de  l'adversaire,  propositions 
aussi  honteuses  pour  Henri  VI  que  favorables  à  son  ennemi,  et 
il  songeait  aux  moyens  de  continuer  la  guerre  '. 

Vainement  les  envoyés  de  Paris,  arrivés  le  1"  septembre,  de- 
mandaient la  paix  avec  instances,  en  disant  que,  si  elle  n'était  pas 
conclue,  la  misère  forcerait  la  plupart  des  habitants  à  quitter 
leur  ville  ;  les  Anglais  estimaient  qu'il  ne  fallait  point  avoir  égard 
aux  clameurs  du  peuple  et  qu'il  valait  mieux  laisser  dévaster  un 
pays  pour  un  temps  que  de  le  perdre  tout  à  fait  *.  Le  5  septembre, 
les  envoyés  de  Paris  furent  admis  devant  le  congrès,  avec  ceux 
de  plusieurs  autres  villes.  Leur  orateur,  Thomas  de  Gourcelles, 
fît  un  discours  si  éloquent  pour  implorer  la  paix  «  que  ce  seroit 
longue  chose  à  raconter  et  sembloit  qu'on  ouyst  parler  un  ange 
de  Dieu,  par  quoy  des  assistants  plusieurs  furent  esmeus  à 
larmes  ^.  »  Le  lendemain,  les  ambassadeurs  anglais  quittaient 
Arras,  rompant  ainsi  les  négociations.  Ils  avaient  compris  que 
leur  cause  était  perdue  auprès  du  duc  de  Bourgogne. 

s'agissait  surtout  ici  de  Philippe  le  Bon  (Rymer,  V,  1"  partie,  p.  21-23). 
Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  le  pape  avait  expressément  recommandé  à 
ses  ambassadeurs  d'exhorter  le  duc  de  Bourgogne  à  faire  la  paix  avec 
Charles  VII,  s'ils  ne  pouvaient  obtenir  la  paix  générale  (voy.  Fr.  9868,  f»  5). 

1.  T.  99  de  la  coll.  de  Bourgogne,  348-355. 

2.  Relat.  française,^.  71.  P.  Cauchon,  évêque  de  Lisieux,  qui  était  un 
des  ambassadeurs  de  Henri  VI,  assistait  à  ce  dîner. 

3.  Voir  un  mémoire  envoyé  par  Fastolf  aux  ambassadeurs  anglais,  avec 
l'agrément  de  Bedford  et  du  Conseil  :  «  and  so  it  semythe  ....  that  thesaid 
taking,  offre  and  appointement  were  none  honorabile  to  the  king,  but 
gretely  to  the  worshipe  and  advantage  of  his  ennemies  and  adversaries  » 
(J.  Stevenson,  II,  2^  partie,  p.  575-585,  et  Rolls  of  Parliament,  IV,  481). 
Le  gouvernement  anglais  déclare  que  les  ambassadeurs  français  «  nulla 
média  rationabilia,  immo  trupha  et  derisoria  obtulerunt.  » 

4.  «  Not  havyng  nor  taking  revsrarde  unto  the  clamour  of  the  people, 
whiche,  of  nature,  love  his  adversarie  more  than  hym  (Henri  VI),  nor  for 
wasting  of  the  country;  for  better  is  a  country  to  be  wasted  for  a  tyme 
than  lost  »  (IVIémoire  de  Fastolf  déjà  cité,  p.  577).  «  Melius  terram  vaiere 
vastatam  quam  perditam  »  (T.  Bazin,  t.  I,  p.  102). 

5.  Relat.  française,  p.  78. 


PHILIPPE   LE  BON  CONSENT  A   LA  PA!X   (6   SEPT.)  229 

Le  connétable  redoubla  d'efforts.  Le  même  jour  (6  septembre), 
devant  les  envoyés  de  Paris  et  des  autres  villes,  l'archidiacre  de 
Metz,  après  avoir  rappelé  les  propositions  faites  aux  ambassa- 
deurs anglais  par  ceux  de  France,  déclara  que  ces  offres,  reje- 
tées avec  tant  de  hauteur,  avaient  paru  «  bonnes  et  raisonnables  » 
aux  cardinaux  et  aux  autres  ambassadeurs  du  concile,  et  il  con- 
jura éloquemment  le  duc  de  faire  la  paix  avec  Charles  VII  *. 
Philippe  répondit  qu'il  était  prêt  à  traiter.  Le  soir,  il  eut  avec 
les  ambassadeurs  français  une  conférence  qui  se  prolongea  jus- 
qu'à minuit  et  dans  laquelle  furent  probablement  arrêtées  les 
principales  conditions  de  la  paix. 

Le  7  septembre,  les  ambassadeurs  de  France  allèrentàlarencon- 
tre  du  comte  de  Gharolais,  qui  venait  de  Lens  à  Arras.  Richemont 
chevauchait  tout  auprès  de  sa  litière,  avec  le  comte  de  Vendôme. 
Dans  des  lettres  datées  du  même  jour,  les  envoyés  de  Charles  VII 
renouvelaient  les  propositions  qu'ils  avaient  déjà  faites  aux  am- 
bassadeurs anglais  *.  Le  8,  jour  de  la  Nativité  de  Notre-Dame,  le 
duc  et  la  duchesse  de  Bourgogne,  avec  les  ambassadeurs  français 
et  beaucoup  d'autres  seigneurs,  entendirent  la  messe  dans  l'église 
de  l'abbaye  de  Saint-Vaast.  Un  jacobin,  confesseur  du  duc  de 
Bourbon,  prononça  un  sermon,  dans  lequel  il  conjura  encore  les 
princes  de  faire  la  paix.  Le  même  jour,  Philippe  le  Bon  reçut  à 
dîner  les  ambassadeurs  du  roi  de  France.  Il  avait  auprès  de  lui, 
à  sa  table,  ses  deux  beaux-frères,  le  duc  de  Bourbon  et  le  con- 
nétable '.  Enfin,  le  10  septembre,  le  duc  de  Bourgogne  déclara 
dans  son  conseil  qu'il  acceptait  les  propositions  du  roi  de  France. 
C'était  l'anniversaire  de  l'assassinat  de  Jean  sans  Peur.  On  re- 
gardait comme  chose  miraculeuse  que  PhiUppe  le  Bon  eût  con- 
senti, ce  jour-là  même,  à  se  réconcilier  avec  Charles  VII.  Le 
lendemain,  il  renouvela  sa  déclaration  devant  le  congrès,  et  il 
n'y  eut  plus  qu'à  rédiger  la  formule  définitive  du  traité. 

Le  16  septembre,  on  apprit  que  le  duc  de  Bedford  venait  de 
mourir,  deux  jours  auparavant,  au  château  de  Chantereine, 
près  de  Rouen.  Rien  ne  pouvait  être  plus  funeste  aux  Anglais, 

1.  Voir  la  déclaration  des  ambassadeurs  du  concile  [Bréquigny ,  81, 
fo»  219-230).  Les  cardinaux,  conformément  aux  instructions  qu'ils  avaient 
reçues,  conjurèrent  aussi  le  duc  de  s'entendre  avec  les  envoyés  de  Char- 
les VII  (Fr.  9868,  f"*  1  v»  et  5).  Des  écrivains  anglais  blâment  aussi  le 
gouvernement  anglais  d'avoir  rejeté  les  propositions  de  Charles  VII  (Sha- 
ron Turner,  III,  127-129;  J.  Stevenson,  I,  préface,  p.  lxvu). 

2.  Voy.  Append.  LXII.  De  Beaucourt,  Charles  VII,  t.  II,  539.  L'original  de 
ces  lettres  du  7  septembre,  avec  les  signatures  et  les  sceaux  de  tous  les  am- 
bassadeurs français,  se  trouve  dans  les  Mélanges  de  Golbert,  3o'6,  charte  202 
(à  la  Biblioth.  nat.). 

3.  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  326-327. 


230  MORT   DE   BEDFORD    (1435,    14   SEPT.) 

plus  favorable  à  la  France  que  ces  deux  grands  événements,  la 
paix  d'Arras  et  la  mort  du  Régent.  Depuis  son  dernier  voyage 
en  Angleterre,  Bedford  avait  compris  que  la  guerre  deviendrait 
de  plus  en  plus  difficile,  parce  que  le  parlement  ne  voulait  plus 
faire  de  sacrifices.  Il  sentait  que  la  rupture  avec  le  duc  de  Bour- 
gogne était  le  prélude  de  l'expulsion  des  Anglais,  et  pourtant  son 
orgueil  n'avait  pu  se  résigner  à  des  concessions  nécessaires.  Ce 
fut  là  une  des  causes  de  sa  mort.  «  Brave  sur  le  champ  de  ba- 
taille, prudent  au  conseil,  calme  dans  la  délibération,  résolu 
dans  l'action,  Bedford  était  certainement  égal,  peut-être  supé- 
rieur à  Henri  V  ^  »  Ainsi  l'Angleterre  faisait  en  même  temps  deux 
pertes  également  irréparables,  Bedford  et  le  duc  de  Bourgogne. 
Les  conditions  de  la  paix  d'Arras  furent  arrêtées  six  jours 
après  la  mort  du  Régent  ^  (20  septembre).  Elle  coûtait  bien  cher  à 
la  France.  Demander  pardon  du  crime  de  1419  et  en  poursuivre 
les  auteurs  ^  ;  fonder  en  l'église  de  Montereau  une  chapelle  ex- 
piatoire, où,  chaque  jour  et  perpétuellement,  serait  dite  une 
messe  basse  de  Requiem  ;  établir  dans  la  même  ville  un  couvent 
de  Chartreux  et  le  doter  ;  élever  sur  le  pont  de  Montereau  une 
croix  commémorative  ;  fonder  en  l'église  des  Chartreux,  près  de 
Dijon,  où  reposait  le  corps  de  Jean  sans  Peur,  une  haute  messe  de 
Requiem^  qui  devait  être  célébrée  chaque  jour,  à  perpétuité  ; 
payer  50  000  écus  d'or,  en  compensation  des  joyaux  que  le  duc 
Jean  avait  sur  lui  au  moment  du  meurtre  ;  céder  les  villes  et  les 
comtés  de  Mâcon,  de  Saint-Gengoux  *  et  d'Auxerre,  la  châtel- 
lenie  de  Bar-sur-Seine,  la  garde  de  l'église  et  abbaye  de  Luxeuil 
avec  les  droits  qui  en  dépendaient,  les  villes,  châtellenies  et 
prévôtés  de  Péronne,  Montdidier  et  Roye,  les  villes  de  la  Somme, 
c'est-à-dire  Saint-Quentin,  Corbie,  Amiens,  Abbeville  et  autres, 
ainsi  que  le  comté  de  Ponthieu,  avec  faculté  pour  le  roi  de 
racheter  ces  villes  moyennant  400000  écus  d'or  ^;  laisser  au  duc 

1.  J.  Stevenson,  I,  préface,  p.  lxix-lxx.  Sandford,  Genealogical  history, 
p.  313-314;  Green,  I,  547;  Rolls  of  Parliament,  IV,  485. 

2.  Voir  les  propositions  des  ambassadeurs  français  datées  du  20  sep- 
tembre, avec  signatures  et  sceaux,  à  la  galerie  des  Chartes  de  la  Bib.  nat., 
n"  406.  Le  20  septembre,  le  légat  du  pape  délie  Philippe  le  Bon  de  son  ser- 
ment de  fidélité  envers  le  roi  d'Angleterre  et  l'engage  à  faire  la  paix  avec 
Charles  VII  (K64,  n"  36  bis). 

3.  Philippe  le  Bon  les  désigna  spécialement  dans  des  lettres  du  23  sep- 
tembre (voy.  Ms.  Colbert  43  [Flandres],  2"  partie,  f»  7  v°,  et  coll.  de  Bourg., 
t.  95,  p. -880).  Il  y  nomme  Tanguy  du  Chastel,  J.  Louvet,  P.  Frotier  et  J.  Ca- 
dart. 

4.  Arrondissement  de  Mâcon. 

5.  D.  Grenier,  100,  f"  50.  Fr.  6965  (Legrand,  VI),  p.  15.  Le  duc  de  Bour- 
gogne s'était  engagé  à  restituer  ces  villes  moyennant  400  000  écus.  Il  devait 
même  les  restituer  gratuitement,  si,  avant  le  l^r  janvier  1436,  le  roi  d'An- 


TRAITÉ   d'aRRAS    (1435,    20   SEPT.)  231 

le  comté  de  Boulogne,  en  empêchant  les  poursuites  de  ceux  qui 
prétendaient  y  avoir  droit  *  ;  remettre  au  comte  d'Etampes  le 
comté  de  Gien-sur-Loire,  après  la  présentation  des  lettres  par 
lesquelles  le  feu  duc  de  Berry  avait  donné  cette  terre  au  duc 
Jean  sans  Peur  ^;  restituer  au  comte  de  Nevers  et  au  comte 
d'Etampes,  son  frère,  32  800  écus  d'or  enlevés  à  leur  mère,  Bonne 
d'Artois,  par  ordre  de  Charles  VI  ;  exempter  Philippele  Bon  de 
tout  hommage,  de  toute  sujétion  envers  la  couronne  de  France 
durant  la  vie  du  roi  ;  s'engager  à  secourir  le  duc  contre  les  An- 
glais, s'ils  lui  faisaient  la  guerre  à  cause  de  sa  défection,  et  à  ne 
point  conclure  la  paix  avec  eux  sans  son  consentement  exprès  ; 
accorder  une  abolition  générale  pour  tous  les  cas  survenus  de- 
puis la  mort  de  Jean  sans  Peur,  en  exceptant  toutefois  ses  meur- 
triers ;  renoncer  à  l'alliance  formée  avec  l'empereur  contre  le  duc 
de  Bourgogne  ;  faire  signer  le  traité  d'Arras  par  René  et  Gh. 
d'Anjou,  le  duc  de  Bourbon,  les  comtes  de  Richemont,  de  Ven- 
dôme, de  Foix,  d'Armagnac  et  de  Pardiac  et  autres  qu'on  avise- 
rait ^  :  telles  sont  les  principales  conditions  que  le  roi  de  France 
dut  subir  *.  Elles  avaient,  pour  la  plupart,  été  débattues,  soit 
aux  conférences  de  Bourg,  en  1423,  soit  au  mois  d'août  1429, 
quand  La  Trémoille  avait  envoyé  dans  cette  même  ville  d'Arras 
le  chancelier  Regnault  de  Chartres,  avec  Christophe  d'Harcourt 
et  le  doyen  de  Paris,  pouf  négocier  avec  le  duc  de  Bourgogne  ; 
mais  alors  Philippe  n'avait  pas  voulu  traiter  sans  les  Anglais  ^, 


gleterre  acceptait  les  olTres  faites  à  ses  ambassadeurs  et  s'il  y  avait  une 
paix  générale,  quand  même  cette  paix  ne  serait  signée  qu'après  le  délai  de 
sept  ans  laissé  au  roi  d'Angleterre  (voy.  ci-dessus,  p.  226,  note  7,  et  Ap- 
pend.  LXI  et  LXII). 

1.  C"est-tà-dire  La  Trémoille.  Il  avait  épousé  Jeanne,  comtesse  de  BoiUo- 
gne  (veuve  du  duc  de  Berry),  qui  lui  légua  l'usufruit  de  ses  biens  (voir  ci- 
dessus,  p.  141). 

2.  "Voy.  Append.,  XV. 

3.  Ms.  CoIt)ert  43  (Flandres),  2°  partie,  f"  10.  Quelques  seigneurs  bour- 
guignons, comme  H.  de  Lannoy,  J.  de  Luxembourg,  comte  de  Ligny,  re- 
fusèrent d'abord  de  jurer  le  traité  d'Arras,  mais  ils  finirent  par  s'y  dé- 
cider [Relat.  française,  p.  lOo;  J.  Ghartier,  I,  208). 

4.  Voir  les  offres  du  20  septembre  sur  le  document  original  qui  se 
trouve  à  la  galerie  des  Chartes  de  la  Bibl.  nat.,  n"  406. 

5.  Sur  les  négociations  de  1429,  qui  servirent  surtout  de  base  au  traité 
d'Arras,  voir  le  t.  90  de  la  coliect.  de  Bourgogne,  f"»  241-243  et  249-251,  et 
ci-dessus,  p.  176.  Sur  le  congrès,  les  négociations  et  le  traité  d'Arras, 
voir  :  le  Journal  français  d'Ant.  de  Le  Taverne  ;  la  relation  française  du 
Ms.  latin  9868  ;  la  relation  latine  du  Ms.  Moreau,  705  (Bréquigny,  81), 
f-  149-230;  Ms.  Moreau,  1425,  n"  129;  Monstrelet,  V,  130-183;  J.  Ghartier, 
I,  185-208;  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  305-361;  01.  de  La  Marche,  édit.  du 
Panthéon  littéraire,  p.  354-365;  Berry,  392;  Th.  Basin,  I,  95-102;  Chroni- 
ques belges  publiées  par  Kervyn  de  Lettenhove,  I,  241-244;  II,  209-210;  III, 


232  PUBLICATION  DU  TRAITÉ  (1435,   21    SEPT.) 

et  ceux-ci  avaient  rejeté  les  offres  de  Charles  VII.  Cette  fois,  le 
connétable  avait  le  bonheur  de  réussir  là  où  son  rival  avait 
échoué.  Cette  récompense  était  bien  due  à  ses  longs  efforts. 

Le  mercredi  21  septembre,  le  duc  de  Bourgogne  et  les  sei- 
gneurs de  sa  suite,  les  ambassadeurs  de  France  et  les  autres 
membres  du  congrès  étaient  réunis  dans  l'église  de  l'abbaye  ; 
une  foule  immense  était  accourue  pour  entendre  la  publication 
de  la  paix.  Le  cardinal  de  Chypre  dit  lui-même  la  messe  ;  l'évèque 
d'Auxerre,  dans  un  sermon  approprié  aux  circonstances,  fit 
éloquemment  ressortir  les  bienfaits  qu'allait  engendrer  l'union 
fraternelle  des  princes;  puis  maître  P.  Brunet,  chanoine  d'Arras, 
monta  en  chaire  et  lut  le  traité  conclu  entre  le  roi  de  France 
et  le  duc  de  Bourgogne.  Cette  lecture  finie,  les  cris  de  :  Noël  ! 
retentirent  de  toutes  parts  et  si  haut  que  «  on  n'eust  pas  ouy 
Dieu  ^  ».  Alors,  selon  ce  qui  avait  été  convenu,  J.  Tudert,  doyen 
de  Paris,  maître  des  requêtes,  conseiller  et  ambassadeur  de 
Charles  VII,  s' agenouillant  devant  Philippe  le  Bon,  dit  à  haute 
et  intelligible  voix  :  que  la  mort  de  Mgr  le  duc  Jean  avait  été 
iniquement  et  mauvaisement  faite  par  ceux  qui  avaient  perpétré 
ledit  cas  et  par  mauvais  conseil  ;  qu'il  en  avait  toujours  déplu  au 
roi  et  que,  de  présent,  il  lui  en  déplaisait  de  tout  son  cœur;  que, 
s'il  eût  su  ledit  cas  et  eût  eu  tel  âge  et  entendement  qu'il  a  de 
présent,  il  y  eût  obvié  selon  son  pouvoir,  mais  qu'il  était  bien 
jeune  et  avait  pour  lors  petite  connaissance  et  qu'il  n'avait  pas 
été  assez  avisé  pour  y  pourvoir  ;  qu'il  priait  Mgr  de  Bourgogne 
d'ôter  de  son  cœur  toute  rancune  et  haine  qu'il  pouvait  avoir 
contre  lui  à  cause  de  cela  et  qu'entre  eux  iV  y  eût  bonne  paix 
et  amour.  —  Le  duc,  relevant  alors  l'ambassadeur  de  Charles  VII, 
répondit  qu'il  y  consentait  ^.  Les  cardinaux  reçurent  ensuite  les 
serments  de  Philippe  le  Bon  et  des  ambassadeurs  français  ;  on 
chanta  un  Te  Deum,  et  le  duc  regagna  son  hôtel  au  milieu  d'une 
multitude  transportée  d'allégresse,  qui  saluait  son  passage  par 
des  acclamations  enthousiastes.  Beaucoup  de  personnes  pieu- 

43-61,  151,  378-382;  Lettres  des  rois,  II,  431  et  suiv.  ;  Rymer,  V,  ire  partie, 
p.  18-23;  Ms.  Colbert,  43  (Flandres),  f"  152-115,  dans  la  2«  partie,  f"  6-8; 
Portef.  Fontanieu,  117-118,  à  la  date;  Vv.  26060,  n»'  2754,  2761;  du  Boulai, 
V,  431-432;  Garnefeldt,  Vita  Albergati,  p.  97-99;  D.  Martène,  V,  437-438; 
VIII,  864-868;  Prowedm»/^,  IV.  préface,  p.  Lxxxm;  J.  Stevenson,  I,  51-64;  II, 
2c  partie,  431-433;  Kervyn  de  Lettenhove,  Hist.  de  Flandre,  IV,  p.  261  et 
suiv.;  Fr.  4054,  n°  168;  K  64,  n»  36';  Fr.  5036,  f"»  310-312;.  Mélanges  de 
Colbert,  355,  n"  202,  n°  203  (original  du  traité),  n»  206  (confirmation  du 
traité  par  le  Dauphin);  D.  Grenier,  100,  f»  43-65,  etc. 

1.  Relat.  française,  p.  99. 

2.  Lat.  1502,  f"  13  V.  Ms.  Colbert,  43  (Flandres),  f"  8  et  9.  Moreau,  1425, 
n»  130.  Fr.  5036,  f  4. 


MORT   DE  LA  REINE   ISABEAU   (1435,    29   SEPT.)  233 

raient  de  joie  ;  dans  les  rues,  dans  les  carrefours,  on  allumait  des 
feux,  on  dressait  des  tables  couvertes  de  pain  et  de  vin,  où  les 
passants  pouvaient  prendre  place;  toute  la  ville  était  en  fête. 
Le  duc  de  Bourbon  et  le  connétable  envoyèrent  aussitôt  des 
messagers  annoncer  de  tous  côtés  cette  bonne  nouvelle,  qui 
causa  partout  la  même  joie  '. 

Tel  fut  le  célèbre  traité  d'Arras,  qui  devait  réparer  les  maux 
causés  à  la  France  par  celui  de  Troyes  et  rendre  à  Charles  VII 
son  royaume  *.  Là  reine  Isabeau  était  sur  le  point  de  mourir.  La 
nouvelle  du  traité  apporta,  dit-on,  un  adoucissement  à  ses  re- 
mords. Elle  termina  tristement  ses  derniers  jours  à  l'hôtel 
Saint-Paul,  le  29  septembre.  On  célébra  pour  elle,  le  9  octobre, 
à  Arras,  un  service  funèbre,  auquel  assistèrent  les  ducs  de 
Bourgogne  et  de  Bourbon,  les  comtes  de  Vendôme  et  d'Etampes  '. 
Ainsi  périssaient  ceux  qui  avaient  fait  tant  de  mal  à  la  France, 
au  moment  même  où  le  traité  d'Arras  allait  lui  rendre  une  vie 
nouvelle.  Partout  on  comprit  l'importance  de  ce  grand  événe- 
ment. Quand  les  ambassadeurs  du  concile  revinrent  à  Bâle,  un 
orateur  s'écria,  dans  son  enthousiasme,  que  cette  assemblée, 
eût-elle  duré  vingt  ans,  avait  fait  assez,  puisqu'elle  avait  procuré 
la  paix  à  la  France  *.  Cette  paix  allait  donner  à  Charles  VII  la 
force  de  terrasser  les  Anglais  ^.  Richemont  avait  contribué  lar- 
gement à  ce  résultat,  et  on  lui  en  sut  gré  ®.  Jamais  peut-être  il 
ne  rendit  à  la  France  un  plus  grand  service. 

Il  fut  moins  heureux  dans  les  efforts  qu'il  fit  pour  délivrer 

1.  D.  Grenier,  XX  625,  liasse  9,  f»  17. 

2.  Ea  enim  dies  fuit  quse  Carolo  regnum  restituit  {Pli  II  Commentarii, 
p.  290).  Le  24  septembre,  le  duc  de  Bourgogne  ordonne  la  publication  du 
traité  d'Arras  (D.  Grenier,  100,  f»  43). 

3.  Le  corps  d'Isabeau  fut  transporté  à  Saint-Denis  le  14  octobre,  par  eau, 
«  pour  ce  que  les  ennemis  venoient  et  prenoient,  chacun  jour,  entre  Paris 
et  Saint-Denis,  gens,  et  emmenoient  prisonniers.  »  Le  lendemain,  ou 
l'inhuma  auprès  de  Charles  VI  (X<*  1481,  f  107;  Bourg,  de  Paris,  p.  309; 
Martial  d'Auvergne,  I,  146;  J.  Chartier,  I,  208-212). 

4.  Latrent  jam,  ut  libet,  sacri  hujus  concilii  detractores  ....  et  dicant 
jam,  si  possint,  «  quid  fecit  concilium  Basileense?  »  Quid  egit,  dicitis, 
Basileense  concilium?  Pacem  fecit  in  Francia.  Numquid  hoc  modicum  est, 
etiamsi  per  viginti  annos  stetissel?  (D.  Martène,  Amplissima  Collectio, 
VIII,  col.  882.) 

5.  Une  médaille  frappée  après  le  traité  d'Arras  représente  Hercule,  c'est- 
à-dire  Charles  VII,  prêt  à  frapper  son  ennemi,  avec  cette  légende  ET  SPE 
lAM  PRiEGIPIT  HOSTEM  (Mézeray,  Hist.  de  Fr.,  édit.  de  1646,  iu-f%  II, 
86,  n»  9). 

6.  Journal  français,  190-191.  Quand  il  revint  d'Arras,  les  villes  lui  offrirent 
des  présents;  Senlis,  par  exemple,  600  saints  d'or  (Flammermont,  Institu- 
tions municipales  de  Senlis,  dans  le  45°  fascicule  de  la  Biblioth.  des  hautes 
études,  p.  252-235). 


234  LES  DUCS  d'orléans  et  d'anjou 

cil.  d'Orléans  et  René  d'Anjou.  Le  duc  d'Orléans  était  venu  à 
Calais,  avec  l'intention  de  travailler  à  la  paix  et  de  se  faire  com- 
prendre dans -le  traité.  La  rupture  des  négociations  engagées 
avec  les  Anglais  lui  enleva  tout  espoir.  Les  ambassadeurs  fran- 
çais avaient,  en  effet,  essayé  d'obtenir  sa  délivrance,  moyennant 
rançon  ;  mais  il  y  avait  tant  d'autres  difficultés  à  surmonter  que 
le  captif  aurait  lui-même  conseillé  au  duc  de  Bourbon  et  à 
Richemont  de  ne  pas  se  laisser  arrêter  par  la  considération  de 
ses  intérêts  personnels  K 

Quant  à  René  d'Anjou,  que  le  duc  de  Bourgogne  gardait  encore 
prisonnier,  il  avait  obtenu  que  ses  ambassadeurs  fussent  admis 
au  congrès  d'Arras.  Le  duc  de  Bourbon  et  le  comte  de  Riche- 
mont  mirent  tout  en  œuvre,  jusqu'au  dernier  moment,  pour 
négocier  sa  délivrance;  mais,  le  21  septembre,  le  duc  de  Bour- 
gogne fît  déclarer  par  son  chancelier  Nie.  Raulin  qu'il  n'avait 
pas  eu  et  n''avait  pas  l'intention  de  comprendre  le  duc  d'Anjou 
et  de  Bar  dans  le  traité  qu'on  allait  publier,  et  les  ambassadeurs 
français  furent  obligés  de  répéter  cette  même  déclaration  *. 
Ces  deux  échecs  n'avaient  pas  une  très  grande  importance;  ils 
n'étaient  pas  irréparables.  Quant  à  la  rupture  des  négociations 
avec  les  Anglais,  fallait-il  s'en  affliger?  Puisqu'ils  ne  voulaient 
pas  la  paix,  il  n'y  avait  plus  qu'à  les  vaincre.  C'est  à  quoi  s'ap- 
pliqua Richemont,  avec  une  ardeur  toute  nouvelle. 

1.  Gruel,  204.  J.  Stevenson,  I,  58-64.  Proceedings,  t.  IV,  préface,  p.Lxxvi. 
Lettres  des  rois,  t.  Il,  420,  433.  Rymer,  V,  1'"  partie,  p.  20. 

2.  Ms.  Lat.  1302  {Varia  acta  concilii  Basileensis),  î"  13.  D.  Calmet,  II, 
793.  Lecoy  de  La  Marche,  Le  roi  René,  I,  115-116.  Ms.  Colbert,  43  (Flandres), 
2°  partie,  f»  9. 


CHAPITRE  II 

LA   RÉDUCTION    DE    PARIS    (1436) 


Les  Anglais  reprennent  Saint-Denis.  —  Richemont  envoie  des  troupes 
dans  le  pays  de  Caux  révolté.  —  Il  fait  évacuer  les  places  de  la  Cham- 
pagne cédées  au  duc  de  Bourgogne.  —  Les  Ecorcheurs.  —  Charles  VII 
ratifie  le  traité  d'Arras.  —  Les  Anglais,  irrités  contre  le  duc  de  Bour- 
gogne, veulent  le  combattre  et  font  de  nouveaux  efforts  pour  continuer 
la  guerre  en  France.  —  Richemont  prépare,  avec  l'aide  de  Philippe  le 
Bon,  une  entreprise  sur  Paris.  —  Les  Français  et  les  Bourguignons 
s'emparent  de  Pontoise,  Vincennes,  Corbeil,  Saint-Germain,  Charealon. 
—  Richemont,  nommé  lieutenant  général,  s'approche  de  Paris.  —  Com- 
bat d'Epinay.  —  Conspiration  à  Paris.  —  Michel  de  Laillier.  —  Entrée 
du  connétable  à  Paris.  —  Capitulation  de  la  Bastille.  —  Etablissement 
d'un  gouvernement  français  â  Paris.  —  Procession  solennelle. 


Le  connétable  avait  hâte  de  quitter  Arras,  pour  aller  secourir 
le  maréchal  de  Rieux,  assiégé  dans  Saint-Denis  par  Th.  de  Scales, 
Talbot  et  Willoughby.  Secondé  par  Le  Bourgeois,  l'habile  ingé- 
nieur, par  Regnault  de  Saint-Jean  et  L.  de  Vaucourt  * ,  qui  périrent 
tous  deux  pendant  ce  siège,  par  Foulque  de  La  Belloseraye,  le 
maréchal  de  Rieux  résistait,  depuis  plus  d'un  mois  et  demi,  avec 
des  forces  très  insuffisantes,  à  toutes  les  attaques  des  Anglais, 
encore  aidés  par  les  Bourguignons  et  Yilliers  de  l'Isle-Adam; 

Le  bâtard  d'Orléans,  avec  le  duc  d'Alençon,  avait  fait  en  Nor- 
mandie une  diversion  qui  eut  pour  résultat  la  prise  du  pont 
de  Meulan  ^,  mais  non  la  délivrance  de  Saint-Denis.  Gomme 
il  marchait  vers  cette  ville  pour  la  dégager,  il  apprit  que  le 
maréchal  de  Rieux,  cédant  à  la  famine  plutôt  qu'à  l'ennemi, 
avait  promis  de  rendre  la  place  ',  s'il  n'était  pas  secouru  dans 

1.  Gruel,  p.  204,  confirmé  par  X^»  24,  au  jeudi  13  août  1444.  Voir  aussi 
Pièces  orig.,t.  530,  dossier  Du  Broullat  (n»  H955),  au  7  août,  et  ci-dessus,  p.  222. 

2.  Le  24  septembre,  d'après  le  Bourg,  de  Paris,  p.  308. 

3.  Le  24  septembre,  d'après  le  Bourg,  de  Paris,  p.  308.  Société  de  Vhist. 
de  Paris,  t.  V,  p.  255  (Flammermont). 


236  SOUMISSION  DU  PAYS  DE  CAUX  (143o,   OCT.) 

trois  semaines.  On  lui  accordait,  d'ailleurs,  les  conditions  les  plus 
honorables  *.  Dans  ces  circonstances,  le  bâtard  ne  jugea  pas  utile 
de  poursuivre  son  entreprise.  Cependant  le  connétable,  aussitôt 
la  paix  publiée,  était  parti  d'Arras  (le  jeudi  22  septembre),  où 
le  duc  de  Bourgogne  voulut  en  vain  le  retenir,  avec  les  autres 
ambassadeurs.  Il  avait  promis  de  secourir  le  maréchal  de  Rieux, 
et  rien  ne  pouvait  le  faire  manquer  à  cet  engagement. 

Arrivé  à  Senlis,  il  apprit  la  capitulation  de  Saint-Denis  ^.  Il 
s'avança  néanmoins  jusqu'auprès  de  cette  ville;  mais,  quand  il 
eut  reconnu  la  position  et  le  nombre  des  ennemis,  il  ne  voulut 
pas  risquer  une  attaque  téméraire.  Après  avoir  laissé  une  partie 
de  ses  troupes  aux  environs  de  Paris,  il  se  rendit,  avec  le  reste, 
à  Beauvais.  S'il  avait  pu  se  concerter  assez  tôt  avec  le  bâtard 
d'Orléans,  l'affaire  aurait  eu  sans  doute  une  meilleure  issue; 
toutefois  ce  ne  fut  qu'un  échec  sans  gravité  ;  les  Français  n'en 
continuèrent  pas  moins  de  menacer  les  abords  de  la  capitale  '. 

En  attendant  le  moment  favorable  pour  donner  suite  à  ses 
projets  sur  Paris,  qu'il  voulait  reprendre  aux  Anglais,  Riche- 
mont  organisa  d'autres  expéditions.  Il  envoya  le  maréchal  de 
Rieux  *  dans  le  pays  de  Caux,  où  l'insurrection  populaire  ne 
cessait  de  grandir.  Le  bâtard  d'Orléans,  qu'il  avait  trouvé  à  Beau- 
vais, fut  chargé  d'aller  combattre  les  Anglais  sur  la  rive  gauche 
de  la  Seine,  dans  la  Beauce  et  dans  la  Normandie. 

Le  maréchal  alla  se  joindre  à  Gh.  des  Marets,  qui  s'était  mis 
à  la  tête  des  Cauchois  révoltés,  avec  un  simple  paysan,  nommé 
Le  Carnier  (ou  Le  Gharuyer),  et  prit  la  direction  de  ce  mouve- 
ment, au  nom  du  roi.  Le  28  octobre,  ils  s'emparèrent  de  Dieppe, 
une  des  places  auxquelles  les  Anglais  tenaient  le  plus  ;  puis,  tou- 
jours renforcés  par  de  nouveaux  auxiliaires,  ils  continuèrent  la 
conquête  du  pays  de  Caux  par  la  soumission  de  Fécamp,  Harfleur, 
Montivilliers,  Lillebonne,  Tancarville  %  etc.,  pendant  que  le 


1.  Sur  la  conduite  du  marée,  de  Rieux,  voir  d'intéressants  détails  dans 
X2a  24  (au  jeudi  13  août  1444  et  au  jeudi  H  février  1444,  a.  st.). 

2.  Senlis  lui  donna  600  saluts  d'or  pour  secourir  Saint-Denis.  Flammer- 
mont,  dans  le  t.  V  de  la  Soc.  de  l'hist.  de  Pa7'is,  p.  275. 

3.  Sur  la  prise  de  Meulan  et  le  siège  de  Saint-Denis,  voir  Gruel,  204, 205; 
Journal  de  la  paix  d'Arras,  p.  104,  106;  Berry,  391;  Monstrelet,  V,  184-187; 
le  Bourg,  de  Paris,  307-309;  JJ  175,  n<'344;  JJ  177,  f"  104;Fr.  23772,  n"^  963, 
967-970,  973-999;  Fr.  26039,  n"  2372,  2373,  2390-2600,  2607;  Pièces  orig., 
t.  2007,  dossier  n"  46062,  pièce  2;  K  64,  n"  1»0;  J.  Chartier,  I,  p.  180-183  et 
208;  Martial  d'Auvergne,  I,  143-144. 

4.  Avec  Gilles  de  Saint-Simon  et  plusieurs  autres  gentilshommes  de  sa 
maison,  notamment  Artur  Brécart,  qui  épousa  la  fille  naturelle  du  conné- 
table. 

5.  Seine-Inférieure. 


LES  ÉCORCHEURS  237 

bâtard  d'Orléans  prenait  Verneuil  *,  menaçait  Evreux  et  répan- 
dait l'alarme  jusque  dans  la  grande  ville  de  Rouen  ^. 

Quant  à  Richement,  il  était  retourné  auprès  de  Philippe  le 
Bon,  à  Arras  '  (le  15  octobre),  pour  s'entendre  avec  lui  sur 
l'exécution  du  traité.  Il  fallait  faire  sortir  les  garnisons  françaises 
des  villes  qui  devaient  être  rendues  au  duc  de  Bourgogne,  et 
c'est  de  cela  qu'eut  à  s'occuper  le  connétable.  Déjà  il  avait  remis 
la  ville  de  Rue  *  aux  Bourguignons.  Le  17  octobre,  il  prit  congé 
de  son  beau-frère,  qui  partait  pour  Boulogne,  et  lui-même  alla 
d'abord  à  Reims  ^,  où  se  trouvaient  les  autres  ambassadeurs  fran- 
çais, puis  à  Dijon,  où  il  vit  le  cardinal  de  Sainte-Croix,  l'évéque 
d'Amiens  et  d'autres  envoyés  de  Philippe  le  Bon,  qui  se  ren- 
daient à  Florence,  pour  demander  au  pape  les  bulles  de  rati- 
fication du  traité  d'Arras  ^. 

Il  dut  rester  quelque  temps  en  Champagne,  pour  opérer  la 
remise  des  places  que  le  traité  donnait  au  duc  de  Bourgogne  ". 
Il  ne  fallut  pas  moins  que  sa  présence  et  toute  son  autorité  pour 
obliger  certains  capitaines,  comme  celui  de  Grandpré  *,  à  quitter 
leurs  villes  ^.  Cette  évacuation  devint  la  cause  de  grands  mal- 
heurs. Elle  jeta  sur  le  pays  une  multitude  de  gens  de  guerre 
qui,  n'ayant  pas  d'autre  occupation  ni  d'autres  moyens  d'exis- 
tence, se  mirent  aie  ravager  avec  une  telle  cruauté  que  le  peuple 
les  qualifia  du  nom  significatif  d'Écorcheurs  ^°.  Ils  formèrent  des 

1.  Le  duc  d'Alencon  avait  échoué  devant  cette  place  en  septembre 
(Fr.  26059,  n"  2612-2617). 

2.  Sur  cette  campagne,  voir  :  Berry,  p.  392;  Gruel,  205;  Monstrelet,  t.  V, 
199-203;  Basin,  I,  111-113;  Martial  d'Auvergne,  I,  147;  Lettres  des  rois,  t.  II, 
p.  435-36;  J.  Stevenson,  I,  424-29;  Bréquigny,  t.  81,  fo'  328-336;  D. 
Grenier,  XX  Us,  liasse  9,  f»  17  ;  Fr.  26060,  n»»  2657,  2662,  2676,  2679,  2685, 
2692-2696;  X2a  24,  au  13  août  1444  et  au  H  février  1444,  a.  st.  En  octobre, 
plusieurs  soldats  anglais  de  la  garnison  de  Gisors  furent  exécutés,  pour 
avoir  voulu  livrer  la  ville  aux  Français  (Fr.  26060,  n»  2654).  En  novembre, 
décembre  et  janvier,  les  Anglais  assiègent  Meulan  (Fr.  26060,  n"  2652,  2665, 
2690,  2789,2710,2727;  Fr.  25772,  n»»  1014,  1017,  1021,  1033;  Fr.  23773, 
nM067). 

3.  Tous  les  membres  du  congrès  étaient  alors  partis,  le  duc  de  Bourbon 
seulement  depuis  le  10  octobre. 

4.  Arrondissement  d'Abbeville. 

5.  Le  24  octobre,  d'après  J.  Chartier,  I,  215.  Il  était  à  Dijon  vers  la  fin  du 
mois  (M.  Canal,  371). 

6.  Journal  de  la  paix  d'Arras,  113-114.  M.  Canat,  371.  J.  Chartier,  I,  215. 

7.  Coll.  de  Bourg.,  100,  f°  247. 

8.  Arrondissement  de  Vouziers. 

9.  Perrinet  Grasset  refusa  de  rendre  La  Charité.  Il  fallut  négocier  avec 
lui  (Coll.  de  Bourgogne,  100,  p.  247). 

10.  «  Lesquels  on  nommoit,  en  commun  langaige,  les  Escorcheurs.  Et 
la  cause  pour  quoy  ils  avoient  ce  nom  si  estoit  pour  tant  que  toutes  gens 
qui  estoient  rencontrés  d'eulx,  tant  de  leur  party  comme  d'aultre,  estoienl 


238      CHARLES   VII   RATIFIE   LE  TRAITÉ   d'ARRAS    (1435,   10   DEC.) 

bandes  qui  avaient  pour  chefs  des  capitaines  royaux,  comme  le 
fameux  Antoine  de  Chabannes  et  deux  bâtards  de  Bourbon  *. 
Faute  d'argent,  le  connétable  ne  savait  comment  employer  ces 
auxiliaires  incommodes.  Il  envoya  bien  à  Dieppe  ceux  qu'il  jugea 
les  moins  dangereux,  avec  Chabannes,  Saintrailles,  Gauthier  de 
Brusac,  au  nombre  de  400  hommes  d'armes  et  de  600  archers; 
mais  il  en  resta  beaucoup  d'autres,  qui  répandirent  la  terreur  dans 
le  pays.  Richemont  faisait  pendre  sans  miséricorde  ceux  qu'on 
pouvait  saisir,  «  et  se  monstra  en  ce  le  dit  connestable  bon  justi- 
cier, et  aussi  il  en  avait  la  grâce  et  renommée  par  tous  pays  *  ». 
Quant  à  ceux  qu'il  avait  envoyés  dans  le  pays  de  Gaux,  ils  ne  se 
comportèrent  pas  mieux;  ils  coururent  la  campagne,  détrous- 
sant «  tout  au  net  ceux  qu'ils  pouvaient  atteindre,  tant  nobles 
comme  autres  ^  ».  Le  connétable  gémissait  de  ne  pouvoir  empê- 
cher ces  excès,  mais  le  moment  n'en  était  pas  encore  venu  *. 

Il  était  grand  temps  que  Richemont  revint  à  la  cour,  pour 
faire  ratifier  le  traité  d'Arras,  car  il  avait  été  stipulé  que  cette 
formalité  serait  remplie  avant  le  15  décembre,  et  le  duc  de 
Bourgogne  en  réclamait  l'accomplissement^.  Le  roi  ne  se  résigna 
qu'à  grand'peine  à  subir  les  dures  conditions  imposées  par  le 
duc  ;  pourtant  il  ratifia,  le  10  décembre  ^,  à  Tours,  les  engage- 

devestus  de  leurs  habillemens  tout  au  net  jusques  à  la  chemise.  »  (Mons- 
Irelet,  V,  317-318.)  Le  nom  d'Ecorcheurs  remplaça  celui  d'Armagnacs. 

1.  Alexandre  et  Guy  de  Bourbon,  fils  du  duc  Jean  !«'  de  Bourbon  (An- 
selme, I,  304).  Voir  A.  Tuetey,  les  Écorcheurs  sous  Charles  VU,  Montbé- 
liard,  1874,  2  vol.  in-8,  t.  I,  au  commencement,  surtout  p.  11  et  suiv. 

2.  J.  Chartier,  I,  217.  Martial  d'Auvergne,  après  avoir  mentionné  les 
ravages  des  Ecorcheurs  en  Champagne,  ajoute  (t.  1, 147,  et  Fr.  5054,  f»  87  v°)  : 

Le  Roy  tantost  y  envoya 
Le  connestable  pour  les  prandre. 
Qui  bien  tost  les  en  envoya. 
Faisant  les  ungz  nayer  et  pendre. 

3.  Monstrelet,  V,  199.  Tuetey,  les  Ecorcheurs,  I,  13. 

4.  Gruel,  205;  J.  Chartier,  I,  215-217.  D'après  J.  Chartier,  I,  216.  Riche- 
mont revint  à  Reims  le  2  décembre.  C'est  peut-être  alors  qu'il  fit  saisir, 
pour  ses  démérites,  jusque  dans  la  cathédrale  de  Reims,  un  individu  nommé 
Etienne  d'Orme,  qui  s'y  était  réfugié  (voir  JJ  176,  f"  311  v°). 

5.  Il  envoya  pour  cela  J.  deCroy  (Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  II,  559;  voir, 
à  la  Bibl.  nat.,  le  n°  406  de  la  galerie  des  Chartes). 

6.  Le  10  décembre,  Charles  VII  ordonne  aux  baillis  de  Mâcon,  Sens, 
Auxerre    de   mettre  le  duc  de  Bourgogne  en  possession   de    ces  comtés 

*  (M.  Canat,  371:  Mélanges  de  Colbert,  355,  n°,206;  voir  dans  le  Ms.  Brienne 
197,  f"'  320-344,  une  copie  du  traité  avec  la  ratification  en  date  du  10  décem- 
bre, à  Tours).  D'après  Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  tous  les  seigneurs  de  la 
cour  de  France  jurèrent  le  traité,  excepté  Dunois,  qui  ne  le  voulait  pas  jurer 
sans  l'autorisation  du  duc  d'Orléans  et  du  comte  d'Angoulême  (Le  Fèvre 
de  Saint-Remy,  II,  365;  01.  de  La  Marche,  édit.  du  Panthéon  litt.,  p.  365). 


IRRITATION  DES  ANGLAIS  CONTRE  PHILIPPE  LE  BON  239 

ments  pris  par  ses  ambassadeurs.  Le  pape  Eugène  IV  et  le  con- 
cile de  Bâle  confirmèrent  aussi  ce  traité  *. 

Le  connétable  alla  encore  passer  quelques  jours  à  Parthenay  ^, 
où  vint  aussi  sa  belle-sœur,  la  comtesse  d'Etampes,  puis  à 
Vannes,  auprès  de  son  frère,  le  duc  de  Bretagne  ^. 

Loin  d'écouter  les  exhortations  de  Philippe  le  Bon,  des  cardi- 
naux et  du  pape,  qui  le  pressaient  de  faire  la  paix  avec  Charles  VII, 
le  gouvernement  anglais  ne  respirait  que  guerre  et  vengeance. 
La  défection  de  son  allié  le  plus  indispensable  portait  un  coup 
mortel  à  ses  intérêts  et  à  son  orgueil.  Un  sentiment  d'indignation 
et  de  haine  contre  Je  duc  de  Bourgogne  animait  la  nation  tout 
entière.  Les  ambassadeurs  qu'il  envoya  notifier  le  traité  à 
Henri  VI  furent  exposés  aux  insultes  et  aux  menaces  d'une  mul- 
titude furieuse.  Philippe  aurait  mieux  aimé  garder  la  neutralité 
que  de  combattre  ses  anciens  amis;  mais,  par  leurs  attaques 
continuelles,  ils  le  contraignirent  à  leur  faire  la  guerre  et  à  de- 
venir l'allié  de  Charles  VII.  La  France  ne  pouvait  qu'y  gagner, 
et  le  roi  ne  négligea  rien  pour  s'attacher  un  auxiliaire  aussi  pré- 
cieux. Il  écrivit  lui-même  au  duc  une  lettre  des  plus  affectueuses, 
et  on  parla  dès  lors  du  mariage  de  Catherine  de  France  avec  le 
comte  de  Charolais  *. 


1.  Voir  Ms.  Colbert  43  (Flandres),  2«  partie,  f"  8  et8  v»,  et  t.  100  de  la  coll. 
de  Bourg,,  f"'  248  et  249. 

2.  11  semble  certain  que  Richement  ne  retourna  pas  dans  le  pays  de 
Caux  après  avoir  quitté  Beauvais,  quoique  Monstrelet  le  dise  au  ch.  CXGIII, 
t.  V,  202,  mais  qu'il  y  vint  après  la  prise  de  Harfleur,  de  Tancarville,  etc.,  et 
qu'après  sa  venue  les  Français  prirent  encore  Aumale  et  plusieurs  autres 
villes.  Le  connétable  envoya  bien  au  maréchal  de  Rieux  quelques-uns  de 
ses  officiers,  Olivier  de  Coëtivy  et  le  bâtard  Chapelle;  mais  il  ne  retourna 
pas  lui-même  dans  le  pays  de  Caux.  Voir  Gruel,  205. 

3.  Cette  visite  causa  de  vives  inquiétudes  aux  Anglais".  Ils  crurent  même 
que  le  connétable  allait  relever  les  remparts  de  Pontorson  et  de  Saint- 
James-de-Beuvron."  Après  avoir  perdu  l'alliance  de  Philippe  le  Bon,  ils  crai- 
gnaient de  perdre  aussi  celle  de  Jean  V.  «  J.  Leber  est  allé,  par  le  com- 
mandement du  lieutenant  et  viconte  d'Avranches,  à  Venues  en  Bretaigne, 
enquérir  et  sçavoir  des  nouvelles  de  Artur  de  Bretaigne,  qui  estoit  venu 
audit  lieu  de  Venues,  devers  monseigneur  le  Duc,  et  que  l'on  disoit  qu'il 
remparoit  Pontorson  et  Saint-James-de-Beuvron;  auquel  voyage  il  a  vac- 
qué  neuf  jours,  depuis  le  13  janvier  1435  (a.  st.),  »  (Fr,  26062,  n''3137.)  Un 
autre  messager  est  envoyé  à  Fougères  et  à  Vitré,  pour  savoir  si  l'on  retn- 
pare  Saint-James-de-Beuvron  et  Pontorson  [Ibid.). 

.  4,  Voir  dans  D,  Martène,  AmpUssima  collectio,  VIII,  col,  861-864,  les  let- 
tres adressées,  le  26  septembre,  à  Henri  VI  et  au  cardinal  d'Angleterre 
par  le  cardinal  de  Chypre  et  le  duc  de  Bourgogne  pour  les  exhorter  à  la 
paix.  Voir  aussi,  dans  le  même  vol.,  col.  871-72,  une  lettre  de  Philippe  le 
Bon  au  cardinal  de  Chypre;  dans  Monstrelet,  la  scène  curieuse  et  vivante 
décrite  au  chap.  CXCI  du  livre  II,  t.  V,  p.  190;  dans  Le  Fèvre  de  Saint- 
Remy,  t.  II,  les  p.  363  et  377;  dans  Stevenson,  t.  II,  la  préface,  p.  x-xv,  et 


240  NOUVEAUX  EFFORTS  DE  l'aNGLETERRE   (1436) 

Il  était  certain  que  Henri  VI  ne  profiterait  point,  pour  se  déci- 
der à  faire  la  paix,  du  délai  que  les  ambassadeurs  français 
s'étaient  engagés  à  lui  laisser,  jusqu'au  1"  janvier  1436  K  L'exas- 
pération excitée  par  le  traité  d'Arras  arrachait  à  la  nation 
anglaise  de  nouveaux  sacrifices.  Le  roi  écrivait  aux  Etats  de  Nor- 
mandie qu'il  voulait  «  bouter  loing  la  guerre  et  mettre  sus  une 
très  grosse  et  puissante  armée  et  la  plus  grosse  qui,  de  mémoire 
d'homme  passa  au-delà  la  mer  ^.  »  Le  duc  d'York,  désigné  pour 
succéder  à  Bedford  ',  les  comtes  de  Somerset  *,  de  Suffolk,  de  Sa- 
lisbury,  devaient  amener  ces  troupes  en  France  et  se  joindre  à 
ïalbot,  à  Willoughby,  à  Fastolf,  à  Th.  de  Sc.ales  et  à  Fauquem- 
berge  ^. 

Le  connétable  voulait  se  hâter  d'agir  avant  l'arrivée  de  ces 
renforts .  Il  se  proposait  de  diriger  lui-même  les  opérations  dans 
l'Ile -de-France,  tandis  que  La  Hire  et  Saintrailles  occuperaient 
les  ennemis  dans  la  Normandie  et  que  le  duc  d'Alençon  Ch. 
d'Anjou  et  les  sires  de  Lohéac  et  de  Bueil  feraient  une  autre 
diversion  vers  les  marches  de  Bretagne,  dans  le  Cotentin  ^.  Il  fal- 

surtout,  dans  le  Ms.  fr.  1278  (f°'  40-43),  un  mémoire  qui  paraît  avoir  été 
rédigé  par  la  chancellerie  de  Bourgogne.  Le  duc  de  Bourgogne  ayant 
occupé  Saint-Quentin,  Corbie,  Amiens,  Saint-Riquier,  Abbeville,  Doullens, 
Montreuil,  qui  avaient  appartenu  à  la  couronne  d'Angleterre,  l'indignation 
publique  fut  au  comble.  Henri  VI  excita  l'empereur  Sigismond,  le  duc  de 
Bavière,  l'archevêque  de  Cologne,  à  faire  la  guerre  au  duc  de  Bourgogne; 
la  garnison  de  Calais  attaqua  ses  Etats,  au  grand  détriment  du  commerce 
de  la  Flandre.  Voir  Stevenson,  loco  citato  ;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  222  ; 
Polydore  Vergil,  édit.  Hellis,  p.  57,  58.  Voir  dans  Le  Fèvre  de  Saint-Remy 
la  lettre  de  Charles  VII  au  duc  de  Bourgogne  en  date  du  4  février.  Le  roi 
lui  annonce  la  naissance  de  son  dernier  fils;  il  lui  apprend  qu'il  l'a  choisi 
comme  son  compère,  pour  donner  son  nom  à  cet  enfant;  enfin  il  lui  de- 
mande la  délivrance  du  roi  de  Sicile.  —  Voir  la  lettre  du  roi  et  la  réponse 
de  Philippe  le  Bon  (Le  Fèvre  de  Saint-Remy,  t.  II,  363-373).  D'après  J. 
Chartier  (I,  219-220),  cet  enfant,  nommé  Philippe,  comme  le  duc  de  Bour- 
gogne, son  parrain,  naquit  à  Chinon,  le  4  février,  et  ne  vécut  que  quatre 
mois. 
'    1.  Ms.  Colbert  43  (Flandres),  2"  partie,  f<"  7  v»  et  8,  et  Ms.  latin  9868,  f»  6. 

2.  Lettres  des  rois,  II,  423-431.  Proceedings,  IV,  préface,  p.  xcvn,  et  p.  316- 
329.  Moreau,  705  (Bréquigny,  81),  f»'  328-340. 

3.  Moreau,  70o,  f-'  342-343. 

4.  J.  Beaufort,  comte  de  Somerset  et  de  Mortain,  petit-neveu  de  Henri  IV. 

5.  W.  Nevil,  lord  Falcombridge,  ou  Fauquemberge  ou  Faucomberge. 

6.  Voy.  Fr.  25772,  n"  1043.  Fr.  23773,  n»  1103.  Bréquigny,  81,  f"'  337-340, 
ou  Lettres  des  rois  et  reines.  H,  438-441.  Fr.  26060,  n»*  2753,  2781,  2788, 
2802,  2802*.  Fr.  26061,  n»'  2810,  2814,  2816,  2836-2840.  Pendant  que  Riche- 
mont  entrait  dans  Paris,  le  duc  d'Alençon,  Ch.  d'Anjou  et  d'autres  capi- 
taines français  s'approchaient  de  Granville  (J.  Stevenson,  t.  II,  appendice 
à  la  préface,  p.  33,  62,  et  Fr.  26060,  n»  2802^).  Fastolf,  capitaine  de  Caen, 
et  Th.  de  Scales,  grand  sénéchal  de  Normandie,  furent  ainsi  retenus  de 
ce  côté.  Talbot,  capitaine  de  Rouen  et  lieutenant  du  roi  sur  le  fait  de  la 


RICBEMO?«T  PRÉPARE   LE   RECOUVREMENT  DE  PARIS   (1436)      241 

lait  aussi  profiter  du  mécontentement  que  l'Angleterre  avait 
soulevé  dans  les  pays  soumis  à  sa  domination  par  le  refus  de 
conclure  la  paix.  Le  conseil  du  roi  Henri  VI  en  France  avait  beau 
lui  faire  envoyer  des  protestations  de  fidélité  par  les  Etats  de 
Normandie,  cet  enthousiasme  de  commande  ne  trouvait  aucun 
écho  dans  le  peuple;  d'ailleurs  les  Anglais  n'observaient  plus 
les  ménagements  que  Bedford  leur  imposait  jadis,  et  l'esprit  de 
révolte  se  propageait.  Les  insurgés  du  pays  de  Caux  furent 
exterminés  devant  Caudebec  (29  janvier  *),  et  Gilles  de  Saint- 
Simon,  lieutenant  du  connétalile,  fut  fait  prisonnier  dans  cette 
expédition;  mais  ce  désastre  n'empêcha  pas  une  autre  révolte 
dans  le  Gotentin  ^  et,  si  La  Hire  fut  battu  par  Th.  de  Scales  près 
de  Rouen  ^,  les  Français  purent  néanmoins  entrer  dans  l'impor- 
tante ville  de  Pontoise,  grâce  à  une  rébellion  des  habitants,  qui 
appelèrent  Villiers  de  L'Isle-Adam  *.  D'autre  part,  les  Français 
avaient  pris  le  pont  de  Gharenton  et  le  château  de  Vincennes, 
Gorbeil,  Brie-Comte-Robert,  Saint-Germain-en-Laye  (janvier- 
mars),  et  occupé  ainsi  les  abords  de  Paris  ». 

Le  moment  semblait  enfin  venu  d'enlever  cette  ville  aux  en- 
nemis. G'était  le  plan  du  connétable,  comme  c'avait  été  celui  de 
Jeanne  d'Arc.  Les  Anglais  étaient  détestés  plus  que  jamais  à  Paris, 
depuis  qu'ils  avaient  refusé  de  faire  la  paix  au  congrès  d'Arras  *. 
Les  Français,  maîtres  de  Harfleur,  de  Tancarville,  deLillebonne, 
de  Meulan,  de  Gorbeil,  de  Melun,  de  Lagny,  de  Pontoise,  tenaient 
la  Seine,  la  Marne,  l'Oise,  et  empêchaient  les  vivres  d'arriver 
jusqu'à  Paris  ';  la  disette  se  faisait  cruellement  sentir;  le  peuple 
s'agitait,  tout  prêt  à  la  révolte.  Une  commission,  comprenant  le 
prévôt  des  marchands,  Hugues  Le  Coq,  deux  membres  du  Parle- 
ment, deux  du  grand  Gonseil,  deux  de  la  Chambre  des  comptes. 


guerre  entre  Seine,  Somme  et  Oise,  était  aussi  retenu  en  Normandie  par 
la  crainte  d'une  attaque  des  Français  sur  RoueTi  (Fr.  26060,  n»  2805,  et  Fr. 
26061,  n»' 28019,  2812,  2824,  2863,  2868,  69,  71  ;  Fr.  25772,  n»»  1053-1037). 

1.  Fr.  26060,  n"  2764*,  2777,  et  Fr.  23772,  n»  1043. 

2.  Fr.  26060,  n»»  2708,  2736,  2737,  2784,  et  Fr.  26061,  n»  2923. 

3.  Fr.  25772,  n-  1043;  Fr.  26060,  n"  2720,  2724-34  et  27643. 

4.  Fr.  26061,  n»'  2838,  2896;  Fr.  26062,  n-  3117.  J.  Ghartier,  I,  217-218. 
Villiers  de  L'Isle-Adam  avait  été  capitaine  de  Pontoise  en  1418  (Bourg,  de 
Paris,  p.  88  et  note  2).  En  1420,  il  avait  laissé  surprendre  cette  ville  par 
les  Anglais  (Anselme,  VII,  10-11). 

5.  Félibien,  II,  822.  Basin,  I,  121-122.  Berry,  392-93.  P  1363»,  cote  1156, 
n»*  47  et  30.  Le  Bourg,  de  Paris,  311.  Martial  d'Auvergne,  I,  147. 

6.  Le  Bourg,  de  Paris,  319-320.  De  Beaucourt,  Charles  Vil,  t.  II,  234. 

7.  Fr.  26060,  n"  2747.  Les  Français,  qui  occupent  Harfleur,  Fécamp,  Tan- 
carville, Lillebonne,  Meulan,  font  des  courses  sur  mer,  sur  la  Seine,  pillent 
les  marchands  et  rendent  presque  impossibles  les  communications  entre 
Harfleur  et  Paris.  Voir  aussi  le  Bourg,  de  Paris,  p.  311,  note  5. 

RiCBEMONT.  16 


242   RICHEMONT.  NOMMÉ  LIEUTENANT  GÉNÉRAL  (1436,  8  MARS) 

deux  du  Ghàtelet,  se  tenait  en  permanence  à  l'hôtel  de  ville,  dès 
le  milieu  de  janvier,  pour  exercer  une  surveillance  inces- 
sante. 

Le  chancelier  Louis  de  Luxembourg,  rappelé  en  hâte,  contrai- 
gnit, sous  les  peines  les  plus  sévères,  tous  les  Parisiens  à  jurer 
de  nouveau  fidélité  à  Henri  VI,  parce  que  ceux  qui  avaient  déjà  fait 
ce  serment  se  disposaient  à  seconder  les  ennemis  du  roi  ^  Le  Con- 
seil avait  même  écrit  au  duc  de  Bourgogne  et  publié  sa  réponse 
(18  février),  pour  montrer  aux  Parisiens  qu'ils  ne  devaient  pas 
compter  sur  lui;  mais  ils  savaient  bien  à  quoi  s'en  tenir  sur  les 
intentions  de  ce  prince,  toujours  si  populaire  parmi  eux.  Ils 
étaient  décidés  à  se  soulever  pour  lui  et  pour  son  allié,  le  roi  de 
France,  dès  que  leurs  troupes  paraîtraient  devant  la  ville  ^. 

Déjà  Philippe  le  Bon  se  concertait  avec  Charles  VII  pour 
encourager  les  Parisiens  à  la  révolte  et  pour  seconder  leurs 
efforts  ^  Le  28  février,  des  lettres  de  rémission  furent  rédigées  à 
Poitiers,  au  nom  du  roi,  et  à  Bruges,  au  nom  de  Philippe  le 
Bon.  Cette  amnistie  s'appliquait  également  à  toutes  les  autres 
villes  qui  voudraient  se  soumettre  au  roi*.  Dans  le  même  temps, 
le  connétable  revenait  à  Poitiers,  où  se  trouvaient  aussi  les  prin- 
cipaux capitaines  et  conseillers  de  Charles  VII,  la  reine  Yolande, 
les  ducs  de  Bourbon  et  d'Alençon,  Ch.  d'Anjou,  comte  de  Mor- 
tain,  le  comte  de  Vendôme,  le  bâtard  d'Orléans,  le  maréchal  de 
La  Fayette,  le  maître  des  arbalétriers,  les  sires  de  Bueil  et  de 
Gaucourt  (3  mars)  ^.  Bientôt  Charles  VII,  par  lettres  du  8  mars, 
nomma  le  comte  de  Richemont  son  lieutenant  général  dans 
rile-de-France,  la  Normandie,  la  Champagne  et  la  Brie,  avec  des 
pouvoirs  souverains  ^.  Il  fut  décidé  que  le  connétable  se  rendrait 
dans  l'Ile-de-France,  pour  diriger  l'entreprise  qu'on  devait  faire 

1.  X'a  1481,  aux  dates  des  12,  14  janvier,  11,  18  février  et  15  mars,  f»' 112- 
118.  XI*  8605,  f<"  32  v»,  33.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  311  et  note  1,  p.  313. 

2.  Xi3  1481,  ibidem,  et  Félibien,  II,  p.  822. 

3.  En  janvier,  J.  Viguier,  huissier  d'armes  et  valet  de  chambre  du  duc 
de  Bourgogne,  est  envoyé  à  Tours  vers  le  roi,  pour  de  grandes  et  impor- 
tantes affaires  (Collect.  de  Bourg.,  t.  100,  f"  247;  voir  aussi  Colbert  VC, 
252,  fo  22  v).  D'après  Anseline,  I,  231  232,  235,  Charles  d'Anjou  aurait  été 
nommé  gouverneur  et  capitaine  de  Paris  par  lettres  du  29  janvier  1436. 

4.  K  949,  n"'  24,  25,  26,  27.  K  69,  n»  21.  Ces  lettres  sont  aussi  dans  Go- 
defroyi  p.  795-96,  dans  Félibien,  etc. 

5.  K  949,  n»  26,  voir  au  dos  de  cette  pièce.  Les  États  de  Languedoil 
étaient  alors  réunis  à  Poitiers.  Ils  octroyèrent  une  taille  de  200  000  1.  et 
consentirent  au  rétablissement  des  aides  pour  la  guerre,  qui  avaient  été 
abolies  depuis  que  le  roi  avait  quitté  Paris  (Ordonnances  XIII,  211  ;  Fr. 
26060,  n»  2769,  et  A.  Thomas,  t.  24  du  Cabinet  hist.,  année  1878). 

6.  Blanchard,  Compilation  chronologique,  Paris,  1715,  2  vol.  in-f»,  col. 
249.  Mémoires  de  la  Soc.  de  Vhist.  de  Paris,  I,  31.  Vallet  de  V.,  Charles  VII, 
t.  II,  349-350.  Append.  LXIII.  Xi'  4797,  f  334. 


IL  s'approche  de  paris  (1436,  avril)  243 

sur  Paris  avec  les  Bourguignons.  S'il  faut  en  croire  son  biogra- 
phe, il  ne  reçut  du  roi  que  i  000  francs,  pour  cette  mémorable 
expédition,  et  les  grands  seigneurs  qui  devaient  l'accompagner, 
comme  le  duc  de  Bourbon,  le  comte  de  Vendôme,  le  chancelier, 
le  quittèrent  pour  retourner  à  la  cour  *. 

Au  départ,  il  n'avait  que  60  lances;  mais  à  Lagny,  où  il  arriva 
le  dimanche  des  Rameaux  [i^^  avril  1436),  il  trouva  une  nom- 
breuse compagnie  ,  sous  les  ordres  de  Jean  Foucault  et  de 
Mahé  Morillon.  Il  envoya  aux  garnisons  de  Champagne  et  de 
Brie  et  aux  autres  troupes  qui  tenaient  les  champs  l'ordre  de 
venir  le  rejoindre  à  Pontoise,  où  il  se  rendit  le  mardi  de  la 
semaine  sainte.  Le  maréchal  de  L'Isle-Adam  et  d'autres  capi- 
taines bourguignons,  les  seigneurs  de  Varambon,  de  Ternant, 
de  Lalain,  qui  occupaient  Pontoise,  vinrent  au-devant  de  lui,  et 
le  bâtard  d'Orléans  lui  amena  quelques  troupes  de  la  Beauce. 
Le  connétable  réunit  ainsi  5  à  6000  hommes,  tant  Français  que 
Bourguignons,  et  il  se  trouva  en  état  d'agir.  Pendant  toute  la 
semaine  sainte,  ses  gens  furent  en  armes,  toujours  prêts  à  com- 
battre. 

Les  Anglais  de  Paris  avaient  aussi  reçu  des  renforts,  amenés 
tout  récemment  d'Angleterre  par  Thomas  de  Beaumont.  Gomme 
l'agitation  du  peuple  et  le  voisinage  de  l'armée  franco-bourgui- 
gnonne leur  faisaient  craindre  une  tentative  sur  Paris,  ils  réso- 
lurent de  la  prévenir.  Le  mardi  de  Pâques  (10  avril),  ils  allè- 
rent, en  grand  nombre,  piller  Saint-Denis,  qui  pouvait  être 
occupé  d'un  moment  à  l'autre  par  les  Français.  Ils  n'épargnè- 
rent pas  plus  l'abbaye-  que  la  ville.  Ils  ne  gardèrent  que  la 
tour  du  Salut  ou  du  Venin,  qui  était  bien  fortifiée  *.  Ce  jour- 
là  même,  le  connétable,  qui  voulait  se  rapprocher  de  Paris, 
avait  envoyé  ses  fourriers,  avec  Le  Bourgeois,  Mahé  Morillon, 
J.  Foucault  et  environ  300  hommes  à  Saint-Denis,  pour  y  faire 
préparer  ses  logements.  Il  se  disposait  à  suivre  cette  petite 
troupe,  avec  le  reste  de  ses  gens.  Les  sentinelles  anglaises, 
ayant  aperçu  cette  avant-garde,  donnèrent  l'alarme.  Aussitôt 

1.  «  Le  roi  et  les  prochains  de  son  conseil  n'avaient  pas  grant  volonté 
d'eulx  armer  et  de  faire  la  guerre  en  leurs  personnes.  Et,  par  ce,  les  sei- 
gneurs de  son  sang  estans  par  deçà  Saine,  les  ducs  d'AIençon,  de  Bourbon 
et  messire  Charles  d'Anjou  s'en  sont  passez  légièrement  et  ont  tout  lessié 
démener  la  guerre  par  delà  Saine  au  conte  de  Richemont,  connestable  de 
France,  et  à  de  simples  capitaines  de  très  grant  courage  et  de  bon  vou- 
loir »  (comme  La  Hire,  Saintrailles)  [voy.  P.  de  Cagny,  Ms.  Duchesne,  48, 
f°  100].  Gruel,  p.  206,  mentionne  simplement  le  fait,  sans  aucune  idée  de 
blâme.  Le  28  avril,  le  roi  donnait  cependant  2  000  moulons  d'or  à  Ch. 
d'Anjou  (Fr.  25710,  n»  96). 

2.  Voir  le  curieux  récit  du  Bourg,  de  Paris,  p.  313-314.. 


244  COMBAT  d'épinay  (1436,  10  avril) 

Th.  de  Beaumont  et  tous  les  siens  «  saillirent  à  l'escarmouche  *  ». 

Ils  étaient  au  nombre  de  700  à  800  combattants  ^  En  voyant 
une  si  grande  compagnie,  Le  Bourgeois  dépêcha  un  messager  au 
connétable,  qui  était  encore  à  Pontoise,  pour  lui  demander  ren- 
fort. Aussitôt  Richemont  envoya  le  sire  de  Rostrenen  et  Villiers 
de  L'Isle-Adam.  Gomme  celui-ci  lui  affirmait  qu'il  ne  pouvait 
faire  aucun  mal  aux  Anglais  dans  la  position  qu'ils  occupaient, 
eût-on  10  000  hommes  à  lancer  contre  eux  :  «  Allez  toujours, 
dit  le  connétable,  allez  devant,  pour  entretenir  Tescarmouche; 
Dieu  nous  aidera.  »  Le  sire  de  Ternant  ne  voulait  pas  marcher 
sans  avoir  reçu  la  solde  due  à  ses  troupes.  Il  fallut  que  le  con- 
nétable s'obligeât  envers  lui  pour  une  somme  de  i  000  écus. 

Cependant  un  combat  opiniâtre  s'était  engagé  près  d'Bpinay, 
à  quelque  distance  de  Saint-Denis.  Les  Anglais,  protégés  par  un 
ruisseau,  gardaient  un  petit  pont,  par  où  l'on  pouvait  les  atta- 
quer. Les  Français  avaient  plusieurs  fois  pris  et  perdu  ce  pont  ; 
L'Isle-Adam  avait  failli  succomber,  et  les  ennemis  gagnaient  du 
terrain,  quand  le  conné|.able  arriva,  par  un  chemin  couvert, 
avec  ses  troupes.  A  cette  vue,  les  Anglais  reculèrent  pour  se 
retrancher  derrière  le  ruisseau  et  défendre  le  pont;  mais  les 
Français  et  les  Bourguignons  les  chargèrent  à  pied  et  à  cheval 
avec  une  telle  impétuosité  qu'ils  furent  rompus  et  mis  en  dé- 
route. Trois  à  quatre  cents  périrent  ;  beaucoup  d'autres  furent 
pris  et,  parmi  eux,  leur  chef,  Thomas  de  Beaumont,  que  Jean  de 
Rosnivinen  fit  prisonnier.  Quelques-uns  se  réfugièrent  à  Saint- 
Denis,  dans  la  tour  du  Salut;  les  autres  s'enfuirent  à  Paris, 
poursuivis  jusque  sous  les  murs  de  cette  ville,  si  bien  qu'il  y  en 
eut  de  tués  à  la  barrière  et  au  bord  des  fossés.  Peu  s'en  fallut 
que  le  connétable  entrât  ce  jour-là  dans  Paris.  Il  n'avait  pas 
assez  de  troupes  pour  exécuter  cette  entreprise;  mais  elle  fut 
certainement  facilitée  par  cette  petite  victoire ,  qui  répandit 
l'effroi  parmi  les  Anglais  et  la  joie  parmi  les  Parisiens.  Le 
moindre  échec  aurait  pu,  au  contraire,  tout  compromettre  ^. 

Après  le  combat,  les  Bourguignons  retournèrent  à  Pontoise  ; 
le  connétable  alla  loger  à  Saint-Denis.  Il  assiégea  aussitôt  la 
tour  du  Salut  *  et  envoya  chercher  au  bois  de  Vincennes  deux 

1.  Grue],  206.  Martial  d'Auvergne,  I,  148. 

2.  Cagny  dit  1  000  à  1  200  h.;  Berry,  envii'on  300;  le  Bourg,  de  Paris,  60O 
à  800;  J.  Chartier,7  à  800  ;  Monstrelet,  600. 

3.  Voy.  Monstrelet,  Y,  217,  et  le  Bourg,  de  Paris,  toujours  disposés  à 
donner  le  premier  rôle  aux  Bourguignons,  et  ici  à  L'Isle-Adam  ;  mais  les  au- 
tres chroniqueurs,  Berry,  Cagny,  J.  Gtiartier,  l'attribuent  au  connétable.  Le 
Bourg,  de  Paris,  314.  Berry,  p.  393;  Cagny,  f»  100  V  et  101;  Gruel,  206-207. 

4.  La  tour  du  Salut  était  aussi  appelée,  improprement,  tour  du  Velin  ou 
du  Venin.  D.  Godefroy,  Hist.  de  Charles  VU,  p.  322;  J.  Chartier,  I,  221. 


COMPLOT  DE  MICHEL   DE   LAILLIER  A   PARIS  245 

bombardes  pour  la  battre  en  brèche.  Dans  la  nuit  du  mercredi, 
il  reçut  de  Paris  les  nouvelles  qu'il  attendait.  On  lui  mandait 
qu'il  pouvait  venir,  que  tout  était  prêt,  qu'on  lui  ouvrirait  une 
des  portes  de  la  ville,  du  côté  de  Saint-Marcel.  Il  fut  convenu 
que  l'entreprise  aurait  lieu  le  surlendemain,  au  matin.  Laissant 
à  Saint-Denis  son  lieutenant,  le  sire  de  La  Suze,  son  maître 
d'hôtel,  Pierre  du  Pan,  et  tous  les  routiers,  avec  ordre  de  con- 
tinuer le  siège  et  de  ne  pas  s'en  écarter,  il  partit,  de  grand 
matin,  pour  Pontoise,  où  étaient  L'Isle-Adam  et  les  autres  capi- 
taines bourguignons.  De  là,  il  envoya  Mahé  Morillon  et  son  frère 
GeofTroy,  avec  400  hommes  de  pied,  qu'ils  devaient  mettre  en 
embuscade  dans  le  village  de  Notre-Dâme-des-Ghamps,  puis  il 
alla  jusqu'à  Poissy  pour  passer  la  Seine  et  rallier  les  troupes 
amenées  par  le  bâtard  d'Orléans.  Après  avoir  rassemblé  toutes 
ses  forces,  il  partit  de  Poissy  le  jeudi  soir,  12  août,  à  la  fin  du 
jour,  et  chevaucha  toute  la  nuit,  pour  arriver  aux  portes  de 
Paris  avant  le  lever  du  soleil. 

A  Paris,  le  peuple,  qui,  depuis  trois  mois,  était  surexcité  par 
une  agitation  continuelle,  n'attendait  qu'un  signal  pour  prendre 
les  armes.  Un  complot  s'était  formé,  dans  lequel  étaient  entrés 
plusieurs  des  principaux  bourgeois  de  Paris,  Michel  de  Laillier 
et  son  fils  Jean  \  Pierre  de  Lancras,  Thomas  Pigache,  Nicolas 
de  Louviers,  Jacques  de  Bergières,  Jean  de  La  Fontaine,  etc.  *. 
Ils  avaient  renouvelé,  le  15  mars,  le  serment  de  fidélité  exigé 
par  le  chancelier  Louis  de  Luxembourg  ;  quelques-uns  d'entre 
eux,  comme  M.   de  Laillier^,   conseiller  à   la   Chambre   des 

1.  Parmi  ceux  qui  firent  le  serment  du  15  mars,  on  trouve  Jean  de  Lail- 
lier,avocat  au  Parlement  (voy.  Reg.du  Pari,  et  Félibien).  Sur  M.  de  Laillier, 
voir  Simon  Fournival,  le  Livre  des  trésoriers,  Paris,  1655,  in-f»,  p.  13,  et 
Mlle  Denjs,  Armoriai  de  la  Chambre  des  comptes,  Paris,  1780,  petit in-4,  p.  53, 
56.  60.  Voy.  ci-dessus,  p.  242,  notes  1  et  2. 

2.  A  ces  noms,  cités  par  Félibien,  il  faut  ajouter  :  Jean  de  Belloy,  Nie. 
de  Neufville,  Pierre  de  Landes,  Jean  de  Grantrue,  qui  furent  élus  éche- 
vins  le  23  juillet  1436  (le  Bourg,  de  Paris,  p.  315,  notes  1  et  2  ;  KK  1009, 
f"  5  v);  Jean  Auger,  qui  fut  nommé  maître  extraordinaire  à  la  Chambre 
des  comptes  le  20  avril,  en  considération  des  services  qu'il  avait  rendus 
pour  chasser  les  Anglais  (voy.  V Armoriai  de  la  Chambre  des  comptes,  par 
Mlle  Denys,  p.  122). 

3.  Richemont  avait  peut-être  connu  M.  de  Laillier  quand  il  était  auprès 
du  Dauphin,  en  1413-1415  (LeFèvre  de  Saint-Remy,  I,  79, 213).  Laillier  avait 
déjà  conspiré  en  novembre  1422,  après  la  mort  de  Charles  VII,  pour  livrer 
Paris  à  Charles  VII  (Vallet  de  V.,  Charles  VU,  1. 1,  367-368;  t.  II,  354-356). 
En  1422,  on  trouve  aussi  parmi  les  rebelles  Jacques  de  Laillier  (JJ  172, 
fo  44  v«).  Quant  à  Michel  de  Laillier,  il  était  fils  de  Richard  de  Laillier, 
bourgeois  de  Paris  [Pièces  orig.,  t.  1624,  dossier  37783,  n»  2).  Il  avait  été 
trésorier  de  France  sous  Charles  VI  (Fr.  26042,  n<"  5195,  5196  ;  P  2297, 
f»»  967-970).  Obligé  de  fuir  en  Bourgogne,  après  la  conspiration  de  1122,  il 


246  msuRREGïiON  DANS  PARIS  (1436,  13  avril) 

comptes,  étaient  même  officiers  du  roi  d'Angleterre.  Le  conné- 
table leur  avait  envoyé  les  lettres  de  rémission  qu'ils  avaient  de- 
mandées pour  entraîner  plus  sûrement  les  Parisiens.  Il  comptait 
aussi  sur  la  popularité  de  Philippe  le  Bon,  sur  l'effet  que  devait 
produire  la  présence  parmi  les  troupes  royales  de  plusieurs 
chefs  bourguignons,  dont  l'un,  Villiers  de  L'Isle-Adam,  avait  été 
capitaine  du  Louvre  et  gouverneur  de  Paris  *. 

Le  vendredi  13  avril ,  de  grand  matin ,  Laillier  et  ses  amis 
parcoururent  les  rues,  en  appelant  les  Parisiens  aux  armes  '^ 
En  quelques  instants,  l'insurrection  se  propagea  de  tous  côtés, 
dans  les  faubourgs,  au  centre,  dans  le  quartier  des  halles,  où 
fermentait  encore  le  vieux  levain  bourguignon.  On  répétait  que 
le  duc  de  Bourgogne  et  le  roi  de  France  avaient  réuni  leurs 
forces  pour  délivrer  Paris,  que  leurs  troupes  entraient  dans  la 
ville,  que  la  misère  allait  finir,  que  les  Anglais  étaient  perdus. 
Bourgeois,  étudiants,  gens  du  peuple  s'armaient.  On  prenait  la 
croix  blanche  (de  France)  ou  la  croix  de  Saint-André  (de  Bour- 
gogne) ;  on  barrait  les  rues  avec  des  chaînes  ;  on  amassait  des 
projectiles  de  toutes  sortes,  en  criant  :  Mort  aux  Anglais  !  Vive 
le  duc  de  Bourgogne  !  Vive  le  roi  de  France  ! 

Les  Anglais  s'attendaient  bien  à  une  tentative  sur  Paris  et  à 
un  soulèvement  de  la  population;  mais  ils  n'en  étaient  pas 
moins  embarrassés,  ne  sachant  où  aller,  pour  faire  face  en  même 
temps  aux  rebelles  et  aux  ennemis  du  dehors.  Quand  ils  essayè- 
rent de  courir  aux  portes,  afin  d'en  renforcer  la  garde,  ils  furent 
arrêtés  par  des  obstacles  qu'ils  rencontraient  à  chaque  pas  dans 
la  ville,  avant  de  pouvoir  passer  la  Seine.  Ils  avaient  beau  tirer 
des  flèches  aux  fenêtres  ;  les  pierres,  les  bûches,  les  tables,  les 
tréteaux  pleuvaient  sur  eux,  quand  ils  essayaient  d'avancer. 
D'ailleurs  LaiUier  avait  opéré  une  diversion  habile,  en  occupant 
la  porte  Saint-Denis,  pour  faire  croire  que  les  Français  allaient 
paraître  de  ce  côté,  tandis  qu'ils  se  présentaient  à  l'extrémité 
opposée.  Les  halles  formaient  un  autre  centre  de  résistance  ;  de 
sorte  que,  les  Anglais  étant  retenus  sur  la  rive  droite,  les  quar- 
tiers et  les  portes  de  la  rive  gauche  se  trouvaient  dégarnis. 

dut  rentrer  bientôt  en  grâce,  car  il  figure  parmi  les  membres  de  la  Cham- 
bre des  comptes  en  février  1424  (Zii»  60,  i"  21  v»;  Monstrelet,  IV,  135;  KK 
403,  f»*  106  Y»,  264  v). 

1.  Anselme,  VIT,  10,  11.  Clairamb.,  t.  112,  f°'  8733,  8735,  et  t.  114, 
fos  8907,  8913.  C'est  lui  qui  avait  enlevé  Paris  au  Dauphin  et  aux  Arma- 
gnacs en  mai  1418. 

2.  Ce  vaillant  homme  fut  en  danger  de  mort  et  dut  se  cacher  dans  une 
maison,  «  pour  ce  que  ceulx  de  ceste  ville  n'estoient  encore  suz  à  puis- 
sance, comme  les  Anglois,  et,  si  tôt  qu'il  eut  compaignie.  ala  par  la  ville 
et  à  la  porte  Saint-Denis,  deschassant  les  Anglois  »  (X^a  4799,  f»  229). 


ENTRÉE  DU   CONINÉTABLE  DANS  PARIS   (1436,  13  AVRIL)         247 

Laillier  avait  promis  à  Richement  de  donner  assez  de  besogne 
aux  ennemis  dans  l'intérieur  de  la  ville  pour  qu'il  leur  fût  im- 
possible de  s'opposer  à  son  entrée.  Il  tenait  parole. 

Pendant  que  le  chancelier  L.  de  Luxembourg,  gouverneur  de 
Paris,  faisait  attaquer  sans  succès  la  porte  Saint-Denis  et  les 
halles  par  Willoughby,  par  le  prévôt  Simon  Morbier  et  par  son 
lieutenant  Jean  Larcher,  «  ung  des  plus  crueulx  chrétiens  du 
monde  %  »  le  connétable  arrivait,  avec  le  reste  de  ses  troupes,  et 
rejoignait  ses  gens  de  pied,  qui  se  tenaient  en  embuscade  dans 
le  village  de  Notre-Dame-des-Ghamps.  On  vint  alors  l'avertir 
que  l'entreprise  était  découverte.  Il  continua  d'avancer,  sans 
dire  mot,  et  envoya  quelques  éclaireurs  vers  les  Chartreux  *  et 
vers  la  porte  Saint-Michel,  pour  savoir  ce  qu'il  devait  faire.  Ils 
virent  paraître  sur  les  murs  un  homme  qui,  avec  son  chaperon, 
leur  faisait  signe  d'approcher.  Ils  en  informèrent  le  connétable, 
qui  s'avança  aussitôt  vers  la  porte  Saint-Michel.  «  Tirez  à 
l'autre  porte,  car  celle-ci  n'ouvre  point,  cria  l'homme  qui  se 
tenait  sur  les  murs;  on  besogne  pour  vous  aux  halles.  »  Riche- 
mont  se  dirigea  vers  la  porte  Saint-Jacques,  suivi  par  H.  de  Vil- 
leblanche,  qui  portait  la  bannière  royale. 

11  était  environ  sept  heures  du  matin.  Les  Parisiens  s'étaient 
déjà  rendus  maîtres  de  la  porte  Saint-Jacques.  Ils  voulurent 
d'abord  parler  au  connétable  et  lui  demandèrent  s'il  leur  garan- 
tissait l'amnistie.  Il  leur  jura  que  les  engagements  du  roi  et  du 
duc  de  Bourgogne  seraient  loyalement  tenus.  Ils  l'introduisirent 
alors  dans  la  barbacane,  en  jetant  une  planche  sur  le  fossé.  Les 
gens  de  pied  passèrent  de  la  même  manière,  puis  ils  escaladè- 
rent les  murs  aux  deux  côtés  de  la  porte  et  se  mirent  à  briser 
les  ferrures  du  pont-levis.  L'Isle-Adam,  qui  s'était  élancé  avec 
eux,  planta  le  premier  la  bannière  de  France  sur  les  murs  de 
Paris  ^.  Le  pont  ayant  été  abattu,  le  connétable  put  monter  à 
cheval  et  entrer  dans  la  ville.  En  même  temps,  des  bateaux 
chargés  de  troupes  pénétraient  aussi  dans  Paris  par  la  Seine,  et 
les  Anglais,  craignant  de  se  voir  couper  la  retraite,  se  reti- 
raient dans  la  bastille  Saint-Antoine,  avec  leurs  partisans  *. 

Richemont  descendit  lentement  toute  la  rue  Saint-Jacques, 


1.  Il  était  aussi  franc-sergent  de  l'église  Notre-Dame  de  Paris,  et  il  fut 
remplacé,  dans  ces  fonctions,  par  P.  de  Haqueville,  drapier  et  bourgeois 
de  Paris  (LL  217,  f»  207  ;  le  Bourg,  de  Paris,  315,  note  3). 

2.  Sur  l'emplacement  actuel  du  jardin  et  des  allées  du  Luxembourg. 

3.  D'après  le  Bourg,  de  Paris,  314-315. 

4.  J.  de  Saint- Yon,  chevalier,  maître  des  bouchers  de  la  grande  bouche- 
rie, Jacques  de  Raye,  épicier,  etc.  J.  de  Saint-Yon  resta  au  service  de 
l'Angleterre  (K  68,  n»  16;  le  Bourg,  de  Paris,  p.  71-72,  note  3;  319,  note  2). 


248       LES   ANGLAIS    SE    RETIRENT   DANS   LA   BASTILLE   (13   AVRIL) 

au  milieu  d'une  foule  enthousiaste.  Arrivé  au  pont  Notre-Dame, 
il  rencontra  Michel  de  Laillier,  qui  portait  une  bannière  du  roi. 
Les  acclamations  retentissaient;  les  cloches  sonnaient  à  toute 
volée;  beaucoup  de  personnes  pleuraient  de  joie.  Le  connétable 
ne  pouvait  contenir  son  émotion  en  se  trouvant  ainsi  au  milieu 
des  Parisiens.  «  Mes  bons  amys,  leur  disait-il,  le  bon  roi  Charles 
vous  remercie  cent  mil  fois,  et  moi  de  par  luy,  de  ce  que  si  doul- 
cement  vous  lui  avez  rendue  sa  mestresse  cité  de  son  royaulme, 
et  s'aucun,  de  quelque  estât  qu'il  soit,  a  mesprins  par-devers 
monseigneur  le  roy,  soit  absent  ou  autrement,  il  lui  est  tout  par- 
donné '.  »  Il  s'avança  ensuite  jusqu'à  la  place  de  Grève,  où  l'on 
vint  lui  apprendre  que  les  Anglais  s'étaient  retirés  dans  la  Bas- 
tille et  que  tout  allait  bien.  On  le  pria  de  se  rendre  aux  halles. 
Il  y  alla  et  remercia  encore  les  Parisiens,  en  répétant  les  mêmes 
promesses  de  pardon.  En  face  des  Innocents  ^,  il  s'arrêta  devant 
la  maison  de  Jean  Asselin  *,  qui  avait  été  autrefois  son  épicier. 
Il  accepta  les  rafraîchissements  qui  lui  furent  présentés,  puis, 
revenant  sur  ses  pas,  il  entra  tout  armé  dans  l'église  Notre- 
Dame,  avec  les  autres  seigneurs.  Il  y  fut  reçu  solennellement 
par  le  clergé  de  la  cathédrale  *,  et  il  entendit  la  messe,  pour 
remercier  Dieu  du  grand  succès  qu'il  lui  accordait. 

De  là,  il  se  rendit  à  la  porte  Baudet  ^  et  établit  devant  la 
Bastille  une  garde  nombreuse,  pour  bloquer  la  forteresse,  du 
côté  de  la  ville  et  hors  des  murs.  Il  avait  d'ailleurs  pris  toutes 
les  mesures  nécessaires  pour  maintenir  le  bon  ordre  et  la  sécu- 
rité, faisant  publier  partout  les  lettres  d'abolition  et  défendant, 
sous  peine  de  mort,  aux  gens  de  guerre  d'entrer  dans  les  mai- 
sons et  de  causer  le  moindre  dommage  ou  déplaisir  aux  habi- 
.  tants  ".  Gomme  il  avait  eu  soin  de  laisser  à  Saint-Denis  les 
routiers  les  plus  dangereux,  ses  ordres  furent  ponctuellement 
observés  ',  On  ne  pilla  que  les  maisons  des  Anglais  et  celles  des 

1.  Le  Bourg,  de  Paris,  317. 

2.  L'église  des  Saints-Innocents  (Sauvai,  I,  358). 

3.  KK  402,  f»  67, 

4.  L'évêque  de  Paris  était  alors  Jacques  du  Ghastelier.  Il  se  fît  Français 
à  ce  moment  et  mourut  le  2  novembre  1438  (Gallia  Christ.,  t.  VII,  p.  146- 
148). 

5.  Porte  Baudet,  ou  Baudets,  ou  Baudette,  ou  Baudoyer,  rue  Saint- An- 
toine (Sauvai,  I,  35). 

6.  Vallet  de  V.  loue  «  l'énergique  modération  »  du  connétable  {Hist.  de 
Charles  VII,  t.  II,  p.  360). 

7.  Il  est  probable  que  le  connétable  avait  amené  à  Paris  le  fameux  Tris- 
tan Lermite,  prévôt  des  maréchaux,  qu'il  nomma  maître  de  l'artillerie. 
Tristan  prêta  serment  en  cette  qualité  le  26  avril  (Anselme,  "VIII,  132,  B). 
Le  connétable  lui  donna  aussi  la  garde  de  Conflans-Sainte-Honorine  (X*» 
4800,  fo  110  V). 


MASSACRE   DES  ANGLAIS   DE   SAINT-DEiNI3   (43   AVRIL)  249 

bourgeois  qui  s'étaient  retirés  avec  eux  dans  la  bastille  Saint- 
Antoine.  Beaucoup  de  Parisiens,  malgré  les  promesses  de  Riche- 
mont,  n'étaient  pas  sans  craindre  ces  Armagnacs,  qui  avaient 
laissé  dans  leur  ville  de  si  mauvais  souvenirs;  mais  ils  se  rassu- 
rèrent bientôt,  et  l'auteur  anonyme  du  Journal  d'un  bourgeois 
de  Paris,  Bourguignon  forcené,  avoue  lui-même  que  le  peuple 
prit  le  connétable  en  si  grand  amour  qu'avant  le  lendemain 
tout  le  monde  était  prêt  à  se  mettre  corps  et  biens  à  son  service, 
pour  détruire  les  Anglais  *. 

Ne  voulant  pas  s'éloigner  de  la  bastille  Saint-Antoine,  Riche- 
mont  alla  loger  dans  la  rue  du  Jour,  à  l'hôtel  dû  Porc-Epic  %  qui 
avait  appartenu  jadis  à  Jean  de  Montaigu  ^  Tandis  qu'il  dînait, 
Pierre  du  Pan,  son  maître  d'hôtel,  vint  de  Saint-Denis,  pour 
rinformer  que  les  Anglais  assiégés  dans  la  tour  du  Salut  vou- 
laient se  rendre,  à  condition  qu'on  leur  accordât  la  vie  sauve. 
Richement  y  consentit  ;  mais,  quand  Pierre  du  Pan  revint,  il 
était  trop  tard.  A  la  nouvelle  que  les  Français  étaient  entrés 
dans  la  capitale,  les  routiers  qui  étaient  été  restés  à  Saint-Denis 
s'étaient  précipités  vers  Paris,  avec  l'espoir  d'y  faire  un  gros 
butin.  En  les  voyant  s'éloigner,  les  Anglais,  sortant  de  la  tour, 
avaient  commencé  à  prendre  la  fuite  avec  leur  capitaine,  le  sire 
de  Brichanteau,  neveu  du  prévôt  Simon  Morbier*;  mais  les 
paysans  leur  avaient  donné  la  chasse  et  en  avaient  tué  un 
certain  nombre.  Sur  ces  entrefaites ,  les  routiers  Kevenaient 
furieux  de  n'avoir  pu  entrer  à  Paris,  dont  les  portes  leur  étaient 
fermées  par  ordre  du  connétable.  Ils  se  jetèrent  sur  les  Anglais 
et  les  massacrèrent  jusqu'au  dernier  ^. 

Le  même  jour,  Marcoussis  ®,  Ghevreuse',  Montlhéry»,  le  pont 
de  Saint-Cloud  furent  remis  en  l'obéissance  du  roi,  grâce  à  quel- 
ques Parisiens^  qui  abandonnèrent  le  parti  des  Anglais  et  qui 
avaient  des  intelligences  dans  ces  places  ^.  Pendant  la  nuit,  le  con- 

1.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  318. 

2.  Richemont  avait  eu  autrefois  un  hôtel  à  Paris,  dans  la  rue  Haute- 
feuille,  devant  les  cordeliers  (KK  402,  f»'  4  et  78).  Cet  hôtel  avait  appartenu 
jadis  au  sire  d'Aligre.  11  avait  été  probablement  confisqué  depuis  1425. 

3.  Hôtel  du  Porc-Epic,  rue  de  Jouy  ou  du  Jour,  près  de  l'église  et  de 
iTiôtel  Saint-Paul  (Sauvai,  II,  81,  133  et  222). 

4.  Godefroy,  p.  323.  En  1430,  S.  Morbier  était  capitaine  «  de  la  forte- 
resse nouvellement  ordonnée  estre  faicte  à  Saint-Denys  en  France  »  (Clai- 
ramb.,  78,  f»'  6142,  6143). 

5.  Gruel,  208. 

6.  Arrondissement  de  Rambouillet. 

7.  Id. 

8.  Arrondissement  de  Corbeil. 

9.  Gruel  (p.  208)  ajoute  à  ces  noms  celui  du  pont  de  Charenton,  qu'on 
trouve  aussi  dans  J.  Ghartier;  mais  il  est  certain  que  cette  place  avait  été 


250       MICHEL   DE   LAILLIER   PRÉVÔT   DES   MARCHAINDS   (14  AVRIL) 

nétable  fit  lui-même  le  guet  devant  la  Bastille,  avec  les  gens  de 
sa  maison.  Ainsi  se  termina  cette  grande  journée,  qui  compte 
parmi  les  plus  mémorables  dans  la  vie  de  Richemont  et  dans 
l'histoire  du  règne  de  Charles  VII.  L'honneur  en  revenait  surtout 
aux  Parisiens  et  à  leurs  chefs,  qui  d'eux-mêmes  avaient  mis  les  An- 
glais hors  de  la  ville  *,  mais  le  connétable  avait  habilement  pré- 
paré ce  succès,  et  il  avait  le  droit  d'en  être  fier.  Pour  les  enne- 
mis, la  perte  de  la  capitale  pouvait  être  la  perte  du  royaume, 
comme  ie  leur  avait  prédit  le  duc  de  Bourgogne  quand  il  était 
leur  allié  *.  Pour  Charles  VII,  pour  la  France,  le  recouvrement  de 
Paris  était  un  encouragement  et  un  véritable  triomphe.  L'exem- 
ple des  Parisiens  pouvait  entraîner  d'autres  villes,  et  ils  espé- 
raient déjà  que- Rouen  s'efforcerait  aussi  de  chasser  les  Anglais  ^. 
En  attendant  que  cette  victoire  eût  produit  tous  les  résultats 
qu'on  en  pouvait  espérer,  la  situation  était  toujours  difficile.  11 
fallait  tout  réorganiser  à  Paris,  faire  cesser  la  disette,  trouver  de 
l'argent  pour  payer  les  gens  de  guerre,  afin  qu'ils  ne  commissent 
aucun  excès,  s'emparer  de  la  Bastille,  et  chasser  aussi  les  Anglais 
des  places  qu'ils  occupaient  aux  environs.  Philippe  de  Ternant 
avait  été  institué  prévôt  de  Paris,  en  place  de  Simon  Morbier  *  (le 
vendredi  13  avril).  Le  lendemain  (samedi  14  avril)^  Michel  de  Lail- 

livrée,  le  10  février  1436,  à  Denis  de  Chailly,  capitaine  de  Corbeil.  Lors  de 
la  réduction  de  Paris,  le  prévôt  S.  Morbier  fut  pris  au  pont  de  Charenton 
par  les  gens  de  D.  de  Chailly.  Le  connétable  réclama  le  prisonnier  comme 
sien,  ce  qui  donna  lieu  à  des  contestations  (Félibien,  II,  822;  X'»  4798, 
f»  53  v,  au  lundi  4  mai  1439).  Morbier  ne  resta  pas  longtemps  prisonnier; 
Henri  VI  lui  donna  une  pension  et  de  hauts  emplois  (Fr.  26063,  n»  3369). 

1.  Voy.  des  lettres  de  Charles  VU,  du  15  mai  1436  (K  950,  n°  26  a^b,c.;  x»» 
4797,  f"  334).  Richemont  envoya  Roulet  Guillaume,  chevaucheur  de  l'écurie 
du  roi,  à  Issoudun,  porter  à  Charles  VII  des  lettres  annonçant  «  la  prise 
et  reddition  de  la  ville  de  Paris  »  (Fr.  26061,  n»  2884).  Voir  aussi  J.  Ste- 
venson, t.  II,  Append.  à  la  Préface,  p.  59,  et  Portef.  Fontanieu,  117-118,  au 
8  septembre  1436. 

2.  Dans  un  avis  donné  par  le  duc  de  Bourgogne  au  gouvernement  an- 
glais en  1430  ou  1431,  on  lit  :  «  Item  est  bien  à  considérer   Testât  de  la 

cité  de  Paris,  qui  est  le  cuer  et  le  chief  principal  du  royaume mesme- 

ment  que  la  dite  cité  est  si  grant  chose  que  d'elle  seule  elle  ne  se  puet 
longuement  soutenir,  sans  l'affluence  des  autres  villes  et  pais  du  royaume, 
et  toutevoies,  les  choses  estant  comme  elles  sont  à  présent,  la  perdicion 
d'icelle  ville,  comme  il  puet  sembler,  serait  la  perdicion  du  royaume.  » 
(Ms.  Fr.  1278,  f»  12.)  Dès  1431,  le  peuple  de  Paris  demandait  au  roi  d'An- 
gleterre des  secours  : 

Secourez-moi  et  faites  bonne  guerre, 
Ou  vous  perdrez  Paris  et  toute  France. 

(Complainte  de  la  ville  de  Paris,  ap.  Delpit,  Doc.  français,  p.  238-239.) 

3.  Voir  dans  Y*  f»  3  v,  les  demandes  des  Parisiens  à  Charles  VII  et  les 
réponses  du  roi,  en  mai  1436. 

4.  Y»  f»  4.  Félibien,  IV,  597. 


CAPITULATION  DE  LA  BASTILLE  (15  AVRIL)  2S1 

lier  remplaça  Hugues  Le  Coq  comme  prévôt  des  marchands; 
quatre  nouveaux  échevins  furent  nommés,  Jean  du  Bellay, 
P.  de  Landes,  Jean  de  Grantrue  et  Nie.  de  Neufville,  tous  natifs  de 
Paris  *.  Le  vieux  marché  de  la  Madeleine,  fermé  depuis  plus  de 
vingt  ans,  fut  rouvert,  et  dès  ce  jour  les  approvisionnements  furent 
si  considérables  qu'on  put  avoir  pour  20  sols  parisis  le  blé,  qui  se 
vendait  50  le  mercredi  précédent  *.  Dans  la  matinée,  il  y  eut 
encore  une  messe  solennelle  à  Notre-Dame.  Le  connétable  y  as- 
sistait, avec  le  bâtard  d'Orléans,  Villiers  de  L'Isle-Adam,  les  sires 
de  Ternant  et  de  Lalain  et  une  multitude  innombrable  de  clercs, 
de  bourgeois,  de  gens  du  peuple.  Il  fît  lire  les  lettres  d'abolition, 
et  cette  lecture  fut  répétée  à  l'hôtel  de  ville  devant  les  mêmes 
seigneurs,  puis  dans  les  carrefours  de  Paris  '. 

Cependant  le  siège  de  la  Bastille  continuait.  Le  connétable 
avait  appelé  toutes  les  troupes  disponibles  qui  se  trouvaient  dans 
le  voisinage,  pour  compléter  l'investissement  de  la  forteresse. 
Elle  contenait  plus  de  500  personnes  *,  parmi  lesquelles  le  chan- 
celier Louis  de  Luxembourg  et  l'èvèque  P.  Cauchon^.  Lord  Wil- 
loughby,  qui  commandait  la  garnison,  était  un  brave  soldat,  un 
combattant  d'Azincourt  et  de  Verneuil;  mais,  comme  le  manque 
de  vivres  ne  permettait  pas  de  faire  une  longue  résistance,  il 
dut  se  résigner  à  une  capitulation.  Les  Anglais  proposèrent 
de  vider  la  place,  à  condition  d'emporter  leurs  biens. 

La  question  fut  vivement  débattue  dans  un  conseil  tenu  par 
Richement  ;  les  uns  soutenant  que  les  ennemis  seraient  bien- 
tôt réduits  par  la  disette  à  se  rendre  corps  et  biens,  qu'on  pou- 
vait compter  sur  un  riche  butin  et  sur  de  grosses  rançons  ;  les 
autres  faisant  remarquer  que  les  Anglais  avaient  encore  un  parti 
nombreux  à  Paris  et  qu'il  y  aurait  là  un  véritable  danger,  s'ils 
recevaient  des  secours.  «  Monseigneur,  disaient  les  Parisiens,  s'ils 
veulent  se  rendre,  ne  les  refusez  pas.  Ce  vous  est  belle  chose 
d'avoir  recouvré  Paris.  Maints  connestables  et  maints  mares- 
chaux  ont  été  autrefois  chassez  de  Paris  ;  prenez  en  gré  ce  que 
Dieu  vous  a  donné  ^.  »  Si  le  connétable  avait  eu  de  quoi  payer  ses 
troupes,  il  eût  mieux  aimé  continuer  le  siège  ;  mais  beaucoup  de 
gens  d'armes  ne  voulaient  plus  servir  sans  avoir  reçu  leur  solde. 
Il  choisit  donc  le  parti  le  plus  prudent,  et  il  accorda  au  chan- 

1.  Félibien,  II,  824.  Le  Bourg,  de  Paris,  279. 

2.  Félibien,  II,  824-825.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  321-323  et  notes. 

3.  K  949,  n»  24.  Voir  aussi  au  dos  de  cette  pièce. 

4.  C'est  le  chiffre  que  donne  le  registre  X"  1481,  f»  120  v».  Gruel  et 
Cagny  disent  1  000  à  1  200. 

5.  LL  211,  fo  206.  Gallia  Christ.,  VII,  148. 

6.  Gruel,  208. 


2o2  GOUVERNEMENT  FRANÇAIS  A  PARIS 

celier  L.  de  Luxembourg  les  conditions  qu'il  demandait.  La  ca- 
pitulation fut  signée  le  dimanche  15  avril. 

Deux  jours  après,  le  mardi  17  avril  *,  les  Anglais  et  leurs  par- 
tisans Jacques  de  Saint-Yon,  Jacques  de  Rays,  Legoix  évacuèrent 
la  Bastille,  poursuivis  par  les  huées  de  la  foule.  On  les  conduisit, 
sans  les  faire  passer  dans  la  ville,  jusqu'à  la  Seine,  où  ils  s'em- 
barquèrent pour  aller  à  Rouen  *.  D'autres  Parisiens,  que  leur 
dévouement  à  l'Angleterre  rendait  suspects,  furent  chassés  par 
ordre  de  Richemont,  mais  ils  ne  furent  pas  traités  avec  une  sévé- 
rité excessive,  car  ceux  qui  voulurent  rentrer  un  peu  plus  tard 
dans  la  ville  purent  y  rester,  en  prêtant  serment  de  fidélité  à 
Charles  VII  K 

D'ailleurs  le  connétable  montra  envers  tout  le  monde  une  mo- 
dération et  une  bienveillance  dont  les  envoyés  de  l'Université 
firent  l'éloge  devant  le  roi  *.  Il  accueillit  avec  douceur  les  délé- 
gués du  Parlement  et  de  la  Chambre  des  comptes,  qui  firent  acte 
de  soumission,  en  proposant  leurs  services  ;  il  leur  conseilla 
d'écrire  à  Charles  VII,  leur  promit  d'appuyer  leurs  démarches. 
Il  les  autorisa  même  (17  et  28  avril)  à  expédier  les  affaires  cou- 
rantes et  à  reprendre  leurs  fonctions,  jusqu'à  ce  que  le  roi  en 
«ut  ordonné  autrement  ^.  Il  institua  quelques  nouveaux  offi- 
ciers''; en  un  mot,  il  pourvut  à  l'organisation  provisoire  de  tous 
les  services  publics.  Le  roi  lui  adjoignit  bientôt  un  conseil,  avec 
pouvoir  de  faire  des  ordonnances,  et  la  capitale  eut  ainsi  son  gou- 
vernement. 

Sur  la  décision  du  chapitre  de  Notre-Dame,  on  fit,  le  dimanche 
22  avril,  une  grande  procession,  pour  remercier  Dieu  de  l'entrée 

1.  LL  217,  f»  206.  Le  Bourg,  de  Paris,  318. 

2.  11  paraît  que  le  chancelier  L.  de  Luxembourg  aurait  dit,  depuis,  qu'il 
avait  bien  payé  son  écot,  puisque  sa  chapelle  et  ses  bijoux  étaient  restés 
au  connétable  (voy.  J.  Ghartier,  I,  228;  Félibien,ll,  824;Monstrelet,  V,22i). 

3.  Félibien,  II,  828,  IV,  598.  Richemont  fit  donner  à  Berthelot  et  à  un 
autre  de  ses  secrétaires  les  biens  de  F.  Férat,  qui  était  venu  de  Rouen  à 
Paris  et  qui  n'avait  pas  voulu  prêter  serment  (X^a  22,  au  dernier  jour 
d'août  1441).  D'autres  partisans  obstinés  de  l'Angleterre  furent  punis  de 
lamême  façon  {Issues  of  the  Exchequer,  p.  430). 

4.  Du  Boulai,  Hist.  de  l'  Université  de  Paris,  V,  436. 

5.  P.  2531,  f»s  146  v,  148.  Félibien,  III,  560.  S.  Fournival,  p.  13. 
Mlle  Denys,  Armoriai,  p.  xxxi,  cxxii. 

6.  Par  exemple,  Jean  Trotet  et  J.  de  La  Fontaine,  trésoriers  de  France, 
J.  Auger,  maître  extraordinaire,  et  Alain  de  Coetivy,  premier  président  de 
la  Chambre  des  comptes  (S.  Fournival,  p.  13;  Mlle  Denys,  Annorial, 
p.  XXXI  et  cxxn).  Un  peu  plus  tard,  Richemont  institua  Emery  Martineau 
procureur  général  sur  le  fait  des  monnaies  {Append.  LXIII;  voir  aussi 
Xia  4797,  f°  334).  Bernard  Bracque,  qui  avait  servi  Charles  VI  et  Charles  VII 
pendant  cinquante  ans,  fut  institué  «  général  maître  de  la  monnoie  » 
(Zi  beO^fo' 35,  36). 


LA  PROCESSION  DES  ANGLAIS  2S3 

du  connétable  dans  Paris  *.  Une  foule  immense  prit  part  à  cette 
cérémonie,  qui  ne  dura  pas  moins  de  quatre  heures,  malgré  une 
pluie  continuelle  *.  Pendant  trois  siècles,  jusqu'en  1735,  l'expul- 
sion des  Anglais  fut  célébrée  comme  une  victoire  nationale. 
Chaque  année,  au  mois  d'avril,  le  prévôt  des  marchands,  les  éche- 
vins,  les  membres  du  Parlement  et  des  autres  cours  assistaient 
à  la  messe  solennelle  et  à  la  procession  des  Anglais  ou  de  la  ré- 
duction de  Paris  '. 

1.  LL  217,  (o  207.  Le  doyen,  J.  Tudert,  ne  revint  que  le  7  mai,  après  une 
absence  de  dix-huit  ans  {Ibid.,  P  209).  Il  avait  été  reçu  doyen  de  Notre- 
Dame  de  Paris  le  li  avril  1414  (LL  141i,  f»  316). 

2.  Le  Bourg,  de  Paris,  320-321. 

3.  K  1002-1005.  Voy.  Append.  LXIV.  La  première  eut  lieu  le  vendredi 
5  avril  1437  (LL  217,  f»  292,  à  la  date  du  mercredi  3  avril). 

Sur  la  réduction  de  Paris,  voir  :  Reg.  du  Parlement  X*»  1481,  f»s  120-121; 
Mémoriaux  de  la  Chambre  des  comptes,  P  2531,  f»  145  et  suiv;  Félibien, 
qui  reproduit  une  partie  des  documents  contenus  dans  ces  deux  registres, 
t.  III,  p.  558-560,  t.  IV,  595-598;  Registre  capitulaire  de  N.-D.  de  Paris, 
LL  217,  f"'  206-207  ;  le  Livre  Vert  vieil  second  du  Châtelet,  Y*,  f»»  1  et  2, 
et  e  carton  K  949,  n»^  24,  25,  26  ;  Fr.  2882,  f»«  108-113;  Perceval  de  Cagny, 
dans  le  t.  48  des  Mss.  Duchesne,  f»'  100  et  101  ;  Gallia  Christ.,  VII,  147-148; 
.Martial  d'Auvergne,  I,  148-151;  le  Bourgeois  de  Paris,  p.  314-323;  J.  Char- 
ger, I,  p.  220-228;  Gruel,  207-208;  Berry,  p.  393;  Basin,  I,  121-122;  Mons- 
trelet,  V,  217-222;  M.  d'Escouchy,  II,  399-400;  les  chroniqueurs  anglais 
Polyd.  Vergil,  édit.  H.  EUis,  59-60;  Hall,  179-180  (édit.  de  Bâle,  1570);  Fa- 
bian,  431;  J.  Stevenson,  t.  II,  préface,  p.  24,  25.  Voir  aussi  Sauvai,  t.  I,  35 
et  358,  t.  II,  p.  153  et  222;  du  Boulai,  t.  V,  435-36;  surtout  Félibien,  t.  II, 
p.  822-825;  t.  III,  558-559,  t.  IV,  598;  Kausler,  Atlas  des  plus  mémorables 
batailles,  kuiWe  14%  Texte  p.  151;  Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  II,  353-364; 
Médaille  coramémorative  dans  Môzeray,  Hist.  de  France,  édit.  de  1646, 
in-f«,  II,  86,  n»  10. 


CHAPITRE  III 

LE    RECOUVREMENT    DE    l' ILE-DE-FRANCE    (1436-1440) 


Richemont  veut  reconquérir  d'abord  l'Ile-de-France.  —  Détresse  finan- 
cière. —  Le  duc  d'York  succède  à  Bedford.  —  Richemont  va  trouver  le 
duc  de  Bourgogne.  —  Les  Français  échouent  devant  Creil.  —  Le  con- 
nétable va  en  Picardie,  en  Champagne,  en  Lorraine.  —  Il  revient  à 
Paris  et  s'efforce  d'y  attirer  le  roi.  —  Il  va  ensuite  à  Loches,  à  Parthe- 
nay,  en  Bretagne,  et  revient  à  Paris.  —  Ses  démêlés  avec  Guillaume  de 
Flavy.  —  Il  contribue  à  la  délivrance  de  René  d'Anjou.  —  Les  Anglais 
reprennent  Pontoise  et  menacent  Paris.  —  Traîtres  exécutés  à  Paris.  — 
Les  Français  s'emparent  de  Malesherbes.  —  Le  roi  prend  part  à  la  guerre. 

—  Prise  de  Nemours.  —  Mort  de  Jeanne  de  Navarre.  —  Siège  et  prise 
de  Montereau.  —  Guerre  en  Normandie.  —  Charles  VII  vient  à  Paris, 
puis  retourne  sur  la  Loire.  —  Famine  et  épidémie.  —  La  guerre  languit. 

—  Assemblée  de  Bourges.  —  Tentative  infructueuse  sur  Pontoise.  — 
Ravages  des  routiers.  —  Guillaume  de  Flavy  enlève  le  maréchal  de 
Rieux.  —  Ordonnance  du  22  décembre  1438  contre  les  routiers.  — 
Grande  mortalité  à  Paris.  —  Richemont  s'éloigne.  —  Il  va  en  Lorraine, 
où  il  échoue  contre  Robert  de  Sarrebrûck.  —  Les  Anglais  surprennent 
Saidt-Germain-en-Laye.—  Accusations  contre  Richemont.  —  Découragé, 
il  veut  se  retirer,  quand  le  roi  ordonne  enfin  le  siège  de  Meaux.  —  Le 
connétable  prend  la  ville  de  Meaux  et  fait  capituler  le  Marché.  —  Le  roi 
revient  à  Paris.  —  Richemont  le  suit  à  Orléans.  —  Négociations  inutiles 
avec  les  Anglais.  —  Etats  d'Orléans.  —  Ordonnance  du  2  novembre 
1439  sur  les  gens  de  guerre.—  Difficulté  d'appliquer  cette  ordonnance. 

—  Le  connétable  échoue  devant  Avranches.  —  Il  obtient  des  mesures 
contre  les  routiers  et  commence  la  réforme  de  l'armée. 

Après  la  réduction  de  Paris,  le  rôle  de  Richemont  devient  beau- 
coup plus  considérable.  On  sent  que  son  influence  grandit, 
que  sa  sphère  d'action  s'étend,  que  son  initiative  s'affirme  da- 
vantage et  qu'il  est,  en  réalité,  le  lieutenant  général  du  roi. 
Avoir  rendu  à  la  France  sa  capitale,  c'était  beaucoup;  mais, 
en  comparaison  de  ce  qui  restait  à  faire,  c'était  peu  de  chose. 
Mettre  la  ville  de  Paris  en  bon  état  de  défense,  réparer  les  maux 
qu'elle  avait  soufferts,  achever  sa  délivrance,  en  chassant  les  An- 
glais de  toutes  les  places  qu'ils  occupaient  encore  dans  le  voisi- 


RICHEMONT  VEUT  RECONQUÉRIR  l'iLE-DE-FRANCE  285 

nage  et  en  réprimant  les  déprédations  des  gens  de  guerre:  tel  est 
le  plan  que  Richemont  se  proposa  tout  d'abord.  Vouloir  expul- 
ser en  même  temps  les  Anglais  de  la  Normandie,  c'était,  dans 
l'état  actuel  des  choses,  une  entreprise  chimérique  et  même  dan- 
gereuse ^  ;  il  l'ajourna  résolument.  Pour  l'exécuter  avec  succès, 
il  fallait  avoir  tout  ce  qui  manquait  en  ce  moment,  de  l'argent, 
une  armée  disciplinée,  l'alHance  de  la  Bretagne,  comme  on 
avait  déjà  celle  de  l'Ecosse  et  de  la  Gastille  *.  Le  nouveau  régent, 
duc  d'York,  allait  débarquer  en  France  avec  une  armée,  et  la  Nor- 
mandie était  pour  les  Anglais  plus  facile  à  défendre  que  Paris. 
Le  connétable  estimait  avec  raison  que,  avant  d'entreprendre  sé- 
rieusement la  conquête  de  la  Normandie,  il  fallait  achever  celle 
de  l'Ile-de-France,  delaBrieet  delà  Champagne,  Il  voulait  intéres- 
ser à  ce  projet  Charles  VII,  le  soustraire  à  l'énervante  oisiveté  de 
la  cour,  l'amener  à  Paris,  l'associer  aux  opérations  militaires, 
éveiller  ainsi  dans  l'âme  de  ce  jeune  prince  des  aspirations  plus 
dignes  d'un  roi  que  la  mollesse  et  le  goût  des  plaisirs  ^,  Il  mar- 
cha vers  ce  but  avec  sa  ténacité  habituelle,  sans  précipitation  té- 
méraire, par  des  progrès  plus  continus  qu'éclatants,  et  refoula 
peu  à  peu  les  ennemis  qui  s'obstinaient  à  menacer  la  capitale. 
La  ville  de  Paris  était  alors  dans  un  état  lamentable,  La  popu- 
lation avait  été  décimée  par  les  fléaux  de  la  guerre  ;  les  murailles 
étaient  mal  entretenues;  beaucoup  de  maisons,  depuis  long- 
temps inhabitées,  tombaient  en  ruines;  la  misère  était  perma- 
nente. D'autres  villes  dans  l'Ile-de-France,  la  Brie  et  la  Champagne, 
notamment  Troyes,  étaient  dans  une  situation  aussi  misérable  *. , 
Quant  aux  campagnes,  sans  cesse  ravagées  par  les  gens  de 
guerre,  elles  avaient  encore  plus  à  soufl'rir.  Beaucoup  de  villages 
étaient  déserts  ;  les  paysans  aimaient  mieux  abandonner  leurs 
champs  que  de  les  cultiver  pour  voir  leurs  moissons  détruites 
ou  enlevées  par  les  ennemis  ou  par  les  routiers  ^. 

1.  Quoi  qu'en  dise  l'évêque  de  Lisieux  Th.  Basin,  qui  ne  voit  que  son 
pays  et  qui  n'embrasse  point  l'ensemble  de  la  situation  (Th.  Basin,  1, 114- 
119,  surtout  p.  118). 

2.  L'utilité  de  ces  alliances  est  bien  indiquée  dans  le  document  déjà 
cité,  qui  émane  de  la  chancellerie  de  Bourgogne  (Fr.  1278,  f'*  41-43). 
L'alliance  avec  l'Ecosse  avait  encore  été  affermie  par  le  mariage  du  dau- 
phin Louis  avec  Marguerite,  fille  de  Jacques  I"  (1436).  Voir  la  curieuse 
relation  de  Regnault  Girard,  égarée  dans  le  Ms.  fr,  17330,  au  milieu  de 
pièces  relatives  à  François  I*"^  et  à  Henri  IL 

3.  Si  Charles  VU  avait  eu  vraiment  quelque  énergie,  s'il  avait  compris 
la  grandeur  de  son  rôle,  s'il  avait  eu  souci  des  intérêts  de  la  France  et  de 
sa  propre  gloire,  il  aurait  dû  accourir  à  Paris,  comme  on  l'en  suppliait 
(voir  ci-dessous,  p.  260  et  notes  7,  8;  p.  261  ;  p.  262,  et  note  5). 

4.  Il  en  était  encore  de  même  sept  ans  plus  tard,  en  1443  (Y*  f»  69). 

5.  Sur  l'état  de  Paris,  v.  Y*  f<>»  29  vet  69;  le  Bourg,  de  Paris,  passim.  Sur 


256  DÉTRESSE  FINANCIÈRE 

Comment  exiger  des  impôts  de  ces  populations  si  cruellement 
éprouvées?  Pourtant  il  fallait  bien  trouver  de  l'argent  '  ;  le  con- 
nétable en  avait  besoin  pour  continuer  la  guerre.  Il  fut  obligé 
d'en  demander  plusieurs  fois  à  la  ville  de  Paris  et  aux  autres 
villes  de  l'Ile-de-France  *.  Cet  argent  fut  employé  à  réparer  les 
fortifications  de  Paris,  travail  des  plus  urgents,  à  solder  les  garni- 
sons qui  furent  mises  dans  les  places  fortes,  avec  interdiction,  sous 
peine  des  châtiments  les  plus  rigoureux,  de  rançonner  les  habi- 
tants, enfin  à  subvenir  aux  dépenses  des  opérations  militaires. 

Dans  le  même  temps  (fin  d'avril  et  commencement  de  mai),  le 
connétable  eut  à  s'occujier  de  deux  tentatives,  Tune  sur  Gisors, 
l'autre  sur  Rouen.  La  Hire  et  Saintrailles,  sans  lui  laisser  le 
temps  de  faire  venir  les  troupes  qu'il  avait  dans  le  pays  de  Caux 
sous  le  maréchal  de  Rieux  ^,  entrèrent  dans  Gisors;  mais  ils  en 
furent  promptement  délogés  par  Talbot  et  Th.  de  Scales,  parce 
qu'ils  n'avaient  pas  assez  de  forces''.  Quanta  l'entreprise  sur  Rouen 
elle  était  trop  prématurée  pour  réussir.  Sur  les  nouvelles  qu'il 
avait  reçues,  le  connétable  s'avança  néanmoins  jusqu'à  Gerberoy 
avec  le  maréchal  de  Rieux  et  toutes  les  troupes  qu'il  put  réunir; 
mais,  comme  les  Anglais  se  tenaient  sur  leurs  gardes,  il  vit  qu'il  n'y 
avait  rien  à  faire  pour  le  moment,  et  il  revint  par  Pontoise  à  Paris  ^. 

Il  ne  pouvait  d'ailleurs  faire  que  de  très  courtes  absences.  Des 
soins  multiples  le  retenaient  dans  la  capitale,  où  chaque  jour  il 
avait  à  conférer  avec  les  délégués  du  Parlement,  de  la  Chambre 
des  comptes,  du  clergé,  de  l'Universiié  de  la  ville.  Il  avait  convo- 

l'élat  dos  campagaes,  voir  Fiammermont,  dans  les  Mémoires  de  la  So- 
ciété de  l'hist.  de  Paris,  t.  V,  p.  237  et  sq.  Sur  la  ville  de  Troves,  voy. 
JJ  177,  f»»  42  V»,  43. 

1.  Les  Etats  de  Poitiers  avaient  voté  une  aide  de  200  000  1.  au  mois  de 
février  (Fr.  26061,  w^  2933,  2936,  2962,2967,  et  Fr.  26062,  n»  3055).  En  sep- 
tembre, les  Etats  du  Dauphiné  octroient  20  000  florins  [Porlef.  Fontan., 
117-118,  à  la  date  de  septembre). 

2.  Le  clergé  de  Notre-Dame  dut  payer,  malgré  la  pauvreté  qu'il  alléguait 
(LL  217,  f"  208).  Senlis  donna  400  1.,  etc.  (Fiammermont,  dans  les  Méw.  rfe 
la  Société  de  l'hist.  de  Paris,  t.  V,  p.  255).  Le  13  mai,  Charles  VII  octroie  à 
la  ville  de  Paris  le  droit  de  lever  6  1.  t.  sur  chaque  muid  de  sel  qui  sera 
vendu  au  grenier  à  sel  de  Paris,  pendant  trois  ans,  à  partir  du  1"  avril 
1436.  Le  produit  de  cette  taxe  sera  employé  à  réparer  les  fortifications  de 
Paris,  qui  en  ont  grand  besoin  (K  950,  n»  26  «.''.<=).  En  août,  en  septembre 
1436,  nouvelles  taxes  sur  les  vins  qui  traversent  Paris  et  le  pays  voisin  et 
sur  le  vin  recueilli  dans  la  vicomte  de  Paris  (Y*  f"*  10,  11  v»  et  12).  V.  Ap- 
pend.  LXV. 

3.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1267-1268. 

4.  Fr.  25773,  n»  1105;  Gruel,  209;  Monstrelet,  V,  231.  Gisors,  arrondis- 
sement des  Andelys. 

5.  Fr.  26061,  n°  2809;  Gruel,  209.  Talbot,  capitaine  de  Rouen,  reçut  des 
renforts  considérables  et  prit  des  précautions  qui  attestent  une  inquiétude 
réelle  (Fr.  26060,  n-  2726,  2734,  2768,  2776;  Fr.  26061,  n°«  2865-2871). 


RICHEMONT  ENVOYÉ  AUPRÈS  DE  PHILIPPE  LE  BON  (1436)   257 

que,  pour  le  B  mai,  à  Paris,  les  délégués  des  villes  de  l'Ile-de-France, 
afin  d'aviser  aux  moyens  de  recouvrer  Creil,  Meaux  et  Montereau. 
Il  fut  décidé  qu'on  attaquerait  d'abord  Creil  '.  Le  connétable  alla 
mettre  le  siège  devant  cette  place,  avec  le  bâtard  d'Orléans,  L'Isle- 
Adam,  La  Hire,  Saintrailles  et  le  sire  de  Rostrenen.  Senlis  et  les 
villes  voisines  *  durent  lui  envoyer  de  l'argent,  des  vivres,  des 
munitions,  des  canons,  des  machines  de  guerre,  des  arbalétriers. 
La  garnison  anglaise  de  Creil  était  en  état  de  faire  une  longue  ré- 
sistance. Malheureusement  Richemont  fut  alors  obligé  de  s'éloi- 
gner, pour  aller  vers  le  duc  de  Bourgogne,  négocier  la  délivrance 
du  roi  de  Sicile.  Charles  YII  et  la  reine  Yolande  tenaient  beaucoup 
à  ce  qu'il  fît  partie  de  l'ambassade  envoyée  auprès  de  Philippe  le 
Bon,  et  lui-même  portait  le  plus  grand  intérêt  à  René  d'Anjou, 
son  compagnon  d'armes,  le  fils  de  sa  protectrice.  Il  laissa  la  direc- 
tion du  siège  au  bâtard  d'Orléans  et  se  rendit  en  Picardie  ^  (juin). 
C'est  à  Saint-Omer  qu'il  trouva  Philippe  le  Bon,  alors  occupé 
à  réunir  une  armée  destinée  à  faire  le  siège  de  Calais.  Il  ne  put 
obtenir  l'élargissement  immédiat  de  René,  le  duc  de  Bourgogne 
y  mettant  des  conditions  trop  dures;  mais  les  négociations  ne  fu- 
rent point  abandonnées,  et  il  ne  désespéra  pas  de  les  voir  bientôt 
aboutir.  Il  offrit  à  son  beau-frère  de  lui  amener  3  000  hommes, 
qu'il  avait  dans  le  pays  de  Caux,  pour  l'aider  au  siège  de  Calais. 
Philippe  n'accepta  point  ce  secours;  il  crut  qu'il  n'en  aurait  pas 
besoin,  car  il  avait  rassemblé  des  forces  considérables,  surtout 
en  Flandre.  Quand  Richemont  voulut  s'en  retourner,  le  duc  le 
reconduisit  et  lui  montra  l'armée  flamande,  dont  le  camp  res- 
semblait à  une  ville.  On  leur  offrit  le  vin  dans  la  tente  de  Gand, 
puis  ils  se  séparèrent  *  (juin).  Au  retour  de  cette  mission,  le 
connétable  passa  par  Azincourt,  Il  voulut  revoir  ce  champ  de 
bataille  où  il  avait  failli  périr.  Il  expliqua  aux  seigneurs  qui 
l'accompagnaient  les  détails  de  cette  néfaste  journée,  en  leur  dé- 
signant les  endroits  où  se  trouvaient  les  principaux  chefs  de  l'ar- 
mée française,  la  place  où  il  avait  combattu  lui-même,  le  lieu 
où  était  logé  le  roi  d'Angleterre. 

1.  D.  Grenier,  t.  XX  bis,  liasse  9,  f"  17  (comptes  de  la  ville  de  Compiègne). 

2.  Compiègne,  Pontoise,  Pont-Sainte-Maxence,  Beauvais,  etc.  (D.  Gre- 
nier, XX  6ii,  liasse  9,  fo'  17  v»  et  18);C.-L.  Doyen,  Hist.  de  Beauvais,  p.  87: 
Flammermont,  Instit.  munie,  de  Senlis,  p.  252-253,  et  Mém.  de  la  Soc,  de 
l'hist.  de  Paris,  V,  233-256. 

3.  En  mai,  Charles  VII  envoie  le  comte  de  Vendôme,  l'évêque  de  Tou- 
louse, etc.,  auprès  de  Philippe  le  Boa  (D.  Calmet,  II,  791).  Richemont  était 
encore  à  Compiègne  au  commencement  de  juin  (D.  Grenier,  XX  bis,  liasse  9, 
fo  17  vo).  Pendant  qu'il  était  avec  le  duc  de  Bourgogne,  il  reçut  des  lettres 
du  duc  d'Orléans  {Catal.  Joursanvault,  l,  19-20,  n»  36). 

4.  Gruel,  209.  Monstrelet,  V,  240. 

Richemont.  17 


2o8  LE  DUC  d'york  successeur  de  bedford  (1436) 

Il  continua  sa  route  par  Hesdin  et  Abbeville  ^  Là,  il  reçut  de 
mauvaises  nouvelles.  Les  troupes  qu'il  avait  laissées  devant 
Greil  venaient  de  lever  le  siège  ^  en  apprenant  que  le  duc  d'York, 
récemment  arrivé  d'Angleterre,  s'apprêtait  à  secourir  cette  ville. 
C'étaient  là  de  fâcheux  contretemps,  qui  devaient  retarder  l'ex- 
pulsion des  Anglais  de  l'Ile-de-France.  Le  duc  d'York  *,  envoyé 
par  Henri  VI  pour  gouverner  ses  provinces  françaises  (mai  1436), 
n'était  pas  indigne  de  succéder  à  Bedford.  Ses  talents  politiques 
et  militaires  faisaient  de  lui  un  adversaire  redoutable.  Il  rétablit 
la  discipline,  l'unité  de  commandement  ;  il  évita  de  mécontenter 
les  populations,  et,  s'il  eût  été  mieux  secondé  par  le  Conseil  d'An- 
gleterre, il  aurait  pu  remporter  de  grands  succès  *.  Il  arriva  en 
France  au  mois  de  juin,  avec  le  comte  de  Suffolk  et  une  armée 
anglaise  ^  ;  mais  le  siège  de  Calais  par  le  duc  de  Bourgogne  (juin- 
juillet)  ^,  le  recouvrement  des  pays  de  Caux  et  de  Bray  occupèrent 
d'abord  son  attention,  et  il  ne  fit  pas  d'entreprise  considérable 
cette  année-là  '. 

Richemont  se  rendit  alors  dans  le  pays  de  Caux,  à  Eu  ^  et  à 
Dieppe,  pour  réprimer  les  excès  intolérables  des  gens  de  guerre. 
Pendant  qu'il  y  était,  Florimond  de  Brimeu,  sénéchal  du  Pon- 
Ihieu,  avec  quelques  troupes  tirées  des  garnisons  d'Eu,  de  Rue  ' 
et  de  Saint-Valery  *°,  s'empara  du  Crotoy  ^',  par  un  habile  strata- 
gème ^^  On  pouvait  faire  là  une  diversion  utile  au  duc  de  Bour- 
gogne, qui  continuait,  non  sans  peine,  le  siège  de  Calais.  Il 
restait  à  prendre  le  château  du  Crotoy,  dans  lequel  les  Anglais 
s'étaient  retirés  *'.  Le  connétable  était  tout  disposé  à  venir  les 

1.  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1267-1268. 

2.  Moastrelet,  V,  229.  Gruel,  209.  Le  Bourg,  de  Paris,  323-324.  Le  12  juin, 
le  bâtard  était  encore  au  siège  de  Creil  (D.  Grenier,  XX  bis,  liasse  9,  f"  17 
v).  Vallet  de  V.  dit  que  l'armée  de  Paris  s'empara  de  Creil  (t.  II,  p.  381). 

3.  Richard  d'York,  petit-fils  d'Edmond  Langley  (4°  fils  d'Edouard  III)  et 
descendant,  par  sa  mère,  de  Lionel,  duc  de  Clarence  (2'  fils  d'Edouard  III). 
11  disputa,  plus  tard  le  trône  d'Angleterre  à  Henri  VI. 

4.  J.  Stevenson,  II,  préface,  p.  xxix.  Green,  I,  339-560.  Moreau  703, 
fos  342-343.  Fr.  26061,  n"  2887,  2892-2894,  2921.  Fr.  26062,  n»  3035. 

3.  Fr.  26061,  n"  2977.  Fr.  26062,  n»  3006.  Hist.  de  Bourgogne,  lY,  224-225. 

6.  Coll.  de  Bourgogne,  t.  100,  f°  249.  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  224-226. 

7.  Les  Anglais  firent  les  sièges  de  Saint-Gerraain-sous-Cailly,  de  Cham- 
brois  (Broglie),  de  Fécamp  (Fr.  26061,  n=s  2900,  2939,  2944,  2998,  2999;  Fr. 
26062,  n-s  3030,  3031,  3038;  Fr.  23773,  n»'  1124,  1128,  1135,  1144,  1147-49). 

8.  Arrondissement  de  Dieppe. 

9.  Arrondissement  d'Abbeville. 

10.  Id. 

11.  Id. 

12.  D.  Grenier,  t.  96,  p.  37,  et  Chron.  belges,  t.  II,  p.  213.  Gruel,  209.  FL 
Lefils,  Hist.  du  Crotoy,  Abbeville,  1860,  in-8,  p.  122-124. 

13.  En  juillet,  Fauquemberge  fut  chargé  de  ravitailler  le  château  du  Cro- 
toy (Fr.  23773,  n»  1124). 


RICHEMONT  VA  EN  PICARDIE,  EN   LORRAINE,  EN   CHAMPAGNE  (1436)   259 

attaquer  lui-même;  toutefois,  il  ne  le  pouvait  pas  faire  sans 
l'agrément  de  Philippe  le  Bon,  à  qui  le  traité  d'Arras  avait 
donné  les  villes  de  la  Somme.  S'étant  avancé  jusqu'à  Abbe- 
ville  *,  il  envoya  demander  au  duc  de  Bourgogne  s'il  auto- 
risait cette  entreprise.  Celui-ci  ayant  répondu  qu'il  serait 
temps  de  s'en  occuper  après  le  siège  de  Calais,  le  connétable 
s'éloigna. 

Il  avait  fort  à  faire  d'un  autre  côté,  pour  chasser  de  plusieurs 
places  des  Anglais  ou  des  routiers,  qui  commettaient  de  grands 
ravages  ^.  Ses  lieutenants  René  de  Raiz,  seigneur  de  La  Suze,  et 
Jean  de  Malestroit  avaient  été  chargés,  avant  la  réduction  de 
Paris,  l'un  d'enlever  aux  Anglais  les  forteresses  de  Nogent  et  de 
Montigny-le-Roi  *,  l'autre  de  combattre  les  gens  d'armes  du 
damoiseau  de  Gommercy,  qui  faisaient  des  courses  sur  les  terres 
de  René  d'Anjou,  pendant  que  Robert  de  Sarrebriick  était  re- 
tenu prisonnier  en  Lorraine  *.  D'autres  routiers,  tels  que  le 
bâtard  de  Bourbon  et  le  petit  Picard,  ravageaient  aussi  les  pays 
de  René  d'Anjou,  et  la  régence  de  Lorraine  dénonçait  à  la  reine 
Yolande,  comme  un  routier  dangereux,  le  lieutenant  même  du 
connétable,  le  seigneur  de  La  Suze  *.  Jean  de  Malestroit,  avec 
Evrard  deLaMarck,  assiégeait  Chauvency  ^,  place  appartenant  au 
damoiseau.  Leurs  gens,  qui  couraient  le  pays,  furent  battus  près 
de  Romagne-sous-Montfaucon'^,  et  ils  durent  lever  le  siège,  après 
avoir  perdu  200  à  300  hommes  (24  juin).  Le  connétable  fit  une 
courte  apparition  en  Lorraine  et  en  Champagne,  pour  essayer 
d'y  rétablir  l'ordre.  Il  prit  lui-même  Louvois  *  ;  mais,  n'ayant  pas 

1.  J.  de  La  Mothe,  qui  avait  fait  tuer  le  Galois  de  Honnignœul,  ayant 
entendu  dire  que  le  conr  jtable,  à  sa  nouvelle  entrée  dans  une  ville,  avait 
pouvoir  de  délivrer  des  prisonniers,  se  rendit  aux  prisons  d'Abbeville  et 
obtint  de  Richemont  des  lettres  de  rémission  qui  furent  confirmées  par  le 
roi.  La  veuve  de  la  victime  poursuivit  néanmoins  le  meurtrier  devant  le 
parlement  (X^^  22,  f»»  1  v,  4). 

2.  Ilist.  de  Bourg.,  IV,  222-223. 

3.  Nogent-le-Roy,  arrondissement  de  Cbaumont.  Montigny-le-Roi,  arron- 
dissement de  Langres.  Le  sire  de  La  Suze  avait  conclu  une  convention,  le 
jour  de  Noël  1435,  avec  Erard  du  Chdtelet,  pour  assiéger  Nogent  et  Mon- 
tigny  (Coll.  de  Lorraine,  VIII,  n"  43,  43;  Coll.  de  Bourgogne,  t.  100,  f"  247 
248;  X2a  23,  au  19  juin  et  au  3  juillet  1455;  Hist.  de  Bourg.,  IV,  222-223). 

4.  Ce  ne  fut  donc  pas  Robert  de  Sarrebriick  qui  fit  lui-même  cette 
guerre,  comme  le  dit,  à  tort,  Monstrelet.  Robert,  revenant  de  la  Terre- 
Sainte,  fut  arrêté  le  18  septembre  1433,  à  Bâie,  puis  remis,  en  août  1436,  à 
la  régence  de  Lorraine,  qui  le  retint  prisonnier  jusqu'au  28  mars  1437 
(D.  Galmet,  II,  794-793;  Dumont,  Hist.  de  Commercy,  I,  232-233). 

5.  Coll.  de  Lorraine,  VIII,  n"  43. 

6.  Chauvency-le-Château,  canton  de  Montmédy. 

7.  Canton  de  Montfaucon-en-Argonne,  arrondissement  de  Montmédy. 

8.  Canton  de  Châtillon-sur-Marne,  arrondissement  de  Reims. 


260  LE   ROI   PROMET   DE   VENIR   A   PARIS    (1436) 

assez  de  forces  pour  s'emparer  de  Braisne  %  défendue  par  une 
garnison  nombreuse,  il  alla  occuper  Sainte-Menehould,  en  vertu 
d'une  convention  conclue  avec  le  capitaine  de  cette  place, puis  il 
réduisit  encore  Nanteuil  %  Han  '^,  Bourg  *  et  plusieurs  autres  for- 
teresses ^. 

Après  avoir  donné  à  la  reine  Yolande  et  à  son  fils  René  ces 
preuves  de  gratitude  et  d'affection,  le  connétable  revint  à  Paris, 
où  il  avait  hâte  de  rentrer  ^  (août  1436).  Sur  ses  conseils,  les 
Parisiens  avaient  envoyé  une  ambassade  à  Bourges  (28  avril), 
pour  prier  le  roi  de  venir  dans  sa  bonne  ville  capitale,  d'y  réta- 
blir les  cours  souveraines  ''  et  de  travailler  à  Texpulsion  totale 
des  ennemis.  Les  ambassadeurs  remercièrent  aussi  Charles  VU 
d'avoir  chargé  du  recouvrement  de  Paris  son  connétable,  dont 
ils  louèrent  la  bienveillance  et  la  modération.  Le  roi  fit  le  plus 
gracieux  accueil  à  ces  envoyés.  Il  leur  affirma  qu'il  viendrait 
«  visiter  et  consoler  ses  bons  et  loyaux  subjects  ^  »  aussitôt  qu'il 

1.  Braisne,  arrondissement  de  Soissons,  appartenait  au  damoiseau  de 
Commercy  (Carlier,  Hist.  du  Valois,  II,  471). 

2.  Nanteuil-la-Fosse,  c.  d'Ay,  arrondissement  de  Reims. 

3.  Han-lès-Juvigny,  c.  de  Montmédy,  ou  Haus,  c.  de  Sainte-Menehould  (?). 

4.  Bourg,  arrondissement  de  Vouziers. 

5.  Charles  VII  donna  Sainte-Menehould  à  Richemont  en  novembre  1437. 
Voir  X»a  4798.  f"  21S;  Ch.  Buirette,  Hist.  de  Sainte-Menehould,  1837,  in-8, 
p.  169-171.  (Sainte-Menehould  était  une  ville  importante,  où  il  y  avait  des 
marchés  et  des  foires  considérables.  JJ  17S,  f »  4  v»;  Monstrelet,  V,  222- 
224;  Abrégé  chronol.  dans  Godefroy,  p.  340;  Cagny,  f"'  101  v»,  102).  Gruel, 
p.  209,  est  muet  sur  ces  faits.  Il  dit  que  Richemont  revint  d'Abbeville  à 
Paris.  C'est  probablement  dans  la  deuxième  moitié  de  juillet  et  dans  la 
première  moitié  d'août  que  Richemont  fit  cette  petite  campagne,  car  il 
était  encore  à  Compiègne  au  commencement  de  ^lin,  et  on  a  vu  qu'il  était 
allé  ensuite  auprès  de  Philippe  le  Bon  (D.  Grenic-,  XX  625,  liasse  9,  f»  17  v°). 
Dans  la  deuxième  quinzaine  d'août,  il  était  à  Paris  (Y*  f"  10). 

6.  Gruel,  210,  dit  que  les  Anglais  lui  tendirent  une  embuscade  pour  l'ar- 
rêter, mais  qu'ils  n'osèrent  l'attaquer.  Richemont  était  à  Pans  le  21  août 
(voy.  Append.  LXIII). 

7.  L'évéque  de  Paris  et  les  autres  ambassadeurs  étaient  partis  le  ven- 
dredi 28  avril  (LL  217,  f»  208;  voy.  aussi  f»  215,  aux  dates  du  lundi  28  mai 
et  du  vendredi  r'  juin;  K  949,  nos  25,  26).  Le  22  mai,  lettres  de  Charles  VII 
ordonnant  que  toutes  les  cours  qui  se  tiennent  à  Paris  cessent,  jusqu'à 
nouvel  ordre,  à  cause  de  certaines  grandes  affaires  qui  empêchent  d'insti- 
tuer le  Parlement  à  Paris,  pour  le  présent,  comme  il  avait  été  ordonné  de 
le  faire  (X»»  8603,  f"  35;  Ordonn.,  XIII,  218-219). 

8.  Le  roi  avait  évidemment  promis  de  venir  bientôt  à  Paris,  puisque, 
après  le  retour  des  envoyés,  le  chapitre  de  Notre-Dame  délibéra  «  de  modo 
recipiendi  dominum  nostrum  regem,  quando  proxime  veniet  in  bac  villa  » 
(LL  217,  fo  218,  à  la  date  du  mercredi  l<i  juin).  On  retrouve  cette  promesse 
dans  la  réponse  que  fait  Charles  VII  à  la  requête  du  Parlement  de  Poitiers 
(Félibien,  t.  III  des  Preuves,  p.  270  ;  voir  aussi  Fr.  21302,  au  10  août). 
Enfin  le  roi  avait  retenu  le  vicomte  de  Thouars  pour  l'accompagner  dans 


EMBARRAS   DU   CONNÉTABLE   A   PARIS   (1436)  261 

aurait  pourvu  aux  affaires  les  plus  urgentes  ;  qu'il  n'avait  chose 
au  monde  plus  à  cœur  que  de  chasser  entièrement  les  ennemis 
de  son  royaume  et  qu'il  voulait  «  s'y  employer  de  corps  et  de 
biens  ».  En  réalité,  il  éprouvait  une  antipathie  insurmontable 
pour  cette  ville  turbulente,  dont  il  avait  gardé  un  si  mauvais 
souvenir  ;  mais  il  n'en  laissa  rien  voir,  et  les  députés  revinrent 
tout  heureux  des  promesses  qu'il  leur  avait  faites  *.  Le  conné- 
table fut,  lui  aussi,  très  satisfait  de  ces' engagements,  et  il  ne  né- 
gligea rien  pour  en  hâter  la  réalisation. 

Au  mois  d'août,  une  nouvelle  ambassade  alla  trouver  le  roi, 
et  dès  lors  il  décida  que  le  Parlement,  qui  était  à  Poitiers  de- 
puis 1418,  serait  rétabli  à  Paris  ^.  Cependant  celte  dernière  ville 
était  toujours  menacée  par  les  Anglais  ^.  Pour  la  protéger,  Riche- 
mont  eut  soin  de  mettre  des  garnisons  suffisantes  dans  les  places 
fortes  de  l'Ile-de-France,  comme  Saint-Germain-en-Laye,  Pon- 
toise,  Senlis,  Lagny,  le  Bois-de-Yiocennes,  Gorbeil,  Chantilly,  le 
Pont-de-Meulan  et  autres  *.  Il  interdit  encore  aux  capitaines  de 
molester  les  habitants,  et  il  essaya  de  pourvoir  au  payement  ré- 
gulier de  la  solde,  par  un  impôt  sur  les  vins  qui  traversaient  Paris 
et  le  pays  voisin  (22  août)  ^.  Cette  ressource  paraissant  insuffi- 
sante, le  Conseil  du  roi  ordonna  (30  août)  qu'on  saisît  et  qu'on 
veildît  les  biens  meubles  et  immeubles  de  tous  les  Parisiens  qui 
persistaient  à  demeurer  en  pays  ennemi  ;  enfin  il  mit  une  aide 
sur  tout  le  vin  recueilli  dans  la  prévôté,  vicomte  et  élection  de 
Paris  ^. 

Pénurie  continuelle  d'argent,  indicipline  et  ravages  des  gens 
de  guerre,  plaintes  réitérées  des  habitants,  telles  étaient  les 
difficultés  qui  entravaient  sans  cesse  les  efforts  du  connétable. 
II  désirait  d'autant  plus  mettre  fin  à  cet  état  de  choses,  et,  comme 

rile-de-France  et  l'avait  chargé  de  réunir  autant  de  troupes  qu'il  en  pour- 
rait trouver  (X">  9201,  f-  202  v). 

1.  LL  217,  f-  215,  au  lundi  28  mai.  Du  Boulai,  V,  436-437.  Xi^  8604, 
fus  127-128.  Félibien,  t.  III,  269.  Y*  f-  3,  5.  X'»  8605,  f"  36.  Ms.  Brienne, 
197,  f»»  346  et  suiv.  Le  roi  confirma  dès  lors  les  privilèges  de  l'Université 
de  Paris  (du  Boulai,  V,  438;  Y*  f»  8). 

2.  LL  217,  f  235,  et  Ordonn.,  XIII,  226-227.  Fr.  21302,  au  10  août  1436. 
D.  Neuville,  le  Parlement  rorjal  à  Poitiers,  dans  la  Revue  histor.,  t.  VI"» 
p.  311  et  suiv. 

3.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  327,  §  708. 

4.  Voy.  Append.  LXVI. 

5.  Voy.  Append.  LXV. 

6.  Y*  f"  10  V»,  12.  Ordonn.,  XIII,  p.  227-229.  Le  Bourg,  de  Paris,  226.  Le 
23  juin  et  le  12  juillet,  des  ordonnances  sur  les  monnaies  avaient  été  ren- 
dues par  les  gens  du  Conseil  du  roi  étant  à  Paris  (Y*,  f"'  8  v  et  9).  Jacques 
Cœur  était  alors  à  Paris  (d'après  P.  Clément,  Jacques  Cœur  et  Charles  VU, 
Didier,  1866,  in-12,  p.  71). 


262      RICHEMONT   VA   VOIR   LE   ROI   ET   LE   DUC   DE   BRETAGNE    (1436) 

il  espérait  beaucoup  de  la  présence  du  roi,  il  se  rendit  auprès  de 
lui,  après  avoir  laissé  à  Paris  son  lieutenant,  le  sire  de  Ros- 
trenen  (septembre). 

C'est  à  Loches  que  Richemont  trouva  la  cour.  Il  fut  reçu 
d'une  manière  plus  cordiale  qu'auparavant,  bien  que  La  Tré- 
moille  ne  fût  pas  encore  oublié  *  ;  mais  il  ne  put  obtenir  que  le 
roi  vint  avec  lui  à  Paris.  Jusqu'ici,  d'autres  soins  avaient  retenu 
Charles  VU  sur  la  Loire,  notamment  le  mariage  du  Dauphin 
avec  Marguerite  d'Ecosse  (2o  juin)  ^.  Maintenant,  il  voulait  se 
rendre  dans  le  Languedoc,  oii  la  mort  du  comte  de  Foix  ^,  gou- 
verneur de  cette  province,  la  mauvaise  administration  finan- 
cière de  l'évêque  de  Laon,  Guillaume  de  Ghampeaux,  et  les 
courses  désastreuses  des  routiers  avaient  créé  de  graves  diffi- 
cultés qui  réclamaient  un  prompt  remède  ■*.  Certes,  la  présence 
du  roi  eût  été  beaucoup  plus  utile  à  Paris  que  dans  le  Lan- 
guedoc, mais  il  préférait  ce  voyage  aux  ennuis  d'une  expédition 
militaire.  Il  fut  seulement  convenu  que  le  connétable  demeurerait 
à  Paris,  avec  la  duchesse  de  Guyenne,  pour  donner  une  première 
satisfaction  aux  Parisiens,  en  attendant  que  le  roi  pût  venir  lui- 
même  dans  sa  capitale  ^. 

Richemont,  après  avoir  passé  quelques  jours  à  Parlhenay,  eut 
une  entrevue,  à  Ancenis,  avec  son  frère,  le  duc  de  Bretagne  et 
avec  Gh.  d'Anjou,  comte  de  Mortain,  qui  était  toujours  en 
grande  faveur  auprès  du  roi  ^  Le  connétable  sentait  bien  qu'il 
était  difficile  de  ramener  le  duc  de  Bretagne  à  l'alliance  fran- 

1.  Il  reçut,  en  novembre,  l'ordre  de  réduire  Montereau  et  Montargis 
(Anselme,  IV,  165  B),  et  fut  même  nommé  capitaine  de  ces  places.  On  soup- 
çonne là  une  nouvelle  manœuvre  du  mortel  ennemi  de  Richemont  (L.  Rc- 
det,  Catal.  de  D.  Fonteneau,  p.  333). 

2.  J  186b,  fo  22.  Le  16  août  est  conclu  le  traité  du  mariage  de  Yolande 
de  France  avec  Amédée  de  Savoie  (J  186b,  f-  23).  Amédée,  fils  de  Louis  V", 
duc  de  Savoie  et  petit-fils  d'Amédée  VIII,  était  né  en  1435.  Yolande,  troi- 
sième fille  de  Charles  VII,  était  née  le  23  septembre  1434  (Anselme,  I,  118). 
Le  mariage  n'eut  lieu  qu'en  1452. 

3.  Jean,  comte  de  Foix  et  de  Bigorre,  vicomte  de  Béarn,  mourut  à 
Mazères  le  4  mai  1436  (Anselme,  III,  370,  373). 

4.  Fr.  26060,  n"'  2744,  2745,  2748.  Fr.  26061,  n»s  2808,  2813.  Sur  les  rou- 
tiers (notamment  Rodrigo),  voy.  Fr.  26062,  n"'  3024,  3053;  Fr.  26063, 
n"  3232,  3270;  J.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando,  p.  126  et  suiv. 

5.  Cagny  dit  que  cette  résolution  mécontenta  beaucoup  tout  le  monde, 
seigneurs,  prélats,  habitants  des  bonnes  villes  :  «  Et  pouvoit  sembler  à 
grant  partie  d'iceulx  qu'il  (le  roi)  avait  petit  regard  aux  grans  meschiefs 
et  guerres  de  son  royaume  »  (Cagny,  f  103  V).  Cagny  dit,  auparavant, 
que  cette  résolution  fut  prise  au  moment  même  où  les  Parisiens  envoyaient 
une  nouvelle  ambassade  au  roi,  à  Amboise,  pour  le  supplier  de  venir  à 
Paris,  où  sa  présence  était  si  nécessaire  [Ibid.). 

6.  Gruel,  210. 


IL  RAMÈNE   LE  PARLEMENT  A  PARIS   (1436,   NOV.)  263 

çaise,  mais  c'était  un  motif  de  plus  pour  préparer  peu  à  peu  sa 
défection.  D'ailleurs  les  Bretons  du  parti  français  continuaient 
de  suivre  le  sire  (Je  Lohéac,  et,  en  attendant  que  le  duc  redevint 
l'allié  de  Charles  VII,  il  pouvait,  rien  que  par  une  tolérance 
bienveillante,  rendre  de  grands  services.  Le  13  septembre,  le 
duc  de  Bretagne  et  Ch.  d'Anjou  avaient  conclu  un  traité  d'al- 
liance *.  L'entrevue  des  trois  princes  ne  put  que  fortifier  les 
bonnes  dispositions  de  Jean  V  envers  la  France  ^,  et,  sans  produire 
d'autre  résultat  immédiat,  elle  suffît  pour  inquiéter  les  Anglais. 
D'ailleurs  les  sires  de  Lohéac  et  de  Bueil  réunirent  des  forces 
considérables  du  côté  de  Vitré,  Fougères,  Laval,  Château-Gon- 
tier,  d'où  ils  menacèrent  la  basse  marche  de  Normandie  ^  (octobre 
et  novembre). 

Richemont  revint  ensuite  à  Parthenay,  hâter  les  préparatifs 
de  départ.  Il  n'attendit  pas  la  duchesse  de  Guyenne,  pour  se 
rendre  auprès  du  roi,  dans  les  premiers  jours  de  novembre  *. 
Par  lettres  données  à  Issoudun  le  6  da  même  mois,  Charles  VII 
prescrivit  le  rétablissement  à  Paris  du  Parlement,  de  la  Cour  des 
comptes  et  de  la  Cour  des  monnaies,  qui  étaient  à  Bourges  de- 
puis 1418.  Le  connétable  et  le  chancelier  étaient  chargés  de 
faire  exécuter  cette  ordonnance  ^.  Ils  prirent  congé  du  roi,  pour 
aller  à  Orléans,  où  déjà  était  arrivée  la  duchesse  de  Guyenne. 
Les  magistrats,  avec  leurs  familles  et  leurs  biens,  étaient  aussi 
venus  dans  cette  ville,  afin  de  se  rendre  à  Paris,  sous  la  protection 
du  connétable,  car  on  pouvait  craindre  la  rencontre  des  Anglais 
et  des  routiers  *'.  Pour  plus  de  sécurité,  le  sire  de  Rostrenen, 
Ant.  de  Chabannes,  Jean  Foucault,  Mahé  Morillon,  prévenus  à 
temps,  s'avancèrent,  avec  une  nombreuse  compagnie  de  gens 
d'armes,  jusqu'à  Etampes.  De  là,  Richemont,  en  passant  par 

1.  L'original  est  aux  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  76,  E,  179. 

2.  Charles  d'Anjou  demanda  probablement  aussi  Tintervention  de  Jean  V 
auprès  de  Philippe  le  Boa,  pour  obtenir  la  délivrance  de  René,  car  le  comte 
de  Montfort  se  porta  garant  auprès  du  duc  de  Bourgogne,  en  janvier  1437, 
Voir  ci-dessous,  p.  529,  note  2. 

3.  Fr.  26060,  n«  28022.  Fr.  26061,  n"  2836,  2839,  2840,  2891.  Fr.  26062, 
n»  3137. 

4.  Gruel,  210. 

5.  X"  8605,  f»'  36  v%  37.  Félibien,  V,  272.  Blanchard,  Compilation  chro- 
nologique, col.  250.  Ordonn.,  XIII,  226.  Le  18  octobre,  le  Parlement  de  Poi- 
tiers recevait  une  lettre  du  roi  qui  lui  enjoignait  de  venir  vers  lui,  à 
Tours,  le  25  octobre  (X*»  9194,  f°  255  v»).  La  dernière  séance  mentionnée 
dans  le  registre  X*»  9201  est  celle  du  20  octobre;  mais  il  resta  tout  au 
moins  quelques  magistrats  de  la  cour  à  Poitiers,  car  la  dernière  aifaire 
criminelle  est  du  mercredi  28  novembre  (X*"  21,  à  la  fin  ;  voir  aussi  Fr. 
21302,  aux  10  août,  15  octobre  et  18  octobre  1436). 

6.  Les  Anglais  occupaient  Montargis  et  Montereau.  Quant  aux  rautiers, 
ils  osèrent  bien,  quelque  temps  après,  attaquer  les  fourriers  du  roil 


264  INSTALLATION   DES   COURS   A   PARIS    (1436,    NOV.-DÉC.) 

Gorbeil,  gagna  Paris,  où  il  arriva  le  vendredi  23  novembre,  dans 
l'après-midi  *.  Dès  le  lendemain,  la  duchesse  de  Guyenne  alla 
entendre  la  messe  à  Notre-Dame,  où  elle  fut  reçue  solennellement 
par  l'évêque  de  Paris  et  son  clergé  *.  Le  29,  le  connétable  fit 
publier  les  lettres  relatives  au  rétablissement  des  cours.  Le  sa- 
medi, l^""  décembre,  il  vint  présider  à  l'installation  solennelle  du 
Parlement,  avec  l'archevêque  de  Reims,  chancelier  de  France, 
l'archevêque  de  Toulouse,  le  bâtard  d'Orléans,  le  maréchal  de 
Rieux,  le  sire  de  Gaucourt,  J.  Tudert,  doyen  de  Paris.  Le  même 
jour,  la  Chambre  des  comptes  fut  ouverte  par  le  chancelier, 
pendant  que  le  connétable  entendait  la  messe  à  la  sainte  Cha- 
pelle. Parmi  les  magistrats  de  cette  cour  nouvellement  ordonnés, 
on  remarque  Michel  de  Laillier  '. 

Ce  n'était  pas  seulement  de  Paris  que  Richement  avait  à  s'oc- 
cuper *.  Il  recevait  de  tous  côtés  des  plaintes  contre  les  gens  de 
guerre.  En  vain  le  Conseil  du  roi,  siégeant  à  Paris,  avait  enjoint 
aux  capitaines  de  ne  rien  exiger  des  habitants,  de  renvoyer  aux 
frontières,  devant  l'winemi,  les  gens  d'armes  qui  étaient  venus, 
sans  autorisation,  dans  les  places  de  l'Ile-de-France  ;  en  vain  le 
sire  de  Rostrenen,  le  prévôt  de  Paris,  les  baiUis  de  Senlis  et  de 
Meaux  avaient  été  chargés  de  réprimer  l'audace  des  routiers  joar 
tous  les  moyens  possibles  (l^""  octobre)  ;  les  pilleries  avaient  re- 
commencé aussitôt  après  le  départ  du  connétable  ^.  Il  semblait 
que  sa  présence  pût  seule  apporter  un  remède  à  ce  fléau.  On 
savait,  du  moins,  qu'il  faisait  tous  ses  efforts  pour  le  combattre. 

Dans  ce  moment  même,  Guillaume  de  Flavy,  capitaine  de 
Compiègne,  commettait  de  cruelles  exactions  dans  le  Soisson- 
nais.  Outre  le  château  de  La  Fère-en-Tardenois  ^,  qui  lui  ap- 


1.  Le  Bourgeois  de  Paris,  p.  327-28.  Gruel,  210.  LL217,  f°  263,  au  23  no- 
vembre. Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1268. 

2.  LL  217,  f»  265,  au  24  novembre. 

3.  X«»  8605,  f»  272.  X»»  1481,  f-  122.  Félibien,  IV,  597  et  suiv.  X'»  1482, 
fo»  1  v"  et  2.  P  2531,  f»'  152,  155.  Xî"  22,  f»  1.  Arch.  du  min.  des  aff.  étr., 
t.  20,  fos  108  v»,  110.  Un  peu  plus  tard,  le  roi  déclare  que  les  sentences 
rendues  auparavant,  sous  la  domination  anglaise,  conserveront  leur  effet 
(Y*  fo  14  v,  15).  II  est  très  probable  que  Richement,  d'accord  avec  le  Par- 
lement, réorganisa  aussi  le  Conseil  de  la  ville  de  Paris  à  cette  époque 
(voir,  dans  K  996,  un  mémoire  du  24  juillet  1778). 

i.  Le  duc  de  Bourbon  devait  avoir  le  commandement  de  la  Bastille  ; 
mais,  à  la  date  du  3  janvier  1437,  personne  n'était  encore  venu,  de  par  le 
roi,  prendre  la  garde  de  cette  forteresse  {Arch.  des  aff.  étr.,  t.  20,  f*  114  v°). 

5.  Voy.  Append.  LXVI.  Voir  aussi  le  Bourg,  de  Paris,  qui  ne  manque 
jamais  une  occasion  de  se  signaler  par  l'aprêté  de  ses  plaintes,  quelquefois 
par  l'exagération  de  ses  griefs  et  l'injustice  de  ses  accusations  (p.  327, 
§  708). 

6.  Arrondissement  de  Château-Thierry. 


DÉLIVRANCE   DE   RENÉ  d'ANJOU    (1437,    4   FÉVRIER)  26S 

partenait,  il  en  avait  pris  plusieurs  autres,  comme  celui  de 
Vailly  *  et  la  tour  d'Ambleny  %  d'où  il  exerçait  dans  le  pays  un 
véritable  brigandage.  Imploré  par  les  habitants,  Richemont  lui 
enleva  le  gouvernement  de  Gompiègne,  l'assiégea  dans  le  châ- 
teau de  Vailly,  l'y  réduisit  à  capituler  (20  décembre)  et  fit  dé- 
molir cette  place  «  pour  le  bien  du  pais  et  de  la  marchandise  ^  ». 
Elu  capitaine  de  Gompiègne  par  les  habitants,  il  accepta  cette 
charge,  dans  laquelle  il  fut  confirmé  par  le  roi  (décembre),  et  il 
y  mit  comme  lieutenant  H.  de  Villeblanche,  puis  le  sire  de  Ros- 
trenen  *.  Toutefois  Guillaume  de  Flavy  rentra  bientôt  en  grâce, 
comme  tant  d'autres  pillards  qui  obtenaient  du  roi  des  lettres 
d'abolition,  au  grand  mécontentement  du  peuple  et  du  conné- 
table. Flavy  redevint  donc  capitaine  de  Gompiègne  (mars  1437) 
et  put  continuer  ses  brigandages  ^. 

Avant  de  reprendre  ses  opérations  dans  les  environs  de  Paris, 
le  connétable  dut  aller,  avec  le  chancelier,  en  Ghampagne  ^,  pour 
obtenir  quelques  subsides  des  Etats  de  cette  province,  puis  à 
Lille,  où  avaient  lieu  des  conférences  entre  le  duc  de  Bourgogne 
et  René  d'Anjou.  Il  prit  une  part  active  à  ces  négociations,  qui 
aboutirent  enfin  à  la  délivrance  du  roi  de  Sicile  (4  février).  Quel- 
que temps  après,  René  rendit  aussi  la  liberté  à  Robert  de  Sarre- 
brùck,  sur  la  recommandation  du  comte  de  Richemont  (28  mars)  '. 

1.  Arrondissement  de  Soissons. 

2.  Id. 

3.  D.  Grenier,  XX  bis,  liasse  9,  f"  18. 

4.  Le  sire  de  Rostrenen  était  lieutenant  du  connétable  à  la  capitainerie 
de  Gompiègne  et  partout  ailleurs  (D.  Grenier,  XX  bis,  f°  18).  Voir,  dans  le 
l.  XX  de  D.  Grenier,  un  extrait  d'un  manuscrit  intitulé  «  Mémoire  pour 
servir  à  l'histoire  de  Gompiègne  »,  p.  38,  et  une  histoire  de  Gompiègne, 
par  D.  Berthau,  ch.  10,  p.  83  et  suiv.  —  Voir  aussi  le  t.  XX  bis  de  D.  Gre- 
nier, liasse  8"",  f»  15i.  Le  connétable  était  à  Gompiègne  le  8  décembre, 
avec  le  chancelier  de  France. 

5.  D.  Grenier,  XX  bis,  f»  18  v».  J.  Ghartier,  I,  244.  Monstrelet  dit  que 
Flavy  trouva  le  moyen  de  rentrer  dans  Gompiègne,  avec  beaucoup  de  gens 
de  guerre,  et  qu'il  reprit  cette  ville  à  ceux  que  le  connétable  y  avait  com- 
mis, enfin  qu'il  tint  longtemps  Gompiègne,  du  consentement  du  roi,  mal- 
gré les  elTorts  du  connétable  pour  la  ravoir  (Monstrelet,  V,  274).  Ge  fait, 
entre  beaucoup  d'autres,  ne  justifie-t-il  pas  cette  amère  réflexion  de 
J.  Ghartier  (le  panégyriste  de  Charles  VII,  pourtant)?  «  Qui  pouvoit  avoir 
plus  de  gens  sur  les  champs  et  plus  povoit  pillier  et  rober  les  povres  gens 

'estoit  le  plus  craint  et  le  plus  doubté  et  qui  plus  tost  eust  obtenu  quelque 
chose  du  roy  de  France  que  nul  aultre  •  (J.  Ghartier,  I,  241). 

6.  LL  217,  {o  267,  à  la  date  du  mercredi  5  décembre.  Il  était  à  Ghâlons  le 
14  janvier,  avec  René  d'Anjou.  11  fit  ajouter  500  1.  aux  1  000  1.  que  devait 
payer  la  ville  de  Ghâlons,  pour  sa  part  d'un  subside  voté  par  les  Etats  de 
Ghampagne,  réunis  à  Reims,  au  commencement  de  janvier  1437  (Ed.  de 
Barthélémy,  Hist.  de  Chàlons,  Ghâlons,  1834,  in-8,  p.  185  et  note  1). 

7.  Le  traité  pour  la  libération  de  René  fut  conclu  à  Lille,  le  4  février.  Phi 


266   LES  ANGLAIS  REPRENNENT  PONTOISE  (1437,  12  FÉVRIER) 

Le  connétable  profita  de  son  séjour  à  Lille  pour  conclure  aussi 
un  arrangement  avec  J.  de  Luxembourg,  qui  n'avait  pas  encore 
consenti  à  jurer  la  paix  d'Arras  ^  La  Hire,  qui  faisait  la  guerre 
au  comte  de  Luxembourg,  dut  s'abstenir  de  toute  hostilité  envers 
lui  et  put  tourner  ses  forces  d'un  autre  côté.  Richemont  repartit 
ensuite  pour  Paris  (février)  ^,  où  sa  présence  était  plus  indis- 
pensable que  jamais,  car,  depuis  son  départ,  de  graves  événe- 
ments s'étaient  accomplis. 

Le  duc  d'York  tenait  à  reprendre  la  capitale  et  les  places  voi- 
sines. Il  avait  des  intelligences  dans  ces  villes  avec  des  traîtres 
qui  lui  révélaient  ce  qui  s'y  passait,  les  projets  du  connétable, 
et  qui  se  préparaient  à  seconder  les  tentatives  de  l'ennemi.  Ils 
avaient,  dit-on,  découvert  d'anciennes  carrières  qui  communi- 
quaient avec  des  caves,  par  où  ils  devaient  introduire  les  An- 
glais dans  Paris  ^. 

Ceux-ci  commencèrent  par  s'emparer  d'Ivry  et  de  Pontoise. 
Le  comte  de  Salisbury,  lieutenant  général  du  duc  d'York,  avec 
Talbot  et  Fauquemberge ,  surprit,  par  un  habile  stratagème, 

lippe  le  Bon,  qui  avait  échoué  au  siège  de  Calais  et  qui  avait  eu  ensuite 
à  repousser  une  invasion  de  Glocester  en  Flandre,  avait  maintenant  à  con- 
tenir les  Flamands,  prêts  à  se  révolter.  Il  avait  besoin  d'argent  et  se  montra 
moins  rapace,  tout  en  imposant  à  René  des  conditions  très  onéreuses, 
comme  le  payement  de  400  000  écus  d'or.  Il  faut  remarquer  que  le  comte  de 
Montfort,  fils  de  Jean  V  et  neveu  de  Richemont,  se  porta  garant  pour  René, 
et  que  le  seigneur  de  Croy,  dont  les  services  peu  désintéressés  n'avaient 
pas  été  inutiles  au  connétable  lors  du  traité  d'Arras,  employa  encore  son 
crédit  auprès  de  Philippe  le  Bon  dans  ces  négociations  (Coll.  de  Lorraine, 
t.  238,  n»»  19,  23,  27,  28;  D.  Calmet,  t.  II,  p.  79i,  800,  et  Lecoy  de  La  Mar- 
che, Le  roi  René,  I,  p.  122-123,  et  II,  p.  224-233;  Monstrelet,  V,  273).  Quant 
au  traité  relatif  à  la  mise  en  liberté  de  Rob.  de  Sarrebrûck,  il  fut  conclu 
à  Vaucouleurs,  le  28  mars, pendant  que  René  était  dans  l'Anjou  (voy.  Du- 
mont,  Uist.  de  Commerctj,  t.  I,  p.  232-233,  et  aussi  plusieurs  copies  de  ce 
traité  dans  le  t.  292  de  la  coll.  de  Lorraine,  f»'  40-46). 

1.  La  Hire,  qui  était  bailli  de  Vermandois,  lui  faisait  la  guerre  et  lui 
avait  pris  la  ville  de  Soissons.  Il  fut  convenu  que  les  hostilités  cesseraient 
de  part  et  d'autre  et  que  J.  de  Luxembourg  aurait  délai  jusqu'à  la  Saint- 
Jean-Baptiste  pour  faire  serment  au  roi  (Monstrelet,  V,  273-274).  Il  resta 
néanmoins  attaché  aux  Anglais  {liist.  de  Bourg.,  IV,  239). 

2,  Il  était  avec  le  chancelier,  à  Gompiègne,  le  15  février  (D.  Grenier, 
XX  bis,  f»  18),  et  à  Paris  quelques  jours  après  (LL  217,  f»  278,  à  la  date 
du  mardi  19  février). 

.  3.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  330-331,  nomme  ici  J.  de  Lunay(ou  de  Lunel); 
J.  Rousseau,  J.  Leclerc,  Mille  de  Saulx.  Cagny  dit  que  Jacques  de  Lunel 
avait  été  secrétaire  de  Henri  VI;  que  ces  traîtres  faisaient  partie  du  Con- 
seil du  roi  à  Paris;  qu'ils  révélaient  ce  qui  s'y  passait;  qu'ils  empêchèrent 
les  Français  de  prendre  Meaux  et  Vernon,  où  ils  avaient  des  intelligences; 
enfin  qu'ils  voulaient  aussi  livrer  le  pont  de  Charenton  aux  Anglais  (P.  de 
Cagny,  ap.  Duchesne,  48,  f»  104  v).  Pierre  de  Rostrenen  occupait  alors  le 
pont  de  Charenton  (voy.  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1298). 


TRAÎTRES   EXÉCUTÉS  A  PARIS   (1437)  267 

cette  place  importante,  qui  fut  mal  défendue  par  Villiers  de  L'Isle- 
Adam  ^ 

Ce  fut  un  grand  malheur  pour  Paris. L'hiver  était  rigoureux; 
la  persistance  du  froid,  la  cherté  des  vivres  ^  aggravaient  la  mi- 
sère du  peuple,  et  Pontoise  regorgeait  de  blé,  tandis  qu'on  en 
manquait  à  Paris  ^.  Avec  les  Anglais  dans  le  voisinage,  les  appro- 
visionnements devinrent  encore  plus  difficiles,  A  peine  étaient-ils 
maîtres  de  Pontoise  qu'ils  essayèrent  aussi  de  surprendre  Paris. 
La  veille  du  premier  dimanche  de  carême  *,  vers  minuit,  ils  ar- 
rivèrent devant  la  ville.  Gomme  les  fossés  étaient  gelés,  ilspurent 
s'approcher  des  murailles  et  les  escalader;  mais  on  faisait  bonne 
garde,  et  ils  furent  repoussés  ^. 

Quelques  jours  après,  Richement  rentrait  à  Paris,  avec  le  chan- 
celier de  France  (mardi  19  février)  ''.Alarmé  du  danger  que  la  ville 
avait  couru  et  qui  la  menaçait  encore,  il  prit  des  mesures  éner- 
giques. Il  institua  prévôt  de  Paris  (23  février)  Ambroise  deLoré  '', 
ce  vaillant  capitaine,  dont  la  vigilance  et  le  dévouement  n'étaient 
jamais  en  défaut;  il  poursuivit  les  traîtres  qui  servaient  si  bien 
l'Angleterre  ;  il  les  fit  condamner  et  décapiter  à  Paris  *.  L'un  d'eux, 
Mille  de  Saulx  ^,  fortifiait  alors  Beauvoir-en-Brie  *°.  Richemont 
envoya  J.  de  Malestroit,  avec  le  commandeur  de  Giresme  et  Denis 
de  Ghailly,  attaquer  cette  place  *'.  Après  un  assaut  qui  dura 
toute  une  journée,  la  garnison  capitula,  en  livrant  plusieurs 
otages,  entre  autres  Mille  de  Saulx.  Amené  à  Paris,  il  fut  exécuté 
comme  ses  complices  (le  10  avril)  *^ 

1.  La  prise  de  Pontoise  eut  lieu  dans  la  nuit  du  12  février  (J.  Chartier, 
I,  233;  Cagny,  f»  104  ;  Berry,  394;  JJ  176,  f»  54  v»;  le  Bourg,  de  Paris,  329). 
Villiers  de  L'Isle-Adam  fut  tué,  la  môme  année,  à  Bruges,  dans  une  sédi- 
tion. Voir  aussi  Fr.  26062,  n<"  3164,  3166,  3185,  3188-89.  Fauquemberge  fut 
nommé  capitaine  de  Pontoise,  Fr.  26063,  n»  3284.  Talbot  et  Fauquemberge» 
avant  de  surprendre  Pontoise,  avaient  déjà  pris  Ivry,  à  la  fin  de  janvier 
(Fr.  26062,  n»  2164J.  Au  mois  de  février,  ils  menacèrent  aussi  Beauvais 
(C.-L.  Doyen,  Hist.  de  Beauvais,  p.  88-89). 

2.  La  famine  se  faisait  sentir  également  en  Bourgogne  (JJ  176,  f"  211  v»). 

3.  On  interdit  alors  de  faire  du  pain  blanc  à  Paris,  par  une  ordonnance 
du  16  février  (le  Bourg,  de  Paris,  329). 

4.  C'est-à-dire  dans  la  nuit  du  16  au  17  février. 

5.  Le  Bourg,  de  Paris,  329-330. 

6.  LL  217,  f»  278. 

7.  Y*  f»  4  v».  Le  roi  lui  donna  l'hôtel  de  la  Grange  aux  Merciers  (près  de 
la  porte  Saint-Antoine),  qui  appartenait  au  chancelier  L.  de  Luxembourg 
(Arch.  du  min.  des  a£f.  étr.,  t.  20,  f»'  121,  128  v,  129). 

8.  Le  26  mars,  d'après  le  Bourg,  de  Paris,  p.  330  et331.Monstrelet,  V,  279. 

9.  Clairamb.,  102,  f-  7911. 

10.  Beauvoir,  canton  de  Mormant,  arrondissement  de  Melun. 

11.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1268.  —  Nicolas  de  Giresme  était 
chevalier  de  Rhodes  (Pièces  orig.,  1333,  dossier  30174,  n"»  25,  33  et  suiv.), 

12.  Gruel,  210.  Vallet  de  V.,  II,  399-400,  avec  la  date  inexacte  de  1438.  Vers 


268  LES   ANGLAIS    MEISACENT  PARIS    (1437) 

Cependant  les  Anglais  continuaient  leurs  entreprises  sur  les  pla- 
ces des  environs  de  Paris,  notamment  sur  Senlis  Mis  s'emparèrent 
de  Clievreuse,du  château  d'Orville  %d'où  ils  pouvaient  surveiller 
les  chemins  conduisant  vers  la  Brie,  la  Picardie  et  la  Flandre. 
Ils  désolaient  tous  les  environs  de  Paris,  interceptaient  les  com- 
munications, empêchaient  les  travaux  des  champs. 

Talbot  enleva  rapidement  plusieurs  places,  telles  que  Amble- 
ville  ^  Genainville  *,  Mézières^  Villarceaulx ^,  Chars',  Vigny  *, 
Viarmes  **,  Luzarches  *'*,  pour  assurer  les  communications  entre 
Pontoise  et  la  Normandie  parle  Vexin,  car  les  Français  tenaientles 
villes  de  la  Seine  au  nord  de  Paris,  comme  Saint-Germain,  Poissy, 
Meulan.  Le  duc  d'York  avait  prêté  au  roi  l'argent  nécessaire  à 
cette  campagne,  et,  sous  son  habile  direction,  les  Anglais  faisaient 
des  progrès  incessants  *'. 

Le  connétable  dut  renforcer  les  garnisons  des  places  voisines 
de  la  capitale,  notamment  celle  de  Saint-Denis,  où  il  mit  ïugdual 
de  Kermoysan  ",  et,  pendant  que  les  Français  inquiétaient  l'en- 
nemi dans  la  Normandie  vers  Château-Guyon  ",  pont  de  l'Arche**, 
Caen,  Bayeux  *%  il  entreprit  lui-même  une  expédition,  pour  en- 
lever aux  Anglais  les  villes  qu'ils  occupaient  encore  entre  Paris 
et  la  Loire.  Il  commença  par  attaquer  Malesherbes  ^^  La  garnison, 
repoussée  dans  une  sortie,  perdit  tout  espoir,  en  voyant  arriver 

cette  même  époque,  au  mois  de  mars,  Richement  apaisa  un  différend  sou- 
levé par  une  contestation  entre  un  écolier  et  un  laïque,  qui  ne  voulait 
pas  se  soumettre  à  la  juridiction  de  l'Université  (voy.  du  Boulai,  t.  V, 
p.  440-441). 

1.  V.  D.  Grenier,  t.  XX  bis,  î'  18  v°.  Ce  passage  prouve  que,  quand  le 
connétable  était  absent  de  Paris,  la  duchesse  de  Guyenne  le  secondait 
autant  que  possible. 

2.  Le  château  d'Orville,  près  de  Louvres,  c.  de  Luzarches,  arrondissement 
de  Pontoise.  Selon  Gruel,  ce  fut  Guill.  de  Ghambrelan,  avec  des  troupes  de 
la  garnison  de  Meaux,  qui  prit  Orville,  grâce  à  la  trahison  du  Galois  d'Aul- 
nay.'Gruel,  210.  J.  Chartier,  I,  233.  Le  Bourg,  de  Paris,  332,  337  et  note  2. 

3.  Canton  de  Magny-en-Vexin,  arrondissement  de  Mantes. 

4.  Id. 

î).  Arrondissement  de  Mantes. 
6.  Id. 

I.  Arrondissement  de  Pontoise. 
S.Id. 

9.  Id. 

10.  Id. 

II.  Fr.  26062,  n"'  3164,  3185,  3188,  3189.  Fr.  26063,  n»  3202. 

12.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  332  et  note  4.  Preuves  de  l'hisl.  de  Bret.,  IL 
coL  1268. 

13.  Arrondissement  de  Mantes. 

14.  Arrondissement  de  Louviers. 

15.  Fr.  26062,  n-  3103,  3116,  3122,  3123,  3147,  3157. 

16.  Arrondissement  de  Pithiviers. 


RICHEMONT  PREND   MALESHERBES   (1437)  269 

des  renforts  amenés  par  le  sire  de  La  Suze.  Elle  capitula,  et  Ri- 
chemont  revint  aussitôt  à  Paris,  pour  apaiser  encore  une  fois 
les  continuels  désordres  des  gens  de  guerre  *  (mai). 

Les  garnisons  de  Saint-Denis,  de  Vincennes,  de  Lagny,  mécon- 
tentes de  ne  point  recevoir  leur  solde,  pillaient  les  campagnes, 
rançonnaient  les  paysans  aussi  cruellement  que  le  pouvaient 
faire  les  Anglais  eux-mêmes  *  et  menaçaient  d'abandonner  ces 
places,  si  l'on  ne  leur  accordait  prompte  satisfaction.  Telle  était 
la  détresse  financière  que  Richemout  dut  s'adresser  au  Parlement, 
pour  obtenir  qu'une  somme  assez  considérable,  mise  en  dépôt 
chez  un  changeur,  par  ordonnance  de  cette  cour,  fût  affectée  au 
payement  des  gens  de  guerre  '. 

Au  milieu  de  ces  entraves,  le  connétable  marchait  néanmoins 
vers  son  but  avec  une  persévérance  que  rien  ne  décourageait.  Il 
attendait  impatiemment  le  retour  du  roi  *,  avec  l'espoir  de  le 
déterminer  enfin  à  prendre  part  aux  opérations  militaires.  Cette 
fois,  il  fut  favorisé  par  les  circonstances.  Au  mois  de  juin, 
Charles  Yll  revint  du  Midi,  avec  des  troupes  nombreuses,  ame- 
nées par  le  comte  de  Pardiac,  un  ami  du  connétable  ®.  Le  roi 
était  fort  irrité  contre  Rodrigo  de  Villandrando,  qui,  pendant  son 
absence,  avait  osé  pénétrer  dans  le  Berry  et  jusque  dans  la  Tou- 
raine,  avec  son  beau-frère,  le  bâtard  de  Bourbon  ",  terrifier  les 
populations  par  ses  ravages  et  jeter  l'alarme  jusque  dans  les 
,  résidences  royales  où  se  trouvaient  la  reine  et  la  dauphine  '' . 

1.  Gruel,  210.  Au  siège  de  Malesherbes,  l'artillerie  était  commandée  par 
Tristan  l'Hermite,  «  prévôt  des  maréchaux  sur  le  fait  de  l'artillerie,  à  quoi 
il  avait  été  commis  par  le  comte  de  Richement  »  (Fr.  20684,  f»  662  v»; 
Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1268).  Il  signe  ordinairement  Tristan 
(Clairamb.,  64,  f»  4973). 

2.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  333. 

3.  X'a  1482,  fo'  20,  21,  aux  10, 14,  17  mai.  D'autres  côtés  encore,  le  conné- 
table recevait  des  plaintes  contre  les  gens  de  guerre  (C.-L.  Doyen,  Hist. 
de  Beauvais,  88-89). 

4.  Il  avait  envoyé  le  sire  de  Rostrenen  auprès  de  Charles  VII,  à  Montpel- 
lier, «  pour  lui  parler  des  affaires  de  la  guerre  »  {Preuves  de  Ihist.  de  Bre- 
tagne, II,  col.  1268). 

5.  Cagny,  f»  107.  Voir  aussi  Fr.  6963  (Legrand,  VI),  f»  23. 

6.  Rodrigo  avait  épousé  Marguerite,  bâtarde  de  Bourbon,  fille  de  Jean  I<"", 
duc  de  Bourbon  (Anselme,  I,  304). 

7.  Ils  s'avancèrent  jusqu'à  Ghâtillon-sur-Indre,  à  huit  lieues  de  Loches. 
La  reine  et  la  dauphine  durent  écrire  deux  fois  à  Rodrigo,  pour  le  déter- 
miner à  s'éloigner.  (Voy.  ce  curieux  épisode  dans  J.  Quicherat,  Rod.  de 
Villandrando,  p.  135-142;  voy.  aussi  Berry,  ap.  Godefroy,  p.  394-93,  et 
Cagny,  f"  103.)  Faut-il  voir  dans  cette  course  de  Rodrigo  une  preuve  d'une 
conspiration  qui  aurait  été  ébauchée,  en  l'absence  de  Charles  VII,  par  le 
roi  de  Sicile  avec  les  ducs  de  Bourbon,  d'Alençon  et  de  Bretagne?  Vallet 
de  V.,  11,  p.  379-81,  M.  de  Beaucourt,  flevue  des  quest.  hist.,  1872,  p.  98,  J. 
Quicherat,  p.  139-141,  croient  à  une  conspiration,  mais  sans  en  fournir  la 


270         LE  ROI  PREND  PART  A  LA  GUERRE  (1437) 

Cette  course  aud  acieuse  avait  excité  partout  une  indignation  que 
le  roi  partageait.  Sa  colère  éclata  quand  il  apprit  que  ses  fourriers 
avaient  été  eux-mêmes  dévalisés  et  maltraitéspar  les  routiers,  près 
de  la  ville  d'Hérisson  ^,  où  ils  allaient  préparer  ses  logements. 

Il  fît  marcher  ses  troupes  contre  Rodrigo,  qui  chercha  un 
refuge,  avec  sa  compagnie,  au  delà  de  la  Saône,  dans  les  do- 
maines de  son  beau-frère,  le  duc  de  Bourbon,  et  qui  fut  ensuite 
banni  du  royaume.  Cet  acte  de  vigueur  tira  Charles  VII  de  son 
apathie.  Il  se  trouvait  à  la  tête  d'une  véritable  armée,  dont  l'ef- 
fectif pouvait  facilement  s'accroître  ;  il  était  sollicité  par  les  ha- 
bitants de  Paris,  et  vraisemblablement  aussi  par  ceux  d'autres 
villes,  par  le  connétable,  par  le  duc  de  Bourgogne,  qui  l'exhor- 
taient à  combattre  les  Anglais  au  sud,  pendant  qu'il  les  combat- 
trait lui-même  au  nord  ^.  Richemont  fit  enfin  décider  le  siège  de 
Montereau,  opération  des  plus  urgentes,  et  le  roi  promit  d'y 
prendre  part.  En  attendant  qu'on  eût  réuni  des  forces  plus  con- 
sidérables, on  résolut  d'enlever  quelques  autres  places,  tant 
pour  isoler  Montereau  des  secours  qui  pourraient  lui  venir  de 
Pontoise,  de  Meaux^  de  Montargis,  que  pour  établir  des  commu- 
nications plus  sûres  avec  les  villes  de  la  Loire.  Le  roi  devait 
opérer  la  concentration  de  ses  troupes  à  Gien  et  se  diriger  de  là 
sur  Montereau  ^ 

preuve.  Les'passages  de  Gagny  et  de  Berry  qu'ils  allèguent  ne  sont  pas 
probants.  La  réunion  des  princes  à  Angers  ne  peut-elle  s'expliquer  naturel- 
lement par  le  mariage  de  Jean  de  Galabre,  fils  de  René  d'Anjou,  avec  Marie 
de  Bourbon?  On  ne  voit  pas  pourquoi  René  aurait  voulu  enlever  le  pou- 
voir à  son  frère  Charles  d'Anjou,  qui  n'avait  rien  fait,  à  ce  qu'il  semble, 
pour  lui  déplaire.  Était-ce  dans  le  but  de  le  remplacer  auprès  du  roi  par  le 
iluc  de  Bourbon?  Celui-ci  est  peut-être  jaloux  de  Ch.  d'Anjou;  mais  est-ce  un 
motif  suffisant  pour  expliquer  cette  prétendue  conspiration?  Les  pourpar- 
lers avec  le  duc  de  Bretagne  ne  prouvent  rien  non  plus.  Gh.  d'Anjou 
n'avait-il  pas  fait  alliance  avec  lui  l'année  précédente?  Le  duc  de  Bourbon, 
qui  semble  être  alors  un  esprit  chagrin,  mécontent,  voulait  peut-être  sup- 
planter Ch.  d'Anjou;  mais  quel  intérêt  pouvait  avoir  à  cela  René,  qui  avait 
hâte  d'ailleurs  de  passer  en  Italie?  La  conduite  équivoque  du  duc  de  Bour- 
bon, les  ravages  de  son  beau-frère  Rodrigo  suffisent  à  expliquer  la  colère 
du  roi;  mais  il  est  difficile  de  croire  à  une  conjuration.  Lecoy  de  La  M. 
combat  cette  hypothèse  (t.  I,  130-132).  Les  ducs  de  Bourbon,  d'Anjou  et 
de  Bretagne  voulaient  obtenir  la  délivrance  du  duc  d'Orléans  et  du  comte 
d'Angoulême,  et  amener  des  négociations  pour  la  paix  avec  l'Angleterre. 
Ils  se  réunirent  certainement  dans  ce  but.  (Voy.  Proceedings,  V,  f"»  7-9, 
20-22,  44,  51,  52-53;  K  534,  n»  19). 

1.  Arrondissement  de  Montluçon. 

2.  Les  villes  faisaient  au  roi  des  offres  d'argent,  de  vivres,  de  troupes 
pour  la  guerre  (Cagny,  f»  106;  voir  aussi  Rod.  de  Villandrando,  p.  14-3; 
Gruel,  210;  LL  217,  f»  283;  lUst.  de  Bourg.,  IV,  231). 

3.  Le  roi  vint  à  Montereau  par  Gien,  Gharny,  Joigny,  Sens  et  Bray.  Le 
1«"  août,  il  était  à  Gien  (Fr.  20418,  n"  3). 


RICHEMONT   PREND   NEMOURS   (1437,    AOUT)  271 

Le  connétable,  avec  le  comte  de  la  Marche,  le  comte  de  Par- 
diac  et  le  sire  d'Albret,  fit  d'abord  une  course  devant  Montereau, 
pour  examiner  l'état  de  la  place,  puis  il  alla  prendre  Charny  * , 
Château-Landon  *,  qui  fut  enlevé  d'assaut  en  présence  du 
Dauphin,  et  Nemours  ^,  qui  capitula  (juillet-août)  ^. 

Le  succès  de  cette  courte  campagne  remplit  le  roi  d'espoir  et  d'ar- 
deur. «  Le  très  bon  couraige  qu'il  avoit  et  la  grant  volonté  de  re- 
couvrer son  royaume  lui  creut  de  plus  de  la  moitié  ^  »  Il  se  rendit 
à  Sens  ^  (août),  d'oii  il  activa  les  préparatifs  du  siège  de  Monte- 
reau, écrivant  aux  bonnes  villes,  pour  leur  demander  des  armes, 
des' vivres,  de  l'argent,  des  hommes,  pendant  que  Richemont  al- 
lait à  Paris  chercher  les  mêmes  secours.  Il  fut  obligé  de  mettre  à 
une  rude  épreuve  le  patriotisme  des  Parisiens  en  leur  imposant 
les  charges  les  plus  accablantes  '^.  Il  excita  ainsi  un  vif  méconten- 
tement, et  perdit  bientôt  la  popularité  dont  il  avait  joui  après 
la  réduction  de  la  capitale;  mais  ces  mesures  étaient  nécessaires. 

Il  était  à  Paris,  quand  il  apprit  la  mort  de  sa  mère,  Jeanne  de 
Navarre  *,  qu'il  n'avait  sans  doute  jamais  revue  depuis  son  re- 
tour d'Angleterre,  c'est-à-dire  depuis  quinze  ans.  La  veuve  de 
Jean  IV  et  de  Henri  V  était  morte  le  9  juillet  1437,  à  son  châ- 
teau de  Hawering-at-Bower  ^.  Depuis  l'avènement  de  Henri  VI, 


1.  Charny,  arrondissement  de  Joigny.  D'après  Monstrelet  (V,  292),  Charny 
fut  prise  par  le  bailli  de  Bourges,  Gaston  de  Logus,  qui  mourut  peu  après, 
d'une  chute  de  cheval,  et  fut  remplacé  par  Saintrailles,  comme  bailli  de 
Bourges. 

2.  Arrondissement  de  Fontainebleau. 

3.  Id. 

4.  Ce  furent  les  premières  armes  du  Dauphin.  Il  fit  pendre  tous  les  An- 
glais et  couper  la  tête  à  tous  les  Français  qui  étaient  dans  la  place,  pour 
montrer  «  le  bon  couraige  qu'il  avoit  à  destruire  les  anciens  ennemis  de 
la  France  »  (Cagny,  f<"  105  v»,  106;  Berry,  p.  395;  J.  Chartier,  I,  236-237; 
Chronique  Martinienne,  f»  cclxxxi  v»;  Monstrelet,  V,  p.  291-92).  La  prise  de 
Nemours,  Chàteau-Landon,  Charny  est  mentionnée  dans  des  chartes  royales 
(Fr.  25710,  n-  114  et  116,  et  Fr.  22296,  n»  3). 

5.  Cagny,  M 06. 

6.  Le  19  août,  Charles  VII  écrivait  de  Sens  aux  habitants  d'Amiens  (D. 
Grenier,  96,  f»  41;  Berry,  355).  Avant  le  1"  septembre,  les  Parisiens  octroient 
au  roi  une  aide  de  36  000  1.  t.  pour  le  siège  de  Montereau  (Z'b  60,  f"  29). 

1.  La  ville  de  Paris  fut  lourdement  imposée,  à  plusieurs  reprises,  en 
août  et  en  septembre.  Le  Bourgeois  de  Paris  en  est  exaspéré  (vov.  LL 
217,  f- 333-334;  Zib  60,  f»  29;  Gruel,  210;  le  Bourg,  de  Paris,  p.  333,  334  et 
notes).  D'autres  villes,  moins  éprouvées  peut-être,  comme  Troyes,  don- 
nèrent plus  qu'on  ne  leur  demandait  (voy.  Boutiot,  Dépenses  faites  par  la 
ville  de  Troyes  pour  le  siège  de  Montereau,  Troyes,  1855,  in-8»,  simple  pièce). 
Paris  fournit,  aussi  comme  les  autres  villes,  «  des  habillements  de  guerre  » 
(voy.  K  950,  n»  32  ••  >>). 

8.  Gruel,  210-211. 

9.  Dans  le  comté  d'Essex.  Henri  VI  lui  fit  faire  de  magnifiques  funé- 


272  RICHEMOINT   PERD    SA  MÈRE   (1437,    9  JUILLET) 

elle  avait  retrouvé  une  certaine  faveur  à  la  cour  d'Angleterre; 
elle  y  avait  fait  venir  son  petit-fils,  Gilles  de  Bretagne,  et  elle 
avait  ainsi  contribué  à  maintenir  son  fils  aîné,  le  duc  Jean  V, 
dans  l'alliance  anglaise,  tandis  que  son  second  fils,  Artur,  con- 
tinuait de  servir  la  France. 

A  ce  moment  même,  Richemont  poussait  Charles  Vil  à  la 
guerre,  pendant  que  son  frère  Jean  V,  d'accord  avec  le  roi  de 
Sicile ,  le  duc  de  Bourbon  et  le  bâtard  d'Orléans,  s'efforçait 
d'amener  le  gouvernement  anglais  à  des  négociations  ^  Le  duc 
d'Orléans,  qui  aspirait  toujours  à  sortir  de  captivité,  devait  être 
envoyé  sur  le  continent,  pour  travailler  tout  à  la  fois  à  sa 
propre  délivrance  et  à  la  paix  ^.  La  guerre  coûtait  cher,  et 
Henri  YI  manquait  d'argent  ^. 

Autre  embarras  et  non  moins  grave.  Le  duc  d'York,  qui  déjà 
peut-être  méditait  d'ambitieux  projets,  demandait  à  revenir  en 
Angleterre,  d'où  Glocester  le  voulait  tenir  éloigné.  Le  remplacer 
n'était  pas  chose  facile.  Il  avait  pourtant  fallu  céder  àses  instances, 
et,  dès  le  mois  d'avril,  le  comte  de  Warwick  *  avait  été  désigné 
pour  lui  succéder;  mais  il  ne  put  venir  en  France  qu'au  mois  de 
novembre^.  C'étaient  sans  doute  ces  difficultés  qui  empêchaient 
Henri  VI  de  repousser  les  demandes  du  duc  d'Orléans.  Pour 
Charles  VII,  n'était-ce  pas  une  raison  de  continuer  la  guerre  ^? 

Pour  subvenir  aux  dépenses  qu'elle  entraînait,  le  connétable  "^ 
avait  réuni  à  Bray-sur-Seine  ^  une  assemblée  des  trois  Etats  des 
pays  situés  au  nord  de  la  Loire.  Si  l'on  en  juge  par  l'exemple  que 

railles.  Elle  fut  inhumée  le  11  août,  dans  la  cathédrale  de  Cantorbéry,  près 
du  tombeau  de  Henri  IV,  son  époux  (A.  Strickland,  p.  109-1 13  ;  J.  Stevenson, 
t.  II,  2e  partie,  p.  761;  Proceedings,  t.  V,  p.  36),  Le  16  mai  1437,  Jeanne  de 
Navarre,  duchesse  de  Bretagne,  reine  d'Angleterre,  dame  d'Irlande,  avait 
donné  à  Berard  de  Montferrant  1  000  écus,  à  prendre  sur  les  2  230  que  lui 
devait  le  duc  de  Bretagne  (Archives  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  59,  E,  152). 

1.  Moreau,  706  (Bréquigny,  82),  f"*  4-7,  9-14, 17.  Après  son  échec  devant 
Calais,  le  duc  de  Bourgogne  fut  aussi  engagé  à  négocier  en  vue  de  la  paix 
générale  (Fr.  1278,  f»»  34-40).' 

2.  Il  semble  qu'il  y  avait  alors  en  France  le  parti  de  la  paix  (René  d'Anjou, 
le  duc  de  Bourbon)  et  le  parti  de  la  guerre  (Richemont,  les  comtes  de  La 
Marche  et  de  Pardiac,  le  sire  d'Albret,  etc.)  [Proceedings,  V,  44,  31, 07,  86]. 

3.  Il  était  obligé  d'en  emprunter  à  ses  ofiiciers,  au  clergé,  aux  seigneurs, 
au  riche  cardinal  Beaufort  [Proceedings,  t.  V,  p.  13,  14,  16). 

4.  Richard  Beauchamp,  comte  de  Warwick. 

3.  Fr.  26063,  n»  3332.  Au  mois  de  septembre,  le  duc  d'York  était  encore 
à  Rouen.  Voy.  Append.  LXVII. 

6.  J.  Stevenson,  t.. II,  Préface,  p.  lvi.  Proceedings,  V,  xiv,  xv,  7,  16,  36. 
Rymer,  V,  2e  partie,  38,  42. 

7.  On  voit  dans  le  document  publié  par  Boutiot  (voir  ci-dessus,  p.  271,, 
note  7)  qu'un  aide  fut  octroyé  au  roi  en  la  personne  du  connétable. 

8.  Arrondissement  de  Provins. 


SIÈGE  DE  MONTEREAU   (1437,    SEPT.)  273 

donna  la  ville  de  Troyes,  les  populations  répondirent  à  cet  appel 
avec  un  patriotique  enthousiasme  ^ 

Vers  la  fin  d'août,  on  fut  en  mesure  de  commencer  le  siège  de 
Montereau  *.  On  construisit  sur  la  rive  droite  de  la  Seine,  vers  la 
Brie,  près  du  château  qui  dominait  la  ville,  une  forte  bastille,  où 
s'établirent  Gaucourt,  Goëtivy,  Saintrailles  ^,  Boussac,  Denis  de 
Ghailly,  le  commandenr  de  Giresme.  Le  roi,  laissant  le  Dauphin 
à  Bray,  vint  loger  dans  un  prieuré  voisin  de  la  bastille.  Il  avait 
amené  6  à  7  000  hommes,  «  gens  de  bonne  estoffe  et  très  bien 
habillés  '',  »  avec  Charles  d'Anjou,  les  sires  d'Albret,d'Harcourt, 
de  Chaumont,  de  La  Varenne,  Le  connétable,  avec  les  comtes  de 
La  Marche  et  de  Pardiac,  le  bâtard  d'Orléans,  Jacques  de  Gha- 
bannes,  prit  position  dans  un  pré,  du  côté  de  la  ville,  vers  le 
Gâtinais.  D'autres  troupes,  avec  le  bailli  de  Vitry  (Hincelin  de  La 
Tour),  Gharles  de  Culant,  le  bâtard  de  Beaumanoir,  occupèrent 
la  pointe  de  la  presqu'île  comprise  entre  l'Yonne  et  la  Seine;  de' 
sorte  que  la  ville  fut  investie  de  tous  côtés.  La  garnison  n'était 
pas  assez  nombreuse  ^  pour  repousser  à  elle  seule  Farinée  de 
Gharles  VII  ;  mais,  pourvue  d'une  bonne  artillerie,  elle  pouvait 
tenir  longtemps  et  attendre  les  secours  sur  lesquels  elle  comp- 
tait «. 

Dans  la  nuit  même  qui  suivit  son  arrivée,  le  connétable  fît 
creuser  un  fossé  large  et  très  long,  établir  des  gabions  et  com- 
mencer les  travaux  d'approche.  Il  fallut  jeter  un  pont  sur  l'Yonne 
et  un  autre  sur  la  Seine,  détourner  les  eaux  de  l'Yonne,  qui 
remplissaient  les  fossés,  ouvrir  des  tranchées,  percer  des  galeries 
couvertes,  mettre  des  canons  en  batterie.  Tous  ces  travaux 
furent  dirigés  avec  une  habileté  remarquable  par  Jean  Bureau 
et  par  Le  Bourgeois,  capitaine  de  Janville,  qui  servait  depuis 
longtemps  sous  le  connétable.  Le  roi  montrait  une  grande  ar- 
deur '.  Jour  et  nuit,  il  parcourait  le  camp,  examinait  tout  par 


l.Châlons-sur-Marne  et  Reims  contribuèrent  aussi  aux  dépenses  decesiège 
(Ed.  de  Barthélémy,  Hist.  de  Châlons,  p.  65,  66,  185;  Mémoires  de  J.  Ro- 
gier,  prévôt  de  l'échevinage  de  Reims,  Reims,  1875,  in-8°,  chez  Giret;  Varin, 
Arch.  législ.  de  la  ville  de  Reims,  1. 1  des  Statuts,  p.  632,  notes,  2«  colonne). 
On  envoyait  non  seulement  des  armes,  des  munitions,  des  vivres,  de  l'ar- 
tillerie, mais  encore  des  volontaires.  D'après  VHist.  de  Bourgogne,  IV,  232,  le 
duc  de  Bourgogne  donna  12  000  1. 1. Voyez  aussi  Tuetey.Les ÉcQ}'cheurs,l,i4t. 

2.  Arrondissement  de  Fontainebleau. 

3.  Y*  f«  19  V». 

4.  Monstrelet,  V,  294.  Y*  f»  21  v». 

5.  3  à  400  combattants,  d'après  Monstrelet,  V,  294. 

6.  Le  duc  d'York  se  disposait  à  en  envoyer.  Voy.  Append.  LXVII. 

7.  tt  Et  luy-mesme,  de  sa  personne,  y  prist  moult  de  travail  »  (Mons- 
trelet, V,  294). 

BlCHEMONT.  18 


274  SIÈGE   DE    MOiNTEREAU    (1437,    SEPT.-OCT.) 

lui-même,  s'exposant  plus  qu'il  ne  convenait.  Quand  l'artillerie 
eut  fait  des  brèches  dans  les  murs,  on  tenta  un  premier  assaut. 
Les  eaux  étaient  encore  trop  profondes,  et  il  fallut  se  retirer. 

Un  second  assaut  fut  donné  le  jeudi  10  octobre,  au  matin.  Le 
connétable  avait  fait  construire  un  bateau  pour  traverser  le 
fossé.  Dans  leur  ardeur,  les  Bretons  s'y  précipitèrent  tous  à  la 
fois  ;  le  bateau  s'enfonça,  et  beaucoup  furent  noyés  ;  mais  les 
autres  parvinrentnéanmoins  jusqu'à  la  muraille  et  l'escaladèrent. 
A  leur  tête  était  Le  Bourgeois,  qui,  le  premier,  atteignit  le  haut 
du  rempart.  Ace  moment  même,  un  boulet  frappa  le  mur,  en  fai- 
sant voler  des  éclats  de  pierre.  Le  hardi  capitaine  fut  précipité 
tout  sanglant  dans  le  fossé  ;  mais  bientôt  d'autres  assaillants  le 
suivirent  et  pénétrèrent  de  toutes  parts  dans  la  place.  Le  roi  les 
animait  de  sa  présence,  de  son  exemple.  Il  s'élança  vaillam- 
ment dans  les  fossés,  ayant  de  l'eau  jusqu'au-dessus  de  la  cein- 
ture, et  monta,  l'un  des  premiers,  à  l'assaut  *.  Les  Anglais  qui  ne 
furent  pas  tués  ou  pris  se  réfugièrent  dans  le  château.  La  ville 
resta  au  pouvoir  de  Charles  VII. 

Il  fallut  ensuite  assiéger  le  château,  qui  était  très  fort  et  bien 
muni  de  tout.  Le  capitaine  anglais,  Thomas  Guérard  %se  défendit 
encore  plus  de  dix  jours  ;  puis,  comme  il  perdait  l'espoir  d'être 
secouru,  il  proposa  de  capituler,  à  des  conditions  honorables.  Le 
duc  d'York  songeait  bien  à  envoyer  des  secours;  mais  il  avait 
employé  une  grande  partie  de  ses  forces,  avec  ses  meilleurs 
lieutenants,  Th.  de  Scales,  Fauquemberge,  Talbot,  aux  sièges  du' 
château  de  Baudemont-en-Vexin  et  de  Tancarville,  pendant  que, 
sur  d'autres  points,  dans  la  Haute  et  la  Basse-Normandie,  de- 
puis Arques  jusqu'à  Vire,  il  avait  à  faire  face  aux  Français  '  ;  enfin 


1.  D'après  la  relation  qu'on  trouve  dans  le  registre  X'a  1482  (f°*  37  v,  38) 
et  que  confirment  quelques  mots  de  J.  Jouvenel  des  Ursins  (Fr.  5022, 
f"  19  vo).  Le  10  octobre,  on  fait  à  Paris  une  procession  générale,  pour  que  le 
roi  obtienne  la  victoire  devant  Montereau  (LL  217,  f"  338).  Le  même  jour, 
Charles  "VII  rend  une  ordonnance  en  faveur  des  archers  de  Paris  (Y* 
fo  21  v).  Le  21  octobre,  on  décide  qu'il  y  aura  une  autre  procession  à  Paris, 
à  cause  de  la  nouvelle  de  la  prise  de  Montereau  (LL  217,  à  la  date;  voir 
aussi  à  la  date  du  27  septembre). 

2.  Il  fut  ensuite  capitaine  de  Pontoise. 

3.  Voy.  Append.  LXVII.  Les  sièges-  de  Baudemont  (à  2  lieues  de  Saint- 
Clair-sur-Epte,  arrondissement  des  Andelys)  et  de  Tancarville  (arrondisse- 
ment du  Havre)  occupèrent  beaucoup  les  Anglais.  Les  documents  abondent  : 
Fr.  25770,  n»»  623  et  626;  Fr.  23773,  n»s  1202-1205  ;Fr.  23774,  n»»  1213-1273; 
Fr.  26062,  n-  3190;  Fr.  26063,  n»»  3192,  3202,  3215,  3217,  3220,  3229,  3240, 
3242,  3255-39,  3262-3296  (surtout  3295  et  3296),  3306-3315,  3327-29,  3331, 
3342,  3346.  Baudemont  et  Tancarville  furent  pris  par  les  Anglais  (Fr.  26063, 
n"'  3329  et  3346),  et  le  château  de  Baudemont  fut  détruit,  comme  beaucoup 
d'autres  forteresses  (n*  ci-dessus,  3346,  et  Fr.  26062,  n°  3163).  Après  la 


CAPITULATION  DE  MONTEREAU   (1437,  22  OCT.)  275 

il  redoutait  une  attaque  du  duc  de  Bourgogne  sur  Calais,  Guines  * 
ou  Le  Crotoy  ^.  Bien  qu'il  eût  reçu  des  renforts  d'Angleterre, 
il  ne  put  donc  envoyer  aux  assiégés  de  Montereau  les  secours 
qui  leur  étaient  indispensables.  Le  roi  ne  voulait  pas  recevoir 
les  Anglais  à  composition;  il  préférait  emporter  le  château  de 
vive  force.  On  lui  remontra  que,  en  terminant  tout  de  suite  le  siège 
par  une  capitulation,  on  aurait  peut-être  le  temps  de  secourir 
Tancarville.  Cette  considération  le  détermina.  La  garnison  an- 
glaise obtint  de  quitter  le  château,  vie  et  biens  saufs  (22  octo- 
bre). Ainsi  fut  menée  à  bonne  fin  la  plus  grande  opération  qui 
eût  été  entreprise  depuis  la  mort  de  Jeanne  d'Arc  ^. 

Ce  succès,  qui  récompensait  les  efforts  communs  de  la  nation 
et  du  roi,  montrait  bien  que  la  France,  même  épuisée,  était 
encore  assez  forte  pour  vaincre  ;  il  encouragea  le  connétable  à 
poursuivre  l'exécution  du  plan  dont  il  ne  devait  pas  se  départir. 
Des  messagers  portèrent  aussitôt  dans  toutes  les  villes  la  nou- 
velle de  la  prise  de  Montereau,  en  ajoutant  que  le  roi  avait  l'in- 
tention d'aller  mettre  en  son  obéissance  Meaux,  Pontoise  et 
Creil,  pour  rétablir  partout  la  justice  et  la  prospérité  *.  Des 
troupes  furent  dirigées  sur  Tancarville,  mais  trop  tard  pour 
sauver  cette  place  ^.  D'ailleurs  la  saison  était  avancée;  l'argent 
manquait;  il  fallut  renvoyer  une  partie   des   troupes.  Le  roi 


prise  de  Tancarville,  il  fallut  envoyer  Talbot  au  secours  du  Crotoy  (Fr. 
26063,  n"  3342,  3351,  et  Fr.  26064,  n»  3413;  Fr.  25774,  n*»  1277,  1278j.  — 
Willoughby  avait  amené  des  troupes  d'Angleterre  (Fr.  25774,  n"  1274, 
1275).  Les  Flamands  échouèrent  au  siège  du  Crotoy  (Monstrelet,  V,  308-316; 
Hist.  de  Bourg.,  IV,  231-32;  D.  Grenier,  96,  f»  41;  Proceedings,  V,  73,  76, 
79,  80). 

1.  Arrondissement  de  Boulogne. 

2.  Id. 

3.  Sur  le  siège  de  Montereau,  voir  aussi  Cagny,  f"*  106  v»,  107;  Berry, 
p.  395-96;  Monstrelet,  V,  p.  294;  Gruel,  210-211;  le  Bourg,  de  Paris,  334. 
J.  Chartier  donne  peu  de  détails.  Ordonnances  rendues  par  le  roi  devant 
Montereau  :  Y*  f<>s  19  v%  21  v,  et  Xi»  8605,  fs  46,  48,  50;  LL  217,  fos  335^ 
338,  343.  Charles  VII  aimait  à  rappeler  les  succès  de  cette  année  (Fr.  22296 
no  3;  Fr.  25710,  n'^  114,  116;  Martial  d'Auvergne,  I,-154;  Chron.  Marti- 
nienne,  f»  cclxxxi  V). 

4.  D.  Grenier,  96,  î»  42.  Fr.  25710,  no  114. 

5.  Le  duc  d'York  avertit  Talbot  que  les  Français  veulent  faire  une  entre- 
prise sur  le  siège  de  Tancarville  (Fr.  26063,  n»  3328).  Après  la  prise  de 
Montereau,  les  Français  voulurent  aussi  faire  une  entreprise  sur  Pontoise 
Mantes  et  La  Roche-Guyon  (Fr.  26063,  n»  3318).  D'après  Berry  (p,  396-97),' 
les  Anglais  assiégeaient,  en  même  temps  que  Tancarville,  Beauchâtel  et 
Malleville  (arrondissement  d'Yvetot),  dont  Rob.  de  Floques  était  capitaine. 
Il  vint  lui-même  demander  au  roi  des  secours  pendant  le  siège  de  Monte- 
reau ;  mais  ses  gens  capitulèrent  avant  son  retour,  bien  qu'ils  eussent 
promis  de  tenir.  —  Sur  Tancarville,  voir  Fr.  26063,  n"  3388,  et  Fr.  26064 


276  CHARLES   VII   VIENT   A   PARIS    (1437,    NOV.) 

promit  alors  au  connétable  de  se  rendre  à  Paris,  et,  quittant  Mon- 
tereau,  dont  la  garde  fut  confiée  au  bâtard  d'Orléans,  il  se  diri- 
gea, par  Melun,  Corbeil  et  Saint-Denis,  vers  sa  capitale  K 

Richemont  l'y  avait  précédé,  afin  de  préparer  tout  pour  le  re- 
cevoir. Ce  fut  le  mardi  12  novembre  1437  ^  que  Charles  VII  fit 
son  entrée  solennelle  dans  Paris,  après  une  absence  qui  avait 
duré  plus  de  dix-neuf  ans  ^.  Le  prévôt  des  maixhands,  les  éche- 
vins  et  les  bourgeois,  avec  les  arbalétriers  et  les  archers  de  Paris, 
allèrent  au-devant  de  lui  jusqu'à  La  Chapelle.  Le  prévôt  lui 
ayant  présenté  les  clefs  de  la  ville,  le  roi  les  remit  au  conné- 
table, puis  il  entra  par  la  porte  Saint-Denis,  suivi  d'un  cortège 
de  magistrats,  de  seigneurs,  de  capitaines,  dont  les  armures  res- 
plendissaient d'argent,  d'or  et  de  pierreries. 

La  population,  oubliant  ses  souffrances,  acclamait  avec  des 
cris  joyeux  son  souverain  légitime,  qui  reprenait  enfin  dans 
la  capitale  de  la  France  la  place  usurpée  trop  longtemps  par 
des  princes  étrangers.  Le  connétable,  tenant  à  la  main  son 
bâton  de  commandement,  chevauchait  à  droite  du  roi,  qui 
avait  à  sa  gauche  le  comte  de  Vendôme,  son  grand  maître 
d'hôtel. 

Derrière  eux  venait  le  dauphin  Louis,  avec  Ch.  d'Anjou  à  sa 
droite  et  le  comte  de  La  Marche  à  sa  gauche.  Le  bâtard  d'Or- 
léans, «  tout  couvert  d'orfèvrerie,  lui  et  son  cheval  *,  »  condui- 
sait un  corps  d'environ  mille  lances,  «  fleur  de  gens  d'armes  »  &, 
qui  formaient  l'élite  de  l'armée.  Le  clergé,  tant  régulier  que  sé- 
culier, alla  en  procession  au-devant  du  roi  jusqu'à  Saint-Lazare, 
hors  de  la  porte  Saint-Denis.  Le  cortège  se  rendit  d'abord  à 
l'église  Notre-Dame,  selon  la  coutume. 

Il  était  environ  quatre  heures  quand  il  arriva  au  parvis.  Là, 
le  roi  mit  pied  à  terre.  Le  clergé  de  la  cathédrale,  avec  l'évêque, 
Jacques  Chastelier,  et  le  doyen,  J.  Tudert,  s'avança  jusqu'au  gui- 
chet. Alors  l'évêque  s'adressant  au  roi  :  «  Très  chrestien  roy, 
nostre  souverain  et  droicturier  seigneur,  les  saincts  et  très  chres- 
tiens  roys  de  France,  vos  prédécesseurs,  qui  tant  ont  honouré  et 


nx^  3448  et  3471;  Clairamb.,  187,  f"  6981.  Tout  le  pays  aux  environs  de  Tan- 
carville  fut  ruiné  (Fr.  26064,  n"  3477). 

1.  Charles  Vil  était  à  Melun  le  4  novembre  (LL  217,  à  la  date;  Z^^  60,  fo  31  ; 
Fr.  26063,  nos  3333,  3343). 

2.  Journal  parisien  de  J.  Maupoïjit,  publié  par  M.  G.  Fagniez  dans  les 
Mémoires  de  la  Société  de  Vhist.  de  Paris,  t.  IV  (1877),  p.  24;  X^»  22,  au 
mercredi  13  novembre  1437. 

3.  Il  avait  quitté  Paris  le  30  mai  1418. 

4.  Monstrelet,  V,  305. 

5.  Monstrelet,  V.  305. 


ENTRÉE  SOLENNELLE  DE  CHARLES  VII  A  PARIS  (1437,  12  NOV.)   277 

amé  Dieu  et  l'Eglise,  si  ont  accoustumé  que,  après  leur  unction 
et  sacre,  en  leur  premier  joyeulx  advènement  en  cesle  vostre 
cité,  ils  viengnent,  premier,  à  l'église,  et,  devant  qu'ilz  entrent  en 
la  dicte  église,  ilz  doivent  faire,  premier,  le  serement  à  l'église, 
et  ainsi  le  debvez  faire,  en  ensuivant  les  sainctes  voyes,  et  bons 
propos  de  vos  prédécesseurs  ^  »  Après  avoir  écouté  la  formule  la- 
tine du  serment,  le  roi,  appelant  auprès  de  lui  le  Dauphin  et 
touchant  les  saints  évangiles,  que  lui  présentait  l'évêque,  répon- 
<lit  :  «  Ainsi  comme  mes  prédécesseurs  l'ont  juré,  je  le  jure.  » 
Ensuite,  il  baisa  dévotement  les  évangiles  et  la  croix.  Alors  les 
grandes  portes  de  l'église,  jusque-là  fermées,  s'ouvrirent.  Le 
roi,  avec  tout  son  cortège,  entra  dans  la  cathédrale,  au  chant  des 
orgues,  au  son  des  cloches,  pendant  qu'une  multitude  innom- 
brable criait  :  Noël! Noël!  et  que  le  Te  Deum  retentissait  sous  les 
hautes  voûtes.  Après  cette  cérémonie ,  le  roi  fut  conduit  à  son 
palais,  au  milieu  des  mêmes  acclamations  ^.  Le  connétable  pou- 
vait, entre  tous,  se  réjouir  de  cette  entrée  triomphale,  à  laquelle, 
plus  que  personne,  il  avait  contribué. 

Le  séjour  de  Charles  VII  à  Paris  ne  dura  que  trois  semaines 
(12  novembre-3  décembre).  Il  revit  alors  sa  belle-sœur,  la  du- 
chesse de  Guyenne,  comtesse  de  Richemont,  qui  avait  été,  comme 
son  mari,  longtemps  éloignée  de  la  cour.  Il  lui  restitua  la  ville 
et  chàtellenie  de  Gien,  que  Charles  VI  lui  avait  donnée,  avec 
Dun-le-Roi,  Montargis  et  Fontenay-le-Comte ,  quand  elle  avait 
épousé  le  dauphin  Louis,  duc  de  Guyenne.  En  outre,  comme 
elle  n'avait  pas  joui  des  seigneuries  de  Montargis  et  de  Dun-le- 
Roi,  elle  reçut,  en  compensation,  celle  de  Sainte-Menehould,  en 
Champagne  ^  (27  novembre  1437).  Le  roi  scella  ainsi  sa  récon- 
ciliation avec  sa  belle-sœur  et  récompensa  les  services  de  son 
mari,  après  sa  longue  disgrâce.  Quant  aux  Parisiens,  qui  avaient 
fait  à  leur  souverain  «  aussi  grand  feste  comme  on  pourroit 
faire  à  Dieu  *»,  ils  reconnurent  bientôt  que  sa  présence  ne  pou- 
vait mettre  fin,  comme  ils  l'avaient  espéré,  à  tous  les  maux 

1.  LL  217,  f<>360. 

2.  Sur  l'entrée  du  roi  à  Paris,  voir  surtout  :  LL  217,  fos  345,  349,  360;  KK 
404,  fo92;  parmi  les  chroniqueurs  :  Monstrelet,  qui  donne  les  plus  longs 
détails,  V,  301-307;  Berry,  398-399;  le  Bourg,  de  Paris,  335-337;  Le  Baud, 
483.  J.  Chartier  résume  tout  en  cinq  lignes.  Sa  chronique  est  généralement 
très  insuffisante  jusqu'à  cette  époque.  11  ne  fut  nommé  chroniqueur  royal 
que  le  18  novembre  1437.  Voir  aussi  D.  Félibien,  II,  828-829:  Martial  d'Au- 
vergne, I,  156-161. 

3.  Voyez  Append.  LXVIII.  On  sait  que  Richemont  avait  occupé  Sainte- 
Menehould  en  1436.  Voy.  ci-dessus,  p.  260  et  note  5.  Quant  à  Uun-le-Roi, 
Charles  VII  l'avait  réuni  à  la  couronne  (Fr.  21302,  au  28  mars  1430,  a.  st.). 

4.  Le  Bourg,  de  Paris,  335. 


278       LE  ROI  RETOURNE  SUR  LA  LOIRE  (1437,  DEC.) 

dont  ils  souffraient.  En  restant  à  Paris,  il  aurait  pu  mieux  as- 
surer la  sécurité  de  cette  ville,  montrer  la  volonté  bien  arrêtée 
de  délivrer  entièrement  l'Ile-de-France;  mais  la  rigueur  de  la 
saison,  la  difficulté  de  payer  les  troupes  étaient  de  réels  empê- 
chements. D'ailleurs  Charles  VII  conservait  une  prédilection 
constante  pour  ces  villes  de  la  Loire,  qui  étaient,  depuis  si  long- 
temps, ses  résidences  habituelles.  Il  semblait  qu'il  aimât  mieux 
rester  le  roi  de  Bourges  que  devenir  le  roi  de  Paris.  Il  quitta  la 
capitale  dès  le  3  décembre  *  avec  le  Dauphin  et  alla  passer  une 
partie  de  l'hiver  en  Touraine  *. 

L'année  1438  peut  compter  parmi  les  plus  tristes  de  cette  mal- 
heureuse époque.  Le  froid,  la  famine,  une  épidémie  terrible, 
les  gens  de  guerre,  tous  les  fléaux  à  la  fois,  s'acharnaient  sur  la 
France.  Nulle  part  ces  maux  ne  se  firent  sentir  plus  cruellement 
qu'à  Paris  ^  Les  Anglais  qui  occupaient  les  places  voisines,  no- 
tamment ceux  de  Pontoise  et  «  les  larrons  de  Ghevreuse  *  »,  pil- 
laient les  environs,  ravageaient  les  campagnes,  empêchaient  les 
arrivages  et  aggravaient  ainsi  la  détresse.  Le  jour  de  l'Epiphanie, 
6  janvier,  ils  auraient  même  osé  entrer  dans  la  ville,  au  milieu 
du  jour,  par  la  porte  Saint -Jacques,  tuer  un  sergent  à  verge 
et  emmener  trois  gardiens  de  la  porte,  avec  plusieurs  autres  pau- 
vres gens  et  un  grand  butin  ^.  Beaucoup  de  malheureux  n'avaient 
à  manger  que  des  navets  ou  des  trognons  de  choux,  «  et  toute 
nuit  et  tout  jour  crioient  petits  enfants  et  femmes  et  hommes  : 


1.  Le  Boïirç.  de  Paris,  338.  Ordonnances  rendues  à  Paris  :  Y*  fos  16,  28- 
29;  K  950,  no  28°. 

2.  Cagny,  fos  107-108.  Voir  des  passages  des  Épîtres  de  Jean  II  Jouvenel 
des  Ursins,  cités  par  M.  de  Beaucourt,  dans  la  Revue  des  questions  histor. 
(livraison  du  l"  juillet  1872).  «  Vous  voulez,  dit-il  au  roi,  estre  muché  et 
caché  en  chasteaulx,  meschans  places  et  manières  de  petites  chambrettes, 

sans  vous   monstrer  et  ouyr  les  plaintes  de  vostre  peuple »  (p.  114). 

«  Hélas!  Sire,  pourquoy  avertissez  du  milieu  de  vostre  sang  vostre  main 
dextre,  c'est  assavoir  de  vostre  ville  de  Paris,  qui  est  le  chief  de  vostre 
royaume?  Quant  vous  y  venez,  il  semble  que  vous  en  vouldriez  estre 
hors  »  (p.  115,  note  4).  Et  l'évêque  de  Beauvais  rappelle  encore  à  Char- 
les VII  l'exemple  de  Charles  le  Sage,  son  aïeul  (Fr.  5022,  f»  15). 

3.  Monstrelet,  V,  319-320,  339-340.  A  Paris,  beaucoup  de  maisons  étaient 
inhabitées  ou  tombaient  en  ruines,  à  cause  de  la  mortalité,  des  guerres, 
des  impôts  excessifs  (Y*  f»  29  v°). 

4.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  338.  Il  n'est  donc  pas  probable  que  Ghevreuse 
n'ait  été  pris  que  le  28  mai  1438  par  les  Anglais  et  les  traîtres  français  de 
Dreux,  avec  Guill.  du  Broullat,  comme  le  dit  Cagny  f"  109.  Voy.  ci-des- 
sous, p.  280,  note  3.  Au  mois  d'avril,  des  Anglais  de  la  garnison  de  Pon- 
toise faillirent  surprendre  Lagny-sur-Marne  (Fr.  25774,  n"  1333). 

5.  Le  Bourg,  de  Paris,  338.  Ce  fait  est  peu  vraisemblable.  On  n'en  trouve 
nulle  mention  dans  les  registres  du  Parlement.  C'est  peut-être  un  de  ce» 
bruits  que  la  crédulité  populaire  accueille  sans  contrôle. 


FAMINE  ET  ÉPIDÉMIE.    LA  GUERRE   LANGUIT  (1438)  279 

Je  meur  !  Hélas  !  las  !  doux  Dieux  IJe  meur  de  faim  et  de  froid  »  *  1 
Vers  le  commencement  de  1438,  Richemont  se  rendit  en  Bre- 
tagne, où  l'appelait  Jean  V,  qui  se  croyait  menacé  par  une 
conspiration,  attribuée  au  maréchal  de  Raiz  et  à  la  maison  de 
Laval  *.  Il  emmenait  un  corps  de  troupes  assez  nombreux  pour 
venir  en  aide  à  son  frère,  en  cas  de  besoin,  et  il  parvint  à 
négocier  un  arrangement  entre  lui  et  le  comte  de  Laval  ^  Re- 
venu de  Bretagne,  il  ne  put  obtenir  que  les  opérations  militaires 
fussent  reprises  avec  vigueur.  Elles  subirent,  au  contraire,  un 
ralentissement  très  marqué  pendant  toute  cette  année  *. 

Les  embarras  financiers,  l'antagonisme  de  Glocester  et  de  son 
oncle, le  cardinal,  gênaient  le  gouvernement  anglais;  il  se  mon- 
trait même  disposé  à  entrer  en  négociations  avec  Charles  VII, 
sur  les  instances  réitérées  des  ducs  d'Orléans  et  de  Bretagne. 
Enfin  le  duc  d'York  n'était  plus  en  France.  Son  successeur, 
Richard  Beauchamp,  comte  de  Warwick  ",  n'avait  ni  son  habileté 
ni  son  énergie;  d'ailleurs  la  famine  et  les  maladies  conta- 
gieuses exerçaient  partout  leurs  ravages,  en  Angleterre  comme 
en  France  ^.  Quant  à  Charles  VII,  sans  montrer  beaucoup  d'em- 
pressement à  négocier,  dans  le  but  de  faire  la  paix,  il  n'en 
montrait  pas  davantage  à  s'occuper  lui-même  de  la  guerre  ', 
comme  il  l'avait  fait  au  siège  de  Monte reau.  Au  retour  d'un 

1.  Le  Bourg,  de  Paris,  339. 

2.  Le  maréchal  de  Raiz  avait  vendu  à  Jean  V  une  partie  de  ses  biens, 
au  grand  mécontentement  des  Laval,  ses  parents  (D.  Morice,  I,  527-528). 

3.  D.  Morice,  t.  I,  527-528,  et  Preuves,  t.  II,  col.  1300  et  suiv.  D,  Lobi- 
neau,  t.  I,  607.  Un  document  atteste  la  présence  d'Artur  en  Bretagne  en 
février  1438;  c'est  une  constitution  d'apanage  faite  par  le  duc  à  ses  fils 
puînés,  Pierre  et  Gilles  (Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  I,  E,  2).  Voir  un 
autre  arrangement  du  5  août  1437  {Ibid.).  Le  24  février,  Charles  VII  ordonne 
à  ses  officiers  de  ne  faire  aucun  tort  ni  violence  à  Richard,  comte  d'Etampes, 
dans  ses  terres  du  Poitou  (Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  34,  E,  93,  et  cass. 
38,  E,  105). 

4.  La  guerre  ne  se  fit  que  dans  la  Normandie,  surtout  dans  le  pays  de 
Caux,  que  les  Anglais  voulaient  reprendre  (Fr.  25774,  no^  1328  et  1346- 
1353;  Fr.  26064,  nos  3447,  3434,  3486,  3494,  3511,  3519,  3533,  3536,  3538;  Fr. 
26065,  nos  3633,  3643,  3646).  Le  duc  d'Alençon  et  Gh.  d'Anjou  conclurent 
même  une  trêve  de  deux  ans,  pour  le  Maine  et  l'Anjou,  avec  le  comte  de 
Dorset,  le  20'décembre,  à  Harcourt  (Ms.  Brienne  30,  fos  173-178).    . 

5.  Fr.  25774,  n»»  1286,  1292,  1303,  1304. 

6.  Sur  les  embarras  du  gouvernement  anglais,  voir  Fr.  26064,  n»»  3303, 
3538,  3542,  3357,  3562;  Rolls  ofParliament,  V,  31  ;  J.  Stevenson,  t.  II,  Ap- 
pendix  to  the  préface,  p.  71.  Sur  les  négociations  avec  les  ducs  d'Orléans 
et  de  Bretagne,  J.  Stevenson,  t.  II,  p.  73,  294;  Proceedings,  t.  V,  Préface, 
p.  xxvni,  XXXI  et  p.  86,  91,  95;  Rymer,  t.  V,  l'o  partie,  p.  46,  34,  53  ;  Fr. 
26064,  n»  3529. 

7.  «  Se  voulez  avoir  bonne  paix,  lui  disait  un  peu  plus  tard  J.  Jouvenel 
des  Ursins,   prépares  vous  à  faire  bonne  guerre,   et  vous-mesmes  vous 


280  ASSEMBLÉE  DE  BOURGES   (1438) 

voyage  dans  l'Ouest,  il  vint  présider,  à  Bourges,  la  grande  as- 
semblée qui  élabora  la  pragmatique  sanction  (mai-juillet). 

Avant  de  consacrer  tous  ses  travaux  aux  affaires  ecclésiasti- 
ques, l'assemblée  de  Bourges  porta  son  attention  sur  l'état  du 
royaume  (juin  1438).  Les  députés  de  Paris  rappelèrent  au  roi, 
comme  il  le  faisait  volontiers  lui-même,  les  succès  de  l'année  pré- 
cédente *  ;  ils  l'exhortèrent  à  ne  s'en  point  tenir  là.  Charles  répéta 
qu'il  voulait  employer  le  meilleur  de  ses  forces  «  et  sa  propre 
personne  »  au  recouvrement  de  son  royaume  *;  mais,  au  lieu  de 
reprendre  les  armes,  il  aima  mieux  acheter  la  reddition  de  plu- 
sieurs places,  comme  Montargis,  Dreux,  Ghevreuse.'Il  est  pos- 
sible que  des  sièges  eussent  exigé  plus  de  dépenses. 

Ce  moyen  pacifique  ne  déplaisait  pas  d'ailleurs  à  des  capitaines 
d'une  vaillance  incontestée,  puisque  Saintrailles  et  le  bâtard 
d'Orléans  allèrent  négocier  l'achat  de  ces  villes  ^.  Richemont 
lui-même  ne  resta  pas  étranger  à  ces  négociations,  car  il  prêta 
de  l'argent  au  roi  pour  le  rachat  de  Ghevreuse  ^.  Enfin, 
Charles  VII  envoya  des  troupes  en  Guyenne  et  en  Gascogne 
contre  les  Anglais,   avec  Poton    de    Saintrailles   et  Rodrigo 

raectes  sus,  en  faisant  les  diligences  que  faisiez  devant  Monstereau  » 
(Fr.  5022,  f»  19  v»). 

1.  Fr,  25710,  n»  114. 

2.  Fr.  25710,  n»  116.  Il  est  très  probable  que  Richemont  ne  fut  pas 
étranger  à  ces  démarches  et  qu'il  vit  le  roi  en  revenant  de  Bretagne.  En 
tout  cas,  on  ne  le  trouve  pas  à  Paris  en  février,  mars,  avril  et  mai.  La 
duchesse  de  Guyenne  était  restée  dans  la  capitale.  Le  23  avril,  elle  demande 
au  Parlement  qu'on  élargisse  l'évéque  de  Langres,  détenu  à  la  Conciergerie 
(XJa  1482,  f»  74). 

3.  Les  négociations  avaient  commencé  dès  décembre  1437.  Après  une 
démonstration  contre  Montargis,  Saintrailles  alla  trouver  Fr.  de  Surienne, 
dit  l'Aragonais,  qui  occupait  Montargis  depuis  1432  (voir  ci-dessus,  p.  193, 
198).Talbot  et  Fauquemberge  voulurent  secourir  Montargis,  mais  Surienne 
se  laissa  néanmoins  gagner.  Le  bâtard  d'Orléans  prêta  au  roi  10  000  écus 
pour  payer  Surienne  et  fut  nommé  capitaine  de  Montargis  (novembre) 
[Cagny,  î"'  107-110;  le  Bourg,  de  Paris,  342  ;  Fr.  25710,  n"  114-116  ;  Fr.  25774, 
n»'  1294,  1295,  1300;  Fr.  26063,  n»  3394;  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  l, 
39,  note  1].  Montargis  fut  rendu  dans  la  dernière  semaine  d'octobre, 
Dreux  et  Ghevreuse  dans  la  nuit  de  la  Toussaint.  Ce  fut  encore  le  bâtard 
d'Orléans  qui  négocia  l'achat  de  ces  deux  villes  avec  uu  Français,  capitaine 
de  routiers,  au  service  de  l'Angleterre,  Guillaume  du  Broullat,  par  l'inter- 
médiaire de  Thibaud  d'Armagnac,  dit  de  Charmes,  bailli  de  Chartres, 
alors  prisonnier  à  Dreux  (Cagny,  f»»  109-110  ;  Berry,  400;  le  Bourg,  de  Paris, 
342  et  note  1;  Fr.  26065,  n<"  3606-3609;  Pièces  orig.,  t.  530,  dossier  11955 
[Du  Broullat];  Zi»  13,  f"  43;  Zi»  14,  f»  2;  Z'a  17,  f»»  22,  25).  Le  roi  ne  rendit 
pas  Montargis  à  Richemont  (voy.  ci-dessus,  p.  278,  et  Append.  LXVIII). 

4.  Voy.  Appendice  LXIX.  Le  duc  de  Bretagne  prête  6  000  écus  d'or  à 
Charles  VU,  le  20  septembre  1438  (Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.38,  E,  105).  Le 
capitaine  de  Dreux  et  de  Ghevreuse  vint  faire  le  serment  au  connétable 
à  Paris  (le  Bourg,  de  Paris,  p.  342). 


TENTATIVE  INFRUCTUEUSE  SUR  PONTOISE    (1438,   JUILLET)        281 

(le  Villandrando,  qui  d'ailleurs  se  rendirent  aussi  redoutables 
aux  populations  du  Midi  qu'aux  ennemis  eux-mêmes  K 

Le  connétable,  faute  de  ressources,  ne  put  faire  de  grandes 
entreprises.  Il  dut  se  borner  à  quelques  démonstrations  sans 
importance,  dans  le  voisinage  de  Paris  et  en  Champagne,  pour 
contenir  les  Anglais  et  les  routiers.  C'est  ainsi  qu'il  dirigea  des 
tentatives  sur  Pontoise,  Meaux,  Creil,  Mantes  (juillet-novem- 
bre), plutôt  pour  donner  satisfaction  aux  Parisiens  que  pour 
attaquer  sérieusement  ces  importantes  places,  avec  les  forces  très 
insuffisantes  dont  il  disposait.  Pourtant  l'occasion  eût  été  belle, 
si  le  roi  eût  voulu  recommencer,  avec  la  même  ardeur,  la  cam- 
pagne de  l'année  précédente.  Les  garnisons  anglaises,  mal  appro- 
visionnées, mal  payées,  étaient  mécontentes;  celle  de  Pontoise, 
qui  avait  pour  capitaine  Th.  Guérard,  voulait  même  déserter.  Les 
Français  avaient  des  intelligences  dans  toutes  ces  villes. 

Au  mois  de  juillet,  le  connétable  essaya  de  surpendre  Pontoise  ; 
«  et  tantost  les  menues  gens  qui  avec  luy  estoient  gaignèrent 
l'une  des  plus  fortes  tours  qui  fust  en  la  ville;  et,  quand  il  vit 
que  l'on  besongnoit  si  asprement,  il  fit  tout  laisser  et  s'en  refouit 
à  Paris  et  dict  qu'il  ne  vouloit  pas  faire  tuer  les  bonnes  gens; 
et,  pour  certain,  le  peuple  qui  avec  luy  estoit  juroit  que,  s'il 
ne  les  eust  point  laissez,  à  très  peu  de  tems,ilz  eussent  gaigné  la 
ville  et  chastel  *.  »  Ce  passage  d'un  témoin  oculaire  montre  les 
difficultés  que  Richemont  trouvait  à  Paris,  au  milieu  d'une 
population  impressionnable,  surexcitée  par  la  souffrance  et  dis- 
posée môme  à  le  soupçonner  de  trahison,  quand  il  ne  faisait 
pas  l'impossible  '.  La  bonne  volonté  des  Parisiens  ne  pouvait 
leur  tenir  lieu  de  toutes  les  qualités  militaires.  Si  le  conné- 
table abandonna  l'entreprise,  c'est  qu'il  savait  que  la  ville 
allait  être  secourue  par  Fauquemberge  *  et  qu'il  ne  voulait  pas 
faire  massacrer,  en  pure  perte,  tant  de  braves  gens  ^. 

1.  Fr.  26064,  nos  3422,  3310,  331o.-  Fr.  26065,  n«»  3631,  3722.  Fr  20417, 
nol4.  K  64,  n»  29.  Pièces  orig.,  542,  dossier  12237  (Brusac),  n°  8. 

2.  Le  Bourg,  de  Paris,  p.  341. 

3.  On  disait  que  le  connétable  était  «  favorable  aux  Anglais,  plus  qu'au 
royne  que  aux  François  ;  et  disoient  les  Anglois  qu'ilz  n'avoient  point  paour 
de  guerre,  ne  de  perdre,  tant  comme  il  seroit  connestable  de  France  » 
(Bourg,  de  Paris,  p.  340). 

4.  William  Nevil  ou  Guill.  de  Neuville,  sire  de  Fauquemberge,  capitaine 
d'Evreux  et  de  Verneuil  (Fr.  25775,  n-  1384,  1387). 

5.  Le  passage  dans  lequel  le  Bourg,  de  Paris  raconte  cet  épisode  a  été 
publié  par  M.  Tuetey,  qui  a  comblé  une  lacune  des  éditions  précédentes 
(voir  p.  338,  note  3).  Sur  les  secours  envoyés  par  les  Anglais  à  Pontoise, 
Meaux,  Creil,  voir  Fr.  25774,  n«»  1341,  1344;  Fr.  23775,  n«'  1359-1361,  1364, 
1366»,  1368,  1371  ;  Pièces  orig.,  t.  1404,  dossier  31583,  n»  8  ;  Fr.  26053,  n»  1404; 
voir  aussi  Fr.  26064,  nos  3551,  3559^  3566,  3574,  3644.  Simon  Morbier  vint  à 


282  RAVAGES  DES  ROUTIERS-  (1438) 

Non  seulement  Richemont  se  trouvait  réduit  vis-à-vis  des  An- 
glais à  une  impuissance  qui  le  faisait  soupçonner  de  trahison, 
mais  encore  il  ne  réussissait  pas  mieux  à  protéger  les  campagnes 
contre  les  gens  de  guerre.  Bien  qu'un  grand  nombre  de  ces  rou- 
tiers fussent  allés  en  Guyenne,  en  Bourgogne,  en  Languedoc,  en 
Lorraine  ^,  il  en  restait  encore  assez  dans  la  Champagne  et  l'Ile- 
de-France  pour  y  commettre  des  ravages. 

En  vain  le  connétable  et  Ambroise  de  Loré,  prévôt  de  Paris, 
redoublaient  d'énergie  et  de  vigilance;  le  mal  allait  s'aggra- 
vant,  et  les  plaintes  devenaient  de  plus  en  plus  pressantes.  Pour 
qu'Ambroise  de  Loré  pût  agir  avec  plus  d'autorité,  Richemont  le 
fit  nommer  juge  commissaire  spécial  et  réformateur  général  des 
crimes  commis  par  les  malfaiteurs  dans  tout  le  royaume  de 
France  (5  avril  ^);  mais  les  efforts  du  connétable  et  du  prévôt  de 
Paris  étaient  paralysés  par  l'intensité  du  mal  et  par  la  détresse 
financière.  Gomme  il  y  avait  souvent  «  de  très  grans  faultes  et 
longs  délaiz  au  paiment  »  des  gens  de  guerre,  ils  étaient  obligés 
de  piller  pour  vivre,  et,  quand  ils  se  bornaient  à  cela,  sans  com- 
mettre de  plus  grands  méfaits,  on  ne  pouvait  guère  les  punir  ^, 

Malheureusement  ces  pillages  n'allaient  pas  sans  d'autres 
violences.  Le  meurtre ,  le  viol  ,  l'incendie  étaient  crimes  si 
communs  qu'on  les  retrouve  à  chaque  instant  mentionnés  dans 
les  chroniques,  dans  les  actes  de  la  chancellerie  royale.  Les 
routiers  pullulaient  de  tous  côtés  •'.  On  rencontre  parmi  eux  les 
meilleurs  officiers  du  roi,  La  Hire,  Saintrailles,  les  Ghabannes, 
les  deux  bâtards  de  Bourbon,  Rodrigo  de  Villandrando,  Robert 
de  Floques,  Louis  de  Bueil  et  tant  d'autres,  qui  pouvaient 
compter  sur  une  impunité  presque  absolue  s. 

Gomment  des  gens  du  peuple,  des  paysans,  auraient-ils  obtenu 
justice,  quand  le  connétable  ne  pouvait  l'obtenir  dans  sa  propre 
cause  ^?  C'est  alors,  en  effet,  qu'un  de  ses  lieutenants,  le  maré- 

Pontoise,  apporter  de  l'argent  aux  gens  d'armes   qui  voulaient  partir,  et 
s'engagea  à  leur  payer  le  reste  (Fr.  26064,  n"  3341;  K  64,  n"  24  bis). 

l.Fr.  25710,  n°^  118  et  119.  Pièces  orig.,  t.  542,  dossier  Bhussac,  n°  122378. 
Fr.  26064,  n^  3422,  3310,  3515.  Fr.  26063,  n"'  3631,  3722.  A.  Tuetey,  Les 
Ecorcheurs,  t.  I,  p.  20,  35,  39,  43. 

2.  Voir  Ordonnances,  XIII,  260-261. 
.    3.  Ils  obtenaient  des  lettres  de  rémission.  Voir,  par  exemple,  celles  qui 
furent  accordées  le  28  mai  aux  gens  d'armes  des  garnisons  de  Gorbeil  et 
du  bois  de  Vincennes.  Y*  fos  23  v»,  26. 

4.  Voir  le  savant  ouvrage  de  M.  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  t.  I,  p.  7  et 
suiv.  ;  Monstrelet,  V,  317-318. 

5.  Voy.  Append.,  LXX. 

6.  «  Cest  outrage  ne  fut  trouvé  bon  en  la  personne  d'un  grand  officier 
de  la  couronne,  encores  que  le  Roy  fût  imbécile  d'entendement  et  que  les 
grands  fissent,  de  son  temps,  grandes  insolences  »  (d'Argentré,  p.  793-794). 


ORDONNANCE  CONTRE  LES  ROUTIERS   (1438,   22  DEC.)  283 

chai  de  Rieux,  qui  était  son  neveu  par  alliance,  ayant  été  arrêté 
par  les  gens  de  Guillaume  de  Flavy,  près  de  Compiègne,  Riche- 
mont  ne  put,  par  aucun  moyen,  l'arracher  de  ses  mains  *.  Ro- 
binet l'Hermite,  qui  avait  opéré  cette  arrestation,  fut  saisi  à 
Paris,  sur  les  ordres  d'Ambroise  de  Loré,  puis  décapité  aux 
Halles  *;  mais  Flavy,  bravant  le  connétable,  dont  il  voulait  se 
venger,  retint  le  maréchal  de  Rieux  dans  une  prison  malsaine, 
au  château  de  Nesles  %  et  l'y  laissa  mourir  *. 

Vers  le  même  temps,  un  des  plus  hardis  routiers  de  l'épo- 
que, le  fameux  Forte-Epice,  que  Richemont  avait  déjà  voulu  châ- 
tier, faisait  prisonnier  Jean  de  Dinteville,  bailli  de  Troyes,  lui 
enlevait  sa  ville  d'Echenay  ^  (mai  1448)  et  la  gardait,  malgré 
les  injonctions  du  connétable.  Ces  actes  et  beaucoup  d'autres  du 
même  genre  montrent  combien  était  nécessaire  et  difficile  la 
réforme  de  l'armée.  Ils  excitèrent  le  connétable  à  poursuivre 
cette  œuvre  ingrate  et  périlleuse.  C'est  dans  ce  but  qu'il  fit 
publier  un  mandement  du  22  décembre  1438,  confirmé  le  même 
jour  par  des  lettres  du  roi,  et  qu'on  peut  regarder  comme  le 
prélude  de  la  grande  ordonnance  d'Orléans. 

Il  y  pose  en  principe  que  chaque  capitaine  «  doit  répondre  des 
gens  qu'il  a  et  tient  en  sa  compaignie  et  gouvernement,  pour  en 
faire  punicion  et  justice,  quant  ilz  délinquent  ».  Il  ordonne  au 
prévôt  de  Paris  de  faire  arrêter,  soit  dans  sa  prévôté,  soit  autre 
part,  dans  tout  le  royaume,  les  malfaiteurs,  ou,  à  défaut  des 
coupables,  leurs  compagnons  et  leurs  capitaines,  pour  les  con- 
traindre, les  uns  ou  les  autres,  à  réparer  les  dommages  causés, 
a  par  prinse  de  leurs  biens  propres  et  détencion  de  leurs  per- 
sonnes »  *. 

Déjà  le  roi  avait  défendu  aux  capitaines  de  gens  d'armes 
d'entrer  sur  les  terres  du  duc  de  Bourgogne,  et  il  avait  autorisé 
les  habitants  à  leur  résister  par  tous  les  moyens,  sans  crainte 


1.  Voir  ci-dessus,  p.  184  et  note  2.  Berry  (p.  401)  dit  qu'il  venait  de  déli- 
vrer Harfleur,  assiégé  par  les  Anglais,  quand  il  fut  arrêté.  Ce  détail  est 
confirmé  par  le  registre  X*''  24  (au  25  juin  1444). 

2.  J.  Chartier,  I,  243-243.  Cet  auteur  dit  que,  pendant  la  captivité  du  ma- 
réchal, Flavy  fit  un  traité  avec  le  connétable,  en  lui  payant  4  000  écus,  qu'il 
voulut  reprendre  à  P.  de  Rieux,  et  que,  pour  cela,  il  le  retint  en  prison. 

3.  Probablement  Nesles-la- Vallée,  canton  de  L'Isle-Adam,  arrondissement 
de  Pontoise. 

4.  Voy.  Append.  LXXI. 

5.  Echenay,  arrondissement  de  Vassy.  En  1437,  Forte-Epice  avait  pris 
Mailly-le-Châtel  (arrondissement  d'Auxerre),  qu'il  ne  voulut  rendre  que 
moyennant  1  500  écus  d'or  (A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  I,  44,  49  ;  CoUect.  de 
Bourgogne,  t.  100,  ^250;  voir  ci-dessus,  p.  219), 

6.  Voy.  Append.  LXX,  et  Ordonnances,  XIII,  295. 


284  GRANDE   MORTALITÉ   A   PARIS    (1438) 

d'être  inquiétés  à  ce  sujet,  quoi  qu'il  en  pût  advenir  ' .  Enfin,  vers 
cette  époque,  le  connétable  fit  saisir,  par  Tristan  l'Hermite,  un 
capitaine  gascon,  Bouzon  de  Failles,  et  un  capitaine  écossais, 
Bouays  Glavy,  «qui  faisoit  tous  les  maulx  qu'on  pourroit  dire.  » 
Le  premier  fut  jeté  dans  la  Seine  à  Troyes,  le  second  fut  pendu  ^. 
11  y  a  là  un  ensemble  de  résolutions  et  de  mesures  qui  prouvent 
que  le  roi  comprenait  la  nécessité  d'une  réforme  militaire  et 
que  Richemont  le  poussait  à  l'accomplir. 

Outre  le  regret  d'être  réduit  trop  souvent  à  une  impuissance 
humiliante,  Richemont  éprouva,  cette  année-là,  d'autres  cha- 
grins. Il  perdit  son  frère  Richard,  comte  d'Etampes^,  qui  l'avait 
toujours  soutenu  de  son  influence  et  de  son  affection.  Ensuite,  ce 
fut  une  de  ses  nièces,  Isabelle,  fille  de  Richard,  qui  mourut,  peu 
après  son  père.  A  Paris,  la  mortalité  avait  pris  des  proportions 
effrayantes  pendant  l'été  ^  :  «  Quand  la  mort  se  boutoit  en  une 
maison,  elle  en  emportoit  la  plus  grant  partie  des  gens,  et  spécia- 
lement des  plus  fors  et  des  plus  jeunes.  »  Un  fille  de  Charles  VII, 
Marie,  abbesse  de  Poissy,  fut  enlevée  par  le  fléau,  le  19  août.  Peu 
de  temps  auparavant,  elle  avait  allumé,  avec  le  connétable,  le  feu 
de  la  Saint-Jean,  devant  l'hôtel  de  ville  ^ 

Richemont,  avec  la  duchesse  de  Guyenne,  quitta  Paris,  sans 
toutefois  s'éloigner  ".  Il  voulut  aller  loger  au  bois  de  Vincennes; 
mais  Roger  de  Pierrefrite,  lieutenant  de  Jacques  de  Chabannes', 

1.  Mélanges  de  Colbert,  335,  n»  209  (Ordonnance  du  15  septembre). Tuetey, 
Les  Ecorcheui's,l,^9-il.  Autre  ordonnance  du  19  septembre  (contresignée  par 
le  maréchal  de  La  Fayette),  signalée  par  Vallet  de  V.,  t.  II,  403,  note  2. 
Voir  aussi  X^^  25,  au  24  juillet  1452.  A  cette  époque,  Charles  VII  se  rappro- 
chait plus  intimement  de  Philippe  le  Bon,  en  concluant  le  mariage  de  sa 
fille,  Catherine  de  France,  avec  le  comte  de  Cliarolais,  le  30  septembre  1433 
(Mélanges  de  Colbert,  335,  n»»  210-212;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  233). 

2.  «  Dont  les  Gascons  et  Ecossois  firent  grant  plaiucte  et  grant  bruit 
devers  le  roy  et  donnèrent  à  monseigneur  (le  connétable)  de  grandes 
menaces,  en  son  absence  »  (Gruel,  211). 

3.  Richard  de  Bretagne,  comte  d'Etampes,  le  plus  jeune  fils  de  Jean  IV, 
mourut  le  3  juin  1438.  Sa  fille  Isabelle  mourut  peu  après;  son  autre  fille, 
Catherine,  épousa  la  même  année  Guill.  de  Châlons,  fils  du  prince  d'Orange 
(Anselme,  I,  463,  et  VIII,  422-23).  Son  fils,  François,  devint  duc  de  Breta- 
gne. Richard  avait  nommé  exécuteurs  testamentaires  ses  frères  Jean  V  et 
xVrtur  (D.  Morice,  I,  p.  529,  et  Preuves,  t.  II,  col.  1316). 

4.  Journal  de  Maupoint,  p.  25. 

5.  Le  Bourg,  de  Paris,  340-341. 

6.  Il  était,  par  exemple,  à  Paris  le  2  octobre  (Zib  60,  f"  35).  A  celte  époque 
on  craignait  encore  des  tentatives  des  Anglais  contre  Paris  (Y*  f  •  42-43  ; 
LL  414,  f  100;  Ordonnances,  XIII,  291  ;  Pièces  orig.,  t.  1404,  dossier  n"  31583, 
pièce  8. 

7.  Gruel,  212  (avec  la  date  inexacte  de  1439).  Voir  Xi»  4798,  f»  122.  Jac- 
ques de  Chabannes  occupait  cette  place  pour  le  duc  de  Bourbon.  Les 
gens  du  duc  de  Bourbon  occupaient  aussi  Corbeil  (le  Bourg,  de  Paris, 


RICIlEMOxNT  QUITTE  PARIS    (1438)  285 

lui  refusa  l'entrée  de  cette  place.  Même  refus  au  château  de 
Beaulé-sur-Marne;  puis,  quand  la  garnison  vit  que  le  connétable 
faisait  amener  son  artillerie,  elle  se  rendit  sans  condition.  Les 
gens  d'armes  qui  la  composaient  furent  conduits  à  Paris,  la  corde 
au  cou,  et  ne  durent  la  vie  qu'aux  prières  do  Mme  de  Guyenne, 
llichemont  alla  successivement  loger  à  Saint-Maur  et  au  Pont- 
de-Gharenton.  Il  se  rendit  ensuite  à  Sainte-Menehould  et  revint 
vers  le  temps  de  Noël,  quand  le  danger  fut  passé  *.  S'il  n'eut, 
dans  ces  déplacements,  d'autre  but  que  celui  d'échapper  à 
l'épidémie,  comme  le  donne  à  entendre  son  biographe  ^,  on  ne 
peut  s'empêcher  de  remarquer  qu'il  eût  été  plus  honorable  pour 
lui  de  rester,  comme  Ambroise  de  Loré,  au  milieu  des  Parisiens, 
pour  soutenir  leur  courage,  en  partageant  leurs  épreuves  ^. 

Il  est  d'ailleurs  certain  qu'il  avait  d'autres  motifs  pour  aller  à 
Sainte-Menehould.  Le  roi  l'avait  chargé  de  conduire  des  troupes 
en  Lorraine,  pour  défendre  les  Etats  de  René  contre  le  comte  de 
Vaudemont  et  son  allié,  Robert  de  Sarrebrûck.  Geux-ci,  malgré 
les  traités,  avaient  recommencé  la  guerre,  en  appelant  des  rou- 
tiers, comme  Forle-Epice  et  Antoine  de  Ghabannes,  qui,  au  mé- 
pris des  ordres  du  roi,  ravageaient  les  possessions  de  son  beau- 
frère.  La  Hire,  Blanchefort,  le  grand  et  le  petit  Estrac  *,  envoyés 
parGharles  Yll,  avaient  battu  le  comte  de  Vaudemont;  mais  ils 
étaient  allés  ensuite  faire  une  course  en  Alsace, et  les  autres  routiers 
qu'ils  avaient  chassés  avaient  recommencé  leurs  incursions  en  Lor- 
raine. G'est  alors  que  les  régents  de  Lorraine  et  Evrard  de  La  Marck 
avaient  demandé  de  nouveaux  secours  au  roi  et  au  connétable  ^, 

351).  Tous  ces  routiers  avaient  obtenu  des  lettres  de  rémission  le  28  mai  1438 
(Y*  f°»  25  v°,  26).  Pendant  la  Praguerie,  ils  ref)riront  le  bois  de  Vincennes, 
où  Roger  de  Pierrefrite  fut  encore  le  lieutenant  de  Ghabannes  (le  Bourg, 
de  Paris,  351;  Gruel,  213).  Tout  cela  semble  confirmer  un  passage  de  la 
Chron.  Martinienne  (f°  cclxxvui  r"  et  v)  où  l'on  voit  que  Jacques  de 
Ghabannes  avait  pris  jadis  aux  Anglais  les  châteaux  de  Gorbeil  et  du  bois 
de  Vincennes  et  que  celui  du  bois  de  Vincennes  lui  fut  donné  par  Ghar- 
les  VII,  sous  réserve  du  droit  de  rachat,  pour  une  somme  de  20  000  écus, 
qui  fut  payée  environ  dix  ans  après  (voy.  Append.  LXXII). 

1.  Gruel,  qui  donne  ces  détails,  dit  que  la  duchesse  de  Guyenne  arriva 
la  veille  de  Noël  à  Paris  ;  il  dit  bien  aussi  que  le  connétable  s'en  revint 
vers  Noël,  mais  il  ne  dit  pas  positivement  qu'il  revint  à  Paris  même 
(Gruel,  212). 

2.  Gruel,  212. 

3.  Peut-être  le  connétable  voulait-il  enlever  Vincennes,  le  château  de 
fieauté  et  quelques  autres  places  aux  routiers,  qui  les  occupaient  pour  le 
duc  de  Bourbon. 

4.  Paul  et  Guillaume  d'Estrac  (Tuetey,  Les  Écorcheurs,  I,  68). 

5.  Gruel,  212.  D.  Calmet,  II,  col.  812,  811 ,  el  Preuves,  col.  ccxxix  et  suiv. 
A.  Tuetey,  Les  Écorcheurs,  I,  66-68.  Dumont,  Hist.  de  Commercy,  1. 1,  234-244. 
JJ  176,  ^  41i  .Collect.  de  Lorraine,  293,  n»  21.  Chron.  Martinienne,  f"  cclxxxt. 


286  RICHEMONT  VA  EN   LORRAINE   (1438) 

qui  avait  répondu  à  leur  appel.  Malheureusement  les  troupes 
qu'il  leur  avait  amenées  furent  battues  par  Robert  de  Sarre- 
bruck  près  de  Romagne  *  et  échouèrent  au  siège  de  Ghauvency*. 
Plusieurs  officiers  du  connétable,  notamment  Alain  Giron,  Gef- 
froy  Morillon,  P.  d'Augy,  furent  tués  dans  cette  expédition,  et 
Robert  put  même  se  venger,  en  dévastant  les  domaines  d'Evrard 
de  LaMarck  ^ 

Ces  échecs  chagrinèrent  beaucoup  Richemont.  Tout  semblait 
tourner  contre  lui.  Il  ne  voyait  partout  qu'indiscipline  et  désor- 
dres. Les  troupes,  mal  payées,  servaient  mal  et  ne  cherchaient 
que  le  pillage.  Les  Anglais  faisaient  des  courses  jusqu'aux  envi- 
rons de  Paris  *.  C'est  ainsi  que  les  garnisons  de  Saint-Denis  et 
de  Lagny  voulurent,  au  mois  de  janvier  1439,  abandonner  ces 
places,  faute  de  payement.  Le  chancelier,  qui  se  trouvait  à  Paris, 
fut  obligé,  pour  les  retenir,  d'emprunter  300  livres  tournois  °. 
En  même  temps,  les  Anglais  prenaient,  par  trahison,  le  château 
de  Saint-Germain-en-Laye,  que  leur  livra,  pour  300  saluts  d'or, 
un  religieux,  prieur  de  Nanterre  ^. 

Ce  n'était  pas  assez  que  le  connétable,  réduit  à  l'impuissance, 
eût  à  déplorer  ces  malheurs  ;  il  fallait  encore  qu'on  l'en  rendît 
responsable.  Le  peuple  ne  voyait  qu'une  chose,  c'est  qu'il  avait 
le  commandement,  et  il  l'accusait  de  tout  le  mal.  Il  faut  ici 
laisser  la  parole  aux  contemporains.  D'après  Cagny,  si  le  châ- 
teau de  Saint-Germain  fut  pris,  ce  fut  «  par  deffault  de  garde  de 
dix  ou  douze  raeschans  Bretons  que  le  connestable  y  tenoit,  qui 
ne  povoit  avoir  assez  place  pour  bailler  à  ses  gens.  Et  ne  lui 
chaloit  quel  tort  il  feist  aux  chevaliers  et  escuiers  d'autre  pais, 
mais  qu'il  peust  avoir  places  pour  y  tenir  ses  gens  en  nom  et  en" 


1.  Arrondissement  de  Montmédy. 

2.  Id. 

3.  Voir  les  auteurs  ci-dessus  et  Berry,  p.  401,  et  surtout  les  lettres  de 
rémission  accordées  par  Charles  VIT  à  Robert  de  Sarrebrûck,  le  dernier 
jour  de  février  1440,  dans  le  t.  293  de  la  Coll.  de  Lorraine,  n»  21. 

4.  LL  414,  f  100.  Les  Anglais  avaient  conclu,  le  20  décembre  1438,  une 
trêve  de  deux  ans  pour  le  Maine  et  l'Anjou  (voir  ci-dessus  p.  279,  note  4). 
Ces  provinces  furent  alors  plus  tranquilles  ;  mais  Paris  fut,  au  contraire, 
plus  menacé  (Ms.  Brienne  30,  f<"  173-178). 

5.  Xia  1482,  f»  95  v». 

6.  Le  Bourg,  de  Paris,  344.  Cagny,  f"  110.  Un  peu  plus  tard,  d'après 
Monstrelet,  un  gentilhomme  nommé  J.  de  La  Fange  fut  décapité  et  écar- 
telé  «  pour  ce  qu'il  fut  trouvé  coupable  d'avoir  pourparlé  avecque  les 
Anglais,  sur  aucunes  besognes  qui  étoient  préjudiciables  au  roi  de  France  ». 
Avec  lui,  on  écartela  un  sergent  du  Châtelet  de  Paris.  Par  lettres  du 
8  avril,  données  à  Riom,  Charles  VII  accorde  à  la  ville  de  Paris  le  .tiers 
des  aides  sur  le  vin  qui  s'y  vend,  pour  continuer  les  travaux  de  réparation 
des  murs,  travaux  qui  sont  très  nécessaires  (K  930,  n»  32».  h). 


ACCUSATIONS   CONTRE  RICHEMONT   (1439)  287 

estât.  Et  moult  de  maulx  en  sont  venus  durant  ces  présentes 
guerres.  Et  de  la  perte  d'icelle  place  et  du  gouvernement  du  dit 
connestable,  en  la  ville  de  Paris  et  ailleurs  estoient  très  mal 
contents  ceulx  de  Paris  *.  » 

Le  Bourgeois  de  Paris,  qui  ne  ménage  guère  Richemont,  n'ac- 
cuse ici  que  le  coupable,  c'est-à-dire  le  traître  qui  avait  livré 
Saint-Germain  aux  ennemis.  Il  n'épargne  pas  le  roi,  qui  restait 
dans  le  Berry  et  «  ne  tenoit  compte  de  l'Isle-de-France  ne 
de  la  guerre,  ne  de  son  peuple,  ne  (non  plus)  que  s'il  fust  prin- 
sonnier  aux  Sarrazins  -;  »  mais  c'est  au  connétable  qu'il  réserve, 
comme  d'ordinaire,  ses  invectives  les  plus  haineuses.  Il  incri- 
mine ses  actes  et  ses  intentions;  il  le  charge  de  tous  les  méfaits 
commis  par  les  gens  de  guerre;  il  est  aveuglé  par  la  passion  à 
tel  point  qu'il  ne  voit  que  le  mal.  Si  Richemont  répète,  pour  en- 
courager les  Parisiens,  qu'il  veut  chasser  les  Anglais  de  Meaux, 
de  Creil,  de  Pontoise;  s'il  rassemble  des  troupes;  s'il  fait  une 
tentative  infructueuse,  ou  une  simple  reconnaissance  militaire, 
le  Bourgeois  ne  voit  dans  tout  cela  qu'un  prétexte  à  pillage. 

«  En  cellui  temps  (c'est-à-dire  vers  le  mois  de  juin,  à  ce  qu'il 
semble)  vint  le  connestable  à  Paris  et  amena  avec  lui  un  grant 
tas  de  larrons  et  fist  entendant  qu'il  estoit  venu  pour  prendre 
Pontoise  ^  et  les  mena  environ  la  ville  et  la  regarda  tant  seulle- 
ment  de  loing  et  dist  qu'elle  estoit  moult  forte  à  prendre  et  qu'il 
n'avoit  pas  assez  de  gens  et  s'en  retourna,  sans  autre  chose  faire, 
lui  et  ses  larrons,  tout  gastant  les  blés,  les  gangnaiges  et  les 
éritaiges  des  bonnes  gens,  avant  qu'ilz  fussent  bons,  espéciale- 
ment  les  serises,  qui  commençoient  à  rougir,  et,  ce  quHlz  ne 
povoient  menger,  comme  fèves  nouvelles  et  pois,  apportoient- 
ilz  à  grans  sachées. 

«  Item,  la  derraine  sepmaine  de  juing,  vint  ung  autre  aussi 
mauvais  ou  pire,  nommé  le  conte  de  Perdriel  *,  qui  fut  filz  du 
conte  d'Arminal,  qui  fut  tué  pour  ses  démérites,  et  admena  une 
autre  grant  compaignie  de  larrons  et  de  meurdriers,  qui,  pour 
leur  mauvaise  vie  et  détestable  gouvernement,  furent  nommez 
les  Escorcheurs;  et,  pour  vray,  ilz  n'estoient  pas  mal  nommez, 
car,  aussitost  qu'ilz  venoient  en  quelque  ville  ou  villaige,  il  con- 

1.  Gagny,  f»  HO.  C'est  la  fin  de  la  chronique  de  Cagny,  dans  le  Ms.  Du- 
chesne,  48. 

2.  Le  Bourg,  de  P.,  344. 

3.  Il  faut  bien  que  Meaux,  Pontoise  et  Creil  aient  été  menacés  au  mois 
de  juin,  puisque  le  gouvernement  anglais  y  envoie  alors  des  secours 
|D.  Grenier,  t.  XX  bis,  liasse  9,  f  18  V;  Fr.  25774,  n»»  1341,  1344;  Fr.  23775, 
n"  1339,  1360,  1361,  1364,  13661,1371,  1407,  1408,  1416;  Fr.  26064,  n°»3351, 
3566,  3574;  Fr.  26065,  n»  3644;  Fr.  26066,  n"  4000). 

4.  Le  comte  de  Pardiac. 


288  ACCUSATIOîSS   CONTRE   RICHEMONT   (1439) 

venoit  soy  rançonner  à  eulx  à  grant  finance,  ou  ilz  degastoient 
tous  les  blez  qui  y  estoient,  qui  encore  estoient  tous  vers.  Et 
firent  entendant  qu'ilz  dévoient  prendre  Meaulx  d'assault,  ou 
par  gens  qui  leur  dévoient  livrer,  ou  par  composicion,  ou  autre- 
ment, et  firent  charger  canons  et  prendre  tout  le  pain  que  on 
trouvoit,  et  orent  de  l'argent  largement,  car  on  cuidoit  qu'ilz 
deussent  trop  bien  faire  la  besongne,  mais  ilz  ne  passèrent  guère 
par  delà  le  chastel  de  Dampmartin,  et  là  pilloient,  tuoient,  ran- 
çonnoient  les  blez  et  tous  autres  gaignaiges,  sans  autre  bien 
faire.  Ainsi  besongnoit  le  noble  connestable  de  France,  nommé 
Artus,  conte  de  Richemont.  Et,  pour  vray,  les  prinsonniers  des 
Anglois  disoient  à  Paris  et  ailleurs,  quant  ilz  avoient  paiée  leur 
rançon  et  qu'ilz  estoient  en  leurs  lieux,  que  les  Anglois  disoient  : 
«  Par  sainct  Georges  1  vous  povez  bien  crier  et  braire  à  vostre 
«  connestable  qu'il  vous  secoure,  car,  par  sainct  Edouart,  tant 
«  qu'il  sera  connestable,  nous  n'avons  point  paour  que  nous 
«  soions  combattuz,  qu'il  puisse;  car,  quant  il  veult  faire  une 
«  armée,  pour  faire  le  bon  varletz  et  pour  avoir  de  vostre  argent, 
«  nous  le  savons  de  par  lui  ou  de  part  autre  touzjours  trois  ou 
«  quatre  jours  davant,  car  par  sainct  Georges  !  lui  bon  Anglois,  et 
«  secret  et  en  appert.  »  Mais  aucuns  tenoient  qu'ilz  le  disoient 
pour  le  mettre  en  hayne  du  roy  et  du  commun,  mais  la  plus 
saine  partie  le  tenoit  pour  très  mauvays  homme  et  très  couart. 
Brief,  il  ne  lui  challoit  ne  de  roy,  ne  de  prince,  ne  du  commun, 
ne  de  ville,  ne  de  chastel  que  les  Angloys  preissent;  mais  qu'il 
eust  de  Targent,  ne  lui  challoit  du  demourant,  ne  de  quel  part. 
Brief,  il  n'estoit  à  rien  bon  au  regart  de  la  guerre,  et  laissoit  et 
souffroit  aux  gros  qui  avoient  les  grans  greniers  plains  de  blez 
et  d'autres  grains,  vendre  aux  povres  gens  tout  comme  ilz  voul- 
loient;  mais  quHl  en  eust  aucun  émolument  ou  prouffît,  il  ne  lui 
challoit  comment  ilz  le  vendissent,...  Et,  pour  ce  que  le  peuple 
ne  se  povoit  taire,  il  fîst  le  bon  varlet  et  fîst  mettre  le  siège  de- 
vant la  cité  de  Meaulx Et  ne  faisoit  mie  en  deux  mois  ce 

qu'il  deust  avoir  fait  en  huit  jours,  car  il  commença  dès  le  mois, 
de  may  à  dire  à  ses  gens  qu'il  se  convenoit  ordonner  pour  y 
aller  et  si  fust  avant  le  dix-neuvième  jour  de  juillet  qu'il  ne  ses 
gens  y  meissent  le  siège  ;  lesquelles  gens  estoient  les  plus  mau- 
vaises gens  que  on  eust  oncques  veu  au  royaulme  de  France,  et 
se  faisoient  appeller  les  Escorcheurs,  car  telz  les  devoit  on 
appeller  et  tenir  partout  où  ilz  passoient,  car  après  eux  ne  de- 
mouroit  rien  ne  qu'après  feu  *.  » 
Il  est  certain  que  ces  accusations  ne  sont  pas  exclusivement 

1.  Le  Bourg,  de  Paris,  345-347. 


NÉGOCIATIONS  AVEC  l'angleterre  (1439)  289 

le  fait  de  deux  chroniqueurs;  il  est  certain  que  la  crédulité 
populaire  les  accueillait,  comme  il  arrive  toujours  en  pareil  cas; 
qu'elles  étaient  répétées  de  tous  côtés  et  que  Richemont  en 
devait  beaucoup  souffrir.  Bravé  impunément  par  les  uns,  haï, 
calomnié  par  les  autres,  abandonné  par  le  roi  à  ses  propres  res- 
sources, condamné,  après  chaque  effort,  après  chaque  succès,  à 
retomber  dans  la  même  impuissance,  il  finit  par  sentir  le  décou- 
ragement. 

Les  Anglais,  sans  profiter  de  cette  situation  autant  qu'ils  l'au- 
raient pu  faire,  reprenaient  pourtant  l'avantage  dans  le  pays  de 
Caux  '  et  aux  environs  de  Paris.  Richemont  voulait  toujours 
assiéger  Meaux,  Creil  ou  Pontoise  ^^  et  c'est  dans  ce  but  qu'il 
avait  appelé  son  ami,  le  comte  de  Pardiac;  mais  il  fallait  que  le 
roi  vînt  lui-même,  comme  à  Montereau,  ou,  tout  au  moins,  qu'il 
envoyât  des  renforts  considérables  et  de  l'argent.  Charles  VII 
avait  alors  d'autres  préoccupations.  Le  parti  de  la  paix  le  pous- 
sait à  négocier  avec  l'Angleterre.  Le  pape,  le  concile,  les  ducs  de 
Bourgogne  et  de  Bretagne  l'y  exhortaient,  en  offrant  leur  mé- 
diation ^.  De  son  côté,  le  duc  d'Orléans,  qui  espérait  une  pro- 
chaine délivrance,  redoublait  d'efforts. 

A  la  fin  de  janvier  1439,  la  duchesse  de  Bourgogne  eut  une 
entrevue  avec  le  cardinal  d'Angleterre,  entre  Calais  et  Grave- 
Unes.  On  y  décida  qu'il  y  aurait  bientôt  des  conférences  pour 
la  paix  et  que  le  duc  d'Orléans  y  viendrait  *.  Les  ambassadeurs 
de  Charles  VII  conduisirent  d'abord  Catherine  de  France  à 
Saint-Omer,  où  fut  célébré  son  mariage  avec  le  comte  de  Cha- 
rolais.  Le  connétable,  qui  avait  à  conclure  avec  Philippe  le  Bon 
quelques  arrangements  relatifs  à  la  dot  de  sa  femme,  s'était 


1.  Sur  la  guerre  dans  le  pays  de  Caux,  voir  Fr.  26066,  n»»  3800-3802,  3835, 
3856.  Les  Anglais  avaient  pris  Fécamp,  Lillebonne  et  essayé  de  pénétrer 
par  trahison  dans  Harfleur  (voir  Fr.  26065,  n»^  3703,  3713,  3732,  3738,  et 
Fr.  25775,  n"  1412).  Le  comte  de  Somerset  et  Talbot  avaient  fait  une  course 
dans  le  Santerre  en  février-mars  (Fr.  26069,  n«  4490,  et  Fr.  26066,  n»  3988). 

2.  Le  connétable  «  désiroit,  sur  toutes  choses,  que  le  Roy  lui  baillast 
gens  et  artillerie  pour  mettre  le  siège  audit  lieu  de  Meaux;  à  ce  sujet,  il 
avoit  envoyé,  de  par  lui  et  de  par  ceux  de  Paris,  devers  le  Roy,  luy  sup- 
plier qu'il  y  voulust  pourvoir,  ou  que  la  bonne  ville  de  Paris  et  tout  le 
pays  d'autour  auroient  trop  à  souffrir  »  (Gruel,212).  Il  faut  dire  que,  dès  les 
mois  de  mars  et  d'avril,  le  roi  voulut  envoyer  dans  l'Ile-de-France,  pour 
assiéger  Meaux  ou  Creil,  les  gens  d'armes  qui  étaient  en  Lorraine  et  en 
Allemagne  ;  mais  le  duc  de  Bourbon  empêcha,  par  ses  intrigues,  l'exécu- 
tion de  cet  ordre  (voir  Doat,  IX,  f»  227,  ou  Math.  d'Escouchy,  édit.  de 
Beaucourt,  t.  III,  p.  5  et  6;  Berry,  401).  Le  duc  de  Bourbon  était  à  Riom 
avec  le  roi  dès  le  20  mars  (Fr.  25710,  n»  122). 

3.  Rymer,  V,  fe  partie,  54,  55. 

4.  Rymer,  V,  1"  partie,  59-64,  Ilist.  de  Bourgogne,  IV,  235. 
Richemont.  19 


290  DÉCOURAGEMENT  DU  CONNÉTABLE  (1439) 

rendu  auprès  de  lui  '.  Il  assista  peut-être  au  mariage  du  comte 
de  Charolais  ^,  mais  il  ne  prit  aucune  part  aux  négociations  qui 
le  suivirent  (juin  1439),  soit  qu'il  les  désapprouvât,  soit  qu'il 
crût  plus  utile  de  continuer  la  guerre  dans  l'Ile-de-France.  Pour 
obliger  les  Anglais  à  rabattre  de  leurs  prétentions,  il  fallait  de 
nouveaux  succès  militaires. 

Pendant  qu'on  négociait,  le  connétable  voulait  agir;  mais  où 
trouver  les  ressources  nécessaires?  Désespéré  de  ne  pouvoir  ni 
arrêter  les  ennemis,  ni  réprimer  l'indiscipline  des  gens  de  guerre 
et  de  leurs  chefs^  ni  les  empêcher  de  piller  les  provinces  dont 
il  avait  le  gouvernement,  il  eut  l'intention  de  se  retirer,  «  telle- 
ment qu'une  fois  il  assembla  le  Conseil  et  fut  délibéré  de  se  def- 
faire  et  descharger  du  gouvernement  de  France  (Ile-de-France)  et 
d'entre  les  rivières  et  d'aller  ou  envoyei-  devers  le  Roy  pour 
ceste  cause  »  ^.  Il  est  présumable  qu'un  de  ceux  qui  assistaient 
à  ce  conseil  (peut-être  Ambroise  de  Loré)  fut  alarmé  des  consé- 
quences que  pouvait  entraîner  cette  résolution  et  chercha  un 
moyen  pour  en  détourner  le  connétable.  L'anecdote  racontée  à 
ce  sujet  par  G.  Gruel  est  curieuse. 

«  Le  lendemain,  au  matin,  vint  le  prieur  des  Chartreux  de 
Paris  devers  luy  et  le  trouva  tout  seul  en  la  chapelle  de  son 
hostel;  et  demanda  au  dict  prieur  :  «  Beau  père,  que  vous  faut- 
«  il?  »  Et  le  prieur  luy  dist  qu'il  vouloit  parler  à  Mgr  le  connes- 
table.  Et  monseigneur  luy  dist  que  c'estoit  il.  Et  le  dit  prieur 
luy  dist  :  «  Pardonnez-moi,  monseigneur,  je  ne  vous  cognois- 
«  sois  pas;  je  veux  parler  à  vous,  s'il  vous  plaist.  »  Et  il  luy 
dist  que  volontiers.  Et  il  commença  à  luy  dire  :  «  Monsei- 
«  gneur,  vous  tinstes  hier  conseil  et  délibérastes  de  vous  des- 
«  charger  du  gouvernement  et  charge  que  avez  par  deçà.  »  Et  lors 
monseigneur  s'eschaufFa  et  lui  dist  :  «  Gomment  le  scavez-vous  ? 
«  qui  le  vous  dist?  »  Et  cuida  monseigneur  que  aulcun  du  Conseil 
luy  eust  dict.  Et  lors  le  prieur  luy  dist  :  «  Monseigneur,  je  ne  le 
«  scay  point  par  homme  de  votre  Conseil  ;  je  le  scay  par  homme 
«  bien  certain  et  ne  vous  donnez  point  de  malaise  qui  me  l'a  dict, 
«  car  ce  a  esté  un  de  mes  frères  ;  »  et  lui  dist  :  «  Monseigneur,  ne 


1.  Après  le  traité  d'Arras,  Philippe  le  Bon  avait  rendu  à  Jeanne  de  Châ- 
lon  le  comté  de  Tonnerre,  dont  les  revenus  avaient  été  assignés  en  dot  à 
la  duchesse  de  Guyenne.  Par  un  arrangement  conclu  le  30  mai,  le  duc 
donna,  en  compensation,  à  sa  sœur,  les  seigneuries  de  Montréal  et  de 
Chastel  Girard  {Hist.  de  Bourg.,  IV,  234-235,  et  Preuves,  p.  Clxiv;  Fr.  4628, 
fos  621-628,  641-643;  Collect.  de  Bourg.,  96,  p.  621-623). 

2.  Fontanieu,  dans  son  histoire  manuscrite  de  Charles  VII  (Fr.  10449, 
i'o  253  v°),  dit  que  Richemont  y  assista,  mais  il  ne  donne  aucune  preuve. 

3.  Gruel,  213.  Ms.  Legrand,  t.  I  {Hist.  de  Louis  XI),  ou  Fr.  6960,  f»  9. 


IL  VEUT  SE   RETIRER  (1439)  291 

«  le  faites  point,  car  Dieu  vous  aidera  et  ne  vous  souciez.  î  Et 
monseigneur  luy  dist  :  «  Ha,  beau  père,  comment  se  pourroit-il 
«  faire?  le  roy  ne  me  veult  ayder  ny  me  bailler  gens  ne  argent, 
«  et  les  gens  d'armes  me  hayssent  pour  ce  que  j'en  fais  justice  et 
«  ne  me  veulent  obéir  *.  »  Et  lors  le  prieur  luy  dist  ;  «  Monsei- 
«  gneur,  ils  feront  ce  que  vous  voudrez,  et  le  roy  vous  mandera 
«  que  ailliez  mettre  le  siège  à  Meaux.  et  vous  envoyera  gens  et 
«  argent  *.  »  Le  roi  fut-il  averti  de  l'intention  qu'avait  le  conné- 
table d'abandonner  le  gouvernement  de  ses  provinces  et  voulut- 
il  le  retenir,  en  lui  donnant  satisfaction?  Ce  qui  est  certain,  c'est 
qu'il  lui  envoya  des  troupes,  en  lui  faisant  dire  qu'il  allât  assié- 
ger Meaux.  Ce  fut  pour  Richemont  une  des  plus  grandes  joies 
de  sa  vie  ^. 

Cbarles  VII  revenait  alors,  par  Lyon  et  le  Beaujolais,  d'un 
voyage  en  Auvergne  (mars-juin)  *.  Il  avait  imposé,  de  sa  seule 
autorité,  une  aide  de  300  000  I.  aux  pays  de  Languedoil;  mais 
il  avait  pris  en  même  temps  l'engagement  de  lever  «  une  grosse 
armée  »  (28  mars).  Les  Etats  de  Languedoc,  réunis  à  Vienne, 
lui  avaient  encore  octroyé  160  000  moutons  d'or  ^  Il  était  donc 
en  état  de  faire  face  aux  dépenses  d'un  grand  siège;  et  d'ailleurs 
les  villes  de  l'Ile-de-France  et  de  la  Champagne  y  contribuèrent 
aussi,  comme  elles  l'avaient  déjà  fait  pour  celui  de  Montereau  ^. 
La  Hire,  Floquet,  Jean  de  Malestroit,  Geoffroy  de  Gouvran  et 
d'autres  capitaines,  qui  revenaient  d'Alsace  par  Montbéliard  et 
Luxeuil,  reçurent  du  roi  l'ordre  d'aller  se  mettre  à  la  disposition 
du  connétable  '^.  Après  avoir  fait  une  course  devant  la  ville  de 

1.  Voir  ci-dessus,  p.  284  et  la  note  2. 

2.  Gruel,  213.  Il  faut  remarquer  que  cette  anecdote,  qui  interrompt 
d'une  manière  assez  inattendue  le  récit  du  siège  de  Meaux,  dans  l'édition 
Michaud  et  Poujoulat,  ne  se  trouve  pas  dans  le  plus  ancien  des  manus- 
crits de  la  chronique  de  G.  Gruel  qui  appartiennent  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale (voy.  Ms.  fr.  3037,  f»  93  v»,  manuscrit  du  sv"  siècle).  On  ne  la  trouve  pas 
davantage  dans  un  manuscrit  du  xvi"  siècle  (Fr.  5507,  f"  27)  qui  semble  re- 
produire le  Ms.  fr.  5037,  mais  elle  est  dans  un  autre  manuscrit  du  xvi"  s. 
(Fr.  18697,  fo^  82  y,  83).  D'ailleurs  le  manuscrit  du  xv"  s.  (Fr.  3037,  f-  93  v» 
met  en  scène  un  chartreux  dont  il  n'a  pas  été  dit  un  mot  auparavant,  de 
telle  sorte  qu'on  reconnaît  les  traces  d'une  lacune. 

3.  Doat,  IX,  p.  227.  Gruel,  212. 

4.  Voir  une  curieuse  relation  latine  de  ce  voyage  dans  le  t.  XI  des  Mé- 
moires de  la  Société  des  antiquaires  de  France,  p.  337  et  suiv. 

5.  Ceux  du  Dauphiné  octroyèrent  30  000  florins  à  Saint-Symphorien 
d'Ozon,  en  mai.  Voir  Fr.  20889,  n»  79;  Legrand,  VI  (Fr.  6963),  f"'  82-83. 
Voir  aussi  Doat,  IX,  f»  127,  ou  Math.  d'Escouchy,  t.  III,  p.  5  et  suiv.;  Fr. 
25710,  no  123;  Fr.  26063,  n»  3770  ;  Portef.  Font.,  117-118,  au  28  mars. 

6.  Voir  les  Mémoires  de  J.  Rogier,  prévôt  de  l'échcvinage  de  Reims,  p.  27  ; 
D.  Grenier,  XX  bis,  liasse  9,  f»  18  v°. 

7.  Berry,  401. 


292  RICIIEMOM   ASSIÈGE   MEAUX    (1439,   JUILLET) 

Meaux  ',  il  revint  presser  les  préparatifs  du  siège.  Il  partit  de 
Paris  vers  le  milieu  de  juillet,  avec  les  gens  de  sa  maison  et  des 
capitaines  qui  lui  étaient  dévoués  depuis  longtemps,  comme 
Ambroise  de  Loré,  prévôt  de  Paris,  Jean  de  Troissy  %  le  sire 
de  Rostrenen,  Tugdual  de  Kermoysan,  dit  le  Bourgeois,  et  beau- 
coup d'autres.  Jean  Bureau  dirigeait  l'artillerie  '. 

Meaux  était  une  des  places  les  plus  importantes  de  France, 
soit  par  ses  fortifications,  soit  par  sa  situation  dans  le  voisinage 
de  Paris,  sur  la  Marne,  dont  elle  commande  le  cours.  Outre  la 
ville  proprement  dite,  située  sur  la  rive  droite  de  la  Marne,  il  y 
avait,  dans  une  presqu'île  formée  par  une  des  boucles  de  cette 
rivière,  la  puissante  forteresse  du  Marché  \  communiquant  avec 
la  ville  par  un  pont  fortifié.  Dix-huit  ans  auparavant,  cette  place 
avait  soutenu  un  siège  mémorable.  Henri  V  ne  l'avait  pu  prendre 
qu'après  sept  mois  d'efforts  (6  octobre  1421  —  2  mai  1422).  C'est 
pendant  ce  siège  que  Richemont  avait  servi  sous  les  ordres  du 
roi  d'Angleterre  !  Il  devait  avoir  à  cœur  de  réparer  cette  faute. 

Après  avoir  réuni  ses  troupes  au  village  de  Ghauconin  °,  il  com- 
mença le  siège  le  20  juillet.  Il  divisa  son  armée  en  trois  corps,  qui 
occupèrent  l'abbaye  de  Saint-Faron,  les  Cordeliers  et  un  autre 
poste  vers  la  Brie,  devant  la  porte  de  Cornillon.  Il  fit  construire 
une  bastille  à  cet  endroit  ^  pour  attaquer  à  la  fois  la  ville  et  le 

1.  Le  roi  ordonne,  le  27  octobre,  de  lui  rembourser  900  1.,  qu'il  avait 
dépensées  dans  cette  course.  Voy.  Append.  LXIX. 

2.  Sur  Jean  de  Troissy,  voir  le  t.  96  de  la  Collect.  de  Bourgogne,  p.  621. 

3.  Jean  Bureau,  qui  s'était  déjà  signalé  par  des  talents  remarquables  dans 
la  direction  de  l'artillerie  (par  exemple  au  siège  de  Montereau),  était  rece- 
veur à  Paris,  quand  il  fut  commis  verbalement  par  le  roi  au  commande- 
ment de  l'artillerie  pour  le  siège  de  Meaux.  Devenu  trésorier  de  France, 
il  n'en  conserva  pas  moins  ces  autres  fonctions  si  différentes.  Son  frère 
Gaspard  servait,  sous  ses  ordres,  au  siège  de  Meaux.  Gaspard  devint  maître 
de  l'artillerie,  après  la  démission  de  P.  Bessonneau,  le  27  décembre  1444 
(Anselme,  VIII,  135,  136,  140;  Y*  P^  63  v»,  64).  Originaires  de  la  Champa- 
gne, les  Bureau,  contrairement  à  ce  qu'on  a  dit,  étaient  nobles  et  issus 
d'une  famille  noble,  comme  il  résulte  de  lettres  données  par  le  comte  de 
Champagne  en  1161,  confirmées  par  le  roi  Jean  en  1361  et  par  Char- 
les VII  en  1447  (JJ  178,  f»  145,  n-  nclxvi). 

4.  Dès  1367,  la  forteresse  du  Marché  de  Meaux  était  une  des  plus  nota- 
bles du  royaume  (JJ  177,  f''  108).  Sur  la  topographie  de  Meaux,  voir  Tous- 
saints  du  Plessis,  Hist.  de  l'Église  de  Meaux,  Paris,  1731,  in-4,  p.  2  et  3, 
et  V.-A.  Garro,  Hist.  de  Meaux,  Meaux,  186o,  in-8,  p.  103  et  suiv.  L'évêque 
de  Meaux,  Pasquier,  était  alors  président  de  la  Chambre  des  comptes,  à 
Rouen  (Fr.  20883,  n»  88). 

5.  Carro,  Hist.  de  Meaux,  p.  175-178.  Il  y  fut  rejoint  par  La  Hire,  Robert 
de  Floq.ues,  le  bâtard  Chapelles,  Denis  de  Chailly,  le  commandeur  de  Gi- 
resme,  etc.  Au  mois  de  février  1430,  Denis  de  Chailly  avait  fait  une  tenta- 
tive sur  Meaux  (JJ  173,  n°  6). 

6.  Monstrelet   seul  indique  sept  bastilles;  Berry  n'en  indique  qu'une 


PRISE   DE  LA  VILLE   DE  MEAUX   (1439,    12  AOUT)  293 

Marché.  La  ville  était  défendue  par  un  lieutenant  de  Talbot  ^  qui 
en  était  le  capitaine,  et  par  le  bâtard  de  Thian,  qui  en  était  le 
bailli.  Elle  pouvait  compter  sur  les  secours  du  comte  de  War- 
wick,  lieutenant  général  de  Henri  VI,  car  le  gouvernement  anglais 
ne  devait  rien  épargner  pour  conserver  une  des  places  de  France 
auxquelles  il  tenait  le  plus.  Malgré  quelques  démonstrations  des 
Français  en  Normandie,  du  côté  de  Granville  et  de  Rouen,  pour 
y  retenir  les  ennemis,  le  comte  de  Somerset,  avec  Richard  Ha- 
rjmgton,  bailli  de  Gaen,  réunit,  dans  les  premiers  jours  d'août, 
une  petite  armée  et  marcha  au  secours  de  Meaux  ^  Il  y  avait 
environ  trois  semaines  ^  que  cette  ville  était  battue  par  l'artil- 
lerie de  J.  Bureau,  quand  le  connétable  apprit,  par  ses  espions, 
que  les  Anglais  approchaient.  Il  réunit  un  conseil  où  on  résolut 
d'assaillir  la  ville  sans  plus  de  retard. 

Le  mercredi  12  août,  au  matin,  l'assaut  fut  donné,  avec  un  tel 
succès  que  la  place  fat  prise  en  moins  d'une  demi-heure  *.  «  Je 
croy  fermement,  dit  le  biographe  de  Richemont,  que  Dieu  y  fit 
plus,  pour  l'amour  de  mondit  seigneur,  que  les  gens  d'armes, 
car  il  ne  coûtoit  rien  à  monter  sur  la  muraille  ^.  »  Le  même  jour, 
ceux  du  Marché  offrirent  de  rendre  cette  forteresse,  si  on  vou- 
lait mettre  en  liberté  trois  prisonniers,  dont  le  bâtard  de  Thian; 
mais  La  Hire  et  Antoine  de  Ghabannes  ayant  réclamé  le  petit 
Blanchefort,  qui  était  aux  mains  des  Anglais,  les  pourparlers 
furent  rompus.  D'ailleurs,  un  traître  Gascon,  Jean  de  La  Fuite, 
encouragea  les  Anglais  à  résister,  en  disant  qu'ils  allaient  être 
secourus.  Le  connétable  fit  couper  la  tète  au  bâtard  de  Thian 
et  à  tous  les  Français  reniés  qui  avaient  été  pris  avec  les  enne- 
mis. Plus  tard,  il  punit  de  la  même  manière  J.  de  La  Fuite. 

La  garnison  du  Marché  pouvait  tenir  longtemps,  à  condition 
qu'elle  ne  manquât  pas  de  vivres.  Elle  reçut  bientôt  les  secours 
promis.  Trois  jours  après  l'occupation  de  Meaux  arriva  le  comte 
de  Somerset  avec  une  armée  de  4  à  5  000  hommes  ^,  commandés 
par  les  meilleurs  capitaines  anglais,  Talbot,  Scales,  Fauquem- 
berge.  Le  connétable  avait  prudemment  fait  rentrer  dans  la  ville 

seule  (ce  qui  est  plus  vraisemblable),  et  Gruel  aucune.  Guillaume  Gruel 
était  au  siège  de  Meaux. 

1.  Berry  l'appelle  Thomas  Abrigent  (p.  402).  Clairamb.,  134,  f"  2057. 

2.  Fr.  26066,  n"^  3829,  3832,  3833,  3838,  3844,  4035. 

3.  D'après  le  Bourg,  de  Paris,  p.  347,  le  siège  aurait  commencé  le 
19  juillet.  Voy.  ci-dessus,  p.  292. 

4.  Proceedings,  V,  384.  Gruel,  213.  Journal  de  Maupoint,  23. 

5.  Gruel,  213.  Il  est  très  probable  que  les  Français  avaient  des  intelli- 
gences dans  la  place  (Z»»  13,  f»  92  V).  Jacquet  Darcet,  écuyer  dans  la 
compagnie  du  connétable,  fut  un  des  premiers  à  entrer  dans  Meaux  (Z** 
13,  f"  11).  En  récompense,  il  reçut  l'office  d'élu  à  Meaux  (f»  23). 

6.  Gruel  dit  7  000,  Berry  4  à  3  000,  Monstrelet  4  000. 


294        SIÈGE  DU  MARCHÉ  DE  MEAUX  (1439,  AOUT) 

la  plus  grande  partie  de  ses  troupes  et  laissé  le  reste,  avec  Denis 
de  Ghailly  et  le  commandeur  de  Giresme,  dans  la  bastille  encore 
inachevée,  du  côté  de  la  Brie,  Vainement  les  ennemis,  qui  ne 
désiraient  rien  tant  qu'une  bataille,  défièrent  plusieurs  fois  les 
Français.  Richemont  n'était  pas  assez  sûr  de  ses  troupes  pour 
risquer  une  partie  aussi  dangereuse  ;  il  défendit  qu'on  sortît  de 
la  ville  ^  Il  laissa  les  Anglais  s'avancer  jusqu'au  bord  de  la 
Marne,  passer,  avec  leurs  bateaux  de  cuir,  dans  une  île  située 
entre  la  ville  et  le  Marché,  remplacer  la  garnison  par  des 
troupes  fraîches,  et  ce  fut  à  contre-cœur  qu'il  céda  aux  con- 
seils de  ses  capitaines,  en  faisant  occuper  cette  île  pendant  la 
nuit. 

Le  lendemain  matin,  les  Anglais  attaquèrent  l'île,  où  se  trou- 
vaient les  gens  d'Olivier  de  Coëtivy.  Le  connétable  envoya  deux 
bateaux  armés  pour  les  secourir  ;  mais  les  archers  anglais  tuè- 
rent les  mariniers,  prirent  les  bateaux  et  passèrent  dans  l'île. 
Tous  ceux  qui  l'occupaient  furent  massacrés  ou  noyés,  sans  qu'on 
pût  venir  à  leur  aide.  Quant  à  ceux  qui  étaient  dans  la  bastille, 
ils  s'enfuirent,  abandonnant  des  vivres  dont  les  Anglais  s'em- 
parèrent. La  Hire  voulait  s'élancer  contre  les  ennemis  ;  d'autres 
cherchaient  à  quitter  la  ville,  «  feignans  de  vouloir  aller  à  l'es- 
carmouche; »  mais  le  connétable  resta  inflexible,  et  même  il  fit 
garder  les  portes  par  les  gens  de  sa  maison  et  par  ses  officiers 
les  plus  dévoués,  les  sires  de  Rostrenen  et  de  Ghâtillon,  Jean 
Budes  ^  son  porte-étendard,  le  Bourgeois,  Guillaume  Gruel. 

Il  recueillit  bientôt  les  bénéfices  de  cette  sage  conduite.  Les 
Anglais  n'étaient  point  venus  dans  l'intention  de  faire  un  siège  ; 
ils  n'avaient  pas  assez  de  vivres  pour  rester  longtemps.  Ils 
espéraient  s'en  procurer  en  s'emparant  de  Grespy-en-Valois  ^, 
mais  le  connétable  les  prévint.  Il  envoya  Olivier  de  Broon,  avec 
d'autres  capitaines,  au  secours  de  cette  place,  et  les  ennemis, 
après  avoir  échoué  dans  cette  entreprise,  furent  obhgés  de  re- 
tourner en  Normandie. 

Le  roi,  inquiété  par  les  nouvelles  qu'il  avait  reçues,  s'était  avancé 

1.  Les  Anglais  et  leurs  capitaines,  surtout  Talbot,  avaient  une  réputa- 
tion de  supériorité  bien  établie  (Fr.  5022,  f°  20).  Richemont  les  connaissait 
mieux  que  personne. 

2.  Des  documents  authentiques  confirment  la  présence  du  sire  de  Ros- 
trenen au  siège  de  Meaux  et  nous  apprennent  que  J.  Budes  était  porte- 
étendard  du  connétable.  J.  Budes  avait  été  mis  en  prison  et  poursuivi  pour 
les  mêmes  méfaits  que  Richemont  réprimait  sévèrement  chez  les  gens  de 
guerre.  Il  fut  cautionné  par  le  prévôt  de  Paris  et  par  le  maître  d'hôtel  de 
ia  duchesse  de  Guyenne  (voir  X^»  22,  aux  dates  du  lundi  15  juin,  lundi  22 
juin,  mardi  23,  jeudi  25  juin  et  jeudi  23  juillet  lid9).  \ oir  Append.  LXXIII. 

3.  Arrondissement  de  Sentis. 


CAPITULATION  DU  MARCHÉ  DE  MEAUX  (1439,  AOUT) 

jusqu'à  Brie-Gomte-Robert  *,  où  il  réunissait  des  troupes.  Il  en- 
voya des  renforts  au  connétable,  qui  fit  reconstruire  la  bastille 
détruite  par  les  ennemis  et  réoccuper  l'île  située  entre  la  ville  et 
le  Marché.  Des  postes  furent  établis  sur  la  Marne  et  sur  la  Seine, 
pour  garder  tous  les  passages,  et  le  roi  mit  tant  de  troupes  à 
Saint-Denis  et  aux  environs  que  les  Anglais  eussent  été  fort 
empêchés  de  revenir  au  secours  du  Marché  de  Meaux.  Le  siège 
fut  poussé  avec  tant  de  vigueur  et  de  célérité  que  Guillaume 
Chamberlain,  le  nouveau  capitaine,  laissé  par  le  comte  de  So- 
merset dans  la  forteresse,  fut  réduit,  au  bout  de  quinze  jours,  à 
capituler  ^.  Il  promit  de  rendre  la  place  dans  trois  semaines,  si 
elle  n'était  secourue  dans  l'intervalle,  à  condition  que  la  gar- 
nison fût  libre  de  se  retirer  corps  et  biens  saufs. 

Le  jour  même  où  le  Marché  de  Meaux  fut  rendu  ^,  le  conné- 
table, après  en  avoir  confié  la  garde  à  Olivier  de  Coëtivy,  revint 
à  Paris.  Le  roi  s'y  trouvait  alors  *.  Il  envoya  au-devant  de  lui 
Charles  d'Anjou  et  d'autres  grands  seigneurs,  qui  lui  firent  cor- 
tège jusqu'à  l'hôtel  Saint-Paul  ".  Là,  Charles  VII  le  reçut  de  la 
manière  la  plus  honorable,  «  en  le  remerciant  du  service  qu'il 
lui  avait  fait  ^.  » 

Pendant  ce  siège,  le  maréchal  de  Rieux  mourut  dans  la  prison 
où  le  retenait  Flavy  '.  Il  fut  remplacé  par  André  de  Laval,  sei- 
gneur de  Lohéac,  auparavant  amiral,  et  celui-ci  par  Prigent  de 


1.  Arrondissement  de  Melun. 

2.  Ce  serait  donc  à  la  fin  d'août.  Les  ambassadeurs  anglais,  qui  étaient 
alors  à  Gravelines,  apprirent  cette  capitulatioa  le  5  septembre  {Proceedings, 
V,  385,  387). 

3.  Le  13  septembre,  d'après  le  Journal  de  Maupoînt,  p,  25.  Le  Bourg,  de 
Paris,  348.  Guill.  Chamberlain,  revenu  à  Rouen,  fut  accusé  de  trahison  et 
même  emprisonné  pendant  quelque  temps. 

4.  Il  y  était  venu  le  mercredi  9  septembre,  d'après  le  Bourg,  de  Paris, 
p.  347. 

5.  Xia  4799,  f  157  r°  et  v.  Berry,  403.  Richemont  trouva  aussi  à  Paris 
son  neveu  Pierre  de  Bretagne.  Ils  assistèrent,  avec  Ch.  d'Anjou  et  le  duc 
de  Bourbon,  au  combat  de  quatre  Français  contre  quatre  Anglais,  en  pré- 
sence du  roi,  le  26  septembre  (Journal  de  J,  Maupoînt,  p,  25,  26). 

6.  Sur  le  siège  de  Meaux,  voir  surtout  Gruel,  qui  fut  témoin  oculaire; 
Berry,  p.  401-403,  et  Monstrelet,  V,  387-390;  Martial  d'Auvergne,  I,  163-167. 
i.  Chartier  en  parle  brièvement  (1, 249-250).  Le  Bourg,  de  Paris  mentionne  en 
quelques  lignes,  p.  347  et  348,  la  prise  de  Meaux  et  celle  du  Marché,  sans 
aucune  réflexion,  après  avoir  déblatéré  pendant  deux  pages  contre  le  con- 
nétable. Voir  aussi  K  65,  nos  jît^  i3o,  issj  Proceedings,  V,  p.  384,  385,  387, 
et  Préface,  p.  lxii-lxiv).  Vallet  de  V.  (Charles  VII,  i.  11,448)  indique,  en  trois 
lignes,  la  prise  de  Meaux,  avec  celle  de  quelques  autres  places,  comme  un 
fait  très  accessoire.  Du  reste,  cet  auteur  n'a  pas  même  entrevu  le  plan, 
pourtant  si  remarquable,  de  Richemont. 

7.  Append.  LXXI. 


296        RICHEMONT   SUIT   LE   ROI   A   PARIS   ET   A   ORLÉANS    (1439) 

Coëtivy,  deux  Bretons.  Le  connétable  avait  repris  assez  d'in- 
fluence pour  faire  prévaloir  ses  choix  i. 

Certes,  la  prise  de  Meaux  était  un  grand  succès  ;  mais  les  en- 
nemis avaient  encore  Saint-Germain,  Pontoise,  Greil,  que  Riche- 
mont  voulait,  avant  tout,  leur  reprendre.  Il  fallut  de  graves 
motifs  pour  l'empêcher  de  poursuivre  une  campagne  si  heureuse; 
mais  la  réorganisation  de  l'armée  ne  lui  paraissait  pas  moins 
urgente,  et  il  voulait  que  cette  question  fût  enfin  résolue  dans 
les  Etats  généraux  convoqués  pour  le  2o  septembre  *.  Il  avait 
obtenu  que  ces  Etats  fussent  réunis  à  Paris  '.  Le  roi,  qui  avait 
hâte  de  revenir  sur  la  Loire,  voulut  ensuite  que  l'assemblée  se 
tînt  à  Orléans,  malgré  les  représentations  qu'on  put  lui  faire. 
Il  quitta  Paris  à  la  fin  de  septembre. 

Richemont  le  suivit  à  Orléans,  avec  le  duc  de  Bourbon,  Gh. 
d'Anjou  et  le  comte  de  La  Marche.  Bientôt  arrivèrent  les  ambas- 
sadeurs des  princes,  notamment  ceux  des  ducs  d'Orléans,  de 
Bourgogne,  de  Bretagne  *  et  ceux  des  bonnes  villes  du  royaume, 
non  moins  intéressées  aux  débats  qui  allaient  s'ouvrir.  Aucune 
assemblée,  sous  le  règne  de  Charles  VII,  ne  mérite  au  même  titre 
le  nom  d'Etats  généraux.  Les  députés  des  pays  de  Languedoc 
y  avaient  été  convoqués,  avec  ceux  de  Languedoil  '^j  et  on  y 
agita  les  questions  les  plus  importantes,  celle  de  la  paix  avec 
l'Angleterre  et  celle  de  la  réforme  de  l'armée. 

Le  gouvernement  anglais,  las  des  difficultés  qu'il  éprouvait  à 
soutenir  la  guerre  ®,  ne  demandait  pas  mieux,  malgré  tous  les 
efforts  du  duc  de  Glocester,  que  d'entrer  en  accommodement. 

1.  Berry,  403-404. 

2.  Fr.  26066,  n»  3932. 

3.  Voir  un  curieux  passade  d'une  épître  de  J.  Jouvenel  des  Ursins  (évê- 
que  de  Beauvais)  à  Charles  VII,  cité  par  M.  de  Beaucourt  dans  la  Revue  des 
questions  hisl.,  livraison  du  1"  juillet  1872,  p.  114.  —  «  Naguères  et  l'an- 
née passée,  vous  aviez  ordonné  à  tenir  vos  trois  Estas  en  la  ville  capitale 
de  vostre  royaume,  c'est  assavoir  à  Paris,  pour  le  fait  de  la  paix,  auquel 
lieu  tous  les  gens  de  vostre  royaume  estoient  joyeulx  de  venir;  mais  à 
cop  vous  muastes  votre  ymaginacion  et  ordonnastes  que  on  alast  à  Or- 
léans »  (Fr.  5022,  P^  5-6;  voir  ci-dessus,  p.  278,  note  2). 

4.  Avec  le  chancelier  de  Bretagne,  Jean  V  envoya  son  fils  Pierre,  neveu 
de  Richemont  qui  lui  succéda  comme  duc  de  Bretagne.  Voy.  ci-dessus, 
p.  295,  note  4.  Pour  le  duc  de  Bourgogne,  voir  Fr.  26066,  n»  3943,  et  Fr.  26069, 
n»  4490. 

5.  Les  députés  de  Languedoc  comme  ceux  de  Languedoil  furent  convo- 
qués pour  le  25  septembre  (Fr.  26066,  n'^  3932  et  3943).  M.  Thomas  croit 
qu'ils  ne  furent  pas  convoqués,  ou,  du  moins,  qu'ils  ne  vinrent  qu'en  petit 
nombre.  Il  prétend  que  les  Etats  de  Chinon  (septembre  1428)  sont  les 
seuls,  sous  Charles  VII,  qui  méritent  véritablement  le  nom  d'Etats  géné- 
raux (A.  Thomas,  dans  le  Cabinet  hist.,  t.  XXIV,  208-209,  et  ci-dessus, 
p.  161-163). 

6.  Proceedings,  V,  Préface,  p.  xxxiv. 


NÉGOCIATIONS  INUTILES.   ÉTATS  d'ORLÉANS   (1439)  297 

Comme  il  avait  été  convenu,  des  conférences  avaient  eu  lieu  à 
Gravelines,  pendant  les  mois  de  juillet,  août,  septembre  *.  Les 
envoyés  de  Charles  VII  s'étaient  montrés  plus  exigeants  qu'au 
congrès  d'Arras,  en  raison  des  succès  qui,  depuis  1435,  avaient 
été  remportés  par  les  Français,  surtout  par  le  connétable  *  ;  mais 
le  principal  obstacle  fut  l'obstination  avec  laquelle  Henri  VI 
refusait  de  renoncer  au  titre  de  roi  de  France  ^.  On  n'avait  donc 
pu  s'entendre  ;  toutefois,  il  avait  été  convenu  que  les  négocia- 
tions seraient  prochainement  reprises.  De  tous  côtés  on  désirait 
la  paix  ;  le  pape,  le  concile,  les  ducs  de  Bourgogne,  de  Bretagne 
et  d'Orléans  proposaient  leur  médiation;  enfin,  à  la  cour  même 
et  dans  le  Conseil  du  roi,  il  y  avait  un  parti  de  la  paix  '*. 

Les  ambassadeurs  qui  avaient  pris  part  aux  conférences,  c'est- 
à-dire  le  comte  de  Vendôme,  Dunois  ^,  le  chancelier,  étaient 
revenus  à  Orléans.  Quand  les  Etats  furent  ouverts,  en  présence 
du  roi,  de  la  reine  de  France,  de  la  reine  Yolande,  des  princes 
et  du  connétable,  le  chancelier  Regnault  de  Chartres  exposa  tout 
ce  qui  avait  été  fait  pour  s'entendre  avec  les  Anglais,  en  ajoutant 
qu'il  y  aurait  de  nouvelles  conférences  à  Saint-Omer  et  que  le 
roi  demandait  l'avis  de  l'assemblée.  Après  de  longues  délibéra- 
tions, elle  se  prononça  pour  la  paix  ^. 

La  question  de  l'armée  ne  passionna  pas  moins  les  Etats.  Ils 
furent,  comme  à  l'ordinaire,  l'écho  des  plaintes  et  des  réclama- 
tions qui  s'élevaient  de  toute  la  France  et  des  pays  voisins,  de 
la  Bourgogne,  de  la  Lorraine,  de  l'Alsace,  également  ravagés 
par  les  gens  de  guerre  ^.  Jusqu'ici,  toutes  les  mesures  qu'on  avait 

1.  Les  ambassadeurs  français,  Dunois,  etc.,  étaient  à  Gravelines  le 
28  juin,  revenant  de  Saint-Omer,  où  ils  avaient  conduit  Catherine  de  France 
et  assisté  à  son  mariage  avec  le  comte  de  Charolais  {Hist.  de  Bourg.,  IV,  235). 
Pendant  ces  négociations,  les  Anglais  apprirent,  le  19  août,  la  prise  de 
Meaux,  et  le  3  septembre  la  capitulation  du  Marché  iProceedings,  V,  384, 
387,  et  aussi  Préface,  p.  Lxn,  lxiv). 

2.  Proceedings,  V,  399,  et  Préface,  p.  lxix  et  lxxvii.  C'est  un  argument 
que  la  duchesse  de  Bourgogne  fait  valoir  auprès  du  cardinal  Beaufort. 

3.  Fr.  5022,  f»  23  v°. 

4.  Sur  ces  négociations,  voir  Bréquigny,  t.  81,  f"  230  et  suiv.  ;  t.  82, 
fos  34-42,  49-54,  59-68;  Proceedings,  V,  385  et  suiv.,  et  la  Préface,  p.  xxxiv- 
LXix,Lxxvii;  Hist.  de  Bourg.,  IV,  234-39,  et  Preuves,  p.CLxniet  suiv.  ;Fr. 26065, 
n-  3756;  Fr.  26066,  nos  3315,  388O. 

5.  Le  bâtard  d'Orléans  venait  de  recevoir  le  comté  de  Dunois,  le  21  juil- 
let, d'après  le  Portef.  Font.,  117-118,  à  la  date.  Pourtant  il  prend  déjà  ce 
litre  dans  un  document  du  30  juin  [Hist.  de  Bourg.,  IV;  Preuves.,  p.  clxvi). 

6.  Berry,  p.  405.  Voir  l'épître  de  J.  Jouvenel  des  Ursins,  évêque  de 
Beauvais,  aux  Etats  d'Orléans  (Fr.  5022,  f»'  1-26).  C'est  un  plaidoyer  pour 
la  paix.  Il  conclut  à  là  convocation  d'une  nouvelle  assemblée  des  Etats,  à 
Paris,  pour  arriver  à  ce  but  (f»  26  v»).  Voir  aussi  P.-L.  Péchenard,  J.  Juvê- 
nal  des  Ursins,  Paris,  Thorin,  1876,  in-8,  p.  194-206. 

7.  XI»  1482,  fo  104.  K  60,  n»  2.  J.  Jouvenel  des  Ursins  revient  sans  cesse 


298  ORDONNANCE  DU  2  DÉCEMBRE  (1439) 

décrétées  n'avaient  point  empêché  le  fléau  de  grandir,  parce 
qu'elles  n'étaient  pas  appliquées.  Le  connétable,  qui  avait,  le 
plus  souvent,  inspiré  ces  ordonnances,  ne  parvenait  pas  lui- 
même  à  les  faire  exécuter.  Aidé  par  Yolande,  par  son  fils 
Charles  d'Anjou,  par  Pierre  de  Brezé,  par  des  hommes  aussi 
modestes  qu'utiles,  les  frères  Bureau,  Etienne  Chevalier,  Jac- 
ques Cœur,  qui  jouissaient  d'un  grand  crédit,  Richemont  sut 
faire  prévaloir  dans  le  Conseil  du  roi  les  réclamations  des 
Etats. 

Le  2  novembre  1439  fut  rendue  la  fameuse  ordonnance  d'Or- 
léans, qui  commença  la  réforme  de  l'armée.  Elle  reproduit  avec 
plus  de  précision  et  de  force  l'ordonnance  du  22  décembre  1438, 
due  à  l'initiative  du  connétable  *  ;  mais  elle  ne  se  borne  pas  à 
rendre  les  capitaines  responsables  de  leurs  gens,  à  prescrire  contre 
eux  des  poursuites  rigoureuses  ;  elle  attaque  le  mal  dans  sa  racine, 
en  posant  ce  principe,  que  le  roi  seul  a  le  droit  de  lever  des  troupes. 
Les  seigneurs  peuvent  avoir  des  garnisons  dans  leurs  châteaux  ; 
ils  ne  peuvent  plus  s'intituler,  de  leur  propre  autorité,  capitaines 
de  gens  d'armes  et  courir  le  pays  avec  des  compagnies,  sous 
prétexte  d'çiller  combattre  les  ennemis.  Nul  ne  peut  désormais 
être  capitaine  de  gens  d'armes,  s'il  n'est  nommé  par  le  roi.  — 
Les  capitaines  choisiront  leurs  gens,  mais  sans  pouvoir  jamais 
dépasser  l'effectif  fixé  par  le  roi.  —  Les  compagnies  devront 
rester  dans  les  garnisons  qui  leur  seront  assignées,  aux  frontières, 
sans  jamais  les  quitter,  pour  aller  vivre  sur  le  pays.  Tous  les 
sujets  du  roi,  nobles  ou  autres,  sont  autorisés  à  repousser  les 
pillards  par  la  force  ;  ceux  qui  les  livreront  à  la  justice  auront 
même  droit  à  leurs  dépouilles.  —  Les  seigneurs  qui  ont  des 
garnisons  dans  leurs  châteaux  devront  les  entretenir  à  leurs  pro- 
pres frais,  sans  pouvoir  prélever,  pour  cela,  aucune  taxe  extraor- 
dinaire sur  leurs  vassaux  et  surtout  sans  pouvoir  détourner  aucun 
denier  des  tailles  ou  des  aides,  comme  ils  le  faisaient  trop  sou- 
vent. —  Enfin,  le  roi  s'interdit  à  lui-même  le  droit  de  donner  des 
lettres  de  rémission  aux  délinquants,  et,  s'il  leur  en  accorde,  on 
n'en  devra  tenir  aucun  compte  ! 

Telles  sont  les  principales  dispositions  de  cette  ordonnance 

sur  ce  sujet,  dans  son  épître  aux  Etats  de  1439  (Fr.  ^022,  passim ;  î°^  20  v, 
26,  par  exemple). 

1.  Voy.  ci-dessus,  p.  283.  Par  un  étrange  oubli,  le  préambule  de  l'ordon- 
nance ne  mentionne  même  pas  Richemont  parmi  ceux  qui  conseillèrent  le 
roi  dans  ces  circonstances,  mais  on  y  trouve  le  nom  du  duc  de  Bourbon  1 
Déjà,  au  moment  du  siège  de  Meaux,  le  duc  de  Bourbon  tenait  une  conduite 
factieuse;  il  engageait  les  capitaines  de  gens  d'armes  à  désobéir  au  roi,  à 
ne  pas  aller  au  siège  de  Meaux  (Doat,  IX,  p.  227).  Quant  à  Richemont,  il 
était  alors  au  siège  d'Avranches. 


DIFFICULTÉ  d'appliquer  l'ordonnance  (1439)  299 

célèbre  *.  Elles  ne  sont  pas  nouvelles,  pour  la  plupart;  mais, 
promulguées  avec  cette  solennité,  acclamées  par  les  Etats  géné- 
raux, elles  ont  une  importance  vraiment  exceptionnelle.  Elles 
n'atteignent  pas  seulement  les  routiers,  les  écorcheurs,  les  capi- 
taines d'aventure,  tous  ceux,  en  un  mot,  qui  vivaient  de  la 
guerre,  même  en  temps  de  paix  et  en  pays  ami;  elles  attaquent 
aussi  la  féodalité  dans  ses  abus  invétérés,  qu'elle  considérait 
comme  ses  privilèges. 

L'application  de  cette  ordonnance  devait  donc  rencontrer 
bien  des  difficultés,  dont  la  moindre  n'était  pas  la  faiblesse  du 
roi  ^.  Faire  un  bon  choix  parmi  les  gens  de  guerre,  habituer  à 
la  discipline  ceux  qui  seraient  conservés,  se  débarrasser  des 
autres,  sans  provoquer  de  graves  désordres,  tout  cela  n'était 
point  chose  facile.  Cette  tâche  ardue  incombait  au  connétable. 
Avant  que  l'ordonnance  fût  signée,  il  se  fit  donner  l'ordre  d'em- 
mener en  Normandie  «  grand  nombre  de  gens  tenans  les 
champs,  qui  n'estoient  point  souldoyez  ^.  »  C'étaient  les  troupes 
qui  avaient  été  au  siège  de  Meaux.  Il  "fallait  en  débarrasser  les 
environs  de  Paris,  qui  avaient  déjà  tant  souffert,  et  faciliter 
l'exécution  de  l'ordonnance. 

Les  Anglais  avaient  surtout  dirigé  leurs  entreprises  contre  le 
pays  de  Caux  *,  mais  ce  ne  fut  point  de  ce  côté  que  Richemont 
conduisit  ses  troupes.  Il  marcha  sur  Avranches  avec  le  maréchal 
de  Lohéac  et  le  duc  d'Alençon,  qu'il  avait  appelé  auprès  de  lui. 
Il  voulait  sans  doute  soustraire  ce  jeune  prince  aux  mauvais 
conseils  du  duc  de  Bourbon,  et,  en  attaquant  Avranches,  il  espé- 
rait peut-être  trouver  des  secours  en  Bretagne.  Il  mit  le  siège 
devant  Avranches,  au  mois  de  décembre  ^  ;  mais  il  manquait 
d'artillerie,  de  manœuvres,  d'argent;  et  il  avait  dans  son  armée 
beaucoup  de  routiers  ^,  dont  l'indiscipline  ordinaire  était  encore 
accrue  par  le  mécontentement,  l'inquiétude,  l'esprit  de  révolte. 
Déjà  se  machinait  la  Praguerie  ^  Quant  au  duc  de  Bretagne,  non 


1.  Ordonnances,  XIII,  306-311.  L'ordonnance  d'Orléans  fut  aussitôt  pu- 
bliée dans  tout  le  royaume,  et  le  roi  commanda  expressément  aux  baillis  et 
aux  juges  de  poursuivre  et  de  punir  les  délinquants  (voir  X^a  22,  aux  dates 
du  jeudi  12  novembre  1439  et  du  jeudi  16  mai  1443;  Fr.  23283,  à  la  fin). 

2.  On  avait  eu  raison  de  prévoir  qu'il  accorderait  des  lettres  de  rémission. 

3.  Gruel,  214. 

4.  Ils  y  avaient  pris  Fécamp,  Lillebonne  et  essayé  de  recouvrer  Harfleur 
par  trahison  (voir  Fr.  26065,  nos  3703,  3713,  3732,  3738;  Fr.  25775,  n»  1412). 

5.  Gruel,  214.  C'était  avant  Noël,  car  Richemont  était  le  20  décembre 
devant  Avranches  (K  65,  n"  1523).  Voir  Appencl.  LXXV. 

6.  Berry  le  dit  formellement,  p.  406. 

7.  Voir  Le  Baud,  p.  486.  Les  seigneurs,  dit-il,  qui  étaient  à  ce  siège, 
n'étaient  pas  bien  d'accord,  «  mais  déjà  se  machinait  une  praguerie.  » 


300      RICHEMONT  ÉCHOUE   DEVANT  AVRANCHES   (1439,   23   DEC.) 

seulement  il  ne  fit  rien  pour  venir  en  aide  à  son  frère,  mais  il 
offrit  même  ses  services  au  roi  d'Angleterre  K 

Dans  ces  conditions,  le  succès  était  fort  douteux,  d'autant  plus 
que  Somerset  et  Warwick  envoyaient  à  ceux  d'Avranches  des 
renforts  considérables  avec  le  comte  de  Dorset,  Talbot,  Th.  de 
Scales  et  Fauquemberge  ^.  Ils  furent  arrêtés  pendant  plusieurs 
jours  devant  la  Sée,  petite  rivière  qui  coule  un  peu  au  nord  de 
la  ville.  Français  et  Anglais,  rangés  en  bataille  sur  chaque  rive, 
s'observèrent  quelque  temps.  Les  Anglais  s'étaient  établis  au 
pont  Gilbert,  tout  près  d'Avranches.  Quant  aux  Français,  ils 
allaient,  chaque  soir,  coucher  dans  les  villages  voisins,  malgré 
la  défense  de  Richemont.  «  Et  vous  certifie  qu'il  estoit  nuict 
qu'il  ne  demeuroit  pas  à  mon  dict  seigneur  le  connestable  quatre 
cens  combatans,  et  Dieu  scait  qu'il  y  endura  '.  » 

Une  nuit,  les  Anglais,  ayant  découvert  un  gué,  traversèrent  la 
rivière,  sans  que  le  connétable,  abandonné  par  la  plus  grande 
partie  de  son  armée,  fût  en  mesure  de  les  arrêter  ou  de  les 
suivre.  Les  ennemis  tombèrent  alors  sur  le  camp  français,  pri- 
rent ou  mirent  en  fuite  ceux  qui  le  gardaient  et  entrèrent  dans 
la  ville.  A  cette  nouvelle  ,  ce  fut  un  sauve-qui-peut  général 
parmi  les  routiers.  Ils  couraient  en  désordre  vers  Pontaubault*, 
où  ils  pouvaient  passer  la  Sélune,  pour  se  réfugier  en  Bretagne. 
En  vain  Richemont,  avec  un  petit  nombre  des  siens,  essayait 
d'arrêter  cette  déroute.  Antoine  de  Ghabannes  et  Blanchefort 
vinrent  lui  dire  que,  personnellement,  ils  ne  l'abandonneraient 
pas,  mais  que,  «  s'il  ne  s'en  alloit,  il  demeureroit  tout  seul,  et 
que,  de  tous  leurs  gens,  ils  n'en  avoient  pas  dix.  »  D'autres  capi- 
taines lui  firent  la  même  déclaration,  en  le  pressant  de  ne  pas 
s'obstiner  à  une  résistance  impossible.  Ils  l'entraînèrent,  pour 
ainsi  dire  malgré  lui,  jusqu'à  Dol.  Il  ne  lui  restait  pas  même 
cent  lances  ^.  Cette  déroute   d'Avranches,  comme   celle  qu'il 


1.  Voir  dans  les  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1326,  une  pièce 
du  4  février  1439  (a.  st.). 

2.  Le  comte  de  Somerset  était  capitaine  d'Avranches  et  de  Ciierbourg 
(Fr. 23773,  nos  1406, 1430, 1432).  Son  frère,  Edmond  Beaufort,  comte  de  Dorset, 
était  capitaine  d'AIencon  (Fr.  26066,  n°  3824  ;  voir  aussi  nos  3910,  3915). 

3.  Gruel,  215. 

4.  Arrondissement  d'Avranches. 

5.  C'était  le  mercredi  23  décembre  (voir  Fr.  26066,  n°  3920).  Pendant  le 
siège  d'Avranches,  le  sire  de  Bueil  enleva  aux  Anglais  Sainte-Suzanne,  la 
plus  forte  place  du  pays,  celle  qui  nuisait  le  plus  au  Maine  et  à  l'Anjou 
(J.  Chartier,  I,  252,  et  Berry,  405).  Sur  ce  siège  d'Avranches,  voir,  outré 
Gruel,  J.  Chartier,  I,  250-232,  qui  est  plus  précis  que  d'ordinaire;  Martial 
d'Auvergne,  I,  167-169;  Berry,  406;  S.  Luce,  Chron.  du  Mont-Saint-Michel. 
39-40  ;  Fr.  5022,  f"  20  ;  Fr.  26066,  u»  3920  ;   Fr.  26067,  n°  4041  ;   Fr.  26068, 


MESURES  CONTRE  LES  ROUTIERS  (1440)  301 

avait  éprouvée  non  loin  de  là,  quatorze  ans  auparavant,  à  Saint- 
James-de-Beuvron,  était  due  aux  mômes  causes,  à  l'indiscipline 
des  troupes  françaises,  à  l'infériorité  de  leur  organisation. 

Ce  dernier  échec  n'était  pas  très  grave,  mais  il  montrait  une 
fois  de  plus  Turgence  des  réformes  décrétées  à  Orléans;  il  servit 
d'argument  à  Richemont,  qui  se  hâta  de  revenir  auprès  du  roi, 
pour  lui  porter  ses  plaintes  et  réclamer  des  mesures  énergiques. 
Charles  VII  manda  aussitôt  à  Angers  les  capitaines  qui  avaient 
pris  part  à  l'expédition.  Là,  en  présence  du  connétable,  il  leur 
demanda  pourquoi  ils  s'étaient  «  si  lâchement  gouvernés  »  de- 
vant Avranches.  Il  décida  qu'à  l'avenir  il  serait  interdit  aux 
gens  d'armes  de  traîner  avec  eux  des  bagages,  des  femmes,  des 
valets  et  autre  coquinaille  qui  n'était  bonne  qu'à  détruire  le 
pauvre  peuple.  Après  avoir  désigné  les  capitaines  des  compa- 
gnies, il  ordonna  «  de  mettre  ses  gens  d'armes  es  frontières, 
chacun  homme  d'armes  ayant  trois  chevaux  *.  »  Désormais  les 
capitaines  institués  par  le  roi  devaient,  tous  les  mois,  faire  leurs 
montres  devant  le  connétable  et  recevoir  la  solde  de  leurs  trou- 
pes. Les  autres  étaient  tenus  de  licencier  leurs  compagnies. 

Ensuite  le  roi  fit  distribuer  à  ses  capitaines  de  l'argent,  des 
armes,  leur  assigna  des  garnisons  aux  frontières,  reçut  leurs 
serments  d'obéissance  ^.  En  outre,  le  Dauphin,  qui  venait  de 
conduire  une  expédition  contre  les  Anglais  dans  la  Guyenne  et 
contre  les  routiers  dont  les  Languedoc ,  était  chargé  d'aller 
réprimer  les  brigandages  d'autres  routiers  dans  le  Poitou  et  la 
Saintonge  ^.  Richemont,  après  tant  d'efforts,  avait  enfin  obtenu 
gain  de  cause,  et  il  était  déjà  reparti  pour  son  gouvernement  de 
rile-de-France,  quand  une  révolte  désastreuse  entrava  encore 
la  réforme  de  l'armée  et  la  guerre  contre  les  Anglais. 

n"  4372.  Le  connétable  avait  environ  6  000  hommes.  D'après  le  Bourg,  de 
Paris,  p.  331,  il  en  avait  40  000  contre  8  000  Anglais! 

1.  Berry,  p.  406.  D'après  Martial  d'Auvergne,  un  homme  d'armes,  ou 
lance,  aura  cinq  chevaux,  un  coutillier,  deux  archers  «  et  son  gros  varlct 
et  paige  »  (t.  I,  170). 

2.  Voir  Berry,  p.  406,  407,  le  seul  chroniqueur  qui  donne  ces  détails, 
confirmés  d'ailleurs  par  un  document  précieux.  C'est  un  mémoire  dont  la 
copie  se  trouve  dans  le  t.  IX  de  la  collection  Doat,  f"  226-252.  Elle  a  été 
reproduite  dans  l'édition  de  Mathieu  d'Escouchy,  par  M.  de  Beaucourt, 
t.  III,  p.  4  et  suiv.  Voir  aussi  Martial  d'Auvergne,  I,  169-170. 

3.  Voir  Fr.  6960,  c'est-à-dire  Legrand,  t.  I,  p.  9.  Sur  l'expédition  du 
Dauphin  en  Guyenne  et  dans  le  Languedoc,  voir  Fr.  6965,  c'est-à-dire  Le- 
grand, VI,  fos  27-36  et  f'  67.  Le  comte  de  Huntingdon  avait  été  envoyé  dans 
la  Saintonge  et  le  Bordelais  (JJ  178,  f»  13  v»;  Fr.  20886,  n»  116;  Fr.  26066, 
no»  3818,  3864,  3870,  3885,  3888,  3901,  3917,  3929  ;  Pièces  originales,  t.  47, 
dossier  Amboise,  n"  1046,  pièce  71  ;  Tuetey,  Les  Écorchews,  1, 124;  Quicherat, 
Rod.  de  Villandmndo,  p.  172-173;  J.  Stevenson,  11,2*  partie,  p.  439  ;  Portef. 
Font.,  117-118,  aux  dates  des  6,  13,  20  octobre  1439;  K  65,  n»'  5-10, 11). 


CHAPITRE  IV 

LA    PRAGUERIE.  LA   JOURNÉE   DE   TARTAS.  LA  TRÊVE  DE  TOURS. 
l'expédition   de   LORRAINE    (1440-1445) 


La  Praguerie.  —  Energie  du  connétable.  —  Il  rend  de  grands  services  au 
roi.  —  Il  conclut  un  arrangement  avantageux  avec  Jean  V.  —  Délivrance 
de  Charles  d'Orléans.  —  Les  Anglais  prennent  Harfleur,  les  Français  Con- 
ches  et  Louviers. —  Le  roi  et  le  connétable  vont  châtier  les  Echorcheurs 
en  Champagne  et  en  Lorraine.  —  Intrigues  de  Charles  d'Orléans.  —  Ri- 
cbemont  prend  Greil  et  assiège  Pontoise.  —  Prise  de  Pontoise.  —  Char- 
les VII  à  Paris.  —  Richemont  le  suit  sur  la  Loire,  puis  va  en  Bretagne. 

—  Jean  V  abandonne  la  Praguerie.  —  Mort  de  la  duchesse  de  Guyenne. 

—  Soumission  du  duc  d'Orléans.  —  Le  connétable  fait,  avec  le  roi,  une 
expédition  en  Guyenne.  —  La  journée  de  Tartas.  —  Prise  de  Saint- 
Sever  et  de  Dax.  —  Richemont  épouse  Jeanne  d'Albret.  —  Mort  de 
Jean  V.  —  Richemont  se  rend  en  Bretagne.  —  Mort  de  Yolande  d'Ara- 
gon. —  Mesures  répressives  contre  les  routiers.  —  Les  Anglais  échouent 
devant  Dieppe.  —  Expédition  infructueuse  de  Somerset.  —  L'Angleterre 
désire  la  paix.  —  Conférences  de  Tours.  —  Le  connétable  y  amène  son 
neveu  le  duc  de  Bretagne.  —  Trêve  de  Tours.  —  Expéditions  de  Lor- 
raine et  d'Alsace.  —  Richemont  accompagne  le  roi.  —  Il  perd  sa  seconde 
femme  et  épouse  Catherine  de  Luxembourg.  —  Différend  avec  Pierre  de 
Brézé. 


Le  principal  instigateur  de  cette  insurrection  féodale  et  mili- 
taire qu'on  appelle  la  Praguerie  fut  le  duc  de  Bourbon.  Ce 
prince,  qui  avait  rendu  des  services  avant  le  traité  d'Arras,  ne 
pouvait  se  résigner  au  rôle  effacé  qu'il  avait  eu  depuis  cette 
époque.  Assez  ambitieux  pour  convoiter  le  pouvoir,  sans  pos- 
séder les  talents  qui  l'en  eussent  rendu  digne,  il  s'irritait  de  voir 
au  premier  rang  Gh.  d'Anjou  et  le  connétable.  Dédaignant  d'oc- 
cuper à  côté  d'eux  la  place  qu'on  lui  eût  accordée  volontiers,  il 
n'aspirait  qu'à  s'élever  au-dessus  de  tous.  Son  esprit  chagrin 
et  jaloux  formait  les  plus  dangereux  desseins.  Il  voulait  mettre 
le  roi  en  tutelle,  donner  la  régence  au  dauphin  Louis,  qui  avait 
alors  seize  ans  et  demi,  et  s'emparer  ainsi  du  gouvernement. 


LE   DUC   DE   BOURBON.    LA   PRAGUERIE    (1440,    FÉVRIER)  303 

Son  programme,  c'était  la  paix,  la  paix  que  le  peuple  réclamait 
et  qui  eût  permis  de  diminuer  les  impôts.  Sous  ce  prétexte,  il 
s'entendait  avec  les  ducs  de  Bourgogne,  de  Bretagne  ^  et  d'Or- 
léans ,  qui  s'étaient  déjà  portés  comme  médiateurs  entre  la 
France  et  l'Angleterre  ;  mais  il  ne  se  bornait  pas  à  une  interven- 
tion désintéressée,  et,  comme  s'il  eût  été  impossible  de  travailler 
au  bien  de  l'État  sans  l'ébranler  par  une  révolution^  il  ne  recu- 
lait pas  devant  la  guerre  civile. 

Déjà  les  intrigues  qu'il  formait,  depuis  1436,  avaient  échoué  *. 
A  l'époque  des  États  d'Orléans,  il  avait  poussé  le  Dauphin  à  la 
révolte.  Quand  les  routiers  étaient  revenus  d'Avranches,  il  avait 
voulu  se  servir  d'eux  pour  prendre  le  château  d'Angers,  où  était 
le  roi,  et  «  tuer  les  plus  prochains  et  principaux  serviteurs  qui 
estoient  entour  luy  »  ^.  Jamais  il  n'avait  trouvé  une  occasion 
aussi  propice  qu'en  ce  moment.  Nobles  et  gens  d'armes,  mécon- 
tents des  réformes  militaires,  étaient  disposés  à  soutenir  ceux 
qui  les  voulaient  empêcher.  Le  duc  d'Alençon,  le  comte  de  Ven- 
dôme, G.  de  La  Trémoille,  le  maréchal  de  La  Fayette,  le  sire  de 
Chaumont,  le  bâtard  d'Orléans  *  lui-même  faisaient  cause  com- 
mune avec  le  duc  de  Bourbon.  Ils  occupaient  des  places  fortes 
dans  le  Poitou,  la  Touraine,  le  Berry,  l'Ile-de-France  ^  Les  rou- 
tiers que  le  roi  n'avait  pas  voulu  garder  à  son  service  leur  four- 
nissaient une  armée  toute  prête,  et  ceux  mêmes  qui,  en  vertu 
d'une  commission  régulière,  tenaient  garnison  contre  les  en- 
nemis*, avaient,  pour  la  plupart,  trahi  leurs  serments. 

La  révolte  éclata  dès  le  mois  de  février  1440.  Pendant  que 
le  duc  d'Alençon  allait  se  concerter  avec  le  Dauphin  et  Dunois 

1.  Preuves.de  l'hist.  de  Bretagne,!!,  col.  1325.  P  13582,  cote  595.  Le  duc  de 
Bourbon,  par  lettres  du  12  janvier,  le  duc  de  Bourgogne,  par  lettres  du 
18  janvier,  font  alliance  avec  le  duc  de  Bretagne  (Turnus  Brutus,  f<"  70  et 
70  v).  En  janvier  aussi,  J.  de  Blanchefort  et  L.  de  Valperga  s'engagent  en- 
vers le  duc  de  Bretagne  {ibid.,  î<"  70  v»  et  71,  et  Fr.  22332,  f<"  221-222).  Voir 
les  plaintes  et  réclamations  du  duc  de  Bourbon  dans  le  t.  III  de  l'édition 
de  M.  d'Escouchy,  par  M.  de  Beaucourt,  82-83.  Plaintes  des  autres  chefs 
de  la  Praguerie,  ibid.,  p.  78-85. 

2.  En  1436, 1437,  1439  (Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  II,  p.  376, 379-381  ;  Doat, 
IX,  227).  Voir  ci-dessus,  p.  269,  note  7. 

3.  M.  d'Escouchy,  III,  p.  8. 

4.  On  est  étonné  de  trouver  ici  le  maréchal  de  La  Fayette,  qui,  d'après 
Vallet  de  V.  {Charles  VII,  t.  II,  402),  était  l'un  des  principaux  auteurs  de  la 
réforme  militaire.  Quant  au  bâtard  d'Orléans,  le  duc  de  Bourbon  lui  avait 
fait  croire  que  le  roi  ne  voulait  point  la  délivrance  du  duc  d'Orléans 
(voir  le  t.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  7). 

5.  Notamment  Corbeil  et  le  bois  de  Vincennes  {Journal  de  J.  Maupoint, 
p.  26). 

6.  Antoine  et  Jacques  de  Ghabannes,  le  bâtard  de  Bourbon,  les  deux 
Blanchefort,  Jean  d'Apchier,  Valperga. 


304  LA  PRAGUERIE   (1440,   FÉVRIER) 

à  Niort  *,  le  duc  de  Bourbon,  le  comte  de  Vendôme,  G.  de 
La  Trémoille  et  plusieurs  capitaines  des  compagnies  du  roi  se 
réunissaient  à  Blois,  ville  qui  appartenait  au  duc  d'Orléans. 
Charles  VII  se  rendait  d'Angers  à  Bourges,  où  il  avait  convoqué 
les  États  généraux  pour  le  15  février*,  quand  il  apprit,  à  Tours, 
ce  qui  se  passait.  Il  n'osa  pas  aller  plus  loin  qu'Amboise,  crai- 
gnant de  tomber  entre  les  mains  des  rebelles.  Il  envoya  Poton 
de  Saintrailles  et  Gaucourt  demander  au  duc  de  Bourbon  ce 
qu'il  voulait  et  lui  remontrer  le  grand  mal  qu'il  allait  faire  au 
roi  et  au  royaume.  Le  duc  leur  répondit  «  oultrageuses  et  des- 
honnestes  paroles  ». 

Le  connétable,  qui  venait  de  quitter  Charles  VII  pour  re- 
tourner à  Paris,  avait  dû  passer  par  Blois  ',  et  y  avait  reçu  un 
mauvais  accueil.  Les  rebelles  (et  parmi  eux  se  trouvait  G.  de  La 
Trémoille)  l'avaient  accablé  des  invectives  les  plus  violentes. 
Dunois  s'était  montré  encore  plus  agressif  que  les  autres,  comme 
s'il  eût  voulu  le  pousser  à  bout,  pour  avoir  l'occasion  de  mettre 
la  main  sur  lui.  Richemont  avait  su  se  contenir  *  ;  mais  il  se  fût 
difficilement  tiré  de  ce  mauvais  pas,  si  Antoine  de  Ghabannes,  qui 
fut  toujours  prudent  et  avisé,  n'avait  fait  observer  que,  à  retenir 
le  connétable,  on  risquait  de  livrer  aux  Anglais  l'Ile-de-France, 
dont  il  avait  le  gouvernement.  Ils  le  laissèrent  partir,  non  sans 
regret.  Pour  eux,  c'était  une  faute,  dont  ils  sentirent  bientôt  les 
conséquences. 

Richemont  n'avait  pas  dépassé  Beaugency,  quand  Gaucourt  et 
Saintrailles  vinrent  lui  dire  que  le  roi  le  priait  d'accourir  au 
plus  vite  ;  que  le  duc  d'Alençon  avait  chassé  le  comte  de  La 
Marche  ^,  conseiller  du  Dauphin  ;  que  les  amis  de  La  Trémoille 


1.  A.  Thomas,  Etals  provinciaux,  I,  321-322. 

2.  Fr.  26066,  n<>''3932et3943.  Ces  Etats  attendirent  près  de  six  mois  le  roi, 
sans  qu'il  pût  venir,  ni  personne  de  sa  part  (Fr.  6960,  f»  14;  A'oir  aussi  Y* 
fo»  43,  64-65). 

3.  D'après  Legrand,  t.  I,  17  (Fr.  6960),  Richemont  aurait  été  envoyé,  avec 
Gaucourt,  vers  les  rebelles,  pour  ramener  le  Dauphin. 

4.  Lors  de  la  déroute  d'Avranches,  Ant.  de  Ghabannes  ne  l'avait  pas 
abandonné  (voir  ci-dessus,  p.  300).  11  n'est  pas  impossible  que  Richemont 
ait  fait  aux  rebelles  quelques  promesses,  pour  leur  échapper.  Gruel  dit 
qu'il  dissimula,  et  Legrand,  dans  son  histoire  manuscrite  de  Louis  XI,  pré- 
tend que  Richemont  se  serait  joint  à  eux,  si  La  Trémoille  n'avait  pas  été 
de  leur  parti.  II  ne  donne  d'ailleurs  aucune  preuve  de  cette  assertion  (voir 
Fr.  6990,  f»  17;  voir  aussi  Fr.  10449,  f»  269).  Cette  supposition  ne  manque- 
rait pas  de  vraisemblance,  si  la  Praguerie  avait  commencé  quelques  mois 
plus  tôt,  c'est-à-dire  à  l'époque  où  Richemont  voulait  abandonner  son 
commandement.  Quant  à  La  Trémoille,  il  s'était  allié  intimement  avec  le 
Dauphin  (Redet,  Catal.  de  D.  Fonteneau,  p.  337). 

5.  Bernard  d'Armagnac,  comte  de  Pardiac,  qui  s'appelait  comte  de  La 


ÉNERGIE   DU  CONNÉTABLE    (1440)  305 

s'insurgeaient  dans  le  Poitou  ;  que  le  sire  de  Ghaumont  refusait 
à  son  souverain  l'entrée  du  château  de  Loches.  Jamais  le  con- 
nétable n'avait  eu  l'occasion  de  jouer  un  rôle  aussi  décisif.  Il 
était  maintenant  appelé  à  défendre  le  roi  contre  La  Trémoille, 
contre  son  propre  neveu,  le  duc  d'Alençon,  contre  son  beau-frère, 
le  duc  de  Bourbon.  S'il  eût  manqué  à  Charles  VII  dans  cette  crise 
périlleuse,  on  ne  sait  ce  qui  serait  advenu  du  roi  et  de  la  France. 
D'ailleurs,  Richemont  défendait  ici  ses  propres  intérêts,  ses  idées, 
son  œuvre.  La  ligue  en  voulait  aux  conseillers  du  roi,  plus  en- 
core qu'au  roi  lui-même.  Elle  visait  à  le  leur  prendre,  pour 
gouverner  en  son  nom,  comme  elle  leur  avait  déjà  pris  le  Dau- 
phin. C'est  un  spectacle  vraiment  curieux  que  de  voir  un  des 
plus  grands  seigneurs  de  l'époque,  un  futur  duc  de  Bretagne, 
défendant  le  pouvoir  royal  contre  la  féodalité  *. 

On  peut  dire  tout  de  suite  que  le  connétable  fut  à  la  hauteur  de 
cette  tâche  et  que  jamais  il  ne  montra  plus  de  décision  et  d'éner- 
gie. Equiper  un  bateau,  le  charger  de  ses  gens  les  plus  dévoués, 
passer  résolument  sous  le  pont  de  Blois,  pendant  la  nuit,  descendre 
la  Loire  jusqu'à  Amboise,  tout  cela  fut  accompli  avec  autant  de 
promptitude  que  de  bonheur.  Quand  on  annonça  son  arrivée  au 
roi,  que  l'inquiétude  tenait  éveillé,  il  lui  «  feit  grand  chère  et 
dist,  puisqu'il  avoit  le  connestable,  que  plus  ne  craignoit  rien  *.  » 

De  son  côté,  le  roi  avait  agi  avec  vigueur.  Il  avait  fait  saisir  le 
petit  Blanchefort  et  dresser  un  échafaud  sur  lequel  on  allait  lui 
couper  la  tête,  quand  Richemont  obtint  sa  grâce,  en  se  portant 
garant  de  sa  fidélité  pour  l'avenir.  Cet  acte  de  clémence,  qui, 
venant  du  connétable,  ne  pouvait  être  considéré  comme  une 
marque  de  faiblesse,  était  habile.  D'ailleurs  la  répression  des 
rebelles  ne  se  fit  pas  attendre.  Des  lettres  furent  envoyées  par- 
tout aux  bonnes  villes,  pour  défendre  de  recevoir  le  Dauphin  et 
ses  complices  ^.  «  Le  connestable,  incontinent  qu'il  fut  arrivé, 


Marche  depuis  la  mort  de  son  beau-père,  Jacques  II  de  Bourbon,  comte  de 
La  Marche  {+  1438)  [Anselme,!,  320;  III,  427].  G.  Chastellain,  qui  a  connu 
Bernard  d'Armagnac,  a  dit  de  lui  qu'il  «  donnoit  exemple  d'un  excellent 
singulier  mirouer  de  toute  bonne  vie  »  (G.  de  Chastellain,  édit.  Kervyn 
de  Lettenhove,  t.  I,  notice  XV). 

1.  On  n'a  pas  fait  ressortir  assez  ce  côté  de  la  Praguerie,  c'est-à-dire  la 
lutte  entre  les  conseillers  de  Charles  VII  et  les  princes  qui  voulaient  leur 
enlever  le  pouvoir,  non  plus  que  l'importance  de  cette  lutte,  au  point  de 
vue  de  la  politique  extérieure,  les  uns  voulant  la  guerre,  les  autres  la  paix 
avec  l'Angleterre.  Le  duc  d'Orléans  s'était  engagé  vis-à-vis  de  Henri  VI  à 
faire  la  paix,  et  pour  cela  il  fallait  qu'il  eût  le  pouvoir. 

2.  Gruel,  215. 

3.  Ces  lettres  furent  envoyées  à  Compiègne,  et  probablement  dans  les 
autres  villes,  dès  le  commencement  de  mars  (D.  Grenier,  t.  XX  Ois,  liasse  9, 

Richemont.  20 


306  SERVICES   RENDUS   AU   ROI  PAR   RICHEMOINT   (4440) 

dist  au  roy  qu'il  prinst  les  champs,  et  qu'il  luy  souvinst  du 
roy  Richard,  et  qu'il  ne  s'enfermast  point  en  ville  ne  en 
place  ^  »  Bien  secondé  par  ses  Bretons,  par  le  maréchal  de 
Lohéac,  par  l'amiral  de  Goëtivy,  par  Pierre  de  Brézé,  qui 
trouva  là  une  occasion  de  faire  une  brillante  fortune,  Riche- 
mont  marcha  aussitôt  sur  Loches,  où  était  le  duc  de  Bourbon, 
fit  attaquer,  dans  les  faubourgs  de  cette  ville,  les  routiers, 
commandés  par  Antoine  de  Chabannes,  le  grand  Blanchefort, 
Jean  d'Apchier  2  et  les  mit  en  déroute.  Le  roi  arriva  le  lende- 
main et  voulut  assiéger  le  duc  de  Bourbon  dans  le  château  de 
Loches;  mais  ce  prince  s'enfuit,  de  grand  matin,  pour  aller  en 
Auvergne  continuer  la  guerre. 

Cependant  le  duc  d'Alençon,  avec  Jean  de  La  Roche,  avait  pris 
Melle  et  attaqué  Saint-Maixent  ^.  Le  roi,  sans  perdre  un  jour, 
vint  assiéger  Melle,  avec  le  connétabe  et  le  comte  de  La  Marche, 
puis  il  s'avança  jusqu'à  Niort,  pour  reprendre  son  fils  au  duc 
d'Alençon  *.  Celui-ci ,  déconcerté  par  une  attaque  aussi  sou- 
daine, feignit  de  vouloir  négocier,  par  l'entremise  du  comte  de 
La  Marche  et  du  connétable,  ses  oncles  °  ;  mais  il  ne  cherchait 
qu'à  gagner  du  temps,  pour  attendre  le  duc  de  Bourbon.  Quand 
il  sut  que  le  duc  avait  été  réduit  à  s'enfuir,  il  n'eut  pas  honte  de 
demander  secours  au  comte  de  Huntingdon^  qui  commandait 
les  Anglais  en  Guyenne  ^. 

Le  roi  était  revenu  à  Poitiers,  dans  l'intention  de  se  rendre  à 
Bourges,  où  l'attendaient  les  États,  quand  il  fut  informé  que  le 
duc  d'Alençon  et  Jean  de  La  Roche  avaient  pris  le  château  et 
la  ville  de  Saint-Maixent  ;  que  les  habitants  défendaient  encore 
une  des  portes  et  l'abbaye  ;  mais  qu'ils  allaient  succomber,  s'ils 
n'étaient    promptement   secourus.    Aussitôt  '  le   roi    monte  à 


fo  19),  à  Reims,  à  Narbonne  dès  le  24  février  (Fr.  1483  [nouvelles  acquisi- 
tions], à  l'année  1440,  n"»  18,  22,  29). 

1.  Gruel,  213.  M.  d'Escouchy,  III,  p.  11. 

2.  Il  y  avait  Jean  et  Guy  de  Blanchefort,  autrement  dits  le  grand  et  le 
petit  Blanchefort,  Jean  el  François  d'Apchier,  tous  routiers  (JJ  177, 
f„.  li^  vo^  160;  JJ  178,  f»  2\  ;  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  l,  161,  163). 

3.  Arrondissement  de  Niort. 

4.  Le  duc  d'Alençon  avait  acheté  la  ville  et  la  châtellenie  de  Niort  à 
Charles  VII,  le  28  août  1423  (Xi^  8604,  fo»  67-68;  K  168,  n»  22). 

5.  Le  duc  d'Alençon  avait  épousé  Isabelle  d'Armagnac,  nièce  du  comte  de 
La  Marche. 

6.  Le  mémoire  Doat  ajoute  que  le  comte  de  Huntingdon  n'envoya  pas 
de  secours,  et  pourtant  Monstrelet  et  Gruel  disent  qu'il  y  avait  des  Anglais 
parmi  les  troupes  des  rebelles.  —  Le  duc  de  Bretagne  était  toujours  en 
relations  avec  Henri  VI  (Bréquigny,  82,  f«  107). 

7.  Le  jour  de  la  Quasimodo,  d'après  le  mémoire  Doat,  c'est-à-dire  le 


DÉFAITE  DES  REBELLES   (1440,   AVRIL-JUILLET)  307 

cheval,  avec  le  connétable,  l'amiral,  Pierre  de  Brézé,  Raoul  de 
Gaucourt.  Il  arrive,  le  soir  même,  à  Saint-Maixent,  et  entre  dans 
la  ville,  pendant  que  les  rebelles,  effrayés,  se  réfugient  dans  le 
château.  Après  un  siège  de  huit  ou  dix  jours,  ils  sont  réduits  à 
so  rendre.  Les  routiers  de  Jean  de  La  Roche  sont  décapités  ;  mais 
les  gens  du  duc  d'Alençon,  qui  avaient  toujours  bien  servi  le  roi 
auparavant,  sont  épargnés,  grâce  à  l'intervention  du  connétable  *. 

Pendant  ce  siège,  le  duc  d'Alençon  s'était  enfui,  avec  le  Dau- 
phin. Ils  étaient  allés  rejoindre  le  duc  de  Bourbon  en  Auvergne. 
Le  roi  se  met  à  leur  poursuite,  avec  le  connétable,  Ch.  d'Anjou, 
le  comte  de  La  Marche,  Saintrailles,  Gaucourt,  Brézé,  Robert 
de  Floques,  sans  dégarnir  le  Poitou,  la  Touraine,  le  Berry, 
l'Ile-de-France,  où  ses  troupes  combattent  les  autres  rebelles. 
Ceux-ci  pouvaient  déjà  comprendre  que  leur  cause  était  fort 
compromise.  Le  peuple,  sur  lequel  ils  avaient  compté,  se  pro- 
nonçait pour  le  roi;  le  duc  de  Bourgogne  ne  voulait  pas  leur 
fournir  de  secours  matériels  ;  Dunois  lui-même  venait  faire  sa 
soumission,  en  s'excusant  d'avoir  voulu  arrêter  le  connétable 
à  Blois.  Bien  accueilli  dans  la  plupart  des  villes,  Charles  VII 
prend  celles  qui  veulent  résister,  Chambon  *,  où  le  connétable 
sauve  la  vie  aux  habitants  réfugiés  dans  leur  église  ^,  Char- 
roux  *,  Ebreuil  ^,  Aigueperse  ',  occupe  toutes  les  places  de  la 
Limagne,  excepté  Riom,  entre  à  Montferrand,  à  Glermont,  qui 
ont  refusé  d'ouvrir  leurs  portes  au  Dauphin,  et,  tout  en  accep- 
tant la  médiation  du  duc  de  Bourgone  et  du  comte  d'Eu,  il  réduit 
les  rebelles  à  l'impuissance,  par  la  soumission  du  Bourbonnais 
et  du  Forez  (avril-juillet). 

Le  17  juillet,  le  roi  écrivait  aux  bonnes  villes  pour  les  informer 
qu'il  avait  reçu  en  grâce,  à  Gusset  '',  le  iDauphin  et  le  duc  de  Bour- 

3  avril.  L'abbé  de  Saint-Maixent  «  fut  cause  de  mettre  la  ville  en  la  main 
du  roy  »  (X»»  4799,  f»  142  v"). 

1.  Fr.  20584,  f  40,  n"  60,  61.  X»»  4798,  f»  246  v».  X^»  20,  f°«  32  v,  34.  JJ 
177,  f°  124  v".  Le  roi  avait  donné  Saint-Maixent  à  la  dame  de  La  Roche- 
Guyon,  qui  avait  mieux  aimé  perdre  ses  biens  que  de  subir  la  domination 
anglaise.  Il  lui  reprit  cette  ville  en  1443  et  lui  donna  Corbeil  en  compen- 
sation, puis  il  donna  Saint-Maixent,  avec  Melle,  Civray,  Gien,  etc.,  à  Ch. 
d'Anjou,  comte  de  Mortain  et  du  Maine  (X«a  4799,  P'  236  v»,  273;  X^»  1482, 
f»  249).  Avantages  accordés  à  Saint-Maix£nt,  en  1440  et  1441  (Redet,  Catal. 
de  D.  Fonteneau,  p.  337). 

2.  Arrondissement  de  Boussac. 

3.  C'est  Berry  qui  fait  connaître  ce  détail  (p.  409).  Le  connétable  exigea 
d'eux  toutefois  qu'ils  payeraient  600  écus  à  Brézé  et  à  Rob.  de  Floques. 

4.  Arrondissement  de  Gannat. 

5.  Arrondissement  de  Gannat  (Allier). 

6.  Arrondissement  de  Riom  (Puy-de-Dôme). 

7.  Arrondiasement  de  Lapalisse  (Allier). 


308  RÉPRESSIO.N    DE   LA   PRAGLERIE    (1440,    JUILLET) 

bon,  venus  vers  «  lui  en  toute  humilité  et  obéissance  *  ».  En  leur 
pardonnant,  Charles  VII  exigea  d'eux,  outre  le  renvoi  de  leurs 
troupes,  l'engagement  d'observer  l'ordonnance  relative  aux 
gens  de  guerre,  «  car  toute  la  guerre  du  royaume  appartient  au 
roy  et  à  ses  officiers  et  non  à  autres,  et  n'est  nul  si  grand  audit 
royaume  qui  puisse  ou  doive  mouvoir  guerre,  ne  tenir  gens 
d'armes  en  icelluy,  sans  l'auctorité,  commission  et  mandement  du 
roy;  et  qui  fait  le  contraire  doit  perdre  et  confisquer  corps  et 
biens  envers  luy,  selon  les  droits  ^  »  Quelques  jours  après  (27  juil- 
let), Charles  VII  déclarait  confisqués  les  biens  de  feu  Jacques  de 
Pailly,  dit  Forte-Epice,  un  de  ces  dangereux  pillards  qui  avaient 
impunément  bravé  le  connétable.  D'autres  routiers,  qui  conti- 
nuaient leurs  ravages-dans  le  Poitou,  furent  punis  par  la  confisca- 
tion de  leurs  biens  et  bannis  du  royaume  ^. 

Cette  énergique  répression  de  la  Praguerie  était  un  triomphe 
pour  Richemont  autant  que  pour  le  roi.  Si  l'épreuve  avait  été  pé- 
rilleuse, il  en  sortait  plus  fort,  plus  décidé  à  poursuivre  ses  ré- 
formes, armé  d'une  autorité  plus  grande  pour  les  réaliser.  Avant 
de  quitter  Charles  VII,  il  fut  chargé  tout  spécialement  de  faire 
emprisonner  et  juger  ceux  qui  auraient  enfreint  l'ordonnance  du 
2  novembre  1439,  corroborée  par  la  convention  de  Gusset  *. 

Laissant  Charles  VII  victorieux  en  Auvergne,  Richemont  re- 
vint à  Paris,  prendre  possession  des  places  que  le  duc  de 
Bourbon  devait  rendre  au  roi  ^  Vincennes,  Corbeil,  Brie-Gomte- 

1.  Lettres  d'abolition  pour  le  duc  de  Bourbon  et  pour  ses  complices,  le 
15  juillet  (P  13722,  cote  2099).  La  paix  fut  publiée  à  Paris  le  jeudi  28  juillet. 
Voir,  dans  Y*  f»  43,  les  lettres  adressées  au  prévôt  de  Paris.  Elles  sont 
reproduites  dans  l'édition  du  Bourgeois  de  Paris  de  M.  Tuetey,  p.  3S3, 
note  1.  Par  lettres  données  le  2  septembre,  à  Bourges,  le  roi  interdit  toute 
poursuite  à  l'occasion  de  la  Praguerie  (X^*  8605,  f"  74  v»,  75J. 

2.  M.  d'Escouchy,  111  {Preuves),  p.  18. 

3.  Y*  fo'  43  \o,  46.  X2a  23,  ^  339,  et  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheuvs,  t.  I,  p. 
127-129.  Jacques  de  Chabannes  perdit  sa  charge  de  sénéchal  de  Toulouse, 
qu'il  avait  obtenue  peu  auparavant  (JJ  178,  fo  125  v»  ;  X'»  4798,  f»  122). 

4.  X2a  22,  au  lundi  19  octobre  1440.  Voir  aussi  Append.  LXII.  —  Sur  la  Pra- 
guerie, voir  le  mémoire  publié  dans  le  t.  III  de  l'édition  de  M. .  d'Escou- 
chy par  M.  de  Beaucourt,  p.  1-29;  Portef.  Font.,  117-118,  aux  dates  du 
2  mai  et  du  5  juillet;  X^»  8603,  fo»  70  vo,  71  ;  Fr.  25711,  n"  iZ^  ;  Pièces  orig., 
t.  207,  dossier  Barton,  pièce  n»  28;  Fr.  20384,  n»'  60,  61;  JJ  177,  n»  182; 
Lat.  6020,  f"  67  ;  Legrand,  t.  I  (Fr.  6960),  f»  15  et  suiv.  ;  t.  VI  (Fr.  6965), 
fo»  69-71,  89,  102-103,  106-114,  Parmi  les  chroniqueurs,  outre  Gruel,  voir 
surtout  Berry,  qui  est  le  plus  complet,  p.  407-411;  Monstrelet,  V,  410-416: 
J.  Chartier,  I,  233-259;  Martial  d'Auvergne,  I,  170-179;  Chron.  Martinienne, 
f"  ccLxxxv  V,  ccLXXXvi;  H.-A.  Briquet,  Hist.  de  Niort,  Niort,  1832,  2  vol.  in-8, 
t.  I,  p.  109-110;  i/w^  de  Bourg.,  IV,  p.  243-44,  Duclos,  Hist.  de  Louis  XI,  La. 
Haye,  1745,  3  vol.  in-12,  t.  I,  p.  17  et  suiv.;  t.  III,  15-19. 

5.  Ce  ne  fut  pas  sans  difficulté  que  ces  places  furent  rendues  (voy.  Ap- 
pend. LXXII).  Il  semble  même  que  les  gens  du  duc  de  Bourbon  gardèrent 


ARRANGEMEiNT  ENTRE  JEAN  V  ET  RICHEMONT  (1440,    24  AOUT)    309 

Robert  *,  puis  il  alla  en  Bretagne.  Le  duc  son  frère  s'était  com- 
promis dans  la  Praguerie  *.  Malgré  l'amnistie  généreusement 
accordée  par  le  roi,  il  n'était  pas  rassuré  sur  les  suites  de  cette 
imprudence.  Pour  se  prémunir  contre  tout  danger,  il  obtint  de 
Richement  une  promesse  d'assistance  éventuelle,  dans  le  cas  où 
la  Bretagne  serait  attaquée  par  les  troupes  du  roi,  c'est-à-dire 
par  les  routiers,  ou  par  d'autres.  Le  connétable  s'engageait  à 
empêcher  toute  invasion  en  Bretagne  et  à  venir,  au  besoin,  s'y 
opposer  lui-même  (22  août)  ^. 

Si  le  document  qui  révèle  ces  détails  portait  une  date  anté- 
rieure à  la  répression  de  la  Praguerie,  il  serait  de  nature  à  faire 
soupçonner  la  fidélité  du  connétable,  mais  il  prouve  plutôt  que 
celui-ci  était  assez  habile  pour  concilier  avec  ses  devoirs  en- 
vers le  roi  le  souci  de  ses  propres  intérêts.  Richemont  savait 
bien  que  Charles  VII  n'avait  nulle  envie  de  déclarer  la  guerre 
à  Jean  V;  que,  s'il  avait  à  intervenir,  ce  serait  tout  au  plus 
pour  empêcher  les  garnisons  françaises  *  voisines  de  la  Bretagne 
d'aller  faire  quelques  courses  dans  ce  pays  ;  mais  il  n'était  point 
fâché  que  son  frère  eût  des  craintes  dont  il  pouvait  tirer  parti. 
Il  obtint  de  lui  une  convention  avantageuse,  qui  contribue  beau- 
coup à  expliquer  l'engagement  du  22  août.  Par  un  acte  du 
24  août,  conclu  à  Vannes,  le  duc  lui  donna  les  terres  de  Bourgneuf- 
en-RetzJ  et  de  Lannion,  pour  parfaire  un  apanage  de  8  000  livres  de 
rentes,  promis  depuis  1422.  Jusqu'ici,  Richemont  n'avait  encore 
reçu  que  des  terres  dont  les  revenus  ne  s'élevaient  qu'à  3  000  li- 
vres. Il  fut  convenu  que  le  duc  lui  donnerait,  en  outre,  comme 
dédommagement,  une  somme  de  G  000  livres  une  fois  payée  *. 

Corbeil.  Pendant  l'absence  du  connétable,  le  sire  de  Rostrenen,  son  lieutenant 
dans  l'Ile-de-France,  était  mort  (Gruel,  216).  II  fut  probablement  remplacé 
par  Olivier  de  Coëtivy,  frère  de  l'amiral.  Gruel  dit  qu'Olivier  de  Coetivy  était 
lieutenant  du  connétable  en  1441,  lors  du  siège  de  Pontoise.  Les  Anglais 
redoutaient  déjà,  au  mois  d'août  1440,  une  entreprise  sur  Pontoise  (K  65, 
n»  34  [ordre  d'envoyer  des  renforts  à  J.  Staulawe,  capitaine  de  Pontoise, 
pour  résister  aux  ennemis  qui  veulent  faire  une  entreprise  sur  cette  ville, 
22 août  1440]  ;K  66,  n»  11*  iPorfe/lFon^, 117-118, au  22  août ;Fr. 26068,  n» 4100). 

1.  T.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  27.  Le  Bourg,  de  Paris,  351-333. 

2.  T.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  22. 

3.  Voir  Append.  LXXIV. 

4.  Par  exemple, celles  de  Graon,  de  La  Gravelle,  et  les  troupes  du  maréchal 
de  Lohéac,  le  duc  étant  en  assez  mauvais  rapports  avec  les  Laval,  parce 
qu'il  avait  acheté  au  maréchal  de  Raiz,  leur  parent,  une  partie  de  ses 
biens.  Voy.  ci-dessus,  p.  279.  Peu  après,  le  duc  de  Bretagne  fit  arrêter  Gilles 
de  Raiz,  qui  fut  condamné  à  mort  et  exécuté  le  26  octobre,  à  cause  de  ses 
crimes  monstrueux  (D,  Morice,  p.  S33-o37,  et  Preuves;  Marchegay,  Notices 
et  pièces  historiques,  Angers  et  Niort,  1872,  in-8,  p.  186-188). 

5.  Arrondissement  de  Paimbœuf. 

6.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1132-1136.  Richemont  accepta 


310  DÉLIVRANCE  DE  CHARLES  d'ORLÉANS   (1440,   9  NOV.) 

Il  faut  donc  voir  dans  cette  conduite  de  Richemont  un  simple 
acte  d'obéissance  envers  celui  qui  était  tout  à  la  fois  son  suze- 
rain immédiat  et  le  chef  de  sa  famille,  mais  nullement  l'inten- 
tion de  trahir  le  roi  ;  on  peut  seulement  regretter  qu'il  n'ait  pas 
agi  d'une  manière  plus  désintéressée. 

Il  n'est  pas  vraisemblable  qu'il  ait  espéré,  en  faisant  ces  con- 
cessions, détacher  son  frère  de  l'alliance  anglaise.  Cette  aUiance 
venait  d'être  resserrée  par  un  traité  (11  juillet  1440)  %  dans  lequel 
le  duc  prenait  l'engagement  de  ne  donner  aucun  secours  à  Char- 
les VII  et  d'empêcher  que  les  Bretons  lui  en  donnassent.  Il  est 
vrai  qu'il  était  toujours  question  de  la  paix  entre  la  France  et 
l'Angleterre,  paix  dans  laquelle  le  duc  de  Bretagne  devait  être 
compris  ^  ;  mais  les  négociations,  recommencées  depuis  la  fin  de 
janvier,  n'avaient  abouti  qu'à  la  délivrance  de  Charles  d'Orléans 
(9  novembre  1440)  ^  Les  hostilités  n'en  avaient  pas  moins  con- 

cet  arrangement  par  lettres  du  23  août,  données  à  Vannes  et  dont  l'original 
se  trouve  aux  A)xh.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  I,  E,  3  (Turnus  Brutus,  1, 
fos  80  vo  et  89  vo). 

1.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1329-1331.  K  66,  n»  13. 
Rymer,  V,  l""»  partie,  85-86.  Voir  aussi  les  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  47, 
E,  121,  ou  le  t.  362  des  Archives  du  ministère  des  Affaires  étr.,  f°'  83-85. 
A  la  même  époque,  Jean  V  négociait  avec  le  duc  de  Bourgogne  (juin-dé- 
cembre). Il  conclut  avec  lui  un  traité  de  paix  et  de  commerce  pour  vingt 
ans  (Arch.  du  minist.  des  Affaires  étr.,  t.  362,  f<"  83  v»,  89;  Portef.  Font., 
117-118,  au  19  décembre). 

2.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1328.  Rymer,  V,  1"  partie,  p.  79. 
Bréquigny,  82,  fo»  91,  103-106. 

3.  Issues  ofthe  Exchequer,  p.  439.  Le  duc  d'Orléans  arriva  le  12  novembre 
1440  à  Gravelines  (Rymer,  t.  V,  pars  I,  p.  73-101).  Le  6  août,  Charles  VII 
ratifie  le  traité  de  libération  du  duc  d'Orléans  {Idem.,  p.  89-90).  Les  ducs 
deBretagneetd'Alen(;on,les  comtesde  Pardiacetde  Vendôme,  etc.,  donnent 
caution  pour  le  payement  de  la  rançon  {Id.,  p.  88-89).  Richemont  avait 
aussi  donné  caution.  On  trouve  dans  les  cartons  K  65  (n"  14  et  13),  K  66 
(nos  2-10)  et  K  72  (n"  56)  de  curieux  détails  sur  la  délivrance  du  duc  d'Or- 
léans, sur  les  ventes  de  terres  qu'il  dut  faire  pour  payer  sa  rançon,  sur 
les  cautions  qu'il  dut  fournir  à  Henri  VI.  Il  avait  demandé  à  Richemont 
une  caution  de  20  000  saluts  d'or,  comme  aux  ducs  de  Bretagne,  de  Bour- 
bon et  d'Alençon  (K  63,  n»  15').  Mais  Richemont  ne  voulut  s'engager  que 
pour  6  000  saluts.  C'est  pendant  le  siège  d'Avranches,  le  20  décembre  1439, 
qu'il  donna  cette  caution  (voir  Append.  LXXV).  Il  est  à  remarquer  que  les 
moindres  cautions  accordées  au  duc  d'Orléans  sont  de  4  000  saluts.  Le 
connétable,  qui  était  fort  riche,  montra  donc  peu  de  bonne  volonté  dans 
cette  circonstance.  Le  duc  d'Orléans  ne  lui  rendit  le  titre  de  sa  caution 
que  le  30  avril  1452,  et,  comme  il  réclamait  une  contre-lettre,  que  Riche- 
mont ne  se  souvenait  pas  d'avoir  eue,  celui-ci  lui  délivra,  le  30  avril  1432, 
un  reçu  du  scellé  de  1439  (voir,  à  V Append.  LXXV,  deux  lettres  de  Riche- 
mont au  duc  d'Orléans).  Quant  au  duc  de  Bretagne,  c'est  lui  qui,  avec  le 
duc  de  Bourgogne,  contribua  le  plus,  de  son  argent,  à  la  délivrance  de 
Ch.  d'Orléans,  Sans  parler  d'une  caution  de  20  000  saluts  d'or,  il  avait 
donné  au  duc  d'Orléans  22  000  écus,  et  il  lui  prêta  encore  9  300  écus  un 


LES  ANGLAIS  PRENNENT  HAUFLEUR  (1440,  OCT.)      311 

tinué,  surtout  en  Normandie  *.  Le  comte  de  Somerset  avait 
amené  quelques  troupes  d'Angleterre,  et  le  duc  d'York,  nommé 
une  seconde  fois  lieutenant  général  et  gouverneur  de  la  France 
(2  juillet  1440)  2,  faisait  les  plus  grands  efforts  pour  reprendre 
Harfleur,  qui,  par  sa  situation  à  l'embouchure  de  la  Seine,  gênait 
beaucoup  les  Anglais.  Il  avait  chargé  le  comte  de  Dorset  '  et 
Talbot  d'assiéger  Harfleur,  tandis  que  le  comte  de  Somerset  * 
occupait  fortement  Fécamp  et  Caudebec,  pour  couvrir  le  siège 
(août  et  septembre). 

Richemont,  revenu  à  Paris,  organisa  un  corps  de  troupes,  qu'il 
envoya  au  secours  de  Harfleur  ^  avec  Charles  d'Artois,  comte 
d'Eu,  Dunois,  La  Hire,  Gaucourt  et  Gilles  de  Saint-Simon.  Ils 
allèrent  d'abord  à  Dieppe  et,  de  là,  marchèrent  sur  Montivilliers 
et  Harfleur.  Le  vendredi  14  octobre,  ils  assaillirent  les  Anglais, 
par  eau  et  par  terre,  mais  ils  furent  repoussés  ;  Gaucourt  fut  même 
pris  *,  et  la  ville  dut  capituler  quelques  jours  après  ''.  Ce  fut  une 
grande  perte  pour  la  France.  Cette  perte  fut  du  moins  com- 

peu  plus  tard  {Arch.  de  la  Loîre-Inf.,  cass.  75,  E,  177;  Arch.  du  ministère 
des  Affaires  étrangères,  t.  »62,  f»'  79-82  ;  K  68,  n»  3). 

1.  Notamment  aux  environs  de  Vernon,  Mantes,  Bernay,  Orbec,  Cham- 
brois,  Gacc,  Exmes.  Fauquemberge  assiège  Dangu  (Eure),  au  mois  de 
mars.  Les  Anglais  avaient  ravagé  le  Santerre  (Fr.  26066,  n»»  3931,  3957, 
3977,  3982,  3983;  Fr.  26067,  n°s  4013,  4026,  4028,  4029,  4035-4039,  4078). 
Les  Anglais  avaient  aussi  pris  Folleville  [arrondissement  de  Montdidier] 
(n»  4057;  K  66,  n"  13),  Lihons  [arrondissement  de  Péronne],  brûlé  l'église 
(Fr.  26067,  no*  4028,  4029,  4037,  4038,  4161,  et  Godefroy,  p.  343;.  Sur 
l'armée  de  Somerset,  voir  aussi  K  63,  n<"  1»,  1''  et  suiv.  ;  Glairambault,  186, 
P-  6916,  6919. 

2.  Rymer,  V,  l''*  partie,  83. 

3.  Edmond  Beaufort,  comte  de  Dorset,  de  Mortain  et  d'Hareourt  (J.  Ste- 
venson, t.  Il,  308;  Fr.  23189,  f»  26). 

4.  Jean  Beaufort  (Fr.  26066,  n»  3933).  J.  et  Edm.  Beaufort  étaient  favo- 
risés par  le  cardinal  Beaufort,  et  le  duc  d'York  par  Glocester. 

5.  Il  fallut  encore  lever  sur  les  Parisiens  des  taxes  onéreuses  (Bourg,  de 
Paris,  p.  334  et  335). 

6.  Gaucourt  se  racheta  bientôt,  et  le  roi  lui  donna  plusieurs  fois  de  l'ar- 
gent pour  payer  sa  rançon  {Portef.  FoiU.,  117-118,  à  la  date  du  1"  décem- 
bre 1442;  Fr.  25711,  n<"  136-157;  K  67,  n«  19). 

7.  Sur  la  perte  de  Harfleur,  voir  :  J.  Stevenson,  t.  II,  308-313;  FenrCs 
letters,  t.  I,  p.  6  (Harfleur  «  the  whicb  is  a  great  jewel  to  ail  England  »)  ; 
K  67,  n»  36;  Fr.  23775,  n-^  1444  et  1445,  1481,  1482,  1487;  Pièces  orig., 
1. 1404,  n"  31583  i»  et  i*.  Talbot  fut  nommé  capitaine  de  Harfleur  {Port.  Font., 
117-118,  à  la  date  du  3  novembre)  et  de  Montivilliers.  Fr.  26067,  n"  4076, 
4080,  4091,  4093,  4098,  4102,  4103,  4103,  4109,  4112,  4113,  4122,  4133,  4136, 
4137,  4142,  4143,  4134,  4160,  4164,  4169.  K  63,  n<"  127,  i37  et  1«.  K  66, 
no-  135,  139,  i«3,  146,  151,  154,  156.  Portef.  Font.,  117-118,  au  10  avril  et  au 
10  novembre.  Legrand,  t.  VI  (Fr.  6965),  f»  146.  Berry,  p.  412.  Monstrelet, 
V,  418-424.  J.  Chartier,  I,  239-260.  Gruel,  216.  D'après  lé  Bourg,  de  Paris,  qui 
exagère  toujours,  il  y  avait  20  000  Français  contre  8  000  Anglais  (p.  355). 


312    LES  FRANÇAIS  PRENNENT  CONCHES  ET  LOUVIERS  (1440) 

pensée  par  roccupation  de  Conches  et  de  Louviers  \  positions 
avantageuses,  d'où  l'on  pouvait  inquiéter  Verneuil,  Evreux  et  les 
villes  anglaises  de  la  Seine,  Vernon,  Pont  de  l'Arche,  même 
Rouen.  Les  fortifications  de  Conches  et  de  Louviers  furent  aus- 
sitôt relevées,  et,  quand  les  Anglais  voulurent  reprendre  ces  pla- 
ces, ils  les  trouvèrent  en  état  de  défense.  Vainement  Talbot, 
Th.  de  Scales,  Fauquemberge,  avec  GOO  hommes  d'armes  et 
1  800  archers,  voulurent  les  attaquer.- Richemont  vint,  avec  le  roi, 
à  Chartres  %  où  ils  réunirent  des  forces  assez  considérables  pour 
contenir  les  Anglais,  tandis  que  d'autres  troupes  françaises,  à 
l'ouest,  faisaient  une  diversion  vers  Domfront,  AlençOn  et  Falaise 
(novembre  et  décembre)  ^.  Vers  le  même  temps,  le  19  octo- 
bre 1440,  le  connétable,  qui  était  revenu  à  Paris,  parvint  à 
reprendre  Saint-Germain  en  Laye  *. 

Cependant  l'indiscipline  et  les  ravages  des  gens  de  guerre  ne 
causaient  pas  moins  d'embarras  à  Richemont  que  les  ennemis  *. 
Malgré  sa  sévérité  bien  connue,  il  ne  parvenait  pas  à  se  faire 
obéir;  il  lui  fallait  parlementer,  traiter  avec  les  récalcitrants, 
payer  leur  soumission  douteuse.  C'est  ainsi  que  Roger  de  Pier- 
refrite,  lieutenant  de  Jacques  deChabannes  au  Bois  de  Vincennes, 
refusa  de  quitter  cette  place,  dont  le  duc  de  Bourbon  avait  pro- 
mis la  restitution.  Il  exigea  préalablement  une  certaine  somme 
et  des  lettres  d'abolition  pour  tous  ses  méfaits  antérieurs,  ce  qui 
ne  l'empêcha  pas,  quand  il  voulut  bien  partir,  d'emmener  l'ar- 
tillerie et  tout  ce  qu'il  put  emporter,  brisant  ou  brûlant  tout  le 
reste.  Arrêté  par  ordre  du  connétable,  il  récusa  sa  juridiction,  en 
appela  au  Parlement,  et  on  ne  voit  pas  si  ce  malfaiteur  fut 
enfin  châtié  ^. 

1.  Conches,  arrondissement  d'Evreux.  Robert  de  Floques,  Pierre  et  Jean  de 
Brézé  prirent  Conches;  Saintrailies  occupa  Louviers,  et  on  releva  les  forti- 
fications de  ces  places  (Berry,  p.  412;  Gruel,  216;  K  68,  n»  7).  A  cette  même 
époque,  les  Français  pillent  Pont-l'Evêque  (Fr.  26067,  n«  4157;  Fr.  25775, 
no  1486;  K  66,  no^  162,  i63^  lesj. 

2.  Avec  le  Dauphin,  le  comte  du  Maine,  etc.  (Y*  fos  49-50,  64-65;  X*» 
8605,  f<"  73  vo,  74). 

3.  Fr.  25775,  n"  1452-1473,  1475-1479,  1481,  1489,1490;  Fr.  25776,  n»»  1510, 
1516-1520;  Fr.  26067,  nO"  4170-4185.  Le  comte  de  Somerset  était  capitaine  de 
Falaise,  et  Th.  de  Scales  capitaine  de  Domfront,  le  comte  de  Dorset  capitaine 
d'Alençon.  Voir  aussi  Berry,  p.  412  ;  Fr.  26068,  n"»  4228,  4232.  Le  roi  resta 
encore  à  Chartres  pendant  le  mois  de  décembre.  Il  y  ordonna  la  levée 
d'une  aide  de  200  000  1.  en  Languedoil  pour  l'entretien  des  gens  d'armes 
de  Conches,  Louviers,  etc.  (Fr.  25711,  n»  135,  et  Fr.  20877,  n»  36). 

4.  Gruel,  216.  Il  est  étonnant  que  le  Bourg,  de  Paris  ne  dise  rien  de  ce 
fait,  mais  il  est  mentionné  de  la  manière  la  plus  précise  par  le  Journal  de 
J.  Maupoint,  p.  26,  ce  qui  prouve,  une  fois  de  plus,  l'exactitude  de  Gruel. 

5.  Voir  le  Journal  de  J.  Maupoint,  p.  26,  et  le  Bourg,  de  Paris,  351-352, 

6.  Voir  Append.  LXXII. 


RAVAGES  DES  ÉCORCHEURS  (1440)  313 

Cet  exemple  montre  bien  les  difficultés  qui  entravaient  sans 
cesse  les  efforts  de  Richemont;  il  fait  voir  aussi  qu'il  ne  recou- 
rait pas  toujours  à  cette  justice  sommaire  qu'on  excuserait  pres- 
que en  de  pareils  cas.  Ailleurs,  c'était  la  garnison  de  Corbeil  qui 
arrêtait  les  approvisionnements  amenés  à  Paris  par  l'Yonne  et 
par  le  Loing  *.  L'audace  des  routiers  ne  connaissait  aucun  frein. 
Ces  hommes  habitués  à  la  violence,  à  la  débauche  et  au  crime, 
ne  se  contentaient  pas  de  demander  au  pillage  ce  qui  leur  était 
nécessaire;  ils  prenaient  plaisir  à  commettre  les  attentats  les 
plus  odieux  ^.L'Ile-de-France  et  la  Champagne,  dont  Richemont 
avait  le  gouvernement,  étaient,  aussi  bien  que  les  autres  pays, 
infestés  par  ces  bandes,  et  il  ne  les  pouvait  débarrasser  de  ce 
fléau.  Il  y  avait  beaucoup  à  faire  de  ce  côté.  En  outre,  la  Lor- 
raine était  désolée  par  une  guerre  incessante,  pendant  l'absence 
du  roi  de  Sicile.  Le  comte  de  Vaudemont  attaquait  les  Etats  de 
René  ;  l'évêque  de  Verdun  était  en  lutte  avec  son  chapitre  ;  de  part 
et  d'autre,  on  appelait  des  routiers,  qui  exerçaient  d'effroyables 
ravages.  Charles  VII  et  le  connétable  étaient  mêlés  eux-mêmes 
à  ces  querelles  :  ils  avaient  envoyé  des  troupes  qui  avaient  pris 
part  à  la  guerre.  Le  damoiseau  de  Commercy  ^  profitait  de  ces 
désordres  pour  continuer  ses  brigandages. 

.  Il  était  temps  de  rétablir  le  calme  dans  ces  pays,  et  la  présence 
du  roi  n'y  était  pas  superflue.  Il  fallait  aussi  débarrasser  la  Bour- 
gogne des  routiers,  qui,  malgré  la  défense  de  Charles  VII,  ne  ces- 
saient d'y  pénétrer,  au  grand  mécontentement  de  Philippe  le 
Bon.  D'ailleurs  le  connétable  se  proposait  de  revenir,  avec  le  roi, 
dans  l'Ile-de-France,  pour  achever  l'expulsion  des  Anglais,  quand 
il  aurait  pacifié  la  Champagne  et  la  Lorraine. 

Paris  ne  pouvait  être  tranquille  tant  que  les  ennemis  occu- 
paient des  places  dans  le  voisinage.  C'est  ainsi  que,  au  commen- 
cement de  1441,  ceux  de  Mantes  firent  une  tentative  sur  la  porte 
Saint- Jacques.    Le   connétable   était  alors  à  Paris.   Il  envoya 

1.  X«a  24,  au  21  juin  1448,  et  JJ  178,  f»'  120-121.  C'était,  il  est  vrai,  pen- 
dant la  Praguerie;  mais  il  ne  semble  pas  que  le  duc  de  Bourbon  ait  rendu 
Corbeil,  quoique  le  Bourg,  de  Paris  (p.  352-353)  le  dise.  Il  est  fort  étonnant 
que  J.  Foucault,  capitaine  de  Corbeil  pour  le  duc  de  Bourbon  pendant  la 
Praguerie,  ait  été  ensuite  nommé  capitaine  du  Bois  de  Vincennes  par  lo 
roi.  Voir  Append.  LXXII. 

2.  Gruel,  216.  Le  Bourg,  de  Paris,  351,  352,  355-356.  LL  414,  f»  102.  Sur 
les  ravages  des  escorcheurs  dans  le  Laonnois,  voir  JJ  176,  f"  51. 

3.  En  1440,  il  avait  vendu  le  château  et  la  moitié  de  la  ville  de  Com- 
mercy à  Louis,  fils  de  René  d'Anjou.  11  avait,  depuis  longtemps,  des 
démêlés  avec  le  connétable  (Coll.  de  Lorraine,  t.  293,  n"  21;  Dumont, //wf 
de  Commercy,  I,  234-245).  Voir  aussi  X*»  25,  au  20  décembre  et  au  14  février 
1453  (a.  st.). 


314  RICHEMONT  CHATIE  LES  ÉCORCHEURS  EN  CHAMPAGNE 

son  lieutenant,  Jean  de  Malestroit,  Gilles  de  Saint-Simon,  Geof- 
froy de  Couvran  et  Jean  de  Rosnyvinen,  qui  passèrent  la  Seine 
à  Saint-Cloud  et  battirent  les  Anglais  K 

Après  avoir  reçu,  à  Paris,  le  duc  et  la  duchesse  d'Orléans  ^ 
(16  janvier  1441),Richemont  partit  pour  la  Champagne.  A  la  fin 
de  janvier,  il  était  avec  le  roi  à  Troyes.  Bien  que  la  misère  fût  très 
grande,  il  demanda  1 000  livres  tournois,  que  les  notables  lui  prê- 
tèrent ^.  Le  26  janvier,  Charles  VII  ordonnait  à  ses  officiers  d'em- 
pêcher les  incursions  des  gens  d'armes  sur  les  terres  du  duc  de 
Bourgogne,  qui  se  plaignait  des  infractions  faites  au  traité 
d'Arras  *. 

A  Bar-sur-Aube,  le  bâtard  Alexandre  de  Bourbon,  un  des  plus 
féroces  brigands  de  l'époque,  mandé  par  le  roi,  ne  craignit  pas 
de  se  présenter.  Nul  capitaine  de  routiers  n'était  plus  exécré.  Il 
avait  été  un  des  principaux  chefs  de  la  Praguerie  ^,  avec  son 
frère,  le  duc  de  Bourbon.  Les  plaintes  qui  s'élevaient  contre  lui, 
les  abominables  forfaits  dont  on  l'accusait  ^  excitèrent  dans  l'es- 
prit du  roi  la  plus  vive  indignation.  Il  n'empêcha  pas  le  conné- 
table de  faire  justice.  Saisi  par  le  prévôt  des  maréchaux,  Tristan 
l'Hermite,  le  bâtard  Alexandre  de  Bourbon  fut  aussitôt  jugé, 
condamné  à  mort,  enfermé  dans  un  sac  et  jeté  à  la  rivière.  Cet 
exemple  produisit  beaucoup  plus  d'impression  que  le  châtiment 
de  quelques  obscurs  coupables  ;  on  comprit  qu'avec  Richemont 
les  ordonnances  ne  seraient  pas  toujours  lettre  morte.  Plusieurs 
compagnons  du  bâtard  et  dix  ou  douze  autres  chefs  de  routiers 
furent  décapités  ''.  D'autres,  plus  avisés,  se  gardèrent  bien  de  ve- 
nir, notamment  Antoine  de  Chabannes,  comte  de  Dammartin  % 
qui  avait  été  longtemps  avec  le  bâtard  Alexandre  de  Bourbon. 

Le  roi  et  le  connétable  passèrent  ensuite  dans  le  Barrois,  con- 
tinuant de  châtier  les  Ecorcheurs.  Un  jour,  comme  Richemont 

1.  J.  Chartier,  II,  14-13;  d'Argentré,  798;  Le  Baud,  487;  D.  Félibien,  II, 
831.  Il  est  étonnant  que  le  Bourgeois  de  Paris  ne  parle  pas  de  cette  tenta- 
tive (voir  p.  358-359). 

2.  LL  218,  f"  27;  LL  414,  f«  102. 

3.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  t.  I,  p.  51.  Boutiot,  i/zs<.  de  Troyes,  t.  Il,  p.  8  et  9. 

4.  Boutiot,  Hist.  de  Troyes,  t.  II,  p.  10.  Le  13  février,  le  roi  et  le  conné- 
table sont  à  Langres  (JJ  177,  f°  5). 

5.  D'après  Mcnstrelet  (V,  458)  et  la  Chron.  Martinienne  (f»  cclxxxvi  v»), 
on  crut  que  le  roi  voulait  frapper  en  lui  un  des  principaux  chefs  de  la 
Praguerie. 

6.  Gruel,  p.  216;  le  Bourg,  de  Paris,  p.  356.  Sur  les  ravages  du  bâtard 
de  Bourbon,  voir  Fr.  25711,  n»  137;  JJ  185,  P  215  v. 

7.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  t.  I,  p.  76-77. 

8.  Il  avait  épousé  tout  récemment,  en  1439,  Marguerite  de  Nanteuil,  qui 
lui  avait  apporté  en  dot  le  comté  de  Dammartin  (voir  l'article  Chabankes 
dans  la  Biographie  Didot,  t.  IX,  et  la  Chron.  Martinienne,  f"  cclxxxv). 


ANTOINE  DE  CHABANNES  ET  ROBERT  DE  SARREBRÛCK     315 

se  trouvait  dans  un  village  de  ce  pays  avec  cinquante  lances, 
Antoine  de  Ghabannes,  que  Charles  VII  avait  mandé  encore  une 
fois  auprès  de  lui,  parut  tout  à  coup,  «  avec  deux  cens  chevaux, 
toutes  gens  d'eslite  *.  Et  alors  qu'il  arriva  audit  villaige,  le  con- 
nestable  estoit  en  unes  fenestres,  et,  faignant  de  monstrer  bon  vi- 
saige,  dist  audit  conte  de  Dampmartin  :  «  Capitaine,  Dieu  vous 
garde.  Si  vous  voulez  venir  devers  le  Roy,  je  feray  qu'il  vous 
fera  bonne  chière.  »  Et  le  dit  conte  lui  répondit  :  «  Monseigneur, 
je  vous  remercye.  Je  n'ai  point  envie  de  boyre  de  Teaue,  car  le 
Roy  ne  me  fera  jamais  le  tour  qu'il  a  fait  au  bastardde  Bourbon. 
Si  vous  avez  vouloir  autre  chose  me  dire,  s'il  vous  plaist,  me  le 
direz.  »  —  Icelluy  connestable,  voyant  qu'il  n'avoit  gens  assez 
pour  le  prendre,  luy  dist  :  «  Adieu,  capitaine;  je  vous  prie,  vivez 
sur  le  peuple  le  plus  gracieusement  que  vous  pourrez.  »  Ce  qu'il 
promist  faire.  Et  devez  savoir  que  le  dit  conte  ne  descendit 
oncques  de  dessus  son  cheval,  ne  toute  la  bende  qui  estoit  avec 
luy*.  »  Ce  petit  tableau,  si  vivant,  ne  met-il  pas  en  pleine  lumière 
le  mal  qui  rongeait  alors  la  France,  l'audace  insolente  des  rou- 
tiers, leur  esprit  d'indépendance  et  d'insubordination,  les  obsta- 
cles auxquels  se  heurtait  sans  cesse  le  connétable,  dans  sa  tâche 
de  réformateur  ?  Quelque  temps  auparavant,  ce  même  Chaban- 
nes  répondait  hardiment  au  roi  lui-même,  qui  le  congédiait  en 
ces  termes  :  «  Adieu,  capitaine  des  escorcheurs!  »  —  «  Sire,  je 
n'ay  escorché  que  voz  ennemys,  et  me  semble  que  leurs  peaulx 
vous  feront  plus  de  prouffit  que  à  moy  ^.  »  Et  pourtant  il  s'en 
faut  que,  parmi  les  capitaines  de  routiers,  Antoine  de  Chabannes 
fût  un  des  plus  mauvais. 

Il  fallut  ensuite  s'occuper  du  damoiseau  de  Commercy,  Robert 
de  Sarrebrûck,  ce  grand  seigneur  qui  n'agissait  pas  autrement 
qu'un  capitaine  de  routiers.  A  l'approche  des  troupes  royales,  il 
eut  peur,  sachant  que  le  connétable  était  là.  N'osant  combattre 
le  roi,  il  négocia  et  obtint  des  conditions  assez  avantageuses,  par 
un  traité  qui  fut  conclu  à  Vaucouleurs  *,  le  dernier  jour  de  février 
1441.  On  lui  rendait  les  places  qui  lui  avaient  été  prises;  mais  il 
s'engageait  à  demander  pardon  au  roi,  au  connétable,  et  à  leur 
donner  pleine  satisfaction  ^.  Le  lendemain,  l^"-  mars,  il  fît  sa 
soumission  devant  l'amiral  Prigent  de  Goëtivy,  Robert  de  Beau- 


1.  Chron.  Martinienne,  f"  cclxxxvi  v. 

2.  Chron.  Martinienne,  f"  cclxxxvi  v». 

3.  Chron.  Martinienne,  f"  cclxxxv  v".  Ant.  de  Chabannes  devint  grand 
pauetier,  puis  grand  maître  de  France  (Anselme,  VII,  131;  VIII,  669). 

4.  Arrondissement  de  Commercy. 

5.  Voir  ce  traité  dans  Dumont,  Hist.  de  Commercy,  t.  I,  243-244. 


316  RICHEMOr<T   AVEC    LE   ROI   EN   LORRAINE   (1441) 

dricourt,  bailli  de  Chaumont  *,  et  Jean  Bureau,  trésorier  de 
France  *. 

La  ville  de  Verdun,  qui  avait  eu  quelques  différends  avec  le 
roi  et  avec  le  connétable,  dut  aussi  se  soumettre.  Menacée  d'un 
siège,  elle  conclut  un  arrangement  avec  Charles  VII  et  lui  paya 
10  000  florins  ^ .  Le  roi  et  Richemont  revinrent  ensuite  en 
Champagne,  punissant  les  routiers,  les  chassant  des  places  qu'ils 
occupaient,  essayant  de  rétabir  partout  l'ordre  et  la  sécurité. 
Pour  mettre  fin  à  la  rivalité  entre  René  d'Anjou  et  le  comte  de 
Vaudemont,  Charles  VII  confirma,  le  27  mars,  à  Reims,  par  une 
déclaration  solennelle,  les  droits  de  René  sur  la  Lorraine  et  sur 
leBarrois  ^. 

Jean  II  de  Luxembourg,  comte  de  Ligny,  qui  avait  toujours 
refusé  de  jurer  la  paix  d'Arras,  venait  de  mourir  au  château  de 
Guise  (janvier  1441)  ».  Son  neveu,  Louis  de  Luxembourg,  comte 
de  Saint-Pol,  qui  avait  hérité  de  ses  domaines,  ne  se  montrait 
pas  plus  soumis,  et  même  ses  gens  pillèrent,  près  de  Ribémont  •'j 
un  convoi  d'artillerie,  que  le  roi  faisait  venir  de  Tournay  '.  Il 
fallut  donc  combattre  aussi  le  comte  de  Saint-Pol.  On  lui  prit  sa 
ville  de  Marie  *.  En  même  temps,  Richemont  agissait  auprès  de  la 
mère  du  jeune  comte  ®,  pour  amener  celui-ci  à  la  soumission.  L.  de 
Luxembourg  céda.  11  vint  à  Laon  faire  hommage  au  roi,  avec  la 
comtesse  de  Ligny,  Jeanne  de  Béthune,  veuve  de  Jean  de  Luxem- 
bourg ^**.  Ainsi  le  connétable  entra  en  relations  avec  le  comte 
de  Saint-Pol,  dont  il  devint  le  beau-frère  quatre  ans  plus  tard. 

A  Laon  '*,  Charles  Vil  reçut  la  visite  d'Eléonore  de  Portugal, 


d.  Celui  qui  avait  accueilli  Jeanne  d'Arc  à  Vaucouleurs. 

2.  Collect.  de  Lorraine,  t.  293,  n"  19.  P  2531,  fos  189-190.  Dumont,  Hist. 
de  Commercy,  t.  I,  244-245. 

3.  D.  Calmet,  t.  II,  col.  821.  Histaire  ecdésiast.  et  civile  de  Verdun,  Paris, 
1745,  in-4,  p.  387-390.  L'auteur  anonyme  est,  d'après  Lelong,  l'abbé  Roussel. 

4.  D.  Calmet,  t.  II,  col.  820-822,  et  Preuves,  ccxxxviii.  Lecoy  de  La  Mar- 
che, Le  roi  René,  t.  I,  p.  241.  Lepage,  Recueil  de  documents  sur  la  Lor- 
raine, Nancy,  1855,  in-8,  t.  I,  129-155.  JJ  184,  f  407  v°. 

5.  Monstrelet,  V,  4SI;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  p.  248;  Anselme,  III,  725- 
726;  Xia  8605,  f»'  124  v,  125.  Louis  de  Luxembourg  était  fils  de  Pierre  I^ 
de  Luxembourg,  comte  de  Saint-Pol  {+  1433).  C'est  le  futur  connétable  de 
Louis  XI  (Anselme,  III,  721-726). 

6.  Arrondissement  de  Saint-Quentin. 

7.  Monstrelet,  V,  461  et  suiv. 

8.  Arrondissement  de  Laon. 

9.  Voir,  dans  P.  Clément,  Jacques-Cœur,  p.  50-51,  en  note,  une  lettre 
écrite  de  Saint-Mihiel,  le  4  mars,  par  Richemont,  à  la  comtesse  de  Saint- 
Pol  (Marguerite  de  Raux,  veuve  de  Pierre  I"  de  Luxembourg). 

10.  Monstrelet,  V,  461-467.  Berry,  p.  413. 

11.  Le  roi  était  à  Laon  dès  le  2  avril.  Il  y  était  encore  le  4  mai  (D.Gre- 


NOUVELLE  DE  PHILIPPE   LE   BON  (1441)  317 

duchesse  de  Bourgogne,  chargée  de  négociations  relatives  à  cer- 
tains articles  du  traité  d'Arras,  à  la  conclusion  de  la  paix  avec 
l'Angleterre,  à  la  forteresse  de  Montaigu  *,  que  Philippe  le  Bon 
ne  voulait  pas  rendre  au  damoiseau  de  Commercy.  Richemont 
fut  envoyé  à  la  rencontre  de  la  duchesse  ^.  Accueillie  par  le  roi 
de  la  façon  la  plus  gracieuse,  cette  princesse  ne  put,  malgré  sa 
grande  habileté,  réussir  dans  sa  mission  diplomatique,  et  elle  en 
manifesta  quelque  dépit.  A  son  départ,  le  connétable  la  recondui- 
sit assez  loin  ^,  puis  elle  continua  sa  route  vers  Le  Quesnoy  *,  où 
l'attendait  le  duc  de  Bourgogne.  Près  de  Cateau-Gambrésis  «,  elle 
rencontra  des  gens  d'armes  du  roi,  qui  revenaient  d'une  course 
dans  le  Rainant.  Elle  les  fît  attaquer  et  poursuivre  par  son 
escorte  *. 

L'échec  éprouvé  par  la  duchesse  de  Bourgogne  irrita  beaucoup 
son  mari.  Il  refusa  de  rendre  Montaigu  à  Robert  de  Sarrebrûck 
et  fit  même  démanteler  cette  place,  dont  la  garnison  désolait  au- 
paravant Saint-Quentin,  Laon,  Reims  et  le  pays  d'alentour  '' , 
D'ailleurs  Philippe  le  Bon  prenait  vis-à-vis  de  Charles  VII  une 
attitude  beaucoup  moins  réservée  qu'à  l'époque  de  la  Praguerie. 
Partisan  de  la  paix  avec  l'Angleterre,  il  aspirait  à  changer  la 
direction  du  gouvernement  et  à  la  faire  passer  au  duc  d'Orléans  ^. 
Après  avoir  contribué,  plus  que  personne,  à  la  délivrance  de  ce 
prince,  il  l'avait  marié  à  sa  nièce,  Marie  de  Glèves  ',  qu'il  avait 
richement  dotée  ***.  Au  lieu  d'aller  sans  retard  rendre  ses  de- 
nier, XX  bis,  liasse  9,  f»  19;  Fr.  23711,  n»  137).  Le  10  avril,  Denis  de 
Chailly,  bailli  de  Meaux,  fut  nommé  capitaine  de  la  ville  de  Crécy-en-Brie 
(qu'il  avait  prise),  en  récompense  des  services  qu'il  avait  rendus,  soit  en 
ravitaillant  Lagny,  soit  en  s'emparant 'de  Château-Chinon,  qu'il  avait  re- 
mis au  connétable  (P  2531,  f«s  184  v»,  188). 

1.  C.  de  Sissonne,  arrondissement  de  Laon. 

2.  Monstrelet,  V,  468-471. 

3.  Monstrelet,  VI,  2. 

4.  Arrondissement  d'Avesnes  (Nord). 

5.  Le  Cateau,  arrondissement  de  Cambrai. 

6.  Monstrelet,  VI,  2-3. 

7.  D.  Calmet,  t.  II,  col.  821;  Hist.  de  Bourgogne,  IV,  249;  Monstrelet, 
VI,  4-0,  26.  Les  fortifications  de  Montaigu  furent  bientôt  relevées.  —  Sur 
l'expédition  du  roi  et  du  connétable  en  Champagne,  voir  Monstrelet,  V, 
437  et  suiv.;  Berry,  p.  413;  Hist.  de  Bourgogne,  t.  IV,  245-249. 

8.  Sur  le  duc  d'Orléans,  voir  Monstrelet,  VI,  23-26,  et  ci-dessus,  p.  310. 

9.  En  novembre  1440  (CoUect.  de  Bourgogne,  t.  96,  p.  627-632;  K  553, 
n*  12).  Marie  de  Clèves,  fille  d'Adolphe  II,  duc  de  Clèves  et  de  La  Marck,  et 
de  Marie  de  Bourgogne,  fille  de  Jean  sans  Peur,  était  nièce  de  Richemont. 

10.  hist.  de  Bourgogne,  IV,  245.  Le  duc  de  Bourgogne  avait  acheté  la  plu- 
part des  terres  que  le  duc  d'Orléans  avait  vendues  pour  payer  sa  rançon 
(voiries  différentes  pièces  de  K  66,  n"  9).  Le  18  décembre  1440,  traité  d'al- 
liance, à  Bruges,  entre  les  ducs  de  Bourgogne  et  d'Orléans,  pour  leurs  inté- 
rêts communs  et  pour  le  bien  de  l'Etat  (K  66,  n"  12,  original,   signé  et 


318  INTRIGUES   DE   CHARLES   d'ORLÉANS   (1441) 

voirs  à  Charles  VII,  à  son  retour  d'Angleterre,  le  duc  d'Orléans 
avait  manifesté  des  dispositions  assez  hostiles,  affichant  de  hau- 
tes prétentions,  s'entourant  d'une  escorte  trop  nombreuse  et 
affectant  de  rechercher  les  autres  mécontents,  comme  les  ducs 
de  Bourgogne,  de  Bourbon,  de  Bretagne,  d'Alençon  et  le  comte 
de  Vendôme.  Le  prétexte  qu'ils  mettaient  en  avant,  c'était  tou- 
jours la  paix  avec  l'Angleterre.  En  réalité,  c'était  une  nouvelle 
Praguerie  qui  se  préparait,  moins  dangereuse  peut-être  que  la 
première,  mais  qui  devait  encore  inspirer  au  roi  et  à  ses  con- 
seillers de  légitimes  inquiétudes  *. 

Le  parti  qui  l'emportait  alors  dans  le  conseil  du  roi  était  celui 
de  la  guerre,  à  la  tête  duquel  on  peut  placer  le  connétable  *.  Là 
encore,  il  se  trouvait  en  opposition  directe  avec  son  frère,  Jean  V, 
et  les  autres  chefs  de  la  Praguerie.  Il  estimait  que  la  paix  serait 
plus  avantageuse  pour  la  France  après  de  nouveaux  succès  mi- 
litaires et  qu'il  fallait  redoubler  d'efforts,  puisque  le  gouverne- 
ment anglais  avait  grand'peine  à  subvenir  aux  dépenses  de  la 
guerre  ^. 

scellé).  Le  19,  autre  traité,  déjà  cité,  entre  Philippe  le  Bon  et  le  duc  de 
Bretagne  (voir  ci-dessus,  p.  310,  note  1). 

1.  Dans  une  lettre  du  15  décembre  1440,  Henri  VI  remercie  le  duc  d'Or- 
léans des  efforts  qu'il  fait  pour  parvenir  au  bien  de  la  paix,  «  auquel  bien 
chacun  prince  catholique  se  doit  employer  de  bonne  voulenté  »  (K  65, 
n°  15*5).  Le  18  décembre  1440,  Ch.  d'Orléans  fait  alliance  avec  Philippe  le 
Bon  pour  leurs  intérêts  communs  et  pour  le  bien  de  l'Etat  (voy.  ci-dessus, 
p.  317,  note  10).  Le  19  décembre,  autre  traité,  déjà  mentionné,  entre  les  ducs 
de  Bourgogne  et  de  Bretagne.  Le  6  mars  1441,  le  duc  d'Alençon  promet  d'ai- 
der les  ducs  de  Bretagne  et  de  Bourgogne  à  faire  conclure  la  paix  avec 
l'Angleterre.  Ch.  d'Orléans  fait  la  même  promesse  le  7  mars,  à  Nantes,  le 
duc  de  Bourbon  le  4  avril,  à  Chàteauroux  (Arch.  de  la  Loire-lnf.,  cass.47, 
E,  121  ;  K  66,  n"  15,  17).  Le  duc  de  Bourgogne  avait  donné  le  collier  de  la 
Toison  d'or  aux  ducs  de  Bretagne  et  d'Alençon  et  au  comte  de  Foix  (deReif- 
fenberg,  Hist.  de  l'ordre  de  la  Toison  d'or,  Bruxelles,  1831,  in-4°,  p.  25).  Les 
ducs  d'Orléans  et  d'Alençon,  les  comtes  de  Vendôme  et  de  Dunois  s'étaient 
rendus  en  Bretagne,  d'où  les  princes  avaient  envoyé  Raoul  de  La  Houssaie 
et  Rolland  de  Carné  vers  le  roi,  pour  lui  proposer  leur  médiation  auprès 
de  Henri  VL  Leurs  lettres  de  créance  sont  du  ^'"^  mars  1441  {Preuves  de 
l'hist.  de  Bretagne,  t.  H,  col.  1346-1347).  Jean  V  prend  le  titre  de  média- 
teur, dans  des  lettres  données  à  Redon,  le  12  avril.  Le  19  avril,  alliance 
entre  le  duc  de  Bretagne  et  Jean  de  Vendôme,  vidame  de  Chartres  {Por- 
tef.  Fontanieu,  117-118,  au  19  avril  1441). 

2.  Les  arguments  de  ce  parti  sont  exposés  et  combattus  par  Jouvenel  des 
Ursins,  dans  son  épître  si  instructive  aux  Etats  de  1439  (Fr.  5022,  passim^ 
surtout  f»  19  V;  voir  aussi  P.-L.  Péchenard,  J.  Juvénal  des  Ursins,  p.  196). 

3.  Henri  VI  est  alors  réduit  à  vendre  ou  à  engager  ses  joyaux.  Le  duc 
d'York,  après  des  demandes  pressantes,  est  obligé  d'aller  lui-même  en 
Angleterre  chercher  des  troupes  {Proceedings,  V,  Préface,  p.  Lxxxyii  et 
p.  132-133,  142,  145-146;  voir  aussi  la  pétition  de  François  de  Surienne,. 
Idem,  p.  147-150). 


RICHEMOM'  FAIT  CAPITULER  CREIL   (1441,    24  MAl)  319 

Sans  refuser  de  donner  suite  aux  négociations  ^  on  résolut 
donc  de  reprendre  les  hostilités  dans  l'Ile-de-France,  comme  le 
voulait  Richemont  *.  Charles  YII  avait  alors  des  forces  considé- 
rables ;  le  duc  d'York  était  en  Angleterre  ;  ses  meilleurs  lieute- 
nants, Talbot,  Fauquemberge,  Th.  de  Scales,  étaient  occupés 
à  contenir  les  Français,  du  côté  de  Granville,  de  Conches  et  de 
Louviers  ^  ;  le  moment  semblait  propice  à  de  nouvelles  entre- 
prises. Après  avoir  perdu,  depuis  cinq  ans,  Paris,  Montereau, 
Meaux,  Saint-Germain,  les  Anglais  conservaient  Creil  et  Pon- 
toise,  que  Richemont  voulait  aussi  leur  prendre,  pour  délivrer 
complètement  la  capitale.  Pendant  qu'il  envoyait  l'amiral  de 
Coëtivy  mettre  le  siège  devant  Creil,  il  allait,  avec  Saintrailles, 
à  Paris,  presser  l'envoi  de  tout  ce  qui  était  nécessaire,  troupes, 
manouvriers ,  argent ,  artillerie ,  et  revenait  aussitôt  diriger 
les  opérations.  Il  se  logea  devant  le  pont  de  Creil.  Bientôt  les 
gros  canons  de  J.  Bureau  eurent  tellement  endommagé  les 
murailles,  que  le  capitaine  anglais,  Guillaume  Peyto,  capitula 
sans  attendre  l'assaut  général  (24  mai  1441)  *. 

Ce  nouveau  succès  provoqua  dans  Paris  des  démonstrations 

1.  Proceedings,  V,  139;  Rymer,  t.  V,  1"  partie,  p.  107-108.  Parmi  les  en- 
voyés de  Charles  VII,  on  remarque  les  ducs  de  Bourbon  et  d'Alençon  et 
G.  de  La  Trémoille. 

2.  En  avril,  les  états  de  Languedoc,  au  Puy,  octroient  une  aide  de 
100  000  1.  t.  pour  les  dépenses  de  la  guerre,  notamment  pour  la  solde  de 
l'armée  que  le  roi  met  sus,  cette  présente  saison  nouvelle,  «  et  a  entencion 
mener  en  personne  es  parties  de  France,  à  rencontre  des  Anglois  »  (K  65, 
no  12;  K  66,  n"  14). 

3.  Les  Anglais  croyaient  que  Charles  VII  allait  attaquer  la  Normandie 
(K66,  n»*  14  et  16;  Fr.  26068,  n»»  4233-4256,  4289-4300). 

4.  Sur  le  siège  de  Creil,  voir  Monstrelet,  VI,  3-6;  Berry,  p.  413;  J.  Char- 
tier,  II,  13-17;  le  Bourgeois  de  Paris,  p.  359-360  (d'après  le  Bourgeois  de 
Paris,  le  siège  aurait  duré  du  19  au  24  mai,  jour  de  l'Ascension;  d'après 
Monstrelet,  il  aurait  duré  douze  jours)  ;  J.  Stevenson,  t.  II,  2'  partie, 
p.  603-607;  Proceedings,  V,  146-147;  Martial  d'Auvergne,  I,  180-181.  Guill. 
Peyto  avait  été  nommé  capitaine  de  Creil  en  janvier  1440  (Fr.  26066, 
n»  3921;  Clairamb.,  186,  f»  7065).  Il  n'y  était  peut-être  que  le  lieutenant  de 
Talbot  (voir  Tuetey,  dans  le  Bourgeois  de  Paris,  p.  359,  note  1);  il  l'était 
du  moins  en  1439  (K  65,  n"  129  et  132).  Qnle  retrouve  lieutenant  de  Talbot 
à  Rouen  (Fr.  23776,  n»  1539,  et  K  67,  n-  12*8).  D'après  J.  Ghartier,  l'assaut 
fut  donné  à  Creil  le  24  juin  «  par  aucuns  du  siège,  de  leur  volonté,  sans 
aucune  ordonnance,  qui  levèrent  contre  la  bresche  de  la  muraille  deux 
eschelles  »  sous  les  yeux  du  roi  et  du  Dauphin.  La  date  du  24  juin  est 
inexacte.  Elle  s'applique  peut-être  à  la  remise  de  la  place,  mais  non  à  la 
capitulation.  Le  28  mai,  Charles  VII  écrit  de  Senlis  aux  habitants  de 
Saint-Quentin  pour  leur  annoncer  la  prise  de  Creil  {Append.  LXXVl  ;  X'» 
4798,  f"  338).  Le  roi  était  à  Soissons  le  7  mai,  à  Compiègne  le  14  mai 
(D.  Grenier,  t.  XX  bis,  liasse  9,  f»  19  r»  et  v»).  Talbot,  qui  se  préparait  à 
secourir  Creil,  ne  fut  pas  prêt  à  temps  (Fr.  25776,  n'^  1521-1523). 


820  RICHEMONT   PRÉPARE   LE    SIÈGE   DE   PONTOISE   (1441) 

enthousiastes  et  encouragea  l'armée.  Richemont  tenait  surtout 
à  reprendre  Pontoise.  Le  siège  de  cette  place  importante  fut 
enfin  décidé  *,  mais  il  devait  être  beaucoup  plus  difficile  que 
celui  de  Creil.  La  garnison,  plus  nombreuse  ^,  était  capable  de 
résister  longtemps,  et  il  était  certain  que  le  gouvernement  anglais 
ferait  les  plus  grands  efforts  pour  la  secourir. 

Pour  cette  campagne  décisive,  Charles  VII  avait  convoqué 
le  ban  et  l'arrière-ban  ;  il  avait  levé  des  impôts  dans  tout  le 
royaume  ;  il  avait,  en  outre,  demandé  à  Paris  et  aux  autres 
bonnes  villes,  Tournay,  Troyes,  Gompiègne,  etc.,  de  nouveaux 
sacrifices,  c'est-à-dire  des  hommes,  de  l'argent,  des  vivres,  de 
l'artillerie,  des  bateaux  ;  il  avait  même  emprunté  à  des  particu- 
liers ^.  Dans  son  armée,  on  voyait,  avec  le  connétable,  quantité 
de  grands  seigneurs,  Charles  d'Anjou,  les  comtes  d'Eu,  de  La 
Marche,  de  Vaudemont,  de  Saint-Pol  ^,  le  vicomte  de  Thouars  et 
les  capitaines  les  plus  renommés,  La  Hire,  Saintrailles,  le  ma- 
réchal de  Lohéac,  Jean  de  Bueil,  Antoine  de  Chabannes,  Robert 
Floquet,  Pierre  de  Brézé,  Salazar  ^,  etc.  Il  était  donc  en  mesure 
de  résister  aux  Anglais,  qui,  de  leur  côté,  allaient  mettre  en 
œuvre  toutes  leurs  ressources  ^. 

Après  la  prise  de  Creil,  le  roi  se  rendit  à  Saint-Denis,  où  il  con- 
centra ses  troupes,  vers  la  fin  de  mai.  Il  alla  lui-même  les  con- 
duire devant  Pontoise,  puis  revint  à  Saint-Denis,  avec  le  Dauphin 


1.  Voir  la  lettre  de  Charles  VII  écrite  de  Senlis  le  28  mai  [Append.  LXXVl). 
L'année  précédente,  le  connétable  avait  déjà  voulu  assiéger  Pontoise.  Au 
mois  d'août  1440,  les  Anglais  redoutaient  déjà  une  attaque  (K  66,  n°  34  : 
ordre  d'envoyer-  des  renforts  à  J.  Staulawe,  capitaine  de  Pontoise,  pour 
résister  aux  ennemis,  qui  veulent  faire  une  entreprise  sur  cette  ville). 
Voir  aussi  K  66,  n»  14;  Fr.  26068,  n"  4100;  Portef.  Fontanieu,  117-118,  au 
2  août. 

2.  Environ  800  hommes,  tant  Anglais  que  Français  reniés,  d'après  Berry 
(p.  413);  1000  à  1200  hommes,  d'après  J.  Chartier  (II,  21);  2  000  hommes, 
d'après  Gruel  (p.  216).  Sur  la  ville  de  Pontoise,  voir  :  Les  antiquités  et 
singularités  de  la  ville  de  Pontoise,  par  Fr.  Noël  Taillepied,  Pontoise,  1876, 
in-8  ,  notamment  p.  100  et  suiv. 

3.  Le  Bourgeois  de  Paris,  361  et  note  2.  Boutiot,  Hist.  de  Troyes  et  de  la 
Champagne  méridionale,  II,  12.  K  66,  n»  14.  Ms.  latin  6020,  f<'77.  D.  Gre- 
nier, XX  bis,  liasse  9,  f»  19,  X^a  25,  au  lundi  12  juillet  1451;  JJ  176,  f<"  30 
v»,  31.  JJ  177,  f»  110.  Fr.  23711,  n»  145.  Portef.  Font.,  117-118,  au  23  juillet 
1442.  LL  218,  f»  207.  LL  414,  f"  103.  A.  Thomas,  Les  Etats  provinciaux  sous 
Charles  VU,  t.  II,  p.  134-143. 

4.  K  67,  n»  30.  JJ  176,  f»  311.  JJ  184,  f-  23,  n»  xxxv. 

5.  Salazar  était  un  véritable  routier.  L'année  précédente,  il  désolait  le 
Languedoc  (Fr.  26067,  n<"  4022;  Fr.  26069,  n»  4322).  C'était  un  lieutenant 
de  Rod.  de  Villandrando,  4126  (Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  I,  67). 

6.  Charles  VII  avait  alors  11  à  12  000  combattants  (Godefroy,  Hist.  de 
Charles  VII,  p.  345).      •  -  , 


SIÈGE   DE  PONTOISE   (1441,   JUIN)  321 

et  Charles  d'Anjou.  Le  connétable  resta,  pour  asseoir  le  siège, 
avec  le  maréchal  de  Jaloignes  *,  l'amiral,  La  Hire,  Saintrailles, 
Joachim  Rouault  et  environ  7000  combattants  *.  Le  même  jour, 
sur  les  cinq  heures,  les  Anglais  firent  une  sortie,  pour  s'emparer 
des  canons  rangés  sur  la  chaussée,  près  de  la  ville.  Ils  furent 
repoussés  et  poursuivis  jusqu'au  pont-levis,  dont  les  chaînes  fu- 
rent prises .  L'effet  de  ce  premier  engagement  fut  tel  que  les  as- 
siégés n'osèrent  plus  guère  tenter  d'autres  sorties. 

Pendant  la  nuit,  le  connétable  commanda  lui-même  le  guet. 
Secondé  par  Le  Bourgeois  de  Kermoysan  ^,  il  fit  creuser  des 
fossés  et  placer  des  gabions,  pour  mettre  ses  gens  à  l'abri  des 
projectiles.  Aussitôt  Jean  Bureau  ^  établit  ses  premières  batte- 
ries contre  le  pont  et  le  boulevard  qui  en  défendait  l'approche. 
Le  dimanche,  on  donna  l'assaut  à  ce  boulevard,  pour  éprouver 
la  résistance  des  assiégés.  Ils  repoussèrent  les  assaillants,  leur 
infligèrent  de  grandes  pertes  et  leur  prirent  deux  bannières. 
Toutefois  l'artillerie  française  battait  si  furieusement  cette  po- 
sition que  les  Anglais  l'abandonnèrent  le  mardi.  Elle  fut  aus- 
sitôt occupée  par  les  assiégeants.  Trois  arches  du  pont  avaient 
été  détruites  par  le  canon,  ce  qui  rendait  plus  difficiles,  sur  ce 
point,  les  communications  des  assiégés  avec  l'extérieur.  On 
avait  maintenant  une  meilleure  base  d'opérations. 

Le  roi  vint  alors,  avec  le  dauphin  et  Charles  d'Anjou,  loger 
à  l'abbaye  de  Maubuisson,  sur  la  rive  gauche  de  l'Oise,  non 
loin  de  la  ville  °.  Avec  des  bateaux  envoyés  de  Paris,  on  éta- 
blit un  pont,  protégé,  à  chaque  extrémité,  par  un  boulevard. 
L'abbaye  de  Saint-Martin,  située  sur  la  rive  droite  de  l'Oise,  en 
face  du  pont  de  bateaux,  à  un  trait  d'arc  du  boulevard  qui  le 
défendait,  fut  solidement  fortifiée.  On  y  ajouta  une  puissante 
bastille.  Ce  poste,  très  exposé  aux  attaques  des  Anglais  de  Nor- 
mandie, fut  confié  à  l'amiral,  qui  s'y  comporta  vaillamment. 

Cependant  Talbot  appelait  à  Vernon  toutes  les  troupes  dis- 

1.  Philippe  de  Culant,  seigneur  de  Jaloignes  (Pièces  orig.,  933,  dossier 
20944,  n"  11  et  suiv.). 

2.  Berry,  415.  Gruel,  p.  216,  dit  que  ce  fut 'le  mardi  de  la  Pentecôte, 
c'est-à-dire  le  6  juin.  Il  est  certain  que,  dès  la  fin  de  mai,  Talbot  est  chargé 
de  défendre  Pontoise  (Fr.  26068,  n»'  4345,  4348;  J.  Stevenson,  t.  II,  2»  par- 
tie, p.  463),  et  que  le  siège  était  commencé  dès  les  premiers  jours  de  juin 
(Fr.  26068,  n«  4309;  le  Bourgeois  de  Paris,  p.  361,  note  3). 

3.  Appelé  ordinairement  Le  Bourgeois  dans  les  chroniques,  ingénieur 
remarquable,  qui  rendit  de  grands  services  au  connétable.  On  l'appelle 
aussi  Tridual  Bourgois  (Clairamb.,  20,  p.  1372,  1373)  ou  Tugdual.  Il  signe 
Le  Bourgeois  de  Kermoysan  (Clairamb.,  23,  p.  1847). 

4.  Monstrelet  parle  des  «  gros  engins  »  et  J.  Chartier  de  la  «  très  grant 
artillerie  »  du  roi,  conduite  par  J.  Bureau. 

3.  Fr.  20384,  n°  60. 

RiCHEMONT.  21 


322  SIÈGE   DE   PONTOISE   (1441,    JUIN,    JUILLET) 

ponibles,  environ  4  000  hommes  ^  Vers  la  fin  de  juin,  il  marcha 
au  secours  de  Pontoise.  Il  arriva  du  côté  de  l'abbaye  de  Saint- 
Martin.  Le  connétable  estimait  que  les  Anglais,  vu  l'infériorité  de 
leur  nombre,  se  trouvaient  dans  des  conditions  désavantageuses 
et  qu'il  en  fallait  profiter  pour  les  combattre.  Il  mit  ses  gens  en 
bataille  et  voulut  franchir  le  pont,  mais  le  roi  défendit  qu'on 
laissât  passer  personne.  Vainement  Richemont  lui  représenta 
que  les  Anglais  s'étaient  exposés  à  une  défaite  certaine  ;  le  roi 
avait  décidé  qu'on  ne  les  attaquerait  pas,  et  il  fallut  obéir. 

Sans  blâmer  la  prudence  de  Charles  VII,  on  est  tenté  de 
croire  que,  dans  cette  occasion  du  moins,  elle  fut  excessive, 
quand  on  songe  que  Talbot  avait  peu  de  troupes,  n'ayant  pas 
osé,  en  l'absence  du  duc  d'York,  dégarnir  trop  les  places  de 
Normandie,  menacées  de  tous  côtés  par  les  Français.  Comme  la 
ville  n'était  pas  entièrement  investie  au  nord,  le  hardi  capitaine 
anglais  y  entra  sans  difficulté,  avec  des  vivres,  des  munitions, 
de  l'artillerie.  Après  y  -avoir  laissé  des  troupes  fraîches,  sous 
Thomas  de  Scales,  il  put,  sans  être  inquiété  davantage,  se  retirer 
à  Mantes  ^. 

Environ  trois  semaines  après,  le  duc  d'York,  revenu  d'Angle- 
terre, se  disposa  lui-môme  à  secourir  Pontoise  ^.  Il  avait  une 
armée  de  huit  à  neuf  mille  hommes,  avec  les  meilleurs  capi- 
taines anglais,  Talbot,  Fauquemberge,  Nicolas  Burdet,  Richard 
Wydeville  *.  Depuis  cette  époque  et  pendant  plus  de  deux  mois 
(deuxième  quinzaine  de  juillet,  août,  septembre),  le  siège  de  Pon- 
toise donna  lieu  à  un  vaste  ensemble  d'opérations,  qui  s'étendi- 
rent aussi  à  la  Normandie  tout  entière,  depuis  Granville  jusqu'à 
Dieppe  ^.  Les  Anglais  s'appuyaient  sur  Vernon  et  Mantes,  les 


1.  K  67,  n»  122.  Clairamb.,  186,  f»  6913. 

2.  Le  24  juin,  d'après  Berry,  p.  413.  Sur  les  opérations  pendant  ce  mois 
de  juin,  voir  Fr.  26068,  n»»  407,  409,  410,  413,  428,  438;  J.  Stevenson,  11, 
2e  partie,  463,  603-607. 

3.  Fr.  23776,  n»  1328.  K  67,  n"^  l^s,  130.  Pièces  orig.,t.  318,  dossier  11646, 
n»»  3  et  4. 

4.  Richard  Wydeville  avait  épousé  la  veuve  de  Bedford,  sœur  de  L.  de 
Luxembourg,  comte  de  Saint-Pol. 

5.  Pendant  le  siège  de  Pontoise,  les  Français  firent  d'importantes  diver- 
sions en  Normandie,  notamment  vers  Arques,  Granville,  Conches,  Louviers. 
Ils  menaçaient  Touques,  Pont-Lévêque  et  Honfleur.  Talbot  ayant  dégarni 
plusieurs  villes,  pour  secourir  Pontoise,  Ch.  des  Marets,  capitaine  de 
Dieppe,  avec  le  capitaine  d'Eu,  en  profita  pour  faire  plusieurs  tentatives 
sur  Pont-de-Larche,  d'où  il  fut  repoussé  par  J.  de  Norbery.  Les  sires  de 
Lohéac  et  de  Bueil  réunissaient  des  troupes  sur  les  marches  de  Bretagne, 
pour  attaquer  la  Normandie.  Louis  d'Estouteville,  capitaine  du  Mont- 
Saint-Michel,  cherchait  à  surprendre  Avranches  et  Granville  (Fr.  26068, 
n»'  4307   4313,  4328,  4367,  4374). 


LE  DUC  d'yokk  secourt  PONTOisE  (1441,  aout)  323 

Français  sur  Louviers,  Meulaii,  Poissy,  Conflans-Sainte-Hono- 
rine,  Saint-Denis,  et  sur  l'Oise,  jusqu'à  Gieil  et  Pont-Sainte- 
Maxence.  Les  Français  de  Louviers  avaient  établi  à  Saint-Pierre- 
du-Vauvray,  sur  la  Seine,  une  forte  bastille,  d'où  ils  arrêtaient 
les  bateaux^chargés  de  vivres,  qui  remontaient  le  fleuve,  de  Rouen 
à  Mantes  '. 

Vers  le  commencement  d'août,  le  duc  d'York  entra  dans  Pon- 
toise  aussi  facilement  que  l'avait  fait  Talbot  ^.  Il  ravitailla  la 
ville,  releva  la  garnison  exténuée  et  la  remplaça  par  de  nouvelles 
troupes,  sous  Clinton,  Nicolas  Burdet  et  H.  Standish  •''.  Il  essaya 
ensuite  de  passer  l'Oise,  pour  attaquer  les  Français  des  deux 
côtés.  Le  roi  disposa  ses  troupes  le  long  de  la  rivière,  depuis 
Gonflans  jusqu'à  Creil,  en  laissant  au  connétable  la  direction  du 
siège.  Entre  l'Isle-Adam  et  Creil,  il  y  eut  quelques  escarmou- 
ches, où  fut  tué  Guillaume  du  Chastel,  neveu  du  fameux  Tanguy. 
Richemont  s'avança  jusqu'à  TIsle-Adam,  où  il  apprit  que  les 
Anglais  avaient  franchi  l'Oise  près  de  Beaumont,  après  avoir 
trompé,  par  une  fausse  démonstration,  Robert  Floquet,  qui  es- 
sayait de  les  arrêter.  Il  revint  promptement  avertir  le  roi,  qui 
se  retira  sur  la  rive  droite,  avec  le  Dauphin,  à  l'abbaye  de  Saint- 
Martin,  où  il  était  plus  en  sûreté. 

Le  lendemain,  les  Anglais  vinrent  occuper  l'abbaye  de  Mau- 
buisson  et  le  boulevard  établi  en  face  du  pont.  Le  connétable 
voulait  rester  à  l'abbaye  de  Saint-Martin,  avec  Charles  d'Anjou; 
mais  le  roi  les  emmena  jusqu'à  Poissy,  laissant  les  Anglais  sous 
Pontoise  et  évitant  toujours  une  bataille  qui  pouvait  tout  com- 
promettre. Cette  tactique  peu  brillante,  mais  fort  sage,  eut,  en 
définitive,  les  meilleurs  résultats.  Les  Anglais,  se  voyant  ob- 
servés par  des  troupes  nombreuses  et  craignant  les  diversions 
qui  se  pouvaient  produire  en  Normandie,  n'osèrent  entreprendre 
des  opérations  de  longue  haleine  pour  dégager  Pontoise.  D'ail- 
leurs leurs  moyens  de  subsistance  n'étaient  pas  assurés.  Ils 
n'empêchèrent  môme  pas  le  connétable  de  faire  entrer  dans  la 
bastille  Saint-Martin  des  vivres  amenés  de  Paris,  sur  des  bateaux, 
par  Ambroise  de  Loré. 

Cependant  les  Anglais  avaient  passé  l'Oise  sur  un  pont  de  ba- 
teaux, établi  par  Guillaume  Forsted  entre^ Pontoise  et  Gonflans*. 

1.  Fr.  20887,  n»'  35,  36.  Fr.  26068,  n»  4335.  Louviers  rendit  de  grands 
services  et  en  fut  récompensé  par  le  roi  en  1442  (Xi^  8605,  f»»  83-85). 

2.  Il  y  était  le  6  août  (Fr.  26068,  n»  4344), 

3.  Clinton  et  non  Clifton  (Fr.  26068,  n»»  4319,  4400,  4405).  Nie.  Burdet 
(Pièces  orig.,  t.  557,  dossier  12579,  pièce  17). 

4.  Ce  pont  fut  fait  par  Guillaume  Forsted,  maître  des  ordonnances  et 
artillerie  du  roi  d'Angleterre,  avec  des  bateaux  en  cuir  amenés  de  Mantes 
(Fr.  26068,  n"  4339-4344). 


324         LE  DUC  d'yORK  se  retire  (1441,  AOUT) 

Ils  voulurent  inquiéter  la  retraite  du  connétable,  mais  il  était  trop 
tard.  Du  haut  d'une  colline,  ils  purent  seulement  apercevoir  sa 
troupe  qui  s'éloignait.  Ils  ne  réussirent  pas  mieux  à  saisir  un 
bateau  pourvu  d'une  bonne  artillerie,  sur  lequel  Ambroise  de 
Loré  s'en  retournait  à  Paris . 

Au  retour  de  cette  expédition,  le  connétable  revint  à  Poissy, 
en  passant  par  le  Pont-de-Meulan,  d'après  les  conseils  de  Sain- 
trailles,  qui  conduisait  son  arrière-garde.  Au  lieu  de  le  suivre, 
Saintrailles  était  allé,  par  la  voie  la  plus  directe,  à  Poissy,  et  là 
il  avait  dit  au  roi  que  le  connétable  n'avait  pas  osé  suivre  le 
même  chemin  et  qu'il  avait  mieux  aimé  faire  un  long  détour. 
Irrité  de  ce  mauvais  procédé,  qui  prouvait,  une  fois  de  plus,  les 
dangereuses  rancunes  des  routiers,  Richemont  infligea  les  blâmes 
les  plus  sévères  à  Saintrailles  devant  le  roi  ^ 

Le  lendemain,  l'armée  anglaise  s'approcha  de  Pontoise  et  vint 
offrir  la  bataille  à  Charles  VII,  qui  défendit  encore  de  laisser 
sortir  les  troupes.  Alors  le  duc  d'York  regagna  Mantes  ^,  pen- 
dant que  le  roi  se  retirait  à  GonP.ans  et  à  Saint-Denis,  avec  le 
connétable  *.  Ensuite  Talbot,  avec  une  grande  partie  de  l'armée 
anglaise,  voulut  attaquer  Poissy,  où  il  croyait  encore  trouver  le 
roi  ;  mais,  quand  il  reconnut  que  cette  ville  était  abandonnée,  il 
alla  rejoindre  le  duc  d'York,  après  avoir  pillé  l'abbaye.  Revenu, 
avec  le  roi,  à  Gonflans,  le  connétable  augmenta  les  fortifications 
de  cette  place,  car  il  s'attendait  à  un  retour  offensif  des  Anglais. 
En  effet,  Talbot  reparut,  à  plusieurs  reprises,  pendant  les  der- 
nières semaines  d'août  et  le  commencement  de  septembre.  II 
s'établit  à  Vigny  *,  d'où  il  pouvait  observer  les  Français,  dé- 
fendre et  ravitailler  Pontoise  ^. 

Le  siège  traînait  en  longueur,  sans  grand  progrès.  Beaucoup 
de  seigneurs  disaient  qu'il  était  inutile  de  s'y  acharner  davantage  ; 
les  comtes  de  Vaudemont  et  de  Saint-Pol  s'en  allèrent;  les  princes 
recommençaient  leurs  intrigues,  réclamaient  la  paix,  négociaient 
avec  l'Angleterre  ®  ;  le  peuple  murmurait.  Si,  après  un  pareil  dé- 

1.  Gruel,  217. 

2.  Sur  cette  expédition  du  duc  d'York,  voir  Fr.  26068,  n»s  4334,  4333, 
4339-4344,  4346,  4351,  4352, 

3.  Le  roi  était  à  Saint-Denis  (JJ  176,  f»'  28, 31)  le  7août  (Xia  8605,  f»  77),  le  12 
août  (Fr.  23711,  n»  141);  à  Gonflans,  avec  le  connétable  (JJ  176,  f»  33  v»), 
le  20  août,  avec  Saintrailles  et  l'amiral  (f»  268  v), 

4.  Canton  de  Marines,  arrondissement  de  Pontoise. 

5.  Fr.  25776,  n"  1330-1333.  Fr.  26068,  no^  4350,  4354,  4358,  4365,  4405. 
K  67,  n<"-12,  133,  137.  Le  23  août,  Talbot  était  à  Pontoise,  avec  Fauquem- 
berge,  Th.  de  Scales  et  Clinton.  Le  27  août,  Talbot  était  à  Mantes  et  les 
Français  à  Gonflans  {Portef.  Fontanieu,  117-118,  à  la  date). 

6.  Arch.  de  la  Loire-Inf..,  cass.  47,  E,  121,   et  Arch.  des  aff,  élr.,  t.  362,, 


ASSAUT  DE  PONTOISE  (1441,  19  SEPTEMBRE)        325 

ploiement  de  forces,  le  roi  éprouvait  un  échec  devant  Pontoise, 
on  allait  retomber  dans  la  Praguerie.  Il  fallait,  à  tout  prix, 
réussir  et  se  hâter.  Le  connétable  y  avait  intérêt,  plus  que  per- 
sonne, pour  justifier  et  soutenir  sa  politique.  Avec  tout  ce  qu'il 
put  rassembler  de  troupes,  suivi  de  Charles  d'Anjou,  des  comtes 
d'Eu  et  de  La  Marche,  il  s'avança  contre  TaJbot  et  se  posta  près 
d'un  chemin  par  oii  les  Anglais  avaient  coutume  de  venir.  Ceux- 
ci  s'arrêtèrent  à  une  demi-iieue  de  là,  dans  un  bois,  puis,  jugeant 
cette  position  peu  favorable,  ils  se  retirèrent,  pendant  la  nuit, 
derrière  un  petit  cours  d'eau  *. 

Le  lendemain  malin,  le  connétable  conduisit  ses  troupes  en 
face  des  ennemis,  jusqu'au  bord  de  la  rivière  ;  mais  ni  les  uns 
ni  les  autres  n'entreprirent  de  la  passer.  Les  Anglais  s'en  retour- 
nèrent à  Mantes,  les  Français  à  Conflans  '.  Toutefois,  ce  départ  de 
Talbot  laissait  le  champ  libre  aux  Français.  Ils  revinrent  occu- 
per l'abbaye  de  Maubuisson.  Alors  le  connétable  assaillit  l'église 
Notre-Dame,  bâtie  sur  une  hauteur,  tout  près  de  Pontoise  et  de 
la  porte  du  faubourg  Saint-Martin.  Elle  fut  prise,  après  deux 
heures  de  combat,  le  samedi  16  septembre  ^.  Ce  succès  encou- 
ragea le  roi  :  il  fit  venir  d'autres  troupes  *,  avec  le  maréchal  de 
Lohéac,  et  des  canons.  L'artillerie  de  Jean  Bureau,  ainsi  ren- 
forcée, tira  incessamment  sur  la  ville;  enfin  il  fut  décidé  qu'on 
donnerait  un  assaut  général. 

Le  mardi  suivant,  19  septembre  ^,  le  roi  attaqua  du  côté  de 
l'Oise,  vers  la  tour  du  Friche;  le  connétable,  avec  le  Dauphin, 
Ch.  d'Anjou,  l'amiral  et  le  maître  des  arbalétriers,  du  côté  de 
l'église  Notre-Dame;  le  maréchal  de  Lohéac  et  le  vicomte  de 
Thouars,  vers  le  boulevard  du  pont;  les  troupes  de  Paris  et  de 
Meulanpar  la  rivière.  En  outre,  une  partie  de  l'armée,  sous  La  Hire, 

f"'  89-91.  Les  princes  continuaient  leurs  menées,  surtout  le  duc  d'Alençon, 
qui  allait  jusqu'à  informer  les  Anglais  des  projets  des  Français  (J.  Steven- 
son, I,  189-193;  Fr.  26068,  n"  4307,  4313;  M.  d'Escouchy,  III,  43;  Preuves 
de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1346-1349  ;  Bréquigny,  82,  f»' 121-133).  La  plu- 
part des  nobles  ne  vinrent  pas  au  mandement  de  l'arrière-bau  [Portef, 
Fontanieu,  119-120,  au  21  septembre  1445).  Troubles  dans  la  Saintonge 
(Xs*  24,  au  15  juillet  1445). 

1.  Peut-être  la  Viorne,  qui  finit  à  Pontoise,  ou  l'Aubette,  affluent  de  la 
Seine,  qui  passe  à  Meulan. 

2.  Le  11  septembre  le  roi  est  à  Conflans  (Fr.  25711,  n»  142). 

3.  Monstrelet,  le  Bourg,  de  Paris,  Gruel  et  J.  Chartier.  Berry  donne  la 
date  du  25,  qui  n'est  pas  exacte.  Le  15  septembre,  le  duc  d'York  est  & 
JRouen,  d'où  il  envoie  un  messager  à  Pontoise  (Fr.  26068,  n»  4410). 

4.  Avec  les  sires  de  Lohéac,  de  Bueil  et  de  Thouars.  Ils  amenaient  pro- 
bablement une  partie  des  troupes  qu'ils  avaient  réunies  vers  Laval  et  Châ- 
teau-Gontier  (Fr.  26068,  n»  4367). 

5.  Et  non  le  29,  comme  le  dit  M.  Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  II,  428. 


326  PRISE  DE  PONTOiSE  (1441,  19  septembre) 

Salazar  elles  deux  Estrac,  se  posta  au  nord  de  Pontoise,  à  quel- 
que distance,  pour  observer  les  Anglais  qui  pourraient  venir  et 
pour  arrêter  ceux  qui  voudraient  s'enfuir.  Après  un  combat 
acharné,  les  Français  entrèrent  de  tous  côtés  dans  la  ville,  le 
roi  un  des  premiers.  Huit  cents  Anglais  furent  pris  ou  tués  *. 
Parmi  les  prisonniers  se  trouvait  Clinton,  le  capitaine  de  la 
ville  ^.  Les  Français  n'avaient  fait  que  des  pertes  insigni- 
fiantes '. 

On  peut  affirmer  que  le  siège  de  Pontoise  est  un  des  faits  les 
plus  mémorables  du  règne  de  Charles  VII  *.  Ce  fut  tout  à  la  fois 
une  victoire  sur  les  Anglais  et  sur  la  Praguerie,  victoire  qui  con- 
solida le  pouvoir  royal  et  l'influence  personnelle  du  connétable. 
Après  cinq  années  d'efforts,  il  achevait,  par  ce  glorieux  fait 
d'armes,  la  délivrance  de  Paris  et  de  l'Ile-de-France  ^.  Cinq  jours 
avant  l'assaut  de  Pontoise,  Robert  Floquet,  capitaine  de  Cou- 
ches, avait  pris,  par  escalade,  Evreux*^,  une  des  principales  villes 
anglaises  de  Normandie. 

Le  lundi,  25  septembre,  le  roi,  avec  le  Dauphin,  le  connétable 
et  les  principaux  chefs  de  l'armée,  fît  une  entrée  triomphale  à 
Paris  ^  La  population  vit  défiler  les  canons  qui  avaient  servi  au 

1.  J.  Chartier  dit  500,  Monstrelet  900,  Grucl  800.  Parmi  les  morts,  Mons- 
trelet  nomme  Nie.  Burdet. . 

2.  Il  était  encore  prisonnier  en  1443  {Proceedings,  V,  278). 

3.  Cinq  à  six,  d'après  J.  Chartier,  dix  à  onze  d'après  le  Bourg,  de  Paris, 
une  quarantaine  d'après  Monstrelet. 

4.  Sur  le  siège  de  Pontoise,  outre  les  documents  déjà  indiqués,  voir  : 
Gruel,  témoin  oculaire,  p.  216-218;  Berry,  toujours  complet  et  exact, 
p.  413-417;  Monstrelet,  qui  donne  beaucoup  de  détails,  t.  VI,  6-24;  J.  Char- 
tier, mieux  renseigné  ici  que  d'ordinaire^  t.  II,  20-32;  Th.  Basin,  I,  138-147; 
Martial  d'Auvergne,  I,  181-190.  Quant  au  Bourg,  de  Paris,  ce  qu'il  dit  de 
ce  siège  (p.  361-363),  surtout  au  §  806,  p.  362,  suffirait  à  montrer  son  esprit 
étroit,  haineux  et  sa  fureur  de  dénigrement.  Cf.  le  Journal  de  Maupoint, 
p.  27.  Voir  aussi  Fr.  1968,  f»  150;  Fr.  26072,  n»  4950;  Fr.  5909,  f»  253;  JJ  176, 
fos  34  yo^  80,  82  v%  85;  Ghron.  Marlinienne,  f»  cclxxxvu. 

5.  Le  22  septembre,  la  ville  de  Paris  envoie  une  ambassade  au  roi,  à 
Pontoise,  pour  le  féliciter  de  la  prise  de  cette  place  (LL  414,  f"  104). 

6.  JJ  176,  f»  269;  JJ  177,  f»  15;  Fr.  20581,  n°«  23,  26;  Fr.  26068,  n»  4408  \ 
K  68,  n»  7.  Le  capitaine  d'Evreux  était  Fauquemberge.  Il  croyait  avoir  bien, 
pris  ses  mesures  de  vigilance;  mais  la  ville  fut  surprise,  grâce  à  deux 
pêcheurs  (K  66,  m^  1»,  1»;  Proceedings,  V,  153-154).  D'après  J.  Chartier  (t.  II,, 
17-18),  Floquet  avait  déjà  pris  Beaumont-le-Roger  et  le  château  de  Beauménil 
(arrondissement  de  Bernay)  [Fr.  26068,  n<"  4371,  4376].  Floquet  fut  nommé 
bailli  et  capitaine  d'Evreux  (Fr.  26069,  n»»  4419,  4502).  P.  de  Brézé  s'était 
signalé  aussi  à  la  prise  d'Evreux  (JJ  177,  f»  52).  En  octobre,  Charles  VII 
envoie  un  messager  à  Florence  annoncer  la  prise  de  Pontoise  et  d'Evreux 
aux  ambassadeurs  français  qui  étaient  auprès  du  pape  (K  67,  n"  7). 

7.  Xia  8605,  f»»  81,  125;  LL  218,  f»  166;  Le  Bourg,  de  Paris,  363-364 ;  Féli- 
bien,  II,  831-832;  J.  Chartier,  t.  II,  27;  Berry,  417. 


LE   ROI  REVIEIST  A   PARIS   (1441,   2o    SEPTEMBRE)  327 

siège  de  Pontoise,  les  prisonniers  liés  ensemble,  tête  et  pieds  nus, 
à  peine  couverts  de  misérables  haillons,  et  elle  accueillit  les 
vainqueurs  avec  une  joie  enthousiaste,  car  elle  se  sentait  enfin 
délivrée  de  l'oppression  anglaise  *,  Le  roi  séjourna  plus  d'un 
mois  à  Paris,  de  la  fin  de  septembre  au  commencement  de  no- 
vembre, s'occupant  de  remédier  aux  maux  dont  cette  ville  avait 
souffert  et  de  mettre  les  places  récemment  conquises  en  état  de 
défense  ^.  Quand  il  retourna  vers  la  Loire,  le  connétable  le  sui- 
vit .à  Amboise,  à  Chinon,  à  Saumur  ^,  s'efforçant  toujours  d'em- 
pêcher les  ravages  des  gens  de  guerre. 

Il  n'oubliait  pas  les  intérêts  de  sa  famille.  Son  neveu  Fran- 
çois, comte  d'Etampes  et  de  Vertus,  fils  de  son  frère  Richard, 
mort  en  1438,  réclamait  le  comté  d'Etampes,  donné  jadis  à 
Richard  par  Charles  VII  ^  et  détenu  par  Jean  de  Bourgogne, 
comte  de  Nevers.  Le  roi  somma  Jean  de  Bourgogne  de  restituer 
le  comté  d'Etampes  au  neveu  du  connétable  et  manifesta  ainsi 
ses  dispositions  iDienveillantes  au  duc  de  Bretagne.  Celui-ci  se 
montra  conciUant  quand  le  roi  voulut  mettre  un  terme  aux  dé- 
prédations commises  dans  le  Poitou  par  des  Bretons  qui  occu- 
paient les  places  de  Palluau  ^  et  des  Essarts  ",  réclamées  par  Isa- 
beau  de  Vivonne,  veuve  de  Charles  d'Avangour.  Jean  V  envoya 
ses  ambassadeurs  à  Saumur,  où  se  trouvaient  Charles  VII  et  Ri- 
chemont  ''.  Sans  entrer  dans  la  querelle  des  Monlfort  et  des  Pen- 
thièvre,  le  roi  décida  que  ces  places  seraient  mises  sous  la  garde 
du  connétable.  Le  duc  y  consentit  (décembre  1441  ^). 

Peu  après,  Richemont  se  rendit  en  Bretagne,  pour  régler 
d'importantes  affaires  de  famille.  Il  avait  institué  héritier  de  tous 
ses  biens  son  neveu  Pierre  de  Bretagne,  second  fils  de  Jean  V. 
Son  autre  neveu, François,  comte  de  Montfort,  fils  aîné  de  Jean  V,. 
se  montrait  jaloux  de  cette  préférence.  Il  prétendait  que  ces 

1.  En  septembre  1441,  les  habitants  de  Sentis  décidèrent  de  faire  écouler 
les  eaux  qni  entouraient  leur  ville,  attendu  que  Pontoise  et  Creil  s'étaient 
rendus  au  roi  et  que  les  Anglais  ne  tenaient  plus  aucunes  places  ni  for- 
teresses dans  l'Ile-de-France  (A.  Dernier,  Monuments  inédits,  documents 
sur  Senlis,  Sentis,  1834,  in-S",  p.  23).  Toutefois  les  Anglais  occupèrent 
encore,  pendant  plusieurs  années,  quelques  places  aux  environs  de  Paris 
(Y*  f"'  80-81). 

2.  JJ  176,  f»  270-273;  Fr.  23711,  n»'  143-146;  Y*  f"*  58  vo-63. 

3.  JJ  176,  f»  273;  Fr.  2o711,  n»  146. 

4.  Le  8  mai  1421,  à  Amboise  [Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  11,  E,  31  ;  voir 
Appendice  XV  et  ci-dessus,  p.  61). 

5.  Arrondissement  des  Sables-d'Olonne. 

6.  Arrondissement  de  La  Roche-sur- Yon. 

7.  Ils  y  étaient  encore  le  23  décembre  (JJ  176,  f»  273). 

8.  Berry,  417.  Richemont  était  encore  à  Saumur  le  23  décembre,  avec 
le  roi  (JJ  176,  f«  273j. 


328  JEAN  V  ABAISDOiNNE  LA  PRAGUERIE   (1442) 

dispositions  ne  pouvaient  s'appliquer  aux  terres  situées  en  Bre- 
tagne, et  Pierre  soutenait  le  contraire.  Pour  terminer  la  con- 
testation entre  les  deux  frères,  Richemont  déclara,  par  lettres 
données  à  Redon,  le  15  janvier  *,  que  le  comte  de  Montfort  héri- 
terait de  toutes  les  terres  qu'il  aurait  en  Bretagne  au  moment 
de  son  décès,  mais  que  les  domaines  qu'il  avait  présentement 
en  Poitou  et  ailleurs  passeraient  à  Pierre  et  reviendraient  à  Fran- 
çois après  la  mort  de  son  frère,  si  ce  dernier  mourait  sans  laisser 
des  héritiers.  Sur  ces  nouvelles  bases,  Jean  V  régla,  quelque 
temps  après  (16  février)  *,  le  partage  éventuel  de  la  succession 
du  connétable  entre  ses  deux  fils  ^. 

Ces  dispositions  ne  devaient  pas  être  exécutées,  car  Riche- 
mont  survécut  à  ses  deux  neveux  ;  mais  ses  bons  procédés  et 
ceux  du  roi  eurent  d'autres  résultats.  Le  duc  de  Bretagne  cessa 
de  prendre  part  à  la  Praguerie.  Ce  fut  une  grande  déception 
pour  les  autres  princes,  qui  recommençaient  alors  leurs  intri- 
gues et  leurs  conciliabules,  à  Hesdin,  à  Rethel  (octobre-dé- 
cembre 1441),  à  Nevers  (février  1442)  *.  Ils  exposèrent  au  roi, 
dans  une  longue  requête,  leurs  plaintes  et  leurs  réclamations; 
mais  ils  ne  purent  obtenir  que  le  duc  de  Bretagne  se  joignît  à- 
eux  ^.  Il  ne  parut  pas  aux  conférences  de  Nevers,  malgré  leurs 
pressantes  invitations. 

Charles  VII  voulait  dissoudre  la  coalition  féodale,  avant  de 
partir  pour  une  grande  expédition  contre  les  Anglais  dans  la 
Guyenne.  La  défection  de  Jean  V  fut  une  nouvelle  victoire  sur  la 
Praguerie.  Le  roi  fit  d'ailleurs  aux  mécontents  une  réponse 
pleine  de  sagesse,  de  modération  et  de  fermeté  '',  réfutant  les  ac- 
cusations injustes,  promettant  de  donner  droit  aux  réclamations 

1.  Appendice  LXXVII. 

2.  L'original  est  aux  Arch.  de  la  Loii^e-Inf.,  cass.  1,  E,  3. 

3.  Le  6  mai  1441,  Richemont  avait  déjà  cédé  à  son  neveu  François  la 
terre  d'Avangour  et  330  1.  de  rente  sur  la  seigneurie  de  Bourgneuf-en-Retz, 
contre  la  terre  de  la  Benaste,  dont  jouissait  alors  Anne  de  Sicile,  veuve 
de  J.  de  Craon.  Le  13  janvier  1442,  Jean  V  et  François  cédèrent  à  Riche- 
mont l'usufruit  de  la  terre  de  Bourgneuf-en-Retz,  en  attendant  que  la  châ- 
tellenie  de  la  Benaste  pût  lui  être  donnée  en  échange.  Les  deux  originaux 
sont  aux  Arch.  de  la  Loire-Infér.  (G.  1,  E,  3).  Voir  aussi  deux  autres  pièces 
du  U  janvier  et  du  16  février  1442,  relatives  à  cette  même  affaire  {ibidem). 

4.  Le  duc  d'Orléans  avait  convoqué  les  autres  princes  à  Nevers  pour  le 
28  janvier  (M.  d'Escouchy,  t.  III,  p.  37.  Voir  aussi  p.  1-4,  S2,  91;  Mons- 
trelet,  VI,  27-50;  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1349-13S4). 

5.  Cette  attitude  nouvelle  de  Jean  V  n'a  pas  été  assez  remarquée.  Elle 
a  pourtant  une  grande  importance.  Il  y  eut  alors  entre  le  roi  de  France 
et  le  duc  de  Bretagne  un  rapprochement  dont  le  connétable  et  Gaucourt 
furent  les  intermédiaires  (t.  III  de  M.  d'Escouchy,  Preuves,  p.  37,  38,  40, 
42-45,  47,  56,  59,  60,  64,  67,  68,  90-91;  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  34,  E,  93). 

6.  Monstrelet,  VI,  26-50. 


MORT   DE   LA  DUCHESSE  DE  GUYENNE    (1442,   2  FÉVRIER)        329 

fondées  et  leur  déclarant,  au  surplus,  que  «  se  il  povoit  estre  cer- 
tainement adverti  qu'ils  voulsissent  traictier  ou  faire  aulcune 
chose  contre  luy,  ne  sadicte  majesté,  il  lairoit  toutes  autres  be- 
songnes  pour  eulx  courre  sus  *.  »  Quant  à  la  paix,  qu'ils  ne  ces- 
saient de  réclamer,  le  roi  la  désirait  aussi  ;  il  ne  refusait  pas  plus 
qu'auparavant  de  négocier  avec  l'Angleterre  *  ;  mais  rien  ne 
pourrait  l'empêcher  de  faire  d'abord  l'expédition  qu'il  avait 
résolue.  Cette  habile  conduite  suffit  à  prouver  que  la  direction 
des  affaires  était  en  bonnes  mains.  Jamais  le  roi  n'avait  été 
aussi  puissant.  On  voit  qu'il  a  conscience  de  sa  force  et  qu'il  se 
sent  capable  de  combattre  à  la  fois  les  ennemis  du  dedans  et 
ceux  du  dehors. 

Ainsi,  tout  encourageait  le  connétable  à  marcher  dans  la 
même  voie,  quand  un  grand  malheur  vint  le  frapper.  Revenu  de 
Bretagne  à  Parthenay,  il  apprit  que  sa  femme,  la  duchesse  de 
Guyenne,  était  morte  à  Paris,  le  2  février^.  Richemont  perdait  la 
compagne  de  sa  jeunesse,  de  ses  années  d'épreuves,  celle  qui, 
veuve  d'un  dauphin  de  France,  l'avait,  par  son  choix,  élevé  au 
plus  haut  rang,  celle  qui  avait  encouragé  son  ambition,  hâté  sa 
fortune,  partagé  fidèlement  sa  disgrâce  et  secondé  ses  efforts. 
Le  rôle  de  cette  princesse  dépasse  la  sphère  du  foyer  domes- 
tique. En  travaillant  à  réconcilier  son  beau-frère,  Charles  VII, 

1.  MonsLrelet,  VI,  50.  Fr.  22333,  f<"  10-14.  llist.  de  Bourgogne,  IV,  230. 

2.  Sur  les  négociations  avec  l'Angleterre,  voir  Proceedings,  V,  163,  169, 
176;  M.  d'Escouchy,  III,  47-51,  57-58,  61-68,  91.  Ces  négociations  avaient 
même  continué   pendant  le  siège   de  Pontoise  (Fr.  26068,  n''4406;K  67, 

nos  142,    14i,    152), 

3.  Elle  mourut  à  l'hôtel  du  Porc-Epic,  après  une  longue  maladie  (Grnel, 
218;  le  Bourg,  de  Paris,  364-365).  Elle  était  déjà  fort  malade  à  l'époque  où 
Richemont  était  à  Paris;  mais  il  s'était  ensuite  produit  une  amélioration, 
qui  lui  avait  donné  bon  espoir.  Dans  un  testament,,  fait  le  dimanche 
14  janvier  et  dans  un  codicille  du  mercredi  31,  elle  avait  choisi  pour  ses 
exécuteurs  testamentaires  son  mari,  le  comte  de  Richemont,  son  frère,  le  duc 
de  Bourgogne;  J.  Guillepou,  chanoine  de  Notre-Dame  de  Paris  et  aumônier 
du  connétable,  Vincent  de  Crosses  ou  de  Croces  (Il  avait  été  reçu  chanoine 
de  Notre-Dame  de  Paris  [LL  218,  P  148)]  le  9  août  1441),  son  propre  aumônier, 
Guill.  de  Vendel,  son  maître  d'hôtel,  J.  Dardenay  son  secrétaire  et  argen- 
tier et  Etienne  Chevalier.  Elle  recommandait  ses  officiers  et  ses  serviteurs 
à  son  mari,  leur  laissait  des  dons,  notamment  à  Guill.  Gruel,  le  biographe 
du  connétable.  Elle  n'oubliait,  dans  ses  libéralités,  ni  les  églises,  ni  les  con- 
fréries, ni  les  enfants  trouvés  (LL  218,  f»  451)  ;  enfin  elle  déclarait  qu'elle 
voulait  que  son  corps  reposât  dans  l'église  Notre-Dame  des  Carmes,  à  Paris, 
et  que  son  cœur  fût  renfermé  dans  une  châsse  d'or  et  porté  à  Notre-Dame 
■de  Liesse.  Ce  testament  est  remarquable  par  les  sentiments  de  piété,  de 
résignation  et  de  repentir  qu'il  exprime  dans  un  langage  simple,  élevé, 
touchant.  Il  fut  fait  par  Jean  Quignon  et  Girard  de  Conflans,  notaires  du 
roi  au  Cbâtelet  de  Paris.  Il  y  en  a  une  très  belle  copie  aux  Arch.  de  la 
Loire-Inférieure,  cass.  9,  E,  24.  Voy.  Append.  LXXVIII. 


330  SOUMISSION  DU  DUC  d'orléans  (1442) 

avec  son  frère,  le  duc  de  Bourgogne,  en  préférant  à  la  cour  le 
séjour  de  Paris,  où  elle  représentait  en  quelque  sorte  la  famille 
royale,  elle  avait  rendu  service  au  roi,  à  la  France  et  mérité 
ainsi  une  place  dans  l'histoire  de  ce  règne  mémorable  *. 

Charles  VII  était  alors  dans  l'Ouest,  avec  l'amiral  de  Goëtivy, 
P.  de  Brézé,  le  maréchal  de  Jaloignes,  écrasant  les  débris  de  la 
Praguerie  dans  le  Poitou,  l'Angoumois,  l'Aunis  *,  la  Saintonge, 
enlevant  au  duc  d'Alençon  la  ville  de  Niort  et  réprimant  les  ra- 
vages des  bandes  qui  occupaient  encore  des  places,  dont  plu- 
sieurs appartenaient  à  La  Trémoille  et  au  duc  d'Orléans  ^  Après 
avoir  contribué  à  rétablir  l'ordre  dans  ces  provinces,  le  con- 
nétable vint  rejoindre  le  roi  à  Limoges.  C'est  là  que  le  duc 
d'Orléans  reparut  à  la  cour,  non  plus  en  rebelle,  mais  en  sujet 
soumis  *.  Comprenant  que  la  Praguerie  était  bien  vaincue,  il 
abandonnait  ses  alliés  pour  se  réconcilier  avec  le  roi.  Cette  nou- 
velle défection,  qui  coûta  cher  d'ailleurs  à  Charles  VII  ^  porta  le 
dernier  coup  à  la  ligue  féodale.  On  put  alors  entreprendre  la 
campagne  qui  avait  été  retardée  par  ces  derniers  événements. 

Il  s'agissait  de  faire  une  imposante  démonstration  dans  la 
Guyenne  et  la  Gascogne,  où  les  Anglais  .exerçaient  une  domi- 
nation trop  longtemps  incontestée.  Depuis  le  glorieux  règne  de 
Charles  V,  la  royauté  française  n'avait  pas  fait  de  tentative 
sérieuse  pour  montrer  sa  puissance  dans  ces  provinces  lointaines  ; 
elle  avait  eu  assez  à  faire  de  combattre  pour  son  existence.  Un 

1.  Charles  VII  donna  bientôt  à  la  reine  de  France  les  villes  de  Gien  et 
de  Sainte-Menehould,  que  ladnchesse  de  Guyenne  avait  eues  sa  vie  durant. 
Il  donna  ensuite  Gien  à  Ch.  d'Anjou,  avec  Saint-Maixent  et  autres  terres  du 
Poitou,  moins  l'hommage  de  Parthenay  (P.  2531,  f°s  213-213).  Il  confirma 
le  don  de  Fontenay  au  connétable  sa  vie  durant,  en  1442  et  en  1444, 
malgré  une  vive  opposition  du  procureur  général  Jouvenel  des  Ursins. 
(Voy.  Append.  LXXVIII  et  LXXVIII  bis.) 

2.  «  Pour  ce  que  ceulx  des  places  de  Guyenne  estans  delà  la  Charente 
avoient  de  grans  accointances  et  faveurs  avec  aucuns  de  la  dicte  ville  de 
Nyort  »  (t.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  43).  Le  roi  garda  cette  ville,  malgré  les 
réclamations  réitérées  des  princes,  en  promettant  toutefois  une  indemnité 
{Idem.,  p.  42,  Sl-52,  59-60,  68-70).  Le  comte  de  Huntingdon  venait  de  faire  une 
descente  en  Saintonge.  Il  fut  ensuite  nommé  gouverneur  de  Guyenne 
(JJ  177,  f»  138;  Rymer,  V,  1'"  partie,  114). 

3.  Par  exemple,  Mareuil  et  Sainte-Hermine,  qui  étaient  à  La  Trémoille; 
Saintes  où  était  Jacques  de  Pons;  Taillebourg,  que  gardait  Maurice  de  Plus- 
calec;  Verteuil-sur-Charente,  où  fut  assiégé  Guiot  de  La  Roche,  etc.  (Berry, 
p.  417-418). 

4.  Zia  14,  f»  44  V».  Le  connétable  était  à  Limoges  le  24  mai  (K  68,  w^  11, 
11  bis). 

5.  Sur  la  rançon  du  duc  d'Orléans,  voir  :  Berry,  418-419  ;Bernier,  Monum. 
inédits,  p.  24;  K  67,  n»  18.  K;  68,  n"  11,  11  bis;  Y*  f°  66;  Portef.  Fontanieu, 
119-120,  au  9  juin  1446;  Fr.  23711,  n»  204. 


ÉTAT  DE   LA  FRANCE  MÉRIDIONALE  EN  1442  331 

voyage  du  roi  dans  le  Languedoc,  en  1437,  une  courte  apparition 
dans  le  nord  de  cette  province,  en  1439,  ti'avaient  pas  eu  de 
résultats  appréciables.  La  Guyenne  était  aussi  Anglaise  que 
l'Angleterre  elle-même  ;  Bordeaux  n'avait  plus  rien  de  français; 
les  contrées  voisines,  Périgord,  Limousin,  Quercy,  Languedoc, 
étaient  menacées,  attaquées,  occupées  en  partie  par  les  ennemis, 
ou,  ce  qui  ne  valait  guère  mieux,  ravagées  par  les  troupes  mêmes 
que  le  roi  envoyait  pour  les  défendre  '.  Le  Languedoc  était,  pour 
les  routiers,  une  terre  promise,  dont  ils  mettaient  tous  les  revenus 
en  coupe  réglée  ^.  Les  grandes  maisons  féodales,  Albret,  Foix, 
Armagnac,  étaient  à  peu  près  indépendantes  et  faisaient  payer 
cher  leurs  services,  quand  il  leur  plaisait  de  les  accorder  '. 

Charles  II  d'Albret,  vicomte  de  Tartas,  comte  de  Dreux  et  de 
Gaurc,  de  même  que  son  frère,  Guillaume  d'Albret,  sire  d'Orval, 
tué  en  1429  à  la  bataille  de  Rouvray,  avait  fidèlement  combattu 
pour  la  France.  Ses  domaines^  voisins  des  possessions  anglaises, 
étaient  exposés  à  de  fréquentes  attaques,  surtout  depuis  que  le 
comte  de  Huntingdon  avait  amené  une  armée  en  Guyenne 
(1439).  L'expédition  du  Dauphin,  en  1439,  ne  lui  avait  apporté 
qu'un  secours  insuffisant.  En  1440,  les  Anglais  avaient  assiégé 
sa  ville  de  Tartas  *  et,  malgré  une  résistance  opiniâtre,  l'avaient 
réduite  à  capituler.  Il  avait  dû  signer  une  convention  qui  laissait 

1.  Par  exemple  Saintrailles,  Rod.  de  Villandrando,  le  bâtard  de  Bourbon 
(Fr.  2o711,  n»  157). 

2.  Guill.  de  Champeaux,  évêque  de  Laon,  qui  administrait  les  finances  de 
cette  province,  y  avait  commis  longtemps  les  exactions  les  plus  flagrantes 
(Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  II,  430-431).  La  nomination  de  Ch.  d'Anjou  au 
gouvernement  de  Languedoc  et  Guyenne  (S  juillet  1440)  n'avait  pas  remédié 
à  cet  état  de  choses  (K  67,  n»  2o,  et  Port.  Fonlanieu,  117-118,  à  la  date).  On 
a  pu  voir  que  Ch.  d'Anjou  ne  venait  pas  dans  son  gouvernement.  Il  y 
avait  pour  lieutenant  le  vieux  Tanguy  du  Chastel,  qui  n'avait  pas  une 
probité  bien  scrupuleuse  {Port.  Fontanieu,  117-118,  au  28  février  1443).  Sur 
la  triste  situation  de  Montpellier  à  cette  époque,  voy.  Fr.  23711,  n»  147. 
Sur  les  pillages  dans  le  Languedoc,  Fr.  25711,  n»  150,  et  K  G7,  n»»  13, 
13  fjis;  Fr.  26069,  n»  4437;  D.  Vaissète,  IV,  487-495. 

3.  Le  19  janvier  1438,  Charles  VII  donne  au  sire  d'Albret  une  pension  de 
12  000  1.  t.  par  an  (t.  XXV  des  Pièces  orig.,  n»  167).  En  1440,  7  juin, 
il  donne  au  sire  d'Albret  la  seigneurie  de  Saint-Sulpice  (c.  de  Carbonne, 
arrondissement  de  Muret),  pour  le  dédommager  des  pertes  qu'il  a  faites 
en  combattant  les  Anglais  (D.  Vaissète,  IV,  493.  Dans  le  reg.  JJ  176,  f»  268, 
on  trouve  la  date  du  16  novembre  1441). 

4.  Arrondissement  de  Sain t-Sever  (Landes).  D'après  Vallet  de  V.,  le  siège 
avait  commencé  vers  juillet  ^44/  et  avait  duré  six  mois,  ce  qui  porterait  la 
capitulation  à  la  fin  de  décembre  1441  (Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  II, 
p.  437).  Or,  dans  un  document  authentique  du  mois  de  janvier  1 44^,  on 
voit  que  le  roi  avait,  depuis  plus  de  deux  mois,  signifié  cette  journée  aux 
Anglais,  «  ainsi  que  le  traictié  le  portoit  »,  et  qu'il  en  avait  «  baillé  son 
scelé  »  (t.  m  de  Math.   d'Escouchy,  p.  36-37,  43). 


332  NÉCESSITÉ   d'une  expédition   en  GUYENNE    (1442) 

à  son  fils,  Charles  d'Albret,  Tartas  et  les  places  voisines,  dans 
un  rayon  de  quatre  lieues,  mais  en  le  soumettant  à  la  tutelle 
d'un  conseil  et  à  la  suzeraineté  du  roi  d'Angleterre  (20  jan- 
vier 1441).  Cet  arrangement  avait  été  conclu  pour  vingt  ans. 
Chaque  partie  avait  la  faculté  de  le  dénoncer,  en  avertissant 
l'autre,  trois  mois  à  l'avance,  et  on  devait  remettre  Tartas  à 
celui  qui,  au  jour  fixé,  serait  le  plus  fort  devant  cette  ville  ^ 

Dès  lors,  le  principal  soin  du  roi  avait  été  de  préparer  l'ex- 
pédition de  Guyenne.  Il  voulait  partir  vers  le  l^''  mars,  pour 
arriver  près  de  Tartas  au  commencement  d'avril  et  avoir  le 
temps  d'appeler  à  lui  ses  vassaux  du  Midi,  avec  toutes  leurs 
forces;  mais  les  dernières  menées  de  laPraguerie  avaient  retardé 
son  départ,  et  d'ailleurs,  sur  la  proposition  des  Anglais  eux- 
mêmes,  la  journée  de  Tartas  avait  été  remise  à  la  Saint-Jean- 
Baptiste,  c'est-à-dire  au  24  juin  1442  ^ 

Un  autre  motif  de  cette  expédition  en  Guyenne  et  Gascogne, 
c'était  l'inquiétude  qu'inspirait  au  roi  la  conduite  du  comte  d'Ar- 
magnac ,  Jean  IV ,  fils  aîné  du  fameux  connétable  tué  à  Paris 
en  1418.  Pendant  que  son  frère  Bernard,  comte  de  Pardiac  et  de 
La  Marche,  continuait  de  servir  la  France,  avec  un  dévouement 
inaltérable,  Jean  IV  abandonnait  Charles  VII  et  s'alliait  avec  les 
Anglais  ^.  Encouragé  par  les  princes,  pendant  la  Praguerie,  il 
négociait  un  mariage  entre  le  roi  Henri  VI  et  une  de  ses  filles. 
Les  conseillers  du  jeune  roi  pensaient,  comme  Glocester,  que 
l'alliance  d'un  des  plus  puissants  seigneurs  du  Midi  pouvait  re- 
lever la  fortune  chancelante  de  l'Angleterre,  au  moment  où  celle 
de  la  France  faisait  des  progrès  alarmants  *. 

1.  Sur  les  instances  du  sire  d'Albret,  Charles  VII,  qui  était  alors  à  Saumur, 
fit  savoir  aux  Anglais  qu'il  serait  le  l""^  mai  devant  Tartas.  Voir  les  notes 
ci-dessus  et  Legrand,  t.  I  (Fr.  6960),  f»  32-33.  Il  donne  la  traduction  du 
traité  du  20  janvier  1441  dans  le  t.  I  de  ses  Preuves  (Fr.  6963),  f»»  131-140. 

2.  On  ne  comprend  pas  tout  d'abord  que  les  Anglais  aient  demandé  ce 
délai,  mais  cela  s'explique  par  la  détresse  financière  qui  les  empêchait 
d'envoyer  des  troupes  en  Guyenne.  Ils  avaient  l'intention  de  paraître  à  la 
journée  de  Tartas,  mais  ils  avaient  grand  besoin  de  renforts.  Monstrelet 
dit  formellement  que  les  Anglais  demandèrent  ce  délai  (Mat.  d'Escouchy,  III, 
36-39,  43-46,  48,  33,  63;  Monstrelet,  VI,  31)  En  avril  1442,  les  états  de  Lan- 
guedoc, assemblés  à  Montpellier,  octroient  une  aide  de  100  000  1.  pour 
«  l'entretenement  »  de  l'armée  qui  va  en  Guyenne,  à  la  journée  de  Tartas 
(Fr.  23711,  n"^  130,  162,  168,  et  K  67,  n"»  13  et  13  bis;  K  68,  n°  16). 

3.  Jean  IV  avait  conclu  un  traité  avec  Henri  VI  dès  1437  (Voy.  la  pré- 
face du  t.  V  des  Proceedings,  p.  xcvi). 

4.  Jean  IV  était  beau-frère  de  Charles  d'Orléans  et  beau-père  du  duc 
d'Alençon.  Le  premier  avait  épousé  sa  sœur,  Bonne  d'Armagnac,  en  1410, 
le  second  sa  fille,  en  1437.  Il  était  aussi  beau-frère  de  Richement  et  de 
Jean  V,  dont  il  avait  épousé  la  sœur,  Blanche  de  Bretagne,  en  1406.  Sa 
deuxième  femme  était  une  cousine  germaine  de  Richemont,  Isabelle  de 


SITUATION   DIFFICILE   DES  ANGLAIS   EN   1442  333 

On  voit  que  la  campagne  de  Guyenne  était  nécessaire,  à  tous 
égards.  Si  le  roi  eût  manqué  à  la  journée  de  Tartas,  «  il  estoit  en 
péril  et  en  adventure  de  perdre,  es  pays  de  Guienne  et  de  Gascon- 
gne,  très  grant  partie  des  seigneuries  à  luy  obéissans  et,  avec  ce 
les  nobles  d'yceulx  pays  *.  »  L'année  précédente,  cette  expédition 
lointaine  eût  été  impossible,  mais  la  prise  de  Pontoise  avait 
changé  la  situation.  Les  Anglais  avaient  assez  à  faire  de  défendre 
la  Normandie,  sans  menacer  encore  l'Ile-de-France.  D'ailleurs 
la  détresse  financière,  le  mécontentement  qui  se  traduisait,  en 
Angleterre  même,  par  des  révoltes,  mettaient  le  gouvernement 
anglais  dans  le  plus  grave  embarras. 

Tandis  que  Charles  VII  trouvait  assez  de  ressources  pour  com- 
battre les  ennemis,  au  nord  comme  au  sud,  les  conseillers  de 
Henri  VI  se  reconnaissaient  impuissants  à  envoyer  des  renforts  sur 
tous  les  points  et  ne  parvenaient  même  pas  à  organiser  une 
armée  pour  la  défense  de  la  Guyenne.  Ils  continuaient  des  pour- 
parlers avec  Charles  VII,  au  moment  où  ce  prince  portait  la  guerre 
dans  le  Midi  *. 

Navarre,  fille  du  roi  Charles  III.  Les  ducs  d'Orléans,  de  Bretagne  et  d'Alen- 
çon  avaient  engagé  des  négociations  relatives  au  mariage  d'une  fille  de 
Jean  IV  d'Armagnac  avec  Henri  VI,  comme  le  prouvent  leurs  lettres  signées 
et  scellées.  On  supposa  en  Angleterre  que  William  de  La  Pôle,  comte  de  Suf- 
folk,  qui  désapprouvait  cette  alliance,  avait  dénoncé  ce  projet  à  Cliarles  VII; 
mais,  en  admettant  cette  supposition,  il  est  bien  certain  que  cette  pré- 
tendue dénonciation  ne  fut  pas  la.  cause  de  l'expédition  de  Guyenne.  Au 
mois  de  juillet  1442,  l'évèque  Th.  Beckington  fut  envoyé  avec  Robert  Roos 
à  Bordeaux,  pour  négocier  le  mariage  projeté,  et  ils  y  restèrent  jusqu'en 
janvier  1443.  Nous  avons  le  journal  de  cette  ambassade.  Il  fournit  de  pré- 
cieux renseignements  sur  les  menées  du  comte  d'Armagnac,  sur  l'état  de  la 
Guyenne  et  sur  les  principaux  événements  qui  signalèrent  l'expédition  de 
Charles  VII  {Journal  by  one  of  the  suite  ofTh.  Beckington,  edited  by  Harris- 
Nicolas,  London,  1828,  un  vol.  in-S",  avec  une  bonne  préface.  — Voir  p.  40 
et  suiv.  et  p.  xLvi-XLVu  de  la  préface;  M.  d'Escouchy,  Preuves,  t.  III*  p.  43; 
Brunet,  Journal  d'un  ambassadeur  anglais  à  Bordeaux,  Paris,  Techener,  1842. 
(C'est  la  traduclion  partielle  du  journal  anglais,  avec  de  bonnes  notes  à  la 
suite.)  Voir  aussi  la  préface  du  t.  V  des  Proceedings,  p.  xcvi  ;  Rymer, 
t.  V,  1"  partie,  p.  112-113;  Sharon-Turner,  t.  III,  p.  137-138;  Bréquigny, 
82,  î-o  135-137). 

1.  Monstrelet,  VI,  31. 

2.  En  novembre  et  décembre  1441,  les  Français  de  Louviers  et  de  Con- 
ches  menacent  plusieurs  villes  de  Normandie,  Harfleur,  Caen,  Ronfleur, 
Caudebec  (Fr.  26069,  n»»  4429,  4433;  Proceedings,  V,  162,  163).  En  1442, 
ils  veulent  attaquer  Pont-de-1'Arche,  Pont-Audemer,  Lisieux,  où  ils  ont 
des  intelligences,  et  prennent  Gigors.  Ils  veulent  aussi  s'emparer  de 
Chaumont-en-Vexin  et  se  concentrent  au  Neubourg,  entre  Louviers  et 
Couches,  sous  Fauquemberge.  Talbot,  envoyé  par  le  duc  d'York  en  Angle- 
terre, obtient,  à  grand'peine,  quelques  renforts  (Fr.  23776,  n°>  1559,  1565, 
1566,  1568,  1373;  Fr.  26069,  n"  4488,  4523,  4527,  4534,  4535,  4547,  4356, 
4571;  4576,  4577,  4580,  4583,  4594,  4598  ;Por<.  Fontanieu,  117-118;  à  la  date 


334  PRÉPARATIFS   DÉ   l'EXPÉDITION   DE   GUYENNE    (1442) 

Quand  tout  fut  prêt,  Richemont  alla  rejoindre  le  roi  à  Limoges 
(mai).  Il  avait  d'abord  eu  l'intention  de  retourner  dans  son  gou- 
vernement de  l'Ile-de-France  %  pour  diriger  la  guerre  dans  le 
Nord  ;  mais  la  campagne  de  Guyenne  exigeant  un  grand  déploie- 
ment de  forces,  la  présence  du  connétable  fut  jugée  nécessaire. 
Comme  le  passage  d'une  trop  grande  multitude  de  gens  de 
guerre  eût  été  ruineux  pour  les  pays  qu'il  fallait  traverser  ^, 
on  décida  que  le  roi  irait  par  une  route  et  le  connétable  par 
l'autre.  Afin  d'éviter  l'ennemi,  on  ne  marcha  pas  directement 
sur  Tartas  par  la  Guyenne  et  la  Gascogne;  on  prit  Toulouse 
comme  lieu  de  concentration.  Le  roi  y  conduisit  une  partie  des 
troupes  par  Villefranche-en-Rouergue,  le  connétable  l'autre 
partie  par  l'Auvergne  ^. 

Jamais  Charles  VII  n'avait  eu  armée  comparable  à  celle  qui  se 
trouva  réunie  à  Toulouse,  vers  le  milieu  de  juin  1442.  Il  y  avait 
là  au  moins  30  000  combattants,  avec  une  artillerie  formidable  *. 
A  côté  du  roi  et  du  Dauphin  se  voyaient  les  plus  gands  seigneurs 
de  France,  le  connétable,  Charles  d'Anjou,  les  comtes  de  La 
Marche,  d'Eu  et  de  Foix,le  sire  d'Albret,  le  vicomte  de  Lomagne, 
fils   aîné  du  comte   d'Armagnac ,   le   maréchal  de  Jaloignes , 

du  7  mai  1442:  K  67,  n<>s  13,  15,  I9,li2,n°«  12  S9,  76,  78;  pr.  26070,  n»^  4693  ; 
Proceedings,  t.  V,  186-187. 

Détresse  financière  et  révoltes  en  Angleterre  :  Fr.  26069,  n»  4339;  J.  Ste- 
venson, t.  I,  p.  431;  Proceedings,  t.  V,  p.  191,  199-203,  et  préface, 
p.  xcvii-c  et  cxx-cxxvii. 

Mesures  prises  par  Gliarles  VU  pour  la  défense  de  la  Normandie,  de  l'Ile- 
de-France,  de  la  Beauce  :  Fr.  237H,  n°  162;  Fr.  26069,  n°  4430;  Fr.  26070, 
n»  4620;  K  67,  n»  8;  Port.  Fontanieu,  117-118,  au  5  mai  1442,  et  Port.  Font., 
119-120,  au  30  avril  1443;  t.  III  de  Mat.  d'Escouchy,  p.  68;  Dernier,  p.  23. 
Réponse  du  roi  aux  prince^,  dans  Monstrelet,  VI,  26-50,  ou  D.  Morice,  t.  II 
des  Preuves,  col.  1349-1334.  Sur  les  pourparlers  entre  Henri  VI  et  Gliar- 
les VII,  Proceedings,  t.  V,  préface,  p.  xciv). 

1.  Gruel,  218.  Par  lettres  du  2  mars,  données  à  Lusignan,  Charles  VII 
commet  Simon  Gharles,  chevalier,  président  à  la  Cour  des  comptes,  et 
Guichard  de  Lisle,  écuyer,  son  maître  d'hôtel,  au  gouvernement  de  l'Ile- 
de-France,  de  la  Normandie  et  de  la  Picardie  (Fr.  6963  [Legt-and,  t.  VI], 
f  99  v). 

2.  Il  y  eut  des  provinces,  le  Limousin,  par  exemple,  qui  payèrent  pour 
que  les  troupes  n'entrassent  pas  sur  leur  territoire  (Glairamb.,  t.  187, 
f""  7031-7033).  Néanmoins  les  compagnies  de  Ghabannes  et  de  Floquet  y 
commirent  les  plus  cruels  ravages  (Zia  14,  P^  229,  231  ;  Zia  15,  fo»  3.5). 

3.  L'argent  dont  le  connétable  avait  besoin  fut  fourni,  en  partie,  par 
l'abbé  de  Saint-Maixeut  et  par  les  chapelains  de  Villefranche-en-Rouergue, 
qui  avaient  à  payer  des  droits  d'amortissement.  Voir  deux  lettres  de  la 
reine  dans  le  Port.  Fontanieu,  117-118,  aux  dates  du  26  et  du  27  mai.  Une 
autre  lettre  d'un  particulier  prouve  que,  même  à  ce  moment,  La  Trémoille 
excitait  encore  des  troubles  dans  le  Poitou,  où  ses  gens  occupaient  la  ville 
de  Lusignan  {Ibid.,  lettre  du  28  mai). 

4.  Fr.  2497  (nouv.  acquis.),  f"  2  v".  - 


LA  JOURNÉE   DE  TARTAS   (1442,    23  JUIN)  335 

l'amiral  Prigent  de  Goëtivy  *,  P.  de  Brézé,  sénéchal  de  Poitou,  et 
les  plus  vaillants  capitaines  de  routiers,  Saintrailles,  La  Hire, 
Antoine  de  Ghabannes,  etc. 

Le  roi  partit  de  Toulouse,  avec  la  moitié  de  l'armée.  Le  conné- 
table marchait  à  l' avant-garde.  Le  22  juin,  ils  arrivaient,  par 
deux  routes  différentes,  à  Meilhan  ^  petite  ville  située  à  environ 
deux  lieues  au  nord-est  de  Tartas.  Le  lendemain  matin,  samedi 
23  juin  ^,  l'armée  française  était  rangée  en  bataille  devant  la 
ville  de  Tartas.  Elle  attendit  vainement  les  Anglais,  qui,  se 
voyant  trop  faibles,  n'osèrent  paraître.  Le  sire  de  Conac  vint 
remettre  au  roi  les  clefs  de  la  place  et  celui  des  fils  de  Charles 
d'Albret  qui  était  resté  en  otage  *.  La,  Journée  de  Tartas  eut  un 
grand  retentissement.  Elle  donna  au  roi  et  à  la  royauté  un  pres- 
tige tout  nouveau;  elle  déconcerta  les  Anglais  et  leur  allié  le 
comte  d'Armagnac;  elle  prépara  d'autres  succès. 

Le  roi  alla  loger  à  Gauna  ^  et  le  connétable  à  Souprose  ^. 
Après  y  avoir  séjourné  le  dimanche,  ils  repartirent  le  lundi  et 
allèrent  mettre  le  siège  devant  Saint-Sever  ',  place  très  forte, 
défendue  par  cinq  enceintes  '.  Les  deux  premières  .furent  prises 
par  les  gens  du  Dauphin,  la  troisième  et  la  quatrième  par  les 
gens  du  roi.  Le  château  fut  assailli,  sans  que  personne  en  eût 
donné  l'ordre,  et  pris,  après  quatre  heures  de  combat  acharné. 
Quand  il  fallut  attaquer  la  dernière  enceinte,  Charles  VII,  pour 
se  réserver  tout  l'honneur  de  la  victoire,  manda  au  connétable 
de  ne  point  faire  donner  ses  gens. 

Bientôt  le  roi,  voyant  ses  troupes  repoussées,  ordonna  au  conné- 
table d'envoyer  les  siennes  à  l'assaut.  Ilichemont  avait  éprouvé 
une  si  vive  contrariété  qu'il  fut  sur  le  point  de  ne  pas  obéir; 
pourtant,  il  lança  ses  Bretons,  qui  escaladèrent  les  murs  avec 
une  impétuosité  irrésistible  et  firent,  les  premiers,  irruption  dans 
la  ville.  Les  assiégés,  qui  résistaient  encore,  furent  tués  sur  les 
remparts,  et  les  gens  du  roi  purent  ainsi  pénétrer  dans  la  place, 
où,  comme  le  disait  le  Dauphin,  ils  ne  seraient  jamais  entrés,  si 


i.  Fr.  25711,  n»  156. 

2.  Canton  est  de  Tartas. 

3.  Gruel,  218,  et  Xi»  4799,  f»  100. 

4.  X'a  4799,  f"  124.  Martial  d'Auvergne,  I,  195-197.  Chron.  Marlinienne, 

i"  CCLXXXVII  v». 

5.  Canton  de  Saint-Sever. 

6.  Canton  est  de  Tartas. 

7.  Charles  VII,  étant  devant  Saint-Sever, le  29  juin,  accorda  au  comte  de 
Montfort  et  à  Pierre  de  Bretagne  un  délai  d'un  an  pour  lui  faire  hommage 
(Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass,  33,  E,  90). 

8.  Cinq  fermetez,  dit  Monstrelet. 


336         PUISE  DE   ST-SEVER  ET   SIÈGE  DE   DAX   (4442,   JUILLET) 

les  Bretons  ne  leur  eussent  donné  la  main  ^  Beaucoup  d'Anglais 
périrent.  Les  Français  perdirent  peu  de  monde  et  ne  firent  qu'un 
petit  nombre  de  prisonniers,  parmi  lesquels  se  trouvait  Thomas 
Rampston,  sénéchal  de  Guyenne. 

Le  connétable  et  le  comte  de  La  Marche  se  distinguèrent  par 
leur  humanité,  non  moins  que  par  leur  courage.  Ils  firent  les 
plus  grands  efforts  pour  protéger  contre  la  férocité  des  gens  de 
guerre  les  malheureux  habitants,  surtout  les  femmes.  Ils  failli- 
rent même  être  tués,  pendant  la  nuit,  en  s'opposant  aux  fureurs 
bestiales  de  quelques  soldats  qui  ne  les  avaient  pas  reconnus. 
Des  mères,  folles  d'épouvante,  avaient  abandonné  leurs  petits 
enfants.  Richemont,  saisi  de  pitié,  prit  soin  d'eux  et  fit  amener 
des  chèvres,  afin  qu'on  pût  les  allaiter.  On  est  heureux  de  signaler 
quelquefois  des  traits  de  ce  genre.  Ils  prouvent  que  toute  sensi- 
bilité n'était  pas  éteinte  dans  le  cœur  des  rudes  hommes  de 
guerre  de  cette  époque  *. 

Le  roi  laissa  au  connétable  la  garde  de  cette  ville,  où  il  s'était 
comporté  si  glorieusement.  Il  se  dirigea  ensuite  sur  Dax,  pen- 
dant qu'une  .autre  partie  de  l'armée  s'avançait  dans  la  direction 
de  Bordeaux  (juillet).  Tout  le  pays  des  Landes,  moins  Bayonne 
et  Dax,  fut  bientôt  soumis.  Les  partisans  de  l'Angleterre  fai- 
saient défection  ;  la  grande  ville  de  Bordeaux,  se  croyant  elle- 
même  menacée ,  hâtait  ses  préparatifs  de  défense.  Malheu- 
reusement l'armée,  quoique  divisée  en  plusieurs  corps,  avait 
grand 'peine  à  se  procurer  des  vivres  et  souffrait  beaucoup  de  la 
disette.  Le  connétable  lui-même  n'avait  à  manger  que  des 
oignons  et  du  pourpier,  avec  très  peu  de  pain  et  de  vin.  C'est  dans 
ce  triste  état  que  les  troupes  allèrent  assiéger  Dax,  qui  passait 
pour  la  plus  forte  place  de  la  Guyenne  '.  Un  autre  désavan- 
tage qui  fut  souvent  funeste  aux  Français,  dans  toutes  les  guerres 
de  cette  époque,  c'est  qu'ils  avaient  trop  peu  d'archers,  tandis 
que  les  Anglais  en  avaient  beaucoup  et  d'excellents. 

Le  siège  de  Dax  dura  plus  de  trois  semaines  et  fut  des  plus 
difficiles.  Les  vivres  manquaient  ;  les  assiégés  faisaient  de  fré- 

1.  Gruel,  218-219,  Berry,  p.  420,  et  Monstrelet,  VI,  54,  disent  aussi  que  les 
gens  du  conaétable  entrèrent  les  premiers  dans  Saiat-Sever.  On  lit  dans  le 
registre  Xia4799,  f"  124  (Parlement)  :  «  Lundi,  23  juillet,  non  fuit  litigatum, 
sed  cantatum  Te  Deum  laudamus  pro  recuperatione  ville  de  Tartaz  et  cap- 
tione  de  Saint-Sever,  que  le  Roy  a  prinse  d'assault,  en  Gascoigne.  » 

2.  Il  y  en  a  un  semblable,  mentionné  dans  une  lettre  de  Dunois  à 
Mme  de  Dampierre.  Cette  lettre  a  été  publiée  par  M.  Clément  dans  son 
ouvrage  sur  J.  Cœur,  p.  52,  note  2;  Gruel,  219. 

3.  Which  is  holden  the  strengest  of  ail  Guienne,  dit  le  Journal  de  Becking- 
ton,  p.  27.  C'était  vers  la  fin  de  juillet  1442  (JJ 176,  fos  100  v",  111  ;  compte 
de  Jean  de  Rosnyvinen). 


DA\   SE   REND  A  CHARLES  VII   (1442,   AOUT)  337 

quentés  sorties,  pendant  lesquelles  leurs  archers  venaient  «  jus- 
qu'à la  pointe  de  la  lance  '  »  tirer  sur  les  Français.  Le  conné- 
table faisait  tout  son  possible  pour  adoucir  les  soufl'rances  de 
ses  gens  et  partageait  avec  eux  ce  qu'il  avait.  Une  pipe  de  vin, 
qu'il  s'était  procurée  à  haut  prix,  «  luy  dura  plus  que  jamais 
vin  ne  luy  avoit  duré,  car  tout  homme  qui  en  envoyoit  quérir 
avoit  sa  bouteille  remplie,  pourveu  qu'il  apportast  une  bouteille 
d'eau  pour  mettre  par  la  bonde  ^.  »  Les  assiégés  étaient  néan- 
moins serrés  de  près  et  ne  recevaient  pas  de  secours.  Dans  les 
premiers  jours  d'août,  quand  l'artillerie  eut  ouvert  des  brèches 
au  principal  boulevard  de  la  ville,  les  gens  du  Dauphin  donnè- 
rent l'assaut  et  s'emparèrent  de  ce  poste  important,  ainsi  que 
d'une  tour.  Le  lendemain,  la  ville  allait  être  elle-même  assaillie, 
quand  le  connétable  et  le  comte  de  La  Marche,  pour  lui  épargner 
de  plus  grands  maux,  déterminèrent  la  garnison  à  se  rendre, 
sans  condition. 

La  prise  de  Dax  jeta  la  consternation  parmi  les  Anglais.  Des 
ambassadeurs,  envoyés  par  Henri  VI  au  comte  d'Armagnac  et 
qui  étaient  restés  à  Bordeaux,  firent  partir,  en  toute  hâte,  un 
messager  pour  l'Angleterre  (vendredi  10  août).  Ils  disaient  que 
le  Dauphin  assiégeait  Bayonne,  avec  le  connétable  et  le  maré- 
chal de  Gulant,  que  les  Français  allaient  marcher  sur  Bordeaux 
etque  tout  était  perdu,  si  l'on  n'envoyait  d'Angleterre  de  prompts 
secours.  Le  Conseil  du  roi  mit  plus  d'un  mois  à  répondre,  tant 
était  grande  la  difficulté  de  réunir  et  de  payer  des  troupes. 
Enfin,  le  ^t  septembre,  les  habitants  de  Bordeaux  furent  infor- 
més que  le  comte  de  Somerset  était  chargé  de  conduire  une  puis- 
sante armée  en  Guyenne,  mais  ils  attendirent  vainement  ;  cette 
armée  ne  vint  pas.  Le  Conseil  d'Angleterre  s'occupait  plutôt  de 
négocier  avec  Charles  VII  que  de  lever  des  troupes  '. 

1.  Gruel,  219. 

2.  Gruel,  219. 

:{.  Outre  les  détails  donnés  par  Berry,  Monsirelet  et  Gruel,  qui  fit  cette 
rainpagne  avec  le  connétable,  nous  avons,  sur  ces  événements,  deux  sour- 
ces précieuses  d'informations.  L'une  est  la  relation,  déjà  indiquée,  d'une  am- 
bassade envoyée  par  Henri  VI  au  comte  d'Armagnac  et  qui  arriva  le  16  juillet 
à  Bordeaux,  où  elle  resta  jusqu'au  10  janvier  1443;  l'autre  est  une  copie  des 
Comptes  de  l'eschansonnerie  du  roy  Charles  VU  au  voyage  et  guerre  de  Gas- 
coigne,  aux  années  I4i^  et  1 4^i^.  L'auteur  de  ces  comptes,  Jean  de  Rosny- 
vinen,  était  premier  échansoii  du  roi.  Il  avait  été  institué  à  cet  office  le 
26juillet  1 WO,  par  lettres  données  à  Gharlieu(Fr.  696o,  f"  101).I1  était  échanson 
du  Dauphin  en  1422  (KK  53,  f"  76).  Le  registre  original  qui  avait  été  offert  à 
l'impératrice  par  M.  le  marquis  de  Rosnyvinen-Piré  a  été  détruit  en  1871, 
dans  l'incendie  de  la  bibliothèciue  du  Louvre,  mais  il  en  reste  vme  excel- 
lente copie,  faite  par  M.  Quesnet,  le  savant  archiviste  de  rille-et-Vilaine. 
Ce  document  permet  de  suivre,  jour  par  jour,  Charles  Vil,  depuis  le  mois 

RiCIIEMONT.  2^ 


338         RICHEMONT  ÉPOUSE   JEAiNNE   d'ALBRET    (1442,    29   AOUT) 

Charles  VII  passa  quelques  jours  à  Dax  et  en  partit  le  vendredi 
17  août  pour  Agen.  Arrivé  dans  cette  ville,  le  mercredi  29,  il  y 
séjourna  jusqu'au  samedi  15  septembre.  A  cause  de  la  difficulté 
de  faire  vivre  les  troupes,  le  connétable  avait  pris,  par  Mont- 
de-Marsan,  une  autre  route,  au  nord  de  celle  que  suivait  le  roi  ' . 
C'est  à  ce  moment  que  Richemont  épousa  la  plus  jeune  fille  du 
sire  d'Albret.  Jeanne  d'Albret  était  nièce  du  comte  de  La  Mar- 
che ^,  qui  avait  engagé  plusieurs  fois  le  connétable  à  ce  mariage. 
Celui-ci  se  rendit  alors  de  Mont-de-Marsan  à  Nérac,  où  se 
trouvaient  le  comte  de  La  Marche  et  le  sire  d'Albret  avec  sa 
femme  et  sa  fille.  «  Et  ceste  nuict  souppa  avec  les  dames,  et  les 
veid  à  son  aise  et  dansèrent^.  »  Pourparlers,  fiançailles,  épou- 
sailles, tout  fut  conduit  avec  une  rondeur  et  une  précision  mili- 
taires. La  campagne  n'en  fut,  pour  ainsi  dire,  pas  interrompue. 
Richemont  était  attendu  par  le  roi  et  n'avait  pas  de  temps  à 
perdre.  Le  mariage  fut  célébré  le  29  aoûL  1442.  Cette  alliance, 
flatteuse  pour  la  maison  d'Albret,  ne  pouvait  être  que  profitable 
à  la  France.  Pour  Artur  de  Bretagne  elle  était  beaucoup  moins 
brillante  que  son  premier  mariage.  Le  sire  d'Albret  lui  céda 
bien  le  comté  de  Dreux,  donné  jadis  à  son  père  par  Charles  VI 

de  juillet  1442,  jusqu'à  la  lin  de  juin  1443.  11  est  intéressant  de  le  com- 
parer avec  le  journal  des  ambassadeurs  anglais,  Thomas  Beckinglon  et 
Robert  Roos.Lcs  deux  documents  sont,  en  général,  d'accord  pour  les 
dates.  Le  journal  anglais  donne  beaucoup  plus  de  détails  historiques,  no- 
tamment des  lettres  des  ambassadeurs,  du  comte  d'Armagnac,  de  son  secré- 
taire Jean  de  Batute  (voir  la  lettre  de  Beckington  du  23  juillet,  p.  13-17: 
le  message  du  10  août,  p.  26-27). 

Dans  la  nuit  du  mercredi  l"""  août,  130  Français,  venus  de  Talmont  et  de 
Royan,  dans  6  gabarres,  allèrent  jusqu'à  Bordeaux  et  prirent,  sans  oppo- 
sition, un  grand  vaisseau  et  un  autre  bâtiment  plus  petit,  mais  on  les 
leur  reprit  vers  Royan.  {Journal,  p.  25-26.) 

Promesses  de  secours  aux  Bordelais,  p.  54,  57  du  Journal. 

Négociations  avec  Charles  VII  :  Proceedings,  t.  V,  p.  215,  et  Préface,  p.  cn-cv  : 
Rymer,  t.  V,  1"  partie,  p.  114-117.  Dans  les  lettres  du  9  septembre,  par 
lesquelles  Henri  YI  donne  pouvoir  à  ses  ambassadeurs  de  traiter  avec 
Charles  VII,  il  n'appelle  plus  ce  prince  le  soi-disant  Dauphin  de  Viennois,, 
ou  Vadversaire,  mais  illustrissimus  princeps  Carolus,  avunculus  noster 
(Rymer,  114-115). 

1.  Le  roi  passa  par  Mugron  le  18  août,  Saint-Sever  le  19,  Nogaro  le  21. 
Eauze  le  22,  Montréal  le  23,  Condom  le  24-27,  la  Plume  en  Armagnac  le  28, 
et  arriva  le  mercredi  29  à  Agen  (Comptes  de  J.  de  Rosnyvinen).  C'est  encore 
aujourd'hui,  excepté  Montréal,  la  grande  route  d'Agen  à  Tartas. 

2.  Elle  était  fille  de  Charles  II  d'Albret  et  d'Anne  d'Armagnac,  sœur  de 
Bernard  d'Armagnac,  comte  de  Pardiac  et  de  La  Marche  (Anselme,  VI. 
212-213).  Le  contrat  de  mariage  d' Artur  de  Bretagne  et  de  Jeanne  d'Al- 
bret avait  été  conclu  pendant  le  siège  de  Dax  et  avant  le  28  juillet,  car,  à 
cette  date,  Richemont  fait  remise  au  sire  d'Albret  d'une  somme  de 
30  000  écus  d'or,  à  lui   promise  par  ce  contrat.  Voy.  Append.  LXXIX. 

3.  Gruel,  219. 


MORT  DE  JEAN   V,    DUC   DE  BRETAGNE   (1442,    28  AOUl)         339 

en  1407;  mais,  pour  en  jouir,  il  fallait  le  prendre  aux  Anglais. 
Il  est  vrai  que  le  connétable  ne  désespérait  pas  d'y  réussir  ^ 

Après  son  mariage  il  ne  tarda  pas  à  gagner  Agen,  où  était  le 
roi.  Quand  il  eut  passé  deux  ou  trois  jours  dans  cette  ville,  il  se 
dirigea,  par  Gasteljaloux  *  et  Sainte-Bazeille  ^,  sur  Marmande, 
tandis  que  le  roi  s'y  rendait  par  Aiguillon  *.  Charles  VII,  parti 
d'Agen  le  samedi  matin  15  août,  arriva  le  16  à  Marmande,  qui 
ouvrit  ses  portes  sans  résistance,  ainsi  que  Tonneins  ».  Il  sé- 
journa un  mois  à  Marmande.  Là,  il  fallut  songer  à  rallier  les 
troupes,  qui  s'étaient  éparpillées,  pour  vivre  sur  le  pays,  jus- 
qu'aux environs  de  Toulouse  et  du  Béarn.  On  voulait  marcher 
sur  Bordeaux;  mais  il  fallait  d'abord  entreprendre  plusieurs 
sièges,  notamment  celui  de  La  Réole,  opération  impossible  tant 
qu'on  n'aurait  pas  un  effectif  plus  considérable. 

Pour  ramener  les  gens  de  guerre  à  l'armée,  où  l'on  avait  vu 
des  hommes  et  des  chevaux  périr  de  faim,  il  fallait  un  chef 
jouissant  de  la  plus  haute  autorité.  Le  connétable  reçut  cette 
mission  difficile.  Gomme  il  approchait  de  Toulouse,  il  ren- 
contra, dans  un  endroit  nommé  Gauré^  Rob.  de  La  Rivière,  qui 
venait,  de  la  part  de  son  neveu  François,  lui  apprendre  la  mort 
de  son  frère,  Jean  V,  duc  de  Bretagne  (28  août)  \  Le  nouveau 
duc,  François  I®'",  avait  aussi  chargé  son  envoyé  d'aller  annoncer 
au  roi  son  avènement  et  solliciter  un  congé  pour  le  connétable, 
afin  qu'il  pût  venir  en  Bretagne.  Charles  VII  consentit,  non  sans 
peine,  au  départ  de  Richement,  dont  il  avait  encore  besoin  ; 
mais  il  trouvait  son  avantage  à  satisfaire  le  successeur  de 
Jean  V.  Le  crédit  et  l'autorité  dont  le  connétable  jouissait 
auprès  de  son  neveu  ne  pouvaient  que  profiter  à  la  France. 

Richemont  était  à  Toulouse,  quand  l'envoyé  breton  revint 
lui  dire  que  le  roi  lui  permettait  de  partir.  A  cette  époque, 
les  Français  s'emparaient  de  La  Réole  (7  octobre).  Il  est  vrai 
que  le  château  résistait  encore,  mais  la  Guyenne  restait  sans 
secours,  et  tout  faisait  présager  d'autres  conquêtes.  Le  conné- 

1.  Voy.  Append.  LXXX.  C'est  peut-être  en  dédommagement  des  30  OOO 
écus  d'or  promis  par  le  sire  d'AIuret  à  Richemont  que  celui-ci  se  fit  céder 
les  droits  de  sou  beau-père  sur  le  comté  de  Dreux  (Voy.  p.  338,  note  2;. 
Il  est  probable  que  Richemont  eut.dès  1443, la  ville  de  Dreux  (Voy. .4/jpewrf.CX). 

2.  C.  de  Nérac. 

3.  C.  de  Marmande. 

4.  Arrondissement  d'Agen. 

5.  Arrondissement  de  Marmande. 

6.  G.  de  Verfeil,  arrondissement  de  Toulouse. 

7.  UHistoire  ecclésiastique  et  civile  de  la  Bretatjne  par  D.  Morice  finit  îi 
la  mort  de  Jean  V.  Elle  est  continuée  par  D.  Taillandier  dans  le  2''  vol., 
qui  parut  en  1756. 


340  MORT  DE   YOLANDE  d'ARAGON   (1442,    14  NOV.) 

table  pouvait  donc,  sans  trop  de  regrets,  abandonner  cette 
expédition,  que  ses  succès  antérieurs  avaient  seuls  rendue  pos- 
sible et  à  laquelle  il  avait  pris  une  part  si  brillante  '. 

Après  avoir  conduit  la  nouvelle  comtesse  de  Richemont  à 
Parthenay,  il  se  rendit  en  Bretagne,  avec  les  ducs  d'Orléans 
et  d'Alençon,  les  comtes  de  Vendôme  et  de  Dunois,  P.  de  Brezé 
et  beaucoup  d'autres  seigneurs.  A  Ploermel ,  il  trouva  ses 
neveux  François,  Pierre  et  Gilles,  ainsi  que  la  princesse  Isabelle 
d'Ecosse,  qui  venait  d'arriver  à  Aurai,  pour  épouser  le  succes- 
seur de  Jean  V.  Richemont  assista  au  mariage,  puis  au  couron- 
nement de  son  neveu.  Cette  cérémonie  eut  lieu  à  Rennes  le 
9  décembre  1442.  Pendant  la  messe,  à  l'offerte,  le  connétable 
fît  chevalier  François  I^'',  duc  de  Bretagne. 

Peu  après  mourut  Isabeau  de  Bretagne ,  comtesse  de  Laval 
et  fille  de  Jean  V  (13  janvier  1443).  En  moins  d'un  an,  Riche- 
mont avait  perdu  sa  première  femme,  son  frère,  une  de  ses 
nièces  et,  ce  qui  fut  pour  lui  un  autre  deuil,  Yolande  d'Aragon, 
reine  douairière  de  Sicile,  morte  au  château  de  Saumur,  le 
14  novembre  1442,  à  l'âge  de  soixante-deux  ans.  Cette  prin- 
cesse, d'un  esprit  supérieur,  avait  été  pour  Richemont  une 
bienfaitrice,  qui  l'avait  toujours  guidé,  soutenu,  secondé,  dans 
la  bonne  et  dans  la  mauvaise  fortune.  La  mort  de  la  reine 
Yolande  laissa  dans  l'entourage  et  dans  le  Conseil  du  roi  un 
vide  qui  fut  bien  difficile  à  remplir,  quoiqu'il  y  eût  alors  auprès 
de  lui  beaucoup  de  conseillers  aussi  dévoués  qu'habiles  ', 

En  quittant  la  Bretagne,  le  connétable  revint  dans  le  Poitou. 
Il  y  resta  plusieurs  mois,  d'abord  à  Fontenay,  où  était  alors  la 
comtesse  de  Richemont,  puis  à  Parthenay.  Pendant  l'absence 
du  roi,  il  ne  se  fit  pas  de  grandes  opérations  militaires  dans  le 

1.  Sur  l'expédilioii  de  Guyenne  et  Gascogne,  voir:  Journal  de  Beckington 
p.  40  etsuiv. ;  Berry,  p.  420-22  (qui  est,  comme  toujours,  bien  informé): 
Monstrelet,r.  II,cli.266;  Gruel  (qui  suivit  le  connétable  dans  cette  campagne), 
p.  218-219;  Legrand,  t.  VI  (Fr.  6965),  f's  202-203;  D.  Vaissèle,  t.  IV,  496-97; 
Fr.  23711,  nos  Io0-lo4;  JJ  177,  f»  50;  K  67,  n»'  16,  16  bis,  34;  Monleziiu, 
llist.  de  la  Gascogne,  Auch,  1864,  in-8»,  t.  IV,  ch.  III,  p.  262-276;  J.  Ste- 
venson, t.  II,  2«  partie,  p.  463. 

Vers  l'époque  où  Richemont  partit,  les  Anglais  reprirent  Saiut-Sever  et 
Dax,  mais  le  comte  de  Foix  leur  enleva  Saiut-Sever.  Pour  la  suite  de  cette 
campagne,  voir  :  Berry  et  Monstrelet:  le  Journal  de  Beckington,  p.  30-33, 
63-63,72,  et  la  traduction  de  Brunet;  Proceedings,  t.  V,  p.  249  et  414-418. 

2.  Dans  les  lettres  par  lesquelles  Charles  VII  donna  les  terres  et  sei- 
gneuries de  Gien,  Saiat-Maixent,  Melle,  Chizé,  Civray,  Sainte-Néomaye  à 
Ch.  d'Anjou,  en  récompense  de  ses  services  et  de  ceux  de  sa  mère  Yolande, 
Il  fait  longuement  l'éloge  de  cette  princesse  (voy.  les  lettres  données  en 
février  1443,  à  Montauban,  dans  P  2331,  f"  213;  Xi%  8603,  f-  91  et  92,  et 
JJ  176,  f»^  121-122;  Berry,  p.  422;  Le  Baud,  489-490;  d'Argentré,  800). 


MESURES  CONTRE   LES   ROUTIERS   (1443)  341 

nord.  Quand  Charles  VII  revint  à  Poitiers,  le  24  mai,  une  des 
premières  questions  sur  lesquelles  le  connétable  *  appela  son 
attention,  avec  une  nouvelle  insistance,  fut  encore  celle  des 
réformes  militaires.  En  dépit  des  ordonnances,  les  actes  d'indis- 
cipline et  de  pillage  s'étaient  reproduits,  sous  les  yeux  mêmes 
du  roi  et  du  connétable,  pendant  l'expédition  de  Guyenne  et 
Gascogne,  Il  est  vrai  que  les  troupes,  mal  payées,  mal  approvi- 
sionnées, se  croyaient,  par  là  même,  autorisées  à  piller,  pour 
vivre,  et  que,  grâce  à  cette  excuse,  les  capitaines  de  gens  d'armes 
obtenaient  facilement  des  lettres  de  rémission.  N'allaient-ils  pas 
jusqu'à  dire  qu'ils  détroussaient  les  sujets  du  roi  «  pour  soy 
plus  honorablement  entretenir  à  son  service  ^  »?  Le  bâtard 
d'Armagnac  et  Salazar  dans  le  Midi  ^,  Jean  de  Blanchefort  en 
Auvergne,  les  troupes  de  Dunois  entre  l'Yonne  et  la  Seine, 
d'autres  encore  ailleurs  et  jusque  dans  le  Poitou,  continuaient 
les  mêmes  ravages.  Les  paysans  étaient  obligés  de  cacljer  leurs 
bestiaux  dans  les  forêts  ;  beaucoup  de  villes  et  de  bourgs  de- 
mandaient l'autorisation  de  se  fortifier,  parce  que  les  gens  de 
guerre  dévastaient  surtout  les  pays  fertiles  et  éloignés  des  forte- 
resses, où  les  habitants  se  pouvaient  réfugier.  Les  princes  réunis 
à  Nevers,  l'année  précédente,  avaient  eux-mêmes  flétri  ces  excès 
et  réclamé  l'application  des  réformes  décrétées. 

Dans  une  assemblée  que  le  roi  réunit  à  Poitiers,  au  mois  de 
juin  1443,  et  où  figurèrent  plusieurs  «  seigneurs  de  son  sang  », 
le  Dauphin,  le  duc  d'Orléans,  René  d'Anjou,  roi  de  Sicile  *,  il 
fut  décidé  qu'on  appellerait  sur  la  Loire  les  compagnies  qui 
vivaient  sur  les  champs,  qu'on  y  choisirait  un  certain  nombre 
de  gens  d'armes,  parmi  les  meilleurs,  qu'on  les  logerait  aux 
frontières  et  que  les  autres  seraient  renvoyés  chez  eux.  De  nou- 
veaux ordres  furent  donnés  de  tous  côtés  aux  officiers  royaux 
pour  faire  exécuter  les  règlements  ;  le  Dauphin  lui-même  fut 
chargé  de  prendre,  dans  ce  but,  les  mesures  les  plus  énergiques  ; 
plusieurs  capitaines  de  routiers  furent  bannis  '•'  ;  mais  ce  ne  fut 
pas  encore  cette  fois  qu'on  put  extirper  un  mal  aussi  invétéré  ®. 

i.  Il  était  alors  ajourné,  avec  Pierre  et  Gilles  de  Bretagne,  comme  héritier 
de  Jean  V,  à  cause  d'un  procès  pendant  devant  le  parlement  de  Paris 
(X2«  22,  aux  9  mai,  18  juin,  29  juillet). 

2.  JJ  177,  f»  20. 

3.  Salazar  avait  remplacé  le  fameux  Rodrigo  de  Villandrando,  qui  était 
resté  en  Castille  (voy.  Quicherat,  Rod.  de  Villandrando,  p.  193). 

4.  René  d'Anjou  était  revenu  d'Italie  en  1442.  —  Richemont  à  Poitiers 
(JJ  184,  f»  411,  n°  vicn).  Charles  VII  accorde  alors  des  lettres  de  rémission 
au  comte  de  Vaudemont  (JJ  184,  f»  407  v»,  n"  vicii). 

0.  Par  exemple,  le  bâtard  d'Armagnac  et  Salazar  en  1443  (JJ  177,  f-  59). 
6.  Regnauld  de  VignoUes,  frère  de  La  Hire,  occupait  le  château  de  Milly 


342  GUERRE  DANS  LE  NORD  EN  1442 

Dans  cette  même  assemblée,  on  s'occupa  aussi  des  dispositions 
à  prendre  pour  repousser  les  Anglais  dans  le  nord.  De  ce  côté, 
ils  n'avaient  pas  mis  à  profit,  autant  qu'on  l'eût  pu  craindre, 
l'éloignement  du  roi  et  de  sa  plus  forte  armée.  Dunois,  le  maré- 
chal de  Lohéac,  le  sire  de  Bueil,  Rob.  Floquet  les  avaient  tenus 
en  respect.  Si  les  ennemis  étaient  parvenus  à  prendre  Cour- 
ville  S  Gallardon  ^  et  Gonches  ^  (août  1442),  ils  avaient  été 
battus  près  du  Neubourg  ■*,  obligés  de  démolir  Gallardon  et 
d'abandonner  Gourville  ;  enfin  ils  avaient  perdu  Granville  '\ 
qu'ils  avaient  tout  récemment  fondée,  fortifiée  et  qu'ils  considé- 
raient avec  raison  comme  une  des  places  les  plus  importantes 
de  la  Normandie  (novembre  1442)  ^. 

Leur  effort  le  plus  puissant  avait  été  dirigé  contre  Dieppe, 
que  Talbot  assiégeait,  depuis  le  mois  de  novembre  1442,  mais 
Ch.  Des  Marets,  le  héros  populaire  du  pays  de  Gaux,  défendait 
la  ville  avec  son  courage  habituel.  Elle  eût  cependant  été 
réduite  par  la  famine,  si  un  lieutenant  du  connétable,  Guillaume 
de  Goëtivy,  ne  lui  eût  amené  de  Bretagne  une  grande  quantité 
de  vivres,  par  mer.  Un  autre  Breton,  Tugdual  de  Kermoysan, 
vint  aussi  prêter  aux  assiégés  le  concours  de  ses  talents.  Il  y 

(c.  de  Marseille,  arrondissement  de  Beauvais)  et  pillait  les  pays  voisins, 
aussi  bien  ceux  du  roi  que  ceux  du  duc  de  Bourgogne.  Jean  de  Bour- 
gogne, comte  d'Etampes,  assiégea  le  château  de  Milly  et  le  réduisit  à  ca- 
pituler (Monstrelet,  t.  VI,  p.  61-65;  JJ  176,  f"»  374  v°-37o;  Hist.  de  Bourgogne, 
IV,  251).  Quant  au  fameux  La  Hire,  il  mourut  à  Montmorillon,  au  retour  de  la 
campagne  de  Guyenne. 

Sur  les  ravages  des  gens  de  guerre,  voy.  Pièces  orig.,  t.  247*,  n"  45; 
Fr.  25711,  n"  162;  Tuctey,  Les  Ecorcheurs,  t.  I,  p.  52  et  suiv.  et  p.  81  et  suiv.  ', 
\^^  24,  aux  dates  du  l»'  et  du  6  août  144S  (il  s'agit  ici  d'un  capitaine, 
Jean  Fo,  qui,  pendant  le  voyage  de  Tarlas,  quitta  l'armée  royale,  avec 
400  hommes,  pour  aller  se  loger  dans  le  Beaujolais,  où  il  exerça  de  grands 
ravages);  JJ  176,  f»s  120-121,  175,  179,  227-228,  239,  260  v%  274,  276  v°,  288: 
JJ  177,  f<"  50,  59;  A.  Thomas,  Etats  provinciaux,  II,  169-170,  191-202. 

Le  registre  JJ  177,  qui  comprend  les  années  1444-1446,  est  rempli  de 
lettres  de  rémission  accordées  aux  gens  de  guerre,  pour  des  faits  dont 
beaucoup  sont  antérieurs  à  1444. 

Assemblée  de  Poitiers  :  Fr.  25711,  n''165.  Fr.  26072,  n-  4920,  4931,  4903. 
Y*  f»  70.  K  67,  nos  29,  29  bis,  29  ter. 

Réclamations  des  princes  :  t.  III  de  Af.  d'Eschouchy  (Preuves),  p.  71-75, 
document  qu'il  faudrait  pouvoir  citer  en  entier. 

Mesures  prises  par  le  Dauphin  :  Y*  f°  70;  Fr.  26072,  n»  4959;  J.  Steven- 
son, II,  350. 

1.  Arrondissement  de  Chartres. 

2.  Arrondissement  de  Chartres  (voir  Revue  archéolog.,  XI"  année,  2»  partie, 
p.  413  et  suiv.  et  xdanche  243). 

3.  Arrondissement  d'Evreux. 

4.  Arrondissement  de  Louviers. 

5.  Arrondissement  d'Avranches. 

6.  Mémoires  de  la  Soc.  des  antiq.  de  Normandie,  1827,  p.  84-89. 


LES   ANGLAIS  ÉCHOUENT  DEVANT  DIEPPE   (1448,   AOUT)  343 

avait  près  de  neuf  mois  que  Dieppe  résistait  aux  Anglais,  quand 
le  Dauphin  fut  chargé  de  faire  lever  le  siège.  On  savait  qu'une 
armée  réunie  péniblement  en  Angleterre  ,  par  le  duc  de  So- 
merset, allait,  après  de  longs  retards,  débarquer  en  France,  et  on 
prit  des  mesures  pour  tenir  tète  à  ces  nouveaux  ennemis  • . 

Pour  faire  accepter  à  Somerset  ^  le  commandement  de  cette 
expédition,  il  avait  fallu  lui  donner  le  titre  de  duc  et  même 
celui  de  lieutenant  général,  mais  on  avait  ainsi  blessé  le  duc 
d'York.  Au  lieu  de  se  diriger  vers  Rouen  et  le  pays  de  Gaux, 
Somerset  alla  débarquer  à  l'extrémité  tout  opposée  de  la  Nor- 
mandie, à  Cherbourg,  dans  le  Gotentin  ^.  Il  n'attaqua  pas  Gran- 
ville,  qui  tenait  depuis  longtemps  en  échec  Thomas  de  Scales 
et  Mathieu  Goth  *;  il  fit  une  pointe  vers  le  sud,  comme  s'il 
eût  voulu  menacer  la  Bretagne,  l'Anjou  et  le  Maine.  Pendant  ce 
temps,  Floquet  opérait  une  diversion  sur  Gonches  et  Pont-Aude- 
mer  %  et  le  Dauphin,  avec  Dunois  et  Gaucourt,  forçait  Talbot 

1.  Fr.  de  Surienne  prend  Courville  et  Gallardon,  près  de  Chartres 
(Fr.  26069,  n»  4484;  Fr.  25776,  n»  1372). 

Robert  Floquet,  capitaine  d'Evreux,  bat  les  ennemis  entre  Evreux  et  Le 
Ncubourg  (Berry,  p.  419).  Il  met  Evreux  en  état  de  défense  (Fr.  26070,  n»  4681). 

Dunois  attaque  Gallardon  et  conclut  avec  Surienne  une  convention  par 
laquelle  celui-ci  s'oblige,  moyennant  11  000  salais  d'or,  à  démolir  Gal- 
lardon et  à  vider  Courville  {Portef.  Fontati.,  117-118,  au  30  octobre  1442  et 
au  18  mars  1444,  a.  st.;  J.  Stevenson,  t.  I,  321:  Fr.  26070,  n°^  4623,  4624 
4627,  4635;  K  67,  n<'12io,  jj  176,  f»  153  v;  Berry,  p.  419. 

Sur  Gonches  :  Berry,  p.  419;  Fr.  26070,  n"*  4610,  4623,  4624,  4633,  4631: 
Fr.  23776,  n»»  1378,  1581,  1385;  K  67,  n"»  12  67.70. 

Autres  opérations  des  Français  en  Normandie  en  1442  :  Fr.  26069, 
u»'  4586,  4397,  4399,  4603:  Fr.  26070,  n»»  4613,  4613,  4638,  4698,  4706,  4739. 

Sur  Granville  :  Chron.  du  Mont-Saint- Michel,  p.  43;  Mémoires  de  ta  Soc. 
des  antiquaires  de.  Normandie,  année  1827;  JJ  177,  f»  110;  Stevenson,  II, 
:J38  ;  K  67,  n»^  20,  20  bis,  215,  218;  Pr.  23189,  f°  26.  —  Sur  Dieppe,  beaucoup 
de  documents  dans  les  Monstres  et  dans  les  Quittances  et  pièces  diverses: 
Fr.  23776,  no^  1570,  1589-1600,  1609-1618,  1626-1632;  Fr.  26070,  n"»  4681- 
4686,  4703,  4703,  4710,  4716,  4729,  4735,  4745,  4749;  Fr.  26071,  n»*  4771- 
4776,4806,  4818,  4820,  4830-4833,  4851;  A.  Thomas,  Etats  prov.,  II,  157-159; 
Fr.  25711,  n»  166;  K  67,  n»  29;  J.  Charlier,  I,  261;  Berry,  423-424.  —  Sur 
l'armée  de  Somerset  :  voy.  Proceedings,  t.  V,  p.  218,  223-224,  229,  236-238, 
et  Préface,  p.  cvi-cxvn;  Rymer,  V,  l'e  partie,  116,  118. 

2.  Jean  Beaufort,  comte,  puis  duc  de  Somerset,  neveu  de  Henri  IV  (Dug- 
dale,  Baronagium,  I,  329).  Il  fut  nommé  lieutenant  et  capitaine  général  du 
royaume  de  France  dans  les  parties  où  le  duc  d'York  n'exerçait  pas  ac- 
tuellement son  pouvoir  (Fr.  26071,  n°  4834;  Proceedings,  Y,  p.  218,  260-264, 
288-290,  et  Préface,  p.  cix  et  cxvi;  Issues  of  the  Exchequer,  445). 

3.  Chron,  du  Mont-Saint-Michel,  p.  44.  Il  était  à  Coulances  le  12  août 
(Fr.  26071,  n»  4834;  Berry,  p.  424).  Somerset  était  capitaine  d'Avranches 
(Fr.  25777,  u^  1650). 

4.  Fr.  26070,  n°«  4730,  4731,  4741;  Fr.  26071,  n"  4775,  4780,  4809-4813, 
4815;  Fr.  25776,  n"»  1624,  1633,  1638;  Fr.  25777,  n»»  1642,  1644. 

5.  Fr.  26071,  n"'  4837,  4840. 


344  EXPÉDITION   INFRUCTUEUSE   DE    SOMERSET   (1443) 

à  lever  le  siège  de  Dieppe  *  (août).  Quant  à  Somerset,  il  s'em- 
para de  la  Guerche  *,  où  s'étaient  quelquefois  rassemblés  des 
Bretons  du  parti  français,  avec  le  maréchal  de  Lohéac  et  le  sire 
de  Bueil,  quand  ils  voulaient  attaquer,  de  ce  côté,  les  frontières 
de  la  Normandie^.  Il  alla  ensuite  s'établir  devant  Pouancé  \ 
croyant  que  cette  ville  allait  se  rendre.  Les  Anglais  restèrent 
là  quelque  temps,  faisant  des  courses  dans  la  Bretagne  et  jus- 
qu'aux portes  d'Angers  ^. 

A  cette  nouvelle,  le  connétable  accourut  à  Angers,  où  il  fit 
venir  toutes  les  troupes  qu'il  put  trouver,  puis  à  Ghâteau-Gon- 
tier,  où  était  le  duc  d'Alençon.  Le  maréchal  de  Lohéac,  P.  de 
Brézé,  Jean  et  Louis  de  Bueil  avaient  aussi  réuni  un  certain 
nombre  de  gens  d'armes  pour  marcher,  sans  plus  de  retard, 
à  l'ennemi.  Le  connétable  essaya  de  les  arrêter.  «  Si  vous 
voulez,  leur  dit-il,  attendre  jusques  à  demain,  j'auray  deux  cens 
Tances  de  mes  gens,  qui  seront  ceste  nuict  icy;  et  ainsi  pourrons 
faire  nostre  entreprise  seurement,  en  telle  manière  que  les 
Anglois  ne  nous  pourront  grever  *.  »  Ils  ne  voulurent  rien 
entendre  et  répondirent  qu'ils  allaient  éclairer  la  route.  So- 
merset, averti  de  ces  mouvements,  avait  envoyé  Math.  Goth, 
avec  1500  hommes,  dans  la  direction  de  Ghàteau-Gontier.  Pen- 
dant la  nuit,  à  l'improviste,  Math.  Goth  tomba  sur  les  Français, 
qui  s'étaient  logés  dans  le  village  de  Saint-Quentin  '',  et  les  mit 
en  déroute.  Il  yen  eut  une  trentaine  de  tués  ou  de  pris  et,  parmi 
ces  derniers,  Louis  de  Bueil;  les  autres  n'eurent  que  le  temps  de 
se  sauver.  On  voit  quels  dangers  pouvait  sans  cesse  occasionner 
l'esprit  d'indiscipline  qui  régnait  dans  l'armée  et  combien  il 
rendait  précaire  l'autorité  du  connétable. 

Après  cette  alerte,  Richemont  resta  quelque  temps  à  Ghàteau- 
Gontier,  pour  observer  les  Anglais,  et  alla  s'entendre,  à  Saumur, 
avec  le  roi  sur  ce  qu'il  y  avait  à  faire  *.  On  se  contenta  de  garder 
la  défensive,  et  Somerset  n'osa  entreprendre  le  siège  régulier  de 
Pouancé,  ni  celui  d'Angers.  Après  de  longues  hésitations,  il  se 
dirigea  vers  la  Normandie,  par  le  Maine,  et  investit  Beaumont- 

1.  Fr.  2377,  n°  1647.  JJ  176,  f»  70.  Fr.  G960,  f»'  36  et  suiv.  Fr.  696o,  f«'  100, 
153,  174  vo.  Y*  f»  70.  JJ  179,  f»  58,  n°  cix. 

2.  Arrondissement  de  Vitré  (Ille- et- Vilaine).  D'Argentré  dit  qu'il  attaqua 
la  Bretagne  sous  prétexte  que  le  duc  n'avait  pas  renouvelé  son  alliance 
avec  l'Angleterre.  Voy.  aussi  Le  Baud,  p.  490. 

3.  Fr.  26070,  no'  4615,  4638.  Voy.  aussi  Proceedings,  t.  Vf,  p.  13-16. 

4.  Arrondissement  de  Segré  (Maine-et-Loire). 

5.  C.  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  I,  Introduct.,  p.  xvii  et  p.  38. 

6.  Gruel,   220. 

7.  C.  de  Graon,  arrondissement  de  Ghàteau-Gontier. 

8.  Gruel,  220;  Berry,  424.  Voy.  Append.  CX.  (Richemont  à  Saumur.) 


L'ANGLETERRE   DÉSIRE   LA   PAIX   (1444)  345 

le-Vicomte  ',  petite  place  qui  gênait  les  communications  des 
Anglais  entre  Le  Mans  et  Alençon.  Il  la  fit  capituler,  et,  comme 
elle  ne  fut  pas  secourue,  il  en  resta  maître.  Ce  fut  là  le  seul  profit 
qu'il  retira  de  cette  expédition,  avec  une  somme  de  20  000  écus, 
pour  laquelle  le  duc  de  Bretagne  racheta  la  Guerche  ^. 

Ces  résultats  n'étaient  pas  en  rapport  avec  les  sacrifices  que 
l'Angleterre  avait  dû  s'imposer  pour  lever  et  transporter  en 
France  cette  dernière  armée.  Les  Anglais  en  furent  mécontents 
et  découragés  ^.  Ils  avaient  subi,  devant  Dieppe,  un  échec  désas- 
treux; ils  avaient  craint  de  perdre  Mantes  *;  enfin  Granville, 
devenue  une  importante  forteresse,  leur  causait  de  vives  alar- 
mes ^.  Richemont  fondait  de  grandes  espérances  sur  cette  place, 
admirablement  située  pour  favoriser  les  attaques  dirigées  de  la 
Bretague  sur  le  Cotentin.  11  mit  donc  à  Granville  une  forte  gar- 
nison, sous  Geoffroy  de  Gouvran,  Olivier  de  Broon  et  Adam  de 
La  Rivière,  puis  il  revint  à  Parthenay  ^  (décembre  1443). 

11  n'y  resta  pas  longtemps  en  repos.  11  fut  bientôt  rappelé  à  la 
•cour  et  au  Conseil,  pour  prendre  part  à  d'importantes  délibéra- 
tions. Sur  les  instances  réitérées  des  ducs  de  Bretagne  '^  et  d'Or- 
léans et  du  pape,  Charles  Vil  s'était  décidé  à  négocier  avec 
Henri  VI,  dans  le  but  d'arriver, cette  fois, à  un  accommodements 
En  Angleterre,  le  parti  de  la  paix  l'emportait,  depuis  que  Glo- 
cester  était  en  disgrâce  et  Sufîolk  en  faveur.  La  nation  anglaise 
était  lasse  d'une  guerre  qui,  malgré  les  talents  du  duc  d'York  et 


1.  Arrond.  de  Mamers.  J.  Stevenson,  t.  II,  p.  347,  et  Por^  Fontanieu,  119- 
120,  à  la  date  du  17  décembre  1443;  Monstrelet,  VI,  66-67. 

2.  Le  duc  de  Bretagne  se  plaignit  vivement  à  Henri  VI,  qui  blâma  So- 
merset et  promit  des  réparations.  Voy.  Proceedings,  t.  VI,  p.  12,  13,  18,  19, 
22,  23;  Arcli.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  48,  E,  122. 

3.  Somerset  fut  accusé  de  concussion.  Après  sa  mort  (1444),  une  en- 
quête fut  faite,  pour  découvrir  les  exactions  qu'il  avait  commises  dans  le 
Cotentin.  Le  13  décembre  1443,  Henri  VI  donna  à  la  reine  tout  ce  que  So- 
meret  pouvait  lui  devoir.  L'enquête  ordonnée  par  Henri  VI  se  trouve  aux 
Arch.  nat.,  K  68,  n»  19.  C'est  un  cahier  de  papier  de  83  feuilles. 

4.  Fr.  25777,  n»  1653;  Fr.  26071,  m  4877. 

5.  Fr.  26071,  n»'  4879,  4903.  Fr.  23777,  n»  1662. 

6.  Gruel,  220;  JJ  177,  f'>  97;  K  67,  n»  21'o.  Peu  après,  J.  de  Lorraine  fut 
capitaine  de  Granville.  (Fr.  26073,  n"  3084.)  Dans  cette  circonstance,  Riche- 
mont  ordonne  à  Ant.  de  La  Mandaye,  son  lieutenant  à  Partheuay,  d'arrêter 
et  de  punir  les  gens  d'armes  qui  servaient  sous  ces  capitaines  et  qui 
n'auraient  pas  rejoint  leurs  compagnies.  Ant.  de  La  Mandaye  en  arrêta 
deux  et  fit  pendre  l'un  par  l'autre  (JJ  177,   f»  97). 

7.  Médiation  du  duc  de  Bretagne  :  Proceedings,  VI,  p.  1-7;  Bréquigny,  t.  82 
(Moreau,  706),  f-'  174-176,205,  209.  Richemont'est  à  Angers  en  Janvier  1444. 

8.  Avant  la  fin  de  l'année  1443,  Charles  VII  était  informé  que  Suffolk 
devait  venir  en  France  pour  négocier  (Proc«edin7.?,  t.  VI,  p.  11-12).  Voir  aussi 
Rymer,  V,  l"  partie,  129-130. 


346  CONFÉRENCES   DE   TOURS    (1444,    AVRIL) 

■de  Talbot,  ne  procurait  plus  ni  gloire  ni  profit.  William  de  La 
Pôle,  comte  de  Suffolk,  «  un  des  hommes  d'Etat  les  plus  éminents 
■de  son  temps  \  »  fît  prévaloir  dans  le  Conseil  du  roi  les  tendances 
pacifiques,  avec  l'appui  du  vieux  cardinal  Beaufort.  Il  écarta  le 
principal  obstacle  qui  avait  jusque-là  retardé  les  négociations,  en 
consentant,  comme  le  voulait  Charles  VII,  à  ce  que  les  confé- 
rences eussent  lieu  dans  une  ville  appartenant  à  ce  prince.  C'est 
lui  qui  fut  nommé  premier  plénipotentiaire  de  Henri  VI  (11  fé- 
vrier 1444).  Il  partit  avec  l'intention  de  conclure  la  paix,  ou  tout 
au  moins  une  trêve,  avec  Charles  VII  et  même  de  marier  Henri  VI 
avec  une  princesse  française  ^ 

En  France,  le  peuple  désirait  ardemment  la  paix,  dans  laquelle 
il  voyait  la  fin  de  ses  longues  souffrances,  mais  le  Conseil  du 
roi  n'était  pas  aussi  unanime  sur  cette  question  capitale.  Les 
partisans  de  la  guerre  avaient  de  bonnes  raisons  pour  soutenir 
qu'il  ne  fallait  pas  s'arrêter  en  plein  succès  et  que  c'était  le 
moment  de  conquérir  la  Normandie  ^.  Néanmoins,  comme  une 
trêve  était  indispensable  à  l'accomplissement  des  réformes  mi-' 
titaires,  elle  devait  être  acceptée  par  ceux  qui  mettaient  en  pre- 
mière ligne  la  réorganisation  de  l'armée,  et  le  connétable  y 
pouvait  trouver  son  profit.  On  résolut  donc  d'apporter  aux  con- 
férences des  dispositions  conciliantes. 

Le  roi  réunit  une  nombreuse  assemblée  de  princes,  de  sei- 
gneurs, de  prélats  à  Tours,  où  devaient  se  rendre  les  ambassa- 
.deurs  anglais  *.  Il  désirait  que  le  duc  de  Bretagne  y  prit  part, 
avec  les  représentants  de  la  France  et  non  avec  ceux  de  l'An- 
gleterre. Il  savait  que  le  duc,  malgré  l'invasion  de  Somerset, 
restait  en  bonnes  relations  avec  Henri  VI  ^,  qu'il  ne  voulait  pas 
s'engager  sans  l'agrément  de  ce  prince  ®  et  qu'il  en  avait  obtenu 
la  promesse  d'être  compris  dans  le  traité.  Charles  VII  voulait 
aussi  qu'il  y  fût  compris,  mais  comme  sujet  et  allié  du  roi  do 


1.  Harris  Nicolas,  Préface  du  t.  VI  des  Proceedings,  p.  x. 

2.  Proceedings,  VI,  Préf.,  pp.  x-xvu  et  p.  32-35.  Sharon-Turner,  t.  III, 
137-139.  Rolls  of  Parliament,  V,  66,  73,  74.  Rymer,  t.  ¥,1'"  p.,  p.  129-130. 
J.  Stevenson,  I,  67. 

3.  Les  Français  faisaient  alors  des  tentatives  sur  plusieurs  places  de  la 
Normandie  (Fr.  26072,  n"  4986,  4994;  Fr.  26073,  n»  5122),  notamment  sur 
Falaise,  Caudebec. 

4.  Fr.  26072,  n»  5041. 

5.  D'ailleurs,  Somerset  avait  été  désavoué  par  le  gouvernement  anglais 
(ProceediîiQs,  t.  VI,  p.  16-19  et  p.  22-23).  Une  trêve  avait  été  conclue,  eu 
1443,  entre  Henri  VI  et  le  duc  de  Bretagne  (Bréquigny.  82,  f"  191).  Gilles 
de  Bretagne,  frère  du  duc,  était  auprès  de  Henri  V,  qui  lui  témoignait 
une  grande  bienveillance  (Rymer,  t.  V,  1"  partie,  p.  128). 

6.  Proceedings,  t.  VI,  p.   U-12  et  p.  20-21. 


LE   DUC   DE  BRETAGNE   VIEM  A  TOURS    (1444,   AVRIL)  347 

France  et  non  du  roi  d'Angleterre.  Il  chargea  le  connétable  d'aller 
chercher  son  neveu  en  Bretagne  et  de  l'amener  à  Tours. 

Richemont  se  rendit  à  Nantes,  où  était  François  I"  et  réussit 
dans  sa  mission.  Il  repartit  de  Nantes,  avec  le  duc  de  Bretagne, 
le  mardi  de  Pâques,  12  avril.  Ils  arrivèrent  à  temps  pour  aller, 
avec  les  autres  princes,  recevoir  les  ambassadeurs  anglais,  à 
Tours,  le  16  avril  *.  Le  chancelier  Regnault  de  Chartres  venait 
de  mourir  (4  avril).  Les  négociations  ^  furent  alors  dirigées  par 
un  nouveau  conseiller  de  Charles  VII,  Pierre  de  Brézé,  sénéchal 
de  Poitou, qui  s'était  élevé  jusqu'au  premier  rang  dans  la  faveur 
du  prince,  par  son  habileté,  par  son  ambition,  peut-être  aussi 
par  l'influence  d'Agnès  Sorel  ^Gette  grande  faveur  ne  pouvait  que 
porter  ombrage  à  Richemont.  P.  de  Brézé  tenait  au  Conseil  une 
large  place;  il  reléguait  au  second  plan  Ch.  d'Anjou  et  le  conné- 
table. Il  y  avait  dans  cette  situation  les  germes  d'un  antagonisme 
qui  toutefois  n'engendra  pas,  comme  jadis,  de  crises  funestes. 
Les  temps  étaient  changés.  La  fortune  de  la  France  n'était  plus 
à  la  merci  d'un  favori,  si  puissant  qu'il  fût.  D'ailleurs  celui-ci 
méritait  par  des  talents  de  premier  ordre  la  confiance  de  son  sou- 
verain, et  la  tâche  était  assez  vaste  pour  suffire  et  à  lui  et  aux 
autres. 

Les  prétentions  de  l'Angleterre  ne  permirent  pas  d'arriver  à 
une  entente  définitive.  Henri  VI  ne  voulait  ni  reconnaître 
Charles  VII  comme  roi  de  France  ni  se  contenter  de  la  Nor- 
mandie, qu'on  lui  laissait,  avec  la  Guyenne,  sous  réserve  d'hom- 
mage. Il  fallut  donc  renoncer  à  faire  la  paix;  mais  on  conclut, 
le  20  mai,  une  trêve  *  qui  devait  durer  jusqu'au  l»""  avril  1446  et 
qui  pouvait  être  prolongée.  Le  duc  de  Bretagne  y  fut  compris 

1.  Grucl,  220,  K  68,  u»  3. 

2.  Sur  les  négociations  préliminaires  entre  Gaucourt,  Guichart  de  Cissé 
et  les  ambassadeurs  anglais,  voir  Fr.  40o4  (anc.  Baluze,  9037^),  f<>s  14-23. 
On  avait  d'abord  choisi  Compiègne,  puis  Vendôme  pour  lieu  des  confé- 
rences. 

3.  Pierre  de  Brézé,  comme  les  Beauvau,  avait  aussi  été  au  service  de  la 
maison  d'Anjou.  En  1437,  il  était  sénéchal  d'Anjou  pour  le  roi  René 
(Ms.  Duchesne,  70,  f°«  87  v,  88  v).  Il  fut  peut-être  favorisé  par  Yolande. 
Il  semble  très  probable  que  Brézé,  qui  avait  d'ailleurs  de  grands  talents, 
«lut  sa  prépondérance  à  la  favorite,  devenue  toute-puissante,  depuis  la 
mort  de  la  reine  Yolande.  Brézé  est  en  faveur  à  partir  de  1443,  c'est-à-dire 
ù  l'époque  où  Agnès  Sorel  devient  favorite  en  titre.  (Olivier  de  La  Marche, 
p.  407,  dans  le  Panthéon  lillér.;  de  Beaucourt,  Agnès  Sorel  et  le  caractère 
/le  Charles  VII,  dans  la  Revue  des  questions  histor.,  t.  I,  p.  20't-22't;  t.  XIV, 
p.  72-74;  Vallet  de  V.,  Uist.  de  Charles  VII,  t.  111,  76,  105,  140-142,  et  un 
article  dans  la  Biblioth.  de  V Ecole  des  Chartes,  3«  série,  t.  I,  p.  478;  Lecoy 
de  La  Marche,  Le  roi  René,  I,  228.) 

4.  Y*  f^'  81-80. 


348  TRÊVE  DE  TOURS  (1444,  âO  mai) 

parmi  les  alliés  et  sujets  du  roi  de  France  *.  Pendant  le  séjour 
de  l'ambassade  anglaise,  il  y  eut  à  Tours  des  fêtes  brillantes, 
où  parut  Isabelle  de  Lorraine,  reine  de  Sicile,  avec  sa  fille  Mar- 
guerite, alors  âgée  de  quinze  ans  et  déjà  renommée  pour  sa  beauté. 
Le  mariage  de  cette  jeune  princesse  avec  Henri  VI  fut  alors 
décidé,  à  condition  que  les  Anglais  rendraient  tout  ce  qu'ils 
possédaient  dans  le  Maine  et  l'Anjou.  Ces  pays  appartenant  au 
roi  René  et  à  son  frère  Charles,  comte  du  Maine,  Henri  VI  ne  pou- 
vait, disait-on,  épouser  Marguerite  en  dépouillant  son  père  et  son 
frère.  Les  fiançailles  furent  célébrées  dans  l'église  Saint-Martin 
de  Tours,  le  23  mai,  et  suivies  de  nouvelles  fêtes  ^. 

La  trêve  de  Tours  excita  partout  des  transports  de  joie;  mais 
qu'allait-on  faire  maintenant  de  ces  gens  de  guerre  qui  dévo- 
raient la  France  ?  Tant  que  la  paix  n'était  pas  conclue,  il  fallait 
bien  laisser  quelques  troupes  aux  frontières.  Quant  aux  autres, 
comment  parviendrait-on  à  les  renvoyer,  en  les  empêchant  de 
continuer  les  brigandages  auxquels  elles  étaient  habituées?  Et 
puis,  la  prudence  exigeait  qu'on  ne  fût  pas  pris  au  dépourvu,  si 
la  guerre  recommençait.  Il  ne  suffisait  donc  pas  de  détruire  les 
anciens  abus,  il  fallait  organiser  une  nouvelle  armée. 

Nulle  question  ne  préoccupait  davantage  le  connétable;  son 
biographe  nous  l'atteste  ^.  La  difficulté  qu'elle  présentait  expli- 
que, en  grande  partie,  la  résolution  que  prit  le  roi  d'aller 
combattre  les  Messins  *.  René  d'Anjou,  qui  avait  à  se  plaindre 
d'eux,  voulait  leur  faire  la  guerre,  et,  pour  cela,  il  demandoit 
des  secours  à  Charles  VII.  On  a  dit,  avec  raison,  que  ce  prince^ 
voulut  alors  faire  valoir  les  anciens  droits  de  la  France  sur  les 
pays  de  la  rive  gauche  du  Rhin  ^,  mais  il  est  permis  de  croire 
que  cette  expédition  n'eût  pas  été  entreprise  à  cette  époque,  si 

1.  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bret.,  II,  5.  D.  Lobineau,  1,624.  Fr.5037,f»  123. 

2.  Sur  la  trêve  de  Tours  et  le  mariage  de  Henri  VI,  voir  :  J.  Stevenson, 
II,  356;  Fr.  \()U,  f<"  14-16,  19-21,  23-2i;  Rynier,  V,  1"  partie,  133-136; 
Grue!,  220  ;  Berry,  p.  425;  J.  Chartier,  t.  II,  p.  125;  Monstrelet,  VI,  96  etsuiv.; 
Mat.  d'Escouchy,édit.  du  Fresne  de  Beaucourt,  I,  5-7;  Bréquigny,82(Moreau, 
706),  f"*  221-233;  Fr.  26072,  n»  5079.  La  chronique  de  Monstrelet  finit  au 
20  mai,  date  de  la  trêve  de  Tours,  et  celle  de  M.  d'Escouchy  lui  fait  suite 
immédiatement. 

3.  «  G'esloit  l'une  des  choses  que  plus  il  désiroit,  et  tousjours  avoil 
tasché  de  faire  »  (Gruel,  221). 

4.  Divers  documents  prouvent  que  l'intention  de  Charles  VII,  quand  il 
décida  les  campagnes  de  Lorraine  et  d'Alsace,  était  bien  de  débarrasser 
la  France  des  Ecorchenrs.  Voir  Tuétey,  Les  Ecorcheurs,i.  I,  p.  137,  138; 
Y*,  f"'  85-86.  J.  Jouvenel  des  Ursins,  dans  son  Epître  de  1439,  conseille 
d'imiter  aussi,  sur  ce  point,  Charles  V  (Fr,  5022,  f-  26). 

5.  Cette  intention  est  formellement  énoncée  dans  une  pièce  du  registre 
JJ  177,  f"  3. 


EXPÉDITIONS    DE   LORRAINE   ET   d'aLSACE   (i444-144o)  349 

elle  n'avait  fourni  un  moyen  opportun  d'emmener  hors  du 
royaume  les  routiers,  dont  on  ne  savait  que  faire  ^ 

Une  autre  occasion  se  présentait.  L'empereur  Frédéric  III,  qui 
était  en  guerre  avec  les  Cantons  suisses,  avait  aussi  prié  Char- 
les VII,  son  allié,  de  lui  fournir  des  troupes.  Il  fut  décidé  qu'on 
ferait  ces  deux  expéditions;  que  le  roi  irait  lui-même  en  Lor- 
raine et  qu'il  enverrait  le  Dauphin  contre  les  Suisses.  Le  duc  de 
Bretagne  conlut  une  trêve  de  quatre  ans  avec  le  Dauphin  (4  juin) 
et  autorisa  ses  sujets  à  servir  dans  les  deux  armées;  d'autre  part, 
le  roi  et  son  fils  s'engagèrent,  par  deux  traités  distincts  ^  (4  mai, 

10  juin),  à  empêcher  ou  à  punir  toute  incursion  des  gens  de 
guerre  dans  son  duché.  D'ailleurs,  on  prit  partout  des  mesures 
pour  réprimer  les  «  pilleries  ».  Les  troupes  qui  restaient  en 
France  reçurent  l'ordre  de  ne  point  quitter  leurs  garnisons  ou 
leurs  compagnies,  sous  peine  des  châtiments  les  plus  sévères  '. 

11  fut  enjoint  à  tous  les  baillis  de  faire  arrêter  les  pillards, 
d'armer,  au  besoin,  les  vassaux  du  roi,  le  peuple  des  villes  et 
des  campagnes  pour  leur  courir  sus  ;  enfin  on  déclara  que  nul  ne 
serait  puni  pour  avoir  blessé  ou  même  tué  des  écorcheurs  (or- 
donnance du  21  juillet)  *. 

Pendant  que  le  Dauphin  se  dirigeait  vers  Bâle,  avec  le  maré- 
chal de  Jaloignes,  Jean  de  Bueil,  Ant.  de  Chabannes  Guy  de 
Blanche  fort  et  beaucoup  d'autres  chefs  de  routiers  %  le  roi 
s'avançait  en  Lorraine,  avec  René  d'Anjou,  son  fils  Jean,  duc  de 
Galabre,  Gh.  d'Anjou,  le  connétable  et  son  neveu,  le  comte  de 
Glermont,  fils  du  duc  de  Bourbon,  le  maréchal  de  Lohéac,  P.  de 
Brézé,  Saintrailles,  l'amiral  de  Coëtivy,  R.  Flo({uet  et  J.  Bureau. 
Gliarles  VII  alla  d'abord  recevoir  la  soumission  d'Epinal,  ville 
qui  dépendait  alors  de  Metz  (11  septembre)  ^.  En  même  temps, 

1.  Des  routiers  anglais  qui  désolaient  la  Normandie  furent  emmenés 
parMalhieu  Gothet  prirent  part,avec  les  Français,àla  campagne  de  Lorraine 
(voir  Fr.  26073,  n»*  5214,  32i;j,  et  Fr.  26074,  n»  5299;  A.  Tuetey,  Les  Ecor- 
cheurs, I,  167). 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  34,  E,  94,  et  cass.  38,  E,  105. 

3.  Déjà,  le  27  février  1444,  le  roi  avait  ordonné  au  prévôt  de  Paris  de 
prendre  les  mêmes  mesures  contre  les  gens  de  guerre.  On  voit,  par  les 
lettres  du  27  février,  que  des  Anglais  venaient  aussi  piller  dans  la  Cham- 
pagne et  dans  l'Ile-de-France,  avec  l'aide  de  quelques  habitants  de  ces 
pays,  et  que  des  gens  de  guerre  au  service  du  roi  se  faisaient  passer  pour 
Anglais,  de  sorte  que  les  habitants  n'osaient  les  attaquer,  ne  sachant  pas 
si  les  pillards  étaient  Anglais  ou  Français  (Y*  f»  79;  voir  aussi  f»»  80-81). 
Voy.  Appendice  LXXXI. 

4.  V.  Appendice  LXXXII. 

3.  Voir  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  I,  160  et  suiv.  Le  Dauphin  emmenait 
aussi  des  Hretons  du  connétable,  avec  Blanchelaine,  leur  chef. 
6.  JJ  177,  f»  3.  XI»  8605,  f--  210. 


3S0  RICHEMONT  AU    SIÈGE   DE   METZ    (4444-1445) 

le  connétable,  qui  commandait  l'armée,  envahissait  le  territoire 
messin,  avec  Gh.  d'Anjou  et  P.  de  Brézé,  le  10  septembre  K 

Metz,  ville  impériale,  c'est-à-dire  dépendant  de  l'empire  d'Al- 
lemagne, était  une  petite  république  riche,  florissante,  belliqueuse, 
souvent  en  guerre  avec  ses  voisins,  le  duc  de  Lorraine  et  le  damoi- 
seau de  Gommercy.  Bien  fortifiée,  bien  pourvue  de  vivres,  dé- 
fendue par  une  ceinture  de  maisons  fortes^  elle  avait  une  bonne 
milice,  des  soldats  ou  souldoyeurs,  commandés  par  des  cheva- 
liers, et  elle  pouvait  opposer  une  longue  résistance.  Il  fallut 
entreprendre  un  siège  difficile,  ou  plutôt  un  blocus,  qui  dura 
près  de  six  mois  (septembre  1444  —  fin  de  février  1445).  Les 
troupes  françaises  s'établirent  tout  autour  de  Metz,  dans  les 
villages,  dans  les  maisons  fortes  :  le  connétable,  avec  P.  de  Brézé, 
sur  la  rive  gauche  de  la  Moselle  ;  le  maréchal  de  Lohéac,  Sain- 
trailles,  J.  Bureau,  Floquet,  sur  la  rive  droite.  Les  Bretons  du 
connétable  occupaient,  entre  autres  positions,  Gonflans,  Gorze, 
Ghâtel-Saint-Germain,  Lorry,  Lessy,  Vaux,  Moulin,  où  il  y  avail 
un  pont  sur  la  Moselle  ^. 

Les  Messins  avaient  conservé  quelques  postes  au  dehors.  Les 
troupes  qui  étaient  restées  dans  la  ville  faisaient  des  sorties.  Il  y 
avait  souvent  des  escarmouches,  parfois  de  véritables  combats. 
Ainsi,  le  dimanche  27  septembre,  des  Bretons,  logés  à  Moulin, 
furent  repoussés,en  voulant  enlever  des  bestiaux  dans  une  métairie 
du  voisinage  ^.  Une  autre  fois,  le  samedi  17  octobre,  1200  soul- 
doyeurs de  Metz  vinrent  attaquer,vers  huit  heures  du  soir,Ghâtel- 
Saint-Germain.  Dans  un  assaut  meurtrier,  ils  mirent  le  feu  à 
l'église,  où  s'était  réfugié  le  curé  de  Saint-Privat-la-Montagne , 
avec  plusieurs  de  ses  paroissiens,  et  furent  enfin  repoussés  par 
les  Bretons  *.  Le  2  novembre,  les  Messins  éprouvèrent  un  rude 
échec,  à  l'attaque  du  château  de  Grépy,  occupé  par  Floquet. 

L'hiver,  qui  fut  très  rigoureux,  n'interrompit  guère  les  hosti- 
lités. Le  roi  s'était  retiré  à  Nancy,  mais  les  troupes  continuèrent 
de  ravager  le  territoire  de  Metz.  De  part  et  d'autre,  de  grandes 
cruautés  étaient  commises.  Le  jeudi,  31  décembre,  des  Bretons, 
qui  faisaient  une  course  aux  environs  de  Moulin,  furent  surpris, 
battus,  poursuivis  jusqu'à  la  rivière.  Une  quarantaine  d'entre  eux 
furent  pris,  tués  ou  noyés.  Tout  en  se  défendant  avec  une  re- 
marquable énergie,  les  Messins  avaient  entamé  avec  Gharles  VII 


1.  Huguenin  et  de  Saulcy,  Relation  du  siège  de  Metz  en  1444,  Metz,  1835, 
in-8»,  p.  83,  22 i,  287. 

2.  Voy.  Huguenin,  p.  298,  299. 

3.  Id.,  p.  99. 

4  Id.,  p.  113,  lli. 


HENRI  VI  ÉPOUSE   MARGUERITE   d'ANJOU   (1445,    MARS)  351 

des  négociations  qui  n'avaient  pas  abouti.  Ils  les  reprirent  au 
mois  de  janvier  et  firent  frapper  une  quantité  considérable  de 
gros  messins' on  pièces  d'or,  qui  paraissent  avoir  joué  un  rôle 
décisif  dans  ces  nouvelles  conférences.  S'il  faut  en  croire  les 
chroniqueurs  messins,  les  conseillers  les  plus  influents  de 
Charles  VII,  surtout  P.  de  Brézé,  ne  furent  pas  insensibles  à  des 
avances  aussi  séduisantes;  quant  au  connétable,  il  n'est  pas 
mentionné  parmi  ceux  qui  en  profitèrent  *. 

Ce  fut  P.  de  Brézé  qui  contribua  le  plus  à  décider  le  roi.  Ce 
fut  lui  qui  reçut  ses  pleins  pouvoirs  pour  conclure  la  paix  (5  fé- 
vrier) j  et  ce  fut  lui  qui  la  signa.  Elle  fut  ratifiée  le  28  février,  à 
Pont-à-Mousson  ^  où  se  trouvaient  le  roi,  le  connétable  et  les 
autres  princes.  Metz  dut  payer  à  Charles  VII  200  000  écus  d'or 
et  promettre  de  ne  point  secourir  ses  ennemis.  A  ce  prix,  elle 
retarda,  pour  un  siècle  encore,  sa  réunion  à  la  France  ^.  Il  en 
fut  de  même  pour  les  deux  autres  évêchés,  Toul  et  Verdun, 
qui  d'ailleurs  reconnurent  l'autorité  du  roi,  en  s'engageant  à 
lui  payer  un  droit  annuel  de  garde  ou  de  protection. 

Pendant  ce  temps,  le  Dauphin,  après  avoir  gagné  sur  les 
Suisses  la  sanglante  bataille  de  Saint-Jacques,  près  de  Bâle 
(26  août  1444),  avait  laissé  la  plus  grande  partie  de  ses  troupes 
en  Alsace  *  et  était  revenu  auprès  de  son  père,  à  Nancy  (décem- 
bre) ^.  Le  comte  de  Sufl'olk  s'était  rendu  dans  cette  ville,  pour 
épouser  Marguerite  d'Anjou  au  nom  de  Henri  VI  *'.  Alors  fut 
célébré  aussi  le  mariage  de  Ferry  de  Vaudemont  '  avec  Yolande, 


1.  Huguenin,  p.  151-132.  On  trouve,  aux  pièces  justificatives,  l'indication 
des  sommes  qui  furent  payées  par  les  Messins  à  P.  de  Brézé  (Huguenin ,^ 
p.  313,  316,  Mat.  d'Escouchy,  t.  I,  p.  37).  D'autre  part,  les  services  de  P.  de 
Brézé  étaient  bien  récompensés  par  le  roi  (voy.  JJ  177,  f"  52;  K  68,  n°  7). 

2.  Arrondissement  de  Nancy. 

3.  Le  3  mars,  René  d'Anjou  fit  un  traité  particulier  avec  Metz  (Huguenin, 
311-3ii,  et  Coll.  de  Lorraine,  t.  224,  f"  60).  Sur  la  campagne  de  Lorraine, 
voir  :  Huguenin  et  de  Saulcy,  Relation  du  siège  de  Metz  en  f444,  avec  les 
pièces  justificatives;  D.  Calmet,  Hist.  de  Lorraine,  t.  II,  col.  832-840,  et 
Preuves,  col.  ccl  et  suiv.,  Martial  d'Auvergne,  I,  216-217;  ,C^?'Ort.  Marti- 
nienne,  f"  ccLxxxvni  ;  Berry,  p.  423-426;  .M.  d'Escouchy,  I,  p.  7  et  suiv. 
Sur  Toul,   voy.  JJ  177,  f»'  26  v»,  27. 

4.  Sur  la  campagne  du  Dauphin,  voir  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  I,  148 
et  suiv. 

5.  Le  roi  était  encore  à  Nancy  au  mois  de  mars  1445,  et  le  connétable 
était  avec  lui  (JJ  177,  f  20  v"). 

6.  Fr.  26073,  n»  5107,  5113.  SufToIk  conduisit  la  nouvelle  reine  eu  Angle- 
terre au  mois  d'avril  1443  {Proceedings,  VI,  Préface,  p.  xvi,  note  1  ;  Fr.  26073, 
no»  5170,  5178).  Elle  entra  le  23  mars  à  Rouen  (Fr.  26073,  n»  5174).  Elle  était 
accompagnée,  depuis  Pontoise,  par  le  duc  d'York,  qui  ■devint,  plus  tard,, 
son  mortel  ennemi  (Fr.  4054,  f'^  35). 

7.  Fils  d'Antoine  de  Vaudemont,  le  compétiteur  de  René  d'Anjou. 


352      RICHEMONÏ   ÉPOUSE   CATH.    DE    LUXEMBOURG    (144o,    JUILLET) 

autre  fille  du  roi  René.  Ces  deux  cérémonies,  qui  se  firent  avec 
un  grand  concours  de  princes  et  de  seigneurs,  donnèrent  lieu  à 
des  fêtes  magnifiques,  festins,  bals,  joutes  et  tournois  *.  On  y  vit 
paraître  Jean  d'Orléans,  comte  d'Angoulême  (frère  de  Ch.  d'Or- 
léans), qui  revenait  d'Angleterre,  après  trente  ans  de  captivité^. 

C'est  dans  ce  môme  temps  que  fut  négocié  le  mariage  du  con- 
nétable avec  Catherine  de  Luxembourg.  Quand  il  était  parti  pour 
la  Lorraine,  sa  seconde  femme,  Jeanne  d'Albret,  était  malade. 
L'hiver  précédent,  une  épidémie  l'avait  forcée  de  quitter  Par- 
thenay  pour  Fontenay-le-Comte,  où  elle  avait  résidé  quelque 
temps.  Revenue  à  Parthenay,  avec  son  mari,  elle  avait  vu  sa 
santé  s'altérer  de  nouveau,  et  elle  avait  été  emportée,  vers  la  fin 
de  septembre,  par  une  mort  prématurée  ^.  Après  la  campagne 
de  Lorraine,  Charles  d'Anjou,  qui  avait  épousé,  en  1443,  Isa- 
belle de  Luxembourg  *,  entreprit  de  marier  Richemont  avec 
Catherine,  sœur  d'Isabelle.  Le  contrat  fut  signé  à  Chàlons  le 
30  juin  1445  ',  et  les  noces  eurent  lieu  quelques  jours  après. 

Cette  maison  de  Luxembourg,  à  laquelle  s'alliait  Artur  de  Bre- 
tagne, était  illustre  et  puissante.  Elle  avait  donné  des  empereurs 
à  l'Allemagne,  des  rois  à  la  Bohème  et  à  la  Hongrie.  La  nouvelle 
comtesse  de  Richemont  était  fille  de  Pierre  de  Luxembourg  ^, 
comte  de  Saint-Pol,  mort  en  1433.  Son  père  et  ses  oncles,  Louis 
de  Luxembourg,  chancelier  de  France  pour  Henri  VI,  et  Jean  de 
Luxembourg,  comte  de  Ligny,  avaient  toujours  servi  l'Angleterre  ; 
mais  son  frère  aîné,  Louis  de  Luxembourg,  comte  de  Saint-Pol, 
qui  était  devenu,  en  1440,  le  chef  de  la  famille,  était  rentré 
dans  le  devoir,  en  faisant  sa  soumission  à  Charles  VII.  Une  de 


1.  Dans  ces  tournois  se  distingua  le  jeune  Jacquet  de  Lalain,  qui  était 
venu  avec  le  comte  de  Saint-Pol  et  dont  G.  Ghastelain  raconte  longuement  les 
prouesses  (voy.  la  Chron.  de  J.  de  Lalain,  par  G.  Ghastelain,  dans  \q  Pan- 
théon lut.,  p.  614-627,  et  Oliv.  de  La  Marche,  p.  407-408;  Martial  d'Au- 
vergne, 1,217-219.  et  Fr.  5044,  f»  128  v»). 

2.  K  72,  n"  563. 

3.  Gruel,  220|, 

4.  Xia  8605,  i''  99-101. 

3.  Le  comte  de  Saint-Pol  s'engage  à  faire  3  000  livres  de  rentes  à  Cath. 
de  Luxembourg.  Dans  l'espace  de  quatre  ans  après  la  célébration  du  mariage, 
il  payera  au  connétable  3  000  écus  d'or  et  le  comte  du  Maine  3  000,  etc. 
(XI'  1483,  f»  88  v»;  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1375-78).  Le 
17  juin  1448,  le  comte  de  Richemont  donne  en  douaire  à  Gath.  de  Luxem- 
bourg la  seigneurie  de  Torfou  (Turnus  Brutus,  I,  f»  224).  11  semble  que  Riche- 
mont eut  beaucoup  de  peine  à  se  faire  payer  la  rente  et  la  somme  promises 
par  le  comte  de  Saint-Pol,  car  il  dut  lui  intenter  un  procès,  en  1453,  devant 
le  parlement  de  Paris,  qui  condamna  L.  de  Luxembourg.  (Xi'""  1483,  f"  88 
v»,  89,  119,  123.) 

6.  Voy.  Anselme,  III,  p.  725-726,  et  ci-dessus,  p.  312,  316. 


RICHEMONT  A  CUALONS  AVEC   LE   UOI    (1445)  3o3 

ses  sœurs,  Jacqueline  de  Luxembourg,  avait  été  mariée  au  duc  de 
Bedford,  en  1433. 

Celte  alliance  de  la  maison  de  Lmxembourg  avec  les  maisons 
d'Anjou  et  de  Bretagne  ne  pouvait  qu'être  utile  à  la  France, 
surtout  dans  ce  moment,  où  les  relations  de  Charles  VII  avec  le 
duc  de  Bourgogne  n'avaient  rien  d'amical.  Les  ravages  continuels 
commis  par  les  routiers  du  Dauphin,  pendant  l'expédition  d'Al- 
sace, avaient  occasionné  de  nouveaux  différends,  qui  faillirent 
même  amener  une  rupture.  La  duchesse  de  Bourgogne  revint 
auprès  du  roi,  pour  conduire  les  négociations.  Sa  présence  et 
celle  de  Marguerite  d'Ecosse,  sœur  de  la  Dauphine  et  de  la  du- 
chesse de  Bretagne,  l'arrivée  de  plusieurs  ambassades,  venues  de 
toutes  les  parties  de  l'Europe,  d'Italie,  d'Espagne,  d'Allemagne, 
de  Constantinople,  donnèrent  à  la  cour  de  France  un  éclat  inu- 
sité. On  était  loin  du  temps  où  le  petit  roi  de  Bourges  cachait 
dans  quelque  manoir  isolé  son  humiliation  et  sa  misère. 

AGhâlons,  comme  à  Nancy,  les  fêtes  se  succédèrent,  de  plus  en 
plus  brillantes.  Les  princes  d'Orléans  et  d'Anjou,  le  comte  de 
Saint-Pol,  les  seigneurs  bourguignons  et  P.  de  Brézé,  un  des 
cavaliers  les  plus  accomplis  de  son  temps,  rivalisaient  d'ardeur 
à  inventer  de  nouvelles  réjouissances,  pour  divertir  les  reines, 
les  princesses  et  les  dames  de  leur  suite  K  Dans  cette  société  élé- 
gante, enjouée,  avide  de  plaisirs,  le  connétable,  qui  atteignait  sa 
cinquante-deuxième  année,  ne  se  faisait  pas  remarquer  au  pre- 
mier rang,  à  l'égal  de  ses  beaux-frères,  ou  du  roi  artiste  Bené 
d'Anjou,  ou  du  prince  poète  Ch.  d'Orléans  ;  mais  il  prenait  grand 
intérêt  à  s'entretenir  avec  la  duchesse  de  Bourgogne,  femme  d'un 
esprit  supérieur.  Il  était  heureux  de  voir  auprès  de  lui  sa  nièce, 
Marie  de  Bourbon,  qui  venait  d'épouser  Jean,  duc  de  Calabre, 
fils  de  René  d'Anjou,  et  le  frère  de  Marie ,  Jean  de  Bourbon , 
comte  de  Clermont,  qui  devait  bientôt  devenir  son  compagnon 
d'armes.  Il  travaillait,  avec  le  comte  de  Foix,  à  obtenir  la  grâce 
de  son  beau-frère,  le  comte  d'Armagnac  *,  alors  vaincu  et  captif; 
il  contribuait  à  terminer  le  différend  entre  Charles  VII  et  Phi- 

1.  Voir  Oliv,  de  La  Marche,  édit.  du  Panthéon  littér.,  p.  407;  Fr.  5034, 
f»  128  V». 

2.  Jean  IV,  comte  d'Armagnac,  après  avoir  échoué  dans  son  projet  de 
marier  sa  fille  avec  Henri  VI,  avait  voulu,  malgré  le  roi,  s'approprier 
l'héritage  de  Marg.  de  Coaiminges.  Vaincu  et  pris  par  le  Dauphin,  en  1444, 
il  n'obtint  sa  grâce  qu'en  abandonnant,  outre  le  comté  de  Comminges,  la 
plus  grande  partie  de  ses  domaines  (Vallet  de  V.,  Charles  VII,  II,  446-447,  et 
III,  91-96;  JJ  177,  f»'  80  vo-83,  147;  X»»  8603,  f  111  ;  JJ  176,  f  289  v»; 
JJ  178,  fos  126  v°,  127).  Richemont  fut  tenu,  ainsi  que  les  ducs  de  Bre- 
tagne, de  Bourbon,  d'Alençon,  de  Savoie,  etc.,  de  «  bailler  des  sûretés  » 
pour  J.  d'Armagnac  {Portef.  Fontanieu,  119-120,  à  1445;  P  2331,  foSOS). 

RiCUEMONT.  23 


354         DIFFÉREND  ENTRE  RICHEMONT  ET  P.   DE  BRÉZÉ   (1445) 

lippe  le  Bon  *  ;  enfin  il  s'occupait  de  licencier  l'ancienne  armée 
pour  organiser  la  nouvelle. 

Ces  plaisirs  et  ces  travaux  faillirent  être  troublés  parla  jalousie 
du  favori  de  Charles  VII.  Pierre  de  Brézé  s'imagina  que  le  con- 
nétable et  Charles  d'Anjou,  qu'il  considérait  comme  des  envieux, 
intéressés  à  le  perdre,  conspiraient  contre  lui,  avec  le  Dauphin, 
le  roi  de  Sicile  et  le  comte  de  Saint-Pol.  Il  alla  jusqu'à  les  accuser 
de  vouloir  faire  une  Praguerie. 

Le  connétable  faire  un  Praguerie!  et  dans  un  pareil  moment! 
L'accusation  était  si  monstrueuse  qu'elle  tomba  d'elle-même, 
devant  des  explications  loyales  et  indignées.  Cet  incident  fâcheux 
n'eut  pas  d'autres  conséquences  pour  Richemont.  Le  Dauphin 
poursuivit  de  sa  haine  le  tout-puissant  ministre,  mais  le  conné- 
table continua  de  travailler  comme  lui,  et  même  avec  lui,  au 
relèvement  de  la  France  ^ 

1.  Deux  traités  furent  signés  entre  le  duc  de  Bourgogne  et  les  rois  de 
France  et  de  Sicile,  le  24  juin  et  le  6  juillet  (Vallet  de  V.,  Charles  VII, 
t.  III,  p.  82;  M.  d'Escouchy,  I,  49;  Berry,  p.  427). 

2.  Gruel,  220-221.  J.  Ghartier,  t.  III,  205.  Mat.  d'Escouchy,  I,  p.  68. 
Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  III,  p.  107  et  suiv.  —  Toutefois,  les  princes  de 
la  maison  d'Anjou  furent  écartés  (de  Beaucourt,  Caractère  de  Charles  VII, 
dans  le  t.  XIV  de  la  Revue  des  questions  historiques,  p.  93).  Intrigues  du 
Dauphin  contre  Brézé  {Idem,  p.  95-104,  et  ci-dessous,  p.  381,  note  4). 


CHAPITRE  V 

LA     RÉFORME     DE     l'aRMÉE 


Opportunité  de  la  l'éforme  de  l'armée.  —  Adversaires  et  partisans  de  cette 
réforme.  —  Ordonnance  du  9  janvier  1445.  —  Autre  ordonnance.  —  Le 
connétable  applique  les  ordonnances.  —  Ordonnance  de  Louppy  (du 
26  mai  1445).  —  Les  compagnies  d'ordonnance.  —  Du  nombre  des 
compagnies.  —  Plaintes  soulevées  par  les  ordonnances.  —  De  l'armée 
permanente.  —  De  la  taille  perpétuelle.  —  La  petite  et  la  grande  ordon- 
nance. —  Effectif  des  compagnies.  —  Hommes  d'armes  et  capitaines.  — 
Payement  des  contributions.  —  Payement  des  troupes.  —  Résultats  des 
réformes.  —  Les  francs  archers.  —  Le  service  féodal.  —  Part  de  Riche- 
mont  dans  les  réformes  militaires. 


Après  les  expéditions  d'Alsace  et  de  Lorraine,  il  parut  enfin 
possible  de  réaliser  le  projet  de  réforme  militaire  qui,  depuis 
longtemps,  préoccupait  le  connétable.  La  défaite  de  la  Praguerie, 
la  trêve  avec  l'Angleterre,  l'accroissement  de  la  puissance  royale 
permettaient  de  mener  à  bonne  fin  cette  entreprise,  qui  présen- 
tait encore  tant  de  difficultés.  Malgré  les  ordonnances  de  1444, 
les  ravages  des  gens  de  guerre  continuaient  partout  ^  Pendant 
l'hiver  de  1444-1445,  quand  la  cour  était  à  Nancy,  la  question 
des  réformes  militaires  fut  encore  examinée  dans  le  Conseil,  où  se 
trouvaient,  avec  le  connétable  ^,  René  d'Anjou  ^,  son  fils  Jean, 
duc  de  Galabre,  son  frère  Charles,  comte  du  Maine,  les  comtes 
de  Glermont,  de  Foix,  de  Tancarville  et  de  Dunois.  Le  roi  lui- 
même,  «  qui  avoit  ceste  besoingne  moult  à  cuer  *,  »  et  le  Dau- 
phin prenaient  souvent  part  aux  délibérations.  Tous  les  mem- 

1.  M.  d'Escouchy,  III,  93-94.  JJ  177,  f<"  10  v,  20.  Les  gens  du  connétable 
faisaient  comme  les  autres. 

2.  M.  d'Escouchy,  I,  54. 

3.  Voir  les  doléances  de  René  d'Anjou  dans  Marchegay,  Archives  cT Anjou, 
t.  II,  305  et  suiv. 

4.  M.  d'Escouchy,  I,  53.  ^ 


356  ORDONNANCE   Dîl  9   JANVIER   1445    SUR   l'aRMÉE 

bres  du  Conseil  n'étaient  pas  d'accord  avec  le  connétable  sur 
cette  innovation,  qui  devait  avoir  de  si  grandes  conséquences. 
Ceux  qui  faisaient  des  objections  plus  ou  moins  sincères  disaient 
que  le  licenciement  des  compagnies  pourrait  bien  exciter  une 
révolte  dangereuse  et  que  Tentretien  d'autres  troupes  serait  une 
lourde  charge  pour  les  populations,  déjà  si  épuisées  '.  Ce  der- 
nier argument  n'était  que  spécieux,  car  des  dépenses  régulières 
et  prévues  étaient  bien  préférables  aux  déprédations  ruineuses 
des  routiers  *.  Quant  aux  difficultés  que  présentait  le  licencie- 
ment, on  en  pouvait  triompher,  avec  de  la  prudence  et  de  l'éner- 
gie. Il  semble  que  Charles  VII  se  soit  alors  inspiré  des  exemples 
de  son  glorieux  aïeul,  Charles  V,  comme  Ilichemont  de  ceux  de 
Du  Guesclin  ^. 

Soutenu  par  le  roi  de  Sicile,  par  Pierre  de  Brézé  lui-même  *, 
et  sans  doute  aussi  par  les  petites  gens  du  Conseil,  qui  avaient 
souci  des  véritables  intérêts  du  peuple,  le  connétable  fit  enfin 
prévaloir  ses  idées.  On  gagna  les  principaux  chefs  de  bandes,  en 
leur  promettant  des  commandements  dans  la  nouvelle  armée;  on 
^résolut  de  faire  un  choix  parmi  les  gens  de  guerre,  de  garder 
les  meilleurs  soldats,  pour  en  former  un  certain  nombre  de  com- 
pagnies, et  de  renvoyer  les  autres,  en  prenant  toutes  les  mesures 
nécessaires  pour  les  empêcher  de  piller.  La  nouvelle  de  ces 
changements  produisit  chez  les  uns  l'inquiétude  et  le  méconten- 
tement, chez  d'autres  une  vive  émulation,  s'il  est  vrai,  comme 
l'affirme  Olivier  de  La  Marche  ^,  que  des  gentilshommes  ache- 
taient fort  cher  de  bons  chevaux,  pour  avoir  plus  de  chances 
d'être  choisis. 

Le  9  janvier  1445,  Charles  VII,  dans  une  ordonnance  dont  le 
préambule  est  remarquable,  exposait  qu'il  avait  depuis  long- 
temps le  désir  de  mettre  fin  aux  déprédations  des  routiers  ; 
qu'il  n'avait  pu  jusqu'alors  y  réussir  autant  qu'il  l'eût  voulu,  à 
cause  de  la  guerre  ;  qu'il  avait  conclu,  dans  ce  but,  une  trêve, 
avec  l'espoir  d'arriver  à  la  paix  définitive;  que,  «  pour  extirper 
la  pillerie  »,  il  avait,  avec  le  Dauphin,  mené  les  gens  de  guerre 

1.  M.  d'Esoouchy,  I,  53. 

2.  Voy.  le  préambule  d'une  ordonnance  du  26  novembre  1446  (K  6&, 
n»s  22  et  23).  Voir  aussi  Fr.  5033,  f"  135  v»,  138;  Fr.  25711,  n»  189;  Mons- 
trelet,  "VI,  176  et  suiv, 

3.  M.  d'Escouchy,  I,  53;  le  P.  Daniel,  La  milice  française,  I,  p.  144  et 
216;  Fr.  25712,  n"  353;  Ordonnances,  V,  658-661.  Voir  aussi  le  Quadriloqe 
invectifà.'W?àn  Ghartier,  dans  l'édit.  A.  Duchesne,  Paris,  1617,  in-40,  p.  451. 

4.  Voy.  Lecoy  de  La  Marche,  Le  roi  René,  t.  l,  p.  244-245,  et  t.  II,  p.  257; 
et  Oliv.  de  La  Marche,  p.  408,  édit.  du  Panthéon  littéraire.  01.  de  La  Marche 
donne  à  tort  le  prénom  de  Jean  à  Brézé,  sire  de  La  Varenne. 

5.  Éd.  du  Panthéon  litt.,  p.  408. 


AUTRE   ORDONNANCE   SUR   l'ARMÉE   (1445)  387 

hors  du  royaume,  et  que,  pour  les  soudoyer,  il  avait  besoin  de 
lever  en  Languedoil  une  aide  de  300  000  livres  '.  Cette  somme 
et  Tindemnité  de  guerre  imposée  aux  Messins  devaient  faciliter 
l'exécution  des  réformes  adoptées.  Ces  réformes  furent  l'objet 
d'une  autre  ordonnance,  dont  on  n'a  pas  retrouvé  le  texte,  mais 
qui  est  certainement  antérieure  au  20  avril  1445  *.  D'ailleurs 
elle  est  suffisamment  connue,  dans  toutes  ses  dispositions  prin- 
cipales, grâce  à  d'autres  documents  relatifs  au  même  objet. 

Tous  les  chefs  de  compagnies  devaient  se  présenter,  avec  leurs 
gens,  devant  le  connétable,  pour  être  passés  en  revue.  Ceux  qui 
seraient  licenciés  étaient  tenus  de  remmener  leurs  hommes  dans 
le  pays  où  ils  étaient  avant  de  s'enrôler',  sans  rien  prendre  par- 
tout où  ils  passeraient  «  fors  seulement  des  vivres,  gracieuse- 
ment *.  »  Pour  leur  faciliter  le  retour  au  travail  et  au  bien,  le 
roi  leur  accorda  rémission  générale  ^  et  défendit  qu'on  les  in- 
quiétât, «  nonobstant  les  crimes,  déliz  ou  maleffices  quelxcon- 
ques  par  eulx  ou  l'un  d'eulx  commis  et  perpétrez-  le  temps  passé, 
à  cause  de  la  guerre  ^.  » 

Ceux  qui  seraient  retenus  au  service  du  roi  devaient  former  de 
nouvelles  compagnies,  composées  d'un  certain  nombre  de  lances 
ou  hommes  d'armes  et  appelées  compagnies  d'ordonnance.  Cha- 
que lance  comprenait  l'homme  d'armes,  avec  un  coutillier  et 
un  page,  deux  archers  et  un  autre  page,  ou  un  varlet  de  guerre; 
en  tout,  six  hommes  et  six  chevaux  '. 

i.  Ordonnance  du  9  janvier  1144  a.  st.,  rendue  à  Nancy  (K  68,  n»  9). 
M.  Tueley  a  donné  un  long  extrait  de  ce  document  dans  son  ouvrage  sur 
Les  Ecorcheicrs,  t.  I,  p.  346-347.  Voy.  aussi  Fr.  26073,  n°  514S,  et  Fr.  26074, 
n»  5376. 

2.  L'ordonnance  du  26  mai  1443  rappelle  ces  ordonnances  antérieures 
(voy.  Append.  LXXXIII,  et  Vallet  de  V,,  dans  la  Bib.  de  l'École  des  chartes, 
2«  série,  t.  III,  p.  124,  note  2). 

3.  II  y  avait  parmi  eux  des  paysans  qui  avaient  quitté  leurs  champs 
pour  suivre  le  métier  des  armes,  en  voyant  «  que  chacun  pilloit  et  desro- 
boit  l'un  l'autre  »  (JJ  178,  f'  28).  «  Ne  je  n'ay  autre  espérance  en  ma  vie, 
senon,  par  désespoir,  laisser  mon  estât,  pour  faire  comme  ceulx  que  ma 
despouille  enrichit,  qui  plus  aiment  la  proye  que  l'onneur  de  la  guerre  » 
(Plaintes  du  peuple,  dans  A.  Chartier,  édit.  A.  Duchesne,  p.  417). 

4.  Voir  Appendice  LXXXIII. 

5.  On  n'a  pas  retrouvé  le  texte  de  cette  amnistie  générale,  mais  elle  est 
souvent  mentionnée  dans  les  lettres  d'abolition  (JJ  176,  f"  289;  JJ  177, 
f  96  v%  97  v»;  JJ  178,  f»  4;  JJ  179,  f»  64  v»;  JJ  180,  >  28  v").  Malgré  cette 
amnistie  générale,  beaucoup  de  routiers  demandèrent  et  obtinrent  des 
lettres  particulières  de  rémission.  Il  y  a  un  très  grand  nombre  de  ces 
lettres  dans  les  registres  JJ  177,  178,  179,  par  exemple  JJ  177,  f"'  35,  50, 
59,  63  v»,  66,  67  vo,  68,  96  v,  97  v,  119  V,  157  v»,  etc. 

6.  Voy.  Append.  LXXXIII. 

7.  Martial  d'Auvergne,  I,  170;  M.  d'Escouchy,  I,  53,  qui  dit,  à  tort,  que 


358  ORDONNANCES  SUR  l'armée  (1445) 

Ces  troupes  devaient  être  logées,  par  compagnies  ou  par  déta-' 
chements,  dans  les  villes,  et  entretenues  aux  frais  des  habitants. 
Elles  ne  pouvaient  rien  exiger  au  delà  de  ce  qui  leur  était  alloué 
par  les  ordonnances  *. 

Les  capitaines,  nommés  par  le  roi  et  révocables  à  sa  volonté  % 
restaient  ainsi  dans  une  dépendance  qui  ne  leur  permettait 
aucun  écart.  Ils  étaient,  en  outre,  tenus  de  faire  leurs  montres, 
c'est-à-dire  de  présenter  leurs  compagnies,  toutes  les  fois  que  les 
commissaires  du  roi  ^  viendraient  en  faire  l'inspection. 

Telles  sont  les  dispositions  générales  qu'on  trouve  dans  les 
divers  documents  relatifs  à  cette  réforme  de  l'armée.  Le  conné- 
table reçut  l'ordre  de  les  exécuter  sévèrement  *.  On  voit  déjà 
qu'elles  contiennent  des  garanties  de  bon  ordre  et  de  discipline 
qui  devaient  mettre  un  terme  à  de  trop  longs  abus  ^. 

L'application  de  ces  règlements  ne  se  fit  pas  attendre  ".  Le 


chaque  lance  comprenait  trois  archers.  Elle  n'en  comprenait  certainement 
que  deux.  11  est  probable  que  ce  nombre  de  six  hommes  par  lance  fournie, 
qui  est  réglementaire,  n'était  pas  toujours  au  complet  (Fr.  25777,  n»  1754; 
Fr.  23778,  n"  1839).  —  Dans  l'armée  anglaise,  chaque  lance,  ou  homme 
d'armes,  avait  trois  archers  (Fr.  4484,  f»  36;  Fr.  23778,  n»  1830;  S.  Luce, 
Chronique  du  Mont-Saint-Michel,  I,  26,  note  4).  —  En  1445,  un  habitant  de 
La  Rochebrou  a  logé  2  hommes  d'armes  et  2  archers  «  qui  sont  9  per- 
sonnes et  9  chevaux  »  (Fr.  26080,  n°  6414).  Voy.  aussi  Flammermont, 
Histoire  des  institutions  municipales  de  Sentis,  dans  le  45°  fascicule  de  la 
Biljlioth.  des  Hautes-Études,  p.  104.  M.  d'Escouchy,  I,  58,  dit  que  les  compa- 
gnies d'ordonnance  formaient  un  effectif  de  9  000  à  10  000  chevaux.  —  Il  ne 
faut  pas  confondre  le  page  avec  le  varlet  de  guerre.  Le  page  était  plus- 
jeune.  On  en  trouve  qui  n'ont  que  douze  ans  (Fr.  26083,  n»  6797).  Autre 
exemple  d'un  enfant,  qui  sert  un  homme  d'armes,  comme  page  et  qui 
devient  ensuite  varlet  de  guerre,  puis  homme  d'armes  (JJ  178,  n»  uni,  f"  34). 

1.  Sous  peine  d'être  privés  de  «  leur  ordonnance  »  (Fr.  26082,  n»  6637). 

2.  Voir  le  serment  prescrit  par  Louis  XI,  en  1467,  aux  capitaines  des- 
compagnies  d'ordonnance  (le  P.  Daniel,  Milice  française,  I,  227). 

3.  Un  de  ces  commissaires,  en  Normandie,  était  Jamet  du  Tillay,  baillî 
de  Vermandois  (Glairambault,  t.  GLXXXVII,  f«  6997). 

4.  M.  d'Escouchy,  III,  95-97. 

5.  Cette  ordonnance  reproduit  des  dispositions  qui  se  trouvent  déjà 
dans  celle  que  Charles  V  rendit  à  Vincennes,  le  13  janvier  1373,  a.  st.  (voy.  le 
tome  V  des  Ordonn.,  p.  637-661).  Il  est  certain  que  Charles  VII  avait  fait 
rechercher  et  étudier  les  actes  de  ses  prédécesseurs,  depuis  le  roi  Jean  le 
Bon,  en  ce  qui  concernait  l'organisation  militaire  (Fr.  23712,  n»  353).  Voir 
le  P.  Daniel,  Milice  française,  t.  I,  p.  216.  Le  nom  même  de  compagnie» 
d'ordonnance  pourrait  bien  venir  de  cet  acte  de  Charles  V. 

6.  Dès  juillet  1445,  il  y  avait  des  gens  d'armes  de  la  compagnie  de  R. 
Floquet  dans  la  ville  et  châtellenie  de  Luçon  (Fr.  26075,  n»  5458;  Fr.  26074, 
n"  5324,  5343,  5350).  Voir  aussi  Flammermont  {Institutions),  p.  105,  110; 
A.Thomas,  États  prov.,  I,  213-214;  II,  237).  Vers  la  fin  de  1445,  Jacques 
de  Clermont  tenait  garnison  dans  le  Poitou  avec  une  compagnie  de 
100  lances  (Pièces  orig.,  t.  783,  dossier  Clermo.m,  n»»  18,  19). 


RlCHEMOiNT  APPLIQUE  LES  ORDONNANCES   (144o)  359 

connétable,  après  avoir  averti  les  officiers  royaux,  baillis,  pré- 
vôts, gouverneurs,  prit  des  mesures  si  bien  concertées  que  le 
licenciement  des  routiers  s'opéra  sans  bruit,  sans  désordre,  avec 
une  précision  et  une  promptitude  inespérées.  Richemont  com- 
mença par  passer  en  revue  les  troupes  qui  se  trouvaient  en  Lor- 
raine, cassant  ceux  qui  ne  méritaient  pas  d'être  conservés  et  choi- 
sissant ceux  qui  lui  paraissaient  dignes  d'être  enrôlés  dans  les 
compagnies  d'ordonnance.  Les  autres  furent  renvoyés,  par  dé- 
tachements, dans  leur  pays,  sous  la  conduite  de  leurs  chefs  et 
sous  la  surveillance  des  officiers  royaux,  avec  un  sauf-conduit 
valable  pour  le  temps  nécessaire  à  leur  retour  (avril  1445)  *. 

Quand  Richemont  eut  ainsi  licencié  les  routiers  de  Lorraine, 
il  soumit  à  la  même  opération  ceux  qui  étaient  revenus  d'Alsace  à 
Montbéliard.  Gomme  il  importait  de  se  hâter,  il  alla  se  concerter, 
à  Langres,  avec  Joachim  Rouault,  qui  commandait  à  Montbé- 
liard, et  fit  passer  par  la  Franche-Comté  des  troupes  qui  allèrent 
chercher  et  ramener  les  routiers,  sans  se  laisser  arrêter  par  les 
protestations  du  maréchal  de  Bourgogne  ^.  Cet  officier  de  Phi- 
lippe le  Bon,  croyant  les  domaines  de  son  maître  exposés  à  de 
nouveaux  ravages,  voulut  marcher  contre  le  connétable,  mais  il 
fut  bientôt  détrompé.  Les  routiers  finirent  par  évacuer  Montbé- 
liard et  se  dispersèrent,  non  sans  exercer  encore  quelques  rava- 
ges dans  la  Bourgogne  ^.  Le  connétable  resta  quelque  temps  à 
Langres  ,  pour  surveiller  ces  mouvements  de  troupes  (mai , 
juin  1445)  *. 

Ailleurs,  il  y  eut  d'autres  difficultés.  Les  lettres  de  rémission 
accordées  aux  routiers  par  le  roi  ne  s'appliquaient  qu'à  ceux  qui 
servaient  sous  ses  ordres  et  non  aux  autres,  comme,  par  exem- 
ple, à  ceux  qui  occupaient  Corbeil,  pour  le  duc  de  Bourbon,  Il 
fallut  que  Denis  de  Chailly  assiégeât  Corbeil,  pendant  quinze 
jours,  pour  les  réduire  à  l'obéissance  ^.  Il  y  eut  peut-être,  çà  et 
là,  quelques  autres  actes  de  mutinerie,  mais,  en  somme,  le  licen- 
ciement des  routiers  s'opéra  sans  retard,  sans  incident  grave,  et 

1.  Voy.  Append.  LXXXIII  et  JJ  184,  f»  7o. 

2.  Tuetey,  Les  Écorcheiirs,  t.  II,  p.  346-347.  M.  Tuetey  dit  que  riea  ne 
permet  d'affirmer  qu'il  s'agit  ici  du  connétable  de  Richemont.  Au  con- 
traire, rien  n'est  plus  vraisemblable.  Cf.  Gruel,  qui  indique  ce  fait  très 
nettement  (p.  221).  Le  maréchal  de  Bourgogne  était  alors  Thiébaud  de 
Neuchâlel,  seigneur  de  Blamont,  qui  avait  remplacé  J.  de  Fribourg  le 
11  avril  1443-  —  Quant  à  J.  Rouault,  il  ne  quitta  pas  Montbéliard  «  pour 
aller  quérir  aventure  »,  mais  pour  rejoindre  Richemont. —  Sur  les  rou- 
tiers en  Bourgogne,  voy.  Fr.  69Ga,  f"*  246  et  suiv. 

3.  Voy.  Math.  d'Escouchy,  t.  III,  p.  99-113  {Preuves). 

4.  Tuetey,  Les  Écorcheurs,  t.  I,  p.  346-47,  et  t.  II,  p.  45-46  et  89-91. 

5.  X2^  24,  au  jeudi  27  juin  1448. 


360  ORDONNANCE  DE   LOUPPY  (1445,    26  MAl) 

la  France,  délivrée  du  fléau  qui  la  ruinait,  retrouva  bientôt,  avec 
le  calme,  une  prospérité  depuis  longtemps  inconnue  \ 

Cependant  le  roi  prenait,  de  son  côté,  des  mesures  pour  or- 
ganiser les  nouvelles  compagnies  ^,  les  répartir  dans  les  dif- 
férentes provinces  du  royaume  et  leur  assurer  des  moyens  de 
subsistance.  Ce  fut  l'objet  d'une  nouvelle  ordonnance,  des  plus 
importantes,  rendue  à  Louppy-le^Château  ^,  le  26  mai  1445.  Le 
roi  y  déclare  qu'il  a  enjoint  de  jeter  hors  des  compagnies  les 
gens  de  néant  qui  ne  servaient  qu'à  piller  et  manger  le  peuple; 
qu'il  a  conservé  un  certain  nombre  de  gens  d'armes  et  de  trait, 
dont  il  a  donné  le  commandement  à  des  chefs  notables,  ayant 
que  perdre,  «  lesquels  sont  tenus  de  répondre  et  rendre  compte 
des  gens  qu'ils  auront  en  leurs  charges  »  ;  que  ces  gens  de  guerre 
seront  mis  en  garnison  *  dans  les  villes  de  tous  les  pays  du 
royaume;  que  les  habitants  devront  leur  fournir  le  logement  et 
une  quantité  déterminée  de  blé,  vin,  viande,  etc.,  avoine,  foin, 
paille  pour  eux  et  pour  leurs  chevaux  ^;  que  ses  élus,  ou  com- 
missaires, sont  chargés  de  choisir  les  logis  des  gens  d'armes,  de 
lever  l'argent  et  les  vivres  nécessaires  à  leur  entretien,  de  les 
leur  distribuer  et  de  contraindre,  par  saisie,  quiconque  refuserait 
de  payer  sa  redevance  ^.  Nul  ne  fut  exempt,  pour  cette  fois,  de 
ces  impositions,  ni  les  nobles,  ni  les  ecclésiastiques  ',  mais  ce 
règlement  fut  bientôt  modifié. 

Les  compagnies  ordonnées  par  le  roi,  ou  compagnies  d'ordon- 
nance *,  furent  promptement  formées,  et,  comme  les  gens  de 

1.  «  Et  ainsi  fut  ostce  la  pillerie  de  dessus  le  peuple,  qui  longtemps  avoit 
duré,  dont  mon  dict  seigneur  fut  bien  joyeulx,  car  c'estoit  l'une  des 
choses  que  plus  il  désiroit,  et  toujours  avoir  tasché  de  le  faire,  mais  le 
Roy  n'y  avoit  voulu  entendre  jusques  à  celle  heure  »  (Gruel,  221).  «  La 
chose  a  esté  mise  et  redduicte  en  si  bon  ordre,  que  ladicte  pillerie  a  cessé 
en  nostre  dict  royaume  »  (Fr.  21427,  n»  38). 

2.  Voir  comment  le  Bourg,  de  Paris  (p.  379)  apprécie  les  efforts  du  roi. 

3.  Arrondissement  de  Bar-le-Duc,  canton  de  Vaubecourt. 

4.  Avec  défense  de  sortir  de  leur  garnison  (JJ  184,  f»  156). 

5.  Voy.  Append.  LXXXIV.  M.  Vallet  de  V.  n'a  publié  que  des  fragments 
de  cette  ordonnance  dans  le  t.  III,  2°  série,  de  la  Bib.  de  VÉc.  des  chartes, 
p.  124,  et  avec  quelques  petites  inexactitudes. 

6.  Z'a  16,  f»  101. 

7.  Portef.  Font.,  119-120,  au  21  septembre  1445;  Zi"  15,  f"'  13a  v»,  136, 
137-139;  Z'a  16,  f-s  77-78;  Zi»  145,  f-  112-117;  Flammermont,  p.  104.  Une 
ordonnance  du  3  août  1445  porte  que  les  gens  d'Eglise  ne  contribueront 
pas  à  la  nourriture,  à  l'entretien  et  au  logement  des  troupes,  contraire- 
ment aune  ordonnance  antérieure  {Onlonn.,  XIII,  442,  et  Préface,  p.  lxxxv). 

8.  Auparavant,  il  y  avait  des  compagnies  qui  se  formaient  sans  ordon- 
nance du  roi  et  qui  s'imposaient.  C'est  ce  que  rappelle  J.  Jouvenel  des  Ur- 
sins  :  «  Aussi  tost  que  ung  paiz  estoit  réduit  en  vostre  obéissance,  dit-il  au 
roi,  on  envoioit  oudit  paiz  vivre  telles  manières  de  gens  sans  ordonnance. 


LES   COMPAGNIES  d'ORDONNANCE.    LEUR  NOMBRE  361 

guerre  sollicitaient,  en  grand  nombre,  la  faveur  d'y  être  admis, 
on  put  fciirc  de  bons  choix.  On  ne  prit  que  les  hommes  bien 
armés  et  bien  montés  *.  Ainsi,  un  homme  d'armes  qui  avait 
perdu  ses  chevaux  et  ses  harnais  dans  l'expédition  d'Allemagne 
ne  fut  pas  mis  «  es  ordonnances  des  gens  de  guerre  du  roi,  parce 
qu'il  n'estoit  pas  lors  bien  monté.  »  Ce  soldat  se  fit  marchand 
et  vécut  de  son  nouveau  métier,  le  mieux  qu'il  put.  Cet  exemple, 
qu'on  trouve  dans  un  document  de  l'époque  ^,  peut  être  inter- 
prété d'une  manière  générale  et  permet  d'affirmer  qu'il  se  pro- 
duisit beaucoup  d'autres  cas  semblables. 

Les  chroniqueurs  s'accordent  à  dire  que  le  roi  garda  1  500  lan- 
ces fournies,  c'est-à-dire,  à  six  hommes  par  lance,  un  effectif  de 
9  000  cavaliers.  D'après  Berry,  M.  d'Escouchy,  Olivier  de  La  Mar- 
che et  H.  Baude  ^,  le  P.  Daniel  et  les  auteurs  contemporains  ont 
répété  la  même  affirmation.  11  est  possible  que  la  première 
ordonnance,  dont  nous  ne  connaissons  pas  le  texte,  celle  qui  est 
antérieure  au  20  avril  1445,  ait  prescrit  d'abord  la  formation  de 
quinze  compagnies  de  cent  lances;  mais  les  documents  qui  nous 
sont  parvenus,  à  commencer  par  l'ordonnance  de  Louppy,  ne 
contiennent  pas  ce  détail.  L'ordonnance  du  20  mai  se  borne  à 
déclarer  que  le  roi  conserve  un  certain  nombre  de  gens  âHar' 
mes  et  de  trait  \  Il  est  sûr  qu'il  voulait  garder  plus  de  1  500  lan- 
ces; mais,  au  moment  môme  où  il  répétait  bien  haut  qu'il  cher- 
chait dans  la  nouvelle  organisation  un  moyen  de  soulager  le 
peuple,  il  hésitait  à  lui  imposer  d'autres  charges  trop  onéreuses. 

La  plus  simple  prudence  exigeait  qu'on  entretînt  assez  de 


chief  ne  manière  de  forme  de  guerre  »  (Fr.  5022,  f»  14)  ;  voy.  aussi  l'ar- 
ticle l"""  de  l'ordonnance  du  2  novembre  1439  {Ordonnances,  XIII,  306). 

1.  Olivier  de  La  Marche  (p.  407-408)  dit  que  les  chevaux  de  guerre  coû- 
taient très  cher  en  France,  lors  des  fêtes  de  Châlons,  en  1443,  parce  qu'on 
parlait  de  «  faire  ordonnance  sur  les  gens  d'armes....  et  sembloit  bien  à 
chacun  gentilhomme  que,  s'il  se  hionstroit  sur  un  bon  cheval,  il  en  seroit 
mieux  congnu,  quéru  et  recueilly.  » 

2.  JJ  179,  fo  126  v,  u»  xi«v. 

3.  Berry,  p.  427;  M.  d'Escouchy,  I,  53,  58;  01.  de  La  Marche,  p.  408; 
H.  Baude,  dans  le  t.  III  de  la  Chronique  de  J.  Chartier,  édit.  Vallet  de  V., 
p.  134-135.  Voir  aussi  Vallet  de  V.,  Hist.  de  Charles  VU,  t.  III,  p.  56,  note  2, 
et  p.  57. 

Puis  si  fist  le  roy  ordonnances 
Par  lesquelles  de  tous  gens  d'armes 
Print  seuUement  quinze  cens  lances 
Kt  les  archiers  après  en  armes. 
Oultre,  esleut  quinze  capitaines,  etc. 

Martial  d'Auvergne,  I,  219,  et  Fr.  5054,  f"  129  V. 

4.  L'ordonnance  du  2  novembre  1439  dit  à  peu  près  la  même  chose 
(Ordonn.,  XIII,  30G). 


362  PLAINTES   CONTRE   LES   ORDONNANCES 

troupes  pour  n'être  pas  pris  au  dépourvu,  si  la  trêve  conclue 
avec  l'Angleterre  n'aboutissait  pas  à  une  paix  définitive.  Dans 
les  ordonnances  relatives  à  l'entretien  des  troupes,  Charles  VII 
ne  cesse  de  déclarer  qu'il  s'elTorce  de  faire  la  paix,  mais  qu'il  est 
obligé  de  conserver  ses  gens  d'armes,  jusqu'à  ce  qu'il  voie  s'il 
aura  paix  ou  guerre  *. 

D'autre  part,  on  n'eût  pas  manqué  de  mécontenter  le  peuple, 
si,  en  lui  imposant  de  lourdes  taxes  pour  l'entretien  des  gens  de 
guerre,  on  avait  laissé  croire  que  ces  charges  seraient  perma- 
nentes. En  effet,  dès  qu'on  voulut  appliquer  les  ordonnances,  il 
s'éleva  de  nombreuses  plaintes  *.  Le  clergé  se  fit  d'abord  exemp- 
ter de  toute  contribution  ^,  ainsi  que  les  nobles,  «  les  vrais  esco- 
liers  et  estudians,  les  officiers  royaux,  etc.  »  *.  Les  villes  préten- 
daient qu'on  les  imposait  trop  et  essayaient  de  rejeter  les  unes 
sur  les  autres  la  plus  grande  partie  du  fardeau  ^.  Si  l'on  eût 
mécontenté  tout  le  monde  à  la  fois,  on  eût  compromis  le  succès 
de  la  réforme.  Il  fallut  donc  user  de  grands  ménagements,  pour 
faire  accepter  comme  une  nécessité  momentanée  des  sacrifices 
qu'on  n'eût  pas  subis  volontiers,  si  on  avait  cru  qu'ils  seraient 
toujours  aussi  onéreux  dans  l'avenir  ". 

d.  «  Et  aussi  pendant  la  dicte  trêve  qui  encores  dure  et  jusques  à  ce  que 
nous  voyons  se  nous  aurons  paix,  nous  est  besoin  entretenir  nos  dits 
gens  d'armes...  »  (Ord.  du  4  décembre  1445,  dans  le  3»  volume  de  la  2"  série 
de  la  Bib.  de  l'Éc.  des  chartes,  p.  128.  L'original  de  cette  ordonnance  a  été 
retrouvé  par  M.  A.  Thomas  dans  le  Ms.  Fr.  21427,  n»  10.)  Cette  déclaration 
se  rencontre  dans  beaucoup  d'autres  documents  du  même  genre.  Voir 
notamment  :  K  68,  n»  24;  Fr.  26082,  n»  6637;  Fr.  21427,  n»  38;  Fr.  23711, 
no»  192,  194,  203;  Fr.  25712,  n"»  266,  299,  321;  Portef.  Fonianieu,  121-122,  au 
28  septembre  1454;  Fr.  26084,  n»»  7042,  7051,  7076;  A.  Thomas,  Etais  prov., 
t.  I,  p.  238.  J.  du  Glercq  parle  de  1700  lances  en  1450,  et  il  dit  que  durant 
la  conquête  de  la  Normandie  tous  les  gens  d'armes,  qu'ils  fussent  de  l'or- 
donnance ou  non,  étaient  payés  chaque  mois.  Pour  la  campagne  de  1433, 
il  parle  de  1  600  à  1  800  hommes  d'armes  (J.  du  Clercq,  610,  616). 

2.  Le  Haut-Limousin  demande  déjà  une  réduction  en  mai  et  juin  1445 
(Clairambault,  t.  CLXXXVII,  f"  7037).  Autres  exemples  :  Zi»  17,  f-  48,  255  v», 
270-271;  JJ  176,  f"  288  v»;  Fr.  26081,  n»  656i;  A.  Thomas,  États  -prov.,  1, 
160,  161. 

3.  Fr.  26081,  n»  6509.  A  Senlis,  par  exemple,  le  clergé  essaya  de  faire 
une  émeute  (voy.  Flammermont,  Institutions,  105-107). 

4.  Ordonnances  du  3  août  et  du  4  décembre  1445  {Ordonn.,.XUl,  442-443, 
et  Bib.  de  l'Éc.  des  chartes,  t.  III,  2"  série,  p.  130). 

5.  Flammermont,  ibidem.  Fr.  20388,  f"  152. 

6.  11  eût  été  impossible  de  rétablir  la  discipline  et  d'accomplir  la  réforme, 
si  la  solde  n'avait  pas  été  payée  régulièrement.  En  mai  1447,  les  gens  de 
guerre  qui  étaient  en  garnison  à  La  Réole  voulaient  abandonner  la  place, 
parce  qu'ils  n'étaient  pas  payés  (Fr.  25711,  n"  211).  Il  fallait  donc  main- 
tenir les  impôts,  mais  en  tenant  compte  des  plaintes  du  peuple.  J.  Jou- 
venel  des  Ursins  disait  au  roi,  eu  1439  :  «  Par  les  tailles,  aides  et  subsides 


DE  l'armée  permanente  ET   DE  LA  TAILLE   PERPÉTUELLE       363 

Il  n'est  pas  inutile  de  faire  observer  que  Charles  VII  ne  décréta 
pas  d'une  manière  formelle  l'institution  d'une  armée /jermanen^e, 
ayant  un  effectif  déterminé  de  quinze  cents  lances.  Tout  au  plus 
pourrait-on  dire  que  ce  principe  de  permanence  est  contenu  dans 
le  préambule  de  l'ordonnance  du  2  novembre  li39  '.  En  fait,  les 
compagnies  d'ordonnance,  maintenues  pendant  tout  son  règne, 
pour  ce  motif  qu'on  était  en  guerre  avec  les  Anglais,  furent  con- 
servées après  lui,  et  cette  institution  devint  définitive.  Ainsi 
Charles  VII  a  créé,  non  Vo.rinée  permanente^  mais  une  armée  qui 
devint  permanente. 

Il  n'est  pas  plus  juste  de  dire  que  Charles  VII  établit,  pour  la 
solde  et  l'entretien,  une  taille  perpétuelle,  votée  par  les  Etats 
d'Orléans,  en  1439,  et  fixée  à  1  200  000  livres  *.  L'examen  atten- 
tif des  documents  n'autorise  pas  une  pareille  interprétation;  elle 
est  môme  contraire  aux  intentions  que  Charles  VII,  avec  ou  sans 
calcul,  ne  cessa  de  manifester.  La  taille  des  gens  d'armes,  comme 
on  l'appelait  alors,  remplaça  les  appatis,  que  le  roi  exigeait  aupa- 
ravant, pour  l'entretien  des  troupes  '.  Afin  de  ménager  le  peuple, 

que  vous  faictes,  soubz  uuabre  de  la  guerre,  voslre  peuple  est  pillé  et  robe 
en  plusieurs  et  diverses  manières  et  tout  destruit,  et  leur  ostez,  ou  voz 
ofiiciers,  de  par  vous,  la  peau  de  dessus  eulx  et  la  char  de  leurs  oz  » 
(Fr.  5022,  f"  23). 

1.  Pour  obvier  aux  excès  et  pillorics  des  gens  de  guerre,  le  roi,  après 
remontrances  des  États,  «  fait  et  establit  par  loy  et  edicl  général,  perpëtiid 
et  non  révocable,  par  forme  de  pragmatique  sanction,  les  édicts,  loys, 
statuts  et  ordonnances  qui  s'ensuivent  »  [Ordonnances,  XllI,  306;  voyez 
aussi  II.  Dansin,  Ilisl.  de  F  administration  et  du  gouvernement  de  la  France 
pendant  le  règne  de  Charles  F//,  Paris,  A.  Durand,  1858,  in-8»,  p.  100-101). 
Quant  à  l'ordonnance  du  2  novembre  1439,  elle  statue  seulement  qvCun 
certain  nombre  de  capitaines  seront  ordonnés  par  le  roi  et  que  chacun 
d'eux  aura  un  certain  nombre  de  gens  d'armes. 

2.  Voir  Dansin,  p.  93,  note  1,  p.  176;  Vallet  de  V.,  Charles  VU,  t.  III, 
p.  61;  Ordonn.,  t.  XIII,  p.  428;  G.  Picot,  Hist.  des  États  généraux,  t.  I, 
p.  334;  A.  Thomas,  Les  États  généraux  sous  Charles  VU,  dans  le  Cabinet 
historique  de  1879,  p.  208-209.  Eu  1484,  les  États  généraux  de  Tours  votè- 
rent 1  aOO  000  1.  t.  pour  l'entretien  des  gens  de  guerre  (Clairamb.,  CXX, 
f»  141;  Journal  des  Etats  de  1484,  publié  par  A.  Dernier,  dans  les  Docu- 
ments inédits  de  l'Uist.  de  France,  1835,  in- 4°,  p.  387).  Il  paraît  que,  sous 
Charles  \'II,  la  taille  s'éleva  jusqu'à  1  800  000  1.  t.  [Mémoires  de  Ph.  de 
Commynes,  édit.  Dupont,  Paris,  1843,  t.  II,  p.  143;  C.  de  Cherrier,  Hist.  de 
Charles  VIII,  Paris,  Didier,  1870,  t.  I,  p.  86).  Les  États  de  1439  n'avaient 
pas  le  droit  d'engager  l'avenir,  ce  qu'ils  eussent  fait  par  le  vote  d'une 
taille  perpétuelle.  Un  pareil  vote  eût  été  contraire  aux  traditions  et  aux 
principes  dont  s'inspiraient  toujours  les  États  (voir,  dans  le  Journal  des 
Étals  de  1484,  les  discours  du  juge  du  Forez,  p.  358-361,  et  celui  de 
J.  Masselin,  p.  380-381). 

3.  Berry,  427;  Z»a  16,  f»  101;  Z"»  17,  f»'  17-18,  41  v»,  42.  II  est  certain 
que  cette  taille  était  considérée  comme  l'équivalent  des  appatis  (Z"«  16, 
i*  188).  «  Les  tailles  qui  sont  mises  sus  en  lieu  des  appatiz  empeschent  les 


364  DE   LA   TAILLE   DITE   PERPÉTUELLE 

on  réclama  d'abord  des  contributions  en  nature,  puis,  quand  on 
les  évalua  en  argent,  on  laissa  aux  pays  et  aux  villes  la  faculté 
d'acquitter  leur  redevance,  soit  en  argent,  soit  partie  en  argent, 
partie  en  nature.  Enfin,  le  roi  imposait,  chaque  année,  des  som- 
mes qui  variaient  suivant  les  besoins  du  moment  *,  et  ces  som- 
mes étaient  votées  par  les  états  provinciaux  *.  Ces  dispositions 
sont  incompatibles  avec  l'établissement  d'une  taille  fixe  et  per- 
manente, qui  aurait  été  décrétée  dès  1-439  '. 

Le  nombre  des  compagnies  n'étant  pas  limité,  la  taille  néces- 
saire à  leur  entrelien  ne  pouvait  pas  être  fixe  et  invariable. 
Même  pendant  la  trêve  avec  l' Angleterre,  Charles  VII  ne  se  con- 
tenta pas  des  1  500  lances  dont  parlent  les  chroniqueurs  et,  après 
eux,  les  historiens. 

Il  lui  parut  nécessaire  d'entretenir  au  moins  2  000  lances,  dont 
1  500  dans  les  pays  de  Languedoil  et  500  dans  les  pays  de  Lan- 
guedoc, sans  compter  d'autres  troupes,  qui  étaient  aux  frontiè- 
res *.  Alors  les  Etats  de  Languedoc  envoyèrent  une  députation 
au  roi,  pour  lui  remontrer  que  le  pays  ne  produisait  ni  foin,  ni 
avoine,  ni  rien  de  ce  qu'il  fallait  pour  nourrir  les  chevaux.  Ils 
proposèrent  de  payer  une  contribution,  pour  que  la  province 
n'eût  pas  à  loger  des  gens  de  guerre  ^.  Cet  arrangement  ayant 


courses,...  Le  roy  a  voulu  que  toutes  manières  de  gens  y  contribuent.... 
Es  tailles  des  appatiz  chacun  y  est  contribuable  «  (Z*»  16,  f"  28  v).  Le  roi 
avait  ordonné  que  les  villages  qui  payaient  appâtis  avant  la  trêve  de  1444 
payeraient  «  tailles  à  la  value  d'iceulx  appatiz.  »  Dunois  avait  «  la  charge 
des  dits  appatiz  »  (Z'>  lo,  f-'  18i-182}. 

1.  Fr.  23712,  n°  280. 

2.  Une  pièce  du  Ms.  Fr.  S909,  f"  236  v»,  prouve  que  les  Etats  de  Nor- 
mandie avaient  coutume  de  voter  ces  impôts.  Voir  aussi  A.  Thomas., 
Etats  provinciaux,  I,  69  et  suiv.,  181,  233-239;  Fr.  23712,  n"^  337,  338,  347; 
Fr.  26083,  n»  7213;  Fr.  26080,  n"^  6300,  6302,  6331,  6343,  6348;  Fr.  6200, 
nos  123-124. 

3.  M.  Boutaric  [Institutions  militaires  de  la  France,  Pion,  1863,  ia-8°, 
p.  311  et  313)  a  bien  saisi  et  signalé  ce  caractère  temporaire  de  la  réforme 
de  1443.  M.  A.  Thomas,  dans  son  remarquable  ouvrage  sur  les  États  pro- 
vinciaux de  la  France  centrale  (Paris,  Champion,  1879,  2  vol.  in-8°),  a 
prouvé  que  ces  États  votaient  chaque  année,  au  moins  jusqu'en  1451,  ces 
impôts  (t.  I,  p.  183  et  suiv.;  t.  II,  p.  209  et  suiv.). 

4.  Voir  une  ordonnance  du  26  avril  1446  dans  K  68,  n"»  24,  24  bis; 
Fr.  26076,  n^  5673;  Fr.  21426,  n»  17;  Musée  des  Archives,  n»  457;  A.  Thomas, 
Etats  provinciaux,  I,  132,  Voir  aussi  le  Journal  des  États  de  1 484,  p.  372- 
373.  J.  du  Clercq  dit  qu'il  y  avait  1  700  lances  en  1 430, et  1  600  à  1  800  hommes 
d'armes  dans  la  campagne  de  1433  (du  Clercq,  p.  610,  616). 

5.  Ils  offrirent  une  somme  de  186  000  francs,  jugée  nécessaire  à  l'entretien 
de  300  lances  fournies,  pendant  un  an  (K  68,  n»  24  bis).  Le  jeudi  16  février 
1447,  les  commissaires  donnent  des  ordres  pour  la  levée  de  cette  somme 
{Ibid.;  voy.  aussi  Fr.  26076,  n»  5673).  Au  mois  de  février  1437,  une  ordon- 


LA  GRANDE  ET  LA  PETITE  ORDONNANCE    •  365 

été  accepté,  les  Etats  provinciaux  votèrent,  chaque  année,  une 
somme  débattue  préalablement  avec  les  commissaires  royaux  et 
qui  varia  suivant  les  circonstances  ^ 

Quand  la  guerre  recommença,  en  1449,  il  fallut  encore  aug- 
menter l'effectif  des  troupes,  pour  la  conquête  de  la  Normandie 
et  de  la  Guyenne,  et,  ensuite,  pour  être  prêt,  en  tout  cas,  h 
repousser  les  attaques  des  Anglais.  A  côté  des  premières  compa- 
gnies d'ordonnance,  qui  restèrent  distinctes  des  autres,  par  leur 
origine,  leur  composition,  leur  nom,  leur  solde,  on  en  forma  de 
nouvelles,  beaucoup  moins  favorisées.  Ces  dernières  furent  appe- 
lées compagnies  de  la  petite  ordonnance^  ou  petites  payes  ^,  par 
opposition  aux  anciennes,  qui  furent  nommées  compagnies  de 
la  grande  ordonnance  '.  Ces  troupes  auxiliaires,  dont  le  nombre 
fut  augmenté  ou  diminué  selon  les  besoins,  furent  maintenues 
pendant  tout  le  règne  de  Charles  VII  *. 


nance  déclare  encore  qu'il  y  aura  2  000  lances,  dont  500  en  Languedoc 
(Fr.  26084,  n"  70 i2,  70ol,  7076).  Sous  Louis  XI,  le  nombre  des  compagnies 
d'ordonnance  n'était  pas  davantage  limité  à  lo.  Par  exemple,  en  mars  1466, 
il  y  avait  1680  lances  dans  les  compagnies  (Fr.  18442,  f»  167). 

1.  144o  (août).  Les  États  de  Montpellier  votent  120  000  1.  t.  (K  68,  n»  17; 
Fr.  26074,  n»  5326}.  —  1446.  Les  États  votent  100  000  1.  t.  (K  68,  n»  24), 
mais  le  roi  demanda  200  000  1.  t.  (K  68,  n»  22;  Fr.  26074,  n°  5454).  — 
1447  (février).  Les  États  de  Montpellier  octroient  186  000  1.  t.  (Fr.  26078, 
n»  6052;  Fr.  26079,  n°  6143;  Fr.  237H,  n»'  192,  194).  —  1448.  Les  États  de 
.Montpellier  octroient  150  000  1.  t.  (Fr.  26078,  nos  6077,  6081,  6099,  6101).  — 
1449.  Les  États  de  Montpellier  offrent  150  000  1.  t.  (Fr.  26079,  nos  6249  et 
6253;  Fr.  25711,  n»  213).  —  1450  (mars).  Les  États  de  Montpellier  offrent 
488  000  1.  t.  (Fr.  26079,  n»s  6186,  6187,  6249,  6253).  —  1451.  Les  États  de 
Toulouse  votent  120  000  1.  t.  (Fr.  26080,  no  6334,  6335).  — 1452.  Les  Etats  du 
Puy  octroient  100  000  1.  t.  (K  69,  n"  4*).  —  1453.  Les  États  de  Montpellier 
octroient  106  000  1.  t.  (K  69,  n»»  4  et  4  bis).  —  1454.  Les  États  de  Montpel- 
lier octroient  126  000  1.  t.  (K  69,  n»»  4»  et  10).  —  1455.  Les  États  de  Toulouse 
votent  116  000  1.  t.  (K  69,  n»  15). 

2.  Ou  petites  soldes  (Iv  69,  nos  17  bis,  42  bis).  On  trouve  déjà  ce  mot  de 
paye,  pour  indiquer  l'homme  d'armes  qui  reçoit  une  solde,  dans  un  docu- 
ment de  1368,  cité  par  le  P.  Daniel,  Milice  fr.  (I,  p.  223-324),  On  disait 
aussi  la  grande  et  la  petite  retenue  (Clairamb.,  XXV,  p.  173). 

3.  Dès  1447  (décembre),  il  y  a  des  gens  d'armes  de  la  grande  ordonnance 
dans  le  Rouergue,  sous  le  sire  de  Bueil  (Fr.  26077,  n°  5872;  voy.  aussi 
Fr.  26079,  n"  6114  et  6144,  pour  l'année  1449).  Après  la  conquête  de  la  Nor- 
mandie, le  roi  met  dans  ce  pays  600  lances  fournies  de  la  grande  ordon- 
nance et  un  certain  nombre  de  petites  payes  (Fr.  26082,  n»»  6637,  6648). 
En  1453,  Charles  VII  est  obligé  de  soudoyer  un  très  grand  nombre  de  gens 
d'armes  et  de  trait,  outre  ceux  de  son  ordonnance  (K  69,  n»  7).  De  même 
en  1453  (K  69,  nM5). 

4.  En  1450,  il  y  a,  en  Normandie,  800  lances  fournies  et  800  petites  payes. 
Le  payement  de  ces  troupes  monte  à  environ  400  000  liv.  par  an  (Fr.  26080, 
n"  6304-6306).  —  En  1451,  600  lances  fournies  et  450  petites  payes  (Fr.  25712, 
n»  247,  et  Append.  LXXXV).  —  En  1432,  600  lances  fournies  et  600  petites 


366  EFFECTIF   DES   COMPAGNIES 

Il  y  avait  tant  d'hommes  disponibles,  tant  de  volontaires, 
qu  il  était  facile  de  recruter  ces  compagnies,  à  des  conditions 
moins  onéreuses  pour  l'État.  Ceux  qui  s'y  enrôlaient  espéraient 
sans  doute  trouver  ainsi  le  moyen  d'entrer  dans  les  compagnies 
de  la  grande  ordonnance,  lorsqu'il  y  avait  des  vides  à  remplir. 

Quant  aux  compagnies  de  la  grande  ordonnance,  elles  ne  com- 
prenaient pas  toutes  un  effectif  fixe  et  invariable  de  cent  lances*, 
comme  on  le  répète  généralement.  Pour  en  citer  un  exemple 
remarquable,  Jean  de  Bueil,  qui  devint  amiral  de  France,  n'avait 
qu'une  compagnie  de  80  lances  *,  et  d'autres  capitaines  en  avaient 
encore  moins.  Elles  étaient  quelquefois  divisées  en  détachements  ' 
qui  tenaient  garnison,  soit  dans  des  villes  de  la  même  province, 
soit  dans  des  provinces  différentes. 

Comme  le  service  dans  les  compagnies  de  la  grande  ordon- 
nance était  fort  recherché,  on  put  n'y  admettre  que  des  hom- 
mes d'élite.  Dans  les  montres  et  les  quittances  des  gens  de  guerre, 
on  voit  que  l'homme  d'armes,  c'est-à-dire  celui  qui  portait  la 
lance,  était  noble  et  avait,  le  plus  souvent,  la  quaUté  d'écuyer  *. 


payes  (Fr.  26081,  n"  6459  et  6309).  —  En  1453,  600  lances  fournies  de  la 
grande  ordonnance  et  512  petites  payes  (Fr.  20683,  n^s  43,  47).  —  En  1454, 
600  lances  fournies  et  515  petites  payes  (Fr.  25712,  n»  277;  voir  aussi  une 
pièce  très  curieuse  dans  le  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Nor- 
mandie, t.  III,  p.  494).  —  En  1455,  600  lances  fournies  et  un  certain  nom- 
bre de  petites  payes  (Fr.  25712,  n»  291,  et  Fr.  26082,  n»'  6637,  6689).  —  En 
1438,  toujours  dans  la  même  province  de  Normandie,  580  lances  fournies  de 
la  grande  ordonnance  et  des  petites  payes  (Fr.  26085,  n»  7215).—  En  1461,  il 
y  a  encore  des  archers  de  la  grande  et  de  la  petite  paye  à  Dax  et  à  Bayonne 
(K  69,  n»  42  bis). 

1.  Voir  M.  d'Escouchy,  I,  55  (quinze  capitaines  ayant  chacun  cent  lances). 
Cette  remarque  a  déjà  été  faite  par  M.  Boutaric  (Instit.  militaires,  p.  312). 
En  1451,  Olivier  de  ÏJroon  a  40  lances,  et  Geoffroy  de  Couvran  50  lances 
(Fr.  26081,  n»  6538').  Le  maréchal  de  Lohéac  a  60  lances  (Fr.  25712,  n"  247). 
Le  n»  247  du  Ms.  Fr.  25712  indique  les  gens  de  la  grande  ordonnance  et 
les  petites  payes  qui  sont  en  Normandie  avec  les  noms  de  leurs  capitaines. 
Le  n"  277  donne  les  mêmes  détails  pour  l'année  1454.  Guill.  de  Rosnyvinen 
a  60  lances,  Odet  d'Aidie  20  lances.  Dunois,  Brézé,  Floquet,  J.  d'Estoute- 
ville  ont  chacun  100  lances  [J.  d'Estouteville,  seigneur  de  Torcy  et  de 
Blainville,  maître  des  arbalétriers  de  France]  (Fr.  26082,  n»  6658;  Fr.  26083, 
nos  6788,  6941  ;  Fr.  26085,  n»  7239).  Pour  l'année  1453,  voir  Fr.  25712,.n»  270. 
P.  de  Brézé  avait  des  gens  d'armes  en  Poitou  et  en  Normandie  en  1447 
(Fr.  26077,  no  5868). 

2.  Sur  J.  de  Bueil,  voy.  Fr.  26085,  n»  7265,  et  surtout  le  dossier  de 
Bueil  dans  le  t.  549  des  pièces  originales,  dossier  12360,  pièces  114-146, 

3.  Robert  Floquet,  bailli  d'Evreux,  avait  60  lances,  on  Saintonge,  en 
1446  (Fr.  26075,  n"  5498).  En  1448,  il  en  avait  en  Poitou  et  en  Normandie 
(Fr.  26077,  n»  5878;  Fr.  26078,  n»  6961). 

4.  Par  exemple  Guill.  de  Bigars,  écuyer,  homme  d'armes  de  la  grande 
ordonnance,  sous  Dunois  (Fr.  26082,  n»  6670;  Fr.  26085,  nos  7139,  7237; 


PAYEMENT  DES  CONTRIBUTIONS  POUR  l'ARMÉE  367 

Il  commandait  aux  cinq  autres  cavaliers  qui  composaient  avec  lui 
une  lance  fournie.  Il  y  avait  là  une  garantie  de  bon  ordre  et  de 
discipline.  Les  capitaines  des  compagnies  étaient,  pour  la  plu- 
part, de  liants  personnages,  comme  le  connétable,  Dunois,  P.  de 
Brézé,  les  maréchaux  de  Lohéac  et  de  Jaloignes,  Jean  de  Bueil, 
le  comte  de  Nevers,  J.  Bureau,  le  maître  des  arbalétriers  *. 

On  eut  soin  de  mettre  ces  troupes  en  garnison  dans  les  villes, 
où  il  était  plus  facile  de  les  loger  et  de  les  surveiller.  Elles 
n'étaient  pas  casernées;  les  habitants  leur  fournissaient  le  loge- 
ment, avec  les  ustensiles  nécessaires,  à  un  prix  raisonnable  *. 

Les  prestations  furent  d'abord  réclamées  en  nature,  afin  de 
moins  gêner  les  populations  épuisées.  On  n'exigeait,  en  argent, 
que  20  sols  tournois  par  mois  et  par  lance,  pour  «  les  menues  né- 
cessitez »  des  gens  de  guerre  (ordonnance  du  26  mai  1445).  Dès  le 
4  décembre  de  la  même  année,  une  nouvelle  ordonnance  imposa 
aux  contribuables  10  liv.  t.  pour  chaque  homme  d'armes,  y  con- 
pris  son  coutillier  et  son  page,  et  10  liv.  t.  pour  les  deux  archers 

voy.  aussi  Fr.  20683,  f»  47  [autre  exemple]).  Le  P.  Daniel  dit  que  les  gens 
d'armes  étaient  gentilshommes  {Milice  fi\,  t.  I,  p.  213).  Il  affirme  ailleurs 
que  les  valets  ou  varlets  étaient  des  écuyers  et  que  ce  titre  pouvait  être 
porté  parles  plus  grands  seigneurs  (p.  129-131).  Il  est  vrai  que  cette  obser- 
vation ne  s'applique  pas  spécialement  aux  valets  des  compagnies  d'ordon- 
nance, mais  on  voit  dans  le  registre  JJ  178  qu'un  noble,  après  avoir  servi  un 
homme  d'armes  comme  page,  devint  ensuite  varlet  de  guerre,  puis  homme 
d'armes  (JJ  178,  f"  34).  Voir  aussi  Oliv.  de  La  Marche,  p.  408.  Autres 
exemples  d'hommes  d'armes  nobles  :  Fr.  20683,  f»  47;  JJ  180,  f»  67  v°; 
JJ  181,  f-  118  V;  JJ  185,  f»»  182,  188  V,  224;  K  69,  n"^  17*,  25.  On  trouve 
même  «  six  gentilshommes  d'armes  »  dans  le  Ms.  Fr.  26085,  n"  7260.  Il  y 
avait  aussi  des  archers  nobles  (JJ  185,  fos  182, 187, 188  vo,  224;  JJ  187,  f"  29). 
On  eut  soin  de  choisir  des  hommes  aguerris  par  de  longs  services.  L'un 
d'eux,  âgé  de  quarante  ans,  servait  depuis  plus  de  vingt  ans  (JJ  185,  f"  204). 
Beaucoup  étaient  mariés  (JJ  179,  f»  209  ;  JJ  180,  f"  25  ;  JJ  184,  f»  216;  JJ  185, 
fo  204;  JJ  186,  f"  3;  JJ  187,  f"  67  v). 

1.  Il  y  avait  aussi  des  capitaines  étrangers,  ayant  sous  leurs  ordres  des 
étrangers,  Ecossais  ou  Espagnols,  comme  Rob.  Coningham,  Martin  Garcia 
(JJ  186,  f"  31  ;  JJ  187,  f»  154  v»;  Clairamb.,  XXVI,  f-  1879). 

2.  Les  gens  d'armes  devront  toujours  «  payer  leur  hostellaiges  modérez 
et  raisonnables  »  (Ordonn.  du  4  décembre  1445;  Bib.  de  l'Éc.  de  ch.,  t.  III, 
20  s.,  p.  129;  voir  aussi  :  Fr.  26082,  n°'  6659,  6770  ;  Fr.  26083,  n»  6879  ;  K  69, 
n»»  25,  25  bis;  Fr.  26080,  n»»  6414,  0415;  Fr.  25778,  n-  1840;  Fr.  26085,  n»'  7235, 
7236,  7242,  7243;  Pièces  originales,  t.  732,  n»  16716»;  Flammermont,  Instit. 
de  Sentis,  p.  110).  La  rétribution  était  de  30  s.  t.  par  mois  (Z'"  17,  f»  187 
v»-188),  mais  il  fallait  quelquefois  payer  davantage,  pour  trouver  des  habi- 
tants disposés  à  loger  les  gens  de  guerre  {Ibid.).  Les  habitants  avaient  par- 
fois à  se  plaindre  de  leurs  hôtes.  Les  contestations  étaient  jugées  par  le 
sénéchal  de  la  province  (A.  Thomas,  États  prov.,  II,  209-230,  247).  Les 
détails  que  donne  H.  Baude  (t.  III  de  J.  Ghartier,  p.  134-135)  ne  sont  pas 
tous  d'une  exactitude  incontestable.  —  On  était  quelquefois  exempté  du 
logement  des  gens  d'armes  (Fr.  5909,  f»  vu^xiii  v»). 


368  PAYEMENT  DES  CONTRIBUTIONS  POUR  l'arMÉE 

et  leur  varlet  *.  Quant  au  surplus,  les  habitants  pouvaient^  à 
leur  choix,  acquitter  leurs  contributions  en  nature,  ou  payer, 
par  moi^',  9  1. 1.,  dont  4  pour  l'homme  d'armes,  4  pour  les  gens  de 
trait  et  20  sols  t.  pour  le  capitaine.  Ce  règlement  était  applica- 
ble à  partir  du  1'^'  janvier  1446  ^  ;  néanmoins  il  y  fut  apporté  des 
modifications,  car  une  ordonnance  de  1445  établit  trois  modes 
facultatifs  de  payement  ^  :  1"  en  nature  ;  2"  en  argent  et  en  nature  ; 
3°  en  argent.  Dans  ce  dernier  cas,  on  devrait  payer  31  l.  t.  par 
mois  et  par  lance,  dont  20  1.  t.  pour  l'homme  d'armes,  lui  troi- 
sième, 10  1.  t.  pour  les  gens  de  trait  et  20  sols  t.  pour  le  capi- 
taine *.  Toutefois,  si  les  troupes  étaient  appelées  hors  de  leurs 
garnisons,  pour  les  besoins  du  service,  la  contribution  devait  être 
acquittée  tout  entière  en  argent  ".  Ce  dernier  mode  de  payement, 
plus  facile  et  plus  avantageux  pour  l'État,  se  généralisa  bientôt  ". 
On  peut  donc  considérer  la  somme  de  31  1.  t.,  par  lance  et  par 
mois,  comme  la  solde  ordinaire  des  compagnies  de  la  grande 
ordonnance  '',  quoique  cette  règle  elle-même  ait  admis  quelques 
exceptions  ^. 

Quand  les  commissaires  royaux  avaient  passé  la  revue  ^  des 
troupes  et  dressé  leurs  états,  la  solde  était  payée  par  les  élus  *•* 

1.  Il  semble  que  cette  organisation  ne  s'établit  pas  sans  tâtonnements. 
Ainsi,  on  voit  dans  les  lettres  de  rémission  accordées  à  Ch.  de  Ciilant 
(A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs,  II,  449-453)  qu'en  144S,  sur  la  solde  de  30  1.  t. 
par  mois,  l'homme  d'armes  devait  avoir  4  francs,  chaque  archer  2  francs,  et 
que  «  le  surplus  leur  seroit  baillé  en  vivres  ».  'Voyez  aussi  Flammermont, 
Instit.  munie,  de  Sentis,  p.  110-111. 

2.  Bib.  de  l'École  des  chartes,  2o  série,  t.  III,  p.  127-131. 

3.  Voir  Append.  LXXXVI. 

4.  Ces  divers  modes  de  payement  prouvent  aussi  qu'il  n'y  avait  pas  de 
taille  fixe  et  permanente  pour  l'entretien  des  gens  de  guerre. 

5.  Fr.  26071,  n»  189;  Porte f.  Fontanieu,  119-120,  au  26  novembre  1446; 
Fr.  5053,  f»»  135  vo-138. 

6.  A.  Thomas,  États  prov.,  I,  155. 

7.  K  69,  n»  18.  Les  exemples  abondent  :  Fr.  21426,  n»  2  ;  Fr.  26080,  n»  6419  ; 
Fr.  21427,  n»'  3-6,  38.  En  1421,  l'homme  d'armes  avait  déjà  30  1.  t.  par 
mois  (Glairamb.,  CXII,  f»  8723;  J.  du  Glercq,  p.  610,  ch.  VllI). 

8.  En  octobre  1445,  des  gens  d'armes  de  Floquet  reçoivent  26  1.  12  s. 
d.  par  mois  (Fr.  26074,  n»  5324).  —  En  octobre  1446,  des  troupes  du 

maréchal  de  Gulant,  logées  dans  le  Haut-Limousin,  reçoivent  15  1.  t.  par 
homme  d'armes  et  7  1.  10  s.  t.  pour  les  archers  (K  68,  n"'  21  et  21  bis). 
En  1448,  même  payement  (K  68,  n»»  28,  33;  voy,  aussi  Fr.  26077,  n»'  5868, 
5878;  Fr.  26078,  n»  5961;  Fr.  21495,  f"  39;  Fr.  26075,  n»  5498).  Le  1"  juillet 
1446,  des  gens  d'armes  logés  en  Saintonge  reçoivent  32 1.  10  s.  t.  par  mois  et 
par  lance  (Fr.  26075,  n»  5498;  Fr.  26074,  n»  5433).  En  1453,  le  roi  augmente  la 
solde  des  gens  de  guerre  de  Normandie,  qui  sont  envoyés  en  Guyenne 
(Fr.  25712,  n»  280).  En  1446,  des  gens  d'armes  logés  en  Saintonge  reçoivent 
34  1.  t.  par  mois  (Fr.  26074,  n»  5408).  Payement  par  mois  (Fr.  €5711,  n»  193). 

9.  K  69,  n»  42. 

10. Le  n»  362  de  K  69  indique  les  différentes  élections  de  LanguedolLLa 


RÉSULTATS    DES    RÉFORMES   MILITAIRES  369 

par  quartier  d'an,  ou  trimestre,  quelquefois  par  mois,  devant  un 
notaire  *  autorisé  spécialement  à  cet  effet. 

Les  troupes  de  la  petite  ordonnance  recevaient  beaucoup 
moins  ^  L'homme  d'armes  avait  10  1.  t.  et  les  archers  100  sols  t. 
par  mois. 

Telles  sont,  dans  leur  ensemble,  les  principales  réformes 
opérées  en  1445  dans  l'armée  '.  Il  est  certain  qu'elles  produi- 
sirent promptement  de  très  bons  résultats  et  que  les  populations 
en  apprécièrent  les  bienfaits,  tout  en  élevant  des  réclamations 
fréquentes.  Le  roi  accueillait  ces  plaintes,  ordonnait  des  enquêtes, 
accordait  des  réductions  '^  et  se  montrait  soucieux  des  intérêts 
du  peuple.  C'est  ainsi  que  le  connétable  fut  chargé  de  diriger 
lui-même  une  de  ces  enquêtes  dans  la  Normandie  et  qu'il  obtint 
pour  cette  province  des  modifications  avantageuses  ^. 

On  put  enfin  empêcher  les  désordres,  les  pilleries,  les  crimes 
que  commettaient  auparavant  les  routiers.  Est-ce  à  dire  que  la 
discipline  devint  aussitôt  parfaite?  11  serait  exagéré  de  le  pré- 
tendre; mais,  s'il  y  eut  encore  des  abus,  des  actes  d'insubor- 
dination ^,  on  voit  qu'ils   étaient  recherchés,  punis  et  qu'ils 

taille  des  gens  d'armes  était  répartie  par  élections.  Les  élus  ou  les 
receveurs  des  tailles  étaient  chargés  d'en  exiger  le  payement  par  tous  les 
moyens,  même  par  la  saisie  du  bétail.  Les  réclamations  étaient  portées 
devant  les  élus,  les  appels  devant  la  cour  des  aides  (Z">  16,  £««  101,  188; 
Fr.  23711,  n»  193). 

1.  K  68,  nos  21,  21  bis,  28,  33;  Fr.  26078,  n»  6035;  Fr.  26081,  n»  6309; 
Fr.  26083,  n»  6790;  K  69;  n»  17.  Le  payement  était  fait  quelquefois  d'après 
une  liste  présentée  par  un  homme  d'armes  ayant  le  titre  de  «  chef  de 
chambre  «  (K  68,  n<"  21,  21  bis). 

2.  Fr.  26080,  n»  6419;  Fr.  26081,  n»  0549;  K  69,  n<"  17  bis,  IV,  17*. 

3.  Il  y  avait,  en  outre,  la  garde  du  roi,  composée  d'archers,  d'hommeâ 
d'armes,  de  cranequiniers.  Ou  en  trouve  la  liste,  avec  les  noms  des  capi- 
taines, dans  KK  51,  f»'  123  et  suiv.,  128. 

4.  Fr.  26080,  n»  6419;  Fr.  21426,  n»  1:  Fr.  26081,  n"  6309,  6564; 
Fr.  23712,  n»  247;  JJ  184,  f»  130;  K  69,  n»  22:  KK  648,  n»  99;  Flammer- 
mont,  p.  111;  A.  ThomSiS,  États  prov.,  I,  161;  il,  234-247,  238-259. 

3.  Fr.  25712,  n»  29i;  Fr.  26082,  n<"  6637,  G633,  6689,  6709,  6765,  6773; 
Fr.  3909,  f»  236  v»;  Appeud.  CIII. 

6.  JJ  179,  f»'  133,  136;  JJ  180,  f-  42  v,  36;  JJ  181,  f«'  5, 15,  121,  132,  136; 
JJ  185,  f"'  1  v,  8,  19  v»,  22,  77  v»,  84  v»,  113,  188  v»  ;  Fr.  26083,  n»  6807; 
JJ  184,  f«»  116  v-in,  240;  JJ  187,  f»'  110  v»,  154  v;  JJ  176,  f"'  445,  470,  474; 
JJ  182,  fo  9  v  ;  Bibliothèque  de  l'École  des  chartes,  t.  I,  p.  230  ;  A.  Thomas, 
États  provinciaux,  1, 160.  —  Beaucoup  d'hommes  d'armes  avaient  conservé 
des  surnoms  significatifs  :  «  la  Dague,  le  Harnois,  Brisebarre,  l'Escor- 
cheur  »  (JJ  179,  f»'  112,  173  v),  «  Qui  n'a  que  faire  »  (JJ  181,  f»  71  v»),  etc. 
La  discipline  était  d'ailleurs  sévère.  On  voit  que  des  pages  et  des  varr 
lets  étaient  battus,  bâtonnés,  blessés  même  grièvement  par  des  hommes 
d'armes,  pour  des  fautes  qui  n'étaient  pas  toujours  très  graves  (JJ  179, 
fos  154  v»,  156;  JJ  180,  fo  67  v).  Un  page  d'environ  douze  ans  est  battu, 
plusieurs  jours  de  marché,  à  Avranches  et  au  Mont-Saint-Michel,  pour 

RiCHEMONT.  24 


370  RÉSULTATS   DES   RÉFORMES   MILITAIRES 

n'étaient  ni  aussi  nombreux  ni  aussi  graves  qu'auparavant. 
Il  n'était  guère  possible  d'opérer,  du  premier  coup,  un  chan- 
gement radical.  Sans  parler  des  soldats,  les  chefs  eux-mêmes  se 
débarrassaient  difficilement  de  leurs  anciennes  habitudes.  Ainsi, 
Charles  de  Gulant,  frère  aîné  du  maréchal  de  Jaloignes  %  et 
capitaine  d'une  compagnie  de  cent  lances,  donnait  le  plus  mau- 
vais exemple.  Retenir  les  gages  des  gens  de  guerre  placés  sous 
ses  ordres  ;  casser  ou  renvoyer,  pour  quelque  temps,  une  partie 
de  ses  hommes,'  afin  de  s'approprier  leur  solde,  môme  pendant 
une  campagne;  présenter  des  rôles  complets  et  n'avoir  qu'un 
effectif  incomplet;  faire  passer,  lors  des  revues,  des  francs  archers 
pour  des  archers  d'ordonnance;  lever  des  contributions  sur  le 
pays,  tous  ces  procédés  peu  corrects  lui  étaient  familiers.  Son 
neveu  et  lieutenant,  Georges  de  Sully,  les  pratiquait  aussi  pour 
son  profit  particulier.  Il  est  certain  que  ces  chefs  n'étaient  pas 
les  seuls  à  qui  l'on  pût  reprocher  ces  malversations  ^.  Faut-il 
s'en  étonner,  quand  on  voit,  plus  de  deux  siècles  après,  un  autre 
organisateur,  aussi  énergique,  aussi  sévère  que  Richemont,  le 
ministre  Louvois,  occupé  sans  cesse  à  combattre  les  mêmes 
abus  ^  ? 

Charles  de  Culant  n'en  devint  pas  moins  gouverner  de  Mantes, 
de  Chartres,  de  Paris,  et  grand  maître  de  France,  c'est-à-dire 
grand  maître  de  l'hôtel  du  roi  (fin  de  1449)  *.  Enfin  il  s'éleva 
tant  de  plaintes  contre  lui,  que  le  roi,  après  information,  fut 
obligé  de  sévir.  Il  lui  enleva  sa  charge  de  grand  maître  et 
ordonna  des  poursuites.  Comme  le  coupable  était  protégé  par 
des  amitiés  puissantes,  il  obtint  des  lettres  d'abolition  ^,  qui 

avoir  volé  33  écus  à  un  homme  d'armes  (Fr,  26083,  n"  6797),  Des  char- 
pentiers, ayant  hlessé  mortellement  un  homme  d'armes  qui  les  avait  mo- 
lestés, obtiennent  des  lettres  de  rémission  (JJ  183,  f»  84  v»), 

1.  Charles  de  Culant,  seigneur  de  Châteauneuf,  et  Philippe  de  Gulant, 
seigneur  de  Jaloignes,  étaient  fils  de  Jean  de  Culant  et  neveux  de  l'amiral 
Louis  de  Culant  (Anselme,  VII,  82,  835;  VIII,  363;  Bib.  de  l'Ec.  des  chartes, 
l,  III  de  la  2e  série,  p.  127,  note  2). 

2.  JJ  183,  f»  37,  et  A.  Tuetey,  Les  Écorcheurs,  II,  449-433.  G,  de  Sully 
avait  reçu  de  Dunois  la  garde  de  la  ville  d'Exmes,  et  il  y  avait  mis,  comme 
lieutenant,  Antoine  de  Sarmet,  qui  rançonnait  aussi  les  habitants,  en  dépit 
de  toutes  les  ordonnances  royales  {Ihid.,  et  Ordonn.,  XIII,  p.  311,  art.  37). 
Sous  Charles  VIII,  on  avait  encore  à  réprimer  les  excès  des  gens  d'armes 
(Procès-verbaux  des  séances  du  Conseil  de  Charles  VIII,  publiés  par  A,  Der- 
nier, dans  les  Documents  sur  VHist.  de  France,  p.  24,  25,  26.  32  et  suiv.). 

3.  G.  Roussel,  Hist.  de  Louvois,  Didier,  1862,  2o  édit.,  in-12,  t.  I,  p.  167- 
172,  197  et  suiy. 

4.  Bib.  de  VÉc.  des  chartes,  2e  série,  t.  III,  p.  127,  note  2.  Pièces  orig., 
t.  933,  dossier  29044  (Culant),  n"  17,  32, 

5.  Le  roi  avait  pourtant  pris  l'engagement  solennel  de  n'accorder  aucune 
abolition  de  ce  genre  {Ordonn. y  XIII,  p.  310,  art.  29). 


RÉSULTATS  DES  RÉFORMES  MILITAIRES  371 

lui  furent  accordées  à  la  prière  de  Dunois  et  du  connétable 
lui-même  M  N'eùt-il  pas  mieux  valu  que,  dans  ce  cas,  Itichc- 
mont  ne  se  fût  pas  départi  de  sa  sévérité  ordinaire?  Une  telle 
indulgence  n'était  point  faite  pour  couper  court  à  tous,  les  abus. 
Toutefois,  une  amélioration  très  réelle  se  fit  bientôt  sentir.  Grâce 
à  la  sécurité  des  campagnes  et  des  chemins,  l'agriculture,  le 
commerce  reprirent  un  rapide  essor  ^,  et  la  prospérité  publique 
fut  un  des  premiers  résultats  des  réformes  militaires  ^.  La 
cohésion,  la  solidité,  la  valeur  des  troupes  furent  une  autre  con- 
séquence de  cette  nouvelle  organisation  ^,  et  on  en  eut  bientôt  la 
preuve,  quand  la  guerre  recommença  ^.  Plusieurs  fois  déjà  on 
avait  essayé  de  réaliser  ces  améliorations  ";  on  avait  échoué, 
parce  qu'on  n'avait  pu  séparer  les  bons  éléments  des  mauvais, 
astreindre  les  chefs  à  l'obéissance  et  établir  la  régularité  de  la 
solde.  Ces  progrès  accomplis,  le  reste  devint  possible. 

Il  n'est  pas  douteux  que  le  connétable  ait  pris  une  grande 
part  à  tous  ces  travaux  et  qu'il  ait  également  contribué  à  une 
autre  institution  militaire,  la  création  d'une  infanterie  nationale. 
On  avait  commencé  par  la  cavalerie,  qui  fut,  longtemps  encore, 
considérée  comme  l'arme  principale,  celle  qui  convenait  à  la 
noblesse.  Quant  à  l'infanterie,  la  piétaille,  elle  se  composait 
d'archers  et  d'arbalétriers  français  ou  étrangers,  gens  de  roture 
et  de  petit  état,  dont  on  ne  faisait  guère  cas.  Si  elle  ne  suffisait 

1.  CL.  de  Culant  était  encore  grand  maîlre  de  France  en  novembre  1450. 
Il  ne  l'était  plus  en  mars  1451,  quand  lui  furent  accordées  ses  lettres  d'abo- 
lition. Dans  ces  lettres,  il  est  encore  qualifié  cbambellan  du  roi.  «  Icellui 
nostre  chambellan  nous  a  humblement  supplié  et  requis  et  fait  supplier 
et  requérir,  par  nostre  très  chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont, 
connestable  de  France,  et  nostre  cousin  Dunois  et  plusieurs  autres  cheva- 
liers de  nostre  Conseil,  etc.  »  (JJ  183,  f»  57,  et  A.  Tuetey,  Les  Ecorcheurs, 
t.  II,  449-453).  Ch.  de  Culant  fut  remplacé,  au  mois  de  mai  1451,  par 
Jacques  de  Chabanaes  (Anselme,  VII,  82;  YIII,  365,  366J. 

2.  M.  d'Escouchy,  I,  59-60. 

3.  Sur  la  réforme  de  l'armée  (cavalerie),  voir  aussi  A.  Thomas,  États 
pi'ov.,  dans  le  t.  XI  de  la  Revue  historique,  septembre-octobre  1S78,  p.  40-55 
le  P.  Daniel,  Histoire  de  la  milice  française,  édition  de  1721,  t.  I,  p.  207» 
216;  A.  Dupuy,  Réunion  de  la  Bretagne  à  la  France,  II,  304  et  suiv.; 
Math.  d'Escouchy,  édition  de  Beaucourt,  I,  51-60  ;  Berry,  p.  427  ;  E.  Hardy, 
Origines  de  la  tactique  française,  Dumaine,  1879,  in-8,  t.  I,  517-522. 

4.  Voir  dans  Mézeray,  édition  de  1646,  in-f»,  t.  II,  p.  88-89,  trois  mé- 
dailles commémoratives.  Une  montre  de  1535  prouve  que  cette  organisa- 
tion subsistait  encore  à  cette  époque  (Ciairamb.,  CXXI,  f«  277). 

5.  Auparavant,  Charles  VII  n'avait  à  son  service  que  des  routiers  indis- 
ciplinés, pillards,  cruels,  incapables  de  lutter  contre  les  Anglais,  comme 
le  disaient  avec  raison  les  conseillers  du  duc  de  Bourgogne  (Collect.  de 
Bourgogne,  t.  XCIX,  f»  352)  et  J.  Jouvenel  des  Ursins  (Fr.  5022,  f«  20^v«). 

6.  Voir  notamment  une  remarquable  ordonnance  du  22  mars  1431' 
(X»»  20,  f-  31-32). 


372  INSTITUTION   DES   FRANCS   ARCHERS    (1448,    28   AVRIL) 

pas,  on  appelait  à  l'armée  des  gens  des  communes,  dans  les 
pays  où  avaient  lieu  les  opérations  militaires;  on  exigeait  des 
villes  un  contingent  plus  ou  moins  considérable  *. 

En  régularisant  ce  service,  imposé  aux  communes,  quand  il 
semblait  nécessaire,  Charles  VII  institua  la  milice  des  francs 
archers,  par  une  ordonnance  rendue  aux  Montils-lez-Tours  ^, 
le  28  avril  1448.  Pour  n'avoir  pas  besoin  de  recruter  l'infanterie 
parmi  les  étrangers,  dans  le  cas  où  la  trêve  n'aboutirait  pas  à 
une  paix  définitive,  le  roi  ordonne  que  chaque  paroisse,  ou 
plutôt  chaque  groupe  de  50  feux,  fournisse  un  archer  ou  un 
arbalétrier  ^,  «  qui  sera  et  se  tiendra  continuellement  en  habille- 
ment suffisant  et  armé  de  salade  (casque  léger),  dague,  espée, 
arc  (ou  arbalestre  garnie),  trousse  etjaques  (pourpoint rembourré) 
ou  huques  de  brigandines  (corselet  garni  de  lames  de  fer).  »  Ils 
seront  choisis  par  les  prévôts  et  les  élus,  parmi  les  hommes  les 
mieux  exercés  *,  sans  aucun  égard  à  la  richesse  ni  aux  requêtes 
qu'on  pourra  faire.  Ils  seront  tenus  de  s'exercer  toutes  les  fêtes 
et  jours  non  ouvrables,  «  avec  les  autres  qui  vouldront  tirer, 
pour  soy  habiliter  ^,  »  et  devront  servir  dans  l'armée  toutes  les 
fois  qu'ils  seront  mandés  par  le  roi. 

Pendant  toute  la  durée  de  leur  service,  ils  seront  payés  4  francs 
par  mois. 

Ils  feront  serment  de  bien  s'acquitter  de  tous  leurs  devoirs,  et 
ils  ne  serviront  que  le  roi,  sous  peine  de  perdre  toutes  leurs 
franchises. 

Ils  seront  enregistrés  par  noms,  prénoms  et  paroisses.  Ce 
registre  sera  fait  en  la  cour  des  élus. 

Dans  chaque  pays,  le  roi  commettra  «  ung  homme  de  bien, 
qui  aura  charge  de  visiter  tous  les  archers  et  de  scavoir  sïlz  sont 

1.  On  en  voit  encore  un  exemple  (après  l'institution  des  francs  archers) 
en  14S0  (JJ  185,  f"  140;  Flammermont,  p.  112-114).  Les  Anglais  faisaient  de 
même  en  Normandie.  Chaque  paroisse  fournissait  des  archers,  qui  s'exer- 
çaient à  tirer  de  l'arc  le  dimanche  et  qui  devaient  venir  en  armes,  quand 
ils  étaient  convoqués,  pour  résister  aux  ennemis  (JJ  175,  f»  103  v,  n»  309, 
et  S.  Luce,  Chronique  du  Mont-Saint-Michel,  \,  36,  note  1).  En  outre,  on 
obligeait  les  habitants  à  faire  le  guet  jour  et  nuit,  quand  il  le  fallait,  dans 
les  villes  et  dans  les  châteaux.  Celte  obligation  subsista  encore  après  la 
création  des  francs  archers.  Les  Anglais  y  soumettaient  aussi  les  habi- 
tants (Fr.  26082,  n«  6664;  JJ  174,  f<"  40,  56). 

2.  Indre-et-Loire.  Il  y  a  aussi  les  Montils  dans  l'arrondissement  de  Blois.. 

3.  Il  y  avait  en  effet  des  francs  arbalétriers,  aussi  bien  que  des  francs 
archers  (JJ  183,  f"  140;  JJ  187,  f»  8;  Fr.  21427,  n»  2). 

4.  On  prenait  plutôt  des  hommes  de  30  à  35  ans  que  de  tout  jeunes 
gens.  Il  y  en  avait  qui  étaient  mariés  et  pères  de  famille,  comme  les 
hommes  d'armes  (JJ  184,  f»  322  v»;  JJ  }S5,  f->  77  v»;  JJ  186,  f»  16). 

5.  JJ  183,  fo  73. 


LES   FIUNCS  ARGIlErRS  373 

bien  en  point,  et  de  les  assembler  toutes  fois  que  le  roy  les 
mandera,  ou  qu'il  luy  plaira.  » 

S'il  y  a  dans  une  paroisse  un  «  bon  compagnon  »  accoutumé 
à  la  guerre,  mais  trop  pauvre  pour  s'équiper,  la  paroisse  pourra 
subvenir  aux  frais  de  son  entrelien. 

Le  châtelain,  ou  son  capitaine,  devra  visiter,  tous  les  mois, 
les  archers  de  sa  châtellenie  et,  s'il  y  trouve  quelque  faute,  la 
signaler  aux  élus  ou  commissaires  du  roi. 

Cette  ordonnance  était  exécutoire  dans  l'espace  de  deux  mois. 

On  institua  ensuite  des  capitaines  de  francs  archers,  par 
élections  et  provinces  *.  Ils  devaient  aussi  prêter  serment  au  roi, 
ou  à  ses  officiers,  tels  que  les  sénéchaux  et  les  baillis.  Ils  veil- 
laient à  ce  que  leurs  compagnies  fussent  toujours  au  complet  et 
en  bon  état.  Ils  étaient  tenus  «  de  faire  les  monstres  et  revues 
des  gens  de  leurs  charges  »  trois  fois,  ou  au  moins  deux  fois 
par  an,  devant  un  des  élus,  ou  le  lieutenant  du  sénéchal  ou  du 
bailli.  A  cet  effet,  ils  les  assemblaient  par  chàtellenies,  ou  par 
quarantaines  ou  cinquantaines,  en  ne  les  faisant  venir  que  de 
quatre  lieues  ou  cinq  au  plus,  «  pour  eschever  leurs  peines  et 
despenses.  » 

Les  montres  faites,  les  capitaines  envoyaient  au  roi  un  état  de 
leurs  compagnies,  avec  les  observations  qui  leur  semblaient 
utiles. 

Ils  recevaient,  en  temps  ordinaire,  120  liv.  t.  *  pour  leurs  gages 
et  8  liv.  t.  «  pour  leurs  chevauchées  » ,  somme  qui  leur  était  payée, 
par  année,  sur  un  mandement  du  roi. 

Cette  institution  est  un  des  principaux  actes  de  ce  règne.  Elle 
tendait  à  développer  parmi  le  peuple  le  goût  des  exercices  mili- 
taires; elle  relevait  l'infanterie,  trop  méprisée  jusque-là;  elle 
mettait  au  service  du  roi  une  force  dont  on  avait  peu  profité 
auparavant,  parce  qu'elle  était  mal  organisée. 

Cette  milice  nationale,  trop  peu  exercée  pour  avoir  la  solidité 
nécessaire,  ne  rendit  peut-être  pas  tous  les  services  qu'on  en 
attendait;  néanmoins  elle  joua  un  rôle  notable  dans  les  campa- 
gnes de  Normandie  et  de  Guyenne  ^ 

1.  En  li58,  il  y  avait  sept  capitaines  de  francs  archers  dans  les  sept 
bailliages  de  la  Normandie  (Fr.  26085,  n»  7215). 

2.  Cette  solde  dut  être  augmentée  dans  la  suite,  car,  le  12  novembre  1454, 
J.  de  Versailles,  capitaine  des  fraucs  archers  du  bailliage  de  Caen,  reçoit 
70  1.  t.  pour  six  mois,  à  140  1.  t.  par  an  (Fr.  26082,  n»  6737).  Il  en  est  de 
même  pour  Rob.  Clamorgan ,  capitaine  des  fraucs  archers  du  duché 
d'Alcnçon,  en  1456  (Fr.  26083,  n»  6925).  ■ 

3.  M.  d'Escouchy,  t.  H,  31,  33,  36;  JJ  181,  f"»  i  v",  5;  JJ  182,  f"'  3,16,  53 
v»  ;  JJ  185,  f»  77  v». 


374  LE    SERVICE   FÉOnAL 

On  ne  sail  pas  au  juste  quel  fut,  sous  Charles  VII,  le  nombre 
des  francs  archers.  H.  Baude  dit  qu'il  y  en  avait  huit  mille  '. 
On  peut  affirmer,  d'une  manière  certaine,  que  cette  milice,  réor- 
ganisée sous  Louis XI,  eut  alors  un  effectif  de  16000  hommes*. 

Il  est  probable  que  la  bourgeoisie  ne  répugna  pas  à  s'y  enrô- 
ler, pour  avoir  l'exemption  d'impôts,  car  une  ordonnance  du 
3  avril  14G0  prescrivit  de  choisir  surtout  les  gens  exercés  au 
métier  des  armes  et  qui  payaient  une  faible  contribution.  Quant 
aux  riches,  s'ils  se  faisaient  élire  francs  archers,  ils  n''étaient 
exempts  que  d'une  «  raisonnable  et  petite  portion  »  des  tailles 
ou  aides  ^. 

Tout  cela  n'empêcha  pas  Charles  VII  de  recourir,  quand  il  en 
etit  besoin,  aux  milices  féodales,  et  d'exiger  le  service  miUtaire 
que  les  nobles  devaient  au  roi.  Par  une  ordonnance  du  30  jan- 
vier 1455,  il  enjoignit  aux  nobles  de  déclarer,  avant  un  mois, 
aux  sénéchaux  ou  aux  baillis  «  en  quel  abillement  ils  pourront 
ou  voudront  servir  *  ».  Toutefois,  il  faut  remarquer  ici  que  ces 
troupes  sont  soudoyées^.  Ceux  qui  seront  armés  comme  les  gens 
de  la  grande  ordonnance  auront  les  mêmes  gages  pendant  qu'ils 
seront  au  service  du  roi  ®.  «  Et  s'entend  en  ceste  manière  que 
chacun  homme  d'armes  ait  deux  chevaux  pour  sa  personne  et 
son  coustilleur  bien  et  suffisamment  monté.  »  Il  aura  15  francs 
par  mois  ''. 


1.  Édit.  de  J.  Cbartier,  par  Vallet  de  V.,  III,  134-133. 

2.  Fr.  18442,  f»  161,  et  Daniel,  Milice  française,  I,  244-250. 

3.  Sar  la  création  et  l'organisation  des  francs  archers,  voir  Ordonnances, 
XIV,  p.  1-3  et  p.  488;  Daniel,  Hist.  de  la  milice  française,  t.  I,  237-251; 
E.  Hardy,  Origines  de  la  tactique,  I,  522-524;  Flammermont,  Instit.  munie, 
de  Sentis,  p.  112-115.  Voir  dans  le  Ms.  Fr.  5909,  f<"  cini  v»-CYi,  des  instruc- 
tions pour  les  capitaines  de  francs  archers. 

4.  Par  lettres  du  22  mars  1448,  les  gens  du  parlement  sont  dispensés  de 
mettre  sus  des  gens  d"armes  et  de  trait,  par  exception  à  une  ordonnance 
qui  imposait  celte  obligation  à  toute  personne  non  suivant  les  armes  et 
tenant  fiefs  et  terres  nobles  (Xi»  8605,  f»'  125  v»,  126  et  146);  voy.  aussi 
Ordonn.,  XIV,  47,  et  dans  le  Ms.  Fr.  5909,  P  cuu  v»,  un  ordre  de  mettre 
sus  les  nobles. 

5.  Pour  la  campagne  de  Guyenne,  en  1453,  le  roi  soudoya  beaucoup  de 
nobles,  outre  les  gens  de  son  ordonnance  (K  69,  n»»  4,  4  ôis,  7).  On  avait 
alors  si  souvent  besoin  de  troupes,  pendant  la  guerre,  que  les  seigneurs 
ne  seraient  pas  venus  si  on  ne  leur  eût  donné  une  solde  (Fr.  21427, 
n"  2,  5,  etc.). 

6.  Ce  sont  peut-être  ceux  qu'on  appelait  les  grandes  payes  et  qui  ne 
faisaient  pas  partie  de  la  grande  ordonnance  (K  69,  n»  42  bis). 

7.  On  a  vu  que  l'homme  d'armes  de  la  grande  ordonnance  avait  20  fr. 
par  mois,  en  1445,  ce  qui  ferait  supposer  une  diminution  en  1435.  En  1447, 
des  hommes  d'armes  rerjoivent  13  1.  t.  par  mois  (Fr.  26077,  n»'  5868,  5872, 
5878;  Fr.  26078,  n»  5961). 


PART  DE  RICHEMOINT  DANS   LES   RÉFORMES  375 

Ceux  qui  ne  pourront  s'armer  comme  les  gens  de  la  grande 
ordonnance  et  qui  auront  chacun  un  cheval  et  leurs  pages  rece- 
vront 10  francs  par  mois  *. 

Celui  qui  viendra  «  en  habillement  de  coustilleur  »,  avec  un 
cheval,  aura  5  francs  par  mois. 

Un  archer  ou  arbalétrier  armé  comme  ceux  de  la  grande 
ordonnance  aura  7  francs  et  demi  par  mois. 

Un  archer  ou  arbalétrier  moins  bien  armé,  mais  suffisam- 
ment monté,  aura  5  francs. 

Un  homme  d'armes  à  pied  *  suffisamment  armé  aura,  pour 
lui  et  pour  son  page  ou  varlet  à  pied,  le  double  de  la  solde  d'un 
franc  archer,  c'est-à-dire  8  francs  par  mois. 

Enfin  le  franc  archer  ou  arbalétrier  à  pied  aura  4  francs  '. 

Il  ne  semble  pas  inutile  de  rappeler  ces  dispositions,  que  les 
historiens  ont  négligées  '*.  Elles  complètent  l'ensemble  de 
mesures  qu'on  peut  désigner  sous  le  nom  général  de  réformes 
militaires  et  prouvent  que  Charles  VII,  même  après  la  réorga- 
nisation de  1445,  fit  quelquefois  appel  aux  milices  féodales, 
c'est-à-dire  au  ban  et  à  l'arrière-ban  ^. 

II  y  aurait  injustice  à  dire  que  Richemont  fut  le  seul  auteur  de 
toutes  ces  reformes,  mais  on  a  le  droit  d'affirmer  qu'il  y  eut  la 
plus  large  part.  Il  y  travaillait  depuis  vingt  ans.  Connaissant 
bien  l'organisation  militaire  des  Anglais,  pour  l'avoir  étudiée  de 
près,  pendant  sa  captivité,  il  avait  compris  la  cause  de  leur 
supériorité;  il  avait  voulu  assurer  les  mêmes  avantages  à  la 
France.  Il  avait  fallu  sa  ténacité,  son  énergie,  son  autorité 
redoutée  pour  licencier  les  anciennes  compagnies  et  rendre 
possible  l'organisation  des  nouvelles.  Quant  aux  francs  archers, 
nul  document,  nul  chroniqueur  ne  dit  qu'il  les  organisa  en 
France;  mais  rien  ne  paraît  plus  probable,  quand  on  voit  que 
cette  institution  existait  déjà  en  Bretagne  ".  Après  avoir  si  long- 

1.  Comme  les  hommes  d'armes  de  la  petite  solde  ou  petite  paye  (K  69, 
n»»  n  bis,  17  ter). 

2.  Il  y  avait  donc  des  gens  d'armes  à  pied.  Le  P.  Daniel  dit  qu'il  n'en 
connaît  qu'un  seul  exemple,  et  il  le  trouve  dans  un  document  anglais 
{Milice  française,  t.  I,  p.  226-227). 

3.  Onlonn.,  XIV,  350-352. 

4.  Lebeurier,  Rôle  des  taxes  de  l'arrière-ban  du  bailliage  dEvreux  en  1563i, 
Paris,  Dumoulin,  1861,  in-S-,  p.  30. 

5.  Le  10  août  1434,  le  roi'ordonue  au  sénéchal  du  Limousin  de  faire 
armer,  avant  le  15  août,  tous  les  nobles  et  autres  vivant  noblement  (K  69, 
n"  13).  Dunois  était  chef  des  arrière-bans  de  France  (Daniel,  Milice  fran- 
çaise, I,  203). 

6.  On  en  peut  déjà  constater  l'ébauche  dans  un  mandement  de  Jean  V 
pour  faire  armer  les  gens  du  commun,  outre  les  nobles  (20  mars  1425).  Le 
nom  de  Richemont  se  trouve  au  bas  de  ce  mandement.  Revenu  eu  Bre* 


376  PART   DE   RICIIEMONT   DANS   LES   RÉFOllMES 

temps  souffert  de  la  mauvaise  organisation  de  l'armée,  lui  qui  en 
avait  plus  que  tout  autre  la  responsabilité,  il  était  parvenu  à  y 
remédier,  et  certes  ce  n'est  pas  là  le  moindre  des  services  qu'il 
a  rendus  à  la  France.  Désormais,  elle  allait  avoir  une  armée; 
auparavant,  elle  n'avait  que  des  bandes  indisciplinées  et  pillar- 
des. En  1439,  J.  Jouvenel  des  Ursins  s'écriait  en  s'adressant  à 
Charles  YII  :  «  On  dit  que  vos  gens  sont  bien  appriz  à  piller  et 
rober    le   peuple,    et  les  ennemis    à  faire    guerre    en    toutes 

manières Hélas!  sire,  la  multitude  de  gens  ne  fait  pas  les 

victoires,  mais  l'exercite.  Voz  ennemis  se  exercitent  tous  les 
jours,  et  vos  gens  pillent  et  robent  et  destruisent  le  peuple  *.  » 
On  verra  bientôt  si  la  nouvelle  armée  française  est  toujours 
inférieure  aux  vieilles  troupes  de  l'Angleterre. 

tagne  depuis  quelques  années,  il  avait  saus  doute  engagé  son  frère  à 
imiter  ce  qu'il  avait  vu  en  Angleterre  {Preuves  de  l'/iist.  de  Bref..,  II, 
col.  1166-1167).  11  y  avait  aussi  en  Bretagne  des  compagnies  d'ordonnance 
organisées  comme  celles  qui  furent  créées  en  France  en  1445.  Ces  compa- 
gnies et  ces  francs  archers  élus  sont  mentionnés  d'une  manière  très  pré- 
cise dans  une  ordonnance  de  Pierre  il,  duc  de  Bretagne,  en  date  du 
20  mars  1430  [Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II,  col.  1535-1357),  et  surtout 
dans  un  registre  de  la  chancellerie  de  Bretagne  (Registre  de  1466-1467, 
fo»  10  et  suiv.,  aux  Arch.  de  la  Loire-Inf.).  Si  les  registres  précédents  n'avaient 
pas  été  détruits  ou  perdus,  ils  auraient  sans  doute  fourni  d'autres  docu- 
ments semblables.  En  1460,  il  y  avait  en  Bretagne  un  grand  maître  de 
l'artillerie,  capitaine  général  des  francs  archers  et  arbalétriers  du  duché 
de  Bretagne,  «  aux  gaiges  et  profits  qui  estoient  au  temps  des  ducs 
Pierre  et  Artur  »  ^Reg.  Turnus  Brutus,  f»  130  v). 
1.  Fr.  3022,  P  20  v. 


CHAPITRE  VI 

GILLES    DE    BRETAGNE    (1443-1449) 


Gilles  de  Bretagne,  neveu  de  Ricliemont.  —  Son  caractère.  —  Gilles  est 
envoyé  par  son  frère  François  l""^  en  Angleterre,  où  il  s  attache  à  Henri  VI. 

—  Revenu  en  Bretagne,  il  se  brouille  avec  François  I"'  et  noue  des 
relations  avec  les  Anglais.  —  Richemont  réconcilie  François  !<"'  et  Gilles. 

—  La  querelle  recommence.  —  François  V'  se  rapproche  de  Charles  VII, 
qu'il  excite  contre  Gilles.  —  Machinations  contre  Gilles.  —  Il  est  arrêté. 

—  Intervention  inutile  de  Richemont,  qui  défend  son  neveu.  —  Capti- 
vité de  Gilles.  —  lutervcntion  de  Henri  VI.  —  Richemont  réconcilie 
François  I"  et  le  comte  de  Penthiôvre.  —  Les  Anglais  veulent  délivrer 
Gilles,  —  lis  prennent  Fougères.  —  Le  duc  de  Bretagne  s'allie  avec 
Charles  VII.  —  Gilles  s'adresse  à  Charles  VII.  —  Perfidie  de  François  I". 
Gilles  est  étranglé. 


Après  la  campagne  de  Lorraine,  Richemont  conduisit  à  Par- 
thenay  sa  femme,  Catherine  de  Luxembourg.  La  trêve  lui  faisait 
quelques  loisirs,  dont  il  voulait  profiter  pour  réparer  les  forti- 
fications de  Parthenay,  de  Fontenay-le-Comte  et  de  Youvant. 
Pour  cela,  le  roi  lui  avait  accordé  le  droit  de  lever,  pendant  dix 
ans,  une  taxe  extraordinaire  sur  ces  villes  '.  Il  eut  bientôt  de 
plus  graves  soucis.  Une  querelle  qui  prenait  des  proportions 
alarmantes  s'était  élevée  entre  ses  neveux,  François  et  Gilles  de 
Bretagne.  François  I®"",  qui  avait  succédé  sur  le  trône  ducal  à  son 
père  Jean  V,  avait,  comme  lui,  un  caractère  indécis,  ombra- 
geux, dissimulé,  peu  loyal  et  peu  susceptible  de  sentiments  géné- 
reux. Gilles,  troisième  fils  de  Jean  Y,  possédait,  dit-on,  de 
grandes  qualités  de  cœur,  avec  un  esprit  ardent  et  porté  à 
l'exaltation.  Les  deux  frères  avaient  longtemps  vécu  en  bonne 
intelligence.  Leur  inimitié  se  déclara  vers  l'époque  de  la  trêve 
de  Tours,  c'est-à-dire  quand  le  duc  François,  n'ayant  plus  à 
craindre  l'Angleterre,  puisqu'il  était  compris  dans  le  traité,  se 

1.  Voy.  Append.  LXXXVII. 


378      GILLES   DE   BRETAGNE    SE   BROUILLE  AVEC   SO?J   FRÈRE   (1444) 

rapprocha  de  Charles  VII,  dont  l'alliance  lui  paraissait  désor- 
mais plus  avantageuse  que  celle  de  Henri  VI.  L'année  précé- 
dente, ayant  sollicité  la  restitution  du  comté  de  Richemont, 
il  avait,  dans  ce  but,  envoyé  son  frère  Gilles  en  Angleterre. 
Il  savait  bien  qu'il  ne  pouvait  faire  un  meilleur  choix  ^  En 
effet,  Gilles  avait  été  élevé  en  Angleterre,  avec  Henri  VI,  qui 
lui  gardait  une  grande  affection  et  qui  lui  donna  une  pension 
de  mille  marcs,  avec  de  riches  présents  *. 

Cette  amitié,  ainsi  ravivée,  exploitée  par  les  démarches  de 
François  lui-même,  tourna  au  détriment  de  son  frère.  Char- 
les VII,  considérant  la  conduite  de  Gilles  comme  un  acte  de 
félonie,  confisqua  les  terres  d'Ingrande  et  de  Champtocé 
(28  août  1443)  ',  qu'il  avait  reçues  en  partage  de  son  père  Jean  V. 
Celui-ci  les  avait  achetées  jadis  au  maréchal  de  Raiz,  *  et  le  roi, 
après  les  avoir  enlevées  à  Gilles  de  Bretagne,  en  fit  don  à  l'ami- 
ral Prigent  de  Coctivy  ^,  qui  avait  épousé,  en  1441,  Marie  de  Raiz, 
fille  unique  du  maréchal. 

Gilles,  revenu  en  Bretagne  (janvier  1444)  ",  demanda  vaine- 
ment un  autre  partage.  François,  qui  se  rapprochait  alors  de 
Charles  VII,  parut  même  approuver  les  motifs  de  la  confiscation, 
comme  s'il  n'avait  pas,  tout  le  premier,  poussé  Gilles  à  recher- 
cher Famitié  des  Anglais.  D'ailleurs  le  duc  était  excité  par  des 
favoris  dont  son  frère  était  l'ennemi  déclaré,  tels  que  Artur  de 
Montauban,  maréchal  de  Bretagne,  Jean  Hingant,  capitaine  des 
gardes,  et  Jacques  d'Epinai,  évêque  de  Saint-Malo  ''.  Ils  mirent 
tout  en  œuvre  pour  envenimer  la  querelle  entre  les  deux  frères. 
Artur  de  Montauban  ne  pouvait  pardonner  à  Gilles  d'avoir 
épousé  la  plus  riche  héritière  de  Bretagne,  Françoise  de  Dinan, 
qu'il  avait  lui-même  demandée  en  mariage  *. 

1.  Proceedings,  VI,  Préface,  p.  m  et  p.  7-12. 

2.  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1361,  1364.  Proceedings,  t.  V,  16-19. 
En  1443,  Henri  VI  lui  donne  une  pension  de  2  000  nobles  (Rymer,  V,  1'^  partie, 
128;  voir  aussi  Rolls  of  Parliament,  IV,  436). 

3.  J.  Stevenson,  I,  439-441.  Rymer,  t.  V,  l""»  partie,  p.  128.  Preuves  de 
l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1362.  Ces  terres  relevaient  du  duché  d'An|ou 
(D.  Lobineau,  I,  624-625). 

•4.  Les  ducs  de  Bretagne  curent,  à  cause  de  Champtocé,  de  longues  con- 
testations avec  René  d'Anjou  (Lecoy  de  La  Marche,  Le  roi  René,  I,  221). 

5.  Le  22  avril  1443,  Charles  VII  donne  à  Prigent  de  Coëtivy  les  biens  de 
Gilles  de  Raiz,  qui  avaient  été  confisqués.  Le  12  mai  1443,  il  lui  donne 
Taillebourg,  où  fut  élevée,  sous  sa  garde,  Marie,  fille  du  roi  et  d'Agnès 
Sorel  (Xia  8605,  f"  90;  Vallet  de  V.,  Uist.  de  Charles  VII,  t.  III,  14  et  note  1  ; 
Anselme,  VII,  842-844;  Pièces  orig.,  t.  797,  dossier  Coetivy,  n»'  25  et 
suiv.;  Fr.  26078,  n»  6057). 

6.  Proceedings,  V,  24. 

7.  Le  Baud,  492. 

8.  Françoise  n'était  encore  qu'uae  enfant.  On  prétendit  plus  tard  que 


RICIIEMO!ST  LES  RÉCONCILIE   (1445,    OCT.)  379 

Poussé  à  bout  par  les  mauvais  procédés  de  son  frère,  le  jeune 
prince  eut  le  tort  de  chercher  aide  et  protection  auprès  des 
Anglais.  Ceux-ci,  qui  ne  pouvaient  voir  sans  dépit  le  duc  de 
Bretagne  abandonner  leur  alliance,  accueillirent  avec  empresse- 
ment les  plaintes  de  Gilles  et  lui  promirent  leur  secours.  Ils 
attisèrent  son  ressentiment  ;  ils  lui  inspirèrent  des  idées  de 
révolte  et  de  vengeance.  Il  s'établit  ainsi  entre  eux  et  Gilles  des 
relations  suivies  *,  qui  n'échappèrent  pas  à  la  vigilance  de  ses 
ennemis.  Ils  saisirent  des  lettres  dans  lesquelles  Gilles  demandait 
l'intervention  du  roi  d'Angleterre  et  allait  jusqu'à  lui  offrir  ses 
services  et  ses  places  en  Bretagne  *.  Il  s'était  retiré  au  château 
du  Guildo  ^,  qui  appartenait  à  sa  femme,  pour  être  plus  près 
de  la  Normandie  et  des  Anglais  (mars-oct.  1445). 

Richemont,  informé  de  ce  qui  se  passait,  vint  alors  en  Breta- 
gne, pour  réconcilier  les  deux  frères  (octobre  1445).  Il  aimait 
Gilles,  et  ce  n'était  pas  sans  un  véritable  chagrin  qu'il  le  voyait 
engagé  dans  une  voie  aussi  périlleuse.  Le  duc  accueillit  le  conné- 
table avec  déférence  et  ne  refusa  pas  d'entendre  les  explications 
de  Gilles.  Celui-ci,  encouragé  par  les  conseils  et  par  la  présence 
de  son  oncle,  vint  trouver  François  P*"  à  Rieux  *.  Là,  il  com- 
parut, le  19  octobre,  devant  un  conseil  présidé  par  le  con- 
nétable, mais  dont  faisaient  aussi  partie  ses  ennemis,  J.  Hingant 
et  A.  de  Montauban.  Après  des  explications  embarrassées,  il 
implora  son  pardon,  en  se  soumettant  à  toutes  les  conditions 
qu'on  lui  voudrait  imposer.  Le  duc  lui  reprocha  durement  sa 
félonie  et  son  crime.  Enfin  il  consentit  à  lui  pardonner,  mais  il 
exigea  qu'il  remît  sa  femme  entre  ses  mains,  quUl  cessât  toute 
relation  avec  les  Anglais,  qu'il  vînt  résider  à  la  cour  de  Bretagne 
et  qu'il  s'engageât  à  n'en  point  sortir  sans  permission  ^. 

Gilles  l'avait  enlevée  et  détenue  au  Guildo  {Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II, 
col.  lo22).  Artur  de  Montauban  fut  accusé  d'avoir  voulu  perdre  Gilles 
pour  épouser  sa  femme  (voir  le  procès  criminel  du  maréchal  de  Gyé  en 
lôOo,  aux  Arcb.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  8i,  E,  192).  Artur  de  Montauban 
était  fils  de  Guillaume  de  Montauban  et  de  Bonne  Visconti  (A.  du  Paz, 
llist.  généal.  de  plusieurs  maisons  illustres  de  Bretagne,  Paris,  1620,  iu-f"», 
p.  461-462). 

1.  Lettres  de  Th.  Hoo,  chancelier  de  France  pour  Henri  VI,  et  de  Rob. 
Roos,  à  Gilles  de  Bretagne  {Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1397-1398  ; 
voir  aussi  col.  1380).  —  Lettres  de  M.  Golh  (col.  1388).  —  Lettre  du  comte 
de  Buckingbam  (col.  1392). 

2.  Henri  VI  écrivait  aussi  à  Gilles  (Preuves  de  rhist.  de  Bret.,  H,  col.  1391). 

3.  G.  de  Matignon,  arrondissement  de  Dinan.  On  voit  encore  les  ruines 
imposantes  de  cette  forteresse  {Esquisses  historiques  sur  la  Bretagne,  Rennes, 
1829,  in-40,  p.  3-7). 

-i.  C.  d'Aliaire,  arrondissement  de  Vannes. 
5.  Preuves  de  Chist.  de  Bret.,  II,  col.  1387. 


380  LA   QUERELLE   RECOMMENCE    (1446) 

Le  connétable,  content  d'avoir  apaisé  celte  querelle,  fit  venir  à 
Nantes  sa  femme,  que  le  duc  et  la  duchesse  désiraient  connaître. 
La  nouvelle  comtesse  de  Richemont  fut  reçue  avec  l'empresse- 
ment le  plus  amical  (décembre  1445);  le  duc  donna  des  fêtes  en 
son  honneur;  il  lui  offrit  des  colliers  d'or,  des  diamants  ^  Avant 
de  quitter  Nantes,  le  connétable  détermina  son  neveu  François 
à  fonder  une  maison  de  chartreux  dans  cette  ville,  et  il  contribua 
lui-même  aux  frais  de  cette  fondation  -.  Il  regagna  ensuite  sa 
résidence  favorite  de  Parthenay. 

Cependant  la  réconciliation  entre  le  duc  et  son  frère  n'était 
qu'apparente.  Gilles,  ayant  obtenu  la  permission  de  retourner 
au  Guildo,  chercher  sa  femme,  ne  voulut  plus  revenir.  Il  savait 
que  le  roi  Henri  VI  avait  intercédé  en  sa  faveur  ^,  qu'il  avait 
enjoint  à  son  chancelier  et  à  ses  autres  officiers  de  lui  offrir  leurs 
services.  Croyant  pouvoir  compter  sur  les  Anglais,  il  ne  sut  pas 
résister  à  leurs  excitations  et  à  leurs  promesses  '*.  Il  s'imagina 
qu'il  pourrait  ainsi  obtenir  de  son  frère  le  nouveau  partage  qu'il 
réclamait  ^,  car,  s'il  avait  eu  l'intention  de  se  révolter,  rien  n'eût 
été  plus  facile  pour  lui  que  de  se  retirer  en  Normandie,  comme 
les  Anglais  l'y  invitaient  ''.  Ses  ennemis  ne  l'en  accusèrent  pas 
moins  de  rébellion  et  poussèrent  le  duc  à  se  mettre  en  garde 
contre  des  attaques  imaginaires.  Gilles  étant  soutenu  par 
Henri  YI,  le  duc  se  rapprocha  davantage  du  roi  de  France.  Déjà, 
lors  de  la  trêve  de  Tours,  il  avait  fait  un  grand  pas  dans  cette 
voie.  Il  se  décida  donc  à  lui  rendre  l'hommage  qu'il  avait  différé 
depuis  plus  de  trois  ans. 

La  cérémonie  eut  lieu  à  Chinon,  le  14  mars.  Le  connétable  y 
assistait,  avec  G.  de  La  Trémoille,  qui  allait  mourir  un  mois  et 
demi  plus  tard  ^  François  I"fît  hommage  simple  pour  le  duché 

1.  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  139i-I39o.  Le  comte  et  la  comtesse 
de  Richemont  reçurent  des  étrennes  du  duc  de  Bretagne,  le  !«■■  jauv.  1446 
(col.  1393).  Gilles  lui-même  reçut  aussi  des  présents  (ibidem). 

2.  Arch.  de  la  Loire-Inf.  Reg.  Turnus  Brulus,  I,  f"'  92,  13o,  183  v». 

3.  Lettre  du  2o  octobre  1445  {Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1391). 
Charles  VII  était  alors  en  pourparlers  avec  Henri  VI  pour  la  conclusion 
de  la  paix.  Il  lui  avait  envoyé  une  ambassade  qui  comprenait  aussi  des 
Bretons  (J.  Stevenson,  I,  87-133,  163).  Le  duc  de  Bretagne  était  toujours 
considéré  comme  allié  des  Anglais.  11  sollicitait  même  la  restitution  du 
comté  de  Richemont,  et  Henri  VI  lui  répondait,  le  14  juin  1446,  qu'il  devait 
venir,  pour  cela,  rendre  hommage  eti  personne,  et  non  par  procureur 
(Arch,  de  la  Loire-Infér.,  cass.  48,  E,  122;  Fr.  26073,  n»  3231). 

4.  Lettres  de  Th.  Hoo  (23  janvier)  et  de  M.  Goth  (26  janvier  1446)  à 
Gilles  {Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1397-1398). 

5.  Idem,  col.  1394-1397. 

6.  Lettres  de  Th.  Hoo  et  de  Robert  Roos,  3  mai  et  6  juin  {Idem,  col. 
1400-1402). 

7.  D.  Lobineau,  II,  col.  1081;  J  243,  n»  103  i,  2. 3, 4.  Arch.  de  la  Loire- 


FRANÇOIS  I'^""  SE  RAPPROCHE  DE  CHARLES  VII  (1446)     381 

de  Bretagne  et  hommage-lige  pour  les  terres  qu'il  avait  en 
France.  Charles  VII  ne  négligea  rien  pour  s'attacher  ce  grand 
vassal,  qui  pouvait  rendre  tant  de  services  aux  Anglais  s'il  fût 
resté  leur  allié.  Il  lui  accorda  des  lettres  d'abolition  pour  lui  et 
pour  tous  les  siens,  y  compris  le  connétable,  afin  qu'on  ne  pût 
incriminer  aucun  de  leurs  actes  antérieurs;  il  cassa  un  ajourne- 
ment donné  au  duc  de  Bretagne  devant  le  parlement  de  Paris,  à 
la  requête  du  comte  de  Penlhièvre  *  ;  enfin,  comme  le  duc  n'avait 
pas  d'hôtel  à  Paris,  il  lui  fit  présent  de  l'hôtel  de  Nesle  %  qui 
avait  appartenu  au  duc  de  Berry  (mai  144()). 

François  I*"""  resta  plus  de  deux  mois  à  la  cour,  où  la  conduite  de 
Gilles  fut  examinée  avec  plus  d'animosité  que  d'indulgence.  Le 
connétable  eut  beau  plaider  en  sa  faveur  et  demander  qu'on  n'eût 
pas  recours  aux  moyens  extrêmes,  Gilles  n'en  fut  pas  moins  con- 
sidéré comme  un  traître  allié  des  Anglais,  tout  disposé  à  les 
introduire  en  Bretagne  '  et  tramant  des  complots  dangereux  à 
la  fois  pour  son  frère  et  pour  le  roi  de  France.  Ceux  qui  avaient 
intérêt  à  le  perdre  convainquirent  Charles  VII  aussi  bien  que  le 
duc;  d'ailleurs  ils  trouvèrent  à  la  cour  des  auxiliaires  puissants, 
comme  l'amiral  de  Goëlivy  et  Pierre  de  Brézé,  qui  n'aimait  pas 
Richemont  '*.  L'arrestation  de  Gilles  fut  secrètement  résolue  entre 
eux;  mais,  afin  d'écarter  les  soupçons  du  connétable,  le  duc 
parut  se  prêter  à  une  nouvelle  tentative  de  réconciliation.  Il 
écrivit  à  Gilles,  pour  lui  affirmer  qu'il  était  prêt  à  s'entendre  avec 
lui  et  pour  l'engager  à  venir,  soit  à  la  cour,  soit  dans  tout  autre 
lieu  de  son  choix,  où  se  trouverait  aussi  le  connétable.  Celui-ci 
écrivit  de  même  à  son  neveu,  pour  lui  donner  les  plus  sages  con- 
seils et  le  tirer  de  son  égarement. 

Ce  fut  J.  Hingant  que  le  duc  chargea  de  porter  ces  deux  let- 

Inférieure,  cass.  33,  E,  90.  G.  de  la  Trémoille  mourut  le  6  mai  1446.  Il 
souffrait  depuis  longtemps  de  la  goutte  et  d'un  coup  qu'il  avait  reçu  à  la 
jambe  gauche  (X^»  22,  au  2  juillet  1442). 

1.  Lettres  du  16  mars  1446,  dans  les  Preuves  de  l'hist.  de  Bret.,  II,  col.  1400, 
et,  d'une  manière  plus  complète,  dans  JJ  177,  f»  116,  et  Arch.  de  la  Loire- 
Inférieure,  cass.  94,  E,  94.  Le  roi  de  Sicile  et  le  comte  de  Penthièvre 
s'opposèrent  à  l'entérinement  de  ces  lettres  (X^»  24,  au  mardi  14  mars 
1446,  a.  st.). 

2.  Lettres  du  20  mai  1446  dans  JJ  177,  fo  150,  n»  227. 

3.  Berry,  429. 

4.  A  celte  époque,  P.  de  Brézé  luttait  contre  les  redoutables  intrigues 
du  Dauphin,  qui  avait  pour  lui  la  plupart  des  princes.  Dans  cette  situation, 
Brézé  tenait  d'autant  plus  à  plaire  au  duc  de  Bretagne,  qui  ne  faisait  pas 
cause  commune  avec  ses  ennemis  (de  Beaucourt,  Le  caractère  de  Charles  VU, 
dans  la  Revue  des  questions  historiques,  t.  XIV,  p.  99).  P.  de  Brézé  était 
alors  en  grande  faveur.  Il  était  sénéchal  du  Poitou,  capitaine  des  châteaux 
de  Poitiers,  de  Niort  et  de  Nîmes  (Fr.  26074,  n<"  5273,  5514,  5524,  5525). 


382       MACHINATIONS  CONTRE  GILLES.    SON  ARRESTATION   (1446) 

très  au  Guildo.  Le  choix  d'un  pareil  messager  suffirait  seul  à 
montrer  la  perfidie  de  cette  prétendue  démarche.  L'arrivée  de 
Hingant  (21  juin),  l'humilité  affectée^  peut-être  provocatrice,  de 
son  attitude  et  de  son  langage  produisirent  sur  Gilles  l'effet  qu'on 
en  pouvait  attendre.  Surexcité  par  la  colère,  il  s'emporta  en 
reproches  violents,  en  menaces  inconsidérées,  dont  Hingant  exa- 
géra encore  l'expression  dans  une  lettre  qu'il  adressa,  de  Rennes, 
au  duc  de  Bretagne  (23  juin)  K  Tanguy,  fils  bâtard  de  Jean  Y, 
témoin  attristé  de  cette  scène,  eut  grand'peine  à  calmer  le  mal- 
heureux Gilles.  Ensuite,  il  lui  fit  envisager  sa  faute  et  le  déter- 
mina même  à  envoyer  au  duc  ses  excuses  ;  mais  celui-ci  ne  voulut 
rien  entendre.  Il  écrivit  au  roi  pour  l'informer  de  ce  qui  s'était 
passé  au  Guildo,  en  le  priant  de  faire  arrêter  Gilles. 

S'il  est  vrai  que  cette  arrestation  eut  lieu  dès  le  dimanche 
26  juin  ^  il  faut  bien  supposer  qu'elle  avait  été  prévue  et  prépa- 
rée de  longue  main.  En  tout  cas,  l'amiral  de  Goëtivy,  ennemi  de 
Gilles  *,  Pierre  de  Brézé  et  son  lieutenant  Regnault  de  Dresnay 
se  rendirent  promptement  au  Guildo,  avec  une  nombreuse  com- 
pagnie de  gens  d'armes.  Ils  s'attendaient  à  une  vive  résistance. 
Malgré  les  avertissements  réitérés  des  Anglais,  qui  le  pressaient 
de  s'enfuir,  Gilles  était  resté  au  Guildo.  Quand  Regnault  de  Dres- 
nay se  présenta,  au  nom  du  roi,  il  fît,  sans  hésitation,  ouvrir  les 
portes.  On  l'emmena  aussitôt  à  Dinan,  où  s'était  rendu  le  duc  de 
Bretagne.  Sa  femme  et  sa  belle-mère,  arrêtées  avec  lui,  furent  con- 
duites auprès  de  la  duchesse  *. 

Toute  cette  affaire  avait  été  tenue  si  secrète  que  Richemont 
n'en  avait  rien  su.  Le  départ  des  troupes  ayant  éveillé  ses  soup- 
çons, il  alla  trouver  le  roi  et  apprit  de  lui  ce  qui  se  passait.  Inca- 

1.  Preuves  de  rhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1378-1380.  Les  termes  de  cette 
lettre  paraissent  avoir  été  calculés  pour  exciter  contre  Gilles  le  conné- 
table lui-même.  D'après  J.  Hingant,  Gilles  aurait  dit  qu'il  ne  se  fiait  pas 
au  connétable,  qu'il  n'avait  jamais  rien  valu,  qu'il  le  considérait  comme 
son  ennemi  mortel,  etc.  D'après  la  déposition  du  bâtard  Tanguy,  Gilles 
aurait  seulement  dit  que  Richemont  «  ne  lui  avoit  voulu  oncques  bien  ». 
Un  autre  témoin,  Gardinet  Le  Frère,  contredit  aussi  sur  d'autres  points  la 
lettre  de  J.  Hingant  (col.  1408  et  suiv.). 

2.  Le  Baud,  492.  Le  23  juin,  G.  Roskill  écrit  à  Gilles  pour  l'avertir  que 
le  duc  de  Bretagne  fait  des  préparatifs  contre  lui.  La  réponse  de  Charles  VII 
au  duc  de  Bretagne  est  du  29  juin,  mais  elle  ne  prouve  pas  que  les  troupes 
royales  n'étaient  pas  parties  auparavant,  comme  le  fait  remarquer  D.  Tail- 
landier {Pi-euves  de  rhist.  de  Bret.,  II,  col.  1404). 

3.  Prigent  de  Goëtivy,  héritier  du  maréchal  de  Raiz  (X*»  4800,  f»'  100, 
120,  etc.),  tenait  à  conserver  les  terres  qui  appartenaient  jadis  au  maré- 
chal et  que  Jean  Y  avait  données  à  Gilles  de  Bretagne  (voy.  ci-dessus, 
p.  378  et  note  5). 

4.  Berry,  429. 


RICHEMONT  INTERVIENT  EN  FAVEUR  DE  GILLES   (1446)  383 

pable  de  contenir  son  irritation,  il  osa  reprocher  au  roi  de  «vou- 
loir ainsi  destruire  la  maison  de  Bretagne  »  *  et  d'envenimer  la 
querelle  entre  les  deux  frères,  quand  il  était  possible  de  l'apaiser. 
L'indignation  et  la  douleur  donnaient  tant  de  force  à  ses  paro- 
les, que  Charles  en  fut  ému.  a  Beau  cousin,  dit-il,  pourvoyez-y, 
et  faites  diligence,  ou,  autrement,  la  chose  ira  mal  -.  »  Le  conné- 
table partit  en  grande  hâte.  Il  craignait  de  trouver  Gilles  aux 
prises  avec  les  troupes  royales.  Quand  il  sut  qu'il  ne  leur  avait 
opposé  aucune  résistance,  il  ne  désespéra  pas  de  le  ramener  dans 
la  bonne  voie  et  d'obtenir  son  pardon.  Il  alla  aussitôt  à  Dinan  et 
pria  le  duc  de  lui  laisser  voir  son  neveu.  Amené  devant  le  con- 
nétable et  devant  ses  deux  frères,  François  et  Pierre  de  Breta- 
gne, Gilles  se  mit  à  genoux  et  supplia  humblement  le  duc  de  lui 
pardonner.  Comme  il  n'obtenait  aucune  réponse,  Pierre  et  le 
connétable  lui-même  s'agenouillèrent  aussi  devant  le  duc  et 
implorèrent  sa  pitié  d'une  voix  altérée  par  les  larmes.  Loin 
d'être  ému  par  ce  spectacle,  François  ne  fit  qu'en  rire.  Alors  le 
connétable  se  releva  indigné  et  partit  ^. 

Il  était  revenu  à  Parthenay,  quand  il  apprit  que  les  états  de 
Bretagne  étaient  réunis  à  Redon,  pour  juger  son  neveu  (août  144G), 
Il  se  rendit  à  Redon,  afin  d'assister  le  malheureux  Gilles.  Comme 
l'arrestation  avait  été  faite  par  l'ordre  du  roi,  deux  de  ses  con- 
seillers, le  sire  de  Précigny  et  G.  Gousinot,  furent  chargés  de 
parler  en  son  nom  ^.  Quand  L.  de  Rohan,  chancelier  de  Breta- 
gne, demanda  leur  avis,  ils  répondirent  que  l'affaire  n'était  pas 
instruite,  qu'il  fallait  donner  à  l'accusé  tous  les  moyens  de  se 
défendre,  et  qu'enfin,  s'il  était  déclaré  coupable,  ils  conseillaient 
au  duc  la  clémence  plutôt  que  la  rigueur.  Cet  avis,  auquel  l'in- 
fluence de  Richemont  n'était  peut-être  pas  étrangère,  fit  impres- 
sion sur  les  états.  Alors  le  connétable  parla  dans  le  même  sens, 
avec  une  émotion  si  persuasive  que  l'assemblée,  où  il  avait  un 
parti  nombreux,  recommanda  aussi  Gilles  à  la  clémence  de  son 
frère.  Les  états  se  séparèrent  ensuite,  laissant  au  duc  toute  la 
responsabilité  des  mesures  qu'il  pourrait  prendre.  Il  en  garda  ran- 
cune au  connétable  et  continua  ses  poursuites  contre  Gilles,  qui  fut 
retenu  dans  une  sorte  de  captivité,  sous  la  garde  de  son  mortel 
ennemi,  le  maréchal  de  Montauban. 

Quelques  mois  plus  tard,  Richemont  dut  encore  quitter  Par- 

1.  Gruel,  221. 

2.  Gruel,  221. 

3.  Gruel,  221. 

4.  Preuves  de  Vhistoire  de  Bretagne,  II,  col.  1 40i-1405.  A  cette  époque  (sep- 
tembre), le  roi  fait  de  nouvelles  concessions  au  duc  da  Bretagne  (JJ  178, 
t'  25). 


384       CONDUITE  DU  DUC  DE  BRETAGNE,  FRANÇOIS  I^"" 

thenay,  pour  assister  à  une  assemblée  que  le  roi  réunit  au  châ- 
teau de  Razilly  %  près  de  Ghinon,  dans  le  but  de  délibérer  sur 
les  moyens  de  mettre  fin  au  schisme,  après  la  mort  du  pape 
Eugène  IV  (23  février  1447)  ^  Le  duc  de  Bretagne  et  beaucoup 
d'autres  princes  se  rendirent  aussi  à  l'invitation  de  Charles  VII  ^. 
Pendant  les  conférences,  Richemont  eut  besoin  d'aller  à  Par- 
thenay.  Quand  il  revint,  après  une  courte  absence,  il  trouva  son 
logis  occupé  par  le  comte  de  Nevers  *.  Le  connétable,  qui  n'était 
pas  d'un  caractère  à  supporter  une  offense,  obligea  le  comte  à 
déguerpir  au  plus  vite. 

Le  roi  les  manda  tous  deux  auprès  de  lui.  Le  comte  de  Nevers 
se  présenta  en  compagnie  du  duc  de  Bourbon  et  du  comte  d'Eu. 
lUchemont  vint  seul,  avec  les  officiers  de  sa  maison,  sans  vouloir 
que  le  roi  de  Sicile,  le  comte  du  Maine  et  le  duc  d'Alençon  l'ac- 
compagnassent. Il  soutint  fièrement  son  droit,  et,  comme  le  comte 
de  Nevers  disait  qu'il  n'avait  cédé  qu'en  considération  de  la  charge 
de  connétable  :  «  Quand  même  je  ne  serais  qu'Artur  de  Bretagne, 
répondit  Richemont,  je  vous  empêcherais  bien  de  me  déloger.  » 
Le  duc  de  Bretagne,  qui  assistait  à  cette  scène,  resta  impassible 
et  ne  dit  rien  pour  soutenir  son  oncle.  Beaucoup  de  seigneurs 
blâmèrent  cette  conduite,  et  Richemont  en  fut  très  froissé;  mais 
il  ne  se  brouilla  pas,  pour  ce  motif,  avec  son  neveu  ^  L'in- 

1.  Aujourd'hui  Sazilly,  c.  de  l'Ile-Bouchard,  arrondissement  de  Chinon. 

2.  II  y  avait  alors  à  la  cour  des  ambassadeurs  anglais,  qui  conclurent  un 
traité  avec  Gliarles  VU  le  22  février  1447  (M.  d'Escouchy,  III,  163). 

3.  II  y  avait  encore,  à  cette  époque,  un  différend  entre  Charles  VII  et 
le  duc  de  Bretap;ne,  à  cause  d'un  arrêt  prononcé  le  17  septembre  1446,  par 
le  parlement  de  Paris,  contre  des  marchands  de  Rennes.  Malgré  deux 
sommations,  le  duc  refusa  l'exécution  des  lettres  d'arrêt  et  les  renvoya  au 
roi  (X2a  26,  f">'  38  et  suiv.  et  ci-dessous,  la  note  5). 

4.  Jean  de  Bourgogne,  comte  de  Nevers,  qui  disputait  le  comté  d'Etampes 
aux  enfants  de  Richard,  neveu  de  Richemont  (voy.  Append.  XV). 

5.  Peu  après,  le  parlement,  par  leltres  du  17  mars,  manda  au  conné- 
table de  faire  exécuter  l'arrêt  du  17  septembre  1446,  sans  délai,  en  telle 
manière  que  le  roi  fût  obéi.  Le  29  mars,  G.  Trouillot,  sergent  ordinaire 
du  bailliage  de  Touraine,  alla  trouver  le  connétable  à  Parthenay  et  lui 
remit  l'arrêt,  avec  des  lettres  closes  du  roi.  Richemont  dit  au  sergent  de 
se  rendre  vers  lui,  à  Nantes,  la  semaine  d'après  Quasimodo,  <■■  pour  veoir 
la  diligence  qu'il  feroit  d'exécuter  ledit  arrêt  et  l'obéissance  que  feroient 
sur  ce  le  duc  de  Bretaigne  et  ses  conseillers,  gens  et  officiers.  »  En  agis- 
sant ainsi,  Richemont  donnait  au  roi  une  grande  preuve  de  dévouement, 
car  il  savait  combien  les  ducs  de  Bretagne  étaient  jaloux  de  leurs  privilèges. 
G.  Trouillot  se  rendit  à  Nantes,  où  était  le  duc,  avec  son  conseil  et  les 
États  de  Bretagne.  Le  connétable  réclama  l'exécution  de  l'arrêt,  mais  elle 
lui  fut  formellement  refusée.  Alors  le  roi,  par  lettres  du  4  juillet  1447, 
ordonna  au  parlement  de  poursuivre  l'exécution  de  l'arrêt  par  tous  les 
moyens.  Cette  affaire  durait  encore  en  1449  (X^a  26,  î"»  38-40).  Voir  ci- 
dessus,  la  note  3. 


CAPTIVITÉ   DE  GILLES.    INTERVENTION   DE   HENRI  VI  385 

térêt  de  la  France  et  celui  de  Gilles  lui  conseillaient  de  ménager 
le  duc  de  Bretagne  *. 

Tous  les  efforts  du  connétable  ne  purent  néanmoins  ramener 
François  1'=''  à  de  meilleurs  sentiments.  Le  duc  fit  continuer 
l'instruction  du  procès  et  interroger  des  témoins,  notamment  le 
bâtard  de  Bretagne,  Tanguy,  dont  la  déposition  fut  beaucoup 
moins  accablante  pour  Gilles  que  la  lettre  de  J.  Hingant.  Déses- 
pérant de  réunir  des  preuves  suffisantes  pour  obtenir  une  con- 
damnation légale,  il  retint  son  frère  en  captivité.  D'ailleurs  les 
tentatives  des  Anglais  pour  secourir  Gilles  tournèrent  à  son  dé- 
triment*. Considérant  son  arrestation  comme  une  infraction  à  la 
trêve,  tout  au  moins  comme  un  acte  d'hostilité  envers  Henri  VI, 
ils  voulurent  faire  une  course  en  Bretagne.  Le  duc,  effrayé,  de- 
manda secours  au  roi  et  au  connétable.  Richemont  lui  amena 
des  troupes  à  Redon  (septembre  1447)  ^,  mais  il  n'eut  pas  à  com- 
battre les  Anglais,  qui  se  bornèrent  à  quelques  démonstrations 
menaçantes. 

Au  commencement  de  1448,  le  duc  de  Bretagne  s'entendit  avec 
Charles  VII,  qui  voulait  contraindre  Henri  VI  à  rendre  Le  Mans. 
Dans  un  traité,  qui  fut  alors  conclu  entre  les  deux  rois,  le  due 
fut  compris  comme  sujet  et  allié  de  la  France.  Par  une  indigne 
supercherie,  les  commissaires  anglais  substituèrent  à  la  pre- 
mière rédaction  de  l'acte  une  copie  où  le  duc  était  mentionné 
comme  sujet  et  allié  de  l'Angleterre  *.  L'échange  des  traités  se 
fît  ensuite  sans  qu'on  s'aperçût  de  cette  ruse  déloyale  ^.  Un  peu 
plus  tard,  les  Anglais  fortifièrent  Mortain  et  Saint- James-de- 
Beuvron  ®,  d'où  ils  pouvaient  attaquer  la  Bretagne  (1448). 

Vers  la  même  époque,  Henri  VI,  par  ses  ambassadeurs,  inter- 
cédait auprès  de  Charles  VII  et  du  duc  François  en  faveur  de  Gil- 
les. Ces  démarches,  bien  accueillies  en  apparence,  étaient,  en 
réalité,  plus  nuisibles  qu'utiles.  Charles  VII  envoya  bien  en  Bre- 
tagne P.  deBrézé  ',  avec  un  autre  commissaire;  mais  la  situation 
de  Gilles  n'en  fut  nullement  améliorée.  Le  duc  s'entendit  même 
avec  l'amiral  de  Coëtivy  et  consentit  à  lui  laisser  la  libre  jouis- 


1.  Gruel,  122. 

2.  K  68,  n»  298.  Des  serviteurs  de  Gilles  étaient  allés  en  Angleterre 
auprès  de  Henri  VI  (J.  Stevenson,  I,  475). 

3.  11  était  à  Redon  le  3  septembre  (Arcli.  des  Basses-Pyrénées,  E,  64). 

4.  Henri  VI  se  prévalait  toujours  des  serments  faits  par  Jean  V,  par  ses 
frères  et  par  ses  fils  (Bréquigny,  83,  ou  Morcau,  707,  f<"  7-9  ;  Proceedings, 
VI,  63). 

5.  D.  Lobineau,  I,  631. 

6.  J.  Stevenson,  I,  209  et  suiv.  Append.  LXXXVIII. 

7.  Preuves  de  rhist.  de  Bret.,  II,  col.  1412  et  suiv.  Fr.  20458,  f«'  3-5,  9, 15. 
Richemont.  25 


386      RICHEMONT  RÉCONCILIE   FRANÇOIS   I"  ET  J.   DE  BLOIS   (4448) 

sance  des  terres  d'Ingrande  et  de  Champtocé.  Il  est  vrai  que 
Goëtivy  s'engageait  à  les  échanger  contre  d'autres  terres,  et  le 
duc  lui  donna  d'abord,  pour  opérer  cet  échange,  la  seigneurie 
de  Bourgneuf-en-Raiz,  qu'il  avait  déjà  cédée  au  connétable. 
Celui-ci,  moyennant  compensation,  se  prêta  volontiers  à  cet 
arrangement  ',  pour  obliger  le  duc  et  pour  faciliter  un  autre  ac- 
cord, auquel  il  avait  beaucoup  contribué.  En  effet,  c'est  grâce  à 
Richemont  qu'un  traité  de  la  plus  haute  importance  était  alors 
conclu  à  Nantes  entre  le  duc  de  Bretagne  et  Jean  de  Blois,  comte 
de  Penthièvre  (27  juin).  Jean.de  Blois  renonçait  à  toute  préten- 
tion sur  le  duché  de  Bretagne  ;  François  P''  lui  rendait  une  partie 
de  ses  terres,  autrefois  confisquées  par  Jean  V,  et  s'engageait 
à  lui  donner  celles  de  Champtocé,  d'Ingrandes  et  de  Palluau, 
ou  d'autres  domaines  équivalents  *.  La  réconciliation  entre  les 
Montfort  et  les  Penthièvre  était  ainsi  accomplie.  Elle  eut  lieu  à 
Nantes,  où  Richemont  avait  amené  J.  de  Blois. 

Le  connétable  fut  moins  heureux  dans  se3  démarches  en  fa- 
veur de  Gilles.  D'ailleurs  l'insistance  et  les  prétentions  des 
Anglais  lui  rendaient  cette  tâche  i'ort  difficile.  Le  roi  d'Angle- 
terre priait  toujours  Charles  VII  d'employer  ses  bons  offices 
pour  tirer  Gilles  de  prison;  en  même  temps,  il  affirmait  ses 
droits  de  suzeraineté  sur  la  Bretagne  et  prétendait  que  ces 
droits  l'autorisaient  à  fortifier  Saint-James-de-Beuvron.  Fran- 
çois I",  au  contraire,  se  déclarait  nettement  vassal  de  la 
France  '.  Des  négociations  qui  eurent  lieu  à  Louviers  (août  et 
novembre)  ne  purent  aplanir  ces  difficultés;  pourtant  la  trêve 
fut  encore  prolongée  jusqu'au  mois  de  juin  1449,  et  la  Bretagne 
y  resta  comprise  *. 

Quand  les  Anglais  virent  que  la  Bretagne  leur  échappait  et 
que  toutes  leurs  sollicitations  en  faveur  de  Gilles  étaient  sans 
effet,  ils  voulurent  l'enlever,  ou  forcer  le  duc,  par  quelque  autre 

1.  Richemont  eut,  en  échange,  la  terre  de  Carhaix  et  300  1.  de  rentes 
sur  la  recette  de  Nantes.  Arch.  de  la  Loire-Infér.  (cass.  1,  E  [3  pièces  du 
8  et  du  21  mars  1448  a.  st.  et  du  28  avril  1449],  et  cass.  60,  E  155). 

2.  J  246,  n»  114;  Duchesne,  70,  f»'  185  v»  186.  Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,^ 
II,  col.  1415  et  suiv.,  col.  1424-1427.  Le  21  septembre  1448,  le  duc  mande  à 
Richemont  de  livrer  Palluau  au  comte  de  Penthièvre  (Arch.  de  la  Loire- 
Inf.,  cass.  71,  E,  171;  voir  aussi  Fr.  22327,  f»  119).  Guillaume  de  Bretagne, 
frère  de  Jean,  prisonnier  depuis  vingt-huit  ans,  devait  être  remis  en  liberté. 

3.  Preuves  de  Vhist.  de  Bret.,  II,  col.  1429-1430;  t.  III  de  Math.  d'Es- 
couchy,  p.  234.  Dans  la  trêve  de  Tours  en  1444,  le  duc  de  Bretagne  avait 
été  compris  comme  sujet  du  roi  de  France,  avec  l'assentiment  de 
Henri  VI ,  comme  le  rappelle  Jouvenel  des  Ursins,  dans  son  Traité  des 
différends  entre  les  rois  de  France  et  d'Angleterre  (Ms  Dupuy  XXXV, 
fo  148  ;  voir  aussi  Fr.  5037,  f  123,  et  Append.  LXXXVIII). 

4.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1430  et  suiv.  1439  et  suiv. 


LES  ANGLAIS  A  FOUGÈRES.  FRANÇOIS  I^r  s'aLLIE  AVEC  CHARLES  VII      387 

moyen,  à  le  mettre  en  liberté  \  C'est  alors  que  François  de  Sii- 
rlenne,  dit  l'Aragonais,  capitaine  au  service  de  Henri  VI,  s'em- 
para traîtreusement  de  Fougères,  pendant  la  trêve  (mars  1449)  *. 

Quand  les  envoyés  de  Charles  VII  demandèrent  réparation,  il 
leur  fut  répondu  que  la  prise  de  cette  place  n'était  qu'une  juste 
représaille  de  l'arrestation  de  Gilles  et  que,  si  le  duc  de  Bretagne 
voulait  s'adresser  directement  à  son  suzerain,  le  roi  d'Angleterre, 
il  serait  facile  de  s'entendre  ^.  Rien  ne  pouvait  être  plus  funeste 
au  protégé  de  Henri  VI  que  cette  manière  de  le  secourir. 

Le  roi  de  France  et  le  duc  de  Bretagne  en  furent  indignés. 
Ils  conclurent,  le  17  juin  1449,  une  ligue  offensive  et  défensive 
contre  l'Angleterre  *.  Déjà  Charles  VII  avait  recommencé  la 
guerre  sur  plusieurs  points;  le  duc  se  préparait  à  y  prendre 
part,  et  ainsi  cette  querelle  entre  François  et  Gilles,  devenue,  au 
fond,  une  lutte  entre  l'influence  française  et  l'influence  anglaise 
en  Bretagne,  occasionna  la  rupture  de  la  trêve  de  Tours  ^ 

Ce  dernier  résultat  ne  pouvait  être  qu'agréable  à  Richemont. 
Il  adhéra  au  traité  du  17  juin  avec  empressement,  ainsi  que  les 
autres  princes  de  sa  famille  '';  mais  la  politique  n'étouffait  pas 
en  lui  les  affections  de  famille  et  les  sentiments  d'humanité.  C'est 
sans  doute  par  son  entremise  que  Gilles  avait  fait  parvenir  jus- 
qu'au roi  une  supplique,  où  il  divulguait  les  traitements  odieux 
dont  il  était  l'objet  dans  sa  prison,  au  château  de  Moncontour  \ 
Un  chambellan  du  roi,  Guillaume  de  Rosnyvinen  ^,  qui  s'était 

1.  J.  Stevenson,  I,  281.  Fr.  4034;  f»  111. 

2.  Le  23  ou  le  24  mars,  d'après  les  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II, 
col.  1475.  Voir  aussi  Math.  d'Escouchy,  t.  III  {Preuves),  p.  243  et  suiv.  ; 
la  Ballade  de  Fougères,  dans  Alain  Chartier,  p.  717-720;  D.  Delaunay, 
Etude  sur  Alain  Chartier,  p.  113  et  suiv.;  Martial  d'Auvergne,  t.  Il,  p.  1-3; 
Chro7iique  Martinienne,  f»»  cclxxxix-ccxc,  et  ci-dessous,  au  chap.  VIII, 
p.  394,  la  prise  de  Fougères,  et  Appendice  LXXXVIII. 

3.  Hist.  de  Bretagne,  II,  22,  23,  et  Preuves,  II,  col,  1473,  1491-1492,  1496. 

4.  M.  d'Escouchy,  III,  239-242;  Fr.  5037,  f»'  124-123;  P7-euves  de  l'hist. 
de  Bret.,  II,  col.  1451  et  suiv.  1508-1510.  Le  premier  document  donne  la 
date  inexacte  du  27  juin  et  le  second  celle'  du  17.  Le  traité  fut  signé  à 
Rennes  par  le  bâtard  d'Orléans,  l'amiral  de  Coëtivy,  Richemont,  etc.,  le 
17  juin,  et  il  fut  ratifié  le  27,  par  le  roi,  aux  Roches-Tranchelion  (le  26, 
d'après  un  document  des  Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  34,  E,  94).  Voir 
aussi  Fr.  Léonard,  Recueil  des  traitez  de  paix,  Paris,  1693,  in-4»,  I,  46-47  ; 
M.  d'Escouchy,  I,  162;  D.  Lobineau,  Hist.  de  Bret..  Il,  1101. 

5.  Rolls  of  Parliament,  V,  179. 

6.  Le  vicomte  de  Rohan,  les  comtes  de  Laval,  de  Porhoet,  etc.  (Fr.  5037, 
f"  123;  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  1434). 

7.  Arrond.  de  Saint-Brieuc. 

8.  Premier  échanson  du  roi,  en  remplacement  de  Jean  de  Rosnyvinen. 
son  oncle.  {Preuves  de  l'histoire  de  Bretagne,  II,  col.  1409).  Il  lui  avait 
succédé  le  16  janvier  .1447. 


388      GILLES    s'adresse   a   CHARLES   VII.    PERFIDIE   DE   FRANÇOIS   l'^»" 

chargé  de  remettre  la  supplique,  plaida  la  cause  de  Gilles  avec 
t«nt  de  chaleur  que  Charles  en  fut  touché.  11  promit  de  de- 
mander grâce  pour  ce  jeune  homme,  pilus  malheureux  que  cou- 
pable. C'était  à  l'époque  où  ses  ambassadeurs,  Dunois,  l'amiral 
de  Coëtivy,  Bertrand  de  Beauvau,  Etienne  Chevalier,  allaient 
en  Bretagne  conclure  le  traité  d'alliance  avec  le  duc.  Il  les 
chargea  de  solliciter  la  grâce  de  Gilles.  Richemont,  qui  était 
venu  à  Rennes,  prendre  part  aux  négociations,  redoubla  d'ef- 
forts pour  sauver  son  neveu.  Le  duc  finit  par  céder  ou,  du 
moins,  feignit  de  céder,  et  l'amiral  fut  chargé  d'aller  lui-même 
à  Moncontour  délivrer  le  prisonnier. 

Faut-il  admettre  que  Coëtivy  était  d'accord  avec  François  !«'' 
pour  jouer  une  indigne  comédie?  qu'il  avait  été  gagné  par  les  en- 
nemis de  Gilles  et  qu'il  favorisa  leurs  criminelles  intrigues  ?  Quoi 
qu'il  en  soit,  le  duc,  après  avoir  fait  grâce,  défendit  d'élargir  son 
frère,  en  prétextant  une  lettre  du  roi  d'Angleterre,  qu'il  aurait 
découverte.  Dans  cette  prétendue  lettre,  Henri  YI  menaçait  le  duc 
de  faire  envahir  ses  États,  s'il  ne  voulait  remettre  entre  ses  mains 
Gilles  de  Bretagne,  chevalier  de  son  ordre  et  connétable  d'Angle- 
terre 1.  On  n'examina  même  pas  si  cette  pièce  suspecte  n'était  pas 
l'œuvre  d'un  faussaire,  et  Richemont  eut  le  chagrin  d'échouer, 
au  moment  même  où  il  croyait  avoir  réussi.  Il  partit  peu  après, 
avec  le  duc,  pour  aller  combattre  les  Anglais,  mais  il  ne  cessa 
pas  de  s'intéresser  à  la  situation  de  son  neveu. 

En  vain  le  malheureux  Gilles  implorait  la  pitié  de  son  frère. 
Aux  lettres  touchantes  et  soumises  qu'il  lui  adressait,  ses  enne- 
mis en  substituaient  d'autres,  pleines  de  menaces  et  d'injures. 
Ils  essayèrent  de  le  faire  périr  de  faim,  dans  une  chambre  basse 
du  château  de  la  Hardouinaie  ^,  où  on  l'avait  transféré  pour  le 
garder  plus  étroitement;  mais  une  vieille  femme,  attirée  par  ses 
lamentations,  parvint  à  lui  faire  passer  du  pain  et  de  l'eau.  Ses 
souffrances  étaient  si  intolérables  qu'il  en  vint  jusqu'à  prier  son 
frère  de  le  faire  mourir,  s'il  ne  voulait  pas  lui  permettre  de  se 
défendre.  Le  duc  eut  la  cr.uauté  de  lui  répondre  qu'il  ne  le  vou- 
lait pas  faire  mourir,  mais  que,  s'il  jugeait  à  propos  de  se  tuer 
lui-même,  il  s'en  rapportait  à  lui  ^î 

Jean  et  Artur  de  Montauban,  secondés  par  le  chancelier  de  Bre- 
tagne L.  de  Rohan,sire  de  Guéméné  Guingamp,  qui  avait  épousé 

1.  Cette  charge  lui  avait  été  offerte,  mais  il  l'avait  refusée  (D.  Lobi- 
neau,  I,  626). 

2.  Au  milieu  de  la  forêt  de  la  Hardouinaie,  canton  de  Merdrignac,  arrond. 
de  Loudéac  (Voir  Esquisses  histor.  sur  la  Bretagne,  Rennes,  1829,  in-4», 
pages  7-9). 

3.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1352. 


GILLES   EST  ÉTRANGLÉ    (14o0,    25  AVRIL)  389 

une  nièce  d'Artur,  voulurent  achever  leur  œuvre  criminelle.  Le 
chancelier  rédigea  la  sentence  de  mort,  et,  comme  le  garde  des 
sceaux,  Eon  Baudoin,  ne  voulait  pas  participer  à  cette  iniquité, 
il  le  destitua  et  scella  lui-même  l'arrêt. 

Richemont,  étant  venu,  sur  ces  entrefaites,  à  Dinan,  apprit  ces 
abominables  machinations.  Il  paraît  qu'il  en  fut  instruit  par  le 
maréchal  de  Montauban  lui-même  *,  soil  que  celui-ci  eût  cédé  à 
de  séduisantes  promesses,  ou  à  de  véritables  remords,  soit  qu'il 
eût  simulé  un  repentir  hypocrite,  pour  échapper  à  une  responsa- 
bilité redoutable. 

Le  connétable  s'emporta  contre  son  neveu  en  reproches  véhé- 
ments. Cette  scène  ne  fit  qu'irriter  le  duc  et  les  autres  ennemis 
de  Gilles.  Ils  n'en  furent  que  plus  acharnés  à  sa  perte,  et  Riche- 
mont  resta  tout  aussi  impuissant  à  le  sauver.  D'ailleurs,  il  fut 
obligé  de  partir  pour  le  Gotentin,  où  les  Anglais  étaient  des- 
cendus (mars  1450).  Après  son  départ,  les  scélérats  ^  qui  étaient 
chargés  de  faire  périr  Gilles  lui  donnèrent  d'abord  du  poison.  Il 
n'en  mourut  pas,  tant  sa  constitution  était  robuste.  Toutefois,  il 
était  très  affaibli  par  les  privations,  par  les  souffrances  physi- 
ques et  morales  qu'il  avait  endurées.  Il  fut  étranglé  dans  son 
lit,  pendant  la  nuit  du  24  au  25  avril  1450  ^. 

Dix  jours  auparavant,  le  connétable  avait  remporté  une  vic- 
toire décisive  à  Formigny.  Les  assassins  osèrent  dire  que  la  dé- 
faite des  Anglais  avait  causé  à  Gilles  un  désespoir  si  profond, 
qu'il  avait  refusé  toute  nourriture  et  s'était  laissé  mourir  de 
faim.  Ainsi  cette  sympathie  pour  l'Angleterre,  qui  avait  été  une 
des  principales  causes  de  sa  perte,  fut  exploitée  contre  lui,  même 
après  sa  mort.  Le  triomphe  du  parti  français  en  Bretagne  fut 
assombri  par  ce  forfait.  Quand  Richemont  en  reçut  la  nouvelle, 
il  était  devant  Avranches,  avec  le  duc.  Il  éprouva  une  si  vive 
douleur  qu'il  ne  put  contenir  l'expression  de  son  courroux  et 
de  son  mépris.  L'armée  entière  partagea  ce  sentiment,  et  si,  dans 
ce  drame  lugubre,  on  trouve  plus  d'un  point  obscur,  il  est  cer- 
tain que  le  duc  de  Bretagne  a  encouru,  plus  qu'aucun  de  ses 
complices,  la  réprobation  de  ses  contemporains  et  celle  de  la 
postérité  ^. 

1.  D.  Lobineau,  I,  640. 

2.  J.  Rayart,  Rob.  Roussel,  Oliv.  de  Meel,  J.  de  La  Ghèse,  etc. 

3.  Les  religieux  de  l'abbaye  de  Boquen  lui  donnèrent  la  sépulture 
dans^leur  église  (Boquen  ou  Bosquen,  dans  la  paroisse  de  Plénée-Jugon, 
arrond.  de  Dinan).  Voir  Esquisses  hist.  sur  la  Bretagne,  p.  9-H  ;  Ogée,  Dict. 
histor.  et  géog.  de  la  Bretagne,  Rennes,  1843,  in-4o,  t.  I,  94).     ■ 

4.  D.  Taillandier  {Hist.  de  Bretagne,  II,  32,  34,  35)  accuse  le  duc  de  Bre- 
tagne et  Arthur  de  Mautauban  de  la  mort  de  Gilles.  Voir  aussi  D.  Lobi- 


390  GILLES  EST  ÉTRANGLÉ   (1450,   25  AVRIL) 

neau,  I,  642-643.  Sur  Gilles  de  Bretagne,  voir  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bre- 
tagne, II,  3-33  ;  D.  Lobineau,  I,  624  et  suiv.  ;  Alain  Bouchard,  édit.  goth. 
de  1531,  f°^  cLxxx-CLXXxvii ;  Gruel,  221-22S;  J.  Ghartier,  I,  228-231;  Archives 
du  marquis  du  Hallay-Coétquen,  Paris,  1851,  in-8o,  p.  7,  et  notice,  p.  xi; 
Anat.  de  Barthélémy,  Mélanges  histor.  et  archéol.  sur  la  Bretagne,  III,  50;  J. 
Geslin  de  Bourgogne  et  A.  de  Barthélémy,  Les  anciens  évéchés  de  la  Bre- 
tagne, Paris  et  Saint-Brieuc,  1855,  et  suiv.,  t.  III,  p.  318-331  ;  voir  à  la  p.  322 
une  lettre  de  Gilles  au  duc  de  Bretagne. 


CHAPITRE  VÏI 

LE    RECOUVREMENT   DE   LA   NORMANDIE    (1449-1450) 


Différend  avec  l'Angleterre,  qui  ne  veut  pas  rendre  le  Maine.  —  Riche- 
mont  fait  capituler  Le  Mans.  —  Nouveaux  différends.  —  Les  Anglais 
surprennent  Fougères.  —  Représailles  de  Charles  YIL  —  Il  déclare  la 
guerre  à  l'Angleterre.  —  Le  connétable  prend  Saint-James- de-Beuvron 
et  Mortain.  —  La  conquête  de  la  Normandie  est  décidée.  —  Richemont 
entraîne  le  duc  de  Bretagne.  —  Ils  attaquent  le  Cotentin,  font  capi- 
tuler Coutances,  Saint-Lô,  Carentan,  le  Pont  d'Ouve,  Valognes,  etc.  —  Le 
connétable  prend  Gavray,  que  le  roi  lui  donne  plus  tard.  —  Reprise 
de  Fougères.  —  Succès  de  Danois  dans  la  Haute-Normandie.  —  Char- 
les VU  entre  à  Rouen.  —  Th.  Kyriel  débarque  à  Cherbourg  avec  une 
armée.  —  Richemont  ne  peut  entraîner  le  duc  de  Bretagne.  —  Les 
Anglais  font  capituler  Valognes.  —  Le  comte  de  Glermont  arrive,  avec 
une  armée  française.  —  Th.  Kyriel  passe  le  Grand-Vey  et  s'avance  vers 
Bayeux.  —  Le  comte  de  Clermont  l'attaque  près  de  Formigny.  —  Ba- 
taille de  Formigny.  L'arrivée  du  connétable  empêche  une  défaite  et 
détermine  la  victoire.  —  Il  fait  ensuite  capituler  Vire  et  se  joint  au  duc 
de  Bretagne  pour  assiéger  Avranches.  —  Capitulation  d'Avranches  et 
de  Tombelaine.  —  Le  duc  de  Bretagne  malade  se  retire.  —  Capitulation 
de  Saint-Sauveur-le-Vicomte,  de  Briquebec,  de  Valognes.  —  Richemont 
va  au  siège  de  Gaen.  —  Il  est  prêt  à  donner  l'assaut.  —  Capitulation 
de  Gaen.  —  Le  connétable  termine,  par  la  capitulation  de  Cherbourg, 
la  conquête  de  la  Normandie. 


Quand  Gilles  de  Bretagne  fut  assassiné  (25  avril  1450),  il  y 
avait  près  d'un  an  que  Charles  VII  avait  recommencé  la  guerre 
contre  les  Anglais.  La  querelle  entre  François  I"  et  son  frère,  la 
rupture  définitive  entre  la  Bretagne  et  l'Angleterre  avaient  été 
les  principales,  mais  non  les  seules  causes  de  celte  reprise  des 
hostilités.  Les  ravages  réciproques  des  garnisons  anglaises  et 
françaises,  des  courses  sur  terre  et  sur  mer,  des  prétentions  rela- 
tives à  des  territoires  contestés  avaient  soulevé  de  continuels  dif- 
férends et  donné  lieu,  pendant  cinq  années,  à  d'interminables 
négociations  (1444-1449).  La  trêve  de  Tours  avait  été  renouvelée 


392  DIFFÉREND   AVEC   l'ANGLETERRE,    AU   SUJET   DU   MAINE 

plusieurs  fois  par  des  conventions  successives  *.  On  n'a  pas  oublié 
que  le  roi  d'Angleterre  avait  pris  l'engagement  de  restituer  le 
Maine  aux  princes  d'Anjou.  Cette  clause  du  traité,  ainsi  que  le 
mariage  de  Henri  VI  avec  Marguerite,  avait  soulevé  en  Angle- 
terre un  mécontentement  général.  L'impopularité  de  la  reine  et 
celle  du  premier  minitre,  Suffolk,  la  mort  mystérieuse  de  leur 
ennemi,  le  duc  de  Glocester  (1447),  créaient  au  gouvernement 
anglais  une  situation  si  difficile  qu'il  n'osait  tenir  ses  engage- 
ments. Pendant  quatre  ans  il  retarda,  par  des  prétextes  et  des 
subterfuges,  l'évacuation  du  Maine  *. 

Quand  le  roi  de  France  fut  las  de  conclure  des  conventions  qui 
n'étaient  pas  exécutées,  il  se  décida  enfin  à  résoudre  la  question 
par  les  armes. 

Il  s'entendit  avec  le  duc  de  Bretagne,  pour  enlever  aux  Anglais 
tout  appui  de  ce  côté;  il  appela  le  connétable  à  Tours,  et  on 
organisa  une  armée  de  six  à  sept  mille  hommes.  Gh.  d'Anjou, 
Dunois,  Pierre  de  Brézé,  le  maréchal  de  Jaloignes  ^,  l'amiral  de 
Goëtivy  marchèrent  sur  Le  Mans  et  se  logèrent  dans  les  faubourgs, 
le  13  février  1448.  Eyton  *  et  Mathieu  Goth  ^  essayèrent  encore  de 
gagner  du  temps  en  pourparlers  ;  mais  Mundeford  **  ayant  voulu 
tomber,  avec  ses  troupes,  sur  les  commissaires  français,  pendant 
la  conférence  '',  il  fallut  renoncer  à  s'entendre  et  commencer  les 
travaux  de  siège  ^.  Pendant  ce  temps,  le  roi  s'avançait  jusqu'à 


1.  Sur  ces  négociations  et  traités,  voir  :  J.  Stevenson,  I,  87,  153,  171, 
183;  II,  368;  Math.  d'Escouchy  (édit.  de  Beaucourt),  III  (Preuves),  153-167; 
Berry,  428-429;  Bréquigny,  t.  82  (Moreau,  706),  f»"  279-281;  Arch.  de  la 
Loire-Iafér.,  cass.  48,  E,  122;  Arch.  des  aff.  étr.,  t.  362,  f»»  91-98;  K  68. 
n«s  123,4,  1819,  23;  Fr.  4034,  {"s  25-28,  38,  45-57;  Fr.  26076,  no'  5653,  5676. 

2.  J.  Stevenson,  II,  361,  638,  II,  2"  partie,  634-710,  715,  719;  T.  Basin,  IV, 
286;  Math.  d'Escouchy,  III,  168-170.  Henri  VI  avait  donné  le  comté  du 
Maine  à  Edmond,  comte  de  Somerset  et  de  Dorset,  Afin  de  pouvoir  rendre 
le  comté  du  Maine  à  René  et  à  Charles  d'Anjou,  Henri  VI  donna,  le  13  no- 
vembre 1447,  une  rente  annuelle  de  10  000  1.  t.  à  Somerset  (Fr.  26077, 
n»'  5834,  3833;  Fr.  26078,  no^  6011,  6019,  6031).  Sur  le  Mans,  en  particu- 
lier, voir  :  J.  Stevenson,  I,  198-2p2,  482,  II,  361,  II,  2"  partie,  702,  710-718; 
M.  d'Escouchy,  III,  173-198;  Rymer,  V.,  2"  partie,  p.  4. 

3.  Avec  des  gens  d'armes  qui  tenaient  garnison  dans  le  Limousin 
(F.  21493,  fos  39,  41,  43). 

4.  Foukes  Eyton,  écuyer,  capitaine  de  Caudebec  (Fr.  26038,  n»  3977). 

5.  Que  les  chroniqueurs  appellent  ordinairement  Matago.  Il  signe 
Matheu  (Fr.  26077,  n"  3922;  Clairambault,  t.  54,  f"  4091).  Les  Anglais  l'ap- 
pellent Mathew  Gough. 

6.  Ecuyer,  trésorier  et  gouverneur  général  des  finances  de  Henri  VI  en 
France  et  en  Normandie  (Fr.  26078,  no»  6025,  6027,  6029).  Il  était  capi- 
taine du  Mans  et  de  Beaumont-le-Vicomte  en  1445  (Fr.  26074,  n»  5295). 

7.  M.  d'Escouchy,  III,  184  et  suiv. 

8.  Le  siège  était  déjà  commencé  le  27  février  (M.  d'Ecouchy,  III,  197). 


RICHEMONT  FAIT  CAPITULER  LE  MANS   (1448,   16  MARS)         393 

Lavardin  ',  près  de  Vendôme,  et  y  rassemblait  d'autres  troupes  ^ 
Il  avait  d'abord  gardé  le  connétable  auprès  de  lui;  mais,  comme 
les  capitaines  qui  assiégeaient  Le  Mans  s'accordaient  mal 
ensemble,  il  l'envoya  prendre  le  commandement  de  cette  armée  ^ 
Bientôt  les  assiégés,  comprenant  que  la  résistance  était  inu- 
tile, se  résignèrent  à  rendre  Le  Mans.  La  capitulation  fut  signée 
le  16  mars  1448  *.  Les  Anglais  s'engagèrent  à  évacuer  aussi 
Mayenne -la- Juhel  ^  avec  quelques  autres  petites  places  qu'ils 
occupaient  encore  ^. 

Cet  épisode  militaire  n'eut  pas  de  suite  immédiate.  Le  gouver- 
nement anglais  n'était  pas  en  état  de  recommencer  la  guerre. 
Non  seulement  la  trêve  ne  fut  pas  rompue,  mais  les  ambassadeurs 
de  Henri  VI  conclurent  même,  à  Lavardin  (11  mars),  un  traité 
par  lequel  elle  était  prolongée  jusqu'au  1"  avril  1450  ^.  De  son 
côté,  Charles  VII  aimait  mieux  différer,  pour  quelque  temps 
encore,  la  reprise  des  hostilités,  afin  de  pouvoir  les  engager  dans 
les  meilleures  conditions  de  succès.  C'est  alors  qu'il  instituait  les 
francs  archers  (28  avril),  pour  compléter,  par  la  création  d'une 
infanterie  nationale,  la  nouvelle  organisation  militaire  de  la 
France.  Le  moment  d'employer  toutes  ces  ressources  ne  se  fit 
guère  attendre.  Les  mêmes  causes  de  rupture  subsistaient  tou- 
jours, infractions  à  la  trêve,  différends  relatifs  à  la  suzeraineté 
de  la  Bretagne,  aux  fortifications  de  Saint-James-de-Beuvron  et 
de  Mortain  ^  ;  mais  la  diplomatie  aurait  sans  doute  trouvé  des 

1.  G.  de  Montoire,  arrond.  de  Vendôme. 

2.  JJ  170,  fo  47,  u»  86. 

3.  D.  Tailllandier,  p.  17,  D.  Lobineau,  I.  630-631. 

4.  Berry  430;  D.  Lobineau,  I,  630-631;  JJ  179,  f»  47,  n»  86;  X»a  8605, 
fo  141  vo-143.  D'après  Jouvenel  des  Ursins,  le  duc  de  Bretagne  figurait 
comme  sujet  du  roi  de  France  dans  la  minute  de  la  convention  relative  à  la 
ville  du  Mans;  mais,  dans  la  grosse,  les  négociateurs  anglais  remplacèrent 
SUJET  DU  ROI  DE  FRANCE  par  SUJET  DU  ROI  d'Angleterre.  Les  copies  ayant  été 
échangées  pendant  la  nuit,  on  ne  s'aper(;ut  pas  de  la  supercherie,  et  ce 
fut  là,  dit  Jouvenel,  toute  la  justification  des  Anglais  touchant  la  prise 
de  Fougères  (M.  Dupuy,  XXXV,  f""  149-150;  voir  ci-dessus,  p.  386,  note  3). 

5.  xMayenne,  ch.-l.  d'arrond.  de  la  Mayenne.  Z^'  17  f"  176. 

6.  JJ.  179,  f-  56  v,  n»  cvn;  Fr.  26077,  n»  5936;  J.  Stevenson,  II,  2°  partie, 
702,  710-718. 

7.  Fr.  4054,  f»  82  J.  Stevenson,  I,  207.  Fr.  26077,  n"  5911. 

8.  Sur  les  infractions  à  la  trêve  et  les  négociations  voir  :  VAppend. 
LXXXVIII;  le  t.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  173-165;  une  lettre  de  Henri  VI 
à  Charles  VII  [Idem,  p.  218-224),  et  une  lettre  de  Charles  VII  à  Henri  VI 
[Idem,  p.  235-239);  Fr.  26074,  n»»  5270,  5276-5278;  Fr.  26076,  n»  5678; 
Fr.  21407,  no  11;  D.  Grenier,  100,  f»*  78,  79.  85;  Bréquigny,  t.  83  (.Moreau, 
707),  fo»  7-9.  JJ  181;  fo  149;  Fr.  4054,  f»'  92,  93,  98,  99.  —  Il  y  a  beaucoup 
d'autres  documents  dans  le  manusc.  Fr.  4054.  Ils  ont  été  publiés,  pour  la 
plupart,  dans  le  recueil  de  J.  Stevenson,  I,  209  et  suiv.,  et  dans  le  t.  III 
de  l'édition  de  M.  d'Escouchy  par  M.  de  Beaucourt,  p.  201  et  suiv. 


394   LES  ANGLAIS  SURPRENNENT  FOUGÈRES  (1449,  24  MARS) 

moyens  d'accommodement,  si  les  Anglais,  pour  sauver  Gilles,  et 
peut-être  aussi  pour  se  dédommager  de  la  perte  du  Mans, 
n'avaient  surpris  Fougères. 

C'est  dans  la  nuit  du  23  au  24  mars  1449  que  François  de  Su- 
rienne  '  commit  cet  attentat.  Non  contents  d'avoir  pillé  la  ville  et 
infligé  aux  habitants  les  traitements  les  plus  barbares,  les  An- 
glais se  mirent  à  ravager  les  environs.  Ce  ne  fut  dans  toute  la  Bre- 
tagne qu'un  cri  d'indignation.  Le  duc  se  plaignit  à  Henri  VI  et  à 
Charles  Vil,  en  demandant  réparation.  Ses  parents,  le  roi  d'Ecosse, 
le  duc  de  Bourgogne,  le  duc  d'Alençon,  les  comte  d'Armagnac  et 
de Penthièvre,  ses  grands  vassaux,  le  m.aréchal  de  Lohéac,  l'amiral 
de  Coëtivy,  tous  les  barons  de  Bretagne,  et  le  connétable,  plus 
que  tous  les  autres,  ressentirent  vivement  cet  outrage.  Ils  repré- 
sentèrent au  roi  qu'il  y  aurait  danger  pour  lui-même  à  laisser 
l'afl'aire  en  cet  état.  Charles  VII  prit  donc  en  main  une  cause  qui 
le  touchait  de  si  près,  et  ce  fut  alors  un  débat  entre  la  France  et 
l'Angleterre  ^. 

Le  gouvernement  anglais  chercha  encore  à  gagner  du  temps 
par  des  négociations  ^.  Il  désavoua  Surienne,  mais  ne  voulut  ni 
rendre  Fougères  ni  accorder  les  réparations  réclamées.  Pendant 
que  la  diplomatie  poursuivait  son  œuvre,  le  roi  de  France  faisait 
des  préparatifs  militaires.  Sans  rejeter  les  moyens  de  conciliation, 
il  agissait  avec  assez  d'énergie  pour  montrer  aux  Anglais  qu'ils 
ne  devaient  point  s'attendre  à  des  ménagements.  S'autorisant 
du  droit  de  représailles,  au  nom  du  duc  de  Bretagne,  il  fit  saisir 
Pont-de-l'Arche,    Couches,  Gerberoy,  Cognac,  Saint-Maigrin  * 

1.  François  de  Surienne.  dit  l'Aragonais,  capitaine  de  Longny  et  de 
Verneuil  {Fr.  26073,  no  5209;  Fr.  26077,  n»  5889;  Fr.  23778,  n»  1808).  Il  avait 
été  fait  chevalier  de  la  Jarretière  en  d447  fJ.  Stevenson,  I,  476,  478).  Il  signe 

F.  l'Arragonoys  (Fr.  23778,  n»'  1814-1831).  Sur  la  prise  de  Fougères, 
voir  :  J.  Stevenson,  II,  2"  partie,  p.  718-723;  M.  d'Escouchy,  III,  239; 
Fr.  4034,  f»»  111-112,  H3-119;  JJ  179;  f°  199  v»;  Fr.  5037,  fo  123;  Blondel, 
De  reductione  Normannise,  édit.  J.  Stevenson,  London,  1843,  1  vol.  in-S" 
p.  4-7  (le  même  volume  contient  la  partie  de  la  chronique  du  hérault 
Berry  relative  au  recouvrement  de  la  Normandie)  ;  Bulletin  de  la  Soc.  ar- 
çhéol.  d'I Ile-et-Vilaine,  t.  XV,  l""*  partie,  p.  60  et  62.  Voir  ci-dessus,  p.  387 
et  note  2,  et  p.  393,  note  4,  à  la  fin. 

2  M.  d'Escouchy,  t.  I,  156-137,  et  t.  III,  212  et  suiv.,  234-235;  J.  Ste- 
venson, 243-264;  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1456,  1488;  Fr.  21407, 
n»  11;  J.  du  Clercq,  dans  le  t.  III,  1""«  série,  de  la  collocticn  Michaud  et 
Poujoulat,  Paris,  1837,  p.  607.  Le  roi  rappela  aussitôt  Dunois  et  J.  GuHir, 
qui  étaient  en  mission,  le  premier  en  Savoie,  auprès  d'Amédée  VIII,  le 
second  à  Montpellier  (Fr.  26078,  n»  6095). 

3.  Fr.  13974,  en  entier;  Dupuy,  774,  f»' 15-20  (Enquête  faite  à  Rouen,  par 

G.  Jouvenel  des  Ursias,  chancelier  de  France  sur  l'attentat  de  Fougères). 

4.  M.  d'Escouchy,  III,  363-366;  K  68  n»  34«  ;  Preuves  de  VHist.  de  Bre- 
tagne, II,  col.  1490;  Blondel,  31-33.  —  Saint-Maigrin,  arrond.  de  Jonzac. 


CHARLES  VII  DÉCLARE  LA  GUERRE  A  l'ANGLETERRE  (1449,  31  JUILLET)   395 

(avril  1449).  Néanmoins  les  pourparlers  continuèrent  jusqu'à  la 
On  de  juillet  *,  mais  sans  aboutir  à  une  solution  pacifique. 

Après  avoir  bien  montré  qu'il  avait  fait  son  possible  pour  con- 
clure la  paix,  Charles  VII  avait  pris  la  résolution  de  recom- 
mencer la  guerre  ^.  Il  avait  tout  ce  qu'il  fallait  pour  réussir,  des 
troupes  disciplinées,  d'excellents  capitaines,  des  ressources  finan- 
cières, l'alliance  de  la  Bretagne  ^.  Dans  une  assemblée  tenue  au 
château  des  Roches-Tranchelion  *,  le  roi  exposa  lui-même  tout  ce 
qu'il  avait  fait  pour  s'entendre  avec  les  Anglais.  Après  mûr 
examen,  ses  conseillers  déclarèrent,  à  l'unanimité,  qu'il  «  estoit 
deuement,  justement  et  honorablement  deslyé  et  acquité  de  la 
trêve  ^.  »  On  introduisit  les  ambassadeurs  du  duc  de  Bretagne, 
qui  approuvèrent  la  détermination  du  roi,  puis  les  ambassa- 
deurs d'Angleterre  à  qui  elle  fut  communiquée  par  le  chancelier 
de  France.  La  guerre  était  déclarée  (31  juillet  1449)  '^. 

Le  duc  de  Bretagne,  fort  de  l'approbation  de  Charles  VII, 
n'avait  pas  attendu  jusque-là  pour  se  faire  justice  lui-même.  Le 
connétable,  informé  de  la  prise  de  Fougères,  par  le  roi,  qu'il 
avait  quitté  récemment,  et  par  le  duc,  était  venu,  avec  ses  gens, 
trouver  son  neveu,  à  Rennes  \  pour  activer  les  préparatifs  mi- 
litaires. Il  lui  conseilla  de  fortifier  Saint-Aubin-du-Cormier  **, 
d'où  on  pourrait  observer  Fougères,  en  attendant  que  l'armée 
bretonne  fût  prête  à  prendre  l'offensive.  Il  partit  à  la  fin  d'avril, 
pour  aller  à  Saint-Aubin,  diriger  et  protéger  les  travaux.  Le 
duc  de  Bretagne  lui  donna  le  titre  de  lieutenant-général  ^.  Outre 

1.  A  Rouen,  an  Port-Saiat-Ouen,  à  Louviers,  à  l'abbaye  de  Bonport  (voy. 
Preuves  de  Vliist.  de  Drct.,  t.  II,  1454-1508,  et  t.  III  de  M.  d'Esconçhy,  p.  211- 
245 ;Fr.  25711,  f"'208-209;J.  Stevenson,!,  223-243;  Ms.  Dupuy  760,  f"M 63-170). 

2.  Dès  le  17  juillet,  il  avait  donné  à  ses  capitaines  pouvoir  d'accorder 
des  capitulations  aux  villes  de  Normandie  [Ordonn.,  XIV,  59-61  ;  JJ  180, 
P  9,  n»  xxi).  Voir  ci-dessous  p.  396-397. 

3.  Charles  VII  avait  aussi  demandé  avis  au  duc  de  Bourgogne,  qui  lui 
conseilla  la  guerre  (Stevenson,  I,  264).  Philippe  le  Bon  garda  la  neutra- 
lité, mais  il  n'empêcha  pas  ses  barons  d'aller  servir  le  roi  de  France  — 
Charles  VII  avait  toujours  l'alliance  du  roi  de  Gastille,  qui  lui  fournissait 
des  vaisseaux  pour  la  défense  des  côtes  (X^*  25,  au  29  mai  1449). 

4.  Près  de  Chinon,  dans  la  forêt  de  Crissay,  canton  de  l'Ile-Bouchard 
(Indre-et-Loire)  [Vallet  de  V.,  llist.  de  Charles  VII,  t.  III,  152,  note  3; 
M.  d'Escouchy,  III,  255  etsuiv.]. 

5.  M.  d'Escouchy,  III,  247. 

6.  T.  III  de  M.  d'Escouchy,  p.  245,  n»  201;  J.  Stevenson,  t.  I,  p.  243. 
Voir  aussi  YAppend.  LXXXVIII. 

7.  Gruel,  222.  Richemont  était  allé  auparavant  auprès  du  roi.  11  était  à 
Tours  le  20  janvier  (Legrand,  t.  VII,  Fr.  6966,  f»  ^45).  Il  était  ensuite  allé 
à  Parthenay,  où  il  était  le  8  mars  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  1,  E,  3). 

8.  Arrond.  de  Fougères. 

9.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1510  ;  Gruel,  222. 


396      RICHEMOIST  PREND   SAINT-JAMES-DE-BEUVRON  ET  MORTAIN   (1449) 

les  troupes  qu'il  avait  amenées  de  Rennes,  avec  le  comte  de 
Laval,  le  maréchal  de  Montauban  et  J.  de  Malestroit,  il  en  reçut 
d'autres  que  le  roi  lui  envoya  sans  retard,  avec  le  maréchal  de 
Lohéac,  Joachim  Rouault  et  Odet  d'Aidie, 

Quand  la  place  de  Saint-Aubin  fut  fortifiée  *,  on  fit  des  courses 
devant  Fougères.  Dans  une  sortie,  les  Anglais  furent  battus  et 
repoussés  avec  des  pertes  sérieuses  ^.  Peu  après  arrivèrent  les 
cent  lances  du  connétable  conduites  par  Geoffroy  de  Gouvran 
et  Olivier  de  Broon.  Son  beau-frère,  Jacques  de  Luxembourg, 
qui  était  alors  son  lieutenant,  vint  aussi  le  rejoindre,  pendant 
que  son  autre  beau-frère,  Louis  de  Luxembourg,  comte  de  Saint- 
Pol,  allait  se  mettre  au  service  de  Gharles  VII,  avec  d'autres 
seigneurs  bourguignons.  Grâce  à  ces  renforts,  le  connétable  put 
prendre  Saint-James-de-Beuvron,  que  les  Anglais  rendirent  au 
bout  de  deux  jours,  le  29  juin  ^.  Laissant  là  une  partie  de  ses 
troupes  en  garnison,  sous  Jacques  de  Luxembourg  et  Jean  de 
Briquebec ,  fils  de  Louis  d'Estouteville  ,  Richemont  revint  à 
Rennes  *,  pour  hâter  la  formation  de  l'armée  que  le  duc  y  réunis- 
sait. Son  autorité  n'était  pas  inutile  pour  triompher  de  la  résis- 
tance que  le  Conseil  opposait  à  cette  expédition. 

Pendant  son  absence  et  selon  ses  ordres,  Jacques  de  Luxem- 
bourg, le  maréchal  de  Lohéac  et  les  autres  capitaines  français 
et  bretons  exécutèrent  plusieurs  opérations  importantes.  Ils 
attaquèrent  Tombelaine,  forteresse  bâtie  sur  îlot  entre  le  Mont- 
Saint-Michel  et  Avranches.  Le  capitaine  du  Mont- Saint-Michel, 
Louis  d'Estouteville,  qui  avait  conseillé  cette  entreprise,  ne 
fournit  pas  assez  d'échelles  aux  assaillants;  ils  furent  repous- 
sés ^  Une  autre  attaque  sur  Mortain  eut  un  meilleur  succès. 
Cette  place,  que  les  Anglais  avaient  fortifiée,  au  mépris  de  la 
trêve,  comme  Saint-James-de-Beuvron,  fut  obligée  de  capituler, 
après  un  assaut  meurtrier,  qui  dura  depuis  sept  heures  du  matin 
jusqu'à  la  nuit  **.  Les  défenseurs  de  Mortain,  à  l'exception  de 
cinq,  avaient  tous  été  tués  ou  blessés.  La  plus  grande  partie  des 
troupes  revint  ensuite  à  Saint-James-de-Beuvron  et  à  Saint- 
Aubin.  Le  maréchal  de  Lohéac  laissa  une  garnison  à  Mortain, 


1.  Dès  le  mois  de  juin  J.  Rouault  y  tenait  garnison,  avec  des  gens 
d'armes  des  compagnies  d'ordonnance  (JJ.  186  f»  41  v°). 

2.  D'Argentré,  p.  928;  M.  d'Escouchy,  I,  172;  Blondel,  45-46. 

3.  Blondel,  74;  M.  d'Escouchy,  I,  173.  Le  jour  de  Saint-Pierre,  c'est-à-dire 
le  29  juin,  d'après  Gruel  (222),  et  non  du  12  au  18  août  (voy.  S.  Luce, 
Chronique  du  Mont-Saint-Michel,  l,  46,  note  2).     ^ 

4.  Le  18  juillet,  il  était  au  Gâvre  (Arch.  de  la  LÔire-Inf.,  caas.  2,  E.  5). 

5.  M.  d'Ecouchy,  I,  473. 

6.  Fr.  21407,  n»  11;  JJ,  180,  f»  13  v»,  n»  xxx. 


IL  ENTRAINE   LE  DUC   DE  BRETAGNE   EN   NORMANDIE   (4449)      397 

dont  la  garde  lui  fut  confiée,  et  il  s'établit  lui-même  à  Vitré,  qui 
appartenait  au  comte  de  Laval,  son  frère.  Le  bâtard  de  Bretagne  ' 
prit  possession  de  Dol  ^;  Odet  d'Aidie  se  logea  dans  l'église 
d'Antrain  ^,  qu'il  fortifia.  Ainsi  furent  occupées  des  positions 
d'où  on  pouvait  attaquer  Fougères  et  Avranches  *,  Ces  opéra- 
tions préliminaires  étaient  terminées,  quand  Charles  VII  rompit 
solennellement  avec  l'Angleterre,  le  31  juillet  1449. 

On  avait  décidé  de  reconquérir  d'abord  la  Normandie.  Dunois, 
institué  lieutenant  général  du  roi  dans  cette  province  ^,  devait 
diriger  les  opérations  à  l'est,  avec  les  comtes  de  Glermont,  d'Eu, 
de  Nevers  et  de  Saint-Pol,  P.  de  Brézé,  Robert  Floquet,  Sain- 
trailles,  les  sires  de  Gaucourt  et  de  Bueil.  En  même  temps,  le 
duc  de  Bretagne  devait  attaquer  la  basse  Normandie  par  le 
Cotentin.  Le  connétable,  chargé  par  le  roi  de  seconder  le  duc 
dans  cette  entreprise,  avec  quelques  compagnies  d'ordonnance, 
décida  son  neveu  à  lever  une  armée,  pour  entrer  en  Normandie, 
malgré  l'opposition  du  Conseil.  Ce  fut  lui  encore  qui,  comme 
lieutenant  général  du  duc  de  Bretagne,  alla  jusqu'à  Redon  ac- 
tiver le  départ  des  troupes  ^. 

Malgré  tous  ses  efforts,  il  ne  put  entrer  en  campagne  aussitôt 
que  le  roi  et  Dunois.  Déjà  les  Français  avaient  pris  Pont-Audemer, 
Mantes,  Vernon,  Lisieux,  Verneuil  ",  quand  l'armée  bretonne, 
forte  d'environ  6000 hommes,  se  trouva  enfin  rassemblée  à  Dinan, 
le  lef  septembre.  Outre  le  duc  et  le  connétable  ^,  on  y  voyait  les 
capitaines  qui  avaient  pris  part  aux  premières  opérations  et 
beaucoup  d'autres  seigneurs.  Le  maréchal  de  Lohéac  conduisait 
les  300  lances  du  roi.  Le  4  septembre,  le  duc  conféra  le  titre  de 
lieutenant  général  à  son  frère  Pierre  ®,  qui  devait  rester  en 


1.  Tanguy,  fils  bâtard  de  Jean  V.  Voy.  ci-dessus,  p.  382. 

2.  Arrond.  de  Saint-Malo. 

3.  Arrond.  de  Fougères. 

4.  M.  d'Escouchy,  I,  172-175. 

5.  K  68,  n»  35, 

6.  Il  était  à  Redon  le  13  août.  (Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  t.  II,  col. 
1510.)  Le  18  juillet  précédent,  il  avait  accepté,  avec  Jean  d'Orléans,  comte 
d'Angouléme,  la  curatelle  de  son  neveu,  François  de  Bretagne,  comte 
d'Etampes  (Arch.  de  la  Loire-Infér.  cass.  2,  E  5).  Le  18  août,  à  Redon,  il 
autorise  François  de  Bretagne  à  donner  5  000  écus  à  sa  sœur  Marie,  qui 
est  sur  le  point  d'entrer  en  religion  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  4,  E, 
12  ;  Original,  signé  Artur  et  scellé).  A  la  fin  d'août  fut  conclu  le  mariage 
du  comte  d'Angouléme  avec  Marguerite  de  Rohan,  nièce  de  Richemont. 

7.  M.  d'Escouchy,  III,  354-358.  365-366;  Fr.  26079,  no  6134;  K  68  n"  34». 
Ordonn.,  XIV,  61-64;  JJ  180,  f»»  1  v»,  9  v-10. 

8.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1513.  Berry,  édit.  J.  Stevenson, 
277-278. 

9.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1514. 


398      RICHEMONÏ  ET  FRANÇOIS  I*""  ATTAQUENT  LE  COTENTIN  (1449) 

Bretagne,  pour  assiéger  Fougères  ;  puis  l'armée  se  dirigea  vers  le 
Mont-Saint-Michel. 

Elle  devait  d'abord  prendre  Goutances,  Saint-Lô,  Carenlan, 
pour  isoler  le  Gotentin  du  reste  de  la  Normandie  et  le  fermer 
aux  ennemis.  Les  Anglais,  attaqués  à  Test,  ne  pouvaient  guère 
envoyer  de  secours  à  l'ouest,  et  les  garnisons  ne  devaient  compter 
que  sur  elles-mêmes.  Partout  les  populations  normandes,  encou- 
ragées par  les  rapides  succès  de  Gharles  VII,  étaient  prêtes  à  se 
soulever  en  sa  faveur  '.  On  savait  que  ses  troupes,  soumises  à 
la  discipline,  s'abstenaient  de  pillage  *,  que  les  villes  reconquises 
étaient  traitées  avec  douceur,  et  la  réputation  du  connétable 
était  une  garantie  de  sécurité.  Au  contraire,  les  troupes  anglaises, 
mal  payées,  avaient  commis,  pendant  la  trêve,  des  déprédations 
qui  avaient  soulevé  bien  des  haines  ^. 

Depuis  que  le  duc  d'York  était  parti,  la  discipline  s'était  relâ- 
chée. Son  successeur,  le  duc  de  Somerset  "*,  n'était  pas  à  la  hau- 
teur d'une  situation  vraiment  critique.  Les  Anglais,  démoralisés 
par  leurs  premiers  échecs ,  par  l'abandon  où  on  les  laissait, 
n'avaient  plus  cette  confiance  en  leur  supériorité  qui,  aupara- 
vant, était  pour  eux  une  si  grande  force.  La  campagne  s'ouvrait 
donc,  pour  leurs  adversaires,  sous  les  meilleurs  auspices. 

Pendant  que  l'armée  de  Dunois  réduisait,  sans  difficulté,  nom- 
bre de  villes  dans  la  Haute-Normandie,  Touques,  Gisors,  Neuf- 
châlel,  etc.  ^,  et  se  préparait  à  marcher  sur  Rouen,  le  duc  de 
Bretagne  et  le  connétable  commençaient  la  conquête  du  Goten- 
tin. Le  Mont-Saint-Michel  et  Granville  leur  offraient  une  excel- 
lente base  d'opérations,  et  L,  d'Estouteville,  qui  connaissait  tout 
le  pays,  leur  était  d'un  précieux  secours  ^.  Une  grosse  bom- 

1.  En  beaucoup  d'endroits,  des  gens  masqués  ou  «  faux  visaiges  »  cou- 
raient les  chemins,  arrêtaient  les  Anglais  (Fr.  26079,  n"  6149;  M.  d'Es- 
couchy,  I,  195;  J.  Stevensop,  I,  SIO). 

2.  Voy.  surtout  Th.  Basin,  liv.  IV,  c.  xviii,  p.  217. 

3.  Portef.  Fontanieu,  119-120,  au  23  janvier  1445;  Fr.  26073,  n"'  S187, 
5214,  5213,  5229-5233,  5262,  5264;  Fr.  26074,  no»  5299,  5412;  Fr.  26076, 
nos  5646,  5740;  Fr.  26077,  n»  5783;  K  68,  n»*  12,  12»,  29». 

4.  Edmond  Beaufort  (frère  de  Jean  de  Beaufort,  -f  1444;  voy.  ci-dessus, 
p.  343-345),  comte  de  Somerset,  marquis  de  Dorsct,  créé  duc  de  Somerset  en 
1448  (Fr.  26077,  n"  5946;  Fr.  26078,  n»»  5959,  5968,  5971;  K  68,  n'«29,  292.*; 
J.  Stevenson,  II,  2»  partie,  592-594;  Dugdale,  Baronagium,  I,  329).  Il  était 
revenu  d'Angleterre  au  commencement  de  1448,  avec  des  renfgrts  et  le  titre 
de  lieutenant  général  (J.  Stevenson,  I,  479,  481-482).  Somerset,  qui  était  un 
Lancastre,  haïssait  le  duc  d'York  (Green,  Hist.  du  peuple  anglais,  I,  562). 

5.  Fr.  26079,  n"  6146;  M.  d'Escouchy,  III,  366-370.  Au  mois  d'août,  le 
roi  partit  de  Touraine  pour  la  Normandie  (Fr.  26079,  n"  6183). 

6.  Fils  de  Jean  II  d'Estouteville  (-|-  1436  .  Il  avait  été  nommé  capitaine 
du  Mont-Saint-Michel  le  2  septembre  1423.  Il  avait  été  investi  de  cette 


ILS  FONT  CAPITULER   COUTANCES  ET  SAINT-LO  (1449,  SEPTEMBRE)      399 

barde  et  d'autres  canons  furent  amenés,  par  mer,  du  Mont-Saint- 
Michel  à  Granville,  où  l'armée  bretonne  arriva  le  lundi  8  sep- 
tembre. Deux  jours  après,  l'amiral  de  Coëtivy  paraissait  devant 
Coutances  \  établissait  une  batterie  dans  le  jardin  des  Jacobins 
et  sommait  la  place  de  se  rendre  au  roi  Charles  VII.  Les  Anglais 
voulaient  résister.  Les  habitants  les  obligèrent  à  céder,  en  mena- 
çant de  les  abandonner.  Le  capitaine  de  la  ville,  Etienne  Munde- 
ford,  conclut  une  capitulation  avec  le  duc  de  Bretagne  et  le 
connétable,  à  des  conditions  avantageuses,  le  vendredi  12  septem- 
bre 2.  Guill.  de  Gouvran  fut  nommé  capitaine  de  Coutances  ', 
Le  même  jour,  les  Anglais  ayant  abandonné  le  château  de  Chan- 
teloup  *,  L.  d'Estouteville  en  prit  possession,  et  l'avant-garde 
partit  pour  Saint-Lô. 

Cette  ville,  bien  fortifiée,  pourvue  d'abondantes  ressources  et 
d'une  garnison  nombreuse,  aurait  pu  résister  longtemps;  mais, 
à  la  vue  des  étendards  où  brillaient  les  fleurs  de  lis,  les  habi- 
tants déclarèrent  qu'ils  voulaient  se  soumettre  au  roi  de  France, 
leur  souverain  seigneur  ^  Le  capitaine  anglais,  Guill.  Peyto  ®, 
fut  donc  obligé,  lui  aussi,  de  capituler.  La  garnison  sortit  avec 
tous  ses  biens,  et  le  duc  de  Bretagne  prit  possession  de  Saint-Lô, 
au  nom  de  Charles  VII.  Il  en  laissa  la  garde  à  Joachim  Rouault  ^ 
(lundi  15  septembre).  Le  même  jour,  le  maréchal  de  Lohéac, 
avec  le  secours  des  habitants  de  Coutances,  alla  mettre  le  siège 
devant  Régneville,  place  forte  et  port  à  l'embouchure  de  la 
Sienne  *.  C'était  pour  les  Anglais  une  position  importante,  qui 
assurait  leurs  communications  avec  les  îles  voisines.  Après  une 

charge  le  8  octobre  suivant,  par  Richemont  lui-même.  II  la  conserva 
jusqu'à  sa  mort,  en  1464  (S.  Luce,  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  p.  27,  note  4, 
et  p.  208-210).  Louis  d'Estouteville  rendit  de  grands  services  en  Normandie 
(voy.  M.  d'Escouchy,  III,  Preuves,  p.  385). 

1.  «  La  principalle  ville  et  chief  du  bailliage  de  Costantin  »  (Fr.  20580,  f»  45). 

2.  Biondcl,  p.  89.  M.  d'Escouchy,  I,  200.  —  Voir  cette  capitulation  dans 
Léop.  Quénault,  Recherches  sur  la  ville  de  Coutances,  2»  édit.  Coutances, 
4862,  in-8»,  p.  20-23;  —  Fr.  20580,  f»  45. 

3.  Voy.  Pièces  orig.,  910,  dossier  20299  (Gouvran),  n»»  11,  14.  Il  resta 
longtemps  capitaine  de  Coutances. 

4.  C.  de  Brehal,  arrond.  de  Coutances. 

5.  Richemont  fit  récompenser  par  le  roi  les  habitants  de  Saint-Lô  pour  les 
services  qu'ils  avaient  rendus  dans  cette  circonstance  (JJ  18i,  f»s  28-157).  On 
voit  aussi,  dans  un  compte  de  l'époque,  que  le  roi  laissa  aux  habitants  de 
Saint-Lô  la  somme  de  1  1001.  t.,  «  à  eulx  remise  et  quictée  par  le  duc  de  Bre- 
taigne  et  monseigneur  le  connestable,  au  temps  de  la  redduccion  dudit  lieu 
de  Saint-Lô,  laquelle  ilz  dévoient  du  temps  des  Anglois  »(Fr.  26081,  n»  65381). 

6.  D'après  J.  Chartier,  II,  124,  et  Berry,  p.  279, 

7.  M.  d'Escouchy,  I,  200.  Il  était  premier  écuyer  d'écurie  du  Dauphin 
(J  J  178,  f»  61). 

8.  Arrond.  de  Coutances. 


400    AUTRES  SUCCÈS  DANS  LE  COTENTIN  (1449,  SEPTEMBRE) 

vive  résistance,  ils  se  rendirent  et  obtinrent  de  quitter  la  place 
en  emportant  tout  ce  qu'ils  possédaient  (vendredi  19  septem- 
bre) *.  Menacés  par  la  population  des  villes  et  des  campagnes, 
qui,  partout,  se  déclarait  contre  eux,  ils  évacuèrent,  dans  l'es- 
pace de  quatre  jours,  plusieurs  places  ou  châteaux  des  environs 
de  Saint-Lô  et  de  Goutances,  le  château  de  la  Motte-l'Evêque  *, 
Thorigny  ^,  Hambye  *,  le  château  de  Laulne^,la  bastille  de  Beu- 
zeville  ^,  Pirou  ''j  Golombières  *. 

Odet  d'Aidie  et  Robin  Malortie,  partant  de  Saint-Lô,  surpri- 
rent la  forteresse  de  La  Haye-du-Puits  ^,  et  quelques  Ecossais, 
s' avançant  jusqu'à  Barneville  ^^,  s'établirent  dans  la  tour  de 
l'église.  De  ce  poste  avancé,  on  pouvait  surveiller  Saint-Sauveur 
et  même  Cherbourg.  Cinq  cents  Anglais,  choisis  dans  la  garnison 
de  ces  deux  villes,  voulurent  déloger  cette  poignée  d'hommes. 
Ils  furent  repoussés, après  un  combat  qui  dura  toute  une  journée. 
Le  25  septembre,  le  château  du  Hommet  fut  pris  par  des  pay- 
sans révoltés,  qui  s'étaient  cachés  dans  les  bois  ".Ils  accouraient 
en  foule  auprès  du  duc  de  Bretagne  et  du  connétable,  les  uns 
armés,  les  autres  apportant  des  provisions  de  toute  sorte  et  de- 
mandant à  marcher  contre  les  ennemis.  Bientôt  le  nombre  de 
ces  soldats  improvisés  dépassa  dix  mille  hommes.  Ils  étaient 
impatients  d'attaquer  la  ville  de  Garentan  *^,  qui  se  vantait  de 
rester  fidèle  au  roi  d'Angleterre  et  qui  reprochait  aux  habitants 
de  Saint-Lô  d'avoir  lâchement  livré  leur  ville  '^ 

L'armée  parut  devant  les  murs  de  Garentan  le  vendredi 
26  septembre  **.  Au  nom  du  roi  de  France,  le  duc  fit  sommer  la 

\  1.  Blondel,  89-92;  S.  Luce,  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  ^p.  50,  note  3. 

r,     {        Toutefois  Lohéac  dut  payer  3  000  écus  à  Guil.  de  Mfnnypeny,  qui  lui  livra 
I        la  place  (Fr.  20683,  f»  45).  Lohéac  fut  nommé  capitaine  de  Régneville  en 
*        1450  (Anselme,  VII,  72;  Mémoires  de  la  Société  des  antiquaires  de  Nor- 
mandie, 1825,  p.  274  et  suiv.). 

2.  Arrond.  de  Saint-Lô,  c.  de  Canisy. 

3.  Arrond.  de  Saint-Lô. 

4.  5.  Arrond.  de  Goutances. 

6.  Arrond.  de  Valognes. 

7.  Arrond.  de  Goutances.  Ge  fut  L.  d'Estouteville  qui  prit  Pirou  (K  68, 
no  47;  Fr.  26082,  n»  6786). 

8.  Arrond.  de  Bayeux.  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  49-o0. 

9.  Arrond.  de  Goutances. 

10.  Arrond.  de  Valognes. 

11.  G.  de  Saint-Jean-de-Daye,  arrond.  de  Saint-Lô  (Chron.  du  Mont- 
Saint-Michel,  50,  note  52). 

12.  Arrond.  de  Saint-Lô. 

13.  M.  d'Escouchy,  I,  201-202. 

14.  Le  27,  le  duc  et  le  connétable  étaient  encore  à  Saint-Lô.  Voy.  Append. 
LXXXIX. 


CAPITULATION  DE  CAHENTAN   (1449,   29   SEPT.)  401 

ville  d'ouvrir  ses  portes.  Une  grêle  de  traits  et  de  projectiles 
répondit  à  cette  injonction.  Les  défenseurs  de  la  place  avaient 
juré  qu'on  n'y  entrerait  qu'en  passant  sur  leurs  cadavres. 
Aussitôt  les  fossés  sont  comblés  avec  des  fascines;  le  signal  de 
l'assaut  est  donné.  A  la  vue  de  cette  multitude  enthousiaste, 
prête  à  s'élancer  sur  les  murailles,  les  habitants  croient  que  la 
patrie  entière  les  attaque  et  ils  n'osent  résister  '.  Le  duc,  imitant 
la  clémence  du  roi,  leur  accorde  un  pardon  généreux  et  permet 
aux  Anglais  de  sortir  un  bâton  blanc  à  la  main  (lundi  29  sep- 
tembre). 

Avant  la  reddition  de  Garentan,  le  connétable  était  allé,  avec 
l'amiral,  devant  la  citadelle  du  Pont-d'Ouve  *,  qui  défendait  l'en- 
trée du  clos  de  Gotentin.  Il  prit  de  vive  force  cette  position  im- 
portante. Aussitôt  Valognes  ouvrit  ses  portes  ^,  et  une  quinzaine 
d'autres  places  chassèrent  les  Anglais,  pour  se  donner  au  roi  de 
France.  Elles  aimaient  mieux  traiter  à  des  conditions  avanta- 
geuses que  de  s'exposer,  par  une  résistance  inutile,  à  toutes  les 
rigueurs  de  la  guerre.  G'est  ainsi  que  le  connétable  reçut  à  com- 
position la  place  de  Neuilly  *,  qui  appartenait  à  l'évêque  de 
Bayeux,  en  offrant  à  ce  prélat  de  lui  laisser  tous  ses  biens  et 
revenus,  s'il  voulait,  dans  un  délai  de  trois  mois,  se  soumettre 
au  roi  de  France  ^  (2  octobre). 

Gette  habile  modération,  pratiquée  par  Charles  VII  et  pres- 
crite à  ses  lieutenants,  fit  plus  que  les  armes  pour  le  recouvre- 
ment de  la  Normandie.  Peu  de  places  osèrent  soutenir  un  siège. 
La  plus  difficile  à  réduire  fut  celle  de  Gavray  ^  Déjà  le  duc  était 
revenu  de  Garentan  à  Goutances,  avec  l'intention  de  ramener 
son  armée  en  Bretagne,  quand  les  vives  instances  des  popula- 
tions le  déterminèrent  à  retarder  son  départ,  pour  laisser  à  son 
oncle  le  temps  de  prendre  Ga:vray.  Ge  fut,  en  effet,  le  connétable 
qui  se  chargea  de  conduire  cette  opération. 


1.  «  Tolius  patriœ  sibi  adversfe  invasionen  exspectare  non  audent.  » 
(Blondel,  p.  100-101;  X*»  8605,  f»  171).  Le  duc  de  Bretagne  conclut  la  capi- 
tulation avec  J.  Desurande,  curé  de  Carenton,  Thomas  Fauq,  chevalier, 
seigneur  de  Saint-Hilaire,  et  autres  habitants  de  la  ville.  Charles  VIT 
ratifia  ce  traité  à  Rouen,  au  mois  de  novembre  (JJ  180,  f»  3S  v, 
n«  un"  ;  Ordonn.,  XIV,  74-75).  Des  gens  d'armes  des  compagnies  de  GuilL 
de  Rosnyvinen  et  d'Olivier  de  Broon  vinrent  tenir  garnison  à  Garentan 
(JJ  180,  f  S4,  no  cxviii). 

2.  Aujourd'hui  Saint-Gôme-du-Mont,  c.  de  Garentan  (S.  Luce,  Chron.  du 
Mont-Saint-Michel,  p.  51;  M.  d'Escouchy,  I,  202). 

3.  Chron.  du  Mont-Saint -Michel,  p.  51. 

4.  C.  d'Isigny,  arrond.  de  Bayeux. 

5.  Append.  XC. 

6.  Arrond.  de  Goutances. 

RiCHEMONT.  26 


402  CAPITULATION   DE   GAVRAY    (1449,    11    OCT.) 

La  place  forte  de  Gavray,  bâtie  sur  une  hauteur  escarpée, 
d'un  accès  difficile,  semblait  ne  pouvoir  être  prise  que  par  la 
famine.  Les  Anglais  se  vantaient  de  défier,  dans  cette  position 
inexpugnable,  toutes  les  forces  de  la  Bretagne  et  de  la  France  *. 

Richemont  envoya  d'abord  Jacques  de  Luxembourg,  Geoffroy 
de  Couvran  et  quelques  autres  capitaines  préparer  l'attaque. 
Après  des  efforts  surhumains,  en  s'aidant  des  buissons,  des  sail- 
lies du  roc,  de  leurs  épées,  qu'ils  enfonçaient  dans  les  fissures, 
les  assaillants  gravirent  la  hauteur  et  parvinrent  au  pied  des 
remparts.  Là,  ils  étaient  exposés  à  tous  les  projectiles.  Les 
femmes  elles-mêmes  jetaient  sur  eux  des  pierres,  de  l'huile 
bouillante,  des  tisons  ardents.  Pendant  la  nuit,  ils  pratiquèrent 
des  degrés  sur  le  flanc  du  rocher;  ils  montèrent  des  échelles, 
des  poutres,  des  portes  de  maisons,  construisirent  des  mantelets, 
pour  se  mettre  à  l'abri,  sapèrent  la  base  des  murs  et  commen- 
cèrent à  creuser  une  galerie,  pour  pénétrer  dans  la  place. 

L'arrivée  du  connétable  excita  encore  leur  ardeur.  La  ville 
était  menacée  des  plus  graves  dangers,  quand  le  capitaine  an- 
glais, André  TroUope  ^,  demanda  enfin  à  capituler  (samedi  11 
octobre).  C'est  ainsi  que  Gavray,  une  des  plus  fortes  places  du 
Cotentin,  fut  prise  en  trois  jours  ^,  sans  le  secours  de  l'artille- 
rie. Jadis  l'illustre  du  Guesclin  Pavait  assiégée  pendant  neuf 
mois  et  n'avait  pu  la  réduire  que  par  la  famine.  Cette  opé- 
ration fit  le  plus  grand  honneur  au  connétable  et  à  ses  lieute- 
nants. Le  roi  l'en  récompensa  en  lui  donnant  la  seigneurie  de 
Gavray  *,  un  peu  plus  tard  (31  mars  1451). 

Après  avoir  laissé  Jacques  de  Luxembourg  à  Gavray,  Riche- 
mont  revint  à  Coutances,  et  partit,  avec  le  duc  de  Bretagne,  le 
lundi  13  octobre,  pour  marcher  sur  Vire.  Arrivés  à  Villedieu  ^, 
ils  reçurent  un  message  de  Pierre  de  Bretagne,  qui  assiégeait 
Fougères,  depuis  le  5  octobre  et  qui  réclamait  leur  aide.  Quand 
on  sut  que  l'armée  allait  quitter  le  Cotentin,  les  habitants  cons- 
ternés vinrent  supplier  le  duc  de  ne  pas  les  abandonner  à  la 
vengeance  des  Anglais,  qui  occupaient  encore  Avranches, 
Saint-Sauveur,  Briquebec  et  Cherbourg.  Richemont  regrettait 

1.  Cependant  le  château  de  Gavray,  rasé  déjà  deux  fois,  n'était  plus 
aussi  fort  qu'à  l'époque  où  du  Guesclin  l'avait  assiégé,  en  1378  {Mémoires 
de  la  Soc.  des  antiquaires  de  Norinandie,  année  1825,  p.  319  et  suiv.). 

2.  Fr.  26978,  n»  S975. 

3.  D'après  R.  Blondel,  p.  103-107;  cinq  jours,  d'après  la  Chron.  du 
Mont-Saint-Michel,  p.  52,  du  lundi  6  au  samedi  11  octobre. 

4.  Voy.  Âppend.  XGI.  Ricliemont,  de  son  côté,  récompensa  G.  de  Cou- 
vran. Il  lui  donna  une  pension  annuelle  de  100  écus  d'or,  sur  les  revenus 
de  la  terre  de  Gavray.  Voy.  Append.  XCII. 

5.  Arrond.  d' Avranches. 


REDDITION   DE  FOUGÈRES   (1449,   5   NOV.)  403 

de  ne  pouvoir  terminer  la  conquête  du  Gotentin  ;  mais  il  tenait 
encore  plus  à  reprendre  Fougères,  car,  après  une  campagne  si 
glorieuse,  un  échec  devant  cette  ville  eût  paru  plus  honteux. 

Après  avoir  promis  de  revenir  bientôt  achever  l'expulsion  des 
Anglais,  le  duc  et  le  connétable  se  dirigèrent  vers  Avranches.Ils 
logèrent,  le  15  octobre,  au  Mont-Saint-Michel,  d'où  ils  se  rendi- 
rent à  Antrain,  puis  à  Fougères.  L'armée  arriva  devant  cette 
place  le  jeudi  16  octobre  et  en  compléta  l'investissement.  Le 
duc  s'établit  devant  une  des  portes;  le  connétable  devant 
l'autre.  Les  travaux  d'approche  furent  poussés  avec  prompti- 
tude, malgré  les  efforts  des  assiégés.  Ils  firent  une  sortie  et 
furent  repoussés.  Quand  les  bombardes  et  les  canons  eurent  ou- 
vert plusieurs  brèches,  quand  tout  fut  prêt  pour  un  assaut, 
quand  la  garnison,  forte  de  5  à  600  hommes,  comprit  qu'elle 
ne  pourrait  tenir  tête  à  toute  une  armée  et  que  les  vivres  com- 
mençaient à  manquer,  elle  dut  se  résoudre  à  capituler. 

François  de  Surienne,  qui,  après  avoir  pris  traîtreusement 
la  ville,  en  avait  gardé  le  commandement,  obtint  pour  les  siens, 
malgré  leur  situation  critique,  des  conditions  très  acceptables.  Il 
est  vrai  que  les  assiégeants  avaient,  eux  aussi,  beaucoup  souf- 
fert et  que  la  mortalité  faisait  dans  leurs  rangs  de  cruels  ra- 
vages *.  Tous  avaient  hâte  d'en  finir.  Surienne,  y  trouvant 
son  profit,  abandonna  le  roi  d'Angleterre,  pour  se  mettre  au 
service  de  Charles  VII  ^.  Fougères  fut  rendu  le  mercredi  5  no- 
vembre au  duc  de  Bretagne.  La  mauvaise  saison,  l'approche 
de  l'hiver,  l'état  sanitaire  des  troupes  ne  permettant  pas  de 
continuer  la  campagne  *,  le  duc  revint  à  Rennes  et  le  con- 
nétable à  Parthenay  *. 

1.  Alaia  de  Rohan,  comte  de  Perhoet  (fils  d'Alain  IX,  vicomte  de 
Rohan),  neveu  de  Richemont,  mourut  pendant  ce  siège. 

2.  J.  Chartier,  II,  172-174;  M.  d'Escouchy,  I,  203;  Preuves  de  l'histoire  de 
Bretagne,  II,  col.  1316;  D'Argentré,  933;  J.  Stevenson,  I,  273,  278-298,  310; 
X^*  1483,  f»  70.  Déjà  la  ville  de  Longny,  au  Perche,  dont  Surienne  était 
le  capitaine,  avait  été  livrée  aux  Français  par  le  gendre  de  Surienne, 
Richard  aux  Epaules,  qui  la  leur  avait  prise  autrefois  (Pièces  orig., 
t.  1032,  n»  101;  JJ  183,  f<'43;  Blondel.  82;  M.  d'Escouchy,  III,  374). 

3.  Sur  celte  campagne  du  duc  de  Bretagne  et  du  connétable  voir  la 
Chronique  du  Mont-Saint-Michel,  édit.  S.  Luce,  p.  44-53;  L.  Delisle,  Hist. 
du  château  et  des  sires  de  Saint-Sauveur-le-Vicomte ,  Pai-is,  Aug.  Du- 
rand, 1867,  in-8°,  p.  231-261,  270,  271;  Martial  d'Auvergne,  FI,  46,  56,  37, 
«0,  81,  et  Fr.  5054,  f»  163;  M.  d'Escouchy,  I,  172-203;  Gruel,  222-223; 
Blondel  4-144;  Berry,  édition  anglaise,  p.  239-322;  Chron.  Martinienne, 
f»  ccxct. 

4.  Le  le'  décembre,  il  était  encore  à  Josselin,  où  il  autorisait  son  neveu 
François,  comte  d'Etampes,  dont  il  était  le  curateur,  à  établir  des  officiers 
dans  ses  domaines  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  2,  E,  3,  deux  pièces  ori- 
ginales) . 


404  SUCCÈS  DE   DUNOIS.   CHARLES  VII  A  ROUEN   (4449) 

En  même  temps,  l'armée  royale,  sous  les  ordres  de  Dunois, 
avait  remporté  de  brillants  succès  dans  la  Haute -Normandie. 
Elle  avait  forcé  les  Anglais  à  évacuer  Rouen  \  où  Charles  VII 
avait  fait  son  entrée  solennelle  le  10  novembre,  cinq  jours  après 
la  reddition  de  Fougères.  L'hiver  n'arrêta  pas  ses  opérations. 
Elle  fît  capituler  Château-Gaillard  le  23  novembre,  Harfleur 
le  24,  réduisit  quelques  autres  places,  comme  Condé-sur-Noi- 
reau  ^,  Bellême  ^  (décembre  1449),  et  mit  le  siège  devant  Hon- 
fleur  (janvier  1450),  qui  se  rendit  le  mois  suivant  *.  Enfin,  dan& 
le  Midi,  le  comte  de  Foix  avait  aussi  recommencé  la  guerre 
contre  les  Anglais. 

Quand  l'armée  bretonne  eut  quitté  le  Cotentin,  les  hostilités 
ne  furent  pas  entièrement  suspendues.  Les  garnisons  françaises 
tenaient  les  ennemis  en  respect.  Ils  essayèrent  de  surprendre  la 
Haye-du-Puits,  mais  ils  furent  battus  par  Odet  d'Aidie,  qu'ils 
croyaient  absent  (décembre  1449).  Quelques  jours  après,  les 
Français  de  Coutances,  de  Gavray,  de  Saint-Lô,  de  Thorigny 
allèrent,  avec  Geoffroy  de  Couvran  et  Joachim  Rouault,  faire  une 
course  jusqu'aux  portes  de  Vire,  puis,  de  là,  tomber  sur 
300  Anglais  partis  la  veille  de  cette  place  et  qui  furent  tués,  ou 
pris,  ou  mis  en  déroute  ®. 

Cette  campagne  de  1449  avait  été  désastreuse  pour  les  An- 
glais. Ils  avaient  perdu  la  plus  grande  partie  de  la  Normandie  ^, 

1.  M.  d'Escouchy,  t.  I,  229  et  suiv.,  t.  III,  338-364;  Xi«  8605,  f"»  147  V- 
149;  Y4,  fo»  94,  108  v°-109.  Somerset  avait  capitulé  le  29  octobre  (K  68, 
n«  37,'  38;  JJ  180  f"  11  v<>).  Les  bourgeois  de  Rouen  prêtèrent  30  000  1.  t. 
à  Charles  VII  pour' le  siège  de  Harûeur  (Fr.  20683,  f»  46). 

2.  Arrond.  de  Vire. 

3.  Arrond.  de  Mortagne. 

4.  Pendant  ce  siège,  le  roi  était  à  Jumièges,  où  Agnès  Sorel  mourut,  le 
9  février  (Glairambault,  104,  f»  8410;  K  68,  n"  50;  JJ  185  f»  184.)  Des  troupes 
envoyées  dans  le  Maine,  pour  assiéger  Fresnay-le-Vicomte,  furent  rap- 
pelées pour  le  siège  de  Honfieur.  Fresnay  fut  assiégé  en  mars  1450,  par 
Gaspard  Bureau  {Chron.  du  Mont- Saint-Michel,  p.  55;  K  68,  n»  49^; 
J.  Chartier,  II,  190).  —  C'est  à  Jumièges  que  Charles  VII  ratifia,  le  17  jan- 
vier, les  actes  du  duc  de  Bretagne  pendant  la  conquête  de  la  Normandie 
(Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  38,  E,  103;  Xi"  8605,  f»»  138  v  139;  Fr.  20580, 
f»  45).  11  y  eut  cependant  quelques  exceptions,  le  duc  ayant  parfois  donné  le 
même  office  à  plusieurs  personnes  {Idem,  f"»  139  v°-144,  150;  Ordonnances, 
XIV,  90-91;  JJ  182,  f»  69  v°).  C'est  enfin  à  Jumièges  que  Charles  VII  donne 
au  bâtard  d'Orléans  le  comté  de  Longueville  (X*»  8603,  f°'  127,  135;  P  2531, 
f»  310). 

5.  Blondel,  107.  M.  d'Escouchy,  I,  274-276.  Gruel,  223. 

6.  Voir  dans  J.  Stevenson,  II,  2"  partie,  p.  619  et  suiv.,  la  liste  des 
villes,  forteresses  et  châteaux  pris  aux  Anglais,  pendant  le  gouvernement 
de  Somerset,  en  1449  et  1450.  Lettres  du  roi  et  de  la  reine  d'Ecosse  à 
Charles  VII,  pour  le  féliciter  de  ses  succès  en  Normandie  (J.  Stevenson,  I, 
299-301). 


TH.  KYRIEL  DÉBARQUE  A  CHERBOURG  (1450,  15  MARS)    405 

et  ils  étaient  menacés  de  perdre  le  reste,  s'ils  n'étaient  prompte- 
ment  secourus.  Déjà  le  duc  de  Bretagne,  poussé  par  le  connéta- 
ble, se  préparait  à  recommencer  les  hostilités.  Il  envoyait  son 
chancelier,  avec  d'autres  ambassadeurs,  déclarer  au  roi  qu'il 
avait  l'intention  «  d'entrer  de  rechef,  prouchainement,  à  puis- 
sance et  grosse  armée  de  gens  *,  »  dans  la  Basse  Normandie, 
pour  y  reprendre  les  places  encore  occupées  par  les  ennemis. 
Charles  VII,  heureux  de  ces  bonnes  dispositions,  s'était  empressé 
de  donner  au  duc  «  plain  povoir,  auctorité  et  mandement  espé- 
cial  de,  en  son  absence,  représenter  sa  personne,  pendant  qu'il 
serait  en  armée,  en  la  dicte  Basse  Normandie  ^  (1450,  16  jan- 
vier ) . 

En  présence  de  ce  nouveau  péril,  Marguerite  d'Anjou  et  Suf- 
folk,qui  gouvernaient  au  nom  de  Henri  VI,  comprirent  la  néces- 
sité de  faire  un  grand  eiïort  ^.  Malgré  les  difficultés  redoutables 
avec  lesquelles  ils  étaient  aux  prises  en  Angleterre,  ils  parvinrent 
à  lever  une  armée  de  quatre  à  cinq  mille  hommes  *.  Thomas 
Kyriel,  qui  en  avait  reçu  le  commandement,  vint  débarquer  à 
Cherbourg,  les  autres  ports  de  la  Normandie  étant  au  pouvoir 
des  Français  (15  mars  1450).  Dès  le  lendemain,  Guillaume  de 
Couvran,  capitaine  de  Coutances,  envoyait  Grenoble,  héraut 
d'armes  du  Dauphin,  porter  cette  nouvelle  au  roi,  qui  était  alors 
à  Alençon  ^. 

Th.  Kyriel  avait  ordre  de  rejoindre  le  duc  de  Somerset  à  Gaen; 
mais,  comme  les  Français  occupaient  Carentan,  il  se  vit  obligé 
de  passer  le  Grand-Vey,  pour  suivre  la  voie  la  plus  directe.  Il 
jugea  donc  nécessaire  de  prendre  Valognes,  qui  lui  fermait  la 
route  et  qui  aurait  pu  gêner  ses  communications  avec  Cher- 
bourg. Des  renforts,  fournis  par  les  garnisons  anglaises  du  voi- 
sinage, vinrent  grossir  son  armée.  Somerset,  qui  se  vantait  déjà 
de  reconquérir  toute  la  Normandie,  lui  envoya  2000  hommes 
sous  Rob.  de  Vere,  Mathieu  Goth  et  H.  Norbery. 

Abel  Rouault  commandait  à  Valognes,  en  l'absence  de  son 
frère  Joachim,  capitaine  de  cette  ville.  Il  dépêcha  aussitôt  des 
messagers  vers  le  duc  de  Bretagne,  le  connétable,  l'amiral  de 

i.  \Qy.Append.  XCIII. 

2.  Voy.  Append.  XCIII. 

3.  J.  Stevenson,  I,  502  et  suiv.,  510,  513. 

4.  M.  d'Escouchy,  I,  276.  Le  9  janvier,  l'évêque  de  Chichester,  envoyé  à 
Porlsmoulh,  pour  payer  les  troupes  qui  allaient  passer  en  France,  périt 
dans  un  mouvement  populaire.  Quelques  jours  après,  le  duc  de  Suffolk 
était  mis  en  acccusation. 

5.  Poftef.  Fontanieu,  121-122,  au  16  et  au  28  mars;  M.  d'Escouchy,  I, 
277;  Berry,  330.  Jacques  Cœur  était  alors  auprès  de  Charles  VII  à  Alençon 
(Fr.  26079,  n»  6145;  JJ  180,  f«  nn«iui). 


406  LE   COMTE   DE   CLERMONT   MARCHE   CONTRE   KYRIEL 

Coëtivy,  le  maréchal  de  Lohéac  et  le  comte  de  Laval,  pour  leur 
annoncer  l'approche  de  l'armée  anglaise  et  leur  demander  du 
secours  '.  Le  connétable  était  alors  à  Messac  %  près  de  Redon. 
Il  alla  trouver  le  duc  à  Dinan  et  voulut  l'entraîner  en  Nor- 
mandie;, mais  il  rencontra  encore  une  vive  opposition  dans 
le  Conseil  ^.  D'ailleurs,  c'était  le  moment  où  il  apprenait  que 
Gilles  était  en  danger  de  mort.  L'altercation  qu'il  eut,  à  ce 
sujet,  avec  le  duc,  suscita  d'autres  difficultés.  Quelques  jours  se 
passèrent  sans  résultat.  Richemont  alla  faire  ses  pâques  a  Dol, 
espérant  que  le  duc  allait  l'y  rejoindre.  Celui-ci  le  lui  avait  bien 
promis,  mais  les  gens  de  son  Conseil  l'en  dissuadèrent  *. 

Le  connétable  ne  voulut  pas  attendre  plus  longtemps.  Il  alla 
prendre  congé  de  son  neveu  et  partit  avec  le  comte  de  Laval,  le 
maréchal  de  Lohéac,  Jacques  de  Luxembourg,  les  sires  de  Bous- 
sac,  d'Orval  et  environ  300  lances  ^.  Beaucoup  d'autres  sei- 
gneurs et  capitaines,  comme  Tugdual  de  Kermoisan,  se  déso- 
laient de  ne  pouvoir  le  suivre.  Le  connétable  les  quitta  en  leur 
disant  qu'il  espérait  bien  ne  pas  revenir  sans  avoir  combattu  les 
Anglais  ^. 

Cependant  Abel  Rouault,  après  avoir  vainement  attendu  des 
secours,  avait  été  réduit  à  capituler  dans  le  château  de  Valognes 
(vers  le  10  avril  1450)  \  Le  roi  de  France  avait  envoyé,  mais  trop 
tard,  une  petite  armée,  conduite  par  son  gendre,  le  comte  de 
Glermont  *,  fils  du  duc  de  Bourbon.  Le  jeune  prince  avait  sous 
ses  ordres  le  comte  de  Castres  ^,  fils  du  comte  de  Pardiac,  l'ami- 
ral de  Coëtivy  ^°,  Pierre  de  Brézé,  Jacques  de  Chabannes,  Joa- 
chim  Rouault,  Geoffroy  de  Couvran,  Olivier  de  Broon.  Arrivé  à 
Carentan,  le  comte  de  Clermont  apprit  la  capitulation  de  Valo- 
gnes et  s'arrêta,  pour  savoir  ce  qu'allaient  faire  les  ennemis.  Il 
envoya  des  messagers  au  connétable,  son  oncle,  pour  le  prier  de 
se  hâter,  en  l'informant  que  les  Anglais  allaient  probablement 
marcher  sur  Saint-LÔ-  Richemont  était  à  Coutances  quand  il 

1.  Voy.  Append.  XGIV. 

2.  Sur  la  Vilaine,  canton  de  Bain,  arrond.  de  Redon.  —  K,  n»  49. 

3.  Dès  le  16  janvier  1450,  Charles  VII  avait  donné  au  duc  de  Bretagne 
pouvoir  d'entrer  en  Normandie  (Fr.  5909,  f°  ccxn  v"). 

4.  D.  Lobineau,  I,  640. 

5.  M.  d'Escouchy,  I,  279. 

6.  M.  d'Escouchy,  I,  277-278. 

7.  Gruel,  224;  M.  d'Escouchy,  I,  277;  J.  Chartier,  II,  192;  Berry,  330. 

8.  Jean  de  Bourbon,  fils  du  duc  Charles  lor.  Il  avait  épousé,  en  1447, 
Jeanne  de  France,  fille  de  Charles  VII. 

9.  Jacques  d'Armagnac,  duc  de  Nemours  en  1462,  exécuté  en  1477. 

10.  Charles  VII  venait  de  lui  donner  la  baronnie  de  Lesparre,  eu  récom- 
pense de  ses  services  (JJ  180,  f"  8,  n"  xix). 


KYRIEL  PASSE  LE  GRAND-VEY  (1450,   14  AVRIL)  407 

reçut,  les  lettres  de  son  neveu  et  celles  que  lui  adressaient  aussi 
le  comte  de  Castres,  l'amiral  et  Brézé.  Il  s'avança  promplement 
vers  Saint-Lô. 

Le  dimanche  12  avril,  Th.  Kyriel  partit  de  Valognes.  Il  se 
dirigea  vers  le  Grand-Vey,  afin  d'y  traverser  les  grèves  au  pas- 
sage de  Saint-Clément.  Le  comte  de  Clermont,  qui  était  à  Caren- 
tan,  tint  conseil,  pour  examiner  s'il  valait  mieux  attaquer  les 
Anglais  au  milieu  des  grèves,  ou  quand  ils  seraient  entrés  dans 
le  Bessin.  On  prit  ce  dernier  parti.  Pourtant,  il  semble  que  les 
ennemis  se  seraient  trouvés  dans  une  situation  bien  périlleuse,  si 
le  comte  de  Clermont  et  le  connétable,  connaissant  leur  inten- 
tion, avaient  pu  s'entendre  pour  les  assaillir  par  devant  et  par 
derrière,  quand  ils  se  seraient  engagés  dans  Tétroit  et  dange- 
reux passage  qu'ils  devaient  suivre,  au  milieu  des  sables  mou- 
vants, sous  la  menace  de  la  marée  montante. 

Quand  on  sut  que  l'armée  n'allait  pas  profiter  de  cette  occa- 
sion, le  peuple,  toujours  prompt  à  s'émouvoir,  accusa  les  chefs 
de  trahison  et  résolut  d'attaquer  les  ennemis,  malgré  la  défense 
du  général  français.  Le  mardi  14  avril,  les  habitants  de  Caren- 
tan  et  ceux  des  villages  voisins  accoururent  en  armes  sur  les 
grèves  et  harcelèrent  les  Anglais.  Le  comte  de  Clermont  envoya 
seulement  Pierre  de  Louvain  avec  une  compagnie  de  cent  lances, 
pour  accompagner  cette  multitude  et,  au  besoin,  pour  lui  por- 
ter secours.  Ces  forces  ne  pouvaient  arrêter  Kyriel.  Il  atteignit, 
sans  avoir  fait  de  grandes  perles,  la  côte  du  Bessin  et  suivit  la 
route  de  Bayeux. 

Informés  des  dispositions  que  prenaient  les  Anglais  pour 
passer  la  nuit  aux  environs  de  Formigny  ^  et  de  Trévières,  les 
chefs  de  l'armée  française  résolurent  de  les  y  attaquer  le  len- 
demain matin.  Le  comte  de  Clermont  envoya  au  connétable  le 
curé  de  Carentan,  pour  l'informer  de  cette  détermination  et  le 
prier  de  marcher  sur  Trévières,  pendant  qu'il  attaquerait  lui- 
même  du  côté  de  Formigny. 

Le  mercredi  15  avril,  de  grand  matin,  l'armée  française 
s'avança  aussi  de  Carentan  vers  Bayeux.  Elle  comprenait  environ 
3  000  hommes,  auxquels  devait  se  joindre  Richemont  avec  1  500 
ou  1  800  combattants  ^.  Le  comte  de  Clermont  avait  commis  une 

1.  Commune  du  canton  de  Trévières,  arrond.  de  Bayeux  (Calvados). 
Formigny  est  à  3  kil.  de  Trévières. 

2.  D'après  Blondel,  M.  d'Escouchy,  Berry,  Th.  Basin,  le  connétable  avait 
300  lances;  d'après  J.  Chartior,  200  à  220  lances,  avec  800  archers.  Les 
troupes  réunies  du  comte  de  Clermont  et  du  connétable  n'atteignaient 
donc  pas  le  chiffre  de  5  000  combattants.  Les  Anglais  étaient  environ  G  000. 
J.  Chartier  et  Th.  Basin  disent  6  000  à  7  000  hommes,  M.  d'Escouchy  5  000 
à  6  000,  Berry  et  du  Clercq  3  000,  chiffre  manifestement   trop  faible  et 


408       LE   COMTE   DE   CLERMONT   ATTAQUE   KYRIEL    (1450,    15   AVRIL) 

première  faute  en  ne  prenant  pas  toutes  les  précautions  pos- 
sibles pour  faire  coïncider  son  départ  avec  celui  du  connétable  *. 
Il  envoya  en  éclaireur  Odet  d'Aidie,  que  l'amiral  Prigent  de 
Goëtivy  suivait  de  près,  avec  Favant-garde,  reconnaître  les. 
positions  des  ennemis. 

Arrivés  au  sommet  d'une  côte  qui  s'abaisse  en  pente  douce 
vers  un  vallon  appelé  le  Val  de  Formigny  ^,  les  Français  aperçu- 
rent l'armée  anglaise,  forte  d'environ  6  000  hommes.  Elle  était 
campée  entre  un  ruisseau,  qui  traverse  le  val,  avant  de  se  jeter 
dans  l'Aure,  et  le  village  de  Formigny,  situé  un  peu  plus  loin, 
vers  le  haut  de  la  côte  opposée,  dans  la  direction  de  Bayeux. 

Kyriel  avait  divisé  ses  troupes  en  deux  corps.  L'un,  le  plus  con- 
sidérable, qu'il  commandait  lui-même,  était  adossé  au  village 
de  Formigny;  l'autre,  que  lui  avait  amené  Mathieu  Goth,  le 
fameux  Matago  des  chroniques,  s'était  établi  plus  bas,  près  du 
ruisseau  qui  arrose  le  val.  Sachant  que  le  connétable  était  dans 
le  voisinage,  les  Anglais  n'avaient  rien  négligé  pour  se  garantir 
contre  toute  surprise.  Selon  leur  habitude,  ils  avaient  fortifié 
leurs  positions  au  moyen  de  fossés,  de  retranchements,  de  pieux. 
Vers  le  village,  ils  étaient  encore  protégés  par  les  maisons,  les 
murs,  les  haies,  les  jardins  plantés  d'arbres  et  impraticables  à 
la  cavalerie.  Les  deux  ponts  oii  la  route  de  Bayeux  traverse 
l'Aure  et  son  affluent  ^  étaient  gardés  pas  les  troupes  de  Kyriel 
et  de  Mathieu  Goth. 

Le  jeune  comte  de  Glermont,  impatient  de  combattre,  n'at- 
tendit pas  l'arrivée  de  son  oncle.  Il  s'avança  donc,  avec  toutes 
ses  forces,  vers  la  position  occupée  par  Mathieu  Goth,  jusqu'à 
une  distance  de  trois  traits  d'arbalète.  Là,  il  fît  descendre  de 
cheval  une  partie  de  ses  archers  et  les  envoya,  sous  la  conduite 


auquel  il  faut  ajouter  celui  des  troupes  envoyées  par  Somerset.  Grafton 
parle  de  S  000  hommes  et  dit  ensuite  que  les  Anglais  eurent  4  000  morts 
et  800  prisonniers.  Prigent  de  Goëtivy,  qui  prit  part  à  la  bataille,  croit 
que  les  Anglais  étaient  au  nombre  de  cinq  à  six  mille.  (Voy.,  dans  les 
Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  II,  1321,  une  lettre  de  l'amiral  de  Goëtivy 
écrite  quatre  jours  après  la  bataille.) 

1.  La  distance  de  Garentau  à  Formigny  étant  à  peu  près  la  même  que 
celle  de  Saint-Lô  à  Trévières  et  le  comte  de  Glermont  étant  arrivé  au 
moins  trois  heures  avant  Richemont,  il  faut  supposer  que  celui-ci  fut 
prévenu  trop  tard  pour  partir  en  même  temps  que  son  neveu. 

2.  Voy.  le  plan  de  la  bataille  de  Formigny.  Sur  le  côté  gauche  de  la 
route  de  Cherbourg  à  Gaen,  presque  en  face  de  la  borne  kilométrique 
indiquant  Isigny  à  15  kil.  et  Bayeux  à  16  kil.,  on  a  élevé  une  petite 
colonne  de  2  mètres,  sur  laquelle  est  gravée  cette  inscription  :  Ici  fut  livrée 
la  bataille  de  Fortnigny,  le  lo  avril  1430,  sous  le  règne  du  roi  Charles  Vil. 

3.  Le  premier  près  deSurrain,  l'autre  au  val  de  Formigny.  Voy.  le  plan 
de  la  bataille  de  Formigny,  p.  409. 


BATAILLE   DE  FORiMIGNY   (14S0,    15  AVRIL) 


409 


du  sire  de  Mauny,  avec  50  à  GO  lances  et  quelques  canons,  pour 
occuper  le  bord  du  ruisseau  et  préparer  sa  jonction  avec  le  con- 
nétable. Ils  engagèrent  une  escarmouche  avec  les  Anglais  postés 
près  du  pont,  tandis  que  les  coulevrines  tiraient  sur  le  camp 
ennemi,  où  elles  causaient  de  sensibles  ravages. 

Au  bout  de  quelque  temps,  Mathieu  Goth,  pour  metti'e  fin  à 
cette  situation,  lança  5  à  600  archers,  qui,  traversant  le  pont, 
chargèrent  les  Français  avec  impétuosité,  les  repoussèrent,  les 

PLAN  DE   LA  BATAILLE   DE  FORMIGNY. 


%. 


i  du.  Comte  de  Qcnxumt 


ArixLÔe  Anrflmne. 


mirent  en  déroute  et  s'emparèrent  des  canons.  Alors  Pierre  de 
Brézé,  se  précipitant,  avec  ses  hommes  d'armes,  ramena  les 
archers  qui  lâchaient  pied.  Un  combat  furieux  s'engagea  '.  Les 
compagnies  d'ordonnance  firent  alors  leurs  preuves.  «  Et  si  n'eus- 
sent esté  les  gens  d'armes,  qui  tinrent  bon,  dit  Gruel,  je  crois 
qu'ils  eussent  fait  grand  oultraige  à  nos  gens  \  »  Toutefois,  les 
ennemis  avaient  obtenu  un  premier  succès  et  comptaient  sur 
les  renforts  dont  disposait  Kyriel.  Si  le  capitaine  anglais  avait 
profité  de  cet  avantage  pour  engager  une  action  générale,  la  si- 
tuation des  Français  eût  été  critique.  Ils  attendaient  avec  anxiété 


1.  Quand  Richemont  arriva,  «  tout  estoit  mêlé,  »  dit  Gruel  (p.  223). 

2.  Gruel,  p.  223. 


410  BATAILLE   DE   FORMIGNY    (1450,    15   AVRIL) 

le  connétable.  Ils  envoyèrent  des  paysans    à  sa  recherche  *. 

Celui-ci  n'avait  reçu  qu'au  point  du  jour,  à  Saint-Lô,  le  der- 
nier message  du  comte  de  Glermont.  Craignant  que  la  préci- 
pitation de  son  neveu  n'amenât  quelque  désastre,  il  se  hâta  de 
faire  lever  ses  gens.  Après  avoir  entendu  la  messe,  il  partit, 
suivi  seulement  de  quelques  hommes.  Rejoint  bientôt  par  le 
reste  de  son  monde,  il  envoya  le  bâtard  de  La  Trémoille  en 
éclaireur,  avec  15  ou  20  lances.  A  l'avant-garde,  il  mit  le 
maréchal  de  Lohéac,  Jacques  de  Luxembourg  et  le  sire  de 
Boussac  *.  Venaient  ensuite  Gilles  de  Saint-Simon,  Jean  et  Phi- 
lippe de  Malestroit,  avec  les  archers;  enfin  il  garda  auprès  de 
lui  Jean  Bude,  son  porte-étendard,  G.  Gruel  et  un  certain  nom- 
bre de  gentilshommes.  Après  avoir  désigné  les  troupes  qui  de- 
vaient former  l'arrière-garde,  il  chevaucha  rapidement,  pour  fran- 
chir la  distance  d'environ  six  lieues  qui  le  séparait  de  Trévières. 

Quand  il  arriva  près  de  cet  endroit,  il  y  avait  déjà  trois  heures 
que  le  combat  était  engagé.  Malgré  la  valeur  des  gens  d'armes 
et  de  Brézé,  les  Français  commençaient  à  faiblir.  Enfin  les 
troupes  de  Richemont  paraissent  sur  les  hauteurs  qui  dominent 
le  val  de  Formigny.  «  Je  crois  que  Dieu  nous  y  amena  monsieur 
le  connétable,  écrivait  l'amiral  de  Coëtivy'  quatre  jours  après 
la  bataille,  car,  s'il  ne  fust  venu  à  l'heure  et  par  la  manière  qu'il 
y  vint,  je  double  que  entre  nous,  qui  les  avions  atteints  les 
premiers  et  faict  mectre  en  bataille,  d'une  part,  et  nous  estions 
mins  en  bataille,  d'autre  part,  n'en  fussions  jamais  sortis  sans 
dommaige  irréparable,  car  ils  estoient  de  la  moitié  plus  que  nous 
n'estions  ^.  »  On  répète  encore  aujourd'hui  dans  le  pays  que 
l'arrivée  du  connétable  sauva  l'armée  française  d'une  défaite 
certaine. 

Les  Anglais,  croyant  d'abord  que  c'est  Somerset 'qui  vient  à 
leur  aide,  poussent  des  cris  de  triomphe;  mais,  quand  ils  dis- 
tinguent sur  les  enseignes  les  fleurs  de  lis,  ils  craignent  d'être 
coupés,  reculent  vers  le  ruisseau,  sur  le  corps  de  bataille,  et 
Brézé  profite  de  ce  mouvement  pour  reprendre  les  coulevrines. 
Le  connétable,  qui  s'était  arrêté  près  d'un  moulin  à  vent,  au 
sommet  de  la  colline  *,  a  bien  vite  jugé  la  situation.  Il  envoie 

1.  Ce  détail  se  retrouve  aussi  dans  les  traditions  locales  et  dans  les 
tableaux  très  rudimentaires  qui  représentent  la  bataille.  (Voir  deux  dis- 
sertations dans  les  Mémoires  de  la  Soc.  des  antiquaires  de  Normandie, 
année  1824,  p.  490-510,  678-698.) 

2.  Jean  II  de  Brosse,  seigneur  de  Sainte-Sévère  et  dé  Boussac,  fils  du 
maréchal  de  Boussac,  mort  en  1433  (voy.  ci-dessus,  p.  140). 

3.  Preuves  de  Vhistoire  de  Bretagne,  II,  1321. 

4.  Gruel,  224.  Voy.  le  plan  de  la  bataille, p.  409.  Ce  moulin  n'existe  plus; 
mais,  dans  le  pays,  on  en  garde  encore  le  souvenir. 


BATAILLE   DE  FORMIGNY   (14o0,   15  AVRIL)  411 

son  avant-garde  vers  le  pont  et  vers  un  gué  situé  sur  sa  gauche, 
en  s'avançant  lui-même  pour  soutenir  ses-  gens.  Les  Anglais, 
déconcertés,  croyant  avoir  affaire  à  des  torces  considérables, 
se  précipitent  vers  leurs  retranchements.  Beaucoup  sont  tués 
ou  pris  avant  de  les  atteindre.  Une  fois  le  pont  enlevé,  toutes 
les  troupes  passent  le  ruisseau  et  rejoignent  celles  du  comte 
de  Glermont  sur  la  rive  droite.  Alors  le  connétable  prend  le 
commandement  de  l'armée  et  va  reconnaître,  avec  Coëtivy,  les 
positions  ennem'es.  «  Que  vous  semble,  dit-il,  monsieur  l'amiral, 
comment  nous  devons  les  prendre,  ou  par  les  bouts,  ou  par 
le  milieu  '  ?  »  Et,  comme  celui-ci  exprimait  la  crainte  de  voir  les 
Anglais  rester  dans  leurs  retranchements  :  «  Ils  n'y  demeure- 
ront pas,  avec  la  grâce  de  Dieu  *,  »  reprend  le  connétable. 

A  ce  moment,  P.  de  Brézé  vient  lui  demander  l'autorisation 
d'attaquer  les  ennemis  à  droite,  pour  couper  leur  ligne  de 
retraite  sur  Bayeux.  Après  avoir  réfléchi  quelques  minutes,  le 
connétable  y  consent.  Aussitôt  le  vaillant  capitaine  s'élance, 
avec  ses  gens,  sur  un  poste  fortiflé,  qui  défendait  le  chemin  de 
Bayeux,  à  droite  de  Formigny.  En  même  temps,  le  connétable 
et  son  neveu,  avec  le  reste  de  l'armée,  attaquent  les  ennemis  à 
gauche  et  au  centre,  vers  le  ruisseau  et  vers  le  village.  Culbutés 
par  Brézé,  les  Anglais  se  débandent,  commencent  à  fuir,  et  cette 
habile  manœuvre  décide  le  succès  de  la  journée.  Kyriel  essaye 
encore  de  résister  dans  Formigny;  mais;  Brézé  se  retournant 
contre  lui,  il  se  voit  attaqué  de  toutes  parts  et  prolonge  vaine- 
ment une  résistance  désormais  inutile.  Ses  troupes  ne  songent 
plus  qu'à  fuir. 

D'autre  part,  la  lutte  continuait  avec  acharnement  près  du 
pont.  M.  Goth  et  Rob.  de  Vere  s'échappent,  pour  chercher  un 
refuge  à  Bayeux  et  à  Caen;  mais  la  plupart  de  leurs  soldats 
sont  massacrés.  Leurs  cadavres  s'entassent  en  cet  endroit  ^  ;  le 
ruisseau  est  rougi  de  leur  sang*.  Plus  loin,  cinq  cents  archers, 
qui  s'étaient  réfugiés  dans  un  jardin  entouré  de  fortes  haies, 
veulent  se  défendre.  Us  sont  assaillis  avec  une  telle  fureur  qu'ils 
se  jettent  à  genoux  et  tendent  leurs  arcs  désarmés,  en  implorant 
merci.  Ils  sont  exterminés  jusqu'au  dernier.  Les  paysans,  accourus 
pour  voir  la  bataille  et  participer  au  butin,  tuent  tous  les  fuyards. 

1.  Gruel,  224. 

2.  Gruel,  223. 

3.  A  ce  même  endroit  le  comte  de  Glermont,  devenu  le  duc  Jean  II  de 
Bourbon,  lit  ériger,  en  1486,  une  chapelle  qu'on  voit  encore  aujourd'hui. 
Voy..  le  plan  de  la  bataille. 

4.  Les  habitants  du  Val  de  Formigny  répètent  encore  ce  détail,  qui  s'est 
transmis  par  la  tradition. 


412  BATAILLE   DE   FORMIGNY    (1450,    15  AVRIL) 

Après  cet  effroyable  carnage,  on  compta,  sur  le  champ  de 
bataille,  3  774  morts,  tous  Anglais,  moins  une  dizaine  de  Fran- 
çais *.  On  avait  fait  douze  à  quatorze  cents  prisonniers,  et,  parmi 
eux,  le  général  en  chef,  Th.  Kyriel,  avec  deux  de  ses  lieutenants, 
Th.  Kirkeby,  H.  Norbery,  et  plus  de  quarante  gentilshommes. 
L'armée  anglaise  était  anéantie.  Ce  fut  une  revanche  de  la 
journée  d'Azincourt,  où,  trente-cinq  ans  auparavant,  Richemont 
avait  failli  périr.  Le  comte  de  Glermont,  le  comte  de  Castres, 
Godefroy  de  La  Tour,  fils  du  comte  de  Boulogne,  et  un  grand 
nombre  d'autres  seigneurs,  qui  avaient  bien  gagné  leurs  éperons, 
furent  faits  chevahers.  Le  connétable  alla  coucher  à  Trévières, 
laissant  à  son  neveu  l'honneur  de  passer  la  nuit  sur  le  champ  de 
bataille  ^  Le  lendemain,  ils  firent  creuser  de  grandes  fosses,  où  on 
entassa  les  cadavres,  puis  ils  conduisirent  l'armée,  avec  les 
prisonniers,  à  Saint-Lô,  où  ils  restèrent  trois  jours,  pour  donner 
du  repos  aux  troupes  et  des  soins  aux  blessés. 

La  journée  de  Formigny  souleva  dans  tout  le  royaume  des 
transports  de  joie  et  d'enthousiasme,  de  grandes  démonstrations 
populaires  ^.  Ce  fut  une  satisfaction  pour  le  sentiment  national  et 
un  présage  d'entière  délivrance.  Depuis  le  début  de  la  guerre  de 
Cent  ans,  la  France  n'avait  pas  remporté  une  pareille  victoire. 
Celle-ci  était  due,  en  grande  partie,  aux  réformes  militaires 
dont  le  connétable  avait  été  le  promoteur.  La  gendarmerie 
française  avait  montre,  pour  la  première  fois,  sur  un  champ  de 
bataille,  ce  qu'on  pouvait  attendre  de  la  nouvelle  armée.  Ces 
qualités  indispensables  au  soldat,  la  discipline,  la  solidité,  le 

1.  L.  Delisle,  Hist.  du  château  de  Saint -Sauveur,  p.  273,  et  Fr.  26080, 
u»  6293.  C'est  aussi  le  chiffre  de  M.  d'Escoiichy  (I,  285)  et  de  Berry.  Blondel 
(p.  173)  dit  3  674,  Grafton  (I,  635)  4  000.  —  Sur  lal)ataille  de  Formigny,  voir  : 
Gruel  (p.  224-225),  qui  était  avec  le  connétable,  mais  qui  donne  peu  de 
détails;  J.  Chartier  (II,  192-197),  qui  dut  se  renseigner  et  aller  voir  les 
lieux  avant  de  raconter  ce  fait  si  important  et  qui  fournit  d'utiles  ren- 
seignements; M.  d'Escoucliy  (I,  279-286);  Blondel  (p.  137-177);  Berry  (éd. 
anglaise,  p.  330-338)  ;  Martial  d'Auvergne  (II,  86-90)  ;  Fr.  5034,  f»  192  V  ;  Chron. 
Martinienne,  fo  ccxcu  v»;  Th.  Basin,  I,  236-239;  A.  Bouchard,  f»  clxxxiu  v- 
CLXxxv;  Ch.-E.  Lambert,  La  bataille  de  Formigny,  Caen,  1824,  in-8'';  le 
père  Daniel,  Hist.  de  France,  VI,  252-253  ;  Chronique  du  Mont-Saint- 
Michel,  I,  36;  E.  Hardy,  Origines  de  la  tactique  française,  Paris,  Dumaine, 
1879,in-8<',  t.  I,  332-338,  avec  un  petit  plan  à  la  p.  533. 

2.  M.  d'Escouchy  I,  286.  —  A  la  cour,  on  discuta  pour  décider  à  qui 
devait  appartenir  l'honneur  d'avoir  gagné  la  bataille.  «  Charles  vint,  qui 
demesla  et  osta  l'estrif,  car  il  assigna  l'honneur  et  la  gloire  de  ceste  vic- 
toire au  comte  de  Glermont.  »  (R.  Gaguin,  Les  grandes  Cronicques,  etc., 
Paris,  1514,  édit.  golh.  in-f",  f»  179  v).  Ce  jugement,  s'il  a  été  prononcé, 
n'est  pas  sans  appel.  Il  prouverait,  une  fois  de  plus,  que  Charles  VII 
n'aimait  guère  le  connétable. 

3.  Sauvai,  Antiquités  de  Paris,  I,  359. 


CAPITULATION   DE  VIRE   (1450,    AVRIL)  413 

sang-froid,  qui  avaient  fait  trop  longtemps  la  supériosité  des 
Anglais,  semblaient  acquises  à  leurs  adversaires.  On  espérait 
que  la  Normandie  entière  allait  être  bientôt  reconquise,  car  les 
Anglais  ne  pouvaient  plus  résister  '. 

Après  la  bataille  de  Formigny,  le  connétable  et  le  comte  de 
Clermont  envoyèrent  demander  au  roi  s'il  fallait  assiéger 
Vire  ou  Bayeux.  Ils  reçurent  l'ordre  de  prendre  Vire.  Ils  quit- 
tèrent Saint-LÔ  le  lundi  20  avril  ^.  Richemont  avait  déjà 
fait  partir  tout  son  matériel  de  siège  et  ordonné  aux  villes  voi- 
sines d'envoyer  les  charpentiers,  maçons,  pionniers,  mineurs 
dont  il  avait  besoin  ^.  Vire  ne  résista  pas.  Il  y  avait  dans  la 
place  300  ou  400  Anglais.  Leur  capitaine,  H.  Norbery,  avait  été 
fait  prisonnier  à  Formigny.  Il  négocia  une  capitulation,  par  la- 
quelle les  Anglais  purent  sortir,  vie  et  biens  saufs,  mais  en  lais- 
sant leur  artillerie  et  en  donnant  4  000  écus,  pour  aider  à  payer 
la  rançon  de  leur  chef  *.  Us  se  retirèrent  à  Gaen.  Le  conné- 
table et  le  comte  de  Clermont  leur  accordèrent  ces  conditions 
avantageuses,  parce  qu'ils  avaient  hâte  de  s'éloigner,  pour  aller, 
l'un  au  siège  d'Avranches,  l'autre  au  siège  de  Bayeux.  Ils  pro- 
mirent également  aux  habitants  de  la  ville  et  de  la  vicomte  de 
Vire  une  abolition  générale,  que  Charles  VII  ratifia.  En  récom- 
pense de  ses  services,  Richemont  reçut  du  roi,  sa  vie  durant, 
la  seigneurie  de  Vire.  Il  nomma  capitaine  de  la  ville  Michel  de 
Parthenay  ^. 


i.  On  leva  de  nouveaux  impôts  dans  les  provinces  pour  continuer  cette 
conquête  [Portef.  Fontanieu,  121-122,  au  19  mai  et  au  28  novembre  14S0; 
Fr.  26079,  n»»  6186,  6187,  6196,  6197,  6211;  Fr.  26080,  n»  6325;  K  68, 
n»'  39,  41;  Fr.  25711,  n»»  207,  219,  232).  Le  5  mars,  à  Bernay,  Charles  VII 
ordonne  de  lever  dans  la  vicomte  de  Gaen  une  partie  de  l'aide  de  188  000  fr. 
octroyée  à  Henri  VI,  au  mois  de  mai  précédent.  La  vicomte  de  Gaen  avait 
déjà  payé  beaucoup  pour  l'armée  du  duc  de  Bretagne  (n»  219). 

2.  Voy.  la  lettre  de  Coëtivy  ;  Gruel,  223,  et  VAppend.  XCVII  (abolition  pour 
Vire).  Le  20  avril,  à  Saint-Lô,  Richemont  ordonne  de  payer  150  saints 
d'or  à  P.  Drouart,  qui  avait  pris  l'Anglais  J.  Boutillier  à  la  bataille  de 
Formigny  (voy.  Append.  XGV).  Le  même  jour,  il  ordonne  de  rembourser 
50  saluts  d'or  à  Guil.  de  Dampierre,  qui  lui  a  prêté  100  saints  d'or,  pour 
acheter  de  la  poudre  à  canon  «  et  autre  artillerie  »,  nécessaires  au  siège 
de  Vire  (voy.  Append.  XGVl,  "n*  1). 

3.  Voy.  Append.  XGVI,  n*  2. 

4.  JJ180,  f»  57;  JJ  185,  f»  1,  no  1. 

5.  Append.  XGVII;  Grnel,  233;  Berry,  338;  M.  d'Escouchy,  I,  286-287; 
JJ  185,  f"  205.  M.  de  Parthenay  fut  remplacé  par  Jacques  de  Luxembourg, 
lieutenant  général  du  connétable  (Fr.  26082,  n"  6774,  au  14  juillet  1431). 
M.  de  Parthenay  semble  avoir  été  soupçonné  de  complicité  dans  l'assas- 
sinat de  Gilles.  Dans  un  rôle  de  dépenses  approuvé  et  signé  par  le  roi  le 
16  mars  1452  a.  st.,  on  lit  :  «  A  messire  Michel  de  Partenay,  chevalier,  la 
somme  de  xv*  1.  t.  à  lui  donnée  par  le  roy,  nostre  dit  seigneur,  -pour  le 


414  CAPITULATION  d'avranches  (1450,  mai) 

Aussitôt  après  la  prise  de  Vire,  le  comte  de  Glermont  partit, 
avec  toutes  ses  troupes,  pour  aller  se  joindre  à  l'armée  de 
Dunois,  qui  devait  faire  le  siège  de  Bayeux.  Quant  au  connéta- 
ble, il  lui  restait  à  prendre  les  places  du  Gotentin  qui  étaient 
encore  au  pouvoir  des  Anglais.  Gardant  avec  lui  le  comte  de 
Laval,  Lohéac,  l'amiral,  Jacques  de  Ghabannes,  les  sires  d'Or- 
val  *  et  de  Boussac,  il  se  dirigea  rapidement  vers  Avranches.  Il 
arriva  le  dernier  jour  d'avril  au  pont  Gillebert. 

Le  duc  de  Bretagne  ^  était  déjà  devant  Avranches,  avec  toute 
son  artillerie.  La  place,  inaccessible  d'un  côté,  défendue,  de 
l'autre,  par  des  fossés  et  par  de  puissantes  murailles,  pourvue 
d'une  garnison  de  500  hommes  aguerris,  était  difficile  à  prendre. 
Le  l"""  mai,  le  connétable  se  joignit,  avec  ses  troupes,  à  l'armée 
bretonne  ^.  C'est  ce  jour-là  qu'il  apprit  la  mort  de  l'infortuné 
Gilles,  et  la  nouvelle  lui  en  fut  confirmée  par  le  duc  lui-même, 
auquel  il  fit  les  plus  sanglants  reproches.  Toutefois ,  il  évita 
d'ébruiter  cette  triste  affaire,  à  cause  de  la  perturbation  qu'elle 
devait  jeter  dans  l'armée.  Il  fît  dresser  des  batteries  du  côté  où 
la  ville  paraissait  le  plus  abordable,  et,  au  bout  de  quelques 
jours,  les  bombardes  eurent  pratiqué  des  brèches  assez  larges 
pour  qu'on  pût  donner  l'assaut.  Le  capitaine  anglais,  J.  Lam- 
pet,  désespérant  d'être  secouru,  se  résignait  à  capituler,  quand 
sa  femme,  lui  reprochant  cette  lâcheté,  revêt  un  costume  de 
guerre,  se  met  à  la  tête  de  la  garnison,  ranime  les  courages 
abattus,  force  les  habitants  à  prendre  les  armes  et  continue  la 
résistance. 

Gependant  la  formidable  artillerie  des  assiégeants  ébranle  les 
murailles;  ils  creusent  des  galeries  souterraines  et  s'apprêtent  à 
donner  l'assaut.  Les  habitants,  épouvantés,  crient  merci;  les  An- 
glais eux-mêmes  réclament,  avec  instances,  une  capitulation. 
Alors  l'héroïne  qui  les  commande  change  de  rôle.  Parée  de 
ses  plus  brillants  atours,  cette  femme,  d'une  beauté  merveilleuse, 
va  parlementer  avec  le  duc  de  Bretagne  et,  nouvelle  Judith, 
verse,  dit-on,  un  poison  mortel  au  jeune  prince,  trop  sensible  à 

récompenser  de  la  cappitainerie  du  chastel  de  Vire,  que  ledit  seigneur  lui 
avoit  donnée,  à  la  réduccion  et  recouvrance,  et,  depuis,  l'a  reprinse  et 
donnée  à  monseigneur  le  connestable  >'  (Fr.  26081,  n»  65381). 

1.  Arnault  Amanieu  d'AIbret,  sire  d'Orval.  II  fut  capitaine  de  Bayeux 
(Fr.  26080,  n»  6396). 

2.  Lieutenant  général  du  roi  sur  le  fait  de  la  guerre  dans  la  Basse-Nor- 
mandie (JJ  180,  f"  49  V»,  n»  ex). 

3.  Voir  une  lettre  de  Pierre  de  Bretagne  à  R.  de  Carné  dans  les  Preuves 
de  rhist.  de  Bret.,  II,  col.  1443-1446,  avec  la  date  fautive  de  1449,  au  lieu 
de  1450,  3  mai.  C'est  ce  qui  a  trompé  M"".  S.  Luce  (Chron,  du  Mont-Saint- 
Michel,  p.  46,  note  1,  p.  57,  note  1);  Gruel,  225. 


CAPITULATION   DE  TOMBELAINE   (1450,   MAl)  415 

ses  séductions  *.  Elle  obtient  pour  les  assiégés  la  permission  de 
quitter  la  ville,  sans  rien  emporter,  il  est  vrai;  mais  le  duc  laisse 
à  J.  Lampet  et  à  sa  femme  tous  leurs  biens.  Louis  d'Estouteville 
est  nommé  capitaine  d'Avranches  (13  mai).  Le  siège  avait  duré 
environ  trois,  semaines  ^. 

L'armée  bretonne  alla  ensuite  assiéger  Tombelaine,  forte- 
resse bâlie  sur  un  rocher,  au  milieu  des  grèves  du  Mont-Saint- 
Michel,  défendue,  en  outre,  par  une  triple  enceinte  et  qui  ne 
pouvait  guère  être  prise  que  par  la  famine;  néanmoins  le  capi- 
taine, Makin  de  Longworth  ^,  voyant  qu'il  n'arrivait  d'Angle- 
terre aucun  secours,  traita  aussitôt  avec  le  duc.  Il  lui  remit  la 
place,  à  condition  que  les  Anglais  pourraient  en  sortir  avec  leurs 
biens,  sans  emmener  l'artillerie,  et  qu'on  leur  payerait  500  écus, 
La  garnison  alla  se  réfugier  à  Cherbourg.  Louis  d'Estouteville 
eut  aussi  la  garde  de  Tombelaine  *. 

Le  duc  de  Bretagne  ressentit  alors  les  atteintes  d'une  maladie 
qui  fît  de  rapides  progrès,  soit  qu'il  eût  été  empoisonné  réelle- 
ment, soit  que  le  remords  d'avoir  fait  périr  son  frère  eût  altéré 
sa  santé.  D'après  une  tradition  populaire,  un  cordelier,  qui  avait 
confessé  Gilles,  peu  avant  le  crime,  aborda  le  duc  dans  les 
grèves  du  Mont-Saint-Michel  et  l'ajourna,  au  nom  de  sa  victime, 
à  comparaître  devant  Dieu,  dans  quarante  jours.  Quoi  qu'il  en 
soit,  le  jeune  prince,  trop  malade  pour  continuer  la  campagne, 
dut  se  retirer.  Il  quitta  le  connétable  au  Mont-Saint-Michel,  mais 
il  lui  laissa  le  comte  de  Laval,  le  sire  de  Boussac,  le  maréchal 
de  Bretagne  et  le  sire  de  Malestroit,  avec  300  lances,  entretenues 
à  ses  frais,  pour  achever  la  conquête  de  la  basse  Normandie  ^. 

Avec  ces  troupes  et  celles  qu'il  avait  déjà,  Richemont  se  di- 
rigea vers  Bayeux  ^,  pour  coopérer  au  siège  de  Caen.  Arrivé  à 
Coutances,  il  envoya  Jacques  de  Luxembourg  et  Odet  d'Aidie 
assiéger  Saint-Sauveur-le- Vicomte,  une  des  plus  fortes  places 
de  Normandie,  protégée  par  les  marais  de  l'Ouve  et  qui  avait  une 
garnison  de  400  à  500  hommes.  Jean  de  Robessart,  chevalier  du 

1.  Cette  anecdote  ne  se  trouve  que  dans  Blondel,  p.  203-208.  II  y  a  quel- 
ques mots  qui  semblent  la  confirmer  dans  M.  d'Escouchy,  I,  28&. 

2.  M.  d'Escouchy,  I,  288;  Ordonn.,  XIV,  91-92;  Chron.  du  Mont-Saint- 
Michel,  p.  57,  note  1  ;  JJ  180,  f*  49  v-30. 

3.  Il  était  déjà  lieutenant  de  SufTolk  à  Tombelaine  en  1438.  Il  était  capi- 
taine de  cette  place  en  1445  (Clairamb.,  t.  186,  f»'  6949-6959). 

4.  M,  d'Escouchy,  I,  288-289;  Blondel,  209;  Berry,  339;  ci-dessus,  p.  396. 

5.  M.  d'Escouchy,  I,  289;  Gruel,  223;  Berry,  364. 

6.  Ckitte  ville  était  déjà  au  pouvoir  des  Français  (JJ  180,  f"  47-vo,  n°  cvi). 
Dunois  l'avait  réduite  à  capituler,  le  16  mai  {idem,  f"»  57  v»-58,  n°  vi"vi; 
J.  Stevenson,  II,  2»  partie,  730;  Ordon.,  XIV,  93-95;  Fr.  26079,  n»'  6207, 
6210;  Fr.  20579,  n»  45). 


416      CAPITULATION  DE   SAINT-SAUVEUR  ET  DE  VALOGNES  (1450,  MAl) 

Hainaut,  qui,  depuis  longtemps,  était  au  service  de  l'Angleterre, 
résista  énergiquement.  Il  fallut  que  Richemont  envoyât  à  son 
lieutenant  des  renforts.  Enfin,  après  dix  jours  de  siège,  Robes- 
sart  capitula,  vie  et  biens  saufs  *.  Odet  d'Aidie  fut  nommé  ca- 
pitaine de  Saint-Sauveur  ^.  Pendant  ce  siège,  la  garnison  anglaise 
de  Briquebec,  se  croyant  aussi  menacée,  se  rendit  à  Jacques  de 
Luxembourg,  aux  mêmes  conditions  que  Saint-Sauveur.  L.  d'Es- 
touteville  reprit  possession  de  Briquebec,  dont  il  était  le  légitime 
seigneur  ^ 

En  même  temps,  le  maréchal  de  Lohéac,  l'amiral,  Geoffroy 
de  Couvran  et  Olivier  deBroon  *,  allèrent  mettre  le  siège  devant 
Valognes.  Le  capitaine  de  la  ville,  Thomas  Chiswal  ^,  voyant 
que  les  autres  places  du  Cotentin  se  rendaient,  faute  de  secours, 
et  obtenaient  ainsi  des  conditions  favorables,  remit  Valognes  au 
maréchal  de  Lohéac,  qui  en  fut  capitaine  (mai  1450)  ".  Ces  ra- 
pides et  faciles  succès  avaient  été  obtenus  sans  qu'on  eût  même 
eu  besoin  d'employer  le  canon,  le  connétable  ayant  dirigé  sur 
Caen  toute  son  artillerie. 

Dans  le  Cotentin,  il  ne  restait  plus  aux  Anglais  que  Cherbourg, 
où  s'étaient  réfugiées  les  garnisons  chassées  des  autres  villes,  y 
compris  celle  de  Bayeux;  mais  le  siège  d'une  place  comme  Cher- 
bourg était  unç  opération  des  plus  malaisées.  Le  connétable  dut  la 
différer.  D'ailleurs  les  comtes  de  Clermont  et  de  Dunois  n'atten- 
daient plus  que  lui  pour  investir  la  grande  ville  de  Caen.  Il  se  di- 
rigea donc  de  ce  côté,  en  passant  par  Bayeux  '',  où  il  réunit  ses 
troupes.  Il  s'avança  ensuite  jusqu'au  village  de  Cheux  ®,  à  douze 
lieues  de  Caen,  avec  le  comte  de  Laval,  le  maréchal  de  Lohéac,  le 

1.  Gruel,  225;  M.  d'Escouchy,  I,  290;  L.  Delisle,  Hist.  du  château  et  des 
sires  de  Saint-Sauveur -le-Vicomle,  264-266.  Le  sire  de  Villequier,  qui  allait 
bientôt  épouser  Antoinette  de  Maignelais,  reçut,  le  10  juillet  1450,  la 
seigneurie  de  Saint-Sauveur.  On  sait  qu'Antoinette  de  Magnelais  rem- 
plaça Agnès  Sorel  auprès  de  Charles  VII  (J.  Chartier,  II,  212-214;  M.  d'Es- 
couchy. I,  291  ;  JJ  180,  f»  127  ;  voir  aussi  f"  58  v°,  n«  vi"vn,  et  JJ  183, 
f"  75  v",  n»  iiii^^xv;  JJ  182,  f»  43,  n°  Ixxi,  p.  2531,  f»  321  v). 

2.  Il  fut  plus  tard  bailli  de  Cotentin  (Pièces  orig.,  t.  15,  dossier  376 
[Aydie],  n<"  3-8). 

3.  Du  chef  de  sa  femme,  Jeanne  Paisnel{M.  d'Escouchy,  I,  291;  J.  Char- 
tier,  II,  211;  de  Gerville,  dans  les  Mémoires  de  la  Société  des  antiquaires 
de  Normandie,  année  1823). 

4.  Il  tenait  alors  garnison  à  Carentan,  avec  Guillaume  de  Rosnyvinen 
(JJ  180,  f»  34). 

5.  Clairambault,  132,  f»  3779. 

6.  Voy.  Appendice  XCVlll;  M.  d'Escouchy,  I,  292;  J.  Chartier,  II,  211-212; 
Gruel,  223.  Cette  ville  et  le  pays  voisin  furent  cruellement  éprouvés  par 
la  guerre  (Fr.  25712,  n»  263). 

.  7.  Voy.  Append.  XGVIII. 
8.  C.  de  Tilly-sur-SeuUes,  arrondissement  de  Caen. 


RICHEMONT  VA  AU   SIÈGE  DE  CAEN   (1450,   JUIN)  417 

maréchal  de  Bretagne,  Jacques  de  Luxembourg,  les  sires  d'Estou- 
teville,  de  Boussac  et  de  Malestroit.  Il  y  fut  rejoint  par  les  comtes 
de  Clermont  et  de  Castres,  l'amiral  de  Goëtivy,  P.  de  Brézé,  Jac- 
ques de  Chabannes  et  les  combattants  de  Formigny  *. 

Cette  petite  armée,  fière  de  sa  récente  victoire,  marchait, 
pleine  d'ardeur,  à  de  nouveaux  succès.  Elle  partit  de  Cheux  le 
5  juin.  Arrivée  sous  les  murs  de  Caen,  elle  s^établit  à  l'angle 
nord-ouest  de  la  ville,  vers  la  porte  de  Bayeux,  la  route  de 
Bretagne,  le  faubourg  l'Abbé  et  dans  la  presqu'île  comprise 
entre  les  deux  bras  de  l'Odon ,  à  la  grande  abbaye  de  Saint- 
Etienne  *.  C'est  là  que  logèrent  le  connétable,  le  comte  de  Cler- 
mont et  les  autres  chefs  principaux,  Dunois,  avec  le  maréchal 
de  Jaloignes  et  Charles  de  Culant,  frère  du  maréchal,  prit 
position  au  sud,  dans  le  faubourg  de  Vaucelles  ^.  On  jeta 
un  pont  sur  l'Orne,  en  aval  de  Caen;  puis  les  comtes  d'Eu  et 
de  Nevers,  avec  J,  de  Bueil  et  Joachira  Rouault,  allèrent  occu- 
per le  faubourg  Saint-Gilles  et  l'abbaye  de  la  Trinité,  à  l'est 
de  la  ville,  dans  la  direction  de  la  mer. 

Le  roi,  qui  venait  d'Argentan,  arriva  peu  après,  avec  René 
d'Anjou,  son  fils  aîné  Jean,  duc  de  Calabre,  le  duc  d'Alençon, 
les  comtes  du  Maine  et  de  Saint-Pol,  Ferry  et  Jean  de  Vaude- 
mont,  Poton  de  Saintrailles  et  d'autres  capitaines.  Il  se  rendit 
auprès  de  Dunois,  puis,  avec  René  d'Anjou,  il  alla  voir  le  conné- 
table et  voulut  monter,  avec  eux,  sur  les  tours  de  Saint-Etienne, 
pour  mieux  contempler  la  ville.  Il  se  logea  ensuite  à  l'abbaye 
d'Ardenne  *.  Le  roi  de  Sicile  et  les  autres  princes  occupèrent 
l'abbaye  de  la  Trinité  et  distribuèrent  leurs  troupes  aux  envi- 
rons de  la  ville,  qui  fut  investie  de  toutes  parts. 

Jamais  Charles  VII  n'avait  réuni  une  aussi  belle  armée.  Elle 
comptait  environ  17 000  hommes,  dont  6  000  francs  archers^. 
On  y  voyait,  avec  les  rois  de  France  et  de  Sicile,  les  plus  grands 
seigneurs  du  royaume  et  les  capitaines  les  plus  renommés. 
Jamais,  non  plus,  armée  chrétienne  n'avait  été  secondée  par  une 
artillerie  aussi  puissante  et  aussi  bien  servie.  Rien  n'y  manquait 
de  ce  qu'on  avait  inventé  jusqu'alors,  ni  les  énormes  bombardes 
pour  démolir  les  murailles,  ni  les  gros  canons,  ni  les  pièces  plus 


1.  Gruel,  p.  225.  —  G.  Gruel  accompagnait  alors  le  connétable. 

2.  En  1435,  lorsque  les  nobles  et  les  gens  du  commun  de  la  vicomte  de 
Caen  avaient  voulu  prendre  la  ville  aux  Anglais,  ceux-ci,  après  les  avoir 
repoussés,  avaient  pillé  l'abbaye  et  abattu  une  partie  des  fortifications 
que  le  roi  Jean  avait  fait  élever  (JJ  187,  f-  74,  n»  vu^nn). 

3.  M,  d'Escouchy,  I,  306-307. 

4.  JJ  186,  f»  34  V»,  n»  im^xvi,  Jacques  Cœur  était  aussi  avec  le  roi, 

5.  Voy.  Append.  XGIX. 

RiCHEMONT.  27 


418  RICHEMONT  VA   AU  SIÈGE  DE  CAEN   (4450,   JUIN) 

légères  et  plus  mobiles,  veuglaires,  ribaudequins,  coulevrines, 
ni  les  mantelets  pour  protéger  les  travaux  d'approche.  Les  frères 
Bureau,  qui  avaient  perfectionné  ce  formidable  appareil,  savaient, 
mieux  que  personne,  en  tirer  parti  *. 

Caen  était  alors,  après  Rouen,  la  ville  la  plus  peuplée,  la  plus 
riche,  la  plus  importante  de  la  Normandie.  Ses  fortes  murailles, 
baignées  par  les  eaux  de  l'Odon  et  de  TOrne,  son  château,  bâti 
sur  un  rocher  élevé,  son  puissant  donjon,  qui  dominait  de  cent 
pieds  le  château  lui-même,  rendaient  plus  difficiles  le  siège  et  la 
prise  de  cette  grande  place  *.  Le  duc  de  Somerset  y  avait  réuni 
une  garnison  de  3  à  4000  hommes,  commandés  par  des  officiers 
vaillants  et  résolus,  Davy  Hall,  Robert  de  Vere  et  H.  Redford, 
capitaines  de  la  ville,  du  château  et  du  donjon  ^.  Il  est  vrai  qu'il 
n'avait  à  compter  sur  aucun  secours  *  et  qu'il  redoutait  l'hosti- 
lité de  la  population.  Il  avait  demandé  en  Angleterre  des  ren- 
forts ;  mais  Henri  VI  et  ses  ministres  avaient  trop  d'embarras  à 
surmonter  pour  s'occuper  de  sa  situation. 

C'était  l'époque  où  Richard  d'York,  mettant  à  profit  la  faiblesse 
du  roi,  l'impopularité  de  la  reine,  l'irritation  du  peuple,  prépa- 
rait la  chute  des  Lancastre  et  la  guerre  des  Deux-Roses.  La  nou- 
velle de  la  défaite  de  Formigny  avait  porté  l'exaspération  au 
comble.  Suffolk  venait  d'être  assassiné  *  ;  une  insurrection  écla- 
tait dans  le  pays  de  Kent;  son  chef,  John  Cade,  était  entré  dans 
Londres  ®.  Découragé  par  ses  revers,  Somerset  comprenait  que 
la  Normandie  était  perdue  ;  il  sentait  aussi  peser  sur  lui  une 
responsabilité  redoutable.  Il  essaya  néanmoins  de  résister. 

Cependant  les  travaux  d'approche  étaient  poussés  de  tous  côtés 
avec  une  remarquable  promptitude,  surtout  vers  l'abbaye  de 
Saint-Etienne,  où  était  le  connétable.  Il  avait  fait  venir  du  Go- 
tentin  un  grand  nombre  de  manœuvres,  de  charpentiers,  de  ma- 
çons, de  mineurs,  avec  le  matériel  nécessaire  '.  Dès  le  premier 


1.  Berry,  édit.  J.  Stevenson,  p.  373-374.  Gaspard  Bureau,  maître  de  l'ar- 
tillerie, était  au  siège  de  Caen  (Fr.  26079,  n»  6220).  Quant  à  Jean  Bureau, 
maître  des  comptes  et  trésorier  de  France,  le  roi  lui  donna,  le  9  février 
1451,  la  seigneurie  de  Briouze,  au  bailliage  de  Caen,  pour  le  récompenser 
d'avoir  contribué  au  recouvrement  de. la  Normandie,  conduit  l'artillerie 
«  à  grant  diligence  »,  assisté  à  tous  les  sièges,  etc.  (K  68,  n»  25). 

2.  L.  Puiseux,  Siège  et  prise  de  Caen  par  les  Anglais  en  1 417,  Caen,  1858^ 
in-S»,  p.  13-19. 

3.  Grafton's  chronicle,  I,  636. 

4.  Voir  cependant  J.  Stevenson,  II,  2e  partie,  595-597. 

5.  Il  avait  d'abord  été  mis  en  accusation  (Rolls  ofParl.,  V,  176  et  suiv.). 

6.  Proceedings,  VI,  préface,  xxni  et  suiv.,  xxxi  et  suiv.,  et  p.  96-101,, 
107-109.  Issues  ofthe  Exchequer,  p.  467,  470,  471. 

7.  Voy.  Append.  G. 


CAPITUUTION  DE  CAEN   (1450,  24  JUIN)  419 

jour,  il  avait  pris  d'assaut  le  boulevard  qui  protégeait  la  porte 
de  Bayeux.  Aussitôt  les  mineurs  s'étaient  rais  à  l'œuvre.  Jacques 
de  Chabannes  avait  fait  creuser  une  tranchée  ouverte,  et  Le  Bour- 
geois *  une  galerie  souterraine  qui  allaient  jusqu'au  pied  des 
murs,  du  côté  de  Vaucelles,  Dunois  avait  aussi  enlevé  les  boule- 
vards de  Gaen,  après  un  combat  acharné,  mais  ce  fut  Richemont 
qui  fut  prêt  le  premier  à  donner  l'assaut.  Le  Bourgeois  avait 
fait  sauter  une  tour  et  un  pan  de  muraille  qu'il  avait  minés; 
une  large  brèche  était  ouverte,  et  on  pouvait  combattre  mains 
à  mains. 

Le  connétable  avait  grand'peine  à  contenir  l'impatience  de 
ses  Bretons;  mais  le  roi,  par  pitié  pour  la  population,  ne  voulut 
pas  permettre  l'assaut.  Il  aimait  mieux  obliger  les  Anglais  à  ca- 
pituler. Somerset  s'était  retiré  dans  le  château,  avec  sa  famille. 
On  raconte  qu'un  boulet  étant  tombé  entre  la  duchesse  et  ses 
enfants,  elle  fut  si  effrayée  qu'elle  se  jeta  aux  genoux  de  son 
mari,  en  le  suppliant  de  traiter  avec  le  roi  de  France.  Le  duc 
allait  céder,  quand  Davy  Hall  déclara  qu'il  avait  reçu  du  duc 
d'Yorli  le  commandement  de  la  ville  et  qu'il  ne  consentirait 
jamais  à  la  rendre.  A  cette  nouvelle,  la  population,  irritée,  menaça 
d'ouvrir  elle-même  les  portes  aux  assiégeants,  si  la  capitulation 
n'était  pas  signée  dans  trois  jours.  Elle  fut  conclue  le  24  juin  ^. 
Somerset  prit  l'engagement  de  livrer  la  ville  le  1"  juillet,  s'il 
n'était  pas  secouru  dans  l'intervalle,  clause  dont  il  savait,  mieux 
que  personne,  l'inutilité.  Les  Anglais  eurent  le  droit  de  sortir 
avec  tous  les  biens  qu'ils  pourraient  emporter.  On  promit  même 
de  leur  fournir,  pour  cela,  des  chariots  et  des  navires,  à  condi- 
tion qu'ils  s'en  retourneraient  en  Angleterre.  Us  devaient  donner 
dix-sept  otages. 

Le  l^""  juillet,  Richard  Harington,  bailli  de  Gaen,  vint  apporter 
les  clefs  de  la  ville,  du  château  et  du  donjon  au  connétable,  qui 
les  remit  aussitôt  à  Dunois,  nommé  capitaine  et  gouverneur  de 
la  place.  Les  otages,  parmi  lesquels  se  trouvaient  Robert  de 
Vere  et  Hugues  Spencer,  furent  aussi  amenés  à  Richemont.  H 
en  confia  la  garde  à  Gilles  de  Saint-Simon  et  à  Guillaume 
Gruel  \ 


1,  Gruel,  226;  M.  d'Escouchy,  I,  310;  d'Argentré,  937;  Martial  d'Auver- 
gne, édit.  goth.  de  1493,  à  la  date,  ou  t.  II  de  l'édit,  de  1724,  p.  97. 

2,  Grafton,  I,  636;  K  68,  n-  45.  J.  Ghartier,  II,  220,  dit  que  ce  fut 
le  25  juin.  Charles  VII  accorda  une  abolition  générale  aux  habitants  de 
Gaen  (JJ  180,  f"  66,  n*"  vu"*!;  Gh.  Hippeau,  l'Abbaye  de  Saint-Etienne  de 
Gaen,  Gaen,  1855,  in-4,  p.  141-143;  Ordonn.,  XIV,  96-98). 

3,  Sur  le  siège  de  Gaen,  voir  :  Blondel,  213-228;  Berry,  dans  le  même 
volume,  345-358;  Jean  Ghartier,  t.  II,  214-223;  M.  d'Escouchy,  t.  I,  304-314; 


420  RICHEMONT  ASSIÈGE   CHERBOURG   (14S0,   JUILLET) 

Le  6  juillet,  Charles  VII  fit  son  entrée  solennelle  à  Gaen.  Le 
connétable  ne  figurait  pas  dans  son  cortège.  Chargé  de  con- 
duire jusqu'au  port  ae  Ouistreham  ^  le  duc  et  la  duchesse  de 
Somerset,  de  pourvoir  à  la  subsistance  et  à  l'embarquement 
des  Anglais  2,  il  avait  hâte  aussi  de  repartir,  pour  faire  le  siège 
de  Cherbourg.  Cette  ville  était  la  seule,  avec  Falaise  et  Domfront, 
qui  fût  encore  au  pouvoir  des  Anglais.  Pendant  qu'une  partie 
de  l'armée  allait,  avec  Jean  Bureau,  assiéger  ces  deux  dernières 
villes,  le  connétable,  avec  le  comte  de  Clermont,  Gaspard 
Bureau  ^  et  les  troupes  qui  avaient  combattu  à  Formigny,  ren- 
forcées par  2  000  francs  archers,  se  dirigeait  vers  Cherbourg,  par 
Carentan  et  Valognes,  Pendant  qu'il  était  encore  sous  les  murs 
de  Caen,  il  avait  prescrit,  dès  le  30  juin,  aux  villes  du  Gotentin 
d'envoyer  à  Valognes,  avant  le  6  juillet,  des  maçons,  des  char- 
pentiers, des  manœuvres,  avec  tout  ce  qui  était  nécessaire  pour 
les  travaux  du  siège  ^.  Les  opérations  commencèrent  donc  sans 
retard. 

Cherbourg  passait  alors  pour  la  plus  forte  place  de  la  Nor- 
mandie. On  croyait  même  qu'elle  ne  pouvait  être  prise  que  par 
la  famine.  Henri  VI  n'avait  pu  la  réduire  que  par  ce  moyen  *,  après 
un  blocus  de  six  mois;  Du  Guesclin  lui-même  avait  échoué  devant 
ses  murs  ^.  Thomas  Gower  y  commandait,  et,  avec  une  garnison 
de  1  000  hommes,  il  ne  doutait  pas  qu'il  pût  repousser  toutes 
les  attaques.  Ce  siège  fut  le  plus  difficile  de  la  campagne.  Il 
dura  environ  un  mois  ^  Il  fut  dirigé,  sur  les  trois  points  prin- 
cipaux, par  le  connétable,  par  le  comte  de  Clermont,  par 
l'amiral  de  Coëtivy,  que  secondaient  le  maréchal  de  Brq.tagne 
et  J.  Rouault.  L'artillerie  de  Gaspard  Bureau  *  ébranlait  des 
murailles  qui,  dans  les  autres  sièges,  avaient  résisté  à  des  engins 

Gruel,  22S-226  ;  K  68,  n»  45  ;  Belleforest,  Les  grandes  annales,  Paris,  1579, 
in-f»,  f«  1134  V»;  Martial  d'Auvergne,  II,  94-102,  et  Fr.  3054,  f»  201;  Chron. 
Martinienne,  f"  ccxciii. 

1.  Canton  de  Douvres,  arrondissement  de  Caen. 

2.  Blondel,  224-223;  J.  Chartier,  II,  223.  —  M.  d'Escouchy  dit  que  So- 
merset et  les  Anglais  s'embarquèrent  à  Calais;  mais,  en  cela,  il  n'est  pas 
d'accord  avec  Blondel,  Berry,  J.  Chartier. 

3.  Clairamb.,  t.  XXIII,  f»  1689. 

4.  Append.  CI,  n»»  1,  2,  3,  4;  M.  d'Escouchy,  III,  371.  Jacques  Cœur  prêta 
60  000  1.  t.  pour  ce  siège  (P.  Clément,  Jacques  Cœur,  175-176). 

5.  Elle  fut  alors  assiégée  par  Glocester,  frère  de  Henri  V,  en  1417  (Le 
Fèvre  de  Saint-Bemy,  I,  320;  Rolls  of  Parliament,  IV,  320). 

6.  D'après  Blondel,  232-233. 

7.  On  avait  supposé  qu'il  durerait  plus  longtemps  (voir  Append.  CI,  n»  4), 
et  l'argent  que  le  connétable  avait  demandé  ne  fut  pas  dépensé  entière- 
ment. 

8.  Pièces  orig.,  t.  558,  dossier  12585  (Bureau),  n"  3. 


CAPITULATION   DE  CHERBOURG   (1450,   42  AOUT)  42i 

moins  puissants.  Les  bombardes  tiraient  sans  relâche,  si  bien 
que  neuf  ou  dix  crevèrent.  Cependant  les  Anglais  résistaient;  ils 
attendaient  du  secours.  En  effet,  quelques  vaisseaux,  parmi 
lesquels  on  remarquait  un  grand  bâtiment,  appelé  la  nef  Henry, 
débarquèrent  des  renforts  *.  L'artillerie  de  la  place  répondait 
vigoureusement  à  celle  des  assiégeants  et  rendait  fort  dangereux 
les  travaux  d'approche.  C'est  ainsi  que  l'amiral  et  Le  Bourgeois 
furent  tués  dans  une  tranchée,  à  huit  ou  dix  jours  d'intervalle. 
Ce  fut  une  grande  perte  pour  l'armée  ;  et  le  connétable  en  fut 
vivement  affecté  '. 

Les  maladies  faisaient  aussi  un  grand  nombre  de  victimes,  et 
la  situation  eût  pu  devenir  inquiétante,  si  l'on  n'avait  eu  re- 
cours à  un  moyen  aussi  hardi  qu'ingénieux,  pour  vaincre  la 
résistance  des  assiégés.  Sur  l'ordre  de  Richemont,  Gaspard  Bu- 
reau établit,  dans  la  mer  même,  au  milieu  des  rochers  qui  res- 
taient découverts  à  marée  basse,  une  batterie  de  quatre  grosses 
bombardes.  Quand  le  flot  montait,  on  les  bouchait  hermétique- 
ment; on  les  recouvrait  d'une  enveloppe  de  cuir,  enduite  de 
graisse,  fixée  par  un  cercle  de  fer.  Quand  la  mer  se  retirait,  on 
pouvait  bombarder  la  ville  du  côté  où  elle  avait  été  jusque-là 
inattaquable,  «  de  quoy  les  Anglois  furent  plus  esmerveillez  que 
d'aucune  aultre  chose  ^.  »  Ils  commencèrent  à  désespérer,  et, 
comme  ils  n'attendaient  plus  d'autres  secours,  ils  aimèrent  mieux 
traiter  que  de  s'exposer  à  être  faits  prisonniers.  La  capitulation 
fut  conclue  le  12  août  1450,  entre  le  connétable,  le  comte  de 
Clermont,  lieutenant  général  du  roi  dans  la  basse  Normandie,  et 
Th.  Gower,  capitaine  de  Cherbourg. 

Cette  date  mémorable  marque  la  fin  de  la  domination  anglaise 
en  Normandie  *.  Falaise,  Domfront  avaient  aussi  capitulé  (23  juil- 
let —  2  août)  *;  la  province  entière  .avait  été  reconquise  dans 
l'espace  d'un  an  ^.  Le  connétable  avait  pris  une  grande  part  à 


1.  J.  Stevenson,  I,  317,  520. 

2.  Blondel,  233;  d'Argentré,  938;  M.  d'Escouchy,  I,  317;  Gruel,  226;  Pr. 
de  Coëtivy  fut  remplacé,  comme  amiral,  par  J.  de  Bueil  (Fr.  26080,  n°  6397). 

3.  Gruel,  226. 

4.  Voy.  Appendice  Cil;  Martial  d'Auvergne,  II,  106-108;  Chron.  Marti- 
nienne,  f»  ccxcni;  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  58-39;  Blondel,  231-236;  K  68, 
n»  48;  Berry,  361,  363-367;  M.  d'Escouchy,  I,  314-316.  —  Le  connétable  donna 
la  garde  de  Cherbourg  à  l'amiral  J.  de  Bueil,  qui  y  mit  les  gens  de  sa  com- 
pagnie d'ordonnance  (Gruel,  226,  confirmé  par  JJ  185,  f»  25  v»;  Pièces 
orig.,  t.  349,  dossier  12360  [de  Bueil],  n"  110-116;  de  Gerville,  dans  les 
Mémoires  de  la  Soc.  des  antiq.  de  Normandie,  année  1824.  p.  197-209.) 

5.  J,  Stevenson,  II,  2"  partie,  735;  Fr.  26079,  n»  6223;  JJ  183,  f»  72. 

6.  Le  31  août,  le  roi  écrit  une  lettre  circulaire,  pour  annoncer  la  prise 
de  Cherbourg  et  le  recouvrement  de  toute  la  Normandie.  Il  veut  qu'on 
en  rende  grâces  à  Dieu,  par  processions  générales  et  messes  solennelles 


422  TOUTE   LA  NORMANDIE  EST  RECONQUISE   (1450,   AOUT) 

cette  campagne,  que  le  roi  qualifiait  avec  raison  de  miraculeuse^  ; 
«  et  ainsi  fut  le  pais  délivré  des  Anglais,  qui,  par  l'espace  de 
trente-trois  ans,  l'avaient  occupé  ^.  » 

Le  roi  confirma  les  mesures  prises  par  le  duc  de  Bretagne  et 
par  le  connétable  pendant  celte  guerre  ^,  traités  conclus  avec  les 
Anglais,  nominations  aux  offices  civils  et  militaires,  promesses 
de  pardon  faites  aux  habitants.  Il  accorda  une  amnistie  géné- 
rale *  et  voulut  que  les  populations  fussent  traitées  avec  une  mo- 
dération qui  leur  fît  aimer,  dans  la  patrie  délivrée,  le  gouverne- 
ment du  souverain  légitime.  Déjà  la  discipline  observée  par  les 
troupes  durant  la  campagne  avait  produit  la  meilleure  impres- 
sion ^.  Pour  maintenir  cet  état  de  choses  en  Normandie,  pour  y 
faire  régner  l'ordre  et  la  sécurité,  le  roi  pouvait  compter  sur  le 
connétable. 

dans  toutes  les  églises  notables  du  royaume,  et  qu'à  l'avenir  pareilles  céré- 
monies se  fassent,  chaque  année,  le  12  août  (Fr.  6966  [Legrand,  VI],  f"  219; 
J.  Stevenson,  I,  307;  J.  Chartier,  III,  331  ;  P.  Louvet,  Hist.  des  antiqiiitez  du 
Beauvoisis,  Beauvais,  1631,  in-4°,  t.  Il,  567,  etc.).  —  Médailles  commémora- 
tives  dans  Mézeray,  II,  p.  90,  n°»  23,  24,  et  Daniel,  Hist.  de  Fr.,  VU,  216. 

1.  «  Esquelz,  recouvrement  et  réduction,  à  bien  tout  considérer, ».. 

est  plus  à  croire  que  ce  est  d'œuvre  divin  et  miraculeux  que  autrement  » 
(Lettre  circulaire  du  31  août  1450). 

2.  L.  Delisle,  Hist.  du  chat,  de  Saint-Sauveur,  p.  267,  274;  Chron.  du 
Mont-Saint-Michel,  p.  59.  A  la  même  époque,  les  Anglais  craignaient  déjà 
une  attaque  sur  l'Ile  de  Wright  (J.  Stevenson,  II,  2«  partie,  474). 

3.  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  38,  E,  105;  Xi»  8605,  i"^  138  V-141,  144- 
145,  171-173;  JJ  180,  f»'  49  ^-50.—  Nouvelle  confirmation  en  1453  (JJ  185, 
f»  205;  X«a  1483,  fos  88,  89;  Ordonn.,  XIV,  256-258;  M.  d'Escouchv,  I,  286-287). 

4.  JJ  185,  f"  109. 

5.  Berry,  p.  370;  Blondel,  p.  236-238.  Dans  sa  lettre  du  31  mai  14S0,  le 
roi  fait  remarquer  non  seulement  la  brièveté  du  temps  employé  à  la  réduc- 
tion de  la  Normandie,  mais  encore  «  la  manière  du  faire,  et  en  quoy  rai- 
sonnablement on  ne  peut  noter  aucune  cruauté,  ne  inhumanité;  ne  y  sont 
intervenus  les  détestables  maulx  qui,  souventefois,  aviennent  en  fait  de 
guerre.  »  —  Dès  le  mois  d'octobre,  Théaulde  de  Valperga,  bailli  de  Lyon, 
est  chargé  d'empêcher  tout  acte  de  pillage  de  la  part  des  gens  de  guerre 
en  Normandie  (Fr.  26079,  n»  6261;  M.  d'Escouchy,  I,  243-244). 


CHAPITRE  VIII 

LES   DERNIÈRES    ANNÉES    (1450-1458) 


Richemont  reçoit  le  gouvernement  de  la  Normandie.  —  Il  se  rend  auprès 
du  roi,  puis  eu  Bretagne.  —  Testament  de  François  I«'.  —  Richement 
héritier  présomptif  du  duché  de  Bretagne.  —  Il  assiste  au  couronne- 
ment de  son  neveu  Pierre  II  et  vient  avec  lui  à  la  cour.  —  Hommage 
de  Pierre  II.  —  Richement  poursuit  les  assassins  de  Gilles.  —  Il  va  à 
Parthenay,  puis  revient  en  Bretagne,  où  il  fait  exécuter  plusieurs  des 
meurtriers  de  Gilles.  —  Don  Carlos  de  Viana  et  Jacques  II  d'Ecosse.  — 
Pendant  la  conquête  de  la  Guyenne,  Richement  retourne  en  Normandie. 

—  Il  vient  demander  au  roi  la  grâce  du  comte  d'Armagnac.  —  Les  An- 
glais menacent  la  Normandie.  —  Mesures  de  défense  prises  par  le  con- 
nétable. —  Nouvelles  plaintes  du  roi  d'Ecosse  contre  le  duc  de  Bretagne. 

—  Il  envoie  des  ambassadeurs  à  Charles  VII  et  en  Bretagne.  —  Riche- 
mont  va  en  Bretagne  et  revient  en  Normandie.  —  Seconde  conquête  de 
la  Guyenne.  —  Le  connétable  se  rend  à  la  cour  et  fait  un  rapport  au  roi 
sur  l'état  de  la  Normandie.  —  Il  retourne  en  Bretagne,  pour  conclure  Ifi 
mariage  du  comte  d'Étampes  avec  Marguerite  de  Bretagne  et  régler  la 
soiccession  au  duché.  —  Le  roi  approuve  l'ordre  de  succession.  —  Mis- 
sion du  connétable  et  de  Dunois  en  Savoie.  —  Ils  amènent  le  duc  Louis  I" 
&  Sain t-Pour gain.  —  Le  roi  fait  arrêter  le  duc  d'Alençen.  —  Richement 
essaye  de  le  sauver.  —  Richement  est  envoyé  à  Paris,  où  il  met  fin  à  une 
longue  querelle  entre  les  ordres  mendiants  et  l'Université.  —  Il  retourne 
i  Parthenay,  puis  en  Bretagne. —  Mort  de  Pierre  II.  — Richement  devient 
duc  de  Bretagne  sous  le  nom  d'Artur  III.  —  Son  entrée  à  Rennes.  — 
Il  se  rend  à  la  cour  de  France.  —  Sa  renommée.  —  Différends  avec  le 
roi.  —  Condamnation  du  duc  d'Alençon.  —  Artur  III  obtient  sa  grâce. 

—  Il  fait  hommage  au  roi.  —  Il  revient  en  Bretagne.  —  Querelle  avec 
Pévêque  de  Nantes.  —  Derniers  projets  d'Artur  III.  —  Sa  mort. 


Pendant  les  huit  années  qui  suivirent  la  conquête  de  la  Nor- 
mandie, Richemont  rendit  encore  de  grands  services,  mais  il  ne 
joua  plus  un  rôle  aussi  brillant.  Agé  de  cinquante-sept  ans,  il 
avait  conservé  toute  son  activité,  toute  son  énergie,  et  il  ne  cher- 
chait pas  le  repos,  tant  que  les  ennemis  occupaient  une  partie  de 
la  France.  Toutefois,  ce  fut  Dunois,  plus  jeune  que  lui,  d'environ 


424      RICHEMONT  A   LE   GOUVERNEMENT   DE   LA  NORMANDIE    (1450) 

dix  ans,  qui  fut  chargé  de  reprendre  la  Guyenne  aux  Anglais.  Il 
est  vrai  que  le  roi  voulait  utiliser  ailleurs  les  talents  et  la  grande 
autorité  du  connétable. 

Dès  le  11  septembre,  un  mois  après  la  capitulation  de  Cher- 
bourg, Charles  VII  écrivait  aux  bonnes  villes  du  royaume  pour 
leur  annoncer  le  recouvrement  de  la  Normandie  et  le  départ  de 
l'armée  qui  allait  reconquérir  la  Guyenne  *.  Malgré  les  troubles 
qui  paralysaient  le  gouvernement  anglais,  il  était  nécessaire  de 
maintenir  en  Normandie  des  forces  assez  considérables  pour 
mettre  ce  pays  à  l'abri  de  toute  surprise.  Le  roi  y  laissa  six  cents 
lances  et  des  troupes  auxiliaires,  qu'il  était  obligé  de  prendre  à 
sa  solde,  outre  les  compagnies  d'ordonnance,  tant  que  la  guerre 
n'était  pas  terminée  ^.  La  milice  des  francs  archers,  qui  allait  être 
établie  dans  toute  la  province,  devait  contribuer  à  sa  défense. 
Le  connétable,  investi  du  commandement  supérieur  %  eut  à  com- 
pléter cette  organisation  militaire  et  à  en  régler  les  détails.  Il  fut 
secondé  par  P.  de  Brézé,  grand  sénéchal  de  Normandie  *,  et  par 
Dunois.  II  y  avait  beaucoup  à  faire  pour  rétablir  l'administration 
française  dans  cette  grande  province. 

Après  la  reddition  de  Cherbourg,  Richemont  se  rendit  d'abord  ^ 
auprès  du  roi,  qui  l'attendait  à  Ghâteau-du-Loir  ^,  pour  lui 
donner  ses  instructions  sur  le  gouvernement  de  la  Normandie. 
Il  fut  accueilli  comme  méritait  de  l'être  un  des  libérateurs  de  la 
France.  Après  avoir  conféré  avec  le  roi,  il  alla  voir,  à  Parthenay, 
la  comtesse  de  Richemont,  et  retourna  bientôt  en  Bretagne,  où 
l'appelait  son  neveu  Pierre  II  (septembre-octobre  1450). 

François  1"%  fils  aine  de  Jean  V  et  duc  de  Bretagne  après  lui, 
depuis  1442,  était  mort  le  18  juillet  1450  '',  ne  laissant  que  des 
filles,  Marguerite  et  Marie,  nées  de  son  deuxième  mariage  avec 
Isabelle  Stuart,  fille  de  Jacques  P'',  roi  d'Ecosse.  Dans  un  tes- 


1.  Fr.  6487,  f»  1  et  M.  d'Escouchy,  III,  372. 

2.  Fr,  25712,  n»  247;  Fr.  21427,  n»  2;  J.  du  Clercq,  p.  610;  ci-dessus,  p.  365. 

3.  J.  Bouchet,  Annales  d'Aquitaine,  p.  260.  «  Pour  laquelle  province  (la 
Normandie)  garder,  fut  ordonné  très  haut  et  puissant  seigneur,  messire 
Artus  de  Bretaigne,  comte  de  Richemont  et  connestable  de  France,  comme 
chef  »  (J.  Chartier,  11,  141).  Il  semble  toutefois  que  le  connétable  s'occupa 
surtout  de  la  Basse-Normandie  et  Dunois  de  la  Haute-Normandie  (Fr.  5909, 
fo  xi^m  y).  Le  connétable  avait,  pour  ses  fonctions,  un  traitement  de 
6000  liv.  t.  Voy.  Appendice  CVIII,  n»  1  (Quittance  du  24  sept.  1453). 

4.  Fr.  26080,  n»  6394. 

5.  Par  Valognes,  Garentan,  Caen,  Falaise,  Argentan,  Le  Mans  et  Château- 
du-Loir  (Gruel,  226).  Le  roi  était  le  22  août  à  Château-du-Loir  (Mat.  d'Es- 
couchy, I,  p.  318,  note  1). 

6.  Arrondissement  de  Saint-Calais. 

7.  Preuves  de  l'Histoire  de  Bretagne,  t,  II,  col.S1539.  D'Argentré,  942. 


RICHEMONT  HÉRITIER  DU  DUCHÉ   DE  BRETAGNE   (1450)  425 

tament  fait  à  Vannes,  le  22  janvier  14o0  *,  il  avait  pris  des  dis- 
positions relatives  à  sa  femme  et  à  ses  filles.  Il  avait  désigné 
comme  exécuteurs  testamentaires  son  oncle  Artur  et  son  frère 
Pierre,  et  leur  avait  confié  la  garde  de  ses  enfants,  mais  il 
n'avait  pas  réglé  la  succession  au  duché  de  Bretagne.  Cette 
question  pouvait  encore  susciter  une  guerre  comme  celle  qui 
avait  désolé  la  Bretagne  après  la  mort  de  Jean  III,  en  1341.  Jadis 
les  femmes  étaient  aptes  à  hériter  du.  duché,  comme  les  enfants 
mâles,  et  il  se  pouvait  faire  que  les  filles  de  François  l""  voulus- 
sent lui  succéder,  maigre  le  droit  nouveau,  mis  en  vigueur  par 
le  traité  de  Guérande  (1365), 

Pour  prévenir  toute  contestation,  François  I*""  déclara,  le  jeudi 
16  juillet  ^  devant  une  assemblée  de  barons  et  de  prélats,  qu'il 
laissait  le  duché  de  Bretagne  à  son  frère  Pierre;  que,  si  ce  der- 
nier n'avait  pas  de  fils,  son  oncle  Artur  lui  succéderait,  et  que, 
si  Artur  mourait  sans  postérité  mâle,  la  couronne  reviendrait  à 
François,  fils  de  Richard,  comte  d'Etampes  ^.  Le  duc  exprima 
aussi  le  désir  que  sa  fille  aînée,  Marguerite,  fût  mariée  au  jeune 
comte  d'Etampes  '',  et  il  chargea  le  connétable  de  faire  exécuter 
ses  volontés  dernières^.  Ces  dispositions,  qui  devaient  toutes  être 
réalisées,  furent  consignées,  le  même  jour,  dans  un  codicille. 
Pierre  II  n'ayant  pas  d'enfants,  Richemont  se  trouvait  ainsi 
l'héritier  présomptif  du  duché  de  Bretagne. 

Le  nouveau  duc,  Pierre  II,  fut  couronné  à  Rennes  (octo- 
bre 1450),  en  présence  de  son  oncle  Artur,  des  comtes  d'Etam- 
pes, de  Penthièvre  et  de  Laval,  qui  lui  rendirent  hommage  ^.  Il 
fit  son  entrée  à  Nantes  quelques  jours  après'',  le  lundi  12  octo- 


1.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1517-1520. 

2.  Preuves  de  V Histoire  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1535-1537;  Archives  de  la 
Loire-Inférieure,  cassette  4,'E,  12;  d'Argentré,  p.  942. 

3.  Voir  le  tableau  généalogique. 

4.  Le  2  septembre  1451,  Richemont  et  le  comte  d'Angoulême  autorisent 
François  de  Bretagne,  comte  d'Etampes,  dont  ils  sont  curateurs,  à  faire 
hommage  au  duc  d'Anjou,  pour  les  flefs  de  son  ressort  (Arch.  de  la  Loire- 
Infér.,  cass.  2,  E,  5). 

5.  L'original  du  testament,  avec  le  codicille,  est  aux  Arch.  de  la  Loire- 
Infér.  (cass.,  9  E,  25).  Il  est  signé  François,  Ysabeau.  Le  testament  de 
François  I",  avec  le  règlement  de  succession,  est  reproduit  dans  un  procès- 
verbal  d'une  assemblée  des  Etats  de  Bretagne  tenue  à  Vannes  le  13  no- 
vembre 1455.  Cette  longue  pièce,  qui  porte  la  signature  de  Pierre  II,  est 
aussi  aux  Archives  de  la  Loire-Inférieure  (cassette  4,  E,  12).  Le  codicille 
qui  se  trouve  dans  la  cass.  9,  E,  25,  porte  la  date  du  17  juillet  et  non  du  16. 

6.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1458.  Nicolas  V  envoya  au  nou- 
veau duc  une  bulle  de  condoléance  sur  la  mort  de  son  frère  (Fr. 
2707,  f"  181). 

7.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  t.  II,  col.  1458. 


426      RICHEMONT  AU  COURONNEMENT  DE  PIERRE  II   (1450,  OCTOBRE) 

bre,  escorté  des  mêmes  princes  et  seigneurs.  Le  connétable, 
tout  en  assistant  aux  fêtes  qui  furent  données  à  cette  occa- 
sion, s'occupa  aussi  de  faire  exécuter  l'arrangement  conclu 
par  son  intermédiaire  entre  François  I""  et  Jean  de  Blois  (le 
27  juin  1448)  *.  On  se  rappelle  que  celui-ci  avait  renoncé  aux 
prétentions  que  les  Penthièvre  pouvaient  avoir  à  la  succession 
de  Bretagne  et  que  le  duc  François  I"  s'était  engagé  à  lui  donner 
les  terres  de  Champtocé,  d'Ingrande  et  de  Palluau,  ou  d'autres 
de  même  valeur  ^.  Il  fallut  négocier  avec  Marie  de  Raiz,  veuve 
de  l'amiral  de  Goëtivy,  pour  entrer  en  possession  de  Champtocé  ^ 
et  d'Ingrande  \  et  avec  René  d'Anjou,  pour  obtenir  sa  renoncia- 
tion aux  droits  qu'il  avait  sur  ces  terres  ^. 

Le  due  surprit  le  consentement  de  Marie  de  Raiz  par  des  moyens 
peu  honorables  ^,  et  Richemont  conclut  un  accord  avec  le  roi  de 
Sicile,  moyennant  une  indemnité  pécuniaire  '.  Quant  à  Jean  de 
Blois,  il  reçut,  un  peu  plus  tard,  le  comté  de  Penthièvre,  au  lieu 
d'Ingrande  et  de  Champtocé  (29  décembre  1450)  *.  Cette  affaire, 
qui  intéressait  le  connétable,  fut  donc  terminée.  Au  mois  d'oc- 
tobre eurent  lieu  aussi,  à  Nantes,  les  noces  du  comte  de  Laval 
et  de  Françoise  de  Dinan,  veuve,  à  treize  ans,  du  malheureux 
Gilles  de  Bretagne.  Pierre  II  exploita  indignement  la  faiblesse  de 
cette  enfant,  qui  préférait  au  comte  de  Laval  son  fils,  le  jeune 
sire  de  Gavre,  et  il  imposa  au  comte  lui-même  les  conditions 
les  plus  onéreuses,  pour  consentir  à  son  mariage  '. 

1.  Voir  ci-dessus,  p.  386. 

2.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  t.  Il,  col.  1539. 

3.  Arrondissement  d'Angers. 

4.  Id. 

3.  11  y  avait  eu  d'abord  entre  René  d'Anjou  et  le  duc  de  Bretagne  un 
procès  que  ce  dernier  avait  perdu  (X*^  24,  au  5  août  1448). 

6.  Le  duc  s'entendit  avec  les  deux  frères  de  Prigent  de  Coctivy,  Olivier  et 
Christophe,  qui  arrachèrent  à  leur  belle-sœur  une  procuration  les  autori- 
sant à  livrer  Ingrande  et  Champtocé.  Marie  de  Raiz,  ayant  ensuite  épousé 
le  maréchal  de  Lohéac,  révoqua  sa  procuration,  réclama  les  deux  villes,  et 
Pierre  II  fut  obligé  de  l'indemniser  en  argent  (D.  Taillandier,  HisL  de  Bret., 
t.  II,  p.  39;  Pièces  orig.,  t.  797,  n»  43;  X*»  1483,  f»»  127  V,  128,  140,  146  v«, 
155  v,  177  vo,  181  v»,  184,  213  v»,  311  v°,  328,  etc.)- 

7.  Cet  accord  fut  conclu  le  10  octobre  à  Angers,  en  présence  de  Michel 
de  Parthenay  {Preuves  de  VHist.  de  Bret.,  t.  II,  col.  1541-1544). 

8.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1539,  1541,  1534;  Fr.  22327,  f»  119. 
Le  comte  de  Penthièvre,  après  avoir  rendu  des  services  au  roi  dans  la 
campagne  de  Guyenne,  en  1431,  mourut  sans  postérité,  en  1452.  Ses  do- 
mainee  passèrent  à  Jean  de  Brosse,  seigneur  de  Sainte-Sévère,  mari  de  sa 
nièce,  Nicole  de  Bretagne  (fille  de  Gh.  de  Blois,  baro©  d'Avangour,  et  d'Isa- 
belle de  Vivonne).  Voy.  ci-dessus,  p.  53,  59. 

9.  D.  Lobineau,  1,  647;  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  t.  II,  39-40, 
Preuves,  II,  col.  152.  Guy  XIII,  comte  de  Laval,  avait  perdu  sa  première 
femme,  Isabelle  de  Bretagne,  fille  de  Jean  V.  (Voy.  le  tableau  généal.) 


PIERRE  II   REND   HOMMAGE  A  CHARLES  VII   (1450,    3  NOVEMBRE)   427 

Les  fêtes  terminées,  Richemont  et  son  neveu  partirent  de 
Nantes  pour  Angers,  où  Charles  VII  était  venu,  avec  le  roi  de 
Sicile,  son  fils,  Jean,  duc  de  Galabre,  son  gendre,  Ferry  de  Vau- 
dremont,  et  une  foule  de  grands  seigneurs.  Les  services  rendus, 
pendant  la  dernière  campagne,  par  le  connétable,  par  le  duc 
François  P',  par  les  Bretons  méritaient  autant  d'égards  que  de 
reconnaissance.  Pierre  II  et  son  oncle  Arlur  arrivèrent  à  Angers 
le  24  octobre,  avec  le  maréchal  de  Lohéac  et  une  suite  nom- 
breuse. Le  roi  s'avança  jusqu'à  la  première  porte  du  château, 
pour  les  recevoir  et  leur  souhaiter  la  bienvenue,  en  leur  expri- 
mant sa  gratitude  et  ses  félicitations.  Le  lendemain,  il  y  eut,  au 
château,  un  grand  dîner,  présidé  par  le  connétable,  en  l'absence 
du  roi.  René  d'Anjou,  Ferry  de  Vaudemont,  le  duc  de  Galabre, 
le  maréchal  de  Lohéac  y  assistaient  *.  Les  princes  allèrent 
ensuite  à  Montbazon  ^,  où.  se  trouvait  alors  la  cour. 

C'est  là  que  le  nouveau  duc  de  Bretagne,  Pierre  II,  fit  hom- 
mage au  roi  de  France,  le  3  novembre  1450,  en  présence  du 
connétable,  des  comtes  de  Glermont,  de  Dunois  et  de  Laval,  du 
maréchal  de  Lohéac,  des  sires  de  Bueil  et  de  Brézé.  Cette  céré- 
monie donna  lieu  aux  contestations  habituelles  entre  le  roi,  qui 
réclamait  l'hommage  lige,  et  le  duc,  qui  prétendait  ne  devoir  que 
l'hommage  simple,  pour  la  Bretagne.  Quand  on  eut  enlevé  au 
duc  son  épée,  pour  la  remettre  au  connétable,  Dunois  lui  rap- 
pela qu'il  devait  l'hommage  lige.  Alors  Pierre  II,  s'adressant  au 
roi  :  «  Monseigneur,  dit-il,  je  vous  fais  ce  que  mes  prédécesseurs 
ont  accoustumé  faire  à  messeigneurs  vos  prédécesseurs  et  à  vous, 
et  non  autrement.  » 

La  discussion  continua  entre  Guillaume  Jouvenel  des  Ursins, 
chancelier  de  France,  et  Jean  de  La  Rivière,  chancelier  de  Bre- 
tagne ;  après  quoi  Dunois  reprit  :  «  Monseigneur  de  Bretaigne, 
vous  faictes  hommage  lige  au  roy,  nostre  souverain  seigneur,  et 
lige  de  la  comté  de  Montfort,  aussi  de  la  terre  de  Néauffle  ^  et 
de  leurs  appartenances  et  généralement  de  toutee  les  autres 
terres  que  vous  tenez;  jurez  et  promettez,  par  la  foi  de  vostre 
corps,  de  le,  servir  et  obéir,  comme  vostre  souverain  et  lige 

4.  Labbe,  Eloges  historiques  (Mélanges  curieux),  p.  707. 

2.  Arrondissement  de  Tours.  —  C'est  à  Montbazon  qu'eut  lieu,  dans  les 
derniers  jours  d'octobre,  le  mariage  d'André  de  Villequier  avec  Antoinette 
de  Maignelais,  qui  avait  remplacé  sa  tante  Agnès  Sorel  auprès  du  roi. 
André  de  Villequier  reçut  les  terres  d'Oleron,  Marennes,  Arvert,  parce  qu'il 
avait  refusé  de  grands  mariages,  pour  épouser  la  favorite  du  roi  (JJ  185,  f"  15  ; 
P  2o31,  f»  318  v»).  Peu  après,  il  reçut  encore  Issoudun  (P  2531,  f"  3*6; 
J.  du  Glercq,  p.  618,  619). 

3.  Néauphle-le-Cliàteau,  canton  de  Montfort-l'Amaury,  arrondissement 
de  Rambouillet. 


428        RICHEMONT   POURSUIT   LES   ASSASSINS   DE   GILLES    (1450) 

seigneur,  contre  toutes  personnes  qui  peuvent  vivre  et  mourir, 
sans  aucune  excepter,  et  il  vous  y  reçoit,  sauf  son  droit  et  l'autrui, 
et  vous  en  baise  en  la  bouche  —  Monseigneur,  ainsi  le  fais-je  voire- 
ment,  »  répondit  le  duc.  Alors  le  roi  le  reçut  au  baiser,  selon  la 
coutume  ^  Jean  Dauvet,  procureur  général  du  roi,  fit  rédiger  le 
procès  verbal  de  cette  cérémonie,  devant  le  connétable  et  les 
autres  seigneurs;  mais,  comme  il  y  avait  de  l'ambiguïté  dans  la 
seconde  formule  du  serment  et  dans  la  réponse  qui  la  suit,  le 
duc,  à  plusieurs  reprises,  protesta  qu'il  n'entendait  pas  porter 
préjudice  aux  privilèges  de  son  duché,  qu'il  maintenait  tous  ses 
droits  et  n'acceptait  aucun  mot  pouvant  y  porter  atteinte. 

Le  20  novembre,  le  duc  eut  encore  une  discussion  à  ce  sujet 
avec  le  roi,  qui  maintint,  lui  aussi,  tous  ses  droits.  Ce  différend, 
qui  se  produisait  chaque  fois  qu'un  duc  de  Bretagne  rendait 
hommage  au  roi  de  France,  ne  troubla  pas  les  fêtes  auxquelles 
donna  lieu  la  présence  de  Pierre  II  à  la  cour  ^. 

En  même  temps,  le  connétable  poursuivait  les  meurtriers  de 
son  neveu  Gilles,  ce  qu'il  n'avait  pu  faire  tant  que  François  I" 
avait  vécu.  C'est  ainsi  qu'il  obtint  l'arrestation  du  maréchal  de 
Montauban^  dont  il  avait  sans  doute  reconnu  la  culpabilité. 
Artur  de  Montauban  comparut,  le  22  novembre,  devant  le  con- 
seil du  roi,  à  Tours;  mais,  sous  prétexte  qu'il  était  assigné  à  com- 
paraître aussi  en  Bretagne,  devant  le  duc,  il  obtint  sa  mise  en 
liberté  jusqu'à  la  Chandeleur,  c'est-à-dire  jusqu'au  2  février 
suivant.  Le  sénéchal  de  Poitou,  Pierre  de  Brézé,  donna  caution 
pour  lui  ^.  En  réalité,  on  fournissait  ainsi  à  Montauban  le  moyen 
d'échapper  aux  poursuites  qu'il  redoutait. 

Un  des  principaux  auteurs  du  crime,  Ohvier  de  Meel,  était  alors 
au  château  de  Marcoussis ,  chez  le  sire  de  Graville ,  qui  avait 
épousé  une  sœur  de  Montauban.  Pour  être  sûr  que  celui-là  ne  lui 
échapperait  pas,  Richemont  employa  les  moyens  auxquels  jadis 
il  avait  recours.  Il  envoya  Olivier  de  Quelen  et  Eustache  d'Espi- 
nay  *,  avec  une  troupe  d'archers,  enlever  Olivier  de  Meel,  qu'ils 
amenèrent  secrètement  à  Tours.  Aussitôt  après,  le  duc  et  le  con- 


1.  J  243;  n"  104;  Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  33,  E,  90;  Preuves  de  l'Hist. 
de  Bretagne,  II,  col.  1544-1S48;  J.  Chartier,  t.  II,  248-249. 

2.  D'Argentrô,  p.  833  et  suiv.  dans  l'édit.  de  1618,  et  f»»  636,  637  dans 
l'édit.  de  1588,  in-K 

3.  Preuves  de  l'Histoire  de  Bretagne,  II,  col.  1550, 

4.  On  voit  dans  les  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1550,  qu'Eus- 
lache  d'Espinay  et  son  frère  Jacques,  évêque  de  Rennes  ,  furent  aussi 
poursuivis  par  Richemont  (Voir  A.  du  Paz,  Hist.  généalogique,  p.  276-284). 
Leur  frère  aîné,  Richard,  avait  épousé  une  sœur  des  Montauban  {Idem, 
p.  289,  462.) 


RICHEMONT  POURSUIT  LES  ASSASSINS  DE   GILLES   (1451)        429 

nétable  partirent,  dès  le  point  du  jour,  et  descendirent  la  Loire 
jusqu'à  Nantes,  avec  leur  prisonnier.  Le  roi  fut  très  irrité  de  ce 
procédé.  Il  réclama  d'abord  Olivier  de  Meel,  puis,  comme  celui- 
ci  n'était  pas  un  personnage  d'importance,  il  l'abandonna  bien- 
tôt à  la  vengeance  du  connétable.  Il  fut  seulement  convenu,  pour 
donner  satisfaction  au  roi,  qu'on  remettrait  de  Meel  à  ses  envoyés, 
qui  le  rendraient  aussitôt  aux  officiers  du  duc  de  Bretagne;  ce 
qui  fut  fait  *. 

Pendant  qu'on  instruisait  à  Nantes  le  procès  des  meurtriers 
de  Gilles,  Richemont  passa  quelque  temps  à  Parthenay.  Il  ne 
semble  pas  qu'il  soit  allé  souvent  en  Normandie,  pendant  que 
Dunois  y  restait,  avec  le  titre  de  lieutenant-général  ^,  soit  qu'il 
y  eût  entre  eux  une  rivalité  qui  eût  rendu  plus  difficile  au  con- 
nétable l'exercice  de  son  pouvoir,  soit,  au  contraire,  que,  se 
trouvant  bien  secondé  par  lui  dans  cette  province,  il  ait  voulu 
profiter  de  ce  loisir  pour  s'occuper  de  ses  propres  affaires  ^. 
Du  reste,  il  pouvait,  de  la  Bretagne,  veiller  sur  la  Basse-Nor- 
mandie, qui  était  particulièrement  confiée  à  ses  soins. 

Au  commencement  de  1451,  il  fallut  faire,  en  Bretagne,  des 
préparatifs  militaires  contre  les  Anglais,  qui  rôdaient  souvent  sur 
les  côtes  *.  On  redoutait  quelque  tentative  de  leur  part,  puisque 
Pierre  II  ordonna  aux  archers  des  paroisses  et  aux  nobles  de 
prendre  les  armes  (15  février  1451)  ^.  Ce  ne  pouvait  être  qu'une 
fausse  alerte,  car  les  Anglais  avaient  trop  d'embarras  en  ce  mo- 
ment pour  songer  à  une  entreprise  sérieuse  sur  la  Bretagne  ou 
sur  la  Normandie.  Sans  parler  des  troubles  intérieurs,  ils  avaient 
assez  de  défendre  la  Guyenne. 

Cependant  Richemont,  qui  était  revenu  en  Bretagne,  faisait 
poursuivre  tous  ceux  qui  étaient  soupçonnés  d'avoir  pris  part  à 
l'assassinat  de  Gilles  ^.  Quelques-uns  lui  échappèrent.  Artur  de 

1.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1346  et  suiv.;  Fr.  15337, 
^•  126-127. 

2.  A  la  fin  de  novembre,  Dunois,  lieutenant  général  du  roi  sur  le  fait 
de  la  guerre  en  Normandie,  était  à  Rouen,  où  se  réunissaient  alors  les 
États  (Fr.  26080,  n»*  6300,  6302,  6345). 

3.  Cette  dernière  hypothèse  est  la  plus  vraisemblable,  car  on  voit  plu- 
sieurs fois  dans  la  suite  que  le  connétable  et  Dunois  vivaient  en  assez  bonne 
intelligence. 

4.  Cette  année-là,  ils  firent  prisonnier,  sur  mer,  le  bailli  de  Rouen, 
G.  Cousinot,  qui  revenait  d'une  ambassade  en  Ecosse  (Fr.  26083,  f"  47; 
voir  aussi  Fr.  26081,  n"  633»;  Fr.  20977,  f-»  201,  209). 

5.  Preuves  de  VHist.  de  Brel.,  t.  II,  col.  1553-1537. 

6.  Le  12  janvier  1431,  il  accorde  prorogation  de  sûreté,  depuis  la  Chan- 
deleur jusqu'à  Pâques,  à  Robert  d'Espinay  {Preuves  de  Bret.,  t.  II,  col.  1354 
1353;  Déclaration  d'OI.  de  Meel,  col.  1551-1334).  En  janvier  1431,  Artur  de 
Montauban  était  encore  bailli  de  Cotentin  ;  en  juillet,  c'était  son  frère 


430        DON   CARLOS   DE   VIANA   ET   JACQUES   II   d'ÉCOSSE    (1451) 

Montauban  se  fit  célestin  ;  Jacques  d'Espinay,  évêque  de  Rennes, 
fut  défendu  par  le  pape  Nicolas  V  *  ;  Jean  Hingant  parvint  à  se 
justifier.  Il  en  fut  sans  doute  de  même  pour  H.  de  Villeblanche, 
car  on  sait  qu'il  assistait  à  Vannes,  en  mai  1451,  aux  états  de 
Bretagne,  comme  grand  maître  d'hôtel  du  duc  Pierre  II  *. 

Le  connétable  eut  fort  à  faire  pour  apaiser  une  querelle  de 
préséance  qui  s'éleva,  lors  de  la  réunion  des  Etats,  entre  le  comte 
de  Laval,  son  neveu,  et  le  vicomte  de  Rohan  ^,  son  beau-frère. 
Il  parvint  à  faire  conclure  un  accord  qui  suspendit  ce  différend 
(25  mai)  *.  Quelques  jours  après,  Olivier  de  Meel  et  plusieurs 
de  ses  complices  furent  décapités  à  Vannes,  le  8  juin,  au  grand 
contentement  du  peuple.  Le  plus  coupable  de  tous,  Artur  de 
Montauban,  qui  ne  put  être  appréhendé,  fut  banni.  Il  devint, 
dans  la  suite,  archevêque  de  Bordeaux  ^. 

A  la  même  époque,  don  Carlos  de  Viana,  fils  de  Jean  d'Aragon, 
qui  lui  retenait  la  couronne  de  Navarre,  négociait  avec  le  duc  de 
Bretagne,  pour  obtenir  la  main  d'Isabelle  d'Ecosse,  veuve  de 
François  h^.  Les  ambassadeurs  du  roi  d'Ecosse,  Jacques  II  **, 
vinrent  même  demander  à  Charles  VII  que  cette  princesse  fût 
mise  en  liberté,  afin  qu'elle  pût  se  remarier.  Ils  le  prièrent  aussi 
de  prendre  en  considération  les  droits  que  les  filles  de  François  P"" 
prétendaient  avoir  au  duché  de  Bretagne.  Le  roi  de  France  ne 
pouvait  encourager  les  prétentions  du  roi  d'Ecosse,  bien  qu'il 
fût  son  allié,  car  elles  étaient  contraires  au  traité  de  Guérande. 
Il  n'encouragea  pas  davantage  les  projets  du  prince  de  Navarre. 
Il  écrivit  au  duc  de  Bretagne  «  de  délayer  la  matière  dudit 
mariage  et  la  tenir  en  sursy  et  suspens,  sans  en  tenir  aucunes 

Jeau  de  Montauban  qui  exerçait  cet  office  (Fr.  26080,  n»'  6317,  6370).  Artur 
de  Montauban  donna  ses  biens  aux  Gélestins  {Preuves  de  l'Rist.  de  Bret.,  II, 
col.  1637). 

1.  Voir  une  bulle  du  pape  en  sa  faveur  dans  Fr.  2707,  f»'  179,  198. 
Jacques  d'Espinay  était  ami  de  Nicolas  V  (voir  du  Paz,  Eist.  généal., 
p.  279-280). 

2.  D'Argentré,  932. 

3.  Guy  XIII  (dit  XIV),  comte  de  Laval,  et  Alain  IX,  vicomte  de  Rohan. 
Sur  cette  querelle,  voir  Preuves  de  VHist.  de  Bret.,  t.  II,  col.  1564  et  suiv., 
et  aussi  un  long  mémoire  de  1479,  qui  contient  d'ailleurs  des  détails  inté- 
ressants sur  la  liretagne  et  une  enquête  relative  à  cette  affaire  de  mai  1431. 
Ce  mémoire  se  trouve  dans  les  suppléments  du  t.  V  de  VHist.  de  Bret., 
voir  notamment  p.  clxxxu  et  ccxxx  à  ccxxxii  et  d'Argentré,  p.  932). 

.4.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  II,  col.  1581-1382.  —  Voir,  sur  ces  États 
de  Vannes,  le  Ms.  Fr.  L  f  1*  de  la  biblioth.  Sainte-Geneviève,  f"  74  et  suiv. 

5.  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  II,  40-41  ;  d'Argentré,  p.  836-838  ;  D.  Lo- 
bineau,  I,  649;  Glairamb.,  cxxx,  f»  1445.  Dans  le  testament  de  Pierre  II,  on 
voit  que  ce  prince  se  repentit  d'avoir  fait  exécuter  P.  Salmon,  comme 
complice  de  la  mort  de  Gilles  {Preuves  de  VHist.  de  Bret.,  II,  col.  1707). 

6.  Fils  et  successeur  de  Jacques  !«■•,  qui  était  mort  en  1437. 


RÉCLAMATIONS  DE  JACQUES  II.   LE  COMTE  d'ARMAGNAC   JEAN  V      431 

paroles  audit  prince  de  Navarre,  ne  autres  »  jusqu'à  ce  qu'il  lui 
eût  fait  connaître  sa  volonté  par  le  sire  de  Bueil  *.  Le  roi 
d'Ecosse  n'en  continua  pas  moins  de  réclamer,  pour  ses  nièces, 
le  duché  de  Bretagne  *.  Cette  compétition  aurait  inquiété 
Pierre  II  et  le  connétable,  si  Jacques  II  avait  été  en  état  de  la 
soutenir  par  les  armes.  Mais  ils  savaient  qu'il  ne  pouvait  rien 
sans  le  roi  de  France  et  qu'il  n'obtiendrait  pas  son  appui. 

Richemont,  après  s'être  entendu  de  nouveau  avec  Charles  VII, 
qui  voulait  aller  en  Guyenne,  était  revenu  en  Normandie.  Dunois 
était  parti  pour  diriger  la  guerre  dans  le  sud-ouest,  avec  les 
comtes  d'Angoulème,  de  Penthièvre,  de  Foix  et  d'Armagnac. 
Beaucoup  de  Bretons,  sous  le  maréchal  de  Lohéac  et  Olivier  de 
Coëtivy  ^,  sénéchal  de  Guyenne,  faisaient  partie  de  cette  armée. 
Des  mesures  furent  prises  pour  assurer  la  stricte  observation  de 
la  discipline  *.  Déjà,  l'année  précédente,  le  comte  de  Penthièvre 
et  Amanieu  d'Albret,  sire  d'Orval,  avaient  enlevé  aux  Anglais 
plusieurs  places.  En  4451,  les  succès  furent  encore  plus  décisifs. 
Bordeaux,  Libourne,  Bayonne  et  beaucoup  d'autres  villes  capi- 
tulèrent. La  Guyenne  fut  conquise  plus  facilement  encore  que  ne 
l'avait  été  la  Normandie  (juin-août  1451)  ^. 

Pendant  ce  temps,  le  connétable  veillait  sur  cette  dernière 
province.  Des  travaux  de  fortification  furent  exécutés  dans  les 
villes  qui  en  avaient  besoin  ®,  mais  les  Anglais  n'étaient  pas  en 
mesure  de  faire,  sur  ce  point,  des  tentatives  sérieuses.  Les  hos- 
tilités se  bornaient  à  des  courses  sur  mer.  Le  connétable  put 
aller  passer  encore  quelque  temps  à  Parthenay,  puis  il  revint 
auprès  du  roi,  aux  Montils-lez-Tours.  René  d'Anjou,  le  duc 
d'Orléans,  les  comtes  d'Angoulème,  de  Clermont,  d'Eu,  de 
Penthièvre,  de  Vendôme,  de  Dunois  et  beaucoup  d'autres  grands 
seigneurs  se  trouvaient  alors  à  la  cour.  Richemont  se  joignit  à 
eux,  pour  prier  le  roi  de  restituer  au  jeune  comte  d'Armagnac, 
Jean  V,  qui  avait  rendu  des  services  en  Guyenne  \  une  partie 

1.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne, 11,  col.  1557.  Voir  aussi,  sur  don  Carlos, 
le  Ms.  Dupuy,  761,  f»»  27-28;  Fr.  5909,  f»  ccxviii;  Revue  des  documents  his- 
toriques,  t.  II,  p.  170. 

2.  Preuves  de  rUist.  de  Bret.,  II,  col.  1644. 

3.  Il  avait,  comme  son  frère  Prij^ent,  servi  sous  le  connétable.  Il  épousa 
en  1458  une  fille  de  Charles  VII  et  d'Agnès  Sorel,  Marie  de  Valois,  qui 
avait  été  élevée  par  Prigent  à  Taillebourg  (Anselme,  VIII,  845;  P  2531, 
fo  412;  Bibliot.  de  l'École  des  chartes,  3«  série,  t.  I,  p.  478  et  suiv.  ;  Pièces 
orig.,  t.  797,  dossier  Coetivy,  n°  43). 

4.  M.  d'Escouchy,  I,  325. 

5.  JJ.  185,  fo»  95-100,  103-106,  110,  154;  K  69,  n»  2;  Fr.  20683,  f»  47. 

6.  Par  exemple  à  Dieppe  (Moreau,  252,  f»»  109-111,  223-225).  Beaucoup 
d'autres  exemples  dans  le  Ms.  Fr.  26080. 

7.  Voir  JJ  185,  f»*  94-95.  Il  était  fils  de  Jean  IV  et  de  sa  seconde  femme 


432  MISSION  DU   CONNÉTABLE  EN  NORMANDIE   (1482) 

des  domaines  enlevés  par  confiscation  à  son  père  (février  1452)  *. 
Le  duc  de  Bretagne  vint  aussi,  avec  le  jeune  comte  d'Etampes, 
visiter  Charles  VIL 

Peu  après,  Dunois  fut  encore  nommé  lieutenant  du  roi  dans 
la  haute  Normandie  (mars  1452)  ^  Quant  au  connétable,  il  fut 
chargé  d'aller,  avec  l'archevêque  de  Narbonne  ^  et  plusieurs 
autres  conseillers,  inspecter  les  troupes  logées  dans  toute  la  pro- 
vince, pourvoir  à  leur  solde,  entendre  les  réclamations  du  peuple, 
réformer  les  abus,  en  un  mot,  mettre  partout  bon  ordre  et 
bonne  police  ''. 

Il  se  rendit  à  Caen  et  parcourut  la  basse-Normandie,  pour 
remplir  la  mission  que  le  roi  lui  avait  confiée.  Les  dépenses 
nécessitées  par  l'entretien  et  la  solde  des  troupes  étaient  fort 
onéreuses  pour  des  populations  déjà  éprouvées  par  la  guerre. 
En  1450  et  1451,  il  avait  fallu  lever  plusieurs  fois  des  aides  en 
Normandie  ^.  Les  Etats  de  la  province  avaient  été  réunis  à  Rouen, 
à  la  fin  de  l'année  1450,  et  invités  à  remontrer  ce  qu'ils  voudraient 
pour  le  bien  du  pays,  mais  les  75  000  livres  qu'ils  avaient  octroyées 
en  janvier  1451  ^  étaient  loin  de  suffire  à  l'entretien  d'environ 
4  400  combattants,  qui  ne  coûtaient  pas  moins  de  400  000  livres  ^, 
et  de  nouvelles  taxes  avaient  été  ordonnées  *. 

Ces  impositions,  nécessaires  sans  doute,  n'en  paraissaient  pas 
moins  dures  et  donnaient  lieu  à  bien  des  plaintes  ®.  Il  est  certain 

Isabelle  de  Navarre  (fille  de  Charles  III,  roi  de  Navarre,  oncle  de  Riclie- 
mont). 

1.  Jean  V  recouvra  ainsi  une  partie  de  ses  biens  (JJ  181,  f"  20;  P  2S31, 
f^  344  vo. 

2.  Fr.  5909,  f°  xi^îiin,  v». 

3.  Louis  d'Harcourt,  fils  naturel  de  Jean  VII  d'Harcourt,  comte  d'Aumale. 
Il  venait  d'être  nommé  archevêque  de  Narbonne,  en  décembre  1431 
(D.  Vaissète,  V,  18;  Anselme,  V,  134-135;  Gallia  Christ,  VI,  103,  361  D). 

4.  Fr.  26081,  n»  6539. 

5.  Voy.  p.  364,  note  2.  Le  16  mars  1451,  le  roi  ordonne  encore  de  lever 
une  aide  de  123  000  1.  t.  dans  la  Normandie,  excepté  le  pays  de  Caux,  qui 
avait  beaucoup  souffert  de  la  guerre  (K  68,  n°  46;  Fr.  23712,  n»  240).  D'autre 
part,  il  ratifie  la  remise  de  1100  1.  t.  faite  par  le  duc  de  Bretagne  et  le 
connétable  aux  habitants  de  Saint-Lo  (Fr.  26081,  n»  63381).  —  Le  31  dé- 
cembre 1431,  nouvelle  imposition  de  223  000  L  t.  en  Normandie  (Fr.  ^6080, 
n»  6419)  pour  le  payement  des  gens  d'armes, 

6.  Fr.  23112,  n»»  236,  237;  Fr.  26080,  n»  6343;  Fr.  20683,  f»  48. 

7.  Fr.  26080,  n»  6304. 

8.  Fr.  25712, n"  240,  263,  264.  —Exemption  d'impôts  aux  habitants  de  la 
ville  et  élection  de  Valognes,  à  cause  des  grandes  pertes  éprouvées  dans 
la  campagne  de  1450  (n-  263). 

9.  Le  duc  d'Alençon  ne  voulut  pas  laisser  lever  11634  I.  t.  auxquelles 
son  duché  avait  été  taxé  (Fr.  20683,  f»  48).  A  Limoges,  il  y  eut  une  tenta- 
tive de  sédition,  quand  on  voulut  lever  les  impôts  (JJ  185,  f»  184;  JJ  185, 
f  166). 


LES  ANGLAIS  MENACENT  LA  GUYENNE  ET  LA  NORMANDIE    433 

que  le  connétable  et  les  autres  commissaires  royaux  écoutèrent 
ces  réclamations  ^  car,  au  mois  d'août  1452,  ils  étaient  à  Dieppe, 
occupés  k  conclure  un  accord  avec  les  habitants,  pour  le  paye- 
ment des  18  lances  de  la  compagnie  de  Dunois  qui  étaient  en 
garnison  dans  cette  ville  ^. 

A  cette  époque,  Charles  VII  marchait  contre  le  duc  de  Savoie, 
Louis  P%  qui,  sans  son  consentement,  avait  marié  sa  fille  au 
Dauphin  ^  En  même  temps,  les  populations  de  la  Guyenne, 
mécontentes  des  impôts  que  le  roi  de  France  exigeait  pour 
la  solde  des  troupes,  se  révoltaient,  appelaient  les  Anglais. 
Henri  VI,  ou  plutôt  Somerset,  débarrassé  momentanément  de 
Richard  d'York,  envoyait  une  armée  à  Bordeaux,  sous  les 
ordres  de  Talbot  (septembre  1452)  \  Il  était  à  craindre  que 
les  autres  provinces  récemment  perdues  par  les  Anglais,  comme 
le  Maine  et  la  Normandie,  ne  voulussent  imiter  l'exemple  de 
la  Guyenne^.  On  faisait  de  grands  préparatifs  en  Angleterre, 
comme  si  on  avait  eu  l'intention  d'attaquer,  en  même  temps,  sur 
plusieurs  points.  Charles  VII  se  hâta  de  conclure  avec  le  duc  de 
Savoie  le  traité  de  Cleppé  "^  (27  octobre),  pour  se  donner  entiè- 
rement à  la  défense  du  royaume. 

Pendant  qu'une  flotte  anglaise  transportait  l'armée  de  Talbot 
à  Bordeaux  (octobre  1452),  une  autre  flotte  menaçait  les  côtes 

1.  En  juin  1452,  l'archevêque  de  Narbonne  et  les  autres  commissaires 
royaux  attendent  à  Chartres  le  connétable  et  Biaise  Gresle,  pour  aller  en 
Normandie.  Ils  ont  hâte  de  partir,  parce  que  le  quartier  suivant  de  la 
solde  des  troupes  va  commencer  en  juillet  et  qu'un  plus  long  retard 
pourrait  causer  du  dommage  (voy.  une  lettre  de  l'archev.  de  Narbonne 
dans  Fr.  6963,  n°  23  ;  voir  aussi  Fr.  20683,  f»  48). 

2.  Voy.  Append.  CIII.  —  Ch.  Des  Marets  était  toujours  capitaine  de  Dieppe 
(Fr.  26081,  n"  6453,  63382,  6539).  Il  l'était  encore  en  1453.  Voir  un  reçu 
signé  de  sa  main  et  daté  du  3  juillet  1455  (Fr.  26083,  n»  6869). 

3.  Le  Dauphin  avait  épousé  Charlotte  de  Savoie,  fille  de  Louis  I"',  le 
8  mars  1431  (Costa  de  Beauregard,  Afé?>ion'e5  histor.  sur  la  maison  de  Savoie, 
Turin,  1816,  in-8o,  t.  I,  262;  Ms.  Brienne  80,  f-  139-148;  Duclos,  Hist.  de 
Louis  XI,  t.  m,  82-91;  S.  Guichenon,  Hist.  généal.  de  la  royale  maison  de 
Savoye,  Lyon,  1660,  in-fo,l,  513-315,  II,  311-215',  Archiv.  des  missions  scientif., 
3«  série,  t.  VII  [1881],  p.  468-469). 

4.  Proceedings,  t.  VI,  p.  119-122, 143,  151-157,  et  préface,  p.  xxxviet  xxxvii; 
J.  Stevenson,  II,  2»  partie,  479-489;  JJ  182,  f»  7.  —  Les  Anglais  refusaient 
de  faire  la  paix  avec  la  France  (Fr.  6963,  n»  23). 

5.  Voir  une  pétition  des  habitants  du  Maine  à  Henri  VI  dans  Stevenson, 
t.  LI,  2«  partie,  p.  598-603. 

6.  Canton  de  Boën,  arrondissement  de  Montbrison.  —  Voir  Ms.  Brienne 
80»,  f"'  139-148  et  149-130.  Voir  aussi  Costa  de  Beauregard,  p.  262-266,  et 
A.  Desjardins,  Négociations  de  la  France  avec  la  Toscane,  1,73-74;  de  Beau- 
court,  Caractère  de  Charles  VII,  dans  la  Revue  des  questions  hist.,  t.  XVII, 
p.  182-192  ;  S.  Guichenon,  Hist.  de  B)'esse  et  du  Bugey,  Lyon,  1650,  in-f», 
p.  80. 

RiCHEMONT.  *  28 


434  MESURES   DE  DÉFENSE  EN   NORMANDIE   (1452,   OCTOBRE) 

de  la  Normandie  et  de  la  Bretagne  *.  Ce  n'était  là  vraisembla- 
blement qu'une  fausse  démonstration,  ayant  pour  but  d'obliger 
les  Français  à  diviser  leurs  forces,  mais  il  n'en  fallait  pas  moins 
prendre  des  mesures  de  défense.  Le  connétable  tint  aussitôt 
conseil  à  Dieppe,  avec  les  autres  commissaires  royaux  et  Dunois  *. 
P.  de  Brézé,  grand  sénéchal  de  Normandie  ',  et  Robert  Floquet 
furent  mandés  à  Caudebec,  puis  à  Rouen;  les  francs  archers  de 
la  province  furent  envoyés  sur  les  côtes,  avec  une  partie  des 
compagnies  d'ordonnance,  le  reste  devant  toujours  être  en  état 
de  marcher  au  premier  signal;  J.  Aubry,  lieutenant  de  Gaspard 
Bureau,  expédia  de  Paris  à  Rouen  des  munitions,  des  armes,  de 
l'artillerie,  que  Richemont  fit  distribuer  aux  places  et  forteresses 
les  moins  bien  pourvues,  surtout  dans  le  Gotentin,  qui  semblait 
plus  menacé  *  ;  il  fut  décidé  que  Dunois  resterait  à  Dieppe  et  que 
le  connétable  irait  à  Gaen,  pour  veiller,  l'un  sur  la  haute,  l'autre 
sur  la  basse  Normandie,  enfin  que  le  grand  sénéchal  et  Floquet 
se  tiendraient  prêts  à  monter  à  cheval,  pour  se  porter  où  on  les 
appellerait. 

Le  connétable  envoya  Geoffroy  de  Gouvran,  avec  40  lances,  à 
la  Hougue- Saint- Vaast  ^,  pour  faire  mettre  sur  pied  les  francs 
archers  des  bailliages  de  Gaen  et  du  Gotentin,  auxquels  devaient 
se  joindre  ceux  du  bailliage  d'Evreux  '';  il  ordonna  au  vicomte 
de  Valognes  d'envoyer  des  blés  à  Cherbourg,  qui  était  mal  avi- 
taillée,  puis  il  se  rendit  à  Gaen  ''  et  à  Garentan,  pour  mieux  sur- 
veiller le  Gotentin  *.  Le  duc  de  Bretagne  mit  des  renforts  à  Brest 
et  se  tint  en  communication  avec  le  connétable  '.  Les  Anglais 
n'attaquèrent  pas  la  Normandie,  soit  qu'ils  n'en  eussent  pas  l'in- 
tention réelle,  soit  que  l'entreprise  leur  parût  trop  difficile,  dans 
ces  conditions.  La  Normandie  fut  ainsi  sauvegardée.  Le  conné- 
table continua  d'y  séjourner,  parcourant  la  province  et  ne  faisant 
que  de  courtes  absences,  pour  aller,  soit  auprès  du  roi,  soit  à 
Parthenay,  d'où  il  ramena  la  comtesse  de  Richemont. 

Au  commencement  de  1453,  le  roi  d'Ecosse  envoya  une  am- 
bassade à  Charles  VII,  pour  lui  recommander  ses  nièces  et  faire 

1.  Fr.  25712,  H"  283. 

2.  Voir  Append.  GIV. 

3.  K.  69  n"  H.  P.  de  Brézé  était  aussi  capitaine  de  Rouen  (Fr.  26082, 
n»  6673) . 

4.  Fr.  20683,  f"  46. 

5.  Arrondissement  de  "Valognes. 

6.  Fr.  18442,  f"  144.  \oir  Append.  GIV. 

7.  11  était  à  Gaen  le  12  octobre  (JJ  181,  f»  160  vo;  Append.  CV). 

8.  Voir  Append.  GIV. 

9.  Fr.  20683,  f  46;  Fr.  18442,  f»  144;  D.  Taillandier,  Hist.  de  Breta- 
gne, II,  30. 


NOUVELLES  PLAINTES  1)U  ROI   d'ÉCOSSE   (1453)  435 

valoir  leurs  droits  sur  le  duché  de  Bretagne  (janvier).  Il  accusait 
Pierre  II,  non  seulement  d'avoir  usurpé  la  couronne,  mais  encore 
de  retenir  dans  une  sorte  de  captivité  la  veuve  de  François  P'  et 
de  lui  refuser  son  douaire.  Il  demandait  que  le  roi  de  France 
intervînt  et  même  qu'il  tînt  en  séquestre  le  duché  de  Bretagne  *. 
Charles  YII  ne  pouvait,  en  aucune  façon,  satisfaire  à  des  récla- 
mations mal  fondées  et  inopportunes;  néanmoins  il  accueillit 
les  ambassadeurs  écossais  avec  les  égards  dus  à  un  allié  fidèle. 
Il  les  envoya  en  Bretagne,  et  leur  adjoignit  deux  de  ses  conseil- 
lers, Guy  Bernard  et  Pierre  Aude  *. 

Le  connétable,  tenu  au  courant  de  cette  affaire.  ^,  alla  s'en- 
tendre avec  son  neveu,  Pierre  II,  et  se  rendit  à  Nantes,  pour 
y  recevoir  les  envoyés  de  France  et  d'Ecosse.  Il  les  conduisit 
à  Rennes,  où  ils  arrivèrent  le  lundi  9  avril.  Guy  Bernard  et 
P.  Aude  furent  admis,  les  premiers,  auprès  de  Pierre  II,  qui  se 
trouvait  alors  à  Bruz  *,  où  il  habitait  un  château  appartenant  à 
l'évêque  de  Rennes  '■".  Ils  revinrent  ensuite,  avec  l'évêque  de 
Galway,  ambassadeur  d'Ecosse,  qui  eut  un  entretien  particulier 
avec  le  duc  et  son  oncle  (mercredi  11  avril).     . 

Le  lendemain,  les  envoyés  français  allèrent,  avec  Richemont, 
voir  la  veuve  de  François  I".  Elle  leur  déclara  spontanément 
qu'elle  était  satisfaite  de  sa  situation,  des  procédés  de  son  beau- 
frère,  Pierre  II,  et  qu'elle  voulait  rester  en  Bretagne.  Elle  fit  les 
mêmes  déclarations  devant  l'évêque  de  Galway.  Les  ambassa- 
deurs ayant  exprimé  le  désir  que  Richemont  se  retirât,  il  passa 
dans  une  pièce  voisine,  où  P.  Aude  vint,  par  deux  fois,  lui  de- 
mander de  faire  sortir  aussi  deux  dames  d'honneur  qui  étaient 
restées  auprès  d'Isabelle,  mais  il  répondit  que  la  duchesse  en  fe- 
rait ce  qu'elle  voudrait  et  que  «  plus  il  ne  lui  en  oseroit  parler». 
L'entretien  terminé,  le  connétable  rentra  dans  la  chambre  où  il 
avait  eu  lieu,  et  l'évêque  de  Galway  lui  dit,  en  riant,  que  la  du- 
chesse était  «  bonne  advocate  contre  elle  ®  ». 

Les  ambassadeurs  n'avaient  plus  qu'à  s'en  retourner.  Le  duc 
leur  fit  sentir  ce  qu'avait  de  blessant  pour  lui  une  pareille 
enquête  ;  il  s''engagea  d'ailleurs  à  respecter  tous  les  droits  de  sa 
belle-sœur  et  de  ses  nièces,  mais  il  chargea  les  envoyés  français 
de  dire  au  roi  qu'il  le  suppliait  de  ne  plus  accueillir  des  plaintes 
et  des  prétentions  déraisonnables  (samedi  14  avril).  Le  même 

1.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1616-1617;  ci-dessus,  p.  430,  431. 

2.  Preuves  de  l'Hisl.  de  Bretagne,  II,  col.  1618. 

3.  Il  était  auprès  du  roi  aux  ÎMontils-lez-Tours  en  mars  (JJ  181,  f"  157). 

4.  Canton  S.-O.  de  Rennes. 

5.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1620. 

6.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bref.,  II,  col.  1620-1624. 


436        SECONDE  CONQUÊTE  DE  LA  GUYENNE  (1453) 

jour,  la  duchesse  écrivit  au  roi  de  France,  pour  lui  renouveler 
les  déclarations  qu'elle  venait  de  faire  devant  ses  envoyés  *. 
Quant  au  roi  d'Ecosse,  malgré  cet  échec,  il  persista  dans  ses 
vaines  réclamations  ^,  mais  ni  Pierre  II  ni  Richemont  n'avaient 
à  s'en  inquiéter  davantage. 

Le  connétable  revint  ensuite  en  Normandie,  où  il  exerçait  tou- 
jours la  charge  de  lieutenant  général  du  roi  ^  Il  demeura  quelque 
temps  à  Vire,  puis  à  Falaise,  avec  la  comtesse  de  Richemont, 
mais  il  visitait  aussi  les  autres  villes  de  la  Normandie  *.  Les 
Anglais  paraissaient  quelquefois  près  des  côtes,  plutôt  pour 
capturer  des  navires  normands  ou  bretons  que  pour  faire  des 
descentes  ^.  Cependant  ils  débarquèrent  à  Crozon,  en  Bretagne. 
Aussitôt  le  duc  avertit  son  oncle,  qui  était  à  Falaise.  Riche- 
mont  n^eut  pas  besoin  d'intervenir.  Pierre  II  rassembla  lui- 
même  des  troupes  et  força  les  ennemis  à  se  retirer  ®. 

Cette  année-là  ,  les  grands  événements  se  passèrent  en 
Guyenne.  Talbot  y  fut  vaincu  et  tué  à  la  bataille  de  Gastillon, 
le  17  juillet  1453  '.  Les  Bretons  que  le  duc  Pierre  II  avait  en- 
voyés en  grand  nombre,  sous  le  commandement  du  jeune  comte 
d'Etampes  ^,  se  comportèrent  vaillamment  dans  cette  mémora- 
ble journée  et  décidèrent  la  victoire  ^.  Les  Anglais  furent  bientôt 
expulsés  des  villes  qu'ils  avaient  occupées  et  enfin  de  Bordeaux, 


1.  D.  Taillandier,  Ilist.  de  Bretagne,  t.  II,  p.  49,  et  Preuves  de  l'Hist.  de 
Bretagne,  t.  II,  col.  1616-1624  et  1629.  —  Le  14  avril,  Pierre  II,  en  pré- 
sence et  avec  le  consentement  de  ses  héritiers,  Artur  et  François  de  Bre- 
tagne, constitue  un  douaire  de  6000  1. 1.  à  sa  femme,  Françoise  d'Amboise 
(Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  6,  E,  18). 

2.  Voir,  par  exemple,  K.  69,  n»  12. 

3.  Il  était  à  Caen  le  24  septembre  1453.  (V.  Append.  CVIII.) 

4.  Caen,  Carentan  (Fr.  26081,  n»  6383).  Il  était  à  Carentan  le  21  sep- 
tembre (Fr.  26082,  n»  6713). 

5.  JJ  184,  f»  260  Y",  n"  uiclvii. 

6.  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  II,  50. 

7.  Fr.  26081,  n"  6392.  André  de  Laval,  sire  de  Loéhac  et  de  Raiz,  était 
aussi  à  Gastillon.  Il  reçut  du  roi  une  assignation  de  6  000  écus  sur  la 
somme  de  30  000  écus  imposée  à  Bordeaux  par  la  capitulation  (Fr.  26084, 
n°  6991).  —  D'après  d'Argentré,  p.  934,  ce  fut  un  Breton,  Olivier  Giifart, 
qui  abattit  et  prit  la  bannière  de  Talbot.  —  Voir,  à  la  biblioth.  Sainte-Ge- 
neviève, le  Ms.  Lf,  fo  131,  qui  contient  un  fragment  de  chronique  intitulé 
La  destrousse  de  Talehot . 

8.  Pierre  II  fournit  aussi  des  vaisseaux  qui  se  joignirent  aux  vaisseaux 
castillans,  pour  empêcher  les  Anglais  de  conduire  d'autres  troupes  en 
Guyenne  (J.  Stevenson,  t.  II,  2"  partie,  p.  489).  Jean  du  Quélenec,  ami- 
ral de  Bretagne,  qui  commandait  la  flotte  bretonne,  reçut  du  roi  une  pen- 
sion de  1200  1.  t.  (D.  Taillandier,  p.  51,  et  Preuves,  t.  II,  col.  1629;  Fr.  26084, 
no  7003. 

9.  J.  Chartier,  t.  III,  p.  1-9,  et  surtout  p.  6;  Ms.  Lf,  f»  131. 


RAPPORT  AU   ROI   SUR  l'ÉTAT  DE   LA  NORMANDIE   (1484)        437 

le  9  octobre  1453  ^  La  Guyenne  était  définitivement  recon- 
quise ;  les  ennemis  ne  possédaient  plus  que  Calais.  La  France 
était  délivrée  ^.  Parmi  ceux  qui  avaient  contribué  à  ce  glorieux 
résultat,  plus  d'un  était  mort,  comme  Jean  de  Blois,  P.  de  Beau- 
vau.  Jacques  Cœur,  victime  d'inimitiés  puissantes,  venait  d'être 
condamné  (29  mai  1453),  le  jour  même  où  les  Ottomans  s'em- 
paraient de  Constantinople  ^ .  Le  connétable  avait  le  bonheur 
de  voir  triompher  une  cause  à  laquelle  il  avait  consacré  la  plus 
grande  partie  de  son  existence.  Il  n'en  continua  pas  moins  de 
servir  le  roi  avec  le  même  dévouement. 

Aux  mois  de  mars  et  d'avril  1454,  Charles  VII  réunit  aux  Mon- 
tils-lez-Tours  une  nombreuse  assemblée,  où  se  trouvait  le  con- 
nétable avec  les  comtes  d'Eu,  de  Clermont,de  Dunois  et  de  Foix, 
l'archevêque  de  Narbonne,lesmaréchaux,ramiral,P.deBrézé,etc. 
Là,  il  put  rappeler,  avec  un  légitime  orgueil,  les  grands  événe- 
ments de  son  règne  et  les  victoires  qui  devaient  l'illustrer  *.Dans 
les  conseils  qui  furent  alors  tenus,  on  examina  toutes  les  afïaires 
importantes  du  royaume.  Richemont,  Dunois,  le  comte  d'Eu, 
l'archevêque  de  Narbonne  ^  et  P.  de  Brézé  firent  au  roi  un  rap- 
port détaillé  sur  l'état  de  la  Normandie,  Ils  lui  expliquèrent  que 
les  impôts  levés  dans  cette  province  pour  la  solde  des  troupes 
étaient  «  à  très  grant  déplaisir  et  charge  à  ses  sujets  »,  et  ils  le 
prièrent  de  ne  point  rejeter  des  réclamations  qui  leur  paraissaient 
fondées.  Charles  se  rendit  à  leurs  avis. 

Une  ordonnance  du  20  mars  1454  ^  permit  de  remplacer  les  con- 
tributions exigées  auparavant  par  une  taille  fixe  de  250  000  1. 1., 
que  la  Normandie  et  le  duché  d'Alençon  auraient  à  payer,  à 
partir  du  mois  d'avril,  pour  la  solde  de  600  lances  et  des  troupes 
auxihaires  qui  semblaient  encore  indispensables  à  la  défense  du 


1.  Xia  8603,  fos  179-182;  JJ  182,  f»  40,  n»  lxvi. 

2.  On  frappa  des  médailles  commémoratives,  qui  furent  offertes  au  roi, 
aux  princes,  etc.  (Bib.  de  l'Arsenal,  Ms.  4071,  planches,  f°  clxi). 

3.  J.  Chartier,  t.  III,  p.  1-44;  P.  Clément,  /.  Cœur,  p.  273,  453.  On  ne  voit 
nulle  part  figurer  le  connétable  parmi  les  ennemi  de  J.  Cœur. 

4.  Voy.  le  préambule  de  l'ordonnance  sur  la  réorganisation  du  parlement 
de  Paris,  dans  Y*,  f"  116  v»-134,  ou  dans  Xia  8603,  î°»  152-170.  Voy.  aussi 
Y62,  P'  1-24  et  Y*,  ^  116  v». 

•  3.  Il  était  président  de  l'échiquier,  de  Normandie  (Fr.  26082,  n"  6703). 

6.  •  Se  nosdiz  subgetz  de  Normandie,  élection  d'Alençon,  et  conté  du 
Perche  advisoient  que  leur  fust  plus  prouffitable  et  agréable  de  continuer 
le  paiement  des  iiclm  1.  t.  par  manière  de  taille,  pour  les  années  après 
ensuivans,  que  paier  les  dictes  imposicions,  nous  serions  contens  que 
ledit  paiement  de  hclm  1.  t.  nous  fust  paie  et  continué  dès  lors  en  avant, 
chacun  an,  et  que  les  dictes  imposicions  n'y  eussent  aucunement  cours, 
jusques  à  nostre  plaisir,  etc.  »  (Fr.  5909,  f*  ucLvn;. 


438  RICHEMONT  VA  EN   BRETAGNE   (1455) 

pays  '.  Les  Anglais  n'étaient  plus  aussi  redoutables,  mais  ils 
pouvaient  encore  faire  des  tentatives  ^.  C'est  ainsi  qu'au  mois 
d'août  suivant,  Dunois  envoyait  auprès  du  roi  J.  Havart,  bailli 
de  Caux,  l'informer  du  départ  d'une  flotte  anglaise  ^.  Aus- 
sitôt le  ban  et  l'arrière-ban  étaient  convoqués,  pour  empêcher 
les  ennemis  de  descendre  dans  la  Guyenne  ou  dans  le  Poitou  *. 
On  continuait  de  faire  bonne  garde  en  Normandie  ;  jour  et 
nuit  le  guet  restait  en  permanence  sur  tous  les  points  accessi- 
bles aux  ennemis- 5.  Richemont  était  retourné  dans  cette  pro- 
vince, où  il  conservait  les  mêmes  fonctions,  continuant  les  tra- 
vaux de  défense  qu'il  avait  commencés  ''.  Il  séjourna  longtemps 
à  Séez,  puis  il  revint  à  Parthenay,  avec  la  comtesse  de  Riche- 
mont.  Au  mois  de  septembre,  sa  petite  nièce,  Jeanne  de  Laval, 
devint  reine  de  Sicile,  en  épousant  René  d'Anjou  '. 

Il  dut  retourner  en  Bretagne  au  commencement  de  1455,  pour 
régler  des  afTaires  de  famille  qui  l'intéressaient  non  moins  que 
ses  neveux.  Il  se  rendit  à  Yannes,  où  furent  données  de  grandes 
fêtes,  pour  célébrer  le  mariage  de  Guillaume  d'Harcourt  *  avec 
Yolande,  fille  du  comte  de  Laval,  et  celui  du  vicomte  de  Rohan 
avec  Péronnelle  de  Maillé  (février  1455). 

C'est  là  aussi  que  fut  stipulé  le  mariage  de  Jean  de  Rohan  ', 

1.  Fr.  26082,  n<"  6637,  6653,  6689,  6709,  6765,  6773;  Fr.  5909,  f"  iiCLVii; 
Fr.  18442,  f»  144,  Fr.  25712,  n"  288. 

2.  A  cette  époque,  J.  Fleury,  «  vis  admirai  de  France,  »  est  envoyé  de 
Normandie  auprès  de  Charles  VII  par  Richemont  (Fr.  25712,  n»  282).  Les 
Anglais  ravageaient  les  côtes  de  Bretagne  [Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II, 
col.  1695). 

.    3.  Fr.  25712,  n»  288. 

4.  Fr.  26082,  n°  6721;  K  69,  n»  13. 

5.  Fr.  26082,  n<"  6664,  6775;  Fr.  26083,  n's  6889,  6890;  JJ  187,  f»  46  v»,  0.° 

IIU'^XIU. 

6.  Voy.  Append.  CVIII,  n»  2.  —  Travaux  de  défense  à  Gaen,  à  Cher- 
bourg, etc.  (JJ  187,  f»  74,  Fr.  26083,  n"  6895,  6919  et  suiv;  Fr.  25712,  n»  304). 

7.  Jeanne  de  Laval  était  fille  de  Guy  XIII,  comte  de  Laval  et  d'Isabelle  de 
Bretagne,  fille  de  Jean  V,  le  frère  de  Richemont.  René  d'Anjou  avait  perdu, 
en  1453,  sa  première  femme,  Isab.  de  Lorraine  (Anselme,  I,  232,  IV,  56; 
Lecoy  de  La  Marche,  René  d'Anjou,  I,  298-301). 

8.  Guill.  d'Harcourt,  comte  de  Tancarville,  fils  de  Jacques  d'Harcourt  et 
de  Marg.  de  Melun,  comtesse  de  Tancarville,  nièce  de  Jean  Larchevêque 
(Anselme,  V,  137-138  ;  Fr.  26082,  n»  6676.  Voy.  Append.  XII).  Guill.  d'Harcourt 
était  beau-frère  de  Dunois,  qui  avait  épousé  sa  sœur  Marie  d'Harcourk. 
Quant  à  Yolande  de  Laval,  petite-nièce  de  Richemont,  elle  était  veuve 
d'Alain  de  Rohan,  comte  de  Porhoet,  mort  au  siège  de  Fougères  en  1449 
(voy.  ci-dessus  p.  403,  note  1  et  le  tableau  généalogique).  Ces  mariages 
avaient  eu  lieu  à  Redon  (D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  II,  53,  et 
Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1641;  D.  Lobineau,  I,  G56). 

9.  Fils  d'Alain  IX  de  Rohan  et  de  sa  2«  femme,  Marie  de  Lorraine,  fille. 
d'Antoine  de  Vaudemont  (Anselme,  IV,  57). 


MARIAGE   DU  COMTE  d'ÉTAMPES  AVEC  MARG.    DE  BRETAGNE      439 

fils  unique  du  vicomte  de  Rohan,  avec  Marie  de  Bretagne,  fille 
du  feu  duc  François  I^^  Ce  prince,  dans  son  testament,  avait 
exprimé  sa  volonté  de  marier  une  de  ses  filles  avec  son  cousin 
le  comte  d'Etampes  et  l'autre  avec  l'héritier  de  la  maison  de 
Rohan,  qui  «.  plus  droictement,  de  toute  ancienneté,  estoit  issue 
de  la  ligne  royale  de  Bretagne.  »  Ces  dispositions,  fort  sages, 
avaient  pour  but  de  prévenir  une  guerre  de  succession.  Pierre  II 
et  Artur  de  Bretagne,  exécuteurs  testamentaires  de  François  !«■■, 
se  hâtèrent  de  stipuler  d'abord  le  mariage  de  leur  nièce  Marie 
avec  Jean  de  Rohan,  qui  n'avait  encore  que  deux  ans.  La  jeune 
princesse  devait  avoir,  pour  tout  droit  de  succession,  une  dot 
de  100  000  écus,  d'après  le  testament  de  François  P^  Le  vicomte 
de  Rohan  accepta,  pour  son  fils,  ces  conditions.  Le  contrat  fut 
conclu  le  10  février  '. 

Restait  à  faire  le  mariage  de  Marguerite,  fille  aînée  de  Fran- 
çois I'^'",  avec  son  cousin  François,  comte  d'Etampes,  fils  de 
Richard  de  Bretagne  (frère  du  connétable)  et  de  Marguerite 
d'Orléans  (sœur  du  duc  Charles  d'Orléans  et  de  Jean , 
comte  d'Angoulême  ^).  On  se  rappelle  que  le  jeune  comte 
d'Etampes  avait  été  désigné  par  François  I^r  comme  héritier 
présomptif,  dans  le  cas  où  Pierre  II  et  Artur  ne  laisseraient 
pas  d'enfant  mâle  '. 

Le  duc  de  Bretagne  et  le  connétable  voulaient  faire  approuver 
par  le  roi  et  par  les  princes  d'Orléans  le  mariage  et  l'ordre  de 
succession  arrêtés  par  François  P^  Richemont,  qui  avait  le  plus 
grand  intérêt  à  celte  affaire,  ne  négligea  rien  pour  la  terminer. 

Le  connétable,  le  duc  de  Bretagne  et  le  comte  d'Etampes,  au 
mois  de  juillet,  allèrent  trouver  le  roi  à  Bourges  *.  Charles  VII, 
sans  tenir  compte  des  réclamations  du  roi  d'Ecosse,  approuva 
les  dispositions  contenues  dans  le  testament  de  François  P"". 
C'était  d'ailleurs    un    moyen    d'accorder    satisfaction    à    Jac- 

1.  Ce  contrat,  signé  Pierre  et  Artur,  est  aux  Arch.  de  la  Loire-Infé- 
rieure, cas3.  4,  E  12,  avec  d'autres  pièces  relatives  au  même  mariage.  — 
Le  11  février,  à  Vannes,  Richemont  donne  aux  couvents  des  frères  prêcheurs 
et  mineurs  de  Guingamp  du  bois  de  chauffage,  à  prendre  dans  ses  bois 
et  forêts  (Arch.  de  la  Loire-Infcr.,  cas5.  30,  E.  84).  Le  23  février,  il  était 
encore  à  Vannes  (communication  de  M.  Flammermont). 

2.  Après  la  mort  de  son  mari,  cette  princesse  s'était  retirée  au  monastère 
deLongchamp,  mais  sans  faire  aucun  vœu  de  religion  (Fr.  2707,  f»^  182,  192). 

3.  Voy.  ci-dessus,  p.  423. 

4.  Preuves  de  Vhist.  de  Bretagne,  II,  col.  1687-1689;  Gruel,  227.  Le  9  juin, 
Richemont  était,  avec  Dunois,  au  conseil,  où  l'on  examinait  l'affaire  du 
comte  d'Armagnac  (Fr.  6967.  f»'  o5-f)6).  Quelques  jours  auparavant,  à  Bois- 
Sire-Amé,  le  29  mai,  Charles  VII  chargeait  le  connétable  de  faire  fortifier 
l'abbaye  de  Saint-Etienne  de  Caen  et  de  la  réunir  à  la  ville  (JJ  187,  f»  74, 
n"  vu"uu.) 


440      MISSION   DE    RICHEMOINT   ET   DE   DUNOIS   EN    SAVOIE    (1455) 

ques  II,  puisque  l'aînée  de  ses  nièces  allait  épouser  l'héri- 
tier du  duché  de  Bretagne.  Le  31  août  1455,  Charles  VII  donna 
son  consentement  à  ce  mariage,  en  confirmant  les  droits  de 
Pierre  II  *.  Le  même  jour,  le  duc  Charles  d'Orléans  donna  aussi 
son  consentement  au  mariage  que  son  neveu  allait  contrac- 
ter, avec  l'autorisation  du  roi  et  de  Richemont.  Il  s'engagea 
même  à  défendre  Artur,  si  le  comte  d'Etampes  venait  à  con- 
tester ses  droits  au  duché  de  Bretagne,  pour  faire  prévaloir  ceux 
de  sa  femme.  Enfin,  le  28  septembre,  Jean  d'Angoulême  signa 
un  consentement  semblable,  avec  mêmes  réserves  et  mêmes 
garanties  en  faveur  de  Pierre  II  et  d'Artur.  Quant  au  jeune 
comte  d'Etampes,  il  s'engagea  le  le"- septembre,  avec  l'autorisa- 
tion de  son  oncle,  Artur,  à  observer  l'ordre  de  succession  réglé 
par  le  duc  François  I^""  et  à  épouser  sa  fille  Marguerite  *. 

Ce  mariage  eut  lieu  le  16  novembre  1455,  à  Vannes,  où  le  duc 
avait  réuni  les  états  de  Bretagne,  pour  leur  faire  approuver  le 
testament  de  son  prédécesseur.  Ils  affirmèrent  ainsi  les  droits 
d'Artur  à  la  couronne  de  Bretagne  ^. 

Le  connétable  ne  put  assister  à  ces  solennités.  Le  roi  l'avait 
chargé,  ainsi  que  Dunois,  d'une  mission  délicate  et  qui  ne  pou- 
vait être  confiée  qu'à  des  personnages  de  la  plus  haute  impor- 
tance. Il  s'agissait  d'aller  en  Bresse  et  en  Savoie  faire  une  en- 
quête sur  les  menées  du  Dauphin  et  de  son  beau-père  le  duc 
Louis  I®%  et  d'imposer  au  duc  la  stricte  observation  du  traité 
conclu  à  Cleppé  en  1452  *. 

Richemont,  Dunois  et  d'autres  conseillers  de  Charles  VII,  à  la 
fois  commissaires  et  ambassadeurs,  réussirent  dans  leur  double 
mission.  Ils  assignèrent,  firent  comparaître,  interrogèrent  les  su- 
jets du  duc  de  Savoie,  comme  s'ils  eussent  exercé  leurs  pouvoirs 
dans  une  province  française;  mais  ils  surent  calmer  la  légitime 
susceptibilité  de  ce  prince,  en  lui  affirmant  que  le  roi  de  France 
ne  voulait  d'ailleurs  porter  aucune  atteinte  à  ses  droits.  Enfin, 
par  leurs  conseils  et  la  fermeté  de  leur  langage,  ils  le  déterminè- 
rent à  venir  avec  eux  auprès  de  Charles  VII.  Ils  conduisirent  le 
duc  et  la  duchesse  de  Savoie  à  Lyon,  puis  à  Saint-Pourçain  ^.  Le 

i.  Il  est  à  remarquer  qu'il  n'est  fait  nulle  mention  de  ceux  d'Artur  dans 
ce  document,  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  4,  E,  i2). 

2.  Ces  quatre  pièces  sont  aux  Archives  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  4, 
E,  12.  Une  seule,  l'engagement  du  comte  d'Etampes,  se  trouve  dans  les  His- 
toires de  Bretagne  de  D.  Morice  et  de  D.  Lobineau  {Preuves  de  l'Histoire  de 
Bretagne,  t.  II,  col.  1678-1680). 

3.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1682,  et  Archives  de  la  Loire- 
Inf.,  cass.  4,  E,  12;  d'Argentré,  956. 

4.  Voir  ci-dessus,  p.  433. 

3.  Arrondissement  de  Gannat. 


LE  ROI   FAIT  ARRÊTER  LE  DUC   d'ALENÇON   (1456,    27   MAl)      441 

roi,  avec  le  chancelier  le  maréchal  de  Lohéac,  le  comte  de  Dam- 
martin,  le  sire  de  Torcy  et  une  nombreuse  escorte,  s'était  avancé 
jusque-là,  pour  surveiller  de  plus  près  le  dauphin  et  pour  inti- 
mider, au  besoin,  le  duc  de  Savoie.  Cédant  aux  conseils  de 
Charles  d'Orléans,  de  Richemont  et  de  Dunois,  le  duc  traita  de 
nouveau  avec  le  roi  et  donna  des  garanties  pour  l'exécution  du 
traité  de  Gleppé  (16  décembre  1455)  K 

Charles  VII  resta  encore  dans  le  Bourbonnais,  l'Auvergne  et 
le  Dauphiné,  pour  observer  la  conduite  de  son  fils,  qui  lui  inspi- 
rait de  vives  inquiétudes.  Le  connétable  demeura  quelque  temps 
auprès  de  lui  et  retourna  ensuite  à  Parthenay  ^  C'est  alors  que 
le  duc  d'Alençon,  accusé  d'intriguer  avec  le  Dauphin,  le  comte 
d'Armagnac,  le  duc  de  Bourgogne,  et  même  de  s'entendre  avec 
les  Anglais,  fut  arrêté  à  Paris  par  Dunois,  le  27  mai  1456  ',  quel- 
ques jours  avant  la  réhabilitation  solennelle  de  l'héroïne  avec 
laquelle  il  avait  combattu  pour  la  France  *. 

On  sait  que  le  duc  d'Alençon  regrettait  toujours  la  seigneurie 
de  Fougères,  qu'il  avait  vendue  autrefois  au  duc  de  Bretagne. 
Vainement  il  avait  proposé  de  la  racheter.  Elle  avait  même  été 
incorporée  à  la  Bretagne  en  1451.  Il  avait  essayé  de  faire  agir 
Charles  VII  en  sa  faveur  et  n'avait  pas  mieux  réussi  de  ce  côté. 
Il  se  plaignait  aussi  de  n'avoir  pas  à  la  cour  le  rang  et  le  crédit 
auxquels  lui  donnaient  droit  sa  naissance  et  ses  services  ^.  De 
même  que  le  Dauphin,  il  reprochait  au  roi  d'avoir  des  ministres 
peu  dignes  de  sa  confiance  et  animés  d'intentions  malveillantes. 
Aigri  par  le  mécontentement  et  la  rancune  qui  troublaient  son 
esprit  ^,  égaré  par  de  mauvais  conseils,  il  noua  des  relations 
avec  les  Anglais  et  promit  de  les  introduire  en  Normandie,  à  la 
première  occasion. 

En  1455,  le  moment  avait  paru  favorable.  Le  roi  se  préparait 
à  envoyer  une  armée  en  Gascogne,  contre  Jean  V  d'Armagnac  '; 


1.  S.  Guichenon,  llist.  généal.  de  la  royale  maison  de  Savoye,  t.  I,  p.  317, 
et  Histoire  de  Bresse  et  du  Bugey,  p.  80-82;  Fr.  6960,  P'  184-185,  et  Fr  5909, 
fo  viu""!!  V».  Voy.  aussi  une  lettre  de  Charles  VII,  datée  du  2  septembre, 
publiée  par  M.  de  Beaucourt,  dans  la  Revue  des  questions  histor.,  t.  XVII, 
p.  403,  note  2,  et  p.  404.  —  Fr,  ioo37  f»»  19  et  169. 

2.  Richemont  était  encore  à  Saint-Pourçain  le  21  janvier  (Fr.  6967,  f"  71  ; 
Gruel,  227).  Le  3  avril,  il  était  à  Parthenay  (communication  de  M.  Flam- 
mermont). 

3.  Ses  biens  furent  aussitôt  confisqués  (Fr.  20886,  n»  9). 

4.  La  réhabilitation  de  Jeanne  d'Arc  fut  prononcée  le  7  juin  1436,  à 
Rouen. 

3.  JJ  180,  f»  48  v,  n«  cvu, 

6.  Voir  ci-dessus,  p,  432,  note  9. 

7.  Le  11  mai  1435,  Charles  VII  ordonnait  d'arrêter  Jean  V,  et  bientôt 


442      RICHEMONT  ESSAIE   DE    SAUVER   LE   DUC   d'ALENÇOîN    (1456) 

mais  les  événements  qui  survinrent  alors  en  Angleterre  contrai- 
gnirent le  duc  d'Alençon  à  différer  l'accomplissement  de  ses 
projets.  Richard  d'York  marchait  contre  Henri  VI  et  gagnait  la 
bataille  de  Saint-Albans  (22  mai  1455).  Quand  la  reine  d'Angle- 
terre eut  repris  le  pouvoir  à  Richard  (février  1456)  et  que  la 

■tranquillité  parut  rétablie,  le  gouvernement  anglais  put  songer 
à  une  nouvelle  entreprise  contre  la  France  *.  Charles  VII  se 
sentait  environné  d'ennemis,  à  commencer  par  son  fils  aine.  Il 

-craignait  pour  lui-même  et  pour  le  royaume.  Il  voulut  faire 
preuve  d'énergie  en  face  de  ces  dangers.  C'est  alors  qu'il  fit 
arrêter  le  duc  d'Alençon  et  qu'il  chargea  Dammartin  d'arrêter 
aussi  le  Dauphin  (août  1456).  Celui-ci  s'enfuit  dans  les  États 
de  Bourgogne  (30  août)*;  mais  le  duc  d'Alençon  resta  prison- 
nier et  se  trouva  dans  une  situation  périlleuse. 

Richemont  en  conçut  un  vif  chagrin.  Il  aimait  son  neveu,  et, 
s'il  n'avait  pas  oublié  ses  torts,  il  n'oubliait  pas  davantage  ses 
services.  Il  espérait  le  ramener  à  de  meilleurs  sentiments,  par  de 
sages  conseils,  par  des  paroles  affectueuses,  et  obtenir  ensuite  le 
pardon  du  roi  pour  le  coupable  soumis  et  repentant.  Chargé  par 
Charles  VII  d'aller  interroger  le  duc  d'Alençon  à  Melun,  où  il 
avait  été  conduit,  le  connétable  ne  put  tirer  de  lui  que  de  nou- 
velles plaintes  contre  le  roi,  contre  ses  ministres,  mais  pas  un. 
aveu,  pas  une  marque  de  repentir.  Le  prisonnier  finit  même 
par  lui  déclarer  «  qu'il  diroit  son  fait  au  roi  et  non  à  autre  ^  ». 
Richemont  retourna  tristement  à^Parthenay. 

Au  mois  de  janvier  1457,  il  dut  aller  à  Paris  ^,  pour  apaiser 
une  querelle  entre  les  ordres  mendiants  et  l'Université.  Cette 
querelle,  qui  durait  depuis  le  mois  de  mai  de  l'année  précédente, 
avait  éclaté  à  l'occasion  d'une  bulle  de  Nicolas  V,  donnant  aux 
religieux  mendiants  pouvoir  de  confesser.  Les  curés  de  Paris, 
se  trouvant  ainsi  lésés  dans  leurs  droits,  se  plaignirent  ;  l'Uni- 
versité les  soutint  et  voulut  obliger  les  ordres  mendiants  à  de- 


une  armée  allait  l'assiéger  dans  Lectoure,  d'où  il  s'enfuit  (juin  1453)  [dom 
Vaissète,  V,  18-19]. 

1.  Le  roi  d'Ecosse,  Jacques  II,  excitait  toujours  Charles  VII  à  profiter 
des  troubles  causés  par  le  duc  d'York,  pour  combattre  les  Anglais  (J.  Ste- 
venson, I,  319,  323,  328,  330).  Le  duc  de  Bretagne  se  plaignait  de  leurs 
ravages  {Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  1695). 

2.  De  Beaucourt,  Revice  des  questions  histor.,  t.  XVII,  p.  403-412;  Duclos, 
Hist.  de  Louis  XI,  t.  III,  p.  99  et  suiv.;  Guichenon,  Hist.  de  la  maison  de 
Savoye,  I,  517;  J.  du  Glercq,  p.  618-619;  Chron.  Martinienne,  f»'  ccxcvn 
V»  et  suiv.  ccn  et  suiv. 

3.  J.  Ghartier,  III,  57.  Voy.  aussi  M.  d'Escouchy,  t.  II,  p.  318-324,  qui  d'ail- 
leurs ne  parle  pas  de  cette  mission  du  connétable;  D.  Taillandier,  I,  p.  60.. 

4.  Il  y  était  le  11  janvier  (Fr.  26084,  n"  7031). 


IL   INTERVIENT  ENTRE   LES   ORDRES   MENDIANTS   ET  l'UNIVERSITÉ      443 

mander  la  révocation  de  la  bulle.  Sur  leur  refus,  on  les  déclara 
parjures  et  exclus  de  l'Université.  Alors  ils  saisirent  de  leur 
cause  le  parlement,  qui  commit  l'archevêque  de  Reims,  Jean 
Jouvenel  des  Ursins,  et  l'évéque  de  Poitiers,  avec  quatre  conseil- 
lers, pour  arranger  le  différend.  Ils  échouèrent  dans  cette  tenta- 
tive de  conciliation,  et  l'Université  résolut  d'en  appeler  non  seu- 
lement au  pape,  aux  communautés,  aux  chapitres,  mais  encore 
au  roi,  aux  princes  et  aux  barons.  Sur  ces  entrefaites,  les  évo- 
ques de  Normandie,  réunis  à  Rouen,  prirent  parti  pour  l'Univer- 
sité. L'évéque  de  Paris  lui-même,  qui  avait  eu  de  graves  démê- 
lées avec  elle,  deux  ans  auparavant,  ne  lui  refusa  pas  -son 
approbation.  La  querelle  menaçait  de  prendre  des  proportions 
inquiétantes,  quand  le  pape  Calixte  III  révoqua  les  privilèges 
dont  voulaient  se  prévaloir  les  ordres  mendiants. 

C'est  alors  que  le  connétable  vint  à  Paris  ^  Depuis  vingt  et  un 
ans  qu'il  avait  chassé  les  Anglais  de  cette  ville,  il  avait  rendu  de 
si  grands  services  qu'il  jouissait  d'une  autorité  considérable.  Il 
détermina  les  ordres  mendiants  à  céder,  en  leur  promettant  ses 
bons  offices  pour  les  faire  rentrer  dans  l'Université. 

Le  18  février,  il  y  eut  une  grande  assemblée  au  chapitre  des 
Bernardins.  Le  connétable  s'y  rendit,  avec  l'archevêque  de 
Reims,  l'évéque  de  Paris  et  les  dignitaires  des  ordres  mendiants. 
Il  fît  un  discours  en  français,  pour  recommander  la  conciliation, 
la  paix,  la  concorde,  et  il  déclara  que  les  moines  mendiants 
renonçaient  aux  droits  dont  les  avait  investis  Nicolas  V,  à  condi- 
tion qu'ils  rentreraient  dans  l'Université.  J.  Bréhal,  prieur  des 
Jacobins,  ajouta  :  «  Présupposé,  premièrement,  les  conclusions 
prises  et  proposées  par  monseigneur  le  connestable,  nous  vous 
requérons  et  supplions  très  humblement,  tant  que  faire  povons, 
que  à  icelles  requestes  et  conclusions  vous  plaise  obtempérer  et 
nous  recevoir  comme  suppôts  et  membres.  »  Ces  paroles  n'ayant 
pas  paru  assez  soumises,  l'Université  persista  dans  son  refus. 

Les  frères  mendiants  sortirent,  et  l'accord  paraissait  bien  com- 
promis, quand  le  connétable,  qui  les  avait  suivis,  les  détermina 
enfin  à  prendre  une  attitude  plus  respectueuse  et  les  ramena  dans 
l'assemblée,  en  disant  :  «  Messieurs,  je  vous  ramène  ces  bons  reli- 
gieux, qui  n'estoient  pas  bien  advisez  quand  ils  vous  ont  fait  leur 
supplication,  et  pourtant  je  vous  les  ramène  mieux  advisez.  »  Le 
prieur  des  Augustins  supplia  ensuite  l'Université  de  vouloir  bien 
admettre  les  ordres  mendiants.  Elle  y  consentit,  à  condition 
qu'ils  ne  se  prévaudraient  jamais  de  la  bulle  de  Nicolas  V  et 
qu'ils  renonceraient  à  toutes  les  poursuites  commencées. 

1.  Voy.  ci-dessus,  p.  442,  note  4. 


444      MORT   DE   PIERRE   II.    RICHEMONT   DUC   DE   BRETAGNE   (1457) 

Avant  de  se  séparer,  l'assemblée  adressa  de  grands  remercie- 
ments aux  seigneurs,  aux  prélats  et  surtout  au  connétabe,  dont 
l'intervention  avait  apaisé  cette  querelle  *.  Richemont  resta 
quelque  temps  à  Paris;  mais,  ayant  appris  que  son  neveu,  le 
duc  de  Bretagne,  était  malade,  il  partit  pour  se  rendre  auprès 
de  lui  ^.  A  Tours,  il  reçut  un  message  qui  l'informait  que  la 
comtesse  de  Richemont  était  aussi  atteinte  d'une  grave  mala- 
die. Malgré  l'avis  de  son  Conseil,  il  voulut  d'abord  aller  à  Par- 
thenay  ^.  Il  y  resta  jusqu'au  rétablissement  de  sa  femme,  puis  il 
repartit  avec  elle  pour  Nantes,  où  était  son  neveu  Pierre  II,  et  il 
ne  le  quitta  plus  jusqu'à  ses  derniers  moments. 

Pendant  sa  longue  maladie,  le  duc  eut  le  temps  de  prendre 
toutes  ses  dispositions.  Il  fit  son  testament  le  5  septembre.  Il  y 
régla  la  succession  au  duché  de  Bretagne,  comme  l'avait  déjà 
fait  son  frère  François,  avec  l'approbation  de  Charles  VII  *. 
Il  désigna  comme  successeur  son  oncle  Artur  et,  à  son  défaut, 
Richard,  comte  d'Etampes.  Il  les  nomma  tous  deux  ses  exécu- 
teurs testamentaires,  avec  la  duchesse  sa  femme.  Il  ne  laissait 
pas  d'enfants  légitimes,  mais  seulement  une  fille  naturelle, 
Jeanne.  Dans  son  testament  il  chargea  Richemont  d'acquitter 
ses  dettes  et  lui  recommanda  une  fille  bâtarde  de  son  frère 
François,  en  le  priant  de  la  marier  selon  son  état®.  Il  expira  le 
jeudi  22  septembre  et  fut  inhumé  le  lendemain,  dans  le  chœur 
de  l'éghse  de  Nantes. 

Parvenu  à  l'âge  de  soixante-cinq  ans,  après  avoir  vu  mourir 
ses  frères,  ses  neveux,  Artur  de  Bretagne  ceignit  la  couronne 
de  ses  ancêtres.  11  fut  proclamé  duc  de  Bretagne,  sous  le  nom 
d'Artur  III,  le  22  septembre  1457  ".  Ce  titre,  presque  royal,  au- 
quel il  ne  pouvait  aspirer  jadis,  n'ajouta  rien  à  la  gloire  qu'il 
avait  su  acquérir  lui-même,  au  milieu  des  plus  dures  épreuves, 
quand  il  était  simple  cadet  de  famille  et  connétable  de  France. 
Aussi  ne  voulut-il  jamais  renoncer  à  cette  charge.  Les  seigneurs 
bretons  eurent  beau  lui  représenter  qu'elle  ne  convenait  plus  à 

1.  D.  Félibien,  Histoire  de  Paris,  t.  II,  841-843;  Gruel,  227;  du  Boulai, 
V,  613-616;  D.  Taillandier,  I,  59-467. 

2.  Il  était  à  Orléans  la  veille  de  Pâques  fleuries,  c'est-à-dire  le  9  avril 
1457,  d'après  Gruel  (p.  227),  à  Tours  le  H  avril. 

3.  Il  y  arriva  le  vendredi  saint,  15  avril  (Gruel,  227).  11  y  était  encore 
le  8  juin.  C'est  là  qu'il  donna  son  consentement  au  mariage  d'Alain  d'Albret 
avec  Françoise,  fille  de  Guillaume  de  Bretagne  (Arch.  des  Basses-Pyrénées, 
E.  648). 

4.  Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  9,  E,  26,  Ce  document  porte  la  signa- 
ture de  Pierre  II  et  celles  des  témoins. 

5.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1703-1709. 

6.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1709. 


ENTRÉE  d'ARTUR   III   A  RENNES    (1457,    30  OCTOBRE)  445 

un  prince  souverain  ;  il  répondit  qu'il  voulait  honorer  dans  sa 
vieillesse  une  dignité  qui  l'avait  honoré  lui-même  dans  sa  jeu- 
nesse *. 

Il  resta  quelque  temps  à  Nantes,  occupé  à  poursuivre  ceux  des 
ennemis  de  Gilles  qu'il  n'avait  pu  jusqu'alors  livrer  à  la  jus- 
tice ^  Sans  attendre  la  mort  de  Pierre  II,  il  avait  fait  arrêter 
son  grand-maître  d'hôtel,  H.  de  Villeblanche,  Jean  Hingant  et 
Goetlogon,  qu'il  soupçonnait  de  complicité  avec  les  meurtriers^; 
mais,  après  une  instruction  de  six  mois,  il  fallut  les  relâcher, 
faute  de  preuves.  En  même  temps,  il  s'occupait  des  affaires  les 
plus  urgentes.  Il  institua  de  nouveaux  officiers,  dont  un  capi- 
taine des  francs  archers  *;  il  envoya  rendre  hommage  à  René 
d'Anjou,  pour  la  seigneurie  de  Champtocé. 

Le  nouveau  duc  de  Bretagne,  Artur  III,  fit  son  entrée 
solennelle  dans  Rennes,  sa  capitale,  le  30  octobre  1457  '.  Les 
comtes  d'Etampes  et  de  Laval,  le  vicomte  de  Rohan,  Jacques  de 
Luxembourg,  les  prélats  et  barons  de  Bretagne  lui  faisaient 
un  magnifique  cortège.  Des  princes  et  seigneurs  étrangers,  qui 
n'avaient  pu  venir  à  cette  cérémonie,  avaient  envoyé  leurs 
hérauts  d'armes.  Comme  les  Etats  de  Bretagne  avaient  été 
convoqués  pour  la  même  époque,  il  y  eut  une  grande  affluence 
et  des  fêtes  brillantes  à  Rennes.  Le  duc  envoya  ensuite  au  pape 
des  ambassadeurs,  pour  lui  notifier  son  avènement  et  lui  prêter 
serment  d'obéissance,  suivant  la  coutume  des  princes  catho- 
liques. 

Revenu  à  Nantes,  il  continua  de  donner  ses  soins  au  gouver- 
nement et  de  recevoir  l'hommage  de  ses  vassaux,  entre  autres 
celui  de  Jean  de  Brosse,  seigneur  de  Sainte-Sévère  et  de  Boussac, 
comte  de  Penthièvre  «.  Il  fut  alors  invité  par  le  roi  à  venir  au- 
près de  lui,  à  Tours,  pour  assister  à  la  réception  des  ambas- 
sadeurs que  le  jeune  roi  de  Bohême  et  de  Hongrie,  Ladislas, 

1.  D'Argentré,  p.  843;  D.  Taillandier,  i/M<.  de  Bretagne,  II,  64. 

2.  Les  poursuites  avaient  continué  contre  Jacques  d'Espinay,  évêque  de 
Rennes  (Fr.  2707,  f"  209-212), 

3.  Preuves  de  l'hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1718-1720.  Ils  étaient  aussi  ac- 
cusés de  sorcellerie  et  de  dilapidations.  —  H.  de  Villeblanche  était  grand 
maître  d'hôtel  de  Pierre  II,  et  Goetlogon  contrôleur  général  (col.  1708). 

4.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1709-1718.  —  Guillaume  Gruel  fut 
nommé  capitaine  de  Dol.  Jean  du  Cellier  fut  institué  chancelier  de  Bre- 
tagne dès  le  30  septembre  (col.  1710). 

5.  Par  la  porte  Mordelaise.  Le  sire  de  Guéméné,  procureur  du  vicomte 
de  Rohan,  qui  était  absent,  pour  cause  de  maladie,  reçut  le  serment  du 
duc,  au  nom  des  Etats  de  Bretagne  {Supplément  aux  preuves  de  VHist.  de 
Bretagne,  t.  II  des  Preuves,  p.  ccxvn).  —  Jacques  de  Luxembourg  était 
alors  capitaine  de  Rennes.  (Arch.  munie,  de  Rennes,  travée  I,  n°  1.) 

6.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1720-1721. 


446      CHARLES   VII   VIENT    A   LA   COUR   DE   FRANCE    (44S8,    JANVIER) 

envoyait  en  France  demander  à  Charles  VII  la  main  de  sa  fille 
Madeleine  *.  Le  duc  fit  ses  préparatifs  pour  paraître  à  la  cour 
avec  un  éclat  digne  de  son  rang  *.  Il  institua  le  vicomte  de 
Rohan  son  lieutenant  général  '  et  prit  toutes  les  autres  mesures 
nécessaires  pour  assurer,  pendant  son  absence^  la  sécurité  de 
la  Bretagne.  C'est  ainsi  qu'il  signa,  le  31  décembre,  des  ordres 
pour  la  mobilisation  des  francs  archers  *,  afin  qu'on  pût  compter 
sur  eux  en  cas  de  besoin;  les  attaques  des  Anglais  étant  toujours 
à  craindre  *. 

Il  partit  ensuite  avec  un  nombreux  cortège  (janvier  1458).  En 
chemin,  il  apprit  la  mort  du  roi  Ladislas  et  le  départ  de  l'ambas- 
sade envoyée  par  lui  à  Tours  ^  Il  continua  néanmoins  son 
voyage.  A  Angers,  où  il  reçut  un  accueil  empressé,  il  fut  retenu 
huit  jours  par  une  indisposition  assez  grave.  Aux  environs  de 
Tours,  il  rencontra  beaucoup  de  seigneurs  qui  étaient  venus  au- 
devant  de  lui,  avec  les  gens  du  roi.  Ils  le  conduisirent  au  palais 
en  grand  appareil.  Devant  lui,  son  écuyer,  Philippe  de  Malestroit, 
po'rtait  deux  épés,  l'une  la  pointe  en  haut,  à  cause  de  sa  dignité 
ducale,  l'autre  au  fourreau,  à  cause  de  sa  charge  de  connétable. 
Artur  III  fut  reçu  avec  les  honneurs  dus  à  son  rang  et  à  ses 
services;  mais  les  fêtes  qui  devaient  avoir  lieu  furent  empêchées 
par  une  maladie  du  roi  ^  Il  demeura  environ  un  mois  à  la  cour, 
où  s'agitaient  d'importantes  questions. 

Après  la  mort  de  Ladislas,  Charles  YII,  en  vertu  des  droits  qu'il 
possédait,  comme  descendant  de  la  maison  de  Bohême,  avait 
revendiqué  le  Luxembourg*,  compris,  avec  l'Autriche,  la  Bohème 

1.  Ladislas  était  fils  posthume  de  l'empereur  Albert  II  d'Autriche  et 
d'Ehsabeth  de  Luxembourg,  fille  de  l'empereur  Sigismond. 

2.  Il  fit  venir  de  la  Basse-Bretagne  des  lutteurs,  pour  donner  à  la  cour  de 
France  un  divertissement  qui  était  fort  à  la  mode  à  celle  de  Bretagne. 

3.  Le  6  décembre,  à  Nantes  [Preuves  de  fHist.  de  Bret.,  II,  col.  1721-1722). 

4.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  II,  col.  1714.  Un  peu  plus  tard,  le  10  juillet 
1458,  Oliv.  de  Quelen  fut  nommé  grand  maître  de  l'artillerie  et  capitaine 
général  des  francs  archers  de  Bretagne  (col.  1717). 

5.  En  1457,  les  Anglais  avaient  encore  menacé  les  côtes  de  France,  et  on 
avait  pris  des  mesures  de  défense  contre  eux  (Musée  des  Archives  natio- 
nales, n»  462;  Fr.  21427,  n»  o). 

6.  Ladislas  mourut  le  23  novembre  1457.  Les  ambassadeurs  hongrois 
repartirent  le  31  décembre  (de  Beaucourt,  Revue  des  quest.  hist.,  t.  XVII, 
p.  415-417). 

7.  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1722-1727.  Le  20  février, 
Charles  VII  ratifie  la  rémission  accordée  par  Artur  III  à  J.  Buchon,  con- 
damné et  emprisonné  à  Fontenay-le-Comte  (JJ  185,  î°  219  v°). 

8.  Le  roi  de  France  Jean  le  Bon  avait  épousé  Jeanne  de  Luxembourg, 
fille  de  Jean  de  Luxembourg,  roi  de  Bohême  (qui  fut  tué  à  la  bataille  de 
Crécy)  et  tante  de  l'empereur  Sigismond.  —  Ladislas  le  Posthume  avait 
d'ailleurs  légué  le  Luxembourg  à  Madeleine  de  France.  Charles  VII  prit 


RENOMMÉE   d'ARTUR  III  447 

et  la  Hongrie  dans  la  riche  succession  de  ce  jeune  prince.  Cette 
succession  excitait  d'ardentes  convoitises.  Charles  VII  lui-même 
songeait  aux  moyens  d'en  avoir  une  partie.  Devenu  le  plus 
puissant  souverain  de  la  chrétienté,  il  semblait  plus  capable 
qu'aucun  autre  de  défendre  la  Hongrie  et  l'Autriche  menacées 
par  Mahomet  II,  le  conquérant  de  Constantinople.  L'empereur 
Frédéric  III  disputait  aux  autres  princes  autrichiens,  à  Georges 
Podiebrad,  à  Mathias  Korwin,  la  succession  de  Ladislas;  mais  il 
était  faible,  méprisé,  impuissant  %  et  se  laissait  «  plumer  la 
barbe  à  chacun  sans  revenger  ». 

Charles  VII  avait  en  Allemagne  un  parti  nombreux,  qui  se 
faisait  une  haute  idée  de  sa  puissance.  Son  ambassadeur  à 
Vienne  écrivait  qu'il  ne  doutait  pas  que,  s'il  s'entendait  avec 
le  duc  de  Bourgogne,  «  la  très  chrestienne  maison  de  France, 
en  brief,  eust  en  main  et  l'empire  et  les  royaumes  de  Hongrie 
et  de  Bohaigne  et  l'oneur  de  secourir  la  foy  ».  L'ambassadeur 
ajoutait  :  «  et  scay  que  plusieurs,  que  seigneurs  et  princes,  que 
tout  le  commun  peuple  d'Almaigne  s'attendent  que  ainsi  aviegne 
et  le  désirent;  et  la  nouvelle  qu'avons  eu  que  le  duc  de  Bretai- 
gne,  connestable  de  France,  est  allé  devers  vous,  me  fait  espérer 
que  ainsi  aviendra  *.  » 

Ce  projet  grandiose  était  chimérique  ;  toutefois  cette  lettre 
montre  que  la  renommée  du  connétable  était  répandue  au  loin 
et  que  sa  dignité  nouvelle  était,  pour  Charles  VII  lui-même, 
un  accroissement  de  puissance.  Il  était  naturel  de  supposer  que 
son  fidèle  connétable,  devenu  duc  de  Bretagne,  serait  pour  lui 
un  auxiliaire  encore  plus  utile.  Certes,  le  duc  Artur  III  fut 
aussi  dévoué  à  Charles  VU  que  l'avait  été  le  comte  de  Riche- 
mont  ;  mais  les  causes  ordinaires  de  différends  entre  les  rois  de 
France  et  les  ducs  de  Bretagne  n'en  subsistèrent  pas  moins. 
Artur  III,  tout  en  restant  connétable  de  France,  n'oublia  pas 
qu'il  était  duc  de  Bretagne.  A  ce  titre,  il  défendit  ses  privilèges 
avec  autant  d'énergie  que  ses  prédécesseurs. 

Avant  de  quitter  Tours,  il  offrit  au  roi  de  lui  faire  l'hommage 
qu'il  lui  devait.  Quand  il  sut  que   Charles  et  ses  conseillers 

sous  sa  garde  Thionville  et  les  autres  places  du  duché  de  Luxembourg.  Il 
y  commit  Thierry  de  Lenoncourt,  bailli  de  Vitry,  et  Tristan  l'Hermite,  le  8 
janvier  1458  (de  Beaucourt,  Revue  des  quest.  hist.,  t.  XVII,  418;  JJ  185, 
f»  220). 

1.  Fr.  15537,  f»»  165  et  166.  L'envoyé  français  à  Vienne  représente  l'em- 
pereur comme  endormi,  lâche,  morne,  pesant,  «  qui  se  laisse  plumer  la 
barbe  à  chacun  sans  revanger,  variable,  hypocrite,  dissimulant,  et  à  qui 
tout  mauvais  adjectif  appartient.  » 

2.  Fr.  15537,  f»'  165,  166.  Ce  document  si  curieux  a  été  publié  par  Duclos 
{Hist.  de  Louis  XI,  t.  III,  167-171). 


448  DIFFÉRENDS   ENTRE   CHARLES   VII   ET   ARTUR   III   (1458) 

réclamaient  l'hommage  lige  pour  son  duché,  il  n'y  voulut  pas 
consentir.  Il  allégua  la  nécessité  de  consulter  les  Etats  de  Bre- 
tagne, et  il  repartit*,  bien  décidé,  s'il  faut  en  croire  son  bio- 
graphe, à  ne  plus  revenir  auprès  de  Charles  YII  et  «  à  ne  lui 
faire  aucune  redevance  *  ». 

Il  est  possible  que,  dans  un  moment  de  colère,  Artur  ait  pro- 
noncé des  paroles  inconsidérées  ;  mais  il  n'est  pas  croyable  qu'il 
ait  exprimé  la  résolution  formelle  de  refuser  l'hommage  rendu 
par  ses  prédécesseurs.  Il  savait  bien  que  le  roi  et  ses  conseillers 
avaient  coutume  de  réclamer  l'hommage  lige,  comme  ils  l'avaient 
fait  encore  à  Pierre  II  ;  mais  il  n'ignorait  pas  que,  dans  la  pra- 
tique, les  choses  se  passaient  autrement,  et  qu'il  pouvait  accom- 
plir ses  devoirs,  en  faisant  respecter  ses  droits.  Il  ne  refusa  donc 
pas  de  retourner  à  la  cour,  quand  la  duchesse  d'Alençon  *  le 
supplia  d'aller  demander  au  roi  la  grâce  de  son  mari. 

Avant  de  partir,  il  montra  la  même  énergie  à  défendre  ses 
prérogatives.  Le  roi  avait  convoqué  le  parlement  à  Montargis, 
pour  le  procès  du  duc  d'Alençon,  et  il  y  avait  appelé  les  pairs  du 
royaume  *.  Il  envoya  un  de  ses  secrétaires,  Bertrand  Brissonnet, 
inviter  Artur  III  à  siéger,  en  qualité  de  pair,  dans  cette  haute 
cour  de  justice.  Il  est  probable  que  Brissonnet  avait  d'autres 
instructions,  relatives  aux  différends  que  soulevaient  aussi  les 
empiétements  de  la  juridiction  royale  en  Bretagne.  La  réponse 
que  fît  Artur  à  l'envoyé  de  Charles  VII,  au  château  de  Nantes, 
le  11  mai  1458,  montre,  mieux  que  le  récit  de  son  biographe, 
ses  véritables  sentiments. 

Artur  III  déclara  «  que,  de  tout  temps,  il  avait  servi  le  roi  et 
son  royaume;  qu'il  était  connétable  de  France  ;  qu'en  cette  qua- 
lité il  était  tenu  de  se  rendre  aux  ordres  du  roi  et  qu'il  était  dis- 
posé à  le  faire;  mais  que,  en  qualité  de  duc,  il  ne  dépendait  de 
la  couronne  de  France  que  dans  le  cas  d'appel  du  parlement  de 
Bretagne  à  celui  de  Paris,  ou  dans  le  cas  de  déni  de  justice;  que 
son  duché  n'avait  jamais  fait  partie  du  royaume  de  France  et 
qu'il  n'en  était  pas  un  démembrement;  qu'il  était  très  déter- 
miné à  ne  point  violer  son  serment  de  conserver  les  prérogatives 
de  son  duché  ;  qu'il  n'était  pas  pair  de  France  et  qu'il  ne  voulait 


1.  A  Tours,  il  se  fit  recevoir  chans  de  Saint-Gatien  {Preuves  de  l'Hist. 
de  Bretagne,  t.  II,  col.  1724). 

2.  Gruel,  228;  d'Argentré,  959.  Artur  III  était  le  14  avril  à  Nantes,  où  il 
signe  un  mandement  relatif  à  la  fabrication  de  la  monnaie  à  Rennes  (Arch. 
de  la  Loire-Inférieure). 

3.  Marie  d'Armagnac,  fille  de  Jean  IV  d'Armagnac  et  d'Isabelle  de  Na- 
varre, cousine  de  Richemont. 

4.  Xia  8605,  f"  188  et  189. 


ARTUU   III   OBTIENT   LA   GRACE   DU   DUC   d'ALENÇON    (1458)       449 

pas  comparaître,  en  cette  qualité,  à  Montargis  ou  ailleurs  *.  » 
Charles  VII  ayant  ensuite  convoqué  à  Vendôme  ^,  pour 
le  12  août,  le  parlement  qui  devait  siéger  à  Montargis,  Artur  se 
rendit  à  Vendôme,  afin  d'implorer  la  grâce  de  son  neveu,  sachant 
qu'il  était  coupable  et  qu'il  serait  condamné.  Il  partit  bien  ré- 
solu à  faire  hommage  au  roi,  sans  permettre  aucune  atteinte 
à  ses  privilèges.  II  emmenait  le  comte  d'Elampes,  le  comte  de 
Laval,  Jacques  de  Luxembourg,  le  chancelier  de  Bretagne,  Ph. 
de  Malestroit  et  baaucoup  d'autres  seigneurs.  Il  fit  une  partie 
du  voyage  par  eau,  en  remontant  la  Loire,  pour  éviter  des 
fatigues  que  sa  santé  ne  lui  permettait  plus  de  supporter.  Arrivé 
à  Vendôme,  il  trouva  le  procès  commencé.  Après  avoir  avoué 
la  plupart  des  crimes  dont  il  était  accusé,  le  duc  d'Alençon  fut 
condamné  à  mort,  le  10  octobre  1458  '. 

Déjà  la  duchesse  d'Alençon  était  venue,  avec  ses  enfants  *,  se 
jeter  aux  genoux  du  roi,  pour  implorer  sa  pitié;  le  duc  de  Bour- 
gogne, par  ses  envoyés,  le  duc  d'Orléans  et  Artur  III  avaient 
inutilement  pris  la  défense  du  coupable.  Une  fois  la  sentence 
prononcée,  il  n'y  avait  plus  à  espérer  qu'en  la  clémence  royale. 
Alors  le  connétable,  qui  voulait,  à  tout  prix,  sauver  son  neveu, 
rappela  les  grands  services  rendus  à  la  France  par  le  captif  de 
Verneuil,  par  le  compagnon  de  Jeanne  d'Arc,  par  son  père,  tué 
à  la  bataille  d'Azincourt.  Ses  éloquentes  supplications  touchèrent 
le  cœur  du  roi.  Charles  VII  fit  grâce  de  la  vie  au  condamné  et 
laissa  même  une  partie  de  ses  biens  à  sa  femme  et  à  ses  enfants, 
en  considération  des  prières  du  connétable  ^.  Toutefois  le  duc 
d'Alençon  fut  retenu  prisonnier. 

Artur,  qui  était  malade,  voulut  s'acquitter  de  l'hommage  qu'il 
devait  au  roi,  pour  retourner  en  Bretagne.  Le  14  octobre,  il  se 
présenta,  l'épée  au  côté,  devant  Charles  VII.  «  Monseigneur  de 

i.  Preuves  de  l'Hist.  de  Bret.,  t.  II,  col.  1729.  —  Analyse  très  exacte  de 
ce  document  dans  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  II,  p.  65.  —  On  trouve 
aux  Arch.  de  la  Loire-Iaf.  (cass.  78,  E,  184)  un  mandement  très  ferme  du 
18  août  1458  qui  corrobore  cette  déclaration. 

2.  A  cause  de  la  grande  mortalité  survenue  à  Orléans,  Sully  et  autres 
lieux  voisins,  par  où  le  roi  devait  passer  pour  se  rendre  à  Montargis 
(X**  8603,  fo*  188-190).  Une  partie  du  parlement  avait  déjà  siégé  à  Montar- 
gis {Ordonn.,  XIV,  466-471). 

3.  J.  Charlier,  III,  90-110. 

4.  Artur  III  avait  pourvu  lui-même  aux  dépenses  de  son  voyage  {Preuves 
de  l'Hist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1722-1727). 

5.  M.  d'Escouchy,  II,  359-361.  «  En  faveur  et  contemplacion  des  requestes 
à  nous  sur  ce  faicles  par  nostre  très  chier  et  très  amé  cousin  le  duc  de 
Bretaigne,  oncle  dudit  d'Alençon  »  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  101,  E, 
221).  —  Louis  XI  rendit  au  duc  ses  biens  le  10  octobre  1461  (P.  2531, 
f»  430  v). 

RiCHEMONT.  29 


450      ARTUR  III  FAIT  HOMMAGE  A  CHARLES  VII   (1458,  14  OCT.) 

Bretaigne,  dit  alors  Dunois,  vous  devenez  homme  du  roy,  mon 
souverain  seigneur,  cy  présent,  et  lui  faites  hommage  lige  à 
cause  de  vostre  duché  de  Bretaigne  et  lui  promettez  foy  et 
loyauté  et  le  servir  envers  tous  qui  peuvent  vivre  et  mourir.  » 
Le  comte  d'Eu  et  le  bailli  de  Tours  ajoutèrent  qu'il  fallait  ôter 
au  duc  son  épée,  l'hommage  lige  se  rendant  à  genoux,  sans 
épée;  mais  Jean  du  Cellier,  chancelier  de  Bretagne,  reprit  : 
«  Il  ne  le  fera  point,  car  il  ne  le  doibt  faire.  »  Alors  le  duc, 
s'adressant  au  roi  :  «  Tel  hommage  que  mes  prédécesseurs  vous 
ont  faict  je  vous  faicts,  et  ne  l'entends  et  ne  le  faicts  lige.  —  Tel 
que  vos  prédécesseurs  l'ont  faict,  vous  le  faites,  répliqua  le  roi. 
• —  Voire,  répondit  Artur;  je  le  fais  comme  mes  prédécesseurs 
l'ont  faict  aux  vostres  et  à  vous,  et  je  ne  le  fais  point  lige.  » 

Le  débat  se  termina  comme  d'ordinaire.  Le  duc  debout,  l'épée 
au  côté,  fut  reçu  au  baiser  par  le  roi.  Le  chancelier  de  Bretagne 
ajouta  même  :  «  Le  duc  n'entend,  par  chose  qu'il  ait  faict  ou  face, 
déroger  ne  préjudicier  à  ses  droicts  et  noblesses.  —  Je  n'entends 
ne  voudrais  préjudicier  en  rien  à  vos  droicts,  répondit  Charles; 
aussi  croy-je  que  ne  voudriez  vous  aux  miens.  »  Artur  répondit 
que  non,  puis,  fléchissant  le  genou  devant  le  roi  :  «  Monsieur, 
lui  dit-il,  je  vous  dois  hommage  lige  à  cause  de  ma  conté  de 
Montfort;  quel  je  vous  vueil  faire  aussi  à  cause  de  Néaufle-le- 
Chastel  ^  —  Levez-vous,  »  dit  le  roi.  Ensuite,  le  chancelier  de 
France,  Guillaume  Jouvenel  des  Ursins,  ayant  réclamé,  en  outre, 
l'hommage  pour  la  pairie,  le  duc  répondit  :  «  Je  ne  suis  point 
délibéré  à  présent  de  rien  en  faire.  —  C'est  son  fait,  dit  le  roi;  il 
scait  bien  ce  qu'il  a  à  faire;  on  s'en  doibt  rapporter  àluy;  »  puis 
il  plaisanta  d'une  manière  bienveillante  sur  ce  qui  venait  de  se 
passer  ^. 

Peu  après,  Artur  prit  congé  de  Charles  VII,  quMl  ne  devait 
plus  revoir.  Il  semble  que  cette  dernière  entrevue  lui  laissa  des 
impressions  désagréables  ®.  Le  duc  d'Orléans  l'accompagna 
jusqu'à  Fontevrault  *,  où  ils  allèrent  visiter  la  nouvelle  abbesse, 
leur  nièce,  Marie,  veuve  du  maréchal  de  Rieux,  qui  était  fille  de 


1.  Une  médaille  commémorative  de  l'hommage  de  Jean  V  représente  le 
duc  de  Bretagne  à  genoux,  sans  armes,  baisant  la  main  du  roi  (Mézeray, 
Hist.  de  France,  II,  84,  n"  3);  mais  l'historien  fait  remarquer  que  cet  hommage 
est  pour  le  comté  de  Montfort  et  non  pour  le  duché  de  Bretagne  (p.  85). 

2.  Preuves  de  Bretagne,  col.  1732-1733,  et  d'Argentré,  p.  846-847;  J  245, 
n»  107;  Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  33,  E,  91.  François  II,  neveu  et 
successeur  d'Artur  III,  ne  voulut  pas  davantage  rendre  l'hommage  lige 
{Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  II,  col.  1737-39). 

3.  Voir  Gruel,  p.  228.  Il  parle  du  roi  avec  une  acrimonie  singulière. 

4.  Arrondissement  et  canton  sud  de  Saumur. 


QUERELLE  ENTRE  ARTUR  III  ET  L'ÉVÉQUE  DE   NANTES  451 

Richard,  comte  d'Etampes,  et  de  Marguerite  d'Orléans.  En  même 
temps,  Cliarles  VII,  avec  l'assentiment  du  connétable,  donnait 
à  Jean,  bâtard  d'Orléans,  comte  de  Dunois,  la  seigneurie  de 
Parthenay  et  les  autres  terres  confisquées  jadis  sur  Jean  Lar- 
chevêque  *.  Le  duc  de  Bretagne  n'ayant  pas  d'héritier  légitime, 
ces  terres  devaient  revenir  à  la  couronne  après  la  mort  d'Artur, 
et  le  roi  en  disposa,  pour  cette  époque,  en  faveur  de  Dunois  * 
(22  octobre  1458).  Celui-ci  n'attendit  pas  longtemps. 

Revenu  malade  en  Bretagne  ^,  Artur  III  ne  fit  plus  que  languir. 
Ses  derniers  jours  furent  attristés  par  les  chagrins  que  lui  causa 
une  vive  querelle  avec  Guill.  de  Malestroit,  évéque  de  Nantes. 
C'était  lui-même  qui  avait  obtenu  que  Jean  de  Malestroit,  l'ancien 
chancelier  de  Jean  V,  abandonnât  l'é  vêché  de  Nantes  à  Guillaume, 
qui  était  son  neveu.  «  Je  ferois  plus  pour  vous  que  pour  homme 
qui  vive,  avait  dit  Jean  de  Malestroit  *;  mais,  par  le  corps  de 
Nostre-Dame,  vous  vous  en  repentirez,  car  c'est  le  plus  mauvais 
ribaud,  traistre  que  vous  vistes  oncques,  et,  si  vous  le  connaissiez 
comme  moi,  vous  n'en  parleriez  jamais  ^.  »  Ces  paroles  ne 
furent  que  trop  justifiées.  Loin  de  se  montrer  reconnaissant 
envers  Artur,  qui  lui  avait  encore  donné  le  manoir  de  Plaisance, 
sa  vie  durant,  Guill.  de  Malestroit  refusa  de  faire  hommage  au 
duc  pour  le  temporel  de  son  église  ^. 

Le  7  décembre,  Artur  III  manda  au  juge  de  Nantes  de  sommer 
l'évêque  de  venir  lui  faire  hommage  et  serment  de  fidélité.  Cette 
sommation  ayant  été  signifiée  au  prélat  pendant  une  procession, 

1.  Il  est  probable  qu'Artur  fut  très  affecté  de  ces  dispositions  (voir 
Gruel,  p.  228). 

2.  Il  les  avait  déjà  données,  en  14S2,  au  Dauphin,  pour  en  jouir  après  la 
mort  de  Richemont  et  de  son  héritier,  Pierre  de  Bretagne  (P  2532,  f»  28  v°). 
Dunois  avait  épousé  Marie  d'Harcourt,  fille  de  Jacques  d'Harcourt,  comte 
de  ïancarville,  et  d'une  nièce  de  J.  Larchevêque  (Bel.  Ledain,  Hist.  de 
Parlhenay,  p.  251  et  suiv.  ;  Anselme,  V,  135;  Append.  XII). 

3.  La  maladie  l'avait  pris  dès  Vendôme.  «  Et,  pour  ce  que  lors  il  y  avoit 
en  cour  quelques-uns  de  ses  ennemis,  on  soupçonna  fort  qu'il  avoit  esté 
empoisonné  »  (d'Argentré).  Le  Baud  se  borne  à  dire  que,  depuis  son 
voyage  de  Vendôme,  «  il  ne  fut  sain  »  (p.  535).  «  Pleust  à  Dieu  que 
jamais  n'eust  esté  à  Vendosme,  car  oncques  puis  ne  fut  sain  jusques  à 
la  mort,  et  plusieurs  font  grant  double  qu'elle  fut  advancée.  Dieu  en 
sçait  la  vérité  »  (Gruel,  228). 

4.  On  voit  par  là  qu'Artur  de  Bretagne  s'était  réconcilié  avec  son  ancien 
ennemi.  Jean  de  Malestroit  était  mort  le  14  septembre  1443  (A.  du  Paz, 
Hist.  généalogique^  p.  843-844). 

5.  Gruel,  228. 

6.  Déjà,  en  1455,  G.  de  Malestroit  avait  été  condamné  dans  un  procès 
devant  le  parlement  de  Paris.  Le  duc  Pierre  II  s'était  opposé  longtemps 
à  l'exécution  de  cet  arrêt  (voir  de  longs  détails  sur  cette  affaire  dans  le 
registre  X»»  1483,  f  223  v»,  226  v,  228  v»,  289,  355  v). 


452  DERNIERS   PROJETS  d'ARTUR  III 

il  en  tira  prétexte  pour  sommer  lui-même  le  magistrat  de  venir, 
dans  les  deux  heures,  sous  le  portail  de  l'église,  rendre  compte 
du  scandale  par  lequel  il  avait  troublé  une  cérémonie  religieuse  *. 
Loin  d'obéir  au  duc,  il  refusa  obstinément  l'hommage,  déclarant 
que,  s'il  tenait  quelque  chose  d'un  seigneur  temporel,  il  enten- 
dait le  tenir  du  roi  seul.  Il  excommunia  les  officiers  d'Artur  et 
Artur  lui-même  ^,  qui  en  appela  vainement  au  métropolitain, 
l'archevêque  de  Tours,  et  au  pape  '. 

Cette  malencontreuse  affaire  lui  causa  beaucoup  d'irritation  et 
de  chagrin.  Ses  forces  déclinaient,  mais  il  était  soutenu  par  son 
énergie  morale.  11  reçut  alors  une  bulle  du  pape  Pie  II  *,  qui 
l'avait  connu  jadis,  au  congrès  d'Arras,  et  qui  avait  pour  lui  la 
plus  haute  estime.  Le  souverain  pontife  invitait  le  duc  de  Bre- 
tagne à  se  rendre,  avec  les  autres  princes,  au  congrès  de  Man- 
toue,  pour  y  délibérer  sur  les  moyens  de  secourir  les  chrétiens 
contre  les  Turcs.  Artur,  qui  se  distingua  toujours  par  une  piété 
exemplaire,  approuvait,  sans  aucun  doute,  les  tentatives  des  papes 
pour  susciter  une  croisade  contre  les  infidèles;  il  avait  même 
permis  au  légat  ^  de  Galixte  III  de  lever,  pour  cette  guerre  sainte, 
des  deniers  en  Bretagne;  mais,  s'il  eût  vécu  plus  longtemps,  ce 
n'est  pas  à  cette  expédition  qu'il  eût  consacré  ses  derniers  efforts. 

Il  voulait  châtier  les  Anglais,  qui  parfois  attaquaient  encore 
les  côtes  de  Bretagne  ^.  Il  avait,  dit-on,  formé  le  projet  de  faire 
une  descente  en  Angleterre,  comme  le  demandait  sans  cesse  le 
roi  d'Ecosse  à  Charles  VII.  On  raconte  même  qu'Artur,  comme 
autrefois  Guillaume  le  Conquérant,  avait,  par  lettres  scellées  de 
son  sceau,  distribué  d'avance,  à  ceux  qui  devaient  le  suivre,  des 
seigneuries  et  des  châteaux  d'Angleterre  '.  Si  ce  dessein  était 

i.  Preuves  de  Bretagne,  11,  col.  1733-1734. 

2.  Preuves  de  Bret.,' t.  II,  col.  1736-1737. 

3.  Sur  cette  querelle,  qui  continue  pendant  le  règne  de  François  II,  on 
trouve  de  curieux  détails  aux  Arch.  de  la  Loire-Infér.  (cass.  27,  E,  74). 
Ce  sont  des  originaux  sur  papier. 

4.  Fr.  2707,  f»»  219,  222-225. 

5.  Vincent  de  Kerlean,  abbé  de  Begar  {Preuves  de  Bret.,  t.  II,  col.  1733). 

6.  En  février  1458,  ils  avaient  encore  essayé  de  faire  une  descente  en 
Bretagne,  du  côté  de  Bourgneuf  et  de  Saint-Malo,  pendant  que  le  duc 
Artur  était  auprès  du  roi  à  Tours;  mais  les  mesurss  qu'il  avait  prises  avant 
son  départ  empêchèrent  ces  tentatives  (D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne, 
t.  II,  p.  64).  La  guerre  se  faisait  encore  un  peu  sur  mer  (Bréquigny,  t.  83, 
ou  Moreau,  707,  f»  57). 

7.  La  guerre  des  deux  Roses  et  le  concours  de  l'Ecosse  auraient  favorisé 
une  invasion  en  Angleterre.  Au  mois  d'août  1457,  P.  de  Brézé  avait  dé- 
barqué à  Sandwich  et  fait  un  riche  butin.  Les  Bretons  l'avaient  suivi 
en  grand  nombre,  et  même  un  capitaine  breton  alla,  aussitôt  après,  sac- 
cager la  ville  de  Fowey,  en  Corn  ouailles  (Vallet  de  V.,  Charles  VII,  t.  III, 
391-393  et  note  2  de  la  p.  395;  voir  aussi  Fr.  25712,  n»  324). 


MORT  d'artur  III  (1458,  26  décembre)  453 

chimérique,  il  était,  en  tout  cas,  digne  d'un  prince  qui  avait 
noblement  expié  les  erreurs  de  sa  jeunesse,  en  combattant,  de- 
puis plus  de  trente  années,  ces  ennemis,  que  jadis  il  avait 
servis.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  mort  allait  mettre  fin  à  ses  pro- 
jets. 

Malgré  son  épuisement,  il  n'avait  pas  voulu  garder  le  lit.  Il 
jeûna  encore  les  quatre-temps  et  la  veille  de  Noël.  Il  se  confessa 
ce  jour-là.  Le  lendemain,  il  voulut  assister  à  tous  les  offices  de 
la  nuit  et  encore  à  la  grand'messe  et  aux  vêpres  de  la  fête  de 
Noël.  Le  26  décembre,  il  entendit  une  dernière  fois  la  messe  «  et 
dit  ses  heures  à  genoux,  bien  dévotement,  comme  bon  et  loyal 
chrestien  *.  »  Il  semble  qu'il  ait  voulu,  comme  un  célèbre  em- 
pereur romain  *,  mourir  debout.  Il  expira  le  même  jour,  vers 
six  heures  du  soir,  au  château  de  Nantes,  le  26  décembre  1458, 
dans  sa  soixante-sixième  année.  Il  fut  enterré,  deux  jours  après, 
dans  une  chapelle  du  monastère  des  Chartreux,  qu'il  avait  fondé 
près  de  Nantes  ^.  Ainsi  mourut,  dit  un  historien,  «  le  plus  grand 

prince  que  la  Bretagne  ait  compté  au  nombre  de  ses  souverains 

Ce  grand  homme  régna  trop  peu  de  temps  pour  la  félicité  de  la 
Bretagne,  mais  son  nom  sera  toujours  cher  à  cette  nation,  et  sa 
mémoire  vivra  éternellement  dans  le  souvenir  des  Français  *.  » 

1.  Gruel,  228. 

2.  Vespasien. 

3.  Gruel,  228;  Le  Baud,  536.  Il  avait  fait  donation  à  sa  femme,  Catherine 
de  Luxembourg,  de  tous  ses  biens  meubles,  évalués  à  60  000  écus,  et  lui  avait 
constitué  un  douaire  de  6  000  1.  de  rente  sur  la  seigneurie  de  Touffou 
(16  et  17  juin  1458).  Cette  disposition  fut  ratifiée  par  François  II,  neveu 
et  successeur  d'Artur  III  (Arch.  de  la  Loire-Infér.,  cass.  6,  E,  16,  f»»  41  et 
suiv.,  et  E,  18). 

4.  D.  Taillandier,  Hist.  de  Bretagne,  II,  69. 


CHAPITRE  IX 

CARACTÈRE   DE   RICHEMONT   —  CONCLUSION 


Caractère  de  Richemont,  d'après  Gruel.  —  Son  portrait.  —  Son  instruc- 
tion. —  Son  goût  pour  la  guerre.  —  Ses  mœurs.  —  Sa  gravité.  —  Sa 
rudesse  et  ses  violences.  —  Son  humeur  rébarbative.  —  Son  ambition. 
—  Son  esprit  d'économie.  —  Ses  revenus  et  ses  dépenses.  —  Sa  piété 
étroite.  —  Son  affection  pour  sa  famille.  —  Appréciation  du  rôle  de  Ri- 
chemont. —  Netteté  de  ses  vues.  —  Résultats  de  sa  persévérance.  — 
Choix  de  ses  auxiliaires.  —  Sa  gratitude  envers  eux.  —  Ses  talents  mi- 
litaires et  politiques.  —  Son  impopularité.  —  Conclusion. 


En  dehors  des  faits  qui  appartiennent  à  l'iiistoire,  les  détails 
plus  particuliers  et  plus  intimes  sur  les  goûts,  les  habitudes,  la 
vie  privée  de  Richemont  font  presque  entièrement  défaut. 
G.  Gruel  ne  donne  pas  ces  renseignements  accessoires,  auxquels 
on  attache  aujourd'hui  une  grande  valeur.  Il  vante  sa  piété,  sa 
patience,  son  humilité,  sa  douceur,  sa  libéralité,  son  désintéres- 
sement, son  affection  pour  le  peuple,  ses  talents  militaires;  en 
un  mot,  il  lui  attribue  toutes  les  quahtés,  toutes  les  vertus,  sans 
laisser  voir  s'il  eut  quelques  défauts  *  ;  mais,  comme  la  plupart 
des  biographes,  il  est  en  même  temps  un  panégyriste.  On  en  est 
donc  réduit  à  interroger  les  principaux  actes  de  Richemont,  ses 
lettres,  les  appréciations  parfois  suspectes  des  chroniqueurs  et 
quelques  documents  plus  spéciaux  épars  çà  et  là,  notamment 
deux  registres  de  comptes,  relatifs  au  domaine  de  Fontenay,  qui 
n'embrassent  que  huit  années  (1428-1435)  *. 

Au  physique,  Richemont  est  encore  moins  connu  qu'au  moral. 
Son  portrait,  reproduit  dans  les  histoires  de  Bretagne,  d'après  un 
original  conservé  aux  Chartreux  de  Nantes  ^,  n'a  pas  une  authen- 

1.  Gruel,  p.  228-229. 

2.  Fr.  8818  et  8819. 

3.  D.  Lobineau,  t.  I,  p.  665,  et  D.  Morice,  t.  II,  p.  67.  Voir  aussi  un  pori 
trait  au  crayon  dans  le  t.  645  de  Clairambault,  f»  133. 


PORTRAIT   DE  RIGHEMONT.   SON  INSTRUCTION  455 

licite  certaine,  el  Gruel  ne  dit  rien  qui  puisse  nous  renseigner. 
S'il  faut  en  croire  d'Argentré  *  et  D.  Lobineau,  il  était  de  petite 
taille  et  d\m  extérieur  peu  agréable,  ce  qui  semble  douteux, 
quand  on  considère  que  son  frère,  Jean  V,  passait  pour  un  des 
plus  beaux  hommes  de  son  temps  ^.  On  peut  supposer  que  Riche- 
mont  avait  un  corps  robuste  et  un  tempérament  vigoureux,  car 
il  supporta,  jusqu'à  l'âge  de  soixante  ans,  les  fatigues  de  la  vie 
militaire,  et  on  ne  voit  pas  qu'il  ait  jamais  éprouvé  de  grave 
maladie. 

Il  est  probable  qu'il  reçut,  auprès  des  ducs  de  Bourgogne  et 
de  Berry,  une  instruction  assez  développée,  pour  le  temps.  On 
ne  sait  s'il  consacra,  comme  Charles  d'Orléans,  les  loisirs  de  sa 
captivité  à  des  travaux  intellectuels.  Son  écriture  nette,  ferme  et 
régulière  dénote  une  main  exercée  '  ;  mais  ce  faible  indice  n'au- 
torise pas  à  croire  que  son  esprit  était  très  cultivé.  En  tout  cas, 
rien  ne  montre  qu'il  ait  eu  le  goût  des  beaux  manuscrits  et  des 
œuvres  d'art,  comme  les  ducs  de  Bourgogne  et  de  Berry,  ou 
comme  les  ducs  d'Orléans  et  de  Guyenne  *. 

Ce  qu'il  aimait  surtout,  comme  les  seigneurs  de  cette  époque, 
c'était  la  guerre,  qui  fut  toujours  sa  principale  occupation. 
a  Tous  les  jours,  au  moins  une  fois  la  journée,  il  parlait  de  la 
guerre  et  y  prenait  plaisir  plus  que  à  nulle  autre  chose  ^.  »  On 
sait  qu'il  eut,  de  bonne  heure,  l'occasion  de  satisfaire  ce  pen- 
chant. Il  n'est  pas  probable  que,  dans  sa  jeunesse,  il  ait  fait  une 
étude  méthodique  de  l'art  militaire,  ni  qu'il  ait  beaucoup  prati- 
qué les  auteurs  anciens,  pour  y  chercher  des  leçons.  Il  est  bien 
plus  vraisemblable  qu'il  fit  l'apprentissage  de  la  guerre  en  s'ins- 
truisant  par  les  conseils  et  les  exemples  de  capitaines  expéri- 

i.  Voy.  d'Argentré, p.  848;  D.  Lobineau,  1. 1,  p.  671,  et  D.  Morice,  t.  II,  p.  68. 
Sainte-Marthe,  Hist.  généalogique  de  la  maison  de  France,  t.  II,  p.  607 
(édition  de  1647). 

2.  D'Argentré,  p.  797. 

3.  11  y^a  aux  Archives  de  la  Loire-Inférieure  deux  pièces  qui  paraissent 
écrites  en  entier  de  la  main  de  Richemont.  L'une  est  un  serment  de  fidé- 
lité au  duc  de  Bretagne,  en  date  du  5  août  1422  {Appendice  XVI);  l'autre 
est  un  serment  d'assistance  fait  par  le  connétable  au  duc  son  frère,  le 
22  août  1440  (Appendice  LXXIV). 

4.  Philippe  le  Hardi,  Jean  duc  de  Berry,  les  ducs  de  Guyenne  et  d'Or- 
léans étaient  de  véritables  bibliophiles.  Voir  Léopold  Delisle,  Le  cabinet 
des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  impériale,  t.  I,  p.  46,  36,  68  et  suiv.,  et 
Léop.  Pannier,  Les  joyaux  du  duc  de  Guyenne.  La  célèbre  Christine  de 
Pisan  dédia  son  livre  De  la  paix  au  duc  de  Guyenne  (Fr.  1182,  f»  3)  et  son 
livre  Des  trois  vertus  à  la  duchesse  de  Guyenne  (Fr.  1177,  f»  114).  Voir,  à  la 
biblioth.  Sainte-Geneviève,  le  beau  manusc.  français  Lf  34  (testament  du 
duc  de  Berry). 

3.  Gruel,  p.  229. 


456  GOUTS   ET   MŒURS   DE   RICHEMONT 

mentes,  comme  le  maréchal  de  Boucicaut,  soii  compagnon  de 
captivité,  ou  comme  Henri  V,  le  roi  conquérant. 

Il  aimait  sans  doute  les  passe-temps  chevaleresques,  tels  que 
les  joutes  et  tournois  *,  mais  il  n'y  devait  pas  prendre  part  bien 
souvent,  car  on  ne  voit  pas  qu'il  y  ait  figuré,  même  dans  les 
circonstances  les  plus  remarquables  *.  S'il  eût  été,  comme 
du  Guesclin,  ou  comme  La  Hire,  un  grand  batailleur,  en  même 
temps  qu'un  général  habile,  il  eût  aussi  été  plus  populaire. 
Pourtant  sa  bravoure  ne  saurait  être  mis-e  en  doute,  quoi  qu'en 
dise  le  Bourgeois  de  Paris.  Il  la  prouva  trop  souvent,  dans  les 
sièges  et  dans  les  combats,  pour  qu'on  puisse  prendre  au  sérieux 
l'accusation  de  couardise  lancée  contre  lui  par  l'irascible  et  mal- 
veillant chroniqueur  ^. 

Gomme  il  trouvait  dans  les  devoirs  de  sa  charge  la  satisfac- 
tion de  son  goût  prédominant,  il  recherchait  peu  les  plaisirs  de 
la  cour  et  n'en  partageait  pas  la  corruption.  Son  biographe 
afflrme  qu'il  était  chaste  *.  On  sait  qu'il  eut  une  fille  bâtarde  ^, 
mais  rien  d'ailleurs  ne  fait  supposer  dans  sa  conduite  les  dérè- 
glements dont  les  grandes  familles  de  cette  époque  offrent  trop 
d'exemples  •'. 

Il  ne  faudrait  pas  croire  que  sa  gravité  d'esprit  le  rendait  cha- 
grin, morose,  ennemi  de  toute  distraction.  Dans  les  fêtes  aux- 
quelles donnaient  lieu  les  réunions  princières,  il  prenait  part 
aux  danses  et  aux  autres  divertissements  '.  Pendant  les  loisirs 


1.  En  septembre  1434,  il  y  eut  une  joute  devant  le  connétable  à  Ham 
(Gruel,  202). 

2.  Par  exemple  aux  fêtes  de  Nancy  et  de  Châlons,  en  1445,  dont  parlent 
longuement  Oliv.  de  La  Marche  (p.  407-408)  et  G.  Chastelain  (p.  614-627). 
Voir  aussi  Vallet  de  V,,  Charles  VU,  t.  III,  p.  115  et  suiv. 

3.  «  La  plus  saine  partie  le  tenoit  pour  très  mauvays  homme  et  très 
couart  »  (p.  346). 

4.  Gruel,  229. 

5.  Cette  fille,  appelée  Jacqueline  ou  Jacquette,fut  légitimée  par  des  lettres 
de  Charles  VU,  en  septembre  1443.  Elle  avait  été  mariée,  le  13  janvier  1439, 
à  Arthur  Brécart,  qui  était,  depuis  longtemps,  au  service  de  Richemont 
(Anselme,  I,  461).  On  voit,  dans  le  Ms.  Fr.  8818,  f"  98,  que  Richemont  donne 
14  écu3  à  Brécart,  le  11  novembre  1428.  Il  lui  donna  l'île  de  le  Bréchat,  19 
janvier  1450  (voy.  Append.  CVI).  Cette  donation  fut  confirmée  par  le  duc 
Pierre  II,  puis  par  Artur  III  {Preuves  de  rHisioire  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1597- 
1599 ,  1714).  Devenu  duc  de  Bretagne,  Artur  III  nomma  A.  Brécart  ca- 
pitaine de  Saint- Aubin-du-Gormier,  le  10  décembre  1437  (D.  Lobineau, 
I,  814,  t.  II,  col.  1196,  1206,  et  Preuves  de  VHist.  de  Bretagne,  t.  II,  col.  1711). 
En  avril  1460,  Artur  Brécart  est  un  des  connétables  de  la  ville  de  Rennes 
{Idem,  col.  1752). 

6.  Jean  V,  frère  d'Artur,  et  François  I^'  ne  faisaient  pas  exception  (voy. 
Blondel,  p.  19). 

7.  Gruel,  p.  192. 


RUDESSE  ET  VIOLENCES   DE   RICHEMONT  457 

forcés  que  lui  fit  sa  longue  disgrâce,  il  trouvait  du  plaisir  à  voir 
jouer  aux  barres  les  officiers  de  sa  maison  *.  Une  fois,  étant 
auprès  de  Charles  VII,  à  Chinon,  il  envoya  des  gens  du  comte 
d'Etampes  arrêter  «  par  farce  »  son  barbier,  pour  s'amuser  de  sa 
frayeur,  en  lui  faisant  croire  qu'on  le  voulait  détrousser.  Une 
autre  fois,  il  faisait  venir  des  lutteurs  bretons,  ou  bien  un  servi- 
teur du  sire  de  La  Marche,  qui  «  jouait  de  souplesse  »,  ou  des 
compagnons  qui  faisaient  «  esbattemens  de  Morisques  »  et  autres 
jeux  devant  lui  ^. 

On  lui  a  souvent  reproché  sa  rudesse  et  ses  violences,  tout  en 
louant  l'énergie  et  la  sévérité  avec  lesquelles  il  réprimait  les  excès 
des  gens  de  guer-re.  Ses  menaces  envers  les  Lyonnais,  l'exécu- 
tion de  deux  favoris  de  Charles  VII,  l'enlèvement  du  troisième, 
sont  les  principaux  griefs  formulés  contre  lui.  Certes,  on  ne  peut 
approuver,  malgré  les  bonnes  intentions  qu'on  lui  suppose,  les 
moyens  sommaires  et  barbares  auxquels  il  eut  recours  dans  ces 
circonstances,  mais  on  reconnaît  que  son  indignation  était  légi- 
time, et  on  ne  le  blâme  pas  d'avoir  châtié  de  la  même  manière 
le  bâtard  de  Bourbon.  C'est  que,  dans  ce  dernier  cas,  le  conné- 
table avait  agi  avec  l'assentiment  du  roi,  tandis  qu'il  avait  pour- 
suivi Giac,  Beauheu  et  La  Trémoille  malgré  le  roi  lui-même.  Ce 
que  nous  lui  reprochons  aujourd'hui,  ce  n'est  pas  tant  d'avoir 
manqué  de  ménagements  et  d'égards  envers  Charles  VII,  ni 
d'avoir  paru  se  révolter  contre  lui,  en  combattant  ses  ministres, 
que  d'avoir  violé  envers  eux  les  principes  les  plus  élémentaires 
de  la  justice,  en  ne  leur  laissant  pas  les  moyens  de  se  défendre. 
Un  historien  judicieux  et  impartial,  le  père  Daniel,  déclare  qu'on 
ne  peut  lui  reprocher  que  ces  actes  de  violence  '.  Il  est  certain 
que  le  connétable  se  montra,  dans  ces  occasions,  peu  respectueux 
et  peu  soumis  envers  le  roi.  Sans  avoir  la  souplesse  et  les  servi- 
les  complaisances  d'un  courtisan,  il  aurait  pu,  dans  bien  des  cas, 
montrer  la  même  fermeté  avec  moins  de  raideur. 

On  sait  qu'il  fut  impitoyable  envers  les  hérétiques  et  les  sor- 
ciers; son  biographe  semble  même  le  louer  d'en  avoir  fait  périr 
plus  qu'aucun  prince  de  son  temps  *.  En  tenant  compte  des  idées 


1.  Fr.  8818,  fo  98. 

2.  Preuves  de  l'Histoire  de  Bretagne,  t.  II,  colonnes  1724-1726.  Il  avait 
un  fou,  appelé  le  Maître  d'hôtel.  II  accompagna  Artur  III  à  Vendôme,  en 
1458,  et  on  voit  que  le  roi  lui  donna  une  robe  et  un  chaperon  (KK  51,  f*' 
85,  86,  90). 

3.  Le  P.  Daniel,  Hist.  de  France,  VII,  p.  309  :  *  On  ne  peut  guère  lui 
reprocher  que  la  hauteur  et  la  violence  dont  il  usa  envers  les  trois  mi- 
nistres dont  j'ai  parlé.  » 

4.  Gruel.  228. 


458  HUMEUR   RÉBARBATIVE   DE   RICHEMONT 

de  l'époque,  on  admettra  peut-être  qu'il  n'était  ni  cruel  ni  vin- 
dicatif %  qu'il  se  montra  parfois  compatissant*,  généreux  et 
même  porté  à  l'indulgence  *,  qu'il  ne  voulait  et  ne  pensait  jamais 
s'écarter  des  règles  de  la  justice,  mais  on  croira  difficilement  à 
la  douceur,  à  la  bénignité,  à  la  patience  inaltérable  *  dont  le 
gratifie  son  biographe.  On  supposera  plutôt  qu'il  était  d'humeur 
rébarbative  ^,  qu'il  avait  dans  le  caractère  une  sévérité  natu- 
relle, encore  accrue  par  l'exercice  de  ses  fonctions  militaires, 
mais  dont  il  ne  savait  pas  toujours  se  départir,  en  dehors  de 
là.  Il  se  fit  ainsi  bien  des  ennemis  et  mourut  peut-être  victime 
des  haines  qu'il  avait  encourues  ^. 

Il  inspira  longtemps  au  roi  une  aversion,  que  la  reconnais- 
sance put  affaiblir,  sans  la  changer  jamais  en  une  réelle  sym- 
pathie. De  son  côté,  Richemont  n'aimait  pas  Charles  VII  ;  on  le 
devine  à  certains  passages  de  Gruel  ',  qui  reflète  ici  les  senti- 
ments de  son  maître.  Attaché  aux  devoirs  de  sa  charge  et  aux 
intérêts  de  l'État,  le  connétable  servit  le  roi  avec  fidéUté,  mais 
sans  véritable  affection.  S'il  avait  été  un  courtisan  plus  adroit, 
s'il  avait  su  faire  comme  Dunois,  qui  regagna  promptement  la 
faveur  de  Charles  VII,  après  s'être  révolté  contre  lui  pendant 
la  Praguerie,  il  y  eût  trouvé  tout  profit  *. 

On  se  demande  s'il  n'était  pas  poussé  par  une  ambition  effré- 
née, quand  il  arrachait  si  rudement  le  roi  aux  mains  de  ses  indi- 


r  1.  J.  Rogier,  dans  ses  Mémoires  (Reims,  1875,  in-8»,  p.  27),  dit  le  con- 
traire ;  pourtant  Richemont  se  réconcilia  bien  avec  J.  de  Malestroit,  son 
ennemi  acharné. 

2.  Par  exemple,  à  la  prise  de  Saint-Sever  (ci-dessus, p.  336).  On  le  vit  traiter 
avec  sollicitude  un  pauvre  fou  qui  passait  pour  démoniaque  (JJ  187,  f»  3  v»). 

3.  Il  montre  quelquefois  de  l'indulgence  à  l'égard  des  gens  de  guerre. 
Voir  par  exemple  X^»  22,  f<"  1  vo-4;  JJ  479,  f-s  170-171.  —  Lettres  de  ré- 
mission accordées  à  J.  Buchon,  qui  avait  été  condamné  à  Fontenay  (JJ  185, 
f»  219  v«). 

4.  «  Et  estoit  le  plus  patient  homme  qui  fust  en  son  temps  »  (Gruel). 

5.  On  a  sur  ce  point  un  curieux  indice,  fourni  par  le  connétable  lui- 
même.  Ce  sont  les  deux  lettres  adressées  au  duc  d'Orléans,  où  la  signature 
est  précédée  de  ces  mots  autographes  :  «  Vostre  vieille  lype  »  (V.  Append. 
LXXV).  On  voit  par  là  que  le  duc  d'Orléans,  son  compagnon  de  captivité, 
son  vieil  ami,  lui  reprochait  familièrement  une  disposition  habituelle  à 
faire  la  moue.  —  Après  un  refroidissement  passager,  les  relations  amicales 
continuèrent  entre  les  deux  princes,  jusqu'à  la  mort  de  Richemont  (Pièces 
originales,  t.  2159,  n»  663). 

6.  On  crut  qu'il  avait  été  empoisonné  à  Vendôme  (voir  ci-dessus,  p.  451, 
note  3). 

7.  Voir  Gruel,  p.  218  (siège  de  Dax),  p.  226  (siège  de  Caen)  et  surtout  p.  228. 

8.  On  coinprend,  en  lisant  Alain  Ghartler,  que  Richemont  n'ait  pas  bien 
réussi  à  la  cour  de  Charles  VII.  Voir  Delaunay,  Etude  sur  A.  Chartier, 
p.  109-112. 


AMBITION   DE  RICHEMONT  459 

gnes  ministres,  et  s'il  n'était  pas  Jaloux  de  son  autorité  au  point 
de  ne  la  vouloir  partager  avec  personne.  Ambitieux,  Richemont 
le  fut,  sans  aucun  doute,  et  on  a  vu  que  cette  ambition  mit  sa 
loyauté  ^  à  une  rude  épreuve,  quand  il  conclut  avec  Louvet  et 
les  autres  conseillers  du  roi  un  compromis  plus  habile  que  sin- 
cère *.  Ce  cadet  de  famille,  qui  ne  pouvait  alors  aspirer  à  la  cou- 
ronne ducale  de  Bretagne,  avait  d'autres  mobiles  qu'un  dévoue- 
ment désintéressé,  quand  il  acceptait  de  Charles  VII  l'épée  de 
connétable,  après  avoir  offert  ses  services  à  Bedford  '. 

Investi  de  ce  commandement  supérieur,  il  prit  au  sérieux  ses 
droits  comme  ses  devoirs,  et,  en  assumant  la  responsabilité  qui 
lui  incombait,  il  voulut  avoir  aussi  les  moyens  d'agir.  Irrité  des 
misérables  obstacles  qui  l'écartaient  sans  cesse  de  son  but,  il  les 
brisa  impitoyablement;  mais,  s'il  tenait  à  ses  privilèges,  s'il  en 
voulait  user  pour  l'accomplissement  de  desseins  qu'il  croyait 
utiles,  il  n'allait  pas  jusqu'à  prétendre  faire  tout^  ou  diriger  tout 
par  lui-même,  ni  jusqu'à  éloigner  du  roi  ceux  qui  voulaient  et 
pouvaient  le  bien  servir.  Ne  sut-il  pas  accepter  le  concours 
d'auxiliaires  habiles,  comme  Dunois,  qui  ne  l'aimait  guère, 
comme  Brézé,  qui  essaya  de  lui  nuire?  Sans  parler  de  sa  dis- 
grâce, les  froissements  d'amour-propre,  les  vexations  qu'il  endura 
souvent  s'accordent  mal  avec  une  ambition  exclusive,  incapable 
de  supporter  la  moindre  atteinte.  S'il  n'eût  été  guidé  que  par  ce 
mobile,  n'aurait-il  pas  été  séduit  par  les  offres  que  lui  firent  les 
Anglais,  quand  il  .était  encore  en  butte  aux  attaques  de  La  Tré- 
moille  *?  En  un  mot,  il  aima  le  pouvoir,  mais  sans  l'accaparer 
avec  une  jalousie  mesquine  et  sans  refuser  jamais  de  le  partager 
avec  ceux  qui  en  étaient  dignes. 

Fut-il  avide  de  richesses  autant  qu'on  l'a  prétendu?  II  eut  cette 
réputation  parmi  ses  contemporains  ;  nous  en  avons  comme 
preuves,  sinon  les  allégations  suspectes  du  Bourgeois  de  Paris  ®, 
du  moins  le  soin  même  avec  lequel  son  biographe  s'applique  à 

î.  Si  Richemont  avait  réellement  inventé  le  complot  attribué  à  Glocester 
etàBelford  contre  la  vie  de  Philippe  le  Bon,  s'il  avait  fait  fabriquer  de  fausses 
pièces,  il  faudrait  voir  dans  de  pareils  actes  la  preuve  d'un  caractère  dé- 
loyal, vindicatif,  haineux  ;  mais  ces  machinations  perfides  sont  loin  d'être 
prouvées,  et  celte  conduite  machiavélique  ne  s'accorde  guère  avec  les 
façons  d'agir  habituelles  au  connétable. 

2.  Voir  ci-dessus,  p.  89-90. 

3.  Voir  ci-dessus,  p.  78-79. 

4.  Voir  ci-dessus,  p.  189-190. 

5.  «  11  ne  lui  challoit  ne  de  roy,  ne  de  prince,  ne  du  commun,  ne  de  ville, 

ne  de  chastcl  que  les  Angloys  preissent,  mais  qu'il  eust  de  l'argent et 

souffroil  aux  gros,  qui  avoientlesgrans  greniers  plains  de  blez  et  d'autres 
grains,  à  vendre  aux  povres  gens  tout  comme  ilz  vouIloient,mais  qu'il  en  eust 
aucun  émolument  ou  prouffit.  »  {Journal  d'un  Bourgeois  de  Paris,  p.  346-347.) 


460  ESPRIT  d'économie  de  richemont 

prouver  son  désintéressement.  D'après  lui,  Richemont  aurait 
refusé,  en  1425,  le  duché  de  Touraine,  que  Charles  VI  lui  avait 
donné  autrefois  et  que  Charles  VII  lui  offrait,  avec  la  charge  de 
connétable  ;  il  aurait  dédaigné  un  butin  de  200  000  écus,  qu'il 
aurait  pu  faire  lors  du  recouvrement  de  Paris,  «  s'il  eût  voulu 
croire  aucuns  de  son  conseil  *.  »  S'il  en  est  ainsi,  ce  sont  là  des 
actes  d'autant  plus  honorables  qu'ils  sont  plus  rares  à  cette 
époque  ^  mais  il  faut  bien  dire  que  Gruel  n'est  pas  d'accord,.sur 
le  second  point,  avec  les  chroniqueurs  3.  Il  a  le  tort  d'affirmer, 
dans  un  autre  endroit,  que  ce  ne  fut  pas  Charles  VII ,  mais  bien 
J.  Larchevêque  seul ,  qui  donna  au  connétable  ses  terres  du 
Poitou,  et  que  le  roi  «  oncques  bien  ne  luy  fist  *  ».  On  a  vu 
que  ces  assertions  sont  inexactes  et  injustes  ^.  Ce  qui  semble 
vrai,  c'est  que  Richemont  eut  fort  peu  de  part  aux  dons  pécu- 
niaires que  le  roi  faisait  souvent  à  ses  officiers  ;  du  moins  est-il 
fort  rare  de  trouver  son  nom  dans  les  divers  documents  qui 
mentionnent  les  libéralités  royales. 

Ce  qui  semble  vrai  également,  c'est  que,  sans  être  cupide  ni 
avaricieux,  il  ne  négligeait  pas  ses  intérêts.  Les  comptes  relatifs 
au  domaine  de  Fontenay  et  quelques  autres  détails  particuliers  ^ 

1.  Gruel,  228-229. 

2.  "Voir  ci-dessus,  p.  351,  l'exemple  de  Brézé,  lors  du  traité  avec  les 
Messins. 

3.  Le  Bourgeois  de  Paris  se  borne  à  dire  que  les  Anglais  traitèrent  avec 
le  connétable,  à  «  grant  finance  »  (p.  318);  mais  Moùstrelet  va  plus  loin. 
«  Si  perdit  ledit  évêque  de  Terewane  sa  chapelle,  qui  estoit  moult  riche, 
et  grant  partie  de  ses  joyaux  et  autres  bonnes  bagues,  qui  demourèrent 
audit  connestable.  »  (Monstrelet,  V,  221;  voy.  aussi  Félibien,  t.  II,  p.  824.) 
En  1442,  le  connétable  fut  ajourné  devant  les  élus  de  Paris  pour  avoir 
voulu  frauder  le  fisc,  en  invoquant  à  tort  un  droit  de  franchise  qui  était 
un  des  privilèges  de  sa  charge.  Dans  ce  procès,  les  demandeurs  «  frappent 
bien  avant  contre  l'onneur  de  Mgr  le  connestable  »  {Append.  CVIIj. 

4.  Gruel,  228. 

5.  On  sait  que  le  roi  lui  donna,  sa  vie  durant,  la  seigneurie  de  Gavray 
et  celle  de  Vire  (voy.  ci-dessus,  p.  413),  sans  parler  de  celle  de  Fontenay, 
qui  était  peut-être  la  plus  riche  de  France.  Jouvenel  des  Ursins  prétendait 
même  qu'il  n'y  avait  seigneur  dans  le  royaume  à  qui  le  roi  eût  donné 
tant  de  terres  (Xia  4799,  f»  93  v;  Xi"»  1482,  f»  223  v''-224).  Le  connétable  ne  dis- 
simule pas  d'ailleurs  les  bienfaits  qu'il  recevait  du  roi(Append.  CVIII,  n»  1). 

6.  Voyez  ci-dessus,  p.  310,  note  3  (caution  pour  le  duc  d'Orléans).  —  Un 
pauvre  paysan  du  comté  de  Gavray,  devenu  fermier  du  connétable,  ayant 
sollicité  de  lui  un  rabais  que  le  roi  lui  avait  accordé  auparavant,  parce 
que  son  moulin  et  sa  ferme  étaient  «  tournez  en  grant  ruyne  et  déca- 
dence »,  Richemont  lui  accorda  le  même  rabais,  mais  pour  un  an  seule- 
ment. En  outre,  il  enjoignit  à  ses  officiers  de  faire  une  enquête  minutieuse, 
pour  savoir  si  les  plaintes  et  la  demande  du  fermier  étaient  bien  fondées 
{Append.  GIX).  —  Dans  un  procès  avec  J.  de  Rochechouart,  le  connétable, 
alors  absent,  demande  délai,  afin  de  pouvoir  suivre  l'affaire,  car  il  veut 


MAISON   DU  CONNÉTABLE  461 

révèlent  des  habitudes  d'ordre,  de  régularité,  d'économie  qu'on 
ne  saurait  d'ailleurs  lui-  reprocher.  Il  faut  remarquer  toutefois 
que  ces  registres  de  comptes  comprennent  surtout  les  années  de 
disgrâce,  pendant  lesquelles,  privé  de  sa  pension,  le  connétable 
eut  à  soutenir  une  guerre  onéreuse  contre  La  Trémoille  ^  En 
outre,  son  rang  et  sa  naissance  l'obligeaient  à  entretenir  un 
personnel  nombreux  d'officiers,  de  conseillers,  de  serviteurs  et 
des  archers  qui  formaient  sa  garde  du  corps  ^.  De  même  que  les 
ducs  de  Bretagne,  d'Orléans,  de  Bourgogne,  il  avait  fondé  un 
ordre  et  distribuait  des  colliers  '. 

Parmi  ces  officiers  ou  serviteurs  du  connétable,  on  remarque 
surtout  Etienne  Chevalier  *,  un  de  ses  secrétaires  ;  le  fameux  Tris- 
tan l'Hermile,  son  écuyer;  Guillaume  Gruel,qui  était  aussi  un  de 
ses  écuyers  et  qui  fut'  son  biographe  ;  Jean  Budes,  son  porte- 
étendard  ;  Raoul  Gruel ,  Jean  de  Troissy ,  ses  conseillers  ;  Artur 
Brécart,  qui  devint  son  gendre;  Guillaume  de  Vendel  ^  et  Jean 
de  La  Haye,  maîtres  d'hôtel;  Gilles  de  Saint-Simon,  chambellan; 
Henri  de  Villeblanche  ;  Jean  de  Rostrenen,  etc.  ®. 

savoir  «  tous  les  fais  et  peins  de  ses  causes  >.  (X»»  9200,  f»  243  v).  Riche- 
mont  eut  d'assez  nombreux  procès  (voir,  par  exemple,  X*»  1480,  f»  310; 
XI»  1482,  fos  143,  157;  Xia  1483,  f<"  88  v»,  119,  123;  X»»  4798,  f»*  16  v»,  58  v, 
95,  107  V»,  279  v»,  408;  X^a  4799,  f»  150;  Xia  9194,  f"'  9  v,  126  v»;  X»»  9200, 
f<"  36,  42,  243,  370). 

1.  C'est  sans  doute  alors  que  le  duc  de  Bretagne  lui  accordait  «  un 
fouage  et  impôt  pour  ses  grans  nécessitez  »  (Turnus  Brutus,  I.  f»  172  v», 
sans  date;  voir  aussi  un  fragment  de  compte  des  années  1443-1445,  Ap- 
pend.  CX). 

2.  Voir  Append.  CX,  «  A  Geoffroy  Tomelin,  archier  du  corps  de  Monsei- 
gneur. »  Quand  il  était  à  la  cour  de  Bretagne,  le  connétable  avait  12  che- 
vaux à  livrée  et  12  personnes  de  bouche  (D.  Lobineau,  II,  1186).  Parmi  ses 
officiers,  on  trouve  Gilles  de  Saint-Simon,  Charles  de  Montmorency,  Jean 
de  Rosnyvinen,  Alain  de  La  Roche,  Olivier  Giffart,  Guillaume  de  Vendel, 
Jean  du  Juch,  Jacques  de  Luxembourg,  Pierre  de  Kermelec,  Jamet  Lamou- 
reux,  Jean  de  Châteaugiron,  Jean  Budes. 

3.  Voir  Append.  CX.  En  1444,  il  donna  120  écus  d'or  à  Guillaume  Vendel, 
pour  faire  faire  un  collier  de  son  ordre. 

4.  Voir  le  testament  de  la  duchesse  de  Guyenne  {Append.  LXXVIII).  Eu 
1434,  il  était  secrétaire  et  «  maître  de  la  chambre  aux  deniers  »  du  con- 
nétable (Fr.  8819,  fo  39). 

5.  Il  était  aussi  maître  d'hôtel  de  la  duchesse  de  Guyenne,  qui  le  choisit 
pour  exécuteur  testamentaire,  en  le  substituant  à  Jean  de  La  Haye,  par 
son  codicille  du  31  janvier  (voy.  Append.  LXXVIII). 

6.  Dans  les  comptes  de  Robin  Denisot  pour  les  années  1428-1435  (Fr. 
8818  et  8819),  on  trouve  encore  les  noms  suivants  :  Thomas  Chappes  ou 
Chappeau,  physicien,  c'est-à-dire  médecin  du  connétable;  H.  Blandin,  re- 
ceveur général;  J.  Chauvin,  sénéchal  de  Fontenay;  L.  Moisen,  capitaine 
de  Fontenay;  J.  de  Rostrenen;  Gilles  de  Keriguen,  échanson;  H.  Ducloux, 
fourrier;  H.  de  Villeblanche;  P.  Guiho,  maître  d'hôtel;  Michel  Baudouin,  etc. 
Dans  le  compte  de  1443-1445,  on  remarque,  outre  Tristan  l'Hermite  etGuil- 


462  DÉPENSES   ET   REVENUS   DE   RICHEMONT 

De  son  côté,  la  duchesse  de  Guyenne,  comtesse  de  Richemont, 
avait  aussi  sa  maison  particulière,  ses .  officiers,  son  aumônier, 
Vincent  de  Groces  *  ;  son  chapelain,  J.  Guérin;  son  secrétaire  et 
trésorier,  Jean  Dardenay;  ses  dames  et  demoiselles  d'honneur  ?. 
Il  est  vrai  que  les  ressources  étaient  très  grandes.  Le  connétable 
recevait  12  000  livres  t.  de  pension  pour  sa  charge,  et  1  000  1.  t. 
«  pour  son  estât  »;  le  duc  de  Bretagne  lui  payait  une  pension 
de  4000  1.  t.  et  lui  faisait  des  dons  assez  nombreux.  Pendant  la 
mission  dont  il  fut  chargé  en  Normandie,  après  la  conquête  de  ce 
pays,  il  eut  500  livres  t.  par  mois,  outre  sa  pension  de  12  000 1. 1.  ^. 
Ces  diverses  sommes  valaient  environ  920  000  francs  de  notre 
monnaie  *.  Quant  aux  revenus  des  grands  domaines  qu'il  possé- 
dait, on  ne  peut  les  évaluer,  même  d'une  manière  approxima- 
tive, mais  on  sait  qu'ils  étaient  considérables  ^.  Il  pouvait  donc 
se  montrer  charitable  et  généreux. 

On  n'ignore  pas  qu'il  faisait  des  dons  aux  églises,  aux  commu- 
nautés religieuses,  aux  établissements  hospitaliers,  quelquefois 
à  ses  officiers,  à  ses  serviteurs;  mais  les  preuves  de  ces  libéralités 
ne  sont  ni  assez  nombreuses  ni  assez  remarquables  ^  pour  qu'on 

laume  Gruel,  écuyers  du  connétable  :  Charles  de  Montmorency,  Jean  de 
Rosynvinen,  Alain  de  La  Roche  ,  Olivier  Giffart,  Jean  du  Juch,  Jacques 
de  Luxembourg,  Jean  de  Rochechouart,  Jean  et  Philippe  de  Malestroil, 
Guillaume  de  Châteaugiron,  Pierre  de  La  Jaille,  André  Giron,  etc.  (voy.  Ap- 
pend.  CX).  Pour  H.  de  Villeblanche  et  J.  de  Rostrenen,  voy.  ci-dessus, 
p.  265.  Enfin,  en  1442,  le  connétable  avait  pour  aumônier  Jean  Guillepou, 
chanoine  de  Notre-Dame  de  Paris  (voy.  Append.  LXXVIIl). 

1.  Dans  son  testament,  la  duchesse  de  Guyenne  le  recommande,  de  la 
manière  la  plus  pressante,  à  son  mari  (voy.  Append.  LXXVIIl).  Vincent 
de  Groces  avait  été  pourvu  d'une  prébende  à  Notre-Dame  de  Paris,  le  9 
août  1441  (LL  218,  f»  158). 

2.  Voir  les  Mss.  Fr.  8818,  notamment  P*  87,  89,  94,  96,  98,  99, 102, 104,  v, 
107;  Fr.  8819,  notamment  f»^  33  v»,  39  v»,  40,  41,  et  ci-dessus,  p.  329, 
note  3,  et  Append.  LXXVIIl. 

3.  Voy.  Pointe  f.  Fontanieu,  117-118,  au  27  décembre  1439;PreuDes  de  D.  Mo- 
rice,  t.  II,  col.  1231,  1259,  1626,  1643,  1685;  Appendice  CVIII,  nos  i^  2,  3,  4. 

4.  Ces  sommes  donnent  un  total  de  23  000  1. 1.,  c'est-à-dire  920  000  fr.  de 
notre  monnaie,  suivant  l'évaluation  de  M.  P.  Clément,  qui  attribue  à  la 
livre  tournois  de  cette  époque  la  valeur  actuelle  de  40  fr.  (P.  Clément, 
/.  Cœur,  préface,  p.  lxvi). 

5.  La  terre  de  Parthenay  produisait  de  très  gros  revenus,  et  il  n'y  avait 
pas  dans  tout  le  royaume  une  si  bonne  seigneurie  que  la  châtellenie  de 
Fontenay.  C'est  du  moins  ce  qu'affirmait  G.  Jouvenel  des  Ursins  quand  il 
s'opposait  à  l'entérinement  des  lettres  par  lesquelles  le  roi  avait  laissé  au 
connétable  la  seigneurie  de  Fontenay,  après  la  mort  de  la  duchesse  de 
Guyenne.  Il  ajoutait  que  cette  châtellenie  avait  plus  de  20  lieues  d'éten- 
due, «  et  en  sont  presque  tous  les  pors  de  mer  du  Poitou,  excepté  La 
Rochelle  »  (X**  4799  ,  f»'  92  vo-93).  Richemont  avait  beaucoup  d'autres 
fiefs,  dans  le  Poitou  et  ailleurs  (L.  Redet,  Catalogue,  p.  337). 

6.  Il  y  en  a  cependant  quelques  exemples,  et  pour  une  période  relative- 


PIÉTÉ  ÉTROITE.   AFFECTIONS   DE  FAMILLE  463 

ose  affirmer,  avec  G.  Gruel,  que  «  oncques  prince  en  son  temps 
ne  fut  plus  libéral  ni  plus  large  *  ». 

Ce  qui  n'est  pas  douteux,  c'est  la  piété  dont  il  fut  toujours 
animé,  piété  étroite,  intolérante  jusqu'à  la  persécution,  mais 
conforme  aux  idées  de  son  temps.  Il  haïssait  le  blasphème  et  les 
blasphémateurs.  Gomme  Jeanne  d'Arc,  il  ne  les  pouvait  entendre 
sans  les  réprimander;  il  les  punissait  même,  quand  cela  lui  était 
possible.  «  Jamais  homme  ne  hayt  plus  toutes  hérésies  et  sor- 
ciers et  sorcières  qu'il  les  hayssoit  *.  »  Il  en  fit  brûler  plusieurs, 
en  France,  en  Poitou  et  en  Bretagne.  «  Il  n'y  avoit  meilleur  catho- 
lique que  lui,  ni  qui  plus  aymast  Dieu  et  l'Eglise  '.  »  Jusqu'au  der- 
nier moment  de  sa  vie,  il  accomplit  avec  ponctualité,  avec  aus- 
térité ses  devoirs  religieux.  Cette  piété  fervente  n'allait  pourtant 
pas  jusqu'à  lui  faire  oublier  sa  sévérité  habituelle,  ni  la  défense 
de  ses  droits.  C'est  ainsi  qu'il  aurait  fait  saisir  «  pour  ses  démé- 
rites »,  jusque  dans  l'église  de  Reims,  un  certain  Etienne  d'Orme  *, 
et  qu'il  engagea,  peu  avant  sa  mort,  une  lutte  acharnée  contre 
l'évêque  de  Nantes. 

Ce  qu'il  faut  remarquer  encore  chez  lui,  c'est  l'affection  qu'il 
avait  pour  sa  famille.  En  toute  occasion,  il  était  prêt  à  soutenir 
ceux  d'entre  les  siens  qui  avaient  besoin  de  son  secours.  On  sait 
avec  quelle  ardeur  il  défendit  son  neveu  Gilles  de  Bretagne,  quel 
chagrin  il  éprouva  de  n'avoir  pu  le  sauver,  quelle  persévérance 
il  mit  à  poursuivre  ses  meurtriers.  Il  intercéda  même  pour  des 
coupables,  comme  les  comtes  Jean  IV  et  Jean  V  d'Armagnac  et 
le  duc  d'Alençon  ^.  Il  obéissait  à  ces  sentiments  si  honorables, 
quand  il  rétablit  l'union  et  la  paix  dans  la  maison  de  Bretagne, 
par  la  réconciliation  des  Penthièvre  et  des  Montfort. 

En  résumé,  il  est  permis  de  ne  pas  croire  à  la  parfaite  exac- 
titude du  portrait  de  Richemont,  tel  que  son  biographe  l'a  tracé 
dans  les  dernières  pages  de  ses  mémoires.  L'affection,  le  respect, 
l'admiration  enthousiaste  qu'il  avait  pour  son  maître  l'ont  em- 
pêché de  voir  ou  de  signaler  ses  défauts.  Après  l'avoir  montré 
«  remply  de  toutes  bonnes  vertus  »,  les  éloges  qu'il  lui  prodigue 
ne  lui  suffisent  pas  à  dire  «  tout  ce  qu'il  a  fait  de  bien  durant  sa 


ment  courte,  dans  Y  Appendice  CX.  Voir  aussi  les  Ms.  Fr.  8818,  f»»  98,  100, 
102  V»,  104  V,  108,  et  Fr.  8819,  f»'  38,  47,  47  v»,  48, 48  vo,  55  v  ;  T.  Brutus,  I, 
328;  JJ  187,  f»  2  v».  —  Don  au  couvent  des  frères  prêclieurs  de  Guingamp 
(Arch.  de  la  Loire-Inf.,  cass.  30,  E,  84). 

1.  Gruel,  228. 

2.  Gruel,  228. 

3.  Ibidem. 

4.  JJ  176,  f»  311  V. 

5.  Voy.  ci-dessus,  p.  353,  431-432,  442,  448-449. 


464  APPRÉCIATION  DU  RÔLE  DE  RICHEMONT 

vie  ».  Dégagés  de  toute  influence,  de  toute  partialité  incon- 
sciente ou  calculée,  instruits  de  certains  détails  que  Gruel  pou- 
vait ignorer,  placés  dans  ce  lointain  d'où  on  embrasse  plus  net- 
tement l'ensemble,  nous  pouvons  mieux  voir  ce  quefutRichemont 
et  quelle  est  l'importance  de  son  œuvre. 

Appelé  tout  à  la  fois  à  commander  les  armées  et  à  exercer  une 
influence  prépondérante  dans  le  gouvernement,  il  eut  ce  premier 
mérite  de  comprendre  la  situation,  d'apercevoir  nettement  ce 
qu'il  fallait  faire,  d'avoir,  en  un  mot,  une  politique  bien  arrêtée. 
Pour  un  homme  d'Etat,  c'est  là  une  grande  force.  Il  en  eut  encore 
une  autre,  la  persévérance,  la  ténacité.  S'il  éprouva  des  échecs, 
s'il  n'exécuta  son  plan  qu'avec  lenteur,  c'est  que  les  difficultés 
étaient  souvent  insurmontables  et  qu'il  rencontra  longtemps  des 
obstacles  là  même  où  il  n'aurait  dû  trouver  que  des  encoura- 
gements et  des  secours. 

A  partir  du  moment  où  il  reprit  la  direction  des  affaires 
(1433),  on  vit,  par  ses  efforts  et  par  un  heureux  concours  de 
circonstances,  la  situation  s'améliorer  de  plus  en  plus.  S'il  est 
vrai  que  le  traité  d'Arras  ait  contribué  puissamment  au  salut  de 
la  France,  on  peut  dire  que  la  gloire  en  revient  surtout  à 
Richemont.  Le  recouvrement  de  Paris  (1436)  et  des  autres  places 
de  l'Ile-de-France  (1436-1441),  la  répression  de  la  Praguerie,  le 
rétablissement  de  la  discipline,  la  réorganisation  de  l'armée 
(1439-1445),  sont  autant  de  résultats  dus,  en  très  grande  partie, 
à  son  initiative,  à  son  énergie,  à  sa  persévérance. 

Pour  accomplir  ces  progrès,  il  sut  utiliser  le  concours  de 
tous  les  bons  serviteurs  du  roi;  il  sut  choisir  des  auxiliaires 
habiles,  comme  Raoul  de  Gaucourt,  Ambroise  de  Loré,  Jean  de 
Bueil,  Boussac,  et  beaucoup  de  Bretons,  comme  Tugdual  de 
Kermoisan,  les  Goëtivy,  les  Laval.  Il  se  montra  toujours  recon- 
naissant envers  ceux  qui  lui  étaient  dévoués  *  ;  il  favorisa  leur 
avancement  ;  il  les  éleva  aux  postes  dont  ils  étaient  dignes  par 
leurs  talents  et  leurs  services.  Il  fit  A.  de  Loré  prévôt  de  Paris, 
Boussac  et  Lohéac  maréchaux  de  France,  Prigent  de  Goëtivy 
amiral  et  lui  donna  Jean  de  Bueil  pour  successeur.  Etienne 

1.  Il  témoigna  cette  reconnaissance  aux  petites  gens  comme  aux  nobles 
et  à  ses  moindres  officiers.  Il  fit  nommer  ouvriers  en  la  monnaie  de 
Saint-Lô  deux  bourgeois  de  cette  ville,  J.  Caboulet  et  J.  de  Conte  ville,  qui 
lui  avaient  rendu  des  services  pendant  la  conquête  du  Cotentin  (mars  1451) 
[JJ  181,  f"  28].  On  peut  encore  citer,  parmi  ceux  à  qui  Richemont  témoigna 
sa  reconnaissance,  ses  secrétaires  Berthelot  (X2«  22,  au  31  août  1441)  et 
J.  Mahé  (JJ  181,  f»  1557)  ;  Colas  Poussard,  son  trompette  (Arch.  des  alT.  étran- 
gères, France,  t.  XX,  f»  133);  P.  de  La  Châtaigneraie  (JJ  179,  f»*  170-171); 
J.  Darcet  (Z»»  13,  f»  23);  Guill.  Vendel  (Arch.  des  ait.  étr.,  t.  XX,  f»  171); 
Geoffroy  de  Couvran  {Append.  LXXXIX). 


CHOIX  DES  AUXILIAIRES.    TALENTS  MILITAIRES  465 

Chevalier,  son  secrétaire  *,  fut  placé  par  lui  auprès  de  Charles  VIÏ 
et  devint  un  des  membres  les  plus  habiles,  les  plus  estimés  du 
grand  conseil. 

Ces  faveurs,  si  justifiées  qu'elles  fussent,  n'en  excitaient  pas 
moins  de  vives  jalousies.  On  reprochait  au  connétable  de  garder 
les  meilleurs  emplois  pour  ses  créatures,  pour  ses  Bretons.  «  Et 
ne  lui  chaloit,  dit  Cagny  *,  quel  tort  il  feist  aux  chevaliers  et 
escuiers  d'autres  pais,  mais  qu'il  peust  avoir  places  pour  y  tenir 
ses  gens  en  nom  et  en  estât.  Et  moult  de  maulx  en  sont  venus 
durant  ces  présentes  guerres.  »  On  sait  combien  cette  accusation 
est  injuste.  «  Sur  toutes  choses,  il  aimoit  les  gens  vaillans  et 
renommez  ^,  »  qu'ils  fussent  Bretons,  Normands  ou  Angevins. 
D'ailleurs,  les  Bretons  étaient  de  vaillants  soldats.  Un  historien 
célèbre  a  dit  qu'ils  avaient  sauvé  le  royaume  au  temps  de 
Du  Guesclin  et  que  «  notre  meilleure  arme  contre  la  Grande- 
Bretagne,  c'est  la  Bretagne  *.  » 

Comme  général,  Richemont  ne  fut  pas  toujours  heureux. 
Gruel  affirme  bien  que  nul  homme,  en  son  temps,  «  ne  fut  de 
meilleure  conduite  que  lui  pour  donner  et  livrer  une  grande 
bataille,  pour  faire  un  grand  et  mémorable  siège  et  pour  toutes 
approches,  exécutions  militaires,  exploits  de  guerre  en  toutes 
manières  ^  ;  »  mais  là  encore  on  peut  voir  une  certaine  exagé- 
ration. A  défaut  de  talents  supérieurs,  Richemont  avait,  tout  au 
moins,  sur  la  discipline  et  l'organisation  des  troupes,  des  idées 
très  arrêtées,  qui  dénotent  une  aptitude  spéciale  et  des  qualités 
précieuses.  S'il  ne  fut  ni  un  profond  stratégiste,  ni  un  grand 
tacticien,  on  peut  dire  que  les  capitaines  les  plus  renommés  de 
son  temps  ne  lui  étaient  pas  supérieurs  à  cet  égard,  et  que  la 
guerre,  comme  on  l'entendait  alors,  n'était  pas  une  guerre  bien 
savante. 

Hardi  sans  témérité,  il  joignait  à  une  grande  vigueur  dans 
l'action  une  prudence  qui  prouve  que  l'exemple  des  Anglais  lui 
avait  profité.  Comme  eux,  il  employait  des  espions  pour  con- 
naître les  projets  et  les  mouvements  de  l'ennemi  ^;  comme  eux, 

1.  Il  figure  avec  ce  titre  dans  le  Ms.  Fr.  8819,  f"  29,  en  1434.  —  Voir 
l'article  Etienne  Chevalier  dans  la  Biographie  Didot,  t.  X,  p,  253.  Et.  Che- 
valier était  encore  dans  la  maison  du  connétable  à  l'époque  où  mourut  la 
duchesse  de  Guyenne,  qui  le  désigna  comme  un  de  ses  exécuteurs  testa- 
mentaires (janvier  1442)  [voy.  ci-dessus,  p.  329,  461].  On  pourrait  encore 
citer  Jean  de  Troissy,  Jean  Bude,  Alain  Giron,  etc.,  qui  occupèrent  des 
postes  plus  ou  moins  importants. 

2.  Ms.  Duchesne  48,  f»  110. 

3.  Gruel,  229. 

4.Michelet,  Hist.  de  France,  Lib.  internat.  Paris,  1874,  in-8»,  t.  V,  p.  19,  25. 

5.  Gruel,  229. 

6.  «  Et  croyez  qu'il  savoit  toutes  les  nouvelles car  il  avoit  bonnes 

Richemont.  30 


466  TALENTS   POLITIQUES.    IMPOPULARITÉ 

il  prenait  toutes  les  autres  mesures  de  précaution  qui  peuvent 
assurer  le  succès.  S'il  éprouva  plusieurs  défaites,  il  est  juste  de 
les  imputer,  en  grande  partie,  à  l'indiscipline,  à  la  mauvaise 
organisation  des  troupes,  au  lieu  de  n'y  voir  qu'une  preuve 
d'incapacité.  Le  plus  souvent,  les  autres  généraux  échouaient, 
pour  les  mêmes  causes  *. 

Quand  Richemont  eut  accompli  ses  réformes  militaires,  quand 
l'armée,  composée  d'éléments  meilleurs,  soldée  avec  régularité, 
devint  à  la  fois  plus  disciplinée,  plus  maniable,  plus  solide,  il 
n'eut  désormais  que  des  avantages.  La  victoire  de  Formigny,  la 
rapide  conquête  de  la  Basse-Normandie  montrent  assez  ce  qu'il 
eût  fait  plus  tôt,  s'il  avait  été  plus  libre  d'agir  et  mieux  secondé. 
Tout  bien  considéré,  on  peut  dire  que  nul  autre  capitaine  de  son 
temps,  pas  même  Dunois,  ne  remporta  plus  de  succès,  et  il  a  eu 
cet  honneur  singulier  d'avoir  organisé  l'armée  qui  acheva  l'ex- 
pulsion des  Anglais  *. 

S'il  eut  pour  les  choses  de  la  guerre  une  prédilection  qui 
était  d'ailleurs  le  premier  devoir  d'un  connétable ,  si  nous  con- 
naissons mieux  cette  partie  de  son  œuvre,  en  faut-il  conclure 
que  les  talents  politiques  lui  manquaient?  Sur  ce  point,  il  est 
plus  difficile  de  déterminer  son  rôle  ;  mais  ses  longues  négocia- 
tions avec  la  Bretagne,  la  Savoie  et  la  Bourgogne,  surtout  à 
l'époque  du  traité  d'Arras,  l'habileté  dont  il  fit  preuve  dans  sa 
lutte  contre  Louvet  et  La  Trémoille,  les  services  qu'il  sut  rendre 
dans  ses  gouvernements  de  l'Ile-de-France  et  de  la  Normandie, 
sa  correspondance  avec  les  principales  villes  du  royaume,  les 
missions  diplomatiques  dont  il  fut  chargé  plusieurs  fois,  tout 
cela  ne  montre-l-il  pas  qu'en  lui  l'homme  d'Etat  n'était  pas 
inférieur  à  l'homme  de  guerre  ^? 

Après  les  premiers  écarts  d'une  ambition  hésitante  et  inquiète, 
il  se  donna  tout  entier  et  pour  toujours  à  la  France.  La  rude 
énergie,  la  rigueur  nécessaire  qu'il  déploya  dans  la  direction  du 
gouvernement  et  de  l'armée  lui  aliénèrent  le  roi,  les  courtisans, 
les  gens  de  guerre,  le  peuple  lui-même.  On  fut  beaucoup  moins 
sensible  au  bien  qu'il  faisait,  ou  qu'il  voulait  faire,  qu'aux  sacri- 
fices dont  il  le  fallait  payer.  Antipathie  du  roi,  rancunes  des 


espies  et  les  payoit  bien,  »  dit  Gruel  (p.  213)  dans  le  passage  relatif  aux 
mouvements  des  Anglais  pendant  le  siège  de  Meaux,  en  1439. 

1.  Voir  un  passage  remarquable  du  Père  Daniel,  Hist.  de  Finance,  VIII,  268. 

2.  Le  P.  Daniel  dit  qu'il  fut  «  un  des  meilleurs  capitaines  de  son  temps  » 
(p.  115),  et«  qu'on  le  peut  compter  au  nombre  des  plus  grands  capitaines 
que  la  France  ait  eus  ù  son  service  »  (p.  309). 

3.  Voir  ci-dessus,  notamment,  p.  97  et  suiv.,  129,  153,  158,  183-184,  188, 
190,  210,  213-214,  218-219,  227,  237,  265,  424  et  suiv.,  435,  437,  442-444. 


CONCLUSION  467 

gens  de  guerre  et  des  courtisans ,  impopularité  imméritée , 
Richement  brava  tout,  supporta  tout,  avec  une  froide  ténacité, 
avec  une  invincible  force  d'âme.  Il  eut  le  rôle  le  plus  difficile, 
le  plus  ingrat;  sa  renommée  en  a  souffert,  après  comnle  avant 
sa  mort.  Ce  qu'on  vit,  ce  qu'on  a  continué  de  voir  surtout  en 
lui,  c'est  le  justicier.  Ce  titre  est  déjà  une  gloire,  mais  ce  n'est 
pas  assez.  Parmi  les  hommes  célèbres  du  règne  de  Charles  VII, 
le  Bien-Servi,  parmi  les  libérateurs  de  la  France,  s'il  en  est  un 
qui  mérite  d'occuper,  à  côté  de  Jeanne  d'Arc,  le  premier  rang, 
on  peut  affirmer,  tout  bien  pesé,  que  c'est  le  connétable  de 
Richemont  '. 

1.  Sur  une  miniature  d'un  manuscrit  de  Jean  Chartier,  qui  est  à  la  biblio- 
thèque de  Rouen,  on  voit  Richemont  à  la  droite  du  roi,  Dunois  à  sa  gau- 
che, puis,  au-dessous,  Jeanne  d'Arc,  P.  de  Brézé,  J.  Rouault  et  J.  Bureau. 
—  Voir  un  fac-similé  dans  Lottin,  Recherches  sur  Orléans,  t.  I,  p.  228, 
Orléans,  183C,  in-8». 


APPENDICES 

NOTES  SUPPLÉMENTAIRES  ET  PIÈGES  JUSTIFICATIVES 


I 

NOTE  SUR  GUILLAUME  GRUEL  (voy.  la  préface). 

Le  peu  que  nous  savons  de  G.  Gruel,  c'est  lui-même  qui  nous  l'ap- 
prend, dans  sa  biographie  d'Artur  de  Bretagne.  On  y  voit  qu'il  fut  au 
service  de  Richemont  tout  au  moins  depuis  l'époque  où  il  reçut  l'épée 
de  connétable,  en  142o  (Gruel,  p.  229).  II  survécut  à  son  maître  et 
n'éciivit  ses  mémoires  qu'un  certain  temps  après  sa  mort.  Il  l'avait 
plusieurs  fois  accompagné  dans  ses  expéditions,  mais  non  dans  toutes. 
Il  est  facile  de  reconnaître,  à  la  longueur  ou  à  la  brièveté  du  récit,  à 
l'abondance,  à  la  précision  ou  à  l'insuffisance  des  détails  (voy.  par 
ex.  ci-dessus,  p.  216,  note  6),  quels  sont  les  cas  où  Gruel  fut  témoin 
des  faits  qu'il  raconte,  et  il  le  dit  quelquefois  d'une  manière  expresse. 
Bien  qu'il  évite,  avec  une  discrétion  manifeste,  de  se  mettre  lui-même 
en  scène,  il  fait  quelquefois  figurer  son  nom  dans  le  récit.  Il  dit  par 
exemple  qu'il  faisait  partie  de  la  maison  militaire  du  connétable  en 
1442  (Gruel,  p.  219),  pendant  la  campagne  de  Guyenne  et  Gascogne; 
qu'il  formait,  avec  plusieurs  autres  gentilshommes,  sa  garde  de  corps 
à  la  bataille  de  Formigny  (Gruel,  p.  224)  ;  qu'il  assista  aux  sièges  de 
Caen  et  de  Cherbourg,  et  qu'il  fut  commis  à  la  surveillance  des  otages 
livrés  par  les  Anglais  (Gruel,  p.  226).  D'autres  passages,  où  ne  se 
trouve  pas  son  nom,  permettent  néanmoins  de  constater  sa  présence 
dans  la  suite  du  connétable. 

Guillaume  Gruel  était,  comme  il  le  dit  lui-même,  un  gentilhomme 
(Gruel,  p.  224).  Avant  d'appartenir  au  comte  de  Richemont,  il  était 
déjà  au  service  de  Jean  V,  duc  de  Bretagne,  sous  les  ordres  directs 
du  sire  de  Montauban.  En  1418,  il  était  parmi  ceux  que  Jean  V  em- 
menait à  sa  suite  dans  un  voyage  en  France  (D.  Lobineau,  t.  II, 
col.  925,  926).  Il  était  sans  doute  le  parent,  peut-être  même  le  frère  de 
Raoul  Gruel,  que  Jean    de  Montauban  donna  comme  écuyer  tran- 


470  APPENDICES 

chant  à  Richeraont,  quand  il  vint,  avec  d'autres  envoyés  bretons,  de- 
mander à  Henri  V  la  mise  en  liberté  de  son  prisonnier,  à  l.'époque  du 
siège  de  Melun  (1420)  [Gruel,  p.  188-,  voir  aussi  l'article  Raoul  Gruel 
dans  la  Biographie  Didot,  t.  XXII,  col.  244].  Guillaume  et  Raoul  Gruel 
étaient  avec  Richemont  en  1424,  quand  il  se  rendit  auprès  du  roi 
Charles  VII,  à  Angers,  avant  d'accepter  l'épée  de  connétable.  A.  cette 
époque,  G.  Gruel  figure  encore  parmi  les  gens  du  sire  de  Mon- 
tauban  (D.  Lobineau,  t.  II,  col.  908;  Preuves  de  D.  Morice,  t.  II, 
col.  1140,  1147,  1174).  Ce  fut  probablement  vers  ce  temps-là  qu'il  fut 
attaché  à  la  maison  d'Artur  de  Bretagne. 

Quand  il  ne  suivait  pas  le  connétable,  G.  Gruel  était  avec  quelqu'un 
des  siens,  comme  la  duchesse  de  Guj'enne,  sa  femme,  ou  le  comte 
d'Etampes,  son  frère.  C'est  ainsi  que  ce  dernier  l'envoya,  en  1433, 
annoncer  à  Richemont  «  que  la  comtesse  d'Etampes  était  accouchée 
et  avoit  eu  un  beau  fils  »  (Gruel,  p.  204).  La  duchesse  de  Guyenne 
devait  avoir  pour  G.  Gruel  une  grande  estime,  car  elle  ne  l'oublia  pas 
dans  son  testament.  Elle  lui  légua  «  sa  robe  de  satin  gris  fourrée  de 
martres,  avec  cent  escus  d'or  pour  une  fois  »  (voy.  Append.  LXXVlll). 

Quand  Richemont  devint  duc  de  Bretagne,  il  nomma  G.  Gruel 
capitaine  de  Dol  (D.  Lobineau,  t.  II,  col.  1202;  Preuves  de  D.  Morice, 
t.  II,  col.  1710). 

Ces  détails,  si  incomplets  qu'ils  soient,  suffisent  à  montrer  que 
G.  Gruel  était  en  position  d'être  bien  informé.  Il  devait  être  à  peu 
près  du  même  âge  que  Richemont,  car  il  se  souvient  de  l'avoir  en- 
tendu appeler  duc  de  Touraine,  titre  qui  lui  fut  donné  par  Charles  VI. 
Il  put  donc  voir  une  grande  partie  des  faits  qu'il  raconte  et  connaître 
les  autres,  soit  par  le  connétable  lui  môme,  comme  il  le  dit  formel- 
lement (Gruel,  p.  229),  soit  par  les  personnes  de  sa  famille  ou  de  son 
entourage,  notamment  par  Raoul  Gruel.  Ce  dernier,  qui  fut,  plus 
longtemps  encore  que  Guillaume  Gruel,  au  service  de  Richemont, 
jouissait  de  toute  sa  confiance  et  fut  chargé  par  lui  de  missions  im-. 
portantes,  où  il  montra  une  grande  habileté  (Gruel,  p.  189,  190,  204). 

Quelle  autorité  faut-il  accorder  à  G.  Gruel?  Doit-on  le  considérer 
comme  un  chroniqueur  véridique,  exact,  ou  comme  un  panégyriste, 
un  apologiste  qui  mérite  peu  de  confiance?  Cette  dernière  opinion 
est  celle  de  Fontanieu,  de  Le  Brun  de  Charmettes,  de  Sismondi  et 
de  M.  Wallon  i.  «  G.  Gruel,  écuyer  ou  page  du  comte  Arthur  de 
Richemont,  en  écrivant  la  vie  de  ce  grand  connétable,  dit  Sismondi 
{Hist.  des  Français,  XIII,  599),  laisse  souvent  percer  l'âme  d'un  valet,  plus 
occupé  de  rehausser  le  mérite  de  son  maître  que  de  s'assurer  de  la  vé- 
rité des  faits  qu'il  rapporte.  »  Les  éditeurs  de  G.  Gruel,  dans  les  diverses 
collections  de  Mémoires,  signalent  tous  l'inexactitude  et  la  partialité 
de  G.  Gruel  (voy.  les  Avertissements  des  éditeurs).  Cependant,  quelque 
prévention  qu'on  puisse  avoir  contre  G.  Gruel,  il  serait  difficile  de  nier 
sa  véracité.  Non  seulement  c'est  un  témoin  bien  informé,  qui  sait,  qui 

1.  Voir,  dans  le  Ms.  Fr.  10449,  l'avertissement;  Fr.  10448,  f»  S3  v^  et  suiv.  ; 
H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  196;  Le  Brun  de  Charmettes,  Hist.  de  Jeanne 
d'Arc,  Paris,  1817,  A.  Bertrand,  4  vol.  in-8»,  t.  II,  198. 


APPENDICES  471 

a  vu  par  lui-même;  on  sent  aussi  qu'il  est  sincère,  qu'il  ne  cherche 
pas  à  tromper,  en  un  mot  qu'il  n'a  «  rien  mis  de  ce  qu'il  a  peu  sca- 
voir  qui  ne  soit  à  la  vérité  »  (Gruel,  p.  229).  Il  est  facile  de  voir  que 
ses  récits  sont  confirmés  par  ceux  des  chroniqueurs  contemporains  et 
par  des  documents  authentiques.  Il  y  a  même  certains  laits  qu'il 
raconte  avec  des  détails  et  une  précision  qu'on  chercherait  vaine- 
ment ailleurs,  par  exemple  les  campagnes  de  Richemont  en  1434, 
1435,  143G.  Il  n'est  donc  pas  étonnant  que  tous  les  historiens  qui  ont 
écrit  sur  le  règne  de  Charles  VII  aient  utilisé  les  mémoires  de  Gruel 
comme  une  source  précieuse  d'informations.  C'est  là  le  meilleur  éloge 
qu'on  en  puisse  faire. 

Est-ce  ci  dire,  pour  cela,  que  ce  biographe  soit  toujours  exact?  Il  y 
aurait  exagération  ou  légèreté  à  l'affirmer.  Comme  il  n'a  pas  tenu  un 
journal  régulier  des  événements  à  mesure  qu'ils  se  produisaient  et 
qu'il  a  écrit  ses  mémoires  après  la  mort  du  connétable,  ses  souve- 
nirs ne  sont  pas  toujours  précis  ni  complets,  et  il  intervertit  quel- 
quefois l'ordre  des  faits.  D'ailleurs,  il  déclare  lui-même  (p.  229)  qu'il 
n'a  mis  en  écrit  que  «  partie  des  faits  de  bon  duc  Artur  ».  Ces  omis- 
sions, cette  confusion  chronologique,  dont  n'est  exempt  aucun  chro- 
niqueur de  cette  époque,  sont  les  plus  graves  défauts  qu'on  puisse 
reprocher  à  Gruel.  Quant  aux  erreurs  matérielles  dans  l'exposition 
des  faits,  elles  sont  rares  et  n'ont  pas  une  grande  gravité.  En  résumé, 
on  peut  dire  que  Gruel  est  véridique  et  généralement  exact. 

Les  réserves  à  faire  portent  sur  ses  appréciations  et  sur  ses  juge- 
ments. On  ne  saurait  blâmer  un  biographe  de  mettre  en  scène  son 
héros  avec  une  complaisance  marquée,  pourvu  qu'il  ne  le  fasse  pas 
au  détriment  de  la  vérité,  et  certes  Gruel  n'a  pas  excédé  la  mesure 
dans  ce  sens,  mais  on  a  le  droit  de  se  tenir  en  garde  contre  une 
admiration  excessive.  Gruel  a  outré  les  talents  et  les  vertus  de  Riche- 
mont  dans  le  portrait  qu'il  en  a  tracé  (Gruel,  p.  228-229);  toutefois  il 
ne  cherche  pas  à  le  relever  en  abaissant  les  autres,  ni  à  lui  attribuer 
des  services  qu'il  n'aurait  pas  rendus.  On  peut  douter  de  sa  clair- 
voyance. Sa  bonne  foi  est  au-dessus  de  tout  soupçon.  En  un  mot,  les 
mémoires  de  Gruel  ont  une  valeur  incontestable;  ils  sont  non  seule- 
ment la  base  nécessaire  d'une  étude  critique  sur  la  vie  et  sur  l'œuvre 
du  connétable  de  Richemont,  mais  encore  une  des  sources  de  l'his- 
toire de  France  sous  le  règne  de  Charles  VII. 

En  1018,  un  correspondant  de  Peiresc  lui  signalait  cette  chronique, 
en  ajoutant  qu'elle  méritait  aussi  bien  d'être  imprimée  que  celle  de 
Bourbon,  de  La  Trémoille,  de  Bayard  et  de  du  Guesclin  (voy.  Fr.  9343, 
f»  200;  communication  de  M.  A.  Longnon).  Elle  se  trouve  dans  le 
Reciceil  des  historiens  de  Charles  VII,  publié  par  D.  Godefroy,  et  dans 
diverses  collections  plus  récentes,  comme  celles  du  Panthéon  litté- 
raire, de  Michaud  et  Poujoulat,  etc.  La  Bibliothèque  nationale  possède 
au  moins  trois  manuscrits  de  la  Chronique  de  Gruel,  l'un  du  xv«  siè- 
cle, le  Ms.  Fr.  5037,  les  deux  autres  du  xvi«  siècle',  les  Ms.  Fr.  ooOl 
et  18697  (anc.  fonds  Saint-Germain).  F.  de  Fontette,  dans  la  Biblio- 
thèque historique  de  la  France,  t.  III,  p.  400,  n°  35883,  mentionne  le 
Ms.  Saint-Germain  et  un  autre,  appartenant  à  la  cathédrale  de  Tournai. 


472  APPENDICES 

II 

JUGEMENTS  SUR  RiCHEMONï  (voy.  la  préface). 

Parmi  les  chroniqueurs  du  xv^  siècle,  un  seul,  le  Bourgeois  de 
Paris,  est  vraiment  hostile  à  Richement.  Ce  Bourguignon  hargneux, 
qui  conserve  toujours  une  vieille  rancune  contre  les  Armagnacs,  même 
après  le  traité  d'Arras,  prodigue  les  invectives  les  plus  haineuses  et  les 
accusations  les  plus  injustes  (voy.  le  passage  cité  ci-dessus,  p.  287-288). 

Un  autre  chroniqueur,  d'un  esprit  beaucoup  plus  judicieux  et  plus 
rassis,  mais  très  indépendant,  Perceval  de  Cagny,  se  montre,  au 
moins  dans  un  endroit,  fort  hostile  à  Richemont  :  «  Enicelui,  an  1438, 
le  dix-huitième  jour  du  mois  de  décembre,  fut  le  chasteau  de  Saint- 
Germain  en  Laye,  à  cinq  lieues  de  Paris,  prins  par  la  porte,  de  huit 
ou  dix  Anglois,  par  deffault  de  garde  de  dix  ou  douze  meschans  Bre- 
tons, que  le  Conestable  y  tenoit,  qui  ne  povoit  avoir  assez  place  pour 
bailler  à  ses  gens.  Et  ne  lui  challoit  quel  tort  il  feist  aux  chevaliers  et 
escuiers  d'autre  pais,  mais  qu'il  peust  avoir  places  pour  y  tenir  ses  gens 
en  nom  et  en  estât.  Et  moult  de  maulx  en  sont  venus  durant  ces  pré- 
sentes guerres.  Et  de  la  perte  d'icelle  place  et  du  gouvernement 
dudit  conestable,  en  la  ville  de  Paris  et  ailleurs,  estoient  très  mal 
contens  de  luy  ceulx  de  Paris  »  (Ms.  Duchesne  48,  f°  110).  Il  est  regret- 
table que  la  Chronique  de  Cagny  n'ait  pas  été  imprimée.  On  n'en 
connaît  qu'une  copie  moderne,  peut-être  incomplète,  celle  qui  se 
trouve  dans  le  Ms.  Duchesne  48  et  qui  s'arrête  précisément  à  la 
citation  ci-dessus.  M.  J.  Quicherat  en  a  donné  un  extrait  dans  la 
Bibliothèque  de  r École  des.  chartes,  2^  série,  t.  II,  p.  142  et  suiv. 

On  croirait  entendre  ici  un  écho  du  Bourgeois  de  Paris,  et  pourtant 
Cagny  est  loin  d'être  un  Bourguignon  (voir,  par  ex.,  le  passage  relatif 
à  la  paix  d'Arras,  f»^  98-99).  Il  est  vrai  que  ce  même  chroniqueur  se 
montre  auparavant  plus  juste  à  l'égard  du  connétable  (f"  100). 

Les  autres  chroniqueurs  parlent  de  lui  d'une  manière  impartiale 
et  généralement  favorable,  comme  Berry,  par  exemple,  dans  ce 
passage  : 

«  Au  mois  de  novembre  ensuivant,  au  dit  an  (14S8),  trespassa  le  duc 
Artus  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont  et  connestable  de  France,  qui, 
en  son  vivant,  fut  un  vaillant  chevalier  et  prince  de  haut  courage  et 
eut,  en  son  temps,  plusieurs  grandes  victoires  à  l'encontre  des  An- 
glois »  (Berry,  ap.  Godefroy,  p.  478). 

Le  pape  Pie  II,  contemporain  de  Richemont,  le  tenait  en  grande 
estime  (voy.  les  œuvres  d'^neas  Sylvius  Piccolomini,  Basileœ,  1551, 
p.  442). 

Alain,  Chartier,  cet  écrivain  d'un  esprit  si  élevé,  dit,  comme  Berry, 
que  Richemont,  c  en  son  vivant,  fut  un  vaillant  chevalier  et  prince  de 
hault  courage,  et  eut  plusieurs  grandes  victoires  à  l'encontre  des 


APPENDICES  473 

Anglois  »  {Œuvres  d'Alain  Chartier,  édit.  d'André  Duchesne,  Paris, 
1617,  in-4»,  p.  451). 
Martial  d'Auvergne  fait  toujours  l'éloge  de  Richemont  : 

Ledit  Richemont  connestable 
En  son  temps  fut  chevalereux, 
Très  vaillant,  grand  justiciable 
Et  en  bataille  fort  eureux. 

(Ms.  de  M.  d'Auvergne,  Fr.  303 i,  f»  li4.  Édit.  Coustelier,  II,  160.) 

Si  nous  passons  aux  historiens,  nous  trouvons  aussi  dans  leurs 
opinions  et  leurs  jugements  sur  Richemont  des  différences  notables, 
mais  moins  tranchées. 

Il  va  sans  dire  que  Alain  Bouchard,  Le  Baud,  d'Argentré,  D.  Lobi- 
neau,  D.  Morice,  D.  Taillandier,  son  continuateur,  et,  en  géné- 
ral, les  écrivains  bretons  sont  grands  admirateurs  du  connétable  de 
Charles  VIL  Cette  admiration  est  partagée  par  d'autres  auteurs.  Se, 
et  L.  de  Sainte-Maiihe  disent  que  Richemont  était  «  prince  petit  de 
corps,  mais  de  grand  entendement,  vaillant  et  hardy  de  sa  per- 
sonne, des  plus  expérimentez  au  faict  des  armes,  etc.  Bref,  il  a  rem- 
porté cette  autre  louange  insigne  d'avoir  esté  l'un  de  ceux  qui 
délivrèrent  la  France  du  joug  insupportable  des  Anglois  »  (Sainte- 
Marthe,  Histoire  généalogique  de  la  maison  de  France,  édition  de  1647, 
t.  II,  p.  607-608).  D.  Godefroy,  dans  son  Recueil  des  historiens  de 
Charles  VII  (p.  79o),  reproduit,  en  partie,  ce  jugement.  Le  P.  Anselme 
{Hist.  généalogique,  t.  I,  p.  459-461)  et  Mézeray  font  aussi  l'éloge  de 
Richemont.  «  11  avait  le  cœur  haut,  l'humeur  guerrière  et  libérale,  et, 
par  ce  moyen,  l'amour  des  soldats  et  la  faveur  de  la  noblesse,  spé- 
cialement de  celle  de  Bretagne  »  (Mézeray,  Hist.  de  France,  édition 
de  1646,  in-f",  t.  II,  p.  5). 

Fontanieu  ne  ménage  guère  Richemont  dans  son  histoire  manus- 
crite de  Charles  VII  et  semble  se  résigner  difficilement  à  reconnaître 
ses  services  (Fr.  10449,  surtout  au  f»  421  v'). 

Le  P.  Daniel,  dont  l'opinion  a  ici  une  valeur  toute  particulière,  en 
raison  de  ses  travaux  sur  l'armée,  porte  un  jugement  d'autant  plus  re- 
marquable que  son  impartialité  ne  saurait  être  contestée.  Tout  en  blâ- 
mant ce  qu'il  trouve  de  répréhensible  dans  la  conduite  de  Richemont, 
il  ne  craint  pas  d'affirmer  qu'il  avait  le  cœur  tout  à  fait  français,  qu'il 
avait  de  grandes  qualités,  qu'il  fut  un  des  meilleurs  capitaines  de  son 
temps,  qu'il  aimait  l'Etat,  qu'il  rendit  de  grands  services  au  roi,  malgré 
ce  prince  même  (le  P.  Daniel,  Histoire  de  France,  édition  de  1755, 
l.  VII,  p.  26,  36,  69,  72,  113,  115,  119,  165,  309). 

Dans  son  Histoire  de  Jeanne  d'Arc,  Le  Brun  de  Charmettes,  après 
un  premier  jugement  assez  favorable,  maltraite  beaucoup  le  conné- 
table et  ne  voit  en  lui  qu'un  ambitieux,  dont  fégoïsme  s'abaisse  aux 
calculs  les  plus  machiavéliques  (voy.  notamment  t.  I,  p.  94,  et  t.  II, 
p.  191  et  suiv.,  201). 

Sismondi,  après  une  appréciation  tout  ou  moins  sévère,  arrive  à 
une  conclusion  assez  inattendue.  Il  veut  bien  reconnaître  à  Riche- 


474  APPENDICES 

mont  un  certain  talent  militaii'e,  de  l'activité,  de  la  décision,  avec 
beaucoup  de  rudesse  de  caractère  et  un  grand  mépris  pour  l'indolence 
du  roi.  «  Il  aurait  rendu  de  grands  services,  s'il  avait  eu  des  talents 
plus  décidés  pour  la  guerre;  mais  ses  revers,  plus  fréquents  que  ses 
succès,  démentent  la  réputation  que  les  historiens  de  Bi-etagne  ont 
voulu  lui  faire,  elc,  »  (Sismondi,  Histoire  des  Français,  édition  de  1831, 
t.  XIII,  p.  41-42,  o8-o9).  Plus  loin,  il  ajoute  que  Richement,  à  l'époque 
de  la  faveur  de  La  Trémoille,  était  jusqu'alors  le  seul  homme  qui  prît 
à  cœur  les  intérêts  de  la  monarchie  et  qui  songeât  à  sa  défense  (t.  XIII, 
p.  89).  Enfln,  dans  une  dernière  appréciation,  qui  est  en  même  temps 
un  portrait  du  connétable,  on  est  étonné  de  trouver  cet  éloge  :  «  Dans 
les  moments  de  grands  revers,  de  la  grande  désorganisation  de  la 
France,  il  avait  opposé  sa  volonté  ferme  et  opiniâtre  à  la  faiblesse  du 
roi,  et  il  avait  ainsi  sauvé  un  Etat  dont  le  chef  désespérait  »  (Sismondi, 
Histoire  des  Français,  t.  XIV,  23). 

De  Barante,  dans  son  Histoire  des  ducs  de  Bourgogne  (t.  IV,  p.  76- 
77,  177,  190;  t.  V,  p.  113),  attribue  un  très  grand  rôle  à  Richemont. 
Son  jugement  peut  se  résumer  ainsi  :  «  C'était  lui  qui,  au  dire  de  beau- 
coup de  gens,  avait  sauvé  le  royaume.  » 

Michelet  insiste  peu  sur  le  rôle  particulier  du  connétable  et  ne  le 
fait  guère  ressortir,  mais  on  voit  qu'il  approuve  Charles  Vil  de  l'avoir 
choisi  (J.  Michelet,  Hist.  de  France,  Paris,  Lacroix,  1871-1874,  in-S», 
t.  V,  p.  19,  20,  145,  146,  170). 

H.  Martin,  au  contraire,  donne  beaucoup  de  relief  à  la  figure  de  Ri- 
chemont; il  montre  bien  les  difficultés  et  l'importance  de  sa  tâche, 
ses  grands  services,  et  il  résume  ainsi  son  opmion  :  «  Sans  avoir  le 
génie  de  son  compatriote  Du  Guesclin,  il  avait  fait  presque  autant  que 
lui  pour  la  France  »  (H.  Martin,  Hist.  de  France,  Paris,  Fume,  18oo, 
in-8",  t.  VI,  p.  107,  175,  176.  180,  181,  218,  321,  513). 

Dans  son  Histoire  de  V administration  et  du  gouvernement  de  la 
France,  sous  le  régne  de  Charles  VU,  M.  H.  Dansin  (Paris,  Aug.  Du- 
rand, 1858,  10-8°)  n'est  pas  moins  favorable  à  Richemont  :  «  C'était 
mieux  qu'un  homme  de  guerre  fort  habile,  c'était  un  administrateur 
intelligent  et  énergique.  Il  prit  la  plus  grande  part  à  la  création  de 
l'armée  permanente  et  à  la  répression  des  désordres  des  aventuriers; 
il  servit  fort  habilement  le  roi  dans  des  ambassades  et  fut  certaine- 
ment un  des  meilleurs  instruments  de  la  délivrance  et  de  la  pacifica- 
tion du  royaume  »  (p.  40-41).  «  En  dépit  des  disgrâces  que  les 
caprices  et  l'ingratitude  du  roi  lui  avaient  quelquefois  infligées,  le 
dévouement  de  Richemont  pour  la  cause  royale  s'était  manifesté  à 
plusieurs  reprises.  Dans  la  Praguerie,  par  exemple,  on  peut  dire  qu'il 
avait  sauvé  Charles  VII,  en  tenant  tête  à  lui  seul  à  Bourbon,  à  Ven- 
dôme, à  Dunois  et  en  donnant.au  roi  le  conseil  et  les  moyens  d'une 
olîensive  énergique  »  (p.  292-293). 

M.  Vallet  (de  Viriville),  auteur  d'une  Histoire  de  Charles  VU  qui  est 
tout  au  moins  remarquable  par  une  très  grande  érudition,  rend  jus- 
tice au  connétable,  sans  la  moindre  partialité.  Il  considère  comme 
un  «  acte  souverainement  habile,  et  qui  devait  avoir  dans  tout  le 
règne  une  conséquence  infinie  »,  le  choix  que  fit  de  lui  la  reine 


APPENDICES  475 

Yolande,  en  le  désignant  à  Charles  VII;  mais  le  rôle  si  important  de 
Richcmont,  au  lieu  d'avoir  la  teneur  et  la  netteté  qu'il  réclame, 
s'éparpille  et  s'efface  au  milieu  de  détails  inconsistants  et  diffus 
(Vallet  de  Viriville,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  I,  429,  465;  t.  II,  3C6,  399, 
407,  etc.). 

Un  écrivain  dont  la  compétence  et  l'autorité  sont  considérables, 
M.  du  Fresne  de  Beaucourt,  a  dirigé  d'assez  vives  attaques  contre  le 
connétable  de  Richcmont,  dans  plusieurs  articles,  qu'on  peut  considé- 
rer comme  l'ébauche  de  sa  grande  histoire  de  Charles  VII  (voy. 
Revue  des  questions  historiques,  t.  IX,  année  1870-1871,  livraison 
d'octobre  et  avril,  p.  347  et  suiv.).  Il  blâme  les  moyens  peu  loyaux  ou 
violents  auxquels  il  eut  d'abord  recours  ;  il  fait  retomber  sur  lui  seul 
toute  la  responsabilité  d'une  situation  désastreuse.  A  ses  yeux,  Riche- 
mont  est  «  un  rude  Breton  à  la  main  de  fer,  qu  aucune  considération 
n'arrête,  quand  il  s'agit  d'arriver  à  son  but.  »  11  n'est  point  ce  héros 
que  certains  historiens  se  sont  plu  à  célébrer  {Revue  des  questions 
historiques,  t.  IX,  notamment  p.  389,  39i,  392,  393,  399,  400;  de 
Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  p.  143). 

Dans  quatre  autres  articles  {Revue  des  questions  historiques,  t.  XII, 
XIV,  XVII),  le  même  auteur  a  l'occasion  de  parler  plusieurs  fois  du 
connétable,  mais  il  le  fait  avec  une  sobriété  regrettable  d'apprécia- 
tions. D'ailleurs,  comme  il  ne  formule  pas  un  jugement  d'ensemble, 
il  nous  laisse  incertains  sur  ce  qu'il  faut  penser,  en  définitive,  de 
Richcmont  et  de  son  rôle.  Dans  sa  grande  Histoire  de  Charles  VII, 
dont  les  deux  premiers  volumes  ont  déjà  paru,  M.  de  Beaucourt  ré- 
pète à,  peu  près  ce  qu'il  a  dit  de  Richcmont  dans  la  Revue  des  ques- 
tions historiques.  A  côté  d'appréciations  fort  justes,  il  en  a  d'autres 
qui  semblent  bien  sévères.  En  somme,  M.  de  Beaucourt  aime  mieux 
réserver  pour  Charles  VII  l'indulgence  qu'il  refuse  au  connétable  (voy. 
de  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VH,  t.  II,  p.  73-76,  82,  86,  103-lOi, 
Ho,  136,  142-143,  lo3,  156,  169,  etc.,  660). 

M.  Wallon,  dans  son  Histoire  de  Jeanne  d'Arc,  se  montre  presque 
aussi  sévère  que  M.  du  Fresne  de  Beaucourt.  Après  avoir  constaté  que 
l'avènement  de  Richcmont  aux  affaires  et  l'éloignement  des  Arma- 
gnacs pouvaient  avoir  de  très  grands  résultats,  que  «  cette  petite 
révolution  de  palais  pouvait  tout  changer  dans  la  France  »,  il  ajoute 
que  le  nouveau  connétable,  «  fier  du  concours  qui  se  faisait  autour 
de  lui,  ne  gardait  pas  de  mesure  et  se  rendait  odieux  par  son  despo- 
tisme. Trop  rude  pour  mener  le  jeune  roi  par  lui-même,  il  avait  ima- 
giné de  le  conduire  par  des  favoris En  somme,  l'œuvre  de  Riche- 
mont  se  réduisit  à  faire  tuer  deux  de  ses  favoris  et  à  se  faire  chasser 
par  le  troisième  (La  Trémoille)  »  (II.  Wallon,  Jeanne  d'Aix^  3' édition, 
in-12,  1873,  t.  I,  p.  3o,  37,  38).  Ce  jugement  sommaire  ne  s'applique, 
il  est  vrai,  qu'aux  débuis  de  Richcmont;  toutefois,  il  ne  contribue 
guère  à  donner  de  lui  une  idée  bien  favorable. 

Tout  autres  sont  les  appréciations  de  M.  Guizot,  dans  son  Histoire 
de  France.  Pour  lui,  Richemont  est  un  homme  de  guerre  éminent  et 
aussi  un  homme  de  gouvernement,  a  Par  un  privilège  assez  rare,  il 
était,  je  crois,  dit  M.  Guizot,  supérieur  au  renom  qui  est  resté  de  lui 


476  APPENDICES 

dans  notre  histoire.  »  Le  célèbre  historien  réèume  son  opinion  par 
ces  mots  caractéristiques  :  «  Après  Jeanne  d'Arc,  le  connétable  de 
Ricbemont  fut  le  plus  efficace  et  le  plus  glorieux  hbérateur  de  la 
France  et  du  roi  »  (Guizot,  Histoire  de  France,  t.  If,  p.  334,  335,  356, 
357). 

Il  serait  facile  autant  que  superflu  de  pousser  plus  loin  les  exemples 
et  les  citations,  pour  montrer  la  diversité  des  jugements  portés  sur 
Richemont.  M.  P.  Clément,  dans  son  ouvrage  sur  Jacques  Cœur  (p.  50), 
M.  A.  Dupuy,  dans  son  Histoire  de  la  réunion  de  la  Bretagne  à  la 
France  (t.  I,  p.  21),  apprécient  hautement  les  services  de  Richemont. 
D'autres  écrivains,  MM.  A.  Mazas  \  A.  Guyot-Jomard  ^,  Bélisaire 
Ledain  *,  font  le  plus  grand  éloge  du  connétable.  M.  H.  A.  Briquet  * 
pousse  l'admiration  et  l'enthousiasme  jusqu'à  l'appeler  un  homme 
de  génie,  un  héros,  le  plus  grand  homme  de  son  siècle,  le  sauveur  de 
la  France.  On  voit  qu'il  y  a  loin  de  ces  louanges  chaleureuses  aux 
accusations  du  Bourgeois  de  Paris  et  qu'il  n'est  pas  inutile  de  cher- 
cher, entre  ces  opinions  si  différentes,  où  se  peut  trouver  la  vérité. 


III 

LES   DUCS   D'ORLÉANS   ET   DE   BOURGOGNE    SE   DISPUTENT   LA   TUTELLE 
DE  JEAN  Y,  DUC    DE  BRETAGNE  (1399-1402)  [voy.  cl-deSSUS,  p.  3j. 

Le  duc  d'Orléans  s'était  allié  avec  Olivier  de  Clisson.  Le  18  octo- 
bre 1397,  Clisson  avait  promis  son  aUiance  à  Louis  d'Orléans,  et  celui- 
ci  avait  promis  son  secours  à  Clisson  le  28  octobre  suivant  (K  57, 
n°  92;  D.  Dobineau,  II,  col.  870-871).  Le  duc  de  Bourgogne  était 
ennemi  de  Clisson  et  de  L.  d'Orléans.  Au  mois  d'août  1400,  Charles  VI 
écrivit  à  la  duchesse  de  Bretagne,  pour  la  prier  de  confier  le  gouver- 
nement de  son  duché  au  sire  de  Clisson,  en  qui  seul  il  avait  con- 
fiance (Lettres  du  23  août  [1400?],  sans  date  d'année;  Archives  de  la 
Loire-Inf.,  cass.  38,  E,  104). 

Quand  le  duc  d'Orléans  vint  à  Pontorson,  il  réclama  la  tutelle  des 
enfants  de  Jean  IV,  au  nom  du  roi  Charles  VI,  beau-père  de  Jean  V; 
mais  on  craignit  qu'il  ne  voulût  profiter  de  cette  occasion  pour  aider 
les  Penthièvre  à  s'emparer  du  duché.  Les  Etats  de  Bretagne  lui  préfé- 
raient, à  cause  de  cela,  le  duc  de  Bourgogne,  qui  alors  était  ennemi 
de  Clisson  et  des  Penthièvre  (Froissart,  Uvre  IV,  p.  366;  Le  Baud, 

1.  Vies  des  grands  capitaines  français  du  moyen  âge,  par  Alexandre 
Mazas,  LecofTre,  1875,  4°  édition,  t.  VI,  in-12. 

2.  Arthur  de  Bretagne,  étude  biographique,  par  Al.  Guyot-Jomard  ;  Vannes, 
d877,  in-S". 

3.  Histoire  de  la  ville  de  Parthenay,  par  Bélisaire  Ledain,  Paris,  A.  Du- 
rand, 1838. 

4.  Histoire  de  Niort,  par  H. -A.  Briquet,  Niort,  1832,  2  vol.  in-8»,  t.  I, 
p.  100,  106,  118. 


APPENDICES  477 

432-433;  d'Argentré,  703).  Ils  promirent  seulement  au  duc  d'Or- 
léans d'envoyer  le  jeune  duc  de  Bretagne  rendre  hommage  au  roi, 
quand  il  aurait  l'âge.  Ils  donnèrent  d'abord  la  tutelle  à  Jeanne  de  Na- 
varre (1400);  puis,  quand  elle  voulut  épouser  le  roi  Henri  IV  de  Lan- 
castre  (1402),  ils  appelèrent  le  duc  de  Bourgogne,  dans  la  crainte  que 
les  fils  de  Jean  IV  ne  fussent  emmenés  en  Angleterre.  Arrivé  le  l^'  oc- 
octobre  1402  à  Nantes,  Philippe  le  Hardi  traita,  le  19,  avec  Jeanne  de 
Navarre.  Il  fut  convenu  qu'elle  emmènerait  deux  de  ses  filles  et  que 
la  troisième,  mariée  au  fils  du  comte  d'Alençon,  resterait  en  France, 
auprès  de  son  mari.  Plusieurs  seigneurs  n'approuvaient  pas  ce  traité. 
Charles  VI  écrivit  au  vicomte  de  Rohan,  pour  lui  ordonner  de  recon- 
naître le  duc  de  Bourgogne  comme  régent  du  duché  de  Bretagne 
(l""  novembre  1402).  Philippe  le  Hardi  et  ses  fils  conclurent  un  traité 
d'alliance  avec  Jeanne  de  Navarre  et  ses  fils,  le  18  novembre;  il  mit 
garnison,  de  parle  roi,  dans  plusieurs  places  fortes,  reçut  le  serment 
des  officiers  du  duché,  puis  il  partit  pour  Paris  (Relig.  de  Saint- 
Denis,  111,  41-42;  Monstrelet,  I,  35;  Le  Baud,  437-438;  D.  Lobineau,  H, 
col.  808,  877-880;  Arch.  de  la  Loire-lnf.,  cass.  75,  E,  177;  Clairam- 
bault,  t.  643,  f»  126,  t.  107,  fo  8373,  t.  29,  f  2113;  D.  Plancher,  If, 
Preuves,  cxx). 


IV 

LE   COMTÉ    DE    RICHEMONT    (vOJ.  ci-deSSUS,  p.  4,  7). 

Le  comté  de  Richemont  (ou,  mieux,  Richmond),  dans  le  Yorkshire, 
fut  donné,  en  1067,  par  Guillaume  le  Bâtard  à  un  fils  d'Eudon,  ou 
Odo,  comte  de  Penthièvre,  Alain  Fergant,  qui  l'avait  secondé  vaillam- 
ment dans  la  conquête  de  FAngleterre,  et  non,  comme  le  disent  Lin- 
gard  et  d'Argentré,  à  Alain  Fergant,  qui  devint  comte  de  Bretagne 
en  1084  (Archœologia,  VI,  310;  Domesday  book,  1872,  in-f",  p.  xxiii 
[part  relating  to  Yorkshire];  d'Argentré,  p.  224-225;  Freeman,  Jïts- 
tory  of  the  Norman  conquest  of  England,  Oxford,  1876,  in-S»,  t.  III, 
p.  231,  note  3,  p.  313  et  note  3,  t.  IV,  p.  296;  D.  Morice,  I,  76 
D.  Taillandier,  II;  Avertissement,  p.  viii-x;  D.  Lobineau,  1,  98).  Ce  vaste 
et  riche  domaine  comprenait  un  grand  nombre  de  manoirs.  Alain  fit 
bâtir  le  château  dont  on  voit  encore  les  ruines  grandioses  à  Rich- 
mond, petite  ville  du  Yorkshire,  sur  la  Swale,  affluent  de  l'Ouse.  Le 
comté  de  Richemont  devint  ensuite  l'héritage  des  ducs  de  Bretagne. 
qui  ne  cessèrent  de  le  revendiquer  et  d'en  porter  le  titre,  même  quand 
il  passa  momentanément,  par  confiscation  ou  par  don  royal,  à  d'au- 
tres possesseurs.  C'est  ainsi  qu'après  avoir  appartenu  à  divers  princes 
ouseigneurs  anglais,  notamment  au  duc  de  Lancastre,  fils  d'Edouard III, 
en  1360,  à  Raoul  Nevil,  comte  de  Westmoreland,  en  1399,  il  fut  donné, 
en  1414,  par  Henri  V,  à  son  frère,  le  duc  de  Bedford,  qui  porta  le  titre 
de  comte  de  Richemont  (JJ  173,  f»  321  v). 


478  APPENDICES 

Le  duc  de  Bretagne  Jean  V  essaya  plusieurs  fois  d'obtenir  la  restitu- 
tion de  ce  fief,  mais  rien  ne  prouve  qu'il  y  réussit.  11  est  même  dou- 
teux que  son  frère  Artur  soit  allé  en  Angleterre  en  1404  et  qu'il  ait 
été  mis  en  possession  du  comté  de  Hichemont  (voir  ci-dessus,  p.  7). 
L'unique  témoignage  du  Religieux  de  Saint-Denis  (t.  III,  p.  131),  quoique 
accepté  par  D.  Morice  (I,  434),  n'est  pas  ici  une  preuve  suffisante,  d'au- 
tant plus  que  ce  dernier  auteur  se  trompe,  en  disant,  au  même  en- 
droit, que  Charles  VI  rendit  alors  Saint-Malo  au  duc  de  Bretagne.  En 
octobre  1409,  .Jean  V  envoyait  encore  Jean  de  Châteaugiron  en  Angle- 
terre, demander  la  restitution  du  comté  de  Ricbemont  (D.  Lobineau, 
II,  col.  833-834).  Aucun  document  authentique  n'autorise  à  croire  que 
le  comté  de  Ricbemont  fut  repris  en  1404,  à  Raoul  Nevil,  qui  devait 
le  laisser  au  duc  de  Bedford.  Il  semble  donc  certain  qu'Artur  n'eût 
jamais  la  jouissance  de  ce  fief,  bien  que,  depuis  son  enfance,  il  ait 
toujours  été  qualifié  comte  de  Ricbemont,  par  les  Anglais  eux-mêmes. 

Sur  les  possesseurs  successifs  du  comté  de  Ricbemont,  voir  :  Rymer, 
Fœdem,  t.  I,  !>•«  partie,  p.  145;  2"  partie,  p.  52,  63,  67,  104,  109,  218; 
4e  partie,  p.  119;  t.  III,  2"  partie,  p.  198,  201-204;  t.  IV,  2"  partie, 
p.  47,  195;  Proceedings  and  ordinances,  t.  I,  43-47,  64,  91  ;  t.  II,  347; 
Rolls  ofParllament,  t.  III,  p.  279,  427;  t.  IV,  p.  40-42,  460-463;  Oelpit, 
Documents  français  qui  sont  en  Angleterre,  p.  211,  p.  clxiv;  D.  Morice, 
Preuves  de  rHist.  de  Bretagne,  I,  col.  1540,  t.  II,  col.  681-682,  691  ; 
D.  Lobineau,  Hist.  de  Bretagne,  II,  col.  797;  H.  Wallon,  Richard  II, 
t.  II,  p.  125,337,  412;  Dugdale,  The  baronage  ofEnglanU,  London,  1675, 
in-fo,  t.  1,  p.  46,  52,  298.  H  y  a  aux  archives  de  la  Loire-Inférieure 
(cass.  43,  E,  116)  un  très  curieux  registre  de  40  feuillets,  en  parche- 
min, qui  indique  les  possessions  des  ducs  de  Bretagne  en  Angleterre, 
et  leurs  principaux  actes,  comme  comtes  de  Ricbemont,  depuis  1066 
jusqu'en  1398. 


MARIAGE    DE   JEANNE    DE   NAVARRE,    MÈRE    DE    RICUEMONT,    AVEC 
HENRI   lY   DE   LANCASTRE,  ROI   d'aNGLETERRE   (1402) 

[voy.   ci -dessus,  p.  4]. 

D'après  Froissart,  le  comte  de  Derby,  fils  du  duc  de  Lancastre  et 
petit-fils  d'Edouard  III,  alla  en  Bretagne  demander  des  secours  à 
Jean  IV,  son  oncle  maternel  i,  quand  il  voulut  renverser  Richard  II. 
Jean  IV,  qui  avait  toujours  aimé  le  duc  de  Lancastre  ^  accueillit  bien 
son  fils;  il  lui  donna  des  vaisseaux,  et  c'est  du  port  de  Vannes  que 

1.  Jean  IV  avait  épousé,  en  premières  noces,  Marie,  fille  d'Edouard  III  et 
sœur  du  duc  de  Lancastre. 

2.  En  1395,  traité  d'alliance  entre  le  duc  de  Bretagne  et  le  duc  de  Lan- 
castre. Le  fils  aîné  du  duc  de  Lancastre,  le  comte  de  Derby,  celui  qui  fut 


APPENDICES  479 

partit  Henri  de  Lancastre  pour  passer  en  Angleterre.  P.  de  Craon 
l'accompagnait,  avec  des  Bretons.  Le  comte  de  Derby  put  donc  voir 
en  Bretagne  Jeanne  de  Navarre,  qu'il  devait  épouser  un  peu  plus  tard. 
M.  H.  Wallon  préfère,  il  est  vrai,  à  la  version  de  Froissart  celle  du 
Religieux  de  Saint-Denis,  qui  fait  partir  de  Boulogne  le  comte  de 
Derb}-;  mais  il  reconnaît  que  le  récit  de  Froissart  est  beaucoup  plus 
circonstancié  que  celui  du  Religieux  *.  En  effet,  Froissart  fournit  des 
détails  si  complets  et  si  précis,  qu'il  est  difficile  de  les  révoquer  en 
doute.  Ne  pourrait-on  pas  ajouter  que  le  mariage  de  Henri  IV  avec  la 
veuve  de  Jean  IV  donne  plus  de  vraisemblance  encore  au  récit  de 
Froissart?  Une  lettre  écrite  à  Henri  IV  par  la  duchesse  de  Bretagne, 
vers  1400,  prouve  qu'elle  entretenait  avec  lui  des  relations  affectueuses  2. 
Elle  lui  recommande  Jeanne  de  Bavalen,  qu'elle  envoie  auprès  de  lui, 
en  Angleterre.  Il  est  vraisemblable  que  cette  mission  était  relative  au 
mariage  de  la  duchesse  avec  Henri  IV,  car  elle  chargea  ensuite  son 
procureur  général,  Antoine  Ricze,  de  confirmer  les  promesses  qu'elle 
avait  déjà  faites  au  roi  d'Angleterre.  Ce  fut  ce  même  Ant.  Ricze  qui 
représenta  Jeanne  de  Navarre  quand  elle  épousa,  par  procuration, 
Henri  IV,  le  23  avril  1402  \ 


VI 

PRÉSENT  FAIT  A  ARTUK  DE  BRETAGNE  PAR  JEANNE  DE  FRANCE, 
DUCHESSE  DE  BRETAGNE,  SA  BELLE-SOEUR  (1408,  22  déc.) 

[voy.  ci-dessus,  p.  13]. 

Jehanne,  fille  du  roi  de  France,  duchesse  de  Bretaigne,  contesse  de 
Montfort  et  de  Richemont,  à  nostre  bien  amé  escuier  Jehan  Periou, 
nostre  trésorier  et  garde  robier,  salut.  Nous  vous  mandons  et  com- 
mandons que  vous  achetez,  à  juste  et  raisonnable  pris,  quatorze  aulnes 
et  demi-quart  d'aulne  de  bon  escarlate  et  seix  cens  soixante  neuf  de 
bonnes  martres,  et  en  faictes  faire  et  fourrer  trois  houppelandes  et 
trois  chapperons  doublés  de  ladicte  escarlate,  que  nous  avons  donné  et 
donnons,  de  nostre  don,  à  beaux-frères  Artur,  Gilles  et  Richart.  Et 
gardez  que  en  ce  n'aie  aucun  deffault.  Et  ces  présentes,  avecques  les 
relations  des  tailleur  et  pelletier  de  Monseigneur  de  ce  que  desdiz  drap 

plus   tard   Henri   IV,  devai.  même  épouser  Marie   de   Bretagne,  fille    de 
Jean  IV  iD.  Lobineau,  t.  II,  col.  791-793). 

d.  Froissart,  livre  IV,  320,  342,  344,  366;  Relig.  de  Saint-Denis,  II,  p.  707; 
H.  Wallon,  Richard  If,  t.  II,  237,  471  ;  voir  aussi  la  Chronique  de  Bre- 
tagne de  Jean  de  Saint-Paul,  publiée  par  A.  de  La  Bordcrie,  Nantes,  1881, 
in-8",  p.  50  et  125,  note  7. 

2.  F.-G.  Hingeston,  Royal  and  historical  letters  during  the  reign  of  Henri  IV, 
London,  1860,  in-8»,  t.  I,  p.  19. 

3.  D.  Lobineau,  II,  col.  874-876;  Monstrelet,  I,  35,  note  1;  Ryraer,  IV, 
1"  partie,  36.  v  . 


480  APPENDICES 

et  panne  sera  entré  èsdites  houppelandes  et  chapperons,  et  des  gou- 
verneurs desdiz  beaux-frères  de  les  avoir  eues  et  receues,  o  les  quic- 
tances  à  ce  appartenantes,  vous  vaudront  de  ce  que,  pour  lesdiz  drap  et 
panne  raisonnablement  aurez  paie,  acquit  et  des  charge,  quant  mestier 
en  aures;  en  mandant  aux  gens  des  comptes  de  mondit  seigneur  ce 
vous  allouer  et  mectre  en  descharge,  quant  vous  compterez,  avecques 
ce  que  raisonnablement  paie  aui'ez,  pour  la  façon  desdites  houppe- 
landes, chapperons,  et  les  fourrer,  que  vous  mandons  semblahlement 
paier.  Donné  à  Nantes,  le  xxvii®  jour  de  décembre,  l'an  mil  quatre 
cens  et  huit. 

Par  la  duchesse  et  de  son  commandement  : 

G.   COGLAIS. 

(Archives  de  la  Loire-Inférieure,  E,  204.) 

En  1409,  le  duc  de  Berry  donne  à  Gilles  de  Bretagne  «  un  petit  ours 
d'or,  esmaillié  de  blanc,  garni  d'un  grant  rubis  en  la  teste,  d'un  mi- 
rouer  de  saphir  dedens  la  pâte  et  de  une  perle  de  cinq  caraz,  pendant 
au  col,  lequel  ours  mondit  seigneur  (le  duc  de  Berry)  donna  lors  à 
monseigneur  Gilles  de  Bretaigne  «  (KK  250,  f»  46). 

Parmi  les  achats  faits  pour  le  duc  de  Berry,  depuis  le  28  décem- 
bre 1409  jusqu'au  28  mars  1410,  on  trouve  la  mention  suivante  : 
«  Pour  deux  pièces  et  demie  de  veluyau  figuré  très  fin,  de  plusieurs 
coleurs,  sur  satin  brochié  d'or  de  Chippre,  dont  semblahlement 
(c.-à-d.  comme  pour  le  comte  d'Eu,  mentionné  dans  ce  même  docu- 
ment) fut  faicte  une  houppelande  pour  monseigneur  le  conte  de  Ri- 
chemont,  son  nepveu  (c.-à-d.  neveu  du  duc  de  Berry),  au  pris  de  sept 
vingt  escus  la  pièce;  valent  trois  cens  escus  »  (KK  250,  f»  50). 


YII 

QUITTANCE   d'a.    DE    CHATEAUGIRON   (1410,    27   Sept.)    [p.    18], 

Je,  Hermel  de  Chastelgiron,  seigneur  de  Saint-Jehan,  conseiller  et 
chambellan  de  monseigneur  le  duc  de  Bretaigne,  confesse  avoir  eu  et 
receu  de  haulz  et  puissants  princes,  messeigneurs  les  ducz  de  Berry, 
d'Orléans  et  de  Bourbon  et  monseigneur  le  conte  d'Alençon,  par  les 
mains  de  Yvonet  de  la  Boissière,  Amignet,  P.  Leysne  et  Jehan  de 
Bellenoe,  escuiers  et  serviteurs  de  mesdiz  seigneurs,  la  somme  de 
quatre  cens  escuz  d'or,  lesquels  mesdiz  seigneurs  m'ont  donnés, 
pour  moy  ayder  à  soustenir  mon  estât,  pour  aller  présentement  ou 
service  du  Roy,  es  parties  de  France,  en  la  compaignie  desdiz  sei- 
gneurs et  de  monseigneur  le  conte  de  Richement;  de  laquelle  somme 
de  quatre  cens  escuz  je  suis  content  et  en  quicte  mesdiz  seigneurs, 
lesdiz  escuiers  et  tous  autres.  En  tesmoing  de  ce,  j'ay  scellé  ceste 
présente  cédule  de  mon  propre  scel,  le  xxvn^  jour  de  septembre, 
l'an  mil  quatre  cens  dix. 

Scellé.  Non  signé. 

(Pièces  originales,  t.  699,  n»  162211.) 


APPENDICES  481 


YIII 


QUITTANCE  DE  NICOLAS  LE   DUR  (1410,    12   nOV.) 

[voy.  ci-dessus,  p.  is.] 

Je,  Nicole  Le  Dur,  conseiller  de  monseigneur  le  duc  d'Orléans,  con- 
fesse avoir  receu  de  maistre  Pierre  Sauvage,  secrétaire  et  garde  des 
coffres  de  mondit  seigneur,  la  somme  de  lxxxiiii  livres  tournois,  pour  le 
paiement  d'un  voyaige  par  moi  fait,  de  Vicestre  en  Bretaigne,  devers 
monseigneur  de  Richemont,  pour  haster  la  venue  de  luy  et  de  ses 
gens,  et  aussy  pour  certaines  causes  que  je  fu  encore  devers  le  duc 
de  Bretaigne;  ouquel  voyaige  j'affirme,  par  serment,  avoir  vacqué 
pendant  vingt-huict  jours  entiers,  depuis  le  xiv°  jour  d'octobre  jus- 
ques  au  x"  jour  de  novembre,  que  je  retournay  à  Estampes,  devers 
mondit  seigneur,  au  prix  de  m  frans  par  jour.  De  laquelle  somme  de 
Lxxxuii  1. 1.  je  quicte  le  dit  maistre  Pierre  et  tous  autres.  Tesmoing  mon 
saing  manuel  cy  mis,  le  xn»  jour  de  novembre,  l'an  mil  quatre  cens  dix. 

N.  Le  Ddr. 
(Pièces  orig.,  t.  1037,  n"  23861"). 

Le  même  Nie.  Le  Dur  fut  envoyé  par  le  duc  d'Orléans  en  Bretagne, 
vers  le  duc  Jean  V,  à  la  fin  de  janvier  1411  {Ibid.,  n°  23861"). 


IX 
PAYEMENT  A   UN   HÉRAUT  DE  RICHEMONT    (1412,   23   déc.) 

[voy.  ci-dessus,  p.  25.] 

Charles,  duc  d'Orléans  et  de  Valois,  conte  de  Blois  et  de  Beaumont, 
et  seigneur  de  Coucy,  à  nostre  amé  et  féal  conseillier  et  cbambellan. 
messire  François  de  Lospital,  chevalier,  seigneur  de  Soisy,  salut  et 
dileccion.  Nous  voulons  et  vous  mandons  que  la  somme  de  vint  escus 
d'or,  laquelle  nous,  par  nostre  amé  et  féal  trésorier  général,  Pierre 
Renier,  avons  fait  paier  et  délivrer,  des  deniers  de  nos  finances,  dès  le 
mois  d'aoust  derrenièreraent  passé,  c'est  assavoir  aux  variez  de  porte 
de  l'ostel  de  monseigneur  le  Roy  estant  à  Aucerre  dix  escuz,  et  au 
héraut  de  nostre  très  chier  et  tri'-s  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont, 
qui,  oudit  lieu  d'Aucerre,  nous  apporta  lettres  de  par  lui,  dix 
escuz,  etc. 

Donné  à  Blois  le  xxiii»  jour  de  décembre,  l'an  de  grâce  mccccxii. 
.    Par  monseigneur  le  Duc,  en  son  conseil,  ouquel  messieurs  de  Saint- 
Chartier,  Eltor  de  Pontbriant  et  autres  estoient. 

S.\UVAGE. 

(Pièces  orig.,  t.  2156,  n»  484.) 

RiCHEUONT,  31 


482  APPENDICES 

; 

X 
PAYEMENT  A  RicoEMONT  (1414,  26  nov.)  [voy.  ci-dcssus,  p.  3o.] 

Dans  un  mandement  des  généraux  conseillers  pour  le  fait  des  aides 
ordonnés  pour  la  guerre,  on  lit  que  Jean  Blonde!,  commis  à  la  recette 
des  aides  à  Caen,  a  envoyé  à  Paris  la  somme  de  1212  1.  10  s.  t.,  qui 

a  été   distribuée  ainsi   qu'il    suit   : 200  1.   t.,   par  une  décharge 

«  donnée  le  vingt-sixiesme  jour  de  novembre  mcccgxiv,  par  Hémon 
Raguier, trésorier  des  guerres  du  Roy  nostre  seigneur,  pour  convertir 
ou  fait  de  son  office,  ou  paiement  de  Testât  de  monseigneur  de  Riche- 
mont,  ordonné  à  servir  et  accompaingner  monseigneur  de  Guienne,à 
certaine  charge  de  gens  d'armes  et  de  trait,  pour  un  mois,  commen- 
çant au  premier  jour  d'octobre  derrenier  passé. 

Donné  à  Paris,  le  iv"  jour  de  mars  mcccgxiv,  avant  Pasques  les  grans. 
(Fr.  26040,  n"  4923.) 


XI 
RICBEMONT    REÇOIT   LE    GOUVERNEMENT    DU   DUCHÉ   DE   NEMOURS 

(1414,  29  décembre)  [voy.  ci-dessus,  p.  37.] 

Charles  TU,  roi  de  Navarre,  qui  succéda,  en  1387,  à  son  père 
Charles  II,  dit  le  Mauvais,  conclut  avec  Charles  VI,  àParis,  le  9  juin  1404, 
un  traité,  par  lequel  il  renonçait  à  tous  les  droits  qu'il  pouvait  tenir 
de  ses  ancêtres  sur  la  Champagne  et  sur  divers  domaines  de  Nor- 
mandie (Cherbourg,  Valognes,  Avranches,  Gavray,  Mantes,  Meu- 
lan,  etc.),  en  échange  du  duché  de  Nemours  (Nogent-sur-Seine, 
Pont-sur-Seine,  Bray-sur-Seine,  Saint-Florentin,  Pont-sur-Yonne,  Cou- 
lommiers-en-Brie,  Nemours,  etc.)  (X'*  8602,  f°  ix^n  ix'"'ni;  P  2530, 
fo*  277  vo,  282  v«,  290,  372  v»;  P  2297,  f"'  571-606,  615-625,  893,919; 
Anselme,  I,  287;  Jouvenel  des  Ursins,  161;  Religieux  de  Saint-Denis, 
III,  151  et  suiv.;  D.  J.  Moret,  continué  par  D.  Fr.  de  Aleson,  An- 
nales del  Reyno  de  Navarra,  Pamplona,  1746,  t.  IV,  p.  291,  305,  307, 
311  ;  Fonds  Godefroy  à  la  bibliothèque  de  l'Institut,  t.  164,  f°  234-235, 
n»  15  et  suiv.).  Ces  domaines  devaient  produire  12  000  livres  de  ren- 
tes, mais,  comme  leur  revenu  était  inférieur  à  cette  somme,  le  roi  de 
France  ajouta  encore  au  duché  les  terres  de  Courtenay,  de  Chantecoq 
et  plusieurs  autres,  le  10  décembre  .1408  (P  2297,  fo«  919-929,  1067- 
1807).  Pierre  de  Navarre,  comte  de  Mortain,  eut,  pendant  plusieurs 
années,  le  gouvernement  du  duché  de  Nemours  et  devait  recevoir 
2000  1.  t.  par  an,  pour  ces  fonctions,  mais  il  fut  mal  payé  par  son 


APPENDICES  483 

frère,  le  roi  de  Navarre,  qui  avait  d'ailleurs  d'autres  officiers  et  créan- 
ciers aussi  peu  favorisés.  Quand  Charles  VI  «  mit  le  duché  de  Nemours 
en  sa  main  »,  la  moitié  des  revenus  fut  affectée  au  payement  des 
officiers  et  des  créanciers  du  roi  de  Navarre  (X*»  4790,  f"»  62,  63,  68, 
71  v°,  72  v«,  83,  135  v»,  27o  v%  X'a  8602,  f°s  234-240;  JJ  163,  f»^  1-4, 
39  V;  X»»  4792,  f«228). 

Richemont  eut  sans  doute  les  mêmes  appointements  que  son  oncle 
P.  de  Navarre.  En  tout  cas,  le  roi  de  France  lui  donna  «  puissance  de 
recevoir  et  prendre  tous  les  prouffiz  »  du  grenier  à  sel  de  Nemours, 
«  pour  certain  argent  qu'il  luy  devoit  (voy.  ci-dessus,  p.  37,  note  2) 
et  aussi  de  toutes  les  chambres  et  greniers  à  sel  du  duché  de  Nemours, 
excepté  aucuns,  dont  prend  les  prouffiz  Monseigneur  de  Bavière,  et  a 
voulu  le  Roy  que,  à  la  nominacion  de  mondit  seigneur  de  Richemont, 
les  officiers  d'illec  fussent  commis.  »  Il  est  certain  que  Richemont 
usa  de  ce  droit  [Z^'  6,  f°  18).  Ces  détails  ne  sont  mentionnés  nulle  part 
dans  les  historiens,  pas  même  dans  le  continuateur  de  D.  J.  Moret. 


Commissio  Comiti  Richimontis  pro  regendo  terras  Régis  Navarre 
manu  Régis  positas  (1414,  29  décembre). 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roi  de  France,  à  tous  ceuls  qui  ces 
présentes  lettres  verront,  salut. 

Comme  nagaires,  pour  certaines  causes,  nous  ayons  fait  prendre  et 
mectre  réalement  en  nostre  main  le  duchié  de  Nemoux,  avec  toutes 
les  villes,  chasteaulx,  seignouries,  terres,  revenues  et  possessions 
d'icelui  duchié  et  autres,  que  baillées  avions  à  nostre  très  cliier  cousin, 
le  roy  de  Navarre  et  dont  il  estoit  détenteur,  et  ayons  voulu  que  elles 
soient  doresenavant  gouvernées  de  par  nous,  jusques  à  ce  que  autre- 
ment en  ayons  ordené,  savoir  faisons  que  nous,  voulans  pourveoir 
au  gouvernement  desdiz  duchié  et  terres,  confians  à  plain  des  très 
grans  sens,  preudommie  et  bon  gouvernement  de  nostre  très  chier  et 
très  amé  cousin,  Artus,  conte  de  Richemont,  nepveu  de  nostre  dit 
cousin  de  Navarre,  et  espérans  que,  par  lui,  pour  ycelle  prouchaineté 
dont  il  attient  à  nostre  dit  cousin  de  Navarre,  il  aura  et  devra  avoir 
mieulx  Vueil  et  Vaffeccion  oudit  gouvernement  que  plusieurs  autres, 
et  aussi  pour  certaines  autres  causes  et  considéracions  à  ce  nous  mou- 
vans,  ycelui  nostre  cousin  de  Richemont  avons  ordené,  commis  et 
establi,  ordenons,  commectons  et  estahlissons,  par  la  teneur  de  ces 
présentes,  gouverneur,  pour  nous  et  soubz  nostre  main,  desdiz  duchié 
et  terres  et  appartenances  d'icelles,  tant  comme  il  nous  plaira,  et  à 
lui  avons,  pour  ce,  donné  et  donnons,  par  ces  mesmes  présentes,  plain 
povoir  et  auctorité  de  ordener,  establir  et  mectre,  de  par  nous,  par 
lui,  ses  lieutenans,  commis  et  députez  en  ceste  partie,  touteffoiz  que 
bon  lui  semblera  et  mestiers  {sic)  sera  et  tant  qu'il  nous  plaira,  en 
ycelles  duchié  et  terres,  bailliz,  capitaines,  prévostz  et  tous  autres 
officiers  quelconques,  souffisans  et  ydoines,  tant  pour  le  gouverne- 
ment de  la  justice  et  des  finances,  de  la  revenue  d  demaine  desdiz 
duchié  et  terres,  comme  pour  la  garde,  seurté  et  défense  des  villes, 


484  APPENDICES 

chasteaulx,  forteresses  et  autres  lieux  qui  y  sont;  de  ester  ceulx  qui 
ne  seroient  proufitables  ne  convenables;  de  y  mettre,  ordener  et  es- 
tablir  autres  souffisans,  telz  et  touteffoiz  que  bon  lui  semblera  et 
mestiers  sera  ;  de  bailler,  sur  ce,  à  yceulx  officiers  ses  lettres,  que  nous 
confermerons  par  les  nostres;  de  faire  faire  teles  et  tant  de  répara- 
cions,  refeccions  et  amendemens  es  chasteaulx,  maisons,  édifices, 
fours^  moulins,  estangs,  et  autres  lieux  desdiz  duchié  et  terres  et  aussi 
de  fortificacions,  emparemens,  garnisons  de  gens  d'armes  et  de  trait 
de  artillerie,  de  abillemens  de  guerre  et  d'autres  choses  quelzconques 
que  il  lui  semblera  estre  expédient  à  faire  en  toutes  les  villes,  chas- 
teaulx, forteresses  et  autres  lieux  desdiz  duchié  et  terres;  de  ordener 
et  taxer  aux  officiers  dessusdiz  gaiges,  salaires  et  voyages,  telz  qu'il 
appartendra  et  yceulx  leur  faire  paier  des  revenues  devant  dictes,  et 
aussi  de  y  faire  paier  touz  autres  fraiz  quelzconques,  qui  sont  à  paier 
pour  le  fait  des  dessusdictes  réparacions,  refeccions,  amendemens, 
fortificacions,  emparemens,  garnisons,  et  abillemens  et  autrement  à 
ceulx  qu'il  appartendra,  par  les  receveurs  desdiz  duchié  et  terres,  et 
es  comptes  desquelz  nous  voulons  ce  que  par  eulx  aura  esté  ainsi  paie, 
par  les  lectres  et  mandemens  de  nostre  dit  cousin  de  Richement  et  les 
quictances  de  ceulx  à  qui  ledit  paiement  aura  esté  fait,  estre  passé  et 
alloué  et  de  leur  recepte  rabatu  par  nos  amez  et  feaulz  gens  de  nos 
comptes,  à  Paris  et  partout  ailleurs,  ou  mestier  sera;  de  veoir  les  estaz 
des  dessusdiz  receveurs  touteffoiz  que  bon  lui  semblera  et  générale- 
ment de  faire,  par  nostre  dit  cousin  de  Richement,  par  lui,  sesdiz 
lieutenans,  commis  et  députez,  toutes  autres  choses  quelzconques  qu'il 
verra  estre  à  faire  èsdiz  duchié  et  terres  pour  le  bien  et  bon  gouver- 
nement d'icelles  et  que  (sic)  eudit  office  de  gouverneur  peuvent  et 
doivent  compéter  et  appartenir.  Si,  donnons  en  mandement  à  nez 
amez  et  feaulx  gens  de  nostre  parlement,  gens  de  nosdiz  comptes 
et  trésoriers,  à  Paris,  et  à  tous  nez  autres  justiciers  et  officiers  pré- 
sens et  à  venir,  ou  à  leurs  lieuxtenans  et  à  chacun  d'eulx,  si  comme 
à  lui  appartendra,  que  dudit  office  de  gouverneur  facent,   seuffrent 
et  laissent  nostre  dit  cousin  de  Richement  joir  et  user  paisiblement, 
et  à  lui  et  à  sesdiz  lieuxtenans,  commis  et  députez  obéir  et  entendre 
sur  ce  de  touz  qu'il  appartendra,  en  expédiant,  par  nos  dictes  gens 
des    comptes   et    trésoriers ,    chascun   peur  tant   que   à   lui   devra 
appartenir,  les  lectres  d'icelui  nostre  cousin,  que   il   baillera   teu- 
chans  les    choses  dessusdictes   et  qui  seront  à  expédier   par   eulx, 
et   en   passant   et  allouant  par   nos   dictes   gens    des  comptes,    et 
autres   qu'il  appartendra,    es  comptes   des   devantdiz   receveurs   et 
rabatant  de  leurs  receptes  tout  ce  que  par    eulz  aura  esté  paie, 
que   dit  est,    sans    quelconque    difficulté,    car  ainsi    nous   plaist   et 
voulons   estre  fait,  nonobstant  quelzconques  oppositions  et  appella- 
cions,  ordenances,  mandemens  eu  défenses  et  lectres  surreptices,  im- 
pétrées  ou  à  impétrer,  à  ce  contraires.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avens 
fait  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes.  Donné  à  Paris  le  xxix«  jour 
de    décembre,    l'an  de   grâce  mil   quatre  cens  et  quatorze    et   de 
nostre  règne  le   xxxv'^.   Ainsi  signé,   par  le  Roy,    en  son  conseil, 
où   messeigneurs  les  ducz  de  Guienne,  de  Berry,  d'Orléans  et  de 


APPENDICES  485 

Bourhon,  les  contes  de  Vertuz,  d'Alençon,   de  Eu,  de  La  Marche  et 
de  Vendosme  et  plusieurs  autres  estoient.  ferron. 

Et  au  dessoubz  estoit  escript  :  prestitit  solitum  juramentum  in  ma- 
nibus  Régis,  die  xxiv»  Januarii,  anno  Domini  millesimo  cccco  xim",  me 
présente,  M.  de  La  Teillaye.  Et  au  dos  des  dictes  lettres  estoit  escript  : 
lecta  et  publicata  in  curia,  xviiio  die  februarii  anno  Domini  mille- 
simo CCCCo  XlIIIo.  BAYE  (Xi"  8602  ,  fo  294;  P  2298,  f"^  lH-120; 
P  2531,  f»  8). 


XII 


NOTE   SUR   JEAN   II    LARCHEVÊQUE   ET    SA   SUCCESSION 
(voy.  ci-dessus,  p.  39,  40,  47-49,  113,  190,  220,  451.) 

Jean  II,  fils  de  Guillaume  VII  Larchevêque,  lui  succéda,  en  1401,  et 
hérita  de  ses  grands  domaines.  Il  épousa  Brunissande  de  Périgord, 
fille  aînée  d'Archambaud  VI,  comte  de  Périgord,  et  de  Louise  de 
Matas  [Art  de  vérifier  les  dates,  II,  385;  JJ  169,  f°  113  v»;  Xia  9197, 
f°  163).  Ce  mariage,  que  Jean  Larchevêque  devait  à  la  recommanda- 
tion du  duc  de  Berry  (Xia  4791,  f»  273  v),  ne  lui  procura  pas  tous  les 
avantages  qu'il  en  aurait  pu  recueillir,  car  Archambaud  VI  fut  banni, 
en  1399,  et  ses  biens  confisqués  furent  donnés  à  Louis  d'Orléans.  Jean 
Larchevêque  chercha  d'un  autre  côté  les  ressources  qui  lui  man- 
quaient. Les  dépenses  de  sa  maison  étaient  considérables.  Sa  femme, 
Brunissande,  avait  aussi  un  «  grant  estât  »,  quinze  à  vingt  dames,  ou 
demoiselles  d'honneur,  des  chevaliers,  des  écuyers,  au  moins  quatre- 
vingts  personnes  en  tout  (Xia  4791,  f»'  277  v"  278).  En  1403,  J.  Lar- 
chevêque vendit  ses  domaines,  pour  200  000  écus  d'or  et  sous  réserve 
d'usufruit,  au  duc  de  Berry,  qui  avait  avec  lui  de  fréquentes  relations 
(Bel.  Ledain,  Hist.  de  Parthenay,  p.  203;  KK  234,  f^  43  v»,  101  V, 
106  yo,  etc.).  Ses  sœurs,  Marie  et  Jeanne  de  Parthenay,  attaquèrent 
cette  vente,  qui  portait  atteinte  à  leurs  droits  (Bel.  Ledain,  ihid.).  Leurs 
revendications  donnèrent  lieu  à  d'interminables  procès. 

Dans  son  Histoire  de  Parthenay,  M.  Bel.  Ledain  signale  tout  d'abord, 
en  parlant  de  J.  Larchevêque,  «  la  bonté  naturelle  de  son  caractère  « 
(p.  202),  sa  douceur  (p.  223).  Il  semble  toutefois  que  sa  femme,  Bru- 
nissande, n'eut  guère  à  se  louer  de  cette  bonté  naturelle  et  de  cette 
douceur,  car  elle  se  plaignit  d'être  surveillée,  séquestrée,  maltraitée, 
avec  la  brutalité  la  plus  révoltante,  par  ce  mari  violent  et  jaloux 
(Xi*  4791,  f»  273  v"'-274).  Une  fois,  après  avoir  subi  les  plus  mauvais 
traitements,  elle  se  réfugia  auprès  de  la  reine  de  Sicile  (f°s  277- 
279).  Le  duc  de  Berry,  dont  elle  implora  aussi  la  protection,  intervint 
en  sa  faveur.  Alors  J.  Larchevêque  enferma  Brunissande  au  château 
de  Vouvant  et  la  menaça  même  de  la  tuer,  en  «  appuyant  l'espée 
sur  elle  ».  Ce  drame  conjugal,  dont  les  causes  ne  sont  pas  assez 


486  APPENDICES 

connues  pour  qu'on  le'  puisse  bien  expliquer,  se  compliqua  vraisem- 
blablement d'intrigues  politiques.  En  tout  cas,  J.  Larcbevêque,  après 
avoir  servi  le  duc  de  Berry,  qui  l'avait  nommé  sénécbal  du  Poitou, 
quitta  le  parti  armagnac,  pour  passer  au  parti  bourguiguon.  Après 
la  défaite  de  Jean  sans  Peur,  en  14t4  (voy.  ci-dessus,  p.  34-3K),  lé 
sire  de  Parthenay  fut  traité  en  rebelle  et  puni  par  la  confiscation 
de  ses  biens,  que  le  roi  donna  au  Daupbin,  puis  au  comte  de  Riche- 
mont  (voy.  ci-dessus,  p.  39;  Xia  4799,  f»  93  v»;  X»'  8604,  f°  126). 

On  a  vu  que  Brunissande  de  Périgord  livra  au  comte  de  Richemont, 
«  en  obéissant  au  roi  »,  la  ville  et  le  château  de  Vouvant  (voy.  ci- 
dessus,  p.  40).  Dès  lors,  elle  n'osa  retourner  auprès  de  son  mari,  «  qui 
la  menaçoit  de  la  faire  morir  »,  et  elle  lui  intenta  un  procès  devant  le 
parlement.  Voici,  en  effet,  ce  qu'on  lit  dans  un  des  registres  du  par- 
lement de  Paris  : 

a  Jeudi  15  juillet  IM7.  —  Entre  Mme  Brunissant  de  Pierregort,  dame 
de  Partenay,  d'une  part,  et  le  seigneur  de  Partenay,  d'autre  part. 
Dit  la  dame  qu'elle  est  fille  ainsnée  du  feu  conte  de  Pierregort,  qui 
s'est  bien  gouvernée  tout  son  temps  et  fu  requise  de  plusieurs  grands 
seigneurs  en  mariage  et,  à  la  requeste  de  monseigneur  de  Berry, 
fu  mariée  audit  seigneur  de  Partenay  et  fu  douée  par  son  dit  mary 
de  la  tierce  partie  des  biens  qui  lui  pourroient  escheoir  de  par  père  et 
mère,  de  certaines  manières,  et,  ledit  mariage  parfait,  le  sire  de  Parte- 
nay promena  ladicte  dame  en  plusieurs  places  et  lieux,  et  tenoit  ladicte 
dame  enfermée  où  il  la  traictoit  assez  estrangement,  en  la  faisant  age- 
noiller  et  baisier  la  terre  où  il  marchoit;  et,  après  la  mort  du  père  dudit 
seigneur  de  Partenay,  fu  emmenée  ou  chastel  de  Partenay,  où  elle 
fu  traictée  plus  durement  que  paravant  ;  et,  pour  ce  que  feu  monsei- 
gneur de  Berry  lui  rescripvy  qu'il  la  voulsist  traictier  plus  doulcement, 
il  envoya  ladicte  dame  ou  chastel  de  Vouvant  et  fist  un  edict  que  nul 
n'entrast  oudit  chastel,  pour  faire  guet  ou  autrement,  s'il  n'avoit  qua- 
rante ans  ;  et  envoyoit  gens  devers  elle,  pour  enquérir  de  ce  qu'elle 
disoit  ou  faisoit,  et  ne  vouloit  voir  homme  qui  dist  bien  d'elle,  et 
n'aloit  ne  venoit  devers  elle  que  pour  espier  et  enquérir  de  son  estât; 
et,  pour  mauvaise  (sic)  soupeçon  qu  il  avoit  sans  cause  contre  elle,  lui 
a  appuyé  l'espée  sur  elle,  en  lui  disant  qu'il  la  tueroit,  s"elle  ne  lui 
disoit  plainement  de  son  estât  ce  qu'il  lui  demandoit.  Dit  oullre  que, 
depuis  que  monseigneur  de  Richemont  ala,  par  l'ordonnance  du  Roy, 
en  la  terre  de  Partenay,  pour  mectre  les  terres  dudit  seigneur  de 
Partenay  en  la  main  du  Roy,  ouquel  ladicte  dame,  en  obéissant  au 
Roy,  délivra  la  ville  et  chastel  de  Vouvant,  elle  n'osa  retourner  de- 
vers son  mary,  qui  la  menaçoit  de  faire  morir,  etc.  »  (Xi*  4791,  î°  273 
vo-274  ;  voir  aussi  f''^  277-279). 

Ce  procès  dura  longtemps,  car  il  était  engagé,  comme  on  vient  de 
le  voir,  dès  1417,  et  il  se  poursuivait  encore  en  1422  et  en  1423,  devant 
les  parlements  de  Poitiers  et  de  Paris.  Le  sire  de  Parthenay  était 
obligé  de  donner  1000  1. 1.  de  provision  par  an,  à  sa  femme  (X>a  9190, 
fo  244;  Xi"  9197,  f»'  163,  192,  221vo-223  v»).  D'ailleurs,  le  roi  avait 
permis  à  Brunissande,  le  13  mai  1416,  de  recueifiir  les  biens  de  son 
père  Archambaud,  comte  de  Périgord,  malgré  la  confiscation  dont 


APPENDICES  487 

ils  avaient  été  frappés  (JJ  169,  f»  dl3  v").  Le  duc  de  Berry,  qui  avait 
toujours  protégé  Brunissande,  étant  mort  le  15  juin  1416  (voy.  ci-des- 
sus, p.  47),  J.  Larchevêque  obtint  peu  après  (1416,  septembre)  la  resti- 
tution de  ses  biens,  avec  des  lettres  d'abolition,  grâce  au  duc  de  Bour- 
gogne, revenu  au  pouvoir  (JJ  109,  f»  258). 

On  sait  que  Richemont,  pendant  sa  captivité,  continua  de  défendre 
ses  droits  contre  J.  Larchevêque  et  qu'il  conclut  avec  le  Dauphin,  par 
l'entremise  de  Jean  V,  la  convention  d'Angers,  le  2  juillet  1417  (voy.  ci- 
dessus,  p.  47-49).  Dès  le  4  juillet,  le  Dauphin  donnait  à  Gilles  de  Raiz, 
seigneur  de  Pouzauges,  commission  de  faire  exécuter  cet  arrange- 
meii  (Redet,  Catal.  de  D.  Fonteneau,  p.  323).  Néanmoins  la  guerre  se 
prolongea  dans  le  Poitou  jusqu'au  traité  de  Pouilly,  c'est-à-dire  jus- 
qu'en juillet  1419.  En  vertu  de  ce  traité,  l'armée  royale  levait  le  siège 
de  Parthenay,  et  le  duc  de  Bourgogne  avait  la  garde  de  cette  ville,  qui 
devait  être  rendue  au  roi  après  la  mort  de  J.  Larchevêque  (voy.  ci- 
dessus,  p.  47-49;  Fr.  20587,  n"  28;  X'a  8603,  f"»  51-53;  Mss.  Moreau, 
t.  1425,  n»s  77*'^  78,  79;  Ordonnances,  XII,  263-^267).  Le  27  juillet,  le 
duc  de  Bourgogne  nomma  Régnier  Pot  capitaine  de  Parthenay 
(Mss.  Moreau,  t.  1425,  no  80).  Après  l'assassinat  de  Jean  sans  Peur 
(10  septembre  1419),  le  sire  de  Parthenay,  selon  l'engagement  qu'il 
avait  pris,  trois  ans  auparavant  (voy.  ci-dessus,  p.  47),  vendit  ses  do- 
maines au  roi  et  au  dauphin  Charles,  le  19  novembre  1419  (J  183, 
n»  135,  longue  pièce  originale,  qui  expose  les  diverses  phases  de  cette 
affaire;  voir  aussi  Xia  8604,  f»*  24-28  v"  ;  P.  2298,  f"^  77-110).  On  voit, 
par  divers  documents,  que  Charles  VII  avait  grand'peine  à  payer  ce 
qu'il  devait  au  sire  de  Parthenay,  même  en  ne  faisant  que  des  verse- 
ments partiels  et  en  demandant  des  délais  (Clairamb.,  V,  f»  223,  n»  131, 
f"  225,  n'^  132,  133;  X'a  8604,  f"^  64  v»  -65,  127;  X'"  9197,  f»"  221 
v°  -223;  Fr.  25710,  n"  19;  K  184,  liasse  1,  n»  21).  C'est  peut-être  à 
cause  de  cela  que  J.  Larchevêque  eut  l'intention  de  faire  annuler  le 
contrat  du  19  novembre  1419,  comme  il  en  avait  le  droit  (Bel.  Ledain, 
p.  224;  K  184,  liasse  1,  n»  21).  Toutefois  il  ne  semble  pas  qu'il  ait 
donné  suite  à  cette  idée. 

Quand  Arlur  de  Bretagne,  devenu  connétable,  eut  triomphé  de 
Louvet,  le  roi  lui  renouvela,  le  24  octobre  1425,  la  donation  des  do- 
maines de  J.  Larchevêque  (voy.  ci-dessus,  p.  113).  Celui-ci  confirma 
la  donation,  mais  le  connétable  devait  parfaire  la  somme  stipulée 
en  1419.  Richemont  continua,  s'il  ne  le  compléta  pas,  le  payement 
commencé  par  le  roi  (Xi*  8604,  f  127;  K  184,  liasse  1,  n»  21).  En 
tout  cas,  J.  Larchevêque  confirma  encore,  par  son  testament,  le  don 
renouvelé  par  le  roi  en  1425,  malgré  les  sollicitations  de  ses  héritiers 
naturels.  Ces  héritiers  étaient  ses  deux  sœurs,  Marie  et  Jeanne  de  Par- 
thenay et  leurs  enfants.  Marie  de  Parthenay  avait,  de  son  mariage 
avec  Louis  !<='  de  Châlons,  comte  de  Tonnerre,  deux  filles,  Jeanne  et 
Marguerite  de  Châlons  (Xia  9194,  f»  25).  L'autre  sœur  de  J.  Larche- 
vêque, Jeanne  de  Parthenay,  mariée  à  Guillaume  d'Harcourt,  comte 
de  Tancarville,  vicomte  de  Melun,  avait  une  fille,  Marguerite  de  Me- 
lun,  qui  avait  épousé  Jacques  II  d'Harcourt,  baron  de  Montmorency 
(Anselme  V,  137-138;  G. -A.  de  La  Roque,  Hist.  génécd.  de  la  maison 


40»  APPENDICES 

de  Harcourt,  Paris,  1662,  in-f",  l.  I,  p.  610-636).  Après  avoir  combattu 
vaillamment  contre  les  Anglais,  Jacques  d'Harcourt,  cédant  peut-être 
aux  excitations  de  sa  belle-mère,  avait  essayé  de  prendre,  par  trahison, 
son  oncle  J.  Larchevêque  et  le  château  de  Parthenay  (1424).  Cette 
tentative  lui  avait  coûté  la  vie  (Bel.  Ledain,  221-224;  Vallet  de  V., 
Hist.  de  Charles  VII,  1. 1,  398-399;  Anselme,  V,  137,  qui  assigne  la  date 
inexacte  de  1428  à  la  mort  de  J.  d'Harcourt).  Il  laissait  une  fille, 
Marie  d'Harcourt,  qui  épousa,  dans  la  suite,  le  bâtard  d'Orléans  et 
un  fils,  Guillaume  d'Harcourt.  Il  est  probable  que  l'action  déloyale  de 
Jacques  d'Harcourt  ne  fit  qu'indisposer  davantage  J.  Larchevêque 
contre  ses  héritiers  naturels.  Pourtant,  on  doit  supposer  qu'il  leur 
légua  au  moins  une  partie  de  sa  succession,  car  on  voit  figurer  Marie 
de  Parthenay  et  les  enfants  de  Jacques  d'Harcourt  dans  un  procès 
où  ils  sont  mis  en  cause,  avec  Richemont,  par  le  seigneur  de  Belle- 
ville,  en  mars  1432. 

J.  Harpedenne,  seigneur  de  Belleville,  prétendait  avoir  reçu  de 
Charles  Vil  la  ville  de  Mervent,  en  payement  d'une  somme  de  1  b  000 1. 1. 
qu'il  lui  avait  prêtée  (Xi*  9200,  f°s  36,  147  v°).  Le  sire  de  Parthenay, 
que  le  roi  n'avait  pas  encore  payé,  ne  voulut  pas  ratifier  cet  arrange- 
ment. Comme  J.  Harpedenne  se  rendait  aux  états  de  Poitiers,  au 
mois  d'octobre  1425  (voy.  ci-dessus,  p.  112),  J.  Larchevêque  le  fit 
arrêter,  avec  ses  bagages,  sa  vaisselle,  ses  bijoux,  et  conduire  au  châ- 
teau de  Parthenay.  Là,  il  le  retint  prisonnier  dans  la  tour  de  Bière 
et  lui  déclara  qu'il  n'en  sortirait  qu'après  avoir  renoncé  à  la  posses- 
sion de  Mervent.  Malgré  les  ordres  du  l'oi,  il  ne  voulut  pas  le  relâcher, 
et  il  le  contraignit  à  signer  un  acte  par  lequel  il  délaissait  Mervent  et 
reconnaissait  les  droits  de  Richemont.  Il  n'est  pas  invraisemblable  que 
Richemont,  dans  cette  circonstance,  se  soit  entendu  avec  J.  Larche- 
vêque, pour  la  défense  de  leurs  intérêts  communs,  car,  dans  ce  même 
temps,  devenu  maître  de  la  situation,  par  le  renvoi  de  Louvet,  il  se  fai- 
sait renouveler,  le  24  octobre  1425,  la  donation  de  1415. 

Quant  à  J.  Harpedenne,  une  fois  libre,  il  déclara  que  l'engagement 
qu'on  lui  avait  arraché  par  la  violence  était  nul,  et  il  intenta  un  procès 
à  J.  Larchevêque.  Celui-ci  étant  mort  pendant  ce  procès,  en  1427 
(voy.  ci-dessus,  p.  151),  le  seigneur  de  Belleville  s'en  prit  à  ses  héri- 
tiers, c'est-à-dire  à  Marie  de  Parthenay,  comtesse  de  Tonnerre,  aux 
enfants  mineurs  de  Jacques  d'Harcourt,  représentés  par  leur  oncle, 
Christophe  d'Harcourt,  et  au  comte  de  Richemont,  «  détenteur  de  Mer- 
vent »  (XI'  9200,  f°s  36,  147  v°).  Ce  procès  durait  encore  au  mois 
de  mai  1432,  quand,  en  vertu  du  traité  de  Rennes  (voy.  ci-dessus, 
p.  190),  Richemont  obtint  un  ajournement  jusqu'à  la  Saint-Martin 
d'hiver  de  1433  (Xi*  9200,  f"  42).  Avant  l'expiration  de  ce  délai,  le 
connétable  renversait  enfin  son  mortel  ennemi,  La  Trémoille  (voy.  ci- 
dessus,  p.  200,  201),  puis  il  rentrait  en  grâce  et  se  faisait  donner, pour 
la  troisième  fois,  les  domaines  de  J.  Larchevêque  (voy.  ci-dessus, 
p.  220).  Par  ses  lettres  signées  à  Tours,  le  9  avril  1434  a.  st.,  le  roi 
ordonnait  qu'on  cessât  tout  procès  contre  le  connétable  et  qu'on  le 
laissât  jouir  paisiblement  de  tous  ces  domaines,  malgré  une  ordonnance 
de  Charles  VI  qui  en  interdisait  au  roi  l'aUénation.  Les  lettres  du 


APPENDICES  489 

9  avril  1434  a.  st.  qui  résument  tous  les  détails  principaux  de  cette 
longue  affaire,  sont  fort  intéressantes  à  ce  point  de  vue.  En  voici  la 
teneur  : 

«  Lectre  octroyée  à  Artur  de  Bretaigne,  eonnestable  de  France,  pour 
joir  des  terres  de  Partenay  et  autres,  qui  furent  de  feu  messire 
Jehan  Larcevesque,  nonobstant  le  procès  pendant  en  parlement,  pour 
occasion  d'icelles. 

«  Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  etc.  Oye  humble  supplicacion  et  re- 
queste  à  nous  faicte,  en  la  présence  de  plusieurs  seigneurs  de  nostre 
sang  et  lignage  et  des  gens  de  nostre  grant  conseil,  par  nostre  très 
chier  et  amé  cousin,  Artur  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  eon- 
nestable de  France,  disant  que,  à  certains  et  justes  tiltres,  et  par  plu- 
sieurs et  divers  moyens  et  transpors  raisonnablement  fondez  et  cy 
après  declairez,  à  lui  appartiennent  et  doivent  appartenir  les  terres  et 
seigneuries  de  Partenay,  Voulvent,  Mervent,  le  Couldray-Salbart,  Secon- 
digny,  Chastelaillon,  Matefelon  et  autres  terres,  appartenant  et  appen- 
dant  à  ycelles  terres  et  seigneuries,  qui  jadiz  furent  et  appartindrent 
à  feu  Jehan  Larcevesque,  en  son  vivant  chevalier;  et  que  d'icelles 
choses  il  a  jà.longuement  joy,  tant  par  vertu  de  certain  don  et  trans- 
port, que  feu  nostre  oncle  Jehan,  derrenier  duc  de  Berry  et  conte  de 
Poictou,  lui  fîst  d'icelles  terres  et  seigneuries,  comme  à  lui  forfaictes  et 
confiquées,  au  moins  ce  que  tenu  en  estoit  de  sadicte  conté  de  Poictou, 
pour  cause  de  la  félonnie  et  rébellion  que  ledit  Larcevesque,  qui 
estoit  son  vassal  et  subgect,  commist  à  l'encontre  de  lui,  ainsi  que 
plus  à  plain  est  contenu  et  peut  apparoir,  par  léctres  d'icelui  nostre 
oncle,  faictes  et  données  le  sixième  jour  de  may,  l'an  mil  quatre  cens 
quinze,  comme  aussi  par  autre  don  et  transport  que  feu  nostre  très 
chier  frère  Loys,  duc  de  Guyenne,  par  ses  lectres  données  le  xxiii*  jour 
dudit  mois  de  may  (et  non  le  xxive  comme  dans  K.  184),  flst  d'icelles 
terres  et  seigneuries  à  nostre  dit  cousin  et  eonnestable,  lesquelles 
nostre  dit  frère  disoit  lui  appartenir,  par  vertu  du  don  que  fait  lui  en 
avoit  feu  nostre  très  chier  seigneur  et  père,  cui  Dieu  pardoint,  par 
certaines  ses  lectres,  données  le  xiiii*  jour  dudit  mois  de  may,  par  la 
forfaicture  et  confiscacion  dudit  feu  Larcevesque,  qui  s'estoit  cons- 
titué et,  par  effect,  démonstré  son  rebelle  et  désobéissant,  en  lui  fai- 
sant et  à  ses  vassaulx  et  subgiez  toute  guerre  et  tenant  à  rencontre 
de  lui  leparty  de  Bourgoigne,  et  par  ce,  commectant  envers  lui  crime 
de  lèze  majesté;  lequel  nostre  cousin  le  eonnestable,  pour  prandre  et 
appréhender  la  possession  desdictes  terres  et  exécuter  lesdictes  lectres 
de  nostre  dit  père,  selon  leur  forme  et  teneur,  se  feust,  par  leur  bon 
plaisir  et  ordonnance,  tantost  après  ces  choses,  tiré  oudit  pais  de 
Poictou  et  tant  fait  que,  par  puissance  de  main  armée,  à  ses  grans 
fraiz  et  mises,  mist  en  obéissance  de  nostredit  seigneur  et  père  toutes 
les  places  dessusdictes,  excepté  seulement  les  ville  et  chastel  dudit 
Partenay,  qui,  pour  lors,  demeurèrent  en  leur  estât,  parceque  icelui 
nostredit  cousin,  en  obéissant  au  mandement  de  nostredit  seigneur  et 
père,  pour  lui  faire  greigneur  service,  ala,  en  ce  temps,  à  la  journée 


490  APPENDICES 

de  Giencourt,  où  il  fut  prisonnier  des  Anglois,  noz  ennemis,  qui  lon- 
guement l'ont  détenu  et  empeschié  de  sa  personne,  ou  pais  et  royaume 
d'Angleterre;  pendant  lequel  empescliement  et  prison  de  nostredit 
cousin  et  après  nostre  partement  de  nostre  ville  de  Paris,  pour  ce  que 
ledit  Jehan  Larcevesque  continua  en  ses  rebellions  et  désobéissances, 
nous  feismes  assiéger  les  diz  ville  et  chastel  de  Partenay,  et,  après, 
feismes  certain  contract  avec  ledit  Larcevesque,  par  lequel  il  nous 
transporta  la  propriété  de  toutes  lesdictes  terres,  moyennant  certaine 
somme  de  deniers  que  paier  lui  devions,  à  plusieurs  et  divers  termes 
et  payements,  par  tele  condîcion  que,  se  faulte  avoit  en  aucuns 
d'iceulx  payemens,  ledit  contract  seroit  réputé  pour  nul  et  demour- 
roient  les  deniers  payez  pour  les  termes  escheuz  audit  Jehan  Larce- 
vesque comme  siens,  franchement  et  quictement,  sans  ce  que  tenu 
fust  d'aucune  chose  en  restituer;  et  fut  dit,  parlé  et  accordé,  en  fai- 
sant ledit  contract,  que  lesdictes  terres  et  seigneuries  estans  en  ladicte 
conté  de  Poictou  demourroient  unies  et  annexées  oudit  conté  de  Poic- 
tou,  sans  ce  que  séparer  les  en  deussions  nepeussions;  et,  pour  ce  que, 
en  ensuivant  et  continuant  les  termes  et  condicions  dessusdictes,  eus- 
sions faiz  plusieurs  payemens  des  sommes  promises  audit  Larcevesque, 
à  cause  dudit  contract,  mais,  depuis,  obstans  plusieurs  grans  charges, 
que  avions  à  soutenir,  eussions  cessé  de  payer,  par  aucuns  termes^ 
les  sommes  que,  pour  raison  desdiz  contraz,  devions  et  estions  tenuz 
paier;  pour  lesquelles  causes,  et  aussi  que  ledit  Jehan  Larcevesque 
nous  fît  savoir  qu'il  estoit  bien  content  que  icelles  terres  et  seigneuries 
venissent  es  mains  de  nostredit  cousin,  eussions  à  icelui  nostre  cousin 
donné,  cédé  et  transporté  la  propriété  de  toutes  lesdictes  terres  et 
seigneuries  et  tout  le  droit,  cause,  poursuite  et  action  que,  par  ledit 
contract  et  autrement,  avoir  y  pouvions,  pour  en  joir  et  user,  par  lui  et 
ses  héritiers  masles,  procréez  et  descenduz  de  sa  char,  en  loyal  ma- 
riage, et,  se  aucuns  n'en  avoit,  eussions  en  ce  donné  icelles  terres  et 
appartenances  à  nostre  très  chier  et  amé  neveu,  Pierre  de  Bretaigne, 
second  filz  de  notre  très  chièr  et  amé  frère  le  duc  de  Bretagne, 
pour  semblablement  en  joir,  après  le  trespas  de  nostredit  cousin,  par 
nostredit  neveu  et  ses  hoirs  masles,  procréez  en  loyal  mariage,  nonobs- 
tant les  reservacions  ou  condicions  apposées  oudit  contract,  faisans 
menciou  de  l'union  ou  adjonction  desdictes  terres  au  demaiae  dudit 
conté  de  Poictou,  lesquelles  nous  ne  voulons  aucunement  nuyre  ne 
préjudicier  ausdiz  don,  cession  et  transport,  par  nous  faiz  à  nos  diz 
cousin  et  neveu,  moyennant  que  nostredit  cousin  payeroit  audit  Jehan 
Larcevesque  le  reste  de  ce  que  lui  devions,  à  cause  dudit  contract, 
pourveu  toutes  voies  que  de  ce  feust  d'accord  ledit  Jehan  Larcevesque, 
lequel,  après  ces  choses,  y  donna  son  consentement  et,  qui  plus  est, 
en  faveur  d'icelui  nostredit  cousin,  ledit  Jehan  Larcevesque,  après  le 
transport  par  nous  fait  d'icelles  terres  et  seigneuries  à  notredit  cousin, 
fut  content  que  le  contrat  d'entre  nous  et  lui,  qui,  comme  dit  est, 
estoit,  par  défaut  de  payement,  rompu  et  adnullé,  demourast  entier 
et  en  sa  force  et  valeur,  et,  sur  ce,  receut  argent  et  nouveaux  paye- 
mens de  nostredit  cousin,  comme  toutes  ces  choses  et  autres  peuvent 
apparoir,  tant  par  noz  lectres  comme  par  celles  dudit  feu  Larcevesque, 


APPENDICES  491 

lequel,  a  grei|zneur  confîrmacion,  ratifia  et  approuva  d'abondant,  par 
son  testament  ledit  contract,  voulant  et  ordonnant  qu'il  eust  et  sortist 
son  plain  effect;  et,  tout  nonobstant,  et  sans  avoir  regart  aux  choses 
dessusdictes,  nostre  procureur  général  a  de  ce  mis  en  procès,  en  nostre 
court  de  parlement,  nostredit  cousin  et  connestable,  tandiz  que,  par 
le  moijen  et  poiirchaz  d'aucuns  ses  malveillans,  qui  lors  avaient  grant 
gouvernement  et  aiictorité  entour  nous,  il  a  esté,  à  sa  grant  déplat- 
sance,  esloigné  de  nous  et  de  Piastre  service,  soy  efforçant  nostredit 
procureur  de  débatre  et  impuner  ledit  don  et  transport,  que  ainsi  fait 
avons  à  ycelui  nostredit  cousin,  et,  par  ce,  empescher  qu'il  ne  joysse 
de  ses  dictes  terres  ;  sur  quoy  a  esté  tant  procédé  que  les  parties  ont 
esté  appoinctées  à  bailler  leurs  causes  et  raisons  par  escript,  d'un 
costé  et  d'autre,  en  quoy  icelui  nostredit  cousin  a  esté  et  est  gran- 
dement damniflé  et  aussi  despiaisant  de  ce  que,  à  l'encontre  de  nous, 
on  le  veult  ainsi  mectre  et  tenir  en  procès,  si  comme  ces  choses  nous 
a  dictes  et  remonstrées,  requérant  humblement  que,  considéré  ses 
droiz  ettiltres  dessusdiz,  dont  il  offroit  faire  prompte  foy,  nous  plaise 
lui  pourveoir  sur  ce  que  dit  est,  par  manière  que  nostredit  don  et 
transport  lui  soit  fructueux  et  valable  et  sortisse  son  plain  effect,  selon 
la  teneur  de  nosdictes  lectres  sur  ce  faictes,  en  le  faisant  mectre  hors 
dudit  procès  et  imposant  sur  ce  silence  à  nostredit  procureur,  en  le 
recevant,  à  cause  desdictes  terres  et  seigneuries,  en  nostre  foy  et 
hommage; 

«  Savoir  faisons  que,  après  ce  que  bien  au  long  avons  fait  veoir  et 
visiter,  par  les  gens  de  nostredit  grant  conseil,  les  droiz  et  tiltres  de 
nostredit  cousin,  touchant  le  fait  dessusdit  et  que  d'iceulx  et  de  son 
donné  à  entendre  nous  est  suffisamment  et  bien  à  plain  apparu,  nous, 
eu  à  ce  regart  et  considéracion,  et  aussi  aux  très  grans,  louables  et 
prouffltables  services  que  nous  a  longuement  faiz  et  que,  de  jour  en 
jour,  s'ofl'orce,  de  toute  affection,  de  plus  encore  nous  faire  nostre 
dessusdit. cousin  et  connestable,  tant  ou  fait  de  noz  guerres  comme 
autrement.,  en  toutes  manières  à  lui  possibles;  voulans,  pour  ce,  le 
traicler  en  tous  ses  affaires,  favorablement  et  en  toute  doulceur,  avons, 
de  nostre  certaine  science,  plaine  puissance  et  auctorité  royal,  en  tant 
que  besoin  en  est,  et  par  l'advis  et  meures  délibéracions  desdiz  sei- 
gneurs de  nostre  sang  et  desdiz  gens  de  nostre  grant  conseil,  pour  ce 
assemblez  en  grant  nombre,  déclairé  et  déclairons,  par  ces  présentes, 
lesdictes  terres  et  seigneuries  à  lui  compéter  et  appartenir,  aux  tiltres 
et  moyens  dessus  déclairez,  et  nostredit  don  et  transport,  ainsi  fait 
desdictes  choses  à  nostredit  cousin  et  connestable,  estre  bon  et  valable, 
et  icelui  avons  confermé,  ratifié  et  approuvé,  confermons,  ratifions  et 
approuvons,  en  tant  que  besoin  en  seroit,  par  cesdictes  présentes,  en 
voulant  et  ordonnant  icelui  nostre  cousin  et  sesdiz  héritiers  masles 
paisiblement,  et  aussi  nostredit  neveu  de  Brctaigne  et  sesdiz  héritiers 
masles,  en  la  condicion  dessusdicte,  joir  et  user  doresenavant  desdictes 
terres  et  seigneuries  contenues  et  déclairées  oudit  transport,  tout 
selon  la  forme  et  teneur  d'icelui,  et  tous  empeschemens  et  procès  au 
contraire  faiz  et  commanciez  par  noz  procureur,  advocaz  et  autres 
noz  justiciers  et  officiers,  voulons  estre  ostez,  et  tout  ce  qui  auroit  esté 


492  APPENDICES 

fait  ou  préjudice  de  nostredit  cousin  et  connestable,  adnullons  et  voulons 
cesser  et  estre  mis  au  néant  ;  à  tous  lesquels  avons  de  ce  imposé  et  im- 
posons perpétuel  silence,  en  décernant,  oultre,  que  nostre  dit  cousin, 
à  cause  desdictes  choses,  sera  par  nous  receu,  touteffois  que  par 
nous  (pour  pm'  lui?)  requis  en  serons  (sic)  (pour  sera?)  en  nosdiz  foy 
ethommage.  Si,  donnons  en  mandement,  par  ces  mesmes  présentes,  à 
noz  amez  et  feaulx  conseillers,  les  gens  tenans  nostre  parlement  et 
qui  tendront  ceulx  à  venir,  les  gens  de  noz  comptes  et  trésoriers  et  à 
tous  noz  autres  j  usticiers  et  officiers,  ou  à  leurs  lieuxtenans  et  à  chacun 
d'eulx,  si  comme  à  lui  appartendra,  que  de  nostredit  don  et  trans- 
port et  de  nostre  présente  déclaracion,  ordonnance  et  ratificacion 
facent,  seuffrent  et  laissent  nosdiz  cousin  et  neveu  et  leurs  diz  hoirs 
masles  joir  et  user  plainement  et  paisiblement,  en  tant  que  à  nous 
touche  et  peut  toucher,  par  la  forme  et  manière  que  dessus  est  dit, 
sans  leur  faire  ne  souffrir  estre  fait  ne  donné,  ores,  ne  pour  le  temps 
à  venir,  aucun  destourber  ou  empeschement  au  contraire,  en  quelque 
manière  ne  soubz  quelle  couleur  que  ce  soit,  et  que  tous  empesche- 
mens  qui,  de  par  nous,  ont  esté  mis  èsdictes  terres  et  seigneuries  es- 
tent et  facent  cesser.  Mandons  aussi  à  nosdiz  procureur  et  advocas, 
et  à  chacun  d'eulx  estroiclement  enjoignons  que,  dudit  procès  par 
eulx  commandé,  comme  dit  est,  se  désistent  et  départent  du  tout, 
sans  plus  aucunement  y  procéder,  ne  tenir,  à  cause  de  ce,  nostre  dit 
cousin  en  procès,  car  ainsi  nous  plaist  il  et  voulons  estre  fait,  de 
grâce  spécial,  se  mestier  est,  nonobstant  ledit  procès  et  tout  ce  qui 
s'en  est  ensuy,  nonobstant  aussi  l'interdiccion  par  nous  faicte  de 
non  alienner  ne  mectre  lesdictes  choses  hors  de  noz  mains,  ne  de 
les  séparer  hors  des  terres  et  seigneuries  ausqueles  elles  furent  an- 
nexées par  le  contract  fait  entre  nous  et  ledit  Larcevesque,  et  quelx- 
conques  lectres  surreptices  impétrées,  ou  à  impétrer,  à  ce  contraires. 
En  tesmoin  de  ce  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes. 
Donné  à  Tours,  le  ix' jour  d'avril,  l'an  de  grâce  mil  CGC  XXX IIII,  avant 
Pasques,  et  de  nostre  règne  le  xm'.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  en  son 
conseil,  ouquel  messeigneurs  le  duc  de  Bourbon  et  Charles  d'Anjou, 
Vous,  le  conte  de  Vendosme,  l'arcevesque  de  Vienne,  les  évesques  de 
Poictiers,  de  Magalonne  et  de  Maillezays,  le  bastart  d'Orléans,  les 
maréchaulx  de  Rieux  et  de  La  Fayette,  le  maistre  des  arbalestriers, 
les  sires  de  Bueil,  de  Gaucourt  et  de  Trêves,  messires  Bertrant  de 
Beauvau,  Hugues  de  Noer  et  Loys  de  Tromagon,  maistres  Renier  de 
Boulligny,  Jehan  Chastenier  et  Jehan  Fournier  et  plusieurs  autres 
estoient. 

«  BUDE.  >) 

Et  au  doz  estoit  escript  :  lecta  et  publicata  in  curia  parliamenti,  de 
expresso  precepto  régis,  ore  facto,  quinta  die  marcii,  anno  Domini 
millesimo  GGGC»»  XXXVt»  (et  non  1434,  comme  dans  K.  184). 

Blois. 

(Xia  8604,  f»s  i 26-1 28.  Gopie,  pas  toujours  exacte,  dans  le  carton 
K  184,  liasse  1,  n°  21.  Ce  document  se  trouve  aussi  aux  archives  de 
la  Loire-Inférieure,  cass.  38,  E,  103.) 


APPENDICES  493 

C'est  seulement  le  5  mars  <436  que  le  parlement,  sur  l'ordre  formel 
du  roi,  enregistra  cette  troisième  donation.  Dès  lors,  le  connétable 
put  jouir  de  cette  succession  qui  lui  avait  suscité  tant  d'embarras.  En 
juin  et  en  juillet  1435,  il  était  encore  en  procès  avec  J.  de  Roche- 
chouart,  seigneur  de  Mortemart,  et  Jeanne  de  Torsay,  sa  femme.  Ils 
réclamaient  à  Ricbemont  une  rente  de  260  1.  t.  sur  Châtelaillon, 
rente  qui  appartenait  à  Jean  d'Argenton,  aïeul  maternel  de  Jeanne 
de  Torsay.  Le  connétable,  qui  était  alors  à  Arras,  opposa  des  lettres 
d'état  et  demanda  que  l'alTaire  fût  remise,  afm  qu'il  pût  y  assister, 
car  il  s'agissait  de  200  1.  t.  de  revenus,  <  qui  est  grosse  chose  » 
(Xia  9200,  fos  243  v°,'  270,  au  mardi  l^'-  juin  et  au  lundi  18  juillet  i435  ; 
ci-dessus,  p.  460,  note  6).  Si  200  1.  t.  étaient  alors  grosse  chose,  que 
faut-il  donc  dire  des  revenus  de  la  succession  entière  de  J.  Larche- 
vêque?  On  sait,  par  un  autre  document  de  l'époque  (X**  4791,  fo^  277 
v»-278;,  que  la  seule  châtellenie  de  Vouvant  valait  de  trois  à  quatre 
mille  livres. 

Enfin  on  a  vu  (ci-dessus,  p.  431)  que  cette  même  succession  fut 
donnée  par  le  roi  au  bâtard  d'Orléans,  pour  en  jouir  après  la  mort 
d'ArturllI,  qui  n'avait  pas  d'héritier  légitime  (Xi*  860S,  f^^  204  v» -205, 
pièce  qui  rappelle  aussi  les  diverses  phases  de  cette  affaire).  Le  duc 
de  Bretagne  Pierre  II,  qui  devait  succéder  à  son  oncle  Artur  dans  cet 
héritage,  étant  mort  avant  lui,  la  riche  succession  de  J.  Larchevêque 
revint  donc  k  Dunois  (Bel.  Ledain,  Hist.  de  Parthenay,  p.  251  et  suiv.). 


XIII 

mCHEMONT,    NOMMÉ    CAPITAINE    GÉNÉRAL   PAR   CHARLES   YI, 
EST   ENVOYÉ    CONTRE    3.    LARCHEVÊQUE    (1415-,  juin)    [p.    40]. 

Dans  la  riche  collection  des  titres  scellés  de  Clairambault,  on  trouve 
des  documents  qui  font  connaître  les  noms  des  chevaliers  et  des 
écuyers  envoyés,  en  1415,  contre  J.  Larchevêque,  sous  les  ordres  da 
comte  de  Ricbemont,  nommé,  par  le  roi,  capitaine  général.  Ce  sont 
les  quittances  de  sommes  payées,  vers  la  fin  de  juin  1415,  à  ces  sei- 
gneurs et  à  leurs  compagnies,  pour  leur  entrée  en  campagne.  Tels  sont  : 

Eynat  d'Antin,  écuyer,  et  sa  compagnie  (Clairambault,  t.  3,  f.  201). 

Guillaume  Baron,  écuyer  et  sa  compagnie  (t.  10,  f"  581). 

Thibault  Barrabes,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  10,  f"  381). 

P.  Boschier,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  13,  f»  1039). 

L.  d'Allesolles,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  39,  f»  2889). 

J.  de  Dercé,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  40,  t"  2979). 

G.  de  La  Forest,  chev.  bachelier,  avec  sa  compagnie  (t.  48,  f»  3629). 

Jacob  du  Fou,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  49,  f»  3657). 

J.  Guymar,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  56,  f"  4293). 

Ch.  de  Mauny,  chev.  bachelier,  avec  sa  compagnie  (t.  72,  f"  5629). 


494  APPENDICES 

J.  de  Murât,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  79,  f»  6229). 
J.  de  St-Nazar,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  80,  f»  6293). 
Bertrand  Nicole,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  81,  f"  6355). 
Antoine  du  Pelle,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  84,  f»  6601). 
Perrot  Pernaulx,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  85,  f»  6661). 
Et.  de  Soley,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  104,  f"  8063). 
David  Tanac,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  105,  f"  8165). 
P.  de  La  Touche,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  106,  f^  8299). 
J.  de  Varèze,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  109,  f»  8549). 
Et.  de  Verrières,  écuyer,  avec  sa  compagnie  (t.  112,  f"  8737). 

Les  quittances  de  ces  capitaines  sont,  pour  la  plupart,  datées  du 
25  juin.  Elles  sont  presque  toutes  conçues  dans  les  mêmes  termes,  et 
il  suffira  d'en  donner  ici  une  seule,  comme  exemple  : 

«  Sachent  tuit  que  je,  Jacob  du  Fou,  escuier,  confesse  avoir  eu  et 
receu  de  Macô  Héron,  trésorier  des  guerres  du  roy  mon  seigneur,  la 
somme  de  cccxv  1.  t.  en  prest  et  paiement,  sur  les  gaiges  de  moy  et 
de  vint  autres  escuiers  de  ma  compaignie  desserviz  et  à  desservir,  ou 
service  du  dit  seigneur,  pour  mectre  en  sa  subjection  et  réduire  à 
son  obéissance  le  seigneur  de  Partenay,  tous  ses  alliez,  aidans  ou 
complices,  et  partout  ailleurs  où  il  plaira  au  dit  seigneur  ordonner, 
en  la  compaignie  et  soubz  le  gouvernement  de  monseigneur  le  conte 
de  Richemont,  capitaine  général,  et  du  nombre  des  gens  d'armes  et 
de  trait  à  lui  par  le  dit  seigneur  ordonnez,  pour  faire  ce  que  dit  est. 
De  laquelle  somme  de  cccxv  I.  t.  et  pour  la  cause  dessus  dicte,  je  me 
tien  pour  content  et  bien  paie  et  en  quicte  le  roy  nostre  dit  seigneur, 
le  dit  trésorier  des  guerres  et  tout  autre  qu'il  appartient.  Tesmoin 
nostre  scel  cy  mis,  le  xxiv"  jour  de  juing,  l'an  mil  quatre  cens  et 
quinze  »  (Clairambault,  t.  49,  f»  3657). 

L'expédition  de  Richemont  dura  jusque  vers  le  milieu  d'octobre, 
car  ou  voit,  dans  un  document  publié  par  D.  Lobineau  (Hist.  de  Bre- 
tagne, II,  col.  903),  qu'il  ordonna,  le  10  octobre,  de  payer  des  gens 
de  guerre  qui  étaient  avec  lui  au  siège  de  Parthenay.  Il  n'eut  que  le 
temps  de  revenir,  pour  prendre  part  à  la  bataille  d'Azincourt,  le 
25  octobre  (voy.  ci-dessus,  p.  40-43).  11  paraît  que  Richemont  paya 
de  ses  propres  deniers  les  frais  de  l'expédition  contre  J.  Larchevêque 
(voy.,  à  l'append.  XII,  les  lettres  du  9  avril  1435). 


XIV 

LETTRES  DU  RÉGENT  CHARLES  A  JEAN  DE  BRETAGNE,  COMTE  DE  PEN- 
THIÈYRE,  ET  A  CHARLES,  SEIGNEUR  d'aVAUGOUR,  POUR  LEUR  RE- 
COMMANDER DE  BIEN  GARDER  LE  DUC  DE  BRETAGNE  ET  SON  FRÈRE 

RICHARD  (16  mars  1420,  ii.  s.)  [voy.  ci-dessus,  p.  53]. 

Charles,  filz  du  Roy  de  France,  régent  le  royaume,  Daulphin  de 
Viennois,  duc  de  Berry  et  de  Touraiue,  et  conte  de  Poictou,  à  noz 


APPENDICES  495 

très  cliiers  et  amez  cousins,  le  conte  de  Penlhièvre,  Jehan,  seigneur 
de  Laigle,  et  Charles,  seigneur  d'Avaugour,  frères,  salut  et  dileccion. 
Comme,  pour  résistier  et  pourveoir  de  vostre  part  et  en  nostre  absence 
il  la  dampnable  entreprinse  des  anciens  ennemis  de  ce  royaume,  les 
Anglais,  qui,  puis  aucun  temps,  y  sont  descenduz,  où  ilz  ont  fait  moult 
de  dommages  et  usurpé  plusieurs  des  terres  et  seigneuries  de  Mon- 
seigneur, espécialment  ou  pays  de  Normendie,  et  tout  par  le  porL, 
faveur  et  dissimulacion  d'aucuns  seigneurs,  vassaulx  et  subgez  de  ce 
dit  royaume,  nous,  confians  à  plain  de  la  grant  loyautié,  puissance, 
bonne  atïection  et  volontié  de  vous,  nostre  dit  cousin  de  Penthevre, 
vous  eussions  naguaires,  par  nos  lectres  patentes,  fait,  commis,  ordonné 
et  establi  lieutenant  et  cappitaine  général  de  mon  dict  seigneur  et  de 
nous  es  pays  d'Anjou,  du  Maine  et  aulre  part,  en  la  marche  de  Ber- 
taigne,  et  donné  plain  povoir  de  faire  tout  ce  que  cognoistroyez  estre 
au  bien  et  prouffit  de  mon  dit  seigneur  et  à  la  conservacion  de  sa 
seigneurie,  en  usant  de  laquelle  commission  et  puissence  soit  venu  à 
vostre  cognoissence  que  beau  frère  de  Bertaigne,  tant  en  sa  personne 
que  autrement,  en  plusieurs  manières,  et  par  le  moyen  de  ses  terres, 
seigneuries  et  pais,  a  publiquement  et  notoirement  favorisé  les  dicts 
anciens  ennemis,  tant  en  ce  que,  sans  le  congié  de  mon  dict  seigneur 
et  de  nous,  ilaprins  avec  iceulx  ennemis,  despuis  leur  descente  en  ce 
dit  royaume,  abstinence  de  guerre,  pour  luy,  ses  terres  et  subgez,  et  ne 
leur  a  donné  ne  souffert  estre  fait  ou  donné  par  les  siens  aucun 
empeschement,  résistence  ou  destourbier,  jaçoit  ce  que  à  son  veu  et 
sceu,  et  joignent  de  son  pais,  iceulx  ennemis  ayent  conquis  sur  mon 
dict  seigneur  et  autres  ses  parens  et  vassaulx  plusieurs  terres  et  sei- 
gneuries, et  mesmement  celles  de  nostre  très  chier  et  très  amé  cousin, 
le  duc  d'Alançon,  propre  nepveu  d'icelluy  nostre  frère,  sans  y  avoir 
mis  ne  soy  esforcié  de  mectre  aucune  provision,  comme,  par  ce  qui 
pis  est,  que,  par  cris  et  detfenses  pupliques,  il  avoit  fait  crier  et  delfen- 
dre  en  ses  dicts  pais,  ce  que  faire  ne  luy  lésoit,  que  aucuns  de  ses 
vassaulx  et  subgez  ne  alassent  ou  venissent  au  mandement  et  service 
de  mon  dict  seigneur  et  de  nous,  à  rencontre  de  nos  dits  ennemis,  sur 
peine  de  confiscacion  de  corps  et  de  biens,  et  ceulx  qui,  oultre  sa  def- 
fense,  pour  acquicter  leurs  loyautiez  y  estoient  venuz  et,  depuis,  puniz 
et  comme  du  tout  destruiz,  et  par  plusieurs  fois,  sans  le  gré,  consen- 
tement ou  voulenté  de  mon  dict  seigneur  et  de  nous,  a  esté  nostre 
dit  frère,  en  sa  personne,  par  devers  les  diz  ennemis  et  mesmcs  par 
devers  nostre  adversa,ire  d'Angleterre,  à  Rouen  et  ailleurs,  où  il  a  fait 
avecques  lui  plusieurs  secrètes  aliances  et  confédéracions,  à  l'encontre 
de  la  souveraineté  et  seigneurie  de.  mon  dict  seigneur,  en  y  faisant 
aussi  partage  et  division  de  ceste  seigneurie,  pour  en  débouter  du  tout 
mon  dict  seigneur  et  nous,  et  en  bien  démonstrant  la  faveur  et  affec- 
cion  désordonnée,  avecques  les  dampnubles  promesses  et  convenances 
qu'il  avoit  à  yceulx  ennemis,  leur  a  fait  administrer  en  ses  diz  pais 
toutes  nécessitez,  comme  harnois,  chevaulx,  artilleries,  blés,  vins  et 
autres  vivres,  et,  en  ce  et  autrement,  leur  a  donné  toute  faveur,  à  la 
grant  desplesence  toutes  voyes  des  bons  preudes  hommes,  barons, 
nobles  et  autres  du  dit  pais  de  Bertaigne,  lesquels,  pour  la  crainte  de 


496  APPENDICES 

luy,  ny  ont  ousé  contre  ester  ne  mectre  le  remède  tel  que  bien  eussent 
voulu,  et,  pour  ce,  pour  la  très  grant  et  amère  desplesence  de  cuer 
que  avoyes  et  bien  dévoyés  avoir  de  toutes  ces  chouses,  recordans  aussi 
et  ayans  bien  en  memoyre  comment  nostre  dit  frère,  persévérant  en 
sa  malvaise  voulenté,  avoit,  par  ses  ambassadeurs  et  autrement,  empes- 
chié  et  destourbié  l'armée  d'Espaigne,  qui,  la  saison  passée,  étoit  déli- 
bérée pour  venir  au  service  de  mon  dit  seigneur  et  de  nous;  s'efTorce 
auxi  d'empeschier  la  descente  de  l'armée  d'Escoce,  à  présent  estant  en 
nostre  service,  et,  en  contempnant  les  personnes  de  mon  dit  seigneur 
et  de  nous,  et  mescognoissant  l'amour,  révérance  et  obéissence  qu'il 
doit  et  esttenuz  de  faire  à  mon  dit  seigneur,  comme  à  son  souverain, 
et  à  nous,  comme  son  seul  filz  et  héritier,  représentans  sa  personne 
et  régent  son  royaume,  s'est  continuelement,  tant  en  ses  escriptures 
comme  on  fait  de  ses  monoyes,  qu'il  a  fait  faire  et  forgier  en  ses  pays 
et  autrement,  en  plusieurs  manières,  démonstré  et  maintenu  par  son 

1 comme  à  mon  dit  seigneur  ou  à  nous,  sans  y  garder 

l'ordre  * ne  les  droiz  seigneuriaux  de  mon  dit  seigneur,  et,  non 

content  de  ce,  ne  des  faveurs  ainsi  par  luy  données  aux  dits  ennemis, 
a  semblablement,  en  diverses  manières,  porté  et  favorisé  le  fait  et  parti 
des  subgetz  de  ce  royaume  rebelles  et  désobéissans  à  mon  dit  seigneur 
et  à  nous;  vous,  voyans  et  considéi'ans  que  autrement  que  par  voye 
de  fait,  ne  povoit  estre  pourveu  ou  remédié  aux  inconvéniens  qui  par 
la  dampnable  entreprinse  de  nostre  frère,  estoyent  vraisemblablement 
tailliez  de  ensuir  à  la  grant  sole  (?)  et,  par  aventure,  total  destruccion 
de  ceste  dicte  seigneurie,  envers  laquelle  vous  et  les  vostres,  sans 
variacion  aucune,  vous  estes  tousjours  tant  léalraent  et  grandement 
gouvernés  et  acquittés,  considérans  aussi  la  grande  proximictié  de 
lignage  dont  vous  atenez  à  mon  dict  seigneur  et  à  nous,  et  mesme- 
ment  à  nostre  très  chière  et  très  amée  compaigne,  la  Daulphine,  par 
quoy  et  autrement  estoyez  tenuz  et,  non  sans  cause,  bien  affectez  de 
pourveoir  et  résistier  aus  diz  inconvéniens,  ayez,  puis  naguaires,  en 
la  compaignie  de  nosti^e  dit  cousin  d'Avaugour,  vostre  frère,  prins  et 
arresté  icelluy  nostre  frère,  et  semblablement  nostre  cousin  Richart, 
son  frère,  pour  ce  que  bien  savoyez  que  autresfois  s'estoit  mis  en 
armes  et  sur  les  champs  pour  vous  combatre,  pour  tant,  que,  par 
nostre  ordonnance  vous  estoyez  mis  sus  pour  nous  venir  servir,  à 
rencontre  des  diz  anciens  ennemis;  en  faisant  laquelle  prinse  et  arrest 
avez  bien  démonstré  la  grant  léautié  et  bon  vouloir  que  avez  envers 
mon  dict  seigneur  et  nous  et  la  couronne  de  France;  et  il  soit  ainsi 
que  nous,  au  plésir  de  nostre  seigneur,  ayons  ferme  propos  et  soyons 
du  tout  délibérez,  toutes  autres  chouses  arrières  mises,  de  pourveoir 
sur  les  chouses  devant  dites  par  manière  que  ce  soit  ou  bien,  honeur 
et  prouffit  de  mon  dit  seigneur  et  de  nous  et  vous  aussi  et  de  tout  ce 
royaume,  savoir  vous  faisons  que,  nous,  pour  les  causes  et  resons 
devant  touchiées,  iceulx  nos  frères  et  cousin  de  Bertaigne  et  chascun 
d'eulx,  avons  fait  et  constitué,  faisons  et  constituons,  par  ces  présentes, 
noz  prisonniers  et  les  avons  prins  et  prenons  en  nostre  main.  Si,  vous 

1.  2.  Mots  effacés. 


APPENDICES  497 

mandons  et  commandons,  en  commectant,  si  meslier  est,  et  à  chascun 
de  vous,  sur  toute  la  loyautié,  obéissance  et  fidélité  que  devez  à  mon 
dit  seigneur  et  à  nous,  que  les  personnes  de  noz  diz  frère  et  cousin, 
ainsi  par  vous  prinses  et  détenues,  vous,  en  vos  personnes,  si  mestier 
est,  et  autrement,  comme  vous  verrez  le  besoign,  gardes  et  faictes 
gardier,  de  jour  et  de  nuit,  à  très  grant  soing  et  cure,  et  en  telle  dili- 
gence, avec  toute  seurlé  et  puissance  qu'ilz  ne  puissent  estre  délivrez 
en  quelque  manière,  afin  que,  à  nostre  venue  et  retour  vers  les  par- 
ties de  part  delà,  qui  sera  brief,  au  plésir  de  Dieu,  nous  en  puissiez 
rendre  bien  compte   et   que  par  eulx  puissions  estre  advertiz  des 
entreprises  et  crimmes  (?)  de  nostre  dit  adversaire  et  des  diz  rebelles 
et  désobéissans  à  mon  dit  seigneur  et  à  nous,  et,  au  seurplus,  faire 
et  donner  tel  appoinctement  que  les  bons  subgez,  nobles,  et  autres 
du  dit  pays  de  Bretaigne  puissent  servir  mon  dit  seigneur  et  nous,  à 
rencontre  des  diz  ennemis  et  autrement  faire  leur  devoir  envers  ceste 
seigneurie,  comme  nous  savons  qu'ilz  y  ont  entière  voulenté;  et,  en 
cas  que  aucuns  se  vouldroyent  enforcier,  en  nostre  absence,  de  pro- 
céder, en  ceste  occasion,  par  voye  de  fait,  à  l'encontre  de  vous  ou  des 
vostres,  nous,  par  ces  mesmes  présentes,  mandons  et  commandons  à 
tous  lieutenans.  mareschaulx,  maistre  des  arbalestriers,  amiral,  cap- 
pitaines  de  gens  d'armes  et  de  trait,  seneschalx,  baillifs  et  tous  autres 
justiciers,  vassaulx  et  subgez  de  mon  dit  seigneur  et  nostres,  prions 
et  requérons  tous  autres  que  en  ce  vous  aydent  et  secourent,  par 
toutes  voyes  et  manières  à  eulx  possibles,  sans  riens  y  espargner,  car 
en  ce  les  soustiendrons,  porterons  et  advouberons  en  touz  endroiz. 
Mandons  aussi  à  tous  cappitaines  et  gardes  de  bonnes  villes,  citiez, 
chasteaux,  forteresses,  pons,  ports,  passages  et  destretz  de  ce  dit 
royaume  que  à  vous  et  à  tous  ceulx  de  vostre  compaignie,  service  et 
adveu  donnent,  en  ce  cas,  passage,  retour,  recept,  reffuge,  vivres  et 
toutes  autres  cbouses  nécessères,  de  jour  et  de  nuyt,  et  tout  ainsi  que 
à  nostre  propre  personne,  toutes  et  quantes  fois  que  requis  en  seront. 
Donné  en  la  cité  de  Carcassonne,  soubz  nostre  scel,  ordonné  en 
l'absence  du  grant,  le  xvi«  jour  de  mars,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens 
et  dix  neuf.  Ainsi  signé,  par  monseigneur  le  Régent  Daulphin,  en  son 
grant  conseil. 

ViLLEBRESME. 

{Archives  des  Basses-Pyrénées,  E,  640.  Copie  sur  parchemin  posté- 
rieure de  quelques  jours  à  l'original.  Il  y  a  une  copie  moderne  de  ce 
document  dansDoat,  t.  161,  f"  53-58,  avec  les  mêmes  lacunes.) 


XV 

DON   DU   COMTÉ   d'ÉTAMPES    A  RICHARD   DE   BRETAGNI*:    (1421,  8   mai) 
[p.  61,  231,  384] 

Ce  comté  appartenait  au  duc  de  Berry,  qui  le  donna,  en  1387,  à 
son  frère,  Philippe  le  Hardi.  Il  passa  ensuite  à  Jean  sans  Peur  ;  mais, 

RlCIlEMONT.  32 


498  APPENDICES 

après  l'assassinat  de  L.  d'Orléans  (1407),  le  due  de  Berry  révoqua  la 
donation  qu'il  avait  faite  et  reprit  le  comté  dÉtampes.  Pendant  la 
guerre  entre  les  Bourguignons  et  les  Armagnacs,  il  permit  à  Ch.  d'Or- 
léans de  mettre  garnison  dans  Étampes.  En  14H,  le  duc  de  Bour- 
gogne vint  lui-même,  avec  le  Dauphin,  assiéger  cette  ville,  qui  fut 
prise  le  15  décembre,  malgré  la  vaillance  de  son  capitaine,  L.  de 
Bosredon  (Fr.  26038,  n"  4584). 

Jean  sans  Peur  ne  cessa  de  réclamer  le  comté  d'Étampes.  Par  le 
traité  de  Pouilly  (1419),  le  Dauphin  lui  en  reconnut  la  possession,  et 
ce  traité  fut  confu'mé  par  Charles  VI,  le  19  juillet  (Moreau,  1425, 
n.s77  .^  b_  78^  79.  Ordonn.,  XII,  264).  Aprèsle  traité  de  Troyes,  le  Dau- 
phin, ne  gardant  plus  aucun  ménagement  envers  Philippe  le  Bon, 
donna  le  comté  d'Étampes  à  Richard  de  Bretagne,  frère  de  Jean  V 
et  de  Richemont  (8  mai  1421). 

Plus  tard,  Charles  VII  confirma  ce  don,  par  lettres  du  mois  d'oc- 
tobre 1425.  (Ces  lettres  de  1421  et  de  1425  sont  aux  Arch.  de  la 
Loire-Inférieure,  cass.  H,  E,  31;  les  Preuves  de  fHist.  de  Bretagne 
ne  contiennent  que  les  lettres  de  1425.)  Néanmoins  Philippe  le  Bon 
garda  le  comté  d'Étampes,  qu'il  céda,  en  1434,  à  son  cousin  Jean  de 
Bourgogne,  comte  de  Nevers  (fils  de  Philippe,  comte  de  Nevers,  tué 
à  la  bataille  d'Azincourt,  et  de  Bonne  d'Artois),  dont  il  avait  épousé 
la  mère,  en  1422.  (Anselme,  I,  238.)  Dans  un  traité  qu'il  conclut,  la 
même  année  (1434,  17  septembre),  avec  Jean  de  Bourgogne,  Riche- 
mont  laissa  prendre  à  celui-ci  le  titre  de  comte  d'Etampes.  Il  avait 
alors  un  tx'op  grand  intéi^êt  à  ménager  la  maison  de  Bourgogne  pour 
soulever,  sur  ce  point,  une  discussion  irritante  (voy.  Append.  LIX). 
Au  congrès  d'Arras,  on  s'occupa  de  cette  question,  sans  la  résoudre. 
Richard  de  Bretagne  n'en  continua  pas  moins  de  s'intituler  comte 
d'Etampes,  comme  Jean  de  Bourgogne,  son  compétiteur.  Après  la  mort 
de  Richard  (1438),  son  fils  François  porta  aussi  ce  titre  et  réclama  le 
comté  d'Étampes.  Le  30  décembre  1441,  Marguerite  d'Orléans,  comme 
tutrice  de  son  fils  François,  rendit  hommage  au  roi  pour  le  comté 
d'Etampes  (A.  Longnon,  Les  limites  de  la  France,  etc.,  dans  la  Bévue 
des  questions  histor.,  t.  XVIII,  p.  533,  note  2). 

Quand  Ch.  d'Orléans  eut  abandonné  la  coalition  féodale,  pour  se 
réconcilier  avec  le  roi,  en  1442,  François  de  Bretagne,  qui  était  son 
neveu,  par  sa  mère,  profita,  comme  lui,  de  cette  défection.  Charles  VII, 
peu  satisfait  de  Philippe  le  Bon  et  n'ayant  plus  à  le  ménager  autant 
qu'avant  le  traité  d'Arras,  confirma,  en  juin  1442,  la  donation  qu'il 
avait  faite  à  Richard  de  Bretagne  (Arch.  de  la  Loire-Inférieure, 
cass.  34,  E,  93)  et  ordonna,  peu  après,  à  J.  de  Bourgogne  de  restituer 
le  comté  d'Etampes.  J.  de  Bourgogne,  comte  de  Nevers,  et  Philippe 
le  Bon  s'opposèrent  à  l'entérinement  des  lettres  du  roi  (X^a  4799,  au 
mardi  20  novembre  1442,  f°  146  y°,  au  jeudi  24  janvier  1443, 
f»  181  v°).  Alors  s'engagea,  devant  le  parlement  de  Paris,  un 
procès  interminable  (Xia  1482,  fos  189  v°,  237,  au  jeudi  12  dé- 
cembre 1443).  Au  bout  de  trente  ans,  le  parlement  rendit  un  arrêt 
qui  ordonnait  la  réunion  du  comté  d'Etampes  au  domaine  royal. 

En  résumé,  Richard  et  François  de  Bretagne,  malgré  la  bonne  vo- 


APPENDICES  499 

lonté  de  Charles  VII,  n'avaient  jamais  eu  que  le  titre  de  comtes 
d'Étampes. 

Voir  Max.  de  Mont-Rond,  Essai  hist.  sur  la  ville  d'Étampes,  Etam- 
pes,  1836-1837,  in-8o,  t.  H,  p.  5-22.  Voir  aussi  le  traité  conclu  à  Nantes 
le  18  mai  1424,  articles  vin  et  ix,  dans  M.  de  Beaucourt,  Hist.  de 
Charles  Vil,  II,  354-355,  elle  traité  d'Arras,  de  1435  (ci-dessus,  p.  231). 


XVI 

SERMENT   DE    FIDÉLITÉ    PRÊTÉ    PAR  LE   COMTE    DE   RICHEMONT   AU   DrC 
DE   BRETAGNE  ET  A  SON  FILS  (1422,  5  aOÛt)  [p.  67,  455,  note  3]. 

Nous,  Artur,  fils  de  duc  de  Bretaig^ne,  conte  de  Richemont  et 
d'Ivry,  promectons  et  jurons,  en  parole  de  loyal  chevalier  et  par  la 
foy  et  serement  de  nostre  corps,  de  vouloir  et  procurer  et  pourchasser 
à  tout  nostre  pouvoir  le  bien,  honeur  et  prouffit  de  monseigneur  le  duc 
nostre  frère,  de  monseigneur  le  conte  de  Moutfort,  son  filz  ainsné,  et 
de  ses  autres  enffans  malles  (sic)  et  de  leur  aider  et  secourir  de  nostre 
puissance  à  garder  leur  principaulté  et  duchié  de  Bretaigne  et  leurs 
terres  et  seigneuries  vers  tous  et  contre  tous  qui  peuvent  vivre  et 
mourir,  leur  dommage  eschever,  et,  se  nous  savons,  ou  nous  vient  à 
cognoissance  aucune  chose  qui  leur  feust  à  dommage  ou  deshoneur 
de  leurs  personnes,  ou  de  leurs  terres  ou  seigneuries,  le  leur  révéler 
et  mectre  peine  à  l'eschever,  en  tout  ce  que  nous  pourrons,  et  envers 
nostre  dit  seigneur  et  frère  et  mes  diz  seigneurs  ses  enffanz  nous 
porter,  en  toutes  choses,  comme  bon,  vray  et  loyal  frère  et  ce  tenir 
ferme  et  accomplir  loyaument  et  en  bonne  foy,  sans  jamais  faire  ne 
venir  à  rencontre.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  passée  ceste  pré- 
sente cédule  de  nostre  main,  pour  maire  fermeté  et  scellé  de  nostre 
scell,  le  cinqesme  [sic)  d'aoust,  l'an  mil  quatre  cens  vingt  et  deux. 

Artur. 
Par  monseigneur,  de  son  commandement  : 

J.    DE    ChATEAUGIRON. 

(Original  aux  Arch.  de  la  Loire-Inférieur,  cass.  57,  E,  147.  Copie 
aux  Arch.  du  ministère  des  aff.  étr.,  t.  362,  f"  68  v»). 


XYII 

CHARLES  VI  s'engage  ENVERS  LE  DUC  DE  BRETAGNE  A  NE  POINT 
TRAITER  SANS  SON  CONSENTEMENT  AVEC  LE  DAUPHIN  (1422,  8  Oc- 
tobre) [p.  69]. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roi  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lectres  verront,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  considérans 


500  APPENDICES 

les  crimes,  fautes  et  delîtz  commis  et  perpétrez  par  Charles,  soy  disant 
Dalphin  de  Viennoys,  à  rencontre  de  nous  et  notre  souveraineté  et  aussi 
contre  la  personne  de  nostre  très  chier  et  très  amé  fils  le  duc  de  Bre- 
taingne,  lequel  a  autreflfois  fait  prendre  et  emprisonner  et,  de  rechief, 
commandé  à  prendre  et  faire  murdrir  et  tuer,  comme  entendu  avons, 
pour  lesquelles  causes  icellui  nostre  filz  de  Bretaingne  a  été  grande- 
ment injurié  et  intéressé  et  ne  se  doivent  tels  énormes  cas,  crimes  et 
délitz  passer  ne  tolérer  sans  deue  punicion  et  réparacion,  et,  enregart 
à  ce  que  icellui  nostre  filz  a  juré  la  paix  final  et  perpétuele  dernière 
faicte  entre  nous  et  nostre  très  chier  et  très  amé  filz,  le  roy  d'Angle- 
terre, pour  nous  et  lui  et  les  royaumes,  pais  et  subgez  de  nous  et  de 
lui,  avons,  par  l'advis  et  délibéracion  de  nostre  très  chier  et  très  amé 
cousin,  le  duc  de  Bedfford  et  des  gens  de  nostre  grant  conseil,  promis 
à  nostredit  filz  de  Bretaingne  et  promectons,  par  ces  présentes,  en 
bonne  foy  et  parole  de  Roy,  que  avec  le  dit  Charles,  soy  disant  Dal- 
phin, ne  ceulx  de  sa  partie  nous  ne  ferons  traictié,  appointement,  ou 
accord,  sans  l'advis  et  consentement  de  nostredit  filz,  le  duc  de  Bre- 
taingne, et  qu'il  y  soit  comprins,se  bon  lui  semble.  En  tesmoingde  ce, 
nous  avons  faict  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes.  Donné  à  Paris,  le 
viii»  jour  d'octobre,  fan  de  grâce  mil  quatre  cens  vint  et  deux  et  de 
nostre  règne  le  quarante-troisième. 

Par  le  roi,  en  son  conseil  : 
De  Rinel. 

(Original  aux  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  34,  E,  93.  Copie  aux 
Arch.  des  Aflf.  étr.,  t.  362,  f°  69.) 


XVIII 

VOYAGE   DE   RICHEMONT   A   ANGERS    (1424,   6   OCtobre)  [p.  85]. 

Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont  et  d'Ivry,  à 
nostre  amé  trésorier,  Jamet  Lamoureux,  salut.  Savoir  vous  faisons  que, 
pour  cest  nostre  présent  voiaige  d'Angers,  par-devers  le  roy,  nous 
avons  ordonné,  conclut  et  délibéré  mener  avecques  nous,  pour  nous 
conduire  et  accompaigner  oudit  voiaige,  le  nombre  et  quantité  des 
chevaliers,  escuiers,  cappitaines  et  gens  d'armes  cy-dessus  nommez  *, 
et  declairez  qui  sont  en  nombre  neuff  bannerez,  douze  chevaliers, 
comptez  Roland  Madeuc  et  Philibert  Vaudrey  pour  deux  chevaliers,  et 
huit  vingz  deiz  et  neuff  escuiers,  selon  qu'il  peut  plus  à  plain  appa- 
roir par  les  retenues  des  diz  capitaines,  dont  cy-dessus  est  fait  man- 
cion;  et,  pour  le  souday  d'icieulx,  avons  ordonné  et  ordonnons,  savoir 
est,  au  sire  de  Beau  manoir,  la  somme  de  cinquante  escuz  d'or,  pour 
sa  personne;  à  messire  Jehan  de  Chevery  cinquante  Uvres  monnoie,  à 

1.  Leurs  noms  se  trouvent  dans  la  l"""  partie  de  ce  document.  Voir  D.  Lo- 
bineau,  TI,  994,  ou  les  Preuves  de  D.  Morice,  II,  1147.  Ces  auteurs  n'ont 
pas  publié  la  seconde  partie  de  cette  pièce. 


APPENDICES  501 

chacun  des  autres  bannerez  la  somme  de  soixante  livres  monnoie; 
à  chacun  des  diz  chevaliers  la  somme  de  trente  livres  et  à  chacun 
des  diz  escuiers  la  somme  de  quinze  livres  leur  estre  par  vous  paiées, 
pour  leurs  gaiges  d'un  mois  à  chacun  d'eulx,  selon  sa  porcion,  comme 
dessus  est  dit.  Si,  vous  mandons  et  commandons  que,  sur  toutes  et 
chacune  vos  receptes,  vous  paiez  lesdiz  bannerez,  chevaliers,  cappi- 
taines,  tant  pour  eulx  que  pour  les  diz  escuiers  dessus  nommez,  des 
sommes  par  nous  leur  ordonnées,  comme  dit  est;  et  gardez  que  en 
ce  n'ait  aucun  deffaiilt;  car  ainsi  le  voulons.  Et,  par  rapportant  ces 
présentes,  o  les  quictances  desdiz  cappitaines  ad  ce  pertinentes,  ce 
qui  par  vous  sur  ce  leur  sera  paie,  comme  devant  est  dit,  nous  vous  fe- 
rons allouer  en  clière  mise  et  rabattre  de  vos  receptes  à  noz  comptes, 
pour  tout  ou  mestier  en  aurez,  par  nos  amez  et  féaulx,  les  gens  de 
noz  diz  comptes,  lesquels  nous  mandons,  par  ces  présentes,  ainsi  le 
fere,  sans  aucun  reffus  ou  contredit.  Donné  à  Nantes,  le  sixième  jour 
d'octobre  l'an  mil  quatre  cens  vingt  et  quatre. 

Artcr. 

Par  monseigneur,  de  son  commandement  : 
J.  DE  Château GiHON. 

(Original  aux  Arch.  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  51,  E,  133.) 


XIX 

PROJET   d'assassinat   ETE   PHILIPPE   LE    BON   PAR   LES   ANGLAIS     (1424) 

[p.  87]. 

Sous  le  titre  qui  précède,  M.  A.  Desplanque,  archiviste  du  dépar- 
tement du  Nord,  a  écrit  un  mémoire  historique  auquel  M.  Vallet  de 
Viriville,  l'auteur  d'une  savante  histoire  de  Charles  VII,  a  ensuite 
ajouté  quelques  notes.  Ce  travail  consciencieux  a  pour  but  de  faire 
connaître  plusieurs  documents  conservés  dans  les  archives  du  dépar- 
tement du  Nord  et  qui,  s'ils  étaient  authentiques,  prouveraient  que 
les  ducs  de  Bedford  et  de  Glocetter,  avec  les  comtes  de  Suffolk  et  de 
Salisbury,  ont  cherché,  pendant  les  années  1424,  1423  et  1426,  tous  les 
moyens  d'attirer  le  duc  de  Bourgogne  dans  un  piège,  pour  le  faire 
périr.  Malheureusement,  ces  pièces  ont  été  fabriquées  par  un  secrétaire 
de  Suffolk,  nommé  Guill.  Benoît  ';  du  moins  c'est  ce  que  celui-ci  a 
confessé  lui-même,  dans  la  première  des  deux  dépositions  qu'il  fît 
en  1427.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'auteur  de  ces  pièces  connaissait  si  bien 
les  hommes  et  les  faits  dont  il  parle,  qu'elles  ont  une  vraisemblance 
incontestable.  C'est  là  ce  qu'admet  M.  H.  Vallon  (Jeanne  d'Arc,  I,  344), 
qui,  d'ailleurs,  ne  veut  pas  accepter  comme  des  preuves  les  dénoncia- 

1.  Voy.  Pièces  orig.,  t.  290,  dossier  6286,  n»  13,  au  mot  Benoit.  —  Vingt 
ans  plus  lard,  on  trouve  un  Guill.  Benoît,  serviteur  de  L.  de  Bueil  (de 
Beaucourl,  Le  caractère  de  Charles  VII,  dans  le  t.  XIV  de  la  Revue  des  ques- 
tions hislor.,  p.  99). 


S02  APPENDICES 

tions  et  les  aveux  d'un  faussaire.  Quant  à  M.  Desplanque,  il  arrive, 
après  un  minutieux  examen,  à  celte  conclusion  que,  si  les  pièces  sont 
fausses,  les  faits  sont  vrais,  c'est-à-dire  que  Glocester,  Bedford,  Suffolk 
et  Salisbury  «  ont  médité,  durant  deux  ans  et  plus,  la  perte  du  Bour- 
guignon »  (p.  56).  Il  y  a  donc  là  des  renseignements  dont  il  faut  user 
avec  une  grande  réserve,  mais  qu'on  ne  doit  pas  écarter  d'une  ma- 
nière absolue. 

Reste  à  examiner  quel  fut  le  rôle  de  Richemont  dans  cette  œuvre 
diabolique,  et  on  ne  peut  l'entrevoir  que  dans  la  première  déposi- 
tion de  G.  Benoît  (pièce  VI  du  mémoire  de  M.  Desplanque,  p.  64), 
car  il  n'en  est  pas  question  dans  la  seconde  (pièce  Vil,  p.  69),  quoi 
•qu'en  dise  M.  H.  Wallon  {Jeanne  d'Arc,  I,  345).  S'il  faut  en  croire 
■cette  première  déposition  (et  elle  a  bien  tous  les  caractères  de  la 
Traisemblance)  ,  G.  Benoît,  personnage  fort  peu  recommandable, 
avait  déjà  fabriqué  quatre  des  cinq  pièces  fausses  à  l'insu  de  Riche- 
•mont  et  avant  d'être  en  rapport  avec  lui,  ou  avec  ses  agents.  Cet 
intendant  de  Suffolk,  brouillé  avec  son  maître  et  cherchant  à  tirer 
Ile  meilleur  parti  possible  des  secrets  qu'il  connaissait,  vit  à  Rouen,  en 
1426,  un  gardien  des  frères  mineurs,  nommé  Guill.  Fortin,  qui  lui 
•donna  l'idée  et  les  moyens  de  s'adresser  au  connétable.  Il  ne  faut  pas 
•oublier  que  G.  Benoît,  intendant  de  Suffolk,  avait  pu  connaître 
Artur  de  Bretagne,  quand  ce  dernier  était  sous  la  surveillance  de  ce 
seigneur  anglais,  en  Normandie.  En  tout  cas,  il  résulte  des  déclara- 
tions mêmes  de  Benoît  que  celui-ci  était  déjà  muni  des  quatre  pre- 
jnières  pièces,  quand  Briffault  et  J.  de  Clienery  le  conduisirent  à 
Angers  vers  le  connétable;  que  là,  «  conversant  avec  le  dit  de  Riche- 
mont,  il  lui  monstra  toutes  les  escriptures  dessus  dictes,  tant  en  lettres 
•originales  comme  en  mémoires,  et  que  lors  le  dit  de  Chenery  lui  dist 
et  affirma  que  toutes  les  choses  déclairées  en  ycelles  lettres  et  mé- 
.moires  estoient  vrayes  et  que  il,  chevalier,  les  oseroit  bien  affirmer 
avecques  lui  qui  parle,  parce  qu'il  en  avoit  par  avant  assez  sceu  par 
autres,  etc.  »  (p.  65  du  mémoire).  Toutefois  Richemont  ne  se  serait 
ipas  opposé  au  remaniement  de  ces  pièces ,  et  il  aurait  même  fait 
ou  laissé  fabriquer  sur  un  blanc-seing  de  Suffolk,  une  autre  lettre,  dont 
il  voulait  se  servir  pour  exciter  le  duc  de  Bretagne  contre  son  ennemi 
personnel,  le  chancelier  Jean  de  Malestroit  (p.  42  et  68  du  mémoire). 
Ce  fut  un  des  serviteurs  de  Richemont,  Jean  de  Chenery  *,  autre  in- 
trigant fort  peu  honorable,  à  ce  qu'il  semble,  qui  dirigea  toute  cette 
affaire,  comme  si  Richemont  eût  répugné  à  entrer  lui-même  dans 
•cette  vilaine  besogne  (p.  67,  68,  69  du  mémoire). 

En  somme,  le  connétable  ne  prit  pas  l'initiative  de  ces  machina- 
tions, mais  il  ne  dédaigna  pas  de  les  continuer,  en  s'y  associant,  pour 
brouiller  le  duc  de  Bourgogne  avec  les  Anglais,  et  le  duc  Jean  V  avec 

1.  Jean  de  Chenery  (ou  Ghevery,  ou  Ghinery)  est  indiqué  parmi  les  che- 
valiers bannerets  qui  accompagnaient  Richemont  à  Angers,  en  1424.  (Voy. 
ci-dessus,  Append.  X\1II.)  Plus  tard,  il  fut  envoyé  par  Richemont,  avec 
frère  Guillaume  Ailes,  prieur  de  la  Celle-en-Brie,  auprès  du  roi.  (Fr.  20684, 
i"  573.) 


APPENDICES  503 

le  chancelier  de  Bretagne.  Sans  doute  le  but  était  louable,  et  la  poli- 
que,  dans  ce  temps-là,  n'était  guère  scrupuleuse,  mais  ce  n'est  pas 
une  raison  pour  dire  que  la  fin  justifiait  les  moyens,  et,  si  la  première 
déposition  de  G.  Benoît  est  véridique  autant  que  vraisemblable,  elle 
autorise  à  suspecter  grandement  la  loyauté  de  Richemont. 

Voir  Michelet,  Hist.  de  France,  V,  139  et  380,  note  75;  Vallet  de  V., 
Hist.  de  Charles  VII,  I,  433  et  note  1  ;  H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  p.  37 
et  344-346  (app.  Il);  Desplanque,  Projet  d'assassinat,  etc.,  Bruxelles, 
Hayez,  1867,  in-4''.  Il  est  à  remarquer  que  D.  Salazard  {Hist.  de 
Bourgogne,  IV,  il  1-1 12,  et  Preuves,  p.  xv),  sans  connaître  les  lettres 
de  Suffolk,  n'en  ignorait  pas  l'existence. 


XX 

ENGAGEMENT  DU  COMTE  DE  RICHEMONT  ENVERS  LES  CONSEILLERS 

DE  CHARLES  VII  (1425,  8  mars),  [p.  90]. 

Ce  sont  les  choses  que  monseigneur  le  conte  de  Richemont  jure  et 
promet  au  Roy,  sur  les  saints  Evangiles  de  Dieu,  par  lebaptesme  qu'il 
apporta  des  saints  fonts,  par  sa  part  de  paradis  et  sur  son  honeur,  en 
prenant  l'office  de  la  connestablerie  de  France,  tenir,  garder  et  accom- 
plir entièrement,  sans  aucune  fraude  ou  malengin,  ne  sans  souffrir, 
par  personnes  ne  en  manières  quelconques,  venir  à  rencontre  des 
dites  choses,  ou  aucune  d'icelles;  oultre  et  par  dessus  les  seremens 
ordinaires  touchans  ledit  office  de  connestable. 

Premièrement,  jure  et  promet  que,  pour  quelconque  chose  qui 
puisse  avenir,  ne  consentira,  en  manière  quelconque,  ainçois  de  tout 
son  povoir  l'empeschera,  que  la  personne  du  Roy  soit  nulle  part  qu'il 
y  ait  seigneur  plus  fort  que  le'Roy,  mais  sera  toujours  le  Roy  le  plus 
fort,  a  son  povoir,  ou  à  tout  le  moins  aussi  fort,  s'il  luy  plaist;  et  sera 
le  roy  accompaigné,  en  ce  cas,  de  telles  gens  comme  il  plaira  au  Roy. 

Item,  jure  et  promet  que,  de  tout  son  povoir,  il  aidera  à  tenir  la 
personne  du  Roy  en  franchise  et  liberté,  en  usant  de  sa  seigneurie 
franchement  et  pleinement,  en  toute  chose,  comme  il  a  fait  jusqu'à 
présant. 

•  Item,  jure  et  promet  que  les  serviteurs  du  Roy,  c'est  assavoir  mes- 
sire  Tanguy  du  Chastel,  prévost  de  Paris,  le  président  *,  le  sire  de  Giac, 
G.  d'Avaugour  et  Pierre  ^  (Frotier)  aymera,  soutiendra  et  portera,  ne, 
pour  quelconque  chose,  ne  fera,  fera  faire,  ou  consentira  chose  qui 
soit  au  domaige  de  leurs  personnes  ne  de  leurs  biens  et  estatz.  Et 
pareillement  feront  serement  de  vouloir  le  bien  de  monseigneur  le 
duc  de  Bretaigne  et  le  pourchasser,  à  leur  povoir,  comme  ils  feraient 
le  bien  du  Roy;  et,  avec  ce,  le  bien  de  mon  dit  seigneur  le  conte  de 
Richemont,  ainsy  qu'il  leur  promet.  _ 

1.  J.  Lonvet. 

2.  Le  mot  Frotier  manque  dans  la  copie  de  D.  Rousseau. 


504  APPENDICES 

Item,  jure  et  promet  que,  pour  quelconque  paix,  traictée  ou  à  traic- 
ter,  ne  souffrera,  ne  ne  consentira,  pour  quelconque  cas  advenu, 
l'esloignement  des  serviteurs  du  Roy  dessus  dits  d'avecques  le  Roy,  ne 
le  despoinctement  de  leurs  estatz;  ainçois,  qui  en  parleront,  empes- 
chera  la  chose  *. 

Item,  des  gens  d'armes  pour  estre  entour  du  roy  et  l'accompaigner, 
s'en  rapportera  au  roy. 

Item,  le  roi  lui  baille  la  connestablerie  en  la  forme  et  comme  ses 
prédécesseurs. 

En  tesmoing  des  quelles  choses,  ledit  monseigneur  le  conte  de 
Richemont  a  cy  mis  son  seing  manuel  et  y  a  fait  raectre  son  scel,  le 
viii*  jour  de  mars  ^,  l'an  mil  quatre  cens  vingt  et  quatre. 

Artur. 


XXI 

LES  DROITS  DU  CONNÉTABLE   [p.  96]. 

Le  connestable  de  France  a  tel  droit  pour  le  fait  des  guerres  : 

Premièrement,  le  connestable  est  par-dessus  tous  les  autres  qui 
sont  en  l'ost,  excepté  la  personne  le  Roy,  s'il  y  est,  soient  ducs, 
barons,  contes,  chevaliers,  escuiers,  sodoiers,  tant  de  cheval  comme 
de  pié,  de  quelque  estât  qu'ilz  soient,  et  doivent  obéir  à  luy. 

Item,  les  mareschaux  de  l'ost  sont  dessoubz  lui  et  ont  leur  office 
distinctes  de  recevoir  les  gens  d'armes,  ducs,  contes,  barons,  cheva- 
liers, escuiers  et  leurs  compaignons,  et  ne  peuvent  ne  ne  doivent  che- 
vaucher ne  ordonner  batailles,  ce  n'est  par  le  connestable,  ne  faire 
bans  ne  proclamacions  en  l'ost,  sans  l'assentement  du  Roy  ou  du 
connestable.  • 

Item,  le  connestable  doit  ordonner  toutes  les  batailles,  les  chevau- 
chées et   de  (sic)  toutes  les  establies  3. 

Item,  touteffoiz  que  l'ost  se  remue  de  place  en  autre,  le  connestable 
prent  et  livre  toutes  les  places,  de  son  droit,  au  Roy  et  aux  autres  de 
l'ost,  selon  leur  estât. 

Item,  le  connestable  doit  aler  en  l'ost  devant  la  bataille,  tantost 

1.  Cet  article  vise  les  négociations  avec  les  ducs  de  Bourgogne  et  de 
Bretagne. 

2.  Il  y  a,  dans  la  copie  de  D.  Housseau,  le  huitième  jour  de  mars  et  non 
le  septième  jour  de  février,  comme  on  le  voit  dans  Vallet  de  V.,  Charles  VII, 
l,  440.  D'ailleurs  la  copie  de  D.  Housseau  présente  elle-même  quelques 
inexactitudes  de  forme  (D.  Housseau,  IX,  n»  3831,  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale). Bien  que  cette  transaction  soit  datée  du  8  mars,  il  est  évident 
qu'elle  avait  été  arrêtée  avant  le  7,  c'est-à-dire  avant  que  Richemont  reçût 
l'épée  de  connétable.  Ce  document  a  été  publié  également  par  M.  de 
Beaucourt  {Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  86-87). 

3.  C'est-à-dire  des  garnisons  et  peut-être  aussi  des  quartiers  dans  le 
camp,  d'après  le  P.  Daniel,  Hist.  de  la  Milice  Française,  I,  p.  177. 


APPENDICES  SOS 

après  le  maistre  des  arbalestriers,  et  doivent  estre  les  mareschaulx  en 
sa  bataille. 

Item,  le  Roy,  s'il  est  en  l'ost,  ne  doit  chevaucher,  ne  les  autres 
batailles  ne  doivent  chevaucher  fors  par  l'ordonnance  et  le  conseil  du 
ronnestable. 

Item,  le  connestable  a  la  cure  d'envoyer  messagers  et  espies,  pour 
le  fait  de  l'ost,  partout  où  il  voit  qu'il  appartient  à  faire,  descouvreurs 
et  autres  chevaucheurs,  quant  il  croit  que  mestier  en  est. 

Item,  le  connestable  a,  de  tous  ceulx  qui  sont  retenuz  à  gaiges  le 
Roy,  une  journée  pour  son  droit,  dès  que  ilz  sont  retenuz,  et,  dès  que 
ilz  prennent  le  premier  paiement,  peut  le  connestable  recevoir  son 
droit,  s'il  lui  plaist  •. 

Item,  de  ceulx  qui  ne  prennent  gaiges  du  Roy,  mais  ont  aucun  cer- 
tain salaire,  ou  restitucion  d'argent,  ou  d'autre  chose,  puis  que  l'en 
chevauche  à  bannière  desploiée,  le  connestable  doit  avoir  son  droit 
pour  le  service  des  dessus  diz,  sur  ceulx  qui  prennent  gaiges,  despens, 
salaire  ou  restitucion,  si  comme  dessus  est  dit. 

Item,  le  connestable  prent  devers  les  trésoriers  de  la  guerre  ses 
droitures  de  tous  ceulx  qui  comptent  par  devers  lui,  c'est  assavoir  une 
journée,  autant  comme  ilz  comptent  par  journée,  quelle  somme  que 
ce  soit. 

Item,  le  connestable  prent  une  journée  de  sodoiers  de  cheval  et  de 
pié  qui  sont  dans  la  retenue  du  maistre  et  du  clerc  des  arbalestriers, 
et  le  maistre  et  le  clerc  des  arbalestriers  en  prennent  une  autre. 

Et  ainsi  est-il  acoustumé  de  tous  jours  du  temps  passé. 

Ista  jura  connestabularii  sunt  extrada  de  Caméra  Compotorum  et 
tradita  domino  Oliviero  Clichon  connestabulario  Francie ,  mense 
Januarii  mcccIxxxi. 

(Y*  f»  133  V".  Voy.  aussi  le  P.  Daniel,  t.  I,  p.  170  et  suiv.  ;  Fr.  23940, 
P>«  9,  12,  13,  36-38.) 


XXII 
LETTRE    DE    CHARLES    YII    AUX    LYONNAIS    (1425,   30    mars)    [p.  97]. 

Chiers  et  bien  amez,  pour  besongner  et  appointer  sur  le  fait  de 
la  paix,  laquelle  nous  avons  entencion  d'entretenir  et  poursuir  de 
tout  nostre  povoir,  toutes  autres  choses  arrière  mises,  laquelle  est  en 
bonne  disposicion  de  venir  à  bonne  conclusion,  ainsi  que  avez  peu 
savoir  par  voz  gens,  qui  ont  estez  par-devers  nous,  que  le  connestable 
et  les  ambaxadeurs  de  beau  frère  de  Bertaigne  et  de  beau  cousin  de 
Savoye  y  ont  esté.  Nous  avons  ordonné  noz  amez  et  feaulx  cousins  et 
conseilliers,  le  conte  de  Vendosme,  le  conte  Daulphin  d'Auvergne,  les 
arcevesques  de  Reins,  de  Lyon,  de  Tholose,  l'évesque  du  Puy,  maistre 

1.  Il  en  est  de  même  quand  les  troupes  changent  de  garnison  (voy.  le 
P.  Daniel,  I,  174-173). 


506  APPENDICES 

Adam  de  Cambray,  président  en  nostre  parlement,  le  bailly  de  Lyon 
et  ung  de  noz  secrétaires,  pour  aller  à  Montluel,  et  là  besongner  sur 
lesdites  matières,  avec  les  gens  de  nos  diz  frère  de  Bretaigne  et  cousin 
de  Savoye,  qui  doivent  estre  audit  Montluel  le  xvi^  jour  d'avril  prou- 
chaiu  venant.  Et,  pour  ce  que,  en  ces  matières,  qui  tant  nous  tou- 
chent et  dont  nous  désirons,  sur  toutes  autres  choses,  avoir  bonne 
conclusion,  voulons  vous  en  estre  bienadvertiz  et  icelles  vous  commu- 
niquer, nous  vous  mandons  et  expressément  enjoignons  que  vous 
eslisiez  d'entre  vous  ung  homme  honneste  et  bien  savant,  pour  envoler 
audit  lieu  de  Montluel,  au  jour  dessusdit,  et  là  trouvera  nosdites 
gens,  lesquelz  lui  diront  nostre  entencion  sur  les  choses  dessusdites. 
Et  gardez,  comment  qu'il  soit,  qu'il  n'y  ait  faulte.  Donné  à  Chinon,  le 
xxx«  jour  de  mars. 

Charles.  Dkluce. 

(Archives  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  22,  f"  72.) 


XXIII 

RÉSUMÉ  d'une  lettre  DU  DUC  DE  BRETAGNE,  JEAN  V,  AUX  HABITANTS 

DE  TOURS  (1425,  13  juin)  [p.  102]. 

Dans  le  t.  III  des  Délibérations  du  conseil  de  la  ville  de  Tours,  on 
trouve,  à  la  date  du  21  juin  1425,  le  résumé  d'unes  lettres  closes,  en- 
volée à  la  ville,  par  monseigneur  le  duc  de  Bretagne,  le  13  juin,  dans 
laquelle  il  déclare  «  avoir  toujours  eu  et  encores  a  parfait  désir  et  vou- 
loir au  bien  de  la  paix  et  union  de  ce  royaume,  et  que  à  icelle,  pour 
achever  et  conclurre,  de  sa  part  et  puissance,  il  tiendra  la  main  et, 
pour  ce  que,  pour  icelle  parachever,  monseigneur  de  Richement,  son 
frère,  estoit  venu  par  deçà,  accompaigné  de  nobles,  gens  d'armes, 
chevaliers  et  escuiers,  et  pour  faire  cesser  les  pilleries  et  roberies  qui 
longuement,  comme  chacun  scet,  ont  esté  et  sont  en  ce  royaume,  par 
le  mauvais  et  desloyal  conseil  et  gouvernement  qu'il  a  eu  et  a  du  pré- 
sident de  Provence  el  autres  ses  adhérents,  lequel  président  a  clous 
et  fait  clourre  la  main  à  monseigneur  le  connestable,  tellement  qu'il 
n'a  pu  avoir  ne  recevoir  finances  pour  le  soudoiment  de  ses  gens 
d'armes,  et  l'on  a  fait  tout  à  contraire  de  ce  que  avait  esté  ordonné 
au  conseil  du  roy  nostre  sire,  tenu  à  Chinon;  par  quoy  n'a  peu  vac- 
quer  ne  entendre  et  faire  ce  que  dit  est  et  que  conclut  et  ordonné 
avoit  esté  oudit  conseil,  et  que  il  avoit  et  a  eu  bonne  et  saincte  en- 
tencion; et  par  les  grant  traïson  et  mauvaise  voulentéque  le  dict  pré- 
sident et  ses  adhérens  ont  machiné  contre  le  dict  monseigneur  le 
connestable,  lui  ont  voulu  et  se  sont  efforcés  de  lui  courre  sus;  pour 
quoy,  pour  subpéditer  le  dict  président  et  ses  adhérens,  est-il  néces- 
saire de  ne  leur  bailler  aucune  entrée  de  villes  ou  forteresses,  en 
priant  aux  diz  gens  d'Église,  bourgois  et  habitants  de  la  dicte  ville 
de  Tours  qu'ils  ne  baillent  au  dit  président  aucune  entrée  en  leur 
ville  et  ne  lui  donnent  aucun  confort  ou  aide,  mais  le  bon  vouloir 


APPENDICES  507 

<iu'ils  ont  eu  et  monstre,  par  effet,  au  dit  monseigneur  le  connestable 
ils  tiegnent  ferme  et  que,  en  vérité,  monseigneur  le  duc  estoit  et  est 
prest  de  venir  servir  le  roy  en  sa  personne,  à  tout  l'effort  et  puissance 
à  lui  possible,  contre  tous  ses  ennemis,  et  que,  pour  le  monstrer, 
enveroit  par-devers  luy  et  le  dit  monseigneur  le  connestable  son  frère 
Richart,  monseigneur  de  Bretaigne,  son  frère  (sic),  accompaigné  de 
grant  compaignie  de  gens  d'armes,  chevaliers  et  escuiers  et  gens  de 
traict,  paiez  et   sobsdoiez  à  ses  despens,  pour  deux  ou  troys  moys. 

Et  a  esté  respondu  au  dit  M*  J.  Bouchier,  envoyé  du  duc,  que  tou- 
jours ont  esté  et  seront  bons,  loiaux  et  vrays  obbeissans  au  roy  et 
n'obéiront  pas  au  commandement  du  président,  »  etc. 

(Archives  municipales  de  Tours,  t.  III  des  Délibérations.  —  Com- 
munication du  D'"  Giraudet.) 


XXIV 

EXPULSION  DE  LOUVET  ET  DES  AUTRES  FAVORIS  DE  CHARLES  YII 

(1425,  juin)  [p.  104]. 

Littera  revocationis  contra  dominum  de  Mirandol. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lectres  verront,  salut.  Comme,  à  la  requeste  et  pourchaz  de 
Jehan  Louvet,  chevalier,  seigneur  de  Mirandol,  nommé  communé- 
ment président  de  Prouvence,  lequel,  pour  certaines  causes  regardans 
le  bien  de  paix  et  la  réunion  d'aucuns  noz  parens  et  vassaulx,  s'est, 
puis  nagaires,  parti,  par  nostre  commandement,  de  nostre  compaignie 
et  service,  nous  à  icelui  président  ayons,  par  maladvertance,  et  sans 
délibération  du  conseil,  baillé  et  délivré,  soubz  nostre  grant  scel, 
plusieurs  noz  lectres  patentes,  par  lesquelles  s'est  fait  donner  et  attri- 
buer par  nous  de  moult  grandes,  excessives  et  desraisonnables  puis- 
sances, tant  sur  le  fait  de  noz  fmances  que  autrement;  entre  lesquelles, 
comme  bien  nous  reeordons,  lui  est  commise  la  totale  administracion 
de  toutes  noz  finances,  quelles  qu'elles  soient,  de  noz  pais  de  Langue- 
doc et  duchié  de  Guienne,  et  aussi  de  nostre  pais  du  Daulphiné  de 
Viennois,  par  tel  et  si  ample  povoir  qu'il  en  puet  faire  et  disposer 
comme  bon  lui  semblera;  avecques  ce,  a  prins  et  levé  de  nous  lectres 
patentes,  tant  pour  lui  que  pour  ses  clercs  et  entremecteurs  de  ses 
affaires,  par  lesquelles  leur  est  permis  et  octroyé  que,  pour  quelcon- 
que finance  par  eulx  receue  de  noz  receveurs,  grenetiers,  maistres  de 
monnoyes  et  autres  officiers  chargiez  de  recepte,  en  compte,  descharges 
ou  autrement,  dont  n'auroient  baillé  acquit  soufflsant,  ilz  ne  soient 
lenuz  d'en  bailler  lesdiz  acquitz,  supposé  que  à  ce  faire  se  feussent,. 
par  leurs  cédules  ou  autrement,  liez  et  obligiez,  et,  par  nos  dictes  lec- 
tres, ayons  voulu  lesdiz  officiers  estre  de  ce  quicles  et  deschargez  en 
leurs  comptes,  sans  raporter  lesdiz  acquiz,  mais  seulement  vidimus 
de  noz  dictes  lettres;  et,  en  oultre,  lui  ayons  baillié  povoir  bien  ample 
et  exprès  pour  appoinctier,  ainsi  qu'il  verra  à  faire,  avec  le  sire  de 


508  APPENDICES 

Saint- Valier,  et  autre  part,  des  contez  de  Valentynois  et  Dyois,  dont 
sommes  en  question  et  débat;  et  aussi  un  autre  povoir  d'engaigier, 
où  et  ainsi  que  bon  lui  semblera,  certains  noz  joyaulx,  qu'il  dit  avoir 
en  gaige  de  nous,  montans  à  grans  finances,  d'en  prandre  et  retenir 
pour  lui  une  partie,  et  des  meillieures  et  plus  riches,  et,  avecques  ce, 
retenir  les  autres,  supposé  qu'il  feust  payé  de  son  principal,  qu'il  dit 
lui  estre  deu,  jusques  à  ce  qu'il  soit  payé  d'une  grant  finance  que, 
par  autres  noz  lectres,  s'est  fait  donner  légièrement  sur  iceulx  joyaulx; 
et,  qui  plus  est,  a  obtenu  de  nous  puissance  générale  pour  traictier 
et  du  tout  conclurre  et  accorder,  en  nostre  nom,  toutes  manières 
d'aliances  avecques  quelxconques  personnes  que  bon  lui  semblera, 
tant  amis  que  ennemis  de  nous  et  de  nostre  royaume;  lesquelles 
lectres,  avecques  autres  plusieurs,  scellées  en  blanc  de  nostre  dit  grant 
scel,  il  a  emportées  ;  et,  depuis,  ayons  plus  avant  pensé  à  la  matière 
et  aux  dangiers  et  inconvéniens  irréparables  qui,  vraisemblablement, 
toutes  choses  bien  considérées,  en  pourroient  sourdre  et  avenir,  ou 
très  grant  préjudice  de  nous  et  de  nostre  seigneurie,  et,  sur  ce, 
demandé  le  bon  advis  et  conseil  de  nostre  très  chière  et  très  amée 
mère,  la  royne  de  Jehrusalem  et  de  Secile,  d'autres  aussi  de  nostre 
grant  conseil  et  de  ceulx  de  nostre  court  de  parlement,  afin  de  trouver 
remèdes  soufflsans  et  convenables  pour  remédier  aux  dessusdiz  incon- 
véniens et  aux  grans  fraudes  et  décepcions  que  ledit  président,  de  la 
voulenté  duquel  ne  sommes  pas  acerteniez,  pourroit,  quant  à  ce, 
commectre,  tant  pour  son  particulier  proufit  que  pour  vengence  et 
faire  à  autrui  grevence;  savoir  faisons  que,  les  choses  dessusdictes 
considérées  et  bien  adverties,  nous,  de  certaine  science  et  propre 
mouvement,  en  ensuivant  aussi  le  bon  conseil  à  nous  sur  ce  donné, 
de  grant  et  meure  délibéracion,  par  nostre  susdicte  mère  et  autres 
devantdiz,  avons  les  dessusdictes  lectres  et  puissances,  ainsi  par  nous 
octroyées  audit  président  et  aux  siens,  tant  en  général  que  en  parti- 
culier, et  généralement  toutes  autres  lectres  de  povoir  et  autres  tou- 
chans  fait  de  finances,  soient  patentes,  closes,  ou  en  forme  de  cédules, 
de  quelque  date  qu'elles  soient,  supposé  que  signées  feussent  de  nosti'e 
main  et  scellées  de  nostre  signet,  révoquées,  rappellées,  cassées  et 
iratées,  et,  par  ces  présentes,  révocons,  rappelions,  cassons  et  iratons 
et  les  mectons  du  tout  au  néant,  avecques  tout  ce  qui  s'en  seroit 
ensuy,  comme  faictes  et  obtenues  contre  nostre  entencion  et  voulenté; 
et  ne  voulons  icelles  avoir  ne  sortir  aucun  effect,  jaçoit  ce  que,  par 
l'importunité  dudit  président  et  par  les  choses  qu'il  nous  donnoit 
entendre,  les  eussions  commandées.  Si,  donnons  en  mandement,  en 
défendant  bien  expressément,  par  ces  dictes  présentes,  à  nostre  très 
chier  et  amé  cousin  le  conte  de  Foix,  nostre  lieutenant  général  èsdiz 
pais  de  Languedoc  et  duchié  de  Guienne,  semblablement  à  noz  amez 
et  féaulx  gens  de  nostre  parlement,  tant  à  Poictiers  que  à  Tholouse, 
aux  gens  de  noz  comptes,  à  Bourges,  aux  généraux  conseillers  sur 
le  fait  et  gouvernement  de  toutes  noz  finances,  tant  en  Languedoil 
que  en  Languedoc,  aux  gouverneur  et  gens  de  nostre  conseil  et 
des  comptes  de  nostre  dit  Daulpbiné  et,  généralement,  à  tous  noz 
seneschaux,  baillifs,  Iresouriers,  receveurs,  maistres  particuliers  de 


APPENDICES  509 

noz  monnoies,  grenetiers,  maistres  des  ports,  et  autres  noz  officiers 
quelxcoiiques  de  noz  diz  royaulme  et  Daulphiné  et  à  chacun  d'eulx, 
comme  à  lui  appartendra,  que  audit  président  ne  à  sesdiz  clercs,  ou 
autres,  commis  et  nommez  sur  le  fait  des  puissances  et  autres  lectres 
et  cédilles  devant  dictes,  ne  facent  et  ne  donnent  obéissance,  quelle 
que  elle  soit,  sur  tant  que  envers  nous  se  peuent  (sic)  meffaire,  ains, 
pour  greigneur  seurté,  facent  ces  dictes  présentes,  ou  le  vidimus  d'icel- 
les,  que  voulons  estre  d'une  telle  auctorité  comme  l'original,  publier  où 
il  appartendra,  si  solemnelment  que  aucun  n'y  doyve  prétendre  igno- 
rance; et,  avecques  ce,  facent,  ou  facent  faire  commandement,  de 
par  nous,  audit  président  et  à  sesdiz  clercs  et  commis,  et  à  chacun 
d'eulx,  comme  il  appartendra,  que,  sur  peine  de  confiscacion  de  corps 
et  de  biens,  ilz  baillent  et  rendent  toutes  teles  lectres  et  cédules  qu'ilz 
ont  eues  de  nous,  soient  escriptes  ou  erî  blanc,  et  aussi  audit  président 
qu'il  rende  nos  diz  joyaulx,  pour  tout  nous  envoyer,  parmi  prenant, 
au  regard  d'iceulx  joyaulx,  par  ledit  président,  assignacionetappoinc- 
tement  seur  et  soufflsant  de  ce  seulement  qu'il  monstrera  lui  estre 
loyaument  deu  à  celle  cause  et  qu'il  auroit  preste  dessus  lesdiz  joyaulx, 
sans  en  avoir  esté  restitué;  en  contraignant,  en  cas  de  refïus,  lui  et 
sesdiz  clercs,  chacun  comme  à  lui  touchera,  à  ces  choses  faire  et 
fournir,  par  arrest  de  leurs  personnes  et  autrement,  comme  la  matière 
bien  le  requiert,  car  ainsi  le  voulons.  En  tesmoing  desquelles  choses 
nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes.  Donné  à  Poictiers, 
le  ye  jour  de  juillet,  l'an  de  grâce  mil  CCCC  vint  et  cinq.  Ainsi  signé 
par  le  Roy,  en  son  conseil,  ouquel  la  royne  de  Secile,  le  maréchal  de 
La  Fayette,  le  grant  maistre  d'ostel,  l'admirai,  le  premier  président 
et  plusieurs  autres  du  parlement  estoient.  J.  Le  Picart.  Et  au  doz 
d'icelles  estoit  escript  :  «  Lecta  et  publicata  ac  etiam  registrata  Picta- 
vis,  in  parliamento  regio,  Xir  die  Julii,  anno  Domini  M»  GCCC°  XW". 

«   BLOIS.   » 

(Xia  8604,  f  76  v»-77.  Copie  dans  le  Ms.  Fr.  S963,  [Legrand,  Hist. 
manusc.  de  Louis  XI],  P^  3-5.) 

Louvet  se  rendit  d'abord  à  Avignon,  puis  dans  sa  seigneurie  de 
Mirandol  (Mérindol).  Sa  réponse  à  l'huissier  d'armes,  qui  vint  lui  signi- 
fier la  révocation  de  ses  pouvoirs,  est  datée  de  Mérindol,  16  août  1423. 
Cette  réponse  est  fort  curieuse.  Louvet  y  prend  un  ton  soumis  à 
l'égard  du  roi,  mais  d'ailleurs  assez  hautain.  Il  rend  les  pouvoirs 
relatifs  aux  finances  et  aux  alliances;  quant  aux  lettres  «  louchans 
son  faict  particulier,  il  ne  les  rend  point,  pour  ce  qu'elles  ne  touchent 
chose  qui 'puisse  porter  préjudice  au  faict  du  roy,  et  sont  au  faict  du 
dict  président  et  de  telles  ne  se  peut  aider  que  devant  le  roy,  ses 
commis  ou  officiers,  et,  quand  il  s'en  aidera,  si  elles  sont  raisonnables 
ou  non  raisonnables,  le  roy  en  ordonnera  à  son  plaisir.  »  Il  finit  en 
suppliant  «  très  humblement  au  roy  qu'il  lui  plaise  l'avoir  toujours 
en  sa  bonne  grâce,  comme  sa  très  humble  créature,  qui  l'a  servi  léale- 
ment  de  tout  son  povoir,  et,  pour  avoir  ce  fait,  en  est  en  dangier  de 
sa  personne;  et,  s'il  a  eu  des  biens  du  roy,  il  les  a  emploicz  pour  lui 
et  despendus  à  son  service,  etc.  »  (Fr.  6965,  ou  Legrand,  VI,  f<»»  3-8.) 


MO  APPENDICES 

Louvet  et  sa  femme  eurent,  leur  vie  durant,  des  pensions  considé- 
rables et  reçurent,  en  outre,  des  libéralités  du  roi,  Louvet  revint 
même,  dans  la  suite,  auprès  de  Charles  VIL  II  l'accompagna,  en  1437, 
au  siège  de  Montereau  et  à  Paris  (Pièces  orig.,  t.  1763,  dossier  Louvet, 
n"  40822.) 

Les  autres  conseillers  éloignés  en  même  temps  que  Louvet  ne  furent 
pas  oubliés  davantage. 

Voir  sur  G.  d'Avaugour  :  Pièces  orig.,  t.  132,  dossier  Avaugour; 
Fr.  7838,  f°s  339-340. 

Sur  J.  Cadart,  voyez  :  Clairamb.,  t.  24,  f"  1713;  K  68,  n»  44. 

Sur  P.  Frotier,  premier  écuyer  de  corps  et  maître  de  l'écurie  du 
roi,  voyez  :  Pièces  orig.,  t.  1253,  dossier  Frotier,  et  KK  33,  f"  133.  Il 
rentra  plus  tard  en  faveur,  mais  sans  jouer  un  rôle  remarquable. 

Tanguy  du  Châtel,  capitaine  et  viguier  de  Beaucaire,  eut  encore  un 
rôle  important  durant  toute  sa  vie,  qui  fut  longue,  et  conserva  toujours 
la  faveur  du  roi  (Fr.  26048,  no  306). 

Regnault  de  Chartres  reçut,  le  7  août,  une  pension  de  2  300  1.  t.  sa 
vie  durant,  en  récompense  de  ce  qu'il  avait  laissé  la  charge  de  chan- 
celier à  Martin  Gouges,  sur  les  instances  du  connétable  (P  2298, 
fos  367-371  ;  Xi"  8604,  f^^  79  v  et  80).  Le  même  jour,  le  roi  donna 
encore  à  Regnault  de  Chartres  la  ville,  le  château  et  la  châtellenie  de 
Vierzon,  pour  une  somme  de  16  000  1.  t.  qu'il  lui  devait  (X>a  8604, 
fos.79.8O). 

Quant  au  bâtard  d'Orléans,  qui  avait  suivi  J.  Louvet,  son  beau- 
père,  il  partagea  momentanément  sa  disgrâce.  Il  fut  remplacé,  comme 
capitaine  du  Mont-Saint-Michel,  par  Louis  d'Estouteville,  que  Riche- 
mont  fit  nommer  le  2  septemlîre  1423.  Dès  le  3  août,  le  roi  avait 
ordonné  au  lieutenant  du  bâtard  d'Orléans  de  ne  laisser  entrer,  sous 
quelque  prétexte  que  ce  fût,  dans  cette  forteresse,  ni  lui  ni  aucun  des 
siens  (voir  la  Chron.  du  Mont-Saint-Michel,  édit.  S.  Luce,  p.  208-210, 
223-224,  233-233).  Toutefois  la  disgrâce  du  bâtard  d'Orléans  ne  fut 
pas  de  longue  durée,  et  il  revint  bientôt  auprès  du  roi. 


XXY 

LETTRE   DE   RICHEMONT   AUX   LYONNAIS    (1425,    28  juillet) 
[p.  101,  104,  185]. 

A  noz  très  chiers  et  bien  amez  les  conseillers^  bourgois  et  habitans 

de  Lyon. 

Très  chiers  et  bien  amez,  nous  avons  esté  pieça  assignez  sur  l'aide 
derenier  mis  sus  a  Lyon,  de  la  somme  de  mil  livres  tournois,  dont 
nous  n'avons  encores  eu  aucun  paiement,  et  s'excuse  le  commis  à 
recevoir  ledit  aide,  disant  que  l'argent  est  encore  deu  en  ladite  ville 
et  quil  n'en  puet  recouvrir  deniers.  Si,  vous  prions  très  acerles  que, 
ou  cas  que  ledit  aide  ne  soit  encores  paie  en  ycelle  ville,  vous  le 
vueillez  faire  avancer,  afm  que  nous  puissons  estre  paiez  de  nostre 


APPENDICES  811 

dite  assignacion,  car  nous  en  avons  grant  besoing,  actendu  les  grans 
frais  que  faire  nous  a  convenu  et  convient  chacun  jour,  pour  le  bien 
de  monseigneur  le  roy  et  de  sa  seigneurie,  comme  assez  povez  savoir; 
et  en  ce  vous  nous  ferez  un  très  grant  plaisir;  et,  se  chose  voulez  que 
pour  vous  faire  puissons,  nous  le  ferons  de  bon  cuer.  Des  nouvelles 
de  par  de  çà,  nous,  beau  frère  d'Estampes  et  les  barons  de  Bretaigne, 
Poictou,  Berry,  Auvergne  et  plusieurs  autres,  sommes  venuz  tous  en- 
semble devers  monseigneur  le  roy,  lequel  nous  a  très  joyeusement 
receuz,  et  a  donné  congié  à  tous  les  serviteurs  du  président  qui 
estoient  entour  lui,  et,  se  Dieu  plaît,  les  besoingnes  se  appoincteront 
si  bien  que  ce  sera  le  prouffit  de  mon  dit  seigneur  et  de  tous  ses  bons 
subgez  et  le  relièvement  de  sa  seigneurie.  Très  chiers  et  bien  amez, 
Nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous.  Escript  à  Poictiers,  le  xxvm*  jour 
de  juillet. 

Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artdr. 

Dijon. 

(Archives  de  la  ville  de  Lyon,  AA.  77.) 


XXVI 

LETTRE    DE   RICHEMONT   AUX   LYONNAIS   (1425,    30  juillet) 
[p.  103,  106]. 

A  noz  très  chiers  et  bien  amez  les  gens  d'Eglise,  nobles,  bourgois 
et  habitans  du  pais  de  Lyonnois. 

Très  chiers  et  bien  amez,  il  a  pieu  à  monseigneur  le  roy  mander 
pardevers  lui  madame  la  royne  de  Secile,  nous  et  plusieurs  autres  sei- 
gneurs de  son  sang  et  lignage,  et  autres  barons  et  seigneurs  de  son 
royaume,  en  très  grant  nombre,  par  l'advis  et  délibéracion  desquelx 
mon  dit  seigneur  le  roy  a  ordonné,  pour  faire  cesser  les  pilleries  et 
roberies  qui  à  présent  sont  sur  ses  subgez,  toutes  gens  d'armes  et  de 
trait  estans  sur  les  champs  estre  mis  et  tirés  es  pais  de  frontière  et, 
avec  ce,  certaines  autres  grans  provisions,  pour  le  fait  de  sa  guerre  et 
recouvrement  de  sa  seigneurie,  et  mander  et  assembler  les  gens  des 
trois  estas  de  son  obéissance,  tant  de  Languedoil  que  de  Languedoc, 
estre  pardevers  lui,  le  premier  jour  d'octobre  prouchain  venant,  en  la 
ville  de  Poictiers.  Et  espérons  que  es  affaires  du  roy  et  de  son 
royaume  sera  mise  cy  (si)  bonne  provision  que  tous  en  serez  joyeux;  et 
desja,  la  mercy  Nostre  Seigneur,  sont  les  choses  en  très  bonne  disposi- 
cion.  Et,  pour  pourveoir  aus  dites  choses  et  autres  grans  charges  qu'il  a 
a  présent  à  soustenir,  jusques  à  ladite  assemblée  des  trois  estas,  a  or- 
donné certain  aide  estre  levé  sur  ses  subgez,  le  moindre  que  on  a  peu 
adviser.  Et,  pour  ce  que  mondit  seigneur  le  roy  nous  a  baillé  la 
charge  du  fait  de  sa  guerre  et  de  faire  vuider  et  cesser  les  dites  pille- 
ries, en  quoy  nous  entendons  emploier  de  toute  nostre  puissance  et 


512  APPENDICES 

donner,  à  l'aide  de  Nostre   Seigneqr,  provision  convenable,  se,  par 
deffault  d'avoir  la  finance  que,  pour  ce  faire,  mondit  seigneur  nous  a 
ordonné  n'estoit  empeschié,  nous  vous  prions  très  acertes  que,  le  plus 
brief  que  faire  se  pourra,  vous  faciez  que  la  somme  que,  pour  vostre 
part  et  porcion  du  dit  aide,  vous  est  imposée,  soit  cueillie  et  levée,  et 
que    en  ce  ne  faciez    aucun    delay,  afin    que    briefment   nous  puis- 
sons  faire  vuidier  et  cesser  les  dites  pilleries,  qui  tant  sont  à  charge  et 
destruction  de  vous  et  d'autres  bons  subgez  de   ce  royaume.  Très 
chiers  et  bien  amez,  Nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous,   Escript  à 
Poictiers,  le  penultiesme  jour  de  juillet. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 


Dijon. 


(Archives  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  77.) 


XXVIl 

LETTRE   DE    RICHEMONT    AUX   LYONNAIS   (1425,   3    aOÛt) 
[p.  lOo,  106,  112], 

A  noz  ti-ès  chiers  et  bons  amis  les  bailli,  conseilliers,  bourgois 
et  habitans  de  la  bonne  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  arnis,  nous  avons  pieça  receu  voz  lettres  par 
Labarbe,  porteur  de  cestes,  par  lesquelles  avons  sceu  vostre  bon  vou- 
loir, de  quoy  vous  raercions.  Et,  pour  ce  que  savons  qu'estes  désirans 
de  souvent  oyr  des  nouvelles  de  par  de  ça,  vueillez  savoir  que  nous, 
beaux  frères  d'Estampes  et  de  Porhoet,  ensemble  les  barons  et  sei- 
gneurs de  Berry,  d'Auvergne,  de  Poictou,  Bretaigne  et  plusieurs  au- 
tres, en  très  grand  nombre,  sommes,  en  conclusion,  après  plusieurs 
troubles,  venuz  à  Poictiers,  devers  monseigneur  le  roy,  lequel  nous 
a  recuellhz  et  receuz  très  joyeusement,  faisant  très  bonne  chière,  et, 
par  son  commandement  et  ordonnance,  a  fait  vuidier  et  mectre  hors 
de  son  hostel  aucune  mauvaise  semence  que  le  président  yavoit  laissée, 
congnoissant  clèrement  le  mauvais  gouvernement  qu'il  a  eu  par  cy 
devant,  telement  que,  Dieu  mercy,  les  choses  sont,  a  présent,  en  très 
bous  termes,  dont  nous  devons  tous  estre  lyez  et  joyeux,  ayant  espé- 
rance qu'elles  continueront  tousjours  de  bien  en  mielx.  Pour  quoy,  ce 
veant,  mon  dit  seigneur,  et  que  présentement  il  lui  convient  adviser 
au  recouvrement  de  sa  seigneurie,  mande  présentement  les  troiz  estaz 
de  son  royaume  à  certain  jour,  comme  pourrez  savoir  par  ses  lettres 
que  sur  ce  vous  envoyé  i,  auquel  jour  vous  prions  bien  acertes  que  de 
vostre  part  n'y  veuillez  faillir.  En  actendant  laquelle  journée,  pour 
pourveoir  à  ce  qui  est  nécessaire,  tant  pour  le  fait  de  Testât  de  mon 

1.  Voir  les  deux  lettres  du  roi,  publiées  par  M.  de  Beaucourt,  dans  son 
Hist.  de  Charles  VII,  t.  Il,  104-106. 


APPENDICES  513 

dit  seigneur,  comme  pour  le  fait,  de  sa  guerre,  se  met  sus  présente- 
ment un  aide,  le  plus  légier  que  faire  se  peut,  ainsi  que  pourrez  plei- 
nement savoir,  par  les  lettres  que  mon  dit  seigneur  sur  ce  vous  es- 
cript;  a  quoy  vous  prions  aussi  que,  de  vostre  part,  vueillez  mectre 
bonne  diligence,  comme  povez  savoir  que  besoing  en  est,  en  vous 
acquictant  et  démonstrant  tousjours  la  loyaulté  et  le  bon  vouloir  que 
avez  eu  au  bien  de  mon  dit  seigneur,  dont  vous  estes  moult  à  louer  et 
recommander.  Et  vueillez  tenir  pour  excusé  le  dit  porteur,  lequel  nous 
bailla  voz  lettres,  adreçans  à  monseigneur  de  Bretaigne,  lesquelles 
nous  lui  envoyasmes,  et  l'avons  tousiours  fait  demourer  pour  vous 
porter  la  vérité  et  certaineté  des  dites  nouvelles.  Si,  nous  faictes  sa- 
voir des  vostres,  ensemble  se  cbose  voulez  que  puissons,  et  nous  la 
ferons  de  bon  cuer.  Très  obiers  et  bons  amis,  Nostre  Seigneur  soit  garde 
de  vous.  Escript  à  Poictiers,  le  tiers  jour  d'aoust. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Gilet. 
(Arcbives  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  77.) 


XXVIIl 

LETTRE  DE  CHARLES  YJI  AUX  LYONNAIS  (1425,  31  aOÛt) 
(p.  105,  106). 

A  noz  chiers  et  bien  amez  les  bourgois,  manans  et  habitons 
de  nostre  ville  de  Lyon. 

De  par  le  Roy. 

Chiers  et  bien  amez,  nous  vous  avons  fait  savoir,  par  nostre  amé  et 
feai  conseiller,  maistre  Gérard  Blancbet,  que,  pour  le  fait  de  la  guerre 
et  deffense  de  nostre  Royaume,  nous  avons  mis  sus  un  aide,  par  déli- 
béracion  de  plusieurs  de  nostre  sang,  de  prellaz,  barons  et  autres 
gens  de  conseil,  naguères  assemblez  devers  nous,  en  nostre  ville  de 
Poictiers,  et  que  la  somme  de  six  mil  cinq  cens  livres  tournois,  à  quoy 
estiez  imposez,  pour  vostre  porcion  d'icellui  ayde,  vous  meissiez  sus 
et  paissiez  hastivement,  pour  la  baillier  à  noz  trésoriers  des  guerres 
et  la  convertir  ou  paiement  des  gens  d'armes  estanz  en  nostre  service, 
lesquelz,  en  espérance  d'avoir  icelle  somme  promptement,  nostre  très 
chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont,  connestable  de  France,  a 
mis  et  envoyez  es  frontières  de  par  deçà,  pour  résister  à  noz  ennemis 
les  Anglois,  qui  y  sont  en  puissance;  le  paiement  et  souldoyment  des- 
quelz  est  très  nécessaire  à  ce  qu'ilz  ne  désempartent  les  dites  frontiè- 
res. Et,  combien  que  ce  doit  mouvoir  vous  et  touz  noz  autres  subgiez 
et  vassaulx  à  libéralement  et  hastivement  paier  icellui  ayde,  toutes-' 
foiz,  comme  entendu  avons,  n'avez  encores  paie  que  pou  ou  néant 
du  dit  ayde  et  que  vostre  entencion  est  d'envoyer  devers  nous  pour 
avoir  et  demander  rabaiz  et  diminuciou  de  la  moitié  de  la  dite  somme 
Richemont.  83 


SI  4  '  APPENDICES 

OU  de  partie,  dont  grant  inconvénient  se  pourroit  ensuir,  et  n'en 
pourrions  estre  contenz,  mesmement  actendu  la  nécessité  que  avons 
d'avoir  la  dite  somme  entièrement,  qui  desjà  est  assignée  pour  le  dit 
fait  de  la  guerre;  pourquoy  nous  vous  mandons  et  expressément  en- 
joignons et  commandons  que,  tous  excusacions  cessans,  et  sur  quan- 
ques  amez  le  bien  et  conservacion  de  nous  et  de  nostre  royaume,  et 
sur  paine  d'encourir  nostre  indignacion,  que,  sans  delay,  vous  paiez 
au  receveur  sur  ce  ordonné,  entièrement  et  sans  diminucion,  la  dite 
somme  de  VI"»  Vc  1.  t.,  en  vous  deffendànt  que,  pour  ce,  ne  venez  ne 
n'envoyez  devers  nous,  car  aucun  rabaiz  ne  delay  n'en  obtiendriez 
de  nous,  veu  la  dite  nécessité.  S'ainsy  le  faittes,  nous  en  aurons  mé- 
moire et  vos  afTaires  en  grant  recommandacion.  Donné  à  Poictiers,  le 
derrenier  jour  d'aoust. 
Charles. 

BUDE. 

(Archives  de  Lyon,  AA,  20,  f»  16.) 


XXIX  ■ 

LETTRE    DU   COMTE  DE  RICHEMONT   A   P.  BESSONNEAU,  MAITRE  DE 

l'artillerie  du  roi  (1425,  6  août) 

(p.  109). 

Chier  et  bien  amé,  pour  ce  que  l'on  doubte  que  les  Anglois,  après 
ce  qu'ils  auront  la  ville  du  Mans,  ne  viengnent  mectre  le  siège  devant 
Sablé,  laquelle  est  mal  garnie  d'artillerie,  comme  entendu  avons, 
par  quoy  se  pourrait  ensuir  la  perdicion  d'icelle  ;  nous  vous  mandons 
et  expressément  enjoignons  que  l'artillerie  qui  sera  nécessaire  pour 
la  garde  de  la  dicte  ville  de  Sablé  et  que  promptement  pourrez  re- 
couvrer, vous  bailliez  et  délivriez  à  nostre  amé  et  féal  conseiller  et 
chambellan  le  sire  de  Beaumanoir  i,  lequel  nous  avons  ordonné  à  la 
garde  de  la  dicte  ville,  ou  à  ses  gens  pour  luy.  Et  gardez  bien  qu'en 
ce  n'ayt  faulte.  Chier  et  bien  amé,  Nostre  Seigneur  ait  garde  de 
vous  *.  Escript  à  Poictiers,  le  vi"  jour  d'aoust  mccccxxv. 
Artur. 

Dijon. 

(Pièces  originales,  t.  245,  dossier  Beaumanoir  [5405],  n"  119.) 

1.  Jacques  de  Dinan,  seigneur  de  Beaumanoir. 

2.  G.  fringant,  dans  son  commentaire  du  Jouvencel,  dit  que  P.  Besson- 
neau  était  «  très  noble  et  saige  gentilhomme  en  son  office  et  en  toutes  autres 
où  on  le  vouloit  employer  »  (Ms.  3059,  Histoire,  à  laBib.  de  l'Arsenal,  f»  116). 
Il  avait  été  institué  maître  de  l'artillerie  le  l"""  octobre  1420.  II  se  démit 
■de  ses  fonctions  en  faveur  de  Gaspard  Bureau,  qui  fut  nommé  le  27  dé- 
cembre 1444  (Anselme,  VIII,  135,  136,  140). 


APPENDICES  51o 


XXX 


LE  DUC  DE  BRETAGNE  ORDONNE  DE  PAYER  AU  COMTE  DE  RICHEMONT 

700  L.  T.  (1425,  13  novembre)  [p.  lll]. 

Jehan,  par  la  grâce  de  Dieu,  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richement 
et  de  Montfort,  à  Jehan  Aleaume,  receveur  de  la  traitte  de  XX  1.  t.  pour 
pippe  de  vin  yssant  des  pays  d'Anjou  et  du  Maine,  salut.  Nous,  con- 
fians  es  loyaultez  de  nostre  très  chier  et  très  amé  frère;  le  conte  de 
Richemont,  connestable  de  France,  et  nostre  bien  amé  et  féal  conseiller 
l^arcediacre  de  Rennes,  yceulx  assemblement  ayons  (sic)  commis  et 
instituez  veriffleurs  des  finances  qui  sont  et  seront  levées  à  cause  de 
la  dicte  traitte,  savoir  faisons  que,  pour  le  salaire  et  labeur  que  en 
ce  ont  eu  et  auront,  es  temps  passé  et  advenir,  nos  diz  frère  et  con- 
seiller, et  pour  autres  causes  ad  ce  nous  mouvans,  à  iceulx  avons  or- 
donné la  somme  de  VKXX  1.  t.,  savoir  est  à  nostre  dit  frère  Vc  livres 
et  à  Tareediacre  cent  livres.  Si,  vous  mandons  que,  des  deniers  que 
avez  receu  et  recevez  de  la  dicte  traitte,  vous  leur  payez  et  baillez  la 
dicte  somme,  en  la  manière  dessus  dicte.  Gardez  qu'il  n'y  ait  faulte, 
car  ainsi  le  voulons,  non  obstant  quelxconques  ordonnances  ou  def- 
fenses  à  ce  contraires.  Et  ces  présentes,  avecques  la  quictance  perti- 
nente vous  vauldront  de  ce  acquit  et  descharge,  touteifois  que  mestier 
en  aurez.  Donné  à  La  Gacille  ^,  le  xni°  jour  de  novembre,  l'an  de 
grâce  mil  quatre  cens  vingt-cinq.  En  oultre,  vous  mandons  paier  et 
bailler  à  nostre  dit  frère,  que  lui  avons  ordonné  pour  faire  mectre  en 
appareil  certain  nombre  d'archers,  la  somme  de  II''  1.  t.  oultre  les 
dictes  V*  1.  ;  et  ces  présentes,  à  relacion  pertinente,  vous  en  vaudront 
acquit.  Donné  comme  dessus.  Godart. 
Par  le  duc  : 
(Sans  signature.) 

Par  [e  duc  et  de  son  commandement,  messire  Jehan 
de  Kermellec,  le  doien  de  Nantes  et  autres  présens. 

GODART. 

(Fr.  26048,  n°  508.) 


XXXI 

QUITTANCE   DE   JEAN   DE   CHATEAUGIRON,    ARGENTIER   DU   CONNÉTABLE 

(1425,  7  décembre)  [p.  lll]. 

Je,  Jehan  de  Chateaugiron,  argentier  et  secrétaire  de  monseigneur 
le  conte  de  Richemont,  connestable  de  France,  confesse  avoir  eu  et 
receu  de  Jehan  Aleaume,  receveur  de  la  traicte  de  XX  s.  t.  pour  pippe 

1.  La  Gacilly,  arrondissement  de  Vannes. 


816  APPENDICES 

de  vin  yssant  des.  pais  d'Anjou  et  du  Mayne,  la  somme  de  sept  cens 
livres  t.  que  le  duc,  mon  souverain  seigneur,  a  donnez  et  ordonnez  à 
mon  dit  seigneur,  ainsi  qu'il  appert  par  ses  lettres  patantes,  données 
le  xuie  jour  de  novembre  mil  quatre  cens  vingt  et  cinq,  et  pour 
les  causes  contenues  en  icelles.  De  laquelle  somme  de  sept  cens  1.  t. 
je  me  tiens  dudit  receveur  pour  content  et  bien  paie,  et  promet  l'en 
aquicter  envers  mon  dit  seigneur  le  connestable.  Tesmoign  mon  signé 
manuel  et  signet  mis  à  ses  présentes,  le  vii«  jour  de  décembre  mil 
quatre  cens  vingt  et  cinq.  De  Chateaugiron, 

Voir  est  de  sept  cens  livres  tournois. 
(Fr.  26048,  n"  523.) 


XXXII 

LETTRE   DU   CONNÉTABLE   AUX   LYONNAIS  (1425,    15    OCtobre) 

(p.  112). 

A  noz  très  chiers  et  bien  amez,  les  conseilliers,  bourgois 
et  habitans  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bien  amez,  pour  la  nécessité  et  très  grant  besoing 
qu'avons  présentement  afaire  d'argent ,  pour  entretenir  les  gens 
d'armes  et  de  trait  qui  sont  en  grant  nombre  en  la  frontière,  lesquelz 
n'eurent,  deux  moys  a,  un  seul  denier  de  leurs  gaiges,  nous  en- 
voyons présentement  par  devers  Jehan  Paumyer,  commis  à  recevoir 
l'aide  à  Lyon,  nostre  très  chier  et  bien  amé  escuier,  Morice  de  Kar- 
loeguen,  trésorier  de  noz  finances,  pour  avoir  l'argent  dicellui,  pour 
aider  à  contenter  les  dites  gens.  Si,  vous  prions  très  acertes  et  sur 
tout  le  plaisir  et  service  que  voulez  faire  à  mon  dit  seigneur  le  Roy 
et  à  nous,  que  vous  soiez  aidens  et  confortens  audit  Paumyer  à  se 
faire  paier  dudit  aide  et  que  vous  lui  vueillez  incontinent  paier  la 
part  et  porcion  en  quoy  vous  avez  esté  tauxés  d'icelluy,  affln  que  l'ar- 
gent en  soit  converti  en  ce  que  dessus  est  dit,  et  que  en  ce  ne  vueillez 
faillir,  car,  en  bonne  foy,  nous  savons  de  vray,  se  faulte  y  avoit,  que 
tous  les  gens  d'armes  et  de  trait  qui  sont  en  la  frontière  d'Anjou  et 
du  Maine  désampareront  les  places  qu'ils  ont  en  garde  et  gouverne- 
ment, qui  seroit  la  perdicien  totale  dudit  pais.  Et  à  ceste  cause  pour- 
roient  ensuir  plusieurs  autres  inconvéniens  inrepairables  à  mon  dit 
seigneur  le  Roy  et  à  sa  seigneurie,  que  Dieu  ne  vueille;  laquelle  chose 
nous  croions  certainement  que  ne  vouldriez  pour  riens.  Si,  vous  prions 
de  rechief  que  à  cest  besoing  ne  vueillez  faire  faulte.  Très  chiers  et 
bien  amés,  s'aucune  chose  voulez,  que  faire  puissons,  faictes  le  nous 
assavoir  et  nous  le  ferons  volentiers,  priant  Nostre  Seigneur  qui  vous 
ait  en  sa  saincte  garde.  Escript  à  Angiers,  le  xv«  jour  d'octobre. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France. 
Artur. 

Channay. 

(Arch,  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  77.) 


APPENDICES  817 

XXXIII 

LETTRE  DU  CONNÉTABLE  AUX  LYONNAIS  (1425,  24  OCtobre)  [p.    112]. 

A  noz  très  ckiers  et  bien  amez,  les  conseillers,  bourgois,  manans 
et  habitons  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bien  amez,  monseigneur  le  roy  envoyé  présentement 
par  delà  nostre  amé  et  féal  conseillier,  Guillaume  Charrier,  son  se- 
crétaire, pour  le  fait  et  avancement  de  l'aide  à  lui  octroyé,  en  ceste 
ville  de  Poictiers,  par  les  gens  des  trois  estas  de  son  obéissance  de 
Languedoil,  à  l'assemblée  par  eux  pour  ce  faite  en  ceste  ville  de  Poic- 
tiers, lequel  nous  avons  chargié  vous  dire  sur  ce  aucunes  choses  de 
par  nous.  Si,  vous  prions  que  icellui  vueilliez  oir  et  croire  de  tout  ce 
qu'il  vous  dira  de  nostre  part,  touchant  ceste  matière,  et  en  ce  lui  faire 
et  donner,  pour  le  bien  de  mon  dit  seigneur,  tout  l'aide,  conseil  et  fa- 
veur que  vous  pourrez.  Très  chiers  et  biens  amez,  Nostre  Seigneur 
soit  garde  de  vous.  Escriptà  Poictiers,  le  xxini«  jour  d'octobre. 
Le  conte   de   Richemont, 
Connestable  de  France. 
(Sans  signature.) 

Dijon, 
(Arch.  de  Lyon,  AA,  77.) 

XXXIV 

LETTRE   DU  COMTE   DE   SALISBURY   A  JEAN   SALVAIN,  BAILLI  DE   ROUEN 

(1426,  1"  mars)  [p.  118,  note  3]. 

Pierres  Poolin,  lieutenant  général  de  noble  homme,  monseigneur 
Jehan  Salvain,  chevalier,  bailli  de  Rouen  et  de  Gisors,  au  viconte  du 
Pont  de  Larche  ou  à  son  lieutenant,  salut.  Nous  avons  au  jour  duy 
receues  les  lectres  de  hault  et  puissant  seigneur,  monseigneur  le  conte 
de  Salisbury  et  du  Perche,  cappitaine  général,  de  par  le  roy  nostre 
sire,  et  lieutenant  sur  le  fait  de  la  guerre  de  monseigneur  le  régent 
le  royaume  de  France,  duc  de  Bedford,  dont  la  teneur  ensuit  : 

Thomas  de  Montagu,  conte  de  Sahsbury  et  du  Perche,  seigneur  du 
Moinhiomier,  (?)  cappitaine  général  de  par  le  roy,  nostre  sire,  lieute- 
nant, sur  le  fait  de  la  guerre,  de  monseigneur  le  régent  le  royaume  de 
France,  duc  de  Bedford,  au  bailli  de  Rouen  et  de  Gisors,  ou  à  son 
lieutenant,  salut.  Comme,  par  noz  autres  lectres  patentes,  vous  ayons 
aaguères  mandé  que,  es  lieux  de  vostre  dit  bailliage  acoustumez  à 
faire  crys,  feisses  cryer  publiquement  que  tous  nobles  et  autres  qui 
ont  acoustumé  eulx  armer  et  êuyr  les  guerres  fussent  prestz  de  ve- 
nir devers  nous,  montés  et  armés  soufOsant,  dedens  deux  jours,  après 
ce  que  l'en  leur  feroit  savoir,  par  cry  publique,  ou  aultrement,  pour 


518  APPENDICES 

résister  à  l'entreprinse  des  ennemis  et  adversaires  du  roy  nostre  dît 
sire,  qui,  dès  lors,  estoient  assemblez  à  grant  puissance;  et,  combien 
qu'il  fust  nouvelles  que  les  diz  adversaires  estoient  conclus  de  venir 
courre  sur  ce  présent  siège,  que  tenons  devant  La  Ferté-Bernard, 
prétendans  lever  icelui,  et  que  nostre  entencion  fust  de  les  attendre, 
nous  avons  seu  nouvellement  que  les  dizennemjs  ont  prins  autre  con- 
clusion et  se  sont  avallés  es  basses  marches  de  Normendie  et  mis 
siège  devant  la  place  de  Saint-James  de  Brevon,  laquelle,  par  l'or- 
donnance  du  roy,  nostre  dit  sire  et  de  monseigneur  le  régent,  avoit 
naguères  esté  fortifiée,  pour  tenir  frontière  contre  iceulx  ennemys,  à 
rencontre  desquels,  par  le  moien  de  l'aide  de  Dieu,  nostre  créateur, 
et  des  bons  et  loyaux  vassaus  du  roy  nostre  dit  sire,  pour  le  bien  de 
sa  seigneurie,  nous  pensons  résister  à  toute  puissance  et  sommes 
conclus  de  les  combatre,  se  attendre  nous  veuUent,  et  en  ce  exposer 
nostre  personne  et  choses  quelconques,  au  plus  brief  que  pourrons 
joindre  et  aprocher  des  diz  ennemys,  et  ad  ce  présent  siège  mectre 
ordonnance,  pour  icellui  entretenir  soufflsant,  jusques  à  nostre  dit  re- 
tour; pour  laquelle  chose  conduire  plus  seurement  il  est  besoing 
d'avoir  en  nostre  compaignie  grant  puissance  de  gens  et  que  chacun 
noble  et  autres  fréquentant  les  guerres  y  vacque  et  s'y  expose,  pour 
la  defFense  du  pays,  sans  aucune  dissimulacion  ;  pour  quoy  nous, 
vouUans  à  ce  pourvoir,  nous  vous  mandons,  commandons  et  enjoin- 
gnons  expressément,  de  par  le  roy  nostre  dit  sire,  monseigneur  le 
régent  et  nous, -que  incontinent  ces  lectres  par  vous  receues,  vous 
faciès  cryer  et  publier,  à  son  de  trompe,  se  mestier  est,  par  tous  les 
lieux  de  vostre  dit  bailliage  acoustumez  à  faire  cris,  que  tous  les  diz 
nobles  et  autres  d'icellui  bailliage,  qui  ont  acoiistumé  eulx  armer  et 
suir  les  guerres,  de  quelque  nacion  qu'ilz  soient,  ensemble  à  tous 
cappitaines  des  villes,  chasteaux,  ou  forteresses,  les  places  deuement 
garnies,  tellement  qu'ilz  soient  en  seurté,  soient  devant  vous,  dedans 
tel  et  sy  brief  jour  que  vous,  en  vostre  personne,  et  les  diz  nobles, 
cappitaines  et  autres  dessus -dis  soyes  devers  nous,  en  la  ville  d'Ar- 
genten,  ou  autre  lieu,  quelque  part  que  soyons,  es  basses  marches 
de  Normandie,  dedens  de  merquedi  prouchain  venant  en  quinze  jours, 
montés  et  armés  soufflsant,  avec  le  plus  grant  nombre  de  gens  que 
vous  et  eulx  pourres  flner,  sur  paine  de  conflscacion  de  corps  et  de 
biens,  et  nous  certiffier  souffisans,  audit  jour,  du  nombre  et  des  noms 
des  diz  nobles  et  autres  et  de  tout  ce  que  fait  en  aures,  affln  deue;  et 
gardez  que  delFault  n'y  ait.  Donné  au  siège  devant  La  Ferté-Bernard, 
le  premier  jour  de  mars,  l'an  mil  CGGC  vingt  et  cinq. 

Pour  le  contenu  es  quelles  lectres  dessus  escriptes  acomplir,  nous 
vous  mandons  et  chargons  que  icelles  lectres  vous  faciès  crier  et 
proclamer  par  tous  les  lieux  de  vostre  dicte  viconté,  acoustumez  à  faire 
crys  et  pubUcacions,  en  faisant  ou  faisant  faire  commandement  exprès 
à  tous  les  nobles  et  autres  de  vostre  dicte  viconté  et  ressort,  qui  ont 
acoustumé  à  poursuir  armes  et  suir  les  guerres,  de  quelque  nacion 
qu'ilz  soient,  ensemble  à  tous  cappitaines  des  villes,  chasteaux  ou 
forteresses  de  vostre  dicte  viconté,  les  places  demourant  garnies  telle- 
ment qu'ilz  soient  en  seurté,  qu'ilz  soient,  lundi  prouchain  venant,  à 


APPENDICES  519 

Rouen,  devant  mon  dit  seigneur  le  bailli,  ou  son  lieutenant,  montés 
ou  armés  soufQsans,  affîn  d'aller  devers  mon  dit  seigneur  de  Salis- 
bury,  en  la  ville  d'Argenten,  ou  autre  lieu,  quelque  part  qu'il  sera, 
es  basses  marches  de  Normandie,  dedens  du  jour  dui  en  quinze  jours, 
avecques  tout  le  plus  grant  nombre  de  gens  qu'ilz  pourront  finer,  sur 
la  paine  desclairée  es  dictes  lectres;  en  nous  certiffiant  deuement,  au 
dit  jour  de  lundi,  des  noms  des  diz  nobles  et  autres  et  de  tout  ce  que 
fait  en  aures,  et  mesmement  de  l'ordonnence  par  vous  faicte  ou  fait 
faire  sur  le  fait  de  la  publicacion  des  autres  lectres  de  mon  dit  sei- 
gneur de  Salisbury,  dont  mencion  est  faicte  es  lectres  dessus  escrip- 
tes,  affm  de  soutenir  et  ensuir  mon  dit  seigneur  de  Salisbury,  à  l'affin 
desclairée  en  ses  dictes  lettres.  Donné  à  Rouen,  le  vi^  jour  de  mars^ 
l'an  de  grâce  mil  CCCG  vingt  et  cinq. 

(Fr.  26049,  n"  554;  voir  aussi  les  n"»  537  et  559.) 


XXXV 

CONVOCATION   DES   ÉTATS   A   ANGERS    (1426,    l'^'"   EVril) 

(p.  122). 

A  nostre  très  chier  et  honoré  seigneur,  le  sire  de  Maulevrier  i. 

Très  chier  et  très  honoré  seigneur,  plaise  vous  savoir  que  nous  avons 
ensemble  advisé  que,  considérées  les  grans  mutacions  et  nouvelletez 
qui  continuellement  adviennent  en  ce  royaume,  est  nécessité,  pour  le 
bien  du  roy  et  de  ce  pais,  de  assembler  ensemble  les  estaz  de  ce  dit 
pais  et  espéciallement  les  nobles,  pour  advertir  et  avoir  avis  que  est 
de  faire,  à  obvier  et  pourveoir  aux  inconvéniens  et  doramaiges  qui, 
par  défault  de  bonne  provision,  se  pourroient  en  brief  ensuir;  à  quoy 
chacun  est  tenu  et  doit  avoir  l'eul,  en  toute  diligence,  pour  le  bien  de 
soy  mesmes  et  pour  la  salvacion  du  pais;  si,  vous  prions,  tant  acertes 
que  plus  povons,  qu'il  vous  plaise  venir  et  estre  en  ceste  ville  d'An- 
giers  au  samedi  prouchain,  après  quasimodo,  qui  sera  le  xiw^  jour  de 
ce  présent  mois  d'avril,  auquel  jour  les  prélaz,  nobles  et  autres  de  ce 
pais  sont  mandez  y  estre;  et  vous  ferez  le  bien,  honneur  et  prouffit  de 
vous  mesmes  et  de  tout  le  pais.  Si,  n'y  veuUez  faillir,  car,  en  si  haulte 
chose  et  qui  si  grandement  vous  touche,  ne  vouldrions  besoigner 
sans  vous.  Très  chier  frère  et  honoré  seigneur,  Messire  vous  ait  en  sa 
sainte  garde.  Escript  à  Angiers  le  premier  jour  d'avril  (1426). 

Le  conte  de  Vendosme,  l'évesque  d'Angiers,  les  seigneurs  de  Maillé 
et  de  Montjehan  et  les  gens  du  conseil  de  la  royne  et  du  roy  de  Secile 
estans  à  Angiers.  (X-"  21,  f»»  47  v»,  48.) 

1.  Le  seigneur  de  Maulevrier  (Fr.  de  Montberon)  était  alors  en  procès 
avec  Boussac.  11  devait  venir  rejoindre  le  connèlable,  avec  des  gens 
d'armes.  Il  obtint  du  parlement  un  sursis.  (X*»  21,  fos  46  v»,  47  ) 


520  APPENDICES 

XXXVI 

LETTRE   DU  CONNÉTABLE   AUX   LYONNAIS    (1426,    10   mai)  [p.  127]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  seneschal,  conseillers  et  bourgois  de 
la  bonne  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  pour  les  très  grans  affaires  que  présente- 
ment avons  pardecà,  pour  le  bien  de  monseigneur  le  roy  et  de  sa 
seigneurie^  en  quoy  ne  nous  est  pas  possible  d'employer  sans  avoir 
argent,  nous  vous  prions  que,  à  toute  diligence,  faictes  lever  et 
cueillir  le  reste  des  deniers  de  nostre  assignacion  sur  vous,  par  le  re- 
ceveur ad  ce  commis,  en  y  tenant  la  main  et  vous  employant  telement 
que  briefment  les  puissons  avoir  et  recevoir  et  que,  par  le  dit  rece- 
veur, nous  soient  envoyez  le  plus  hastivement  que  faire  se  pourra, 
ainsi  que  lui  escripvons  et  que  de  ce  en  vous  avons  parfaite  fiance.  Au 
surplus,  nous  faictes  savoir  de  voz  nouvelles  et,  se  chose  voulez  que 
puissons,  nous  la  ferons  de  bon  cuer.  Très  chiers  et  bons  amis,  Nostre 
Seigneur  vous  ait  en  sa  saincte  garde.  Escript  à  Chinon.  le  x«  jour  de 
may. 

Le  conte   de   Richemont, 

Connestable  de  France , 

Artur. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  A  A,  77). 

XXXVII 

LETTRE   DU   CONNÉTABLE   AUX   LYONNAIS    (1426,    6   OCtobre) 
[p.  127,  133,  note  2]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  conseillers  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  nous  avons  receu  voz  lettres,  veu  le  con- 
tenu d'icelles  et  oy  la  créance  par  Raoulin  de  Mascon,  vostre  procu- 
reur; sur  quoy  vueillez  savoir  que,  quant  ad  ce  que  par  icelles  nous 
rescripvez,  que  la  somme  sur  vous  imposée  de  l'aide  derrenièrement 
mis  sus  par  monseigneur  le  roy  soit  modérée  à  moindre  somme, 
nous  nous  en  rapportons  aux  commissaires  ordonnez  et  envoyez  par- 
delà,  pour  ceste  cause,  et  serons  bien  joyeulx  et  contens  qu'ils  vous  en 
rabatent  et  quilz y  facent  modéracion  telle  qu'en  doyez  estre  contens; 
et  y  tendrons  voulentiers  la  main,  car,  quant  à  nous,  en  ce  et  autres 
choses,  vous  vouldrions  complaire,  mais  mon  dit  seigneur  nous  y  a 
assigné  de  la  somme  de  XXlfc  f.  pour  le  fait  de  la  guerre,  laquelle 
il  nous  convient  avoir  en  grant  scellerité,  pour  convertir  et  employer 
au  dit  fait;  à  quoy  ne  povons  riens  exploicter,  sans  avoir  ladite  somme 


APPENDICES  521 

et  autres,  que  ne  povons  avoir  ne  recouvrer  si  tost  que  voulsissions 
bien.  Si,  vous   prions  que  la  dite  somme   de  XXIIc  f.  vueillez  faire 
cueillir  et  recevoir,  pour  envoyer  par-devers  nous,  le  plus  tost  que 
faire  se  pourra,  en  nous  faisant  savoir  se  chose  voulez  que  puissons,  et 
nous  la  ferons  de  bon  cuer.  Très  chiers  et  bien  amez,  Nostre  Seigneur 
soit  garde  de  vous.  Escript  à  Saumur,  le  vi*  jour  d'octobre. 
Le  conte  de   Bichemont, 
Connestable  de  France, 
Artdr. 

Gilet. 

(Archives  de  la  ville  de  Lyon,  AA,  77.) 


XXXVIII 
LETTRE  DU  CONNÉTABLE  AUX  LYONNAIS  (1426,  23  novembre) 

[p.  127]. 

A  nos  très  chiers  et  bons  amis,  les  conseillers  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  combien  que,  par  plusieurs  fois,  nous  aiez 
escript  que  vous  feriez  tant  que  serions  paie  de  toutes  noz  assigna- 
cions,  rnoyennant  certaines  lettres  que,  à  vostre  requeste,  feismes 
obtenir  de  monseigueur  le  roy,  pour  contraindre  certains  marchans 
de  Lyon  à  vous  paier  certaine  somme  d'argent,  sur  quoy  nous  deviez 
paier  les  Vc  f.  de  nostre  assignacion  derrenière,  incontinent  que 
pourriez  avoir  lesdites  lettres;  et  néanmoins  que  les  vous  ayons  en- 
volées, n'en  pouvons  estre  paie  et  en  devez  encores  environ  IIIIc  f. 
Aussi,  de  nostre  assignacion  précédent,  dont  vous  avions  remis  et 
rabatu,  de  II"»  lie  XIIII''  f.,  parmi  ce  que  pairiez  le  surplus  à  ceste 
Saint-Michiel,  riens  n'avez  fait,  comme  avons  sceu  par  Ligier,  nostre 
serviteur;  de  quoy  nous  sommes  tant  desplaisant  et  mal  content  que 
plus  ne  pouvons,  et,  puisque  ainsi  est  que  paie  n'avez  le  reste  dudit 
rabais,  nostre  entencion  est  que  ledit  rabais  soit  de  nule  valeur,  et 
d'estre  paie  de  toute  ladite  somme  de  XXIIc  f.  et  des  despens  faiz  eu 
la  poursuite,  par  nostre  dit  serviteur  Ligier,  tant  pour  la  response  (des- 
pence?) par  lui  faite  des  seaulx,  en  la  chancellerie,  de  vos  dites  let- 
tres, comme  autrement.  Si,  nous  vueillez  paier  et  contenter  des  dites 
sommes  de  IIIlc  et  de  II'»  11°  telement  que  n'ayons  cause  d'y  procéder 
par  autre  manière  à  vostre  desplaisance,  et  telement  que  nostre  dit 
serviteur,  porteur  de  cestes,  n'ait  plus  cause  d'en  retourner  par  de- 
vers nous,  car  il  nous  desplaist  bien  du  délay  qu'en  ce  nous  faites. 
Nostre-Seigneur  soit  garde  de  vous.  Escript  à  Chauvigny,  le  xxiiio  jour 
de  novembre. 

Le   conte   de   Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  AA,  77.) 


APPENDICES 


XXXIX 


LETTRE   DU   CONNÉTABLE   AUX   LYONNAIS    (1427,    20  janvier) 
[p.  127,  129]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  bourgois  et  habitans 
de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  austrefoiz  vous  avons  escript  que  nous 
voulsissiez  payer  de  la  reste  de  nostre  assignacion,  dontjapiéça  fusmes 
assignez  sur  vous,  pour  le  fait  de  la  guerre,  à  quoy  jusques  cy  avez 
tousiours  différé,  dont  nous  donnons  grant  merveille.  Et,  pour  ce  que 
par  le  retardement  dudit  payement,  le  fait  de  la  guerre  pourroit  de- 
mourer,  dont  inconvénient  pourroit  ensuir,  ou  préjudice  et  dommage 
de  monseigneur  le  roy,  de  vous  et  de  ses  autres  subgez,  que  Dieu  ne 
vueille,  nous  vous  prions  tant  que  plus  povons,  que  l'argent  de  nostre 
dite  assignacion,  incontinent  ces  lettres  veues,  vueillez  bailler  et  déli- 
vrer à  Ymbaut  de  Bleterans,  porteur  de  cestes,  pour  icelui  apporter 
ou  envoyer  par  devers  nous,  et  vous  nous  ferez  très  grant  plaisir.  Et, 
au  surplus,  vueillez  oir  et  féablement  croire  ledit  Ymbaut  de  ce  qu'il 
vous  dira  de  par  nous.  Très  chiers  et  bons  amis,  Nostre  Seigneur  soit 
garde  de  vous.  Escript  à  Moulins,  le  xx^  jour  de  janvier. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Chevalier. 
(Arch.  de  Lyon,  AA,  77.) 


XL 

LETTRE   DU   CONNÉTABLE  AUX   LYONNAIS  (1427,   28   février)  [p.  127]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  conseilliers  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  vous  savez  que  despieça  monseigneur  le 
roy,  pour  le  fait  de  la  guerre,  nous  fist  assigner,  à  Lyon,  sur  la  por- 
cion  de  l'aide  à  lui  octroyé  à  Poictierâ,  à  l'assemblée  des  gens  des 
trois  estas  de  son  obéissance,  de  certaine  somme  de  deniers,  dont 
nous  est  deu  en  ladite  ville  de  Lyon,  la  somme  de  deux  mil  deux  cens 
livres  tournois,  sur  quoy  nous,  estans,  derrenier,  à  Montluçon,  avons 
parlé  aux  ambaxeurs  d'icelle  ville,  qui  estoient  venuz  audit  lieu,  par 
devers  mondit  seigneur,  lesquelx  nous  ont  promis  de  faire  leur  povoir 
qne  nous  serions  payez  de  ladite  reste  de  II'"  IJc  livres  t.  Et,  avec- 
ques  ce,  avons  esté  assigné  audit  lieu,  sur  la  porcion  de  l'aide  derre- 
nier octroyé,  de  certaine  somme  d'argent,  dont  se  doit  prendre,  sur 
ycelle  ville,  la  somme  de  cinq  cens  livres  tournois  et  le  surplus  sur 


APPENDICES  523 

le  plat  pais.  Et  pour  ce  que,  pour  le  très  grant  bien  et  évident 
proufflt  de  mondit  seigneur  et  de  sa  seigneurie,  nous  est  besoing  et 
nécessaire  de  recouvrer  promptement  argent,  nous  envolons  pré- 
sentement pardelà  nostre  amé  et  féal  secrétaire  de  mondit  seigneur 
et  nostre  maistre  Jehan  de  Dijon,  pour  recouvrei  ce  qui  nous  est  deu 
à  cause  desdites  assignacions.  Si,  vous  prions  très  acertes,  sur  tant 
que  amez  le  bien  de  mondit  seigneur  et  de  sa  seigneurie  et  que  nous 
désirez  faire  plaisir,  que  de  tout  ce  qui  nous  est  deu  en  ladite  ville, 
tant  dudit  aide  de  Poictiers  comme  de  celui  de  Montluçon,  vous  nous 
vueillez  faire  paier  et  contenter,  en  tele  manière  que  ledit  de  Dijon 
puisse  hastivement  faire  apporter  ledit  argent  pardevers  nous,  en 
adioustant  foy  et  créance  à  ce  qu'il  vous  dira  sur  ce,  de  nostre  part. 
Et  par  lui  nous  faites  savoir  se  chose  voulez,  et  nous  le  ferons  de  bon 
cuer.  Très  chiers  et  bons  amis,  Nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous. 
Escript  à  Bourge,  le  derrenier  jour  de  février. 
Le  conte  de  Richemont, 
Conncstable  de  France, 
Artur. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  AA,  77.) 


XLI 

LETTRE    DU   CONNÉTABLE  AUX  LYONNAIS  (1427,  12  juin) 
[p.  127,  133,  note  2]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  conseilliers  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  nous  avons  seau  par  Dijon  l'appointement 
qui  lui  avez  offert,  touchant  le  reste  de  deux  mil  deux  cens  frans  à  nous 
deuz  en  la  ville  de  Lyon,  à  cause  de  l'assignation  que  y  avions,  sur  l'aide 
octoyé  à  Poictiers,  en  octobre  mil  CCCC  XXVI,  qui  nous  a  semblé  bien 
pou  de  chose,  considéré  la  longueur  du  temps  que  nous  avons  actendu 
et  les  petites  charges  que  avez,  au  regart  des  autres  subgez  de  mon- 
seigneur le  roy  '.  Toutesfoiz,  pour  ce  que  nous  vouidrions  tousjours, 
à  nostre  povoir,  supporter  les  subgez  de  mondit  seigneur  le  roy  et 
mesmement  ceulx  de  ladite  ville  de  Lyon,  actendu  aussi  les 
autres  grans  charges  que  avez  eues  à  supporter,  ainsi  que  ledit  Dijon 
nous  a  rapporté,  et  aussi  pour  la  grant  nécessité  que  avons  d'avoir 
promptement  finance,  pour  nous  acquicter  envers  plusieurs  personnes 
auxquelz  nous  sommes  tenuz  et  obligiez,  espérans  que,  une  autre  foiz 
nous  aiderez  plus  avant,  avons  esté  et  sommes  contens  dudit  appoinc- 
tement.  Si,  vous  prions  que,  en  ce  que  avez  promis,  par  ycelluy  ap- 
pointement,  n'y  ait  point  de  faulte,  comme  promis  l'avez,  car  autre- 
ment nous  y  aurions  très  grant  dommaige,  et  aussi  aurez  vous;  car, 

1.  La  ville  de  Lyon  offrait  de  payer  800  1.  t.  à  la  Saint-Michel,  au  lieu 
do  2  200  1. 


524  APPENDICES 

se  faulte  y  a  de  vostre  part,  le  dit  appoinctement  sera  nul,  et  trouve- 
rons manière  d'estre  paie  tout  au  long,  par  raison  et  justice.  Très  chiers 
et  bons  amis,  Nostre-Seigneur  vous  ait  en  sa  saincte  garde.  Escript  à 
Poictiers,  le  xn"  jour  de  juing. 

Le   conte  de   Richemont, 
Connestable  de  France. 
Artur. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  AA,  77.) 


XLII 

LETTRE  DU  CONNÉTABLE  AUX  LYONNAIS  (1427,  13  juin) 

[p.  127,  133,  note  2]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  séneschal,  conseillers  et  bourgois 
de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  amis,  nous  avons  sceu,  par  le  rapport  de  nostre 
bien  amé  Pierre  Auffroy,  receveur  de  l'ayde  en  Lyonnois,  la  grant 
cure  et  bonne  diligence  qu'e  avez  prinse  et  faite  à  l'avancement 
du  paiement  de  nostre  assignacion,  tant  à  l'expédicion  de  justice, 
où  besoing  a  esté,  comme  autrement;  de  quoy  vous  mercyons,  et  vous 
prions  de  bien  en  mieulx  y  continuer  et  persévérer,  comme  en  vous 
en  avons  parfaite  confiance,  en  conseillant  et  confortant  en  nostre 
faveur  ledit  receveur  sur  tout  ce  qu'il  aura  à  faire,  touchant  le  fait  de 
sadite  recepte,  par  manière  que  briefment  puissons  avoir  et  recouvrer 
ce  qui  nous  est  deu  de  nostre  dite  assignacion,  pour  emploier  et  con- 
vertir en  certaines  entreprinses,  que  avons  entencion  de  bien  briefment 
mectre  sus,  pour  le  bien  de  mondit  seigneur  le  roy  et  recouvrement 
de  sa  seigneurie  *,  en  quoy  ne  nous  est  pas  possible  d'emploier  sans 
avoir  ledit  argent.  Si,  en  faites  telement,  à  ceste  foiz,  que  en  doiez 
estre  recommandez  de  bonne  obéissance  et  que  n'en  puissez  avoir 
blasme  ou  reprouche  à  vostre  charge;  et  vous  nous  ferez  singulier 
plaisir.  Et,  se  chose  voulez  que  puissons,  faites  la  nous  féablement 
savoir,  et  nous  la  ferons  de  bon  cuer.  Très  chiers  et  bons  amis,  Nostre 
Seigneur  soit  garde  de  vous.  Escript  à  Poictiers,  le  xm^  jour  de  juin. 
Le  conte  de  Richetnont^ 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  AA.  77.) 

1.  Sans  doute  le  ravitaillement  de  Montargis  (voir  p.  295  et  suiv.). 


APPENDICES  525 

XLII  bis 

LETTRE   DU    CONNÉTABLE   AUX   LYONNAIS   (1427,   8   aOÛt)    [p.  127]. 

A  noz  très  chiers  et  bons  amis,  les  conseilliers  de  la  ville  de  Lyon. 

Très  chiers  et  bons  'amis,  nous  avons  receu  voz  lettres  par  nostre 
serviteur  Ligier,  porteur  de  cestes,  par  lesquelles,  et  aussi  par  ledit 
Ligier,  avons  sceu  la  peine  et  bonne  diligence  qu'avez  prins  et  prenez 
chacun  jour,  afin  de  nous  contenter  et  payer  entièrement  de  ce  que 
nous  devez,  par  assignacion,  et  le  bon  vouloir  et  affeccion  que  démons- 
trez  avoir  envers  nous,  dont  nous  vous  mercions  tant  que  pluspovons, 
vous  priant  que  adès  vous  y  vueillez  emploier  et  labourer,  en  ce  qui 
sera  possible,  et  avoir  noz  besongnes  et  affaires  pour  recommandées, 
ainsi  comme  en  vous  en  avons  nostre  parfaicte  seurté  et  fiance.  Et, 
quant  à  l'empeschement  que  vous  donne  Benard  Jacob  de  non  paier 
ce  qui  vous  doit,  ledit  Ligier  porte  pardelà  toutes  telles  lettres  qu'il 
appartient,  pour  le  contraindre  et  faire  venir  à  raison.  Si,  vous  prions 
que,  en  bonne  dilligence,  le  contraignez,  par  manière  que  nostre  deu 
puissons  avoir,  le  plus  tost  que  faire  se  pourra,  ainsi  que  bien 
besoing  nous  en  est,  et  comme  vous  dira  ledit  porteur.  Au  surplus, 
nous  vous  prions  d'avoir  pour  recommandé  Pierre  Auffroy  en  l'office 
du  receveur  de  ce  présent  aide,  ainsi  que  darrenierement  lui  fut  pro- 
mis à  Montluçon,  en  le  portant  et  soustenant  oudit  office,  par  ma- 
nière qu'il  congnoisse  nostre  prière  envers  vous,  et  vous  nous  ferez 
très  grant  plaisir.  Et  s'aucune  chose  vouliez  que  puissons  faire,  faites 
la  nous  savoir,  et  nous  la  ferons  de  bon  cuer.  Très  chiers  et  bons 
amis,  Nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous.  Escript  à  Montrichart  %  le 
viii«  jour  d'aoust. 

Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artcr. 

Gilet. 

(Arch.  de  Lyon,  AA,  77). 


XLIII 

ALLIANCE  CONCLUE   PAR  LE   CONNÉTABLE   DE  RICHEMONT 

AVEC  LE  COMTE  DE  FOix,  JEAN  i*""  (1427,  6  janvier)  [p.  130]. 

Nous,  Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigae,  conte  de  Richemont,  connes- 
table de  France,  jurons  et  promectons,  par  les  foy  et  serment  de  nos- 
tre corps,  que,  au  bien  du  roy,  nous  serons  bon  ami  à  nostre  cousin 

1.  Arrondissement  de  Blois. 


52d  appendices 

le  conte  de  Foix,  son  bien  garderons  et  pourchacerons ,  son  dom- 
maige  escheverons,  et  de  nostre  povoir,  avecques  lui  ensemble  et  d'un 
commun  accord,  au  bien  du  roy  et  de  sa  seigneurie  nous  employe- 
rons;  et,  pour  ce  que  on  dit  aucunes  aliances  estre  entre  nous,  le  duc 
de  Bretaigne  et  nostre  frère  le  conte  d'Armignac,  esquelles  nous  som- 
mes comprins,  ou  cas  que  nostre  dit  frère  le  conte  d'Armignac,  ou  nostre 
nepveu  le  conte  de  Perdriac,  son  frère,  feroit  guerre  à  nostre  dit  cou- 
sin de  Foix,  nous  ne  servirons  ne  aiderons  yceulx  noz  frère  et  nepveu 
d'Armignac  et  de  Perdriac  contre  nostre  dit  cousin  de  Foix,  sinon  par 
le  conseil  de  la  royne  de  Secille  et  de  nostre  frère,  Charles  de  Bour- 
bon, conte  de  Clermont,  et  de  leur  commun  assentement,  supposé 
que  leurs  personnes  ne  feussent  ensemble  ;  le  conseil  des  quels  avons 
promis  tenir  et  ensuir,  et  ils  ont  promis  et  juré  nous  bien  et  loyau- 
ment  conseiller  et  à  nostre  honneur.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons 
signé  ces  lectres  de  nostre  main  et  à  icelles  fait  mectre  nostre  scel. 
Donné  à  Montluçon,  le  vi»  jour  de  janvier,  l'an  mil  CCCC  vint  et  six. 

Artur. 
(Arch.  des  Basses-Pyrénées,  E  434.  Original  sur  parchemin.) 


XLIV 

LETTRE   DU   COMTE   DE   RICHEMONT   A   LA   DAME   DE    SALtGNY 

(1427,  13  mars)  [p.  134]. 

En  suscription  :  A  ma  très  chiêre  etamée  cousine,  la  dame  de  Sàligny. 

Très  chière  et  amée  cousine,  j'ay  receu  vos  lectres  et  veu  le  contenu 
d'icelles,  et  en  tout  ce  que  je  sauray  à  vous  estre  prouffîtable  et 
agréable  je  me  y  emploiray  de  bon  cuer.  Et,  quant  à  vostre  place  de 
Chastillon,  j'ai  trouvé  manière  par  laquelle,  au  plaisir  Dieu,  elle  sera 
briefment  en  voz  mains;  car,  combien  que  par  deçà  ait  eu  moult  de 
troubles  et  empeschemens,  néantmoins,  la  mercy  Nostre  Seigneur, 
les  choses  sont  à  présent  en  bonne  disposicion,  espérant  icelles  pren- 
dre bonne  conclusion.  Et  est  à  présent  vostre  nepveu  de  Chalançon 
premier  chambellan  de  monseigneur  le  roi,  en  l'office  que  souloit 
tenir  feu  Gyac,  et  est  ung  des  principaulx  d'entour  mondit  seigneur; 
par  quoy  j'espère  que  les  choses,  à  l'aide  de  Dieu,  sortiront  bon 
effect.  Si,  me  vueillez  souvent  faire  savoir  de  voz  nouvelles,  ensemble 
se  chose  voulez  que  je  puisse,  pour  l'acomplir  de  bon  cuer. 

Très  chière  et  amée  cousine,  Nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous. 

Escript  à  Bourges,  le  xui^  jour  de  mars. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Chevalier. 

(Fr.  2920,  f»  2,  original  sur  papier.  Voir  aussi  le  Bulletin  de  la  Soc. 
archéol.  de  Nantes,  t.  VIII,  p.  240.) 


APPENDICES  827 

XLV 

PRÉPARATIFS   DU   SIÈGE   DE  PONTORSON    (1427)    [p.  134]. 

Nous,  Richart  de  Beauchamp,  conte  de  Warewyk  et  d'AumalIe,  sei- 
gneur le  Despensier  et  de  Lisle,  capitaine  et  lieutenant  général  du 
roi  et  de  monseigneur  le  régent  le  royaume  de  France,  duc  de  Bed- 
ford,  par  tout  le  royaume  de  France,  certiffions  que,  pour  le  fait  du 
siège  de  Pontorson,  ont  esté  baillées  et  distribuées,  par  Jehan  Harbo- 
tel,  escuier,  maistre  des  ordonnances  de  l'artillerie  de  mondit  sei- 
gneur le  Régent,  les  artilleries  et  habillemens  de  guerre  qui  ensuivent, 
c'est  assavoir  :  deux  mil  deux  cens  livres  de  pouldre  à  canon;  item, 
six  milliers  cinq  cens  de  trait  commun;  item,  deux  milliers  cinq 
cens  de  dondaines  *  ;  item,  quatre  milliers  deux  cens  cinquante  des 
dictes  dondaines;  item,  trante  huit  panais  2;  item,  douze  panais,  qui 
furent  emprumptez  à  Rouen;  item,  quatre  panaisines  ^;  item,  ung 
falot;  item,  cent  tourteaux;  item,  quarante-cinq  sarpes  à  bois;  item, 
quinze  congnées  à  fendre  bois;  item,  deux  engins  à  poulies  doubles; 
item,  trois  engins  sangles;  item,  soixante  livres  de  fil  d'envers;  item, 
trente  livres  d'acier;  item,  douze  cens  livres  de  fer  d'Espaigne;  item, 
quatre  cens  pelés,  c'est  assavoir  un  cent  de  ferrées  et  trois  cens  non  fei'- 
rées;  item,  deux  cens  quarante  picquoiz;  item,  mil  toises  de  cordaige  ; 
item,  ung  grant  chable;  item,  cinq  cens  fusées;  item,  trois  cens  qua- 
rante maillez  de  plom;  item,  douze  lanternes  et  cinq  arbalestre's  rom- 
pues et  cassées.  Toutes  lesquelles  artilleries  et  habillemens  dessusdiz 
ont  esté  baillées  et  distribuées  par  ledit  maistre,  par  nostre  comman- 
dement et  ordonnance.  Et,  à  sa  descharge,  et  pour  lui  valoir  en  ses 
comptes,  lui  avons  baillées  et  accordées  ces  présentes  lettres  certiffl- 
catoires,  auxquelles,  en  tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  nostre 
signet,  le  ix"  jour  de  janvyer,  l'an  mil  quatre  cens  et  vint  sept. 

(Ms.  Fr.  26030,  n»  740,  à  la  Bibli.  nat.  Voir  trois  autres  documents 
sur  le  siège  de  Pontorson  dans  l'édit.  de  la  Chron.  du  Mont-Saint- 
Michel,  par  M.  S.  Luce,  p.  2S3-2S8.  Le  n»  740  est  aussi  publié  dans  ce 
même  volume,  p.  263-264.) 

XLVI 

RICHEMONT   ORDONNE   DE   PAYER   200   L.    T.    AU   BARON   DE   COULONCES 

(1426,  12  avril)  [p.  in]. 

Le  conte  de  Richement,  connestable  de  France,  et  l'arcediacre  de 
Rennes,  à  Jehan  Aleaumes,  receveur  des  Ponts  de  Scé,  salut.  Veues 

1.  Machines  à  lancer  de  grosses  pierres  rondes. 

2  et  3.  Panais,  panaisines,  formes  corrompues  des  mots  pavais,  pavaisines, 
sorte  de  bouclier  (V.  Ducange,  t.  V,  aux  mots  Panesius  (p.  49)  et  Pave- 
siUM  (p.  150). 


528  APPENDICES 

par  nous  les  lettres  de  monseigneur  le  duc  i,  ausquelz  ces  présentes 
sont  attachées,  soubz  l'un  de  nos  signez,  nous  vous  mandons  que,  en 
accomplissant  et  entretenant  le  contenu  d'icelles,  vous  payez,  baillez 
et  délivrez,  des  deniers  de  vostre  recepte,  au  baron  de  Coulonces, 
nommé  es  dites  lettres,  la  somme  de  deux  cens  livres  tournois,  pour 
les  causes  et  tout  ainsi  et  par  la  forme  et  manière  que  mondit  sei- 
gneur le  duc  le  veult  et  mande,  par  ses  dites  lettres.  Donné  le  xii»  jour 
d'avril,  l'an  mil  quatre  cens  vingt  et  six,  après  Pasques. 

Artur. 

(Fr.  26049,  n»  572.  Voir  aussi  la  Chron.  du  Mont  Saint- Michel,  publiée 
par  S.  Luce,  p.  230,  note  i,  et  p.  242.) 

Le  reçu  du  baron  de  Coulonces  est  dans  le  Ms.  Fr.  26049,  n»  379. 


XLVII 

LETTRE  DU  CONNÉTABLE  A  LA  DAME  DE   SALIGNY  (1427,   4  avril) 

[p.  142]. 

En  suscription  :  A  ma  très  chière  et  amée  cousine,  la  dame  de  Saligny. 

Très  chière  et  amée  cousine,  je  me  recommande  à  vous.  Et  vueillez 
savoir  que,  sur  les  choses  que  naguières  escriptes  m'avez,  j'ay  encores 
bien  pou  besoigné,  pour  plusieurs  choses  et  occupacions  qui  me  sont 
sourvenues,  par  quoy  je  n'ay  bonnement  peu,  mais,  au  plaisir  Dieu, 
j'en  parleroy  bien  acertes  à  beau  cousin  de  La  Trimouille  et  y  feray, 
à  vostre  intencion,  tout  ce  que  faire  j'en  pourray,  comme  plus  à  plain 
j'ay  parlé  à  (Jehan)  du  Blexer,  vostre  serviteur,  porteur  de  cestes, 
lequel  vous  plaise  croire  de  ce  qu'il  vous  dira  sur  ce,  de  ma  part. 
Très  chière  et  amée  cousine,  Nostre  Seigneur  vous  ayt  en  sa  garde. 
Escript  à  Bourges,  le  iv°  jour  d'avril. 
Le  conte  de  Richemont, 
Connestable  de  France, 
Artur. 

Jarno. 
(Fr.  2931,  fo  27.  Original  sur  papier.) 

Cette  lettre  a  été  publiée,  comme  la  précédente,  par  M.  Marchegay, 
dans  le  Bulletin  de  la  Soc.  archéol.  de  Nantes,  t.  Vin,  1868,  p.  240-241. 

Il  est  possible  que  cette  lettre  soit  olographe.  Elle  est  probablement 
de  1427,  mais  elle  peut  être  de  1426.  En  avril  1426,  G.  de  La  Tré- 
moille  était  auprès  de  Philippe  le  Bon,  comme  envoyé  de  Charles  VII. 
Jean  Lourdin  de  Saligny  devait  avoir  quelques  démêlés  de  ce  côté, 
car,  aux  conférences  de  Bourbon-Lancy  (janvier  1427),  il  est  question 
de  la  forteresse  de  Saint-Bricon,  appartenant  à  messire  Lourdin  de 
Saligny,  qui  devait  être  remise  à  la  garde  du  sire  de  Chalençon  (Col- 

1.  Lettres  du  25  mars  (Fr.  26049,  n»  562). 


APPENDICES  '  529 

lection  de  Bourgogne,  t.  99,  p.  233-235).  M.  Marchegay  croit  que  la 
dame  de  Saliyny  est  Jeanne  Bracque,  femme  de  J.  Lourdin,  seigneur 
de  Saligny  (Voy.  Pièces  originales,  t.  2613,  dossier  58137,  Saligny, 
jiassiin). 


XLVIII 

HENlll   VI   CONFISQUE    LE    COMTÉ    d'iVRY,    DONNÉ    PAR   HENRI   V 

A  RiCQEMÔNT  (1427,  12  juillet)  [p.  IW.] 

Henry,  par  la  grâce  de  Dieu,  roi  de  France  et  d'Angleterre,  savoir 
faisons  à  tous,  présens  et  à  venir,  que,  pour  considéracion  des  bons  et 
notables  services  que  nous  a  faiz  et  fait  encore  nostre  très  chier  et 
amé  cousin,  Jeban,  conte  de  Hontinlon,  et  pour  autres  causes  et  con- 
sidéracions  à  ce  nous  mouvans,  à  icellui,  par  l'advis  et  délibéracion 
de  nostre  très  cbier  et  très  amé.oncle  Jeban,  régent  nostre  royaume  de 
de  France,  duc  de  Bedford,  avons  donné,  cédé,  transporté  et  délaissiez 
donnons,  cédons,  transportons  et  délaissons,  par  ces  présentes,  les 
conté,  terre,  seigneurie  et  baronnie  d'Ivry,  avecques  ses  droits,  fran- 
cbises,  libertez,  préérainances,  prérogatives,  appartenances  et  appen- 
dances,  qui  dernièrement  furent  et  appartindrent  à  Artur  de  Bre- 
taigne,  par  don  qui  lui  en  fut  fait  par  feu  nostre  très  chier  seigneur 
et  père,  cui  Dieu  pardoint;  lesquelles  sont  à  nous  forfaictes,  confis- 
quées et  acquises,  pour  la  rébellion  et  désobéissance,  et  autres  crimes 
de  lèse-majesté,  commis  à  rencontre  de  nous,  par  ledit  Artur;  pour 
jouir  d'icelle  conté,  terre,  seigneurie  et  baronnie  par  nostre  dit  cousin 
de  Hontinton  et  ses  hoirs  masles  légitimes,  venant  de  lui  en  directe 
ligne,  à  toujours  mais,  perpétuellement  et  héréditablement,  comme 
de  leur  propre  chose,  à  quelconque  valeur  ou  estimaison  que  les  choses 
dessus  dictes  aient  esté,  soient  ou  puissent  estre,  pourveu  que  par 
nous  elles  n'aient  esté  données  à  autres,  par  l'advis  et  délibéracion 
de  nostre  dit  oncle  et  pour  ce  que  nostre  dit  cousin  en  fera  les  devoirs 
et  paiera  les  charges  pour  ce  deues  et  accoustumées.  Si,  donnons  en 
mandement  à  noz  amez  et  féaulx  conseillers,  les  gens  de  nos  comptes, 
trésoriers  et  généraux  gouverneurs  de  toutes  nos  finances,  en  France 
et  Normandie,  aux  bailliz  d'Evreux  et  de  Chartres,  à  tous  noz  austres 
justiciers  et  officiers  présens  et  à  venir  et  à  leurs  lieutenans  et  à  cha- 
cun d'eulx,  si  comme  à  lui  appartendra,  que  de  noz  présens  don, 
cession,  transport  et  délaissement  fassent,  seuffrent  et  laissent  nostre 
dit  cousin  et  ses  diz  hoirs  joir  et  user  pleinement  et  paisiblement  à 
toujours  mais,  perpétuellement  et  héréditablement,  comme  de  leur 
propre  chose,  par  la  manière  que  dit  est,  sans  leur  faire,  mectre,  ne 
donner,  ne  souffrir  estre  faict,  mis  ou  donné  ores,  ne  pour  le  temps 
à  venir,  aucun  destourbier  ne  empeschement  au  contraire.  Et,  afin 
que  ce  soit  chose  ferme  et  estable  à  toujours,  nous  avons  fait  mectre 
nostre  scel  à  ces  présentes,  sauf  en  austres  choses  nostre  droit  et  l'au- 
truy  en  toutes. 

RiCHEMONT.  M 


530  APPENDICES 

Donné  à  Paris,  le  xii»  jour  de  juillet,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens 
et  vint  sept,  et  de  nostre  règne  le  quint.  Et  ainsi  signé  : 
Par  le  roi,  à  la  relacion  de  monseigneur  le  régent,  duc  de  Bedfoi'd. 

J.  DE  RiNEL. 


XLIX 

PRÉPARATIFS  DU  SIÈGE  DE   MONTARGIS  PAR   LES  ANGLAIS 

(1427,  2  juillet)  [p.  145]. 

Guillaume  de  la  Pôle,  conte  de  Suffolk  et  de  Dreux,  capitaine  et 
lieutenant  général  des  pais  de  {sic)  Chartrain,  Vendosmois,  Beausse  et 
Gastinois,  confessons  avoir  eu  et  receu,  en  celte  ville  de  Verneuil,  ou 
Parche,  de  Jehan  Harbotel,  escuier,  maistre  des  ordonnances  du  roy 
nostre  sire  et  de  }\gv  le  Régent,  les   ordonnances  cy-après  desclai- 
Y        rées,  c'est  assavoir  :  soixante  grans  paifaiz  blans  ;  quatorze  petitz  pa/a- 
i/     sines  noirs;  six  vints  quatorze  pelles  ferfées,  six  vints  seize  pelles 
defFerrées  ;  cent  soixante-dix  et  sept  picquoys  ;  ung  baril  de  pouldre  à 
canon  et  quatre-vingt-deux  lances  ferrées,  pour  convertir  et  employer 
ou  siège  ordonné  estre  mis  devant  Montargis,  Desquelles  ordonnances 
dessus   dites  nous  promectons,  par  ces  présentes,  descharger  le  dit 
J.  Harbotel  envers  le  Roy  nostre  dit  seigneur,  mon  dit  seigneur  le  Ré- 
gent et  tous  autres  qu'il  appartient.  Tesmoing  nostre  scel  cy  mis,  le 
n«  jour  de  juillet  l'an  mil  quatre  cent  vingt  et  sept. 
Par  monseigneur  le  conte^ 
Lieutenant  et  capitaine  généi'al, 
Berasse. 

(Fr.  26030,  no  746.) 


INSTRUCTION  POUR  l'ÉVESQUE  DE  TUELLE  ET  MAISTRE  GUILLAUME  DE 
QUIEFDEVILLE,  CONSEILLERS  DU  ROY,  ENVOYEZ  PRÉSENTEMENT,  DK 
PAR  LEDIT  SEIGNEUR,  DEVERS  LE  ROY  DE  CASTILLE  ET  DE  LÉON, 
SON    FRÈRE    ET   ALIÉ    (1428,  28  juin)    [p.  146,148]. 

Item,  et,  après  ce  i,  communiqueront  au  roy  de  Castille  les  autres 
affaires  du  roy  et  feront  savoir  les  choses  survenues  en  ce  royaume, 
depuis  le  retour  du  dit  de  Quiefdeville  par  deçà. 

Et,  premièrement,  comme  les  diz  Anglois  ont  toujours  continué,  puis 
le  retour  du  dit  de  Quiefdeville,  à  porter  et  faire  guerre  et  touz  les 
dommages  qu'ilz  ont  peu  au  Roy  et  à  sa  seigneurie. 

Item,  et  comme,  en  continuant  leurs  diz  maulx,  se  assemblèrent, 

1.  C'est-à-dire  après  avoir  demandé  des  secours  au  roi  de  Castille. 


APPENDICES  S31 

environ  le  mois  de  juillet  derrenier  passé,  et  vindrent  devant  une  nota- 
ble ville,  nommée  Montargiz,  et  là  mistrent  le  siège,  à  grant  nombre 
de  gens  d'armes  et  de  trait,  desquels  estoient  chiefz  les  contes  de 
Varewic  et  de  Suffort  et  le  sire  de  la  Poulie. 

item,  et  comme,  pour  secourir  la  dite  ville,  le  roy  fist  assembler  les 
gens  de  ses  garnisons  et  autres  estans  à  son  service,  desquels  bailla 
la  charge  à  messire  Guillaume  de  Lebret,  le  bastart  d'Orléans  et  au 
sire  de  Graville,  maistre  des  arbalestriers  de  France,  lesquels,  en 
bonne  ordonnance,  vindrent  férir  sur  le  dit  siège,  et,  par  la  grâce  de 
Dieu,  desconflrent  les  diz  Anglois;  et  en  y  ot  mors  et  prins  jusques  au 
nombre  de  mil  et  cinq  cens,  ou  environ,  et  les  autres  s'en  alèrent  et 
mirent  en  fuite. 

Item,  et,  comme  depuis,  les  gens  d'armes  des  garnisons  estans  sur 
les  frontières  ont  prins  et  remis  en  l'obéissance  du  roy  plusieurs  villes 
et  forteresses. 

Item,  et  comme,  depuis  le  retour  du  dit  de  Quiefdeville,  le  duc  de 
Bretaigne  a  esté  devers  le  Roy  et  fait  plusieurs  promesses  et  sere- 
inens  de  le  servir  envers  touz  et  contre  touz,  comme  bon  parent. 

Item,  et  ce  non  obstant,  par  le  moien  et  pourchaz  d'aucuns  qui 
sont  environ  le  dit  duc  et,  par  donner  à  entendre  choses  qui,  au  plai- 
sir de  Dieu,  n'avendront  pas,  le  dit  duc  s'est  substrait  de  l'obéissance 
du  roy  et  a  fait  le  serement  aux  Englois  et  contraint  plusieurs  des 
nobles  et  autres  du  dit  duchié  à  pareillement  faire  le  dit  serement. 
Touteffois  n'a-t-il  pas  esté  en  son  povoir  de  le  faire  faire  à  plusieurs 
grans  seigneurs  du  dit  pays,  mais,  en  ce,  lui  ont  désobéy,  pour  gar- 
der leur  loyaulté,  en  espécial  la  dame  et  enffans  de  Laval,  le  seigneur 
de  Rez,  le  viconte  de  Rohan  et  l'évesque  de  Saint-Malo. 

Item,  et  que,  à  l'occasion  de  la  désobéissance  que  a  faicte  le  dit  duc, 
le  Roy  a  eu  et  encores  a  grandement  à  faire  contre  ses  diz  adversai- 
res, qui,  après  la  dite  desconfiture  de  Montargiz,  estoient  très  fort 
afeblis  et  avoient  très  petite  puissance,  et  tant  que,  se  n'eust  esté  la 
désobéissance  du  dit  duc,  il  est  vraysemblable  que  le  roy  eust.à  pré- 
sent recouvert  gi'ant  partie  de  sa  seigneurie  occupée  par  les  diz  An- 
gloys,  etc. 

Donné  à  Loches,  le  xxviii*  jour  de  juing,  l'an  de  la  grùce  mccccxxviii. 
Charles. 

Fresxoy, 

(Lat.  6024,  n»  26.  Original  sur  parchemin,  avec  la  signature  du  roi 
et  le  petit  sceau.) 


BEDFORD    ORDONNE    d'eNVOVER    QUATRE    GROS   CANONS    POUR   LE    SIÈGE 

DE  MONTARGis  (1427,  22  Septembre)  [p.  147]. 

Jehan,  régent  le  royaume  de  France,  duc  de  Bedford,  à  noz  très 
chiers  et  bien  amez  Hamon  Belknap,  escuier,  trésorier   et  général 


532  APPENDICES 

gouverneur  des  finances  de  monseigneur  le  roy,  en  France  et  Normen- 
die,  el  P.  Sureau,  receveur  général  des  dites  finances  en  Normendie, 
salut.  Comme,  présentement,  pour  le  recouvrement  de  la  ville  de 
Montargis,  occupée  par  les  ennemis  de  mon  dit  seigneur  et  de  nous, 
soit  besoing  et  nécessité  avoir  hastivement  quatre  gros  canons,  les- 
quels, si  promptement  et  hastivement  que  mestier  en  est,  ne  se  peuent 
trouver,  attendu  la  grant  multitude  qui  en  a  esté  rompue  et  despé- 
ciée  es  sièges  qui,  de  par  mon  dit  seigneur,  ont  esté  mis  et  tenuz,  pour 
le  recouvrement  de  plusieurs  places  occuppées  par  les  dits  ennemis,  tant 
en  France,  Normendie,  Anjou,  le  Maine,  comme  autre  part,  sinon  de 
ceulx  qui,  de  présent,  sont  en  la  ville  de  Harefleu,  nous  ayons,  par  nos 
autres  lettres,  mandé  à  Guilllaume  Mineurs,  escuier,  capitaine  du  dit  lieu 
de  Harefleu,  et  à  Jehan  HoUand,  grenetier  ilec  et  garde  des  canons, 
artillerie  et  habillemens  de  guerre  de  monseigneur  le  roy,  estans  en 
la  dite  ville  de  Harefleu,  ou  à  leurs  lieuxtenans  vous  bailler  et  déli- 
vrer les  dits  quatre  gros  canons,  pour  les  faire  charger  en  bateaux  et 
yceulx  faire  mener  par  eaue  en  la  ville  de  Paris  et  illec,  les  bailler,  ou 
faire  bailler  et  délivrer  au  maistre  de  l'artillerie  de  mon  dit  seigneur 
le  Roy  en  France,  ou  son  lieutenant,  ou  autre  tel  ou  telz  comme  par 
noslre  très  chier  et  très  amé  cousin,  le  chancelier  de  France  et  le  conseil 
de  mon  dit  seigneur  vous  sera  ordonné,  nous  vous  mandons  et  expres- 
sément enjoignons  que,  sans  délay,  vous  vous  transportez  en  la  dite 
ville  de  Harefleu  et  yceulx  quatre  gros  canons  faictes  essayer  et  jecter, 
et,  s'ils  sont  en  estât  que  on  s'en  puisse  aidier,  faictes  les  chargier  en 
vaisseaulx  et  yceulx  mener  par  eaue  en  la  dite  ville  de  Paris,  et  les 
baillez  ou  faictes  bailler  et  délivrer  à  Phillebert  de  Mollens,  maistre  de 
l'artillerie  de  mon  dit  seigneur  le  roy,  en  France,  son  lieutenant,  ou 
autre  tel  ou  telz,  comme  ordonné  vous  sera  par  nostre  très  chier  et 
très  amé  cousin,  le  chancelier  de  France  et  conseil  du  roy,  comme 
dessus  est  dit,  pour  yceulx  faire  mener  du  dit  Paris  devant  la  dite 
ville  de  Montargis;  et  par  rapportant  ces  présentes  et  recongnoissant  de 
celui  ou  ceulx  à  qui  vous  les  aurez  faiz  délivrer  et  bailler,  nous  vou- 
lons que  vous  en  demourez  quictes  et  deschargez,  partout  où  il  appar- 
tendra.  Voulons  aussy  que  tout  ce  que  paie  sera  par  vous,  receveur 
général,  pour  les  frais,  missions  et  despens  de  iceulx  quatre  canons 
faire  charger,  mener  et  conduire  jusques  en  la  dite  ville  de  Paris,  en 
rapportant  ces  dites  présentes,  ou  vidimus  d'icelles,  fait  soubz  scel 
royal,  et  quictance  souffisans  de  ce  que  paie  en  aurez,  soit  alloué  en 
vos  comptes  et  rabattu  de  vostre  recepte,  par  noz  très  chiers  et  bien 
amez  les  gens  des  comptes  de  mon  dit  seigneur  le  roy,  à  Paris  et  par- 
tout ailleurs,  où  il  appartendra.  Auxquelx  nous  mandons,  par  mes- 
mes  présentes,  que  aussy  le  facent,  sans  contredit  ou  defflculté  quelx- 
conques.  Donné  à  Rouen,  le  xxii"  jour  de  septembre,  l'an  de  grâce 
mil  quatre  cens  et  vint  sept. 

Par  monseigneur  le  Régent 
le  royaume  de  France,  duc  de  Bedford. 

J,   MlLET. 

(Fr.  26050,  n»  771.) 


APPENDICES  533 


LU 

♦ 
LES  COMTES  DE  RICHEMONT,  DE  CLERMONT  ET  d' ARMAGNAC  PROMET- 
TENT AU  DUC  DK  BRETAGNE  DE  LE  SECOURIR  CONTRE  JEAN  DE 

BLOis  (1428,  30  janvier)  [p.  135,  io6]. 

Nous,  Charles,  aisné  filz  de  monseigneur  le  duc  de  Bourbonnoiz 
et  d'Auvergne,  conte  de  Clermont;  nous,  Artur,  filz  de  duc  de  Bretai- 
gne,  conte  de  Richeraont ,  seigneur  de  Partenay  et  conneslable  de 
France,  et  nous,  Bernart  d'Armagnac ,  conte  de  Pardiac,  visconte 
de  Cariât  et  de  Murât,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lettres  verront, 
salut.  Comme  nous  ayons  sceu,  de  certain,  que  Jehan  de  Blois,  se 
disant  seigneur  de  Laigle,  ait  eu  voulenté  et  propos  délibéré,  tant 
par  lui  que  par  ses  alliez  et  complices,  nous  faire  grevance  et  des- 
plaisir, se  faire  le  povoit,  à  quoy,  au  plaisir  de  Dieu,  nous  espérons 
pourveoir  et  résister,  à  l'aide  et  confort  de  nos  parens  et  amis,  et 
entre  autres,  en  ceste  matière,  ayons  prié  et  requis  hault  et  puissant 
prince  et  nostre  très  honnouré  seigneur,  cousin  et  oncle  et  très  redou- 
blé seigneur  et  frère,  monseigneur  le  duc  de  Bretaigne,  ainsi  que  bons 
parens  et  amis  se  doivent  aidier  les  ungs  des  autres,  en  tel  cas,  qu'il 
lui  pleust  nous  secourir  et  aidier  des  gens  d'armes  et  de  trait  de  son 
pais,  en  ayans  mesmes  considérations  à  ce  que  ledit  de  Blois  est  son 
ennemy  mortel;  laquelle  chose,  de  son  bon  plaisir,  il  nous  ait  octroyé, 
par  tel  condition  que  nous  n'employerons  sesdiz  gens  à  l'encontre  du 
roy  d'Angleterre,  ses  bienveillans  et  alliez,  ne  pour  leur  porter  gre- 
vance, dommaige  ne  desplaisir  en  aucune  manière;  savoir  faisons 
que  nous  avons  juré,  promis  et  accordé,  par  ces  présentes,  jurons, 
promectons  et  accordons,  par  les  foy  et  serment  de  noz  corps  et  sur 
nos  honneurs,  que  lesdiz  gens  d'armes  et  de  trait  dont  il  lui  plaira 
nous  aidier  et  conforter,  nous  ne  les  employerons  et  ne  soufTrerons 
(ju'ilz  soient  employez  ne  embesoignez  en  aucune  exercite  de  guerre  ne 
pour  grevance,  daugier  porter  à  personne  quelconque,  et,  par  cspe- 
cial,  à  lencontre  du  roy  d'Angleterre,  ses  bienveillans,  alliez,  comme 
dit  est,  mais  seulment  a  lencontre  d'icellui  Jehan  de  Blois,  ses  com- 
plices et  adhérens,  et  de  leurs  entreprises  et  entencions.  Et,  avecques 
ce,  promectons  et  jurons  à  nostre  dit  seigneur,  cousin,  frère  et  oncle, 
monseigneur  le  duc  de  Bretaigne,  que  sesdiz  gens  d'armes  et  de  trait 
nous  lui  renvoierons  en  son  pais,  sans  empeschement,  touteffois  qu'il 
le  requerra,  ou  que  le  cappitaine  principal  desdiz  gens  s'en  vouldra 
retourner.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  mis  nos  sceaulx  et  saings 
manuelz  à  ces  présentes.  Donné  à  Chinon,  le  xxx^  jour  de  janvier,  l'an 
de  grâce  mil  quatre  cens  vingt  et  sept. 

Charles,  Artur,  Bernart. 
(avec  les  trois  sceaux,  celui  de  Richemont  un  peu  brisé  en  haut  et  en  bas). 

(Original  aux  Archives  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  76,  E  181.  Copie 
aux  Archives  du  min.  des  aff.  étr.,  t.  362,  f"''  7b-76.) 


534  APPENDICES 


LUI 

PROJET    DE    CONVOCATION   DES   ÉTATS    GÉNÉRAUX   A   POITIERS 
(1428)  [p.  158,  159]. 

Pour  bien  conseiller  le  roy,  en  ta  grant  neccessilé  en  laquelle,  de 
présent,  son  royaume  est,  et  réduire  ledit  royaume  à  bonne  tranquilité, 
semble  neccessaire  l'assemble  des  trois  estas  représentans  le  corpz 
publique  dudit  royaume,  affin  que,  par  le  bon  conseil  du  chief  el 
corps  ensemble,  par  la  gi^âce  du  Saint-Esprit,  laquelle  reluit  en  toute 
congrégacion  faicte  ou  nom  de  Dieu,  et  plus  eficacement  en  une 
générale  agrégacion  qu'en  une  petite,  puissions  parvenir  et  briefve- 
ment  à  la  fm  que  dessus.  Pour  parvenir  à  ces  trois  estas  et  eflfective- 
ment  besoignier,  semblent  neccessaires  les  considéracions  qui  sen- 
suivent  : 

Premièrement,  pour  tant  que  ladicte  congrégacion  est  désirée  pour 
pai'venir  à  la  tranquilité  du  royaume,  comme  dict  est,  et  à  la  paix 
d'icellui,  que  le  roy  bénignement  doit  déposer  et  effacier  toutes 
indignacions,  ires  ou  desplaisement,  se  aucunes  en  a,  contre  les  sei- 
gneurs de  son  sang,  contre  leurs  hommes,  officiers,  ou  serviteurs  et 
aussi  contre  ses  propres  officiers  royaulx,  serviteurs  et  adhérens  à  len- 
tencion  desdiz 'seigneurs  et  généralement  contre  tous  aultres,  sui- 
vans  ou  qui  ont  suivi  à  l'entencion  d'iceulx. 

Item,  semble  expédiant  que  le  seigneur  de  La  Trémoille,  le  seigneur 
de  Trêves  et  tous  autres  du  conseil  et  bostel  du  roy  soient  réconciliez 
avec  lesdiz  seigneurs,  en  déposant  leurs  ires  ou  malveillances  vers 
les  dessusdiz,  à  l'oneur  de  Dieu,  du  roy,  en  compassion  du  poure 
peuple  et  au  grant  prouffit  de  la  chose  publique,  ainsi  faisans 
honnorant  le  roy  en  révérence,  eulx  mesmes  en  la  vertu  d'obéis- 
sance. 

Item,  après  toute  déposicion  de  toutes  desplaisances,  comme  dici 
est,  semble  expédiant,  par  l'ordonnance  du  roy  et  commandement,  que 
l'amour  entre  les  seigneurs  et  les  dessusdis  soit  de  nouvel  reformée, 
par  scellez  ou  autrement,  au  premier  estât,  et  conformé,  tout  ainsi  qu'il 
semblera,  à  l'establissement  et  plus  grant  seureté  de  l'amour  et  union 
d'iceulx  et  des  leurs. 

Item,  quant  au  fait  du  conseil  des  trois  estas,  semblent  neccessaires 
les  manières  de  seurtez  qui  s'ensuivent  :  seurté  de  le  tenir;  seurté  dos 
chemins,  pour  venir  oudit  conseil,  jour  et  lieu;  seurté  contre  toute 
oppression  et  violence,  durant  lediz  conseil,  avec  toute  liberté  à  ung 
chacun  de  dire  tout  ce  que  bon  lui  semblera,  à  laffin  que  dessusdite  ; 
seurté  de  garder,  tenir  et  observer  inviolablement  ce  que  dit  et  conclu 
sera  par  le  roy  et  par  lesdiz  trois  estas. 

Quant  à  la  présente  seurté,  c'est  assavoir  seurté  que  on  tendra  ledit 
conseil  au  jour  et  lieu  qui  sont  ou  seront  advisez  par  le  roy  et  son  con- 
seil, qu'il  plaise  au  roy  dès  maintenant  faire  cesser  toute  voie  de  fait  et 


APPENDICES  535 

pareillement  lesdiz  seigneurs  i  et,  sur  ce,  bailler  leurs  lettres -,81,  sembla- 
blement,  qu'il  plaise  au  roy  envoyer  ses  Jettres  par  tout  le  royaume 
et  Daulpbiné,  pour  venir  audit  conseil,  aux  dis  jour  et  lieu,  et  affln  de 
plus  esniouvoir  ung  chacun  à  venir  plus  copieusement  audit  conseil, 
qu'il  plaise  au  roy  en  sesdites  lettres  faire  mencion  de  la  bonne 
amour  entre  le  roy  et  lesdiz  seigneurs  de  son  sang,  la  bonne  amour, 
union  et  réconciliacion  entre  iceulx  seigneurs  et  les  conseillers  et  ser- 
viteurs du  roy,  en  signiffiant  aussi  les  seurtez  des  chemins,  en  affirmant, 
par  lesdites  lettres,  tenir  ledit  conseil  au  jour  et  lieu  que  dis  seront, 
sans  aucune  mutacion. 

Quant  à  la  seurlé  des  chemins,  est  assavoir  que,  en  ce  royaume,  a 
gens  d'armes  de  deux  façons  ;  les  ungs  sont  chevaliers,  escuiers  et 
autres  proffitables  à  déboucter  les  ennemis  ;  et  que  iceulx,  tant  du  roy, 
des  seigneurs,  que  d'autres,  tantost  et  sans  delay,  soient  embesoigniez 
en  frontières  et  ailleurs,  contre  les  dis  ennemis;  les  autres  sont  inutiles 
et  de  grant  charge  à  la  chose  publique;  et  que  iceulx,  dedans  certain 
temps  devant  venir  audit  conseil,  comme  dedans  trois  semaines,  vui- 
dent  le  royaume,  et  soient  commis  gens  pour  les  faire  vuidier  et  mec- 
tre  hors. 

Quant  à  la  seurté  durant  le  temps  dudit  conseil,  sembleroit,  pour  ce 
que  c'est  le  plaisir  du  roy  tenir  ledit  conseil  en  la  ville  de  Poictiers, 
que  tous  ceulx  de  la  ville,  par  le  commandement  du  roy,  jurent,  durant 
ledit  conseil,  par  avant,  ne  après,  ne  esmouvoir  aucune  rumeur  contre 
les  venans,  demorans,  ou  retournans  dudit  conseil,  ains  les  garder  et 
deffendre  conte  tous  autres,  de  quelque  estât  ou  dignité  qu'ilz  soyent; 
et  pareillement,  pour  la  garde  du  roy,  de  ceulx  de  son  sang  ou  de 
tous  autres,  semble  estre  expédiant  avoir  quatre  ou  cinq  notables  per- 
sonnes, advisez  et  ordonnez  par  le  roy,  et  lesquels  soient  agréables 
auxdis  de  son  sang,  accompaigniez  de  nobles  barons,  chevaliers, 
escuiers,  tous  de  ce  royaume,  fors  ceulx  que  le  connestable  d'Escosse; 
au  cas  qu'il  seroit  un  des  esleuz,  vouldroit  choisir  du  pais  d'Escosse, 
lesquelx  barons,  chevaliers,  escuiers,  pourront  choisir  ceulx  qui  auront 
esté  ordonnez  par  le  Roy,  comme  dit  est,  en  nombre  convenable,  ainsi 
que  leur  semblera. 

Item,  affin  que  nul  ne  puisse  prétendre  non  avoir  franche  liberté 
de  parler  et  conseiller  ce  que  bon  lui  semblera,  sans  laquelle  liberté 
nUl  conseil  ne  puet  riens  valoir  (frustra  consulitur  animus  timoré  non 
liber),  semble  estre  expédiant,  ains  neccessaire,  que  à  tous  autres  soit 
inhibé  et  delfendu,  de  par  le  roy,  tout  port  d'armes,  ledit  temps  durant, 
fors  aux  ordonnez  et  advisez  en  la  manière  dessusdite  et  à  leurs 
choisis,  lesquelx  ordonnez  et  leurs  choisis,  par  l'ordonnance  et  com- 
mandement du  roy,  promectront  et  jureront  pareillement,  en  la  main 
du  roy,  ou  d'aucuns  par  lui  ad  ce  commis,  en  la  manière  qui  sera 
advisée  et  sur  les  saints  Esvangiles,  garder,  protéger  et  deffendre 
inviolablement,  de  tout  leur  pouvoir,  tous  ceulx  qui  viendront  et  qui 
parestront  audit  conseil,  de  quelque  condicion  quilz  soient,  haulte, 

1.  On  peut  supposer,  d'après  cela,  que  ce  document  est  postérieur  à 
novembre  1427.  (Voy.  ci-dessus,  p.  149-151.) 


536  APPENDICES 

basse,  ou  moyenne,  contre  toutes  violences,  injustices  ne  oppressions 
de  l'ait  ne  de  parole;  et  que,  à  ceste  fin,  le  roy  leur  commette  son 
auctorité  et  puissance,  durant  ledit  conseil,  et  aussi  pour  certain  temps 
après  la  terminaison  d'icelluy. 

Quant  à  la  seurté  de  tenir,  garder  et  observer,  au  moins  pour  le 
temps  que  advisé  sera,  inviolablement,  ce  que  advisé  et  conclud  sera 
par  le  roy  et  les  dis  trois  trois  estas,  et,  s'il  plaist  au  roy,  il  commectra 
dès  maintenant  la  pratique  de  la  dite  seurté  à  la  reine  de  Scecille,  sa 
mère,  et  à  ceulx  que  ladite  reyne  vouldra  appeler  à  la  conseiller  du  con- 
seil du  roy,  de  son  propre  conseil,  des  conseils  des  seigneurs  et  d'ail- 
leurs ;  et,  pour  ce  que  soit  grant  illusion  à  la  chose  publique  et  irrision 
à  si  liaulte  et  si  soUempnel  assemblée,  si  la  conclusion  faite  par  leur 
délibéracion,  advis  et  conseil  n'estoit  fidèlement  gardée,  pour  le  temps 
qu'il  sera  advisé  par  le  bon  plaisir  du  roy,  considérant  le  temps  de  la 
présente  extrême  nécessité,  semble  que  le  roy,  de  sa  grâce  et  hu- 
maine justice,  deveroit,  dès  maintenant,  bailler  ses  lettres  quant  à  l'ob- 
servacion  inviolable  de  la  dite  seurté,  le  dit  temps  durant,  et  après  que 
la  dite  seurlé  sera  pratiquée  particulièrement  par  la  dicte  dame,  avec 
le  conseil  des  dessus  dis,  la  confermeret  approuver  expressément,  pour 
le  dit  temps,  affîn  que,  dès  maintenant,  les  puissances  du  roy  et  des 
seigneurs,  puissent  estre  exploictées  par  la  volenté  et  ordonnance  du 
roy,  d'un  commun  accord,  au  bien  de  sa  seigneurie  et  de  la  chose 
publique. 

Item,  sembleroit  honorable  au  roy  et  à  ceulx  de  son  sang  les  choses 
dessus  dites  accordées  et  afTermées  par  le  bon  vouloir  et  ordonnance  du 
roy,  que  les  dis  trois  seigneurs  de  Clermont,  connestable  et  Pcrdriac,  par 
son  bon  plaisir,  puisent  venir  devers  lui,  où  bon  lui  semblei'a,  en  leur 
estât  acoustumé,  pour  démonstrer  obéissance  et  amour  au  roy,  leur  sei- 
gneur souverain,  à  la  consolacion  du  roy,  de  sa  seigneurie  et  de  tous 
ceulx  qui  bien  lui  vuellent,  par  quoy,  devant  le  dit  conseil  des  trois 
estas  pourront  les  dis  seigneurs  personnellement  confermer  les  choses 
dessus  dictes  et  adviser  ensemble,  avec  les  seigneurs  et  autres  du 
conseil  du  roy,  toutes  les  choses  qui  seront  principalement  à  introduire 
audit  conseil  des  trois  estas,  pour  toujours  gaigner  temps  et  abrégier 
le  temps  que  autrement  pourroit  durer  le  dit  conseil. 

(Aucune  signature.) 

Copie  du  temps,  sur  papier,  avec  quelques  fautes  du  copiste.  P  1388  3, 
n"  114  bis.  —  Cette  pièce  est  au  musée  des  Archives  nat.,  n°  444. 

L'auteur  de  la  notice  du  musée  (n°  444)  dit  que  cette  pièce  semble 
devoir  être  placée  en  novembre  1427  et  attribuée  à  un  conseiller  du 
comte  de  Clermont,  mais  rien  ne  prouve  qu'elle  soit  de  no- 
vembre 1427,  ni  qu'elle  doive  être  attribuée  à  un  conseiller  du 
comte  de  Clermont  plutôt  qu'à  un  conseiller  de  Richemont.  Elle 
peut  tout  aussi  bien  être  de  1428.  On  voit  seulement  qu'elle  est  anté- 
rieure au  27  juillet  1428,  puisque  les  comtes  de  Clermont  et  de  Par- 
diac  obtinrent,  à  cette  dernière  date,  des  lettres  de  rémission,  après 
leur  tentative  sur  Bourges.  Si  l'on  rapproche  ce  document  des  lettres 


APPENDICES  537 

adressées  par  les  princes,  en  janvier  1428,  au  parlement  de  Poitiers, 
à  la  ville  de  Tours  et  à  d'autres  villes  du  royaume,  on  voit  que  ces 
lettres  se  rapportent  bien  au  projet  développé  dans  le  manifeste  ci- 
dessus.  Il  doit  donc  être  à  peu  près  de  la  même  époque  (voy.  ci- 
dessus,  p.  15o,  et  de  Beaucourt,  Hist.  de  Charles  VII,  t.  II,  p.  156-157). 


LUI  bis. 

EXTRAITS  DU  CAHIER  DES  DOLÉANCES,  CONTENANT  LES  DEMANDES  ET 
REMONTRANCES  FAITES  AU  ROI  CHARLES  VII  PAR  LES  GENS  DU  PAYS 
DE  LANGUEDOC,  AUX  ÉTATS  GÉNÉRAUX  TENUS  A  CUINON,  AVEC  LES 

RÉPONSES  (1428,  11  novembre)  [p.  163]. 

S'ensuivent  les  suplicacions  et  requestes  qui  ont  esté  faictes  de 
bouche  au  roy,  nostre  souverain  seigneur,  par  les  gens  du  pays  de 
Languedoc,  en  tant  que  peut  touchier  chacun  estât  d'eux  : 

2.  La  seconde  supplication  fust  qu'il  pleust  au  roy,  pour  le  bien  et 
conservacion  de  sa  seigneurie,  et  au  recouvrement  d'icelle,  par  toutes 
les  voyes  et  moyens  possibles,  attraire  par-devers  lui  tous  les  sei- 
gneurs de  son  sang  et  affinité. 

Ils  scavent  la  bonne  responce  que  le  roi  leur  a  sur  ce  faicte. 

3.  La  tierce  requeste  fut  qu'il  pleust  au  roy  de  vouloir  entendre, 
par  tous  les  bons  moyens  possibles,  à  la  paix  de  monseigneur  de 
Bourgoigne  et  trouver  manière  de  le  rejoindre  et  unir  à  sa  seigneurie. 

Ils  scavent  aussi  la  responce  du  roy  et  les  diligences  qui  sur  ce  ont 
esté  faictes. 

S'ensuit  une  requeste,  laquelle  se  devoit  faire  de  bouche  et,  par 
oubli,  a  esté  obmise  : 

7.  C'est  assavoir  que,  pour  les  raisons  cy  desus  déclairées  plus  à 
plain,  et  aussi,  considéré  le  bon  advis  et  délibéracion  du  conseil  de 
Languedoil,  comme  il  appert  par  la  teneur  de  leurs  articles,  qu'il 
plaise  au  roy  attraire  par-devers  lui,  en  bon  amour  et  obéissance  et 
en  son  service,  monseigneur  le  connestable,  et,  pour  ce  faire,  lui  plaise 
continuer  les  ambaxades  et  traictiés  qui  ont  esté  commencés. 

Par  le  roy  ne  ceulx  qui  sont  entour  lui  n'a  tenu  ne  tendra  :  et  en 
ont  esté  faictes  grans  diligences  par  le  roy,  comme  il  leur  a  esté  ex- 
posé, et  encore  sera  faict. 

(Ms.  Latin  9177,  f"^  268,  271,  272  v»,  273.  Extrait  des  Archives  de 
l'hôtel  de  ville  de  Montpellier.) 


LIV 

LETTRE   DE    G.    DE    LA   TRÉMOILLE    A   MESSIEURS   DE    LA   CHAMBRE 

DES  COMPTES  DE  BOURGES  (1431,  10  Septembre)  [p.  187]. 

Messieurs,  je  me  recommande  à  vous.  Le   roy  vous  escript  pour 
l'expèdicion  des  lettres  du  partaige  par  lui  baillé  à  mon  frère  de  Jon- 


538  Al'PEMUCES 

velle  et  à  ma  suer,  sa  feimne,  et  vous  envoyé  les  lettres  de  sou  dit 
partaige,  pour  icelles  expédier,  affin  qu'il  ait  et  preingne,  doresnavanl, 
la  revenue  et  jouissance  d'icelui  partaige  et  que  les  places  en  demou- 
rent  en  ma  garde,  ainsi  comme  le  roy  l'a  voulu  et  veult.  Si,  vous  prie 
tant  acertes  et  de  cueur,  comme  je  puis,  que  les  dites  lettres  vueillez 
expédier,  ainsi  que  le  roy  vous  escript,  non  obstant  que  encore  ne  le 
soient  par  la  court  de  parlement,  et  aussi  vueillez  expédier  les  lettres 
du  rachat  que  le  roy  lui  en  a  donné  et  les  lettres  de  souffrance(?) 
[mot  déchiré]  de  non  faire  la  foy  et  homaige  jusques  à  un  an.  Et,  en  ce 
faisant,  vous  me  ferez  ung  très  grant  plaisir."  Messieurs,  se  chose  vous 
plaist  que  je  puisse,  je  le  feray  de  très  bon  cueur,  priant  Nostre  Sei- 
gneur qu'il  vous  ait  en  sa  sainte  garde.  Escript  à  Amboise,  le  dixième 
jour  de  septembre. 

Gkorges  de  la  Trémoylle. 

Lettre  sur  papier,  pliée  et  cachetée,  avec  suscription. 

(J.  183,  no  145.) 

La  pièce  46  (J  183)  est  une  copie  de  la  lettre  du  roi  indiquée  dans 
celle  de  la  La  Trémoille.  On  y  voit  que  J.  de  Jonvelle  avait,  de  la  suc- 
cession de  L.  d'Amboise,  les  terres  qui  avaient  appartenu  aux  père 
et  mère  de  la  dame  de  Jonvelle  (Lettre  du  10  septembre,  écrite  à 
Amboise). 


LV 

ENGAGEMENT   DU  DUC   d'aLENÇON   ENVERS    LE    ROI    DE    FRANCE 

(1432,  15  janvier)  [p.  187], 

Jehan,  duc  d'Alençon,  conte  du  Perche  et  viconte  de  Beaumonl,  a 
louz  ceulx  auxquelz  ces  présentes  seront  monstreez,  salut.  Savoir 
faisons  que,  comme  nostre  oncle,  le  duc  de  Bretaingne,  ait  naguerez 
envoyé,  et,  par  son  commandement,  soyent  venuz  plusieurs  gens 
d'armes  et  de  traict,  tant  Anglois  que  Bretons,  pour  nous  cuider  assié- 
gier  en  nostre  ville  et  chastel  de  Pouencé,  devant  lesquelz,  nous  ab- 
sente, ayent  miz  le  siège,  noz  très  redoubtée  dame  et  mère  et  nostre 
très  chière  et  très  amée  seur  et  compaigne  estans  dedens,  lesquelles 
choses  ainsi  faitez,  par  voye  de  fait  et  de  force,  avons  signifié  à 
nostre  très  redoublé  et  souverain  seigneur,  monseigneur  le  roy,  en 
luy  suppliant  que,  de  sa  grâce,  il  luy  plaise  nous  aider  et  donner  se- 
cours contre  les  diz  Anglois  et  Bretons,  en  nous  olfrant  toujours, 
comme  son  humble  parent,  subget  et  vassal,  d'obéir  à  sa  bonne  jus- 
tice, plaisir  et  volenté  et  d'ester  à  droit,  se  d'aucune  chose  nostre  dit 
oncle  nous  vouloit  faire  question  ou  demande  ;  sur  quoy  il  a  pieu  à 
mon  dit  seigneur  le  roy  nous  acorder  le  dit  secours  et  aide,  ou  cas 
que  nostre  dit  oncle  voudroit  continuer  la  dite  voye  de  fait  et  ne 
vouloir  obéir  à  luy  et  à  sa  bonne  justice  et  cesser  toutes  voyes  de 
fait  de  guerre;  et,  pour  ce  que  les  gens  de  guerre  que  mon  dit  sei- 
gneur nous  voudra  envoyer,  pour  nostre  dit  aide  et  secours,  peuvent 


APPENDICES  539 

doubler  de  non  avoir  logeis,  quand  ils  seroienl  venuz  devers  nous;  cl 
mon  dit  seigneur  aussi  que  nous,  par. aucuns  moyens,  trouvissions 
avecques  noslre  dit  oncle  aucun  traictié,  que  voulsissions  accepter  sans 
le  congié  et  licence  de  mon  dit  seigneur;  nous,  qui  de  ces  choses  le 
voulons  rendre  certain,  ses  gens  et  officiers  et  les  dis  capitaines  qu'il 
envoyei'a  pour  nostre  dit  secours,  avons  promiz  et  promectons,  par  la 
foy  et  serment  de  nostre  corps  et  sur  nostre  estât,  de  jamais  non 
prendre  aucun  accord,  traictié  ou  apoinctement  avecques  nostre  dit 
oncle  du  débat  qui  est  ou  sera  entre  nous  deux,  pour  occasion  de 
ceste  guerre,  ou  autrement,  en  quelque  manière  que  ce  soit,  soit  de 
la  délivrance  du  chancelier  de  Bretaingne  que  autrement,  sans  le 
congié  et  licence  de  mon  dit  seigneur;  de  ne  prendre  trièves,  abs- 
tinence ou  souffrance  de  guerre,  que  ce  ne  soit  de  son  plaisir  et  vo- 
lenté;  ains  ferons  guerre  à  nostre  dit  oncle,  en  personne  et  de  nostre 
puissance;  et,  avecques  ce,  avons  promis  à  mon  dit  seigneur  et  pro- 
mectons, par  ces  présentes,  et  sur  les  paines  dessuz  ditez,  de  logier  en 
nos  villes  et  forteresses,  jusques  à  deux  mil  combatans,  des  capitaines, 
gens  d'armes  et  de  traict  de  mon  dit  seigneur,  telz  qu'il  luy  plaira 
les  envoyer,  parmy  ce  que  iceulx  capitaines  nous  bailleront  leurs 
scellés  de  nous  rendre  et  délivrer  les  dites  villes  et  places,  obéir  à 
nos  comandemens,  soubz  l'auctorité  et  puissance  à  nous  baillée  par 
mon  dit  seigneur,  et  icelles  nos  places  et  forteresses  vuyder,  touteffois 
qu'il  plaira  à  mon  dit  seigneur  et  à  nous.  Et,  affln  que  mon  dit  sei- 
gneur soit  plus  seur  des  dites  promesses  et  sermens,  nous  avons  fait 
mètre  nostre  sccl  à  ces  présentes.  Données  à  Chinon,  le  xv«  jour  de 
janvier  l'an  mil  quatre  cens  trente  un. 

Par  monseigneur  le  duc, 
Haultpin. 
(J.  227,  n»  84.) 


LYI 

AVIS  DONNÉ   AU  DUC   DE   BOURGOGNE,   POUR  LE  POUSSER   A  FAIRE    PLUS 
ACTIVEMENT  LA  GUERRE  A  CUARLES  Vil  (1431)  [p.  189.] 

Advcrtissement. 

Il  semble  (considéré  que  monseigneur  de  Bourgoigne  congnoist  la 
graut  mauvaisetié  et  malevolence  que  ses  ennemis  ont  eu  et  ont 
envers  lui  et  encores  se  travaillent  de  faire  chacun  jour)  que  il  lui 
est  chose  nécessaire  de  entretenir  les  alliances  des  Anglois. 

Item,  lui  est  chose  nécessaire  de  soy  disposer  et  conclure  avec  ses 
afflns,  frères  et  alliez,  comme  monseigneur  de  Bretaigne,  les  siens  et 
aultres,  qui  à  ce  ont  bon  vouloir,  à  faire  plaine  guerre  au  reboucte- 
ment  des  diz  ennemis  et  adversaires,  sans  dissimullacion  ne  aucune 
fiction,  attendu  la  maltaise  voulenté  d'iceulx  ennemis,  qui  de  tous 
points  se  sont  délibérez  et  ont  prinse  conclusion  de  destruire,  par 
subtilz   moiens,  mondit   seigneur   de   Bourgoigne  et   ses   diz  pays. 


540  APPENDICES 

Item,  pourra  nioiidit  seigneur  de  Bourgoigne  pourveoir  et  en- 
tendre à  la  chose  par  la  manière  qui  se  ensuit  :  c'est  assavoir  que, 
afin  de  mouvoir  mondit  seigneur  de  Berlaigne  de  entendre  au  fait  de 
ladite  guerre  plus  plainement,  la  conté  de  Poitou,  qui  est  voisine  de 
son  pays,  lui  soit  donnée,  ou  que  mon  dit  seigneur  de  Bourgoigne  la 
demande  pour  soy  mesmes,  pour  en  disposer  à  son  plaisir  i. 

Item,  que,  pour  l'entretenement  et  conduite  de  la  chose,  soit  trouvé 
moien  que  monseigneur  de  Richemont  se  départe  de  la  charge  qu'il 
a  de  l'office  de  connestable  de  par  delà  et  soit  pareillement  mins  ou- 
dit  office  de  connestable  de  par  deçà,  par  le  moien  de  mondit  sei- 
gneur de  Bourgoigne.  Et,  avec  ce,  lui  soit  donné  le  duchié  de  Tou- 
raine,  la  conté  de  Saint-Onge,  le  pays  d'Aunis  et  la  ville  de  La  Ro- 
chefie,  avecques  les  terres  et  seignories  que  tient  le  seigneur  de  la 
Trémoille  es  pays  de  Poitou  et  de  Saint-Onge  et  autres  choses. 

Item,  et  par  ainsi  mondit  seigneur  de  Bertaigne  et  semblablement 
mon  dit  seigneur  de  Richemont  se  pourront  exposer  à  ladite  guerre. 
Et  est  à  considérer  que  desjà  eulx  et  leurs  alliez  ont  la  greigneure 
partie  des  diz  pays  en  leurs  mains,  pour  en  faire  à  leur  voulenté, 
tant  les  nobles  que  les  forteresses  et  bonnes  villes  des  pays  dessasdiz 
de  Poitou  et  de  Saint-Onge. 

Item ,  moyennant  l'aide  de  IIIM  combatans  que  l'eu  pourroit 
bailler  à  mon  dit  seigneur  de  Richemont,  ou  aide  de  argent  pour  soul- 
dayer  autres  gens  audit  nombre  de  IIIM  combatans  qu'il  pourroit  trou- 
ver, se  ainsi  estoit,  en  cas  que  mon  dit  seigneur  de  Bourgoigne  se 
vouldroit  disposer  à  ladite  guerre  et  soy  mettre  sus  à  puissance,  pour 
entrer  et  faire  guerre  es  pays  voisins,  comme  es  marche  de  Berry,  par 
la  Charité  et  ailleurs  et  icellui  monseigneur  de  Richemont,  qui  seroit 
fort  de  l'autre  part  et  se  pourroit  joindre  devers  lui,  toutefi'oiz  que 
besoing  seroit,  et  par  ce  contraindroict  le  Roy  ^  de  départir  et  eslon- 
gier  les  marches,  comme  de  soy  retraire  es  pays  de  Languedoc,  ou 
autres  loingtains,  par  quoy  les  ennemis  tenans  les  places  et  faisans 
guerre  à  l'encontre  de  mon  dit  seigneur,  de  ses  pays  d'en  deçà,  sembla- 
blement pourroient  être  contrains  de  déjaissier  et  désemparer  les 
lieux  et  places  et  eulx  en  départir,  par  l'eslongnement  dudit  Roi,  at- 
tendu que  d'avoir  secours  ne  pourroient  avoir  aucune  espoir. 

Item,  semble  que  mon  dit  seigneur,  à  ce  disposé,  ne  devroit  nul- 
lement arrester  de  besoingner  es  choses  dites,  pour  occasion  de  mectre 
sièges  ne  autrement,  tant  pour  les  grans  fraiz  et  charges  qu'il  auroit 
à  y  porter,  comme  pour  les  inconvéniens  qui  en  pourroient  ensuir, 
mais  se  devroit  mectre  sus,  à  puissance,  pour  entrer  es  dits  pays, 
comme  dessus  est  dit. 

Item,  semble  et  est  à  considérer  que,  se  mon  dit  seigneur  de 
Bourgoigne  fait  ce  que  dit  est,  que  les  nobles,  bonnes  villes  et  forte- 

1.  Le  comté  de  Poitou  fut  donné  à  Jean  V  le  7  janvier  1432.  Ce  docu- 
ment est  doue  antérieur  à  1432. 

2.  L'emploi  de  ce  titre  donné  à  Chartes  VII  est  remarquable  et  contraire 
à  toutes  les  habitudes  de  ses  ennemis.  Il  prouve  que  ce  document  n'est 
pas  de  source  anglaise. 


APPENDICES  541 

resses  de  par  delà  se  mettront,  de  légier,  en  son  obéissance,  moiennant 
que  bonne  justice  leur  soit  administrée,  attendu  et  considéré  les  grans 
oppressions  et  charges  qu'ils  ont  chacun  jour  à  porter,  par  les  pilleries 
destrousses,  tailles,  subsides,  emprunts  et  autres  subvencions,  qui  sur 
culx  sont  tenus  chacun  jour. 

Item,  est  à  considérer  que  mon  dit  seigneur  de  Richemont  a  plu- 
sieurs places  en  Poitou,  Saint-Onge  et  autres  pays,  comme  sur  la  ri- 
vière de  la  Charente  et  ailleurs,  qui  sont  places  voisines  et  marchis- 
sans  ou  pays  bordellois,  et,  sebesoing  estoit  de  avoir  aide  des  Anglois 
et  liordellois,  en  pou  de  temps  ils  pourroient  estreet  venirsceurement, 
sans  le  dangier  des  ennemis,  au  secours  et  aide  de  mon  dit  seigneur 
de  Bourgoigne,  par  le  moien  des  dites  places  de  mon  dit  seigneur  de 
Richemont,  qui  seroit  chose  de  grant  aide  et  reconfort. 

Item,  et  se  mon  dit  seigneur  de  Richemont.  en  faisant  les  diz  ser- 
vices à  monseigneur  de  Bourgoigne,  perdoit  aucune  de  ses  places  et 
singnories,  que  il  fust  récompensé  d'icelles  pertes. 

Item,  semble  que,  ou  cas  que  mon  dit  seigneur  de  Bourgoigne 
tendra  son  voyage  pour  aler  en  Bourgoigne,  qu'il  se  doit  garder  de  sa 
personne  et  autrement,  car  ses  diz  ennemis  sont  disposez  et  conclus 
de  le  destruire  de  corps,  s'ilz  peuvent,  et  autrement,  en  quelque  ma- 
nière que  ce  soit,  quelques  promesses  et  dissimullacions  detraittiez  de 
paix  ne  autres  qu'ilz  doivent  entreprendre  avecques  lui  ;  et  à  mon  dit 
seigneur  de  soy  garder,  que,  en  quelque  manière  que  ce  soit,  il  ne 
tiengne  ne  faice  tenir  avecques  les  diz  ennemis  aucune  convencion  ne 
assemblée,  et,  se  autrement  le  fait,  se  trouvera  par  eulx  deceu  '. 

(Fr.  1278,  fs  47-48.) 


LYII 

TRAITÉ   DE    RENNES    (1432,    O    mars)   [p.  190,  191]. 

Jehan,  par  la  grâce  de  Dieu,  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Montfort  et 
de  Richemont,  Artur,  fdz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont, 
seigneur  de  Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lettres  verront  ou  orront,  salut.  Savoir  faisons  que  de  nostre 
part,  noys  avons  appointié  et  accordé  les  articles  qui  s'ensuivent. 

Articles  passez  et  accordez  par  messire  Raoul,  sire  de  Gaucourt, 

1 .  Il  est  très  probable  qtie  ce  docuraentémane  do  quelque  conseiller  du  duc 
de  Bourgogne.  Il  indique  un  plan  bien  arrêté  par  le  gouvernement  anglais 
et  qui  reçut  un  commencement  d'exécution,  comme  le  prouvent  le  don  du 
Poitou  au  duc  de  Bretagne,  le  1  janvier  1432,  un  autre  document  qui  se 
trouve  dans  le  même  Ms.  fr.  1278,  f"  46  v»,  et  une  lettre  de  H.  de  Lannoi, 
ambassadeur  du  duc  de  Bourgogne  en  Angleterre,  publiée  par  J.  Stevenson, 
t.  II,  1"  partie,  p.  227  et  229. 

M.  de  Beaucourt  (t.  II,  415-416,  et  note  1  de  la  p.  416)  assigne  à  ce  do- 
cument la  date  de  1429,  mais  sans  fournir  aucune  preuve  à  l'appni  de 
celte  opinion.  A  la  p.  294,  il  semble  lui  donner  une  date  postérieure  à  1429. 


J)42  APPENDICES 

gouverneur  du  Daulphiiié,  et  messire  Regnauld  Girard,  seigneur  de 
Bazoges,  conseillers  et  ambassadeurs  du  roy  et  commissaires  par  lui 
depputez  en  ceste  partie,  d'une  part,  et  les  gens  du  conseil  de  mon- 
seigneur le  duc  de  Bretaigne  et  monseigueur  le  conte  de  Richemont. 
son  frère,  d'autre  part,  pour  appaiser  tous  débas  et  divisions  pour 
occasion  des  gens  d'armes  qui  présentement  sont  ou  pourroient  estre- 
mis  es  pays  de  Bretaigne  et  de  Poictou,  et  faire  cesser  toute  voye 
de  fait  qui  s'en  pourroit  ensuir  et  esmouvoir. 

Premièrement,  au  x'egard  de  mondit  seigneur  de  Richemont,  lui, 
ensemble  tous  ses  gens,  officiers,  vassaulx  et  serviteurs  seront  et 
demoureront  paisibles,  et  paisiblement  pourront  aler,  passer,  demeu- 
rer et  séjourner  par  tout  le  royaulnie,  tant  en  bonnes  villes  que  ail- 
leurs, en  leurs  besongnes  et  affaires,  sans  ce  que,  ù  l'occasion  des 
choses  faictes  et  passées,  en  faveur  et  pour  le  service  de  mondit  sei- 
gneur de  Richemont,  leur  soit  fait  ou  souffert  faire  aucun  empesche- 
ment  ou  dommaige,  en  corps,  ne  en  biens. 

Item  que  tous  procès  pendant  en  la  court  de  paxiement,  à  Poictiers, 
contre  mondit  seigneur  de  Richemont,  tant  au  regard  du  procureur 
du  roy  comme  au  regart  d'autre  partie,  demoureront  en  estât,  sans 
plus  avant  y  estre  procédé,  jusqu'au  jour  de  saint  Martin  d'yver  prou- 
chain  venant  en  ung  an,  l'an  mil  CCCC  trente  et  trois. 

Item,  que  ledit  monseigneur  de  Richemont  aura  les  aides  qui  seront 
mis  suz  en  ses  terres  de  Partenay,  de  Fontenay  et  leurs  apartenances, 
jusques  à  deux  ans  entiers  prouchains  venans,  en  payement  et  déduc- 
tion de  ses  gaiges,  par  la  main  des  officiers  du  Roy,  qui  seront  tenuz 
sans  difficulté,  touteffoiz  que  le  cas  y  escherra,  en  baillier  descharge 
souffisante  au  trésorier  de  mondit  seigneur  de  Richemont,  pour  les 
lever  et  recevoir. 

Item,  et  que  ledit  monseigneur  de  Richemont  cessera  de  faire  forger 
monnoyes  en  la  ville  de  Partenay,  ne  en  autres  quelxconques. 

Item,  que  à  mondit  seigneur  de  Richemont  sera  rendu  récemment 
et  de  fait  le  chastel  et  chastellenie  de  Chastelaillon,  avec  les  places  et 
appartenances  fortes  d'icelles,  et  aussi  lui  seront  délivrées  les  autres 
places  fortes  de  la  seignourie  de  Fontenay,  qui  ont  esté  prinses  et 
mises  hors  de  sa  main,  et  en  joyra  et  aura  les  prouffis  et  émolu- 
mens,  ainsi  que  dépara vanl;  et  aussi  les  fruis  d'icelles  choses  qui,  pen- 
dant le  débat,  ont  esté  receuz  et  levez,  s'ilz  sont  en  estre  ou  en  main 
de  commissaires,  lui  seront  rendus  et  restituez,  parmi  ce  qu'il  sera 
tenu  rendre  le  chastel  de  Gençay  au  sire  de  La  Trémoille,  aiîquel  l'en 
dit  ledit  chastel  appartenir. 

Item,  que  les  villes  et  chasteaulx  de  Gyen,  Montargis  et,  Dun-le-Roy, 
appartenans,  à  cause  de  douaire,  à  madame  de  Guienne,  femme  de 
mondit  seigneur  de  Richemont,  à  présent  tenues  en  la  main  du  roy, 
seront  rendues  et  restituées  réaniment  et  de  fait  à  mondit  seigneur  de 
Richemont,  s'ainsi  n'est  qu'il  plaise  au  roy  les  retenir,  en  le  recom- 
pensant d'autres  terres  à  la  value,  ce  que  faire  pourra,  au  dit  et  ordon- 
nance de  la  royne  de  Secile,  de  mondit  seigneur  de  Bretaigne  et  de 
monseigneur  le  bastard  d'Orléans,  pourveu  que,  dedens  la  Magdelaine 
prouchain  venant,  ils  en  ordonneront  et  détermineront.  Et  ce  que  par 


APPENDICES  o43 

eulx  en  sera  ordonné  sera  tenu  et  accompli.  Et  seront  les  gens  du  roy 
tenus  faire  venir  devers  mondit  seigneur  le  duc,  en  Bretaigne,  au  moins 
jusques  à  Ancenis,  mondit  seigneur  le  bastard,  sans  lequel  ladicte 
ordonnance  ne  pourra  estre  faite.  Auquel  lieu  d'Ancenis  ladicte  royne 
sera  requise  de  venir,  s'il  luy  plaist,  et  néantmoins,  si  venir  ne  luy 
plaisoit,  mondit  seigneur  de  Bretaigne  et  mondit  seigneur  le  bastard 
ordonner  en  pourront,  ainsi  qu'ilz  verront  l'avoir  à  faire,  en  l'absence 
(lé  ladicte  royne. 

Item,  est  accordé  que  le  roy  tollerera,  senz  préjudice  desdiz  procez, 
que  mondit  seigneur  de  Richemont  reçoive  les  hommages  de  tous  le 
vassaux  des  dessus  dictes  terres  et  qu'il  en  prengne  les  rachaps  e 
autres  drois  féodaux;  et  aussi  est  accordé  que  mondit  seigneur  de  Ri- 
chemont recevra  les  vassaux  des  dictes  terres,  qui  faire  lui  vouldrout 
leurs  hommages,  par  procureurs  souffisamment  fondez,  sanz  faire,  à 
cause  de  ce,  aucun  reffus  ou  difficulté. 

Item,  est  accordé  que,  au  regart  de  tous  les  serviteurs  et  subgetz  du 
roy,  qui,  pour  occasion  de  son  service,  auroient  esté  ou  seroient  em- 
peschez  en  leur  biens,  terres,  forteresses  et  possessions,  mondit  sei- 
gneur de  Bretaigne  et  mondit  seigneur  de  Richemont  ne  leur  en  pour- 
ront faire  question  ou  demande,  pour  occasion  de  quelque  cho%e  que 
l'en  pourroit  avoir  fait,  soit  à  l'encontre  d'eulx,  ou  d'aucuns  de  leurs 
serviteurs  et  subgetz;  et,  s'aucuns  de  leurs  biens  ou  forteresses  estoient 
empeschées,  ilz  leur  seront  mis  à  plaine  délivrance,  ne  jamais,  pour 
nulz  cas  advenus,  ne  leur  en  sera  fait  question  ne  demande. 

Item,  et  semblablement,  se  aux  terres,  biens,  forteresses  et  posses- 
sions des  vassaux,  subgetz  et  officiers,  ou  serviteurs  de  mondit  seigneur 
de  Bretaigne  et  de  mondit  seigneur  de  Richemont  estoit  fait  aucun 
empeschement,  pour  avoir  servi  ou  favorisé  mesdiz  seigneurs  de  Bre- 
taigne et  de  Richemont,  iceulx  empeschements  seront  ostez  et  leur 
seront  leurs  terres,  biens  et  possessions  mis  à  plaine  délivrance,  sans 
aucun  reffus  ou  difficulté. 

Item,  que  le  roy,  par  ses  gens,  conseilliers  et  serviteurs,  de  quelque 
estât  ou  auctorité  qu'ilz  soient,  fera  cesser  toute  voye  de  fait  et  autres 
empeschemens  de  corps  et  de  biens,  allencontre  de  mesdiz  seigneurs 
de  Bretaigne  et  de  Richemont  et  leurs  gens,  serviteurs,  officiers,  sub- 
getz et  aliez.  pour  occasion  de  quelconque  chose  que  l'on  pourroit  dire 
avoir  esté  faicte,  tant  contre  le  roy  que  contre  ses  dictes  gens,  conseilliers 
et  serviteurs,  sans  leur  en  povoir  faire  aucune  question  ou  demande. 

ftem,  et  s'il  avenoit  (que  Dieu  ne  vueille!)  que  aucune  chose  fust  ou  soil 
rapportée  au  roy  ou  à  son  conseil^  parquoi  leroy  fust  indigné  envers  mondit 
seigneur  de  Richemont,  il  a  suplié  au  roy  qu'il  lui  plaise  le  lui  faire  sa- 
voir, avant  y  procéder  par  voye  de  fait,  ne  autrement,  afin  qu'il  s'en  puisse 
excuser  et  desblarner,  se  mestier  est;  laquelle  chose  lui  a  esté  accordée. 

Item,  et  à  ce  que  le  roy  a  requis  à  mondit  seigneur  qu'il  se  désiste 
du  tout  du  mariage  de  monseigneur  Pierres  de  Bretaigne,  son  filz,  et 
de  la  fille  messireLoysd'Amboise,  mondit  seigneur  de  Bretaigne,  con- 
sidérant que  ladite  fille  n'est  pas  en  aage  de  contracter  mariage,  a  res- 
pondu  que,  quand  il  le  voudra  marier,  il  le  fera  savoir  au  roy,  dont 
il  est  nepveu  et  duquel  il  puet  avoir  honneur  et  avancement,  affinque, 


544  APPE>DICES 

0  son  advis,  plaisir  el  assentement,  il  soit  marié;  et  n'a  point  mondil 
seigneur  de  Bretaigne  intencion  de  autrement  le  faire;  s'il  ne  venoit 
autre  succession  à  ladicte  fille  que  dudit  messire  Loys  d'Amboise,  ne, 
à  ceste  cause,  ne  fera  ne  soufferra  faire  mondit  seigneur  de  Bretaigne 
par  ses  gens  point  de  guerre  au  roy  ne  en  ses  pays. 

Item  et,  au  regart  de  la  forteresse  de  Mauléon,  est  accordé  que  Pri- 
gent  de  Coitivy  en  sera  capitaine  et  en  aura  la  garde,  de  par  le  roy, 
et  fera  serment  au  roy  de  garder  la  dicte  place  en  son  obéissance,  sànz 
y  mectre  ne  laisser  entrer  nulles  gens  qui  facent  guerre  au  pays,  ne 
aux  gens  du  roy;  et  aussi  fera  ledit  de  Coitivy  serment  à  madame 
Marie  de  Reux,  femme  de  messire  Loys  d'Amboise,  de  bien  et  loyaul- 
ment  garder  ladite  place,  sanz  y  mectre  ne  laisser  entrer  aucunes  gens 
qui  facent  guerre  à  elle,  ne  à  ses  terres  et  subgetz,  ne  aussi  aux  pays 
et  subgetz  de  mondit  seigneur,  de  Bretaigne,  ne  de  mondit  seigneur 
de  Richement,  ne  à  leurs  places,  ou  temps  advenir,  en  aucupe  manière. 
Item,  est  accordé  que  ledit  sire  de  Coitivy  en  demourera  cap- 
pitaine,  sans  ce  que  le  roy  l'en  mue  ne  change,  ne  y  mecte  d'autre 
capitaine,  decy  à  dix  ans;  et,  se  cependant  ledit  sire  de  Coitivy  aloit 
de  vie  à  trespassement,  ung  autre  cappitaine  y  sera  mis,  aggréable  ù 
mondit  seigneur  de  Bretaigne,  qui  fera  semblable  serment  au  roy  et 
à  la  dicte  dame,  comme  fait  ledit  de  Coitivy  ;  et,  se  ladicte  dame  n'est 
contente  que  ainsi  soit,  mondit  seigneur  de  Bretaigne  ne  lui  donnera 
confort  ne  aide  contre  le  roy;  ne,  pour  le  deffault  de  ladicte  dame  de 
non  tenir  ce  que  par  mondit  seigneur  de  Bretaigne  en  a  esté  accordé, 
ne  seront  les  autres  appointemens  d'entre  le  roy  et  mondit  seigneur 
aucunement  rompus,  ains  demeureront  en  leur  effect. 

Item,  et  que,  en  ce  qui  touche  la  revenue  de  ladicte  terre  et  sei- 
gneurie de  Mauléon,  ladicte  dame  en  joyra,  et  demourra  en  sesdictes 
ville  et  chastel  de  Mauléon,  se  bon  lui  semble,  et  mectra  en  ladicte  terre 
tous  autres  officiers  pour  le  gouvernement  d'icelle. 

Item,  a  esté  accordé  à  monseigneur  Richard  de  Bretaigne,  conte 
d'Estampe,  que  tous  les  procès  pendans  en  la  court  de  parlement,  à 
Poictiers,  contre  lui,  tant  au  regart  du  procureur  du  roy  que  d'autres 
parties,  demeureront  en  Testât,  sanz  plus  avant  y  estre  procédé,  jusques 
à  ung  an  prouchain  venant. 

Item,  a  esté  accordé  et  promis  que,  à  l'occasion  des  choses  faictes 
et  avenues,  en  quelconque  manière  que  ce  soit,  ne  sera  par  le  roy,  ses 
parents,  serviteurs,  subgetz  et  allez,  ne  de  leurs  places,  fait  ne  pour- 
chassé aucune  guerre,  dommage,  desplaisir  ne  empeschement  à  mondit 
seigneur  de  Bretaigne,  messeigneurs  ses  enlfens,  frères  et  barons,  ne 
à  leurs  serviteurs  et  subgetz,  ne  aussi  à  leurs  places  et  forteresses 
oudit  pays  de  Bretaigne,  en  Poitou  ne  ailleurs,  ou  temps  advenir,  par 
voye  de  fait,  surprinse,  décepcion,  ne  autrement,  en  aucune  manière. 
Et  aussi  a  esté  promis  et  accordé,  par  mondit  seigneur  de  Bretaigne, 
que  par  lui,  ses  enffans,  frères  et  subgetz  ne  de  leurs  places  ne  sera 
fait  ne  pourchacé  au  roy, ses  parens,  serviteurs  et  subgetz  quelxconques, 
ne  à  leurs  places  et  forteresses  aucune  guerre,  dommaige,  desplaisir 
ne  empeschement,  par  voye  de  fait,  sourprinse,  décepcion,  ne  autre- 
ment, en  aucune  manière. 


APPENDICES  845 

Item,  et,  s'il  avenoit  que  Tune  des  parties,  pour  aucuns  rappors,  des- 
plaisirs, ou  autrement,  fust  meue,  ou  eust  intention  de  procéder  contre 
l'autre  partie  par  voye  de  fait  ou  de  guerre,  elle  ne  le  pourra  faire 
sans  le  signifier  et  faire  savoir  à  l'autre  partie  deux  mois  paravant, 
affm  que,  pendant  ledit  temps,  les  choses  fourfaictes  puissent  estre  ré- 
parées, par  manière  que  plus  grant  inconvénient  ne  s'en  ensuive. 

Item,  et  partant,  les  marchans,  subgetz  et  autres  gens  des  pays  et 
de  l'obéissance  du  Roy  et  de  mondit  seigneur  de  Bretaigne  et  des  terres 
de  mondit  seigneur  de  Richemont  pourront  fréquenter  et  communiquer 
seurement  les  uns  avecques  les  autres  et  aler  de  pays  en  autre  à  toutes 
leurs  nécessitez,  sanz  ce  que  aucun  empeschement  leur  y  soit  fait  ou 
donné,  en  corps  et  en  biens;  et  cesseront  toutes  courses,  pilleries, 
destrouses  et  appatiz,  tant  de  l'une  partie  que  de  l'autre. 

Item,  et  de  toutes  les  choses  dessusdictes  ont  esté  faictes  ces  pré- 
sentes lectres,  lesquelles  iceulx  ambaxeurs  sont  tenus  faire  rattifier  par 
le  Roy,  soubz  son  scellé,  et  l'envoyer,  dedens  quinze  jours  prouchain 
venans,  à  mesdis  seigneurs  de  Bretaigne  et  de  Richemont,  qui  de  pré- 
sent en  ont  baillié  leurs  lectres,  pour  maire  fermeté  des  choses  pro- 
mises et  accordées  de  leur  part.  Lesquelz  articles  dessusdiz,  en  tout 
leur  contenu  et  effect,  nous,  duc  et  conte  dessusdiz,  promectons, 
jurons  et  nous  obligons  entretenir  et  faire  serment  entretenir  et  garder, 
de  nostre  part,  sanz  fraulde,  barat  ne  malengiu  et  sans  faire,  ne  souf- 
frir estre  fait  ou  attempté,  par  guerre,  entreprinse,  voye  défait,  sour- 
prinse  ou  décepcion,  chose  quelconque  au  contraire.  Et,  en  tesmoing 
de  ce,  nous  avons  signé  ces  présentes  de  noz  mains  et  fait  sceller  de 
nos  seaulx,  à  Rennes,  le  v^  jour  de  mars,  l'an  de  grâce  mil  CCCG 
trente  etung. 

Jehan.  Artur. 

Par  le  duc,  de  son  commandement  : 

GOAYNON. 

(J  243,  n»  102.  Original  sur  parchemin.) 

Le  25  mare  1431  (a.  st.),  à  Redon,  le  duc  de  Bretagne  ratifie  le  traité 
de  Rennes.  L'original  sur  parchemin,  signé  Jehan,,  est  aussi  dans  le 
carton  J  245,  n»  101.  Après  la  reproduction  intégrale  du  traité  et  la 
ratification,  le  duc  de  Bretagne  ajoute  :  «  et  est  nostre  entencion  que 
très  haulte  et  puissante  princesse  et  nostre  très  chière  et  très  amée 
dame  et  suer,  la  royne  de  Sicille,  nostre  très  chier  et  très  amé  nep- 
veu,  le  duc  d'Alençon,  beau  fîlz  le  conte  de  Laval  et  beaux  frère  et 
nepveu  les  contes  d'Armaignac  et  de  Pardiac,  noz  allez,  soient  com- 
prins  esdiz  appointemens.  » 

(J  245,  no  101.) 

LVIIl 
SUR   LE    SIÈGE    DE    SAINT-CÉNERI   PAR    LE    COMTE    d'aRONDEL    (1433, 

26  décembre)  [p.  206-207].' 

L'an  mil  CCGC  et  trentre-trois,  le  xxvi«  jour  de  décembre,  par-devant 
nous,  Guillaume  Fortin,  viconte  d'Alençon,  furent  présens  en  leurs 

Richemont.  .  35 


546  AI'l'K.MilCKS 

personnes,  Michiel  Le  l'Yançois  et  Jehan  (iaull,  voilurieis  par  terre, 
demourans  à  Caen,  lesquels  cogneurent  et  confessèrent  avoir  eu  et 
receu  de  Pierre  Surreau,  receveur  général  de  Normandie,  par  la  main 
de  Jehan  de  La  Preuse,  son  clerc,  la  somme  de  vingt-deux  livres  dix  solz 
tournois,  qui  deue  leur  estoit,  par  marchié  à  eulx  fait,  pour  les  peine, 
salaire  et  despens  d'eulx  et  six  leurs  chevaulx  à  bastz,  d'avoir  admené 
et  apporté,  sur  iceulx  chevaulx,  dès  ledit  lieu  de  Caen,  en  caste  ville 
d'Aiençon,  la  partie  de  la  somme  de  treize  mil  trois  cens  livres  tour- 
nois, en  blans  de  x  d.  et  bretons  de  ix  d.  t.  pièce,  receue,  audit  lieu 
de  Caen,  par  ledit  de  La  Preuse,  dudit  receveur  général,  pour  convertir 
ou  payement  des  gens  d'armes  et  de  trait  de  l'armée  ordonnée  soubz 
monseigneur  le  conte  d'Arundell,  pour  le  recouvrement  de  la  forteresse 
de  Saint-Celerin  et  d'autres  forteresses  occcupées  par  les  adversaires 
.du  Roy  nostre  sire,  pour  le  second  mois  d'icelle;  laquelle  armée  est  de 
présent  à  siège  devant  ladicte  forteresse  ;  et  autrement,  pour  le  fait 
dudit  siège,  en  la  compaingnie  dudit  de  La  Preuse,  d'autres  voitu- 
riers  et  de  plusieurs  gens  d'armes  et  de  trait,  qui,  dès  ledit  lieu  de 
Caen,  ont  admené  et  conduit  en  ceste  dicte  ville  ladite  finance,  plu- 
sieurs charrois  (sic)  chargiez  de  canons,  pierres  à  canons,  panais,  vivres 
et  autres  habillemens  de  guerre,  pour  les  mectre  jusques  audit  siège; 
et  pour  les  peine,  salaire  et  despens  d'autres  deux  chevaulx  à  bastz, 
par  eulx  achetez  en  chemin,  par  l'ordonnance  dudit  de  La  Preuse,  à 
Faloize;  d'avoir  admené  d'illec  en  ceste  dite  ville  la  somme  de  dix 
neuf  cens  livres  tournois,  receue  audit  Faloize,  par  ledit  de  La  Preuse 
de  plusieurs  officiers  de  finances  d'illec,  èsdiz  blans  de  x  d.  et  bretons; 
et,  dès  Argenten  en  ceste  dite  ville,  en  la  compaingnie  dessus  dite,  la 
somme  de  cinq  cens  livres  tournois,  tout  pour  ung  voyage,  receue 
illec  par  ledit  de  La  Preuse,  èsdiz  blans,  des  receveurs  des  aydes  à 
Argenten  et  grenetier  d'Exmes,  pour  convertir  oudit  paiement.  Ouquel 
voyage  lesdiz  voicturiers  et  six  chevaulx  ont  vaqué,  en  venant,  par 
trois  jours,  commcnçans  le  xx"  jour  de  ce  présent  mois,  séjournans  en 
ceste  dicte  ville  par  plus  de  jour  et  demi,  en  actendant  compaingnie, 
pour  les  dangiers  qui,  de  présent,  sont  sur  les  chemins,  sans  leur 
retour;  et  lesdiz  deux  chevaulx  en  venant  par  deux  jours,  commençans 
ledit  xx"  jour,  séjournans  par  plus  de  jour  et  demi,  comme  les  autres 
dessus  diz,  sans  leur  retour;  dont  lesdiz  voituriers  doivent  avoir  par 
ledit  marchié,  ladite  somme  de  xxu  1.  x  s.  t.,  de  laquelle  ilz  se  sont 
tenuz  et  tiennent,  par  ces  présentes,  pour  contens  et  bien  payez,  et  en 
ont  quicté  et  quictent,  par  ces  mesmes,  le  Roy  nostredit  seigneur,  ledit 
receveur  général  et  tous  autres.  Donné  à  Alençon,  ledit  x.wF  jour  de 
décembre,  l'an  dessus  dit,  mil  CCCC  et  trentre-trois. 

Fortin. 

(Fr.  26057,  n»  2201.  Voir  aussi  les  n<>2222,  2226,2227,  ofi  il  est  ques- 
tion du  môme  siège.) 


APPENDICES  547 


LIX 


TRKVE  DE  SIX  MOIS  CONCLUE  PAR  LE  COMTE  Dt-:  RICHEMONT,  AU  NOM 
DU  ROI,  AVEC  LE  COMTE  d'eTAMPES,  AU  NOM  DU  DUC  DE  BOUR- 
GOGNE (1434,  17  septembre) 

[p.  213-21 '*]. 

A  tous  ceux  qui  ces  présentes  lettres  verront,  Robert  le  Josne,  sei- 
gneur de  Forets,  conseiller  du  Roy  nostre  sire  et  son  bailly  à  Amiens, 
salut.  Savoir  faisons  que  nous  avons  aujourd'hui  veuet  leu  et  diligem- 
ment regardé  unes  letres  saines  et  entières  en  scel  et  esciiptures, 
(lesquelles  la  teneur  s'ensieut  : 

Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentes 
lettres  verront,  salut.  Savoir  faisons  que,  pour  et  en  intencion  de  par- 
venir à  paix  générale  en  ce  royaulme,  laquelle  nous  savons  certai- 
nement que  monseigneur  le  Roy  a  toujours  désiré  et  de  tout  son 
cuer  désire  entièrement,  et,  adfln  de  tant,  et  sy  avant  que  possible 
nous  est,  avanchier  le  bien  de  la  dicte  paix  générale,  à  quoy,  par 
raoien  de  bonnes  triefves  et  abstinences  de  guerre  l'en  pourra,  au 
plaisir  de  Dieu,  plus  tost  et  aisiément  parvenir,  et,  pour  relever  et 
allégier  le  povre  peuple  des  oppressions,  paines  et  travaulx  et 
aultres  maulx  et  dommages  que  si  longuement  il  a  enduré  et  souf- 
fert et  encore  souffre  et  endure  chacun  jour,  à  cause  de  la  guerre, 
et  qu'il  puist  paisiblement  labourer  et  marchandise  avoir  son  cours, 
nous  avons,  pour  et  ou  nom  de  mondit  seigneur  le  Roy,  et  en  ensié- 
vant  son  bon  voloir,  prins,  fermé  et  accordé,  et,  par  la  teneur  de  ces 
présentes,  par  l'advis  et  délibéracion  d'aulcuns  de  ses  officiers  et  con- 
seillers, estans  en  nostre  compaignie,  prenons,  fermons  et  accordons 
lionnes  triefves  et  abstinences  de  guerre,  à  durer,  depuis  la  date  des 
dictes  présentes,  jusques  à  six  mois  continuels  et  prochains  ensié- 
vaut,  à  ung  mois  de  desdit,  avec  nostre  très  chier  et  très  amé  cousin, 
le  conte  d'Estampes  *,  seigneur  de  Dourdan,  pour  et  ou  nom  de  nostre 
très  honoré  seigneur  et  frère,  le  duc  de  Bourgongne,  adversaire  de 
monseigneur  le  Roy,  en  la  forme  et  manière  et  soubz  les  condicions 
qui  cy  après  s'ensièvent  : 

Premièrement,  que,  par  nostre  dit  frère  de  Bourgongne,  nostre 
cousin  d'Estampes,  par  leurs  hommes,  vassaulx  et  subgiectz  et  soul- 
doyers  et  servans  ne  sera  faicte  guerre,  publiquement  ne  occultement, 
es  pays,  citez,  villes,  forteresses  et  seignouries  estans  soubz  l'obéis- 
sance de  mondit  seigneur  le  Roy,  par  deçà  rivières  d'Ayne,  de  Sere  et 
Oise,  c'est  assavoir  aux  villes  et  forteresses  de  Laon,  Vasly,  ne  à  tout 
le  pays  de  Lannois,  aux  villes  et  forteresses  de  Compiengne,  Dyvez 

1.  Il  est  à  remarquer  que  Richemont  donne  ici  à  Jean  de  Bourgogne  le 
litre  de  comte  d'Etampes,  que  revendiquait  et  portait  aussi  son  frère, 
Richard  de  Bretagne  (Voy.  appeud.  XVJ. 


848  APPENDICES 

Ressons-sur-le-Mas,  Beauvais,  Rambures,  Gournay-sur-Aronde,  ne  à 
tout  le  pays  de  Beauvoisis,  ne  aux  villes,  chasteaulx,  places,  forte- 
resses, subgiectz  et  habitans  desdit  paj's  de  Lannois,  Beauvoisis  et 
Picardie  qui  à  présent  sont  en  sonobéissance. 

Itan,  semblablement  mondit  seigneur  le  Roy  et  nous  ne  ferons,  ou 
souffrirons  par  quelsconques  ses  hommes,  subgiectz  ou  souldoyers,  ne 
aussi  par  ses  servans  et  alliez,  estans  présentement  en  son  royaulme, 
ne  aultres  tenans  son  parti,  ou  qui  cy  après  porroient  venir  en  son 
service,  faire  ne  estre  faicte  guerre  en  aulcune  manière,  publiquement 
ne  occultement,  aux  pays,  citez,  villes,  forteresses,  terres  et  seignouries 
de  nostre  dict  frère  de  Bourgongne,  ne  à  celles  qu'il  a  en  sa  main  et 
aussi  en  son  gouvernement  es  marches  de  par  deçà,  c'est  assavoir  aux 
pays  de  Brebant,  Lembourg,  Flandres  et  Arthois,  Hayneau,  Namur 
et  Boulenois; aux  villes,  prevostez,  chasteaulx,  chastelenies  de  Péronne, 
Mondidier  et  Roye,  ne  aux  places,  villes  et  terres  qui  en  sont  tenues; 
aux  villes,  chastel  et  chastelenie  de  Saint- Walery,  Rousoy,  Coulongue, 
appartenant  à  nostre  très  chier  et  très  amé  cousin  le  conte  de  Nevers 
et  à  nostre  cousin  le  conte  d'Estampes;  aux  villes  d'Amiens,  Abbeville, 
Monstreul,  Saint-Quentin,  Noyon,  les  villes  et  chastel  de  Chauny, 
Bray-sur-Somme  Encre,  Corbie,  Ribémont;  les  villes  et  chastel  de 
Picquegny,  Boves,  Doullens,  Saint-Riquier,  Arleux,  Crevecœur,  Mor- 
taigne,  Cambray  et  le  pays  de  Cambresis;  aux  contez,  villes  et  forte- 
resses de  Guise,  de  Marie  et  autres  places,  terres  et  seignouries 
appartenant  à  beau  cousin  le  conte  de  Liney,  à  belle  cousine,  la  con- 
tesse  de  Marie,  sa  belle  fdle,  et  à  belle  cousine,  la  viconlesse  de  Meaulx, 
sa  belle-mère,  estans  par  deçà  lesdictes  rivières  ;  lesquelles  terres  et 
places  ledit  beau  cousin  sera  tenu  bailler  par  déclaracion  et  nous 
certiffier,  dedans  trois  sepmaines,  aprez  la  publicacion  de  cestes; 
aux  villes,  chastel,  terres  et  seignouries  d'Aubenton,  Rumiguy, 
Martigny  et  les  appartenances,  appartenant  à  beau  cousin,  le 
conte  de  Waudemont,  ne  aux  places,  forteresses,  terres  et  sei- 
gnouries des  subgiets  et  vassaulx  de  nostre  dit  frère  de  Bour- 
gongne, ou  d'aultres  tenans  son  parti,  non  subgiets  à  lui,  qui 
comprins  y  voldront  estre,  dont  les  seigneurs  et  cappitaines  desdictes 
forteresses  et  places,  aiusy  non  subgietes  de  nostre  dit  frère  de  Bour- 
gongne seront  tenus  de  nous  faire  savoir  leur  volenté  et  en  faire  cer- 
tifier souffisamment,  en  dedans  trois  sepmaines  prouchaines,  aprez  la 
datte  de  ces  présentes;  pendant  lequel  temps  icelles  places  démoule- 
ront néantmoins  es  dictes  abstinences  durant  lesdictes  trois  sepmaines, 
par  ainsy  toutes  voies  que  lesdis  seigneurs  et  cappitaines  ne  feront 
aulcune  chose  contre  les  dictes  abstinences;  aux  forteresses  et  places 
de  Dours,  Yancourt,  Morœul,  la  Ferté-lez-Saint-Riquier,  Dongy, 
Oysemont,  Baillœul-en-Vymeu,  Moyencourt,  Aplaincourt,  Chaule  et 
Follevile-en-Vymeu;  ne  aux  subgiets  et  habitans  quelsconques  des 
villes,  places,  terres  et  seignouries  de  nostre  dit  frère  de  Bourgongne; 
ne  desdis  subgiez  et  aultres  qui  comprins  vouldront  estre  es  dictes 
abstinences,  estans  par  deçà  les  rivières  dessusdictes,  jusques  à  la 
conté  de  Rethelois,  qui  n'y  est  point  comprinse,  ains  y  cessera  toute 
guerre  et  voye  de  fait,  et  ausssy  tous  appâtis  quelsconques,  durant 


APPENDICES  549 

le  temps  de  ces  présentes  abstinences,  qui  commencheront  à  avoir 
force  et  vertu  du  jour  de  la  datte  de  ces  présentes. 

Item,  pendant  et  durant  lesdictes  triefves  et  abstinences  de  guerre, 
aulcune  desdictes  parties  ne  pourra  prendre  ou  faire  prendre,  gaigner 
ne  conquérir  l'une  sur  l'autre  aulcunes  villes,  places  ou  forteresses 
comprinses  en  ces  présentes  abstinences,  publiquement  ne  occulte- 
ment,  de  jour,  de  nuit,  par  engin  d'eschelles,  d'emblée,  ne  aultre- 
ment;  et,  posé  ores  que  les  cappitaines,  gardes  ou  habitans  d'icelles 
se  voulsissent  rendre  et  tourner,  de  leur  plaine  volenté,  de  l'un  party  à 
l'autre,  jà  n'y  seront  ne  porront  estre  receus;  ne  porront  estre  aussy 
réparées  aulcunes  places  ou  forteresses  autres  fois  démolies,  mais 
seront  et  demourront  en  Testât  qu'elles  sont  de  présent;  et  ne  se 
porra,  par  quelque  manière,  acroistre  l'une  desdictes  parties  sur 
l'autre,  es  termes  d'icelles  triefves  et  abstinences,  soubs  quelque  pré- 
texte et  couleur  que  ce  soit. 

Item,  que  tous  marchans  des  villes  et  pays  comprins  en  ladicle 
abstinence  porront,  par  sauf-conduits,  converser  et  marchander  les 
uns  avec  les  autres  d'une  obéissance  en  l'autre;  lesquels  sauf-conduits 
l'en  sera  tenu  de  bailler,  et  par  prix  raisonnable;  c'est  assavoir,  pour 
un  chariot  deux  salus  pour  mois;  une  charette  un  salut  pour  mois; 
chacun  marchant  et  aultre  que  gens  de  guerre  ung  salut  pour  six 
mois,  et,  pour  chacun  cheval  à  somme,  avec  celui  qui  le  conduira, 
ung  salut  pour  lesdits  six  mois;  et  seront  lesdits  sauf-conduits  bailliez 
par  nous  et  par  nostre  cousin  d'Estampes,  ou  ceulx  qui,  de  par  lui 
et  nous,  seront  à  ce  commis  et  ordonnez. 

Item,  que  gens  de  tous  estats,  tant  gens  d'ayde,  comme  gens  de 
guerre,  bourgeois,  gens  de  bonnes  villes,  laboureurs,  et  aultres  gens 
de  plat  pays  porront,  chacun  es  termes  de  son  obéissance,  aller,  venir, 
estre,  demourer,  labourer  et  faire  leurs  besongnes  seurement  et  pai- 
siblement, es  tei^mes  desdictes  abstinences  et  durant  le  temps  d'icelles, 
sans  ce  que  on  puisse  prendre  leurs  corps  ne  leurs  biens. 

Item,  que  toutes  gens  d'un  party  et  d'aultre  se  porront  armer  et 
faire  guerre,  où  et  ainsy  que  bon  leur  semblera,  hors  des  pays  et 
termes  comprins  es  dictes  abstinences. 

Item,  pour  mieulx  entretenir  icelles  abstinences,  la  ville  de  Hen, 
qui,  de  -présent,  est  en  nostre  main,  sera  baillée  et  mise  en  la  main 
de  nostre  dit  cousin  d'Estampes,  ou  nom  de  nostre  dit  frère,  pour  en 
faire  et  disposer  à  son  bon  plaisir;  et  aussy  y  sera  mise  la  ville  et 
forteresse  de  Bretheuil,  pour  prestement,  aprez  qu'elle  y  sera,  estre 
démolie  et  abatue.  Et  semblablement  la  ville  de  Bruyères-soubs-Laon, 
que  tient  présentement  nostre  dit  cousin,  le  conte  le  Liney,  sera 
démolie  et  abatue,  en  dedans  vingt-six  jours  prouchainement  venans. 
Item,  que,  ou  cas  qu'il  y  eust  quelque  entrefait  d'un  costé  oo 
d'autre,  la  dicte  abstinence  durant,  pourtant  ne  seroit  icelle  absti- 
nence enfrainte,  ne  la  partie  bléchyée  ne  porra  récompanser  par 
voye  de  fait,  ains  sera  tenue,  avant  toute  voye  de  fait,  de  sommer 
deuement  les  conservateurs,  pour  estre  récompensé,  et,  s'il  y  a  def- 
fault  d'un  mois,  aprez  la  dicte  sommacion,  la  dicte  partie  bleschiée  se 
porra  récompenser  par  telle  voie  que  bon  lui  semblera. 


550  APPEISDICES 

Item,  que,  s'il  advenoit  que  noslre  dit  cousin,  le  conte  de  Liney 
voulsist,  cy  aprez,  de  sa  part,  desdire  lesdictes  abstinences,  elles  de- 
mourront  en  leur  vertu,  au  regard  de  lui,  ung  mois  aprez  ce  qu'il  avoir 
{sic)  desdites,  et,  au  regard  de  nostre  dit  frère,  elles  demourront  en 
leur  force  et  vertu  leur  temps  durant,  selon  ce  que  dessus  est  dit,  et 
demourra  la  dicte  ville  de  Hen  en  la  main  de  nostre  dit  frère  de 
Bourgongne,  ou  de  nostre  dit  cousin  d'Estampes,  pour  lui  seurement 
et  en  abstinence,  ainsy  que  ses  autres  villes  et  pays  dessudits. 

Item,  et  que  ces  présentes  abstinences,  ainsy  que  sont  déclairées, 
commencberont  à  avoir  leur  effect  au  jour  de  la  datte  de  cestes, 
lesquelles  debvront  estre  publiées  notamment,  partout  où  il  appar- 
tiendra, dedens  douze  jours  après  la  datte  d'icelles,  et  durant  le  temps 
que  dessus  est  dit,  et  à  ung  mois  de  desdit,  toutes  et  quantes  fois  que 
bon  semblera  à  mondit  seigneur  le  Roy,  ou  a  nostre  dit  frère  de 
Bourgongne;  lequel  desdis  celui  qui  faire  le  vouldra  sera  tenu  sei- 
gniffier  et  faire  savoir  par  ses  lettres  patentes,  c'est  assavoir,  de  la 
partie  de  mondit  seigneur  le  Roy,  ez  villes  d'Arras  ou  de  l'Ille,  à  la 
personne  du  gouverneur  de  l'un  des  lieux,  ou  son  lieutenant,  et,  du 
costé  de  nostre  dit  frère  de  Bourgongne,  es  villes  de  Compiengne  ou 
de  Beauvais,  au  cappitaine  de  l'un  desdis  lieux,  ou  son  lieutenant; 
depuis  laquelle  présentacion  ledit  mois  commenchera,  et,  durant 
iceluy,  s'entretenront  ces  dites  présentes  abstinences  en  tous  leurs 
poins. 

Item,  que,  pour  apaisier  et  appointier  les  questions,  débat  et  entre- 
prinses  qui,  d'un  costé  et  d'aultre,  porroient  survenir,  à  l'occasion 
desdites  abstinences,  nous,  pour  mondit  seigneur  le  Roy,  et  nostre  dit 
cousin  d'Estampes  pour  icelui  nostre  frère  de  Bourgongne,  y  com- 
metrons,  chacun  endroit  soi,  pour  son  party,  aulcuns  seigneurs  et 
chevaliers  notables  et  puissans,  qui,  en  nos  absences,  congnoistront 
et  appointeront  desdites  questions  et  débat,  et  de  ce  leurs  donrons 
nos  lettres  de  povoir  souffisantes,  et  néantmoins  en  porra  chacun  de 
nous  congnoistre  à  sa  personnes,  toutes  et  quantes  fois  que  bon  lui 
semblera. 

Sy,  donnons  en  mandement  à  tous  les  vassaulx,  hommes,  justiciers, 
officiers,  serviteurs  et  subgiets  quelsconques  de  mondit  seigneur  le 
Roy  et  aux  nostres  et  à  chacun  d'eulx,  si  comme  appartiendra,  que 
lesdiles  triefves  et  abstinences  de  guerre  ils  gardent  et  entretienghent 
et  facent  garder  et  entretenir  inviolablement,  en  tous  leurs  poins  et 
articles,  sans  faire  quelconque  chose  au  contraire,  sur  paine  d'estre 
pungny  comme  infracteur  de  triefves  et  seur  estât.  Et,  en  oultre,  à 
iceulx  justiciers  et  officiers,  ou  à  leurs  lieutenans  qu'ils  facent,  chacun 
-endroit  soy,  ces  présentes  publier  et  solempnellement,  à  son  de 
trompe,  partout  où  il  appartiendra,  en  dedans  douze  jours  prochains, 
■comme  dessus  est  dit,  car  ainsy  le  volons  et  avons  promis  et  accordé 
■estre  fait. 

En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à  ces  pré- 
sentes. Donné  en  la  ville  de  Ham,  le  xvii'=  jour  de  septembre,  l'an  de 
grâce  Mccccxxxiiii.  Ainsy  signé,  par  monseigneur  le  conte  connestable 
•en  son  Conseil,  ouquel  monseigneur  le  bastard  d'Orléans,  messire  P.  de 


APPENDICES  o5l 

Rochcfort,  mareschal  de  France,  les  sires  de  Prye,  de  Mouy,  de  Fon- 
taines, de  Valpergue,  messire  Gilles  de  Saint-Simon,  Charles  d'Ebon- 
ville  (?)  Brangon  d'Arpajon,  Eloy  d'Escorailles,  chevaliers,  Potton,  sei- 
gneur de  Fontrailles  (sic),  Estienne  de  Vignoles,  dit  La  Hire,  Jehan  de 
Blanchefort,  M^  Jehan  de  Troissy  et  plusieurs  aultres  estoient.  Gilles. 
En  tesraoing  de  ce,  nous  avons  mis  à  ces  lettres  de  vidimufi,  ou 
transcript,  le  scel  dudit  baillage.  Donné  à  Amiens,  le  xxvm"  jour  de 
septembre,  l'an  Mccccxxxnir. 

(D.  Grenier  100,  p.  40-42.  —  Copie.) 


LX 

RiCllEMONT   DÉLII5   ROBEHT   DE    SARREBRUCK   DE   SES    ENGAGEMENTS 

(1434,  15  septembre) 
(p.  216). 

Artur,  fîlz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  lettres  verront, 
salut.  Comme,  pour  le  passevissement  du  traictié  derrain,  par  nostre 
moien  fait  entre  nostre  très  chier  et  très-amé  cousin,  le  duc  de  Bar 
et  de  Lorraine,  d'une  part,  et  nostre  bien-amé  cousin,  messire  Robert 
de  Sarrebruche,  seigneur  de  Commarci,  d'autre,  ou  cas  où  des  articles 
pourpalés  entre  nosdits  cousins  serions  contens  et  d'accord,  icelui 
nostre  cousin  de  Bar  ait  promis  à  icelui  nostre  cousin  de  Commarci 
de  lui  faire  avoir  quictance  de  nous  du  créant  que  derrain  fit  en 
nostre  main  au  lieu  de  Vitry,  et  de  tous  aultres  qu'il  nous  pourroit 
avoir  fais,  et  aussi  quictance  de  ses  gens,  que  nous  feismes  prenre  et 
arrester  à  Revigny;  avec  main  levée  et  joyssement  de  tous  empesche- 
mens  que  pourrions  avoir  fais  on  fait  faire  sur  lui,  sur  ses  servans  ou 
sur  ses  biens,  depuis  le  traictié  derrain,  fait  entre  nosdiz  cousins  au 
lieu  de  Vitry,  à  quelque  cause  que  ce  peust  estre;  savoir  faisons  que, 
pour  amour  et  en  contemplacion  de  nostre  dit  cousin  de  Bar  et  de 
Lorraine,  nous  avons  tous  les  traictiés  et  accordz  par  lui  faiz,  passez 
et  accordez  avec  ledit  de  Commarci  pour  agréables,  et  icelui  nostre 
cousin  de  Commarci  quictons,  de  bonne  et  léal  quictance,  de  tous 
créans  et  promesses  qu'il  a  ou  puet  avoir  fais  en  nostre  main,  par 
lettres,  ne  autrement,  en  manière  que  ce  soit,  sans  jamaiz  l'en  pour- 
suivre ou  approchier;  et  si,  mecions  au  délivre  de  corps  et  de  biens  et 
quictons,  par  ceste,  ses  gens,  que  autreffoiz  feismes  arrester  à  Revigny 
et  que  nous  avons  fait  détenir  prisonniers  à  Bar,  et,  avec  ce,  levons 
nostre  main  et  lui  rendons,  par  ceste,  entier  joyssement  de  tout  ce  en 
rjuoy  il  pourroit  avoir  esté  empesché  par  nous,  ne  de  nostre  ordon- 
nance, ou  nom  de  monseigneur  le  Roy  ne  de  nous,  depuis  le  traictié 
derrain  fait  au  lieu  de  Vitry,  entre  nosdiz  cousins,  tant  de  son  corps, 
de  ses  servans  et  de  leurs  biens  et  besoingnes  quelconques,  à  quelque 
cause  ou  occasion  que  ce  feust  ou  peust  estre.  Sy,  donnons  en  man- 
dement, par  ces  présentes,  de  par  monseigneur  le  Roy  et  nous,  à  tous 


APPENDICES 


à  qui  il  appartient  que  de  nostre  présente  quictance  et  main  levée 
facent,  sueffrent  et  laissent  joir  et  user  plainenoient  et  paisiblement 
nostre  dit  cousin  de  Commarci,  Donné  à  Chaalons,  le  xv<=  jour  de  dé- 
cembre l'an  mil  quatre  cens  trente  quatre.  Ainsi  signé,  par  monsei- 
gneur le  connestable  E.  Chlr.  (Chkvalier). 
(Coll.  de  Lorraine,  t.  293,  no  18.) 

C'est  un  Vidimus  du  9  décembre  1436, 


LXI 

ENQUÊTE    SUR   LA   CLAUSE   DU    TRAITÉ    d'aRRAS    RELATIVE   AUX  VILLES 

DE  LA  SOMME  (1449,  janvier) 

(p.  227,  231). 

Le  9  janvier  1448  (a.  st.),  Charles  VII  charge  J.  Tudert,  G.  de  Vie, 
R.  Thiboust  et  J.  Aude  de  faire  une  enquête,  pour  savoir  si,  en  cas  de 
paix,  ou  de  longue  trêve  avec  les  Anglais,  il  n'aurait  pas  le  di^oit  de 
reprendre  les  villes  de  la  Somme  ',  sans  payer  400,000  écus.  On 
craint  que  le  duc  de  Bourgogne  ne  fasse  difficulté  de  rendre  ces  villes 
sans  indemnité,  parce  que  les  lettres  du  traité  d'Arras  «  ne  font  de  ce 
aucune  mencion  ». 

Audry  du  Baif,  prêtre,  qui  était  avec  Christophe  d'Harcourt  à  Arras, 
affirme  que  le  duc  de  Bourgogne  promit  «  de  rendre  lesdites  terres 
et  seigneuries  franchement  et  sans  rien  payer  »,  s'il  y  avait  paix  avec 
les  Anglais;  «  mais,  de  longue  trêve,  ne  sauroit  pas  bien  parler  au 
vray.  » 

«  Très-hault  et  puissant  prince,  monseigneur  Artur  de  Bretaigne, 
conte  de  Richemont,  seigneur  de  Partenay  et  connestable  de  France, 
aagié  de  cinquante-six  ans,  ou  environ,  examiné  par  nous,  commis- 
saires dessus  nommez,  en  la  ville  de  Tours,  le  xx^  jour  dudit  mois  de 
janvier  mccccxlvui,  sur  le  contenu  es  dites  lettres  de  commission, 
dit  et  dépose,  par  son  serment  : 

Que,  en  l'an  mccccxxxuii,  ou  mois  de  febvrier,  ou  environ,  messeigneurs 
de  Bourbon,  liiy  qui  parle,  feu  monseigneur  l'archevesque  de  Reims, 
lors  chancelier  de  France,  Christ,  de  Harcourt  et  le  maréchal  de  La 
Fayete  eurent  certaines  paroles  en  la  ville  de  Nevers  avec  les  gens  de 
monseigneur  de  Bourgoigne,  pour  trouver  manières  que  mondit  sei- 
gneur de  Bourgoigne,  eust  traicté  au  Roy;  et,  après  plusieurs  ouver- 
tures, faictes  d'une  part  et  d'autre,  fut  pourparlé  ou  cas  qu'il  plairoit 
au  Roy  que  les  terres  et  seigneuries  que  à  présent  tient  monseigneur 
de  Bourgoigne,  par  le  traicté  d'Arras,  estans  deçà  la  rivière  de  Somme, 
luy  demeurassent,  seulement  en  gaige  de  cccc  mil  escus,  combien  que 
paravant  les  gens  de  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  demandoient 

1.  Le  duc  avait  demandé  ces  villes  pour  soutenir  la  guerre  à  laquelle  il 
s'exposait  en  traitant  avec  Charles  VII. 


APPENDICES  OOO 

avoir  lesdites  terres  pour  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  et  luy  de- 
mourer  perpétuellement,  à  luy  et  aux  siens,  lesquelles  choses  furent 
rapportées  tant  au  Roi  que  à  mondit  seigneur  de  Bourgoigne,  dont 
ils  furent  assez  d'accord,  d'une  part  et  d'autre,  et,  pour  ce  faire,  et 
Iraicter  entre  eux  appoinctement  et  accord  final,  entreprindrent  cer- 
taine journée,  laquelle  a  depuis  esté  tenue  à  Arras;  à  laquelle  mesdits 
seigneurs  dessus  nommez  et  autres  y  furent,  par  le  commandement 
et  ordonnances  du  Roy,  et  aussi  y  furent  les  gens  de  mondit  seigneur 
de  Bourgoigne;  et  après  que,  de  la  partie  de  mondit  seigneur  de 
Bourgoigne,  mesdits  seigneurs,  et  autres  ambassadeurs,  et  autres 
pour  le  Roy  eurent  esté  requis  faire  paix  et  traictié  avec  les  Anglois, 
et,  pour  ce  qu'il  sembla  à  mesdits  seigneurs  et  autres  ambassadeurs 
dessus  dits  que  profit  du  Roi  soit  mieulx  de  faire  traicté  avec  mondit 
seigneur  de  Bourgoigne,  sans  y  comprendre  les  Anglois,  que  de  traicter 
avec  le:i  Anglois  ;  et  pour  que  il  leur  sembloit  que,  quand  mondit  seigneur 
de  Bourgoigne  auroit  traicté  avec  le  roi,  lesdits  Anglois  plus  aisément 
et  à  moindre  charge  pour  le  Roy  vendroient  à  aucun  traicté,  et  mieulx 
que  quand  on  traicteroit  des  deux  ensemble;  et  se  recoi'de  que,  audit 
lieu  d'Arras,  par  aucuns  de  mesdits  seigneurs  ambassadeurs  du  Roy  fût 
dit  aux  gens  de  mondit  seigneur  de  Bourgoigne,  en  débatant  desdites 
matières,  telles  paroUes,  ou  semblables,  c'est  assavoir,  puisque  le  Roy, 
par  ledit  traictié  fait  à  Arras,  laissoit  à  mondit  seigneur  de  Bour- 
goigne si  grande  partie  de  ses  terres  et  seigneuries,  quelles  choses  il 
pourroit  bailler  aux  Anglois  pour  avoir  traictié  avec  eulx,  et  mesme- 
ment,  se  le  Roy  n'avoit  point  entencion  de  luy  laisser  la  duché  de  Nor- 
mandie, et  lors  les  gens  de  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  respondi- 
rent  que,  quand  le  Roy  vouldroit  Iraicter  aux  Anglois  il  ne  devoit 
point  laisser  pour  les  terres  qu'il  avoit  baillées  en  gaige  à  mondit 
seigneur  de  Bourgoigne,  et  que,  si  le  Roy  faisoit  paix  auxdits  Anglois, 
mondit  seigneur  de  Bourgoigne  feroit  tant  que  le  Roy  seroit  content  de 
luy  et  qu'il  vouldroit  qu'il  eust  jà  fait  paix  aux  Anglois  et  il  y  eust 
restitué  lesdites  terres,  sans  rien  payer.  Interrogé  se  mondit  seigneur 
de  Bourgoigne,  ou  ses  gens,  firent  lors,  ou  depuis,  aucunes  promesses 
à  mesdits  seigneurs  et  autres  ambassadeurs  du  Roy  de  rendre  et  res- 
tituer lesdites  terres  engaigées,  et  toutes  quantefois  que  le  Roy  feroit 
paix  ou  longues  trêves  aux  Anglois,  sans  payer  ladite  somme  de 
r.ccc  mil  escus,  pour  laquelle  lesdites  terres  sont  engagées  et  si  de  ce 
en  furent  faites  ou  accordées  aucunes  lettres,  dit  qu'il  n'en  scet  autre 
chose  hors  ce  que  dessus  a  déposé  ». 

Le  maréchal  de  La  Fayette,  interrogé  le  22  janvier,  déclare  que 
cette  question  fut  très  débattue  du  côté  du  roi  «  et  se  recorde  que,  à 
aucunes  journées,  dont  n'est  recors,  ils  se  assemblèrent  de  nuit  avec 
lesdites  gens  de  mondit  seigneur  de  Bourgoigne,  et  luy  semble  que 
c'estoit  en  l'hostel  où  estoit  logé  mondit  seigneur  le  connestable,  pour 
ce  qu'ils  doubtoient  parler  desdites  matières  que  messire  Jehan  de 
Luxembourg  et  autres  de  la  ligue  et  alliance  le  sceussent  et  empes- 
chassent  ledit  traictié;  auquel  hostel  de  mondit  seigneur  le  connes- 
table et  ailleurs  fut  débattu  par  lesdits  ambassadeurs  du  Roy  que 
lesdites  terres  engaigées  ne  fussent  baillées  à  mondit  seigneur  de 


o54  APPENDICES 

Bourgoigne;  et  se  recorde  que  finablement  lesdites  gens  de  mondit 
seigneur  de  Bourgoigne  consentirent  et  accordèrent  que,  en  baillant 
lesdites  terres  en  gaiges  à  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  de  cr.cc  mil 
escus,  ou  cas  que  le  Roy  feroit  paix  final  aux  Anglois,  il  recouvrast 
lesdites  terres  engaigées  pour  lesdits  cccc  mil  escus,  sans  payer  aucune 
chose.  Et  cuidoit  certainement  que  lesdites  promesses  sur  ce  faites  par 
lesdites  gens  de  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  fussent  escriptes 
oudit  traictié  et  n'est  pas  souvenant  qu'ils  accordassent  restituer  les- 
dites terres,  s'il  avenoit  que  le  roi  prinst  longue  trêve  aux  Anglois.  » 
(Fr.  6966,  ou  Legrand,  VII,  fo»  242-247.  Copie.) 

Le  duc  de  Bourgogne  s'était,  en  effet,  engagé,  par  lettres  du 
:J0  septembre  1435,  à  rendre,  sans  indemnité,  les  villes  de  la  Somme, 
en  cas  de  paix  entre  la  France  et  l'Angleterre,  comme  le  prouve  le 
document  qui  suit.  C'est  un  argument  que  J.  Jouvenel  des  Ursins  fit 
valoir  dans  son  Epître  aux  Etats  d'Orléans,  en  1439,  pour  exhorter 
le  roi  à  conclure  la  paix  avec  Henri  VI.  (Voir  Fi\  5022,  f»  26.) 


LXII 

LETTRES  DU  DUC   DE   BOURGOGNE  RELATIVES  AUX   VILLES  DE  LA  SOMME 

(1345,  30  septembre) 

(p.  225,  229,  231). 

Après  avoir  reproduit  les  clauses  du  traité  d'Ârras  relatives  aux 
villes  de  la  Somme,  ces  lettres  rappellent  que  les  ambassadeurs  de 
Charles  VII  exhortèrent  les  ambassadeurs  de  Henri  VI  à  conclure  la 
paix  et  lui  donnèrent  délai  jusqu'au  1"  janvier  suivant,  pour  accepter 
leurs  propositions  du  7  septembre  1435,  également  reproduites  dans 
ce  même  document,  puis  elles  ajoutent  ce  qui  suit  ; 

«  Savoir  faisons  que  entre  les  ambaxeurs  de  monseigneur  le  Roy, 
pour  et  ou  nom  de  lui,  d'une  part,  et  nous,  d'aultre,  a  esté  traictié  et 
accordé  sur  ce  en  la  manière  qui  s'ensieut;  c'est  assavoir  que,  ou  cas 
que,  en  dedans  ledit  premier  jour  de  janvier,  de  la  part  de  mondit 
seigneur  et  cousin  le  Roy  d'Angleterre  ne  seront  acceptées  les  offres 
en  la  forme  et  par  la  manière  contenue  es  lettres  dessus  transcriptes 
et  de  ladicte  acceptacion  certiffiés  lesdits  légats  et  messages  de  nostre 
saint  père  et  consille  de  Basle,  ou  nous,  en  ce  cas  les  citez,  villes,  for- 
teresses, terres  et  seigneuries  dénommées  en  l'article  cy-dessus  tran- 
script  nous  demourront  et  appartendront  à  nos  hoirs  et  ayans  cause, 
à  rachapt  de  cccc  mil  escus,  tels  et  ainsy  qu'il  est  contenu  oudit  article 
dessus  transcript  et  selon  le  contenu  es  lettres  de  rachapt  que  en 
avons  baillées  à  mondit  seigneur  le  Roy;  et  s'il  advenoit  que,  de  la 
part  de  nostre  dit  seigneur  et  cousin  le  Roy  d'Angleterre  fussent  et 
soyent  acceptées  lesdites  offres  dedens  ledit  premier  jour  de  janvier  et 
ladite  acceptacion  signiffiée,  comme  dessus,  et  que,  dès  lors,  il  voulsist 
faire  les  renonriacions  au  title,  droit  et  couronne  du  royalme   de 


APPENDICES  555 

France,  ensamble  les  vecongnoissances  des  hommages,  ressort  et  sou- 
veraineté de  que  l'en  lui  oÏÏve  laissier  en  ce  royalme,  et  que,  par  ce 
moien,  fut  faicte  et  conclue  paix  final  entre  les  deux  Roys  et  les  royal- 
mes  de  France  et  d'Angleterre,  en  tel  cas,  nous  serons  tenus  de  lais- 
sier, rendre  et  restituer,  incontinent  après  ladicte  paix  final  faicte  et 
publiée  à  Amiens  (et  les  autres  villes,  d'Amiens  et  aultres  ')  à  mondil 
seigneur  le  Roy,  toutes  les  dites  villes,  citez,  terres  et  seigneuries  à 
nous  transportées,  franchement  et  sans  en  demander  ne  debvoir  avoir 
aucun  payement  desdits  cccc  mil  escus,  et  seulement  serons  contens, 
ou  dit  cas,  de  la  percepcion  des  fruits  que  en  aurons  receus  cepen- 
dant; mais  se,  dedens  le  premier  jour  de  janvier,  de  ladicte  pari 
de  nostre  dit  cousin  le  Roy  d'Angleterre  estoient  acceptées  lesdictes 
offres,  en  la  manière  que  contenu  est  es  lettres  dessus  transcriptes, 
c'est  assavoir  qu'il  voulsist  avoir  la  faculté  de  attendre  jusques  à 
sept  ans  de  faire  lesdictes  renonciacions  et  recongnoissance  ;  en  ce 
cas,  nous  ne  serons  tenus  de  rendre  ne  restituer  à  mondit  seigneur 
le  Roy  ne  ses  hoirs  lesdictes  citez,  villes,  forteresses,  terres  et  seignou- 
ries  déclairiées  oudit  article,  ains  les  tendrons  etenjoyrons,  pour  nous 
et  nosdits  hoirs,  au  title  de  rachapt  que  dessus,  et  en  ferons  les  fruits  et 
revenus  nostres,  jusques  audit  temps  et  terme  de  sept  ans,  synon  que, 
de  la  part  du  roy  d'Angleterre  l'en  voulsist  cependant  faire  lesdictes 
renonciacions,  recongnoissance,  et,  par  ce  moien,  conclure  paix  final, 
ouquel  cas  nous  serons  contens  de  avoir  lesdis  fruits  et  revenus,  jus- 
(|ues  au  temps  desdictes  renonciacions,  recongnoissances  et  paix 
final,  ou  en  nous  rendant,  de  la  part  de  mondit  seigneur  le  Roy,  lesdis 
cccc  mil  escus,  comme  dessus  est  dit,  et  non  aullrement;  et,  au  bout 
desdis  sept  ans,  s'il  plaist  à  nostre  dit  cousin,  le  Roy  d' Angleterre 
recommenchier  la  guerre,  semblablement  nous  demourront  icelles 
citez,  villes,  forteresses,  terres  et  seignouries  nommées  et  déclairées 
oudit  article,  pour  en  joyr;  et  les  tenir  et  posséder  pourrons,  et  nosdis 
hoirs,  soubs  ledit  rachapt  de  cccc  mil  escus,  tels  que  dits  sont;  mais  se 
il  advient  que  ledit  Roy  d'Angleterre,  à  la  fin  des  sept  ans  ans,  faice 
lesdictes  renonciacions  et  recongnoissance  et  accomplisse  lesdictes 
choses  contenues  es  dictes  lettres  dessus  transcriptes,  par  le  moien 
de  quoy  paix  final  soit  signiffiée  et  publiée  entre  lesdis  deux  royalmes 
de  France  et  d'Angleterre,  en  ce  cas,  promectons,  en  bonne  foy  et 
parole  de  prince,  et  par  les  foy  et  sermens  de  nostre  corps,  pour  nous 
et  nosdis  hoirs  et  successeurs,  de  rendre,  restituer  et  delaissier  à 
mondit  seigneur  le  Roy,  ou  ses  hoirs  et  successeurs  en  la  couronne  de 
France  franchement  toutes  lesdictes  citez,  villes,  forteresses,  terres  et 
seignouries  désignées  en  l'article  devant  dit,  tantost  après  lesdits  sept 
ans  passés,  sans  en  faire  aulcune  demande  ou  querelle  desdits  cccc  mil 
escus,  et  icelles  citez,  forteresses,  villes  et  seignouries  ou  aulcune 
d'icelles  retenir,  ne  auitrement  différer  ou  retarder  lesdictes  resti- 
tucion  et  délaissement  d'icelles,  ou  partie  d'icelles,  soubs  umbre 
et  occasion  de  quelque  autre  debte,  demande  ne  poursuite  que  po- 
vions  ou  porrions,  ou  temps  advenir,  avoir,  ou  nos  hoirs  et  succes- 

1.  Il  doit  y  avoir  ici  une  faute  de  copiste. 


556  APPENDICES 

seurs,  à  quelque  cause  ou  title  que  ce  soit  ou  puisse  eslre,  àl'eneonlre 
de  moiidit  seigneur  le  Roy,  ou  de  ses  hoirs  et  successeurs,  pourveu 
toutevoies  que  tous  les  fruits,  rentes  et  revenues  quelconques  que 
aurons,  durant  lesdis  sept  ans,  receus  desdictes  citez,  villes,  forteresses 
et  seignouries  nous  demourront  entièrement,  sans  ce  que  nous  soyons 
tenus  de,  en  aulcune  chose,  rendre  ne  restituer  à  mondit  seigneur  le 
Roy,  ne  aux  siens,  ou  qu'ils  nous  en  puissent  aulcune  chose  quérir  ne 
demander;  toutesvoyes,  nous  ne  entendons  prendre,  en  ces  présentes, 
aulcunement  les  chastel  et  ville  de  Péronne,  combien  qu'ils  soient 
assis  sur  la  rivière  de  Somme,  ne  aulcune  des  autres  villes,  forteresses, 
seignouries  à  nous  transportées  par  mondit  seigneurie  Roy  déclairées 
et  spécifiées  es  aultres  articles  dudit  traictié  de  paix;  et,  à  tout  ce 
faire,  tenir  et  accomplir  nous  sommes  obligiés  et  obligons,  par  la 
manière  dessusdicte  et  soubs  Tobligacion  et  ypothèque  de  tous  nos 
biens  et  de  nosdis  hoirs  et  successeurs  présens  et  advenir,  voulans  à  ce 
estre  contrains  par  la  censure  ecclésiastique  de  nostre  saint  père  le 
Pappe  et  du  saint  consille  de  Basle,  par  toutes  aultres  cours  ecclésias- 
tiques et  séculières  et  toutes  aultres  voyes  deues  et  raisonnables,  aus- 
quelles,  quant  ad  ce,  nous  sommes  soubsmis  et  soubmettons  et  nosdis 
hoirs,  successeurs  et  biens  quelconques,  par  ces  mêmes  présentes,  et 
tout  sans  fraude  et  malengins,  renonchans  à  toutes  choses,  tant  de 
droit  que  de  fait,  que  porrions  dire  ou  alléguier  au  contraire  de  ce 
que  dit  est.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à 
ces  présentes,  données  en  nostre  ville  d'Arras,  le  derrain  jour  de 
septembre  mccccssxv. 
(D.  Grenier  100,  p.  48-49.  Copie.) 


LXIII 

LECTRE    DE   MAISTRE    EMERY  MARTINEAU,    PROCUREUR   DU   ROI 

SUR   LE   FAIT    DES   MONNOYES    (1436,    21    aOÛt) 

(p.  242,  252,  note  6;  p.  260,  notc  6). 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lec- 
tres  verront,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  confians  à  plain  des 
sens,  souffisance,  loyaulté,  proudommie  et  bonne  dilligence  de  la 
personne  de  nostre  amé  et  féal  conseiller,  maistre  Aimery  Martineau, 
iceluy  avons  fait,  créé,  ordonné,  constitué  et  estably,  faisons,  créons, 
ordonnons,  constituons  et  establissons,  par  ces  présentes,  et  par  vertu 
du  povoir  et  auctorité  royal  dont  nous  usons  en  ceste  partie,  procu- 
reur de  monseigneur  le  Roy  sur  le  fait  de  ses  monnoyes,  pour  iceluy 
office  avoir  et  tenir  doresenavant  par  ledit  maistre  Aimery,  aux 
gaiges,  droictz,  prouffiz  et  émolumens  acoustumez  et  audit  office 
apartenans,  tant  qu'il  plaira  à  mondit  seigneur  et  jusques  à  ce  que 
par  luy  y  soit  autrement  pourveu.  Si,  donnons  en  mandement,  par 
ces  dictes  présentes,  de  par  mondit  seigneur  et  nous,  à  nos  très  chiers 


APPENDICES  557 

et  bons  amys,  les  trésoriers  et  conseillers  des  finances  et  aux  géné- 
raux maistres  des  monnoyes  de  mondit  seigneur  et  à  chacun  d'eulx, 
si  comme  à  luy  appartendi'a,  que,  prins  et  receu  dudit  maistre  Ai- 
mery  le  serment  en  tel  cas  acoustumé,  ilz  le  mectent  et  instituent,  ou 
facent  raectre  et  instituer  en  possession  et  saicine  dudit  office,  et 
d'iceluy,  ensemble  des  gaiges,  droitcz,  prouffilz  et  emolumens  dessusdiz 
le  facent,  seuffrent  et  laissent  joyr  et  user  plainement  et  paisiblement 
et  à  luy  obéir  et  entendre  de  tous  ceulx  qu'il  appartiendra,  es  choses 
touchans  et  regardans  ledit  office,  en  luy  faisant  payer,  bailler  et 
délivrer  lesdiz  gaiges  par  celuy  qui  acoustumé  les  a  payer,  aux  ter- 
mes et  à  la  manière  acoustumez;  lesquelz  à  luy  ainsi  payez,  par  rap- 
portant vidimus  de  ces  présentes,  avecques  quictance  sur  ce  dudit 
Martineau,  seront  allouez  es  comptes  et  rabatuz  de  la  recepte  de 
celuy  qui  payez  les  aura,  sans  aucun  contredict  ou  difficulté,  non 
obstans  quelconques  ordonnances,  mandemens  ou  defïenses  à  ce 
contraires,  car  ainsi  le  voulons  et  nous  plaist  estre  fait,  par  cesdictes 
présentes,  ausquelles,  entesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  notre 
scel.  Donné  à  Paris  le  xxi«  jour  d'aoust,  l'an  de  grâce  mil  iiiic  xxxvi. 
Ainsi  signé,  par  monseigneur  le  conte  connestable. 

E.  Chevalier. 
(Z»''  60,  f»  28.) 


LXIV 

LA  MESSE   ET  LA  PROCESSION  DES  ANGLAIS 
(p.  253). 

Les  premières  eurent  lieu  le  vendredi  3  avril  1437  (LL  217,  f"  292, 
au  mercredi  3  avril).  Les  documents  contenus  dans  les  cartons  K.  1002- 
1005  montrent  que  cette  cérémonie  commémorative  avait  lieu  au 
mois  d'avril.  Plus  tard,  on  célébra,  de  la  même  manière,  du  20  au 
22  mars,  l'entrée  de  Henri  IV  dans  Paris.  En  1733,  Louis  XV  décida 
que  ces  deux  cérémonies,  si  rapprochées,  seraient  réunies  en  une 
seule,  comme  le  prouvent  les  deux  lettres  suivantes  : 

A  monsieur  Turgot,  prévost  des  marchands  *. 
A  Versailles,  le  29  mars  1733. 

Il  me  paroist  effectivement,  Monsieur,  que  le  parlement  et  la 
chambre  des  comptes  désirent  également  que  le  Roy  veuille  bien  les 
dispenser  d'une  cérémonie  aussy  inutile  que  celle  de  l'assistance  à  la 
procession  qui  se  fait  le  vendredi  d'après  Pasques,  en  mémoire  de 
l'expulsion  des  Anglois,  et,  comme  j'ay  lieu  de  croire  que  Sa  Majesté 
voudra  bien  les  en  dispenser  en  effet,  ou  joindre  cette  procession  à 
celle  qui  se  fait  le  22  mars,  pour  la  réductioa  de  Paris  sous  le  règne 

I.  .Michel-Etienne  Turgot,  père  du  célèbre  ministre  de  Louis  XVI. 


558  APPENDICES 

d'Henry  IV",  vous  pouvés  vous  arranger  dès  à  présent  sur  ce  pied  là  et 
disposer  d'un  vendredy,  qui,  vraysemblablement,  ne  sera  pas  plus  à 
charge  au  bureau  de  la  ville  qu'aux  cours  qui  ont  assisté  jusqu'icy  à 
la  cérémonie  de  ce  jour. 

Je  suis,  monsieur,  parfaittement  à  vous. 

Daguesseau. 
(K.  lOOo,  à  la  date  du  29  mars  1733.) 

A  Monsieur  le  Prévost  des  Marchands. 

A  Versailles,  le  19  mars  173u. 

Le  Roy  m'ordonne  de  vous  faire  scavoir,  Monsieur,  que  Sa  Majesté 
trouve  bon,  par  les  raisons  qui  luy  en  ont  esté  expliquées,  qu'il  ne 
soit  fait  doresnavant  qu'une  seule  cérémonie  en  mémoire  des  deux 
réductions  de  Paris,  l'une  du  temps  des  Anglois,  l'autre  sous  Henry  IV, 
et  que  le  jour  en  demeure  fixé  au  22  mars  de  chaque  année.  Sa 
Majesté  n'a  pas  cru  devoir  prendre  d'autres  voyes  pour  vous  faire 
scavoir  ses  intentions  à  cet  égard,  puisqu'il  n'est  pas  d'usage  qu'on 
expédie  aucun  ordre  pour  la  procession  qu'on  appelle  des  Ânglois, 
et,  qu'à  l'égard  de  celle  qui  se  fait  pour  la  réduction  de  Paris  sous 
le  règne  d'Henry  IV,  les  ordres  que  l'on  a  accoutumé  d'expédier  ne 
regardent  qu'un  incident  de  la  cérémonie  et  non  pas  la  cérémonie 
mesme. 

Je  suis,  Monsieur,  parfaittement  à  vous. 

Daglesseau. 

(K.  1005,  au  19  mars  1735.) 


LXV 

TAXE  SUR  LES  VINS  QUI  TRAVERSENT  PARIS,  SAINT-CLOUD,  POISSY 

(1436,  22  août) 
(p.  256,  note  2;  p.  261). 

Arlur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentés  lettres 
verront,  salut.  Comme,  pour  résister  aux  entreprinses  des  Anglois, 
anciens  ennemis  de  monseigneur  le  Roy,  et  mesmement  ceulx  estans 
et  occupans  les  places  faisans  frontières  à  la  bonne  ville  de  Paris  et 
au  pays  d'environ  et  pour  la  conduite  des  alfaires  de  mondit  seigneur 
le  Roy  èsdites  marches,  soit  besoing  et  nécessité  d'avoir  et  recouvrer 
grans  financés,  par  toutes  les  voyes  et  manières  possibles,  considéré 
mesmement  que  les  revenues  de  mondit  Seigneur  èsdiz  pays  ne 
pourroient  suffire  à  la  conduite  et  entretenement  desdiz  affeiires, 
attendu  la  petite  valeur  et  la  grant  diminucion  d'icelles  finances; 
savoir  faisons  que  nous,  ce  considéré  que,  en  la  dicte  ville  de  Paris 
a  grant  quantité  de  vins  et  que,  de  jour  en  jour,  des  pays  de  Bour- 


APPENDICES  559 

goiiigne,  d'Orléans  et  aillieurs  l'en  y  en  a  amené  et  amainne  en  très 
giant  nombre  et  plus  qu'il  n'est  nécessité  pour  l'usaige  et  provision 
des  habitants  en  icelle,  et,  pour  ce,  soit  besoing  aux  marchands  et 
autres  bourgois  et  habitans  de  la  dicte  ville  de  Paris  vendre  et  faire 
mener  et  transporter  hors  d'icelle  aucune  partie  desdiz  vins,  tant 
èsdiz  pays  de  Normendie,  comme  ailleurs,  es  pays  désobéissans,  à  ce 
qu'ilz  et  autres  ayant  vins  puissent  recouvrer  argent  de  la  vente 
d'iceuli,  pour  faire  recueillir  les  vendenges,  continuer  leurs  labours 
et  marchandises,  et  aussy  que,  par  le  moyen  desdiz  vins  transportez 
et  des  marchans  qui  les  conduiront  et  feront  conduire  et  mener, 
ladite  ville  de  Paris  puist  estre  fournie  et  pourveue  d'autres  denrées 
et  marchandises  qui  y  sont  nécessaires;  sur  lesquelz  vins  ainsi  trans- 
portez et  videz  d'icelle  ville  de  Paris  se  pourra  trouver  et  recouvrer 
aucun  aide  pour  traicter,  pour  aider  à  supporter  lesdiz  affaires;  nous, 
pour  ces  causes,  et  par  l'advis  et  délibéracion  des  gens  du  Conseil  de 
mondit  seigneur  estans  de  présent  en  ceste  dicte  ville  de  Paris,  avons 
ordonné  et  ordonnons,  par  ces  présentes,  que,  sur  chacune  queue  de 
vin  qui,  depuis  le  jour  et  date  de  ces  présentes,  jusques  à  ung  an 
prouchainement  venant,  sera  traicte  hors  d'icelle  ville  de  Paris  et  pays 
d'environ,  et  menée  oudit  pays  de  Normendie,  par  eaue  et  par  terre, 
et  aillieurs  ou  pays  désobéissant  et  qui  passeront  la  dicte  ville,  et 
aussi  ceulx  qui  passeront  les  ponts  de  Saint-Cloud  et  Poissy,  sera 
paie  par  l'acheteur,  ou  celui  qui  le  fera  traire  et  mener,  supposé  qu'il 
ne  soit  pas  vendu,  la  somme  de  trente  deux  solz  parisis  pour  queue 
de  vin  de  Bourgoingne  et,  pour  chacune  queue  de  la  traicte  d'autre 
pays,  vint  quatre  solz  parisis  et  au  dessoubz,  à  l'équivalent;  et,  au 
regard  de  cellui  qui  sera  prins  et  enlevé  et  mené  par  charroy  en 
l'obéissance  de  mondit  seigneur  n'en  sera  aucune  traicte  paiée,  mais 
seulement  seront  tenus  ceulx  qui  ainsi  les  tireront  ou  feront  tirer  et 
emmener  de  bailler  pleige  et  caucion  de  rapporter  certifficacion 
souffisaut  de  la  justice  des  lieux  et  places  de  ladicte  obéissance  oh  ilz 
auront  menez  et  deschargez  lesdiz  vins,  laquelle  avons  ordonné  estre 
receue  par  Jehan  Le  Riche,  qui  en  baillera  ses  cédules,  signées  de 
son  saing  manuel  et  du  saing  manuel  de  Jehan  de  Lisle,  que  nous 
avons  commis  à  faire  le  controlle  d'icelle;  à  laquelle  paier  voulons 
estre  contrains  tous  ceulx  qui  en  feront  transporter  et  mener,  pour 
telle  quantité  qu'ilz  en  feront  transporter  et  mener,  par  toutes  les 
voyes  et  manières  qu'il  est  acoustumé  de  faire  pour  les  propres  debtes 
de  mondit  seigneur;  et,  en  cas  que  aucuns  s'efforceroient  de  en  trans- 
porter ou  faire  transporter  sans  avoir  paie  et  acquicté  ladicte  traicte, 
et  qu'il  en  appere  par  cédule  signée  comme  dit  est,  nous,  en  ce  cas, 
voulons  que  le  dit  vin,  avec  le  vessel  ou  charroy  où  ilz  seront  char- 
giez, soient  forfaiz  et  confisquez  et  les  délinquans  condempnez  en 
amende  arbitraire.  Si,  donnons  en  mandement  au  prévost  de  Paris  et 
au  bailly  de  Senliz,  ou  à  leurs  lieuxtenans  et  à  tous  les  autres 
officiers  de  mondit  seigneur  que  ceste  présente  ordonnance  et  traicte 
facent  paier  et  entretenir  diligemment,  sans  enfraindre,  en  faisant 
ces  présentes  publier  es  lieux  acoustumez  à  faire  criz  et  publicacions, 
es  mettes  et  juridicions  desdiz  prévoté  et  bailliaige,  tellement  que 


560  APPENDICES 

aucun  n'ayt  cause  d'en  prétendre  ignorance;  et,  pour  ce  que  de  ces 
présentes  en  aura  à  faire  en  plusieurs  lieux,  nous  voulons  que,  au 
vidimus  d'iceiles,  fait  soubz  scel  royal,  ou  autre  autentique,  foy  soit 
adjoustée,  comme  à  l'original.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait 
mectre  nostre  scel  à  ces  présentes.  Donné  à  Paris,  le  xxiie  jour 
d'aoust,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  trente  six.  Ainsi  signé,  sur  le 
reply  de  la  marge  d'embas,  par  monseigneur  le  connestable,  P.  de 

WlLLERIES. 

Au  dos  desquelles  lectres  estoit  escript  ce  qui-  s'ensuit  :  Publiées 
en  jugement  ou  Chastellet  de  Paris,  le  mardi  xxvin«  jour  d'Aoust,  l'an 
mil  quatre  cens  trente  six.  P.  Choart. 

Collacion  faicte  à  l'original  et  icellui  rendu  à  Jehan  Le  Riche, 
dedens  nommé. 

(Y'  [Livre  vert  vieil  second]  fo  10.) 

Le  9  septembre  suivant,  le  roi  rend  une  ordonnance  conforme. 
(Ordonn.  XIII,  227-229.) 


LXVI 

ORDONNANCE   CONTRE    LES   GENS   DE   GUERRE    (143G,    ler   OCtobre) 
(p.  261,  264). 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  noz  amez  et  féaulz 
conseillers,  les  commis  par  nous  sur  le  fait  de  la  justice  souveraine  es 
ville,  prévosté,  et  viconté  de  Paris  et  es  bailliages  de  Senlis  et  de 
Meaulx,  au  sire  de  Rostelan,  nostre  conseillier  et  chambellan  et  lieu- 
tenant de  nostre  très  chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont, 
nostre  connestable,  au  prévost  de  Paris,  aux  baillis  de  Senlis  et  de 
Meaulx,  ou  à  leurs  lieuxtenans,  et  au  premier  nostre  huissier,  ou  ser- 
gent d'armes  salut  et  dilection.  De  la  partie  de  nostre  procureur 
général,  aux  griefves  et  piteuses  complaintes  et  clameurs  de  plusieurs 
noz  poures  subgez,  nous  a  esté  exposé  que,  comme,  depuis  l'obéis- 
sance à  nous  faicte  de  nostre  bonne  ville  de  Paris,  nostre  dit  cousin, 
connestable  et  lieutenant,  par  l'advis  et  délibéracion  de  nostre  Conseil 
estant  en  nostre  ville  de  Paris,  ait,  pour  résister  à  noz  anciens  ennemis 
et  faire  cesser  plusieurs  robberies  et  pilleries,  qui  se  faisoient  sur  noz 
subgectz,  ordonné  en  plusieurs  villes  et  places  fortes,  où  besoing 
estoit,  cappilaines  et  certain  nombre  de  gens  de  guerre  souffisans 
pour  la  seureté,  garde  et  défense  desdictes  places  et  du  pays  d'environ 
et  les  eust  appointiez  de  leurs  gaiges  et  souldoiées,  tant  sur  certain 
aide  mis  sur  par  nostre  dit  cousin,  pour  icelle  cause  audit  pays, 
comme  sur  nos  autres  finences,  à  ce  qu'ilz  se  peussent  entretenir, 
sans  de  là  en  avant  mectre  sus  ne  lever  aucuns  appâtis  et  sans  pille- 
ries ne  autres  exécucions  indeues,  ne,  pour  occasion  de  ce,  faire 
aucunes  courses  ou  chevauchées  sur  noz  subgectz,  et  que  iceulx  noz 
subgectz  peussent  paisiblement  vivre  soubz  nous,  en  faisant  leurs 


APPENDICES  561 

labours  et  marchandises  et  paisiblement  recuellir  leur  aoust  et  ven- 
denges,  pour  le  vivre  et  substantacion  d'eulz  et  de  noz  autres  subgez 
et  mesmement  de  nostre  dicte  bonne  ville  de  Paris;  et,  combien  que 
tde  la  dicte  ordonnance  et  appointement,  fait  par  nostre  dit  cousin, 
comme  dit  est,  les  cappitaines  desdictes  places,  et  mesmement  de 
Pontoise,  Saint-Germain-en-Laye,  Senliz,  Laigny,  Chantilly,  le  Pont 
de  Meulent,  Corbuel,  Braye-Conte-Robert,  le  bois  de  Vinciennes  et 
autres  s'en  soyent  tenus  contens,  comme  par  raison  dévoient  estre, 
tant  du  nombre  des  gens  de  guerre  nécessaires  pour  la  garde  et  seu- 
reté  desdictes  places,  comme  des  assignacions  et  ordonnances  pour 
leurs  gaiges  et  souldoiées,  néantmoins,  puis  le  partement  de  nostre 
dit  cousin  de  notre  dicte  ville  de  Paris,  aucuns  desdis  cappitaines  et 
gens  de  guerre  ont  mandé  et  fait  venir  et  tiennent  es  dictes  places, 
ou  en  aucunes  d'icelles,  excessif  et  trop  plus  grant  nombi'e  de  gens  de 
gueri'e  que  ordonné  et  appoinctié  avoit  esté  par  nostre  dit  cousin  le 
connestable;  et  soubz  umbre  de  la  creue  d'iceulz  gens  de  guerre, 
combien  qu'elle  ne  soit  point  nécessaire,  mais  est  importable  au  pays, 
et,  autrement,  de  leur  volenté  desraisotmable,  ont  prins  et  exigé  de 
noz  poures  subgiez  leurs  blez,  vins,  bestaulx  et  autres  biens,  et,  en 
outre,  mandé,  mendent  et  se  ventent  de  faire  venir  devers  eulz  noz 
diz  poures  subgez  dudit  plat  pays,  en  leur  envolant  cédules  pour  les 
vouloir  contraindre  à  eulz  appâtissier  et  composer,  à  leur  baillier 
grans  sommes  de  deniers,  biefs,  vins  et  autres  choses  impossibles  et 
importables  à  nos  dis  subgez,  en  venant  et  rompant  de  fait  les  dictes 
ordonnances  faictes  par  nostre  dit  cousin,  par  quoy  grant  rompture 
et  dommage  irréparable  pouri'oit  parvenir  à  nostre  seigneurie,  qui 
pourroit  estre  la  totale  destruction  de  nosdis  pays  et  subgez  et  mes- 
mement de  nostre  dicte  ville  de  Paris,  se  pourveu  n'y  est  de  remède 
de  justice;  si,  comme  nostre  dit  procureur  d'ilec,  requérant  pour  le 
bien  de  nous  et  de  nosdiz  subgez  et  seigneurie,  y  voulons  donner 
provision;  pour  quoy,  nous,  les  choses  dessusdictes  considérées,  qui, 
de  tout  nostre  avoir,  désirons  telles  voyes  de  fait,  pilleries,  roberies  et 
exactions  sur  nostre  peuple  cesser  et  justice  estre  faicte  et  gardée 
devers  nos  dis  subgez,  à  ce  qu'ilz  se  puissent,  soubz  nostre  seigneurie 
et  obéissance,  vivre  en  paix;  considérans  mesmement  que  à  nul,  de 
quelque  estât  ou  auctorité  qu'il  soit,  ne  loise  de  prendre  ne  exhigier 
de  nos  diz  subgez  telles  manières  d'exactions,  ne  les  contraindre  à  les 
paier,  sy  non  par  nostre  auctorité  et  ordonnance,  ou  de  nostre  dit 
cousin  le  connestable  ;  nous  mandons,  commandons  et  expresseiBent 
enjoignons  à  chacun  de  vous  que  vous  faictez  ou  faictez  faire  exprez 
commandement,  de  par  nous,  à  tous  lesdis  cappitaines,  ou  à  leurs  dis 
lieuxtenans,  sur  quanques  ilz  peuent  meffaire  envers  nous  et  [sur 
peine?]  de  confiscacions  de  corps  et  de  biens  que  les  dis  gens  de 
guerre  venuz  de  creue,  oultre  le  nombre  ordonné  par  nostre  dit  cou- 
sin, comme  dit  est,  ilz  renvoyent,  tantost  et  sans  delay,  en  la  fron- 
tière dont  ilz  sont  venuz,  à  l'encontre  de  nosdis  ennemis  et  qu'ilz  se 
despartent  hastivement  des  dictes  places  et  pays,  sur  peine  de  for- 
faire  corps  et  biens;  et  que  l'ordonnance  faicte  par  nostre  dit  cousin 
ilz  gardent  et  tiennent,  sans  enffraindre,  et  cessent  doresenavant  de 

RlCHEMO.VT.  36 


562  APPENDICES 

exhigier  sur  nosdiz  subgiez  telles  exactions  et  pilleries;  et  ad  ce  que 
aucun  n'en  puisse  prendre  cause  d'ignorence,  faictes  ces  présentes 
publier,  à  son  de  trompe  et  autrement,  es  lieux  où  verrez  estre  ex- 
pédient, et  tous  ceulx  que  trouverez,  après  la  publicacion  d'icelles,^ 
faisans  le  contraire  des  dictes  ordonnances,  et  qui  ainsi  exigeront  et 
pilleront  nosdiz  subgiez,  prenez  les,  ou  faictes  prendre  au  corps  et 
iceulx  admenez  prisonniers  à  nos  prisons,  pour  en  ordonner  ainsi 
qu'il  appartendra  par  raison;  et,  au  cas  que  prendre  et  appréhender 
ne  les  pourrez,  si  les  appelez  ou  faictes  appeler,  à  certains  briefz  jours, 
à  comparoir  en  personne  par  devant  vous,  nosdis  conseillers  en 
nostre  Palais,  à  Paris,  sur  peine  de  bannissement  et  de  conliscacion 
de  corps  et  de  biens,  en  y  procédant  par  toutes  voyes  et  manières 
que  verrez  estre  nécessaires  et  convenables,  et  par  main  armée,  se  le 
besoing  est,  en  convocant  et  appelant,  se  mestier  est,  de  noz  subgez 
telz  et  en  tel  nombre  comme  bon  vous  semblera;  et  de  ce  faire  vous 
donnons  povoir  ;  mandons  et  commandons  à  tous  noz  justiciers, 
officiers  et  subgiez  que  à  vous  et  à  vos  gens  et  depputez,  en  ce  fai- 
sant, obéissent  et  entendent  dilligemment  et  vous  prestent  et  donnent 
conseil,  confort  et  aide  et  prisons,  se  mestier  est,  et  requis  en  sont. 
Donné  à  Paris,  le  premier  jour  d'octobre,  l'an  de  grâce  mil  quatre 
cens  trente  et  six  et  de  nostre  régne  le  xiv.  Signé,  par  le  Conseil  lay 
estant  à  Paris,  J.  Leclerc. 

Au  dos  desquelles  estoit  escript  ce  qui  s'ensuit  :  Publiées  en  juge- 
ment ou  Chastellet  de  Paris,  le  lundy  huitième  jour  d'octobre,  l'an  de 
grâce  mil  quatre  cens  trente  et  six.  Signé,  J.  Doulzsire.  Ledit  jour 
publiées  par  les  carrefours  acoustumez  à  faire  publicacions  en  la  ville 
de  Paris  et  en  la  rue  saint  Anthoine,  à  l'opposite  de  la  rue  saint  Pol. 

Signé.  J.  Doulzsire. 

(Y  *  [livre  vert  vieil  second]  f"  13  v",  14  v"). 


LXVII 

LETTRE  DU  DUC  d'yORK,  RELATIVE  AU  SIÈGE  DE  MONTEREAU 

(1437,  18  septembre) 
(p.  272,  273-274). 

De  par  le  duc  de  York,  lieutenant  général  et  gouverneur  de  France 
et  Normandie. 

Très  cher  et  bien  amé,  pour  ce  que,  de  présent,  sommes  grande- 
ment occupez, pour  le  fait  du  secours  qu'il  est  nécessaire  de  faire  de 
très  brief  à  ceulx  de  dedens  la  ville  et  chastel  de  Montereau,  lesquelz 
sont  jà  fort  contrains  par  les  ennemis  qui  tiennent  le  siège  devant 
eulz,  ne  pouvons  présentement,  et  jusques  à  ce  qu'il  aura  pieu  à  Dieu 
que  le  dit  secours  soit  fait,  entendre  à  autre  chose,  si,  vous  prions, 
requérons  et  chargeons,  de  par  monseigneur  le  Roy  et  nous,  que 
toutes  les  gens  de  guerre  que  avez,  tant  à  cause  de  votre  bailliage  de 


I 


APPENDICES  563 

Caen,  que  de  votre  cappitainerie  d'Argentan,  vous  continuiez  et  entre- 
teniez, pour  un  mois  entier,  en  tel  et  pareil  estât  et  nombre  comme 
avez  fait  pour  le  mois  dernier  passez,  et  en  faisant,  à  ceste  cause, 
monstres  devant  les  commissaires  qui  vous  ont  estez  ordonnez  pour 
le  temps  passez.  Ces  présentes,  avec  icelles  monstres,  vous  vauldront 
garant  pour  ledit  mois. 

Très  cher  et  bien  aimé,  nostre  Seigneur  soit  garde  de  vous.  Escript 
à  Rouen,  le  xyiii"  jour  de  septembre  *. 

Plus  bas,  une  attestation  de  J.  Biart,  tabellion  d'Argentan,  datée  du 
7  octobre  1437.  (Fr.  25774,  n»  1246.) 


LXVIII 

RKSTITUCION  FAICTE  AU  CONTE  DE  RICUEMONT,  CONNESTABLE  DE  FRANCE, 
DE  LA  VILLE,  TERRES  ET  CIIASTELLENIE  DE  GIEN  ET  SES  APPARTE- 
NANCES. BAIL  ET   TRANSPORT  FAICT  DE   LA  VILLE   ET  CUASTELLENIE 

DE  SAiNCTE  MENEHOULD  EN  CHAMPAGNE  (1437,  27  novembre) 

(p.  277,  280,  note  8). 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lettres  veiTont,  salut.  Comme  piéça,  par  nos  autres  lettres, 
et  pour  les  causes  contenues  en  icelles,  nous  eussions  baillé,  assigné  et 
délaissié  à  nostre  ti"ès  chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemoiit,  con- 
nestable  de  France,  par  manière  de  provision,  à  cause  du  domaine  de 
nostre  très  chière  et  très  amée  suer, la  duchesse  de  Guienne,  sa  femme, 
pour  raison  du  mariage  de  feu  nostre  très  chier  frère,  Louis,  jadis  duc 
de  Guienne,  les  villes,  terres,  chasteaux  et  chastellenies  de  Fontenay-le- 
Conte,  Gien,  Montargis  et  Dun-le-Roy,  avec  les  rentes,  revenues  et  appar- 
tenances et  appendances  d'icelles,  et,  sur  ce,  ayons  faict  bailler  et  dé- 
livrer à  nostre  dit  cousin  nos  lettres  patentes,  vérifflées  et  expédiées 
en  nostre  cour  de  parlement,  en  nostre  chambre  des  comptes  et 
ailleurs,  où  il  appartient,  et,  à  cette  cause,  ait  nostredit  cousin,  de- 
puis, jouy  et  usé,  par  aucun  temps,  et  jusques  à  ce  que,  pour  aucunes 
affaires  qui  nous  sont  survenues,  et  autres  causes  et  considéracions  à 
ce  nous  mouvans,  nous  reprimes  et  mismes  en  nostre  main  lesdictes 
villes,  terres,  chasteaux  et  chastellenies  de  Dun-le-Roy,  Gien  et  Mon- 
targis, desquelles  nostre  dict  cousin  n'a  aucunement  jouy,  et,  pour  ce, 
nous  ait  requis  que,  ayant  regard  à  ce  que  dict  est,  luy  voulsissions 
rendre  et  restituer  les  dictes  terres  et  chasteaux  et  chastellenies,  ou 
autrement  le  pourveoir,  à  cause  dudict  douaire;  scavoir  faisons  que 
nous,  voulans,  ainsi  que  de  raison  est,  à  nostre  dict  cousin  tenir  et 
accomplir  tout  ce  que  autrefois  luy  avons  promis,  touchant  les  choses 
dessusdictes,  nous  luy  avons,  de  rechef,  pour  et  ou  nom  de  nostre 
dicte  suer,  baillé,  rendu  et  restitué,  baillons,  rendons  et  restituons 

1.  Cette  lettre  est  adressée  à  Richard  Horington,  capitaine  d'Argentan 
(Fr.  2;m4,  n»»  12o7,12o8,  1261,  1282). 


ë64  APPENDICES 

ladicle  ville  de  Gien,  avec  toutes  ses  appartenances  et  appendances 
quelxconques,  pour  la  tenir  et  en  jouir  ainsi  qu'il  faisoit  paravant 
ladicte  prinse  et  qu'il  est  contenu  en  nos  dictes  autres  lettres;  et, 
pour  aucunement  le  récompenser  des  dictes  terres  et  chastellenies  de 
Montargis  et  Dun-leRoy,  par  manière  de  provision,  luy  avons  baillé, 
délivré  et  délaissié,  baillons,  délivrons  et  délaissons,  par  ces  pré- 
sentes, nos  ville,  terres,  cliastel  et  chastellenie  de  S'"  Ménéhould,  en 
Champagne,  avec  les  rentes,  revenues,  et  toutes  et  cliacunes  ses  appar- 
tenances et  appendances  quelxconques,  pour  les  dictes  villes,  terres, 
chasteaux  et  chastellenies  de  Gien  et  de  Dun-le-Roy  et  de  toutes  leurs 
dictes  appartenances  et  appendances  et  aussi  desdictes  villes,  terres, 
chastel  et  chastellenie  de  Fontenay-le-Conte,  en  Poictou,  qu'il  a  tous- 
jours  depuis  tenu  et  possédé  et  faut  encore  jouyr  et  user,  et  les  avoir, 
tenir  et  posséder  plainement  et  paisiblement,  comme  de  douaire,  à 
cause  de  nostredicte  suer,  sa  femme,  et  durant  sa  vie  d'elle,  oujusques 
à  ce  que  autrement  ayons  appoinctié  nosdicts  cousin  et  suer  sur  le  faict 
d'iceluy  douaire,  et  tout  sous  les  prérogatives,  droictz,  libertez,  préé- 
minences, condicions  et  manières  plus  à  plain  contenues  et  déclarées 
en  nozdictes  autres  lettres  sur  ce  faictes;  et  toutes  fois,  si  nosdicts 
cousin  et  suer,  par  nostre  ordonnance  ou  de  nostre  court  de  parle- 
ment estoient  tenuz  de  délaissier  et  délaissoient  aucunes  des  terres 
dessusdictes,  nous  les  en  récompenserons  convenablement,  comme 
verrons  estre  à  faire  par  raison.  Si,  donnons  en  mandement  etc., 
Donné  à  Paris,  le  vingt-septiesme  jour  du  mois  de  novembre,  l'an  de 
grâce  mil  quatre-cens-trente-sept,  et  le  seiziesme  de  nostre  règne  ; 
scellées  de  nostre  scel,  en  l'absence  du  grant,  Ainsy  signé,  par  le  Roy, 
en  son  conseil,  ouquel  estoient  messeigneurs  le  Daulphin,  Charles 
d'Anjou,  les  contes  de  La  Marche  et  de  Vendosme,  l'arcevesque  de 
Thérouenne  *,  les  évesques  de  Clermont  et  de  Magalonne,  etc. 

J.  Dijox. 
(P.  2S31,f»«  138-160.) 

Lundi  27  juin  1440. 
Ouye  la  requeste  du  connestable,  pour  raison  du  siège  de  bailli  de 
Vitry  au  lieu  de  S'*'  Ménéhoue  et  des  proufîz  d'icelui  siège  ;  de  laquelle 
requeste  Rapiout,  pour  le  connestable,  a  requis  l'entérinement,  dit 
Simon,  pour  le  procureur  du  Roy,  que,  au  premier  point  de  la 
requeste,  que  le  siège  soit  à  8"=  Ménéhoue,  faire  ne  se  doit  aucune- 
ment que  autre  n'y  feust  commis  à  l'exercice  de  la  justice  que  icelui 
qui  la  gouverne  audit  lieu  pour  le  connestable,  c'est  assavoir  M"  Je- 
han Thoygnet;  à  l'autre  point,  d'avoir  les  émolumens,  dit  que  le 
procureur  du  Roy,  et  par  le  mandement  du  Roy,  dès  piéça  s'est 
opposé  à  toute  aliénacion  du  domaine.  Le  Roy,  à  son  sacre,  a  promis 
de  ne  l'aliéner,  et  pourtant  doit  M«  Jacques  Jouvenel,  advocat  du  Roy, 
estre  attendu;  et  veue  ladite  opposicion,  quant  à  présent,  ne  peut 
autre  chose  dire  fors  qu'il  s'oppose  à  l'aliénacion,  et  dit  que  ladicte 
requeste,  au  second  point,  ne  doit  estre  faicte,  et,  ni  veniat  eventus, 
jusques  M"  Jacques  soit  venu;  se  à  tant  estoit  que  aucunement  l'en 

1.  Faute  de  copiste.  Il  doit  y  avoir  Tboulouse  dans  l'original. 


APPENDICES  S65 

obtemperast  à  ladite  requeste,  que  au  moins  les  fruiz  soient  receuz  par 
le  receveur  du  Roy  et  que  les  deniers  en  demeurent  en  sa  main, 
comme  en  séquestre,  jusques  à  ce  que  autrement  en  soit  ordonné. 

Rapiout  dit  que  sa  requeste  est  moult  favorable  et  bien  fondée, 
comme  de  doaire,  et  dit  qu'il  ne  requiert  point  que  aucun  des  offi- 
ciers du  connestable  tiegne  le  siège  de  bailli.  Ainsi  est  le  premier 
point  vuidié.  Aussi,  par  le  premier  bail  qui  lui  fut  fait  de  Montargis,  il 
eust  à  Montargis  peu  mectre  bailli  et,  in  commutacione  de  Montar- 
gis à  S'c  Mônéhou,  lui  a  esté  baillé  semblablement  S'^  Ménéhou.  Au 
point  des  fruiz,  dit  que  lo  Roy  lui  a  baillé  tous  les  fruiz  dudit  lieu,  et 
y  doit  l'en  entendre  les  emolumens  du  baillage,  et  ne  seroit  que  re- 
quérir de  séquestrer  les  fruiz;  et  dit  qu'il  n'est  que  doaire,  qui  est 
favorable  et  ad  vitam,  et,  par  ce,  n'y  a  aliénacion.  Aussi  le  Roy  lui 
avoit  baillé  Montargis  et  autres  terres,  qui  plus  valoient  beaucop  que 
S'e  Ménéhou;  et  dit  que  Jouvenel  ne  doit  estre  attendu,  mais  lui  doit 
sa  provision  estre  faicte. 

Simon  dit  que  S*e  Ménéhou  vault  plus,  en  revenue,  que  Montargis 
et  Dun-le-Roy,  que  le  Roy  lui  avoit  baillé,  tant  seulement  par  provi- 
sion, par  quoy  n'y  peut  avoir  eschange  ne  commutacion  ;  et,  quicquid 
dicat,  c'est  aliénacion. 

Rapiout  dit  qu'il  seroit  bien  content  d'avoir  Montargis  et  Dun-le- 
Roy,  qui  le  lui  vouldra  bailler  pour  S'"  Ménéboue. 

Appoinctié  est  amectre  les  lectres  du  bail  de  S'<=  Ménéhou  et  de 
Montargis  et  la  requeste  par  devers  la  court  et  au  conseil. 

(X'»  4798  fo»  213,  ro  et  v».) 

Après  la  mort  de  la  duchesse  de  Guyenne,  comtesse  de  Richemonl 
(1442,  2  février)  Charles  VU  donna,  le  8  mars  1442,  à  la  reine  de 
France,  le  comté  de  Gien  et  la  ville,  château  et  chatellenie  de  Sainte 
Ménéhould,  à  commencer  du  jour  du  trépas  de  la  duchesse  de  Guienne 
(P.  2331,  f°'  213-213.)  En  1443,  le  roi  donna  à  Charles  d'Anjou,  comte 
de  Mortain  et  du  Maine  (en  récompense  des  grands  services  que  lui 
avait  rendus  sa  mère,  la  reine  Yolande)  le  comté  de  Gien-sur-Loire, 
et  les  châteaux,  villes,  baronnies,  châtellenies,  terres  et  seigneuries  de 
Saint  Maixent,  Melle,  Civray,  Chizé  et  Sainte  Neomaye  «  avec  tous  les 

droiclz,  noblesses,  prérogatives,  prééminences  qui  y  appartiennent 

excepté  les  foy  et  hommage  deus  à  cause  des  chastel,  terre  et  sei- . 
gneurie  de  Partenay.  » 

(P.  2331,  f»'  215  V,  219.  Voy.  ci-dessus,  p.  330,  note  1.) 


LXIX 

PAIEMENTS   DE    DIVERSES    SOMMES    AU    CONNÉTABLE 

(1459,  27  octobre) 
(p.  280,  292,  462). 

Les  gènéraulx  conseillers  du  Roy  noslre  sire  sur  le  fait  et  gouver- 
nement de  ses  finances,  tant  en  Languedoil  comme  en  Languedoc, 


366  ■'  APPENDICES 

ont  fait  recevoir,  par  M»  J.  de  Xaincoins,  receveur  général  desdites 
finances,  de  P.  Parcaut,  commis  à  recevoir  en  Poiclou  la  portion  de 
l'aide  de  mi  c.  mil.  1.  t.  mis  sus  par  le  Roy,  noslre  dit  seigneur,  en 
ses  pais  de  Languedoil,  ou  mois  de  mars  derrenier  passé,  pour  con- 
vertir ou  fait  de  sa  guerre  et  aultres  ses  affaires,  sur  ce  qu'il  peut  et 
pourra  devoir,  à  cause  de  sa  recepte  et  dont  ledit  receveur  général,  a 
pour  ce  baillé,  sa  cédule  au  contreroleur  et  en  ceste  mis  son  signe,  la 
somme  de  quatre  mil  quatre  cens  trente  1.  t.  pour  monseigneur  le 
connestable  de  France,  c'est  assavoir  qui  lui  estoit  deu,  pour  argent 
par  lui  preste  au  Roy,  en  l'année  passée,  pour  la  recouvrance  du  chastel 
de  Chevreuse  iP"  iin°  xxx  1.  t.;  pour  certaine  dépense  par  lui  faicte, 
ou  mois  de  juillet  derrenier  passé,  à  faire  le  gast  devant  Meaulx,  avant 
le  siège  mis  devant  ladicte  place,  ix'  1. 1.  et  sur  son  estât  de  m  1.  t. 
par  mois,  des  mois  de  septembre  et  ce  présent  mois  d'octobre,  oultre 
sa  pension  ordinaire,  xa*  1.  t.  Escript  le  xxviF  jour  d'octobre,  l'an 
mil  un"  trente  et  neuf. 

PicART,  Xaincoins,  Bcde. 

(Portefeuille  Fontanieu  117-118,  à  la  date.  —  Copie  moderne.) 


LXX 

SUR   LES   CAPITAINES   DE   GENS   d'aRMES   POUR   LES   RENDRE 

RESPONSABLES  Dbi  LEURS  GENS  (1438,  22  décembre) 

(p.  282,  283). 

Arlur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Ricbemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  au  prévost  de  Paris,  ou  à  son  lieute- 
nant, salut.  Pourceque  chacun  capitaine  aiant  charge  et  ordenance 
de  gens  de  guerre,  tant  en  garnison,  pour  la  garde,  seurté  et  deffense 
des  villes,  chasteaulx  et  forteresses  appartenans  à  monseigneur  le  Roy 
et  à  autres  ses  subgez,  comme  autrement,  doit  respondre  des  gens 
qu'il  a  et  tient  en  sa  compaignie  et  gouvernement,  pour  en  faire 
punicion  et  justice,  quant  ilz  délinquent  et  que  les  gens  de  guerre  de 
plusieurs  garnisons  et  autres  font  souventeffoiz  de  très  grands  griefs, 
maulx  et  dommaiges  aux  subgez  de  monseigneur  le  Roy  des  villes  et 
pais  alentour  d'eulx,  en  prinses  et  raençons  de  biens,  chevaulx,  bes- 
tail,  voictures  et  aucuneffoiz  des  corps  des  personnes,  dont  plusieurs 
clameurs  et  complaintes  se  font  et  en  viennent  souvent  à  mondit 
seigneur,  à  nous,  à  son  Conseil  et  à  sa  justice,  et  n'en  est  faicte  puni- 
cion, ainsy  qu'il  appartient,  pourceque  les  malfaicteurs  se  défuyent, 
absentent  ou  retraient  en  leurs  places  et  garnisons,  ou  autrement,  en 
manière  que  on  ne  les  peut  avoir  ne  appi'éhender,  nous,  pour  le  bien 
de  mondit  seigneur  le  Roy,  en  relievement  de  ses  poures  subgez, 
voulans  à  ce  pourveoir,  ainsy  qu'il  appartient,  et  eue  considéracion 
à  ce  que  dit  est,  et  mesmement  pour  faire  cesser  les  maulx  et  dom- 
maiges dessusdits,  vous  mandons,  de  par  mondit  seigneur  le  Roy  et 


APPENDICES  o67 

nous,  et  comineclons  ',  par  ces  présentes  que,  se  en  la  ville  de  Paris 
et  autres  villes  et  lieux  de  vostre  prévosté,  ou  autre  part  en  ce  royaume  *, 
vous  povez  trouver  et  appréhender  ceulx  qui  feront  et  commectront 
les  maulx  et  dommaiges  telz  que  dit  est  dessuz,  vous  les  prenez, 
arreslez  et  détenez,  ou  faictes  pranre,  arrester  et  détenir  es  prisons 
de  mondit  seigneur  le  Roy,  et,  moiennant  justice,  faictes  faire  resli- 
tucion  des  choses  prinses  à  ceulx  qu'il  appartendra,  en  punissant  les 
délinquans  selon  l'exigence  des  cas;  et,  ou  cas  que  ne  pourrez  lesdiz 
malfaicteurs  avoir  ou  appréhender,  se  vous  trouvez  leurs  capitaines, 
ou  autres  souldoiers,  par  le  moien  desquelz  puissiez  avoir  lesdiz  mal- 
faicteurs, ou  restituer  les  endommagiez,  prenez  les  et  arreslez,  ou 
faictes  pranre  et  arrester  seniblablement  prisonniers,  sans  en  faire 
aucune  délivrance,  jusques  à  ce  qu'ilz  vous  auront  fait  délivrer  et 
rendre  les  malfaicteurs  de  leurs  compaignies,  se  iceulx  malfaicteurs 
sont  en  leur  puissance,  ou  que  frauduleusement,  de  leur  sceu  ou  con- 
sentement se  soient  départiz  d'eulx  pour  fouyr  et  délaier  justice, 
ouquel  cas,  se  iceulx  capitaines  ou  souldoiers  ne  rendent  et  mectent 
en  justice  lesdiz  malfaicteurs,  de  leurs  gens  ou  compaignons,  con- 
traingnez  les  à  restituer  les  dommaiges  faiz  et  perpétrez,  par  prinse 
de  leurs  biens  propres  et  détencion  de  leurs  personnes,  tant  et  si 
longuement  et  en  telle  manière  que  les  parties  dommagées  doivent 
raisonnablement  estre  contentes.  De  ce  faire  vous  donnons  povoir, 
auctorité  et  mandement  espécial;  mandons  à  tous,  de  par  mondit 
seigneur  le  Roy  et  nous,  que  à  vous  et  à  vos  commis  et  députez,  en  ce 
faisant,  obéissent  et  entendent  diligemment.  Donné  à  Paris  le  xxu"  jour 
de  décembre,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cent  trente  huit.  Ainsy  signé, 
par  monseigneur  le  connestable,  E.  Chlr  (E.  Chevalier). 

Au  dos  :  Publiées  en  jugement  au  chatelet  de  Paris  le  lundi  5  jan- 
vier 1438.  (Y*,  fos  36  V»  37). 

N.  B.  —  II  y  a  aussi  une  ordonnance  royale  absolument  semblable 
du  22  décembre,  publiée  également  le  5  janvier  suivant,  au  Chatelet 
de  Paris  (Y*  f"  36).  (Voy.  Ordonnances  XIII,  293.)    . 


LXXI 

SUR   GUILLAUME   DE    FLAVY,    LE   MARÉCHAL   DE  RIEUX    ET  LE 
CONNÉTABLE    DE    RICHEMONT  (1436-1439) 

(p.  264-263,  282-283,  293). 

On  a  vu  que  Pierre  de  Rieux,  ou  de  Rochefort,  deuxième  fils  de 
Jean  II  de  Rieux  et  de  Jeanne  de  Rochefort,  baronne  d'Ancenis,  avait 
été  arrêté,  en  1438,  par  Guillaume  de  Flavy,  capitaine  de  Compiègne, 

1.  Il  y  a  «  en  commectant  »,  mais  c'est  une  faute  du  copiste  Doulzsire, 
car,  dans  l'ordonnance  royale  conforme,  on  lit  «  et  commectons  ». 

2.  Voy.  les  lettres  du  3  avril  1438,  dans  les  Ordonnances,  XIII,  260-261,  et 
ci-dessus,  p.  282. 


568  APPENDICES 

et  retenu,  par  lui,  captif,  jusqu'à  sa  mort  (1439).  [Voy.  ci-dessus,  p.  282- 
283-295.]  Cette  affaire  donna  lieu  à  un  long  procès,  qui  fut  intenté 
à  G.  de  Flavy  par  François  de  Rieux,  neveu  du  juaréclial,  devant  le 
parlement  de  Paris.  On  trouve  dans  les  registres  X^»  24  et  X^»  25  les 
plaidoiries  des  procureurs  qui  représentaient  les  deux  parties.  Ces 
débats  révèlent  de  curieux  détails,  dont  l'hislorien  peut  tirer  profit, 
tout  en  tenant  compte  des  altérations  que  la  parole  des  avocats  fait 
subir,  en  pareil  cas,  à  la  véiùté.  Ainsi  Luillikr,  l'avocat  de  Guiil.  de 
Flavy,  expose  et  apprécie  les  actes  de  P.  de  Hieux  avec  une  partialité, 
une  exagération  qui  semblent  dépasser  la  mesure.  Ne  va-t-il  pas 
jusqu'à  nier  qu'il  fût  maréchal  de  France  ?  Rapiout,  procureur  de 
François  de  Rieux,  conteste  et  réfute  les  allégations  de  Luillier,  sans 
diriger  d'ailleurs,  ce  qui  semblait  facile,  des  attaques  violentes  contre 
G.  de  Flavy.  Barbin,  au  nom  du  roi,  soutient  l'accusation  criminelle. 
Sans  faire  la  biographie  de  G.  de  Flavy,  personnage  assez  connu 
d'ailleurs,  il  ne  sera  pas  inutile  d'emprunter  aux  débats  du  procès 
les  renseignements  propres  à  expliquer  sa  conduite,  celle  du  maré- 
chal de  Rieux  et  surtout  le  rôle  du  connétable  dans  cette  affaire. 

D'après  Luillier,  la  famille  de  Flavy  était  des  plus  nobles  de  la 
Picardie.  Guillaume  de  Flavy  avait  six  frères,  dont  deux  étaient  morts 
au  service  du  roi.  Quant  à  lui,  écolier  à  Paris  et  gradué  (on  ne  dit 
pas  de  quel  grade),  «  clerc  en  habit  et  tonsure  »,  il  avait  été  protégé 
par  le  chancelier  Regnault  de  Chartres,  qui  l'avait  emmené  deux  fois 
à  Rome,  puis  en  Angleterre  et  ailleurs.  Il  était  avec  le  Dauphin,  quand 
celui-ci  s'était  enfui  de  Paris,  à  l'entrée  des  Bourguignons  dans  cette 
ville  (1418).  Il  se  vantait  d'avoir  été  toujours  fidèle  au  roi,  de  lui  avoir 
rendu  de  grands  services.  Lors  du  sacre,  il  lui  avait  amené  trois  à 
quatre  cents  chevaliers  (1429,  juillet).  C'est  lui  qui  avait  déterminé  la 
soumission  de  Compiègne  (1429,  août)  et  Charles  VII  l'avait  nommé 
capitaine  de  cette  ville,  en  lui  faisant  «  jurer  qu'il  ne  la  bailleroit  à 
personne,  à  moins  que  le  roi  ne  lui  dist  de  sa  bouche  ».  Après  avoir 
rappelé  tous  les  services  de  Flavy,  son  avocat  ne  craint  pas  d'ajouter 
que  «  telz  gens,  quant  ilz  ont  délinqué  un  pou,  doivent  avoir  grâce 
plustost  que  autres.  »  (Voy.  X*"  24,  au  mardi  1 1  et  au  jeudi  13  août; 
H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  285-280.) 

Quant  au  maréchal  de  Rieux,  Luillier  assure  qu'il  ne  mérite  pas  le 
même  intérêt.  Ses  services  ont  été  bien  surfaits.  S'il  fut  pris  au  Âians, 
c'est  «  en  fuyant  et  non  autrement.  »  (Probablement  en  1425  ou  en 
1428.  Voy.  ci-dessus,  107-108-161;  Cousinot  251-252.)  Chargé  de 
défendre  Saint-Denis,  en  1435,  avec  Regnault  de  Saint-Jean  et  L.  de 
Vaucourt,  il  rendit  la  ville  aux  Anglais  et  s'en  alla,  au  moment  où 
le  bâtard  d'Orléans  lui  amenait  des  secours  qu'il  trouva  en  route. 
(Voy.  ci-dessus,  p.  235-236.)  Ce  n'est  pas  le  roi  qui  l'envoya  dans  le 
pays  de  Caux;  il  y  fut  appelé  par  les  habitants,  révoltés  contre  les 
Anglais.  II  fit  beaucoup  de  mal  dans  ce  pays  et  ne  voulut  pas  aller, 
avec  les  gens  des  communes,  attaquer  Rouen.  Il  est.  vrai  qu'il  prit  la 
ville  de  Dieppe  (1435),  mais  c'est  parce  que  «  ceux  qui  étaient  dedans 
lui  baillèrent  le  port..»  (Voy.  ci-dessus,  p.  236.)  Quant  à  la  ville  de 
Harfleur,  elle  fut  délivrée,  non  par  lui,  mais  par  des  gens  que  Pe- 


APPENDICES  S69 

nansac  •  avait  envoyé  quérir  au  mont  Saint-Michel.  Rocliefoit  (c'est 
ainsi  que  Luillier  appelle  toujours  le  maréchal  de  Rieux)  vint  ensuite. 
(Voy.  ci-dessus,  p.  283,  note  1.)  Il  enleva  le  commandement  de  Har- 
ileur  à  Penansac;  hien  plus,  il  lui  prit  ses  biens  et  le  retint  prisonnier. 
Pour  cette  cause,  Penansac  «  eut  mandement  de  se  recouvrer  sur 
Rochefort  »,  et,  quand  il  le  sut  prisonnier  à  Compiègne,  il  s'opposa 
môme  à  sa  délivrance.  Rochefort  «  voulait  bailler  toutes  les  places  aux 
Bretons.  »  (X^*  2i,  au  jeudi  13  août  1444.)  —  C'est  ainsi  que  LuiUier 
traite  un  lieutenant,  un  ami,  un  parent  du  connétable.  On  trouve 
dans  sa  plaidoirie  un  écho  des  clameurs  irritées  et  jalouses  que  ces 
routiers  poussaient  contre  le  justicier,  c'est-à-dire  contre  le  conné- 
table et  contre  ses  Bretons.  Et  puis,  il  ne  faut  pas  oublier  que  Flavy 
était  un  protégé  non  seulement  du  chancelier  Regnault  de  Chartres, 
mais  encore  de  La  Trémoille  !  (H.  Wallon,  Jeanne  d'Arc,  I,  285,  note  i.) 
Voyons  maintenant  les  griefs  personnels  de  Flavy  contre  le  maréchal 
de  Rieux  et  contre  le  connétable,  car  il  est  bien  certain  que  Riche- 
mont,  lui  aussi,  est  visé  indirectement  par  Luillier. 

Quand  Rochefort  revint  d'Angleterre  ^,  il  eut  la  garde  de  Beauvais. 
Peu  après,  ayant  besoin  de  vivres,  il  alla  en  demander  à  G.  de  Flavy, 
qui  lui  en  fournit.  Rochefort  contracta  ainsi  une  dette  de  sept  à  huit 
mille  francs  envers  Flavy.  Il  lui  donna,  pour  cela,  des  lettres  d'obli- 
gation et  aussi  «  des  lettres  de  fraternité  ».  Quand  Rochefort  était 
dans  le  pays  de  Caux  ^,  Flavy  l'alla  trouver  et  lui  réclama  l'argent 
qu'il  lui  devait,  mais  Rochefort  ne  voulut  pas  le  rendre  et  il  ajouta 
(sans  doute  pour  se  débarrasser  de  Flavy)  que  le  connétable  se  dis- 
posait à  partir  pour  ComJDiègne  (1436).  Comme  Flavy,  d'après  ce  qu'il 
avait  entendu  dire,  se  doutait  que  «  c'estoit  en  mal  de  lui  »,  il  envoya 
son  frère  Hector  vers  le  maréchal  de  Rieux,  pour  lui  rappeler  ses 
lettres  de  fraternité  et  le  prier  d'intervenir  auprès  du  connétable. 
Rochefort  le  lui  promit.  Il  vint  ensuite,  avec  Richemonl,  à  Compiègne  *, 

i.  Ou  Pannessac,  un  capitaine  de  routiers. 

2.  On  a  vu  qu'il  avait  été  pris  au  Mans  par  les  Anglais. 

3.  Le  4  janvier  14.36,  un  poursuivant  du  maréchal  de  Rieux  vieut  annon- 
cer à  Compiègne  la  prise  de  Fécamp,  Montivilliers  et  de  plusieurs  autres 
forteresses  du  pays  de  Caux.  (D.  Grenier,  XX^'%  liasse  9.  Comptes  de  la 
ville  de  Compiègne,  f»  17.) 

4.  On  voit  dans  les  Comptes  de  Compiègne  (f«  17  v»)  que  le  maréchal 
de  Rieux  était  dans  cette  ville  le  4  juin  1436,  et  Richemont  le  6  juin. 
Peu  auparavant,  celui-ci  avait  mandé  «  d'envoyer  à  Paris  devers  lui, 
au  8  mai,  aucunes  personnes  notables  de  la  ville  de  Compiègne,  pour 
adviser,  avec  les  députés  des  autres  bonnes  villes,  à  ce  qui  serait  à  faire, 
pour  le  recouvrement  de  Creil,  Meaux  et  Montereau  y-  (f»  17).  Au  mois  de 
juin,  le  connétable  vint  à  Compiègne,  pendant  que  le  bâtard  d'Orléans 
assiégeait  Creil.  Il  avait  eu  charge  de  lever  30,000  1.  t.  principalement 
pour  le  recouvrement  de  Creil,  Meaux  et  Montereau.  Il  voulait  faire  con- 
tribuer Compiègne  au  payement  de  cette  somme.  Alors  la  ville  opposa  des 
lettres  de  1430,  qui  lui  octroyaient  exemption  d'impôts  et  envoya  des  dé- 
putés au  roi,  à  Bourges  (21  mai-24  juin).  Charles  VII  écrivit  alors  au  con- 
nétable, qui  accorda  diminution  d'un  tiers  de  la  taxe  (f*  17  vo).  Aussitôt 
une  taille  fut  levée  à  Compiègne,  pour  le  siège  de  Creil  (f"  18;  ci-dessus 


S70  APPENDICES 

après  avoir  mandé  à  Flavy  d'y  venir  également,  pour  recevoir  le  con- 
nétable. Or,  Richemont  et  Rochefort  avaient  décidé  ensemble  que 
G.  de  Flavy  serait  arrêté,  avec  ses  frères,  et  Rochefort  n'en  prévint  pas 
Flavy.  En  effet,  le  connétable,  étant  à  Gompiègne,  manda  Guillaume 
de  Flavy  et  ses  frères  et  les  retint  prisonniers.  Quand  le  chancelier 
apprit  cela,  il  en  fut  Itien  ébahi.  Il  réclama  Flavy  comme  son  clerc  '. 
Il  lui  fut  répondu  que  :  «  S^il  estait  clerc,  la  mort  des  clercs  estait  de 
noyer.  » 

Cependant,  le  beau-père  et  d'autres  parents  de  Flavy  s'étaient 
retirés  dans  la.  forteresse.  Richemont  envoya  d'abord  J.  de  Troissy 
dire  à  Flavy  qu'il  serait  noyé,  s'il  n'obéissait  pas  aux  ordres  du  conné- 
table; puis  Rochefort  lui-même  lui  promit  de  le  faille  mettre  en  sûreté, 
avec  ses  frères,  si  la  forteresse  était  rendue.  Rochefort  s'engageait, 
s'il  n'accomplissait  pas  sa  promesse,  «  à  tenir  prison  cent  lieues  autour 
Compiègne.  »  Sur  ces  assurances,  G.  de  Flavy  fit  bailler  la  place  à 
Rochefort,  par  Guimon,  qui  en  était  Je  capitaine.  Le  connétable  mit 
aussitôt  ses  gens  dans  la  forteresse.  Rochefort  prit  à  G.  de  Flavy  ses 
harnais  et  ses  chevaux.  On  lui  prit  aussi  son  artillerie  et  ses  autres 
biens  meubles,  qui  valaient  bien  40  000  à  bO  000  livres  tournois.  Le 
soir,  on  amena  un  prêtre  et  un  bourreau,  avec  des  cordes,  à  la  porte 
de  la  chambre  où  était  enfermé  Flavy,  comme  si  on  eût  voulu  le 
traîner  à  la  rivière.  Enfin  Flavy  fut  délivré  par  ses  parents,  mais 
Luillier  ne  dit  pas  par  quels  moyens.  On  comprend  toutefois  que  ce 
fut  par  suite  d'un  accord  conclu  avec  Richemont,  car  il  ajoute  que 
Flavy,  avant  de  quitter  Compiègne,  s'engagea  envers  le  connétable  à 
payer  20000  écus,  s'il  rentrait  dans  cette  ville.  Luillier  ne  dit  pas  non 
plus  que  Richemont  fut  élu  capitaine  de  Compiègne,  en  place  de 
Flavy,  mais  il  rappelle  que  cet  office  fut  donné  au  sire  de  Rostrenen, 
qui  y  commit  H.  de  Villeblanche  *. 

Quand  le  roi  sut  ce  qui  s'était  passé,  il  fit  dire  à  Flavy  que  ce  n'étoit 
pas  de  sa  volonté.  Quelque  temps  après,  ceux  de  Compiègne  le  rappe- 
lèrent, et,  comme  il  était  sûr  de  la  volonté  du  roi,  il  rentra  dans  cette 
ville  et  reprit  la  capitainerie  -i.  L'année  suivante  (1 438),  Rochefort,  ayant 


p.  236-257).  Le  connétable  revint  à  Gompiègne  au  mois  de  décembre  1436. 
On  ne  voit  pas  bien  si  c'est  en  juin  ou  en  décembre  qu'il  fit  arrôter  G.  de 
Flavy.  (Voy.  ci-dessus,  p.  265,  note  4.) 

1.  C'est  peut-être' pour  cela  que  le  chancelier  vint  à  Compiègne.  Il  y  était 
le  8  décembre  1436,  avec  Richemont.  (D.  Grenier,  f»  18.) 

2.  Les  informations  de  Luillier  manquent  ici  d'exactitude.  Les  Comptes 
de  la  ville  de  Compiègne  prouvent  que  l'office  de  capitaine  fut  donné  au 
connétable  et  qu'il  y  institua  comme  lieutenants  d'abord  H.  de  Ville- 
blanctie,  puis  le  sire  de  Rostrenen.  (Voy.  ci-dessus,  p.  265,  et  les  notes.) 
Le  premier  jour  de  l'an  1437,  le  vin  est  présenté,  à  Compiègne,  à  H.  de 
Villeblanche,  lieutenant  du  connétable,  et  à  J.  de  Troissy.  Le  10  jan- 
vier 1437,  un  présent  est  fait  au  sire  de  Rostrenen,  lieutenant  du  conné- 
table à  la  capitainerie  de  Compiègne  et  partout  ailleurs.  Le  27  du  même 
mois,  un  festin  lui  est  offert.  (D.  Grenier,  XX^i',  liasse  9,f«  18.) 

3.  Le  24  mars  1437,  un  festin  est  offert  à  G.  de  Flavy,  rentré  en  grâce, 
capitaine  de  Compiègne.  (D.  Grenier,  f»  18  v.) 


APPENDICES  571 

quitté  le  pays  de  Caux,  pour  se  rendre  auprès  de  Charles  VII,  apprit 
que  Flavy  réunissait  des  troupes  à  Pont-Sainte-Maxence,  pour  les  con- 
duire devant  Creil  •.  Supposant  que  Flavy  n'était  pas  à  Compiègne,  il 
se  dirigea  vers  cette  ville  (Luillier  ne  dit  pas  dans  quel  but).  C'est 
alors  que  Guimon,  sachant  cela,  fit  arrêter  Rochefort  par  les  sergents 
du  roi.  On  le  mit  «  en  une  chambre  bien  honneste  et  bonne,  »  puis 
Flavy  le  lit  conduire  à  Mortemer,  à  cause  de  la  mortalité  et  lui  donna 
sa  meilleure  chambre.  On  devine  ensuite,  bien  que  Luillier  ne  le  dise 
pas  clairement,  que  Flavy  voulait,  en  retenant  Rochefort  prisonnier, 
obliger  ainsi  le  connétable  à  lui  rendre,  pour  prix  de  son  élargisse- 
ment, le  scellé  par  lequel  il  s'était  engagé  à  lui  payer  20000  écus, 
dans  le  cas  où  il  reviendrait  à  Compiègne.  (Voy.  ci-dessus,  p.  570).  Riche- 
mont  répondit  «  qu'il  ne  rendroit  le  scellé,  senon  que  Rochefort  lui 
baillast  quatre  mil  escuz  *,  et  estoit  la  cause  pour  ce  que  Rochefort 
avait  gaigné  beaucoup  du  scel  du  connestable.  »  Rochefort  emprunta 
ces  4000  écus  à  Flavy,  «  en  s'obligeant  de  tenir  prison  de  les  restituer.  » 
Il  fut  ensuite  transféré  (toujours  dans  l'intérêt  de  sa  santé!)  pour  fuir 
la  mortalité,  de  Mortemer  *  à  Compiègne,  à  Pernant  *  et  enfin  à 
Nesles  *.  Il  fut  toujours  bien  traité  et  il  mourut  de  maladie,  pour 
n'avoir  pas  voulu  être  saigné.  (Plaidoirie  de  Luillier,  dans  le  registre 
X^»  24,  au  jeudi  13  août  1444.) 

C'est  ainsi  que  Luillier  rejette  tous  les  torts  sur  le  maréchal  de 
Rieux  et,  d'une  manière  plus  réservée,  sur  le  connétable,  mais  il  n'est 
pas  bien  difficile  d'entrevoir  la  vérité,  à  travers  ses  explications  sou- 
vent incomplètes,  embarrassées  ou  obscures. 

Rapiout,  le  procureur  de  François  de  Rieux,  présente  les  choses 
sous  un  jour  tout  différent.  Il  rappelle,  en  passant,  qu'on  imputait  à 
Flavy  la  prise  de  Jeanne  d'Arc,  à  Compiègne.  Il  affirme  que  le  maré- 
chal de  Rieux  avait  encore  défendu  Saint-Denis  (en  1433),  deux  se- 
maines après  l'expiration  du  délai  dans  lequel  le  bâtard  d'Orléans 
devait  lui  amener  des  secours.  C'est  bien  lui  qui,  avec  Ch.  Des  Marets, 
avait  conquis  le  pays  de  Caux;  lui  qui  avait  fait  lever  le  siège  de  Har- 
tleur;  lui  enfin  qui  avait  maintenu  longtemps  ce  pays  en  l'obéissance 
du  roi.  Il  cite  d'autres  exploits  de  P.  de  Rieux  et  nous  apprend  qu'on 
l'appelait  le  bon  maréchal.  Non  seulement  il  n'assista  pas  au  conseil 
où  fut  décidée  l'ai  restation  de  Flavy,  en  1436,  mais  il  intercéda  même 
en  sa  faveur  et  c'est  grâce  à  lui  que  Flavy,  prisonnier  du  connétable, 
put  obtenir  le  traité  qui  lui  sauva  la  vie.  Quand  il  revint,  après  avoir 
délivré  Harlleur,  Flavy  l'attira  dans  un  véritable  piège.  Ayant  appris 
que  P.  de  Rieux  se  trouvait  dans  le  voisinage,  il  lui  envoya  l'invita- 
tion de  venir  se  rafraîchir  à  Compiègne  et  lui  donna  même  une  es- 

1.  On  a  vu  (ci-dessus,  p.  281)  que  le  connétable  fit,  cette  année-là,  une 
tentative  sur  Creil. 

2.  Voy.  ci-dessus,  p.  283,  noie  2. 

3.  Arrondissement  de  Compiègne,  canton  de  Ressens. 

4.  Arrondissement  de  Soissons,  canton  de  Vic-sur-Aisne. 

5.  Arrondissement  et  canton  de  Château-Thierry,  à  moins  que  ce  ne 
soit  Nesle-la-Reposte,  c.  d'Esternay,  ou  Nesle-le-Repons,  c.  de  Dormans, 
an""  d'Epernay. 


hl"!  APPENDICES 

corle  de  quatre  hommes,  puis  il  le  fit  arrêter  par  Robinet  l'Herniite 
et  plusieurs  autres  de  ses  gens.  Flavy,  qui  s'était  engagé,  sous  peine 
de  payer  20  000  écus  au  connétable,  à  ne  pas  rentrer  dans  Compiègne, 
voulait  aussi  se  faire  rendre  cette  obligation.  En  outre,  il  exigeait 
iOOO  écus  pour  élargir  son  prisonnier.  Le  neveu  du  maréchal  donna 
cette  somme  à  Flavy,  qui  réclama  encore  4  000  écus,  sans  vouloir  ac- 
cepter comme  cautions  Michel  de  Laillier  et  plusieurs  autres.  11  refusa 
de  relâcher  P.  de  Rieux,  et  le  tint  prisonnier  «  en  une  telle  détresse 
quHl  en  mourut  ».  Flavy  fut  donc  la  cause  de  sa  mort.  (X2a  24,  au 
jeudi  H  février  1444,  a.  st.  Plaidoirie  de  Rapiout.) 

Barbin,  pour  le  roi,  soutient  l'accusation  contre  Flavy  et  défend  le 
maréchal  de  Rieux.  C'est  bien  par  les  gens  de  Flavy,  par  Robinet 
l'Hermite,  Robin  Leroy  et  Canny  que  le  maréchal  fut  arrêté  et  x  ce 
ne  fût  pas  par  justice  ».  Barbin  requiert  contre  Flavy  une  peine  afflic- 
tive,  une  amende  de  100  000  écus  et  la  confiscation  des  biens  (X-*  24, 
au  jeudi  13  août  1444). 

Il  faut  croire  que  Flavy  avait  des  protections  puissantes,  car  le 
procès,  déjà  commencé  trois  ans  auparavant,  traîna  encore  en  lon- 
gueur. En  1437  (le  4  novembre),  G.  de  Flavy,  qui  devait  craindre  la 
vengeance  du  connétable,  après  lui  avoir  enlevé  la  capitainerie  de 
Compiègne,  avait  obtenu  des  lettres  de  rémission  *  (J.  Quicherat,  Pro- 
cès de  J.  d  Arc,  V.  174-178).  Le  lundi  5  avril  1445,  Luillier  présenta 
pour  Flavy  «  certains  lettres  royaux  »  à  la  cour,  en  demandant  que  le 
procureur  du  roi  se  désistât,  mais  Rapiout  fit  opposition  à  l'entérine- 
ment de  ces  lettres,  en  disant  qu'elles  étaient  «  surreptices,  orrep- 
tices,  inciviles  et  déraisonnables.  »  (X^"  24,  au  lundi  o  avril  1445, 
après  Pâques.)  Quand  Flavy  mourut,  en  mars  1449,  le  procès  durait 
encore.  On  lit,  à  la  date  du  19  mai  1449,  dans  le  registre  X^'^  25,  que 
G.  de  Flavy  est  mort  peu  auparavant  -,  dans  son  château  de  Nesle-en- 
Tardenois,  au  bailliage  de  Vitry,  laissant  un  fils  de  cinq  ou  six  mois. 
Ce  n'est  que  soixante  ans  plus  tard  qu'un  arrêt  du  9  septembre  1509 
termina,  aux  dépens  de  Jeanne  de  Flavy,  petite-nièce  de  Guillaume 

1.  On  voit,  daus  les  Antiquités  de  Compiègne,  par  Gillesson,  que  le  con- 
nétable donna,  en  1438,  des  lettres  signées  et  scellées  contenant  l'abolition 
accordée  aux  habitants  de  Compiègne,  pour  avoir  reçu  comme  capitaine 
en  ladite  ville  G.  de  Flavv,  «  lequel  il  avait  esté  lui-même  dudict  estât  ■». 
(Fr.  24067,  p.  43.) 

2.  G.  de  Flavy  fut  assassiné  le  9  mars  1449,  par  sa  femme,  Blanche 
d'Aurebruche,  aidée  du  barbier  de  son  mari  et  d'un  certain  bâtard  d'Or- 
bandas.  (Voy.  De  Beaucourt,  Blanche  d Aurebruche  et  ses  trois  maris,  dans 
les  Mémoires  de  la  soc.  des  anliq.  de  Picardie,  t.  XIX,  p.  401  et  suiv.,  et 
le  t.  III  de  M.  d'Escouchy  [Preuves],  p.  346-353.)  G.  de  Flavy  avait  été 
fiancé,  dès  1436,  à  Blanche  d'Aurebruche.  Cette  jeune  fille  avait  une  fortune 
considérable,  mais  grevée  de  dettes  énormes.  Parmi  les  plus  forts  créan- 
ciers, on  remarque  un  Jean  de  Chènery.  Serait-ce  le  même  J.  de  Ghènery 
qui  était  au  service  de  Richement  en  1426?  (Voy.  ci-dessus,  p.  123-124  et 
Append.  XIX).  Il  réclamait  50  000  écus  et  le  château  de  Nesle.  Or  c'est  en 
1436,  que  le  connétable  attaque  Flavy.  (Voy.  ci-dessus  p.  265.)  Il  y  a  là  uu 
rapprochement  qui  ne  doit  pas  être  négligé.  (Voy.  .M.  d  Escouchy,  III. 
347-348.^ 


APPENDICES  S73 

de  Flavv,  le  procès  commencé  en  1440.  (J.  Quiclierat,  Procès  de 
J.  d'Arcl  V,  174-178.) 

En  résumé,  G.  de  Flavy  arrêta,  séquestra  et  laissa  mourir  en  prison 
P.  de  Rieux,  pour  se  venger  de  Richemont,  qu'il  haïssait  (D.  Grenier, 
XX,  p.  38,  83-86).  11  put  braver  le  connétable,  lai  résister  les  armes  à 
la  main,  lui  reprendre  et  garder  malgré  lui  le  commandement  de  Com- 
piègne,  enlever  et  détenir  son  neveu,  échapper  à  l'action  de  la  justice. 
Et  qui  donc  osait  traiter  de  la  sorte  un  maréchal  de  France  et  le  chef 
suprême  de  l'armée?  Un  simple  capitaine  de  routiers.  Ce  seul  exemple, 
sans  parler  des  autres,  ne  montre-t-il  pas  d'une  manière  saisissante 
combien  fut  difficile  et  méritoire  le  rôle  du  connétable  de  Richemont? 

Outre  les  sources  déjà  indiquées,  on  peut  voir  encore  sur  G.  de 
Flavy,  le  Ms.  Fr.  24067,  f^  73-76,  121,  132,  196;  J.  Du  Clercq,  p.  611- 
612;  l'article  Flavy  dans  la  biographie  Didot;  De  Beaucourt,  Jeanne 
d'Arc  et  G.  de  Flavy,  dans  le  Bulletin  de  la  Soc.  d'Hist.  de  France^  1861, 
p.  173-176.  Dans  le  t.  XLVIII  de  Clairambault,  f"  3369,  on  trouve  la 
signature  et  le  sceau  de  G.  de  Flavy, 


LXXII 

SUR    JACQUES    DE     CHABANNES,    ROGER   DE    l'IERREFRITE     lîT    LE    BOIS 

DE   YINCENNES    (1440,    aOÛt) 

(p.  284,  285,  308,  312,  313). 

Mardi,  XVH^  jour  dudit  moys  (novembre  1439),  Cambray  président. 
Après  que  messire  Jacques  de  Ghabannes  chevalier  a  requis  estre 
receu  à  faire  le  serment  de  l'office  de  séneschal  de  Tholose,  à  lui 
donné  par  le  Roy  nostre  sire,  Jouvenel,  pour  le  Roy,  dit  que  ledit  de 
Chabannes  a  tenu  à  Corbueil  *  et  au  bois  de  Vincennes,  dont  il  est 
chief  et  capitaine,  beaucoup  de  gens  de  guerre,  qui  ont  fait  plusieurs 
maulx  et  pilleries  et  peu  d'obéissance  à  justice  ;  mais,  qui  plus  est,  le 
lieutenant  dudit  de  Chabannes  à  Corbueil-*,  a,  de  fait  et  de  force,  prins 
les  fruiz  estans  soubz  la  main  du  Roy,  à  cause  de  certains  procès  pen- 
dant céans,  entre  maistre  Henry  Tiboust  et  autres.  Si,  requiert  que, 
avant  que  ledit  de  Chabannes  soit  receu  à  faire  ledit  serment,  il  lui  soit 
défendu,  à  grosses  peines,  que,  de  cy  en  avant,  il  cesse  de  faire  ou 
soulFrir  faire  par  ses  dictes  gens  telz  maulx  et  pilleries,  et  que  comman- 
dement lui  soit  fait,  soubz  les  dictes  peines,  qu'il  face  restablir  es  mains 
du  commissaire  lesdiz  fruitz  que  son  dit  lieutenant  a  euz,  et  qu'il  face 
en  oultre,  en  tout  et  partout,  obéir  à  justice  par  tous  ceulx   qu'il 

1.  JJ.  178,  fo»  122  vo,  128. 

2.  Le  28  mai  1438,  le  roi  avait  accordé  des  lettres  de  rémission  à  Girard 
de  Semur,  écuyer,  lieutenant,  à  Gorbeil  de  Jacques  de  Chabannes,  à  Reg- 
nault  Le  Pêle,  à  Jean  de  Castelnau,  à  Pierre  de  Cidrac  et  à  d'autres  gens 
d'armes  des  garnisons  de  Gorbeil  et  du  Bois  de  Vincennes,  qui  avaient 
dû,  pour  vivre,  piller  le  pays  voisin,  à  cause  «  de  très  graves  faultes  et 
longs  dclaiz  ou  paiement  de  leurs  gaiges  et  soldées.  »  (Y*,  ^•  2o  v,  26.) 


574  APPENDICES 

apparteadra,  et  à  ce  soit  contraint.  Et  dit  que  ledit  Cliabannes  est 
seneschal  de  Bourbonnais  et  ne  peut  tenir,  de  raison,  les  deux  senes- 
chaussées  et,  par  ainsi,  il  doit  laisser  l'office  de  seneschal  de  Bour- 
bonnais, s'il  veult  avoir  celui  de  Thoulouse;  ainsi  le  requiert.  Finable- 
ment,  ledit  de  Chabannes  s'est  désisté  et  départy  dudit  office  de 
seneschal  de  Bourbonnais  et  a  requis  comme  dessus.  Duquel  la  court, 
après  ce  qu'elle  lui  a  défendu,  à  peine  de  centmarcz  d'or,  à  applicquer 
moytié  au  Roy  et  moytié  à  partie  blessée,  toute  voye  de  fait  et  lui  a 
commandé,  sur  la  dicte  peine,  qu'il  face  obéir  ses  gens  et  subgiez  à 
justice  et  restablir  et  restituer  ce  que  son  lieutenant  a  levé  et  eu  des 
fruitz  estans  à  la  main  du  Roi,  et,  oultre  plus,  qu'il  face  tenir,  observer 
et  garder  les  ordonnances  royaulx  nouvellement  faictes  à  Orléans,  es 
troys  estatz,  sur  le  fait  des  gens  d'armes  et  pilleries  qu'ils  font,  ce 
qu'il  a  promis  et  juré  faire,  à  son  povoir,  a  receu  le  serment  acous- 
tumé. 

(Xi«  4798,  fo  122.) 

1440,  lundi ^  19  décembre.  Cambray  président. 

«  Entre  Rogier  de  Pierrefrite  ,  prisonnier  en  la  conciergeiùe  du 
palais,  à  Paris,  appellant  de  maistre  Jehan  de  Troissy,  d'une  part,  et 
ledit  maistre  Jehan  de  Troissy,  le  procureur  général  du  Roy,  nostre 
sire,  et  monseigneur  le  connestable,  se  mestier  est,  d'autre  part. 
LuiLLiER,  pour  ledit  appellant,  dit  qu'il  est  escuier,  qui  a  bien  servy  le 

Roy  en  ces  guerres  et  a  esté  au  bois  de  Vincennes  et '  ou  mois  d'aoust 

derrain  passé,  qu'il  en  fust  descbargié  ;  et,  pendant  ce  qu'il  y  a  esté, 
avoit  peuplé  un  estang,  estant  audit  lieu,  de  poisson,  où  il  avoit  beau- 
coup frayé,  et,  pour  ce,  luy  avoit  esté  promis  qu'il  en  avoit  la  pesche, 
et  néantmoins,  en  le  faisant  nagaires  peschier,  survint  ung  huissier 
d'armes,  nommé  Jaquet  Danoir,  qui  luy  dist  qu'il  venist  parler  à 
monseigneur  le  connestable,  à  quoy  il  respondit  qu'il  le  feroit  voulen- 
tiers,  et,  ce  fait,  ledit  Jaquet  Danoir  retourna  au  bois  de  Vincennes  et 
print  cinq  ou  six  hommes  d'armes,  auxquelz  il  ordonna  de  admener 
ledit  Rogier,  lesquelz  firent  promectre  audit  Rogier  qu'il  ne  se  boute- 
roit  poiut  en  franchise  et  l'admenèrent  à  Paris  et  ne  le  firent  point 
parler  àmondit  seigneur  le  connestable,  mais  l'admenèrent  prisonnier 
ou  Chastellet  de  Paris;  et,  après  ce,  ledit  maistre  Jehan  de  Troissy 
vint  par  devers  luy  et  le  feit  admener  en  la  chambre  de  la  question, 
présent  le  lieutenant  criminel,  et  l'interrogea  dont  il  estoit  et  pour- 
quoy  il  estoit  venu  par  deçà  et,  après,  luy  demanda  qu'estoit  devenue 
l'artillerie  du  bois  de  Vincennes;  et,  quand  ledit  Rogier  vist  que  ledit 
de  Troissy  l'interroguoit  tout  seul  et  que  ledit  lieutenant  ne  disoit 
mot,  il  dist  audit  de  Troissy  qu'il  n'estoit  point  son  juge  et  qu'il  ne 
responderoit  point  devant  luy  et  qu'il  estoit  clerc;  et  ledit  de  Troissy 
luy  dist  que  si  feroit,  et  qu'il  luy  feroit  bien  répondre,  voulsist  ou  non  ; 
et,  pour  ce,  ledit  Rogier,  doubtant  qu'il  ne  le  voulsist  contraindre  par 
force  à  respondre  devant  luy,  luy  dist  que,  ou  cas  qu'il  le  vouldroit 

1.  Marge  détériorée. 


APPENDICES  575 

contraindre  à  respondre,  il  en  appelloit.  Si,  conclud  en  cas  d'appel  et 
requiert  provision  de  sa  personne  et  de  ses  biens.  Thiessart,  pour 
Tévesque  de  Paris,  dit  qu'autrelfoiz  il  a  requis  ou  Chasteiiet  de  Paris 
ledit  Rogier  luy  estre  rendu  et  encores  le  requiert. 

Simon,  pour  le  procui-eur  du  Roy,  dit  qu'ilz  n'ont  encore  sceu  ne 
veu  les  charges  dont  on  veult  chargier  ledit  Rogier.  Si,  est  nécessité 
de  les  veoir,  avant  qu'ilz  en  puissent  aucune  chose  dire. 

Appoinctié  est  que  ledit  procureur  et  ledit  de  Troissy  venront  de- 
main dire  sur  tout  ce  qu'il  appartendra. 

Et,  ce  jour,  après  ledit  appoinctement,  et  avant  que  la  court  feust 
levée,  Jehan  de  La  Haye,  escuier,  vint  devers  la  court,  disant  que 
monseigneur  le  connestable  l'avoit  chargié  d'y  venir  et  dire  que,  quant 
mondit  seigneur  le  connestable  estoit  dernièrement  parti  du  Roy  *, 
le  Roy  nostre  dit  seigneur,  informé  que  Rogier  de  Pierrefrite  et 
aucuns  autres  avoicnt  enfraint  l'abolicion  à  eulz  faite,  avoit  chargé  et 
commandé  à  monseigneur  le  connestable  de  faire  prenre  et  empri- 
sonner ledit  Rogier  et  ses  complices  et  de  leur  faire  raison  et  justice, 
et,  pour  ce  acomplir,  mondit  seigneur  le  connestable  avoit  fait  prenre 
ledit  Rogier,  mais  il  avoit  entendu  que  la  court  y  vouloit  procéder  et, 
pour  ce,  requeroit  à  la  court  qu'elle  le  voulsist  envoler  et  bailler  à 
mondit  seigneur  le  connestable,  pour  en  faire  ainsi  que  le  Roi  luy 
avoit  ordonné.  Auquel  Jehan  de  La  Haye  la  court  a  respondu  que 
ledit  Rogier  est  appellant  et  a  aujourd'huy  fait  proposer  sa  cause 
d'appel,  et  ont  parties  adverses  jour  à  demain  à  venir  dire  ce  qu'il 
appartendra.  Et  si  a  l'évesque  de  Paris  requis  ledit  Rogier  luy  estre 
rendu,  comme  clerc,  et  convenoit  oir  les  parties,  avant  ce  que  la  court 
y  peust  riens  ordonner,  et  que,  icelles  oyes,  la  court  feroit  ce  qu'il 
appartendroit. 

Mardi,  20  décembre  1440. 

«  En  la  cause  d'entre  Rogier  de  Pierrefrite,  appellant  de  maistre 
Jehan  de  Troissy,  d'une  part,  J.  de  Troissy,  lieutenant  de  monseigneur 
le  connestable,  le  procureur  général  du  Roy  et  mondit  seigneur  le 
connestable,  d'autre  part.  Rapiout  pour  lesdits  de  Troissy,  monseigneur 
le  connestable  et  procureur  du  Roy,  dit  que  ceste  besoingne  touche 
directement  le  fait  du  Roy  et,  sur  ce,  a  mandat  exprez  (?)*  du  Roy.  Récite 
ce  que  a  dit  Pierrefrite  en  sa  cause  d'appel.  Ce  fait,  dit  que  l'auctorité 
du  Roy  est  grande  et  est  empereur  en  son  royaume  ;  pour  exercer  les 
armes  et  justice  a  commis  [officiers?]  3  outre  lesquelz,  pour  le  fait  des 
armes,  a  commis  monseigneur  le  connestable,  qui  a  grant  administra- 
cion,  auctorité  et  prééminances,  tant  à  cause  de  luy  que  de  l'office, 
et,  inter  cetera,  a  toute  cognoissance  du  fait  de  la  guerre  et  mesme- 
ment  des  capitaines  es  frontières,  de  visiter  les  forteresses  et  y 
pourveoir  des  gens  et  habillemens  dé  guerre,  et,  se  aucun  y  méfiait, 

1.  C'est-à-dire  quand  il  avait  quitté  le  roi  en  Auvergne,  pour  revenir  à 
Paris.  (Voy.  ci-dessus,  p.  308.) 

2.  Mot:à  moitié  elfacé. 

3.  Marge  détériorée. 


576  APPEISDICES 

à  luy  eu  appartient  la  cognoissance,  selon  raison.  Ce  présupposé,  dit 
que  le  Bois  de  Vincennes,  appartenant  au  Roy,  est  notable  chastel,  près 
de  Paris;  par  ce,  est  nécessaire  que  soit  bien  gardé  et  establi;  Rogier 
en  a  esté  longtemps  capitaine,  ou  lieutenant  du  capitaine,  où  il  s'est 
petitement  gouverné.  Dit  que  capitaines  doibvent  estre  hardiz  contre 
les  ennemis  et  doulz  envers  les  subjectz,  ce  que  n'a  esté  Rogier  envers 
les  subgectz  du  Roy,  mais  tout  le  contraire;  debvoit  obéissance  au 
Roy  et  à  monseigneur  le  connestable,  ausquelz  a  désobey  et  contredit 
à  la  reddicion  de  la  place,  et  mesmement  a  convenu,  avant  que  l'ait 
rendue,  que  le  Roy  luy  ait  fait  promesses  et  baillé  certaine  somme  d'ar- 
(jent  et  autres  choses,  pour  ses  gaiges  et  autrement,  et  si,  a  eu  aboli- 
cion  des  excès  par  luy  faiz  ',  et  nihilominus,  au  partir  de  la  place,  a 
osté  et  emporté  toute  l'artillerie  qui  y  estoit,  et,  ce  que  n'en  a  peu 
porter,  luy,  ou  autres,  de  par  luy,  ont  ars,  rompu  les  huis,  osté  serrures, 
verroux  et  emporté;  a  copé  les  bois  qui  ne  sont  disposez  à  chaufage  et 
en  a  vendu  et  donné  bien  quatre  cens  charretées,  et  mesmement  mer- 
rien  à  mettre  vin,  et  tout  depuis  l'aboliclon.  Le  Roy,  de  ce  informé,  en 
a  esté  mal  content,  et  non  sans  cause.  Ont  aussi  rompu  les  croisées  des 
fenêtres,  pour  tirer  hors  les  grans  chesnez.  Monseigneur  le  connestable 
estant  devers  le  Roy,  a  eu  charge  expresse,  de  par  le  Roy,  que  feist, 
pour  ces  causes,  prenre  Rogier  et  sceust  qui  l'avoit  meu  de  faire  ces 
choses,  et,  puis  deux  jours,  luy  en  a  escript  le  Roy.  En  obtempérant 
au  Roy  et  usant  de  son  office,  monseigneur  le  connestable  l'a  fait 
prendre  etmectre  prisonnier  ou  Chastellet,  ut  licebat  sibi,  et  commist 
Troissy,  son  lieutenant  général,  à  parler  à  Rogier  et  savoir  de  luy 
la  vérité  des  dictes  choses.  Rogier  ala  ou  Chastellet  parler  à  luy, 
présent  le  lieutenant  criminel;  et  luy  demanda,  entr'autres  choses, 
qn'estoit  devenue  l'artillerie  et  qui  avoit  rompu  et  emporté  lesdictes 
choses.  Rogier,  qui  jà  avoit  juré  de  dire  vérité  et  commencé  à  res- 
pondre,  dist  que  Troissy  n'estoit  son  juge  et  ne  luy  en  responderoit 
riens,  et  que,  se  à  ce  le  vouloit  contraindre,  appelloit,  disant  qu'il 
estoit  clerc.  Dit  que  l'appellacion  n'est  recevable,  veu  ce  que  dit  est, 
dont  la  cognoissance  appartient  au  Roy  et  à  monseigneur  le  connes- 
table, car  c'est  fait  de  guerre  ;  et  d'autres  choses,  et  mesmemens  luy 
appartient  la  cognoissance  de  l'artillerie,  pour  laquelle  le  Roy  avait 
baillié  mil  francs  à  Anthoine  ^  de  Chabannes,  duquel  Rogier  estoit  lieute- 
nant, et  sic  Rogier  en  devoit  respondre  devant  Troissy  mesmement, 
car  n'apparoit  que  feust  clerc  et  dato  qu'il  en  apparust,  si  estoit-il 
question  de  choses  dont  la  cognoissance  appartient  au  Roy,  et  en  ce, 
ne  devoit  joir  de  privilège  de  clerc,  et,  n'en  avoit  habit  ne  possession, 
aussi  est-il  homme  d'armes  (et  s'est  immiscue ?)  et  ad  hoc  em- 
ployé l'abolicion;  et  est  Rogier,  comme  homme  d'armes,  subject  de 
monseigneur  le  connestable;  mesmement  qu'il  estoit  chief  de  ceulz 
qui  estoient  dans  la  place  et  faisoient  plusieurs  maulx  cy  entour,  et 
estoit  temps  de  respondre  et  non  de  décliner,  et,  par  ce,  n'est  son 

1.  Voy.  ci-dessus,  p.  573,  note  2. 

2.  11  y  a  là  une  faute  du  copiste.  C'est  Jacques  et  non  Antoine^  comme 
on  le  voit  plus  loin  et  aussi  dans  X'"  4798,  f"  122. 


APPENDICES  577 

appellacion  recevable,  et  oncques  Troissy  ne  le  menassa  de  luy  mectre 
en  question,  aussi  ne  l'a  il  pas  dit  devant  les  ccmmissaires  ;  par  ce 
n'est  à  recevoir  à  le  dire  de  présent  et  à  varier;  et  n'en  pourroit  co- 
gnoistre  l'évesque;  et,  se  Troissy  luy  avoit  dit  qu'il  luy  en  feroit  bien 
répondre,  auroit  bien  fait  et  n'y  auroit  grief,  et  sic  avoit  mal  appelle; 
conclud  que  ne  soit  à  recevoir  comme  appellant,  ains  a  mal  appelle; 
offre  prouver  et  nye  ;  et  prent  monseigneur  le  connestable  la  garantie 
et  adveu  pour  Troissy,  Et,  au  regard  de  la  réquisitoire  de  l'évesque  de 
Paris,  dit,  bis  visis,  que  Rogier  ne  doit  estre  rendu  à  l'évesque,  car  la 
cognoissance  ne  luy  en  appartient,  mais  au  Roy  et  à  monseigneur  le 
connestable. 

Vient  ensuite  une  réplique  de  Lufllier  pour  R.  de  Pierrefrite.  Voici 
seulement  quelques  passages  et  une  analyse  de  ces  débats  :  c  Le  con- 
nestable a  grant  office  et  cognoissance  de  beaucoup  de  choses,  mais 
ne  se  doit  entremectre  de  choses  dont  la  justice  ordinaire  peut  et 
doit  cognoistre,  comme  le  prévost  de  Paris  des  choses  faictes  en  sa 

prévosté Quand  le  Roy  est  in  exercitu,  monseigneur  le  connestable 

a  la  cognoissance  de  tout  ce  qui  se  y  fait,  sed,  hoc  cessante,  les  ordi- 
naires ont  la  cognoissance,  en  leurs  juridictions,  de  toutes  choses,  et, 
se  Rogier  avoit  aucune  chose  faict  au  Roy,  la  cognoissance  en  appar- 
tient au  prévôt,  juge  ordinaire  et  à  la  court  de  céans  (le  parlement) 

Rogier  avait  la  garde  du  Bois,  sous  Jacques  de  Chabannes,  qui  l'avoit 
pris  aux  Anglais.  L'artillerie  appartenait  à  messire  Jacques.  Depuis, 
J.  Fourcault  a  pris  la  garde  du  Bois,  de  par  le  Roi,  et  a  fait  bailler  l'ar- 
tillerie aux  gens  de  monseigneur  de  Bourbon,  qui  l'envoya  quérir  par 
Regnault  Le  Pelé.  Quant  aux  quatre  cents  charretées  de  bois,  il  dit 
qu'il  y  avait  du  bois  mort  et  peut-être  qu'il  en  a  prins,  mais  d'autre, 
non.  La  place  a  esté  tenue  longtemps  pour  le  duc  de  Bourbon  par 
Chabannes,  auquel  on  se  doit  adresser,  pour  lui  demander  lesdictes 
choses,  et  non  à  Rogier Vu  l'abolicion  accordée  par  le  Roi,  la  con- 
naissance en  appartient  au  parlement,  non  au  connestable.  »  Rogier 
réclame  toujours  le  bénéfice  de  sa  qualité  de  clerc  et  il  requiert 
même  provision  de  ses  chevaux  et  autres  biens. 

L'évoque  de  Paris  réclame  aussi  Rogier. 

Rapiout  duplique  que  la  «  connaissance  de  l'affaire  appartient  bien 
au  connestable;  que  toujours  ceux  qui  étaient  au  Bois  étaient  in  exer- 
citu, vu  qu'il  est  en  frontière,  que  l'affaire  appartient  non  au  prévôt, 
mais  au  Roi;  que  le  connestable  agit  non  simpficiter,  ex  officio,  sed  de 
expresse  mandate  Régis,  dont  il  est  le  lieutenant  par  deçà  et  que 
Troissy  est  le  lieutenant  général  du  connestable  ;  que  Roçier  avait 
bien  la  garde  du  Bois;  qu'il  est  donc  responsable  de  tout;  qu'il  est 
qualifié  capitaine  de  gens  d'armes  dans  l'abolition  et  qu'il  est  bien 
justiciable  du  connestable  ».  Après  une  courte  réplique  de  Lhuillier, 
le  procureur  du  roi  dit  que  Roger  ne  doit  pas  être  rendu  au  conné- 
table. La  cour  décide  que  les  parties  mettront  devant  elle  tout  ce  que 
bon  leur  semblera. 

(X2»  22,  aux  19,  20  décembre  1440.) 

RiCHEUONT.  37 


578  APPENDICES 


LXXIII 


SUR  JEAN  BUDES,  PORTE-ÉTENDARD  DU  CONNÉTABLE  (1439,  juin,juill.) 

{Conflit  de  juridiction  entre  le  connétable  et  le  parlement  de  Paris] 
(p.  294,  note  2). 

On  lit  dans  un  registre  du  Parlement  de  Paris  (X^*  22,  à  la  date  du 
lundi,  15  juin  1439)  : 

Rapiout,  pour  monseigneur  le  connestable,  dit  qu'il  y  a  un  prison- 
nier en  la  conciergerie  du  palais,  nommé  Jehan  Budes,  lequel,  comme 
on  dit,  a  esté  emprisonné  pour  certain  cas  qui  a  esté  fait  par  gens  de 
guerre,  et  en  fait  de  guerre,  et,  par  ce,  dit  que  ce  touche  la  jurisdic- 
tion  de  monseigneur  le  connestable,  et  en  demande  le  renvoi. 

Lundi,  xxH  juin,  mccccxxxix. 

JouvENEL,  pour  le  procureur  du  roy,  contre  monseigneur  le 
connestable,  requérant  Tenvoy  de  J.  Budes,  le  prisonnier  en  la 
conciergerie  du  palais,  dit  que  le  renvoy  ne  luy  sera  pas  fait, 
car  dès  piéça  ung  nommé  Guille  de  La  Forge  et  ung  surnommé  Du- 
puis,  parens  de  feu  Geffroy  Dupuis,  mirent  en  procès,  par  devant 
maistre  Jehan  de  Troissy,  lieutenant  de  monseigneur  le  connestable, 
ledit  J.  Budes,  à  Angiers,  et  tant  fût  procédé  que  lesdiz  parens  dudit 
feu  Dupuis  en  appellèrent,  et,  après,  firent  lesdictes  parties  certain 
traictié  ensemble,  par  lequel  ilz  se  soubzmirent  au  seigneur  de  Beau- 
manoir,  sur  certaines  peines,  et,  ou  cas  que,  dedans  le  jour  sur  ce 
accepté,  ne  les  accorderoit,  promirent  retourner  en  Testât  qu'ilz 
estoient;  lequel  procès  ne  fût  point  déterminé,  et  s'en  descharga 
ledit  Beaumanoir,  et,  par  ce,  par  le  moien  dudit  appel  et  de  la  sub- 
mission, la  cause  vint  à  la  court  de  céans,  et,  attendu  que  on  est 
appellant  de  monseigneur  le  connestable,  n'est  pas  raison  qu'il  en  ait 
le  renvoy.  Dit  aussi  que  la  court  de  céans  est  la  souveraine  de  toutes 
autres  et  ordinaire,  prent  et  peut  prenre  et  avoir  la  cognoissance  de 
toutes  matières  et  cas  que  bon  luy  semble;  et  dit  que  ung  malfaic- 
teur,  feust  homme  de  guerre,  puisqu'il  soit  prins  en  bonne  ville, 
mondit  seigneur  le  connestable  n'en  debvoit  point  avoir  le  renvoy,  et 
en  a  veu  aucunes  lettres  et  arrestz  par  lesquelx  apparoit  que  le  pre- 
vost  de  Paris  en  a  eu  la  cognoissance,  et,  par  ce,  dit  que  la  cause 
doit  demourer  céans,  sans  en  faire  aucun  renvoy,  et  ad  ce  con- 
clud. 

Simon,  pour  la  partie,  employé  ce  qui  a  esté  dit  par  le  procureur 
du  roy  et  dit  que  aucun  renvoy  n'en  doit  estre  fait  ;  mesmement  que 
le  cas  ne  advint  pas  en  fait  de  guerre,  mais  advint  de  fait  appensé  et 
propos  délibéré.  —  Appoinctié  est  que  les  parties  mectront  devers  la 
court  ce  qu'elles  vouldront  et  au  conseil. 


APPENDICES  579 

Mardi,  xxiii  juin. 

Maistre  Robert  Cordelle,  ou  nom  et  comme  procurem'  de  Jehan 
Dupais,  nepveu,  et  de  Guille  de  La  Forge,  cousin  germain  de  feu 
Geffroy  Dupuis,  a  consenti  et  consent  que  la  cause  pendant  céans 
entre  iceulz  parens  dudit  défunt  et  le  procureur  général  du  roy  nostre 
sire,  demandeurs,  d'une  part,  et  J.  Budes,  prisonnier  en  la  concier- 
gerie du  palais,  d'autre  part,  dont  monsiegneur  le  connestable  a  requis 
le  renvoy  estre  fait  par  devers  luy,  soit  renvoyé  par  devant  mondit 
seigneur  le  connestable,  s'il  plaist  à  la  cour. 

Jeudi,  XXV  juin. 

Rapiout,  pour  monseigneur  le  connestable  de  France,  requiert, 
comme  autreCFoiz  a  fait,  le  renvoy  de  la  cause  d'entre  les  parens  et 
amis  de  feu  Geoffroy  Dupuis  et  le  procureur  général  du  roy  nostre 
sire,  demandeurs,  d'une  part,  et  J.  Budes,  escuier,  prisonnier  en  la 
conciergerie  du  palais,  d'autre  part,  attendu  mesmement  que  la 
partie  adverse  se  y  est  consenti. 

JoNVENEL,  pour  lo  procureur  du  roy,  dit  que  J.  Budes  est  appellant 
de  maistre  J.  de  Troissy,  qui  est  lieutenant  de  monseigneur  le  con- 
nestable, et,  par  ce,  fault  que  la  court  ait  la  cognoissance  dudit  appel, 
et,  quelque  accord  qu'il  y  ait  entre  les  parties,  dont  ne  savent  riens, 
si,  ne  s'en  peuvent  elles  départir,  sans  lettres  et  congié  du  roy  et  de 
la  court;  par  quoy  n'en  doit  estre  fait  aucun  renvoy.  Sur  quoy  les 
dites  parties  oyes,  la  court  a  mis  ladite  appellacion  au  néant. 

Et,  ce  fait,  Simon,  pour  Jehan  Dupuis  et  Guille  de  la  Forge,  parens 
de  feu  Guille  Dupuis,  et  J.  Budes,  disent  qu'ilz  se  confient  bien  de 
la  bonne  justice  de  mon  dit  seigneur  le  connestable,  et  qu'ilz  sont 
d'accord  d'aler  procéder  par  devant  luy. 

Le  procureur  du  Roy  dit  que,  par  l'impétracion  de  la  partie,  la 
cause  vient  céans  et,  pour  ce,  requiert  à  la  court  se'  la  cause  doit  estre 
renvoyée  ou  non. 

Rapiout,  pour  monseigneur  le  connestable,  dit  que. partie  en  est 
d'accord  et,  par  ce,  le  procureur  ne  le  peut  empeschier. 

Appoinctié  est  que  les  parties  mectront  devers  la  court  ce  qu'elles 
voudront  et  au  conseil  sur  le  dit  procez.  Et,  au  surplus,  la  court,  pour 
certaines  causes  ad  ce  la  mouvans,  a  ordonné  et  ordonne  que  le  dit 
J.  Budes  sera  eslargy  partout,  jusques  à  dehuy  en  un  mois  prouchai- 
nement  venant,  moiennant  que  J.  de  Rostellan,  chevalier  et  J.  de 
la  Haye,  escuier,  pour  ce  présens,  en  leurs  personnes  se  sont  constitués 
et  constituent  pleiges  et  caucions  pour  le  dit  J,  Budes,  et  chacun  d'eulx 
pour  le  tout,  de  la  somme  de  deux  mil  escuz  d'or  et  ont  promis  et 
promectent  de  ramener  et  faire  Comparoir  le  dit  J.  Budes,  en  Testât 
qu'il  est  audit  jour,  sur  peine  de  paier  ladite  somme  de  deux  mil 
escuz,  laquelle  somme  ilz  ont  promis  et  promectent  paier  tantost 
sans  delay,  ou  cas  que  défault  y  auroit,  sous  l'obligacion  en  telz  cas 
accoutumée;  ou  cas  touteffoz  que  ledit  J.  Budes  ne  soit  prins  ou  mort 
par  les  adversaires,  ou  qu'il  y  ait  autre  empeschement  par  cas  de  for- 
lune,  et  le  dit  monseigneur  le  connestable,  pour  ce  aussi  présent,  a 


580  APPENDICES 

promis  à  desdommager  les  dessusdiz.  Lequel  J.  Budes  a  promis,  soubz 
les  peines  et  submission  accoustumées  et  soubz  ladite  peine  de  deux 
mil  escuz  d'or,  retourner  in  statu  audit  jour.  Et,  partant,  a  esté 
eslargy.  »  (X^*  22,  aux  dates.  —  Tous  ces  passages  viennent  à  la  suite, 
sans  aucune  interruption.) 

Jeudi,  xxm  juillet. 

Rapiodt,  pour  monseigneur  le  counestable,  dit  que  J.  Budes  fut  na- 
gaires  emprisonné  es  prison  de  la  Conciergerie,  dont  mondit  seigneur 
le  connestable  requiert  le  renvoy  et,  après,  fut  ledit  J.  Budes  eslargy 
jusques  à  ung  mois  qui  eschoira  samedi  prochain,  à  la  caucion  de 
monseigneur  de  Rostellan  et  de  J.  de  la  Haye;  et,  pource  que  la 
journée  de  son  élargissement  approuche  et  aussi  que  ledit  J.  Budes 
a  la  garde  de  Vestendart  de  mondit  seigneur  le  connestable ,  qui  est  au 
siège  de  Meaulx,  requiert  de'  rechief  le  renvoy  et,  en  cas  de  délay, 
requiert  que  le  dit  J.  Budes  soit  eslargy,  à  sa  caucion. 

Et,  après  ce  que  monseigneur  le  premier  président  (Cambray)  a 
dit  que  la  court  avoit  ordonné  que  iceluy  J.  Budes  soit  eslargy  de 
rechief,  soubz  les  peines  et  aux  caucions  par  luy  autreffoy  baillées, 
pourveu  qu'elles  fussent  renouvelles,  jusques  au  lendemain  de  la 
Saint-Martin  d'iver  prouchainement  venant,  J.  de  la  Haye,  escuier, 
présent  en  jugement,  avec  le  dit  J.  Budes,  a  respondu  qu'il  se  deschar- 
geait de  la  caucion  par  luy  baillée  pour  iceluy  J.  Budes  et  l'a  ramené 
et  rendu  es  mains  de  la  court,  pour  en  ordonner  comme  il  appar- 
tiendra, disant,  oultre,  que  monseigneur  de  Rostellan,  qui  avait  esté 
caucion  avecques  lui  pour  ledit  J.  Budes,  estoit  audit  siège  de  Meaulx 
et  ne  savoit  se  il  voulait  de  rechief  caucionner  ledit  J.  Budes. 

Ce  fait,  attendu  ladite  descharge,  et  eue  par  la  court  délibéracion 
sur  ce,  a  ordonné  que  ledit  J.  Budes  sera  renvoyé  prisonnier  en  la 
Conciergerie  du  palais. 

Et,  tantost  après,  Rapiout,  pour  mondit  seigneur  le  connestable  et 
pour  ledit  J.  Budes,  à  requis  qu'il  pleust  à  la  court  eslargir  iceluy 
J.  Budes,  à  la  caucion  du  px'évost  de  Paris  et  du  maître  d'hostel  de  ma- 
dame de  Guyenne,  lesquelx  estoient  prestz  d'eulx  constituer  caucions 
pour  luy.  Sur  quoy  a  esté  appoinctié  au  conseil.  (X**  22,  à  la  date.) 

LXXIV 

SERMENT   D  ASSISTANCE   FAIT  PAR   LE   CONNÉTABLE   AU  DUC  SON  FRÈRP: 

(1440,  22  août) 
(p.  309,  455). 

«  Nous  Artuz  [sic),  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont, 
seigneur  de  Partenay,  connestable  de  France,  pour  les  singuliers  désirs 
et  affections  que  avons  de  servir  nostre  très  redoubté  seigneur  et  frère, 
monseigneur  le  duc,  ainsi  que  naturelement  tenuz  y  sommes,  avons 
juré  et  promis,  jurons  et  promectons,  par  ces  présentes,  par  les  foy  et 
serment  de  nostre  corps  et  sur  nostre  honneur,  de  empescher  de  tout 


APPENDICES  581 

noslre  pouvoir  la  venue,  dessente  et  entrée  ou  pais  et  duchié  de  Bre- 
taigne  des  gens  de  guerre  estans  ou  service  et  obéissance  de  mon- 
seigneur le  Roy,  ou  d'autres  qui  y  vouldraient  faire  ou  porter  guerre 
ou  dommage.  Et,  s'il  advenoit  que,  pour  ce  faire,  dessendre  et  entrer 
y  voulsissent  et  que  empescher  ne  leur  poussions,  de  venir  en  per- 
sonne par  devers  mondit  seigneur  le  duc,  le  plus  tost  que  possible 
nous  sera,  après  qu'il  le  nous  aura  mandé  et  fait  savoir,  et  amener 
avecques  nous  tout  ce  que  nous  pourrons  finer  et  rencontrer  de  gens 
de  guerre,  pour  leur  contester  et  deffendre  ladite  entrée,  les  en  dé- 
bouter, se  entrez  y  estoient,  et  garder  que  à  ses  dits  pays  et  duchié  ne 
facent  aucune  guerre,  mal  ou  dommage;  et  ce  promectons  en  bonne 
foy,  sans  fraulde,  barat  ne  malengin.  Tesmoing  noz  seing  manuel  et 
scel  cy  miz,  le  xxii*  jour  d'aoust,  l'an  mil  quatre  cens  et  quarante. 
Artir. 

Par  monseigneur  le  conte  et  connestable, 

J.  DE  WiLLERIES. 

Original  aux  archives  de  la  Loire-Inférieure.  Cass.  57,  E  147.  — 
(^opie  aux  archives  du  ministère  des  affaires  étrangères,  t.  362,  f»  79. 
1).  Lobineau,  t.  I,  613,  indique  ce  document,  sans  le  donner. 


LXXV 

N°  1.  RICUEMONT  DONNE   CAUTION  POUR  LA  RANÇON  DU  DUC  d'ORLÉANS 

(1439,  20  décembre) 

(p.  299,  310,  438). 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  touz  ceulx  qui  ces  présentes 
lectres  verront,  salut.  Comme  jà  pieça,  à  la  requeste  et  prière  de 
nostre  très  honoré  seigneur  et  cousin,  monseigneur  le  duc  d'Orléans, 
nous  eussions  baillié  nos  lectres  de  scellé,  dont  la  teneur  s'ensuit  :  A 
vous,  très  hault  et  très  puissant  prince,  Henry,  roi  d'Angleterre,  nous, 
Arlur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de  Par- 
tenay, connestable  de  France,  promectons,  par  la  foy  et  serment  de 
nostre  corps  et  sur  nostre  honneur,  de  vous  rendre  et  paier,  ou  à 
voz  commis  et  députez,  ou  autres  qui  de  vous  auront  cause,  es  villes 
de  Rouen,  de  Calais  ou  de  Chierbourg,  tenans  vostre  parti,  ou  en 
l'une  d'icelles,  laquelle  sera  mieulx  vostre  plaisir,  à  noz  propres 
coustz  et  despens,  la  somme  de  six  mil  saluz  de  bon  or,  de  soixante- 
dix  au  marc,  dedens  la  feste  de  Saint-Andry,  qui  sera  l'an  mil  quatre 
cens  quarente,  en  rendant,  délivrant  et  mectant  en  sa  franche  liberté 
en  nostre  parti  le  corps  de  nostre  très  honoré  seigneur  et  cousin,  mon- 
seigneur le  duc  d'Orléans ,  garny  de  bon ,  vray ,  loyal  et  seur  sauf- 
conduit,  par  vertu  duquel  nostre  dit  seigneur  et  cousin  et  ceulx  de  sa 
compaignie  puissent  aler  et  venir  seurement  en  l'un  party  et  en  l'au- 
tre, pour  soy  emploier  au  fait  de  la  paix  final  d'entre  les  royaumes  de 
France  et  d'Angleterre  et  pour  pourchasser  sa  délivrance  ;  ou,  en  def- 
fault  de  ce,  rendre,  dedens  ledit  terme  de  Saint-Andry,  le  corps  de 


882  APPENDICES 

nostredit  seigneur  et  cousin,  mort  ou  vif,  prisonnier  comme  devant, 
en  l'une  des  dictes  villes  de  Rouen,  de  Calais  ou  de  Chierbourg, 
laquelle  que  mieulx  vous  plaira,  es  mains  de  vous,  très  hault  et  très 
puissant  prince,  ou  de  vos  diz  commiz  et  députez.  Et,  pour  l'accom- 
plissement des  choses  dessus  dictes,  nous  avons  obligé  et  obligons,  par 
ces  présentes,  à  vous,  voz  hoirs,  successeurs,  ou  autres,  qui  de  vous 
auront  cause,  nous,  nostre  honneur  et,  tous  et  chacuns,  noz  biens 
meubles  et  immeubles  présens  et  à  venir,  et  tout  sans  fraude,  barat 
ou  malengin.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  signées  ces  présentes  de 
nostre  main  et  à  icelles  fait  mectre  nostre  scel,  en  nostre  ost  devant 
Avranches,  le  vingtième  jour  de  décembre,  l'an  de  grâce  mil  quaire 
cens  trente-neuf.  Ainsi  signé,  Artur.  —  Par  monseigneur  le  conte 
connestable  T.  Phon(?)  —  Savoir  faisons  nous  avoir  aujourd'huy  eu  et 
receu  de  mondit  seigneur  d'Orléans,  par  la  main  de  maistre  Guille 
Le  Bourellier,  son  serviteur,  commis  ad  ce,  nosdictes  lectres  de  scellé 
saines  et  entières  et  d'icelles  sommes  contens  et  en  quictons  mondit 
seigneur  d'Orléans,  ses  hoirs,  successeurs  et  ayans  cause  et  tous 
autres  à  qui  quictance  en  puet  et  doit  appartenir  ;  et,  pour  ce  que 
mondit  seigneur  d'Orléans  dit  avoir  trouvé  par  escript  nous  avoir 
baillé  contre-lectre  et  obligacion  de  nostredit  scellé,  de  laquelle  ne 
sommes  records  et  n'en  trouvons  devers  nous  aucune  chose  *,  nous 
icelle  contre-lectre  et  obligacion  adnullons  par  ces  présentes,  sans  ce 
que  nous,  noz  hoirs,  successeurs  ou  ayans  cause,  nous  en  puissions 
aider,  ores  ne  pour  le  temps  advenir.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons 
signées  ces  dictes  présentes  de  nostre  main  et  à  icelles  fait  mectre 
nostre  scel.  Donné  à  Loches,  le  derrenier  jour  de  avril,  l'an  de  grâce 
mil  quatre  cens  cinquante  et  deux. 
Artdr. 

Par  monseigneur  le  conte  connestable^ 

MlLET. 

(K.  72,  n"  56  n.  Original.  —  Il  y  a  une  copie  de  ce  document  dans 
le  carton  K.  65,  n"  15  ^a.] 

N"  2.  Lettre  de  richemoiNT  au  duc  d'orléans.  (1452,  26  avril.) 
A  mon  très  honnouré  seigneur  et  cousin,  monseigneur  le  duc  d'Orléans. 

Monseigneur  d'Orléans,  je  me  recommande  à  vous  tant  comme  je 
puis.  J'ay  receu  vos  lectres  et  oy  la  response  que  m'avez  faicte  par 
Sangler,  mon  poursuivant,  que  j'avoie  envoie  par  devers  vous,  espérant 
que  par  luy  vous  pleust  m'envoier  mon  scellé,  que  piéça  vousprestay 
pour  emploier  au  fait  de  vostre  finance  et  raençon,  duquel  ne  vous 
estes  pomt  aidié.  Et,  touchant  ce  que  demandez  avoir  une  obligacion 
que  pensez  m'en  avoir  baillée,  quant  je  vous  prestay  mondit  scellé,  je 
vous  assure,  monseigneur  d'Orléans,  que  mondit  scellé  je  baille  à  Huet 
de  Saint  Mars  pour  vous  porter,  et  ne  m'en  bailla  de  vous,  ne  d'autre, 

1.  Il  avait  eu  cette  contre-lettre.  Sur  le  document  qui  l'indique,  on  lit 
en  marge  :  «  Rendu  ce  scellé  et  en  a  quittance  mise  ou  chartrier,  pour 
ce  qu'il  n'a  pas  rendue  la  contre-lectre.  »  (K.  65,  n»  lii-O), 


APPENDICES  583 

raucune  obligacion,  ne  n'en  demande  point,  car  de  ce  je  me  fioye  assez 
en  vous.  Toutevoies,  par  mondit  poursuivant,  porteur  de  cestes,  je 
vous  envoie  une  quictance  en  blanc  dudit  scellé;  laquelle,  présent 
ledit  porteur,  pourres  faire  amplir  à  vostre  bon  plaisir.  Et,  en  prenant 
icelles,  je  vous  prie  qu'il  vous  plaise  par  lui  m'envoier  mondit  scellé, 
en  me  faisant  savoir  s'il  vous  plaist  chose  que  je  puisse,  pour  la  faire 
et  accomplir  de  bon  cuer.  Monseigneur  d'Orléans,  je  prie  à  Dieu  qu'il 
vous  doint  joye  et  accomplissement  de  voz  bons  désirs.  Escript  à  sainte 
Catherine  de  Fierbois  *,  le  xxvie  jour  d'Avril. 

Vostre  vielle  lype  ^. 

MlLET.  AUTUR. 


(K.  72,  n»  56  **.  Lettre  sur  papier,  pUée,  avec  suscription.) 

N"  3.  Autre  lettre  de  richemont  au  duc  d'orléans.  (14S2,  30  avril.) 
A  mon  très  honnouré  seigneur  et  cousin  monseigneur  le  duc  d'Chiéans. 

Mon  très  honnouré  seigneur  et  cousin,  je  me  recommande  à  vous 
tant  comme  je  puis.  J'ai  receu  le  scellé  que  m'avez  envoie,  lequel 
autrefFoiz  je  vous  avois  preste,  dont  je  vous  mercye  et  vous  envoie  la 
quictance  que  m'avez  demandée,  en  la  forme  que  vostre  conseiller, 
porteur  de  cestes,  l'a  voulu  avoir.  Toutevoies,  je  feray  visiter  et  re- 
chercher se  on  trouvera  aucune  contrelectre  qu'en  eussiez  autreffoiz 
baillée,  combien  que  je  cuide  estre  seur  et  bien  recors  qu'il  ne  m'en 
fust  oncques  nulle  baillée,  et,  s'aucune  s'en  trouve,  je  la  vous  envoieray, 
ainsi  que  j'ay  dit  plus  à  plain  à  vostre  dit  conseiller.  Mon  très  hon- 
nouré seigneur  et  cousin,  s'aucune  chose  vous  plaist  que  je  puisse,  la 
me  faisant  savoir,  je  la  feray  de  bon  cuer,  priant  le  benoist  Saint 
Esprit  qu'il  vous  doint  ce  que  vostre  cuer  désire.  Escript  à  Loches,  le 
derrenier  jour  d'avril. 

Vostre  vielle  lype  '. 
MiLET.  Artur. 


^r 


(K.  72,  n»  o6  i».  Lettre  sur  papier,  pliée,  avec  suscription.] 

1.  Arrondissement  de  Chinon. 

2.  Mots  écrits  de  la   main  du  connétable. 

3.  Ces  mots  sont  écrits  de  la  main  du  connétable. 


584  APPENDICES 


LXXVI 

LETTRE  DE  CHARLES  VII,  ANNONÇANT  LA  PRISE  DE  CREIL  ET  LE  SIÈGE 

DE  PONTOiSE  (1441,  28  mai) 
(p.  319,  320). 

A  nos  chiers  et  bien  amez,  les  bourgeois,  manans  et  habitans  de  la  ville 
de  saint  Quentin. 

De  par  le  Roy. 

Chiers  et  bien  amez,  comme  tenons  que  avez  sceu,  nous  avons 
mis  le  siège  devant  nos  ville  et  chastel  de  Creilg,  détenus  et  occupez 
par  nos  anciens  ennemis  les  Anglois  et  iceulx  prins  et  mis,  la  mercy 
Nostre  Seigneur,  en  nostre  obéissance;  et,  en  continuant  nos  entre- 
prinses  et  faîcts  de  guerre,  faisons  mectre  le  siège  devant  nostre  ville 
de  Pontoise,  et  espérons,  moyennant  l'aide  Nostre  Seigneur,  en  brief, 
ledit  Pontoise,  et  autres,  occupés  par  nosdits  ennemis,  remectre  en 
nostre  obéissance.  Pour  lesquelles  choses  mectre  à  exécution  nous  est 
besoing  et  nécessité  dudit  aide  et  confort  de  nos  bons  et  vrais  subgects, 
et,  pour  ceste  cause,  et,  pour  vous  faire  savoir  de  nos  nouvelles,  vous 
escrivons  présentement,  en  vous  priant  très  acertes,  sur  la  loyauté  et 
obéissance  que  nous  devez,  que,  à  ce  besoing,  qui  tant  nous  touche  et 
le  fait  de  nostre  seigneurie,  vous  vueilliez  présentement  et  prestement 
aider  et  envoyer  cl  arcs  et  cl  trousses,  xx  arbalestriers  garnis  d'arba- 
lètres  et  de  traits,  x  colovriniers  garnis  de  colovrines,  de  pouldre 
et  pierres  pour  en  tirer,  payés  pour  ung  mois,  et,  en  ce  faisant,  nous 
en  serons  tenus  à  vous,  et  nous  ferez  service  et  plaisir  que  vous  recon- 
noitrons;  et  sur  ce  vueillez  croire  nostre  amé  et  féal  escuier  d'escuierie 
Regnault  de  Longueval,  et  Touraine,  nostre  hérault,  de  ce  qu'ils  vous 
diront  de  par  nous.  Donné  à  Senlis  le  xxvm"  jour  de  May. 
Charles. 

burdelot. 

(D.  Grenier,  100,  f»  282.) 


LXXVII 

RICHEMONT  INSTITUE  POUR  HÉRITIERS  SÏS   NEVEUX  FRANÇOIS  ET  PIERRE 

(1441,  11  janvier,  a.  st.) 
(p.  228). 

«  Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  touz  ceulx  qui  ces  présentes  lettres 
verront  et  oiront,  salut.  Savoir  faisons  que,  jaçoit  ce  que,  par  nos 
autres  lettres  patentes,  et  pour  les  causes  contenues  en  icelles,  nous 
avons,  despièca,  voulu,  conscenti  et  accordé  que,  ou  cas  que  n'aurons 
enffans  légitimes  qui  nous  succèdent,  nostre  très  chier  et  très  amé  filz 


APPENDICES  585 

et  nepveu  Pierres  (sic)  de  Bretaigne,  (îlz  second  de  notre  très  redoubté 
seigneur  et  frère,  monseigneur  le  duc  de  Bretaigne,  soit  nostre  vray 
héritier  et  succède  à  noz  terres  et  seigneuries  que  aurons  et  tendrons 
en  Poitou  et  ailleurs,  à  cause  de  la  seigneurie  de  Partenay,  au  jour  et 
heure  de  nostre  trespassement  de  cette  vie  mortelle,  et  que,  après  lui, 
ses  enffans  légitimes,  descendans  de  sa  char,  nez  et  procrayez  en  loyal 
mariage,  viengnent  à  ladicte  succession,  ainsi  que  plus  à  plain  est  con- 
tenu en  nosdictes  autres  lettres  sur  ce  faictes;  neantmoins,  pour  la 
grant  amour  et  dilection  que  avons  et  devons  avoir  naturelment,  par 
consanguinité,  proximité  de  lignage  et  autrement,  avecques  notredit 
1res  redoubté  seigneur  et  frère,  monseigneur  le  duc  et  notre  très-ho- 
noré  seigneur  et  nepveu,  monseigneur  le  comte  de  Montfort  ^  son 
ainsné  filz,  considerans  et  aians  en  mémoire  de  plus  en  plus  le  bon 
vouloir  et  affection  qu'ilz  ont  envers  nous  et  les  grans  biens,  amitiez  et 
plaisirs  que  nous  fait  chacun  jour  mondit  seigneur  le  duc,  désirans 
les  recognoiste  envers  lui  et  mondit  seigneur  et  nepveu,  avons,  pour 
lesdictes  causes  et  autres  a  ce  nous  niouvans,  et  pour  le  bien  et 
accroissement  de  la  duché  et  seigneurie  de  Bretaigne,  de  notre  cer- 
taine science  et  propre  mouvement,  voulu,  octroyé,  conscenti  et 
accordé,  voulons,  octroions,  conscentons  et  accordons,  par  ces  pré- 
sentes, que,  non  obstant  le  contenu  en  nosdictes  autres  lettres,  ou  cas 
que  nous  irions  de  vie  à  trespassement  sans  hoir,  ou  hoirs  procraiez  en 
mariage,  qui  nous  succèdent,  ou  que  nostre  dit  fiiz  et  nepveu.  Pierres, 
n'aurait  hoir,  ou  hoirs,  aussi  procraiez  en  mariage,  qui  lui  succédas- 
sent, selon  le  contenu  en  nosdictes  autres  lettres,  recours  à  icelles,  et, 
ou  deffault  de  nosdiz  hoirs  et  des  siens,  nostre  dit  seigneur  et  nepveu, 
le  conte  de  Montfort  et  ses  hoirs  procraiez  de  sa  char,  comme  dit  est, 
viengnent,  davant  touz  autres,  à  nostre  succession  et  soyent  nos  vraiz 
héritiers  desdictes  terres  du  Poitou,  entièrement,  sans  nulle  réservacion  ; 
et,  combien  que  nostre  dit  seigneur  et  nepveu,  le  conte  de  Montfort, 
de  son  droit,  ou  cas  que  décéderions  sans  hoirs  légitimes  et  deffault 
d'iceulx,  soit,  après  le  décès  de  nostre  dit  très  redoubté  seigneur  et 
frère  monseigneur  le  duc,  nostre  héritier  principal,  seul  et  pour  le  tout, 
de  ce  que  aurions  au  temps  de  nostre  décès,  en  Bretaigne  et  ailleurs, 
toutesfois,  d'abondant,  pour  plus  à  plain  déclerer  nostre  entencion,  du 
consentement  de  nostre  dit  seigneur  et  frère  monseigneur  le  duc, 
qui,  ou  cas  présent,  a  voulu  à  nostre  dit  seigneur  et  nepveu  avancer 
son  droit  de  nature,  avons  voulu,  conscenti  et  octroyé,  voulons,  cons- 
centons et  octroions,  par  ces  présentes,  que  nostre  dit  seigneur  et 
nepveu,  le  conte  de  Montfort,  viengne  entièrement,  et  sans  réservacion 
quelconque,  directement  et  sans  moien,  à  la  succession  de  toutes  et 
chacune  noz  terres  et  seigneuries,  choses  et  appartenances  quelzcon- 
ques,  que  aurons,  ou  temps  de  nostre  décès,  en  Bretaigne  et  ailleurs, 
excepté  que,  es  terres  que  avons  de  présent  en  Poitou  et  ailleurs,  à 
cause  de  la  seigneurie  de  Partenay,  il  succédera  en  la  manière  que  dit 
est  dessus;  à  la  charge  à  un  chacun  d'eulx  d'accomplir  nostre  testa- 
ment et  derrenière  voulenté,  pour  autant  que  à  un  chacun  en  ordon- 

1.  C'esl-à-dire  François. 


586  APPENDICES 

lierons,  en  transportant,  après  notre  décès,  à  nostre  dit  seigneur  et 
nepveu  et  dès  maintenant,  comme  pour  lors,  lui  transportons  es  dits 
cas  toute  droiture,  seigneurie  et  possession  de  toutes  et  chacune  les 
choses  dessusdites.  Et  tout  ce  avons  promis  à  nostre  dit  seigneur  et 
nepveu,  et  promectons,  par  ces  présentes,  avoir  agréable  et  tenir  ferme 
et  estable  à  toujours,  sans  jamais  faire,  aler  ne  venir  à  rencontre, 
directement  ou  indirectement,  par  quelque  manière  que  ce  soit.  En 
tesmoignage  de  ce,  nous  avons  faict  mectre  notre  scel  à  ces  présentes 
et  icelles  signées  de  nostre  main.  Donné  à  Redon,  le  xi«  jour  de  jan- 
vier, l'an  mil  quatre  cent  quarente  et  ung. 

Abtur. 

Par  monseigneur  le  connestable  (avec  le  sceau  du  connétable). 

BlLET. 

{Archives  de  la  Loire-Inférieure,  cass.  1,  E.  3.) 


LXXVIII 

TESTAMENT   ET  CODICILLE  DE   MARGUERITE   DE   BOURGOGNE,  DUCHESSE 
DE    GUYENNE,    COMTESSE    DE    RICHEMONT   ET    DAME    DE    PARTUENAY 

(1442,  14  et  31  janvier) 

(p.  329,  461,  462). 

Très  haulte,  excellante,  et  puissante  princesse,  dame  Marguerite  de 
Bourgogne,  duchesse  de  Guienne,  contesse  de  Richemont  et  dame  de 
Partenay,  inferme  de  corps,  et  saine  de  pensée,  ayant  en  elle  bon  et 
vray  entendement,  si  comme  elle  dit  et  comme  de  prime  face  il  est 
apparu  aux  notaires  soubzscripz,  etc.,  attendant  et  en  elle  sagement 
considérant  qu'il  n'est  chose  plus  certaine  de  la  mort,  ne  moins  cer- 
taine de  Teure  d'icelle,  et  que  à  toute  créature  humaine,  par  le  cours 
du  temps,  aprouche,  de  jour  en  jour,  le  terme  de  sa  vie,  ne  scet 
quant,  etc.  ;  pensant  aux  choses  souveraines  et  derrenières,  non  vou- 
lant décéder  de  ceste  mortelle  vie  intestate  etc.  ainçois,  elle  bien  advi- 
sée,  désirant  vivre  et  morir  comme  bonne  et  vraye  chrétienne,  catho- 
lique, etc.  de  tout  son  pouvoir  remédier  et  pourveoir  au  salut  de  son 
âme,  etc.  et  des  biens  temporels  que  N.  S.  lui  a  donnez  et  prestez  etc. 
disposer,  pour  le  salut  de  son  âme,  par  forme  testamentoire,  ou  ordon- 
nance de  dernière  voulenté,  de  son  bon  gré,  etc.  ou  nom  du  Père,  du 
Fils  et  du  benoist  Saint-Esperit,  fait,  ordonne,  dispose  son  testament, 
ou  ordonnance  de  derrenière  voulenté,  en  la  forme  et  manière  qui 
s'ensuit  : 

Et,  premièrement,  icelle  dame  donne  et  laisse,  en  recommandant 
humblement,  son  âme,  quant  de  son  corps  partira,  à  Dieu,  nostre  créa- 
teur, à  la  très  glorieuse  vierge  Marie,  sa  précieuse  et  doulce  mère,  à 
monseigneur  saint  Michiel  l'ange  et  archange,  etc.,  en  leur  suppliant 
très  humblement  et  de  bon  cuer  dévotement  que  sa  dite  poure  âme, 
quant  de  son  corps  départira,  ils  vueillent  mectre  et  leur  plaise  rece- 
voir en  la  perpétuelle  gloire  de  Paradis. 


APPENDICES  587 

Item,  en  après,  elle  esleut  sa  sépulture  et  veult  estre  inhumée  et 
enterrée  en  l'église  Nostre-Dame  des  Carmes,  à  Paris,  en  la  chappelle 
Nostre-Dame  de  Recouvrance,  fondée  en  la  dicte  église,  entre  les  deux 
autels  d'icelle  chappelle,  auquel  lieu  icelle  dame  testatcresse  a  très 
parfaicte  dévocion,  pour  l'amour  de  ce  qu'elle  dit  avoir  esté  cause  et 
moyen  de  remectre  sus  la  confrarie  de  Nostre  dicte  Dame  de  Recou- 
vrance en  ycelle  église,  ou  cas  toutevoies  qu'elle  yra  de  vie  à  trespas- 
sement  et  que  Dieu  fera  son  commandement  d'elle  en  ceste  ville  de 
Paris;  sinon,  qu'elle  aille  de  vie  à  trespassement  hors  de  ceste  ville  de 
Paris,  elle  veult  estre  mise  et  sépulturée  en  autre  église  de  Nostre- 
Dame,  au  lieu  où  il  plaira  à  ses  exécuteurs  cy  dessoubz  et  après 
nommez. 

Item  veult,  ordonne  expressément  et  requiert  très  affectueusement 
que,  premièrement,  et  avant  toute  euvre,  ses  tors  fais  soient  amendez 
et  ses  debtes  paiées  par  sesdits  exécuteurs,  et  dont  il  leur  apperra 
deuement,  tant  pour  le  fait  de  sa  despense  que  d'argent  emprunté  et 
autrement,  ainsi  que  ses  diz  exécuteurs  verront  à  estre  paie  et  à  fere 
en  leurs  consciences,  à  la  descharge  de  l'âme  d'elle. 

Item,  elle  veult  et  ordonne  son  luminaire  estre  tel  comme  sesdiz 
exécuteurs  vouldront,  et  qu'il  en  soit  fait  du  tout  à  leur  voulenté; 
ausquelz  elle  se  rapporte  de  ce  faire  et  tout  ce  qu'il  fauldra  pour  le 
fait  de  son  enterrement,  obit  et  service,  que  elle  veult  estre  fait  à 
l'ordonnance  de  monseigneur  le  connestable,  son  espoux,  ou  de  ses 
exécuteurs. 

Item,  veult  et  ordonne  que,  le  jour  qu'elle  yra  de  vie  à  trespasse- 
ment, se  fere  se  peut,  que  les  quatre  ordres  mendians  de  Paris  soient 
mandez  à  venir  en  l'ostel  d'elle,  et  sur  son  corps  soient,  par  chacune 
des  di;s  ordres,  dictes  vigilles  de  mors,  à  neuf  seaulmes  et  neuf  leçons, 
avant  que  son  corps  parte  de  sondict  hostel;  et  pareillement  les  col- 
leiges  de  l'Ostel  Dieu  de  Paris,  du  Saint-Esprit  en  Grève  et  les  Quinze- 
Vins  de  Paris  et  que  chacun  desdits  colleiges  die  pareillement  vigilles 
à  neuf  saulmes  et  neuf  leçons,  et,  ce  fait,  aillent  tous  en  procession 
à  convoler  son  corps,  jusques  en  ladicte  église  des  Carmes,  et,  eulx 
retournez  chacun  en  son  hostel,  elle  veult  et  ordonne  que  chacune 
desdiz  ordre  et  coUeige  die  en  son  église,  le  plus  brief  que  ilz  pour- 
ront, vigille  des  morts  à  neuf  seaulmes  et  neuf  leçons  et  une  grant 
messe  solempnelle  de  Requiem  pour  le  salut  de  son  âme.  Et,  pour  ce 
faire,  elle  laisse  à  chacune  des  dicts  quatre  ordres  mendians  et  à 
chacun  des  collèges  dessusdiz  x  livres  tournois.  Et,  parmi  ce,  seront 
tenus  chacune  ordre  et  collège  à  sesdiz  exécuteurs,  ou  à  l'un  d'eulx, 
le  jour  et  l'eure  que  ilz  vouldront,  fere  ledit  service. 

Item,  veult  et  ordonne  que,  le  jour  de  son  obil,  soient  dictes  en  la 
dicte  église  de  Nostre-Dame  des  Carmes,  où  elle  sera  enterrée,  vigilles 
de  mors  à  neuf  seaulmes  et  à  neuf  leçons  et  trois  grans  messes 
solempnelles  pour  le  salut  de  son  âme,  l'une  du  Saint-Esperit,  l'autre 
de  Nostre-Dame,  et  l'autre  de  Requiem. 

Item,  veult  et  ordonne  que,  le  jour  de  son  obit,  et  après  son  service 
fait,  soit  fait  une  donnée  à  poures,  et  soit  donné  a  chacun  poure  qui 
y  sera  présent,  x  deniers  tournois,  pour  le  salut  de  son  âme. 


588  APPENDICES 

Item,  elle  laisse  et  donne  à  l'euvre  et  fabrique  de  l'église  monsei- 
gneur Saint-Pol  à  Paris,  dont  elle  est  paroissienne,  pour  estre  partici- 
pante es  biensfais  d'icelle  fabrique,  la  somme,  pour  une  fois,  de  x  1. 1. 

Item,  au  curé  de  ladicte  église  monseigneur  Saint-Pol,  à  Paris, 
parmi  ce  que  il  sera  tenu  de  dire  vigilles  à  neuf  seaulmes  et  neuf 
leçons,  une  grant  messe  à  note  solempnelle  en  la  dicte  église  monsei- 
gneur Saint-Pol,  et  aussi  que  il  conduira,  à  compagnie  de  chappel- 
lains  revestus,  en  procession,  avecques  les  autres  églises,  son  corps 
jusques  au  lieu  où  elle  sera  enterrée,  et  sera  présent  à  ce  fere,  la 
somme  de  ini  livres. 

Item,  ou  clerc  de  la  parroisse  de  ladicte  église,  pour  convoier  son 
corps  et  à  ce  qu'il  soit  tenu  de  prier  Dieu  pour  elle,  xx  s.  t. 

Item,  elle  laisse  à  l'église  et  aux  religieux  de  Sainte-Catherine  du 
Val  des  Escoliers,  à  Paris,  pour  convoier  son  corps,  comme  dit  est 
dessus,  et  pour  dire  vigilles  à  neuf  seaulmes  et  neuf  leçons  et  une 
grant  messe  solempnelle  en  leur  église,  un  liv.  t. 

Item,  aux  religieux  et  aux  églises  des  Billettes  pour  semblable 
cause,  ini  liv. 

Item,  aux  religieux  de  Sainte-Croix,  pour  pareille  cause,  nu  liv. 

Item,  aux  religieux  des  Blancs-Manteaux,  pour  semblable,  nii  liv. 

Item,  aux  religieux  de  Saint- Anthoine,  dedens  Paris,  pour  pareille 
cause,  un  liv. 

Item,  aux  Célestins,  dedens  Paris,  pour  dire  vigilles  à.  neuf  seaulmes 
et  neuf  leçons,  en  leur  église,  et  parmi  ce  que,  le  jour  de  son  obit,  ils 
sont  tenus  de  dire,  en  leur  dicte  église,  cbacun  religieux  une  basse 
messe  ;  pour  ce,  pour  tout,  c  s.  t. 

Item,  elle  veult  et  ordonne  que,  le  jour  de  son  trespassemeut,  après 
ce  qu'elle  sera  trespassée,  elle  soit  ouverte  et  que  son  cuer  soit  prins 
et  distrait  de  son  corps  et  icellui  envoie  et  porté  bonnestement  en 
l'église  de  Nostre-Dame  de  Lience  i,  où  elle  le  avoit  et  a  voué  et  donné 
depuis  son  jeune  âge,  lequel  son  cuer  elle  veult  estre  enchassié  en  or; 
et,  quant  il  sera  en  icelle  église,  elle  veult  que  il  soit  deschassié  et 
sépulture  devant  l'ymage  Nostre-Dame  et  ledit  enchâssement  d'or  estre 
mis  honnorablement  devant  ledit  ymage  de  Nostre-Dame.  Et,  ce  fait, 
elle  veult  ung  service  estre  fait  en  ycelle  église  de  Liance,  c'est  assa- 
voir :  vigille  de  mors,  trois  grans  messes  à  note  solempnelle,  l'une 
du  Saint-Esperit,  l'autre  de  Nostre-Dame  et  la  tierce  de  Requiem',  à 
laquelle  église  elle  laisse,  pour  ce  fere,  vi  liv. 

Item,  ladicte  dame  laisse  et  donne  à  ladicte  église  de  Nostre-Dame 
de  Lience  une  de  ses  robes  de  drap  d'or,  ensemble  la  penne  d'icelle 
robe,  par  ainsi  que  dudit  drap  d'or  elle  veult  en  estre  fait,  par  l'or- 
donnance de  ses  exécuteurs,  chasuble  diacre  et  soubz  diacre,  tout  ce 
pour  le  salut  de  son  âme  et  à  ce  qu'il  soit  mémoire  d'elle. 

Item,  outre,  veult  et  ordonne  icelle  dame  que  en  ycelle  église  soit 
faicte  une  tombe  à  la  disposicion  et  ordonnance  de  sesdiz  exécu- 
teurs, sur  laquelle  tombe  elle  veult  estre  faicte  la  remembrance  d'elle 
enlevée,  laquelle  tendra  ung  cuer  représentant  le  scien  à  deux  mains 

1.  Notre-Dame  de  Liesse  (canton  de  Sissonne,  arr<"  de  Laon). 


APPENDICES  589 

eu  manière  qu'elle  le  offre  à  Nostre-Dame;  sur  laquelle  tumbe  soit 
escript  :  ycy  est  le  cuer  de 

Item  elle  laisse  à  la  confrarie  de  Nostre-Dame  de  Recouvrance,  en 
ladicte  église  de  Nostre-Dame  des  Carmes,  à  Paris,  la  somme  de  xxx  liv. 
tournois,  pour  une  fois,  pour  achetter,  au  prouffit  d'icelle  confrarie  et 
en  l'augmentation  d'icelle  confrarie,  quarente  solz  tournois  de  rente 
perpétuelle,  ou  icelle  somme  de  xxx  livres  tournois  emploier  au 
prouffit  de  ladicte  confrarie,  à  l'ordonnance  de  ses  diz  exécuteurs;  et, 
ou  cas  que  ses  diz  exécuteurs  verroient  que  ladicte  somme  de  xxx  li- 
vres tournois  ne  pourroit  bonnement  satisfaire  à  ce  que  dit  est  faire, 
elle  veult  que  sesdiz  exécuteurs  y  facent  ce  que  ils  regarderont  estre 
à  faire,  parmi  ce  que  lesdiz  .confrères  seront  tenus  et  obligiez  de  faire 
dire,  cbacun  an,  à  tel  jour  que  son  trépas  sera,  à  tousjours,  vigilles 
de  morts  et  une  grant  messe  de  Requiem,  pour  le  salut  de  son  âme. 

Item,  elle  veult  et  ox^donne  que,  dès  le  lendemain  de  son  trespas- 
sement,  on  commence  trois  trenteins  de  messes  :  l'un  à  l'autel  de 
ladicte  dame  de  Recouvrance,  en  ladicte  église  des  Carmes,  l'autre  en 
l'église  Nostre-Dame  de  Paris,  et  l'autre  en  l'église  Nostre-Dame  des 
Chartreux,  hors  étiez  Paris;  et  seront  lesdictes  messes  de  Requiem; 
et  que,  en  la  fin  d'icelles  messes,  soit  faicte  mémoire  de  Nostre-Dame 
Salve  sancta  Parens,  etc.;  en  laquelle  église  des  Carmes,  après  le 
trentein  fait  et  accomply,  en  la  fin,  seront  dictes  trois  grans  messes, 
l'une  du  Saint-Esperit,  l'autre  de  Nostre-Dame  et  l'autre  de  Requiem 
et  vigilles  a  neuf  seaulmes  et  neuf  leçons;  et  veult  que  il  y  ait  lumi- 
naire, paremens,  et  tout  ce  que  il  convient  fere  en  tel  cas,  à  ladicte 
voulenté  et  disposicion  de  sesdiz  exécuteurs. 

Et  pareilelment  soit  ainsi  fait  aux  Chartreux. 

Item,  veult  et  ordonne  expressément  ladicte  dame  que,  tantost  après 
son  dit  trespassement,  tous  les  jours  de  l'an  et  jusques  à  trois  ans  après 
entresuivans  et  acomplis,  pour  l'acquiet  et  à  la  descharge  des  faultes 
qu'elles  a  faictes  et  commises  en  sa  vie,  soit  dit,  où  son  corps  repo- 
sera et  sera  inhumée,  une  messe  de  Requiem  basse  et,  par  chacun 
desdiz  jours  de  l'an,  durans  lesdiz  trois  ans,  elle  veult  et  ordonne 
estre  dictes  vigilles  de  mors  basses,  à  neuf  seaulmes  neuf  leçons,  et, 
pour  chacunes  vigilles  basses,  veult  estre  baillié  et  paie  xvi  deniers 
et,  pour  chacun  année,  estre  paie  l  1. 1. 

Item,  elle  laisse  à  la  confrérie  de  la  Sainte-Cooception  Nostre-Dame, 
fondée  en  l'église  monseigneur  Saint-Pol,  à  Paris,  en  l'augmentacion 
d'icelle  et  du  divin  service,  ung  marc  d'argent. 

Item,  elle  laisse  à  la  confrarie  monseigneur  Saint-Lubin,  fondée  en 
ladicte  église  monseigneur  Saint-Pol,  à  Paris,  ung  calipce  pesant  ung 
marc  d'argent. 

Item ,  elle  laisse  à  la  confrarie  aux  Bourgeois,  en  l'église  de  la 
Magdaleine,  en  la  cité  de  Paris,  en  laquelle  confrarie,  elle  s'est  de 
nouvel  mise,  ce  que  il  plaira  à  sesdiz  exécuteurs  et  qu'ilz  verront  estre 
à  fere,  pour  lui  faire  ung  service. 

Item,  elle  laisse  et  donne,  pour  Dieu  et  en  aumosne  aux  enfans 
trouvez,  estans  en  l'église  Notre-Dame  de  Paris,  pour  leur  aidier  à  leurs 
nécessitez  et  avoir  leur  vie,  pour  une  fois,  xl  sols  p. 


890  APPE!NDICES 

Item,  a  donné  et  laissié  à  quinze  poures  filles  à  marier,  pour  leur 
aidier  à  avoir  chacune  une  robe,  à  ctiacune  desdictes  filles,  xl  s.  t. 

Item,  elle  veult  et  ordonne  expressément  que  tous  les  veulz  qu'elle 
a  faiz  soient  acomplis;  c'est  assavoir  :  l'un  à  Saint-André  de  Brabant, 
en  Hénault,  l'autre  à  monseigneur  Saint-Claude,  ung  autre  à  monsei- 
gneur Saint-Mathurin  de  Larchampt,  ung  autre  à  Nostre-Dame  de 
Lience,  et  ung  autre  à  monseigneur  Saint-Fiacre  en  Brye. 

Item,  elle  veult  et  ordonne  expressément  que,  tout  ce  que  ses- 
diz  exécuteurs  verront  en  quoy  elle  sera  tenue  à  Margot  et  à  Jehan 
Ryoul,  enfans  de  une  nommée  Osanne,  que  paiement  leur  en  soit  fait 
comme  ils  verront  estre  à  faire,  pour  l'acquiet  et  descharge  de  son 
âme. 

Item,  veult  et  ordonne  expressément  ladicte  dame  que,  tout  ce  que 
ses  diz  exécuteurs  verront  qu'elle  sera  tenue  à  ung  nommé  Vaulbricet, 
que  paiement  lui  en  soit  fait,  ainsi  comme  ilz  verront  estre  à  faire, 
pour  l'acquit  de  son  âme. 

Item,  veult  ladicte  dame  que  il  soit  sceu  à  Jaquotin  ce  que  ladicte 
dame  lui  peut  devoir  et  qu'il  en  soit  creu  en  sa  conscience  et  que,  de 
ce  qu'elle  lui  peut  devoir,  que  il  en  soit  paie  et  contenté. 

Item,  quant  et  au  regard  de  ce  que  les  Tarennes  lui  demandent, 
elle  s'en  rapporte  à  la  discrécion  et  conscience  de  monseigneur  son 
espoux  et  de  ses  diz  exécuteurs  d'en  fere  ce  qu'ilz  verront  estre  à  faire 
et  aussi  à  la  conscience  desdiz  Tarennes. 

Item,  semblablement  au  regard  de  la  femme  Godeffroy. 

Item,  semblablement,  de  toutes  autres  debtes,  que  sesdiz  exécu- 
teurs en  facent  ainsi  qu'ilz  verront  en  leurs  consciences  estre  à  faire, 
pour  l'acquit  et  descharge  de  la  conscience  de  ladicle  dame. 

Item,  elle  requiert,  prie  et  supplie  à  monseigneur  son  espoux  qu'il 
lui  plaise  fere,  paier  et  contenter  tous  ses  officiers  de  ce  qui  leur  peut 
estre  deu,  à  cause  de  leurs  gaiges  et  salaires,  et,  en  oultre,  que  il  lui 
plaise  tenir  sesdiz  officiers  à  ses  despens,  jusques  à  ce  que  ilz  soient 
pourveuz  de  bien  où  ilz  puissent  avoir  leur  vie,  ou  jusques  à  ce  que 
ilz  soient  paiez  et  contentez  de  ce  qui  leur  est  deu  de  leurs  diz  gaiges 
et  salaires. 

Item,  la  dicte  dame,  considérant  que  plusieurs  ses  serviteurs  lui 
ont  fait  plusieurs  et  amiables  services  et  notables  et,  pour  ce,  la  dicte 
dame,  voulant  les  rémunérer  et  récompenser  de  ce,  laissa  et  laisse  à 
ceulx  et  celles  qui  cy  après  sont  nommez  les  laiz  qui  s'ensuivent, 
oultre  ce  qui  leur  est  deu. 

Premièrement,  à  dame  Charlotte  du  Plesseis,  dame  de  Bonneil,  sa 
robe  de  veloux  violet,  fourrée  de  martres  et  une  de  ses  saintures  d'or 
cramoisie,  avecques  la  somme  de  cent  livres,  pour  une  fois. 

Item,  à  Perrenet  le  Borgne  cent  et  cinquante  escus  d'or,  lesquels 
elle  lui  devoit,  tant  pour  les  bons  services  que  il  lui  avoit  fais,  comme 
pour  l'augmentacion  de  son  mariage. 

Item,  à  Jehan  Floria  et  Jehanne  sa  femme,  pour  une  fois,  cinquante 
livres  et  une  de  ses  robes,  noire,  fourrée  de  gris. 

Item,  à  madame  Daubegny  sa  robe  de  veloux  gris  fourrée  de  mar- 
tres, une  de  ses  ceyntures  d'or  bleu  et  cent  francs  en  argent,  pour 


APPENDICES  591 

une  foiz,  lesquelz  ladicte  dame  prie  et  supplie  à  monseigneur  son 
espoux  que  il  les  lui  face  ou  assigne  sur  ses  terres  en  Poitou. 

Item,  à  Jehanne  Daynart  une  de  ses  robes  de  vert  pardu,  fourrée 
de  menu  vair,  et  une  de  ses  ceyntures  d'or,  noire,  avesques  xl  francs 
en  argent,  pour  une  fois. 

Item,  à  la  femme  Jaquet  d'avoir  une  de  ses  robes  de  vert  perdu, 
fourrée  de  menu  vair. 

Item,  à  Martinete  une  de  ses  robes  de  drap  noir,  fourrée  de  menu 
vair  et  sa  robe  de  nuyt.  ■ 

Item  à  Isabeau,  pour  une  fois xxx  livres. 

Item  à  Miilart  son  quenx,  pour  une  foiz...  c     — 

Item  au  boiteux  de  la  cuisine,  pour  une  foiz.        xxx      — 

Item,  oultre,  veult  et  requiert  ladicte  dame  à  monseigneur  son 
espoux  que  il  lui  plaise  paier,  ou  fere  paier  xx  escus  d'or  qui  lui  sont 
deubz,  de  reste  de  xxx  escus,  que  mondit  seigneur  et  elle  lui  promis- 
trent  donner  au  traittié  de  son  mariage. 

Item,  à  Lorens,  de  la  cuisine,  pour  une  fois.  xxx  livres. 

Item,  à  Iluguenin,  de  l'eschançonnerie lxxx  — 

Item,  à  Jehan  Raoïilet xxv  — 

Item,  à  Colin,  de  la  penneterie xxv  — 

Item,  à  Greffin,  le  portier xx  — 

Item,  à  Goussale xxx  — 

Item,  à  maistre  Pierre  Germaine xxv  — 

Item,  à  Marc xxv  — 

Item,  à  Perrin  Dadvid,  saussier x  — 

Et,  oultre,  requiert  ladicte  dame  à  monseigneur  son  espoux.  que 
ledit  Perrin  et  sa  femme  soient  paiez  et  contentez  de  leurs  salaires. 

Item,  à  Guillemin  de  Mons xl  livres 

Item,  à  Montbar xxv  — 

Item,  à  Jehan  Dardenay,  son  secrétaire  et  ar- 
gentier, pour  une  fois ce  escus  d'or. 

Item  à  Vincent  de  Crosses,  son  confesseur  et  aumosnier,  pour  une 
fois  ce  escus  d'or  et  sa  robe  de  drap  de  dampmas  noir,  fourrée  de 
gris,  laquelle  est  de  présent  en  manteau,  avecques  sa  chappelle  blan- 
che de  drap  d'or  complète  et  son  calipse  d'ax'gent,  son  messel,  la 
croix  de  la  chappelle,  les  chandelliers,  la  paix  et  les  burettes  d'argent, 
la  boëte  et  toutes  les  appartenances  d'icelle  chappelle;  et,  oultre  et 
avecques  ce,  sa  chambre  appelée  la  chambre  aux  lyons  toute  entière 
et  garnie  de  toutes  ses  pièces;  en  requérant  et  suppliant  à  mondit 
seigneur  son  espoux  que  il  lui  plaise  délaissier  et  délivrer  audit 
maistre  Vincent  ce  présent  lays. 

Item,  elle  laisse  à  Guillaume  Gruel  sa  robe  de  satin  gris,  fourrée  de 
martres  et  cent  escus  d'or,  pour  une  fois. 

Item,  à  Jehan  de  Benoist  la  somme  de  cent  francs  et  une  de  ses 
robes  de  satin  noir,  fourrée  de  menu  vair. 


592  APPENDICES 

Item,  à  la  fen)me  de  Jehan  de  Troissy  sa  ceinture  grise  ferrée  d'or. 

Item,  à  maistre  Adam  Martin,  son  cirurgien,  pour  une  fois,  la 
somme  de  l  livres. 

Item  ladicte  dame  veult  et  ordonne  expressément  que  le  veu  qu'elle 
a  fait  au  cuer  monseigneur  Saint- Vincent,  à  Dun-le-Roy,  soit  fait  et 
acomply,  et  donné  à  l'église  dudit  monseigneur  Saint-Vincent  une 
chappe,  d'une  de  ses  robes,  telle  qu'il  plaira  à  mondit  seigneur  son 
espoux,  et  veult  qu'elle  soit  armoiée  des  armes  d'elle. 

Item,  ladicte  dame  veult  et  ordonne  estre  paie  aux  exécuteurs  de 
feu  Pierre  Roussignol,  en  son  vivant  son  varlet  de  chambre  et  tail- 
landier, vint  escus  d'or  vielz,  lesquels  elle  lui  devoit  dès  longtemps, 
combien  qu'elle  cuide  en  avoir  paie  audit  Roussignol  la  moitié. 

Item,  veult  et  ordonne  icelle  dame  estre  paie  aux  exécuteurs  de 
feue  Isabeau,  jadis  femme  dudit  Roussignol,  sa  femme  de  chambre, 
XX  escus  d'or,  qu'elle  lui  devoit,  pour  deux  dyamens  que  icelle  Isabeau 
avoit  prestez  à  ladicte  dame,  pour  donner  à  sa  voulenté,  c'est  assa- 
voir, l'un  à  icelle  dame,  elle  estant  à  Bourges,  et  l'autre  elle  estant  à 
Gyen;  et  aussi,  pour  et  en  récompensacion  d'aucuns  biens  de  ladicte 
Isabeau,  que  icelle  dame  feist  prendre  après  le  trespas  d'icelle  Isabeau, 
desquelz  elle  feist  sa  volenté  et  dont  d'iceulz  avoit  à  faire. 

Item,  veult  et  ordonne  icelle  dame  que,  ce  qui  estoit  deu  ausdiz 
feuz  Pierre  Roussignol  et  Ysabeau,  sa  femme,  à  cause  de  leurs  gaiges 
et  salaires,  aux  jours  et  heures  de  leurs  trespas,  à  cause  du  service 
par  eulz  faiz  à  icelle  dame,  durant  le  temps  que  ilz  l'ont  servie,  soit 
paie  et  contenté  auxdiz  exécuteurs  desdiz  Rossignol  et  sa  femme. 

Item,  ladicte  dame,  considérant  que  ses"  amez  et  féaulx,  maistre 
Vincent  de  Groces,  son  confesseur  et  aumosnier,  et  maistre  Jehan  de 
Dardenay,  son  argentier,  l'ont,  par  bien  longtemps,  féablement  servie 
en  leur  temps,  usé  en  son  service,  pour  certaines  causes  justes  à  ce 
la  mouvans,  en  conscience,  voulant  son  âme  acquitter  et  descharger 
envers  Dieu  et  sesdiz  confesseur,  aumosnier  et  argentier,  et  subvenir  à 
leur  indigence  et  nécessité,  afin  qu'ils  puissent,  ou  temps  avenir,  vivre 
honnorablement  et  maintenir  leur  estât,  et  qu'ils  soient  tenus  à  prier 
Dieu  pour  l'âme  d'elle,  tant  qu'ils  vivront;  veult  et  ordonne,  par 
toutes  les  meilleures  voies  et  manières  que  faire  se  pourra,  que 
chacun  de  ses  diz  officiers,  c'est  assavoir  confesseur,  aumosnier  et 
argentier  ayent,  après  son  trespas,  deux  cens  livres  parisis  de  rente, 
à  prendre  et  parcevoir,  par  chacun  an,  le  cours  de  la  vie  de  chacun 
d'eulx,  tant  seulement  sur  sa  chastellenie  de  Verdun-sur-Soône,  à 
elle  appartenante,  par  appanage  à  elle  fait  par  monseigneur  son 
beau-frère  de  Bourgoingne,  ou  autrement;  voulans  que  assiette  en 
soit  faicte  bonne  et  convenable  audit  maistre  Vincent,  son  confesseur 
et  aumosnier,  de  deux  cens  livres  parisis  et  audit  maistre  Jehan  de 
Dardenay,  son  argentier,  d'autres  deux  cens  livres  parisis  de  rente, 
comme  dit  est,  par  ses  exécuteurs  cy  après  nommez,  en  tele  manière 
que  ses  diz  officiers  en  puissent  joir  franchement  et  paisiblement, 
sans  aucun  destourbier,  leur  vie  durant,  comme  dit  est.  Et  affin  que 
ceste  présente  provision  et  ordonnance  de  ce  présent  laiz  soit  ferme 
et  estable,  la  dicte  dame  prie  et  requiert  à  monseigneur  son  dit 


APPENDICES  593 

beau  frère  de  Bourgoingne,  tant  et  si  affectueusement  comme  elle 
puet  et  sur  toute  l'amour  et  fraternité  qu'elle  eust  oncques  à  lui, 
que  ce  que  dit  est  lui  plaise  accomplir;  et  veult  que,  par  ses  exécu- 
teurs, ou  aucun  d'eulx,  soit  requis  et  prié,  pour  et  au  nom  de  elle, 
qu'il  lui  plaise  laissier  et  souffrir  joir  et  user  sesdiz  confesseur,  au- 
mosnier  et  argentier  et  chacun  d'eulx  de  la  dicte  rente,  leurs  vies 
durans,  et,  se  mestier  est,  leur  en  facent,  s'il  leur  plaist,  bonne  as- 
siette, telement  que,  sans  aucun  empeschement,  ils  puissent  estre 
entièrement  paiez  de  leur  dit  laiz;  mondit  seigneur  de  Bourgoingne, 
son  dit  beau  frère,  qu'il  lui  plaise  considérer  que,  en  faveur  et  con- 
templacion  de  lui  et  des  siens,  elle  a  fait,  le  temps  passé,  aucunes  re- 
nunciations  de  plusieurs  grans  droiz,  comme  de  successions  de  père 
et  de  mère,  de  trois  mille  livres  de  rente  et  cent  mil  escus  d'or,  qu'elle 
devoit  avoir,  par  le  traittié  du  mariage  fait  de  feu  son  très  redoubté 
seigneur,  monseigneur  le  duc  de  Guienne,  daulphin  de  Viennois,  cui 
Dieu  pardoint,  et  d'elle  ;  et  voulut  que,  après  son  déceps,  lui  et  les 
siens  succédassent  à  lui  et  lui  revensissent  toutes  ses  terres  et  sei- 
gneuries qui  lui  appartiennent;  et  que,veu  Testât  dont  elle  est  partie, 
duquel  elle  avoit  bien  peu  amande,  et  les  honneurs  mondains  qu'elle 
a  euz  en  ce  monde,  que  il  lui  plaise  qu'elle  ne  soit  point  de  pire  con- 
dicion,  quant  à  son  ordonnance  de  dernière  voulenté,  qui  est  bien 
petite,  que  seroit  une  autre  personne  de  plus  bas  estât,  qui  pourroit 
libéralment  ordonner  de  ses  biens,  pour  le  salut  et  salvacion  de  son 
âme.  Oultre,  la  dicte  dame  prie,  supplie  et  requiert  à  son  beau  frère, 
en  l'honneur  de  Dieu,  nostre  créateur,  et  tant  humblement  qu'elle 
puet,  que,  après  son  trespas,  il  ait  souvenance  d'elle,  à  faire  aucune 
ordonnance  salutaire  en  commémoracion  d'elle,  pour  le  salut  de  son 
âme,  ainsi  qu'il  lui  semblera,  à  son  bon  plaisir,  estre  à  faire. 

Item  ladite  dame  veult  et  ordonne  deux  chappelles  estre  fondées  en 
une  des  églises  de  Paris,  ou  en  deux,  se  mondit  seigneur  son  espoux 
voit  que  mieuLx  soit,  lesquelles  chappelles  elle  avoit  promis  fonder  ou 
faire  fonder,  dès  longtemps,  pour  aucunes  causes  à  ce  lamouvans. 

Et  aussi,  pour  le  salut  des  âmes  de  feuz  nosseigneurs  les  feuz  ducs 
et  duchesse  de  Bourgoingne  ses  ayeul,  ayeulc,  père  et  mère,  pour  elle 
et  pour  autres  ses  parens  et  amis  trespassez,  l'une  desquelles  cha- 
pelles elle  veult  estre  fondée  en  Tonneur  et  révérence  de  Nostre 
Dame  et  douée  de  xxiv  livres  p.  de  rente  admortie,  pour  quatre  basses 
messes  la  sepmaine,  à  telx  jours  que  ses  exécuteurs  adviseront,  et 
que  le  chappellain  d'icelle  chappelle  sera  tenu  et  obligé  de  célébrer, 
par  chacune  sepmaine  de  Nostre  Dame ,  ou  cas  que  ausdiz  jours  ne 
seroit  feste  tele  que  il  conveinst  muer  le  service,  ouquel  cas  ledit 
chappellain  sera  tenu,  après  sa  messe,  dire  le  service  de  Nostre  Dame, 
et  si  sera  tenu,  par  chacun  desdiz  jours  que  il  aura  célébré  lesdictes 
messes,  de  dire  le  seaulme  de  de  profundis,  pater  noster,  et  les  orai- 
sons de  inclina,  quœsumus,  Domine,  pro  tua  pietate  et  fidelium;  et 
l'autre  chappelle  sera  fondée  en  l'onneur  de  monseigneur  Saint-Chris- 
tofle,  de  Saint-Leu  et  de  Saint-Gile  et  douée  de  pareille  rente  admor- 
tie que  dessus,  pour  quatre  basses  messes  la  sepmaine;  c'est  assavoir, 
l'une  de  monseigneur  Saint-Cristoûe,  l'autre  de  monseigneur  Saint- 

RlCHEMONT.  38 


594  APPENDICES 

Leu  et  l'autre  de  laonseigneur  Saint-Gile  et  la  quarte  des  trépassés,  ou 
cas  toutes  voies  que  il  ne  seroit  feste  solempnelle  le  jour,  par  quoy 
il  convenist  muer  le  service,  ouquel  cas,  après  sa  messe  du  jour,  il 
sera  tenu  de  dire  messe  du  saint  dont  il  eust  célébré  sa  messe,  se  ce 
n'eust  esté  l'empeschement  de  ladite  feste,  avesques  le  seaulme  de 
De  profundis  et  oroisons  dessus  diz. 

Item  ladicte  dame  supplie  et  requiert  à  monseigneur  son  espoux 
que  son  présent  testament  et  les  lais  et  ordonnances  et  fondacion 
contenans  en  ycellui  il  lui  plaise  de  tout  son  pouvoir  entériner  et 
accomplir,  le  plus  brief  que  faire  se  pourra,  en  aiant  tous  jours  l'âme 
d'elle  pour  recommandée  après  sa  mort,  aussi  bien  comme  en  son 
vivant,  et  comme  il  vouldroit,  se  le  cas  feust  advenu,  qu'elle  eust  eu 
et  fait  de  lui. 

Item,  oultre,  prie,  requiert  et  supplie  ladicte  dame  à  mondit  sei- 
gneur son  espoux,  que  il  lui  plaise  vouloir  croire  et  adjouster  foy  en 
ce  que  le  dit  maistre  Vincent  de  Groces,  son  confesseur  et  aumosnier 
dessus  nommé,  lui  dira  et  exposera,  de  bouche,  de  par  elle,  et  lui 
bailler  ce  qu'elle  lui  a  ordonné  et  chargé  lui  requérir  et  demander, 
pour  convertir  et  emploier  en  l'acquict  et  descharge  et  pour  le  salut 
et  remède  de  son  âme,  et,  oultre,  avoir,  pour  l'amour  et  en  mémoire 
d'elle,  icellui  maistre  Vincent  et  icellui  tenir  en  sa  bonne  grâce  et 
recommandacion,  pour  contemplacion  des  bons  et  agréables  services 
que  il  a  faiz  à  icelle  dame,  en  lui  remonstrant  le  salut  de  l'âme  d'elle 
et  l'admonnestant  de  sa  conscience,  où  il  a  fait  diligemment  son 
devoir  et  soy  loyaulment  acquittié. 

Item,  supplie  et  requiert  la  dicte  dame  à  monseigneur  le  duc  de 
Bourgoigne,  son  beau  frère,  que  il  lui  plaise  avoir  l'âme  d'elle  pour 
recommandée  et  vouloir  acomplir,  ou  aidier  à  accomplir  son  dit 
présent  sien  testament;  et,  pour  l'acomplissement  d'icellui,  et  afin 
qu'il  soit  plus  diligemment  acomply,  ensemble  la  fondacion  desdictes 
chapelles;  et,  oultre,  lui  plaise  vouloir  et  consentir  que  la  revenue  de 
deux  années  des  terres,  lesquelles  ladicte  dame  tient  et  possède,  pour 
le  présent,  et  lesquelles  lui  doivent  revenir  après  le  trespas  d'elle, 
soit  receue  par  ses  exécuteurs,  ou  leurs  commis  ;  ce  que  il  semble  à 
ladicte  dame  que  mondit  seigneur  ,  son  beau  frère  peut  licitement 
faire  et  accorder,  attendu  et  en  regard  qu'elle  lui  a,  de  tout  son 
povoir,  compleu  et  à  ses  plaisirs,  pour  tousjours  entretenir  son 
amour;  mesmement  que,  à  sa  prière  et  requeste,  que  quant  elle  voulut 
espouser  mondit  seigneur  son  espoux,  elle  lui  quitta  et  délaissa  la  somme 
de  cent  mil  escus  d'or,  lesquels  lui  avoient  esté  promis  par  feu  mon- 
seigneur le  duc  de  Bourgoigne,  son  père,  au  traittié  du  mariage  de 
feu  monseigneur  le  duc  de  Guienne,  daulphin  de  Viennois  et  d'elle, 
et  aussi  que  il  scet  qu'elle  n'a  riens  eu  en  biens  meubles  et  héritaiges 
des  successions  de  nos  seigneurs  leurs  feuz  père  et  mère,  et  que  icellui 
monseigneur  son  beau  frère  a  assez  et  plusieurs  belles  autres  reve- 
nues, requérant  non  estre  par  lui,  en  ce,  esconduit,  attendu  et  consi- 
déré que  icelle  présente  requeste,  qu'elle  lui  fait,  est  faicte  en  ses 
derreniers  jours,  qui  est  pour  le  salut  et  remède  tant  de  son  âme 
que  de  leurs  diz  feuz  père  et  mère. 


APPENDICES  *  S95 

Item  ladicte  dame  supplie  et  requiert  à  monseigneur  le  duc  de 
Bretaigne,  son  beau-frère,  que  il  lui  plaise  pritr  Dieu  pour  l'âme 
d'elle  et  icelle  son  âme  avoir  pour  recommandée,  et  que,  se  il  l'a  bien 
amée  en  sa  vie,  que  il  lui  plaise,  après  sa  mort,  la  encores  plus  amer 
en  son  âme,  en  lui  requérant  qui  il  lui  plaise  croire  le  dessusdit  mais- 
tre  Vincent  de  Grosses,  son  aumosnier  et  adjouster  foy  en  ce  que  il 
lui  dira,  de  bouche,  de  par  elle,  et  le  acomplir  à  son  povoir. 

Item,  ladicte  dame  veult  et  ordonne  que  mondit  seigneur  son  espoux 
ait  regart  des  laiz  par  elle  laissez  et  faiz  à  ses  officiers;  se  il  voit  que 
icelle  dame  leur  laisse  trop  pou,  eu  regard  aux  services  que  sesdiz 
serviteurs  lui  pevent  avoir  faiz,  que  iceulz  laiz  il  puisse  augmenter  à 
chacun  d'eulx,  où  il  verra  estre  à  faire,  à  sa  bonne  voulenté  et  dis- 
crécion,  ce  que  il  lui  plaira,  sans  riens  diminuer  desdiz  laiz. 

Pour  lesquelles  choses  dessusdictes  et  chacune  d'icelies  faire  enté- 
riner et  acomplir  et  mectre  à  exécucion,  de  point  en  point,  ainsi  et 
par  la  manière  que  dessus  est  dit,  icelle  dame  fait,  nomme  et  eslit 
ses  exécuteurs  et  féaulx  commissaires  mondit  seigneur  le  conte  de 
Richemont,  son  espoux,  monseigneur  le  duc  de  Rourgoigne,  son 
beau  frère,  maistre  Jehan  Guillepou,  chanoine  de  Nostre  Dame  de  Paris 
et  aumosnier  de  mondit  seigneur  le  conte  de  Richemont,  ledessus 
nommé  maistre  Vincent  de  Crosses,  sondict  aumosnier,  Jehan  de  la 
Haye,  escuier,  maistre  d'ostel  dudit  seigneur,  maistre  Estienne  Che- 
valier, trésorier  d'icellui  seigneur,  et  Jehan  Dardenay,  secrétaire  et 
argentier  de  ladicte  dame  ;  ausquelx,  ensemble  aux  trois  ou  deux 
d'iceulx,  dont  mondit  seigneur  le  conte  son  espoux  soit  l'un  et  le 
principal  et  après  lui  et  mondit  seigneur  de  Bourgoigne  ledit  maistre 
Vincent  son  aumosnier  soit  principal  et  toujours  l'un  desdiz  trois  ou 
deux,  elle. donne  povoir  de  ce  faire  et  mettre  à  exécucion,  etc.;  es 
mains  desquelz  elle  se  desmist  de  tous  ses  biens,  etc.  ;  voulans  que, 
tantost  après  son  trespassement,  ils  en  preingnent  réaiment  et  de  fait 
la  possession  et  saisine  et  en  soient  saisiz  et  vestus,  jusques  à  plain 
acomplissement  de  cestui  présent  scien  testament,  le  compte  et  audi- 
cion  luquel  elle  soubzmet,  avecques  ses  biens,  à  la  court  de  Parle- 
ment, où  à  telle  autre  court  et  jurisdicion  que  il  plaira  à  mondit 
seigneur  son  espoux  et  à  sa  bonne  discrécion  et  de  sesdiz  autres  exé- 
cuteurs; et  révoque  tous  autres  testamens,  codicilles  ou  ordonnances 
de  derinière  voulenté,  s'aucuns  en  avoit  faiz  paravant  cestui,  auquel 
elle  se  arreste,  et  le  veult  valoir  et  sortir  son  plain  effect,  force  et 
vertu,  comme  testament  ou  ordonnance  fait  en  sa  dernière  voulenté, 
en  la  meilleure  forme  et  manière  que  valoir  devra  et  pourra,  selon 
droit  et  coustume. 

Fait  et  passé  par  ladicte  dame,  l'an  mccccxli,  le  dimenche  xiv  jour 
du  mois  de  janvier,  par  devant  Jehan  Quignon  et  Girard  de  Conflans, 
notaires  du  Roy  nostre  seigneur  ou  Chastellet  de  Paris. 

Le  mercredi,  xxxi*  et  derrenier  jour  du  mois  de  janvier,  l'an  mil 
quatre  cens  quarente  et  ung,  devant  diz,  la  dessus  nommée  Madame  de 
Guienne,  en  la  présence  de  nous,  notaires  cy  après  nommez,  qui  devers 
elle  estions  transportez,  par  son  commandement,  pour  le  fait  de  l'or- 
donnance par  elle  faicte  par  son  testament,  pour  savoir  se  elle  y  vou- 


596  APPENDICES 

loit  rien  diminuer  ne  augmenter,  et  que  nous,  notaires,  lui  eusmes  de- 
mandé se  son  plaisir  estoit  que  nous  le  lui  leussions,  pour  soy  advertir, 
respondi  que  il  lui  souvenoit  bien  de  ce  qu'elle  y  avoit  fait  mectre  et 
dit,  et  lui  souffisoit  ;  vouloit  que  il  se  tenist,  et  ratiffloit  et  confermoit 
ycellui  en  la  manière  que  dit,  fait  et  passé  l'avoit,  excepté  es  points 
qui  s'ensuivent  :  c'est  assavoir  que,  ou  regard  de  sa  sépulture,  par 
elle  ordonnée,  par  sondit  testament,  sur  ce  pas  qu'elle  soit  sépulturée 
en  la  chapelle  de  Nostre-Dame-de-Recouvrance,  aux  Carmes,  à  Paris, 
ainsi  que  ordonné  l'avoit,  ou,  se  il  ploist  mieulx  à  ses  exécuteurs, 
qu'elle  soit  mise  et  sépulturée  ou  millieu  du  cuer  de  ladicte  église 
des  Carmes,  elle  y  veult  estre  tout  à  la  voulenté  de  sesdiz  exécuteurs  et 
qu'il  en  soit  fait  à  leur  voulenté.  Et,  en  oultre,  veult  et  ordonne  que 
sur  elle  soit  faicte  une  tumbe  eslevée,  belle  et  honnorable,  telle  que  à 
sa  personne  et  à  son  estât  appartient. 

Item,  oultre,  elle  laisse,  en  augmentant  sondict  testament,  par  ma- 
nière de  codicile,  c'est  assavoir  à  messire  Jehan  Guérin,  prestre,  son 
chappelain,  xxx  livres  tournois. 

Item,  à  Montjoie  le  hérault  trente  francs;  en  priant,  oultre,  par 
ladicte  dame  audit  monseigneur  son  espoux  que,  pour  l'amour  et  en 
mémoire  d'elle,  il  vUeille  avoir  ledit  Montjoie  pour  recommandé  et 
non  lui  vouloir  faillir,  mais  aidier  et  secourir  à  avoir  sa  vie. 

Item,  elle  laisse  à  Jehan  des  Noyers,  fils  de  sa  lavendière,  xxy  livres 
tournois,  pour  l'envoier  à  VescoUe,  ce  pour  considéracion  que  il  avoit 
servi  comme  clerc  en  sa  chappelle. 

Et  à  messire  Guillaume  de  Vendelles,  chevalier,  son  maistre  d'ostel, 
pour  sa  femme,  une  robe  de  satin  noir,  fourrée  de  menu  veir,  qu'elle 
avoit,  par  son  te'stament,  laissée  à  Jehan  de  Benoist. 

Et,  quant  à  ses  exécuteurs  nommez  en  sondict  testament,  elle  veult 
que  ilz  demeurent  ses  exécuteurs,  excepté  Jehan  de  la  Haye,  escuyer, 
qu'elle  révoque,  et,  en  lieu  de  lui,  faict  et  nomme  son  exécuteur, 
avecques  ses  autres  exécuteurs  nommez  oudict  testament,  ledict  mes- 
sire Guillaume  de  Vendelles,  son  maistre  d'ostel.  Toutesvoies  elle  dist 
et  déclaira  qu'elle  vouloit  enpressement  que,  après  monseigneur  son 
espoux  et  monseigneur  son  beau  frère  de  Bourgoingne,  maistre  Vincent 
de  Crosses,  son  aumosnier  demeure  et  feust  son  exécuteur  principal, 
comme  elle  l'avait  voulu  et  ordonné  par  son  dict  testament.  Ce  présent 
codicille,  passé  par  ladicte  dame,  l'an  et  jour  dessusdiz,  par  devant 
Jehan  Quignon  et  Girard  de  Conflans,  notaires  du  Roy,  nostre  sire, 
ou  Chastellet  de  Paris. 

Non  signé. 

(Arch.  de  la  Loire  Inférieure,  cass.  9,  E.  24.  Belle  copie  du  temps, 
sur  papier.) 


APPENDICES  597 

LXXVIII  bis. 

CHARLES  VU  DONNE  FONTENAY-LE-COMÏE  A  RIGHEMONT 

(1442,  10  mars) 
(p.  330,  note  1). 

Lettres  par  lesquelles  le  Roy  veut  que  les  lettres  du  don  faict  à  Artur 
de  Bretaigne,  connestable  de  France,  de  la  ville  et  chastellenie  de  Fonte- 
nay-le-Conte  lui  soient  entérinées  {144i,  24  novembre). 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lectres  verront  salut.  De  la  partie  de  nostre  très  chier  et  amé 
cousin,  Artur  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de  Partc- 
nay,  connestable  de  France,  nous  a  esté  exposé  que,  comme  naguères, 
pour  certaines  causes  et  considéracions  à  ce  nous  mouvans,  nous  luy 
avons  baillé  et  délaissé,  sa  vie  durant,  noz  chastel,  ville  et  chastellenie 
de  Fontenay-le-Conte,  en  nostre  pais  de  Poictou,  avec  toutes  les  reve- 
nues et  appartenances  et  tout  droict  de  seigneurie  et  de  ressort  que 
avoir  y  povoient,  tant  en  les  rentes  et  revenues,  que  en  justice  haulte, 
moyenne  et  basse,  reliefz  et  rachapts,  hommes  et  femmes  de  corps 
qui  anciennement,  ainsi  que  plus  à  plain  est  contenu  et  déclairé  en 
noz  autres  lectres,  desquelles  la  teneur  ensuit  : 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  etc.  Comme,  dès  pièca,  par  noz 
autres  lectres  patentes,  données  le  ix"  jour  de  mars,  l'an  de  grâce  mil 
quatre  cens  vingt  quatre  *,  nous  eussions  baillié,  délivré  et  délaissié  à 
nostre  très  chier  cousin,  le  conte  de  Richemont,  connestable  de 
France,  pour  partie  du  douaire  de  feu  nostre  très  chière  et  amée  suer 
et  cousine,  la  duchesse  de  Guienne,  lors  sa  femme  et  espouse,  avec 
autres  terres,  les  chastel,  ville  et  chastellenie  de  Fontenay-le-Conte, 
en  Poictou,  avec  tous  les  revenus  et  appartenances,  tant  en  cens, 
rente  de  grains  et  d'argent,  que  en  feux,  eaues,  estangs,  forestz, 
moulins,  pi'ez,  vignes,  et  autres  fruictz  et  prouffiz  quelconques  et 
générallement  de  droict  de  seigneurie  et  de  ressort  que  avoir  y  po- 
vons,  tant  en  justice  haulte,  moyenne  et  basse,  hommes  et  femmes  de 
corps,  fiefz,  arrière-flefz,  reliefz,  rachapts  que  autrement,  en  quelque 
manière  que  ce  soit,  réservé  à  nous  tant  seulement  les  foy  et  hom- 
mage que,  pour  ce,  nous  feist  dès  lors  nostredict  cousin  et  aussi  le 
ressort  et  souveraineté,  à  cause  de  ladicte  chastellenie,  et  soubz  le 
ressort,  sans  moyen,  de  nostre  court  de  parlement,  ainsi  que  plus  à 
plain  est  contenu  en  nosdictes  lettres,  sur  ce  faictes,  pour  ledict 
douaire  ;  et  il  soit  ainsi  que,  de  nouvel,  nostredicte  feue  suer  et  cou- 
sine soit  allée  de  vie  à  trespassement,  par  quoy  nostredict  cousin  le 
connestable  nous  a  supplié  et  requis  que,  en  considérant  les  services 
qu'il  nous  a  faictz  et  a  bonne  voulenté  de  faire,  luy  voulsissions 
donner  et  laisser,  à  sa  vie,  lesdiz  chastel,  ville  et  chastellenie,  en  et 
ainsiqu'il  les  a  tenuz,  jusques  au  jour  du  trespassement  de  nostredicte 
feue  suer  et  cousine,  sa  femme  et  espouse,  scavoir  faisons  que  nous, 

1.  Voy.  ci-dessus  p.  113  et  note  3. 


598  '  APPENDICES 

considérans  les  grans,  louables  et  agréables  services  que  longuement 
nous  a  faictz  et  chacun  jour  nous  faict  nostredit  cousin,  au  faict  de 
noz  guerres  et  autrement,  en  plusieurs  manières,  voulans  les  lui 
recongnoistre  ;  pour  ces  causes  et  autres  à  ce  nous  mouvans,  avons 
donné,  octroyé,  laissé,  donnons,  octroyons  et  laissons,  par  ces  pré- 
sentes, à  icelui  nostredict  cousin  lesdiclz  chastel,  ville  et  chastellenie 
de  Fontenay-le-Conte,  avec  tous  les  revenus,  appartenances  et  appen- 
dances  d'iceulx,  tant  en  rentes  de  grains  et  d'argent  que  en  foretz, 
eaues,  foires,  moulins,  prez,  vignes  et  autres  fruictz  et  prouffiz  quel- 
conques, et  générallement  tout  le  droict  de  seigneurie  et  de  ressort 
que  avoir  y  povons,  tant  en  justice  haulte,  moyenne  et  basse,  hommes 
et  femmes  de  corps,  fiefz,  arrière-fiefz,  reliefz,  rachapts  que  autre- 
ment, en  quelque  manière  que  ce  soit,  réservé  à  nous  tant  seulement 
les  foy  et  hommage,  pour  ce  nous  sera  tenu  de  faire  nostredict  cousin 
et  aussi  le  ressort  et  souveraineté  de  ladicte  chastellenie  et  soubz  le 
ressort,  sans  moyen,  de  nostredict  cousin,  sa  vie  durant,  tant  seule- 
ment, tout  ainsi  et  par  la  forme  et  manière  qu'il  est  contenu  plus  à 
plain  en  nosdictes  autres  lectres  sur  ce  faictes  du  douaire  et  qu'il  en 
a  jouy,  du  vivant  de  nostredicte  feue  suer  et  cousine,  jusques  au  jour 
de  son  trespassement; 

Si,  donnons  en  mandement,  par  ces  mesmes  présentes,  à  noz  amés 
et  féaulx  gens  de  nostre  parlement  et  de  noz  comptes,  aux  généraux 
conseillers  sur  le  faict  de  noz  finances  et  nostre  trésorier,  au  sénes- 
chal  de  Poictou  et  à  tous  noz  autres  justiciers  et  officiers,  ou  à  leurs 
lieuxtenans  présens  et  advenir  et  à  chacun  d'eulx,  si  comme  à  lui 
appartendra,  que  de  noz  présens  don  et  octroi  et  delà  possession  des- 
diz  chastel,  ville  et  chastellenie  de  Fontenay-le-Comte,  appartenances 
et  appendances,  ainsi  que  par  la  manière  ci  dessus  est  déclairé,  facent, 
souff'rent  et  laissent  jouir  et  user  nostredict  cousin  plaineraent  et 
paisiblement,  sans  aler,  faire  aler,  ne  venir  à  l'encontre,  par  quelque 
manière  que  ce  soit,  et  sans  lui  en  faire,  ou  donner  aucun  empesche- 
meut  et  le  facent  obéir  par  tous  les  vassaux  etsubgectz  de  ladicte  terre 
et  chastellenie,  ausquelz  nous  mandons,  par  ces  dictes  présentes,  que 
ainsi  le  facent,  sans  y  faire  quelconque  difficulté,  nonobstant  que  par 
cy  devant  eussions,  par  adventure,  en  autre  manière  disposé  de  la- 
dicte terre  et  chastellenie  et  icelle  autre  part  baillée  et  transportée,  ce 
que  ne  voudrions  préjudicier  ne  sortir  aucun  elfect  au  préjudice  de 
nostredict  cousin,  ne,  pour  ce,  y  estre  différé,  et,  en  tant  que  mestier 
seroit,  les  lui  promectons  garantir  envers  et  contre  tous,  et,  par  rap- 
portant, pour  une  fois,  coppie  de  ces  présentes,  ou  vidimus  d'icelles, 
faicts  souby  scel  royal,  voulons  nostre  receveur,  qui  en  debvoit  tenir 
compte,  estre  tenu  doresenvant  quicte  et  deschargé  par  nosdiz  gens 
des  comptes  et  partout  où  mestier  lui  sera.  En  tesmoing  de  ce,  nous 
avons  faict  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes.  Donné  à  Lezignen,  le 
xe  jour  de  mars,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  quarante  et  ung  et  de 
nostre  reigne  le  vingtiesme; 

Lesquelles  nos  lectres  dessus  transcriptes  iceluy  nostredict  cousin  a 
faict  présenter  en  nostre  court  de  parlement,  pour  icelles  faire  publier 
et  en  avoir  l'entérinement,  mais  nostre  procureur  s'est  opposé  à  l'en- 


APPENDICES  599 

contre  i,  soubz  ombre  que  l'on  dit  avoir  de  certaines  ordonnances, 
qu'il  dict  par  nous  avoir  esté  faictes,  de  non  donner  ou  alliéner  aucune 
chose  de  nostre  domaine,  et  de  certaines  révocacions  et  deffences  qu'il 
dict  de  par  nous  leur  avoir  esté  faictes  de  ne  consentir  à  quelque 
donacion  que  faissions  de  nostredict  domaine,  et  a  tant  débattu  et 
deffendu  que  par  nostredicte  court  a  esté  dict  que  les  dictes  let- 
tres ne  seroient  point  entérinées,  et,  pour  ce,  double  nostredict  cousin, 
que,  par  ce  moyen,  l'effect  de  nosdictes  lectres  et  le  don  que  lui  avons 
faict  de  ladicte  terre  et  seigneurie  soient  de  nulle  valeur,  se  par  nous 
ne  luy  estoit  pourveu,  de  nostre  gracieuse  provision,  requérant  hum- 
blement icelle  ;  pour  ce  est-il  que  nous,  considérées  les  causes  pour 
lesquelles  lui  avons  faict  ledict  don  et  les  grans,  notables  et  con- 
tinuelz  services  que  nostredict  cousin  nous  a  toujours  depuis  faicts, 
au  faict  de  nostre  guerre ,  où  continuellement  il  s'est  tenu ,  et 
encores  est  occupé  chacun  jour,  à  grant  charge,  et  est  disposé  de  faire 
tousjours  de  bien  en  mieulx,  avons,  pour  ces  causes,  et  autres  grandes, 
jusics  et  raisonnables  à  ce  nous  mouvans,  et  par  l'advis  et  délibéracion 
de  nostre  grant  Conseil,  dict  et  déclaré,  disons  et  déclarons,  par  ces 
dictes  présentes,  que,  considéré  que  ce  n'est  seulement  que  don  à  vie, 
qui  n'est  pas  alliénacion  de  nostre  domaine,  nostre  plaisir,  voulenté  et 
entencion  estre  telz  que,  nonobstant  ladicte  opposicion  faicte  par 
nostre  procureur,  à  rencontre  de  l'entérinement  de  nos  dictes  lectres, 
nostre  dict  cousin  ait  et  tienne,  sa  vie  durant,  nosdictzchastel  et  chas- 
tellenie  de  Fontenay-le-Conte,  avec  tous  les  revenus  et  appartenances, 
tant  en  cens,  rentes,  grains  et  argent,  eaues,  forestz,  estangs,  moulins, 
foires,  prez,  vignes  et  autres  fruictz  et  proufflz  quelconques  et  général- 
lement  tout  le  droit  de  seigneurie  que  avoir  y  povons,  tant  en  justice 
haute,  moyenne  et  basse,  hommes  et  femmes  de  corps,  fiefz,  arrière- 
fiefz,  reliefz,  rachaptz  que  autrement,  en  quelque  manière  que  ce  soit, 
réservé  à  nous  tant  seullement  les  foy  et  hommage  que  nous  en  faict 
nostredict  cousim,  ainsi  que  plus  à  plain  est  contenu  esdictes  lectres; 
et,  d'abondant,  en  tant  que  mestier  est,  lui  avons,  de  nouvel,  donnez 
et  baille?,  donnons  et  baillons,  de  grâce  espéciale,  plaine  puissance 
et  auctorité  royalle,  par  ces  dictes  présentes,  sa  vie  durant,  tout  ainsi 
qu'il  est  contenu  en  noz  autres  lectres  de  don,  excepté  toutesfois  que 
nous  voulons  doresenavant  que  la  dicte  terre  et  chastellenie  de  Fon- 
tenay-le-Gonte  et  les  hommes  et  subgectz  d'icelle  ressortissent  et  res- 
sortiront  par  devant  nostre  seneschal  de  Poitou,  ou  son  lieutenant,  à 
son  siège  de  Niort,  ainsi  et  pareillement  que  font  les  terres  de  Par- 
tenay,  Youlvent,  Mervent  et  autres,  que  tient  nostredit  cousin,  en  noz 
pais  et  conté  de  Poitou;  et,  en  oultre,  voulons  que  les  sentences,  pro- 
cez,  appoinctemens  et  exploicts  faicts  et  donnez  par  le  chastellain, 
seneschal  et  autres  noz  officiers,  commis  et  ordonnez  en  ladicte  terre 
de  Fontenay  par  nostredict  cousin,  depuis  nostredict  don  et  qui 
seront  donnez  doresenavant  vallent  et  tiennent  et  y  soit  telle  foy 
adjoustée  ;  et  les  avons  authorisez  et  authorisons  comme  se  nosdictes 
lectres  eussent  esté  entérinées  par  nostredicte  cour  ;  et  que  nostredict 

^.  Voy.  ci-dessous,  même  appendice,  n»  2. 


600  APrEîSDlCES 

cousin  ait  et  lui  demeure  tout  ce  qu'il  en  a  pris  et  perceu,  depuis  la 
dabte  de  nosdictes  premières  lectres  de  don  que  lui  en  avons  faict 
jusques  à  présent  et  qu'il  en  prendra  doresenavant,  sadicte  vie  durant, 
sans  ce  que  en  soit  tenu  rendre  et  restituer  aucune  chose  à  nous,  ne 
à  autre  de  par  nous,  en  quelque  manière  que  ce  soit,  mais  voulons 
qu'en  rapportant,  pour  une  fois  seulement,  ces  présentes,  ou  vidimus 
d'icelles,  faict  soubz  scel  royal,  auquelvoulons  plaine  foy  estre  adjous- 
tée,  comme  à  ce  présent  original,  avec  reconnaissance  sur  ce  de  nos- 
tredict  cousin,  nostre  receveur  ordinaire  de  Poictou,  ou  autre  qui 
en  debvroit  tenir  compte,  soit  et  demeure  quicte  et  deschargé,  par- 
tout ou  besoing  sera,  pourveu  que  nostredict  cousin  sera  tenu  de 
payer  fiefz  et  aumosnes  et  autres  charges  ordinaires  et  accoustu- 
mées.  Si,  donnons  en  mandement,  par  ces  mesmes  présentes,  à  noz 
amez  et  féaux  gens  de  noz  comptes  et  trésoriers  à  Paris,  au  senes- 
chal  de  Poictou  et  à  tous  noz  autres  justiciers  et  officiers,  ou  à  leurs 
lieuxtenans,  ou  à  chacun  d'eulx,  sr  comme  à  lui  appartendra,  en 
obtempérant  à  nostre  présente  voulenté  et  ordonnance,  ilz  entérinent 
et  expédient,  de  poinct  en  poinct  cesdictes  présentes,  selon  leur 
forme  et  teneur,  et  facent,  souffrent  et  laissent  nostredict  cousin 
jouir  de  nosdictz  don,  voulenté  et  octroy  plaiuement  et  paisiblement, 
sans  y  faire  quelconque  delay,  reffus  ou  difficulté,  ne  venir  ou  souf- 
frir venir  à  l'encontre,  par  quelque  manière  que  ce  soit,  car  ainsi 
nous  plaist  et  nous  voulons  estre  faict,  et  à  nostredict  cousin  l'avons 
octroyé  et  octroyons,  de  grâce  espècial,par  cesdictes  présentes,  nonob- 
stant ladicte  opposicion  et  ledict  appoinctement  qui  s'en  est  ensuivy,  de 
nostredicte  court  de  parlement,  allégacions  ou  opposicions  faictes,  ou 
que  pourroit  faire  nostre  procureur,  auquel  et  à  tous  autres,  quant  à 
ce,  nous  imposons  silence,  et  quelconques  révocacions,  ordonnances, 
restrinctions,  mandemens  ou  deffenses  par  nous  faictes  ou  à  faire  au 
contraire.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  faict  mectre  nostre  scel  à  ces 
présentes,  ordonné,  en  l'absence  du  grant.  Donné  à  Nancy,  en  Lor- 
raine, le  XXIV*  jour  de  novembre,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  qua- 
rante quatre  et  de  nostre  reigne  le  xxni«.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  en 
son  grant  Conseil, 

Delaloere. 

(P.  2531,  f"5  258  v°,  264  v".  Copie  moderne,  qui  semble  assez  fautive.) 


LXXVIII  bis. 

N»  2.  LE  PARLEMENT  REFUSE  d'ENTÉRINER  LES  LETTRES  PAR  LESQUEL- 
LES CHARLES  VII  A  DONNÉ  FONTENAY  AU  CONNÉTABLE. 

Dans  un  registre  du  Parlement  (X'a  4799,  f"  92  v»)  on  lit,  à  la  date 

jeudi,  7  juin  1442  : 

Pour  le  connestable  de  France  a  "esté  requis  l'entérinement  des 
lectres  du  Roy,  qui  lui  a  donné  la  ville,  terre  et  seigneurie  de  Fonte- 
nay-le-Conte.  Au  contraire,  Jouvenel,  pour  le  Roy,  dit  que,  par  les 
ordonnances  royales  qui  sont  honorables  et  nécessaires  à  la  couronne 


APPENDICES  601 

de  France,  le  Roy  ne  doit  aliéner  quelque  chose  de  son  demaine,  et 
voit  l'en  asses,  par  les  transpors  et  aliénacions  du  temps  passé  le  do- 
maine du  Roy  estre  tant  deminué  que,  par  faulte  du  demaine,  le  pou- 
vre  peuple  subject  souffre  beaucoup.  Dit  que,  d'ancienneté,  les  Roys 
de  France,  le  Roy  nostre  sire,  en  leur  sacre,  ont  promis  et  juré  ne 
aliéner  ne  transporter,  et  le  Roy  aussi,  par  plusieurs  foiz  et  expressé- 
ment l'a  souvent  défendu,  et  ordonné  que,  s'il  faisoit  le  contraire,  que 
n'y  fust  ne  soit  obtempéré  ;  l'a  dit  de  bouche  ;  en  apparaîtra  aussi  par 
la  chambre  des  comptes;  et,  mesmement,  aussi  le  fist  le  Roy,  l'an  XXXIX 
et  voulut  et  déclara  que  tout  ce  qu'il  seroit  fait  au  contraire  soit  nul. 
Dit  qu'il  est  nécessaire  et  plus  qu'expédient  tenir  et  garder  lesdictes 
ordonnances  et  défenses.  Dit  que  la  conté  de  Poictou  est  de  belle  et  de 
grant  estendue,  consioutant,  en  aucuns  lieux,  es  fins  du  royaume,  où 
il  a  plus  grant  nombre  de  baronies  et  seigneuries  qu'en  duchié  ne  conté 
de  ce  royaume,  comme  Thouars,  Partenay,  Chastellerault,  la  viconté 
d'Auzay,  et  autres  plusieurs  ;  et  est  bien  raisonnable  et  convenable  que 
le  conte  de  Poictou,  à  tout  le  moins,  est  (pour  ait)  autant  de  demaine  que 
nul  des  seigneurs  subjectz  dudit  conte.  Dit  que  Fontenay-le-Viconte 
est  plus  grant  chose  que  la  chastellenie  de  Poictiers;  seulement  la 
censé  du  Chaiet(?)  vault  par  an  xv"  escuz,  et  s'extend  ladicte  chastel- 
lenie de  Fontenay  jusques  au  Port  de  Piles.  Dit  qu'il  y  a  plusieurs  con- 
tez en  ce  royaume  qui  ne  valent  la  dicte  terre  de  Fontenay.  Dit  que 
le  connestable  es  toit  présent  quant  le  Roy  fist  ses  ordonnances  et  dé- 
fenses; il  les  conseilla  faire,  contre  les  autres  seigneurs;  et  cuide  que, 
qui  lui  en  demanderoit  son  adviz,  que  encores  diroit-il  que  ses  lectres 
ne  sont  raisonnables.  Dit  que  ne  veult  dire  que  le  connestable  n'ait 
bien  servy,  mais  aussi  ont  autres  grans  seigneurs,  qui  semblablement 
vouldroient  estre  compensez;  et  ne  demoureroit  rien  au  Roy.  Dit  que 
le  connestable  n'a  donné  entendre  ladicte  cause  d'opposicion  du  pro- 
cureur du  Roy.  Dit  que,  se  les  lectres  estoient  entérinées,  que  le  con- 
nestable auroit  en  demaine,  en  Poictou,  autant  que  le  Roy  et  plus,  car 
Fontenay  vault  bien  la  moitié  du  demaine  de  Poictou  ;  et  si  est  le  prin- 
cipal siège  du  seneschal,  après  Poictiers.  Contiennent  les  ordonnances 
royaulx  choses  dérogatoires,  ce  dont  les  lectres  du  connestable  ne 
font  quelque  mencion  ;  sont  surreptices  et  ne  seront  entérinées.  Ainsi 
le  requiert  et  se  oppose.  Dit  que  se  aussi  elles  estoient  entérinées,  que 
ce  seroit  un  commancement;  que  bien  autre,  après  le  connestable,  en 
obtiendroit  le  don,  ou  à  vie,  ou  autrement,  et,  par  ainsi  demoureroit 
le  conté  de  Poictou  démembré  et  le  Roy  desnué  conséquemment  de 
son  demaine. 

Rapiout  dit  que  prima  causa  tradicionis,  pour  le  demaine,  fut  ho- 
norable, raisonnable  et  favorable.  Le  connestable  est  de  grant  hostel, 
proche  parent  du  Roy,  a  bien  servy,  exposé  en  plusieurs  grans  périlz 
et  est  bene  merens  à  cecy  et  plus  grans  choses-;  et  n'est  estrange  se 
le  Roy  le  lui  donne  à  sa  vie,  car  l'a.voit  la  feu  duchesse  de  Guienne, 
sa  femme.  Fontenay  est  bien  convenable  au  connestable,  qui,  emprès, 
a  sa  terre  de  Partenay,  et  près  des  frontières,  en  quoy  il  pourra  trop 
mieulx  tenir  ses  gens  en  frontière  que  nul  autre.  Dit  que  ne  veult 
dire  que  les  ordonnances  royaulx  ne  soient  favorables  et  bonnes, 


602  APPENDICES 

mais  causœ  suiiL  dissimiles  et  y  a  forant  diférence  du  connestable  à 
plusieurs  autres  qui  pourroient  demander.  Dit  que,  en  ce,  le  Roy  ne 
fait  aliénacion  et  ne  met  ladicte  terre  que  in  familiâ  domus  sue,  car 
le  connestable  est  proche  parent  et  connestable.  Dit  que  tel  an  est  que 
toute  la  terre  de  Fontenay  ne  vault  II"=  fr.  Dit  que,  se  le  Roy  la  tenoit, 
elle  cousteroit  plus  à  garder  que  ne  lui  vauldroit.  Dit  que  un  an  a 
que  l'admirai  en  prend  les  fruiz  et  que  autant  vault  que  le  connes- 
table les  liève.  Dit  que  les  ordonnances  royaulx  ne  se  extendent  à 
ceste  matière,  considéré  la  personne  et  les  mérites  de  la  chose  et  la 
nature  du  don.  Dit  que  pose  que,  se  le  Roy  a  défendu  ne  obtempérer 
aux  aliénacions,  toutesvoies,  ex  quo  supervenit  jussus  secundus,  l'en 
y  doit  obtempérer.  Dit  que  par  les  lectres  est  assez  fourny  aux  clauses 
dérogatoires  et  doit  l'en  avoir  regart  à  l'entencion  du  Roy  et  non 
stricte  verbis  ordinacionis.  Dit  que  ses  lectres  sont  civiles  et  lui  seront 
entérinées.  Dit  que,  considéré  le  temps  des  guerres  qui  court,  le  Roy,  ad 
evictaudum  majus  scandalum,  et  que  les  seigneurs  de  son  sang  et  ses 
vassaulx  soient  plus  enclins  à  le  bien  servir,  le  Roy  l'a  bien  pu  faire. 
Dit  que  n'est  nouvel  que  les  Roix  ont  donné  à  ceulx  de  son  (sic)  sang. 

Dit  JonvENEL,  pour  le  Roy,  que  les  seigneurs  et  vassaulx  habent 
ob  quod  tenent  Régi  et  re  publiée  servire,  et  si  tient  le  connestable 
Partenay,  que  il  dit  le  Roy  lui  avoir  donné,  qui  bien  vault  VRI  M. 
escus  ;  et  n'y  a  seigneur  à  ce  royavme  à  qui  en  ait  tant  donné  et  s'en 
peut  bien  passer.  Se  le  Roy  lui  fit  graciuse  en  faveur  de  feu  monsei- 
gneur de  Guienne,  non  propter  hoc  tenebatur,  car  le  doaire  se  devoit 
asseoir  sur  les  terres  dudit  feu  Monseigneur,  qui  est  (sic)  en  Guienne  ; 
et  ce  que  le  Roy  en  fîst  ne  fut  que  de  sa  grant  deliberalité  et  ne  s'en 
suit  que  de  vie  en  vie  la  terre  du  Roy  s'en  voise,  ainsi  mesmement  tele 
seigneurie  que  Fontenay,  car  il  dit  que,  de  la  qualité  dont  est  Fonte- 
nay, le  Roy,  en  tout  son  royaume,  n'a  en  une  pièce  tele  ne  si  bonne 
seigneurie.  Dit  que  la  chastellenie  de  Fontenay  a  plus  de  xx  lieues 
d'estandue,  et  en  sont  presque  tous  les  pors  de  mer  de  Poictou, 
excepté  La  Rochelle.  Dit  que,  en  efFect,  tout  est  transporté  audit  con- 
nestable et  est  aussi  dangereuse  cette  aliénacion  que  autrement  ;  et 
directement  est  contre  les  ordonnances  royaulx.  Dit  que,  en  exécu- 
cion  de  fait,  le  connestable  est  principal  officier  du  Roy;  y  a  son  sere- 
ment,  et  bien  advisée  ne  seroit  ceste  poursuite.  Le  Roy  a  de  plus 
proches  parens;  que,  se  cecy  estoit  ouvert,  au  Roy  demoureroit  petit. 
Dit  que  l'on  scet  bien  comment  le  connestable  s'est  aidié  de  la  sei- 
gneur de  Pai'tenay,  et  est  ceste  voye  à  pillerie  du  tout;  autrement,  le 
Roy  n'auroit  plus  terre  royale  en  Poictou. 

Appoinctié  est  à  montrer  lesdictes  lectres  par  devant  la  court,  au 
conseil,  avecques  tout  ce  que  les  parties  y  vouldront  mectre. 

(Xi»  4799,  f<"  92  vo-93  v».) 

Dans  le  registre  X'a  1482,  à  la  date  du  samedi  15  décembre  1442, 
on  lit  :  t  Ce  xv^jour  d'icelui  mois,  au  conseil  présens  mesdiz  seigneurs 
qui  hyer  y  furent,  a  esté  jugé  le  procès  de  monseigneur  le  connestable 
de  France  contre  le  procureur  général  du  Roy,  pour  les  ville,  chastel  et 
chastellenie  et  terre  de  Fontenay-le-Gonte,  en  Poictou  ;  c'est  assavoir 


APPENDICES  603 

que  le  procureur  général  du  Roy  à  bonne  cause  s'est  opposé  àTenconlre 
de  rentérincment  des  lettres  de  don  desdictes  terres  au  connestable  et 
que  lesdictes  lectres  ne  seront  point  entérinées.  Toutes  voies,  pour  ce 
que  lachose  est  grande,  touche  fort  le  Roy  et  que  le  connestable  a  aujour- 
d'hui entour  le  Roy  grande  auctorité  et  puissance^  et  a  charge  du  Roy 
d'aler  en  Bretaigne,  pour  le  traictié  de  la  paix  des  deux  royaumes,  a  esté 
advisé  qu'il  vauldra  mieulx  lundi  prochain  laisser  à  plaidoyer  et  que 
la  court  soit  encore  mieulx  assemblée,  et  y  seront  les  maistres  des 
requestes,  pour  savoir  se  l'en  pourra  point  trouver  autre  expédient 
que  de  dire  rondement  que  le  procureur  du  Roy  à  bonne  cause  s'est 
opposé  contre  ;  afin  de  moins  irriter  le  connestable  que  l'en  pourra.  » 

Lundi,  XVII*  jour  dudit  mois,  au  conseil,  ouquel  furent  présens 
messire  A.  de  Cambray,  chevalier,  premier  président,  etc.,  etc.  (suit 
une  longue  liste  de  noms). 

Et  de  nouvel,  ou  de  rechef  a  esté  visité,  veu  et  raporté  et  jugié,  à 
grande  et  meure  délibéracion,  ledit  procès  de  Monseigneur  Artur  de 
Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de  Partenay  et  connestable 
de  France,  demandeur,  d'une  part,  contre  le  procureur  général  du  Roy 
nostre  sire,  défendeui",  d'autre  ;  pour  raison  de  l'entérinement  de  cer- 
taines lectres  de  don  fait  parle  Roy  audit  connestable  des  ville,  chastel, 
chastellenie  et  terre  de  Fontenay-le-Conte,  en  Poictou.  Et  finablement 
a  esté  jugié  ledit  procès  et  dit  que  le  procureur  du  Roy  à  bonne  et  juste 
cause  s'est  opposé,  et  que  lesdictes  lectres  ne  seront  point  entérinées; 
mais,  avecques  ce,  il  a  esté  advisé  et  délibéré  qu'il  ne  sera  pas  dit 
aux  parties,  ainçois,  pour  les  causes  touchées  en  la  délibéracion 
samedi  derrenier  faicte,  et,  considéré  le  temps  tel  qu'il  est  aujourdui, 
est  plus  expédient  et  plus  profitable  dire  et  sera  dit  aux  parties  en  la 
manière  qui  s'ensuit,  c'est  assavoir  qu'il  est  question  de  bien  grant 
chose  et  que  la  court  est  délibérée  de  ne  procéder  au  jugement  dudit 
procès  jusques  la  court  ait  premièrement  parlé  au  Roy.  » 

On  lit  en  marge  :  «  Dit  aux  parties,  ledit  jour.  » 

(Xia  1482,  îos  223  vo-224.) 

Le  parlement  refusa,  longtemps  encore,  d'entériner  les  lettres  de 
don  de  Fontenay,  comme  on  le  voit  dans  le  registres  X'*  4800,  f»  142, 
à  la  date  du  mardi  16  juin  1444.  Boyleaue,  pour  le  procureur  général, 
s'opposa  encore  à  l'entérinement,  malgré  de  nouvelles  lettres  du  roi, 
pour  les  mêmes  motifs  que  Jouvenel  avait  déjà  fait  valoir.  Enfin  le 
roi,  par  ses  lettres  du  24  novembre  1444,  exigea  l'entérinement  des 
lettres  du  10  mars  1442  (Voy.  ci-dessus,  n"  1  de  l'appendice).  On  voit 
que  la  lutte  avait  été  longue  et  vive. 

LXXIX 

ARTUB    DE    BRETAGNE    FAIT    REMISE    A   CHARLES    II    D'aLBRET  ,    d'uNE 
SOMME    DE    30,000   ECUS    PROMISE    A    CAUSE    DE    SON   MARIAGE    (28 

juillet  1442)  [p.  338]. 

Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présents  lec- 


604  APPENDICES 

très  verront,  salut.  Comme  par  le  traictié  du  mariage  naguères  pro- 
mis et  accordé  de  nous  et  Jehanne,  fille  ainsnée  de  beau  cousin  le 
sire  de  Lebret,  le  dit  beau  cousin,  entre  autres  choses,  ait  promis  nous 
payer,  bailler  et  délivrer,  en  faveur  dudit  mariage,  la  somme  de  trente 
mil  escuz  d'or,  du  poix  de  lxx  au  marc,  aux  termes  et  ainsi  que  diroit 
et  appoincteroit  le  sire  de  Coictivy,  admirai  de  France;  savoir  fai- 
sons que,  pour  certaines  causes  et  considéracions  à  ce  nous  mouvans,  et 
mesmement  pour  contemplacion  du  dit  mariage  et  de  l'amitié  et 
aliance  pour  ce  prinses  entre  iceluy  beau  cousin  et  nous,  à  iceluy 
beau  cousin  avons  quicté  et  donné,  et,  par  ces  présentes,  quictons  et 
donnons  les  diz  xxx™  escuz  d'or  et  voulons  que  doresenavant  il  et  ses 
hoirs  et  ayans  cause  en  soient  et  demeurent  quictes  envers  nous,  sans 
ce  qu'ils  soient  tenuz  en  paier  aucune  chose,  ores  ne  pour  le  temps 
advenir,  à  nous  ne  à  nos  héritiers  ne  successeurs.  Donné  au  siège  de- 
vant Ax,  le  xxvni<'  jour  de  juillet,  l'an  de  grâce  mil  CCCC  quarente  et 
deux. 

Artur. 

Par  monseigneur  le  conte,  connestable. 
Berthelot. 

(Arch.  des  Basses-Pyrénées,  E.  64.  —  Original,  sur  parchemin.) 


LXXX 

CHARLES  II  d'aLBRET  DONNE  LE  COMTÉ  DE  DREUX  A  ARTUR 

DE  BRETAGNE  (1442,  18  novembre)  [p.  339]. 

«  Nous  Artur  fllz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  sei- 
gneur de  Partenay,  connestable  de  France,  confessons  avoir  eu  et 
receu  de  noslre  ti'ès  cher  et  amé  père,  le  sire  d'Alebret,  par  la  main 
de  messire  Geoffroy  de  Rochechouart,  chevalier,  seigneur  de  Bordet, 
ung  vidimus  fait  soubz  le  scel  de  la  prévosté  de  Paris  des  lectres 
royaulx  faisans  mencion  du  transport  que  fist  le  roy,  par  manière 
d'eschange,  de  la  conté  de  Dreux  et  de  toutes  ses  appartenances  avec 
feu  nostre  cousin,  messire  Charles  de  Labret,  lors  connestable  de 
France,  pour  les  causes  contenues  èsdictes  lettres  royaulx,  données 
le  xxie  jour  de  décembre  l'an  mil  quatre  cens  et  sept,  incorporées  ou 
dit  vidimus,  fait  le  xiii*  jour  du  mois  de  janvier  ensuivant  ou 
dit  an. 

Auquel  vidimus  sont  attachées  l'expédicion  de  la  chambre  des 
comptes  et  unes  lettres  du  bailly  de  Chartres,  par  vertu  desquelles  la 
possession  de  la  dicte  conté  fut  bailliée  audit  feu  nostre  cousin,  messire 
Charles  d'Alebret.  Lequel  vidimus,  avec  les  dictes  attaches  et  expé- 
dicions  nous  promectons  bien  garder,  pour  nous  en  ayder,  se 
mestier  est,  au  recouvrement  de  la  dicte  conté,  à  nous  baillée  et 
donnée  par  nostredit  père  d'Alebret,  au  mariage  qui  a  esté  de  nouvel 
fait  et  consommé  entre  nous  et  nostre  très  chère  et  très  amée  com- 
paigne,  Jehanne  d'Alebret,  sa  fille.  Tesmoing  ceste  cédulle  signée  de 


APPENDICES  605 

nostre  inain  et  scellée  de  nostre  scel,  le  xviii®  jour  de  novembre,  l'an 
mil  quatre  cens  quarante  et  deux.  » 
Signé  Artlr. 

Par  monseigneur  le  connestable. 
Gilet. 

(Pièces  originales,  t.  23,  n»  173.  Copie  coUationnée  sur  l'original  le 
1"  juillet  1309.) 


LXXXI 

LIÎTTRES  COMMENT  MONSEIGNEUR  LE  PRÉVOST  DE  PARIS  EST  COMMIS  DE 
POVOIR  PRENDRE  ET  JUSTICIER  LES  MALFACTEURS,  TANT  CEULX  DU 
PARTI    DU   ROY    NOSTRE    SIRE,  COMME    CEULX    d'aNGLETERRE   (1444, 

27  février)  [p.  349]. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roy  de  France,  au  prévost  de  Paris 
ou  à  son  lieutenant,  salut.  Combien  que,  en  espérance  de  mectre  et 
faire  tenir  en  paix  et  tranquillité  noz  pays  de  France,  Brye  et  Chara- 
paigne  et  autres  noz  pays  de  delà  et  de  tous  poins  relever  nos  vas- 
sauïx  et  subgecz  èsdiz  pays  des  tirannies,  oppressions  et  autres  maulx 
et  dommaiges  y  faiz  par  cy  devant,  tant  par  noz  anciens  ennemis  et 
adversaires  les  Anglois  que  par  noz  gens  contre  eulx  résistans  et  fai- 
sans frontière,  es  prinses  par  eulx  faictes   des  corps  de  plusieurs  de 
nos  diz  vassaulx  et  subgecz  et  en  autres  diverses  et   merveilleuses 
persécucions,  ayons,  puis  certain  temps  ençà,  par  longs  sièges  et 
puissance  d'armes,  conquis  et  fait  conquérir  plusieurs  villes  et  autres 
forteresses,  lors  par  nosdiz  ennemis  détenues  et  occupées  en  iceuli 
pays  et  sur  la  marche  et  frontière,  espérans  que,  par  ce  moyen,  non 
seulement  nosdiz  vassaulx  et  subgecz  èsdiz  pays  demourans  y  deus- 
sent  et  peussent  seurement  résider,  aler,  venir,   faire  et  continuer 
leurs  labeurs,  mestiers,  marchandises  et  autres  leurs  affaires,  maiz 
aussi  toutes  manières   de   gens ,   marchans  et  autres ,  de  quelque 
estât  qu'ilz  fussent,  sans  encourir  en  quelques  pertes  de  leurs  biens, 
ne  dangier  de  leurs  personnes;  ce  néantmoins,  ainsi  qu'il  est  venu  à 
nostre  congnoissance,  plusieurs  de  noz  anciens  ennemis  et  adversaires 
les  Anglois,  et  autres  tenans  leur  parti,  moyennant  l'aide  et  faveur 
qu'ilz  ont  eu  et  ont  d'aucun  demourans  èsdiz  pays  ou  autrement,  sont 
passez  et  passent  bien  souvent  et  presque  tous  les  jours,  en  et  par 
divers  nonibres  et  troppeaulx  èsdiz  pays,  èsquelz  ils  ont  faiz  et  font 
innumérables  maulx  et  dommaiges,  tellement  que  à  paines  est-il  plus 
marchant  ne  autre  qui  ause  yssir  hors  ville  fermée  ou  autre  place 
forte,  ne  par  lesdiz  pays  aler  ne  passer,  et,  jaçoit  ce  que  nozdiz  vas- 
saulx et  subgecz,  demourans  es  pays  dessus  diz,  à  ce  bien  voulentiers 
et  souvent  eussent  pourveu  et  encores  pourverroient  par  la  chace  et 
prinse  qu'ilz  eussent  peu  et  pourroient  faire  des  diz  ennemis,  toutef- 
foiz  ilz  n'ont  àusé  ne  ausent  eulx  ingérer  à  ce  faire,  pour  ce  que  plu- 
sieurs de  ceulx  des  garnisons  par  nous  y  establies,  et  autres  avecques 


606  APPENDICES 

eulx,  ou  soubz  leur  couleur  ou  adveu,  vont  et  passent  très  souvent  par 
lesdiz  pays,  et  faingnans  eulx  estre  de  la  "part  de  nosdiz  ennemis^ 
font  prinses,  destroasses,  ravissemens  et  tous  autres  maulx  et  dom- 
maiges  quelxconques  que  pourroient  faire  nosdiz  ennemis;  et  doublent 
nosdiz  vassaulx  et  subgecz,  qui,  par  ce  que  dit  est,  ne  peuent  avoir 
vraye  congnoissance  de  quel  parti  sont  ceulx  qui  font  lesdiz  maulx 
jusques  après  leurs  retours  aux  lieux  où  ilz  sont  demourans,  que,  se, 
en  cuidant  prendre  iceulx  noz  ennemis,  ilz  prenoient  et  blessoient 
aucunes  gens  des  dictes  garnisons  tenans  nostre  parti  et  que  mort  ou 
mutilacion  s'en  ensuivist,  ainsi  que  beaucoup  de  foiz  pourroit  advenir, 
comme  à  ce  nécessairement  procéder  conviengne  par  force  et  main 
armée,  ilz  n'en  feussent  appréhendez  par  justice  et  que  ce  ne  leur 
tournast  à  dommaige  de  leurs  biens  et  péril  de  leurs  personnes;  par 
quoy,  se  provision  n'est  de  brief  à  ce  donnée,  convendra  cesser  tous 
labeurs  et  marchandises  es  pays  dessusdiz,  et  s'en  pourront  de  plus 
en  plus  ensuivir  de  grans  inconvéniens,  ou  dommaige  de  nous,  de 
nosdiz  pays,  vaussaulx  et  subgecz,  et,  pour  ce,  nous,  qui  de  tout 
nostre  cuer  désirons  et  voulons  à  ce  estre  pourveu,  comme  besoing 
est,  vous  mandons  et  très  expressément  enjoignons,  en  commettant 
se  mestier  est,  par  ces  présentes,  que  toutes  manières  de  gens  de 
guerre,  de  quelque  estai,  garnison  ou  parti  qu'ilz  soient,  que  saurez 
ou  pourrez  trouver  èsdiz  pays  faisans  aucuns  maléfices,  ou  qui,  pour 
ce  faire,  y  seroient  venus,  vous  iceulx,  sans  quelque  dissimulacion, 
port  ou  faveur  à  et  soubz  qui  ilz  soient  et  puissent  estre,  quelque 
part  trouver  les  pourrez,  prenez,  saisissez,  emmenez,  ou  faictes 
prendre,  saisir,  et  emmener  prisonniers  et  en  faictes  ou  faictes 
faire  bonne  et  briefve  pugnicion  et  justice,  ainsi  que  verrez  appar- 
tenir, et  tellement  que  tous  autres  y  puissent  prendre  exemple.  Et 
deffendez  et  faictes  deffendre,  de  par  nous,  à  son  de  trompe  et  cri 
publicque,  es  lieux  de  vostre  prévosté  et  autres  lieux,  èsdiz  pays  acous- 
tumez  à  faire  criz  et  publicacions,  que  nul,  sur  peine  de  confls- 
cacion  de  corps  et  de  biens,  ne  donne  ou  face  donner  passaige  par 
eaue,  ne  recoille,  recoure,  soustiegne  ou  conforte  aucune  gens  de 
guerre  faisans  ou  qui  ont  acoustumé  de  faire  lesdiz  maléfices  et  de 
ceulx  que  trouverrez  faisans  le  contraire,  ou  avoir  à  nosdiz  ennemis, 
par  cy  devant,  depuis  la  délivrance  des  places  par  eulx  lors  détenues, 
comme  dit  est,  donné  paissaige,  faveur  ou  confort,  faictes  faire  telle 
pugnicion  et  justice  que  dessus  est  dit,  en  procédant  ad  ce  par  force 
et  main  armée  et  convocquant  et  faisant  assembler  en  armes  tant  et 
de  telz  de  noz  officiers  et  de  nozdiz  vassaulx  et  subgetz,  soient  nobles, 
bourgoiz,  marchans,  gens  mecanicques  ou  d'autre  labeur,  ou  autres 
gens  deffensables,  de  quelque  estât  qu'ilz  soient,  que  verrez  pour  ce 
faire  estre  nécessaires  et  convenables;  ausquelz  faictes,  de  par  nous, 
exprès  commandement  qu'ilz  se  arment  et  embastonnent  au  mieulx 
que  possible  leur  sera,  à  ce  que,  pour  faire  et  acomplir  ce  que  dit  est 
ilz  puissent  eulx  mectre  en  armes  et  estre  prestz  touteffois  que  le  leur 
ferez  savoir;  et,  pour  ce  que,  en  faisans  ce  que  dit  est,  convendra  à 
vous  et  à  eulx,  qui  avec  vous  seront,  faire  aucunes  mises  et  despenses, 
nous  à  vous  et  eulx  avons  donné  et  donnons,  par  ces  dites  présentes, 


APPENDICES  607 

loute  la  defferie  et  destrousses  de  ceulx  que  ainsi  aurez  prins  ou  fait 
prendre,  que  voulons  par  vous  estre  distribuée  et  dipartie  à  chacun, 
selon  ce  que  verrez  devoir  appartenir;  et,  s'il  advenoit  que,  en  fai- 
sant l'exploict  dessusdit,  mort  ou  mutilacion  s'ensuivist  es  personnes 
d'aucuns  malfaicteurs  de  nostredit  parti,  par  vous  ou  ceulx  de  vostre 
compaignie,  ou  aucun  de  vous,  nous,  en  ce  cas,  dès  maintenant  pour 
lors,  le  reniectons,  quictons  et  pardonnons  du  tout,  par  ces  présentes, 
à  celui  ou  ceulx  qui  ce  auroient  fait,  et  sur  ce  imposons  silence  per- 
pétuel à  nostre  procureur  et  tous  autres.  De  faire  et  faire  faire  toutes 
et  chacunes  lesquelles  choses  dessusdites  avons,  à  vous  et  à  vos  com- 
mis et  depputez  en  ceste  partie,  donné  et  donnons  povoir  et  auctorité 
et  mandement  espécial,  par  ces  mesnies  présentes,  par  lesquelles 
mandons  et  commandons  à  tous  noz  justiciers,  officiers,  vassaulx,  et 
subgetz  que  à  vous  et  vosdiz  commis  et  depputez,  en  ce  faisans,  obéis- 
sent et  entendent  diligemment  et  vous  prestent,  baillent  et  donnent 
conseil,  confort  et  prisons,  se  mestier  est,  et  par  vous  requis  en  sont. 
Donné  à  Tours,  le  pénultième  jour  de  février,  l'an  de  grâce  rail 
quatre  cens  quarante  et  trois  et  de  nostre  règne  le  vint  deuxième. 
Ainsi  signé,  parle  Roy,  en  son  conseil. 

Beadvarlet. 

Au  dos  desquelles  lettres  royaulx  estoit  escript  ce  qui  s'ensuit  : 
publiées  par  les  carrefours  et  lieux  accoustumez  à  faire  criz  et  publi* 
cacions  delà  ville  de  Paris,  le  lundi  xnie  jour  d'avril  mil  quatre  cens 
quarante  quatre,  après  Pasques.  Ita  est,  Doulzsire. 

(Y*  f»  79-80.) 


LXXXII 

LETTRES  PAR  LESQUELLES  LE  ROY  NOSTRE  SIRE  COMMET  MONSEI- 
GNEUR LE  PRÉVOST  DE  PARIS  ET  LES  BAILLIFS  DE  SENLIS  ET  DE 
MEAULX  A  PRENDRE  ET  JUSTICIER  LES  GENS  DE  GUERRE  VIVANS  SUR 
LE    PAYS   ET  MESMEMENT    EN  LA   PRÉYOSTÉ    ET    YICONTÉ    DE    PARIS 

(1444,  21  juillet)  [p.  349]. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France  aux  prévost  de  Paris, 
bailliz  de  Senlis  et  de  Meaulx  et  à  tous  noz  autres  justiciers  ou  à  leurs 
lieuxtenans  salut.  Comme,  après  la  trêve  prinse  et  accordée  puis  na- 
guères  entre  nous  et  nostre  nepveu  et  adversaire  d'Angleterre,  nous 
ayons  ordonné  que  tous  les  capitaines  et  gens  de  guerre  qui  estoient 
et  vivoient  sur  les  champs  en  nostre  royaume  et  une  partie  de  ceulx 
qui  estoient  es  garnisons,  es  places  estans  es  frontières  de  noz  ennemis 
s'en  yroient,  en  la  compaignie  de  nostre  très  chier  et  très  amé  filz,  le 
Daulphin  de  Viennois,  lequel,  par  nostre  ordonnance,  les  meine  et 
•  onduit  hors  de  nostre  dit  royaume,  en  aucunes  parties  que  lui  avons 
chargié,  afin  de  éviter  les  grans  pilleries  et  maulx  que  faisoient  les 
diz  gens  de  guerre  sur  nozdiz  pays  et  subgecz;  et  à  ceulx  qui  sont 
demourez  èsdiz  garnisons  ayons  fait  ordonnances  convenables  pour 


608  APPENDICES 

leur  paiement,  et  ordonné  que  aucun  ne  tenist  plus  les  champs,  sur 
peine  d'encourir  nostre  indignacion  et  d'en  estre  pugniz,  et  soit  ainsi, 
comme  entendu  avons,  que ,  nonobstans  les  choses  dessusdicles, 
plusieurs  gens  de  guerre,  tant  des  garnisons  des  places  estans  es 
marches  de  nostre  pays  de  France  délaissent  leurs  dictes  places  et  au- 
tres qui  délaissent  leurs  compaignies  et  celles  de  nostre  dit  filz  et  s'en 
vont  vivre  sur  les  champs  en  nostre  dit  pays  de  France,  y  pillent,  ran- 
çonnent et  appatissent  noz  subgez  et  y  font  maulx  innumérables, 
qui  est  venir  directement  à  l'encontre  de  nosdiz  voulenté  et  ordon- 
nance, à  la  grant  foule  et  oppression  de  nosdiz  subgecz  et  à  nostre 
très  grant  desplaisance  ;  pour  ce  est-il  que  nous,  voulans  à  ce  poorveoir 
et  obvier  auxdiz  maulx  et  inconvéniens,  vous  mandons  et  commec- 
tons  et  à  chacun  de  vous  qui  sur  ce  sera  requis,  que  vous  faictes  ou 
faictes  faire  inhibicion  et  defïense,  de  par  nous,  à  son  de  trompe  el 
par  cry  publicque,  se  mestier  est,  et  par  vos  juridictions  et,  en  parti- 
culier, se  faire  se  peut,  à  tous  capitaines  et  gens  de  guerre  et  autres 
qu'il  appartendra,  qu'ilz  ne  soient  plus  si  osez  ni  hardiz  de  désem- 
parer leurs  dictes  garnisons.  Au  regard  de  ceulx  qui  sont  à  ce  or- 
donnez et  aux  autres,  qu'ils  ne  habandonnent  ne  délaissent  la  com- 
paignie  de  nostredit  filz,  ne  liengnent  aucunement  les  champs,  en 
nostredit  pays  de  France,  mesmement  en  nostre  prévosté  et  viconté 
de  Paris,  ne  y  pillent,  robent,  ne  facent  aucune  violence,  mais  se 
tiengnent  chacun  en  sa  garnison,  ou  aillent  avecques  nostredit  filz, 
ainsi  que  ordonné  leur  a  esté,  et  ce  sur  peine  d'en  estre  pugniz 
comme  inforfecteurs  de  noz  ordonnances;  et,  au  cas  que  aucuns  de 
la  condicion  dessusdicte  vouldroient  ou  s'efforceroient  faire  le  con- 
traire, après  lesdictes  deffenses  et  la  publicacion  de  cesdietes  pré- 
sentes, nous  voulons,  ordonnons  et  vous  mandons,  et  à  chacun  devons, 
par  ces  dictes  présentes,  que  vous  leur  résistez  par  voye  de  fait  et 
main  armée  et  par  toutes  les  autres  voyes  et  manières  à  vous  possibles  ; 
et,  pour  ce  faire,  assemblez  et  convoquez  à  vostre  ayde  et  secours  de 
nos  féaulx  vassaulx,  gens  et  communitez  des  bonnes  villes  et  autres, 
tant  et  en  tel  nombre  et  par  tant  de  fois  que  verrez  estre  à  faire  pour  le 
bien  et  conservacion  de  nostredit  pays  de  France  et  de  nos  subgecz 
d'icellui,  et  espécialement  de  nostre  dicte  ville  de  Paris,  prévosté  et 
viconté  d'icelle,  en  manière  que  la  force  et  auctorité  nous  en  de- 
meure. Et  prenez  ou  faictes  prendre  lesdiz  délinquans,  ou  leurs  capi- 
taines, se  mestier  est,  et  faictes  ou  faictes  faire  d'iceulx  telle  et  si 
bonne  justice  qu'il  appartendra,  selon  l'exigence  du  cas,  en  manière 
que  autres  y  prengnent  exemple.  Et  se,  en  faisant  la  dicte  résistance, 
ou  courant  sus  ausdiz  délinquans,  s'ensuivoit  mort  ou  mutilacion  en  la 
personne  d'aucuns  desdiz  délinquans,  nous  ne  voulons  pas  que  ce 
tourne  à  dommaige  ou  reprouche  à  cellui  ou  ceulx  qui  l'aront  fait, 
ainçois  a  bien  fait  et  mérité  ;  et  ledit  fait  et  cas,  en  tant  que  mestier 
est,  leur  avons,  dès  maintenant  pour  lors,  quicté,  remis  et  pardonné, 
quictons,  remettons  et  pardonnons,  par  ces  dictes  présentes,  et  sur  ce 
imposons  silence  à  nostre  procureur  et  à  tous  autres,  sans  ce  que 
jamais  iiz,  ne  aucuns  d'eulx,  en  puissent  estre  poursuivis  ne  mis  en 
cause,  à  requeste  de  partie  ne  autrement,  en  quelque  manière  que 


APPENDICES  609 

ce  soit.  Et  voulons  ces  présentes,  ou  le  vidimus  d'icelles  (auquel,  fait 
sous  scel  royal,  ou  auctenticque,  voulons  foy  estre  adjoustée  comme  à 
l'original)  leur  valoir  sur  ce  descharge  partout  où  mestier  sera.  De 
ce  faire  vous  avons  donné  et  donnons  plain  povoir,  auctorité,  com- 
mission et  mandement  espécial.  Mandons  et  commandons  à  tous  nos- 
diz  féaulx  vassaulx,  justiciers,  officiers,  communitez  de  villes  de  plat 
pays  et  autres  noz  subgiez  que  à  vous  et  à  chacun  de  vous  et  à  voz 
commis  et  députez,  en  ce  faisant,  obéissent  et  entendent  diligem- 
ment, prestent  et  donnent  conseil,  confort,  aide  et  prisons,  se  mes- 
tier est  et  requis  en  sont.  Donné  à  Orléans,  le  xxie  jour  de  Juillet, 
l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  quarante  et  quatre  et  de  nostre  règne 
le  xxue.  Soubz  nostre  scel,  ordonné  en  l'absence  du  grant.  Ainsi 
signé,  par  le  Roy,  en  son  conseil. 

Delaloere. 

Au  dos  desquelles  lectres  estoit  escript  ce  qui  s'ensuit  : 
Publiées  en  jugement  ou  Cliastellet  de  Paris,  le  jeudi  xxxe  jour  de 
juillet,  l'an  mil  quatre  cens  quarante  quatre.  Ita  est,  Doulzsire. 
(Y*  f«»  83  vo-86.) 


LXXXIII 

SAUF-CONDUIT  DU  CONNÉTABLE  POUR  LE  BATARD  DE  LIMEUIL,  CHARGÉ 
DE  RAMENER  DANS  LEURS  FOYERS  UN  DÉTACHEMENT  DE  CENT- 
SOIXANTE  CAVALIERS  E-T  LEUR  BAGAGE,  LICENCIÉS  PAR  ORDON- 
NANCE (1445,  20  avril)  [p.  357,  359]. 

«  De  par  le  conte  de  Richemont,  seigneur  de  Partenay, 
connestable  de  France.  » 

«  Cappitaines  de  gens  d'armes  et  de  trait,  gouverneurs,  chastel- 
lains,  baillifs,  prévosts,  gardes  de  bonnes  villes,  citez,  chasteaulx, 
forteresses,  pontz,  portz,  passages  et  destroiz,  et  autres  justiciers  et 
officiers,  féaulz  hommes  et  subjetz  de  monseigneur  le  Roy,  ausquelz 
ces  présentes  seront  montrées,  savoir  vous  faisons  que,  en  suivant 
l'ordonnance  de  monseigneur  le  Roy,  pour  faire  cesser  les  pilleries 
et  roberies,  faictes  par  cy  devant  sur  ses  pays  et  subjectz,  nous  avons 
donné  congié  et  licence  au  bastard  de  Limeul  de  soy  despartir  des 
routes  et  compaignies,  et  mener  en  sa  corapaignie  jusques  au  nombre 
de  vin""  chevaulx  et  autant  de  personnes,  ou  au  dessoubz,  et  autres 
gens  de  trait  et  de  bagage  que  bon  luy  semblera;  lequel  bastard  de 
Limeul  sera  tenu  de  mener  chascun  en  son  hostel,  comme  ils  faisoient 
avant  qu'ilz  vinssent  à  la  guerre,  sans  plus  tenir  les  champs,  fors 
seulement  le  temps  à  eulx  nécessaire  pour  leur  chemin,  ouquel  ilz 
ne  prendront  forz  seulement  des  vivres,  gracieusement.  Si,  vous  man- 
dons expressément,  de  par  mondit  seigneur  et  nous  et  à  chacun  de  vous 
que,  le  dit  bastard,  accompaignié  et  en  faisant  comme  dit  est,  faictes, 
souffrez,  laissez  aler,  passer  et  mener  ledit  nombre  de  gens  et  de 

RiCHEMONT.  39 


610  APPENDICES 

clievaulx  en  et  par  vos  dictes  villes,  citez,  jurisdictions  et  autres  des- 
troiz  que  bon  lui  semblera,  plainement  et  paisiblement,  sans  lui  mectre 
ne  souffrir  estre  mis  ou  donné,  ne  à  aucun  de  sadicte  compaignie 
aucun  arrest,  destourbier,  ou  empeschement,  en  quelque  manière  que 
ce  soit.  Car  ainsi  plaist  à  mondit  seigneur  le  Roy  et  à  nous,  nonobs- 
tant les  crimes,  deliz  ou  maleffices  quclxconques  par  eulz  ou  l'un 
d'eulx  commis  et  perpétrez  le  temps  passé,  à  cause  de  la  guerre; 
lesquelx  mondit  seigneur  le  Roy  leur  a  remiz,  quicté  et  pardonné  par 
son  ordonnance;  en  ensuivant  laquelle,  nous  les  leur  quictons,  remec- 
tons  et  pardonnons  semblablement  par  cestes,  ausquelles  noiis  avons 
faict  mectre  nostre  contrescel;  ces  présentes  durant  ung  mois.  Donné 
à  la  Marche  en  Lorreyne  %  le  xxe  jour  d'avril  l'an  mil  ccccxlv.  Ainsi 
signé,  par  monseigneur  le  conte  connestable.        «  J.  le  Breton  ». 

(Fr.  4034,  f°  46.  Publié  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes, 
t.  m,  2"  série,  p.  124-125.) 


LXXXIV 

OBDONNANCE   DE   LUPPÉ-LE-CHASTEL  (1445,  26  mai)  [p.  360]. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  noz  amés  et  féaulx 
conseillers  l'évesque  de  Poictiers,  le  seneschal  de  Limosin,  Jehan  Le- 
bourcier,  chevalier,  messires  Morice  Claveurier,  Jehan  Chevrier,  et 
aux  esleuz  sur  le  fait  des  aides  en  Poictou  salut  et  dileccion.  Comme, 
pour  faire  cesser  de  tous  poins  la  pillerie  qui  longuement  a  eu  cours 
en  nostre  roiaume,  garder  et  préserver  noz  pais  et  subgetz  des  maulx 
et  oppressions  qu'ilz  ont  souffers,  ou  temps  passé,  à  cause  de  la  mau- 
vaise et  désordonnée  vie  que  ont  menée  les  gens  d'armes  tenans  les 
champs,  vivans  sur  iceulx,  avons,  par  grande  et  meure  délibéracion, 
fait  certaines  ordonnances  justes  et  raisonnables  sur  la  manière  et 
ordre  de  vivre  desdits  gens  d'armes  et  les  logeis  d'iceulx,  au  bien  et 
solagement  de  nostre  peuple,  et  à  ce  que  chacun  puisse  aler  et  venir 
seurement  et  sans  dangier  par  tous  les  pais  de  nostre  obéissance, 
faire  son  labeur,  ou  mestier,  et  vivre  selon  son  estât  ;  par  lesquelles, 
entre  autres  choses,  pour  eschever  la  grant  destrucion  qui  se  faisoit, 
à  cause  du  grant  et  excessif  nombre  de  chevaulx  et  gens  de  néant  qui 
estoient  es  compaignies  et  qui  de  riens  ne  servoient,  fors  de  piller  et 
mangier  le  peuple,  ait  esté  ordonné  que  tout  ledit  bagaige  sera  mis 
et  gecté  hors  desdictes  compaignies  et  envoiez  chacun  en  leurs  hostelz 
et  domiciles  faire  leurs  mestiers  et  vivre  ainsi  qu'ilz  avoient  acoustumé 
à  faire  paravant  qu'ilz  vensissent  à  la  guerre,  et  ne  demourroit  seule- 
ment que  certain  nombre  de  gens  d'armes  et  de  trait  qui  auroient, 
c'est  assavoir  chacun  homme  d'armes  ung  coustiller,  ung  paige  et 
trois  chevaulx  et  deux  archers,  ung  paige,  ou  ung  varlet  de  guerre  et 
trois  chevaulx;  pour  la  conduicte  desquelx  avons  ordonné  et  commis 

1.  La  Marche  en  Bassigny,  arr'  de  Neufcbâteau  (Vosges). 


APPENDICES  611 

certains  notables  chiefz,  noz  subgetz  bien  recéans  et  qui  ont  que 
perdre  en  nostre  roiaume,  expers  et  congnoissans  en  telz  matières, 
lesquelx  seront  tenuz  de  respondre  et  rendre  compte  des  gens  qu'ilz 
auront  en  leur  cbarge,  et  à  ce  que  aucuns  maulx  ne  soient  par  eulx 
faiz  à  nos  diz  pais  et  subgez;  et,  pour  ce  que,  à  tenir  les  champs, 
ainsi  qu'ilz  avoient  acoustumé  faire,  estoit  fort  à  doubter  que  aucune- 
ment ilz  s'escartassent,  ne  voulsissent  pas  bien  obéir  à  leurs  chiefz, 
ne  n'eust  pas  esté  si  de  légier  mis  l'ordre  en  eulx  comme  il  en  estoit 
besoing;  nous  avons,  en  outre,  ordonné,  pour  le  moins  grevable  et 
plus  aisié  pour  nostre  dit  peuple,  que  lesdiz  gens  d'armes  seront 
logiez  es  bonnes  villes  de  tous  les  pais  de  nostre  roiaume,  chacun 
selon  ce  que  raisonnablement  il  pourra  porter,  ainsi  que  plus  à  plain 
est  contenu   en  nos   dictes  ordonnances;  et,  entre  les    autres,   avons 
ordonné  que  ou  pais  de  Poictou  seront  logés  ix^^x  lances  et  les  ar- 
chers, c'est  assavoir  soubz  nostre  amé  et  féal  le  seneschal  dudit  pais 
cent  lances,  soubz  le  maréchal  de  Loheac,  au  Bas  Poictou  lx  lances 
et  trente  lances  du  nombre  de  Floquet,  et  les  archers,  qui  font  en- 
semble, à  trois  personnes  et  trois  chevaulx  pour  lance,  et,  pour  deux 
archers,  trois  personnes  et  trois  chevaulx,  xi^xl  personnes  et  autant 
de  chevaulx,  lesquelx  seront  fourniz  de  vivres  par  les  gens  dudit  pais 
en  la  forme  et  manière   qui   s'ensuit;   c'est  assavoir,  pour  chacune 
personne,  pour  ung  an  entier,  trois  charges  et  demi  i  de  blé  et  deux 
pippes  de  vin;  item,  en  char,  pour  ung  homme  d'armes  et  les  archers, 
qui  seront  six  personnes,  comme  dessus  est  dit,  par  mois,  deux  mou- 
tons, et  demi  bœuf  ou  vache,  ou  autre  char  à  l'équivalant,  et,  par  an, 
quatre  lars;  item,  pour  selz,  huille,  chandelle,  œufs  et  frommaiges, 
pour  les  jours  que  on  ne  mangera  point  de  char,  avecques  leurs 
autres  menues  nécessitez,  par  chacun  mois,  pour  homme  d'armes  et 
les  archers,  vingt  solz  tournois;  et,  pour  chacun  cheval,  par  an,  douze 
chevaulx  chargez  d'avoine,  et  quatre  charretées  tant  foing  que  paille, 
c'est  assavoir  les  deux  pars  foing  et  le  tiers  paille,  ou  autres  telz  vivres 
que  vous  adviserez  estre  nécessaires  pour  lesdictes  gens  d'armes  et  de 
trait  et  leurs  diz  chevaulx.  Pour  lesquelx  vivres  asseoir,  mectre  sus  et 
imposer,  cueillir,  lever,  et  faire  venir  ens  logis  lesdictes  gens  d'armes, 
et,  au  surplus,  mectre  à  exécution  nos  dictes  ordonnances  èsdiz  pays, 
nous  soit  besoing  de  commectre  gens  notables,  puissans,  expers  et 
bien  congnoissans  en  telz  matières  et  qui  aiment  le  bien  de  la  chose 
publique,    savoir   vous   faisons  que,   confians  à  plain   de   voz  sens, 
loyaulté,  preudommie,  bonne  diligence  et  expérience  en  telz  cas,  vous 
avons  ordonné  et  commis,  et,  par  la  teneur  de  ces  présentes,  ordon- 
nons et  commectons,  et  aux  trois  ou  deux  de  vous,  en  l'absence  des 
autres,  pour  adviser  aux  lieux  et  places  qui  vous  sembleront  estre 
plus  convenables  et  propices  pour  le  logeis  desdictes  gens  d'armes,  et 
pour  en  iceulx  les  logier  selon  le  contenu  en  nosdictes  ordonnances 
et,  avecques  ce,  pour  asseoir,  mectre  sus  et  imposer  sur  tous  lesdiz 
pais,  le  plus  justement  et  également  que  faire  se  pourra,  le  fort  por- 

1,  Une  charge  et  demie  dans  la  copie  de  Vallet  de  V.  (Bib.  de  l'École 
des  Chartes,  III,  2"  série  [1846],  p.  126.) 


612  APPENDICES 

tant  le  foible,  les  vivres  et  argent  dessusdiz,  qui  leur  seront  néces- 
saires, ensemble  les  fraiz  raisonnables  et  modérez  jusques  à  la  somme 

de    ' livres   tournois,    et  iceulx   faire    cueillir,    lever   et  venir 

ens  et  distribuer  auxdictes  gens  d'armes,  ainsi  et  en  la  forme  et  ma- 
nière devant  dicte,  et  de  contraindre  les  seigneurs  et  habitans  des 
.villes  où  ilz  devront  estre  logiez,  soient  gens  d'église  ou  laiz  et  tous 
autres  qu'il  appartendra,  à  vous  faire  ouverture  et  plaine  obéissance 
d'icelle,  pour  y  logier  lesdictes  gens  d'armes  et  pareillement  ceulx 
qui  auront  esté  assiz  et  imposez  auxdiz  vivres,  argent  et  fraiz,  exemps 
et  non  exemps,  privilégiez  et  non  privilégiez,  et  sans  préjudice  de 
privilèges  pour  ceste  foiz,  à  paier  leurs  coites  etporcions  d'iceulx  par 
quartier  d'an,  à  commancer  leur  paiement,  pour  ledit  quarteron,  au 
premier  jour  que  lesdictes  gens  de  guerre  entreront  dedans  lesdictes 
villes,  et  par  toutes  voies  acoustumées  à  faire  pour  noz  propres  debtes, 
non  obstans  opposicions  ou  appellacions  quelconques.  Et,  en  oultre, 
ou  cas  qu'il  y  en  auroit  aucuns  reffusans,  denyans  ou  cont'redisans 
aux  choses  dessusdictes,  nous  voulons,  néantmoins  les  contraintes  et 
cohercions  dessusdictes,  que  vous  avons  baillées  en  ceste  partie,  que, 
avecques  ce,  vous  les  adjournez  ou  faites  adjourner  et  comparoir  en 
pei'sonne,  à  certain  et  compétent  jour,  ou  cas  que  prendre  et  ap- 
préhender ne  les  pourrez  personnellement,  pour  exécuter  lesdictes 
contraintes,  par  devant  nous  et  les  gens  de  nostre  grant  Conseil 
quelque  part  que  serons,  sur  peine  de  bannissement  et  de  confiscacion 
de  corps  et  de  biens,  pour  respondre  à  nostre  procureur  à  telz  Ans 
et  conclusions  qu'il  vouldra  eslire  à  l'encontre  d'eulx  et  chacun  d'eulx, 
touchans  lesdictes  désobéissances,  reffus  ou  delay,  procéder  et  aler 
avant  en  oultre  selon  raison,  ainsi  qu'il  appartendra,  en  prenant  et 
mectant  sus  tous  leurs  biens  meubles  et  immeubles,  s'ilz  sont  gens 
laiz,  et,  s'ilz  sont  gens  d'église,  leur  temporel  en  nostre  main  réaument 
et  de  fait,  et  baillant  à  régir  et  gouverner  à  personnes  souffisans  et 
idoines,  qui  en  puissent  et  saichent  respondre  et  rendre  compte  et 
reliqua  quant  et  à  qui  il  appartendra,  non  obstant  comme  dessus,  au 
moins  jusques  à  ce  que  par  nous  autrement  en  soit  ordonné,  car  ainsi 
le  voulons  et  avons  ordonné  estre  fait.  De  ce  faire  vous  donnons 
povoir,  commission,  auctorité  et  mandement  espécial,  mandons  et 
commandons  à  tous  noz  justiciers,  officiers  et  subgiez  que  à  vous,  en 
ce  faisant,  obéissent  et  entendent  diligemment  et  vous  prestent  et 
baillent  et  donnent  conseil,  aide  et  prisons,  se  besoing  en  avez  et  vous 
les  en  requérez.  Donné  à  Luppé  le  Chastel,  le  xxv»  jour  de  may,  l'an 
de  grâce  mil  cccc  quarante  et  cinq  et  de  nostre  règne  le  xxine. 
Soubz  nostre  scel,  ordonné  en  l'absence  du  grant. 
Par  le  Roy,  en  son  conseil. 

Delâloere 

(K  68,  n"  14.) 

1.  En  blanc.  Au  n"  li^'^  qui  indique  40  lances,  soit  240  personnes  et 
240  chevaux,  logés  dans  les  pays  de  Mende  et  du  Gevaudan,  la  sompie 
énoncée  est  400  1.  t. 


APPENDICES  61 3 


LXXXV 

ORDONNANCE    SUR    LE    FAIT   DU   PAIEMENT   DES   GENS   DE    GUERRE 
EN  NORMANDIE.   —    (1451,   14  mai)  [p.  365], 

Charles,  etc.,  à  noz  amez  et  féaulx  les  généraux  conseillers,  par 
nous  ordonnez  sur  le  fait  et  gouvernement  de  toutes  noz  finances 
salut  et  dilection.  Comme,  pour  obvier  aux  grans  abuz  qui,  ou  temps 
passé,  ont  esté  faiz  au  paiement  de  noz  gens  de  guerre,  et  afin  que, 
par  faulte  dudict  paiement,  ilz  n'aient  cause  de  prandre  aucune  chose 
sur  noz  subgez  sans  paier,  mais  se  gouvernent  selon  noz  ordonnances 
sur  ce  faictes,  ayons,  par  grant  et  meure  déllbéracion  de  nostre  Con- 
seil, voulu  et  ordonné  que  noz  diz  gens  de  guerre,  que  avons  ordonnez 
estre  establiz,  paiez  et  souldoiez  en  noz  pais  et  duché  de  Normandie, 
pour  la  garde  et  seureté  d'icelui,  soient  paiez  de  leurs  diz  gaiges  et 
souldes  et  leurs  chefz  et  cappitaines  de  leur  estât,  par  ung  qui  sera 
par  nous  commis,  par  chacun  quartier  d'an,  c'est  assavoir  lesdiz  gens 
de  guerre,  selon  les  monstres  et  reveues  qui  seront  faictes  d'iceulx  par 
nostre  amé  et  féal  conseiller  Jamet  de  Tilhay,  nostre  escuier  d'escuierie 
et  bailly  de  Vermandoys,  à  ce  par  nous  commis,  ou  par  ses  aides  et 
députez;  et,  pour  ce  faire,  ayons  commis  et  ordonné  nostre  amé  et 
féal  receveur  général  de  noz  finances  en  nostre  dit  pais  de  Normandie 
Macé  de  Launay,  pour  les  quartiers  d'an  commançant  le  premier  jour 
de  janvier  et  d'avril  derniers  passez,  lesquelz  sont  escheuz  dès  la  fin 
du  mois  de  juing,  sans  ce  que  y  ayons  envoies  et  pourveu,  pour  ce 
présent  quartier  d'an  commençant  en  juifiet,  par  quoy  soit  besoing 
commeclre  aucune  personne  à  nous  féable  ;  savoir  faisons  que  nous, 
ce  considéré,  et  pour  la  confiance  que  nous  avons  dudit  Macé  de 
Launay,  et  aussi  que,  par  commission  de  nous,  il  a  fait  le  paiement 
d'iceulx  gens  de  guerre  lesdiz  deux  quartiers  d'an  derreniers  passez, 
icelui  avons,  par  l'advis  et  déllbéracion  des  gens  de  nostre  Conseil, 
commis  et  ordonné,  commectons  et  ordonnons,  par  cesdictes  présentes, 
à  faire  le  paiement  du  nombre  de  cinq  cens  soixante  dix  lances  et  de 
quatre  cens  soixante  paies,  logez,  par  nostre  commandement  et  ordon- 
nance, en  nostre  pais  de  Normendie,  pour  cedit  quartier  d'an  com- 
mençant le  premier  jour  de  juilhet  derrenier  passé,  à  telz  gages  et 
chevauchées  qui,  par  nous  lui  seront  pour  ce  tauxez  et  ordonnez  et 
aux  autres  droiz,  proffiz  et  emoiumens  acoustumez,  au  feur  de 
XXXI  1.  tournois  par  mois  chacune  lance  fournie.  Testât  du  cappitaine 
en  ce  comprins,  et  de  dix  livres  tournois  aussi  par  mois  chacune  petite 
paie,  des  deniers  par  nous  ordonnez  estre  mis  sus  oudit  pays,  pour  le 
paiement  dessusdit;  c'est  assavoir  soubz  nostre  chier  et  féal  cousin 
le  conte  de  Dunois  irn""  lances  fournies  et  cent  petites  paies  pour 
Harefleu;  soubz  le  sire  de  La  Varenne  cent  lances  fournies  et  quarante 
petites  paies,  pour  le  palais,  chastel  et  pont  de  Rouen  et  pour  Tou- 
ques; soubz  Robert  de  Flocques,  bailly  d'Evreux,  quatrevingt  dix  lances 
fournies  et  quarante  paies,  pour  Honnefleu;  soubz  le  sire  de  Torcy 


614  APPENDICES 

cent  lances  fournies  et  dix  petites  paies,  pour  Marques  ;  soubz  le  sire 
de  Bueil,  admirai  de  France,  quatre  vings  lances  fournies  et  cinquante 
petites  paies,  pour  Cherebourg;  soubz  Odet  d'Aidie  vingt  lances  four- 
nies; soubz  Geoffi'oy  de  Couvran,  chevalier,  quarante  lances  fournies; 
soubz  Guillaume  de  Roussevignan  trente  lances  fournies  ;  soubz  Oli- 
vier de  Bron  trente  lances  fournies;  soubz  Jehan  de  Lorraine,  pour 
Grantville,  cent  petites  paies;  soubz  le  sire  d'Estouteville,  pour  le 
Mont  Saint-Michel  et  Tombelaine,  cinquante  petites  paies;  soubz 
Charles  des  Marres,  pour  Dieppe,  soixante  petites  paies,  et,  soubz  le 
sire  d'Orval,  pour  Baieux,  dix  petites  paies;  et  lui  avons  donné  et 
donnons,  par  cesdictes  présentes,  povoir  de  recouvrer  les  deniers 
ordonnez  pour  ledit  paiement,  des  receveurs  particuliers  qui  en  font 
recepte,  par  ses  quictances  seulement,  lesquelles  leur  voulons  valoir 
aquict  à  la  despense  de  leurs  comptes;  et  de  contraindre  à  les  lui 
paier  lesdiz  receveurs  particuliers,  les  termes  escheuz,  par  prinse  de 
corps  et  de  biens,  tout  ainsi  qu'il  est  acoustumé  faire  pour  noz  propres 
debtes,  non  obstant  opposicions  ou  appellacions  quelconques.  Si,  vous 
mandons  et  expressément  enjoingnons  que  de  noz  présentes  ordon- 
nance et  commission  vous  faictes,  souffrez  et  laissez  joyr  et  user  plai- 
nement  et  paisiblement  Macé  de  Launay,  durant  le  quartier  d'an,  et 
à  lui  et  à  ses  commis  obéyr  et  entendre,  ainsi  qu''il  appartiendra,  es 
choses  touchans  et  regardans  nozdictes  ordonnance  et  commission,  et, 
par  rapportant  cesdictes  présentes,  avec  roolle  de  monstre  fait  en 
parchemin,  contenant  les  noms  et  surnoms  de  chacun  homme  de 
guerre,  signé  de  nostre  dict  conseiller  ou  de  sesdiz  commis  et  dep- 
putez,  et  certifficacion  ou  quictance  souffîsant  desdiz  gens  de  guerre 
contenuz  ou  dit  roolle,  avec  vidimus  de  la  retenue  et  quictance  de 
chacun  desdiz  chefs  et  cappitaines,  en  tant  que  touche  leur  estât,  nous 
voulons  tout  ce  que  paie  aura  esté  par  ledit  de  Launay,  ses  clercs  ou 
commis,  aux  chefs,  cappitaines  et  gens  de  guerre  dessudiz  estre  alloué 
en  ses  comptes  et  rabatu  de  sa  recepte  par  noz  amez  et  féaulx  gens 
de  noz  comptes,  ausquelz  nous  mandons  que  ainsi  le  facent,  sans 
aucune  difficulté;  et,  pour  ce  que,  de  cesdictes  paies,  ledit  de  Launay  a 
à  besongner  en  plusieurs  lieux,  voulons  que  au  vidimus  d'icelles  plaine 
foy  soit  adjouctée,  si  comme  à  ce  présent  original,  car  ainsi  etc.,  non 
obstans  quelzconques  mandement,  restrictions  ou  deffenses  à  ce  con- 
traires. Donné  à  La  Guierche  en  Touraine,  le  xnii'  jour  de  may,  l'an 
de  grâce  mil  IIIPLI  et  de  nostre  règne  le  xxix°. 

(Fr.  3909,  fo^  ix^xiiiiv"  ix^^xv  v°.  Copie  dans  Moreau  2o2,  f-^  128-129. 
Cf.  Fr.  25712,  n»  247.) 


LXXXVI 

LES     TROIS     VOYES     DU     VIVRE     DES     GENS     d'aRMES     PREMIÈREMENT 
TENUES   (1445)   [p.    368]. 

S'ensuivent  les  troys  voyes  que  le  Roy  nostre  sire  a  ordonnées  pour 
l'entretenement  et  nourrissement  de  ses  gens  de  guerre  estans  logez, 


APPENDICES  615 

par  son  ordonnance,  en  son  royaume,  affin  que,  icelles  troys  voyes 
remonstrées  aux  subgetz,  ils  puisent  eslire  laquelle  qu'ils  vouldront, 
et,  icelle  voye  eslicte,  seront  tenuz  d'entretenir  lesdiz  gens  de  guerre 
chacun  selon  son  taux  et  porcion,  à  commancer  le  premier  jour  de 
janvier  mil  ccccxlv. 

La  première  desdites  trois  voyes  que  le  Roy,  nostre  dit  seigneur,  a 
advisées  en  son  grant  Conseil  '  que,  pour  entretenir  lesdiz  gens  de 
guerre  sans  pillerie,  ilz  seront  paiez  et  soustenuz  par  les  subjetz  des 
pais  où  ilz  sont  et  seront  logez,  à  commencer  dudit  premier  jour  de 
Janvier  nn«  xlv,  en  la  manière  qui  s'ensuit  :  C'est  assavoir  que,  par 
lesdiz  subjectz  sera  baillé  et  paie,  pour  chacune  personne,  pour  ung 
an  entier,  trois  charges  et  demye  de  blé,  moitié  seigle  et  moitié  fro- 
ment, et  deux  pippes  de  vin;  —  en  char,  pour  lance  fournie  de  six 
personnes,  deux  motons  et  demy  beuf,  ou  vache,  ou  autre  beuf  ^  à 
l'équivalent,  par  mois;  —  par  an,  quatre  lars  bons  et  convenables;  — 
pour  sel,  huille,  chandelle,  œufz  et  fromaiges,  pour  les  jours  qu'on  ne 
mengera  point  char,  et  autres  menues  nécessitez,  pour  chacune  lance 
fournie  comme  dessuz,  trente  solz  tournois  par  chacun  mois;  —  poui" 
chacune  lance  fournie  comme  dessuz,  trois  charretées  de  bois,  bonnes 
et  raisonnables  et  telles  qu'on  les  vend  es  marchez  où  ilz  seront  logez; 
—  pour  chacun  cheval,  par  an,  douze  charges  d'avoyne  et  quatre 
charretées,  tant  foing  que  paille,  c'est  assavoir  les  deux  pars  foing  et 
le  tiers  paille  ;  et  paieront  lesdiz  habitans  le  logiz  desdiz  gens  de 
guerre,  et,  avec  ce,  paieront  quatre  livres  tournois  chacune  paye, 
qui  sont  huit  livres  tournois  pour  lance  et  vingt  solz  tournois  pour 
Testât  du  capitaine, par  chacun  mois. 

Ou,  pour  la  seconde  voye,  paieront,  en  argent  comptant,  par  chacun 
mois,  la  somme  de  vingt  livres  tournois  pour  lance  fournie  et  vingt 
solz  tournois  pour  Testât  du  capitaine  ;  —  pour  chacune  lance  four- 
nie de  six  personnes  et  six  chevaulx  comme  dessus,  vingt  boisseaulx  de 
blé,  à  la  mesure  de  Pai'is,  par  moitié  froment  et  seigle,  par  chacun 
mois,  qui  sont,  par  an,  pour  chacune  personne,  trois  sextiers  et  ung 
boisseau,  mesure  de  Paris  ;  —  pour  chacune  lance  fournie,  comme 
dit  est,  siz  charges  d'avoyne,  chacune  charge  contenant  xxini  boisseaulx, 
mesure  de  Paris,  par  chacun  mois  ;  et  aussi  leur  seront  baillées,  par 
chacun  mois,  deux  charretées  de  foing  et  paille,  les  deux  pars  foing 
et  le  tiers  paille,  chacune  charretée  bonne  et  convenable,  à  deux 
beufz;  —  pour  chacune  lance  fournie,  trois  charretées  de  bois,  à  deux 
beufs,  bonnes  et  convenables,  chacun  mois,  excepté  que,  es  mois  de 
de  mai,  juing,  juillet,  aoust  et  septembre,  souffira  que  lesdiz  gens  de 
guerre  aient,  pour  chacun  desdiz  mois,  deux  charretées  de  bois. 

Ou,  pour  la  tiei'ce  et  derreniére  voye,  paieront  et  délivreront  auxdiz 
gens  de  guerre  la  somme  de  xxxi  1.  t.  à  chacune  lance  fournie  de  six 
personnes  et  six  chevaulx,  c'est  assavoir,  pour  ladite  lance  fournie 
comme  dessus,  xxx  1.  t.  et,  pour  Testât  du  capitaine,  xx  s.  t.  Et 

1.  Il  devrait  y  avoir  est,  mot  omis  par  le  copiste. 

2.  Pour  chair.  C'est  probablement  une  faute  du  copiste.  (Cf.  ordonn.  de 
Louppy,  ci-dessus,  p.  611.) 


616  APPENDICES 

paieront  lesdiz  gens  de  guerre  leurs  hostellages,  au  regard  de  ces 
deux  dernières  voyes,  au  feur  de  xxx  s.'  t.,  fournie  par  mois  tant  seu- 
lement. Et,  ou  cas  que  lesdiz  gens  de  guerre  ne  vouldroient  paier 
lesdiz  xxx  s.  t,  pour  hostellage,  les  commissaires  les  pourront  retenir 
et  paier,  par  leur  main,  sur  leur  dit  paiement  de  chacun  mois. 

Et,  n'entend  pas  le  Roy  que  les  hostes  où  seront  logez  lesdiz  gens  de 
guerre  les  fournissent  d'autre  chose  que  de  linge  de  table  et  de  lit, 
utencille  d'ostel  et  de  logiz,  tant  pour  eulx  que  pour  leurs  chevaulx; 
et  changeront  lesdiz  gens  de  guerre  leurs  diz  logiz  de  trois  en  trois 
mois,  par  l'ordonnance  des  commissaires,  ou  de  la  justice  ordinaire 
dudit  lieu  où  ilz  seroit  logez,  affin  que  chacun  porte  sa  part  dudit 
logiz,  se  n'estoit  du  consentement  de  l'oste  où  ils  seront  logez. 

(Fr.  3909,  f"  216  V,  217  v».  Copie  du  temps,  qui  est  évidemment 
inachevée).  Par  lettres  du  26  novembre  1445,  Charles  VII  informe  les 
habitants  du  Bas  Limousin  et  du  comté  de  la  Marche  qu'ils  pourront, 
à  leur  choix,  payer  31  fr.  par  lance  fournie,  par  mois,  ou  21  fr.  et  les 
vivres  pour  le  reste  des  31  fr.  (K.  68,  n"s  22,  23.)  Voy.  aussi  Flammer- 
mont,  Instit.  munie,  de  Senlis,  p.  IH. 


LXXXVII 

LE  ROI  ACCORDE  AU  CONNÉTABLE  LE  DROIT  DE  LEVER,  PENDANT 
DIX  ANS,  UNE  TAXE  EXTRAORDINAIRE,  POUR  RÉPARER  LES  FOR- 
TIFICATIONS  DE   PARTHENAY   (1445,    11    avrll)   [p.   317]. 

A  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lectres  verront  et  orront,  Jehan  Tren- 
chans,  bourgeois  de  Poicliers,  garde  du  scel  estably  aux  contracz  à 
Poictiers  pour  le  Roy  nostre  sire,  salut.  Savoir  faisons  que  nous  avons 
veu  et  leu,  de  mot  à  mot,  les  lettres  patentes  du  Roy  nostre  dit  sei- 
gneur scellées  de  son  scel  en  cire  jaune  et  queue  simple,  avec  l'atache 
des  généraux  conseillers  dudit  seigneur  sur  le  fait  et  gouvernement  de 
toutes  ses  finances,  saines  et  entières,  desquelles  la  teneur  s'ensuit  : 

Charles,  par  la  gi'âce  de  Dieu,  roy  de  France,  aux  esleuz  sur  le  fait 
des  aides  ordonnées  pour  la  guerre  en  nostre  pais  de  Poictou,  salut. 
Nostre  très-chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Parthenay,  connestable  de  France,  nous  a  exposé  que,  en  icelle  ville  de 
Parthenay  sont  à  faire  plusieurs  grandes  repparacions  et  emparemens, 
pour  la  fortification  d'icelle,  lesquelx,  à  l'occasion  des  guerres  et  di- 
visions de  nostre  royaume  et  des  grans  pillieries  et  roberies  qui  ont 
esté  faictes  sur  le  pais  d'illec  et  à  l'environ,  ne  pourroient  estre  faiz  des 
derniers  communs  d'icelle  ville  et  chastcllenie,  obstant  ce  que,  à 
cause  d'icelles,  ilz  sont  moult  diminuez  et  amoindriz;  pour  quoy 
nostre  dit  cousin  nous  a  supplié  et  requis  que  nous  vueillons  consentir 
que,  jusques  à  certain  temps,  soit  cueilly,  assis  et  imposé,  sur  les 
habitans  de  la  dicte  ville  et  chastellenie,  par  chacun  an,  la  somme  de 
huit  cens  1.  t.,  pour  les  derniers  qui  en  ystront  estre  convertiz  et  em- 
ploiez  en  ladicte  repparacion  et  fortificacion  dudit  Parthenay,  et  sur 


APPENDICES  617 

ce  lui  en  octroier  noz  lettres.  Savoir  vous  faisons  que  nous,  ce  con- 
sidéré, acerteniez  aucunement  des  choses  dessusdictes,  voulans,  pour 
ce,  incliner  à  la  requeste  d'icellui  nostre  cousin,  avons  consentiz,  oc- 
troyé, consentons  et  octroions,  par  ces  présentes,  que,  de  cy  à  dix 
ans  prouchene'ment  venans,  à  compter  de  la  date  ces  présentes,  soit 
par  vous  assis  et  imposé,  par  chacun  an,  une  fois  et  non  plus,  sur  les 
habitans  de  ladicte  ville  et  chastellenie  ladicte  somme  de  huit  cent 
1.  t.,  avecques,  oultre  et  par  dessus  le  principal  des  tailles  qui,  de  par 
nous,  seront  imposées  en  ladicte  ville  et  chastellenie,  pourveu  que  à 
ce  se  consentent  la  phis  grant  et  saine  partie  des  manans  et  habitants  de 
ladicte  ville  et  chastellenie  et  que  les  deniers  de  noz  tailles  et  aydes  ne 
soient  aucunement  retardez  ne  diminuez  ;  et  icelle  somme,  ainsi 
assise  et  imposée,  faictes  cueillir  et  lever  par  le  receveur  de  nosdictes 
tailles  et  par  lui  bailler  et  délivrer  au  receveur  de  ladicte  ville,  pour 
par  lui  estre  convertiz  es  dictes  reparacions,  par  l'ordonnance  de 
nostre  dit  cousin;  lequel  receveur  de  ladicte  ville  sera  tenu  d'en 
rendre  compte  par  devant  les  gens  d'icellui  nostre  cousin,  appeliez  à 
ce  aucuns  noz  gens  et  officiers.  Si,  vous  mandons  que  noz  présentes 
lettres  vous  mectez  à  éxecucion  de  point  en  point,  selon  leur  forme, 
et  sans  en  ce  faire  aucune  difficulté.  Et,  par  rapportant  ces  dictes 
présentes,  vérifiées  de  noz  amez  et  féaulx  les  généraulx  conseillers 
sur  le  fait  de  noz  finances,  ou  vidimus  d'icelles,  fait  soubz  scel  roial 
et  quictance  sur  ce  souffîsans,  nous  voulons  tout  ce  que  par  nostre 
dit  receveur  ou  receveurs  desdictes  tailles  aura  esté  baillé,  à  la 
cause  dessusdicte,  estre  alloué  es  comptes  et  rabatue  de  leurs  re- 
ceptes  par  noz  amez  et  féaulx  gens  de  noz  diz  comptes,  auxquelx 
nous  mandons  ainsi  le  faire  sans  difficulté.  Donné  à  Nancy,  en  Lor- 
raine, le  XI*  jour  d'avril,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  quarante  cinq, 
et  de  nostre  régne  le  xxiii»,  soubz  nostre  scel,  ordonné  en  l'absence 
du  grant,  après  Pasques.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  en  son  Conseil. 

Chaligant. 

Suit  l'attache    des  généraux   conseillers    du   roi  sur  le   fait   des 
finances. 
Vidimus  du  21  mai  1445  (Fr.  257 H,  n»  177). 

Le  même  jour  (H  avril  1445),  le  roi  accorde  aussi  au  connétable  le 
droit  de  lever  pendant  dix  ans,  sous  les  mêmes  réserves  et  condi- 
tions, une  somme  annuelle  de  600  1.  t.  à  Fontenay,  pour  réparer  les 
fortifications  de  cette  ville  (Fr.  25711,  n"  178). 

Le  20  avril,  les  généraux  conseillers  du  roi  sur  le  fait  et  gouverne- 
ment de  ses  finances,  tant  en  Languedoil  comme  en  Languedoc,  con- 
sentent, sous  les  réserves  indiquées,  à  l'entérinement  de  ces  lettres 
(Fr.  26073,  n»  5197). 

On  voit,  dans  un  autre  document,  que,  le  15  octobre  1455,  J.  Blan- 
chet,  sergent  du  roi,  est  venu  à  Fontenay;  que  là,  en  présence  d'un 
notaire,  il  a  demandé  aux  principaux  habitants,  à  la  requête  du 
comte  de  Richemont,  s'ils  consentaient  au  contenu  des  lettres  royaux 
du  11  avril,  dont  il  leur  a  donné  lecture  et  qu'ils  ont  répondu  affir- 
mativement. On  trouve,  dans  cette  pièce,  les  noms  de  soixante-dix 


618  APPENDICES 

des  principaux  habitants  de  Fontenay-le-Comte,  tant  nobles  et  gens 
d'église  que  manants  (Fr.  26074,  n"  3329).  11  est  certain  que  ces 
mêmes  formalités  furent  accomplies  à  Parthenay  et  à  Vouvant.  C'est 
seulement  après  cela  que  les  taxes  accordées  au  connétable  furent 
levées. 

On  trouve  encore  dans  le  riche  recueil  des  Quittances  et  pièces 
diverses  de  la  Bibliothèque  nationale,  deux  autres  pièces  relatives  à 
cette  même  affaire.  L'une  est  un  reçu  du  connétable,  l'autre  un  reçu  de 
J.  Secillon,  commis  par  lui  à  la  recette  de  ces  impôts. 

REÇU    DU   CO.NNÉTABLE  (1446,    20   FÉVRIER). 

Nous,  Artur,  filz  et  oncle  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richement, 
seigneur  de  Parthenay,  Fontenay  et  Vouvent,  et  connestable  de  France, 
confessons  avoir  eu  et  receu  de  Pierre  Percaut,  commis  en  Poitou  par 
monseigneur  le  Roy  à  recevoir  la  porcion  de  l'aide  de  ncM.  fr.  rais 
sus  en  ses  pays  de  Languedoil,  au  moys  de  février  ccccxluii,  la  somme 
de  xvuc  1.  t,  laquelle  mondit  seigneur  le  Roy  nous  a  ordonnée  estre 
baillée  et  délivrée,  pour  convertir  es  repparacions  de  noz  villes  et 
chastellenies  desdiz  lieux  de  Parthenay,  Fontenay  et  Vouvent,  ainsi 
que  plus  à  plain  est  contenu  es  lectres  patentes  de  mondit  seigneur  le 
Roy  sur  ce  faictes.  De  laquelle  somme  de  dix-sept  cens  livres  tournoys 
nous  nous  tenons  pour  bien  paie  et  content  et  en  avons  quicté  et 
quictons  et  promectons,  par  ces  présentes,  acquicter  ledit  receveur  de 
ladicte  somme,  envers  tous  et  contre  tous.  Donné  soubz  noz  scel  et 
seing  manuel,  le  vingtiesme  jour  de  février,  l'an  mil  cccc  quarante  et 
cinq. 

Artur 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 
Lebreton. 

(Fr.  26074,  n«  5397.) 

Le  19  octobre  1448,  J.  Secillon,  commis  par  le  comte  de  Richement 
receveur  des  deniers  pour  les  réparations  et  remparement  de  Par- 
thenay, Vouvant  et  Fontenay-le-Comte,  reçoit  d'Antoine  Vousv,  rece- 
veur des  tailles  en  Poitou,  la  somme  de  1700  1.  t.  (Fr.  26078,  n"  6013). 


LXXXYIII 

LECTRES   COMMENT    LE   ROY   DÉGLAIRE    LES    CAUSES   POUR   LESQUELLES 

IL   ENTRA   EN   NORMENDIE   APRÈS   LA   PRINSË   DE   FOULGIÈRES 

(1451,  2  avril)  [p.  383,  386,  387,  393,  39S]. 

Charles,  etc.,  à  tous,  etc..  Comme  l'an  mil  CGCCXLIIII  ou  environ 
uostre  nepveu  et  adversaire  d'Angleterre  eust  envoie  ses  solempnelz 
messages  et  ambaxeurs  par  devers  nous,  requérir  que  voulsissions 
entendre  et  nous  condescendre  à  avoir  et  prandre  trêves  avecques 
lui,  en  espérance  de  parvenir,  durant  le  temps  et  termes  d'icelles,  à 


APPENDICES  619 

aucun  bon  traictié  et  appoinctement  de  paix  final;  à  laquelle  chose, 
pour  honneur  de  Dieu,  nostre  créateur,  principallement  éviter  l'effu- 
sion de  sang  humain  chrestien  et  les  maulx  et  inconvéniens  qui  sou- 
ventelfoys  adviennent  par  faict  de  guerre,  nous  feussions  accordez  et 
coBsentiz  et  que,  sur  ce,  eussent  esté  faiz  et  accordez,  pour  la  forme 
et  manière  de  vivre  durant  lesdictes  trêves,  certains  articles  et  chap- 
pitres  plus  à  plain  contenuz  et  déclairez  es  lectres  faictes  et  passées 
touchant  ladicte  matière,  et  icelles  trêves  et  tout  le  contenu  èsdictes 
lectres  promis  et  accordé,  d'une  part  et  d'autre,  ainsique  en  tel  cas 
appartient;  et,  depuis,  pour  ce  que,  pendant  le  premier  terme  des- 
dictes trêves,  la  matière  de  ladicte  paix  ne  peut  estre  accordée  ne 
conclue,  furent  icelles  trêves,  par  diverses  foys,  prorogées  et  conti- 
nuées et,  aucunes  des  foys,  prinses  et  acceptées  de  nouvel,  en  tant 
comme  besoing  faisoit,  jusques  à  certain  temps  et  terme  plus  à  plain 
contenu  etdéclairé,  et  lectres  sur  ce  faictes  et  accordées  et  consenties; 
pendant  lequel  temps  desdictes  trêves  et  prorogacion  d'icelles,  nous 
avons,  de  nostre  part,  ordonné  et  commis  notables  conservateurs, 
pour  les  garder  et  maintenir  et  faire  observer  et  entretenir,  ainsiqu'il 
appartient,  et  quant  aucune  plaincte  nous  est  venue,  touchant  ladicte 
matière,  y  faisons  incontinent  donner  la  provision  telle  qu'il  apparte- 
noit,  selon  la  teneur  desdictes  trêves,  et,  par  plusieurs  foys  et  en  di- 
verses convencions,  fait  offrir  à  ceulx  de  la  part  d'Angleterre  que,  s'il 
estoit  trouvé,  par  aucun  de  nostre  part,  aucun  excez  ou  attemptat 
avoir  esté  commis  contre  ne  ou  préjudice  desdictes  trêves,  nous  le 
ferions  réparer  et  y  donner  la  provision  telle  que,  selon  raison  et  la 
teneur  d'icelles,  faire  se  devroit,  et  que  aussi  ceulx  de  ladicte  part 
d'Angleterre  feissent  le  semblable  de  leur  cousté,  de  laquelle  chose 
faire  iceulx  de  la  part  d'Angleterre  ont  toujours  esté  délaians  et  en 
demeure,  jasoit  ce  que  de  plusieurs  excez  et  actemptaz  nostredit 
neveu  ait  esté,  mesmement  en  Angleterre,  de  par  nous,  par  diverses 
foys,  adverti,  ceulx  aussi  de  son  Conseil  ou  du  royaume  d'Angleterre 
et  pareillement  ceulx  de  son  Conseil  estably  en  ce  royaume,  et  smgu- 
liêrement  le  duc  de  Sommerset,  son  lieutenant  général  et  représen- 
tant sa  personne,  pour  le  temps  de  lors,  deçà  la  mer,  et,  en  espécial, 
par  plusieurs  foys,  {sic,  sans  ait)  esté  notiffié  audit  de  la  part  d'Angle- 
terre comme,  contre  la  teneur  desdictes  trêves  et  les  chappitres  et 
articles  expressément  contenuz  et  déclairez  en  icelles,  aucuns  leurs 
subgetz  et  obéissans,  à  leur  veu  et  sceu,  et  à  quoy  chacun  jour  ilz 
eussent  peu  pourveoir,  s'ilz  eussent  voulu,  emparèrent  et  fortiffièrent 
les  places  de  Saint-Jame-de-Beuvron  et  de  Saint-Guillaume-de-Mor- 
taing,  situées  et  assises  es  marches  des  frontières,  qui  estoit  directe- 
ment contre  la  teneur  de  certain  article  expressément  contenu  et 
déclaré  èsdictes  trêves,  touchant  ladicte  matière  ;  et,  en  oultre,  firent 
leursdicts  subgetz  plusieurs  pilleries,  roberies,  meurtres  et  destrousses 
sur  noz  subgetz  et  en  nostre  obéissance,  dont  les  cas  esloicnt  claire- 
ment prouvez  par  informacions  et  procès  deuement  faiz,  monstrez  et 
exhibez  en  forme  deue  et  autenticque  ausdicts  de  la  part  d'Angle- 
terre; et,  en  continuant  de  mal  en  pis,  fut  prinse  par  ceulx  dudict 
parti  d'Angleterre,  et  mesmement  par  gens  estans  de  l'ordre  de  la 


620  APPENDICES 

Jarretière,  pensionnaires  et  du  conseil  de  nostredict  nepveu  d'Angle- 
terre, ses  hommes  et  vassaulx  et  ayans  charge  de  places  et  de  gens  de 
guerre  soubz  lui,  la  ville  et  chastel  de  Foulgières,  grosse,  puissante 
et  très  riche  ville,  et  garnie  de  très  bel  et  fort  chaatel,  appartenant  à 
nostre  beau  neveu  de  Bretaigne,  située  et  assise  en  son  pais  et  duché 
de  Bretaigne,  et  en  nostre  obéissance  ;  en  laquelle  place  on  ne  faisoit 
ne  ne  se  donnoient  ceulx  de  dedans  aucunement  garde,  pour  la  seu- 
reté  en  quoy  ils  se  cuidoient  estre,  à  cause  et  par  le  moien  desdictes 
trêves;  et,  à  icelle  prinse,  tuèrent  et  occirent  gens,  prindrent  prison- 
niers et  brûlèrent  églises,  ravirent  femmes,  prindrent  et  butinèrent 
tous  les  biens  qui  en  ladicte  ville  estoient,  montans,  selon  la  com- 
mune renommée,  à  très  grans  et  excessives  sommes  de  deniers;  tin- 
drent  et  occupèrent  ladicte  place,  et,  d'icelle,  firent  guerre  ouverte 
en  tous  les  lieux  du  pais  de  Bretaigne  où  ilz  le  peurent  faire,  boutant 
feux,  tuant  et  murdrissant  gens,  prenant  et  menant  prisonniers  bes- 
tiaulx  et  tous  les  biens  qu'ils  povoient  trouver,  appatissant  le  pais  et 
faisant  tous  exploiz  de  guerre,  ou  telz  et  semblables  comme  en  temps 
de  hostilité  est  accoustumé  de  faire  ;  et,  combien  que,  considéré  les 
choses  dessusdictes,  estoit  cler  et  manifeste  que  lesdicts  de  la  part  d'An- 
gleterre avoient  rompu  et  enfraint  lesdictes  trêves,  et  qu'il  nous  feust 
loisible,  sans  aucune  charge  d'onneur  ne  de  congnoissance,  de  leur  po- 
voir,  dès  adonc,  faire  guerre  ouverte  et  procéder  à  l'encontre  d'eulx  par 
voye  de  fait,  comme  contre  ennemis  et  adversaires,  néantmoins,  pour 
mectre  toujours  Dieu  de  nostre  part,  et  que  chacun  congneust  le  devoir 
en  quoy  nous  voulons  mectre,  eussions  toutes  ces  choses  notiffiées  et 
faictes  savoir  ausdicts  de  la  part  d'Angleterre  et  les  sommer  et  requérir 
qu'ils  en  feissent  repparacion  et  y  donnassent  la  provision  par  effect 
telle  qu'il  appartenoit,  selon  l'exigence  du  cas,  à  quoy  aucunement 
n'ont  voulu  entendre;  ainçois,  pour  monstrer  plus  clerement  leur 
vouloir  et  entencion,  se  sont  voulu  efforcer,  par  certains  moiens,  de 
actraire  et  attribuer  à  eulx  la  subgection  et  obéissance  de  nostredict 
neveu  de  Bretaigne  et  de  son  pais  et  duché,  jasoit  ce  que,  à  la  vérité 
et  comme  il  estoit  notoire,  il  est  nostre  homme,  vassal  et  subgect,  et 
que,  dès  le  commencement  des  trêves,  icekii  nostre  neveu,  comme 
nostre  subgect  et  obéissant,  eust  esté,  et  ses  pays  et  seigneuries,  nom- 
mées, comprinses  en  icelles,  qui  est  bien  clère  demonstrance  de  no- 
toire et  manifeste  infraction  desdictes  trêves  de  la  part  d'Angleterre; 
et,  à  ceste  cause,  et  voyans  les  tors,  desraisons,  .denées  de  droit  et 
clères  infractions  desdictes  trêves  par  ceulx  d'icelle  part  d'Angleterre, 
eussions  fait  faire  noz  protestations  solempnellement  et  auctentique- 
ment,  en  la  présence  des  ambaxeurs  et  commissaires  de  ladicte  part 
d'Angleterre,  garniz  de  povoirs  souffisans  en  ceste  partie,  du  devoir 
en  quoy  nous  estions  mis,  de  nostre  part,  et  du  tort,  déraison,  injus- 
tice et  denée  de  droit  procédant  de  la  leur,  en  appellant  Dieu  et  la 
vérité  à  tesmoings  de  ces  choses  et  que  nous  nous  tenons  plus  honno- 
rablement  deschargez  de  tout  ce  qui  s'en  pourroit  ensuir;  lesquelles 
choses  et  solempnitez  ainsi  faictes  et  gardées,  eussions  esté  conseillez, 
par  grant  et  meure  délibéracion,  d'entrer  en  guerre  ouverte  à  l'en- 
contre de  nostredit  neveu  et  desdits  de  la  part  d'Angleterre;  en  la- 


APPENDICES  621 

quelle  matière  aidant  le  benoist  filz  de  Dieu,  qui  a  congneu  le  bon 
droit  que  avons  en  ceste  partie,  nous  sommes  maintenuz  et  gouvernez 
au  bien  et  recouvrement  de  nostre  seigneurie,  ainsique  chacun  a  peu 
et  peut  tous  les  jours  veoir  et  congnaistre;  et,  soit  ainsi  que,  par  noz 
messages  et  ambaxeurs,  c'est  assavoir  maistre  Girard  Le  Bourcier, 
maistre  des  requestes  de  nostre  hostel  et  Anego  Darcio,  escuier,  noz 
conseillers,  ayons  ces  choses  fait  savoir  et  notiffier  bien  à  plain  à  très 
hault  et  puissant  prince,  nostre  très  cher  et  très  amé  frère  et  cousin, 
le  roy  de  Castelle  et  de  Léon,  comme  à  nostre  premier  frère  et  alié 
et  à  celui  à  qui  voulons  toujours  communiquer  et  faire  savoir  de  noz 
affaires,  pour  le  bon  entretenement  des  aliances  qui  sont  entre  lui  et 
nous  et  qui  ont  esté,  le  temps  passé,  entre  noz  prédécesseurs,  leur 
pais,  terres  et  seigneuries  et  les  siens  ;  toutesfois,  icelui  nostre  frère 
nous  a  fait  savoir  qu'il  vouldroit  bien  eslre  informé,  par  nos  lectres 
patentes,  de  l'infraction  et  rompture  desdictes  trêves  et  de  la  manière 
comment,  et  que  aussi  le  portent  ainsi  les  aliances  qui  sont  entre 
lui,  nous,  noz  pais,  terres,  seigneuries  et  subgetz  et  les  siens;  pour  ce 
est-il  que  nous,  ces  choses  considérées,  désirans  le  bon  entretenement 
desdictes  aliances  entre  icelui  nostre  frère  et  nous,  et  voulans  le  con- 
tenu en  icelles  estre  tousjours  entretenu  et  accomply  de  nostre  part 
et,  avecques  ce,  que  sommes  bien  joyeulx  que  nostredict  frère,  cousin 
et  atié  et  tout  prince  chrestien  aye  vraye  congnoissance  du  démené 
desdictes  matières,  en  obtempérant  à  ce  que  nostredict  frère  nous  a 
fait  savoir,  touchant  ce  que  dit  est,  et  entretenant  lesdictes  aliances, 
et  pour  les  autres  causes  et  considéracions  que  dessus,  nous  avons 
faits  mectre  et  reddiger  par  escript,  en  ces  présentes,  ausquelles,  en 
tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel.  Donné  aux  Mon- 
tilz-lez-Tours,  le  second  jour  d'avril  MIIII'L. 
(Fr.  5909,  f»*  ix»ni  v»-ix"v.) 


•LXXXIX 

QUITTANCE  DE  FRANÇOIS  I"  ET  DE  RiCHEMONT  (1449,  27  Septembre) 

(p.  400,  401,  464). 

François,  par  la  grâce  de  Dieu,  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Mont- 
fort  et  de  Richement,  Arlur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Riche- 
mont,  seigneur  de  Partenay  et  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui 
ces  présentes  lectres  verront,  salut.  Savoir  faisons  nous  avoir  eu  et 
receu,  par  les  mains  de  Thomas  Marest  et  Colin  Cannelande,  fermiers 
du  tabellionnage  de  Saint-Lô,  la  somme  de  quinze  salus  d'or,  pour 
tout  ce  qu'ils  peuent  ou  pourront  devoir,  à  cause  d'iceliui  tabellion- 
nage, pour  le  terme  Saint-Michel  prouchainement  venant;  et  l'oultre 
plus  du  paiement  d'iceliui  terme,  qui  se  monte  à  sept  livres  dix  solz 
tournois,  avecques  stippes  et  nobis  *,  nous  leur  avons  donné,  quicté  et 

1.  Droit  d'uu  denier  en  quelques  lieux,  ou  de  trois  deniers  en  d'autres, 
par  livre,  en  Normandie.  [Dict.  de  Trévoux,  VII,  831.) 


622  APPENDICES 


remis,  donnons,  quictons  et  remettons,  pour  les  supporter  des  pertes, 
dommages  et  vacacions  qu'ilz  ont  eus  et  soustenus  au  fait  d'icellui 
tabellionnage,  à  l'occasion  de  caste  présente  guerre.  Donné  à  Saint-Lô, 
soubz  noz  signes  manuelz,  le  xxvn^  jour  de  septembre,  l'an  mil 
quatre  cens  quarante  neuf. 

François  Artur. 

(Fr.  26079,  n»  6151). 


XG 

CONFIRMATIO  TRACTATUS  FACTI  PER  COMITEM  RICHEMONTIS,  CONNESTA- 
BULARIUM  FRANCIS,  CUM  HABITANTIBUS  DE   NUILLY  l'eYESQUE. 

.  (1449,  2  octobre)  [p,  40i]. 

Charles,  etc.,  savoir  faisons  à  tous  présens  et  à  venir,  nous  avoir 
veues  certaines  lettres  patentes  données  de  nostre  très  chier  et  amé 
cousin,  le  conte  de  Richemont,  connestable  de  France,  signées  de  sa 
main  et  scellées  de  son  scel,  en  queue  simple  et  cire  vermeille,  seines 
et  entières,  contenans  la  forme  qui  s'ensuit  : 

«  Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur 
de  Parthenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentes 
lettres  verront,  salut.  Scavoir  faisons  que,  aujourd'huy,  par  mon  sei- 
gneur et  neveu  le  duc  et  nous,  a  esté  faict  le  traictié  et  appoinc- 
tement  de  rendre  et  mectre  en  noz  mains,  pour  et  ou  nom  de  mon- 
seigneur le  Roy,  le  chastel  et  place  de  Nully  l'Evesque,  appartenant  à 
l'évesque  de  Bayeux,  icellui  appoinctement  fait,  accordé,  traicté  et 
appoinctié  par  entre  nous,  d'une  part,  et  le  soubz-doyen  du  dit  Bayeux 
et  le  lieutenant  d'icelle  place  de  Nully  et  autres  officiers  dudit  évesque, 
d'autre,  en  la  manière  qui  s'ensuit  : 

Premièrement;  pour  empescher  que  ladite  place  et  chastel  ne  soit 
assiégée  etprinse  par  force,  dont  pourroit  ensuir  inconvéniens  irrépa- 
rables, lesditz  soubz-doyen,  lieutenant  et  officiers  nous  ont  promis 
rendre  ladite  place  en  l'obéissance  de  mondit  seigneur  le  Roy  et  icelle 
mectre  en  noz  mains,  ou  de  nos  commis,  dedens  ung  mois  prouchai- 
nement  venant,  et  nous  en  bailleront  trois  ostaiges,  personnes  notables 
et  souffisans,  vendredy  prouchain,  ou  ung  autre  jour,  que  nous  yrons 
ou  envoyerons,  accompaignez  de  gens  d'armes  et  de  trait,  devant  ladite 
place,  ou  cas  que,  oudit  terme  et  jour,  ils  ne  vouldront  défendre 
ladite  place,  se  bon  leur  semble;  et,  en  rendant  icelle  place  en  noz 
mains,  ou  autres,  ayans  pouvoir  de  mondit  seigneur  le  Roy,  ou  de 
nous,  nous  avons  promis  et  accordé  que,  se  ledit  évesque  se  veut  re- 
mectre  en  l'obéissance  de  mondit  seigneur  le  Roy,  il  le  pourra  faire  et 
sera  receu  dedens  trois  moys  prouchainement  venant,  et,  ce  pendant, 
joira  toujours  de  ses  biens,  rentes  et  revenues,  tant  espirituel  que  tem- 
porel, et  lui  seront  renduz  tous  ses  biens  meubles,  quelz  qu'ils  soient, 
que  on  trouvera  en  ladite  place  et  audit  lieu,  réduit  en  l'obéissance  de 
mondit  seigneur  le  Roy,  par  le  moien  de  nous  ;  et  ce  pendant,  en 


APPENDICES  62S 

attendant  savoir  la  volenté  dudit  évesque,  seront  iceulx  biens  gardez 
et  defTenduz,  à  son  profflt,  par  les  mains  de  ses  parents  et  officiers, 
lesquels  pareillement,  durant  ledit  temps,  joyront  de  leurs  biens  ;  et 
après,  se  ledit  évesque,  ses  parents  et  officiers,  familiers  ou  domes- 
tiques veulent  demourer  en  ladite  obéissance,  ils  seront  maintenuz  en 
leurs  prélatures,  offices,  bénéfices  et  estatz,  sans  aucune  innovacion  ; 
et,  avec  ce,  demourront  en  la  possession  de  leurs  maisons,  héritages 
et  autres  biens,  pour  enjoir  paisiblement,  ainsi  que  ilz  ont  accoutumez 
faire  ;  et,  en  ce  faisant,  pour  aucunes  causes  à  ce  nous  mouvans,  con- 
sidérans  que  ladite  place  ne  puet  bonnement  estre  recouvrée  ne  red- 
duite  sans  grans  fraiz  et  despens,  avons  promis  et  accordé,  et,  par  ces 
présentes,  de  par  mondit  seigneur  le  Roy,  en  usant  des  povoirs  par  lui 
à  nous  sur  ce  donnez,  accordons  et  permectons  que  maistre  Nicole  Her- 
mecant,  archidiacre  et  chanoyne  de  l'église  de  Bayeux,  Guillaume  de 
Castillon,  archidiacre  des  Vées  et  chanoyne  d'icelle  église,  Rolant  de 
Thaleuces,  soubz-doyen  et  chanoyne,  Brande  de  Castillon,  Rogier  Du 
Moustier,  Robert  d'Estampes  et  Nicole  Dudoye,  touë  chanoynes,  parens, 
officiers  ou  serviteurs  du  dit  évesque  de  Bayeux  sont  et  demeurent 
possesseurs  de  tous  leurs  bénéfices,  avecques  tous  chacuns  leurs  biens 
meubles  et  héritaiges,  en  quelque  lieu  qu'ilz  soient  situez  et  assiz,  no- 
nobstant quelconques  don  ou  dons  que,  auparavant  de  ses  heures,^ 
par  importunité  de  rëquérans  ou  autrement,  en  pourroient  avoir  esté 
faiz  ;  lesquelz,  se  aucuns  en  ont  esté  faiz,  nous  avons  cassez  et  annul- 
lés,  cassons  et  adnulons,  par  ces  mêmes  présentes,  non  obstant  qu'ilz 
soient  demourans  en  l'obéissance  des  Anglais,  lesquelz,  en  brief 
temps,  et  le  plus  tost  que  possible  leur  sera,  se  vendront  redduire  en 
l'obéissance  de  mondit  seigneur  le  Roy  ;  et  semblablement  joyront  de 
leurs  biens  et  héintages,  les  autres  habitans  de  la  dicte  place,  qui 
vouldront  demourer  en  ladicte  obéissance  de  monseigneur  le  Rov, 
en  faisant  le  serment  au  cas  appartenant.  Et,  au  regard  de  ceux  qui 
s'en  vouldront  aller,  de  quelque  estât  ou  nacion  qu'ilz  soient,  faire  le 
pourront  seurement,  avecques  leurs  biens  meubles,  et  leur  sera  par 
nous  baillé  temps  et  sauf-conduit  souffisans  de  vuider,  eux  et  leurs 
biens.  Et  touchant  les  canons,  couleuvrines,  arbalestes  et  autres  habil- 
lemens  de  guerre,  qui  sont  pour  la  garde  et  deflfense  de  ladicte  place, 
ils  seront  mis  par  inventoire  et  baillés  au  capitaine  qui  y  sera  ordonné,^ 
qui  sera  tenu  en  répondre  audit  évesque,  sitost  qu'il  aura  esté  receu 
au  serment  de  feaulté,sans  riens  en  transporter  ne  bailler  ailleurs;  et, 
se  lesdiz  soubz-doyen  et  autres  parents,  officiers  et  serviteurs  dudil 
évesque  veuUent  demourer  en  ladicte  place,  pour  la  seurté  d'icelle  et 
de  leurs  personnes,  faire  le  pourront  seurement,  pour  eulx  et  leurs 
biens,  faisant  le  serment  en  tel  cas  appartenant.  Item,  que  ceulx  qui 
sont  bénéficiez  et  qui  feront  le  serment  de  demourer  en  l'obéissance 
de  mondit  seigneur  le  Roy,  auront,  se  mestier  est,  lectres  espécialles 
et  collacion  en  régalle.  Item,  que,  le  moys  durant,  nous  ne  ferons,  ne 
ferons  faire,  entreprinse  de  jour,  ne  de  nuyt  sur  ladicte  place;  et,  ou 
cas  que  empeschement  y  seroit  mis,  nous  le  ferons  oster,  pourveu 
que  ceulx  de  ladicte  place  ne  feront  chose  qui  soit  préjudiciable  à 
mondit  seigneur  le  Roy,  ne  à  nous.  Donné,  soubz  nostre  scel,  à  Ca- 


624  APPENDICES 

rentan,  le  second  jour  d'octobre,  l'an  de  grâce  mil  cccc  quarante 
neuf.  Artur.  —  Par  monseigneur  le  conte  connestable,  J.  Goguet. 

Et  ayons  esté  requis  par  nostredit  cousin  que,  actendu  le  grant  bien 
qui  est  ensuy  à  nous  et  à  la  chose  publicque  au  recouvrement  de  nos- 
tredit pays  de  Normendye  et  qu'il  a  promis  faire  par  nous  rattifier  et 
avoir  agréable  l'apoinctement  dont  en  icelle  est  faicte  mencion,  il 
nous  plaise  ainsi  le  faire  ;  pour  ce  est-il  que  nous,  considérées  les 
choses  contenues  es  dites  lettres,  qui  ont  bien  au  long  esté  remonstrées 
à  nous  et  aux  gens  de  nostre  conseil;  actendu  aussi  que  ce  qui  a  esté 
fait  en  ceste  matière  par  nostredit  cousin  a  esté  pour  le  bien  de  nous 
et  le  recouvrement  de  nostre  seigneurie,  voulans  entretenir  ce  que  par 
nostredit  cousin  a  esté  promis  et  accordé,  de  par  nous,  icelles  lectres, 
dessus  transcriptes,  et  le  traictié  et  appoinctement  contenu  en  icelles, 
avons  eu  et  avons  agréables  et  les  avons  rattiffiées,  approuvées  et  con- 
fermées,  rattifflons,  approuvons  et  confermons,  de  grâce  espécial, 
plaine  puissance  et  auctorité  royal  par  cesdictes  présentes,  etc,.  Donné 
aux  Montilz  lès  Tours,  le  xxiii"  jour  de  mars,  l'an  de  grâce  mil  CCCC 
cinquante  et  de  nostre  règne  le  xxix*.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  en  son 
conseil,  ouquel  Vous,  le  conte  de  Dunois,  l'admirai  et  les  sires  de  La 
Forest  et  d'Esternay  et  plusieurs  autres  esties.  Delaloere.  CoUacion 
est  faicte.  Visa.  —  (JJ.  183,  f°  31.) 


XGI 

LE  ROI  DONNE   AU   CONNÉTABLE,  SA   VIE   DURANT,  LA  SEIGNEURIE  DE 

GAVRAY  (1451,  31  mars)  [p.  402]. 

A  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lectres  verront,  Jehan  Mesmeau, 
garde  du  scel  estably  aux  contracz  de  Partenay,  pour  très  redoubté  et 
puissant  seigneur,  monseigneur  le  conte  de  Richemont,  seigneur  dudit 
Partenay,  connestable  de  France,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  l'an 
de  grâce  mil  CCCC  cinquante  ung,  le  mercredi,  vingt  quatriesme  jour 
de  novembre,  veismes  ung  vidimus  de  lectres  roiaulx,  collacionnées  à 
l'original,  par  la  court  du  prévost  de  Paris  et  scellées  du  scel  de  ladicle 
prévosté,  en  double  queue  et  cire  vert,  sain  et  entier  en  scel  et  escri- 
pture,  contenant  ceste  forme  :  A  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lectres 
verront,  Robert  d'Estouteville,  seigneur  de  Beyne,  baron  d'Ivry,  che- 
valier, conseiller,  chambellan  du  Roy  nostre  sire  et  garde  de  la  prévosté 
de  Paris,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  l'an  de  grâce  mil  CCCC  cin- 
quante ung,  le  mercreii  vingt  troiziesme  jour  de  juing,  veismes  ung 
lectres  royaulx,  scellées  en  double  queue  et  cire  jaune,  saines  et 
entières  en  scel  et  escripture,  contenans  ceste  forme  : 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces 
présentes  lectres  verront,  salut.  Savoir  faisons  que  nous,  considérans 
les  grans,  notables,  continuelz  et  prouffltables  services  que  a  faiz  par 
longtemps  à  nous  et  à  la  chose  publicque  de  nostre  royaume  nostre 
très  chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont,  connestable  de 


APPENDICES  625 

France,  ou  fait  de  noz  guerres,  à  l'encontre  des  Anglois,  noz  anciens 
ennemis,  tant  à  la  recouvrance  de  nostre  pais  et  duchié  de  Normandie 
que  autrement,  fait  et  continue,  chacun  jour,  en  maintes  manières,  et 
espérons  que  plus  face  ou  temps  à  venir,  voulans  iceulx  services  aucu- 
nement envers  luy  recognoistre,  à  icellui  nostre  cousin  le  connestable, 
en  recongnoissance  desdiz  services,  et  afin  que  il  soit  toujours  plus 
enclin  de  y  continuer,  et  qu'il  ait  mieulx  de  quoy  soy  entretenir  ho- 
norablement en  icelui,  et  pour  certaines  autres  grans  causes  et  consi- 
déracions  à  ce  nous  mouvans,  avons  donné,  baillé  et  délaissié,  donnons, 
baillons  et  délaissons,  par  ces  présentes,  de  grâce  espécial,  à  sa  vie 
seulement,  les  fruiz,  prouffiz  et  revenues  quelxconques  de  noz  ville, 
terre,  seigneurie  et  viconté  de  Gauray,  à  iceulx  avoir  et  prendre 
chacun  an,  à  sa  dicte  vie  durant,  par  les  mains  de  nostre  viconte  d'illec 
et  par  les  simples  quictances  d'icellui  nostre  cousin,  ou  de  son  tréso- 
rier, fiefz,  aumosnes,  gaiges  d'offices,  reparacions  de  places  et  autres 
charges  ordinaires  premièrement  paiez;  et,  de  plus  ample  grâce,  luy 
avons  octroyé  et  octroyons,  par  cesdictes  présentes,  qu'il  puisse  pour- 
veoir  à  la  garde  et  cappitainerie  et  généralement  à  tous  les  autres 
offices  desdictes  terre  et  seigneurie  de  Gauray,  toutes  et  quanteifoiz 
que  le  cas  y  escherra,  de  telles  personnes  que  bon  luy  semblera, 
excepté  seulement  à  l'office  de  viconte,  ouquel  office  de  viconte  nostre 
dict  cousin  ne  pourra  nommer  telle  personne  qu'il  voudra,  quant  le 
dit  office  sera  vacant,  et  à  sa  nominacion  y  pourverrons  et  donnerons 
ledit  office.  Si,  donnons  en  mandement,  par  cesdictes  présentes,  à 
noz  amis  et  féaulx  les  gens  de  noz  comptes  et  trésoriers,  au  baillif  de 
Constantin  et  à  tous  noz  autres  justiciers,  ou  à  leurs  lieuxtenans  et  à 
chacun  d'eulx,  si  comme  à  lui  appartendra,  que,  en  faisant  nostre  dit 
cousin  joir  et  user  plainement  et  paisiblement  de  noz  présens  grâce, 
don,  bail  et  octroy,  ilz  luy  facent  bailler  la  possession  réelle  desdictes 
place,  terre  et  seigneurie  de  Gauray,  et  d'icelles,  ensemble  des  fruiz, 
rentes,  cens,  revenues,  prouffiz  et  esmolumens  à  icelle  terre  et  sei- 
gneurie de  Gauray  appartenans,  le  facent,  seuffrent  et  laissent,  sadicte 
vie  durant,  joir  et  user  plainemeut  et  paisiblement,  sans  aucun  empes- 
chement,  lequel,  se  rais  ou  donné  lui  estoit,  estent  ou  facent  oster  et 
mectre  incontinent  et  sans  delay  à  plaine  délivrance  ;  et,  par  rappor- 
tant cesdictes  présentes,  signées  de  nostre  main,  ou  vidimus  d'icelles 
pour  une  foiz  seulement,  et  récognoissance  sur  ce  souffisant  de  nostre 
dit  cousin,  nous  voulons  et  mandons  tous  ceulx  de  noz  receveurs  ou 
vicontes  qu'il  appartendra  en  estre  et  demourer  quictes  et  deschargez 
par  nosdiz  gens  des  comptes,  ausquelx  nous  commandons  que  ainsi 
le  facent,  sans  difficulté,  car  ainsi  nous  plaist  il  estre  fait,  non  obstant 
les  ordonnances,  restrictions,  mandemens  ou  delTences  à  ce  con- 
traires. En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à  ces 
présentes.  Donné  à  Tours,  le  derrenier  jour  de  Mars,  l'an  de  grâce 
mil  CCCG  cincquante,  et  de  nostre  règne  le  trente-et-unième,  avant 
Pasques.  Ainsi  signé,  Charlks,  et,  sur  le  reply  :  par  le  Roy,  en  son 
Conseil,  Delaloere. 

Et  nous,  à  ce  présent  transcript,  ou  vidimus,  avons  mis,  en  tesmoing 
de  ce,  le  scel  de  ladicte  prévosté  de  Paris,  l'an  et  jour  dessus  premiers 

RiCIIEMOM  40 


626  APPENDICES 

diz.  Ainsi  signé.  A  Rebours.  En  tesmoing  de  laquelle  vision,  inspection 
et  lecture  dudit  vidimus,  nous,  garde  dudit  scel,  pour  mondit  sei- 
gneur le  conte  connestable,  icellui  dit  scel  à  ce  présent  transcript,  ou 
vidimus,  à  la  féalle  rellacion  des  notaires  cy  dessous  escrij^ts,  avons 
mis  et  apposé,  Tan  et  jour  premiers  diz.  Constat  en  razure  Jehan 
Mesmeau,  que  nous  approuvons.  Donné  comme  dessus. 

GOGUET. 

(Pièces  originales,  t.  302,  dossier  11383  [ducs  de  Bretagne]  n"  6.) 


XGII 
QUITTANCE  DE  GEOFFROY  DE  couvRAN  (1456,  8  novembre)  [p.  402j. 

Je,  Guiffroy  de  Couvran,  chevalier,  seigneur  de  La  Marandoye,  cap- 
pitaine  de  Constances,  confesse  avoir  eu  et  receu  de  Olivier  Le  Roux, 
trésorier  de  haultet  puissant  seigneur,  monseigneur  le  connestable  de 
France,  par  la  main  de  Jehan  Croixart,  viconte  de  Constances,  pour 
la  pension  à  moy  ordonnée  par  mondit  seigneur  le  connestable,  sur  la 
terre  de  Gauray,  qui  est  de  cent  escuz  d'or  par  an,  la  somme  de  cent 
douze  hvres  dix  soulz  t.  comptant,  par  Cohn  Gronars,  clerc  dudit  vi- 
conte, pour  les  trois  quartiers  d'an  derrenier  passez,  c'est  assavoir 
pour  les  mois  de  janvier,  febvrier,  mars,  apvril,  may,  juing,  juillet, 
aoust,  septembre  derrain  passez  ;  dont  je  quicte  mondit  seigneur  le 
connestable,  son  dit  trésorier,  ledit  viconte  et  tous  aultres.  Tesmoing 
mon  saing  manuel  et  sceau  de  mes  armes  cy  mis,  le  huitième  jour 
d'octobre,  l'an  mil  CCCC  cinquante  six. 

Geff.  de  Couvran. 

(Pièce  orig.,  t.  919,  dossier  20299  [Couvran],  n»  13.) 


XGIII 

POYOIR  DONNÉ  AU  DUC  FRANÇOIS  DE  BRETAIGNE  POUR  ENTRER  EN 

NORMANDIE  (1450,  16  janvier)  [p.  405]. 

Charles,  etc.,  à  tous,  etc.,  salut.  Comme  nostre  très  chier  et  très 
amé  neveu,  le  duc  de  Bretaigne,  en  demonstrant  par  effect  le  très 
grant  et  bon  vouloir  qu'il  a  tousjours  eu  et  a  à  nostre  personne  et 
au  bien  et  recouvrement  de  nostre  seigneurie,  se  soit,  puis  demy 
an  ençà,  ou  environ,  mis  sus  et,  à  grant  armée  et  puissance  de  gens 
de  guerre,  entré  en  Basse  Normandie,  et,  illec,  par  sièges,  assaulx,  et 
autrement,  conquesté,  mis  et  réduit  en  nostre  obéissance  plusieurs 
citez,  villes,  chasteaulx  et  forteresses  que  tenoient  lors  et  occupoient 
noz  anciens  ennemis  et  adversaires,  les  Anglois,  en  quoy  il  ait  exposé 
sa  propre  personne,  ses  subgetz  et  biens,  sans  y  riens  espargner,  tant 
et  si  avant  que  bien  en  doit  estre  envers  nous  loué  et  recommandé; 


APPENDICES  627 

et  encores,  en  persévérant  de  bien  en  mieulx  en  son  bon  vouloir,  ait 
entencion,  ainsi  que  par  son  chancelier  et  autres  ses  gens  et  ainbaxa- 
deurs,  qu'il  a,  pour  ce,  présentement  envoiez  devers   nous,  nous  a 
fait  dire  et  remonstrer,  d'entrer,  de  rechef,  prouchainement,  à  puis- 
sance et  grosse  armée  de  gens,  en  ladicte  Basse  Normandie  et  nous 
y  servir  au  bien  et  recouvrement  des  autres  citez,  villes  et  places  que 
nozdis  ennemis  y  tiennent  encores,  par  toutes  (voies?)  et  manières  à 
lui  possibles;  savoir  faisons  que,  ponr  la  singulière  amour  et  dileccion 
que  avons,   comme  bien  avoir  devons,  à  la  personne  de  nostredit 
neveu,  tant  pour  l'inclinacion  naturelle  que,  par  expérience,  il  a  tous- 
jours  monstre  avoir  à  nous,  comme  pour  la  proximité  de  lignace  (sic) 
en  quoy  il   nous  atient,  et  pour  l'entière  et  parfaite  confiance   que 
avons  de   ses   sens,  vaillance,  loiaulté   et   bonne   diligence;  à  icelui 
nostre  neveu,  pour  ces  causes,  et  autres  à  ce  nous  mouvans,  et  mes- 
mement  ayans  regard  et  considéracion  à  Testât  et  auctorité  de  sa 
personne  et  à  la  grant  et  bonne  puissance  qu'il  a  de  nous  servir  et 
que   bien  savons   tel  estre  son  vouloir;   avons,   de    nostre   certaine 
science,   et  par  grant  et   meure  délibéracion  de  Conseil,  donné   et 
octroie,  donnons  et  octroions  plain  povoir,  auctorité  et  mandement 
espécial  de,  en  nostre  absence,  représenter  nostre  personne,  pendant 
qu'il  sera  en  armée  en  ladicte  Basse  Normandie;  de  prandre,  réduire 
et  mectre  en  nostre  obéissance,  par  sièges,  assaulx,  composicion  et 
autrement,   ainsi  qu'il  verra  estre  expédient  et  que  mieulx  faire  le 
pourra,  toutes  citez,  villes,  chasteaulx  et  forteresses  détenues  et  occu- 
pées par  nosdis  ennemiz  et  autres  tenans  leur  party  es  dictes  mar- 
ches, et,  pour  ce  faire,  mander,  convoquer  et  assembler  à  son  aide  et 
service,  se  besoing  est,  et  il  voit  que  faire  se  doye,  noz  vassaulx  et 
subgetz,  cappitaines,  gens  de  guerre  et  autres,  telz,  en  tel  nombre, 
en  telz  lieux  et  par  tant  de  foys  que  bon  lui  semblera;  de  establir  et 
mectre  garnisons  èsdictes  villes  et  places,  ainsi  réduictes  ou  conquises, 
telles  et  en  telle  quantité  qu'il  verra  estre  à  faire;  de  quicter,  remectre 
et  pardonner  et  abolir  à  toutes  manières  de  gens,  tant  gens  d'église, 
nobles  comme  autres,  soit  en  général  ou  en  particulier,  estans  et  qui 
seront  èsdictes  citez,  villes,  chasteaulx,  et  forteresses  qui  ainsi  seroient, 
par  son  moien,  redduitz,  et  à  tous  autres,  demourans  en  ladicte  Basse 
Normandie,  tous  crimes,  offenses,  deliz  et  maléfices  par  eulx  et  cha- 
cun d'eulx  commis  et  perpétrez  à  l'encontre  de  nous  et  de  nostre  sei- 
gneurie; de  les  recueillir  et  recevoir  en  nostre  bonne  grâce  et  bien- 
veillance; de  laisser  à  ceulx  qu'il  trouvera  èsdictes  villes,  places  et 
forteresses  qu'il  redduira,  par  traicté  et  composicion,  en  nostre  dicte 
obéissance  leurs  estatz  et  offices,  se  bon  lui  semble;  de  commectre  à 
tous  offices  estans  es  lieux  qu'il  redduira  et  mectra  en  nostre  dicte 
obéissance,  soit  par  composicion  ou  par  force,  telles  personnes  qu'il 
verra  estre  pour  ce  propices  et  convenables;  ausquelles  personnes,  et 
non  à  autres,  quant  il  nous  apparaîtra  de  la  provision  que  nostredit 
neveu  leur  aura  sur  ce  faicte,  nous  ferons  don  desdiz  offices  et  sur  ce 
leur  baillerons  noz  lectres  telles  que  au  cas  appartient  ;  de  bailler  sur 
toutes  ces  choses  et  chacune  d'icelles  ses  lectres  en  forme  deue,  et, 
généralement,  de  faire  es  choses  dessus  dictes,  leurs  circonstances  et 


628  APPENDICES 

deppendances,  tout  ainsi  et  par  la  forme  et  manière  que  ferions  et 
faire  pourrions,  se  présens  en  nostre  personne  y  estions  ;  jaçoit  ce  que 
la  chose  requist  mandement  plus  espécial,  nonobstant  tous  povoirs 
que,  en  pareils  et  semblables  cas,  pourrions  avoir  donné  à  autres 
quelconques,  le  temps  passé,  lesquelz  ne  voulons  aucunement  préju- 
dicier  à  ces  présentes;  promectons,  en  bonne  foy  et  parolle  de  Roy, 
avoir  agréable,  ferme  et  estable  tout  ce  que  nostre  dit  neveu  fera  es 
choses  dessus  dictes  et  leurs  deppendances,  et  les  rattifler,  approuver 
et  confermer,  et  sur  ce  bailler  noz  lectres,  toutes  et  quantes  foys  que 
requiz  en  serons.  En  tesmoing,  etc.  Donné  à  Jumièges,  le  xvi*  jour  de 
janvier  mhucxlix  et  de  nostre  règne  le  xxviii*. 
(Fr.  5909,  f°'  ne  xii  vo-iic  xiii  v"). 


XGIV 

LE  DUC    DE    BRETAGNE  ET   LE    CONNÉTABLE    SONT    INFORMÉS   QUE    LES 
ANGLAIS  VIENNENT  ASSIÉGER   VALOGNES  (1450,  l*""  avril)  [p.  406]. 

Guillaume  Lecoq,  lieutenant-général  de  noble  homme  Artur  de 
Montauban,  escuier  d'escuierie  du  Roy,  seigneur  de  Creppon  et  son 
bailli  de  Costentin,  au  viconte  de  Constances  salut.  Nous  vous  man- 
dons et  commandons  que,  des  deniers  de  vostre  recepte,  vous  paiez, 
baillez  et  délivrez  à  Sandres  Broquart  et  à  Jamet  Delaunay,  messagiers 
à  cheval,  la  somme  de  cent  et  dix  soulz  tournois,  c'est  assavoir  audit 
Sandres  Broquart  la  somme  de  cinquante  s.  t.,  pour  sa  paine,  salaire 
et  despens  d'estre  party,  sur  son  cheval,  de  ceste  ville  de  Constances 
«t  alley  en  la  ville  de  Rennes,  en  Bretaigne,  porter  devers  très  hault  et 
très  puissant  prince,  le  duc  de  Bretaigne,  hault  et  puissant  seigneur 
l'admirai  de  France,  haults  et  puissans  seigneurs  les  mareschal  de 
France  et  de  Bretaigne,  le  conte  de  Laval  et  autres  seigneurs  et  chiefs 
de  guerre  les  lettres  closes  de  noble  homme  Abel  Ruault,  escuier, 
frère  de  noble  homme  et  puissant  Joachin  Ruault,  escuier,  chief  de 
guerre  et  cappitaine,  pour  le  Roy  nostre  sire,  des  villes,  chastel 
et  place  de  Valongne,  des  viconte,  officiers  du  Roy,  gens  d'église  et 
bourgois  dudit  lieu,  à  nous  envolées,  faisans  mencion  comme  les 
Anglois,  ennemis  et  adversaires  du  Roy,  naguères  descendus  à  Chier- 
bourg,  au  nombre  de  deux  à  trois  mille,  et  auxi  partie  d'iceulx  de 
Chierbourg,  de  Saint-Sauveur-Ie-Viconte,  de  Briquebec,  détenus  et 
occupés  par  lesdiz  Anglois,  estoient  assemblés  et  joins  ensemble, 
avecques  grant  nombre  de  charroys,  artillerie,  canons  et  autres  ordon- 
nances de  guerre,  en  entencion  de  venir  asségier  la  dicte  ville  et  for- 
teresse de  Valloignes,  et  icelle  prendre  par  force,  et  aultres  choses 
déclairées  plus  à  plain  es  dictes  lettres  closes  ;  et  audit  Jamet  Delau- 
nay, pour  sa  paine  et  salaire  d'estre  semblablement  party  de  Cons- 
tances et  allé  vers  très  hault  et  puissant  seigneur,  monseigneur  le 
connestable  de  France,  au  port  de  Messac,  oudit  pays  de  Bretaigne, 
porter  semblables  lettres  des  nouvelles  et  entreprinse  dampnables 


APPENDICES  629 

d'iceulx  ennemis,  avecque  les  lettres  closes  des  capitaines  de  Cons- 
tances, de  nous  et  des  officiers  du  Roy  nostre  dit  seigneur  en  la  dicte 
ville  et  viconté  de  Constances,  touchant  la  dicte  entreprinse  et  nou- 
velles dessus  dictes,  afin  qu'il  pleust  aux  diz  prince,  seigneurs  et  chiefs 
de  guerre,  dessus  nommés,  venir,  à  toute  puissance  et  diligence,  par 
deçà,  donner  répulsion  à  rencontre  desdiz  ennemis,  pour  le  bien  du 
Roy  nostre  dit  seigneur,  seurté  et  garde  de  son  pais  et  subgies,  et  d'en 
avoir  raporté  lettres  de  respouse  d'iceulx  prince  et  seigneurs  devers 
ledit  Abel  Ruault  et  gens  de  justice  et  autres  nobles  et  bourgeois 
d'icelle  ville;  èsquelx  volages  faisant,  tant  en  alant,  séjournant,  que 
retournant  audit  lieu  de  Goustances,  iceulx  messagiei's  ont  vacqué, 
tant  de  jour  que  de  nuyt,  c'est  assavoir  ledit  Sandres  Broquart,  par 
l'espace  et  temps  de  cinq  jours  et  ledit  Delaunay  par  le  temps  et 
espace  de  six  jours;  pour  chacun  desquelz,  par  marchié  fait  avecques 
eulx,  par  l'advis  et  oppinion  des  procureurs  du  Roy,  avocat  et  autres 
gens  notables,  leur  a  esté  tauxé  à  chacun  d'eulx,  pour  jour,  la  somme 
de  dix  s.  t.,  qui  valent,  pour  lesdiz  cinq  journées  dudit  Broquart,  la 
somme  de  cinquante  s.  t,  et,  pour  ledit  Delaunay,  pour  lesdis  six  jour- 
nées, la  somme  de  soixante  s.  t.,  montant  icelles,  paiées  en  somme 
toute,  à  cent  dix  s.  t.  Et,  par  raportant  ces  présentes  et  quictances 
suffisantes,  icelle  somme  sera  alouée  en  vos  comptes  et  rabatue  de 
vostre  recepte,  par  MM.  les  gens  des  comptes  du  Roy  nostredit  sei- 
gneur, ausquelz,  par  ces  dictes  présentes,  nous  supplions  et  requé- 
rons que  aussy  le  facent  sans  diffîulté.  Donné  audit  lieu  de  Gous- 
tances, soubz  nostre  scel,  le  premier  jour  de  apvril,  l'an  mil  quatre 
cens  cinquante,  avant  Pasques,  selon  l'usage  du  diocèse  de  Constances. 

(K.  68,  n»  49.) 


XCV 

RICHEMONT  ORDONNE  DE  PAYER  150  SALUTS  d'OR  A  P.  DROUART 

(1450,  20  avril)  [p.  413]. 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  etc.,  au  bailli 
de  Custentin,  ou  à  son  lieutenant,  salut.  Nous,  pour  aucunement 
récompenser  Pierres  Drouart  de  la  somme  de  trois  cens  saluz  d'or  à 
quoy  il  avoit  mis  à  ranchon  Jehan  Boutillier,  Englois,  lequel  icellui 
escuier  avoit  prins  son  prisonnier,  en  nostre  compengnie,à  la  journée 
de  Fourmigny,  et,  pour  occasion  de  la  prinse  duquel,  icellui  Drouart  a 
esté  endommagié,  tant  de  la  perte  de  ses  chevaulx  que  autrement,  en 
très  grant  somme  de  deniers  et ,  pour  lequel  prisonnier,  pour  les 
exaus  et  énormes  crimes  qu'il  avoit  faiz  et  foisoit  chacun  jour  sur  les 
subgez  de  monseigneur  le  Roy,  tant  de  femmes  prinses  à  force, 
murdres,  arsuers  de  maisons,  a  esté  délivré  à  justice;  nous  vous  man- 
dons et  commectons,  se  mestier  est,  [que,]  sans  quelconque  difficulté 
ou  dissimuUacion,  par  les  procureurs  et  officiers  de  mondit  seigneur  le 
Roy,  à  Goustances,  faictez  asseoir,  cueillir  et  lever  sur  le  pais  de  l'envi- 


630  APPENDICES 

ron  où  icellui  Boutillier  a  conversé  et  conversoit,  la  somme  de  cent 
cinquante  saluz  d'or  et  icelle  somme  faictez  paier  audit  escuier  fran- 
chement et  sans  aucune  diminucion.  Ce  faictez,  et  gardes  que  deffault 
n'y  ait,  en  contraignant  à  ce  tous  ceulx  qui  pour  ce  seront  à  con- 
traindre, par  toutes  voies  deues  et  raisonnables.  Donné  à  Saint-Lô, 
par  la  délibéracion  et  advis  de  nostre  très  chier  et  très  amé  neveu  le 
conte  de  Cleremont,  le  séneschal  de  Poictou,  le  mareschal  de  France, 
l'amiral  de  la  mer  et  plusieurs  autres,  le  xxe  jour  d'avril,  l'an  mil 
CCCC  cinquante.  Ainsi  signé  : 
Artur. 

Pour  monseigneur  le  conte  connestable. 
Gilet. 
Collacion  faicte  à  l'original. 
(Fr.  26079,  n"  6194,  —  Copie  très  fautive.) 

XCVI 

N"    1.    PRÉRARATIFS   DU   SIÈGE   DE   VIRE    (1450,  20  avrlI)  [p.  413]. 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  nostre  bien  amé  Raoul  Gourdel, 
viconte  de  Carenten,  salut.  Pour  ce  que,  à  nostre  prière  et  requeste, 
Guillaume  de  Dampierre,  senescbal  de  Saint-Lo,a  preste  comptant,  du 
scien,  la  somme  de  cent  saluz  d'or,  lesquelz  nous  avons  présentement 
fait  bailler  et  délivrer,  pour  l'achat  de  certaine  quantité  de  pouldre  à 
canon  et  autre  artillerie,  qui  a  esté  baillée  a  Jehan  Houe),  escuier, 
commis  et  ordonné,  de  par  nous,  à  conduire  et  gouverner  le  fait  de 
l'artillerie  que  faisons  mener  es  sièges  qu'avons  entencion  de  mectre 
et  tenir,  pour  la  recouvrance  de  Vire  et  autres  places  et  forteresses 
détenues  et  occupées  par  les  Anglois;  nous  vous  mandons  et  enjoin- 
gnons  expressément,  par  ces  présentes,  de  par  mondit  seigneur  le 
Roy,  que,  des  deniers  de  vostre  recepte,  vous  bailliez,  payez  et  déli- 
vriez audit  Jehan  (sic)  de  Dampierre  la  somme  de  cinquante  saluz 
d'or,  pour  restitucion  de  la  moitié  de  ladicte  somme  de  cent  saluz. 
Et,  par  rapportant  ces  présentes  et  quictance  sur  ce  dudit  Guillaume 
de  Dampieri'e,  nous  prions  et  néantmoins  mandons,  de  par  mondit 
seigneur  le  Roy,  à  noz  très  chiers  et  bons  amis  les  gens  de  ses  comptes 
et  autres,  qu'il  appartendra,  que  ladicte  somme  de  cinquante  saluz 
d'or,  ou  la  monnoye  à  la  valeur,  attendu  que  c'est  pour  employer  en 
ce  que  dit  est,  ilz  allouent  en  voz  comptes  et  rabatent  de  vostre  re- 
cepte, sans  aucun  contredit  ou  difficulté.  Et,  se  mestier  est,  ou  cas 
que  ces  présentes  ne  souffiroyent  pour  vostre  acquit,  nous  vous  en 
promectons  de  bonne  foi  faire  avoir  autre  acquit  souffisant  à  vostre 
descharge.  Donné  audit  lieu  de  Saint-Lo,  le  xx"  jour  d'avi'il  l'an 
mil  CCCC  cinquante,  après  Pasques. 
Artur 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 
Gilet. 

(Original.  Fr,  26079,  n»  6193.) 


APPENDICES  631 

No  2.  PRÉPARATIFS  DU  SIÈGE  DE  VIRE  (1450,  20  avril). 

Guillaume  Le  Coq,  lieutenant  général  de  noble  homme  Artur  de 
Montauban,  seigneur  de  Crépon,  escuier  d'escuerie  du  Roy,  nostre  sire, 
bailli  de  Costentin  et  commissaire  en  ceste  partie  de  hault  et  puissant 
seigneur  monseigneur  le  connestable  de  France,  au  viconte  de  Cons- 
tances, ou  à  son  l'ecepveur  commis  en  ladicte  viconté,  salut.  Nous  vous 
mandons  et  expressément  enchargons  que,  des  deniers  assis,  cueillis 
et  levez  en  ladicte  viconté,  pour  le  fait  du  siège  de  Vire,  tenu  par 
mondit  seigneur  le  connestable,  vous  paies  et  délivrés  à  Anthoyne  de 
Launay,  messagier  à  cheval,  la  somme  de  trente  solz  tournois,  que 
tauxée  lui  avons,  pour  sa  paine,  salaire,  travail  et  despens  d'estrc 
venu,  par  un  voyage,  de  Vire  à  Constances,  par  le  commandement  et 
ordonnance  de  mondit  seigneur  le  connestable,  et  apporté  devers  nous 
lectres  closes  et  mandement  de  mondit  seigneur,  pour  faire  porter, 
par  vous,  viconte,  ou  vostre  commis,  audit  lieu  de  Vire,  ou  par  icellui 
messagier,  le  paiement  des  charretiers,  massons,  syeurs,  charpentiers, 
pyonniers  et  aultres  manouvriers  de  ladicte  viconté,  servans  au  siège 
tenu  devant  la  ville  et  chastel  dudit  lieu  de  Vire,  pour  trois  jours 
entiers,  pour  chacun  desquelz  lui  avons  tauxé  la  somme  de  dix  solz  t. 
qui,  pour  tout,  vallent  ladicte  somme  de  trente  s.  t.  Et,  par  rapportant 
ces  présentes  et  quictance  suffisans  dudit  Anthoyne,  icelle  somme  sera 
allouée  en  voz  comptes  et  rabatue  sur  vostre  dicte  recepte  par  nos 
seigneurs  les  gens  des  comptes  du  Roy  nostre  dit  sire,  auxquelz,  par 
ces  mesmes  présentes,  nous  supplions  et  requérons  que  ainsi  le  facent. 
Donné  à  Coustances,  le  xx»  jour  d'avril,  l'an  mil  CCCG  cinquante. 

(Fr.  26079,  n»  6192.) 


XGVII 

ABOLITIO   PRO   HABITANTIBUS   VICECOMITATUS   DE   VIRE 

(1450,  novembre)  [p.  413|. 

Charles,  etc.,  savoir  faisons  à  tous  présens  et  h  venir  que,  comme, 
puis  naguères,  noz  très  chiers  et  amez  cousins,  les  contes  de  Riche- 
mont,  connestable  de  France,  et  de  Clermont,  noz  lieuxtenans  géné- 
raulx  sur  le  fait  de  la  guerre  en  la  Basse  Normandie,  aient,  par  nostre 
ordonnance,  mis  et  tenu  le  siège  devant  noz  ville  et  chastel  de  Vi^re, 
en  Normandie,  et,  après  ce,  ait  été  fait  et  passé  certain  appoinctement 
et  composicion  entre  eulx,  pour  et  ou  nom  de  nous,  d'une  part,  et 
d'aucuns  Anglois,  lors  tenans  et  occupans  lesdiz  chastel  et  ville,  pour 
nostre  adversaire  d'Angleterre,  d'autre  part,  sur  le  fait  de  la  réduction 
d'iceulx  ville  et  chastel  en  nostre  obéissance;  par  lesquieulz  traictié  et 
appoinctement,  ou  composicion,  enti'e  autres  choses,  nosdiz  cousins, 
en  usant  du  povoir  par  nous  à  eulx  sur  ce  donné,  aient  voulu  et 
octroie  que  les  gens  d'Église,  nobles,  bourgois,  manans  et  habitans 
desdiz  ville  et  chastel  de  Vire  auroient  abolicion  générale  de  tous 


632  APPENDICES 

cas,  crimes,  déliz  et  offenses  par  eulx  et  chacun  d'eulx  commis  à  ren- 
contre de  nous,  et'joyroient,  ceulx  qui  vouldroient  demoureren  nostre 
dite  obéissance,  de  tous  leurs  biens  meubles  et  immeubles  quelxcon- 
ques,  lors  présens  et  à  venir,  ainsi  que,  par  les  lettres  dudit  appoinc- 
tement,  sur  ce  puet  duement  apparoir  ;  et,  pour  ce,  aient  naguères 
lesdiz  gens  d'église,  nobles,  bourgois  et  habitans  envoyé  par  devers 
nous,  en  nous  humblement  suppliant  et  requérant  que  icellui  appoinc- 
tement,  touchant  ce  que  dist  est,  nous  plaise  avoir  aggréable,  tant 
pour  eulx  que  pour  les  autres  habitans  d'icelle  viconté  de  Vire,  et  les 
remectre,  prandre  et  recueillir  en  nostre  bonne  grâce  et  bienveillance; 
nous ,  bénignement  inclinans  à   ladite   supplicacion  et  requeste  ,  et 
voulans  prefférer  miséricorde  à  rigueur  de   justice,  et   que  nosdiz 
subgiez  desdiz  ville  et  chastel  et  viconté  puissent  vivre  et  demourer 
en  repos  et  tranquilité    soubz    nous,  à  ladiclc  ville  et   ausdiz  gens 
d'esglise,   nobles,  bourgois,  manans   et  habitans,  qui  èsdictes  ville, 
chastel  et  viconté  de  Vire,  ou  ailleurs,  en  nostre  obéissance  vouldront 
demourer  et  faire  le  serment,  se  jà  fait  ne  l'ont,  d'estre  bons,  vrays 
et  loyaulx  subgiez  envers  nous,  avons  accordé,  consenty  et  octroyé, 
accordons,  consentons  et  octroyons,  de  nostre  certaine  science,  grâce 
espécial,  plaine  puissance  et  auctorité  royal,  par  ces  présentes,  aboli- 
cion  générale  de  tous  cas,  crimes,  faultes  et  déliz  par  eulx  et  chacun 
d'eulx  commis  et  perpétrez,  tant  en  général  comme  en  particulier,  à 
rencontre  de  nous  et  de  nostre  seigneurie  et  majesté  royal,  par  avant 
la  redduction  de  ladicte  ville  et  chastel  en  nostre  obéissance,  en 
quelque  manière  ne  pour  quelconque  cause  que  ce  soit;  et  les  avons 
restituez  et  restituons,  par  ces  présentes,   en   leur    bonne   famé  et 
renommée  et  à  tous  leurs  biens  meubles  et  immeubles;  et  demeurent 
en  tous  leurs  héritaiges,  rentes  et  revenues,  fieffés,  droiz,  acquisicions 
et  possessions  quelxconques  à  eulx  appartenans,  leurs  appartenances 
et  appendances,  quelque  part  qu'ilz  soient  situez  et  assiz  en  nostre 
royaume,  et  en  joyssent  dores  en  avant,  ensemble  de  tous  leurs  pri- 
villèges,  prééminances,  jurisdicions,  auctoritez,   prérogatives,  droiz, 
franchises  et  libertez  quelxconques,  dont  ilz  joyssoient  et  avoient  droic- 
ture,  avant  la  descente  en  Normandie  du  feu  roy  Henry  d'Angleterre, 
derrenier  trespassé,  et  tout  ainsi   que  s'ilz  avoient. continuellement 
demouré  en  nostre  dicte  obéissance,  sanz  eulx  en  estre  aucunement 
departiz;  et  pareillement  aussi  au  regard  de  tous  leurs  biens  meu- 
bles qui,  au  temps  dudit  siège  mis  et  de  la  redduction  desdicte  ville 
et  chastel,  n'auroient  esté  prins  par  noz  gens  et  officiers,  ou  autres 
de  nostredicte  obéissance,  non  obstant  quelxconques  dons,  declara- 
cions  et  adjonctions  à  notre  domaine  que  porrions  avoir  faiz  desdiz 
biens  meubles  et  immeubles,  à  quelque  personne  ne  en  quelque  ma- 
nière au  contraire  ;  en  imposant  sur  ce  silence  à  nostre  procureur 
présent  et  à  venir.  Si,  donnons  en  mandement,  par  cesdictes  présentes, 
à  noz  amez  et  féaulx  conseillers  les  gens  tenans  et  qui  tendront  nostre 
parlement  et  nostre  eschiquier  de  Normandie,  aux  bailliz  de  Caen  et 
de  Constantin  et  à  tous  noz  autres  justiciers  et  officiers,  ou  à  leurs 
lieuxtenans  présens  et  à  venir  et  à  chacun   d'eulx,  si  comme  à  lui 
appartendra,  que  de  noz  présens  grâce,  abolicion,  concession  et  octroy 


APPENDICES  633 

ilz  facent,  seuffrent  et  laissent  lesdictes  gens  d'esglise,  nobles,  bour- 
gois,  manans  et  habitans  desdicte  ville,  chastel  et  viconté  de  Vire,  et  à 
tous  autres  à  qui  ce  pourra  toucher,  joir  et  user  plainement  et  paisi- 
blement, sans  leur  faire  ne  souffrir  estre  fait  mis  ou  donné  aucun 
destourbier  ou  empeschement  au  contraire,  ores  ne  pour  le  temps  à 
venir,  en  aucune  manière,  car  ainsi,  etc.  Et,  pour  ce  que  de  ces  pré- 
sentes on  porra  avoir  à  besongner  en  plusieurs  et  divers  lieux,  nous 
voulons  que,  au  vidimus  d'icelles,  fait  soubz  scel  royal,  plaine  foy  soit 
adjoustée,  comme  à  ce  présent  original.  Et  afin,  etc.  Donné  à  Mont- 
bason,  au  mois  de  novembre,  l'an  de  grâce  mil  CCGC  cinquante,  et 
de  nostre  règne  le  xxrx'.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  en  son  conseil, 
Chaligant,  Visa.  Contentor.  E.  Froment. 
(JJ.  185,fM.) 


XGVIII 

CONFIRMATIO   ABOLITIONIS   PRO   PETRO   DU   FIQUET 

(capitulation  de  valognes.  1450,  mai)  [p.  416]. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roy  de  France,  savoir  faisons  à  tous, 
présens  et  à  venir,  nous  avoir  receue  humble  supplicacion  de  Pierres 
du  Fiquet,  bourgois  de  nostre  ville  de  Valoignes,  chargié  de  femme 
et  de  huit  petiz  enffans,  contenant  : 

Comme,  dès  le  temps  de  la  redduction  en  nostre  obéissance  de 
nostre  chastel  dudit  lieu  de  Valoignes,  pour  ce  qu'il  avoit  esté  donné 
à  entendre  à  nostre  très  chier  et  amé  cousin  le  conte  de  Richemont, 
connestable  de  France,  que  ledit  suppliant  avoit  levé  et  exigé,  sans 
congié  ou  commission  de  nous,  sur  les  manans  et  habitans  es  paroisses 
de  la  viconté  dudit  lieu  de  Valoignes,  certains  grans  sommes  de  de- 
niers, eust  esté  réservé  et  excepté,  par  nostre  dit  cousin,  de  l'aboli- 
cion  et  composicion  faicte  et  donnée  aux  habitans  desdicte  ville  et 
chastel  de  Valoignes  et  mené  en  arrest  par  devers  nostre  dit  cousm, 
le  connestable  de  France,  en  nostre  ville  de  Bayeux,  pour  soy  justifier 
de  ce  que  dit  est;  et  lui,  estant  audit  lieu  de  Bayeux,  se  fust  justifié, 
par  devant  nostre  dit  cousin,  le  connestable,  et  monstre  ce  qui  avoit 
esté  mis  sus  en  ladicte  viconté  avoit  esté  du  consentement  et  octroy 
de  plusieurs  des  gens  d'église,  nobles  et  bourgois  de  ladicte  viconté,  pour 
la  garde  et  seureté  d'icelle,  et  que  ledit  suppliant  avoit  esté  commis 
à  la  recepte  par  nostre  bien  amé  escuier  d'escuierie  Joachim  Rouhault, 
aiant  la  garde  de  ladicte  place,  du  consentement  desdiz  gens  d'église 
et  nobles,  et,  sur  ce,  ait  monstrées  ses  quictances  et  autres  choses 
servans  à  sa  descharge,  tellement  que  par  nostredit  cousin  le  connes- 
table il  en  fut  tenu  pour  deschargé  et  ses  personne  et  biens,  ensemble 
ses  pleiges  et  caucions,  mis  à  plaine  délivrance,  et  lui  fût  octroyé  par 
icellui  nostre  cousin  qu'il  fust  comprins  en  ladicte  abolicion  et  com- 
posicion octroyé,  à  ladicte  redduction,  aux  habitans  dudit  lieu  de 
Valoignes,  ainsi  que  ces  choses  et  autres  sont  plus  à  plain  contenues 
es  lectres  de  nostre  dit  (sic),  desquelles  la  teneur  ensuit  : 


634  APPENDICES 

Artur,  filz  du  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Parthenay,  conneslable  de  France,  à  tous  les  justiciers  et  officiers  de 
monseigneur  le  Roy,  ou  à  leurs  lieuxtenans,  salut.  Comme  il  soit  ainsi 
que  Pierres  du  Fiquet,  bourgois  de  Valoignes,  cust  esté  par  nous 
réservé  de  la  composicion  dudit  lieu  et  chastel  dudit  lieu  de  Valoignes, 
recouvert,  ou  mois  de  may  derrenier  passé,  sur  les  Anglois  et  ennemis 
et  adversaires  de  monseigneur  le  Roy,  et  son  corps  mis  en  arrest  et 
amené,  ou  fait  amener,  devant  nous,  par  nostre  très  cliier  et  amé 
cousin,  le  sire  de  Lohehac,  mareschal  de  France,  en  la  ville  de  Bayeux, 
pour  soy  estre  meslé  et  avoir  cueilly  et  levé,  sans  le  congié  et  auc- 
torité  de  monseigneur  le  Roy,  ou  de  nous,  sur  les  paroisses  d'icelle 
viconté,  ou  partie  d'icelle,  certaines  grans  sommes  de  deniers,  par 
forme  de  provision,  alantes  aux  cappitaines  et  gens  de  guerre  estans 
en  ladicte  place  de  Valoignes,  pour  icelle  préserver,  et  ledit  pais  de 
ladicte  viconté,  à  l'encontre  desdiz  ennemis  et  adversaires,  lors  tenans 
et  occupans,  à  grant  force  et  puissance,  les  villes  et  chasteaux  de 
Chierbourg,  de  Briquebec  et  de  Saint-Saureur-le-Viconte,  qui  sont 
situées  en  icelle  viconté,  auprès  d'icellui  chastel  de  Valoignes,  afln  de, 
sur  ce  estre  by  et  pugny  d'iceulx  cas,  s'il  estoit  trouvé  coulpable,  s'il 
ne  se  povoit  excuser  ou  descharger  aucunement;  lequel  du  Fiquet, 
sur  ce  par  nous  oy,  s'est  d'iceulx  cas  deuement  purgé,  excusé  et  des- 
chargé, tant  par  escriptures  deuement  signées  et  approuvées  de  la 
commission  qu'il  avoit  de  faire  ladicte  recepte  et  des  paiements  et 
acquitz  par  lui  faiz  aux  personnes  qui  en  ont  receu  l'argent  ainsi  par 
lui  cueilly  et  receu  que  autrement,  en  nous  requérant  très  humble- 
ment délivrance  lui  estre  par  nous  sur  ce  donnée;  savoir  faisons  que, 
aujourd'huy,  veu  et  entendu  les  escriptures,  descharges  et  quictances 
d'icellui  du  Fiquet,  par  lesquelles  nous  est  deuement  apparu  que 
lesdictes  provisions  avoient  esté  levées  du  consentement,  don  et  octroy 
de  plusieurs  des  gens  d'église,  nobles  et  bourgois  de  ladicte  viconté, 
pour  la  garde  et  detfense  d'icelle,  et  ledit  du  Fiquet  à  ce  commis 
deuement  par  Joachim  Rouault,  escuier,  garde  de  ladicte  place,  à  la 
requeste  et  élection  desdis  gens  d'église,  nobles  et  bourgois  ;  de  laquelle 
recepte  et  entremise  il  avoit  quictances  et  descharges  vallables,  dont 
il  nous  est  deuement  apparu;  et,  sur  tous  les  caz  dessus  touchiez,  a 
plain  oy  en  ses  excusacions  et  justificacions,  et,  sur  ce,  eu  par  nous 
advis  et  gran  délibéracion,  icellui  du  Fiquet  avons  mis  et  mectons  à 
plainière  délivrance,  et  d'iceulx  cas  le  tenons  quicte  et  deuement  des- 
chargié,  et  ses  pleiges,  ou  respondans  pour  lui,  avecques  tous  ses 
biens  meubles  et  héritaiges,  en  le  mectant  et  restituant,  en  tant  que 
mestier  en  serait,  en  la  saisine,  possession  et  joissement  d'iceulx,  sans 
lui  estre  mis  ou  donné  aucun  arrest,  ou  empeschement,  à  quelle  cause 
que  ce  soit  ou  puisse  estre,  par  raison  d'icelle  resservacion  et  des  cas 
dessus  touchiez  ;  et  luy  avons  donné  et  donnons  semblable  composi- 
cion comme  plusieurs  du  pais  et  duchié  de  Normendie,  lors  estans 
oudit  chastel  de  Valoignes,  eurent,  alors  de  ladicte  redduclion,  et, 
générallement  de  toutes  autres  choses  et  cas  dont  on  lui  vouldroit 
donner  charge  auparavant  aujourd'huy,  tout  ainsi  que  s'il  eust  esté 
comprins  en  ladicte  composicion,  alors  d'icelle;  en  le  restituant,  et, 


APPENDICES  635 

par  ces  présentes,  restituons  en  ses  bons  famé  et  renommée,  et  impo- 
sant, et,  par  ces  présentes,  imposons  silence  perpétuel  aux  procureurs 
de  mondit  seigneur  le  Roy  et  à  tous  ses  justiciers  et  officiers,  auxquelx 
nous  mandons  que,  à  cause  des  cas  dessus  touchiez,  ores,  ne  pour 
le  temps  à  venir,  à  lui  ne  aux  siens  ne  lui  facent  aucune  question 
ne  demande.  Donné  à  Bayeux,  le  tiers  jour  de  juing,  l'an  mil  CCCG 
cinquante.    Ainsi    signé  ,   par  monseigneur   le    conte    connestable  , 

J.  GOGUET. 

Toutesvoies,  pour  ce  que  ledit  suppliant  n'a  encores  sur  ce  eue  au- 
cune confirmacion  ou  approbacion  de  nous,  aucuns  noz  gens  et  offi- 
ciers, ou  autres,  se  veullent  eff'orcer  de  lui  mectre  empeschement  en 
sesdis  biens,  et,  pour  ce,  nous  a  humblement,  sur  ce,  fait  requérir 
nostre  déclaracion  et  grâce  :  pour  ce  est  il  que  nous,  ces  choses  consi- 
dérées et  sur  ce  eu  le  rapport  de  nostre  très  chier  et  amé  cousin,  le 
conte  de  Clermont,  qui  fût  présent  aux  choses  dessus  dictes,  les- 
quelles il  a  aff"ermé,  en  nostre  présence,  estre  vrajes,  ayans  le  contenu 
es  lectres  d'icellui  nostre  cousin  le  connestable  agréable,  icelles  avons 
approuvées  et  ratiffîées ,  approuvons  et  ratiffions,  et  audit  suppliant 
avons  octroyé  et  octroyons,  de  grâce  espécial,  plaine  puissance  et 
auctorité,  par  ces  présentes,  qu'il  joisse  de  l'effet  et  contenu  d'icelle 
et  qu'il  soit  comprins  en  ladicte  abolicion  et  composicion  octroyée 
ausdis  habitans  de  Valoignes  etc.  etc.  Donné  aux  Montilz  lez  Tours, 
le  nu"  jour  de  février,  l'an  de  grâce  mil  CCCG  cinquante,  et  de  nostr& 
règne  le  xxix".  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  le  conte  de  Glermont,  le  sei- 
gneur de  La  Tour,  GuiUaume  Goffier  et  autres  présens.  Delaloere. 
Collacion  est  faicte.  Visa.  Gontentor.  E.  Froment. 

(JJ.  185,  f°M8  vo  19,  n"  xxni). 


XGIX 

NOTE    SUR    l'effectif    DE    l'aRMÉE    FRANÇAISE    AU    SIÈGE   DE    CAEN 

(juin,  4450)  [p.  417]. 

En  additionnant  les  chilFres  donnés  par  Berry,  J.  Ghartier  et 
Blondel,  dont  les  narrations  présentent,  sur  Iç  siège  de  Gaen,  les 
mêmes  détails,  on  obtient  un  total  d'environ  17  000  hommes. 

Mathieu  d'Escouchy,  moins  explicite,  sur  plusieurs  points,  que  les- 
trois  auteurs  précédents,  dit  que  le  roi  avait  11  700  hommes  de  guerre, 
mais  il  semble  bien  certain  qu'il  n'entend  par  là  que  les  hommes  des 
compagnies  d'ordonnance  et  qu'il  ne  comprend  pas  dans  ce  chiffre 
les  francs-archers.  (Voy.  Mat.  d'Escouchy,  t.  I,  p.  311  et  note  1.)  Or,  on 
voit,  dans  les  autres  chroniqueurs,  qu'il  y  avait  au  moins  6  000  francs- 
archers  au  siège  de  Gaen.  Si  on  ajoute  ces  6  000  francs-archers  aux 
H  700  hommes  de  guerre  dont  parle  M.  d'Escouchy,  on  trouve  le 
total  de  17  700  combaltants.  On  peut  donc  considérer  comme  très 
probable  l'effectif  d'environ  17  000  h. 

Ces  indications  sont  précieuses,  parce  qu'elles  permettent  d'évaluer 


636  APPENDICES 

les  forces  de  l'armée  française  en  14b0,  c'est-à-dire  à  l'époque  où  se 
termine  la  conquête  de  la  Normandie,  où  va  commencer  celle  de  la 
Guyenne.  On  voit  encore  par  ces  chiffres  qu'il  y  avait  alors  plus  de 

10  compagnies  d'ordonnance,  puisque  le  total  de  ces  1  500  lances,  à 
6  hommes  et  6  chevaux  par  lance,  n'est  que  de  9000  h.  de  cavalerie. 

11  est  vrai  qu'il  y  avait,  dans  cette  armée,  les  contingents  bretons  et 
peut-être  d'autres  encore,  comme  ceux  du  duc  d'Alençon,  mais  on 
peut  affirmer  que  toutes  les  compagnies  n'avaient  pas  été  retirées 
des  garnisons  de  l'intérieur  ou  des  frontières. 

C'est  la  première  fois  que  les  chroniqueurs  donnent  des  détails 
aussi  complets  sur  l'effectif  de  l'armée  ;  malheureusement,  ils  n'em- 
ploient pas  la  désignation  par  lances  de  6  hommes,  qui  serait  une 
base  certaine  d'évaluation  et  il  n'est  pas  possible,  à  cause  de  cela, 
d'obtenir  des  résultats  très  certains. 

Quant  au  connétable,  on  ne  peut  savoir  au  juste  combien  il  avait 
de  troupes,  soit  des  compagnies  d'ordonnance  du  roi,  soit  de  l'armée 
bretonne.  Mat.  d'Escouchy  dit  bien  (I,  189)  que  le  duc  lui  laissa  300 
lances,  entretenues  à  ses  frais,  mais  Gruel  dit  100  lances  et  les  ar- 
chers. Plus  loin,  il  évalue  à  800  lances  et  les  archers  les  troupes  qui 
étaient  avec  le  connétable,  devant  les  murs  de  Caen,  mais  on  voit 
qu'il  y  comprend  celles  du  comte  de  Clermont. 

Il  ne  semble  pas  que,  même  à.  cette  époque,  l'armée  fût  bien  appro- 
visionnée (JJ.  180,  f"  64  vo  n"  vi'"'xix.) 


c 

N"    1.    SIÈGE   DE   CAEN    (1450,   juin)"  [p.  418]. 

GUILLAUME  DE  BRETEUILLE  ,  COLIN  MORIN,  GUILLAUME  SOLAIL,  OLIVIER 
FONSTAINE,  GUILLAUME  LE  COUREUR,  OLIVIER  BLONDEL ,  JEHAN  LE  CHE- 
VALIER 

tous  mineurs,  qui  confessent  avoir  eu  et  receu  de  James  Godart 
escuier,  viconte  de  Constances,  par  la  main  de  Sansois  Paquier,  clert 
et  receveur  dudit  viconte,  la  somme  de  cinquante-six  livres  traize 
soulz  tournes,  quatre  deniers  tourn.;  c'est  assavoir  chacun  vn  1.  i  s.  et 
VIII  derniers  tournois,  qui  ordonnés  leur  ont  esté,  pour  leur  paine  et 
salaire  de  avoir  esté  et  servy  au  siège  de  Caen,  chescun  par  l'espace 
de  trente-quatre  jours,  par  l'ordonnance  de  monseigneur  le  connes- 
table  de  France  ;  de  laquelle  somme  de  cinquante-six  livres  traize 
soulz  quatre  deniers  tournes  ilz  se  tindrent  contens  et  en  quictèrent 
le  Roy  nostre  sire,  ledit  viconte,  receveur  et  tous  aultres.  Fait  et  passé 
à  Constances,  devant  Estienne  Jourdan,  tabellion,  le  ii«  jour  de  juillet, 
l'an  mil  CCGC  cinquante,  présens  Thomas  Ardant  et  Roger  de  La- 
planque. 

E.  Jourdan. 

(Fr.  26079,  n"  6219.) 


APPENDICES  637 

N"  2.  SIÈGE  DE  CAEN  (1450,  juin). 

COLIN   JEHAN,    SERGENT,   JEHAN   LE   CHEVALIER,  SERGENT,    SANDRES    BROQUART 

confessent  avoir  eu  et  receu  de  James  Godart  escuier,  viconte  de 
Constances,  par  la  main  de  Sansoy  Pasquier,  clerc  et  receveur  dudit 
viconte  la  somme  de  trente  huit  livres  cinq  solz  t.  ;  c'est  assavoir 
chacun  la  somme  de  douze  livres  quinze  solz  tournois,  qui  ordonnées 
leur  ont  esté,  pour  leur  paine  et  salaire  d'avoir  esté  chacun  l'espace  de 
trente  quatre  jours,  pour  aidier  à  conduire,  mener  et  gouverner  les 
mâchons,  charpentiers,  myneurs  et  pionniers,  au  siège  devant  Caen, 
par  l'ordonnance  de  haut  et  puissant  seigneur,  monseigneur  le  con- 
nestable  de  France.  De  laquelle  somme  ilz  se  tindrent  contens  et  en 
quictèrent  le  Roy,  nostre  sire,  ledit  viconte,  receveur  et  tous  autres. 
Fait  et  passé  devant  Estienne  Jourdan,  tabellion,  à  Constances,  le 
XIX''  jour  d'aoust,  l'an  mil  CCCG  cinquante,  présens  Jehan  Bonifface  et 
Jehan  Auber. 

E.  Jourdan. 

(Fr.  26079,  n»  6240). 

Voir,  aux  n°*  6220,  6242,  6238,  d'autres  documents  de  ce  genre,  re- 
latifs au  siège  de  Caen. 


CI 

N»   1.    PRÉPARATIFS    ORDONNÉS    PAR    LE    CONNÉTABLE    POUR   LE    SIÈGE 
DE  CHERBOURG   (1450,   30  juin)  [p.  420]. 

Artur,  fllz  de  duc  de  Bretaigne.  conte  de  Richement,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  au  viconte  de  Avrenches  ou  ù  son 
lieutenant  salut.  Pour  ce  que,  pour  le  recouvrement  des  villes  et 
chastel  de  Chierbourg,  occupées  par  les  Anglois,  devant  lesquelz,  à 
ceste  cause,  l'en  espère  mectre  et  tenir  siège,  est  de  nécessité  d'avoir 
et  recouvrer  grant  quantité  de  charpentiers,  tailleurs  de  pierre  et 
manouvriers,  pour  les  affaires  dudit  siège,  fourniz  et  paies  aux  despens 
des  habitans,  es  vicontez  où  ilz  seront  prins;  nous  vous  mandons  et 
expressément  enjoingnons,  de  par  monseigneur  le  Roy,  que  inconti- 
nent vous  faictes  assembler,  de  la  dicte  viconte,  le  nombre  de  vingt 
charpentiers,  six  maçons  et  six  vingts  manouvriers  et  trois  sergents, 
garniz,  c'est  assavoir,  chacun  charpentier  de  hache,  tarière  et,  deux  et 
deux,  une  scie,  chacun  maçon  de  gros  martel  et  de  martel  à  pointe 
et  trenchant,  et  chacun  manouvrier  de  houe,  pic  et  d'une  pelle  ou 
besche  ferrée  ;  et  iceulx  à  vostre  compaignie,  ou  d'ung  commis  par 
vous,  avec  lesdiz  trois  sergens  pour  les  conduire  et  gouverner,  faictes 
rendre  et  venir  par  devers  le  maistre  de  l'artillerie  de  mondit  sei- 
gneur, en  la  ville  de  Valongnes,  dedens  lundi  prouchain  venant,  par 
tout  le  jour,  qui  sera  le  sixième  jour  de  juillet,  paies  pour  ung  moys 
entier,  commençant  ledit  jour,  au  pris  chacun  charpentier,  maçon  et 


638  APPENDICES 

tailleur  de  pierre,  maistres  et  souffisans  desdiz  mestiers,  de  cinq 
solz  tournois,  chacun  manouvrier  de  trois  solz  quatre  deniers  tour- 
nois, et  chacun  sergent  de  sept  solz  six  deniers  tournois,  par  chacun 
jour;  pour  le  paiement  desquelz,  pour  ledit  moys,  auxdiz  pris  et 
pour  les  aultres  fraiz  raisonnables,  que,  pour  ce  faire,  convendra, 
appeliez  avecques  vous  les  esleuz  sur  le  fait  des  aydes,  advocat  et 
procureur  de  mondit  seigneur  en  ladicte  viconté,  faictes  assiette  sur 
tous  les  habitans  en  icelle,  le  fort  portant  le  foible,  sans  en  excepter 
aucuns,  fors  ceulx  qui  es  tailles  et  aydes  piises  sus  par  mondit  sei- 
gneur sont  par  lui  exceptés  et  reservez,  et  lesquelz  haliilans  vous  ferez 
contraindre  realement  et  de  fait,  comme  pour  les  propres  debles  de 
mondit  seigneur,  à  vous  paier  promptement  et  sans  aucun  delay,  ou 
à  vos  commis  ad  ce,  le  taux  et  impost  qui  sur  ce,  à  ceste  cause,  sera 
rais  sus,  pour  les  deniers  qui  en  ystront  (sic)  estre,  par  vous,  ou  vos 
diz  commis,  distribuez  par  chacun  jour  audiz  ouvriers,  manouvriers 
et  sergens,  ainsi  qu'ilz  ouvreront  ;  et  par  rapportant  ces  présentes, 
avec  quictances  sur  ce  souffisans  et  cei^tifficacion  dudit  maître  de  l'ar- 
tillerie de  mondit  seigneur  des  journées  que  lesdiz  ouvriers  et  ma- 
nouvriers auront  vacqué  et  servy,  tout  ce  qui  aussi  par  vous  aura  esté 
paie,  sera  alloué  en  vos  comptes,  déduit  et  rabatu  de  vostre  recepte 
par  nos  très  chiers  et  bons  amys,  les  gens  des  comptes  de  mondit 
seigneur,  auxquelz  nous  requérons  que  ainsi  le  facent,  sans  contredit  ou 
dificulté;  et,  avecques  ce,  voulons  et  vous  mandons  que  vous  faites,  ou 
faictes  faire  commandement  exprez,et  sur  certaines  grosses  peines,  à 
toutes  manières  de  gens  que  verrez  este  à  faire,  que,  audit  jour  et  lieu 
ilz  soient  prestz  et  garniz  de  vivres,  chacun  selon  qu'il  saura  et  pourra 
finer,  pour  d'ilec  estre  portés  et  menés  audit  siège.  De  ce  faire  vous 
donnons  povoir;  mandons  et  commandons,  de  par  mondit  seigneur,  à 
tous  ses  justiciers  et  officiers,  vassaulx  et  subjecz,  à  vous,  en  ce  fai- 
sant, estre  obbey  et  entendu  diligemment.  Donné  au  siège  devant  Caen, 
le  derrain  jour  de  jning,  l'an  mil  quatre  cens  cinquante. 

Artur. 
(Le  nom  du  secrétaire  a  été  coupé). 

Au  dos  on  lit  que  ce  mandement  fut  lu  et  publié  au  marché 
d'Avranches,  le  4  juillet. 

(K  68,  n»  43.) 

N»  2.  SIÈGE  DE  CHERBOURG  (1450,  juillet-aoùt). 

Jaspar  Bureau,  seigneur  de  Villemomble,  maistre  de  l'artillerie  du 
Roy  nostre  sire,  certifflons  à  tous  à  qui  il  appartient,  que  Gonsalle 
d'Ars,  huissier  d'armes  du  Roy,  nostre  dit  sire  et  son  viconte  de 
Baieux,  a  vacqué,  pour  assembler,  faire  venir  et  administrer,  et  troys 
de  ses  sergens  en  sa  compagnie,  certain  nombre  de  charpentiers,  mâ- 
chons, sieurs  de  long  et  aultres  manouvriers,  pour  l'entretainement  du 
siège  derrainement  tenu  par  ledit  seigneur  devant  la  ville  et  chastel 
de  Chierebourg,  l'espace  de  quinze  jours  entiers,  commenchant  le 
derrain  jour  de  juillet  et  fenissant  le  xx^  jour  de  cest  présent  moys 


APPENDICES  639 

d'aoust,  iceulx  jours  inclus.  Auquel  Gonsalle  a  esté  tauxé,  pour  sadicte 
vacquacion,  pour  chacun  jour,  la  somme  de  vingt  soulz  tournois.  Et  ce 
certiffions  estre  vray;  tesmoing  nostre  signet  et  saing  manuel  cy  mis, 
le  xixe  jour  d'aoust,  l'an  mil  CCCG  cinquante. 

Jaspar. 

(Fr.  26079,  n»  6239). 

N"  3.  SIÈGE  DE  CHERBOURG  (1450,  juiUet-août). 

JEHAX  LECROSNIER,  GUILLAUME  LESAGE ,  CARDIN  BASIRE ,  JAQUET  VIDOQ, 
OLIVIER  LE  RONIER,  THOMAS  LEMAREZ ,  GAUTIER  LEMARIEY ,  COLIN  NOM- 
BRET,    GIRET   OUYN,   JEHAN   VILLAIN ,    JEHAN   DUCLIN,    GUILLAUME    BOURDON, 

tous  manouvriers  et  pionniers,  qui  confessèrent  avoir  eu  et  reçu 
de  Jacques  Godart,  escuier,  viconte  de  Coustances,  par  la  main  de 
Sansoy  Pasquier,  clerc  et  receveur  dudit  viconte,  la  somme  de  qua- 
rante livres,  douze  solz,  six  deniers  tournois;  c'est  assavoir  chacun 
Lxii  s.  VI  d.  qui  ordonnés  leur  ont  esté,  pour  leur  paine  et  salaire 
d'avoir  e?té  et  servy  au  siège  devant  Chierbourg,  par  l'espace  chacun 
de  quinze  jours,  par  l'ordonnance  de  très  hault  et  puissant  seigneur, 
monseigneur  le  conhestable  de  France.  De  laquelle  somme  de  qua- 
rante livres  douze  solz  six  deniers  ilz  se  tindrent  conlens  et  en  quictè- 
rent  le  Roy  nostre  sire,  ledit  receveur  et  tous  autres.  Fait  et  passé 
devant  Estienne  Jourdan,  tabellion  à  Coustances,  le  xxvi«  jour  de 
novembre,  l'an  mil  1111°  cinquante,  présens  Colin  Lengrogne  et  Jehan 
Leserf. 

E.  Jourdan. 

(Fr.  26079,  n»  6266.) 

Autres  documents  du  même  genre,  relatifs  au  siège  de  Cherbourg, 
n°^  6230,  6268.  ' 

N°  4.  SIÈGE  DE    CHERBOURG. 

Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roy  de  France,  aux  vicontes  de 
Caen  et  Faloize,  ou  à  leurs  lieuxtenans  et  à  chacun  d'eulx,  salut.  Pour 
ce  que  entendu  avons  que,  pour  le  recouvrement  de  la  ville  de  Chier- 
bourg  et  l'enlretenement  du  siège  que  naguères  y  avons  faict  mectre  et 
tenir,  nostre  très  chier  et  amé  cousin,  le  conte  de  Richemont,  connes- 
table  de  France,  eust  envoyé  mandement  devers  les  vicontes  de  Bayeux 
Carenten,  Valongne,  Coustances,  Avranches,  Vire,  Mortaing  et  Condé, 
pour  avoir,  aux  despens  des  habitans  des  dictes  vicontes,  grant  nom- 
bre de  maçons,  charpentiers,  manouvriers,  sergens,  pour  leur  con- 
duitte,  pour  ung  mois  entier  et,  depuis,  pour  quinze  jours,  outre  ledit 
mois,  qui  sont  six  semaines  entières,  et  mander,  par  ses  lectres,  l'ar- 
gent ad  ce  nécessaire  y  estre  assis  et  imposé,  chacun  en  son  regard; 
et,  pour  ce  que  la  dicte  place  de  Chierbourg  a  esté  plus  tost  rendue 
et  minse  en  nostre  obéissance,  le  dict  argent  n'a  pas  du  tout  esté 
employé,  mins  ne  distribué  et  lequel  pourroit  prendre  autre  chemin 
que  à  nostre  plaisir  et  volenté,  se  pourveu  n'y  estoit;  nous,  voulans  à 


640  APPENDICES 

ce  remédier,  vous  mandons  que  vous  faictes  ou  faictes  faire  comman- 
dement exprès,  de  par  nous,  à  tous  lesdiz  vicontes  que,  des  deniers 
mis  sus  et  mandés  estre  levés  par  nostredit  cousin,  à  la  cause  dessus 
dicte,  qui  ne  sont  encore  distribuez  et  lesquelz  voulons  estre  cueilliz 
et  levez  entièrement  par  lesdiz  vicontes,  se  faict  ne  les  ont,  ilz  ne 
baillent  aucune  chose  à  quelque  personne,  ne  pour  quelconque  cause 
que  ce  soit  ou  puisse  estre,  synon  par  la  certifficacion  de  Jaspard 
Bureau,  maistre  de  nostre  artillerie,  sur  paine  de  recouvrer  sur  eulx 
ce  que  baillé  en  auront  autrement;  lesquelles  certiffîcacions  voulons 
premièrement  estre  alouez  et  emploiez,  et  le  surplus  qui  s'en  restera, 
voulons  estre  baillé  et  délivré  audit  maistre  de  nostre  artillerie,  et  non 
à  autre,  en  prenant  sur  ce  de  luy  leur  acquit,  lequel  les  distribuera, 
ainsy  que  luy  avons  ordonné,  ou  ordonnerons,  car  ainsy  nous  plaist  il 
et  voulons  estre  fait,  nonobstant  quelzconques  lectres  impétrées,  ou  à 
impétrer,  de  nous,  ou  de  nostredit  cousin,  et  autres  choses  ad  ce  con- 
traires. Donné  à  Montbazon,  le  xxvie  jour  de  septembre,  l'an  de  grâce 
mil  CCCC  cinquante  et  de  nostre  règne  le  xxvnie. 
Ainsi  signé.  Par  le  Roy,  maistre  Jehan  Bureau  et  autres  présens. 

Chaligant. 

(Portefeuille  Fontanieu  121-122,  au  26  septembre  1450.) 


GII 

CAPITULATION  DE  CHERBOURG  (1450,  12  aOÛt)  [p.  42l]. 

Charles,  etc.,  savoir  faisons  à  tous,  présens  et  à  venir,  que,  comme 
nagaires  ait  esté  fait,  passé  et  accordé  certain  traictffi  et  appoincte- 
ment  entre  nos  très  chiers  et  amez  cousins  les  conte  de  Richemont, 
connestable  de  France,  et  le  conte  de  Cleremont,  nostre  lieutenant 
général  sur  le  fait  de  la  guerre  ou  bas  pais  de  Normandie,  d'une  part, 
et  Thomas  Gower,  escuier  Anglois,  soy  disant  cappitaine  de  Chier- 
bourg,  d'autre  part;  par  le  moien  duquel  appoinctement,  la  dicte  ville, 
qui,  au  temps  dudit  appoinctement  et  aucuns  jours  paravant,  avoit 
esté  et  estoit  assiégée  par  nosdis  cousins  et  autres  nos  cappitaines  et 
chiefs  de  guerre,  ait  esté  et  soit  redduicte  et  mise  en  nostre  obéis- 
sance; et,  pour  ce,  nous  aient  humblement  fait  supplier  et  requérir 
les  bourgois,  manans  et  habitans  d'icelle  ville  de  Chierbourg  que, 
pour  greigneur  seureté,  il  nous  plaise  leur  octroier  noz  lectres  de 
ratifficacion  et  approbacion  dudit  appoinctement,  duquel  la  teneur  est 
telle  : 

Par  appoinctement  fait  entre  monseigneur  le  conte  de  Richemont, 
connestable  de  France,  et  monseigneur  le  conte  de  Cleremont,  tenans 
le  siège  devant  Chierbourg,  de  par  le  Roy,  d'une  part,  et  Thomas 
Gower,  Anglois,  cappitaine,  de  par  le  Roy  d'Angleterre,  dudit  Chier- 
bourg, d'autre  part,  est  promis  et  accordé,  entre  autres  choses  :  pre- 
mièrement, que  rendra  ledit  Th.  Gower  au  Roy  ou  à  mesdis  seigneur 
le  connestable  et  conte  de  Cleremont  les  ville,  chastel  et  dangeon  de 


APPENDICES  641 

Chierbourg,  dedans  le  douziesme  jour  de  ce  présent  mois  d'aoust, 
avecques  tous  lès  prisonniers  et  artillerie  qui  appartiennent  au  Roy  et 
à  la  ville  ; 

Item,  et  que  tous  ceulx  qui  vouldront  demourer  ou  party  du  Roy 
auront  grâce  et  abolicion,  sans  ce  qu'il  leur  soit  riens  reprouché  de 
tout  le  temps  passé,  ne  donné  charge,  empeschement  ou  reprouché, 
ou  leur  faire  aucune  action  ou  demande  de  quelconques  choses  que 
ilz  aient  tenues  ou  possédées,  ne  dont  ilz  se  soient  entremis,  en  quel- 
que manière  que  ce  soit;  lesquelx,  en  faisant  le  serment,  joyront  de 
tous  leurs  héritaiges,  terres  et  biens  quelconques,  à  eulx  appar- 
tenans  : 

Item,  se  aucuns  des  dessusdiz,  qui  s'en  vouldront  aler,  ont  héri- 
taiges de  leur  propre  acquiz,  ou  fieuffez,  les  pourront  vendre  ou  donner 
où  il  leur  plaira  : 

Item,  et  au  regard  des  gens  d'église  présentez,  paravant  ce  jourdui, 
à  aucun  béneffîces,  par  gens  estans  en  la  dicte  place,  soit  par  pro- 
curacion,  scellez,  ou  autrement^  dont  ilz  ont  eu  collacion  par  le  dio- 
césain, demourront  paisibles;  et  aussi;  s'aucuns  estans  enladicte  place, 
qui  demourer  vouldront,  ont  droit  de  présenter  à  aucun  bénefflce, 
faire  le  pourront  comme  paravant;  et  les  autres  gens  d'église  bénef- 
ficiez  par  autre  voye  retourneront  à  leurs  béneffîces;  et,  pour  seureté 
de  faire  et  acomplir  les  choses  dessus  dictes,  ledit  Th.  Gower  et  ceulx 
estans  dedans  ladicte  place  bailleront,  dès  à  présent,  hostaiges  souf- 
flsans,  jusques  au  nombre  de  six,  telz  qu'ilz  seront  advisez  par  mesdiz 
seigneurs  le  connestable  et  conte  de  Cleremont  et  ledit  Gower,  lesquelx 
hostaiges,  incontinant  après  que  les  dictes  ville,  chastel  et  dangeon 
seront  en  la  main  de  mesdis  seigneurs,  seront  mis  à  délivrance  fran- 
chement; et  aussi,  pour  seureté  de  faire  et  accompUr  cest  présent 
appoinctement,  mesdis  seigneur  le  connestable  et  conte  de  Clermont  et 
autres,  telz  que  ledit  Gower  vouldra,  bailleront  leurs  scellez;  et  se 
entend  le  présent  appoinctement  sans  fraude,  barat,  ou  mal  engin. 
Donné  soubz  nos  seaulx  cy  placquez,  le  xii«  jour  d'aoust,  l'an  mil  qua- 
tre cens  cinquante.  Ainsi  signé,  par  messeigneurs  les  contes  et  connes- 
table. 

MlLET. 

Nous  ledit  traictié  et  appoinctement  avons  loué,  ratiffié  et  approuvé 
louons,  ratiffions  et  approuvons,  par  la  teneur  de  ces  présentes,  de 
nostre  grâce  espécial,  plaine  puissance  et  auctorité  royal,  et  voulons 
et  ordonnons  que  iceulx  gens  d'église,  nobles,  bourgois,  manans  et 
habitans  de  ladicte  ville  et  chastel  de  Chierbourg,  et  autres  à  qui 
cedit  traictié  et  appoinctement  pourront  touchier,  joissent  et  usent 
du  contenu  en  chacun  des  diz  articles,  sans  aucun  contredit  ou  em- 
peschement et  sans  estre  en  ce  molestez  ou  empeschez  en  aucune 
manière.  Et,  sur  ce,  imposons  scilence  perpétuel  à  noz  procureurs 
présens  et  advenir.  Si,  donnons  en  mandement,  par  ces  mesmes 
présentes,  à  noz  amez  et  féaulx  conseilliers  les  gens  tenans  et  qui 
tendront  nostre  parlement  à  Paris  et  nostre  eschiquier  en  Normandie, 
aux  bailliz  de  Rouen,  Caen,  Constantin  et  à  touz  noz  autres  justiciers 

RlCIlEMONT.  41 


642  APPENDICES 

OU  officiers,  ou  à  leurs  lieuxtenans ,  présens  et  à  venir  et  à  chacun 
d'eulx,  si  comme  à  lui  appartendra,  que,  de  noz  prés'ens  grâce,  con- 
cession et  oclroy,  ils  facent,  seuffrent  et  laissent  lesdis  gens  d'église 
nobles,  bourgois,  manans  et  habitans  desdis  ville  et  chastel  de 
Chierbourg,  et  tous  autres  à  qui  ce  pourra  toucher,  joir  et  user  plai- 
nement  et  paisiblement,  sans  leur  faire  ne  souffrir  estre  fait,  mis  ou 
donné  aucun  destourbier  ou  empeschement  au  contraire,  ores  ne 
pour  le  temps  à  venir,  mais,  se  fait,  mis  ou  donné  leur  avoit  esté,  ou 
estoit,  l'ostent,  ou  facent  incontinant  oster  et  mectre  au  premier  estât 
et  deu,  car  ainsi  nous  plaist  il  et  voulons  estre  fait.  Et,  pour  ce  que  de 
ces  présentes  ou  pourra  avoir  afaire  en  plusieurs  et  divers  lieux,  vou- 
lons que,  au  vidimus  d'icelles,  fait  soubz  scel  royal,  foy  soit  adjoustée 
comme  à  ce  présent  original.  Et,  afin  que  ce  soit  chose  ferme  et  esta- 
ble  à  tousjours,  nous  avons  fait  mectre  nostre  scel  à  ces  présentes, 
sauf  en  autres  choses  nostre  droit  et  l'autrui  en  toutes.  Donné  à 
Escoché  1,  ou  mois  d'aoust,  l'an  de  grâce  mil  quatre  cens  cinquante, 
et  de  nostre  règne  le  vingt  huitiesme.  Ainsi  signé,  par  le  Roy,  mon- 
seigneur le  conte  du  Maine,  le  conte  de  Tancarville,  messire  Théaulde 
de  Valpergue,  maistres  Jehan  Bureau  et  Estienne  Chevalier  présens. 
RoLANT.  Visa. 
(JJ.  185,  f»  59.  —  Copie  dans  Moreau,  t.  232,  f°s  100-103.) 


GUI 

APPOINTEMENT  FAIT    PAR    LE    CONNÉTABLE    ENTRE   LES    HABITANTS  DE 
DIEPPE  ET  LES  GENS  d'ARMES  (1452,  aOÛt)  [p.  369,  433]. 

A  tous  ceulx  qui  ces  présentes  verront  ou  orront,  Jacques  de  la 
Tour,  viconte  d'Arqués,  salut.  Savoir  faisons  que,  par  devant  Jacques 
Lehadoue,  clerc  tabellion  juré  des  lettres  obligatoires  de  la  ville  de 
Dieppe  pour  le  Roy  nostre  sire,  à  cause  de  régalle,  fut  présent,  si 
comme  il  nous  a  tesmoingné,  Robert  Morel,  procureur  général  des 
bourgois,  commun  et  habitans  de  la  dicte  ville  de  Dieppe,  lequel,  pour 
et  au  nom  d'iceulx  bourgois,  commun  et  habitans,  a  voulu,  consenti 
et  acordé,  et,  par  ces  présentes,  audit  nom,  veult,  consent  et  accorde, 
en  entretenant  certain  appoinctement  fait  par  monseigneur  le  connes- 
table,  monseigneur  l'archevesque  de  Nerbonne  et  autres  commissaires 
du  Roy,  nostre  dit  seigneur,  eulx  estans  en  la  dicte  ville  de  Dieppe,  ou 
mois  d'aoust  derrenier  passé,  entre  iceulx  bourgois,  commun  et  habi- 
tans, d'une  partj  et  les  dix-huit  hommes  d'armes  et  les  archers  de  la 
grant  ordonnance,  de  la  charge  de  monseigneur  le  conte  de  Dunois, 
logiez  en  la  dicte  ville,  par  l'ordonnance  du  Roy  nostre  dit  seigneur 
d'autre  part,  que,  de  certaine  quantité  d'extencilles  par  lesdiz  bour- 
gois, habitans  et  commun  baillez  et  délivrez  ausdiz  gens  de  guerre 
que  iceulx  gens  de  guerre  puissent  avoir,  poursuivre,  demander,  rece- 

1.  Ecouché,  arrt  d'Argentan. 


APPENDICES  643 

voir  et  appliquer  à  eulx  tous  tel  louage  et  prouffit  desdiz  extencilles, 
pour  les  quartiers  de  juillet  et  octobre  derrenier  passez  et  pour  les 
quartiers  de  janvier  et  avril  prouchain  ensuivans,  tant  seulement,  que 
lesdiz  bourgois,  habitans  et  commun  eussent  eu  ou  peu  avoir  durant 
ledit  temps  de  leurs  diz  extencilles,  selon  certaine  ordonnance  sur  ce 
faicte,  se  n'eustesté,  ou  estoit,  les  appoinctemens,  accord  et  consente- 
ment dessusdiz;  promectant  oudit  nom  les  choses  dessusdictes  avoir 
agréables  et  de  non  jamais  en  faire  question  ou  demande  au  Roy  nos- 
tre  dit  seigneur,  ne  à  aucuns  de  ses  officiers,  en  quelque  manière 
que  ce  soit,  ains,  en  tant  que  mestier  seroit,  ledit  procureur,  en 
icelui  nom,  les  en  quicta  et  quicte  par  ces  dictes  présentes.  En  tes- 
moing  desquelle  choses,  nous,  viconte,  etc.,  dessus  nommé,  à  la  rela- 
cion  dudit  tabellion,  avons  mis  à  ces  lectres  le  grant  scel  aux  causes 
de  la  dicte  viconté.  Ce  fut  fait  le  dix  neufième  jour  de  janvier,  l'an  de 
grâce  mil  cccc  cinquante  deux,  présent  Rigault  Eude,  escuier,  Jehan 

F^equ rabras  et  Jehan  Restout,  etc. 

J.  Lehadoue. 
(Fr.  26081,  no  6525.) 

Dans  un  rôle  du  16  mars  1452  (a.  st.)  on  lit,  sous  le  titre  de  «  Voyaige 
et  Chevauchées  »  : 

«  A  messire  Loys  de  Harecourt,  arcevesque  de  Nerbonne,  maistre 
Pierre  Thiboust,  Robert  de  Montmirel,  Biaise  Greesle,  conseillers  du 
Roy,  nostredit  seigneur,  et  maistre  Loys  Daniel,  secrétaire  d'icellui 
seigneur,  la  somme  de  xvm^  11.  t.  à  eulx  ordonnée  par  ledit  seigneur, 
pour  le  voyaige  que  ledit  seigneur  leur  a  ordonné  faire  oudit  pays  de 
Normandie,  en  la  compaignie  de  monseigneur  le  connestable  de 
France,  pour  mectre  ordre  et  police,  tant  sur  le  fait  des  gens  de  guerre 
establiz  à  la  garde  dudit  plÇ's,  que  en  autres  choses  touchans  le  bien 
et  proffit  d'icelui  » 

(Fr.  26081,  n»  6539). 

Dans  un  autre  document  (compte  de  dépenses),  on  lit  : 

«  A  maistre  Robert  de  Montmirel,  clerc  le  Roy  nostre  sire,  en  la 
chambre  des  comptes,  la  somme  de  vclxv  1. 1.,  à  lui  ordonnée  pour  la 
parpaye  d'un  voyaige  qu'il  fist  l'année  passé,  m  cccc  ui,  en  la  compai- 
gnie de  messeigneurs  le  connestable,  l'arcevesque  de  Nerbonne,  et  au- 
tres commissaires,  pour  certaine  réformacion  que  le  Roy,  nostredit 
seigneur  avoit  ordonné  estre  faicte,  ladite  année,  èsdiz  pays  et  duchiez 
de  Normandie,  où  il  avoit  vacqué  par  l'espace  de  mcvi  jours  entiers  n. 

On  voit  ensuite  que  «  maistre  P.  Thiboust  conseiller  du  roy  en  sa 
court  de  parlement  »  faisait  partie  de  la  même  commission. 

(Fr.  26083,  n»  48.) 

GIV 

MESURES  DE  DÉFENSE  EN  NORMANDIE  (1452,  OCtobre)  [p.  434]. 

Mémoires  et  instructions  au  bailly  de  Caux  de  dire  et  remonstrer  au 
Roy  nostre  sire  les  choses  qui  s'ensuivent,  de  par  messeigneurs  le  connes^ 


644  APPENDICES 

table  de  France,  l'arcevesque  de  Narbonne,  le  conte  de  Dunois  et  autres 
ses  commissaires  estans  à  présent  en  Normandie. 

I.  —  Premièrement  lui  parlera  du  fait  des  monnoyes,  touchant  l'advis 
qui  autreffoiz  a  esté  fait  par  sire  Jehan  Roy,  que  lui  avons  envoyé,  afin 
qu'il  lui  plaise  en  mander  son  bon  plaisir,  car  qui  ne  y  mectra  ordre 
à  ce  premier  jour  d'octobre  prouchain  venant,  que  les  fermes  se  bail- 
lent, à  paine  pour  l'année  qui  vient  se  y  pourra  mettre. 

II.  —  Item,  luy  dira  comme  lors  que  Messeigneurs  le  connestable, 
de  Dunois  et  moy,  qui  estions  à  Dyeppe,  oysmes  ces  nouvelles  de  l'ar- 
mée d'Angleterre,  incontinent  mandasmes  le  grant  seneschal  (P.  de 
Brézé)  et  Floquet  venir  vers  eulx  à  Caudebec,  et,  depuis,  en  ceste  ville 
de  Rouen,  fust  par  eulx  prins  conclusion,  pour  ce  que  le  doux  de  Cos- 
tentin  est  tant  dangereux  que  merveilles,  et  la  place  de  Chierbourg  si 
périlleuse  et  mal  avitaillée,  que  le  viconte  de  Valoignes  feroit  mectre 
dedans  la  place  de  Chierbourg  les  blez  qui  sont  deuz  au  Roy  à  cause 
de  sadicte  viconté;  et  doit  le  dit  viconte  rendre  des  dits  blez;  et  nous 
asseura  que,  posé  qu'il  ne  fust  jà  mestier  de  avitailler  ladicte  place, si 
sera  ce  le  proufflt  du  Roy,  caries  blez  se  y  vendent  mieulx  que  ailleurs. 

III.  —  Oultre  plus,  fut  ordonné  que  mondit  seigneur  de  Dunois  se 
doit  tenir  et  faire  sa  résidance  à  Dieppe,  jusques  à  ce  que  autres  nou- 
velles soient  venues  et  que  l'en  saiche  quel  tramiz  tendra  ladicte 
armée  ;  et  mondit  seigneur  le  connestable  s'en  ira  en  la  Basse-Nor- 
mandie et  se  tendra  à  Caen,  Carenten  et  là  entour  ces  marches.  Et, 
pour  ce  que  le  Roy  a  mandé  partie  des  gens  de  guerre  qui  estoient  en 
ladicte  Basse-Normandie,  mondit  seigneur  le  connestable  prendra,  se 
mestier  est,  des  gens  du  grant  sénéchal  et  Floquet  jusques  à  c  ou  vi"" 
lances,  de  ceulx  qui  sont  à  Bernay,  Lou\#rs,  Verneuil,  Gisors  et  qui 
ne  sont  point  sur  la  mer,  lesquels  gens  de  guerre  seront  à  toute  heure 
tous  prestz  de  monter  à  cheval,  et  s'en  sont  chargez  lesdiz  sénéchal 
et  Floquet,  mais,  pour  double  des  pilleries,  se  il  n'en  est  mestier,  ilz 
ne  partiront  point. 

IIII.  —  Item,  messire  Geuffroy  de  Coueren  (Couvran)  est  parti  de 
icy,  qui,  à  toute  diligence,  va  à  la  Hogue  Saint- Vaast,  atout  xl  lances, 
et,  se  mestier  est,  mandera  de  ceulx  qui  sont  à  Caen,  Baieux  et  Chier- 
bourg, et  fait,  que  tous  les  francs  archiers  dudit  bas  pays  seront  prestz. 

V.  —  Item,  lui  dira  touchant  le  fait  des  mortes  paies  ;  c'est  assavoir 
que  il  semble  que  on  doit  ordonner  que  les  archiers  n'aient  nulz  che- 
vaulx,  et  n'auront  que  iiii  fr.  par  mois. 

{Semble  qu'il  est  bon  advis.) 

VI.  —  Item,  semblablement,  les  lances,  excepté  aucuns  qui  prennent 
doubles  paies,  ou  qui  ont  charge  de  gens  soubz  eulx,  n'auront  dore- 
senavant  que  ung  cheval,  et  n'auront  que  vin  fr.  Et  lui  remons- 
trera  le  bien  et  prouffit  que  ce  sera,  car  ilz  seront  tenuz  plus  à  faire 
résidence,  et,  avec  ce,  en  demourra  au  Roy  x  ou  xn  ™  1.  Et  lui  dira 
plus  amplement  les  causes  qui  ont  meu  à  ce  ordonner,  avec  ce,  ceulx 
qui  estoient  présens,  et  en  apportera  ung  mandement  du  Roy,  pour 
les  causes  que  par  deçà  on  luy  a  dit  : 

[Semble  qu'il  est  bon  advis.) 


APPENDICES  645 

VIF.  —  Item,  que,  doresenavant,  les  gens  de  guerre  seront  tenuz  faire 
résidance,  sans  partir,  excepté  v  à  une  foiz,  par  le  congié  de  leur 
cappitaine,  ainsi  que  les  ordonnances  le  portent,  et  s'ilz  s'en  vont  au- 
trement, il  leur  sera  rabattu  le  temps  qu'ilz  seront  dehors. 

{L'article  semble  bien.) 

Vin.  —  Item,  du  guet  de  la  mer,  lui  dira  comme,  pour  y  pourveoir 
et  aler  sur  chacun  des  portz  et  es  foyers  anciens,  on  y  a  commis,  et, 
pour  adviser  quelles  paroisses  et  quelles  personnes  y  vendront,  le 
cappitaine  de  Dyeppe,  le  lieutenant  du  bailly  de  Caux,  et  comme  pa- 
reillement le  ferons  en  la  Basse-Normandie. 

IX.  —  Item,  parlera  au  Roy  s'il  veult  que  les  receveurs  fornissent  les 
gens  d'armes  tant  de  logeis  que  de  utensiles  de  la  grant  ordonnance 
et  qu'ilz  preignent  les  ii  1.  t.  par  mois,  pour  ce  que  aucuns  s'en  plai- 
gnent, comme  ledit  bailly  le  scet,  et  lesdiz  receveurs  le  feront  vou- 
lentiers,  et  a  semblé  à  tous  que  il  ne  y  auroit  que  bien  ;  et  fault  que 
ledit  bailly,  se  le  Roy  en  est  content,  apporte  le  congié.  {Semble  qu'il 
peut  estre  au  choix  des  gens  d'armes,  pourveu  que  ceulx  qui  voudront 
l'argent  n'auront  point  de  contrainte  sur  le  peuple,  pour  fournir  des  uten- 
siles.) 

(Fr.  18442,  fo  144.) 

On  lit  dans  le  Ms.  fr,  20683,  f»  46  :  «  à  Jehan  Aubry,  lieutenant  de 
Jaspar  Bureau,  maistre  de  l'artillerie  du  Roy  noslre  sire,  la  somme  de 
n'=  xxxiiii  1.  n  s.  vi  d.  t.  pour  la  parpaye  de  la  somme  de  v"  ix  1.  ii  s.  vi  d.  t. 
qui  deue  lui  estoit,  à  cause  de  certaine  artillerie  qu'il  avait  achetée, 
et,  par  l'ordonnance  de  Messeigneurs  du  conseil,  envoyée,  ou  moys 
d'octobre  MCGCCLII,  de  la  ville  de  Paris  à  Rouen,  pour  estre,  par 
l'ordonnance  de  Monseigneur  le  connestable  et  autres  gens  du  conseil 
du  Roy  nostre  sire,  départie  et  distribuée  en  certaines  places  et  forte- 
resses dudit  pays  de  Normandis,  pour  la  seurté  et  deffence  d'icelles. 
A  Jehan  de  Versailles,  escuier,  cappitaine  des  francs  archiers  ou 
baiUiaige  de  Caen,  la  somme  de  u*  xii  1.  t.  à  luy  ordonnée,  pour  la 
parpaye  de  MLnii  1.  t.  que  se  montoit  le  paiement  de  v"  xxvn  francs 
archiers  de  sa  charge  et  compaignie,  qu'il  avoit,  ou  moys  d'octobre 
MCGCCLII,  par  l'ordonnance  de  Monseigneur  le  connestable  et  autres 
gens  du  conseil  du  Roy,  nostre  sire,  lors  estans  oudit  pays  de  Nor- 
mendie,  menez,  avec  les  autres  francs  archiers  des  bailliaiges  d'Evreux 
et  Constantin,  sur  la  coste  de  la  mer,  pour  obvier  et  résister,  si  be- 
soing  estoit,  à  la  descente  des  Anglois,  qui  oudit  temps,  estoient  à 
puissance  sur  la  mer  et  près  de  la  coste  dudit  pays  de  Normendie.  » 

(Fr.  20683,  f»  46.) 


GV 
SAUVEGARDE  ACCORDÉE  PAR  LE  CONNESTABLE  A  UN  ANGLAIS 

(1452,  12  octobre)  [p.  434,  note  7], 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  à  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lec- 


646  APPENDICES 

très  verront,  salut.  Savoir  faisons  que  aujourduy  est  venu  par  devers 
nous  Thomas  de  Saint-Martin,  escuier,  natif  de  l'isle  de  Gerzey,  lequel 
a  fait  le  serment  en  noz  mains  d'estre  bon,  vray  et  loial  subject  de 
monseigneur  le  Roy.  A  quoy  l'avons  receu  et  recevons,  par  ces  pré- 
sentes, et,  par  ce,  avons,  lui,  sa  femme  et  enfans,  familliers  et  servi- 
teurs et  tous  leurs  biens  meubles  ethéritaiges  prins  et  mis  en  la  seurté 
et  sauvegarde  de  mondit  seigneur  le  Roy  et  de  nous;  lesquelz  con- 
joinctz  avons  restituez  à  tous  leursdiz  biens,  meubles  et  héritaiges 
quelconques,  pour  d'iceulx  en  joir  jusques  au  bon  plaisir  de  mondit 
seigneur  le  Roy  et  que  autrement  en  soit  par  lui  ordonné.  Si,  mandons 
à  tous  les  justiciers,  officiers,  vassaulx  et  subjectz  de  mondit  seigneur 
le  Roy,  capitaines,  gens  d'armes  et  de  trait  et  autres  gens  de  guerre 
que  lesdiz  conjoinctz  facent,  souffrent  et  laissent  joir  et  user  de  nostre 
présente  sauvegarde  plainement  et  paisiblement  et  de  leursdiz  biens 
les  faire  joir,  jusques  à  ce  que  autrement  par  mondit  seigneur  en  soit 
ordonné,  comme  dit  est.  Donné  à  Caen,  le  xii^  jour  d'octobre,  l'an 
mil  CGGG  cinquante  deux. 
Artur. 

GOGUET. 

Cette  lettre  est  ratifiée  par  le  roy  le  20  mars  1453. 
(JJ.  181,^  161  vM62.) 


GVI 

RICHEMONT  DONNE  l'iLE   DE   BRÉHAT   A   SON    GENDRE,  ARTUR   BRÉCART 

(1450,  19  janvier)  [p.  456]. 

Sachent  tous  que,  comme  autresfois  très  redoubté  et  puissant  mon- 
seigneur Artur,  fils  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  sei- 
gneur de  Partenay,  conestabie  de  France,  ou  traictô  et  collocucion  du 
mariaige  jà  pieça  fait  et  accomply  de  son  chier  et  bien  amé  et  féal 
escuier,  Artur  Brécart,  et  de  Jacqueline,  fille  naturelle  de  mondit  sei- 
gneur le  conte,  entre  autx^es  choses  eust  donné  et  promis  bailler  audit 
escueir  et  à  sadicte  femme,  à  cause  d'elle,  ung  hostel  herberge  valant 
cent  livres  de  rente,  assis  en  pais  de  Poictou,  de  Xantonge,  ou  de 
Bretaigne,  dedans  deux  ans  après  ledit  mariaige  fait  et  accomply;  et, 
pour  gaige  et  seurté  de  ce,  et  en  attendant,  lui  bailler  ladite  assiette 
dudit  hostel,  en  la  valeur  desdites  100  livres  de  rente,  mondit  sei- 
gneur lui  eust  baillé  son  chastel  et  chastellenie  de  Merevent  et  son 
hostel  de  Puy-de-Cerre,  avecques  les  appartenances,  appendances, 
fruiz  et  levées  d'icelui  hostel ,  lequel  hostel  de  Puy-de-Cerre,  avec- 
ques sesdites  appartenances,  ledit  escuier,  pour  les  causes  susdites, 
depuis  ledit  mariage  ainsi  fait  et  accomply,  ait  tousjours  eu,  prins  et 
levé,  tenu  et  exploité  à  son  prouffit,  jusques  aujourduy,  en  acquict 
desdites  cent  livres  de  rente,  comme  de  ce  mondit  seigneur  le  conte 
et  ledit  escuier  ont  présentement  esté  à  ung  et  d'accord  et  congnu 
et  confessé  les  choses  dessusdites  et  chacunes  d'icelies  estre  vroyes  ; 


APPENDICES  647 

et  il  soit  ainsi  que,  pour  aucunes  causes  et  considéracions  ad  ce  mou- 
vans,  mondit  seigneur  le  conte  ait  désir  de  retraire  et  mectre  en  sa 
main  sondit  chastel  de  Merevent,  avecques  sondit  hostel  de  Puy-de- 
Cerre  et  sesdictes  appartenances,  ce  que  faire  ne  veult  mondit  sei- 
gneur sans  premièrement  récompencer  ledit  escuier  desdiz  cent  livres 
de  rente;  assavoir  est  que,  en  la  court  du  scel  estably  aux  contratz 
audit  Parthenay,  pour  mondit  seigneur  le  conte,  seigneur  dudit  Par- 
tenay,  conestable  de  France,  en  droit,  en  ladicte  court,  personnelment 
establiz  mondit  seigneur  le  conte,  d'une  part,  et  ledit  Artur  13recart, 
escuier,  tant  pour  lui  que  pour  ladicte  Jacqueline,  sa  femme,  absente, 
pour  laquelle  il  s'est  fait  fort  que  les  choses  en  ces  présentes  conte- 
nues elle  aura  fermes  et  agréables  et  que  elle  ne  fera,  ny  ne  venra 
encontre,  et  lui  en  fera  donner  lectre  de  rattifîcacion  et  approbacion, 
si  mestier  est,  toutesfoiz  que  requis  en  sera,  d'autx'e  part;  ont  congnu 
et  confessé  mondit  seigneur  le  conte  et  ledit  escuier  avoir  fait  de  et 
sur  lesdictes  promesses,  convenances  et  autres  choses  dessusdites  les 
assiettes,  quittances,  promesses  et  obligations  contenues  en  ces  pré- 
sentes : 

C'est  assavoir  que  mondit  seigneurie  conte,  pour  estre  et  demourer 
quicte  et  deschargé  perpétuellement,  lui  et  les  siens  et  aians  cause, 
envers  lesdits  escuier  et  sa  femme,  desdites  cent  livres  de  rente,  et 
pour  acquit,  admortiment  et  assiette  d'icelles,  mondit  seigneur  le 
conte  a,  aujourduy,  baillé,  cédé  et  transporté,  quicté  et  délaissé, 
baille,  cède,  transporte,  quicte  et  délaisse,  par  cesdictes  présentes,  à 
tousjours,  pour  lui,  ses  hoirs  et  successeurs  et  aians  cause,  le  chastel, 
terre  et  seigneurie  de  Bréhat,  avecques  ses  appartenances,  appen- 
dances  et  deppendances,  fruitz,  cens,  rentes  et  revenues  quelcon- 
ques, appartenans  à  ladicte  terre  et  seigneurie,  pour  en  joir  lesdits 
conjoints,  leurs  hoirs  et  successeurs,  procréez  d'eulx  deux,  ou  d'autres, 
si  ledit  escuier  alloit  de  vie  à  trespassement  par  avant  sadicte  femme 
et  que  elle  parvint  avecques  autres  à  segondes  nopces,  franchement, 
paisiblement  et  à  plain  droit,  parmy  ce  que  iceulx  ditz  conjointz, 
ieursditz  hoirs  et  successeurs  tiendront  de  mondit  seigneur  le  conte, 
ses  hoirs  et  successeurs,  à  foy  et  hommaige  lige  ledit  chastel,  terre  et 
seigneurie  de  Bréhat;  de  laquelle  terre  et  seigneurie  mondit  seigneur 
a  retenu  et  réservé,  retient  et  réserve,  par  sesdictes  présentes,  à  luy  et 
à  sesdits  hoii^s,  le  ressort  d'icelle  à  sa  barre  de  Lanvollon,  en  Gouelo  ; 
et  aussi  mondit  seigneur  le  conte  sera  tenu,  a  promis  et  promet,  par 
sesdites  présentes  fere  rattiffier  et  approuver  ladicte  assiette,  ainsi 
par  lui  faitte  audit  escuier  et  sadicte  femme  desdiz  cent  livres  de 
rente  à  très  redoublé  et  puissant  prince  le  duc  de  Bretaigne,  et  que 
d'icelle  il  en  fera  donner,  passer  et  avoir  audit  escuier  et  sadicte 
femme  lettres  de  coufirmacion,  ratifficacion  et  approbacion  confoi^ma- 
bles  à  ces  présentes.  Et,  parmi  ce,  mondit  seigneur  le  conte  a  donné 
et  donne,  par  cesdictes  présentes,  en  mandement  à  ses  séneschal, 
procureurs,  receveurs  et  autres  offlciers  de  ladicte  terre  de  Bréhat,  et 
à  chacun  d'eulx,  comme  à  luy  appartendra,  que  doresenavant,  ils 
faccnt,  souffrent  et  laissent  joir  et  user  lesdiz  conjoings,  leurdiz  hoirs 
et  successeurs  dudit  chastel,  terre  et  seigneurie  de  Bréhat  et  leursdictes 


648  APPENDICES 

appartenances,  sans,  sur  ce,  leur  mectre  ne  donner  aucun  trouble, 
ne  empescheraent. 

Et,  par  rapportant  cesdictes  présentes,  ou  vidimus  d'icelles,  fait 
soubz  scel  auttentique,  par  une  foiz  seulement,  pour  ledit  receveur  de 
ladicte  terre  et  seigneurie  de  Bréhat,  mondit  seigneur  a  voulu  et 
veult  que  ledit  receveur  soit  et  demeure  quitte  et  deschargé  dores- 
enavant  envers  lui  et  les  siens  et  aians  cause  de  ladicte  recepte  de 
ladicte  terre  et  seigneurie  de  Bréhat,  donnant,  en  oultre,  mondit 
seigneur  le  conte  en  commandement,  par  cesdictes  présentes,  à  touz 
les  hommes  féaulx  et  subgietz  et  autres  de  la  terre  et  seigneurie  de 
Bréhat  que  audit  escuier  et  à  sadicte  femme,  à  cause  d'elle,  ilz  facent 
doresenavant  les  foiz  et  hommaiges  et  paient  les  devoirs,  droiz  et  aul- 
tres  choses  quelconques  qu'ils  pourront  devoir,  à  cause  de  ladicte 
terre,  tout  ainsi  et  par  la  manière  qu'ils  devoint  et  estoint  tcnuz  de 
faire  à  mondit  seigneur. 

Et,  en  ce  feùsant,  mondit  seigneur  les  en  a  quictés  et  quicte  perpé- 
tuelment,  par  ces  présentes,  et,  avec  ce,  a  deschargé  et  descharge, 
par  cesdictes  présentes,  touz  officiers,  autreffoiz  par  luy  commis  en 
ladicte  terre  et  seigneurie  de  Brebat,  en  donnant  en  commandement, 
ausdiz  escuier  et  sa  femme  de  pouvoir  mectre  et  ordonner  doresena- 
vant en  ladicte  terre  et  seigneurie  telz  officiers  que  bon  lui  semblera. 

Et  lequel  escuier,  ad  ce  présent,  comme  dit  est,  prenans,  stipu- 
lans  et  acceptans  ladicte  terre  et  seigneurie  de  Brebat,  pour  acquit  et 
assiette  desdiz  cent  livres  de  rente,  ainsi  à  luy  et  à  sadicte  femme, 
pour  les  causes  devantdictes,  promises  par  mondit  seigneur,  comme 
dit  est,  a  quicté  et  quicte  perpétuelment  mondit  seigneur,  les  siens  et 
et  aians  cause  desdiz  cent  livres  de  rente;  et  aussi  s'est  désisté,  dé- 
party  et  départ,  par  cesdictes  présentes,  pour  et  au  prouffit  de  mondit 
seigneur,  des  siens  et  aians  cause,  dudit  chastel  de  Merevent  et  dudit 
hostel  de  Puy-de-Cerre  et  de  ses  dictes  appartenances,  ainsi  autreffois  à 
luy  et  à  sadicte  femme  baillez,  pour  gaige  et  seurté  de  ladicte  somme  de 
cent  livres  de  rente,  en  lui  faisant  donner  et  bailler,  par  mondit  sei- 
gneur, au  duc  de  Bretaigne  ladicte  rattifficacion  et  approbacion  du 
contenu  en  ces  présentes,  comme  dessus  est  dit.  Ausquelles  choses 
dessusdictes,  toutes  et  chacunes,  par  la  manière  que  elles  sont  par- 
dessusdictes  divisées,  et  déclairées,  faire  tenir,  garder,  entériner  et 
accomplir  fermement  et  léaument,  sans  jamès  fere  ne  venir  encontre, 
par  cas  qui  soit,  lesdictes  parties  et  chacune  d'elles,  chacune  par  tant 
que  à  son  fait  touche  et  peut  toucher,  ont  obligé  et  obligent  elles  et 
tous  et  chacuns  leurs  biens  meubles,  immeubles  et  héritaiges  présens 
et  futurs  quelconques,  la  foy  et  serment  de  leurs  corps  sur  ce  don- 
née, renoncians  sur  ce  lesdictes  parties  en  cestuy  leur  faict,  soubz  la 
vertuz  de  la  foy,  serment  et  obligacion  que  dessus,  à  toutes  exepcions, 

décepcions  et  allégacions  quelconques  qui  leur  pourroient  aider 

Donné  et  fait  en  double,  du  consentement  desdictes  parties,  présens 
ad  ce  honorables  hommes,  maistre  Pierres  Rougne,  baillif  de  Gas- 
tines,  Guillaume  Papin,  chastellain  et  conseillers  de  mondit  seigneur 
le  conte  audit  Partenay,  le  xix  janvier  l'an  mccccxlix.  Ainsi  signé, 
N.  GiRAUT,  J.  Gauter,  et  scellé. 


APPENDICES  649 

Donné  et  fait,  par  vidimus,  par  nostre  dicte  court  de  Nantes,  tes- 
moign  le  scel  estably  es  contraz  d'icelle,  le  xxi^  jour  de  juin  mccccux.  — 
Raboteau.  Passé  par  vidimus,  sous  le  sceau  de  la  court  de  Nantes. 

{Archives  dép.  de  la  Loire-Inférieure,  E,  133.) 


GVII 

PROCÈS  DU  CONNÉTABLE  DEVANT  LES  ÉLUS  DE  PARIS  (1442-1446) 

[p.  460,  note  3]. 

Du  xe  jour  du  mois  de  mars  MCCCCXLI  (a.  st.) 

Entre  les  fremiers  de  l'imposicion  du  vin  vendu  en  gros  à  Paris, 
ceste  année  présente  (1442)  demandeurs,  d'une  part,  contre  monsei- 
gneur le  connestable ,  adjourné  par  devant  les  esleux  de  Paris,  avec 
Jacot  Galobriet  et  Thomas  Baron,  deffendeurs,  d'autre.  Après  ce  que 
lesdiz  demandeurs  ont  requis  la  cause  estre  renvoyée  par  devant 
lesdiz  esleux  et  qu'il  a  esté  dit  par  la  court  que  la  cause  demourra 
céans,  Nyole,  pour  lesdiz  demandeurs,  dit  que,  pour  ce  qu'il  estoit 
venu  à  leur  congnoissance  que  lesdiz  Jacot  et  Thomas  avoient  amené 
en  ceste  ville  de  Paris  lxxiiii  pièces  de  vin,  que  ilz  avoient  confessé 
par  devant  lesdiz  esleux,  et  qu'ilz  appartenoient  à  Janot  Bar,  parce 
qu'il  les  avoit  achetés  et  fait  acheter  de  ses  deniers;  et  aussi,  pour  ce 
que  icellui  Janot  Bar  est  grant  marchant,  et  que,  es  années  passées, 
en  a  fait  venir  en  ceste  ville  de  Paris  et  en  avoit  payé  l'imposicion, 
ont  fait  arrester  l'argent  qui  leur  povoit  estre  deu  de  l'imposicion,  à 
cause  desdictes  lxxiiii  pièces  de  vin;  et,  pour  ce  que,  par  devant 
lesdiz  esleux,  pendant  le  temps  que  la  cause  y  estoit,  lesdiz  Jacot  et 
Thomas  y  ont  esté  interroghuiez,  requièrent  que,  de  ce  qu'ilz  ont 
confessé  de  vin  avoir  esté  vendu  qu'ilz  payent,  et,  pour  ce,  requièrent 
qu'il  soit  dit  ledict  arrest  estre  bon  et  valable,  et  demandent  despens, 
et  aussi  requièrent  que  le  vendeur  qui  a  vendu  lesdicts  vins  soit  inter- 
roghuié. 

BoYLEAUE,  pour  Icsdicts  deffendeurs,  présuppose  la  prééminence  de 
mondict  seigneur  le  connestable,  et,  ce  présupposé,  dit  que  mondict 
seigneur  le  connestable  est  grant  seigneur  et  feue  madame  de  Guyenne 
grant  et  noble  dame,  et,  à  cause  de  ce,  avaient  plusieurs  assignacions; 
et  que,  pour  la  provision  de  leur  hostel,  mandèrent  audict  Janot  Bar 
qu'il  achetast  pour  eulx,  et  de  leurs  deniers,  deux  cens  queues  de  vin, 
et,  pour  ce  faire,  lui  en  envoya  ses  lectres,  aussy  lui  en  envoya  lectres 
du  Roy  pour  non  payer  aucune  imposicion  en  les  amenant,  et  que,  en 
enssievant  le  contenu  es  dites  lectres  de  mondict  seigneur  le  connes- 
table, ledict  Janot  Bar  acheta  lesdictes  deux  cens  queues  de  vin.  De 
laquelle  quantité  ledict  Janot  Bar  en  envoya,  par  lesdiz  Janot  et  Tho- 
mas, en  ceste  ville  de  Paris  lxxiui  pièces  de  vin,  lesquelz  les  ont 
aconduiz  jusques  en  ceste  ville,  pour  et  ou  nom  de  mondict  seigneur 
le  connestable,  et  que,  quand  ilz  y  ont  esté  arrivez,  les  ont  bailliez  et 
délivrez  au  maistre  d'ostel  de  mondict  seigneur  le  connestable,  lequel. 


650  APPENDICES 

pour  le  service  de  feu  madite  dame,  a  ordonné  en  vendre  xlii  pièces. 
Et,  depuis,  pour  l'imposicion  d'iceulx,  fist  arrester  partie  dudit  vin, 
et,  pour  ceste  cause,  lesdits  demandeurs  ont  esté  adjournez  par  de- 
vant lesdiz  esleux,  par  devant  lesquels  a  esté  dit  que  icellui  vin  est  et 
appartient  à  mondit  seigneur  le  connestable,  et,  pour  ce,  iceulx  Jacot 
et  Thomas  requirent  avoir  garde,  ce  qui  leur  fut  octroyé  par  lesdiz 
esleux;  et,  pour  ceste  cause,  le  procureur  de  mondit  seigneur  le  con- 
nestable s'est  adjousté  avec  lesdiz  Jacot  et  Thomas,  et,  après  ce,  a 
requis  ladite  cause  estre  renvoyée  en  la  court  de  céans,  ce  qui  a  esté 
fait  par  lesdiz  esleux.  Dit  que  ledit  arrest  n'est  recevable,  car  ledit 
arrest  n'est  pas  certain,  et  dit  que  quant  l'on  procède  contre  aucun 
par  voye  d'éxécucion,  la  somme  pour  laquelle  l'éxécucion  se  fait  doit 
estre  certaine,  autrement  plusieurs  inconvéniens  en  avenroient.  Aussy 
dit  que  lesdites  xlii  pièces  de  vin,  à  cause  de  ladite  imposicion,  ne 
pourroient  pas  devoir  trente  deux  francs  et  touteffois  il  en  a  fait 
arrester  cent  frans,  et  dit  que,  se  ceste  chose  avoit  lieu,  jamais  homme 
privilégié  ne  joyroit  de  son  privilège,  et,  par  ainsy,  à  dire  que  mondit 
seigneur  le  connestable  ne  joisse  de  sondit  privilège  ne  doit  estre 
receu.  Sy,  conclud  qu'il  soit  dit  que  ledit  arrest  est  non  valable  et  que 
l'argent  arresté  lui  soit  délivré,  quoy  que  soit  à  caucion,  et  demande 
despens. 

Nyole,  pour  lesdits  demandeurs,  réplique  et  dit  que  iceulx  deman- 
deurs sont  serviteurs  de  mondit  seigneur  le  connestable  et  que,  ad  ce 
qui  lui  toucheroit,  ne  lui  vouldroient  faire  ou  donner  aucun  empes- 
chement,  et  qu'ilz  tiennent  la  somme  du  Roy,  qu'il  faut  qu'ilz  payent 
au  Roy.  Ainsy  fault  que  ceulx  qui  donnent  aucune  chose  à  cause  des- 
dites pièces  soient  par  eulx  contraints  à  payer  icelle.  Dit  aussy  qu'il 
n'y  a  aucun  seigneur,  s'il  l'acheta  pour  vendre,  qu'il  veut  qu'il  ne  donne 
imposicion.  Dit  aussi  que  lesdiz  vins  ne  sont  de  mondit  seigneur  le 
connestable,  mais  sont  audit  Janot  Bar,  car  pour  lui  et  en  son  nom 
ont  esté  achetez  et  les  a  non  offert  vendre  en  ceste  ville  pour  et  en 
son  nom,  et;  aprez  assez  que  ledit  Thomas  avait  lesdites  pièces  de 
madite  dame,  en  a  voulu  vendre  xl  queues;  et,  pour  ce  qu'il  se  courcha 
au  marché,  le  marchant  ne  fît  aucun  marchié  et,  pour  ce,  est  à  pré- 
sumer qu'ilz  ne  sont  pas  à  mondit  seigneur  le  connestable.  Dit  aussi 
que,  avant  que  lesdiz  vins  soient  partis  du  pays  dont  ilz  sont  venuz, 
ledit  Bar  les  a  voulu  vendre  as  autres  raarchans;  ainsy  appert  que  ne 
sont  ceulx  de  mondit  seigneur  le  connestable.  Aussy  dit  que  ledit  Bar 
devait  de  l'argent  à  feue  madite  dame  et  lui  bailloit  iceulx  vins  en 
payement;  ainsy,  doit  l'imposicion  et,  par  ainsy,  appert  que  à  bonne 
cause  ledit  arrest  a  esté  fait,  pour  telle  somme  qu'il  y  peut  appartenir; 
et  quant  ad  ce  que  ledit  deffendeur  a  dit  que  mondit  seigneur  le  con- 
nestable est  franc  etc.,  dit  qu'il  ne  veult  empescher  aucunement  ses 
drois.  A  l'arrest,  parce  qu'il  n'est  pas  certain  etc.,  un  fermier  qui  ne 
saura  combien  on  aura  vendu  de  vin,  peut  faire  arrest  de  plus  grant 
somme  que  ne  lui  est  deue,  jusques  au  serment  fait  par  le  vendeur, 
autrement  les  fermiers  seroient  deffraudez.  Dit  que  lors  lesdiz  deman- 
deurs estoient  bien  informez  que  l'on  avoit  vendu  grant  quantité  de 
vins  et  que,  à  cause  de  ce,  grant  argent  leur  en  estoit  deu  et,  par 


APPENDICES  651 

ainsy,  dit  que  ledit  arrest  est  bon.  Dit  aussi  que,  paravant  l'arrest  et 
depuis,  ilz  en  ont  vendu  plus  de  lxiiii  queues  et  à  plus  hault  pris  qu'ilz 
n'ont  déclaré.  Et  dit  qu'il  porte  par  mémoire  qu'ilz  en  ont  vendu  au- 
cunes XXI  escus,  les  autres  xx  francs  et  les  autres  xvni,  et,  pour  ceste 
cause,  avoit  esté  approuvé  par  lesdiz  esleux  que  le  vendeur  soit  inter- 
roguié  pour  savoir  la  vérité  de  la  quantité  et  du  prix  dudit  vin  et 
encore  le  requiert.  Dit  aussi  que  iceulx  vins  ne  sont  les  vins  de  mondil 
seigneur  le  connestable,  mais  sont  audit  Janot  Bar,  lequel  autrefois 
en  a  cuidié  sauver  par  telle  manière,  mais  Bonchassy,  qui  a  conduit 
le  procès  contre  lui  en  a  esté  condempné  envers  icellui  Bar,  et,  s'il 
estoit  trouvé  que  ainsy  fust,  mondit  seigneur  le  connestable  ne  ses 
gens  ne  le  devroient  soubstenir.  Ad  ce  que  lesdiz  deffendeurs  ont  dit 
que,  veu  le  certificat  de  mondit  seigneur  le  connestable,  l'argent  leur 
doit  estre  délivré,  dit  que  demandeurs  sont  contrains  de  payer  le  Roy, 
et  délivrer  leur  argent  à  caucion  ne  se  doit  faire,  mais  dit  que  ledit 
argent  doit  estre  délivré  auxdiz  demandeurs,  à  leur  caucion,  veu  qu'ilz 
sont  bien  caucionnez.  Ainsy  conclud  que  son  arrest  soit  dit  estre  bon 
et  valable  et  demande  despens. 

BoYLEAUE,  pour  lesdiz  deffendeurs,  dupplique  et  dit  que  lesdiz  de- 
mandeurs  frappent  bien  avant  contre  l'onneur  de  mondit  seigneur  le  con- 
nestable, car,  par  ses  lectres  patentes  et  closes,  il  advoue  lesdiz  vins 
à  lui  appartenir,  et  aussy  par  ses  lectres  closes  appert  qu'il  a  demandé 
audit  Bar  qu'il  face  ladite  provision,  et  aussy  veu  que  en  jugement  il 
advoue  iceulx  vins  à  lui  appartenir,  ainsy,  à  dire  le  contraire  lesdiz 
demandeurs  ne  sont  à  recevoir,  veu  les  privilèges  de  mondit  seigneur 
le  connestable,  car  il  est  plus  privilégié  que  nul  autre.  Ad  ce  que  ledit 
vin  appartient  audit  Janot  Bar,  etc.,  et  qu'il  en  a  fait  venir  d'autres,  etc. 
dit  que  nul  aultre  n'a  fait  venir,  et,  s'aucuns  aultres  en  a  fait  venir,  ne 
les  advoue  point.  Aussy  dit  que,  pour  la  despense  de  mondit  seigneur 
le  connestable,  peut  bien  avoir  Lxxim  queues  de  vin,  et  plus,  car  il 
en  donne  l'argent.  Ad  ce  que  Thomas  s'est  efforcié  de  vendre  partie 
dudit  vin,  etc.  que  ce  auroit  esté  comme  ayant  commission  du  maistre 
d'hostel  de  mondit  seigneur  le  connestable.  Ad  ce  que  Janot  Bar  les 
avoit  fait  vendre  par  delà,  etc.  dit  qu'il  ne  sera  ja  sceu  ni  trouvé;  et, 
posé  que  ainsy  fust  que  ce  auroit  esté  pour  en  avoir  proufit,  et,  de 
l'argent  qui  en  fust  ysseu,  en  eust  acheté  d'autres,  et  quidquid  sit, 
dit  qu'il  les  a  envoyez  et  livrez  et  sont  inventoriez  avec  les  aultres 
biens  de  feue  madicte  dame.  Et,  ad  ce  que  ledit  Bar,  ou  procès  qu'il 
avoit  contre  Bonchassy  fust  condempné  etc.,  dit  qu'il  ne  sot  riens,  et 
se  ainsy  estoit,  parceque  mondit  seigneur  le  connestable  ne  l'auroit 
pas  advoue.  A  la  provision,  etc..  dit  qu'elle  est  fondée  en  droit  com- 
mun et,  par  ainsy,  à  sa  caucion  l'argent  lui  doit  estre  délivré;  et  con- 
clud comme  dessus. 

En  droit. 

(Z'a  13,  f»«  37-38.) 

Du  xiue  jour  de  mars  ini'  xli. 

Veu  le  playdoyer  du  x*  jour  de  ce  présent  mois  de  mars,  d'entre  les 
fermiers  de  i'imposicion  du  vin  vendu  en  gros  en  la  ville  de  Paris, 


652  APPENDICES 

ceste  année  présente,  commençant  le  premier  jour  d'octobre  desrain 
passé,  demandeurs,  d'une  part,  et  monseigneur  le  connestable,  adjoinct 
avec  Jacques  Galobriet  et  Thomas  Baron,  deffendeurs,  d'autre  part, 
pour  raison  de  l'imposicion  de  xii  deniers  pour  l'une,  de  lxxiiii  de 
queues  de  vin  vendu  en  gros  en  ladite  ville  de  Paris  par  lesdiz  deffen- 
deurs, ceste  année  présente,  avec  les  lectres  mises  devant  la  court  par 
lesdiz  deffendeurs,  etc.,  la  court  dit  que  l'argent  arresté  à  la  requesle 
desdiz  demandeurs  sera  délivré  ausdiz  deffendeurs,  en  baillant  par 
eulx  caucion  de  la  somme  à  quoi  montera  ladicte  imposicion  ;  et  avec 
ce,  la  court  parlera  à  Guille  Lamoureux,  vendeur  desdiz  vins,  à  Janot 
Bar  et  aultres,  et,  ce  fait,  au  surplus  les  appoinctera  comme  il  appar- 
tendra  par  raison;  tous  despens  reservez  en  deffmitive, 
[V^  13,  f»39  vo.) 

Du  iii«  jour  de  septembre,  mil  cccc  xlvi. 

Veu  le  plaidoyé  fait  en  la  court  de  céans,  le  x°  jour  du  moys  de 
mars,  l'an  mil  cccc  xli,  d'entre  les  fermiers  de  l'imposicion  du  xxe  du 
vin  vendu  en  gros  en  la  ville  de  Paris,  en  la  dicte  année,  demandeurs, 
d'une  part,  et  Jacoq  Galobriel  et  Thomas  Voiron  {&ic),  facteurs  et  servi- 
teurs de  Janot  Bar,  le  connestable  de  France  adjoint  avec  eulx,  deffen- 
deurs, d'autre  part,  avec  l'appoinctement  par  lequel  avoit  esté  dit  que 
l'argent  qui  appartenoit  auxdiz  deffendeurs  et  qui  avoit  esté  arresté 
à  la  requeste  desdiz  demandeurs  seroit  délivré  à  iceulx  deffendeurs, 
en  baillant  par  eux  caucion  de  paier  la  somme  à  quoy  monteroit 
le  xxe  du  vin  dont  lesdiz  demandeurs  faisoient  demande  auxdiz 
deffendeurs,  se  par  la  court  estoit  ordonné  et,  avec  ce,  qu'elle 
parleroit  sur  ce  audit  Janot  Bar  et  à  Guill.  Lamoureux,  vendeur  de 
vins  en  la  ville  de  Paris,  pour  les  appoincter  au  seurplus,  comme  il 
appartenoit  par  raison,  et,  après  ce  que  la  court  a  fait  examiner  sur 
ce  ledit  Janot  Bar  et  Guill.  Lamoureux,  et  qu'elle  a  veu  et  diligemment 
visité  leurs  depposicions,  la  court  condempne  ledit  Jehannot  Bar  à 
rendre  et  paier  aux  diz  demandeurs  le  xxe  de  lx  et  xui  pippes  (ou 
pièces)  et  demye  de  vin  que  lesdiz  Jacoq  Galobriel  et  Thomas  Voiron 
ont  vendues,  pour  et  ou  nom  dudit  Janot  Bar,  en  ladite  ville  de  Paris  et 
en  ladite  année,  au  pris  qu'il  sera  trouvé  iceulx  vins  avoir  esté  venduz, 
et  en  leurs  despens  par  eulx  fait  en  ceste  cause,  la  tauxacion  d'iceulx 
réservée  par  devers  la  court.  Et,  pour  aucunes  faultes  et  abuz  que  la 
court  a  trouvé  que  ledit  Janot  Bar  a  voulu  faire  oudit  procès,  la  court 
condempne  iceluy  Jehannot  Bar,  en  amende  envers  le  Roy,  en  la 
somme  de  nii""  1,  p. 

(Z»a  16  fo  88.) 

GVIII 

QUITTANCES  DU  CONNÉTABLE  DE   RICHEMONT  (p.  436,  438,  462). 

NO  1.  QUITTANCE   DU  24  SEPTEMBRE  1453  (p.    436,  note  3,  p.    462). 

Nous,  Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richement,  seigneur 
de  Parthenay,  connestable  de  France,  confessons  avoir  receu  de  Macé 


APPENDICES  653 

de  Launay,  receveur  général  des  finances  de  monseigneur  le  Roy,  en 
ses  pais  et  duchié  de  Normandie,  la  somme  de  six  mille  livres  tour- 
nois, laquelle  raondit  seigneur  nous  a  ordonnée  estre  baillée  et  déli- 
vrée par  ledit  receveur  général,  oultre  nostre  pension  et  autres  bienf- 
faiz  que  avons  et  prenons  de  luy,  chacun  an,  pour  certaine  ordonnance 
de  cinq  cens  livres  tournois  par  mois  qu'il  nous  a  faicte,  tant  que 
serons  en  cedit  pais  de  Normandie,  en  la  charge  à  nous  baillée  par 
mondit  seigneur,  et  ce  pour  ung  an,  commençant  le  premier  jour 
d'octobre  derrain  passé.  De  laquelle  somme  de  vi^  1.  t.  nous  nous 
tenons  pour  content  et  bien  payé.  Et  en  avons  quicté  et  quictons  ledit 
receveur  général  et  tous  autres.  —  Donné  à  Caen,  le  xxiii»  jour  de 
septembre,  l'an  mil  cccc  lui. 
Artur. 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 
0.  Le  Roux. 

(Musée  des  archives  nat.,  n"  459.) 

Le  ms.  Clairambault  645,  p.  134,  mentionne  un  autre  reçu  de  la 
somme  de  7500  L  t.  payée  le  8  octobre  1451  au  connétable  par  Macé 
de  Launay,  pour  partie  de  sa  pension. 

N«  2.    QUITTANCE  DU  4  JUILLET  1454  (p.  438,  462). 

Nous  Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richement,  seigneur 
de  Partenay,  connestable  de  France,  confessons  avoir  receu  de 
maistre  Simon  Le  Bourlier,  notaire  et  secrétaire  de  monseigneur  le 
Roy  et  receveur  général  de  ses  finances,  es  pays  et  duché  de  Nor- 
mendie,la  somme  de  six  mil  livres  tournois,  laquelle  mondit  seigneur 
nous  a  ordonnée  estre  baillée  et  délivrée,  par  ledit  receveur  général,  en 
ceste  présente  année,  commençant  le  premier  jour  d'octobre  derre- 
nièrement  passé,  pour  nostre  ordonnance  de  cinq  cens  livres  tournois 
par  moys,  que  mondit  seigneur  nous  a  ordonnée,  tant  que  nous  serons 
ou  dit  pais  de  Normendie,  en  la  charge  qu'il  nous  a  baillée,  en  oultre 
et  par  dessus  la  somme  de  douze  mil  livres  tournois,  que  avons  et 
prenons  de  lui,  pour  nostre  pension  de  ladite  année.  De  laquelle  somme 
de  six  mil  livres  tournois  nous  nous  tenons  pour  content  et  bien  payé 
et  en  avons  quicté  et  quictons  ledit  receveur  général  et  tous  autres. 
En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  signé  ces  présentes  de  nostre  main  et 
scellées  de  nostre  scel,  le  quart  jour  de  juillet,  l'an  mil  quatre  cens 
cinquante  quatre. 
Artur. 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 

GOGUET. 

(Manque  le  sceau.) 
(Fr.  26082,  n°  6707.) 

N°  3.   AUTRE    QUITTANCE    DU  4  JUILLET    1454  (p.   462). 

Nous,  Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur 
de  Partenay,  connestable  de  France,  confessons  avoir  receu  de  maistre 


654  APPENDICES 

Simon  Le  Bourlier,  notaire  et  secrétaire  de  monseigneur  le  Roy  et 
receveur  général  de  ses  finances,  es  pays  et  duchié  de  Normendie,  la 
somme  de  douze  mil  1.  t.,  laquelle  mondit  seigneur  nous  a  ordonnée 
estre  baillée  et  délivrée  par  ledit  receveur  général,  pour  nostre  pen- 
sion de  ceste  présente  année,  commençant  le  premier  jour  d'octobre 
derrenièrement  passé.  De  laquelle  somme  de  douze  mil  1.  t.  nous  nous 
tenons  pour  content  et  bien  payé,  et  en  avons  quicté  et  quictons  ledit 
receveur  général  et  tous  autres.  En  tesmoing  de  ce,  nous  avons  signé 
ces  présentes  de  nostre  main  et  scellées  de  nostre  scel,  le  quart  jour 
de  juillet,  l'an  mil  quatre  cens  cinquante  quatre. 
Artur. 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 

GOGDET. 

(Pièces  originales,  t.  502,  dossier  11383  [ducs  de  Bretagne],  n°  7.) 

N°  4.    QUITTANCE  DU  6  JUIN  1455  (p.  462). 

Nous,  Artur,  filz  du  (sic)  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  sei- 
gneur de  Partenay  et  connestable  de  France,  confessons  avoir  receu 
de  maistre  Matbieu  Beauvarlet,  notaire  et  secrétaire  de  monseigneur 
le  Roy,  et  par  lui  commis  à  la  recepte  générale  de  ses  finances,  la 
somme  de  quatre  mil  1. 1.,  laquelle  mondit  seigneur  le  Roy  nous  a  or- 
donnée, pour  partie  de  nostre  pension  de  ceste  présente  année,  com- 
mençant le  premier  jour  d'octobre  derrenier  passé.  De  laquelle 
somme  de  nn  mil  1.  t.  nous  nous  tenons  pour  contens  et  en  quictons 
ledit  maistre  Mathieu  Beauvarlet  et  tous  autres.  En  tesmoing  de  ce, 
nous  avons  signé  ces  présentes  de  nostre  main  et  fait  sceller  du  scel 
de  noz  armes,  le  vi^  jour  de  juing,  l'an  mil  cccc  cinquante  et  cinq. 
Artl'R. 

Par  monseigneur  le  conte  connestable. 
Le  Maingan. 

(Clairambault,  titres  scellés,  t.  22,  p.  1521.) 


GIX 

INFORMATION  ORDONNÉE  PAR  LE  CONNÉTABLE  (1457,  11  janvier) 

(p.  460,  note  6). 

A  tous  ceulx  qui  ces  lectres  verront,  Bernard  Mondet,  maistre  es 
ars,  licencié  en  loys,  garde  du  scel  des  obligacions  de  la  viconté  de 
Constances,  salut.  Savoir  faisons  que,  aujourduy,  un*  jour  d'avril, 
l'an  mil  ccccLvni,  Estienne  Jourdan,  clerc  tabellion  juré  ou  siège  de 
Constances  nous  a  tesmoingnié  et  relaté,  soubz  son  saing  manuel , 
avoir  veu,  leu,  visité  et  diligemment  regardé,  mot  après  mot,  unes 
lectres  scellées  en  simple  queue  et  cire  vermeil,  saines  et  entières, 
en  scel  et  escripture,  sans  aucun  vice,  gloze  ne  razure,  desquelles  la 
teneur  ensuit  : 


APPENDICES  655 

Artur,  filz  de  duc  de  Bretaigne,  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  au  viconte  de  Coustances,  ou  à  son 
lieutenant,  salut.  Receue  avons  humble  supplicacion  de  Jehan  Haneron 
pouvre  homme  de  labour,  comme  ayant  la  garde  et  adminislracion 
lies  enffans  de  luy  et  de  feue  Clémence,  sa  femme,  contenant  que 
jàpiéça  les  prédécesseurs  de  ladicte  Clémence  fieffèrent  des  gens  des 
comptes  de  monseigneur  le  Roy  la  fieflferme  Bretel  et  le  moulin  de 
Lespinay,  assis  en  la  paroisse  de  Lengroine  i  en  la  seigneurie  et  de  la 
recepte  de  Gauray,  pour  quarante  et  ung  quartiers  de  fourment, 
mesure  dudit  lieu  de  Gauray,  quatre  livres  dix  sept  solz  tournois  d'une 
part,  et  six  livres  deux  solz  t.,  d'autre  part,  qui  soulient  estre  paiez 
au  prévost  de  la  prévosté  dudit  lieu  de  Gauray,  laquelle  fîefferme  et 
les  places  subgectes  à  icelle  et  mesmes  ledit  mouUn  sont  tournés  en 
sy  grant  ruyne  et  décadence,  par  le  moyen  des  guerres  et  mortalitez 
qui  ont  eu  cours  oudit  pays,  qu'ilz  sont  à  présent  de  pou  de  valeur  et 
ne  reviennent  pas  à  la  quarte  partie  desdictes  charges,  ainsi  qu'il  dit, 
et  que,  t\  ceste  cause,  par  vertu  des  lectres  patentes  de  mondit  sei- 
gneur le  Roy,  les  trésoriers  de  France  luy  avoient  modéré  ladicte  fief- 
ferme,  en  payani  le  quart  desdictes  charges,  jusques  à  quatre  ans  lors 
prochains  et  après  ensuivans,  ainsy  qu'il  nous  a  fait  apparoir  par  le 
vidimus  desdictes  lectres  royaulx  et  exécutoire  desdits  trésoriers  ataché 
à  ces  présentes;  et,  pour  ce  que  lesdits  quatre  ans  sont  expirez  et 
escheuz,  dès  le  douzième  jour  de  juing  cccc  cinquante  cinq,  ot  ung 
an  derrain  passé,  ledit  suppliant  s'est  trait  par  devers  nous,  pour  ce 
que  mondit  seigneur  le  Roy  nous  a  fait  don  des  fruiz,  prouffiz  et  reve- 
nues quelconques  de  la  dicte  terre,  seigneurie  et  prévosté  dudit 
Gavray,  et  nous  a  humblement  requiz  luy  faire  de  nouvel  rabaiz  ou 
quictance  de  ladicte  fîefferme,  à  nostre  bon  plaisir;  savoir  faisons  que 
nous,  inclinans  à  sa  supplicacion,  et  eu  considéracion  aux  rabaiz  et 
quictance  qui  par  cy  devant  luy  ont  esté  faiz,  en  tant  que  à  nous  est, 
pour  le  présent,  avons  voulu  et  voulons,  en  vous  mandant  que  ledit 
Jehan  Haneron,  ou  dit  nom,  souffrez  et  laissez  joir  desdiz  fîefferme  ou 
moulin,  d'icy  à  ung  an  prouchain  venant,  en  vous  payant  et  des  arré- 
rages escheuz  depuisledit  douzième  jour  de  juing,  le  quart  des  charges 
seulement  ;  et  ce  pendent  nous  vous  mandons  que,  appelle  avecques 
vous  noz  advocat  et  procureur  et  nostre  cappitaine  de  Gavray,  ou  son 
lieutenant,  ou  les  deux  d'eulx,  vous  transportez  sur  les  lieux  et  vous 
informez  et  enquérez  bien  et  deuement  si  ladicte  fîefferme  et  moulin 
sont  en  telle  décadence  et  non  valeur,  comme  dit  ledit  suppliant,  et 
à  quel  faulte  c'est  ;  et  tout  ce  que  en  trouverez,  mectez  le  par  escript 
et  nous  le  envoiez  clos  et  scellé,  comme  il  appartient,  en  manière  que 
on  y  adjouste  foy,  affîn  que  soyons  plus  amplement  informé,  pour 
faire,  ou  temps  advenir,  audit  suppliant  telle  grâce  que  verrons  estre 
à  faire  par  raison.  Et,  en  rapportant  ces  présentes,  avec  recongnois- 
sance  dudit  Haneron,  vous  en  serez  deschargé  en  voz  comptes  par 
tout  où  il  appartendra.  Donné  à  Paris  le  xi*  jour  de  janvier  l'an  mil 
cccc  cinquante  six.   Ainsy  signé.  Artur.   Par  monseigneur  le  conte 

1.  Lengronne,  c.  de  Gavray,  arr»  de  Coutances. 


656  APPENDICES 

connestable,  Baudry.  En  tesmoing  desquelles  choses,  nous,  garde 
dessusdit,  à  la  rellacion  dudit  tabellion,  avons  mis  à  ces  présents  vi- 
dimus  ou  transcript  le  scel  desdictes  obligacions,  en  Fan  et  jour  pre- 
mier dessusdiz. 

Collacion  faicte.  Jourdan. 

(Fr.  26084,  n"  7031.) 


GX 

FRAGMENT  d'uN  COMPTE  DE  DÉPENSES  DU  CONNÉTABLE 
DE  RICHEMONT  (1443-1443)  [p.  339,  444,  461,  463]. 

Le  compte  de  Raoul  de  Launoy,  trésorier  général  et  maistre  de  la 
chambre  aux  deniers  de  très  hault  et  puissant  prince,  mon  très  re- 
doubté  seigneur,  monseigneur  le  conte  de  Richemont,  seigneur  de 
Partenay,  connestable  de  France,  des  receptes,  charges,  mises  et  des- 
penses, depuis  son  premier  compte,  rendu  et  présenté  à  la  chambre 
des  comptes  de  mondit  seigneur,  tenant  en  son  chastel  de  Partenay, 
le  xxvii^  jour  d'aoust,  l'an  mccccxliii;  scavoir  est  de  ladicte  chambre 
aux  deniers,  pour  deux  ans  cinq- mois,  commençans  le  premier  jour 
dudit  mois  d'aoust,  et  de  la  thrésorerie  générale  pour  deux  ans  trois 
mois,  commençans  le  premier  jour  d'octobre,  ledit  an  mccccxliu,  auquel 
jour  fut  ordonné,  commis  et  institué  ledit  de  Launoy  trésorier  général, 
au  lieu  de  Jamet  Lamoureux,  et  finissant,  pour  ladicte  chambre  et  la 
thrésorerie,  le  derrain  jour  de  décembre,  l'an  mccccxlv. 

A  Messire  Gilles  de  Saint-Simon,  Charles  de  Montraoranci,  Henry 
de  Launay  et  Jean  de  Saulnières,  conseillers,  chambellans  et  maistres 
d'oustel  de  mondit  Seigneur,  le  x  jour  dudit  mois  d'avril,  l'an  mccccxlv, 
avant  Pasques,  pour  leurs  gaiges  des  mois  de  février  et  de  mars  der- 
renièrement  passez  ;  à  chacun  d'eux  xl  escus. 

A  Jehan  de  Rousnivinen,  Jehan  de  Savonnières,  Estienne  Prigent, 
Yvon  de  Kreimerch,  Yvon  de  Titanna  (Tinténiac?),  Jehan  du  Juch,  Jac- 
quet d'Arvet  et  Guillaume  du  Pair,  escuiers,  et  serviteurs  de  mondit 
seigneur,  celuy  jour,  et  pour  pareille  cause,  à  chacun  quarante 
livres. 

A  Alain  de  La  Roche,  escuier  de  monseigneur,  la  somme  de  six 
vingt  dix  réaulx  d'or,  scavoir  est,  cent  du  don  de  mondit  seigneur  et 
trente  pour  ses  gaiges  de  deux  mois,  comme  il  apert  plus  à  plain,  par 
mandement  de  monseigneur,  donné  le  xi«  jour  de  novembre,  l'an 

MCCCCXUIII. 

A  messire  Gilles  de  Saint-Simon,  chevalier,  conseiller  et  chambel- 
lan de  mondit  seigneur,  la  somme  de  cent  réaulx  d'or,  que  monsei- 
gneur luy  avoit  ordonné  pour  son  voyage,  où  il  va,  par  l'ordonnance 
de  mondit  seigneur,  pour  le  gouvernement  de  ses  cappitaines  et  gens 
d'armes  tenans  les  champs,  comme  apert  par  mandement  de  monsei- 
gneur, donné  à  Saumur,  le  xxvn^  jour  de  novembre,  l'an  mccccxliii. 

A  Geoffroy  Thomelin,  archier  du  corps  de  monseigneur,  la  somme 
de  soixante  escus  d'or,  lesquels  mondit  seigneur  luy  avoit  donnés,  de 


APPENDICES  657 

sa  grâce,  tant  en  récompensacion  des  services  qu'il  avoit  fait  à  mondit 
seigneur,  le  temps  passé,  que  pour  l'augraentaciou  et  avancement  de 
son  mariage,  comme  apert  par  mandement  de  mondit  seigneur, 
donné  le  xvni«  jour  de  février,  l'an  mccccxuii. 

A  messire  Olivier  Giffart,  chevalier,  la  somme  de  cent  livres  t.  que 
monseigneur  luy  avait  donné,  pour  et  en  récompensacion  de  plusieurs 
mises  et  despenses,  qu'il  avoit  souffertes  et  soustenues,  en  plusieurs 
manières,  comme  apert  par  mandement  de  mondit  seigneur,  donné 
le  11^  jour  de  juin,  l'an  mccccxliiii. 

A  messire  Guillaume  de  Vendel,  chevalier,  conseiller,  chambellan 
et  maistre  d'ostel  de  mondit  seigneur,  la  somme  de  neuf  vingt  dix 
escus,  que  mondit  seigneur  luy  avoit  ordonné  estre  payez ,  c'est  assa- 
voir vi""  escus  d'or,  que  longtemps  mondit  seigneur  luy  avoit  promis 
et  octroyé,  pour  faire  faire  ung  collier  de  Vordre  de  mondit  seigneur 
et  XX  escus  ',  tant  pour  la  récompensacion  du  voyage  que,  au  mois 
de  décembre  derrenièrement  passé,  il  fit,  de  par  mondit  seigneur,  en 
ta  ville  de  Dreux,  pour  le  fait  du  gouvernement  d'icelle,  que  pour  ses 
gaiges  des  mois  d'avril  et  may  derrains,  comme  il  apert  par  mande- 
ment de  mondit  seigneur,  donné  le  xxv"  jour  de  juin,  l'an  mccccxliui, 

A  messire  Louys  de  Laval,  seigneur  de  Chastillon,  la  somme  de 
deux  cens  escuz  d'or,  que  mondit  seigneur  lui  a  ordonné  de  sa  grâce, 
ainsi  qu'il  apert  par  ses  lettres  patentes,  données  à  Angiers,  le 
xx!!**  jour  de  janvier,  l'an  mccccxliii.  Pour  ce  a  payé  cedit  thrésau- 
rrer  à  Michel  de  Saint-Aignan,  serviteur  dudit  messire  Louys. 

A  Jean  du  Juch,  escuier,  la  somme  de  cent  escuz  vieulx,  pour  deulx 
chevaulx  que  mondit  seigneur  a  fait  prendre  et  achepter  de  luy,  pour 
ieeulx  donner,  l'un  à  lirunet,  serviteur  du  chancelier  de  France,  et 
l'autre  au  tabourin  du  duc. 

Do7is  faits  par  Monseigneur,  au  mois  d'aoust. 

A  Pierre,  bastard  de  Préaune  (?),  le  w^  jour  dudit  mois  d'Aoust,  vi 
escuz,  que  Monseigneur  luy  a  donné,  de  sa  grâce. 

A  messire  Jehan  de  Chalon,  bastard  de  Tonnerre,  le  xxvui''  jour  dudit 
mois  d'Aoust,  xx  escus,  que  Monseigneur  luy  a  donné,  de  sa  grâce, 
pour  récompensacion  de  certains  voyages  qu'il  a  faits  devers  luy,  de 
par  madame  de  Tonnerre,  pour  la  finance  que  devoit  mondit  sei- 
gneur à  ladicte  dame  de  Tonnerre,  pour  la  terre  de  Partenay. 

A  Tristan  l'Hermile,  escuyer  de  Monseigneur,  le  xu«  jour  du  mois  de 
septembre,  que  Monseigneur  luy  ordonna  pour  ses  gaiges  d'icelui, 
ouquel  il  a  esté  en  son  service,  xx  1.  t. 

A  Guillaume  Gruel,  pareillement  escuyer  de  Monseigneur,  le  dernier 
jour  du  mois,  sur  ce  qui  lui  est  deu  de  ses  gaiges  du  temps  passé,  x  1.  t. 

Rolle  d'octobre  mccccxliii. 
A  monseigneur,  contant  à  sa  main,  en  la  ville  de  Saumur,  le  xu'^  jour 
dudit  mois  d'octobre,  l'an  mccccxliii  qu'il  perdit  au  jeu  de  la  paulrae,  o 
messire  Loys  de  Beauvau,  seigneur  de  Précigné. 

1.  Probablement  lxx  escus. 

RiCHEMO.NT  42 


658  APPENDICES 

A  luy  pareillement,  audit  lieu  de  Saumur,  le  xvii«  jour  dudit  mois^ 
que  semblablement  il  perdit,  o  le  roy  de  Sécile,  monseigneur  Charles 
d'Anjou,  et  autres,  xx  escus. 

A  Vouvant,  poursuivant  de  mondit  seigneur,  le  xxi»  jour  dudit  mois, 
pour  son  deffray,  allant  et  retournant  de  Saumur  à  Partenay,  porter 
lectres  de  mondit  seigneur  à  ma  dite  dame,  vm  escus, 

Gaîges. 

A  monseigneur  Jacques  de  Luxembourg,  pour  ses  gaiges  du  mois 
de  septembre,  le  dernier  jour  d'iceluy,  l  livres. 

A  messire  Gilles  de  Saint-Simon,  chevalier,  chambellan  de  mondit 
seigneur,  ledit  jour,  pour  pareille  cause,  xx  escus. 

A  messire  Jehan  de  Malestret,  Jehan  de  Rochechouart,  chevaliers, 
Charles  de  Montmorency, René  Rouaultet  Jehan  de  Saulnières,escuyers, 
chambellans  et  maistres  d'hostel  de  mondit  seigneur,  ledit  jour,  pour 
pareille  cause,  à  chacun  xii  escus. 

A  Phelippe  de  Malestret,  Jacques  Ratault,  Guillaume  Gruel,  Yon 
de  Treanna,  Archambaut  Ratault,  Raoul  Payen,  Jehan  Eudes,  Guil- 
laume de  Chateaugiron  et  Alain  de  La  Roche,  escuyers  de  mondil 
seigneur,  ledit  jour,  pour  pareille  cause,  à  chacun  x  escus. 

A  Jehan  de  Feraucourt,  pareillement  escuyer  de  mondit  seigneur, 
pour  un  mois  de  gaiges,  fini  ledit  jour,  x  escus. 

A  Pierre  de  la  Jaille,  escuyer  de  mondit  seigneur,  qu'il  luy  a  or- 
donné, pour  un  mois  de  gaiges,  néantmoins  qu'il  n'ayt  servi  que  en- 
viron dix  jours  d'iceluy,  et  l'autre  plus  en  don,  x  escus. 

A  André  Giron,  retenu  par  mondit  seigneur  en  son  escuyer,  qu'il 
luy  a  ordonné,  pour  deux  mois  de  gaiges,  à  valoir  sur  un  quartier 
qu'il  doit  servir. 

(Ms.  Duchesne  70,  P^  112- il 3.  Copie  qui  ne  semble  pas  toujours 
très  exacte.) 

La  pièce  suivante  se  rattache  naturellement  à  celle  qui  précède, 
bien  qu'elle  lui  soit  antérieure  de  beaucoup. 

Reçu  de  P.  de  Kermelec,  écuyer  et  maître  d'hostel  du  comte 
et  de  la  comtesse  de  Richement  {4it26,  3  avril). 

Je,  Pierre  de  Karmelec,  escuyer  et  maistre  d'ostel  de  monseigneur 
et  de  madame  de  Richemont,  confesse  avoir  eu  et  receu  de  JametLa- 
moureux,  trésorier  de  mondit  seigneur,  par  la  main  de  Jehan  de 
Ghastelgiron,  argentier  d'icellui  seigneur,  la  somme  de  deux  cens 
livres  tournois,  en  déducion  et  rabat  de  plus  grant  somme  ordonnée 
pour  la  despense  de  madicte  dame.  De  laquelle  somme  de  ii<=  1.  t.  je 
me  tien  pour  content  et  en  promez  faire  avoir  audit  Jamet  Lamoureux 
tel  acquit  qu'il  appartendra,  enmoy  rendant  ces  présentes.  Tesmoing 
mon  scel,  cy  mis,  le  lu^  jour  d'avril,  Tan  milCCCC  vint  seiz,  après  Pas- 
ques. 

Scellé.  Non  signé. 

(Clairambault,  t.  LXII,  f»  4819.) 

FIN 


TABLEAUX  GÉNÉALOGIQUES 


TABLEAU  GÉNÉALOGIQUE  DES  DUCS  ] 


Pierre  l",  de  Dreux,  dit  Mauclerc,  duc  de  Bretagne,  comte  de  Richemonl  (1212-1237;  -}-  1250),  épouse  A 


Jean  l",  le  Roux  (1237- 


Jean  II  (1286-1305). 


Artur  II  (1305-1312). 


Jean  III  (1312-1311),  inoit 
sans  postérité:  épouse:  1»  Isa- 
belle de  Valois  (-{-  1309),  fille 
de  Ch.  de  Valois  et  sœur  de 
Philippe  VI  ;  2°  Isabelle  de  Cas- 
tille  (-f  1328),  fille  de  Sanche  IV; 
3»  Jeanne  de  Savoie  (-f  1334), 
fille  d'Edouard,  comte  de  Savoie. 


Guy,  comte  de  Pcnlhièvre,  seigneur  d'Avaugour  (+  1341);  épouse  Jeanne 
d'Avaugour.  1 

Jeanne  de  Penthièvre  ;  épouse  Ch.  de  Blois  (-f-  1364),  seigneur  de  Guise, 
fils  de  Gui  de  Chàtillon,  comte  de  Blois,  et  de  Marguerite  de  Valois,  sœur 
do  Philippe  VI. 


Jean  de  Blois,  comte 
de  Penthièvre  ;  épouse 
Marguerite  de  Clisson, 
deuxième  fille  du  con- 
nétable Olivier  de  Clis- 
son et  meurt  le  16  jan- 
vier 1404. 


Gui,  mort 
en  otage 
en  Angle- 
terre. 


Henri ,  despote 

de  Romanie 

(+  1400). 


Marie  ;  épouse,  en 
1360,  Louis  le-- d'An- 
jou, roi  de  Sicile,  et 
meurt  en  1404. 


Marguerite,  épouse 
L.  d'Espagne,  comte 
d'Angoulème,  et  meurt 
sans  postérité. 


Olivier  de 
Blois,  c.  de 
Penthièvre , 
vicomte  de 

Limoges  ; 

ép.,  en  1406, 

Isabeau    de 

Bourgogne 

(fille  de 

Jean  sans 
Peur),   puis 
Isabeau    de 
Lalaing,    et 

meurt,  en 
1433,  sans 
postérité. 


Jean  II  de 
Blois,  Feign. 
de  Laigle,  c. 
de  Penthiè- 
vre en  1433  ; 
ép.  Margue- 
rite de  Chau- 

vigny,  et 
meurt     sans 
postérité    en 
1454. 


Charles  de  Blois, 
seigneur  d'Avau- 
gour; ép.  Isabeau 
de  Vivonne  et 
meurt  avant  1434. 
I 

Nicole;  épouse 
Jean  II  de  Brosse, 
seign.  de  Ste-Sé- 
vère  et  de  Bous- 
sac(filsde  Jean  Ic" 
de  Brosse,  maré- 
chal de  France, 
-1-1433),  comte  de 

Penthièvre  en 
1454.       I 


Jean  III  de  Bros- 
se, comte  de  Pen- 
thièvre ;  épouse, 
en  1468,  Louise 
de  Laval  (fille  de 
Guy  XIll,  comte 
de  Laval,  et  d'Isa- 
belle de  Breta- 
gne), et  meurt  en 
1485. 


Guillaume;   épouse,  en 
1451,  Isabeau  de  La  Tour. 


Françoise  ;  épouse  Alain 
d'Albret. 


Marguerite  ;  Jeanne  ;    épouse 

ép.  Jacques  de  JeanHarpedenne, 

Bourbon,  c.  de  puis    Robert     de 

la  Marche.  Dinan. 


François  !"■ 
(1442-1450), 
né  le  11  mai 
1414,  mort  le 
18  juin.  1450; 
ép.  Yolande 
d'Anjou  (fille 
de  LoLis   II 

d'Anjou  et 
de     Yolande 

d'Aragon, 
-1-1440),  puis 
Isab.  Stuart 
(fille  de  Jac- 
ques le,  roi 
d'Ecosse),  le 
30  cet.  1441. 


Pierre  II 
(1450-1457), 
né  le  7  juillet 
1418,  mort  le 
22  sept.  1457; 
ép.  en  1431 
Françoise 
d'Amooise 
(fille  ainée  de 
Louis  d'Am- 
boise    et    de 

Marie    de 
Rieux),  mor- 
te en  li85i 


Gilles,  sei-      Anne, 
gneur  de 

Champtocé, 
-f-  25  avril 
1-450,  fiancé  à 
Françoise  de 
Dinan  ,  fille 
de  Jacq.  de 
Dinan,  seign. 
de  ChiUeau- 
briant. 


Isabelle, 

promise, 
en  1417, à 
Louis  III 

d'Amou, 
mariée  le 
le'  octob. 

1430,  à 
Guy  XIII 
(ou  XIV), 
c.  de  La- 
val;morte 
en  1442. 


Marguerite, 
épouse,  le  16 
novembre  1455 , 
François,  comte 
d'Etampes  ,  puis 
duc  de  Bretagne, 
etmeurt  en  1489. 


Marie,  épouse 
Jean  II  deRohan 
fils  d'Alain  IX  de' 
Rohan  et  de  Ma- 
rie de  Lorraine. 


(a  ^ 


BRETAGNE   DE   LA   MAISON   DE  DREUX 


sœur  d'Arlur  (emprisonné  par  son  oncle,  Jean  sans  Tekre,  en  li02,  +  1403)  et  héritière  de  la  Bretagne. 


Jean  de  Monlfort  (appelé  quelquefois 
Jean  IV,  -f-  1345);  épouse  Jeanne  de 
Flandre,  lille  de  Louis  de  Flandre, 
i:rimte  de  Ne  vers  (+  138  i). 


Jeanne;  épouse 
Robert  de  Flan- 
dre, seigneur  de 
Cassel. 


Béatrix;  épouse 
Guy  X,  comte  de 
Laval. 


Alix;  épouse 
Bouchard  VI , 
comte  de  Ven- 
dôme. 


JT    ?  'r^°     f'   *'"t     ""  Jean  IV  (ou  V)  de    Montfort  (1361-1399)  ;  épouse  :  1"  Marie  d'Angleterre    lille 

ra.te  de  Guerande   a  Jean  pmnee  d'EnouARD  III,  morte  après  1362;  2»  Jeanne  Holland,  fille  de   Th    Ho  land 

e  Blo.s,  comte  de  Pcnthie-  comte  de  Kent,  en   1366  {+  1384);  3»  Jeanne  de  Navarre    fille  de  Charles     I   le 

re.  Ce  mariage  n'ayant  pas  Mauvais,  roi  de  Navarre,  en  septembre  1386.  (Jeanne   épouse   ensuite  Henri   ÎV 

u   lieu,    elle  épouse,  vers  roi  d'Angleterre,  en  1402,  et  meurt  en  1437  )                    ^                                           ' 

}96,  Raoul  Basset  Drayton,  i                         ' 


Jean  V  (ou  VI)  ri399- 
1442],  né  le  24  décem- 
bre 1389.  épouse  le 
19  sept.  1396  Jeanne 
de  France  (-f-  1433), 
fille  de  Charles  VI. 


rguerite,  à        Tanguy, 

icée,  en  =  bâtard  cle 

,  à  Guy  o  Bretagne; 

(ou  XIV)  £        épouse 

Laval,  u 
■te     en 


,  à  neuf 
et  deux 


Jeanne 
Turpin, 
fille  d'An- 
toine Tur- 
pin ,  sei- 
gneur de 
Crissé,  et 

meurt 
sans     en- 
fants . 


Artur  III 
(1457-1458),  c. 
de  Richemont, 
connétable  de 
France  ,  puis 
duc  de  Breta- 
gne sous  le  nom 
d'ARTL'R  III, né 
en  1.393,  mort 
en  1458;  épou- 
se :  1"  Margue- 
de  Bourgogne; 
2°  Jeanne  d'Al- 
bret  ;  3»  Cathe- 
rine de  Luxem- 
bourg. 


Jacqueline,bù- 
tarde,  mariée  à 
A.  Brécart. 


Gilles 
(+  19 
juillet 
1112). 


Richard, 
né  en  1395, 
c.  d'Etam- 
pes;  épou- 
se Margue- 
rite    d'Or- 
léans,  fille 
de  Louis I^f 
d'Orléans 
et  de   Va- 
lentine 
Visconti, 
et  meurt 
en  1438. 


Jeanne, 

née  en 

1387 

(+  1388). 


Marie,  née 
en  1391,  ac- 
cordée, en 
1395,  à  Hen- 
ri de  Lan- 
castre,  c,  de 
Derby  (plus 
tard  Henri 
IV);  mariée, 
en  1396,  à 
Jean  1er,  c. 
d'Alençon, 
et  meurt  en 
1446. 


Blanche, 
mariée,  le 
30  juillet 
1406,  à 
Jean     IV 
d'Arma- 
gnac   (fils 
aine   de 
Bernard 
VII  d'Ar- 
magnac, 
conné- 
table de 
France)  ; 
meurt 
avant 
1419. 


Margue- 
rite,   ma- 
riée, le  23 
avril  1407, 
à  Alain 
IX,  vi- 
comte  de 
Rohan ; 
meurt    le 
13  avril 
1428. 


François, c.  d'Etnm-         Marie;    épouse 

pes,  puis  duc  de  Bre-  P.  de  Rieux,ma- 

tagne,  sous  le  nom  de  réchal  de  France 

François    II;    épouse  (+  1439),  et  de- 

Marg,    de    Bretagne,  vient  abbesse  de 

fille    de    François   I"  Fontevrault. 
(1455),  puis  Marg.  de 
Foix,  et  meurt  en  1 188. 


Cutlierine;  épouse 
en  1468  Guill.  de 
Chàlon  ,  plus  tard 
prince  d'Orange. 


Anne  de  Bretagne  ; 
épouse  Charles  VIII, 
puis  Louis  XII,  rois 
do  France, 


662 


APPENDICES 


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Guy  XIII  (dit  XIV),  premier 
4-  1486);  épouse  IsabeUe  de  B 
EAN  V.puis  Françoise  de  Dinan 
e  Bretagne.        '                   | 

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Pierre  ler  de  Luxembourg, c. 
de  Saint-Pol  (+  1433);  épouse 
Marguerite  de  Baux. 
1 

Louis  de  Luxembourg,  c.  de 
Saint-Pol,  connétable  de  France 
(+  1475). 

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INDEX  ALPHABÉTIQUE 


AbboviLe,  40,  230,  240,  258-60,  348. 

Abolilion  (lettres  d'),  310,  371,  380, 
576,  577. 

Abolition  générale  pour  les  gens  de 
guerre,  610. 

Abrigent  (Th.),  293. 

Agen,  388,  389. 

Aguesseau  (d'),  538. 

Aides  (les),  242,  298,  357,  432,  513, 
517,  522,  523,  616,  618.  —  (La  cour 
des  ,  97,  112,  369,  649,  650,  652. 

Aidie(Odet  d'),  366,  396,  397,  400,  404, 
408,  415,  416,  614. 

Aigueperse,  307. 

Aiguillon,  339. 

Aisne  (1'),  547. 

Albany  (le  duc  d'),  80. 

Albergali  (Nie),  cardinal  de  Sainte- 
Croix,  195,  196,  199,  223,  227,  230, 
237. 

Albret  (la  maison  d'),  331,  338, 666.  — 
(Alain  d'),  petit-lils  de  Charles  II, 
444.  —  (Amanieu  d'),  fils  de  Char- 
les II,  184,  208,  271,  272,  414,  431. 
531,  614.  —  (Charles  I^'  d'),  connét. 
de  Fr.,  12,  22,  33,  34,  40-42,  84,  151, 

338,  604.  —  (Charles  II  d'),  60.  110, 
111,  131,174,193,  331,334,335.  338, 

339,  603,  604.  —  (Ch.  d'),  fils  de 
Charles  II,  332.  —  (Guill.  d'),  s. 
d'Orval,  84,  111,  144,  145,  157,  331. 
—  (.leanne  d'),  comtesse  de  Riche- 
mont,  338,  340,  352,  604. 

Aleaume  (J.),  515,  527. 

Aleman  (L.),  card.  arch.  d'Arles,  210. 

Alencon,  107,  193,  206,  207,  300,  312, 
345',  373,  405,  545,  546.  —  (Le  duché 
d'),  537.  —  (La  maison  d'),  95,  664.  — 
Jean  I«%  comte,  puis  duc  d'),  3, 10, 
11,  16,  22-25,  28,  29,  33,  35,  37,  40, 
42,  46,  477,  480,  485.  —  (Jean  II, 
duc  d'),  13,  61,  81, 116,  136,  161,  164- 


74,  176,  177,  184-88,  191,  193,  206- 
208,  217,  221,  235,  237,  240,  242,  243, 
260,  279,  299,  303,  305-307,  310,  318, 
319,  325,  330,  332,  333,  340,  344,  353, 
384,  394,  417,  432,  441,  442,  448,  449, 
495,  538,  545,  636.  —  (Catherine  d'), 
29. 

Aligre  (le  s.  d'),  249. 

Allemagne,  289,  350,  353,  447. 

Ailes  (Guill.),  502. 

Allesolles  (L.  d'),  493. 

Alsace  (1'),  285,  291,  297,  300,  359,  378. 

—  (Expédition  d'),  348,  351,  354, 
335,  607. 

Amadoc  (frère  de  La  Hire),  212.  Voy. 

VlGNOLES. 

Amblenv,  265. 

Ambleville,  268. 

Amboise,  167,179,181,183,262,538.— 
(La  famille  d'),  183.  —  (Françoise  d'), 
duchesse  de  Bretagne,  181, 183,  436, 
444,  543, 544.  —  (Ingerger  II  d'),  181. 

—  (Jacqueline  d'),  183.  —  (Louis  Il~ 
d'),  48,85,86,178,179,  181-184,191, 
197,  198,  200,  208,  222,  260,  304,  305, 
320,323,  327,  538,  543,  544.  —  (Mar- 
guerite d'),  181,  182.  —  (Péronnelle 
d'),  181.  —  (Pierre  d'),  s.  de  Chau- 
mont,  198,  200,  208,  273,  303,  305. 

Ambrières,  147. 

Amédée  VII  et  VIII.  Voy.  Savoie. 

Amiens.  43,  67,  72,  74,  77,  78,  230, 

240, 271, 547,  548,  551,  555.  —  (L'évè- 

que  d'),  237. 
Amignet,  480. 
Amiral  (1'),  497,  500.  —  (de  la  mer), 

630.Voy.  Bleil,  Cugnet,  Gulant,  Cois- 

TIVY. 

Ancenis,  262,  543. 

Angers,  80, 84-86,108, 110, 122, 137,138, 
149, 183, 192,  197,  270,  301-304,  344, 
345,  426,  427,  446,  470,  500,  502,  516, 
519,  578,  657.  —  (Entrevue  d')  en 
1424,  p.  85-86.  —  (L'évêque  d'),  90, 


670 


INDEX   ALPHABETIQUE 


519.  —  L'abbaye  de  Saint-Aubin,  à 

Angers,  85. 
Anglais  (les  ambassadeurs),  223  et  s., 
295,  337,  338,  346-48,  384,  385,  393, 
395.  —  (Les  archers),  294,  408,  409. 

—  (Les  commissaires),  385.  —  (Le 
gouvernement),  194,  201,  202,  222, 
228,  239,  250,  272,  279,  287,  293,  296, 
318,  320,  333,  346,  392-94,  424,  442, 
541.  —  (La  messe  et  la  procession 
des),  353,  557,  558. 

Anglaise  (l'armée),  170,  405-408,  412. 

—  (La  domination), 221. —  (La  flotte), 
433, 438.  —  (La  nation), 239, 240,  345. 

Angleterre  (l'armée  d'),  644.  —  (Le 
conseil  d'),  206,  220,  228,  258.  —  (Le 
connétable  d'),  388.  —  (La  cour  d'), 
199,  272.  —  (La  couronne  d'),  240, 
258.  —  (Le  parlement  d'),  194,  230, 
261.  —  (Les  partisans  de  1'),  336.  — 
(Les  représentants  de  1'),  346.  — 
(Edouard  III,  roi  d"),  2,  46,  258,  477, 
478.  —  (Guillaume  I",roi  d'),  452, 477, 

—  (Henri  IV,  roi  d'),  4  et  s.,  22-27,  45. 
271,  272,  477,  479.  —  (Henri  V,  roi 
d'),  27,  29,  37-67,  68  et  s.,  94,  116, 
143,  225,  230,  257,  292,  420,  456,  469, 
477,  495,  500,  529,  632.  —  (Henri  VI, 
roi  d'),  64,  67  et  s.,  82,  94,  115,  116, 
123,  138  et  s.,  155.  156,  163,  176, 
178,  179,  187, 189,  194  et  s.,  212,  217- 
221,225-228,  239-242,  250,  238,  266, 
268,  271,  272,  297,  300  et  s.,  318,  323, 
332  et  s.,  345-48,  351,  333,  378  et  s., 
392,  394,  400,  403,  405,  413,  418,  433. 
441,  517,  518,  529  et  s.,  546,  554, 
555,  562,  581,  607,  618-20,  640.  Ses 
ambassadeurs,  554,  618-20.  Son 
conseil,  79,  241,  242,  337,  346,  532, 
619.  Ses  conseillers,  332,  333.  — 
(Marie  d'),  fille  d'Edouard  III,  du- 
chesse de  Bretagne,  478. — (Richard 
II,  roi  d'),  4,  9,  306,  478,  664. 

Anglo-Bourguignons  (les),  210. 

Angoumois  (1'),  94,  330. 

Anjou  (1'),  50,  79,  82,  94, 107,  111,  112, 
114,  122,  123,  12B,  129, 138,  139, 147, 
150,  179,  180, 197,  279,  300,  343,  347, 
348,  378,  495,  515,  516,  532. 

Anjou  (la  maison  d'),  95. 150, 179,  183, 
191, 196, 198,  201,  347,'  353,  392,  662. 

—  (Les  princes  d'),  354.  —  (Charles 
d'),  c.  de  Mortain  et  du  Maine,  48, 
83,  104,  179,  181,  183,  196-210,  217, 
220,  231,  240,  242,  243,  262,  263,  270, 
273,  276,  279,  295-98,  302,  307,  312, 
320-25,  330,  332,  334,  340,  347-49, 
352-55,  384,  392,  417,  492,  564,  565, 
641, 658.  —  (Jean  d'),  duc  de  Galabre, 
270,  349,  355,  417,  427.  —  (Louis  II 
d'),  roi  de  Sicile,  24,  25,  28-33,  40, 
48,  183.  —  (Louis  111  d'),  roi  de  Si- 
cile, 30,  48-50,  82,  83,  85,  109,  117, 


179,  195,  211,  519.  —  (Louis  d').  fils 
deRené,313.— (Marguerite  d'),  reine 
d'Angleterre,  345,  348,  351,  392,  405, 
418,442. — (Maried'), reine  de  France, 
30,  48,  99,  199,  202,  222,  269,  297, 
330,  496,  565.  —  (René  d'),  duc  de 
Bar  et  de  Lorraine,  roi  de  Sicile, 
48,  179,  181,  195,  211,  214-217,  220, 
224,  231 ,  234,  257,  259,  260  et  s.,  270, 
272,  285,  313,  316,  341,  347-56,  381, 
384,  392,  417,  42.5-27,  431,  438,  445, 
551,  658.  —  (Yolande  d'),  fille  de 
Louis  II,  duchesse  de  Bretagne,  183. 

—  (Yolande  d'),  fille  de  René,  com- 
tesse de  Vaudemont,  351.  —  Yo- 
lande, reine  de  Sicile,  voy.  Aragon 
(Yolande  d'). 

Anthenaise  (Aimeri  d'),  207,  209. 

Antin  (Eynat  d'),  493. 

Antrain,  117,  120,  397,  403. 

Apchier  (J.  d'),  303,  306.  —  (Françoise 
d'),  306. 

Aplaincourt,  548. 

Appàtis  (les),  545,  548,  560,  561,  608, 
620. 

Aragon  (Jeanl*'^,  roi  d'),  29.  — (Jean  II 
d'),  196,  430.  —  (Yolande  d'),  reine 
de  Sicile,  femme  de  Louis  II  d'An- 
jou, 24,  29,  30,  48-50,  53,  76-79,  82- 
86,  89-92,  95,  99-112,  117,  131,  140- 
144,  155,  156,  158,  162-165, 179,  181- 
86,  191,  192,  196-99,  202,  203,  206- 
211,  222,  242-,  257-60,  297,  298.  Sa 
mort,  340,  347,  475,  485,  508,  509, 
511,  519,  526,  536,  542-545,  565. 

Arbalétriers  (les),  371,  372,  375,  584. 

—  (Le  clerc  des),  505.  —  (Le  maître 
des),  395,  497,  505.  Voy.  Estoute- 
viLLE,  Malet,  Tohsay. 

Arbalétriers  (les  francs),  372,  375. 

Arc  (Jeanne  d'),  75,  157,  164-182,  185, 
193,  212,  241,  275,  316,  441,  449,  463, 
467,  473-76,  571. 

Archers  (les),  301,  336,  337,  357,  358, 
367  et  s.,  409,  410,610,  611,  642. 

Archers  (les  francs),  372-75,  393,  420, 
434,  644,  645. 

Ardant  (Th.)^  656. 

Ardenon  (la  bastille  d'),  près  du  Mont- 
Saint-Michel,  221. 

Argentan, 165,  176,  417,  424,  518,  546, 
563. 

Argenton  (le  s.  d'j,  180,  493. 

Arleux,  548. 

Armagnac  (maison  d'),  95, 150, 331,665. 

—  (Anne  d'),  338.  ~  (Le  bâtard  d'), 
341.  —  (Bernard  VII  d'),  connét.  de 
Fr.,  10-50, 100, 131,  287,  332.  —  (Ber- 
nard d'),  c.  de  Pardiac  et  de  La 
Marche,  8,  100,  130,  144,  155-166, 
173, 174,  191,  197,  202,  231,  269-273, 
287,  289,  304,  305,  307,  310,  320,  325, 
332,  334-38,  406,  526,  533,  536,  545, 


INDEX  ALPHABETIQUE 


671 


—  (Bonne  d'),  duchesse  d'Orléans, 
13,  332.  —  (Isabelle  d'),  306.  —  (Jac- 
ques d'),  c.  de  Castres,  406,  407,  412, 
417.  —  (Jean  IV  d'),  10,  60, 130,  144, 
155,  160,191,217,  231.  332  et  s.,  353, 
394,431, 432,  463,  526,  545.  —  (Jean  V 
d'),  334,  431,  4.32,  439,  441,  463.  — 
(Marie  d'),  duchesse  d'Alencon,  448. 

—  (Thibaud  d'),  dit  de  Charmes,  280. 
Armagnacs  (les),  10-63,  238,  249,  472, 

475,  486,  498. 
Armée  française  (1'),  97-98,  171,  175, 
208,  301,  354,  372,410,  417,  466.  —Sa 
mauvaise  organisation,  376,  466.  — 
Excès  des  gens  de  guerre,  355,  369, 
370,  606-611.  Voy.  Compagnies,  Rou- 
tiers. —  Ordonnances  sur  l'armée, 
97,  283,  284,  298-301,  308,  349, 
355-58,  360-67,  371-74,  437,  560,  566, 
574, 606-614 .  —  Réforme  de  l'armée, 
283,  286-98,  301,  303,  341,  346,  348, 
355  et  s. ,375,  412,  464,  466. —  Licen- 
ciement des  compagnies,  en  1445, 
p.  356,  359,  375.  —  Compagnies  d'or- 
doûnance,  356-67,  375,  376,  396,  397, 
409,  415,421,  424,  434,  437,  635,  636. 

—  Leurs  capitaines,  360,  363,  367- 
70,  611.  —  Compagnies  sans  ordon- 
nance, 360.  —  Compagnies  de  100 
lances  (les  quinze),  361-66.  —  Lan- 
.ces.  Lance  fournie,  357,  358,  367, 

368,  611-15,  636,  644.  —  Hommes 
d'armes,  301,  357,  358,  366-69,  372, 
374,  576,  378,  610,  642.  —  Homme 
d'armes  à  pied,  375.  —  Surnoms 
d'hommes  d'armes,  369.  —  Gentils- 
hommes d'armes,  367.  —  Archers, 
367,  368,  371,  375,  409,  410.  —  Cou- 
tilliers,  301,  357-358,  367,  374,  375, 
610.  —  Pages,  357, 358, 367,  369,  375, 
610.  —  Varlets,  357,  358,  367-69, 
610.  —  Commissaires  aux  revues, 
358,  364-73,  433,  434.  —  Discipline, 
358,  367,  369,  422,  431,  464.  —  Élus, 
360,  368,  369,  372, 373.  —  Garnisons, 
360,  367,  404,  433,  505,  605-608.  — 
Logement, 358, 367,  610,  611,  645.  — 
Montres  ou  revues,  301,358,  370-73, 
432,  563.  —  Solde,  301,  365,  368,  371 , 
374,  432,  433, 611, 614,  644.  —  Taxes 
pourl'entretien  de  l'armée,  360,  367, 
368,432,437,611,  612,  614  et  s.,642- 
43.  —  Appâtis, 363, 364, 548.  -  Taille 
des  gens  d'armes,  363,  369.  —  La 
taille  dite  perpétuelle,  363,  364,  368. 

—  Compagnies  de  la  grande  ordon- 
nance, 365-68,  374,  375,  642,  645;  — 
delà  petie  ordonnance,  365,  366, 

369.  —  Grande  et  petite  retenue, 
365.  —  Grandes  et  petites  payes,  ou 
soldes,  365,  366,  369,  374,  375,  613, 
614.  —  Doubles  payes,  644.  —  Mor- 
tes payes,  644.  —  Garde  du  roi,  369. 


—  Troupes  étrangères,  101,  367, 
372.  —  Milices  féodales,  374, 375.  — 
Leur  solde,  374,  375.  —  Ban  et  ar- 
rière-ban, 136,  320,  325,  375,  438.  — 
Troupes  auxiliaires,  438.  —  Résul- 
tats des  réformes,  371.  —  La  nou- 
velle armée  française,  376,  412.  — 
UaxméQpei-manente,  363.  —  La  gen- 
darmerie, 412.  —  L'infanterie,  371- 
73,  393.  —  L'armée  royale,  167. 168, 
173,  348,  350,  404,  487.  —  Voy'.  Ar- 
CHEits,  Archers  (kbancs),  Bretagne, 
Gens  d'armes,  Gens  de  glerbe.  Rou- 
tiers. 

Arondel  (le  c.  d'),  192,  206,  209,  217, 
221,  545,  546. 

Arpajon  (Béranger  d'),  104,  116,  145, 
551. 

Arqués,  274,  322,  614,  642. 

Arras,  34,  74,  75,  220-223,  226-229,  233, 
235,  237,  493,  550,  552,  556.  —  (Con- 
grès d'),  196,  224-29,  232  et  s.,  297, 
452,498, 552,  554.  —  Abbaye  de  Saint- 
Vaast,  à  Arras,  224,  229.  —  Hôtel 
de  la  Cour-le-Comte,  à  Arras,  224. 

Ars  (Gonsalles  d'),  638,  639. 

Artillerie  française  (1'),  321,  334,  514, 
527,  645.  —  (Le  maître  de  1'),  637. 
Voy.  Bessonneau,  Bureau. 

Artois  (1'),  548.  —  Artois  (le  héraut), 
32.  —  Artois  (Bonne  d'),  duchesse 
de  Bourgogne,  87,  88,  176,  231.  — 
(Charles  d'),  c.  d'Eu,  19,  31,  33,  41, 
42, 47,  51 ,  87,  320,  325,  334,  384,  397, 
417,  431,  437,  449,  480,  485.  —  (Phi- 
hppe  d'),  c.  d'Eu,  31,  87. 

Arvert,  427. 

Arvet  (J.  d'),  656. 

Arzillières,  214. 

Ashton  (Roger),  55,  56. 

Asselin  (Jean),  248. 

Assis-s-Serre,  212. 

Astarac  (le  c.  d'),  217. 

Aubenton,  648. 

Aubert  (J.),  139,  637. 

Aubette  (1'),  325. 

Aubigny  (seigneurie  d'),  108. 

Aubry  (J.),  434,  645. 

Aude  (J.),  435,  552. 

Auffroy  (P.),  524. 

Auger  (J.),  245,  252. 

Augustins  (les),  443. 

Augy  (P.  d'),  286. 

Aulnois,  214. 

Aumale,  175,  239. 

Aunis,  94,  189,  330,  540. 

Aurai,  59,  340.  —  (Bat.  d'),  2. 

Aurebruche  (Blanche  d'),  572. 

Aurou  (1'),  132. 

Autriche  (1'},  446,  447.  —  (Albert  II  d'), 
446.  —  (Ladislas  d'),  445,  446. 

Autrichiens  (lès  princes),  447. 

Autua,  218. 


672 


INDEX  ALPHABETIQUE 


Auvergne  (1'),  94,  101,  129,  141,  160, 
306,  308,  334,  341,  441,  511,  512,  575. 
—  (Beraud,  comte-dauphin  d'),  85, 
89,  505. 

Aux  Epaules  (Richard),  403. 

Auxerre,  22,  30,  230,  481.  —  (Comté 
d'),  79,  122,  230,  238.  —  (Conféren- 
ces d')  en  1432,  p.  195,  196.  —  (L'é- 
vèque  d'),  223.  —  Voy.  Traités. 

Auxerrois  (!'),  128,  238. 

Auzav  (la  vicomte  d'),  601. 

Avallôn,  206. 

Avaugour  (seigneurie  d'),  12,  67,  328. 

Voy.    PENTmÈVRE. 

Avesne,  59. 

Avignon,  104,  509. 

Avranches,  51,  63,  118,  119, 135,  137, 
221,  29 'i-,  322.  343.  349,  396,  397,  402, 
403,  413-15,  482,  632,  639.  —  (L'évê- 
que  d'),  117.  —  (Le  vicomte  d'),  239. 
Voy.  Sièges.  —  Le  pont  Gilbert,  près 
d'Avranches,  300,  414. 

Azincourt,  41,  257.  Voy.  Batailles. 


Bailleul-en-Vimeu,  548. 

Baillis  (les)  373,  374,  497. 

Bàle,  206,  233,  249,  251,  259.  —  (Le 
concile  de),  206,  210,  218,  219,  224, 
233,  238,  289,  297,  554,  556.  —  (Am- 
bassadeurs et  légats  du  concile), 
226,  229,  233,  554. 

Bapaume,  34. 

Bar  (Janot),  649-652, 

Bar  [Edouard  III,  duc  de),  33,  42. 

Bar-le-Duc,  216,  511.  — Bar-s.-Aube, 
314.  —  Bar-s. -Seine,  79,  230. 

Barbazan  (Arnaud  Guilhem  de),  33, 
56,  177,  181,  194. 

Barbezieux  de  s.  de).  Voy.  La  Roche 
(J.  de). 

Barbin,  568,  572. 

Barneville,  400. 

Baron  (Guill.),  40,  493.  —  (Tii.),  649-52. 

Barons  français  (les),  160,  161. 

Barrabes  (Thibault  ,  493. 

Barrau  (G.),  30. 

Barrois  (le),  216,  314,  316. 

Bas-Courtils  (combat  des),  137. 

Basin  (Th.),  évêque  de  Lisieux,  255. 

Bastille  ('a"i.  Vov.  Paris. 

Bataille  (Guill.),'21. 

Batailles  :  —  d'Anthon,  194,  197;  — 
d'Aurai.  2;  —  d'Azincourt,  41,  43, 
45,  46,  50,  81,  85,  87,  91,  141,  142, 
165,  251,  257,  412,  449,  490,  494,  498; 

—  de  Baugé,  60,  108  :  —  de  Bul- 
gnéville,  195;  —  de  Castillon,  436; 

—  de  Gravant,  81  ;  —  de  Crécy,  40  ; 

—  de  Formigny,  389,  407,  413,  417, 
418,  420,  466,  469  ;  —  de  Patay,  171- 
72;  —  de  Poitiers,  41;  —  de  Rou- 
vray  (ou  journée  des  Harengs),  164, 


172,  337;  —  de  Saint-Jacques,  351  ; 

de  Verneuil,  81,  82.  Voy.  Combats. 
Batute  (J.  de),  338. 
Baudouin  (Michel),  461. 
Baudry,  secret,  de  Richement,  656. 
Baugé,  60,  108.  Voy.  Batailles. 
Baugiz,  140. 

Bavalen  (Jeanne  de),  479. 
Bavière  (Guillaume  IV  de),  35,  72, 240. 

—  (Isabeau  de)  reine  de  France,  9- 
14,  29,  30,  37,  38,  50,  52,  56,  64,  68, 
75, 129,  233.  —  (Jacqueline  de), com- 
tesse de  Hainaut,  72,  73,  76,  86,  114, 
317.  —  (Louis  de),  29,  34,  38,  483. 
— (Margueritede),  duchesse  de  Bour- 
gogne, 65,  76. 

Bayart  (J.),  389. 

Baveux,  268,  401,  407-416,  614,  623, 
633-39,  644.  —  (L'évêque  de\  401, 
622,  623. 

Bayonne,  336,  337,  366,  431. 

Béarn  (la),  339. 

Beaucaire,  102,  510. 

Beaucamp,  175. 

Beauce  (la),  114,  133,  147,  171,  236, 
243,  334,  530. 

Beauchamp  (Richard),  c.  de  Warvvick, 
114,  123,  128,  134-37,  145,  146,  156, 
272,  279,  293,  300,  527,  531.  —  (Eléo- 
nore),  duchesse  de  Somerset,  420. 

Beauchâtel,  275. 

Baudemont-en-Vexin,  274. 

Beaudricourt  (Robert  de),  315,  316. 

BeaufTremont  (P.  de),  22». 

Beaufort  (Edmond),  comte,  puis  duc 
de  Somerset,  279,  300,  311,  312,392, 
393,  404  et  s.,  418-20,  433,  619.  — 
(Henry),  card. -évêque  de  Winches- 
ter, 114,  134,  175,  199,  201,  225,  228, 
239,  272,  279,  289,  297,  311,  346.  — 
(Jean),  comte,  puis  duc  de  Somerset, 
240, 289,  293,  295,  300,  311,  312,  337, 
343-46.  —  (Thomas\  c.  de  Dorset. 
37,  65. 

Beaugency,  162,  167,  169-72. 

Beaujolais  (le),  12,  22,  291,  342. 

Beaulieu  (Camus  de).  Voy.  Veriset. 

Beaumanoir  (le  bâtard  de),  273.  —  (Le 
sire  de),  12,  79,  85,  123,  127,  166, 
171-73,  183,  184,  500,  514,  578. 

Beauménil  (le  château  de),  326. 

Beaumont-s.-Oise,  212,  213,  323.  — 
Beaumont-le-Roger,  175,  179,  326. 

—  Beaumont-s.-Sarthe,  24, 107,  206, 
344. 

Beaumont  (Alain  de),  24.  —  (André 
de),  178,  181,  182.  — Beaumont  (Tho- 
mas), 243,  244. 

Beaune,  218. 

Beauté-sur-Marne  (château  de),  285. 

Beauvais,  65,  213,  221,  236,  239,  257, 
267,  550,569.—  Beauvaisis  (le),  548. 

Beauvarlet,  607,  654. 


liNDEX   ALPHABETIQUE 


673 


Beauvau  (les),  347,  388,  437.  —  (Ber- 
trand de),  492.  —  (Louis  de),  s.  de 
Précigné,  637. 

Beauvoir-en-Brie,  267. 

Beaux  (Marg.  de),  comtesse  de  Saint- 
Pol,  316. 

Béceleuf,  39. 

Beckington  (Th.),  333,  338. 

Bedford  (Jean  de  Lancastre,  duc  de). 
vu,  7,  63-81,  86-89,  94,  98,  106-109, 
113-116,  121-124,  134,  138,  144-49, 
135,  138,  161,  163,  174-76,  179,  186- 
189,  192  199,  201,  206,  211,  212,  222, 
228-30,  240,  241,  238,  353,  439,  477, 
478,  500-502,  517,  518,  527,  529-32. 

Bégar  (l'abbé  de),  452. 

Bélier  (Guiil.),  151,  157. 

Belknap  (Hamon),  531. 

Bellême,  404. 

Bellenoe  (J.  de),  480. 

Belleville,  217.  —  (Le  s.  de),  voy.  Har- 

PEDENNE  (J.). 

Belloy  (J.  (ie),  245,  251. 

Beluteau  (J.),  192. 

Benard  (Jacob),  525. 

Bénéfices  ecclésiastiques,  101. 

Benoist  (J.  de),  591,  596. 

Benoît  XIII,  73. 

Benoît  (Guill.),  124,  501-503. 

Benon,  181,  184. 

Bergières  (Jacques  de),  245. 

Bernard  (Guy),  435. 

Bernardins  (les),  443. 

Bernay,  311,  413,  644. 

Berry  (le),  22,  36,  91,  94,  101, 143,  139, 
164,  189,  269,  303,  307,  480,  484-89, 
494, 497, 498,  511, 312,  340.  —  (Bonne 
de),  duch.  de  Savoie,  10-14,  75.  — 
(Jean,  duc  de),  vu,  8-11,  13-21,  23- 
33,  33-41,  47,  75,  77,  141,  142,  231, 
455.  —  (Jeanne  de  Boulogne,  duch. 
de),141, 144, 231. —  (Marie  de),  duch. 
de  Bourbon,  10,  31,  87,  88,  663. 

Berthelot,  secret,  de  Richemont,  252, 
464,  604. 

Besancon  (l'archevêque  de),  75. 

Bessin  (le),  221,  407. 

Besson  (Jean),  145. 

Bessonneau  (P.),  maître  de  l'artillerie, 
138,  292,  514. 

Béthencourt,  41,  147. 

Béthune  (Jeanne  de),  comtesse  de  Li- 
gny,  316. 

Beuzeville,  400. 

Biart  (J.),  563. 

Bicêtre,  17,  481.  —  (Château  de),  18, 
21.  —  (Traité  de),  18. 

Bigars  (Guill.  de),  366. 

Bigorre  (le  comté  de),  114. 

Bilet  (secret,  de  Richemont),  386. 

Blanchefort  (le  grand  et  le  petit,  Guv 
et  Jean  de),  213,  214,  283,  293,  300, 
303,303,306,  341,349,331. 

UlCUCMOiNT 


Blanchelaine,  349. 

Blanchet  (Girard),  513.  —  (Jean),  617. 

Blancs  (monnaie),  546. 

Blandin  (H.),  151,  461. 

Biangy, 175. 

Blasphémateurs,  463. 

Bleterans  (Ymbault  de),  322. 

Blois,  163,  167,  173,  212,304-307,  481. 

—  (Comté  de),  22.  Voy.  Penthièvue. 
Blois  (greffier),  492. 
Blondel  (J.),  482. 
Bocage  (le),  151. 
Bohême  (la),  332,  446,  447. 
Bois-Sire-Amé,  439. 
Bonchassy,  631. 
BonilTace  (J.),  637. 
Bonmoulins,  192,  193,  207. 
Bonnay  (le  s.  de),  159,  161. 
Bonport  (l'abbaye  de),  395. 
Boquen  (l'abbaye  de),  389. 
Bordeaux,  331,  333,  336-339,  430,  436. 
Bordelais  (le),  19,  301.  —  (Les),  541. 
Boschier  (P.),  493. 
Bosredon  (L.  de),  129,  498. 
Bouays-Glavy,  284. 
Bouchers  de  Paris  (les),  27. 
Bouchier  (J.),  307. 
Boucicaut  (J.  Le  Meingrc  de),  40,  41, 

47,  51,  436. 
Boulligny  (Rénier  de),  492, 
Boulogne,  141,  237,  479.  —  (Le  comte 

de),  412.  —  (Le  comté  de),  231.  — 

(Jeanne  de),  voy.  Berry  et  La  Tré- 

MOILLE. 

Boulonnais  (le),  348. 

Bourbon-Lancy  (conférences  de)   en 
1427,  p.  129,  528. 

Bourbon  (maison  de),  93,  130.  — 
(Alexandre  et  Guy,  bâtards  de),  187, 
238,  259,  269,  282,  303,  314,  315,  331, 
457.  —  (Charles  de),  comte  de  Cler- 
mont,  puis  duc  de  Bourbon  (Char- 
les I"),  8,  26,  66,87,88, 103,  HO,  111, 
122,  129,131,  144,  149,  130,  153-164. 
177,  193,  209-213,  218-25,  229,  231, 
233  et  s.,  264,  269,  272,  284,  283,  289, 
293-99,  302-308,  312-14,  318,  339,  384, 
474,  492,  526,  533,  336.  332.  577.  — 
Jacques  de),  c.  de  La  Marche,  roi  de 
Sicile,  12,  144,  149,  150,  155,  160, 
197,  271-76,  296,  303,  437,  564.  — 
(Jean  de),  c.  de  La  Marche,  12.  — 
(Jean  P',  duc  de),  10,  13,  16,  18, 23, 
28,  31,  34,  36,  38,  40-42,  31,  66,  87, 
269,  480,  484,  533.  —  (Jean  de),  c.  de 
Clermont,  fils  de  Charles  I",  349, 
353,  355,  397,  406-421,  427,  431,  437, 
630,  631,  635,636,  640,  642.  —  (Louis 
de),  c.  de  Vendôme,  12»  40,  42,  51, 
86  et  s.,  110,  111,  131,  167,  172,  219- 
25,  229,  231,  242,  243,  237,  276,  297 
303,  304,  310,318,  340,  431,  474,  485, 

43 


674 


INDEX   ALPHABETIQUE 


491,  SOS,  S64.  —  (Marguerite,  bà- 1 
tarde  de),  269.  —  (Marie  de),  353. 

Bourbonnais  (le),  94, 193,307,  441,  S74. 

Bourg,  260.  —  (Conférences  de)  en 
1423,  p.  73,  231, 

Bourg-de-Déols,  131. 

Bourgeois  de  Paris  (le),  chroniqueur, 
121,  249. 

Bourges,  19,  22,  23,  28,  33,  36,  50, 
100-103,  132,  133,  143,  154,  159-61, 
189,  214,  219,  220,  260,  263,  304, 
306,  308,  439,  508,  523,  326,  528, 
536,  537,  369,  592.  —  (Assemblées 
de),  103, 280.  (Le  roi  de),  94, 278,  353. 
—  Voy.  Sièges,  Traités. 

Bourgneuf-en-Retz,  309, 328, 386,  452. 

Bourgogne  (la),  66,  73,  88  et  s.,  128, 
129, 173, 195  et  s.,  210,  213,  215,  227, 
240,243,  246,  267,  282,  297,  313,  359, 
442, 466, 541, 338-559. —(La  chancel- 
lerie de),  240, 253.  —  (Le  conseil  de), 
129,  229.  — (La  cour  de),  189.  — (Les 
états  de),  76.  —  (La  maison  de),  66, 
80, 84, 95,  498, 663.  —  (Agnès de), du- 
chesse de  Bourbon,  65, 66, 88, 218.— 
(Anne de),  duchesse  de  Bedford,  63, 
66,  73,  74, 199.  —  (Antoine  de),  duc 
de  Brabant,  35,  42.  —  (Catherine 
de),  30.  —  (Charles  de),  comte  de 
Charolais,  219,  220,  229,  239,  284, 
289,  290,  297.  ^(Charles  de),  c.  de 
Nevers, 231.— (Isabelle  de),comtesse 
de  Penthièvre,  9.  —  (Jean  de),  duc 
de  Brabant,  72, 73,  77.  —  (Jean  sans 
Peur,  duc  de),  5-52,  83,  87,  90,  130, 
141 ,  157,  229,  230,  486,  487,  497,  498, 
193,  594.  —  (Jean  de),  comte  d'Etam- 
pes  et  de  Nevers,  214,  225,  231,  233, 
327,  342, 367,  384,  397,  417,  498,  547- 
550.—  (Marguerite  de),  comtesse  de 
Hainaut,  35,  38,  72.  —  (Marguerite 
de),  duchesse  de  Guyenne,  puis 
comtesse  de  Richemont,  vn,  5,  7, 
8,  28,  38,  veuve  du  dauphin  Louis, 
65  et  s.  ;  épouse  le  c.  de  Richemont, 
73-76),  76,  78,  83,  88,  100,  110- 
114,  132, 141,  130, 131, 135,  157, 164, 
184,  191,  220,  262-264,  268,  277,  280, 
284,  285,  289,  290,  294  (meurt  en 
1442,  p.  329),  330,  461,  462,  465, 
i70,  542,  563,  365,  580,  586-97,  601, 
649,  650.  —  (Marguerite  de),  com- 
tesse de  Hainaut,  35,  38,  72.  — 
(Marie  de),  duchesse  de  Clèves,  317. 
—  (Marie  de),  duchesse  de  Savoie, 
12,  75.  —  (Philippe  le  Bon,  duc  de), 
vn,  7,  8,  38,  52  et  s.,  61-66,  70-88, 
93,  98,  106,  112-163,  175-189,  192- 
202,  206-266,  283-297,  303-333,  342, 
334,  359,  371,  394,  395,  441,  447,  449, 
459,  498,  501-504,  528,  537,  339-541, 
547-o34.  —  (Philippe  le  Hardi,  duc 
de),  2-8,  12,  34,  75,  223,  476,  477, 


497,  592-96.  —  (Philippe  de),  c.  de 
Nevers,  43,  87,  498. 

Bourguignons  (les),  14,  19-22,  26-36, 
39,  48,  50,  94,  98,  141,  173,  235,  237. 
243,  244,  486,  489,  498.  —  (Ambas- 
sadeurs), 200-202,206,  218,  237,  239. 
—  (Capitaines),  243,  246.  —  (Sei- 
gneurs), 227, 396. 

Bournonville  (Enguerrandde),  32-34. 

Bours  (Regnault  de),  167. 

Boussac(le  maréchal  de).  Voy.  Brossk 
(Jean  1"  de). 

Boussac  (le  sire  de).Voy.  BR0ssK(JeanII 
de). 

Boutillier  (J.),  413,  629,  630. 

Bouzon  de  Failles,  284. 

Boves,  548. 

Boyleaue,  649. 

Brabançons(les),17.— Brabant(le),348. 

Bracque  (Bernard),  252.  —  (Jeanne), 
voy.  Saligny. 

Braisne,  260. 

Branch(H.^,147, 172.  — (Philippe),  118. 

Bray  (sur  Seine),  270,  272, 273.  —  (sur 
Somme),  348. 

Bray  (le  pays  de),  238. 

Brécart(Àrtur,  gendre  deRichemont). 
236,436,  461,  646-48. 

Bréhal  (J.),  443. 

Bréhat  (île  de),  12,  59,  436,  646-48. 

Bresse,  88. 

Brest,  434. 

Bretagne  (la),  4  et  s.,  10,  18,  24,  26, 
50,  39,  62  et  s.,  80-89,  93-101,  107- 
112,  116-128,  131  et  s.,  148  et  s., 
163-66,  173  et  s.,  183,  185, 190  et  s.. 
208  et  s.,  239,  255,  279,  299  et  s., 
309, 318,322-329,  332,  339-347, 378-98, 
401,  402,  424  et  s.,  435,  436,  446-453, 
465,  466,  476-81,  495-99,  511,  512, 
331,  542-43,  381, 585,  603,  620, 646.  — 
(Les  ambassadeurs  et  envoyés  de), 
196,  202,  218,  393,  403,  469.  —  (L'ar- 
tillerie de),  376.  —  (Le  ban  et 
l'arrière-ban  de),  117.  —  (Les  ba- 
rons de),  394,  395.  —  Le  chancelier 
de),  296,  405.  —  (Les  compagnies 
d'ordonnance  de),  376.  —  (Le  con- 
seil du  duc  de),  396,  397,  406.  —  (La 
cour  de),  379,  461.  —  (Les  ducs 
de),  447,  477,  478.  —  (Les  Etats  de), 
3,  54,  61,  62  et  s.,  71,  72,  84,  110, 
148,  383,  384,  425,  430,  440,  445,  448, 
476.  —  (Les  francs  archers  de), 
375,  376,  429,  443,  446.  —  Bretagne 
(la  maison  de),  29,  66,  80,  179,  333, 
383,  439,  463,  660.  — (Anne  de),  fille 
de  Jean  V,  26.  —  Artur  IH  (c.  de 
Richemont,  connét.  de  Fr.,  duc  de), 
né  en  1393,  p.  1  ;  c.  de  Richemont, 
3;  condiiit  en  France  et  en  Flandre, 
3,6;conIiéau  ducdeBerry,  8;  com- 
prime une  révolte  à  Saint-Brieuc. 


INDEX  ALPHABETIQUE 


67S 


10;  entre  dans  le  parti  armagnac, 
10  et  s.;  prend  Saint-Denis,  20;  va 
recevoir  les  Anglais,  25;  placé  au- 
près du  dauphin  Louis ,  duc  de 
Guyenne,  28;  retenu  au  service  du 
roi,  30;  lieutenant  du  Dauphin,  33, 
gouverneur  du  duché  de  Nennours, 
36,  37;  lieutenant  de  la  Bastille,  38; 
reçoit  les  domaines  de  J.  Larche- 
vêque,  39;  capitaine  général,  40; 
combat  J.  Larchevêque,  40;  blessé 
et  pris  à  Azincourt,  42  ;  captif  en 
Angleterre,  45-37;  remis  en  liberté 
sur  parole,  37  et  s.  ;  s'attache  à 
Henri  V,  qui  lui  donne  le  comté 
d'Ivry,  60;  amène  des  troupes  à 
Henri  V,  63;  détermine  Jean  V  à 
jurer  le  traité  de  Troyes,  62-68; 
épouèe  Marg.  de  Bourgogne,  du- 
chesse de  Guyenne,  75;  s'entend 
avec  Yolande,  belle-mère  de  Char- 
les VIT,  77;  rompt  avec  Bedford, 
79, 80  ;  se  rapproche  de  Charles  VH, 
82-86;  essaye  de  réconcilier  Char- 
les VII  et  Philippe  le  Bon,  86-88  ; 
transige  avec  les  favoris  de  Char- 
les VII,  89,  90;  reçoit  l'épée  de  con- 
nétable, 90-92;  arrête  son  plan,  93; 
combat  et  écarte  Louvet,  98-103  ; 
prend  le  pouvoir,  104;  procure  à 
Charles  VII  l'alliance  de  la  Breta- 
gne, 109-112;  échoue  à  Saint-James- 
de-Beuvron,  118-120;  essaye  de  di- 
riger Charles  VII,  125-127  ;  fait  périr 
P.  de  Giac,  129-133;  ne  secourt  pas 
Pontorson,  134  et  s.;  se  débarrasse 
de  Beaulieu,  qu'il  remplace  par  La 
Trémoille,  140-141;  est  obligé  de 
lutter  contre  La  Trémoille,  qui  veut 
l'éloigner,  143  et  s.  ;  envoie  des  se- 
cours à  Montargis,  145-147;  ne  peut 
empêcher  la  défection  de  Jean  V, 
147;  forme  une  ligue  contre  La  Tré- 
moille, 149;  hérite  de  la  seigneurie 
de  Parthenay,  151;  se  défend  con- 
tre La  Trémoille,  dans  le  Poitou, 
154;  fait  appel  au  pays,  156;  mar- 
che contre  La  Trémoille  et  échoue 
devant  Bourges,  160  et  s.;  est  sou- 
tenu vainement  par  les  Etats  gén. 
de  Chinon,  163;  se  retire  en  Bre- 
tagne, puis  à  Parthenay,  163  ;  se 
joint  à  J. d'Arc,  malgré  Charles  VII, 
I6i  et  s.;  prend  part  à  la  bat.  de 
Patay,  170  et  s.  ;  est  obligé  de  quit- 
ter J.  d'Arc  et  va  combattre  les 
Anglais  en  Normandie,  173,  174; 
entre  en  pourparlers  avec  La  Tré- 
moille, qui  fait  arrêter  ses  envoyés, 
L.  d'Amboise,  etc.,  178  et  s.;  con- 
tinue de  guerroyer  contre  La  Tré- 
moille, 182  et  s.  ;  réconcilie  Jean  V 
et  le  duc  d'Alençon,  183  et  s.;  con- 


clut le  traité  de  Rennes  avec  Char- 
les VII  (mars  li32),  p.  188ets.,mais 
reste  en  disgrâce,  192;  perd  Mon- 
targis, 193;  travaille  à  réconcilier 
Philippe  le  Bon  avec  Charles  VU, 
196  et  s.;  renverse  La  Trémoille, 
200-203;  marche  contre  les  Anglais 
(journée  de  Sillé),  207  et  s.;  rentre 
à  la  cour,  209;  va  aux  Etats  de 
Vienne,  210-211;  fait  une  expédi- 
tion dans  la  Picardie,  la  Champagne 
et  le  Barrois,  212-215;  oblige  R.  de 
Sarrebriick  à  se  soumettre  à  René 
d'Anjou,  215;  prépare,  aux  confé- 
rences de  Nevers,  la  réconciliation 
de  Philippe  le  Bon  avec  Charles  VII, 
217-219  ;  est  envoyé  au  congrès  d'Ar- 
ras,  où  il  fait  conclure  la  paix  en- 
tre Charles  VIT  et  Philippe  le  Bon 
(20  septembre  1435),  p.  222-234;  ne 
peut  empêcher  la  prise  de  Saint- 
Denis,  235-236;  envoie  le  marée, 
de  Rieux  dans  le  pays  de  Caux, 
236;  fait  évacuer  les  places  cédées 
au  duc  de  Bourgogne  et  ratifier  le 
traité  d'Arras,  237-38;  prépare  la 
réduction  de  Paris,  241  et  s.  ;  bat 
les  Anglais  à  Epinay,  244;  entre 
dans  Paris,  247  et  s.;  veut  recou- 
vrir toute  l'Ile-de-France,  254  et  s.  ; 
négocie  la  délivrance  de  René  d'An- 
jou, 257  et  265;  traque  les  routiers, 
258  ;  ramène  le  parlement  à  Paris, 
260-264;  poursuit  G.  de  Flavy,  265; 
enlève  Malesherbes,  Charny,  Châ- 
teau-Landon  et  Nemours  aux  x\n- 
glais,  268-69;  perd  sa  mère,  271-72; 
assiège  et  prend  Monlereau,  avec 
le  roi,  273-75  ;  ramène  Charles  VII 
à  Paris,  276  et  s.;  va  en  Bretagne 
et  revient  à  Paris,  279;  tente  vai- 
nement de  reprendre  Pontoise,  281  ; 
continue  de  poursuivre  les  rou- 
tiers et  commence  la  réforme  de 
l'armée,  282-84  ;  quitte  Paris  pen- 
dant une  épidémie  et  va  en  Lor- 
raine, 285-86;  ne  peut  chasser  les 
Anglais  des  environs  de  Paris,  286; 
est  accusé  d'incapacité  et  de  trahi- 
son, 286-289;  se  décourage  et  veut 
se  démettre,  290-91;  reçoit  des  ren- 
forts, 291-92  ;  assiège  et  prend 
Meaux,  292-95;  va  aux  Etats  d'Or- 
léans et  obtient  l'ordonnance  du 
2  novembre  1439  sur  la  réformje  de 
l'armée,  296-99;  éprouve  les  plus 
grandes  difficultés  à  faire  exécuter 
l'ordonnance,  299;  échoue  au  siège 
d'Avranches,  par  le  mauvais  vou- 
loir des  troupes,  299-301;  réprime 
énergiquement  la  Praguerie,  avec 
le  roi,  302-308;  conclut  un  arran- 
gement avec  Jean  V,  309;  va  châ- 


676 


INDEX   ALPHABETIQUE 


tier  les  Écorcheurs  en  Champagne 
et  en  Lorraine,  314-316;  prend 
Creil,  319  ;  assiège  et  prend  Pon- 
toise,  320-26;  retourne  en  Bretagne, 
321-28;  perd  sa  femme,  la  duchesse 
de  Guyenne,  329-330;  accompagne 
le  roi  dans  l'expédition  de  Guyenne 
et  de  Gascogne,  330  et  s.  ;  épouse 
Jeanne  d'Albret,  338;  perd  son 
frère,  Jean  V,  339;  continue  les 
réformes  militaires  et  la  guerre 
contre  les  Anglais,  341  et  s.  ;  amène 
son  neveu,  François  !«',  à  Tours, 
où  une  trêve  est  conclue  avec  l'An- 
gleterre, 346-48;  accompagne  Char- 
les VII  dans  l'expédition  de  Lor- 
raine ,  349-51  ;  perd  sa  seconde 
femme,  J.  d'Albret,  et  épouse  Ca- 
therine de  Luxembourg,  352;  con- 
tinue la  réforme  de  l'armée,  354  et 
s.  ;  licencie  les  anciennes  compa- 
gnies, 359  et  s.  ;  coopère  à  l'orga- 
nisation des  francs-archers,  371  et 
s.,  375  ;  s'efforce  de  protéger  Gilles 
de  Bretagne  contre  François  I'"', 
377  et  s.;  triomphe  dans  un  diffé- 
rend avec  le  comte  de  Nevers,  384; 
réconcilie  le  duc  de  Bretagne  avec 
Ch.  de  Blois,  386;  adhère  à  une 
ligue  avec  Charles  Vil  et  Fran- 
çois Pr,  après  la  prise  de  Fougères 
par  les  Anglais,  387;  ne  peut  sauver 
son  neveu  Gilles  de  Bretagne,  388- 
390  ;  recommence  la  guerre  avec  les 
Anglais  et  fait  capituler  Le  Mans, 
392-93;  entreprend,  avec  François!" 
la  conquête  de  la  basse  Normandie, 
395  et  s.  ;  fait  capituler  Coutances, 
Saint-Lo,  Carentan,  Gavray,  Fou- 
gères, 399-403;  marche  contre  Th. 
Kyriel,  406  et  s.  ;  gagne  la  bataille 
de  Formigny,  408-412  ;  fait  capituler 
Vire  et  Avranches,  412-415;  contri- 
bue à  la  prise  de  Caen,  416  et  s.  ; 
fait  capituler  Cherbourg,  421  ;  reçoit 
le  gouvernement  de  la  Normandie, 
424  ;  est  déclaré  héritier  de  la  Bre- 
tagne, 425;  poursuit  les  meurtriers 
de  Gilles,  428-430;  retourne  en  Nor- 
mandie, 432  et  s.  ;  fait  écarter  les 
réclamations  du  roi  d'Ecosse  rela- 
tives à  la  succession  de  Bretagne, 
434-36,  et  approuver  par  Charles  VII 
l'ordre  de  succession  fixé  par  le 
duc  François  P',  429-440  ;  est  chargé 
d'une  importante  mission  en  Sa- 
voie, 440;  essaye  de  sauver  le  duc 
d'Alençon,  441-42;  apaise,  à  Paris, 
une  querelle  entre  les  ordres  men- 
diants et  l'Université,  442-444;  de- 
vient duc  de  Bretagne  (Artur  III), 
444;  se  rend  à  la  cour  de  France, 
où  il  a  qq.  différends  avec  Char- 


les VII,  448;  obtient  la  grâce  du 
duc  d'Alençon,  449;  rend  hommage 
à  Charles  Vil,  449-50;  engage  une 
vive  querelle  avec  l'évèque  de  Nan- 
tes, 451-52;  meurt  en  1458,  p.  453. 
Caractère  ,  goûts  et  mœurs  de  Ri- 
chemont,  454  et  s.  Ses  officiers  et  ses 
serviteurs,  461.  Appréciation  de  son 
rôle  et  conclusion,  464-67.  Juge- 
gements  sur  Richeniont,  472.  Voy. 
aussi ,  sur  Ricbemont  ,  les  pièces 
justificatives,  p.  469-494,  498-517, 
520-29,  533,  536,  537,  540-47,  550- 
553,  556-58,  560-70,  576-84;  594- 
605,  609,  610,  616-618,  621-26,  628- 
31,  633-656. 
Bretagne  (suite).  —  (Blanche  de), 
comtesse  d'Armagnac,  10,  332.  — 
(François  I^f,  c.  de  Montfort,  due 
de),  48,  54,  88,  148,  176,  183,  186, 
263,  266,  327,  328,  335,  339,  340,  344- 
47,  353,  377,  378-89,  391-400,  402-406- 
413-15,   422-28,    430,   432,  435,  439, 

440,  444,  456,  499,  584-86,  620-22, 
626-28,  647,  648.  Ses  ambassadeurs,. 
627.  Ses  conseillers,  384.  —  (Fran- 
çois II,  c.  d'Etampes  et  de  Vertus, 
âue  de),  222,  327,  397,  403,  425, 
432,  436,  439,  440,  444,  445,  449, 
450-53,  498.  —  (Gilles  de),  fils  de 
Jean  IV,  3-10,  13,  14,  17,  19,  23,  24^ 
26,  479,  480.  —  (Gilles  de),  fils  de 
Jean  V,  190,  272,  279,  340,  341, 
346,  377-91,  406,  413-415,  426,  428- 
30,  445.  —  (Isabelle  de),  comtesse- 
de  Laval,  48,  49,  85,  86,  109,  179, 

340,  438.  —  (Isabelle  de),  fille  de 
Richard,  284. —  (Jacqueline,  bâtarde 
de),  fille  d'Artur  III,  456,  646-48.  — 
(Jean  III,  duc  de),  42,  425.  —  (Jean 
de  Montfort,  prétendant  à  la  suce. 
de),  2,  53.  —  (Jean  IV,  duc  de),  1-4, 

271,  284,  476-78.  —  (Jean  V,  duc 
de),  .3-15,  18.  19,  22-29,  37,  40,  43, 
46,  49-89,  95-100,  106-109,  111,  114- 
117,  121-24,  128,  134-38,  148,  155, 
156,  163-66,  176-80,  183-92,  197,  202, 
205,  206,  218,  239,  262,  263,  269,  270, 

272,  284,  289,  295-299,  303,  306,  309, 
310,   318,   327,  328,  332,  333,   339, 

341,  375,  377.  382,  385,  386,  424-26, 
434,  438,  450,  451,  456,  461,  469,  476- 
481,  487,  490,  494-500,  502-507,  513, 
515,  526,  528,  531,  533,  538-45,  580, 
581,  585.  586,  595.  Ses  officiers,  543. 
Ses  sujets,  543,  545.  —  (Jeanne, 
bâtarde  de),  fille  nat.  de  Pierre  II, 

441.  —  (Marguerite,  comtesse  d'E- 
tampes, duch.  de),  424,  425,  430, 
431,  434,  435.  439,  440.  —  (Marie 
de),  duch.  d'Alençon,  3,  165,  185, 
479.  — (Marie  de),  femme  de  P.  de 
Rieux,  184,  397,  450.  -  (Marie  de). 


INDEX  ALPHABETIQUE 


677 


■vicomtesse  de  Rohan,  424,  425,  430, 
431,  434,  435,  439.  —  (Pierre  IT,  duc 
de),  54,  163,  183,  184,  191,  279,295, 
296,  327,  328,  335,  340,  341,376,  383, 
397,  402,  414,  424-32,  434-36,  439, 
440,  442,  444,  445,  448,  451,  490-93, 
343,  584,  585.  —  (Richard  de),  c. 
d'Etampes,  3,  13.  26,47,  49,  51,  53, 
59,  61,  62,  65,  76,  77,  101,  105,  108, 
110,  H7.  128,  lis,  155, 179,  180,  184, 
187-190,  206,  222,  279,  284,  327,  384, 
423,  439,  451,  457,  470,  479,  494-98, 
507,  511,  312,  544,  347.  Sa  fille, 
208.  —  (Tanguv,  bâtard  de),  382, 
383,  397.  —  (Les  marches  de),  240. 

—  (Le  maréchal  de),  415,  417,  420. 

—  (La  noblesse,  les  nobles  de),  429. 
444,  473,  497.  —  (Le  parti  français 
de),  166.  222,  263,  344,  389.  —  (Les 
prélats  de),  445.  —  (La  succession 
de),  425,  426,  430,  431,  433,  439,  440, 
444    439. 

Breteîiil,  214,  213,  549. 

Breton  (Guill.),  207. 

Bretonne  (Armée),  100,  118,  121,  133, 
136,  187, 274,  393-98,  404,  414, 415.  — 
(Flotte),  436.—  Bretons  (les),  9,  12, 
14,  17,  19-21,  34,  36,  46,  30,  61,  62, 
71,  96,  110,  119,  123,  167.  187,  188, 
200,  286,  306,  310,  327,  335,  336,  344, 
349,  350,  380,  419,  427,  431,  436,  432, 
463,  472,  479,  497,  338,  569,  636.  — 
(Les  marins),  138.  —  (Les  princes), 
387. 

Bretons  (monnaie),  346. 

Brézé  (Jean  de),  221,  312.  —  (Pierre 
de),  seigneur  de  La  Varenne,  grand 
sénéchal,  199,  200,  203,  208,  273, 
298,  306,  307,  312,  320,  326,  335,  340, 
344,  347,  349-51,  353-56,  366,  367, 
381  et  s.,  392,  397,  406-411,  417,  424, 
427,  428,  434,  452,  459,  467,  613,  644. 

Brichan*eau  (le  sire  de),  249. 

Brie  (la),  114,  179,  242,  243,  235,  268, 
603. 

Brie-Gomte-Robert,  241, 295, 308,  361. 

Briffaut  (Nie),  114,  502. 

Brimeu  (Fiorimond  de),  258. 

Briouze  (la  seigneurie  de),  418. 

Briquebec,  402,  416,  628,  634.  —  (Jean 
de),  396. 

Broon  (Olivier  de),  294,  345,  366,  396, 
401,  406,  416,  614. 

Broquarl  (Sandres),  628,  629. 

Brosse  (Jean  I^'  de),  s.  de  Boussac  et 
de  Sainte-Sévère,  mar.  de  Fr.,  136, 
140,  141,  150,  164,  167,  195,  273, 
410,  464.  —  (Jean  II  de),  s.  de  Bous- 
sac,  puis  c.  de  Penthièvre,  407,  410, 
414,  413.  417,  426,  445. 

Bruges,  115,  139,  141,. 142,  242,  '261, 

Brunet,  657.  — (P.),  232. 

Brusac  (Gauthier  de),  145, 188,  238. 


Bruyères-sous-Laon,  214, 549. 

Bruz,  435. 

Buchan  (le  c.  de),  60,  61,  76,  81. 

Buchon  (J.),  446,  458. 

Buckingham  (le  c.  de),  379. 

Bude,  492,  514,566. 

Budes  (Jean),  porte-étendard  de  Riche- 
mont,  294,  410,  461,  465,578  80,658. 

Bueil  (Anne  de),  198. —  (Jean  de),  ami- 
ral, 146,  197,  198,  200,  201,  203,  207- 
209,  220,  240,  242,  263,  320,  322,  323, 
342.  344,  349,  363-67,  397,  417,  421, 
437,464,492,614.  —  (Louis  de),  282, 
300,  344,  501. 

Buignéville,  195.  Voy.  Batailles. 

Burdelot,  584. 

Burdet  (Nie.)  118,  119,  322,  323,  326. 

Bureau  (les  frères\  298,  418.  —  (Gas- 
pard), 392,  404,'  418,  420,  421,  434, 
514,  637-40,  645.  —  (Jean),  273,  292, 
293,  315,  319,  321,  325,  349,  330,  367, 
418,  420,  467,642. 

Burgh  (Th.),  123,  134. 

Burton  (Th.),  47,  51. 

Buzançais  (traité  de),  27. 


Gaboulet(J.),464. 

Gadart  (J.),  99, 102,  230,  310. 

Gade  (John),  418. 

Gaen,  30,  177,  193,  207,  221,  240,  268, 
293,  333,  373,  403,  411-420,  424,  432- 
39,  438,  469,  482,  346,  563,  644,  646, 
653.  — L'abbaye  d'Ardenne,  à  Gaen, 
417.  —  L'abbaye  de  Saint-Etienne, 
417,  418,  439.  —  L'abbaye  de  la  Tri- 
nité, 417.  —  (Le  bailli  de),  632,  641, 
643,645.—  (Le  bailliage  de),  645.  — 
Le  faubourg  Saint-Gilles,  417.  —  Le 
faubourg  de  Vaucelles,  417,  419.  — 
(La  vicomte  de),  413,  417.  —  (Le 
vicomte  de),  639.  —  Voy.  Sièges. 

Caille  (le  rubis  de  la),  29. 

Galais,  19,  40,  41,  45,  62,  86,  166,  205, 
206,  234,  240,  257-59,  266,  272,  275, 
289,  437,  581,  582. 

Calixte  III,  443,  452. 

Cambout(J.  de),  m.  d'hôtel  de  Riche- 
mont,  33,  36. 

Cambrai, 223,  548.—  Cambraisis  (le), 
548. 

Cambray  (Adam  de),  54,  223,  509,  569, 
573,  580,  603. 

Gamu  (H.),  72. 

Camus  de  Vernet  (dit  de  Beaulieu), 
133,  139-141,  437. 

Cannelande  (Colin),  621. 

Canny,  372. 

Gantorbéry,  272, 

Capitaines  français  (les),  301. 

Capitaines  (de  francs-archers).  645;  — 
(de  gens  d'armes),  97, 113,  261,  264, 


678 


INDEX  ALPHABETIQUE 


283,  298,  299,  301,  304,  341,  371,  497, 
566,567,575, 576,607-609, 613-15, 646. 

Carcassonne,  497. 

Cardinaux  (les),  224, 226,  229,  232,  239. 

Carenlan,  398,  400,  401,  405-408,  416, 
420,  424,  434,  436,  624,  630,  639,  644. 

—  (Le  curé  de),  407. 
Garhaix,  386. 

Carné  (Roland  de),  318. 

Gardinet  le  Frère,  382. 

Carquefou  (la  lande  de),  186. 

Cassinel(Guill.),39.  -  Cassinelle(Lai,39. 

Casteljaloux.  339. 

Castelnau  (J.  de),  573. 

Castille  (la),  82,  116, 122, 158,  221,  255, 
341.  —  (Jean  II,  roi  de),  76,  122,  146, 
148,  395,  530,  621. 

Castillanes  (troupes),  122,  138. 

Castillon  (bataille  de),  436.  — (Brande 
de),  623.  —  (Guill.  de),  623. 

Cateau-Cambrésis,  317. 

Catuyt  (J  ),  valet  de  ch,  de  Riche- 
mont,  47. 

Cauchois  (les),  236. 

Cauchon(P.),évêquedeBeauvais,puis 
de  Lisieux,  65,  71,  228,  251. 

Caudebec,  241,  311,  333,  346,  392,  434. 

Cauna,  335. 

Caux  (le  pays  de),  148, 193, 206, 221,236, 
239,  241,  256-58,  279,  289,  299,  342, 
343,  432,  438,  568,  569,  571.  —  (Le 
bailli  de),  643,  645. 

Cévennes  (les),  197. 

Chabannes  (les),  282.  —  (Antoine  de), 
c.  de  Dammartin,  238,  263,  285,  293, 
300  et  s.,  314,  315,  320,  334,  335,  349, 
441,  442.  —  (Jacques  de),  273,  284, 
285,  303,  308,  312,  371,  406,414,  417, 
419. 

Chailloué,  192,  193. 

Chailly  (Denis  de),  128,  250,  267,  273, 
292,  294,  317,  359. 

Ghalancon  (Armand  de),  159.  —  (Guill. 
de),  159.  —  (Louis  de),  134,  140,  159, 
5,26   528. 

Chaligant.'en,  633,  640. 

Chalon-s. -Saône,  265.  —  (Conférences 
de)  en  1423,  p.  76-79. 

Chalon  (Guil.  de),  284.  —  (Hugues  de), 
c.  de  Tonnerre,  130.  —  (Jean  de , 
prince  d'Orange,  20,  194.  —  (Jean 
de),  bâtard  de  tonnerre,  657.  — 
(Jeanne  de),  290,  487.  —  (Louis  de), 
prince  d'Orange,  194,  195,  284.  — 
(Louis  de),  c.   de  Tonnerre,    487. 

—  (Marguerite  de),  487. 
Châlons-s.-Marne,  214-16, 273,352, 353, 

361,  456,  552. 
Ghambéry,  211.  —  (Conférences  de) 

en  1424,  p.  84. 
Chambon,  307. 

Chambrelan  (Guill.  de),  268,  295. 
Ghambrois  (Broglie),  258,  311. 


Champagne  (la),  81,94,  114,  128,  139, 
157,  162,  174, 177,  179,  206,  214,  219, 
237,  242,  243,  255,  259,  265,  281,  282, 
291, 313-17, 349, 482, 605.-(Lecomte 
de),  292. 

Champeaux  (Guill.  de),  262,  331. 

Champtocé,  179,  180,  378,  385,  426, 
445.  —  (Entrevue  de)  en  1431 ,  p.  180. 

Champtoceaux,  53,  103. 

Chandos  (J.),  2. 

Channay  (secret,  de  Richement),  516. 

Ghantecoq,  482. 

Chanteloup,  399. 

Chantereine  (château  àe\  229. 

Chantilly,  261,  561. 

Chapelle  (le  bâtard),  239,  292 

Chappes,  194.  —  (Thomas),  461. 

Charente  (la)  330,  541. 

Charenton,  241,  249,  250,  266,  285. 

Charles  (Simon),  334. 

Charlieu,  337. 

Gharny,  270,  271. 

Charolais  (le),  209,  210. 

Charpaigne.  Voy.  Gouoes  (Martin), 

Charrier  (Guill.),  517. 

Charroux,  307. 

Chars,  268. 

Chartier  (Alain),  115.  —  (Jean),  133, 
140,  169,  265,  277. 

Chartrain  (le  pavs),  114,  138,  530. 

Chartres,  117,  178,  193,  312,  370,  433, 
529.  —  (Le  bailli  de), 604.  —  (L'évê- 
que  de),  88.  —  (Traité  de),  12. 

Chartres  (Regnault  de),  chancelier  de 
France,  8S,  90,  100.  144,  157,  173, 
203,  212,  213,  215,218,  220,  223,  231, 
243,  263,  264-67,  286,  297,  347,  505, 
510,  552,  557,  568-70. 

Chartreux  (près  de  Dijon),  230;  —  (de 
Montereau),  230;  —  (de  Nantes), 
380,  453,  454:  —  (près  de  Paris  , 
247,  589.  —  (Le  prieur  des),  290. 

Chaslel-Girard,  291. 

Chastelain  (G.  ,  352. 

Chastenier  (J.),  492. 

Châteaubriant,  187,  188,  —  (Le  sire 
de),  85,410. 

Châleaii-du-Loir,  424. 

Château-Gaillard,  175,  177,  404. 

Châteaugiron  (Armel  de),  9,  24,  480. 
—  (Guillaume  de),  462,  658.  —  (Jean 
de),  secret,  et  argentier  de  Riche- 
mont,  33,  36,  85,  104,  461,  478,  499, 
501,515,516,  658.— (Le  seigneur  de), 
42,  137.  Voy.  Errata. 

Château-Gontier,  187,  263,  325, 344. 

Château-Guyon,  268. 

Château-Lahdon,  271. 

Châleaulin-sur-Trieux,  67. 

Châteauneuf-en-Thimerais,  147. 

Châteauronx,.318. 

Châteauvillaiu  (le  s.  de),  199,  209,  211, 
217. 


INDEX   ALPHABETIQUE 


679 


Chàtel-Saint-Germaiu,  350. 

Châtelaillon,  39,  49, 154,  184, 185. 100, 
212,  220,  489,  493,  542. 

Châtelains,  373. 

Chàtelaudren,  67. 

Châtellenies,  373. 

Ghâtellerault,  104,  149,  150,  601. 

Châtillon  (le  s    de),  294. 

Châlillon,  526.  —  (sur-Indre),  181, 
269.  —  (sur-Sèvre),  181-85, 191.  Voy. 
Macléon. 

Uhauconin,  292. 

Chaulnes,  548. 

Chaumont  (Guill.  de),  s.  de  Guitry, 
145,  168,  198.  —  (Le  s.  de),  voy. 
Amboise  (P.  d'). 

Chaumont,    316.    —   (La-Guiche), 
217.  —  (en-Vexin),  333. 

Chaunv,  213,548. 

Chauvency,  259,  286. 

Chauvigny,  150,  521. 

Chauvin  (J.),  461. 

Chénerv,  ou  Chéverv  (J.  de),  72,  97, 
106.  124,  125, 154,  500,  502,  572. 

Cherbourg,  175,  300,  343,  405,  415, 
416,  420,  421,  424,  434,  438,  469,  482, 
581,  582,  614,  628,  634,  644. 

Cheux,  416,  417. 

Chevalier  (Elienne"),  secret,  de  Riche- 
mont,  126,  298,  329,  388,  461,  465, 
522,  526,  552,  557,  595,  642. 

Chevreuse,  249,  268,  278,  280,  566. 

Chevrier  (J.),  610. 

Chichester  (l'évêque  de),  403. 

Ghinon,  50,  84,  86,  89,  90,  100,  111, 
113,121.  150,  151,  155, 157,  162,  163, 
167,  200,  â20,  240.  327,  380,  384,  395, 
457,  506,  520,  533,  537.  539.  -  (Châ- 
tellenie  de),  162. 

Chiswail  (Th.),  416. 

Chizé,  23,  340,  565. 

Chypre  (le  cardinal  de).  Voy.  Lusignan 
(Hugues  de). 

Cidrac  (P.  de),  563. 

Cissé  (Guichart  de),  347. 

Civray,  307,  340,  565. 

Clain  (le),  140. 

Clamorgan  (Uob.),  373. 

Clarence  (Thomas,  duc  de),  25,  27, 60. 

—  (Lionel,  duc  de),  258. 
Claveurier  (.M.),  610. 
Clergé  (le),  101. 

Clermont,  307. —  (en  Beauvaisis),212. 

—  (Jacques  de),  358.  —  (L'évêque 
de),  90,  104,  149,  564. 

Cleux  (Olivier  de),  186. 

Clèves  (Adolphe  il,  duc  de),  317.  — 

(Marie  de),  duch.  d'Orléan.s,  317. 
Clignel  de  Brebant  (l'amiral),  33,  42, 

61,  80. 
Clinton,  323,  324. 
Clisson  (Bcatrixde),10.  —  (Marguerite 

de),  comtesse  de  P.enthièvre,  2,  3, 


15,  102, 103.  —(Olivier  de),  connét. 
de  Fr.,  vii,  2-5,  10,  96,  476,  504. 

Coaynon  (Alain),  186,  545. 

Coëlivy  (les),  464.  —  (Alain  de),  192. 
252.— (Christophède),  436.  — (Guill. 
de),  342.  —  (Olivier  de),  192,  239. 
294,  295,  309,  426,  431.  —  (Prigenl 
de),  185, 191,  192.  198,  200,  203,  208, 
296,  306,  307,  315,  319  et  s.,  325,  330, 
335,  349,  378  et  s.,  381-88,  392,  394, 
399.  401,  405,408-411,  414  et  s.,  431, 
544;  604,  624,  628. 

Coetlogon,  445. 

Coelquen  (Jean  de),  42,  117. 

Coetquis  (Phii.  de),  178. 

Cœur  (Jacques^  261,  298,  394,  405, 
417,  437. 

Coglais  (G  ),  480. 

Cognac,  394. 

Coinces,  171. 

Colin  (J.),  637. 

Cologne,  75.  —  (L'archevêque  de),  220. 

Colombières,  400. 

Combarel  (Hugues  de),  130. 

Combats,  —  des  Bas-Courlils,  137; 

—  de  Chappes,  194;  —  d'Epinay, 
244  ;  —  de  Gerberoy,  221  ;  —  de  La 
Broussinière,  96;  —  de  Vivoin,  206. 

Gomhorn  (J.  de),  s.  de  Trignac,  100, 
104,  192. 

Conibour  (le  s.  de),  20,  21. 

Commercy,  215,  216,  319.  —  (Le  da- 
moiseau de),  voy.  Sarrebruck  (Ro- 
bert de). 

Comminfies  (le  comte  de),  110,  111, 
130,  131,  139,  217.  —  (Le  comté  de), 
353.  —  (Marguerite  dej,  333. 

Communautés  (les),  443. 

Communes  (les  gens  des),  98, 372,  417, 
568.  —  (Milice  des),  98. 

Compagnies  (les),  301,  341,  345,  610. 

—  (Les  chefs  de),  356,  357  ;  —  (d'or- 
donnance), voy.  Armée. 

Compiègne,  33,  48,  117,  212,  237,  260 
et  s.,  283, 305,  319,  320, 347, 547, 550, 
567,  568,  573.  —  (Sièges  de),  33,  194. 

Comptes  (la  Chambre  des),  241,  245. 
246, 252, 256, 263, 264  ;  —  (de  Rouen) , 
292.  —  (Les  gens  des),  484,  308,  537, 
563,  600,  604,  625,  629-31,  638,  643. 

Conac  (le  s.  de),  335. 

Couches,  175,  312,  314,  322,  326,  333, 
342,  343,  394. 

Condé-sur-Noireau,  404,  639. 

Cmdom,  338. 

Conflans  (près  de  Metz),  350.  —  (Saiale- 
Honorine),  248,  322-25.  —  (Girard 
de),  329,  595,  .596. 

Connétable  de  France  (pouvoirs  du'), 
96,  504,  505,  575,  577. 

Connétablerie  (la),  503,  504,  540. 

Conseillers  (les  généraux)  sur  le  fait 
des  finances,  508,  565,  613,  617. 


680 


INDEX  ALPHABETIQUE 


Constantinople,  353,  437,  447. 

Conteville  (J.  de),  464. 

Contiogents  militaires,  372. 

Corbeii,  109,  114,  156,  158,  172,  196, 
199,  241,  250,  261,  264,  276,  282  et 
s.,  303,  307-309,  313,  359,  561,  573. 
—  (Traité  de),  57,  58,  60. 

Corbie,  226,  230,  240,  548. 

Gordelle  (Robert),  579. 

Cornouailles,  452. 

Cosne,  26,  65,  66. 

Cotentin  (le),  25,  50,  207,  221, 240,  241, 
343,  345,  389,  397-99,  401-404,  414 
et  s.,  420,  429,  434,  464.  —  (Le  bailli 
du),  625,  628,  629,  631,  632,  641.  — 
(Le  bailliage  du),  645.  —  (Le  clos 
du),  401,  644. 

Coulanges-la-Vineuse,  219. 

Gouldray(lechâteaudu),àChinon,200. 

Coulonces  (le  baron  de).  Voy.  La  Haye 
(de). 

Courcelles  (Thomas  de),  228. 

Cours  souveraines  (les),  260,  264. 

Courtenay,  482. 

Courtisans  (les),  466,  467. 

Courville,  342,  343. 

Cousinot  (Guill.),  383,  429. 

Coutances,  343,  390,  399-402,  404-406, 
415,  626et  s.,  654.  — (Le  diocèsede), 
629.  —  (Le vicomte  de),  626  ets.,655. 

Couvran  (Geoffroy  de),  291,  314,  345, 
366,  396,  399,  402  et  s.,  416,  434, 464, 
614,  626,  644. 

Cranequiniers,  369. 

Craon,309.—  (Jean  de),  109.—  (Pierre 
de),  2,  3,  122,  141,  149,  162,  479. 

Gravant  (bataille  de),  81. 

Crécy,  81;  —  (en  Brie),  317;  —  (sur- 
Serre),  213.  —  (Bataille  de),  40. 

Greil,  212.  213,  257,  258.  275,  281,  287, 
289,  296,  319-27,  569-71,  584. 

Crépy  (château  de),  près  de  Metz,  350. 

Crespy-en-Valois,  294. 

Crèvecœur,  548. 

Crissay  (la  forêt  de),  395. 

Croces  ou  Crosses  (Vincent  de),  329, 
462,  591-596. 

Croixart  (J.),  626. 

Crould  (le),  20. 

Croy  (An t.  de),  226,  227.  —  (Jean  de), 
238,  266. 

Crozon, 436. 

Culant  (Charles  de),  273,  371,  417.  — 
(Louisde),amiral,  164, 184,210,211. 
— (Philippe  de),  s.  de  Jaloignes,  ma- 
rée, de  Fr  ,  321,  330,  334,  337,  349, 
367  et  s.,  392,  417. 

Cuningham  (Rob.),  367. 

Cusset,  307. 


D 


Dacie  (le  roi  de),  324. 


Dammartin, 288.  Voy.  Chabannes  (Ant. 
de). 

Dampierre  (Guill.  de),  413, 630.  — (.Ma- 
dame de),  336. 

Dangu,  175,  311. 

Daniel  (L.),  643. 

Danoir  (J.),  574. 

Daours,  548. 

Darcet  (J.),  293,  464. 

Darcio  (Anego),  621. 

Dardenay  (J.),  329,  462,  591,  593,  395. 

Dauphiné  (le),  88,  94,  102.  164,  194, 
197,  209.  441,  507-509,  535,  542. 

Dauphinois  (les),  63. 

Dauvet  (J.),  428. 

Dax,336, 338,340,366, 458,604.  —  (Siège 
de),  336, 

Decize,  218. 

Delaloere,  ÔOO,  609,  612,  624,  635. 

Delaunay  (Jamet),  628,  629. 

Deloye  (Simon),  114,  128. 

Dehice,  506. 

Denisot  (Robin),  151,  154,  461. 

Dercé  (J.  de),  40,  493. 

Des  Essarts  (P.),  prévôt  de  Paris,  27. 

Des  Landes  (P.),  245,  251. 

Des  Marels  (Ch.),  221,  236,  322,  342. 
433,  571,  614. 

Desurande  (J.),  401. 

Devonshire  (le),  133. 

Dieppe,  206,  221,  236.  238,  258,  311, 
322,342-46,431-34,  568,  614,  642,  644, 
645.  —  (Les  habitants  de),  642,  643. 

Dijon,  7,  65,  66,  75,  76,  87,  196,  218, 
237. 

Dijon  (J.),  secret,  de  Richemont,  511, 
512,  514,*517,  523,  564. 

Dinan, 71,  136,382,  383,  389,  397,  406. 
—  (Bertrand  de),  85,  108,  135.  — 
(Françoise  de),  femme  de  Gilles  de 
Bretagne,  378;  379,  382,  426.  —(Jac- 
ques de),  s.  de  Montafilant,  202.  — 
(Jacques  de),  s.  de  Beaumanoir,  500. 
514.  —  (Jean  de),  108,  135.  —  (Ro- 
bert de),  12.  —  (Roland  de),  12. 

Dinteville  (J.  de),  283. 

Diois  (le),  508. 

Dol,  121,  300,  406,  445,  470. 

Domaine  royal  (le),  178,  601.  —  (Alié- 
nations du),  112. 

Domfront,  148,  312,  420,  421. 

Dondaines,  527. 

Dordrecht,  125. 

Douai,  7. 

Doué,  141. 

Douglas  (Archibald),  duc  deTouraine. 
76,  81,  86. 

Doullens,  219,  225,  240,  548. 

Doulzsire  (J.),  562,  567,  607,  609. 

Dourdan,  38. 

Douvres,  45. 

Dresnay  (Regnault  de),  382. 

Dreux,  145,  278,  280,  331,  339,  657.  — 


INDEX   ALPHABETIQUE 


681 


(Comté  de),  338,  339,  604.  —  (Jac- 
ques de),  23. 
Drouart  (P.),  413,  629. 
Du  Baïf  (Audry),  552. 
Du  Blexer  (J.),  528. 
Du  Broullat  (Guill.).  278,  280. 
Du  Buisson  (le  s.),  40,  42. 
Du  Cellier  (J.),  445,  449,  450. 
Du  Chastel (Guill.),  9,  323.  —(Tanguy), 

52,  54,  71,  83,  84  et  s.,  99,  102,  230, 

323,  331,  503,  510. 
Du    Chastelier  (Jacques),  évêque   de 

Paris,  248,  276,  277. 
Du  Châtelet  (Erard),  259. 
Ducloux  (H.),  461. 
Du  Coing  (L.),  127. 
Dudoye  (Nie),  623. 
Du  Piquet  (P.),  633,  634. 
Du  Fou  (.lacob),  40,  493,  494. 
Du  Guesclin,  vu,  2,  6,  95,  98,  135,  152, 

356,  402,  420,  456,  465,  474. 
Du  Juch  (J.),  461,  462,  656,  657. 
Du  Moustier  (B.),  623. 
Dun-en-Berry  (ou   Dun-Ie-Roi),    113, 

132,  180, 181,  191,  219,  277,  542,  563- 

65,  592. 
Dunois  (le  comte  de),  voy.  Orléans  (le 

bâtard  d').—  (Le  comté  de),  22,  297. 
Du  Pair  (Guill.),  656. 
Du  Pan  (P.),  m.  d'hôtel  de  Richemont, 

245,  249. 
Du  Pelle  (Ant.\  494. 
Du  Peschin  (Jeanne),  129. 
Du  Pleisseis  (Charlotte),  590. 
Dupuis,  578,  579. 
Du  Quélenec  (J.),  436. 
Durtal,  207. 


Eauze,  338. 

Ebouville  (Ch.  d'),  551. 

Ebreuil,  144,  307. 

Echenay,  283. 

Ecoliers  (les),  362. 

Ecorcheurs  (les),  237,  238,  287,  288, 
299   313-15    348, 

Ecosse,  52,  82,  255,  429,  452.  —  (L'ar- 
mée d'),  496.  —  (Eléonore  d'),  353. 

—  (Isabelle  d'),  duchesse  de  Bre- 
tagne. 340,  354,  380,  382,  424,  425, 
430,  435.  —  (Jacques  I",  roi  d'),  58, 
64,  76,  114,  127,  164,  255,  424,  430. 

—  (Jacques  II,  roi  d'),  394,  404,  430 
et  s'.,  442,  452.  —  (Marguerite  d'), 
femme  du  dauphin  Louis,  255,  262, 
269,  353.  —  (La  reine  d'),  404. 

Ecossais  (les),  60,  76,  80, 101,  135, 138, 
157,  187,  284,  400,  535.  —  (Les  am- 
bassadeurs), 430,  431.  —  (Le  con- 
nétable des),  128,  145,  150.  —  Voy. 
Stuart  (J.). 

Ecouché,  642. 


Ecurie  du  roi  (le  maître  de  1'),  510. 
Eder  (Guill.),  80;-  (Pierre),  186,  208. 
Eglise  (1'),  277,  612.  —  (Les  gens  d'), 

159. 
Elections  (les),  369, 373  ;  —  (de  Langue- 

doil),  368. 
Elus  sur  le  fait  des  aides  (les),  122, 

460,  610,  638,  649,  650. 
Emery  (Martineau),  252. 
Emprunts,  97. 

Encre  (aujourd'hui  Albert),  548. 
Eon  (Baudoin),  389. 
Epense,  216. 
Epinal,  349. 
Epinay,  244. 

Escorailles  (L.  d'),  104,  551. 
Espagne  (l'),  52, 164,  353.  —  (L'armée 

d'),  496.  —  Espagnols  (les),  80. 
Espinay  (Eustache  d'),  428.  —  (Jacques 

d'),  évêque  de  Rennes,  428, 430,  445. 

—  (Richard  d'),  428.  —  (Robert  d'), 
évêque  de  Saint-Malo,  208,  378,  429. 

Essai,  207. 

Estampes  (Robert  d'),  623. 

Esternay  (le  s.  d'),  624. 

Estouteville  (Jean  d'),  s.  de  Torcy  et 
de  Blainville,  maître  des  arbalé- 
triers, 366,  367.  —  (Jean  II  d'),  398. 

—  (Louis  d'),  45,  147,  322,  396,  398- 
400,  415,  417,  510,  614.  —  (Robert 
d'),  624. 

Estrac  (le  grand  et  le  petit),  285,  326. 

Etampes,  107,  143,  172,  263,  481,498, 
499.-  (Le  comté  d'),  61,327, 497, 498. 

Etats  généraux  et  provinciaux,  97, 
158-162,  304,  306,  364,  365.  511,  512, 
517,  519,  522,  534-37.  —  Etats  géné- 
raux de  Chinon  en  1428,  p.  106,  162, 
163,  296;  —  d'Orléans  en  1439, 
p.  296-99,  303,  363,  554;  —  de  Tours 
en  1484,  p.  363.  —  Etats  de  Cham- 
pagne, 265;  —  du  Dauphiné,  209- 
211,  291  ;  —  de  l'Ile-de-France,  86; 

—  de  Languedoc,  210,  211, 291, 319, 
322,  364;  —  de  Languedoil,  105,  106, 
112, 122,  128, 130.  203,  242; —  de  la 
Marche,  197,  296,  564;  de  Mehun- 
sur-Yèvre,  130;  —  de  Monllucon, 
122;  —  de  Montpellier,  365;  —  de 
Normandie,  86,  240,  241,  364,  429, 
432;  —  de  Poitiers,  112,  150,  256, 
488;  — du  Poitou,  48;  — du  Puy,  365; 

—  de  Rouen,  163;  —  de  Saumur, 
122,  128;  —  de  Toulouse,  365. 

Etrepagny,  175. 

Eu,  258,  322.  —  (Le  comte  d"),  voy. 

Artois 
Eugène  iv,  195,  227,  238,  384. 
Europe  (les  souverains  d"),  224. 
Evreux,  139,  175,  221,  226,  237,  281, 

312,  343,  434,  529,  613,  645.  —  (Le 

bailli  d'),  170.  —  (Le  comté  d'),  131, 

164. 


682 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Exmes,  311,  370,  546. 
Eyton  (Foiikes),  392. 


Falaise,  177,  312,  346,  420,  421,  424, 
436,  546.  —  (Le  vicomte  de),  639. 

Famine  (la),  279, 

Fastolf,  81,  107,  134,  147,148,164,  168- 
172,  187,  228.  240. 

Fauq  (Th.),  401. 

Fauquemberge  (on  Falcombridge). 
Voy.  Nevil. 

Fécamp,  236,  241,  258,  289,  299,  311, 
569. 

Féodalité  (la),  299,  305. 

Férat  (F.),  252. 

Féraucourt  (J.  de),  658. 

Finances  (admin.  des),  507,  508,  565, 
613,  617. 

Fisc  (le),  460. 

Flamande  (l'armée),  257. 

Flamands  (les),  266,  275. 

Flandre  (la),  6,  79,  106,  142,  176,  240, 
257,  266,  268,  548.  —  (Les  commu- 
nes de),  227.  —  (Les  Etats  de),  35. 

—  (Jeanne  de),  comtesse  de  Mont- 
fort,  53. 

Flavy  (la  famille  de),  568.  —  (Guill. 
de),  264,  265,  283,  295,  566,  568,  573, 

—  (Hector  de),  569,  —  (Jeanne  de), 
572. 

Fleury  (J.),  vice-amiral,  438. 

Floques  (Robert  de),  dit  Floqnet,  275, 
2S2, 291,  292,  307,  312,  320  et  s.,  334, 
342  et  s.,  350,  358,  366-68,  397,434, 
611,  613,  644. 

Florence,  227,  326. 

Fo  (Jean),  342. 

Foix  (Gaston,  comte  de),  318, 334,  340, 
353,  355,  404,  431,  437.  —  (Jean  de 
Grailly,  comte  de),  60,  74,  95,  110 
et  s.,  122, 123, 130,  131,  139,156,262, 
508,  525,  526.  —  (La  maison  de),  331. 

Folleville-en-Yimeu,  311,  548. 

Fontaine  (le  s.  de),  551, 

Fontenay-le-Comte,  113, 151, 154, 164, 
165,  179,  184, 190,  192,  277,  320,  340, 
352,  377,  446,  454,  458,  460-62,  542, 
563,  597-603.  617,  618, 

Fontevrault,  430. 

Forez  (le),  307.  —  (Le  juge  du),  363, 

Formigny  (le  val  de),  408-411.  Voy. 
Batailles. 

Forsted  (G.),  323, 

Forte-Epice,  Voy.  Pailly  (Jacques  de). 

Fortin  (Guiil.),  502,  545,  546. 

Fotheringay  (château  de),  47. 

Foucaut  (Jean),  222,  243,  263,  313,  577. 

Fougères,  71,  123,  239,  263,  385-87, 
393-98,  402-404,  438,  441,  618,  620. 

—  (Baronie  de),  165,  —  (Siège  de), 
402. 

Fournier  (J,),  492. 


Fowey,  452. 

France  (la),  1-567.  — (La  bannière  de), 
247-48.  —  (La  cour  de),  157, 181,  200, 
222,  225,  238,  262,  297,  330,  345, 353, 
355,  381,  427,  431,  446,  448,  458.  — 
(La  couronne  de),  223,  226,  231,  431 
496,  554,  535,  601 .  —  (La  maison  de), 
447,662.— (Catherine  de), reined'An- 
gleterre,  29,  37,  32-56,  6'*,  71,  109. 

—  (Catherine  de),  comtesse  de  Cha- 
roiais,  239,  284,  289.  —  (Charles  V, 
roi  de),  vn,  2,  3.  152,  278,  330,  348. 

—  (Charles  VI,  roi  de),  2- 14,  16-20, 
22-30,  32-41,  47-30,  53-56,  61-70,  86, 
87,  90,  94,  231,  233,  243,  232,  277, 
336,  358,  460,  470,  476-83,  486-89, 
493-99,  604.  —  (Charles  VII,  roi  de), 
vin,  4,  6,  16,  19,  29,  69  et  s.  Dau- 
phin et  régent,  48  et  s.  Roi,  69  et  s. 
Sacré  en  1429,  p.  74,  568.  Remis  en 

Sossession  de  Paris,  247  et  s.  Ses  am- 
assadeurs,  218,  220,  224-26,  228-30, 
232,234-37, 240, 289, 319, 326, 435,436, 
440,  447,  552-54,  621.  Ses  capitaines, 
192,  395.  Les  comptes  de  son  échan- 
sonnerie,  337.  Ses  conseillers,  80,  81, 

114,  173,  175,  178,210,  305,340,  351, 
395,  440,  447,  448,  503,  543.  Ses  fa- 
voris, 86,  89,  90,  95-98. 101,  102,  110, 

115,  129,  142,  151,  457,  459,  475. 
Ses  ministres,  442.  Ses  troupes,  286, 
331,  341,  349,  398,  —  (François  1er, 
roi  de),  235.  —  (Henri  II,  roi  de), 
235.  —  (Henri  IV,  roi  de),  537,  558, 

—  (Isabelle  de),  reine  d'Angleterre, 
11,  —  (Jean  lî,  roi  de),  2,  24,  33, 

46,  88,  292,  358,  417,  446,  —  (Jean 
de),  dauphin,  duc  de  Touraine,  6. 

47,  48,  72,  73.  —  (Jean  de),  duc  de 
Berry,  Voy.  Berry.  —  (Jeanne  de), 
reine  de  Navarre,  5.  —  (Jeanne  de), 
duchesse  de  Bretagne,  3,  4,  6,  12. 
13,  29,  37,  53,  54-38,  62,  205,  479.  — 
(Jeanne  de),  comtesse  de  Clermont, 
406,  —  (Louis  de),  dauphin,  duc  de 
Guyenne,  fils  de  Charles  VI,  p,  vn, 
3,  7,  8,  10,  13,  14,  18-20,  23-40,  47, 
30,  55,  37,  60,  64-67,  71-73,  75,  77,  89, 
141, 142,  245,  277, 329,  453,  482,  484- 
489, 563,  593,  594,  602,  —  (Louis  de), 
fils  de  Charles  VII,  dauphin,  puis  roi 
sous  le  nom  de  Louis  XI,  88,  102, 
255,  262,  271,  273,  276,  277,  301-307, 
312,  316,  319-21,  323,  325,  326,  331, 
334-38,  341-43,  349-31,  354-36,  365, 
374,  399,  433,  440-42,  449,  431,  564, 
607,  608.  —  (Louis  XV,  roi  de),  557, 

—  (Madeleine  de), fille  deCharles  VII, 
446.  —  (Marguerite,  bâtarde  de),  fille 
deCharles  VII,  p.  144.  —  (Marie  de), 
fille  de  Jean  II,  p.  33.  —  (Marie  de), 
abbesse  de  Poissy,  283.  —  (Mai  ie,  bâ- 
tarde de),  fille  de  Charles  VII,  378, 


INDEX  ALPHABETIQUE 


683 


431.  —  (Michelle  de,  duchesse  de 
Bourgogne,  5,  87.  —  (Philippe  VI, 
roi  de),  1,  2.  —  (Philippe  de),  fils 
de  Charles  VII,  p.  2i0.  —  (Yolande 
de),  fille  de  Charles  VII,  p.  262.  — 
(Le  peuple  de).  Voy.  Peuple.  —  (Les 
pairs  de),  448.  —  (Les  prélats  de), 
160,  161,  242.  —  (Les  princes  de), 
297,  305,  324,  325,  328,  330,  332,  342, 
351,  381,  443.  —  (Les  représcfllauts 
de  la),  346.  —  (Les  rois  de),  26  et 
s.,  601,  602.  Leur  conseil,  24,  28-30, 
32,  34-39,  60,  104,  181,  297,  298,  318, 
340,  345-47,  355,  356,  371,  428,  439, 
465,  500,  507-509,  536,  543,  566,  599, 
600,  607,  609,  612-14,  617,  624-27, 
633,  645.  —  (Le  royaume  de),  162, 
182,  357,  448.  —  (Les  seigneurs  de), 
262,  303,  443.  —  (Les  sujets  du  roi 
de),  348,  437,  513,  543-45,  548,  560, 
561,  566,  576,  601,  605,  607-609,  613, 
615,  619,  628,  629.  632.  634,  635,  638, 
646. 
Français  (les),  26  et  s.,  —  (reniés),  320. 

—  Française  (l'armée).  Voy.  armée. 

—  Royauté  (la),  335. 
Franche-Comté  (la),  339. 
Frédéric  III.  Voy.  Autriche. 
Fresnay-le-Vicomte,  107,  177,   206, 

404. 
Fresnoy,  127.  531. 
Frétard  (Olivier),  200. 
Fribourg  (J.  de),  359. 
Fniment  (E.),  633,  635. 
Frotier  (P.),  52, 90,  92, 99-102, 130, 144, 

230,  503,  510. 

G  * 

Gacé,  311. 

Gaillon,  80. 

Galeninde  (château  de),  123. 

Gallardon,  342,  343. 

Galobriet  (J.),  649-52. 

Galway  (l'évêque  de),  435. 

Gand,  75,  237.  —  (La  tente  de),  257. 

Gantois  (les),  75. 

Garcia  (M.),  367. 

Garuier  (J.),  122. 

GascogDe(la),  94,  280, 330, 333-336,441. 

Gascons  (les),  20,  21,  184,  284. 

Gâtinais  (le),  114,  138,  530. 

Gâtine  (la),  39,  47,  48,  89.  —  (Le  bailli 
de),  648. 

Gaucourt  (Raoul  de),  20, 34, 45, 85.  130, 
144, 145,  150,  156,  160,  167, 171,  187- 
194,  198,  200,  210,  211,  217,  220,  242, 
264,  273,  304,  307.  311,  328,  343,  347, 
397,  464,  493,  541. 

Gault  (J.),  546. 

Ganre,  331,  339. 

Gauter  (J.),  648. 

Gavray,  401-404,  460,  482,  624-26,  655. 

Genainville,  268. 


Gençay, 133, 141, 154, 184, 183, 190, 542. 

Gennes.  108. 

Gens  d'armes  (les),  97,  106,  251,  301, 

303,  341,  345, 356,  .504  et  s..  535,  539, 

542;  —  (du  roi),  317. 
Gentilly,  17,  18,  28,  29. 
Gerberoy,  221,  256,  394.  —  (Combat 

de),  221, 
Germigny,  194. 
Gerson  (J.),  37. 
Gervasic,  58. 
Gévaudan  (le),  612. 
Giac  (L.  de),  134.  —  (Pierre  de),  90, 

92,  99, 101, 112, 122,  125, 129-34. 140- 

142,  154,  162,  200,  457,  503.  526. 
Gien,  113.  145,  179, 191,  231,  270,  277, 

307,  330,  340,  542,   563-65,  592.  — 

(Ligue  de),  13,  19,  20. 
Giirart(Jean),  42, 154.  —(Olivier),  436, 

461,  462,  6-57. 
Gilbert  (le  pont),  près  d'Avranches, 

300,  414. 
Gilet  (secret,  de  Richement),  513,  520- 

25,  605,  630. 
Girard  (J.),  118,  145.  —  (Renaud),  s. 

de  Bazoges,  178,  190,  222,  253,  542. 
Girault  de  La  Pallière,  80. 
Giraut  (N.),  648. 
Giresme  (Nie.  de,  ou  le  commandeur 

de),  267,  273,  292,  294. 
Giron  (Alain),  122,  132,  145,  212,  286, 

465.  —  (André),  462,  658. 
Gisors,  237,  236,  338,  398,  517,  644. 
Glasdale  (G.),  107,  123,  134. 
Glocester  (Humphrev  de  Lancastre, 

duc  de).  58, 67,  72  e't  s.,  83  et  s.,  106, 

109,114,  115,124,  134,266,273,279, 

296,  311,  345,  392,  420,  459,  501,  502. 
Godart  (J.),  515,  636-39, 
Goëllo  (le  pays  de),  67. 
Goguet   (J.),   secret,   de  Richemont, 

624,  626,  633,  646,  633,  634. 
Gorze,  330. 
Goth  ou  Gough  (Mathieu)  ou  Matago, 

107,  343,  344,  349,  379,  392,  405-411. 
Goulfier  (Guill.),  635. 
Gouges  de  Charpaigne  (Martin),  chan- 
celier de  Fr.,  8,  77,  80,  89,  90,  99, 

100,  149,  510. 
Gourdel  (R.),  630. 
Gournay-sur-Aronde,  548. 
Gower  (Th.),  420,  421,  640. 
Grainetiers  (les),  507,  508,  546, 
(Jrancey,  217. 
Grandpré,  237. 
Gramme  (J.  de),  251. 
Granville,  240,  293,  319,  322,  340-45, 

398,  399,  614. 
Grasset  (Perrinel),  116, 142,  193,  237. 
Gravelines,  310.  —  (Conférences  de), 

289,  293  97. 
Graville  (le   s.  de),  Voy.  Malet  (J,), 
Grenoble  (le  héraut),  405. 


684 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Gresle  (Biaise),  433,  643. 

Gronars  (Colin),  626. 

Gruel  (Gui!!.),  vu,  vin,  58,  59,  71,  85, 
110,  140,  141,  215,  216,  222,  293,  294, 
329,  410,  419,  445,  454,  455,  461-64, 
469,  470,  591,  657.  —  (Jean),  137.  — 
(Raoul),  58,  66,  72,  84,  85,  114,  227, 
461,  469,  470. 

Gueldre  (Adolphe,  duc  de),  223,  224. 

Guéméné  (le  s.  de),  445. 

Guérande  (traité  de),  2. 

Guérard  (Th.),  274,  281. 

GuériQ  (J.),  462,  596. 

Guerre  (la),  106,  —  (de  Cent  ans),  412. 
—  (Gens  de),  17,  20,  98,  237,  248, 
250,  255,  258,  261,  269,  282  et  s.,  308 
et  s.,  314,  327,  336, 339  et  s.,  356, 357, 
364,  422,  458,  466,  538,  549,  560,  561, 
573,  574,  5S1,  605-10,  614,  616,  620, 
642-46.  —  (Le  parti  de  la),  17,  20,  98. 
Voy.  Abolition,  Rémission. 

Guet  (le),  372,  438,  —  (de  la  mer),  645. 

Guiho  (P.),  461. 

Guillepou  (J.),  aumônier  de  Riche- 
mont,  329,  462,  595. 

Guimon,  570,  571. 

Guines,  275.  —  (Comté  de),  lil. 

Guingamp,  439,  463. 

Guise,  80,  81,  104,  316.  548. 

Guyenne  (la),  8,  27,  94,  102,  114,  123, 
174,  189,  226,  280,  282,  301,  306,  330 
et  s.,  347,  368,  379,  424  et  s.,  431  et 
8.  438,  507,  508,  602,  636.  —  (Cam- 
pagne de)  en  1442,  p.  332  et  s.,  340, 
374,  469.  —  (Conquête  de  la),  365, 
373.  —  Guyenne  et  Languedoc 
(gouvernement  de),  8,  139. 

Guymar  (J.),  493. 

Gyé  (le  maréch.  de),  379. 

H 

Hainaut  (le),  59,  86,  87,  98,  548,  590. 

—  (Jacqueline  de).   Voy.  Bavière. 
Hal  (en  Belgique),  7,  11. 

Hall  (Davy),  418,  419. 

Ham,  213,  214,  455,  549,  5.50. 

Hambye,  400. 

Han-lès-Juvigny,  260. 

Haneron  (J.),  655. 

Hans,  214,  260. 

Haqueville  (P.  de),  247. 

Harbotel  (J.),  527,  530. 

Harcourt  (Christophe  de),l  04, 218, 223, 
231,  488,  552.  —  (Guill.  de),  c.  de 
Tancarville,  210,  438,  487.  —  (Guill. 
de),  fils  de  Jacques,  488.  —  (Jac- 
ques de),  baron  de  Montmorency, 
438,  451,  487,  488.  —  (Jean  de),  c. 
d'Aumale,  432.  —  (Louis  de),  archev. 
de  Narbonne,  432,  433,  437,  642-44. 

—  (Marie  de),  fille  de  Jaf'ques,  com- 
tesse de  Dunois,  438,  451,  488.  — 
(Les  sires  de),  219,  273. 


Harengs  (la  journée  des),  ou  bataille 

de  Rouvray,  164. 
Harfleur,  40,  45,  51,  147,  236,  239,  241, 

289,  299,  311, 322,  323,  404,  532,  .569, 

571,  613. 
Harington  (R.),  293,  419,  563. 
Harpedenne(J.).  s.  de  Beileville,  144. 

151,  154,  157,  190,  488. 
Haultpin,  539. 
Havapt  (J.),  438. 

Hawering-at-Bower  (château  de),  271. 
Heilly,  226.  —  (Jacques  de),  23,  40. 
Hérétiques  (les),  457. 
Hérisson,  270. 
Hermecant  (Nie),  623. 
Hermine  (le  héraut),  57. 
Héron  (Macé),  494. 
Herpelav  (J.),  187. 

Hesdin,'l09,  258,  328,  385,  430,  445. 
Hingant  (J.),  378-82. 
Hollaud  (J.),  .532. 
Hollande,  115. 

Hommes  d'armes.  Voy.  Arméh. 
Hommet  (château  du),  400. 
Honfleur,  404,  613. 
Hongrie  (la),  352,  447. 
Hoo  (Th.),  379,  380. 
Hoste  (Anne),  141.  —  (Jean),  141. 
Houdan,  207,  221. 
Houel  (J.),  630. 
Hungerford,  172. 
Huntingdon  (le  c.  de),  143,  206,  225, 

301,306,330,  331,  529. 


Ile-de-France  (1')^  22,  94,  113  et  s.,  139, 
174,  175,  192,^12,  240,  242,  255  et 
s.,  278  et  s.,  301-314,  326  et  s.,  349, 
364,  366,  605.  —  (Les  délégués  des 
villes  de  1'),  257.  —  (Etats  de  1'),  86. 

Impôt  du  vin  à  Paris  (fermiers  del'), 
649,  650,  652. 

Ingrande, 378,  386. 

Isabeau  de  Bavière.  Voy.  Bavièke. 

Issoudun,  130,  25X),  263,  427. 

Italie,  270,  341,  353. 

Ivry,  69,  80,  «1,  266,  267,  499,  500.  — 
(Château  d'),  80.  —  (Comté  d'),  80. 
113,  143,  529. 


Jacobins  (les),  443. 

Janville,  170-72,  273. 

Jargeau,  145,  146,  167,  168,  178. 

Jarno  (secret,  de  Richement),  528. 

Jarretière  (ordre  de  la),  394,  620. 

Jersey  (île  de),  646. 

Joigny,  270. 

Jonvelle    (le   s.    de),    voy.   La   Tké- 

MoiLLE  (Jean  de). 
Josseaume  (Guill.),  154. 
Josselin,  10,  403.' 


INDEX   ALPHABETIQUE 


685 


Jourdan  (Et.),  636-39,  654,  636. 

Jouvencel  (le),  de  Jeaa  de  Bueil,  146, 
197,  198,  314. 

Jouvenel  des  Ursins  (Guill.),  chance- 
lier de  Fr.,  394,  427,  441,  450,  462. 

—  (Jacques),  avocat  du  roi  au  par- 
lement, 330,  394,  427,  441,  430,462. 

—  (Jean  II),  chroniqueur,  évêque 
de  Beauvais,  archev.  de  Reims,  278, 
279,  296,  297,  348,  376,  393,  423,  554. 

Joyeuse  (L.  de),  99. 
Jumièges,  404,  628. 
Juridiction  royale  (la),  448. 


Karloeguen  (M.  de),  trésorier  de  Ri- 
chemont,  516. 

Kent  (Thomas,  comte  de),  86.  —  (Le 
comté  de),  418. 

Kériguen  (Gilles  de),  461. 

Kerléan  (Vincent  de),  432. 

Kermelec(J.  de),  513.  —  (P. de),  maître 
d'hôtel  de  Richement,  461,  638. 

Kermoysan  (Tugdual  de),  dit  Le  Bour- 
geois, 167,  233,  243,  244,  268,  273, 
274,  292,  294,  321,  342,  406,  419,  421, 
464. 

Kirkeby  (Th.],  412. 

Korwin  (Mathias),  447. 

Krelmerch  (Yvon  de),  656. 

Kyriel  (Thomas),  405-413. 


Labarbe,  512. 

La  Beaume  (le  bâtard  de),  128,  129. 

La  Belière  (le  vie.  de),  24,  137. 

La  Belioseraye  (J.  de),  235. 

La  Benaste  (seigneurie  de),  328. 

La  Bolsière  (Yvonnet  de),  480. 

La  Borde  (les.  de),  159-161. 

La  Broussinière  (combat  de),  96. 

La  Celle  (le  prieur  de),  124,  125. 

La  Chapelle-Saint-Denis,  21,  75,  276. 

La  Charité,  116, 142,  177,  237,  540. 

La  Châtaigneraie  (P.  de),  464. 

La  Chèse  (J.  de),  389. 

Ladislas.  Voy.  Autriche. 

La  Fange  (J.  de),  286. 

La  Fayette  (le  marée,  de),  60,  81,  202, 

210,  211,  218,  220,  223,  242,  303,  492, 

509,  552,  533. 
La  Feillée  (Olivier  de),  42. 
La  Fère-en-Tardenois,  264, 
La  Fcrté-Bernard, 116,118,127, 139,318. 
La  Ferté-lez-Saint-Riquier,  548. 
La  Feuillée  (Alain  de),  166. 
La  Fontaine  (J.  de),  245,  252. 
La  Forest  (Guill.  de),  24,40,42,493.— 

(Le  sire  de),  624. 
La  Forge  (Guill.  de),  578,  579. 
La  Fuite  (J.  de),  293. 
La  Gacilly,  513- 


Lagny,  192,  193,  197,  212,  221,  222, 
241,  243,  261,  269,278,286,317,  561. 

—  (Siège  de),  193,  197. 
La  Granche  (J.  de),  140. 
La  Gravelle,  148,  149,  309. 

La  Guerche  (en  Bretagne),  187,  188, 
344,  345;  —  (en  Touraine),  614. 

La  Hardouinaie  (château  de),  388. 

La  Haye  (J.  de),écuverde  Richemont, 
461,  575,  579,  580,  593,  396.  —  (J. 
de),  s.  de  Coulouces,  137,  527,  528. 

La  Haye-du-Puits,  400,  404. 

La  Hire  (Et.  de  Vignoles,  dit), 81,  145, 
146,  164, 167, 168, 171,  177,  192,  197. 
212  et  s.,  223,  226,  240  et  s.,  236,  237, 
266,  282,  285,  291  et  s.,  311,  320  et 
s.,  342,  436,  351.  Voy.  Amadoc.  Vi- 
gnoles. 

La  Hougue-Saint-Vaast,  25,  44,  644. 

La  Houssaye  (Eust.  de),  24.  —  (Raoul 
de),  318. 

La  Ilunaudaye  (le  s.  de),  137. 

Laigle,  24,  193.  —  (Le  s.  de).  Voy. 
Penthièvre  (Jean  de). 

Laillier  (Jacques  de),  245.  —  (Jean  de), 
243.  —  (Michel  dei,  245-251,  264, 
372.  —  (Richard  de),  245. 

Laiz  (gens),  612. 

La  Jaille  (le  s.  de),  166,  167,  462,  658. 

Lalain 'Jacquet  de),  352.  —  (Le  s.  de), 
226,  243,  251. 

La  Mandaye  (Ant.  de),  343. 

La  Marche,  94,  122, 197,  296,  564,  616  ; 

—  (en  Lorraine),  610.  —  (Le  c.  de). 
Voy.  Bourbon  (Jacques  de). 

La  Marck  (Evrard  de),  239,  285,  286. 

La  Mothe  (J.  de),  259. 

La  Motte-l'Evéque  (château  de),  400. 

Lamoureux  (Guill.),  652.  —  (Jamet), 
trésorier  de  Richemont,  461,  500, 
655,  638. 

Lampet  (J.),  414,  415. 

Lancastre  (les),  418.  —  (Henri  de),  c. 
de  Derby,  478,  479.  —  (Jean,  duc 
de),  225, 477, 478.  —  (Philippine  de), 
224. 

Lances.  Lance  fournie.  Voy.  Armée. 

Lancras  (P.  de),  245. 

Lande  du  grand  Orme  (la),  208. 

Landes  (le  pays  des),  336. 

Langres,  314,  359.  —  (L'évêque  de), 
280. 

Languedoc  (le),  8,  94,  95,  102,  110, 
114, 162,  189,  197,  198,  262,  282,  291, 
296,  301,  320,  331,  364,  507  et  s., 
336,  540,  363.  617.  Voy.  Etats. 

Languedoil  (pays  de),  111,  162,  163, 
291,  296,  312,  357,  364,  508,  311,  517, 
537, 363,  566,  617, 618.  —  Voy.  Etats. 

Lannion,  300. 

Lannoi  (H.  de),  202,  227,  231,  541. 

Lanvollon,  67,  647. 

Laon,212,  214,223,316,  317,  547.  —Le 


686 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


mont  Saint-Vinceut,  près  de  Laon, 

212  213. 
Laonnois  (le).  313,  347,  548. 
La  Paliière  (Girault  del,  80,  !4S,  168, 

171. 
Laplanque  (Roger  de),  636. 
La  Plume  (en  Armagnac),  338. 
La  Foie  (William  de),  c.  de  Suffolk, 

59,  62,  80.  107,  114  et  s.  138,  145, 

146, 167,  223,  240,  258,  333,  345,  346, 

351,  392,  405,   415,  418,    501,   303, 

530,  531. 
La  Preuse  (J.  de),  346. 
Larcher  (J.),  247. 
Larchevêque  (Guili.),  485. 
Larchevêque  (Jean),  s.  de  Parthenay, 

23,  39,  40,  47-49,  31,  113,  151,  154, 

438,  451,  460,  485-94. 
La  Réole,  339,  362. 
La  Rivière  (Rob.),  339.  —  (Adam  de), 

345.  —  (Jean  de),  427. 
La  Roche  (Alain  de),   461,  462,  656, 

658.  —  (Guiot  de),  330.  —(Jean  de), 

154,  160,  165,  192,  306,  307. 
La  Rochebrou.  358. 
La  Roche-de-Nesle  (le  château  de), 

181. 
La  Roche-Derrien,  67. 
La  Roche-Fatou  (le  château  de),  48. 
La  Roche-Guyon,  275.  —  (La  dame 

de),  307. 
La  Rochelle,  69. 143, 144,  184, 189, 222, 

462,  602. 
La  Suze,  123.  —  (Le  s.  de).  Voy.  Laval 

(René  de). 
La  Teillaye  (M.  de),  485. 
La  Touche  (P.  de),  494. 
La  Tour  (Godefroy  de),  412.  —  (Hin- 

celin  de),  273.  —  (Jacques  de),  542. 

—  (Le  s.  de),  635. 

La  Trémoille  (le  bâtard  de),  410.  — 
(Georges  de),  86,  88,  115,  116,  130 
et  s.,  141  et  s.,  152,  154-169,  172-194, 
196-203,  205,  208,  231,  262,  303-305, 
319,  330,  334,  380-84,  457-61,  466, 
475,  482,  528,  534,537,  538,  542,  369. 

—  (Guy  VI  de),  86, 131, 141.  —  (Isa- 
belle de),  199.  —  (Jean  de),  fils  de 
Georges,  208.  —  (Jean  de),  s.  de 
Jonvelle,  86,  131,  142,  144,  182,  189, 
337,  538.  —  (Louis  de),  fils  de  Geor- 
ges, 182. 

Laulne  (le  château  de),  400. 
Launay  (Ant.  de),  631.  — •  (Jean  de), 

266.  —  (Macé  de),  613,  614,  653. 
Launoy  (Raoul  de),  trésorier  général 

de  Richemont,  656. 
Lautrec  (la  vicomte  de),  114. 
Laval,  139,  148,  149,  161,  177,  263.  — 

(Lamaison  de),  179,279,309,464,667. 

—  (André  de),  s.  de  Lohéac,  marée, 
de  Fr.,  166, 169,  180,  208,  240,  263, 
293,  299,  306, 309,  320,  322,  325,  342, 


et  s.,  350,  366,  367,  394  et  s.,  406, 
410,  414-16,  426,  427,  431,  436,  441, 
464,  611,  628,  634.  —  (Anne  de),  179. 

—  (Gilles  de),  s.  de  Raiz,  marée. 
deFr.,109, 123,127, 166,171,174,208, 
279,  309,  378,  487,  531.  —  (Guy  XIII, 
ou  XIV,  comte  de),  49,  110, 148,  165- 
171,  180, 187,  279,  387,396,  397,  406, 
414-416,  425-30,  445,  449,   545,  628. 

—  (Guy  de),  s.  du  Gâvre,  fils  de 
Guy  XIII,  426. —  (Jeanne  de),  femme 
de  du  Guesclin,  95,  96.  —  (Jeanne 
^de),  veuve  de  J.  de  Montfort,  531.  — 
(Jeanne  de),  reine  de  Sicile,  438.  — 
Louis  de),  s.  de  Châtillon,  180,  657. 

—  (Marie  de),  ou  de  Raiz,  fille  de 
Gilles,  378,  426.  —  (René  de),  s.  de 
La  Suze,  109,  243,  259,  269.  —  (Yo- 
lande de),  fille  de  Guy  XIII,  208, 
222,  438. 

Lavardin,  393. 

La  Varenne(!e  s. de).  Voy.  BRÉzÉ(P.de). 
Leber  (J.),  239. 
Le  Borgne,  140. 

Lebour<;ier  (J.),  610.  —  Le  Bourcier  (Gi- 
rard), 621. 
Le  Bourellier  (Guill.),  582. 
Le  Bourlier  (S.),  653,  654. 
Le  Breton  (J.),  secret,  de  Richemont, 

610,  618. 
Le  Brun  (J.),  54,  56. 
Le  Carnier,  236. 
Le  Chevalier  (J.),  637. 
Leclerc  (J.),  266,  562. 
Lecoq  (Guill.),  628,  631. 
Le  Coq  (Hugues),  241,  231. 
Le  Coudray-Salbart,39,49, 57, 220,489. 
Le  Crotoy,  77,  221,  258,  275. 
Lectoure,  442. 
Le  Dur  (Nie),  18,  481. 
Le  Forestier  (Olivier),  107. 
Le  François  (Michel),  546. 
Le  Galois  d'Aulnay,  268;  —  de  Hon- 

nignœul,  239. 
Le  Gâvre,  9,  12,  13,  67,  396. 
Legoix,  21,  232. 
Le  Guildo,  379-82. 
Lehadoue  (J.),  642,  645. 
Le  Josne  (R.)^  347. 
Le   Maçon   (Robert),   s.  de  Trêves, 

chance!,  de  Fr.,  109, 125,  149,  137, 

158,  180,  492,  534. 
Le  Maingan  (secret,  de  Richemont), 

634. 
Le  Mans,  107-109,  127,  161,  345,  383, 

392,  394,  424,  314,  568,  369. 
Lendit  (le),  20. 
Le  Neubourg,  342,  343. 
Lengrogne  (Colin),  639. 
Lengronne,  635. 
Lenoncourt  (Thierry  de),  4't7. 
Lens,  229. 
Le  Parc  l'Evèque,  117. 


i 


INDEX   ALPHABETIQUE 


687 


Le  Pelé  (Regnault),  o73,  o77. 

Le  Picart  (J.),  309. 

Le  Plessis-Guérif,  187. 

Le  Porc  (P.),  108. 

Le  Puy,  209.  —  (L'évêque  du),  88, 505. 

Le  Quesuoy,  317. 

Le  Riche  (J.),  359. 

Le  Roux  (O.j,  secret,  de  Richement, 
633. 

Leroy  (Robin),  372. 

Le  Sage  (Raoul),  36.  —  (Robert),  78. 

Leserf  (J.),  639. 

Les  Essarts,  327. 

Lesparre  (la  baronuie  de),  406. 

Les  Roches-Tranchelion,  387,  393. 

Lessy,  330. 

Lestêno  (Annette  de),  1. 

Le  Veer  (Guill.),  42. 

Leysne  (P.),  480. 

Lezay,  178,  181. 

L'Hermine  (château  de),  123. 

L'Hermite  (Robinet),  283,  372. 

L'HermiteouLermite(Tristan),écuyer 
de  Richement,  prévôt  des  maré- 
chaux, maître  de  l'artillerie,  214, 
248,  269,  284,  314,  347,  361,  637. 

Libourne,  431. 

Liesse  (N.-D.  de),  329,  388,  390. 

Lieutenant  criminel  (le),  576. 

Ligier,  321 ,  323. 

Lignerolles,  171. 

Ligny-en-Barrois,  215,  216.  —  Lee. 
de).  Voy.  Luxembourg. 

Lihens,  311. 

Lille,  266,  330. 

Lillebonne,  236,  241,  289,  299. 

Limague  (la),  307. 

Limbeurg  (le),  548. 

Limeuil  (le  bâtard  de),  609. 

Limoges,  160,  161,  330,  334,  432. 

Limousin  (le),  30,  94,  331,  33  i,  362, 
368,  373,  378,  392,  616.  —  (Le  séné- 
chal du),  610. 

Lisieux,  333,  397. 

L'Isle-Adam  (Villiers  de), 60, 233,  241, 
243-47,  231,  237,  258,  267,  323. 

Lisle  (Guichard  de),  334.  —  (J.  de), 
339. 

L'Isle-Bouchard  (Catherine  de),  130, 
131,  141,  134,  182. 

Loches,  84,  167.  180,  182,  262,  269, 
305,  306,  331,  382,  383. 

Logus(G.  de),  bailli  de  Bourges,  271. 

Lohéac  (le  marée,  de),  voy.  Lav.%l 
(André  de). 

Loing  (le),  313. 

Loire  (la),  138,  144,  162-66,  177,  198, 
206,  226,  262,  268,  296,  305,  327,  341, 
42'>,  449.  —  (Les  villes  de  la\  270, 
278. 

Lombards  (soldats),  80,  101. 

Londres,  45,  46,  57,  60,  68,  201,  202, 
418.  —  (La  tour  de),  33. 


Longchamps  (le  monastère  de),  439. 

Longny,  394,  403. 

Longueval  (Regnault  de),  384. 

Longueville  (le  comté  de),  404. 

Longworth  (Makin  de),  415. 

Loré  (Arabroise  de),  108, 124, 127, 147, 
171,  188,  192,  206,  207,  217,  221,  267. 
282,  283,  285,  290,  292,  294,  323,  324, 
464. 

Lorraine  (la),  193,  259,  282,  285,  289, 
297,  313,  316,  359.  —  (Charles  1er, 
duc  de),  195,  196,  216.  —  (Expédi- 
tion de),  en  1444-45,  p.  348-35,  377. 

—  (Isabelle  de),  reine  de  Sicile,  193, 
215,  348,  438.  — (Jean  de),  343,  614. 

—  (La  régence  de),  259,  285. 
Lorrains  (les),  17. 

Lorry,  330. 

Lospital  (Fr.  de),  481. 

Loudun,  149,  167. 

Louplande,  123. 

Lourdes  (chàtellenie  de),  114. 

Louvain  (P.  de),  407. 

Louvet  (Jean),  dit  le  président  de 
Provence,  83,  84,  89-92,  99-105, 108- 
112, 125,  132, 133, 180,  201,  230,  439, 
466, 487, 488, 503,306-512.— (Jeanne), 
99,  104.  —  (Marie)  ou  Louvette , 
femme  du  bâtard  d'Orléans,  84,89, 
104. 

Louviers,  177,  183,  312,  319-323,  333, 
386,  395,  644.  —  (Nicolas  de),  243. 

Leuvois,  259.  —  (Le  ministre),  370. 

Louvre  (le),  30,  31,  36-39,  64,  63,  246. 

Luce  (Guill.),  48. 

Luçon,  338. 

Luillier,  368,  372.  574.  377. 

Lusignan,  84,  130,  162,  163,  334, 398. 

—  (Anne  de),  duch.  de  Savoie,  211, 
440.  —  (Hugues  de),  cardin.  de 
Chypre,  210,  211,  223-26,  232,  239. 

—  (Jacques  I"  de),  roi  de  Chypre, 
210. 

Luxembourg  (le),  446,  447.  —  (La 
maison  de),  332,  333, 667.  —  (Bonne 
de),  reine  de  France,  33,  446.  —  (Ca- 
therine de), comtesse  de  Richement, 
332,  380,  424,  434,  438,  444,  433.  — 
(Elisabeth  de),  446.  —  (Guy  de),  22. 

—  (Isabelle  de),  femme  de  Gh.  d'An- 
jou, 332.  —  (Jacqueline  de.),  duch. 
de  Bedferd,  199,  322,  353.  -  Jac- 
ques de),  396,  402  et  s.,  417,  445, 
449,. 462,  658.  —  (Jean  de),  roi  de 
Bohême,  446.  —  (Jean  de),  s.  de 
Beaurevoir,  34,  162.  — (Jean  II  de), 
c.  de  Ligny,  212-214,  226,  227,  231, 
266,  316,  332,  333,  348-30.  —  (Louis 
de),  c.  de  Saint-Pol,  316,  320-24, 
352-34,  396,  397,  417.  —  (Louis  de), 
évêque  de  Théreucnne,  chancel. 
de  Fr.  pour  Henri  VI,  201,  212, 
242,  247,  231,  252,  267,  460,  532.  — 


688 


INDEX  ALPHABETIQUE 


{Pierre  I"  de),  c.  de  Sainl-Pol,  199, 
206,  212,  225,  316,  332.  —  (Sigis- 
mond  de),  empereur,  178,  217,  231, 
240,  446.  —  (Waleran  de),  22,  24.  — 

Luxeuil,  230,  291. 

Luzarches,  268. 

Lyon,  88,  97,  125,  127,  154,  209,  210, 
226,  291,  422,  440,  510,  516,  521-23. 

Lyonnais  (le),  524.  —  Lyonnais  (les), 
80,  88,  94,  100,  105,  125  et  s.,  133, 
146,  147,  155,  211,  457,  504,  510-525. 

IH 

Màcon,  87,  88, 223, 230,  238.  —  (Comté 
dej,  79,  230,  238. 

Madeuc  (Roland),  500. 

Maguelonne  (l'évêque  de),  492,  564. 

Mahé  (J  ),  464. 

Mahomet  II,  447. 

Maignelais  (Antoinette  de),  414,  427. 

Maillé  (Péronnelle  de),  438.  —  (Le  s. 
de),  519. 

Maillezais  (l'évêque  de),  492. 

Mailly-le-Ghâteau,  128,  129,  283. 

Maine  (le),  22-24,  50,  79-82,  94,  107, 
111-117, 122,  123,  126,  138,  139,  147- 
150, 177-180,  192,  197,  2:9,  343,  344, 
348, 391,  404,  433,  493,  515,  516,  532. 

Maisoncelles,  41. 

Malesherbes,  136,  268,  269. 

Malestroit,  116.  —  (Geoffroy  de),  42, 

—  (Guill.  de\  évêque  de  Nantes, 
431,  463.  —  (Jean  de),  évêque  de 
Nantes  et  chancel.  de  Bret.,  52,  56, 
120,  125,  185,  188,  197,  208,  314, 
396,  410,  415,  417,451,  438,  462, 
502,  503,  539.  —  (Jean  de),  écuyer 
de  Richemont,  239,   267,  291,  658. 

—  (Phil.  de),  410,  446,  449,  462, 
638. 

Malet  (J.  de),  s.  de  Graville,  maître 

des  arbalétriers,  108, 145,  198,  220, 

242,  428,  531. 
Malicorne,  123,  127. 
Malleville,  275. 
Malo  (roi  d'armes),  186. 
Malortie  (Robin),  400. 
Manouvriers  (payement  de),  639. 
Mantes,  62,  273,  281,  311,   313,  322- 

323,345,370,  397,  482.  —  (Le  comté 

de  ,  128. 
Mantoue  (le  congrès  de),  432. 
Marans,  181-186. 

Mardi  (Edm.  Mortimer,  c.  de),  63. 
Marchenoir,  107,  147,  173. 
Marcoussis,  249. 
Maréchaux  (les),  437,  497,  504,  503. 

—  (Le  prévôt  des),  214. 
Marennes,  427. 

Marets  (Th.),  621. 

Mareuil,  330. 

Marie,  316.  —  (La  comtesse  de),  568. 


Marmande,  339. 

Marmoutiers,  50, 

Marne  (la),  241,  292-95. 

Martigny,  548. 

Martin  (Adam),  592.  —Martin  V,  70, 
195. 

Martineau,  222,  —  (Aimery),  556,  557. 

Masselin  (J.),  363, 

Matas  (Louise  de),  485. 

Matefelon,  220,  489. 

Mauléon.  Voy.  Ghatillon-s.-Sèvre. 

Mauny  (Ch.  de),  40,  493.  —  (Guil- 
laume de),  123.  —  (Olivier  de), 
117.  —  (Le  s.  de),  409, 

Maure,  214, 

Mautravers  (le  s.  de'.  Voy.  Akondel 
(le  c.  d'). 

Mayenne,  108,  113,  393. 

Mazères,  262. 

Meaux,  64,  257,  264  et  s.,  275,  281, 
287-89,  292,  293,  296,  317,  319,  560, 
566,  569.  —  L'abbaye  de  Saint-Fa- 
ron,  près  de  Meaux,  292.  —  (Le  bailli 
de),  264,  607.  —  (Les  Cordeliers), 
près  de  Meaux,  292,  —  La  porte  de 
Cornillon,  à  Meaux, 292.—  (Le  Mar- 
ché de),  64,  292-97.  —  (La  vicom- 
tesse de),  548.  Voy.  Sièges. 

Meel  (Olivier  de),  389,  428-430. 

Mehun-s.-Yèvre,  36,  69,84,  102,  113, 
116,  127. 

Meilhan,  335. 

Melle,  154,  306,  307,  340,  563. 

Melun,  26,  38,  56,  58,  64,  196,  199, 
212,  221,  222,  241,  276,  442,  470.  — 
(Marguerite  de),  487  —  (Marie  de), 
438, 

Mende,  612, 

Mendiants  (ordres  et  frères),  442, 
443. 

Mérindol  (ou  Mirandol),  99,  104,  307, 
509. 

Merle  (J.  de),  225. 

Merlin,  43,  53. 

Mervent,  39,  49,  144,  151,  193,  220, 
488,  599,  646-48. 

Meryng  (W.),  58. 

Meslay,  148. 

Mesmeau  (J.),  624,  626. 

Messac,  406,  628. 

Messins  (les),  215,  348,  350,  357,  460. 

Metz,  215,  216,  349-51.  —  (L'archi- 
diacre de),  229.  —  Expédition  dt> 
Charles  VII  contre  Metz,  350-51. 

Meulan,  72,  233-37,  241,  261,  268, 
323-23,  482,  361. 

Meung,  162,  167,  170-71. 

Mézières  (Seine-et-Oise),  268. 

Midi  (le),  139,  173,  269,  281,  332, 
333,  341,  404.  —  (La  noblesse  du), 
217. 

Mignot  (L.),  140. 

Milan  (le  duc  de),  76,  196. 


INDEX  ALPHABETIQUE 


689 


Milet  (J.),  secret,  de  Richement,  532, 
582,  583,  641. 

Milet  de  Cliampressy,  104. 

Milices  communales,  98. 

Milly  (château  de)  341,  342. 

Mineurs  (Guill.),  532. 

Mineurs  (payement  de),  636. 

Moisen  (L.),  192,  461. 

Mollens  (Philib.  de),  532. 

Moncontour  (en  Bretagne),  387,  388, 
—  (Les  s.  de),  11-13. 

Mondet  (B.),  654. 

Mondoubleau,  127,  147. 

Monnaies  (les),  556,  644.  —  (La  cour 
des),  263.  —  (Le  maître  des),  507, 
508,  557. 

Monnypeny  (Guill.  de),  400. 

Montagu  (Thomas),  c.  de  Salisbury, 
56,  63,  77,  106-108,  113,  114,  118, 
123,  138,  158,  162,  163,  178,  240, 
266,  501,  502,  517,  519. 

Montaigu,  317.  —  (J.  de),  archev.  de 
Sens,  20.  —  (J.  de),  gr.  maître 
d'hôtel  de  Charles  VI,  14,  249. 

Monlargis,  37,  113.  138  et  s.,  145-47, 
191,  193,  198,  262,  263,  270,  277, 
280,  448,  449,  524.  —  (Délivrance 
de),  145-48. 

Montauban  (Artur  de),  378,  379,  383, 
388.  389,  396,  428-30,  628,  631.  — 
(Bertrand  de),  40,  42.  —  (Guill.  de), 
59,  85,  379.  —  (Jean  de),  368,  469, 
470.  -  (Robert  de),  108,  132,  166. 

Montbard,  76,  83. 

Montbazon,  427,  633,  640. 

Montbéliard,  291,  359. 

Moatberon  (Fr.  de),  s.  de  Maulévrier, 
519.  —  (Jacques  de),  183. 

Mont-de-Marsan,  388. 

Montdidier,  230,  548. 

Montépilloy,  175. 

Montereau,  52,  56,  230,  257,  262,  263, 
270-76,  289,  319,  562,  569.  —  (Le 
crime  de),  52,  89,  114,  130,  228, 
230.  Voy.  Sièges. 

Montfaucon  (en  Auvergne),  209. 

Montferrand,  307.  —  (Bérard  de), 
72    82    272 

Monîfort,  60,'  107.  —  (L'Amaury),  57, 
58,  207.  —  (Le  héraut),  180.  —  (Jean 
de),  Voy.  Bretag.ne.  —  (Jeanne  de 
Flandre,  comtesse  de),  53.  —  Les 
Monîfort,  4,  9,  10,  11,  14,  53,  327, 
386,  463.  Voy.  Bretagre. 

Montgommery  (J.  de),  81,  107,  123. 

Montigny-le-Roi,  259. 

Montils-lès-Tours,  196,  431,  435,  437, 
621,  624,  635. 

Montivilliers,  236,  311,  569. 

Montjean  (le  s.  de),  519. 

Montjoye  (le  héraut),  160,  596. 

Monllhéry,  17,  249. 

Montluçon,  122,  128,  130,  209,  522-26. 

RlCHEMONT. 


Montluel,  116,  129,  506.  —  (Conféren- 
ces de),  88,  97. 

Montmayeur  (G.  de),  90. 

Montmirel  (R.  de),  643. 

Montmorency  (Ch.  de),  461,  462,  656, 
658. 

Montpellier,  269,  331,  332,  394. 

Montréal,  290,  338. 

Monlrésor  (le  château  de),  201. 

Montreuil-sur-Mer,  219,  240,  548. 

Montrichard,  181,  525. 

Mont-Sain t-.Michel  (le),  81,  107,  110, 
118,  137,  147,  163,  178,  221,  322. 
369,  396-99,  403,  415,  5i0,  569,  614! 
—  (L'abbé  du),  18. 

Montsurs,  123,  148. 

Morel  (R.),  642. 

.Moreuil,  548. 

.\Iorhier  (Simon),  145, 221,  247-50,  281 . 

Morillon  (Geoffroy)  ,  245 ,  286.  — 
(Mahé),  222,  243,  245,  263. 

Mortagrie,  75,  107,  548. 

Mortain,  385,  393,  396,  639.  —  (Le 
comté  de),  29,  104,  197.  —  (Le 
comte),  voy.  Anjou  (Charles  d'). 

Mortemer,  571. 

Morvilliers  (Ph.  de),  71. 

Moselle  (la),  350. 

Moufflaine  (le  bois  de),  près  d'Ar- 
ras,  223. 

Moulin  (près  de  Metz),  350. 

Moulins,  129,  130,  522. 

Moulins-Engilbert,  87,  218. 

Mouy  (le  s.  de),  551. 

Moyencourt,  548. 

Moynier.  106,  113,  128. 

Mugron,  338. 

Mundeford  (Et.),  392,  399. 

Murât  (J.  de),  494. 

Namur,  548. 

Nancy,  351,  353,  355,  600,  617. 

Nantes,  5,  27,  71,  76,  98,  110,  120. 
137,  183,  185,  188,  208,  318,  347, 
380,  384,  386,  425,  426,  429,  435, 
444  et  s.,  453,  477,  480,  501,  649.  — 
(Le  doyen  de),  515.  —  (L'église 
Saint-Pierre  de),  84.  —  (L'évêché 
de),  451.  —  (L'évêque  de),  186. 

Nanterre  (le  prieur  de),  286. 

Nanteuil  (Marguerite  de),  314. 

Nanteuil-la- Fosse,  260. 

Naples  (le  royaume  de),  109.  —  (Jeanne 

11,  reine  de),  12.  —  Naillac  (Guill. 
de),  130.  —  (Jeanne  de),  130. 

Narbonne  (le  vicomte  de),  197,  306, 
432.  —  (L'archevêque  de).  Voy.  Har- 
couKT  (Louis  de). 

Narcy,  215. 

Navarre  (la),   430.   —   (Béatrix  de), 

12.  —  (Charles  II,  dit  le  Mauvais, 
roi  de),  2,  6,  36,  52,  482.  —  (Ghar- 

44 


690 


INDEX   ALPHABETIQUE 


les  m,  roi  de),  7,  12,  13,  36,  37, 
432,  482,  483.  —  (Isabelle  de),  com- 
tesse d'Armagnac,  333,  432,  448.  — 
(Jean  II,  roi  de),  196.  —  (Jeanne 
de),  duch.  de  Bret.,  reine  d'Ang.  et 
mère  de  Richemont,  1-6,  24,  45,  46, 
52,  55,  58,  65,  476-79,  665.  —  (Pierre 
de),  c.  de  Mortain,  8,  13,  25,  26, 
29,  44,  482.  —  (La  perle  de),  102. 

Neauphle-le-Château,  427,  450. 

Nemours,  271,  279.  —  (Duché  de),  36- 
39,  482,  483. 

Nérac  338. 

Nesle'(le  château  de),  283,  571,  572. 

Neuchâtel  (Thiébaud  de),  359. 

Neuchâtel,  398. 

Neufville  (Nie.  de),  245,  251. 

Neuilly-l'Evêque,  410,  622. 

Neuvillalais,  207. 

Nevers  552.  —  (Conférences  de),  217- 
20.  224,  328,  341. 

Nevil  (Raoul),  c.  de  Westmoreland, 
7,  477,  478.  —  (William),  lord  Fal- 
combridge,  ou  Fauquemberge,  240, 
258,  266,  267,  27  i,  280,  281,  293, 
300,  311,  312,  319,  322-26,  333. 

Nicolas  V,  425,  430,  442,  443.  Voy. 
Sarzana  (Th.  de). 

Nicole  (B.),  494. 

Nîmes,  381. 

Niort,  304,  306,  330,  381,  599. 

Nivernais  (le),  22. 

Nobles  (les),  325,  362,  374,  375,  417. 

Nogaro,  338. 

Nogent-le-Roi,  147,  259.  —  (le-Ro- 
trou),  107,  147. 

Norbery  (H.),  405,  412,  413.  —  (Jean), 
322. 

Nord"  (le),  139,  340,  342. 

Normandie  (la),  22,  24,  40,  50,51, 
59,  64,  79,  94, 106,  111-117,  134,  138, 
139,  147,  156,  174,  175-78,  192,  206, 
217,  221-26,  235-42,  255,  268,  274, 
293,  294,  299,  311,  314,  322-26,  333, 
334-49,  366-69,  372,  373,  379,  380, 
392,  395,  413,  415,  418,  424,  429-41, 
462,  466,  482,  495,  502,  518,  529, 
532,  346,  553,  559,  562,  612,  618, 
624-26,  632,  634,  636,  740-45,  653, 
634.  —  (La  basse),  206,  263,  397, 
405,  414,  415,  421,  424,  429,  432, 
434,  466,  626,  627,  631,  644,  643. 
—  (La  haute),  398,  404,  424,  432, 
434.  —  (La  conquête  de  la),  362, 
365,  373,  391,  397  et  s.,  424.  — 
(L'échiquier  de),  437,  632,  641.  — 
(Les  évêques  de),  443. 

Normands  (les),  63,  81.  —  Les  insur- 
gés), 221.  —  (Les  navires),  43. 

Norwich  (l'évêque  de),  223. 

Noyers  (Hugues  de),  210,  492. 

Noyon,  548. 

Nyole,  649,  650. 


O 

0,  192,  193. 

Odon  (1'),  417,  418. 

Officiers  royaux  (les),  139,  160,  308, 
314,  341,  359,  362,  363,  460,  542, 
362,  606,  607,  609,  612,  628-38,  641, 

643,  646. 

Oise  (!'),  206,  241,  321,  323,  323,  547. 

Oldhall  (Guill.),  107,  127. 

Oleron,  427. 

Olonnes,  181. 

Orbec,  311. 

Ordonnances  sur  l'armée.  Voy.  Armée. 

Orléanais  (!'),  26,  94,  95,  107,  173. 

Orléans,  38,  134,  138,  145,  156,  160- 
167,  172,  212,  263,  296,  297,  444, 
449,  559,  609.  Voy.  Sièges. 

Orléans  (la  maison  d'),  93, 664.— (Char- 
les, duc  d'),  8-42,  51,  33,  61,  72,  77, 
78,  115,  202,  205,  226,  234,  238,  257, 
270,  272,  279,  289,  296,  297,  303,  303, 

310,  314,  317,  318,  328,  3.30-33,  340, 
341,345,352-54,431,439-41,449,450, 
455,  438,  460,  480-85,  498,  581-83.  — 
(Jean  d'),  c.  d'Angoulême,  27,  30, 
202,  210,  212,  238,  270,  352,  334, 
397,  423,  429,  431,  439,  440.  —  (Jean, 
bâtard  d'),  c.  de  Dunois,  vn,  84, 
99,  104,  117,  143-48.  164,  167,  169, 
171,  187,  191, 193,  193,  200,  206,  210- 
213,  220-22,  235-38,  242-43,  251,  237, 
264, 272,  273,  276,  280,  303,  304,  307, 

311,  336,  340-43,  353,  366-71,  373, 387 
et  s.,  392-98,  404,  414-419,  421  et  s., 
431-34,  437-41,  430,  431,  438,  439. 
466,  467,  474,  488,  491,  493,  510,  531,' 
542,  543,  550,  568-71,  613,  624,  642, 

644.  —  (Jeanne  d'),  duch.  d'Alencon, 
13,  61,  187.  —  (Louis  1er,  duc  d'),, 
vu,  3,  8-16,  37,  61,  70,  84,  476,  477, 
498.  —  (Marguerite  d'),  comtesse 
d'Etampes,  61,  222,  239,  439,  451, 
470,  498.  —  (Philippe  d'),  c.  de  Ver- 
tus, 18,  28,. 30,  31,  36,  49,  485.  — 
(Le  parti  d'),  20,  21,  26,  31.  —  (Les 
princes  d'),  21-24,  31. 

Orme  (Et.  d'),  238,  462. 

Orne  (!'),  417,  418. 

Orval  (les  s.  d').  Voy.  Albret  (Ama- 

nieu  d')  et  (Guill.  d'). 
Orville,  268. 
Ottomans  (les),  437. 
Ouest  (1'),  280,  330. 
Ouistreham,  420. 
Ouschard  (J.),  118,  135. 
Ouse  (1'),  477. 
Ouve  (1'),  415. 
Oysemont,  548. 
Owen  Glendowr,  9. 


Pailly  (J.   de),  dit  Forte-Epice,  219, 
283,  283,  308. 


INDEX  ALPHABETIQUE 


691 


Paimpol,  67. 

Paisnel  (Jeanne),  416. 

Paix  (la),  304,  506,  547,  552-55,  581, 
603,  619. 

Paix  avec  l'Angleterre  (la),  362,  395, 
433.  —  (Le  parti  de  la)  en  Angle- 
terre, 345-347;  —  en  France,  289, 
297. 

Palluàu,  327,  386,  426. 

Panais,  Panaisines,  527,  546. 

Pape  (le),  101,  149,  219,  224,  228, 
237,  239,  289,  297,  326,  345,  443, 
445,  432,  434,  556.  —  (Les  ambas- 
sadeurs du),  226.  —  (Les  légats 
du),  534. 

Papin  (Guill.),  648. 

Parcaut  (P.),  566. 

Pardiac  (le  c.  de).  Voy.  Armagnac 
(Bernard  d'). 

Parenlucelli  (Th.),  dit  Th.  de  Sar- 
zana,  227. 

Paris,  6,  8,  10,  13,  17-22,  24,  27-38, 
't8,  30,  58,  62,  64,  66-68,  71,  74-78, 
85,  86,  94,  107,  134,  145,  147,  168, 
170,  174-76,  178,  194,  220-222,  233, 
236,  237,  240-52,  271,  274  et  s.,  283- 
287,  289,  295-99,  304,  308,  311-14, 
319-32,  370,  381,  434,  441-44,  472, 
477,  482,  484,  490,  300,  530,  532,  557- 
361,  364,  567-69,574,  576,  587,  593, 
607,  608,  645,  649,  652,  655.  —  Les 
archers  de,  274,  276.  —  L'armée  de, 
258.  —  La  bastille  Saint-Antoine,  à, 
38,  238,  239,  247-52,  264.  —  Les  Ber- 
nardins, à,  443.  —  Le  Chàtelet  de, 
242,  286,  329,  560,  562,  567,  574,  576, 
395,  596,  609.  —  Le  clergé  de,  256, 
264,  276.  —  Le  collège  de  Navarre, 
à,  37.  —  Le  collège  de  Saint-Esprit- 
en-Grève,  à,  587.  —  La  Conciergerie 
de,  280,  574,  578-80.  —  La  confrérie 
aux  Bourgeois,  à,  589.  —  La  confré- 
rie de  N.-D.  de  Recouvrance,  à,  587, 
389,  396.  —  La  confrérie  de  N.-D. 
de  Sainte-Conception,  à,  589.  —  La 
confrérie  de  saint  Lubin,  à,  589.  — 
Le  conseil  de,  264.  —  Le  conseil  de 
Charles  VII,  à,  261,  264, 266,  290, 559, 
360.  —  La  croix  du  Trahoir,  à,  31. 

—  Les  curés  de,  442.  —  Les  dépu- 
tés de,  228,  229,  236,  260,  280.  —  La 
domination  anglaise,  à,  264.  —  Les 
échevins  de,  253,  276.  —  Eglises  : 
des  Billettes,  588  ;  des  Blancs-Man- 
teaux, 588;  des  Célestins,  37,  588; 
desinnocents, 248;dela  Madeleine, 
389;  Notre-Dame,  31,  32,  37,  247, 
248,  251,  232,  260,  264,  276,  277,  329, 
462,  589;  N.-D.  des  Carmes,  329, 
387,  589,  596;  Sainte-Catherine-du- 
Val-des-Ecoliers,  588;  Sainte-Cha- 
pelle, 264;  Saint-Paul,  249,  588,  589. 

—  Entrée  et  séjour  de  Charles  VII 


à,  276,  277.  —  Etat  de  Paris  en  1437, 
p.  278.  —  L'évêque  de,  32,  260,  264, 
443,  575,  577.  —  Le  grenier  à  sel  de, 
256.  —  Grève  (la  place  de),  à,  248.  — 
Les  Halles  de,  31,  36,  56,  57,  66,  283, 
426-28.  —  L'Hôtel-Dieu  de,  587.  — 
Hôtels  :  de  la  Grange-aux-Merciers, 
267;  de  la  Petite-Bretagne,  178;  du 
Porc-Epic,  249,  329;  de  Nesle,  65, 
381  :  Saint-Paul,  8,  24,  32,  38,  42,  39, 
64,  69,  72,  233,  249,  295.  —  L'Hôtel 
de  Ville  de,  31,  57,  242,  251,  284.  — 
Le  marché  de  la  Madeleine,  à,  251. 

—  La  mortalité  à,  284.  —  Le  palais 
de  justice  de,  32.  —  Le  parlement 
de,  voy.  Parlement.  —  Le  pont  N.- 
Dame,  à,  248.  —Portes:  Baudet,  248  ; 
Saint-Antoine,  267;  Saint-Denis, 
32,  246,  472,  476;  Saiul-Honoré,  32; 
Saint-Jacques,  21,  247,  278,  313; 
Saint-Michel,  247;  de  Seine,  20.  — 
Le  prévôt  de,  70,  264,  283,  294,  308, 
349,  559,  566,  577,  580,  605,  607,  624. 

—  Le  prévôt  des  marchands  de,  70, 
253,  276.  —  La  prévôté  de,  283,  624, 
625.  —  Les  Quinze-Vingts,  587.  —  La 
réduction  de,  233-57,  260-69, 460, 537- 
560,611.  —  Rues  :  Hautefeuille,  249; 
du  Jour,  ou  de  Jouy,  249  ;  Saint- An- 
toine, 562  ;  Saint-Jacques, 247  ;  Saint- 
Paul,  562.  —  Les  religieux  de  Saint- 
Antoine,  à,  588;  de  Sainte-Croix, 
588.  —  L'université  de,  32,  70,  224, 
252,  236,  261,  268,  442,  443.  —  La 
vicomte  de,  256,  261.  —  Environs 
de  Paris:  L'abbaye  de  Longehamps, 
439;  Montmartre,  21,  32;  N.-D.  des 
Champs,  245,  247;  Le  Roule,  32; 
Saint-Lazare,  276;  Saint-Marcel,  17, 
245:  Saint-Remy,  20. 

Parisiens  (les),  17,  21,  31,  32,  77,  220, 
242,  244,  246-52,  260-62,  270,  271, 
277,  281,  285,  287,  289,  311. 

Parlement  de  Paris  (le),  70-72,  77, 
140,  194,  241,  232-56,  264,  269,  278, 
280,  312,  341,  352,  374,  381,  384, 
437  et  s.,  451,  484,  486,  498,  506- 
509,  519,  562,  563,  568,  575-79,  595, 
600-603,  641,  643. 

Parlement  de  Poitiers  (le),  155,  163, 
165,  181,  190,  192,  220,  223,  260-63, 

493,  508,  536,  542. 

Parlement    de   Toulouse    (le) ,    308. 

Parlement  (les  registres  du),  77,  86, 
165. 

Parthenay,  23,  40,  41,  151,  155-58, 
161,  164,  174,  177  et  s.,  184,  190, 
192,  198,  200,  207,  212,  220,  222, 
239,  262,  263,  329,  330,  340,  345, 
352,  377,  380  et  s.,  395,  403,  424, 
429,  431  et  s.,  441-44,  451,  486-89, 

494,  542,  565,  585,  599,  601,  602, 
616,  618,  624,  647,  648,  656-38.  — 


692 


INDEX   ALPHABETIQUE 


(Jeanne  de),  48S-88.  —  (Marie  de), 
485-88.  —  (Michel  de),  413,  426.  — 
(Seigneurie  de),  39,  151,  190,  220.  - 
Voy.  Sièges.  Traités. 

Pasqiiier  (évêque  de  Meaux),  292. 

Pfttay,  m.—  (Bataille  de),  171-74. 

Paumyer  (J.),  516. 

Payen,  658. 

Paysans  (les),  341. 

Peiresc,  471. 

Penansac,  569. 

Penhoet  (le  s.  de),  9,  85,  185. 

Penthièvre  (le  comté  de),  426. 

Penthièvre  (les),  4  et  s.,  14,  53-61, 
68,83,90,102,109,111,121,155,377, 
386,  426,  463,476.  — (Alain  Fergant, 
comte  de),  477.  —  (Ch.  de  Blois, 
comte  de),  1,  2,  12.  —  (Charles  de 
Blois,  ou  de),  baron  d'Avaugour, 
53,  59,  103,  190,  327,  426,  494,  495, 
496.  —  (Eudon,  comte  de),  477.  — 
(Françoise  de),  444.  —  (Guill.  de), 
52,  85,  89,  90,  99,  102,  386,  444.  — 
(Jean  I*'  de  Blois,  comte  de),  2,  3,  9. 

—  (Jean  II  de  Blois,  s.  de  Laigle, 
comte  de),  2,  3, 15,  53,  59, 102,  121, 
154-58,  381,  386,  394,  425,  426,  431, 
437,  495,  533.  —  (Jeanne  de),  1,  2. 

—  (Nicole  de),  426-  —  (Olivier  de 
Blois,  comte  de),  9  et  s.,  14,  15, 
17,  21-25,  36-38,  53,  55,  59,  102, 121, 
494,  495.  Voy.  Brosse  (Jean  II  de), 
CussoN  (Marguerite  de),  et  le  ta- 
bleau généal.  des  ducs  de  Breta- 
gne, p.  660-61. 

Perçant  (P.),  618. 

Perche   (le),  22,  127,  403,  437,  517, 

530. 
Périgord    (le),    331.     —     (Archam- 

baud  VI,  c.  de),  485,  486.  —  (Bru- 

nissande  de),  485,  486. 
Periou  (J.),  479. 
Pernant,  571. 
Pernaulx  (P.),  494. 
Péronit,  6. 

Péronne,  75,  109,  548,  556. 
Petit  (J  )    11. 
Peuple  (le),  307,  324,  346,  356,  361,363, 

369,  373,  407,  432,  466. 
Pevensey  (château  de),  58. 
Peyto  (Guill.),  319,  399. 
Picard  (le  petit),  259. 
Picardie  (la),   94,   174-77,  210,   213, 

257,  268,  334,  548,  568. 
Picart,  566. 
Picquigny,  548. 
Pie  II,  452,  472. 
Pierrefrite  (Roger  de),  284,  285,  312, 

573,  576,  577. 
Pierres  à  canon,  546. 
Pigache  (Th.),  139,  245. 
Pillards,  pilleries,  214,  349,  356,  360, 

363,  369,   506,    511,   512,   541,  545, 


560,  561,  566,  573,  574,  605  et  s., 
616,  619,  644. 

Pinon  (L.),  év.  d'Auxerre,  223,  227, 
232. 

Pionniers  (payement  de),  639. 

Pirou,  400. 

Pisan  (Christine  de),  455. 

Pithiviers,  139,  143. 

Plaisance  (château  de),  451. 

Pleurs  (château  de),  106. 

Ploermel,  340. 

Pluscalec  (H.  de),  69.  —(Maurice  de), 
108,  330. 

Pocaire  (R.),  178. 

Podiebrad  (G.),  447. 

Poissy,  245,  268,  323,  324,   558,  559. 

Poitiers,  21,  48,  50,  100-112,  126,  140, 
150,  158,  159,  173,  181,  200,  242, 
263,  306,  341,  381,  509-517,  522-24, 
534,  535,  601.  —  (Assemblée  de) 
en  1443,  p.  341,  342.  —  (L'évêque 
de),  443,  492,  610,  616.  —  (Les  ha- 
bitants de),  158.  —  (Le  Parlement 
de),  voy.  Parlement. 

Poitou  (le),  22,  23,  30,  40,  48,  51,  56, 
61,  94,  101,  154,  157  et  s.,  166,  177, 
181-192,  200,  208,  219,  301-308,  327 
et  s.,  334,  340,  341,  347,  358,  366, 
381,  428,  433,  460-63,  486-90,  511, 
512,  540-44,  556,  585,  597-602,  610, 
611,  616,  618,  646.  —  (Le  comte  de), 
601.  —  (Le  sénéchal  de),  611,  630. 

Pons  (J.  de),  180,  330. 

Pontaubault,  300. 

Pont-à-Mousson,  351. 

Pont-Audemer,  333,  343,  397. 

Pontbriant  (H.  de),  481. 

Pont-de-1'Arche,  268,  312,  322,  323, 
394    517. 

Pont-'d'Ouve,  401. 

Pont-l'Evêque,  312,  322. 

Pont-Sainte-Maxence,  222,  257,  323, 
571. 

Ponthieu  (le),  219,  230,  258.  —  (Char- 
les de)  30.  Voy.  Dauphin  Charles  (lel. 

Pontoise,  21,  36,  58,  114,  241,  243-45, 
256,  257,  261,  266-68,  270,  274,  275, 
278,  281,  282,  287,  289,  296, 309,  319- 
27,  351,  561,  584.  —  Les  abbayes  de 
Maubuisson,  321-25,  et  de  Saint- 
Martin;  près  de  Pontoise,  321-23. 
—  Le  tour  du  Friche,  à  Pontoise, 
325.  Voy.  Sièges,  Traités. 

Pontorson,  3,  51,  59,  117,  118,  123, 
128,  134-139,  148,  172,  239,  476, 
527.  Voy.  Sièges. 

Ponts-de-Cé  (les),  126,  197,  527. 

Poolin(P.),517. 

Porhoet  (le  c.  de).  Voy.  Rohan  , 
(Alain  de). 

Port-de-Piles,  601. 

Port-Saint-Ouen,  595. 

Portsmouth,  405. 


INDEX   ALPHABETIQUE 


693 


Portugal  (Jean  I",  roi  de),  176,  196. 

—  (Isabelle  de),  duch.  de  Bourgo- 

gae,  176,  218,  220,  224,  229-32,  289, 

316,  317,  3oi. 
Pot    (Renier),   s.    de  La  Roche,   71, 

487. 
Pouancé,  185-8S,  207,  344,  538. 
Pouilly  (traité  de),  49,  31. 
Poussard  (Colas),  trompette  de  Ri- 

chemont,  464. 
Pouvoir  royal  (le),  326. 
Pouzauges  (le  s.  de),  49. 
Pragmatique  de  Bourges  (la).  280, 
Praguerie  (la),  283,  299,  302-303,  308, 

309,  313-18,  323  et  s.,  332,  334,  333, 

438,  464. 
Préaune  (le  bâtard  de),  637. 
Precigay  (le  s.  de),  383. 
Prévôts  (les),  372. 
Prigent  (Jean),  186.  —  (Et.),  636. 
Procureur  du   roi  (le),  542,  361-64, 

372-79,  598,  601,  603,  607,  608,  612, 

638,  641. 
Provence    (le    président    de).    Voy. 

LOUVET. 

Prye  (le  s.  de),  159,  160,  551. 
Pucelle  d'Orléans  (la).  Voy.  Arc  (J.  d'). 
Puiseux  (Colinet  de),  20. 
Puy-de-Cerre  (l'hôtel  de),  646-48. 
Puzignan  (la  seigneurie  de),  197. 


Quelen  (0.  de),  428,  446. 
Quercy  (le),  331. 
Quiefdeville  (Guill.  de),  530,  531. 
Quignon  (J.),  329,  395,  596. 


Raboteau,  649. 
Raguier  (Hémon),  482. 
Rambouillet,  81,  107,  139,  147,  130, 

207. 
Rambures,  198,  548.  —  (David  de),  33. 
Rampston  (Th.),    117,  118,  134,    172, 

336. 
Raoulet,  72. 

Raoulin  de  Mâcon,  320. 
Rapiout,  364,  563,  368,  571,  572,  577- 

80,  601. 
Ratault  (J.),   658.  —  (Archambaud), 

638. 
Ranlin  (Nie),  227,  234. 
Raye   J.  de).  247,  252. 
Razilly  (le  château  de),  384, 
Ré  (l'île  de),  181,  184,  185. 
Rebelles  (les),  20,  303-307. 
Rebours  A.),  626. 
Receveurs,   369,   507,   508,  614,  617, 

625,  645. 
Receveur  général,  633,  654. 
Redford  (H.),  418. 
Redon,  124.  163,  183,  191,  192,  328, 

383,  385,  397,  406,  545,  586. 


Regnault  de  Chartres.  Voy.  Char- 
tres. 

Régneville,  399. 

Reims,  168,  173,  174.  194,  214,  223, 
237,  238,  263,  273,  306,  316,  317,  463. 

—  (Les  habitants  de),  178. 
Rémission  (lettres  de),  282,  283,  357. 
Rémission    générale    pour  les   gens 

de  guerre,  337. 

Renier  (P.),  481. 

Renis  (Lyonnel),  9. 

Rennefort,  127. 

Rennes,  4,  26,  62,  63,  71,  117,  120, 
188-91,  340,  382,  387,  388,  395,  396, 
403,  425,  435,  445,  448,  456,  543,  628. 

—  (L'archidiacre  de),  313.—  (L'évê- 
que  de),  433.  —  (Marchands  de, 
384.  —  (Traité  de',  26. 

Re?sons-sur-Matz,  548. 

Restout,  643. 

Rethel,  328. 

Revigny,  213,  551. 

Rhin  (le),  348. 

Rhodes  (chevalier  de),  267. 

Ribemont,  348. 

Richmond,  477. 

Richemont  (le  comte  de),  connét.  de 
Fr.  Voy.  Bretagne  (Artur  de).  — 
(Le  comté  de),  3,  4,  7,  12,  14,  378, 
380,  477,  478. 

Ricze  (An t.),  479. 

Rieux,  379.  —  (François  de),  368,  371, 
572.  —  (Jean  II  de),  9,  184,  567.  — 
(Jean  III  de),  110,  181,  184.  — 
(Marie  de),  vicomtesse  d'Amboise, 
181,  183,  184,  191,  544.  —  (Pierre 
de),  dit  de  Rochefort,  marée,  de 
Fr.,  184,  208,  212,  213,  220,  221, 
235,  236,  239,  256,  264,  283,  295, 
454,  492,  530,  567,  568,  573,  667. 

Rigaut  (E.),  643. 

Rinel  (J.  de),  300,  530. 

Riom,  286,  289,  307. 

Ripaille,  224. 

Robessart  (J.  de),  415,  416. 

Rochechouart  (G.  de),  604.  —  (Jean 
de),  s.  de  Mortemart,  212,  493.  — 
(Louis  de),  223. 

Rochecorbon,  140. 

Rochefort  (sur  Charente),  192;  —  (sur 
Loire),  141;  —  (en  Yveline).  8, 113. 

—  (Jeanne  de),  184,  567.  —  (Le  sire 
de),  143. 

Rochester  (l'évêque  de),  56. 

Rohan  (la  maison  de),  439,  666.  — 
(Alain  VIII,  vie.  de),  10,  13,  37, 
148,  477,  331.  —  (Alain  IX,  c.  de 
Porhoet,  vie.  de),  85,  104,  110,  118, 
148,  180,  202,  212.  222,  387,  403,  430, 
438,  439,  445,  446,  312.  —  (Alain  de), 
c.  de  Porhoet,  fils  d'Alain  IX,  222, 
387,403.  —(Edouard  de),  40  42.— 

—  (Jeaa  II,  vie.  de),  438,  439.  — 


694 


INDEX   ALPHABETIQUE 


(Jeanne  de),  202,  214.  —  (Louis  de), 
chanc.  de  Bret.,  383,  388,  40S.  — 
(Marguerite  de),  femme  de  J.  de 
Beaumanoir,  12.  —  (Marguerite  de), 
comtesse  d'AngouIême,  397. 

Rolant,  642, 

Romagne,  239,  286. 

Rome,  82,  S68. 

Romilly,  175. 

Roos  (Rob.),  333,  338,  379,  380. 

Roses  (la  guerre  des  Deux\  418,  452. 

Roskill  (G.),  382. 

Rosnyvinen  (Guill.  de),  366,  387,  401, 

416,  614.  —(Jean  de),  200,  244,  314, 
337,  387,  461,462,  636. 

Rostrenen  (le  s.  de),  lient,  de  Ri- 
chemont,  133,  166,  167  et  s.,  173, 
183,  184,  208,  244,  237,  261-69,  292, 
294,  309,  461,  360,  570,  379,  580. 

Rouault  (Abel),  405,  406,  628,  629.  — 
(Joachim),  321,  359,  399,  404,  406, 

417,  420,  467,  628,  633.  —  (René), 
658. 

Rouen,  40,  50,  58,  60,  77,  107,  116, 
137,  139,  166,  175,  178,  185,  206, 
207,  229,  237,  240,  241,  230,  232,  256, 
272,  293,  295,  312,  319,  323,  323, 
343,  351,  394-98,  404,  418,  429,  432, 
434,  443,  495,  502,  517,  319,  532, 
563,  568,  581,  582,  613,  644,  645.  — 
(Le  bailli  de),  641.  —  (Les  bour- 
geois de),  404.  —  (Le  château  de), 
193. 

Rouergue  {le),  363, 

Rougne  (P.),  648, 

Roulet  (G.),  250. 

Rousseau  (J.),  266. 

Roussel  (Rob.),  389. 

Roussignol  (P.  et  Isabelle),  392. 

Routiers  (les),  78,  122,  210,  243,248, 
249,  235,  259,  263,  264,  270,  281, 
282,  285,  299-309,  313,  324-326, 
331,  335,  348,  354  et  s.,  359,  363, 
369,  371,  569;  —  (anglais),  349.  — 
(Capitaines  de),  314,  315,  341,  349. 

Rouvray  (la  bataille  de),  164,  172, 
331. 

Rouxél  (Rob.),  58. 

Roy,  544. 

Royan,  338. 

Royaume  de  France  (le),  162, 182,357. 
—  (Le  recouvrement  du),  280. 

Roye,  73,  230,  548. 

Rozoy,  348. 

Rue,  221,  222,  237,  258, 

Rumigny,  548. 

Rygmayden  (G.),  207. 

Sablé,   108,  109,  122,   193,  208,  209, 

314,  —  (Traité  de).  61-66, 
Sacre  des  rois  de  Fr.  (le),  601. 
Saint-Aignan,  167.  —  (M.  de),  637. 


545, 


261, 

472, 


128, 


Saint-Albans  (bat.  de),  442. 

Saint-Amand,  73. 

Saint-André  de  Brabant,  590. 

Saint-André  (la  Croix  de),  246. 

Saint-Aubin-du-Cormier,  456. 

Saint-Bricon,  528. 

Saint-Brieuc,  10. 

Saint-Calais,  123. 

Sainl-Céneri,  192,  193,  206,  207, 
346. 

Saint-Chartier  (le  s.  de),  481. 

Saint-Claude,  390, 

Saint-Clément   (les  grèves  de),  407. 

Saint-Cloud,  20-22,  249,  314,  338,  359. 

Saint-Denis,  17  et  s.,  22,  32-37,  38,  39, 
175,  222,  233-36,  243-43,  249,  268, 
269,  276,  286,  293,  320-24,  568,  371. 

—  (L'abbaye  de),  20.  —  La  tour 
du  Salut,  ou  du  Venin,  à  Saint- 
Denis,  243,  244,  249. 

Saint-Evroult,  192,  193. 
Saint-Fiacre-en-Brie,  590. 
Saint-Gengoux,  230. 
Saint-Germain    (en  Laye),  241, 

264,  286,   287,  296,   312,   319, 

361  ;  —  (sous  Cailly),  258. 
Saint-Gilles  (Guill.  de),  166. 
Saint-Guillaume-de-Mortain,  619. 
Saint-Jacques  (bataille  de),  351. 
Saint-James-de-Beuvron,  117-123, 

135-38,  148,  192,  239,  301,  385,  386; 

393.  396,  313.  619. 
Saint-Jean  (le  feu  delà),  284. 
SainWean    (Regnault  de),  222,  233, 

568. 
Saint-Lo,  398-400,  404-414,  432,  464. 

621,  622,  630.  —  (Le  sénéchal  de); 

630. 
Saint-Maigrin,  394. 
Saint-Maixent,  306,  307,  330,  340,  363. 

—  (L'abbé  de),  307,  334. 
Saiut-Malo,    29,   79,  378,  432,  478.  — 

(L'évêque  de),  531. 
Saint-Mars  (Huet  de),  582. 
Saiut-Martin  (Th.  de),  646. 
Saint-Mathurin  de  Larchampt,  590. 
Saint-Maur,  285. 
Saint-Michel  (le  mont).  Voy.  Mont- 

Saint-Michel. 
Saint-Mihiel,  216,  316. 
Saint-Nazar  (J.  de),  494. 
Saint-Omer,    199,  257,    289,   297.   — 

(Conférences  de),  297. 
Samt-Ouen,  20,  33,  148. 
Saint-Pierre-de-Vauvray,  323. 
Saint-Pol  (le  c.  de).  Voy.  Luxembourg. 
Saint-Port  (conférences  de),  199. 
Saint-Pourçain,  440,  441. 
Saint-Privat-la-Montagne,  350. 
Saint-Quentin,  41,  223,  230,  240,  317 

319,  348,  584.  —  (Le  village  de),  344 
Saint-Remy-au-Plain,  22. 
SaintrRémy  (le  héraut),  226. 


INDEX  ALPHABETIQUE 


695 


SaiQt-Riquier,  219,  240,  548. 
Saint-Sauveur-le-Vicomte,  400,   402, 

415,  416,  628,  634. 
Saint-Seine,  7. 
Sainl-Sever,  335-340,  458. 
Saint-Simon  (Gilles  de),  chambellan 

de  Richemont,  212,  215,  216,  236, 

241,  311,  314,  419,  461,  351,  656,  638. 
Sainl-Sulpice  (la  seigneurie  de),  331. 
Saint-Svmphorien  d'Auzon,  210,  291. 
Saint-Vaast  (labbaye  de),  223,  224, 

229,  232.  —  (L'abbé  de),  223.  Voy. 

Ahras. 
Saint-Vaast-la-Hougue,  434. 
Saint-Valéry  (en  Caux),  206;  —  (sur- 
Somme),  258,  548. 
Saint-Vallier  (le  s.  de),  308. 
Saint-Vincent  (l'église),  à  Dun-le-Roi, 

592.  —  (Le  mont),  près  de  Laon, 

212,  213. 
Saint-Yon  (J.),  247,  252. 
Sainte-Ampoule  fia),  96. 
Sainte-Bazeille,  339. 
Sainle-Catherine-de-Fierbois,  583. 
Sainte-Croix  (le  cardinal  de).  Voy. 

Albekgati. 
Sainte-Hermine,  141,  154,  330. 
Sainte-Ménéhould,  214,  260,  277,  285, 

330,  563-65. 
Sainte-Néomaye,  164,  340,  363. 
Sainte-Sévère  (le  s.  de).  Voy.  Brosse 

(Jean  de). 
Sainte-Suzanne,  108,  113,  147,  300. 
Saintes,  330. 
Saintonge  (la),  94,  154,  164,  181, 184, 

188,   189,  192,  301,    325,   330,  366, 

368,540,  541,  646. 
Saintrailles  (Poton  de),  vu,  75,  145, 

171,  172,  180,  194,212-216,  221,  223, 

226,  237,  240,  243,  256,  237,  273,  280, 

282,  304,  307,  312,  319-21,  324,  331, 

333,  349,  330,  397,  417,  551. 
Salazar,  320,  326,  341. 
Saligny  (la  dame  de),  526-29.  —  (J. 

Lourdin  de),  328-29. 
Salisbury  (le  bâtard  de),  187.  —  (La 

comtesse  de),  86.  —  (Le  comte  de). 
.    Voy.  MoNTAGU  (Th.  de). 
Salmon  (P.),  430. 

Salut  (la  tour  du).  Voy.  Saint-Denis. 
Salvaiu  (J.),  123,  137,  207,  517. 
Sandres-Broquart,  628,  629,  637. 
Sandwich,  432. 
Sangler  (poursuivant  de  Richemont), 

582. 
Sansoy-Pasquier,  636-39. 
Santerre  (le),  289,  311. 
Saône  (la),  270. 
Sarmet  (Ant.  de),  370. 
Sarrebrûck  (Rob.  de),  damoiseau  de 

Commerey,  214-216,  259,  265,  266, 

285,  286,  313-317,  350,  551.  552. 


Sarzana  (Th.),  pape  sous  le  nom  de 
Nicolas  V,  227. 

Saulnières  (J.  de),  656,  658. 

Saulx  (Mille  de),  266,  267. 

Saumur,  48,  52,  108, 110,111, 122,  123, 
157,  180,  184,  207,  327,  332,  340,  344, 
521,  636-58.  —  (L'abbaye  de  Saint- 
Florent,  à),  110, 111.  —  (L'entrevue 
de),  110,  114.  —(Traité  de),  11. 

Sauvage  (P.),  481.  —  (de  Fermain- 
ville),  109. 

Saveuse  (Guill.  de),  42,  80. 

Savoie  (la),  97,  440,  446.  —  (La  mai- 
son de),  95.  —  Amédée  Vil,  comte 
de),  12,  14,  75.  —  (Amédée  VIll, 
comte,  puis  duc  de),  vu,  12,  75,  77, 
80,  84-90,  95,  99,  103,  106,  111,  114, 
118,  121,  124,  129,  133,  157,  175, 
179,  194-201,  210,  211,  217  et  s.,  224, 
262,  394,  505.  —  (Amédée  de),  fils 
de  Louis  I",  262.  —  (Charlotte  de), 
femme  du  dauphin  Louis,  433.  — 
Louis  I".  comte  de  Genève,  duc 
de),  211,  262,  333,  433,  440,  441.  — 
(Marguerite  de),  reine  de  Sicile,  193, 
211. 

Savonnières  (J.  de),  636. 

Scales  (Th.  de),  81,  107,  134,  137,  170, 
172,  187,  190,  221,  235,  240,  241,  256, 
274,  293,  300,  312,319,  322,  324,  3't3. 

Sceau  (le  grand),  508. 

Scel  (la  cour  du),  647. 

Scel  des  obligations  (le),  654. 

Schisme  (le),  384. 

Secillon  (J.),  618. 

Secondiguy,  39,  220,  489. 

Sée  (la),  300. 

Séez,  438. 

Seine  (la),  21,  175,  206,  210,  236,  241, 
243-47,252,268,  273,  295,  311,  312. 
314    323  341. 

Selles-en-Berry,  97,  102,  103,  155-67. 

Sélune  (la),  300. 

Semuf  (Girard  de),  573. 

Senlis,  33,  35,  68,  175,  178,  212,  223, 
236,  256,  257,  261,  268,  319,  320, 327, 
362,  559-61,  384.  —  (Le  bailli  de), 
264,  607. 

Sénéchaux  (les),  373,    374,  497,  508. 

Seneterre  (le  bâtard  de),  212. 

Senonches,  81,  107. 

Sens,  20,  36,  179,  238,  270,  271.  — 
(L'archev.  de),  90.  —  (Le  bailli  de^. 
137.  Voy.  Troissi  (J.  de). 

Sergents,  571,  637-39. 

Sérisy  (l'abbé  de),  11. 

Serre  (la),  547. 

Sévérac  (le  marée,  de),  90,  116. 

Sévestre  (J.),  164. 

Sézanne,  106. 

Sienne  (la),  399. 

Sièges  :  —  d'Arras,  34  ;  —  d'Avranches, 
298-304,310,389,414,582;  — de  Beau- 


696 


INDEX   ALPHABETIQUE 


demont-en-Vexin,  274;  —  de  Bour- 
ges, 23,  26;  —  deCaen,  417-20,635- 
638;  —  de  Cherbourg,  420,  421,  637- 
640;  — deCompiègae,33,  194;  — de 
Creil,  319  :  —  de  Dax,  336,  337  ;  -  de 
Dieppe,  342-44;  —  de  Fougères,  402, 
403;  —  de  Gavray,  401,  402;  —  de 
Lagny,  193,  197;  — de  La  Gravelle, 
148,  149;  —  du  Mans,  392,  393;  — 
de  Meaux,  64,  289-98,  466,  580;  — 
de  Montargis,  145-48,  530-32,  542, 
563-65  ;  —  de  iMontereau,  270-75, 279, 
280,  291,  292,  562  ;  —  du  Mont  Saint- 
Michel,  81, 107,  110, 163, 178,  221  ;  — 
de  Moynier,  106,  113,  128;  —d'Or- 
léans, 138,  163,  165;  —  de  Parthe- 
nay,  40,  49;  —  de  Pontoise,  320- 
26;  —  de  Pontorson,  135-38;  —  de 
Pouancé,  187, 188;  —  de  Sillé,  207- 
209,  —  de  ïancarville,  274;  —  de 
Saint-Céueri,  206,  207;  —  de  Saint- 
Denis,  235,  236; —  de  Saint-James- 
de-Beuvron,  118,  120,  396;  —  de 
Saint-Sever,  335,  336;  —  de  Sois- 
sons,  33,  34;  —  de  Valognes,  416; 

—  de  Vire,  413,  630,  631. 
Sigisœond  (l'empereur).  Voy.  Luxem- 
bourg. 

Sillé-le-Guillaume,  24,   107,  207-209. 

—  (La  journée  de),  208,  209. 
Simon,  564,  573,  578,  579. 
Sodoiers,  eu  Soudoyers,  505,  548. 
Soissonnais  (le),  139,  264. 
Soissons,  61,  319.  —  (Siège  de),  33,  34. 
Soley  (Et.  de),  494. 

Somerset  (comtes  et  ducs  de),  voy. 

Beaufort. 
Somme  (la),   40,    41,    206,   225,  241, 

552,  536.  —  (Les  villes  de  la),  219, 

230,  259,  552-56. 
Sorciers  (les),  457,  463. 
Sorel  (Agnès),  347,  404,  416,  427,  431. 
Souprose,  335. 
Soulhampton,  51. 
Spencer  (Hugues),  419. 
StalTord  (Rob.),  139. 
Standish  (H.),  323. 
Staulawe  (J.),  309,  320. 
Stuartou  Steviart  (J.),  c.  de  Dernlev, 

s.  d'Aubignv,  60,  108,  118,  123,  128, 

131,  136,  13'8,  145,  150. 
Succinio  (le  château  de),  1. 
Suffolk  (le  c.  de).  Voy.  La  Pôle. 
Suisses  (les), 349, 351.  —  (Les  cantons), 

349. 
Sully,  141,  167,  172,  449.  —  (Georges 

de),  370.  —  (Marie  de),  86,  131,  141. 
Sureau  (P.),  342,  546. 
Surgières  (J.  de),  190, 
Surienne  (François),  dit  l'Aragonais, 

193,  280,  318, '343,  387,  394,  403. 
Surrain,  408. 
Swalc  (la),  447. 


Tabellionnage  (le),  621,  622. 

Taillebourg,  330,  431. 

Tailles  (les),  298,  369,  617. 

Talbot  (J.),  134, 139,  143, 148, 161,  168, 
170-172,  212,  235,  240,  256,  266-268, 
274,  275,  280,  289,  293,  294.  300,  311- 
14,  321-25,  333,  342-46,  433,  436. 

Talmont,  181,  197,  338. 

Tanac  (D.),  40,  73,  494, 

Tancarville,  236,  239,  241,  274-76.  — 
(Le  c.  de),  355,  642, 

Tartas,  331-33,  —  (La  journée  de),  332- 
335,  342. 

Tennie,  107. 

Ternant  (Ph.  de),  243,  244,  251. 

Terre-Sainte  (la),  259. 

Thalence  (Roi.  de),  623. 

Thermes  (Thibault  de),  128. 

Thérouenne (l'évêque de) .  Voy.  Luxem- 
bourg (Louis  de). 

Thian  (le  bâtard  de),  293. 

Thiboust  (H,),  573,  —  (P.),  643.  —  (R.), 
552. 

Thiessart,  375. 

Thionville,  447. 

Thoreau  (Guill.),  48. 

Thorigny,  400,  404. 

Thouars,  157, 181, 182,601,  —  (Le  vie. 
de).  Voy.  Amboise  (L,  d'). 

Thoygnet  (J.),  564. 

Tillay  (Jamet  de),  212,  338,  613, 

Tirecoq  (J.),  189, 

Titanna  (Yvon  de),  656. 

Toison  d'or  (la),  318. 

Tombelaine,  396,  413,  614. 

Tomelin  (G.),  archer  du  corps  de  Ri- 
chement, 636. 

Tonneins,  339. 

Tonnerre  (le  comté  de),  290.  —  (Ma- 
dame de),  637,  —  Voy,  Chalon. 

Torcy,  157.  —  (Le  s.  de),  441 ,613.  Voy, 

ESTOUTEVILLE   (J.   d'). 

Torfou  (la  seigneurie  de),  352, 

Torsay(J.  de),  100,  181,198.  —  (Jeanne 
de),  181,  493, 

Toul,  351. 

Toulongeon  (le  marée,  de),  129. 

Toulouse,  334,  335,  339,  373,  374.  — 
(L'archev.  de),  237,  264,  503,  364.  — 
(Le  parlement  de),  308. 

Touques,  322,  398,  613. 

Touraine  (le  héraut),  534. 

Touraine  (la),  26,  69,  85,  94,  181,  197, 
269,  303,  307,  384,  398,  470,  494,  540. 
—  (La  duchesse  de),  Yolande  d'Ara- 
gon, 86,  101,  102.  -  (Le  duc  de),  le 
dauphin  Jean,  Arch.  Douglas  et  le 
c.  de  Richemont,  48,  81,  86.  —  (Le 
duché  de),  85,  86,  113,  217,  460. 

Tournai,  82,  97,  320, 

Tours,  9, 17,  89, 101,  133, 161, 162, 167, 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


697 


178,  181,  203,  220,  238,  242,  263,  304, 
347,  348,  392,  395,  428,  444-52,  488, 
492,  506,  536,  552.  607,  625.  —  (L'ar- 
chev.  de),  150,  452.  —  (Le  bailli  de), 
102,104.  (Les  habitants  de),  102, 133, 
506.  —  (Le  manifeste  de),  17.  —  (La 
trêve  de),  347,  348,  607,  619,  620,  — 
(Saint-Gatien  de),  448. 

Tourteaux,  527. 

Trait  (les  gens  de),  646. 

Traités,  trêves,  conventions  :  —  d'Ab- 
biate-Grasso,  en  1424,  p.  76;  — 
d'Amiens,  en  1423,  p.  74;  —  d'An- 
gers, en  1417,  p.  49,  51,  487  ;  —  d'Ar- 
ras,  en  1414,  p.  35,  38;  en  1416,  p. 
47;  en  1435,  p.  77,  95,  219  et  s.,  229- 
233,  237-40,  259,  266,  290,  302,  314- 
17,  464,  466,  472,  498,  552-54;  — 
d'Auxerre,  en  1412,  p.  25;  —  de 
Bicêtre,  en  1410,  p.  18;  —  de  Bour- 
ges (ou  d'Auxerre),  en  1412,  p.  25- 
27, 30  ;  —  de  Bruges,  en  1440,  p.  317  ; 

—  de  Buzançais,  en  1412,  p.  27  ;  — 
de  Chambéry,  en  1424,  p.  84;  en 
1434,  p.  217;  —  de  Champtocé,  en 
1431,  p.  180;  — de  Chartres,  en  1409 
p.  12;  —  de  Gleppé,  en  1452,  p.  433 
440,  441;  —  de  Corbeil,  en  1420 
pourl'élargisseraent  de  Richemont 
p.57,58,60,68;  — deGusset,enl440 
p.  307,  308;  —  de  Guérande,  en  1365 
p.  2,  425,  430;  —  de  Ham,  en  1434 
p.  214;  —  de  Harcourt,  en  1437,  p 
279;—  de  Lille,  en  1437,  p.  265 
266;  —  de  Montluel,  en  1425,  p 
88,  98;  —  de  Nantes,  en  1424,  p 
77-79,  83;  en  1448,  p.  386;  —  de  Ne- 
vers,  en  1435,  p.  218;  —  de  Paris, 
en  1404,  p.  482;  —de  Parthenay-le- 
Vieux,  en  1419,  p.  31;  —  de  Pont- 
de-Veyle,  en  1434,  p.  217  ;  —  de  Pon- 
toise,  en  1413,  p.  27;  —  de  Pouilly, 
en  1419,  p.  49,  51,  427,  498;  —  de 
Rennes,  en  1432,  p.  191,  193,  488, 
541-545; en  1449, p. 347;—  de  Sablé, 
en  1421 ,  p.  61-63,  66 ;  —  de  Saumur, 
en  1425,  p.  111,  114.  115,  143,  147; 

—  de  Tours,  en  1406.  p.  9;  en  1444, 
p.  346-48,  356,  392,  364,  372,  377, 
380,  386,  387,  391,  393,  607,  619-20; 

—  de  Troyes,  en  1420,  p.  55-58,  61, 
63,  65,  68-71,  82,  90,  93,  109,  148, 
228,  233,  498;  —  de  Vitry-en-Per- 
thois,  en  1434,  p.  215;  —  de  Vau- 
couleurs,  en  1437,  p.  266;  en  1441, 
p.  315. 

Autres  traités  :  de  1395,  p.  3  ;  —  de  1402. 
p.  5  ;  —  de  1408,  p.  11  ;  —  de  1409, 
p.  13;— de  1419,  p.  49;— entre  Phi- 
lippe le  Bon  et  Jean  V,  en  1419,  p.  53  ; 

—  entre  Philippe  le  Bon  et  les  Etats 
de  Bretagne,  en  1422  et  1423,  p.  71, 
72  ;  —entre  Philippe  le  Bon  et  Jean  V, 


en  1425,  p.  98;  —entre  Charles  VII 
et  Philippe  le  Bon,  en  1425  et  années 
suiv.,  p.  115,  129,  153,  154, 157,  158  ; 

—  entre  Henri  VI  et  Jean  V,  en  1426. 
p.  121,  155,  156;—  entre  les  comtes 
de  Richemont,  de  Clermont  et  de 
Pardiac,  en  1427,  p.  144;  —  entre 
Jean  V  et  Ch.  d'Anjou,  en  1431,  p. 
183  ;  —  entre  Richemont  et  La  Tré- 
moille,  en  1431 ,  p.  185  ;  —entre  Char- 
les VII  et  Philippe  le  Bon,  en  1431, 
p.  188;  —  entre  les  ducs  de  Breta- 
gne et  d'Alençon,  en  1432,  p.  188; 

—  entre  Henri  VI  et  Ch.  d'Orléans, 
en  1433,  p.  202,  205;  —  entre  les 
ducs  de  Bourbon  et  de  Savoie, 
en  1434,  p.  217;  —  entre  Henri  VI 
et  Jean  V,  en  1440,  p.  310;  —  entre 
Henri  VI  et  François  1er,  d^c  de  Bre- 
tagne,en  1443, p.  â  46  ;  —  entre  le  dau- 
phin Louis  et  François  I^"',  en  1444, 
p.  349;  —  entre  Charles  VII  et  Fran- 
çois 1er,  en  1444,  p.  349;  —  entre 
Charles  VII  et  Metz,  en  1445,  p.  331  ; 

—  entre  René  d'Anjou  et  Metz, 
en  1443,  p.  351  ;  —  entre  Charles  VII, 
Philippe  le  Bon  et  René  d'Anjou, 
en  1445,  p.  354;  —  entre  Charles  VII 
et  Henri  VI,  en  1448,  p.  385;  — 
entre  la  France  et  l'Angleterre,  de 
1444  à  1449,  p.  391-93. 

Tramecourt,  41. 

Tréanna  (Yvon  de),  658. 

Trenchans  (J.),  616. 

Trésoriers  de  Fr.  (les),  484,  508,  557, 

600,  625,  635.  —  (Des  guerres),  504, 

313. 
Trêves  (le  s.de).  Voy.  Le  Maçon  (Rob.). 
Trévières,  407-412. 

Trignac(le  s.  de).  Voy.  Comborn  (J.  de). 
Tringant  (Guill.),  146,  198,  202,  314. 
Troissi  (J.  de),  lient,  de  Richemont, 

157,  292,  461,  463,  531,  370,  374-79, 

592. 
Trollope  (A.),  402. 
Tromagon  (L.  de),  492. 
Trotet  (J.),  252. 
Troyes,  214,  218,  253,  236,   271,  273, 

284,  314,  320.  —  (Le  bailli  de),  157. 
Tucé  (Beaudouin  de\  bailli  de  Tours, 

102,  104. 
Tudert  (J.),  doyen  de  Paris,  223,  231, 

232,  233,  264,  276,  352. 
Tulle  (l'évêque  de),  530. 
Turcs  (les),  452. 
Turgot  (M.-E.),  557. 


U 


Université  de  Paris  (1').  Voy.  Paris. 

Urbain  V,  21. 

Ust  (Olivier  d'),  37. 


698 


INDEX   ALPHABETIQUE 


Vailly,  265,  Ml. 
Valentinois  (le),  308. 
Valognes,  221,  401,  405-407,  416,  420, 
424,  432,  434,  482,  628,  633-637,  639. 

—  (Le  vicomte  de),  644. 

Valois  (Marie  de),  431.  Voy.  France. 
Valperffa(L.  de),  303.  —  (T.  de),  122, 

223,  226,  422,  551,  642. 
Vannes,  1,26,  54,  61.  62,  123,  203,  222, 

239,  309,  310,  425,  430,  438-40,  478. 

—  (Les  états  de),  39. 
Varambon  (le  s.  de),  243. 
Varèze  (J.  de),  494. 
Vaucoiileur  (la  lande  de),  136. 
Vaucouleurs,  316. 

Vaueourt  (L.  de),  222,  235,  568. 
Vaudemont  (Ant.  de),  193,  215,  283, 

313,  316,  320,  324,  341,  351,  548.  — 

(Ferry  II  de),  351,  417,  427.  —  (Jean 

de),  417.  —  (Marie  de),  vicomtesse 

de  Rohan,  438. 
Vaudrey  (Phil.   de),  84,  83,  114,  500. 
Vaulbricet,  590. 
Vaurus  (le  bâtard  de),  64. 
Vaux  (près  de  Metz),  330. 
Vées  (l'archidiacre  des),  633. 
Vendel  (Guill  ),  m.  d'h.  de  Richement, 

137,  149,  329,  461,  464.  596,  657. 
Vendôme,  25,  138,  145,  147,  347,  393, 

449,  431,  437,  458.  —  (Le  c.  de).  Voy. 

Bourbon  (L.  de). —  (Jean  de'IjVidame 

de  Chartres,  208,  318. 
Vendômois  (le),  107,  114,  138,  530. 
Verberie,  213. 
Verdun,  316,  331.  —  (sur-Saône),  592. 

—  (L'évêque  de),  313. 

Vère  (Rob.  de),  403,  411,  418,  419. 
Vermandois  (le),  114,  266,  338,  613.  — 

—  (Le  bailli  de),  358. 
Verneuil,  81,  127,  237,  281,  312,  397, 

449,  530,  644.  —  (Bat.  de),  81,  82, 
86,  107,  163,  231. 

Vernis  (Simon),  31. 

Vernon,71,173,  266,  311,312,  321,322, 
397. 

Verrières  (Et.  de),  494. 

Versailles  (J.  de),  373,  645. 

Verteuil-sur-Gharente,  330. 

Vertus,  106,  128.  —  (Le  c.  de).  Voy. 
Orléans  (Phil.  d'). 

Vexin  (le),  268. 

Vexio  (l'évêque  de),  224. 

Vey  (le  grand),  405,  407. 

Viana  (Carlos  de),  430,  431. 

Viarmes,  268. 

Vie  (G.  de),  332. 

Vienne  (la),  150,  167. 

Vienne,  209,  210,  211,  291.  —  (en  Au- 
triche), 447.  —  (L'archev.  de),  220, 
492.  —  (Jacques  de),  20. 

Viennois  (le),  507. 


Vierzon,  102,  510. 

Vienoles  (Et.  de).  Voy.  La  Hirk.  — 

(P.  Regnaud  de),  192,  212,  341.  Voy. 

Amadoc. 
Vigny,  268,  324. 
Viguier  (J.),  242. 
Villandrando  (Rodrigo  de),  139,  173, 

197, 198,  217,  262,  269,  270,  280,  282, 

320,  331,  341. 
Villarceaulx,  268. 
Villars  (J.  de),  193. 
VillebIanche(H.  de),  192,  247,265,430, 

443,  461,  570. 
Villebresme,  497. 
Villedieu,  402. 

Villefranehe  (de  Rouergue),  334. 
Villequier  (André  de),  416,  427. 
Villes  (les  bonnes),  103-106,  133,  133, 

160,  210,  262,  271,  296,  303,  307,  497, 

569,  608,  611. 
Villiers  (voy.  L'Isle-Adam). 
Vincennes(ou  le  bois  de),  67,  241,244, 

261,  269,  282-85,  303,  308,  312,  313. 

358,  361,  573-77. 
Vienne  (la),  357. 
Vire,  274,  402,  404,  413,  414,  436,  631- 

633,  639.  —  (La  seigneurie  de),  413, 

460.  —  (Le  siège  de),  413,  630-31. 
Visaiges  (les  faux),  398. 
Visconti.  —  (Bonne),  379.  —  (J.  Ga- 

léas),  11.  —  (Valentine),  11. 
Vitré,  239,  263,  397. 
Vitry,  17.  —  (en  Pertheis),  81,  106, 

214,  213,  273,  447,  551,  564. 
Vivein,  206. 

Vivonne  (Ant.  de),  178,  181.  —  (Isa- 
belle de),  59,  190,  327,  426. 
Vousy  (Ant.),  618. 
Vouvant(poursuivant  de  Richement), 

638. 
Vouvant,  39,  40,  192,  220,  377,  483, 

486,  489,  493,  399,  613. 
Voyennes,  41. 

W 

Wandonne  (Lionel  de),  75. 
Warwick  (le  c.  de).  Voy.  Bkauchamp. 
VV^estminster,  46. 

Westmoreland  (le  c.  de),  voy.  Nevil. 
Willeries  (de),  secret,  de  Richement, 

560,  581. 
Willoughby,  107,  122,  187,  192,  206, 

233,  240,  247,  251,  275. 
Winchester  (l'évêque,  card.  de).  Voy. 

Beaufort  (H.). 
Windsor  (le  château  de),  64. 
Worcester  (l'évêque  de),  56. 
Wydville  (Rie),  166,  322. 


Xaincoins,  566. 


INDEX  ALPHABETIQUE 


699 


Yancourt,  348. 

Yenne,  153. 

Yolande    (la    reine).     Voy.    Araoon 

(Yolande  d'). 
Yonne  (1'),  273,  313,  341. 
York  (l'archev.  d'),  223.  —  (Edmond 


Langley,  duc  d'),  268.  —  (Edouard 
Langley,  duc  d'),  29.  —  (Richard, 
duc  d'),  régent  de  France  pour 
Henri  VI,  258,  266,  268,  272-73, 
279,  311,  318,  319,  322-23,  333,  343, 
345,  331,  398,  418,  419,  433,  442, 
562. 
Yorkshire  (le),  477. 


TABLE  DES  MATIERES 


Pkéface VII 

Principales  sources ii 

I.  —  Manuscrits ix 

II.  —  Imprimés xit 

Ouvrages  anglais xiv 

PREMIÈRE  PARTIE 
Enfance  et  débuts  d'Artur  de  Bretagne  (1393-1415). 

CHAPITRE  I".  E.-NFANCE    et    adolescence   d'ARTUR    de   BRETAGNE  (1393-1410).   — 

Naissance  d'A.  de  Bretagne.  —  Sa  famille.  —  Mort  de  son  père.  —  Enfance 
d'Artur.  —  Il  reçoit  le  titre  de  comte  de  Richemont.  —  Sa  mère  épouse 
Henri  IV  et  va  en  Angleterre.  —  Artur  est  élevé  par  le  duc  de  Bourgogne, 
puis  par  le  duc  de  Berry.  —  Il  réprime  une  sédition  à  Saint-Brieuc.  — 
Il  entre  dans  le  parti  Armagnac,  après  l'assassinat  de  L.  d'Orléans.  — 
Nouvelle  querelle  entre  les  Montfort  et  les  Penthièvre.  —  Traité  de  Char- 
tres. —  Ligue  de  Gien.  —  Esprit  du  temps.  —  Influences  qui  agissent 
sur  le  caractère  d'Artur 1-16 

CHAPITRE    II.   RÔLE    DE    BICIIEMONT   DANS    LA    GUERRE    ENTRE    LES    ARMAGNACS    ET 

LES  BOURGUIGNONS.  BATAILLE  d'azincourt  (1410-1415).  —  Artur  de  Bretagne 
amène  des  troupes  aux  Armagnacs.  —  Traité  de  Bicêtre.  —  Nouvelle 
guerre  civile.  —  Richemont  prend  Saint-Denis.  —  Il  va  en  Bretagne 
puis  avec  le  comte  d'Alençon.  —  Alliance  des  Armagnacs  avec  les  Anglais 
—  Richemont  est  chargé  de  recevoir  les  Anglais.  —  Traités  de  Bourges 
et  de  Buzançais.  —  Les  Armagnacs  au  pouvoir.  —  Artur  est  mis  auprès 
du  dauphin,  dont  il  devient  le  favori.  —  Troisième  guerre  civile.  — 
Richemont  reçoit  un  commandement.  —  Grande  démonstration  militaire 
à  Paris  contre  les  Bourguignons.  —  Jean-sans-Peur  devant  Paris.  — 
Richemont  lieutenant  du  dauphin.  —  Il  prend  part  aux  sièges  de  Com- 
piègne,  de  Boissons,  d'Arras.  —  Premier  traité  d'Arras.  —  Richemont 
reçoit  le  gouvernement  du  duché  de  Nemours.  —  Le  dauphin  s'em- 
pare du  pouvoir.  —  Il  donne  à  Richemont  la  lieutenance  de  la  Bastille 
et  la  seigneurie  de  Parlhenay.  —  Richemont  va  combattre  le  sire  de 
Parthenay.  —  Invasion  de  Henri  V.  —  Bataille  d'Azincourt.  —  Riche- 
mont prisonnier 16-45 

44* 


702  TABLE  DES  MATIÈRES 

DEUXIÈME  PARTIE 
I.a  captivité  et  la  délivrance  (141S-14SS). 

CHAPITRE  1".  La  CAPTIVITÉ  de  richemont  (1415-1422).  —  Artur  en  Angleterre. 

—  Il  revoit  sa  mère.  —  Guerre  contre  J.  Larchevêque.  —  Convention 
d'Angers.  —  Invasion  de  Henri  V  en  France.  —  Massacre  des  Arma- 
gnacs. —  Artur  vient  en  France.  —  Assassinat  de  Jean-sans-Peur.  — 
Emprisonnement  de  Jeanne  de  Navarre.  —  Richemont  retourne  en 
Angleterre.  —  Jean  V  s'allie  avec  Philippe-le-Bon.  —  Il  est  arrêté  par 
les  Penthièvre.  -^  La  duchesse  de  Bretagne  demande  la  délivrance  de 
Richemont.  —  Traité  de  Troyes.  —  Traité  de  Corbeil.  —  Richemont 
revient  en  France.  —  Condamnation  des  Penthièvre.  —  Artur  reçoit 
de  Henri  V  le  comté  d'Ivry.  —  Bataille  de  Baugé.  —  Jean  V  s'allie  avec 
le  dauphin.  —  Richemont  ramène  Jean  V  à  l'alliance  anglaise.  —  Il  va 
avec  Henri  V  à  Meaux  et  à  Paris.  —  Il  retourne  en  Bretagne.  —  Il 
songe  à  épouser  la  duchesse  de  Guyenne.  —  Il  fait  accepter  à  Jean  V  le 
traité  de  Troyes.  —  Mort  de  Henri  V.  —  Situation  d'Artur.  —  Mort  de 
Charles  VI.  —  Avènement  de  Henri  VI  et  de  Charles  VII 45-70 

CHAPITRE  II.  Richemont  se  sépare  des  anglais  et  devient  connétable  de 
FRANCE  (1422-1425).  —  Entrevue  et  traités  d'Amiens.  —  Richemont  épouse 
la  duchesse  de  Guyenne.  —  Il  négocie  avec  Amédée  VIII,  ami  de  la 
France  et  de  la  Bourgogne.  —  Deuxième  entrevue  d'Amiens.  —  Riche- 
mont voit   la  reine  Yolande  en  Bretagne.   —  Il  rompt  avec  Bedford. 

—  Défaite  des  Français  à  Verneuil.  —  Détresse  de  Charles  VII.  —  Il 
fait  proposer  l'épée  de  connétable  à  Richemont.  —  Inquiétudes  des 
conseillers  Armagnacs  de  Charles  VII.  —  Richemont  se  rend  à  Angers 
auprès  du  roi.  —  Philippe-le-Bon,  irrité  contre  les  Anglais,  autorise 
Artur  à  s'entendre  avec  Charles  VII.  —  Engagement  de  Richemont 
envers  les  conseillers  du  roi.  —  Il  reçoit  l'épée  de  connétable...     70-93 

TROISIÈME  PARTIE 

La  lutte  contre  les  favoris  de  Charles  VII  (1425-1433). 

CHAPITRE  I".  Les  premières  années  de  pouvoir  (1425-1427).  —  État  de  la 
France  en  1425.  —  Plan  de  Richemont.  —  Difficultés  de  sa  tâche.  — 
Droits  du  connétable.  —  Essais  de  réformes  militaires.  —  Louvet 
attaque  Richemont,  qui  parvient  à  le  renverser.  —  Le  connétable 
prend  la  direction  du  gouvernement.  —  Nouveaux  embarras.  —  Il  amène 
le  duc  de  Bretagne  à  s'allier  avec  Charles  VII  par  le  traité  de  Saumur. 

—  Il  s'efforce  vainement  de  réconcilier  le  duc  de  Bourgogne  avec  le 
roi.  —  Les  Anglais  attaquent  la  Bretagne.  —  Le  connétable  échoue 
devant  Saint-James-de-Beuvron.  —  Il  s'en  prend  au  chancelier  de  Bre- 
tagne. —  Guerre  dans  le  Maine  et  l'Anjou.  —  Richemont  excite  les 
ducs  de  Bretagne  et  de  Bourgogne  contre  les  Anglais.  —  Il  est  obligé 
de  lutter  contre  P.  de  Giac.  —  Il  le  fait  exécuter.  —  Bedford,  revenu 
d'Angleterre,  pousse  vivement  les  hostilités.  —  Les  Anglais  reprennent 
Pontorson.  —  Grands  efforts  du  connétable  pour  leur  résister.  —  Camus 
de  Beaulieu,  successeur  de  Giac,  est  assassiné.  —  Il  est  remplacé  par 
Georges  de  La  Trémoille,  qui  travaille  à  supplanter  Richemont.  —  Dé- 
faite des  Anglais  devant  Montargis.  —  Le  duc  de  Bretagne  fait  la  paix 
avec  l'Angleterre.  —  Richemont  ne  peut  renverser  La  Trémoille.  —  Il 
se  retire  à  Parthenay , 93-153 


TABLE   DES   MATIÈRES  703 

CHAPITREH.  DiSGKACEDERICHEMONTET  LUTTE  CONTRE  LA  TRÉM0ILLE(1428-1433).— 

Richeniont,  poursuivi  par  La  Trémoille,  demande  secours  au  duc  de 
Bretagne.  —  Il  est  soutenu  par  les  comies  de  Glermont  et  de  Pardiac.  — 
Ils  font  appel  au  pays.  -—  Richemont  retourne  à  Parthenay.  —  La  Tré- 
moille chasse  de  Ghinon  la  duchesse  de  Guyenne.  —  Les  princes  récla- 
ment les  Etats  généraux.  —  Ils  occupent  Bourges,  mais  le  connétable  ne 
peut  les  rejoindre,  et  ils  traitent  avec  La  Trémoille.  —  Les  Etats  généraux 
de  Ghinon  demandent  en  vain  le  rappel  du  connétable.  —  Siège  d'Or- 
léans. —  Jeanne  d'Arc.  —  Le  duc  d'Alençon.  —  Richemont  lui  envoie 
des  renforts  et  rejoint  l'armée  royale,  malgré  la  défense  du  roi.  —  Il 
contribue  à  la  prise  de  Beaugency  et  à  la  victoire  de  Patay.  —  Jeanne 
d'Arc  ne  peut  obtenir  qu'il  reste  à  l'armée.  —  Il  combat  les  Anglais  en 
Normandie.  —  La  Trémoille  empêche  Jeanne  d'Arc  et  le  duc  d'Alençon 
d'aller  en  Normandie.  —  Jeanne  d'Arc  est  abandonnée  et  prise.  —  Riche- 
mont retourne  à  Parthenay.  —  La  Trémoille,  après  avoir  échoué  du  côté 
de  la  Bourgogne,  se  tourne  vers  la  Bretagne.  —  Il  s'entend  avec  Jean  V, 
mais  non  avec  Richemont.  —  Il  fait  arrêter  et  condamner  L.  d'Amboise 
et  les  autres  envoyés  du  connétable.  —  La  guerre  continue  dans  le 
Poitou.  —  Yolande  d'Aragon  interpose  en  vain  sa  médiation.  —  Le  duc 
d'Alençon,  excité  par  La  Trémoille,  enlève  le  chancelier  de  Bretagne.  — 
Jean  V  fait  la  guerre  au  duc  d'Alençon.  —  Richemont  les  réconcilie.  — 
Charles  VII  conclut  avec  Jean  V  et  Richeniont  le  traité  de  Rennes.  — 
La  Trémoille  continue  néanmoins  la  lutte  contre  Richemont.  —  Guerre 
contre  les  Anglais.  —  Eugène  IV  essaye  inutilement  de  faire  conclure  la 
paix.  —  La  Trémoille  attaque  Yolande  d'Aragon  et  laisse  les  Anglais 
reprendre  Montargis.  —  Indignation  générale.  —  Complot  contre  La 
Trémoille.  —  Enlèvement  de  La  Trémoille.  —  Conséquences  de  cet 
événement Io3-20o 

QUATRIÈME  PARTIE 

Les  années  fécondes  (143a-i4S8). 

CHAPITRE  I".  Le  traité  d'arras  (li3o).  —  Richemont  assiste  aux  funé- 
railles de  la  duchesse  de  Bretagne.  —  Il  va  dans  le  Maine  pour  soutenir 
le  duc  d'Alençon  et  Amb.  de  Loré.  —  La  journée  de  Sillé.  —  Le  conné- 
table rentre  en  grâce  auprès  de  Charles  VII.  —  Il  arrête  un  plan  de 
campagne  pour  obliger  le  duc  de  Bourgogne  à  faire  la  paix.  —  Étals  de 
Vienne.  —  Campagne  de  Richemont  dans  la  Picardie,  la  Champagne  et 
le  Barrois.  —  Il  conclut  une  trêve  de  six  mois  avec  Philippe  le-Bon, 
réprime  les  brigandages  des  routiers  et  oblige  Robert  de  Sarrebrûck  à 
se  soumettre  à  René  d'Anjou.  —  Le  duc  de  Bourgogne  se  montre  dis- 
posé à  la  paix.  —  Richemont  se  rend  aux  conférences  de  Névers,  où 
est  décidé  le  congrès  d'Arras. —  Rôle  de  Richemont  au  congrès  d'Arras. 

—  Les  Anglais  rejettent  les  propositions  de  Charles  VH,  mais  le  duc  de 
Bourgogne  fait  la  paix.  —  Traité  d'Arras.  —  Mort  de  Bedford.  —  La 
guerre  continue  avec  l'Angleterre 205-235 

CHAPITRE  IL  La  réduction  de  pabis  (1436).  —  Les  Anglais  reprennent 
Saint-Denis.  —  Richemont  envoie  des  troupes  dans  le  pays  de  Caux 
révolté.  —  Il  fait  évacuer  les  places  de  la  Champagne  cédées  au  duc  de 
Bourgogne.  —  Les  Ecorcheurs.  —  Charles  VII  ratifie  le  traité  d'Arras. 

—  Les  Anglais,  irrités  contre  le  duc  de  Bourgogne,  veulent  le  combattre 
et  font  de  nouveaux  efforts  pour  continuer  la  guerre  en  France.  — 
Richemont  prépare,  avec  l'aide  de  Philippe-le-Bon,  une  entreprise  sur 


704  TABLE   DES   MATIÈRES 

Paris.  —  Les  Français  et  les  Bourguignons  s'emparent  de  Pontoise,  Vin- 
cennes,  Corbeil,  Saint-Germain,  Charenton.  —  Richement,  nommé  lieu- 
tenant-général, s'approche  de  Paris.  —  Combat  d'Epinay.  —  Conspira- 
tion à  Paris.  —  Michel  de  Laillier.  —  Entrée  du  connétable  à  Paris.  — 
Capitulation  de  la  Bastille. —  Etablissement  d'un  gouvernement  français 
à  Paris.  —  Procession  solennelle 235-254 

CHAPITRE  III.  Le  recouvrement  de  l'ile-de-france  (1436-1440).  —  Richemont 
veut  reconquérir  d'abord  l'Ile-de-France.  —  Détresse  financière.  —  Le 
duc  d'York  succède  à  Bedford.  —  Richemont  va  trouver  le  duc  de  Bour- 
gogne. —  Les  Français  échouent  devant  Creil.  —  Le  connétable  va  en 
Picardie,  en  Champagne,  en  Lorraine.  —  Il  revient  à  Paris  et  s'efforce 
d'v  attirer  le  roi.  —  Il  va  ensuite  à  Loches,  à  Parthenay,  en  Bretagne,  et 
revient  à  Paris.  —  Ses  démêlés  avec  Guillaume  de  Flavy.  —  Il  contribue 
à  la  délivrance  de  René  d'Anjou.  —  Les  Anglais  reprennent  Pontoise  et 
menacent  Paris.  —  Traîtres  exécutés  à  Paris.  —  Les  Français  s'empa- 
rent de  Malesherbes.  —  Le  roi  prend  part  à  la  guerre.  —  Prise  de  Ne- 
mours. —  Mort  de  Jeanne  de  Navarre.  —  Siège  et  prise  de  Montereau. 
—  Guerre  en  Normandie.—  Charles  VII  vient  h  Paris,  puis  retourne  sur 
la  Loire.  —  Famine  et  épidémie.  —  La  guerre  languit.  —  Assemblée  de 
Bourges.  —  Tentative  infructueuse  sur  Pontoise.  —  Ravages  des  rou- 
liers.  —  Guillaume  de  Flavy  enlève  le  maréchal  de  Rieux.  —  Ordon- 
nance du  22  décembre  1438  contre  les  routiers.  —  Grande  mortalité  à 
Paris.  —  Richemont  s'éloigne.  —  Il  va  en  Lorraine,  où  il  échoue  contre 
Robert  de  Sarrebriick.  —  Les  Anglais  surprennent  Saint-Germain-en- 
Laye.  —  Accusations  contre  Richemont.  —  Découragé,  il  veut  se  retirer, 
quand  le  roi  ordonne  enfin  le  siège  de  Meaux.  —  Le  connétable  prend 
la  ville  de  Meaux  et  fait  capituler  le  Marché.  —  Le  roi  revient  à  Paris.  — 
Richemont  le  suit  à  Orléans.  —  Négociations  inutiles  avec  les  Anglais. 

Etats  d'Orléans.  —  Ordonnance  du  2  novembre  1439  sur  les  gens  de 

gueiTC.  —  Difficulté  d'appliquer  cette  ordonnance.  —  Le  connétable 
échoue  devant  Avranches.  —  Il  ol)lient  des  mesures  contre  les  routiers 
et  commence  la  réforme  de  l'armée 254-302 

CHAPITRE  IV.  La  piuguerie.  La  journée  de  tartas.  La  trêve  de  tours. 
L'expédition  de  uorkaine  (1440-1445).  —  La  Praguerie.—  Energie  du  conné- 
table. —  Il  rend  de  grands  services  au  roi.  —  Il  conclut  un  arrangement 
avantageux  avec  Jean  V.—  Délivrance  de  Charles  d'Orléans.  —Les  Anglais 
prennent  Harfleur;  les  Français,  Conches  et  Louviers.  —  Le  roi  et  le 
connétable  vont  châtier  les  Ecorcheurs  en  Champagne  et  en  Lorraine.— 
Intrigues  de  Charles  d'Orléans.  —  Richemont  prend  Creil  et  assiège 
Pontoise.  —  Prise  de  Pontoise.  —  Charles  VII  à  Paris.  —  Richemont  le 
suit  sur  la  Loire,  puis  va  en  Bretagne.  —  Jean  V  abandonne  la  Pra- 
guerie. —  Mort  de  la  duchesse  dj  Guyenne.  —  Soumission  du  duc 
d'Orléans  —  Le  connétable  fait,  avec  le  roi,  une  expédition  en  Guyenne.— 
La  journée  de  Tartas.  —  Prise  de  Saint-Sever  et  de  Dax.  —  Richemont 
épouse  Jeanne  d'Albret.  -  Mort  de  Jean  V.  —  Richemont  se  rend  en 
Bretagne,  —  Mort  de  Yolande  d'Aragon.  —  Mesures  répressives  contre 

■  les  routiers.  —  Les  Anglais  échouent  devant  Dieppe.  —  Expédition 
infructueuse  de  Somerset.  — •  L'Angleterre  désire  la  paix.  —  Confé- 
rences de  Tours.  —  Le  connétable  y  amène  son  neveu  le  duc  de  Breta- 
gne. —  Trêve  de  Tours.  —  Expéditions  de  Lorraine  et  d'Alsace.  — 
Richemont  accompagne  le  roi.  —  Il  perd  sa  seconde  femme  et  épouse 
Catherine  de  Luxembourg.  —  DilTérend  avec  Pierre  de  Brézé.    302-355 


TABLE  DES  MATIÈRES  705 

CHAPITRE  V.  La  kékormk  de  l'armée.  —  Opportunité  de  la  réforme  de 
l'armée.  —  Adversaires  et  partisans  de  cette  réforme.  —  Ordonnance  du 
9  janvier  1445.  —  Autre  ordonnance.  —  Le  connétable  applique  les 
ordonnances.  —  Ordonnance  de  Louppy  (du  26  mai  1443).  —  Les 
compagnies  d'ordonnance.  —  Du  nombre  des  compagnies.  —  Plaintes 
soulevées  par  les  ordonnances.  —  De  l'armée  permanente.  —  De  la 
taille  perpétuelle.  —  La  petite  et  la  grande  ordonnance.  —  Effectif  des 
compagnies.  —  Hommes  d'armes  et  capitaines.  —  Payement  des  contri- 
butions. —  Payement  des  troupes.  —  Résultats  des  réformes.  —  Les 
francs  archers.  —  Le  service  féodal.  —  Part  de  Richemont  dans  les 
réformes  militaires 355-377 

CH.4.PITRE  VL  Gilles  de  bhetag.ne  (1443-1449).  —  Gilles  de  Rretagne, 
neveu  de  Richemont.  —  Son  caractère.  —  Gilles  est  envoyé  par  son 
frère,  François  !•"■,  en  Angleterre,  où  il  s'attache  à  Henri  VI.  —  Revenu 
en  Bretagne,  il  se  brouille  avec  François  I"  et  noue  des  relations 
avec  les  Anglais.  —  Richemont  réconcilie  François  l"'  et  Gilles.  —  La 
querelle  recommence.  —  François  I*""  se  rapproche  de  Charles  VU,  qu'il 
excite  contre  Gilles.  —  Machinations  contre  Gilles.  —  Il  est  arrêté.  — 
Intervention  inutile  de  Richemont,  qui  défend  son  neveu.  —  Captivité 
de  Gilles.  —  Intervention  de  Henri  VI.  —  Richemont  réconcilie  Fran- 
çois I"  et  le  comte  de  Penthièvre.  —  Les  Anglais  veulent  délivrer 
Gilles.  —  Ils  prennent  Fougères.  —  Le  duc  de  Bretagne  s'allie  avec 
Charles  VII.  —  Gilles  s'adresse  à  Charles  VII.  —  Perfidie  de  François  I". 

—  Gilles  est  étranglé 377-391 

CHAPITRE  VII.  Le  recouvrement  de  la  Normandie  (1449-1450).  —  Différends 
avec  l'Angleterre,  qui  ne  veut  pas  rendre  le  Maine.  —  Richemont  fait 
capituler  Le  Mans.  —  Nouveaux  différends.  —  Les  Anglais  surprennent 
Fougères.  —  Représailles  de  Charles  Vil.  —  Il  déclare  la  guerre  à  l'An- 
gleterre. —   Le  connétable  prend  Saint-James-de-Beuvron  et  Mortain. 

—  La  conquête  de  la  Normandie  est  décidée.  —  Richemont  entraine  le 
duc  de  Bretagne.  —  Ils  attaquent  le  Cotenlin,  font  capituler  Coutances, 
Saint-Lô,  Carentan,  le  Pont  d'Ouve,  Valognes,  etc.  —  Le  connétable 
prend  Gavray,  que  le  roi  lui  donne  plus  tard.  —  Reprise  de  Fougères. 

—  Succès  de  Dunois  dans  la  Haute-Normandie.  —  Charles  VII  entre  à 
Rouen.  —  Th.  Kyriel  débarque  à  Cherbourg  avec  une  armée.  —  Riche- 
mont ne  peut  entraîner  le  duc  de  Bretagne.  —  Les  Anglais  font  capituler 
Valognes.  —  Le  comte  de  Clermont  arrive  avec  une  armée  française.  — 
Th.  Kyriel  passe  le  Grand-Vey  et  s'avance  vers  Bayeux.  —  Le  comte  de 
Clermont  l'attaque  près  de  Formigny.  —  Bataille  de  Formigny.  L'arrivée 
du  connétable  empêche  une  défaite  et  détermine  la  victoire.  —  Il  fait 
ensuite  capituler  Vire  et  se  joint  au  duc  de  Bretagne  pour  assiéger 
Avranches.  —  Capitulation  d'Avranches  et  de  Tombelaine.  —  Le  duc  de 
Bretagne  malade  se  retire.  —  Capitulation  de  Saint-Sauveur-le-Vicomte, 
de  Briquebec,  de  Valognes.  —  Richemont  va  au  siège  de  Caen.  —  Il  est 
prêt  à  donner  l'assaut.  —  Capitulation  de  Caen.  —  Le  connétable  ter- 
mine, par  la  capitulation  de  Cherbourg,  la  conquête  de  la  Nor- 
mandie       391-423 

CHAPITRE  VIII.  Les  dernières  années  (1450-1458;.  —  Richemont  reçoit  le 
gouvernement  de  la  Normandie.  —  Il  se  rend  auprès  du  roi,  puis  en 
Bretagne.  —  Testament  de  François  I»'.  —  Richemont  héritier  pré- 
somptif du  duché  de  Bretagne.  —  Il  assiste  au  couronnement  de  son 
neveu  Pierre  II  et  vient  avec  lui  à  la  cour.  —  Hommage  de  Pierre  II. 


706  TABLE   DES   MATIÈRES 

—  Richemont  poursuit  les  assassins  de  Gilles.  —  Il  va  à  Parthenay, 
puis  revient  en  Bretagne,  où  il  fait  exécuter  plusieurs  des  meurtriers 
de  Gilles.  —  Don  Carlos  de  Viana  et  Jacques  II  d'Ecosse.  —  Pendant 
la  conquête  de  la  Guyenne,  Richemont  retourne  en  Normandie.  —  Il 
vient  demander  au  roi  la  grâce  du  comte  d'Armagnac.  —  Les  Anglais 
menacent  la  Normandie.  —  Mesures  de  défense  prises  par  le  connétable. 

—  Nouvelles  plaintes  du  roi  d'Ecosse  contre  le  duc  de  Bretagne.  —  Il 
envoie  des  ambassadeurs  à  Charles  VII  et  en  Bretagne.  —  Richemont 
va  en  Bretagne  et  revient  en  Normandie.  —  Seconde  conquête  de  la 
Guyenne.  —  Le  connétable  se  rend  à  la  cour  et  fait  un  rapport  au  roi 
sur  l'état  de- la  Normandie.  —  Il  retourne  en  Bretagne,  pour  conclure  le 
mariage  du  comte  d'Étampes  avec  Marguerite  de  Bretagne  et  régler  la 
succession  au  duché.  —  Le  roi  approuve  l'ordre  de  succession.  —  Mis- 
sion du  connétable  et  de  Dunois  en  Savoie.  —  lis  amènent  le  duc  Louis  I" 
à  Saint-Pourçain.  —  Le  roi  fait  arrêter  le  duc  d'Alençon.  —  Richemont 
essaye  de  le  sauver.  —  Richemont  est  envoyé  à  Paris,  où  il  met  fin  à  une 
longue  querelle  entre  les  ordres  mendiants  et  l'Université.  —  Il  retourne 
à  Parthenay,  puis  en  Bretagne. —  Mort  de  Pierre  II.  — Richemont  devient 
duc  de  Bretagne  sous  le  nom  d'Artur  III.  —  Son  entrée  à  Rennes.  — 
Il  se  rend  à  la  cour  de  France.  —  Sa  renommée.  —  Différends  avec  le 
roi.  —  Condamnation  du  duc  d'Alençon.  —  Artûr  III  obtient  sa  grâce. 

—  Il  fait  hommage  au  roi.  —  Il  revient  en  Bretagne.  —  Querelle  avec 
l'évêque  de  Nantes.  —  Derniers  projets  d'Artur  III.  —  Sa  mort.    423-434 

CHAPITRE  IX.  Caractère  de  Richemo.nt.  —  Conclusion.  —  Caractère  de  Ri- 
chemont, d'après  Gruel.  —  Son  portrait.  —  Son  instruction.  —  Son 
goût  pour  la  guerre.  —  Ses  mœurs.  — .Sa  gravité.  —  Sa  rudesse  et  ses 
violences.  —  Son  humeur  rébarbative.  —  Son  ambition.  —  Son  esprit 
d'économie.  —  Ses  revenus  et  ses  dépenses.  —  Sa  piété  étroite.  —  Son 
affection  pour  sa  famille.  —  Appréciation  du  rôle  de  Richemont.  —  Net- 
teté de  ses  vues.  —  Résultats  de  sa  persévérance.  —  Choix  de  ses  auxi- 
liaires. —  Sa  gratitude  envers  eux.  —  Ses  talents  militaires  et  politi- 
ques. —  Son  impopularité.  —  Conclusion 454-467 

APPENDICES 

IVotes  supplémentaires  et  pièces  justificatives. 

I.  —  Note  sur  Guillaume  Gruel 469 

IL  —  Jugements  sur  le  connétable  de  Richemont 472 

III.  —  Les  ducs  d'Orléans  et  de  Bourgogne  se  disputent  la  tutelle 

de  ,lean  V  (1399-1402) 476 

IV.  —  Noie  sur  le  comté  de  Richemont 477 

V.  —  Mariage  de  Jeanne  de  Navarre,  mère  de  Richemont,  avec 

Henri  IV,  roi  d'Angleterre  (1402) 478 

VI.  —  Présent  fait  à  Artur  de  Bretagne  par  Jeanne  de  France,  du- 
chesse de  Bretagne,  sa  belle-sœur  (1408) 479 

VIT.  —  Quittance  d'A.  de  Chàteaugiron  (1410,  27  septembre)..    480 

VIII.  —  Quittance  de  Nicolas  Le  Dur  (1410,  12  novembre) 481 

IX.  —  Payement  à  un  héraut  de  Richemont  (1412, 11  décembre).    481 

X.  —  Payement  au  comte  de  Richemont  (1414,  26  novembre).    482 

XI.  —  Richemont  reçoit  le  gouvernement  du  duché  de  Nemours 

...  (1414,  29  décembre) 482 


TABLE   DES  MATIÈRES  701 

XII.  —  Note  sur  Jean  II  Larchevêque  et  sur  sa  succession  (donnée 
à  Richemontj '^85 

XIII.  —  Richemont   nommé    capitaine-général    par   Charles  VI,   va 

combattre  Jean  Larchevêque  (1415,  juin) 49a 

XIV.  —  Lettre  du  dauphin,  régent  de  France,  à  J.  de  Penthièvre  et 

et  à  Charles  d'Avaugour,  pour  leur  recommander  de  bien 
garder  le  duc  de  Bretagne  et  son  frère   Richard  (1420, 

16  mars) -494 

XV.  —  Don  du  comté  d'Etampes  à  Richard  de  Bretagne  (1421, 
8  mai) i^^ 

XVI.  —  Serment  de  fidélité  prêté  par  le  comte  de  Richemont  à 
Jean  V  (1422,  5  août) 499 

XVII.  —  Charles  VI  s'engage  envers  le  duc  de  Bretagne  à  ne  point 
traiter    sans   son   consentement  avec  le  dauphin   (1422, 

8  octobre) '499 

XVIII.  —  Voyage  de  Richemont  à  Angers  (1424,  6  octobre) 500 

XIX.  —  Projet  d'assassinat  de  Philippe-le-Bon  par  les  Anglais 
(1424) 501 

XX.  —  Engagement  de  Richemont  envers  les  conseillers  de  Char- 
les VII  (1423,  8  mars) 50a 

XXI.  —  Les  droits  du  connétable ' 504 

XXII.  —  Lettre  de  Charles  VII  aux  Lyonnais  (1423,  30  mars). . .     303 

XXIII.  —  Résumé  d'une  lettre  de  Jean  V,  duc  de  Bretagne,  aux  habi- 

tants de  Tours  (1423,  13  juin) 50& 

XXIV.  —  Expulsion  de  Louvet  et  des  autres  favoris  de  Charles  VII 

(1423,  juin) 507 

XXV.  —  Lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais  (1425,  28  juillet)  ..     310 
XXVI.  —  Lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais  (1423,  30  juillet)  ..     511 

XXVII.  —  Lettre  de  Richemont  aux  Lyonnais  (1425,  3  août) 512 

XXVIII.  —  Lettre  de  Charles  VII  aux  Lyonnais  (1423,  31  août)  ...     513 
XXIX.  —  Lettre  du  comte  de  Richemont  à  P.  Bessonneau,  maître  de 

l'artillerie  (1423,  6  août) 514 

XXX.  —  Le  duc  de  Bretagne  ordonne  de  payer  au  comte  de  Riche- 
mont 700  1.  t.  (1423,  13  novembre). 515 

XXXI.  —  Quittance   de  J.  de  Chàteaugiron,  argentier  du  connétable 

(1423,  7  décembre) 515 

XXXII.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1423,  13  octobre).     316 

XXXIII.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1423,  24  octobre).     517 

XXXIV.  —  Lettre  du  comte  de  Salisbury  à  J.  Salvain,  bailli  de  Rouen, 

(1426,  l*''  mars) 517 

XXXV.  —  Convocation  des  Etats  à  Angers -(1426,  1"  avril) 519 

XXXVI.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1426,  10  mai) 520 

XXXVII.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1426,  .6  octobre).     520 
XXXVIIl.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1426,  23  novemb).    521 

XXXIX.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1427,  20  janvier)..     522 

XL.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1427,  28  février)..     322 

XLI.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1427,  42  juin)  ....     523 

XLII.  —  Lettre  du  connétable  aux  Lyonnais  (1427,  13  juin) ....     524 

XLII  bis.  —  Lettre  du  connétahle  aux  Lyonnais  (1427,  8  août) 525- 

XLIII.  —  Alliance  conclue  par  le  connétable  avec  le  comte  de  Foix, 

Jean  I"  (1427,  6  janvier) 525 

XLIV.  —  Lettre  du  comte  de  Richemont  à  la  dame  de  Sàligny  (1427» 
1 3  mars) 52& 


708  TABLE  DES  MATIÈRES 

XLV.  —  Préparatifs  du  siège  de  Ponlorson  par  les  Anglais  (1427).    527 
XLVI.  —  Richemont  ordonne  de  payer  200  1.  t.  au  baron   de  Cou- 

lonces  (1426,  12  avril) 527 

XLVII.  —  Lettre  du  connétable  à  la  dame  de  Saligny  (1427,4  avril).    328 
XLVIII.  —  Henri  VI  conQsque  le  comté  d'Ivry,  donné  par  Henri  V  à 

Richemont  (1427,  12  juillet) 529 

XLIX.  —  Préparatifs  du  siège   de  Monlargis  par  les  Anglais   (1427, 

2  juillet) 530 

L.  —  Instruction  pour  l'évesque  de  Tuelle  et  maistre  Guillaume 
de  Quiefdeville,  conseillers  du  roy,  envoyez  devers  le  roy 

de  Castille  et  de  Léon  (1428,  28  juin) 530 

LI.  —  Bedford  ordonne  d'envoyer  quatre  gros  canons  pour  le  siège 

de  Montargis  (1427,  22  septembre) 531 

LII.  —  Les  comtes  de  Richemont,  de  Clermont  et  d'Armagnac  pro- 
mettent au  duc  de  Bretagne  de  le  secourir  contre  Jean 

de  Blois  (1428,  30  janvier) 533 

LUI.  —  Projet  de  convocation  des  Etats  généraux  (1428) 334 

LUI  bis.  —  Extraits  du  cahier  des  doléances    des  Etats  généraux  de 

Chinon  (1428,  11  novembre) 537 

LIV.  —  Lettre  de  G.  de  La  Trémoille  à  Messieurs  de  la  chambre  des 

Comptes  (1431,  10  septembre) 337 

LV.  —  Engagement  du  duc  d'Alençon  envers  le  roi  de  France  (1432, 

15  janvier) 538 

LVI.  —  Avis  donné  au  duc  de  Bourgogne,  pour  le  pousser  à  faire 

plus  activement  la  guerre  à  Charles  VII  (1431) 539 

LVII.  —  Traité  de  Rennes,  entre  le  roi,  le  duc  de  Bretagne  et  Riche- 
mont (1432,  3  mars) 541 

LVIII.  —  Sur  le  siège  de  Saint-Céneri  par  le  comte  d'Arondel  (1433, 

26  décembre) 545 

LIX.  —  Trêve  de  six  mois,  conclue  par  Richemont,  au  nom  du  roi, 
avec  le  comte  d'Etampes,  au  nom  du  duc  de  Bourgogne 

(1434,  17  septembre) 547 

LX.  — 2I^ichemont    délie   R.   de   Sarrebrûck   de  ses  engagements 

(1434,  15  décembre) 551 

LXI.  —  Enquête  sur  la  clause  du  traité  d'Arras,  relative  aux  villes 

de  la  Somme  (1449,  janvier).... 552 

LXII.  —  Lettres   du   duc  de  Bourgogne,  relatives  aux  villes  de  la 

Somme  (1433,30  septembre) 554 

LXIII.  —  Lectre  de  maistre  Emery  Martineau,  procureur  du  roi  sur 

le  fait  des  monnoyes  (1436,  21  août) 556 

LXIV.  —  La  messe  et  la  procession  des  Anglais 557 

LXV.  —  Taxe  sur  les  vins  qui  traversent  Paris,  Saint-Cloud,  Poissy 

(1436,  22  août) 558 

LXVI.  —  Ordonnance  contre  les  gens  de  guerre  (1436, 1«'  octobre).    560 
LXVII.  —  Lettre  du  duc  d'York,  relative  au  siège  de  Montereau  (1437, 

18  septembre) 562 

LXVIII.  —  Restitution  de  Gien  et  don  de  Sainte-Ménehould  à  Riche- 
mont (1437,  27  novembre). 563 

LXIX.  —  Payements  de  diverses  sommes  au  connétable  (1439,  27  oc- 
tobre)       563 

LXX.  —  Ordonnance  sur  les  capitaines   de  gens  d'armes,  pour  les 
rendre  responsables  de  leurs  gens  (1438,22  décembre).    566 


TABLE  DES   MATIÈRES  1Q9 

LXXI.  —  Sur  Guillaume  de  Flavy,  le  maréchal  de  Rieux  et  le  conné- 
table de  Ilichemont  (1436-1439) 567 

LXXII.  —  Sur  Jacques  de  Chabannes,  Rogier  de  Pierrefrite  et  le  Bois 

de  Vincennes  (1440,  aoi\l) 573 

LXXIII.  —  Sur  Jean  Budes,  porte-étendard  du  connétable  (1439,  juin, 

juillet) 578 

LXXIV.  —  Serment  d'assistance  fait  par  le  connétable  au  duc  de  Bre- 
tagne, son  frère  (1440,  22  août) 580 

LXXV.  —  Richeraont  donne  caution  pour  la  rançon  du  duc  d'Orléans 
(1439,  20  décembre)  [avec  deux  lettres  et  deux  fac-similé 

du  connétable] 581 

LXXVI.  —  Lettre  de  Charles  VII  annonçant  la  prise  de  Creil  et  le  siège 

de  Pontoise  (1441,  28  mai) 584 

LXXVII.  —  Richemont  institue  pour  héritiers  ses  neveux  François  et 

Pierre  (1442,  11  janvier) 584 

LXXVIII.  —  Testament  et  codicille  de   Marguerite  de  Bourgogne,  du- 
chesse de  Guyenne  et  comtesse  de  Richemont  (1442,  14  et 

31  janvier) 586 

LXXVIIIôw.—  No  1.  Charles  VII  donne  Fontenay-le  Comte  à  Richemont 

(1442,  10  mars) 597 

N»  2.  Le  parlement  refuse  d'entériner  les  lettres  par  les- 
quelles Charles  VII  donne  Fontenay  au  connétable..     600 
LXXIX.  —  Artur  de  Bretagne  fait  remise  à  Charles  II  d'Albret  d'une 
somme  de  30  000  écus,  promise  à  cause  de  son  mariage 

(1442,  28  juillet) 603 

LXXX.  —  Charles  II  d'Albret  donne  le  comté  de  Dreux  à  Artur  de 

Bretagne  (1442,  18  novembre) 604 

LXXXI.  —  Lettres  comment  Mgr  le  prévost  de  Paris  est  commis  de 

povoir  prendre  et  justicier  les  malfacteurs >.....     60r> 

LXXXII.  —  Lettres   par  lesquelles  le  roy   commet  Mgr  le  prévost  de 
Paris  et  les  baillifs  de  Senlis  et  de  Meaulx  à  prendre  et 

justicier  les  gens  de  guerre  (1444,  21  juillet) 607 

LXXXIII.  —  Sauf-conduit  du  connétable  pour  le  bâtard  de  Limeuil  (1445, 

20  avril) 600 

LXXXIV.  —  Ordonnance  de  Luppé-le-Chaslel  (1445,  26  mai) 610 

LXXXV.  —  Ordonnance  sur  le  fait  du  payement  des  gens  de  guerre  en 

Normandie  (1451,  14  mai) 613 

LXXXVI.  —  Les  trois  voyes  du  vivre  des  gens  d'armes  premièrement 

tenues  (1445) 614 

LXXXVII.  —  Le  roi  accorde  au  connétable  le  droit  de  lever  une  taxe 
extraordinaire,  pour  réparer  les  fortifications  de  Fon- 
tenay (1445,  11  avril) 616 

LXXXVIII.  —  Lectres  comment  le  roy  déclaire  les  causes  pour  lesquelles 
il  entra  en  Normendie  après  la  prinse  de  Foulgières  (1451, 

2  avril) 618 

LXXXIX.  —  Quittance    du    duc  François   I"    et    de   Richemont  (1449. 

27  septembre) ". 621 

XC.  —  Confirmatio  tractatus  facti  per  comitem  Richemontis,  cum 

habitantibus  de  Nuilly  L'Evesque  (1449,  2  octobre)..     622^ 

XCI.  —  Le  roi  donne  au  connétable,  sa  vie  durant,  la  seigneurie  de 

Gavray  (1451,  31  mars) 624 

XGII.  —  Quittance  de  Geoffroy  de  Couvran  (1456,  8  novembre).     626- 


710  TABLE   DES   MATIÈRES 

XCIII.  —  Povoir  donné  au  duc  François  de  Brelaigne  pour  entrer  en 

Normendie  (1 450,  16  janvier) 626 

XCIV.  —  Le  duc  de  Bretagne  et  le  connétable  sont  informés  que  les 

Anglais  viennent  assiéger  Valognes  (1450,  1"  avril).     628 

XCV.  —  Richemont  ordonne  de  payer  ISO  taluts  d'or  à  P.  Drouart, 

un  des  combattants  de  Formigny  (liSO,  20  avril)....     629 

XGVI.  —  Préparatifs  du  siège  de  Vire  (1450,  20  avril) 630 

XCVH.  —  Abolitio  pro  habitantibus  vicecomitatus  de  Vire  (1450,  no- 
vembre)       631 

XCVIIl.  —  Confirmatio  abolitionis  pro  Petro  du   Fiquet   (capitulation 

de  Valognes)  (1450,  mai) 633 

XCIX.  —  Note  sur  l'effectif  de  l'armée  française  au  siège  de  Gaen 

(1450,  juin) V. 635 

G.  —  Deux  documents  relatifs  au  siège  de  Gaen  (1450,  juin).     636 

CI.  —  Préparatifs  ordonnés  par  le   connétable   pour  le  siège   de 

Cherbourg.  Quatre   documents   relatifs  à  ce  siège  (1450, 

juin,  novembre) 637 

Cil.  —  Capitulation  de  Cherbourg  (1450,  1 2  août) 640 

cm.  —  Appointement  fait  par  le  connétable  entre  les  habitants  de 

Dieppe  et  les  gens  d'armes  de  la  garnison  (1452,  août).     642 

GIV.  —  Mesures  de  défense  en  Normandie  contre  les  Anglais  (1452, 

octobre) 643 

GV.  —  Sauvegarde  accordée  par  le  connétable  à  un  Anglais  (1452, 

12  octobre) 645 

GVI.  —  Richemont  donne  l'île  de  Bréhat  à  son  gendre,  Artur  Bré- 

cart  (1 450,  19  janvier) 646 

CVII.  —  Procès  du  connétable  devant  les  élus  de  Paris  (1442-1446).    649 
GVIII.  —  Quatre    quittances    du    connétable    de    Richemont    (1453- 

1455} 652 

CIX.  —  Information   ordonnée    par    le    connétable    (1457,   il    jan- 
vier)       654 

ex.  —  Fragment  d'un  compte  de  dépenses  du  connétable  (1443- 
1445) 656 

Tableaux  généalogiques 659 

Tableau   généalogique  des   ducs    de   Bretagne    de    la  maison   de 
Dreux 660-661 

Principales  maisons  alliées  à  la  maison  de  Bretagne 662 

Index  alphabétique 669 


ERRATA 


Page    o,  note  4,  lisez  «  Fb.  Devon  ». 

—  11,  note  2,  lisez  «  le  comte  d'Alençon  ». 

—  12,  note  1,  ligne  o,  lisez  «  Avaugour  »,  et  de  même  partout  ail- 
leurs, p.  53,  59,  85,  89,  99,  102,  190,  328,  426,  etc. 

-    Page  27,  note  4,  lisez  «  Des  Essarts  ><. 

—  39,  ligne  25,  lisez  «  Mer  vent  ». 

—  42,  ligne  31,  lisez  «  le  seigneur  de  Châteaugiron  »,  en  supprimant 
«  SON  secrétaire  et  son  trésorier  ». 

Page  53,  ligne  20,  lisez  «  Olivier,  c.  de  Penthièvre  »  ;  —  note  4,  lisez 
Avaugour. 

Page  56,  note  5,  lisez  «  le  même  jour  ». 

—  59,  ligne  23,  lisez  Charles  d'Avaugour;  —  note  4,  lisez  Avaugour. 

—  62,  note  3,  lisez  «  le  roi  de  Castille  et  de  Léon  ». 

—  73,  ligne  6,  lisez  «  PuiLipPE-le-Bon  ». 

—  79,  à  la  fin  de  la  note  3  de  la  p.  78,  et  note  I,  lisez  «  Chronique 
Artokihe,  fo  265  ». 

Page    93,  ligne  3,  lisez  «  passé  a  quatre  cents  ans  ». 

—  107,  note  8,  lisez  «  Paris,  1648,  in-4o  ». 

—  il8,  ligne  27,  lisez  «  Suffolk  ». 

—  178,  ligne  2,  lisez  «  Sigismond  de  Luxembourg  »;  —  note  6,  lisez 
«  Henri  VI  ». 

Page  186,  ligne  18,  lisez  «  Jean  V  ». 

—  195,  note  2,  lisez  «  Charles  !«'  ». 

—  221,  ligne  14,  lisez  «  Crotoy  ». 

—  225,  ligne  12,  lisez  «  Henri  VI  ». 

—  245,  note  3,  ligne  3,  lisez  «  Charles  VI  ». 

—  256,  dernière  ligne,  lisez  «  PUniversité  ». 

—  268,  ligne  18,  lisez  «  Pont  de  l'Arche  >>. 

—  271,  avant-dernière  ligne,  lisez  «  Henri  IV  ». 

—  284,  note  3,  lisez  «  Guill.  de  Chalon  ». 

—  301,  ligne  24,  lisez  «  dans  le  Languedoc  ». 

—  316,  dernière  ligne,  lisez  «  Isabelle  de  Portugal  ». 

—  317,  en  tête,  lisez  «  ATTITVDE  NOVVELLE  ». 

—  339,  note  1,  lisez  «  Appendice  LXXVIII  bis,  n»»  1  et  2  »  en  suppri-  ' 
mant  «  LXXVIII  ».  _ 


712  ERRATA 

Page  343,  noie  1,  ligne  17,  lisez  «  Montres  ». 

—  346,  note  5,  lisez  «  Henri  VI  ». 

—  353,  ligne  11,  lisez  «  Éléonohe  d'Ecosse  ». 

—  370,  ligne  21,  lisez  «  gouverneur  de  Manies  ». 

—  384,  noie  4,  lisez  «  frère  de  Richemont  ». 

—  394,  note  2,  ligne  5,  lisez  u  Louis  l"'  »  (au  lieu  de  «  Amédée  VIII  »)» 

—  401,  note  1,  ligne  3,  lisez  «  Carentan  ». 

—  420,  ligne  20,  lisez  «  Henri  V  ». 

—  426,  ligne  23,  lisez  «  sire  du  Gavre  ». 

—  444,  ligne  17,  lisez  «  François,  comte  d'Étampes  ». 

—  446,  en  lêle,  lisez  «  ARTUR  III  »  (au  lieu  de  «  CHARLES  VII  »)  ; 
note  8,  lisez  «  Bonne  de  Luxembourg  «. 

Page  448,  note  1,  lisez  «  chantre  de  Saint-Gatien  ». 

—  456,  note  5,  ligne  5,  lisez  «  l'île  de  Bréhat  ». 

—  492,  ligne  31,  lisez  «  mil  CCCGX XXIII  ». 

—  494,  ligne  38,  lisez  «  Olivier  de  Bretagne,  à  Jean,  S^f  de  Laiolb  »► 

—  509,  ligne  38,  lisez  «  M.  H.  Wallon  ». 

—  551,  ligne  12,  lisez  «  15  décembre  ». 

—  565,  ligne  41,  lisez  «  li39  ». 

—  602,  ligne  16,  lisez  «  Evictandum  ». 


Coulommiers.  —  Tyj..  P.  BROPARD  cl  GALLOIS. 


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