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L'EMPIRE SUMATRANAIS
DE ÇRÎVIJAYA
PAR
GABRIEL FERRAND
MINISTRE PLÉNIPOTENTIAIRE
PARIS
LIBRAIRIE ORIENTALISTE
PA VL GEVTHNER
i3, Rue Jacob-VP
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L'EMPIRE SUMATRANAIS
DE CRÎVIJAYA,
PAR
GABRIEL FERRAND,
MINISTRE PLENIPOTENTIAIRE.
.1 la mémoire de Hendrik KERN.
On chercherait vainement le nom de l'ancien empire de
(irivijaya dans les dictionnaires et manuels de géographie ou
d'histoire : il est encore inconnu. Des textes orientaux qu'on
trouvera plus loin, permettent, cependant, d'en reconstituer
huit siècles d'histoire. Colonisé par l'Inde à haute époque,
comme le Camhodge et le Campa, l'empire, le premier em-
pire de l'Indonésie, est en plein développement culturel dès
le vil'' siècle de notre ère : nous en avons pour témoignage le
lécit d'un étranger, le grand pèlerin Yi-tsing.
La bibliographie du sujet peut tenir en (pielques lignes :
kilâb 'ajàïb al-Hind, Livre des Merveilles de l'Inde, par le capitaine
BozoRfi BiN Saiiriyâr (Ic llâmiiormoz , ti-ad. par Marcel Devic, texte arabe
et noies par P. A. van der Lith, Leyde, i883-i886, in-/i°, p. 2/17-
253, avec une note ae Beal.
Les religieux éminenls qui alliirent chercher la loi dans les pays d'Occi-
dent, Mémoire composé à l'époque de la grande dynastie T'ang par I-tsing,
Irad. Ed. Chavannes, Paris, iSy^i, iii-8",
M. (.. i'i;r,r,.\.M). i
J. Takakusu , A Record of the Buddhist religion as practised in India
and the Malay Archipelago {A. D. 6'ji-6g5) by I-tsing, Oxford, 1896,
pet. in-A".
Paul Pelhot, Deux itinéraires de Chine en Inde à la foi du vm' siècle,
dans B.É.F.E.-O., t. IV, igoi.
Gabriel Ferrand, Relations de voyages et textes géographiques arabes,
persans et turks relatifs à l'Extrême-Orient, Paris, in-8°, t. 1, 1918;
t. II, 1914.
N. J. Krom, Een Sumatraansche Inscriptie van Koning Krtanagara,
dans Verslagen en Med. der K. Akademie v. Wetenschapen, Afdeeling
Letterkunde, 5e Reeks, Deel II, p. Soô-SSg, 1916.
r
Georges Coedès , Le royaume de Çrivijaija, dans B.E.F.E.-O. , t. XVIIl ,
1918, n" 6, 36 pages avec 3 planches.
Gabriel Ferrand , Compte-rendu du mémoire précédent dans /. As. ,
juillet-août 1919, p. 1 49-200.
N. J. Krom, De Sumatraansche période der Javaansche geschiedenis ,
Leyde, 1919, 33 pages in-8°; traduit en français dans le B.E.F.E.-O.,
t. XIX, 1919, n° 5, p. 127-135.
J. Ph. VoGEL, Het koninkrijk Çnvijai/a, dans Bijdragen tôt de Taal,
Land- en Volkenkunde van Nederlandsch-Indië, deel 78, 1919, p. 626-
687 (l'auteur analyse le mémoire précité de CœdÈs, Le royaume de
Crivijuya, et donne des renseignements peu connus sur l'entrée, à la
bibliothèque de l'Université, de la rr grande charte de Leyden , vide infra,
XXXIl,p. 46).
G. 0. Blagden, The Empire of the Maharaja, King oj the Mountains
and Lord of the Isles, dans Journ. Straits Branch oJ R. A. S., n° 81,
1920.
On a réuni dans les pages suivantes , les textes chinois , indo-
nésiens, sanskrits, pâlis, tamouls, arabes, persans, cambod-
giens et siamois qui , sous des noms divers , mentionnent l'em-
pire de Çrivijaya et ses dépendances. Ces textes s'éclairent les
uns par les autres et permettent heureusement d'arriver à des
précisions. Les résultats obtenus à la suite d'une enquête nou-
velle portant sur un plus grand nombre de documents, modi-
fient dans une certaine mesure, infirment quelquefois telle
opinion exprimée dans mon compte rendu du mémoire de
CoEDÈs {^supra, p. 2). Mais il ne s'agit pas ici de simples
rectifications personnelles qui auraient pu tenir en quelques
pages; la question est plus haute et vaut qu'on y revienne.
C'est presque une opinion courante que Java a été le foyer et
le centre d'expansion de la civilisation indienne dans l'Insu-
linde. Il semble, au contraire, qu'il faille en faire honneur à
l'empire sumatranais de Çrivijaya, dont les textes et l'épigra-
phie nous montrent la haute culture et l'incontestable supré-
matie politique, militaire et navale pendant le premier millé-
naire de notre ère. Maître encore d'un immense territoire
au xnf siècle, l'empire s'effondre sous les défaites que lui
infligent les Javanais dans la métropole, les Thaïs de Sukho-
daya dans ses possessions de la péninsule malaise, et à la suite
des revers éprouvés dans les deux expéditions contre Ceylan.
TEXTES CHI^OIS.
Yi-TSiNG ^^\ Ta t'ang siyu k'ieou fa kao seng tchouan, Les Reli-
gieux énnnents qui allèrent chercher la Loi dans les paijs d'Occident,
Mémoire composé a l'époque de la grande dynastie T'ang, trad.
Ed. Chavannes, Paris, i8f)/i, in-S".
I. (P. 63-64.) Maître Ydn-k'i est originaire de la province de ^
Kiao I autrement dit du ^lîjf: Kiao-lche, le Tonkin]. . . Il est revenu
[de Chine] dans les 1:1ers du sud depuis plus de dix ans. Il s'enlond
parfaitement au parler ^ ^ k'ouen-loucn^'^^; il connaît bien la langue
(') Dans quelques cas où lu prtisenle version française diffère dos traduc-
tions de textes cliinois que j'ai utilisées, les corrections dont il s'agit m'ont été
indiquées par M. Pki.liot, qui a bien voulu lire une épreuve de ce mémoire.
Il s'en faut cepeudaiil que toutes les erreurs aient été rocliiiées; il n'eutiait
pas dans le cadre de ce travail de le faire. 11 serait désirable qu'un sinologue
voulût bien se charger de cette néctîssaire revision des textes en question.
'-' «L'appellation k'ouen-lnuen, dit en note Chavannes, peut être prisn pour
synonyme de Malais, n Dans un mémoire postérieur à la traduction du présent
1 .
sanskrite. Dans la suite, il jugea convenable de rentrer dans le monde
et se fixa dans le pays de ^ ^Ij f^ j^ Che-li-fo-yeou [graphie fautive
pour 111^ Ghe-li-fo-chc]. C'est là qu'il vit encore aujourd'hui
[vers 692]. , .
II. (P. 76-77.) . . . Les ouvrages chinois qu'ils (les Maîtres de la
Loi Pei-ngan et Tche-ngan) avaient pris, le Yôga-çâstra (tdias Yôgàca-
rijûhhmni-çàslra) et d'autres sûlras et çdstfas se trouvent tous dans le
pays de Ghe-li-fo-che.
III. (P. 119.) . . . Avant que vingt jours se fussent écoulés [depuis
notre départ de Canton], nous arrivâmes au pays de Fo-che*''; je m'y
arrêtai pendant six mois [, en 671]; j'y étudiai par degrés la science
des sons [çabda vidyà). Le roi me donna des secours grâce auxquels
je parvins au pays de ^ ^ J^ Mo-io-yu [=Malâyu]; j'y séjournai
derechef pendant deux mois. Je changeai de direction pour aller dans
le pays de ||| ^ kie-tch'a [=Këdah, sur la côte occidentale de la
péninsule malaise]. Lorsque arriva la douzième lune [de l'année ôy'j],
on hissa la voile; je remontai sur un bateau du roi et je me dirigeai
petit à petit vers l'Inde orientale [à destination de Tâmralipti, l'actuelle
Tamluk, en faisant escale au pays des Hommes nus ou îles Nicobar] . . .
IV. (P. 125.) . . . [Après un séjorn* dans l'Inde, Yi-tsing revient
ouvrage de \i-tsing (Sylvaia Lévi et Edouard Chavannes, Les seize Arhat pro-
tecteurs de la Loi, J. As., XI" série, t. VIII, 1916, p. /ig), Chavannes a inter-
prété le texte : «Amoghavajra partit de (janlon sur un bateau k'ouen-loueni;
par «... sur un bateau malais??. L'équivalence k'ouen-iouen = malais n'est
sûre que dans le premier cas où il s'agit du Che-li-fo-che = Çrivijaya = em-
pire de Palembaii. Pour la seconde citation, la même interprétation est dou-
euse, car le lexte ne dit pas expressément qu'il s'agit d'un bateau du même
pays. On sait, en effet, que les Chinois ont indiqué comme |1|^ -^ 1 ^ •^
k'ouen louen, variantes ^ ^ hiue-louen, 'g' ^ koti-loueii, des indigènes
de l'Indonésie et de i'Inde transgangétique voisine. Cf. G. Ferrand , Le K'ouen-
iouen et les anciennes navigations inlerocéaniq^tes dans les mers du Sud, J. As.,
XI" série, t. XIII, p. 319 et suiv. , en rectifiant ainsi favant-dernière phrase :
ff . . .Par langue k'ouen-Iouen à Java, au vii° siècle, il faut entendre le kawi
ou vieux-javanais; c'est le vieui-malais qu'on parlait à Palerabaii à la même
épo ue, ainsi qu'eu témoigne l'inscription de Banka. , .11. Pour cette inscrip-
tion, vide inj'ra, XXVII.
(-) Forme abrégée de Che-li-fo-che. Yi-tsing emploie tantôt l'un, tantôt
Iculre.
h Târnralipti.] Après cela, je m'embarquai; je passai par le royaume de
Kie-tch'a: les textes sanskrits du Tripitaka que je rapportais formaient
plus de cinq cent mille stances qui , dans la traduction chinoise, rempli-
raient bien mille rouleaux; je les pris avec moi et m'arrêtai dans le pays
de Fo-che.
V. (P. 126.) . . . 'Maître Chan-hing était un de mes disciples. A ma
suite il vint dans le pays de Cbe-li-fo-cbe. . . (cf. également p. i3G).
VI. ( P. làU.) ... Le maître du dhyâna Wou-umG prit le maître de
la discipline Tche-hong pour compagnon, et au temps du vent d'est,
ils s'embarquèrent; en un mois ils arrivèrent au ])ays de Che-li- fo-che.
Le roi de ce pays les honora fort et les distingua du vulgaire. Il leur
disliibua des fleurs d'or; — il répandit pour eux du millet d'or''' —
Il leur fournil les quatre choses nécessaires à l'entretien (le manger et
le boire, les vêtements, la literie, les médecines); — il se prosterna de
tout son corps (pancânga) pour leur dévoiler son cœur. Lorsqu'il apprit
qu'ils venaient du pays du Fils du ciel de la grande dynastie T'ang,
il redoubla pour eux d'honneurs.
Puis Wou-HixG s'embarqua sur un bateau du roi; au bout de quinze
jours il aborda dans l'île de Mo-lo-yu; au bout de quinze autres jours
il arriva au pays de f§ ^ Kie-tch'a [= Këdah , sur la côte occidentale de
la péninsule malaise]. Lorsque le dernier mois d'hiver fut venu, il clinn-
gea de route dans sa navigation et se dirigea vers l'ouest. Au bout de
trente jours, il parvint au pays de Na-kia-po-tan-na [= Negapatam dans
le sud-ost de l'Inde]; i\ partir de ce lieu, il arriva, après deux jours de
navigation sur mer, dans l'île du Lion (Simhala, Ceylan).
VIL (P. 159.) ... La deuxième année y ong-chouen (=683 de
notre ère), le maître de la Loi Ta-tsîn entreprit de partir pour les mers
du sud ... il suivit un ambassadeur impérial ; après une navigation de
plus d'un mois, il aborda dans l'île de Che-li-fo-che. Il demeura là [tiu-
sieurs années; il s'initia à la langue k'onen-louen^"-^', il étudia un grand
nombre de livres sanskrits. . .
W ffLes fleurs d'or et le millet d'or avaient une sifynification symbolique
dans la relipion bouddhique. Ainsi l'expression -^ ^ Wi . l'iopr. : l'ombre
(lu millet d'or, si[i;riifi(' i'ombro à\i lioiiddlia (St. Jumkn, lliiii'ii-lclioaiifr, l. II,
p. XV ). D'aprôs un rcnsfi/Tnemcnt oral qui m'a été donné [lar un iettié chinois
on appellerait millet d'or les jjraines de cannciier (Cuavannks)».
'-' Vide supra , p. '? , tioIo a.
■-t9'( 6 )'C»-
VIII. (P. 176 el suiv.) Pour moi, Yi-tsing, je m'embarquai à l'em-
bouchure du fleuve de Fo-che ... Ce que j'ai réuni des trois Recueils,
à savoir plus de cinq cent mille stances'*^, se trouve en entier dans ie
pays de Fo-che. . . . Puis, le premier jour de la 11° lune de cette année
(689), nous nous embarquâmes sur un bateau marchand et nous nous
éloignâmes de Canton. Nous nous dirigeâmes vers le (5 '^ Tchan-po
[=(lampa, l'Annam actuel] en hissant nos voiles; — nous nous pro-
posions d'arriver dans le pays de Fo-che par une longue course, —
... (cf. également p. 182, i83, 187, 188, 189, 190).
Yi-TsiNG, Nan hai ki kouei nei fa tcJiouan, A record of tJie
Buddhist religion as 'practisedin India and the Malay Archipelago ,
trad. par J. Takakusu, Oxford, 1896, in-li°,
IX. (P. 10.) ... Dans les îles de la mer du sud où il y a plus de
dix royaumes, le Mûlasarvâstivâdanikâija a été à peu près généralement
adopté ... En les comptant d'ouest [en est], la première de toutes est
^ '^ iilJ IJ'I'I l'île *'6 P'o-lou-che [=Baros, sur la côte occidentale de
Sumatra]; pms, ^BM M (var. M) IP 4" >P M fi M (gra-
phie fautive ^yeou) ^ ^ l'île de Mo-lo-yu [^^^MalayuJ, c'est main-
tenant [vers 699] le pays de CheJi-fo-che . . . ''^'.
HouEi-JE (né en 680).
X. Ce moine chinois effectua un voyage de Chine en Inde
et passa par Fo-che. «Les royaumes maritimes du sud-est, dit
le Song kao seng tchouan (éd. de Tôkyô, XXXV, 5, io3';
chap. 29) : iM ^ K'ouen-iouen , % % Fo-che, l'ile de Ceylan
et d'autres, il [Houei-je] les traversa, les parcourut, et il attei-
gnit l'Inde w (cf. mon mémoire sur Le K'ouen-louen et les
anciennnes navigations interocéaniques dans les mers du Sud,
/.y4s.,XP série, t. XIII, 1919, p. 2/16 , VIIUis).
(>) GiuvANNES a ici «cinq cent mille phrases 7) , mais il faut lire stances, comme
dans Textrait précédent do la page laB de sa traduction {vide supra).
(^) Trlpit. do Tôkyô , boite XXXV, vol. VII , p. 68 , col. a. Cf. P. Pelliot , Deux
itinéraires, p. 828. Il faut évidemment entendre par cette phrase concise quo
le Malâyu est passé sous la suzeraineté du Che-ii-fo-che.
.( 7 )
Vajrabodhi (717).
XL Ce moine, qui s'embarqua à Ceylan pour ia Chine, rf traversa vers
l'est plus de 20 royaumes, dont ceux de f^ % Fo-che et des |^ A
Hommes nus {Song kao seng ichouan, dans Tripiuika de Tôkyô, ^ , IV,
p. 70 v")''. Selon un autre texte, parti de Ceylan avec 35 navires per-
sans, ffen un mois de route il arriva au royaume de f^ 3^ Fo-che.
Le roi du royaume de Fo-che vint au-devant du maître avec des parasols
et dais d'or et un lit d'or. A cause du vent contraire, [le maître] s'arrêta
là cinq mois. Quand le vent fut fixé, alors il put se mettre en route 'i.
Il rencontra d'ailleurs des tempêtes terribles et erra de royaume en
royaume pendant trois ans avant de parvenir en Chine daiis le courant
de l'année 720 [Tcheng yuan sin ting che kiao mou lou, dans Triint. Tôk.,
^,VÏ,p. 78^)0.
Ambassades de P M ^^ che-li-fo-che
ET DE ^% ^- FO-CHE À LA COUR DE CHINE (^'.
XII. D'après le Sin t'ang chou (k. 922 T > P- '» r°)i 'e Che-h-fo-che
envoya des ambassades de la période /iîen4eHg' (670-678) à la période
k'ai-yuan (71 8-741).
XIII. La 1" année tcheng-cheng (695), au 9' mois, le 5* jour, une
décision impériale ordonne de distribuer des vivres aux envoyés de cer-
tains pays étrangers qui viendraient à ia cour, dont ceux du Che-li-fo-
che [T'ang houeiyao, k. 100, p. 22 v°).
XIV. Au 12° mois de la 1" année tch'ang-ngan (début de 702) et en
716, ambassades du Fo-che (Ts'ô fou yuan kouei, k. 970, p. 18 r",
pour la première ambassade, et k. 971, p. 9 r°, pour la seconde).
XV. En 724, au 7° mois de l'année chinoise, ffle roi du royaume de
Che-li-fo-che envoie en ambassade fil j^ || Kiu-mo-lo (peut-être
kumâra rrle prince héritier «) pour offrir deux nains, une fille ff" ijîft
seiig-k'i [c'cst-à-dirc une négresse de l'Afrique orientale], une troupe
de musiciens et des perroquets aux cinq couleurs; [l'empereur] conféra
(') Apud Paul Pelliot, Deux ilinéraires , p. 336,
<') Apud Paul Pelliot, Deux itinéraires, p. 33^-335.
— f-a.( 8 )<-»—
à [Kiu-]mo-lo [le litre] de fjf flj ichô tch'onfr (général), lui accorda
cent pièces de soie, et le renvoya dans son pays (Ts'ô fou yuankouei,
k. 971, p. 6 i'°; cf. aussi Sin i'nng chou, k. 222 f , p. h r°)ri. An
huitième mois chinois de la même année, l'empereur conféra à P ^Ij
^ ^ JA }'^ Ghe-li-l'o-lo-pa-mo (Çrïndravai'man?), roi du Che-H-fo-
che, le titre de ^ J^ f|j J^ -^ ^£ iso-ivei-wei-ta-tsiang-hiiin (Ts'o fou
yuan kouei, k. 964, p. i5 v°; k. 976, p. h r°; cf. Sin t'ang chou,
k. 222 HF î P- ^ i"°)-
XVI. En 728, le roi du Fo-che fait de nouveaux dons de perroquets
bigarrés [Ts'ô fou yuan houei, k. 971, p. 7 v°).
XVII. Au 12° mois de la 29' année h' ai-yuan (au début de 7^2),
le roi du Fo-che envoie son fils à la cour chinoise pour offrir le tribut
( Ts'ô fou yuan kouei, k. 971, p. 1 A r°). C'est à cette occasion sans doute
qu'en cette même année 7''i9, le roi du Fo-che, apoelé ^ij ^^ -^ ^
Lieou-t'eng-wei-kong, fut nommé ^ H ï Prince Pin-yi et reçut le
titre de iso-kin-wou-wei-la~tsiang-kiun [Ts'ô fou yuan kouei, k. 9G5,
p. 1 V).
Tenon fan tche de Tchao Jou-koua ( 1 2 2 5 ).
Chau Ju-kua, His work on the Chmese and Arnb trade in the
twelfth and thirteenth centuries, entitled Chu-fan-tciiï, traduit du
chinois et annoté par Friedrich Hirth et W. W. Rockhill, Saint-
Pétersbourg, in-Zi", 1912. Le texte chinois en a été posté-
rieurement publié par Rockhill à Tokyo (Rokumin shimbun
Press) avec une postface en anglais datée du 1'' avril 191^.
La date exacte du Tchoii fan tche a été indiquée par Pelliot
dans son compte rendu de la traduction Hirth-Rockhill ( T'oung
pao, t. XIII, 1912, p. 4/16-/181).
H f^ ^ SaN'FO-TS'i.
XVIU. (P. 60.) San-fo-ts'i gît entre le ^ 31 Tchen-la (le Cam-
bodge) et le ^ ^ Cho-p'o (Java). Sa suzeraineté s'étend sur quinze
provinces ( jl'l'l )• Ce pays se trouve droit au sud de Ts'iuan-tcheou [du
Fou-kien].
Pendant l'hiver, avec la mousson, [en partant de ce dernier port,]
vous naviguez pendant un peu plus d'un mois et vous arrivez alors an "^
^ P^ (lélroit de Linfi-ya^'', où un tiers des marchands qui elîectuent
ce voyajie [font escale?] avant de pénétrer dans ce pays [de San-fo-ts'i].
Un grand nombre des gens de ce pays ont pour nom de famille Jf^
p'ou ^'K
Le mur de la ville (la capitale) est construit en briques et mesure
plusieurs dizaines de H de tour.
Lorsque le roi sort, il est assis dans une embarcation; il est recon-
vei-t par un pagne enroulé autour du corps. 11 est abrité [du soleil] par
un parasol en soie et gardé par des hommes portant des lances d'or.
Les habitants [de la capitale] vivent soit disséminés hors de la ville,
soit sur le fleuve dans des maisons flottantes {lut. : des radeaux) cou-
vertes avec des roseaux. Ils ne paient pas d'impôls.
Les gens du pays sont habiles à combattre sur terre et sur l'eau.
Loisqu'ils sont sur le point de faire la guerre contre un autre état, ils
réunissent et expédient le corps de troupes que réclament les circon-
stances. Ils nomment [alors] les chefs et commandants; chacun fournit
son propre équipement militaire et les approvisionnements nécessaires.
Pour affronter l'ennemi et braver la mort, ils n'ont pas leurs égaux chez
les autres peuples.
(') Le détroit de Lifiga.
(■^) Les traducteurs disent en note (p. 6i, n. 3) : ^Fti stands for Bu, an
al)l)rc\ iatiou of Abu «fatliorw , whicli précèdes so many Arabie names. The phrase
^ fÈ. M "•"^''iiy ^''s surnamed Fiiv, orcurring hère and there in Chinese
ethnographical literature may safely ho taken to indicato Arah settlements.
Hir.TH, Die Insel Hainan, /187, note.» Si cette interprétation était exacte, il
eu résulterait que le San-fo-ts'i = Paiembaù du commencement du xin" siècle
possédait une très importante colonie musulmane , arabe ou d'origine arabe ;
mais il n'en est rien : le sens de la phrase est tout autre. Par «Un grand
nombre [de gens de ce j)ays] ont pour nom de famille Fout) , le texte veut
faire entendre, à la chinoise, que beaucoup de noms de gens du San-fo-ts'i
commencent par Fou. Ce Fou n'a rien à voir avec l'arabe Abu ; il s'agit ici
du titre nobiliaire indonésien Pu ou Mpu (cf. cam Pô), correctement rendu
par f^j . Les ff Arab settlementsn du San-fo-ts'i au début du xiii" siècle n'ont
donc pas plus de réalité historique que tfces tnarrlmnds sobérns que la fertile
imagination de Bkai. avait fait venir à Ceylaii au temps de Fa-hikn et que
LKiKiK n'en sut pas chassern (Pklliot, bulletin crilicjue du T'oimgpao, t. XIII,
1919 , p. 'i56); que h; «Tigre des Thaisn de l'épigrajjhie siamoise (cf. G. Coedks,
Uucutnetits sur la dynastie de Sukkodaya, dans B.E.F.E.-O., t. XVII, 1917,
n° 2 , p. 5-6 ) et autres idola libri.
_^( 10 ).« —
Us n'ont pas de monnaie de cuivre enfdées à une corde [comme les
Chinois], mais ils se servent de morceaux d'argent coupé pour les
transactions commerciales.
Pendant la plus grande partie de l'année, la température est chaude
et il n'y a que peu de temps froid. Leurs animaux domestiques sont très
semblables à ceux de la Chine.
On trouve chez eux du vin fait avec des fleurs, du vin de coco, du
vin fabriqué avec des noix d'arec et du miel; tous ces vins ont fermenté,
bien qu'on n'ait employé aucun levain de quelque sorte que ce soit. Ces
vins enivrent quand on en boit.
Pour la rédaction des documents officiels , ils se servent de caractères
étrangers (#)'''. La bague du roi est employée comme sceau. Ils con-
naissent également les caractères chinois et ils les utilisent quand ils
envoient un mémoire à la cour [de Chine].
(P. 61.) Les lois du pays sont très rigoureuses. L'adultère expose
rhomme et la femme [qui le commettent] à la peine la plus rigoureuse
[, c'est-à-dire : à la mort].
Quand le roi meurt, le peuple prend le deuil en se rasant la tête.
Cependant, les gens de la cour attachés à sa personne se donnent volon-
tairement la mort en se jetant dans un bûcher funèbre ardent; cet acte
est appelé ff vivre et mourir ensemble n '•'K
Il y a [à San-fo-ts'i,] une [sorte de] Buddha [, c'est-à-dire : une sta-
tue] appelée :^ 1^ |lj ff Montagne d'or et d'argent ^i , qui est fondue
en or. Chaque nouveau roi, avant de monter sur le trône, fait fondre
une statue d'or représentant sa personne. Les gens du pays ont giand
soin d'apporter en offrande des vases d'or à ces statues. Les statues d'or
et les vases d'or portent tous une inscription destinée à prévenir les
générations futures de ne pas les fondre '■^K
(1) Comme à Java, les anciennes inscriptions de Sumatra sont tantôt rédi-
gées en sanskrit, tantôt en indonésien écrit au moyen d'un système graphique
emprunté à l'Inde.
(^) Sur cette pratique, cf. Livre des merveilles de l'Inde, au glossaire, s.
y" j^i^, p. 194.
(•■"î Ce passage n'est pas clair dans le texte. M. Pelliot en propose l'inter-
prétation suivante : ffll y a un Buddha qu'on appelle le Buddha de la Mon-
tagne d'Or et d'Argent. Sa statue est fondue en or. Chaque roi, [juste] avant
de monter sur le trône, [fait] fondre sa [propre] image en or pour remplacer
cette statue. On fait des vases et de la vaisselle en or, et on rend [à cette
image] des hommages solennels. Les statues d'or et les vases et vaisselle
portent tous des inscriptions gravées pour que les générations futures ne les
-^«.( 11 )
Daus ce pays, lorsque quelqu'un est gravement malade, il distribue
aux pauvres du pays [une somme e'quivalente à] son poids en argent.
[Cette pratique] est considérée comme un moyen de retarder la mort.
Ils donnent à leur roi le titre de f| ^ long-lsing ''^ Il ne doit pas
détruisent pas.n Pour ces statues royales, cf. une coutume identique chez des
tribus turkes dont parle Pelliot dans un compte rendu de Les pays d'Occident
d'après /e Wei-lio, de Chavannes (B.E.F.E.-O., t. VI, p. 892, n. 3; et dans
un autre compte-rendu , ibid. , p. h 10).
(') HiRTH et RocKHiLL out cru à tort que long-Uing transcrivait un terme
protocolaire (cf. p. 65, note 12). «The title arun [auquel avaient songé les
traducteurs du T chou fan tc/ie], dit G. 0. Blagden [Some remarks on Chah
Ju-kua's Chu fan chi, dans J.R.A.S., 1918, p. 166), is used in Celebes
and is not Malay at ail. What Malay vvord is transcribed by the very un-Malay-
looking long-tsing I cannot imagine. Possibly thèse are simply Gliinese words
intended for a translation of some Indian title beginning with «âg-a,the équi-
valent of long. Tsing is given in Giles as meaning inter alla tt essence, spirit».
But long appears there also in phrases whore it merely means ffimperial-i.
Gannot the words represent some conventional expression like «His Majestyn hi
La remarque est fort intéressante, mais partiellement inexacte. M. Pelliot
m'a fait savoir que long-tsing (et non long-ts'ing, comme transcrivent Hirtu el
Rockhill) n'est pas une transcription d'un nom étranger et que les deux
caractères doivent être interprétés avec leur valeur sémantique : «esprit,
sperme de dragonn, c'est-à-dire aesprit, sperme de nâgav. Cette constatation
a une haute importance, car elle rattache l'origine de la dynastie de San-fo-
tsi à un nâga. Dans son important mémoire : The yupa inscriptions of king
Mûlavarman, from Koctei [East Bornéo] [Bijdragen toi de T., L. en Volken-
knnde van Nederlandsch-Indië , deel 7A, 1918, p. 178),!. Ph. Vogel dit:
ffll y a une curieuse légende que nous a conservée la poésie taraoule, (pii
rattache l'origine des Pallavas aux anciens souverains du Gororaandel. Gettf
légende rapporte que le premier Tondaimân (=Pallava) était le fils d'un roi
cola et d'une nâgî ou démonne-serpent.» Et l'auteur ajoute en note : «Le
poème lamoul Manimegalai , dans lequel se trouve cette légende, mentionne
également une ville appelée Nâgapuram [ = skr. Nâgapura «la ville du nàgart]
située dans le Çâvaka-nâdu [ = pays de Gâvaka] qui, comme le dit M. Ven-
kayïa, semble être le nom tamoul de l'île do Java [lire : Sumatra; Çâvaka est
la forme tamoule du malais Jàvaka^:> Zâhag , ainsi qu'on le montrera plus
loin]. Deux rois de Nâgapuram sont mentionnés : Bhûmicandra et Punyarâja
qui prétendaient descendre d'Indraji. {Archl. Survey A nmial Report for 1906'-
1907, p. 3 21, n. 1.) D'autre part, la tradition d'après laquelle la première
dynastie du Fou-nan remonte au mariage d'une nâgi avec un prince indien
a été étuflico par Finot (Sur rjurlqties traditions indochinoises , dans Bull, de la
Commission archêol. de l'Indochine, 1911, p. 3o et suiv.). Ccenès a étudié
manger de céréales, mais on le nourrit de sagou. S'il feisait autrement,
l'année serait une année de sécheresse et les céréales seraient chères. 11
prend des bains dVau de rose: s'il se baignait dans de l'eau ordinaire,
il y aurait une grande inondatio'i.
[Le roi] porte une haute coiffure dans laquelle sont enchâssés des
centaines de joyaux et qui est très lourde. Dans les grandes cérémonies
de cour, le roi seul est capable de la porter; aucune autre personne ne
le peut. Lorsque le trône devient vacant, tous les fils du roi se réunis-
sent, la coiffure leur est présentée et celui qui peut [eu supporter le
poids j succède au souverain défunt.
Il y a, dans ce pays, une ancienne tradition d'après laquelle le sol
s'est une fois entr'ouvert subitement; de la crevasse, sortii-ent plusieurs
myriades de bœufs qui se précipitèrent en troupeaux dans les montagnes;
les habitants s'en emparèrent à l'envi et les mangèrent. Ensuite, la cre-
vasse fut bouchée avec des bambous et des arbres, et il n'en resta plus
li'ace.
Eu dehors des produits du pays qui comprennent l'écaillé de tortue,
le camphre; le tch'en, sou , tchan et le cheou commun (quatre variétés de
bois d'aloès); le ]dang-tchen^^\ le girofle, le sandal, le cardamome; on
trouve encore des perles, de Tencens, de l'eau de rose, des fleurs de
gardénia, de la civette, de la myrrhe, de l'aloès, de l'assa-foetida ,
du putchuk, du stoiax liquide, des défenses d'éléphanl, du corail, des
œils-de-chat, de l'ambre, des étoffes de coton étrangères et des lames
de sabre. Tous ces [derniers] sont des produits des pays étrangers,
^C ^ Tache ( Arabes) ^^' et autres, rassemblés dans ces pays, et que
les marchands étrangers viennent vendre en les échangeant contre de
l'or, de l'argent, des objets en porcelaine, de la soie brochée, des éche-
également la Légenâp de la Nâgî dans ses Etudes Cambodgiennes [B.E.F.E -0.,
t. XI, 1911, p. 391-398) et conclut ainsi : «De quelque façon que nous i'en-
visagions, la légende cambodgienne [de la nâgî] nous ramène à la cour des
Pallavas . . .r> L'interprétation nouvelle du long-tsing du Tchou fan tche et ie
Nâgapuram du poème tamoul montrent que ie cycle légendaire du nâga ou
de la ndgl s'étend à rinsuhnde occidentale : comme l'ancien Cambodge,
Sumatra a dû son hindouisation à des immigrants veims de i'inde sud-orien-
tale. Le fait n'a rien d'inattendu; mais des informations dans ce sens ne
peuvent être que les bienvenues et on y reviendra ultérieuremenl.
C' C'est le parfum désigné en anglais sous ie nom de laha-wood.
'^) Les produits d'importation dont il s'agit sont ceux qui sont énumérés
après : on trouve encore des perles , . , .
.( 13 )<^
veaux de soie, des e'tolTes en soie, du sucre, du fer, du vin [de grains],
du riz, du galanga séché , de la rhubarbe et du camphre.
(P. 62.) Ce pays git dans l'océan et est niaitre des détroits par lequel
le trafic étranger par mer et par terre, dans Tune et l'autre direction''',
doit passer. Autrefois, on utilisait une chaîne de fer, comme barrière,
pour se gaier des pirates des autres pays. Cette chaîne pouvait être
maintenue haute ou abaissée, grâce à un ingénieux dispositif. Si un
navire marchand arrivait, on l'abaissait. Après un certain nombre d'an-
nées de paix, pendant lesquelles elle ne fut pas utiUsée, on l'enleva et
[maintenant] elle gît lovée sur le rivage. Les indigènes la vénèrent
comme le Buddha et les navires qui arrivent lui offrent des sacrifices.
Lorsqu'elle est frottée d'huile, elle brille comme une chaîne neuve. Les
caïmans n'osent pas passer sur la chaîne pour [aller] faire du mal.
Si un navire marchand passe devant [San-fo-ts'i] sans y faire escale,
les bateaux [du pays] sortent pour l'attaquer d'après une manœuvre
[jrévue; ils sont prêts à mourir [pour réaliser leur entreprise]. C'est
pour cette raison que ce pays est devenu un imporlaul centre mari-
time'''.
Les dépendances [de San-fo-ts'i] sont les suivantes :
^^ P'eng-fong [= Pahan],
^ ^ iÊ Teng-ya-nong [=Trëhganu],
^^ ^ Wl M Ling-ya-sseu-kia [=Lënkasuka],
■^Mé- Ki-lan-tan [-Këlantan]'^',
#J1^ Fo-lo-an(?),
B m^ Je-lo-ting (?) ("),
(') Des pays de l'Ouest eu Chine et inversement.
('^' L'escale de San-fo-ts'i était ainsi rendue obligatoire pour tous les bâti-
ments qui passaient à proximité.
(•'> Ces quatre dépendances sont situées sur ia côte orientale de la péninsule
malaise. La suivante, Fo-lo-an, se situe cnalement sur ia même côte, mais
n'est pas localisée.
('') Jo-lo-ting représente un ancieu *Nit-la-din ou * Nil-ra-dih , c'est-à-dire
*Ni'-ra-dih ou * Ni' -la-din = *Niladinga ou *i\iradinga, qui n'est pas attesté
par ailleurs. Peut-être est-ce du même pays (pfil s'ajjit dans ce passajje du
Song clie où il est dit : rr . . . puis, en quinze jours, [de ^j} j^ P'o-ni (Bor-
néo)] on arrive au royaume de San-fo-ts'i-, puis, on sept jours, on arrive au
royaume de '^ ^ Kou-lo; puis, en sept jours, on arrive au royaume de ^
^ ^ Tch'ai-li-tiu|{; on parvient au Kiao-tche (Tonkin) et on [fajjne Kouaujj-
tcheou (Canton)'! [Pklliot, Deux itinéraires, p. dijO et 3o6]; ce qui situerait
également le Je-lo-tiug ou Tch'ai-li-ting sur ia côte orientale de la péninsule
^( U )
•€-»-
ï^ig Ts'ieii-mai(?),
Wi ^ Pa-t'a (^
^ M} ^ Tan-ma-ling [=Tambralinga]'^',
MB^ Kia-lo-bi [- Grahi :^ Jaya] ('>,
è feîl Pa-lin-fong [==Paiemban],
^^ ^^ Sin-l'o [variante 9^^ ftlL SoMen-f'w^Sunda, partie occiden-
tale de Java],
^H Kieu-pi[^Kampe](^
^ ^ H Lan-wou-li [=Lamuri] ''',
$0 ^ Si-ian [= Ceylan]'"'.
Ce pays commença à avoir des relations avec la Chine pendant la
période t'ien-yeou (90/1-907) des T'ang. Pendant la période hien-long
(960-968) de la présente dynastie [des seconds Soug], il a envoyé trois
fois le tribut [d'allégeance]. La troisième année de la période chouen-Jioua
(992), il fit savoir qu'il avait été envahi par Chô-p'o (Java) et suppliait
qu'un édit impérial fût envoyé à leur pays; cela fut accordé.
Dans la sixième année de la période hien^'ing (ioo3), on fit savoir
au Trône [impérial de Chine] qu'un temple buddhiste avait été construit
dans ce pays afin d'y prier pour [la prolongation de] la vie de l'empe-
reur; et on exprima le désir que ce temple reçût son nom et une cloche
[de la cour de Chine]. L'empereur donna son approbation à cette
requête, ordonna que le temple porterait le nom de :^ ^ H ^
malaise. Mais ce n'est là qu'une conjecture, car l'identité du Je-Io-ting de
'J'chao Jou-koua et du Tch'ai-li-ting du Song che n'est pas certaine.
('' Il s'agit peut-être ici des Bataks de Sumatra, comme l'ont indiqué les
traducteurs (p. 66, n. 8).
(^) Sur la cote nord-orientale de la péninsule malaise, au sud de la baie de
Bandon. Cf. Coedès, Le royaume de Çnvijaya, p. 16-18.
(') Ibid.
(*' Sur la côte orientale de Sumatra.
'^) Dans le nord de Sumatra.
''') Près de trois siècles avant la publication du TcJiou fan tche, Mas'udî
écrivait déjà dans les Prairies d'or (t. I, p. 170) : «... le Maharaja roi des
îles du Zâbag, de Kalab (=Kra de la péninsule malaise), de Sirandi'o
(== Ccylan), etc. : ...Lô^-^cj i_^.joj*«j jd5^ ^iJlS'-jlyil J.>L« ■^\y^X\ ". La ren-
contre est curieuse , mais aucun témoignage historique n'atteste par ailleurs
que Ceylan ait été une dépendance de Sumatra vers le milieu du x° siècle
Mas'ûdï) et le premier quart du xui° (Tcuao Joh-koca).
«A partir de la dynastie Ming, et encore de nos jours, on écrit f^ "^
Si-lan55 (Pelliot, Deux itinéraires, p. 358).
Tch'eng-tfien-^an-chou a Dix mille années à recevoir du Ciel» et lit cadeau
d'une cloche.
Jusqu'aux périodes king-tô, siang-fou et't'ien-hi (1006-1022) et pen-
dant les périodes ijuan-yeou et yiian-fong (1078-109/1), ce pays envoya
un certain nombre d'ambassades apportant le tribut, et des messages
impériaux lui furent adi-essés à titre de louange et de réconfort.
Dans l'est, ce pays [de San-fo-ts'i] est limitrophe de J%^^^ Jong-
ya-lou [= Jëngâlâ, à Java], [^'ote : appelé aussi "M. M Ê. Tchong-kia-
lou.]
SoNG CHE OU Histoire des seconds Song (960-1279),
chap. cccGLXxxix'''.
San-fo-ts'i.
XIX. Le ^-^ royaume de San-fo-ts'i ^'' est l'un des royaumes des Bar-
bares méridionaux. Il git entre le Tchen-la (Cambodge) et le Chô-p'o
(Java) et étend son autorité sur quinze pays différents.
(1) D'après W. P. Groeneveldt, Notes on the Malay archipelago and Malacca,
dans Miscellaneous papers relating to Indo-China and the Indian archipelago,
second séries, t. I, Londres, 1887, in-8°, p. 187 et suiv.
Le Song che, qui a été compilé au xiv' siècle, a fait de très nombreux
emprunts à la notice sur le San-fo-ts'i de Tchao Jod-koca. On s'en convaincra
facilement en comparant les deux textes.
(•-) Il y a une question du ^ |^ ^ij Kan-t'o-li du Leang chou (var. du
Song chou : Jp [% ^ij Kin-t'o-li) que je ne traiterai pas ici pour ne pas
allonger démesurément ce mémoire. Cf. sur le sujet, Ghokneveldt, Notes,
p. 185-187; G. Ferrand, Le K'ouen-louen et les anciennes navigations traiis-
océaniques dans les mers du sud, J. As., XP série, t. XIV, 1 9 1 9 , appendice III,
p. 288-2^11.
(') Dans un commentaire de ses Notes, GROENEyELOT dit (loc. cit., p. içja) :
«In transcribing the names of the différent kings [mentionnés dans lo Song
che,] the oid JNIandarin pronunciation has been foUowed, because thèse
names were writtou down at court and not carried to China by merclianls
from Southern China; we are howcvcr but very insufficientiy acquainled with
the pronunciation of that period , and so our transcription may often not be
quite correct. . . n En fait, presque toutes les restitutions de Guoeneveldt sont
fautives. Son San-bo-tsai, par exemple, à côté de la graphie EL i^ ^ ■< ^^^
un pur harharisme. La prononciation de ces trois caractères sous les seconds
Song devait être à peu près *Sam-bud-ls'ui (fallriquée du troisième caractère
pouvant représenter les palatales sourde et sonore, soit *is'ai<::jay ou cay)
Ses produits sont le rolin, le kino rouge, Je bois d'aloès, les noix
d'arec et les cocos. On ne s'y sert pas de monnaie de cuivre, mais on a
l'habitude de traiter toutes les transactions commerciales avec de l'or et
de l'argent. Pendant toute l'année, la température est ordinairement
chaude et rarement froide; en hiver, il n'y a ni gelée ni neige. Les gens
se frictionnent le corps avec de l'huile parfumée. Le pays ne produit pas
d'orge , mais il y a du riz et des pois verts et jaunes. La volaille , les
oies et les canards y sont à peu près les mêmes qu'en Chine. •
On y fait du vin avec des fleurs, des noix de cocos, des noix d'arec
ou du miel; et tous ces vins enivrent, quoiqu'ils soient fabriqués sans
levain ni levure *''.
Pour faire de la musique, ils ont une petite guitare et un petit tam-
bour; les esclaves provenant du K'ouen-louen ^"' font de la musique pour
les gens du pays, eu sautant sur le sol et en chantant.
lis écrivent avec les caractères sanskrits ; le roi se sert de sa bague en
guise de sceau. Ils connaissent également les caractères chinois et ils en
usent lorsqu'ils présentent des lettres avec le tribut [à la cour de Chine].
Ils ont construit une ville fortifiée, entourée d'un mur en briques
superposées qui a plusieurs dizaines de H de tour: leurs maisons sont
recouvertes avec des feuilles de palmier. Les habitants vivent disséminés
hors de la ville et ne payent pas d'impôts. En temps de guerre, ils choi-
sissent immédiatement un chef pour les commander; chacun fournil
ses propres armes et approvisionnements. Avec un vent favorable , on se
rend de San-fo-ts'i à Canton en vingt jours.
On donne au roi le titre de § .^ tchan-pei (''. Dans ce pays , il y a
beaucoup de gens dont le nom de famille est ^ p'ou '*'.
et permet de remonter à un original tel que *Samb%ijaxja. En dehors de
quelques cas spéciaux, je ne reviendrai pas sur les restitutions inexactes de
l'auteur des Notes ; elles ont été corrigées en partie par Pelliot dans ses Deux
itinéraires.
(•' Le Song che ou Histoire des seconds Song a été compilé par T'o-t'o au
Mv" siècle (Pelliot, Devx itinéraires, p. 3o/i). A peine est-il besoin de faire
remarquer que de nombreux emprunts ont été faits au Tchoufan tche (XVIII,
p. 8).
(■^) Il s'agit ici de nègres de la côte orientale d'Afrique.
(3-4) (3) Ce titre royal est énigmaticjue et inconnu par ailleurs. «D'après leLmg-
tvai tai ta [de Tchkou K'ih-fei, qui a été rédigé en 1178 et dont le Tchou
fan tche reproduit textuellement de très nombreux passages,] (k. 2 , p. 12 r"),
en 1 179 [lire : 1178] le royaume de San-fo-ts'i envoya «un ambassadeur du
Vers la fin de la dynastie des T'ang, eu l'année goS, ils ont envoyé
le tribut, et l'ambassadeur''' qui était le gouverneur de leur capilaie,
reçut de l'empereur de Gbine le titre de fcGénéral qui pacifie les pays
éloignes fl.
Dans le 9" mois de l'année 960, [le roi | ^. ^Ij i§J ic ^ M IS
Si-!i hou-ta Hia-li-tan [= malais : Sëri kuda Haridana?] envoya un
andjassadeur pour apporter le tribut'""'; ce qu'il lit encore pendant Télé
de l'année suivante. Pendant l'hiver de 961, le tribut fut présenté par
un roi appelé ^ ^ij ,% Jïjj Che-li Wou-ye [= Çrî Wuja ?] '''.
Au printemps de l'année 962 '*', le roi Ghe-li Wou-ye envoya une
ambassade composée de trois ambassadeurs, pour apporter le tribut.
Ils rapportèrent [de leur visite à la cour de Ghine] des queues de yak,
royaume de Tchan-pei pour apporter le tribut 75. Or il semblerait que ce nom
de Tchan-pei fût les deux fois [, clans le Ling wai tai ta et le Sung che,] celui
du pays même de San-fo-ts'i, qui dans un cas aurait été faussement pris pour
le nom du souverain. Plus tard, YHistoire des Ming (k. 324,p. 11 v°; Grokne-
VKLDT, Notes, p. 196; ScHLECiEL, dans Toung pao, II, u, p. laS) nous dira
encore que le royaume de Jambi [sur la côte orientale de Sumatra, au nord
de Palemban] tire son nom de tchan-pei qui, dans la langue du San-fo-ts'i,
signifie irsouverainn (P. Pi:lliot, Deux itinéraires, p. 346)îî. D'après plusieurs
testes arabes : «l'île de Kilah [=Kra] appartient au royaume de Jâba lin-
dieuTi (Ibn Houdâ^beh); Edrîsï s'exprime dans les mêmes termes. Ir.N .it-WAHDî
dit que «le roi de la ville (sic) [de Jàba] s'appelle [aussi] Jâba" (pour ces
citations, cf. mes Relations de voyages, t. I, p. 27, i84, i85; t. II, p. 621).
Il y a, je crois bien, une parenté étroite entre ce nom royal de Jâba et le titre
de Tchan-pei; mais je ne sais quel terme protocolaire ils recouvrent et laquelle
de ces deux transcriptions, arabe ou chinoise, reproduit le moins inexacte-
ment l'expression indonésienne. On verra plus loin que les conclusions de ce
mémoire autorisent un tel rapprochemenl. — W Vide supra, p. 9, n. 2.
'') D'après le Wcu liicn l'ong kao, l'ambassade arriva à la cour eu 90/1;
l'ambassadeur s'appelait ^^ gpj" ^ Pou Ho-sou; Méridionaux, trad. d'IIeuvby
DE Saint-Denys, Genève, i883,in-/i°, p. 56 1.
'-' D'après le Wen hien t'ang k'ao [Méridionaux , p. 56 1), cet ambassadeur
s'appelait ^ ^ '^ Li-tche-ti.
'■'') Le Wen hien t'ong k'ao (Méridionaux, p. 502) ajoute ici : «On apprit
par CCS ambassades que le royaume de San-fo-ts'i' était appelé aussi royaume
de -^ •^ Sieu-lieou.5) J'ai proposé déjà de corriger ^ -^ Sien-lieou en
!^ ■^ iMo-licou = Malâyu (cf. J. As., juillet-août 1919, p. i65).
''') D'après Ma Touan-lin {Méridionaux, p. 562), cette auibassude aurait été
envoyée par le roi ^ ^ /^ ^ jtJc 0 ^ Li-si-lin-nan-mi-je-lai [lire
«Mi-je-lai, fils de Li-si-lin«J.
M. G. FERRAND, U
-^3.( 18 ).e^—
de la porcelaine blanche, des ustensiles en argent, du fd de soie et deux
jeux de selles et de brides.
En l'année 971, i'un des précédents ambassadeurs fut renvoyé [à ia
cour de Chine] pour y offrir du cristal et du naphte. Il revint à la cour
en 972. En 974, on apporta comme tribut de l'ivoire, de i'encens, de
i'eau de rose, des dattes, des pêches plates {s{c)^^\ du sucre blanc, des
bagues en cristal, des bouteilles en verre et du corail. En 976, de
nouveaux ambassadeurs vinrent [à la cour], où on leur fit présent de
coiffures et de ceintures.
Eu 980, le roi de San-fo-ts'i ^ ^ Hia-tch'e [= vieux malais Haji
frroii (-'] envoya un embassadeur. La même année, on apprit de Tch'ao-
tcheou (Swatow du Fou-kien), qu'un marchand étranger venu de San-
fo-ts'i était arrivé dans ce port avec un chargement de parfums, de
médicaments, drogues, cornes de rhinocéros et d'ivoire. Par suite de
vent contraire, il avait mis soixante jours pour la traversée de San-fo-ts'i
à Tch'ao-tcbeou.
En 983, ie roi i^ ^ Hia-tcb'e [= vieux malais Haji cfroin] envoya
un ambassadeur qui apporta en tribut du cristal, des étoffes de coton,
des cornes''^ de rhinocéros, des parfums et des drogues **'.
En 985, ie capitaine d'un navire arriva et offrit en présent des pro-
duits de son pays.
En 988 , un ambassadeur arriva avec l'intention d'apporter le tribut.
Pendant l'hiver de 992, on apprit de Canton que cet ambassadeur'"'
qui avait quitté la capitale de ia Chine deux ans auparavant , avait appris
dans ie sud que son pays avait été envahi par le Cho-p'o (Java) et que,
en conséquence de cet événement , il était resté pendant un an [ à Can-
ton]. Au printemps de 992 , l'ambassadeur était allé au Campa avec son
^') Ma Touan-lin (Méridionaux , p. Sôa) a : des confitures de pêches.
'^^ L'/i initiai est tombé en malais moderne.
^^' Le texte a ^ , iitt. des dents , dos défenses.
'*' Chavannes (Les Inscriptions chinoises de Bodh-Gand , dans Revue hist. des
religions, t. XXXIV, n" 1, 1896, p. 52 , note, du tirage à part) donne le texte
et ia traduction de ce passage du Song che (chap. /iSg, p. 5 v") où il est dit :
«La huitième année [t'ai-p'ing-Mng-kouo = 988], ie roi de ce pays [de San-
fo-ts'i], Hia-tch'e, envoya l'ambassadeur f^ ^f p^ M ^^m ïa-t'o-lo [= Pu
Ya-da-ra ou -la\ apporlor en tribut. . . n
(^' D'après ie Wen hien l'ong k'ao {Méiidionaux , p. 669), cet ambassadeur
s'appelait f^ $]] Pl^ ^ P'ou ïi-t'o-li = Pu Yi-da-ri ou -li. C'est probable-
ment ie même que celui de l'ambassade de 988. Voir la note précédente.
.__^( 19 yc-t—
navire, mais comme il n'y recueillit pas de bonnes nouvelles, il revint
[en Chine] et demanda [à la cour] qu'un décret impérial fût promulgué
mettant le San-fo-ts'i sous le protectorat de la Chine.
Eu ioo3, le roi ^. || ^% ^ JE if^ BM ^- Sseu-li-fchou-
lo-wou-ni-fo-ma-tiao-houa [= skr. Çrîculamanivarmadeva] ^'' envoya
deux ambassadeurs pour apporter le tribut. Ils racontèrent que, dans
leur pays, un temple buddhique avait été érigé afin d'y prier pour la
prolongation de la vie de Tempereur; ils demandaient que l'empereur
lui donnât un nom et [fît présent] de cloches pour le temple; l'empe-
reur montrerait ainsi qu'il faisait cas de leurs bonnes intentions. On
promulgua un décret par lequel le temple reçut le nom de Tch'eng-fien-
wan-chou et des cloches furent fondues pour être données aux ambassa-
deurs ^"\ En outre, l'un des ambassadeurs reçut le titre de n-Général
qui est attiré par la vertu n et l'autre, celui de ff Général qui aime ardem-
ment l'influence civilisafriccw.
En 1008, le roi ,g, MB% ÉC (s?c) Sseu-ii Ma-lo-p'i [=Çrïmâ-
Ttwijaj/ottuhgavarman] envoya trois ambassadeurs pour offrir lo tribut.
On leur permit de se rendre au T'ai-chan (l'une des montagnes saintes
de la Chine, dans le Chan-tong) et de se trouver en même temps que
l'empereur dans la salle d'audience. Finalement, ils furent renvoyés
[dans leur pays, après avoir reçu] de généreux cadeaux.
En 1017, le roi M'MM ^^h Ëï M Hia-tch'c Sou-wou-lch'a-
p'ou-mi [=Haji Sumatrabhumi crie roi de la terre de Sumatrai^^']
(') Ce nom royal et le suivant ont été restitués par CoeoÈs , Le royaume de
Çnvijmja, p. 7.
W Vide supra, p. iA-i5.
'^) Pour cette restitution, cf. ma note : La pltis ancienne mention du nom de
file de Sumatra, dans J. As., W série, t. IX, 1917, p. 33 1-335 et la cor-
rection, au sujet du caractôrc ^ tvou, dans Le K'ouen-hmcn et les anciennes
navifjations inierocéaniqxiea dans les tners du sud [ibid., t. XllI, 1919, p. 377-
278)-
ffQue Samudra, Sumatra, sijpiifie l'île de VOce'an, dit Rouffaeu, et soit à
identifier avec la ville de Samudra sur la rivière de Pasei de la côte orientale
de Acch, c'est ce dont proscjue personne no doute» {Oudlwikundige opmer-
kingen, dans Bijdragcn t. T., L. en Volkenkimde v. Nederlandsch-Indië , decl 74,
1918, p. i38). J'imagine, au contraire, que celte interprétation ne doit pas
avoir beaucoup de partisans. Le skr. samudra signifie bien frmer, océanw; mais
on n'a pas encore, à ma connaissance, apporté le témoignage qu'une île déter-
minée a été jamais appelée *samndr(idripa rîle de la mer-o et que c<^t étrange
toponymc a désigné file entière ou la partie septentrionale de Sumatra. Dans
envoya des ambassadeurs avec une lettre écrite en lettres dore'es et un
tribut sous forme [de présents comprenant] des perles, des livres san-
skrits plies entre des plancbettes et des esclaves. Par édit impérial , ils
furent autorisés à voir l'empereur et à visiter quelques édifices impé-
riaux. Lorsqu'ils retournèrent [dans leur pays], on promulgua un édit
adressé à leur roi et on leur remit différents présents dans le but de lui
être agréable.
En 1028, au S' mois, le roi ^ i^^ ^ ^ Che-li-tie-houa [=Çrï-
deva] envoya des ambassadeurs pour porter le tribut. Habituellement,
.'es ambassadeurs venant de pays éloignés recevaient une ceinture ornée
d'or; mais, cette fois, on donna aux ambassadeurs de San-fo-ts'i des
ceintures entièrement en or.
En ) 0(57, arriva en Chine un ambassadeur qui était l'un des plus
haut dignitaires de Sau-fo-ls'i et s'appelait M ^ {{iD ^ Ti-houa k'ie lo
[=DevakalaJ. On lui conféra le litre de Grand Général qui maintient
l'obéissance et qui aime ardemment le renouvellement. On lui accorda
un édit impérial conçu en ces termes : cf Notre réputation et Nos eusei-
un travail postérieur (un important mémoire également publié dans les
Bijdragen, que je n'ai pas encore eu le temps délire à loisir), I^ouffaer y
revient à propos du présent roi de San-fo-ts'i : Haji Sumatrabhûmi. L'auleur
rappelle l'interprétation que j'en ai donnée et ajoule : «d'après moi, [ce com-
plexe désigne] plus exactement un l^oi du pays de Samudra, c'est-à-du'c du
pays de la mer, c'est-à-dire du pays de Tasik [en malais «mer»], Tëviasik,
Tumasik [formes infixées de Tasik], autrement dit de l'de de Singapour;'
^Was Malaka emi^orium voor lâoo A. D. genaamd Malajoer? dans Bijdragen,
deel 77, 1921, p. 75). L'objection est la même que dans le premier cas :
comment l'ile de Singapour puurrail-eile être appelée «pays de i'océan» ? Ce
loponyme est aussi impossible que le précédent : une île déterminée ne peut
pas plus être dénommée «Océanj) que «Terre de l'océan», surtout quand
(fOcéann s'applique au nord-est de Sumatra et «Terre de Tocéann à Tite de
Singapour. Le ]\ àgarakërlàgama (3° édit., p. 5i) a bien Tumasik, qui a été
identifie à Singapour et Johor {ibid., p. :2Go) et qui est sans doute le |^ ^
^^ Ta7i-ma-si du Tao yi tche lio (notice consacrée au j"^ Sien, pron. anc.
*Syam, l'ancien royaume de Sukotliai, dans Rockuill, JMotes on the relations
and trade oj China, T'uung pao , t. XV, 1916, p. 100); mais il n'est aucune-
ment démontré qu'il s'agisse ici d'une île qui aurait été appelée initialement
Samudra «la mer, l'océann. Je ferai remarquer, enfin, que le premier carac-
tère du toponyme en question est sou = su, comme celui de toutes les autres
notations chinoises et arabes qui transcrivent le nom de l'iie et de l'état suma-
Iranais de la côte nord-est [vide injra, LXXIK, extrait du ms. aa99, la note
à propos du nom de l'dc de Sumuira, p. 81 ).
gnemenls projettent leur ombre sur tous les pays, proches ou lointains;
si les représentants de ces pays sont seulement loyaux et soumis, Nous
leur donnons toujours des titres chinois, en leur accordant des noms
distingués dans le but de marquer notre estime pour leur pays. Vous
vous êtes joyeusement soumis à Notre haute influence et vous êtes venus
à travers la mer, pour apporter en tribut des objets précieux. Nous vous
louons de cela et Nous vous avons élevé en dignité pour vous encourager
à être loyal et soumis. «
Pendant la \)éviode yuan-fong (1078-1085), des ambassadeurs vin-
rent de San-fo-ts'i apportant encore de l'argent, des perles, de l'huile
de camphre, de l'encens et d'autres produits du pays. La lettre qu'ils
ap[)ortaient fut d'abord envoyée à la cour, de Canton où ils attendaient
que [l'ordre vînt] de les faire escorter jusqu'à la capitale. L'empereur
se rappelant qu'ils venaient de très loin, leur donna de généreux pré-
sents et les autorisa ensuite à s'en retourner. L'année suivante, il leur
donna 6/1.000 ligatures de monnaie de cuivre, iS.ooo laels d'argent et
il accoi-da aux deux ambassadeurs des titres honorifiques. L'un d'eux
demanda la permission d'acheter des ceintures d'or, différents objets en
argent, des vêtements de pourpre pour moines buddhistes et des tablettes
officielles^'' : tout cela lui fut donné comme il le désirait'^'.
En 1080, un étranger du sud arriva à Canton. Il (Ht qu'il avait la
direction des affaires dans son pays. La fdle du roi envoya [par son
intermédiaire] une lettre en caractères chinois au surintendant du com-
merce avec [, en présent,] du camphre de Baros et des cotonnades. Le
surintendant n'osa recevoir ni lettre ni présent et il fît un rapport au
Trône; sur quoi il reçut l'ordre de payer ces marchandises à leur valeur.
Le surintendant acheta alors de la soie pour une valeur égale à celle des
objets donnés en présent , et la remit à l'étranger en question.
En 1083, trois ambassadeurs vinrent de San-fo-ls'i pour obtenir
audience de l'empereur; ils apportaient des fleurs de lotus en or ornées
de perles, du camphre de Baros et [ils accomplirent la cérémonie appe-
lée] ^ ^ sa-tien ^''. On leur conféra des titres honorifîquos d'après leur
grade personnel. Le troisième ambassadeur mourut en Chine, après
(>) ÉiH ^ • Le sens de ces mots n'est pas clairn (Groeneveldt).
(2) Sans qu'il eût rien à payer, ajoute le Wen hien t'ong k'ao ( Méridionaux ,
p. 565).
W GuoENEVELnT na pas compris ce passage, qui est plus explicite clans le
Wen hien t'ong k'ao (Méridionaux , p. 505 et n. 20). Cette cérémonie consiste
à répandre du camphre cl des perles sur les degrés du Irône de l'empereur.
avoir quilié la capitale. Le g-ouvernement chinois fit présent de cinquante
pièces de soie pour ses obsèques.
En io83, trois autres ambassadeurs arrivèrent; il leur fut conféré à
tous des titres honorifiques d'après leur grade personnel.
Pendant la période chno-cheng (109/1-1097), une ambassade vint
encore.
En 11 56, le roi ^ ^ij B,M% I^.'È Si-li ma-hia-lo-cho [= skr.
Çaîmahârâja > malais Sëri Maharaja] envoya des ambassadeurs pour
apporter le tribut. L'empereur dit : ff Lorsque des gens éloignés se sen-
tent attirés par Notre influence civilisatrice, on doit louer leur discerne-
ment. C'est de cela que Je me réjouis, mais non pas parce que Je veux
tirer bénéfice des produits de leur pays.n A cette occasion, le roi de
San-fo-ts'i avait également envoyé des perles pour être remises en pré-
sent à l'un des ministres chinois qui mourut à ce moment. L'empereur
donna l'ordre de recevoir les perles et de remettre une somme égale à
leur valeur^*'.
En 1178, on envoya encore des ambassadeurs pour apporter en tri-
but, des produits du pays. A cette occasion, l'empereur promulgua un
édit prescrivant que [les envoyés de San-fo-ts'i] ne viendraient plus à la
cour et s'installeraient à Ts'iuan-tcheou du Fou-kien ^^'K
SoNG CEE ou Histoire des seconds Song, chnp. ccccxc, dans
Ed. Chavannes, Les inscriptions chinoises de Bodh-Gmjâ (^Revue
de l'histoire des religions, t. XXXIV, 1896, p. Ba).
XX. La huitième année t'ai-p'ing-hing-kono =^ ^83 , le religieux f^
j^ Fa-yu, revenant de l'Inde où il avait été chercher des livres sacrés,
(') Le Wen hien fong k'ao mentionne entre l'ambassade do 11 56 et celle
de 1 178 une ambassade dont ne parle pas le Song che : «La 8° année kion-lao
(1173), le roi [de San-fo-ts'i] sollicita l'autorisation d'acheter du cuivre, d'en
faire charger un batetu et d'engager aussi à son service un cerlain nombre
d'ouvriers chinois sachant fabriquer dos tuiles avec ce métal. L'empereur
donna son consentement, mais sous ia condition que cette demande ne serait
pas renouvelée.»
'^) Le gouverneur do Ts'iuan-tcheou les recevrait désormais et leur servi-
rait d'intermédiaire {Wen-}den t'ong k'ao, Méridionaux, p. 566). Ma Touan-
LiN ajoute {ibid.) : a Le roi de San-fo-ts'i fit connaître [par l'ambassade de
1178] (|u'il avait succédé à son père depuis la k" année kien-tao (1169). Aus-
sitôt l'investiture lui fut donnée , avec la confirmation de tous les titres dont
arriva à H f^ ^ San-fo-ts'i et y rencontra le religieux hindou §^ J^
fi ^ ^ Mi-mo-lo-che-li (= Vimalaçrl), qui, après un court entre-
tien, le chargea d'une requête dans laquelle il exprimait son désir de se
rendre dans le Royaume du Milieu ^'^ et d'y traduire les livres saints.
L'empereur eut la bonté de rendre un édit pour l'appeler auprès de lui.
Fa-yu quêta ensuite des aumônes pour fabriquer un dais précieux et un
kasâija. Gomme il se proposait de retourner eu Inde, il demanda qu'on
lui remît des lettres officielles pour les royaumes qu'il devait traverser.
[L'empereur] lui donna donc des lettres pour iH ^ Hia-tche [p= vieux
malais Haji cfroii], roi du pays de ^ f^ ^ San-fo-ts'i: pour ^ ^
fo Ê" Sseu-ma-ki-niang '"\ souverain du pays de ^ "é" ^ Ko-kou-
ses ancêtres avaient joui et avec les présents consistant en habits de cérémo-
nie, ceinture d'or, chevaux, selles, soieries, tracUtionnellemcnt accordés aux
princes de son rang à l'occasion de leur avènement.»
(1) La Chine.
('^' Dans la notice i4 consacrée au Cho-p'o = Java , Tciiao Jou-koda dît :
(T Comme mandarins, il y a [dans ce pays] des ^ >Sj '^ ^ f n jÈ **''""
ma-kie-lo-ki-licn qui administrent ensemble les affaires du royaume; ils sont
comme les ministres en Chine» (Pelliot, Deux itinéraires, p. 3ii; cf. Chau
Jur-kua, p. 76). Le Si ya»g tch'ao kong tien luii de Hooang Sing-ts'eng (1620)
contient une notice sur Pahan (côte orientale de la péninsule malaise), où
une note au texte dit : wEn l'année 1879, P'eng-heng (Pahaù) envoya à la
cour de Chine ime ambassade avec une requête [gravée] sur une feuille d'or
et un présent d'esclaves et de divers objets. En l'année 1/11 A, il envoya le
haut fonctionnaire ^ ||t (11 P^ â'ù M Sou-ma-kou-mm-li-li et d'autres avec
le tribut» (Hockhill, Notes on the relations and trade oj China with the eastein
Archipelago and the cnast of the Indian Océan duiing the fourteenth century,
dans T'oung pao , t. XVI, 1916, p. 131, note). De ces deux litres, la seconde
partie du premier : lo-ki-lien a été correctement restituée en j-rtAri/aw (Pelliot,
Deux itinéraires, p. 3ii-3ia), qui est bien connu en vieux-javanais et vieux-
malais {vide infra l'inscription de Banka); les trois derniers caractères du
second : jnen-ft-/î représentent le titre malais mëntëri-<. skr. mantri «ministre».
Dans les deux cas , les trois premiers caractères
sseu-ma-kie lo-ki-lien = rakryan
suu-ma-kou men-ti-li = mëntSri .
sont évidemment apparentés, mais je ne sais quel terme protocolaire indoné-
sien ils transcrivent. IIutTii et Rockhill ont traduit le passage précité du Tchou
fan tche : (tOf officiais tliey hâve Ssi-ma-kié (and) Lo-ki-lien ... n (p. 7G),
mais cette interprétation ne se justifie pas. Pklliot [ibid. , p. 3 11) avait
remarqué déjà que le Song chc et le Won hien t'ong k'ao (cf. Méridionaux
lo; pour ^ iH H Tsan-tan-lo [=Candra] du pays de ^ ^ Ko-lan
[=Kûlam des textes arabes, le Quilon de nos cartes], et pour |^ ,^|ç
fllj Mou-t'o-sien [=- Mudiasena], fils du roi de l'Inde de l'Ouest; on le
fit partir muni de ces lettres.
MiNG CUE OU Histoire des Ming ( 1 3 6 8- 1 6 /i 3 ) ,
livre CCCXXIV (i).
San-fo-ts'i.
XXI. San-fo-ts'i, appelé autrefois ^ |ï^ ^ij Kan-to-li^-', envoya
pour la première fois des ambassadeurs apporter le tribut sous le règne
de l'empereur Hiao-wou de la dynastie des premiers Song [h^h-h'ok).
Pendant le règne de l'empereur VVou de la dynastie des Leang (5o2-
669), ils revinrent à plusieurs reprise^;; et à l'époque de la dynastie
des seconds Song (960-1279), ils apportèrent le tribut sans arrêt.
En 1870, l'empereur de Chine envoya un ambassadeur [au roi de
San-fo-ts'iJ pour enjoindre à celui-ci de se faire représenter [à la cour
chinoise par une ambassade]. L'année suivante, le roi qui était appelé'^'
^ Ki M ^L A M h Ma-ha-la-tcha pa-la-pou [= indonésien Maha-
raja Prabhu], envoya des ambassadeurs portant une lettre écrite sur
une feuille d'or et apportant en tribut des ours noirs, des cssoars, des
paons, des perroquets de différentes couleurs, plusieurs sorles de par-
p. 497) ont seulement lo-ki-lien au Heu de sseu-ma-kie lo-ki-lien; le passa{Te
parallèle du Si yang tch'ao hong tien lou vient lieureuseraent résoudre une par-
tie de l'énigme : c'est sseu-ma-kie qu'il faut lire; les deux premiers caractères
tseu-ma, complexe chinois signifiant tfchef militaire, général", sont hors de
cause.
Le Ko-kou-io du Song che qui est, sous une autre graphie, identique au
^ ^ ^ Ko-kou-lo de Ku Tan et qu'il ne faut pas confondre avec son
homonyme le âJjIs Kâkula de Ibn Batûta, est à situer sur la côte occidentale
de la péninsule malaise. Le nom du souverain de ce pays : Sseu-ma-ki-raang,
semble bien devoir être lu : Sseu-ma-ki Maug, le premier terme de ce nom
ou titre royal étant à rapprocher du Sseu-ma-kie du T chou fan tche et du Sou-
ma-hou du Si yang tch'ao kong tien lou.
(') D'après Groeneveldt, Notes, lue. cit., p. 199 et sulv.
'^) Pour le Kan-t'o-li, cf. l'appendice III de mon mémoire sur Le K'ouen-
louen et les anciennes navigations interocéaniques dans les mers du Sud, dans
J. As., XI" série, t. XIV, 1919, p. 238-aii, et supra, p. i5, n. 2.
(■■'> Il faut cnlt'ndre : (jui portait le titre de Maharaja Prabhu.
--M.( 25 ).€^—
fums, (le l'étoffe ,"2^ pi , des couverlures en laine et hraucoup d'aulres
objets. LVnipereur ordonna de leur donner une copi(î de Talmanacli
impérial el des pièces de soie [en nombre variable] suivant leur grade.
En même temps, le ministère des Finances fit savoir qu'un navire avec
des marchandises leur appartenant, était arrivé à Ts'iuan-tcheou [du
Fou-kien] et voulait leur faire payer dos droits ; mais l'empereur pres-
crivit de ne rien leur faire payer.
En 1873, le roi '\^ B \^ M M ^ Ta-raa-cha-na-a-tcbô;')
envoya des ambassadeuis pour porter le tribut, avec une lettre spéciale
de félicitation pour le nouvel an suivant.
A cette époque, il y avait trois rois dans ce pays.
En 187/1, le roi Mj M ^ ^ ^ ^ Ma-na-ha Pao-lin-panj;- [= Ma-
haraja (le Palembaù] envoya des ambassadeurs pour apporter le tribut,
ce qu'on fît également le 1 "" mois de l'annt'e suivante.
Au 9' mois de l'année 1875, le roi appelé ff" '({[JI ^J, ^ ^ Seng-
h'ia-lie-yu-lan^-^ envoya des ambassadeurs pour appoi'ter le tribut. Ces
ambassadeurs vinrent à la cour en suivant un envoyé impérial qui reve-
nait de mission dans un autre pays.
En 1876, le roi Ta-ma-cha-na-a-tchô mourut et son fils, lit §f) ^
3? M. Ma-na-tchô AYou-li [= Maharaja Wuli ou Wuni?] lui succéda.
L'année suivante, ce dernier envoya en tribut des cornes de rhinocéros,
des casoars, des singes blancs, des perroquets noirs et verts, de l'écailIe
de tortue, du girolle, du camphre de Baros et d'autres objets. Les
ambassadeurs dirent que le fils n'osait pas monter sur le trône de sa
propre autorité, c'est pourquoi il en demandait la permission à la cour
impériale. L'empereur fit i'éloge de son sentiment du devoir et ordonna
à des envoyés impériaux de lui porter un sceau et un brevet de roi de
San-fo-ts'i.
Cependant, à cette époque, San-fo-ts'i avait été déjà conquis par J^
(') GnoENEVELDT a lu inexactement Ta-ma-cha-na-a.
(') D'après le Yuan che (XXIX, 22°; XXX, 2', 20°), le roi de Java envo\a
en i3:'.5, en ambassade en Chine, un ministre appelé ^ ^"(J f^ ^ W .rfjji
Si-la 6'ertg--Â.'ù(-/i-(/r' = javanais Sira San kaliya (1). En i332, une autre ambas-
sade avait à sa tête un ministre du nom de f^ ^ ^'|j Seng k'ia-la, Htt. San
Gala (ou Kala) (Yuan che, XXX, 21'; XXXVi, 4''). Gomme l'a conjecturé
WocKwiLL (Notes on tlie relations and trade, dans T'oung pao, t. XV, 191^,
p. A/16-A/17), il s'agit très vraisemblablement du même personnage. Le nom
de raml)assadeur javanais est sans doute le même que celui du roi du San-fo-
ts'i, mais je n'ai pas réussi à les restituer.
-•->.l
( 26 }
P^ Tchao-wa'*'. Le roi de ce dernier pays apprenant que l'empereur
de Chine avait nommé un roi de San-fo-ts'i, en fut extrêmement irrité;
il envoya des gens qui guettèrent au passage et assassinèrent les envoyés
impériaux. L'empereur ne pensa pas qu'il fût juste de punir le roi de
Java pour cela.
Après cet incident , San-fo-ts'i devint ce plus en plus pauvre et on
n'apporta plus le tribut de ce pays.
En 1897, les fonctionnaires du ministère des Rites adressèrent un
mémoire à l'empereur, disant que différents Barbares n'avaient pas
apporté le tribut depuis longtemps.
L'empereur répondit en ces termes : ffAu commencement de mon
règne, les différents Barbares envoyaient sans cesse des ambassadeurs
avec le tribut; parmi ces Barbares étaient les pays d'Annam , du Campa ,
du Cambodge, du Siam, de Java, de Lieou-k'ieou '-', de San-fo-ts'i, de
[la côte septentrionale de] Bornéo, de Pahan, de [l'état de] Sumatra
[sur la côte nord-est de l'île du même nom] et de beaucoup d'autres
pays; mais, récemment, San-fo-ts'i se prévalut de la révolte de Hou
Wei-yong et induisit en erreur nos envoyés dans ce pays par de faux
rapports. En apprenant cela, le roi de Java envoya des gens pour faire
remarquer aux envoyés impériaux qu'ils avaient été trompés et on les
renvoya [en Chine] avec la plus grande courtoisie. Depuis cette époque,
les relations commerciales ont cessé.
(1) Le Tao yi tche lio de Wang Ta-yuan (18/19) contient iino notice consa-
crée à Tchao-wa = Java — Rockuill {Notes un the relations and trado, dans
Toung pao, t. XVI, 191 5, p. 286) a imprimé la leçon fautive habituelle )^
pi Koua-wa pour jj^ | Tchao-wa qui est sans doute celle du texte chinois
— où il est dit : «C'est le royaume de |g ^ Chô-p'o d'autrefois. w La gra-
phie I§ M se prononçait sous les T'ang *Z'a-b<va ^dJawa; au xiu° siècle,
ces deux caractères avaient une prononciation à peu près identique à celle du
chinois mandarin moderne : Chô-p'o, qui n'avait plus qu'une lointaine relation
phonétique avec le nom de la grande île indonésienne. Par un louable souci
de rendre aussi fidèlement que possible le toponyme étranger, les Chinois
adoptèrent une nouvelle transcription : Tchao-wa, phonétiquement Cao-wa,
qui représente exactement Jawa, au timbre de la palatale près, sonore en
indonésien , sourde en chinois. L'emploi du caractère ^ tchao -< indonésien
ja, répond à une particularité de Teuphonie chinoise d'après laquelle on choi-
sit de préférence un mot dont le phonème final soit en harmonie avec Tini-
tiale de la syllabe suivante, soit tcha-o -{- iva = jawa.
(2) Sur ce pays, cf. l'appendice I de mon mémoire Malaka, le Malàyu et
Malâyur, dans ./. As., XI' série, t. XII, 1918, p. 126-1 33.
---«.( 27 )k-^—
ffLcs (lidiireuts pays n ont pas îa même mentalité : l'Annam, le Campa,
le Cambodge, le Siam et le Lieoii-k'ieou se rendent à la cour et apportent
le tribut comme par le passe'; mieux encore, le Lieou-k'ieou a envoyé
des jeunes gens qui viennent s'instruire ici. Toutes les fois que les pays
barbares envoient des ambassadeurs, ceux-ci sont toujours traités avec
courtoisie et Je ne suis en aucune façon indifférent .à leur égard ; mais ,
actuellement. Je ne connais pas leur mentalité. Si Nous envoyons actuelle-
ment des porteurs de message à Java, il est à craindre que Saa-fo-ts'i
ne les arrête en route. Je suis informé que ce San-fo-ts'i était initiale-
ment un pays appartenant à Java. Prenez donc note de ma manière de
voir et faites-en part au Siam, en lui enjoignant de la faire connaître à
Java. n
Sur ce, le ministère des Rites envoya une lettre ainsi conçue :
ff Depuis que le ciel et la terre existent, la différence entre souverain et
sujet, entre haut et bas, a toujom's existé. Les pays qui se trouvent
autour de la Chine sont réunis en un seul par notre gouvernement et
autrefois les différents Barbares d'au delà de la mer, venaient régulière-
ment jouir de son influence. Actuellement, le San-fo-ls'i a eu de mau-
vaises intentions, il a trompé nos fidèles envoyés impériaux et s'est
rendu coupable de trahison. Notre saint Empereur traite tous les Bar-
bares avec la même bienveillance et justice; comment osent-ils être
ingrats pour ces hautes faveurs et oublier les devoirs d'un sujet envers
son prince? Si la colère de l'empereur est éveillée, il peut envoyer une
armée de cent mille hommes pour mettre à exécution la punition du
ciel, ce qui lui est aussi facile que de retoui'ner la main. Pourquoi ks
Barbares ne se raj)pellent-ils pas de cela? Notre saint Empereur a dit
que l'Annam, le Campa, le Cambodge, le Siam et le Lieou-k'ieou rem-
plissent leurs devoirs de sujets, mais le San-fo-ls'i seul se retourne
contre les saintes instructions de l'Empereur. Quoi<ju'i] soit plus petit
que les autres pays précités, il se risque à être rebelle : il sera ainsi la
cause de sa propre ruine. Mais vous, Siam, comme vous remphssez
respectueusement vos devoirs de sujet; comme le gouvernement prescrit
parle Ciel vous a en grande estime, il vous confie le soin d'informer
Java que ce dernier pays doit parler au San-fo-ts'i de ses devoirs [envers
l'empereur] et de lui faire savoir que si celui-ci modifie ses mauvais pro-
cédés, il sera aimablement reçu à la cour comme par le passé."
A cette époque, Java avait conquis le San-fo-ts'i tout entier et changé
son nom en celui de ^ f^ Kicou-kiang^''. Lorsque le San-fo-ts'i fut
(') Litt. ffle vieil estuaire», le vieux port.
-^{ 28 )<^
ballu, il y eul des troubles dans tout le pays et les Javanais ne purent
pas l'occuper entièrement. En raison de cela, les Chinois qui étaient
établis là, se révoltèrent pour leur propre compte, et un Cantonnais de
Nan-hai, appelé ^ ^1; Oj] Leang Tao-ming, qui avait vécu pendant
longtemps et erré sur la mer, et qui avait l'appui de plusieurs milliers
d'hommes du Fou-kien et de Canton, fut choisi par eux comme chef.
Il régna comme maître d'une partie du pays, et son fils qui renconti-a,
une fois, un ambassadeur impérial envoyé en mission hors de Chine,
fut amené par celui-ci à la cour.
En i/io5, l'empereur envoya un porteur de message qui était origi-
naire de la même ville que Leang Tao-ming, invitant le chef chinois de
Sau-fo-ts'i à se présenter à la cour. Tao-ming et sou allié ff) fé ni
Tcheng Po-k'o suivirent l'envoyé impérial et apportèrent en tribut, des
produits du pays à la cour. Ils revinrent ensuite [dans leur pays] après
avoir reçu de nombreux présents.
En i/»o6, le chef [chinois] de Kicou-kiang, appelé ^ fl ^ Tch'en
Tsou-yi, envoya son (ils; Tao-ming envoya son neveu qui se rendirent
ensemble à la cour. Tsou-yi était également un Cantonnais et quoiqu'il
envoyât le tribut à la cour, il se hvrail en même temps à la piraterie;
les ambassadeurs d'autres pays qui apportaient le tribut en Chine en
souffrirent beaucoup.
En 1/107, l'envoyé impérial Tcheng Ho'*' qui revenait d'Occident,
le convoqua par un porteur de message. Tsou-yi feignit d'obéir à cet
ordre, mais il se prépara secrètement à dévahser aussi Tcheng Ho.
Celui-ci en fut prévenu par un autre Chinois appelé f^ j§ l^p Che
Tsin-k'iug, et lorsque Tsou-yi l'attaqua, il le fit prisonnier, l'amena
à la capitale où il fut exécuté. En même temps, Tsin-k'ing envoyait
son gendre apporter le tribut; sur quoi l'empereur donna l'oidi-e de
créer un bureau de Pacificateur de Kieou-kiang et nomma Tsin-k'ing
à ces fonctions. Far ordre impérial, on remit à ce dernier un sceau, un
chaj)cau et une ceinture [comme insignes de ses fonctions], et depuis
lors le tribut fut appoi'té à la cour à plusieurs reprises. Quoique Tsin-
k'ing ait reçu une commission de l'empereur, il était en même temps
soumis à Java. Le teri-itoire de son gouvernement n'était pas étendu et
n'était en rien comparable à celui de l'ancien San fo-ts'i.
En 1/124, le fils de Tsin-k'ing, appelé M'MM Che Tsi-souen,
fît savoir que son père était moi-t et demandait l'autorisation de lui suc-
(') Sur ce célèbre eunuque et ambassadeur impérial, cf. Rockuill, Notes on
t'np -.xhUi'ins and (rnik , T'oung- pao, t, XVI, 191 5, p. 81.
— «.( 29 )<s—
cëder : elle lui fui accordée. En ili-2o, il envoya des ambassadeurs
pour apporter le tribut. Ceux-ci direut que l'ancien sceau avait été dé-
truit dans un incendie; sur quoi l'empereur ordonna d'en donner un
nouveau. Depuis lors, le tribut fut graduellement apporté plus rare-
ment.
Vers la fin de la période kia-tsing (i522-i56G), le fameux bandit
cantonnais, ^ '^ Tcbang Lien, causa des troubles; mais, au bout de
quelque temps, les officiers de l'armée firent savoir qu'ils l'avaient cap-
turé. En 1677. des marchands venus à Kieou-kiang virent que cet
homme y avait une rangée de boutiques et était le maître de navires
indigènes ; un grand nombre de Chinois du Fou-kien lui étaient attaches
et il était une sorte de surintendant du commerce avec la Chine.
Ce pays est un endroit de grande importance pour le commerce des
Barbares. Il est situé à l'ouest de Java d'où on y arrive , avec vent favo-
rable, en huit jours de voyage environ. Le pays est divisé en quinze
districts; le soi est fertile et propre à l'agriculture; d'après un dicton
local : ffSi vous plantez du riz une année, vous avez de l'or pour trois
ansn , ce qui veut dire que la récolte est abondante et peut être vendue
pour beaucoup d'argent.
Les gens riches sont très adonnés à la débauche.
Les habitants de ce pays sont habiles à combattre sur l'eau; aussi
leurs voisins les craignent-ils.
Le pays est abondamment fourni de [cours d']eau. Les chefs vivent à
terre; le peuple habite sur la rivière; dans ce but, on construit les mai-
sons sur des radeaux qui sont attachés à des pieux de telle façon que
lorsque la marée monte, les radeaux s'élèvent sans être submergés
Lorsqu'on veut changer de place, on arrache les pieux, ce qui ne coûte
pas beaucoup d'argent ni de travail.
Les basses classes donnent à leurs supérieurs le titre de @ ^
tchan-pei^^\ ce qui a le même sens que ff souverain du pays^. Postérieu-
rement , l'endroit où le jiremier chef vécut fut appelé également Tchan-
pei'^'.
L'ancienne capitale du pays a été changée en [l'actuel] Kieou-kiang.
Autrefois, le pays était riche; mais depuis sa conquête par Java, il est
devenu de plus en plus pauvre et peu de navires marchands s'y rendent.
(') Vide supra, p. 16, n. 3.
(-) C'est-à-dire Jambi , au nord de Palembaù, qui correspond géographi-
qucment au Malâju de Yi-tsing. Cf. mon mémoire Malaka, le Malàyu et Malà-
yur, dans /. As., mai-juin et juillet-août 1918.
Ses coutumes et ses produits ont été décrits dans illisloiie des
[seconds] Song''>.
Tao yi tche Lio (le Wang Ta-yuajn (18/19).
San-fo-ts'i.
XXII. En'-' parlant du détroit de Long-ya f| ^ f^ *'', on arrive
dans ce pays après un voyage de cinq jours et cinq nuits.
Beaucoup de gens ont pour nom de famille f^ p'ou '*', Ils aiment à
se battre, sur mer et sur terre. Les combaltanls avalent une drogue qui
empêche les épées de les blesser. Ce sont ainsi les gens les plus auda-
cieux du monde.
Le pays a une population dense; la terre est fertile et splendide; le
climat est chaud. Au printemps et pendant l'été, il pleut continuelle-
ment.
Les coutumes y sont bienséantes et pures. Hommes et femmes coiffent
leurs cheveux en chignon et portent une courte chemise bleue en coton ;
ils s'enveloppent dans une pièce d'étoffe de colon [provenant (?)] de
Tong-tch'ong ^ /ffï •^ . Comme ils aiment la propreté, ils mettent leurs
maison sur des charpentes [flottant] sur l'eau'''. lis recueillent les
huîtres pour en faire du |^ tcha '"'. Ils font bouillir l'eau de mer pour
faire du sel et font fermenter le riz glutineux f)ft pour faire du vin. Ils
ont un souverain.
Les produits indigènes sont la fleur de prunier, les morceaux de
(') Vide supra, p. i5 et suiv.
("-) D'après W. W. Rockhill, Notes on the 7'elatwns and trade of China ivith
the Eastem Archipelago and the coast of the Indian Océan during the fourteenth
centunj, dans T'oung pao, t. XVI, i9i5, p. i34-iAo.
(^' Ainsi que Ta montré Rockhill (/oc. cit., p. 129, n. 2), il s'agit ici du
détroit de Singapour, alors que le ^ ^ f^ Ling-ya men du Tchoti fan tche
(vide supra, p. 9) «le détroit de Ling-yan, désigne le détroit de Linga. Le
Long-ya-men du Tao yi tche lio signifie littéralement «détroit de ia denl du
dragon». Rockhill situe inexactement San-fo-ts'i à Jambi; c'est Palembaù
qu'il faut lire.
W Vide supra, p. 16, n. A.
''') Vide supra, p. 29 et 9.
W Sorte de condiment colonial appelé en anglais chutney. Cf. Hobson-Job-
soN, S. v° Chulny,
—-*-»'{ 31 )»€l-- -
camphre de qualité moyenne, le bois de laque, la noix d'arec, les
étoffes de coton et du bois artistiquement sculpté.
Les marchandises qu'emploient [les Chinois] pour faire du com-
merce sont : les taffetas de couleur, les perles rouges, les châles, les
étoffes de coton de couleur, les mai-mites en cuivre et en fer el d'autres
encore.
D'après une ancienne tradition, [une fois,] la terre s'ouvrit subite-
ment et plusieurs myriades de bœufs en sortirent. Les gens s'en empa-
rèrent et les mangèrent : puis, ils prirent des bambous et comblèrent
[la crevasse] pour toujours ''^
^ f^ KlEOU-KIÂNG.
XXIII. [En partant] de f^ |^ Tan-kiang, on pénètre dans le ^
^ P^ détroit de P'eng-kia [=Banka]<''. Les habitants se servent de
[radeaux en] bambous au lieu de bateaux. Le long des routes, il y a
beaucoup de pagodes en briques. Le profit qu'ils retirent de leurs
champs est le double de celui des autres pays. C'est un dicton populaire
que si du grain est planté une année , la troisième année il pousse de
i'or; ceci veut dire que le grain a été changé en or. Au bout d'un cer-
tain temps, des gens de l'Océan occidental ayant entendu parler de la
fertilité du sol, vinrent dans des navires et prirent dans les champs un
morceau de l'os de la terre (1^ ffl ^ ^ i. 'W) V^^^ ^® transporter
dans leurs propres champs et établir ainsi des relations entre eux et ce
pays (JtU êi ÎS ffl ;^' 2^ M); mais, quoi qu'ils aient planté du
grain, l'or des champs de Kieou-kiang ne poussa pas. Ceci est une
étrange chose '^' !
Le climat est plutôt chaud. Hommes et femmes coiffent leurs cheveux
en chignon et portent un pagne de coton blanc. Ils fout bouillir l'eau de
(') Vide supra, p. 12.
(-) «C'est-à-dire : «Quand on quitte l'embouchure de la rivière de Jambi
«ou Suni Sunsan (appelé ici «i'estuaire à i'oau doiicen ou Tan-kiang), on entre
«d'abord (en se rendant dans la mer de Java) dans le détroit de Banka.w
(ROCKIULL.)
(■^) «Le Tong si yang h'ao (3, li") dit : « Kicou-kiang était appelé ^ ^
«Yao Cou «le pays fertiiew, parce que, d'après le dicton, si on sème du grain
une année, la troisième année [suivante], il pousse de l'or; ce qui veut dire
«que les récoltes y étaient si abondantes qu'on en relirait beaucoup d'or en les
«vendant." (Rockuill.) Vide swpra, p. 39.
mer pour eu faire du sel et fout feimenlerie jus de la uoix de coco pour
en faire du vin. Ils ont un souverain.
Les produits indigènes sont : le bois d'aloès, le parfum -^ §^ Liu-
yin''^\ du coton supérieur à celui de tous les autres pays étrangers, de
la cire d'abeille, du kiang-tchen de qualité inférieuie, de très grands
buceros'"' et du bois d'aloès de qualité moyenne.
Les marcbandises qu'emploient [les Chinois] pour faire du commerce
sont : de petites perles colorées de P^ ^[5 % 1% Men-pang (?) , des |jt
1^ fji noyaux de ki-lhi[l), des objets en pui'celaine de TcIi'ou-[tcheou-
fou], des chaudrons de cuivre, des étoffes de colon de couleur, d
grands et petits récipients pour l'eau, des pois et d'autres choses encore
YiNG YAl CHENG LAN de Ma HoUAN ( 1 /| 2 5-1 /l3 2 ?).
e
K
lEOV-KIANG.
XX.IV. On l'appelait anciennement San-fo-ts'i. On l'appelle également
'i^ î$|{ ^ Po-lin-pang [=^Paîemban] et il est sous la dépendance de
ïchao-wa (Java). A l'est, [ce pays] est contigu à Tchao-wa; à l'ouest,
à ïpg $lj JjH Man-la-kia [=Malaka] '^'; au sud, se trouvent de hautes
montagnes et au nord-ouest, il s'étend jusqu'au bord de la mer. Les
navires (venant de Kieou-kiang) entrent dans le f^ ^ Tan-kiang
frl'estuaire à l'eau douce^i; puis à ^^ P'eng-kia [=Banka]. Ils
doivent transborder sur de petits bateaux pour remonter le [Tan-]kiaug
et atteindre la capitale "''.
(^' wLc hin-yin hinng, litt. «encens d'argent et d'or?), en malais kcmanjan,
[lire : keminan, cf. Faviîe, Dict. malais-français , sub verbis (^y^JT, ^^■i^, (^'-^Ji
est le benjoin doux; voir Hir.TU et Rockhill {Chau Ju-hua, p. 198 [où il est
appelé ^ |§ ^ kin-yen-hiang «encens de couleur d'orw]; ie Tong si yang
k'ao (3, 17 a) mentionne le naphte ^^ ^ |t{| parmi les produits de Kieou-
kiang.?? (RoCKUlLL.)
(^) Pour la description de cet oiseau, vide infra, XXIV, p. 3i.
(') Ma Houan oriente Sumatra de Test à l'ouest, alors que l'orientation de
Tile est du nord au sud. Une erreur identique a été commise par le muallim
arabe Ibn Majid (ms. a^ga de la Bibliothèque Nationale), qui a rédigé ses
Instructions nautiques dans la seconde moitié du xv'' siècle et par SdlaymAn al-
MAunl, autre auteur d'Instructions nautiques de la première moitié du xvi" siècle
(ms. 2 55f) du mê'me fonds).
''') Telle est riutorprétation de Hockiiill, mais elle doit être rectifiée ainsi :
Les navires venant de Kieou-kianij = Palembaii doivent suivre le détroit de
■ ■ t »»( 3"] )»€i- • -
Un grand nombre des habitants sont des immigrants de Canton, de
Tchang-tcheou et de Ts'iuan-tcheou [, ces deux derniers au Fou-kien].
Le pays est fertile et la population dense. Le sol est bon pour la
culture. D'après un dicton populaire, si on cultive le sol une saison, la
troisième saison on récolte du riz i{^ |^ ; le mot J(^ chou signifie « mois-
sonner un grand espace» '''.
11 y a [dans ce pays] beaucoup plus d'eau que de terre. Les habitants
sont adonnés au combat sur l'eau. Les maisons des hauts fonctionnaires
sont seules sur les berges de la rivière; le peuple vit disséminé sur des
radeaux en bambous attachés à des racines d'arbres ou à des pieux; ces
radeaux suivent le mouvement de la marée, du flot et du jusant''^.
Les mœurs et coutumes '^^ et la langue sont les mêmes qu'à Tchao-wa
(Java).
Sous le règne de l'empereur Hong-wou (des Ming, 1 368-1898), il y
Banka, puis, entrer dans le Tan-kiang ou estuaire de la rivière de Jambi. Là,
ils transbordent sur de petits bateaux pour remonter la rivière de Jambi et
atteindre la capitale. Le texte du ïiuff yai cheng lan traduit par Gf.oeneveldt
(Notes, p. 197), précise que ie transbordement s'effectue «près d'un endroit
où se trouvent de nombreuses pa^jodes construites en briques».
(1) ffTout le sel de l'histoire a disparu dans cette version [vide supra,
p. 39]. Au lieu de tron récolte de rhv on devrait avoir naturellement «on
récolte de for-i. Ralph Fitch qui écrivait dans le dernier quart du xvi" siècle,
dit en parlant de Jambi : trJamba is an Island among the Javao aiso, from
whence come diamants. And the king hath a masse of earth whicli is golde ;
it growcth in the middle of a river : and when the king doth lacke gold, they
eut part of the earth and melt it, whereof commcth golde. This masse of earth
doth appeare but once in a yeare; wliich is when the water is iow : and this
is in the month of Aprili (Haklcït, Principal Naiigations, V, /199; Hahlmjt
Soc. édit.). Ceci, conclut Rockhill, est évidemment une autre version de cette
Iradilion.Ti (Rockhill.) Le texte traduit par Groeneveldt {^otes, p. 197) a,
plus correctement : «Les gens de ce pays sont très riches, car ie sol est très
fertile. Un dicton populaire dit, en effet : «Quand quoiqu'un sème pour une
(tannée, il peut récolter pendant trois ans-:, ce qui n'est pas exagéré du toul.îi
(■-' S'élevant avec le flot, s'ai)aissant av.-c le jusant. Le texte traduit par
Gr.oENEVELDT {Notes , p. 197) ajoute ici : «Lorsque les habitants de ces mai-
sons flottantes veulent s'en aller cl aller vivre dans un autre endroit, ils
arrachent les poteaux [auxquels elles sont attachées] et se déplacent avec leur
maison tout entière, ce qui est très commode. La rivière a deux marées par
jour.n Vide supra, p. 2g.
(•') Le texte traduit par Guoenetelot [ibid.) ajoute ici •. «les cérémonies du
mariage et des funérailles-n
M. ( . ferc.vnd. 3
avait à Canton un homme appelé Tch'en Tsou-yi, qui, étant proscrit,
s'enfuit dans ce pays dont il devint le chef, pillant impitoyablement les
voyageurs de passage. Sous le règne de l'empereur Yong-lo (1608-1^2 4),
l'empereur ordonna à l'eunuque Tcheng Ho de prendre le commande-
ment de la flotte chinoise. Lorsqu'il arriva à [Kieou-kiang], il y avait
à Canton un homme appelé ^ ^ Che Tsin qui adressa à Tcheng
Ho une plainte contre [Tch'en] Tsou-yi. Tcheng Ho ordonna à ses
soldats d'arrêter celui-ci et [Tch'en] Tsou-yi fut décapité. Tcheng Ho
donna à [Che] Tsin des fonctions officielles et là-dessus celui-ci retourna
à Kieou-kiang dont il devint le chef. A sa mort, sa fille lui succéda
et eut le pouvoir de promouvoir en dignité [les gens utiles] et de
punir ceux qui ne servent à rien , comme son père l'avait fait.
Ils sont passionnément adonnés aux jeux d'argent, tels que le ^Ei ^
fa-houei, les échecs, les combats de coqs, pour lesquels ils engagent
des enjeux en argent.
Dans les transactions commerciales, ils font usage de monnaie de
cuivre [chinoise], de [pièces] de cotonnade, de soie et d'autres mar-
chandises de ce genre.
Les produits du pays sont : les buceros , le houang-lien (rhizome du
copiis tecta), le kiang-tchen , le bois d'aloès, la cire d'abeille, le parfum
de km-yin'-^'> qui a l'air d'un objet avec incrustations d'argent; il est
de couleur noire avec des parties blanches. La meilleure espèce est
celle dans laquelle le blanc prédomine sur le noir; la plus médiocre,
celle qui est presque noire. Lorsqu'on le brûle, ce parfum impressionne
l'odorat d'une manière irrésistible. Les Occidentaux appelés $^ H^
So-li [=Cola] l'apprécient fort.
Le buceros i| j^ ,% est plus grand que le canard. Ses plumes sont
noires et il a un long cou. L'os de sa têle a environ un pouce d'épais-
seur; à l'intérieur il est jaune, et à l'extérieur rouge; il est très joli et
très estimé.
L'[oiseau appelé] ^ |,| houo-Jà''^''' (litt. = poule de feu) est plus
grand qu'une grue. Son cou est aussi très long. 11 a une crête charnue
rouge , un bec en pointe , des plumes de la couleur d'un mouton noir
(^ ^ ?), de longues jambes noires avec des ergots si effilés que s'il
blesse quelqu'un à la poitrine celui-ci en meurt. 11 mange des charbons
ardents. Il ne meurt pas en captivité.
('' Vide supra, p. 83, n. i.
^-1 C'est le casoar.
Le ffcerf des fées»*'^ {îf^ M) ^st de la taille d'un grand porc, envi-
ron trois pieds de haut, et a le poil ras, un groin de porc, et comme
le porc, le sabot triflde (sic). Il est herbivore et n'approche pas des
choses qui ont une odeur forte.
Leur bétail se compose de moutons , porcs , chiens , poules , canards ;
leurs comestibles et leurs fruits sont les mêmes que ceux de Tchao-wa
(Java).
SiNG tch'a cheng LAN de Fei Sin.
KlEOV-KIANG.
XXV. L'ancien nom était royaume de San-fo-ts'i. On peut s'y rendre
de Tchao-wa (Java) eu huit jours, avec vent favorable. On y parvient
après avoir pénétré dans l'embouchure de la rivière.
La terre est très riche, deux fois plus riche qu'ailleurs. D'après un
vieux dicton, si on plante du grain une année, trois ans après, il
pousse de l'or; ce qui veut dire que le grain est récolté en telle abon-
dance, qu'on retire beaucoup d'or'"'. Aussi les habitants sont-ils à leur
aise.
Ils sont habituellement bruyants et très débauchés. Ils sont adonnés
au combat sur l'eau.
D y a Lt beaucoup d'eau et peu de terre non immergée. Tous les chefs
construisent leurs maisons sur les berges; les personnes de leur suite et
lem's domestiques sont logés dans leur entourage. Le bas peuple con-
struit ses maisons sur des radeaux en bambous qu'on relie à des pieux;
quand l'eau monte, les radeaux flottent sans danger d'être submergés.
Les habitants de ces maisons flottantes veulent-ils aller ailleurs , ils ar-
rachent les pieux et s'en vont avec leur maison , sans peine ni dépense.
Actuellement, ce pays est sous la souveraineté de Tchao-wa (Java).
Les produits naturels sont : le bois d'aloès des espèces houang-chou
et sou, le bois de laque, le bois d'aloès de l'espèce tch'en, la cire
d'abeille, les buceros. Les marchandises [étrangères qu'on y vend]
sont : les perles de coulem-, la porcelaine bleue et blanche, les chau-
drons de cuivre , les étoffes en coton de couleur et en soie , le satin de
couleur, les grandes et petites jarres en porcelaine et la monnaie de
cuivre [chinoise].
En la i3° année du règne de l'empereur Yong-lo (i/n5), Tcheng Ho
(') Tapir de Suinatra.
('-) Vide sitpra, p. 33, n. i.
et d'autres personnes se rendaient avec une flotte [chinoise] à l'étranger.
Le pirate Tcb'en Tsou-yi et d'autres qui pillaient les marchands étran-
gers à San-fo-ts'i projetèrent de les attaquer; mais les commandants de
notre flotte leur tendirent un piège, les battirent, prirent les pirates
vivants et emmenèrent les chefs à l'empereur. Depuis lors, du nord au
id et de l'est à l'ouest des mers intérieures et extérieures , la tranquil-
le régna partout.
ToNG SI Y AN G KAO ( l 6 1 8 ).
XXVI. (Livre m.) Lorsqu'un navire arrive à Kieou-kiang, on offre
en présent au roi, des fruits et de la soie, en quantité déterminée.
Lorsque les gens de Jambi traitent l'achat de marchandises , le prix
convenu est indiqué en or, mais ils ne payent qu'avec du poivre; par
exemple , si quelque cliose coûte deux taels en or, ils payent cette somme
avec 100 pikids de poivre ou à peu près. Ils achètent volontiers des
femmes du dehors; des filles provenant de pays étrangers sont fré-
quemment amenées à Kieou-kiang et y sont vendues contre du poivre.
Ils se servent de monnaie en plomb.
San-fo-ts'i était autrefois connu comme un endroit riche; mais, depuis
qu'il a été conquis par Java, la capitale a été abandonnée et peu de
marchands s'y rendent maintenant.
INSCRIPTIONS MALAISES, SANSKRITES ET TAMOULES.
Inscription, envieux-malais, de Kola Kapur dans l'île de
Banka (côte sud-est de Sumatra), dans H. Kern, Verspreide
geschriften, t. VII, 1917, La Haye, in-8°, p. 2o5 et suiv.
XXVII. (L. 9.). . • Il çakavarsalîta 608 dih pratipada çuklapaksa vulan
vaiçakha. tatkâhvia {]. lo) yaii mahman sumpah ini. nipakat di velâm yah
valu cri vijaija halivat manàpik yah bhmni jâva ùda bhakli ka cri vijay<i.
cf L'année çaka révolue 608 [= 68G de notre ère], le premier jour de la
quinzaine claire du mois de vaiçakha, [telle est] la date à laquelle celle
imprécation a été gravée. C'est à celte [même] époque que l'armée de
Çrï Vijaya vient de partir en expédition [contre] le pays de Java [qui]
ne [reconnaissait] pas la suzeraineté de Çrï Vijaya^''.»
(') Pour rintorprétation de ce passage , cf. mon compte rendu de Le royaume
de Çrîvijnyn de Co;:i)Ès, dans J. As., juillet-aont i Ç) i y , p. i52-i53. Çrï-
~^>{ 37 ).«-
D'après le Sin t'ong chou ou ISouveUe histoire des Tang (G 1 8
c)o6), «dans la ^év'ioàQ chang-yunn (Gy/i-ôyô), les gens du
royaume de g^ P^ Ho-ling, appelé également m ^ Clio-p'o
[=Jawa, Java central], élevèrent à la royauté une femme nom-
mée ^^ Si-mo [pron. anc. *Si^-mak = *Sira Maka ou
Maga]''', dont le gouvernement plia tout à la règle; sur les
routes, on ne ramassait pas ce qui était tombé. Le prince des
:}^ "^ Ta-che [pron. anc. *T§zï ou *Tâjik'-)] l'entendit dire; il
fit don d'un sac d'or qui fut placé dans une avenue; tous ceux
qui passaient l'évitaient immédiatement. Il en fut ainsi pen-
dant trois ans. [Puis,] le prince héritier, en passant, foula du
pied cet or. Si-mo, furieuse, voulut le faire décapiter. Les mi-
nistres intercédèrent avec insistance, et Si-mo dit : «Puisque
«la faute se trouve originairement dans les pieds, on peut lui
«couper les doigts de pied. 55 Les ministres intercédèrent à
nouveau, mais on lui coupa les doigts pour l'exemple. Les
vijaya est mentionné deux autres fois dans la même inscription (t. a et l)-5).
Cf. également N. J. Krom, Epigraphische Aaiiteelceningen. XVI. De inscriplie
van Karang Brahi, dans Tijdschrift voor Indische T., L. en Volkenkutide ,
deel LIX, 1920, p. 4aG-63i.
^*' GnoENEVELDT {Notcs , p. iSg) 3 inexactement restitué Sima. Les rappro-
chements de I^ouFFAER avec ie vieux-javanais sîma (Oudheidkundige opmer-
kingen, dans Bijdragen, deel 7^, 1918, p. lAo et suiv.) sont donc à écarter.
(-' tfll y a dans les Histoires des Tang, comme dans ie Tong tien, dit I^el-
LiOT {Deux itinéraires, p. 297), de longues notices sur les Ta-che, d'où il
ressort avec la plus grande netteté que les Arabes et les Arabes seuls sont
désignés par ce nom.n 11 est au moins inattendu de voir les Arabes mentionnés
dans un texte chinois à propos de Java, en (57/1-675. A cetle époque, le prince
des Arabes ne peut être que Mu'âwiya, le khalife omeyyade de Damas, qui
mourut en G80. Il est surprenant que cotte dynastie ait été connue en
Indonésie du vivant même de son fondateur. Dans les textes chinois, la
graphie ^ fijj Po-sseu transcrit tantôt le nom de la Perse; tantôt 'e nom d'un
état indonésien presque homophone de celui-ci (cf. Sino-iranica de B. Laufer
et mon compte-rendu de ce travail dans J. As., XT série, t. XVlll, 1921,
p. 279-39.3); Ta-che désigne sûrement les Arabes, mais désigne vraisembla-
bbunent aussi un pays et un peuple d'Kxtrème-Orient de la région de Tlnsu-
linde ou de l'Inde Iransgangétique. La question (!st d'importance et j'y re-
viendrai.
_^5«( 38 ).c^^
Ta-che apprirent cela et craignirent [Si-mo]; ils n'osèrent
pas lever de troupes [contre elle] 55 ^^L
Par Ho-ling également appelé Gho-p'o ou Javva, il faut en-
tendre le centre de Tîle de Java, ainsi que l'atteste l'inscription
de Kalasan [infra, p. 3 9). C'est là que se situe en toute certi-
tude le royaume de Si-mo. On conçoit aisément par la descrip-
tion qu'en fait le Sin t'ang chou, qu'un tel royaume ait été
tout à fait indépendant vers la fm du vif siècle. L'inscription
de Banka précise, en effet, que y ah bhûmi jâva tida bhakti ka
çnvijaya, «le pays de Java [== C/iJ-j!>'o du Sin ùing chou\ ne
[reconnaissait] pas la suzeraineté de Çrï Vijaya^n C'est cepen-
dant contre cette redoutable Si - mo ou son successeur que
l'empire sumatranais voisin dirige, en 686 de notre ère, l'ex-
pédition mentionnée dans la dernière ligne de la même inscrip-
tion. De la confrontation de ces textes, on doit conclure que
l'empire de Çrï Vijaya était plus puissant et plus redoutable
encore que celui de la reine javanaise , car l'expédition attei-
p^nit son but : on verra plus loin que le royaume javanais fut
occupé jusque dans la seconde moitié du ix" siècle par les Çai-
lendra de Sumatra.
Inscription sanscrite de Kalasan, près de Yogyakarta (Java
central), de 701 çaka^yyg (cf. J. Brandes, Een nâgan-op-
schrift gevonden tusschen Kalasan en Pramhanan, dans Tidjdschnft
voor Indische Taal-, Land- en Voîkcukunde, Batavia, deelXXXI,
1886, p. 2A0-260; B. G. Bhandarkar, a Sanskrit Inscription
from central Java, dans Journ. Bombay Branch of B. A. S.,
t. XVII, 1887-1889, part II, p. 1-10; N. J. Krom, De Suma-
iraansche période der Javaatische geschiedenis (leçon inaugurale à
l'Université de Leyde) , 3 décembre 1919, p- 1 3 et suiv. '-'.
XXVIII, ... (5). Dans le florissant royaume du roi qui estrorne-
(') Dans Pelliot, Deux itinéraires, p. 297.
(-' Vide svpra, p. 2.
ment de la dynastie des Çailendra , un temple de Tara a été construit par
le guru du roi de la dynastie des Çailendra . . .
(6). C'est lorsque sept siècles de l'ère çaka furent révolus (701 çaka
==779) 'ï"^ ^^ Maharaja fit construire le temple de Tara pour honorer
le guru. *
(7). Le village appelé Kâlasan est donné à la communauté [du
temple]; en sont témoins les notables chefs du pays : pankiir, tavan et
drip.
(8). Cette incomparable donation en terre, faite à la communauté
par le Lion Royal sera maintenue par les rois de la race des Çailendra. . .
Cette interprétation n'est exactement ni celle de Brandes ni
celle de Bhandarkar, mais on a utilisé l'une et l'autre. «Le
Çailendra, dit Krom en résumant ce passage, qui a fait con-
struire Kalasan, dit expressément qu'il agit dans son propre
royaume, donne des terrains au sanctuaire, bref apparaît
absolument comme le roi du pays [landsvorst, loc. cit.,
p. i6)W.»
Le même auteur ajoute :
Un demi-siècle environ avant l'inscription [ci- dessus] de Çailendra
[, vers 780], nous trouvons dans cette même région centrale de l'île de
Java, un document émanant d'un tout autre prince, un prince çivaïte
qui se donne expressément comme le roi de Java et qui sait qu'il descend
d'un courant d'immigrants venus du sud de l'Inde. Cette contrée est connue
comme étant le berceau du culte du prophète Agastya ; aussi a-t-on eu
raison d'établir un rapprochement'^' entre ce roi de Java central et un
autre prince qui, trente ans plus tard [, en 689 çaka = 760], fit ériger
une image de ce prophète, mais dans une toute autre région, dans l'Est
de Java [, à Dinaya]. En revanche, on constate dans le centre de Java
un phénomène remarquable : après ladite inscription çivaïte, et durant
une période d'un siècle et demi [, de 780 à 880 de notre ère], on ne
trouve plus dans le centre de Java aucune charte royale authentique, à
l'exception justement des inscriptions des Çailendra. On connaît un
0) n.É.F.E.-O., t. XIX, 1919, n° 5, p. i3o.
(-) F. D.K.Hoscii, De Sanskrit-inscripik oj) dm Steen van Dtnaja {68a çaka),
dans Tijdschrifl voor Indische T., L en Volkenktmde , deel LVII, 1916, p. ^'^i-
nombre assez considt^rable de chartes, mais les cérémonies consécra-
toires ne sont jamais accomplies par un roi : eiles le sont par un haut
dignitaire. Durant cette même période les témoignages chinois rap-
portent bien quelques ambassades de Java central , mais ne disent nulle
part qu'elles aient été envoyées par un roi, et ne donnent plus aucun
nom de roi, comme ils le font d'ordinaire si volontiers. La première
explication qui se présente provisoirement est que, durant cette période,
les anciens rois de Java central s'étaient retirés dans l'Est, Java central
étant tombé sous la domination des Çailendra de Sumatra, qui firent
ériger quelques monuments importants en leur propre nom , mais s'en
remirent pour le reste à leurs représentants et aux autorités locales. Le
témoignage des inscriptions favorise donc l'hypothèse d'après laquelle
Java central aurait été positivement vassal du royaume de [Çrï Vijaya
ou] Palemban. Environ cent ans après la fondation de Kalasan [, c'est-à-
dire vers 880 de notre ère], se manifestent les signes que la période,
que nous pouvons appeler la période sumatranaise, a pris fin. De nou-
veau se montrent des chartes royales d'un caractère indigène, et il appa-
raît bientôt que les mêmes princes gouvernaient à la fois l'est et le centre
de Java. La disparition de l'influence sumatranaise semble coïncider avec
la reprise de Java central par les anciens rois de Java établis alors dans
i'Est(/6/rf.,p. i6-i8)(').
Deux textes chinois permettent d'apporter quelque précision
en ce qui concerne le transfert de la capitale de Java, du
centre de Tîle à la partie orientale. Le Sin t'ang chou ou Nou-
velle histoire des T'ang (618-906) dit (k. 222 HF, p. 3 r°) :
ïMmMm^m-^my^mMiMm^mm- «Le roi
habitait la ville de Chô-p'o [=Jawa]; son ancêtre Ki-yen a
transporté [la capitale] vers Test, à la ville de P'o-lou-kia-
sseu55 [pron. anc. *Ba-ru-ga-si, litt. «la plage de sable » =
Grise ou Grisse, le port de la Résidence de Surabaya]'^).
(') B.É.F.E.-O., t. XIX, 1919, n" 5, p. i3o. M. Krom a eu l'obligeance de
me faire savoir que le roi Çailendra est également mentionné dans l'inscrip-
tion de Kloorak de 706 çaka [vide Brandes apud Groeneveldt, Catalogus Ba
tavia, 1887, p. 389).
(-' Pour cette restitution, cf. mon mémoire Le K'ouen-louen et les anciennes
navigations interocéaniques dans les mers du Sud, dans /. As., XP série, t. XIII,
1919, p. 3o'i.
A propos du môme événement, l'auteur du Yuan che lei pion
(k. /i2, p. 87 r'') rapporte que, dans la période Cien-pao
(7/.2-755) : i 11 îi n mil S/r M «on déplaça [la
capitale] de Cho-p'o à la ville de P'o-lou-kia-sseu ?5 (dans Pel-
LioT, Deux itinérantes, p. 2 25)'''.
En confrontant ces indications avec les renseignements
fournis par l'inscription de Banka et le passage du Sin t'ang chou
ayant trait à la reine Si-mo [vide supra, p. 87), on peut en
déduire que l'expédition sumatranaise de 608 çaka = 686
n'atteignit son but qu'à la longue, car il fallut plus d'un demi-
siècle aux envahisseurs pour occuper la capitale et provoquer
ainsi la fuite dans l'est, à Grise, de la famille régnante, repré-
sentée alors par un successeur de Si-mo, le roi Ki-yen. Ce que
nous savons par la Nouvelle histoire des T'ang du royaume java-
nais, montre que la victoire finale dut être chèrement achetée.
Mais elle alïirme, d'autre part, la puissance incontestable des
Çailendra de Sumatra qui opéraient loin de leur pays et de-
vaient avoir une remarquable organisation militaire et navale
pour mener a. bonne fin une telle entreprise coloniale, suivie
bientôt par l'occupation d'une partie de la péninsule malaise
et la campagne contre le Cambodge.
ÏNscRiPTroN sanskrite de Vien Sa de 697 çaka==775 (côte
orientale de la péninsule malaise, au sud de la baie de Ban-
don), dans G. Cœdès, Le royaume de Çrivijaija i^B.E.V.E.-O.,
\. XVIII, 1918, n° 6 , p. 29-82). Je n'en reproduis que les
passages utiles.
XXIX . . . Victoiieux est le roi de Çrîvijaya, dont la Çrî a son siège
échauffé par les rayons (îmanés des rois voisins , et qui a été diligemment
créé par Brahmâ comme si ce Dieu n'avait eu en vue que la durée du
Dharma renommé.
O Apud Pklliot, Deux ilinéraire.s , p. aaS, n. 2 , ci p. A i3 , et ma commu-
nication à la Société Asiatique, dans /. As., Xl° série, t, XIX, 192J, p. l'.i").
Le roi seigneur de Çrîvijaya, seul roi suprême de tous les rois delà
terre entière, a élevé ces trois beaux édifices de briques, séjour de Kaja-
kara (=Padmapâni), du Destructeur de Mâra (=le Buddlia) et de Vaj-
rin (= Vajrapâni).
. . . Ensuite le chapelain royal nommé Jayanta ayant reçu du roi cet
ordre excellent : crFais trois stupas ri , il les fil.
Quand ce (Jayanta) fut mort, son disciple le sthavira Adhimukti fit
deux cailijas de briques près des trois caitijas (élevés pai^ le roi).
(L'année) çâkarâja (désignée par les (six) saveurs, le nombre neuf
et les (sept) munis étant révolue (697 çaka = 776), le onzième jour de
la quinzaine claire du mois de Mâdhava, le Soleil se levant en compa-
gnie de Vénus dans le Cancer, le roi de Çrîvijaya semblable au roi des
Devas, supérieur aux autres rois, ayant l'aspect du cintâmani, attentif
aux trois mondes a élevé ici ... stûpa ...
Ce roi suprême des rois (râjâdhirâja) , le seul qui par son éclat soit
comparable au soleil (dissipant) cette nuit qu'est la troupe de tous ses
ennemis, ressemblant par sa beauté charmante à la lune d'automne sans
tache, ayant l'aspect de Kâma incarné, ayant l'aspect de Visnu . . . chef
de la famille des Çailendra ^'', nommé Çrï Maharaja {cailendravançapra-
bh[u] nigadatah çrïmahârâjanâmâ) . . . (la suite manque).
Manuscrit népalais à miniatures datant au plus tard du
début du xf siècle, rédieé dans le couvent nommé urï Hlam
(manuscrit sanskrit Additional i6âS de la bibliothèque de l'uni-
versité de Cambridge), dans A. Foucher, Etude sur l'iconogra-
phie bouddhique de l'Inde, Bibliothèque de l'Ecole des Hautes
Etudes, t. XIII, Paris, 1900, in-S".
XXX. La miniature 28 du manuscrit précité est ainsi décrite
par FoucHER : «Bodhisattva blanc, debout, à quatre bras :
1° bras inférieurs : main droite en charité, main gauche re-
C' CoEDÈs {Le royaume de Çnvijaya, p. 3a) a traduit çailendravançaprabhu
par ffclief de la famille du roi des monts 57. Je préfère lire : «chef de la famille
des Çailendra», c est-à-dire «chef de la famille du roi de la montagne'?, et
j'en ai donné les raisons dans mon compte rendu {Jonrn. .<4«(V(f., juillet-août
1919, p. 198-199). Cette nouvelle interprétation est conforme à une légende
historique bien connuci
pliée tenant le lotus; a" bras supérieurs : main droite tenant
le rosaire, main gauche, le livre; à sa droite, autre lotus. — -
Deux assistants : à droite, Bodhisattva féminin, verte (Tara);
à gauche : [assistant] terrible, sexe indécis, rouge, coiffé d'une
tête de cheval (Marïcï ou Hayagrïva). — Halo. 5? La miniature
porte l'inscription suivante : Suvarmapure Çri-Yijay apure Loka-
nâtha k Avalokiteçvara à Çri-Vijayapura dans Suvarnapura»
(p. 198, n° 2.3).
FoucHER ne se prononce pas entre les identifications possibles
de Suvarnapura à Karnasuvarna au sud-ouest du Bengale,
Suvarnabhùmi en Birmanie et Suvarnadvïpa des îles de la
Sonde {^ibid., p. io5). Pour Goedès, «Suvarnapura peut aussi
bien désigner la Birmanie (Suvarnabhùmi) que Sumatra (Su-
varnadvïpa) [Le royaume de Çrlvijaya, p. 4] ?5. J'ai dit déjà que,
isolément, Suvarnapura ne prête pas à une identification déci-
sive, car on peut, en effet, hésiter entre la Birmanie et Suma-
tra; mais quand le texte précise qu'il s'agit de Çrivijayapura
«ville de Çrivijaya?? situé dans Suvarnapura «la ville de l'or 55
ou « la ville [du pays] de l'or 55 , la localisation s'impose : il s'agit
de Grivijaya = Palemban, et la Birmanie est hors de cause.
En dernière analyse, l'inscription me semble devoir être tra-
duite par : «sAvalokiteçvara à Çrï-Vijayapura (ville de Cri Vi-
jaya) dans Suvarnapura (la ville [du pays] de l'or^Pa-
lemban). 55
La mention de Çrivijayapura dans un manuscrit népalais
du x^-xf siècle témoigne que la connaissance de l'empire suma-
tranais s'étendait à cette époque jusque dans le nord-est de
l'Inde, et celte constatation a son prix. La première miniature
du même manuscrit porte celte inscription : Yavadvïpe Dïpan-
kara, «Dïpankara à Yavadvïpa» (Fouciier, ibid., p. 79 et 189;
cf. également la miniature 1 2 du manuscrit A. 1 5 de Calcutta,
avec une inscription identique, ibid., p. 309, n° 12), et
il s'agit ici de Sumatra ou de Java. Or, un important article
publié en 1 90 1 par G. A. J. Hazeu dans la Tijdschriftvoor Indische
Taal-, Lancl- eu Volkenkunde (t. XLIV, p. 2 8 9-8 5 'y), sous
le titre de Het oiid-javaansche Adipariva en zijn Sansknt-Origineel ,
nous montre la littérature javanaise en relations étroites avec
le nord-ouest de l'Inde.
L'auteur s'est assigné comme tâche la recherche de l'origine du Mahâ-
bhûmta en kawi. Dans son présent article, il compare le chapitre Adipar-
van du poème vieux-javanais avec la partie correspondante des rédactions
sanskrites et avec la Bhàratamanjan de Ksemendra. Voici ses conclusions :
On peut admettre que dans la période des ix", x' et xi° siècles, il a existé
plusieurs rédactions ou même plusieurs écoles du Mahâbhârata. Une de
ces rédactions , celle qui au milieu du xi' siècle était répandue au Kaç-
mir, nous est suffisamment connue par l'extrait qu'en donne Ksemexdra.
Etant donnée l'étroite parenté qui existe entre celte rédaction kaçmi-
rienne et l'original de la traduction faite un siècle auparavant à Java ,
on est autorisé à conclure que l'original du manuscrit vieux-javanais
était lui-même venu du Kaçmir ou d'une région limitrophe, tout au moins
du nord-ouest de l'Inde {B.E.F.E.-O., t. II, 1902, p. 3o5).
Ainsi aux x^-xf siècles, l'empire de Çrîvijaya est connu au
Népal et on traduit à Java une version kaçmirienne du Maliâ-
bhârata; le contact est donc établi entre le nord de l'Inde et
l'Indonésie occidentale depuis au moins quelque dix siècles.
Inscription tamoule de Tanjore (io3o).
Elle a été éditée, traduite et commentée par E. Hultzsch
dans Archaeolog/cal Survey of India, South-Indian insmptions :
Tamil inscriptions of Rajaraja, Piajendrachola , and others in the
Rajarajesvara temple at Tanjavur (vol. II, parti, Madras, 1891,
in-^°, p. 108) et Epigraphia Indica (vol. IX, part V, jan-
vier 1908 : n° 3 1 . Tirumalai rock inscriptions of Rrijendra-
Cholal, p. 23o-23t).
XXXI. Le deux cent quarante-deuxième jour de la dix-neuvième an-
née [du règne] de Ko-Parakesarivarman, olias le Seigneur Çrî-Râjëndra-
coradeva [1", 1012-10^9], qui .. . conquit avec sa grande et belii-
■ •t9'( A 5 )•€-»—-
queuse armée . . . Ii-a-niai.HJalaai (Ceylan) ca eutior [siluéj sur la mer
transparente; . . . Odda-visayam (province d'Orissa) qu'il était difficile
d'approcher; ... le bon Kâçalai-nâdu (?), où les Brahmanes s'assem-
blaient; Tandabutli (c'est-à-dire Danda-bhukti [?]), dans les jardins du-
quel abondent les abeilles; . . . Vangâladeçam (le Bengale) où il ne cesse
de pleuvoir ... ; la Gangâ (le Gange) ... ; et [qui], ayant envoyé de
nombreux navires au milieu de la mer ondulante et s'étant emparé
de Samgrâmavijayottungavarman , roi de Kadâram, avec les éléphants
en rut qui lui servaient de montures et qui dans les batailles [étaient
aussi impétueux] que la mer, [prit aussi] une immense quantité de tré-
sors que [ce roi de Kadâram] avait justement accumulés; le Vidyâdha-
ratorâna, la rr Porte de la guerre n de la grande cité ennemie, la rr Porte
des joyauxn splendidement ornée, la ff Porte des grands joyaux i, le pro-
spère Çrïvijayam; Pannai (Pane, sur la côte nord-orientale de Sumatra) ,
arrosé par la rivière; l'ancien Malaiyûr''' [avec] un fort situé sur une
haute colhne; Mâyirudingam '^^ entouré parla mer profonde [comme]
un fossé plein d'eau entoure un château-fort; llangaçogam (Lëûkasuka,
sur la côte orientale de la péninsule malaise), intrépide dans de terribles
batailles; Mâppapâlam (le grand Pappâ|am) '^^ défendu par d'abondantes
eaux profondes ; Mevilimbangam (?) défendu par de beaux murs ; Valaip-
pandûru (?) possédant [à la fois] des terres cultivées et des (erres
incultes; Talaittakkolam (le Takkola du Milindapanha, le Tixj^Xa. de
Ptolémée), loué par de grands hommes [versés dans] les sciences;
le grand Damâlingam (-=1^ ,^ -^ Tan-ma-ling de Tchao Jou-koua,
Tâmbralinga de l'inscription de Vien Sa), inébranlable dans les grandes
et terribles batailles; Ilâniuri-deçam (le Lâmurï des textes arabes, au
nord de Sumatra) dont la terrible force fut vaincue par une impétueuse
[attaque]; Mânakkavâram (le gi-and Nakkavâram-=les Nicobar) dont
les jardins de fleurs [ressemblaient] à la ceinture [de la nymphe] de la
région méridionale, et Kadâi-am [= ville ou état du Çrïvijaya] à la force
terrible qui était protégé par la mer voisine . . . '''.
(') Cf. mon mémoire sur MalaLu, le Malàijn cl Muldijur, daos Journ. AsiaL,
XI" série, t. XII, p. 83 et suiv.
(-' Vide supra, p. i3 et n. ^i.
(^' Tamoul Mdppappalam — Mahâ-l'appulam. Pap[)âlam est soit le «.lis Fafa-
lam de Sulayman al-Maiiiû (manuscrit nbbtj, foi. 33 v°, 1. lo) = J.9^9 Faw-
fal de Ibn Sa'id — ^ ^ ^ Pao-p'a-lai de TciiAo Jou-koua de la côte nord-
orientale de rinde; soit le Ikipphâla du Mahàmmsa au Péyou; mais la première
identification est plus vraisemblable.
('" Pour ce texte, rf. Coedès, Le roijaiDiie de Çrïvijaya, p. f) et suiv., et
Inscription sanskrite et tamoule dont la partie sanskrilc est
datée de lolih et la partie tamoule de lohS de notre ère
(^Archaeological Survey of Southern India, vol. IV : Tamil and
Sanskrit inscriptions with some notes on village antiquities collected
chiejly m the south oj ihc Madras Presidency, par Jas. Burgess,
trad. de S. M. Natesa Sâstrî, pandit, Madras, 1886, in-Zi",
p. 2o5 et 218). C'est la charte appelée «grande charte de
Leyde55 oii elle est conservée dans le musée de l'université
de cette ville.
XXXII. Partie sanskrite : ... En la 21 "^ année du règne [du roi
cola] Pkâjarâja Râjakêsarivarman ^'' . . ., à Nâgïpattana (Negapatam),
par Çrî Mâravijayotlungavarman , fils de Cudâmanivarman . . . , issu de
la famille de Çailëndra (Çailendravamça) , roi de Kalâha (Katâhâdhipati)
et de Çrï Visaya [Çrî fisayâdhipati), a été donné au Buddha qui se
trouve dans le très beau Cûdâmanivarman-vihara '"' — ainsi nommé
d'après son père — le village de Anaimaùgalam situé dans le même
populeux district appelé Pattanakkûrru , dont les quatre limites-fron-
tières ont été nettement marquées par le parcours d'un éléphant
femelle . . .
Partie tamoule : Salut! Prospérité! — Nous, [Râjarâja Râjakêsari-
varma] Kônerinamaikonçlan , le 92" jour de la 21° année de notre règne
. . . nous témoignons que le don [de ce village] a été fait par le roi de
Kidâra {Kidârattaralijan) pour le charitable entretien du Çûlâmanipad-
mon compte rendu de ce travail dans Journ. Asiat., juiilet-aoùt 1919, p. 17a
et suiv. Un rapport épigraphique (Government of Madras, G. 0. gëi, 2 août
1913, p. 100, n" 36) mentionne trois inscriptions consacrées à Ràjàdhi-
râja I" (n° 75 de 189.5, n" 96 de 1896 et n" 343 de 1913) dans lesquelles
on rappelle que ce roi est fils de Râjêndracôradeva I" (dont il est question
dans XXXI, sup^a) et que ce dernier souverain ffs'était emparé de Ganga, au
nord; Lanka (Ceylan), au sud; Mahôdaya (= Cranganore; cf. Ep, Ind., vol. VII,
P" 97)' à l'ouest, et Kidàram [identifié inexactement par l'auteur du rap-
port à la Basse Birmanie] (= Çrivijaya), à l'est». Je reviendrai plus loin sur
ces identifications de Kadâram , Kidâram à Çrivijaya.
(1) Râjarâja I" régna de gSS à 1012 de notre ère. La 21' année de son
règne tombe donc eu 100 5 ou 1006.
(^) Monastère [fondé] par Cudâmanivarman (vide supra, p. 19, pour ce
souverain de Çrivijaya dont le nom est mentionné dans le Soni' che).
ma-viliâi'a construU à Nâgapattana (Ncgapatam) par Çûlamânipadma
... Le village de Anaimangalam ... a été donné par nous , le roi de
Kadâra {Kadârattaravjmj) . . . pour le charitable entretien du Çûlâma-
nipadma-vihâra de la ville de Nâgapattana . . .
En d'autres termes, la présente charte du roi cola Râjarâja
a pour but de commémorer la donation du village de Anai-
mangalam à un temple buddhique de Negapatam. La construc-
tion de ce temple a été commencée par l'empereur sumatranais
Cûlâmanivarman et achevée par son fils et successeur Mâravi-
jayottungavarman. Le temple est appelé Çûlamanipadma-
vihara, du nom de son fondateur. Dans la partie sanskrite,
Mâravijayottungavarman est titré ç^roi de Kataha et de (jri
Visaya = Çri Vijayaw; dans la partie tamoule, «roi de Kidâra??
(1. 117), K roi de Kadâra 5) (1. 121).
XXXIIL Inscription TAMOULE de io8/t environ [Archaeological
Survey of Southern India, vol. IV, loc. cit., p. 226-227).
Cette charte du roi cola Kôvirâjakesaripanma, le cahravarii
Cri Kulôttungaçoladêva, a pour but d'exempter de certaines
taxes le village donné au temple buddhique dont il est question
dans la grande charte de Leyde [vide supra, p. 46) et d'auto-
riser un échange de terrains. Cette mesure gracieuse fut prise
à la requête du roi de Kidâra (^Kidàraitaranjar) w présentée par
ses envoyés Râjavidyâdhara Sàmanta et Abhimanôttuiiga Sà-
manla55 (1. 10-11). Dans cette inscription, le temple bud-
dhique dont il a été question ci-dessus (p. 46), est appelé Cri
Çailêadracùdâmanivarma-vihâra «monastère de S. M. Ciidama-
nivarma [de la famille] des Çailendra??.
Pendant la correction des épreuves de ce mémoire, M. G. Jou-
VEAu-DuBREuiL m'a aimablement signalé l'existence dans l'épi-
graphie de l'Inde d'inscriptions qui ont trait à l'histoire du Çrï-
vijayu. Lu collection des rapports épigrapliiqucs du Gouverne-
ment de Madras que possède ia bibliothèque de la Sociélé asia-
tique est malheureusement incomplète. Dans les fascicules que
j'ai consultés, on relève les textes suivants :
Inscription n° 588 de 1917, datée de la 10" année du
règne de Jatavarman Vïra-Pândya= 126/1.
XXXIll bis. [The pânçlya kiugj Jalâvarnian Vîra-Pânclya is repre-
senled by a dozen inscriptious in ihe collection. Three of thèse, viz. ,
n°" 439, 689 and 657 supply détails of date which hâve been discussed
by Mr. L. D. Swamikannu Pillai in Appendix F. But as the citations are
technically wrong in certain respects the records do not help us to
identify the king. N° 588 of 1916 is dated in the tenlh year of Jata-
varman Vîra-Pândya, o-who was pleased to take the Ghôla country,
Ceylon, and the crown and the crowned head of the Çâvaka [= Jâvaka]".
To identify this king with Vîra-Pândya the conqueror of Kongu whose
initial date has been fixed as i954 A. D., we find that the record under
review omits cr Kongu 75 among the conquests of Vîra-Pândya. If however
he is to be identified with the conqueror of Koùgu as the paleographical
évidence tends to prove, it is interesting to note that the epithet ffwho
took the crown and crowned head of the Çâvaka n is found for the first
time among his records ...'*' The phrase as it stands means frone who
eut ofï the crown and the crowned head of the Çâvaka (king)ri. Pro-
bably the land of Çâvaka (i. e. Java? [sic] '^)) or a king of narae Çâvaka
might hâve been intended . . . (Government of Madras, G. 0. n" io35,
10 août 1917, Epigraphy, p. 5o cl 111).
Inscription n° 356 de 1906, datée de la 11' année du
règne de Jatavarman Vïra-Pàndya =- 1265.
XXXIII 1er. To retiu-n to the records of Jatavarman Vîra-Pândya,
est-il dit dans un autre rapport, the conqueror of Kongu, Ham, etc.,
(') Dans les lignes qui suivent, le rapporteur déclare douteux que Çavaica
soit ici pour Çrâvaka.
'-) Çâvaka ucst aiilrc que la transcription régulière en tamoul de hmka>
Zâha^ = Çrîvijaya.
Ihe Kii(liimiyâmalai inscription n° 356 of 1906, must be attribulcd io
him, because Lhere, the chief adviser of tbe king in making the grant
w{is Kâlingarayan who bas been already referred to as onc of Vîra-
Pândya's olficers. This epigraph is a parlicularly interesling one and
supplies for Jafâvarman Vïra-Pândya a historical introduction in pool-
ical prose beginning witb tbe words tiruviagal valar. We loarn from Uic
inlioduction that Vîra-Pândya couqueied the kings of Gaiigam'"^, G;ui-
damC-), Kadâram(^), Kâsi^''', Kongam'^), Kudiram, KoUamî^', Çôna-
gam, Çïnam''', Avanti''', Karunadam (Karnâta), Ilam<'\ Kalingara,
Telingam <"'', Pundram*"', etc., fought witb tbe Cbôla king a battle at
Kâvikkalam, killed one of tbe two kings of Geylon, captured bis armv.
cbariols, treasures, tbrone, crown, necklaces, bracelets, parasols, chau-
ns<'-' and olber royal possessions, planted tbe Pandya flog Avitb tbe
double fisb on Kônamalai and tbe bigb peaks of tbe Trikûtagiri moun-
tain, received elepbants as tribule from tbe otber king of Geylon (wbom ,
perbaps, be raised to tbe tbrone) and subdued tlie Kêrala. Trikûtagiri
is, vcry probably, tbe name applied to a tbree-peaked mountain in tlic
Kandyan bill country (Parker's Cerjlon, p. 9) and Kônamalai is tbe
Tirukkônamâmalai mentionned in tbe Devaram. This bigb eulogy bes-
towed on Vïra-Pândya in tbe Kudunuyâraalai record justifies at least
bis more modest boast of having conquered Kongu , Ijam and tbe Gola-
mandaiam. N° i3i of 1907 from Kodumbâlûr, in a shorter poetical
introduction, also states that Vïra-Pândya took Koiiganam, devaslaled
tbe land of Vadugu, (captured) Gangai-nâdu and vvas crowned at Puli-
C' Les Gangas orientaux et occidentaux.
'-' Bengale orientai.
'•^' Çrivijaya.
''*' Bcnares.
(^' Salem district.
'*' Le Kûlam des géographes arabes, le Quiion de nos cartes, sur la cote
sud-ouest de l'Inde.
(') Il ne s'agit pas dp la Chine, comme l'a cru le rapporteur, mais des
Çinas alliés des Kurus, des Kiràtas et du roi de Prâgjyotisa (d'après un article
de M. JouvEAU-DuBREUiL destiné à ÏAsialic Review, qui m'a été obligeamment
communiqué en manuscrit).
^*) Ljjain.
C' Ceylan.
''") Le pays lelugu.
(") Chotâ-nâgpur.
t'^) Chasse-mouches.
M. '•.. rKRIlAM). A
— M^ 50 }
yûr [t. e., Ghidambaram). The latter record makes référence to the
coins palam-ÇoUyan-kâçu and Vira-Pândiyankâçu (Government of Ma-
dras, G. 0. n° 919, 29 juillet 1912, Epigraphy, p. 72, n" 89; cf. éga-
lement p. 71, n° 87).
D'après la première inscription précitée(n'' 588 de 1917),
le roi pândya conquit le pays des Colas, Geylan et «s'empara
de la com'onne et de la tête couronnée (c'est-à-dire : du roi)
de Çàvaka (=Çrivijaya)55. La seconde inscription (n" 356 de
1906) nous apprend que, entre autres rois, Jalavarman vain-
quit les rois des Colas, de Geylan et de Kadâram. Ce dernier
texte épigraphique est daté de laGS; le précédent, de 126/1.
Il faut donc poser : Kadâram ==Jâvnka et identifier également
celui-là à Çrïvijaya.
Je ne sais dans quelle partie de Sumatra situer cette viiie
ou état de Kadâram, dont le nom varie d'une inscription à
l'autre (je supprime la désinence tamoule -m) :
Manuscrit népalais (cf. XXX) Kalàha
Inscription de Tanjore (XXXI) Kadàra
^, 1 1 , 1 T 1 /vwTTN ( Partie sanskrite. Katàha
Grande charte de LeYde(AAAll). ] Ti .• . i rz-'i-
•' ^ ' ( Partie tamoule . Kidara
Inscription de io84 (XXXIII) Kidâra
Inscription de 126/i (XXXIII bis) Jâvaka
Inscription de 1266 (XXXIII ter) Kadàra
Kathâsarilsâfrara Katâha
Poème tamoul Paddinappalai Kàlaga
Poème tamoul Kalingattuparaui Kadàra
Skr. Katâha et tamoul Kadâram sont sémantiquement appa-
rentés, comme l'a indiqué Coedès (Le royaume de Çrïvijaya,
p. 20), et signifient également « poêle , chaudron de cuivre » ;
tamoul K kadâram a aussi le sens de ce couleur brune tirant sur
le noirw; or hâlagam a précisément le sens de ç^ noirceur??, et
c'est peut-être uniquement cette synonymie qui a incité le
— +s.( 51 )<ei-
commentateur du Paddinappalai et les lexicographes à gloser
Kâlagam par Kadâramn [ibid.). Sans qu'on puisse expliquer les
variations vocaliques de la syllabe initiale, Kadnrnm et Kidâ-
ram sont évidemment les leçons différentes d'un même topo-
nyme; mais ils n'ont aucune parenté phonétique avec Katâha,
ni avec Kàlagam. Ceux-ci et ceux-là ne peuvent pas, à mon
avis, représenter malais Këddh de la côte occidentale de la
péninsule malaise (cf. J.As., juillet-août 1919, p. 178-182),
auquel avait songé Goedès. Géographiquement, Kadàram et Ki-
dâram sont à situer à Sumatra, d'après les textes tamouls
(notamment d'après XXXIII his et XXXIII 1er). Les seuls noms
sumatranais qui s'en rapprochent sont le ^ lî^ M Kan-t'o-h
du Leang chou et du Ming \che {vide supra, XXI, p. 2/1), le Jt
^ ^1J Kin-to-li du Song chou; et le t^^\ÙK^S Kaiidâri de la Hâwiya
de Ibn Mâjid, ce dernier désignant incontestablement Sumatra
(cf. mon mémoire Le K'ouen-louen et les anciennes navigations
interocéaniques dans les mers du Sud, J. As., XP série, t. XIV,
1919, p. 288-2/11). Le seul nom indigène qui réponde
d'assez loin aux transcriptions chinoises (Kan-io-li = *Kandal,
*Kandar, ''Kandali, *Kandari) et arabe [Kandâri), est le topo-
nyme Andalus, VAndaloz de Barros, qui se situe dans le sud de
la grande île indonésienne (cf. mon mémoire Malaka, le Ma-
lâiju et Malâyur, J. As., XP série, t. Xll, 1 918, p. 62 et 72).
Quant à Katâha, qui figure dans la titulature du souverain de
Çrivijaya [supra, XXXII), un passage an Kathâsaritsâgara sem-
ble le placer à l'est de Suvarnadvïpa = Sumatra (cf. J. As.,
juillet-août 1919, p- 182 et suiv.). La question reste donc
ouverte et ne sera résolue de façon décisive que si on découvre
des textes plus explicites que les précédents.
li.
-^^{ 52 )<^
TEXTES ARABES ET PERSANS,
IbN HORDÂ^BEH (8/i/i-8/i8).
Kitâb al-masâlik wal-mamàUk , éd. et trad. M. J. De Goeje,
Leyde, 1889, in-S^Hl
XXXIV. (P. i3.) ... Le roi de Zâbag giyi s'appelle o^à^J! (var.
cA^ijJl)'^'; ... le roi des îles de la mer orientale, le Maharaja''^ . . .
(') Tous ces textes , à l'exeeplion des extraits du Nuzhat al-kulûb de Ham-
DULLAH MusTAWFl et dcs mss 2292 et 2559, ont été étudiés déjà dans les
tomes I et II de mes Relations de voyages et textes géographiques avahes,
■persans et turks relatifs à l Extrême-Orient, auxquels je renvoie une fois pour
toutes.
(2-3) (2) Litt. ^/-jfiT.. ./(.«, var. ^/-FïA.î. Ces deux leçons sont fautives. D'après
une suggestion de Kern, De Goeje a restitué i~^.^LiJ\ Al-Fatijab = Pali-Jalia
tfle prince de Java«. J'ai dit déjà [Relations de voyages, t. I, p. 28, note 7)
que cette restitution est impossible : le Jaba des géographes arabes est toujours
écrit ÂiU^ Jâba. Pour le même tiire royal, EdrIsî {vide infra, XLVI, in fine,
p, 66) a i-^a^j, lilt. F.n.j.b ou F.n.g.b. En adoptant celle dernière leçon,
vocalisée v--^ *Fungaba, on aurait *Piingaba, forme araliisée de *Pungaba
<;skr pwng-flî^a trlaureau, héros, chef «> javanais, malais, sundanais, etc.
pungàwa ou puiigawa «premier ministre, officier, héros, grand de la cour»
(cf. Favre, Dictionnaire malais-français , ^^Sjù). Un passage du JS àgarakërtà-
gama mentionne les puiigavas avec d'autres dignilaires. Le poêle décrivant
les environs de Majapahit (chant XU, strophe 1, trad. Kern, éd. Krom, p. /17-
Zi8; cf. également R. NG. Poerbatjaraka, De inscriptie van het Mahâksobhya-
beeld te Simpang [Soei'abaya], dans Bijdragen toi de T., L. en V. van Nedcr-
landsch-Indië , deel 78, 1922, p. Ubo-hoi), dit : « . . . A fest, [habitent] les
Brahmanes çivaïtes dont le plus notable est le Très Révérend Rrahmarâja.
Au sud, [habitent] les Buddbisfes; le plus notable de la congrégation est le
sthavira Rëiikannadi. A l'ouest, [liabitenl] les Ksatnyas, les Mantris, les
Pungavas et les parents de S. M. le roi» {kulvan ksalriya mantri pungava
sagotra çi-înarendràdhipa). Dans cette hypothèse, pungava, haut dignitaire de
la cour, aurait été inexactement pris, par le géographe arabe, pour un titre
royal. L'erreur est manifeste, car Ibn Hordâ^beh dit plus loin [vide infra) que
«le roi du Zâbag est nommé le Maharajas. Une autre conjecture possible est
que, dans ie premier cas, il s'agisse du nom personnel du souverain régnant
au ix° siècle; mais notre documentation actuelle est alors trop fragmentaire
~-^( 53 ).«—
(P. /j5.) ... Dans les montagnes du Zâbag, il y a d'énormes serpents
qui dévorent les hommes et les buffles ; on en trouve même qui dévorent
les éléphants. Ce pays produit des camphriers gigantesques; il y en a
qui peuvent étendre l'ombre de leur feuillage sur environ cent per-
sonnes. Pour obtenir le camphre, on pratique, au sommet de l'arbre,
une incision par laquelle l'eau de camphre s'échappe en assez grande
quantité pour qu'on puisse en remplir plusieurs jarres. Après l'avoir
recueillie, on fait une autre incision au-dessous, vers le milieu de
l'arbre, d'où découlent les morceaux de camphre; c'est la gomme de cet
arbre, mais elle se trouve dans le bois même. Après celte opération,
Tarbre devient inutile et se dessèche.
(P. 48.) ... Le roi du Zâbag est nommé le Maharaja ... Le Maha-
raja perçoit chaque jour un revenu de deux cents mami d'or; il ftiit
fondre cet argent en une seule brique et le jette dans l'eau en disant :
Voilà mon Trésor. Une partie de ce revenu, soit cinquante mann par
jour, lui vient des combats de coqs. Une des cuisses du coq vainqueur
appartenant de droit au roi, le possesseur la rachète à prix d'or.
SULÀYMÂN (85 i).
Voyage du marchand arabe Sulaymân en Inde et en Chine
re'digé en 85 i, suivi de remarcpes par Abu Zayd Hasan (vers
916), trad. G. Ferrand, Paris, 1922, in-8° (t. VU des Clas-
siques de l'Orient).
XXXV. (P. Al.) ... De LangabâlQs (les Nicobar), les navires appa-
reillent ensuite pour se rendre à un endroit appelé Kalâh-bâr^'^ On dé-
signe également sous le nom de hâr, un royaume et une côte. Le Kalâh-
bâr I fait partie de] l'empire du Zâbag qui est situé au sud du pays de
l'Inde. Le Kalâh-bàr et ie Zâbag sont gouvernés par un même roi ^"^^ . . .
pour nous permettre de corriger avec certitude les leçons fautives des manu-
scrits arabes. — W Les textes arabes, comme les textes malais, ont jr'jft^
iilt. mahvdj. J'ai rétabli partout la forme initiale sanskrile vialidrâja.
(') ^U »:>)S, iitt. le pays maritime de Kalâh = Këra ou Kra, sur la côte occi-
dentale de la péninsule malaise , d'après lequel est nommé fiadïme de Kra de
nos cartes. Pour celte identificalion, cf. mon mémoire Le k'ouon-Louen et les
anciennes nav'ifalions inlerocéiinirjui'g dans le» mers du Sud, J. As., Xl° série,
t. XIV, i<)i<), appendice I, p. 9,l'\-^^'^'^.
('-) On a vu déjà {supra, \\l\ . p. fi\-h:'.) par l'inscription sanskrile de
(P. 45.) On rapporte que près du Zàbag^'^, ii y a une montagne
appelée montagne de feu dont il est impossible de s'approcher. On en voit
sortir de la fumée pendant le jour et des flammes pendant la nuit. Au
bas de la montagne sourdent une source d'eau froide potable et une
source d'eau chaude potable.
Ibn al-Fakih (902).
Gompendium libri Kitâb al-holdân auctore Ibn al-Fakïh al-
Hamadhânï quod edidit, indicibus et glossario instruxit M. J. de
GoEjE, Leyde, i885,in-8*.
XXXVI. (P. !•)... Au Zabâg, il y a des perroquets blancs, rouges
et jaunes qui , quand on le leur apprend , parlent couramment arabe ,
persan, grec et hindou ^''>; il y a [également] des paons verts et tachetés
de blanc et de noir; des faucons blancs à huppe rouge; de grands
singes blancs de la taille d'un bnfïïe. On y trouve des êtres à forme
humaine qui parlent un langage incompi'éhensible ; ils mangent et
boivent [comme les hommes]. U y a des chats de différentes espèces,
ailés comme les chauves -souris ; [leurs ailes] vont de la naissance de
l'oreille (p. Il) à la queue . . .
(P. \V) ... Le navire se dirige ensuite vers un endroit appelé
Kalah-bàr '^'. Celui-ci fait partie de l'empire dn Zâbag qui est situé au
sud du pays de l'Inde. Un roi les réunit [=Kalah-bàr et Zâbag sont
gouvernés par un même souverain] '''' . . .
(P. \\") ... Dans le voisinage du Zâbag se trouve une montagne
qu'on appelle la montagne de feu et dont on ne peut pas s'approcher. On
Vien Sa, qu'au vin° siècle, le roi de Çrivijaya étendait sa souveraineté jusqu'à
ia baie de Bandon, où elle se maintenait encore en iaa5 [supra, XVIII.
extrait du T chou fan tche , p. ii).
(1) Ma traduction de ce texte arabe a : Zâbag<; Jâwaga = île de Java. J'ai
dû maintenir l'identification traditionnelle , ie caractère de cette publication ne
me permettant pas de présenter, avec arguments à l'appui, la thèse nouvelle
exposée ici. Ceci s'applique également à l'extrait XXXIX, infra, p. .56.
(-) AjjsJLiij i^i^i À^Aw^Lî; '^-r^ -«S-»^ t*^^ \^xJLi Lo ^£ xciXxj'. Ce passage
montre que la langue grecque était connue en Indonésie occidentale à la fin
du ix° siècle.
(') ,L? ao! On remarquera plus loin d'autres variantes de ce toponyme.
W Vide supra, p. .53, XXXV.
— •*■>{ 55 )•€-!—
en voit sorlir de la fumée pendant le jour, et, pendant la nuit, de la
flamme. Du pied de cette montagne, sourdent une source d'eau froide
potable et une source d'eau chaude potable {vide supra, p. 54).
(P. \ù) ... On va ensuite au pays du Zâbag dont le grand roi s'ap-
pelle Mabârâja, ce qui veut dire rrroi des rois'''^. Il n'y a personne
derrière lui [dans la direction du sud], car il est dans la dernière des
îles. C'est un roi très riche. . . .
(P. m) ... Le girofle, le bois de sandal, le camphre, la noix mus-
cade proviennent du Zâbag — pays situé du cùté du sud, dans le voisi-
nage de la Chine — d'un pays [du Zâbag] appelé Faneur '"' [==Baros,
sur la côte occidentale de Sumatra] . . .
Ibn Rosteh (vers 908).
Kitflb al-alak an-naflsa VU auctore Abu 'Alï Ahmed ibn 'Omab
IBN Rosteh, éd. De Goeje, Leyde, 1892. in-S".
XXXVil. (P. iP'v) ... Le grand roi [du Zâbag] s'appelle Maha-
raja, ce qui veut dire rrroi des rois'^^. On n'eu compte pas de plus
grand parmi les rois de l'Inde; car il habile dans des îles. On ne connaît
pas de roi plus riche, plus fort et ayant plus (p. ir^) de revenus.
IsHAK BiN 'Imrân (mort vers 907).
Cité par Ibn al-Baytâr (1 197?-! 2/18) dans son Traité des
simples, t. lll = Notices et Extraits, t. XXVI, i883, trad.
L. Leclekg, n" 1868, p. 127.
XXXVIII. Le camphre est apporté de Sofëla et du pays de Kalà ^"\ du
Zâbag et de Haranj (ou Harang)^''. Or Haranj est la petite Chine et
c'est de là cju'on en exporte le plus . . .
Ce passage a été reproduit presque littéralement par Ibn
Serapion (cf. mes Relations de voyages et textes géographiques
(') Le sons exact de ce tonne sanskrit est agrand roin.
(-) \yn'-''> i qui représente malais Panêuv.
W Vide supra , note i.
('■) -c?-^. var. -^.^ llar'i) ou Hanf^. Ce pays n'ost pas idenlifié.
arabes, persans et turks relatifs à TExtrèine-Orient , t. I, iQiS,
in-8°, p. 112).
Abu Zaïd Hasan (vers 916).
Voyage du marchand arabe Sulaymân en Inde et en Chine
rédigé en 85 1, suivi de remarques par Abu Zayd Hasan (vers
916), trad. G. Ferrand, Paris, 1922, in-8° (t, VII des Clas-
siques (le lOrienty
XXXIX. (P. 95.) Description de la ville (sic) de Zâbag. Nous com-
mençons [ce chapitre] par l'histoire de la ville de Zâbag parce qu'elle
est située en face de la Chine. La distance entre l'une et l'autre est d'un
mois de route par mer, et même moins si les vents sont favorables.
Le roi de cette ville est connu sous le titre [sanskrit] de maharaja
( ffgrand roi^i ). On dit que la superficie [du territoire dont cette ville est
la capitale] est de 900 parasanges [carrt^es]. Ce roi est eu même temps
souverain d'un grand nombre d'îles qui s'ëtendent sur 1.000 para-
sanges de distance et plus encore. Parmi les états sur lesquels il règne ,
est l'île appelée Sribuza^'', dont la superficie est, dit-on, de ^00 para-
sauges [carrées], et l'île appelée Râmï^^', dont la superficie est de
800 parasanges [carrées]. Dans celle-ci, on trouve des ])lantations de
bois du Brésil, le camphrier et d'autres essences. Fait également partie
des possessions du Maharaja, le pays maritime de Kalah ''^ qui est situé
à mi-chemin entre la Chine et l'Arabie. La superficie du pays de Kalah
est, dit-on, de 80 parasanges [carrées]. La ville de Kalah est (p. 96)
le marché où se centralise le commerce de l'aloès, du camphre, du
sandal, de l'ivoire, de l'étain, de l'ébène, du bois du Brésil, de toutes
les épices et aromates et d'autres produits dont la mention détaillée
serait trop longue. C'est dans ce port que se rendent actuellement [, au
^') Le texte a ^j^j* S.r.b.zœ, var. «jj^* S. rira, qui sont à rectiOer en
Sjiy*". •j:?7**' est la leçon fautive habituelle des manuscrits arabes.
'■-'> (f^\yi\, plus exactement c^I-^Jl que Ibn al-Fajçïh vocalise (^IJI Ar-
Râminl (cf. mes Relations de voyages, t. I, p. 56 et u. 6). C'est un des noms
de l'île de Sumatra. Abu Zayd, ni les géographes antérieurs et postérieurs ne
se sont rendu compte que Zàbag, Sribuza, RâminT désignaient un seul et
même pays insulaire.
'') Ou Kra, sur la péninsule malaise. Vidcsiiprn, p. 03, note i.
commencement du x" siècle,] les navires de T'Omân el c'est de ce poit
que partent les navires à destination de T'Omân.
L'autorité du Maharaja s'exerce sur ces îles. Son île à lui, dans laquelle
ii réside, est aussi fertile qu'une terre peut l'être et les endroits peuplés
s'y suivent sans interruption. Quelqu'un, dont le témoignage est digne
de foi, a rapporté que lorsque les coqs de ce pays se mettent à chanter
à l'aube, comme ils le font en Arabie, ils se répondent les uns aux
autres [sur une étendue de pays qui atteint] jusqu'à loo parasanges
et plus encore; [il en est ainsi] parce que les villages sont contigus l'un
à l'autre et se succèdent sans interruption, car il n'y a ni déserts, ni
ruines. Celui qui se déplace dans ce pays en voyageant à pied où à
cheval peut aller où il lui plaira; s'il lui arrive de s'ennuyer ou (p. 97)
que son cheval soit fatigué, il peut s'arrêter où il voudra [, il trouvera
toujours un gîte].
Parmi les choses extraordinaires qui sont venues à notre connais-
sance, en ce qui concerne les traditions de cette île appelée Zàbag [, je
vais rapporter la suivante]. Un ancien roi de cette île qui portait le titie
de Maharaja, avait son palais qui faisait face à un talâg^^^ communi-
quant avec la mer — par talâg, on désigne un estuaire comme celui du
Tigre, le fleuve de Bagdad et de Basra, où pénètre l'eau de la mer avec
le flot et où l'eau est douce au moment du jusant. — De ce talâg, se
formait un petit lac contigu au palais du roi. Chaque matin , l'intendant
se présentait devant le roi et lui apportait un lingot d'or en forme de
brique, pesant un certain nombre de mann dont la valeur m'est
inconnue. Puis, devant le roi, l'intendant jetait ce lingot dans le lac.
Au moment du flot, l'eau recouvrait entièrement ce lingot et les lingots
identiques qui se trouvaient déjà dans le talàg; au moment du jusant,
quand la mer se retirait, les lingots reparaissaient et brillaient au soleil.
^') Le texte a la leçon fautive ^^ pour ^^j. «Les Indiens, dit MuTAniiAr,
BIN Tâiiir al-MaçdisI (Le livre, de la création el de l'histoire, texte arabe et Irad.
par Cl. HuART, t. IV, Paris, 1908, in-8°, p. .^9), se nourrissent habituellement
de riz et de sorgho; ils boivent l'eau des mares où se rassemblent les eaux de
pluie, et qu'ils appellent -^J talàjn [lire : talâg avec ^ en fonction de guttu-
rale sonore]. «C'est, ajoute en note le traducteur, le sanskrit tàdài^a, hiudou-
stani Jljo' tàdâg.n Le rapprochement est exact, sous cette réserve que 17 de
la transcription arabe ^5A.j doit remonter à une forme prâkrite *tâlàg. Pour
l'équivalence régulière des cérébrales indiennes et indonésiennes en transcrip-
tion arab(!, cf. l'appendice I de mon mémoire sur Le k'ouen-lducn el les an-
ciennes navigations interocéaniques dans les mers du Sud, J. As., XI' série,
t. XIV, p. a 1/1-233.
-^w.( 58 ).«—
Le roi les examinait quand il siégeait dans sa grande salle dominant le
lac. Cette coutume se maintenait invariable : on jetait tous les jours un
lingot d'or dans le lac. Tant que le roi vivait, on ne touchait pas aux
lingots. A sa mort, son successeur faisait retirer tous les lingots sans en
excepter un seul. On les comptait, on les faisait fondre; puis, on en
partageait [une certaine quantité] entre les membres de la famille royale,
hommes, femmes et enfants, les généraux, les esclaves royaux, en tenant
compte de leurs rang et prérogatives respectifs. L'excédent était ensuite
distribué aux pauvres et aux malheureux. Puis, on inscrit officiellement
le nombre des lingots d'or et leur poids. [ Dans le procès-verbal rédigé
à cette occasion,] (p. 98) il était mentionné que tel roi ayant régné à
telle époque, pendant tant d'années, avait laissé, après sa mort, tant de
lingots d'or dans le lac royal et que ses lingots avaient été partagés,
après sa mort , entre les princes et les fonctionnaires royaux '^'. Chez les
gens du Zâbag, c'était une gloire pour un roi qu'eussent été longs les
jours de règne et que fût plus grand le nombre des lingots d'or qu'il
laissait en héritage'"'.
D'après les annales du pays de Zâbag, il y avait autrefois un roi
(') Mas'ùdî {Les Prairies d'or, t. I, p. 175-177) fournit des renseignements
identiques. D'après Ibn Sa'îd {videinfra, LX), on laisse dans l'étang une brique
d'or par règne et le nombre des briques isolées représente ainsi le nombre des
rois qui ont régné sur le pays. Cette coutume existait également au Campa.
Ma Touan-lin {Méridionaux , j). /i3o; cf. également G. Maspero, Le royaume
de Champa, T'oting pao, t. XI, 1910, p. 5i4) rapporte que le premier em-
pereur de la dynastie des Souei (518-617), Wen-ti, fit envahir le Lin-yi
(Campa) par une armée chinoise commandée par le général Lieou-fang.
Celui-ci s'empara de la capitale et tcy prit dix-huit tablettes d'or massif, dans
la salle où le roi [cam] honorait la mémoire de ses ancêtres. Ces tablettes
étaient au nombre de dix-huit parce que '^ j^ Fan-tche [, le roi cnm
vaincu, ] était le dix- neuvième roi du Lin-yi ... 5).
'-' «Ce lac aux briques d'or, dit Millies (Recherches sur les monnaies indi-
gènes de l'archipel indien et de la péninsule malaise, La Haye, 1871, in-û°, p. 21),
rappelle tout de suite plusieurs noms géographiques de Java , comme le Kali-
mas «la rivière d'or» qui passe par Surabaya; le nom de Banyou-mas (lire :
Banu-mas) «l'eau d'or» , etc.; soit que ce conte soit un mythe étymologique, soit
que la mémoire de l'usage ancien ait été conservée par le nom géographique».
C'est celte dernière hypothèse qui est à retenir. «Il est bien connu, dit
RouFFAER {Encyclopaedie van NederlandscJi-Indië , 1" éd., t. IV, p. 38a , 2° col.,
fin de la note 3), que les princes de Java et de Bali avaient l'habitude de
mettre leurs trésors à l'abri sur une Pulo gëdon — une île du Trésor (een
Schatkamer Eiland), construction en maçonnerie entourée d'eau.»
de Khmèr [doul il va élre question plus loin]. Le Khmèr est le pays
d'où ou exporte l'aloès khmèr. Ce pays n'est pas une île, mais [il est
situé] sur la partie [du continent asiatique] qui confine au pays des
Arabes (sic) '■^\ Il n'y a pas de royaume qui possède une plus nombreuse
population que celui de Khmèr. Tous les Kbmèrs vont à pied. La
débauche et toutes les boissons fermentées leur sont interdites; dans les
villes et dans l'empire, on ne trouverait pas une seule personne prati-
quant la débauche ou usant de boissons fermentées. Le Khmèr est situé
sur la même longitude que le royaume du Maharaja, c'est-à-dire l'ile
qui est appelée Zâbag. Entre ces deux pays , la distance est de dix à vingt
jours [de route] par mer, en faisant route dans la direction nord-sud ou
inversement; [dix jours avec bon vent et vingt jours] avec un vent
moyen.
On raconte que, autrefois, un roi de Khmèr fut investi du pouvoir;
il était jeune et prompt à agir. Un jour, il était assis dans son palais qui
dominait un fleuve d'eau douce semblable au Tigre de l'Trâk — entre
le palais et la mer, la distance était d'un jour de route [par le fleuve] —
il avait son ministre devant lui. Il s'entretenait avec son ministre et il
était question dans la conversation du (p. 99) royaume du Maharaja,
de l'éclat qu'il jetait, de sa nombreuse population et des îles qui lui
étaient soumises. ffJ'ai un désir [, dit alors le roi,] que j'aimerais à satis-
faire, n Le ministre, qui était sincèrement dévoué a sou souverain el qui
connaissait sa promptitude à prendre des décisions, lui demanda : rrQuel
est ce désir, ô roi'n Celui-ci reprit : ffJe désire voii' devant moi, sur un
plat, la tête du Maharaja, roi du Zâbag. 75 Le ministre comprit que c'était
la jalousie qui avait suggéré cette pensée à son souverain et il lui ré-
pondit : ff Je n'aimerais pas, ô roi, que mon souverain exprimât un tel
désir. Les peuples du Khmèr et du Zâbag n'ont jamais manifesté de
haine l'un pour l'autre, ni en paroles, ni en actes. Lo Zâbag ne nous a
jamais fait de mal. C'est une île lointaine qui n'est pas dans le voisinage
de notre pays. [Son gouvernement] n'a jamais manifesté un vif désir de
s'emparer du Khmèr. 11 ne faudrait pas que qui que ce soit eût connais-
sance de ce que le roi vient de dire ni que le roi répétât ce propos. « Le
roi du Khmèr se fâcha [contre son ministre], n'écouta pas l'avis que lui
C Mas'ûdî qui mentionno également, presque dans les mômes termes, la
campagne du Zabâg contre le Khmèr ou ancien Cambodge, dit plus correcte-
ment : J'-'.s»-) -a? Cf^^ (s^ J^ 5-^î~" 3^'t^ O* '7^7^ i>2A.*Jl »js^ ^j^i ''Ce
pays [du Khmèr] n'est pas une île de la mer; il est seulement situé sur le
bord de la mer; et [ii y a dans ce pays] des montagnes n.
donnait son sage et Joyal conseiller et il répéta le propos devant ses
[jénéraux et devant des grands de sa cour qui étaient présents. Le pro-
pos passa de bouche en bouche au point qu'il se répandit partout et
qu'il parvint à la connaissance du Maharaja. Celui-ci était un souverain
énergique, actif et expérimenté; il était alors arrivé h l'âge mûr. 11 fit
appeler son ministre et l'informa de ce qu'il venait d'apjirendre; puis, il
ajouta : ff Après le propos que ce fou [de roi khmèr] a rendu public,
devant le désir [de voir ma tête sur un plat] qu'il a exprimé parce qu'il
est jeune et léger, après la divulgation du propos qu'il a tenu , il est né-
cessaire que je m'occupe de lui. [Mépriser ses insultes,] serait me faire
tort à moi- (p. loo) même, me diminuer et m'abaisser devant lui. n
Le roi prescrivit ensuite à son ministre de garder secrète la conversation
qu'ils venaient d'avoir et de faire préparer mille navires de moyenne
grandeur, de les équiper, de mettre à bord de chacun d'eux des armes
et des troupes vaillantes en aussi grande quantité que possible. [Pour
expliquer ces armements,] il déclara ouvertement qu'il désirait faire un
voyage d'agrément dans les îles de son royaume; et il écrivit aux gou-
verneurs de ces îles qui lui étaient soumises, pour les prévenir qu'il
allait leur faire visite en effectuant un voyage d'agrément dans les îles.
La nouvelle se répandit partout et le gouverneur de chaque île se pré-
para à recevoir le Maharaja comme il convenait.
Lorsque les ordres du roi furent exécutés et que les préparatifs étaient
terminés, celui-ci s'embarqua et avec sa flotte et ses troupes fit route à
destination du royaume de Khmèr. Le roi et ses compagnons se servaient
du cure-dent ; chacun d'eux s'en servait plusieurs fois par jour. Chacun
emportait un cure-dent et ne s'en séparait pas ou le donnait à garder à
son domestique.
Le roi du Khmèr n'eut soupçon de ces événements que lorsque le
Maharaja se fut emparé du fleuve conduisant à sa capitale et eut lancé
en avant ses troupes. Celles-ci cernèrent la capitale à l'improvisle, elles
s'emparèrent du roi et entourèrent son palais. Les Khmèrs avaient fui
devant l'emiemi. Le Maharaja fit déclarer par des crieurs publics qu'il
garantissait la sécurité de tout le monde; puis il s'assit sur le trône du
roi du Khmèr qui avait été fait prisonnier et le fit comparaître devant
lui ainsi que son ministre. Il dit au roi du Khmèr : ff Qu'est-ce qui t'a
poussé à formuler un désir qu'il n'était pas eu ton pouvoir de satisfaire,
qui (p. ici) ne t'aurait pas donné de bonheur s'il avait été réahsé et
qui même n'aurait pas été justifié s'il avait été facilement réalisable ?n
[Le roi khmèr] ne répondit pas. Le Maharaja reprit : ffTu as manifesté
le désir de voir devant toi ma lêle sur un plat; mais si tu avais égale-
-— «.( 61 ).«—
ment voulu t' emparer de mon pays et de mon royaume ou seulement eu
ravager une partie, j'en aurais l'ait autant au Khmèr. Gomme tu nas
exprimé que le premier de ces désirs, je vais t'appliquer le traitement
que tu voulais me faire subir et je retournerai ensuite dans mon pays,
sans m'emparer de quoi que ce soit du Khmèr, quïl s'agisse de choses
de grande ou d'infime valeur. Ma victoire [servira de leçon] à tes suc-
cesseurs ; personne ne sera plus tenté d'entreprendre une tâche au-dessus
de ses forces, et de désirer plus qu'il ne lui est échu en partage par la
destinée; on s'estimera heureux d'avoir la santé, quand on en jouira. ^^
Il fit alors couper la tête au roi du Khmèr. Puis il s'approcha du ministre
khmèr et lui dit : trJe vais te récompenser pour le bien [cjue tu as
essayé de faire] en agissant en [bon] ministre; car je sais bien comment
tu avais sagement conseillé ton maître : [cjuel dommage pour lui] qu'il
ne t'ait pas écouté. Cherche maintenant quelqu'un qui puisse faire un
bon roi après ce fou , et mets-le à la place de celui-ci. "
Le Maharaja partit sur l'heure pour retourner dans son pays, sans
que lui ni aucun de ceux qui l'accompagnaient emportassent quoi que ce
soit du pays de Khmèr. Lorsqu'il fut de retour dans son royaume, il
s'assit sur son trône qui dominait le lac [aux lingots d or] et il lit mettre
devant lui le plat contenant la tête du roi du Khmèr. Puis il fit con-
voquer les hauts fonctionnaires de son royaume et les mit au (p. lori)
courant de ce qui s'était passé et des motifs qui l'avaient poussé à entre-
prendre cette expédition contre le roi du Khmèr. [En apprenant cela],
le peuple du Zâbag pria pour son roi et lui souhaita toutes sortes de
bonheur. Le Maharaja fît ensuite laver et embaumer la tête du roi du
Khmèr; on la mit dans un vase et on l'envoya au roi qui avait remplacé
sur le trône du Khmèr le souverain décapité. Le Maharaja fit parvenir
en même temps une lettre ainsi conçue : ff J'ai été poussé à agir comme
je l'ai fait vis-à-vis de ton prédécesseur à cause de la haine qu'il avait
manifestée contre nous et nous l'avons châtié [pour donner une leçon] à
ceux qui voudraient l'imiter. Nous lui avons appliqué le traitement qu'il
voulait nous faire subir. Nous jugeons bon de te renvoyer sa tête, car
il n'est maintenant pas nécessaire de la retenir ici. Nous ne tirons aucune
gloire de la victoire que nous avons remportée contre lui." Quand la
nouvelle [de ces événements] parvint aux rois de l'Inde et de la Chine,
ie Maharaja grandit à leurs yeux. Depuis ce moment, les rois du
Khmèr, tous les malins, en se levant, tournent le visage dans la direction
du pays de Zâbag, s'inclinent jusqu a terre et s'hiuuiiient devant le Ma-
haraja pour lui rendre hommage.
♦*-»»l
( 6â ).
Mas'ûdï (g/iS).
Les Prairies d'or, texte et trad. par C. Barbier de Meynard et
Pavetde Courteille, t. I, i86t , in-8°; t. II, i863,in-8''.
XL. (Tome I, p. 162, in fine.) L'Inde est un vaste pays qui s'étend
sur la mer, le 'continent (p. léS) et au milieu des montagnes; ce
royaume est limitrophe de celui du Zâbag, qui est l'empire du Maha-
raja, roi des îles. Le Zâbag, qui sépare la Chine de l'Inde, est compris
dans cette dernière contrée.
(P. 207, in fine.) ... Les crocodiles abondent . . . dans la baie du
Zâbag, [qui se trouve] dans les états du Maharaja . . .
(P. 2/12.) ... Aux environs de Kalah et de Sribuza, on trouve des
mines d'or et d'argent.
(P. 343.) . . . Dans l'empire du Maharaja est l'île de Sribuza qui est
située à environ 600 parasanges du continent et enlièrement cultivée.
Ce prince possède aussi les îles de Zâbag ^'^ et de Râmnï et bien d'autres
encore que nous ne mentionnerons pas; au surplus, sa domination
s'étend sur toute la sixième mer ou mer de Campa (l'Annam actuel).
(P. 394.) Nous avons déjà parlé . . . dans nos Annales historiques et
notre Histoire moijenne^'^ ... du Maharaja, roi des îles, ainsi que des
parhims et des plantes aromatiques , et des autres princes de l'Inde. . . .
ce pays [Mandûra-patan ''\ la capitale du Madura,] est situé vis-à-vis
de Ceylan, comme le pays de Khmèr l'est des îles du Mahâi-âja, telles
que le Zâbag et les autres . . .
(Tome II, p. 5i.) ... On rencontre une troisième espèce de singes
dans les nombreuses criques que forme la mer de Chine sur les côtes du
Zâbag et de l'empire du Maharaja, roi de ces îles. Les possessions de ce
dernier, comme nous l'avons (p. 62) déjà fait remarquer dans cet
ouvrage, font face à la Chine et occupent une position intermédiaire
entre ce royaume et celui du Ballahrâ [de l'Inde] ... Les marins de
Sirâf et de l"Omân qui font continuellement le voyage de Kalah et du
Zâbag , connaissent parfaitement les singes de cette espèce . . .
(^) Les éditeurs ont lu fautivement g'iyi Zandj.
(2) kuv^illj yUJl ;Lj^). Ces ouvrages ne nous sont malheureusement pas
parvenus.
W Les éditeurs ont adopté la leçon fautive ^Ji3^fùJ^ Mandûrafïn, qu'il faut
corriger en ^^xj^y^Xj».
»«-»«l
( 63 y
Mas'ûdï (955).
Kitâb at-tanbîh wa'lisrâf, éà. M. J. De Goeje, Leyde, 189/i,
in-S"; Le livre de l'avertissement et de la révision, trad. Carra de
Vaux, Paris, 1896, in-8°.
XLI. (P. 90, in fine.) . . . Nous avons doané dans le livre des Prai-
ries d'or et des mines de lierres iirécieuses, des renseignements sur tous
les volcans qui se trouvent dans la partie habitée de la terre, comme . . .
(p. 91) ... le grand volcan qui est dans le royaume du Maharaja, roi
des îles du Zâbag et d'autres îles dans la mer de Chine, parmi lesquelles
sont Kalah et Sribuza. On désigne tous leurs rois par le titre de Maha-
raja. Cet empire [du Mahâi-âja] a une population énorme et des armées
innombrables; personne ne peut en deux ans, avec le vaisseau le plus
rapide, parcourir ces îles, qui toutes sont habitées. Le roi [de ces îles]
possède plus de variétés de parfums et d'aromates que n'en possède
aucun autre roi. Ses terres produisent le camphre, Taloès, le girofle, le
sandal, la muscade, le cardamome, le cubèbe, etc. Quant au volcan, il
est situé dans les montagnes''^ qui se trouvent à (p. 92) l'extrémito
d'une des îles. Il paraît noir le jour à cause de la clarté du soleil, et
rouge la nuit; sa flamme rejoint les nuages du ciel tant elle est haute
el tant elle monte dans l'air . . .
V
Ibrâhïm bin WIsif-Sâh (vers 1000).
L'Abrégé des Merveilles, trad. de l'arabe d'après les manu-
scrits de la Bibliothèque Nationale de Paris, par Carra de Vaux,
Paris, i898,in-8°.
XLII. (P. 61.) ... Une île proche du Zâbag; il s'y dresse une mon-
tagne dite montagne du feu, d'où sort, le jour, de la fumée; la nuit, de
la flamme ; personne ne peut en approcher.
(P. 62.) Les îles du Zâbag. C'est un g'rand archipel, fort peuple,
riche en moissons et en denrées diverses. On dit que lorsque les habi-
tants de la Chine étaient ruinés par les invasions ou les guerres civiles ,
'') Il semble qu'il s'agisse ici du fameux Bërâpi de Sumatra (litt. [la mon-
tajpie] qui est en feu), Barapi on dialecte minankabaw (cf. /. As., juillet-
août i(,i(j, p. 198-1 (j9).
ils venaient [)illei' l'une des îles du ZâbajT et que tel fal le soii de toutes
les îles de cet archipel et de toutes leurs villes . . .
Les îles du Zâbag sont nombreuses : l'une d'elles, connue sous le
nom de Sribuza*'', a une superficie de hoo parasanges [carrées]. Elle
produit des denrées et des parfums . . .
L'île du Maharaja: c'est le nom du roi de file. C'est une grande île
très prospère et très fertile. Des commerçants dignes de foi ont rapporté
que les coqs chantant dans les arbres s'y répondent à cent parasanges
(p. 63) à cause de la continuité des terrains cultivés et du bel arrange-
ment des campagnes , que n'interrompent ni déserts ni ruines. Les voya-
geurs s'y déplacent sans provisions et descendent où ils veulent'"'*.
BîRÛNï (vers 1 o3o).
Albervni's India, an account of the religion , philosophy,
litleralure, clironology, astronomy, customs, law and aslro-
logy, about A. D. io3o, cdited in tlie Arabie original by
E. Sachau, Londres, 1887, m-h°^^\
XLIII. (P. l-r) Les îles orientales de cette mer [l'Océan Indien] qui
sont plus rapprochées de la Chine que de l'Inde , sont les îles du Zâbag
appelées dans l'Inde sûwarndih^''\ c'est-à-dire rrîles de ïovr, . . ,
(P. VtY^) . . . L'épithète d'or (ou de l'or) appliquée à la forteresse,
peut être de pure convention. Il est, cependant, possible qu'il faille l'en-
tendre au sens propre du mot, car les îles du Zâbag sont appelées cria
terre de l'or^, parce qu'on retire beaucoup d'or en lavant un peu de
terre [de ces îles].
Du même auteur : Kkâb at-tafhini li âwail sanuat at-tanjîm
«Livre de l'instruction sur les principes de l'astrologie w, dans
('' Les mss ont sovjJv.» Sadula, »jj»*w Sarira; Carra de Vaux a restitué Scr-
boiah.
'-' FiV/p supra, p. 57.
(■') Traduit en anglais par Sachau sous le litre de : Aldehuni's Lidia, etc.,
an English édition, vvilli notes and indices, a vol., in-8°, Londres, 1910,
a" éd.
W i^i yi>-w. C'est la forme ara]>iséo du complexe sanskrit suvarnadvïp
«île de i'orn.
— f>( 65 ).«—
mes Relations de voi/agcs et textes géographiques arabes, persans
et turlis relatifs à l'Extrême-Orient, t. II, Paris, iQi^, in-S",
p. 600-601.
XLIV. . . . Plus loin (au delà de Ceylan), sont l'iie de Kalah d'où
on exporte l'étain et l'île de Sribuza d'où on exporte le camphre.
Des pays qui se trouvent dans les climats . . . Nous disons que
l'écpialeur commence dans la mer au sud de la Chine; passe à l'ile de
Zâbag- qui renferme de l'or, entre les îles de Kalah et de Sribuza . . .
Harakî (vers 1 iSa).
Al-Batlânï sive Albatenii opus astronomicum, éd. et trad.
C. A. Nallino, pars prima, Milan, igoS, in-/i% p. lxvii.
XLV. Parmi les îles de cette mer de l'Inde, sont l'île de Zâbag . . .,
Pile de Kalah d'où l'on exporte l'étain, l'île de Sribuza d'où l'on exporte
ie camphre.
Edrîsî (1 i5/l).
Kitâb nuzhat al-mukah Jl ihtirâk al-afâk k Livre de la récréa-
tion pour l'homme désireux de connaître les paysw, trad. par
Amédée Jaubert sous le titre de Géographie d'Edrisi, Paris,
t. I, i836, in-/i° (t. V du Recueil de voyages et de mémoires
publié par la Société de Géographie de Paris).
XLVI. (T. 1, p. 58.) . . . Les habitants des îles du Zâbag vont au
[)ays du Zang''^ dans de grands et de petits navires, et ils s'en servent
pour le commerce de leurs marchandises, attendu qu'ils comprennent le
langage les uns des autres *^^
(P. 69.) ... Au nombre des îles du Zâbag est celle de Sribuza''^
dont la circonférence est, à ce qu'on dit, de 1.900 milles et où l'on
ti'ouve des péch(;ries de perles et diverses sortes d'aromates et de par-
fums, ce qui y attire les marchands.
(') Côte orientale d'Afrique au sud du cap Guardafui.
^'■1 La texte araltc a »>5ji Sarbuwa; la carte aflérento à cette section, «jJ^^
Sarira , qui sont à corriger en »jij.w Sribuza.
M. G. KKliRAND. 5
__«.( 66 )^^—
(P. 60.) ... On dit que lorsque l'état des affaires de la Chine fut
troublé par les rébellions et que la tyrannie et la confusion devinrent
excessives dans l'Inde, les habitants de la Chine transportèrent leur
commerce au Zâbag et dans les autres îles qui en dépendent , entrèrent
en relations et se familiarisèrent avec ses habitants, à cause de leiu-
équité , de la bonté de leur conduite , de l'aménité de leurs mœurs et de
leur facilité dans les affaires. C'est pour cela que cette île [de Zâbag] est
si peuplée et qu elle est si fréquentée par les étrangers.
Auprès de cette île [du Zâbag], il en existe une autre peu considé-
rable, dominée par une haute montagne dont le sommet et les flancs
sont inaccessibles, parce quelle brûle tout ce qui s'en approche.
Durant le jour, il s'en élève une épaisse fumée, et durant la nuit, un
feu ardent. De sa base coulent des sources, les unes d'eau froide et
douce, les autres chaudes et salées.
(P. 65.) ... Les habitants des îles du Zâbag et des autres îles envi-
ronnantes viennent chercher ici [à Sofâla de la côte sud-orientale
d'Afrique] du fer pour le transporter sur le continent et dans les îles de
l'Inde , où ils le vendent à bon prix , car c'est un objet de grand com-
merce et de grande consommation dans l'Inde . . .
(P. 78 infra.) ... Les gens de Komr (= Madagascar) et les mar-
chands du pays du Maliârâja viennent chez eux [les Nègres de la côte
sud-orientale d'Afrique], en sont bien accueillis et trafiquent avec eux ...
(P. 178.) ... Au Zâbag, les rois s'appellent <».^a '^' ...
Yâkùt (122/1).
Yacut's gcographischcs WôiHcrbuch . . . herausgegeben von
Ferdinand WïsTEKFELD, Leipzig, G vol.jin-S", 1866-1870.
XLVII. (T. I, p. m) ... Dans les régions de l'est, se trouvent les
îles du Zâbag; puis, . . . Sribuza''^ d'où on tire le camphre.
(T. II, p. 1 ■ f) Az-Zâbag est une île située aux confins [orientaux] du
pays de l'Inde, derrière la mer de Harkand [= golfe du Bengale], et
aux confins [occidentaux] de la Chine.
(T. III, p. ^a) Sribuza est une île dans la terre de l'Inde dont la
(^) Vide supra, p. Sa, n. 2.
(-) On a imprimé Sj^ji/, erreur typographique pour 5j^_^ Sarbuza, qui est
a corriger en s
y 7-
— -*-»•( 67 )•«—
position dans le monde habile est sur i'équateur. On en exporte le
camphre.
Kazwînï (120 3- 1283),
Kitâb ajâïh al-malilûkàt iva yarâïh al-maujûdât « Livre des
merveilles des créatures et des curiosités de l'univers w, dans
Zakarija BEiy MuBAMMED BE.\ Mabmvd el-Cazwiim's Kosmogra-
phî'e, éd. WiJsTENFELD, Gôttingen, 18/19, ^'^"8% Erster Theil.
XLVill. (P. l'A) Les îles de la mer de Chine. . . . L'île de Zâbag^'^
C'est une grande île sur les frontières de la Chine, à l'extrémité du pays
de l'Inde. Elle est gouvernée par un roi appelé le Maharaja.
XLIX. MuHAMMÀD BL\ Zakariyâ ar-Râzî [mort en 928 ou 982] dit :
«Le Maharaja reçoit un tribut qui s'élève à deux cents manu d'or par
jour; le mann vaut 600 dirhams. 11 fait faire des briques [avec cet or],
et les jette dans l'eau [d'un étang], et cet étang lui sert de maison du
Trésor, v
L. Ibn al-Fakïh [902] dit: ffDans cette [île] habitent des êtres sem-
blables aux hommes, mais leur caractère ressemble plutôt à celui des
bêtes sauvages; ils parlent une langue que personne ne comprend. 11 y
a dans cette [île] des arbres et ses [haljitants] sautent d'un arbre à
Tautre." Le même auteur dit ensuite: ffll y a dans cette [ile] une
espèce particulière de chats avec des ailes comme celles des chauves-
souris qui partent de la naissance de l'oreille et vont jusqu'à la queue ;
il y a aussi des antilopes semblables aux bœufs de montagne, dont la
couleur est rouge à points blancs, leur queue est semblable à celle des
gazelles et leur chair est d'un goût désagréable. Il y a encore la civetle
qui ressemble au chat et dont on tire le parfum du même uom ; le rat
musqué; la montagne appelée Nasbâu''* où se tiouvenl de grands ser-
pents dont quelques-uns peuvent avaler des hommes, des bœufs et des
buffles, d'autres [même] des éléphants; des singes blancs qui ressem-
blent en partie aux buffles, en partie aux béliers, et d'autres [singes]
avec la poitrine blanche et le dos noir'^^n
'■) Ici et iufi-a, le texte a fautivement -fk Zànaff pour -?l; .
(^) yLaiî_JI, var. yLa-JI, yLài.,'! , yL.:sju3JJ! ; je nc sais quelle est la lionne
ieçon du nom de cette montagne, qui n'est pas identifiée.
(') Ces deux passages ne se retrouvent pas iuLégralument dans le texte (lui
nous est parvenu et qui a été édité par De Goeje [vide supra, p. 5/i).
,( 68 )•€-!--
LI. Zakariyâ bin Yahyâ bin Hâkan*'' dit : rrDans l'île de Zâbag-, il y a
une espèce de perroquets blancs, rouges et jaunes, qui parle toutes les
langues possibles; il y a également des paons noirs, tachetés de blanc,
et verts; une espèce d'oiseau appelé al-hawâri, plus grand que celui du
Soudan, plus petit que le pigeon à collier, à bec jaune, ailes noires,
ventre blanc et jiattes rouges, qui parle mieux encore que les perro-
quets. Il y a également dans [cette] ile des créatures à forme humaine qui
parlent une langue incompréhensible; ils mangent comme les hommes ;
il y en a de blancs , de noirs et de verts , avec des ailes au moyen des-
quelles ils volent <^^n
LU. Mâhân bin Baiir'^' de Sîrâf dit : rr J'étais sur l'une des îles du Zâbag
et je vis de nombreuses roses rouges, jaunes, bleues et d'autres cou-
leurs. Je pris un morceau d'étoffe rouge et mis dedans quelques roses
bleues. Lorsque je voulus les emporter, je vis du feu dans l'étolTe qui
consuma toutes les roses qui s'y trouvaient, mais l'étoffe ne brûla pas.
Je questionnai les gens du pays à ce sujet et ils me dirent : ffCes roses
ffont beaucoup de propriétés utiles, mais il est impossible de les em-
ff porter hors de la roseraie, n
LIIL Mdhammad bin Zakariyâ [ar-Râzï] dit : ff Parmi les merveilles de
celle ile [de Zâbag], il faut compter l'arbre à camphre. Il est extrême-
ment grand et couvre de son ombre cent hommes et même davantage.
L'arbre étant percé dans sa partie la plus élevée, il en coule Veau de
camphre de quoi remplir une quantité de cruches. [Quand la récolte de
la partie supérieure est terminée,] on perce un peu plus bas, au milieu
de l'arbre, et on en fait sortir des morceaux de camphre; car c'est dans
cette partie que se trouve la résine de l'arbre et il n'y en a qu'à l'inté-
rieur du camphrier. Quand on l'a récolté, l'arbre se dessèche.»
LUI. (P. l<5>i) ... La montagne de Jâba, dans l'Inde. C'est une
montagne au sommet de laquelle se trouve un feu qui brûle [sur un
espace de] 900 coudées carrées. Pendant le jour, [il en sort] de la
fumée. Il y a là des collines qui produisent des parfums qu'on trans-
porte dans les [autres] pays et dans l'univers entier.
'') Cet auteur ne m'est connu que par la présente citation.
t^) Vide supra, p. 5/i, le passage de Ibn al-Façïu qui est vraisemblablement
à la base de ces informations.
^') Inconnu par ailleurs.
— H^( 69 )^H—
Kttâb âOâr al-bilâd iva ahhâr al-ibâd «Livre des monuments
des pays et des renseignements sm- les hommes jî, dans Zaka-
RIJA BEN MuHAMMED BEN MaHMUD EL-CaZWINi's KosmOgmphw ,
éd. WûsTENFELD, Zvveiter Theil, Gôttingen, 18/18, in-8''.
LIV. (P. 1^) Jâwa est un pays [situé] sur le rivage de la mer de
Chine, limitrophe du pays de l'Inde. De notre temps, les marchands
[voulant trafiquer avec la Chine] n'arrivent que jusqu'à ce pays; toute
autre région de la Chine leur est inaccessible à cause de la grande dis-
tance et de la différence des religions. Lés marchands exportent de ce
pays l'aloès [appelé] /âwî (ou aloès sumatranais), le camphre, le nard ,
le girofle, le macis, les vases chinois. On exporte [ces derniers] dans le
monde entier.
LV. {P. h) L'île de Zâbag. C'est une grande île à la frontière de la
Chine, limitrophe du pays de l'Inde. Elle contient des choses extra-
ordinaires. C'est un royaume étendu. Son roi est puissant; il s'appelle
le Maharaja.
LVI. MuHAMMAD BiN Zakariyâ dit: ffLe Maharaja perçoit chaque jour
un impôt qui s'élève à 200 mann d'or; il fait [avec cet or] des briques
et les jette dans l'eau. C'est l'eau qui lui sert de maison du Trésor. «
11 dit aussi que parmi les merveilles de cette île est l'arbre à camphre.
Il est très p-rand et couvre de son ombre cent hommes et plus. L'arbre
dans sa partie la plus élevée, étant percé, il en coule l'eau de camphre,
de quoi remplir une quantité de cruches. [Quand la récolte de la partie
haute est terminée,] on perce un peu plus bas, au milieu de l'arbre, et
on en fait sortir des morceaux de camphre; car c'est dans cette partie
que se trouve la résine de l'arbre et il n'y en a que dans l'intérieur du
camphrier. Quand on l'a récoltée, l'arbre se dessèche '^'.
LVII. Mâhân BIN Bahr de Sîrâf raconte ceci : rr J'étais, dit-il, sur l'une
des îles du Zâbag et je vis de nombreuses roses rouges, jaunes, bleues
et d'autres couleurs . . . [vide supra, LU, p. 68).»
LVIII. Ibn al-Fakïh dit (p. t^') : ff II y a dans cette île, un peuple
semblable aux hommes, si ce n'est que leur caractère ressemble à celui
des bêtes féroces. Ils parlent une langue qu'on ne comprend pas.
Ils sautent d'arbre en arbre . . . {vide supra, L, p. 67).
(') Vide «Mpî-rt, XLIX et LUI, p. 67 et 68.
— H>.( 70 )^---
LIX. Zakariyâ bin Mchahmad bin Hâkân'^' dit : cfDaas l'ile de Zâbag,
il y a des perroquets blancs, jaunes et rouges qui parlent toutes les
langues possibles. Il y a également des paons noirs, tachetés de blanc,
et verts ; un oiseau appelé al-havoân, plus petit que le pigeon à collier,
à ventre blanc, aux ailes noires, aux pattes rouges et à bec jaune.
11 parle mieux encore que le perroquet. Allah seul sait la vérité !n
Ibn Sa'îd (1208 ou 121/1-127/1 ou 1286).
Extraits du ms. 228/1 du fonds arabe de la Bibliothèque
nationale de Paris qui est intitulé : c^ Livre qu'a réuni et résumé
'Alî bin Sa'îd le Maghrébin l'Espagnol — qu'Allah l'ait en sa
miséricorde! — du Livre de la Géographie [de Ptolémée],
en sept chmats; et il y a ajouté les longitudes et les latitudes
exactes d'après le Livre de Ibn Fâtima ^2) — qu'Allah l'ait en
sa miséricorde ! 51
LX. (Fol. '2 II v°). 1" chmat. ... Les îles du Zâbag sont célèbres
chez les voyageurs, La plus grande est l'île de Sribuza, dont la lon-
gueur, du nord au sud, est de 4oo milles, et dont la largeur, soit au
nord, soit au sud, est de 160 milles. On y accède facilement de la mer'"'.
Sa ville [appelée aussi] Sribaza, jusquoii pénètie un golfe de l'île, est
située au centre de l'île. Elle est [située] sur un fleuve. Sa longitude est
de 88° 3o' et sa latitude de 3° ho'. Dans cette île, se trouvent d'autres
villes dont nous ignorons les noms. ... Au sud-est de Sribuza, se
trouvent un nombre infini d'îles qui font partie de l'archipel du ZâJjag.
Le plus grand nombre de ces îles sont habitées par des noirs . . .
LXl. (Fol. 27 Y°.) ... Les îles du Maharaja sont nombreuses et on
en parle dans les livres. On y trouve de l'or excellent. Leur souverain
compte parmi les rois les plus riches de l'Inde et c'est celui qui possède
le plus d'éléphants. (Fol. 27 v°.) La plus grande des îles de cet archipel
qui contient la ville du Maharaja, a 200 milles de long et environ
100 milles de large. La ville est située sur son côté occidental et est par
(1) C'est évidemment le même personnage qui est appelé précédemment
(LI,'p. 68) bin Yahyâ.
(^) Inconnu par ailleurs.
(') Litt. elle a des entrées dans la mer.
— «.( 71 )»€-»—
i5i° de longitude et 13° 3o' de latitude. A l'est de la ville , se trouve un
estuaire qui vient de .la montagne qui est au nord. On raconte que le
palais de ce roi se trouve sur un vaste canal dont il a tapissé le fond avec
de l'argent. Il l'a clos aux deux extrémités pour que ce qu'on y dépose
ne puisse pas sortir. Depuis qu'ds gouvernent ces îles, la coutume de
chacun des rois de cette dynastie est de jeter une brique d'or, chaque
année, [dans le canal]. Après la mort [du roi], on compte les briques
et on connaît [ainsi] la durée de son règne. On remet [dans le canal]
une des briques et on distribue le reste aux soldats , en l'honneiu" du
nouveau roi. Les briques isolées [ représentant chacune un règne , ] sont
mises d'un côté, et les briques [annuelles mises dans le canal par le
souverain régnant,] sont mises d'un autre côté. Quand ou veut indiquer
coml)ien de leurs rois ont régné, on compte les briques isolées [qui
représentent chacune un règne '^^]. On sait quelle est la durée du règne
du roi régnant au moyen d'une baguette [graduée comme un maréo-
mètre]. On ne la sort pas de sa place, car elle se trouve dans un endroit
exposé au soleil levant; et, dans la matinée, cet or brille au milieu de
l'eau. On trouve des corindons, des émeraudes, de grandes perles dont
d [le Maharaja] dispute la possession aux autres rois et dont il s'en-
orgueUlit. Cet endroit (fol. 28 r°) est le Trésor des richesses [du roi^^' ].
On dit, sans le prouver, que cette île a été enlevée à une race pour
passer à une autre. Pour cela, ils montrent de la fierté à leurs voisins.
Le titre de Maharaja est un surnom [lire : titre] que [les rois] se trans-
mettent héréditairement.
LXII. Au sud des îles du Maharaja est l'île de Jâwa^^', grande,
célèbre, où les navires se rendent à cause des nombreuses drogues
indiennes qui s'y trouvent et parce que ses habitants sont bien connus
par leur façon de traiter les voyageurs. Son extrémité occidentale est
par ihh° de longitude et dans ce coin [nord-occidental], parmi ses
villes, est celle qui est célèbre pai-mi les voyageurs, Lâmurï'*''. Cette
O Vide supra, p. 58, n. 1.
('^' Vide supra, p. 58, n. a.
(') SflÀ'^ ~ Sumatra.
(*) <5jv»i), que je lis ^^^is) d'après les notations chinoises. C'est le ^
_g [sic) Lun-li du Lin^ wai lai <«. le ^ ^ ^ Lan-ivou-li du Tchou fan
tche (cf. HiRTH-RocKHiLL, Chau Ju-kua, p. G2, 6(3, 79 et 73)-, le P^ PÂJA n||
Nan-wou-li du Tao yi Iclie lio , le ^ ^^ _g Nan-po-li du Yitiff ijai cheng tan
( cf. RocKiiiLi. , NoiPs on Ihfi relations and (rade, dans Toung pao, t. XVI, 1916 ,
,(72 )^—
dernière est par 5" de latitude. Dans le sud de l'île, dans le coin sud-
ouest, se trouve la ville de Pan6ûr''> qui donne son nom au camphre
[iippelé] pancfiri. Elle se trouve sur le même méridien que l'autre [Lâ-
muri] en ce qui concerne sa longitude. Sa latitude est de i" i5o'. Les
Montagnes du Camphre s'ëtendent de la ville [de Pancûr] jusqu'à peu
près à l'extrémité de l'île, de l'ouest à l'est. Au milieu de l'île [de Jàwa],
sur les Montagnes du Camphre, se trouve sa capitale, la ville de Javva.
Là, réside le roi de cette île et des îles qui l'entourent et qui se rattachent
[h l'île de Jâwa]. De cette ville tire sou nom l'aloès [appelé] jâwl; il est
noir, lourd , plonge dans l'eau comme s'il était une pierre. On dit que
l'aloès, c'est la racine de l'arbre. (Fol. 28 v°.) Cette ville [de Jâwa] est
par 1/19° 20' de longitude et 3° de latitude.
KuTB AD-DÏN As-SïRÂzi (mort en 1 3 1 1).
Nihâyat al-idrak fi dirayat (d-ajldk «La plus parfaite compré-
hension de la connaissance des sphères», d'après le ms. 1106
p. 1/48 et 1^9 ; cf. également Pelliot, Deux itinéraires, p. 827, note 3); ie
Lamuri du Nâgarakêrlâgama (chant XIII, strophe 2, édit. Krom , p. r)o), etc.
(') Cod. ^y^2^ pour -^^xi, litt. Faneur avec ^ = t. C'est le fameux port
du camphre de la côte occidentale de Sumatra , l'actuel Baros ou Barus. Les
Chinois l'ont connu sous ce dernier nom : ^ •'^ ^ifi Fo-lou-che (Yi-tsing),
W'M M M Lang-p'o-lou-sseu [Sin t'ang chou); c'est aussi Baros qu'il faut
restituer dans le complexe ^ f^ ^ signifiant «onguent de P'o-lu)i et dési-
gnant le camphre, qui remonte au plus tard an temps des Leang (5oa-
556) (Pelliot, Deux itinéraires, p. 3io-34i). Quant au ^ ^ Pin-sou du
xni° siècle, au |ÈÉ ^ Pan-tsou du Tao yi tche lio (cf. Rockhill, Noies on the
relations and trade, T'oung pao, t. XVI, 191 5, p. i33); au ||| 2^ Pan-tsou,
ou Jlï 2$^ 3J Pan-tsou-eul du xv° (cf. Pelliot, Deux itinéraires, p. 3^1 1),
il faut évidemment restituer également Pancur; mais si j'en juge d'après le
passage du Ming che (apud Groeneveldt, Notes, p. i64) et la notice lik du
Tao yi tche lio, il ne peut s'agir dans ces deux cas du Pancur-Baros de la côte
occidentate de Sumatra que son exportation de camphre avait rendu célèhre.
Le passage du Ming che dit : «Ahout that time (i6i5), some followers of the
impérial envoys (envoyés à Java) had been driven hy a storm to the country
Pan-tsou-cul)) (Groeneveldt, Notes, p. i64). L'itinéraire des missions chinoises
se rendant à Java n'a pu, en aucim cas, passer au large de la côte occidentale
de Sumatra; ce Pan-tsou-eul = Pancur n'est donc pas le Pancur-Baros d'où
s'exporte le camphre, La notice lia du Tao yi Iche lio, traduite par Rockhill,
dit : ff Pan-tsou. This locality is the hill back of f| ^ f^ Long-ya-mcm^
de Leyde et le ms. 5682 de Berlin, dans Eilhnrd Wiedemann,
Bcitrâge zur Geschichte der Naturwissenschaften, XXVII, tirage
à part des Sitzungsherichte der pliysikalisch-medicinischen Societdl
in Erlangcn , t. hh ^ 19^2.
LXIIÏ. (P. 3^.) L'ëquateur commence à l'est de la Chine et passe
par une île que les Indiens appellent Jamkût; puis, par les parties
méridionales de la Cliine; puis par Dizkank [ouKankdiz]; — ''' par
l'ile de Zâwa '-\ nom qui signifie trie pays de l'om ; ensuite, par le. sud
de l'ile de Sirandib (Geylan); entre les îles de Kalah et de Sribuza; ...
DiMASKÎ (vers 1825).
Cosmographie de Cuems ed-din Abou Abdallah Mohammed
ED-DiMiCHQi, texte arabe, éd. Mehren, Saint-Pétersbourg,
1866, in -4°; Ma7iuel de cosmographie du moyen Age, trad.
Mehren du texte précédent, Paris, 187/1, in-S".
LXIV. (P. 9 de la trad.) . . . [L'équateur] passe aux îles Dïbajât (les
Maldives), entre les côtes me'ridionales de l'ile de Sirandib (Geylan) et
l'ile de Sribuza; après lîle de Zâbag, il touche la côte méridionale de la
Chine et aboutit à l'extrême frontière de l'Orient . . .
(P. 22.). . . . D'après Abu'l-Faraj bin Kodâma [, mort en 922,] . . .
parmi les fleuves situés au-delà de l'équateur, nous trouvons . . .
deux fleuves de l'île de Sribuza.
(P. 199.) L'île de Sribuza, d'une circonfe'reuce de 1.200 milles,
contient beaucoup de villes, parmi lesquelles Sribuza est la plus célèbre;
on y trouve la meilleure espèce de camphre.
(P. 206.) L'île de Maharaja est la plus considérable'^'; sa longueur
[litt. : (rdétroit de la dent du dragon (long-ya), vide supra, p. 3o, note]
. . . n Ces indications permettent de situer ie Pan-lsou ou Pan-tsou-eul du Tao
yi tclie lia et du il/m^ clw sur la côte oi'ienlalo de Sumatra où il existe, eu
effet, une île Pancur, homonyme et homographe du port du ccmphre de
la côte occidentale de la même île.
(') Ce qui suit est une addition marginale au manuscrit de Leyde (Wiede-
hann).
('^) Le texte l donc Sjl; .
•et w P
(^) Le texte a p. l<M= : *-o^!j4i! jSl-^1 A ^^ z}t^^ 'r'r?'*' '^^'' ^'"'^ ^^
l\lalirirfija est la mère des îles malirirfijicnncs-' (.ipparlenant au Maharaja).
est de 12 journées [de mai'che] sur une largeur de 5; à son extrémité,
est (p. 207) situé un grand volcan qui lance des étincelles comme des
pierres, avec un bruit de tonnerre et des éclairs; à cause du feu, il n'y a
ni lieu d'habitation, ni passage jusqu'à une distance d'une parasange.
Ce volcan est le plus grand du monde, et il n'y en a pas de pareil : la
place qu'il occupe s'appelle lie du volcan, et, comparée avec le reste de
l'île , elle ressemble au pied en proportion de la jambe . . .
Abûlfidâ (1273-1 33 1).
Géographie ctAsoviFÉDA, t. II, 2' part., trad. St. Guyard,
Paris, 1 883, in-/i°.
(P. 126.) Iles de la mer orientale.
LXV. ... On lit chez Ibn Sa'ïd : Les îles du Zâbag sont célèbres par
les récits des marchands et des voyageurs <'l La plus grande est l'île
de Sribuza qui a hoo milles de longueur du nord au sud et environ
160 milles de largeur sur toute son étendue '-'. Des bras de mer y pé-
nètrent. Sa capitale Sribuza est située en son milieu , sur un estuaire et
sur un fleuve. Sa longitude est 108° 3o' et sa latitude 3° ho'.
LXVI. (P. 127.) Le même auteur rapporte que parmi les îles de la
mer de l'Inde, il faut citer celle de Jâwa, grande, île célèbre par l'abon-
dance de ses drogues '''. La côte [nord-] occidentale de cette île a pour
longitude i45° et pour latitude 5°. Au sud de l'île de Jâwa on remarque
la ville de Pancûr, d'où le camphre [appelé] pancûri tire son nom. La
longitude de Pancûr est ihb" et sa latitude 1° 3o'.
LXVII. (P. i3o.) ... Ile de Zâbag. D'après VAtrvâl [=^ Livre des lon-
gitudes et des latitudes attribué à Al-Faris, x° siècle], 11 5" de longitude.
Au sud du 1" climat. Dans la mer Verte.
On lit dans YAtwâl : il y a dans les îles du Zâbag des serpents ca-
pables d'engloutir un homme et même un buffle , et des montagnes en
ignition perpétuelle. Les feux de ces montagnes se voient sur la mer
à plusieurs jours . . .
(') Vide supra, LX , p. 70.
(2) Les chiffres donnés par le manuscrit de Ibn Sa'îd s'accordent ayec
ceux-ci. Vide supra, LX, p. 70.
(') Vide supra, LXIT, p. 71-
••t9'( 75 )•€-»—-
LXVIII. Ile (lu Maharaja ou de Sribuza '*'. D'après le Kânûn [de Bîrûnî j
i/io° de longitude et i° de latitude. Au sud du premier climat. Grande
île de la mer Verte.
Ou lit chez Ibn Sâ'îd : Les îles du Maliârâja sont de nombreuses îles.
Leur souverain est un des plus riches rois de l'Inde et celui qui pos-
sède le plus d'or et d'éléphants. La plus grande de ces îles est le siège
de sa royauté- D'après le Kitâb al-Atœâl, l'île de Sribuza, c'est l'île du
Mahârâj
(2)
LXIX. MuHALLABï [fin du x° siècle] dit que Tîle de Sribuza est une
des dépendances de la Chine. 11 ajoute qu'elle est prospère et peuplée ,
et que lorsqu'un vaisseau en part pour se rendre en Chine il trouve en
face de lui, dans la mer, des montagnes étendues et qui pénètrent dans
la mer, cela pendant dix jours. Quand les voyageurs s'approchent de ces
montagnes, ils y trouvent des passages et des chenaux qui aboutissent
chacun à une contrée quelconque de la Chine '^'.
Hamdullah Mustawfï (i3/io).
The geographical part of the Nuzhat al-Qiilùb composed hy
Hamd-Allàb Mvstawfî of Qazwîn in jâo (iSâo), texte persan
et Irad. anglaise par G. Le Strange, E. J. W. Gihh mémorial
séries, n" XXIII, 2 vol., in-S", parti, 1916 (texte); part. II,
1918 (trad. et notes).
LXX. (P. 2 29 de la trad.) Iles de Jâba et de Zâbag'*\ Elles sont
situées sur la frontière de l'Inde et leur roi est appelé Maharaja. Ibn
IJcrdâSbeh assure qu'il est le souverain d'un si grand nombre d'îles et
si peuplées que son revenu quotidien s'élève à 200 mann d'oi-'^^ Dans
(') Le texte a : [sic) s-jj* '^y^'y^ cs^i îi't*^' ^t^T^ KVi\Q du Maharaja,
c'est l'île de Sribuzan, c'est-à-dire : île du Maliârâja et île de Sribuza sont les
deux noms d'une même île. Le texte a, en plus, cette phrase que Guyaud n'a
pas traduite : ~lj4^l Sj^jr^ cs^i {sic) s^vau '»\t>j=^ Jljl^i)! t_>Uj ^ JU^ «d'après
le Livre des longitudes, l'île de Sribuza, c'est l'île du Mahârâjan.
(') Cf. la note précédente et vide supra, LXI, p. 70.
(') Ces passages sont géniTalement appelés : Inertes de la Chine. Cf. mes
Relations de voyages, à l'index du tome tl, sous : (Jhinc (Portes de la - ).
''') Le texte a gk que Le Strange a fautivement rendu eu translittération
anglaise par Zâbij.
(■') Vide sxipra, XXXIV, p. 53.
-^( 76 ).«^
l'île de Jâba, il y a une montagne au sommet de laquelle se trouve un
endroit de loo aunes carn'es de superficie, qui est entièrement éclairé
par le feu. Pendant la nuit, ou voit ce feu s'élevant à la hauteur de deux
longueurs de lance et [se développant sur] loo aunes de long; pendant
le jour, on aperçoit comme de la fumée; il ne s'éteint jamais. Sni- celte
île il y a des hommes ailés qui peuvent voler.
Ibn al-Ward! (vers i 34o).
Mandat al-ajâïb wa faridat al-yaraih «La perle des mer-
veilles et le joyau des choses extraordinaires». J'ai utilisé l'édi-
tion du Caire de l'^So-^iSôS et l'édition Tornberg (2 vol.,
in-8°,Upsal, 1835-1839).
LXXI. (P. II.) . . . Parmi les îles de la mer de Chine, est l'île de
Zâbag qui comprend de nombreuses îles cultivées et fertiles, situées aux
confins extrêmes de la Chine et des régions les plus éloignées de l'Inde.
On n'y voit pas de ruines: on peut y voyager sans [emporter] ni eau ni
provisions en raison de la fertilité [du pays]. Elle a environ 100 para-
sanges.
LXXII. MuHAMMAD BiN Zakariyâ [ ar-Râzî] dit quc le roi de cette île
s'appelle le Maharaja. 11 perçoit chaque jour un tribut de 3oo mann
,|'or — le mann est de 600 dirhams. — Son produit net quotidien est
de plus de 126.000 midkâl qu'on [fond et qu'on] transforme en briques
et qu'on jette [ensuite] dans la mer qui [ sert ainsi] de Trésor^''.
LXXIII. Ibn al-Fakîh dit : «Dans cette île habitent des [êtres] qui
ressemblent aux hommes, mais ils ont le caractère des bêtes sauvages et
parlent uu langage incompréhensible. [Dans cette île,] se trouvent des
arbres et ses habitants sautent (lilt. volent) d'un arbre à l'autre. Il y a
aussi une espèce de chat sauvage [de couleur] rouge, tacheté de blanc,
qui a une queue comme celle des lézards. Une autre espèce de chat est
pourvue d'ailes comme la chauve-souris. 11 y a également des bœufs sau-
vages rouges, tachetés de blanc; leur chair est acide; des civettes qui
sont une espèce de chat et des rats musqués. Sur une montagne connue
de l'île, appelée An-Nasân ''', se trouvent des serpents d'une telle gran-
(') Vide supra, p. .^)3, Sy, 67, fig et 76.
'-) y'.*.-ai.'l. Vide siiprn . T[). C^'^.
deur qu'ils pcuveni avaler un «éléphant; des singes de la taille d'un
buffle et de grands béliers. Parmi les singes, les uns sont blancs comme
du papier; d'autres ont le dos blanc et le ventre noir; d'autres, au con-
traire, ont le dos noir et le ventre blanc; d'autres, enfin, sont noirs
comme les rats [sic). Il y a (p. m) des perroquets en grand nombre,
blancs, rouges, jaunes, verts, qui parlent toutes les langues qu'ils
entendent. Il y a des créatures à forme humaine, blanches, noires,
rousses , vertes , qui mangent , boivent et parlent un langage incompré-
hensible. Elles ont des ailes avec lesquelles elles volent
(1)
. n
LXXIV. Ibn as-Sîrâfï '"' dit : «Je fus dans une des îles du Zabag et
je vis des roses en grand nombre, rouges, blanches, bleues , jaunes et
niuiticolores. Je pris un manteau et j'y mis des roses bleues. Lorsque
les roses furent [dans le manteau], je vis du feu, dans le manteau,
qui brûla toutes [les roses] qu'il contenait sans que le manteau fût
brûlé '^'.n
J'ai questionné des gens à ce sujet qui m'ont répondu que ces roses
sont très utiles , mais que jamais personne n'a pu les sortir de cette rose-
raie.
On trouve dans celte île l'arbre à camphre qui est si extraordinaire-
ment grand qu'un seul camphrier peut couvrir de son ombre cent
hommes ou même davantage . . .
LXXV. L'ile de Jâba est (p. \rv) grande. On y trouve la banane, le
coco, le riz, d'excellentes cannes à sucre et l'aloès ... 11 y a [dans cette
île], une grande montagne. La nuit, il en sort un grand feu visible
à 1 5 parasanges ; et le jour, de la fumée. 11 est impossible de s'approcher
de la montagne, [même] à 5 parasanges, sans en mourir [, tant la cha-
leui' est intense]. Le roi decette ville (sic) [de Jâba] s'appelle [également]
Jâba'*'. 11 est revêtu de vêtements en or et [coiffé] d'une couronne en
or, ornée de perles, de corindons et de pierres précieuses de grand prix.
Ses dirhams et ses dinars sont fi'appés à son effigie. 11 adore les idoles.
Le culte des gens de cette île consiste en chants et mélodies [accompa-
gnés] de battements de mains. Les jeunes filles les plus jolies se réu-
(') Vide supra, p. .5A et 68.
(■-) H s'ajjit sans doute de MiiiÂN din Bahi» AS-SïnÀFï (de Sîrâf) dont il a été
question précédemment (s«p-aj p. GH).
'') Vide supra, p. 68 et 69.
W Vide sup\-a, p. 72.
__t^( 78 ).e^~-
nisseut et dansent en variant les mouvements du corps et en balanrant
le corps devant l'idole. Dans le temple où se trouve l'idole , il y a de
belles jeunes filles qui dansent en faisant de nombreuses inclinaisons du
corps. Lorsqu'une femme met au monde une belle fille et que celle-ci
est devenue adulte, sa mère la revêt de vêtements splcndides, [la pare]
de bijoux et, accompagnée de ses parents, hommes et femmes, conduit
sa fille à l'idole et la lui offre en hommage. Ensuite, les serviteurs [de
l'idole] remettent [la jeune fille] à des maîtres qui enseignent à danser
et à faire des mouvements de corps harmonieux <''.
Bâkuwï (commencement du xv'' siècle).
Kitdl) talhîs alâOâr wa '^ajaih al-malik al-kahhàr «Livre de l'exa-
men des monmïients et des merveilles du roi tout-puissant 55,
trad. DE Guignes, dans Notices et Extraits, t. II, 1789.
LXXVl. (P. 397.) Jâwa. Pays sur le bord de la mer de Chine, du
côté de l'Inde; les marchands en tirent le bois d'aloès nommé jâwi, le
camphre , le nard , le girofle , le macis et les vases de la Chine dont on
fait commerce.
LXXVll. L'île de Zâbag. Cette île, qui est grande, est située sur les
frontières de la Chine , du côté de l'Inde. Ses productions sont étonnantes ;
c'est un royaume fort étendu ; on y trouve le camphre qui est un arbre
si grand que 100 hommes peuvent y être à l'ombre, et qui rend beau-
coup de liqueur; on fait une ouverture au tronc et on en tire des mor-
ceaux de camphre qui est une sorte de gomme. Il y a dans ce pays une
espèce de chat qui a des ailes comme celle de la chauve-souris, qui
s'étendent d'une oreille à l'autre (sic); des chèvres qui ressemblent a des
bœufs de montagne, elles sont rouges marquées de blanc; la civette;
dans une montagne appelée Nasbân '■^\ de grands serpents qui attaquent
les bœufs et les buffles; des singes; des perroquets, les uns blancs,
d'autres rouges ou jaunes, qui parlent très bien, et de beaux paons.
LXXVllI. (P. 410.) . . . L'île de Jâba. Ile de l'Inde dont les habi-
tants sont roux. On y voit une haute montagne qui pendant la nuit jette
(') Cf. mes Relations de voyages, t. Il, p. l\2'2, n. i.
(') Vide supra, p. 76, u. 2.
du feu, et de ia furaëe pendant le jour. Il y a du bois daloès, des cocos,
des bananiers et des cannes à sucre.
Ibn Majid (l/l8(j).
LXXIX. Le muallim^^^ ou maître de navigation Sihâb ad-din
Ahmad bin Mâjid^-^ est l'auteur à' Instructions nautiques sur les
mers du Sud (Océan Indien, mer de Chine occidentale et
mers du grand archipel d'Asie) que nous ont conservées les
mss 2992 et 255t) du fonds arabe -de ia Bibliothèque Natio-
nale de Paris.
Le passage suivant est extrait d'un traité nautique du
ms. 2292 , intitulé : *X^tjJLJI^ j^^Ji ^ ^Jr*o\ ^ «XjtyUî oU^
« Livre des renseignements utiles sur les bases et les principes
de la science nautiques, daté de 896 de l'hégire = 1/1 89-1 Age.
Au chapitre consacré à la description des dix plus grandes
îles des mers du Sud, qui sont, d'après Ibn Mâjid : la pres-
qu'île arabique , j.iUî Al-Komr = Madagascar, Sumatra, i^U^
Jâwa = Java, j^î Al-yùr = Formose , Ceylan, Zanzibar; Bah-
w
''' *J-«-*'. Au sens classique : «précepteur, moitre, professeur, instituteur;
celui qui est arrivé à la maîtrise dans son art ou son métiern. En termino-
lojjic nautique, le mu'allim répond à TofTicier de navijjation de ranciennc
marine à voiles qui élait spécialement charjjé de la conduite du navire. Dans
son Ayn-i-Akbari , Ar.cY-FAZL en donne la définition suivante : «Le muallim
ou capitaine. Il doit être informé des endroits |)rofonds et peu profonds de
focéan et doit connaître l'astronomie. C'est lui qui guide le navire vers sa
destination et l'écarle des dangers^ {The Âm i Akbari liy Abcl Fazl 'Allami,
trad. Blochmann, Calcutta, 1878, in-S", p. 280). Cf. également mes Relations
de voyages, t. II, 191 A, in-8°, p. 5^1 8, el Ilobson-Jobson , a'édit. , s. v" mahim.
Sur Ibn Màjid et le muallim suivant, SilaïmAn al-MaiirT, cf mes Relatiom de
voyages, ibid., p. ^18 5 et les auteurs cités.
(^) Sur IiiN Majid, cf. mon article Le -pilote arabe de Vasco de Gama et les
instructions nautiques des Arabes au xv' siècle, dans Annales de géogi-aphie,
XXX° année, n" 172, i5 juillet 1929, p. 289-807.
rayn et Ibn Gâwân, dans le golfe Persique, et Socolora; l'au-
teur décrit ainsi Sumatra :
3^ ^JJ! i^^ ^y (')»pa^ ïyj^ iiiJliJI »j^ ... (Fol. 68 v".)
JliULUwl tSxs.^ ^3^l*!i.ii ^* L^yJÎvNj:*! <X>^ ^i^^ i^^^J^ «XïLxi :>|^ii^
l..«-iû Jo i^ytr*^ ^ (J*»'^^^ (J-^^iA^^ t^jl—^j' liJl-»-^^ (J^y^ lïj-9 ^AaÀwwJÎ
^jAjitNjb «XjtXKAM Ia^j! ^^vwuj <_^tX3-Aw c^'^'^ t^^V' J^ [jX*«i)) Las».
Cj Sans doute pour ëCLiû, qui désigne ici l'île de Sumatra tout entière.
L'état du même nom sur la côte nord-est de l'île est appelé par Ibn BatCta
ïJa^ Sumutra, var. ïJisJsi, Sumutra.
(-) Cod. i_o0^jv^. Je corrige la vocalisation de l'initiale d'après les nota-
tions chinoises : ^|, '^ Si-lan du Ling wai tai ta [Chau Ju-kua, p. ']li.,n. a),
i^H M '^*"'"" et surtout i^0 !^ ^ Si-louen-tie , pron. anc. *Si-lun-dep, qui
est la transcription correcte du toponyme arabe Sirandîb (cf. Pelliot, Deux
itinéraires, p. SôS-BSg; Chau Ju-kua, p. 7a, 78 et 7^, n. 8).
'■') Cod. (jii*^. Voir la note précédente.
-^>{ 81 )<H
^^^_A_x_j>Jl ,^3 (fol. 69 r°) »jj_^— «Jî (jb^i) l^_i_Sl_5 c-o<XJ^ tS'^'J
^ii_5 5--0 /waLs^îAaw »*X£ l^ sJa^^Nij Xjçi iUiî_5 l-gjl-» f»l.*w.Ji /w» (jàxj^j
(j^y-> çLx^-»}^ (jol=i iWî_5 ^'' iu-U-wo^ >_jilXl!_5 (>ï>yJi JLiili y*>sJC«
^^^ ^j^i^i «J^Ur «XsLjIÎI xaAc Lg^JUsi^ ijCii L^lioi ^^^ cxiû JJî
La troisième île est l'ile de Sumutra*"^ C'est Tile où passe l'e'quatcnr.
Un ignorant a dit qu'il passe au nord de l'île; mais nous disons qu'il
passe au sud. La position exacte [de l'équaleur] est par 5 isba (iitt.
doigts) des Farâkid''^', au moment de leur passage au méridien vers
l'est et au moment de la culminatiou fie l'Epi (la Vierge du zodiaque)
au-dessus du cap'^'. Là, les deux pôles sont à la même distance'^'. [Les
pôles] ne sont pas deux astres, mais ce sont deux endroits qui séparent
les régions de l'est de celles de l'ouest ''''.
[L'ile de Sumutra] est la résidence de Al-Hâtï, le sultan de tout le
0) Cod.
(-) Cette vocalisation est en accord avec les transcriptions chinoises du nom
de l'état de Sumutra , homonyme de celui de l'île tout entière , que donnent le
Tao yi tche Ho : ^ jj^ ^ ^ij Siu-wen-ta-la ; le Ying y ai cheng lan et le
Sing tch'a cheng lan : ^ P^ ^ ^ij Sou-men-ta-la (cf. Rockhill, Notes on
llie relations and trade , T'oung pao, t. XVI, igiS, p. i5i-i57; et Pelliot,
Deux itinéraires, p. 827, n. à). Je reprendrai la question prochainement. Vide
supra, p. 80, n. 1.
(•'J 5 isba des Farâkid (j3 et 7 ou les Gardes du la Petite Ourse) = environ
0" 53' Nord. Pour ces calculs, cf. mes Relations de voyages, t. 11, p. hgli et les
auteurs cités.
^'') Cet essai de traduction n'est en rien certain. Les textes nautiques des
mss 2993 et 2559 contiennent un très grand nombre d'expressions techniques
tout à fait inconnues par ailleurs. Je n'ai pas réussi encore à les interpréter
toutes.
('■>) Là = l'équateur, qui est à égale distance des deux pôles.
'"' Il y a ici confusion entre pôle cl innidirii.
M. G. FEniiA.NU. (i
pays d'Abyssiuie '''. Certains sultans sont en lutte contre lui; mais il est
le plus grand de tous.
On diffère d'opinion en ce qui concerne le nom de Sirandib. Les uns
disent que c'est le nom de l'île de Silân; d'autres, celui de [l'île de]
Sumutra *^'. Ce qui est certain , c'est que l'équateur se confond avec la
vallée, [c'est-à-dire] la vallée de Sirandib ''^l [Cette dernière île] est égale-
(') Cette phrase et la suivante n'ont rien de commun avec la description de
Sumatra. Je ne sais par quelle confusion elles ont été interpolées dans ce pas-
sage. Ce titre royal éthiopien (en gë'ëz <||2 hade) est mentionné dans le oU5
^giill ^Js de Kalkasandî, qui est du xiv' siècle (l'auteur est mort en iii8) :
«Rois d'Abyssinic de notre temps. Tous les rois d'Abyssinie s'appellent i^^ {sic)
hattî; c'est le titre qui est mentionné daus la correspondance à eux adressée
par la cour des sultans [mamluks du Caire]» (édit. du Caire, t. V, 191 5 1
p. l^'^ô). Pour l'une des lettres auxquelles fait allusion ce passage, cf. Qoatre-
MÈRE, Histuii'e des sultans mamlouks de l'Egypte , écrite en arabe far Taki-eddin
Ahmed Makrizi , t. I, s° part., Paris, 1887, in-/i°, p. 12a, n. i5i : «En
1374, rapporte MakrïzI, on reçut une lettre adressée au sultan [Malik Zâhir
Bibars] par le roi d'Abyssinie qui prend le titre de (J^^ al-hatî, c'est-à-dire
khalife. n Albuquerqde (lettre XLI, en date du h décembre i5i3, dans Cartas
de Affonso de Albuqverqve , seguidas de dociimentos que as elucidam, t. I,
i884, in-4°, Lisbonne, p. 929) écrit : «Les Maures et les Abyssins appellent
le souverain d'Abyssinie généralement [connu sous le nom de] Prêtre Jean,
Elaty, [ce qui répond] au titre d'empereur; ils ne l'appellent pas Prêtre Jean. 51
Dans une autre lettre non datée, adressée à Duarte Gualbâo (sic), il dit
encore : «Le Prêtre Jean s'appelle [en réalité] elayre {sic, pour elaty), ce
qui répond au titre d'empereur; son nom [personnel] est David, roi d'Israël"
[ibid., p. 600). Une lettre adressée au roi de Portugal par Francisco d'ALBU-
querqce (un juif converti qui avait sans doute pris le nom de son parrain, le
chef d'escadre cousin du grand Albuqucrquc), en date du 20 octobre i5i3
{Carias de Affonso ve Alduquerque , t. III, 1908, Lisbonne, in-i", p. 872,
^tili), porte ceci : «Si Votre Majesté désire savoir comment s'appelle le roi
Prêtre [Jean, qu'EUe sache] qu'ils (les indigènes) l'appellent «ell hati danti-
«nellque {sic) ysraell» , ce qui signifie «David, roi d'Israëljî.n Les Commen-
tarios do Grande Afonso D^tBOQt'B/tQPE (réimpression de 177/1,1. IV, chap. vu,
p. Al) disent également : «Les Abyssins n'appellent le Prêtre Jean que Elati,
ce qui répond au titre d'empereur, n
(^) C'était une erreur courante au moyen âge.
(') Pour Ibn Màjid, Ceylan est sur l'équateur. Sédillot décrit dans ses
Matériaux paur servir à l'histoire comparée des sciences niathémaliques chez les
Grecs et les Orientaux (Paris, 1 SA 6-18/19, in-8°, t. I, p. 8/19), un astrolabe
en laiton acheté à Alep qui porte l'inscription suivante sur un côté du premier
disque : «Pour l'ile de Sirandib (Ceylan), qtii n'a pas de latitude puisqu'elle
— -«.( 83 )k-i—
ment appelée Sirandîd avec deux d'^^'' et [Sii-andîb] avec un d et un b.
Dans les deux cas, elle est située pai" /i ùba des FaiTikid. Si tu ap-
pliques le mot ffla vailéen , c'est-à-dire la vallée de Siraudib [au nom de]
cette île, c'est exact. Les latitudes sont prises du pôle; elles ne sont pas
prises de l'étoile Al-Judayy''\ qui s'appelle également As-Sumiyyâ [en
arabe] et, en persan, Gâli''\ Le pôle, les observateurs ne le voient pas
et cependant c'est du pôle qu'on prend les latitudes. On eu a la direction
par une étoile toujours visible qui fait partie des étoiles boréales , telles
que Mîb '''\ Gâb et Faràkid '"'. Quand on observe la hauteur méridienne
et le maximum de déclinaison d'une étoile, on apprend que l'axe [de la
sphère] est entre les deux points observés et qu'elle [l'étoile] est à tant
de degrés de l'horizon d'après l'observation faite avec l'astrolabe. La ligne
de l'équateur [qui s'étend] à l'est et à l'ouest, est traversée parla ligne
du méridien et divise ainsi la terre en quatre parties. La ligne du méri-
dien est sur les deux bords des ténèbres '*\ La ligne de l'équateur [com-
mence] à l'est, aux îles de Silâ^'' et [se termine] à l'ouest, aux iles For-
tunées; et ces deux lignes [, c'est-à-dire le méridien et l'équateur,] se
est dans la ligne équinoxiale, son heure la.n L'autre côté porte : tfPour lati-
tude OG", heure 24n, c'est la durée du plus long jour de l'aimée sous ce paral-
lèle.
(^^ Celte indication, inexacte d'ailleurs, ne se retrouve, à ma connaissance,
dans aucun autre texte arabe.
'^' L'étoile polaire. Cette affirmation est inattendue, car presque toutes les
latitudes boréales sont déterminées par des observations de l'étoile polaire;
cf. mes Relations de voyages, t. II, p. 5i.ô-5,39.
'^' En persan »l5gàh, litt. fie lieu)). Quelques pages avant, au fol. 27 r°,
1. i3 et suiv. , Ibn Mijid dit :
jO_4i <-r^-»'2-»-J (^■>^5 U^l >>v^:Os-û.j<^ A^i! JIjJI «-.^j^'j jo^ ^o nl ^^ t5'>^
L;.twJ) JkJyiail ^L),>J1 JJÎi\ .>vJLc (^fv*Jj Vj-*^ is*"y^ C^' ^^^i '-0»." f-f^
tcAl-Judayy, c'est le gâli. Al-jadi [avec lequel il ne faut pas le confondre,]
est un signe du Zodiaque (le Capricorne), qui [s'étend sur] deux mansions et
un tiers-, c'est l'une des douze divisions du ciel. Gâh est un nom persan ara-
bisé-, les Égyptiens l'appellent as-simiijijâ (sic).
W Litt. trie clou^, étoile voisine de la polaire.
(') Litt. cflcs Veauxn. Vide supra, p. 8), n. 3.
(*) Il faut sans doute entendre que les extrémités nord et sud du méridien
sont plongées dans les ténèbres des deux pôles.
^') La Corée.
coupent à la vallée de Sirandïb. La plus grande partie de la terre habitée
(fol. 69 v°) se trouve dans les deux quarts boréaux et la plus grande
partie des deux [quarts] austraux est occupée par l'eau, sauf. . .''^ de la
terre comme l'Abyssinie et une partie de la Syrie, car l'eau pénètre très
avant [dans les terres].
Sumutra a un grand nombre de rois infidèles. C'est le pays par excel-
lence ('' des éléphants blancs ('>, du camphre, du macis, du musc excel-
lent de cette île qu'on vend au poids de l'or. Au nord [de l'île], les
Farâkid sont par 7 [isba] 3/6 ; au sud, les Farâkid sont par un peu
moins de û [isba]'-''''.
Ibn Iyâs (i5i6).
Kilftb nasak al-azhâr fi 'ajâïb al-aktâr et Livre de l'odeur des
parfums dans les merveilles des paysw, éd. Arnold, dans sa
Ckrestomathia arabica, Paris, i853, in-8".
LXXX. (P. 66.) ... Le royaume [de l'Inde] est voisin immédiat du
royaume de Zâbag''^ la résidence du Maharaja, [qui est situé] entre
l'Inde et la Chine ...
(P. 71, infra.) ... La ville du Zâbag(°> est grande; elle est située sur
une île aux confins de la Chine, du côté de l'Inde. Elle contient des mer-
veilles. Il y pousse (p. 72) l'arbre à camphre. Cet arbre est si grand
qu'un seul [camphrier] peut couvrir 100 hommes de son ombre. Le
camphre coule du sommet de l'arbre [après l'avoir incisé] et on le met
(2) Je traduis par tfpays par excellences i'arabe y-xx», qui a le sens de
nmlneTî , «endroit où quelque chose se trouve spécialement et eu grand nombre?;.
'•■') On sait que l'éiéphant dit éléphant blanc est un simple albinos, d'où sa
rareté. On sait aussi la vénération qu'ont les bouddhistes pour 1 éléphant blanc,
en lequel se serait incarné Çàkyamuni pendant sa longue ascension vers le
nirvana. Autant que je sache, il n'a pas été trouvé de nombreux éléphants
blancs à Sumatra; il en existe actuellement quelques-uns à la cour de Bangkok
et au Cambodge.
W Pour les latitudes du nord et du sud de Sumatra, vide infra les extraits
du ms. aSBg.
(S) Le texte a la leçon fautive gjJl J-U pour gly)! liLU.
(") Le tf xto afaulivomont g-'lj, pour jj!^ .
■ ■■•*>{ 85 )•€-+-—
dans des jarres pour y être desséché et solidifié. C'est une résine de cet
arbre qui ne se trouve qu'à l'intérieur [de l'arbre]. Il y a dans celte
[ville], des chats ailés comme les chauves-souris. Il y a aussi une espèce
de démon qui ressemble à une vache de montagne; il est de couleur
rouge, tacheté de blanc, ses chairs sont amères (sic). Il y a également
un félin à musc, semblable au chat, dont le musc se trouve sous l'ais-
selle. 11 y a une montagne appelée An-Nâsbân '^' où se trouvent de grands
serpents qui avalent éléphant, vache, veau et buffle. II y a des singes
blancs semblables aux buffles et aux grands béliers. Il y a des oiseaux
blancs, rouges, jaunes qui parlent toutes les langues : on les appelle
des perroquets. H y a des paons au plumage tacheté de blanc et de noir,
verts, aussi grands que les grandes autruches.
SuLAYMÂN al-Mahp.î (i""" moitié du xvf siècle).
Les textes arabes qui suivent sont empruntés au ms. aBog
de la Bibliothè(|ue Nationale de Paris. Ils ont pour auteur un
muallm^-^ arabe nommé Sulaymân ibn Ahmad al-Maiihi Al-
MuHAMMADÎ, qui est inconnu par ailleurs. Nous savons seule-
ment par un passage du Midût de Sïdï 'Alî, que ce muallim
était déjà mort en i553 '^^.
Le premier texte est extrait d'un traité nautique daté de
t5i2, intitulé : i^j^î -^IxJl Isj^jo ^ «J^^^î »<Vj!j| ^c Le sou-
tien des Mahara (de l'Arabie méridionale; ce sur quoi s'ap-
puient les Mahara, en quoi ils ont confiance) et la fixation des
sciences nautiques ??.
Les variantes au texte arabe indiquées en note sont don-
nées : A, d'après le ms. 2299 du même fonds arabe de Paris
i^vide supra, p. '79); B, d'après un extrait du texte lurk du
Mtihit d(! SiDÎ 'Alî (ms. de Naples) publié par Luigi Bonelli^''^;
(') Vide supra, p. 78, n. 2.
(^) Vide supra, p. 79, n. 1.
^'' Le Muhît n'est en réalité que la version lurke dos textes nautiques arabes
de Ihn MàJîd et Sulavmàn al-MauiîT. Cf. mes Relulions de voyages, t. II,
p. /i85, n. 3.
('') /)('/ Muhît 0 '-Desniziotu' dei mari délie hidie-^ deU'ammiraglio turco Slnf
^ 0
-^^( 86 ).«^
C, d'après la traduction allemande du Muhît par Maximilien
BiTTNER (1), qui a quelquefois corrigé les lectures de l'éditeur du
texte turk en utilisant le manuscrit de Vienne, plus correct
que celui de Naples.
l.^^! (''(sîc)(_^Ja^ h^¥?^ (sîc)oé^*« ^i tS"*ai (Fol. 27 v", 1. 6.)
x_»^ i)î J^-ï^ (j-jf ^\ ibfiU; A^js-^ ^l<>J>jA)l t^^ J<>=?- JUwJI ^^
/j_^_X_JCJ^ ^AwL» ^ y'^l^ '^^ «X«yi ^Siff'i ^^^wJ 't'.j-»^^ (^y* '"^^'^^'b
'AlÎ detto Kidtib-i-Rûm , dans Rendiconti délia R. Acad. dei Lincei, Classe di
scienze morali, storiche e Jilologiche, Série quinta, vol. III, 189^, p. 751-777.
Le texte en question se trouve aux pages 771-773.
(') Dans Die topoi>raphischen Capitel des Indischen Seespiegels Mohît, trad.
M. BiTTNER, avec introduction et 3o cartes par Wilheim Tomaschek, Vienne,
1897, in-foi. La traduction du passage en question est aux pages 71-73.
W Cette graphie incorrecte : ^ final = ï , se présente à plusieurs reprises
dans les mss 9392 et aSSg. B a sjaii «jjj^ yA'>- Le nom de l'île n'est voca-
lisé que dans A et B. Les trois textes ont la sifflante palatale, s^la^ "p^ir?" 7^-^
est à traduire par rrroutes [maritimes] de Tile de Sumutra^. L'arabe s^.>>,
plur. jj'j>, a, en terminologie nautique, le sens de «route?). Sïdï 'AlI le glose
par i^jjl^ «route, chemin». Le sens de ces deux mots est en effet identique,
celui-ci étant employé pour la terre et celui-là pour la mer.
La phrase suivante du texte turk n'existe pas dans le ms. sSBg : elle a élé
ajoutée par Sîdï 'Alî au texte arabe : «Schiffswege (jj.i) an der Insel Sumutra.
Mit den Schiffswegon an der Insel Sumutra verhalt es sich folgenderraassen :
Zuerst sei kund, dass es daselbst Zibeth, nàmlich Moschus-Galia (c^ju .ibj
LiLSw» *:Jlc), in unermesslicher Menge gibt.n Le ghcdiya est un parfum com-
posé de musc et d'ambre; c'est également un médicament. Cf. mes Relations
de voyages, t. I, p. 286 et t. II, p. 61/4-620.
Ce texte sur Sumatra a été reproduit en traduction seulement dans le
t. II de mes Relations de voyages, p. 5oi-5ii, d'après B, C et le ms. 2559.
(•'') B a à^MJj ySji^ que G a lu Ntkû Tarmid. Le ms. 2669 avait o^^y >^,
sans points diacritiques. Ils ont été ajoutés par un correcteur inconnu. Les cor-
rections de cotte nature et les additions en marge y sont nombreuses. Il semble
bien qu'après avoir été copié par un scribe quelconque, le 2559 a été colla-
tionné avec le texte reproduit, car quelqu'un y a ajouté, d'une autre encre,
les points diacritiques, les passages sautés par le copiste et a rectifié les
->^( 87 )K-^
(_^l_i A_x-Lfij x_>u-ot xj^î yî*XSytJ) ^jî J^ilî JyJI J!y»i iUb" ^^
t_>*_»Jî A-jç-Lfi:^ ^^A^ iUjjî «aAa yij«*ï^À)i y! c^jl-^' JyiJ'j ''' ^j-*4^'
j-^i v.jL*aj^ iuÀj <xj| (^yxiJi^i ifoXs.^ e*]UJî Jyiiîj ''^ ^jLJj^i q^xj^
erreurs de copie. Cette revision n'a été cependant que partiellement faite et
laisse à désirer. A , fol. 53 r°, 1. 8 , a : o^-^' ^<^' Tabâkû tarmad. Je suis la
leçon du ms. 2r>59 sans en garantir l'exactitude.
(^) B a seulement : ^u>XL)^j^l J^l t-^jc^ ^Jij^yi y,>«-^A3l ci>^^u> jlà J^ï, que
C a traduit par rtnach Angabe der Araber nicht ganz 'i".
'•'') Ce passage a été mal rendu par Sïdi 'Ali, qui, en outre, y a ajouté ce
qui suit : B j_j ' ^ ..-=>l yX .« th t ^) ^jol_a_*sI ^^^^ ^1 sj^^Lj wLjàjo ciJLi Jjji
L«joL- 1^3 r>^^i^ ^s-*^ ^•>^'-j tJjt^J^ yi ■J^.-^.'^ ^'^£+^' s^j' 8j^a^ 'î^in^
- 1 ■ ,L>i « ^j '->-'>-? ,'^-:-*gl "^y^ L«JL«j j tSJLcà i_Mâ! ^^Oo^à 8JsJ-«;LJ5 (Ul<' y^j! y->i
^jl : -î- I j wjI;^^ ^li^-^ *-^ XJ xJjjl ^j tijji^ «^^ soJj JojC L)^ xJ)! u-où
xJ^I J^ »,^L51 v^"';! xxjjj^jj, que C traduit par : « . . . und nach dor
Behauptung etlicher 3 1/2 Finger hoch. Einige haben sogar gesagt, er stùnde
auf dem Siidende der Insel Sumutra nur 3 Finger hoch. Nach meinem Dafiu--
halton ist dies ailes richtig : Denn, wie schon frùher erwahnt, bewegen sich
die Flxstcrne mit dem achten Himmel. Dies beweist auf Folgendes : Bei der
Bestimmung der Fingerhôhe (des Kleinen Baren) an jcnem Punkte fanden
nàmlich die Inder zu unserer Zeit den Klninen Baren Ix Finger hoch slehend ,
wàhrond vor diesen die Araber den Kleinen Barcu 3 3//i Finger hoch stehend
gefunden hatten; einige sagten, er stùnde nur 3 1/2 Finger hoch, und wieder
einige fanden am Ende der Insel nur 3 Finger. Es steht also fest, dass die
Hohenbcstimmung immer strittig ist, denn es ist évident, dass der Kleine
Biir sich mit der Bowegung des achten Himmcls bewegt. Mau sollte also mit-
telsl des Astrolab's odor «antworteuden Quadranten?) die geographische Brcite
eines jeden Platzes bestimmen und verzeichuen, aber auch mit Beriicksichti-
gung der goographischcn Breitn eine Karte conslruiren, die aile Ilohen, Insein
und Weltgegendon je am richligcn Orte briiigt, und sich nacli dicser orion-
tirpnn (p. 7 1) Bittnk» traduit ^-^=1 par «Fingern , ce qui est son sens httéral.
Cf. mes Relations de voyajjes, t. II, p. /197, n. 6.
(*) -4I3 signifie littéralement rdosA. Appliqué à une grande îlo orientée
-^.i-&.( 88 )^—
tiJljL.i& y\«X_j^JI^ '-' j*.3,^LoIJux> (^yfVkO '*' iyy^S' ij^y^ v^^ 0-*
a^.^2^ j^^ Uy-H^^ '*'j)^^*- ;»^5 (j^'^^-*^^ u^yjr" *^^=' ''' f^ **^^
nord-sud, ctdosn désigne la côte qui fait face à la haute mer (la côte occiden-
tale de Sumatia et la côte orientale de Madagascar, par exemple). ^^
«veutren, désigne la côte opposée (orientale de Sumatra et occidentale de
Madagascar). On retrouve une terminologie à peu près identique et sans doute
empruntée aux Arabes dans les anciens routiers portugais. Cf. «Portos que ha
na ilha de Sâo Lourenço pela banda de dentron = côte occidentale de Mada-
gascar = K ventre" des instructions nautiques arabes (dans G. Pereira, Roteiros
Portuguezes da viagem de Liboa à India nos seculos xvi et xvii , Lisbonne, 1898,
in-8°, p. 84 )-, ff Viagem de Goa para o cabo de Boa Espcrança por Moçambique
por dentro da ilha de Sào Lourenço 55 [ihid., p. 160); tr Viagem de Goa para 0
cabo de Boa Esperança por fora [=cfdos"] da ilha de Sào Lourençoji {ihid.,
p. ii8). Ces expressions parallèles sont courantes dans les textes arabes et les
routiers portugais.
(" Le texte avait initialement »^>.5' «grande» , qui a été corrigé en iy^
pour Sj^JiJ «nombreux'!.
(^) A a la même leçon dans ce vers, fol. io5 v°, 1. 8 :
«et leur nom [de ces îles], ô ami, est MïkâmârQs-, Mârûs, à Sumutra, est
une montagne qui nous est familière».
(■■*) Le passage depuis yLy^ ,xso ^ jusquà ylo^ï^iJl ^,^;^L«ULy« avait été
sauté par le copiste. 11 a été ajouté en marge par le correcteur.
(4) G a lu Andar-Sàbûr. Aucun des textes n'est vocalisé; mais, par analogie
avec r>KJol, qui est sûrement à lire 3y';^l /«Jra/w-a = Indrapura , je voca-
lise r^Lw^^xJ! Indra-sâhîir.
(^) B a la même leçon; G a c^^UaJ^ Mantâwi, qui est le nom des îles Men-
tawei, Mantawai ou Mantawei. (S)^i^ est un complexe malais bien connu :
mata-hâri, litt. «l'œil du soleil, le soleil». Il s'agirait donc d'une île appelée
«île du soleil». Bittner, qui a adopté la correction c^jlLa^, lit Mentàivî (p. 71);
ToMASCHEK inscrit Maidàivï sur la carte XXV. Graphiquement, la correction de
(5,t.g^ en c^jLLjl.* est dilTicilement acceptable, car le 4 médial ne peut guère
être confondu avec la médial. Au surplus, il serait extraordinaire que le
ms. 2559 et le manuscrit turk fussent tous deux fautifs en donnant une leçon
qui représente le complexe malais précité. Enfin, géographiquement , l'île de
Matahari ou île du Soleil est située dans ces deux textes par W A3' nord et les
îles Mentawci sont par Ta 3° sud. Tomaschek a donc été obligé d'inscrire une
._^( 89 )<-^
^^ yii (s?c) '^' A.2S.5A.A.J lLg_A.Awio <îu^!5Aj L2.3^.4w.j i^J^Î^ ^^jùU ^jAà
île Mantâwï contre Ja côte nord-occidentale de Sumatra, alors qu'aucune rela-
tion de voyage , ancienne ou moderne , n'a signalé un nom de ce genre à cette
lalilude. Je ne suis pas on mesure d'identifier Tile de Matahâri; mais il me
parait plus prudent d'en maintenir provisoirement le nom sur la foi des textes
arabe et turk.
'■' ts^!>^ (JLaJ^, qui a été ajouté en marge, ne figure ni dans B ni dans C.
^-) ^J^, en terminologie nautique, désigne un ffbanc plat s'étendant devant
la terre" (cf. Instructions nautiques sur la mer Rouge et le golfe d'Aden , Paris,
i885, in-8°, n° 681, à l'index des mots arabes, p. xv, s. v° Rak).
'^) i_-jui, plur. yLoi-i = trrécif de roches» (cf. Instructions nautiques , op.
laud., s. v° Shah). »
(*) Manque dans B et C.
'^) C a : ffMan nennt sie Fulô Bâniq; bci den Indern heissen sie Talàgili,
weil sie den zu Gùgarât gehôrigen Talâgih ahulich sind.»
(") Le texte a *a.3A^ .
t') A a Mi ,j^^ Gâmis-falak, fol. Sa v", dernière ligne; Ma J^^ Gâmis-
fallah, fol. 109 r°, 1. 7; 109 v", 1. 18; 111 r", 1. a; *Jj ^«jiLi G âmûs-f allait ,
fol. io5v°, L 11 et kI^ (jMy>\^ Gâmûsî-ftilah , fol. 54 v" infra. Cette der-
nière leçon est un hybride composé de j'allah , déformation du malais ^^j
pîilaw, pïilo «rîlcTî, et du perso-arabe ^^U... rrhuillc". La syntaxe malaise et
arabe exigerait *jallah-gâmûs ; mais l'inversion gmtm-fallah , dont on retrouve
d'autres exemplaires dans la toponomastique ancienne de l'Inde trausgangé-
tique , a été faite sur le modèle de sanskrit Yavadmpa.
W ^1 al-barr a, dans certains textes géographiques, le sens de ffconti-
nont, terre feiinon, par opposition à la mer et aux terres insulaires. Ici, il est
employé avec son sens initial de tr terre, par opposition à la mer. Cf. les
exemples classiques ><*îJlj tJl «la terre et la mern; itarj lo tfpar terre et
par mer».
— «.( 90 )<^
^U II JjJiJI Wc_,^jui! ^^ 4^i)l J^iJi Jiyî A^)ci- AAÀi '''^'li^^li
^1 Juk-^A« xJJa^ ij\ ^£<>JA^ ii^S4*** «-^^ï cuJUJl Jj.xîî^ J"*4^ (*^^
xAJa-* ^LUI Jj-A-JI^ -AjJI jxJJo* Jj^l Jj,iJI J!yl iuAjfAAii iLWi
(jUj^^ija ^uuî^ j^iii j^Jii vy^î ^^ ^^^ J^iJ'^ J^^î
(j*K^L:a>. (wi L^-Â-Lao 5oi> Uî^ i^^^JI^ iJyoL^Î^ Vt*^ c^aJujI J^Jut^
XA-ii iL.lafw ^♦Kix) t^*x»i) ^^^ (fol. 38 v°) cjJi*!) *XLi« <^j«^U A.Xi
SvJa-i^ >*X_JLj (j--*5 r-*-^5 xÀla^ J*^^^^ *^jl> • ('^"^ u&Jv:*.! y^l^ï
^ » JLa..çw ^«Xjo «j)_j.^iî liû^iUj Uî^j c^JixJÎ i^dk^ t-JUJI U>-ài.ii
(') A a la leçon fautive , fréquente dans les textes arabes , ^yJ^i^i Payeur,
fol. 53 r°, 1. 5 ; et la bonne leçon, ^yùiXi, fol. 111 r", 1. 5.
(-) Vide supra, p. 87, n, k.
(^' C'est la bonne leçon qu'ont également A, B et C. Vide supra, p. 86,
n. 9.
C") A a lijLc, fol. 111 r°, 1. 6; B et C ont »^ys. Cette notation est tout à
fait inattendue, car le Nâgarakërtàgama (i365) a Harœ (cf. G. Furrand,
Relations de voyages, t. II, p. 662), qui est passé à Haru, puis à Aru, dans
la langue moderne. D'après le poème kawi précité, ^^i^^ et Sjjc sont à lire
SjnLii 'Àrûh et s^jc 'Arûh; Ijjlc, 'Ai'û.
(=■) A a pS:4^ Mahkafang, foi. 53 r°, 1. 1, et ^JSi^ Mahhafing, foi. n 1 r°,
1. 3. B et G ont la même leçon que le ms. aôôg. Bittner a lu Mâhôfdnag.
(') C'est l'un des 32 ^^ hann (plur. yUii.1 a^nân) ou rumbs de vent de la
boussole. L'expression arabe, litt. triever du Scorpion)', a été rendue, en tra-
duction, par le terme équivalent usité dans les marines occidentales. Cette
'+9*\
.( 91 )<4<
L^-^ ,j-^;UU.A-« ;jj.=:^ Ji ^\^ (W)i)l **J;Î ^jÎJ^â^l V>^5 Oj^^^
^ ^àJl JS ;ôau (^' ^1 ^ jUù ^:>i)i y^lj t^U!^
LXXXJ. Le soutien des Mahara.
Section traitant de la connaissance de l'île de Sumntra.
Elle''' commence, au nord'®\ à la montagne de Lâmurî où les Far-
question sera traitée en détail dans la traduction intégrale des mss 2-299 et
2559, qui sont actuellement en cours de publication.
(') B a : ,i>r^4-i-o aLj! Jov£ cs^^^ )'^)i-^i ^;>oo.'>-^ ;'^-»^ et C : «... ein
neuer und bewolmter Hafeu, dessen Gouverneur durch Gerechtigkeit bekannt
ist ... ».
(2) B a la même leçon; A a yiili, fol. 53 r°, 1. 7 et 111 r°, 1. 9; C a
Menang-hdbà (sic), rectifié, entre parenthèses, en Manqâbôh, ce qui repré-
sente SjjLLLo, comme dans le ms. 2 5 69. Le Nâgarakërtàgama a Manankabiva
(cf. G. Ferrand, Relations de voyages, t. II, p. 652), qui permet de corriger
les leçons précédentes et de rétablir Sj^ij^jJ Manangl^âbwa = Mananhabwa.
Dans un manuscrit malais daté du i3 safar 12^0 = octobre 182^, le même
nom est écrit ^.JjLl* = Mënaiikabaw (H. H, Jdïnboll, Catalogus van de Ma-
leische en Sundanesche handschnjten der ieidsche Universtteits-bibliotheek , Leyde,
1899, in-8°, p. 2/i5, GGLVl).
W B et G ont la même leçon fautive, que Tomaschek a identifiée à Tile de
Banka. Le ms. 2 559 ^t B ont tous deux ^ ^ ^^J^ vh port de Falu Baug» -,
il ne s'agit donc pas d'une île, mais d'un port de la côte sud-orientale de
Sumatra. ^ ^ est à corriger en ^ ^ . A a , en effet , ^ (jgiS au fol. 1 1 1 r",
1. 11, et J^ au fol. 53 r°, 1. 8. L'iiu et l'autre et les leçons précédentes
sont, sans doute, pour ^4^ Falimbang = V'd\emh3ih.
C') Même leçon dans G; B a fautivement ^J^j.
(5-6) (5) Les documents utilisés pour le commentaire de ce texte sont :
Itinerario voyage ofte schipvaert van Jan Huygen van Linschoten naer oost
ofte Portugais Indien i5jQ-i5g2, édit. H. Kern, VGraveuliago , in-8°, 1910,
t. 1, chap. 19 : Van 't Eylandt Samatrn, eertijts Taprnhana glieheeten, p. 7/1-7(5
et la carte do la page 70 du même volume-,
La carte de Sumatra de Valentyn reproduite dans le n" 22 du Journal of
kadayn (les deux Gardes = (S et 7 de la Petite Ourse) sont par 7 M et
y/8 [= 5" AS' nord environ], d'après les uns; par 7 isba 3/4 [= 5° 34'
t/ie 5<raùs iranc/i 0/ «/le Royal Asiatic Society, décembre 1890, intitulée :
Nieuwe kaart vnn het eyland Sumatra verbeterd door François Valentyn, J. van
Braam et (sic) GouDER de Linden;
Le Petit Atlas maritime , recueil de cartes et de plans des (juntre parties du
monde, Tome III, contenant :T l'Asie, W l'Afrique, avec les détails intéressans
de ces deux parties, 176'!, sans nom d'auteur ni de iieu d'impression (je n'ai
pas encore pu retrouver les deux premiers volumes de cette publication, dont
le présent volume m'est seul connu);
A new directory for the East Indies containing gênerai and jmrticular charts
of the océans, seas , straits , coats, islands, capes, golfs, bays, harbours, rocks,
sands, soundings , etc., necessary to be hnoivn in sailing to,from and throughout
the East Indies, the whole (originally begun and carried on from the most
approved charts and plans, by M' W. Herbert, M' W. Niciielson and others)
much improved and augmented by Samuel Dunn, Londres, 5' édition, 1780;
Tlie Oriental Pilot; or a sélect collection of charts and plans, both gênerai and
pnrticulars; calculated for the navigation of the couniry trade in the seas beyond
the cape of Good Hope : including the Indian sea, with the Arabie and Persian
golfs, the China sea, the castern sea, etc., etc., etc. Dratvn chiefly from the last
édition of the Neptune OniENTAL of Mons. d'Amies nE Mannevillette ; with
important additions and several improvements , extracted from mimerons Journals
of the Honourable the English East India Company; and from actual siirveys by
officers in that service ; as also from the original drafts of the Dutch East India
Company with sailing directions. Londres, sans date (vraisemblablement des
dernières années du xvin° siècle).
Ce sont les seuls documents cartographiques que j'aie à ma disposition. —
W D'après le texte de Linschoten (p. 7^-75), la pointe nord de Sumatra
est par 5° nord et l'extrémité méridionale de l'île par 6° sud. L'île aurait
170 milles de long et 60 milles de large. Sur la carte de Linschoten, la pointe
nord-ouest et la pointe sud de Sumatra dépassent respectivement de près d'un
quart de degré le cinquième parallèle septentrional et le sixième parallèle
méridional. La partie nord de Sumatra est à peu près parallèle à l'équateur et
divisée en trois états : Daia, au nord-ouest; Achem = Acin, communément
Atchin, au centre; et Pedir, au nord-est.
Sur la carte de Valentyn, l'extrême pointe nord-ouest est par environ
5° 30'. Tout le nord de l'île constitue l'état d' Atchin {Tryk van Atsjen), avec
la ville d'Atchin à la pointe nord-est, sur la rive droite et à l'embouchure
d'une rivière non dénommée.
D'après le Petit Atlas maritime , l'extrême pointe nord-ouest est par 5° et
quelques minutes. Mêmes indications que dans Valentyn. La rivière est appelée
ff rivière d'Achem».
La carte XTII du New Directory {A particular plan of Acheen road with the
—!-».( 93 )<^ —
environ], d'après d'autres. Elle finiL au sud, [avec le pays ou le cap
de] Tïkû Tarmad^'l En ce qui concerne la latitude de ce dernier
endroit, les opinions fUiïèrent : il y en a trois, La première est que, m
cet endroit, les Farkadayn sont par k isba [= o" 62' sud environ]; cest
l'opinion de la majorité des Indiens [de la côte occidentale de l'Inde].
La seconde est que, en cet endroit, les Farkadayn sont par un peu moins
de A isba [= un peu moins de 0° 62' sud] ; c'est l'opinion des Arabes et
des Colas'-). La troisième est celle de ceux qui l'ont vérifiée : [les Far-
kadayn sont en cet endroit] par 3 isba 1/2 [= 1° A3' sud envii-on]. Cer-
tains disent que l'extrémité méridionale de l'île de Sumutra est [même]
par 3 isba' [= 1° 34' sud environ] ^'l
Sache que sur la côte occidentale, il y a de nombreuses iles appelées
Islands adjacent) désigne l'extrême pointe nord-ouest sous le nom de «kings
Pointw, la ville d'Atchiu est à 0° 10' à l'est. Ce «Kings Point», ia moderne
fflète d'Atchinîi , est à peu près entre 5° a3' et 5" a-V. VOriental Pilot (carte ia ,
A chart of the strails of Matacca and Siiigapore) appelle également cette pointe
«tlio King's Point or Cape Ashimn et la situe par environ 5° 20'. La ville de
«Acliem or Ashimn est à un degré de longitude à l'est, sur le delta d'une
rivière non dénommée.
tf . . . the great Island Sumatra, whicli Extendeth from o5° lio' South
Latitude to oô" io' North Latitude, soc that the Equinoctiall Line dividelli
this Island into 2 Equall parts..." {A Geographical account of cuuntries round
ihe baij oj Bengal, iÔGq to iGjg, by Thomas Bowrey, édit. Sir Richard Caiinac
Temple, Halduyt Society, a" série, t. XU, Londres, 1906, p. 286).
(') Vide supra, p. 86, n. 3.
'-' Le J^->e^\ ù-~f^ (yï J>=îJI *Às?' ^j-i t-jLx5' de Sulaymân ibn Ahmad al-
iMatirî, que contient également le ms. a55g, a, au fol. 167 r", 1. 9 et suiv. :
rLes Sùliyàu [= Cola] sont les gens du Sùlamandala [= Colamandalam =
Coromandel]. La plus célèbre de leurs villes est celle de Kâyâl. C'est la ville
do leurs savants. Kâyâl est un port célèbre depuis l'antiquité. 11 est situé dans
le pays do Kankara (ou Karaykara, le Kailukari de nos cartes).»
Kâyal est le Cail de Marco P01.0 (cf. édil. \Li.i:-C()iiDn;u, t. 11, 1903,
p. 372-373). La notation arabe reproduit exacloment le nom tamoul de cet
ancien port : Kâyal (cf. Impérial Gazelteer of Indiu, Madras, t. II, Calcutta,
1908, p. 283).
(') Toutes ces latitudes sont inexactes. L'extrémité méridionale de Sumatra
est aux environs de 6".
Mîkâmârûs'''; les Farkadayn sont là par 7 isba [=li° 18' nord environ].
Viennent ensuite deux îles appelées Indrasâbùr '"'. Entre ces îles et la
côte occidentale de l'île de Sumutra, il y a 8 zàm'^> [de distance]. En-
suite, au sud de ces îles, se trouve une île appelée Matahârï'''^ là où les
Farkadayn sont par 7 isba i/k [=- k" kB' nord environ]. Après celle-ci,
au sud, il y a de nombreuses îles appelées Mïkâmârûs <^', là où les Far-
kadayn sont par 7 degrés de hauteur [= k" 18' nord]. Là où les Farkadayn
sont par 6 isba iji [= 3° 26' nord], se trouvent deux grandes îles : ce
sont des montagnes élevées. A mi-chemin de l'île septentrionale de ces
deux îles , il y a de petites îles. A l'est de ces deux îles , il y a peu de
fond, des récifs de roches et (fol. 28 r°) des barrages dans l'eau ('\ On
appelle ces deux îles Pulaw BânyakC*. Les Indiens les ajjpellent Talâgîh
parce qu'elles ressemblent aux Talâgih [du Guzerate]'"*; car dans l'île
septentrionale, les montagnes qui s'y trouvent apparaissent semblables
aux Talâgih. Les précautions, toutes les précautions, il faut que les
prenne en cet endroit, celui qui vient de Gâmis-fula '^', car il ne peut
(1) Vide supra, p. 88, n. a.
(^) Vide supra, p. 88, n. 4.
(') 8 zàm = zh heures de route , à raison de 3 heures au zâm.
'*) Vide supra, p. 88, n. 5.
'^) Ce sont les dernières îles méridionales de l'archipel dont il vient d'être
question.
C) Il s'agit vraisemblablement , soit de hauts-fonds , soit de bancs de sable.
(') Ce sont les îles que nos cartes, reproduisant servilement la transcription
hollandaise, appellent Banjak, qui est à prononcer Banale, ^j-ob, que Bittneu
a lu Bâmk (p. 71), est donc à lire J-oLj Bânyak. C'est un bon exemple de
Iranscriplion de la nasale palattllo -)- a.
'*) Vide supra, p. 89, n. 5.
(') Vide supra, p. 89, n. 7. C'est la Gaucnispola de Marco Polo (édit. Yule-
CoKDiEH, t. II, p. 3oo et 807); la Gomespola de Linschoten (édit. H. Kekn,
carte de la p. 70, t. I); la Poulo Goiiws du Neiv Directory (carte XIII) et de
ÏOrienlalPilot (carte liz). ff[Achin], rapporte Thomas Bowrey (.4 geographical
account of countries round the bay of Bengal, 166g to 16^ g, édit. Sir Rich.
Carnac Temple, Hakluyt Society, 1906, p. 286-287), hath likewise a very
Excellent Roade or bay in which there is roome Enough for many hundreds
of Ships and in great Safety, where they may ride in 12, 10, 8, 6, 4 fathoms
depth , very cleare ground , and almost land locked with the head of Sumatra
[=Tête d'Atchin], Pullo Way, and Pullo Gomus, and 2 or 3 Small Islands
and rocks." Sic Carnac Temple ajoute en note : «Cf. Dampier, William, A new
voyage round the worldn (Londres, 1696, t. II, p. 122) : «Pulo Gomcz is
another large island about 20 miles West from Pulo Way, and about 3 leagues
-«.( 95 )-^
se sauver que sur la côte, c'est-à-dire sur la côte occidonLale de Tile de
Sumulra, s'il veut arriver à Pancur^'^
from the N. W. point of Sumatra^. Cf. also the foUowing from «Abstiacl of
Captain Aitkins Jourualn, 0. C. N° io/iS, «tiSth April i675n. As soon as wee
were shott without the island Polo Gomos, wee mctt with a slrong stream??.
Horsburgh, East India Directory, vol. II, p. ia, cd. i8o5, lias «Pulo Gomez,
vvhere there are regular soundings and good anchoring ground, from lo to
17 fathoms'i. Cf. Captain Alexander Hamu.ton {A new account of the East
Indies, Edinbourg, 1727, vol. II, p. 112), «Between Atchcen Head an higli
steep Promontory, and the South End of Gomus Islands , there are two Chu-
nels to corne from the Westward into the Road.n
C) ;>«ai9, litt. Fansûr = Faneur -<: Pancûr. Vide supra, p. 90, n. 1. Dans
une note de son Account of the Malay Mss belonging to the Royal Asiatic Society
(Miscellaneous papers relaling to hido-China and the Indian arcliipelago , û" série,
t. II, 1887, p. 5i), H. N. Van der Tdnk dit à propos de Hamzah de Baros
appelé Hamzah tg^yai tH parce que »Fantsur est Tancicn nom de Baros; d'où
le camphre de Baros est appelé en arabe ^^yaJULlI ^^i^ «camphre de Pancuri^.
YcLE, qui a utihsé cette citation, ajoute {Marco Polo, éd. Cordier, t. II,
p. 302) : «It is highiy probable that Fansûr and Barûs may be not only the
same locality but mère variations of the same name. The place is called in
the Shijarat Malayu, Pasuri, a name which the Arabs certainly made into
Fansûri in one direction, and which might easily in another, by a very com-
mon kind of Oriental metathesis, pass into Barfisi.n Ydle, qui n'était pas ara-
bisant, n'a pas pris garde que ïs, en transcription, de Fansûr et de Barûs,
sont deux lettres différentes. La première est un ^_J^ qui, dans le cas présent,
rend la palatale malaise c, transcrite par les Hollandais //; la seconde, une
sitllante dentale que les Arabes ont également rendue pur j- s. En réalité,
malais *Pancur > arabe ^ynSi n'a absolument aucun rapport avec malais
Barus ou Baros > arabe ^y.yli Balûs. Les deux noms désignent le même port
occidental de Sumatra, mais il u'y a aucune parenté phonétique de l'un à
l'autre. Sur Balûs et Faneur, cf. les deux premiers volumes de mes Relations
de voyages et textes géographiques arabes, turks et persans, passim. Le doublet
Baros-Pancur s'explique ainsi. Baros qui est situé par environ a" de latitude
Nonl , en pays batak, est le port d'exportation et la têlo de ligne de la route à
destination de la région du benjoin et de celle du camiilire. Les premières
étapes sont : Kampoù Mudik, Lubuk Tuwa et Pansur, le long de la rive
gauche de la rivière Batu Garigis. Les Bataks écrivent Pansur, mais prononcent
Patsur, d'où la forme malaise Pancur qui a confondu l'un et l'autre et que les
Arabes ont rendu par ;>«i^ (cf. L. van Vuuren, De handel van Baroes, als
oudste haven op Sumatra' s westhust, vei-klaard; en voor de toehomst hesehouwd,
dans Tijdschrift v. Kon. Nederlandsch aardrijicskundig Genotschap, a" série,
t. XXV, lyoB, afl. 6, p. 1389 et suiv., avnc carte et plans).
_.o.( 96 ).€^—
Sui' la colc orientale de Sumutra, la mer a peu de foud, particulière-
ment autour du port de Aru.
[Voici] la route [à suivre] sur la côte occidentale de lile de Sumulra.
De Gâmis-pula à Mâkûfâug^'', d y a trois opinions : la première, [faii-e
route] au sud-est; la seconde, au sud-sud-est; et la troisième, au sud.
D'après moi, c'est la route au sud qui est la meilleure. De Mâkùiâng —
c'est uue montagne sur la côte occidentale de l'ile de Sumutra. Les Far-
kadayn sont là par 7 isba 1/2 [= 5° 9' nord environ], d'après les uns:
7 isba i/à [= II" /i3' nord environ], d'après les autres — de Mâkufang
à Pancur, la route est, d'après les uns, au sud-est; d'après les autres,
au sud-est- i/4-sud : c'est la première qui est la meilleure. De Pancûr à
l'extrémité de l'île de Sumutra, la route est, d'après les uns, à l'est-sud-
est; d'après d'autres, au sud-est- i/4-est et d'après d'autres encore, au
sud-est. La première et la seconde opinion est celle des Colas ; et la troi-
sième, celle des Arabes, des gens de Hormuz et des Indiens [delà côte
occidentale de l'Inde].
[Voici] la route [à suivre] sur la côte orientale. De Gâmis-fula à
Lâmurï, au sud-est'"'. De Lâmurî au port de Sumutra, les uns disent
[qu'il faut faire route] à l'est- i//i-sud; les autres, à l'est-sud-est'"'. Du
port de Sumutra à l'extrémité de l'ile , l'opinion dominante est de faire
route au sud-est.
V
Les ports de l'ile les plus connus sont : le port de Sumutra sur la
côte orientale — les Farkadayn sont là par 7 isba 1/2 [=:= 5° 09' noj-d
environ]; le port de Mandara'^' qui est proche de Lâmurï, également
sur la côte orientale — c'est un port nouveau, célèbre par sa prospéiité
et par le bon ordre qui y règne — ; le port de Pancûr, sur la côte occi-
dentale— les Farkadayn sont là par 6 isba [= a° 34' nord environ]; le
port de Manankâbwa '''\ également sur la côte occidentale — les Far-
(') C'est le Mancopa de Barros (Da Asia, décade III, iiv. V, chap. i, Lis-
bonne, 1777, p. 5i 1).
(-) La direction donnée à la route est inexacte , car la petite de de Gâmis-
fida est au sud-ouest de la pointe la plus septentrionale de la Tête d'Atchin.
Vide infra le texte arabe suivant.
^^ Celte route indique nettement que Lâmurï est à l'est de la Tête d'Atchin ,
donc sur la côte orientale de Sumatra, en prenant comme point de séparation
entre les doux côtes la pointe la plus septentrionale de l'île.
('') Ce port est inconnu par ailleurs.
(*) Vide supra, p. gi, n. 2. Linschoten l'a également inscrit sur sa carte
comme port de la côte occidentale : Manancabo. C'est aujourd'hui le nom d'une
— «.( 97 ).«^—
kadayn sont là par 5 isba [=o''52' nord environ]; le port de Pulaw
Bang^'', sur la côte orientale — les Farkadayn sont là par 3 isba Zjk
[= 1° i8' sud environ].
Sache que dans les îles Mïkâraârûs, se trouvent des gens semblables
aux bêtes féroces qui maugent les hommes. 11 en est de même des gens
de la côte occidentale de l'ile de Sumatra : ce sont des brutes anthropo-
phages qu'on appelle Batang^^' [=Batak]. Prends garde, prends bien
garde 1
Le texte suivant est extrait également du ms. aSSg. C'est
une des sections du chapitre m d'un autre ouvrage nautique
de SuLAYMiN al-Mahrî, intitulé ^rs^JI ^s. ^9 ysJsl\ ^14^1 v^
yi^lJl «Livre de récits de voyages précieux ou science de la
mer en fureur». Il n'est pas daté, mais il est postérieur au
texte précédent. C'est au Khâh al-minhâj que Sîdî 'Alî a em-
prunté les trois importantes sections : sUi j-Ls ^J> J^ai Sec-
tion de la latitude d'après l'étoile polaire (du fol. (U v^à 70 r°);
/oJoJdi (j-Lï ^^ Jbwai Section de la latitude d'après les Far-
kadayn ou les deux Veaux = /S et 7 de la Petite Ourse (du
fol. 70 r" à 7 1 v°) et jiotjL]! ^Lo ^i Ju^i Section de la latitude
d'après a, /3, 7, <J de la Grande Ourse (du fol. 7 1 v" à 72 r°).
On trouvera la traduction de ces trois sections d'après le MuiiU
de Sîdî 'Alî, dans mes Relations de voijages et textes géogi-ophùpies
arabes , persans et turks, t. II, p. 5i5-53().
Le chapitre 11 du . <j t j! ^L^_àJIî ljLlj:} commence ainsi
(fol. 6/1 r", 1. 9 et suiv.) :
^^jLi ^^-LoiJ! ^J»l^ ^ V;-*^'^ 4>J4J! Jtf>! ^JM Làjl o^Axà.! J^^^»-^
peuplade de celle réf[ion, que les anciens marins avaient sans doute donné au
porl par lequel on pénélrail dans le pays.
'*) A corriger en Palemhanjj == Palemban. Vide supra, p. 91, n. 3.
'*) Il s'a(Til sans di)iilo des Balaks, dont le nom a élé inexactement transcrit.
Cf. le texte aralie stiivanl, p. 100 et loa.
M. G. FERRANU. 7
__^( 98 )<^-^
LeiXjiJî Jj,.S OOUaJ cjbdOl Î<X£& ^j yLJj,*ïJJ IX9Î_^ »«xjJ! ^b:^
Lgj qIoî a*jS^^\ (j«jj)l (jiî*j ^ '^^jT' C5J' -î^^yj ;^^^' (J^^ C5*
Chapitre 11 traitant de la latitude [des ports situés] sur les côtes habi-
lées connues. Sache que, au sujet de la hauteur du Gâh (l'étoile polaire),
il y a des divergences entre les gens des pays sous le vent et ceux des
pays au vent^'', en ce qui concerne certains caps. Il en résulte également
des divergences entre les gens de l'Inde [occidentale] et les Arabes au
sujet de la hauteur fondamentale [, c'est-à-dire de la hauteur de la
polaire à tel ou tel endroit]. Dans mon livre intitulé Al-'Umda {vide
supra, p. 85), [les latitudes données] sont conformes à celles des
[marins] Colas '^'; dans le présent livre, j'ai reproduit l'opinion des
(') Dans la terminologie nautique de Ibn Màjid et de Sulaymân ai.-Mahrî, le
point de séparation entre les pays au vent et les pays sous le vent est le cap
Comorin. Cette expression , qui est sans doute empruntée au malais , a pris en
arabe, comme on vient de le voir, un sens géographique assez différent. Pour
les Malais, le point de séparation des deux sortes de pays est, au conlraire,
la pointe nord de Sumatra. Modifier dans ce sens la note 2, p. ^96, de mes
Belalions de voyages, t. II.
TcHEOD K'iD-FEi, dans son Ling ivai tai ta [II, la""), indique une répartition
spéciale des pays de la mer de Chine et du grand archipel d'Asie en «pays de
la haute côte et de la basse côte» : «Le royaume de Chô-p'o, appelé égale-
ment f^ ^ ^1 P'ou-kia-Iong [= P'u-kia-lon < Pëkalonan], git dans le
sud-est de la mer. Sa position étant en bas (c'est-à-dire dans le sud par rap-
port à l'Annam, qui est au nord et qui est dit être «en haut»), fait qu'il est
appelé la côte basse» (dans Chau Ju-kua, trad. Hirth-Rockhill, p. 79 infra).
Le T chou fan tche contient des indications identiques, évidemment emprun-
tées au Ling mai tai ta. «On a l'habitude, dit Tchao Jou-koua (ibid., p. 2o4,
notice 11), de distinguer entre la «haute côte» et la «basse côte». Le Tchen-
la (Cambodge) et le Tchan-tch'eng (Campa) sont appelés [pays de la] haute
côte; [le pays de] Ta-che, le San-fo-ts'i (Palemban) et Cho-p'o (Java) sont
appelés [pays de la] basse côte.»
(-' 11 existait donc aux xv° et xvi° siècles des textes nautiques colas sur la
navigation dans l'Océan Indien, les mers de Chine et de l'Indonésie, assez
importants et utiles à connaitre pour que les auteurs d'Instructions nautiques
arabes se soient crus obhgés de les étudier et, dans certains cas, de les prendre
pour base de leurs propres publications. Je ne crois pas que cette littérature
Anciens [qui ont rédigé des Instructions nautiques,] pour toutes les côtes
parce que je les ai vérifie'es pour certains caps que je supposais avoir
été situes au-dessous de leur latitude vraie, par exemple Midawwar et
Zagad, J'ai trouvé ces deux caps pai- lo et ii [isba], et même à un
peu moins [de lo et 1 1 isba] . . .
(j^ l-^»i\ sJLwi »Ja^ h^'f^ i^jJi^ (^ tK»^ (Fol. 78 r°, 1. 10.)
y.j<S yyA. jj^^ xL» (j**Lo Vy-^ ijl:2.^ (jAiK ^^Lfiî (j*»vî l«xô vy^^
aJJlj (fol. 78 v°) ylJ^jyiJi L£»-a^Tyî^Ai)l Jyl\ Ji«i iJJ^jJi ^i
x-Lk-il ^ A-1-9 (j«Ll <xXi (j^^^W- Q* U-^^^ ^r?.^ '-«b V,^**^' aXIxo
k-l_)Lj iv-la-^ (:J-^^ li? • (^^'* S-Sujfié yù\j>jJ <îJj (j**L« (^3 ^^A»«oi)î
xAia-« '^'r^ *7-!^^ ixAjfcjj qx»^ JUamj yî«Xïyl)i J^X^^sii ^^la/s «Lû^
» Ja>^ (^ ^^ iolJi »*:>0>J! Loî^ '^^^^ »;J«>Jî »*>^ ^i J^^'
j,_aJ| iJa_X-« /v5j <_>J> /j-o ;ïiy XiUw tXsi-iJi <.i*xa. ^\y4' (*^^^^ (:)^
jjLojJi ivX^ ^ jj^.;i^ -Afi '^'j)^jj*Xjî ^jvXàj :i^\^ yjJ^S cAiûi)^«XÀj
spéciale ait été consultée-, je n'ai même pas souvenir qu'on en ait signalé
l'existence.
('J Le texte a fautivement j-^.
^*^ God. r^*a.u .
(') Cod. 8^
W Cod. lp;Ool.
— ^ 100 ).♦*—
_j,jÔ5 (fol. 79 r°) 8^1=^ ^iSXi J.xXxi\ ^tXÀi yû|^ tfy*^ li-î^ o^^yftj
^tXJLj ^~£Û_5 (J-^ J*^^-*-? J•■^*^ ^»^»^ ^'^^ *JL5 ^*^^ ^■'^ ^••^^ ^'^J
>LjLAaJ! ^i)LÀ_Aj| ^ilyôj jjoU» ^Osxj Liaj|_^3 '^^ ^? 45-^ _J"-^^ jfr*^
«XJLâ jiULxJl cyl*«lo Loli ^^:a.|yJ! diXï ^^^ ^rft^J ^^- )^^ ("^^
^ U*>oo *S- p'^jî iojLc Uy^ -xiLJlî^ '''^'li^U xbLsL» ^^ Jx^
yî»XJ>-iJ!^ '"' jjgii^UlJùyo ^tfwô' ^^Iàjj )^^^ t^^'^ *;^^ *Td3^ V>*^
j^! oJ» ^1 ci^Ul^j-à.^ (^UAaw:i\j »jJV^^ ^jJ >^ '>^»J jMj (^''<^) à^
x-o^ ^^^' itX;Û5 (.juajj *Jù«< U;û y!*XS»x!î (*^ jX>-w ^tXô^^l ^^
*AjIJu ^d)^ '^jri'fT- (fol. 79 v°) vy^I ^il ;v4^ *i|^di *N^5 yU*^'
^j! (tf>^U (sîc) jijij)lJiJL^ ^yC^' («^ji)^ *^^' ;'»NJ^ Uy'^^^ ^''^^^âaoa)
(^ qXJ -.ajJI xJIm ^^'> ^yaXi ^\ {sic) q*.^j1JU/b *;^)"^ O^ <é^^'
(') Cod. ^.> J~9.
('^) Cod.;^U, Jo!.
W Cod. gU^U.
W Cod. j-j^LiUu..
(0 Cod. iU^^-.
t«) Cod. jjCi.
W Cod. ^_^JyaU.
") Cod. r>*a^ •
— «.{ 101 ).e*—
Livre de récits de voyages précieux.
V
LXXXII. Section traitant de ia connaissance de l'ile de Surautra.
Sumutra commence, au nord-ouest, là où les Farkadayn sont par un
peu moins de 8 isba [= 6° nord environ]. Gâmis-fula est à l'ouest de ce
cap [nord-occidental]. Proche de ce cap, c'est-à dire du cap [septen-
trional] de Sumutra, gisent les îles de Mâs-fula'^'. Ce sont des îles
grandes et petites. En ce qui concerne la latitude de l'extrémité méridio-
nale de l'île de Sumutra, il y a plusieurs opinions que j'ai rapportées
dans [l'ouvrage intitulé] Al-'Umda ''''. L'opinion la plus répandue est
qu'elle se termine là où les Farkadayn (fol. 78 v°) sont par 3 isba 1/2
[= 1° 63' sud environ].
[Voici] la route à suivre sur la côte occidentale : de Gâmis-fula à
Mâkûfâng, au sud-sud-esl; de Mâkûfâng à Pancûr, au sud-est- i/4-sud;
de Panèûr à l'extrémité méridionale de l'île, au sud-est.
[Voici] la roule à suivre sur la cote orientale : de Gâmis-fula à Mâs-
fula, au [)lein est^^'; de Mâs-fula au port de Sumutra, à l'est- 1/4 -sud;
W Cod. Uco,
(^' Cod. ryoJu».
W Mâs-J'ula est un complexe dont les mots sont malais et la construction
sanskrite, signifiant «île de i'orn. L'aire d'expansion de mâs, correctement
ëmûs, amas et mets en malais, s'étend, en dehors de l'Indonésie, à ia pénin-
sule malaise et à l'Indochine. Cf. javanais emas; blsaya, dayak, tagal amas;
makassar amasa; batak ornas; khmèr mâs; bahnar, jaral, halafi mah; cam
mo'h; rade ma; péninsule malaise amas , mas, mâs (cf. Aymonier-Gabaton, Dic-
tionnaire cam-français , p. 365, sub verbo, et C. Otto Bi.aoden, Comparative
vocabulary qf aboriginal dialects, dans Pagan races of ihe Malay peninsula,
Londres, 1906, in-8°, t. II, p. 621, s. v° gold). La Lijst van de voornaamste
aardrijkskundige namen in den Nederlandsch-Indischen archipel (Bailaiyia, 1906)
mentionne trois îles du môme nom : l'une dans l'archipel des îles Aru (Rési-
dence d'Amboinc)-, la seconde dans la résidence de Timor, et la troisième sur
la côte orientale de Sumatra, dans la Résidence de Riouw et dépendances.
(*' Vide supra, p. 85.
''J Litt. «à l'est fondamental T».
[du port] de Sumutra à Pulaw Barhaia, au sud-est- i/i-est — les Far-
kadayn sont là par 7 isba [= k" 18' nord environ]; — de [Pulaw] Bar-
haia à l'ile de jumur, au sud-est-i/i-est également. Celte route est [dite
la route] du large'''.
La route le long de la côte [orientale] est la suivante : [du port] de
Sumutra à Aru où les Farkadayn sont par 6 isba 1/2 [= 3° 26' nord envi-
ron], au sud-est; de Aru aux environs de Rakan'->, à l'est-i/isud —
les Farkadayn sont là par 6 isba' i/k [= 3° 00' nord environ]. A partir
des environs de Rakan, la terre s'avance dans la direction du pôle [sud]
et de ses environs, jusqu'à l'extrémité de l'ile. On dit cela et on dit aussi
autre chose.
Les porls connus de l'île sur la côte occidentale, sont :
Le port de Panèar; c'est le port du camphre. . .'^', de l'or et d'autres
produits;
Le port de Pariyaman '^', célèhre parmi les hommes [et qui est situé
dans le pays] de Manankabwa; c'est le port de la poudre d'or et de
l'aloès;
Le port de Indrapura'^^ qui n'est plus connu à cette époque-ci, mais
qui était célèbre autrefois.
Les ports de la côte orientale sont :
Le port de Pedir'^', sous la montagne de Lâmuri; c'est le port du
poivre ;
Le port de Sumutra; (fol. 79 r°) c'est le plus célèbre des ports de
l'île. C'est une grande ville. C'est le port du poivre, de la soie et de l'or.
C'est un port fréquenté;
(1) C'est-à-dire la route par le milieu du détroit, opposée à la route du
cabotage le long de la côte. Pulaw Barhaia est sans doute le petit groupe d'îles
à l'est de l'embouchure de la rivière de DeU, plus exactement Dëh, au sud
du k' degré de iatitmle nord, que YOriental Pilot j; carte la) appelle «Pulo
Varela, cali'd by Ihe Sailors Pulaw Verura». Pulaw Jumur, exactement Pulaw
Jëmur, est l'une des îles de l'archipel des Aru. Cf. Tomaschek, carie XXV, et
mes Relations de voyages, t. II, p. A89, note; Age, note; iga, igç), 533,
oîi 8jjr Gumrah, ^ Gamar, etc.; Gumar, Gamar, doivent être rectifiés en
j57 Jumur < malais Jëmur.
f^) Malais Rëkan ou Rokan.
(') Le texte a ^, qui peut signifier tf camphre vivantn , mais je n'ai trouvé
cette expression nulle part ailleurs.
W Ou Pariaman , généralement appelé Priaman.
(M Indrapura , la ville d'Indra ; exactement Indrôpurô et IndërôpurÔ.
'•) Litt. Fîdir; en atchinais Pidië.
__«.^ 103 ).«—
Le port de Aru; c'est un petit port;
Le port de Rakan; c'est un petit port;
Le port de Palemban'''; c'est également un petit port. Parmi ces
petits ports sont les ports du benjoin'^' et d'autres produits de ces
re'gions.
En ce qui concerne la latitude ^'' de ces ports , je l'ai indiquée au cha-
pitre des latitudes et il n'y a pas à y revenir.
Attention'*'. Sache que sur la côte de l'ile de Sumutra qui fait face à
la haute mer, du côté de l'ouest, il y a une série d'iies. [Voici quelle
est] la route au large : de Gâmis-fula aux îles de Indrasâhûr qui sont
les premières en commençant par le nord, au sud-sud-ouest — elles
sont en face de Mâkûfâng; — la distance entre ces deux points est de
8 zâm. Ensuite, au sud, une grande île aux nombreux criques'*' et
ports, appelée Mîkâmârûs où les Farkadayn sont par 6 isba 3/4 [— 3° 62'
nord environ]. C'est le pays dont sont originaires les Batak anthropo-
phages. — Nous implorons d'Allah le pardon et la sécurité I — Entre
cette île et la côte occidentale de Sumutra, il y a également 8 zâtn de
distance. Si, de cette île, tu fais route à l'est-i/i-sud, tu arrives dans un
groupe d'îles parmi lesquelles sont : Pulaw Bânyak'^', Pulaw Lumbû'''',
''' Le texte a Falî-bang.
'*) Le texte a ^^lA ■^ùli^.
('' Le texte a euLwUiJI, pluriel de o-Uï, qui signifie simplement «mesure"
et, dans le cas présent, avec le sons de «mesure de hauteur d'étoile à tel
endroit pour en déterminer la latitude».
'*' *->>Jij' signifie au propre «avertissement, admonition, avisî5. Je l'ai tra-
duit par le terme nautique équivalent : «attentions, qui est imprimé en
caractères gras dans les Instructions nautiques modernes. Les instructions qui
suivent ce titre mis ainsi eu relief ont pour but de mettre en garde les marins
contre les dangers de la navigation en tel ou tel endroit.
(^' D'après Birûnî, <_».c yubb, plur. vU-èl aybàh, signifie «golfe, baie» et
^>i. hiir, plur. ;l>^l ahwàr, «estuaire de fleuve formant golfe» {Albebdni's
India, cdit. et trad. E. Sachau, p. UY du texte arabe et p. 208, t. I, de la
traduction anglaise). L'indication est exacte du point de vue géographique;
mais, en terme de marine, hûr a le sens de «lagune, crique». Cf. Instructions
nautiques sur la mer Rouge et le golfe d'Aden, n" G81, i885, p. xv, sub verbo.
'*) Pulo Banak. Vide supra, p. gi et note 7. Le texte a ici la leçon fautive
^b Bànî pour jï^jLj Bânyak.
<') Je n'ai pas à ma disposition de document cartographique me permettant
de situer ciaclemeat cette île. Il s'agit sans doute du groupe insulaire gisant
en face de Baros.
Pulaw Lûlû ''', i'île de Talâgïh <'' et des îles désertes <'' jusque près de la
côte. Sur la côte, se trouve le port de Sinkil'''', là où les Farkadayn sont
par 6 isba 1/2 [=3° 26' nord environ]. C'est un endi'oit à récifs de
roches. Après ces îles, en se dirio;eant vers le sud, (fol. 79 v°) se trouve
une île située en face de Panèûr — entre ces deux points, il y a environ
8 zâm — appelée Mankârûs ^^K Sache que la route de l'île de Mankârùs
à Panèûr est à l'est-sud-est ; mais prends bien garde [aux parties] mai-
saines'"' dans ces endroits.
(^) Voir la note 7 de la page précédente.
W Ibid.
(') Le texte a cabl^^, de la racine v^ «être ruiné, dévasté, dépeuplée .
«[The Moorish pilot], rapporte Teixeira, though repuled the best in those
narrow seas [il s'agit du golfe Persique], neariy pul us high and dry at a
pass wliirh the Moors cail Karab [lire v'7^ harâb], that is, «broken?) or
«ruinedn. They say that there veas a great city, that was overflowed by reason
of ils low positions {The travels of Pedro Teixeira, trad. et annoté par William
F. Sinclair et Donald Fergcson, Haklmjt Society, 2* série, n° IX, 1902 , p. 26).
La traduction de caUl^ par «désertes» implique que les îles en question ont
été dévastées et dépeuplées.
W Exactement Siàkil, mais communément appelé Sinkel. La notation arabe
Sinkil est fautive , car la sifflante palatale n'existe pas dans les langues de Sumatra.
(^) Dans le même traité du ms. 2659, au fol. 70 v°, 1. ih etsuiv. , Solaïmân
cite les ports et îles suivants, qui sont situés à l'endroit où les Farkadayn sont
par 6 isba' : J-.}^L• 8tt>j=>- ^ ^yo.i.i> ^0^ *j »jL<ii ^^Lj ^^ ^JS^ ^0^ *i *ïiU
»Ja*4 cii^-i-» ^y• ^^^^ ^ cy<^«^ J^î «Malâka [sur la côte occidentale de la
péninsule malaise]-, puis le port de Rakan sur la côte orientale de [l'île de]
Sumutra; puis le port de Pancîir; puis l'île Rlàrûs, qu'on dit s'appeler aussi
Fulo Bàbik [et qui est située] à l'ouest de [l'île de] Sumutra. n Mankârûs
est, sans doute, une erreur de graphie pour Mârûs et l'île en question est à
identifier à Pulaw Babi, au large de Fancûr-Baros. Vide swpra, p. 88, n. 2.
W ^Lw;i)l, pluriel de g^, signifie au propre «saleté, mai propreté n ; c'est le
contraire de vJi;>jià-5 «propre». Ces deux mots répondent en terminologie nau-
tique française à «sain» et «malsain», avec le sens de «endroit où la naviga-
tion est ou n'est pas dangereuse». Cf. les passages suivants des ^mlructions
nautiques sur la mer Rouge et le golfe d'Aden, n° 681, i885 : p. 56 «Au sud
des îles Djifatin jusqu'à Kosseïr, la côte a comme direction générale le S. S. E
et est assez saine»; p. 70 «le chenal en dedans de Makaoua ... est sain»;
p. 85 «Le passage entre Shab [=sa'b] Gousser et Shah Touil paraît sain»;
p. 65 «La BAIE MALSAINE ... cst pleine de récifs et de roches sous l'eau»;
p. 86 «Approche de Suouakin par l'est. — Le chenal ... est malsain pour les
navigateurs qui ne sont pas pratiques de la localité; on conseille donc de ne
pas le prendre jusqu'à nouvel ordre».
[161] -^«.( 105 ).«—
Parmi les iles connues [sont les suivantes] : l'ile Nihâ''^ qui est située
au-dessus [=au sud'-'] du port de Pancûr; l'ile Bâsalâr qui est au sud
et au large de Pancûr '^'. Il se trouve dans cette dernière île un cours
d'eau qui ne tarit jamais <^'. Mais combien il y a encore d'iles non
mentionnées ici et de récifs de roches !
Abû'l-Fazl (1095).
The Ain i Ahhari hy Abvl Fazl Allami , texte persan édité
par H. Blocumann, 2 vol., in-Zi", Calcutta, 1872 et 1877;
trad. anglaise : t. I, par Blochmann, in-8°, Calcutta, 1878;
t. Il et III, par le colonel H. S. Jarret, Calcutta, 1891 et
189/1.
LXXXllI. (T. 111, p. 46.) Table pour la détermination des longitudes
et des latitudes des endroits situés dans le quart habité du globe. . .
Pays situés au sud de l'équateur.
L'ile de Lâmurî, dans l'Inde,
qui produit le bois du
Brésil long. i3o' 00' lai. 9" 00'
L'ile de Kalah, dans rinde. . lio'oo' 8° 00'
L'iledu Maharaja, dansl'Inde. iBo" 00' 1° 00'
Premier climat.
L'ile de Zâbag io/j"oo' iS" oo'[nord<')]
(') Le texte a L^^ , que je lis L^vj . On sait que le nom indigène de l'ile de
Nias est Niha.
'■^' Les cartes arabes ont une disposition différente des nôtres. Le sud est en
haut de la carte; ie nord, en bas; l'est, à la gauche du lecteur et l'ouest, à b'a
droite. Tel endroit au-dessus de tel autre est donc au sud de celui-ci. Pour des
expressions de ce genre, cf. Ibn KhaldCn, t. II de mes Relations de voyages,
p. A61.
('' Il s'agit d'une île Pancûr de la côte orientale de Sumatra, dont le nom
est homographe de celui du célèbre port du camphre de la côte occidentale :
Pancur-Baros.
^*) Litt. qui coule toujours.
(^' Toutes ces indications sont inexactes. Les pays situés dans le i"" climat
sont au nord de l'équateur. D'après les latitudes données par Ado'l-Fazl, le
M. G. FEnnAND. 8
■^i 106 ).«— [162J
Mille et une nvits'^^K
LXXXIV. Au cours de son premier voyage, Sindbâd arrive dans une
île inconnue. Il y rencontre des j3alefreniers qui lui dirent : ffNous
sommes les palefreniers du roi [appelé] le Maharaja à qui celte île
appartient. . . ri Dès que les juments du roi eurent élé saillies par l'éta-
lon sorti de la mer, ffles gens, montés chacun sur une jument, formèrent
une troupe nombreuse et partirent, en m'amenant de compagnie, pour
la ville du roi [appelé] le Maharaja, où nous arrivâmes tous ensemble.
Ils m'introduisirent vers ce roi et me présentèrent devant lui. Il me
demanda qui j'étais, et je lui racontai tout ce qui m'était arrivé" (texte
et trad. de Langlîîs, dans Savauv, Grammaire de la langue arabe, Paris,
i8i3, in-/i°, p. /i75-/i76).
liIVRE DES MERVEILLES DE lInDE.
Kitâb %ij(nb al-Hind, Livre des merveille,'! de l'Inde par le capi-
taine BozoRG BiN Sahriyâr de Râmhormoz, trad. par Marcel
Devic, texte arabe et notes par P. A. van der Lith, Leyde,
i883-i886,in-/i°(2l
LXXXV. (P. 187.) Yunus, fils de Mahrân, de Sïrâf, 'e marchand
qui a été au Zâbag, m'a dit : ffDans la ville où réside le Maharaja, roi
du Zâbag, j'ai vu une quantité innombrable de rues marchandes. Dans
[la rue] des Changeurs, j'ai compté jusqu'à 800 changeurs, outre ceux
qui sont établis çà et là dans les autres rues.n II ajoutait bien d'autres
choses sur cette île du Zâbag, ses campagnes cultivées, la multitude de
S2s villes et de ses villages, qui passent toute description.
LXXXVl. (P. 176.) J'ai déjà parlé de Sribuza qui est située à l'ex-
trémité de l'ile de Lâmurï, à 1 20 :âm [= 060 heures de route] de Kalah.
Zabâg serait à 16" au nord de i'ile du Maliâraja, à 28° au nord de Kalah =
Kra de la péninsule malaise et à 2 A" au nord de Lâmurï = pointe nord de
Sumatra !
C Le texte des Mille et une nuits n'est pas daté, mais son ancienneté est
incontestable (cf. mes Relations de voyages, t. II, p. 564).
'■-) La date de ce texte est incertaine; j'en ai donné les raisons dans mes
Relations de voyages, t. Il, p. 564-565.
[163] --«.( 107 )^^—
Allah seul coanait la vérité! La baie de Sribuza pénètre, dit-on, de
5o parasanges dans l'île. C'est un fleuve beaucoup plus large que le
Tigre à Basra, ses eaux sont douces comme celles du Tigre. Il n'y a
point de baie plus longue dans toute l'ile. Le flux s'y fait sentir de
douze en douze heures. On y trouve des crocodiles; mais ceux qui sont
dans la partie qui avoisiue les habitations, ne font aucun mal, ayant
été enchantés, comme nous l'avons dit<'', tandis que les parties situées
en dehors des constructions sont inabordables, à cause de ces animaux.
Quelques maisons sont bâties sur terre: mais la plupart flottent sur
l'eau, soutenues sur des pièces de bois reUées ensemble, en forme de
radeaux, et d'une durée infinie. Ils font cela par ciuinte du feu; car
leuis habitations, construites en bois, sont fort sujettes à l'incendie;
que le feu prenne quelque part, tout brûle. Placées sur l'eau, les mai-
sons sont mieux protégées; si le feu se déclare en un point, chaque
propriétaire peut couper ses amarres, déloger et s'aller fixer ailleurs,
loin de l'incendie. Lorsqu'il se déplaît quelque (p. 177) part, il peut
de même changer de quartier. Ces habilalions de la baie sont rangées de
manière à former comme des rues. L'eau, entre les habitations, coule
avec abondance. C'est de l'eau douce qui arrive du haut pays pour
pénétrer dans l'estuaire et se jeter dans la mer, de la même manière que
le Tigre.
V
ClÛrUAYA > CuE-LI-FO-CHE = ZâBAG < JâVAKA.
L'empire de Çrïvijaya avait sa capitale à Palemban même
ou aux environs de l'actuelle Palemban. C'est ce qui résulte
des itinéraires de Yi-tsing(III et VI, p. k et 5). Celui-là, de
Chine en Inde, part de Canton, avec escales à Fo-che ou Che-
li-fo-che, Mo-lo-yu, Kie-tch'a, l'une des Nicobar, pour aboutir
à Tâmralipti; autrement dit Canton-PalembaiWambi-Këdah-
INicobar et, enfin, Tamluk. Celui-ci, de Chine à Ceylan,
emprunte l'itinéraire suivant, le port chinois d'embarquement
n'étant pas explicitement indiqué : Canton, Che-li-fo-che, Mo-
lo-yu, Kie-tch'a, Na-kia-po-tan-na, Ceylan; c'est-à-dire : Can-
ton-Palemban-Jambi-Këdah-Negapalam-Ceylan. Dans ce der-
'') Vida p. iGS-iOo du même ouvrage.
-^>.( 108 ).€^— |1G4]
nier cas, il est dit que la durée du voyage entre les deuxième,
troisième et quatrième escales, fut de quinze jours de Clie-li-
fo-che à Mo-Io-yu et de quinze jours également de Mo-lo-yu à
Kie-tch'a^". Si le voyage paraît un peu long entre ces escales
qui sont relativement proches, on se rappellera que Palembaii
et Jambi sont des ports fluviaux, situés, comme Bangkok,
Saigon et Canton, en amont, à quelque cent milles de l'em-
bouchure, et que la navigation dans ces fleuves et rivières
d'Extrême-Orient est extrêmement lente, malgré l'assistance
V ^
des pilotes locaux. En fait, de Palemban à Jambi, près d'un
quart du voyage s'efl"eclue dans l'estuaire et la partie basse du
fleuve oii les apports d'alluvions et les déplacements constants
des bancs de sable et de vase sous l'influence du courant varial)le
avec les saisons (saison des pluies ou saison sèche), de la
mousson, des cyclones, rendent la pratique du fleuve extrême-
ment diflicile et malaisée pour les bâtiments de haute mer. Je
n'ai navigué ni sur le bas fleuve de Palemban, ni sur celui de
Jambi, mais je connais assez bien le bas Menam; et je sais
combien la montée de la mer à Bangkok et la descente du
fleuve à la mer exigent de précautions, même de la part des
marins du commerce qui font régulièrement la navette entre
Saigon ou Singapour et la capitale siamoise, avec des vapeurs
de faible tonnage. On peut ainsi facilement imaginer combien
cette navigation était plus délicate encore pour les voiliers et
jonques de mer du vn^ siècle.
Çrïvijaya et Che-li-fo-che ou Fo-che se situent donc à Pa-
lemban. D'après l'inscription de Vien Sa (XXIX), le roi de
Çrïvijaya est titré Maharaja; le texte épigraphique dit en efl'et,
C Vùli! supra, LXXXVI. p. 162 , le passage du Livre des merveilles de l'Inde
où ii est dit que Kalali ou Kra de la péninsule malaise est à 120 zàm de
route = 36o heures = i5 jours de route de Sribuza; mais il s'agit sans doute
ici d'un voyage direct, sans escale intermédiaire entre les deux ports de départ
et d'arrivée.
[165] -—«•( 109 )<*—
expressément : çrmahârâjanàmâ i^vide supra, p. /12). C'est
exactement le titre par lequel les textes arabes désignent le
souverain du Z;ibâg et nous en avons de nombreux témoi-
gnages : Ibn 1Jorda(Jbeh (XXXIV^), Ibn al-Fakïh (XXXVI,
p. lô), Ibn Rosteh (XXXVII), Abij Zayd (XXXIX, § 9), Mas'ùdî
(XL et XLI), Kazwînî (XLVIII et LV), Ibn Sa m (LXI, infne),
Abîjlfidâ (LXVIII et LXÎX), Ibn al-Wardï citant Muhammad
BiN Zakariyâ AR-Rizi (LXXII), qul s'étendent du milieu du
i\.^ siècle au milieu du xiv%
D'autre part, Abîjlfidâ affirme que «l'île du Mabârâja, c'est
l'île de Sribuza?), c'est-à-dire que «île du Maharajas et «île
de Sribuza?) sont les noms différents d'une même île (LXVIII,
p. 75, et n. 1 ). Le même auteur rapporte également un pas-
sage du Livide des Io?igitiides attribué à Al-Faris (x^ siècle) dont
Abûlfidâ ne fait sans doute que reproduire le témoignage
(p. 7/1). DiMASKÏ, qui fut contemporain du prince de Hamât,
s'exprime dans des termes équivalents : «L'île du Mabârâja,
dit-il, est la mère des îles mabâràjiennesjj (LXIV, p. 78, et
n. 3), ce qu'il faut entendre par : l'île du Mabârâja [=Sri-
buza] est la capitale de tous les pa^s dépendant de ce souve-
rain.
(
L'é(|ualion : île du Mabârâja = Zâbag = Sribuza est du
reste attestée par ailleurs. Abu Zayd décrit en détail la ville [sic)
de Zâbag (XXXIX); Ibrahim bin Wâsif-Sâii (XLII) s'exprime
lansles mêmes termes en parlant de l'île du Mabârâja. D'après
Abu Ziiyd, le palais du Mabârâja du Zâbag est situé sur un
fleuve dont l'estuaire est semblable à celui du Tigre (XXXIX,
p. 67); le Livre des merveilles de l'Inde en dit autant du fleuve
de Sribuza (LXXXVI), que l'auteur trouve «beaucoup plus
large que le Tigre à Basra??. Le même ouvrage arabe parle
des maisons llottanles ancrées dans le fleuve de Sribuza; le
Tchou fan tche en fuit également mention dans la notice consa-
crée au San-fo-ts'i (XVllf, p. (j).
_^5.( MO )^-,— [166]
Ibn Sa'iû décrit le lac ou étang aux briques d'or et le situe
dans la ville (s/c) du Maharaja (LXI, p. '70); c'est ce même
lac ou étang dont parlent, à propos du Zâbag, Ibiv Hordâ<5'beh
(XXXIV), Abu Zayd (XXXIX, p. 67; cf. également Les Prai-
ries d'or de Mas'ûdî, t. I, p. 175-176), Kazwïnî (XLIX) et
Ibn al-Wabdï (LXXII), ces deux derniers d'après la même
source.
Ces constatations sont décisives et on en peut conclure à
l'identité de Che-li-fo-che ou San-fo4s'i, Zâbag, Sribuza, île
du Maharaja et du Çrïvijaya. Dans tous les cas et à partir de la
fin du vn" siècle (cf. IX), il s'agit d'un puissant empire dont la
capitale se trouvait dans la région de Palembon; la dynastie
régnante des Çailendra se rendit maître de l'île de Sumatra
tout entière et étendit ses conquêtes coloniales à Java, d'une
part, et à la péninsule malaise, d'autre part. Le texte du Tchou
fan tche (XVIIl, p- i3 ) est suffisamment explicite à cet égard.
Les géographes arabes sont moins précis. Un seul, Ibn al-Fakïh
(XXXVI, p. 54), rapporte que Kalah de la péninsule malaise
et le Zâbag font partie du même empire ^^*; les autres se con-
tentent de vanter la puissance et la richesse du Maharaja : «roi
des îles du Zâbag et d'autres îles dans la mer de Chine??, dit,
par exemple, Mas'ùdï (XLl), sans y apporter plus de précision.
Mais si on lit ces textes avec la préparation nécessaire, on
s'aperçoit aisément que Sumatra a été morcelée en plusieurs
îles qui ne sont en définitive que des régions différentes de la
grande île indonésienne. Le nord de Sumatra est décrit comme
une île indépendante appelée Râmi, Râmnï, Râmini'-), Lâmurî^^';
O EdrIsî donne implicitement un renseignement identique en disant que,
dans l'île de Kalah, «demeure un roi qu'on appelle le Jâba [al-hindi] ou prince
indienn (cf. mes Relations de voyages, t. I, p. i84).
^-'> Pour d'autres mentions de l'ile de Râmi, cf. l'index du t. II de mes
Relations de voyages , s. v" Ràml, Ràmvi, Râmnî.
^'J Ibid., s. v° Làniiiru
[167] —«•( 111 )•«—
nie de Pancûr ou Bâliis désignent également Baros, le
port fameux du camphre de la côte occidentale; par l'ile de
Sribuza, il faut entendre plus particulièrement le sud-est de
Sumatra. De même, dans le JSdgarakërtâgnmn, le poète de cour
Prapanca donne comme ^îlesw [nmn) vingt-quatre villes ou
états du Malayu = Sumatra dont quelques-uns sont situés dans
l'intérieur de l'île [vide infra, p. i83). Sans indiquer qu'ils
font partie d'une même île, Yi-tsing cite trois pays : P'o-
lou-che, Mo-lo-yu et Che-li-fo-che (IX, p. 6) dans son ISan
liai kl kouei nei fa tchouan, en indiquant que c^le i\Io-lo-yu,
c'est maintenant [=a été soumis par] le Che-li-fo-che». Aussi,
dans son Ta t'ang si yu h'ieou fa kao seng tchouan, divise-t-il
Sumatra en deux pays ou royaumes. c^Deux hommes du Sin-lo
(Corée) . . . partirent de Tch'ang-ngan (capitale de la Chine)
et, après une longue route, arrivèrent dans les mers du sud.
Ils se rendirent en bateau dans le royaume de Fo-lou-che
[== Baros], à l'ouest du royaume de Che-li-1'o-che » [Religieux
émincnts, p. 86-87). Kia Tan, au contraire, n'a qu'un nom
|)Our Sumatra : # Jt Fo-che : « . . . Puis, après cinq jours
de route, dit-il dans son itinéraire par voie de mer, on arrive
à un détroit que les barbares nomment ^ Tche (détroit de
Malaka). Du nord au sud, il a cent li. Sur la côte septentrio-
nale, c'est le royaume de ^ ^ Lo-yue (pron. anc. *LavaS ou
*LawaS) ; sur la côte méridionale , c'est le royaume de Fo-che »
(Pelliot, Deux itinéraires , p. 878).
Le Tao yi telle Ho de Wang Ta-yuan (18/19) contient 1 00 no-
tices dont 99 sont des notices géographiques. Les suivantes
sont consacrées à différentes parties de Sumatra. On verra par
leur numéro d'ordre que l'auteur n'a pas eu le sentiment qu'il
s'agissait d'une même terrcinsulaire: 99. San-fo-ts'i; /ii. Kieou-
kiang; /i/(. Pan-tsou[-eur| f^'; 58. ^, yj^ B^ Ki-chouei-ivan ^h
(') Vide supra, p. 7-3, n. t.
-^*^{ 112 )^H— [168]
baie aux eaux furieuses 55 (''; bà. ^M M Houa-mien kouo rIc
pays des hommes au visage fleurie [= tatoués] = pays des
Bataks; 55. ^i^-W Tan-yang (l'embouchure de la rivière de
Tamian); 56. H ^ :^ ;$lj Sm-iven-ta-la (état de Sumatra de
la côte nord-est); 5 9. ##M T'6-fan-U, peut-être Tapanuli
de la côte sud-ouest (?); 62. Pj^ P3Â M lSan-wou-li = LÂmun^^K
Dans le Ying yaicheng lan de Ma Huan , sur 1 8 notices, 5 sont
consacrées à Sumatra (3 , 6,7,8 et 9). Le Sing tch'a cheng lan
de Fei Sin est divisé en à chapitres contenant ensemble
ho notices géographiques (1-12, i3-2i, 22-81, 82-/10). Les
5 notices suivantes, insérées au hasard dans les trois premiers
chapitres, sont consacrées à Sumatra : 10, 20, 21, 22 et 28.
Il en est de même dans le Si yang tcJiao kong tien lou de Houang
Sing-ts'eng ^^^ et même dans le Tchou fan tche (trad. Hirth-Rock-
HiLL, cf. la table de la page vii)^^'.
Les textes qui précèdent désignent successivement l'empire
sumatranais sous les noms de :
Chinois : Che-li Fo-chc ou Fo-che, Che-U P'i-che, jusque'
dans les premières années du x" siècle; à partir des dernières
années des T'ang, en 90/i, apparaît la leçon San Fo-ts'i on
Fo-ls'i, qui se maintiendra sous les Song postérieurs (960-
1279) et jusqu'au début des Ming (fin du xiv' siècle);
Indonésien, sanskrit ettamoul : Çrl Vijaya (tamoul Çrl Visa-
yam, qui est l'exacte représentation phonétique, en tamoul, de
la leçon indonésienne);
Arabe : Sri Buza^z^Sri Buja (restitution des graphies fau-
C' A la pointe nord de Sumatra.
(-) Pour ces notices et les suivantes, cf. Rockhhx, f^otes on the relations
and trade , T'oung -pao, 1916, t. XV, p. 6^1 et suiv.
''' Dans RocKHiLi,, ISoles on the relations and trade, T'oung pao, t. XVI,
1915, p. 79.
-') Pour la conception qu'avaient les Chinois de la situation des îles de
rindonésie, cl. l'étrange carie à la fin du t. 11 du Si yu ki, trad. St. Juukn.
|169j — «.( 113 ).«—
tives i'-rijM», ^jjj-*»-? \^^ Sarhaza, Sarhuza, Surira) et Zâ~
bag;
Javanais : Sam Boja, Sëm Boja^^K
Plusieurs de ces lerons sont étroitement apparentées. F^e '^
M Wù jS Che-li P'i-che du T'ai p'ing houan yu là est incontes-
tablement une transcription chinoise parfaite du Çrl Yijayn de
l'inscription indonésienne de Kota Kapur (XXVII). A celte
notation correcte s'oppose celle de Yi-tsing et d'autres textes :
^ (ou fï) ^ij 1^ à- (ou ^) Che-li Fo-che, qui représente
Clie-li <z* Çri et Fo-che < *Bu''^-jaif, l'implosive dentale du carac-
tère \% fo < ancien *hud, étant en harmonie avec la palatale
sonore initiale du mot suivant cAe< ancien *jay; c'est-à-dire
*Çri Bujatf. Phonétiquement, l'alternance viz^-hu est incon-
testablement fautive et d'autant plus inexplicable que Yi-tsing
a longuement séjourné dans le pays où il apprit le sanskrit et
la langue indigène; une erreur de ce genre de la part de ce
moine lettré et polyglotte échappe à tout commentaire. Force
nous est donc de constater une divergence pour laquelle on
n'entrevoit aucune justification. A partir de la fin des Tang,
les transcriptions chinoises présentent la même difficulté et
une autre encore. H # ^ San Fo-tsi est la stricte notation
d'un ancien *Sam. Bu'^-jay". H san, pron. anc. *sam avec im-
plosive nasale labiale, tient ici la place du clie-li>çri de Yi-
tsing et d'autres textes. De çrl à *sam, on ne peut songer à une
alternance phonétique *sain<:çrl que rien ne justifierait. La
seule explication possible est la suivante : des textes javanais
tardils ont Samhoja et Semhoja, qui sont très voisins de San-fo-
tsi<z*Sam Bujaya. Ceci permet de conjecturer que la leçon
javanaise remonte peut-être au x" siècle, date de l'apparition
de cette nouvelle notation chinoise, qui aurait suivi une évolu-
W J'ai déjà traité la question en détail dans le /. A»., juillet-août 1919,
[t. iTiS-iCi, aii(|uel je renvoie.
— ««( 114 ).e4— [170]
tion parallèle à celle du nom indigène : Çrî Vijayaz^- Samhoja ,
Sëmboja. Mais cette hypothèse soulève des objections assez
graves. Tout d'abord, nous ne possédons aucun texte indoné-
sien du début du x^ siècle et l'épigraphie n'a révélé rien de
pareil; enfin et surtout, les inscriptions tamoules du xf siècle
ont toutes Çrî Vîsnya=Çrï Vijaya. ce qui montre que le nom
de l'empire sumatranais attesté par l'inscription malaise de
Kota Kapur se maintenait intact et n'avait pas varié au mo-
ment où les Chinois commençaient à le rendre par San Fo-ts'{-<.
*Sani Bujaya. Le désaccord phonétique de ces différentes
leçons du nom d'un même pays reste ainsi irréductible en
l'état de nos connaissances f^'.
Sous les réserves précédentes, on peut donc poser géogra-
plnquemenl^-^ : Çrl Vijaya = Çri Visaya = Che-li Fo-che ou Fo-che
= San Fo-ts'i ou Fo-ts'i = Sri Buza'<*Sn BuJa^^Sam Boja,
Se m Boja.
L'autre nom sons lequel les Arabes désignent l'empire suma-
tranais : ^1) Zâbag, est également la transcription d'un terme
indigène. Le j z transcrit la palatale sonore indonésienne j, le
<_> peut représenter un v initial et le g; en fonction de guttu-
rale sonore =§•. On conçoit que les premiers transcripteurs
(1) Ihid. La mémo énigme phonétique se présente dans la loponomastique
du Campa. L'une des capitales du pays est appelée |^ ^ Fo-che — *Bu -jay'
( sino- annamite PaW/iç) par les textes annamites; j^ ^ Fo-che =:*Bu''-jay'',
par le Song che ; le Tao yi tche lio, dans la notice sur Pin-l'ong-long = Pându-
ranga, a [BU; ^ Fi-ts'i = *Vijay''. ttOr, dit Goedès {Le royaume de Çnvijaya,
p. 2 4), on sait d'une façon certaine par l'épigraphie qu'à cette époque la
capitale came était au Binh-dinh et s'appelait Vijaya.-n Le cas est exactement
semblable à celui des transcriptions du Çrivijaya sumatranais et la divergence
vocalique est également inexplicable. [Cf. cependant skr. mâna> arabe busàn,
dans mes Relations de voyages, t. II, p. 676, qui présentent une alternance
identique i > u après v. Le procès est évidemment le même dans Vijaya >>
Fo-che ].
(^) îbid., p. i52-i55, oii il est montré que le Çrl Vijaya de l'inscription
de Kota Kapur ne peut se traduire que par «Sa Majesté Vijayan et qu'il s'agit
donc d'un nom de souverain.
[171] -^^( 115 ).«—
dont le parler arabe avait conservé au ^ sa prononciation guttu-
rale (qui s'est palataiiséc en dehors de T'omânais et de l'égyp-
tien) et qui, par conséquent, ne possédaient pas de palatale
sonore, aient employé le ; - pour rendre approximativement le
j indonésien. C'est ce que firent les Grecs, qui se trouvaient
dans le même cas (cf. skr. Ujjayim>0^ïjvtj, Kanyakubja^
KoLvoyî^tj). ^î) Znbng a donc régulièrement à la base malais
*Javaga. Parfois, à la gutturale sourde d'un mot étranger,
l'arabe répond parla sonore. Ainsi, skr. çaka «teck 55 a donné
en arabe ^L», litt. sâg; skr. nârikela «noix de rocow > Jjy^^li
nôrgû; et celle alternance se retrouve en grec : Kafoy/^j; <c
skr. Kanynkubja, le ^Canoge-o de nos caries; Bapuya^a <; skr.
Bhanikacclin, la ville maritime de «Broach». D'après ces
exemples où l'alternance k>^-^g est nettement attestée, on
peut également poser g'ijj Zâhag-<*Jâvaka^^\ Cette restitution
théorique est confirmée par un texte de basse époque, il est
vrai, le Mahâvcnnsa , où il est question (LXXXIII, 3 6-4 8, et
LXXXVIII, 62-76) d'une armée de Jâvakaqui, à deux reprises,
envahit Cevlan dans la seconde moitié du xm^ siècle. Les Jâ-
W L'allernance j étranger > ^ z et ^ = gutturale sonore représentant une
sourde initiale étrangère est attestée par le cas suivant. Le nom du cap nord-
occidenlal du Kathiawar est Ov^^ Zagad d'après Sulaïmân al-Mauiiî (vide
supra, p. 98); mais la traduction turke de Sïdï 'Alî (cf. mes Relations de
voyages, t. 11, p. .5 1 5, n. g, et 689, n. 5) a oJl^ Jakad; et celui-ci est évi-
demment à la base do la transcription précédente pour un Arabe dont le parler
ne connaît pas la palatale sonore. J^^ et .>X^ sont ainsi deux notations plio-
nétiquement égales. Le cap en question est désigné par Barros [Da Asia,
décade IV, 1" pari., liv. IV, chap. iv, p. 891 de la potite édition de la fin du
xvni" siècle) sous le nom de fra ponla de Jn<fuele [=.lakct], que he aquelle
nomeado lemplo dos liesbulos, la pointe de Jaket qui est appelée temple des
Rajputsv. Le major Hknnkl {Recueil de caries fréo^raphiquos pour la description
de l'Indoustan, revues par le Citoyen Buaciik, Paris, an viii [1800]) écrit
Jifrat =Ji^r(ii, On peut donc poser en toute certitude, comme pour Zàbng,
Zagad -ccJatiud. Pour It; cap en question, cf. Instructions nautiques, n° 85:2,
Océan Indien, Mer d'Oman (partie Est), Paris, igoS, in-8°, p. 3go, sub
Temple de Dwarlirt.
— H^( 116 ).€^— [172]
vaka étaient commandés par le roi Candrabhânu (^jâvakarâjeko).
Lors de la seconde invasion, les troupes qui débarquèrent à
Ceylan comprenaient une armée jâvaka et une « grande armée v
levée «^dans les royaumes Pândya, Cola, etc., ainsi que des
soldats tamouls... ». Le roi jâvaka Candrabhânu et les troupes
jâvaka sont évidemment des roi et troupes du Zâbag, c'est-à-
dire de Sumatra. Jâvaka et Zâbag soniles deux seuls noms géogra-
phiques de l'Océan Indien qu'on puisse rapprocher avec certi-
tude; celui-ci désigne authentiquenienl l'île de Sumatra; celui-
là ne peut désigner que la même île et Candrabhânu est ainsi
un roi sumatranais^''.
KDans le T'ongtien (k. 188, p. a/i v^-aô r°) [encyclopédie
compilée à la fin du viii" siècle par Tou Yeou (785-812)] et
le T'ai ping yu lan (k. 788, p. 17 r") [rédigé pendant la
période 977-988], ^\{Veluot [Deux itinéraires , p. 275), il y
a des notices, à peu près semblables d'ailleurs, sur le pays de
îfefc M Tou po, qui se trouvait dans le Tchang-hai [iitt. «la
mer immense»^ mer de Chine occidentale], à l'est du Fou-
nan [==en gros, le Cambodge et le Siam actuels] '2'. On y
arrive après avoir voyagé sur mer plusieurs dizaines de jours.
Les femmes y tissent des cotonnades à ramages. Sur l'île de
Tou-po, il y a plus de dix villes royales, ou du moins dont les
C'î Vide infra, p. aaS, pour ces deux expéditions à Ceylan. Kern {Twee
krijgslochten uit den Indischen Archipel tegen Ceilon, paru en 1896 dans les
Bijdragen et réimprimé dans ses Veispreide geschriflen, t. III, igiS, p. 29 et
suiv.) a traduit jâvaka par «javanaise. Ce mol considéré comme un complexe
java-[-ka, sur le modèle de romaka = roma -{- ka trromain» a, en efl'et, ce
sens dans les langues de l'Inde. Mais jâvaka est inséparable des transcriptions
arabe Zâbag et chinoise Chô-po, pron. anc. *Ja-bak, qui désignent Sumatra.
11 est donc au moins inattendu de rencontrer, à côté de Yava et Java, une
forme Jâvaka, dont la finale, attestée par trois sortes de textes différents,
est tout à fait inexplicable.
W L'orientation est inexacte, mais les Chinois ont très fréquemment com-
mis des erreurs de ce genre pour la situation des pays étrangers les uns par
rapport aux aut.es.
[173] --«•( 117 )^-»—
chefs prennent le titre de rois. On aurait entendu parier de ce
pays au temps des Souei (689-6 18). « tfc fou, comme l'a
indiqué Pelliot [ibid.), se confond fréquemment avec jfd: c/w;
on est donc autorisé, Tou-po ne répondant à rien de connu, à
restituer fi vH Cliô-po, représentant un ancien *Ja-bak^^l *Ja-
hah, il n'est pas nécessaire d'y insister, est une transcription
parfaite de Jrwaha> Zâhag; il s'agit donc encore de Sumatra.
Mais d'autres textes nous permettent de remonter plus haut.
«Le nom de Tou-fo [à corriger en Chô-po], dit Pelliot [ibid.,
p. 977 et n. 2), nous est encore fourni par une citation du
Nan tcheou yi ivou tche [de Wan Tgiien , qui vivait au ni' siècle t^)]
et parles fragments subsistants du Fou-nan t'ou sou tchounn de
K'ang Tap^' qui fut envoyé en mission au Fou-nan avec Tchou
Ying, vers 2/i5-2 5o de notre ère^^lî'
La forme Yava du complexe Yavadvipa qu'on interprète par
«île de Java», nous est connue de longue date. Elle apparaît
pour la première fois dans le Râmfnjnm. On la retrouve ensuite
(Unis le H M Yie-tiao, pron. anc. *Yap-div= Yavadvipa, dont
il est question au début de 182 de notre ère dans le Heou lum
chou (26-220) et le Tong houan ki ou Tong kouan lian ki de la
seconde dynastie des Han'^'; le laëdSiov de Ptolémée e^', le g|l
M^ Ye-p'o-ti {^ron. anc. ''Ya-b'^a-de, pratiquement *Kai;flJ?')
de Fa-hien (/i 12-/11 3) qui sont encore des transcriptions cor-
rectes de Yavadvipa. Or, les descriptions qu'en donnent le Râ-
mâyana et Ptolémée sont heureusement assez précises : le texte
(') Deux ainéraircs, \). 270-271 et -277-278. L'implosivc finale -k représenlo
également uno gutturale! étrangère sourde ou sonore.
'-) Deux itinéraires,^. 377.
('' Ibid., p. 269-270.
l") Ibid.
W Cf. Pbliiot, Deux itinéraires, p. 266.
(«) La finale -<î/ow de la notation de Ptomîméb est une prâkritisatîon du skr.
rfuîpa. Cr. Klun, Java en het (ioudeiland luAjn'ns de oudsle berichten, article de
1869, réimprimé daus les Verspreide ijeschnj'ten , t. V, ujiO, p. Sof).
— M.( 118 ).€^— [llh]
sanskrit qualifie Yava de «l'iie de l'or et de l'argent, parée de
mines d'or 71 ; le texte grec s'exprime dans les mêmes termes :
«elle produit beaucoup d'or 55. Cette indication dicte notre
choix entre «Java la mineure 57 et «Java la majeure jj de Marco
Polo : c'est évidemment ici de Sumatra qu'il s'agit, dont la
richesse en or est bien connue, alors que la production d'or de
Java a toujours été nulle ou insignifiante. Je sais bien qu'il y a
une inscription sanskrile de Cangal (K.ôdu, à Java), datée de
65/i çaka=732, où il est dit : «H y avait (s/c) une île excel-
lente, incomparable, appelée Yava, ferlile en céréales et en
autres grains, riche en mines d'or [kanakâkara) ...» Kern,
qui l'a éditée, traduite et commentée, a naturellement rap-
proché celte description de celle du Yavadvïpa du Râmriyaua
et rappelé ce qu'il avait déjà dit à cet égard : «Les expressions
du Iiâmfnjnna au sujet de l'ile de l'or et de l'argent ne sont pas
exemples d'ambiguité dans l'original, mais elles ne le sont pas
davantage dans la traduction. Ce serait donc, à mon avis, une
explication très forcée si nous vouhons conclure, soit du texte,
soit de la traduction, qu'il y est question d'une autre île que
Yavadvïpa» [=Java de nos cartes] '^l Quinze ans après (en
i885), Kern ajoutait : «Ce que j'ai dit alors (en 1869) a
acluellement une double force. Quoique, tant Ptolémée que les
informations chinoises nous aient appris que l'or fait partie des
produits de Java, le fait a été révoqué en doule. En face du
témoignage de notre inscription [de Cangal] tout doute rai-
sonnable doit disparaître '-1 »
J'avoue ne pas être convaincu. En face des indications four-
nies par le Rnmâyuna et Ptolémée, où manquent, cependant,
des précisions géographiques décisives, il y a lieu de recher-
'^' Java en het Goudeiland volgens de oudste berichten, 1869, réimprimé
dans Verspreide geschriften, l. V, 1916, p. 807.
'"1 De Sanskrit-inscriptie van Canggal {Kèdu), uit 65à çaka, i885, réim-
primé dans Verspreide geschriften, L VII, 1917, p. 128.
[175] — *-5-( 119 )k^—
cher quelle est l'iIe d'Extrême-Orient suvarnarûpijakadv'ipmn
siivarnà hammam] I tam , ev(popct)TOiTï] Ss Xé-yerai )) vîja-os sivai aat
ht irlsTalnv xp^^^^ Tsaieh. Le choix est aisé, car il n'existe
qu'une seule terre insulaire à laquelle s'appliquent ces textes :
c'est la # '^11 kin-tchcou kTiIc de l'orw de Yi-tsing, qui en par-
lait en pleine connaissance de cause, la suvarnahhûun cela terre
de l'or» d'une inscription sumatranaise (^uifrn, XC, p. 179),
c'est-à-dire Sumatra (''. Dans les textes sanskrit et grec, la carac-
téristique principale du Yavadvipa est d'être «î'ile de l'or, parée
de mines d'or», de «produire beaucoup d'or 55. Sumatra seule,
par sa richesse en or, peut entrer en ligne de compte. L'argu-
ment tiré des informations chinoises (^Chineesche berichten) fait
sans doute allusion à ces passages du Sm tang chou ou Nou-
velle histoire des Tang (618-906, compilée en io6o) disant :
kLc pays de M Pâ Ho-ling appelé également (il ^^ Chô-p'o
(^=Jawn) produit de l'écaillé de tortue, de l'or cl de l'argent,
des cornes de rhinocéros et de l'ivoire»; et du Sang che ou
Histoire des seconds Song (960-1279, compilée au xiv* siècle)
où il est dit : «Le pays de [g ^ Cho-p'o (= phonétiquement
Jaœa) produit, en outre, de l'or, de l'argent, des cornes de
rhinocéros, de l'ivoire, le hois d'aloès, le sandal, l'anis, le
poivre, la noix d'arec, le soufre, le hois du lîrésil^-'. » Mais
l'or n'a pas une place éminente dans cette énuméralion de
produits javanais et ne justifierait en aucune façon la qualifica-
tion de suvarnàkaramandilam. On a trouvé et on trouve sans
• • •
doute encore de l'or à Java, comme dans tous les pays du
monde. Nous avons, par exemple, nos orpailleurs du Rliône;
mais, de ce fait, la France n'a jamais été considérée comme
une suvarnabhûmi. Knfin, le Te hou fan tchc, qui donne généra-
lement une liste étendue des produits des pays étrangers, ne
(') Pour Yi-TS!Mi cl rinscripliuii sumali-anaisc, vide iiifm, {>. 178 cl s.iiv,
t-) Cf. Gkoknkvkldt, Mole», jt. 183 el l'ia.
_«.( 120 )<4— [1761
mentionne pas l'or parmi les produits énumérés dans les no-
tices ih et i5, qui sont consacrées à Java'^l
Le cas de l'inscription de Cangal est beaucoup plus embar-
rassant; à dire vrai, le problème est insoluble. Ainsi que le
fait remarquer une note de Kern, la phrase commence par âsît
«il était w, au lieu de asti «il estw, alors que le mètre n'est pas
en cause, et l'éditeur déclare ignorer pourquoi le poète emploie
le passé au lieu du présent'-'. D'autre part, le texte attribue
au Yavadvlpa une richesse en or que Sumatra et Sumatra seule
possède. La seule explication qu'on entrevoit, c'est que les deux
grandes îles indonésiennes ont dû porter en même temps un
nom identique '^' et que les produits de l'une ont pu être ainsi
inexactement attribués à l'autre '^l
Les Arabes ont, en effet, connu la forme Yava^-Java^
Sumatra. On la retrouve encore au début du xv* siècle dans
BâkuwI, sous deux formes phonétiquement apparentées »^U-
Jâwa (LXXVl, p. 78) et a^l:^ Jâha (LXXVlll, p. 78), dont
l'ignorance de l'auteur, qui reproduit des informations anté-
rieures, al fait deux îles distinctes, indépendantes du Zâbag-
Sumatra (cf. également Ibn Sa'ïd, LXll, p. 71, et Ibn al-
Wardï, LXXV, p. 77). Jâwa ou Jâha est devenu dans certains
textes arabes le nom d'une île ou pays maritime, de sa capi-
tale et même du roi du pays^^'. Dans Ibn Batûta, au contraire,
(') Cf. Chau Ju-kua, trad. Hirth-Rockhill, p. 70-87.
'-) Loc. cit., p. 193 , n. a.
(^) Cf. les deux Java de Marco Polo et iiifra, les notations arabes.
('') Au fond, je crois que le rédacteur de Tinscriptiou de Cangal a tout sim-
plement mis au compte de Java, la description du Yavadvipa du Râmâyana,
sans se préoccuper du désaccord avec la réalité.
(5) Cf., par exemple, Ibn Sa'ïd (LXII, p. 71-72), Ibn al-VVardï (LXXV,
P- 77)-
L'identité de Jàba et Zâbag avait été signalée déjà par De Goeje dans son
édition de Ibn Hobdâ<Îbeh (p. l\6 et n. 3). On peut faire la même remarque à
propos du volcan qui est situé à Jàba par Ibn Hord1<îbeh, V Abrégé des Mer-
[177] -^>{ 121 )k^—
Jâiva désigne nettement l'île de Sumatra et il n'est plus ques-
tion de Jâba ni du Zâhag (cf. mes Relations de voyages ^ t. II,
p. /i3/i et suiv.). Enfin , à partir de la fin du xv^ siècle, les deux
miialUm Ibn Mâjid (LXXIX) et Sulaymân al-Maurî (LXXXI et
LXXXII) inaugurent la loponomastique moderne : Sumutra et
Jfiivaj, que feront définitivement prévaloir les marins et voya-
geurs européens des xvf , xvu^ et xviif siècles.
En malais, la grande île indonésienne occidentale est géné-
ralement désignée dans les textes sous l'un des trois noms sui-
vants : Pûlaw Emds et l'île de l'or», Ptdaiv Përca «l'île de la
gutta-perchajj et Pâlaiv ou Tânah Andalas « l'île ?5 ou "^pays de
Andalas^j; en javanais, sous celui de Malayu (cf. Nâgarakërtâ-
gama et Pararalon, infra, p. i83 et 326).
SvvABi
NADVIPA.
L'île de Sumatra a été quelquefois désignée sous les noms
sanskrits de Suvanjadvlpa «l'île de l'or», Siwarnahhûmt «la
terre de l'or», Suvarnapura «la ville de l'or». Dans les deux
derniers cas, ce complexe désigne plus spécialement la partie
méridionale de l'île. A l'inscription déjà reproduite du manu-
veilles, Kazwïnï, Ibn al-WaiadI et Bâkuwî; et au Zâba{i[ ou près du Zâbag par
SdlaymAn, Ibn al-Fakïh, Mas'Ddï, V Abrégé des Merveilles et AbllfidA. L'Abrégé
des Merveilles situe d'abord ce volcan (tvis-à-vis de l'ilc de Jâbu" et, quclipu'S
pages plus loin, «dans une ile proche du Zâbagn (cf. J. As., juilict-aoùt 1919,
p. 188, n. 1). il y a lieu de rappeler ici uue très inléres.santo note de De Goeje
publie'e en hollandais dans le Feestbiindel-Vt:in (Leyde, 189^1) et traduite en
français, en appendice à son Mémoire sur les mijp-alions des Tsiganes à travers
l'Asie (Leyde, 1903, pet. in-8°, p. 86-91). VMa traite des Snyâbija, au sing.
Sâbaj (qui est à Wr^Sâhag), et que fauteur a rapproché du Zâbag do Sumatra.
Ces descendants de Malais sumalranais vivaient au ix* siècle, au témoignage
de BEi.ÂDonï, dans le golfe Persique et en 'Irak. Je n'ai pas ici la place de re-
produire les texies arabes qui en font mention; on étudiera ailleurs cet autre
témoignage de l'activité des Sumalranais à l'étranger.
U. U. FKRRANO. 0
—«.( 122 )^-^^ [178]
scrit népalais à miniatures (supra, XXX, p. 62), s'ajoutent
les inscriptions et les textes suivants :
Yi-TSiNG, Ta t'ang si yu k'ieou fa kao seng tchounn, iraà.
Ed. Chavannes (vide supra, p. 3).
LXXXVII. (P. 179.) . . . Puis, le premier jour de la onzième hine
de cette amiée (689), nous [, maître Tcheng-kod et moi Yi-tsing,]
nous nous embarcjuâmes sur un bateau marchand et nous nous éloi-
gnâmes de P'an-yu (Canton). Nous nous dirigeâmes vers le [5 'M
Tclian-po (Campa) en hissant nos voiles; — nous nous proposions
d'arriver dans le pays de Fo-che par une longue course, — ... (p. 181)
TciiENG-Kou fut mon excellent compagnon; — nous arrivâmes ensemble
à -^ M l'île de Tor ''>. — Si nous pûmes accomplir notre voyage vers
les pays hindous, — ce fut grâce à notre parfaite amitié. — ...
LXXXVIII. (P. i85.) ... Lorsque Tao-hong apprit que moi, Yi-
TSiNG, j'étais arrivé [en Chine] , il se rendit à pied (au temple) Tchouang-
yen pour s'y informer où je demeurais; on lui dit que je m'étais établi
dans le temple Tche-lche. A peine se fut-il acquitté des salutations
d'usage qu'il s'éprit de l'idée du départ ... (p. 186) ... Alors il ne
songea plus qu'aux mers du sud, — au voyage que nous ferions
ensemble à l'île de l'or ... ([). 187) ... Lorsqu'il arriva au pays de
Fo-che, il s'appliqua de tout son cœur au recueil de la discipline . . .
Vie de Dîpamkara Atïça, en tibétain, résumée par Sarat
Ghandra Das dans Indian Panàils in tlie land of snow, Calcutta,
1893.
Atïça naquit au Bengale en 980 de notre ère.
LXXXIX. (P. 5o.) Ou account of thèse divers allainments Avhich
moved bis miad variously in dilTerent directions, he resolved to go to
Àchârya Chandrakîrti, the High Priest of Suvarnadvïpa (''. Accordingly
in the company of some merchants he embarked for Suvarnadvïpa in a
large vessei. Tlie voyage was long and tedious, extending over severai
(') Chavannes a traduit «Tile d'orn ici et plus loin.
l^) S, G. Das dit on note : trSudharmauagara in Pegu, now calicd Thaton.n
La remarque est inexacte : il s'agit de Sumatra.
[179] --«.( 123 )^-i—
months during which the travellers were overlaken by terrible storms.
At this lime Suvarnadvîpa was Ihe head quarter of Buddhism in ibe
East, and its High Priest vvas considered as ihe greatest scholar of his
âge. DîPAMKABA resided tliere for a period of twelve years in order to
completely master the pure teachings of Buddha, of Avhich the key Avas
possessed by the High Priest alone. He returned to India accompained
by some nierchants in a sailing vessel, visiting Tâmradvîpa (Ceylon) and
the island of forests in his way.
Inscription en vieux-malais de 1208 çaka=i286 trouvée
dans la plaine de Padan Roco, près de Sunay Lansat, sur la
rive gauche du Balan-Hari, dans la subdivision (^on(lerafdeeUng\
des rçBatan-Hari-districten55 de la résidence des «Padangsche
Bovenlanden 75 , dans l'ouest de Sumatra, par environ i°3o'
Sud.
Cette inscription, découverte en 1911 par L. C. Westenenk,
a été publiée et traduite en hollandais par N. J. Krom dans sa
magistrale étude : Een sumatraansche Inscriptie van Konîng Krta-
nagara, dans Verslagen en Mededelingen Sev K. Akademie van
Weien., Afdeeling Letterkunde, 5' reeks, deel II, Amsterdam,
1 916, p. 3o6-33().
XC. (1 a) Il svasti çahavarsâtîia , iao8, bhâchavâda niâsa , ti
(b) thi pratipada çiddfqmksa, mavidu, vâge, vrhaspati vâra, madahku-
han, grahacâra naiiilistha , viçâkâ
(c) naksatra, cakra [devata, 7na]ndala, çubha
(9 a) yoga, kuveva purbeça , kinstughna inuhûrlla, kamjà râçl, i
{h) nan tatkâla pâduka bharâla âryijâmoghapaça lokeçvara, caîurdaçâ-
mitkâ saptnratnasahita , diântuk [
(c) dnii bhûmi jâva ka svarmabhûmi (sic) dipratistha dt dharmmâ-
çraya, akan
(3 ft) punya çri viçvarûpa kumârn, prakâranah dilîtah pâduka cri ma
(b) hârâjadiiirâja çiï krtanagara vikraina dharmmottuhgadeva maiiirth-
kan pâduka bharâla, raknjân mahâmantri dyah
(c) advayabrahma, rakryân srikan dyah sugalabrahma , mûah
{h a) , samagat payâtmn hah dipahkaradâsa , rakryân damuh pu
vira ,
-~M.( 124 )k^— [180]
(b) hunah punyeni yogija dianumodanânjaïeh sukapraja di bhûmi ma-
lâyû, brâhmanah ksatruja vaiçija sûdra, à
(c) ryyâmaddyât, cri maharaja çrimat Iribhuvanarâja maulivarmmade
(d) va pramukha //.
Salut! En çaka 1208, au mois de bhâdrapada, premier jour de ia
quinzaine claire, jour de la semaine de six jours : Mavulu; de la se-
maine de 5 jours : Vâge; le jeudi; witku (période de l'annëe civile) Ma-
dankunan ; position de la planète , dans le sud-ouest ; mansion lunaire ,
Viçàkhâ; sous la divinité çakra appartenant au cycle de . . . , yoga Çubha ;
seigneur de la jonction (astronomique), Kuvera; heure, Kimstughna;
signe du zodiaque, la Vierge; c'est à cette date que (l'image) du Haut
Seigneur l'Àryya (le noble) Amoghapâçalokeçvara avec ses 1 3 compagnons,
accompagné des sept joyaux, venant du pays de Jâva'^' à destination
de Suvarnabhûmi (crie pays de l'or i: = Sumatra), fut érigée à Dharm-
mâçraya ^'\ en tant que don de Son Altesse le prince héritier Cri Viçva-
rûpa. A cet effet. Sa Majesté Çrî Mahârâjadhirâja '■> Çrï Krtanagara
Vikrama Dharramottungadeva donna l'ordre d'accompagner la sainte
image aux hauts fonctionnaires suivants : le Rakryan^''^ Mahâman-
(') Le texte a bhûmi jàva construit à la malaise, et il s'agit ici de l'île de
Java de nos cartes. C'est t'équivalent exact de i'iudonésien moderne tcmahjàwa,
iitt. aterre, pays de Javan, où le caractère insulaire de Java n'est pas marqué.
Ce genre d'expression est commun à tout le domaine linguistique de l'indo-
nésien; cf., par exemple, en malgache : tnni Madarrasikara «la terre, le pays
de Madagascar;) (malg. tâni répond à indonésien occidental tânah, avec le
même sens). ^
'-) Situé par Rouffaeu dans le haut pays du fleuve de Jambi (cf. mes Rela-
lions de voyages, t. II, p. 602 , n. 3 et i).
(') On remarquera que le fameux souverain javanais Krtanagara est titré
ici Çrî Mahàrâjadhirâja , iitt. rrSa MajcsLi- le grand roi des rois», titre dont le
souverain du Zàbag = Çrivijaya avait le privilège. Mais ce texte est daté de
i3o8 çaka= 1286 de notre ère et c'est l'époque où le Zâbag-Çrivijaya entre
en pleine décadence et succombe sous les coups de ses adversaires Javanais,
Thaïs de Sukhodaya et Singalais. A cette même époque les rois javanais sont
assez forts pour repousser l'attaque prochaine des troupes chinoises de Hubilaï
Hân et c'est dans la même période que se fonde le puissant empire de Maja-
pahit, qui sera l'héritier de la souveraineté exercée par le Çrivijaya depuis le
début de notre ère.
(4) C'est le titre javanais que le Tchou fan tche et le Song che mentionnent
sous sa forme chinoise ^ f^ j£ lo-ki-lien (cf. Pelliot, Deux itinéraires,
p. 3 11, et C'/iau Ju-kua, trad. IIiuth-Rockhill, p. 76).
[181] — «•( 125 ).€^~
<n''' Advayabrahma, le /îa/.T^a« sinkan chjah Sugatabrahraa ; puis, au
dyah Saingèt'''^ patjânan hah Dipaùkaradâsa et au Rahryan démuhpu Vïra.
Ensuite, à cause de ce don convenable, tous les sujets du pays de
Malâyu se réjouirent : brahmanes, ksatriya, vaiçya et sudra et, au
milieu des Arya (nobles), Çrî Maharaja'^' Çrïmal Tribhuvanarâja Mau-
livarmadeva s'en réjouit le premier.
Inscription cambodgienne gravée sur le piédestal d'une
grande statue de Buddha provenant du Vat Hua Vien, une des
pagodes de Grabi (le j}j^ ^ ^ Kia-lo-hiAw Tchoufan tche, vide
supra, p. i/i, et du Song che), du pays de Jaiya (siamois :
Xaya), qui est situé dans la partie septentrionale de la baie de
Bandon, sur la côte orientale de la péninsule malaise (cf. G. Goe-
DÈs, Le royaume de Çrïvijaya, (oc. cit., p. 33-36). L'inscription
est incorrectement datée , mais « un fait semble certain , c'est
qu'elle ne saurait guère être postérieure au milieu du xiii' siècle »
i^ihid., p. 36).
XCI. En 11006 {sic) çaka, année du Lièvre, par ordre de Kam-
raten An Maharaja çrïmat Trailokyarâjamaulibhusanavarmadeva, le
3° jour de la lune croissante de Jyestha, mercredi, le Mahâsenâpati Ga-
lânai (?) qui gouverne le pays de Grahi, invita le Mrateii Çrî Nâno à
faire cette statue. Le poids du samrit est 1 hhâra 2 tula et la valeur de
l'or (employé pour la dorure) est 10 tamlih. Cette image a été érigée
(') Litt. «le grand manlri ou ministre».
(-) D'après une heureuse suggestion de M, I'eluot, satngët semble Lien être
le titre indonésien qui est à ia base de la transcription chinoise sseu-ma-kie
(vide supra, p. ^3, n. 2), dont ie troisième caraactère est à implosive finale
dentale.
(') Le roi de Malâyu n'est titré que Çn Maharaja «Sa Majesté le grand roin
à côté du Çri Mahâràjadhiràja de Krtanagara {vide supra, p. 180, n. 3).
C'est que le Malâyu a été envahi et vaincu en 1 i(j7 çaka = 1275 et que l'am-
bassade de Krtanagara est, en somme, envoyée à un vassal (cf. Pararaton,
Irad. IkiNDEs, édit. Kkom, p. 92). Krtanagara fut le premier prince javanais
qui prit le titre de prabhu [ibid., p. 78 et 8-'i), dont les Çailendra de Çrivi-
jaya usaient depuis des siècles, car il ligure dans l'inscripliou de Vieù Sa
{vide supra, XX.1X, p. hi).
-~^^{ 126 )<^-~ [182]
afin que tous les fidèles s'en réjouissent, la vénèrent et l'adorent ici . . .
obtiennent l'omniscience '''.
Het oud-javaansche lofdicht Nâgarakrtâgama van Prapanca
(i365 A. D.) [Le panégyrique en Aieux-javanais intitulé Nàga-
(') Une inscription sanskrite découverte sur le territoire du Minankabaw,
et qui se trouve actuellement à Pajjar Ruyon, est au nom de : Çrïmat çri
A[ Jyâdityavarma . . . râjendramaulimanivarmadeva mahârâjâdhirâja, et datée
de 1978 çaka = i356 (cf. Commissie in Nederlandsch-Indië voor oudheikundig
onderzoek op Java en Madoera. Oudlteikundig verslag iQi^, 2' trimestre,
p. 5 1-52 et A a; le titre royal précédent est aux lignes 6-7; aux lignes 18-19,
le même souverain est appelé : Adityavarmanrpatemanivarmadeva). Cet Adi-
tyavarman nous est connu par ailleurs. Sous le titre général de Het zoogenaamde
rolinschrift van vBalu Bëragung-n in Mënangkabau {126g en isgj çaka), dans
Verspreide geschriften, t. VI, 1917, p. aig-aGS, Kern a réuni deux articles
intitulés : "f Opschrijt van Batoe Beragong op Sumatra et Het opschrift van
Batoe Bei^agong opriieuw onderzoclu, publiés dans les Bijdragen tôt T., L. en V.
V. N-I en 1872 et 1877, oii il est question de ce souverain. Cf. également, du
même auteur, De n'ij-inscriptie op het Amoghapaça-beeld van Padang Candi
(Midden-Su)natra)\ i^Gq çaka (dans Verspreide gescitriflen, t. Vil, 1917,
p. 173), où ce roi est appelé : Çrimat çiï Udayâdityavarman râjendramauli-
mâlivarmadeva maliârâjâdhirâja, et où il est fait mention de Malaijapura,
erreur de graphie pour Malaynpura {ibid., p. 17^^). Par une autre inscription
également publiée par Kern (Het sanskril-inscitrift op den grafsteeu van Vorst
Adityavannan te Kubur Baja, Mënangkabau ; ± i3oo çaka, dans Verspreide
geschriften, t. Vil, p. 2i5-32i), nous savons que ce roi était fds de Advaya-
varman et titré Kanakainedinlndra «souverain de la terre de l'or». Nous savons,
enfin, que ce dernier souverain eut un lUs, Anafigavarman, qui fut probable-
ment son successeur (cf. N. J. Krom , Eine sumatraansche Inscriplie van Koning
Krtanagara, loc. cit., p. 338). D'après ces textes épigraphiques , on peut
établir la liste suivante des rois de Malâyu au xiii" siècle çaka :
Çrïmat Tribuvana râjamaulivarmadeva, qui règne en 1208 ç. = 1 286 (supra,
XC, p. 179);
Advayavarman , père du roi suivant;
Çrimat çrl A[ jyâdityavarma (var. Udayâdityavarman) râjendramaulimani-
varmadeva ( var. râjendramauHmâlivarmadeva), qui régnait en 1269 ç. = 13/17
et mourut vers i3oo ç. = 1378.
Anangavarman.
Le Maharaja çrimat Trailokya râjamaulibhûsanavarmadeva de l'inscription
cambodgienne de Grabi était certainement un roi de Malâyu, car ses titres
[183] — «•( 127 ).«—
RAKRTÂGAMA (le Prapanca, daté de 1287 caka = i365 de notre
ère], texte en transcription, traduction et commentaires par
H. Kern, avec annotations et indices de N. J. Krom, La Haye,
i9i9,in-8% avec une carte des dépendances de l'empire de
Majapahit et un fac-similé de quelques feuilles du manuscrit
kawi.
XGII. L'île de Sanialra, l'une des dépendances de l'empire de Maja-
pahit, y est désignée sous le nom de frpays de Malayu (tanah ri Malayii)n
par le poète javanais qui en mentionne les vingt-quatre villes ou étals
suivants : ffLes principales îles {sic) qui sont sous la souveraineté (de
Majapahit) dans le pays de Malayu sont les suivantes : Jambi, Palemban ,
Karitan,Tëba (Toha), Dharmmâçraya (Dharmâçraya), Kançlis (Kandis),
Kahwos (Kawai), Manankabwa (Mënankabaw ou Minankabaw), Siyak
(Siak), Rëkân (Rokan), Kâmpar, Pane (Paney), Kâmpe (Pulaw Kom-
pai), Haru (Aru), Mandahiliù (Mandaihù), Tumihan pour Tamihan
(Tamian), Parllâk (Përlak), Barat, Lwas lâwan (Padan Lwas ou Gayu
Luas), Samudra (l'ancien état de Sumutra, sur la côte nord-est de l'île
dont on retrouve encore les ruines près de Lho' Seumawé), Lamuri
(Grand-Aceh), Batan (peut-être l'île de Batam), Lampun (Lampon) et
Barus (Baros). Telles sont les plus importantes dépendances du pays de
Malayu tout entier; tous ces pays dépendent [de l'empire de Majapahit]. n
(Chant i3, p. 5o; cf. également chant h\, strophe 5, p. io5, et
chant h'2 , strophe 9, p. 107; pour les identifications précédentes, voir
p. 267-259, et mes Relations de voyages, t, II. p. 662, oii la note 8 :
trPane ou Panei dans l'ouest de Sumatra « est à corriger en : rfsur la
côte orientale de Sumatra, en face de l'île de Jamar = Jumur de \ Oriental
Pilotr> I cartes A2 et 43], et p. 671.)
Les noms entre parenthèses représentent la forme malaise
moderne des notations du texte kawi.
Les deux complexes sanskrit et cliinois sont parallèles au
double point de vue sémantique et syntaxique : ^ ^\ hn-
tcheou recouvre exactement suvarna-dvïpa ; Tun et l'autre repré-
protocolairos sont remarquablement idonliques à ceux des rois do celte
dynastie sumalranaiso alk'sl(;s par les iiisniptiims qiip nous possédons.
-><«.( 128 )<^— [184]
sentent littéralement or4/e, le premier terme étant, par anté-
posilion, complément du second. Chavanncs a traduit kin-tcheou
par t^île d'or», mais cette interprétation n'est pas à retenir :
c'est ç^île de l'or?? qu'on doit lire, et c'est ainsi qu'il faut éga-
lement traduire le suvarnadvipa des textes sanskrits. En chinois
et en sanskrit, le sens du complexe est un peu flou : il peut
s'agir aussi bien d'une île riche en mines d'or que d'une île
dont le sol et la flore sont en or. Mais, dans le cas présent,
il n'y a pas place au doute; l'information s'appuie sur un fait
concret bien connu : la richesse aurifère de Sumatra, et nous
n'avons pas affaire à un thème de folk-lore. On vient de voir
(supra, p. 177) que l'un des noms malais de la grande île
indonésienne est Pûlaw Emus Kile de l'or» (cf. un toponyme
de formation parallèle : Pidaw Bfitu td'île de la pierre», ainsi
appelée parce qu'il s'y trouve une pierre remarquable et non
parce qu'elle est constituée par un bloc de rocher; Pûlaw Pinah
«île de l'aréquier», etc.). Pûlaw Emâs répond à Kin-tcheou et
à Suvarnadvipa, construit suivant les exigences de la syntaxe
indonésienne, à l'inverse du sanskrit et du chinois; et, comme
il vient d'être dit, le sens en est clair et ne comporte aucune
amphibologie (cf. également Birûnî, XLIII, p. 64).
Pour Yi-TsiNG (LXXXVII et LXXXVIII, p. 178), l'île de l'or
= Fo-che ou Che-li Fo-che, c'est-à-dire la partie méridionale
de Sumatra. Dans l'inscription malaise de 1208 çaka [supra,
XG, p. 179), le pays où se rend la mission javanaise est
appelé Suvarnabhûmi «la terre de l'or» (1 c) et il est dit expli-
citement plus loin que le pays en question est le Malâyu (àb),
c'est-à-dire la partie de Sumatra également désignée sous le
nom de Minankabaw^^l L'auteur du Kitâb al-minhâj, Sulaymân
al-Mahrî, compte parmi les ports de Sumatra (LXXXII,
(1) Cf. mon mémoire Malaka, le Mâlayu et Malâyur, J. As., XP série,
t. XII, p. 5i et suiv.
[185] —«.( 129 )^H^
p. 103), trois ports par lesquels s'exporte l'or : Pancùr, à
l'ouest; Pariyaman «célèbre parmi les honimes [et qui est
situé dans le pays] de Manankabwa [=Minankaba\v] », au
sud-ouest; et Sumutra, au nord-est'^'. Les anciennes relations
portugaises sont plus explicites encore :
Arrivèrent également [à Malaka] , dit Gaspar Gorrea (Lendas da India,
t. Il, p. 9 66), quatre barques du royaume de Manancabo, qui ne pro-
duit pas d'autre marchandise que l'or en poudre et en barres, que les
gens du pays apportent [à Malaka].
L'or qui est importé à Malaka , disent les Commentaires d'Albuquerque
(^Commentarios do Grande Afoxso Dalboquerqve, édit. de 1776, t, III,
chap. XXXII, p. 161), provient en majeure partie d'une mine [du pays]
de Menamcabo, qui se trouve à l'extrémité de l'île de Samatra, du
côté du sud, en face de Malaka, à six jom's de mer. . .
A ce moment, arrivèrent trois joangajaoas (navires à rames et à voiles)
du royaume de Menamcabo , qui est situé à l'extrémité de l'île de Gama-
tra, sur l'autre côte méridionale [que celle qui fait face] à Malaka
[= côte sud-ouest]. Ils apportaient une quantité d'or {ibid., chap. xxxvii,
p. 182). [Pour d'autres témoignages portugais de la richesse en or du
Minaùkabaw, cf. mon mémoire Malaka, le Malâjju et Malàyur, dans
/. As., XP série, t. XII, 1918, p. 80-81.]
Il est plusieurs fois question des fameuses «Iles de Xov-n
[Ilhas do ouro) dans les relations portugaises de la période des
t') M. Eilhard Wiedemann a récemment publié et a eu l'obligeance de me
faire parvenir un article sur les drojjues employées par les Arabes, où fifjuro,
en traduclion, un important extrait de i'oncyclopédio de NuwayrI (mort
en i33a). A propos du camphre, l'auteur arabe dit : «En ce qui concerne son
habitat orijjiuel, il y a plusieurs ofiinions. Les uns disent cpie le camphre pro-
vient do Faneur [=I5aros, sur la côte occidentale de Sumatra], une île de
700 parasan(jes de tour qui est connue comme le pays de l'or. . .-n {Beilruge
zur Geschichte der Naturwissenschaften , XLIX. IJber von den Arabern benutzte
Drofren, dans Silzitnfrsberichte der pltysih(discJt-n>ediz{n{schen Sozietdt in
Erlangen, Band hS, i(ji6, p. 17.) Cette information dont j'ai eu connais-
sance pendant l'impression du présent mémoire, contirme heureusement le
témoignage de Yi-tsing et de l'inscription malaise de 1208 çaka : l'île de
Sumatra est bien le pays ou l'île de l'or.
— 1^( 130 ).€^— [186]
découvertes. En fait, les découvreurs étaient surtout préoccupés
de recueillir des informations sur l'Eldorado oriental pour pou-
voir s'y rendre et en rapporter les fabuleuses richesses qu'une
légende plus que millénaire situait dans des îles indétermi-
nées ^^l Joâo de Barros, Thistoriographe royal du xvi^ siècle,
en parle à trois reprises dans la décade III :
. . . Diog'o Pacheco, dit-il (liv. III, cliap. m, p. 964), peu de temps
après son arrive'e de Malaka [à Sumatra], avait apporté d'importantes
informations sur les lies de l'or qui, d'après un bruit général dans
l'Inde, gisaient au sud de Sumatra. C'est à l'effet de les découvrir que
Diogo Lopes [de Sequeira] envoyait Diogo Pacheco, parce que celui-ci
était très versé dans les choses de la mer et extrêmement habile décou-
vi'eur, étant, en outre, un parfait gentilhomme. Dans ce but, on lui
donna l'ordre d'armer un navire à bord duquel il serait, et un brigantin
dont serait capitaine Francisco de Sequeira. . .
Pacheco se met en route et touche à Daya, sur la côte
nord-ouest de Sumatra, où le brigantin se met au plein et se
perd corps et biens, à l'exception d'un esclave canarin (^ibid.,
p. 266). Avec son seul navire, le marin portugais descend le
long de la côte et fait escale au port de Baros :
(P. 268.) . . . Tandis qu'il se trouvait là, il ne se préoccupait que
de deux choses : se tenir sur ses gardes de peur que, pendant la nuit, à
l'instigation des Maures [=miisuiQians] de Cambaya [qui se trouvaient
là], il ne fût victime de quelque traîtrise; et s'informer auprès des gens
du pays de ce qu'ils savaient et disaient des lies de l'or qui gisaient au
sud de l'île de Sumatra. D'autant que, à Malaka où se rendaient cer-
tains marchands de ce royaume de Baros, l'opinion générale était que
ce pays de Baros ne produisait pas autant d'or qu'ils en apportaient,
mais que la plus grande partie était obtenue par échange dans les Iles
de l'or où ces marchands se rendaient par mer. Quoique les Maures et
les gens du pays fussent très jaloux [de conserver le secret] de ce com-
^^) Sur ces îles légendaires, cf. Pomponius Mêla, Pline l'Ancien, Solin,
Isidore de Séville, dans Coedès, Textes d'auteurs grecs et latins relatifs à l'Ex
trême-Orient , Paris, if)io, in-8°.
[187] ->«.( 131 )^^K-
merce, Diogo Paclieco piil cependant acheter deux ou trois indigènes
qui s'y étaient rendus et qui finirent par lui dire ce qu'ils avaient vu et
ce qui s'était passé. (P. 269.) Ils racontèrent que, à peu près à 100 et
des lieues au sud-est du port de Baros, gisait une ligne de hauts-fonds
et de bancs de sable, au milieu desquels se trouvait une île, légèrement
accidentée, dont les cotes étaient couvertes de palmiers; à l'intérieur
de l'ile, vivait une nombreuse population noire avec laquelle ils échan-
geaient de l'or sur le rivage, parce que ces gens ne permettaient à per-
sonne de se rendre où ils habitaient. Pour celte raison, [les commer-
çants de Baros] ne connaissaient ni l'intérieur de l'ile, ni la façon de
vivre des insulaires. Ceux-ci donnaient une grande quantité d'or en
échange de pièces d'étoffes de Cambaya, de la même sorte que celles
que Pacheco avait apportées : vespicias (toiles), viantazes (draps) et
beiHangis (toiles) bleus et rouges^'*. Quoiqu'on se procurât de l'or à
très bon marché en l'échangeant pour des étoffes de qualité inférieure,
cependant, beaucoup de marchands qui s'y étaient rendus une fois,
malgré la grande quantité d'or qu'ils en avaient }-apporté, n'y retour-
naient plus de peur d'y perdre la vie. En général, de vingt navires qui
partaient pour les lies de l'or, il n'en restait que le quart, ces voyages
étant extrêmement périlleux; on ne pouvait les effectuer que pendant
une mousson qui durait trois mois et seulement avec des navires de très
faible tonnage à cause des nombreux hauts-fonds et bancs de sable qu'il
y a là, [entre lesquels] se trouvent de très étroits passages par où l'on
fait route. Ces passages changeaient de place chaque année par suite du
déplacement des sables (p. 370) sous l'action des courants marins pen-
dant la période d'hiver de cette région. Quand les marins étrangers
arrivaient à entrer ou sortir par ces passages, un jour où il ne faisait
pas très beau et calme, la mer furieuse engloutissait tout ce qu'elle ren-
contrait. Cependant, bien que les indigènes de Baros lui exposassent les
très grands dangers qu'on courait, jaloux [qu'ils étaient de se réserver]
ce commerce, comme il le comprit, Diogo Pacheco ne cessait de leur
poser de nombreuses questions, autant pour son instruction personnelle
que pour se rendre compte s'il n'y avait pas quelque contradiction dans
ce qu'ils racontaient. Après qu'il en eut tiré ce qu'il put, comme cette
enquête était la principale raison qui l'avait fait s'arrêter à Baros pen-
dant quelques jours, il piit congé du roi et de ses gouverneurs et fil
roule en longeant la côte de l'Ile. . .
'') Pour ces étoffes, cf. mon mémoire Los poids, mesures et monnaies des
mers du Sud aux xvi' et wii' siècles, J. As., dér. 190.0, p. 203-2o3.
-^H^( 132 )^-8^ [188]
Pacheco contourna Sumatra par le sud et, remontant la
côte orientale de l'île, retourna à Malaka, sans avoir tenté de
découvrir les lies de l'or.
En juin 1621, rapporte encore Barros (décade III, liv. IV, chap. m,
p. 4i2), arriva de Portugal un navire apportant des instructions du roi
D. Manuel, fr Entre autres choses, le roi invitait Diogo Lopes [de Se-
queira] ... à charger quelqu'un d'aller découvrir les lies de l'or préci-
tées qui gisent par le travers (« través) de l'île de Sumatra; car, plusieurs
personnes qui étaient allées dans cette région de l'Inde {naquellas partes
da India), avaient donné grand espoir qu'on pourrait les découvrir. . . -n
Les Lenchs da India «Les légendes de l'Inde» ont trait à la
période comprise entre 1/197 ^^ i55o. Nous savons par une
indication de l'auteur lui-même qu'il travaillait encore à la
rédaction de ses Lendas en i56i (cf. 1. 1, p. 2 65). Elles ont
été publiées par les soins de l'Académie des Sciences de Lis-
bonne, le t. III en 1862, le t. IV en 186/1; 'm-k\
(T. III, 1" partie, p, 288, chap. 11.) Des navires de France.
En l'année qui précéda 1697, trois navires armés en corsaires dont
l'un commandé par le Portugais Esteuâo Dias Brigas , partirent de France
et firent route à destination de l'Inde . . .
(P. 2 4o.) ... Le second navire se sépara du convoi au cap de Bonne-
Espérance, du côté du Sud, ne sachant plus où il allait. Il prit le che-
min des côtes de l'île de Sumatra et arriva à l'Ile de l'or dont le sable
du rivage , gros et petit , est tout en or. La végétation y est luxuriante ;
il Y a de grands bois (aruoredos), des rivières d'eau excellente, beaucoup
d'arbres fruitiers dont les fruits sont savoureux. Les habitants sont nus
et sauvages , ne se couvrant que d'étoffes fabriquées avec des feuilles
d'arbres (follias d'heruas). Ils ne mù-ent aucun obstacle à ce qu'on prît
ce qu'on voulut. Les [marins du navire français] embarquèrent autant
d'or qu'ils voulurent et s'en allèrent, faisant route sans savoir dans
quelle direction le vent leur serait le plus utile. Ils arrivèrent ainsi sur
la côte de Sumatra en pleine détresse, la plupart d'entre eux étant
morts ou malades. Le navire faisait tant d'eau, qu'il était sur le point
de couler. Ils mirent le cap sur la terre pour s'y échouer; mais avant d'y
arriver, ils s'échouèrent sur un banc (de sable ou de roches) oii le
navire se perdit. Ceux qui pouvaient travailler, mirent la chaloupe en
189] -^^«.( 133 ).«^~
état et vinrent à terre avec beaucoup d'or que chacun y avait rais. [En
arrivant] à terre , ils moururent. Des barques de pêcheurs qui les ren-
contrèrent par hasard, emportèrent i'or. On apprit cela à MalaJia par
des marchands de Sumatra qui venaient y trafiquer, que partout on
parlait de cotte chaloupe que des pêcheurs avaient trouvée pleine d'or
et que les hommes qui en parlaient (e que os homens que falauâo
como bombardeiros?). On amena un de ces individus au roi d'un pays
(sic) qui le fit empaler parce qu'il disait qu'il ne saurait pas retrouver
l'Ile [de l'orj. On apprit e'galement que ceux qui découvrirent celte
Ile de l'or n'appartenaient pas à l'équipage du navire commandé par le
Portugais Brigas.
(T. IV. p. 3o6.) [En i5Zi3] ... [le gouverneur Martim Afonso de
Sousa] donna l'ordre à Jeronymo de Figueiredo de partir avec un galion
et trois fustes , à la découverte de l'Ile de i'or qu'on disait être par le tra-
vers (atraués) de i'ile de Sumatra, au large de Sumatra, du côté de
l'Ouest. . . Au moment de partir, le navire [désigné pour cette expédi-
tion] faisait tant d'eau que, pendant la nuit, il coula dans la rivière [de
Goa oh il était ancré ... On le remit à flot] et il fut réparé et prit
ensuite la mer. Le directeur des finances fit informer Diogo Cabrai qu'il
avait fait faire secrètement des trous au navire et celui-ci coula [en mer]^'^
Il est question d'îles de l'or dans un curieux mémoire de
Godinho de Eredia (ou Heredia)^-' intitulé : Declaraçam de
Malaca e India Méridional com o Cathay em III tract. Le texte
portugais avec traduction française, sans notes, a été publié
sous ce titre : Malaca, l'Inde Méridionale et le Cathay, édit. et
trad. Léon Janssen d'après le manuscrit de la Bibliothèque
Royale de Bruxelles, avec une préface de Gh. Ruelens; Bru-
xelles, in-/i°, i88;i, XIV pages -f 8a folios -[- loo pages, avec
ho cartes et plans cl 19 illustrations de l'auteur. Ce mémoire
est adressé à Philippe 111 de Portugal et daté de Goa, le â/i no-
vembre 1610 (la traduction porte par erreur : a/i décembre).
Dans ce texte, Inde mcridionak désigne une terre et des îles
(') Ce fonctionnaire portujjais avait un intérêt, que nous ne soupçonnons
pas, à cmpèchor le d('part du galion.
'-) Sur ce porsonnnjjc, cf. Hamy, Le descohridor Godinho de Eredia, dans
Bull. Soc. Géojrr. de l'avis, juin 1878, p. 5i6.
-^«.( 13Zt )<^— [190]
imaginaires situées au sud du i o^ degré de latitude australe.
La seconde partie (p. 5/i et suiv.) est consacrée à cette Inde
méridionale. Il y est question de deux îles riches en or : Luca-
antara (lire : Luça y4«tora= javanais Nusa Anlara «l'île du
milieu 77, litt. «l'île entre [d'autres îlesjw)'^' et Luca (^=-Luça,
pour Nusa «île 55) Veacli = Veak. Dans la première, oii se
rendit un prince javanais, «il y vit beaucoup d'or, de girofle,
de noix muscade imassanos=massa nos'j, de sandal blanc et
rouge, d'autres épices et aromates, et en prit des échantillons w
(p. 58).
La description de l'île de Luca Veach vaut d'être reproduite
intégralement :
Chapitre vn. De l'île de Loca Veach.
(P. 63.) ... La'"' navigation était suivie entre les îles d'Ende (Flo-
rès) et Luca Veach '^\ terre produisant de l'or eu grande quantité : on
en tirait de nomJjreux lingots de ce métal par des échanges, ainsi que
le racontent les vieillards d'Ende. Ces vieillards rap[)ortent l'aventure de
cette harque d'Ende qui, faisant voile vers Luca Veach, fut prise, à la
hauteur de l'Ile de Saho'*', par une violente tempête. Elle ne put entrer
nia Saho, ni dans le port deRajoam'^' ni à Lucachancaua '"', rivages
qui sont en vue l'un de l'autie. La tourmente l'entraîna et lui fit perdre
de vue toutes ces îles. Ensuite ie temps se calma, les vents tombèrent.
Pendant trois jours, la bai-que égarée navigua de part et d'autre, puis
(^) C'est l'ancien nom de Madura , appliqué ici à une île imaginaire.
(^) Je reproduis la traduction de Janssen en la rectifiant par des notes.
(^' Pour cette ile , vide infra.
'*■) God. Sabbo. La carte du fol. 52 a Sabo. C'est l'île appelée Savu, Sawu ou
Rai Hawu, la Savoe de nos cartes, entre Sumba et Timor.
(^) Cod. ilha Rajoam «l'île de Rajoam». La carte du fol. 5:2 a Rajoan. C'est
l'île Ranjmva ou Rai Jua du groupe des îles Savu.
(^) Luca est pour /»m = javanais mtsa «îlen; Chancana est vraisemblable-
ment à corriger en *Canc/ian« = À'flHtana. Sur la carie du fol. 5tî, ces trois
îles et une quatrième non dénommée sont situées par Godinbo au nord et à
peu de distance de l'île de Petau et au Nord-Nord-Oucst de la pointe de
Beacb.
[191] — «.( 135 ).«—
elle fut poussée à Luca (p. 64) Veacli où les marins qui montaient rem-
bai'cation, débarquèrent dans un village. Ils voulaient faire de l'eau et
des vivres car, pendant la tempête. Us avaient tout perdu sauf une cer-
taine quantité de fruits d'une espèce de [talmier nommée SivaUas'-^^ qui
servaient de lest au bâtiment. Ces fruits du Sivallas étaient très estimés
h Luca Veach. Ils obtinrent en échange de leurs Sivallas ^-'> autant d'or
qu'ils en voulurent : ce métal est très commun à Luca Veach où le gra-
vier qui se trouve au pied des arbres est du minerai d'or '^'.
Cette île de Luca Veach mesure environ 8 lieues espagnoles de circon-
férence. Sa terre, qui produit des minerais, est fraîche et en partie
boisée''^ : elle est très fertile en riz et en grains de toutes sortes, bien
plantée de palmiers , de cocotiers domestiques '^' et d'une grande variété
de cannes à sucre. De nombreuses et fraîches rivières où coule une eau
excellente et où se trouvent des rochers aurifères, arrosent le pays, et
les marins d'Ende y firent de l'eau ^°'.
Une autre partie^'' des habitants sont des blancs à cheveux blonds,
avec des yeux bleu clair, petits de taille, nus ou mal vêtus. Ils habi-
taient des maisons couvertes de paille et vivaient du fruit de leur tra-
vail, cultivant des jardins légumiers^''. Parmi eux se trouvent égale-
ment des hommes bruns, mais tous parlent la même langue qui est
celle de Sabo et de Rajoam ''>. Ils emploient le fer pour fabriquer les
armes, les frondes, les dards et les lances dont ils munissent la pointe
de dents de poisson. C'est le plus riche et le plus puissant d'entre eux
qui gouverne le pays.
Le long de la côte, sur une largeur de i5o pas géométriques, la mer
^'^ Cod. dafructa sivallas.
'-) Cod. sivallas, fructa de palmm bravas «sivallas, fruit de palmiers sau-
vages. . . ».
'^) Cod. era de mettaes de ourn, Htt. ff était do métaux d'or», était en or. Il
n'est pas du tout question de minerai.
('') Cod. estava fresca echea de bosques arvoredos welle était fraîche et cou-
verte de forêts [et] de bois:i.
'^) Cod. de cocos domeslicos, c'est-à-dire de cocotiers cultivés.
W Cod. e tem muytas e fresca ribeyras de excelente agoa do rochas de ouro,
onds fizerâo aguada trot il y a de nomlircuses et fraîches rivières d'oau excel-
lente [sourdant] de rochers on or, où [les marins étrangers] liront de l'eau».
'') Cod. E a gente algua «(juel(jues-uns des habitants».
(^) Cod. com grangeria de orlas, ils vivent de leurs labeurs et travaux [qui
consistent] «ou «ullure do jardins» ; ils vivent du produit de leurs jardins.
^°' Cod. de lla,joa6 (sic, pour lia]oâo) e Sabbo.
.( 136 ).^+— [192]
qui baigne cette île est remplie d'une espèce de corail ''' recouvert de
varech, ce qui gêne le débarquement dans le port de Luca Veach. Pour
que l'embarcation pût atterrir, il fallut couper les branches de ces varechs
et s'y frayer un passage. De cette façon, la barque toucha terre el revint
sans encombre , car il n'y avait pas d'autres récifs ni bancs de sable sur
iacôte''-'.
Après que l'embarcation eut un chargement suffisant d'or, elle quitta
Luca Veach. Mais, assaillis par une nouvelle tempête, les marins furent
obligés de jeter leur or à la mer '^^ Ils n'en gardèrent que ce qui était
nécessaire pour lester la barque et regagnèrent Sabbo quand le temps
se calma. Us y déchargèrent leur or dont il y avait encore une telle
quantité que tous les habitants de Sabbo en furent frappés (p. 65)
d'étonnement. La vue de ces richesses leur donna l'intention de faire
une nouvelle expédition vers Luca Veach, mais ils ne donnèrent pas
suite à leur projet à cause de l'ignorance des habitants , qui ne savaient
ni la latitude ni la configuration de Luca Veach. EnGn cette île s'appelle
ainsi parce que, dans la langue de Sabbo et de Java^''^ Luca^^'' signifie
(fîlen et Veach veut dire cfd'om ^^K
(^) Cod. de certos coraes falsos «de certains faux coraux».
'^) Cod. per nào haver outras restingas «car il n'y avait pas d'autres récifs".
^^' Le jet de l'or à la mer a pour but d'apaiser la tempête. C'est un thème
de folklore bien connu, qui est généralement à trois motifs : I. Motif de
l'arrivée dans une île ou un pays inconnus; II. Motif de l'enlèvemont par les
étrangers du produit caractéristique de l'île; III. Jet obligatoire du produit
en question pour apaiser la tempête occasionnée par l'enlèvement de ce pro-
duit. Dans le cas présent, comme il s'agit d'un voyage de chercheurs d'or,
Godinho raconte qu'il en fut conservé une certaine partie à titre de lest , pour
montrer aux indigènes de Sabo que Luca Veach est l'île de l'or qu'on recherche.
Sur un thème de folklore parallèle, cf. mes Relations de voyages, t. II, p. 299,
3 10 et 4 10. Dans ces trois passages, les roses magiques disparaissent par com-
bustion instantanée dès qu'elles sont portées hors de la roseraie {supra, LU,
p. 68;LVII,p. 69;LXXIV, p. 77).
W Le texte a : chez les indigènes de Ende = Flores, de Sabbo et de Java.
W Luca est pour /«ça = javanais nusa «île». Nusa n'est usité qu'à Java,
Madura et à Madagascar (nûsi). Partout ailleurs, «île" est généralement désigné
sous le nom de pulaw, pulo ou par une variante dialectale se rattachant à ce
thème.
W En indonésien, le nom de l'or se rattache aux types suivants :
I. Malais mas, ^mas ; javanais ëmas; bisaya, dayak,tagal amas; batak ornas;
makassar amasaq; vieux-bugi masa; bësëmah ëmas, rëmas. Cf. khmèr wuw,
[193] -^>{ 137 )k^»—
Chapitre viii. Certificat relatif à l'île de Luca Veach.
Pendant que je commandais la forteresse d'Ende [ou Flores], les
habitants les plus honorables et les mieux placés de celte Chrétienté
rendirent compte, à moi, Pedro de Cai'valhaes, comme il suit, du fait
de la découverte de l'Ile d'or [lire : Ile de l'or] ou Luca Veach.
Une petite embarcation avec quelques marchands, chassés du port de
Sabbo par les vents, la tempête et de violents courants, s'égara, perdit
de vue la terre et, naviguant la proue au Sud, pendant environ
3o lieues '*', rencontra Pulo Cambin<"\ une île dans laquelle il n'y a
que des chèvres. Puis continuant sa route au Sud , après avoir parcouru
environ la même distance encore , elle trouve Pulo Nhior ^^\ autre île
déserte dans laquelle croissaient des cocotiers. Plus avant, la barque en
question rencontra l'île Pulo ïambini''', peuplée de femmes, et puis
après, apparut Luca Veach.
cam m(yh; bahnar, jarai (chréai), halaii de rindochine mah; mas, mds, amas
dans les dialectes de la péninsule malaise, trorn; kawi mâs.
II. Dayak, katinan bulan; magindanao et bolaaii-moàondu bulawan; bugi
ulaivëii; bontenaii wulën «orn.
III. Vieux-bugi taneyo ou tuhkexjo <Cey()h «briller».
IV. Vieux-bugi wara-wara <CvDara «charbon ardent)?.
V. Malgache vulamena, litl. argent rouge, sumba amas rara, Htt. or rouge
= tt or».
VI. Vieux-bugi rupajati, magindanao kancana, dayak (mot religieux) rawia
«or», empruntés respectivement à skv. jâta rûpa «or», kâncana «or», ilravya
«objet, richesses».
Cf. R. Brandstetter, Mata-Hari, Lucerne, 1908, in-8°, p. 8-9; Aymoniek-
Caiîaton, Diclionnah-e cam-français , s. v° mo'h; G. 0. Blagden, Comparative
vocahulary of aboriginal dialects, dans Skkat et Blagden, Pagan races of ihe
Malay peninsula , Londi'cs, 1906, in-8°, t. II, p. 621, n° G^, s. v° gold. Veach
n'a donc rien de commun avec le nom de i'or en indonésien.
'') Cod. pouco menas de 3o legoas «un peu moins de 3o lieues».
^^) Cod. Pulo Cambim ( sic) de cabras «l'ulo Cambim [ou île] des chèvres».
Pulo Cambim est la transcription portugaise de Pulaw Kambih, qui signifie en
effet «île des Chèvres». Celle île figure sur la carie de Godinho, du fol. /i8 v° :
elle est située au Nord de la pointe orientale de ïimor. Il existe en effet une
île de ce nom dans la Résidence de Timor et dépendances. Elle est également
appelée Hoogciland.
'^' Cod. Pulonkior de cocos «Pulonhior [ou ile] des cocos» = Pa/aw niynv,
qui signifie «île des Cocos». Celle île el la précédente, où reparaît le terme
malais pulaw, au lieu du javanais nusa, ne figurent pas sur la carte du fol. 52.
'*' Cod. i^alo lambini de molhcres «Pulo Tambiul [ou ile] des Femmes». Lu
M. G. KLnRANl). 10
^«.( 138 ).«— [194]
Les uavigateurs y aperçurent notamment riieureiise montagne d'or,
et les gens de Sabbo qui montaient la barque mirent pied à terre dans
le port, où ils virent une telle quantité d'or qu'ils en demeurèrent
frappés d'étonnement. Ils en chargèrent autant qu'ils voulurent et tant
que le navire en put supporter le poids. Puis, poussés par les vents du
Sud, la barque regagna le port de Sabbo. Cette expédition enrichit cette
terre, qui n'était pas très riche par elle-même. Aujourd'hui encore, tout
l'or qui se trouve à Sabbo est celui qui provient de l'expédition de cette
dite barque à Luca Veach.
(P. 66.) Les susdits navigateurs rapporleut qu'il se trouve à Luca
Veach un pic élevé, qui est une montagne massive d'or. C'est-à-dire que
ce métal s'y trouve en telle quantité qu'il est répandu dans les pierres
en gros filons et en veines considérables.
Sous l'action du temps, cet or a été mis à nu et fait resplendir la
montagne à tel point que de loin, sous la réverbération du soleil, elle
apparaît comme un brasier eu feu.
Sur CCS informations, je fis apprêter de suite doux embarcations à
rames, bien approvisionnées, avec des pilotes et des marins d'Ende [ou
Flores] et d'autres officiers pour faire le voyage de Luca Veach. Alors
que les embarcations étaient déjà prèles à lever i'aucre et à faire voile,
les pères de l'ordre des Dominicains, comme vicaires de cette Chrétienté
et administrateurs des pays du Sud, me supplièrent avec la plus grande
insistance de ne pas elîectuer ce voyage, disant que les Chrétiens qui
carte du fol. 52 a : Lucatambini = Nusa TamLim, I. de Molheres. C'est la
légendaire lie des Femmes dout Ercdia a voulu parler. Le javanais bini signifie
bien «femelle, femme 55; mais tambini n'a pas ce sens. La géo[jraphie légen-
daire des Javanais à laquelle Ercdia a fait cet emprunt maladroit connaît une
Nusa Tambini. C'est la Nusa Tambini où Aji Çaka, fbindou civilisateur des
Javanais, s'établit en fan 10 do l'ère qui porte son nom [= 88 de notre ère]
(cf. Raffles, Historij of Java, Londres, 1817, in- A", t. II, p. ?.3i), la Nusa
Tambina du cycle léjjcndaire de Panji oîi le brahmane Kanda (appelé aussi
Sakendo et Salirli), protecteur du râja de Nusa Kancana ttl'ile de i'or» , alla
faire pénitence au ix° siècle [ibid., p. 90). Dans un manuscrit en javanais
moderne contenant un fragment du cycle de Panji, il est question de Wando,
princesse de Teml)ini {apud ms. cmlix [cod. Si^a], dans H. H. Jcynboll,
Supplément op den catalogus van de Javaansche en Madoereesche Handschriften
der Leidsche Universiteits-Bibliothcch, t. II, Leyde, 1911, in-8% p. 78). Et c'est
évidemment cette Nusa Tambini ou Tëmbini qui, par un contre-sens, est
devenue rSile des Femmes» de Eredia.
[195] --«.( 139 )<^—
s'y aventureraient, ne connaissant pas la navigalion de cette raer<'' et
la situation de Luca Veacli , courraient à une perte certaine et trouve-
raient la mort sur cet océan. Par respect pour la requête solennelle de
ces religieux, j'abandonnai mon dessein et le voyage vers cette île si
riche de Luca Veach ou ile d'or, n'eut pas lieu^">.
Le descobridor Emanuel Godinlio de Eredia m'ayant demande cette
de'claration pour le bien de son voyage et de son entreprise et pour
le service du Roi, je jure par les Saints Evangiles que tout ceci est la
vérité et j'ai scellé les présentes de mon sceau ci-dessous.
Malaca, le h octobre 1601.
Pedro de Carvalhaes.
Pedro de Carvalhaes était sans doute de bonne foi; mais il
va de soi que l'île de l'or en question est purement imaginaire;
imaginaire aussi le voyage de Eredia à Luca Veach. Tout cela
est du folk-lore transformé en réalité par un métis ambitieux à
la recherche de dupes. Le résultat final est décisif dans ce sens :
Godinho de Eredia ne retourna jamais dans l'ile en question.
Les Portugais navaient naturellement pas découvert les
fameuses Iles de l'or. Les Hollandais eurent sans doute vent
des projets d'expédition en Eldorado de leurs prédécesseurs et
mirent aussi la question à l'étude. Le Dagh-Register gehouden
int Casteel Batavia vaut passeremk cher ter plaetse ah ovcr te
geheel Nederlants-Iitdia anno 1 636 ^f. Journal tenu dans le Château
de Batavia de ce qui s'est passé à Batavia même ainsi que
dans les Indes néerlandaises tout entières pendant l'année i636 »
(édit. H. T. CoLENBRANDER, 's-Gi'avenhage , 18 9 9, gr. in-8°,
p. 10/1) fait mention, au mois de juin, d'un projet de décou-
verte de l'ile riche en or et argent (^fiet goiit ende sdverrljck eij-
landiy^K On songe à charger de ce soin le commandaut Ma-
(') Cotl. como ignorantes daqudla narifraçâo.
'"^) La raison invoqm-e pour empêcher ce nouveau voyage à Luca Veach, est
dilliciiement acceptable. 11 y a lieu de remarquer qu'il n'est pas question dans
ce procès-verbal de la tempête qui oblifrea les marins de Sabbo à jeter à la
mer la plus [jra.ule partie de i'or recueilli dans l'ile mcrveilltuse.
(^' L'édileur ajoute en note : «Cf. Lbv)pk, Ileue van Maarlen Gemlz», p. 3
10.
_^ lliO )k^— [196]
ihijs QuAST avec les navires Grol et Waterloose Werve. Suit ce
curieux renseignement : «On rapporte que l'île aurifère et
argentifère gît par 87° 1/2, à environ /loo milles à l'est {^bij
oosteii) du Japon. ?)
D'après les renseignements recueillis par Diogo Pacheco
sur la côte occidentale de Sumatra , les Iles de l'or devaient se
trouver «à peu près à cent et des lieues au sud-est du port de
Baros» (^supra, p. 187). Pendant les cent et quelques années
qui ont suivi l'infructueux voyage du capitaine portugais, la
région au sud-est de Sumatra a été parcourue en tous sens et
aucune île aurifère n'y a été découverte; mais la légende de
l'Ile ou des Iles de l'or, que justifient dans une certaine mesure
les arrivages de poudre et de lingots d'or à Malaka, conserve
ses fidèles parmi les gens de mer et les marchands européens.
Les îles de l'Indonésie n'ont pas fourni encore de richesses com-
parables aux fabuleux trésors des Indes occidentales; mais
l'enthousiasme des découvreurs n'en est pas atteint : leur foi
reste entière et leur zèle ne se dément pas. Ceux qui, comme
le signataire de ces bgnes, ont vu de près les prospecteurs du
Transval et de Madagascar, peuvent témoigner de la touchante
crédulité des chercheurs d'or; et leurs lointains prédécesseurs
des xv' et xvi° siècles n'étaient pas moins crédules. L'insuccès
des expéditions portugaises n'a découragé personne. Leur
unique résultat pratique est d'avoir montré qu'il n'y a pas
d'Iles de l'or dans i'InsuHnde; mais qu'à cela ne tienne; elles
et 35-io; Heeres, Life and labours of Abel Jansz. Tàsman, p. i5-305). Je n'ai
pas eu occasion de consulter ces deux ouvrages. M. Paul Pelliot a eu Tobli-
geance de me signaler le mémoire de 0. Nachod, Ein unentdeckles Goldland
{ Mittheilungen dcr Deutschen Gesell. fiir Nalur- und Volkerkunde Oslasiens,
Tokyo, t. VII, 3' part., p. 3ii-i5i), où on retrouvera l'historique des expédi-
tions envoyées à la recherche de la légendaire lie de l'or, depuis le projet
hollandais de Versteegen, en i635, jusqu'aux voyages de La Péiîouse, Anson,
Brocguton, von Krhsenstebn, John Meares; et la liste des documents et
cartes ayant trait à l'Ile de l'or, de i587 à iSgT) ! La première des expéditions,
celle de Diogo Pacueco {supra, p. i8(3), n'y figure pas.
[197] — «•( làl ).€-H—
n'en existent pas moins et la recherche continue. L'Ile de l'or
ne peut être que difficilement accessible : la rumeur publique
la situera donc à Aoo milles à Test du Japon, dans quelque
terre insulaire du Pacifique, où on ne la trouva pas davantage.
La vraie merveille de la légende, c'est que les Portugais et
Hollandais des xvf et xvn" siècles ne soupçonnaient pas encore
la richesse aurifère du sud de Sumatra, où tant de fois ils
firent escale. Le secret fut rigoureusement gardé, tant par les
Sumalranais que par les trafiquants musulmans avec lesquels
ils traitaient. En Indonésie comme en Afrique, l'européen est
considéré comme un ennemi; le musulman ou l'hindou ont
seuls la confiance de l'indigène. Ainsi ce trafic d'or qu'on cache
jalousement aux marins d'Europe, a été connu d'un moine
chinois dès la fin du vn^ siècle (LXXVII, LXXXVIII, p. 178)
et il est révélé aux marins arabes par Bîrûnî (XLIII, p. 6/j)
et surtout par les Instructions nautiques de Sulaymân al-Maurî
(sufra, p. 102), quelque cent ans avant l'époque où le com-
mandant Mathijs QuAST est chargé d'aller rechercher l'Ile de
l'or à l'est du Japon.
Le Kitâh al-minhftj de Sulaymân al-Maharî a une courte section
(Juâj) consacrée aux distances entre certains ports de l'Océan
Indien (ms. 2 5 69, fol. 22 r°). Aux lignes G-7, il est dit ceci :
4^«>Jî_5 (_^^jJO()yxj J-iL^^ ^y^ ijy-^*-^ Jjwt^-uJî^ (^^3 j5j-^ JJl^
^b u^y^^ «comme [entre] les îles Zurïn et les Sawâhil (côte
orientale d'Afrique), il y a 60 zmn [= 180 heures de route]
de distance; comme entre [l'ile de] Tayzam-turî et les Mal-
dives, il y a 20 zâm [== 60 heures de route] de distance 55.
Dans la Hâwiija de Ibn Mâjid qui est datée du 1 3 septembre
1/162, la même île est également mentionnée (ms. 2292,
fol. 107 v°, vers 10) :
^'; U^/^ iS^y («'0 fj^'' (:J^^ U-^^
Entre elle (Fane des Maldives cilée au vers précédent) et Tayzam-
tûrï, il y a 20 zâm.
— «.( 142 ).«— [198]
En marge de ce vers, une main étrangère, très différente
de celle du copiste, a écrit : t-^*x)l Sjj^rs- = o>jft<xM iy^ «l'île
de Torw. Sïdï 'Alï, dans son Miihït, nous a conservé la légende
de cette île de l'or :
[Le sol de] l'île de Tayzam-tùrï est connu comme terrain aurifère,
comme il ne peut pas y en avoir un second au monde. On raconte qu'une
fois, un commerçant indien était ailé pour affaires, du port de Surat de
la province de Guzerate, dans les districts du Bengale. Comme il reve-
nait du Bengale [à Surat] avec des marchandises, sa route le fit passer
devant l'île de Tayzam-tûrï. Le marchand jeta l'ancre, vint sur l'île et
s'empressa de faire cuire son repas. La chaleur du feu fit entrer l'or en
fusion et il coula de tous les côtés. Lorsque celui-ci vit cela, il jeta par
dessus bord toutes les marchandises qui se trouvaient sur le navire et
le chargea avec la terre de l'île. Lorsque, avec l'aide d'Allah, il fut de
retour dans le port de Surat, il donna au Fadisâh du Guzerate une par-
tie [de la leri'e lapportée] et fit construire dans le port de Surat un
talàw profond, c'est-à-dire un gigantesque bassm tout en pierre pour
lequel il avait dépensé sur la part qui lui restait un kulûr, c'est-à-dire
100 lak [= lo millions de pièces de monnaie]. On n'avait jamais vu
encore dans le monde entier une construction semblable (trad. Bittner,
dans mes Relations de voyages, t. II, p. 54 1).
En fait, ni Ibn Mâjid, ni Sulaymân al-Mahrî ne men-
tionnent cette île de l'or purement légendaire; leurs Instruc-
tions nautiques sont des travaux scientifiques où la réalité seule
est enregistrée. L'amiral turk, au contraire, ne néglige pas
le folk-lore; il a Intercalé cette disgression sur l'île de Tay-
zam-tùri dans le passage du Kilâb al-minhâ] qu'il est censé tra-
duire, sans prévenir le lecteur qu'il s'agit d'une addition de
fon cru.
Cette croyance en l'île de l'or était si fortement ancrée dans
l'esprit des découvreurs des xvii' et xvnf siècles, qu'on la trouve
portée sur des cartes européennes et même sur des caries
marines. Godinlio, par exemple, inscrit près de la côte occi-
dentale de sa ç^ Sumatra moderne» (fol. 2/1 v" de la Decinraçam)
[199] — «.( U3 )^-»—
un archipel situé entre i° et ;2° de latitude Nord et correspon-
dant à peu près à l'ile de Nias, au-dessous duquel est noté
«ouroîi. Non loin de là, entre l'équateur et i° Sud, une autre
île est appelée «Pulomâs 55 = malais Pûlaw mas, «île de l'or 55
— c'est probablement la Tanah Masa de Tarchipel des Batu.
Linschoten, qui a beaucoup emprunté aux Portugais, a inscrit
sur sa carte de l'Extrême-Orient une «Beach prouincia auri-
fera», située droit au sud de Java, entre 16° et 20° de latitude
méridionale. C'est évidemment la Veach ou Beach de Go-
dinho; la partie méridionale de cette «province aurifère» se
confond avec le cadre de la carte et l'on ne sait s'il s'agit d'une
île ou d'un continent. Cette hantise des îles de l'or se manifeste
encore à la fin du xvnf siècle dans les cartes marines de
\ Oriental Pilot. Elles figurent sur la carie 82 , entre 1° et 2" Nord
et respectivement par 92° 3 0', 87° et 83° de longitude :
«Ouro according to the Dutch. [Incertain 55 , «Another Ouro
equally uncertainw, «Ouro or Owra. According to the English.
Ils Situation and existence Uncertain » (cf. également la carte /i 7
du même atlas). La carte 1 7 est intitulée : A chartofthe Indian
ïslands, with the Coasts of the Continent from Cahninera Point to
Amoye in China, draivn from the Best Journals and Remarks of
Navigators, ascertained hij astronomical observations, and improved
from the last édition of the Neptune Oriental o/'Mons'' D'après de
Mannevillette. Sur celte carte, entre 82" et 93° de longitude
orientale de Londres, et o''3o' et 2° de latitude nord, sont
inscrits, de l'est à l'ouest, trois îles ou groupes d'îles avec les
inscriptions suivantes : «Ouro [portugais «orw] according to
the Dutch», «another Ouro e(|iially uncertain» et «Shoal of
Ouro uncertain». C'est évidemment un souvenir, transmis par
les Hollandais (d'après le cartographe anglais), des lies de l'or
que chercha vainement Diogo Pacheco.
Le ioWLî ics^l\ et le ^l^i v^ ^^ Sulaymân al-Maharî
consacrent chacun une section aux îles Zarîn.
-_«.( IM ).«^ [200]
Le premier texte (ms. a 55 9, fol. 92 v°, i. 12)3:
Ci>L>l^3 v-»<:îs£\i *m vAX> kii^lfi '-â>>y» <L«^\£ /s^^ 3Jt^ (^**' (J^j3 ^r?*"
Jj-^js! caJ^ (jl5C« JS" yî jt^î^ J^^ ^ (^î ^i /*^>^ï*j (^^ J^W
Section traitant de la connaissance des îles Zarïn. Elles gisent par
a xshd des Farâkid [—environ h" 18' snd]. On dit que ces îles Zaïïn
sont au nombre de 7. En ce qui concerne les abords de ces îles [, ils
sont les suivants] : quand on en approche, l'eau change [de couleur]
et elle devient verle. Comme [autre] abord des côtes [de ces îles], il y
a encore des jàijât (algues). Entre ces îles et la côte [africaine], il y a
60 zàm \= 180 heures de route]. J'ai entendu dire par des gens dignes
de foi que par 3, â, 5 uhd des Farâkid, gisent des îles (fol. 28 r")
éparses , échelonnées depuis l'alignement des îles Zarîn dans la direction
de la côte [d'Afrique]. Certains disent que ce sont des îles de sable.
Sache que toute région écartée est inconnue 1
Le second texte (ms. 2559, fol. 78 v" mjra) est identique
au précédent :
^^jf^ ^Sà^s. i^j^i^ (jUx.«î (^^^ yi^XSjiJI c^;;;))^ (5* jSa:>
ci>l-«!5VjcJl *Jui (j-g-^Afi tjj.J> i^A^ ^\^ {j*^ [j^'j *^.^ (:^â-*^^ ')j^
J.AÎ /vJr^ vLaMrf ^^ cyiJ^'-^^ ejlij.ÀA^ ^j^ X»M^^ **0l5
Section traitant des îles Zarïn. Elles gisent par 2 ishd des Farâkid
[= environ 4° 18' sud]. On dit que ces îles sont au nombre de 7. Entre
ces îles et la [côte africaine], il y a 60 zâm [= 180 heures de route].
En approchant de ces îles, surviennent des abords comme l'abord des
terres. J'ai entendu dire à qui connaissait ces questions par expérience , que
par 3 , 4 , 5 ishd des Farâkid , gisent des îles éparses qui s'échelonnent
depuis l'alignement des îles Zarin dans la direction de la côte [d'Afrique].
[201] --«.( 1/j5 ).«—
D'après la position de ces îles indiquée par Sulaymân al-
Mahrï, on ne peut guère les identifier qu'au groupe insulaire
des Seychelles, au nord de Madagascar. Leur nom de ^^,j^ ^y^
juzr Zarln est intéressant. Zarïn n'est pas arabe, mais il est
aisé d'y retrouver le persan ;) zer «orjj, ^^jj zerîn «d'or»
(aureus). Les Instructions nautiques arabes sont, à ma connais-
sance, les seuls textes orientaux qui en fassent mention. Les
Seychelles n'ont, je crois, jamais livré un gramme d'or. Ce
toponyme injustifié est sans doute la localisation dernière de
la légende des Iles de l'or, qu'on a successivement situées au
sud-est de Sumatra, au sud de Java, à l'est du Japon, au sud
de l'Inde, entre Sumatra et Geylan et enfin aux Seychelles,
l'événement montrant chaque fois que les indications fournies
par les indigènes étaient erronées : le secret était hien gardé.
Ce n'est que plus tard que fut révélée la richesse aurifère de
Sumatra : les marchands sumatranais, musulmans et hindous
avaient réussi à la cacher aux découvreurs européens en quête
de l'Eldorado oriental.
ESQUISSE HISTORIQUE.
D'après les textes qui précèdent et quelques autres qu'on
utilisera plus loin, il est possible de retracer dans ses grandes
hgnes l'histoire de l'ancien empire sumatranais de la seconde
moitié du vii^ au xv^ siècle. La période antérieure, du début de
notre ère à &lili, date de l'envoi de la première ambassade à
la cour de Chine par le Malâyu, est reconstituée grâce à une
interprétation nouvelle de documents sanskrits, grecs et chi-
nois. J'ai indiqué, pour chacun d'eux, le coellicient de certitude,
de presque certitude ou de vraisemblance que présentent les
solutions qu'on propose. Quant aux origines mêmes du Çrivi-
jaya et du Malâyu, elles nous restent complètement inconnues,
faute de documentation à cet égard.
__^( U6 )k^— . [202]
Le nom de Çrivijaya est adopté déjà en orientalisme pour
désigner l'empire sumatranais qui avait sa capitale dans le
sud-est de 111e, à Palemban même ou dans la région de Pa-
lemban : on l'a donc maintenu dans ce travail. Son histoire est
intimement liée à celle de l'ancien royaume voisin de Malâyu,
l'actuel Minankabaw, qui fut tantôt suzerain , tantôt feudataire
de celui-là et dont la capitale se trouvait sur le haut Batan
Hari, à Pagar Ruyon ou aux environs de cette ville. Il sera
donc alternativement question de ces deux états qui furent en
permanente interdépendance mutuelle. On rappelle enfin que
l'île de Sumatra, _le Çrivijaya et le Malâyu ont été connus sous
des noms différents par les Chinois et les Arabes et notam-
ment sous celui de Java et ses variantes. Ce témoignage nous
permet de remonter à haute époque, jusqu'à Ptolémée, au
Heou han chou et au Râmâyam.
Vers le début de notre ère, «notre Rômàyana, dit Syl-
vain LÉvr(PoMr lliistoire du Râmâyam, J. As., XP série, t. XI,
1918, p. i5o), composé à une époque encore indéterminée,
sort dans ses multiples recensions d'une édition publiée aux
environs de l'ère chrétienne, v
Le texte sanskrit dit : t^De tous vos efforts gagnez l'île de
Yava, embellie de sept royaumes, l'île de l'or et de l'argent
(suvarnarûpyakadvlpain^, parée de mines d'or (^suvamâkara-
manrjitam); puis, par delà l'île de Yava est la montagne appe-
lée Çiçira (litt. : fraîche) dont le sommet (lilt. : la corne,
çrhga) touche le ciel et qui est visitée par les dieux et les dé-
mons. » «Le mont Çiçira, dit Kern {^Java en het Goudedand vol-
gens de oudste herichten, dans Vcrspreide geschriften, t. V, 1916,
p. 307), est nettement fabuleux [zuiver fahehchtig)\ il consti-
tue la limite extrême-orientale des connaissances géographiques
du poète, car, au delà, on ne cite ni terres ni mers légen-
daires. 11
1
[203] ■—«.( l-^i7 ).«—
Yamdvlpn a été idenfilîé à Java et, autant que je sache, au-
cune objection n'a été élevée contre cette identification. Voyons
plutôt si l'examen du texte sanskrit la justifie autant qu'on le
croit. Le Râmâyana note deux particularités de l'île de Yava :
1° elle est embellie de sept royaumes; 2° c'est l'île de l'or et
de l'argent, parée de mines d'or. La première information
este sans objet : il y manque les noms des sept royaumes.
D'autre part, nous ne savons pas s'il y eut sept royaumes à Java
ou ailleurs, il y a quelque vingt siècles*^'; la question ainsi
(^) Sylvain Lévi {ibid., p. 81-82) n'a pas manqué de citer ici la description
de Java par Odoric do Pordenone , qui rappelle de très près les indications
fournies par le Râmâyana. Le moine dit, en effet : «Rex hujus Jauœ habet
bene sub se septem reges coronae?? (sic) , et l'emprunt au texte sanskrit est évident
et indiscutable, jlais ni le texte latin ni la version française éditée par H. Gon-
BiER, ne parlent explicitement de richesse aurifère du pays. Voici, par exemple,
la description du palais royal qui a do grands escaliers. ffGraduum unus est
aureus, aller vero argenteus. Pavimenlum autem ejus unum laterera habet de
auro, alterum vero de argento. Murus vero istius palatii totus est lamatus
interius laminis aureis in quibus lamis sculpti sunt équités solum de auro
babentes circa caput unum magnum circulum aureum. . . Insuper tectum ejus
totum est do auro puro.» C'est exactement ce que rapporte le Sin l'ang chou
(k. 222 "]», p. h. v") dans la notice sur le royaume de P'iao = Birmanie qui
contient un itinéraire finissant 'au Chô-p'o = Java : Le pays de ^ |^ |J[] J^
P'o-bouei-kia-lou [graphie fautive pour ^ ^ ffni Sfr P'o-lou-kia-sseu, dans
l'est de Java, vide supra, p. ho] est chaud; aux carrefours et sur les routes on
a planté des cocotiers et des aréquiers; eu levant la tète, on ne voit pas le
soleil. A l'habitation du roi, les tuiles sont faites en or; les cuisines sont cou-
vertes de tuiles d'argent. On brûle des bois parfumés. Les salles sont ornées
de perles brillantes. H y a deux étangs dont les berges sont en or; les rames
des bateaux sont entièrement garnies d'or et de joyaux [apiul Pelliot, Deux
itinéraires, p. 22^). «Cette abondance de l'or et de l'argent, dit Sylvain Lévi
en commentant la citation d'Ononio de Pordenone, semble gloser suvarna-
rûpyalcadvîpan {il/id., p. S;',). A mon avis, la question n'est pas là; l'ancien
palais d'un llàrQu ar-RasTd, d'un doge de Venise ou le Louvre d'un Louis XIV
aurait pu valoir dans la relation d'un voyageur hindou, l'épithète de SMvama-
rîipyali-a a[)i)\k\uéG à Bagdad, Venise cl Paris. Ce qui importe dans le passage
du Râmâyana, c'est le suvarnâharamandita. Or, ni le Sin t'anu chou, ni Odouic
ne p;irlenl de mines d'or. La Java des T'ang et d'ODonic était riche et. prospère;
le palais de ses princes, fastueux; et c'est encore le cas. Mais sa richesse auri-
fère est à peu près nulle. Peut-ôlre, la description d'Onouic a-t-elle été influ-
__«.( 1/48 )<4— [204]
posée reste donc ouverte et il est peu vraisemblable qu'on y
trouve réponse quelque jour. La seconde information est, au
contraire, précise et il est aisé d'en vérifier l'exactitude : la
seule île de l'Insulinde occidentale «parée de mines d'or»,
c'est Sumatra: sa richesse aurifère lui vaudra le nom de «île
de Yoni dans un grand nombre d'inscriptions et de textes qui
ne prêtent pas à discussion.
Sumatra est l'île la plus occidentale du grand archipel
d'Asie. Située à l'avancée des terres indonésiennes, voisine de
la péninsule malaise , c'est évidemment l'île qu'ont colonisée
d'abord les immigrants venus de l'Inde, quelques siècles avant
notre ère. Leur premier atterrissage en Indonésie est inscrit
sur la carte et aussi certain que si l'épigraphie nous en donnait
l'assurance explicite, qu'ils soient venus directement par mer
ou qu'ils aient longé, en cabotant, la côte occidentale de la
péninsule malaise. Les « sauvages v sumatranais de la période
antérieure à l'hindouisation de l'île, ne pouvaient ni ne de-
vaient faire mystère de l'abondance de l'or dans leur pays,
s'ils en exploitaient déjà les mines : avant que l'ère des
échanges internationaux ait pris naissance, l'or n'est qu'un
métal comme un autre, moins utile que le fer. Peut-être,
comme le rapporte Ibn HoRDie^^BEH des Wâkwâk orientaux,
étaient-ils « tellement riches en or, que les habitants fabriquent
avec ce métal, les chaînes de leurs chiens et les colliers de
leurs singes 55(1). Dans cette hypothèse, les Hindous immigrés
encée par celle de Vàlmïki; en tout cas, le moine voyageur reproduisait une
opinion courante, non dénuée d'exactitude, qui vantait la splendeur des palais
royaux de Java au xiv° siècle, en termes à peu près identiques à ceux de la
Nouvelle histoire des Tang. Et ceci n'infirme pas la localisation à Sumatra du
Yavadvîpa, aux environs de notre ère.
'') Cf. mes Relations de voyages, t. I, p. 3o-3i , et t. II, p. 67^ pour la rec-
tification à la p. 3i, 1. 3. C'est dans ce «pays de l'orn que je compte situer les
Vâkwâk orientaux. Il en sera longuement traité dans un excursus du t. III de
mes Relations de voyages.
[205] — «♦( UO )k^—
ne pouvaient pas ne pas être frappés de cette richesse qui
s'étalait en toute innocence, au grand jour. Si, au contraire,
les premières exploitations aurifères ont été inaugurées par
les immigrants hindous qui connaissaient la valeur de l'or,
le résultat reste le même. Je veux dire que dans l'une ou l'autre
hypothèse, les civilisateurs de l'Inde ont su de bonne heure
qu'ils avaient découvert Vile, terre ou pays de l'or et c'est ainsi
qu'ils la. désignèrent le plus souvent : suvarnadvipa ou suvarna-
è/mm/(". Et à ce propos, on doit ajouter ici que la date de
rédaction initiale du Râmàyana serait la bienvenue pour cette
autre cause : elle tiendrait lieu d'une sorte de terminus a quo
qui nous manque encore, pour fixer approximativement, mais
sur une base certaine, l'époque où fut colonisée l'Insuhnde.
Enfin, Sumatra s'est appelée aussi Java<z.Yava, nous le sa-
vons de source certaine; ce fut le pays des Jàvaka, ce qui est
également attesté sans conteste'-'. On conçoit donc que le
Râmàyana puisse parler d'un Yavadvlpa suvarnâkaramandita et
qu'il s'agisse de Sumatra. Mais si nous continuons à situer Ya-
vadvipa à Java, le texte sanskrit est incompréhensible, parce
que matériellement inexact. Une tradition déjà longue a con-
sacré l'équivalence Yavadvïpa = i\e de Java de nos cartes. Il
semble que l'identification est définitive et inattaquable quand
un Kern et un Sylvain Lévi l'ont adoptée sans réserve. Reve-
nons , cependant , au Râmàyana et aux environs de notre ère ,
alors que la tradition n'est pas encore établie. Les colons hin-
dous sont à Java, s'y étabhssent et constatent qu'il n'y a pas
d'or ou qu'on l'y trouve en petite quantité, ce que nous savons
par ailleurs. C'est ce qu'on peut conclure de la phrase du Sin
t'ang chou et du Song clic où sont énumérés les produits du
pays [supra, p. 176). Or, l'épopée sanskrite parle d'un Ya-
(') Pour cette dernière expression, cf. notamment, rinscriptlon de iao8
çalca = ia86 trouvée dans le Minahkabaw [supra, p. 179).
(') Vide infra, p. iiii8-2a(j cl supra, p. 47-68.
—*->( 150 ).€^— [206]
vadvipa suvarnàkaramandita , c'est-à-dire d'un suvarnadvîpa ,
d'un ^ §\\ kin-tcheou, d'une «île de l'orw; et «l'île de l'or??,
c'est Sumatra. Si on maintient Fidentification traditionnelle,
il faut admettre que Yavadvïpa = Jaya a été pourvue par erreur
d'une richesse en or que Sumatra seule possède. On voit im-
médiatement combien une telle explication manque de base et
prête à la critique. Car, enfin, de deux choses l'une : on con-
naissait sûrement Sumatra à l'époque où écrivait Vâlmïki :
c'est ce qu'autorise à poser son suvarnàkaramandita; peut-être,
sans doute même, connaissait-on aussi Java; mais le poète
hindou informé de la richesse en or de celle-là, n'a pas pu
l'attribuer à celle-ci parce qu'il n'avait aucune raison de le
faire. En dernière analyse, Yavadvlpa a désigné Sumatra; nous
en avons la certitude par des formes dérivées de Yava dont j'ai
parlé déjà'^^; mais la richesse aurifère de la Yava du Rfwiâ-
yana est, à mon sens, l'argument décisif pour rejeter l'identi-
fication traditionnelle et adopter celle qu'on propose ici ^-\
En utilisant les renseignements fournis par Edrîsî [supra,
p. 65), Ibn Sa'îd, Diogo de Couto, le Père Luiz Marianno,
Manuel Freire de Andrade , le Père Nacquart, Flacourt et les
témoignages linguistiques que fournissent les dialectes mal-
gaches anciens et modernes (cf. mon mémoire Le K'ouen-louen
et les anciennes navigations interocéaniques dans les mers du Sud,
dans /. is., XI" série, t. XIV, 191 9, p. 62-68, et les ouvrages
cités), je suis arrivé à la conclusion que «Madagascar a été
colonisé vers le début de notre ère par des Indonésiens occi-
dentaux hindouisésî) [ilnd., p. 68). J'ai, depuis 1919, repris
l'étude de l'inscription en vieux-malais de Kota-Kapiir, dans
l'île de Banka [supra, p. 36; cf. également /. As., juillet-
<^) Vide supra;, p. lyG.
''' Vide supra, p. 2o3, n. i.
[207] — «•( 151 ).«—
août 1919, p- i53, note). Les affinités remarquables de ce
texte avec le malgache ancien et moderne, à l'exclusion de
toute autre langue du domaine, tant au point de vue de la
phonéticjue que de la morphologie et de la syntaxe, permettent
de préciser davantage. A k Indonésiens occidentaux hindoui-
sés5i, on peut substituer maintenant «Sumatranais bindoui-
sés V '^'
La date de cette migration par la voie de mer est naturelle-
ment approximative; mais la migration d'est en ouest ne peut
se situer dans le temps qu'à très baute époque et il est, en
somme, de peu d'importance qu'il faille un jour la faire des-
cendre d'un siècle ou deux. Nous en connaissons les points de
départ et d'arrivée, et c'est un résultat appréciable en pareille
matière. Les Indonésiens occidentaux qui ont colonisé Mada-
gascar alors peuplé de nègres parlant une langue bantoue,
ont imposé aux anciens habitants de la grande île africaine
leurs langue, mœurs et coutumes, religion, et profondément
modifié leur type somatique. Le fait est incontestable, car
nous en avons des témoignages certains que l'anthropologie,
l'ethnographie et la hnguistique ont enregistrés. Il restait à
retrouver le pays d'origine des immigrants et c'est en Indoné-
sie que devait s'effectuer l'enquête. La traversée de l'Océan In-
dien de bout en bout et à haute époque suppose chez les ma-
rins qui vont l'entreprendre, une connaissance parfaite de la
mer, un matériel navigant perfectionné par rapport à l'arme-
ment rudimentaire à la pêche ou au rabotage; en bref, l'exis-
tence de tout ce qu'exige la navigation haulurièrc. Une telle
préparation ne peut se concevoir que chez un peuple de haute
culture, identique, par exemple, à celle des marins d'Hiram,
(') Ceci conGrme l'interprétation que j'avais indiquée précédemment du
mal{jaclie Ramini, Raminia par «le Sumatranais, la Sumalranaisen (cf. mon
article Les Uns Ràmnif, Ldmevji, Wakwak, Kvmor des néu^n-aphes arabes et
Madaguscar, dans J. As., V série, t. X, 1907, p. Ulii et suiv.).
— «.( 152 )k^^— [208]
roi de Tyr, qui se rendaient à la mystérieuse Ophir pour le
compte de Salomon. Je pense avoir montré dans mon mémoire
sur Le K'ouen-îouen et les anciennes navigations interocéaniques
dans les mers du Sud, que les mers de Chine, du jjrand archipel
d'Asie et l'Océan Indien ont été parcourus aux environs de notre
ère par des navires de pays différents et notamment de i'In-
sulinde occidentale. Au fur et à mesure que progressent les
études entreprises dans ce domaine spécial de l'activité extrême-
orientale, des faits se précisent qui étaient ignorés ou restés
dans l'ombre. La révélation par les textes d'un puissant empire
sumatranais au vn^ siècle, nous est un précieux témoignage
permettant de remonter dans le passé et de retrouver dans le
glorieux Çrivijaya de Yi-tsing, la descendance des lointains
ancêtres qui colonisèrent Madagascar et l'Afrique orientale
(cf. le mémoire précité). C'est également à l'île de Sumatra
tout entière ou plutôt à une partie de l'île non expressément
indiquée, que s'appliquent trois textes chinois (^Heou han chou,
k. 6, p. 3 v°; Tong kouan hi, k. 3, p. h v"; Tsien han chou,
k. 1 1 6 , p. 3 v°-/t r°) ayant trait à la même ambassade et qu'on
peut résumer ainsi :
1 32. «La sixième année 7j07ig-kiende l'empereur |^ Chouen,
au 12* mois [=tout au début de i32 de notre ère], le roi du
^ m Ye-tiao (pron. anc. *Yap-div=Yavadvîpa^, ^ Pien ,
envoya en ambassade êi '^ Che-houei (phonétiquement Se-
hwi) pour se rendre à la cour de Chine et offrir le tribut. De
Che-houei, on fit un «maître de la ville de Ye-tiao soumis aux
«Han 55. L'empereur de Chine accorda au roi Pien un sceau
d'or et un ruban violet ^^'.»
(1) Apud Pelliot, Deux itinéraires, p. 266. Le même auteur dit plus ioin
{ibid., p. 268, n, 2) : « . . .En proposant de retrouver Yavadvïpa dans Ye-tiao,
je ne veux naturellement pas dire qu'il faille y voir Java même plutôt que
Sumatra; c'est pour moi le pendant du nom donné par Ptolémée et rien de
plus. »
[209] —>«•( 153 ).«—
2' moitié du ii^ siècle. «Déjà même au if siècle, dit Syl-
vain Lévi (^Pour l'histoire du Râmâifana , ./. As., XI" série, t. XI,
1918, p. 82), la notice de Ptolémée (VII, 2, 29) semble
traduire en langage positif les données du Râmâyana et du
Saddharmasmrtyupasthanasutra (^^ : «labadiou, ce qui signifie
«l'ile de l'Orge î5, est, dit-on, d'une fertilité extraordinaire, et
«produit beaucoup d'or; la capitale est ArgyrO «[la ville] de
«l'argent^i située à l'extrémité occidentale par 167° de longi-
cttude], 8°3o' sud [de latitude], l'extrémité orientale de l'île
«étant par 169% 8" 3 0' sud '-' a (cf. également G. Coedès, Textes
d'auteurs g^recs et latins relatifs à l'Extrême-Orient, Paris, 1910,
in-S", p. 61). Le Rûmnijana et la Géugraphie de Ptolémée notent
également la richesse aurifère de Yavadvîpa; il ne peut donc
s'agir que de Sumatra.
2/i5-2 5o. «Dans les fragments subsistants du Fou-nan t'ou
sou tclwuan de K'ang T'ai (2/i5-25o), il est question à plu-
sieurs reprises du pays de i# f# Tchou-po, pron. anc. *Cu-hak
(transcription fautive i^our *Sô-bah<cJâvaka), à l'est duquel
on arrivait à l'île ,^ ^ Ma-ivou [?]. Selon le Waikouo tchouatf
(qui doit remonter au in" siècle), les femmes de Tchou-po
savent tisser des cotonnades à ramages. Ce pays de Tchou-po,
est-il dit dans d'autres textes qui remontent indirectement à la
mission de K'ang T'ai, se trouvait à l'est du Fou-nan, dans le
C Dans un article que ne connaissait pas Sylvain Lévi, publié en 1869
dans les Bijdragen et qui a été réimprimé dans le tome V des Veisprmde
geschriften {Java en het Goudeiland volgens de uudsln bcrichtcn, 191 0, p. 807
de cette dernière publication), Kkun dit éjjalement : «Quand on compare les
données du Râmâyana avec celles de Ptolémki;, on peut poser avec uue suffi-
sante certitude, ce qui peut également s'entendre de YavadvTpa, que, dans
tous les cas , le Yavadvîpa riche on or des Hindous et la labadiu ricbe on or du
géographe alexandrin ne sont qu'une seule et môme île.» Kehn et Sylvain Lévi
la situent à Java; mais je l'identilie, ay contraire, à Sumatra.
'-) Ce (jui (loin e à l'ile une longueur do -i degrés eu longitude. Lu réalité,
Java s'étend sur près de 10 degrés en longitude.
M. G. FElUiANU. 1 1
-—«.{ 154 ).«— [210]
Si ']# Tchang liai, qui est noire mer de Chine de Hainan
au détroit de Malaka. ?5 (Pelliot, Deux itinéraires, p. 269-
270.) Vide supra, p. l'ya-iyS.
F
892. Le Oie eul yeou king ou «SCitra sur les Douze Etapes
du Buddliajj, traduit en 892 par le moine Kâlodaka., contient
une notice sur le Jambudvipa qui est insérée dans le King hu yi
siang compilé en 5 1 6 et où il est dit ceci : ç^ Dans la mer, il y a
2.5oo royaumes. . . Le premier roi a pour nom ^jf M Sseu-h;
ce royaume ne sert que le Buddha et il ne sert point les héré-
tiques. . . Le quatrième roi a nom ^ %^ Chô-ye; la terre y
produit le £jï ^ pî-pa «poivre long 55 et le jUM hou-tsmo
«poivre»... (Sylvain Lévi, Pour l'histoire du Râmâyana,
J. As., XP série, t. Xî, 1918, p. 83). «Le glossaire Fan fan
yu, compilé au vf siècle, à la fin du livre IV, section 1 2, cite
trois de ces noms : «roi de Kia-lo, roi de Pou-lo, roi de Chô-
ye?) (mêmes caractères c|ue ci-dessus) en se référant à un
«Sùtra sur les cinq Songes du Prince Royal» [Ta\ tseu wou
tnong king) qui ne se retrouve pas dans nos collections. Il
glose le nom de kia-lo par M « noir» (skr. hâla), pou-lo par ^
wville5) (skr.j^Mm), chô-ye par ^ff. r^ victoire» (skr.jaya)» {^ibid.).
Sylvain Lévi ajustement identifié Sscu-li à Ceylan, le Siele-
diba de Cosmas, dont «la dévotion au Buddha est bien un des
traits traditionnels de l'île». En ce qui concerne Chô-ye, le
maître indianiste considère que la notation chinoise est une
altération du nom de Java. Je renvoie au fascicule du Journal
de juillet-août 1919 (p. 162-163) où j'ai donné les raisons
pour lesquelles l'identification de Chô-ye, glosé par skr. jaya
«victoire», à Vijaya (qui a également le sens de ^victoire») =
Çrïvijaya, me paraît préférable.
lixli. «Fa-hien [revenant de l'Inde, via Ceylan] arriva
[, en /-i lA,] dans un pays appelé MM^ Ye-po-t'i[= Yava-
[211] --«^( 155 )<x—
dvlpaY^\ Dans ce pays, les brahmanes hérétiques sont fort
nombreux; quant à la religion buddhique, elle n'y a pas assez
d'importance pour qu'il vaille la peine d'en parler. 11 s'arrêta
là pendant près de cinq mois et s'embarqua ensuite sur un
autre navire marchand qui avait un équipage d'environ deux
cents hommes. On prit à bord pour cinquante jours de vivres
et on mit à la voile le 1 6' jour du k^ mois [chinois de Zii/i].
Fa-hien s'installa à bord du navire. On fit route au nord-est
pour se rendre à Kouang-tcheou (Canton) w (cf. Si yu hi, trad.
S. Beal, Londres, t. I, in-S", 1906, p. lxxxi).
De Ceylan à Canton la route habituelle passe par Che-li-fo-
che, c'est-à-dire le détroit de la Sonde et Palembaii. Tcheou
K'iu-FEi l'indique nettement au xn* siècle [vide infra, p. y 16)
et il n'y a aucune raison de croire que tel n'était pas l'itiné-
raire des marins du v* siècle. Yavadvïpa désigne donc ici Su-
matra et non Java.
«Dans le Kao seng (chouan ou Biographie des religieux émi-
nents, compilé en 5 1 9 ( Tripilaka de Tôkyô , ^ , II , k. 3 , p. 1 5-
16), dit Pelliot {^Deux itinéraires, p. 27/1-975), se trouve
entre autres la biographie de ^M^ÂM K'ieou-na-pa-mo,
Gunavarman. Gunavarman, petit-fils de PpI ii i^ PÉ Ho-li-pa-
t'o, Haribhadra, et fils de ff |[iD ^ H Seng-kia-a-nan , San-
ghânanda, appartenait à la famille royale du Ki-pin (Cache-
mire). Il se consacra de bonne heure à la vie religieuse. Quand
il eut trente ans, le roi du Cachemire étant mort sans enfant,
on voulut le mettre sur le trône, mais il refusa et partit pour
Ceylan, oii il habita un village appelé il] '^ M Kie-po-li. En-
suite il se rendit dans le royaume de |§ ^ Cho-p'o. La nuit
qui précéda son arrivée, hi mère du roi vit en songe un reli-
gieux qui entrait dans le royaume sur une jonque volante. Au
(') Bkai, ajoute entre parenthèses : «Java or, pe?-/iap«, Sumatra 5). Cf. éga-
leuient Pelliot, Deux itinéraires, p. -271.
11.
r
1
■~^«.( 156 ).«— [212]
matin, Gunavarman arrivait, et la reine-mère, convaincue par
son rêve, se convertit au bouddhisme. Elle usa de son influence
sur son fils pour qu'il l'imitât; elle parvint à le persuader.
Des ennemis ayant envahi le royaume, le roi demanda à Gu-
nuvarman s'il n'était pas contraire à la loi rehgieuse de lutter
contre eux; Gunavarman répondit qu'on devait châtier les bri-
gands; le roi partit alors en guerre et remporta la victoire. Peu
à peu le bouddhisme se répandit dans tout le royaume, et le
roi, qui voulait entrer en religion, ne renonça à ce projet sur
les instances de ses ministres qu'à la condition que dans le
royaume entier on cesserait de mettre à mort des êtres vivants.
La renommée de Gunavarman s'était répandue au loin; en
li'2k, des bonzes chinois demandèrent à l'emperem' d'inviter
Gunavarman à se rendre en Chine; des messagers furent dépê-
chés à cet effet à Gunavarman et au roi de Chô-p'o, ^ ^ #11
P'o-to-kia. A ce moment Gunavarman s'embarqua ou s'était
embarqué pour aller au Lin-yi (Campa) sur le navire du mar-
chand ^111^ Tchou Nan-t'i (l'Hindou Nandin); quand le
vent fut favorable, il gagna Canton. Il arriva à Nankin en 43 i,
et dut mourir quelques mois après, âgé à la chinoise de 65 ans.
Voilà la version de l'hagiographie, ajoute Pelliot, et sans
doute elle a quelque peu déformé pour le bon motif la vérité
historique. Il n'en reste pas moins, si le Chô-p'o est bien Java,
qu'entre la visite de Fa-hien qui en /ii A trouve dans l'ile si
peu de bouddhistes que «ce n'est pas la peine d'en parler» et
l'arrivée de Gunavarman à Nankin en /i3i, une active propa-
gande avait dû s'exercer à Java en faveur de la Loi. » La locali-
sation du Ye-p'o-t'i de Fa-hien à Sumatra supprime toute diffi-
culté, car il s'agit alors de deux îles ditîérentes.
v" siècle (fin du — ) ou commencement du vi". L'astronome
Aryabuata qui est né en k^6 de notre ère, dit dans son Arya-
hhalvjam[\S , vers i3) : «Lorsque le soleil se lève sur Ceylan,
[213] — «•( 157 ).«-»—
il se couche dans la ville des Bienheureux (aux îles Fortunées,
à 180" de longitude Ouest de Geylan); il est midi à la pointe
de Yava [Ynvakoti) et minuit dans le pays des Romains [Roma-
havisaije)^) [apud Kern, Java en het Goudeiland volgens de oudste
berichten dans Vespreide geschriften, t. V, p. 3 08). Kern inter-
prète Yavakoti par «pointe de Yava 55 = Java. En l'absence
d'indication décisive, il peut tout aussi bien s'agir de Sumatra.
Cf., à l'appui de celle nouvelle identification, ce passage du
Sûrya-Siddhânta[\\\, vers 38, de l'éd. Fitz-Edward Hall,
Calcutta, 1859 , Bibliotheca Indica) où il est dit : ç^Sur un [des]
quarts de la circonférence de la terre, gît, à l'est, dans la
partie du monde des Bhadrâçvas, la ville fameuse de Yavakoti
dont les remparts et les portes sont en orw [opiidKEm, ibid.,
p. 309). Et Kern ajoute dans son commentaire [ibid.) : «Ces
remparts et portes en or semblent être un ornement emprunté
à la description [du Yavadvïpa] du Râmâyanaw, et conclut que
nous manquons d'indications pour décider s'il s'agit de Java
ou de Sumatra.
Après ce qu'on vient de lire, il me semble que la traduction
de Yavakoti par «pointe de Yava = Sumatra w , peut être,
tout au moins provisoirement, adoptée. A la date où écrivait
Âryabuata, nous ne savons pas par ailleurs si la description du
Sin t'angchou [vide supra, p. 9o3, n. 1) était déjà applicable à
Java. 11 est hors de doute, au contraire, que le Çrivijaya que
nous dépeindra Yi-ïsing à la fin du vu" siècle, était en puissance
dans celui de la fin du v*, sans remonter jusqu'à Ptolémée ni
au Râmâyana.
6/i/i. En 6/1/1 ou tout au début de 6/i5, le nom de Mo-lo-
yeou apparaît pour la première fois dans les textes chinois.
«La 18" année tcheng-hoiian (6/1 A), dit le Ts'ô fou yuan kouei
(k. 177, p. i/i r°), au nVmois, le royaume de l!'^!^ ^ M Mo-
lo-yeou (=Malayu) envoya un ambassadeur (à la cour de
__„.( 158 )k+>- [2U]
Chine) offrir des produits du pays^^ (^apud Pklliot, Deux itiné-
raires, p. Sq/i ).
D'après Hobson-Jobson (^2" éd., s. v° Java, p. /i55, co-
lonne 9), il faudrait rappeler ici l'inscription de Pagar Ruyoii
datée de 678 çaka = 656, publiée par R. H. Th. Friederich
dans les Verhandclitigen van het Bataviaasch Genootschap van K.
en W. (deelXXVI, iSô/i-Sy, p. 3 1-8 6) où il est question d'un
roi appelé Adityadharma, demi de la première Yava = Suma-
tra; mais il n'existe rien de pareil : nom royal, «première
Yava?) et date proviennent de fausses lectures de Friederich.
Kern a, en effet, montré depuis longtemps que le véritable
nom du souverain en question est Adityavarman et que l'in-
scriplion est datée de 1278 çaka=i356 (cf. Verspreide
geschriftcn, t. VI, 1 9 1 7, p. 259-276). fJne transcription com-
plète de ce texie épigraphique a été publiée par N. J. Krom
dans Commissle in Nedcrlandsch-Indië voor oudheikundig onderzoek
op Java en Madoera (Oudheikun<!ig Verslag, 1912, 2" tri-
mestre, p. 5 1-52). J'y reviendrai plus loin i^infra, p. 289).
670-7/» 1 . Le Che-li-fo-che envoie des ambassades en Chine
de Çt'-jO ^A '-jhi [mpra, XII, p. 7).
686 = 608 çaka. L'armée de Çrïvijaya part en expédition
contre le pays de Java (==Java central) qui, à cette époque,
ne reconnaissait pas la suzeraineté de Çrïvijaya (sMpm, XXVIl,
p. 36).
?. Le poème tamoul Manimegalai cite le nom de deux rois :
Bhûmicandra et Punyarâja, qui régnèrent à Nâgapura, capi-
tale du pays de Çâvaka = Jâvaka = Zâbag {^vide supra, p. 1 1,
n. 1.
689-692. Lo moine Yi-tsing voyagea de Chine en Inde et
d'Inde en Chine de 671 à 696 oie notre ère. Il fit un premier
[215] — -«.( 159 )-^~-
séjour de six mois à Ghe-li-fo-cbe en 6 7 1-6 7 a ; un autre de
(|uatre ans en 686-689 et un troisième, à son retour de Can-
ton, à la fin de 689 qui fut également prolongé. Les deux ou-
vrages du pèlerin chinois dont il a été précédemment question
(I, p. 3, et IX, p. 6) ont été composés dans la période com-
prise entre 689 et 699 (c'est à cette dernière date que le
manuscrit en fut envoyé en Chine par l'auteur). Dans le Nan
haï ki kouei nei fa tchouan (^supra, IX, p. 6), Yi-tsing dit :
cr L'île (ou l'état) de Mo-lo-yu==Malâyu {^alias le pays de Minan-
kabavv), c'est maintenant (de 689 à 692) le pays de Che-li-
fo-chew, autrement dit : le Malâyu qui était antérieurement
l'état souverain de Sumatra, est passé, sans que nous sachions
pourquoi ni comment, sous la dépendance du Çrïvijaya. Yi-
ïsiNG désigne le Fo-che = Çrïvijaya sous le nom de «l'île de
l'or», ce qui assure son identification au Yavadvipa de Ptolé-
MÉE et du Râmâyana.
D'après certains renseignements que donne incidemment
Yi-TsiNCx (ds ont été relevés par Takakusu, dans l'introduction
de A Record, p. xl-xli), le Che-li-fo-che avait atteint un haut
degré de culture dès la seconde moitié du vii^ siècle. Ainsi ,
le pèlerin chinois s'y arrête pendant six mois en 671-673;
trj'y étudiai par degré, dit-il, la science des sonsw, c'est-à-dire
la grammaire sanskrite i^mpra, III, p. A). çrDans la ville for-
tifiée de Fo-che, dit-il encore, il y a plus de mille prêtres bud-
dhistes dont l'esprit est tourné vers l'étude et les bonnes
actions. Ils scrutent et étudient tous les sujets possibles, exac-
tement comme dans le Madhyadeça («le pays du milieu jj,
l'Inde); les règles et les cérémonies y sont identiques [à celles
de rindej. Si un prêtre chinois veut se rendre en Occident
[=dans l'Inde] pour y entendre (des leçons) et y lire (les
textes buddhiques originaux), il ferait mieux de séjourner
[d'abordj à Fo-che pendant un an ou deux et d'y prati(juer
les règles convenables; il pourrait se rendre ensuite dans l'Inde
-^^>{ 160 ).«— [216]
centrale» [A Record, p. xxxiv). De tels conseils donnés jiar un
moine chinois qui parle en pleine connaissance de cause, ont
pour nous une signification évidente : l'enseignement du sans-
krit et l'interprétation des textes buddliiques étaient organisés
avec tant de soin, de méthode et de science que la réputation
des maîtres de Che-li-fo-che les faisait préférer à ceux de l'Inde
propre par un buddhiste chinois aussi éminent que Yi-tsing.
Celui-ci apprit également la langue indigène : le vieux-malais,
et son exemple fut suivi par plusieurs religieux, notamment
par le tonkinois Yun-k'i (I, p. 3) et le chinois Ta-tsin
(VII, p. 5).
Mais ce n'est pas tout. Cette maîtrise dans l'enseignement
du malais, du sanskrit et de la Loi qui est l'indice certain d'un
haut développement intellectuel, va de pair avec une égale
maîtrise dans l'armée et la marine dont témoignent incontes-
tablement les campagnes A-ictorieuses à Java, sur la péninsule
malaise et au Cambodge. Le commerce et la marine marchande
ne sont pas moins florissants : Che-li-fo-che est l'escale en
quelque sorte obligatoire entre l'Inde et la Chine. Tcheou K'iu-
FEi dira en 1178, dans son Lingivai tai ta, que «le San-fo-ts'i
est l'escale maritime la plus importante pour les étrangers.
Qu'ils viennent de Java, dans l'Est, ou du pays des Ta-che
(Arabie) et de Kou-lin (Quilon du sud-ouest de l'Inde), dans
l'Ouest, tous passent par là en se rendant en Chine 57 [Chau Ju-
kua, p. 63, n. 1). Enfin, si on en juge par l'attitude du Maha-
raja de Zâbag vis-à-vis des Cambodgiens vaincus {supra,
XXXIX, p. 56-6 1), la noblesse morale et la sagesse politique
de ces souverains Çailendra ne sauraient être trop admirées.
Telle est la situation de l'empire sumatranais au vu* siècle.
Cette prospérité éclatante dans tous les domaines est tellement
inattendue dans la Sumatra actuelle, qu'elle resterait insoup-
çonnée sans le témoignage décisif des historiens et géographes
étrangers. L'étude et la confrontation des textes nous a révélé
[217] -^«.( 161 y^-
l'existence d'un nouveau centre de civilisation dans les mers du
Sud. Comme au Cambodge et au Campa, l'Aima mater
indienne, à haute t^poque, v «avait apporté ses dieux, ses arts,
sa langue littéraire, enfin l'appareil complet de sa civilisa-
tion (^^». Et pendant plus d'un millénaire de notre ère, ces
disciples de l'Inde firent grand honneur à leurs éducateurs.
696. Une décision de l'empereur de Chine prescrit de
donner six mois de vivres aux envoyés du Che-li-fo-che crui
viendraient à la cour (XIII, p. 7).
702 et 716. Ambassades du Fo-che à la cour de Chine
(XIV, p. 7).
717. Fo-che est visité par le moine Vajrabodhi se rendant
en Chine (XI, p. 7). C'est peut-être vers cette époque que le
moine chinois Houei-je, se rendant de Chine en Inde, passa
également par Fo-che (X, p. 6).
72/1. P M^^t^f^ Che-li-t'o-lo-pa-mo (Çrindravar-
man), roi du Che-li-fo-che, envoie une ambassade en Chine
(XV, p. 7).
728. Nouvelle ambassade quatre ans après (XVI, p. 8).
782^65/1 çaka. C'est la date que porte l'inscription trou-
vée à Java et qui a été publiée en i885 dans les Bijdragen par
Kern (^De sanskrit- inscri plie van Canggal (Kë(hi), uit çaka 65â
(dans Verspreide geschrijten, t. VII, 1917, p. it/i-128).
Le passage intéressant pour ce mémoire est le suivant dont
je reproduis le texte en transcription, d'après Kern :
âsîddvîpavaram \javâkhijamalula)ulhâ{inja) divijâdkikarn
smwpannam kanakâknraistadamarai ...
Il était (sic) une île excellente, incomparable, appelée Yava, fertile
'') Sylvain Li'vi, Pour l'histoire du Uâmâxjana , J. As., XI* série, t. XI,
1918, p. i53.
— M.( 162 ).«-- [218]
en céréales et autres graines , riche en mines d'or ; les immortels s'en
sont emparés par etc. (sic) ...
Après avoir noté que le texte devrait avoir asti au lieu de
âsît (vide supra, p. 176), Kern dit en note : «La traduction est
défectueuse et incertaine (gebrekkig en onzeker); il manque un
mot que je ne sais pas comment suppléer parce que je ne puis
pas deviner l'intention du poète. La première syllabe peut être
aussi bien s/Ar7 quesvân {ibid., p. 122, n. 2). Ce passage rap-
pelle singulièrement celui de Râmdyana sur Yavadvïpa et Kern
n'a pas manqué de signaler la concordance (mV/e supra , p. 17^).
Je n'ai rien à ajouter à ce que j'en ai dit déjà i^supra, p. 176):
il s'agit ici delà Yava = Java de nos cartes etl'épithète de kana-
kàkara «riche en mines d'or 55 est absolument injustifiée et inex-
plicable. La richessse en or est un fait spécifiquement sumatra-
nais qui a été gratuitement transporté à Java sans qu'on puisse
entrevoir la raison cjui a dicté de tels vers au poète.
7/12. Le roi de Fo-che, Witê ^M Licou- t'eng-wei-kong,
envoie son fils à la cour de Chine pour offrir le tribut (XVII,
p. 8).
776. L'inscription sanskrite de Vien Sa (XXIX, p. ki)
commémore la construction de trois stupas effectuée sur l'ordre
du roi de Çrïvijaya. Le texte épigrapbique donne au souverain
les titres de : «roi suprême des rois 55, «Çrï Maharaja» et ajoute
qu'il est «le chef de la famille des Çailendra (^litlér. : roi de la
montagne) f^' 55. On a vu déjà (p. i65) que le second de ces
titres est celui sous lequel fut connu par les Arabes, le roi du
Zâbag<:Jâvaka qui est un autre nom de l'empire de Çrïvijaya.
? D'après l'inscription précédente, l'empire sumatranais
'^' Pour la traduction «roi de ia montagne^ au lieu de «roi des montsn,
cf. mon compte rendu de Le royaume de Cnvijaya de Coedès dans /. As..
juillet-août 1919, p. 198-199.
[219] -^.( 163 JK-i—
s'étendait jusqu'à Vien Sa dans la seconde moitié du viii'' siècle.
Le texte ne le dit pas expressément, mais le fait de la posses-
sion du pays par l'empereur sumatranais me paraît résulter
assez clairement des titres souverains qui lui sont attribués
dans ce document; un prince étranger indépendant ne s'en
serait cerlainement pas accommodé dans son propre pays (cf.,
par exemple, l'inscription cola, XXXII, p. /i6). Viefi Sa est
donc sinon une colonie de Çrîvijaya, tout au moins un pays
de protectorat de l'empire sumatranais.
Si l'empire de Çrîvijaya fait acte de pouvoir souverain dans
la baie de Bandon au viif siècle, c'est évidemment que ce terri-
toire alors cambodgien et de langue cambodgienne (cf. l'in-
scription de Grahi, supra, XCI, p. 181) a été conquis par
l'empereur sumatranais, qui s'est également emparé des autres
états ou provinces maritimes de la péninsule malaise. C'est
vraisemblablement vers cette époque qu'a dû avoir lieu l'expé-
dition du Mabârâja du Zâbag ou Çrîvijaya contre le Cambodge.
La relation qu'en donne Abv Zayd (XXXÏX, p. 69-61) a été
rédigée au début du x'' siècle; Mas'îjdï rapporte les mêmes faits
dans ses Prairies d'or, qui ont été rédigées en g 4 3 {^swpra,
p. 62). L'un et l'autre s'expriment dans les mêmes termes :
les faits dont il s'agit se sont passés -Uiii ^oj-xï ^ «dans les
temps anciens 5?. L'expression est aussi vague que t^ jadis, au-
trefois 55 et ne peut se traduire cbronologiquement par une
reculée déterminée; des informations complémentaires per-
mettent seules de situer les faits dans le temps. L'inscription
de Vien Sa me semble en tenir lieu. C'est donc au vin* siècle
qu'on peut placer l'expédition victorieuse du Maharaja contre le
Cambodge. A prendre à la lettre le récit de Mas'ûdï et de Abu
Zayi) qui sont identiques dans le fond et la fonne, le Maharaja
avait prétexté «un voyage d'agrément dans les îles de son
royaumes, pour cacher le véritable but de ses armements
ninriiiuK's (^.wpra, p. 60). Le terme arabe employé : jjU-=>- bit.
„.H^( 164 )^-H^ [220]
«îles» peut s'appliquer à des possessions de la péninsule
malaise qui est elle-même une iiyyf^ «île 55 ou rc presqu'île».
Ce voyage d'agrément dans des possessions du Zâbag devait
s'effectuer dans la direction du Cambodge pour pouvoir servir
utilement les projets du Maharaja. Comme la seule terre con-
tinentale ou insulaire qui remplît ces conditions est la pénin-
sule malaise, on en est amené à conclure que le Zâbag était
déjà souverain d'une partie de la péninsule sinon de la pénin-
sule tout entière au moment où le Maharaja allait venger l'in-
sulte de ce « fou » de roi klimèr.
779 = 701 çaka. L'inscription sanskrite de Kalasan
(XXVIIÏ, p. 38-/n) nous renseigne sur les résultats de l'ex-
pédition entreprise en 686 contre l'île de Java (XXVII, p. 36),
plus exactement contre le roi javanais du centre de l'île. Qu'elle
ait précédé ou suivi l'expédition contre le Cambodge, cette
nouvelle campagne fut également victorieuse, car le texte épi-
graphique précité présente le roi « de la dynastie des Çailen-
dra», c'est-à-dire de la dynastie régnant à Çrïvijaya, comme
le véritable maître de Kalasan , faisant une donation à un temple
situé en son propre royaume. Cette situation de fait est impli-
citement confirmée par un passage du Sin fang chou i^ihd.) qui
relate le transfert à Grise (Java oriental) de la capitale de Java
central, abandonnée au Çailendra victorieux dont l'occupation
se prolongea pendant environ un siècle.
803-869. L'inscription bilingue, sanskrite et khmère, de
Sdok kak thom qui contient la date de 97/1 çaka= 1062 —
«c'est sans doute en cette année même qu'elle fut rédigée:? —
a été éditée, traduite et commentée par Finot (^B.E.F.E.-O.,
t. XV, 1915, II, p. 53 et suiv.). Il est dit dans la partie
khmère [ibid. , p. 71 ; pour le texte, p. 61 et 68-78; pour la
traduction, p. 87 et 88): c^Alors S. M. Parameçvara (= Jaya-
varman II, 72^-791 çaka = 80 2 -86 9) vint de Java pour
[221] —M ^65 )'€4~-
régner dans la cité d'Indrapiira . . . Alors un brahmane nom-
mé Hiranyadâma, savant dans la science magique, Aant de
Janapada , parce que S. M. Parameçvara l'avait invité à faire
un rituel pour que le Kambujadeça ne fût plus dépendant de
Java et qu'il y eût [dans ce royaume de Kambuja] un souverain
cakravartin . . . v L'identification de Çrwijaya à Zâhag <: Jâ-
vaka = Yava = Jâba = Jàwa des textes arabes, entraîne auto-
matiquement, pour ainsi dire, l'interprétation de Java par
Java = Sumatra. C'est à la suite de la campagne du Maharaja
au Cambodge — l'expédition ayant eu lieu vers la fin du
viif siècle , ce qu'autorisent à poser l'inscription de Vien Sa et
la relation de Mas'ùdi et Abu Zayd — que l'empereur sumatra-
nais vainqueur aurait imposé au Kambujadeça un souverain de
son choix. Le Zâbag se situant à Sumatra, Java propre est
hors de cause, car ce que nous savons historiquement ne per-
met en aucune façon d'attribuer un tel rôle à l'un des souve-
rains javanais contemporains de Jayavarman IL
8/i4-8/i6. Première mention du Maharaja du Zâbag dans
un texte arabe, par Ibn Hordâ^beh [supra, XXV, p. 52).
85 1. Texte arabe du marchand Sulaymân (^supra, XXV,
p. 53).
ix" siècle (fin du — ). Isiiâk bin 'Imrân, mort en 907, fait
mention du camphre du Zâbag (^supra, XXVIIl, p. 55).
909. Ibn al-Fakïh donne quelques renseignements sur la
situation elles produits du Zâbag [supra, XXXVI, p. bh).
908 (vers — ). Ibn Hosteii décrit l'ordahe du feu en usage
dans le pays du Maharaja, à Pancur ou Baros de la côte occi-
dentale de Sumatra (cf. mes Relalions de voijages , t. I, p. 79-80).
C'est, dit-il, «un pays de l'Inde [hic) bien connu 55 (XXXVII).
---«.( 166 )<s^ [222]
90/i (ou 906 ). Envoi d'une ambassade en Chine par le
San-fo-t'si [supra,]-), ili, lyetn. 1).
916 (vers — J. Abu Zayd fait, pour la première fois, une
description un peu détaillée du Zâbag {^supra, XXXIX, p. 56
et suiv.) et de la cour du Maharaja. Suit la très importante re-
lation de la campagne du Maharaja contre le Khmèr ou Cam-
bodge. Dans ce texte arabe apparaît le nom de la ville ou état
de Sribuza = Çrmjaya.
9/13 et 955. Dans les Prairies d'or et le Livre de l'avertisse-
ment (XL et XLI, p. 62 et 63), Mas'^ûdï donne des renseigne-
ments à peu près identiques.
960-962. Le roi de San-fo-ts'i, ^. M ili ^ ^ H 'fl Si-li
hou-ta hia-li-t' an = Çrl Kuda Haridana (?], envoie une ambas-
sade en Chine. Autre ambassade envoyée pendant i'hiver de
la même année par le roi ^ ^1J ,% Jf^ Che-li Wou-ye=-Çvi
Wuja(?),etau printemps de 962. Le dernier ambassadeur dit
que le San-fo-ts'i s'appelait également ^ ^ Sien-lieou, vrai-
semblablement pour 5^^ Mo-&oM = *yiirt'-//eoif = Malâyu
(^swpra, p. ly, n. 3).
971, 972, 97^, 975- Quatre ambassades envoyées par
un ou des rois non dénommés.
980 , 983. Ambassades envoyées par les rois ^ '-^ Hia-tch'e
ai 'M ^ Hia-tch'e (dans les deux cas il s'agit du titre indo-
nésien Haji «roi 55).
983. Passage du religieux Fa-yu se rendant d'Inde en
Chine. Il s'y arrêta encore en retournant de Chine en Inde
[supra, XX, p. 22).
988-992. Autre ambassade en 988. A son retour de Chine
en 990, l'ambassadeur apprit ctdans le Sud^;, en retournant à
[223] — «.( 167 )<^—
San-fo-ts'i, que son pays avait été envahi par les Javanais qui
l'occupaient encore au commencement de 992. Du Campa où
il recueillit ces fâcheuses nouvelles, l'ambassadeur revint à la
Cour et demanda à l'empereur de rendre un décret mettant
le San-fo-ts'i sous le protectorat de la Chine. L'invasion du San-
fo-ts'i par les Javanais est vraisemblablement la revanche de
l'invasion du centre de Java en 686 et de l'occupation de cette
partie de l'ile par les Çailendra jusque vers 880 (supra, XXVIII,
p. 3 8-/11). Autant que nous sachions, l'occupation javanaise
du San-fo-ts'i fut de courte durée.
x' siècle. Al-Faris affirme l'identité de Sribuza et de l'ile du
Maharaja (supra, LXVII, p. 'jk).
1000 (vers l'an — ). V Abrégé des Merveilles (^XLll, p. 63-
G/i) fournit des informations sur le pays du Maharaja, Sribuza ,
V '
Jàba et le Zâbag.
1 00 3. Envoi d'une ambassade en Chine par le roi de San-
fo-ts'i Çrïculamanivarman (supra, p. 19).
ioo5 ou 1006. La 21" année du règne de Râjarâja P""
(980-1012) une inscription est gravée commémorant la dona-
tion d'un village à un temple buddhique de Negapatam dont
la construction fut commencée par le roi de Çrîvijaya Cûlâma-
nivarman (le souverain précédent) et achevée par son tUs et
successeur Çrimâravijayotlungavarman (sM/;m^ XXXII, p. /i6).
ioo'7=-=92 9 çaka. La capitale de Java est détruite et son
roi tué. Il s'agit vraisemblablement d'une campagne heureuse
du Çrîvijaya, en représailles de l'invasion du San-fo-ts'i par
les Javanais une quinzaine d'années auparavant (cf. P. V. van
Stein Callenfels, De veroveraar vun Dhurmmawangça's kralon,
dans Oudlieiliumlig verslag, 1919» P- i^^ et suiv.).
1008. Envoi d'une ambassade en Chine par le roi Çrimâ-
_„^5.( 168 ).«^ [22i]
ravijayottungavarman , fils et successeur du précédent i^supra,
P- 19)-
1017. Haji Sumatrabhûmi wle roi de la terre de Sumatra »
envoie une ambassade en Chine (^supra, p. 19).
1028. Le roi Çrideva envoie en Chine une ambassade
{^supra, p. 90).
io3o. Le roi Râjendracola P' (10 1 2-10/19) au cours d'une
heureuse campagne s'empare des possessions métropolitaines
et coloniales de l'empire de Çrivijaya {^supra, XXXI, p. kk).
io3o (vers — ). Birùni rapporte cjue les îles du Zâbag
sont appelées dans l'Inde, suvarnadvlpa {\\A\\ ^ p. 64). Cf. éga-
lement les informations contenues dans son Kânûn (^supra,
p. 75).
1067. Devakala, l'un des plus hauts dignitaires de San-fo-
ts'i, se rend en ambassade en Chine {^supra, p. 90).
1068. Un des successeurs de Râjendracola P"", son fds (?)
Vïrarâjendra P", prétend aussi, en 10G8, avoir conquis Kadà-
ram et l'avoir ensuite rendu à son roi (le souverain de San-fo-
Is'i; cf. HuLTZscH, Soulh-lndian Inscriptions, t. III, p. 192,
iq5, 90 2, dans CœoÈs, Le royaume de Çrivijaya, p. h, n. à).
1068-1077. D'après le Wen hien t'ong k'ao (Ma Touan-lin,
Méridionaux, p. 586), le ^ ^ Tchou4ien (ou pays des Co-
las) était, à cette époque, vassal du San-fo-ts'i.
1078-1085. Pendant cette période, des ambassadeurs
sont envoyés en Chine (^supra, p. 21).
1080. Un étranger du Sud, qui avait la direction des
affaires de son pays, apporte à Canton une lettre de la fille
du roi écrite en caractères chinois [supra, p. 91).
[225] — «.( 169 ).«--
1 oSa. Arrivée en Chine de trois ambassadeurs du San-fo-ts'i
i^supra, p. 2 i).
io83. Nouvelle ambassade en Chine {^supru, p. 22).
io8ii±. Le roi de Kidâra = Çrïvijaya envoie deux ambas-
sadeurs auprès du roi cola pour demander une exemption de
taxes au bénéfice du village donné au temple buddhique élevé
par les soins d'un de ses prédécesseurs, Çriculamaiiivarman
[supra, XXXIII, p. /ly).
1088= 1010 çaka. Une inscription tamoule de cette date
a été trouvée sur la côte occidentale de Sumatra, à LobuTawa,
près de Baros. Elle rappelle un don fait par un groupe de per-
sonnes qui y sont appelées ^des i5oo??. C'est tout ce que le
mauvais état de l'inscription apermisàHuLTzscH delire(cf. ^cwr.
v4s., juillet-août 1919, p. 19^)-
1 09/1-1 09 7, ''Autre ambassade pendant cette période (p. 2 2).
1182. Harakî cite Tîle de Sribuza d'où l'on exporte le
camphre (^supra, p. Ghy
11 5/1. Vide supra, XLVI, p. 65-66, les informations re-
cueilhes et transmises par Edrisî, notamment sur les relations
du Zâbag avec la côte orientale d'Afrique.
11 56. Ambassade envoyée en Chine par le roi du San-fo-
Is'i que le texte chinois désigne sous le titre de Çrïmaharâja
{^supra, p. 22).
1178. Autre ambassade [ibid.y C'est en cette année que
paraît le Ling wai lai ta de Tcueou K'iu-rEi dont le Tchoii fan
tche de Tchao Jou-koua reproduit textuellement le plupart des
informations (p. 8-1 5).
1Q2I1. Le Mujam al-buldân de Yâkût, qui a été terminé le
H. G. FERIUND. 13
-^.^( 170 )<^^ [226]
i3 mars de cette année, contient de brefs renseignements sur
Râmî, Zâbag et Sribuza (^supra, p. 66).
12 25. Description du royaume de San-fo-ts'i et de ses
quinze dépendances dans le Tchou fan tche de Tchao Jou-koua
[supra, XVIII, p. 8-1 5).
i2 5od=. D'après l'inscription khmère de Jaya {^supra,
p. i8 1 ) qui, dit CoEDÈs (Le royaume de Çr'wijaya, p. 36), « ne
saurait être postérieure au milieu du xiif siècle 55, régnait à
cette époque un roi du Malâyu appelé Kamraten Ail Maharaja
çrimat Trailokyarâja Maulibhusana Varmadeva.
1208-1286. Ibn Sa'id fournit d'intéressantes informations
surl'lijsulinde occidentale (^supra, p. 70-72).
126/1-1265. Conquête du Jâvaka = Çrïvijaya par le roi
Jatâvarman Vïra-Pândya i^supra, XXXIII Us et XXXIII ter,
p. /i8 et suiv.), qui Tit prisonnier le souverain sumatranais.
1275-1293. c^ Quelques dix jours après [, en 1293], rap-
porte le Pararaton (trad. Brandes, éd.KROM, p. 92), les troupes
[javanaises de Tumapel] qui étaient allées conquéiir le Malâ-
yu''^, revinrent avec deux princesses [du pays vaincu]. L'une
d'elles, Raden (la princesse) Dara pôtak, devint la hinihaji
(femme) de Raden Vijaya \^aUas Çrï (Sa Majesté) Kertarajasa].
L'aînée, [la princesse] Dara jinga, épousa un (leva [=roi] et
fut la mère du roi de Malâyu, Tuhan (le Seigneur) Janaka,
dont le nom {Jiasirlasir = ravis"^ était Çrï Marmadeva et dont
le nom de règne fut Aji Mantrolot. La campagne entreprise
contre le Malâyu et la chute de Tumapel eurent lieu dans la
même année çaka 1 1 97 [= 1275] ...5?
Ce texte imporlanl demande quelques explications et recti-
fications. La date du début de l'expédition javanaise contre le
'*) Le Malâyu du lexle javanais désigne Sumatra. Vide supra, p. i83.
■r-**-
[227] — «.( 171 )■-
Malâyu ,1197 çaka = 1 q 7 5 , est exacte. Cette guerre fut entre-
prise parle roi de Tumapel Cri Kertanagara (nom posthume :
Çivabuddha), le ^è M âj M M^ /JP ^'J Ha-fche Ko-ta-na-kia-la
du Yuan che (k. 169, p. 5 v^j^Haji (le roi) Kertanagara.
Raden Vijaya (le ± ^ iÈJ» llî T'ou-han P'i-chô-ye = Tuhan
(Seigneur) Vijaya du Yuan che \apud Groeneveldt, Notes,
p. 1^9]), nom de règne Çrî Kërtarajasa, entre en scène
l'année de la prise de Tumapël : 121/1 = 1992 (cf. Pararaton,
éd. Krom, p. 92, n. 8). Mon savant confrère, le professeur
N. J. Krom a eu l'obligeance d'attirer mon attention sur le fait
que le Nâgarakèrtâgama , dont l'auteur était mieux renseigné
que celui du Pararaton, contient des indications préférables
aux données de ce dernier ouvrage qui sont incontestablement
inexactes. Kertanagara , d'après Prapanca , est mort en 121/1 =
1292 , l'année même de la prise de Tumapël (cf. Nâgarakërtâ-'
gama, trad. Kern, éd. Krom, chant 43, strophe 5 , p. 112),
C'est dans ce sens que doit être modifiée la note de Pelliot,
Deux itinéraires, p. 332 , et mon Malaka, le Malâyu et Malâyur
(/.is.,XPsérie,t. XI, p. /i8i-/i83,ett. XII, p.^ 68-70).
«Les troupes javanaises, dit le Pararaton, étaient allées
conquérir le Malâyu. 55 Que faut-il entendre ici par Malâyu
(telle est la graphie du texte sans â long) ? S'agit-il du Malâyu
propre (avec ïâ long des Malais), c'est-à-dire du Minankabaw?
La réponse n'est pas douteuse : Malâyu, en javanais, désigne
l'île de Sumatra ; nous en avons pour témoignage certain le
chant i3 du Nâgarakèrtâgama (2° éd. Krom, p. 5o et 1 2-1 3),
où Tanah ri Malâyu et le pays de Malâyu 55 désigne incontesta-
blement l'île de Sumalra tout entière. Il faut donc entendre
ainsi la phrase précédente : «Les troupes javanaises étaient
allées conquérir le Malâyu = Sumatra.» Il est, cependant, à
peu près certain que la campagne ne s'étendit pas à toute l'île,
mais fut dirigée contre la capitale de l'état souverain, en l'es-
pèce le San-fo-ts'i =Çrïvijaya. C^ctte interprétation est confirmée
13.
.( 172 )<^— [2'28]
par le passage da Ming che où il est dit à propos du San-fo-ts'i :
«A cette époque (iSyô) le San-fo-ts'i avait été déjà conquis
par Java 55 (^supra, p. aS, etinfra, p. 287). Il s'agit ici du
même événement, c'est-à-dire de la conquête de layô-iayS,
enregistrée dans l'histoire javanaise sous le nom de conquête
du Malayu. Si le Nngarakëriâgama et le Pararaton s'expriment
ainsi, c'est que le Malâyu-Minankabaw, pays d'origine des Ma-
lais, a été autrefois l'état suzerain de l'île entière jusqu'au mo-
ment oii(Yi-TSiNG le dit expressément [supra, p- 6]) la suze-
raineté est passée au Che-li-fo-che^Çrivijaya, dont on sait
l'éclatante fortune sous la dynastie des Çailendra qui étaient
eux-mêmes originaires du Minankabaw. On verra plus loin que
l'influence politique du Malâyu sur les anciennes colonies de
la péninsule malaise fut utilisée encore au xix'' siècle par les
administrateurs anglais des Etablissements des Détroits i^Slraits
settlementsy
12 55 et années suivantes. Le Mahâvamsa nous a conservé
le souvenir des faits suivants : « La 1 1" année du règne de Parâ-
kramabâhu II (roi de Ceylan qui régna de 12/10 à 12^5 ^^*) fut
celle où un certain ro'\ jâvaka (^jâvaharâjeko [=roi de Zâbag]),
appelé Candrabhânu, débarqua avec une armée de Javaka à
Kakkhalâ, après avoir traîtreusement affirmé : «Nous aussi,
nous sommes buddhistes. 55 Les guerriers jâvaka , qui étaient
tous munis de flèches empoisonnées comme d'horribles ser-
pents, se rendirent maîtres de tous les passages de rivières,
tourmentèrent cruellement sans relâche tous ceux qu'ils ren-
contrèrent, se répandirent partout, parcourant en furieux l'île
entière de Lanka (Ceylan) qu'ils ruinèrent . . . Ayant obligé
les Jâvaka à prendre la fuite, le régent Vïrabâhu hbéra d'en-
nemis tout le territoire de Lanka. 55 Quelques années après,
(') Pour celle rectification à l'cirlicle de Ki:rn, cf. Rouffaer, Was Malaka
emporium . . ., dans Bijdragen, deel 77, 1 gai, p. 83, n. 1.
[229] --««( 173 )k-.—
rapporte encore le Mahâvnmsa , «ce fut à cette époque que le
roi (landrablmnu qui, précédemment, avait été contraint de
s'enfuir après une grande bataille, débarqua à Mahâlirtha avec
une armée de Jâvaka, après avoir rassemblé une grande armée
dans les royaumes Pândya, Çoja, etc., ainsi que des soldats
tamouls ... 55. Cette nouvelle armée fut encore battue par
VïraJjâhu (^apud Kern, Twee hrijgslochten uii des Indischen Archi-
pel tegen Ceilon, paru en 1896 dans le tome XLVI des Bijdra-
gen, ààns Verspreide geschriften, t. III, iQiS, p- 29 et suiv.
Ces deux passages du Mahâvamsa sont dans LXXXIII, 36-/i8,
et LXXXVIII , 6 '2-7 5 ; vide supra, p. 171). Comme nous savons
par les inscriptions des rois colas (rtV/e supra, p. hh), que le
Çrïvijaya a été en relations fréquentes avec la côte orientale
de l'Inde, que Jâvaka est à la base de la notation arabe Zâbag
(^supra, p. 171), il est permis de supposer que Colas et Suma-
tranais étaient alliés vers 1260 pour aller piller ensemble l'île
de Ceylan; cf. également le témoignage du T chou fan tche qui
compte Ceylan comme l'une des i5 dépendances du San-fo-ts'i
{^supra, p. 1 hy^\
1286= 1208 çaka. Une statue de Amoghapâça Lokeçvara
est envoyée par le roi javanais Kërlanagara à Suvarnabbûmi =
Malâyu = l'actuel pays de Minaiikabaw dont le souverain est
Çri maharaja çrîmat Tribuvanarâja Maulivarmadeva {vide
supra, p. 179).
On a'^'groupé ensemble ci-dessous ,^des textes chinois et une
inscription siamoise portant sur les années 1281-1801 qui
nécessitent un commentaire spécial :
1281. «La 17^ année Iche-i/uan, au 12^ mois (c'est-à-dire
tout au début de 1281), dit le Yuan che (k. 11, p. h r°), au
(>' Les inscriptions de Jatâvarman Vira-Pândya (supra, XXXIII bis et
XXXIII Ivv, j). /18) rapjielanl la confuuHc do Jâvaka pur ce souverain, peu-
— ^«.( ]lli W— [230]
jout" meou-ym, de ^ i^lj ^- Sou-ia-man (Sulaymân), chargé
d'une mission au royaume de /j'C ^Ij ^ Mou-la-yeou [= Ma-
lâyu], et d'autres, on fit des tchao-t'ao-che; ils portèrent à la
ceinture une tablette d'or» (^apud Pelliot, Deux itinéraires,
p. 826).
1281. « La 1 8' année tche-ijuan, au 6" mois (1281), quand
"i^ >§, T Chan-sseu-ting (c'esl-à-dire ^^i'^^ ij^^ Samsu d-diii) ,
chargé de mission pour le royaume de Mou-la-yeou, arriva au
Campa, son navire fut détruit; il envoya un messager demander
pour lui un navire, des approvisionnements et des soldes sup-
plémentaires; un ordre impérial lui donna plus de i./i 00 pi-
culs de Y\zii (Yuan che, k. 1 1, p. 6 r", dans Deux itinéraires,
p. 826).
1 292 ±1. A la fin de la fameuse inscription siamoise dite de
Râma Khamheng (cf. C. B. Bbadley, The oldest known writing
in Siamese, thc inscription of Phra Ram Khamaeng of Sukholhai
I2g3 A. D., The Journal of the Siam Soc, vol. VI, part. I,
1909, p. 3o ; pour la date : G. Coedès, Notes critiques sur l'in-
scription de Râma Khamheng, ibid., vol. XII, part. I, 1918,
p. i3-2 5), le texte épigraphitjue rappelle les conquêtes faites
par le roi aux quatre points cardinaux, çt Dans la direction du
sud, il conquit . . . Sithammarat et le rivage de la mer
océane. n Sithammarat est la forme siamisée du skr. Çridhar-
marâja[7iagara], c'est-à-dire de Ligor'^^ sur la côte orientale de
la péninsule malaise, par un peu plus de 8° nord^-'.
vent donner à croire que Gandrabliânu était un simple allié du roi pânijya
dans les opérations entreprises contre Ceylan. Tous ces textes épigraphiqucs
de rinde du Sud devront être étudiés comparativement pour en tirer des pré-
cisions, tant au point de vue des faits historiques que de la chrouoio^jie.
(1-2) (i) Le sanskrit ûagara «villes a abouti en cambodgien et siamois aux
formes nohor, Hgor, lakkôn. On sait également que Aiikor, vulgairement Aiigkur,
est également issu de nagara. Cf. PiiLLioi, bulletin critique du T'oung pau,
t. XIII, 191a, J). A6G-/1G7. Çndhannarâja [nagara] rla ville de sa Majesté
[231] -^>{ 175 ).«—
1293. Yi-k'o-mou-sou, alias Ye-hei-mi-che , l'un des gêné"
raux chinois qui faisaient campagne à Java, «envoya Tclieng-
kouei notifier les ordres impériaux au TJv ^ |^ Mou-lai-yeou
[=Malâyu] et à d'autres petits royaumes; tous (les rois de ces
pays) envoyèrent leurs fils ou leurs frères pour faire leur sou-
mission 55 ( Yuan f/«e, k. 1 3 1 , p. 8 v", upud Pelliot, Deux itiné-
néraires, p. 3 2 6-3 2 '7 ).
129/1. Le 10° mois, «au jour yi-sseu, on renvoya les am-
bassadeurs du ^ 2E M Nan-wou-li (le Lâmurî des Arabes, au
nord de Sumatra), du }^:^^M Sou-mou-tou-la (état de
Sumatra, sur la côte nord-est), du |^ -^ $lj ^ Ki-mo-ia-mao
(vraisemblable erreur de graphie pour \^ $lj -^ Mo-la-yu =
Malayu) et du ^ f^f Tan-yang (sur la côte orientale de Suma-
tra) pour qu'ils retournassent dans leurs pays. On leur fit don
de tablettes au tigre avec double perle, de tablettes d'or et
d'argent, d'or, de soieries, de vêtements suivant le rang de
chacun. Antérieurement, lorsque Ye-hei-mi-che allait en cam-
pagne contre le Tchao-wa (Java), il avait appelé (à se sou-
mettre à l'empereur) les royaumes situés au bord de la mer.
Sur quoi, le Nan-wou-li et autres (pays) envoyèrent des gens
pour faire acte d'obédience. Comme on interdit (aux navires)
de commerce de prendre la mer, (ces gens) restèrent à la
capitale. A ce moment (c'est-à-dire en 129/1), on rapporta
l'embargo (mis) sur le commerce; c'est pourquoi on les ren-
voya tous» [Yuan che, k. 18, p. à r°, apud Pelliot, Deux iti-
néraires, 3 2 "7-3 28).
1296. La 1''° année yuan-tcheng (1 295) de Tch'eng-tsong,
Dharmarâja (pâli : Dhammarâja) «le Roi de la Loi'?, a été fondée ou plutôt
peut-ôlre simplement nommée par un roi siamois de ce nom (cf. Coedès, Docu-
ments sur la dyiiattia des Sukiwduyu, dans B.li.F.E.-O., t. XVII, 1917,11,
p. -'i/i-45). — '-' Au mémoire cité dans la note précédente, ajouter un autre
article de Goedè^, Les origines de la dynastie de Sukhodaija, dans 7. i4«., avril-
juin igao, p. 233-2/i5,
_.«.( 176 )^-i— [232]
le royaume de j'S Sien [pron. anc. *Syam, khmèr Syâm^ pré-
senta une supplique en lettres d'or, priant la cour [chinoise]
d'envoyer une mission dans ce royaume. Or, avant que cette
supplique n'arrivât, on avait déjà envoyé une mission; c'est
sans doute que ceux-là (c'est-à-dire les gens du Sien) ne le sa-
vaient pas encore. On donna à l'envoyé une tablette en or uni
pour qu'il la portât à la ceinture. L'envoyé s'en retourna immé-
diatement; un ordre impérial envoya une mission pour partir
avec lui. Comme les gens du Sien s'entreluaient depuis long-
temps avec les m M '^ 5i Ma-li-yu-eul [= Malâyur] , tous à
ce moment se soumirent. Il y eut un ordre impérial disant aux
gens du Sien : «Ne faites pas de mal aux Ma-li-yu-eul afin de
tenir votre promesse:? {Yuan che, k. 210, p. 5 v°, dans Deux
itinéraires, p. 2/12).
1299. t^La 3" année ta-tô (1299), au printemps, le
i*"" mois, au i*"" jour qui était houei-wei , les royaumes barbares
Sien, des ^%\\ {^ Mo-la-yeou et du H ^ Lo-hou (sur le
bas Ménam) vinrent chacun apporter en tribut des produits du
pays. On accorda au prince héritier des barbares Sien une
tablette au tigre» [Yuan che, k. 20, p. 1 r°, dans Deux itiné-
raires, p. 2/18).
i3ot. «C'est encore du même pays [de Malâyu] qu'il doit
s'agir, dit Pelliot [Deux itinéraires, p. 828), quand il est
dit {Yuan che, k. 20, p. 5 r°) que la 5° année yuan-tcheng
(1801), le 8^ mois, «au jour meou-wou, ,|| ^ ^^ Ma-lai-hou
et d'autres îles de la mer envoyèrent des ambassadeurs à la
cour. »
Dans mon mémoire sur Malaka, le Malâyu et Malâyur
(/. As., XP série, t. XII, 1918, p. i84 et suiv.), j'ai déjà
étudié ces textes et l'interprétation qui en a été donnée n'a pas
cessé de me paraître vraisemblable. En 1296, au témoignage
[233] --«.( 177 )^-»—
du Yuan che, les Ma-H-yu-eul «s'entretuaient depuis long-
temps» avec les gens du Sien, c'est-à-dire, à celte époque,
avec les Thaïs ou Siamois de l'empire de Sukhodaya. Or, ni
texte, ni inscription ou tradition d'où que ce soit, n'indique
explicitement ou implicitement que les gens du Sien aient
jamais fait campagne à Sumatra. L'argument est décisif et il
faut situer ces Ma-li-yu-eul ailleurs que dans la grande île
indonésienne. Comme l'inscription siamoise de Râma Kham-
heng donne comme limites à l'empire de Sukhodaya = Sien,
à la fin du xiif siècle : au nord, Luang Phrabang sur le haut
Mékong, et au sud, Ligor = Silhammarat, sur la côte orientale
de la péninsule malaise , c'est au sud de Ligor qu'il faut recher-
cher ces Ma-li-yu-eul = Malâyur (appelés également Mou-lai-
yeou, Mo-la-yu, Mo-la-yeou, Ma-lai-hou =Malâyu). La loca-
lisation de ces Ma-li-yu-eul ou Malâyu est précisée par les an-
ciennes relations portugaises et le Ming che. ç^Les navires du
Siam, rapportent les Commentaires d'ALBUQUERQUE i^Commenla-
rios, t. III, chap. xvni, p. cjli), ne viennent plus à Malaka
avec leurs marchandises parce que [les Siamois] ont été con-
stamment en guerre avec les Malaios (les Malâyu de Malaka). 55
Et plus loin (^ibid., chap. xxxvi, p. 179) : i^ Le roi [de Siam] a
toujours été en guerre avec celui de Malaka; à cause de cela
il ne fut pas fâché de voir [Malaka] détruit [par les Portugais].»
Dans la notice que consacre à f^ $lj >&p Man-la-kia = Ma-
laka , le Ming-clie ou Histoire des Ming, il est dit que « en 1^19,
le roi de Malaka vint à la cour ... En s'en allant, il affirma
que le Siam paraissait disposé à attaquer son pays. En consé-
quence, l'empereur envoya l'ordre au Siam [de ne pas atta-
quer Malaka] et ce pays s'y conforma» (cf. Groeneveldt,
Notes, p. 2 5o).
Les gens de Malaka sont donc des Mahujo qui étaient «con-
stamment en guerre » avec le Siam. Leur pays est limitrophe
des possessions thaïs de Sukhodaya = Sien, que les Thaïs ont
-^( 178 ).«-.- [23/t]
conservées après leur descente sur le bas Ménam et que con-
servent encore leurs descendants, les Siamois modernes. Il me
paraît hors de doute que ces Malaijo sont identiques aux Ma-
li-iju-eul du Yuan che qui, à la fm du xnf siècle, r^ s'enlretuaient
depuis longtemps» avec les gens du Sien = Siam. La concor-
dance de ces informations de sources différentes me semble
décisive dans ce sens. Le passage du Yuan che a trait à la pé-
riode antérieure à 1296; les deux extraits des Commentaires
font, au contraire, allusion à des faits postérieurs à la fin du
xiif siècle, à ceux que signale le Ming che. Les textes chinois
et portugais témoignent ainsi que l'état d'hostilité entre le
Siam et ses voisins Malâyu de Malaka s'est maintenu pendant
des siècles, malgré les interventions répétées de la cour de
Chine pour le rétablissement de la paix entre les belligérants.
On sait, enfin, qu'à l'époque mongole, V Histoire des Yuan
(1 280-1868) ne fait aucune mention exphcite de relations
entre la cour de Chine '^^ et le Malâyu ou le San-fo-ts'i de Su-
matra.
En 1225, TcHAO Jou-KOUA énumèrc dans son Tchou fan
tche, quinze dépendances du San-fo-ts'i ou Çrïvijaya dont huit
sont situées sur la côte orientale de la péninsule malaise
[supra, p. i3). Quelque cinquante ans après, les Thaïs de
Sukhodaya, autrement dit les Siamois, se rendent maîtres de
la basse vallée du Ménam et de la partie septentrionale de la
péninsule malaise jusqu'à Ligor. Cette dernière conquête en-
lève au Çrïvijaya ses possessions coloniales de la péninsule
qu'il occupe, au plus tard, depuis le vnf siècle <2) ^cf. supra,
(1) Cî. mon mémoire Malaka, le Malâyu et Malâyui', dans J. As., XI' série,
t. Xll, 1918, p. 83 et suiv.
(2) L ambassade chinoise envoyée au Cambodge en 1296, trouve la cam-
pagne dévastée par la guerre siamoise. « Dans la récente guerre avec les Sia-
mois, dit le Tchen-la fong tou ki, le pays a été entièrement dévasté;? {Mé-
moires sur les coulumes du Cambodge par Tcueou Ta-kouan, trad. et annoté par
[235] — «•( 179 )<^->-
XXIX, p. Al, l'inscription de Vien Sa). La progression du
Si;im vers le Sud ne s'arrèla pas là et se poursuivit jusqu'aux
détroits, car le Ming clie rapporte qu'en lAoS, Malaka payait
au Siam un tribut annuel de quarante taels d'or (cf. Groene-
VELDT, Notes, p. 2^8 et un renseignement identique dans le
Ying yni cheng lan, ihicL, p. 9 63). Dans son *Xj|yUi iJca^
daté de i/iSy-i/i^o , Ibn Mâjid dit également (ms. 9992,
folio 53 r", 1. 5-6) : -L<^i '^■.i ^sjû\^ iu-^ Jvji {sic) ^^L^-l^
«Singapour est par plus de 5 ^^inha des Farkadayn] et c'est là
que se termine la côte du Siamw. Sulaymân al-Mahrî, dans son
^l^i cjU^, qui est de la première moitié du xvi^ siècle, s'ex-
prime dans le même sens (ms. 2 55(), folio 71 r°, 1. 5-6) :
cj^-j^Ji (jj-o f»U-w*5^ j? f--^ ij^^ ^^iLs^.*« 'ss>*J^ yijviyiJî «[Là où]
les Farkadayn sont par 5 \jshd, gît] Singapour; elle [est située]
à l'extrémité de la côte du Siam, dans le sud 55.
Pendant le dernier quart du xnf siècle , le glorieux empire
sumatranais s'écroule. La longue campagne des Javanais
(1275-1293) a mis fin à l'hégémonie politique, militaire et
navale du San-fo-ts'i en Insulinde et aboutit à une sorte de
protectorat, car Tuhan Janaka, roi du Malayu de Sumatra,
était fils de la princesse sumatranaise Dara Jinga ramenée par
les troupes victorieuses, qui épousa un roi non dénommé, sans
doute javanais^'l A la même époque (1276 et années sui-
vantes), Candrabhânu envahit deux fois Ceylan et éprouve
une double défaite '-l Enfin, les Thaïs de Sukhodaya s'empa-
rent de toutes les possessions coloniales du San-fo-ts'i sur la
péninsule malaise. Les ambassades à la cour de Chine qu'on
trouvera mentionnées plus loin ne doivent pas donner le
Paul PelUot, datls B.É.F.E.-O., l. H, 1902, p. 173-, cf. épalonicnt p. i3i).
Ces faits de {;uerro sont de la môme période que la conquête des coloules suma-
Iranaises de la péninsule malaise.
^'' Vide supra, p. ;!r>G.
(-) Vide supra, p. 2(!8 et p. 17-.!, n. 1.
-i-^l
{ 180 )<^~- [236]
change : l'empire a vécu et la cour impériale recevra désormais
l'hommage d'un simple vassal de Java. Raden Vijaya dont le
nom de règne fut Çrï Kërtarajasa, fonde en 1216 çaka =
129/1 l'empire de Majapahit dont il est le souverain [prahhu,
cf. Pararaion, trad. Brandes, éd. Krom, p. 1 28). Il avait succes-
sivement épousé les quatre filles de Kertanagara et la princesse
sumatranaise Dara pëtak ramenée par les troupes javanaises
victorieuses {^supra, p. 226). Un second grand empire se lève
en InsuHnde, héritier des possessions de l'ancien Çrivijaya.
Dans son Nâgarakërlâgama qui est daté de 1287 çaka = 1 365 ,
Prapanca les énumère complaisamment à la louange de son
maître Hayam Vuruk, alias Çrï Râjasanagara et Saii hyan Vëkas
in sukha^^', dans les chants i3, là, i5, 16 (cf. Nâgarahër-
tàgama, éd. et trad. Kern, 2* éd. Krom, p. 5o et suiv.) et 83,
strophe k (^ibid., p. 186) : ce sont l'Insulinde et la péninsule
malaise à peu près tout entières; le Campa, le Cambodge et
d'autres pays de l'Inde Iransgangélique Ksont des amis con-
stants 55 (chant i5); «sans arrêt, venaient en foule toutes
sortes de gens des autres pays; du Jambudvïpa (l'Inde), du
Cambodge, de la Chine, du Yavana, du Campa, du Karnâ-
taka, etc., du Gauda (l'actuel Gaur en Inde orientale) et du
Siam ; ils venaient par des navires avec de nombreux marchands ,
des moines et de distingués brahmanes; ceux qui vinrent furent
accueillis et restèrent volontiers [dans le pays]» (chant 83,
strophe k). Ce sont les termes mêmes du poème vieux-java-
nais. La réalité historique est naturellement un peu en deçà des
exagérations attendues d'un poète de cour. La ^^Xa ^^\^ ool5i^
ou Histoire des rois de Pâsè (cf. mes Relations de voyages, t. II,
p. 666-669) donne, semble-t-il, un tableau plus exact de
l'expansion territoriale de l'empire javanais en Insulinde; mais,
cette rectification faite, il n'est pas douteux que les souverains
^'' Pour ce nom, cf. N. J. Krom, De hegraaf'plaaU von Hayam Wuruh, dans
Bijdragen tôt T., L. en V. van Nederlandsch-Indië , deel 'jb, 1919, p. 25-27.
[237] -H^( 181 )kh—
de Majapahit fussent en relations avec tous les états de l'Ex-
trême-Orient à l'exception du Japon, et que de l'Inde à la
Chine, on tînt en juste considération le pays et les hommes
qui avaient victorieusement repoussé l'attaque des troupes de
Hubilaï H an.
1825. Information sur l'Insulinde occidentale dans la cos-
mographie de DiMASKi (^supra, p. yS).
1 273-183 1. Autres informations fournies par AbdlfidÂ
(supra, p. 7/1).
?. Récits consignés dans les Mille et une nuits [supra,
p. iG-j) et le Livre des Merveilles de l'Inde {supra, \^. 62-68).
i865= 1287 çaka. Le Nâgarakërtâgama fournit des ren-
seignements détaillés sur l'île de Sumatra qu'il désigne sous le
nom de Tanali ri Malayu ^^pays de Malayu» [supra, p. i83).
1 878. Le roi du San-fo-ts'i '[Ë B fP M PrJ # Ta-ma-sa-
na-a-tchô envoie une ambassade en Chine. Il y avait alors trois
rois dans le pays [supra, p. 2 5).
187/1 et 1875, au 1^'- mois. Le roi .Ç| iI5 R& ^ # #15 Ma-
na-ha Pao-lin-pang = Maharaja de Palemban envoie deux
ambassades (sMpra, p. 26).
1875, au 9° mois, ambassade envoyée par ff flni ^^ ^ 1^
Seng-k'ic-lie-yu-lan, l'un des trois rois du San-fo-ts'i [supra,
p. 2,5 , et cf. /. yl.9,, juillet-août 1919, p. 196, n. 2).
1876. Mort du roi Ta-ma-sa-na-a-tcho auquel succède son
li!s BM'^ Wi M. Ma-na-tcho Wou-li -- Maharaja Wuli (?)
qui envoie une ambassade à la cour de Chine l'année suivante
pour demander son cxcqualur à l'empereur. «A cette époque,
~-*^{ 182 )k^^ [238]
ajoute le texte , le San-fo-ts'i avait été déjà conf|iiis par Java.
Le roi de ce dernier pays [c'est-à-dire l'empereur de Maja-
paliit] apprenant que l'empereur de Chine avait nommé un roi
pour le San-fo-ts'i , devint très en colère et envoya des gens
qui tendirent une embuscade aux envoyés impériaux [appor-
tant l'exequatur de la cour de Chine] et les assassinèrent, v
Le Ming che ajoute ensuite cette curieuse phrase : « L'empereur
de Chine ne pensa pas qu'il eût le droit de punir le roi de Java
pour cela. Après cet événement, conclut YHistoire des Ming, le
San-fo-ts'i devint peu à peu de plus en plus pauvre et n'envoya
plus de tribut w {^supra, p. 2 5-2 6).
XV* siècle. A partir de i/io5, des désordres se produisent
et des Chinois établis dans le pays s'emparent du pouvoir avec
l'aide de compatriotes du Fou-kien et de Canton. L'ancienne
dynastie des Çailendra n'existe plus ou ses représentants dégé-
nérés passent complètement inaperçus et disparaissent, tels,
au xix'' siècle, les derniers successeurs des grands Mongols de
l'Inde.
Reste le Malâyu propre, je veux dire l'ancien suzerain du
Çrivijaya au vif siècle , l'actuel pays de Minaiikabaw. L'épigra-
phie ne nous fournit c|ue quelques noms de souverains aux xnf
et XIV* siècles. Les inscriptions sont généralement assez déve-
loppées, mais leur contenu est totalement dénué d'intérêt en
dehors du nom royal et de la date. Celle de 1208 çaka
(^supra, p. 1 y^) est extrêmement importante; celle de 1 260 rh
est importante aussi, car elle est rédigée en cambodgien et a
été trouvée dans une ancienne possession de l'empire suma-
tranais. Les autres textes épigraphiques n'ont de valeur que par
les noms des rois dont elles commémorent les règnes. En voici
la trop courte liste :
1 2 5 G i ? : Trailokijarâja-maidihhûsana-varmadcea = le Var-
[239] — «.( 183 >
madeva — ornement du diadème — du roi des 3 mondes
i^supra, p. i8i).
iao8ç. = 1286: Tribuvanarâja-mauli-varmadeva = \e\ar-
madeva — diadème — du roi des 3 mondes [sufra , p. 181).
?. Advayavarman, père du roi suivant.
1969 0=13/17: Àdityavarman (ou Udayàdityavarman,
ou encore A[ jyâditynvarma) rnjendra-maidimam (var. mauli-
maUyvar madeva = le Varmadeva — joy^^u du diadème de
rindra des rois. Il en est question dans les inscriptions de
1278 ç. = i356, 1269 ç. == 13/17. L'inscription de sa pierre
tombale de Kubiir Raja (Minankabaw) est datée de 1 3oo d= ç. =
1378 et il y est titré Kamhamcdinmdra w souverain de la
terre de l'or 55 = suvarnabhûmi du Malâyu de Tinscription de
1208 çaka ci-dessus (^supra , p. 182).
?. Anangavarman, fils du précédent; il fut probablement
son successeur (ibid.).
1/189. Description de Sumatra par le mualUm Ibn Mâjid
{^supra, p. 79-8/1).
xvi° siècle (première moitié du — ). Description de Sumalra
d'après «j-qJII s^iJî et ^l^li (J^i du mualUm Sulaymân al-
Mahrï (^supra, p. 8 3- 10 A).
Nous sommes redevables à Newbold, l'auteur du Pohtical
and slatisiical account oftlie Brilish scttlements in the Straits oj Ma-
lacca (•2" vol., in-8% Londres 1839), de la connaissance d'un
document de haute importance appelé Trumba piisaka «loi de
succession n, Trumba pusaka Minnitkabaw «loi de succession du
Minankabaw w, ou encore Trumba Minahkabaw «loi du Minan-
kabaw», dont j'ai récemment donné une traduction nouvelle
(dans Malaka, le Mnlài/u el Mnldi/iir, ./. As,, XI" série, t. XII,
•—«.( 184 )k-ï^- [240]
1918, p. 5i et suiv.). Ce document a été rédigé vers 1826;
c'est une lettre d'intronisation de Raja Lâbu comme Yah di-
përtuan (iitt. : «celui qui est fait maître, qui est reconnu
comme maîtres, le souverain suprême) des quatre états dissi-
dents de la péninsule malaise qui continuaient à reconnaître
l'autorité traditionnelle du Minankabaw. Le signataire du
Trumha pusaka est le Grand Sultan Maharaja di râja de Minan-
kabaw. Il affirme une suzeraineté purement nominale, mais
qui rappelle une ancienne suzeraineté effective, sur l'île de Su-
matra tout entière et sur l'état javanais de Bantën ou Bantam
qui faisaient partie de l'ancien Çrïvijaya. Si on se rappelle
qu'en 1826, le sultan de Minankabaw était un simple souve-
rain indigène soumis à la Hollande et qu'il intronisait un autre
souverain indigène résidant en territoire colonial anglais, on
pourra juger du prestige qu'avait conservé, longtemps après
la conquête étrangère, l'héritier des titres et prérogatives du
grand empire sumatranais disparu. Quatre Yah di-përtuan de
la péninsule malaise furent successivement désignés et intro-
nisés par le sultan de Minankabaw : Adil qui mourut en 1796
ou 1796; Hïtam, mort en 1808; Leiigan Laut, mort en
1824. Râja Lâbu intronisé en 1826, ne régna que six ans.
A partir de 1882, son successeur fut désigné dans le pays
même et on n'eut plus recours au sultan de Minankabaw. Les
exigences de la politique coloniale mirent fin à la pratit[ue qui
consistait à demander à un souverain soumis à la Hollande, la
nomination du chef des sujets britanniques indigènes de la
péninsule malaise.
Tels sont les renseignements que nous fournissent les textes
sanskrits, pâhs, chinois, tamouls, arabes, persans, cam-
bodgiens, siamois et indonésiens pendant quelque quinze
siècles. Ces informations présentent de grandes lacunes que
l'avenir comblera peut-être; mais les faits parvenus à notre
[2Û1] — *9.( 185 )<^—
connaissance, ceux surtout qu'a rapportés Yi-tsinf^, sont assez
nets et précis pour faire revivre la grandeur de l'ancien empire
sumatranais. Le Çrîvijaya entre dans l'histoire générale de
l'Asie orientale au moment où régnent, en Chine, la grande
dynastie des T'ang (618-906); à Bagdad, les illustres kha-
lifes abbassides Hârûn ar-Rasid (786-809) et son fils Al-
Mâmûn (81 3-8 3 3), tous deux contemporains de Chaiiemagne.
L'Inde a accompli cet autre miracle insoupçonné : la création
à Sumatra d'un centre de civilisation indonésienne, qui dès
le VIII* siècle, avait pour roi un souverain cakravartin dont la
renommée s'étendra, au x% jusqu'au lointain Népal.
On aurait dû s'en douter plus tôt^'); mais nous avons tous
été victimes d'une illusion d'optique. Les relations occidentales
sur rinsulinde de la fin du xiii" et du xiv* siècles (Marco Polo,
Odoric de Pordenone) et des siècles des découvertes (relations
portugaises, hollandaises, anglaises et françaises), présentent
généralement Java comme une île riche, prospère et d'antique
civihsation; Sumatra, au contraire, est un pays de sauvages et
d'anthropophages. Cette impression s'accentue et se précise au
fur et à mesure qu'on retrouve à Java des ruines de palais et
de temples d'une incontestable grandeur; elle s'étabHt défini-
tivement et s'impose par la découverte de ce splendide monu-
ment qu'est le Boro-Bodur, achevé dans le courant du ix* siècle '^l
(') Dans une note à sa traduction du Ta t'ang si yu k'ienu fa kao teng
Ichouan de Yi-tsing, Chu^kj^urs {Religieux éminenls , 189/1, P- ^o^) avait mon-
tré l'identité du Che-li-fo-che et du Zabedj [sic) et rappelé le passage do Birûni
sur le suvarnadvïpa {supra, p. 6i). Ainsi présentée, l'identification n'allait
pas de soi, car il n'y a aucun rapport piionéticiuc entre les transcriptions chi-
noise et arabe; elle ne fut pas adoptée. Quinze ans après, Gkiuni la reprit
dans ses Reseavches on Plolenu/s geography of Easlern Asia (Londres, 1909,
in-8°; voir à l'index, s. v° Zàbej) où il transcrit également Zâbej. A son habi-
tude , l'auteur restitue toutes les formes imaginables sans s'arrêter à la seule
correcte avec ^ en fonction de gutturule sonore; et on n'en tint pas compte.
''' Cf. Archaeologisch Onderzoek in Nedurlamhch-ïndié. III. Bcschriiving van
H. G. FKnn.l.ND. i3
— «.( 186 ).«— [242]
Tout récemment encore , l'île voisine ne présentait rien de pareil.
Ses titres sur pierre à une ancienne culture étaient peu nom-
breux et inconnus, donc inexistants pour l'historien. Sa popu-
lation actuelle ne conserve pas de traces d'un glorieux passé :
Atchinais du Nord, Bataks de l'Ouest, Malais de l'Est, Minan-
kabaws et Lampons dn Sud ont tout à fait allure de barbares.
Les textes chinois qui ont tant à nous apprendre sur Sumatra
n'avaient pas été traduits; les inscriptions tamoules et les géo-
graphes arabes étaient mal interprétés. Nous sommes enfin
mieux informés grâce aux recherches entreprises sur place et
à l'étude d'un grand nombre de documents orientaux. La
réunion de tous ces témoignages est singulièrement instructive
et il s'en dégage, presque automatiquement, un point de vue
nouveau qui est exposé dans ce mémoire.
Kern termine son article intitulé : Java en het Goudeiland
volgens de oudste berichten^^^ par les conclusions suivantes :
« 1° D'après la conception dominante, Suvarnadvîpa et Yava-
dvîpa étaient une [seule et même île]; q° deux îles initiale-
ment différentes furent confondues l'une avec l'autre; 3° au
sens propre, Suvarnadvîpa est Sumatra, et Yavadvïpa, Java;
li° Sumatra (ou une partie de Sumatra) et Java ont été consi-
dérées comme un tout, peut-être parce que les deux îles fai-
saient partie d'un même groupement politique; 5° par Yavakoti
Barabudur, samengesteld door N. J. Krom en T. van Erp. 1" deel. Archaeolo-
gische Beschrijving door N. J. Krom, s'Gravenliage, 1920, gr. in-4°, viii-
791 pages, avec atlas de liks planches in-folio. Sur cette magistrale publication,
cf. le compte-rendu de Finot, dans B.É.F.E.-O., t. XX, 1920, IV, p. iSS-i/ig.
D'après l'étude paléographique des épigraphes, Kern fixait la date de construc-
tion du Boro-Budur vers 85o; Kkom indique 760 à 800 de notre ère. 11 est
à peu près certain que ce temple fameux a été achevé dans le courant du
ix° siècle (Finot). D'après une récente note de Coedès {A propos de la date
d'édification d'Angkor Vat, dans/, is., janvier-mars 1920, p. 96-99), wAng-
kor Vat ne saurait être antérieur à ma A. D.n.
(') Publié en 1869 dans les Bijdragen, réimprimé en 1916 dans le t. V
des Verspreide geschi'iften,^. it'4.
[243] ^-«.( 187 ).«—
«la pointe de Yava»''*, on a désigné proprement le cap orien-
tal de Java. 5) A mes yeux, ces conclusions ne sont pas entière-
ment justifiées. Sumatra et Java ont été, il est vrai, désignées
sous le même nom : Yava et ses dérivés; nous en avons l'as-
surance certaine pour Sumatra par Marco Polo et les textes
arabes jusqu'au xiv' siècle (voyage de Ibn Batûta). Mais, dans
les passages du Râmâyana et de la Géographie de Ptolémée
que j'ai reproduits (supra, p. 202 et 209), Yavadvipa est
pour moi, Sumatra. Des environs de notre ère à la seconde
moitié du 11' siècle, Java était vraisemblablement moins bien
connue que Sumatra dont la richesse en or est notée comme
un fait remarquable par Vâlmîki et par le géographe alexan-
drin. Ce n'est que beaucoup plus tard que cette richesse a été
inexactement attribuée à Java, grâce sans doute à l'identité de
nom des deux îles et parce que Yava > Jâiva désigna postérieu-
rement la seule île de Java. Enfin, Yavahoù me semlDle plutôt
devoir être interprété par «pointe de Yava = Sumatra ».
Cet article a été écrit en pieux hommage à la mémoire de
Hendrik Kern (2). Le maître regretté auquel l'Institut royal de
La Haye élève le beau monument, perennius aère, que sont les
Verspreide Geschriftcn, était un orientaliste illustre; mais il fut
aussi un grand citoyen épris de vérité et de justice, inflexible
en matière de droit et d'honneur, affectueux et tendre dans
son milieu familial, fidèle et dévoué à ses amis et ses élèves,
inlassablement obligeant à tous, ainsi qu'en peut témoigner,
avec bien d'autres, le signataire de ces lignes '^l. Le savant était,
chez lui, de premier ordre; fhomme fut toujours égal au sa-
'■' Vide supra, p. 21 3.
(^) ^é le 8 avril i833, Kern est décédé le /i juillet 1917. Cf. l'arliclc nécro-
logique auquel il est fuit allusion dans la noie suivante.
'') Cf. l'article nécrologique de S«odck HuncnoNJE, dans Uijdiafrcn loi de T.,
L. en V. van A'.-/., deel 73, 1917, uolammeut [>. vu.
— «.( 188 ).€^— [244]
vant. Tel parmi nous son souvenir demeure, admirable modèle
et perpétuel enseignement '^l
('' MM. N. J. Krom et Ph. S. van Ronkel, de rUniversité deLeyde; Gaude-
froy-Demo.mbynes et Paul Pelliot m'ont obligeamment fourni de très utiles
indications. Je leur en exprime ici mes plus cordiaux remerciements.
[Extrait du Journal asiatique, juillet-septembre et octobre-décembre igaa.)
[2/15]
.{ 189 >
TABLE DES MATIERES.
Introduction i
TEXTES CHINOIS.
Yi-tsing 3
Houei-je "
Vajraliodhi 7
Ambassades en Chine (7i3-
7^12) 7
Tchou jan tche 8
Song che 1 5
Ming che a^
Tao yi tche lio 3o
Ying y ai cheng lan 3 a
Sing tch'a cheng lan 35
Tong si yang k'ao 36
INSCRIPTIONS MALAISES,
SANSKRITES ET TAMOULES.
Inscription de Baiika 36
La reine Si-nio de Java 87
Inscription de Kalasan 38
Les Çailendra à Java 89
Inscription de Vieii Sa ^1
Manuscrit népalais /ia
Inscription cola de Tanjore.. . . A/i
Grande charte de Leyde 46
Inscription cola de io8ù ^17
Inscription de Jatâvarman de
1364 '. 48
Inscription de Jatâvarman de
ia65 .' 48
TEXTES ARABES ET PERSANS.
Ibn Hordàiîbeh 5u
Sulaymân 53
Ibn al-Fakih 54
Ibn Rosteh 55
Lsliak bin 'Imrân 55
Abu Zayd Hasan 56
Mas'ûdi 62
Ibrahim bin Wâsif-Sâh 63
Bïrûni 6^
Harakï 65
Eilrisï 65
Yâkût 66
Kazvvinî 67
Ibn Sa'id 70
Kutb ad-din as-Sirâzï 72
Dimaskî 73
Abûlfidâ TU
Hamdullah Mustawfi 70
Ibn al-Wardi 7^
Bàkuwï 78
IbnMàjid 79
Ibn lyâs 84
Sulaymân al-Maliri 85
Abul-Fazl 161
Mille et une nuits 162
Livre des Merveilles de l'Inde.. 169
ÇRlVlJAYA > CIIE-LI-FO-CHE
= ZÂBAG<;jiVAKA= SU-
MATRA i63
SUVARNADViPA = SUMATRA. . 177
Yi-tsing 178
Vie de Dipanikara Atiça 178
Inscription malaise de 1286. . 179
Inscription cambodgienne de
Grahi 181
.( 190
Nâgarakrtâgama i8a
Textes portugais i85
Les îles de l'or i85
Voyage de Pacheco 186
Lendas da India 188
Godinho de Eredia 189
Voyage de Quast 196
Sulaymàn al-Mahrï 197
Ibn Mâjld 197
Le Muhlt de Sîdi 'Ali 198
Les îles Zarïn a 00
ESQUISSE HISTORIQUE. . , 201
Râmâyana aoa
Heou han chou 908
Ptolémée 309
Mission de K'ang T'ai 209
Che eut yeou king 210
Fa-hien 210
Gunavarman ,.. 211
Àryabhata 912
Le Malâyu en 644 2i3
Inscription de Pagar Ruyon de
656 2)4
Ambassades en Chine au
vii° siècle 2i4
Poème tamoul Manimegaîai, . . 9 1 4
Yi-tsing 2i4
Ambassades en Chine au
viii° siècle 217
Inscription de Cafigal (Java). . 217
Inscription de Vieù Sa 218
Campagne contre le Cambodge. 9 1 8
Inscription de Sdok kak thom. 920
Les textes arabes 921
).«— [246]
Expédition contre Java en
1007 228
Ambassades en Chine 228
Campagne victorieuse de Râ-
jendracola en io3o 294
Autre campagne victorieuse
des Colas en 1068 29 4
Colonie tamoule à Baros 9 95
Ambassades en Chine au
xii' siècle 225
Campagne victorieuse de Jatâ-
varman Vîra-Pândya 226
Campagne victorieuse des Ja-
vanais en 1275-1293 226
Campagne contre Ceylan
d'après le Mahâvamsa 228
Envoi d'une statue au Malâyu
par Kërtanagara 229
Textes chinois sur le Malâyu
ou Malâyur 229
Inscription de Râma Khara-
heng 280
Textes chinois sur le Malâyu. 281
Situation de ce Malâyu sur la
péninsule malaise 2 3a
Ambassades en Chine au
xiv' siècle 287
Conquête du San-fo-ts'i par
Java 288
Le Malâyu = Minaiikabaw. . . . 288
Java et Sumatra 24i
Les conclusions de Kern a4a
Rectifications proposées 94a
Hommage au maître hollan-
dais 348
r\
l 'ta' t m t^ %^>^ f «^ririr
D3 Ferrand, Gabriel
6/^6 L'empire sumatranais de
.1 Grivijava
F4.
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