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LE MYSTERE i
LA PASSION
D'ARNOUL GREBAN
I . y 0 N , — IMPRIMERIE P I T R A T A 1 N É , RUE 0 E .N T I L , i.
LE MYSTÈRE
DE
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LA PASSION
D'ARNOULD GREBAN
P U U 1, 1 É
d'aPUÉS les manuscrits de PARIS AVEC UNE INTRODUCTION
ET UN GLOSSAIRE
GASTON PARIS et GASTON RAYNAUD
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PARIS
F. VIEWEG, LIBRAIRE-ÉDITEUR
UUK I> K RICHELIEU, t>7
BN I VCIi nu L\ HIBMOTHKQUB N.VTIONALK
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INTRODUCTION
Nous n'avons pas l'intention d'apprécier ici la valeur et l'importance de l'œuvrp
que nous publions, ni de lui assigner sa place dans l'iiisloire du drame religieux au
moyea-âge. 11 faudrait pour cela retracer cette histoire tout entière, et ce sujet,
outre qu'il exigerait des développements considérables, ne peut être traité d'une
façon complète avant qu'on ait publié un grand nombre de documents indispensables.
Parmi ces documents, la Passion d'Arnoul Greban est sans contredit un de ceux
qui méritaient le plus d'être mis au jour. Nous avons voulu remplir un vœu qui
avait été exprimé depuis longtemps' et plus d'une fois répété, qui avait dû être
accompli par d'autres que nous il y a déjà bien des années *, et dont l'exécution ne
peut manquer d'être bien accueillie, non-seulement par les curieux de notre ancienne
littérature, mais par tous ceux qui s'intéressent à l'histoire du tliéàtre moderne.
Nous nous bornerons ici à donner sur l'auteur, sur son œuvre et sur les manuscrits
qui nous en sont parvenus, les renseignements, malheureusement trop peu nombreux,
que nous avons pu recueillir.
Le plus ancien manuscrit du Mi/stèrc> de (a Passion que nous ayons conservé,
celui que nous désignons par A, contient une rubrique que nous avons imprimée à la
' « la publicaliou de ce texte, d disait M. Paulin Paris en 1815, « auroit un vérita)>le inteict; c.-.r on ne
peut sempê.-lier de le regarder comme le plus beau monunien! de notre ancienne lilt^ralnrc dramatique. »
(Les Manuscrits français de la biblioUièqite du roi, VI, 310.)
* i< Kn IS.î."», l'éditeur de la Mbliotliè'jue cl/.évirienne annourail le Mystère de la Passion comme dc-
Tnnt faraitre dans un délai rapproché. Celte puldication aurait été faite |iar MM. Charles d'IIéricault tt
Louis Moland, deux écrivains distingués et familiarisés depuis longtemps avec la lilténUure du moyen-àge ;
mais, par des considérations (pie je n'ai pas à approfondir, ce travail fut abanUoaué. » (A. Sorel, Xoticesvr
Arnoul et Simon Greban; Compiègne, 187.^, p. 2'.)
H INTRODUCTION
page 2 de cette édition, et qui nous fait connaître le nom de l'auteur : maistre A rnoul
Gresban, notable bachelier en théologie. Cette rubrique, publiée en partie pour la
première fois par Vallet de Viriville^ puis en entier par M. P. Paris^, avait échappé
à tous les critiques antérieurs, qui ne savaient à qui attribuer l'œuvre remaniée
par Jean Michel en 1486. Le manuscrit étant daté de 1473, l'ouvrage de Greban
était nécessairement plus ancien; mais un autre texte, resté inconnu jusqu'en 1855,
permit d'en reculer la composition de plus de vingt ans. Ce fut M. P. Paris qui
trouva'^, dans les portefeuilles de Dom Grenier*, et publia avec une de ses leçons
du Collège de France^ la curieuse quittance copiée par le savant bénédictin dans
les archives d'Abbeville'' et ainsi conçue '^ : «Le dernier jour de décembre 1452,
au petit echevinage, en présence de sire Jean Laudee, majeur, a esté conclu
par les eschevius en grand nombre que la somme de dix escus d'or que avoit et
que a payé Guillaume de Bonoeuil^ pour avoir les jus de la passion, a Paris, a
maistre Ernoul Greban ^, luy fussent baillé et délivrés des deniers de laditte ville ;
oc sont iceulx jeux cloz et sellés des seaux de Jean de Limeu, Mathieu du
Pont, Cliretien le Guievre, et Jacques d'Aoust, echevins, et mis en un coffre en
l'eschevinage de ladite ville, tant et jusques a ce qu'on vora iceulx juer, laquelle
somme sera desduite sur ce que messieurs "* vouront donner quant on joura les
dits jeux. »
Ainsi, en 1452, l'œuvre d' A rnoul Greban était non-seulement composée, mais
célèbre. C'est sans doute le succès des représentations parisiennes qui engagea les
echevins d'Abbeville à s'en procurer un manuscrit et à le faire jouer dans leur ville.
1 Bibl. de l'Ec. des Chartes, III, 4'33.
2 Les Manuscrits français, \l, 281.
3 Dés 183i cependant, Louandre, dans son Histoire d AbbeeiLle (i" édit., p. 238), avait mentionné
la délibéralion de l'échevinage, en imprimant Ilaoul Greban au lieu d'ArwoM?; mais cette notice avait
passé inaperçue.
•* On sait que dom Grenier, qui mourut pendant la révolution, avait rassemblé les matériaux d'une his-
toire de Picardie que la mort lempècha d'écrire ; tous ses manuscrits se trouvent à la Bibliothèque nationale.
I.a copie dont il s'agit se lit au i" 99 r" du volume de cette collection qui porte le n» XIV.
'■' Reçue des Cours publics, 1855, p. 33 et 50 ; Journal de l'Instruction publique, 1855, n^"* 43
et 17.
•J Les recherches que nous avons faites pour retrouver l'original n'ont pas abouti; Louandre dit déjà en
note : « Ce manuscrit n'existe plus dans les archives. » La Revue des Cours publics mentionne une
première quittance, donnée par Greban à Guillaume de Bonœuil; nous n'avons pu la retrouver dans;
"S portefeuilles de dom Grenier, et nous craignons que l'existence de cette pièce, qui serait précieuse,
e repose sur quelque inadvertance, comme il s'en produit dans un exposé oral.
' Nous donnons ce texte d'après la copie de dom Grenier, rectifiée, pour les noms jiropres, par la compa-
r.iison de pièces authentiques qu'a publiées Louandre. Ainsi D. Grenier lit Landee, Brimeu, le Ouefure el
à'Aaast. Le texte de la Reçue des Cours publics, imiirimé dans un journal et d'après des notes de cours,
offre quelques divergences qu'il est inuiile de relever.
' La Revue des Cours publics porte Borneuil, qui doit être une Taute d'impression; Louandre a lion-
nœuil, et il ne travaillait pas sur la copie de dora Grenier, car il lit Wille le prénom écrit par dom Grenier
Guillaume.
''La copie de dom Grenier et les imiirimés donnent Grebain, mais Louandre lit Greban.
'" Messires dans la copie.
INTRODUCTION m
C'est donc un peu plus anciennement qu'il faut placer la composition de notre mys-
tère.
On remarquera que l'auteur, qui est nommé notable bachelier en théologie daoF
la rul)ri(}ue du manuscrit A, ne reçoit pas ce titre dans la quittance de \Aô)i. Il est
appelé simplement maislre, ce qui indique un maître es arts. En effet, un document
officiel nous apprend qu'.\rnoul Greban ne devint l)aclielier en tiiéologie que quelques
années i)Ius tard. Dans le registre do la Faculté de tliéologie de Paris pour les années
1449-1404, le seul du quinzième siècle qui se soit conservé', nous lisons au folio UiJ r°
la mention suivante, appartenant au mois d'août 1450 : Receplt primo a bac-
calariis cwsoribus sequentibus Ma[gister] Arnulj^hus Greben incipil
prinium ciirsum die xxviii" septenihris sub magistro Thoma de Courcellis,
XX ss.
M. Thurot, dans son inappréciable ouvrage sur l'organisation de l'ancienne uni-
versité de Paris, donne des renseignements qui nous permettent de nous rendre
compte delà carrière dans laquelle s'était engagé notre auteur. Pour être maître es
arts, il fallait avoir passé, — généralement dans la même année, — l'examen de
licence, et être agréé pai- les maîtres plus anciens. Quant h la licence, elle s'obtenait
h la suite d'un examen qui portait sur des matières de dialectique et de piiilosophie
naturelle*. Les candidats juraient en outre qu'ils avaient vingt-un ans accomplis,
qu'ils n'étaient pas mariés, qu'ils avaient déterminé^ h Paris ou dans une université
comptant au moins douze régents, qu'ils avaient soutenu, rue du Fouarre, deux
argumentations publiques contre plusieurs maîtres, enfin qu'ils avaient étudié à
Paris, dans la Faculté des arts, pendant trois ans''. « Une fois admis, le licencié se
faisait agréer par la corporation des maîtres dans un acte appelé inceplio... Avant
l'acte, le récipiendaire, accompagné d'un bedeau de sa nation, parcourait les écoles
delà rue du Fouarre, pour demander aux maîtres de cliaque nation s'il leur plaisait
qu'il célébrât son inceptio. Lorsqu'il était agréé, il prêtait serment entre les mains
1 « Le grand bedeau [de la Faculté de théologie] tenait un regisire sur papier où il inscrivait, pour chaque
année, les coni|ites de mise et de recette, la liste des cursorcs, des sentenliarii, des licenciés et des doc-
teurs, avec la date de leur réception et le chiffre des sommes qu'ils payaient à l;i Faculté. La Bibliothèque
nationale possède (lat. aiic. f. 5657 C) le registre tenu par le grand beJeau pendant les années i449-14()4. »
(ïhurot, de l'Organisation de l'eiiaeignement dans L'Vnicersité de Paris au muyen-ilge. Paris,
1850, p. 136.)
s X l'époque où Arnoul Grebau passa sa licence, lescandid.ils devaieni avoir suivi des cours sur l'iutro-
duction de Porphyre, les catégories, l'interprétation, les premiers et les seconds anal) tiques, les traités dt>
Boéce sur les toinques et la division, la physique, de coelo, de generatione, de anima, de sensuel
sensato, de memoria et reminiscentia, de lon^/itudine et hnwitate vilae; il fallait, en outre, avoir en-
tendu cent leçons si r les mathématiques et 1 astronomie et avoir suivi ou dû suivre au moment de l'examen uu
cours de métapliysii[ue (Tliurot, p. 51). L i grammaire, qui avait autrefois été demandée pour cet examen,
n'y était plus comirise depvùs 1306.
^ C'est à-dire qu'ils avaient passé le premier examen, celui qu'on appeli plus tard baccalauréat, et qui
esf devenu notre baccalauréat es lettrcsi
* TIauot, p. ô2i
IV INTRODUCTION
du recteur'. » Ce serment reproduisait à peu près celui qu'il avait prêté pour la licence.
« Le jour fixé, le récipiendaire se rendait en grande pompe aux écoles de sa nation,
rue du Fouarre. Le maître sous lequel il avait été licencié prononçait une harangue
et lui imposait le bonnet, insigne de la maîtrise... Dès lors il portait devant son
nom le titre de magister^. »
Beaucoup de maîtres es arts passaient dans la Faculté de théologie et travaillaient
pour obtenir les grades qu'elle conférait et qui donnaient accès à toutes sortes de
positions honorables et lucratives. Ils aspiraient d'abord à être bacheliers. Le bac-
calauréat n'était pas un grade, mais un état^. Les bacheliers répondaient à peu près
à co qu'on appelle dans les universités allemandes les Privat-Docenten, si ce n'est
qu'ils n'étaient pas docteurs : c'étaient de futurs professeurs qui faisaient leur appren-
tissage. Dans la Faculté de théologie on distinguait trois degrés dans cet appren-
tissage de la maîtrise qu'on appelait baccalauréat; à ces trois degrés correspondaient
trois classes de bacheliers : les biblici ordinarii et cwsores, les sententiarii et les
fonnati '. Pour être admis au premier degré, c'est-à-dire pour être baccalarius
cursor comme Arnoul Greban, « il fallait avoir fait six ans d'études [dans la Faculté],
être âgé d'au moins vingt-cinq ans, et n'être ni bâtard, ni contrefait... Vers 1452,
les séculiers étaient généralement dispensés de la sixième année. Le candidat devait
comparaître devant la Faculté, représentée au moins par sept maîtres, et justifier de
son temps d'études par des certificats signés de ceux dont il avait suivi les leçons,
ou par trois témoins qui garantissaient sa moralité et attestaient les six ans d'études.
Après avoir vérifié si le candidat satisfaisait aux conditions exigées, la Faculté com-
mettait quatre maîtres pour l'examiner sur les principes de la théologie. Sur le rap-
port des examinateurs, elle admettait le candidat à prêter serment et k commencer
ses exercices de bachelier... Les bacheliers [non réguliers] n'étaient pas astreints
[commeles ordinarii qvii appartenaient aux ordres mendiants] k lire la Bible de suite
les jours ordinaires ; ils ne faisaient que des leçons extraordinaires, et ils étaient
appelés, parce motif, baccalariicursores, ou simplement cursares. » On peut voir dans
le livre de M. Thurot le texte des obligations et des droits des cursores ; ils ouvraient
leurs cours sous les auspices d'un maître qui en était plus ou moins responsable. Le
patron qu'avait choisi Arnoul Greban était Thomas de Courcelles, picard de nais-
sance, personnage fort important de l'éjwque, curé de Saint-André des Arcs, puis
doyen de Notre-Dame et proviseur de Sorbonne, gallican fougueux qui représenta au
synode de Bourges les prétentions anti-papales du concile de Bàle et- qui eut une
grande part, en 1438, à la rédaction de la pragmatique sanction de Charles VIL
Ces documents nous fournissent quelques dates pour la vie de notre auteur ; ils
nous apprennent en outre qu'il n'était ni bâtard, ni contrefait, mais ils laissent dans
une obscurité singulière plusieurs points fort importants. En général, une fois qu'on
i Th ot, p. 59-60. - s Thurot, p. 00. — ■* Tlmrot, p. I.S7. - ' Tliurot, p. iSS-lSO.
INTRODUCTION v
était hnccahiriux rursor, pour pou qu'on eût du inérito, on ne s'arrêtait pas là : ou
(lovenait senloiUinnus, puis formatiis, on passait la licence, enfin on arrivait ii la
maîtriso après une quinzaine d'années d'études dans la seule P'aculté de théologie
C'est la marche que nous voyons suivre à plus d'un des jeunes cursores reçus eu
môme temps qu'Arnoul Greban. Pour lui, au contraire, il s'arrêta dans cette voie
à la première étape : nous ne rencontrons plus son nom dans le registre du grand
bedeau, qui va jusqu'en 14()i '.
Ce qui est plus étrange, c'est la même absence du nom d'Arnoul dans le registre
de la nation de France de la Faculté des arts. Nous possédons le registre des pro-
cureurs de cette nation pour les années 1444-1450*: ce registre contient les noms
de tous ceux qui, dans cette période, ont déterminé et ont été reçus maîtres es arts-'',
et nous y cherchons eu vain celui qui nous intéresse. Il faut donc qu'Arnoul ait élo
reçu maître avant 1444 ; si nous supposons qu'il lo fut en 1443, cela fait entre sn
gradiudion et son admission parmi les bacheliers en théologie un intervalle do
treize ans qui est tout à fait inusité. Quoi qu'il en soit, maître es arts au plus tard
en 1443, âgé alors au moins de vingt-un ans, il n'a pas dû naître après l'an 4420.
Mais où est-il né? Nos documents officiels ne nous en apprennent rien. Si nous
possédions son inscription comme maître sur le registre de de la Faculté des arts,
nous saurions à quoi nous en tenir. En efi'et, non-seulement cette Faculté était divi-
sée en nations, mais sur le registre de la nation de France la patrie ou au moins le
diocèse de chaque étudiant est indiqué, Ce secours nous manquant, nous en sommes
réduits à des témoignages postérieurs, mais qui cependant auraient depuis long-
temps suffi à produire l'évidence, si leur continuité ne se trouvait interrompue de la
façon la plus singulière.
Pour tout le monde, jusqu'en 1584, Arnoul Greban et Simon, son frère et son
collaborateur, sont des Manceaux. On a souvent cité, mais nous devons reproduire
encore, l'épigramme de Marot à Salel, où il leur assigne leur patrie, ainsi qu'à d'au-
tres poètes alors célèbres :
De Jean d(! Meuu s'enfle le cours de Loii-o ;
En maistre Alain Normandie prend gloire,
Et plainct encor mon arbre patci'nel ;
Octavian rend Cognac éternel;
De Moulinet, de Jean le Maire et Georges
Ceulx de Haynault chantent a pleines gorges;
Villon, Crétin, ont Paris decoié;
Les deux Grebans ont le Mans honoré ;
1 II ne se trouve pas davantaj^e dans la liste des licenciés en théologie depuis 1373 qui est conservée à la
Bibl nat. dans un manuscrit moderne (anc. f. 5657 A).
'^ Ce registre est conservé à la Sorbonrie, aux archives de l'Université.
3 C'est là que M. Lrfjngnon a trouvé à trois reprises la mention de ce François de Monicorbier. qui devait
faire « bruire son bruit en l'honneur » d'un aulre nom, celui de Villon.
VI - INTRODUCTION
Nantes la biette en Meschinot se baigne ;
De Goquillart s'esjouyt la Ghampaigne :
Quercy, Salel, de toy se vantera
Et, comme croy, de moy ne se taira.*
Marot mérite évidemment toute créance; il avait été élevé dans le milieu poétique
dont il rappelle ici les principales illustrations, et il n'avait aucune raison d'altérer
un fait dont il devait être sûr. C'est ce que remarque judicieusement le bon CoUetet,
on répondant à ceux qui pensaient que Marot, dans le vers consacré aux Greban,
avait été induit en erreur par le fait qu'ils passèrent au Mans les dernières années
de leur vie. « Le suffrage de Marot, » dit l'auteur des Vies des Poêles fran-
çais, « me semble d'autant plus recevable que dans cette épigramme, où il
fait état de plusieurs poètes tant anciens que de son tems, il n'y en a pas un seul
duquel il ne désigne précisément le lieu natal, et non pas le lieu de sa résidence
ordinaire^. »
Le même C'jUetet' a le premier cité un autre témoignage qui n'est pas moins décisif
que celui de Marot. Au folio 103 des Œuvres poétiques de Jacques Peletier du
Mans, imprimées à Paris, en 1547, par Michel Vascosan, on lit le dizain suivant :
J . I) U n K 1. 1. A Y A LA VILLE DU MANS
Cesse, le Mans, cesse de prendre gloire
En tes Grebans, ces deux divins espritz :
Trop plus sera durable la mémoire
De ton renom, si tu donnes le prix
A Peletier, sur tous le mieux appiis
A translater, et qui d'invention
N'a pas acquis moindre perfection.
Mais si doutteuse en est la veiité
Au temps pi'èscnt, laissons l'affection :
Je m'en rapporte â la postérité.
» Œuvres de Cle'ment Marot, vallet de chambre du roy. Lyon, Scheuring, ia-8', t. I (1<^69), p. 530-537.
- Ce passage se lit dans l'abrégé de la vie des Greban, conservé à la Bibl. nat. dans un manuscrit (fr.
nouv. acq. 3073) sur lequel nous renvoyoas à la notice de L. Pannier dans la liecue critique {I8'i0-1\,
t. II, p. 326 ss).
3 Les deux premiers vers étaient cités dans la vie complète, aujom'd'hu; brûlée. Ils furent relevés par
M. Hauréau, qui les imprima dans la nouvelle édition de son Histoire littéraire du Mairie (t. III, p. 224),
en déclarant d'ailleurs que du Bellay s'était trompé, et en refusint d'admetti'e les Greban ]iarmi les Man-
ceaux. M. A. Sorel, dans sa notice déjà citée, reproduisit ces deux vers en les appréciant de même. Mais oii
se trouvaient ces deux vers? A\icun des deux écrivains ne le disait. Nos recherches dans les diverses éditions
de Joachini du Bell ly furent absolument vaines; plusieurs connaisseurs de la poésie du seizième siècle, in-
terro^'éi par nous, M. Marty-Laveaux ejitre autres, déclarèrent ne les avoir jamais vus. Nous croyions à une
erieur de Gollelet, d'autant plus qu'il nous semblait étrange de voir les Greban traités de « divins esprils »
parle grand contempteur de la poésie du quinzième siècle; nous insérâmes, en désespoir de cause, une de-
mande à ce sujet dans V Intermédiaire dis rhercheitrs et curieux (iO avril 1870). Le numéro suivant nous
apjiortaU la réponse, due à M. Prosper Blanchemain. auquel nous offrons tous nos. remerciements (voy.
V Intermédiaire, 1876, col. 248).
FNTROnUCTION . vir
Ainsi Joachim du Bellay, s'adi'essant ii la ville du Mans, l'invite à renoncera se
targuer, pour toute gloiro littéraire, do l'honneur d'avoir produit les Greban, et l'en-
gage à prendre j)lut()t Jacques Peletier, son ami, pour cliampion. Il est clair qu'il ne
pouvait s'exprimer ainsi que si les Greban étaient Maiiceaux et si leur ville natale
était (le longue date accoutumée à se glorifier d'eux.
C'est d'ailleurs au Mans qu'ils finirent leurs jours comme ils les y avaient com-
mencés. Arnoul Greban y fut fait chanoine de l'église catliédrale de Saint-Julien'.
Quant h Simon, nous le voyons figurer, en 14(18, parmi les officiers du comte Charles
du Maine-; un témoignage autorisé nous dit même qu'il fut secrétaire de ce prince*;
un registre de l'église Saint Julien nous apprend qu'il occupait en 1471-1472 une
maison au Mans, où il était, comme son frère, chanoine de cette église Saint Julien*:
nous croirions volontiers, en l'absence, sur ce registre, de toute mention d' Arnoul,
que Simon fat nommé chanoine en remplacement de son frère, et que celui -ci, par
conséquent, était mort en 1471. Quand Simon Greban mourut, on lui éleva dans la
catiiédra](s devant l'autel de saint Michel, un tombeau qui, fut détruit avec bien
d'autres, en 1502, par les Huguenots"'.
Voici donc les points principaux de la vie d'Arnoul, tels que nous pouvons les
assurer. Il naquit au Mans vers 1420, vint étudier à Paris et se fit recevoir maître es
arts avant 1444. Avant 1452, jl avait composé « a la requeste d'aulcuns de Paris, »
comme dit notre manuscrit A, et fait représenter avec succès le Mystère delà Pas-
sion. Il fît sans doute vers le même temps des poésies dont une seulement nous est
parvenue en partie, dont une autre est simplement mentionnée; nous en reparlerons
tout à l'Iieure. 11 est probable que son goût pour la poésie et spécialement pour la
composition de mystères l'empêcha de se livrer avec assiduité à ses études tiiêologi -
ques. Nous ne pensons pas qu'il ait jamais mené là vie désordonnée de certains
écoliers d'alors, celle dont un autre maître es arts, François de Montcorbier, dit Villon,
traçait, quelques années plus tard, le saisissant tableau; nous ne croyons pas que,
pour composer des vers et des mystères, il ait jamais été confondu parmi ces « enfants
de mauvaise vie, « avec lesquels il devait être souvent en contact, et auxquels le
poëte parisien adresse un de ses plus mordants couplets :
' C'est c.> fine dit I/ici-oix du Maine, qui, sui- ce point, est tiès-digne de foi (voy. ci-dessons, p. ix)
2 État de la maison de Charles d'Anjou, conVedu Maini, en 14G>i (Bib'. Nat.. M<s. fr. 7.S.'i5, anc.
supp. fr. 2340, p. 708; cité par Vallet de ViriviUe dans la Biographie générale, et par ^[. Soel. p. 10) :
Autres officiers... M. Simon Greben a Ix"".
^ Voy. ci-dessone, p. ix, la notice de Lacroix du Maiir.
■• On lisait au f' 35 d' s Comptes de l'argenterie de 1 église Saint-Julien du Mans (année {k'i\.-\kli)
à l'article des maisons canoniales : « .V/nisO-e Simon Greban, pour la maison dans laquelle il
demeure, paye X livres. » Ces comptes n'existent plus aujoiird'lur ; l'extrait qu'on vient de lire a été pris au
xvni" siècls par un érudit inanceau, l'abbé Belin de Berre. Nous en devons la connais^nnce A
l'ohll^'eante érudition de M. H. Chardon, dont le^ travaux sur l'Iiisloire et l'histoire littéraire du Mans sont si
justement estimés.
5 Ces deux derniers faits sont attestés par Lacroix du Maine; doni Piolin a transformé la tombe en
n un beau monument, d
viii INTRODUCTION
Rynie, raille, cymballo, luttes
Comme fols faintis eshontez,
Farce, broille, joue desflustes;
Fais, es villes et es citez,
Fainctes, jeux et moralitez ;
Gaigne au berlan, au glic, aux quilles :
Ou s'en va tout ? Or escoutez :
Tout aux tavernes et aux filles ' .
L'ensemble de son œuvre respire pour cela trop de gravité, et d'ailleurs ces « en-
fants perdus » ne retrouvaient guère la bonne voie, ne devenaient pas bacheliers en
théologie et ne finissaient pas par un de ces bons canonicats qu'ont tant convoités les
poëtes besoigneux. Cependant, si nous examinons la partie comique et familière du
Mystère delà Passion, nous voyons que Tauteur n "était pas non plus un per-
sonnage trop solennel, et qu'il connaissait à fond les mœurs et la langue de la rue,
des tavernes, des brelans et des prisons. N'oublions pas aussi que nous avons
d'Arnoul une « complainte d'amour » dont nous parlerons plus tard, et qui mêle à
des réserves au sujet du Paradis une requête fort profane. Considérons-le donc
comme ayant vécu assez librement à cette époque, ce qui n'avait rien d'exceptionnel
pour un maître es arts, ni même pour un futur théologien. Ce qui était plus rare alors
c'était de gagner de l'argent avec ses ouvrages autrement que par la faveur des
grands, et Aruoul nous semble être un des premiers parmi nos poëtes qui aient vécu
du théâtre. Il est probable que ces Parisiens qui lui avaient demandé de composer son
grand mystère lui payèrent bien un si long travail; mais ce qui dut le surprendre
agréablement, ce fut la visite de Guillaume de Bonœuil, lui offrant, au nom de la
ville d'Abbeville, dix écus d'or pour une copie de son œuvre. Il est à croire que la
ville d'Abbeville ne fut pas la seule à en agir ainsi, et qu'Arnoul tira plus d'un bel
écu de son ouvrage. Ce fut sans doute ce qui l'engagea à continuer dans celte voie,
et à composer, cette fois en collaboration avec son frère cadet, Simon, le mystère co-
lossal des Actes des Aj)ôtres, qui représente le plus grand effort de la dramaturgie
catholique et qui se maintint en faveur jusqu'à la prohibition des mystères eu 1548.
Nous n'avons aucun renseignement sur la date où fut écrit cet ouvrage ^ mais
nous penchons à le placer dans cette période de la vie d'Arnoul, certainement
après le Mystère de la Passion et vraisemblablement avant sou baccalauréat en
théologie.
11 semble en effet qu'il ait reconnu que la profession de faiseur de mystères ne
pouvait assurer suffisamment sa vie et qu'il se soit décidé à reprendre sérieusement
ses études tliéologiques. Nous conclurions volontiers de la rubrique du manuscrit
i Œueres de Villon, p. p. Januet, Paris, 18(57, p. 87.
* Les frères Parfait (lltst. du théâtre français, II, 377) ilisejit qu'il fut écrit en 1450; mais nous croyons
cette "date, que d'ailleurs nou^ aeceplerion; volontiers, donnée au liasard.
INTRODUCTION ix
A que le prologiio du ui^'slèrc fut ajouté par lui h des exemplaires exécutés après
1450: il voulait faire profiter son œuvre de son instruction plus approfondie et en
augmenter la valeur religieuse : cette partie d'ailleurs était destinée à la lecture et
non à la représentation. (>'est sans doute à cette époque qu'il fut nommé chanoine au
Mans et qu'il abandonna pour toujours la carrière universitaire dans laquelle
il était rentré. Si la conjecture que nous avons proposée ci-tlessus est fondée, il
mourut avant 1471, n'ayant guère, selon toute vraisemblance, plus d'une cinquan-
taine d'années.
Là se bornerait le peu que nous pouvons dire sur la biographie d'Arnoul Greban,
si nous n'étions obligés de réfuter une erreur, répétée sans contradiction depuis
près de deux siècles, et qui enlèverait les deux Greban au Maine pour en faire des
natifs de Compiègne. Gh )se étrange! c'est un Manceau, Lacroix du Maine, qui, sous
l'empire d'une confusion bizarre, est venu contredire la tradition universellement
reçue qui lui d )nuait pour compatriotes les auteurs des deux plus grands drames
religieux du moven-àge.
Dans sa Bibliothèque française, publiée en 1584, Lacroix du Maine joint au nom
de Simon Greban ' la aiotice suivante : « Simon Greban, secrétaire de Monsieur lu
Conte du Maine Charles d'Anjou^, natif de Compiègne en Picardie, qui fut cause
qu'il s'appella Simon de Compiègne, etc^., frère d'Arnould Greban, chanoine en
l'Eglise du Mans, comme nous avons dit cy dessus ^
« Il a continué le livre des Actes des Apostres, commencé par son frère Arnoul...
lia escrit jjhisieurs élégies, complaintes et deploralions... epitaphes sur la mort du
roy de France Ciiarles 7... la sphère du Monde, qu'il appelle autrement les vertus
de l'Espère du monde, imprimée avec un vieil calendier, etc.
« lia traduit, parle commandement du Roy de France Philippes le Bel, un livre
intitulé le Cœur de philosophie'^ imprimé à Paris par Philippes le Noir l'an 1520,
mais je ne sçay s'il y auroit point faulte au livre imprimé. Car s'il estoit ainsi
' La notice sur Anioul Greban (p. 24) se borne à dir^ : « Natif de Compiègne en Picardie, chanoine du
Mans l'an 1450 ou environ, frère de Symon Greban, duquel nous parlerons ci-aprés. » Lacroix du Maine ne
parle que des Actes des Apôtres et ignore absolument la Passion.
* Colletet contredit cette assertion, en croyant plutôt la préface des Actes composée parle libraire Ala-
liât en 15HG, qui lappelle docteur en théologie. Mais Aiabat ne savait rien des Greban et en parle à l'aven-
ture. Le téraoigna^'e de Lacroix du Maine est contirmé par un document officiel, et Simon Greban ne
ligure sur aucune des listes de maîtres ou de licenciés en théologie qui nous sont parvenus. Il était seule-
ment niaitre es arts, comme l'indique la notice imprimée ci-deSîUs, p. vu, note 4.
■' Que peut vouloir dire ce singulier etf. ?
■• Voy. ci-dessus, note 1.
^ Lacroix du Maine entasse ici confusion sur confusion. L'Espère du Monde, qu'il donne comme un ou-
vrage distinct du Cuer de Philosophie, n'est qu'une partie de ce livre, la seule, à vrai dire, où il soit
parlé de Simon de Compiègne M. Chassang (Nouvelle Biographie générale) a enchéri sur Lacroix ; il
attribue à Simon Greban (confondu, comme dans Lacroix, avec Simon de Compiègne) « Aeuj. poèmes inti-
tules, l'un, la Création du Monde, l'autre la Sphère du Monde ou les natures (sic) de l'espèce (sic)
du Monde, et une traduction d'un ouvrage latin, le Cœur de Philosophie. » Cet article est d'ailleurs
rempli d'inexactitu<les.
X INTRODUCTION
qu'il eust ihry soiibz le règne diulit Pliilippes et de Charles 7. ce seroit chose
trop miraculeuse : qui est cause que je pense qu'il y ait faxilte en l'impression
du livre, qui dit sur la fin que ce livre du Cœur de philosophie aye esté traduit
par ledit Simon Greban parle commandement du Roy Philippes le Bel; car c'est
chose toute asseuree qu'il florissoit soubs le règne de Charles 7. lequel mourut en
l'an 1461. Nous avons plusieurs de ses compositions escrites a la main et non
encore imprimées ^ »
Qui a pu induire Lacroix du Maine a reconnaître dans ce Simon de Compiègne,
qui dédiait son ouvrage à Philippe le Bel, Simon Greban qui, de son propre aveu,
florissait sous Charles VII ? c'est ce qu'il est impossible de deviner ^ : le livre qu'il
avait sous les yeux ne prête en aucune façon à cette confusion ^. Cette identification
absurde est cependant la seule preuve qu'il apporte à l'appui de son dire. Pour rendre
possible un rapprochement que rien au monde ne justifie, il s'est avisé de supposer une
faute à l'impression, mais cette liypothèse est tout à fait inadmissible. Non-seulement
le Cuer de philosophie ' porte après le titre : Translaté de latin en françoys a la
requeste de Philippes le Bel, roy de France ; non-seulement Vexplicit {i" 144 v°)
répète la même formule, non-seulement dans sa dédicace, évidemment remaniée par
celui qui a procuré l'édition de Vérard, mais authentique pour le fond, Simon de Com-
piègne s'adresse à son « souverain seigneur, Philippes le Bel, roy de France, » mais
le style, malgréle maladroit rajeunissement qu'il a subi, porte, autant que les idées,
le cachet du temps de Philippe IV et non de Charles VII ou de Louis XL On ne peut
pas davantage soutenir, comme l'avait imaginé Prosper Marchand^, et comme l'a
1 La Bibliothèque du sieur de la Croix-du- Maine, Paris, Abel l'Aiigelier, 1584, in-f", p. 456.
2 A le lire, on croirait que le Cuerde Philosophie fait à la fin mention de Simon Greban; il n'en est rien.
Il n'est parlé que de Simon de Compièi/ne, comme on le verra dans le passage même, cité plus loin.
3 Noxis avions eu l'iJée, pour expliquer en quelque façon l'étrange erreur de Lacroix du Maine, de supposer
qu'il avait trouvé Simon Greban dans l'exemplaire du Cuer de philosophie dont il s'est servi, et nous ima-
ginions, non sans vraisemblance pour qui connaît les mœurs typograjMques d'alors, qu'un éditeur du
xvi" siècle, voulant fiire profiter le Cuer de philosophie., qu'il réimprimait, de la célébrité de Simon Greb:in,
avait substitué, soit sur le titre, soit sur Vexplicit, son nom à celui de Simon de Compiègne, en laissant
d'ailleurs subsister ce dernier à un autre endroit. Pour vérifier cette conjecture, il fallait consulter l'édition
donnée en 1520 par Philippe le Noir, puisque c'est celle-là qu'a eue sous les yeux Lacroix du Maine. Mais
c'est plus facile à dire qu'à faire. Aucune bibliothèque de Paris ne la possède, Brunet la décrit minutieuse ■
ment et ajoute qu'il la décrit d'après l'exemplaire de l'Arsenal : or, à l'Arsen il, on a trois éditions du Ciicr
de philosophie, dont aucune ne contient d'ailleurs le nom de Greban, mais on n'a pas celle que Brunet dit
y avoir vue, et les conservateurs assurent qu'on ne l'a jamais possédée. Nous espérions que les livres de 1 a-
(ivix du Maine se retrouveraient à la bibliothèque du Mans; mais M. H. Gliardon nous apprit qu'il avait
t ansporlè ses livres à Paris et qu'on n'en possède aucun dans sa ville natale. Nous eilmes alors recours à
l'obligeance d'une personne fort instruite. Miss L, T. Smith, qui voulut bien faire pour nous des recherches
an liritish Muséum, Elle y découvrit en effet l'édition tant pourchassée, mais notre conjecture se trouva
fausse. L'édition de Pliilippo le Noir, 1520, ne parle, comme les autres, que de Simon de Compiègne, et
ne dit pas un mot de Simon Greban. L'aberration de Lacroix du Maine demeure inexpliquée.
■1 Paris, Antoine Vérard, s. d. (Bibl. Nat. 11. -t- 721 C). ■ — Remarquez que Lacroix du Maine, par suite
d'une confusion dans ses notes, fait deux ouvrages différenis de celui-là et de V Espère du Monde,
•qui n'en est qu'une partie.
5 Dict. historique, t. I, p. 288, note E (cité par M. Sorel).
INTRODUCTION xi
fait M. A. Soi'el', que Simon Greban n'aurait été que le réviseur d'un livre plus
ancien, dû à maître Aignan et dédié par lui à Philippe le Bel. C'est bien Simon de
Compiègne qui parle dans la dédicace, et quant h la notice où il est parlé de « maistre
Aignan » à côté do « maistre Synion de Compiengne, qui fut moine de Saint Richier en
Ponthieu,» il faut l'entendre en ce sens que Simon de Compiègne traduisit une partie
de sa compilation, celle qui est relative au Conijml et au Kalendier, du latin d'un
maître Aignan ^ qui vivait peu de temps avant lui, et dont l'ouvrage est arrivé jusqu'à
nous'.
Il est étonnant qu'une allégation aussi directement contraire à l'évidence que celle
de Lacroix du Maine ait obtenu autant de succès. Elle s'est maintenue en faveur jus-
qu'à nos jours; non- seulement Compiègne a revendiqué les frères Greban par l'organe
de M. Sorel ''', mais M. Hauréau et D. l'iolin, au nom du Mans, ont renoncé pour leur
ville à riioiiueur de les avoir vus naître. Pour nous, revenant à la tradition évidem -
ment authentique attestée par du Bellay et Marot, nous regardons, ainsi que le fai-
sait Pasquier^ vingt-quatre ans avant la publication du livre de> Lacroix du Maine,
Arnoul et Simon Greban comme « frères nez de la ville du Mans. »
Il ne nous reste plus qu'un point à examiner, c'est la forme du nom de famille de
notre auteur et de son frère. On l'écrit le plus souvent Gresban, et c'est l'orthogra-
phe adoptée par le manuscrit A dans sa précieuse rubrique. Cependant nous ne la
trouvons qu'exceptionnellement aux quinzième et seizième siècles, et on avait à cette
époque une telle manie d'insérer partout des s prétendues étymologiques qu'il ne
faut pas s'étonner de cette altération. Les documents officiels nous donnent deux
formes : Greban (registre de Saint-Julien du Mans et délibération d'Abbeville) *, et
Grehen (registre de la Faculté de théologie, ms. 2340). Cette dernière forme n'est
qu'une façon de noter le son du mot Greban; la bonne orthographe est Greban,
comme on le voit dans la dernière stance d'un poëme du plus jeune des deux
frères, dont les neuf premiers vers forment l'acrostiche Simon Greb, qui se
complète avec la première et la dernière lettre du mot final amen''. Il est vrai
' Ouvr. cit., p. 17.
- Voici ce passape. tel qu'il doit être lu : « Cy fine l'ordoniiemeut du monde et commence rordoiniement du
coiiipoit et du kalendier, et les noms do ceuk qui le firent, si comme maistre Symon de Compiengne, qui
fut moine de saint Richier en Poutliieu, lequel le translata de latin en (rançois (et) selon maistre Aiguan. »
(f» 12G i-> do rexemi)laire de li Bil.l. nat., coté R + 721 C).
3 B:bl. Nat. Mss. lai., 7i23. 8129, 8429 A, 15159. On voit dans ce dernier manuscrit, entre autres {(" 204), que
ni.'t:'e « magister Auianus » n'avait dit lu'-mcMiio qu'alireger Alexandre di- Villedieu, loquel l'.orissait dans
la première moitié du xm' siècle, et qu'il avait même di\ écrire un certain temps après lui.
■> M. Sorel (p. 9) et déjà Vallet d? Viriville, dans son article Gresban de la liiograpliie Didot, rattachent
à nos auteurs (au moins jiar descendance collatérale) la famille encore existante de Gréhan de Potltourny.
Cette famille est donnée comme originaire de Compiègne, mais il faudrait savoir si cette origine n'est pas
hypothétique et si elle n'a pas été admise par la famille précisément en vue de se rattacher aus Greban du
quinzième siècle, supposés natifs de cette ville.
'■> liecherches de la France, Paris, éd. 1633, I.iv. vu, ch. 5, p. CI2.
" Voy. ci-dessus, p. ii et p. vu, note 4.
" Voy, Sorel, l, c, p. 15.
XII INTROnUCTION
que Geofroi Tory dit avoir vu un acrostiche du frère aîné qui donnait Araol-
dus^ Grabans, mais il ne cite pas le texte, et nous sommes portés à regarder cetti
allégation isolée comme reposant sur une erreur de copie ou d'impression.
C'est à ces pauvres résultats que se borne la biographie d'Arnoul Greban. Qr.an
à ses œuvres, elles lui avaient valu, auprès de ses contemporains et de la génératioi
quileur succéda, une renommée considérable, dans laquelle il nous apparaît d'ailleur:
presque toujours associé à son frère. La plupart des témoignages qui l'attestent on
déjà été réunis 2; nous croyons cependant devoir les rapporter encore en y joignan
quelques observations.
Ce sont d'abord les auteurs d'ouvrages de rhétorique et de critique qui nous fon
l'éloge des Greban. Le plus ancien, Henry de Croy, ne mentionne qu'Arnoul et lu
attribue une invention dont il ne mérite sûrement pas l'honneur : « Pour faire, » nou
dit-il en titre, « amoureuses complainctes et aultres doléances, ainsi que a fait maistr
Arnoul Grebert (sic), qui en fut premier inventeur de belle rhétorique. — Exemple
A TOUS, dame, je me complains :
Je vois pleurant avau les plains s.
Car ne'' congnois que pleurs et plains :
Puis que je vis
Votre gent et gracieulx vis,
J'aime mieulx estre mort que vifz :
Neantmoins, que voulentiers qu'envis.
Je me soubnics
Au dieu d'amour, qui desorniès
Me fait servir d'estranges mes
De danger et de refus, mais
C'est par amer
Vostre beaulté pleine s d'amer.
Qui a fait mon cuer entamer,
Sy que je vouldroie en la mer
Estre perilz,
Estre noie, mors et pourris,
Mès^ avec les sains esperis "
L'ame dont les yeulx ont pou ris
Fusist sauvée «
' Il est appelé Arnulphus, traduction plus correcte à'Arnoitl, dans le reg-istre de la Faculté il
théologie.
2 En dernier lieu par M. Sorel, dans l'ouvrage cité. Nous avons vérifié toutes ces citations dans les livre
auxquels elles sont empruntées.
3 L'imprimé a avant pour avau; Et. Pasquier (l. c, p. 613) donne par vaux 'et plains.
■* L'imprimé a je, qui ne va que difficilement au sens.
^ Éd. plainier.
^ L"imprimé ancien porte Mix.
' 1,'Art de rhétorique lit acecques les sains espris.
s L'Art et science de rhétorique pour faire rigmes et ballades, réimpression de Crapelet, dans les Pol
sies des xv et xvi' siècles, Paris, 1830-1832. in-S» goth. (Bibl. Nat. Y + 4397 + Aa), B. III, v".
INTRODUCTION xiii
Il s'en faut bien que Greban ait inventé cette forme devers, familière h Rutebeuf et
que nous trouvons déjà euipluyée au douzième siècle ; on pouri'ait croire qu'il l'a régu-
larisée; cependant le DU de Poissy, de (^lirisline de Pisan, nous montrCj aussi bien
que le fragment de Greban, des groupes de vers égaux en nombre et ratlachtts de
même; il faut donc supposer que toute l'invention d'Arnoul consiste à avoir appliqué
cette forme à la complainle amoureuse. En tout cas il est a remarquer qu'il s'en
est aussi servi, avec diverses variations, dans le Mystère '. Comme nous l'avons dit
plus haut, cette pièce doit se rapporter à la même période de sa vie *.
Pierre Fabri ou plutôt Lefèvre semble, comme Henri de Croj, ne connaître que
l'aîné des deux frères qu'il place au rang des yrands orateurs : « 11 me suffit d'en
dire que depuis pou de temps la science a esté amplement magnifiée en noslre lan-
gage d(> plusieurs et grans orateurs, et mesmes de nostre temps de maistre Arnault
Grebon (sic), de Hurion, imitateur de Georges Castelain, etc.^. »
L'entliousiasme du troisième critique qui parle de notre auteur, Geofroi Tory, est
bien autrement exalté ; maliiçureusement il ne semble pas moins factice, et Q est
permis de soupçonner que le bon typographe, si on lui eût demandé quelles œuvres il
admirait si fort, aurait été embarrassé de répondre. L'étrange anachronisme dans le-
quel il suit naïvement son ami René Macé à propos d'Arnoul (les Greban semblent
prédestinés à faire commettre ce genre de bévues ! ) prouve combien il était mal informé
de ce dont il pai'lait. 11 a cependant, ce qu'on n'attendrait guère, le mérite de nous
révéler l'existence d'un petit ouvrage inconnu de notre poète, a Arrière! arrière! »
s'étrie-t-il,''« autheurs grecz et latins : de René Massé naist chose plus belle et grande
que le Iliade. On pourroit en oultre user des oeuvres de Arnoul Graban et Simon
Graban son frère. Dantes.-Uigerius Florentin, comme dict mon susdict bon amy René
Massé, faict honorable mention dudict Arnoul Graban. Et d'icelluy Arnoul aj' veu
en l'esglise des Bernardins de Paris ung tableau auquel il y a une oraison a la vierge
Marie qui se comnvAWCQ En protestant ^^i les premières lettres des versetz du dernier
couplect contiennent son nom et surnom qui sont Arnoldtts Grabans'^ me'^. » Il est
1 V. 9U9-9508, 11891-1U>05, 15456-15507,25350-25501.
2 Cette pièce a été cité; eu pirtie par Pasquier, qui, après avoir constaté que les Oreban furent grande
metit « célébrez par les iiostres, » et avoir cité Jean le Maire. Geoff oy Tore (sic), Mnrot, etc., nous donne les
trois premiers couplets qu'il avait copiés à Blois dans « l'autlieur du vieux art poétique fraiiçols », et regrette
do n'avoir pas copié le reste. An reste, Pasquier se trompe en croyant que la pièce était complète dans
l'Art et science de rlœtorique, et M. Sorel tombe dans la même erreur : H. de Croy ne donne que le détmt :
la pièce devait être bien plus longue. — 11 est probable, d'après les variantes rapportées plus haut, que
Pasquier avait copié sur un manuscrit.
'' Le f/rant et vrai/ art de pleine Rhétorique utille, proffilahle et nécessaire a toutes f.ens qui
désir nt a bien eleganmient parler et escrire... Rouen, 1521 (Bibl. Nnt. X 3290), P m, r" (Prologue de
l'acteur).
* Champ Ficury... P.iris, 1529 (Bibl. Nat. V 4- 595in-f'), f' m, r'.
^ ïSur cette orlhogr.ipbe, v. ci-dessus, p. xii.
'' Ce me pourrait être le commencement, seul exprimé, de la formub' me fecit. Toutefo.s, il est curieux
d'avoir un « coupleit » de dix-sept vers. Ne faut-il pas en faire deux stances de huit Ters, qui auraient porté
en acrostiche Arnoldus Greb.inusf
j^iv INTRODUCTION
probable que René Macé, qui communiqua si généreusement à son « bon am j » la belle
découverte qu'il avait faite clans Dante, avait parlé ailleurs des Greban ; mais l'œuvre
littéraire du chroniqueur de François I" est aujourd'hui perdue ou au moins inconnue,
et les manuscrits de la Bibliothèque nationale qui contiennent presque tout ce "que
nous avons de lui ne font aucune allusion à ce sujet ' . — Quant à la prétendue mention
honorable faite par Dante d'Arnoul Greban, il est clair que le bon Macé a été trompé
par le célèbre passage du Purgntoire (c. xxvi) consacré à la gloire d'Arnaut, c'est-
à dire d'Arnaut Daniel : leu sut ArnaiU que itlor e vai cantan^.
Geofroi Tory est le dernier cï-itique qui fasse l'éloge des Greban ; avant même le
triomphe de la Pléiade, leur étoile jumelle s'est éclipsée. Thomas Sibilet, en 1548,
dans son Art poétique, n'a plus même un mot pour eux. Bientôt ils sont enveloppés
pour toujours dans le mépris, — assez justifié, — dont l'école de Ronsard couvre tous
les poètes de l'école si admirée au temps de Louis XII. Ces poètes, plus jeunes que
les Greban, les reconnaissaient pour leurs maîtres et ont célébré leur nom en mainte
rencontre. Le signal est donné par le plus illustre de tous, Jean le Maire de Belges,
qui, parlant des meilleurs écrivains français antérieurs à lui, cite « Jehan de Meun,
Froissart, maistre Alain, Meschinot, les deux Grebans, Millet, Moulinet, George
Chastelain et autres dont la mémoire est et sera longuement en la bouche des hommes,
sans ceulx qui encore vivent et florissent, desquels Guillaume Crétin est le prince'. »
A la suite du maître viennent les disciples. Jean Bouchet ne manque pas de
placer les deux frères dans son éuumération des « inventeurs et aucteurs des ars et
sciences » :
Scmblablement je vy par fantasie
Les inventeurs de l'art de poésie
Et les aucteurs qui se voulurent mettre
A composer premièrement en mètre
Grec et latin et vulgarre langage...
Puis je apperceu Milet et les Grebans;
Georges, Castel reposent la dedans, etc*.
Bouchet fait des Greban, associés aux mêmes auteurs, une louange plus précise
dans une de ses épîtres familières :
' Fr. 14492, le bon Prince, poëme sur le voyage de Charles-Quint en France, incomplet. Ce poëme.
dont il existe encore deux manuscrits, l'un à Aixeji Provence, signalé par M. L. Delisle (Voy.le Bulletin
de la Société de l'histoire de Paris, 1875, p. 2Î;), lautredans la bibl. de Sir Thomiis Phillijjps, sera trés-
procliainement pulilié pai- l'un des éJiteurs de ce volume, - Fr. 49(3o et 2S2.3, Chronique en vers. —
Lat. 8417, Klégies et épUres.
2 Cette exiilieation de la méprise de Macé u déjà été donnée.
3 Prologue du Traiclé intitulé la Concorde des deux langaiges, faisant suitej avec d'autres pièces, aux
Illustrations de Saule dans l'édilion de F. Regnault, Paris (1506 ?).
■i Le Temple de bonne renommée et repos des hommes et femmes illustres .^ Paris, a l'Escu de
France, lôlf , golh;, ('■ xliiii \" et xlv r°;
INTRODUCTION xv
Priant a Dieu qu'il to donno le stylo
Des deux Clrebaus, dont grant doiilceur distille,
ICt de Castel l'invention des laiz,
De Cicoigos l'art, la veine Sainct Gcloyg'.
Cléiiunit, Mai'ot se rattachait à cette école par ses origines et croyait encore lui
iipiiarUniir, b'u'ii ([u'il s'en fût heureusement dégagé et se fîit ouvert une voie toute
per.sunnelle. Aussi ne faut il pas s'étonner qu'il répote les éloges accordés aux Ore -
ban par ses anciens. Nous avons rapporté plus haut l'épigranime où il dit qu'ils ont
honoré U'ur ville natale; il les loue encore ailleurs en compagnie d'autres poètes :
le grave Cliastellain,
Le bien disant en ritlimc et prose Alain,
Les deux Grebans au bien résonnant stile,
Octovian a la veine geutile,
l.e bon Crétin au vers équivoque, cic ».
Dans tout le milieu littéraire d'alors, le nom des Greban était en grande vénération.
Il était invoqué dans les discussions poétiques. Ainsi dans l'une des pièces du long
débat entre Marot et Sagon, l'auteur, opposant ;i Marot les grands poëtes qui l'ont
précédé, s'exprime ainsi :
Venez donc, Ghartier et Crétin,
Greban, Mescliinot et I?ertiu ■'.
Ce nom figure dans cette dispute d'une façon plus curieuse. Les partisans de Sagon
se plaisent à le surnommer « l'autre Greban, » comme on le voit par les deux pas-
sages suivants :
Ha ! que dis je? tu es l'autre Greban,
Qui a Marot dénonce arrière ban^.
Lettre, va t'en, et ne faictz long séjour,
Te présenter devant l'autre Greban ^.
La gloire des deux Greban fut, au moment de s'éteindre, brillamment ra-
jeunie par le succès incomparable qu'obtint, sous le règne de François L', leur mjs-
I Epistres inorales et familiuyes du Trdvetseiir, é\<. LXl (réponseà ThiijauU, nvocnt de Poitiers).
Piiiliers, 1515, in-l'", III, 1^ xlij r° a.
- Kd. citée, t. 11 (1870), p. 93-91.
Le Rabais du caquet de Fripelippes (Harot, éd. Leiglet-Dufresnov, t. \I, p. 104).
■' llescripl a François de Sagon, l. c^Wï, SI.
i (Irande généalogie de Fripelippes, l. c, VI, 61. — Nous devons ces trois indications à l'obligeante
érudition de M. Émil- Picot. Il e.st porté à conclure de ce surnom d' « autre Greban » que Sigon avait com-
posé des ouvrages dramatiques.
XVI INTRODUCTION
tére des Actes des apôtres. Dans le prologue de l'édition de 1540, on fait un pom-^
peux éloge de Simon, qualifié à tort de docteur en théologie, et oji ajoute :
Ung frcie il eut, Ariioul Greban nommé,
Gentil ouvrier de pareille science,
Kt inventeur de grande véhémence ' .
Enfin nous avons vu qu'en 1547 Joachim du Bellay traitait encore les deux Gre-
ban de « divins esprits. » Du Bellay n'avait alors que vingt-trois ans : il n'avait pas
conçu les théories nouvelles qu'il allait, deux ans plus tard, soutenir avec
tant d'éclat. Ce dernier admirateur, — admirateur sur parole, probablement, —
de nos poètes manceaux devait donner le signal de la révolution qui allait les plonger
dans l'oubli et qui eut pour premier efîet de faire périr leur principal titre de
gloire en abolissant la représentation des mjstères.
II
Le Mystère de la Passion, a. nos yeux, ne justifie pas ces éloges. C'est un ouvrage
considérable, travaillé, mais où il est impossible de reconnaître du génie ou même
un talent remarquable. L'auteur ne fait guère preuve d'originalité que dans la partie
proprement dialectique, où d'ailleurs il se complaît. L'interminable discussion entre
Justice, Vérité, Miséricorde et Paix, lieu commun légué au poëte par les âgesprécé-
dents, nous offre le tableau fidèle d'une de ces disputes scolastiques qui remplissaient
alors la rue du Fouarre. Le drame proprement dit est encadré dans cette discussion,
engagée au début et pacifiquement résolue à la fin. C'est là une idée qui nous semble
neuve et qui ne manque pas de grandeur. Dans la mise eu scène de la vie du Ciirist,
Arnoul Greban suit l'Evangile, non seulement sans invention, mais avec une remar-
quable faiblesse. Les miracles divers qui, sous une main habile, auraient pu donner
lieu à tant de scènes charmantes ou pathétiques, sont platement dialogues, et beaucoup
des plus intéressants sont omis. L'absence complète de caractère personnel chez Jésuf
était imposée au poëte par la façon étroite dont le moyen-âge comprenait la figure
de l'Homme-Dieu, mais comme celte figure occupe presque tout le temps le théâtre,
il en résulte une froideur constante. Les personnages accessoires ne sont guère plus
vivants. Us débitent juste ce qui est nécessaire pour expliquer leur intervention et
leur action, sans qu'on trouve chez le poëte une trace d'eff"ort pour les rajeunir ouïes
caractériser. Quel parti, dans ladonuée où l'auteur étai^ nécessairement assujetti,
1 Triumphant mystère rfes Actes des ap)stres, l'jris, 1540, ciiez Ar.ioul et Cliailes les Aa'/elier<
(2 vol. iii-i". Bil)l. Xat., Y 4358; I, vei-j 16-S du Prologue non pagine.
i
INTRODUCTION xvii
ne pouvait-il pas tirer de personnages tels que Josepii, Hérode, Joan-Bapliste,
Pierre, Judas, Madeleine, Lazare, Pilate, et autres ! C'est à peine s'il a développé çà
et là les indications qu'il trouvait dans ses sources. Seule, Marie a été traitée avec
une prédilection particulière et qui a parfois porté bonheur au poëte. La complexité
mystique de ce caractère de vierge mère, de ce cœur qui dans le même être aime son
fils et vénère sou Dieu, de celte ùme qui, tout éclairée des presciences de la gloire
future, n'en est pas moins meurtrie par les angoisses delà douleur présente, cette
complexité qu'il est impossible de saisir et de représenter réellement, Arnoul Greban
a eu le mérite de l'imaginer et parfois, si nous ne nous trompons, de l'indiquer avec un
certain succès. Marie est la figure la plus pure et en même temps la plus vivante de
son œuvre.
Tout drame suppose une lutte. Dans le récit de la i^assion, il n'y a en réalité pas
de lutte, puisque le héros, d'après le dogme catholique, va volontairement au sup-
plice et n'est même devenu iiomnie que pour atteindre ce but : il est d'ailleurs trop
au dessus de ceux qui l'entourent et l'aiment pour que leurs sentiments, comme dans
Polyeucte, osent tenter de s'opposer aux siens. Les dramaturges chrétiens ont été
obligés de laisser en blanc, pour ainsi dire, en sous-entendu tout le côté de la résis-
tance ; ils n'en ont développé qu'avec plus de verve le côté de l'attaque. Les Juifs, les
bourreaux, les diables, ces trois genres d'ennemis défrayent à eux seuls une large
part de l'action. Les derniers surtout, dès avant Arnoul Greban, étaient en posses-
sion de faire rire le public des mystères, que la vue des scènes pieuses, sans inter
mèdes, aurait ou ennuyé ou trop attendri. Le moule des plaisanteries froides et mono-
tones qui font toute la gaieté des scènes d'enfer était trouvé depuis longtemps :
Greban l'a rempli avec une certaine discrétion, si on le compare à d'autres, et parfo's
il a mêlé à ses bouffonneries grimaçantes quelques accents plus sérieux et plus pro-
fonds, comme dans le rondel : La dure mort éternelle C'est la chanson des damnés.
Mais en somme il n'a i)as innové. Les scènes de bourreaux sont également plus an-
ciennes que lui, mais il s'y est particulièrement complu. Il est clair qu'en les déve-
loppant comme il l'a fait il plaisait à ses contemporains. Pour nous, nous ne savons
ce qui nous repousserait le plus, des tortures aussi atroces que dégoûtantes dont Jésus
estabreuvépendantsept mille vers, ou des facéties bestiales de ses tortureurs; le public
du quinzième siècle, en prenant plaisir aux unes et aux autres, manifestait certaine-
ment deux goûts que la populace n'a pas encore perdus, mais notre sentiment moderne
ne peut comprendre comment on supportait les unes et les autres, appliquées au Ré-
dempteur, au {''ils de Dieu, au Christ qu'on adorait chaque jour'.
' M. Paulin Paris, en 1805, appréciait à peu prés de même cetle partie de l'muvre ileG.eban « Le Sau-
veur des hommes n'a pas soulïert plus loiiyiemps en réalité que, dans le Mystère, celui qui le représeiilr.
Comment pouvait-on s' complaire à d'aussi interminables tableaux? Les tourments du Fils de Dieu arri-
chaient-ils des larmes ? Les grossiers jeux de mots des tyrans provoquaient-ils des éclats de rire ? N'eus ne
savons : les uns et les autres peut-être; mais nous sommes surpris quo les larmes et les ra-es ne se soieut
pas lassés dés la première de ces mortelles heures » (Revue des Cours xiv.bUcs. h c, p. 51).
6
XVIII INTRODUCTION
Pour les Juifs, les docteurs, les pharisiens, Arnoul Greban s'est aussi mis en frais,
et là, comme nous l'avons déjà dit, sa dialectique et sa science ont trioraplié. Il leur
fait pousser et soiidre un argument avec une dextérité incontestable. A ces
scènes -là, le petit peuple ouvrait de grandes oreilles, mais les personnes notables et
discrètes, qui d'ailleurs avaient pris leur part du rire et des larmes des épisodes sai-
sissants, sentaient qu'elles avaient affaire à un iiomme instruit et approuvaient du
geste ses irréprochables syllogismes. Son instruction historique était moins forte :
il n'hésitait pas à faire adorer Mahomet par Pilate ; mais qui se scandalisait alors
de pareils écarts?
Enfin le fond général de la pièce, attrait sans cesse varié pour les contemporains,
qui, à d'autres titres, n'a pas cessé d'agir sur nous, c'était la représentation naïve de
la vie de tous les jours et de tout le monde. Depuis les rois et leurs conseillers, les
grands prêtres et les chevaliers, jusqu'aux petites gens de tous les états, on voyait là cir-
culer, agir, on entendait parler toutes les classes de la société dans une procession in-
terminable et sans cesse renouvelée. C'était un spectacle dont on ne se lassait pas, et
qui nous plaît encore, bien que nous le regardions avec de tout autres yeux. Cette
variété infinie donnait aussi occasion au poète de varier son style et son langage, de
reposer, par des cliangements continuels de ton, l'attention des si)ectateurs d'alors
et d'accumuler pour le lexicographe d'aujourd'hui des trésors dont notre glossaire
peut donner l'idée. .
Ce n'est pas à coup sûr dans ces passages familiers que les admirateurs d'Arnoul
Greban auraient trouvé « le bien resonnant stile » dont ils le louent. Mais pour nous,
sans nier que dans la partie de son œuvre où il prend le ton élevé et oiî il se montre
vraiment un « noble rhetoricque, » il y ait parfois des vers bien frappés, des élans
poétiques, un maniement heureux durhythme, nous regardons en général ces mor-
ceaux laborieux comme de parfaits échantillons d'un art creux, faux et puéril, et
nous apprécions surtout chez lui les passages nombreux où, quittant le cothurne, il
parle avec aisance, parfois avec gaieté, la bonne et franche langue populaire.
En résumé, on ne peut mieux comparer le Mystère de la Passion qu'à tel ou tel
de ces vieux tableaux flamands qui représentent le même sujet, et devant lesquels
nous nous arrêtons longuement avec curiosité, mais sans éprouver ni attendrissement
ni extase. Sur ces antiques panneaux, travaillés d'un bout à l'autre avec un soin
minutieux, Jérusalem, vue du haut de la colline du Calvaire, ressemble à Paris ou à
Bruges; le Christ, entre ses bourreaux grotesques qu'un rire liideux fait grimacer,
s'avance, figure plate et sans expression, parce qu'elle ne doit pas marquer de dou-
leur humaine, autour de laquelle est plaquée une auréole d'or cru ; les bourgeois de
la ville regardent défiler le cortège d'un air béat ; les soldats romains, habillés en che-
valiers, s'arrêtent un instant pourboire ; les voleurs déjà crucifiés se distinguent par
la laideur et les convulsions de l'un, le calme relatif de l'autre ; les croix bien
propres se dessinent nettement sur un ciel d'un bleu monochrome; seule peut-
IISTRODDCTrON xix
être, dans tin coin, la mère habillée en nonne qui se pâme dans les bras de ses amies
à la vue du cortège fait passer uuo synipatliie poignante dans le cœur; mais en
regardant en haut, on voit le ciel ouvert, où Dieu le père, en habit de pape, une co-
lombe sous ses pieds, attend paisiblement le retour de son fils, entouré de ses anges
symétriques. C'est ainsi que l'imagination d'alors se représentait le drame du Gol-
gotha, ot c'est ainsi qu'avec une jouissance et une édification sans bornes le pul)lic de
Paris d'abord, puis de presque toutes les grandes villes de France, le contempla sur
la scèn(>, grâce h maître Arnoul Greban.
■^ La mise en scène, le spectacle ! voilà quel fut le grand élément de cet incompa-
rable succès des mystères. Les conditions dans lesquelles était né le drame chrétien
l'avaient amené à se créer un logis à son usage propre, qui disparut probablement
sans retour avec la renaissance du drame grec, et qui cependant marque une des
formes les plus remarquables, peut-être susceptible de renouvellement, de l'art dra-
matique. Au lieu d'être successive, si l'on peut ainsi parler, la mise en scène est si-
multanée. Les différents liotix où se passe l'action sont tous, dès l'origine et jusqu'à
la fin, sous les yeux du spectateur, garnis des personnages afférents. Tous ces lieux
communiqxient entre eux par le devant de la scène, terrain neutre où se passent les
voyages, les marches, les actions sans lieu définiT) Qu'on se figure une telle scène
livrée au génie d'un Shakespeare : n'en aurait-il pas tiré un extraordinaire parti ? et
n'aurait-elle pas du moins été préférable à ces éternels cliangements de décors qui
aujourd'liui rendent si difficile l'exacte re[)résentation de Hamlei ou. de Richard IIH
Devant la foule, amassée longtemps à l'avance, s'étendait ainsi, sur un espace
souvent très-vaste, le coin du monde où se déroulait l'action : ici une ville, là une
montagne, une plaine, le bord d'un lac ou de la mer, la chambrette de Marie, la pri-
son de .Jean, la salie du festin d'IIérode, l'étable de Bethléem, etc. D'un côté, sans
doute à une extrémité, s'élevait le Paradis, formant un étage supérieur, au-dessous
duquel des tentures dissimulaient l'échelle qui le faisait communiquer avec la terre ;
h l'autro bout s'ouvrait la gueule d'enfer par laquelle sortaient et rentraient sans
cesse les diables envoyés parmi les hommes. Ainsi s'exprimait aux yeux le monde
tel que l'esprit le concevait, divisé en trois règnes distincts, celui du boniieur éter-
nel, celui du malheur sans fin, et au milieu la terre où l'homme décide par sa vie à
quelle région, céleste ou infernale, il appartiendra pour toujours, où les diables le
tentent, où les anges le soutiennent. L^ , du haut des cieux, aux rugissements des dé-
mons, on voyait descendre le fils même de Dieu pour livrer à Satan la grande bataille
dont lesépisodesse déroulaient l'un après l'autre. Oublions ici la faiblesse du style, la
pauvreté de l'invention, l'inconcevable distance où l'exécution reste du sujet; ne pen-
sons qu'à ce sujet et aux sentiments qu'il inspirait aux spectateurs. Ce drame qui se
jouait sur la scène, c'était à la fois le sj'mbole, la représentation et la solution terrible
ou bienheureuse du drame dont cliacun de nous est sans cesse le protagoniste. Aussi,
quelle participation, quelle attention haletante I quels gros rires quand les diable»
XX INTRODUCTION
déçus faisaient en enfer « grand tumulte, » quel enthousiasme quand, au son des
orgues du Paradis, le chœur des anges célébrait les victoires de Dieu !
Le grand mouvement des mj'stères commence pour nous vers 1450 ' et finit en 1548,
lors de l'édit du Parlement qui interdit de représenter la Passion et autres sujets
religieux. Il dure un siècle. A l'origine, si nous ne nous trompons, il faut placer
l'œuvre d'/Vrnoul Greban : c'est elle qui la première avait excité l'admiration et avait
été représentée de ville en ville. Son succès lui vint sans doute, — eu outre du talent
réel, si on le compai'e k ses prédécesseurs, qu'j avait montré l'auteur, — de ce
qu'elle inaugurait la grande mise en scène. Jamais on n'avait vu jusque-là un mystère
durer quatre journées, employer plus de 220 personnages, déployer une action si riche
et tant d'épisodes variés. Ce n'était rien à côté de ce qui suivit : les Actes des Apolres
sont à la Passion ce que celle-ci était aux mystères plus anciens, mais Greban avait
donné le signal. Plus tard on trouva qu'il était trop timide et trop bref, et quand on
voulut représenter, avec une pompe qui surpassât tout ce qu'on avait vu encore, la
Passioji à Angers, en 1486, on chargea le docteuj;^ean Michel de remettre l^v rage
d'Arnoul Greban à la mode.
Cette refaçon de Jean Michel fit rentrer dans l'ombre le texte primitif; c'est elle
qu'on joua presque exclusivement depuis lors. L'auteur avait moins de sérieux, mais
plus de verve que Greban; son travail a détruit en bonne partie le caractère reli-
gieux de l'œuvre, mais il l'a rendue plus riche, plus variée, plus touffue, plus inté -
ressante en beaucoup de points. Ce serait une étude digne d'intérêt que la compa-
raison détaillée de l'œuvre du docteur angevin à celle du maître es arts de l'univer-
sité de Paris ; nous ne songeons pas à l'entreprendre ici, nous bornant à fournir à
cette enquête la pièce principale vainement demandée jusqu'ici.
Il vaudrait encore plus la peine de rechercher le rapport de l'œuvre d'Arnoul
aux essais qui l'avaient précédé. Nous nous sommes déjà excusés d'entreprendre ce
travail. Disons seulement que Greban ne parait pas dépendre beaucoup de la tradi-
tion antérieure. 11 est très-probable que les mystères du quinzième siècle publiés
par M. Jubinal nous représentent le répertoire des confrères de la Passion, et il est
également vraisemblable que c'est pour eux, pour remplacer ces pièces vieillies,
qu'Arnoul Greban a travaillé. On ne voit pas cependant qu'elles aient eu d'influence
sur lui, et il y a notamment une remarque importante à faire.^Les mystères anté-
rieurs font aux épisodes étrangers au récit évangélique, empruntés aux apocryphes
ou à des légendes, une part qu'Arnoul Greban leur retire presque absolument. Les
quelques traits de ce genre qu'il admet étaient consacrés par l'enseignement de
l'Église elle-même ou devenus tellement inséparables de la représentation de la Passion
1 On peut le rapport r à la période de calme et de prospérité qui suivit, notamment à Paris, la trêve
d'Arras (1444). Les Anglais, qui infestaient les abords de la ville, ne reparurent plus dans l'Ile-de-France.
I.es derniers épisodes de la guerr^> de cent ans se passèrent, i)lusieurs années après," en Normandie el eu
Guyenne.
INTRODUCTION xxi
qu'il était impossible de les en exclurei[Jeaii .Michel se nioulra moins sévère : les
légendes, les épisodes apocryphes, les développements de pure invention prennentchez
lui une i)lac(' énorme et, en rendant son œuvre plus neuve, plus diverse, jdus pallié-
tique, rejoignent de plus en plus du terrain sévèrement religieux où Arnoul Grebaii
avait voulu la maintenir. La grande innovation de celui ci avait été de comprendre,
dans une seule œuvre, qui devrait dès lors s'appeler le mystère de la Rédemption et
non de la Passion, l'histoire entière du Christ, depuis le moment mystique où Dieu
décide de sauver l'homme en s'inearnant lui-même jusqu'au retour triomphant du
Fils dans le sein de la Trinité.
Quoi que nous puissions penser aujourd'hui de cette tentative et de la manière dont
elle a été exécutée par Arnoul Greban, le succès immense qu'elle obtint n'est pas
douteux. Depuis 1452, nous voyons, dans des documents nombreux qu'il serait inté-
ressant de rassembler aussi complètement que possible, la Piission représentée dans
la plupart des villes du nord, de l'ouestet du centre delà France'. Sans doute il n'est
pas absolument sûr que ces représentations aient toujours porté sur l'œuvre de Gre-
ban, mais c'est extrêmement pi'obable. En tout cas nous n'avons conservé aucun
autre ouvrage sur le même sujet : les manuscrits qui semblent s'écarter des nôU'es
en offrent des abrégés, des remaniements ou des amplifications. La plus célèbre de ces
dernières est celle que fit à Angers, en 1486, le (locteur Jean Michel, et qui fut im-
primée peu après à Paris. Elle Supplanta sans dtuite l'ancien mystère dans la faveur
générale ; au moins les nombreuses éditions de la Passion contiennent-elles toutes,
à notre connaissance, le rifacimento et non l'œuvre primitive. C'est aussi la Pos-
sion de Jean Michel qui fut dans le seizième siècle représentée, à Paris, parles Con-
frères; c'est sur elle spécialement que porta, en 1548, l'interdiction du Parlement.
III
Nous avons donné cette édition d'après trois manuscrits, dont voici l'indication :
Le manuscrit de la l^ibliothèque nationale fr. 81G (anc. 7206*) est un volume
in-folio de 236 feuillets sur papier ; il est orné d'une miniature et de deux initiales.
Ce manuscrit a été décrit par M. Paulin Pai-is', qui le reconnaît, d'après les armes
peintes dans les deux grandes initiales des feuillets 1 et 4, comme ayant été exécuté
pour le connétable de Saint-Pol, qui eut la tète tranchée à Parisle 19 décembre 1475.
Sur la page blanche qui précède le dernier feuillet, le copiste s'est nommé : « Fait,
escriptet accomply par moy Jacques Riche, presbtre indigne, le lundi xxii''jour de
' Mentionnons, à cause Je la date, la repr<sontation qui eut lieu à .\miens en 1450: il est probable que
les bourgeois d'Amiens furent piqués d'émulation par le succès de \aPassio>i à .\bl)eville.
' Les Manuscrits français, VI. 580.
xxii INTRODUCTION
février l'an mil quatre cent soixante et douze, » c'est-à-dire d'après notre compte le
22 février 1473. — Le second propriétaire paraît avoir été Plùlippe de Glèves, dont
on lit la signature au bas de l'avant-dernier feuillet.
Le manuscrit 815 (anc. 7206), que nous appelons B, est un volume in-folio de
277 feuillets de parchemin, à deux colonnes, contenant plusieurs miniatures. 11 a
été décrit au même endroit par M. Paulin Paris. Il provient de la bibliothèque de
Gaston, duc d'Orléans. A la fin on lit cette note : Et sic est finis mysterii Pas-
sionis, resiirreotionis, ascensionis et eliam missionis sancti sjnritus domini
nosiri Jhesu Christi, scripta anno domini M" quinquagesimo (sic, lisez quin-
gentesimo) septimo,die septimo januaHi, favente Altissimo qui est trinus et
unusin secula secidorum. Amen. On lit sur le recto de la dernière garde : « Ce
présent livre appartient a madame la princesse de Roche sur Yon, » c'est-à-dire à
Louise de Bourbon, fille de Gilbert de Bourbon, comte de Montpensier, morte en 1561;
et au verso : « Marie de Malingres, famé de noble home Hector de Moy, a fest feres
sete passion. » Nous n'avons trouvé nulle part aucun rcLseignement sur cet Hector
de Moy (ou Mouy), dont nous avons eu grand peine à déchiffrer le nom effacé.
Nous désignons par G le troisième manuscrit, conservé à la bibliotlièque de
l'Arsenal (B. L. Fr. 270) et comprenant 287 feuillets de parchemin, écrits à deux
colonnes. Ce manuscrit, qui est orné de nombreuses miniatures, abeaucoup souffert et
a notamment perdu un assez grand nombre de feuillets. Il porte sur les plats les
armes de l'intendant Foucault, et à l'intérieur la marque imprimée de la bibliotlièque
de l'abbé de Rothelin. Le catalogue de G. Hsenel donne à tort Jean Michel pour au-
teur de l'œuvre contenue dans ce volume.
Dans ces trois manuscrits il est facile do distinguer deux groupes bien marqués,
composés l'un du seul manuscrit A, l'autre des manuscrits B et G. Ges deux manus-
crits ont très -souvent des fautes communes, tandis que A n'est d'accord avec l'un
d'eux contre l'autre que pour des leçons, ou évidemment préférables, ou au moins
égales à celles du manuscrit isolé. 11 en résulte que A d'un côté, B G de
l'autre, représentent deux familles différentes. Le manuscrit A a sur les deux
autres l'avantage d'une antériorité considérable (35 ans sur B, plus sans doute
sur G) qui engageait déjà à lui donner la préférence, mais cette circonstance n'aurait
pas suflî si le rapprochement des leçons n'avait pas montré que B G représentent, sans
parler des fautes nombreuses qu'ils partagent, un texte remanié et surtout ra-
jeuni. La comparaison de leurs variantes, que nous avons toutes indiquées au bas
des pages, n'est pas sans intérêt pour qui veut étudier les modifications insensibles
du langage et du style dans l'espace qui sépare la composition de Greban de cette
première retouche, antérieure à la grande i-efonte de Jean Michel et par conséquent
à l'année 1486 '. 11 est un seul point sur lequel nous nous sommes écartés de notre
* îJous avons pu en effet nous assurer, par la comparaison de nombreux passages, que Jean Michel a
exécuté son travail à. Angers, en 1486, d'après un manuscrit appartenant à la famille BC.
I
INTRODUCTION xxiii
principe de préférer toujours A à B C (sauf bien entendu le cas, d'ailleurs assez
rare, de leçons visiblement fautives dans A), c'est l'accueil que nous avons fait dans
le texte aux additions nombreuses de B G. Quand les premiers cas de ce genre se sont
l)rêsentés à nous, dans le cours de cett(! longue impression, nous n'étions pas
peut être absolument assurés du rapport de nos trois manuscrits; il semblait d'ail-
leurs possible que A tout en étant en somme la reproduction plus fidèle de l'ori-
ginal, y eût pratiqué des suppressions; aussi avons-nous mieux aimé admettre
ces morceaux que de nous exposer à mutiler le texte. Aujourd'hui, en considérant
la manière dont ils sont presque tous intercalés, — entre deux rimes, — nous
jugeons leur interpolation par B G beaucoup plus vraisemblable que leur suppres-
sion par A ', mais on peut dire qu'ils ne jurent pas dans le texte, comme d'ailleurs
la révision conservée dans 15 G est faite dans son ensemble avec intelligence et so-
briété, et conserve généralement le caractère de l'original. Peut-éti'e cette l'évision
émane-t- elle de Simon Grcban ? car divers indices ne permettent pas de l'attribuer
à Arnoul lui-même. Si Arnoul était mort, comme nous l'avons supposé plus haut,
vers 1470, c'est dans les années qui suivirent immédiatement que Simon, sans doute
au Mans, a pu donner de l'œuvre de son frère une édition revue, corrigée et augmen-
tée. — Nous avons aussi admis dans le texte les indications scéniques qui se trou-
vent à peu près exclusivement dans B G; celles, en petit nombre, que fournit A, ont
été rejetées en note.
Nous n'avons connu qu'après l'achèvement plus ou moins entier de notre travail
trois autres manuscrits, tous incomplets, qui, heureusement, n'en auraient en rien
modifié l'exécution. C'est d'abord le manuscrit de la Bibliothèque nationale, fr.
1550, manuscrit sur papier de 206 feuillets. Il ne contient que le prologue et la
première journée. 11 se rattache à la famille B G; comme B, dont il se rapproche
surtout, il commence au vers 223 de .\et place les vers 1-222 entre les vers 1732
et 1741. Le seul intérêt de ce manuscrit est dans ses indications scéniques, diffé
rentes de celle de B G et beaucoup plus nombreuses; elles s'arrêtent au vers 2071 ;
nous les donnons en note^.
' Plusieurs de ces adilitions consistent eu triolets ; il était aussi facile de les supprimer que do les ajouter ;
m lis le second parait plus vraiseinblaljle.
* Au V. 311 ycy se parent les angeles en révèrent devant Dieu. — 4ÎG Ycy doibt avoir grant
tempeste en enfer, puys dit Lucifer, dyable avecgues les aultres ou dit enfer. — ô25 Ycy fait la
bénédiction. — 551 Ycy fait une masse de terre dont il faitVomme. — 555 Ycy est créé Adam et
se lieve a genoux devant Dieu. — 559 Ycy parle a Adam. — 570 Ycy luy monstre et le maine
Dieu en paradis terrestre. — 106 Ycy s'endort .Idam et Dieu prent une coste de luy et crée Eve.
— 601 Ycy se lieve Eve. — ti47, Ycy chantent les anges. — 60i Salhan en forme de serpent sur le
pommier. - 724 i>y qucuille une pomme. — 727 Ycy mort en la pomme. — 730 Ycy baiile de la
pomme a Adam. — 742 Ycy 2>rent Adam de la pomme et en mamjeue. — Si-T Ycy ce met le chéru-
bin a garder paradis terrestre — 1079 Ycy boulent le feu chacun en soti sacrifice. — 1U4 Ycy
s'en vont aux cJtamps. — 1101 Ycy tue Cayn Abel et le laisse mort. — 1203 Ycy le signe Dieu d'un
signe rouge au front. — 12il Ycy trouvent Abel mort. — 2071 Ycy sont cinq dames en paradis
et s'en doibt lever une.
XXIV INTRODUCTION
Le manuscrit de la Bibliotlièque nationale fr. 15064 et 15065, en deux vo-
lumes, l'un de 102, l'autre de 208 feaillets, sur parchemin et papier, contient les
deux premières journées. Ce manuscrit est encore de la famille B G, et il a les mêmes
indications scéniques que ces deux manuscrits; il conmience comme B au vers 223
de notre édition '.
Enfin nous avons eu entreles mains un manuscrit qui se trouvait, au mois de juil-
let 1876, en la possession du libraire Techener, et qui, après avoir fait partie de
la collection Soleinne-, a longtemps appartenu à M. le baron Tavlor^. Ce manuscrit se
rattache étroitement par toutes ses leçons à la famille B C. Il commence par les deux
cent quinze premiers vers, qui sont communs à nos trois textes, mais tandis que B, se
contentant d'omettre les vers 216-222, conserve les vers 233 -1732, et les place avant
le vers 1 ; que C, après avoir omis 216-222, suit le texte de A jusqu'à 232, et saute
ensuite 233-1740, le manuscrit Soleinne omet les vers 216-1740 entièrement, et ne
rejoint le texte commun qu'au premier vers de la première journée. 11 ne comprend
d'ailleurs que trois journées, et il a sans doute été fait sur un manuscrit incomplet de
la rédaction B C : il suit fidèlement cette rédaction jusqu'au vers 27399, mais il
remplace la fin de la troisième journée par cinquante-cinq vers qui lui sont propres,
et il termine par un prologue final également tout différent. Il contient de nom-
breuses indications de mise en scène qui ne sont pas identiques à celles de B, et qui
pourraient offrir de l'intérêt.
Nous n'avons, sur un septième manuscrit qui se trouve à Rome, dans la biblio-
thèque Corsini (col. 44, A. 7), que les renseignements qu'a publiés récemment
M. Ed. Stengel*: a Nel catalogo délia biblioteca H. Rossi (Romœ, 1786, p. 41)
d' onde provenne , porta il numéro 412 e questo bizzarro titolo : Dramma inti-
tolalo Adamo al limbo, in lingua francese anlica. Il codice è cartaceo, del
secolo XVI, di circa 800 fogli non numeraii. Per quanta posso giudicare da
alcuni appunti presi di volo, il testo si avvicina al codice fr. 815 di Parigi,
descrillo da P. Paris nei mss. fr. vi. 280. » M. P. Paris avant réuni dans une
seule notice les manuscrits 815 (notre B) et 816 (A), et n'indiquant pas les différences
de ces deux textes, les paroles de M. Stengel doivent simplement s'entendre en ce
sens que le manuscrit de Rome lui a paru contenir la rédaction d'Arnoul Greban, et
non celle de Jean Michel. D'après la date du manuscrit, il est ti'ès-probable qu'il;
appartieut à la famille B C, et que nous avons, par conséquent, pu nous en passer
sans grand inconvénient pour établir notre texte.
* îTous devons l'indication de ce manuscrit et du précédent à notre ami regretté Léopold Pannier.
2 La courte notice de ce manuscrit dans le catalogue Soleinne (I, p. 90, n" 524) ne permet pas de douter
de l'identité, notamment en ce qui concerne la reliure.
3 M. P. Par.s, rei,Tettant de ne jias avoir vu ce manuscrit, ajoute (l. c, p. 291). « On dit qu'il remonte aux
premières années du xv" siècle. » C'est une faute d'impression pour xvi".
■' Rivista di filologia roma>i7a, II, p. 128.
INTRODUCTION xxv
Un manuscrit du Mystère de la Passion, conservé autrefois aux archives de
riiotel de ville de Troyes, et maintenant à la bibliothèque municipale de celte ville,
où il porte le n» '^2^2 (anc. 1410), a fait l'objet, il y a trente- cinq ans, d'une
notice de Vallet do Viriville'. (W-'ice à l'obligeance de M. Emile Picot, qui, ayant
emprunté ce manuscrit, a bien voulu nous le communiquer ainsi que les notes qu'il
en a tirées en vue de sa grande Bibliographie de l'ancien Théâtre français, nous
pouvons en donnei' une idée plus exacte. Le manuscrit comprend trois volumes,
dont chacun est divisé en deux parties; il est écrit par deux mains contemporaines,
mais on ne doit à l'un des auteurs qu'un tiers environ du premier volume; tout
le reste est l'œuvre d'un nommé Brochard. Cette Passion fut exécutée pour une
l'eprésentation qui eut lieu à Troyes au mois de mai 1490; dans la représentation
sans doute il se perdit un volume, car le trompette Clérembault, qui, d'après un
acte conservé aux archives de Troyes, relia l'ouvrage, '«n cette même année 1490,
pour le compte delà ville, ne relia que les trois volumes encore existants 2. Or, entre le
second etle troisième, il en manque un, comme le prouve la lacune évidente qui existe
précisément dans le tableau de la passion. La première partie, où sont racontés la
création, le péché originel, le meurtre d'Abel et la mort d'Adam, est fort intéressante;
elle coïncide au début avec le Mystère du Vieil Testament (jusqu'au vers 1257 de
l'édition que va publier M. le baron James de Rothschild pour la Société des
Anciens Textes)- à partir de là, elle offre une rédaction toute particulière qui ne
ressemble ni au Vieil Testament ni à l'œuvre de Greban. Si on rapproche cette
circonstance du nom de création abrégée, donné par Greban h l'introduction qu'il
ajouta à son œuvre (p. 2), on est porté à soupçonner qu'il pourrait bien être l'auteur
en tout ou en partie du mystère du Vieil Testament, où il aurait repris en partie
une Création plus anciennement composée par lui, existant dans le manuscrit de
Troyes et insérée dans les autres sous une forme abrégée. C'est une question qui
sera plus facile à résoudre quand le texte du Vieil Testament sera à la disposition
du public. — A partir de la seconde partie, qui comprend la conception, la nati-
vité et la fuite en Egypte, le manuscrit de Troyes ne fait que reproduire l'œuvre
d'Arnoul Greban, d'après la rédaction B C, en l'abrégeant assez sensiblement et
surtout en rajeunissant la langue, l'ne preuve curieuse de ce rapport se trouve dans
le fait qu'en plusieurs endroits le vers primitif de Greban a été rayé et qu'un
nouveau vers a été mis à la place (on a changé la rime pour faire une cou-
pure). Ainsi, le v. 3650 : Qui moult dignetnent l'a receu a été rayé et remplacé
par : Qui l'a receu moult dignement, parce que le remanieur pour son travail
avait besoin d'une rime en ent. De même le v. 13132 : Sa majesté le (de)-
' Bibliothèque de l'École des Chartes, III, 448-i74.
- Voy. Boutiot, Recherches sur le théâtre à Troyes au XV' siècle, dans les Mémoires de laSociete
d'agriculture, des sciences, arts et belles-lettres de l'Aube, XVIII (1854) p. 430.
XXVI INTRODUCTION
monstrera a été remplacé par celui-ci : En fera demonstracion. A côté des sup-
pressions, nous trouvons aussi, notamment dans la troisième partie, quelques
passages nouveaux. — Entre la deuxième et la troisième, devaient s'intercaler,
comme nous l'avons dit, la cinquième et la sixième partie, formant un volume
aujourd'hui perdu. — La septième partie, qui commence le tome III actuel,
correspond avec la huitième à la quatrième journée de Greban. 11 est à noter que
le manuscrit de Troyes permet de restituer après 27498 trois vers que nous avons
dû indiquer par des points ; il faut lire : Et lui firent crudeUté souffrir, moult fort
obprobrier, Et des Juifs injurier. La dernière partie est à peu près exactement
conforme au texte de Greban et la fin est identique. Le manuscrit de Troyes n'offre
donc ni une imitation ni une simple copie, mais un véritable remaniement :
certaines parties sont conservées sans aucun changement ; d'autres sont supprimées
ou refaites : ainsi dans la scène des bergers une partie du dialogue est remplacée
par des strophes lyriques. Le rôle du sot, dont Vallet de Yiriville a exagéré
l'importance, se borne à quelques annonces ; les vers burlesques qui le composent
ont été ajoutés en marge du manuscrit, à l'occasion de quelque représentation, par
une main légèrement postérieure à celle qui a écrit le texte : c'est là un trait intéres-
sant pour riiistoire des mystères. Ce personnage adventice était fréquemment ad-
joint, dans les représentations, aux véritables acteurs du mystère; on peut dire
qu'il était en marge île l'œuvre, comme nous le montre le manuscrit de Troyes.
Au reste, il n'est écrit que pour la première partie; dans le reste de l'ouvrage,
on lit seulement en marge : le sot, ou le folace. L'acteur chargé de ces intermèdes
bouffons improvisait sans doute son rôle ou le composait à part lui ; on a d'autres
exemples de ce procédé.
A l'aide de notre ptAlication, on pourra établir avec une précision absolue le
rapport du manuscrit de Troyes à l'œuvre d'Arnoul Greban : il ne pouvait en tout
cas servir de rien à une édition critique.
A plus forte raison en est -il ainsi du manuscrit de Valenciennes, où Onésime
Leroy ' a cru reconnaître une rédaction toute particulière du Mystère de la Passion,
rédaction qui présenterait un caractère tout à fait flamand. La comparaison des
passages qu'il cite avec le texte de Jean Michel nous montre que ce manuscrit n'est
qu'une copie abrégée de l'œuvre de ce dernier, qui elle-même est un remaniement de
celle d'Arnoul Greban. Jean Michel s'est d'ailleurs servi, comme nous l'avons dit
plus haut, d'un manuscrit appartenant à la famille B G : la comparaison de son
texte ne pouvait donc guère nous être utile. Nous l'avons cependant consulté, et nous
avons eu une ou deux fois l'occasion de le citer dans nos notes ^.
' Etudes sur les Mystères (1837, in-S), p. 13J-101.
- Notons ici qu'un fragment manuscrit du Mystère de la Passion, quise trouve à la bibliothèque Je
Saint-Pétershourfr, ajipartient à l'œuvre de Jean Michel.
INTHODUCTION
Le système que nous avons suivi, dans l'impression du Mystère de la Passion,
est d'une grande simplicité. Prenant pour base le manuscrit A, nous l'avons reproduit,
sauf les cas où la leçon de BG nous paraissait meilleure: les variantes des trois
manuscrits ont été complètement ndevôes. Nous avons apporté un soin particulier
à la ponctuation, grâce à laquelle les phrases souvent diffuses de Greban ont pris
un peu plus de clarté. Nous avons aussi essayé de rendre visible la construction
ih\ thmique des parties qui ne sont pas en rimes plates : une initiale rentrante
marque le commencement d'une strophe et n'est jamais employée dans le courant du
dialogue ; les vers qui, dans les rondeaux (triolets pour les modernes), sont répétés
une ou deux fois, ont été imprimés en caractère espacé, etc. Nous avons essayé de
marquer par des blancs plus ou moins grands les changements , de lieu qui se pro-
duisent si fréquemment ; nous n'avons pu arriver à une précision parfaite, parce que
les personnages qui vont d'un lieu à un autre en passant par le devant de la scène
parlent souvent pendant tout le temps de leur voyage et empêchent ainsi toute cou-
pure nette, et pour d'autres motifs analogues, tenant à la construction de l'an-
cien théâtre. On ne s'étonnera donc pas que la division indiquée dans la Liste
des personnages ne coïncide pas toujours exactement avec celle qu'on trouve
dans le texte; nous appelons particulièrement l'attention sur cette Liste, qui,
grâce à la disposition que nous lui avons donnée, permet d'embrasser d'un coup d'œil
la distribution des lieux et des personnages. Enfin le Glossaire apporte une contri-
bution importante à la lexicographie du quinzième siècle; nous y avons fait entrer,
outre les mots hors d'usage ou pris dans un sens aujourd'hui inconnu, un grand nom-
bre de termes empruntés crûment au latin, caractéristiques pour la langue littéraire
de l'époque, et dont la plupart ne se sont pas maintenus ; nous avons aussi cherché h
enregistrer toutes ces locutions populaires et pittoresques dont le style familier d'.\r-
noul Greban n'abonde pas moins que son style élevé n'est prodigue de prétentieux
latinismes.
Et maintenant nous dirons à nos lecteurs ce que Greban disait à ses auditeurs en
prenant congé d'eux :
Se rien avons dit ou cscrit
t. Ou mal fait ou mal ordonné,
F' Pour Dieu qu'il nous soit pardonné...
S'orreur disons ou expliquons,
Tout maintenant la révoquons,
Soubraettans nos fais et nos signes
S. vos corrections bénignes.
Pari», janvier IS78
LISTE DES PERSONNAGES
PROLOGUE
DIEU LE PERK.
SERAPHIN.
CHKKUBIN.
MICUEL.
OADRIKL.
RAPIIAEl..
LUCIFER.
SATHAN.
BEI.7.EBUTH.
ASTAROTH.
DIEU LE PERE,
MICHEL.
GABRIEL.
LUCIFER.
SATHAN,
LUCIFER.
SATHAN.
BEl.ZEliUTU.
ASTHAROTH.
MICHEL.
DIEU I.E PERE.
ADAM.
EVE.
LUCIFER.
SATHAN.
EVE.
SAl'HAN.
ADAM.
DIEU LE PERK
CHERUBIN
249
.340
395
427
451
648
<)85
ADAM.
EVE.
SATHAN.
LUCIFER.
ASTAROTB.
BELZKBUTU.
ADAM.
KVE.
ABEL.
CAYN.
DIEU LE PERBa
ASTAROTH.
BELZEBUTH.
LUCIFER.
ADAM.
EVE.
ADAM.
EVE.
SKTH.
ADAM.
EVE.
SETH.
SETH.
CUERUIIIN.
902
PIO
m
1214
1230
1286
1327
lAli
1436
1570
ADAM.
SETH.
EVE.
LUCIFER.
SATHAN
BELZEIiUTH.
LISTE DBS PERSONNAGES
i614 SETH.
1642
EVE.
SETH.
I.AMETH.
SATIIAN.
I.UCIEKU.
1CD2
1G62
1698
PREMIERE JOURNÉE
1
. ADAM.
2
EVE.
3.
, YSAIK.
4.
EZECniKL.
5.
JHEREMIE.
6.
DAVID.
7.
MISERICORDE.
8.
DIEU LE PERE.
9.
JUSTICE.
10.
VERITE.
H.
PAIX.
12.
SAPIENCE.
- l.-î.
GABRIEL.
14.
CHERUBIN.
15.
SERAPHIN.
16.
MICHEL.
17.
RAPHAEI.
IS.
UKIEL.
i/l9.
JOSEPH, mary
20.
NOSTRE DAME.
GABRIEL.
V2I.
NOSTRE DAME.
ELIZABETH
GABRIEL.
-
DIEU LE PERE.
CHERUBIN.
SERAPHIN.
MICHEL.
RAPHAËL.
URIEL.
22.
LUCIFER.
23.
SATHAN.
24.
ASTAROTH.
25.
BERICH.
16.
liELZEBUTH.
27.
CERBERUS.
1741
2072
3395
3605
3G45
3705
NOSTRE DAME.
ELIZABETH.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
3079
3999
4031
DIEU LE PERE.
GABRIEL.
OABRIKL.
JOSEPH.
JOSEPH,
NOSTRE DAME.
28. CIRINUS.
29. LiGERET, messager,
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
30. ELIACHIN.
LIGERET.
CIRINUS.
JOSEPH.
ELIACHIN.
NOSTRE DAME.
31. SADOC, liostelain.
32. ALORis, jj)'«wtVr pastoreau.
33. YSAMRERT, deuxigme pastoreau.
34. PELLioN, troisième x'>astoreau.
35. RiFFLART, quatrième pastoreau.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
DIEU LE PERE.
MICHEL.
GABRIEL.
RAPHAËL.
ALORIS.
YSAMBERT.
PELLION.
RIFFLART.
NOSTRE DAME.
MICHEL.
GABRIEL.
RAPHAËL.
URIEL.
4197
4211
4255
4281
4375
4 143
4463
4638
4855
4905
5000
4967
4979
5000
LISTE DES PERSONNAGES
SERAPHIN.
CBKni'IlIM.
JOSEPH.
NOSTRE DAMK.
GABRIEL.
MICnEI..
HAPnAEL.
ALORIS.
YSAMBERT.
PELLION.
HIPFLART.
OAHRIEL.
RAPBAEL,
L'RIKL.
t
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
3o. JASPAH, premier roy.
37. ANTHioccs, chevalier.
3S. CELSANOER, checalier.
39. MEI.C10H, deuxième roy.
40. CADORAS. chetalier.
41. POLIDORUS, chevalier.
4?. BALTAZAR, troisième roy.
43. LiCANUs, checalier.
44. piRoDES, chevalier.
ALORIS.
YSAMRERT.
PELLION.
RIFFART.
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
45. OARNiER,cmîui«Jn« bergier.
46. GOMBAULT, sixième bergier.
ANTHlOCtS.
JASPAR.
CELSANDER.
MELCIOR.
CADORAS.
POLIDOnUS.
BALTA/.AR.
LUCANU3.
PIR0DE3.
JOSEPH.
ELIACHIN.
4'. ESDRAS.
NOSTRE DAME.
BALTAZAR,
MELCIOR.
JASPAR.
ANTHIOCCS.
ELUcniN.
ESDRAS.
NOSTRE DAMK.
JOSEPH.
5044
5163
5171
5230
5252
53'4
5430
5476
5752
5858
5982
5978
JASPAR.
MELCIOR.
BALTAZAR.
ANTHIOCUS.
48. oamauel, scribî de la loy.
49. ROBOAN, second scribe.
50. zoROBABEL, phoristen.
M.
52.
53.
54.
XXZI
SW8
6024
6050
56.
57.
ZOROBABEL.
BKRODE, roy,
JASPAR.
MELCIOR.
ADRACLs, conte.
HERMOOENES, Uftg chevolter au roy Herode,
ARPBAZAC, deuxième chevalier.
BALTAZAR.
OAMAUEL.
ROBOAN.
MALAQCiN, messager.
MALAQUIN. 6377
ANNE, preslre de la loy.
cAYPHE, d-uxieme prestre.
MALAQUIN.
ANNE.
CAYPHE.
HEROOK.
XOROBABEU
ROUOAN.
OAMALIEL.
HERMOOENES.
JASPAR.
MELCIOR.
BALTAZAR.
ANTHIOCUS.
LUCANUS.
CELSANDER.
PIRODES.
POLIDORUS.
CADORAS.
BERODR.
ANNE.
CAYPHE.
OAMALIEL.
BOBOAN.
ZOROBABEL.
ANTHIOCUS.
JASPAR.
LUCANUS.
MELCIOR.
CELSANDER.
BALTAZAR.
PIRODES.
POLIDORUS.
CADORAS.
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
58. ELEAZAR, hostelier.
LUCANUS.
CELSANDER.
PIRODES.
6391
G575
6501
eSBA
6760
XXXIl
LISTE DES PERSONNAGES
59,
rOLiDOBUS.
CADORAS.
DIEU L15 PERE.
RAl'HAEL.
RAPHAËL.
JASPAP.
MELCIOR.
ANTHIOCUS.
LE MATELOT.
CELSANDER,
BALTAZAR.
6798
6808
60. SAïKT siMEOx, le propltele.
JOSEPH.
NOSTKE DAME.
ELIACHIN.
ESDRAS.
61. AQuiLLAiNE, /'emme Esclras.
HERODE.
HERMOGENES.
ARPHAZAC.
ELIACHIN.
ESDRAS.
JOSEPH.
SIMEON.
02. jECONYAS, prestre du Temjple.
nostre dame.
aquilla;ne.
63. ANNE, la prophctesse.
SATHAN.
SIMEON.
64. JACOB, scribe.
OAMALIEL.
ANNE.
70R0BABEL.
ROBOAN.
DIEU LE PERE.
GABRIEL.
OAMALIEL.
HERODE.
ZOROBABEL.
ROBOAN.
ADRACUS.
HERMOGENES,
ARPHAZAC.
GABRIEL.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
SATHAN.
LUCIFER.
BELZEBUTJI.
CERBERUS.
ASTAROTII.
BERICn.
6848
6898
0948
6968
7133
7153
7193
7209
7279
7297
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
7463
05. THEODAs, premier prehstre des idoles
d'Egipte. 7474
06. TORQUATUs, deuxième prebstre.
08,
09.
71)
71.
72.
73.
74.
75,
76.
HERODE.
NARiNART, tirant.
ADRACUS.
HERMOGENES.
ARPHAZAC.
AGRIPART.
ACHOPART.
RECHIGNÉ.
RAp, nourrice.
RACHEL, nourrice.
ANDROMETA, nourrtce.
ARBELINE, tiourrice.
MEDUSA, nourrice du fils Herode.
SABINE, sa chamberiere.
SATHAN.
ASTAROTH.
SALOMÉ, seur Uerode.
SATHAN.
ASTAROTH.
LUCIFER.
DIEU LE PERL.
GABRIEL.
GABRIEL.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
ADRACUS.
HERMOGENES.
ARPHAZAC,
SALOMÉ.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
78. jHEsus enffant.
"9, MARIE SALOMÉ.
80. MARIE J,\COBY
81. ZEBEDEUS.
AQUILL.VlNr,
ESDRAS.
ELIACHIN".
ZOROBAllKL
OAMALIEL,
ROBOAN.
82. MANASSES.
83. NATHAN.
84. NACHOR.
MARIE JACOB Y,
NOSTRE DAMK.
JHESUS.
MARIE SALOSI:-:.
AQUILI.AINE.
JOSEPH.
ESDRAS.
2EBEDEUS.
7510
7982
7590
8C06
8020
8032
8128
8148
?17o
LISTE DES PERSONNAGES
ELIACUIN.
ZOKOUAUKI.. .
8AMAL1EI..
ROBOAN.
MANASSES.
NACHOH.
NATHAN.
JBESUS.
JOSEPH.
ZEBKDEUS.
ESURAS.
EUACHIN.
AQUU.I.AINE.
NOSTUE DAME.
MAHIE JACOBV.
MARIE SALOMÉ.
ZOROBABEL.
OAMALIEL.
ROBOAN.
JHESUS.
NATHAN.
NACUOH.
MANASSEii.
AQUILLAINE.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
NOSTRE DAME.
ZEBEDEUS.
ESDRAS.
AQUILLAINE.
8190
832S
8338
83fii
8-U6
9144
9168
9^49
JOSEPH,
8Ô. ALPHEUS.
MARIE SALOMâ.
NOSTRE DAME.
BLIACniN.
AQUILLAINE.
AQUILLAINE.
ARRELINK,
ANDROMETA
JOSEPH.
86. pRiscus, voisin.
87. RACHEL, f^emmu a Prisrua.
NOSTRE DAME.
AQUILLAINE.
JOSEPH.
NATHAN.
MANASSE4,
NACHOR.
OAMALIEL.
ZOROBABEL.
JBESUS.
ROBOAN.
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
ZOROBABEL.
JHESUa.
OAMALIEL.
MANASSES.
NOSTRE DAME.
JOSEPH.
NATHAN.
ROBOAN.
i/
XXXIII
9315
9347
9369
9393
A
'.'421
95-^
9801
9817
SECONDE JOURNEE
1. JEHAN BAPTISTE.
2. ABIAS, juif,
JEHAN BAPTISTE.
3. NATHAN, pharisien
4. NACHOR, pharisien.
5. sopHONiAS, juif.
6. MANASSES, juif.
7. jiiEsus homme,
f<. NOSTKE DA.ME.
SOPHONIAS.
JEHAN BAPTl&TE.
MANASSES. '
NACHOR.
NATHAN.
10044
10205
10281
10313
ABIAS.
JHESUS.
9. DIEU LIi PERE.
JEHAN BAPTISTE.
DIEU LE PERE.
JEHAN BAPTISTE.
JHESUS.
10. SATHAN.
11. BERICB.
10399
10411
10115
104 l'J.
10143
10151
12. LUCIFER.
13. ASTAROTH.
SATHAN.
14. BELZEBUÏH.
15. CEKBERUS.
BERICH.
JHESUS.
SATHAN.
S
LUCIFER.
•SATHAN.
BELZEBUTH.
JHESUS.
NOSTRE DAME.
ABIAS.
JEHAN BAPTISTE.
MANASSES.
JEHAN BAPTISTE.
16. HERODE ANTIPAS.
17. BERODiADE, îtt femme,
18. GRONONART.
JHESUS.
NOSTRE DAME,
19. s. PIERRE.
20. s. ANDRY,
JHESUS.
21. S. JAQUES ZEBEDEY.
22. S. JEHAN Vevangeliste.
23. zEBEDEUs le père.
JHESUS.
24. s. PHELIPE.
JHESUS.
25. S. EERTHELEMY.
S. PIERRE.
S. JEHAN.
26. s. THOMAS.
JHESUS.
27. s. SIMON.
28. s. JUDE.
29. s. MATHIEU, changeur publicanus.
JHESUS.
30. JUDAS SCARIOTH.
31. S. JAQUES ALPHEY.
JHESUS.
JUDAS.
JHESUS.
S. PIERRK.
32. AGRESTIN.
NOSTRE DAMB.
JHESUS.
LISTE DES PERSONNAGES
10471
10564
10683
10721
10733
10749
10851
10867
10897
10929
10957
AGRESTIN.
33. LE SEIGNEUR DES NOPCES.
34. REMISSE, servant.
35. RESPicE, deuxième servant.
JHESUS.
NOSTRE DAME.
AGRESTIN.
REMISSE.
35. ARCHEDECLIN.
JHESUS.
le seigneur des nopces.
nostre dame,
l'espousee.
agrestin.
RESPICE.
REMISSE.
ARCHEDECLIN.
11153
11174
11180
11190
37.
s. PIERRE.
JHESUS.
S. ANDRY.
NOSTRE DAME.
38. EMiLius, vendeur d'oiseaux.
39. CELsiDON, mercier.
40. RABANus, changeur.
JHESUS.
s. JEHAN.
41. NICODEMUS. ;
JHESUS.
s. PIERRE.
42. RAAB, la samaritaine.
JHESUS.
S. ANDRY.
S. JEHAN.
S. PHELIPE.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S, PIERRE,
11335
11359
H 432
11542
RAAB,
43.
CASTORIN,
44.
MICHEAS.
10995
S. BERTHELEMY,
JHESUS.
11017
S. JAQUES ALPHEY.
S. JEHAN.
11078
RAAB.
MICHEAS.
CASTORIN.
11094
45.
YSMAEL, prince de synagogue,
JHESUS.
46.
FAUSTULUs, varlet.
11124
47.
LA PILLE.
S. THOMAS.
S. PIERRE.
11635
11649
11701
LISTE DES PERSONNAGES
48. LuciNE, mère a Venffant mort.
49. MAHIIRIKN.
BO. AIIIIION.
LUCINE.
JHESUS.
ahihon.
51. i/enfpant ressuscité,
maiiiiuien.
herodiadb.
BERUDE.
ORONONART.
HUIlliliE.
52. RODiaoN, co>lte.
53. AMvnivRUS, chevalier.
BERODIADE.
54. LA FILLE.
55. ANDALUS, maistre d'ostel.
LA FILLE.
ORONONART.
IIERODE.
AMPBIARUS.
RODIOON.
LA FILLE.
BERODIADE.
BERODE.
LA FILLE.
ORONONART,
ANDALUS.
ORONONART.
JEHAN ISAPTISTE
LA FILLE.
LA PILLB.
BERODIADE,
DIEU LE l'EBE.
SOPHONIAS.
MANASSES.
ABIAS.
ORONONART.
BERODE.
JUKSUS.
S. JUDE.
56. LA FILLE CBANANEE.
57. LA CUANANEE.
58. YsoRE, garde de la fUU,
JBESUS.
LA FILLE CBAMANEB.
LA CBANANEE.
YSORE.
S. PIERRE.
JUDAS.
11861
imio
59. FEROALLs, deable.
LUCIFER.
IIKLZEIIUTU.
LA CBANANEE.
LA FILLE.
JBESUS.
11980
S. ANDHY.
S. PBELIPE.
12031
60.
LE PARAI.ITIQUE.
JBESUS,
S. PIERRE,
NATBAN.
12059
LE PARALITIQUE.
NACBOR.
1207.5
JBESUS,
LE PARALITIQOB. ~
NATBAN,
NACBOR,
61.
jAcon, scribe.
62.
JORRAN, scribe.
12107
63.
YSACAH, scribe.
s. JEU.VN.
s, PIERRE.
12119
64,
05,
, ABACUT, disciple.
, MOAB.
ABIRON.
68.
TUBAL.
07.
CKLIUS.
12159
08.
69.
SALMANAZAR.
RUBEN,
70.
NEPTALIN,
71.
OEDEON.
12187
ABIAS,
MANASSBS,
72.
NEMBROTB.
12193
JBESUS.
1 07
S. THOMAS.
S. BERÏHELEMY.
S, JUDE,
12217
S. SIMON.
S, PBELIPE.
S, JAQUES ALPBEY.
S. ANDRY.
12221
73.
l'eNFPANT aux PAINS.
MANASSES.
12229
S. JAQUKS ZEBEDEY,
S. MATHIEU.
JUDAS.
ABACUT,
MOAB,
12265
ABIRON,
TUBAL,
CELUS.
SALMANAZAR.
NEMBROTB,
B. PIERRE.
XXXV
12333
1235
123fri
12371
12461
12491
12611
RUBEN.
NEPTALIN.
SALMANAZAR.
TUBAL.
CELIUS.
OEDEON.
ABIAS.
MANASSES.
ABACUT.
JHESUS.
S. JEHAN.
S. PIERRE.
S. BERTHELEMY.
ANDALUS.
HERODE.
RODIGON.
JHESUS.
S. PIERRE.
S. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
74. HELiE, prophète.
75. MOYSE, prophète.
DIEU LE PERE.
S. THOMAS.
JUDAS.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S. PIERRE.
S. ANDRY.
JHESUS.
76. JHEROBOAN, premier pharisien.
77. MARDOCEUs, deuxième pharisien ■
78. NAASON, troisième pharisien.
79. ELiACHiN, quatrième pharisien.
80. BANANiAS, cinquième pharisien.
81. JOATHAN, sixième pharisien.
NACHOR, septième pharisien.
NATHAN, huitième pharisien.
JACOB, premier scribe.
JORRAN, deuxième scribe,
YSACAR, troisiem,e scribe.
NI coDEMU s, p/iar js ten.
JHESUS.
82. JHEZABEL, la pescherreise.
83. SIMON, pharisien.
JHESUS.
S. MATHIEU.
SIMON, pharisien.
RUBEN, juif.
ABIRON, juif.
84. SAFFRET, varlet.
JUD.\S SCARIOTH.
85. MADELAINE,
SAFFRET.
SIMON.
JHESUS.
LISTE DES PERSONNAGES
13023 MXDBLAINE.
13047
13133
13165
13353
13409
13757
13787
13807
13862
SIMON.
SAFFRET.
RUBEN.
ABIRON.
JHESUS.
MADELAINE.
86. MARTHE.
87. LAZARON.
madelaine.
88. l'aveuole Né.
s. phelipe.
S. JUDE.
S. BERTHELEMY.
JHESUS.
l'aveugle né.
MOAB.
NEPTALIN.
RUBEN.
ABIRON.
ABIRON.
MARDOCEUS.
RUBEN.
jheroboan.
l'aveugle.
NAASON.
ELIACHIN.
NICODEMUS.
NEPTALIN.
BANANIAS.
MOAB.
89. TROTEMENU.
TROTEMENU.
TROTEMENU.
90. LE PERE DE l'aVEUOLE.
91. LA MERE.
TROTEMENU.
JHEROBOAN.
LE PERE.
LA MERE.
MARDOCEUS.
NAASON.
jheroboan.
l'aveuole.
eliachin.
bananias.
JOATHAN.
NACHOR.
NATHAN.
JACOB.
JORRAN.
l'aveugle.
JHESUS.
S. JEHAN.
13872
13932
14047
14071
14142
14224
14344
14364
14400
14454'
14556
LISTI-: DES PERSONNAGKS
xxxvn
nuiiEN.
ADIHON.
SAI.MANA7.An,
JIIESUS.
YSACAR.
JBESU3.
g. JF.IIAN.
I.A7.AR0N, malade.
MARTHE.
MADELAINK.
2, miUTAUMONT.
LAZAUON.
MAKTHB.
MADEI.AINE.
BRUTAUMONT.
JHESU.S.
LAZARON,
MADEI.AINE.
BRfTAUMONT.
MARTHE.
CB1.1US.
ABACUT.
TlIBAI,.
OEDEON.
NEPTAI.IN.
RUBEN.
93. SIMON, lépreux.
CELIUS.
MADELAINB.
RUBEN,
NEPTALIN,
SIMON,
MARTIU:.
JHESUS,
S, PIERRE.
S, JAQUES ZEBEDEY,
S. ANDRY.
B. THOMAS.
SALMANAZAR.
ABIRON.
MOAK.
BRUTAUMONT.
MARTHE.
JHESUS.
MADELAINE.
TUBAL.
aEbEON.
RUBEN.
SIMON, lépreux.
ABIRON.
MADELAINE.
JBESUS.
S. BERTBELBMY.
14582
i407«
14686
147fO
1472S
1476(i
14786
14838
148.-i:
1488^
14926
14936
14980
14996
MOAB.
NEHTALIN.
TUBAI..
MARTHE.
ABACUT.
CEI.IUS.
OEDEON.
LAZARON.
JHESD8.
MARTHE,
MADELAINE.
SIMON, lépreux.
LUCIFER.
BEI.ZEBUTH.
ASTAROTU.
BERICII.
CERHERU.S.
FEROALU.S.
SATHAN.
NEPTALIN.
MOAB.
SIMON, lépreux,
OEDEON.
RUBEN.
SALMANAZAR.
ABIRON.
TUBAL.
CELIUS.
94. PHARES.
ABACUT.
NEMBHOTH.
PHARK.S.
NEMBROTH.
JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
BANANIAS.
JOATBAN.
NACBOR.
95. MALABRIN.
96. CAYPBE.
MALABRIN.
NATHAN.
JACOB.
JHEROBOAN.
CAYPHE.
JORUAN.
97. MAUcoURANT, messajcr.
NOSTBE DAME.
JHESUS.
NOSTRE DAME.
MAUCOURANT.
98. ANNE.
^. ROULLART, premier sergent.
100. DENTART, deuxictne sergent.
101. OADiFER, troisième sergent.
15074
15100
15170
15206
15258
15306
15324
15.^4
15374
15457
15508
XXXVIII
LISTE DES PERSONNAGES
ANNE.
CAYPHE.
JEEROBOAN,
YSACAR.
MAKDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
BANANIAS.
JOATHAN.
102. MALcus, sergent a Cayphe.
103. BRUYANT, deuxième serrjent.
104. ESTONNÉ, troisième sergent.
ROULLART.
JHESUS.
s. PIERRE.
MADELAINE.
LAZARON.
MARTHE.
JHESUS.
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
MARTHE.
LAZARON.
SIMON, lépreux.
OADIPER,
ROULLART.
DENTART.
MALCUS.
ESTONNÉ.
BRUYANT,
SIMON.
MARTHE.
JHESUS.
MADELAINE.
OADIPER.
CAYPHE.
ROULLART .
DENTART.
ANNE.
JHEROBOAN.
SIMON, lépreux.
JHESUS.
MADELAINE.
JUDAS.
S. THOMAS.
S. DERTHELEMY
S. PIERRE.
S. JEHAN.
S PIERRE
S. JEHAN.
JHESUS.
S. ANDRY.
S. BERTHELEMY.
S. PHELIPE.
S. SIMON.
S. JUDE.
S. JAQUES ALPHEY.
S. MATHIEU.
15542 RUBEN.
OEDEON.
NEPTALIN.
MOAB.
ABIRON.
TUBAL.
OELIUS.
ABACUT.
JACOB, scribe.
JORHAN.
YSACAR.
JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
ANNE.
CAYPHE.
NAASON.
ELIACHIN.
NACHOR.
NATHAN.
16123
162Ô3
15'Î44
15752
15863
15889
15903
15913
RUBEN.
105. LE PREMIER ENFFANT.
106. LE DEUXIEME ENFFANT.
107. LE TROISIEME ENFFANT.
NAASON.
ELIACHIN.
NACHOR.
S. PIERRE.
JHESUS.
MARTHE.
MADELAINE.
NOSTRE DAME.
S. PIERRE.
S. JEHAN.
NOSTRE DAME.
JHESUS.
S. JEHAN.
MARTHE.
JHESUS.
15943 s. SIMON.
MARDOCEUS.
CAYPHE.
ANNE.
JHEROBOAN.
JHESUS.
CAYPHE.
16047 ANNE.
ELIACHIN.
JHEROBOAN.
BANANIAS.
NACHOR.
NATHAN.
ANDALUs, des gens Herode.
BANANIAS.
NACHOR.
16323
16369
16383
16423
16639
16655
16696
17219
LISTE DES PERSONNAGES
XXXIX
nANANIAS.
JHESIIS.
NAcnon.
NATHAN,
s. PIKRRE.
BANAWIA3.
ANUALUS.
S. JKHAN,
jnEsus.
a. ANDRY.
MARTHE.
NOSTHE DAME.
JHESUS.
SATHAN.
LUCIFER.
CEHBEHUS.
SATHAN.
HERICH.
ASTAROTH.
FKROALUS.
NAASON.
CAYPHE.
NATHAN.
ANNE.
JHERODOAN.
MAUDOCEOS.
ELIACHIN.
BANANIAS.
JUDAS.
ANNE.
JOATHAN.
CAYPHE.
NACHOa.
S. PIERRE.
JHESU.S.
S. JEHAN.
17241
17279
17287
17305
17323
17339
17465
17507
17523
108. piRAOMDN, porteur d'eau.
109. URioN, le mai.itre.
s. PIERRE.
S. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
PIRAGMON.
S. PIERRE.
URION.
S. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
PIRAOMON.
ANNE.
CAYPHE.
JHERODOAN.
ROULLAHT.
DENTART.
17599
176)5
17647
17679
17735
OADIFER.
110. UAI.CUIDANT.
111. ORAOON.
ESTONNÉ.
112. OUKUI.U.
MAI.CUS.
BRUYANT.
S. PHEUPE.
JUDA8.
S. BEHTBELEMY.
JHESUS.
MARTHE.
MADKLAINE,
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
NOSTBE DAME.
MARTHE.
I.AZAKON.
3. PIKRRE.
JHESUS.
URION.
PIHAOMON.
JUDAS.
NOSTRE DAME.
S. PIERRE.
S. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
JHESUS.
PIRAOMON.
JUDAS.
S. THOMAS.
S. PHEUPE.
S. ANDRY.
S. JAQUES ALPHEY.
S. MATHIEU.
S. BERTHELEMY.
S. SIMON.
S. JUDE.
SATHAN.
URION.
JUDAS.
ANNE.
CAYPHE.
EMII.IUS.
CELSIDON.
RABANUS.
NEMBROTB.
SALMANAZAR.
PHARES.
ANNE.
HOUI.I-ART.
DENTART.
OADIFER.
CAYPHE.
MAI.CUS.
BRUYANT.
JHERODOAN.
17799
17823
17871
17887
17977
17985
18531
18579
LISTE DES PERSONNAGES
JUDAS.
MARDOOEUS.
BANANIAS.
MALCUS.
ESTONNÉ.
MALCUIDANT.
DRAOON.
OUEULU.
JHESUS.
S. PIERRE.
JHESUS.
S. PIERRE.
8. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
DIEU LE PERE.
113. JUSTICE.
114. MISERICORDE.
115. MIGUEL.
116. GABRIEL.
ANNE.
CAYPHE.
MALABRIN.
18625
18673
1870
18812
MICHEL.
JHESUS.
JUDAS.
MALCUS.
ROULLART.
DENT ART.
NATHAN.
JHESUS.
S. PIERRE.
JUDAS.
OADIFER.
JHEROBOAN.
MALCUIDANT.
BRUYANT.
JUDAS.
JHESUS.
MARDOCEUS.
DRAOON.
OUEULU.
S. JEHAN.
ROULLART.
DENTART.
OADIFER.
MARDOCEUS.
JHEROBOAN. .
S. PIERRE.
S. JAQUES ZEBEDEY.
EMILIUS.
GELSIDON.
RABANUS.
MALCUS.
S. ANDHY.
18928
18946
19008
19016
19034
19046
19076
UERTHELEMY.
S. PHELIPE.
S. SIMON.
S. JUDE.
BANANIAS.
MALCUIDANT.
ESTONNÉ.
S. MATHIEU. 19266
s. THOMAS.
S. JAQUES ALPHEY.
MALCUIDANT. 19286
ROULLART.
ESTONNÉ.
OUEULU.
OADIFER.
S. JAQUES ALPHEY.
EMILIUS.
DRAOON.
BANANIAS.
JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
JOATHAN.
NACHOR.
S. JEHAN. 19340
S. PIERRE.
JHEROBOAN. 1937
117. MARCELLE, première chamberierc.
MARDOCEUS.
ROULLART.
118. CASSANDRE.
MALCUS.
OADIFER.
DENTART.
BRUYANT.
MALCUIDANT.
JHEROBOAN. 19422
■ ANNE.
DRAOON.
OUEULU.
S. JEHAN. 19450
MARCELLE.
S. PIERRE.
CASSANDRE.
BANANIAS. 19508
ANNE.
JHESUS.
DRAGON.
OUEULU.
ROULLART.
OADIFER.
DENTART.
MARCELLE. 19638
PHARES.
S. PIERRE.
MALCUIDANT.
SALMANAZAR, COUSitl O MulCUS .
ESTONNÉ.
s. PIERRE.
ROUI, I. ART.
OADIKE».
DKNTART.
ANNE.
LISTE DES PERSONNAGES
19702
197iO
ANNE.
ROUI.LART.
DENTART.
OADl'rER.
ROUI.I.ART.
XLI
19900
19787
TROISIEME JOURNÉE
1. ANNE.
2. ROULLART.
3. DKNTAUT.
4. OADIPER.
ANNE.
ROULLART.
OADIFER.
ROULLART.
DENTART.
ANNE.
ROULLART.
DENTART.
OADIFER.
ROULLART.
DENTART.
5. MALGUIDANT.
OADIFER.
6. DRAGON.
7. OUEULU.
8. MALGOS.
9. BRUYANT.
10. ESTONNÉ.
11. CELSIDON.
12. JUDAS.
13. CAYPHE.
14. JBEROBOAN.
ROULLART.
CAYPHE.
JBEROBOAN.
15. MARDOCEUS.
16. NAASON.
17. ELIACHIN.
18. BANANIAS.
19. JOATHAN.
20. NACHOR.
21. NATHAN.
22. .MAUGOURANT.
23. JACOB.
MAUGOURANT.
24. EMILIUS.
25. RABANUS.
26. NEMiîRorn.
27. SALMANAZAR.
28. PHARES.
20145
29.
RUBEr^
20174
30.
OEDEON.
31.
NEPTALIN.
32.
MOAB.
33.
ABIRON.
20202
34.
35.
TUBAL.
CELIUS.
20222
36.
ABAGUT.
CAYPHE.
NEMBROTH.
20234
SALMANAZAR.
PHARES.
JHEROBOAN.
RABANUS.
20270
MARDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
EMILIUS.
JACOB.
37.
JORRAN.
38.
Y3ACAR.
39.
JHESUS.
BANANIAS.
JOATHAN.
NACHOR.
Î0300
NATHAN.
BRUYANT.
MALCUIDANT.
MALCUS.
Î0318
DRAOON.
OUEULU.
ESTONNâ.
CELSIDON.
MAUGOURANT.
MAUOOURANT.
ANNE.
ROULLART.
DENTART.
JUDAS.
20474
40.
S. JEUAN.
20490
41.
NOSTRE DAME.
42.
OAHRIEL.
43.
MADELAINE.
44.
MARIE JAOOBY.
45.
MARIE SALOMÉ.
20518
20534
21088
2H20
21182
XLII
LISTE
CAYPHE.
46. BARRAQUIN, huissier a Pilate.
ANNE.
BARRAQUIN.
47. PILATE, prevost de Jhevusalem.
BARRAQUIN.
MARDOCBUS.
PILATE.
ANNE.
CAYPHE.
JHEROBOAN.
PILATE.
JHESUS.
PILATE.
CAYPHE.
JHEROBOAN.
BARRAQUIN.
BARRAQUIN.
48. GRIFFON, premier tirant.
49. CLAQUEDENT, deuxième tirant.
50. ORiLLART, troisième tirant.
51. BRAYART, quatrième tirant.
GRIFFON.
PILATE.
CLAQUEDENT.
BRAYART.
ORILLART.
ANNE.
CAYPHE.
JUDAS.
ANNE.
CAYPHE.
MARDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
CAYPHE.
BANANIAS.
ANNE.
52. LUCIFER.
53. DESESPERANCE.
DESESPERANCE.
JUDAS.
54. BERICH.
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
DES ]
PERSONNAGES
21308
LUCIFER.
DESESPERANCE,
55.
ASTAROTH.
56.
FERGALUS.
21326
57.
CERBERUS.
21348
58.
BARRAQUIN.
HERODE.
GRIFFON.
59.
RODIOON.
JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
21442
YSACAR.
JACOB.
21481
60.
HERODE.
AMPHIARUS.
61.
ANDALUS.
62.
GRONGNART.
RODIOON.
21540
JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
ELIACHIN.
BARRAQUIN.
NOSTHE DAME,
21568
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
BARRAQUIN.
PILATE.
GRIFFON.
ANNE.
21604
CAYPHE.
ANNE.
21608
CAYPHE.
21656
ANNE.
RUBEN.
CAYPHE.
NEPTALIN.
21690
JHEROBOAN.
EMILIUS.
CELSIDON.
MARDOCEUS.
RABANUS.
JORRAN.
NEMBROII.
21726
PILATE.
21768
GRIFFON.
CLAQUEDENT.
BRAYART.
21790
63.
BRUTAUI.T.
GRIFFON.
64.
BAHRABAS.
22030
GRIFFON.
PILATE.
EMILIUS.
CELSIDON.
RABANUS.
22066
SALMANAZAR.
22258
22284
22558
22572
22618
22652
LISTE DES PERSONNAGES
XMII
pRARE».
NEMIIKOTII.
OnlI.I.AHT.
BRAYABT.
CLAQUKDENT.
65. iiiioYEFFORT, vavlel.
DAHHAQL'IN.
riI.ATE.
NATHAN.
JHEROUOAN.
EMILIUS.
CAYPUE.
ANNE.
OELSIDON.
MARDOCEUS.
RAIIANUS.
SALMANAZAR.
NAASON.
ELIACHIN.
PILATE.
JBESUS.
PILATE.
BANANIAS.
JOATHAN.
EMILIUS.
CELSIDON.
G6. ADAM.
07. EVE.
C8. DIEU LE PERE.
69. MICHEL.
ADAM,
EVE.
70. YSAIE.
71. EZECHIEL.
72. JIIEREMIE.
73. DAVID.
LUCIFER.
BËRICB.
CERDERUS.
ASTAROTH.
FEHOALTJS.
74. SATIIAN.
SATHAN.
75. LA FEMME PII.ATE.
LA FEMME PILATE.
7G. SARDINE, chambrière.
PILATE.
SARDINE.
PILATE.
EMILIUS.
JIIEUÛHÛAN.
MARDOCEUS.
CAYPHE.
lîARRAQUIN.
RABANU3.
23010
23108
23122
23180
23204
23270
23409
23448
23486
23530
23660
£3686
23754
23782
2380C
23824
SAI.MANAZAR.
• NEMHROTII.
NATHAN.
ANNB.
ORirVON.
OHIFPON.
77. BRUTAUMONT.
78. niSMAS, bon larron.
79. OESTAS, mauvais larron.
ORIFFON.
PILATE.
ORILLART.
OESTAS.
CAYPHE.
jhekoiioan.
uroyeffort.
ORIFFON.
80. LE CHARPBNTIER.
BROYEFPORT.
81. LE FEVRE.
LE CHARPENTIER.
GRIFFON.
LE FEVRE.
BROYEFFORT.
PILATE.
ANNE.
CAYPHE.
JHEROBOAN.
ORIFFON.
ORILLART.
CLAQUEDENT.
BRAYART.
MARDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
^2. LA TROMPETE.
83. CENTURION.
84. ASCANUS, premier chcralier.
85. MARC ANTHOiNE, deuxicme chevalier.
86. EMILIUS, troisième chevalier.
ORIFFON. 23984
ORILLART.
BRAYART.
CLAQUÇDENT.
BHOYEFFORT.
87. JULIE, première femme de Jheru-
salem. 23996
88. vERONNE, deuxième femme.
89. PERUZiNE, troisième femme.
90. PAsiTHEE, quatrième femme.
JHE3U3.
ORIFFON.
CAYPHE.
2384C
23964
XLIV
LISTE DES PERSONNAGES
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
91. JOSEPH d' Arismathie.
NOSTRE DAME.
MARIE JACOUy.
ORII.LART.
BRAYART.
CLAQUEDENT.
ANNE.
GRIFFON.
PILATE.
VERONNE.
92. SIMON, Cireneen.
s. JEHAN.
NOSTRE DAME.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
MADELAINE.
GRIFFON.
CLAQUEDENT.
ORILI.ART.
PILATE.
BRAYART.
S. JEHAN.
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
BROYEFFOKT.
PILATE.
GRIFFON.
CLAQUEDENT.
CENTURION.
GRIFFON.
SIMON, Cireneen-
ORILLART.
CENTURION.
BRAYART.
SALMANAZAU.
DIEU LE PERE.
MICHEL.
SATHAN.
LUCIFER.
CERBERUS.
FERGALUS.
ASTAROTH.
MICHEL.
GRIFFON.
PILATE.
CAYPHE.
ANNE.
JHEROBOAN.
ORILLART.
BRAYART.
BROYEFFOUT.
CLAQUEDENT.
24110
NOSTRE DAMK.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
24162
CENTURION.
GRIFFON.
ORILLART.
MAUDOCEUS.
24226
CAYPHE.
BRAYART.
BHOYEFFORT.
CLAQUEDENT.
BANANIAS.
ELIACHIN.
NAASON.
242/0
MADELAINE.
24282
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
S. JEHAN.
GRIFFON.
ORILLART.
24304
BRAYART.
PILATE.
BROYEFFORT.
CLAQUEDENT.
CENTURION.
24312
ANNE.
CAYPHE.
JACOB.
JORRAN.
YSACAR.
24324
DISMAS.
GESTAS.
SATHAN.
PILATE.
24371
CENTURION.
GRIFFON.
JHEROBOAN.
ORILLART.
EMILIUS.
CELSIDON.
RABANUS.
24450
NEMBROTH.
SALMANAZAR.
PHARES.
24480
JHESUS.
DISMAS.
GESTAS.
NACHOR.
NATHAN.
24530
JACOB.
YSACAR.
24562
MARDOCEUS.
NAASON.
ELIACHIN.
BANANIAS.
JOATHAN.
ANNE.
ROULLART.
GADIFER.
DENTAHT.
MALCUIDANT.
24630
DBAOON.
OUEULU.
nnAYAUT.
KSTONNÉ.
93, MAi.AimiN.
MAUCOURANT.
CLAQUEDENT.
NOSTIIE DAME.
S. JKHAN.
MAnELAINE.
SATHAN.
SATHAN.
ORIFFOX.
GRIFFON.
Onil.I.AHT.
CI.AQUEDENT.
BRAYARÏ.
PII.ATE .
CENTURION.
ANNE.
HUHEN.
ASCANUS.
JHESUS.
UHOYEPFOHT.
YSACAR.
JORRAN.
JACOB.
JOATHAN.
RUBEN.
SALMANAZAR.
l'HARES.
NEMBROTH.
ASCANUS.
«ABANUd.
CENTURION.
NOSTRE DAME.
MADELAINB.
JUESUS.
CENTURION.
RUBEN.
NOSTRE DAME
MADELAINE.
GRIFFON.
ORILLART.
CLAQUEDENT.
PII.ATE.
CENTURION.
HUHEN.
ASCANUS.
EMILIUS.
CENTURION.
94. S. DENIS d'Alhenes.
95. EMPEDOCLKS.
LISTE DES. PERSONNAGES
UIBU LE PBRE.
96. RAPHAËL.
97. URIKL.
MICHEL.
GABRIEL.
NOSTRE DAME.
25700
25706
25818
25874
2589*5
25978
26006
26020
26040
26048
26074
100
8ATBAN.
LUCIFER.
cerderus.
fergalus.
astaroth.
98. l'e.sperit jiiesus.
99. les amks du limbe,
tous les deaiiles.
ADAM.
S. JEHAN BAPTISTE.
EVE.
DAVID.
VSAIE.
E7.ECBIEL.
JHEREMIE.
LUCIFER.
ÇERBERUS.
ASTAROTH.
SATHAN.
FEROALU3.
BERICH.
JHBROBOAN.
CAYPIIE.
ANNE.
CAYPHE.
PILATE.
ANNE.
BRAYAUT.
ORILLART.
CLAQUEDENT.
GRIFFON.
BROYEPFORT.
LONOIS.
BROYEFFOBT.
BRAYART.
CLAQUEDENT.
DISMAS.
0E8TAS.
BRAYART.
ORILLART.
GRIFFON.
CLAQUEDENT.
.MICHEL.
' SATHAN.
nROYEFFORT.
BRAYART.
OUIFFON.
I.ONGIS.
ORILLART.
CENTURION.
XVI
26140
Î6?02
26/24
26256
101.
26337
26426
264i9
26o2|
265:5
26557
266U9
2661;
XI.VI
LISTE DES PERSONNAGES
MARC ANTHOINE.
EMII.IUS.
LONOIS.
EKOYEFFOET.
JOSEPH d'Arismaihie.
PILATE.
CENTUBION.
JOSEPH.
102. NICODEMUS.
103. LA MARCHANDE DE SOYE.
JOSEPH.
nicodemus.
104. l'espicier.
nicodemus.
JOSEPH.
NOSTRE DAME.
S. JEHAN.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
MADELAINE.
JOSEPH.
NICODEMUS.
NOSTRE DAME.
S. JEHAN.
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
26685
26708
26770
268M
26852
26888
26972
27018
27216
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
CAYPHE.
ELIACHIN.
BARRAQuiN, huissiev.
CAYPHE.
ANNE.
YSACAR.
BARRAQUIN.
PILATE.
BARRAQUIN.
JHEROBOAN.
CAYPHE.
PILAÏE.
ANNE.
CENTURION.
JORRAN.
MARDOCEUS.
CENTURION.
ASCANUS.
MARC ANTHOINE.
EMILIUS.
CAYPHE.
RUBEN.
ANNE.
JOATHAN.
YSACAR.
JHEROBOAN.
ASCANUS.
EMILIUS.
MARC ANTHOINE.
27238
27^46
27266
27286
27290
27363
27418
QUATRIEME JOURNÉE
1. ASCANUS.
2. MARC ANTHOINE.
3. EMILIUS.
4. JACOB, scribe.
5. MARDOCEUS.
6. YSACAR.
7. JOATHAN.
8. CAYPHE.
9. BANANIAS.
10. JORRAN.
11. NAASON.
12. ANNE.
13. ELIACHIN.
14. NACHOR.
15. NATHAN.
16. JHEROBOAN.
MARDOCEUS.
17. BRUYANT.
18. ESTONNÉ.
27631
27Î38
27964
19. DRAGON.
20. MALCUIDANT.
21. GUEULU.
GUEULU.
CAYPHE.
ESTONNÉ.
JORRAN.
MALCUIDANT.
DRAGON.
ELIACHIN.
NACHOR.
BRUYANT.
i2. MADELAINE.
23. MARIE JACOBY.
24. MARIE SALOMÉ.
MALCUIDANT,
27990
28054
28122
LISTE DES PERSONNAGES
XLVll
URAOON.
25. josKfH, d'Arimathie.
OUKULU.
URliYANT.
ESTONNÉ.
OUKUI.U.
josKi'n.
CAYPHK.
NAASON.
ELIACHIN.
ANNE.
BRUYANT.
ESTONNft.
MALCUIDANT.
JORRAN.
DRAGON.
26. MALABRiN, geôlier.
OUEULU.
BRUYANT.
OAYPnE.
KSTONNé.
NACHOR.
NATHAN.
madklaine.
marie jacoby.
marie salomé.
27. l'espicier.
madelaine.
marie salomé.
marie jacoby.
28. s. JAQUES ALPHEY.
29. RUBEN.
30. OEDEON.
31. NKPTALIN.
32. S. PIERRE.
S. PIERRE.
33. S. ANDIIY.
34. S. JEHAN l'evangeliste.
35. s. JAQUES ZEBEDEY.
36. s. BERTHELEMY.
37. s. THOMAS.
38. s. SIMON.
39. S. JUDE.
40. s. MATHIEU.
41. s. PHKLIPE.
ASCANUS.
EMILIUS.
Marc anthoinE.
42. LUCIFER.
43. SATHAN.
44. ASTAROTH.
45. BERicn.
40,
. FEROALUa.
47,
, CKRBERUS.
LUCIFER.
SATBAN.
B£RU:n.
28157
ASTAROTH.
FEHOAI.US.
CERBERUS.
48.
DIEU LE PERE.
49.
MICHEL.
50.
RAPHAËL.
51,
IRIEL.
52.
SERAPHIN.
EMILIUS.
28342
MARC ANTHOINE.
ASCANUS.
53.
NOSTRE DAME.
28372
MICHEL.
NOSTRE DAME,
54.
JHESU3.
MADELAINE.
28390
MARIE JACOBY,
MARIE SALOMÉ,
MICHEL,
28456
RAPHAËL.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ,
28466
MADELAINE.
ASCANUS.
MARC ANTHOINB.
EMILIUS.
28558
MADELAINE.
28613
3. PIERRE.
■ S. JEHAN.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
'3»
S. JEHAN.
S. PIERRE.
MADELAINE.
MICHEL.
MADELAINE.
28783
JBESUS.
S88M
MADELAINE.
28868
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
28876
MARIE SALOMÉ.
JHESUS.
28987
29086
29112
29144
29182
29259
29283
29299
Î9405
29429
29465
29487
29527
29542
29571
XLVIII
LISTE DES PERSONNAGES
MARIE JACOBY.
MABIE SAI.OMÉ.
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
S. PIERRE.
JHESUS.
S. PIERRE.
MADELAINE.
S. ANDRY.
MARIE JACOBY.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S. BERTHELEMY.
S. THOMAS.
S. SIMON.
S. JUDE.
S. MATHIEU.
S. PHELIPE.
S. JAQUES ALPHEY.
JHESUS.
RUBEN.
OEDEON.
NEPTALIN.
S. JAQUES ALPHEY.
RUBEN.
OEDEON.
JOSEPH d Arismathii:.
JHESUS.
JOSEPH.
JHESUS.
MARDOCEUS.
NAASON.
CAYPHE.
ELIACHIN.
MALABRIN.
MALABRIN.
BRUYANT,
ESTONNÉ.
MALCUIDANT.
DRAGON.
OUEULU.
MALABRIN.
CAYPHE.
ANNE.
BANANIAS.
JOATHAN.
ASOANUS.
MALABRIN.
EMILIUS.
MARC ANTHOINE.
MALABRIN.
CAYPHE.
JOATHAN.
ANNE.
NACHOH.
29596
MALABRIN.
ASCANUS.
29603
EMILIUS.
29625
CAYPHE.
MARC ANTHOINE.
NATHAN.
29649
NACHOR.
JACOB.
ASCANUS.
JORRAN.
ANNE.
YSACAR.
MARDOCEUS.
NAASON.
BANANIAS.
MALABRIN.
JOATHAN.
29807
CAYPHE.
JHEROBOAN.
ANNE.
NACHOR.
NATHAN.
MALABRIN.
29837
MALABRIN.
ASCANUS.
29841
CAYPHE.
EMILIUS.
ANNE.
29831
MARC ANTHOINE,
MARDOCEUS.
ASCANUS.
29903
NAASON.
ANANIAS.
OA HaN.
NACHOR.
NATHAN.
29929
CAYPHE. •
ANNE.
MARDOCEUS.
JACOB.
JORRAN.
YSACAR.
JHEROBOAN.
29959
CAYPHE.
EMILIUS.
JACOB.
ANNE.
MARC ANTHOINE.
29985
ASCANUS.
ELIACHIN.
NAASON.
55. S. LUC.
30017
50 CLEOPHAS.
30039
30043
30293
30389
30393
30556
30589
MARC ANTBOINE,
306:3
30647
LISTK DKS PKRSONNAOliS
XLIX
j7. ni.ATE.
KMII.IU».
AflCANUS,
MAIIC ANTIIOINE.
ASCANUS,
(i. IVQ.
(JI.KOI'UAS.
H. I.UQ.
CI.KOPHAS.
CLEOPHAS,
68, I.'OSTB.
S. I.UC.
JBESUii.
ff. LUC.
l.'I.EOl'IIAS.
CI.KOPHAS.
I-'OSTS.
». IVS.
CJ.EOriIAS,
». l.VQ.
«, ANDHV.
S. JAQUKS ZEBEDEV.
S- PBELIPE.
S. MATBIKU.
H. HKRTHKLEMV.
p. THOMAS,
S. aiMON.
«.EOPBAS,
t!. JUDE,
». LUG.
JHESUS,
8, MATHIEU.
a. PHELIPE.
a. BERTHELEMY.
S. ANDHY.
S. JEHAN.
S. PIERRE.
S. JAQUES ZEBEDEV.
8. JAQUES ALPBEY.
S. SIMON.
S. JLDE.
S. MATHIEU.
S. PHELIPE.
S. ANDRÏ.
S. JAQUES ZEBEDEV.
S. BERTHELEMY.
S. JAQUES ALPHEY.
S. SIMON.
S, JUUE.
S. THOMAS.
S. PIERRE.
S. THOMAS.
S, JEHAÇ^,.
30809
30815
.30931
31141
31157
3U8!>
31Ï83
31345
31466
31521
31535
g.
ANDHV.
8.
JAQUKH ZRREOKY.
JBK8US.
H.
BERTHELEMY.
S.
JAQUES ALPHKY.
».
THOMAS.
MADKI.AINK.
NOSTIIE DAME.
MARIE JAGOBY.
MARIE SALOMl':.
g.
PIERRE.
H.
ANDHY.
K.
JAQUE» ZEBEDEV.
H.
BERTHELEMY.
rt.
JAQUES ALPHKY.
H.
THOMAS.
K.
JEHAN.
».
SIMON.
g.
JUDE.
».
JEHAN.
».
ANDRY.
».
JAQUES ZEBEDEV,
».
BERTHELEMY.
».
THOMAS.
».
PIERRE.
».
JAQUES ALPBEY.
».
BERTHELEMY.
».
THOMAS.
».
PIERRE.
»■
JAQUES ALPHEY.
S.
JEHAN.
».
ANDRY.
»,
' JAQUKS iSEBEUKY.
JHESUR.
8.
JEHAK.
S.
THOMAS,
».
PIERRE.
B.
ANDRY.
g.
JAQUES ZEBEOEY.
g.
MATHIEU.
S.
PHELIPE.
8.
BERTHELEMY.
S.
JAQUES ALPBEY.
S.
TBOMAS.
S.
ANDRY.
s.
PIERRE.
s.
JEHAN.
s.
PIERRE.
JHESUS.
S.
ANDRY.
S.
JAQUES ZEBEDEV
JHESUS.
S.
BERTHELEMY.
S.
THOMAS.
S.
JEHAN.
S'
JJMJUES ALPBPV.
31003
31617
31693
31785
31757
3180?
31823
31831
31867
31879
s. JAQUES ZEBEDKY.
S. BERTHRI.EMY.
SATHAN.
LUCIFER.
ASTAROTH.
FEROAI.US.
BERICH.
S. ANDKY.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S. JAQUES ALPHEV.
lUIBEN.
;)9. MOAH.
OEDEO.X.
S. BERTHELEMY.
NEPTALIN.
60. s. M.VTHIAS.
61. JOSEPH le Juste.
62. ABIROX.
63. TUBAL.
64. CELIUS.
65. ABACUT.
s. PIERRE.
S. JEHAN,
g. SIMON.
S. MATHIEU.
JHE.SUS.
.S. SIMON.
S. THOMAS.
JOSEPH le Juste.
MOAB.
ABIRON.
TUBAL.
CELIUS.
ABACUT.
S. PBELIPK.
S. MATHIAS.
S. PHELIPE.
S. PIERRE.
S. ANDHY.
RUBEN.
S. SIMON.
S. JUDE.
NOSTRE DAME.
MADELAINE.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
PILATE.
66. BARRAQUIN.
67. LA FEMME PILATE.
68. CENTURION.
S. ANDRY.
S. PIERRE.
NOSTRE DAME.
S. JEHAN.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S. BERTHELEMY.
MADELAINE.
S. MATHIEU,
LISTE DES PERSONNAGES
31917
31935
32003
s. SIMON.
S. JUDE.
S. THOMAS.
RUBE«.
S. JAQUES ALPHEY.
S. PHELIPE.
JHESUS.
S. JEHAN.
S. PIERRE.
S. ANDRY.
NOSTRE DAME.
69. NICODEMUS.
JOSEPH d'Arisjnathie.
JHESUS.
s. PIERRE.
NOSTRE DAME.
S. ANDRY.
S. BERTHELEMY.
S. JAQUES ZEBEDEY.
S. MATIIIAS.
MARIE SALOMÉ.
MARIE JACOBY.
70.
ADAM.
3208!)
71.
EVE.
72.
YSAIE.
73.
JHEREMIE.
74.
EZECHIEL.
75.
DAVID.
76.
S. JEHAN BAPTISTE.
38193
77.
LE BON LARRON.
S. PIERRE.
S. ANDRY.
JHESUS.
RUBEN.
NEPTALIN.
S. JEHAN l'evangeliste.
NOSTRE D.IME.
32213
MOAB.
ABIRO.N.
TUBAL.
32221
RAPHAËL.
NOSTRE DAME.
ABACUT.
32286
RUBEN.
S. MATHIAS.
S. PHELIPE.
JOSEPH le Juste.
3248Ô
JHESUS.
DIEU LE PERE.
MICHEL.
78.
OABRIEL.
URIEL.
79
. CHERUBIN.
SERAPHIN.
RAPHAËL,
32600
32662
32728
32760
32778
32784
3294S
32956
33118
33136
33152
33182
LISTK Di;S FKRSONNAGES
JIIEStlS.
OIKU I.E PERE.
». IIKR'niKI.IMY.
S. MATHIAS.
B. JKHAN.
M. THOMAS.
JosKi'ii le Juste.
SATIIAN.
A.1TAH0TII.
HKUICII.
l.UCIFKH.
PKUOALL'S.
CKRIIKUII.S.
S. l'IERRK.
S. JEHAN l'evangeliste.
». MATUIAS.
S. JAQUES ALPBEY.
JOSKPH le Juste,
a. SI.MON.
aUHKN.
s. JAQUKS ZEBEDKV.
S. ANDRY.
S. JL'DE.
NEPTAI.IN.
S. l'HELIPE.
S. MATHIEU.
S. BERTHELEMY.
OEDEON.
MOAB.
ABIHON.
TUBAL.
OEHUS.
AUACUT.
JHESUS.
DIEU I.E PERE.
33389
33383
33492
s. ANDRY. .
8. JAQIIKN /.KHEDKV.
.t. HEHTHKIEMV.
UADEI.AINK.
S. JUDK.
S. I-IIELIPE.
RUHEN.
S. .MATHIAS.
NO.STRE DAME.
.I. MATHIEU.
JOSEPH le Juste.
s. LUC.
Cl.EGPBAS.
OEDEON.
NEITAI.IN.
ABIHON.
TUBAI..
CELIUS.
ABACUT.
MOAB.
MARIE JACOBY.
MARIE SALOMÉ.
DIEU LE PERE.
JHESUS.
MICHEL.
MICHEL.
80. JUSTICE.
u
33020
33770
81. SAPIENCE.
DIEU LE PERE.
82. MISERICORDE.
JUSTICE.
JHESUS.
^^3. VÉRITÉ.
PAIX.
34088
34178
34194
84.
LA PASSION
NOSTRE SEIGNEUR JHESU GRIST
»
Ce présent livre contient le commancement et la creacion du monde en brief par parsonnages,
la nativité, la passion et la résurrection de nostre saulveur Jhesu Crist, traictces bien au long se-
lon les sainctes euvanfjiles. Et devez savoir que maislre Abnoul Gresban, notable bachelier en
théologie, lequel composa ce présent livre a la regueste d'aucuns de Paris, fit ceste creacion abrégée
seulement pour monstrer la differance du péché du deable et de l'omme et pour quny le péché de
Vho'mme ha esté reparé et non j)as celluy du deable. Et liourtant, qui vouldroit jouer ce présent
livre par parsonnages, il fauldroit prendre et commancer a 'ce prologue qui s'ensuit, et ce fait,
delaissier la dicte creacion abrégée et commancer a Adam estant ou limbs qui dit ainsi :
O souveraine majesté
Et en ce point l'ont fait ceulx de Paris qui ontja par trois fois joué ceste présente passion.
Ces indications ne se trouvent qu'en tête du m%. A. -~ Le nis C. sans les reproduire les a taises à lirofit et a Si'^i-
primé le prologue (223-1 740).
LA PASSION
NOSTRE SEIGNEUR JHESU GRIST
PROLOGUE
Vciii ad liliciaiiduiii jios.
Ddiniiic Dcus vii Uituiii I
Pmtr Viiffeiicc iht premier porif
qxie tout le gendre hiimain compère
5 en servitude très greraine.
Volt le fils de Dieu par mistere
couvrir sa divinité clere
du voille de nature humaine,
Quand de la majesté liaultaine
10 en la jxirre vie mondaine
vint pour devenir nostre frère,
Ou sa personne d'honneur plaine
soubmist a traveil et a jiaine
et en fin a mort très amere.
i:> Long temps fut huumine nature
soubmise a trop dure pointure
de puis celhnj transgrés commis,
Car l'essence qui toujours dure
et en qui n'a fin ne mesure
20 avoit cest edit ainsi mis
Que mesmes ses meilleurs amis
en ténèbres feussent soubmis
sans terme de gloire conclure,
Et fut tel discort entremis,
25 qu'il ne pooit estre demis
par angle n'aultre créature.
■Quant a ce discort subvenir
remède ne pooit venir
si non de Dieu tant seulement :
30 Homme n'y pooit advenir,
pechié l'en avoit fait hanir
et forclorre totallement ;
L'angle n'y pooit bonnement
pour le vice qu'aucunement
35 infiny se voulait tenir,
En tant que son deriglement
s'estoit adressé plainement
contre cil qui ne peust fenir.
Et ainsi durant ceste guerre
SO a qui Justice tenoit serre
humanité trop se douloit,
Car pour supplier ne requerre
ne pooit avoir ne acquerre
félicité qu'elle voulait ;
45 Le supplier ne luy talloit.
Miséricorde lui fallait,
qu'aultre aide n'avait en terre.
Et se qwlque espoir lui hailloit,
rigueur de Jttstice y saillait :
50 s'en estait privée grant erre.
Ainsi tous humains descendaient
i Les m.is portrnt ces nwts : Cy coinmoncp le prolojçue du premier livre de la passion. — 4 Quencor tout le gendfe
B. C. — 9 de m.iii'/w A. - 19 nest B. G. — iS lenbreu A. —31 pechin luy ot fait forbanir B. C. le pechie A. —
32 et indigne B. C. 38 pouoit B. C. contre dieu A. — 43 scauoii B. C, — 47 quant a i-e riens navoit en terr»
B. C. — 51 se rendoient B. C.
MISTERE DE LA PASSION
en enfer, et la se rendaient
privés de consolacion,
Si non de l'espoir qu'ih avoici-t
55 et que par vraye foy savaient
en fin avoir redempcion ;
Mes la grande dilacian
de la pacificacion
moidt tristes et pensifs 2')laindoient,
60 Car la maie transgression
leur causait la privacian
de la gloire qu'ih attcnda'cnt.
Tant grevable estait ceste offence
que Justice de la sentence
65 ne se voulait a mercy traire
Et tenait la cause suspence,
se du fait n'avait rec .mpence,
a qui qu'il tournast a contraire.
L'amme n'avait de quay la faire,
70 angle n'y pavait satisffairc :
qui restait il mes d'apparence.
Fors qu,e Bien, qui tout peust reffaire,
venist la nature parfaire
qui de son bien ot tel carence ?
75 Les patriarches a hault son
demandaient ceste ranson
"pour parvenir a vray repos,
Eulx gem issans en la prisait,
et hanis sous leur mesprisan,
80 de béatitude forclos,
Iceuloc en si desplaisant clos
par rigueur de justice enclos,
crians sans cesser a haidt ton,
Pooient proférer tels mos:
( 85 « Veni ad liberauduni nos,
« Uomine Deus virtutum !
« Ne nous laisse plus icy vivre,
« bon Dieu, mes vien, si nous délivre,
« qui tant desirons ta venue ;
00 « Vien de fait et oeuvre le livre
« ou tu sces nostre debte csuyvre,
« jjar qui prison avens tenue. »
Quand la journée fut venue,
leur requeste fut obtenue
95 et de servitude délivre ;
Lors fut la finance randue.
quand en croix fut moi'te estandue
la char de cil qui tout bien livre.
Lors paya le dangereux pris
100 celluy ou tous biens sont compris,
c'est Jhesus, nostre doulx saulveur :
Lors celluy qui prenait fut pris,
lié, conffondu et surpris
sans jamés espoir de vigueur ;
105 Et c'est la cause sans faveur
qui nous meust pour bien et honeur
d'avoir cestuy mistere empris.
De vous demonstrer par doulceur
la passion et la douUnir
110 que pour nous tous a entrepris.
Monstrer voulons par parsonnages
aucuns des principaux ouvrages
que fist nostre seigneur pour nous,
Les pain .'S, travaulx et oultrages,
115 temptacions et griefs dommages,
qu'il voult endurer pour nous tous.
Se la, reverance de vous
faillie y voit dessus ou dessoubi,
trop dit ou faulte de langages,
120 Soie: amiables et doidx
et nous corrigez sans courroux:
n'en serons auttreffois plus sages.
Prenez ce que ban vous sera
et le surplus l'en laissera,
125 car tout ne paons pas attaindre ;
Nostre procès mieulx en vauldra
et plus grant proffit en sauldra,
sans nostre matière cantniindrc ;
Mes pour nostre ignorance estaindre
130 ou presumpcion pourrait maindre,
ung chacun de nous requerra
La Yierge quel ne veille faindre
a nous bien régir et constraindrc,
en disant Ave Maria.
[Ave Mai-ia.]
135 Vcni ad liberanduiii nos,
Domine Deus virtutum !
Je dis encore a mon propos
par le thème de mon sermon
qûê~lés prophètes de renom
52 et tous en enfer descendoient B. C. — 59 plaignoient A. ^ 64 sa C. — 6S a qui qui A. a qui que lî. — 75 les
patriarches a grant son B. — 76 raenson B. C. — 78 tel C. — 81 et eulx en tout B. C. — 82 vertu B. — f8 vien
si] viens et B. — 105 sans faneur] beaulx seigneurs B. C. — 112 de C. — 113 sauueur C. — 132 que ne C. —
134 sen dirons B. G. Les mots entre croclwts manquent A. — 135 nos etc. G. — 138 pères sains — de foy et espé-
rance sains B. G.
PROLOGUE
140 ou limbe aUemlans la journe»
et la venue désirée
du doulx Messias nostre-sirc
pooient tels paroles dire :
« Bon Dieu, pour nous confort livrer,
,145 « de ceste chartrc yriefre et liinie
* vieil ici/ pour nous délivrer
« par ta puissance precellante. »
A cestuy j>oint eomniancerons,
et premier nous vous monstrerons
150 les plaintes que faire pooient
lesperes qui ou limbe estaient,
attendaits leur rcdcmpcion
par la haulte incarnacion
du douh et benoit filz de Dieu, .
155 qui leurs plains en temps et en lieu
entendit et amodera
pour la mort q'uil en endura.
Jlla vo^ildrons lahsier l'istoixe
par moyen d'interlocutoire
100 et moraliser un fetit ^
pour contenter vostre appétit.
Nous tneticrons cinq parsonnages
de cinq dames haultes et sayes,
es quelles Paix sera propice,
165 Miséricorde avec Justice,
Vérité et puis Sapience ;
et ce pour juger de l'offense
d'Adam qui fut le premier homme,
quelle elle fut et de quel somme,
170 et s'elle est digne de pardon
ou d'avoir si mauvais guerdon
que jamès ne soit retournée.
Après la sentence donnée
orrez raisons haultes et bonnes,
175 (i la quelle des trois parsonnes
Père, Fils et saint Esperit,
pour le gendre humain qui périt,
ioist faire repparacion
en souffrant mort et passion ;
ISO et pour quoy ce divin mistere
appartient au Fils plus qu'au Père
ou au saint Esperit de nom ;
s'arguerons que si, que non,
comme saint Thomas l'a traictié
1» aoubtillemcnt en son traictié
~iur le tiers livre de titntences.
S< orrez argus et deffences
pour quoy le faulx perhc' dampnable
du deable fut irréparable,
190 condampiu' en l'cternal fu,
et pour quoy l'homme allegic fu
non obstant son péché très grief;
et ce fait déduit ussés brief,
verres conclure en audience
105 par la divine Sapience ;
le rray fils de Dieu ordonne'
divinement estre incarné
ou très saint ventre virginal ;
et puis message especial
MO commis pour anoncer l'affaire
a la très doulce et débonnaire
vierge qui mère devait estre
pour porter le doulx fruit celestre
venant du trosne supernel.
205 Lors vendra l'angle Gabriel
faire l'adnunciation
et après ferons mencion
de lu doiclce nativité,
poiirsuyvans sans prolixité
810 l'euvangile a noslre sçavoir
sans apocriphe recevoir.
Si vous prions, seigneurs et dames,
cojointement hommes et famés,
que silence vueilles garder
215 et brief nous orres procéder
a l'ayde du créateur,
le quel nous doint par sa doulceor
si bien faire et vous bien ouir
qu'a la parfin puissions jouir
220 de la vision éternelle
de Dieu en gloire supernelle.
Amen.
Ouvres vos yeulx et regardes,
dévotes gens qui attendes
825 a oyr chose salutaire :
veilles vous pour vo salut taire
par une amoureuse silence ;
158 iller B. C. — 159 et par B. C. manière A. — 161 nostre A. — 169 elle maniue B. est C. — 170 gi:erdon B.
— 172 pardonnce A. — 173 ordonnée B. C. — 174 ourrons B. — 178 appurlient A. — 1S3 nous A. sargurons B.
que si et que non B. C. — 188 le mal pechie C. — 193 conclu A. — l'JO lo fils de Dieu estre ordo nne B. C. —
ÏOS vierge qui viert;e B. C. — 206 dencneiacion C. — 208 sa C. — £09 perplexité A. — 210 pouuoir A. — 211
apoeasse C. — 215 verrez B. — 2ie-î22 man'iurnl B. C. — 2231732 /bniicnf le prologue dans B. e( sont placn
en tt'le du manus'^rit.
6
M I S T E R E DE LA P A S S 1 0 N
si verres en briefve sentence
le fait de la création
230 et la noble plasmacion
du ciel, terre, angles et humains,
en brie f (car cecy, c'est du mains),
et comme incident littéral
a nostre propos principal :
2£ nostre especialc matere
est de traictier le hault mister e
de Jhesits et sa passion
sans prendre aultre occupassion.
Mes la creacion du inonde
840 est ung mistere en quoy se fonde
tout ce qui deppend en upprès :
si la monstrons par mos exprès;
car la manière du produyre
ne se peust monstrer ne déduire
245 par effect, si non seulement
grassement et figuraiilment ;
et selonc qu'il nous est possible,
en verrez la chose sensible.
DIEU LE PERE
Pour louer nostre majestii
250 et départir nostre bonté
non principiee, non faicte,
infinye, seule et parfaicto
et qui n'a besoing liens quérir
pour gloire totalle acquérir,
i55 nous, ung en vraye trinité,
trin en equalle etei'nité.
Dieu régnant sans fin, sans mesure,
sans indigence ou mespresure
nostre altitude amcndrissant,
260 tout bon, tout sage, tout puissant,
tout beneuré, tout glorieux,
esmeu d'un voloir désireux,
volons faire creacion,
affin que la relacion
21)5 de créateur a créature
soit realeraent en nature.
Et en nous seul selon raison
par celle subtille achoison,
nous produirons nouvelles choses
270 dont les ydees sont encloses,
reluisans éternellement,
en nostre seul entendement.
Et pour commancer nostre ouvrage,
créons le ciel en hault estage
275 d'une forme ronde espeiique
affm qu'il conserve et implique
dedans soy tous les aultrcs corps
et que riens ne se monstre hoi-s. [
Après créons quatre elemcns,
280 qui seront les commancemens
concurrens a causer la masse
de toute créature basse,
divers en leur subtilité,
en vigueur et en qualité :
285 le feu comme le plus ysnel
.soubz la circuité du ciel
situons pour jjrendre retrait ;
après l'air, qui plus luy poui trait,
ara dessoubz place oppoitune;
290 et après l'eaue, qxd lepugne
du feu, convendra eslonger -
et dessus la terre loger,
la quelle dernière ordonnons,
lieu et stabilité donnons
295 du centre de nostre facture,
affin que sa griefve estature
luy doint reposer au moyen
de ce beau lieu celestien
ou toute amcnité rodonde.
300 Et ou plus beau de nostre monde
créons angles en trois parties
et en faisons trois jherarchies :
en la première sont ydones
chérubins, séraphins et troues ; '
:«15 en la seconde cstalilissons
les haultes dominacions,
potestés et principaultés ;
en la tierce virtuaultés,
archanges et après les anges,
310 pour sempiternelles louanges
de nosti'e service obtenir.
Or sus a vostre bien venir,
mes amis, mes vrays serviteurs,
mes champions et conducteurs,
315 de Ical vouloir viieillez tendre
a nous rétribuer et rendre
le service que me devez ;
vostre cliief suis, bien le savez.
233-1740 manquent C. — 236 dinsisler au I!. — 242 si monstrerons les B. — 247 qui A. — 249 le Père manriw
toujours A. — 257 ne B. — 266 rcalinent B. relacion A. — 267-272 manquent A. — 286 en B. — 287 créons pour
prendre le A. — 289 dessoulz aura B. — 290 eau A, et manque A. B. G. eaue xem'ile quelquefois compter pour
trois si/Uabes. — 293 derraine B. — 301 danges B. — 304 Seraph., cher. B. — 307 princip. et pot. B. — 316 a
moy B. ,
ROLOOUE
;ti(i
3»r>
r
:i;«
Xfô
a qui (lovez oboyssanec.
SERAPHIN
IIoiiiK'ur, puissance et rovornnce
soit a vous, Dieu, hault créateur;
a vous seul, coinme a uostre acteur,
ilc'vous louange et prefferancc.
CHERUBIN
Mil la vertu d'obedianco
moy sachant vostroserviteui-,
honneur, puissance et revoranco
soit a vous. Dieu, hault créateur.
MICHEL
Qui souffira tel precellance
assez louer, hault plasmateur,
o prepotont proliatcur,
o puissante magnificence?
GABRIEL
Honneur, puissance et revcrauce
soit a vous, Dieu, hault créateur;
a vous seul, comme a nostre acteur,
devons louange et prefforance.
RAPHAËL
o haulte et souveraine essence,
vrayenient louer vous devons ;
car tout le bien que nous avons
vient de vous, créateur et père.
S40
3'ir.
350
LUCIFER
Quand mon estât liien considère,
je suis do nature plaisant,
clere, subtille et reluysant,
de hault fait et puissance ardue :
de qui qu"el me soit descendue,
de moy seul le tien et tendray,
grâce no mercy n'en rendray :
trop grandement m'al)esseroyc,
serviteur me re|)puteroye
ou je suis maistre et gouverneur.
SATHAN
Vous estes bien digne d'honneur,
Lucifer, nostre principal :
en ce beau lieu celestial
n'y a créature si belle
que vous.
LUaPSR
La vérité est toile ;
.Ti5 au moins le m'est il bien advis.
BBLZBBUTH
Nous no voulons cstrc asservis
a aultre nature Imultaine :
vous serez nostre capitaine,
vos sers et corapaignons serons,
afio et jnmès nous n'obeyix)ns
a aidtre, quelque grand qu'il semble ;
nous tendrons nostre fait ensemble
contre tous puissamment et fort.
ASTAROTH
Je suis aasés de vostre accord,
365 que de riens no nous asservons :
par dessus tous nous cslevons
et faisons valoir nosti'e bende.
LUCIFER
Je n'ai pas peur que je descende ;
prestement me verrez monter
370 et tous les haulx cieulx surmonter ;
user puis de ce piivilcge ;
en aquilon mettray mon siège :
la seray comme primerain
equiparant au souverahi.
STTi La vouldiay régner,
valoir, gouverner,
tnimiphe mener,
drois et loys donner
en ce beau reaime :
SSO Ija fpray sonner
ma voix et tonner,
commands resonner,
causes terminer,
sans evocquer ame :
.385 Dieu ha beau mander ;
il n"a qu'esgai'der
pour moy commander
ses commands garder :
ce me seroit blasmo
390 De moy deffonder
« pour son los fondei",
quand a demander
d'honneur babonder
son pareil me clame.
niEU LE PERE
395 Par vostro orgueil vil et infâme.
3t9 renilrc assistance Ti. — 321 et 327 et créateur B. — 323 confrnoissant vo B. — 328 Sainl-M. toujouff B. —
32U linimteiir B. — 331 Je salue ta mapniflcence .\. — ?32 Ce ters et la prrmièri- partie du rrrs 333 sont attri-
huéx à Michel B. — 337 vraieuient bien A. B. — 343 puissant ardure B. — 3i4 de qui que B. — 347 me A. — 35* L»
rhose A. — 376 vouloir A. — 383 cause A. — 395 le Père ninn^uc A.
8
MI STERE DE LA PASSION
faulx anges, vous serez pugnis
et de mon règne vous banis
a tousjours mais sans revocguior,
et vous condampnons tresbuchiei'
400 la bas es abismcs soubz terre
et la tenir prison et serre
en paine et grielVe affliction.
Michel, mon vaillant champion,
chasse ces dragons venimeux
405 par puissance ou puis ténébreux ;
il est appointé par sentence.
MICHEL
A vostre haulto prepotence,
mon Dieu, toujours obéir veil :
Lucifer, faulx prince d'orgueil,
410 et les compaignons adherans,
vos faulx tours sont trop apparans,
vostre malice trop empire :
vuidez, vuidez du hault empire,
desloyaulx ennemis de Dieu ;
415 pas ne vous appartient tel lieu.
Vuidez, deables, vuidez, vuidez ;
trop hault cslever vous cuidez
contre le roy omnipotent.
Peine et traveil si vous attent,
480 feu terrible et mort pardurable.
a GA.BRIEL
Vuidez, faulce tourbe dampnable,
maudiz et condampnés serpens.
LUCIFER, en cheant et trebuchaut
a terre.
Je m'en repens, je m'en rcpens,
d'avoir brassé tel appareil.
SATHAN, en trébuchant.
425 Et nous d'avoir creu ton conseil
sommes de gloire tous suspens.
Icy cheent et tresbuchent les mauvais anges
en enfer en fourme de deables.
LUCIFER
Haro ! j'enrage, je me pens,
je forcené de dueil et d'ire ;
qu'ay je fait? il n'est point a diie ;
430 ou suis je ? dont viens je cy ore,
bani de l'éternelle glore
que jamès retourner n'y puis ?
0 pute chartre, o hydeux puis,
ordo et puant fomaise horrible,
435 O mordant flamme inextinguible,
quel povre esprit te portera ?
SATHAN
Le deable nous confortera :
par vous sommes cheus en ces las.
BELZEBUTH
Voire sans jamais sourdre. '
LUCIFER
Helas !
440 Or n'est espoir d'en saillir hors ;
va hors, plus de cent fois va hors,
détestable et maudit orgueil ;
tu as mué ma joye en dueil
sans jamais remède y trouver.
ASTAROTH
445 Ha ! quelle orreur !
BELZEBUTH
C'est pour crever ;
tout nostre bien est trespassé.
SATHAN
Tout tel que nous l'avons brassé
le fault boire, maistre Agrijipart.
ASTAROTH
Que le sanglant deable y ait part :
450 allons ce loyer recevoir.
I Icy doivent fere grant tempeste.
MICHEL
Pero divin, j'ay fait devoir
de bouter hors vos ennemis.
DIEU LE PERE
Puis qu'ilz sont de gloire desmis
par leur offonce et leur malice,
455 affin que jamès a tel vice
ne se dispose et ne s'applique
nulle autre nature angelique,
mes anges, loyaulx serviteurs
et obediens auditeurs
4G0 de nos misteriaulx sermons,
des ore en bien vous conformons
que jamès ne pourrez pécher
pour riens qui vous puist empeschcr,
pai' don de grâce especialle.
MICHEL
465 Haulte puissance imperialle,
humblement ce bien recepvons.
404 ses A. B. — 407 Saint-^L B. — 423 425 etc. Les tndicaîion'i scèniqu^s rntre crochets n'existent que dans
B. — 426 chace puis que je me frape ens A. — 436 esperit A. B. — 438 ses las B. ce las A, — 448 Agrappart B.
— 456 s' man'ine K, — 458 mes vrais seruiteurs B. — 4fi6 du don louange vous deuona B.
l'ROI.OOITR
475
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490
VX,
505
:.iO
niEU I.E PEUE
Or est tciiip-s quo nous uchevous
iiostre operaciou grant erre ;
ja créé avons ciol et terre
par limitation voi tainc,
mes ccllo terre est viiide et vaine,
couverte d'oauo ties parfondo,
et tenebrosité habondc
dessus la face des aliisnios;
et sur celles eaues nicismes
nostrc esprit se jiorte et transftero
])ar liault et solenipnel luistore.
Soit donc lumière devisoo
et de tc^nehres divisée,
la quelle, pour tant quo clcr luyt,
nouions joK)' et ténèbres imyt. i
Or est fait vespie et matinée
pour nostie première journée.
Après voulons que soit posé
mi firmament ))ien disposé,
divisant les eaucs terrestes
contre les haultcs et célestes,
uonnué ciel pour plaisant séjour,
et plus n'en produyrons ce jour.
Après voulons que terie apperc
et qu'en luig singulier reppero
toute eaue se tire et s'assamblo,
et cella bien conjoinct ensemble
sera mer très bien dénommée
et la sèche terre nommée ;
terre doncques gouvernera
herbe vei'de, et pioduiia
arbres, pommiers, pour toujours rendre
ung chacun, fruit selonc son gendre,
ayans semences vertuables,
prest/. a engendrer leurs saniblables :
atant e:^t fait soir et matin
et nostre tiers jour traict a fin.
.\près créons ou firmament
deux luminaires noblement,
et soit l'un grand et l'aultrc mendre
pour mieulx discerner et conpreudro
connneut jour de la nuit diffère :
le soleil par lumière clerc
au jour esclairier servira,
et la lune de nuyt luyra
habondanment acconipaignio
il'e.-toilles a gi ant compaignie ; '
or puisque chacune enlumine,
atant nostre quait jour termine.
.\l)rès atant no nous ])assons :
pi'oduisout eaucs les iMissonf,
ballaiucs it aultre» rcptillcs
vivant eu eaue, et volatilles,
rjïO oyseaulx de diverse» espèces
a grosHos touilles et esi)csses,
jiour habitiu' et vie querre
les uugs en mer, aulti'cs en terre ;
et pour tant que bous les tenons,
5Î5 ceste beneysson leur donnons :
erescc/. tous ( t multipliez
et nndtiplians remplie/,
lu mer tt terre en habondauce,
chacun sclouc son ordoimance.
530 Or est vespre et matin levé
et nostre quint jour achevé.
Et pour nostre oeuvre tiairc avant
produysc terre ame vivant
en divei's gendres bestiaulx,
535 oeilles, vaches et chevaulx,
jumens et reptillcs plusieurs,
deux et deux pour estre plus scurs.
Or est la terre prepaiee
et de la mer bien sepai-ee,
5i0 la terre do bestes foruio,
la mer de poissons bien garnie,
et tout bel et bon et bien fait.
Reste ung seul point a nostre fait :
faisons un homme bel et sage
5'i5 a nostre scmblaueo et ymage,
qui soit seigneur et oultrepassc
do toute créature basse
qui se meust soub/. le firmament
par lumière d'entendement :
550 du limon de terre formé
sera et d'une ame imformé.
Icy fuit home.
Or est la matière assouvye ;
reste inspiraciou de vie
en sa belle face inspirer
555 pour le veoir vivre et respirer.
Icy fait fourme d'inspirer le
fait d'Adam.
Or es tu formé pour le mieulx,
homme, la face vers les cieulx,
tout droit pour noter et entendre
la région ou tu dois tendre :
500 c'est ou ciel seul, vers aultro non.
Adam sera ton pi'opre nom.
ADAM, o genoux.
Mon Dieu et mon vi-ay createur.
4T0 esperit B. — 47S diuisee A. — 479 séparée A — 495 plate B. — 498 pommes A. — 519 ame A. B. — 587 raemplis-
sez B. — 547 maniue B. — 554 la A. — 558 or es tu ] homme or es. B. — 557 la belle B. — 559 contendra B.
10
MISTERK DE LA PASSION
mon seigneur et seul plasmateur,
très humblement je vous mercy,
505 Vous congnoissant mon seul acteur
ot moy vostro humble serviteur
a toùsjours mais.
DIEU LE PERE
II est ainsi.
Adam, je veil que tu t'en viengncs
et que tu habite et te tiengnes
570 en ce beau paradis terrestre. |
ADAM
Plus beau lieu ne peust en terre estro,
plus gracieux ne plus serain :
0 mon créateur souverain,
plaise vous que toùsjours y soye !
niEU LE PERE
575 Pour toy institué l'avoyo
et paré d'arbres dclitablcs ;
regarde les fi-uis savourables :
tout est pour toi, tous les te donne,
tous a ton gré les haliandonne
580 pour en menger quant te plaira.
Ung seul deffendu te sei'a,
qui povoir ha especial
de faire savoir bien et mal :
c'est cestuy : garde que n'en uses,
585 et que d'en menger ne t'abuses :
quelconques jour en mangeras,
soies seur que de mort mourras.
Garde t'en, si feias que sage.
ADAM
Mon très cher sire, sy fera je,
590 puisqu'ainsy m'est expédient.
DIEU LE PERE
n n'est pas bien convenient
que l'omme soit seul sans subscide :
faire luy voulions une ayde
en espèce pareille a luy.
ADAM
595 Le sommeil m'a fort cnvay :
l'eposer me fault.
Cy se dort Adam.
DIEU LR PERE
Nous prendrons
ccste costc et l'cdifirons
de char et d'ame intellective,
et* elle raisonnable et vivo
600 sera femme bien dénommée.
Femme, or es tu vivo et formée ;
si vendrons Adam exiter
et toy devant luy présenter,
affin que recevoir te veille.
605 Adam, viens ça ; si t'appareille
de ceste fenuîie recevoir.
ADAM
0 Dieu, j'ay merveille a ce voir :
cest os la de mes os yssi
et la char de ma char aussi ;
610 virago la dy par raison.
DIEU LE PERE
Très bien ; et pour ceste aehoison,
l'omme, en ung temps qui s'ensuyra,
père et mère l'eîainquira
pour astre a sa femme conjoinct :
615 ainsi vous conjoins par ce point,
que deux en ung serez hés ;
croissez donc et multipliez
tant que terre ait replecion
d'humaine gcneracion.
620 Dessus les poissons dominez,
oyseaulx et bestes gouvernez
et prenez vostre soustenance
de tous fruis a vostre plaisance,
hors rais celluy que voiez croistre,
625 qui est pour bien et mal cognoistre ;
gardez vous en, car aultrement
vous mouri'ez infailliblement
a vostre dueil irréparable.
EVE
0 hault créateur vertuable,
630 de qui les oeuvres sont parfaictes,
du grant honneur que vous nous faictes,
ne vous povons louer assés.
DIEU LE PEKE
Or sont nos beaulx cieulx compassés,
terre estable et mer terminée
035 et nostre suprême journée
de vespre et matin faicte et close.
A ce septième ferons pose :
de tout ouvrage y cesserons
et celluy jour sanctifirons,
640 et voulions qu'il soit saint et digne
observé tant que monde fine
de toutes generacions.
Sus, mes anges par légions, \
mig chacun en sa jherarchie,
645 a nostro haulte monarchie
accomplie en nobilité
chantez un joyeux silete.
563 mon principe B. — 569 habites et viengnes B. — 574 vous plaise B. — 576 para B. — 5S6 qnen B. — 597 I'
manr/uf A. — 602 vouldrons A. — 605 sa A. — 607 ad A. — 610 est dit A. — 628 inrreparable A. — 640 qui A. —
647 LHw^icatioii srètilqu.c manqua B et se trou-ve A.
P 11 0 [. 0 fi U K
11
[SlLETE.]
Dieu te père se revient en son
siège et chantent les anges.
ne Icuf fay mcngfor a toux deux.
i.uciPRn
Or va, qu'en iioftir piiiM hideux
puisses tu retourner a joyo !
y
¥
»
LUCIFER
Haro! quoi forscii, quelle larro,
quel horribilité ! j'enni^e
Ka (le «lueil et de mortel courroux.
SATHAN
Qu'est la, Lucifer? qu'avez vous?
a yl chose (nii vous ilosplaise?
I.Uni''ER
Oy, lari-on, la plus mauvaise
que jamais nous puist advenir ;
firiT) et qui la lerra parvenir,
nous sonunes pardus, liien le vois.
f)ye/,, deablcs, oyez ma voix
bruyant, tonnant comme tempeste ;
oyez, larrons, dressez la teste,
Ofio sailliez tous sur piez, levez sus. j
Ce liault triumpliant de lassus
a nostre {j'iant honte et diflame
ha vouUu créer honnne et famé
doués do si haulz privilèges,
i;65 qu'ilz seront pour remplir les siojïes
dont nostre toui'bn est fourbanie.
Sathan, faulx chien, je te regnic
et t'iray sur piez devourer
se tu les laisses demeurer
TiTO en ue point sans les assaillir.
SA.THAN
Dispenccz nioy donc du faillir,
se voulez que je les combatc.
LUCIFER
Je le veil.
SATHAN
Levez donc la pâte :
aultremeut je ne vous croy point.
LUCIFER, en levant la main.
fii:> La voyla.
SATUAN
D'aller eu ce point,
on vcrroit trop tost ma falacc ;
je prendrai virginalle face,
les piez et le corps serpentin,
et ains que soit demain matin
680 je veil estre au gibet pendu,
se lin fruit a eulx deffendu
BvR, toutf seule.
085 Vecy do l)eaux arbres nionjoyo,
et de fi'uis assés a choisir.
Jo prens a les voir grant plaisir ;
mes celluy par cspecial
de science de bien et de mal
fiOO nie plaist moult. Et se j'en niengoye ?
Las, que dis je ? je n'oscroyo :
Dieu le nous deffend par ses dictz.
Icy s'en va Sathan a quatre pies
comme un serpent entortiller
(tuteur de l'arbre.
SATHAN
Femme, qu'est ce la que tu dis ?
Pourquoy n'osez vous bien lueuger
695 de tous frais de ce beau verger ?
Dieu vous a il riens except»' ?
EVE
II nous a licence preste
d'user et meugcr a tous dis
de tous les frais de paradis ;
700 mes uiig en y a au millieu
qid nous est d(!ffendu de Dieu,
que nous n'en mengous n'y touchons ;
et pour tant point n'y approchons,
car espoir mort s'en ensuyvi-oit.
SATHAN
705 Pourquoy ?
EVE
Car ce frait nous seroit
cause de savoir bien et mal.
SATHAN
\'ous avez engin bestial :
inengcz en tant que vous pouiTez ;
jamès pour cela ne mourrez.
710 Mes uug aultre point te demande :
secs tu pourquoy Dieu vous commande
qu'a ce fruit n'atouchez en rien ?
EVE
Pourquoy ?
SATHAN
Pour cause qu'il scet bien
que d(! l'eure qu'en mangerez,
715 tantost comme deux ilieux serez.
G48 quel foroe A. — 665 sont fais .\. — 6C8 te A. — 673 doncqui'S B.
la A. qucst-cc que tu me B. — 700 ou millieu B.
675 11 v.iult. Dy îillor B. — 693 que»»»
12
MISTER Iv DE LA PASSION
sachant bien et mal clerement ;
1
720
:>
730
7'10
T50
mengcz, mangez en hardiment :
si seront vos raisons ouvertes.
EVE
N'est ce autre chose?
SATHAN
Nonnil certes :
vous estes follement deceu.
EVB
Se ja pieça je l'eusse seeu,
j'en eusse essayé a mon vueil,
car le fruit est plaisant a l'ueil,
et cuide qu'il soit bon aussy ;
quoi qu'il soit, j'aray ceste cy. \
Icy m qunilU et mengue. \
Vecy pomme moult précieuse
et a menger tant savoureuse
qu'ung morceau en doit valoir cent.!
Tenez, Adam, essayez ont :
meilleur fruit ne pourrez menger.
ADAM
Ha ! seur, il y a grant danger :
vous en pourrez estro l'eprise.
EVE
Ha ! beau sii'c, a mon entreprise
essayez ent, mon cliei' mary,
ja n'en ayez le cueur mari y ;
le serpent m'a dit pour le mieulx
que nous serons comme deux dieux
sachans bien et mal, c'est grant chose.
ADAM
Mal en vendra, je le suppose ;
mes pour ce qu'a vous amour ay,
a vostre veil j'en mengeray,
seulement pour savoir que c'est. ,
EVE
Une chose trop me dosi)lcst :
j'ay honte qu'ainsi nudz nous voye.
ADAM
Oneques mes pensé n'y avoye :
si n'est pas bel, a vrai jugier ;
prenons des fucilles de figuier,
deux et deux les cousons ensemble,
très bien serviront, ce me semble,
a nostre humanité couvrir.
Icy assemblent des fueilles de figiil j et
en colorent leurs natures.
DIEU LE PERE
Péché a fait les yeulx ouvrir
a l'ommc, et bien et mal savoir :
départir me veil pour le voir,
pour lui arguer sa folye.
Icy vient par decers Adam.
ADAM
753 Las! j'ay la voix de Dieu ouyo
qui nous espouvante tretou».
EVE
Ha! mon cliier aiiiy, mussons nous,
de grant crainte ne sçay que dire.
Cy se mussent.
mEV LE PERE
Adam, ou es tu?
ADAM
Helas! sire,
700 j'ai ouy ta voix et tes dis
resoner ou ce paradis,
dont de peur ne sçay que je face ;
si me suis musse de ta face,
de honte qu'ainsi me voy nu.
DIEU LE PERE
765 Et par quoi as tu recongnu
que nu scies en ce jiourpris,
si non pour ce que tu as pris
du fruit contre ma volenté ?
ADAM
La femme que tu m'as preste
770 pour compaignie lateialle
ne m'a pas esté bien Icalle,
car par elle j'en ay gout(!.
DIEU LE PERE
Et toi, femme, d'aultre costé,
dont as tu la hardiesse eue ?
EVE
773 Sii'c, le serpent m'a deceue ;
c'est i)ar son conseil dccevable.
DIEU LE PERE
Mauvais serpent et miseralde,
par ta perverse abusion
recevras malédiction :
7Si) de toutes bestcs aras pis ; \
tu te trayneras sur ton pis '\
tous les jours en mengant la terre; !
Si mettray continuel guerre !
qui entre femme et toy se tienne 1
783 entre sa semence et la tienne, Il
qui jamès ne terminera. n
La teste te soubzmarehei a •
719 nesse A. — 724 qui A. — 741 a vostre emprinse B. — 753 de porter B.
B. — 776 mizerable B. — 777 deceuable B. — 779 receueras A. — 7S0 pie2 B.
756 inespoanle et enterrit tous.
V R 0 1. 0 G L" K
13
pt t'cspyra do lVi<gnillion I
souvent a ta confusion. V
790 Toy, fcniiiic, ne seras pas quitte
(le ce mal : en peine et labite,
a griefz dueilz et geniisscniens,
tu feras tes enfanteniens,
et seras en obeyssancc
7Uj (Icssoul)/. l'omnic et soubz sa puissance,
a qui résister n'oseias.
Adam, pour ce qu'obey as
a ta femme et mongié du fruit,
contre ce que t'avoyo iiistniit,
soo la terre en ton oeuvre interdicto
dev<'ndra l)reliaigne et mauldite :
quanque d'elle recueilleras
a grand labeur et peine aras,
et ne t'advienra pour tous dons
S05 sinon espines et chardon»
aucuneffdis pour ton salaire.
En la sueur île ton viaire
useras ton pain chacun jour,
jusqu'à temps que faces retour
810 en la terre dont tu yssi :
car |)Ouldre es, et eu pouldre aussi l
te fauldra retourner en fin. /
f) souverain père divin,
haultainc lumière infaillible,
815 quel offencc griofvc et torrilile
ay je au jour d'uy vers toi commis !
en quel danger nie suis je mis !
a quel meschief suis je venu !
Doulx Dieu, que m'est il advenu
820 d'estrc allé contre ta deffence !
0 très nolile estât d'innocence,
trésor hault tt (Ugne sur tous,
or es tu l)ien pardu pour nous.
l'ardu, voire 1 helas! comment ?
8ij sans fin, irréparablement
changé en dure dolcance !
0 griefve desobeyssance,
hydeux serpent, horrible monstre,
ta faulcc trayson nous monstre
^îo quel grand bien nous as empescho ;
car par la sente de péché
et les desers de dur reniort
nous niaines au terme de mort
sortir nostrc honteux demaine.
SX, () très noble nature, humaine,
pur ruisselet de deité,
miroir do pure éternité,
a Tymoge do Dieu molce,
or es tu par moi violée ;
8io par moy ta noblp»sc eft parduo.
O pur effect do oflimo ardue,
fin or de reppose mynioro,
ray cler d'éternelle lumière,
fontaine y.s8ant de roche vivo,
S\:> rosete de beaulté nayve
procédant <lc glorieux ])lains,
nature humaine, je te plains ;
au plaindre ay la bataille prino
qui jaincs ne sera desprise,
850 tant que mort fine le procès, j
EVE F
Je suis cause de cest excès,
cher espoux, je le congnoy bien :
par moy est pardu UQstrc bien,
par moy sommes mis en misère,
855 mes ou nom de Dieu, mon cher frerc,
je vous supplie, moi indigne,
que fiagilité femenyne
vous plaise ung peu considérer.
ADAM
Ha ! seur, ne cessons de pleurer
860 par tout le cours de nostrc aage.
SATHAN
J'ay bien joué mon pai'sonuage:
je puis bien faire retournée,
car jamès si haulte journée
ne fera deable que j'ay faift.
ADAM
865 Seur, j'ay pensé a nostrc fait ;
pour vostre grande renommée
veil que soiez Eve nommée
comme mère de toute gent.
EVB
Sire, le nom est bel ft gent, .
870 fondé sur propriété bonne. |
DIEU LE PERE
Ces deux plices icy vous donne ;
prenez les tost, si les veste/.
et tantost d'icy vous partez :
c'est mon veil, plus n'y devez cstro. |
ADAM
875 Holas ! l)cau paradis terrestre,
beau lieu de doulceur refulcy,
te delaissci-ons nous ahisi
par nostre coulpe oi-dc et immonde ?
788 V'-rs in':om,)IH li. que U... maint s.iison. /. • irrj ((<■ A piuvit «iMsi .i/lc'n'. — 791 Ion B. — Slï tout ung B.
— 815 horrible ». — 841 ii;noran.M D. — 832 grief B. — 833 miine au ler.ne Je la m jrl. B. — Slî reppoiee A. B.
— 860 ilurant A. — S70 iloulx lieu de beaulté B.— 878 très immonde A.
14
M 1 S T E R E
EVE
Adii'u lo plus beau lieu du monde,
S80 adieu aménité seraine,
adieu terre doulco et féconde
pour toute plaisance mondaine :
Helas ! trop a esté soubdaine
nostro demeure en si beau lieu :
885 or allons en traveil et paine
labourer, puis qu'il plaist a Dieu.
DIEU LE PERE
Or est t'ait Adam par offeneo
comme ung de nous, ayant science
de bien faire et mal retarder ;
890 si nous couvieut bien regarder
que sa bouche ne soit servye
des beaulx fruis de l'arbre de vie,
car en mengant il demourioit
vivant, ne jaraès ne raourroit ;
895 Chei-ubin, gardes ceste porte
affin qu'homme ne se transporte
jamos pour en oser cueUlir.
CHERUBIN
S'il est homs qui l'ose assaillir,
de ceste versatille espee
900 enflammée, aura dissipée
la teste, et tout le corps aussy.
ADAM
Chère seur, laliourons droit cy
pour nostre vie soustenir ;
soit de houer ou de fouir
905 mig chacun se mette eu dcvoii'.
EVE
Mon cher seigneur, vous dites voir :
j'ay trouvé ung engin soubtil
et matière a faii-e du fil
pour couvrir nos deux povres corps.
DE LA PASSION
a ceste fois, il est besoing.
Petits dcables, baissez le groing,
915 et m'aourez comme ung gobitre ;
j'ay fait lo plus cruel besitre
qu'onoques fut ne janiés sera.
LUCIFER
Oez que Sathan preschera,
progciiie au feu condampiiee.
SATHAN
920 L'omme est happé a la trainee ;
Lucifer, il est pris au bric,
il est pardu, il en est pic :
il a niengé de celle pomme.
LUCIFER
As tu deceu ce meschant homme ?
925 Sont ilz a mourh- destinés
par tes abus ?
SATHAN
Adevmez ;
tous deux sont par mon faulx conseil
mauldis en peine et en traveil ;
je leur ay brassé ce brouet
930 et bany du lieu quod pro et,
ou jamos no ferons retour.
LUCIFER
Sus, dcables, chacun a son tour
aourez Sathan en parsonne
et lui affublez la couronne
935 comme au roy de tous nos heraulx.
ASTAROTH
De roses ? .
LUCIFER
Mes de gros barreaux,
ardans comme feu de tonnoh're.
BELZEBUTH
Les vecy cliquans comme ung voirre,
si chault ne senty de cest an.
LUCIFER
9i0 Or affublez maistrc Sathan
ce dyademe triumphal,
car nous n'arons jamés vassal
qui face plus haulte entreprise.
Icy doivent fere une bien grande
I ■ tempeste en leur enfer.
SATHAN, en fourme dyaboiicqwe.
910 Hau ! roi Lucifer, sailliez hors
n grosso tombe d'ennemis :
bniyez comme toureaux fainis ;
L ACTEUR
Or vous avons en brief comprise
945 la matière haulte et féconde
898 Cil A. — 903 substanter B. — 904 planter B. —915 me \i. arbitre B. — 930 quod est dnnné ]""' «'K" abréviation
latine A. B.— 932sur A:— 936de bons gros A. — 937 ung feu B, — 944 L'acteur] Pholoque II" B.
PROLOG UK
15
de la creacion dit monde ;
puis comment homme fut formé
et comment de Dieu informé
inodebience commist,
950 pour quoi/ Dieu tantont le desmist
de paradis en aultre terre
pour sa vie en grant labour querrc.
Son labour, sa dure grecance,
sa très amere penitance
9J5 que depuis Adam long iemjis fit,
passerons oultre, et nous souffit
monslrer, pour depescher matière,
comment Cayn occist son frère
par envye ; et le traicterons
oao tout le plus brief que nous pourrons.
ADAM
l'^vc, ma l'hcrc scur benigue,
la haulte majesté divine
debvoiis louer do bon courage,
qu'il luy a [ileu a nostr<( ymago
iKij nous donner generacioii
Jiour faire l'augmentucion
dos suppos de nature Imniainc ;
deux filz avons en no deniaine,
tous grans : l'un Cayn, l'autre Aboi,
970 et chacun gracieux et Ijel,
qui se portent bien. Dieu niercy.
EVE
Dieu mou créateur on incrcy
de bon cu<'ur et de vrayo humblcsse,
non oljstant qu'on dure <lestret<se
975 j'en aye fait l'enflanteniont ;
si prons je plaisir grandement
a les voir, et me reconffoi'te,
car chacun d'eulx très liien se i)orto
ot entendent bien au labour.
ADAM
9S0 11 le tault, chacun a son tour,
nul de nous n'en est excepté :
[)cchc le nous a apporté
dont jamès quittes ne serons.
EVE
Assés briefment posscsserons
985 de moutons en grant habondance,
car Abel preut fort sa plaisance
a les conduyre et gouverner.
ADAM
Cavn se veult déterminer
aultroment : il a aiwernblcc
990 foison d'avcincH- et do bic»
et fait <tiligenc(! très bomic
do labourer et prendre cnisoiine
a tous lieux, a co que je vois.
Mo» euffan», entendez ma voix,
995 chacun en soy, jo vous supplio ;
vou» voyez que Dieu multiiilie
vos biens de terre, aussi vos bestus ;
par quoy iugras et mauvais estcit
et plains de mauvaise avarice,
1000 se no luy rendez sacrifice
des grans biens qu'il vous a presto.
ABEL
Quant a moy, jo suis appresté,
mon chci' p(n'o, en temps et en lieu
de rendre sacrifice a Dieu
iOOj au miculx quo je le pourray faire.
CAYN
•le n'argue pas du contraire
quo chacun ne face devoir :
j'ay des jarbes iiour grant avoir,
je suis content qu'il en ait une.
ABEL
ioio Faisons ordomianco conmiuiic
du sacrifice qui sera,
savoir couunent il se fera,
et après n'arresterons point.
ADAM
Kuffans, vous ferez par ce point :
1015 pour plus vray sacrifice rendre,
vostre oblaciou devez prendre
elle que meilleure veri'ez ;
et puis le feu tout prcst arez,
ot quand vous l'wez présentée
lOîO et devant Dieu snaguif.'stee
jim- pui'o et dévote oroison,
le feu ardant a grand foison
l'oblacion consumera ;
lors la fumoc montera
loiâ a Dieu qui l'accepte humblement.
ABEL
Choi' porc, vostre enseignement
vient d'ung entendement t:-es bon ;
vecy grand planté de charbon,
le feu tout alumé et prest ;
i030 si m'en vois faire mou apprcst
d'ung aigncau jwur sacrifier.
CAÏN
Il me fault mes jarbes tiier
et une des mendies eslire
953 en labu\ir \i. ■
- 1030 mca U.
964 qui A. — 975 les aje ou mon Bt — 997 bien A. — 998 quoj nuxnqne A.— 1019 que quand B.
16
MISTERE DE LA PASSION
pour présenter a nostre sire ;
1035 car peine parduc seroit
qui des meilleures clioisiroit,
puis qu'au feu ardre les convient :
a co faii'c autant a point vient
la meschante comme la bonne.
ABEL
1040 Dieu, mon créateur, je te donne
et présente d'entente pure
cest agneau masle sans soullieure,
comme ton povrc serviteur,
en toy priant, vray créateur,
1045 que ce présent en son degré
te plaise recevoir en gré
et ne vueilles regarder l'offre
mes le voulloir de cil qui l'offre.
Bien sçay que ta puissance excède,
roso et de toy tout vient et procède
par le don de creacion ;
regarde mon intencion
et me donne grâce de faire
chose qui me soit salutaire,
1(S5 si vray que tout mon desirier
est a toy, juge droicturier,
de cueur et ferme volenté.
CAYN
0 souveraine majesté.
Dieu régnant ctci'uellenieut,
1060 sans fin et sans commencement,
vray chief et pei-e de justice,
reçoy en gré mon sacrifice,
et vueillo qu'il soit acceptalile
a toy, et a moy pourfitable
lOfô durant ceste vie présente ;
car de bon cueur le te présente,
en espérant qu'il me pi'offitc
et qu'en fin il tourne a mérite
de mon ame et falvacion.
ABEL
1070 l'our achever l'oblacion
que j'ay a mon vray Dieu promis,
temps est que mon agneau soit mis
par dedans la flamme et biidé,
car il est dcsja immolé
1075 et offert a Dieu sans faintise.
CAYN
Ma gerbe aussi y sera mise
en espérant que Dieu la prende,
et qu'il voye que je lui rende
le devoii' ou je suis tenu.
Cai/m brulle sa ijerbe.
ABEr,
1080 N ray Dieu dont tout làen est venu
et ou tout bien a résidence,
or voy je par expérience
que mon offrande est acceptée,
car la fumée en est montée
1085 droit en hault sans aillieurs retraire.
CAYN
La mienne va tout au contraire,
car elle s'abesse et s'espart,
]iar quoy je congnois pour ma part
que Dieu me het et n'en tient compte.
1090 Haro ! oncques mais si graut honte
ne m'advint u'advendia jamais.
Or sui je tenu pour mauvais,
pour reffusé tt villené,
et mon frère qui est mainsné
1005 est tenu pour juste et plus digne.
Quand Dieu l'exausse, c'est ung signe
qu'en fin sur moy donùnera
et que Dieu mo délaissera
pour octroyer son bon désir.
liOO Haro ! quel mortel déplaisir !
haro ! quel courroux, quelle rage !
mon ame, comment en fora je ?
je meurs se je n'en suis vengé. l
Icy s'appert Dieu le père a Cayn.'
DIEU LE PERE
Ton viairc est forment change,
U03 Cayn, et selonc ta manière
tu vas ti'iste et a basse chère ;
ton ris est mué en tristesse ;
dont te parvient ceste simplcsso ?
Maintenant ne scez tu pas bien,
1110 se tu fais bien, tu aras bien,
et que juste suis en mes fais
pour rettribuer tes liicnffais i
Se mal fais, ton péché sauldra
et tost a lumière vendra,
1115 car pour l'offence simple et briefve
s'cnsuyra pugnicion griefve,
tt se l'appétit sensual
te dctraict et encline a mal
dont forse tu soyes deceuz,
U20 tu as raison qui est dessus
pour dominer ton appétit
et le reffrener ung petit,
afiin qu'il n'ysse hors des termes;
et se par raison le couffermes.
1057 et lOCO cour A. — 1065 man'iw B. — 1006 Après <:c Ken vlrnt : deuant loi loffre et le présente B. — 1074
, desja est il. B. — 1085 tout droit a hault sans soy distraite B. — 1089 Dieu manque A. — 1121 ton] cest B. — 1123
qui A.
prologup:
17
iiîj tu lie pcus ciTor nullement.
Icy se départ Dieu.
CAYN
.lo n'ay raison n'entcndenieiil
qui de ce me porte defl'encc,
soit pour mérite ou pour ott'ence,
que je n'eu face a mon voulloir ;
H30 mon cueur no se peust plus douloir
qu'il fait, d'cstre en ccate misère.
ABEL
Gomment vous va, Cayn, mon frero?
vous me semblez tout assimply.
CAYN
Aboi, frère, je vous supply,
1133 allons m'en aux champs vous et moy,
pour passer ung peu mon esmoy ;
je ne suis pas bien a mon aise.
ABEL
Frère, s'il est riens qui vous plaise
ou je vous puisse secourir,
1140 commandez moy vostre plaisir,
il sera fait sans longue pose.
CAYN
Il ne me plaist oro aultre chose
sinon que nous allons aux champs.
ABEL
Allons donc.
Icy s'en vont ensemble aux
champs.
CAYN
^ Hé ! villain mcschans,
ll'i5 n'estes vous pas le malheuro
que Dieu a huy plus honoré
qu'il n'a moy ? Vous le compaiTez,
janiès de pain ne mangerez,
puisque je vous tiens ore cy.
ABEL
lljO Hclas! frère, pour Dieu, mcrcy !
Ne me veuillez pas huy occire.
CAYN
Vous n'cschapperez pas ainsi.
' ABEL
Helas! frero, pour Dieu, mercy !
CAYN
Mort vous rcndray taiiit et nercy :
11J5 sovez a la dame ou au sire.
Holas! frorc, pour Dieu, mnrcy !
No me veuillez pas huy occire.
/ci/ le frappe.
Ha ! roy du souverain empire,
a co grand besoing to reclame :
1100 ayos huy pitié de mon amo ;
en ta garde la recommande. |
CAYN '
Il est mort, a Dieu le commande;
je m'en vois a tant et lo Icsse.
Mon père en ara grant tristesse,
1105 mes de son courroux ne me chault;
d'aultre part aussi, si le fault,
je m'cxcuseray bien et bel. I
DIEU LE PERE
Cayn, ou est ton frère Aboi ?
Présentement le vuoil savoir.
CAYN
1170 Je ne sçay, sii'e, a dire voir ;
l'ay je prins en garde et son fait ?
DIEU LE PERE
Ha ! meschant honmie, qu'as tu fait ?
Le sang de ton frero a oultrance
crye a moi pour avoir vengonce
1175 de la terre ou espandu l'as ;
si seras mauldit, triste et las,
vacant sur terre et fugitif.
Par ton faulx cueur vindicatif,
tu as fait ceste occision :
1180 a peine et a confusion
sur la terre lalioureras
et ja fruit n'en recueilleras
fors ordure et stérilité.
CAYN
Je congnois mon iniquité
1183 plus grand esti c, quant la rccordo,
que ne soit ta miséricorde ;
je voy mon énorme poché
et sçay bien que tant ay péché
contre ta majesté divine
1190 que je suis de mcrcy indigne.
Or suis je mauldit, asservy ;
encores plus seray jingny,
car jamès pour riens que je face,
ne me verray devant ta face ;
1195 inesmes tous ceiilx qui me verront
tantost occire me querront,
et bien y a raison aussi.
1129 je man'iue lî. — 1132 ooininont vous est il, mon ohier frere 11. — 1133 ine mnniw k. — 113* te B. — 1141
sans autre chose B. — 1106 |sii le l'ault B. — 1171 en son fait B. — 1179 qui .-is D. — 1190 dieu inerey B.
18
Ml STERE DE LA PASSION
DIEU LE PERE
n ne se fora pas ainsy :
(juiconcques Cayn occira
1200 a sept doubles pugny sera,
pour l'orreui' de son fol oultrage.
CAYN
Helas ! et quel signe en ara je
pour quoy congnoistre le pourront ?
DIEU LE PERE
Gestuy signe aras en ton front
1205 pour la sëurcté plus aecroistre.
CAYN
Le pourra bien chacun cognoistre ?
j'en ay grant double a desmesure ;
partir me veil a l'aventure
et erier par divers pourpris.
1210 Jamais tant que mort m'ara piis,
je n'aray reppos no séjour,
ne bien, ne plaisance ung seul jour,
poui- le péché de mon affaire.
Cy se départ et s^en va.
ASTAROTH
Roy Lucifer, qu'est il a faire
1215 de l'ame Abel a nous rendue ?
elle nagaire est descendue :
ordonnez qu'on en fora doncques.
BELZEBUTH
C'est la première qui vint oncques :
si luy fault faire grosse feste.
LUCIFER
1220 Belzebuth, deablo, arreste, arrcste :
il ne s'en fault ja si hault bruyre,
tu n'as puissance de luy nuyre
se le grand deablo ne t'emporte.
Elle est juste, porte la, porte
1225 lassus au limbe, et la la mectz.
BELZEBUTH
D'icy ne partirez jamès,
meschant ame, je le suppose :
la poi'te du ciel vous est close
et a tout le lignage humain.
ADAM
1230 Eve, seur, je suis iucprlaiu
que nos deux filz sont devenus ;
ilz deussent estre revenus
pieça a mon intencion.
EVE
J'ay au cucur grant suspicion
1235 qu'il n'y ait danger ou moshaing :
Cayn avoit pris en dcdaing
son frère puis ung peu de temps.
ADAM
C'est ce do quoy je suis doubtans
et dont tout lo cucur me freraye ;
1240 allons m'en voir, ma doulcc amye,
en quel lieu ilz sont maintenant.
! Icy s'en vont aux champs et
treutent Abel mort.
EVE
Helas ! Abel, mon cher enffant,
or gis tu mort en my la voye ;
jamès de chose que je voye
1245 n'aray plaisir ne reconffort.
ADAM
Est ce Abel qui icy gist mort l
Doulx Dieu, or suis je desconftis.
EVE
Certes c'est Abel, nostre filz.
Helas ! que m'est il advenu !
1250 Or nous est le raeschief venu
que tant ay doublé en ma vie :
Cayn l'a tué par envye
sans quelque meffait ou mesdit.
ADAM
Ha! Cayn, tu soies mauldit
1255 de Dieu ! or si es tu, ce croy.
As tu eu hardiment en toy
d'ainsi meurdrir ton povre frère ?
Parvers sang, parverse matière,
cueur traictrc et très inhumain,
1260 as tu osé mettre la main
par quoy cy gist mort et deffais
qui valloit mieulx que tu ne fais ?
Helas ! Abel, mon très cher gendre,
avec toy biief vouldrai descendre
1265 en enfer, et la jamais faindre
de toy fort lamenter et plaindre
sans consolacion aucune.
EVE
0 envye et faulco rancune,
119S ce A. — 1216 elle est maintenant B. — 1217 ordonnons B. — 1218 qui vis A. — 1220 Vers in-omptcl B : Belze-
buth, reste, reste. — 1224 trop juste B. — 1226 partiras A. — 1235 qui A. meliaing B. . — 1243 cy mort en B. —
1246 Esse A. B. gist icy A. — 1251 a ma vie B. — 1255 se A. je B. — 1259 très ] cueur Ai — 1202 qui mieux valoit B.
PROLOGUE
horrible sei-pent monstrueux,
iî70 par toy fousnies Imiii» tous doux
(lu beau paradis do doliccs ;
cnvyo, pir(! do tous vio(>s,
par toy fault nostrc pain quérir,
par toy sommes sera a mourir
1275 et, qui pis est au résidu,
l)ar toy ost uostro enflant j)ardu.
Ta guorro cy nous est trop dure ;
0 grief dostrcsse a desmesure,
quel cueur humain te portera ?
ADAM
iiSO Ma seur, Dieu nous confoi-tera, .
si lui plaist, par sa doulco grâce.
Ne reste mes qu'a choisir place
et l'enterrer on quelque lieu.
EVE
Puisque c'est le vouloir do Dieu,
)i8j aultro remède je n'y vois.
Ici/ l'enterrent et puis s'en vont
en leur hostel.
CATN
Or no sçay je en quel lieu je vois :
je ne voy chose qui me plaise ;
je meurs do fain et de iiiosaise.
Je suis tout deschaiilx et tout nu,
iiSO ne jamos ne suis liion venu
pour quelque peine que j'embrasse
chacun me fuit, chacun me chasse
pour ma ville coulpe et maligne ;
se Dieu ne m'eust baillié ce signe,
J»j je fousso picva délivré :
les serpents m'eussent dévoré
plus de mille fois d'ung accort ;
a haulte voix huche la mort,
et si n'en puis venir a bout :
130() je randiray tant tout par tout,
que j'aray ung peu de repos.
Icy s'en va a l'adoenture.
10
l'acteur
Seigneurs^ selonc nostre propos^
nous vous avons montré le fait.
comment Cayn par son meffait
1306 occist son frère injustement,
et puis le grief gémissement
qu'Adam et Eve pour lui firent;
car Abel par long temps plaindirent
sans prendre consolacion.
1310 Et font les escrips mencion
que depuis la mort de Venffant
cent ans furent en gémissant
tousjours en penance cruelle
sans copulacion charnelle.
1315 Après ce temps s' entrecongn curent,
dont ung enffant masle receurent
nommé Seth par son propre nom,
très preudomme et de bon renom,
et très bien ressambloit Abel.
1320 Icelly Heth tindrent a bel,
car en leur deuil les depporta
et grandement les confiforia.
A celuy Seth cnmmancerons ;
le trespas d'Adam traicterons
1325 sans nostre matière deffaire
le plus brief qui se pourra faire.
ADAM
0 doulx Dieu, quand je considère
les gricfz travaulx et la misère,
les dcsplaisirs et les ennuys
i^m que j'ay eu de jour» et de nuys,
puis ceste eure que j'offensay
mon doulx createui', je ne sçay
comment je dure .si long temps.
Il y a ja neuf cens trente ans
1335 et plus, que je connnis l'offence
et vice d'inobedience,
qui de la mort nous maine au terme,
dont puis ay plouré mainte lerme.
Plaise au hault juge pardurable
1340 quo la penance soit vallable
et que ma coulpe se consomme.
Consomme ? que dis je, povre homme i
que je suis fresle créature !
Je voy toute humaine nature
1345 ja infecte par mon seul vice.
Las ! qui contentera Justice ?
En ce qui passe ma puissance,
je me metz en ton ordomiance,
B, - 1321 IP,' " dueu^* R «9. H~» ';,*?^'"'J Prologue B. - 1317 Selh norame B. - 1319 «.«mbUnt
20
bon Dieu qui tout sces et tout vois ;
1^0 car se par grâce ne pourvois,
aultre remédier n'y peust.
EVE
Las ! mon cher niary, qui vous mcust
de tousjours plaindre et doulouzer ?
temps est que doyez repposer ;
13to assés avez pris de douleurs
et de tristesses en vos jours :
faictes ung peu de bonne chère.
ADAM
Helas ! Eve, compaigne chère,
jamès bonne chère ne fis
13G0 puis la mort Abel nostre fil/-,
ne ne feray, ce croy, jamès :
meurdry lut en piteux remetz
et livré a mort très austère,
et mesmes de son propre frère,
1365 qui est un cas lait et hydeux.
Ainsi pour ung en pardons deux :
le povre innocent est occis,
l'aultre est fuitif par le pays
dont jamès nouvelles n'orrons.
EVE
1370 Sire, se Dieu plaist, si ferons,
au moins y ay je l'espérance,
et desja nous fait demonstrance
que nostre dueil est recouvré :
Dieu nous a ung beau filz donné,
1375 nommé S( th, comme vous savez ;
pourquoy de dueil grant masse avez
si n'y prenez aultre confToit.
ADAM
Seth est beau filz, membru et fort,
bien moriginé et bien duit,
1380 et bricfment, c'est tout mon déduit
et mon plaisir quant le regarde.
Je pi'ie Dieu qu'il le nous garde
si vray que j'en ay bon mestier.
Seth, vien ça, mon filz.
SETH
Volentier,
1383 mon père ; je suis appresté
a faire vostre volenté
de tout mon povoir, se m'aist Dieux.
ADAM
!Mon cnfi'ant, je deviens fort vieux,
et ay en la vie mondaine
1390 vescu en traveil et en paine.
Neantmoins quoique j'ayc souffert.
MISTRRE DE LA PASSION
Dieu m'a tousjours sa grâce ofieit
et aydié a tous mes besoings.
Si veil que tu notes ces poins :
13^ ayme Dieu de toute ta force
et a son service t' efforce
en obédience et cremcur ;
aye tes parens en honneur
tousjours et en grant reverance ;
liOO et Dieu par sa doulce clémence
jamès ne te délaissera,
ainçois en ton conffort sera
jusques en la fin de ton aagc.
SETH
Mon très cher père, si fera je ;
1405 vostre bonne admonicion
de toute mou affection
veil faire, et tenir vo doctrine.
EVE
C'est pour ton bien qu'il t'endoctrine,
mon enffant, tu le peux congnoistre ;
1410 Dieu te doint eu vertus accroistre,
si vrayment que je le désire.
CAYN
Je me deromps, je me dessire
et souffre tous les maulx du monde :
je prie a Dieu qu'il me confonde
1415 briefment et ma vie termine,
affin que ma misère fine
ou mon vice m'a obligé.
Que n'as tu mon cours abrégé.
Dieu, et pourquoy me signas tu
1420 pour avoir tant de raaulx sentu
que j'ay jusqu'à l'eure présente ?
J'ay ja des cuffans vingt ou trente,
mal endoctrinés, mal conduis ;
je les ay si mal introduis
1425 qu'ilz font de très mauvais ouvrage :
je double bien on mon courage
que la grand faulte que je fis,
quand Abel mon frère deffis
et le meurdris villainement,
1430 ne descende présentement
sur moy et toute ma famille.
J'ay voulu des fois plus do mille
moy occh'o par desespoir ;
et bien brief le feray, espoir,
1435 se Dieu ne m'abrège mon cours.
1350 se manque A. — 1352 Ha B. — 1356 tristesse A. H. — 1383 si bien A. — 1384 sa A.
^— 1408 qui A. — 1411 si voirement que le désire B. — 1418 cueur A, B. cf. 1435.
1407 veil croire B,
PROLOGUE
a
ADAM
Rvo, seur, j'ai ja plusieurs joui-s
vescu on ce siècle présent,
ou mon ])cchô m'a fait présent
(le tant ilo peine et tant irenconihro
1*40 que Dieu seul en oongnoist le nombre ;
m(>s puisqu'il plaist a sa clémence,
j'ay tout porte on patience,
le plu» doulccment que j'ay peu.
Nous avons plusieurs enflans eu,
|1U5 filz et filles, grant multitude ;
mette/, tousjours bien vostre estude
a les duyre et les asservir
principaulment a Dieu servir
honorablement sans reproche.
\H50 Je sçay bien que ma fin approche,
et ne puis mes longuement vivre ;
je prie a Dieu qu'il me délivre
des misères de cestuy monde,
car tant de misère y habonde,
1455 que le plus vivre me desplaist.
EVE
Cher époux, je vois bien que c'est ;
vous vivez tout desplaisamment,
et fault dire qu'aucunement
vous ayez chose qui vous griefve.
AD\M
Ghere seur, pour sentence briefve,
je ne puis mes maulx oblier ;
je me sens moult affoiblier
pour vieillesse qui fort m'assault.
Je sens bien que mourir me fault
«65 briefmcnt, et payer le truage
a quoy mon vice et mon oultrage
m'a piteusement obligé.
EVE
Vous serez tantost allégé,
cher espoux, ayez espérance :
U70 Dieu par sa liaultaine puissance,
si lui plaist, vous conffortera.
ADAM
Eve, ma fin aiiprochera,
bien le voy et le considère.
hETH
Conmient vous va, mon très cher père ?
1475 Vous me samblcz en petit point.
ADAM
Seth, mon enffant, il ne va point :
1480
UK>
U90
1495
1500
1505
1510
1515
1520
vieiliesRo m'a foit affoibly ;
j'ay le |)ovre euour defailly,
et n'a vertu qui no me fuye.
Je suis a la fin do ma vie,
nature n'y peut secourir ;
mes pui^qu'oinsi me fault moui'ir
et passer ce dolant esgard,
j'ay aussi cher tost comme tard ;
mieulx me vault mouiir vistemeut
que languir ainsi longuement.
Je Bçay bien au point que je suis
James liesse avoir ne puis :
je n'y voy point d'aultro remède,
sinon je prie a Dieu qu'il m'aide
et me pardonue le méfiait
dont je congnois que j'ay nieffait
contre sa baulto majesté.
SBTll
Las ! père, n'ayez volonté
de nous délaisser si soudain ;
en ce povre règne mondain
avons tant de durs adversaires
que sans vous a tous nos affaires
n'avons qui nous puist confforter.
ADAM
Cher filz, vueillo toy dej^rter
de moy plaindre en ccste manière ;
prie l'ineflable lumière
qu'elle vucille drecier ma voye
et que la fin de mes jours voye
en grâce et bonne confidence.
Noble ot digne estât d'iimocence,
vraye originalle justice,
holas ! bien mauldit fut le vice
qui de toy me deposscssa,
a ceste mort cy m'oppressa
et m'asservist a ce dm' more ;
par celle ponmie en quoy j'ay moi"s
me rendz a la mort tributaire.
SETH
Las ! mon père, se peust il faire
que mon secours vous puist valoir ?
Tout mon désir et mon povoir
est a vous servir adonné.
ADAM
Mon fJz, il en est ordonné ;
mes pour tant que bon désir as,
je te diray que tu feras :
va t'en et fais tant que l'entrée
do paradis te soit monstree
1450 que ma vie approche B. — 1459 auez B. — 146» serez mnnquf A. — n/u souuei
cueur tout B. — 1479 et nay vertu B. — 1483 ce manque A. — 1490 pry a Dieu qui me
B. — 1505 et vraje B. — 1518 que A.
1468 serez tnnnque A. — 1470 souueraine B. — 1478 j»y j» !•
A. — 1508 pry liofaillaUe
22
MISTERK DR LA PASSION
dont jadis fus haiitateur ;
et si plaist Dieu, mon créateur,
15S5 estre ta guide et bonuo garde,
l'angle trouveras qui la garde
atout une espee en son poing.
Requiers ly qu'a mon grant besoing
de moy envoyer se reoorde
1530 de l'uille de miséricorde
qui est doulce et souef ilairant.
' Ce me pourroit porter garant,
et me samble, se j'en avoye
tant soit peu, tout guery seroye
1535 et pourroye santé recevoir.
SETH
Père, j'en feray mon devoir.
Je pry Dieu que mon fait se porte
si bien que je treuve la porto
de ceste gracieuse place.
ADAM
1540 Or va, mon filz, Dieu par sa graee
te veille conduyre et mener.
Je ne sçay s'a ton retourner
me trouveras encor en vie.
Dieu par sa puissance infinie,
1545 te doint sa bénédiction
et la pai'ticipation
de sa grâce qui est moult grande ;
tous tes frères te recomnianile :
soye leur vray amy et frère,
1550 leur fragilité considère
et les entretiens en amour ;
confforte les en leur clamour,
et les aide en leur doleance.
Mon enfant, j'ay la grant fiance
1555 qu'ainsi le feras loyaument.
SETH
Père, Dieu me doint sentement
de l'accomplir' de tout mon cueur ;
a Dieu vous command.
Icy se départ Seth et s'en va
droit au paradis terrestre.
ADAM
Chère seur,
je sens que mon mal point n'allège,
1560 mes tant plus va et plus engroge ;
je suis de la mort au postis.
Mes enffans, soiez ententis
de prier a Dieu pour mon ame,
si que de l'éternelle flamme
1565 la préserve en temps et en lieu.
EVE
Mon amy, je requiers a Dieu
qu'il lui plaise vous secourir
et que briefment puissiez garir
(lu mal qui vous torniente ainsy.
SETH
1570 J'ay tant allé, la Dieu mercy,
que j'ay trouvé le lieu et l'estre
du noble paradis terrestre.
Mes je voy via le portier
qui samble tant orrible et fier
1575 qu'il me fait grant paour a le voir ;
je luy voy une espee avoii"
moult grande et rouge comme flannne.
Je le double tant, par mon anie,
que je demeure tout surpris.
CHERUBIN
1580 Seth, que quiere tu en ce pourpris?
N'aye doutance, approche toy.
SETH
Helas ! sire, pardonnez moy.
Si convient que mon cas vous die :
mon père est en grand maladie
1585 moult piteusement desvoyé ;
si m'avoit vers vous envoyé
prier qu'en pitié et concorde
de l'uille de miséricorde
luy veuillez ung seul peu donner
1530 qui puist ceste douleur saner
dont il est tant fort assailly.
CHERUBIN
Mon filz, retourne devers ly,
et fais ton compte sur ce point
que de cest huille n'ara point
1595 qu'il n'y aist encore de temps
près de cinq rail et cinquante ans,
et lors le sauveur qui sera
misericoi'de lui fera
pour le délivrer de servage.
SETH
1600 Helas! et quel signe eu aia je
sur quoy ma credence s'assigne ?
CHERUBIN
Tien, mon filz, tu aras ce signe :
porte ces trois grains en ta main ;
et quand Adam sou cours humain
1605 ara oxploitié par la mort
1524 sil B. — 1534 ung seul peu B. — 1550 tout en ce point comme jespere A. — 1551-1554 minquent A — 15Ki
que tu lo A. — 1558 Eve li. — 1507 qui A. —1570 alay B. — 1574 terrible B. — 1595 lij* ans B. — 1604 corps humain B.
PROLOGUR
23
qtii tinit tup, tresparco et mord,
plaiitfi lo3 (lossus son tonibi^au :
uiig arlji'c en sauldra haiilt et 1)pîiu
on quel la très doulx fruit i)eudra
Ifiio qui ceste vraye liuilo rendra
de quoy avoir tant to soucye.
• SETH
Très cher sire, je vous mercyo ;
atant m'en vois, c'est lo meilleur.
Cy s'en retourne.
ADAM
Las ! que je seuffre grand douleur
1015 par tout le corps et tous les membres !
Las ! se de raoy uo to remembres,
mon Dieu, tout mon fait deperist...
En ta main niectz mon espnrist,
souverain juf^o ti-iumphant.
Cl/ arrive Seth a Vostel de son
père.
SETH
1620 Mero, conuncnt va?
EVE
Mon cnffant,
il nous va moult piteusement :
ton père est moit nouvellement,
dont toute ma joyo est finee.
Hclas ! dolente destinée,
liiffl moi't terrible de dur alloy,
sur nous as prins trop dure loy,
que par ton dai t nous examines,
nez coui-s et nos jours détermines
par trop inhumaine sentence.
l«30 O mauvaise inobedience,
par toy sommes en peine mis
par toy sommes a mort submis
et ployés en ceste misère.
SETH
Helas! mon cher et amé père,
1635 or ne sçay ce que je feray,
quand en ce point pardu vous ay
si tost, sans jamais recouvrer !
EVE
Mon cnii'aut, cesse de pleurer.
Il convient qu'il soit mis en terre,
1M0 et vueillons humblement requerre
que Dieu luy soit misericors.
Icy l'enterrent eulx deuas sans
mot dire.
LUCIKEI»
Saillicz hors, drable», Failliez hors,
ordc prngenie enfumée.
Il est venu a ma famée
1845 oonunc .\daiii est mort a ceste hetirc.
SATH*N
Si Tarons brief, je vous asseuvc :
il n'est qui nous en puist garder.
BBLZGRUTH
Se nous le laissoas eschappcr,
et que no l'ayons tout sur piez,
1850 je veil que vous me rôtissiez
aussi rouge comme, ung charbon.
SETH
Il m'est advis qu'il sera bon
que les grains a moy iiresentcs
sus mon perc soyent plant'.'s,
1655 comme l'angle me l'enseigna.
Or sont ilz plantés, les vccz la :
Dieu les doint croistrc en tel haultesse
et rendre fruit a td largesse,
que lo fniyt luy soit poui-iitable,
1660 misericors et charitable
au salut de Iv et de nous !
Cy est Eve mcdade couchée sur
son lict.
EVE
Mes membres s'aflfoiblissent tous
et sens bien que ma fin s'advance.
Je n'ay mais force ne puissance,
1665 dont je me puisse soustenir ;
a la mort me fault pai'vcnir
briefment par le cours de nature.
Prens pitié de ta créature,
hault roy qui tout prens en ta garde,
1670 et ta grant bonté ne regarde
le vice que je perpetray
1810 tros doulce A. — 1611 auoit tant te soucye A. se B. — 16(3 pour le B. — 1618 commands mon esprit B.
— 1027-1088 manqut^nt A. — 1029 et A. — 1031 vioe voralif et faulifz B. — 1637 retourner B. — 1643 progenie» A.
B. — 1044 mest B. — 1645 cest A. — 1648 la A. — 1649 que nous ne B. — 1635 me les bailla B. — 1688 se A.
manque B. — 1670 ne retarde B. — 1671 jay perpètre A.
24
MISTRRR DE LA PASSION
quand de celle pomme goustay,
conti'e ton command, Dieu, won pei'O.
Ma fragilité considère,
1675 car j'ay trop meffait en cecy ;
juge, je te requiers mercy
et a ton voulloir me submès ;
ma cause un ta grâce je mes
par si que pitié la termine
J680 en tant que la bonté divine
a esté par moy offencee.
Eve cy meurt.
SETH
Nostre mcrc est huy trespassee ;
frère, vous le povez bien voir.
LAMETH
Elle est oultre, vous dictes voir ;
1685 Dieu en a fait sa volenté,
dont j'ay tel dudl en venté
que je ne sçay que je dois faire.
SETH
Aller ne poons au contraire :
contre mort remède n'y vault.
LAMETH
1690 Prestement enterrer la fault
par honorable sépulture.
C'est le cours d'humaine nature,
par ce point nous acquiterons.
SETH
En ce cercus la raecterons
1695 au plus près d'Adam nostre père.
Je pry Dieu que son ame appere
en gloire qui jamais ne fine.
Icy Venterrent près d'Adam.
SATHAN
Fronssez de vostre ordc narine,
Lucifer, dragon furieux,
1700 gcttez souppirs sulphurieux,
brandonnez de flamme terrible,
cornez prise a voix très horrible ;
nous avons eu cruelz vacarmes.
LUCIFER
Gomment va nostre herault d'armes ?
1705 Es tu venu, roy de la fève?
SATHAN
J'ay admené Adam et Eve,
qui sont ja du siècle transsis -,
ilz sont la en ce limbe assis,
si très piteus qu'il n'y fault rien.
LUCIFER
1710 Laissez les moy la, ilz sont bien :
îlz y ont, je croy, beau poser.
Dcables, ne vueillcz repposer,
randissez moy, grans et petis,
courez moy tous nos appatis,
1715 tout le monde est a moy donné.
SATHAN
Grand mei-cy a moy, Domine :
j'en ay esté l'embassateur.
L ACTEUR
Or avons monstre, beau seigneur,
le trespas de nos premiers pères ;
1720 mes pour abréger nos materes,
d'Abraham, Ysaac et Jacob
laisserons, qui nous tendrait trop
a ce que nous avons a faire.
Souffice vostre doulx affaire
1725 qu'après celle transgression,
voyez la repparacion
par la puissance precellante ;
c'est nostre singulière entente,
la se tourne tout no désir;
1730 pour le traictier plus a loisir,
nous ne voulons pas tant comprendre
de fais que chacun en soit mendre.
Au limbe nous commancerons '
et puis après nous traicterons
1735 la haultaine incarnacion
pour ve7iir a la passion
de nostre sauveur Jhesu Crist ;
après, sa résurrection
et l'admirable ascension,
1740 et mission de saint Esprist.
1672 ioelle B. gouste A. — 1679 lacriraine B. — 16S1 L'indication scènique qui suit est empruntée au manuscrit
A. — 1694 adjousterons B. — 1695 de A. — 1698 fronchez B. — 1700 et geltez B. — 1702 très manque A.— 1705 Tu
me sambles A. — 1709 qui A. — 1715 tout nostre B. — 1718 Le mot : L'acteur qui procède est remplacé par : Lb pro-
logue B.— 1729-1732 manquent A. — 1733-1740 manquent B.
PREMIERE JOURNEE
DE LA PASSION NOSTRE SAULVEUR JHESU GRIST
ADAM, estant ou limbe.
0 souvoraine majesté,
bon Dieu qui eu éternité
régnez sous jamos prendre fin,
ci-eateur et pore tliviu
1745 dessus toute chose créée
quand vendra l'eure dosirce
que de cest enfer ysterons?
Ne sçay se toujours y serons :
l'attente largement me tarde.
1750 Helas ! liault plasmateur, regarde
nostrc misère et la consomme :
je suis Adam, le premier homme,
le ](remier do tous les humains,
que tu voulz former par tes mains.
1755 Hault juge, ne regarde \>m
mon pesché, mon cruel trespas ;
justice modère et accorde
par doulccur et miséricorde ;
aultroment mon fait est piteux.
1760 0 hault triumphaut vertueux,
vertu de mirable efficasse,
casse la chcsnc qui nous lasse,
lâche nostre poix trop grovain.
Helas ! mon juge très haultain,
17K bien me souvient de l'oxistenee
et du noble estât d'innocence
ou vostre grâce m'ordonna,
quand tous les fruis m'haliandonna
fors ung, dont je fis fol essay,
1770 quant vostre connnand transgressay :
iuobedience le fist.
1775
1780
qiù de tout mon bien rao deffist.
Serpent venimeulx, plain d'envye,
ta vie qui tout bien desvye
fut cause do mal encourir,
qui me rendist serf a mourir.
Neantmoins de ma povre puissance
je fis au monde penitance
grande et longue pour moy purger ;
si fust temps que de ce danger
fusse hors, des longtemps y suis,
et trouver remède n'y puis,
qui me prive de tout soûlas.
Quand vendras tu, doulx Messias,
1785 voir la peine qui nous babondc ?
Quand vendras tu, sauveur du niondu
qui des pi'ophetes es promis,
visiter tes povres amis
qui tant ta venue désirent
1790 et en toy désirant souspirent
par douloureuse desplais^ance ?
Quand tu vendias, j'ay cspei ance
que du tout nous resjouyras
et tous noz cueui-s consoleras
1795 de gloire haultaine et parfaicte.
EVE
Doulx Messias, quand sera faicte
la redempcion ou tendons,
et que tant tristes attendons?
Il est bien temps que l'eure viengne :
1800 très doulx Dieu, de nous te souvieugue ;
icy languissons en grant peine
qu'a la vision souveraine
1741 t'y rommancf le premier livre de ta pcusion nosire saulreur Jhesu Crisl dont le prologue est tout au
premifr île es lirre. l'M ; Veni. etc. A. C</ commance te miHrre de la pnMion nostre Sauveur Jhesu Crisl B. —
1742 Iriiiilé B. — 1756 et cruel C. — 1764 certain B. C. — 1766 de A. — 1767 et 1768 in« A. C. — 1770 trespasuy
C. — i77i du tout A. — 1774 qua B. qui a tout bien obuie C. — 1781 fus ce A. — 1784 lu manque A. — 17«
Vendras tu B. — 1799-1981 manquent C. Le feuillet est déehirè. — ItiOÏ que a A.
20
MISTERE DE LA PASSION
ne pooiis venir ne attaindre ;
en ténèbres sommes pour plaindre,
1805 livrés a desolacion,
sans bien, sans consolacion,
se n'est espoir qui nous confforte
qu'encore verrons nous la porte
casser qui nous tient en ces las.
ISIO Hclas ! et quand sera ce ? helas !
Cinq mille ans y a que cy sommes
sans lumière, femmes et hommes,
tenus a desolacion.
0 bon Dieu, pren compassion
i815 de nostre griefve perte et dure :
la dilacion trop nous dure ;
pourvoyes y quant te plaii'a.
YSAIE
Eve, le terme approchera
que d'ici serons rachetés,
1820 car en plusieurs lieux bien notés
ay presdit en mon escripture
que d'une vierge nette et pure,
ferme, de bonne intencion,
doit naistre sans corrupcion
1825 la fleur très digne et précieuse
qui de la chaitre ténébreuse
tous et toutes nous ostera.
11 vendra, plus ne restera,
car les escriptures haultaincs
1830 de luy sont comblées et plaines :
si fault qu'il les viengne accomplir.
EZECHIEL
Nous Tarons a nostre désir,
si plaist Dieu, et la saison vient ;
et quand a ce, bien me souvient
1835 comme»t Dieu par sa courtoisie
sur l'esperit de prophecie
vision me monstra jadis,
bien notant les fais dessus dis :
vers Orient vis une porte
1840 riche, belle et de noble sorte,
par la quelle img roy voult passer
sans l'ouvrir et sans la casser,
qui signifioit par vray signe
que d'une vierge très bénigne
1845 uaistera virginallement
le roy qui de ce dampnement
puissamment nous vendra fortraire
et en la liaulte gloire attvairo
qui jamès ne nous finera.
JHEREMYE
1850 Quand ce noble trésor sera
descendu pour nous sur la terre,
lors sera finee la guerre
que nous fait l'original vice
contre la ilivine justice
1855 qui nous tient ainsi désolés.
Mes escrips chantent a tous lés
que la redempcion humaine
par la puissance souveraine
alors sera parconsommee.
1860 David, roy de grand renommée,
s'aucuns vers savez autentiques,
dictes nous en.
DAVID
Tous mes cantiques
en sont combles de toutes pars ;
en mes pseaulmcs sont espars
1865 beaulx diz de la nativité
de l'hoir de la noble cité
qui fera nostre délivrance.
J'ay moult chanté de sa naissance,
de sa vie très vertueuse,
1870 de sa passion douloureuse
qui par envye luy vendra,
dont grand bien nous en advendra.
En plusieurs lieux fais niencion
touchant sa lesurrection,
1875 comment, comme uhg lyon très fort,
de mort vendra casser l'effort,
et comment ou ciel montera
ou tous ses bons amis traira.
J'ay moult chanté d'une pucelle
1880 qu'a Dieu sera si vraye ancelle
que son digne corps sera lieu
et temple du vray filz de Dieu.
0 la très bonne et bieneuree,
0 la vierge très désirée,
1885 o la souveraine princesse,
quand vendra l'euro qu'elle naisse ?
pleust a Dieu que ce fust des ore.
0 saint et pur reclinatore
ou tel mistere se fera !
1890 Loué soit Dieu quant ce sera :
l'attente nous est trop grevaine.
La providence souveraine
par sa grâce y vueille pourvoir !
ADAM
Las ! mes enft'ans, vous poez voir
1806 sans eur B. — 1808 nous Tnanque A. — 1810 et manqw A. — 1817 poiiruoîs y quand il te B. — 1819 cy
de A. — 1823 fiTine et B. — 1831 qui A. — 1810 riclie et belle H. — 1S46 teneraent B. Le vers est répété. —
1860 de moult grant A. — 1875 comment un lyon grant et fort A. — 1889 ce A.
■R ICMIERR .lOrRNRK
1895 a quel moschief sommes livrés ;
nei'ou» noua jaiium délivras ?
Hvoun nous (juelquo iiimrveance?
Hola-i ! or vient cesto niescliance,
pour l'od'iuico iju'a Dieu j'uy fait.
iiKX) Kntfans, vous portez mon meilait ;
pai' nioy compare/, ce dommajro :
la perte vient do mon oïdtrage,
tel n'en peust mes qui le compère.
0 dolaut et malheureux père,
c'est (lonunage et pitié qu'il vist
qu'ainsi son lig:nag(! a.sservist.
0 dure pomme et intordicte,
de moy dois bien estre mauldite
mille fois, quant pour uug tel l'ien
je peis uug tant souverain bien
que cucur ne le sçaroit penser
ne langue humaine recenser !
Kt a mal heure je creus oncques
le conseil de ma femme adonc:ques :
dure perte m'en est venue,
et m'a bien foit rigueur tenue
Justice qui ne poust ploissier
ne son estandai t abaissier,
qui me signe guerre mortelle.
Au moins se la chose fut telle
que moy seul, qui ay fait l'ofl'ence,
en fusse pugny par sentence,
la chose en fut plus tollerable ;
mes que la perte dommageable
ressortisse a tous mes enifans,
bien doyvent estre desplaisans
et sans cesser je les dois plaindre.
Helas ! par moy deussent attaindi'e
et venir a béatitude,
mes ma folie ville et rude
les admaine a peine et a dueil,
dont j'ay cause se je me dueil.
Vive fontaine de bonté,
royal ceptre de majesté,
qui règnes sans janiès tarir
tu as promis nous secourir
par ta divine providence ;
tiens nous la voye de clémence :
Justice nous est par trop fiere.
EVE
1940 0 très souveraine lumière
qui sans terminer toujours dures
KK»
I9t0
1915
1920
1925
»
1930
19:15
nos peines ennoyanR et dute«
vucillcs regaitier en pitié.
Monstre nous signe d'amitié,
19^5 le trésor do grâce descueuvi-e,
et no dcspriso point ton oeuvre
formée a ta propre samblance.
Je congnois ma povro ignorance ;
je congnois que par moy dampnés
I9:i0 sont tous ceulx qui sont d'Adam nés ;
par moy cesto pei-te reçoyvent,
par moy paient ce qu'ilz no doivent,
par moy lamentent sans conduite.
Helas ! mon Dieu, je fus seduiti;
1Kir> du faulx serpent ambitieux ,
qui par ses tours malicieux
me fit a la pomme toucher,
dont le goût m'est vendu tant cher
en regrès durs et douloureux.
1960 Ne me soies pas rigoreux,
ma fragiUté considei-e,
et l'arc de Justice admodere
qui si long temps nous est tendu.
YSAIE
Helas ! tant avons attendu,
1905 en ceste obscure mancion,
en pleur, en desolacion,
sans quelque ame qui nous resjoye !
Quand parvendrons nous a la joye
qui janiès ne dell'auldera ?
1970 Quand naistra celluy qui sera
l'edemptcur de nature humaine ?
quand naistra la vierge puraine
qui en fera renfTantement
tant purement et chastement,
1975 que nature eu ai'a merveille ?
O des autres la non pareille,
0 trésor de virginité,
o temple de divinité,
arche d'excellante haultesse,
1980 quel bien, quel plaisir, quel liesse
arons en exultacion,
quand si noble creacion
sera foi'mee eu noble centre
de ton digne et précieux ventre !
1985 Nostre chaigo s'allégera,
tout paradis s'esjouyra,
et tout le monde fera feste
si plantureuse et magnifeste
1900 comparez B. — 1901 portez cesluy. B. — 1905 qui A. — 1911-1918 manquent A. — 1913 je manque B. — 1917
voult plaissier B. — 1935 finir C. — 1942 ennuyeuses C. — 1946 et que desprise pas C. — 19M) de A. —
1952 painnt manque A. — 1955-1956 serpent malicieux, tours ambitieux C. — 1958 trop C.
sidère C. — 1963 est manque A. — 1968 voye C. — 1969 deffauldra lî. deffinera C. ■
tant chastement C. — 1S82 incarnacion C.
-1968 modère B. cen-
• 197? h»ult«in A. — 1974
28
MISTERE DE LA PASSION
que Paix y tendra son domaine.
1990 Vien donc, rosée souveraine,
vien, tendre fleur et amyable,
secourir la porte dampual)le
qui sans toy ne se peust reffaire.
EZECUIEL
0 doulx Messias débonnaire,
1995 en qui est nostre seul recours,
approche, vien, si nous secours :
temps est que ta promesse tiengnes.
Pas ne doubtons que tu ne viengnes ;
tu vendras, il nous est certain,
8000 mes le jour nous est moult loingtain.
En .ténèbres est no demeure,
il n'est ame qui nous sequeure.
Soigneusement t'avons servy,
et haulte gloire desservy ;
2005 or nous trouvons nous empesché
par cest originel péché,
coulpe poignant, foi'te a deffaire,
a qui ne povons satiffaire ;
nostre procès pend en balance :
2010 doulx Messias, vien et t'advance,
fais que ta sentence termine,
qui lassus en gloire divine
conjointement nous logera.
JHEREMYE
Tout nostre dueil s'allégera
2015 tant seulement de la nouvelle,
quand ceste bénigne pucelle
au monde mortel sera née.
0 très noble et haulte journée,
bieneuree, bien adjournee,
2020 quand te vouldra Dieu adjçurner ?
Quand sera la saison donnée ?
la dilacion foisonnee
nous lasse de tant séjourner,
Ne savons a qui retourner
2025 pour faire passer et tourner
le temps qui ja t'eust admenee ;
Or n'est qui nous la puist donner,
se tu ne la veulx ordonner,
mon Dieu, qui ja l'as ordonnée.
DAVID
2030 0 haulte essence enluminée
do tout bien et do tout honneur,
considère nostre douleur,
et voy le lieu ou sommes mis,
ton oeuvre, tes povrcs amis.
20.35 en pleurs et lamentacions.
Regarde les promissions
que tu nous as fait largement
jiar tout l'ancien testament ;
considère comme jadis
2040 a Abraham promis et dis
que toutes gens en sa semence
seroyent benys. Donc commance
a ceste benysson estandre ;
nous sommes son sang et son gendre,
8045 oste nous de ce grand soucy.
De rechief tu lui dis ainsi
pour l'obédience et la crainte
que trouvas en son cueur emprainto
que multipliroyes de ly
2050 semen sicut stellas celi.
Or as la promesse tenu,
mes trop mal nous seroit venu
se la multiplicacion
avoit tel malédiction
2055 que tout eu enffer descendist,
avant que le doulx Crist venist
de qui tant nous gricfve l'attente.
0 sapience precellante,
affin que briefment nous resjoyc,
2060 fais que du tout proférer j'oye
les mos dont tant nous conffoi-tas
disant : AttoUite portas ;
ouvrez les portes eternalles
de vos régions infernalles :
2065 si entrera le roy de glore.
ADAM
Ha ! pleust a Dieu que ce fut ore !
La voix nous seroit moult joyeuse,
douice, plaisant et savoureuse
et de nos maulz cousolative ;
2070 la puissance suppcrlative
la nous face briefment oyr !
Icy sont cinq personnaiges en
Paradis et premier se lèvera
une dame.
MISEBICORDE
Je ne me puis plus contenir
que les humains ne prengne en cure,
et pour leur bon droit maintenir
2075 il fault que leur cause procure. «
1990 donques A. — 1996 approche et B. viens et si C. — 1998 nous ne doublons point que ne C. — 2001
faisons demeure C. — 2002 homme A. — 2003 te A. — 2004 hault gloire C. — 2013 allégera. — 2019 manque B.
— 2020 vendra A. — 2023 laisse .\. B. C. — 2026 que B. qui tant a le durée A. — 2029 las ja B. C. — 2038 ton
ancien B. tout ton ancien C. — 2045 cesluy soucy B. G. — 2049 tu A. B. — 2059 du tout G. — 2060 profaire B. brief-
ment C. — 2061 me C. — 2066 Helas C. — 2068 deliceuse C. — 8072 plus] mais C. — 2073 preus B.
P R K M II-: R K J O U R N K K
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ÏOSO
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«100
2103
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2110
2ii:
2120
C'est grand pitio quand créature
ainsi désordonné son vpil,
qu'il convient sous in couverture
de jilnisir sortir si grand ducil.
C'est pitié que l'iiounno fut fait
en si noble et haulto exccllancc,
quand péché ainsi le deffait
et prive de sa profl'erancc.
11 plaint et pleure on audience
et niaine trop cnnoyaut vie,
car chose qui est en absence
de sa fin ja n'est assouvyo.
11 plaint sa fin qui lui dcfTault
et ja niorcy ne s'i accorde ;
il languist ou son bien lui fault,
amo de luy ne se recorde ;
Mes je, qui suis Miséricorde,
la plus piteuse de jamès,
luy pense a desnocr la corde
qui le tient en si piteus mes.
Devant vous viens et mo soubmœ,
crccur du ciel et de la terre,
vostre cclsitudc requcrrc
qu'il vous plaise exaucer ma voix
sur ung article que je vois
csti-e grandement nécessaire
ou au moins convennlilc a faire
pour ester voye x-igourcuse.
DIEU LE PBRE
Dame débonnaire et piteuse,
dcliboroz en plaine face
ce qu'il vous plaira que je face ;
si pourvoiray sans roffusor,
car de riens je ne veil usci'
qu'avec moi ne soiez unye.
MISERICORDE
Souveraine essence infinie,
je sçay bien que sommes tout ung
et avons uug vouUoir commun,
et pourtant je vous voil bien dire
qui me meust. Très rcdoubté sire,
vray est que du commancement
ce beau monde totallement
voustes créer par vray désir
et mcu d'un gracieux plaisir
de participer vostre bien
a aultruy qui de soy n'est rien;
non pas que vous otuaicz betioing
d'aultmy, car soit ou près ou loing
vouH estei! tout bien par cssance.
Et au fait do ccslo excellance,
21K ou sont mistcrcs très rcalles,
ti'cuvo deux oeuvre» principallcs :
d'une part est la terre basse ;
dessus, le ciel, qui la compassé
et la circuit et la cerne,
£130 si que par vertu la gouverne :
natiu'o le vcult pour le mieulx.
Kn chacun de ces deux beaux lieux
voulstes habitateurs créer,
pour eulx dcduii'e et recréer
«135 et sortir <lu bien a leur gré,
voire chacun a son degré.
Ou ciel qui est noble facture,
fut la plus noble créature ;
ce fut la nature ajigelique
21'i0 affin que le lieu autent'quc
a son logé mieulx corresponde.
Dedans la terre et au bas monde
voulstes l'orame former et mettre,
et le faire seigneur et maistre
2145 sur tous vivans gcneralment ;
mes do la manière et comment,
je m'en tais : il est assés sceu.
Or est il en ce point mescheu,
qu'en la nature basse et haultc
Î150 a esté trouvé grand deU'aulte :
les anges jusqu'à très grand nombre
ont commis oifence soubz umbre
de la preflference divine ;
orgueil qui puissance termine
•21m les a tournés en impotence.
L'homme eu son estât d'ignorance,
a oftencc d'aultrc costé
vostre divine majesté,
de tant que savoir appetoit
2160 aultre et plus qu'il ne competoit.
L'un a pris orgueil de povoir,
l'aultre boban de trop sâvoii^
dont tous deux sont a dampnement
jugés, voire diversement :
2165 l'ange par sa coulpe mortelle
est darapné a peine éternelle,
peine do sens qui trop lui griefve ;
l'omrae a dampnaeion plus briefve.
2070 souffrir A. — |20S1 haulti^ et noble C. — 2088 la tin qui ny B. — 2091 et ame B. — 2090 qui A. — 2105 pl»m
A. — 2114 et ee qui me meut, 1res doulx sire C. — 2118 esmeu lî. C. — 2122 s»n» aler plus loing B. C. — 8125
moult C. — 2126 moult realles C— 2128 le B. — 2134 solUcier C. — 2139 et fut C. — 2141 corrunde B. — Î147 il
man'jttf, assez est B. C. — 2150 trouuee tleffaulte C. — 2154 de puissance extermine C, — 2150 son manque A. B.
— 2159 trop plus qua luy B. — 2164 jugiez sire voire C. — 2160 mortelle C. — 2167 de feux C. — 218S obli-
gacion B. C.
30
MISTERE DE LA PASSION
car sa peine a fin se comporte ;
2170 et quand a la peine qu'il porte,
ce n'est fors peine de dommage,
en tant que de son héritage
est privé autant qu'il s'extend,
ncantraoins que venir y prétend,
2175 combien que la chose diffère.
Desquelles prémisses j'infère
conclusion en ce point cy :
qu'il est droit que l'homme ait niercy,
veu la grand douleur et la perte
2180 qu'il a ja des long temps soufferte,
et que sa coulpe est excusal)le
~ grandement par raison prouvable,
que je diray quand sera temps.
De l'ange et ses cohabitans,
2185 nommé deable, prince d'oi'gueil,
je ne dis mot ne dire vueil.
Je n'ay cause de le deffendre ;
mes tant qui touche l'humain gendre,
de tant qu'il m'a pris a garant
2190 pour son offcncc rop])arant,
je requier ce que je propose.
JUSTICE
Faictes l'apoint : je m'y oppose,
et vous dcffens de disposer
quelque bien sans moy exposer
2195 le fait : j'en doy estre avertyc
et des ore me fais partyo
formelle, et veil tenir la main
contre tout le lignage humain,
et sa délivrance erapescher.
2200 Guidez vous pour vostro prescher
le délivrer, quand au surplus,
pour dire « je le veil » sans plus ?
La chose ne sera pas telle :
je leur feray guerre mortelle
2205 pour corriger leur mauvais vice.
MISERICORDE
Quand a ce point, dame Justice,
je ne prétends pas les ravoir
du tout a mon premier voulloir ;
mes aussi, ne vous en desplaisc,
2210 leur cause n'est pas si mauvaise
que sentence doyez donner
seuUe sur eulx pour les dampner,
sans ce que ma voix soit oye.
JUSTICE
Aussi ne le sousticus je mye,
2215 mes tenir me fault rigoreuse.
MISERICORDE
Et moy je leur suis amoureuse,
car ilz ont eu a moy reffuge.
JUSTICE
Ce n'est pas cela ; juge, juge,
tu es la rigle de droiture,
2220 tien raison, fais juste pai-ture,
tien la balance entre deux fers,
ne t'abbaissc point pour tes sers.
Rendz a chacun qui t'a servy
selonc ce qu'il a desservy,
2225 ta justice ne regarde ame ;
et quoy que dye ceste dame
de ce gendre humain misérable,
je la reppute fav.îrable ;
par ses dis la pourray confondre.
MISERICORDE
2230 Je pourroye a ce point respondrc,
puisque tant estes espineuse,
que vous estes sa grand hayueuze,
car par trop le voulez grever ;
si vous pourroye repprouver
2235 de tenir trop forte rigueur
comme moy de porter faveur,
et ainsi vous n'ariez riens dit.
DIKU LE PERE
Vostro cause est en contredit ;
affln que le fait soit notoire,
2240 laissez cest interlocutoh-e
et venez au fait principal.
jfsricE
0 très hault juge impérial,
bien puis declai'er ma pensée,
car je me tiens trop offencee
2245 dp l'omme et ses abusemens.
Entendez bien mes argumeiis,
je conclurray par loys actives
et par raisons démonstratives,
l'omme devoir estre dampnc,
ï^O et au feu d'enffcr condampné
tenir éternelle prison.
MISERICORDE
Justice, vous n'arcz raison
tant soit estrangcment prouvée,
2169 le C. - 2170 qui A. C— 2171 si' A. — 2173 au temps qui A. — 8174 y man'iuf B. C. — 2188 ja dis C. ---
2185 et prince C. — 2186 ne die mot ne dire ne vueil G. — 2188 quil B. C. — 2190 par B. C. — 2201 les deliurer
C. — 2206 ad A. — 2213 sans que.. .y soit B, C. — 2216 PoUrquoy C. — 2217 et ilz ont a moi leur B. tout leur
C. — 2218 point B. C. — 2;'22 en rien pour C. — 2226 je dye B. — 2232 seriez B. C. — Î237 auez A. — 2238 Les
mots : LE PKRE manciufiit A. B. C — 2241 si B. C. — 2247 loy a.'tiue C. — 2248 demonstratiue C. — 2249 oon'
dampne B. — 2251 de tenir G — 2252 voire naue» G. — 2253 esprouuee G.
P K V. M I K R K J O U R N K E
31
se Dion plnist, qti'cl no soit sauvée.
2255 Dictes tout ; i ioiis no l'nult coler.
JUSTICE
Daiiio, puisqu'il vient a parler,
par vos (lictz il est niagnifosto
qu'au juge avez cy fait rcquesto,
portant troys poin» assés terribles,
ïîCO des quoi/, les deux sont impossibles
et le tiers vous direz pourquoy.
Au premier point, par grand eflroy,
pour tous les humains requérez
que d'enfler soient sepparos
iiGj et que la chose est convenable
par ne sçay quoi raison justable,
ou je n'ai gueres arresté,
car c'est content do vérité.
Puis roquerez que son meifait
SCTO luy soit repparé et refl'ait
je ne sçay pas pai' quel moyen ;
pourtant que vous vous doubtcx bien
que sans rcpparaison patente
je ne seroye pas contente.
:'275 Au tiers point requérez merveilles,
qui voulez doux causes pareilles
tauxer par divers jugement ;
vous demandez allégement
pour l'ommo et plaine délivrance ;
2i80 mes du dcable et sa dolcance,
ne falotes quelque mencion ;
jo ne svay quel distinction
sçarcz en l'oflence assigner,
qui voulez l'un mediciner
2285 et l'aultre laissier en la fange.
MISERICORDE
.lustice, ne vous soit estrange,
ma requeste juste trouvez ?
JUSTICE
Non fais du tout.
MISERICORDE
Or l'iinprouvez
se quelque déraison s'i trouve.
JUSTICE
22«0 Quand au premier point, je l'impreuve,
et dis que l'omrae, quoy qu'il face,
n'est pas digne d'obtenir gi-aco,
qui en rien sa peine aniodero.
Gonunent ! hault juge, considère
22œ la noblesse ou il fut formé
et soubtilleinent informé
de lumière d'entendement
(X)ur soy conformer justement
a la divine volonté,
ffloo le sens et la nobilit<5
qu'il ot en Testât d'ignonceuce :
de tous biens avoit afllucnce,
habandonné luy fut tout l'eMtrc
du noble paradis terrestre
2305 ou il trou voit ce qu'il vonloit :
tout avoit, riens no luy failoit,
choisir povoit a l)eau loisir
de tous les fruis a son dcsir ;
il u'estoit plaisance mondaine
2310 qu'il n'eust en ce joyeulx dcmoino
dont il ostoit habitateur ;
tant seulomcnt son créateur
une pomme luy defTcndist,
a quoy tantost la main tendist
2315 et comme glouton et fifiommand
trcspassa le divin command,
en quoy il commist triple ofleiice :
tout premier, inobcdienco
contre vous, puissance iiifinye' ;
2320 la seconde fut gloutonnie
et la tierce se mcust d'orgueil,
quand par un désordonné veil
appeta le savoir divin.
O mauvais cueur plain do venin,
2325 engin export devenu inide,
liberté mise en servitude,
noble entendement assourdy,
comment euz lo cueur si hardy
de connnettre ung tel vitupère
2330 contre Dieu, ton juge et ton yteve,
qui si bien t'avoit introduist,
de quelque heure que do ce fi-uit
attoucheroycs pour on menger, ,
de mort encourroyes le danger
2335 a quel peine ot quel mort dampnabic
s'obhga l'omme misci'able.
Qui dira qu'a tort est lassés,
je dy qu'il n'en a pas assés,
et requier peine plus ague,
23-50 et briefjnent voycy que j'argue :
quiconques fait iniquité
contre la divine bonté
encourt peine ijerpetuelle ;
la detfaulto de l'onmio est telle
2254 qui ne soit B. C. — 2255 dites il ne faut riens celer. — 2258 cy manqur A. C. — 226Ï par nng B. C. —
226S cest ou A. pour content U. pour conclud C. — 2273 repparance B. C. — 2278 jugemens C. — 22ii7 bonne C.
— 2288 uic prouueï A. — 2290 point premier je le preuue A. — 2291 qui A. C. — 2292 de A. — 22U.t ne queu rien
M peine modère B. C. — 2299 de la B. - 2302 Influence B. — 2315 gouraient B. C. — 2317 telle A. It. — 2319
toy B. C. — 2331 te A. — 2333 attoucherez B. C. — 2334 encourre» B. C. — 2i35 a queUe peine et mort A.
MISTERE DE LA PASSION
2345 attendu sa gi ant mesprison :
si conclus par cestc raison
que remède ne luy duyst point.
J'argue contre l'aultrc point :
ofFenco d'osgalle action
23S0 veult esgalle pugnicion.
L'ange et l'omme ont esgal commis :
soient donc egabncnt pugnis,
et ainsi se l'omme a secours,
l'ange y pourra avoir recours.
2355 L'un, dictes vous, est importun?
ergo l'aultre, car c'est tout ung.
Quand a la satisffacion,
je fais ceste improbacion :
mal se peust celluy deslier
2360 qui doit et n'a de quoy payer :
demeurer doit pour les ostages.
L'omme d.it grans et pesans gages,
et n'a de quoy faire raison :
si conclu qu'il tendra prison,
2363 forclos de toutes courtoisies.
Et pourtant, mes raisons oyes,
liault juge ou tous biens sont compris,
je l'equier que l'omme soit pi'is
hoi's du limbe, pour tous debas,
2370 et mis en enffer au plus bas,
s'il n'a qui responde pour soy.
MISEUICORUE
Dea, Justice, pardonnez moy ;
vous estes ung petit trop fiere ;
mes parlons ung peu par manière,
2375 si vous plaist, et je respondray.
JUSTICE
Ce que je propose est si vray
que tout le monde en est tesmoing,
et sans que nous allons plus loitig.
Vérité est icy présente,
8380 très sage dame et très prudente,
qui scet bien se ma cause est bonne.
VÉRITÉ
Je croy bien que mal se consonne
au propos de Miséricorde
qui de soy volentiers s'accorde
2385 a pitié et a penitance ;
mes non obstant la dissonance,
si fault il dire a l'abrégé
que Justice a très bien jugé
et que l'ofi'cnce est détestable
2390 quand a soy, et non recouvrable ;
car qui ofl'cncc l'infiny,
sans fin requiert estre pugny,
affin que la peine baboudant
soit au délit correspondant :
2395 tout est fait a juste compas.
Mes touteffois je ne dis pas
que Miséricorde en la fin
n'y trouvast bien plus doulx chemin,
comme elle en est bien coustumicre.
JUSTICE
2400 Ne m'en chault riens de sa manière :
il me souffit que mes raisons
infèrent leurs conclusions
contre les dis qu'elle maintient ;
car se dampner l'omme appartient,
2405 j'en feray l'execucion.
iMISERICORDE
Justice, vostre intencion
me samble bien dure a tenir ;
vous parlez assés de pugnir,
mes de modérer rien ne dictes.
2410 Ce ne sont pas choses petites
qu'une créature tant digne,
faicte a la samblance divine,
en qui reluist la propre ymage
du haultain créateur et sage,
2415 fut ainsi parduo et dcffaicte
de la fin pour quoy elle est faicte,
non pas une et pour une pièce,
mes sans fin et toute l'espèce,
passés, advenir et prcsens.
2420 Vous les servez de durs presens
et les condampnez bien en haste,
et si'l leur fault une advocate,
ilz ne vous prendront pas, ce croy.
0 très bon Dieu, entendz a moy,
2425 ne discute pas de ce vice
du tout au voulloir de Justice ;
l'omme aroit trop forte partie.
Je requier que je soie oye,
juge très prudent et Ical.
2430 Je sçay bien que l'omme a fait mal
(s'a esté deceu par fallace)
tellement, se ce n'est par grâce,
son fait est du tout deppointié ;
se ce n'est par vostre pitié,
2435 Justice le vouUlra confondre :
I
2345-2346 mnïviurnt C. — 2347 doit B. C. - 2350 pareille C. — 2351 qui ogual C. — 2353 1' manque C. — 2358
je y fais B. C. — 2300 quil C. — 2363 se na B. si C. — 2364 qui A. — 2365 forclouses toutr-s B. 0. — 2J66 mais C.
— 2372 Dya B. C. — 2375 sil B. C. — 2376 ey C. — 2380 humble dame sage et prudente C. — 2390 reoeuable B. se-
courable A. — 2391 le A. — 2396 Mes neantmoins si ne dy je pas B. si manque C. — 2400 Ne ine C. — 2403 les
quelles C. — 2412 fait C. — 2'il3 le A. — 2'il7 non pas ung C. — 2419 ou presens C. — 242'» O très doulx juge enten-
dez moi B. O très bon C. — 2431 si a C. — 2434 partie B. se nest par grâce et par pitié C. — 2435 me C.
PREMIERE JOURNEE
33
2U5
S450
nios par bcaulx poiiis jo puis i espondre
et sauver ses ruisoii» lo cours.
UIEU I,E PERE
NolJe (lanio, dictes tousjoui s,
vostre bon <li'oit seiay gardant ;
ii'iO ma grâce est largo et liahondaiit
sur qui elle se veult csteudrc.
MISEKICOnOE
J'alleguo a sa cause ded'cudro
plusieurs poins : premier, sa noblesse,
son igiiorcnco, sa foiblesse;
j'allègue aussi qu'il estoit mis
entre ses mortels ennemis
qui pai- cnvye qu'ilz avoient
do tout leur pouvoir le grevoicnt.
J'allègue aussi, hault créateur,
qu'il pécha comme viateur,
et n'estuit pas faicto du tout
sa voye, qui l'excuse moût.
De rechief ramentevoir puis
la peiiance qu'il lit dei)uis,
a4:iô les dueilz, les malédictions,
les corporelles passi( iis
dont il fut largement scrvy ;
la moi't a qu ly fut asservy,
qui est uug dur pa> a passer,
2460 le doit uug peu rccompencer,
et beaucop de peine inféconde,
qu'il a poit'j au mortel monde
pour cuider Justice appaisier,
qu'encor ne ces?e do noisier,
2105 qui sanible estre crudelite.
Et quand a sa nobilit'j
que premier voulz lamentovoir,
je dis que vostre majesti',
hault juge, y doit nionstrcr devoir ;
2470 L(ing temps a est ' en vieultô,
vostre graco y vueillo pourvoir,
car chose do grant royaulté
grand bien et royal doit avoir.
JUSTICE
Vostre raison qui comracct faulte,
2'.7j conclud cjntre vous, belle amye,
et comme hors des termes sault?
je no vous le celleray mie ;
Car de tant que chose est plus haulte
et en puissance plus unye,
2480 s'il chet qu'elle face doH'aultc,
de tant doit estre mieulx pugnye.
.MisERicoana
Voire, quand la cotilpe provient
do son pur et propre malice
et par orgueil no luy souvient
2485 de la haulteur du bénéfice,
Pitié ne niercy n'y convient,
ne remède a tel maléfice ;
mes qui a mal par aultruy vient,
plus excusable çn est le vice.
JUSTICE
S'iOO De richesse en grant povretô
venir, quant l'en se doit parfaire,
pai' aultre ou par sa volent*^,
si n'excuse en riens «on afl'aire ;
Homme n'est jamcs supplanté
2495 s'il ne consent a soy deffaire ;
car qui a franche volonté
peut choisir le faire ou non faire.
MISERICORDE
Franche voulenté en saisine
avoit l'onune lors, point n'en double;
ZMO mes sensualité voisine
luy estoit et contraire toute,
L'ennemy, la char qui domine
le monde tost croit et escoute
comme la branche qui s'encline
2505 au veut qui le plus fort la boute.
JUSTICE
Ara cil excusacion
a qui Dieu ta vie compassé
et luy predist sa passion,
qui luy vendra s'il la trespasse ?
8510 Or en vient a dampnacion
et puis pour retourner a grâce,
allègue sa decepcion !
l'ignorance est ung peu trop grasse.
MISERICORDE
Vous samble il fort, se dire veult
2515 estre pai- aultruy confondu,
son oll'ence confesse et deult,
plaignant ce qu'il a otfendu ?
Dont sa penitauce me meust;
car en jugement bien rendu,
5!520 quand cueur loyal fait ce qu'il peust,
raison supplcsl au résidu.
JUSTICE
S'il plaignoit eu nombre aussi hauh
qu'arismetiquc le earcuUo,
et plouroit toa«jours son deffault
2436 cps Jeux li. t. — 2447 qui C. — 2450 et 2454 qui A. — 2467 voz C. — 2470 en violence a este C. — 2482 Voir.'
la coulpo proprement C. — 2401 dcust (".. — 24S2 sa manque C. — 249J ce C. - 24'>5 coutenil A. U. — 2if6 et 2198
libertiS C. — 2505 do U. C. — 2507 voye C. — 250S la C. — 2509 si A. — 2512 alléguer B. C. — 2514 veuil B. —
2516 complainl deult A. deuil C. — 2518 recelé B. me manque C. — 2521 le résidu C. — »2i prioit tousjour
sans B. C.
Pas.
3
34
MISTERE DE LA PASSION
25^ pour soy rayer de ma ceduUe,
Sa penance riens ne luy vault,
son procès n'en va ne reculle,
cai' qui en souffisanco fault,
la satisffacion est nulle.
MISERICORDE
S530 S'il n'est souffisant a vo choi»,
bons amis a a mon entente
et tel qui en mourra anchois
qu'il demeure pour ceste rente,
Ne pour vos rigoreuses loys
3535 ne lerrez pas estre contente,
car puisque vous avez vos drois,
ne vous chaillc qui vous contente.
JUSTICE
Se j'ay ce que je dois avoir,
ne vous poise, c'est mon usage ;
ZM) et encore pourray je voir
qui pourra payer si fier gage :
Lors le pourray je recevoir ;
encore peust estre dira je
que cil qui a mal fait de voii'
2545 reppare mesmes son oultrage.
MISERICORDE
Helas ! Justice, Ijieu soufflt
s'aultruy paye la forfaiture ;
oultre puissance riens ne gist,
c'est une maxime en nature :
2550 Vous arez cil que vous promist
le juge en la sainte escripture,
qui pi'ccieux change vous fit
de créateur pour créature.
JUSTICE
Se l'omme a telz solucious,
2555 je n'ose dire plus avant :
si haultes satisflacions
doyvent souffire au recevant :
Mes pour oster suspicions
qui me peuvent estre mouvant,
2560 bailliez moy donc salvacions
a mes argumens de devant.
MISERICORDE
Sy feray je tout en syvant:
il n'y a raison qui m'empesche.
Vous arguez : quiconques pèche
2565 contre la majesté haultaiue
doit avoyr infinye peine :
l'omme a fait offence sainblable,
si doit avoir peine influable.
Vous péchez en conclusion
2570 qui nyez repparacion ;
mes très bien poez inférer
qu'il convient a le repparer
que cil qui on ara l'ottroy
aist puissance infinye en soy.
2575 Et se tel le rcppai'e bien,
vostre argument ne conclud rien
ne nostre juge en riens ne meust.
Vostre seconde raison veult
qu'offence d'esgal jugement
2580 passe par esgal vengcment;
c'est raison, je vous le concède ;
mes vostre mineur mal procède,
que l'ange et l'omme, tout pensé,
ont egallement offencé ;
2585 et pour tant que faulce la treuve,
je la vous nye.
JUSTICE
Je la preuve.
Se l'ange et l'omme aucunement
ont offencé diversement,
comme vous tenez contre droit,
2590 ou la diversité vendroit
de la part des deux offençans,
ou des offences transgrossans,
ou de Dieu vers qui l'ofléiice est.
Le premier dire me desplest,
2595 car tous deux estoient substance
noble, de clere congnoissance,
informés de haulte lumière
d'entendement large et plainicre,
dont chacun d'culx povoit vertir
2600 son vueil et en bien pervertir ;
se l'ange plus clere l'avoit,
l'omme pourtant moins no savoit,
car avant sa transgression
il avoit eu moniclon
2605 de la propre bouche de Dieu,
qui luy dit en temps et en lieu
ce qui luy estoit advenir.
D'aultre part ne sçaroz tenir
différence en l'offence d'eulx,
2610 car par orgueil sont cheus ambdeux.
Tant aussi que l'offence touche,
quelque ditferance n'y couche,
car l'oftenca dos deux s'adresse
contre l'iufinye haultesse,
2015 qui leur tauxe peine infinye,
2526 ne me B. C. — 2531 a Hlanr/ite B. — 2533 qui A. — 2540 pourray bien G. — 254Ï Lors je le C. — 2546 il
vous soutTist C. — 2547 se C. — 2590 ce quil C. — 2551 sa C. — 2570 qui y mettez C. — 2572 a manriue C. — 2579
de quel A. — 2582 rigueur C. — 2586 je le nye. Je le vous preuue C. — 2587 Ihorame] homme C. — 2592 des
offençans B. — 2593 cil. C. — 26(K) en Dieu ou paruertir C. — 2606 bien en temps et lieu G. — 2607 a aduenir B. que
C. — 2610 tous deux A. — 2615 leur peine B, Cauxa C.
PREMIERE
ot nioy aussi.
MISERICORDE
Je vous le uyo :
vous faille/ eu probacioii.
JUSTICE
Assignez donc distinction,
affin que nous nous a|)pai»ons.
MISERICORDE »
Ï6J0 Sy feray je par six raisons,
que je diray : dont la première
est fondée sur la lumière
(rontendomciit que Tange avoit,
qui trop plus cleromont congnoist,
ïiiïj car touti! sa cognicion
se fait sans inquisicion :
on soy n'a voillo qui rencombrc.
I/onnno congnoist un peu soubz l'ombre
de raison qui souvent s'aljusc,
W)30 pai' quoy ignorance s'excuse.
D'aultro part quant a l'affoctive,
l'ange l'a tant ferme et active,
que s'en bien ou a mal la mcct,
il y demeure et s'y soubmect ;
!Î635 or la voult l'ange a mal tourner,
si n'en peust jamés retourner.
L'homme ne l'a pas si fermée,
car se par mal l'a difformee,
toutcffois la iieust rovertir
2W0 on Diou, et en liicn conveilir;
ainsi luy a Diou ordonnée.
JUSTICE
Honne raison avez donnée ;
venez a l'aulti'e, si vous plaist.
MISERICORDE
La seconde raison si est
2045 fondée sur leui's deux natures,
car les anges sont créatures
i' nobles, dont le parfait connnun
n(; ilevoit pas descendie d'mig
par quelque genoracion ;
ï(«o mes toute humaine nacion
venoit d'ung qui l'avoit deftaicte :
si doit par uug estr<! reftaicto,
ou l'ange ne peut (larvenir.
VERITE
Par ceste voye maintenir,
2(i5j l'ommo de danipner n'ai'a garde.
MISKRICORDE
Ma troisième raison regarde
JOURNEE
leur poché, que dame Justice
appreuvo egunl en maleflm ;
mes la (lifTercnco eut notoire :
8600 l'omnio a poché par vaine gloire
de science haulte et notable,
dont sa nature ostoit capable
miculx que le mal ango n'estoit
de iniissance qu'il appctoit.
2865 .\ussi quand a la circonstance,
l'ange queraut ceste puissance
commist vers Dieu oU'encement
de son malice i)roprement,
et par luy l'onune fut seduist,
8670 par quoy remède ne luy duist,
ne jamè» je ne m'y accorde.
DIEU I.E PEIUS
Vous dictes bien, Miséricorde,
et moii.^trez bien vostre sagesse.
MISERICORDE
Ma quatrième raison s'adresse
8075 vci-s vous. Justice ; vous savez
que les faulx anges repprouvés,
tous créés et estans en estre,
offencerent au lieu celestre
chacun de proi)re mocion ;
2680 mes humaine corrupcion,
venant d'Adam par son trespas,
seulloment ne s'estendoit pas
sur luy qui estoit ja vivant,
mes sur tout le gendre ensuy vant ;
2685 par quoy n'estoit pas convenable
a voiLs, .Justice redoubtable,
que vostre sentence ci-uelle
de dampnacion éternelle
dessus les humaias assignez,
2690 qui encore ne sont pas nés.
Se ceste rigueur se tenoit,
et pitié n'y contrevenoit,
tous sont a toinient invites
des avant leui's nativiuis,
2095 que jamés ne consentiroye.
VÉRITÉ
Vous parlez par trop bonne voye
et bon argtiment avez fait.
MISERICORDE
La cinquième touche mon fait,
car, quant je regarde et escoute,
2700 nature humaine est chouti! toute
et tresbuchee en grant mi.sere
35
201G Je le vous C. — 2l)27 comble C. — 2631 la factliie C. — 2633 se a bien C. — 8S30 iieantmoins il C. — 86*8
de A. — 3653 ne pouoit H. — 2656 ma raison troisième C. — SdôS en mnii'/ue H. C. — 2659 est manque B. — 2063
lange A. — 2675 lontro vous Justioe et sauez C. et sauez B. — 2678 en 0. — 2680 1' C. — 8681 de A. son mniviue
A. — 26.'<2 seulement nentendoit pas C. — 2685 pas nestolt B. C. — 2C92 coniretenoit B. C. — 2893 inuite A. C, —
2691 naliuile A. B. C. — 2701 tel U. C.
36
MISTERE DE LA PASSION
pour le vice du premier père ;
pour ung seul toute est obligée.
La chose est aultrement jugée
2705 aux anges en leur action,
car la dure obligacion
n'est pas a tous anges sortyc ;
mes seuUement une partie
est cheute en peine obligatoire,
Ï710 les aultres demourés en gloire ;
par quoy ce seroit grant dommage
se le total humain lignage
tel dampnacion prcferoit
plus que des anges ne seroit
2715 qui ne sont qu'une qualité.
PAIX
C'est notablement rapporté,
dame do grâce l'aulmonnierc ;
poursuyvez par ceste manière
et l'orame obtendra guerison.
MISERICORDE
2720 Quand a ma siziome raison,
c'est ma principalle en ce cas :
elle regarde leurs estas,
et, comme devant dit j'avoye,
l'omme estant encor en sa voye
2725 pécha ; par quoy cust bien puissance
de retourner a penitanco,
car en terre commist l'oultrage,
qui n'estoit qu'ung pèlerinage
et une sente pour venir
2730 au règne qui ne peut fenir.
Mes l'ange estant au hault estage
et au terme de son voyage,
en tant parfaicte mancion,
et qui n'avoit d'exempcion
2735 fors ce qu'il se desordonna,
commist péché qui le dampna
sans jamès a bien reppairier.
Et pourtant, juge droiturier,
mes argumens très bien prouvés
2740 et coulx de justice saulvés,
je roquier que soit consommée
la redempcion prénommée,
et soit mise nature humaine
en sa noblesse premeraine,
2745 tant au moins que par bien servir
puist vostre gloire desservir
et que vostre grâce entendez.
DIEU LE PERE
Justice, plus ne respondez ;
voulez vous aultre chose dire ?
JUSTICE
2750 Assés pourroyc contredire,
et querre rigoreux chemin,
mes je vous congnoy tant enclin
a Miséricorde ensuyvir,
que je n'en sçaroye chevir ;
2755 par quoy je n'y contredis point.
Reste tant seullement ung point,
que mon admende soit tauxeo
de tant que je suis offencce ;
hault pris me soit ravallué.
2760 Et de fait j'avovc argué
que l'omme en doit payement faire,
et il n'a de quoy satisffaire ;
par quoy doist estre retenu.
■ Elle m'a ce point prévenu
2765 que s'il est do soy impuissant,
il ara gage souffisant
qui mon respondant en sera :
je veil bien voir qui ce fera,
car assés commect la besongno
2770 qui par aultruy oeuvre et besongne.
Et atant m'en tays et depporte.
DIEU LE PERE
Vostre procès très bien se porte,
qui vous trouvez en concordance ;
Vérité, dame d'excellance,
2775 declairiez aussi vostre entente.
VERITE
Juge de vertu precellante,
mon vouloir est près converty ;
j'ay long temps tenu le pai-ty
de Justice la peu piteuse,
27S0 qui fort se monstroit désireuse
de venger son offencement ;
mes quand j'oys si doulcement
la piteuse cause debatre,
pour la rigueur Justice abatre,
2785 pitié m'y constraint et raniadue,
que la redempcion humaine
se face par paix et concorde,
pourveu que Miséricorde
aist prins souffisant exposé,
2790 ainsi comme elle a proposé,
et qir Justice ait sacrifice
2703 Io)it A. B, C. oblige A. B. — 2704 juge A. — 2706 la manque C. — 2709 sont C. — 2710 demeurent C. — 2711
trop seroit C. — 2713 proferoit B. perferoit C. — 2717 la minière C. — 2722 et regardez leurs deux B et regarde les
deux C. — 2723 j' C. comment B. — 2725 parquoy bien et puissance C. — 2726 de reuertir C. — 2734 delection B.
dilectio'n C. — 2751 quérir C. — 2761 en ] qui A.'— 2768 que B, que se C. — 2773 a B. C. — 2774 noble et franche
B. noble dame et franche C. — 2780 despiteuse A, — 2782 si très B. - 2788 pour C. — 2790 el A.
l'RKMIERF JOURNEE
37
I
solcnipucl pour le malofico
o)>liguiit huiiminc nature.
DIEU I.K PERK
Kt vou.", l'aix cl(! noble cstnturo,
27<Jj (luino dont tout l)icu sourt et vient,
vostre raL^ou dire convient
sur eoste requeste prcuiise :
est il tcniiis que voua soyez mise
entre moy et ceulx do la terre ?
2800 est il temps de cesser la guerre,
qui des jadis y est si forte ?
est il saison d'ouvrir la jiorte
de mon hault et noble royahne ?
délibérez, notalilc dame,
8805 car très liien vous voulions oyr.
PAIX
Je ne veil querelle tenir ;
juge, je suis indifférente.
S'il est qui Justice contente
de son adraendc qu'dle quicrt
Î810 et Miséricorde en requiert,
par raison m'y devez poser ;
et encore, a l'ommc excuser,
je vous veil bien ramentavoir
deux points qui vous doyvent mouvoir
£815 n le délivrer de servage.
Car premier, ce seroyt dommage
de ces beaulx cieulx qui clos seront
et inhabités demourront
se l'oinme n'y peust revenir,
Ï820 qui e^^t formé pour les fournir.
Considérez d'aultro costé
se l'ommc est de servage osté,
quant parfais homme il y sera,
combien en terre naistera
ÎSffi de femmes de haulte vallue ;
or sera cesta oeuvre pardue,
éternellement condanipnee,
se remrde n'y est donnée.
La terre qui tant bien s'attourne,
Î830 ce beau soleil qui dessus tourne
accompaigné d'aultres planètes
et d'estoilles clercs et nettes,
seront frustrés de leurs ouvrages :
de quoy servent leurs grans voyages,
8833 leurs tours, leurs revolueions,
leurs pardurables moeions ?
Qui m'en demandera, en somme
je dis que tout est fait pour Tomme
comme Genesi» lo recite.
8840 Mes quoy, do combien lui profiito
d'avoir esté servy au monde
de corps do vertu si parfonde,
et apprés la mort corporeUo
encouri'c la mort eterncllo
tsv> sans enti'er a port do valu ?
trop petit luy aroit valu
le service tant bien paré.
VÉRITÉ
C'est force qu'il soit repparé,
tant poui' les raisons ja attainctes
8850 que pour les escriptures saintes,
qui ne peuvent estro frustrées,
mes par oeuvre de fait monstrees
comme il est au sens littéral.
DIEU 1£ PERE
Pour rendre jugepient final,
8855 a la requeste, a la jjriero
de nostre amee tresoriere,
Miséricorde, nous voulons,
saulves toutes objections,
que nature humaine ait escout
8860 et soit repparce de tout,
comme il est dit cy en commtui.
JUSTICE
Voire, sauf lo droit de chacun ;
aultrement je m'opposeroye.
VÉRITÉ
Vous tenez rigoreuso voye :
8806 en gi-and danger est qui s'i couche.
JUSTICE
Je le dy poiu' tant qu'il me touche,
qui vauldra en temps et en lieu.
PAIX
Loué soyes tu, très bon Dieu,
juge qui tout tiens en ta main,
2870 quand jugement tant doulx et pieu
as fait pour le lignage humain ;
Pren joye, trosne souverain,
teiTe, fais liesse a planté ;
vous, anges de vouloir serain,
8875 doulcement chantez : Silelg.
VERITE
Miséricorde, vous savez
que sentence pour vous avez ;
loué en soit Dieu nostre père.
Or est il temps qu'il nous appere
8880 par quel moyen vous entendez
8794 «lature. lî. — aSlfi Et promier qui B. — 8819 ]' manque C. — 8880 le C. — 8?83 il manque A. y mnnquf C.
• a>23 sic A. li. C. — 2827 et etcinellpment C. — 2828 trouuee A. — 2,»29 se trouue C. — 2S;U dont seniiront C.
2840 il proufflte C. — 2844 encourir A. — 2853 ou B. C. — 2!'55 et la prière C. — 28:8 sauluo A. — 8S(35 cy B.
I— 2866 quil n. — 28C8 soyez vous C. - 2f69 la main C. — 2873 fais joye C. — 8874 et anges B. C. — 8877
1 qui A. — 2879 qui A.
38
MISTKRK DE LA PASSION
qu'a Justice son droit rendez :
aultr'ement n'en chevircz point.
MISERICORDE
Mes dames, quand est ad ce point
devant vous ne veil pas pictendro
2885 que j'en doyve jugement rendre ;
mes allons pour avoir sentence
parler a dame Sapicnce,
qui tantost nous ordonnera.
PAIX
Tous les moyens y trouvera
2890 qui seront possibles do faire.
VKRITÉ
Dame courtoise et debomiaire,
ou gist de savoir la monjoye,
a vous adressons nostre voye,
affin que d'ung petit procest
2895 nous mettez d'accord, si vous plaist,
comme bien faire le sçarez.
SAPIENCE
Il fault que le fait déclarez,
affin que nous en ordonnons.
VERITE
Ma dame, devers vous venons
2900 comme a ung singulier reffuge,
pour cause que Dieu, nostre juge,
veult sa bcnigvolence estendre
de racheter tout l'humain gendre,
comme il a des long temps promis ;
2905 et est nostre fait très bien mis ,
mes Justice fait action
pour avoir repparacion
de l'offence vers luy commise,
dont Miséricorde est soubmise
2910 a vous pour en faire l'accord.
SAPIENCE
A le bien trouver sera fort,
veu ce que Justice demande
très grand et sumptueuse admende,
et l'homme a puissance petite.
PAIX
2915 Comment ! est la chose ainsi dicte
que pour riens que l'omme sceust faire,
il ne peust pour soy satisffaire?
est tant interdist son service ?
SAPIENCB
Demandez a dame Justice,
2920 s'elle s'y scroyt concordant.
JUSTICE
Nennil, pas en cent milliers d'ans,
et fut il tousjours en penanco.
L'omme est pcschour plain de meschance,
indigne, vil et détestable ;
29^ son fait ne m'est point acceptable :
querez toure plus conveniens;
PAIX
Tousjours vos rigoreux moyens.
Justice, vous sont en saison.
SAPIENCE
Justice a très bonne raison,
2930 s'elle se tient bien difficile ;
regardez en cause civille
s'ung malfaictcur par son desioy
est tenu en prison de roy
et tant a mal faire s'admort
2035 que sa cause est digne de mort :
se lore, quand il se voit contraindre,
commence a larmoyer et plaindre,
soy rcppontant du grief meffait,
la reppentanco rions ne fait,
2940 ne le juge en riens ne retarde
que son payement no luy garde
de la moit qu'il a desservye ,
n'il ne peust racheter sa vye,
tant se peine en grant haljondance ;
2945 et non pas que la pénitence
ne soit vraye on fait et en signe,
mes pour tant que cil est indigne
dont la penitaiicc procède,
en son fait n'a point de remède,
2950 a sa mort ne peust contredire;
et forse Justice veult dire
que le cas de l'omme est pareil.
JUSTICE
C'est mon, ou de pire appareil,
si ne doit pas estre accepté.
VERITE
2955 Voire, mes en bonne équité
aidtre voye y fault csgarder,
et encores me veil fonder
sur la similitude bonne
que dame Sapience donne ;
2900 car posé que le malfaicieur,
qui est en chartre habitateur,
ne puist satisflaire a son mal ;
neantmoins par don especial,
le roy le peust permettre vivre,
2965 ou forse vient, qui le délivre,
le prince de celle cité
2891 courtoisie B. — 2895 sil C. — 2908 elle B. — 2912 veu que A. B. — 2921 cent «uuir/uc A. B. — 2932
se A. C. — 29J3 saisi B. C. — 2940 regarde A. — 2950 ny C. — 2951 forte B. force C. corrigé en eroy que par un
lecteur.
PREMIERE JOURNEE
39
(jui onoqufts n'y ni'oit osti'?.
Sy veil a co point parvenir
quo tnl prince pourroit veiiii-
Xnn CM liuiiinino hahitacion,
(jui t'n preiiiiroit ooinpastiiou
en baillant plaine délivrance.
SAI'IENCE
Venté, dame d'exccllance,
vous arguez de bon endroit,
«975 et pour tant le plus fort vondroit
quo l'elluy priuci^ fut trouvé
tant noble en puissance esprouvé
qu'il allast fedre cesto grâce
au jirisonnier qui tant se lasse
2080 de la dure cliaitre ou il gist.
PAIX
Est il ange qui y soufflt ?
dictes le nous en briefvo clause.
.7USTICE
Nennil, certes.
SAIMENCE
Justice a cause,
et me tiens assés de sa pai't,
8985 se Vérité avec nous part.
Briefment je dy qu'il fault conclure
que createiu' ou créature,
voire clerc d'enteudenient,
voit faire ce repparement.
SMO Encore des choses créées
qui pourroyent estre ordonnées :
l'omino n'y doit ne peust souffire,
comme Justice a sceu descriprc :
ja ne consentira ce change.
8flK5 Ne reste que savoir se l'ange
souffit pour repparacion ;
auquel point je respons que non,
car il a puissance finye,
et ceste offense est inflnye
3000 de tant que vers Dieu fut commise,
en qui fin ne peult estre mise.
Par quoy s'il y a rédempteur,
il convient qu'il soit créateur
tout tenant en sa pi-ovidence.
PAIX
3003 0 souveraine Sapience,
dame de grand auctorité,
trésor do pure dcité,
noblement avez respondu ;
en vos dis n'y a riens pardu.
S^to tant Dont (mu (lar roaniero gente.
Touteffoig, treH noble rcf^onte,
n'ayez conti-o moy mocion,
se je fais une qui«tion
|iour contenter l(>s anfiialanB.
SAPIBNCOt
3015 Nennil, ccitce.
PAIX
Pai- vous j'entcndz,
qu'il n'est créature tant haulte
qui ceste douloureuse faultc
peust repparer, tant est despitc ;
assavoir, s'il seroit licite
.■«80 et 80 Dieu en pourroit faire une,
ftist ange ou d'aultre espèce aucune,
en qui fust tel jici'fection
que peust faire solucion
de ceste debte tant g-revable ?
SAPIENCE
30K) A nostre hault juge honorable,
attribuons par juste loy
tout ce qui est i>ossiblo en soy ;
neantmoins quoique créateur puist,
quelque creatui'o (-n veni.st
.1030 no combien de vertu puissante,
elle y seroit insuffisante
pour plusieurs poiiis, dont l'un la vient
que toute chose qui provient
en estre par creacion
3035 toute son operacion
doit a Dieu, combien qu'il labeure ;
et ainsi riens ne luy demeure
dont elle puist satiffier
pour l'admendc d'aidtruy payer.
.3040 D'aultre part repparer nature
n'appartient pas a créature,
mes tant seulement a celuy
qui fit nature et estably.
Moif engin pourroye employer
3045 a telz raisons multiplier,
mes je m'en tairay du surplus :
sur quoy finablement conclus
que la redompcion humaine
par la puissance souveraine
3030 se fera et non aultrcment.
VEniTÉ
O noble et digue jugement !
benoit soit qui t'a prononcé !
8907 avoit li. C. — 2W2 par baillant C. bonne D. C. — 2973 nobla et franchfl B. noble dame et franche C —
2978 qui A. — 2088 chauso C. — 8985 aiieoques A. — 20S6 veoy qu'il C. voiz (luil B. 2987 le créateur C. — 8990
irees A. B. G. — a009 riens nya C. — 3011 ma B. C. — 3015 Nennil voir — l'ar vos ditx jentens B. C. — 3010 qui
A. C. — 3020 ou so C. — 3021 ou manque A. — 3023 peust ] pour A. B. C. — 3032 auient B.
40
MISTERR DE LA PASSION
l'omme sera bien advancé,
s'il parvient a ccste querelle.
PAIX
«055 Dame, puisque la chose est telle
et que l'omme est tenu tant cher,
ung peu plus avant veulx toucher.
La redempcion qui sera,
Dieu et non aultre la fera
3060 comme ja devant dit l'avez ;
' mes, noble dame, vous savez
qu'en ceste jiure deité,
en ceste parfaicte unité
et très puissant magnificence,
30Ô5 est une singulière essence,
ou trois personnes sont unies,
en noblesse et vertu onnyes,
le Père, le Filz qu'il cherist,
et le bonoit saint^Esperist,
3070 tous trois ung : tel le tiens et crois.
Si fault savoir le quel des trois
sera commis d'avoir la charge
de ce voyage grand et large,
ou se les trois Tarent ensemble.
SAPIENCE
3075 Honorable dame, il me samble
que, selonc les naturels termes
de Justice justes et fermes,
quiconcques oifence commect
a pugnicion se submect,
3080 et luy mesmes sans aultre avoir
en doit la peine recevoir.
Or est il que l'omme a failly,
si fault qu'il trouve homme pour ly
qui porte la peine et niartire,
30fô puisque de soy n'y peust pouffire.
Or est nostre appointement tel
que quelque pur homme mortel
jamès ce mal ne repparast,
quelque peine qu'il endurast ;
3090 sy concluons que Dieu l'achevé ;
et pour ce que peine l'escheve
^ et fuit (car il est impassible,
dont souffrir luy est impossible
voire quand a sa doito),
3095 sy conclus par nécessité
que cil qui ara ceste somme
sera et vray Dieu et vray homme
par divine operacion.
Or viens je a vostre question
3100 que demander estes venue :
a quelle personne est mieulx deue
ceste incarnacion eraprondre,
se le Père ou Filz la doit prendre
ou le saint Esprist simplement,
3105 ou se tous trois coujointtcment :
je dis pour sentence finable
qu'a tous trois n'est pas convenable ;
car pour néant par plusieurs se fait
ce qu'ung tout seul très liien parfait ;
3110 se l'une des trois l'entreprend,
puisqu'en luy reçoit et comprend
totalle deité parfaicte,
aussi noblement sera faiete
la redempcion des humains,
3115 comme par trois, ne plus ne mains.
Aussi ceste incarnacion
présuppose en soy mission,
et fault que celluy soit transmis
qui a C3 fait sera commis ;
3120 or ne pourroit estre transmise
Trinité ou d'aultrc commise,
car point n'aroit qui la transmist
ne qu'a ce faire la commist ;
si nous fault arrester sur Tune,
3125 qui ticngne la voye opportune
do payer ce grief payement.
VERI lÉ
Vous délibérez haultcment,
dame des haulx ciculx tresoriere ;
vostre petite chaniberiere
3130 Philozophie n'a engin
qu'a ce propos hault et divin
ne fut vain et obnubillé ;
mes le vostre est tant bien stillé
que tout scct tt voit sans fallace.
MISERICORUE
3135 11 fault doncq que l'ung seul la face,
puisque la chose ainsi s'ordonne ;
mes qui y est le plus ydonne,
affin que le cas nous appere ?
SAPIENCE
Le Filz.
305 4 cil A. — 3065 et B. C. — 3C67 oyes B. unies C. — SC08 qui A. C. et son fils B. C. — 3069 le lien est le B. C.
— 3081 la pomme B. — 3C82 sest ainsy B. C. — 3088 jamais liomme ne C. — 3090 savons conclu G. — 3091 s'es-
oh eve C. — SCSS de Dieu le tuiel est C. — 30t5 je concliidz B. C. — 5097 et maniiie C. — 3100 a demander A. ou
le A. B. — 3108 car manque A. — 3109 se que A. ce qu.iussi bien par ung est fait B. C. — 3110 ce une des per-
sonnes G. — 3111 puisquen soy C. — 3117 mension C. — 3119 qui a ce faire A. B. — 3181 daultruy C. — 3122
nauroit de transmetant B. nauont G. — 3123 qua ce lenuoyast et pourtant B. C. — 3124 si maiiQue B. G. — 3125
trouue C. — 3126 daoheuer B. C. — S12S de beaux yeux G. — 3132 obumbill B. — 31?5 Donc fault il que luy seulC.
— 3130 se A. — : 139 Certes le filz C.
PREMIERE JOURNEE
41
PAIX
Pouiquoy plus qufl 1« Pcre ?
;ilM ne poust il fournir <'(*t oïlit?
fAPlKNCE
Cclla no vous ny jo pas ilist ?
ni( s je titMW ijar rnisoii prouvobh^
qu'il oA au fiiz plu^ convenable
qu'aux aultres ileux, sans reppiouvor.
nur) J'adniaine a mon propos prouver
quatre propriet''s :r.oult belles
qui luy eonveijfU' nt, qui sont telles ;
la prcniiere jiuis estimer
sclone qu(^ /i'j se lait nonmier ;
Sino la seconde, qu'il est ymai^e
(le Dieu, le jiere neble et sage ;
tiercenient, est parole et verbe
de Dieu qui est noble i)r()verl)e ;
et la quart", qui l)ii ii consonne,
3ir)5 il est la moyeime parsonne
en la Trinité beneurco.
La prcniiere dont déclarée
de tant qu'il est filz naturel
de Dieu, son vray père éternel,
3160 le preuve estrc très nécessaire
a cestc rodcmpcion faire ;
car filz denotft obédience,
huniilit'' ( t ])acience,
comme filz plain de charitt-,
316.') et en son père aucturité :
par quoy quand incarné vendra,
prier très bien luy eonvcndra
son perc et satisffaire aussy,
qui l'exsaucera, et ainsy
3170 l'ordre en sera n iiulx ordonnée
que s'au contraire estoit tournée.
Et si est bien d'utilité,
que luy, qui en éternité
est lil/ de Dieu sanctismo et digne
3171. par geueraeiou divine,
soit filz secondement au monde
d'une vierge très pure et monde,
qui sur toutes sera choisie :
ainsi, par crste courtoisie,
3180 d'humanité et dcitii
n'ara qu'ung filz (n trinité,
qui, vray filz et naturel hoir,
jjourra les hiunains promouvoir
a i^a: ticipi r l'eritage
3ia'> (lu haiilt ciel et puissant e8tag(^
dont par luy seront rc(;eptifz
comme Icaulx filz adoptifz.
Quand ymage d(! Dieu se nomme,
jo dis qu'il convient bien a l'omnK*,
3190 car, comme Genèse maintient,
l'omino rejjresente et contient
l'ymage de Dieu imprimée,
pai' quoy sera plu» sublimée,
se l'ymage qui tout compassé
3195 veult prendre en soy l'ymago basie ;
par e(' i)oint l'ymage increee
joindra cell(! qui est creeo
avec soy en béatitude.
misericoude
De sainte et benourec estudo
3200 ou si haulte science est prise,
par dedans nous ave» esprise
pour l'omme paifalcte espérance.
SAPIENCE
Au tiers point j'ay fait demonstrance
de verbe et parole divine,
3205 qui pour donner bonne doctrine
aux humains grandement duyra,
car très bien les intrwluyra
de nobles predicacions.
Quai-tement luy appropiioas
3210 en trinité celestienne
estre la parsonne moyenne
par quoy miculx lo puis allier
a l'omme reconsillier,
affin que cil , qu'en tel moyen
321j et si noble a pris le lien,
soit souffisant médiateur
de créature a créateur.
Mes dames, voyla mon devis;
dictes que vous en est advis,
3220 car la matière est bien doubteuse.
PAIX
0 Sapience |)recieuse,
fine cscharbouelo reluysant,
vostre dist est si bien duysant
que do riens ne vous desdisons ;
3225 ainssois avec vous concluons,
approuvans ce qui est dicté.
SAPIENCE
Miséricorde, Vérité,
.lustiee, dame do valfur.
3154 doux autres B. C. — 3145 S'amène B. G. — 3146 moult manque G. — 3148 et premier le puis B. C. —
3149 ce A. ce quil G. — 315'. a la quarte B. G. qui bien me B. — 3160 le prouue C. — 3162 i-ar il B. C. — 3iœ et a
A. — 3166 incarner A. — 3167 le C. — 3171 est A. trouuee C. — ri72 de A. B. y est B. — 3174 et est B. — 3180
do A. do m'^n'/ur C. — 31S2 vray Dieu C. — 3190 genesiB B. C. — 3196-97 inoree, cre« A. B. G. — 3802 1' matupte
C. — 3214 tel lien B. G. — 3215 est... prins le moyen B. G. — 3217 au créateur C, <— 3219 quil vous en est C, —
3221 0 Sap., dame précieuse G.
42
MISTRRR DELA PASSION
Délibérez.
JUSTICE
C'est le iiioilleur,
3230 de vous ne me discorde point.
MISERICORDE
Ne moy.
VERITE
Ne moy.
SAPIENCE
Et sui' ce point,
nous baillons nostre appointeraent :
que le filz de Dieu proprement
assumera sa créature
3SS5 et joindra humaine nature
a sa deité éternelle
en la substance personnelle,
et luy, en ce point incarné,
au lignage humain condampné
3240 donnera conffort et secours.
PAIX
Or nous convient avoir recours
au hault juge sans contredire,
et luy ceste sentence dire,
assavoir s'il la passera.
SAPIENCE
3245 Vérité la proposera,
et présente avec ly seray.
VERITE
Volentiers m'en avanceray
pour le fait mieulx expédier.
Souverain juge droiturier,
3850 qui dominez par dessus tous,
nous retournons par devere vous
pour enquérir se bon vous samblo
ce qu'avons ja conclud ensemble.
Dit est par sentence commune
.3255 que pour oster la grand rancune
que Justice aux humains soustient,
vostre filz incarner convient,
qui dessus soy la charge porte
tjmt que soit ouverte la porte
3260 qui forclost les humains de gloire.
DIEU LE PERE
0 mauvais vice obligatoire,
en inale heure fus estauré !
fault il que mon filz beneuré
pour toy repparer tant endure
3265 et doité qui toujours dure
soit jointe a mortelle substance
pour trouver ceste délivrance ?
Justice, estes vous si estroite,
tenez vous la glave si droite,
3270 que pour racheter l'umain gendre,
ne prendrez point de gage mendro
que mon filz ? faisons aultrement
avec vous et plus doulcement ;
vous me demandez trop hault pris.
JUSTICE
3275 Aultre par moy ne sera pris ;
en ly seul mon payement gist,
et encores s'il n'accomplist
sur tout son corps, nerfz et jointures,
toutes les saintes escriptures,
32R0 tant que le dernier point verray,
ja contente no me tondray ;
ja point n'en sera mis arrière :
regardez donc par quel manière
et comment me contenterez.
DIEU LE PERE
,3285 Or donc, Justice, vous Tarez,
puisque la chose est ordonnée
et la sentence en est donnée ;
se sur luy vous recompensez,
ne vous plaignez plus, c'est assés,
3290 la recompense est bien haultaine.
0 très chère nature humaine,
en ta noblesse priineraine,
belle, doulce, clere et seraine
enti'e mes fais,
3295 Regarde quel honneur te fais,
regarde par qui tes meffais
seront repparés et reffais
au parvenir ;
Bien eureuse te dois tenir,
3300 quand a ton fait entretenir
tu aras pour toy soustenir
telle potence ;
Pour toy mettre en magnificence
n'argue point d'impacience :
3305 tu as le tre.sor de clémence
tout descouvert.
Le don de mercy t'est ouvert,
peulx tu mieulx estre recouvert,
que mon propre filz soit couvert
3310 de ta nature ?
0 beneureo créature,
o chère et amee facture,
quand tu verras tel couverture.
3837 la minqiie A. B. C. - 3240 dourra vray H. C. - 3243 et a lui C. - 32i5 si la C. - 3247 me A. - 3253 j«
manqua A. — 3269 le glaiuo ». C. si droit B. — 3270 1' manque C. — 3275 ne sera par moy C. — 3277 encor sil ne
l'ace. B. si encores sil u' C. - 3280 vendray B. - 3284 esgardez B. - 3283-3390 manquent C. reuiHet déchire. -
3288 sur soy B. — 3289 ne plaignez plus, car B. — 3304 ne, de A. — 3308 estre mieux B.
1' U K M I !•; R I.; .1 0 U R N K K
43
preus y chaloy,
.tsir. I";t voy que j'aray fuit i)our toy :
ma graoc! eonsidcro et voy
qui to fait plus que jo no doy :
tu vois lo fait,
l'iuioro quand tout soi-a fait,
:!3Sn ton mal |)ar(lonné et reflait,
mon fil/, pour toy mort et défiait
pour ton oflfiaudo,
Pour ccstp grai'o largo et grande
riens que ton amour ne demande ;
3:t$r) se tu fais ce que je commande,
il to vauldra.
SAPIENCE
Juge, regarder vous fauldra
le moyen de plus noble affaii'e
a ceste incarnacion faire
3XM> qu'on y puist trouver par l'aison.
DIEU LE PERE
Nous ferons par ceste achoison,
dame d'excellante value :
une noble vierge ay cslue
du sang et gendre de David,
atr) Oncqnes plus humble homme ne vit,
j idus vénérable ne plus sainte ;
si vueil que briefment soit eusainte
^ . de mon cher ûh divinement,
F sans quelque humain atouchenient ;
3340 virginalmont l'enflantera,
i nouriiia et alaittera
du laict do sa doulce mamelle.
MISERICORDE
0 la beneuree pucelle,
en qui tel fleur sera posée,
^irîiri très sainte et précieuse ancelle
combien digne es d'estre aloseo !
A bonne heure fus composée :
* pour tel noblesse en toy poser
est ta chambre bien disposée,
3a-,0 quand tel prince y veult repposer.
DIEU LE PERE
Gabriel, allez disposer
en teri'e ce divin mistere
a la vierge qui sera mero
de mon cher filz et bien amé.
33:).-) Gabriel vous ay bien nommé
qui fortitude signifie ;
vostre office le veriffie,
vous portez nouvelle certaine,
la plus forte et la plus haultaine,
3360 qu'oncques fut en ten-c evcoutce :
la vierge que j'ay acceptée
I)ar nom Marie ojit appclleo
et native do Ualilcu ;
en Nazareth la trouverez,
8885 a l'entrer la saluerez
de par moy par un doulx langage
et I>ui8 la cause du mossago
luy déclarerez piiidemment.
OAimiEL
Créateur du hault firmament,
3370 ce message noble et tlivin
voys faire de eucur entciin :
jo luy uoncei'ay la nouvelle
la plus doulce et la jilu» nouvelle
qui jaraés en torie jjuist estre.
CHERUBIN
3375 Chantons a dextre et à senestrc.
et menons exultacion,
' car ceste annonciacion
de tous poins nous resjouyra,
ICIiançon.]
SERAPHIN
Quand humanité sera
.3380 mise en vertu primeraine,
toute la court souveraine
parfaicte joye fera.
MICHEL
Paradis resonnera
de lyesse très seraine,
.3385 quand humanité sera
mise en vertu primeraine.
RAPHA.EL
Nostre roy la pai-fera
qui va prendre char humaine
dedans la vierge puraine
3.390 qui vierge l'enfTantera.
URIEL
Quand humanité sera
mise en vertu primeraine,
toute la court souveraine
parfaicte joye fera.
JOSEPH, mary Nostre Dame.
33» Marie, il ne vous desplaira,
se ma volonté vous dcsclairc ?
:OÎ2 mon B. — 3325 ce qui to B — .3,327 regardez B. — 33*6 es manque A. — 33 W t« oh. es» bien A. ces»
B. — 3357 la vciiflie B. — 3300 concques A. B. — 3365 entrée A. — 3i68 declairei prudoolement B. — 338* de
mélodie seraine B. ~ 3395 mary Nostre Dame matique A.
44
MISTERE DE LA PASSION
NOSTRE DAMK
Joseph, mon mary débonnaire,
dire pouez vostrc prnsé.
JOSEHH
Très chero dame, j'ay pensé
3400 et considéré nostre estât.
Vray est, arae n'y mect dibat,
que par la volenté divine
j'ay esté esleu, raoy indigne,
vostre mary ou au moins garde.
3405 Dieu doint que si bien je vous garde
que la garde me vaille a l'ame !
Or savez vous, notable dame,
que la loy baille par usage,
quand deux gens viennent eu mcsnagc,
3410 avant qu'ilz conviengnent ensamble,
doyvent vacquer comme il me samblc
en oroyson ung certain temps ;
si seroye assés consentans
que nous tenissons ceste rigle.
NOSTRE DAME
3415 Ma volenté se tient et ligle
a la vostre, mon cher cspoux ;
vos poucz ordonner de vous
et je doys estre obeyssanto.
JOSEPH
La rigle est bonne et suffisante,
3420 et puisque vostre vueil y est,
nous la tendrons.
NOSTRE DAME
Très bien me plest,
ne je n'y dois mettre contraire.
JO.-EPH
Or doncqucs vueillons nous retraire
une espace chacun a part,
3425 tant que Dieu, qui tout bien deppart,
arons servy ung certain terme,
a celle fin qu'il nous comfiorme
en amour et vraye union.
NOSTRE DAME
J'ensuivray vostre opinion,
3430 la vouldroy je estre diligente :
voicy chambrete belle et gente
pour Dieu mon créateur servir ;
et pour sa grâce desservir
/je vouldray lire mon psaultiei\
3435V pseaulnje après aultre tout entier ;
j'ay maintenant assés espace.
Au commaneer requier ta grâce.
Dieu d'équité qui tout ordonnes,
et te supply'que tu me donnes
3440 tel lyesse contemplative,
que la joye consolativo
retourne a ma salvacion.
GABRIEL
Ave pour salutacion,
je te salu d'affection,
3445 Maria, vierge très bénigne,
Marie de devocion ;
gratia par infusion
de grâce acceptable et condigne ;
Pleiia par la vertu divme,
34r>0 pleine quand dedans toy recline
Dominus par dilection ;
Nostre sii-e fait ung grand signe
tecum d'amour quand il assigne
avec toy sa perrnansion.
NOTRE DAME
3455 Je prens grand admiracion
en moy d'estre ainsy saluée
et me raectz en turbacion
comme chose inacoustumee.
GABRIEL
Marie, vierge comprouvee,
3460 asseure toy, n'ayes cremeur,
car grâce as acquise et trouvée
par devant Dieu nos^tro seigneur.
En ton ventre coucopveras
et enffanteras ung beau filz,
3465 le quel Jhesus appelleras ;
onoques si haulte oeuvre ne feis.
Il sera grand et bien rassis
de tout bien qui est en enffant ;
en ton ventre sera assis
3470 le filz du très hault triumphaut.
Et lui donra Dieu nostre sire
le siège de David son père,
et tendra son règne et empire
en la maison joyeuse et clere
3475 De Jacob ou tout bien reppere,
le quel règne tant durera
que de l'eure qui luy appere,
jamès ne luy terminera.
NOTRE DAME
0 angle de Dieu salutaire,
34S0 nou /elleté vous os retraire
de haulte et mirable faconde :
Go;r.mcnt C2 poui'ra ceoy faire
3398 pensée B. — 3401 ne débat C. — 3405. don C. — 34ii ce quil me semble B. — 3418 je y C. — 3423 donc C.
— S427 a fin telle C. qui A. — 3430 je vouldroye G. — 3434 or vouldre C. — 3437 au commancement C. — 3438
tout' manque G. — 3440 celle liesse complantatiue C. — 3444 sa.ue A B. C. — 3'i60 afferme toy G. — c461 ta graca
C. — 3466 plus belle G. — 3407 et agensiz B. agensis C. — 3409 sera dit par mon bien assis C. — 3470 très mangm
C. — 3477 de quel heure il y B. quelque heurs il luy G. — 3481 nouuelle G,
PREMIERE JOURNEE
45
3483
3190
»'i9j
3500
350r>
3510
3515
3520
3525
que je soye mère au parfaire,
quand homme ne congnois au monde ?
(iAnniEi,
Le saint cspcrit qui rcdonde
en tout cupur devost et liabondo,
te seurveiidra en cest affaire,
Et la vertu pleine et parfonde
du très hault ou tout bien se fonde,
t"obuni))rora sans riens mefl'airo ;
Pour quoy ce qui prendra ton gendre
on ton saint ventre précieux
se pourra nommnier sans niesprcndre
le vray filz de Dieu vertueux,
Et affin que tu croycs niioulx
venir ce que j'ay maintenu,
prcns exemple a ung ca^ joyculx
qui de nouvel est advenu :
I';iizabcth de Dieu voisine,
la chcrc et amce cousine,
fait joyc et i arfaicU; liesse,
Car par la volenté divine
a conceu ung filz de hault signe,
elle ;a venue en vieillesse ;
Ja le sizienie mois la presse,
tant qu'elle est l)i('n grosse et espesso,
que chacun brehaigne cuidoit :
En cest espoir donc le relcsso,
quelque parole a Dieu s'adresse,
imiiossible cstre ne luy doit.
De tout faire il est suffisant ;
sans luy n'est quelque 1 '. ;. luiy ;
il est tout sachant, tout puissant
et en ses vertus infiny.
NOSTRE DAME
Ecce aiicilla Domini,
l'ancellc Uieu suis, sy luy plaist;
j'ay pavfaicte credenco en luy
et sclonc ton mot me soit fait.
josEi'H, a genoux.
0 Dieu tout bon et tout parfait
plus que cueur ne pourroit comprendre,
raercis et grâces vous doy rendre
de ma force et vertu tolallo,
de ma compaignie loyale
que pour potence et vray secoui's
m'avez donné en mes vie!/, jours.
Préservez de mal et d'ennoy
Marie, ma compaigue et moy,
si vray comme j'y ay fiance.
ouiniBi.
Je te fais la signiflance
3530 de Marie, noble puccUe,
■loscph, que n'atouches a elle
pai' charnelle habitacion,
car de certaine intonciou
a fa vii'giniti' vouée
3535 a Dieu le poio et dedyee :
laisse la donc pcrsoverer,
et Dieu, qui scet rémunérer
tout bon cueui', le te rendcra.
JOSEPH
Mon corps James n'aiTcsteia,
3540 s'aray a Marie de bouche
déclaré ung point qui me touche,
dont elle et moy ferons grand joyc.
NOSTRE DAME
0 do science la raonjoye,
o dfe vérité droicto voye,
3545 puissance de deité piue
Jami's n'est nouvelle que j'oye
qui plus doulccment me resjoyc
que ceste divine adventure.
crest <cuvre jiar dessus nature -
3550 que moy, petite créature,
mon créateur enffanter doyo.
C'est mon bien, c'est ma nourriture,
qui nie promeust a l'estature
du plus hault fiiit que n'attendoye.
:^3 Mon Dieu, ir.on bien, mon sauvement,
mon recours, mon avancement,
ma seuUe félicité toute.
Je vov.s reniercy humblement
de ce très hault assemblement
^60 qu'en moy est ja fait, point n'en doubte.
0 mon vray Dieu q<ie tant redouble,
foy tant parfaicte en moy se boute
sur ce que l'angle m'a dicté,
Que je croy fermement sans doubte
3565 qu'en mon ventre gist et s'aboute
le filz de haulte deité.
Et puis donc que tu m'as cslcuc
a fait de si haulte vallue
que ton filz en tes flans porter,
S370 En ceste joyeuse advenue
fais que je soye entretenue
humble sans en orgueil monter ;
Des vices nie fais absenter,
en toutes vertus augmenter,
34<:0 te A. tobunbeia IJ. — 34'U son C. — 3499 a Dieu B. — 350'i elle est C. — 3505 saprcsse C. — 3507 sierille
B. stérile la C. — 35118 en est H. — 3511 tout bien faire est C. — 3516 sil B. C. — 3518 ta parole inc. — 3528 gy
«y A. jo ay P. C. — 353Ô la jouuencelle B. C, — 3531 ne touches B. C. — 3535 et a Dieu C. — 3538 si le te C. —
3540 tout que jayo A. — 3541 declaray A. — 3553 qui ma prouurent B. — 3554 du plus haut que je n" B. — 3565
que mon B, et manque C.
46
MISTER EDE LA PASSION
3573 tant que l'eure soit advenue
Que ton cher filz puisse enffanter
et le très doulx fruit présenter
a toy dont la fleur est venue.
JOSEPH
Très chore espeuze, j'ay congnue
3580 et sceu assés près vostre entente
par la puissance precellente
de Dieu qui m'en a adverty :
vous avez choisi le party
de conserver virginité.
NOSTRE DAME
3585 Mon cher sire, il est vérité ;
c'est tout ce que mon cueur désire.
JOSEPH
Or je voue a Dieu, nostre sire,
que pareillement garderay
la myenne tant que je vivray :
3590 par ce point serons d'une sorte.
NOSTRE DA.ME
Mieulx en vauldra nostre consorle
et vendra a plus hault degré.
Cher époux, s'il vous vient a gro,
volontiers visiter allasse
3595 ma cousine, par vostre grâce,
Elizabeth, en la montaigne.
JOSEPH
Si y allez, chère corapaigne,
je n'y raetz point de contredit.
NOSTRE DAME
Bien enssainte est, comme l'en dit ;
3600 si ne luy fauldra demander
aultre que moy pour la garder,
qui luy sera grant courtoisie.
JOSEPH
Partez quand il vous plaist, Marie ;
a joye puissiez retourner !
[SlLETE.]
3610 en ton saint ventre convenant.
Et qui fait cecy maintenant
que la mère de mon seigneur,
de mon Dieu, de mon créateur,
viengne icy pour moy visiter ?
3615 Si tost que j'ay peu escouter
ta voix de salulacion,
en joye et exultaciou
l'enffant de mon ventre s'est rais,
congnoissant cil a qui soubmis
3620 est tout ce qui au monde est creu ;
et benoite es tu qui as creu,
car dedans toy seront parfaictes
les paroUes que Dieu t'a faictes,
et les verras en temps et lieu.
NOSTRE DAME
3625 Mon ame magnifie Dieu
et mon esperit se resjoye
en Dieu, mon salut et ma joye ;
car il a regardé l'umblesse
de son ancelle et sa simplesse.
3630 De ce benoite me diront
tous gendres qui jamès seront,
car grant chose m'a fait celluy
qui a toute puissance en luy ;
son nom soit bcnist dignement !
ELIZABETH
3635 Marie, vostre advenement
m'est plaisant, je vous en asseure ;
icy demourrez de ceste heure
une bonne csj ace avec nous.
NOSTRE DAME
Mon vouloir est du tout a vous,
3640 chère cousine débonnaire,
et se service vous puis faire,
ne m'e-spargnez point, je vous prie.
ELIZABETH
C'est de vostre grâce, Marie,
qui devers moy s'est estandue.
OSTRE DAME
3605 Bon jour vous vueille Dieu donner,
Elizabeth, dame honorée.
ELIZABETH
O dame, tu es bienouioe
sur toutes les femmes du monde
et le fruit bcnoit qui se fonde
GABRIEL
3645 A vous soit louange rendue,
père du ciel puissant et sage ;
j'ay accomply vostre message,
pouifitablo a nature humaine,
a la vierge do giacc plaine
3650 qui moult dignement l'a receu.
ibll tilz C. — 3SS3 que vous C. — 3585 espoux A. — 3601 de moy B. — 36i)2 Cira B. — 3604 et a C. Silete mm-
que B. C. — 3614 cy C. — 3620 s.-eu B. C. — ?62l tu matujuc A. B. C. — 3628 1' manf/ue C. — 3629 la C. — 3630
benoîtes A. — 3635 auancement B. — 3636 en manque C. — 3638 une espace de temps C. — 3640 sans deflWre
B. C.
i
PREMIKRE JOURNEE
47
DlEi; I.E PERE
Sa foi uo l'aia pas dcceu,
car en son vontre est des ja mis
lo fruit que jo luy ay promis,
dont grant noblesse- luy vcndi'a;
3G55 pourtant, mes angles, il fauldra
que souvent vous la visitez,
et premicf vueil que vous chantez
dietios do matière joyeuse
' pour la nouvelle gracieuse
3660 que (iabriel a dénoncée,
cai' la matière prononcée
requiei't grans jubilations.
CHEnUBlN
Gloire a Dieu donnons,
et nous ordonnons
3605 a liesse faire ;
Quanque nous pouons.
Dieu, nous vous loons
de si nolJe affaii'e.
SERAPHIN
Ce noble exemplaire
3670 bon Dieu, vous dcclairo
aux humains enclin.
Les vueillans rctraire,
qui a grant contraire
vont tous a déclin.
MICHEL
3675 Or sont en chemin
d'attaindre la fin
qu'ilz doivent avoir.
Quand le roy divin
leur est tant begnin
3680 a les promouvoir.
RAPHAËL
Précieux avoir,
gracieux a veoir,
cler a regarder,
Peust apparcevoir
3685 la vierge et savoir
bien le doit gai'der.
URIKL
Boaulx dictiés fonder,
doulx chans accorder
devons on liesse,
3690 Quand pour reffonder
nature et monder,
nostre roy s'abbesse.
GABRIEL
0 chère maistrcsse,
0 haulte princesse,
3<.95 dame souveraine.
Par ta grand iiumblcssc
s'osjoye et csdresso
nostre court haultainc.
Car espoir nous mainc
3700 que nature humaine
l)ar toy se radressc
A la gloire pleine,
dont coulpe villaine
luy toit sa noblesse.
[SlLKTE.]
IXCIFER
3705 Saultez hors des ablsmes noii's,
des obscurs infernaulx manoirs,
tous puans de fou et de soutfre,
deables, sailliez de vostre gouffi'o
et des horiibles régions :
3710 par milUers et par légions
venez entendre mon procès.
Laissiez les chaisncs et croches
gibès et larronceaux pendans,
fourneaux fotirnis, serpcns moi'dans,
3715 dragons plus ardans que tempeste ;
ne vous bruslez plus groing ne teste
a faire ces motaulx couUer :
faictes moy bondir et crouller
tout le liideux infernal porce,
3720 de hasto de venir a force
oyr ma proposiciou.
SATHAN
Qui fait ceste mutacion ?
Lucifer, roy des ennemis,
vous hurlez comme ung lou famis,
,'i725 quand vous voulez chanter ou rire.
LUCIFER
Ha ! Satlian, Dieu te puist maudire !
Quand est de mes ris et mes chans,
ilz sont malheureux et meschans ;
ma miblesse et ma grant braulté
3730 est tournée en lUftbi'mité,
mon chant en lainentacion,
mon ris en desolacion,
0653 lenfant C; — 3055 pour quoy B, C. — 3657 chanties C. — S662 grand A. — 3935 liesse et joye C. — 3661
quant nouuelle ouons B. C. — .Sfifi9 Cest B. — 3676 a la lin C. — 3677 dcuoient A. — 3686 la B. — 3690 ressoulder
B. C. — 3697 relesse C. — 3703 la C. — 370-1 Silcte Manijuc A. — 3707 pugnais B. C. — 3708 saulleï B. C. -«3719
porche A. B. C. — 3725 cuidez B. C — 3727 mes dicz et mes champs C.
48
MISTERE DE LA PASSION
ma lumière en tcncbre umbrage,
ma gloire en douloureuse rage,
3735 ma joyo en incurable dueil ;
ne demeure que mon orgueil
qui ne m'est mué ne changé
depuis le jour que fus forgé
lassus au parduralslo empire,
3740 si non que tousjours il empire,
sans soy diminuer en rien.
SATHAN
De ce point je vous croy très bien,
jamès n'y attendez reppos ;
mes cecy n'est point au propos
3745 sy n'est besoing qu'on le reppete.
LUCIFER
Astaroth, sonne la trompeté
et busine par telz moyens
que tous les deables de céans
saillent dehors tost et en haste.
ASTAROTH
375 S'il y demeure pié ne paste
qui tost ne viongne a la meslce,
je suis content d'avoir ])ruJeo
ma ville et puante substance :
vous orrez de quoy.
SATHAN
Or t'avance,
3755 si qu'ilz vienguent au mandement ;
que de rage e* de mal torment
puist il mourir qui te couva !
ASTAROTH
Or va, de par le deable va ;
Icy trompecte.
c'est la note a prendre mon ton.
BERICH
3760 11 y ara feste a bâton :
Belzebutli la busine soime
courons y veoir s'on y ordonne
quelque appointemcut infernal.
DELZEBL'TH
Le mandement est gênerai,
3765 si fault que nous y comparons
et forse que nous y arons
un récépissé mal appoint.
CERBERCS
J'aymasse mieulx n'y aller point,
pour la double de moy crotter.
BERICH
3770 II n'y a point do cul frotter :
vous y vendi'ez ou ciu ou cuit
payer vostre comparuit,
ouyr que le roy parlera,
ou dealjle vous emportera;
3775 entendez vous, niaistre coureur ?
CERBERUS
Y plaidon point par procui'eur ?
l'oi'donnance mal se consonne.
BELZEBUTH
11 fault comparoir en personne
il n'y a si gros ne si rouge ;
3780 tous passent par la.
CERBERUS
Ne te liouge,
je suis très mal aboissonné ;
nous serons ja tost torchonné,
seurement, ainsi s'entent il ;
et d'excusacion ?
BERICH
Nichil ;
37S5 puisque Lucifer est fumé
et il y a deable sommé,
s'il ne saulte, il reçoit la torche,
et encor souvent il nous torche
sans advis fie sommacion.
CERBERUS
3790 C'est très orde institucion ;
mais ce sont les loys de l'ostel :
je l'entens ainsi.
BELZEBUTH
Il est tel,
le deable les acharia.
CERBERUS
Voire, mais aultre point y a ;
3795 cil qui par p!i is ou nephas fault,
combien paie il pour son deffault ?
respondez moy, maistre advocatz.
BERICH
La peine est bien legiere au cas :
il souffre pour toutes promesses
3800 estre traisné dessuz ses fesses
travers tous les gibés d'enfer,
et d'estre a bons croches de fer
plougié sept foiz au plus parfont
du i)uiz.
3734 destreuso rage G. destreteuse B. — 3738 en moy de puis quil fut B. C. — 3739 en C. — 3743 ny attendez
jamais C. — 3759 saultent B. G. — 3750 Sil y B. — ù751 que A. tost manqua B. G. — 3754 Or sus or t' C. —
' 3757 puist mourir cil qui le trouua B. C. — 3759 bon ton B. — 3762 se on B. — 3764-G8 manquent C. — 3768 point
manque A. ny aller ja G. — 3773 pour oyr que le roy dira G. — 3774 thollera B. soûlera G. — 3775-76 en tourment
et peine dampnable Brlzebutli. Allons y donc de par le diable A. — 3777-3806 manqu'Ut A. — 3778 11 y G. —
3781 apoissonne C. — S7S6 il ny a dyable qui ne soit sonne G. — 3787 si ne saulte qui nait la torche G. — 3788
manque G. — 3792 jtel C. — 37'J6 ployé B. — 3800 destre G. —3801 autrauers des gibes G.
PREMIERE JOURNEE
40
CERHEnUS
Si n'y fauklray pas dont,
3805 puisqu'il y a si grosse j)cine :
alon» ! que le deablc nous maine,
nous pairon.s le profpciat.
ASTAROTH
Roy Lucifer, do vostre estât
par dcclaiaciou donnez ;
3810 vecy tous les deables dampnés
rengés pour oyr vostre voix.
LUCIKER
Je suis joyeulx quand jo les vois
combles en brigade si belle,
voire de joye telle quelle,
3815 joye par courroux dcscont'fite,
niesloo de rage conffite
tant qu'esperist en peiist charger.
SATHAN
Su.s, sus, pensez de dégorger
de vostre gosier mal appris
38i0 ces beaux propos qu'avez enipi'is,
s'il est riens qui nous puist valoir.
LUCIFER
Sathan, tu es de bon vouloir,
c'est dommage que n'as puissance
de conmicltre autant de grevanco
3825 comme tu es entallenté.
SATHAN
Ne vous chault ; bonne volenté
sera repputee pour fait.
LUCIFER
.\vant que plus avant soit fuit
no plus déterminé par vous,
3830 doablos, arrengez vous tretous
en tourbe a grosse quantité,
et me chantez un silete
en vosti'e horrible diablerie.
ASTAROTH
^'ous orrez belle chanterie
835 tantost et ung motet d'onneur :
Sathan, tu feras la teneur
et j'asserray la contre sus ;
Belzebuth dira le dessus
avec Bericli a haulte double
et Cerberus fera un trouble
continué, Dieu scet comment.
LUCIFER
Sus, fiappez ens ligierement,
faut il faire tant d'agios ?
commencez mes petis deablos,
3845 gringotcz et ci'oqucz vos DOtW,
et barbotez comme manuotM
ou vielz corbeaux tous afTamcs.
BERICH
Vous orrez dictiés bien rimes
et chant couché a l'avenant ;
3850 sus, Belzebuth.
BELZEBUTH
.\vant !
CERBERUS
Avant !
je pense que vous l'orrez belle .
\Cfiancon ensemble :]
La dure mort éternelle
c'est la chançon des dampnés ;
Bien nous tient a sa cordelle
3855 la dure mort éternelle;
Nous l'avons desservy telle
et a luy sommes donnés ;
La dure mort éternelle
c'est la chançon des dampnés.
LUCIFER
3860 Haro ! ribauls, vous m'estonnez,
tant menez cry espouventable ;
cessez, cessez, de par le deable,
vostre chant s'accorde trop mal.
SATHAN
C'est le silete ferial :
3865 tous les joui-s est dit a l'ostel,
mes se voulez le solempnel,
vous Tarez, qui est bien doucet.
LUCIFER
Nennil, non, je sçay bien que c'est:
c'est assez pour fendre cervelles.
3870 Je vous vueil dire des nouvelles
dont je me donne grand soucy.
ASTAROTH
S'il y a riens, dictes le ey :
tantost sera exécuté.
LUCIFER
Mes deables, il est vérité
3875 que par toui-s et soubtilz moyens
nous, habitans et cytoiens
de la région désolée,
chartre de détresse appellee
ou de mort (tout revient a ung),
3880 ensemble et de voloir commun,
3807 paier nostre A. Ce vers /•( le précédent mnt ilit.i yai- Behehuth C, — 3Î-80 apris B. C. — 3827 me sera A.
— 3834 hurleiie C. — 3837 feray le contre sus C. - 3839 haiilt C. _ 3841 djable C. — 3842 Frappez dedena A. —
i;843 faut faire tant dagio C. — 3815 sonnez vos nettes C. — 3848 bien menez C. — 3850 sus Belzebuth vumque B.
sus commancons C. — 3854 en A. — 3856 desseruie B. — 3862 cessez vous C. — 3863 tr»s mal C. — 3866 ce A. si
B. se vous vouez C. — 3876 noz B.
50
MISÏERE DE LA PASSION
ti-ouvasmes manière do traire
nature humaine a grand contraiie,
quand par nostre ennort meu d'envye
atoucherent au fruit de vie,
3885 dont la generacion toute
descend en enffer ; mes je double
luig point, qu'aucun ne les délivre
ou qui que soit conffort leur livre
pour nostre puissance deffaire.
ASTAROTH
3890 Délivrer ? il ne se peust faire ;
ne doublez point de ce trespas :
car encor ne s'en vont ilz pas,
mes tous les jours a grans monceaux
il en arrive de nouveaux,
3895 venans quérir leur dernier niés.
LUCIFER
Astaroth, ne parle janiès,
tu es encore tout novice ;
Sathan, tu es un gueux propice,
je veil oir ta voix terrible.
3900 Sathan, te samble il impossible
de délivrer nos prisonniers
qui sont icy tenus cloistriers
en ce limbe, privés de glore 't
neantnioins je ne suis pas encore
3905 bien a>seur qu'ilz ne nous eschappent.
SATHAN
Maistre, mes griffes en alrappenl
aucuns mçschans et malheurés
dont nous sommes tous asseurés
que jamès n'en départiront,
3910 mes a nos peines partiront
tant que Dieu durera sans fin ;
mes quand est de l'autre couvin
des prophètes, des patriarches,
je douljte bien que de nos marches
3915 n'yssent en aucune saison.
HBRICH
Jamès n'ysteront de prison :
il a raenty par sa gargate;
c'est jugé ung' peu trop en haste,
je ne le croiray de cest an.
LUCIFER
3920 Achevé ton propos, Sathan,
car je nie tr;ùs assés des tiens:
de l'opinion que tu tiens
grand soupeçon en"moy se fonde :
quand tu cours et vas par le monde
3925 regardes tu point escriptures,
savoir se de nos adventures
ne font aucune niencion ?
SATHAN
.le respons a la question,
que ces prophètes ont prédit
3930 merveilles du fait dessusdit,
et qu'ung fort roy s'eslievera
qui nostre enffer despoullera;
je ne sçay s'il est vray ou non,
qui sera ne quel est son nom,
3935 mes l'escripture en fait beaulx ditii.
LUCIFER
Savez vous pourquoy je le dis ?
jamès n'oys ces prophètes faindre
de fort doulouser et complaindre.
Si claiment tousjours sans cesser
3940 secours; or ne sçay je penser
de quel part leur pourroit venii'
ne qui leur pouri'a soubvenir,
considéré leur grand offence
et que Dieu a donné sentence
3945 qu'il ne peust ne doit revocquer.
Touttefois pour mieulx applicquer
puissance a garder nostre droit,
Satliau s'en ira, s'il m'en ci'oit,
au monde faire une hurture :
3950 au moins, s'il naissoit d'aventure
homme de vertu si parfaite
que par luy deust estre reffaicte
la transgression des humains,
il y tiengne si bien les mains
3955 qu'il le face a mal incliner,
car se tellement peust niyner
que par péché soit corrumpu
cest homme, son fait est rompu :
car quelque rançon qu'il assigne,
3960 liens n'y vauklra, il est indigne
a faire satitfacion.
SATHAN
Sans longue protestaciou
je m'offre a faire tout devoir
en fait de visitacion,
3905 sans longue protestaciou.
ASTAROTH
Puisque tu as devocion,
autre coureur n'v fault avoir.
3887 quame B. oa G. — 38?8 quelque soit B. G. — 3893 oaP )danqM A. — 3893 et tous les jours C. — 3898 engi-
.gneux G. — 3904 je manque B. — 3905 qui A. C. — 3906 agrappent A. — 390Î inaleureux B. — 3908 asseurs B.
— 3909 ne sen partiront G. — 3912 comuiin G. — 3915 nystront G. — 3920 a ce G. — 3921 car nlamjue G. — 3923
satbnde B. — 3926 se maiviuc G. — 3927 font point C. — 3931 se lyeuera G. — 3933 voir ou non B. — 3936 les dis
B. — 3937 plaindre C. — 3939 se crient A. — 3940 ne scay que C. — 3942 na qui deulx B. — 3943 bien considère
leur C. — 3945 qui A. — 3948 me G. — 3950 nestoit A. — 3955 qui A. — 3959 raison A. — 3960 sil a peohe A. —
3061 pour B. G. — 3U64 quant au C. — 3900 tu y as G. — 3967 contre couroux B.
PREMIERE JOURNEE
51
8ATHAN
Sans longue protestacion
je m'offre a faire tout devoir;
.W70 mes nie fault avant lo uiouvoir
avoir la boueisson houssuo
de vostre orde pâte crochue,
affin que mou fait mieulx s'adi'esse.
I.LCIKEn
Or t'en va, que de tel radrcsso
3U7Û te puissent les deables mener,
que gros dragons au retourner
te ramainont tout a ton aise
ai'dant connue fou de foui nuise! i
[POSB.]
k
JOSEPH
() créateur de hault parago,
:«)80 qui m'as forme a ton ymago
et donné hault entendement.
Donne moy vouloir et courage
en cest humain pèlerinage
de toy servir songneusemeut ;
Se j'ay failly aucunement
ou non pas si très ardemment
servy que doit faire honnue sage.
Donne moy cuour et pensement
de moy purger présentement
3«90 qui suis desja venu sur l'aage.
Autant qu'homme de mon lignage,
me dois esjouir en liesse,
quand Dieu me donne en ma vieillesse
espeuzc tant sainte et tant bonne
Muj et la plus bénigne personne
qui soit, je pense, soubz la nuci
Je m'esbahis qu'el n'est venue ;
elle a ja resté long termine.
temps est que je lue uiette eu \oye
de retourner vers mon mary,
1005 pour doubtti qu'il ne soit marry
de ma ti-op longue deiuource.
KLIZAKETU
Marie, vierge bien euree,
cent mille fois vous remercie
de la bonté et couiiolsie
WlO que m'avex fait eu ma gcsine.
N08TRE DAME
Ma chère parente et cousiue,
ma compaigne et ma doulco seur,
prenez en gi'é, car de bon cueur
l'ay fait, ce scet Dieu, nostro sire,
■1015 vei-s qui ma piiere se tire,
et luy requiers d'umble vouloir
qu'il vous doint en santé valloir,
si vray que je ne vous he» mye.
Adieu, cousine.
EUZAB8TH
Adieu, ma mye,
Wio ma dame et ma chère maistresfie;
au départir mon cueur larmye ;
adieu, cousine.
NOSTRE DAME
Adieu, ma mye.
ELIZABETH
En moy n'a joye ne d'envye,
puisque j'eslongnc vostre humblesse.
NOSTRE DAME
■4025 Adieu, cousine.
EI.1ZABETU
Adieu, ma mye,
ma dame et ma chore maistresse,
je requier a Dieu qu'en lycsse
et a la joye de vos yeulx
puissiez voh- le fruit précieux
i030 qui en vastrc ventre reppose.
NOSTRE DAME
Elizabeth, chère cousine,
4000 puisque Dieu, nostre sauvcment,
a permis vostre enffantement
venir a liesse et a joye,
JOSEPH
En mon entendement suppose
que j'apperçois icy Marie
qui retourne ; plus n'y varie :
c'est elle, je la conguois bien.
4035 Ma mye, mon espoir, mou bien,
et la plus humble qui soit née.
3070 il me faut preiiller avoir A, — 3S7i la bénédiction A. — 3974 Or va que do telle A. radesse C. — 3975
le <leabl(' A. ramener C. — 39S1 noble C. — 3i)S7 comme B. — 3988 sentement G. — 3998 mais B. — 3990 quil A.
lerte» dessouliz A. soul« C. — 3997 quelle I'.. — -4003 a voje B. je twm'iuc C. — 4004 sur B. C^ — 1010 me A.
a. Jiia B. — 4()U voisine B^ — 4015 te \. — 4017 ou m.m'/icf C. — 4018 si voir C. — 4019-4020 adieu ma dame et ma
mje et ma très <?hicre maistresse C. — 4022 adieu ma cousine ma mye C. — 4024 adieu ma cousine — adieu m»
dame et amye C. — 4023 et ma très chiere C. — 4030 dans A. — 4033 ne B. — 4035 manque B.
52
MISTERE DE LA PASSION
vous soiez la bien retournée :
moult vault la présence de vous.
NOSTRE DAME
Mon mary débonnaire et doulx,
■4040 joye et lyesse vous ottroit
le souverain, que mon cueur croit
estre vray Dieu sans variance.
JOSEPH
Ma myc, ma doulco alliance,
ma très tendre société,
4045 vous a yl toujours bien esté,
puis que vous partistes d'icy ?
NOSTRE DA.ME
Oil, sire, la Dieu mercy,
et est encores, ce scet Dieux ;
et vous?
JOSEPH
Si bien qu'on no peust mieulx,
4050 et posé que mal m'advenist,
vostre présence m'esjouyst
a vous veoir tant seulement,
car de plus beau contenemcnt
n'est il point, ce croy, en ce monde.
40ot Comment le fait la pure et monde
Elizabeth, nostre parente ?
NOSTRE DAME
Elle est maintenant en la sente
de toute beaulté, soyez fiz ;
elle est adjute d'un beau filz,
4060 nommé Jehan pour vérité,
a la quelle nativité
toute ceste noble contrée
a si grant joye demoustree
qu'oncques pareille ne fut veue. i'
JOSEPH f
4065 Je n'avoye point apparceue
une besongne merveilleuse.
Comment Marie, chère espeuze,
vostre ventre est fort engrossi ;
comment est entendu cecy ?
4070 Vous monstrez vous ainsi pour faiute
ou se de fait estes ensainte
depuis que deppart fait avez ?
comment, Marie ? vous savez
que puis le temps que je vous ay,
4075 oncques a vous je n'atouehay,
ains de commune volenté
avons voué virginité,
a quoy je ne vueil contredire :
par quoy vous ne pouez pas dire,
4080 que s'aucun fruit en vous s'engendre
il ne vient pas de mon engendre,
tant pour nostre emprise commune
que pour mon aage qui répugne
a faire geueracion.
4085 0 dame de devocion,
la plus doulco et la plus savant
qui soit en ce monde vivant,
vous estes ensainte tout oulti'e ;
clcr est, vostre venti-e le moustre.
4090 Quel pechié vous est advenu?
au moins, s'il vous est mesvenu,
excusez vous pour vostre honneur.
NOSTRE DAME
Mon mary et mon cher seigneur,
ne prenez contre nioy courroux :
4095 je confesse que moy et vous
avons conjointement vouée
virginité, vertu louée,
la quelle je n'ay pas enfrainte,
mes maintenue sans contrainte
4100 de volenté franche et délivre.
JOSEPH
Holas ! vostre ventre me livre
matière a croire le contraire.
11 est saison de nous retraire
et de nous coucher ceste nuit ;
4105 couchez vous, si ne vous ennuit,
Marie, dedans vostre celle,
et demain vous orrez nouvelle
de ce qui sur le cueur me gist.
NOSTRE DAME
Cil Dieu, qui nous créa et fist,
4110 demeure en vostre compaignie !
JOSEPH
Et vous veille garder, Marie,
en très bonne prosjierité ;
je m'en iray d'aultre costé
en ma chambrete repposer.
NOSTRE DAME
4115 0 bon Dieu, qui vouls composer
ce beau monde par ta plaisance,
et puis l'homme dedans poser
pour y prendre sa soustenance.
Tu sces que par haulte alliance
4120 ton cher filz en mes flans reppose ;
4040 accroît C. — 4043 et ma B. mamour et C. — 4044 et ma C. — 4046 depuis que partistes C. — 4054 je croy C.
— 4055 se A. se porte C. — 4058 de toute liesse honorée A. — 4059 dun beau fllz elle est accouchée A. est manque
C. 4062 nostre B. manqw C. — 4064 conoques A. — 4071 se matujii- C. — 4975 natouche C. — 4077 joue A —
4083 nostre B. C. -^ 4086 saichant B. — 4090 pitié A. B. C. — 4097 vertu bonté B. une C. — 4105 cy A. ne numjuf
B. — 4109 Dieu manque C.
PRKMIKRE JOURNRK
68
r
I
donne moy vertu et puissance
de bien garder tant noble clioso.
Noble chose en nioy pront son lieu,
j'en ay forme crediditi',
4125 c'est le précieux (ilz de Dieu,
vray héritier de deité.
Qui pour vestir humanité
dedans moy se voult imprimer ;
o tros parfaite humilité,
4130 bouche ne te peult exprimer.
Peult exprimer dame nature
ce qui passe toutes ses loys ?
])eult comprandre la créature
les haultains et divins oxplois?
4i;i5 ^es toy, bon Dieu, qui les prévois
et les couguois avant le faire,
pense a mou cas, comme tu vois,
qui requiert et est neccossaire.
JOSEPH
Mon soucy ne se peult deft'aire
4140 de Marie, m'espeuze sainte,
que j'ay ainsi trouvée ensainte,
ne sçay s'il y a mal ou non.
0 dame de très gi'ant renom,
pucelle de vertu lleurie,
4145 très pi'udente femme Marie,
la plus humble et sage de toutes,
tu metz mon cueur en fortes doubtos.
Je ne sçay de ton fait la sonnne.
Savoir ? que dis tu, meschant homme
4150 que je suis ? Il est vérité
et par pure nécessité,
puis qu'engendre est en elle faicte,
il faut qu'elle se soit moffaicte,
car de moy n'est il pas venu :
4155 sa promesse n'a pas tenu ;
elle a rompu son mariage.
Rompu ? que dis tu, dur courage,
trop sainte parsonne esclandis.
0 bouche, garde que tu dis !
4160 toucheras tu l'onneur de celle
qui est la plus doulce pucelle
qui dessoubz les cieulx soit régnant,
la plus sage et plus advenant
et en qui bouche gracieuse
4185 oncques n'oys paroUo oyHeuae î
as tu dit que tant doulce face
et tant prudente se mefface ?
tu meus, il luy est impossible.
Mentir ? je suis bien insensible,
4170 quand je regarde bien son fait,
de croire qu'il n'y aist mcffait :
elle est ensainte ; et dont vendroit
l'engendre ? il fault dire par droit
qu'il y ait vice d'adultero,
■4175 puisque je n'eu suis point le pore.
Dieux ! quel horreur ! et le croiray je 1
nennil, je mens. Encor ne sçay je ;
elle a este trois mois entiers
hore d'icy, et au bout du tiere,
4180 je l'ay toute enssainte receuo
L'aroit quelque mauvais deceue
ou de fait venu eflbrcer ?
briefment je n'y sçay que penser.
Mes j'ay ma resolucion
4185 que pour la grand perfection
que j'ay veu en elle pour vray,
tant que je vive, ne ci'oiray
qu'en son fait aist eu négligence ;
mes au fort vecy que je pense
4190 pour moy de tous dangiers oster :
mes bagues vouldray apprestei'
et domain a l'adjournement
me pai-tir tout soubdainement,
si la laisseray tout pai' elle.
4195 Donc je pry l'essence immoi-tello
que do mal la veille garder.
Icy est couchié Joseph.
DIEU LE PERE
Gabriel.
GABRIEL
Vueillez commander.
Père puissant, il sera fait.
DIEU LE PERE
J'ay bien considéré le fait
4Î00 de Joseph le juste preudomme
qui de doubles met très grand somme
au fait de la vierge bénigne ;
4124 creiMilo G. — 4127 humilité C. — 4132 ces A. — 4135 les congnois B. C. — 4136 preuois auanl lafliùn B.
vois C. — 4137 en C. — 4141 trouun ainsi C. — 4145 saincte B. — 4149 dis je C. — 4152 enpendreure en elle
est G, — 4157 dis je C. — 4158 car saincte B. — 4161 saincte C. — 41C3 et mnnqv» C. — 4165 qui ne dis oncqnes
chose B. noys oncques G. — 41f;6 ay je dit A. — 4168 je A. luy manque C. — 4171 qui A. C. — 4173 le gendre C.
— 4174 a pecho A. — 4182 voulu C. — 4187 je ne C. — 41f8 quil ait en son fait nepligence C. — 4193 moy
partir si B. nien G. — 4197 Cy (fort Jotej h A. Jry .se cnwitr J. G- que voulez G. — 4190 considoray B. — 4îOl
très manque G.
54
MISTERE DK LA PASSION
et de fait il se detei-mine
a la laissier secrètement.
4206 Anoncez luy l'enffantement
de la vierge et sa grand noblesse,
et que pour riens il ne la laisse,
car en garde luy ay donnée.
GABRIEL
La chose sera ordonnée
4210 a vostre vueil. Père divin.
des divins secrets bien celler,
qui ne se do3'vent reveller
ne déclarer par bouche humaine,
mes laissier la vertu haultaine
'.œo disposer, qui mieulx les entend.
Encor ne suis je pas content
de plaintes que je sache faire
jusqu'à ce qu'a ton doulx viaire
en aray requis le pardon.
[Pose.]
rPosE.l
.Joseph, servant de Dieu begnin,
filz de David de noble gendre,
n'ayes en toy crainte de prendre
Marie, ton espeuze chicre,
4215 car le fruit dont elle est portière
et qui en elle se nourrist
est conceu du saint Esperit.
Vh'ginalment enffantera
son cher filz, qui par toy sera
4220 nommé Jhesus, qui par povoir
saulvera son peuple pour voir,
et par luy seront depeschês
do tous leurs vices et peschés.
Atant me pars, et ne l'oublie.
JOSEPH
4225 0 haulte puissance anoblie,
vraye majesté adorée,
par quel point sera l'eparoe
l'offence d'incrédulité
que j'ay eu par iniquité
4230 contre mon espeuze loyalle ?
0 sainte pucelle i-oyalle,
des prudentes la passe route,
que ne m'as osté ceste doubte
et pourquoy ne nie revellas ?
4235 pourquoy ne me le dis ? helas !
que ne m'anonças ce mistere,
que tu feusses esleue mère
du doulx Crist en la loy promis ?
0 vouloir de femme bien mis,
4240 constance de cueur affermé,
secret en fin fermail fermé,
fermeture fermement faicte,
forte foy franchement parfaicte
sans quelque dubitacion,
.4245 tu as consideracion
4255 Marie, pour vostre guerdon,
d'un bon jour et beau vous salue.
NOSTRE DAME
Cher espoux de haulte value.
Dieu vous acroisse saintement !
Vous estes niatineux forment :
4260 dictes dont vient ceste achoison ?
JOSEPH
Ha ! dame, il y a bien raison :
je viens devers vous, chère dame,
humilié de corps et d'amo,
requerre mercy de l'offence
4265 que j'ay fait a vostre innocence
et confesse que j'ay doublé
contre vostre virginité
quand ensainte vous ay choisie.
Mercy par vostre courtoisie,
4870 Marie, ma joye, m'amour,
jamèsje n'en doubteray joiu'.
L'angle m'en a acertené
et revelacion donné
du mistere qui en vous est.
NOSTRE DAME
4275 J'en loue Dieu puisqu'il luy plest
que du cas vous soiez certain.
Le mistere est noble et haultain :
je requier Dieu qu'il le parface
a son gré.
JOSEPH
Amen par sa grâce
4280 et le nous doint a joye avoir !
ciRiNus, prevost de Judée.
11 faïUt exploitier mon devoir
4206 de grand A. — 4207 et quil tiengne bien sa promesse G. — 4211 L'indication scénique est rfoiw A. — 4215
dont elle sera mère A. — 4236 me A pourquoy G. — 4238 la toy G. — 4241 fort A.— 4251 je manque A. — 4253 de
pleurs tant qua son A. — 4262 a vous G. — 4263 ignorance lî. G. — 4267 contre A. — 4269 requier par A. — 4275
qui A. je A. — 4277 liault Pt G. — 4278 qui A. G-
PREMIERE JOURNEE
(lu raaudemont quo j'ay m mains
(lo par l'emperpui' dos Romains;
Auguste, mon maisti'C et s('ign(!ur.
42sri Je ])onso qu'oucques mes groignour
ne l'ut puljliii eu .lutleo ;
la chose est forment adraondcn
ea mains do oost imperateur,
car il est huy gubomateur
090 do la totallc! monarchie
du monde ; c'est grand seiguoric :
Alixandre n'en eust pas plus.
Tout le monde luy doit tribus,
tout le monde luy doit hommage ;
'lâO'i personne ne luy fait donnuage :
paix est universellement
en son noble gouvernement ;
oncque temps ne fut si féconde
puis la creacion du monde ;
KM nos dieux li^ veuillent maintenir !
LIGERET, messager.
Est il quelque mand a fournir ?
dictes le moy, sire prevost,
et je l'aray fait et plus tost
quo la pie n'a fait ung sault.
cmiNus
4305 Es tu desjeuné?
LIGERET
Autant vault.
Dieu scet comment je me gouverne ;
je suis vray pillier de taverne,
et j'en s<;ay toute la doctrine.
cmiNus
Comment ?
LIGERET
De fournir ma poiti'ine
'MO a l'envers, de paour de brouillas,
j'ay fait ung Deo gracias
a ce matin d'une saulcisse.
CIRINUS
Tant feras tu mioulx ton office
et en aras plus'saiiio voix.
'.315 Pren ce mandement que tu vois,
et t'en va par toute la terre
de Judée, bonne et grant erre,
genei'aulment le iiublier.
LIGERET
Laissez le mov ostudier
V«0 avant: et je feray merveille.
CIRINU8
Songne touHJours do la bouteille,
comment qui'il voit, pour le danger.
LIGERET
C'est lo mostier d'ung mesnager ;
il n'est mandement qui le vaille:
'i.t25 de bien Iwiro et do bien mangei-,
c'est le mestier d'ung messager.
CIRINUS
Or t'en va ton mand abréger,
tu songea trop de la mengeaille.
LIGERET
C'est lo mostier d'un messager.
■4330 il n'est mandement qui le vaille.
Il fault desploicr ma piétaille,
il est heure pour cestc fois.
A Dieu vous command, je m'en vois
randir villes, chastcaux et foi-s ;
-4335 je n'aray ners tant soient foi-s
qu'ilz ne soient tous desnoués,
avant que jamcs vous m'arcz.
Atant me pars, priez pour moy.
CIRINUS
Mahommet te garde d'ennoy,
■{.•MO et a liesse te rapporte !
LIGERET
Je sçay que mon mandement porte :
il en y a trop longue tire,
si n'est ja bcsoing de le lire
ainsi qu'il gist, mais j'ay songié
4345 que j'en feiay un abregié,
et pour avoir meilleur mémoire
et mieulx prononcer, je vueil boire
ung tatin ains que je commance :
quand on arrouse ung tantôt l'ance,
4350 elle en pipe plus souplement.
[Pose.]
Ouez, ouez generalment
et entendez que je vueil dire ;
tous vrays subgetz du noble empire
des Romahis, je m'adresse a vous.
•1282 en C. — 42S4 César mon seigneur A. — 4285 concques A. mes manque C. — 4288 entre les C. — 4Ï89 est
manque C. — 4292 doit pas plus C. — 4295 quelque ame ne luy face B. quelque personne C. — 4296 uniuersable-
moiit A. — 4301 Sil fault ung mandement A. — 4302 ou publier A. — 4303 je laray fait biaucop A. — 4308 ear A.
— 4317 par toute la terre ràpMé C. — 4319 ung peu estudier C. — 4321 ta B. — 4327 va ton mandement A. — 4328
penses A. hesongnes trop de niangaille G. — 43?5 rains tant A. — 4336 dosuoyez A. — 4.337 [I'osb] A. — 4337-
4350 manquent A. — 4340 et a joye si C. — 4341 Je seay bien C. — 4343 la A. — 4347 il fault C. — 4349 jar-
rouse un petit lance C. — 4350 elle en pile C. — 4351 op7, généralement oueï A. — 4353 an noble C.
56
MISTERE DE LA PASSION
4355 L'en vous fait assavoir a tous
que l'impcrateui' qui se nomme,
souverain par dessus tout homme,
veult savoir le nombre total
de tout le monde en gênerai,
4360 c'est quans hommea, enffans et femmes
sont obeyssans a luy raesmes,
affin que les tribus y sache
et moderacion il face,
s'il fault plus ou moins recevoir.
4365 Et pour ce nombre mieuls savoir,
chacun se tiengne pour cité
de soy retraire en la cité
ou il a prinse sa naissance,
et la par notable ordonnance
4370 seront commis clercs en commun,
escripvans les noms de chacun
pour en faire juste rapport.
Et les negligens a mal port
arriveront, n'en doubtez mye.
JOSEPH
4375 Marie, ma très chère amye,
vous avez ouy que nous mtmde
l'empereur, et qu'il nous commande
que chacun se voit faire escripre,
et fault que chacun se retire
4380 en la cité dont il est né.
NOSTRE DAME
Puisqu'il est ainsi ordonné,
«her sire, nous obeyrons ;
enBetleen nous on irons,
cité de David haulte et belle,
4385 nous présenter, car dedans elle
avons esté né et nourry.
JOSEPH
Ha ! dame, j'ay le cueur merry,
qu'il convient que je vous y maine ;
car vostre saison est prochaine
4390 d'acoucher, comme je suppose :
si doubte dessus toute chose
qu'il ne vous tourne a doleance.
NOSTRE DAME
Mon cher seigneur, n'ayez doubtance
Dieu nous aydera, s'il luy plest.
JOSEPH
4395 Ghere espeuze, puisqu'ainsi est,
mener nostre asae convendra
pour vous poi'ter quand la vendra ;
s'irons tout doulcement le pas
et pour ce que nous n'avons pas
4400 tant d'argent qu'il nous fault despendre, (,
nous prenrons ce beuf cy pour vendre
qui nous aidera a parfaire.
NOSTRE DAME
Ce qui vous plaist me doit bien plaire, ,
je n'y metz point de contredit.
JOSEPH
4405 Sy sera fait comme il est dit :
je vois exploitier la besongne.
ELIACHIN
Joseph, cher parent, je ressongne
d'aller en Betleen si brief ;
le chemin y est grand et grief,
4410 par quoy trop mal appoint nous viont._
Je ne sçay de quoy il souvient
au prevost de nous traveillier
et de tel mandement bailler
qui no poi-te guère de fruit.
JOSEPH
4415 Eliachin, je suis instruit
que le grant prevost de Judée
n'a pas ceste chose mandée
a tous de son auctorité,
mes c'est l'empereur redoubté
4420 qui luy a transmis cest edit.
ELIACHIN
Par moy ne sera pas desdit,
j'y serai moy et ma maignie.
JOSEPH
Nous vous y tendrons compaignie,
Marie et moy, mes qu'il vous plaise.
ELIACHIN
4425 II me plaist bien, et suis très aise
de vous compaignier en voyage,
car nous sommes tous d'ung lignage
dont plus affin de nous serez.
JOSEPH
S'il vous plaist dont, vous m'ayderez
4430 a charger ma femme droit cy
sur cest asne.
ELIACHIN
Vostre mercy,
qu'il vous en plaist faire requeste.
4356 que le noble empereur de Romme A. — 4359 nombre B. — 4360 quans hommes, femmes et cnfans A. —
4361 sont a luy mesma obeyssans A. — 4332 il sache B. face C. — 4303 que B. — 4364 plus manqw B. — 4369
très belle A. — 4370 et commun B. mis clercs ou G. — 4373 ceulx qui fauldront a mauuais A. — 4377 lequel nous
A. et qui G. — 4380 ville A. — 4382 cher seigneur A. — 4;'83 nous nous C. — 4392 qui A. C. — 4399 nous manguf
C. — 4401 icy vendre C. — 44C3 quil A. B. C. — 4400 ma C. — 4415 tout inslruil G. - 4il6 liault B, — 4421 Par
ma foy C, — ',422 je A T. C. — 4'i50 ou G, — 442S affm A.
PREMIERK
O trcs noble dame et hounesto
vous estes grandement enferme,
/i435 eiisainte et près de vostre terme.
A joye en puissiez délivrer;
c'est grand ])eché de vous livi'ci'
co traveil, et bien je vous plains.
JOSEPH
Or cheminons par mons et plains,
4-140 nostre chose est toute a|)prestee.
La majesté de Dieu doubtco
vueille estre en nostre sauvegarde !
Icy s'en vont en Bethleen.
[Pose.]
UGERET
Sire prevost, Mahom vous garde
et vous tiengne en son amitié !
4445 J'ay le mandement exploitié
a haulte voix par toute ville.
CIRINUS
Tu es mig messager habille,
il sera temps de besongner.
LIGERET
Pensez hardiment do songner
4'.jO a vous pourvoir do parcliemin :
il vient tant do gens par chemin
qu'oncques ne vy tel multitude ;
tout le monde met son estude
a soy en sa ville retraire ;
4455 n'a si grand qui voiso au contraire,
tous s'y rendent, chacun pour soy.
ClRlNUS
J'en suis bien joyeux, par maloy ;
c'est signe que puissamment règne
nostre prince et roy en son règne
•4460 et que moult bien est obey,
car, son commandement ouy, .
tout le monde fait diligence.
JOSEPH
Or soit louée la clémence
de Dieu a qui sommes tenus !
JOURNKK
U65 En Betlcon sommes venus
a la peine do nosli'c corps.
EUACHIN
Joseph, il fault pour tous accors
queiir le logis dos premici*» ;
les gens sont asscs coustumiers
4470 d'eulx loger tantost en venue,
et quand la place est retenue,
ceulx qui viennent en sont privés.
JOSEPH
Nous sommes bien tart arrivés,
cai'la cité estja comblée
4475 de gens a si grant assemblée
qu'ilz ne se scevent ou estendre,
mes l'advcnture en fault attendre,
et trouver logis qui pourra.
NOSTRE DAME
Dieu, s'il luy plest, nous aidera :
4480 mettons en luy nostre espei-ance.
ELIACHIN
Oncques de gens telle habondanco
ne vis depuis que je nasqui,
car l'on ne scet comment n'a qui
trouver logis pour son argent.
JOSEPH
4'i85 Cher cousin, soiez diligent,
allez vooir se logis arons ;
et Marie et moy vous suyvrons
querans logis d'aultre costé. .
ELIACHIN I
J'ay en plusieurs logis esté,
4490 mes j'en sercheray plus de cent,
ains que ne trouve lieu décent
pour ceste bonne damoiselle.
JOSEPH
Eliachin, j'ay pitié d'elle,
je vous promets, ])arfoudenient ;
4495 de moy ne me chault pas grannient :
une nuyt est tantost passée.
ELIACHIN
La bonne dame est bien lassée :
il y pert bien a son affaire.
Mais laissez moy hardiment faire ;
4500 je trouveray sa place a part.
JOSEPH
Je querray aussi d'autre part
sçavoir se lieu pourray trouver.
Marie, sans vous trop gi-ever,
suivez moy trestout a vostre aise.
57
438 car bien A. — ViM. louée C. — 4450 et de vous C. — 4455 qui y mette contraire C. — 4456 foy qaa Tons<loy
4407 se seroit mes aeeorJs C. — 4469 Cest la eoustume dos estrangiers C. — 4470 tost C. — 4472 demeu-
rent sont fiustrez C. — 4473 mais il se fault auancer G. — 4476 ne manque C. — 4478 do C. — 4483 Ne nen ne scet
B. comment] Irouuer C. — 4487 M. et moy vous suyuerons A. — 4491 que je ne C. — 4493 par mon serment A-
Ay grant pitié C. De la voir en peine et danger A. — 4494-4500 marviui-nt A. — 4504 tout C.
58
MISTERE DR LA PASSION
NOSTBE DAME
4505 Jo requiers a Dieu qu'il luy plaise
nous secourir en ce danger.
ELUCHIN
Cher sire, pourrions nous loger
céans pour passer la nuyttee,
et que place nous soit prestec
'ihiO pour nostre argent, je vous suppl)' ?
SADOc, hostelain.
Vous n'y pouez : tout est remply :
c'est a vous grand abusion :
vous vcez la conffusion
des gens qui y sont, bon gré Dieu,
4515 et encor vous demandez lieu !
Vous ne deviez pas tant attendre.
ELIACHIN
Je commanco le fait entendre :
povres gens n'ont huy pas d'escout.
Helas ! sire, gardez par tout
4520 s'il y a point quelque placete,
quelque retraict, quelque chanibrette ;
ne sçara estre si meschantn
qu'el ne soit assés suffisante
pour y prendre nostre repas.
SADOC
4525 Vous n'y pouez, croyez vous pas ?
Et quand place pour vous aroye,
pourtant ne vous y logcroye :
ce n'est pas ic}^ hospital,
c'est logis poui" gens de cheval
45S0 et non pas pour gens si meschans ;
allez loger aval les champs,
et vuidiez acop ma maison. ,
ELIACHIN
Ha! sire, vous n'avez raison
de vous courroucer ; qui vous meult ?
4535 chacun quiert son proffît, qui peust.
Pardonnez moy : je prens congé.
JOSEPH
Pour Dieu, serons nous cy logé?
pourrions nous avoir place, frère?
SAIIOC
Nennil par mon ame, beau pero.
4540 si jo ne vueU aultruy deffaire.
JOSEPH
Helas ! sire, s'il se peust faire,
faictes nous aucune amittié ;
regardez ung peu en pitié
ma femme qui tant est ensainte
4545 et de lasseté palle et tainte
a pou s'elle se peut ayder.
SADOC
.l'ay pitié de la regarder
tant humble et do prudent maintien ;
mes, beau père, vous savez bien
4550 que ceulx qui prengnent de haulte heure,
la place par droit leur demeure.
Et s'autrement vouloyo dii-e
ilz y vouldroyent contredire :
l'usaige est ancien longtain.
JOSEPH
4555 Mon hoste, j'en suis tout certain,
je ne vueil pas quérir mon aise
pour mettre aultruy en son malaise,
mais le droit de chacun garder ;
dont, pour Dieu, veuillez regarder
4560 quelque place, sans grever ame,
ou nioy et cestc bonne danio
pourrons logier deux ou trois nuyz.
SADOC
.l'y regarde quanque je puis,
et eusse bonne voulenté
4565 de vous faire aucune bonté,
mais bricfment pour .somme totale,
je ne trouve chambre ne sale,
que tous ne soit plain a touz lez ;
excusez moy, se vous voulez:
4570 je ne sçaroye que penser,
se vous ne vous voulez passer
d'ung vieil appentis qui cy est.
JOSEPH
Que n«us le voyons, s'il vous plest :
[leut ostro y serons nous bien mis.
SADOC
4575 Regai'dez illec, beaux amis,
entrez dedens, l'uis est ouvert ;
il est tout rout, tout descouvert :
ce n'est point logis, se m'aist Dieux.
JOSEPH
("est vray, mais en attendant mieulx,
4505 requier Dieu C. — 4506 raanque A. — 4510 en prv C. — 4515 encore A. — 4517 Je pense bien ce fait A. —
451S point B. (le C. — 4523 que B. — 4525 Tout est plains me croiez vous pas? A. — 4528 cy ung hospital A. —
4538 Pourrons B, — 4545 et de lasse tant B. — 4546 qua peine se peut elle G. pou m.anqi<.e A. — 4547 ay mnnrjur A.
— 4551 logis la place leur A. — 4552-4569 manquent A. — 4554 et loingtain Ci — 4557 a son malaise C. — 45(i5
quelque C. — 4570 do vous penser A. y C. — 4574 liien manqui' B. — 4577 rond B.
I
PREMIERE
<580 passer se fault, n'en doublez point,
ilo ce qu'on trouve.
SADOC
C'est le point.
Icy doncqiios vous logerez?
JOSEPH
Ouy.
SADOC
Tre» bien servy serez,
mes le lieu est do petit pria.
JOSEPH
t5S5 Dame, nostro lofris est pris,
vous pouez hardiment descendre;
l'on pourroit bien loger en mendre
qu'il n'est, et aussi en meilleur.
NOSTRE DAME
Loué .-«oit Dieu, nostre seigneur,
4,^90 do tous les biens qu'il nous envoyé!
SADOC
Ce n'est jtns mig lieu a onneur.
JOSEPH
Loué soit Dieu, nostre seigneur!
et fut il mendre de valleur,
si vaut il niieulx qu'il nous pourvoyo
que de demourer sur la voye,
par uuyt en froidure et malheur :
au moins la place est assés coye.
NOSTRE DAME
Loué soit Dieu, nostro seigneur,
de tous les biens qu'il nous envoyé!
C'est mon espoir que meilleur voye
quand Dieu, nostre seigneur, plaira.
JOSEPH
Chère seur, l'on s'en passera ;
pour moy il est assés poissant
mes a vous trop insuffisant,
4605 ce scet la majesté haultainc.
0 vierge loyalle et certaine,
tresoriore de deité,
doulce fleur de virginité
ou gist le très doulx Messias,
4810 je voy que piteux mes cy as
et logis de povre vallue :
je pry Dieu qu'il le ravallue
a vostre ame au hault firmament.
NOSTRE DAME
Nous porterons paciemment,
«15 attendans la grâce divine.
I
JOURNEE W)
J088PH
Ma très chero cspou/e et bénigne,
erapri's le fou voa-* ropoxe/.
et a vostre aise tous posez ;
je sçay que forment estes lasM.
'•A£0 11 convient qu'a ccsluy coing lasse
nostre boeuf et nostre asno ensemble,
et en penser, car il me semble
qu'ils sont de faim en grand danger ;
et puis j'iray querro a manger
'■«85 pour nous ; si ferons l)onne chère.
NOSTRE DAME
Faictes leur appresto prenûere ;
c'est raison, il fault penser d'eulx.
JOSEPH
Ils sont très bien Ués tous dculx ;
jo leur fcray icy docoste
'iKm une maugcouere a ma poste
pour mettre leur viande a pnit :
avant que je face deppart,
ils seront très bien ordonnés.
Or vous tournez, baudin, tournez
«035 le museau vers la maugcouere
pour jouer de la machouere :
vous avez eu peine a foison.
ALOHIS, premier pastoreau.
11 fait assés doulco saison
pour pastoureaux, la Dieu meroy.
YSAMBERT. deuxième paslorenv.
'MO Se les bergiers sont de raison,
il fait assés doulce saison.
PELLION, troisième pastoreau.
Rester ne porroye en maison
et voir ce joyeulx temps icy.
ALORIS
Il fait assés doulce saison.
40S5 pour pastoureaux, la Dieu raercy.
YSAMBERT
Fi de richesse et de soucy!
il n'est vie si bien nourrie
qui vaille estât de pastourrie.
PELLION
A gens qui s'esbatent ainsi,
4050 fi de richesse et de soucy!
RiFFLART, quatrième pastoreau.
.le suis bien des vostres aussi
'.5S0 son A. C. — 4583 ouy manque A. Au surplus bien seruis sercs A. syro, oyl C. — 4588 qui A. greigneur B.
'•591 Ce lieu nest de grant A. — 4595 que demourer en niy A. — 4599 qui A. — 4C00 mon] bon B. C — 4001
1 iuo]i irealeur plaira A. — 4603 duysanl A. — 4612 qui A. C. — 4613 rostre A. — 4615 attendons B. en
utliMulanl C. — 4B17 ce feu A. — 4620 qua ci-. <-oiiijr enlace A. — 4623-4731 manijurtlt C. feuillet déchiré. — 4630
une manière dune coste B. — 4635 douera B. — 4637 vous auen bien gaigne a boire B. — 4640 brebis A. — 4051
voalre A.
60
M I S T R R p: de la p a s s I 0 N
atout ma barbete fleurie ;
quand j'ay du pain mon saoïU, je orye :
fi de richesse et do soucy !
ALORIS
■4655 II n'est vie si bien nourrie
qui vaille estai do pastourrie.
YSiMBERT
Est il liesse plus série
que de regarder ces beaux champs
et ces doulx aignelés paissans,
4060 saultans en la belle prairie?
PELLION
On parle de grant seignourie,
d'avoir donjons, palais puissans;
est il liesse plus série
que de regarder ces beaux champs?
RIFFLART
4665 Quand ma pennctiere est fournie
de bons gros aux et nourrissaiis,
de ma flûte vous fais uns chans,
qu'il n'est point de tel symphonie.
ALORIS
Est il liesse plus série
4670 que de regarder ces beaux champs
et ces doulx aignelés paissans,
saultans en la belle praerie?
Quand le beau temps voyent,
pastoureaux s'esjoyent,
4675 chantent et festoyent,
et n'est esbas qui ne soient
entre leur déduis :
Leurs chappeaux cointoient,
leurs gippons uestoicnt,
leurs moutons pourvoient,
leurs chiens retourner envoient,
ceulx qui sont mal duys.
Le jour passe, et puis
quant viennent les nuis,
leur'parc cloyent et appoyent,
et se loups famis
venoient qui les guerroient,
des chiens sont remis.
YSAMBERT
En gardant leurs brebietes.
pasteurs ont bon temps;
on gardant leurs brebietes,
ilz jouent de leurs musettes,
liés et esbatans,
la dient leurs chansonnetes ;
4680
4685
4690
470O
47)
et les doulces bergerettes,
qui sont bien chantans,
cueillent herbes bien sentans
et belles fleurettes ;
qui pourroit vivre cent ans
et voir telz baguettes !
pasteurs ont bon temps.
PELLION
Bergier qui ha pennetiere
bien cloant, ferme et entière,
c'est ung petit roy;
47(K bergier qui ha pennetiere
a bons cloans par derrière
fermant par bonne manière,
que lui fault ? quoy ?
il a son chappeau d'osiere,
4710 son poinssou, sou alleniero,
son croc, sa houllette chère,
sa boite au terquoy,
beau gippon sur soy,
et par esbanoy
sa grosse fleute pleniere,
souUiers de courroy
a beaux tacons par derrière ;
face feste et bonne chère :
c'est ung petit roy.
RIFFLART
Forsetes, cousteaux pragois,
grosses mouffles a deux dois,
son coffin aux nois,
Icallendrier de bois,
du lart en ses pois,
4725 paletos sarrazinois
luy vallent ilz rien ?
grosses botines a plois,
des flajollès deux ou trois,
tabours et fleutes de chois,
4730 patins en lourdois,
lacés au gallois,
pour mener aucunefibis
Rriet, leur grand chien;
et se je vouloye bien
47ffi deviser tout leur maintien,
je n'aroye fait des mois.
ALORIS
Nous chantons cy nos serventois,
mes je ne voy berger qui songne
d'aller exploitier sa besongne
4740 et mettre ses brebis appoint.
4720
4053 Mais que jaye du pain B. — 4C59 ses A. — 4660 a A. — 4661 Len B. — 4662 et do portes a tours B. —
4668 qui A. — 4682 retourner ceulx etc. B. — 4682-4683 puis Quand il est nuys B. — 4087 y viennent B. — 4688
ilz sont bien remis B. — .',708 il faut il A. — 4700 son man'/ue A. — 4712 tart quoy A. — 4714 par lesb.inoy B. —
4/17 tasseaulx B. — 4720 pradois B. — 4724 jatte aux pois B. — 4729 villes de bois B. — .',731 laisses A. — 4737
Nous parlons ey bien de guingois A.
PREMIERE JOURNEE
61
YSAMnERT
Aloi'is, lie te hasto point :
encof est le soleil tout hault;
nous nions tantost fait ung sault,
80 nous voyons qu'il on soit heure.
PEIXION
4745 Faisons icy nostie demeure,
hardiment cncor une espace ;
il n'est point de plus gente place
pour nous, sans que plus hault montons :
nous voyons paistre nos moutons
'.750 et nos portières i-uminer ;
ilz ne pourront pas cheminer
que tantost on y remédie.
RIKFI.ART
Avant qui que soit, si nous die
dos nouvelles en attendant.
AI.ORI.S
'.7jj N'a pic qui en sache tant
que toy, Rifflart ; tousjours en trouves ,
car avant les fcroycs neuves
que tu n'en feusses bien fourny.
YSAMBERT
11 ment aussi bien quant a luy
1760 que voisin qu'il ait, tant soit graus,
et aussi bien aux jours ouvranz
qu'ung aultre foroit au dimanche.
RIFFLART
Voule/, vous donc que je coramancc
a faire ma narracion?
PEI.LION
Ne mens point; fais en conscience.
RIFFI.ART
Voulez vous donc que je commance?
AI.ORIS
C'est raison qu'il ait audience,
veue la supplicacion.
RIFFLART
Voulez vous donc que je commance
70 a faire ma narracion?
Je vous dys qu'hier soir, environ
soleil couchant, que je ne monte,
maistrc Ysangrin quei'oit sa rente,
comme il en est bien coustumier.
75 A mon parc s'adressa premier
et saulta tout oultre la cloyc ;
se n'eust esté que je veilloye
d'adventure cousant ma Juppé,
il avoit trouMo «ur sa crappc
4780 un gras mouton sans dire gare.
Jo criay : Biict, haro ! haro !
tant que Robin a se» choiti couDtz
lui futnrraché et rcscoux;
ou aultremont il l'oust mangé.
YSAMBERT
4785 As tu si longuement songé
pour dire ce» boimcs nouvelles ?
PKLLKf.N
Se tu n'en comptes do jdus belles,
ton faict ne vault pas ung aillot.
ALORI.S
Est ce tout?
RIFFIAUT
Or ne soimoz mot,
'.790 et vous orrez fais bien nouveaux.
Je monay liior bien ti'ente aigneaux
vondi'e en Betteen a la festo ;
mes qui n'aroit vou jamès teste,
voise la, on on voitassés.
4795 Mes quoy, Ysambert, tu ne scés?
je regarday un cschafrault,
les gens assis tout au plus hault,
vestus dessus do robes linges
et einmantelos comme sùiges
4800 si très drus qu'ilz s'entretenoient ;
de grans fuoillios ilz retournoient
et s'apprestoient pour escripre,
mes quoy, je ne sçay pour vrai dire,
et qui pis est, il ne m'en chault.
YSAMBERT
4805 Fais le court.
RIFFLART
J'ay fait, autant vault.
Ainsi que rogardoye amont,
vint ung de ceulx, ne sçay qui sont,
coulx qui font les gens enfermer...
haro ! ayde moy a nommer...
4810 qui portent ces bâtons d'argent,
c'est, c'est...
PELLION
Il voult dire un sergent,
qui maiue les gens en prison.
RIFFLART
Ne plus 110 inoins, tu as raison.
11 me mena connue contrains
4815 par devant ces gros machcfraiiis.
4741 ten li. — 4743 tost fait C. — 4753 Au.int que (luil que soil, nous die A. et auant C. — 4755 ny a A. H. il ny
a C. — 4*57 feroyes tu A. B. C. — 4761 les jours A. — 4765 Ne mens point don*' en conscience G. — 4766 donc
manque C. — 4774 en manqua C. — 4775 sadressa a mon parc B. C— 1776 une B. C. — 4777 mais se ne fust B. ne
»iaii7iif C. — 4778 courant C. — 4781 je huohai B. Baillet A. — 4784 1' manf/u- A. — 4786 tes B. — 4788 tout ne
vault pas C. — 478D esse tout? A. B. C. — 4791 bien manque B. — 4793 oncques B. C. — 4794 leo il en verra B.
ilec il en verra C. — 4796 je regarde C. — 4797 et gens C. — 4798 de robes dessus linges C. — 4799 oinges A. —
4800 qui A. — 4801 qui ces B. si grans C. — 4803 vous dire C. — 4808 vont A. — 4811 Cest chose B. ces choses...
tu veulx dire C. — 4815 machefoins. H. G. 4.'rans C.
62
MISTERE DE LA PASSION
Dont es tu ? dit l'un ))ion habille.
— Je suis, ce dis jo, de no ville,
tout nourri do pois et de lart.
— Et comment te nomme on? — Rifflart.
4820 ce dis je, ne vous en chault? — Non,
mes il rirent tant de ce nom
(ju'oncques folz n'eurent si graut ris ;
lors me mirent en leurs escrips
et me renvoyèrent sans boire.
ALORIS
4825 Et sans manger ?
RIFFLAHT
Par mes ans, voire,
de quoy je me tins bien de lire.
YSAMBERT
J'ay, passé huit jours, oy dire
que je ne sçay quel grant seigneur....
comment le nomme on ?
PELLION
L'empereur?
YSAMhERT
4830 Voire, c'est l'empereur do Romme,
qu'il fait escripre chacun homme
en ses iiapiers ; est il bien sos !
ALORIS
Escripre? mais a quel propos?
est ce pour faire une bataille?
RIFFLART
4835 Voire, ou pour payer une taille,
hardiment, qui nous sera dure.
PELLION
Je ne sçay, voist a l'aventure!
se gens viennent de tant de lieux,
nos moutons si s'en vendront raieulx
4840 en Betleen et autre part.
YSAMBERT
11 est temps de faire doppart
et de nous aller habillier,
car ennuyt nous convient veillier
sur le troppeau, chacun par soy,
ALORIS
4845 Je suis tout prcst.
RIFFLART
Si suis je, nioy,
pour veillier jusques a matines.
PELLION
Mes que j'aye prins mes botines,
et mes mouffles a gros noyaulx,
' s'il gelloit jusques aux crappauX,
4850 je no craing froidure qui viengne.
YSAMBERT
Nous sommes bien, chacun se tienguo :
qui verra le loup maine l)ruit.
ALORIS
S'il vient il y ara déduit ;
chacun se garde de mespreiidro.
[Pose.]
JOSEPH
48te O chère dame, vueillez prendre
ung bien petit vostre reppas,
et tant ne vous traveilliez pas,
car le trop grever n'est pas bon ;
tousjours estes eu oroison,
4860 tousjours priez et prenez peine :
et touteffois nature humaine
n'est pas a ce faire puissante ;
eucor vous, qui estes pesante,
n'avez do grand jtraveil inestier.
NOSTBE DAME
48()5 Joseph, je le' fais volontier;
et j'ay bien cause légitime,
car le terme est forment proxime
de mon benoist enffautcnieut,
et pense que présentement
4870 l'eure en sera parconsommee.
JOSEPH
0 dame de grand renommée,
sur toutes vertueuse et bonne,
ceste place n'est pas ydonne,
mes très ville et trop mal parce :
4S76 mes puis que l'essence increee
a le terme ainsi ordonné •
et au terme ce lieu donné,
loué en soit Dieu mille fois !
Et quand en cest estât vous vois,
4880 de doulouzer ne puis me faindre.
NOSTRE DAME
Cher sire, ne me vueillez plaindre
no prendre en vostre cueur tristesse,
car joye et parfaicte liesse
sont en moy très habondammeut.
4885 Pourj crainte j'ay asseurement
'•«16 don C. — 4817 se A. — 4819 coimiie C. — 4820 ce Manque B. — 4822 oonoques A. — 4S31 qui A. B. veull
faire escripre tout B. 0. — 4832 pays C. - 4834 esse A. B. C. — 4838 ces A. — . 4S39 nostre bestial sen vendra A.
— 4842 pour B. €. — 4816 iusquâpres 0. — 4S47 chausse A. — 4S49 et gelast B. C. — 4852 et qui C. — 4853 y
vient il ara C. — 4856 ung petiot B. un petit C. — 4858 peuor B penser C. - 4807 forment mcspnme B. C. — 4874
aincois ville et mal parée B mais ville et orde et mal C. — 4875 incree A. B. C. - 4876 et le terme C. - 4880 ne
me puis C. — 4881 mon cher C. — 4882 a vostre B. — 4884 ardamment C.
I
^^m certniu do non oMic gi'uvcc
^^B pai' vii'giiiiti') cuii8Ci'vco
^^f dont ronfuntuiiient He féru
^^^ qui eu riens no nie grèvera;
■1890 pour pcsnnco ay ligereté,
pour foiljies.se pleine «anté,
car mou corps et mon ame ensauiJjle
sont bien disposés, co me samblu,
tet ne sens chose qui me grieve.
JOSEPH
Or je roquicr Dieu qu'il abriefvo
ce niistcre tant gracieux,
affin que le fruit précieux
puissions humblement recevoir.
Marie, jo vous vois pourvoir
*vw de ce qui sera nécessaire
a vous aidior dans cest aft'aire ;
le pouoir y est moult petit,
mes neantmoins j'ay bon appétit
de faire touto diligence.
Ici/ se met Noxtre Dame sur sa couche, Joseph
va songner de menues choses pour l'enfant.
DIEU LE l'EUE
Le temps est que ma providence
ha disposé et ordonne
que mon cher filz Jhesus soit né
do la noble vierge sacrée ;
et affm que mieux consacrée
IIO soit si noble nativité,
angles, par grand agilité,
pour mener feste plantureuse,
do voix doulce et mélodieuse
prononcez ung beau silete. t
Chançon aux angles tous ensamUe. \
[SlLETE.]
La festlvité
vient que le seigneur,
du monde et sauveur,
Doit estre enflante;
u sa majesté I
soit los et homieur 1
C'est humilité
au haïUt créateur
d'estio viateur
Et a deité
PREMIERE JOURNEE
Viïj joindre liumaiiitt)
pour son Hervittnir.
m EU I.E l'KKK
l'our monstror noblesm> et haullcui-
a ccste ))cnoito journée,
je veil qu'en terre soit donnée
11)30 grâce de; quoy puissent jouir
les humains pour culx rc«jouir,
et vueil que d'angles grant i>artiu
s'en voisent en celle partie
ou la vierge merc se gist,
4«a5 et le lieu qui pas ne souffist
estre a tel fait deternriné
soit noblement enluminé
et fulcy do noble lumière,
et nostro amoc tresoriere
1940 de tout resjouye et reffaite,
de vraye liesse parfaipte
et noblement accompaignie.
Vous luy tendrez tous compaiguie,
tant que l'entlantement divin
1915 soit reveramment traict a fin,
comme le mistere en est digne.
MICHEL
Souveraine essence divine,
vostre conmiand accompliron.s
et la vierge consoUerons
■iDôO on portant reverand honnuage.
GABRIEL
Souverain roy de hault paragc,
tout ce qu'avez dit, sera fait
et de très grand vouloir parfait ;
c'est bien raison, juge très sage.
niEU LE PERE
4955 Gabriel, nostre cher message,
si tost que l'enrtant dessus dit
sera né par joyeulx edit,
la nouvelle soit demousti-ec,
aux pastoureaux do la contrée,
4960 qui leurs troppeaux gardent et veillent;
car il me plaist qu'ilz se reveillent
a ceste joyeuse naissance.
GABRIEL
Kon Dieu, en vostre obeyssauee
sommes tous de grâce remplis ;
49(38 vos commands seront accomplis,
comme les avez connnandés.
Icy descendent atout torches et cierges ardans
et eont au lieu ou gist Nostre Dame^
te*" coiif.irmci' C. — 4S()0 pesiiiileur jay C. — 4S!>5 abrepe C. — 4002 il est A. — 490! mes iiimi'iur A. — 4904 (le
rendre toute A. — 4U05 L'iudirali'iii n'i^iw/uf^ dan^ C ''S< ii itmninte : /et/... *■( tatt'iiz Josfph ra soigner d-'
eueunerhif/' i)iHtr Vi'nfaiit. — 4907 cher «Kiit/u ■ C. — 4aOS haiilte O. — 49i7 et manque \. — 49»< <•« A. <le V..
— AaSt voisent a lielle coinpaiîfnie I). — 4934 la douliw dame si gist. C. — 493.S fulfucy 0. — 4939 a nostre T.. — 494U
da tout C. — 4941 lumièri- A. — 4943 Danges a uobli- loirtpaignie C. — 4951-4951 wurt'/uoiU B. C. — -1957 unj
Joyeulx B. (.:. — 1958 soil la uouuelle li. C. — 4960 bestes C.
XISTKKK BS LA PASSIFS
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PREMIERE JOURNEE ■ «5
et uwoM. ta « la féem et h tmde
(PO».]
SMS il est temps qpe i^ummu doTe,
espoir que se trop atteodoye,
Siariearoit
O^oriewe
qn*est ce que je tôt a cesia teare t
l UBO rappençois aag cnfiat qm pleue,
loat Ma »ar le fcrr» giiawt \
et la mère a goMndx deraat |
radonotpar
coaoBwladmDe
3K5 defnrt qni loat geaoal s'twnMr ;
et moy, porre pecfaenr inili|;f',
etoMB
coarert oe
sa» giMBt en td fragilité,
qn'ar je a~&ire poar le
anoB de taoj racr a tare
et adonr le Muamaa aé
qui estre et Tte m'a doaaê t
sœ Moohaakcfeatev, mMaeaijage,
,teltelieaB,ldteJBKe,
lt>y<
qui m'i
qa*a hm poMir ame ae m rniperf :
t je t'adoK «t te dMne a «ois |
I dnabt i. iilTtal , moB TravDieaet moapere.
Ta es le aaahear da monde,
aiABtoa te
pardi
Delof ■DdrekîearedoiMfe: fli de kMrit pris aè de pcfite
Jtm%tùea» C — SW7 «alm C — S»» ii«fce B. a — SU* 1*^ «dits B- <^ — SIM Qm Mb r«Màr at ■«*>*
MWC — son fr <« t— » C. — 3»» JoJ» wiM C — 5K»-aWt i—i» r«r C. -SM» JMVB. Inft ■•■«»
C — son raraMrt C - SMt ifiULUt B. — MM iii|ai & C. — 51» «wrf A. - Sttl ■^■'«f A. _ SBt
fri* C — SlSt Q«i arc«ftec aws hay Twttv aanOc B. - 5tB Bff I C — M» &wt C — 9» O Km B C
Pas. . à
66
que puis je plus ? Je t'adnouce a voix saine
mou doulx euflaut, mou vray Dieu et mon père
JOSEPH
Ta naissance nous esjoye,
a tout le nioude fait joye
5135 et resjoye
tous les trosnes glorieux ;
Tout paradis en festoya,
n'est angle qui no s'employe
a moutjoyo
5140 formel- chaus mélodieux.
Ave, fruit très précieux,
ave', saulveur gracieux
et piteux,
et se plus dire savoye,
5145 De cueur humble et amoureux
le diroye pour le mieulx,
ce scet Dieux :
or doint qu'en gloire te voye !
NOSTRE DAME
Dieu par sa grâce nous pourvoie !
5150 Joseph, en ceste mansiou
a si povre provision
que c'est grand pitié, Dieu le scet.
, JOSEPH
Veez cy des drajipeaulx six ou sept,
telz que je les ay pu trouver
5155 metez l'enfifant eus sans grever :
il se passera bien ainsi.
J'ay apporté du lait aussi
que je vois bouillir sans targer,
pour luy faire ung peu a manger,
DlBO affin que faim ne le sui prende.
NOSTRE DAME
Ti'es cher sire. Dieu le vous rende
vous prenez peine largement.
UAHUIEL
Faire vois le commandement
de Dieu envers les pastoureaux
5165 qui veillent huy sur leurs aigneaux ;
si leur poi-teray la nouvelle.
MICHEL
Vous avez compaignie belle
a vostre mand exécuter.
UAPHAEL
, Jusque la me veil depporter
5170 avec vous, pour mener liesse.
MISTERE DE LA PASSION
Icy s'en vient Gabriel devant atout grand
lumière vers les bergiers et les autres vien-
■nent après tout bellement.
ALORIS
0 Dieu d'Israël, quel chose est ce
que je voy devant et derrière ?
oncques je ne vys tel lumière,
bergiers, regardez que voicy.
YSAMBERT
5175 Vertu divine, qu'est cecy ?
qui vit oncques mes tel merveille l
PEILI.ON
Fol est qui ne s'en esmerveille
de veoir a inynuit ung tel signe.
RIFFLART
Je cuide que le monde fine,
5180 ou la lune a changé son cours.
ALORIS
Ha ! doulx Dieu, donne nous secours ;
ceste clarté qui lesplendit
par tel façon nous esbayst,
que nous ne nous osons mouvoir.
UABRIEL
518j Bergiers, ne veilliez crainte avoir :
bonnes nouvelles vous anonee,
grant joye et pleine vous dénonce
qui a tout le peuple sera :
le saulveur qui rachètera
5190 le monde qui trop dépérit
(c'est nostre seigneur Jhesu Grist)
vous est au jour d'uy né sur terre ;
et se du lieu voulez cnquorrc,
c'est en Bethleeu la citi',
5195 et en signe de vérité
quand le petit enffant verrez,
cnvelloppé le trouverrez
et nu en la croche gésir.
RAPHAËL
Sus, angles, par joyeulx plaisir,
5200 de cestuy mistere tant beau
commançons ung chant tout nouveau
pour les pastoureaux resjouir.
URIEL
Chant doulx et plaisant a ouir
(Usons ensemble, je le lo.
{Chantent tous ensemhh: ;]
5205 Qloria in excelsis Deo
5131 te nouce B. a liault seine C. — 5142 vertueux B. C. — 5151 petite C. — 5155 mettez ens B. C. — 5161 très
manque C. — 5164 deuers B. vers C. — 5171 esse A. B. C. — 5175 quesse cy A. B. et quest cecy C. — 5179 Peut
estre C. =- 5181 donnez B. — 5191 sire B. — 5197 vous le A. — 5199 pour B. — 5202 pasteurs C.
PREMIERE JOURNEE
«7
<:t in terra pax ho ninibus
bonee voluntatis !
MICHEL
Gloir(^ soit nu hmilt lieu doniieo
a Dieu qui louti^ diose ordomio!
GAnniEi,
52i0 l'^t eu Unie )iiiix ordwinee
aux hommes de volcnto bonue !
ficy s'en retournent les anffes en Paradis, et
en doit tousjuws dcmourer ung avecques
Nostre Dame.
ALonis
0 crceur de toute pai'sonuo,
vecy nouvelles do hault pris ;
do joyo soiiuues tant esiiiis
5215 (lue ne savons que doyons faire.
YSAMBRRT
Qui mon conseil voudra parfaire,
eu Bethleou nous avoyons,
affin que ce sacre voyons,
(pie Dieu lia fait traire a uaissanco,
[ 5220 coniino il nous fait sigiiifiance :
nous n'en serons gueres grevés.
PELLION
Ysambert, tl'es bien dit avez ;
chacun se mette en appareil ;
' nous en irons par mon conseil,
[58*8 (jui vouldra, nous suyve le pas.
RIFFLART
Quand a moy, je n'y fauldray pas,
j'y scray des premiers aussi.
ALORIS
Nos brebis demourront icy ;
Garnier et Gombault a la tasse
1 5230 les garderont pour une espace,
tant que nous soyons retournt's.
YSAMBERT
Sommes nous très bien atournés ?
Chacun ha il ce qu'il fauldra ?
Partirons nous?
PEI.LION
Quand l'en vouldra.
0235 Cheminons, (jue Dieu nous conduyo!
NOSTRE DAME
0 mou clier fllz, trop s'humilie
ta haultesso pour ceste fois ;
trop simplement lugii te voiij,
my divin, pure majesU-,
.5*40 quand il fault que par povretô,
en la ci'ocho des bcufz te couche ;
ton indigence au cuour me touche,
et «i ne la puis amender.
J08BPU
Pitié me fait a regarder
5Ï45 et ne puis reffroner mou vneil
que par haboiidaucc de ducil
ne fonde d&s larmes dessus,
quand le roy des angles lassus
soitist place tant imparfaicto.
.NOSTRE DAME
5Ï50 La volenté de Dieu soit faicte ;
nous ne la poons trespasser.
[PqSE.]
JASPAR, premier roy.
En mon cueur ne puis trop penser
quel signifianc;' a en soy
cette estoillo que j'apper(,'oy
5255 dessouhz le cerne de la lune ;
ce n'est pas estoillc commune,
car les aultres do commun cour
luysent de nuyt, non point de jour,
et ceste a toute heure se monstre.
5200 Si fault dire qxi'cUe demonsti'C
quelijue significacion,
ne quant a situacion
aux aultros pas ne s'appareille,
car elle est moult basse a merveille,
5265 et les aultres sont hault assises ;
irauitant après toutes devises,
il fault dire qu'elle nous signe
quelque hault et mirable signe
qui est de nouvel advenu.
ANTHIOCUS, chevalier.
5Î70- Sù-e roy, c'est très bien congnu
et jugé de bonne prudence,
et jMur renforcer la sentence,
il n'est op))inion qui mette
ne (jui la tiengne ostre cornette,
51875 car combien que comette vienguo
paroir en l'air et la se tiengne
jiar nuyt monstraut lueur planiorc.
5212 iTcaleuiC. — 5215 douons ('.. — 5217 «a yrons C. — 5218 li^ sacre C — 5220 inagnelicenip C. — 5225 si
nous C. — 5227 jo A. B. C. — 5229 Cobc-rt A. lî. — 5230 bien une H. — 523;) qui A. il luy H. faull C. — 5236 se A.
B. G. — 5243 le A. — 5247 de lermes B. — 5248 de lassus T.. - 5253 quelle C. — 5258 et point C. — 5259 ceste
cy toujours A. — 5264 bas B. teste est C. — 5267 qu« U. — 5272 omplier B. C.
68
5280
5285
5290
5295
5300
5305
5310
5315
5320
par jour ne rend point de Inraiere ;
par quoy fault dire par di-oiturc
que cestc est d'une aultre nature
et pour aucun niistero faicte.
JASPAR
Elle est vrayc estoille et parfaicte,
clere comme seroit Venus,
et croy que les jours sont venus
de l'estelle "que moult prisa
Balaan, qui prophétisa
que de Jacob par grand mistere
naisteroit une estellc clerc
et d'Israël devoit descendre '
une vierge pour entreprendre
les princes de Moab desti-uire.
CELSANDER, chevalier.
Oncques ne veys estellc luyre
par si admirable vei tu ;
si me suis assés consentu
a l'oppinion que tenez,
sire roy, et que cil soit nés
dont les prophètes ont escrijjt.
JASPAR
S'il fut par dit ou par escript
que je sceusse la vérité
du fait de la nativité
de renflant des long temps promis
qui doit estre roy des Juifz,
jamcs ioy ne resteroye
jusqu'à ce qu'adoré l'aroyc
en juste et vraye obeyssance,
car des le temps de mon enffance,
je l'ay proposé en ce point.
ANTHIOCUS
Sire roy, je ne doubte point
que l'estelle que nous voyon
ne face demonstracion
d'ung très hault fait, au vray jugiei
et croiroyc assés de ligier
que l'enffant dont avons parlé,
vray roy des Juifs appelle,
fust Imy en terre descendu,
considéré et attendu
qu'en l'esperit de prophecie
Balaan le nous verrific,
qui ceste estelle nous prouiist.
CELSANDER
L'estelle qui clor resplondist
MISTERE DE LA PASSION
a ceste heure pas n'enlumine
se ce n'est par vertu divine,
et croy qu'elle nous monstre aussi
quelque etfect de ce monde cy
5325 qui soit de divine ordonnance ;
or n'est il plus haulte alliance
que celluy roy en terre naisse
en qui gist la plus grand haultesse
que jamès nul roy peust avoir.
JASPAR
5330 Celsander, vous avez dit voir,
vous faites très bon sillogisme ;
ceste estelle en mon cueur imprime
qu'uiig très grant bien m'en advendra.
Et pourtant mettre a point fauldra
5335 bouges, bahus, fardeaux et malles
et les besoiignes principallcs,
qu'il nous convient a voyager, •
car jamès ne vouldray targer
tant qu'en vraye devocion
5340 j'aye fait adoracion
a cil que l'estelle présente
nous signifie et représente.
Je ne sçay qu'il est ne qui non,
ou il est, ne comme est son nom ;
5345 mes, se possible est, je feray
tant de pas que le trouveray,
quelque lieu que doye vertir.
ANTHIOCUS
Sire, quand il vous plaist partir,
toutes nos besongnes sont prestes.
CELSANDER
5350 Ne restez plus pour les apprestes,
tout est prest quand il vous pleura.
JASPAR
Dieu, s'il luy plaist, nous conduira,
et le bon roy que nous querons !
Et voicy comment nous ferons :
5355 a giand peine vendrons a fin
de nostrc voye, mes affm
de nous rigler aucunement,
l'estelle appert en oi'ient :
nous nous riglerons dessus elle,
5300 cheminant tousjours vers icelle
sans lien nostre chemin muer;
et croy que par continuer
nous vendrons en quelque province,
qui de si hault et puissant prince
5365 nous dira quelque bon rapport.
5280 quelle est tout dune autre A. — 5288 lequel G. — 5289 et que G. — 5293 amiable G. — 5294 et me suis G. —
5298 Sy A. — 5299 jen G. — 5300 ou fait G. — 530i de G. — 5302 lequel A. — 5303 narresteroye G. — 5305 et juste
et G. — 5314 haultalu A. — 5317 que B. G. — 5321 ne A. — 5322 ce se A. euure B. G, — 5324 en ce monde ycy G. —
5326 nohle B. G. — 5329 puist B. G. — 5333 ung grand bien qui B. G. — 5337 qui A. B. — 5340 aroy B. G. — 5341
qui A. B. G. — 5344 fomnient C. — 5347 qui \. — 534S plaira G. — 5350 mais B. narrestez G. — 5352 si A. —
53C4 ce haull C.
l'RKMIKHK .lOllRNKK
«9
ANTH10C.U8
Dieu nous «ioint venir a bon pofi I
sire roy, voius parlez très ))ipn,
do vous un discoiclons en lieu ;
n'y a que de nous mettre a voye.
CELSANDEIl
5370 Je requier que cil nous convoyé
pour qui rcstello est composée,
affin que sa face alosoc
puissions voir et magniffier.
Ici) se mettent a la voye
devant Vestoille.
MELCiOR, deuxième roy.
Quel chose vcult signifier
1375 ceste estello qui est tant basse ?
il semble que les aultres passe
en vei'tu de luyre a ccsto heure ;
il fault dire, je vous asseure,
que le haultain roy couronné
5380 des Juifz a ceste heure est né :
voy la le signe qui ne fault.
CADORAS, chevalier.
Sire roy, vous parlez bien hault,
en ce cas gardez que vous dictes ;
ce ne sont pas choses petites
5385 de prenostiquer telz explois ;
bon fait doubler aucuucffbis,
pour avoir plus grand certitude ;
si vault mieulx bonne doubte et mde
que savoir trop présomptueux.
MELCIOR
5390 Mes ditz sont bons et vertueux,
et sont fondes sur la parole
Balaaii, qui soubz parabole,
par grand deliberacion,
nous bailla declaracion
5393 d'une cstoUc qui doit descendre
de Jacob, par qui puis entendi'e
une vierge qui naistera
et ung si grand roy portera,
qu'il tendra dessoubz son domine
5100 toute Judée eu discipline ;
sa venue est pieça promise
par toute la loy de Moyse ;
prophètes en t<'xte et en glose
ne chantent a |)«u d'aultre rhoso :
5406 dont, quand j'ay veue C08t« estelle
en cours, en lumière nouvellis
j'ay jugé qu'elle nous proteste
la nativité magnifestc
de celluy roy ; et dis ainsy
5M0 qu'il fault qu'il soit né au jour d'uy
que l'estello s'est apparue.
P0LID0RU8, chevalier.
A'ostre raison ti'cs bien argue
et procède d'un très bon seas,
puissant roy ; asscs je consens
5'il5 que vostre oppinion soit bonne,
mes se la chose ainsi s'ordonne
qu'il soit né par quelque avanture,
quel chose voulez vous conclure
• affin que nostre exploit s'aroye ?
MELClOR
5'i20 J'ay propos do me mettre en voye
et jamès rester en voyage
jusqu'à ce qu'honneur et hommage
luy aray rendu dignement,
et avec ce très largement
54S5 luy poi-teray de mon trésor.
CADORAS
Et voulsissez partir des or,
nostre chose est toute apprestee.
MELCIOR
Fartons, que la veitu doubtee
de Dieu soit en nostre convoy !
Icy se mettent a chemin comme les autres
et cheminent après.
BALTAZAR, troisième roy.
5'i30 Or loué soit Dieu, que je voy
l'estelle clere et bien omee !
o benoite soit la journée
que Dieu la m'a donné choisir !
Long temps par ung ardent désir
5435 ay attendu ceste venue,
espérant que fut advenue
la promesse que fit jadis
Balaan, quand en ses beaux dis
nous proraist l'estelle future ;
5368 de tout C. — 569 en voye A. — 5370 cil qui B. C. — 5372 for.-e C. honor(>e A. — 5375 tant est B. —
5377 en C. — 5378 par voye seure B. C. — 53ï0 est a ceste heure ne A. — 5386 aucnnetrois C— 5390 par quoy C, —
5397 Que dune vierge qui naistra C. naistrera A. — 5398 l'ng roy et si grant portera C. — 5399 qui A. — 5404
d' manque B. — 5411 cest A. — 5414 Sire roy et asse» B. C. — 5416 de A. — 5418 chose en B. C. — 5449 se
A. — 5420 moy B. a voye C. — 5421 au B. et de C. — 5426 Sire se voulez C. — 5430 La deurifme partie de l'indi-
cation scénique n'est que dans C. — 5431 aornee A — 5438 et benoite C. — 5433 Dieu manque A. — 5435 attendue
la B. sa C. — 5438 par A.
70
MISTKRK DE LA PASSION
5U0 or la voy ; le Dieu de nature
en loue de cueur et pensée.
LUCANUS, chevalier.
Quel gaigne y avez vous pensée,
noble roy qui tant la prisez ?
moult haultement l'autorisez :
5445 je ne sçay combien vous proffite.
BALTAZAR
La noblesse n'est pas petite,
Lucanus, en ce nouveau signe,
car ceste estelle nous désigne,
selon les documens plusieurs
5'é50 q[u'ont donné nos prédécesseurs,
que le haultain roy naturel
des Juifz au monde mortel
est no ; et dieut tous en somme
que celluy roy est Dieu et homme :
5455 dont jamès je ne seray aise
pour quelque chose, tant me plaise,
jusqu'à tant que l'aray veii
et de mes trésors pourveu,
adorant sa haulte noblesse.
piRODES, chevalier.
5460 Vous devisez àc bonne adresse,
noble roy ; et est convena))le
qu'un roy qui est tant vcrtuable
soit honoré a grand effort ;
mes a le trouver gist le fort,
5'.65' car quelque nouvelle ne court
ou il gist n'ou il tient sa couit :
sy fait bon emploier ses jias.
BALTAZAR
Cela ne ra'arrestera pas,
car un ver dit, et je l'approuve,
5'.70 que celluy qui bien quicrt bien trouve ;
ceste estelle assés bas se trait
et vers Judée prent son traict ;
suyr a l'ueil nous la convient.
LLCANIS
Je requier Dieu dont tout bien vient,
5475 qu'a joye nous y doint venir.
[POSB.]
ALOniS
Bergiei-s, de tout fault souvenir
quand je me suis bien advisé,
encor n'avons point devisé
quelz presens ne de quel façon
j'jSO nous ferons a cest entfançon,
mes que nous soyons la venu.
YSAMBERT
Aloris, c'est bien souvenu ;
il y fault penser en présent.
PELLION
J'ay bien advisé quel présent
5485 je luy feray, qui sera digne.
RIFFLART
Quel, je te pry ?
PELLION
Or adevine,
et tu orras bonne sornette.
RIFFLART
Tu luy veulx doiyier ta houlette
ou ton beau cliapolet troué ?
PELLION
5490 Encor ne l'as tu pas trouvé :
ma houlete m'est trop propice ;
sans elle n'est riens que je fisse ;
encore s'il la desiroit,
je me doubte bien qu'il l'aroit,
5495 tant est bien mon petit cousin.
RIFFLART
Luy donras tu ton chien?
PELLION
Nennin ;
qui retourneroit mes brebis ?
RIFFLART
Tu luy donras donc du pain bis
et des chastaignes ung grant mont ?
PELLION
5500 Nenml.
RIFFLART
Que luy donras tu dont ?
est ce ung don si au lignollet ?
PELLION
Je luy donray mon flageoUet
tout neuf ; il n'est pas de reffus :
oncq puis en Betleen ne fus
5505 qu'a ung de ces petits mercière
il me cousta deux bons deniers,
et encore pour soy esbatre
ne sçay homme qui l'eust pour quatre ;
mes neantraoins, et fust il plus riche.
» 5449 enseigneraens G. — 5452 en ce A. — 5453 tout B. C. — 5457 Jusques a tant que laray B. a ce que G. — 5458
grans trésors A. — 5459 noble haultesse B. — 5466 ne ou A. ou B. Ou il est ne ou il tient sa court G. — 5467
fait il... ces C. — 5473 Suyr nous la conuient a lueil B. — 5474 Je requier Dieu donc de bon cueur A. celuy dont
tout B. cil dont ton G. — 5475 qui B. — 5476 Voirement de tout B. G.— 5480 a cel C. — 5481 Sen Bethléem sommes
B. G. — 5482 sest A. B. — 5486 ladeuiue B. — 5492 lis ce B. — 5493 si A. Mais encor B. G. — 5494 qui A. — 5498
dung bon B. du bon G. — 5500 N'ennil, non C. — 5501 Esse A. G. Gest ung B. — 5504 Ains puis G. — 5509 et
manf/w* A.
PRP;MIERB JOURNEE
71
5510 il l'ara.
Al.nni8
IjO lion n'est pas chiclio,
mes fist digno de grand guordon.
YSAMBERT
.l'ay advisé ung aultre don
d'une aultre bague bien doulcete :
je luy donray une hocheto
si très bien faicte que merveille,
qui (lira die clic a l'oreille ;
au moins quand l'enfant plorora,
la hochete l'apaisera,
et se taira pour une pose.
ALonis
.le lui donray bien aultre chose :
j'ay ung' lieiui kalendrier de bois
pour savoir les jouin et les mois,
le karesnie et le nouveau temps ;
par luy toutes festes entens,
ne trouve si juste qu'il est ;
chacun saint a son marmouset
cscript de lettre de berger,
qui n'est pas lettre pour songer.
Cella luy fera avantage :
au moins s'il vient en avant aage,
il apprendra a les savoir.
RIKKLART
C'est mig don qui vault graut avoir,
et ftist pour donner a ung conte ;
mes je fais a part moy mon compte
de luy donner une sonetti;
qui est pendue a ma cornette
depuis le temps Robin Fouet,
et puis ung très beau pirouet
qui est dedans ma gibecière ;
il n'y a bergier ne bergiere
au monde qui peust point fincr
de plus beau don pour l'cstriuer
ne de plus grant nouvelleté.
PELLION
Or sommes nous en la cité
f5545 de Betleen, la mercy Dieu :
n'y a que de quérir le lieu
ou l'enffant et la raere sont.
YSAMBERT
Querons fort ; les angles nous ont
baillé signe, quand la veudron,
[_5K0 pour savoir se c'est il ou non.
.W20
5525
PSiSn
iKia-)
L5j'.0
dont bien nous devons esprouver
8« nous ne le saToim trouver,
et j'ay OR|>crance que «y.
Ai/)nis
Le cuoui' me dit que c'est ioy :
SS55 entrons dedans a l'aventure.
HIKKI.ART
C'est jugé do bonne nature,
vee/, cy la maison proprement.
PKI.I.ION
Or nous mettons tou-s humblement
a geuoulx en niagniffiant
nSflo le doulx et précieux entrant,
car par entendement couguois
qu'il est honnne et Dieu.
YSAMBERT
.lo lo crois ;
c'est le très doulx l<!mmanuel,
le Dieu, le aaulveur d'Israël,
5505 pour quoy présenter luy vouidray
ung dittier tel que je sçaray
leaulment selon ma mdesse.
Enffaut de haultc noblesse,
bien soies tu né !
5570 cnffant de haulte noblesse,
par douleiu' et vraye humblessc
bien assai.sormé,
en tiy est toute sagesse,
tout honneur, toute laigesse,
tout bien t'est donné ;
tu es ordonné
pour sourdre nostro foiblesse :
donc, filz aorué
de doulce et tendre jeunesse,
bien soies tu né !
ALORIS
En simplesse de savoir
te rendons hommage;
en simplesse de savoir,
cher enffant, te venons voir
de joyeulx courage,
pour monstrer nostre devoir,
pour ta bienveillance avoir
a nostre avantage ;
nostre simple usage
veilles en gré recevoir,
roy puissant et sage :
de corps et d'ame et d'avoir.
wJ75
5,vsn
5585
5590
5510 r manTue A. Si laura il ni™ B. nicho C. — 5M3 chose C. — 5514 housetto C. — r.jl7 le petit B. C. — 5518
, clochette C. — 5519 sera taira A. se taire B. — 5523 De lannee B. C. — 5524 En plai-o ou je seray |C. je sojej
kaultains B. C. — 5527 pour songier B. C. — 5528 Mais quelle lettre île bergier B. C. — 5530 quand il vendra en C.
- 5531 II lappendra C. — 553'. Mais jay fait tout par moy C. — 5536 Qui a B. Que jay C. — 5537 Four le temps de
Bultier fouet C. — 5538 pilouet B. C. — 5541 socusist B. en sceust C. — 55'.2 estrenner B. C. — 5550 »' A — 5551
«pprouuer A. — 5552 Et se nous le sauons C. — 5553 cy B. — 5561 par manque A. — 5568 Ainsi 1« croix C. —
[6578 ourna B. et donc filz orne C. — 5592 Car de corps C.
MISTRRF, DR LA PASSION
Îtj95
5600
5605
5610
5615
to rendons hommage.
PELL'.ON
Tu os roy de tout le monde
et tel te croyons ;
tu es roy de tout le monde,
nostre espérance s'i fonde
ou que nous soyons ;
combien que mal corresponde
la place ville et innnondo
en quoy te voyons,
nous magnifions
ton los en simple faconde,
et nous conffions
qu'en toy toute grâce habonde,
et tel te croyons.
RIFFL*HT
0 haulte nativité,
o très noble enffant,
0 haulte nativité
ou tu nous as invité,
vray Dieu triomphant ;
quand je te voy alité,
en si grand humilité
le cucur si me fent ;
mon corps croit et sent
que tu es vraye deité
qui pour nous descent
prendre nostre humanité,
o très noble enffant!
Icy prent Nostre Dame l'enfant et s'assiet,puis
le met sur son genou t, et les pasteurs l'ado-
rent, chacun faisant son présent.
YSAMBERT
5620 Chacun de nous te fait présent,
doulx et piteux enffançonnet ;
reçoy les en gré pur et net,
car nulz presens ailleurs n'avons.
ALORIS
Dame, nous vous remercions
5625 de vostre doulceur et clémence
que nous avons en la présence
de vostre filz que tant amez.
PELUON
Nous nous en tendrons bien eurés
tant qu'en ce monde pourrons vivre.
NOSTRE DAME
5630 Frères, je pry Dieu qu'il vous livre
le parfaict de vostre désir ;
je sçay que le divin plaisir
le vous a voulu leveller,
par quoy ne puis ne vcil celler
5635 l'enffant oultre sa volenté.
RIFFLART
0 filz de grant autorité,
chef do tous les mondains roy aimes,
en ton amour tant fort m'enflammes,
que me fait mal de toy laisser.
YSAMBERT
5640 Du retour nous convient ponseï',
s'yrons a nos troppeaux entendre.
Adieu mon enffant doux et tendre.
ALORIS
.\dieu enffant de no))le gendre.
PEI.LION
Adieu filz de nobilité.
BIFFLAHT
0645 Adieu fleur pour bonne odeur rendre.
YSAMBERT
Adieu sens pour tout bien comprendre.
PELLION
Adieu trésor de deité.
ALORI.S
Chef de foy.
RIFFLART
Feu de charité.
YSAMBERT
Loi d'honneur.
PELLION
Bien d'utilité.
5650 Adieu, plus ne pouons attendre.
ALORIS
Adieu très humble humanité.
RIFFLART
Adieu haulte divinité ;
nous t'adorons au congé prendre.
JOSEPH
Celluy que cueur ne peust comprendre,
5655 enffans, soit a vostre convoy !
Ici/ s'en retournent les bergiers.
NOSTRE DAME
; 0 mon cher filz, quand je te voy,
( le cueur me sautelie de joye,
' ne jamès ne me saouleroye
de ta tendre bouche baisier ;
5660 pour l'eure ne te puis aisier,
ce lieu nous est ti op mal propice,
dont il me poise ; or te soufflée
la substance do ma mamelle,
car tant qu'il y aist goutte en elle,
5665 reffusee ne te sera.
5599 corronile B. Creeur de la terre ronde A. — 5603 en] et B. — 5605 grâce manque B — 5607-5619 manquent B.
C. — 5620 Ces poures presans te faisons B. C. — 5622 car ce nest B. C. — 5623 Fors pourtant que meilleurs auons B.
C. — 5630 qui A. Amys... deliure C, — 5035 contre B. — 5637 mondains manque C. — 5639 Quil B. Qui C. — 5643-
5653 ne sont pas en dialogue, austsi coupé dans A. — 5648-5649 Chicf... chief B. C. — 5653 te A. — 5057 aault C. —
5662 or manque B. C. — 5664 Que tant quil ait B. — 5665 Elle ne te C.
P R R M I R R F, .1 O U R N F F.
73
JOSEPH
Se Dieu plaist, l'on ou pensera,
tnllonifiiit qiril n'arn «Inftiuiltc.
ALOKIS
ChoBC avons veuo noble et haulto ;
la puissance Dieu soit loueo,
honorée et magnifiée,
quand par les glorieux messages
il nous a voulu faire sages,
premiers sur toute nacion,
de .«i noble iiicaniacion ;
il n'est chose plus authentique.
YSAMBEHT
La monicion augclique
avons trouvé notoire et vrayo.
GARNIER, cinquième bergier.
Gomment demainent chère gayo
ces gens qui cy viennent do tire ?
Gombault, et regardez, beau sire,
ung peu les manières qu'ilz font.
GOMBAtLT, sixième bergier.
Certes je ne sçay qui ilz sont,
mes ilz retournent moult joyeulx
et rcgai'dcnt tant vers les cieulx
|!685 que c'est une grande merveille.
Qui sont ilz?
GARNIER
Je m'en esraerveille,
il fault que nous les regardons ;
seroit ce point nos compaignons
qui retournassent do Judeo ?
GOMBAULT
IB690 Leur manière bien regardée,
je juge que ce sont ilz, nioy.
GARNIER
Ce sont ilz, je les recongnoy ;
veez la Pellion et Rifflart,
Aloris et danip Ysambart,
1 5695 au moins leurs houletes sont telles.
GOMBAULT
Ça, gentils bergers, des nouvelles,
chaudement, tandis qu'elles durent.
PKLUO.N
Lofi plus haulteti qui oncqucx furent,
et n'y mettez ja Miuppeçoiwi ;
5*00 car jiour certain vous anonçon»
la nativité du soigneur
du tout le monde et vray saulveur,
qui |>our nous saulvcr ext venu.
OABNIBR
Est il vray ?
RIFFLART
Nous l'avons tenu
5705 et adoré en sa pei-sonne,
car nostro eredenco s'adonne
qu'il est le vray Dieu qui tout fit.
GOMBAULT
Il fault donc dire que c'est Crist,
promis des prophètes haultains ?
A LORIS
5710 C'est il, nous en sommes certains,
que Dieu le père a envoyé ;
les angles l'ont bien tesmoignié
qui le mistere nous noncerent;
en Bethlecn nous onvoierent
57)5 et sur leur mot sommes partis,
et nous, venus en ces partis,
avons trouvé le roy de gloire
né en ung povre divoreoirc,
( n la cresche des beufz gisant
5720 et la mère a genoulx devant
l'adorant de cueur piteable.
OARNIER
Vecy nouvelle raervcillable :
et de moult grant signifiance;
Dieu doint qu'elle soit pourfltable !
GOMBAULT
5725 Vecy nouvelle merveillable :
le filz Dieu ne en une estable !
0 pitié, o bénigne euffancc !
YSAMBERT
C'est humilité chaiitable
qui le maine a ceste ordonnance.
GOMBAULT
5730 Vecy nouvelle merveillable
et de moult grand signifiance.
PELLION
Vaillaus bergiers, chacun s'avance
a son ti'oppeau songneusement,
et servons Dieu dévotement,
57.15 chacun selonc nosti-e simplesse.
i Seaa bien en A. — 5674 sa C. — 5075 Qui C. — 567S demainent ilz C. — 5882 qui y sont A. C. - 5683 ill maiiiiue*t
— 56« enuers B. deuers C. — 56S4 Si souuent que cest grant B. C. — 5688 Seroient re B. — 5692 S« B. — 5086
A. C. — 5698 haultaincs quoncques B. — 5704 vcu B. C. — 5718 reuenui C. — 57Ï8-5787 Le dinloguf rtt plHt
upé dans B. C. — 5726 <1" Dieu C. — 5729 son C. — 5732 se A.
74
MISTRRE DE LA PASSION
JOSEPH
Marie, le jour nous appresse
qu'il convendra que vostre filz
selonc la loj- soit circoncis :
il est la huitième journée.
NOSTRE DAME
5740 La loy de Dieu fut ordonnée,
si la devons entretenir.
Joseph, il vous fauldra tenir
l'enffant, et sans dilaciou
faire sa circoncision,
5745 ainsi comme la loi nous rigle.
JOSEPH
C'est une bien estroite rigle
et dure a jeunes enflfançons,
mes affin que mieulx le façons
je vois querro une quantité
5750 de gens de nostre parenté ;
la chose en sera plus honneste.
[Pose.]
ANTHIOCUS
Sire roy, menez joye et feste,
si plaist la puissance infinye,
nous avons trouvé compaignie
5755 qui se tire a nostre chemin.
JASPAR
Loué en soit le roy divin :
nostre compaignie en sera
plus joyeuse et mieulx en vauldia.
Ce semblent gens de noble arroy.
CEI.SANDER
5760 J'entens que c'est ung puissant roy,
qui nostre chemiu veult aller ;
si vous plairoit a luy pai'ler,
vous sçarez son intancion.
JASPAR
Nous ferons ioy stacion,
5765 tousjours attendans leur venue.
Cil Dieu, gouvernant ciel et nue,
sire roy, vous tieugne en sa grâce !
MELCIOR
Et vous entretieugue et perface
en honneur et puissance deue
5770 cil Dieu qui gouverne la nue!
JASPAR
Se nostre vovo avez tenue
ou voulez tenir une espace,
nous sommes joyeulx qu'il se face.
MELCIOR
Cil Dieu qui gouverne la nue,
5775 sire roy, vous tiengne en sa grâce
et vous entretieiigne et perface
en honneur et puissance deue!
A juger selonc vostre veue
attendu la voyc présente,
5780 nous sommes tous deux d'une entente
et une oppinion avons.
JASPAR
Ou alez vous ?
MELCIOR
Nous ne savons
en quel terre n'en quel pays,
mes le nouveau roy des Juifz
5785 est né, comme l'estelle signe : .
si m'en vois ensuyvant ce signe
l'adorer et hommage rendre.
JASPAR
En mon cueur ay volu emprendre
voye sarablable comme vous,
5790 si me suis meu et mes gens tous
pour y venir hastivcment.
MELCIOR
Loué en soit Dieu haultemeut,
que si bien rencontré nous sommes !
Donc, s'il vous plaist, nioy et mes hommes,
5795 jusqu'à la vous compaignerons ;
s'ay espoir que nous trouverons
nouvelles a nostre plaisance,
car l'estelle nous adevance,
qui la nostre guide sera.
JASPAR
5800 J'ay espoir qu'elle nous menra
jusques au lieu déterminé,
ou celluy noble roy est né ;
or cheminons ysnel le pas.
CADORAS
Mes seigneurs, ne vous hastez pas,
5805 de rester soiez diligens,
je voy grand biigade de gens
qui nous suyt a toute vigueur.
POLIDORUS
Peust estre c'est ung grand seigneur
qui s'en veult venir no^^tre voye.
5740 fut de Dieu B. G. — 5744 Alez faire G, — 5751 En chose A. — 5753 Sil B. — 5759 Se A. — 5762 SU B. C.
plaisoit A. — 5764 cy G. — 5766 qui gouueriie G. 5767 a sa B. roy manque G. — 5769 puissanoe et honneur A,
B. G. c/'. 5777. — 5771 Sire, nostre C. — 5774 Sire, cil C. — 5775 roy manque G. — 5776-5781 sont atlribués à Jas-
par A. — 5777 manque C. — 577S A jugier selon vostre face B. C. — 5779 Et veue B. G. — 5795 Jusques la B. C.
— 5796 Se A. Si G. — 5799 garde C. — 5805 Darrester C. — 5808 Esse aucun B. G.
PRKMIKUIi
I
5810 N()l)I(>s sci(;iieiirs, Dieu vous avoyi^
et Joint ce que vos cueurs désirent !
( )u vont mo8 chers seigneui-s ?
JASPAU
Hz tirent
au vouloir Dieu et son aydo
Il après l'estelle qui les guide ;
■15 Dieu doint qu'a bon port nous amaine !
m BALTAZAR
■ Ma pensée est asscs prochaine
■ a la vostre, rois droituriers :
■ tantost ara dix jours entiers
■ que rcstcUc en ma région
58Î0 nous a fait apparioion,
par quoy j"ay on mon cueur conceu
que le roy <lu ciel est receu
et né (le la vierge pucello ;
et moy, tousjour» suyvant l'estelle,
5825 suis v<'iiu en ceste pai'tie,
espérant qu'elle me conduyo
Iau saint lieu ou cecy est fait.
MELCIOR
Assés semblable est uostre fait :
quand l'estelle avons apperceuo,
raison pareille avons conclue
et sommes de Tharsc partis
et d'Aiabe ou sont nos partis.
Sur l'estelle nous avoyons
et jamès tant que la voyons,
ne cesserons de voyager,
tant que la sentirons targer
eu quoique province loingtaine ;
si avons attente certaine
qu'au lieu ou elle targera,
5840 la vierge mansion fera
Iqui du roy est mère et nourrice.
BALTAZAR
Grant courtoisie et bénéfice
me ferez, roys de noble sorte,
si vous plaist qu'avec vous m'assorte,
tant que j'aye fait mon voyage.
JASPAR
Mes joyeux sommes en courage
de vostre compaigni'e noble,
et fust jusqu'à Constantinoble,
loyaulment vous compaignerons.
LUCANUS
«850 Qui m'en croira, nous hasterons
d'aller nostro chemin le cours,
.lOURNKK
car l'estelle s'en va teusjours ;
«le séjourner n'avons loinir.
PI RODES
Tant que nous la puissions choiiiir,
5806 de desYoyer nous n'avons garde.
JASPAR
Je roquier a Dieu qu'il nous garde
de donnnagc et mal cnicombrier.
fPo8E.]
JOSEPH
Eliachin, mon amy chier,
et vous, Esdras, mon bon parent,
5860 ung cas hastif m'est apparent,
dont il fault que me secourez.
ELIACHIN
Nous ferons ce que vous vouldrez,
Joseph, et do loyal vouloir.
ESDRAS
S'il e.st riens en iiostre [louoir
6865 qu'a vostre proffit puist tourner,
dittos le sans plus séjourner,
et chacun en fera devoir.
JOSEPH
Mes amis, vous pouez savoir
comment Marie, mon cspeuze,
5870 par la volcnté glorieuse
de Dieu qu'ainsi l'a avancée,
est ceste sopmaine acouchee
d'un beau filz, gent comme une fleur.
Or est huy le huitième joui-
5875 qu'il requieit esti'c ciiconcis ;
si vous supply tant que je puis,
qu'il vous plaise y estre presens.
ELIACHIN
Nous n'en voulions pas estre exemps,
mes servir par boime oi-donnance,
5880 s'il est riens en nostro puissance
a quoy emploier nous puissons.
ESDRAS
C'est droit que nous obeyssons ;
or partons, que Dieu nous conduye !
JOSEPH
Marie, ma très chère amie.
75
' 5813 de Dieu A. — 5814 nous guide B. C. — r>81j que a port nous maine C. — 5817 nobles princiers B. C. — 58Î6
nous C. — 5829 parcoue B. — 58:!0 par elle U. — 5830 le B. — 5838 Sauons espérance C. — 5840 la fera C. — 5843
Me» feres A. — 584/i Sil B. — 5843 ay A. — :848 jusquen B. — 5855 nauona nous C. — 5856 qui A. — 585» cher
parent B. C. — 5872 Elle est de reste C. — 5875 Qui A. C. — 5876 quanque C. — 5SS3 Partons noua B. nona
manquf C. — 5SS4 esgardez, chore amie B. C.
76
MISTRRE DE LA PASSION
5885 vcez cy aucuns de nos amis
apprestés, comme ilz m'ont promis,
il .' nous aidicr en ceste affaire.
ELIACHIN
S'il est chose que puissions faire,
qu'il vous plaise, dittes le cy :
5890 il sera fait.
NOSTRE DAME
Vostre mercy.
Seigneurs, vous voyez mon enffant
en la cresche des beufz gisant
moult povrement ; Dieu soit loué !
S'est le logis bien cher loué,
5895 si n'avons pas finances moult,
neantmoins nous voulions faire tout
comme la loy le nous commande.
L'enffant motz en vostre commande ;
circoncisez le doulcement,
5900 en gardant le coimnandement
que Dieu, nostre sire, a donné.
ELIACHIN
Il nous est de Dieu ordonné,
c'est raison qu'il soit accomply.
ESDRAS
Chacun le doit, n'y a celluy :
5905 nous le tenons de tous nos pères
qui ont tenu a grans misteres
le fait de circoncision.
JOSEPH
Pour en faire expcdicion,
seigneurs, l'cnffançonnet prenez ;
5910 icy doulcement le tenez,
tandis que je l'abi-egeray.
ELIACHIN
A vostre vueil vous aideray
a mon pouoir lude et leal.
JOSEPH
Helas ! mon filz, il me fait mal
5915 qu'il te fault porter ceste paine ;
très doulce natui'e puraine,
se d'humilité ne voulsisses,
ceste rigle pas ne tenisses ;
nature ne t'y peust liei'
5920 se tant te veulx humiUer
que porter ceste disciphne ;
pardonne moy, pécheur indigne,
se de la main t'ose toucher
pour ta char saintisme trancher,
5925 car comme contrains je le fais.
ESDRAS
Tous nos apprcstemens sont fais.
.Joseph, père très vénérable,
faictes conclusion finable
et abrégez, car il est tart.
JOSEPH
5930 Or le tournez ung peu appart,
et je l'expedirai grant erre.
[Pose.]
BALTAZAR
Je ne sçay penser en quel terre
nous sommes ne en quel pays.
MELCIOR
Oncques mes je ne m'esbahis
5935 en tout le voyage tenant
si fort que je fais maintenant :
l'estelle, qui si fort luysoit
et en luysant nous conduysoit,
nous est tout a cop deffaillie.
JASPAR
5940 Je ne sçay ou elle est saillie,
mes nos yeulx en sont bien restrains,
et par force serons contrains
de retourner chacun son cours ;
se Dieu ne nous donne secours,
5945 nous en sommes en grant balance.
BALTAZAR
Non ferons, car j'ay espérance
en Dieu qu'il nous donra conffort ;
et ung point, qui est le plus fort,
c'est de querre songneusement
5950 en quel heu n'en quel tellement
nous sommes venus de ceste heure.
ANTHIOCUS
Nobles seigneiu's, je vous asseure,
que nostre demeure est fondée
pour le presens dedans Judoe ;
5955 et que cecy soit vérité,
c'est Jlierusalem la cité,
que nous voyons la devant nous.
JASPAR
Voire, Anthiocus, estes vous
tout certain que la chose est telle?
5S88 riens que nous B. C. — 58S9 Sil vous plaist C. — 5890 La vostre mercy C. — 5896 nous manr/u<y B. — 5898
Et prouue que lenfant est tendre C. — 5900 obseruant B. C. — 5903 qui C. — 5904 doit faire C. — 5905 des anciens
pères B. C. — 5908 faire ent B. C. — 5910 prenez G. — 5915 Qui A. — 5916 et puraine C. — 5919 le C. — 5920 te
manque A. — 5923 te A. — 5931 expediere B. — 5947 qui A. — 5954 Pour ceste lieure cy en C. — 5956Xest droit
la Jlierusalem la cite G. — 5957 cy B. G. — 5959 Certain... soit B. Tout nxanque C.
I
1
PREMIKRK JOURNEE
77
ANTHIOCIÎS
5960 Je i-t'spons, sii'p, que c'est elle ;
je coiignois de long temps ou c'est.
JASPAR
Or ça, soigneui-s, puisqu'ainsi est,
que l'estollo nous a laissés,
puisque nous sommes près assé»
5005 de la cit(' que nous voyons,
Bqui nie croiia, nous entrerons
dedans In ville et irons voir
aux sages pour conseil avoii-
sur le fait que nous demandons.
MELCIOR
5970 Du tout a VOUS nous attendons
et seront vos conseils tenus.
lUI.TAZAR
S'en la cit(' sommes venus,
nous pourrons enquérir adoncques
s'il est en région quelconques
5975 ou il soit de ce roy nouvelle.
.lASPAR
L'opinion est bonne et belle,
or cheminons sans arrester.
ELIACHIN
L'eu ne sçarroit niieulx apprester
ne circoncir plus gentemcnt
que l'enffant est.
BSDRA8
Benignement
eu soit loué Dieu, nostre pero !
ELIACHIN
Mario, vous estes la mère :
gardez quel nom l'enfant ara.
NOSTRE DAME
Mutacion ne se fera
15 du nom haultement assigné
lequel luy est prédestiné ;
des que l'angle le m'annonsa
le nom me dit et deuonsa ;
si n'y vcil rien ajouster sus.
ESORAS
5990 Connnent fut celuy nom ?
I NOSTRE DAME
Jhesus.
ELIACHIN
Jhesus est nom do grand valeur
i
et vault autant coninio Mulvcur.
Or Dieu doint qu'il nouH puist saulver
et »i bien nos pechi'-s laver
5995 qu'en gloire nous puist rrwvoir.
JOSEPH
Si vi'ay le piiig.say je savoir,
que j'y ay parfaictc uredence.
JASPAR
Seigneurs de notable prudence,
ou est le lieu de grâce plain
cooo ou le roi des Juifz haultain,
qui est né, fait sa résidence?
MELCIOR
Nous querons estre eji sa présence
pour aouror ce souverain :
seigneurs de notable prudence
6005 ou est le lieu de grâce plain?
BALTAZAR
Son estelle de grand puissance
avons choisie pour certain
en orient, dont en soubdaiu
venons veoir sa magnificence.
ANTBIOCUS
0010 Seigneurs de notable prudence,
ou est le lieu de grâce plain
ou le roy des Juifz haultain,
qui est né, fait sa résidence?
GAMALIEL, scvibe de la loi/.
Vecy merveilleuse éloquence
6015 et de grande suspicion ;
seigneurs, vous faictes question
qui a respondro de legier
ne fait pas, mes a grand dangier :
du roy des Juifz enquerrez
6020 nouveau, ne dont rien ne sçarez
de par nous, car de voix commune
icy n'en est nouvelle aucune;
pourtant respoudre n'y savons.
ROBOAN, second scribe.
Quant est pour l'oure, nous n'avons
0025 point de roy de nostre lignée,
ainz est la terre gouvernée
d'ung honunc d'cstrange i>ays
qui se clame roy des Juifz.
car a la jwinte de l'espee
0030 la terre a prise et usurpée
Sa A. — 5966 en yrons lî. — 5971 consaulx lî. — 5972 Se eD C. — 5974 en m-inqof (".. — 5978 soarroit C. —
Regardez quel nom il ara B. (".. — 59S7 me A. — 5989 Sil B. — 5993 qui A. B. — 5997 py A. je y B. C. — 6000
très haultain A. — 6003 Pour laourcr comme A. ladorer comme B. roy tiouuerain C. — 6001-6005 manffucnt A. —
8006 priidencB H. luisani'e C. — 6010-6013 tiKin'juenl A. — 6019 que vous querez A. — 6023 Par quoy respoodre ncn
B. ny C. — UOiS réclame A.
78
MISTEREDE LA PASSION
(5070
et la tieut dessoubz l'empereur
de Romrae, qui est le seigneur
de tout le monde pour ce jour :
il nous maintient en son amour
6035 tant qu'il peust, affin que n'allons
contre luy et nous rebellons ;
Herode par nom est nommé,
ne sçay se tant est renommé
que son renom soit parvenu
6040 jusqu'au lieu dont estes venu;
volentiers le vous monstrcrons.
JASPAR
Ce n'est point ce que nous querous,
mais neantmoius ce seroit il bon,
que nous oyssions sa raison,
6045 savoir s'il en scct quelque chose.
ZOROBABEL, pharisien.
Se la nouvelle est, je suppose
qu'il en ara ouy la voix ;
or me suivez, devers luy vois
pour luy iliro vostre venue.
[Pose.]
6050 En force et honneur maintenue,
soit vostre noblesse, cher sire !
HERODE, roy.
Le bien que vostre cueur désire
vous octroit le Dieu d'Israël !
Quelz nouvelles, Zorobabel?
6055 comment le font nos citoiens ?
les scribes et pharisiens
sont ilz en paix? leur faut il rien?
ZnnoBABEI,
Sire, je ne sçay que tout bien ;
j'ay par devers vous admenés
6060 trois notables roys coui'onnés,
les quelz ont désir et propos
de parler seulement doux mos
a vostre majesté royalle.
HERODE
La nouvelle est cspecialle
()Oi35 et estrango, a ce qu'il nous .samble ;
comment, sont ce trois roys ensamble,
venus maintenant cy envers?
ZOROBABEI,
Ouy ; de royaulnies divers,
6032 en est C. — 6035 Ce quil peut G. — 6036 et que ne nous C. — 6040 Jusques au lieu estes B. C. — 6042 pas B.
— 6043 ce seroit A. seroit il B. C. — 6044 nous manque C. — 6046 la manqw B. C. — 6049 Si luy tliray B. C. —
1)053 vostre A. — 6058 ny B. — 6062 De vous dire deux ou trois mos C. — 6065 qui C. — 6066 sont ilz B. C. —
0069 Saba] Sable B. — 6071 requérir B. C. — 6072 vous manr/ue C. — 6074 Sire roy, oyez B. C. — 6075 qui C. — 6082
raejiipli de saigesse B. C. — 6083 Vostre honneur accroisse celuy C. — 6084 Et ne soit G. — 6087 Qui a toute
puissance en luy njoiité B. C. Sil vous plaist vous vous serrez B. C. Cil A. — 6000 cueur mnnqar \. — 6091 sa A.
— 6093 de vostre chemin B. C. — 6094 Quen riens ne vous sera grief B. C. — 609S depuis brief temps U. G, — 6100
sceuent A. soullent C. — 6105 le prophète A. B. C.
de Saba, d'Arabe et de Tharse.
HERODE
Puisque leur voye est tant esparce,
c'est pour ung grand fait enquérir ;
savez vous qu'ilz viennent quérir ?
vous le pouez bien reveller.
ZOROBABEL
Sire, vous les orrez parler
6075 et vous orrez qu'ilz vous diront.
HERODE
De par nous visités seront,
savoir qui vers nous les adresse.
JASPAR
Noble roy rempli de sagesse,
vostre honneur accroisse celuy
6080 qui a toute puissance en luy,
et vous dnint trésors a largesse !
HERODE
Nobles roy comblés de proesse,
vostre renom hault anobly
ne soit jamès mis en oubly,
6085 ains l'entretiengne en sa haultesse
Mahonnnet, mon dieu infiny !
S'il vous plaist, vous serrez icy
et après nous deviserons.
MELCIOU
A vostre vuoil obeyrons
6090 do bon cueur sans y contredire.
HERODE
Or ça, seigneurs, vous pouez dire
fi'anchement et de cueur affin
la cause qui vous meult, affin
que sachons qui nous sera grief.
JASPAR
6095 Sire roy, pour ataindre on brief
nostre fait, il est véi ilé
que Dieu nous a manifesté
une estelle, n'a pas long, temps,
tout aultrcraent son cours portaus
6100 que les aultrcs ne seullent faire,
et quand nous avons son affaire
choisi, qui est clere et notoire,
il nous est venu en mémoire
lie l'estelle que nous promist
6105 Kalaan prophète, qui dist
que de Jacob l'estelle belle
doit naistro en ung temps, de la quelle
le hault Crist se doit incarner
PREMIERE JOURNEE
7î>
et ilcssuz los Juil'i! régner,
6110 wiiiriu' nos cxpositcui-H iliinit ;
or nous nionsticnt et Higiiificnt
les moyens du signe donne,
«ju'il l'uult que celluy roy soit né,
veu que l'estelle nionstroe
Bil5 s'est pur toute nostro contrée.
C'est la cause qui nous adnmiiie
pour voir sa niajesti^ haultaine
et luy présenter aucuns dons.
»HEKODE
Beaulx seigneurs, ung peu attendons;
SiïO vous esti's gens prudcus et sages,
no profferci! pas tels languages
se vous n'y sentez fondement,
car il nous toudie grandement
s'il advenoit ce que vous dittes.
MEi.cmn
61^5 Quand des raisons qu'il a predittes,
nous le savons certainement,
et qu'il soit vray, vecy comment :
l'estelle dont il nous declaire
n'eust jias mouvement circulaire
^30 comme celles du firmament,
mes .alloit tout directement :
realcment l'avons j)eu voir
devant nous aller et mouvoir ;
admeni' nous a jusqu'à cy
15 sans di'vyer, la Dieu mercy,
et tantost la cité voue
subtillement s'est disparue
par quoy nous en sommes plus seuis.
HEUODE
Contes, chevaliers et seigneurs,
escoutez cy la dealilerie
qui touche nostrc seigneurie
largement et de tous costés.
Seigneurs, gardez que vous comptez ;
ignorez vous uostre i)uissance,
U5 nostre siège, nostre ordonnance ?
ignorez vous que vray roy sommes
de Judée et do tous les hommes
«qui sont au royaulme appendens ?
en quel paît estes vous tandons?
uiôO quel prince, quel roy querez vous ?
Pest il huy aultre roy que nous ?
est il honmie de ça la mer
si haidy, qu'il s'osast clamer
roi dos Juilz i >'\ viongue embatre :
6155 par force l'en vouldr(ini4 comlmtre
tcllonient qu'il s'en desdira.
APRACL'g, conte.
Qui est si hardy qu'il dira
que roy nous gouverne a sa mode
aultre que nostro roy Hcrode,
01(10 qui cy est. Dieu luy ci'oisHO lionn<>ur?
HEKMouENES, unif ckevaliev au roy Herudi.
Nous n'avons aultre gouverneur,
aultre roy n'aultro cap|iitainc
qu'Herode, c'est chose ceitainc,
car a luy seul olieyssons.
ARPHA.ZAC, deuxième chevalier.
til05 11 n'est homs que ne desti-uissoi»,
s'il vouloit le contraire dire.
ADRACUK
L'en ne m'en peust plu» faire d'ire
ne ma pensée comturbor,
que d'empescher et destourbcr
6170 nostro roy en son nobie règne.
HERODB
Qui doubte que tousjoui-s ne i-egne ?
J'en pr<'niliay débat contre tous.
BALTAZAR
Sire roy, ne prenez courroux ;
se celluy roy voulons trouver,
6175 nous ne querons ame grever,
ne vous, ne vostre royaulté,
mais enquerons la vérité,
cmnno gens hors de leur pays.
HERODB
Comment! estes vous esbays
6180 d'ouir telz mos de nosti^c bouche ?
vous samble il pas que près nous touche ?
Très fort nous sentons attouchéa,
et voulons bien que vous sachez
le royaulme estre en uostre main,
6185 et ne congnoissons souverain
.se ce n'est l'empereur de Ronime,
qui nostre vray seigneur se nonnne,
et nous n'v coutretUsous pas.
Et p ui' vous informer du cas,
«190 ceste contrée, a brief parler,
a volu long temps rebeller
a l'empereur, et sa conduite,
or l'avons pai* force reduictc,
et conquise sanz contredit.
6109 tous les A. — 6114 lestoille sest A. — 6Hr> l'ai- trdoiite A. — «125 Qnnnil osl des raisons qu'il a dictes B. G.
— 6128 nous A. — 6130-6131 Comment les aultpes bien obseruent. Qui au haultaiu firmament scruent B. G. — 0148
•ttendans B. — 6151 il mannue A. — 6152 sa C. — 6153 qui A. B. — 6154 Or si A. — 6156 qui A. C. — «157 qui A.
B. C. — 6159 le roy li. le bon C. — G102 ne A. — 0163 Cest oeluy qui nous garde et maino B. C. — 6164 Et a qui
(eul B. C. — 6105 hors que B. — 6168 de A. — 6171-6172 attrihuès l'i Hrrmogenes 1!. C. ny B. C. Nous lemporlerons
contre tous B. le porterons C. — 6175 aultruy B. — 6177 nous A. — 6180 de A. vostre B. — 618Ï nous y sentons
touches B. greuez G. — 618i est B. — 6186 Se nest lemperateur B. C. — 6194-619& Et le moyen bien confenne
P«r quoy lempereur prénomme B. C.
80
6193
OSOO
MISTERE DE LA PASSION
6203
6210
6215
0220
622
0230
6235
l)ar quoy l'empereur devant dit
nous en a donné la couronne ;
et donc nous ne doublons parsouuc
qui par soy ou force d'amis
nous en puist faire estre desmis
par quelque mauvaise rencontre.
JASPAR
Nous ne voulons pas aller contre,
mes du fait tant savoir cuidons
que celluy roy que nous querons
est plus grant de vous et plus foit.
HERODE
A ce ne mettons nul effort,
s'il a grant terre et grant pays
mes qu'il ne soit roy des Juifz,
son fait liens ne nous touchera.
JASPAR
Roy des Juifz est et sera,
et qui plus est, tout ce l)eau monde,
doit gouverner a la reonde
comme juge et refformateur.
HERODE
Seigneui-s, escoutez quel horreur,
quel i)este, quel forsen, quel l'age !
veez cy le plus mauvais langage,
le plus fier, le plus desplaisant
qu'oncques fut, et le plus cuysant,
d'ouir si terribles l'aisons.
AIÎPHAZAC
Sire roy, nous nous en taisons,
car point n'y adjoustons de foy,
et tenons qu'il n'est aultrc roy
que vous sur la Juyverie.
HERODE
Farderons nous la seigneurie,
qui tant chère nous a cousté ?
parderons nous la royaulté
dont proesse nous monstre digne ?
parderons nous nostie domine
vendue par si dur ehastoy ?
Fortune, il n'en est pas en toy.
Fortune, beste morveillable :
toy et ta roue détestable
mettons au sanglant pis tourner.
GAMAI.IEI.
11 ne faut pas tel dueil mener :
qui trop de courroux en soy prend,
nature et raison l'en repprond :
car comme Cathon nous afferme,
ire qui excède hors terme
empesche fort l'entendement
qu'il ne face vray jugement.
0240 Ceste rigle est commune a tous ;
estez donc cesle ire de vous,
tant que j'aye a la question
fait aucune distinction,
ou forse vous porrez ouir
0245 aucun point pour vous resjouir
sur ceste matière présente.
HERODE
Toute joye est de moy exempte,
puisqu'on fait sur moy entreprise,
car chose a grand peine conquise
0250 s'en veult plus chèrement garder.
GAMALIEL
C'est vray, mes pour vous accorder
avec ces notables seigneurs
qui admainent raisons plusieurs
pour celluy roy qu'adorer viennent,
0555 je ne cuide pas qu'ilz maintieiment
qu'il soit pur homme en quelque empire
autre de vous qui se puist dire
roy des Juifz, n'en faictes doubte;
mes ung point y a que je doubte, ■
0200 que celluy roy dont ilz nous touchent
et dont si hault language couchent,
ne fut Crist né nouvellement,
dont les prophètes plainenumt
ont afferme qu'il doit venii',
0263 et vuellent a ce parvenir,
ce samble, car leur dit se fonde
qu'il doit gouverner tout le monde
comme Ciist, car quand il vendra,
nostre règne en paix maintendra
0270 et sera vray roy d'Israël.
HERODE
Vous dites bien, GamalicI,
et nous advertisscz d'ung point
a quoy nous ne pensions point,
tant qu'il touche celhiy Cristus ;
0275 il doit estre de grans vertus
comme vous, Juifz, le tenez,
et par vos cserips l'apprenez ;
chacun scet assés son regnoni,
mes savoir s'il est né ou non,
6280 la gist le foi-t et le danger.
nOBOAN
Do ce no pouvons nous juger ;
0209 II est roy des Juifs et sera B. — 0211 II doit gouuerner a la ronde A. — 0214 forée A. — 0217 Coiicques A.
le manque A. — 6218 Pour peu que ne vous despecons B. nous ne desperons G. — 0219 Artaz vc B. — 0222 Sur
toute la Juiferie A. G. — 6228 Veult dire G. — 0229 en mnnqae A. B. — 0231 uierueillable B. C. — 0243 discussion
G. — 0247 de nous B. G. — 0248 anie fait s>ir moy emprise B. — 0251 11 est vrai ulti-ihuè à Adrams B. C. mes
iiuuuiur B. G. — 6258 point doubte A. — 6272 Et aduerlissez dun grant point A. — 6273 certes ne penssion point .\.
— 0276 entre vous A. — i>277 approuuez A. C
PREMIERE JOURNEE
81
16S90
I63!U5
(«303
l«310
8315
I63ii0
G'Mô
il nVn pst faictc mcncion :
vous oc/, la rclnciou
(le CCS notables loy.s icy,
qui sont certains qu'il est ainsi ;
ne savons »o la chose est voire.
HKlllIDE
Ce qu"il/. ilicnt n'est point a croire,
se tout lo nioude l'acceptoit.
lît |)roniior, se Crist nés cstoit,
nous croyons, sans estie deceu,
que les .luifz l'eussent bien sceu,
s'eust esté sa nativité
f'aicto a si giant solennité
que si grant joyc ne fut oncqucs :
or n'en est nouvelle quelconques ;
par quoy tels parlées ne nous montent.
De l'estolle qu'il/, nous raiouti'nt
qui leur a esté denionstrco,
c'est une abusiou notree,
une fantaisie ou ung songe,
espoir cause d'un grand mensonge
a cil (jui s'y arrestc et croit ;
et quand vraye cstello seroit
quelque grant mistcre poi'tant,
si ne s'en suyt il pas pourtant
qu'honnne puist juger en sa vie
quel niistere elle signifie,
se n'est par supposicion.
G.VMALIEI.
Noire, ou par revelacion,
que Dieu eust monstre (;i\ ovi la.
HERUDE
Hz ue proposent pas cela :
leur totaIl(! raison s'assigne
que l'estelle leur monstre it signe
que Cristus doit estro venu.
ADUAC.U.S
Cela est poui' néant conclu,
et leur raison mal se modère
de fonder ung si grand mistere
sur si très petit d'apparence.
IIEnODK
Quoy qu'il soit de la conséquence,
nous vuuldrlons très bien savoir
en quel lieu n'en quel terrouoir
Cristus est prophetizé uaistre ;
puisqu'il doit cstre vostre maistre,
seigneurs Juifz, laison suppose?
que vous en savez quelque chose,
[lar quoy miculx eu pouez parler.
ZOnonADEL
Sire roy, foietc» n.ssciubler
les scribes qui cogiioissent lettres,
pharisiens, princes des prebstrcs,
0330 et quand tous sei'ont mis appoint,
iuterroguoz les sur ce point,
car bien vous on s(,'aront a dire.
iiKiioiie
Il sera fait sans cuntredire
tout selon vostre; volent»'.
6335 Maiaquhi?
MALAQUIM, messager.
Sire redoubti',
quel est vostroconunandcnicnt?
herode
Tu t'en iras tout chaudement
l'aire ung message a ])eu de nios.
MALAQUIN
Mes que je sache à quel propos,
03i0 tautost l'aray exi)cdié.
IlEltODE
Tu n'as pas, ce ci oy je, oublie
l'hostel d'Anne, le grand pontiphe,
et de sou conqjaignon (^aiphe
atout son grant chapeau de bievre ?
MALAQUIN
6345 Je le syay plus courant qu'ung lievro
passé quatorze ans huy matin :
j'y ay bcu maint godet de viu
et dancé au son de la broche,
tout on crocquant une ospinochc
()3J0 d'ung morc;det filant et gras.
HEUDUE
Va t'en donc, et si leur diras
tous deux, si n'ont aucune charge
ou cnipeschcmcnt qui les charge,
qu'ilz viennout ung [ion devers noui.
MALAQUIN
0333 Tautost les verrez devant vous,
sire i-oy, je le vous crcans.
Messager qui va par les champs
doit il point boire par coustumc?
Il doit boire des |ilus fiians,
6360 messager qui va par les champs;
L'en nie parle de jeux et chants,
mais n'est t.'l que souffler la plume.
Messager qui va par les champs,
0389 primi's B. prenez C. — 6291 si leussfiit A. — 6292-6293 Aii.isi & sa naliuite Eust eu grand snleinnite A. — 6301
Cause fspoii- lî. C. — 031;) l't lu'fii'/ue B. — C315 pourement C. — 6321 lien miin'/ur A. ou en 11. — 0324 la raison A.
— «32J et pi<.bslres A. — 63;i2 El l)ien C. — 0347 voirro A. — 0331 se U. — 0334 icy deuers A. — 0353 arcs A. —
6202 Ai.^c lu- suis se vin ne hume A.
Pas. 6
82 MISTERE DE LA l'ASSION
doit il point boii'e par cousturae?
G3')5 Qu'est ceoy? latc^^te luo fume,
le viii m'a piis par le toupet,
je parle seul et pers mou plel ;
je m'en vois, je suis bien hejaune,
j'apperçois via l'ostel d'Anne,
0370 qui est des Juifz grand poiitiiihe,
et si eroy que vêla Gayphe,
qui est assis dccoste luy :
tant eu sera plus tost founiy
mon niossagc a ce que je vois,
G37j car je feray a mio fois
ce qu'il m'cust fallu faii'O a deux.
Seigneurs sages et vertueux,
le grand Dieu vous ait eu sa garde !
Hcrode, nostrc roy, qui garde
63S0 tout le l'oyaulme do .ludee
vous mande que sans dcnioureo
venez ung peu par devers luy,
s'il vous plaist.
ANNE, 2ii'''sii'c de la loij.
11 n'y a celluy
de nous qui veille contredire
6385 au conunaud du roy nostrc sire,
ains le voulons sei'vii' et craindre,
comme cil qui nous peu,<t contraindre
et a son voloir gouverner.
r.Aii'HK, deuxième prcstrj.
Or très poussons de choniinei' ;
d.190 le Dieu d'Israël nous conduye !
Icy s'en vont vers Herode.
MALAQUIN
Dieu soit en vostrc conipaiguie,
roy s, et la déesse Venus I
Vècz cy les grans prestres venus
eu vostrc roynlle présence.
ANNE
();«»j Honneur, noblesse et reverancc
soit a vous, roy de grant renom !
6105
O'.IO
Cil 5
CAll'HE
A vostrc maudemeut vcnon,
comme obeyssans et sougneux.
HERODE
Par nm kiy, nous sommes joyeulx
O'iOO a vous veoir, seigneurs très discrés;
or vous venez seoir icy près, .
puis de ce qui sera mostier
ilcvisei'ons.
ANNE
Ti'cs voleutier ;
vo.<tre voloirs est accordes.
HERODE
S(ùgneurs, nous vous avons mandés,
cognoissant vostre coui-toisio,
pour une grant controvcrsie,
qui entre nous est icy mise.
Vous savez qu'on la loy Moyso
Gi-ist vous est promis des pi'ophctes ;
si ont esté cy doubtes faictes
que, de fait, il ne soit venu ;
mes quoy qu'il en soit advenu,
sur ce ne nous arrcsterons;
tant seulement savoir quorons
qtiel lieu a esté assigné
ou celu\' Ci-ist doit estre né;
or vous plaise le nous espimdre.
ANNE
Sii'C roy, pour vous en respondro,
vray est et voulons soustenir
que Cristus vrayment doit venir :
mes qu'il soit desja comparu,
il uc nous est point apparu,
n'il n'en est nouvelle au surplus,
par quoy no vous on ])arlons plus ;
mes du lieu et de l'ordonnance
ou il doit prendre sa naissance,
les sages qui bien estudient
les prophètes tiennent et dient
qu'en Botleen, la noble teri-e
de Juda, le couvieiit il queri'e,
dont Miclieas le bon prophète
ceste prophecio en a faicte :
« Retleeu, teire de Judée,
<i4:i5 (i tu n'es pas la mendie fondée
<( entre les princes de Juda ;
(( mig prince de toy ystcra
« pour gouvi'rner a tous jours mes
« mon peuple d'Israël en paix. »
(l'i'iO ^'eez la que le prophète chante.
0«0
6'.Ï5
6430
6361 \\\'-i: 1). ^ (VWl-niTI i/i ntiuei'. I!. C. I.? gi-aii'l ponliphe A. —0372 Et si vi\v Ciiiplie auiîc luy H. C. — 6382 |in
l»r H. — (i'iOl cy B — 6iO'É Vos vouloirs vou-i sont A. — 040U jiiilue U. jui:i' C. — Oill Sont esio si gi-aus H. C.
1)4)1 Sur uny point nous A. — 0121 voirement doit venir B. G- — 64jJ Les proph'ciei G. — 6130 Q«' )H\'n'i»-: A, —
643i il man'itic B;
PREMIERE* JOURNEE
M
HEUODE
La chani;oii n'en o»l pa-i mcschantc,
iiioH (le bien gi-ant auturitû.
CA.IPHK
Il vous a le droit point uoto
ijiii parli^ (1(! cesto niaticro,
01 '.5 ol (lit la raison tout cnti(n'(',
sur la qu(!lle nous nous riglon».
Z0R0I1A.IIEI,
Mil tout(! la loy ne trouvons
laisou no vif (msrignonicnt
qui assigno si proprcmont
'■.'■■>0 ]() lieu bu lo saulv(;ur doit naistrc.
ROBOAN
Nous tenons tous que ce doit cstre
en Hctlccn, comme il a dit.
HERODE
Nous prenons bien garde a son dit,
et est bien de legier croyable.
O'iJô A vostre coniniand honorable,
))eaulx seigneurs, ne veille dosplaire,
s'ung petit nous voulons retrairc
pour deviser deux nios ou trois
en secret a ces nobles roys ;
0'i60 nous retournerons ass(5s brief.
GAMALIEI.
Nostre roy et souvoi'ain cliicf,
faittes tout ce qu'il vous plaira.
HERMOGENES
Nobles roys, suyvir vous fauldra
lo roy qui d'icy fait deppart ;
6Sfl5 il veult parler a vous a part
a ce que j'en ay entendu.
JASPAR
Or sus, plus ne soit attendu,
allons, si orrons son devis.
HERODE
Sages roys, tant par bon advis
S470 nous sonnnes icy on priv(3 ;
est il certain et esi)rouv(;
que- cest cstellc avez voue,
et (niVllo vous soit apparue
par les iuoy(>ns que vous comptez?
JASl'AR
~T> Sire roy, janu'w n'en doublez,
qu'il est vorito de l'estelle.
HBROnR
Voiru, mes poust <«tro cstoil elle
do natni'e et do niuuveniont
comme cellen du firinaniont,
IJ480 car point n'y mettez diirori'uco.
MEi/yon
Sire, sauf vostro roverance
et se parler fault a la lettre,
trois diffei'Onws y |)cu8 mettre,
l'romioi', celles qui ou ciel sont
1)185 mouvemcns circulaires ont :
ccsto cy ne tournoyé point,
ains nous precodoit de droit |x)int.
Secondement, chaciui par^'oit
que quelconque ('«telle qui soit,
()'i90 ou ciel tant fort tourne et s'avance,
pour la haultc et grande di-stancc
nous ne les voyons iioint mouvoir ;
et ceste cy avons peu veoir
mouvoir si ti'es sensiblement
(i'i«r> que sur elle tant seulement
nous avons riglé nosti-e voye.
Tiereoment, n'est liotnmc qui voyo
les ofîtelles do jour reluyre,
car lo soleil pour son clor luyi'c
6500 les passe et met en impotence
de les choisir en sa présence :
or nous rendoit ceste lumière
au plus clcr jour si très plainiere
que chacun do nous la veoit :
6305 si dis qu'elle signitioit
quelque gi-and mislere advenu.
HEUODE
C'est bien son proiws soustenu
et prouve par une raison ; '
mes parlez nous de la saison
6510 que vous la veistes par exprés.
BALTAZAR
11 y a (Ux jours ou bien près
que premier se fut présentant,
et nous dure jusques a tant
que do l'ueil avons pou choisir
0515 Jhei'usalem a beau loisir ;
lors d'y venir feusmes conclus.
UERODB
listes vous seui's qu'il n'y a plus?
car il nous touche, pour voir dire.
JASPAH
11 n'y a no plus no mains, sire ;
IMI Kl la chaiicoii nesl pas B. C. — 0142 très II. C. — 0115 plus iMiliere C. — 0455 rouuent B. — (Uo6 Seigneun:
[.De vo)M veilhî desplaii'f^ 13. — (il57 pou a p:<rt uous l'anlt II. — OlfVl Stûgneïtrs suiuir vous conuciulra C. — 0464 fait
^Uiey B. C. — 6165 Kl vault lî C. — «107 uy B. C. — 616'.) Beaux seipneurs C. — 0171 II est certain A. — 6480 vous
ny B. C, — 6193 uous puet veoic B. — 0196 Auous règle tout C— 0.502 rouooil B. — 6509 façon B. — 6511 niaHqw
' , Nou» vous dison:! sire après C. — 6512 presenteuieul C. — 6513 a dure B. — 0518 voir] vous .\. vo(h touche B.
84
MISTERE
6520 sur la foy le vous affermons.
HERODE
Soigneurs, très bien vous en croyons,
et vous tenons bien pour croyables
pour i)lus grant cas et gens notables
d'honneur ou il n'a que reppi'endre ;
6525 et pour nostre vouloir entendre,
nous sommes joyeulx a outrance
de cesto noble demonstrance,
et de ce roi né do nouveau,
quand a ce, nous plaist bien et beau ;
6530 car s'il est Cristus, bien sçavons
que vray hommage lui devons :
jiar quoy vecy que vous ferez :
en Bethleen vous en irez
interroguer diligemment
6335 de l'enffant, de son naisscmont,
comment ses parons sont fondés,
et principaulmcnt demandez
le lieu ou il prend sa demeure,
et quand Tarez trouvé, en l'curc
6510 retournez icy par devers nous,
affin que nous et nos gens tous
lui puissions aller faire hommage,
et l'aourer de bon courage,
comme nous y sommes tenus.
MELCIOR
6545 Sire l'oy, nous illec venus,
se lo vray en pouons savoir,
devers vous ferons tel devoir
qu'il vous souffira ; soyez seurs.
Adieu, sire.
HERODE
Adieu, mes seigneurs,
6550 le grant Dieu vous veille conduire !
BALïAZAR
J'apparçois nostre estelle luyre,
ce me semble, elle est retournée.
JASPAR
Ha ! benoîte soit la journée
et loué soit Dieu mille fois !
MELCIOR
6355 C'est elle vraymcnt, je la vois :
elle a la forme et. la clarté.
DE LA PASSION
le cours, la haulteur, la beauté ;
loue soit Dieu de cueur piteux !
ANTHIOCUS
Oncques je no fus si joyeulx
6560 que do la revoir en inesent.
LUCANUS
Ce nous est le plus beau présent
que jamos puissions posscsser.
CELSANDER
11 n'est point saison do cesser :
cheminons de joyeulx vouloir.
PIRODES
6365 Autre guide ne fault avoir
pour conduire nostre voyage.
POLIDORUS
Or Dieu doint que par sou ouvrage
nos soigneurs puissent porvenir
ou lieu ou est tout leur désir,
6570 si vray qu'ilz y ont la fiance !
CA DORAS
Ce signe a grant signiffianco ;
Dieu doint que cil qui lo nous signe,
nous face a l'ame médecine,
si vray qu'il a i)uissanco en soy !
Lt'oSE.J
HERODE
6575 Seigneurs et princes do la loy
qui pour nosti'o salut veillez,
nous vous avons fort traveillés,
mes tout bien se desservira.
Allez vous ont quand vous plaira :
6580 nostre exploit est tout abrogé.
ANNE
Sire roy, a vostre congé.
S'il vous plaist riens en quelque
[jour,
n'espargnez point nostre labour.
CAIPHE
Vostres sommes a l'abrégé
6585 pour servir chacun a son tour
do bonne et cordiallo amour
comme chacun est obligé.
Nous serions bien ombosongné
6522 pour bien B. — 0324 Dun grant cas [G. faltl ou n.i que B. — 6323 Et a nostre vueil faire enteiidre B. C. —
(;530 II est crisl très Ijien U. C. — 03: 5 et de son naissance C. — G33G Comme B. C. — C549 Adieu sr'ij.'iieurs A. —
(1553 voireuient C. — G33G et wm^/ur B. — 6539 ne fusnies B. — 6560 présence A. a présence B. C. — 0361-6374
manquant A. et sont yemp!<r-vs p<rr 1rs quatre vrrs sunants :
snyuoiis la tost sans deiaourance car elle noua menra pour voir
et cheiuinons de grant vouloir au lieu ou est ne ce hault roy.
6377 moult B. C. — 0570 Ailes eut quand il B. — 6581 coailic C. — 65S4 C ajoute le ccrs : Sire roy a vostre congé.
PRKMIRRE JOURNEE
85
so nous no vonions pans (feniouc.
GAMAI.IBL
("090 Sirn l'oy, nous prenons oonpé.
UOBOAN
S'il vous plnist ri(Mis on quoiquo
[jour,
n'esiiargnez point nostrc laliour.
/.OROBAHEI,
Vostros souinies n l'nbrcgô.
Jet/ s'en vont chicitn en son lien.
\
ANTHIOCtS
Seigneui-s, tant avez voyagé
Oj95 quo vostre terme fort s'appresto,
car je vois l'csteile qui reste,
et ne s'est qu'en ung lieu laonstroe,
puisque nous avons fait entrée
dedans Hethlccn la cité.
JASPAR
6600 Je conclus par nécessité
quo le hault roy que nous quorons
en cesto place trouverons
se l'estelle y est arrestee.
I.UCANUS
La chose est si manifestée
6605 que chacun le peust voir a l'ueil.
MEI.CI0R
Or sommes hors de nostrc dueil
et délivrés de grant doubtance,
et avons clerc dcmonstrance
de nostrc fait par deux moyens :
fiCiO les scri))t's et iiharisiens
nous ont leurs rclacions faictes,
qu'il est conclu par les prophètes
que le hault Grist doit naistre cy ;
et l'estelle le monstre aussy,
66tr) qui nous haille double doctrine.
CELSANDER
La haultc puissance divine
en soit louée dignement.
BALTAZAR
Regarder fault songneusemcnt
dessus quelle lialiitacion
0620 elle fait ores stacion,
car se l'ostcl sçavons choisir,
nous arons tous nostrc désir ;
au moins j'y ay ceste credenco.
6591-3 iMribués n Camaliel A. — C603 lesloille si C. — 66C6 tout dueil B. — 00)0 Les juifz «t B. C. —6082 tout
B, — 0623 y ay je la B. C. — 6o20 a petit B. — 6633 au moins quen B. C. — 003.". y mettre C. y nuxnque A. — 6611
dont a tel présent B. — 66/i7 pense ] note B. C. — 664S Na cil qui ne soit de grand nocle B, C, — 6649 magnifestions
A. — 6050 tel le vérifions B, G.
PinODBR
Il nous appert par cvidenctr
OflK selonc quo rewtello s'affiche
quo c'est 00 petit édifice,
car elle est de di'oit point drwsus.
I-OMDOni'S
Nous no |iouons entre decom
a entrer dedans et y voir,
0030 cai- Dieu peut l>ion faire apparoir
en petit lieu niisteres grandes.
.lASPAR
Apprcstons i>roniier nos offrandes,
affin qu'au moins en l'adorant
prestement chacun soit offi'ant
0035 son don sans mettre y delayanco,
et chacun on son ordonnance.
Or donc, sire roy Melcior,
quoi don présenterez vous ?
.MEI.CIOR
Or,
niierro, et encens qui très doulx fume
OO'iO luy donray, car c'est la cousturae
de nos marches : de tel présent
Ton doit faire a tel roy présent.
Et vous, sire roy Baltazar?
BALTAZAR
Pareillement. Et vous, Jaspar,
Ofl'iS sont vos dons dissonans aux nostres ?
JASPAR
Ncnnil, mes telz comme les vostros.
Et qui bien nos dons en soy pense,
ilz sont de grant signifiance :
par encens le magnifestons
0650 vi'ay Dieu, et tel le confessons ;
par or nous le demonstrous roy ,
et par mierre mortel en soy ;
ce sont trois choses de hault pris.
CA DORAS
Sire roys, entrez ou pourpris
6655 quand vous plaira dorennavant,
tout est prost.
MELCIOR
Or entrez devant,
sire Jaspar, en la maison :
vous le valez.
BALTAZAR
, C'est bien raison,
car il est l'aisné de nous trois.
JASPAR
6660 Ne vous desplaise, nobles roys.
g6 MISTKRK DK
vous me portez trop grans honneurs.
Regardez icy, beaux soigneurs,
l'umilité, la paeience
do la puissant magnificonce
0665 qui tant huniblemont se rabesso
que sa doulce et tendre jeunesse
aux asnes et beufe se sonbmette.
MELClOn
Que chacun a genoux se mette
et offrons nos dons gracieux.
JASPAB.
.Je te salue, Dieu du ciel glorieux.
Dieu immortel, Dieu siu- tous vertueux,
vray lilz de Dieu qui créas ciel et terre ;
Je te salue, roy par dessus les cieux,
raonarchc seul du monde et tous les ii<'ux
que cueur humain peut penser no euquerre.
Je congnois bien que nostre char humaine
as pris ou corps do la vierge p\u'aine
pour racheter tes amis inuocons :
reçoy mon don, si vray que tu le sons
offrir do cueur, et pour totalle somme
présent te fais d'or, do miorre et
I d'encens,
toy demonsti'ant roy, Dieu, et mortel
Ihonimo.
MEI.CIOR
Jo te salue, cher onffant gracieux,
très noble filz, très saint fruit précieux,
des beaulx le chois ou plus l)eau ne fault quorro.
Je te salue dos doidx plus deliteux
le plus, des plvis begnins lo plus piteux,
céleste pain, vraye angulaire pierre;
Parfaicte amour par devant toy m'admaine.
recongnoissant ta puissance haultaine,
et qu'aux humains délivrer condescons,
et se je n'ay dons a toy bien decens,
excuse moy : jo, qui ton serf me nomme,
présent te fais d'or, do mierre et
[d'encens,
toy demonstrant roy. Dieu, et mortel
[homme.
HALTAZAR
Je te saljie, roy du ciel plantureux,
fruit do salut, dès riches plus euroux,
liors qui tresm- bien ne se peiist conquerre,
LA PASSION
S'en biens mondains es nu et diseteux
ot dohoi's pers povre enflant souffreteux,
tant as en toy que nul ne peust onquerro :
Car du plus hault de l'arche souveraine
es descendu en la vie mondaine,
juge et régent des preseus et absens,
et non obstant que tous biens sont recens,
en toy, saulvour, no temps ne les consomme,
présent te fais d'or, de miorre et
[d'encens,
toy demonstrant roy, Dieu, et mortel
[homme.
Icy tient Noslre Dame l'enfant en son giron
et chacun des trois roys fait son présent en
ordonnance.
XOSTRK DAME
Seignoui's, vous pi'osentoz granl somme
6710 d'avoir a mon cher filz Jhesus ;
mes povromcnt estes receus,
dont il me poise en mon affaire
do ce que mieiUx ne vous puis faire :
vous voyez le lieu mal honneste,
071') qui n'est pas deu a faire feste
a rois do si noble façon :
vous voyez le povre onffançon
en ces povres drapelez mis ;
vous voyez ses povres amis,
0720 sa i)Ovre more qui le garde.
JASPAR
A cela ne prenons pas garde,
chère dame, jo vous promès ;
mes heure no sera jamcs
que bien ne nous en soit escheu,
0725 quand vostro enflant avons vou ;
son povre estât riens ne nous meust,
mes croions que tout scet et peust
comme vray filz de Dieu lo pore.
MEI.CIOR
Dame, très veneridjle more,
ei'XO a joye le puissiez garder ;
tant plaisant est a regarder
quo cuem' n'est qui le puist comprendre.
lîALTAZAR
Ma noble dame, au congé prendre,
nous vous saluons humblement.
NOSTRE DAME
073.") Je pry au roy du firmament
que le bien fait vous veille rendre.
JOSEPH
Soigneurs, vous avez peu apprendre
6668 tost B. — 6674 seul mantur C. sur tous les lieux C. — 6683 beneureux B. C. — 6687 begnin A. B. C. des
plus piteux B. C. — 6700 (le hors pays B. — 0701 Que riens ne peuz acquerre C. ~ 6702 prinieraine C. — 0715 Qui
ne doit pas C, — 6725 Que vostre B. C. enffancon A. — 6735 a dieu du G.
PRKMIKRE JOURNKK
97
nostrc potit gouvonicmoul ;
lions soiimics ifi simplomont :
0740 puisqu'un !•( tiiwr voulez eiitoiidrc,
Diiu vous gaidc dViicomhi'cniPiit !
JASI'AIl
l'n'iidonR, pensez Roigneusoment
lie ec saint et preoioulx (gendre ;
t'uictes laut (pul ii"aist a rcppreudio
6T'.j eu sou (loulx eiitieteiicuieut.
MEi.cion
.Ma noble daino, au congé prendi-e,
nous vous saluons humblement.
NOSTUE DAMK
Je pry au roy du firmament
tjiie le bien fait vous veille rendre.
n\i,TAZ\n
"6750 Beaux seigneurs, il nous fault entendre
a nous loger pour costo nuit,
et mener liesse et déduit
de nostie joyeusi? advonturo,
ANTIllOr.L'S
Siiyvez après iiioy bon allure :
|87K j'ay ti'ouvé logis tout propice
de puissant et noble édifice,
ou vous serez liieii a vostri; aise.
MKI.CIOK
l'entrez dedans mes qu'il vous plaise,
sire, vous estes nostre aisiii'.
car ei<l)a» no fcsto n'y voin
puisque je n'y niaH^un ou IkiIh :
«7r> je ne veil point truffer la dent.
ELEAZAR
(Vost pnrli' droit en presidnnt :
il n'est l-epposeï' qui le vaille :
ji? vais quérir île la mnngcoille
tant que vous po\iri'ez expenser.
07S0 Laissez la vos seipiimus penser
a (lebitoribus noslris,
et songnoz de fntctu ventris,
hardiment je lo vous conseille.
HIBODES
C'est dit d'une franche bouteille,
8785 il ne muse pas d'un coussin.
EI.BAZAH
Tenez, suis je voti'e cousin ?
reviens je point la main fournie ?
depeschez moy ocîste i«)ignie
tandis que l'aultre nieurira.
I'OLID0Bi;.S
6790 C'est bien dit, l'en y pensera,
au moins ay je l'inteneion ;
nos seigneurs font eollacion
maintenant, comme j'yningine,
et nous, songnons a la cuisine
fi7rr> diligemment.
CA DORAS
lùi ooui-t d<; l'oy,
l)eaux amis, chacun est pour soy ;
qui ne lo fait, il n'est pas sage.
Ici/ peuent les trois rot/s boire nne foi:: et puis
eulx reposer sur leurs couches.
Ei.KAZAU, hostelier.
ïe7C0 Vostre lieu est tout assigné :
j'ay tendu lilz et oratoires,
et fait telles préparatoires
qu'il np|iarti('iit a vostre estât,
et se j'en sçay trouver l)eau jilat
|6705 do viande fresche venant
et de bon vin a l'avenant,
vous en arez vostre leçon.
HJCANUS
C'est parlé d'osto de façon :
nos seigneurs, pour vous abréger,
r6770 ne veullent boire ne manger :
ilz ne quiereut que le reppos.
CEI.SANDER
' Ce n'est pas bien a mon pi-opos.
DIEU LE PEBE
Raphaël, faictes ung message
aux trois roys sages et discrés :
fisoo allez vei-s eulx et leur direz
que vers Hei'ode ne retournent,
ains leur chemin vere la mer tournent
pour aller en leur région.
car lo roy mauvais tt fellon
iiso:) a propos d(^ perdre l'enffant,
s'il pouoit.
BAPHAEI.
l'ère triuniphant.
il sera fait tout de ceste heure.
07-'.l de tout en.onibiicr C. - 674'. v.s nist ,|ue H. C. - <S"A ,l«.ieiior C. - 6756 <■% boa U.C. - C761 Say B. C
0764 Si ay lait la.re un^r C. - C770 le ;i..nt C. - 0785 point B. C. - 6787 <le main a - 6S03 retournaos B, C.
6806 tout puissant B, G, — 0807 8»ns nul Jemtiin B. C.
MI STERE DE LA PASSION
[Pose.] ' eu joyo et paifaicte lyesso 1
Nobles roys, en caste demeure
Dieu le père par nioy vous mande
OSIO et très expressément commando
que vers Herode n'alliez pas :
vers la mer adressez vos pas
et nagez jusqu'à vostro terre,
car le tirant vouldroit enquérie
0SI5 rcnlFant Jhesus, non jias affin
de Taourer, mes pour mettre a fin
s'il on avoit ceste puissance ;
et piurtant, roys de grant vaillance,
donnez vous en tretous en garde.
Icy s'en retourne.
JA.SPA.R
CS20 Or, beaux seigneurs, chacun se garde
d'estre son chemin attirant
vers Herode, fellon tirant,
. comme l'anglo nous l'ammoneste.
MELCIOR
Sus ! chevaliers, chacun s'appreste :
6823 il est grant saison do partir ;
Dieu nous ha volu advertir
d'ung gi ant bien a ceste journée.
A^'THI0CUS
Nostro l)arg3 est toute attournee,
nos vivres sont prests a largesse :
6S30 sus! matelot, la voile dresse,
metz a point tes habilemens.
LE MATELOT
Avant! seigneurs, entrez dedans:
nous avons vent de si bonne erre
que plus tost qu'ung cop de'tonnni'ro
0835 nous serons en Tharsc singles.
Rangez vous et vous as.-^amljlez :
chacun.se mette bien aposte,
l'un au millieu, l'aultre decost?,
vous verrez bel esbat tantost.
CELSANDER
C8'.0 Or halle ! halle, matelot,
halle le tref, no te l'aing point !
LE MATELOT
Nous avons vent si bien appoint,
qu'homme, tant y sceusist viser,
ne le sçaroit mieux deviser :
6345 n'y a que de singlcr en voye.
iiALTAZAR
Je requier Dieu qu'il nous convoyé
SAINT SIMEON, le prophète.
0 vieillesse,
estât de ludesse,
68"i0 d'impotence et de grant foiblesse,
tant ay vescu que je suis en tes las ;
Ma jemiesso
est morte et me laisse,
et n'attens que la mort me presse
comme homme mort et pi'ivé de solas.
' Messias,
mon Dieu, quand vendras?
doulx Grist, quand te verray, helas?
Dieu immortel, tu m'as fait la promesse
6860 Que des las
de mort matz et las,
ma vie no termineras
que n'aye veu Grist, ton fdz do noblesse.
Tu m'as promis, et je le tiens pour vray,
6805 que du monde ne fineray
ne mourray
de mort corporelle,
jusqu'à ce que celluy verray,
et sensiblement le tendray,
que je sçay
ma vie éternelle ;
Et donc, vray Dieu, si ta promesse est telle,
j'ay parfaicte espérance en elle ;
no me celle
ce que tant cher ay
car par dessus toute chose mortelle
j'attens qu'une bonne nouvelle
me revelle
ee dont liés seray.
CS80 De vous prier ne cesseray :
bon Dieu, que de moy vous souviengne.
et vous plaise que le jour viengne
do l'humaine redertipcion.
Envoyez consolacion
C885 aux filz d'Israël vos amis,
ainsi que vous l'avez promis
par toute la icy de Moyse.
0 filz de la haulte pourprise,
Gristu-', saulvcur, Emmanuel,
0S90 puissant rédempteur d'Israël,
a la dextre ton perc assis,
Deits fortis, princeps pacis,
0870
6875
0808 de vouloir humain B. C. —0813 en B. — 0810 paur vinn/ur C. — 0817-8 maaiunit B. C. — 0810 Et pourUinl
donnez vous en A. — 0822 le félon et mal tirant B. C. — flSjO mathenot parinat B. — 0838 a la ooustu C. —
685î Comme ung Jiomme priue de soulas A, passe et priue B. — 6858 quand voudras B. C. — 0860 ses pas A, — 6861
De la mort et son trespas A. helas B. — 0802 natermineras B. C. — 6863 ton doulx fils B,
PREMIERE JOURNEE
qiiaiiil vendra l'heure bien curouae
(liic ton ('ij(luiiiî(! «loriouso
fiSfl.'i imissci olioixir iinrfuictonient ?
.)<■ rcquior Diou dévotement
([lie liricriiK'iit lii pforacsso ticngnc.
[SlI.KTK.]
.inSEI'H
Affiii que la loi s'eiiti'etiengno
de niiiis sans i'e|ii'elieneion,
C900 vostro imiifieacion,
Marie, nous faiddra parfaire,
ja soit eo que droit ordinaire
ne vous y lie nullement :
il est huy le jour proprement ;
0905 regardez que vous voulez dire.
NOSTBE DAME
A vostro vouloir, mon cher sire ;
j<' ne viieil pas esti'e exemptée
de la loy qu(î Dieu a donnée,
ne mon estât magniffier ;
liOlO ains me vouldray purifier
selonc la loy et l'ordonnance.
JOSEPH
C'est Inen dit, ma doulee alliance,
1 1 imisqu'a ce vous consentez,
pour faire les solempnités,
C915 l'ii Jhej-usalem nous menrons,
et .lliesus o nous porterons
au tem|ile pour l'y présenter.
NOSTIiE I>A\;E
Nos ortrandcs y fault poiter ;
elles sont de nécessité
0920 pour l'enffant.
JOSEPH
Il e.st vérité,
dame, bonne raison avez ;
mes, chère amye, vous savez
que nous sommes moult indigens
des biens du monde et povres gens :
6985 si no devons pas estro ott'rans
d'oblacions que font les grans ;
Beulement deux turtes devons
pour nostre oft'rando ou deux pigeons
si nous en fault faire l'aiipreste.
ELIACHIN
G930 Veez cy la chose toute prest.' ;
pour cela pas ne tarderon.
ElinRAR
Voez cy ung: petit paneron
])oin' le» ]H)i-ter tout douleonient.
AQUil.LAi.NE, femme Kndrns,
So c'est vostre conMenteuient,
09X> ma eherc voisine Marie,
je VOU.S y tendray coinpaignie
<'t d'aultres dames grnnt foison
qui y vendront.
ESOBAS
C'est bieu raison
qu'elle soit de nous honorée
€0W a eeste saintisme journée
de sa noble purgacion.
NOSrnE DAME
Dames de grant devocion,
graeo et inerit(^ vous doy rendre,
qui tel iieino voulez èmprendre
0945 jwur moy : Diou le tourne eu mérite.
JOSEPH
Dieu veille estre en nostre conduite
et nous doint sa grâce aulmonnierc !
[l'OSK.]
HERODE
Nous n'entendons point la manière,
les raisons ne les drois uiotis
C950 pourquoy ces roys, qui sont i)artis
en nostre congé grant pièce a,
ne .sont retournés par de i;a
comme promis le nous avoient.
HER.M0GE.SE3
Je double, sire, qu'ilz ne soient
0955 deceus de leur advision,
et n'estoit qu'une illusion
do leur estelle et de loin- compte ;
par quoy je croy qu'ilz ont eu honte
de retourner, comme je tien.
HEBODE
C9fl0 Hermogenés, vous dittes bien,
ilz ont vrayment esté honteux :
dont nous sommes liés et joyeux
que la chose est a néant venue :
tant que de Crist et sa venue,
C9."> jamès nous n'i'n croirons paroles.
ARPHAZAC
Ce sont oppinious frivoles ;
sii-e roy, n'y pensez jamès.
0893 vertueuse B. — 0901 conuendra faire C. — 0922 ohere dame C. — 6987 teurtres 11. — 0933 et «mye C.
09:,J a flostre B, — 0(69 le lien B, — (1902 nous manr/ne .\, B. — 0901 mon'jn»»' A. Quant est C
ÔO
MisTERK ni-:
[Pose.]
ELUrHIN
Jiiyoïix sommes plus qii'oiicquos mes,
que vernis sommes au saint temple.
Esun.\s
<'>0;o CVt iinp: saint lieu pour prendre exemple
a toutes vertus ensuyvir.
.lOSEPH
Chacun pense do Dieu servir
eu i)arfaicte devocion,
puis ferons nostre ohlacion
C97j de eueiu' et bonne volenti'.
Icy se mettent a genoux.
SIMEON
0 souveraine majesté,
de qui toute lionti' procode,
de qui to\ite haultesse excède
quanqu'il est par dessus les.cieuls,
C9SÛ mon espoir confermez en mieulx,
élevez mon intelligence
et me donnez ferme eredence
que Grist l'enffant est né pour, voii',
et qu'a\i jour d'uy le pourray voir
f)9S5 présenter au temple de Dieu.
.l'ay grand vouloir d'aller au lieu,
et mon ame y est si fermée
qu'el n'en peust estre deffermee.
Je tiens que le saint Rsperit
C990 le m'enseigne et le m'avcrit ;
je requier Dieu, mon créateur,
qu'il veille estre mon conducteur.
car jamès je n'arresteray
jusqu'à ce qu'au temple seray
C995 pour estre du fait plus certain.
JECONYA.S, prestre du temple.
Dames, qui de vouloir humain
ce petit enflant apportez,
.approchez et le présentez
a l'aidtel bien l'overranmient.
XO.-TRE 0.\MF.
7000 Volentiei-s.
.JECONYAS
Au eommancement
la loy a ainsi ordonné
que, puisque c'est le premier né,
il est deu a Dieu sans doubtanco
en signe de la délivrance
LA PASSION
7005 de nos lions pères anciens.
Quand Dieu sur les Egipciens
occist par dure et fiera gueri-e
tous les premiers nés de la teiTo
et ceulx d'Israël conserva,
7010 ces drois lors a soy réserva;
neantmoins qu'après le présenter
très bien le pouez racheter
|)our une offrande coustumicre,
et en a de double manière,
7010 conmie chacun le scet assés,
AQUILLAINE
Sus ! Marie, or vous avancez,
offrez voftre enffanvon petit
selonc la forme qu'il a dist ;
de mon (louoir vous aideray.
NOSTRE DAME
7020 De bon vouloir l'accompliray,
c'est très bien mon intonciou.
SIMEON
A toy .soit adoraeion,
louange, veneracion,
Criste, fili Dei viri,
De qui la presentacion
et la doulce recepciou
i)î spirilu Dei scivi.
Tu, es nostre salvacion,
nostre vrayc redompcion,
quam ai'denter conciipiri :
Benoit soit le Dieu de Syon
qu'a si noble incarnacion
ùciiJos meos leravi.
0 sainte vierge preelicte,
7o:î:) combien ce digue fridt proffite
a toy ot a tous les humains,
je te requiers a jomtes mains
que ta grâce puisse ol)tenir
de l'enffant en mes bras tenir ;
70'i0 plus aise en fineray mes joui's.
NOSTRE DAME
Le vouloir Dieu soit fait tous jours
]ioint n'y metz d'opposicion.
SIMEON
Nitiic dimittis servum tiium.
0 sire, laisse désormais
70'.") ton sei-vant reposer en paix,
car mes yeulx ont vcu ton salu
que tu as paré et eslu
en la face de tout le monde,
7025
70.'S0
697;' Et lin qui la C. — 0979 Qu.'int qui li. — 09S5 rrpi'tc B. — 0691 mon doiilx iTeateui' C. — 7IH)2 quil est B.
7005 predwessem-s B. C. —7007 serre B. C. — 7013 l'ar B. C. — 7017 enfant C— 7027 s<-ini] sancti A. — 70-M
mais B. — 7045-59 Cfs vers ont f^tr corrigés par un lecteur plus modertip que le copiste C. — 70-47 prépare
7048 force C.
désir
C. —
»
rRi;:\iiKHF. .iothnek
91
TOM
7ft;o
TOfi-
TOTl)
Tosri
:tm
:«>:.
luniii'i(! ou loii('l)i'o n'halmiido
pour la voyc aux gons rovolei"
et Iii gloire pour foiisolor
1(111 pruplc d'Ismol m joyc.
O clier enffnnt, coin duro vovi'
lu arns n passer encore
avant ipio viengno In tempore
(juo les escrips et les recors
soient ncconiplis sur ton corps
que les prophètes ont escript !
Très doulx filz, très doulx .Ihesu (liisl.
()n<(Hies ne tut si dure sonuiie.
JOSEPH
Mario, escoutez co saint homme,
ipielz proverbes il nous prononce :
iiiervcilles de .lliesus anoncc
qin no sont pas a oublier.
N'OSTRE DAME
C'est liieii chose a soy merveillier,
et en iiioy liien lo considère.
SIMEON
De la dcxtre île Dieu lo pore
soiez bénis entre vous doux.
0 gens, vous estes bien eureux
et pour bien fortunés vous clame :
il y pert bien qiu^ Dieu vous anio
qui ung tel trésor a coniiiiis
on vostre garde, mes amis ;
Dieu vous doint faii-c bonne garde !
Et toi, dame, ton fllz regarde
que tant cher tiens on ta saisine :
enoor sera mis en ruyne
et en dolente passion,
causant la resun-ection
do plusieurs gens en Israël ;
et lors ung glaive très cruel
tresperc(Ma oultre ton anio,
très sainte et vénérable dame,
par pitié et compassion,
et alors revolacion
de mainte pensée aperra
de maint cucur qui ti'iste sera.
\NN.\, la prophotffsse.
Vray Dieu, vray chicf de nostre loy,
tous mes péchés confesse a toy,
et sçay bien que ne suis pas digne
de voir personne tant divine,
tant saint, tant hault médiateur
que le souverain rédempteur
que j'appei'çois en ma pro.sence.
0 très sainte et pure innocence,
Crisl Al» pro])het««i approuvi-,
tu nous soi(!» le bien ti'ouvi-,
très l)enigno fleur dcsii'oc I
la puissance Uieu soit louée
71(10 do ton divin adressement !
Hsjouissez vous haultcnient,
bon peuple do .Ihenisalem,
de Syon et de Kethlceui,
fnittes feste grant et menu :
7105 vecy vostre saulveur venu,
vostre délivrance est prochaine !
AQl'II.I.AINE
Comment, dame, estes vous coi luiuc
que cest euffant que uouh voyous
est Crist propre que nous croions
7110 venu poui' nostro délivrance?
ANNA
C'est il, n'en faittes ja" doubtaiice :
c'est nostre bien, nostre refl\igc,
nostre rédempteur, nostre juge,
qui vient pour tout l'humain lignage
7)1."> délivrer <le peine et servage.
Dieu doint qu'ai)rès ce povre coins
il face n nos âmes secours,
si vray que j'y ay espérance !
ESDRAS
Nous avons double dcmonstraneo
71S0 que c'est Crist icy proprement.
AQUIU.AINE
Je le tiens et crois ft'rmement
par les i-appors que ces gens fout,
qui devotz et saintes gens sont :
|)ar qiioy j'en suis plus as.«euree.
JOSEPH
712") Or estes vous purifiée,
dame, comme la loy commande.
Puisque fait avons nostre oflVande.
retourner nous fault sans arrest
en la cité de Nazareth
"l.'în 0)1 est nostre habitacion.
NOSTHE DAME
Or alons sans dilacion ;
Dieu nous conduye par sa groce !
Jcy s'fin vont en leurs premiers lie nx.
SATHAN
.le quiei-s cy toute jour et trace,
regardant moyens et cautelles
isr> po\n' parvenir a mes querelles.
707'. fac,> faire C. — 70S1 son H. — 7087 de j et A. B. brise. C. — 7091 tant (ligne B. — 7i)90 lie .les B. — 7101
liuiiibleraent B. C. — 7111 1' m^rn^ui- B. C. — 712(') Ma senr B, i;. — 7187 Sauons parfaii'le B.
92
MISTERE DELA PASSION
nios jo ne puis trouver moyen
a quoy je puisse gaignei' rien,
s'i prens trop grant marmouserio;
do quoy me sert ceste Marie
"l-iO qui ne sçay quel filz a i)orté
dont l'eu fait tel solemiité ?
l'engendrement m'est esconssé,
renffantoment du tout musse,
de la manière n'ay rien sceu :
71't5 s'ay grand double d'estre deceu,
et qu'il n'y ait qu'a exploitier •
quelque chose soubz le mortier,
qui cy après grand dueil me face.
11 n'y a moyen que je sache
7150 sinon de fouir en enffer
moy conseillier a Lucifer
quel remède y sera trouvée.
SIMEOX
Jherusalem, cité louée,
fille de Dieu très jjrecieuse,
7155 fais cliiere et joye plantureuse:
ton rédempteur est né au monde ;
celluy ou ton cspoii' se fonde
et ta redempcion suhmès
est venu, n'en doubte jamès ;
7160 briefment le verras de cueur pieu,
h'sjouys toy, fille de Dieu,
quel plus grant bien peus tu avoir?
C'est ton trésor, c'est ton avoir
qui t'est livré a juste terme ;
7105 il est venu, je te l'afferme,
et n'est chose plus vei'itable.
JACOB, scribe.
Simcon, saint honnne honorable,
dittes vous que celluy Cristus
qui doit faire tant de vertus
7170 est venu ? c'est ung cas haultain.
SIMEON
Jacob, soiez en tout certain,
que j'ay tenu entre mes bras
Cristus, no^tre doulx Messias ;
loué en soit Dieu et son nom !
GAMAI.IEL
7175 Simeon, vous avez renom
d'estre homme de grant conscience :
ne proferez pas tel loquenee,
se grant vérité n'y sentez.
ANNA, la propheiesse.
Mes seigneurs, jamès n'en doubtez,
7180 il n'est rien plus acertené
qu'il est homme, de vierge né,
et en nostre [n'esence niesmes,
voyans plusieurs hommes et femmes,
a esté présenté de fait
7185 au temple, tant doulx et parfait,
que c'est le plus beau des vivans.
ZOnOHABEF,
Nous ne .sommes pas estrivans,
et espoir peust bien estre ainsi;
mes qui m'en croira sur cecy,
7190 a Herode Tirons noncer :
forse se pourroit courroucer,
qui du fait ne l'advertiroit,
et peust estre qu'il doubteroit
que feussions joyeux a planté
7195 qu'il fut de son règne exempté,
et que son courroux nous fut bel.
ROBOAN
C'est bien pensé, Zorobabel,
très bien v voulons consentir.
DIEU LE PERE
Gabriel, allez advertir
7200 Joseph, nostre devost concierge,
qu'il jn'engne Marie la vierge
atout son doulx enfant Jhesus,
et s'en voit sans arrester ]ilus
manoir en la terre d'Egipte,
7205 et qu'il y demeure et habite
jusqu'à ung temps qu'on luy dira.
GABRIEL
Vostre mand accomply sera,
père du ciel : j'y vois tout droit.
GAMALIEL
Vray chief de justice et de droit,
7210 Dieu vous gart et vostre bernago !
HERODE
Ganialiel, bons de parage,
vous nous soiez le bien venu !
qu'est il de nouvel advenu ?
vous nous samblez tous esgarés.
71/.2 absconse B. C. — 7161 peuple de B. C. — 7166 Jacob, Juif B. C. — 7H5 déboute C. — 7200 bon concierge C.i
■ 7202 Et son doulx entt'aiieon B. C, — 7207 coinniand B. C. — 7208-9 man'iueni Ç - 7214 effraiez B. C,
I
PREMIERE JOURNEE
03
mo
Ti£
CiAMAMEL
lilj llaiilt justifier, vous le svaioz
et le dirons de point en point.
HEHOUR
Couvi'oz vous.
ZOROBAIIEI.
Il u'appat'tient point :
vostic honnrui' no nous est pas (irid'.
(iAMAMKI,
l'our vous (.•(inii)t('r lo cu.s en hiiof,
sire, vecy ou mon point vient :
ne sçavous so mes vous souvient
(le.s trois roys qid par cy passèrent
et du fuit Grist vous niioucerent,
et do rcsti'llo, soiiinie toute,
qui le denionstroit iw sans douLt.'
et venu eu propre |)ersonne.
HEnODE
Souvenance en avons Inen bonne,
car du retoiu'iier nous mentirent ;
mes au fait dont nous advertircnt
7S30 ne pensasmes oucques depuis,
de paour que ne fcussions soui'|iris
do quelque folle fantaisie.
GAMAMEL
Sire roy, je vous certiflie
que la nouvelle est dévoilée
7235 par tout le pays de Judée
que celluy roy qu'il/, demandoient
est ne tout ainsi qu'ilz disoieut,
mes du lieu l'en ne scet eu quel.
HEROUK
Que dittes vous ?
ZOROBABEL
11 est tout tel,
72'iO ot de fait aucuns l'ont veu
qui l'afl'ermi ut avoir tenu
en leui's bras petit cnfançon.
HEIIODE
Mes sont ilz bien gens de façon,
ceulx qui sèment itelz langages (
IIOUOAN
7215 Des plus sains, notables et sages
qu'on sccust trouver par vérité
en -Iherusalom la citti,
qui dient que la chose' est telle.
HERODE
Vecy deablerie nouvelle,
725() vecv ri injreKcnient de dueil
et lo rovora do iiostro vucil,
tout comble de rngo «Iftipilc ;
ha! faulce liguée maudite
des traites my» Arabienx,
7255 par faulx cl cauteleux moiciw
nous avez voulu deffrauder,
et bien vous estes sceu garder
de retournei- par devci-s noiw.
AORACUS
Sii'c, cessez voslre courroux :
7260 bonne romedc y sera mise.
HERODE
Ce sera niou pai' tel devise,
que tout le monde en ara crainte,
et, se ne fust que de contrainte
a Ronnnc nous fault comparoir
7265 pour raison et jus^tico avoir
de nos fllz qui noas grjefvcnt trop,
nous en ordonnissions a trop
de ce qui sur le cueur nous gist,
et ci'oyez qu'onique honnue ne fist
7270 si douloureuse discipline.
HERMOOENES
Te iips est que chacun (s'achemine :
no .13 avons grant voyage a faii'e.
ARPIIAZAC
Au retourner jwurrez parfaire
du tout vostrc oxecucion.
HERODE
7275 Nous n'avons pas intenciou
de l'oublier, soiez en seure,
ZOROBABEI.
Adieu, sire.
HERODE
Adieu, beaulx seigneui-s,
au retour fei'ons Iwnue cliierc.
/ci/ s'en va Uerode et sen yens vers Ronune,
(iABRlEL
Joseph, euteus ma voix plainicre :
7280 lievo toy et te i)ars d'icy,
pn'us l'enfl'ant et sa mère aussi,
et fuys en Kgipte bat;mt
et la demeure jusqu'à tant
que je te diray ton affaire ;
7285 car le tmnps vient dur et contraire
7226 Kt ) Kst A. H. — 7227 bien ] 1res li. G. — 72:tl seduiz C. — 723S auquel lî. — 12X0 tout tn.ui'/ui- B. — 72tO si
lont A. — 72» voeubl's D. (",. — 7245 ''t des plus notubles H. ('.. — 7251 renuers C. — 7254 tristes It. — '»M telle
guise A. — 7260 De uostie (ilz qui nous trop ■frilue A. — 7207 Nous leissious orilonnaucc biiefuo A. — 7277 beaulx
mmi'/icc A. — 7282 Ten fuiz C. — 72S3 te liens D. C.
94
MISTERE DE LA PASSION
qu'Hei'ode se voiililra aherdre
a [irendru l'ciifiaiit pour le perdre,
mes Dieu y voiddi-a prévenir.
JOSEPH
Icy uo vous fault plus tenir ;
7290 Marie, levons nous briefment,
et nous en allons visteraont
en Egii>te pour luic espace ;
l'angle m'a dit qu'ainsi le face
pour doubte d'une grand fortune.
NOSTRE DAME
7205 La nuit est bien obscure et brune ;
allons m'en par secrète voye.
hy monte Nostre Dahie sur l'asnc et l'enfant,
et s'en vont en Egipte.
SATHAN
Haro ! deables, a grant uionjoye.
liar tourbes et grosses fumées,
" lie sourtVo etcrnal onflaninices,
7o00 venez nioy tantost secourir.
I.rC.lKKR
Sus! deables, pensez de courir
a Sathau uostrc oinbassadeur :
il crie que c'est grand hidour,
il y a quelque grosse enibuclie.
HELZEHl TH
7305 S'iray tantost a l'escarinucbe
savoir quel dealjlc le couva.
CERHEUUS
Connnent va, Sathan, conunent va ?
es 1 1 enrage: ou desvé ?
que te lault il ? qu'as tu trouve ;
7310 qui te rainaine par cbcniin ?
ASTAUOTH
Descbargcz sur ce pèlerin
tordions plus drus que pois en pot.
LLClFEn
llola! ne lui touclie, Astarolli :
je te le deffens sur la hart.
*:!ir> Sathau, gette cy ton regard
plus trcspoiraiiL qu'ung basilique,
et en horrible i-ethoriquc
oruee de termes morteulx,
nous chante on motos despiteus
7320 la manière de ta besongnc.
SATHAN
Se je faulx, ame ne me grougno :
je suis a moittié hors du sens.
r Lucifer, a ce que je sens,
\ nostre brigade est bien taillie
7325 '.d'avoir très ordo conipaiguie,
bins que passe longue saison.
j • HELZEHLTH
i'ar quoi moyen, par quel raison?
tu ne nous dis chose qui vaille.
LUCIKER
Laissez le dire, ribauldaille ;
7330 qu'il n'y ait ame qui l'empesche.
SATHAN
Roy d'enffcr, je te dis et pi'eschc
I qu'es parties de Galilée
est ne sçay quel famé, appelée
Marie, assés jeune puecUe,
7335 la plus courtoise, la plus belle,
la plus doulce, la plus bénigne,
la plus vertueuse et plus digne
(pii soit es mondains au jour d'uy ;
j'ay i-egardé et circuy
73'i0 de l'avoir par aucun malice,
mes il n'est mal peclio ne vice,
de quoy je la puisse occuper.
I.LT.IKEn
i Connnent ! ne la sces tu tionqier ?
tu os tant soubtil et tant cault,
7345 desloyal Sathan.
SATHAN
Rien n'y vault :
c'est merveille que de sa vie ;
sou ame est tout a Uieu ravie,
et mesmes quand je la regarde,
advis m'est que jo Inulo et arde
735') endjrasé de cent mille fus :
et lors je m'en vois tout confi'us,
hurlant comme ung loup forcené.
LUCIKER
Haro ! fauls serpent condanipu'-,
garde que U» gorge propose.
SATHAN
7355 Briefment c'est la plus sainte chose
que bouche s(,'aroit racontei' :
je vis Judich, je vis Hester,
je vis Rachel, je vis Lya :
riens de compuroison n'y a :
7300 c'est icy une pa'sseroute.
CERBERUS
. Sathan, tu nous metz en grunl doubte
et sur le point de desconffort.
FATHAX
Kucor vous diroy je plus t'oit :
â9J allons nnus l'ii C. -v 7291 Uleii tusl ot huslineiiiL'iit ('.. — 7295 so.Tele et C. — 729j m' nUuiiH- H. — 73(W
'[ui deable .\. il y a C. — 7331 vous B. C. — 7353 serpent ] ^atlian A.
l'RKMIliRp: JOL'RNKK
fl6
oi'sto viorge a eu un oudaiit,
::i'.", et si u'ay seeu coiiimoiit uo quant ; 7400
toutedbi» si,'ay je bieu en sounue
(lu'diKiIuo.s n'oust atouelicniont d'honniu' :
i't si elle a ou ung beau fiiz,
iliiiit no\is soi'ons tous dcscouflis,
7:;7(i lai' le bruit vole maintenant
i[ue c'e.-t Chi'istus propre venant
|ionr tous les bniiiaiu» raehi'ter,
et il(( fait l'ay veu liioseuler
au teniple, et dire a voix publique
: '.:. ipic c'est le saulveur autenlique Tior)
qui doit délivrer les .luif/..
I.I'CIKKU
Kaulx dragon, l'aulx matin l'amis,
perverse toi'tue mortelle,
ni'ai)portes tu ceste nouvelle
TJSO la plus despito et plus mauvaise
que jamès en Tardant fournmse
gorge do deable nous pulilie^
Sus! Hclzebuth, viens, si le lye 7110
devant moy de chcsues de fer
TJSj cmrtaniboes du feu d'eufl'er
pins ardant <iue fou de tenqiesle,
et le bâte/, jiar tel moleste
qu'il soit brulc de part en part.
SATHAN
lia! nicrey, maistre. 7515
HEI./.EliUTll
(l'est trop lart :
7390 vous arcz ung ijurjnivimus
sur vostre groing, villain soudart.
SATHAN
lia 1 mcrey , maistre.
ASTAUOTH
C'est troi) tart.
I.LC.IKKR 7420
Cliaulle il '.
CERIIERL.S
Mes demandez s'il ai t :
connue brandons au vent renms.
hEKlCH
•MC) Veez la le gallant bien camus : 7'iir>
je eroy qu'il eu a bieu sa |>art.
SATHAN
lia ! mercy , maistre.
i,ii<'.iFEr>
C'est Ircip tart :
vous arez ung jiu f/ n ii: initis .
Kii'tlez desMUH, h'i'o» et meniui,
!(■ ribault ext liabandoniié.
HEL/.KHLTH
],on ileables l'ont bien rauieni-
lK)ur nous rapporter t^'l langage.
MCI FER
Sathan, eouimenl te va '.
SATHAN
•l 'enrage ;
iielas! maistre, miserieurde !
LUCIFER
.loues lu la ton pei-soniiage !
Satlian, comment te va?
SATHAN
.l'eniage.
ASTAKOTII
A dneil, a passion, a rage
convient qu'on le tue ,et descorde.
LUCIFER
Traiiu'ï le d'une grosse eoi-dc
tout partout l'iufernal mesnagi',
fiffiu que plus ne s'y adniorde.
CERHERLS
.l'ay si grant jiaour qu'il no im' morde
que je preus bien cnvis vinage.
SATHA.V
.le mcvus, je forcené eu courage ;
il n'est ame qui s'en rccoi'de;
LLOIKER
Sathan! comment te va?
SATHAN
.J'enrage ;
lielasi maistre, miséricorde!
I.bClFEU
Cessez, maignio laide et orde ;
Sathan, tourne cy ta figuie
et me parcompte l'aventure
(pie tu avoycs commancé.
SATHAN
Ha! maistre, je suis .si lassé
de butiner et torchouner
qu'.*! peine imis je mot sonner ;
le dealJe y ait part au voy.ngo !
je n'en puis plus.
LrClKKU
Sy soies sage
ime aullre l'ois, m'eulens tu bien ?
Or, sire, Herodo scet il rien
de cest ouffaut dessus noiuniô ?
7akS i:.>tlc qui 11! tient a son lilz li. C. — 7;!l)0 j'' m- liens plus II. C. — 7.177 fuiliz C. — 7:i.KW:J Muniii n' 0. —
73UO pran» et lî. I".. — 7101 Tous l''S 0 — 7.».! tr^ „i ntiuc I!. — 7W:i-17 m '.if/:i'.i' A. 7i0j-(> m.r,,yif «( C. — 7107
A tlurr pas.iou ris niL-i- C. — 710S Knult i".. — 711:1 Que jy [ireu : Ijieii une rage C. — 7111 jeiinipe C. — 711S Cn
.vubstance villaiue el orde li, (J. — 7111) Tourne ton horrible ligure lî. C. — 71») i\ laueilture A. — 71Î1 Ce nat lu
auoys A. — Ti-ii tant eusse B. C. — TCCi Uebatre et de C. ■»- 7i8S Or satliau liurodo... C.
MISTERE DE LA PASSION
SATHAN
430 Ouy, il en est informé
et luy fut la ehosc nionsli'cc
par ti'ois rois d'cstrange contrce
et aultres plusieurs ses suppos.
IXCIFEn
Comment ! n'a il point en pi'opos
743j (l'y pourvoir ?
SATHAN
Ouy, mon seigneur ;
mes il est devers l'empereur
accusé pour aucun/, meii'ais,
qui l'a retardé de ses fais,
jusqu'à ce qu'il soit retourné.
7440 Ung point luy avoye encorné :
que tous les enffan(;ons petis
! de Bethlecn et des partis
j par mort destruit et exillast,
affin qu'entre eux colluy trouvast
7445 qui le roy des Juifz se porte.
LLCIFER
O quel conseil de noble sorte !
fraude et malice dccevable !
eu tout nostre enffcr n'y a dcable
qui l'eust sccu songer ne trouver.
7450 Or sus! Sathan, va achever,
fais qu'Hcrode viengne au retour.
SATHAN
Astai'Oth y voise a son tour :
si parfourmera le seurplus.
LUCIFER
Tu yras, n'en caquettes plus ;
7453 tu t'abuses de rebeller.
SATHAN
Et souffrez au moins qu'a l'aler
Bericli me ticngne compaignie.
LUCIFER
Allez I que l'orriblo maignie
(les dampncs vous guident et mainent,
7460 et a telz tourmens vous raniainent
qu'au parfont du gouffre infernal
ardez tous en souffre cternal !
Icy s'en vont vers Herode.
JoSEl'H
Dieu mercy, tant sommes venus,
qu'assés brief s(>nunes parvenus
7465 en Egii)te sans nul danger.'
NOSTRK DAME
Sire, penssons de nous loger
en caste cité cy prochaine ;
nous avons eu traveil et paine :
rcpposer nous fault ung petit.
JOSEPH
7470 Chère dame, a vostro appétit
obeys en fais et en dis,
et vous plains plus que je ne dis.
Suyvez moy, je m'en vois devant.
hy s'en vont logi>:r, et auprès doit estre un g
temple ou il y a plusieurs ydoles, qui tres-
hucherunt a leur venue.
THEODAS, premier preùstre des ydoles d'Egiptc.
11 est après soleil lovant
7475 cler jour et belle matinée ;
si convient que ceste journée
sacriffions a nos grans dieux ;
allons y bien tost.
TORQUATUs, deuxième prebstre.
C'est le mieulx.
11 n'y ara dieu ne déesse
74S0- (ung chacun selouc sa haultcsse),
qui n'aist sacrifice plainier :
Mahomet sera le premier,
.\polo. Venus et Mercure.
THEODAS
Allons au temi)le bon allure,
7485 si ferons a nos dieux honmiage.
TORQUATUS, estant ou temple.
Qu'est cecy ? vecy fier ouvrage
dont ne suis pas accoustumés ;
vecy tous nos grans dieux tumés
et renversés les piez dessus !
THEODAS
74«0 J'ay bien regardé jus et sus,
mes je n'ay ymage trouvée
qui ne gise sur la pavée.
Je no S(,^ay qui ainsi les met :
veez cy le grand dieu Mahomet
7405 qui ha la teste despecee ;
veez cy Venus toute cassée,
veez cy .A^polo et Juppin.
TORQUATUS
Vooz la Saturne et Adoyn,
7443 destruisist C. — '
— 7452-54 ma,nf/LC''nt A.
jiffhfftri- pairn H. G. —
tuine A. tum))cs B. C. —
4'i4 cslluy J il A. — 74'i5 Cil ijui A C— 7450 laohouliT C. — 7451 au retour besongne A.
- 7i5'> Ciinsontpz qua ccste besoiigne A. — 7462 du feu eternal C. — 7471 difu B. — 7474
'478 trestous H. C. — 74bO a sa haultcsse G. — 74S1 premier B. — 74SS nostre grand dieu
74yi-;i Irouue, le paue B.
P R E M 1 K R F.
l'ana, Cloto ot Lachcsis,
7500 Dcmoguorguon avec Ysis,
mis |i;ir tcrro aveu Ycaïus.
THEODAS
\i'(v, oy Flora et /Copliinis,
•lui»), Soclioii et Myiiorvc
et briefiiieiit toute la catcrvo
7">05 lies (lieux qui sont tous rues bas.
TOHQUATUS
Dont leur sont venus telz debas
qu'ainsi sont versés doux et deux '.
est il venu ung plus fort d'eulx
ou quelque dieu en ceste terre,
7510 qui leiir ait fait si forte guerre
que de les mettre a tel reiivers?
THEODAS
11 fauMra assembler les clcrs
et disputer de la matière
dont cecy vient.
TORQUATl.S
C'est la manière :
7510 par ee point la cause eu sçarons.
Ici/ xc met Ilerode et ses gens a chennii.
HERODB
Tantost en Judeo serons:
nous eoinmançons a veoir l'entrée
de uostre cité désirée;
de .Iherusalem approchons.
NARINART, tirant.
75Ï0 J'ay grant fain que nous y soions
l)our menger ces bons gras morceaux ;
nous ne mangons que pain et aux,
a passer ces haultes niontaignes.
ADRACUS
Cela n'est pas peller châtaignes :
7525 tu songnes du bec, Narinart;
quoi gueux a porter l'estendart
S(iul)/. une vielle capeline!
NARINART
Mes que co soit a la cuisine,
VOUS m'y verrez bon champion.
HEROUE
7530 Or avons confii'macion
en nostrc royalmc haultaiu
de par l'imperatcur romain
sur nos subgès et tous nos hoinmos,
par quoy plus assouris nous .sommes
7540
7V.5
JOURNEE
7535 de faire a nosti-e volenté.
.\dracus, conte redoublé,
et vous, nos i)aren» et amis,
vous sçavez que nous sommes mis
de nouveau en possession
do ceste nol)le région,
dont bien mal au cueur nous feroit,
si perdre nous la convcnoit.
Or sçavez vous, n'a pas gramment,
nous eusmes advei-tissement
d'ung enffant né en cest pays
qui s(! clame roy dos Juifz,
qui tourne a nostre préjudice :
si fault par rigueur de justice
rabaisser tel/, abusemcns.
ADRACUS •
7550 Sire roy, vos comniandeniens
•seront fournis sans reffuser.
HERMOOENES
11 no vous faidt que devLseï',
et il sera fait prestement.
HERODE
Avant nostre depai-tcmcnt
7555 la nostre intencion fut telle
de mettre a mort dure et cruelle
tous enffans de la nacion
de Hethleen et d'environ,
aflln que ce roy malheureux,
7560 s'il est ué, mourust avec eulx,
sans prétendre a nosti'o coui-onne.
ADRACUS
L'ordonnance estoit belle et bonne ;
il la convient exécuter.
HERODE
.Vdracus, il fauldroit compt(M'
7505 le temps que l'ostclle apparust,
car au jour qu'elle comparust
l'enffant fut m, comme aucuns diént .
HERMOGE.NES
Ceulx qui bien l'istoire estudiont,
tiennent et dieiit par exprés
7570 qu'il y a deux ans ou bien près,
dont le second est entamé.
HERODE
C'est assés justement sommé,
et, a faire cxocucion
selonc ceste sommaciou,
7575 occire faiddroit tous enffans
qui soroient dessoubz deux ans,
tout oniiv sans rien exceiiter.
97
7.^00 (icinorgor^'on .V. - 7502 scoi-a A. - 7503 celyon B. 0. - 75IS De la oite 1res C. - 7:,26 groing C. - T, i
asseuis en )!. C. — 7536 sire B. C. — 754li réclame A. — 7557 Tous les enfants <le la cloison B. G^ — 7559 me-
'ureux li. - 73«!i |,„ rais,.n C. — 7571 0:i 11 C. _ 757ii A.i .|.-ssoiih/ laspe île deux ans A.
l'AS. -
98
MISTEREDE LA PASSION
ARPHAZAC
C'est bien dist, faictes apprester
vos sergens et appariteurs,
7580 et nous serons leurs conducteurs
pour leur donner ayde et port.
HERODE
Arphazac fait très bon rapport
et a luy nous voulions tenir.
Adracus, faictes nous venir
7j85 nos sergens pour les introduii'C.
ADRACUS
Sus ! Dragon, viens a uostre .sire,
Rechigné, et toj-, Achopart,
et n'oubliez pas Agripait :
il servii'a bien avi Imtin.
AGRIPART
7590 Mes mieulx Ja moittic au butin :
je ne quicr licns que la cliquaillo.
HERMOGENES
Sus ! venez au loy, ribaudaille,
ne sçavez vous passer avant ?
NARINART
Nous fault il point armer devant
7595 et endosser nos haiiberjons ;
HERMOGENES
Et pourquoy i
NARI.NART
Pour les horions,
je prens volontiers ma huvete
et mon vieil pourpoint a Ijoutons.
ARPHAZAC
¥A pourquoy ?
ACHOPART
Pour les horions.
RECHIGNÉ
7600 Ça, mon glaive.
AGRIPART
Ça, mes poinssons.
NARINART
Ça, mon mailliet.
ACHOPART
Ça, ma jùqueto.
ADRACU8
Et pourquoy?
ACHOPART
Pour les horiousj
je prens volontiers ma huvcte.
RECHIGNÉ
• 11 ne fault plus qu'on iiou.s caqueté :
7605 armés sommes et adoubés,
aussy fiers que coulons tubes
pour faire une grosse hemee.
AGRIPART
Quelz compaignons en une armée,
pour comljatrc ung homme sans teste !
NARINART
70i0 Quoy qu'il soit de guerre ou tempeste,
je suis content, pour tous potages,
seulement de garder les gages
et regarder le lieu de loing,
ou au fort de bouter mon groing
7615 dedans le pot a la moustarde.
HERODE
Sus ! comiiaignons de l'avangarde,
monstrcz ung peu que vous valiez :
en Bethleen vous en allez,
et tous enffans dessoubz deux an?
7620 que trouverez ilec gisans
mettez a mort tout a l'onny ;
et s'il est soudait si hardy
qui y espargne seur ne frère,
ou ait pitié de pore ou mère,
7625 ou soit corrompu par peccune,
soit seur que sa meilleur fortune
sera d'cstre au gibet pendu,
sans jamès estre deffendu.
Or vous en allez vistement.
Ici/ demeure Adracus avec lu rui), et tons ses
autres gens s'en ront.
ARPHAZAC
7630 Or SUS ! marchez legiereinent.
compaignons, tost a la besougne.
ACHOPART
Veez cy Agripart qui ressongno
et dit que ne luy chault des percs,
mes il redoubte bien les mores
7635 qui souvent sont de grant courage.
AGRIPART
11 ne nous demourra visage
qui do griffes ne soit deifait.
HERMOGENES
Sus ! sus 1 il fault ouvrer de fait ;
compaignons, a ceste matrone ;
76iO veez la ung enffant tout ydone,
tel qu'il fault pour expédier.
RECHIGNÉ
Sy vouidray donc estudier
75S4-5 les venir Uug petit li. C. — 75S7 happart C. — 759d 11 ne quiert rien A. que la iiluc(iimille lî. ('.. — 76'.H)
pknssons B. C. — 7603 liabillies A. —7606 coulons liubez C. — 7608 a une A. — 7615 ung pot lî. — 7617 qui B. —
7024 ait manque A. B. — 7625 Ue niale A. — 7628 en deffendu B. — 7638 ribaulx ouurez C.
PREMIERE JOURNEE
99
pour esprouvcr mon bracqucmait.
Dame, bailliez moy ce poupait,
T6ij mes qu'il no vous veille desplaiie.
iiAP, nourrice.
Mon aniy, que voulez vous faire
(le mon enflant, quand le tendrez?
NAIUNAUT
Ne vous chaille, vous le verrez :
il ne le fait que pour esbatrc.
RAH
7650 A cela no voil pas dobatrc ;
tenez le, veez la bel et tendre ;
voiliez le tout doulccraent prendre :
tost luy forez le cuour faillir.
NABINART
Or tenez, portez le boullir
TKw ou en faietcs de gros pastcs.
Icy te tue,
HA[>
Ha ! faulx meurtriers, estes vous telz ?
faulx larrons, faulx tirans pervers,
estes vous venus cy cnvei's
pour uiig cas tant villain et let ?
7CC0 Hclas ! mon doulx cnffançonnct,
lielas ! ma très doulcc portée,
lii'las ! or t'est la vie ostee,
lielas! or ne te puis ravoir!
■laniès joye no quier avoir
7065 tant que la mort me viengne quorre.
ACHOI'ART
Ça, dame, sans plainte requcrre,
cest onflançon que vous portez
est il vostre ?
UACHEI., nourrice.
Point n'eu doubtoz :
il est mien, tel le tiens et crois.
ACHOPART
7G7U De quel aage ?
RACHEL
De treze mois ;
il ne passe guei'cs plus liault.
AGRIPART
.Vchopart, c'est tant qu'il te fault ;
tastc ung tantôt combien il poise.
ACHOPART
.le le voil : ça donnez, bourgeoise 1
7075 il fault qu'il passe par mes mains.
RACHEI.
Mes amis et frères humains,
hclas ! voulez vous faire injuri?
a oeste iwvrc créature,
a co povrc onfTant innoecut ?
ACHOPART
7080 Or luy demandez s'il le sent.
Jcy le tue.
Tenez : allez rôtir, cousine :
je luy ay donne médecine
dont jamos ne sera malade.
ARPHAZAC
Sus ! gallans, virez la brigade :
7685 aux aultrc» plus tost, il est temps.
RACHEL
Ha ! faulx chiens et folons tirans,
ha ! cucurs de meurtriers desloyaux,
gens infajnes, villains bourreaux
sur la doulcc et tendre jeunesse
761)0 qui point ne vous fait de rudesse,
qui oncquos riens ne vous meffit,
je requier le Dieu qui tout fit
qu'a dure mort et discipline
puissiez vous mourir!
ANDROMETA, nourrice.
Aibeliiie,
7605 le grant Dieu d'Israël vous gai 1 1
saulvons nos euffans quelque part
ou oncques tel meschief n'advint.
Veez cy des scrgons seize ou vingt
qui mettent tous enffaiis a mort
7/00 dessoubz deux ans.
ARBELINE, nourrice.
Quel dcscoutlbrt !
helas ! voisine débonnaire,
il'ou vient ce, no qui leur fait faire ?
ne sçay en quel lieu nous allon.
ANDROMETA
C'est Hcrode, le roy folloii
7705 qui nous a baillié cest edit :
de Dieu puist il cstre maudit
et finer ses jours en misère !
ARBELINE
(juc foras tu, dolente mei'o,
quel tour querras tu pour le luiculx .'
7710 to fault il veoir devant tes yeulx
mourir ton enffant povremeut ?
Helas ! filz, mon seul pcnsemcnt,
voicy piteuse destinée '.
Que maudite soit la journée
7715 qu'oncqucs en mes Hans te conceus,
7653 To«l m,in<iuc C. -^ 705i iimnqui- C.. — 7660 sans trop C. ^ 7684 veez la H. — Î6g5 togt il cii est C. — 76S?
Iruaus C. — 76U0 Aue« vous montre tel rudesse 0. -• 769'i CUiore voisine B. C. — 7Î02 puel fere B.
100
MISTERE DE LA PASSION
s'il faut que tu soies rcceus
es mains de tes pcrsf cutcurs !
ANDROMETA
• Ha ! filz, pour toy sens telz douleurs,
que je ne sçay comment il m'est.
RECHIGNE
(720 Seigneurs, escoutez s'il vous plcst :
j'oy des femmes, ce m'est advis
ploror et faire leur devis,
qui rcdoul)teut fort la foitun \
AGRIPART
s'il y a assamblee aucune,
7725 assés tost je l'aray trouvée.
Y avoit il telle couvée,
le dcable y en avoit tant mis '.
ARBELINE
Las ! que querez vous, mes amis ?
en ce manoir vous fault il rien ?
AGRIPART
7730 Ne vous chault, vous le sçarez bien.
A ce que je voy et suppose,
vous avez muscé quelque chose ;
si convient bien qu'il nous appere.
ANPROMETA
Non avons.
RECHIGNÉ
^'ous mentez, comere ;
7733 faulces sorcières condampnees,
de nous vous estes destournees :
mes le muscer ne vous vauldra.
AGRIPART
s'il y a enifant, il sauldra,
et fust il bouté en ung puis.
HERMOGENES
7740 Avant ! compaignons.
ACHOPART
Se je puis,
j'en rapporteray pié ou elle.
NARINART
Ha ! faulce vieille maquerellc,
voulez. vous im[iugner la loy
et le commaudement du loy (
7745 il ne vous domourra vivant
. au jour d'uy enfl'ant ne suyvant :
vous avez partie ti'op forte.
AGRIPART
Regardez cy que je rap]iorte :
j'en ay une paire eu ma part.
ARPHAZAC
7750 Depescho en la court, Agripart,
et nous en allons tout courant.
ARBELINE
Que feras tu, mauvais tirant?
laisse le povre innocent vivre.
AGRIPART
Se je ii'ay tost ung secourant...
ARIiELINE
7755 Que feras tu, mauvais tirant?
AGRIPART
Geste lisse est si fort tirant
qun j'ay paour qu'el ne me délivre.
ANDROMETA
Que feras tu, mauvais tirant?
laisse le povre innocent vivre,
AGRIPART
7760 Sçay ji' [las la leçon sans livre ?
suis je pas ung gentil archer ?
RECHIGNÉ
Voire, ou ung habille boucher ;
quand a ce tu en sces assés.
HERMOGENES
.\ux aultres, ceulx la sont [jassés :
77G5 tant moins en avons a dcstniire.
ARBELINE
0 vray Dieu, qui pourroit descrirc
la grand détresse que je sens ?
•Je n'ay entendement ne sens,
qu'a coste fois ne me doffine.
ANDROMETA
7770 ReconfFortcz vous, Arbeline ;
qui vcult bien nostre fait entendre,
mon dueil n'est pas du vostre niendre,
mes si faut il qu'il se modère.
ARBELINE
O povre cueur de lasse mère,
7775 noyé en aliismes de plours,
crevé d'angoisse et de douloui's,
car ainsi ne peus plus durer
ne la grand détresse endurer,
mou filz, qui pour ta mort m'appresse.
MEDUSA, nourrice du fil: Utvjdc.
7780 > Sabine ?
7720 Agrippart cesse ton caquet B. C. — 7721 Joz des femmes H. C. - 7734 soit rapposli B. C. — 7731 vous auez
menti B. C— 7755 iii'iifjuc A. B. en marge C— 7757 quelle me B.— 7767 douleur C — 776y dcsire B.— 77S0 Mei'uni A.
PREMIERE JOURNEE
101
SABINE, sa chamhericrr.
Qui; vous plaist. maistrosso ?
je m'('sbut(n(î uiig [x^tiol,
MEDUSA
Approstoz moy le chariot
pour a|)prendio aller monseigneur ;
il amende fort en gramleur
7785 et si ne va n'en ohanips no vovo.
SABINE
Ma maistresse, eu pensoi' l'avoyc ;
le vecz cy ja tout api)resté.
Sire, trop avez arresté,
il vous fault esbattre ung petit.
MEDl'SA
7790 Or le niaine a ton appétit,
et garde bien qu'il ne se blesse.
SABINE
J'en feray bien, mes qu'on me lesse,
l'roiez qu'il sera bien songné.
AGRIPAUT
Nous avons très bien besongné
779') en briof temps sur ceste niardaille.
ACHOPART
Je les tue plus dru que paille :
j'en ay depesché puis ung mois
plus de deux mille.
NARINABT
Et moy do trois,
voire de quatre, a mon cuidiei'.
RECHIGNÉ
7800 Vous appliquez bien a plaidier,
mes quoy ? c'est vostre entente toute.
AGRIPART
Pourquoy, sire?
RECHIGNÉ
Voyez vous goûte ?
veez la ung enffant qu'on promaine.
ACHOPART
S'entrera en maie sepmaine,
780) se j'y puis venir plus en haste.
RECHIGNÉ
Or regarde ung tour de ma pasto,
Narinart.
NARINART
Bec, tu y metz trop.
RECHIGNÉ
I,e voyla tranché tout d'ung cop
on deux pai* ; n'est ce pas beau fait ?
MEDl'SA
78in Ha! faulx nicurtrici's, qu'avez vous fait?
occis avez villainenicnt
\i\ filz Herode proprement :
quel horreur vous est advenu !
AORIl'ART
Sy ne fust i)as si près venu !
7815 les deables l'ont bien advoyé.
ARI'HAZAC
Encore est il bien employé ;
s'il nous eust adverty du cas !
et aussi il n'appai'ticnt pas
do'commettre tel tiramiye.
HERMOGENES
7880 S'il en compère la folie
et le boit tel qu'il l'a brassé,
c'est bien pris,
ACHOPART
C'est très bien farce.
Sus ! allons aux aultres plus tost.
MEDUSA
Compter luy vois de mot a mot,
7825 si luy feray bien vostre saulce.
NARINART
Adieu, Belot tire ta cllaulse,
ja tost le nous feras bien braire.
MEDUSA
Sire roy, ung très grant contraii'e
nous est advenu de nouvel,
7830 et est le faict tant criminel
qu'a peu se je l'ose toucher.
HERODE
Gomment va ?
MEDUSA
Mal. Vostre filz cher
que vous m'avez baillé en garde
est occis, il n'est qui l'en garde,
7835 voyans plusieurs hommes et femmes.
HERODE
Et qui a ce fait ?
MEDUSA
Vos gens mesraes
entre les aultres l'ont destniit.
ADRACUS
Quant a moy je suis tout instruit
qu'ilz ne le cougnoissoient mye.
7783 a aller C. — 77S5 ne champs ne B. — 77S9 fault manque B. — 7802 sire manque B. — 7805 Se icy B. — 7806 ma
manque C. — 78(y7 be B. — 7809 bien fait C. — 78J6 esse B. C. - 7824 a mort P. — 7826 belet C. — 7831 le vogj
«une compter B. — ''832 vostre chier fllz p,
105
MISTRRE DE LA PASSION
HERODE
784(1 Ha ! fortune, faulcc ennemyo,
foi-timc, bcste déguisée
et do tout mal faire advisec,
c'est les tours que tu sces jouer :
mon dueil cuides faire muer :
7845 mes encore ce rain de rage
n'eschappera ja mon courage
pour caste persecucion
ne la terrible occision
tjui de par nous est commancee.
MEDUSA
7850 II me souffit d'estre acqiiitee,
sire : je me deppars atant.
HERMOGENES
Or nous en allons tout bâtant
par devers le palais royal,
car le command especial
7855 du roy est bien exécuté.
ARPHAZAC
Je ne sçay vill(? no cité
par tout Bethloon contenue
qui n'aist ploré nostre venue :
oncques ne fut tel desconffort.
HERMOGENES
7860 Noble roy redoid)té et fort,
vostre command est accomply
et est bien le peuple assimply
depuis que d'icx' nous partîmes.
HEnODE
Avez vous fait comme nous dismes ?
7865 n'y est il enffant demouré ?
NARINART
Tout est nioi't.
HERODE
C'est bien labouré.
N'y est il demouré enffant
soubz l'aago de deux ans estant,
qui n'aist passé par la fenestie?
AGRIPART
7870 Tout est rifflé.
HERODE
C'est dist do maistre ;
nous sommes joyeux de l'exploit
' autant que de chose qui soit,
sinon qu'ung seul point nous remort
7875
7880
7885
7890
7895
7900
790^
7910
7915
de nostre filz qui en est mort
par le moyen d'inadvertance
qui vient do nostre négligence,
sans vous le meffait imputer ;
mes encor voulons nous porter
tout ce courroux paciamment,
mes que nous sachons fermement
que ce Cristus, nostre adversaire,
il soit deffiné au parfaire
et exillié par ce point cy.
ADRACUS
Il fault dire qu'il est ainsi,
car puisque tous les entfans masles
y ont eu estraines si malles
qu'ilz sont tous par mort occupé,
je dis qu'il n'est pas reschapé,
se magique n'y a eu cours.
HERODE
Seigneurs, en qui gist le recours
de nostre plainiere santé,
très fort nous sentons molesté
et de maladies diverses
les plus dures et plus perverses
qu'oncques eust corps de créature.
ARPHAZAC
Dont procède cesto adventure ?
sire, la sentez vous pieça ?
HERODE
Arphazac, ol nous conniicnça
des ce que nos trois filz tuasmcs,
pour ce que tendans les ti-ouvasmcs
a nous vouloir suppediter;
puis avons ouy raconter
que le quatrième d'habondance
fut ainsi murtri en enffance,
qui beaucop nos dueilz rengregea.
HERMOGENES
No vous en desconffortez ja,
en prenant courroux, sire rois ;
encor vous en demeure il tiois,
hardis princes et de grant famé,
pour bien succéder au royalme
que paisiblement vous tenez.
HERODE
Vous dittes vray, Hermogenés,
mes les deux qui nous ont esté
tousjours en contrariété
ja ne vendront a nostre règne :
nous le mettons es mains du jesne,
7840 forte onnemye B. C. — 7814 Mon veul C. — 7840 Ne changera ja C. — 7849 Qui par nous est encommencee B.
— 7873 seul mot G. — 7877 Sauez vous le B. — 7881 ce manque C. — 7886 Y minque A. — 7S98 il nous B. C. —7904
tue A. — 7905 rencharga A. — 7907 Ne prenez B. C. — 7909 porlans heaulmc A. — 791G Lautre tendra tout le
royaulme B. Dittez donc au tiers quil le prengne C.
PREMIERE JOURNEE
103
voire, mes par coiwlicioii
(juo janiès i)ai" proauiiipciou
ne so face couronnor d'honinio
7',«ii so n'est par l'ompercur do Rom me
i(ui est nostre souveiaiii ehçf.
llari)! seigneurs, com gi'aiit nieschef
et dur tourment intollorable
nous tient, et n'est no Dieu ne deable
:9i:< qui nous laisse prendre repos !
ARPHAZAC
Couchez vous.
SATHAN
C'est bien a propos ;
je ne sçay qui le couchera,
mes jamès n'en relievcra
que je n'aye aumusse ou chape.
ASTAROTH
7030 Garde bien, Sathan, qu'il n'cschapo,
ce faulx oppresseur d'innocens.
HERODE
Haro ! quel destressc je sens,
haro ! quelz tourmens importables ;
je vois plus de cent mille deables,
7935 les plus hideux qu'on sceut conqirendre,
qui n'attendent que jiour moy prendre
et moy entrainoi' avec eulx.
SALOMÉ, seur Herode.
Mon frero, soicz courageux,
et reprenez ung peu de cueur.
HERODE
79''.û Ha ! Salomee, chero scur,
je vis et la mort m'est devant,
je meurs et je suis tout vivant,
j'enrage et je suis tout sensible,
et cuido qu'il n'est point possible
IW.t qu'oncque homme fust ainsi pugny.
ADRACUS
N'approchez point si près de luy,
danio, pour le mal scntonient :
il jiut le plus horriblement,
qu'il n'est huy riens plus corruptil :
795(1 les vers le manguent tout vif
et lui Maillent par les conduis.
HERODE
Or Bçay je bien que les .luifz
do ma mort feront festo grande,
et jiour tant, seur, jo vous commande
Torû que tous les nobles de grant lo»,
qui sont en nos prisons enclos,
faciez tuer dessuz ma lame
après que j'aray rendu l'amo ;
[jar ce point les pourrez contraindre
79(i0 d'y venir pour ma mort complaindre
et solerinizer mon trespas.
SAmMÉ
Mon frère, jo n'en fauldray pas ;
quoique la chose pst rude et ficre
fait sera : faictes bonne chiere
7965 et vous excitez de ce somme.
HERODE
Or nous donnez donc une pomme
et ung Cousteau pour la peler.
SALOMÉ
\'ous Tarez sans plus appeler :
tenez la, veez la toute preste.
HERODE
7970 Haro mes pies, haro ma teste,
despito et furieuse rage !
je n'en puis plus se je n'enrage :
voicy ma destresse ou je rentre.
SATHAN
Et meschant, fiers dedans ton ventre
7975 ce Cousteau sans plus endurer.
HERODE
Deables, je ne puis plus durer,
il fault qu'a vous tous obeyee.
Ha ! mort, hastc toy, faulce lice,
voyla fait pour toy avancer :
7980 de cueur, de corps et de penser
a tous les deables me command !
Icy Herode se tue d'ung coxisteav.
SATHAN
Sus ! troussons nous deux saqueniout
ce faulx meurtrier désespéré.
A8TAH0TH
Son logis est ja tout paré :
7985 portons l'en enffor, droite voyo.
79Î2 Haro qun je sens grant A. — 7924 et si nest dieu 13. C. — 7926 au B. C. — 792S il neu leuera B. C. — 7931
niurtr er C. — 79i2 si suis B. C. — 79.19 lumis plus B. — 7950 mangcussent A. — 7950-1 attribués à Hermogenea B. C.
— 7952 Ma seur je scay bien A. — 7953 joye B. — 795^1 seur minque C. — 7957 par du remort A. — 7958 Sur mon
tombeau après uni mort A. — 7959 vous pourres A. — 7900 Les Juifs de venir ma mort plaindre A. — 7971 effrénée B.
<;. — 7974 en ton C- — 7975 sans tant C. — 7979 moy auancer C.
104
MISTERE DE T. A PASSION
SATHAN
Lucifer, regardez quel proye
nous admenons cy au chapitre,
ASTAROTH
C'est Herode, vostre menistre,
qui vient pour quérir son loyer.
LUCIFER
T990 Sy le fault très bien festoier :
il vient de loing, et pour salu
estrenez l'en plonc bien boulu,
conflit en métal tout ardaut :
nos lois a esté bien gardant,
7995 c'est raison qu'il aist ses souldees.
Icy font les deables tempeste.
DIEU LE PERE
Selonc les saisons ordonnées
pour Jhesus nostre filz régner,
temps est qu'il doyve retourner
d'Egipte ou il fait résidence
8000 et sa mère : par ordomianco,
Gabriel, allez le noncer
a Joseph qu'il veille penser
de faire en Judée retour.
GABRIEL
Je le feray par bonne amour,
8005 Père, comme faire le doy.
[Pose.]
Joseph, mon amy, lieve toy,
prens l'enffant Jhesus et sa mère,
laisse ce pays de misère
et va en la terre Israël,
80i0 car mort est le tirant cruel
qui l'eufTant queroit a destruire.
JOSEPH
Marie, il plaist Dieu, nosti'o sire,
qu'eu nostre pays retournons.
NOSTRE DAME
Siie, puisqu'il le vous plest dire,
8015 a vostre veil nous en tournons ;
Puisque le vouloir Dieu sçavons
* tenons son conseil vertuable.
JOSEPH
Je luy requier que nous trouvons
chose qui nous soit poui'fitable.
Ici/ revient Joseph, Nostre Dame et l'enfant sur
son asne comme devant.
ADRACUS
8020 Oncques mort si très redoubtable
n'endura corps de créature.
HERMOGENES
Il fault prendre en gré l'aventure ;
quand a moy, ma sentenc:; assigne
que c'est pugnioion divine
8025 qui l'a rabatu par tel serre.
ARPHAZAC
N'y a que de le mettre en terre
fit faire les solemiités
qu'il appartient.
SALOMÉ
Ne vous doubtez,
que j'ay le cueur de deuil party
8030 de veoir mon frore en ce party :
mes je ne le puis admender.
[Pose.]
JOSEPH
Pour la loy tenir et garder
a laquelle sommes tenus,
puisque nous sommes revenus
8035 en Nazareth nostre cité
pour la grande solennité
de Pasques liaultain et célèbre,
qu'en Jherusalem se celel)r(.'
a cestuy jour prochainement,
8040 aller nous y fault promptemeut :
admcnez Jhesus avec vous.
NOSTRE DAME
.Ihesus, vendrez vous avec nous,
mon cher et gi'acieux enffant ?
le chemin est long et pesant,
8045 si crains que n'y eussiez gievance.
JHESU8, enffant.
Chère nierc, n'ayez doubtance :
au vouloir mon père divin,
j'accompliray bien le chemin
selonc ma possibilité,
7990 ung pou B. C. — 7992 Gettez len beau plonc boulu A. — 7997 garder C. - 7998 doyuenl A. — 8Ù00 par assis.
tance B. C. — 8001 ladnoncer B. — 8009 irael A. disrael C. — 8014-15 manquent C. — SC15 gre en retournons B. —
80?8 Quil y C. —8037 haulte C. — 8041 Et mener J. auec nous B. C. — 8043 très doulx C.
PRKMIKRK JOrUNKK
105
iOM car a toll(! solcnnitc'
devons Uiou louer et servir.
.lOSKI'H
.le voy tous nos parents venir
qui nous viennent quérir ensemble.
NOSTRE DAME
Mes deux seiirs y sont, e;' me semble,
SiiV. et plusieurs do nostre ligna^o
qui nous tendront en ce vuia^e
oompaignie jusqu'au retour.
JOSEPH
Dieu soit loué !
MARIE SAI.0MK
Bon an, bon jour
et le désir de vostro cueur
SûWl vous ottroit Dieu, ma doidce seur,
et au (loulx .lliesus cnccment.
MARIE JAConv
Honneur et tout avancement
doint Dieu a toute rasseml)lce !
JOSEPH
Kt vous accroisse puissanmient
S«ir. honneur et tout avancement!
ZEHEnELS
Cousine, au très hault firmament
imissiez vo>is cstre transportées
avec ceste belle portée
dont vous feistes l'engendi-ement !
AQUILIAINE
fO'O Honneur et tout avancement
doint Dieu a toute l'assembleel
car je croy qu'elle est assemblée
pour aourcr Dieu reveramment.
ESDRAS
Or nous partons ligierenient,
S075 cliers parens ; il est nécessaire :
nous avons grant chemin a faire,
et pourtant partir nous fauldra.
JOSEPH
Nous sommes pretz quand on vouldra :
départons nous, c'est trop songé ;
iiuso vcez cy mon sachet tout chai'gc'
de pommettes et de bon pain,
affni que se .Thosus a fain,
il soit secouru sur la voye.
ELIACHIN
Mes dames, cheminez en voye,
^)85 tirez vous a part, s'il vous plcst ;
vous savez que la coutume est,
et la loy fait enseignement,
que pour allei- plus chastement
a ceste souveraine leste
8090 et mener vie plus honneste,
les femmes par elles s'en vont,
et les hommes d'aultrc part sont
sans aller en leur compaignie.
JOSEPH
Ma très cherc dame Marie,
S005 puisque sans vous cheminer doy,
envoyrez vous Jhesus o moy ?
si ie vous plaist a me lesser,
j'en cuide si très bien penser
que de rien deffaulte n'ara.
NOSTRE DAME
Stoo Cher sire, ainsi qu'il vous plaira ;
je sçay que bien en penserez
et que bien penser en sçarez,
mes poui' ce que sans luy n'ay bien
et tout bien ay quand je le tien
8105 et liesse paiiaicto et plaine,
je vous supply que je le mainc
(•este fois : j'en soray plus aise.
JOSEPH
Ha ! Marie, ja Dieu ne plaise
que j'empeschasse vostro'Mieil :
8)10 tout ce que vous voulez je veil;
c'est raison qu'a vous me modère.
.Adieu, cher filz.
JHESL'S
.Vdicu, mon pei'C.
JOSEPH
l'àivis vous laisse, n'en doubtez,
mes avant que vous départez,
sir. je vous donray de mes chosettes,
do mes pommes, de mes uoisetos ;
tenez, veez la pour vous desduire.
JHESUS
Mon cher père, Dieu vous le miio :
il souffit bieu, j'en ay assés.
Icy le baise et se part et ca avecqttes les hommes
et Nostre Darne avecques les femmes,
comme dit est.
ESDRAS
MiO Joseph, se ne vous avancez,
nous pourrions demeurer derrière ;
ne voyez vous pas la manière
de nos gens qui s'en vont devant ?
S1I51 ipicrir C. — S()52 reinierir C. — f'CBO dieu mnnritii- A. — S0C6 ou B. C. — S()67 vous «inii'^uc li. — 80" Si ne
•-nuou< ijuil aduenrad B. C. — .'079 a lahrej-'io B. C. — SOSl de ponilues et de 1res bon A. — 8084 cheminons B. —
M)96 Emmeneray je C. — 8098 pense B. — 8106 prie C. — 8107 sen B. — 8111 El la cause bien considère C. — 8113
Bien enuis vous Iniz l'. ^ 8114 Mais puisque vous vous flepartez C,
106
MISTRRE DR LA PASSION
JOSEPH
Hz ne sont pas si très avant
S125 que brief ne les aoonsuyvons.
ESDRAS
Dieu doint que la voye achevons
au ))ien do nostre conscience I
ZOROBABEL
Seigneurs de paifondc science
ou tout le peuple prcnt exemple,
SIM retrayons nous devers le temple
a ces haulx jours.
6AMALIEL
11 le convient,
car j'entens que le peuple y vient
soy sanctifier do tous lieux.
ROBOAN
Nos o6frandes en vauldront mieulx,
813.") se le peuple y vient a grans sources.
.MANASSES
Voire, et par conséquent nos hources,
car les ohlacions qui viennent
pour une part nous appartiennent :
s'en arons plus grant porcion,
NATHAN
Sl'iû Partons nous sans dilaeion ?
il n'est pas saison de prescher,
bien arons a nous ompescher
avant que tout soit labouré.
NACHOR
Voire, encore considéré
su^j que la (este huit jours s'extend.
ZOROBABEL
Allons, le peuple nous attend,
la puissance Dieu nous convoyé !
Icy s'en vont cm temple et seoir en haultes
chaires.
MARIE JACORY
Or avons tant .allé par voyo
entre nous, povres femraeletes,
S15D et si bien cheminé souletes,
que nous ari'ivons au saint lieu
en la noble cité do Dieu :
loué soit le liault triomphant !
XOSTRE DAME
Helas ! Jhesus, mou cher enffant,
Sisn grand pitié de vous me remembre :
sur tout vostre corps n'y a membre
qui ne soit mat et plain de la«se.
.IHESLS
Chère marc, sauf vostro grâce,
je me sons assés esvoillié,
Sifio et ne suis pas tant traveillié
que je me rende desconffls
de cheminer.
NOSTRE dame'
0 très doulx filz,
s'il plest Dieu, j'ay bien en propos
que vous prenez vostre repos,
si6r> ains que jamès cheminons pas.
MARIE SALO.MÉ
0 mes seurs, no voyez vous pas
ce beau temple ? quel eilifficc,
quel chef d'euvre, quel artiffice !
qui sçaroit plus beau lieu monstrer?
AQUILLAINE
8170 Or je requior Dieu qu'a l'entrer
en nos cueurs sa grâce nous donne,
que tous les meflfaits nous pardonne
par quoy lui avons peu meffaire.
MARIE JACOBY
Or allons nos olTrandes faire
8175 et chacune en sa qualité.
Icy vont faire leurs offrandes.
JOSEPH
De nostre possibilité,
seigneurs, nous avons fait devoir,
car devant nos yeulx pouous voir
la cité que Dieu a esleue.
ESDRAS
Siso 0 cité de haulte vallue,
o sainte terre et beueuree,
que forment avons désirée,
a joye te puissions trouver.
ZEBEDEUS
Allons au saint temple achever
S185 nos ol)lacions saintement,
a celle fin que dignement
le grant Dion les veille acceptei'.
ELIACHIN
Si ))ien les puissions prcsentei'
S127 l't salut de nostre ame li. — 8127-8218 inanrjuent C. feuillet déchiré. — 8128 de rennmmee i>t ftime B.
8133 en A. — 8152 En ] El B. — 8165 cheminez B. — 8170 je manque A. — 8173 Et manque A.
P R 1-; M I R R E .1 O U R N R R
107
qu'elles nous soient iiourfitaWc».
Ii^ij s'en vont les hommes (Vautre coslé fain
Iriirs oblacions.
zouon\nEL
•iiiK) Seigneurs tros cxpeis et notables,
tandis que bien assamblcs sommes
l)lusieui's docteurs et prudens honuiios
ou gist gravite" et science,
je vous veil dii'o eu audience
Sl9ri et noter ung merveilleux point
u quoy plusieurs ne pensent point,
et c'est tout commun maintenant.
GAMAI.IEI.
Nous serons bien lu main tenant
a ouir la relacion.
ZOUOBAUEI,
8200 Seigneurs do grant discrccion,
vous savez, et est tout notoire,
que selonc nostre répertoire
et l'antiquité des escrips
que nous ont laissé et escrips
s205 nos prophètes, anciens peros,
nous trouvons que par grans misteres
Christus nous est de Dieu promis,
par lequel doit estrc remis
nostre royaulme en sa vigueur
S2iû qui maintenant par grant rigueur
soubz les Romains est ti'ibutairo :
et ne s'en voust pas David taire
qui l'a prononcé gouverner
Israël et sur luy régner
8215 comme vous savez, n'a celluy ;
mes de l'advencment de luy,
n'en quel temps Dieu le vouldra naistre,
je croy qu'il n'y eust si grand maistre,
qui l'osast pour vray affermer.
8220 Noantmoins aucuns veullent semei-
paroles et ont maintenu
que de fait il est ja venu,
et raisons assés y aboutent,
par quoy plusieurs simples gens doubtent
S22ri que Christus est né pour certain.
r.AMALlEL
Vous mouvez ung propos haultain,
Zorobal)el, et sur biicfs termes,
et croy que peu de gens sont fermes
en la matière que vous dittos ;
SÎM quant aux pi'ophccies escriptes,
nous croyruis tous certainement
que Christus vendra voircmenl,
mes qu'il soit venu de cesle heure,
l'opiiinion n'en est pas seure
sïST) s'il n'estoit aultrcmont prouvé,
et croy que ce soit controuvé
de sinqilo gent et inexperte
qui parlent a gaing et a perte,
ou c'est oi)pinion de femmes.
ZOROHAIIEL
8240 Je vous dy que les i)lus gi-ans mesmes
en font com-ii' ceste nouvelle.
nOBOAN
Mes dont peust venir tel querelle '.
c'est depuis ung peu do saison.
Z0ROBAHEL
Ha ! croyez qu'ilz ont bien raison,
82'.'! sur quoy ilz se sont résolus.
MANASSES
Kt quel raison ?
ZOBOBABEL
Je n'en sçay plus :
j'ay assés d'autres pensemens.
NACHOR
Recitez nous des argumens
sur quoy ilz se veuillent fonder.
ZOROBABEL
8250 Cela leur fauldroit demander,
je n'ay pas enquis si avant
Hz mettent peust cstro au devant
aucuns signes qu'a ce les meuvent,
par lesquelz ilz jugent et preuvont
8253 ceste haulte nativité.
NATHAN
Se cecy fiist la venté,
pour dire quel signe en avons,
nous qui l'escripture savons
et congnoissons et texte et glose
8260 en deussions savoir quelque chose ;
or n'en avons nous riens congnu :
si croy qu'il ne soit pas venu,
qui que soit qui nous le dénonce.
ZOnOBABEL
Nathan, il y a bien l'esponcc
8205 a vos ditz ; et a dire voh"
nous ne pouons pas tout savoir ;
et forse aussy qu'au temps passé
nous n'y avons guère pensé :
8190 expers et vénérables D. — 8198 Kt nous serons la B. — 8203 .inciennele B. — 8205 et anciens B. — 8231 tout
H. — 82M nest pas bien G. — 8252 peu A. — 8253 si(?nes manque A. — 8fô4 treuuent B. O. — S259 le texte et B. C. —
S2Ô1 allons rien maintenu R. C.
108
MISTRRE DR LA PASSION
^i vient la faulto de scione.>
S270 entre nous par inadvertance ;
mes quand nos livres sercherons
et les signes bien noterons
que baille la sainte escripture,
nous trouverons par adventure
S275 que Ghristus est né voiremont.
GAMALIEL
Seigneur, a parler proprement,
a ce que j'entens de nous to\is,
il est expédient a nous
de discuter do cest affaire.
ZOROBABEL
8280 Je vous diray qu'on pourra faire ;
je vous voy icy grant foison
de docteurs de haultc l'aison :
soit la matière discutée
et par arguniens disputée
8285 a l'une et a l'aultre partie ;
pour voir s'avant la départie
sçarons trouver la venté
de la haulte nativité
de celluy que nous attendons.
ROBOAN
8290 C'est très bien dit; or procédons
sur ceste yniaginacion.
ZOROBABEL
L'un prengne une posicion
sur ce point, et la soustendra,
et lors chacun de nous vendra
829."i pour l'arguer et improuver ;
sçavoir se nous pouri'ons trouvei'
la matière estre véritable.
MANASSES
Le conseil est très profitable,
et qui bien nous avancera.
ZOROBABEL
S300 Or donc, qui se disposera
a respondre sur ceste somme '(
NATHAN
Zorobabel, je n'y vois homme
qui mieux en sceusist langager
que vous : vueilliez vous en charger,
8305 et ce nous fera grand jilaisir.
ZOROBABEL
Pour complaire a vostre desh'
et avoii' vostre bonne grâce,
seigneurs, c'est raison que je face
ce qu'il vous plaist me commander,
8310 non obstant qu'a bien regarder
vous estes en ce mieulx instruis
et résolus que je ne suis ;
mes pour ce que long temps y a
que mon engin n'estudia
8315 ceste matière en son degré, -
s'il vous plaist et c'est vostre gré,
j'arroye bien mon appétit
de la receler ung petit
affln que plus récent en fcusse ;
8320 ainsi vous me donrez induce
de m'y aller ung peu esbatre,
seulement trois heures ou quatre
[jour ma mémoire raffreschir.
NACHOR
Prenez d'espace et de loisir
8325 si longuement que bon vous semble,
et d'aultre part nous tous ensemble
entenderons a nostre fait.
Icy se part le petit Jhesiis secrètement d'avee-
qxies sa mère et s'en va vers les docteurs.
JHESUS
Puisque vers Dieu, mon père, ay fait
dévotement mon oroison,
8330 d'icy me pars ; il est saison
que j'ensuyve sa volenté.
Je voy de docteurs grant planté
assamblés pour mig grant niistere :
il sera bon que j'y com])ere
8335 ouir leurs proposicions
et leurs argumentacious,
qui seront de la loy divine.
.lOSEPH
Loué soit la puissance digne
du grand Dieu des Israhelites
8.3W que nos oblacions petites
avons fait a nostre povoir.
ZEBEDEL'S
En gré les veille i-ecevoir
celluy qui règne sans flner.
ESDRAS
Seigneurs, pensons do retourner
8345 ung chacun dont i,| est party ;
nos femmes tendront leur party
et s'en vendront plus a leur aise.
8277 vous tous C. — 8278 fust B. C. — 8286 Sauoir sauant B. C. — 8292 oppinion B. — 830-'i vous man'-iue B. — 8300
accomplir B. — 8309 moy B. C. — 8310 sest B. — 8323 le [C. la] mémoire B. — 8340 nous A. — 834'. eheminer B, -»
8347 tout a leur aise C,
l'RKMIKRK JOURNKE
109'
ELIACHIN
Josepli, cher pai'cnt, il vous plaise
que le petit ciiffaii(,'Oiuiot
8350 Jlicsus, <jui est tant clcr et net,
s'en vicngue avec uous ceste fois.
JOSEPH
l'^liacliin, je tiens et crois
(ju'il soit pour l'euie avec Marie,
et ([u'cilo se tondroit marrie
8355 se je luy rcqucroyo en rion ;
laissez l'avecq elle, il est bien,
( t suis tout soeur que bien en pense.
ESDRAS
l'iliachin, quant je [lourpensc
i|Me nous avons si long voiage,
S;i60 hastons nous, nous ferons que sage.
tiMidis que la journée est belle.
ZEBEDEUS
•le prie l'essence éternelle
qu'elle soit en nostre convoy.
Icij s'en r.ont les hommes ensemble.
AQUILLAINE
Cousines, a ce que je voy,
>!365 temps est de laisser ces partis :
nos maris sont pieça partis
et s'en retournent bonne allure.
nlstre hame
0 trésor de deité pure,
ou est .Ihesus, mon doulx enfFant ?
MARIE JACOBY
S370 11 cstoit icy maintenant
mis a genoux, le chict" tout nu.
NOSTRE DAME
Las ! ma seur, qu'est il devenu ?
s'il est pardu, que forons nous '.
MARIE SALOMÉ
Marie seur, a|)aisiez vous,
sins car je cuide estrc bien certaine
que Joseph le tient et le maino ;
car n'a gueres que je le vis
aller vers luy, ce m'est advis,
et le bon homme l'a tant cher
."^aso qu'amour luy a fait ompescher
de venir a nostre assemblée.
NOSTRE DAME
.l'estoie de douleur coiublee,
seur, mes vostre responce oye,
V0U.S m'avei! toute resjouye,
8385 et croy très bien quant a cela
(pie .losepli, nostro mary, l'a ;
par quoy j'en suis hors de soucy,
car il on i)eu.se bien aussi,
il ne l'en fault point advertir.
«.qUlLLAINE
8390 .\us»i veiste» qu'au partir
il vous requist fort de l'avoir.
NOSTRE DAME
.Vquillaiue, vous chttcs voir,
et j'amay mieuix de le mener,
et i)cust estre qu'au retourner
8305 il a voulu avoir sa fois :
et l'enflant est doulx et courtois,
si n'y a point mis de contraire.
MARIE JACOHY
Mes sem"s, pensons de nous retrairc ;
Marie, seur, mctez vous sus,
8400 et ne pensez plus a Jhesus,
car il est bien, je n'eu fais doubtc.
NOSTRE DAME
11 n'y a qu'ung point que je doubte :
le chemin est long a merveille,
si craint que troii ne se traveille,
SMKJ veu, mes chères seurs, que ces hommes
sont trop plus durs que nous ne sommes,
et d'aller fort se peineront.
MARIE SALOMÉ
Taisiez vous, ma seur : non feront ;
lues [lensez on vosti'c courage
8410 que tous sont de nostre lignage :
si n'y a anio d'estranger,
par quoy n'y a point de danger
qu'il ne voit tout a sa santé.
NOSTRE DAME
Je requier Dieu par sa bonté
8415 qu'il le deflende de grevance.
Icy retournent les fetnmes a leur logeis.
20R0BABËL
Seigneurs, mettons par ordonnauco
nostre fait ainsi qu'il vous plest :
je suis de respondro tout prest,
et ay ma matière advisee.
GAMALIEL
S'.iO Or nous soit doncques dcvi^ee,
et quel proiios voulez t iiir ;
8361 la majeslo C. — 8364 Cousine A. C. — 8370 tout maintenant C. — S376 emniaine H. C. — 8384 très bien resjove
C. — 8:«IU veiz te au partir qnil A. veistes vyus li. C— 83)1 moult 1!. C. — S..93 aJnicner B. C. — S400 mais a B. C —
^'. 5 Veu encoreque ses B. — S4)3 losl B.
110
MISTERE DE
s 425
8130
8135
140
8445
8450
8151:
8465
et puis i)ensez du soustenir :
vous serez a force iinpugué.
ZOnOBABEL
Je soustious que Gristus est né
et vouu pour nous tous saulver.
GAMALIEL
Je veil le contraire prouver
et briefnient j'argue que non :
la loy tient que le hault renom
(le celluy dont mencion faictes,
qui nous est promis des pi'ophetes,
sera de si haulte inonstrcc
qu'au monde n'y ara contrée
qui ne sache parler do luy ;,
et est bien droit : car c'est celluy
par qui doit estrc refondee
toute la terre de Judec,
qui de présent en grant donnnage
est sous les Romains en seivage :
celluy qui nous vendra livi-er
secoui's pour nous tous délivrer ;
et suppose, quand est a moy,
que Gristus sera nostie roy,
nostro duc, nostrc chevetain.
qui nostrc royaulme haultain
entretendra en si grant paix
que si bonne ne fut jamais.
l']t que cecy soit verit(',
je Ijaillo pour auctorité
le psaulmc soixantj douzieurj
ou David en fait grant pi-ohemo,
et est l'intitulacion :
Deim judiciuiii tuum;
la parle il du roy a venir,
qui son royaulme doit tenir
en paix, en justice et concorde,
en doulceur, en miséricorde
et bricf en tout bien tlisposé.
Kt donc, cecy presuposé
qu'il soit de tel gouvernement,
je fonde ainsi mon argument :
tant est roy de plus grant puissance,
et tant doit cstre sa naissance
plus haultoment solennizee
et [lar con equent alozee
par tout sou rogne universel !
le cas n'est pas advenu tel,
LA PASSION
de sa naissance n'est nouvelle :
si n'est pas no. Ma foy est telle.
Item, contre ce de devant
8470 je veil arguer plus avant :
l'escripture dit, sans faillie,
la ligne des rois est faillie,
et, qui nous est ung piteux change,
nous sommes soubz ung roy estrange,
S1T5 Herode ou son filz qui nous a
et tient sub manu ferrea ;
au propos nous tous concédons
que Gristus que nous attendons
sera filz d'ung roy noble et franc,
84S0 car s'il n'estoit do noble sang
mal luy duyroit la seignorie
que la lettre lui approprie.
S'il est donc né, connue vous dittes,
sans plus faii'c tant de redites,
8485 assignez moy de quel seigneur.
Se vous dittes de l'empereur,
l>ar deux points je le jiuis nycr :
premier, qu'il l'oust fait ])ublier
aux Juifz pour luy faii'o hommage ;
8490 secondement, pour le lignage,
que les prophètes ont prédit
qu'il naitra du gendre David,
dont l'empereur ne dcscent jias :
.Iheremie parle en ce i>as
8195 qui veult on ceste forme dire :
les jours vendront, dit nostrc sire,
que David vouldray susciter,
germe juste, et ne fault doul)ter
que cela s'entend proprement
?<50() de Gristus, dont final)lement
je preuve et soyez assouffiz
qu'il n'est pas a l'empereur filz.
Qu'il soit filz a Herode aussi,
je dis qu'il no peust ostre ainsi
8505 pour la cause ja assignée,
car il n'est pas de la lignée !
et dont, puisque mes roy n'avons,
ne prince sur nous ne s^avons
digne d'avoii' si noble gendi'c,
8510 je veil ma conclusion prendre
que Gristus n'est pas né encores !
mes raisons sont assés notores :
s'il vous plaist, vous les saulvercif.
8422 de A. —8423 II sera B. C. -• 812t briefuemeiit B. — S4ai grande criée B. C. -^ S437 a graut B. C. — 8139
Luy venu B. C. — 8441 ja quant a moy B. C. — 8443 capitaine A. -^ 8144 royaulte haultaini' A. — 8148 par A. —
84&5 en concorde lî. G. -* 84G2 Tant plus A, — 8470 Car comme lescrijjture espond Nostre maistro qui respoud
m'inqiu-nt A. — 8471 Scest asocz je nen double mie B. — 8472 lignée A. C. — S475 ou les siens B. G. — 8477 tous
nous lî. Cl -' 8483 Quil nous dit régir frans et quittes G. — 8484 num'iue C. — 84SS il eust A. — 8489 A. tous
juifs A. — 8197 vouldra B. — i-'M cuide cstre tous (iz B: C. — 8510 Nous pouons dire sans niesiirendre B. — 8512
Mais B,
PRRMIKRE JOURNEE
111
^
I
ZOROIIABEI,
Les moyens bien coiisidcro»
srilT) par quoy nnstro iiiaistrc itrosoiil
m'argue, jo inV'ii tiens exempt
do saulvcr sans cstic rcppris,
car trop soubtillomotit ?ont piis,
et j'ay petite intelligence.
S520 Non obstant, a la confidence
de mes maistrcs cy assistans,
je diray comme je l'entons,
tousjours soubz leur correction.
Encontre ma conclusion
ffiij fondez deux argumcns moult fors ;
le i)romicr, se bien m'en recors,
est qu'ung roy, tant est plus graut inaisti'o,
tant doit il plus noblement naistre.
•Je vous nyc ccste majeur,
S5TO *t voil dii'c, sauf vostre honneur,
qu'il n'est point de ncccssité ;
et que cccy soit vérité.
prenons Romulus et Ronms
qui a tel los furent promus
85;*5 que d'cstrc premiers fondatoui-s
de Ronnnc et haulx irapcratours,
et qui tant de proesse firent :
touteffois simplement nasquirci.t
d'une fillo qui les conceu,
sj'iO n'oncques leur pei-c no fut scou :
mes puis, pour eulx miculx rcnonnnor,
fil/, de ^lars se firent nonuner.
riusicurs en traroyc a garant,
comme d'Alixandrc lo grant
S5'i5 qui tint tout le monde on possesse,
et toutofibis quant a noblesse
il fut d'ung bien simple roy né ;
encor l'ont auciuis impugné,
et a dit maint recitatcur
sjôo qu'il fut le filz d'ung enchanteur,
et dont pas nécessite n'est ce
que Cristus si haultemont naisse,
se n'est l'escnpturo qui dit
qu'il naîtra du gendre David.
Sjjô Cola tiens pour voix autontique.
mes que son naistre soit puljliquo
no que tout le monde le sache,
il n'est ja besoing qu'il so faccj
car tel poust eatre le sçaroit
Km qui a sa mort pourehasseroit,
connue de l'empereur de Ronnno ;
8565
8570
8575
8580
8585
8590
8505
8(500
8005
pensez que s'il savoit ung homme
qui nostre roy franc se clamast,
sans que ses tribus luy payast,
qu'il n'y voulsist pas contredire ?
ouy, et ix)ur ce je veil dire
que, posé qu'il naisse en secret,
ce ne fi'ustre en riens mon deci'ct,
ne sa naissance trop comnmne
n'est pas bonne, pour la fortune
qui le pourroit mettre en dessoubz.
GAMAI.IEI.
Vous n'avez pas l'argument .soubz
ne n'cschappcz riens par ce point ;
quant a nous, nous ne doublons point
que Cristus qui nous est promis
no soit de Dieu propre transrais,
et qu'il ne soit prophète saint,
d'honneur et de noblesse saint,
especial amy de Dieu.
Dont j'argue qu'en quelque lieu
Dieu sa nativité ordonne,
il est possible qu'il luy donne
tel grâce qui le conduyra
si bien qu'homme ne luy nuyra,
car ce que Dieu veult conserver
ame vivant no peust grever ;
dont, posé que tant saint prophète
fust né, et feste pour luy faicto
telle qu'a tel roy est bien deue,
pour quelque envye qu'il eust eue
il fust parvenu a sa fin,
veu que le presçavoir diviu
qui ha prédestiné son rogne
failUr ne peust, mes fault qu'il règne.
Tous ces empeschemens forclus,
ainsi comme devant conclus
qu'il n'est pas né, qui que le dyc.
Aussi ce semble musardic
qu'ung tel prince fust né pour voir,
et Dieu n'en oust rions fait s(,>avoir
a son bon peuple, a ses amis ;
eonmient qu'il fust des ennemis,
nous en eussions eu jilus haidt signe.
ZOUOBABEL
(Juant a la puissance divine
que ne puist en cas nécessaires
le garder de ses adversaires)
jamès no le dis ne soustiens:
seulement contre vous maintiene
R51S Car subtill.Miient Sont compris A. — S520 en la It. C. — 85ï-i Jen IS. C. — 8528 Kt tant doit [.lus H. — Sô'.S
l-cpugne C. — 8502 se ja scaroit hoiiimu U. — 8564 Sans ce que Iribus .\. — 8572 la
li. — 8579 Et especial G. — 8580 sen quelque lieu A. — 8591 la fin A.
A. [wusl B.
.argement A. — 8573 Et ueschappl-s
8603 hault signe C. — 86(» No lepuial
112
AlISTEUE DE LA FASSION
qu'il no fault point Dieu attemptcr
8610 en chose qu'on puist éviter
et fouir par humaine voye.
Or prenons, connnc je disoic,
que les parons do cil Cristus
sachent les grâces (t vertus
8615 que le souverain triumi)hant
a donné a leur saint enffant :
est il besoing qu'ilz facent fosto
si bruyant et si manifeste
que tout le monde s'i assanible '.
8620 c'est terapter Dieu, comme il me sauible,
de le lesser sans avant garde,
ou présumant que Dieu lo garde ;
mes vault mieulx que tout simplement
lo nourriceiit et quoyement,
8625 en attendant que plus s'efforce
et Dieu luy donne sens et foico
pour pervenir au résidu.
ROBOAN
C'est pnidontement respoudu
et do grant circonspection.
ZOROBAIÎEL
8630 Au regard de l'objection
ou vous dittes : s'il estoit vray
Dieu l'eust fait s(;avoir, je ne sçay,
no telz raisons ne sont pas clercs,
car Dieu revellc ses misteres
8635 quand bon lui samble et temps en est,
et les celle quand il luy plest :
on no le peut a co contraindre ;
ou espoir s'en est voidu faindro
jusqu'il ait aage plus parfait,
8640 ou forso a revello lo fait
a aucmis ses vrais serviteurs.
JHESUS
Notables maistres et docteurs
qui sçavez toute l'escripture,
que direz vous de l'aventure
8645 qui advint puis douze ans en ya
ou temps qu'Herode commeuva
les petis enffans dccolor ?
n'oystes vous point lors parier
d'ung enfi'ant né en Bethloen
8650 dont par toute Jherusalen
il fut si grande mencion '<
n'en ot pas rcvelaeion
saint Simeon, c'est vrayc exemple,
quand en ses bras lo thit au temple
P655 et le prescha publiquement
qu'il estoit Ghristus proprement
venu poui' raison ot justice ?
d'Anna aussi la prophetisse
vous souvient il point qu'elle en dit ?
SG60 pensez sur ce point ung petit
et vous trouverez quelque chose.
ROliOAN
Oez que ccst enflant propose
et radvertissemcnt qu'il domic,
et fust il très sage personne,
sooj si meult il très bonne raison.
ZOROBABEI.
^'oiro, et très bleu prinse en stiison ;
croiez que voulcntiers l'escoutc
car il m'advertist, somme toute,
et parle de bonne façon.
GAMALIEL
8670 Oncqucs je no vis onffançon
plus propre jour de mon vivant.
ZOROBABEL
Mes oez qu'il a dit devant,
seigneurs, il fait bien a noter,
et briof je m'y voil arrostor
8073 pour mieidx la vérité onquerrc.
Il me souvient bien qu'en la terre
de Bethloen qu'il a nommée
ung enffant de grant renommée
vers le temps qu'il a dit nasqui,
8680 je ne sçay eu quel lieu n'a qui,
de quel gendre ou do quclz parents,
mes plusieurs signes apiiarens
qu'on y vit firent a plus sages
semer paroles et langages
8085 que né fut Cristus en enffanci'.
et n'y voy point de répugnance
que lo fait no puist ostre vray.
GAMALIEL
Voire, nies je demaudoray,
comme je feiz présentement,
8090 qui en a fait rengendrement,
s'il est né, dont est il sailly ;
le gendre des rois est failly :
c'est une faute espccialle,
s'il n'est do limée rovale.
8009 templer A. — S6H fuir lî. — 8612 le B. — ,«614 la grâce et les B. C. — S610 Donne a leur beueuro B. C.
— 8624 tout quoiemcnt C— 8627 venir a perfection A.— 8628-8629 m'inquent A.— 8Ki5 en manque B.— 8639daige
B. — 8647 Aux petits B. C. — 8648 Xoystent vous A — S653 cest ] et B. C. — 8662 Seigneurs oytz C. — 8064 Pour
néant fust bien saige B. — 8(!6S Car il nous a meu une double B. C. Aprca ce vers B. et C. ajoutent : A quoi je
ne pensoye fîuere. Man. Zorobabel faictes le taire Ce nest pas cy ce quil nous fault. Znr. Sire Manasses ne vou'»
chanlt 11 parle (8609). — S670 Oncqnes mais plus proj re B. — 81)71 Je no vois jour B. — 8682 Mais les grands signes
C. - S(iS3 vit faire des plus .\. pluseuis sages C. — 8091 il est B.
PREMIERE JOURNEE
113
8695 luy qui sera roy solonnol.
ZOROBABEl,
NostPO raaistro Gamaliol,
vos répliques gucres no vaillent,
car posé que les rois nous faillent,
leur gendre ne fault pas pour tant ;
8700 vray est que n'avons roy (lai-tant
<lo David ou ses susccsscurs :
toutoffois nous sommes tous sccurs
qu'en Nazai-eth et aultre part
sa generacion s'cspart ;
8705 s'y a des gens de son lignage
l)lusicurs qui sont de liault ])arago
des quclz Cristus pourroit dosccudi'C,
et ne fault ja qu'ung roy l'engendre,
mes souffit que naissance prendo
8710 d'aucuu qui de David descende :
en ce point le maintenoui nous.
JHESUS
Et, mes seigneurs, que diriez vous
d'une haultaine prophecio
que met, ce me samblo, Ysaic,
8715 qui ou septième chapitre est :
Ecce virgo concipiet
et pariet, et cetera?
Dist il pas que le temps sera
qu'une vierge gente et plaisant
8720 doit conccpvoir ung bel enffaut
et rcnffanter sans fraction
ne charnelle operacion ?
et ce filz par non solennel
se doit nommer Emmanuel,
8725 vous savez bien que c'est a dire.
Or ne devez pas contredire
ne vouloir au contraire aller
qu'Ysaie entend a parler
de la nativité de Crist,
8730 et que pour luy ces mes cscript.
Dont se celle vierge enffantoit,
et son enlfant Cristus estoit,
qui au monde vray homme appere
né sans attouclienient de perc,
8735 que diriez vous do la favou ?
NATHAN
Faictes taire quoy ce garçon :
sa jeugle ne nous sert de rien.
ZOROBABEL
Mes rcspont au propos très bien,
qu'il n'est riens dit plus proproniont.
NATnAN
S7W Comment?
ZOROBABEL
Je vous diray comroeut :
sur fourme d'une question
il baille la solucioii
do l'argument qui estoit fait.
J'cntons, ce me sanible, son fait :
8715 nostre maistre tient contre nioy
qu'il fault que Crist soit filz de roy
s'il estoit au monde venu,
et cest enffaut a provenu
allpg\iant que, se Ciistus naist
8750 d'une vierge, ja besoing n'est
qu'ung roy l'engendre par ce point,
car de père n'ardit il point :
veez la comment il a prouvé.
NACHOH
C'est très soubtiUemcnt trouvé :
sres maintenant sommes assouffis,
OAMALIEL
A dea, veez la trop gentil filz,
comment il a sèche parole ;
s'il est maintenu a l'escole,
il sera homme de hault fait.
ROBOAN
8760 II poite engin le plus parfait
de jeune enli'ant que je veiz oncques.
Mes au propos vous tenez doncques,
pour cas possible suustenant
que Cristus soit né maintenant,
8765 etGnmaliel, nostre maistre,
a argué qu'il ne peust estre :
si me veil sur ses ditz fonder ;
mes premier je veil demander
que vault a dire ce, Cristus.
ZOROBABEL
8770 Cristus vault autant comme unctus,
la question gueres ne point.
UOBOAN
Cristus est cil qui est enoinct,
ainsi que vous l'interprétez,
dont aucunement attestez
8775 que Cristus sera roy régnant
et tout Israël gouvernant
en vraye miion et concorde.
ZOROBABKL
11 est vray, je le vous accorde,
qu'il soia enoinct sainttement
8780 et qu'il régnera voireuicnt,
1-t fiiH., . n ■•,r ^'^t '»"•■'"' '° A- - 8^30 Pour celluy ces mot^ rtsl B. Car pour lui ce mot cscript C. - 8736
S7M ^ in. . ^ • V:: ^™ """ '^*" '''"' ^- ^- - ^"- ""^ " ^- - 8'^ ''^ B. - 8757 porte il seiche B. C. -
S7W ma.nten.nl L. - 8,l.i vo.re.nent C. - 8774 acceptes C. - 8775 vraj- regi.aut B. C. - 8780 rojaulment C.
Pas. ^
114
MISTERE DE LA PASSION
c'est toute jour quanquc je dis.
ROBOAN
J'argue donc contre vos ditz :
quand Cristus, ce l'oy pur et inonde,
sera né en ce mortel monde,
8783 les rois et primas de la terre
le vendront adorer grant erre
et luy rendre hommage et ser%ice
comme au haultain chicf de justice
qu'ilz doyvent requerra et prier ;
8790 et se vous lo voulez nyer,
je vous baille David en preuve
qui très liien le dit et l'approuve,
desous deux vers très bien assis :
ne dit il pas reges Tharsis
8795 et insulc que venient
et thus mimera afférent?
Les rois, dit il en ses psoaulraes,
de Tharse et des aultres royaulnies
de Saba, d'Arabe et d'aillieurs
8800 et briefment les plus grans seigneurs,
luy vendront offrir dons exprès ;
et dit encor au ver d'après
que tous les rois qui lors seront
et toutes gens le sorvii'ont,
8805 et beaucop de los autontiqucs
luy prophetize en ses cantiques,
que je lesse pour la briefté,
comme de la transquilité
et de la paix universelle
8810 qui a son temps doit cstre telle
que c'est le choix du temps futur
juxta illud : Orietur
his dichus justifia
et pacis habundancia.
8815 Sur ces deux poins, pour traire a chiof,
deux argumens vous fais, et brief :
premier, que les rois que j'ay dist
et lesquclz David a predist,
ne sont point venus honorer
8820 Cristus, servir et adorer :
si dy par vraye congnoissancc
que Cristus n'a pas pris naissance ;
secondement, la paix n'est pas
bonne sur nous en plusieurs pas :
8825 nous sommes .gouvernés par force,
et chacun jour guerre s'efforce
' de nous faire payei' tribus :
si fault ilire que c'est aljus
de croire qu'il soit né encores.
zonoiiAnEL
8830 Vos argumens sont tous notorcs :
on voit la faultc de l'aval
dont le premier procède mal,
car en vostrc allegacion
David ne fait pas mencion
8835 du temps que les roys s'y rendront ;
trop bien dit il qu'ilz y vendront,
mes combien l'enffant ara d'aage
lorsqu'ilz vendront payer l'ommage,
nous n'en sommes pas bien instruit.
8840 Or voyez dont se bien s'en suit :
les rois n'ont pas offert leurs dons,
ergo Crist que nous attendons
n'est pas venu, la faulto est clere ;
et forse que Dieu considère
S845 et veut qu'on son aagc parfait
l'hommage des rois luy soit fait,
aussi est il plus convenent :
de quoy sort un riche présent
fait a ung pi'ince, quel qu'il soit,
SS50 se le prince ne le conguoit?
il n'a de gueres pourfité ;
mes vault mieulx qu'il soit présenté
en aage qu'il a congnoissancc,
affin que sa haulte puissance
8855 rétribue a ses bien vcillaus
le hault bien qui luy sont baillans :
j'ay ceste ymaghiacion.
ROBOAN
^'ous estes donc d'oppinion
que de riens il n'est nécessaire
8860 que l'hommage se doy ve faire
a sa nativité de grâce,
mes souffît bien que l'en luy face,
quand il sera puissant de corps ?
Quoiqu'il soit, jamès ne m"accors
SS65 qu'au monde nasquist ou tel roy,
et il n'y venist roc ne roy ;
j'entendz que lors feront l'acquit,
et ainsi l'eutendist David
quand les paroles dessus dites
8870 voult prophetizer.
ZOROBABEL
Vous le ditteS)
mes au prouver gist le soubtil.
JHESUS
Mes seigneurs, vous desplairoit il
S7S(> et querre B. — 8816 Vous fais deux B. G. — SSl'l primes B. ^ 8823 ne ailorer B. C— 8821 conclus A. Si dis
i|uil iiest pas en enfance B. C. — 8822 Ne venu ne trait a naissance B. C. — 8824 pas] pars B. — 8826 Ciiacun jour
Icmperour A. — 8829 mmque B. — 88'i4 Et ibrsun A. — 8847 pertinent C. — 8S50 Quand lacceplant ne le B. —
8865 ung tel roy B. C. — S866 Et ny venist ne rocq B. Et quil C.
P R R M I E R F, T 0 U R N ?: E
115
se je clcniaiidoie deux mos
qui servent ung peu nu [iropos
SS73 par moyen d'advertissonicnt ?
GAMAI.IEI.
Nennil, fil/., dittes hardiment
et vous arez bonne audience.
JHESUS
Chers maistres, rompUs de science,
puisque demander le conviexit,
8880 je no sçay se point vous souvient
de ti'ois roys do nolilo renom
depuis dix ans ou environ,
qui par vision d'une estelle
hiysant en l'air, gente et ysnelle,
8S85 on cesto cité an'ivcreut
et publiquement demandèrent :
ou est lo hault roy couronné,
le roi dos Juif/, qui est né ?
en Orient choisie avons
8890 son cstelle, et vers luy venons
10 servir de dons honorables.
Je croy que seigneurs si notables
ne feussent pas venus si loing
no soy traveillicr sans besoing';
SS93 or pensez bien sur ceste clause.
OAMALIEL
L'cnffant dit très bien : il a cause
ot ap|)reuve très bien son dit :
il mo souvient bien, comme il dist,
comment Herodo nous manda
S900 et nous cnquist et demanda
ou Grist devdit naissance prendre,
et pour vrayc responce rendre,
ung de nos docteurs plus certains
dit que selonc prophètes sahis
S903 dovoit naistre poui' vérité
dedans Bcthleen la cité.
Ataut les trois rois se partirent,
mos on quclz marches ilz vortircut,
ne de leur fait ."avoir n'en puis,
soie car ilz ne revindrcnt depuis,
mes prindcnt aidtro part leur voye.
ROBOAN
11 m'en souvient bien, j'y estoie ;
Herodc en fit lors forte enquesto.
ZOROHAIÎEL
Quand je n'avay raison que cesto,
801D de droit point elle vous couffout j
car se les rois venus y sont
pour exaulcer .sa soignorie,
la prophecic est adverie,
et ainsi Christus est venu.
jtiEsua
89Î0 No vous est--il point souvenu
de l'cstcUe dont ilz parlèrent,
et publiquement lesmoigncrent
l'avoir veuc en l'air clcrement ?
ZOROBABEI.
Très bien.
JHESUS
lît quel enseignement
8925 pouoieut ilz prendre par elle
qui se donnoient peine telle
de soy si loing adventurer?
que pouoient ilz espérer
s'aultre chose no rcgardoiont ?
ZOROBAHEL
8930 Mon filz, j'cnteuùz qu'ilz se fondoient
sur une pi-ophecic faicte
do Balaan qui fut prophète
en leurs marches do par de la,
lo quel dist : exibit Stella
S935 ex Jacob; la fait assavoir
qu'une cstelle doit apparoir
a la nativité joyeuse
do la sahito fleur précieuse
qu'Ysaic nous a nonce
89i0 florir de la verge Jcsso ;
si virent lors par advtnture
une ostollc contre nature
mouvant par bas, clerc et nouvelle :
si conclurent que c'cstoit celle,
89'.5 et lors se mirent en chemin.
JHESUS
C'estoit ung misterc divin,
si fut ainsi qu'ilz lo disoient:
car sur elle se conduisoient,
et les admcna jusqu'à cy
S950 sains ot saulvos, la Dieu mercy ;
et ainsi, a mon simple sens,
a ce que du niistero sens,
doux prophocies décorées
furent en ce veriffiees :
8955 celle a Balaan la première
en tant que la clore lumière
de restcUe leur appanist
qui ou chemin les secourust ;
celle a David secondement,
8900 car il fut soeu publiquement
qu'ilz furent das pays yssus
que David avoit dit dessus :
a ce ne [loust ou coutrecUre.
8882 Lesquelz puis dix ans enuit-on 6. — SSS3 par la B. C. — 8881 gente et belle C. — 8888 qui ja est A. — 8S95
Or y pensez sur C. — 8901 selon les C. — 8905 Quil deuoit A. — 8906 Dans A. — 8939 enoncie C. — S9M alore A.
116
MISTEREDE LA PASSION
ZOROBABEL
Oncques mes jo n'ouys mieulx dire,
8963 et a l'ouir pi-cnz giant liesse.
GAMALIEL
Oncques enflant de sa jeunesse
n'cust, je ci'O}', mémoire si bonne,
car au temps dont il nous sermonne,
il fault qu'il fustbien jeune d'aage.
ROBOAN
8970 Jo m'esbays plus du langage
et la naturelle prudence
qu'il a en couchant sa sentence
que je ne fais du demeurant.
NATHAN
Or ça : au propos de devant,
8975 venons a nos conclusions.
ROBOAN
J'avoye baillé deux raisons
et de matière assés commune,
dont nostre maistre a saulvé l'une :
or viengne a l'aultro, si luy plaist.
ZOROBABEL
8980 11 me souvient bien quelle elle est :
vous faictes une objection
de la paix' et grand union
qu'au temps de Giist doit cstre mise,
comme David le prs^plietise,
8985 et que pas celle paix n'avons
pour plusieurs grans cxtorcions
qui sont longues a mettre en compte.
En tant qu'a ma matière monte,
il est besoing que nous sachons
8990 qu'il y a paix de deux façons,
il y a 2)ax imperata
et pax jilena et perfecta, ,
J'appelle une paix imperee
quand le peuple d'une contrée
8995 est tenu dessoubz ung princier
si serré qu'il n'ose groncier,
et Bi n'y a pas paix parfaitte,
mes est quelque paix contrefaitte
en tant qu'anie ne se rebelle ;
9000 l'aultro «t trcp meilleur et plus belle,
qui est quand ung peuple d'honneur
est soubz son naturel seigneur
qu'il ayrae, sort, honore et craint,
et que le seigneur ne constraint
800j SCS subgetz ne les tiranuisc,
mes les maintient en leur franchise
en faisant a chacun droiture ;
et ceste paix a tel nature
et est de si hault bénéfice
9010 qu'el ne peust régner sans justice,
car ou que justice n'a cours
paix ne peust délivrer' secours,
, et ou que justice sera
paix sa résidence y fera ;
9013 et si doulcement se complaisent,
(Ut David, qu'elles s'entrebaisent.
Ces-te paix dont, ditto dernière,
pourrons avoir vra yo et plainiei'C,
se le temps vient que Cristus règne
9020 en parfait aage sur son règne,
et qu'il aist bouté ses nuysans
et vaincu ses contredisans ;
la première qui est trop mendro
a présent nous fault en gré prendre,
9025 puisque mieulx ne pouons avoir.
JHESUS
Mes seigneurs, il est assavoir
se vous entendez que la paix
soit la plus grande de jamais,
|)ar quoy j'entendz l'especialle,
9030 ou qu'elle soit si generalle
qu'en tous les climas de la terre
il ne soit tant soit peu de guerre.
Le second faire ne se peust,
car tous les jours guerre se meust
9035 entre seigneurs et habitans,
eulx pour divers cas debataus ;
mes que la paix soit par deçà
plus grande qu'el ne fut pieça,
ce ne pouez vous ignorer ;
9040 quel paix peust on plus espérer
quand tout le monde en une somme
est tributaire a ung seul homme ?
Tout le monde joint liuy les mains
a l'imperateur des Romains ;
9043 dont, mes seigneurs, je vous demande
s'oncques nul jour fut paix jilus grande
ne plus générale union ?
ROBOAN
Certes, mon filz, je croy que non,
et bien parlez a ma plaisance.
JHESUS
9030 l'^t dont, pour quelle répugnance
ne pourroit il estre advenu
que Crist a présent fut venu ?
8966 la jeunesse A. — S068 Que il C. — 8970 lignage C. — SOOÎ Et manque A. B. — 8994 et une contrée B. C.
— 8996 Se serre B. — 8998 Sosse quelque B. — gcoO trop mnnquc C. — 9002 Obeyst a son seul B. — 9003 Qui laime
A. B.— 9012 son cours B. — 9017 Ceste dont ditto derrenicre B. — 9020 mrmque B. — 9035 seigneurs] bourgois B. G.
— 901S Certes fils je pense B. C. — 9050-30» attribuas ù Roboan B — 9052 Cristus C.
PREMIERE
en son tomps doit i)aix habondcr
et justice se doit (Tarder ;
9055 et puisque ce» deux choses sont,
concluez.
ZOROBARBL
Grist est venu dont,
et s'ensuit très Lien par vos dis.
JHESIIS
Mes seigneurs, tout ce que je cli<
c'est soubî, correction bénigne
9000 et pour avoir forme et doctrine
par la science qu'en vous gist.
NATHAN
Certes cest enflant m'esbayst
et le grant sens qu'eu luy l'epose :
ce m'est la plus nouvelle chose
90()5 que jamés je cuide choisir.
NACHOn
Je prens grand plaisir a l'ouir,
que de riens qu'oncques mes ouys
tant eu cueur ne me resjouys,
tiuit est gent de corps et de voix.
MANASSES
9070 Qui est il ?
NACHOR
Je ne le congnois,
et fust il yssus d'ung bergier,
si peust on plainement jugier
que c'est ung enffant de hault lieu.
MANASSES
Nostre maistre, au vouloir de Dieu
907j vous avez maintes raisons fortes
saulvees et de plusieurs sortes:
mes pour enquérir plus avant
de Cristus qui est dit devant,
s'il est né ou s'il ne l'est mye,
9080 exposez moy la prophecie
dont Daniel jadis parla,
quand ung angle luy revella
qu'après que septante sepmaines
seront acompUes et plaines,
9083 nostre péché doit terminer
et vraye justice rogner ;
prophecies et visions
aront lors leurs implecions,
et dit qu'a celuy temps futur
S090 sanctus sanctorum ungetur,
par lequel Cristus entendons.
ZOROBABEL
Nostre maistre, ung peu attei;dons ;
JOURNEE
vous nous mouvez très forte doubto
dont j'ay doublé et encor double,
gogr> passé des ans a grant foison :
il fault «jufesscr par raison
que Daniel parle eu appert
du hault Cristus, et bien y port,
car il le nomme ]ilainement.
MANA.SSBS
910O l-'t veey dont mon argument :
se depuis le temps que ce dist
Daniel jusqu'au ten)ps de Crist
n'a de sepraaines que septante,
il fault par i-aison suffisante
9105 que Cristus soit venu pieça,
car du temps que ce dénonça
jusques a cy, sans riens rabatre,
il y a trois cens ans ou quatre,
et ainsi Crbtus oppresse
9H0 de vieillesse fust trespassé,
ou il soroit per|)eluel,
ou la vision Daniel
n'aroit pas esté véritable.
D'aultre part il n'est pas croyable
9115 qu'il fust venu en son royalitie,
et si n'en sçaroit parlerame ;
aultrement vous fault évaser.
ZCROBABEI.
A communément exposer
mie sepmaine pour sept jours
9120 comme l'en fait le commun cours,
vostre argument bien conclurroit
mes jamès ne s'i deduiroit ;
ains fault que la sepmaine monte
largement a trop plus grant compte
9125 pour venir jusqu'à nostre temps.
JHESUS
Prenez chacune pour sept ans
pour voir combien a bien compter
les septante pourront monter:
espoir que vous y trouverez
9130 le juste temps que vous querez
depuis la revelacion
dont Daniel fait mcncion
jusques au temps que nous vivons.
ZOROliAHEL
Filz, c'est bien dit : or l'esprouvons,
9135 savoir qu'il en pourroit aller.
NATHAN
Je voys tout par moy calculer
117
9066 tel plaisir C. — 9081 acomplis toutes pleines A. — 9093 ung Irfs bon 15. une bonne C. — 9095 Passe ades ans
grant. B. — 9108 U a des ans trois cens B. C. — 9109 expresse C. — 9114 nestoit pas B. — 9120 on le B. — 9123
Mais B. — 9124 manqxte C. — 9126 Or prenez chacune a B. C. — 9187 brief compter A. — 9131 le prenons B.
H8
MISTER F. DE LA PASSION
savoir se iiombrer le sçaray.
NACHOR
Et tandis je coiicorderay
nos histoires et nos cronicques
9140 des rois et des ducs autentiques,
combien ilz ont régné sur nous
depuis ce temps.
MANASSES
Dépêchez vous,
il est grant temps d'aller diner.
Icy font semblant d'estudier
et les autres de nomhrar.
AQUILLAINE
0 Dieu, qu'il fait dur cheminer
9145 en ce temps d'esté qui est chault !
mes, Dieu raercy, il ne m'en chault,
puisque tant nous sommes penees
qu'au logis sommes retournées :
loué en soit le Dieu des cieulx !
MARIE JACOBY
9150 Je voy nos maris,
MARIE SALOMÉ
Tant vault mieulx :
regardez les venir bâtant,
ilz ne se sont pas hastés tant
qu'il z soient devant nous logé.
NOSTRE DAME
Chères seurs, a vo^tre congé,
9155 et aussi vous, dame Aquiline,
ma chère et amee voisine,
je me pars, et ne vous desplaise,
car jamès je ne seray aise
tant que Jhesus mon enffant voye.
MARIE JACOBY
9160 Seur, je pry Dieu qu'il vous convoyé :
chacune voist a son mesnage.
MARIE SALOMÉ
Nous VOUS mcrcions du voyage
ou avec nous avez esté.
AQUILLAINE
Je pry au Dieu de majesté
9105 qu'a vous toutes, notables dames,
tourne au saulvement de vos âmes
et de moy par vostre moyen !
Icy s'en vont chacune en leur logeis.
91,37 les scaray li. — 9164 .a dieu de B. — 91G6 noz B. —
petite potence C. — 9177 vous promet! B. G. — 9178 Quf
i;. — 9183 Enoor e crus je bien B. G. — 9184 Qui moy ma
JOSEPH
Marie, ma joye et mon bien,
Dieu vous tiengne en parfait soûlas !
9170 Je viens, je vous promos, bien las
et fort traveillié sans doubtance.
NOSTRE DAME
Et Jhesus, mon cher filz ?
JOSBÏ'H
Je pense,
se m'aist Dieu, qu'il n'en aist pas mains.
NOSTRE DAME
De le regarder trop remains ;
9175 je m'esbays que ne le voy.
JOSEPH
Ou est il?
NOSTRE DAME
Dittes le.
JOSEPH
Qui, moy?
• jepromos Dieu qu'a mon advis
depuis le partir ne le vis.
NOSTRE DAME
O cher espoux, sans plus d'esmoy,
9180 ou est il?
JOSEPH
Dittes le.
NOSTRE DAME
Qui, moy?
il est avec vous, je le croy ;
c'a esté tousjoui's mon devis,
le contraire croy bien envis.
JOSEPH
Ou est il?
NOSTRE DAME
Dittes le.
JOSEPH
Qui, moy ?
91S5 je promus Dieu qu'a mon advis
depuis le partir ne le vis.
NOSTRE DAME
0 tendre bouche et riant viz,
forme humaine bien disposée,
la plus noblement composée
9190 sur tous ceulx du monde mortel,
enffans des vivans le plus bel,
le plus gent et plus cher tenu,
9170 je vous creans B. G. — 9171 manque B. Atout ma
puis B. G. — 9179 en bonne foy B. G. - 9182 Sa A. B.
nyiic B, — 9187 et manque B.
PRKMIRRR JOURNEE
119
mon cher filz, qu'es tu devenu ?
Doluiitc! et piteuse journée
0195 jiour moy si est huy ndjournec
quand de l'ostel te fois bouger !
quel dueil, quel courroux, qiiel danger,
quel niartire, quelz durs de|)ars
nray je, filz, si je te pars ?
8200 0 cnll'ant de bonté pnrfonde
en qui tout mon espoir se fonde
et sans qui n'ay plaisant séjour,
que m'est il advenu ce jour ?
Très auiourousc créature,
9205 t'ay je lessé a l'aventure
sans garde, sans protection,
sans vivres, sans provision,
sans toy anoncer mon départ ?
et encor ne sçay en quel paît,
9210 0 cher fdz, je te trouveray.
JOSEPH
Chère espeuze, je vous diray ;
pour Dieu, tenez moy excuse :
je n'ay pas renft'aut roffuso
no laissé par ma négligence,
9Î15 mes cuidoie en ma conscience
( ainsi m'aide Dieu a la vie ! )
qu'il fust en vostrn compaignie,
et a vous je m'en attendoye.
NOSTRE DAME
Et d'aultre costé je cuidoye
9820 ( ce scet Dieu ) qu'il fut avec vous.
0 cher espoux, que fei'ons nous ?
tout nostre trésor est pnrdu ;
BC ))ricfment il ne m'est rendu
courroux me partira le cueur.
JOSEPH
922-5 Resconfortez vous, chiere seur,
( t vous soufflée qu'on le quorre.
11 n'est pas demouré derrière,
je le cuide sçavoir de vray.
NOSTRE DAME
0 doulx Jhesus, ou te querray ?
9230 se de toy puis estre certaine,
je n'y plainderay pas ma paine,
et deusso jusqu'à la mort querro.
JOSEPH
Cessez vos plains : allons enquerro
par nos congnous, par nos voisins,
9235 par nos affins, par nos cousins,
sçavoir se nous le trouverons.
NOSTBB DAME
Allons, jamès ne cesserons
tant que nous en ayons nouvelle.
JOSEPH
Dieu doint qu'elle «oit bonne et belle,
98*0 si vray qu'il nous en est mcstier !
NOSTRE DAME
Allez d'ung costé.
JOSEPH
Vol entier ;
noua ferons icy départie :
vous en ii'oz d'une partie
et j'iray d'aultre pour sçavoir.
NOSTRE DAME
9245 Pour Dieu, faictes en bon devoir.
JOSEPH
Plaise Dieu qu'a cela no tiengne,
je n'ay pas peur qu'il ne reviengne
sur piez devant vostre regard.
NOSTRE DAME
Beau frère, le grand Dieu vous gard !
9250 nous sommes moult fort desconffis.
ZEBEDEUS
Comment, Marie ?
NOSTRE DAME
De mon filz
Jhesus, que Dieu veille garder,
que ne cessons do demander,
et si n'en oyons vent ne voye.
ZEBEDEUS
92!xi Par mon ame, je ne sçaroyo
pour l'eure le vous jissensor,
ne je no sçaroye penser
qui lo peut avoir retenu :
est il point avec vous venu ?
9260 nous tous espérions qu'il y fust.
NOSTRE DAME
Je cuidoye que Joseph l'cust,
et luy a moy, d'autre costé.
ZEBEDEUS
Et ainsi l'enfifant a esté
par ce moyen mis en oubly ?
NOSTRE DAME
9265 Ça mon, mes pas je ne l'oubly :
Dieu scet combien j'en suis dolente.
Olft'i Iristablo B. C. — 9195 Par moy .is mnleheiire lî. C. — 9202 Sans qui nay plaisance B. — 9210 ou te trouuay
B. — 92111 Nainsi iiiaist G. — 9221 O nirinr/iu- C. — 9225 belle seur A. — 9233 salons B. — 9238 oyons C. — 92V4
part sauoir B. — 9215 faietes y. Joseph mon deuoir B. bon manque C. — 9!K6 assener C. — 9261 Jentendoye B. —
9262 Et luy moy en bonne vérité A. — 9265 Sa mon A. B. C.
120
MISTERE DE
ZEBEDEUS
En bonne foy, chère parente,
sur ce ne sçaroye que dire ;
bien sçay que Joseph le bon sire
9870 cuidoit de vray que vous l'eussiez.
NOSTRE DAME
N'est il en lieu que vous sceussiez
m'en donner advertissement ?
ZEBEDEUS
Nennil, dame, certainement :
je ne vous sçay assigner place.
NOSTEE DAME
9275 0 père du ciel, par ta grâce
vueille ton cher filz prendre en garde
et la povre mère regarde
en doulceur et vraye amittié,
car se de mon fait n'as pitié
9880 a peu sçay je comment il m'est.
LA PASSION
ne le vous ramena il mye ?
NOSTRE DAME
Nennil, ma doulce chère amie;
9300 c'est de quoy je me debas tant:
il s'en est venu tout bâtant,
et l'enffant est la demouré.
ESDRAS
C'est petitement laboure ;
il ne l'eust deu laisser jamès.
AQUILLAINE
9305 Ha ! le bon homme n'en peust mes :
il en pense com de soy mesmes ;
il a cuidé qu'entre nous femmes
l'eussions par de ça ramené.
NOSTRE DAME
Voisin, qu'il me soit pardonné :
9310 je vois mon enqueste parfaire.
AQCILLAINE
Pour meilleur diligence faire,
voisine et ma doulce compaigne,
je vous pry que je vous compaigne,
car vostre dueil me gricfve moult.
NOSTRE DAME
9315 II me plaist bien.
Voisin.
ESDRAS
Ma dame, que vous plest ?
comment vous est, je vous on prie ?
NOSTRE DAME
Povrement, je suis tant merrye
que cueur n'en peust plus, beaux amis.
ESDRAS
9885 Gomment ce ? qui vous y a rais ?
vous me faictes tout espardu.
NOSTRE DAME
Jhesus mon euffant est pardu,
ce sont nouvelles bien maudites.
ESDRAS
Pardu ! dea, qu'est ce que vous dites ?
9890 no proferez pas tel langage ;
forsc qu'il est en ce village,
en lieu que nous no sçavons pas.
NOSTRE DAME
Je le quier partout pas pour pas,
mes ame n'en scet quelque chose.
AQUILLAINE
9293 Et certainement je suppose
qu'il n'est de gueres eslongné ;
quant Joseph a eu besongné.
JOSEPH
Dieu benist tout !
Chers parents, est il de vous nulz
qui me sceut enseigner Jhesus,
nostre enffançonnet tant habille ?
nous le querons par tout la ville ;
9320 oncques mon corps tant ne pena.
ALPHEUS
Quant Marie le ramena,
ou l'a el laissié n'en quel lieu ?
JOSEPH
Elle l'a laissié, de par Dieu,
en Jherusalem la cité.
ALPHEUS
9325 C'est simplement diligente :
il y a plain jour de chemin.
JOSEPH
Nous doubtons qu'aucua bon voisin
l'aist ramené sans nostre sceu.
ALPHEUS
Certes nous n'en avons rien sceu,
9330 et est l'aventure ennuyeuse,
9271 ou vous B. — 0276 en grâce B.— 9284 ne B. — 9288 Sont ce B. C. — 9290 ce language C. — 9291 Forsan A.
dame très sage A. — 9298 vous ne scauez pas C. — 9294 ne B. — 9309 il me B. G. — 9315 II me desplait C. — 9320
tant mon B. C. — 9321 Alpheus'} Zebedeus B. C. — 9382 Ou la le A, Ou la elle B. C.
PREMIERE JOURNEE
121
car la more est forment pitiu:)U :
si croy qu'il no luy plaist qu'uug peu.
MAlllE SAI.OMK
Qui est 00 ?
ALPHEUS
C'est voptro ncpvou
Jbcsus, qu'on quiert de tous costés.
JOSEPH
9335 Nous sommes tant doseonffortés
en nostro hostol de ccst annoy,
que je ne sçay Marie ou nioy
qui plus eu a de dosplaisaiice.
MARIE SAIX)MÉ
Or regardez quel aggravance :
93'iO tousjours nouveaulx desplaisire viennent •
c'est mal fait a ceidx qui le tiennent
qui ne l'ont ramené en l'euro ;
mes quoy qu'il soit, je vous asseure
que céans il n'est pas verty.
JOSEPH
9345 Je querray donc aultro paity
tant que je viengne a quelque fin.
tu n'avoyes plaisance qu'une,
ue jamè» plus n'en attendiz ;
9305 or la pers, et mal y tendiz :
tu vois le danger qui en sourt.
AQUILLAINE
Se quelque ame n(! nous ressourt,
cause n'y voy d'y faire chère.
Arbeline, voisine chère,
8370 avez vous point veu cy en sus
vostre hostcl le petit Jhesus ?
dites le nous, je vous eu prie.
ARBELINE
Qui, Jhesus ?
AQUILLAINE
Le filz do Marie,
qui est de si noble renom.
ARBELINE
9375 En vérité, m'amye, non,
et s'aucune chose en savoie,
autant volontiers le diroie
comme vous me le requérez.
NOSTRE DAME
Kliachin, mon cher affin,
n'est point dedans vostre maison
mon filz Jhesus ?
ELIACHIN
Pour quel raison ?
9350 ne sçavez vous, danio, ou il est ?
NOSTRE DAME
Se vous l'avez, et il vous plcst,
pour Dieu qu'amo ne me le celle,
car au jour d'uy cuide estre celle
qui a plus de ducil a porter.
ELIACHIN
9355 Se vous sceusso réconforte!',
dame, je le feisse en brief terme,
mes je vous promès et afferme
que je ne l'ay veu n'encontré.
NOSTHE DAME
Vecz cy pour avoir tout iiultré
9360 le cueur par desplnisance amere ;
o dolantc et piteuse mère,
que feras tu de ta fortune ?
ANDROMETA
Et qui est ce que vous querez
0380 si cbauldoment, dame Aquiline?
AQLILLAINE
C'est Marie, nostre voisine,
qui a pardu tout son désir.
ANDROMETA
Qui?
AQUILLAINE
Son enffant.
ANDROMETA
Quel desplaisir !
helas ! qu'elle est en grant soucy 1
ARBELINE
9385 II ne peust estre loing d'icy ;
avez vous bien par tout enquis ?
AQUILLAINE
Nous l'avons en tant de lieux quis
que ne sçavons mes ou quérir.
ARBELINE
Vous pourray je en riens secourir?
9:C0 n'ctpaigr.tz tme a tel hescing.
9336 A noslre B. — 93'<8 ims B. C. — 93M ou il se tient B. C. — 9551 Sauoun bon voisin le retient B. C. — 9354
plus a lie dueil Ji. — 9363 fors une B. G. — 9365 entendiz B. — 937:! supplie B. C. — 9377 vous Uiroio B.
122
MISTERR DE LA PASSION
AQUIU.AINE
Dame, ja n'en irez plus loing,
nous en avons tourné maint tour,
JOSEPH
Avez vous point veu cy cntour
ung onffant (l'un bien (loulx visage ?
PRiscus, voisin.
9395 Dittes, beau père, de quel aage ?
et après nous le vous cliron.
JOSEPH
Il a douze ans ou environ,
non obstant qu'il est grandelet,
ung beau filz assés vermeillet,
9400 les yculx vers, la char blanche et tendre,
les cheveulx blons, et a tout prencli'c
il a la bouchete vermeille,
et est bel enffant a merveille :
en luy n'y a riens a redire.
PRISCUS
9405 Est ce Jhesus ?
JOSEPH
Oy, cher sire ;
il est huy de nous départy
et no sçavons en quel party
l'aller querrc pour le meilleur.
RACHEL, femme a Priscus.
Ha ! que la mers a de doleur, •
94)0 Marie, la bonne maistresse !
c'estoit la plus belle jeunesse
d'enffant qu'on peust regarder d'ueil.
PRISCUS
Joseph, je plains bien vostre dueil
et de vostre espeuze ensemcnt ;
9415 mes de l'enffant certainement
en riens conffoiter ne vous puis,
ne je ne le vis oncques puis
que de la cité nous partismes.
JOSEPH
L'un a l'aultre nous attendismes ;
9420 ainsi l'avons demanevé.
NOSTRE DAME
Aquiline, avez vous trouvé
mon cher enflant en quelque place ?
AQUILLAINB
Nennil, dame, sauf vostre grâce,
la vérité n'en fault celer ;
9425 et vous ?
NOSTRE DAME
Ame n'eu scet parler ;
et si le quiers toute journée,
AQUILLAINE
Je ne trouve parsonne née
qui m'en sache faire raport ;
mes prenez un bon reconfort,
9430 dame, et n'ayez le cueur merry :
veez cy Joseph vostre mary
qui l'a trouvé, comme je tien.
NOSTRE DAME
J'apperçois bien a son maintien
qu'il ne l'a trouvé no que j'ay.
9435
0440
9450
9455
AQUIIXAINE
Gomment va, Josejih ?
JOSEPH
Je ne syay ;
ma chère amye, en vérité,
je suis en tel perplexité
qu'a peu que le cueur ne me part.
NOSTRE DAME
Vous ne le trouvez quelque part :
vostre samblant assés le juge.
JOSEPH
Ma dame et singulier reflTuge,
pardonnez moy se j'ay mespris,,
mes j'en ay tant de peine pris
de randir derrière et devant,
et si ne treuvc ame vivant
qui sache riens de son affaire :
je n'en sçaroye plus que faire
et s'en deusist ma mort onsuyvre.
NOSTRE DAME
0 mort, accours et me délivre,
mort, vien et m'escrips en ton livre,
car sans mon filz je ne puis vivre ;
vien, je le veil :
Si me feras cesser le dueil
dont tant amèrement me dueil
que je pleure de cueur et d'ueil
par grant vertu.
Filz de toute bonté vestu,
ou os tu, cher filz, ou es tu ?
9305 Bien gentelet Priscus Et de quel ange B. C. — 9399 Ung bel enfant C. — 9404 Briefment il le fault ainsi
aire 8. Ç. — 9406 sest B, C. — 9409 a grant B. G. — 9480 desamene B. — 9455 Quant je B.
PREMIERE JOURNEE
123
94C0
9i05
9'i70
9'.S0
9485
9490
9 '.95
9500
950J
doulx Jhesug, quo n'as tu setitu
les gran» ennuys
Quo j'aray de jours et de iiuys,
so jnnù'S ravoir no te puis ?
mes larm&s foroient ung puis
;i la durée.
0 tendre bouche coulouree,
douloo forme biou figiireo,
créature très bien euroc
qui fais cccy,
N'as tu do ta merc mcrcy,
quand tu l'habnudouncs ainsy
tainte d'ung courroux tout noircy ?
fllz, que feray ?
Est ce le guerdon que j'aray
que jaini's jo no te verray,
mes par tciy sans fin gemiray ?
qu'ay jo méfiait ?
Tu es tout bon et tout parfait :
filz, regarde en pitié mon fait,
sans toy mon bien vault que deffait,
j'en suis cortaine;
Sans toy vivre ne m'est que paine,
sans toy santé si m'est grevaine,
et par toy tout bien me ramaine
en cstaturo.
0 très excoUanto nature,
précieux fruit qui n'as pointure,
hault trésor de deité pure,
t'ay je pardu ?
Mo seras tu jamès rendu ?
je veil savoir au résidu
les raisons pourquoy, attendu
quo doulcemont
T'ay nourri et songneusemcnt,
pensant de toy totallement :
» haidt porc du firmamcut
qui me donnas
Ton cher filz et le m'ordonnas
quand en mon ventre l'incarnas,
se do moy souvenance n'as,
il m'est ravy.
Tout mon penser luy ay plevy,
tousjours l'ay amé et soi'vy ;
le perdre n'ay pas desservi
par négligence.
Mes j'ay parfaicte confidence
que ta bénigne providence
le me restitue on présence
quand to plaira.
JOSEPH
Chère espeuzc, qui me croira,
»10 vous lerrez vos plaintes ester,
car par plourer et lamcuter
nous ne pouons ronfTaut ravoir,
mes pour le miculx allons syavoir
en Jheiusalom sans tai'der
05i5 et de lieu en lieu demander
s'il y est ; veez la mon conseil.
NOSTRE DAME
.Mlons, cher espoux, je le veil •
nous le trouverons par ce point,
car quant a moy je ne croy point
9580 qu'il n'y demourast au retour.
JOSEPH
Il est la en quelque destour
ou il a fain et grant mesaise.
NOSTRE DA.ME
Or je requier Dieu qu'il lui plaise
nous en donner nouvelles bonnes I
.]
NATHAN
9525 Seigneurs et discrètes personnes,
j'ay ces sepraaines regardées,
ainsi quo les a demandées
cest cnfFant qui est cy scans ;
mes pris chacune pour sept ans,
9530 so mes chiffres no me forconiptent,
les septante semaines montent
et portent des ans dessus dis
quatre cens quatre vingtz et dis,
autant y en trouve par nond)rc.
MANASSES
9535 Or fault il maintenant qu'on nombre
combien il a que du prophète
ceste prophocie fut faicte :
ce nous pourra moult avancer.
NACHOR
Je trouve qu'il fault commancer
i»40 au cinquième an ou peu plus bas
du rogne de Sedechias,
et les raisons y sont notoires,
car, comme on voit par nos histoires,
plusieurs de nostro nacion
9545 par divine pugnicion
9467 très manqur C. — 9469 Que nas tu C. — 9479 que fait C. — 9503 pordray n. — 9517 amis je le conseil B.
9583 Je requiers a B. — 9530 Do ce mes chiffres ue surcontent B. — 95'»0 peu manque B.
124 MISTERE
furent monés en Babiloiiie,
la souffrirent de grant essoino,
de servitude et de meschief.
GAMALIEI,
Nostro maistre, faictes le Lrief :
SfôSO long procès n'est point de saison.
NACHOR
Je le dis pour ceste raison,
que le saint de Dieu approuvé,
Daniel, estant captivé
en celluy estrange pays
95» comme plusieurs aultres Juifz,
ung jour regardant en l'escript
que Jheremie avoit escript,
trouva qu'après des ans septante
de leur servitude pesante
9560 dévoient estre délivrés
et en leur terre recouvrés,
et Daniel qui ce veoit
incessamment a Dieu prioit
que si haulte promission
9565 sortist verificacion
comme depuis y a paru,
car ung angle luy apparu
qui luy revella plus avant
qu'il n'avoit demandé devant :
9570 car oultre celle délivrance
que depuis orent, congnoissance
l'angle de Dieu luy voult donner
du temps que Grist devoit régner
comme veillant appropiier :
9575 Daniel, tu veulx Dieu prier
que ton peuple soit évité
d'exil et de captivité,
luy demandant ayde et conffort :
tu Taras ; et encor plus fort,
9580 car oultre celle cspecialle,
la délivrance générale
qui par Gristus doit estre mise
dessus la uacion juifze
par moy te sera magnifeste,
9585 et de fait je te magnifeste
qu'en ces septaiitc et cetera
Gristus son règne acceptera.
Septante sepmaines luy mist
jusqu'à Tadvenement de Grist,
9590 et a les prendre pour sept ans
en commançaut a celluy temps
de Sedechias, qui bien compte,
DE LA PASSION
il vient bien près do nostre compte ;
car depuis luy a temps passés
9595 et d'ans largement et assés
pour fournir totallcs et plaines
les dictes septante sepmaines
qu'a Daniel furent données,
et chacune pour sept années,
9600 comme par nos histoires treuve.
NATHAN
L'enifant a bien dist, je l'appreuve
et n'avoit pas mal devisé.
GAMALIEL
Mes soubtillement advisé,
on ne sçauroit mieulx exprimer.
ZOROBABEL
9605 Et c'est tousjours pour conformer
la conclusion que je preus ;
et soustiens que pas ne mesprens
de dire que Gristus est né
et au mortel monde incarné,
9610 puisque le temps qu'il fut promis
a Daniel ba esté mis
a sensible execucion.
JHESUS
Seigneurs, j'ay une question
petite que volentiers feisse,
9615 se vous oflfencer ne craignisse ;
si vous plest, vous me la souldrez.
ZOROBABEL
Demandez ce que vous vouldrez,
bon filz, et vous serez ouy ;
est ce sur la matière ?
JHESUS
Ouy.
9620 Daniel dit, comment il m'est
advis, en son petit livret,
en tel forme : Quando vel cuin
venerit sanctus sanr.lorum,
cessabit unctio vestra.
9625 Que veult il pi'ouver par cela ?
veult il dire que l'onguoment
des roys qui s'est fait lougnemont
en Judée pour grand raison
doyve faillir en la saison
9630 que Gristus vendra en ce monde ?
exposez moy ou il se fonde,
car il m'est ung peu difficille.
ZOROBABEL
Vostre question est soubtille,
9547 de leur personne A. — 9548 Do seruUude gvant meschief A. — 9551 achoison C. ^ 9555 des aultres A. —
9560 Si deuoient A. — 9571 pleine et franche B. C. — 9572 Congnoissance luy vol donner B. C. — 9578 En lui don-
nant A, — 9585 proteste C. — 9594 a manrjue B. a dans G. — 9595 Et tant C. — 9601 deuise C. — 9615 cuidisse 11.
craindisse C. — 9620 comme il me sambie B. C. — 9621 En autre lieu qui sentresamble B. G.
PREMIERE JOURNEE
125
mon filz, et je vous y rospons
0635 que, so ces inos sont bien cspons,
il veult dire quand Crist vendra
que nostre unction dcifauldia,
hoc est qu'alore nous n'arons point
de roy sur nous qui soit cnoiut,
9640 mes alors sei'a cessé l'oindre.
JHESUS
Et comment se pourra il joindre ?
^'ous soustenez qu'Emmanuel
sera vosti'e roy temporel,
et s'il est dont qu'il règne ainsi,
96lj il fault qu'il soit cnoint aussi :
donc alors pas ne cessera
l'onction, puisqu'enoint sera :
cela se vouldroit contredire,
so n'est que vous voulsissiez dire
9650 que Cristus l'onction receust
et puis janiès roy ne le fust;
mes ainsi n'entend pas sa clause,
et si fauldroit assigner cause.
Mes se vous voulez condescendre
155 qu'avant que Crist doyve descendre
cesto unction soit doperie,
la chose est ja toute adverio,
car roy n'avons, ce sçavez vous,
qui soit enoint par dessus nous,
8660 n'oncques Herode ne receust
l'onction ne digne n'en fut,
car sa ligne n'est pas fondée
ne venant des rois de Judée ;
dont, quand Herode avant sailly,
itnctio nostra doffailly:
cela se pourroit maintenir.
ZOROBABEI,
11 dit bien, c'est pour soustenir
la posicion que j'ay fait
que Cristus est venu de fait ;
9670 car puisque nostre unction fault,
I Cristus est venu, il le fault,
c'est Daniel tout a la lettre.
JHESL'S
Dittes nioy aussi, nostre maistro,
ou gist une aultre autorité
B75 qu'on a maintefTois recité
et est en nostre loy commune.
ZOnOBABEL
Ou est elle, mon filz ?
JHESUS
C'est une
fil
9685
9090
WiO i-ossora le monde B, leur oindre G. — 9662 lignée A. II.
souslrnir lî. G. — 9671 y le lî. — «677 Quelle C. — 9079 Ou il a B.
nonr.1 1!. C. — 9695 auoit donc B. — 9705 judce G. — 9706 Ncst
soit B. C — 9718 comme B. — 9719 Oncqucs je no>s telle A.
qui parlfl aussi du temps futur
en disant : A'on aii/J'eretur
9080 ceptrum de Juda.
ZOROUADEL
11 souffit ;
ce fut quand Jacob si bcnist
ses douze filz : lors leur prcscha
et du temps futur annunça
aucunes choses bien obscures,
prophetizant leurs adventures
qui en après leur advcndroient
ou a ceulx qui d'euix descendroient;
et quand a Judas son filz vint,
ccstc pi'oniesse luy maintint
et dist que le ceptrc royal
( c'est le royaulme geuei'al )
en sa ligne ja ne faiddroit
jusques a tant que Crist vcndroit :
l'auclorité est bien patente.
JHESUS
9C95 Jacob donc avoit son entente
qtio les roys de Juda venans
dévoient estre parvenans
de ligne bien entretenue
jusqu'à celle digne venue
0700 de Cristus '>.
GAMALIEL
Ainsi l'entendons.
JHESIS
VX donc, mes seigneui-s, regardons :
le ccptre de regaUté
u'est il pas substret et ostc
de la lignée de Juda ?
9705 quel roy le ceptre de Jude a ?
il est d'estrange nacion,
de langage et d'extraction,
et mesmement d'estrange loy
repprouvé et de faulx alloy,
9710 faulx ydolatre et mescroant
qui est img point l>ieu mal séant
en nostre loy tant noble et digne.
Et de recliief c'est img grant signe
que la haultaiue prophecic
9715 do Jacob est or accomplie,
et que Cristus est descendu.
ROROAN
Seigneurs, avez vous entendu
ccst enffant comment il propose ?
GA.MALIEL
Oncques mais je u'ouys tel chose,
c. — 9663 En la lignée de judee B. C. — 9666
C. — 9681 jacob quant il venist B. G. — 96S3 leur
il A. — 9709 faiilse lov B. — 9715 et 9716 est
1-26
MISTERE DE LA PASSION
9720 et fust iing homme de trente ans,
s'est il bien son propos traictans
et d'ung entendement soabtil.
MANASSES
Mes je vous prie, qui est il ?
est il homme qui le congnoisse ?
NATHAN
07i5 Je requicr a Dieu qu'il l'accroisse
et le parface, si luy plaist ;
je ne sçay qui ne dont il est,
mes enffant de grant bien se moustrc.
JHESUS
Seigneurs, je vous demande en oultro
0730 ung aultre point tuut simplement.
ZOROBABEL
Avant ! mon cnifant, hardiment,
nous vous orrons de bon vouloir.
JHESUS
Or je vous demande assavoir
se la loy que nous maintenons
9735 et que de Moyse tenons
s'cntretondra tousjours ainsi
sans riens changer ?
GAMALIEL
Je tiens que sy,
car la loy fut de Dieu donnée
et par sa puissance ordonnée.
9740 Si croy qu'on ne pourroit trouver
qui y voulsist riens innover,
car elle est très Wen en ce point.
MANASSES
Quant a cela je ne croy ]ioint
et repute a très grand folye
9745 que nostre loy soit abolye ;
mes tousjours ainsi dui-era.
ZOnOBABEI,
Va je cuide que non fera,
et qu'il y ara changement
devers le hault advenement
9750 de Gristus ; et ma raison fonde :
pourquoy vendra il en ce monde,
sinon pour régir et juge;-
et nos deffaultes corriger ?
et quand ainsi corrigera,
9755 je tien que la loy changera,
et seront alors demollies
beaucop do nos eerimonies
aux sains prophètes révélées,
a tout le moins renouvellees ;
07C0 plusieui-s ont ceste oppinion.
JHESUS
Selonc ceste conclusion,
simples gens conclurro pourront
que Crist fust ne ; car ilz verront
fort approuchei' ce que vous dittes ;
97C5 et pour monstrer les choses dittes,
regardez moi vostre prestrise,
le grand pontiphe, dont Moysc
Aaron le premier consacra,
l'ongnict unctione sacra
9770 et voulu que la dignité
qui est de belle auctorité
descendist par succession
a celle generacion
qui do droite ligne vendroit
9775 d'Aaron, et que cil la tendroit
tout son temps sans l'avoir pointe
a qui elle seroit escheute.
Mes puis ne sçay quantes années
les choses sont bien retournées,
9780 car on la vend puis ça, puis la,
puis on l'oste a celuy qui l'a ;
tous les ans ou tous les demys
vos hauls pontiphes sont demis
et non pas par élection,
97S5 mes par belle vendicion,
car celle dignitcj vendez
et au plus offrant la rendez ;
de jour en jour la chose change,
et doit sambler assés cstrange
9790 que dignité tant noble et chère
se livre ainsi a la renchcrc.
Les ciremonies légales
dcffaillent et les principales,
qui est signe de loy nonvolle
9795 et que Gristus les renouvelle :
si les doit estre repparant,
il doit estre assés apparaut
qu'il est né : veez la ma querelle.
ZOROBAUEL
Elle me semble bonne et belle
OSOO tt de la bonté m'esmerveil.
[Pose.]
NO^tBE t)AAlË
Jtjseph, a peine et a traveil,
sommes arrivés, la Dieu gracCj
en la sainte et beuoito place
9725 qui le croisse C. — 9733 .le fais question C. — 9739 sa raowiur B. — 97in iirouuer B. C. — 9742 Yen quelle B.
— 9769 Kt fut A. B.— 9//0 Enoiiit pour la grand A — 9790 si haulte B. C— 9793 faillent donc B. C- 9803 beniile B.
PREMIERE JOURNEE
127
de Jhcrusalcrn que Dieu gard.
9805 Cictoiis ijurtout iiostre regard,
sçavoii' se nostrc ciiffniit verrons.
JOSEPH
Mai'io, pi-cinier lo qucrons
au temple, qui est uiig saint cstrc.
NnSTRE DAMK
Je pense que la doit il csti'o
9S10 s"il est en toute la cité,
car il a de propriété
qu'avec les enffans no s'esbat,
ne se joue, no se desbat,
mes est a Dieu totallenicnt.
JOSEPH
0S15 Or y allons ligierenient ;
je pry Dieu qu'il nous on doiiit joyc !
Z0R0BA.BEL
A nostre propos je disoie
qu'il est bien possible a tcnii'
que CristUR doit briofnient venir
'9820 (t qu'il est venu tout pour vray,
et pour ce, rccollei' vouldray
en biief les signes ordonnés,
qu'a présent ont esté donnés,
et argue : premier, veon
[ 9823 que le saint honmie Simeon
a prcsché par raison notable
ceste chose estre véritable,
et d'aultrcs aussi plus de trois ;
nous avons aussi dos trois roys
i'9830 qui vindront de loingtain pays
l'aourer comme roy des Juif/, :
nous avons de l'estelle après,
que Ralaan met par exprès ;
nous avous la paix de reclicf
' 9835 qui est grande, quant a uug clif f
tout le monde se rend loyal ;
nous avons du ceptre royal
qui de nostre ligne est chang'!'
et a ung estrange adjugé ;
1 9810 MOUS avons de nostre unction
qui cesse, et n'en est mencion,
car la manière en est démise ;
nous avons de l'archeprestrisc,
comme l'euffant dire vouloit,
0845 (pii no va [dus comme el souloit,
qui sont choses assés certiiincs.
JHESUS
Et puis des septante sepmaines
quo Daniel voult l'acomptcr.
OAMALIEL
11 dit voir, a les bien noter ;
085» selonc les motifz iirccedons
c'est des signes i)lus ovidcns
et qui plus la chose demonsti'e.
MANASSES
Nous avons aussi raison contre :
premier, qu'a sa nativité
9S55 n'avons point esté invité
n'anie de nous n'y est venu ;
et que son gendre est iucongneu,
ne scet on le lieu ne la ville,
qui samble chose diffîcille,
9800 qu'uiig roy si haultc loy décrète
et naisse en place si secrète
qu'amo n'en doyc riens sçavoir.
NOSTRE DAME
Ha ! Joseph, pour Dieu venez voir
grans merveilles et bien apportes.
JOSEPH
08C5 Est ce nostre enflant ?
NOSTRE DAME
Oy certes,
c'est Jhesus mon filz débonnaire :
je recongnois son doulx viaire,
sa bouchete et ses rians yeulx.
JOSEPH
Or, dame, loué en soit Dieux 1
9870 vecy ung cas bien uouvclet,
comment il se sied tout seulet
au milieu do tous ces docteui-s.
NOSTRE DAME
isolent docteurs ou sénateurs,
il n'est qui red'raindre m'en sache
9875 que prestement je ne l'embrasse,
et l'iray baisior devant eux.
Icy vient a l'enfant et la baise'.
O mon doulx enfTant gracieulx,
filz do toute doulceur pai-fait,
mon cher (ilz, quo nous as tu fait.
9818 est possible el a tenir D. C. — 9825 prophète C. — 9826 esUble B. — 9829 aussi vou des ro>8 \. — gsVJ
(ompler B. C. — 9808 bouche C. — 9S0U O daine A. — 9S7i Comme B. — 98Î4 me fnco B. — 98T9 fllï mun'jiue A.
128
9880
MISTER E DE LA PASSION
0885
0800
9895
9000
0005
9010
991Ï
qu'as tu fait a ta povrc mère?
Dieu scet comment je et ton pcre
t'avons quis dollans et irés.
JHESUS
Et qu'est ce que vous me querez
si fort ? no sçavez vous pas, niere,
qu'es choses qui sont a mon père
et touchent sa magnificence
il me convient eslre en présence ?
n'en ayez la chère assimplye.
ZOROBAUEL
Cherc dame, je vous supplie,
est il vostre enffant ce beau ficulx l
NOSTRE DA.ME
Oy, mon seigneur : ce scet Dieux
que je l'ay porté en mon ventre.
MANASSES
Belle dame, gardez qu'il n'entre
en oyscuse et jeunesse folle,
mes l'entretenez a l'escolle
le plus songneux que vous pourrez,
et en temps futur vous verrez
qu'il tendra ung nohle chemin.
NATHAN
C'est l'enffant de plus bel engin
que je sache, et pour miculx complaiie.
' NOSTliE DAME
Seigneurs, ne vous veille desplaire
se l'enffant avec nous s'en vient :
ung peu festoier le convient
après que retrouvé l'avons.
ROBOAN
Bonne mère, bien le sçavons :
nous prions Dieu qu'il vous conduyc.
JOSEPH
Mou filz, vous n'y demourrez mye,
avec nous vous en revendrez :
ferez pas?
JHESUS
Comme vous vouldrez,
mon pero : je veil obéir
a vous du tout sans dcffaillir
comme je suis tenu de faire.
NOSTRE DAME
C'est parlé de très bon affaire,
mon cher filz.
JOSEPH
Et pour ce tenez
du pain blanc, et vous en venez
avec nous tout resjouyssant.
NOSTRE DAME
Loué soit le Dieu tout puissant,
de ceste noble recouvrance,
et nous doint science et puissance
0020 de le garder doresnavantl
Ict/ s'en vont a leur logeis.
ZOUOBABEL
Seigneurs, ouy avez devant
les poins sur quoy nous demourons ;
il fauldra que nous labourons
cy après tousjours pour penser
9925 de niiculx la matière affoncer ;
mes point d'apparence n'y vois
de riens conclurre ceste fois,
car la matière est trop soubtive
et la journée est bien tardive :
9930 temps est de j)enser du diner.
GAMALIEI,
Il nous fauldra jour assigner
cy après pour y revertir,
mes quoi qu'il soit au départir,
je prie a Dieu qu'il vous maintienne.
ROBOAN
9935 Et je luy requier qu'il vous tienne
en amour et vraye union !
L ACTEUR
Seigneurs, en la déduction
de nostre petit abregié
il vous a esté prolongic
0940 a nostre possibilité
la divine nativité
de Jhesu Crist, nostre sauveur,
la charité et grand ferveur
qu'il a eu a l'humain lignage,
9945 quand pour l'oster hors de servage
voulut en la vie mondaine
soy couvrir de nature humaine,
estre subjcct aux passions.
9881 Combien C. moy et A. — 9884 ne scauez vous pas donc B. C. — 9885 qua mon père sont B. C. — 0890 f\h
B. — 9891 soyez fiz B. — 9005 Belle mère A. — 9906 Je prie a Dieu A. — 9008 vendrez C. — 0014 cher moii'/isc
A. — 9915 Du bon pain B. C. — 0918-0910 inlenertis A. sauoir et puissant A. — 9923 nous y labourons C. — '.02S
trop manque B. — 0937 Prologue /înablc B. C. — 9946 A voulu en vie B. C.
PREMIERE JOURNEE
120
peines et tribulaeious,
MSO povretés et necessiti's
a quoi) nous sommes invités;
puis avons fait ostencion,
monstraiis sa circoncision,
laquelle humblement toulc souff'rir;
OOjj puis luy avez vcu dons offrir
par les trois roys, c'est bel exemple;
et en après offrir au temple,
saint Simeon le recevoir
qui moult le desiroit avoir;
9060 puis avei veu l'orrible loy
d'Hcrode, le très cruel roy,
qui fit tuer tes innocens,
dont puis moiirust hors de son sens ;
l'enffant Jhesus reistes porter
9965 en Egipte pour éviter
la fureur qu'aultres encoururent,
ou toutes les ydoles rheurent,
quant en la terre fut entré;
item depuis avons monstre
9970 comment aux docteurs disputa,
en quoy sagement se porta
les interrogant sans séjour ;
et atant fin du premier jour.
Demain retournez, s'il vous plest :
9975 ne sçares estre si tost prest,
que nous ne venons accourant
pour poursuir au demeurant.
Fin du premier jour de la passion nostre
seigneur Jhesu Crist.
9955 lauez veu au temple offrir B. C. ■
frcmier litre A. le premier jour G.
- 9956-9957 manquetU B. C. — 'mt Aux iaterrogans A. — 9977 ExpticU l»
I
Pas.
SECONDE JOURNEE
DE LA PASSION NOSTRE SAULVEUR JHESU GRIST
t^îv-Uj^ Si^>^
A l'aide du créateur,
Jhesia; Piastre vray redemptiur ,
qui de sa grâce nous régente,
en la journée précédente
tous fut une grant pari monstree
des fais Jhesus, et a l'entrée
tous feismes xtng procès moral
sur l'appoi}ztemcHt principal
de l'umaine redempcion ;
puis a l'adnunciation
venismes sans prolixité,
et après la nativité
vous fut monstree et tes arroi:
des pastourcaulx et des trois roys,
qui par dons portant grant substance
vendrent la beneurce enfance
adorer par dévote somme,
le confessans vray Dieu et homme ;
comment aussi fut circoncis,
et puis les innocens occis
par Herode le fel tirant
qui ainsi les fut martirant
10000 soub: timbre du sauveur haullain
qu'il cuidoit trouver pour certain
lors et luy faire expirer l'amc,
doubtant de perdre son royalmc,
mais Dieu, qui les choses prévoit
et a son vouloir y pourvoit,
de Joseph le fait révéla
qui en Egipte s'en ala
9985
9990
0995
10005
et mena l'enffant et sa mère,
doubtans ceste entreprinse amere
10010 que le fel Herode encouru,
dont puis villainemeiit mouru ;
après d'Egipte retournèrent
et en Nazareth demourerent :
s'avaient coustume en leurs loys
10015 d'alcr tous les ans une fois
en Jherusalem sans reffus
et mener le petit Jhesus :
et en son aage de douze aiis,
les parents mats et desplaisans
10020 en Jherusalem le perdirent,
qui moult diligemment le quircnt
par trois jours, dont moult se grcvcrcnt,
et finablement le troxtverent
entre les docteurs disputant
10023 comme peustes voir ; et atant
fina la matière assignée
et la primeraine journée.
Or vouldrons par ires bo>inc amour
commancer nostre second jour,
10030 et monstrer en temps et en lieu
du benoist Baptiste de Dieu
comment ou désert il prescha
et a voix haullaine adnonça
la venue du doulx aigncl,
10033 la vray rédempteur d'Israël;
d'ilec par fais et par escript,
poursuyr des fais Jhesu Criit,
inonstrant sa chère passion
jusqu'à la résurrection.
9978-10043 Prologas xaper srcund'i die pan.iionis Domlni lî. T.. man'/udit A.— 9982 partie C — 9984 propos C. —
9987 nomliiaciou C. — 9988 prolixité G. — 10002 I^ors pour Ci — 10011 finablement C. — 101U4 de coustume B. —
'0088 troa. mmijue I!. — 10031 disciple Ci — 10033 haulle B. — 10038 ilerc C.
132
iMISTERE DE LA PASSION
10050 La sera le second point fait,
et pour plus tost attaindre au fait,
Jehan, venes Vûiis advanccr,
de xostre sermon comtnancer.
JEHAN BAPTISTE
Penitcnciam agite :
10015 peuple qui par iniquité
as laissé voie do laisoii,
Repens toy et prens charité
tant que tu as temps et saison :
chacun prépare la maison
10030 de sou cueur, de sa conscience ;
ung chacun mette diligence
de faire en soy la très digne oeuvre
de penitanco, car je trouve
et vous anonce pour certain
10055 que le règne Dieu est prochain.
Je suis la voix qui crie et sert
de puhlier par le désert :
parez les voyes nostrc sire,
rectifiez sans contredire
10060 les sentes du saulveur du monde
qui vient pour nostrc coulpe immonde
reparer par promission ;
c'est tout nostrc salvacion
ou tout nostre espoir conformons,
10065 comme il est escript aux sermons
pai- Ysaie le prophète
qui en ces termes le répète :
Omnis vallis implebitur
et mons hiimiliabitur.
10070 Go prophète dist par doulceur
qu'a la venue du saulveur
les vallées pleines seront
et montagnes s'humilieront :
par colles vallées s'entendent
10075 les humbles qui vers Dieu se rendent
obeyssans et assimplis
et seront de grâce remplis
et de vertuable doctrine
a ceste venue tant digne ;
lOOSO par les mons qui hault s'entretiengnent,
j'entens ceulx qu'en orgueil se tiennent,
les haultains, les presumptueux,
qui, a voir les fais vertueux
qui d'icelluy saulveur vendront,
1008» humbles et jîourtois dcveiidront
et a sa docti'ine excellente
soubnieteront tout leur entente
^ par foy et vraye obédience.
Et s'ensuit en celle sentence
10090 qu' Ysaie magnifesta :
Erunt prav.i. in directa,
et dit que les chemins mauvais
seront redressés et reffaiz;
et par icenlx chemins tortus
10095 s'entend gens vuides de vertus,
dévoyés par leur maléfice
du sentier de droite justice :
ceulx alors seront redressés
et par beaulx sermons adressés
lOiOO a la droiture d'équité,
lectifiés par volenté,
que chacun d'eulx portera foy
a son prochain si comme a soy :
l'ung ara de l'aultre pitié
10105 en amour et vraye amitié,
en doulceur et compassion ;
se l'ung voit oceupassion
dessus son prochain encourir,
prest sera de le secourir
10110 et le reconfortei- en Dieu,
et ainsi paix ai'a son lieu
et pourra estre universelle,
si bonne qu'oncques ne fut telle.
Puis seront, dist Ysaias,
10115 aspera in vias planas ;
chemins aspres et mal onniz
seront a l'cqualité mis,
et seront les plaines plus dures,
j'entendz les cueurs des ci'eatures
10120 endurcis d'obstinacion,
par laquelle obduracion
quelque anionestement divin
n'y pouoit prendre bon chemin :
ceste opressc lors cessera,
10125 dit le prophète, et ce sera
quand par doulces monicions,
par saintes predicacious,
se convertiront de la voye
de péché qui trop les desvoyc ;
10130 et s'ensuit eodetn loco :
Et eidcbit omnis cnro
10043 Saint J. II. A. — 10052 les digues fruiz B. — 10053 je truis B. — 10058 De parer la voix C. — 10li(l vostre B.
— 10062 preuision B. — lOOSl ceulx maii'jur A. qui orgueil tiennent C. —10091 Krunt] Contre B. C. — 10098 si seront
dressez A. — 10099 redrossez A. — 11000 loviiulte C. — 10105 charité A. — 10100 amour et B. — 10107 voit] prend
A. — 10118 Et seront les plus dures plaines Faites voves doulees et plaines l'ar ces voyes aspres et dures C- — 10121
induraeion B C. - 10123 son B. C. — 10120 dures A."— 10128 a la A.
SECONDE JOURNEE
133
loiar.
10140
10U5
10150
10155
10160
10165
10170
10)75
10180
salutarn Dei nostri;
et lors, dit le prophète icy,
tout liomnie verra proprement
le saulvoui' sans omposdieiiieut,
et ce peuist double sens avoir :
ou que tout hoiunie le puist voir
seusiblciiieut en char humaine,
mes cesto glose n'est ])as saine,
qui n'entend que do toutes loys
gens le pourront voir une fois ;
ou se peust entendre aultrement
du jour du dernier jugement,
et lors tout homme le verra :
adonc a tous se monstrera
pour rendre a chacun son loyer,
pour les bons et mauvais payer
a chacun selonc sa di'oituro.
Kt [lourtant selonc l'escripturo
vous ay dit et admonesté :
pcnitenciam agite.
Peuple de povre remembrance,
fais penitance, penitance,
fais penitance austère et dur.e
tant que ta povre vie dure :
vivant la feras se tu voulx,
api'ès la mort jamès ne peulx.
Vice au vivant est réparable,
mes au mort irrémédiable.
Je ne veil pas que vous fie/
n'en disant vous glorifiez :
Abraham avons nostre père,
comme pour donner vitupère
au peuple d'aultre nacion
et a vous dominacion ;
tel louange ne vous vauldroit,
car je vous dis que Dieu pourrnit
de ces pierres cy sans aham
susciter les filz d'Abraham ;
et s'au cler le voulez entendre,
je vous dy que Dieu pourroit prendre
les publicans et les payens
et les vestir en telz moyens
qu'ilz seront mieulx ydones tous
d'cstre filz d'Abraham que vous,
car s'en péché jierscverez,
ja SCS leaulx filz ne serez.
Lieve toy donc, peuple, et t'efforco
de faire penitance a force ;
rends toy oheyssant et prest :
Jam secxiris posita est
ad radicem, Croy ma devise,
car la coiguee est desja mise
auprès des racines de l'arbre,
10185 et feussent culx plus dur» que marbre,
briefment les tranchera tout ens :
par l'arbre le i)euple j'cnteus
et par cesto coignee fine
l'exploit de justice divine
10190 qui est preste de discuter
sur le peuple et l'exécuter
selon son operacion,
et a ceste execucion
tout arbi'e qui n'ara fait fruit
10193 sera decouppé et destruit
et mis en éternelle flame.
Pour ca est ce que je vous proclame,
veant vostre fragilité :
penitciiciam agite.
10200 Venez donc et faictes devoir
du saint batesme recevoir
qui disposés vous rendera
a l'aultre qui apri-s vendra,
qui sera fait au saint Esprit.
ABUS, juif.
10S05 Saint prudhome, il nous est escript
que Cristus pour nous racheter
a ndus se doit manifester,
enseigner en amour divine
le peuple par bonne doctrine :
10210 doneqiies veus vos enseigncraens
et les notables preschemens
que donnez aux hommes et femmes,
doublons que ne soiez vous raesmcs
qui nionstrez si belles vertus.
JEHAN BAPTISTE
10215 Non suis, je ne suis point Cristus,
mes dessoubz luy je m'humilie.
NATHAN, pharisien.
Et quel chose es tu donc ? Helye ?
te dis tu Helias?
JEHAN BAPTISTE
Non.
SACHOR, phiirisie,!.
Non ?
qui es tu donc ? quel est ton nom ?
10220 yniagiuer je ne le puis :
10113 (Ifin-enier II. — ICI 'l'i (^1 1015/i Alors B. — 101'.5 aspre et C. — 10158 recouurobla B. — 10163 vitupère] no»-
tre père B. — 1018/. Empres B. — 10185 abre, niabre A. — 10197 vous manque B. C. — 102» prophète A. — 10208
Et semer B. — 10813 ce niesnies B.
134
MISTERE DE LA PASSION
tu es donc prophète?
JEHAN BAPTISTE
Non suis.
NATHAN
Qui es tu donc? or le dénonce,
affin que nous donnons responce
aux scribes et pliarisiens
d0225 qui nous ont transmis comme siens :
que nous dis tu de toy ?
JEHAN BAPTISTE
Ego
tox clamantis in deserto ;
la voix suis au désert criant
que chacun soit rectiffiant
10230 les voyes du saulveur haultain
qui vous approche pour certain,
et n'y metez doubtcs quelcoiicques.
NACHOR
Et a quoy baptizcs tu doncques,
si tu n'es Cristus n'Helias
10235 ne prophète ? aucun droit n'y as
de faire ce baptizement.
JEHAN BAPTISTE
Je vous baptize seulement
on eaue clerc, mes vous avez
tel entre vous que ne savez :
10240 c'est celuy qui vient après moy
neantmoins qu'il fut devant ( n soy ;
sa puissance passe la moyo,
et se comparer m'y vouloie,
pas ne suis digne a dénouer
10245 la courroye de son soler :
celuy fault aller en croissant
et nioy tousjours en mendrissant.
Cil après, vous baptizera
ou saint Esprit et portera
10250 en sa main ung espurgement
pour espurger le bon forment
et métro en sa grange a couvert,
et la paille qui riens ne sert
au terrible feu gettera
10255 qui jamès ne s'estaindera,
tant est mordant et redouljtablc.
SOPHONIAS, juif.
0 saint Baptiste vénérable,
affin que ces griefz n'encourons,
a jointes mains vous requérons
10260 ce saint baptesme vertuable.
MANASSES, juif.
Puisqu'il nous est tant pourfitable,
de tout nostre cueur le querons,
0 saint Baptiste vénérable,
affin que ces griefz n'encourons.
ABIAS
10265 11 nous sera voie notable
a cil que de Cristus arons.
JEHAN BAPTISTE
0 chers frères, considérons
ceste meschante vie cstable,
la gloire du ciel acceptable
10270 et les tormens que nous sçavons
estre en enffer, Icsquclz avons
pour ung meschant délit dampnable.
ABIAS
0 saint Baptiste vénérable,
affin que ces griefz n'encourons,
10275 a joinctes mains vous requérons,
ce saint batesrae vertuable.
MANASSES
Puisqu'il nous est tant pourfitable,
de tout nostre cueur le querons.
JEHAN BAPTISTE
Vouloii's avez fermes et bons :
102S0 prestement baptizés serez.
Icy les baptize tout bas.
JHESUS, homme.
Ma merc, vous entenderez,
s'il vous pliiist, mon intencion :
j'ay attaint la perfection
d'aage d'homme, a eo que je vois,
102S5 car sur mon an trentième vois ;
par quoy il est temps que j'appere
a faire les oeuvres mon père
et moy viay filz de Dieu prouver ;
et pour le batcsme approuver
10290 dont Jehan nostre précurseur
est ministre et vray denonceur,
en Bethanie m'en iray,
et la baptizer me feray
par luy au fleuve de Jourdain,
10295 lequel batcsme pui' et sain
sera cause après d'ung grant bien.
NOSTRE DAME
Filz, vostre vouloir est le mien
10284 phariseans A. — 10223 enuoyes céans A. Qui nous ont transmis commissiens B. — 10229 vcriffiant C. — 102^^
clere mnnque B. C. — 10239 Tel ou meilleu B. C. — 10249 Au saint A. — 10257 et 102C3 0 vraj- baptiste verluabli>
B. G. — 10260 vénérable B. G. — 10208 instable C. — 10273 vertuable B. C. — 10276 vénérable B. C. — 10278 nos
cueurs le requérons G
SECONDE JOURNEE
186
et chose qu'il vous plaise faire
no me peust ne me doit desplnii'o,
1030O car vostrc haultesso pnrfoiulo
coiignois miculx q\io tous ceulx du monde.
Je sçay vostre coucepcion
jiar divine oporacion
avoir esté dedans nioy faicte :
10305 je sçay vostre bonté parfaicle
qui jarat's ne peust dévier,
par quoy je no puis obvier
a vostre volonté planiere.
JHESl'S
Vostre mercy, ma chère niere,
10310 et atant prens congé do vous.
NOSTBE DAME
Mou cher filz amiable et doulz,
a joye vous puisse revoir !
Icy s'en va vers saint Jehan.
SOPHONUS
Loué soit Dieu d'humble vouloir
qui nous a octroie l'espace
10315 de venir par sa digne grâce
au saint batesme recevoir!
JEHAN BAPTISTE
Cher enftans, il vous peust valoir
a monder l'onterine face.
MANASSES
Loué soit Dieu d'humble vouloir
10320 qui nous a octroie l'espacol
NACHOR
Nathan, allons faire devoir,
que uostrc message se face.
NATHAN
Mes que la signagoguo sache
ses fais : elle y vouldra pourvoir.
NACHOR
10325 J'y pense a faire tel devoir,
au retour qu'on vena la trace.
ABIAS
Loué soit Dieu d'humble vouloir
qui nous a octroie l'espace
de venir par sa digne grâce
10330 au saint baptosme recevoir!
JEHAN BAPTISTE
0 peui)le de Dieu, venez voir,
cnffans : ecce agnus Dei,
qui tollit peccata mundi ;
voez cy le doulx ng^ieau de Dieu,
10335 le vray rédempteur humble et pieu
qui vient poui- porter les péchés
dont tout le monde est enteché».
C'est cil do quoy j'ay protesté
moy Buivir, et si a esté
10340 devant moy sans comparaison.
JHESl'8
Jehan, par dévote oraison
vous pi-y que sans arrestoison
de vostre main baptizé soie.
JEHAN BAPTISTE
Ha! sire, ce n'est pas raison
10315 que moy qui suis mendre foison
si hault seigneur baptizer doyo.
JHESL'S
Les aultres bapiizé avez
et j'en veil bien estre lavés
pour mieulx esprouvcr la loture.
JEHAN BAPTISTE
10350 Ne sçay se faire le devez,
mes, mou cher seigneur, vous sçavez
qu'il n'appartient a ma nature :
Je suis creatm-e
de povre facture,
10355 de simple estature,
mcschant viatcur,
C'est chose troj) dure
et contre droiture
que je lave ou cure
103C0 mou hault créateur.
Tu es précepteur,
je suis serviteur ;
tu es mon pasteur,
ton ouaille suis;
10365 Tu es le docteur, '
je suis l'auditeur ;
tu es mon ducteur
sans qui rions ne puis.
Et posé que si digne feusse,
10370 que ton saint corps baptizer deusse,
o haulto clémence,
tu n'as indigence
de prendi-e lavement humain,
car ta corpulence
10375 n'a quelque apparence
du péché, tant es pur et sain !
Car du lieu haultaiu
au règne mondain
viens cy pour laver nostre offence
102<.;9 Ne mo duit uu poiirroit 11. C. — 10310 a vous B. — 1032-4 y manqur li. — 10325 Jen B. — 10335 doulx A.
preu B. O. — 10358 ariicrt B. — 10354 estaturo A. - 10355, 10358, 103C5, 10360 «mn7uf»( A. — 10303-1Û3G4 «iitn--
■certis A. — 10367 Mon vray coaductour A. — 103C9 si »ion7U<' B. — 10379 cy manque A. B.
136
MISTERE DE LA PASSION
10380 dont a bon droit crain
de toucher la maiii
a si haulte magnificence.
Mes par plus juste conséquence,
sire que chacun doit priser,
10385 tu me dois niesmes bapti/.er
sans estre devers moy venant.
JHESUS
Jehan, seuifre toy maintenant ;
combien que vers moy peu te prises,
si veil je que tu me baptizes :
10390 en l'eauo me baptizeras ;
mes après baptizé seras
au ?aint Esprit dont tout bien vient,
car par ce moyen nous convient
parfaicte justice accomplir.
JEHAN BAPTISTE f
10395 Je ne veil pas désobéir,
mes a vostie gré je suis prest :
jjrcparez vous quant il vous plest
et puis je feray diligence.
Icy se deivest Jhesus et entre en l\ au
et saint Jehan le bctptiie.
DIEU LE PERE
En l'honneur et la révérence
10400 de Jhesus, mon filz vertueux,
a son batesme précieux
qui se fait au fleuve Jourdain
nous vendrons au règne mondain
deraonstrer par une puissance
10405 vraye lumière et congnoissance
de uostre unie trinité
et de nostre trine unité,
et apparoir sensiblement
a ce très saint baptisement,
10410 affin qu'il soit plus hault prisé.
DIEU I.E PERE
Hic est filius meus diteclus,
in quo michi bene complacui.
C'est cy mon fliz, le beneuré Gristus
qui me bien plest : ma plaisance est eu luy.
Jcy descend le saint Esperit en espèce
de coulon sur Jhesus dans ledit
fleuve.
JEHAN liAPlISTE
0 vray saulveur et nostre recouvrance,
médiateur et parfaicte espérance
pour nous pourvoir ;
Vray filz de Dieu tu me fais demonstrauce
que te soubmùs a nostre délivrance
pour peine avoir.
Tu es mon Dieu, jamos n'y mes doubtance,
tu os Gristus né de la viergp franche ;
et qu'il soit voir,
La voix du père on fait siguifiance,
le saint Esprit du coulon eu seœblancQ
le fait sçavoir.
JHESUS
Jehan, faictes vostre devoir
de publier en plaine face
que chacun penitance face,
et baptizez sougnousement ;
1043J car au saint admonnestement
du saint Esprit qui me conseille,
il fault que mon corps s'apparcillo
d'aller au désert demourer.
JEHAN BAPTISTE
Dieu me doint si bien labourer
10440 que mon service pou vallable
nie soit vallont et acceptable :
j'en fei ay mou petit pouoir.
JEHAN BAPTISTE
Sire, vous estes baptizé
qui a vostre haulte noblesse
ne doit pas ne a ma simplesse
du fleuve deussiez estre vssus.
JHESUS, au desfirl.
En ce desort me fault manoir
et lianter pour cause certaine ;
104'.5 si jeuneray la quarantaine
sans manger goutte ne dcmyo,"
comme fit le prophète H(>lie
qui jeûna les quarente jours :
ainsi seront cy mes séjours
10150 tant que le terme soit venu.
10390 et 10399 Et en C. — 10416 complacuit B, _ 10417 jhesus C.
10442 deuoir Q.
- 10434 baptisier B. — \Qm plaisapt et C.
SECONDE
SATHAN
Deables dampiuis gros et menu,
RO bricf confort ne m'est doaué,
je suis par rage forcené,
et sont ni s cxplois confondus.
HKUICH
lO'iSJ Quel deahlo d'iioninie est ce Jhesus?
en tout le monde universel
n'y en a pas encor luig tel :
il vit purement et sans vice,
et n'est do quoique nialofico
10460 d;' quuy jo le soousse charger.
SATHAN
Tes toy, tu me fais enrager
quand tu m'en parles grain ne goûte.
«EUICH
Et pourquoy ?
SATHAN
Pour ce que je doubte
qu'en fin jo n'en soie désert :
104O laissons le cy en ce désert,
et nous on courons eti entier
nous conseillier a Lucifer
sur deux nios que je luy veil dire.
BERICH
Le deable nous veille conduyre
10470 a l'aller, s'en serons plus sceurs.
i.rciKEn
J'ai)pergoy nos ambassadeurs
qui reviengncnt moult empeschés.
ASTAROTH
N'oulo/. vous qu'ils soient torchés ?
vee/. cy les instnunens tous près.
LUCIFER
lO'iTj Dea, ne te hasto pas si près
de fraper derrière et devant :
ouyr fault leur rapport avant,
sçavoir s'il y a perte ou gaigne.
SATHAN
Lucifer, je crevé d'engaignc
10480 des fortunes qui nous surviennent,
et se les deables ne me tiennent.
JOURNEE
je desveray et pi» encore.
LUCIFER
Sathan, tien ung ])cu ta nicmorc,
et compte tes fais par manière.
BELZERUTH
1048^) Fais, fais hardiment bonne chiero :
nous sommes cy plus d'ung millier
pour ce» deux gallans estrillier
si n'y a rapine ou conqueste.
CËRRERUS
J'ay ma plommee toute picstc :
10490 je n'attens mes que l'un d'eulx entre
pour les batre tant dos et ventre
que jamos n'emportent santé.
LUCIFER
Deables, ung [icliV silcle :
vous leurs estes mig peu trop fermes.
1049J Sathan, compte nous en briefz ternies
se ce Jhesus est point fine.
SATHAN
Nennil, jo l'ay tant butiné,
tant poursuy, tant ospio,
tant regardé, tant costoié !
10500 Mes mon fait n'y vault une nois :
plus le voy et moins le congnois,
plus le i-ogarde et plus le crains :
brief il excode tous humains.
Ung jour doubte qu'il ne soit auge,
10505 et l'aultre fois mon propos change,
et me doubte d'une aultrc; somme,
qu'il ne soit Dieu eu forme d'hommo
voue la sainteté qu'il tient,
et briefment ma raison maintient
lOjiO qu'il est quelque chose bien haullc,
car oncquos il ne commist faulte
dont je le sceusse réprouver.
LUCIFER
Ha ! larron, ne sces tu trouver
quelque faulce soubtilité ?
IlEI.ZEnUTH
10515 Voulez vous qu'ilz soient escroté
par manière de jiasse temps ?
ASTAROTH
Cinq ou six torchons bien hurtans
ne seroient pas mal assis.
LUCIFER
Va hardienient jusqu'à six,
10580 ou cent ou deux cents tout comptant.
beij:ebuth
Et a son compaignon ?
137
Id'iOO ppusse B. — 10465 mnniue C. — iOViS soient bien A. — 1048Ï ou pis B. jenraperay C. — 10487 les deux
U. C. — 10488 Sil y a B. — 10510 chose mnnqw A. — 10511 ne l'oinniis deffaulte B. C. — 10514 Quoique mauuaise
joutiente B. — 10515-4? nhiH'iwnt A. — 10519 di.t C.
ï
138
MISTER E DE LA PASSION
LUCIFKR
Autant ;
si l'cstuvcz en ce brasier :
ung tantet pour les niioulx aisier
brûlez ces serpens plains d'envie.
BERICH
105J5 Ha ! Sathan, vecy dura vie :
il nous convient estre housses.
SATHAN
Ha! mercy, maistre.
LUCIFER
C'est assés,
je leur pardonne la fortune.
ASTAROTH
Passez, ribauldaille, passez.
BERICH
10530 Ha! mercy, maistre.
LUCIFER
C'est assés.
Les turez vous? cessez, cessez!
CERBERUS
Encor aront ilz caste prune.
SATHAN
Ha! mercy, maistre.
LUCIFER
C'est assés,
passez, ribauldaille, passez.
105.35 Les turez vous? cessez, cessez i
je leur pardonne la fortune,
ASTAROTH
Je pense qu'ilz en ont pour une :
ils sont frotés a grosse cloche.
LUCIFER
Comment te va, Sathau ?
SATHAN
.Je cloche,
10540 maistre, je ne puis hay avant ;
je ne seray plus poursuivant :
les gages sont trop mal courtois.
LUCIFER
Si feras oncoi' une foiz,
il le fault, je te le commande.
105i5 Or me respons a ma demande :
ou tient ce Jhesus son ménage
maintenant?
SATHAN
Dedans ung bocage ;
il s'est en ung désert logé,
au quel lieu n'a beu ne mangé
10550 depuis l'heure qu'il y entra.
LUCIFER
Par mon conseil on le tentra
par trois ou par quatre façons,
affin au moins que nous sachons
s'il est Dieu, homme ou autre chose.
SATHAN
10555 Tost y courusse, mes je n'ose,
pour doubte qu'on ne me torchonne.
LUCIFER
Se tu laiilx, je te le pardonne
par tel que tu t'y emploiras.
SATHAN
Ça donc, le congé.
LUCIFER
Tu Taras.
10560 Or va, que pour toy coufermer
tous ceulx de l'air et do la mer
te ramaincnt a sauvegarde
plus tost que pierre de bombarde !
Icy vient Sathan devers Jhesus.
JHESUS
Quarante jours ay jeune plains,
10;i65 dont aucunement me complains,
car la fain me commance a prendre.
SATHAN
Je ne sçay ton fait bien comprendre,
Jhesus, mes dy nioy de quoy sert
qu'ainsi te tiens en ce désert ?
10570 es tu homme bien abusé ?
en quarente jours n'as usé
I quelque viande corporelle.
Se tu es l'essence éternelle
et vray filz de Dieu souverain,
10575 puisque tu souffres et as fain,
que ne prens tu ces pierres cy
et en fais pain ? car par ainsi
tu éviteras ce tourment.
JHESUS
Homme ne vit pas seulement
105S0 du pain que nature luy livre,
\ ■,_' mes aucunellbis peust il vivre
„ •' de la sainte parole digne
venant de la bouche divine :
donc se le pain matériel
105S5 me fault, j'ay le pain éternel
de Dieu le perc tout puissant
105'i3-43 S. Il ny a tour dabileto Sa saintele est trop grande. L. Viens oa sathan je te demniide A. — 10,547 et que
deable scay je B. C. — 10551 Ion le temptcra B. — 10554 dieu maniuc A. U. quelque autre A. — 10559 conuoy
B. G. — 10560 infirmer A. — 10567 entendre C. — 105S1 preut il C.
SECONDE JOURNEE
139
qui est ydone et suffisant
a parfouruii' lo rosulii.
SATIUN
C'est subtillcmetit rcspuiidu
10J90 et m'apperçois bien que tu scez
des cavillacious assés
])Oui' uioy (.ollor tout ton afFaire,
mes je pense tellement faire
que je sçaray aiiis le départ
10595 que tu es ore ou de quel pai't
se tu n'eschappes par miracle.
Regarde ce liaultain pinacle
de ce beau temple tant massis :
proiiiptemont seras sus assis
10600 pour niieulx esprouver ta vertu.
Monte sur raoy ; que restes tu ?
as tu paour a raprochenicnt ?
je l'y porterai franchement ;
ne prens en toy merencolyo.
JHESCS
10605 Se tant a ton voil m'humilie
et vers toy me veulx supporter
que je te seuftVe me porter,
mon fait n'en empirera pas.
SATHAN
Je pense qu'il y a mains pas :
10010 tu es cy pour faire uug beau sault.
Oi' regarde do bas ou hault ;
fa eestc fois t'esprouveray :
se tu es le filz de Dieu vray,
saulte d'icy jusques a terre,
106).") dommage n'y pourras acqucrro,
car Dieu a do toy commaudi;
aux angles que soies gardé
en toute voye nécessaire,
et en tant que tu as a faire :
lOOSO ja blossier ne te laisseront,
ains eu leurs mains te porteront,
affin que ton pio no se blesse
aux pierres par quelque rudesse ;
saulte donc hardiment en bas,
10025 affin que voient tes esbas
les simplo.>< qui tes fais désirent
et ta puissance plus remirent,
et plus exaussé en seras.
JHESUS
En l'escripture trouveras,
10030 et est esoript en certain lieu,
que ne devons pas tempter Dieu
ne quérir par voye baultaino
ce qu'aussi bien par voye humaine
10591 De B. — 10597 piiiaglo D. pignacle C. —
— 10650 en sommacion B. C. — 10673 fortraire B.
BC peust faire et exécuter :
10035 ton conseil ne peust pourfitcr, .
si m'est ta voyo réprouve.
8ATUAM
C'est bomie évasion trouvée,
et voy bien qu'en ton cueur emprainte
est toute l'escripture sainte :
10640 tu la congnois de pas en pas ;
mes atant n'eschaperas |>as,
tu aias encor ung assault ;
je ne vouldi'ay que faire ung sault
a toy porter en aultre marche.
Ici/ l'emporte sur la ynontaiyne et dit encore:
10045 Or vien ça, monte dessus l'arche
de ceste montagne, au plus hault
et regarde tost combien vault
lo pays que tu vois a l'ueil ;
, et brief distinguer le te vueil :
10650 premier, vois le mont de Syon,
la terre de promission
qui est terre ou tout bien habonde
et n'a plus doulce en tout le monde ;
vers ça est la terre d'Europe,
10655 vers la la terre d'Ethiope,
tous royaulmes de noble arroy,
de quoy je suis seigneur et roy ;
Rome tiens, firece a moy applique,
Arabe, Tliarse, Asie, Auffrique,
10660 Egipte et la grant Kabilonne ;
tout est a moy et tout te donne,
mes que seulement tu t'enclines
et m'aoures et me domines
comme tu sces que je le puis,
10GC5 et moy ton Dieu et seigneur suis :
jamès nul jour delfaulte n'as
s'ainsi le fais.
JHESUS
Va, Sathanas
en ta peine horrible et cruelle,
en ta dure mort éternelle :
10670 escript est : tu adoreras
ton seul Dieu et le serviras
do cupur sans toy vers aultre traire ;
pai- quoy je ne veil pas soubstrairc
la gloire du hault créateur,
10075 pour toy, faulx angle distracteur,
a qui n'est deu ne los n'hommage.
SATHAN
Haro ! haro ! haro ! j'enrage :
sur ciel ne sui' terre ne tien ;
je suis plus vaincu qu'un viel chien ;
10606-7 manquent I!. C. — 10019 manque C. — 1Û0.^0 Si mesl A
C. — 10674 plasmaleur B. C.
uo
MISTERE DE LA PASSION
lOCSO en mon fait n'a point de recours,
en enfler m'en vois le grant cours
plonger au fons de la chaudière.
Ll'ClFEK
Sathan a, je croy, vent derrière ;
il revient cy moult raideraent.
^0685 Comment va, Sathan ?
SATHAN
Malement,
je reviens conffus en enffer,
mes j'ay bien fait plus fort que fer
jiar devers ce mauldit .Ihesus.
LUCIFER
Qu'as tu fait ?
SATHAN
Le deable tout sus ;
10090 au désert me suis transporté
ou il estoit et l'ay tempté
do trois péchés par compaignie :
premièrement, de gloutonnie ;
puis l'ay cuidé mettre en la loiro
-:0695 d'elacion et vaine gloire ;
au tiers point, pour le mieulx combatre,
je l'ay cuidé faire ydolatre,
contondant qu'il m'eust adoré ;
mes il m'a chassé si serré
10700 biiefment que je n'y ay peu plus.
LUCIFER
Et ainsi doncques tu conclus
qu'il est Dieu, non pas créature ?
SATHAN
Maistre, je ne sçay que conclure,
mes je ne croy point quant au fait
lOTOj qu'homme puist faire ce qu'il fait :
je n'en trouve nul de tel sorte.
BELZEBUTH
Encore la doubto plus forte
qui soit, puisqu'il fait tplz vei'tus,
c'est qu'il ne soit celuy Gristus
10710 que ces prophètes veulent dire.
LUCIFER
Va, Sathan, Dieu te puist maudire !
fay diligence de sçavoir
• se sur luy pourras riens avoir :
de le poursuir ne séjourne,
10715 et souvent par de ça retourne
pour nous rapporter des nouvelles.
SATHAN
Se je puis, vous les orrez telles
que la feste sera vilaine.
LUCIFER
Or va, que le deable te maine
10780 a peiije et terrible misère !
Icy retourne Jhesus vers sa mère.
JHESUS
Paix soit a vous, ma chère mère,
et vous doint tout vostre désir !
NOSTRE DAME
Mon filz, ma joyo et mon plaisir,
long temps ay esté en absence
10725 de vous, mes de vostre présence
j'ay le cueur tretout resjouy.
JHESUS
11 fault que me gouverne ainsi
que Dieu mon père le m'ordonne,
et que mon estât se consonne
10730 a ce que l'escripture chante.
NOSTRE DAME
Et je m'y reus oboyssante,
ne mon veil n'v discorde en rien.
[Pose.]
ARIAS
Ileiode tient mauvais moyen,
le tetrarche de Galilée,
10735 dont la seignoiie est foulée
et nous qui sommes ses subgis
en sommes pirement régis.
JEHAN BAPTISTE
Par quel moyen ?
ABIAS
La chose est clore,
qu'il tient la femme de sou frère
107i0 et luy a mallement ravye
par quoy jamès en nostre vie
n'avons espoir que bien nous vicngne
on son pays tant qu'il la tiengne,
ains nous va tout en empirant.
MANASSES
10745 C'est fait d'ung très mauvais tirant
10681 tout le cours C, — 10684 doulent radement B. G. — 10694 luy cuiday B. — 10697 le ouiilay B. — 107C0
puis plus C. — 10703 ny A. nen B. — 10721 auec vous chère mère B. C. — 10725 mes pour B. — 10745 desleal B- C.
s E C 0 N D K J 0 U R N K K
141
•
et de perverse conscience.
■ JEHAN BAPTISTE
Je liiy vois n'iiionstrer l'offence
avant qu'aultrc chose je face.
[Pose.]
: 10750
10755
10760
10765
I
I
Cher sii'c, Dieii vous doint sa grâce!
Je vien.s a vostie tiibunal
pour vous remonstrer aucun mal
ou vostro parsonno pi'etcnd
dont vostre peuple est mal content
et Dieu iircniier. V.t quant au point,
je dis qu'il iic t'appartient point
la femme a ton frère tenir.
Tu te veulx prince maintenir,
tetrarche et de justice chef,
et tendrois pour ung graiit meschef
s'ung do tes suhgès le faisoit :
ta justice l'en pugniroit
comme d'ung vice ort et infâme,
et toy doncques chef du royalme,
que noblesse doit introduyi-c,
en qui vertus doyvent reluyre
comme en l'or fait le dyanient,
ton frère n'aymes loyalment,
quand par- cautellc ambicieuse
luy as ravye son espeuzc :
tel cas n'est pas fraternité,
mes plus que bestialité.
Tu vois les oiselcs petis
qui eu soy ont cueurs si gentilz
que chacun se tient a son per
10775 sans l'aultre frauder ne ti'omper ;
et conmietz un tel adultère,
et encore contre ton frero :
ne sçay qui t'en peust excuser.
HERODK ANTIPA.S
Jehan, bien sçave/. proposer
10780 et s(;ay bien qu'entre vous, hermites,
tant de cerimonies dites
que chacun s'en pourra lasser.
(Jultre bien vous pouez i)asser
lie nioy proscher de cest att'aire ;
10785 s(;ay je pas bien que j"ay a faire ?
Ne me tenez plus ceste voyc,
car s'il convient que j'y pourvoyc,
jami-s n'en cschapcrez quitte.
JEHAN BAPTI.STE
11 me souffit que je m'acquitte,
10790 et i)OUi' moy acquittier te somme
que c'est fait d'ung désirai homme
do tenir celle que tu tiens,
et fais grant villenie aux tiens,
non pas seulement vilenie,
10795 mes advoutrie et tii-annic
ou il n'a voye de raison.
HERODE
Jehan, passé longue saison,
j'ay souslcnu en mon courage
que vous estes saint homme et sage,
losoo et faisiez ])our les simples gens
beaucop de beaux ensoignemeus,
mes je vous voy trop avancer ;
vous pensez sans contrepenser
devant qui vous couchez vos dis.
.lEHAN BAPTISTE
10805 Je t'ay dit et encor te ditz
qu'il te vient d'ung mauvais vouloir
de frauder ton frère et vouloir
tenir sa femme devers toy :
mauvais homme, prens y chastoy,
10810 reparc l'ofTence et luy rendz,
et a ton père exempld prens
qui a sy pute fin parvint
par la cnidelité qu'il tint
et garde qu'ainsi ne t'en prende.
HERODIADE, la femme.
Il n'est pas doubte qu'il se rende :
il dist tousjours de pis en pis.
Ësbahir assés ne me puis
de telz vielz bigos réputés,
comment ainsi les escoutcz :
il rassote a ce que je vois :
il a tant jeune en ce bois
qu'il n'a en Soy fil de cervelle.
JEHAN BAPTISTB
0 pei-verse femme et cruelle,
faulce serpente venimeuse,
10825 tortue mordant et hideuse,
pal' toy es ainsi séparée
et mourras de mort maleuree,
se bricfmcnt tu n'en fais départ.
HERODIADE
Hahay ! ce meschant papelart
10830 nous rompcra ineshuy la teste.
10815
10820
107',3 frère H. — 10755 Te dis quil ne loyst B. te fault point C. — 10765 noblesse doit R. justice C. — 10766 fait
miiifiw A.— 10767 nest pas vravanient B. Krero nés pas ne vrayamenl C— 10772 ojsillons B. C— 10796 il maiv)ur
A. _ 1080'. toucliiez C. — lOSOS" encore dis H. — 10Ï09 prens ung B. C. — :0!>3;î <> penierse tortue uiortelle \. —
10825 Cciuleuure .\. h.njdeuse A.
142
MISTERE DE LA PASSIOX
HERODE
Grongnait.
GRONGNART
Hola!
HERODE
Quelle orde beste !
c'est bien respondu a l'honneur,
n'est pas ?
GRONGNART
Que vous plest, monseigneur ?
Pardonnez moi, car ma narine
10835 estoit au pot a la cuisine :
si ne vous entcndoye point.
HERODE
Empoigne moy par son pourpoint
ce prescheur et le mctz en chartre.
GRONGNART
Il n'y fault mandement ne chartre :
10S40 il vous sera fait volentier ;
passez avant, frère Gaultier,
vous arez sanglante sepmaine ;
entrez la.
JEHAN liAPTlSTE
Majesté haultaine,
en ta garde me recommandz.
GRONGNART
10845 J'ay bien accomply vos commandz,
l'ermitte n'a garde d'issir.
HERODIADE '
Il est très bien a mon plaisir :
face hardiment bonne cliiere,
car se j'y sçay trouver maniera,
10850 il mourra de mauvaise mort.
[Pose.]
JHESUS
Déporter me veil jusqu'au port
dessus la mer de Galilée
et prescher par toute contrée
le règne de Dieu sans cesser :
10855 c'est le temps qu'il me fault penser
de faire cougrcgacion
de gen ^ de bonne intencion
qui mes disciples veuillent eslre,
affin qu'en la vie terrestre
10860 ilz me soient coadjuteurs,
vrais prescheurs et informateurs
du fait de ma ueufve doctrine ;
et pourtant, ma mère bénigne,
a vostre congé me dépars.
NOSTRE DAME
10865 Vostre vouloir en toutes pars
me plest bien, mon filz débonnaire.
s. PIERRE
Andry frère, il nous fault retraire
a la nave, si pescherons
quelque chose dont nous arons
10870 pour soustenir la povre vie.
s. ANDRY
Pierre frère, pas n'y obvie ;
je vouldray pescher avec vous,
le temps est gracieulx et doulx ;
se nostre roix est attournee
10875 nous gaignerons nostre journée,
se Dieu nous laisse consomcr.
s. PIERRE
Or gettons la roix en la mer.
Andry frère, entendez de la.
JHESUS
Enffans, que besongnez vous la
10880 maintenant de si grans façons ?
s. PIERRE
Sire, mon frère et moy peschons ;
povres gens sommes de mestier,
mais nous laborous volentier
pour gaigner ce dont nous vivons.
JHESUS
10885 Laissez ces operacions,
suyTez moy, soiez diligens :
je vous feray pcscheurs de gens,-
en lieu de pescher les poissons,
par belles predicacions
10890 et loyaulx admonestemens.
s. ANDRY
Sire, par les beaidx documens
qui de vous procèdent et ysseiit
nos cueurs a vous se convertissent
et laissons tcut pour vous servir,
s. PIERRE
10805 Je ne veil aultre desservir
pour riens qui m'en sache empcscller.
10S55 ou pot de la B. C. — 10S50 ssnglante mort C. — 10860 conduitteurs C. — 10867 Les nams des apôtres
Sont irrégutiri-emeiU précédés dans A. B. du, mot Saint. — 10874 raiz A. — 10S75 bonne journée B; — 10891 endoc-
trinemens C^ — 10805 JaiiiaU no \ucil autre seruir B, G,
SECONDE JOURNEE
143
s. JAQUES ZEOEUEY
Jehan, il nous convient pescher
ccste nuit, su lo temps Tadonne,
mes uostre roix n'est pas trop bonne,
10900 elle est ou plusieurs lieux deffaicte.
s. JEHAN, Vevangcliste.
Il fauldra qu'elle soit reffaictc,
mon frère, un tantôt par dessoubz,
et vcez cy mon père avec nous
qui nous aydera, si luy plest.
ïEBEOEUS, le père.
10005 Ouy, mes cnfïïms, je suis prcst
et est bieu raison que j'en songnc :
or nous mettons tous en besongne,
et chacun y ticngne la main.
JHESUS
Amis, ne faictes mes l'cmain
10910 au mestier que pour l'heure avez :
venez vous en et me suyvez :
je vous désire moult ensemble.
s. JEHAN
Jaques frère, que vous en samble ?
j'ay mon cueur tant enluminé
15 'que je suis tout déterminé
de suivir ce bonoist prophète.
s. JAQUES ZEHEDEY
La conclusion eu est faicte,
je feray comme vous fereï.
ZEBEDEUS
Comment donc, vous me laisserez,
820 enffans. pour suir ung estrangc ?
s. JEHAN
Il nous convient passer ce change ;
père, prenez en pacience,
car nous tenons en conscience
qu'en ce gist nostre sauvemeut.
ZEllEDELS
1925 Je requicr le Dieu qui ne ment,
mes chers enffans, que sa doctrine
vous poite a l'ame médecine
tant que vostre salut s'y face.
B. PHËLlt'E
Tandis que j'ay temps et espacç,
830 a la mer m'en vois bcsongner ;
si me fault penser de gaigner
pour ma maignco entictenir.
JHESUS
Amy, vouldras tu point venir
0 moy et estre de ma sorte ?
8. PHELIPE
10935 Sire, a vosti-c vcil m'en rap|>oite
et m'offre a vous faire service
leal, s'il est riens que je puisse.
Par mon nom l'helipe me nomme ;
non obstant que je suis simple homme,
10940 j'en feray ma povre puissance.
JHESUS
Amy, de moy suir l'avance,
laisse ces oeuvres terriennes,
tu verras les celestiennes
qui plus te pourront pourfiter.
s. BERTHELE.MY
109'i5 Puisqu'il vous ptet moy inviter,
sire, vostre suis sans contrainte ;
vostre renommée est tant saincte
que c'est tout bien.
s. PIERRE
Bertheleiny,
bien viengnez vous, mon cher amy,
10950 en nostre simple compaignie !
JHESi:S
Par ainsi croist nostre niaignic
et nostre colegc simplet,
mes encore n'est pas complet
le nombre que nous roquerons.
s. JEHAN
10955 Vostre plaisir faire querons,
sire, sans jamais départir.
s. THOMAS
Il sera grant temps do partir
l)Our aller ma nef apprester,
tandis que le temps veult rester
10960 et tourner en tranquillité.
JHESUS
Thomas, homme de charité,
laisse de tout point ton manoir,
avec moy t'en viens remanoir :
de tout bien seras eurichy.
s. THOMAS
lOOœ Saint homme, la vostre merci,
moult volentier vous os parler ;
et a moy ainsi appeler
10900 enseigne B. — 10912 auoir 1!,
'— 10903 Et auec.i... in.iiioir B. C.
1093'i A moy H. — 1003S je me A. - 10958 iiaue B. C. — 10064 to A.
144
MISTERE DE LA PASSION
me faictes honneur grandement :
je laisse tout cntioreraent
10970 pour vous suivir a tousjours mes.
JHESUS
Et vous deux ne restez jamès
en la vie que vous tenez :
nostre compaignie prenez ;
si vendrez a perfection.
s. SIMON
10975 C'est toute nostre intoncion,
sire, d'estre o vous habitans :
Simon suis nommé de long temps ;
et veez cy Judas Xclotés,
mon frère, a qui honneur portez
10980 de nous evocquer en ce point.
s. JUDE
Nous ne vous délaisserons point,
sire, pour purger nos meffais,
car chacun parle des haulx fais
qui viennent de vostre parsonne.
JHESUS
10985 Ma volenté veult et ordonne,
frères, que d'icy nous partons,
et la parole Dieu portons
par devers toute créature
pour ramener a leur nature
10990 tous povres pescheurs desvoyés,
affin qu'ils soient ravoyés
a la vérité, vie et voyo
qui de sa grâce les pourvoye
par pitié et compassion.
s. MATHIEU, changeur, publicanus.
10995 Je prens grant occupacion
d'assortir monnoies pluscurs ;
nous, publicans et colecteurs
des tribus et des maies taultes,
pouons commettre moult do faultes
11000 devers l'empereur des Romains,
qu'en tant de lieulx mettons les main.'-
que le peuple en est molesté.
Or ça, qui se sent endebté
de tribus, de drois et do restes,
11005 viengne paier, j'ay les mains prestes :
tout prens, je ne refuse riens.
JHESUS
Délaisse tout et si t'en viens :
suis moy et tu feras que sage.
s. MATHIEU
Mon cher seigneur, aussi fera je ;
11010 quanque je tiens, je laisse et donne
aux povres pour Dieu en aulmone :
jamès ne m'en veil entremetre ;
me suffit que soiez mon maistre
ne jamès ne veil aultre avoir.
JHESUS
11015 S'en pourras le trésor avoir
qui jamès ne deffinera.
JUDAS SCARIOTH
Ne sçay se Dieu me danipnera
avec le mauldit Sathanas,
et ma vie m'abrégera
11020 par mort villaine, veu mon cas ;
Je suis le malheureux Judas
en qui tant de mal se contient
que je m'esbahys hault et ))as
comme la tei'i'C me soustient.
11025 Je suis le pire et plus infâme
qui soit n'en ville n'en royalmc
et l'homme plus mal fortuné :
La terre m'ai'gue et diffame,
le ciel encontre moy proclame
11030 comme ung meurtrier habandonné.
0 pervers cueur infortuné,
en tout mal commetre obstiné,
quand en toy recongnois tel blasme,
mauldis mille fois corps et ame
11035 et l'heure quand oncques fus né.
A la dame de beau maintien
qui oncques me fit plus de bien
et me nourrist de ma jeunesse,
j'euz en mon faulx cueur hardiesse
11040 que de tuer son propre filz.
0 mauvais meurtrier, que mal fis !
Par les ditz
que tu dis
trop hardis,
11015 tu rendis
mal pour grant bonté.
Et l'empris
ou pourpris
ou tu pris
11050 los et pris.
10971 narre.-itiiz C. — 1097-4 Se H. — 10979 A qui grant amistio portez B. C. — 11007 Laisse B. Mathieu lai.sse C. -
11010 Tant que .\. — 11018 malheure B. — 11022 maintient B. C. — 11032 Le vert se réditit au seul mol obsti^^
B. — 11039 en mon cueur tel C.
SECONDE JOURNEE
145
paix et chanté.
S'en cuft'or en es député
et des grans deablcs emporté,
en la fin ce sera liion pris.
H055 Nouveau dueil, nouveau vitupère,
nouvelle rage composée !
puis cella j'ay tué mon pero
et ma propre merc espousce ;
mes ma coulpe eu ( st excusée
11060 quant au ilomourant,
car vray ignorant
ay fait ce trespas ;
mes pourtant ne s'ensuit il pas
que ceste malédiction
11065 ne se retourne pas a pas
a mon dueil et confusion.
Suis je de tout bien interdit,
suis je des hommes plus raauldit,
suis je né pour toute misère ?
11070 au fort aller, je considère
par quel moyen je tourneray ;
jamès je ne sejourneray
tant que Jhesus aye trouvé
et luy mon fait tout approuvé :
11075 car s'il est par sens et par voye
que de sa compaignie soye,
mes poché» me seront remis.
s. JAQUES AM'HEV
Trop longuement ay icy mis
que je n'ay faicte diligence
11080 de quérir la sainte présence
de Jhesus par aucuns moyens :
chacun dit qu'il fait tant de biens
que tout le peuple s'en adniende.
Sans ce que jamcs (ilus attende,
11085 je vois voir se le trouvcray,
et de ses disciples seray
s'il est que j'y puisse advenir.
JHESUS
Mon amy, veux tu |)urvenir
au règne du ciel glorieux ?
s. .I.VQIES AI.PHEV
[ llosio Sire, je ne roquier pas mieulx :
j'y submetz ma volenté toute.
JHEijUS
Or me suis donc, et riens ne doubte,
car tu vendras a ton désir.
JUDAS
Sire, se c'est vostro plaisir,
uoas volentiere des vostrcs scroio
et humblement vous sei-viroye,
se mon service vous plaisoit.
Le pire suis, je croy, qui soit,
a tout mal suis condescendu,
11100 mes pour ce que j'ay entendu
que des povres pescheurs avez
mercy et que les recevez,
je viens demander vostre grâce.
JHESUS
C'est raison que je te la face
11105 puisque tu te veulx adraender :
pense des commandz Dieu garder
et tu aras misei'icorde.
Et des maintenant je t'acorde
que tu soies nostre bouraier
11110 mesouen et le despensier
de tout ce qu'on nous donnera :
tretout par tes mains passera,
fay prudommement ton devoir.
JUDAS
Mon cher raaistre, sachez de voir
11115 que vous me trouverez leal.
JHF.SIS
l'uisque j'ay le nombre total
des apostrcs que je vouloie,
retourner vouldray droite voye
en Nazareth pour visiter
11120 ma mère et mes gens conforter,
qui mon absence plaignent moût.
s. PIERRE
Sire, nous vous suyvrons par tout
ou que vous prenez vostre adresse.
Icy s'en retourne vers Nostre Dame
AtilUSSTI.N
Mai'ic, devers vous m'adresse,
111Ï5 pour vous dire que vous allez
aux nopccs, et pas n'y faille/,
dont nagueres estes priée.
NOSTKE DAME
Et quand ?
11065 par compas 11. C. - 11074 Et dit mon luit lovit ri-prouue (.'. — 11(1^3 moult de pcupl.- I!. C. - 1H13 pruden-
Icmoiit B.
Pas.
10
146
MISTERE DE LA PASSION
AGRESTIN
Demain est la journée ;
et s'il chct que Jhesus retourne,
11130 et a vostre traveil ne tourne,
vous luy pourrez signifier
que l'esiiouzé le fait prier,
luy et tous ses gens ensement.
NOSTRE DAME
Je luy diray certainement :
11135 veez le cy ou il Tient de tire,
vous mesmes luy pouez bien dire :
s'acheverez tout d'une voye.
AGRESTIN
Sire, le grand Dieu vous avoye !
Vostre bon amy et voisin
11140 vous supplie de cueur affin
qu'a ses nopces soiez présent,
car je sçay bien qu'il n'est présent
dont il puist estre plus joyculx.
JHESUS
Mon ami, soiez curieulx
11145 de dire au sire sans remaiu
qu'a la journée de demain
très volentiers nous serons la.
AGRESTIN
Il m'estoit dit avec cela
que tous vos disciples y feussent,
11150 car moult volentiers les y eussent
le sire et la dame de pris.
JHESUS
Tous ensemble y seront compris
en ceste journée ensuyvant.
AGRESTIN
Et je m'en voy tousjours devant
11155 pour anoncer vostre venue.
Seigneurs, a ma bien revenue
de fournir viandes pensez,
car vous arez des gens assés
se ceulx qui sont priés y viennent.
LE SEIGNEUR DES NOPCES
1U60 Mes que les choses s'entretiennent
nous avons provision haulto ;
si ne craiiigz point qu'il y ait faulte :
nous avons nietz de toutes guises.
REMISSE, servant.
Toutes les tables sont ja mises
H165 et les nappes bien cstandues.
salles parées et tandues :
il n'y a plus que besongner.
RESPICE, deuxième servant.
11 y ara bien a manger
et de nouveaulx et divers mes.
REMISSE
111/0 Respice ne songnc jaincs
et n'a le cueur qu'a la cuisine,
c'est son fait.
RESPICE
La suis je bien digne
de dancer au son d'une broche.
JHESUS
Chère mère, le temps approche
11173 qu'il nous convient aux nopces rendi-e,
affin que ne façons attendre
la conipaignie qui sera.
Partons nous ?
NOSTRE DAME
Quand il vous plaira,
mon filz ; il est maintenant heure.
AGRESTIN
11180 Sus ! seigneui's ; ame ne demeure,
que chacun se siée ou il veult,
chacun prengae place qui peust,
raetez vous cy cinq et cy six.
REMISSE
Voire, car les premiers assis
11185 ont tousjours les plus gras lopins,
et s'il y a point de bons vins
ilz en sont les premiers servis.
ARCHEDECLIN
Sans faire foison de devis
je prendray icy mon about.
JHESUS
H190 Paix soit en ccst ostcl par tout
et a tous ceulx qui dans habitent 1
LE SEIGNEUR DES NOPCES
Je requier a tous qu'ilz s'acquitent
a faire chère plantureuse.
11132 le sire lî. C. - 11134 diligemment B. C. — 11138 vous dointjoye B. —11145 Dictes au seigneur B. - 11147
serons ila B. — 1HSS3-11233 manquent C. feuillel décliiré, - 11160 L'es}>ouzé A - 11175 cliies Icspeux E. - H188
Tantôt archedeclin, tantôt l'arcliedelin B,
SECONDE JOURNEE
147
NOSTKE DAMK
Damo gracieuse,
11105 (jui estes es|ieu/.e
pour ce joyeux joui',
au rogne majeur
sciez boueureuse,
dame gracieuse.
i.'kspousee
11200 Estraiiie joieuse,
vie vertueuse,
Marie, m'aniour,
ayez par honnour,
sans vie ennuyeuse
11805 ostraine joyeuse.
AGREsTlN
Vous serez cy cniprès l'espeuze,
danio, pour duyi'e son maintien
car de sens, d'honneur et de bien,
sçavez plus que fanie qui vive.
NOSTHE DAME
11210 A vostro vouloir pas n'estrive,
j'obciray a vostre vucil,
mes avant tout oeuvre je voil
que .lliesus s'assisc a la foste.
LE SEIGNEUR DES NOPCES
Veez cy sa place toute preste,
11215 assés près de vous, chero dame.
Icy s'assiet chacun a table.
«ESPIGE
Or, messeigneurs, qu'il n'y ait amc
qui ne pense de soy gorger :
faictes moy ces pos descharger,
depcschez le premier venant.
REMISSE
11220 Pour faire ces barlies nager,
faictes moy ces pos descharger.
AGRESTIN
Kt se vous avez a manger
peu, buvez bien a l'avenant.
IIESPICE
Faictes moy ces pos descharger,
112;5 depeschcz le premier venant.
AUCHEDECLIN
Nous sommes très bien maintenant
en paix et aise, Dieu mercy.
RESPICK
Je croy qu'il fait meilleur icy
qu'il ne fait aller peller l'orme.
REMISSE
11230 s'il y a homme qui s'endorme.
jo luy soufHcrny la cliandclle.
ARCHEDROLIN
La compaignic est l)unnc et belle
et bien assemblée a propos.
AOUESTIN
Vcez cy tros mauvaise nouvelle,
U235 il n'y a plus de vin es pu» :
ces coquars sont cy a repot*
a jouer de la chalcmelle,
et par leur meschante querelle
le vin fault ; sont ilz pas bien sos ?
REMISSE
11240 Veez cy très mauvaise nouvelle
et grevablo pour les supos.
LE SEIGNEUp DES NOPCES
Que vous faut il ?
REPPICE
La faulte est telle :
il n'y a plus de vin es pos,
et qui pis est, pour remplir bros,
11245 n'avons point taverne prochaine.
ARCHEDECLIN
Nous sommes icy a grand peine
de soif, qui ne nous secourra.
NOSTRE DAME /
/ Mon filz, grand esclandre encourra y
/ l'espeux, si vous n'y pourveez ;
11250| son vin lui fault, vous le veez :
J pour Dieu, saulvcz luy cest ennoy.
JHESUS
Femme, que te touche il n'a moy
se la deffaulte est survenue ?
mon heure n'est myc venue
11255 de monstrer mes fais vertueux.
NOSTRE DAME
Servans, approchez vous tous deux
et la besongno amendera ;
ce que Jhesus connnandera
accomplissez le vistement.
REMISSE
11260 Die ce qu'il veult hardiment,
et nous l'accomplirons bonne erre.
JHESUS
Prenez moy ces cruches de pierre
et d'eau clore jusques au bort
les emplissez.
RESPICE
Je suis d'accord :
11265 Remisse, porto ceste paire.
Mon jo m'apense qu'il veult faire
11219 le maii'iur 1!. - 11222 Se vous aueï peu H. — 11223 Se buueï B.— 11225 Les vers 11217, 11218, 11219 sont répétés
ici B.— 11227 Et iiaix A. B.— 11239 folz B.— 11242 te faut il B. C. la chose A.— 11243 Qui' B. G.— 11244 bros] broches B.—
11247 seul' A. — 1124S sera A. — 11257 Ojez ce que len vous dira B. C. — 11861 nous maniur A. — 11202 de terre A-
148 M I S T E R E
do cestc eau clere.
REMIS.SE
Je ne s^ay.
RESPICE
La veult il baillier pour essay
pour eschauffer leur appétit?
11270 le bruvage est par trop petit,
il ne plest point a bons grommés.
REMISSE
L'envoiroit il quérir jamès
pour aller brasser du bouillon ?
HESPICE
11 souffit que nous lui baillion,
112/5 puis en face brouet et souppes;
y mouille qui vouldra ses souppes :
mes se j'en boy je puisse estrc ars.
REMISSE
C'est bruvage pour les canars,
non pas pour gentilz compaignons.
RESPICE
11Ï80 Tenez, sire, nous apportons
de l'eauc assés a grant foison ;
disposez en selonc raison
ce qui vous sanible pour le mieulx.
Jhesus benist l'eaue et puis dit :
JHESUS
Pour louer les fais vertueulx
11285 de mon perc le roy divin,
ccste eaue icy deviengne vin.
Amis, versez du vin par tout
et premier a vostre chemin
portez en a Archedeclin
11290 qui fait la dessus son about.
Jcy boit Arcliedeclin, puis dit :
ARCHEDECLIN
Veez cy ung vin de très bon goût,
le meilleur et plus agoutans
qu'oncques je goutay on nul temps :
oncques meilleur vin ne fut beu.
11295 Sii-e des nopces, j'ay argu
d'ung point ou je vous voy enclin.
LE SEIGNEUR DES NOPCES
Or dictes, sire Archedeclin,
tout ce que sur le cueur avez.
ARCHEDECLIN
Tout au couti'aire nous servez
11300 que los maistios d'hotol si font:
' en ce pays coustumiei's sont
de servir quand vient l'asseoir
DE LA PASSION
du meilleur vin qu'on puist avoir,
tant qu'iceulx soient onyvrés ;
li;,Oô après sont ser^'is et livrés
du pire, et par voye soubtivc
se frustre la judicativo
do ceulx qui Ixtyvent largement ;
mais vous faictes tout aultrement,
11310 car petit vin meistes premier,
et vecz si bon le dcinier
qu'il n'est point de meilleur bejisson.
LE .SEIGNEUR DES NOPCES
Je n'entendz point ceste fasson;
mes d'où pcust ce bon vin vciiii"?
RE.MISSE
11315 Sire, j 'ose bien soustonir
que Jhesus qui la sict a table
a en soy vertu mei'veillable
par dessus toute créature,
car certes il a fait d'eau pure
11320 le propre vin que vous buvez.
ARCHEDECLIN
Est il vray ?
RESPICE
Ja n'e'n ostrivez,
il est tel que le vous tesmongne,
car a jiarfaire la besongne
nous deux avons teiute l'eau quise.
LE SEIGNEUR DES NOPCES
11325 La chose est haultaine et exquise
et ne se peust faire tel signe
se n'est par puissance divine,
dont je le croy vray possesseur.
ARCHEDECLIN
Loué soit Dieu nostre seigneur,
11330 qui telz fais nous veult départir.
JHESUS
Mes frères, temps est de partir,
puisque la festo est defi'aillie.
LE SEIGNEUR DES NOPCES
Jhesus, humblement vous mercie
de vostre visitacion.
Se partent.
s. PlEUnE
11335 0 inaistre, grant perfection
gist en vous, vos oeuvres l'aiipiviivout
11267 clere manque A. B. C. — Hï7) fçueres ]i. C. — 11273-0 maiiqwnl A. — 11Î84, 11285 et 112SG monr/ueni
lî. C. — H2S7 en plusieurs lieux li. C. — H2S9 Portez deuant li. C. — 1129D Kt quil en dye son entente B. C. —
H291 liqueur ires excellente B. G.— 11297 De quel point B. C. — 11298 Dictes ce que sur cueur B. C. — 11299 a
lass5oir C. — 11305-6 Kt lors sert nen du pire après Car par ceste B. C. — 11307 ladju<licaliuo B. — 11309 Et .\. —
11315 maintenir B. — 11316 vosire comensable B. C. — 11317 vertuable -V.
SECONDE JOURNEE
IW
et ostic fil/- Jft Dieu vous preuveiit :
et nous le croyons cstro ainsi.
JHKSUS
Mes fi-ert's, pmlons nous cl 'ii'v :
»3*0 en Judée nous fault veitir
pour le iicuplo Uicu convertir
<t l)apti/,er tous vrais pruffé»
qui sont rcponlans et couffcs
do Icui's luaulx et iuiqidti's.
s. ANDRY
[ UMj Sire, nous souuues approstés
de vous suivir en tout(^ place.
JHESLS
Chère niere, par vostre graeo
en ceste cité vous tendrez
et nostre retour attendrez.
1 11350 11 n'est janiès temps que je reste,
ainçois me dispose et apiireste
d'anoncer par noble niistcro
la parole de Dieu, mon père,
car pour ce suis je né au monde.
NOSTRE DAME
\ii35ô Mon filz et ma joye féconde,
vostre volenté en soit faicte :
lors de tout bien seray reffaitte
quand vostre retour se fera.
JHE8US
Mes frère» chiei's,
la haulte fcste solennelle
11375 de Fasqucs qui est annuelle
aux Juifz et de grant memore
approchera en bi iof tempère :
nu temple donc nous en irons,
et la le peuple i nseiffiierons
ll3,so chose dont il puist mieuls valoir.
s. JEHAN
Nous sommes a vostre vouloir,
si no (levons pas contredire.
le;/ rient Jhesus et fait comme xing souffle-
ment de la bouche, et lors toutes tes tables
des vendeurs cheenl et treslntchent hors du
temple.
CELSIDOX
Vecy bien poui enrager d'ire,
a brief dire,
11385 mes qui nous fait cest eneombrier?
RABANUS
Tous nos estaulx sont chcus a tire ;
qui les tire ?
Vecy bien pour enrager d'ire,
a brief dire.
CELSIDON
11390 Je n'ay boiste ne tirelire,
seau ne cire
qu'il ne m'aist tout fallu vuidier.
EKIILIVS
Vecy bien pour enrager d'ire,
a brief dire ;
llROTi mes qui nous fait cest eneombrier?
JHESUS
Pas ne deussi-cz appi'oprier
ce lieu a marchandise rendre :
allez ailleurs vos coulons vendre
et de la maison honorée
ll'iOO qui a mon pei-e est préparée
n'en falotes pas vostre marché.
Se l'escripture avez serché,
il est escript que ma maison
se nomme maison d'oroison,
lUOj et vous la faictes de rancune.
RABANirS
Donnez au moins raison aucune
en quel signe et signifianco
vous usez de ceste puissance :
si prendront les aullres exemple.
jHEsrs
liuo Quel signe? Deffaictcs ce temple,
U339 nous maruiue A. — 11340 partir B. — 1135ï-ll'i45 manquent C. feuillet déf-hirè. — 11398 ces roulons B.
— 11403 ma manque A. — 11405 trop i-ommune B. — 11407 Ou B
Ici/ doit estre a l'entrée du t<.mple foison
de changeurs et vendeurs.
EMiLius, tendeur d'oiseaux.
Nostre vente s'approchera,
[ll360 Gelsidon, se peuple s'assamble,
et a mon advis il me samble
qnc nous ferons nostre pourfit.
CELSinoN, mercier.
Voisin, je suis tout desconflit
conunent fortune m'est tournée,
[ 11365 car je ne feiz l'aultre journée
comme riens de ma marchandise.
RABANUS, changeur.
Nous avons bonne mancndise
en ce temiilo cy tout ouvert :
au moins sommes nous a couvert
[ 11370 et n'avons garde de la pluye.
Ça. qui ve\ilt changer si le dyj :
je le fourniiay de deniers
s'il a de l'or.
150
MISTER E DE LA PASSION
et par puissance je feray
qu'eu trois jours le redifieray :
ce ne sont pas vertus petites.
EMILIUS
Comment grans merveilles vous dictes !
H415 Par nos prédécesseurs savon
que le puissant roy Salomon
mist quarente six ans a faire
ce temple, et tu le veulx reffaire
en trois jours ! ce seroit trop fort.
CELSIDON
H420 Qui Youldra croire mon raport,
nous nous en irons vous et raoy
devers les princes de la loy
de ceste offence murmurer,
car se cest homme peust durer,
H425 la loy sera tout abolye.
UABANUS
11 fault prévenir sa folye
soubtillement, car plusieurs l'ayment
et pour saint prophète le claiment,
qui peust estre le porteroient
il430 et forse le revangcroient
s'il estoit pour mort convenu.
NICODEMUS
Puisque le soir m'est survenu
et la nuit m'est assez obscure,
vers Jhesus m'en vois bonne allure
H435 pour sçavoir que c'est de son fait :
chacun dist que merveilles fait,
tant est en puissance haultain.
[Pose.]
Maistre, nous sçavons de certain
que tu es venu pour pécheurs
11440 de Dieu propre et non pas d'aillieurs,
car homme ne sçaroit parfaire^
les signes que te voyon.s faire,
se Dieu n' estoit avecques ly.
JHESUS
Mon amy, tu n'as pas failly :
■{1445 prudentemcnt couche tes ditz,
mes certainement je te dis :
qui ne sera de nouveau né.
quoi qu'il ait bien fait no pené,
le règne Dieu ne pourra voir.
NICODEMUS
11450 Voicy ung fort point a savoir :
comment peust naistre un homme ancien ?
est il possible qu'au gré sien
dedans les flans de sa mère entre
et naisse encore de son ventre ?
11455 ce chemin ne samblc pas ferme.
JHESUS
Encore te dis je et afferme :
qui régénéré ne sera
de l'eaue qui le lavera
en la vertu du saint Esprit,
11460 au livre de vie est escript
que jamès le haultain royalme
ne verra en corps ne en ame;
qui de char est, char se dénomme,
qui de l'esprit, esprit se nomme,
114© et doncques ce renaissement
s'entend espiritualment :
donc mon dit ne dois admirer,
qui vous semont régénérer.
Le saint Esprit franchement peust
11470 aspirer en tel lieu qu'il veult,
et os sa voix, mes tu ne s ces
d'où il vient n'ou sont ses accès ; '
tu as les escriptures faictes
ou par la bouche des prophètes
11475 le saint Esprist parler convient,
mes du principe dont il vient
n'a quel fin celuy sermon tend
en ton sçavoir pas ne s'extend ;
tu vois aussi un mortel corps
11480 clerement laver par dehors,
mes au lavement plus parfait,
qui par grâce en l'eaue se fait,
ton sens ne se peust pas estendre.
NICODEMUS
Cher maistre, je ne sçay entendre
11483 le moyen de vostre argument;
est il bien possible ?
JHESUS
Comment !
tu es en Israël docteur,
prince de la loi et ducteur
qui doit sçavoir les esciiptures :
11490 dis je paroles si obscures
que tu les deusses ignorer ?
et premier dois considérer
11414 nous B. — 11415 Que nos B. — 11430 forsan A. — 11431 conuaincu B. — 11439 aux pécheurs B. — 11443
mis auec B. — 11448 Combien quil ait pour son salut pêne B. G. — 11457 regenepay A. — 11458 Deaue C. — 11465
regenerement B. C. — H4T0 Espirer B. — 11478 sentend B. — 11481 Mes du A. B. C. — 11482 par ce B. en |lame B
coiunio tu a« dit par dessus
que de Dieu viens et suis yssus,
1U95 par quoy tu peulx dire pour vray
que je parle ce qu(! je sçay
et tosnioiigu(^ ce que i'ay veu ;
iicantnioins vous n'avez pas rcceu
le tesmoiignage que je porte,
iirjOO et se je vous presche et exhorte
d'aucun ouvrage terrien
et de celluy ne croyez rien,
tant soit il évident et cler,
se je voulloye rcvcller
1)505 les haulx secrés celestiaux
qui sont bien plus especiaux,
connue y ariez vous credcnce ?
encor dis je ceste sentence,
qu'homme mortel n'est de soy digne
H510 de monter en gloire divine,
fors seulement le filz de l'honnae
qui est au ciel de droite somme ;
et pour ce qu'il n'est créature
qui le ciel ait do sa nature,
H 51 5 ce baptesnic porte efficace
que l'homme l'acquière par grâce,
posé que nature luy nye ;
et affin que soit accomplye
grâce dont le ciel est concquis,
11520 ung aultre point est cy requis :
car connue Moyse exaussa
le serpent d'airain et haussa,
voyant tout le peuple, au désert,
affin que du venin couvert
des serpens no feussent periz,
aussi fault pour aultrcs perilz
que le fdz de l'homme elçvé
soit en l'arhre mat et grevé,
affin que tous ses l'egardans
des serpens soubtilz et mordans
soient délivrés et sanés,
et fuiablement admenés
au reppos de vie éternelle.
NICODEMUS
Maistrc, vostrc doctrine est belle,
111535 pour quoy a elle me souhmos
et l'entreteudrez desormès
selonc ma possibilité.
JHESUS
Kreres, il est nécessité
qu'en Galilée retournons.
s. PIERRE
l^lViO Sire, a vous seul nous adonnons.
SECONDE .lOTTRNER
cheminez quand il vous plaira.
151
11525
«530
RAA.B, la samaritaine.
Aller au puis me convendra
querro do l'eau pour mon mesnagc,
et ceste cruche en mon voyage
11545 porteray, qui tendra assés,
JHESUS
Frères, no>i» sommes moult lass<;s,
a moy reposer fort varie.
s. ANDRY
C'est la terre de Samarie
ou nous sommes venus a cop.
JHESUS
11550 Veez cy la fontaine Jacob :
au plus près me vouldray poser
pour mon coi'ps ung peu reposer.
Mes chers frères, vous irez tous
acheter des vivres pour nous
11555 dedans la cité de Sicliar,
et je demourray icy, car
.je ne puis cheminer de lasse.
S. JEHAN
Nous revendrons eu brief espace,
car la cité n'est gtieres loing.
JHESUS
11560 Femme, regarde mon besoing
et me donne de ce bruvage.
RAAB
Comment, sire? oe samble outrage,
de requerre, qui es Juifz,
moy qui Samaritaine suis
11565 pour boire, car tu es certains '
que Juifz et Samaritains
sont peuples divers et contraires
qui ne veuUent en leurs affaires
l'ung l'aultre de riens secourir.
JHESUS
11570 Ne t'esbahis du requérir :
se tu sceusses la vertu grande
de celuy qui te le demande,
forse comme femme soubtivo
luy eusses requis l'eaue vive,
11575 et elle te fust octroyée.
RAAB
Ce seroit chose desguisee
que ceste caue vive trouvisses ;
tu u'as dont espuisier la puisses,
car haidt est et parfont le puis.
11493 Comment H. C. - 11494 venus C. -11507 Comment B. G. areï A. D. - 1152» fault il C. -11516 fort A.- 115K
cycar B. rhichar C- 11503 toy qui A. - 11573 forsan A. force C. - 11577 truisses B. - 11579 Sest hault et bien B-
152
M I S T R R E D !•: LA PASSION
H58Û par quoy imaginer ne puis
dont elle te pourroit venir.
Te vouldrois tu plus g-rant tenir
que ne fut .lacob, nostre père,
le quel but de ceste eaue clere,
11585 ses enft'ans et ses bestes toutes?
et ne fait l'escripture doubles
que ce puis mesmes nous donna.
JHESUS
Geste eaue cy pas tel don n'a,
quand l'eu on boit, que le buvant
H590 n'aist aprt's soif comme devant,
après qu'elle ara fait son cours ;
mes celle durera tousjours
que je donne, et ja soif n'ara
cil qui de cueur la buvera,
H595 ains luy sera une fontaine
pour saillir en gloire haultaine
sans imperfections quelconques.
RAAR
Ha ! sire, donne la moy doncques,
si que la soif plus ne me tiengne
H600 et jamès a ce puis ne viengne
pour remplir cruche ne bary.
JHESUS
Va donc, si huche ton mary.
BAAB
De mary, sire, n'ay je point :
[il est de ce siècle finy].
JHESUS
11605 Tu dis très bien quant a co point.
Cinq maris as eu d'ung tenant
et cil que tu as maintenant
n'est pas tien, dont tu t'es meffaitte.
BAAB
Sire, je te tiens vray prophète,
H610 car impossible est de sçavoir
ce que de moy te vois sçavoir
se n'est par divine science,
et bien juge en ma conscience
que briefment Messias vendra,
H615 qui du tout nous anonccra,
ce qui nous sera pourfitable.
JHESUS
Ta credence est bien verjtablc,
et je suis celuy mesmenient
qui parle a toy présentement ;
11620 n'y mes jamès point de doubtance.
s. PHELlPE
Veez cy merveilleuse ordonnance:
n'est co pas nostre niaistre yla
qui parle a ceste femme la ?
mes soçons, regardez y bien.
s. JAQUES ZEBEDEY
11625 Oy, c'est il, ne dittes rien,
allons luy ces vivres porter.
RAAB
Jamès je ne veil arrester
tant que dedans la cité soyo,
et pour plus abréger la voye
116S0 et raconter ceste manière,
je lairray ma cruche derrière,
tant que je soye retournée.
s. PIERRE
Nous avons fait bonne journée,
cher maistre, veez cy a manger.
RAAB
U635 Mes seigneurs, venez sans targer
veoir ung homme de grand mérite
qui toute ma vie m'a ditte
et tant que j'ay fait en mon aage.
CASTOBIN
Ou est ce qu'il tient sou ménage?
11640 moult volentiors je le verray.
MICHEAS
Ce prophète qui est tant sage
ou est ce qu'il tient son ménage?
RAAB
Se vous ne croyez mon langage,
suyvez moy, je vous y menray.
CASTORIN
11645 Ou est ce qu'il tient son ménage?
moult volentiers je le verray,
et selon que je trouveray,
je trairay vers luy mon courage.
s. BERTHELEMY
Vous avez fait un grand voyage,
11650 maistre, et souffert grand passion :
* prenez ung peu reffection
pour vostre appétit conforter.
JHESUS
Frères, j'ay viande a goûter
dont vous n'estes pas advertis.
s. JAQUES ALPHEY
11655 Luy a quelque ame en ses partis
11590 soeuf A. — flOOl Dont sonnent oyle cueur marry B. C. — 11C04 monde A. Ce vers nous semble interpolé. —
11620 variancp U. C. — 11624-5 Mais regardez un petiot. J. OyI cest il ne sonnons mot B. C. — 11638 quanques C
SRCONDR JOURNEE
1.-3
adiiiiiiistro viaiiilo nucuno ?
8. JEHAN
Jp no S(;ny.
JHESUS
Viaiidfi coinmuno
avez vous tousjours corporcUo ?
iim viande cspirituello
liaco est qno la volcnti! i)arfaicte
(Ifi mon pore soit partout faicte
fit qu'a SCS oeuvres je m'employe.
lUAB
Vee/, cy l'honime dont je pavloyo ;
oez le parler, mes amis :
11065 Dieu en luy te! science a mis
qu'en son dit n'a que verit".
MICHEAS
Il est de grand auctorité
a ce que son semblant appo: te.
JHESUS
Je m'csjouys et me déporte
f 11670 d'ouvrer tout oeuvre vertuable
qu'a mon père sens agréable :
c'est la parole et le doulx vivre
do quoy j'appete plus a vivre.
No dit pas la commune voix
11675 qu'ilz sont encore quatre mois
jusques au temps de moissoimer,
qu'il fauldra son corps ordonner
a conçut illir les biens de terre ?
mes qui veult en son cueur conqucrro
11680 la moisson que plus mon père ame,
qui predicacion se clame,
elle est presto et assaisonnée
et on saison d'estre donnée ;
regardez aval et amont
11685 les cités qui ja blanches sont,
prestes pour moisson recevoir,
et cil qui fera son devoir
de les moissonner par sermons,
signes et prodicacions,
H690 en ara l)on loior on fin.
CASTORIN
C'est icy ung homme divin,
veu les boaulx parle\s qu'il nous somme.
MICHEAS
Bien le nous disoit ceste femme
qui nommer propliete le veult,
lioori mais son parler trop plus me meult,
car je voy de vray et m'y fonde '
que c'est cy le saulveur du monde,
qui vient pour nous donner secours.
JHESI'.S
Frères, adi'essons nostrc cours
11700 poui' aller en aultre contrée.
Y8MABL, prince de siiiayogue.
Sire, oez raoy, s'il vous agrée :
ma fille est a ce jour d'uy morte
dont mon cueur tout se desconfoi'te;
mes j'ay en vous parfait espoir,
11705 que s'il vous plest la venir voir
et nietre vostre main sur elle,
elle vivra.
JHESUS
A la pucelle
secours prochainement ferons :
allez devant, nous vous suivrons,
11710 nous serons illec maintenant.
YSMAEL
Veez cy le prophète venant,
mes amis, pour nous recouvrer.
KAUSTULUS, vartet.
Quel chose y pourra il ouvrer ?
la fille gist la toute roide
11715 et de fait est ja toute froide,
par quoy n'y a point de rei)it.
JHESUS
Dont estes vous sy desconffit ?
dont menez vous tel doleance ?
Yssez dehors sans demourance :
11720 la fille n'est pas trespassee,
mes tenez de forme pensée
qu'elle est seulement endormye.
FAUSTUI.LS
Je suis tout sceur que ne dort mye,
ou s'elle dort par tel sera
11725 que jamès n'en esveillera :
la conclusion on est faicto.
Et est ce cy ce saint prophète
que le peuple tant fort renomme ?
ce n'est pas parlé d'ung sage homme
11730 de juger de chose improveue
si en hasto sans l'avoir veye;
mes au fort vecz cy que je pense :
de fol juge briefve santence,
l'on le voit souvent advenir.
JHESUS
11735 Or me laissiez sa main tenir
11662 me ploie C. — 11675 Qui A. Quil soit B. — 11677 emploier A. — 11679 son man7i<« A. — 11684 a moult C.
— 11687-11804 m'Tnquenl C. feuillet déchiré. — 1169ïnous mnnque lî. — 11693 Plus ne me B. — 1172:! FaiurnlHS A.
— 11724 par si H. — 117S5 ne seueillera B. — 11729 de sape B. — 11730 impounieue B — 11731 et sans B.
154
MISTERE DE LA PASSION
affin que la puisse exciter.
FAUSTULUS
Il n'y fault ja tant caqueter :
riens n'y vauldra la médecine
après la mort.
JHESUS
Fille bénigne,
11740 je veil que mon vouloir achieves,
et que prestement tu te lieves
devant ceulx qui te vouldront voir.
LA. FILLE
0 très souverain presçavoir,
0 très puissante majesté
HT45 ou ay je esté?
Bon Dieu qu'on ne peust décevoir,
grand doulccur et bénignité
m'as présenté :
J'estoye en grand perplexité,
11750 or m"as fait grâce recevoir
pou;' mieulx avoir,
Vray Dieu, vi aye félicité ;
tu m'as la vie fait ravoir,
c'est noble avoir.
11755 Saint prophète, je vous mercio
de la bonté et courtoisie
Que m'avez fait
de cueur parfait ;
vous veil servir toute ma vie
11760 Et n'ay envye
d'estre asscrvye
a aultro par dit ne par fait.
KAUSTULUS
Je sens que mon corps s'est forfait
d'avoir du saint homme mesdit;
H7C5 maintenant croy je ce qu'il dit,
et si vray qu'il n'y a que dire.
YSMAEL
Vostre serf me rendz, très cher sire ;
et parce que vos oeuvres vois
je vous dénonce a haulte voix
11770 saulvcui' pour nostre deKvrance ;
et s'il est riens en ma puissance
qui a vostre vouloir s'adonne,
corps et biens, tout vous abandonne
et submetz a vostre plaisir.
JHESUS
11775 De tes richesses n'ay desii',
mes sers Dieu de toute ta force,
de le craindre et amer t'efforce,
et ton devoir me souffira.
Frères, partir nous couvendra
11780 et parfaire nostre voyage.
s. THOMAS
Nous sommes prestz de franc courage,
cher sire, quand il vous plaira.
YSMAEL
Qui plus esjouir me pourra,
dont puis je mener plus grant chère,
11785 que de vous ravoir fille chore
en planiere et bonne santé ?
LA FILLE
La parfaicte bénignité
du créateur en soit louée;
je ci'oy de volenté fermée
11790 que Jhesus le pretUcateur
est vi'ay saulveur et rédempteur
venu pour l'humaine nature.
JHESUS
Mes chers amis, il est droiture
que je pense de vostre affaire
11795 et vous die qu'il est a faire
affin que vous vous gouvernez
comme vrays filz de Dieu amés.
Et premier, tous en gênerai,
de vouloir franc et libéral,
11800 je vous donne puissance pleine
sur toute la tourbe villaine
des esperis de Dieu mauldis,
et veil qu'a vos fais et vos ditz
les deables dampnés obeyssent
11805 et hors des créatures yssent
a vostre vouloir plainement ;
et a parler sommierement,
sur tout mal legier ou grevain
que pourroit souffrir corps humain
11810 vertu vous ottroye, et si veil
que les sanez a vostre veil.
Par le monde vous en irez
et a haulte voix prescherez
que le hault royaulrae des cieulx
11815 approche pour jeunes et vieulx.
Visitez les maladis corps,
mondez lépreux, suscitez corps,
gettez deables hors créatures,
et veil que vos fais et vos cures
11820 ne vendez ne mettez a pris,
car pour néant les avez pris.
Ne pocessez riches parures,
trésors ne dorées saintures ;
mallete en voye ne portez.
11739 Elle est oultre B. — 11754 Ce B. — . 11756 courtoise A. — 11763 mesfoit B. corps maa'iue A. — 11765-6 que
ce quil dit Est si vray A. — IISOO command B. C. — 11807 tout seurement B. — 11817 lèpres B. lardres G. — 11818
horsl des B. C. — 11821 manriue B.
SECONDE JOURNEE
f55
H825 ne de\ix vcstonimis ii'nqucstez,
voigo 110 cliau(r<>iiicnl ou piez;
et est raison quo vous sachie/.
que tout l)on ouvrier mercenaire
est digne d'avoir son salaire.
11830 S(' par cas de nouvolcté,
venez on aucune cité,
logez vous en quelque manoir
ou dignement puissiez manoir,
et dites ce salut icy
11835 a l'entrer : Pax huic domtti .'
S'iiinsi est que tel maison doyvc
estre digne que jiaix reçoyve,
vostro paix sur elle vendra ;
se ce non, a vous revendra.
11S/|0 S'aucuns sont qui ne vous l'ecueillent
ne vos sermons oir ne vueillent,
yssez hors et vous en allez,
et la pouldro que vous pillez
scouez sur culx en tesmongnage
11845 do leur rudesse et fier courage.
Ainsi je vous envoie tous
comme brebis entre les loups ;
soiez dont sages et prudens
a la manière dos serpcns
11850 et simples comme les coulions,
tousjours begnins, non pas félons.
Les princes et juges des villes
vous enmenront en leurs concilies,
sinagogues ou tribunaulx
11855 ou [lar divers gendres de maulx
serez flagelos la dcdons,
et devant rois et presidens
serez menés sans espargner
pour eulx vérité tesmoignor ;
11860 et quand vous cuideront confondre,
ne sognez que devez respondre,
car l'on vous donrra a ceste heure
responce contre eulx forme et sceui'o,
et n'estes pas qui respondez,
In865 mes veil bien que vous l'entendez
que c'est l'esprit Dieu, vostro père,
qui vostre paiole modère.
Vous verrez guerres, pestilences,
divisions, giiefves offences,
(«870 frères trahir, frères livrer,
porc a mort son fils délivrer
et le père des filz occis.
Et ainsi vous serez havs
de tous le» hommes pour mon nom,
11875 mes qui, par feirno intcncion
jusqu'en fui pemeverera,
en gloire seurement ira.
S'une cité vous fait injure,
fuyez a l'aultre bonne alure,
11880 et faictcs ce que vous jwurrez,
car jamès ne consumerez
toutes les cités d'Israël
tant qu'en son jugement cruel
le filz de l'homme soit venu.
s. PIERRE
11885 Maistre, nous avons entendu
les enseignemens que nous dites,
et sans mettre aucunes redites,
pretz sommes de les acomplir.
JHESUS
Frères, il nous convient vertir
11890 devers ccstc cité prochaine.
LUCiNE, mère a Venffant mort.
Ha ! fortune, chose soubdaine,
plus variable et incertaine
que chose née.
Trop diversement t'es tournée
11895 devers la povre infortunée
qui plus n'attens
Que la mort me perse tout ens ;
jamès a joye ne protendz,
quand mon conffort,
11900 Mon onffant, mon bien, mon déport
voy devant moy gésir tout mort ;
o lasse merc,
Tant souffre de douleur amere,
que quand mon grief dueil considère,
11905 le cueur me part.
MARBRIEN
Dame qui prent plus que sa part
de dueil, son cueur en a le pis ;
se la mort a i)ris vostro filz,
ja n'en fault toi duoil démener,
11910 veu qu'il n'en peust nulz retourner ;
c'est le cours de nous : mortelz sommes,
tous ensemble, femmes et hommes ;
riens n'y vault le dcsconfortor.
ABIRON
Il le fault en terre porter.
11833 mnn'/ite B. — 11S44 Sera sur eulx C. — 11845 de courage B. — 11860 Lors vous verrez confondre C. — 11861
iNc pensez B. C. — 11863 aitiue et B. C. — 11865 apreiidrez H. C. — 11877 ara B. sauuement ara C. — llSSl con-
liommerez B. G.— 11889 venir A. — 11895 fortunée A. — 11898 parlons C. — 11901 gesant B. C. — 11903 Tant ] Tu
|A. Tant tu C. - 11907 depis B. du pis C.
d56
MISTKRR DE LA PASSION
11915 aiiltre conseil n'est que j'y voyc.
Icy l'emportent.
LLCINE
Helas ! mon enffant et ma joye,
sur tous gracieux et plaisaus,
t'en vas tu en tes jeunes ans
finer et en terre pourrir ?
119^0 Helas ! dévoyés tu mourir
si tost ? faulce mort forcenée
espiois tu ceste journée
pour moy priver de tout plaisir ?
Ou parfont puis de desplaisir
11925 en toy me fault finer mes jours.
JHESUS
Je prens grant pitié des dolouis
que ceste femme a son cueur donne ;
c'est nature qu'ainsi l'ordonne
qui ne peust a son sang mentir.
11930 Femme, vueillc toy revertii'
du ducil qui est en toy enclus,
appaiso toy, ne [Jcure plus,
et Dieu t'aidera de ceste heure.
LUCINE
Ha ! sire, se je plains et pleure,
11935 le motif est bien suffisant :
je n'avoye qu'ung seul enffant
que feu mon mary me laissa
tout seulet quand il trespassa,
et huy la mort le m'a toUu !
JHESUS
11940 C'est Dieu qui ainsi l'a voulu
pour y monstrer oeuvre plus grande.
Arrestez, je vous le commande,
ne portez plus la bière avant.
ABIRON
Sire, selonc vostrc command,
11945 voulons exploitier ceste fois.
JHESUS
Adolescent, eutendz ma voix,
affîn que mon command achevas :
je te command que tu te levés ;
en ce tomb^-au plus ne t'absconce,
11950 mes donne a ta mero responce
et t'appers vivant en ce lieu.
l'e.nffa.nt res-lscité
0 doulx Jhesus, vray filz de Dieu,
en vous est vertu infinie :
par vous suis retourne en vie
11955 et ramené d'ung grand danger ;
jamès ne me veil retarger
de vous servir et honorer.
JHESUS
Tu n'as matière de plourer,
femme ; prens ton fils et l'emmaine.
LUCINE
11960 0 iniissance de Dieu haultaine,
qui est cueur qui vous puist comprendre ?
Doulx Jhesus, je ne vous puis rendre
le bien dont vous estes acteur,
mes Dieu, mon père créateur,
11965 en loue en ma povre simplcsse.
0 cher filz, a joye et liesse
soies tu vers moy retourné !
MAHBRIEN
Oncques homme de mère né
ne vit oeuvre si merveillable
11970 no si notable.
ABIRON
A Dieu, mon père vertuable,
en soit los et mercy donné,
qui ordonné
nous a prophète tant vallable
11975 par qui son peuple misérable
est au port de salut mené.
LUCINE
Oncques homme de mère né
ne vit vertu si merveillable.
l'enffant
A Dieu, mon père vertuable,
îioso en soit los et mercy donné.
JHESUS
Fi'cres, mon veil s'est adonné
do vertir en aultro contrée
affin qu'a plusieurs soit monstree
la iiarole de Dieu, mon père.
[Pose.]
HERODIAUE
11985 Trop grand dueil en mon cueur repère
de Jehan, cest hermitto infâme,
qui tousjours me desprise et blasme
et me vcult faire sepai'cr
du lieu ou mieulx veil reparer ;
11990 temps est qu'il en aist sa déserte :
11980 et deuoyes A. C. deuies B. — 11924 parfait B. G. — 11965 de ma A. — 11969 chose B. - 11970 manîue B.
11972 loue C. — 11982 nostre B. vostre C.
SECONDE JOURNEE
157
sire roy, vous y are/, perto,
so bricfmoiit vous n'y pourvoie /.
HKllODE
Ma chcrc ilaïuc, vous voie/,
que tant qu'est de rexpcdicr,
li'.wj il n'y si;aroit remédier
qu'il ne niouiu^it prochainement ;
mes le i)eupli' l'aynie forment,
pour quoy je craingz, se je traictoio
son mal ou a mort le niettoyc,
12000 qu'il n'en sourdist scdiciou.
HEUOmADE
Faictes eu expcdicion
conmient q\i'il en doyve advenir :
il me vcult de vous forbanir,
tou.sjours nie bla.sme et vitupère
l£00j et vous ; si fault qu'il le conipore,
ou janiès au cuciu' u'aray joye.
HEUODE
Dame, vee/. cy que j'esgardoic :
il est huy la festivité
du jour de ma nativité,
ISOiO auquel jour je fais volentiers
ung souper a tous mes princiers
pour la fe te mieulx approuver:
si fauldra manière trouver
que l'en en face un abrégé.
HERODIADE
1Î0I5 Sire l'oy, j'avoie songé
ung moien assés cotivenable :
que tautost que serez a table,
ma fille qui est bien inobillc,
souple de corps, gente et habille,
1Î020 veuist faire ung esbatement
devant vous saultant genteraent ;
et lors quant l'esbat ara fait,
ainsi comme ignorant du fait,
vous la mettrez a l'abandon
lj;0;5 de vous demander quelque don
qui mieulx a son veil pourra duyrc ;
et lors je la vouidray instruire
quel chose elle demandera.
hErodE
A vostrc veil fait eu sera
l20;to et la devise bien me plest.
(iROXONAUT
Sire, venez seoir, tout est [ircst.
la viande grant et menue,
on n'attend que vostrc venue ;
si sont Tenus tous les seigneurs.
I HBROOE
iîOS'i Vous estes vaillaos serviteurs
et qui faictes ung grand devoir.
Seigueur.s, lavons ; puis irons seoir
to>t a cop.
RODiGON, conte.
Nous n'avons pas luu-te.
SRONGNART
Seez vous, la viande se gaste :
1Î050 qu'or en eusse le |ilus beau plat,
j'en troasseroye tel csclat,
qu'il y perroit bien au retour.
HERODE
Seigneuis, en cordialle amour
faict(>s tous chère plantureuse,
120i3 car la conipaignie joyeuse
nous tient en uug plaisant séjour.
noniGON
C'est do vostrc bien et honnour,
sire roy, qu'il le vous plest dire.
AMPHIARUS, chevalier.
Se la festc est de grand valeur,
12050 c'est de vostre bien et honnour.
IIEROUE
Vous sçavez qu'il est huy le jour
qu'il a pieu a Dieu nosti'c sire
nous faire naistre, et puis l'atour
de tetrarche faire et eslire,
12055 et vosti'c noblesse et couleur,
par quoy plus festoier désire.
RODIGON
C'est de vostre bien et honnour,
sire roy, qu'il le vous plest dire.
HEROUIAUE
Fille, ne me vueillez desdire ;
lïOOO allez vous en a ma requestc
devant le roy en plaine feste
faire ung sault gentil et niignot,
et je suis sceuro que tantost
il vous fera quelque promesse .
L\ FILLE
120G5 Ma more et ma noble princesse,
a vosti-e vouloir je fei'ay
le plus beau jeu que je s^aray ;
12001 i-n scuremenl C. — 15019 Km.ilie lie B. C. et iiiiinobile C.
12012 parroit H. — 1204S roy iii'in'jue A. — 12056 fostoiir vous C.
12023 innocent C. — 120Î6 a sou dueil B. —
158
MISTERE DE LA PASSION
voiez comment je m'y dispose.
HERODIADE
S'il vous promect aucune chose
12070 ne demandez ne ce ne quoy,
mes retournez par devers moy,
et je vous diray quel demande
vous luy ferez.
LA FILLE
Je ne demande
qu'a faire vostre volonté.
ANDALUS, maistre d'oslel.
12075 Seigneurs, menez joyeuseté,
comme a tel feste le convient.
Veez cy un entremès qui vient
pour la compaignio esjouir.
LA KILLE
De joye puist tousjours jouir
12080 le roy et la noble consorte !
GRONGNART
Qu'est cecy, dea ? que nous aportc
ceste morveuse ? Dieu la gard !
HERODE
Laisse l'esbatre, dy, Grongnart ;
c'est quelque habilité nouvelle.
GRONGNART
12085 Sus de par Dieu, baille luy belle :
elle nous fera beau sabat.
HERODE
Gardez se gentement s'esbat,
est ce bien sailly a devis ?
que vous eu samble ?
AMPHIARUS
A mon advis,
12090 oncques mes je ne vis mieulx faire ;
le tour qu'elle a fait la declaire
habille de corps et ligiere.
RODIGON
Elle tient la meilleur manière
que jamès homme puist choisir.
HERODE
12093 c'est si bien fait a mon plaisir
que pour impossible m'appert
que corps d'hoimne, tant soit appert,
sceut faire chose plus nouvelle.
Or venez ça, gcnte puccUe :
12100 par vostre habilité prouvée
ce jour avez m'amour trouvée,
et sur la foy de gentil homme
que doys a l'empereur de Rorame,
demandez finance ou avoir,
12105 ou tel don qu'il vous plest avoir,
soit la moitié de mon royalme :
donné vous sera.
LA KILLE
Noble dame,
le roy m'a voulu accorder
ung don : que doy je demander ?
12110 faire veil par vostre moyen.
HERODIADE
Demandez luy sur toute rien
qu'il vous délivre sans arrest
le chef Jehan qui en prison est,
et se vous en venez a chef,
12115 aportez moy le propre chef:
si sera mon courroux vengé.
LA FILLE
Je m'en pars a vostre congé,
j'en feray ce qu'en moy sera.
HERODE
Or ça, que nous devisera
12120 ceste joieuse damoiselle ?
LA FILLE
Entretenez vostre querelle,
sire roy, mon droit soit gardé.
Vous m'avez ung don accordé :
c'est bien raison que j'y parviengne.
HERODE
12123 Je n'ay riens dit que je ne tiengne
franchement sans y mettre gloses.
LA FILLE
Je demande pour toutes choses
en ce plat que j'ay préparé
le chef hors du corps séparé
12130 de Jehan que l'en nomme Baptiste.
HERODE
0 par mon ame, je suis triste
de la demande proposée.
Hal fille, ti'op estes osée :
querez aultre don plus liaultain.
12076 Comment a tel feste A. — 12083 Laisse la B. C. — 120S4 tinesco B. C. — 120S7 Veez A. Kegardez C. —
12094 sceust B. C, — 12096 nappert C. — 12097 fust Bi C. — 12113 de jehan B> C; — 12118 ce qui vous plaira G.
SECONDE JOURNEE
159
I
LA KII.I.B
18135 Aultro 110 vcil.
HBROOE
Il est villoin,
jo 110 8çay dont il pcust venir ;
toutcffois li; fiiult il tenir,
car cxpi'ossoiueiit l'ay juré.
QRONGNART
11 a trop longuement tluré,
18140 j'en feray fin a peu do noise.
HEllODE
0 que la demande nie poisc,
0 que j'ay le eueur romply d'ire
qu'il fault qu'ung si saint homme iiiuyro
pour une plaisance volage !
ANDAI.US
12U5 Oncques n'advint si grand dommage
par tout le pays de Judée.
UERODE
Puisque la chose est accordée,
il fault poursuir sa parole :
Grongnait, va tost, sy le decole
1Ï150 que jamès n'en oyons parler.
ghongnaut
Créiez, puisqu'il m'y fault aller,
sa besongne sera bien mise ,
et fust il plus saint que Moysc,
de cestc espee giant et large
12155 luy pense donner tel décharge,
qu'il ne le sçara ja porter.
LA FILLE
J'iray pour le cliiof i aporter,
mes qu'il soit séparé du corps.
GRONGNART
Ça, maistre, ça passez dehors ;
[12100 je vous baudray le dernier mes,
ce croy, que vous arez jamès :
baissez vous, vous estes trop hault.
JEHAN BAPTISTE
Aniy, puisque faire lo fault,
pour tenir justice et raison,
' 12165 accorde moy une oroison
a Dieu par pensée dévote.
GRONGNART
Or le fais court, qu'il ne se crote :
j'ay a faire en aultro pays.
JEMAN BAPTISTE
Mon créateur, on qui mercy je suis»
que j'ay servi et sers taut que jo puis
com précurseur de ton filz, moy indigne,
Pour toy servir a la mort suis produis
et on mourant pour ta loy me déduis,
pensant au bien qui jaint» no deffine
Ou jo m'attons par ta grâce bénigne
et de l'espoir ne puis cstro séduis,
car tu conduis
tout cueur contrit a vrayc médecine
qui médecine
le» doleans : en ce point me réduis.
GRONGNART
Or tien ce horion, et puis
l'en va caqueter a la feste.
LA FILLE
Grongnart, délivre moy la teste,
car je ne l'ose recueillir.
GRONGNART
121S5 Tenez, or la portez bouillir,
et puis en faictes des pastés.
LA FILLE
Ma dame, vous n'avez pas telz
presens que je vous les apporte.
UERODIADE
Ha ! perverse charogne morte,
12190 faulx bigot de mauvais chastoy ;
or suis je vengée de toy
a ton dueil et confusion.
DIEU LE PERE
Or est la decolacion
du benoit Baptiste parfaicte ;
12iœ or est fine le saint prophète,
et si fault que sa gloire attende
et la bas au limbe descende
jusqu'au temps de miséricorde ;
et raison asscs s'y concorde :
12200 car ainsi qu'il fut precurseui-
de mon filz et vray denonceur
au monde a tous mes loyaulx serfs,
ainsi sera il aux enffcrs
dont plusieurs dcmenront liesse
12205 de la nouvelle de noblesse
qu'aux prophètes anoncera.
' 12147 proposée A. - 12157 apporter C. - 12163 finer me fault B. C. - 12167 Faictes le oourt B. C. - 12175 pour
ta B. — 12188 comme je vous B. C — 12200 Si comme B. C— 12202 mes beaux serfs C.
i«0
MISTERK DE LA PASSION
SOPHONIAS
Helas ! qui nous conffoitcra,
frères ? nostre maistrc est fine.
MANASSES
Le mauvais tiiant obstiné,
12210 Herode, que Dieu puist confonfire,
l'a fait mou'ir.
ABIAS
Allons espondrc
son digne corps en un scrcus,
car quant les tirans l'ont perçus,
ilzîo laissent sur le pave,
SOPHONIAS
12215 S'il plcst Dieu que l'ayons trouvé,
nous y monstrei'ons diligence.
GRONGNART
Sire loy, j'ay vcstre sentence
exécuté, comme il fut dist.
HERODE
11 me poise moult de l'editt ;
ls'2S0 mes il n'est douleur qui ne passe.
JHESLS
Frères, il n'a pas grant espace
que la voix comraance a courir,
comment Herode a fait mourir
Jehan le saint Baptiste et digne :
12225 je veil laisser gent si maligne
et en lieu désert habiter.
s. JUDK
Ou qu'il vous plaira fréquenter,
suivir vous voulons, mon cher maistre.
l.A KILLE CHANAXKE
Haro ! les pastcs sont en l'aistre...
122:i0 Gardez le chat pour les souris...
Plus de cent deablcs sont flouris
au sanglant fons do ma cervelle...
Ha ! larreu-, garde la cordelle,
ta gorge sent tout le happart. . .
12235 Ce sont florins : a pai t, a part :
j'ay veu musscr le pot en terre ..
Gens d'armes vont ilz a la guerre
pour apprendre a piller des pois ^..
11 est pi'is ! haro ! je le vois. . .
12240 Hey dea, gelines et cauars,
voulez vous menger les renais ?
or gardez qu'ilz ne vous mengusscnt !..
J'os bien les Vaudois qui me huchent
pour chevaucher ung viel ballet...
12245 Turz ! tuez ! maistre et vallet,
jamès n'aiont respit ne trêve...
Noël ! j'ay cy trouvé la fève
dedans la corne d'une chievre :
que de sanglante forto fièvre
12250 puissent espouser les chevros !
LA CHANANEE
Ha ! fille, veez cy piteux mos :
or ne sçay je qui me deflfend
que de dueil le cueur ne me fend
quand le deable ainsi vous tourmente !
12255 Helas ! je vous ay veu tant gente,
tant courtoise, tant bien apprise,
et maintenant estes surprise
de tel demoniaclerie
dont jamès ne serez guérie,
12200 se Dieu n'y estand son miracle.
YSORE, garde de li fille.
Oncques mes nul demoniacle
ne vis si mauvais a nul jour ;
jamès n'a repos ne séjour
par l'ennemi qu'ainsi l'ordonne.
JHESUS \
12265 Nous piirochons Tire et Sidonne,
tant avons nous fait de voyage.
LA FILLE CHANANEE
Meslez du di'agaut avec rage,
pour sçavoir s'il est dur ou sur...
Ostcz les fondemens du mur,
12270 que le i)lancher ne viengne en bas...
Ha ! Fergalus, que tu ni'abas !
Bas, bas, qu'est ce que tu barbetes ?
Elles sont d'aulne les pilletcs...
Hz sont cuys, allez les plumer.
LA CHANANEE
12275 Veez cy bien mos pour moy fermer
en désespérance mortelle.
\S0UE
Maistresse, la nouvelle est telle
12228 vous vauldray C. — 12229 )fslrc B. atre C. — 12232 de la A. -
B. C. — l??e5 sodoiiiine C — 12271 se lu B. — 12273 les plumettes C.
1225' iiuinquc A. — 12261 Ouoques nul jour
SECONDE JOURNEE
161
que Jhosus, en prophète saint,
en qui tant de puissance maint,
itiso vient visiter ceste contrée ;
se la chose hiy fust nionstreo,
il la guerist, n'en douhtcz pas.
lA r.HANANEE
James je n'arrcstcray pas
tant que j'aye veu sa présence.
LA. FllAJS,
1Î285 Deables, mettez vous en deffence,
ung lyon vous vendra combatrc...
Hz sont couchés au piastre, au piastre.-
Devant matines sonnez prime.
LA CHANANEE
Filz de David digne et saintisme,
12290 ayez de mon fait remcmbrance :
ma fille est vexée a oultrance
du deable qui l'a en ses las !
Il ne me respont mot ! helas !
Saint prophète très vertuable,
12293 entendez mon fait piteable ;
doulx Jhcsus, oez moy parler.
S. PIERRE
Faictes ceste femme en aller,
sire, ou luy passez sa demande.
JUDAS
Elle nous fait ung grant esclandre,
12300 do hucher ainsi après nous.
JHESUS
Mes chers enffans, ne sçavez vous
que je ne suis pas envoyé
a quelque troupeau dcsvoyé
fors de la maison d'Israël ?
LA CHANANEE
12305 Ha ! sire, mon cas est cruel :
aydez moy pour Dieu et son nom.
JHESUS
Femme, tu sces qu'il n'est pas bon
prendre le bien des enffans siens
et le vouloir donner aux cliiena.
12310 Les vertus qui sont ordonnées
pour cstre au fdz de Dieu données
ne se doyvent monstrer ne faire
devant gens de loy adversaire,
ne ne sont dignes de les voir.
LA CHANANEE
112315 Helas ! sire, vous dites voii',
mes les povres chyennès famia
qui dessoubz la table sont mis
aucuneffois se peuvent paistre
de miette qui de leur maistre
12320 dessoubz la table leur desccnt :
aussi co no m'est pas décent
de voir les paifaicte» doctrines,
do quoy les Juifz sont plus dignes :
a cause de pi'ovision
12325 une petite porcion,
si vous plest, en recoveray,
considère la foy que j'ay
de parvenir a ma demande.
JHESUS
0 femme, ta foy est moult grande :
12330 il te soit fait comme tu veulx.
LA FILLE
0 doulx Dieu qui tant vaulx et peux
par essence qui toUsjours dure !...
PERGALUS, deable.
Kn peine et dueil et griefve ardiu-e,
plus ardent que barre de fei',
12335 m'en revois courant en enffer
moy plonger au fond du palus.
LUCIKER
Qu'est il advenu, Fcrgalus,
quel sanglant deable te ramaine ?
KERGALUS
Ha ! maistre, j'enrage de paine :
12340 ce Jhesus qui règne sur terre
nous maine la plus forte guerre
qu'oncques fit homme en ce party !
J'avoye mon lieu assorty
en une fille chananee,
12345 et malgré ma face dampnee
il m'en a fallu desloger.
LUCIFER
Portez rôtir ce messager
par tous les brasiers infernaulx.
BELZEBUTH
Oncques larron n'eust tant de maulx,
12350 ne peine tant dure et amere.
LA CUANANEE
Goumient va, fille ?
LA FILLE
Chère mère,
il va très bien, la Dieu mercy :
12282 snnast 13. — 12298 Kille on luy B. luy hkok/iw A. — 12306 pour et en son nom C. — 12303 scions A. B. —
|1123U Nilz ne B. — 12310 Mes les petiz chiens faitiz C. — 12318 peullent A.— 12319 Des miettes A. B. C. —12331 m<in-
- 12332 e/raco dans B et remplacé à Vena-e rouge jwr 12340.— 123'.0 De jhesus B. — 12346 contraint B. C.
Pas. U
Bue D.
162
MISTERE DE LA PASSION
mon corps est sano et guary
du deable qui le tourmentoit.
LA. CHANANEE
12355 La majesté qui tout pourvoit
eu aist louauge et préférence.
0 Jhesus, j'ay ferme credence
que tu es le vray Messias
qui de ta doulce mercy as
12360 ma fille entièrement sauee.
JHESUS
Frères, retournons en Judée,
le temps le veult et la saison,
affin de donner gueiison
a plusieurs qui la sont posés,
12365 mal haitiés et mal disposés
tant de Tame comme du corps.
s. A.NDRY
Nous tous sommes de vos accors
sans jamès voidoir dissontir.
s. PHELIPE
Touteffois qu'il vous plest partir,
12370 nostre chose est tout ordomiee.
LE PARALITIQUE
Helas ! com dolente journée
fut pour moy faicte et adjournee,
quand Dieu me volt traire a naissance,
Veue ma vie fortunée,
12375 en rigueur de fortune née,
et en bruit de désespérance !
Je vis comme en tranco
et n'ay espérance
qui soit retournée,
12380 car elle a sa roue tournée
de tous poins a ma doleance.
Helas ! or suis je a la piscine
qui mepeust donner médecine
et ma maladie guérir ;
12385 Plusieurs y treuvent très bon signe
et les guerist et médecine
et leur fait santé acquérir ;
J'y cuiday quérir
respit de mourir,
12390 mes j'en suis indigne,
car d'attendre cy je ne fine
et si n'y puis liens conquérir.
12395
12400
12403
12410
12415
12420
124;^
12430
12435
Trente et huit ans y a passés
que j'en ay attendu assés,
languissant en piteulx martire :
or me doint huy, Dieu nostre sire,
que mes malz soient respassés
et guéris comme je désire !
JHESUS
Pitié m'esmeust quand je remire
cestuy povre honnue mat et fade
qui cy gist en son lit malade :
ame de luy ne se recorde ;
si luy feray miséricorde
maintenant, mon veil s'i consonne.
s. PIERRE
Sire, vous ferez grant aulmonne :
santé luy seroit bien duysaut.
JHESUS
Amis, que je voy cy gisant
si piteusement démené,
vouldroys tu pas estre sané ?
tu en as, je croy, bon besoing.
LE PARALITIQUE
Helas ! sire, j'en suis bien loing :
j'ay fait icy ja longue attente
a ceste piscine présente
en qui malades grant foison
treuvent santé et garison.
L'angle descend en la fontaine
et en aucune heure certaine
esmeust l'eaue quand il luy plest,
et le malade qui est prcst
a descendre premier dcdens
est sané de tous ses tourmens.
Chacun y trouve sa manière :
tousjours je demeure derrière.
Trente et huit ans a que j'altcns :
si ne trouve qui me mette ens ;
tous les aultres treuvent amis,
mes tousjours arrière suis mis ;
de malades telle assamblec
y a, que se l'eaue est troublée
et je me cuide mettre avant,
ung aultre se boute devant :
ainsi demeure icy hé
comme ung malheureux oublié
et demourray, comme je croy,
a tousjours.
JHESUS
Amy, levé toy
et te dresse dessus tes piez,
12354 me surprenoit C. — 12355 tout croist C. — 12356 reiierenoe C. — 1Î3ÎS nulle espérance G. — 12380 roUe
manque B. Le vers num'jue C. — 12397 ti-espassez A. — 12398 sanez B. C. — 12421 11 est sane de tous B. — 12425 amc
qui me C. — 12427 suis arrière B. G. — 12432 demouray je A. — 12436 en piez et despurte B.
I
SECONDE JOURNEE
163
et puis prcns ta couche surpiez
et l'enipoi'to ligioivment.
I.K PAtlAMTlQUE
0 Lault pcro du firmament,
ii'M coin grant graco m'est descendue !
santt! m'est plaincment rendue,
quand sans enipcschemcns quclconcques
j'andjulo miculx que no fis oncqucs.
Je vois sainement par la voie
12445 sans quelque mal qui me convoie.
Helas ! et qu'est ja devenu
cil par qui ce bien m'est venu ?
au moins se trouver le sceusisse,
de bon cueur mercy luy rendisse,
lï-450 ainsi que bien faire le doy,
mes certes je ne le congnoy ;
si n'en puis, dont forment me poise.
11 est grand temps que je m'en voise
atout ma couche sur mon col ;
12455 encor ne suis je pas si fol
que je la laisse a la harpaille.
Je suis chargé, vaille que vaille :
atout mon fardeau m'en iray
qui poise : c'est, je vous diray,
124G0 a longue voye pesant fais.
NATHAN
Dea, amis, qu'est ce que tu fais ?
ton offence trop la loy touche :
tu ne dois pas porter ta couche
a tel jour, la loy y débat.
I.E PARALITIQUE
1 124G5 Non ? et pourquoy ?
NACHOR
Pour le sabai
qui est huy, feste soleimelle,
en quoy tout oeuvre manuelle,
tout labeur et peine de corps
doit cesser.
LE PARALITIQLE
Je le vous accors :
[12470 Dieu l'a eu ce point ordonné ;
mais cil qui tantost m'a sané
m'a de fait commandé et dit
que je m'en voise atout mon lit ;
et je l'emiiorte a son conunand.
NACHOU
[12470 Mes, beau sire, je te deniand
qui est il, il fault qu'on lo sache ;
car il n'est pas raison qu'il face
tel transgression en la loy.
LE PARALITIQUE
Mes seigneurs, je ne le congnoy,
12480 n'en ayez ja le cueur marry,
mes je suis sceur qu'il m'a guary
d'une très griefvc maladie,
par quoy est force que je dyc
qu'il a en soy vertu parfaictc ;
12485 et qu'il soit quelque grand prophète,
il m'en a monstre vray exemple.
Retraire me voil vers le temple,
pour Dieu mercier de cueur lyé
du grant bien qu'il m'a envoyé ;
12490 il n'est qui m'en saclie empcscher.
Icy vient Jhesus au temple.
JHESUS, OU temple.
Or regarde, mon amy cher,
la grâce que Dieu t'a donnée
qui en la présente journée
t'a rendu plus sain que devant.
124% Garde toy donc dorénavant
de pécher et plus ne t'aviengne,
affin que pis ne te surviengne,
car tu sces que péché encombre,
tousjours portant mortel cncombic
12500 pour celluy qui do luy se çaint.
LE PARALITIQUE
0 Jhesus, vray prophète saint,
maintenant croy je moy indigne,
que par vostre vertu divine
ay eu de mon mal alegence,
lfô05 par quoy j'ay parfaicte espérance
que vous estes le vray saulveur
que Dieu, nostre vray créateur,
a transmis au règne mondain ;
et pour le prescher plus a plain,
12610 je le vois dénoncer et dire
a ces Pharisiens plains d'ire
ou tant de répugnance avez.
Icy s'en vient aux Pharisienx.
Ha! mes seigneurs, vous ne sçavez
depuis que d'icy me party,
lfôl5 je suis grandement advcrty
qui m'a gary par ceste voye ;
12437 leiuporte B.— 12138 Tu iiaras [loinl deinpesohemonl B. C. — 12448 sreusse C. — 1245C ehappaille lî C. —
12459 Quil poise voimiient dit on vray B. C. — 12474 sa commande A. — 12475 demande A. — 12488 pracier C. —
12490 manque B. ~ 12499 encontre B. — 12507 hault créateur B. C. _ lïoll inauuais juif» B. C. — 12516 une B.
164
MI STERE DE LA PASSION
n'a gueres que riens n'en sçavoye,
mes maintenant j'en suis tout ferme.
NATHAN
Qui a ce fait ?
LE PARALITIQUE
Je vous afferme
12520 que c'a fait celluy qui se nomme
Jhesus, qui est le plus saint homme
qui soit dessoubz le firmament.
NACHOR
A ce fait Jhesus ? et comment !
il se monstre bien homme infâme,
12525 quand la loy transgresse et diffame,
faisant tel operacion.
NATHAN
Il y chet bien pugnicion
quand ainsi le sabat transgresse.
C'est a toy donc que je m'adresse,
12530 Jhesus : nous sommes en débat
pour cause que le grant sabat
vielles en faisant cestc oeuvre.
JHESUS
Mon père jusqu'à ores oeuvre,
et j'oeuvre a l'instance de luy,
12535 et ensuys l'oeuvre do celluy
qui au monde m'a envoyé.
JACOB, scribe.
Oez du meschaut desvoyé
les blasphèmes qu'il nous prétend !
il n'est pas seulement content
K40 de nostre hault sabat enfraindre,
mes de fait il nous veult contraindre
de croire qu'il soit a Dieu filz.
JHEÎUS
En ceste oeuvre lùens me meffis,
car vrayement je vous declaire
12545 que le filz ne peust de soy faire,
se n'est chose qui bonne appere
et qu'il a veu faire a son père :
en cç que le père fera
le filz ensuyvant le sera ;
12550 le pcre ayme son filz tout oultre,
et tout tant qu'il fait il ly monstre,
et encore oeuvres plus ardues
demonstrera que n'avez veues,
pour vous tk)nncr crainte et merveille.
JOURAN, scnhc.
l'ïû55 Mes amis feaulx, je conceillo
que pour ceste fuis le laissons
et de riens nous ne l'oppressons,
car veez cy peuple a grant effort
par quoy il seroit le plus fort
12560 s'il en mouvoit sedicion.
YSACAR, scribe.
Je suis de vostro oppinion
pour le présent de le laisser :
laissons ceste Pasques passer ;
ime aultre fois vendra par cj'.
JACOB
12565 Je suis content.
JORRAN
Et nioy aussi :
la chose est ainsi bien sortye.
JHESUS
Mes amis, faisons départie
d'icy et faisans no.-tre allée
oultre la mer de Galilée ;
12570 le peuple y fault endoctriner.
s. JEHAN
Cher maistre, aussi le séjourner
ne nou3 est point ici propice,
car ces scribes plains de malice
vous heent tant qu'il n'est point a dire.
s. PIERRE
12575 Après vous, Jhesus, nostre sire,
voulons nous tous vivre et mourir.
Icy doiient suicir Jhesus tous tes Juifs
cy dénommés.
ABACLT, disciple.
Amis, pensons de le suivir;
grant pourfit y pourrons avoir,
et ne fust seulement qu'a voir
12580 les haulx fais qu'il monstre partout.
MOAB
Suivir le veil pour faire escout
de ses belles monicions.
ABIRON
Ses haultes predicacions
nous peuvent foison profiter.
TUBAL
1x585 Honnne ne les peust escouter
que Eon ame mieulx ne dispose.
CELIUS
C'est une moult haultaine chose
que de son fait, chacun le voit.
SALMANAZAR
Nous le suyvrons comment qu'il voit,
12590 sçavoir quelz signes il fera.
RUBEN
S'il scet riens, il le monstrera
12543 En ce faisant B. C— 12540 ensuiuantj insoqutur (sii^) B. — li560 Sil sen B. — 125G2 maniur C. — 1£33 C.
ajoute: Sans limpugner ne transgresser C. 'n^~-» i---» .. ^ ., .. . .. _ _ ..
B. — 12570 fault A. — 12581 faire tout C.
■ 12572 licite B. C. — 12573 Car ceste lignée mauldite B. C. — 12578 ilz
■ 12582-12689 manjuent C. feuillet déchiré. — 12589 quel lieu quU B.
»
SECONDE JOURNRR
165
en Galilcc Imultcraent,
car c'est le pays proprement,
ou il a pris sa nacion.
NEl'TALIN
12r>95 Maint signe d'aduiiradon 12635
a demonstrô en ceste terre,
et si n'y peust jamès conqucrrc
l'amour de plusieurs opposans.
OEDEON
11 a largement de nuysans ; 12040
12800 Dieu doint que jamès ne luy nuisent.
ABUS
Il sarable droit qu'ilz se déduisent
a luy faire anoy et griefté,
cai' quant il leur dit vérité 12045
si l'impugnent ilz a puissance.
MANASSES
12605 C'est de leur mauvaise arrogance,
qui jamès ne se peust jiloyor.
NEMHnonn 12650
Sus ! pensons de le eonvoier :
luy et ses gens s'en vont de tire ;
il fault que chacun de nous tire
12610 de le suivir diligemment.
Icys'en vont trestous après Jhosus, et lors Jhesus 12655
et ses disciples montent sur une montaigne.
12660
JHESIS
Mes amis, au commencement
do ceste predicacion,
devez faire invocaciou
a Dieu, vostre souverain père, 12665
[12615 si que sa grâce vous appere
et vous donne sens et sçavoir
de ma parole recevoir
a vostre edificacion
et la glorificacion 12670
fl2620 do luy, qui eu l'oternel rcgno
sans terminer domine et règne ;
car sans grâce ne pouez faire
chose qui vous soit salutaire.
Grâce est la ]irecieusc ointure 12675
' 12625 qui le eueur de la créature
assouplist, et donne vouloir
d'ouir ce qui luy peust valoir ;
grâce est donc lant noble rosée
que, quand l'ame en est arrousee, 12680
12630 tousjours croist et plus se parfait
en vertus par dit et par fait;
sans grâce n'est vertu pai'faictc,
sans vertu l'ame est im|)arfaicte
du bien qui plus la doust parfaire
et sans vertu no peust parfaire.
Peuple, donc esleve ta face
a Dieu, et roquier ceslo grâce
qui l'ame en bon eslat maintient ;
tu Taras, sy a toy ne tient ;
se contre sa haulto clémence
as commis péché et ofl'enco
ou contre ton prochain aussi,
requiers luy humblement mercy
en bonne et humble repeut;mce,
toy soubmctant a pcnitauce
en prometant admendcment
de jamès renchoir ensement :
ta coulpe sera pardonneo
et te sera grâce donnée
pour dampnacion éviter
et pour tousjours niieulx pourfiter
et admeuder en temps et lieu
dessoubz la parole de Dieu.
Les nobles predicacious
et doulccs exhortacions
du hault fiuit du ciel descendues
sont diversement entendues
selonc divers entendemeus,
et de cecy enseignemens
vous veil baillier par parabole ;
et entendez bien ma parole.
Ung père de famille sage,
entendant a sou labourage,
pieça de sa maison yssi
pour semer aillieurs et icy
son grain, comme il est coustumier
et le grain qu'il sema pi-emior
si cheut en divei'scs parties
selonc les places assoi-ties :
l'une part cheut en plaine voye,
mes tanstost fut ravye en voye
des oiseaulx du ciel qui voilèrent
et tout celuy grain recueillerent ;
l'aultre part sur les pierres cheut
et celle tost sechee fut,
car le souleil par sa chaleur
le sécha par faulte d'humeur ;
une aultre part cheut es espincs,
mes par leurs pointures malignes
creurent sus et le suffoquèrent
tant que croistre ne le laisseront ;
12606 vcult B. — 12625 oorps A.— 12033 nest lame parfaii-te B. — 12631 In] luy A. — 12638 Qui tant clément vers
toy se B. — 12639 Que tu laras sen toy ne tient B. — 12^7 manqur B, — 18675 cette part A. «-elle tantost B.
106
MISTERE DE LA PASSION
l'aultre part cheut en terre bonne,
et celle croit et si foisonne ;
l'une a cent pars, l'aultre a soixante,
18685 l'aultre a quarente, l'aultre a trente,
selon qu'elle chet bien appoint.
S. THOMAS
Cher maistre, nous n'entendons point
pourquoy a ces gens assemblés
en telz paraboles parlez
12690 qui sont tant rudes créatures,
et encore sont tant obscures
que nous ne les sçavons comprendre,
JHESUS
Mes amis, vous devez entendre
et vous ay dit en aultre lieu
12695 qu'il vous est ordonné de Dieu
de congnoistre par voies cleres
les haultains et divins misteres,
si ne vous en veil riens celer ;
mes aux aultres me fault parler
12700 en paraboles et proverbes
affin qu'a mes motz et mes verbes
les voyans aveugles se rendent
et les oyans rien n'y entendent.
Ysaie le prononça
12705 quand en tel forme le nonça :
Yos auditu audietis
nec tamen intelligetis,
dist ce prophète : vous orre7^
mes pourtant vous ne l'entendrez,
12710 pour vos grans obstinations.
s. BERTHELEMY
Cher maistre, nous vous supplions
puisqu'il plaist a Dieu, nostre père,
nous reveller ce hault mistere
et nous fait digues de choisir
12715 ses secrcs par vostre plaisir,
exposez nous a quoy profite
la parabole dessus ditte,
car nous la créions vertuablo
et très grandement véritable,
12720 comme vous l'avez proposée.
JHESUS
Maintenant Tarez exposée,
mes chers enffans, pour valoir mieulx,
et certes benois sont vos yeux
a qui telz dons sont ottroiés
12725 que de voir ce que vous voyez,
et vostre oye est sainte et digne,
a qui la majesté divine
12688 quoy manque B. — 12697 diuers B. — 12704
pouez A. auez a B. vous ouez G. — 12-42 propine B. —
P. — 12769 multiplier A.
donne d'ouir a sens ouvert
ce qui nous sera descouvert.
12730 Et certainement je vous dis
que maint prophète de jadis,
mains justes et saintes parsonncs
ont désiré par grans ensonnes
de voir ce que ja veu avez
12735 et si en ont esté privés,
et de ce que ouez ouir,
et si n'y ont peu advenir.
Or m'entendez donc proposer'
et la parabole exposer :
12740 premier, par le seminateur
j'entens tout bon prédicateur ;
par la semence qu'il somine,
j'entens la parole divine
que le prescheur semé et espart
8745 en maint lieu et en mainte part,
qui de tout humain sentemcnt
n'est pas reoeue également ;
par celle qui chet en la voye,
j'entens du peuple grant moujoyo
12750 qui se cuide mettre en devoir
des paroles Dieu recevoir,
mes les oyscaulx du ciel y viengnent :
ce sont les deables qui surviengnont,
qui la semence encommancee
12755 estent surpiez de leur pensée ;
par la semence nette et pure
qui chet dessus la piçrre dure,
j'entens peuple mal doctrine,
long temps en son mal obstiné,
12760 lequel, quand luy vient mocion
d'une bonne admoniciou,
aucuneffois bien le conçoit
et a grant joye le reçoit
et promet admender son grief;
12765 mes la semence meurt trop brief,
car si tost qu'il luy sourt contraire,
il est tant apris a mal faire
qu'il laisse tout mortifier
le bon grain sans fructifier ;
12770 par le grahi en lieu espineux,
j'entens peuple délicieux
qui tout sur vanité s'arreste,
lequel tantost qu'on luy appreste
predicacion bien notore,
12775 posé que très bien l'incorpore
et la propose a effect mettre,
il n'est pas de son vouloir maistre,
car il a si fort son estude
Le prophète isaie G. — 12733 par pensées bonnes A. — 12736
12744 Que sur le peuple A. — 127()5 meut B. — 12767 fort aprins
SECONDE JOURNEE
167
en inondaino snlicitudo
12780 pour SCS licliosses amasser,
qu'il n'a loisir d'ailleui-s penser :
tels richesses fort cmiioignans
sont <lonc les cspincs poignans
qui les bons es|)is fimt ploiex
12785 sans les laisser nmltipliei' ;
le grain qui chet en bonne terre
et la s'ongrossit et enteri-e
tant qu'il ait ses racines dures
scgnifie les créatures
1Ï790 qui humblement et de cueur pieu
oyent la paroUe do Dieu
et en l'oant moult bien |)roffitent
et en profitant so délitent ;
puis quand humblement l'ont oye,
18793 quoy qu'il soit, no l'oublient mye,
mes vont de vraye intencion
la metti'e a execucion ;
et s'ilz ont oy quelque vice
de quoy la divine justice
1Ï800 les puist reprendre et arguer,
tautost se vont esvertuer
de l'extirper et expurger,
ou s'on leur monstre le danger
ou leur aine a trop arresté,
12805 d'inio très bonne volenté
jamais narout joie do corps
tant qu'ilz en soient tiré hors ;
s'on leur presche aussi de la joye
de lassus qui tout cueur resjoye,
18810 de bon cueur se peinent, affin
qu'ilz y puissent venir en fin ;
s'on leur presche de pardonner,
tout prestz sont a niercy donner ;
s'on leur conseille faire aulmonne,
12815 chacun très volentiors la donne ;
s'on leur conseille faire june
jamès leur vouloir n'y répugne,
mes se mettent en la Dieu grâce :
veez cy la bonne terre et grasse,
1J820 bien labourée et bien hantée,
en quoy la sonience gettee
apporte a cent doubles le fruit ;
en tel terre labourer duit
puisque fruit de labour appert,
12825 mes en aultrc son labour perd
cil qui grain en cuidcî cueillir.
Qui oreilles a pour ouir
entende ce que je sermonne.
a. .il'DE
La parabole est hnulto et bonne,
l£830 cher maistre, ou tous biens sont compris ;
grans biens en nous avons espris
de la noble exposicion.
s. SIMON
Oncques si grant colection
de peuple je ne vis ensemble
12835 que je voy icy, ce me samble,
jiour nosti'e précepteur entendre.
s. PHELIPE
Encor en voyez vous descendre
tousjoui's nouveaux de toutes pars,
et ai sont cy si drus cpars
12840 qu'il n'y en peust plus aborder.
JHEsrs
Pitié prens a les regarder,
car bons vouloir leur cueur incline
pour venir oir ma doctrine,
et touteffois, pour abréger,
12845 vous voyez qu'ilz n'ont que manger
et s'en ont grant nécessité.
Phelipe, frère, en vérité
respondez cy a ma demande :
ou pourrons nous trouver viande
12850 pour ce peuple cy contenter
ou argent pour en acheter?
car fain grandement les traveille.
s. PHELIPE
Sire, vous demandez merveille,
qui voulez saouler cestc gent ;
12855 nous n'avons comme point d'argent
non pas pour nous a quart n'a tiers,
et touteffois deux cens dcniere
ne souffiroieut pas au plain
seulement pour avoir du pain
ISSGO a toute cestc grant famille.
s. JAQUES ALPHEY i ^ -^
Hz sont icy plus de cinq mille,
sans les enfifans et sans les femmes ;
fort seroit d'avoir de nous mesmes
vivre a tel peuple souffisant.
s. ANDRY
18866 11 y a cy ung jeune euffant
qui porte icy en demussons
cinq pains et deux petis poissons,
lesquelz on aroit de léger ;
mes que seroit ce pour manger
12870 entre tant de peuple et si grant?
T -,,-
12782 Ses richess.es A. — 127S4 vont ploicr A. payer C. — 12785 In souffrir B. C. — 12790 preu C. — 12805 Dune
bonne et vraye C. — 12S07 nient [0. ayant] A. H. tire [B. C. traictie] A. — 12814-15 manquent C. — 12810 l'aire | la
B. jeune A. B. C. — 12829 parole C. — 12839 Kt si sont si druz et espars B. — 12847 cher frère A. B. charité B. C-
168
MISTER E DE LA PASSION
JHESUS
Allez, Andiy, et faictes tant
que de l'enffant les acheter,
et en présent les m'apportez,
car pour cause avoir je les veil.
s. ANDRY
12875 Mon très cher sire, a vostre veil
les vous vois quérir sans plus dire.
Mon enflant?
l'enffant aux pains
Que vous plaist il, sire ?
dittes le moy sans plus attendre.
s. ANDRY
Ces pains icy sont ilz a vendre,
12880 que tu les pourportes ainsi ?
l'enffant
Oy, et les poissons aussi,
s'il est qui acheter les veille :
il ne m'en chault qui les recueille,
mes que j'en aye argent, beau frère.
s. ANDRY
12885 Que les fais tu ?
l'enffant
Veez cy mon père
qui tantost vous les vendera
luy mesmes autant qu'il vouldra :
il s'en sçara mieulx entremetre.
MANASSES
Que demandez vous ?
s. ANDRY
Nostre maistre,
12890 pardonnez moy, je demandoie
a vostre filz et marchandoie
d'uug tautet de vivre qu'il porte ;
il fault qu'au maistre les transporte,
par en bien payant vos dessertes.
MANASSES
12895 Est ce pour Jhesus ?
s. ANDRY
Oy certes,
c'est pour luy et pour aultre non..
MANASSES
Andry, pour luy et pour son nom
donroye chose plus honneste
et de plus grand valeui' que ceste,
12900 car en luy tant de bien repose
qu'il vaut bien d'avoir plus grant chose ;
et pour l'honneur de sa parsonne,
emportez tout, je les vous donne :
ja denier ne vous coustera.
S. ANDRY
129(B Cher sire, il le deservira
devers vous, je vous certifie,
et de par luy je vous mercye
humblement et a jointes mains.
Nostre maistre, veez cy les pains
12910 que m'avez envoie quérir :
faictes en a vostre plaisir
et des poissons pareillement.
JHESUS
Faictes asseoir ysnellement
tout le peuple par ordonnance :
12915 si pi-endront pour leur soutenance
repas : ilz en ont bien mestier.
s. PHELIPE
Nous l'accomplirons volentigr,
ja ne leur convient siège querre.
ilz s'asserront icy a terre,
1S920 et s'en passeront au surplus.
s. JAQUES ZEBEDEY
Au moins y a il du foin sus
a graut largesse et habondant.
S. MATHIEU
En tel danger hatif et grant
on se passe de ce qu'on trouve..
12925 Or ça, seigneurs, chacun s'appreuve
a soy ranger par bon devis,
et après vous serez servis
des biens que Dieu vous envoira.
s. JAQUES ALPHEY
Seez vous, on vous servira
12930 prestement et de cueur joyeulx.
Icy fait Jhesus beneisson sur le pain et le
baille a ses disciples, et puis ils servent le
peuple.
JHESUS
Mes frères, metez devant eulx,
et les servez par diligence.
JUDAS
Hz prendront bien en pacience,
ou ilz ont bien haul tains courages ;
12935 ilz sont trop plus eureux que sages,
Dieu les a cy bien admenés.
Or tenez, mes seigneurs, tenez,
mangez fort, faictes bonne chère :
vivres ne sont pas a renchere.
12940 Tant qu'on vous baille telz loppins,
tenez, fourrez vos canepins
tout en cocquois et en lourdois ;
il n'a si bonne freze au bois,
12883 Et ne raen B. — 12884 Mes quen ayez A. — 12895 pour manque B. — 12909 Mon chier sire B. C. —
12923 corrundant B. correspundant C. — 12926 long dcuis B. — 12938 Boutez B. G. — 12941 cauequins C. — 12943
noix aux bois B. C.
SECONDE
affin quo vous l'entendez bien ;
1Î945 si ne veistes aujourd'uy cliieu
qui le donnast pas a sa niero.
ABACUT
Il fnult qu'il y aist grant misterc
en lu puissance do Jhesus,
dont nous sont tant de bions venus
129J0 cy en secret et en couvert :
nous sommes en ung lieu désert
et si n'y a ne pain ne paste.
MOAB
Mes d'où sont sailli si en hasto
telz vivres a grand habondance?
AiimoN
12^5 II n'est qui en aist congnoissance,
se ce n'est Jhesus seulement.
TUBAL
Avoit il fait preparenieut
de ces biens pour nostre repas ?
CELIUS
Nennil, car il ne s^avoit pas
1Î960 nostre venue en ce paity,
mes qui plus est, il est party
avec nous sans aucun obstacle.
ABACUT
Il fault dire que c'est miracle
le plus noble a tous vrays sentans
JS965 qui fut monstre passé cent ans :
mercions en Dieu, mes amis.
SALMANAZAR
N'a guère estoie tant famis
que plus n'en pouoie sans mort,
mes viengnc donc qui peust : au fort,
18970 puisque j'ay ma panse fournye,
il ne m'en chault.
JUDAS
Quel chère?
NEMBROTH
Lye:
nous buvons et mangons très bien .
JIDAS
A bon droit : il ne couste rien ;
armez vous bien pour la froidure,
12975 je le conseille.
SALMANAZAR
Tant qu'il dure,
nous ne nous faindrons, n'en doublez.
JHESUS
Or ça, mes chers frères, ostez
de ces vivres le résidu ;
affin que riens no soit pardu,
JOURNEE
12980
109
12985
12990
12995
13000
13005
13010
13015
13020
pensez de mettre tout a point.
8. PIERRE
Aussi nous ne le perdrons point,
car ce scioit chose honteuse
que viande si précieuse
et par si noble fait venue
ne fust chèrement retenue,
car les reliques y sont grandes.
s. ANDRY
Nous avons trouve douze mandes
pour bouter ce qui demourra.
S. PHELIPE
Je ne sçay se tout y pourra,
car les biens sont fort plantureux
qui sont demeurés devant eulx ;
ça, fi'eres, or nou? abrégeons.
ABACUT
Jhesus, nous vous remercions
des biens haultement apprestés
que nous avez icy prestes,
car grant besoing nous en avions.
CELIUS
Pour ce que nous rccongnoissons
la grant vertu que vous portez,
Jhesus, nous vous remercions
des biens haultement apprestés.
JHESUS
En samblables afflictions
vos cueui's par fermes volantes
en Dieu de parfait veil entez,
et vous arez provisions.
TUBAL
Jhesus, nous vous remercions
des biens haultement apprestés
que nous avez icy prestes,
car grand besoing nous en avions.
s. SIMON
Très cher sire, nous revenons
d'accomplir vostre veil errant ;
nous avons pris le demeurant
des viandes cy assemblées :
mes douze mandes bien comblées,
nous en avons ja raporté.
JHESUS
Louée en soit la majesté
de Dieu, mon porc de lassus !
Mes frères, tirons nous en sus
de ce peuple sans demeurée ;
allons nous en vers Cesaree
la parole Dieu anoncer.
12909 il peust B. G. — 12U88 tous eus qui vouldra B. C. — 12990 sumptueux B. G. — 13011 pris maiique B.
170
MISTERE DE LA PASSION
s. PIERRK
n est temps de' nous avancer,
se mcshuy y voulons contendre.
Jcy se part Jhesus et ses disciples et laisse le
peuple qui s'en ta d'autre costé.
RUBEN
Mes seigneurs, je ne sçay entendre
le fait au vray de ce Jhesus
13025 qui présentement a repus
plus de cinq mille hommes ensemble
de cinq pains sans plus.
NEPTALIN
Il nie samble
que c'est ung signe bien terrible ;
mes comment est cecy possible,
13030 je n'en sçay riens quant a ma part.
SALMANAZAR
Seroit ce point par mauvais art?
aussi de tout fault demander.
TUBAL
Le vray Dieu me veille garder
d'avoir tel mauvaise pensée ;
13035 mes croy fermement en pensée
que c'est par miracle haultain
venant de Dieu.
CELIUS
11 est certain :
c'est tout bonté que de son fait
et tant de belles oeuvres fait
13040 qu'il convient dire eu somme faicto
que c'est le souverain prophète
promis en la loy des Juifz.
GEDEON
Ainsi le croy.
ABIAS
Autel vous dis :
j'y ay mon espérance toute.
MANASSES
13045 C'est le vray Cristus.
ABACUT
Point n'en doubte,
toute ma foy y est tournée.
JHESUS
Frères, passé mainte journée
presché et baptizé avez
par quoy des nouvelles sçavoz:
13050 que dient les hommes de moy
et qui je suis ?
s. JEHAN
Hz ont en soy
grand diversité sur ce cas :
les ungz vous dient Helias,
aultres vous dient Jheremie,
13055 les aultres que de mort a vie
Jehan Baptiste est ressuscité
et soutiennent pour vérité
que o'estes vous et aultre non.
JHESUS
Et quel est vostre oppiniou
13000 do moy ? de quel part suis je yssus ?
qu'en dites vous ?
s. PIERRE
Tu es Cristus,
la vray filz de Dieu le vivant ;
ainsi le portons en avant
et nul de nous aultre foy n'a.
JHESUS
13065 Benois es, Simon Barjona ;
la char et sang qu'en toy repose
ne t'a pas revellé.tel chose
que de deité soie yssus,
mes Dieu, mon père de lassus,
13070 si te l'a revellé grant erre ;
et je te dis que tu es Pierre,
et sur ceste pierre feray
mon église et edifiray,
laquelle les portes d'enffer
13075 ne pouri'ont vaincre ne grever,
et te donray pour valoir mieulx
la clef du royaulme des cieulx,
et si ne veil pas oublier
que ce que tu vouldi^s lyer
13080 en terre, sentence sera
qu'au ciel lyé se trouvera,
et tant que deslier vouldras
ou de la sentence absoudras,
de la clef aras pouoir tel
13085 qu'il sera deslié ou ciel,
tant sera ton pouoir haultain.
S. BERTHELEMY
Sire, nous sommes tout certain
que tu n'es Moyse n'Helie,
mes plus; car ta vertu nous lye
13090 que tu es Cristus propi'ement.
13027 De cinq pains et de deux poissons Sans plus C. — 13037-4â maiiqueht G. — 13061 S. P. Qui en double
tu es cristus B. C. — 13068 Mais de dieu seul las peu conquerre B. C. — 13069-70 manquent B. C. — 13079 quanque
B. C. — 13081 Ou ciel A. Et ou B.
SECONDE JOURNEE
171
JHE8UR
Enffans, vous i)arlez sagoment,
mes mou vouloir pas ue cousoime
que vous eu touchez a pai'sonno
jusqucs a mig temps qui vendra.
ISOK) Uriefmcnt aller uiVîn convendra
eu .Iherusalem moy oflrir
a peines et touruicus souffrir
par scribes et pharisiens,
qui trouveront cruelz moyens
13100 de moy mettre a terrible mort;
et non obstant tout leur effort,
au tiei-s jour ressusciteray.
s. PIERRE
Sire, cecy ne soit pas vray,
jamès tel douleur ne t'adviengne,
13105 que la siuagoguo te tieugne
quand la mort dessorvye u'as ;
a quoy cecy ?
JHESUS
Va, Sathanas,
après moy, tu os mon esclandre :
ton entendement ne demande
13110 que les terriennes doctrines
et vcult ignorer les divines.
Qui veult venir a voye active
ny<! soy mesmes et nie suyvo
]iortant sa croix et passion
13H5 en peine et persécution;
qui son ame trop amera
en la fin il la perdera,
et qui pour moy l'ara pardue
en gloire luy sera rendue.
13120 Le filz de l'homme est a venir
en fin pour jugement tenir
et ses angles en sa présence,
et lors par terrible sentence
vouldra bons et mauvais payer
13125 ung chacun selonc son loyer.
Chacun note en son cuer ces ditz,
et certainement je vous dis
que des assistans aucuns sont
qui de la mort ne goustei'ont
13130 tant qu'ilz voient le filz do l'hommo
venir en son règne, si comme
sa majesté le monstrera.
ANUALU8
Siro roy, merveille advendra
se ce Jhcsus longuement rcgue :
13135 il convertit tout vostre règne
par ses pai'oles vertueuses
et fait oeuvres tant merveilleuses
que cueur ne pourroit reciter,
comme de mors ressusciter,
13140 saner boiteux, paralitiques,
aveugles, contraictz, ydropiques ;
brief il fait oeuvre non pareille.
HERODE
J'en os tant parler que merveille ;
si sceussc volentiers que c'est.
13145 Que dient les gens qui il est,
ce Jhesus ?
ANDALU8
Plusieurs ont tenu
que c'est Helie revenu ;
les aultres n'y consentent mye,
mes dient que c'est Jheremie
13150 ou ung des prophètes anciens,
qu'ainsi trait le peuple des siens ;
aultres dient, hommes et femmes,
que c'est Jehan Baptiste mesmes
qui est yssus de son tombeau.
HERODE
131K Cela est menty bien et beau :
je mesmes l'ay fait decoler,
par quoy jamès n'en fault parler.
Mes quoiqu'il soit, cest homme saint
qu'en soy tant de vertus empraint,
13160 si volontiers ne mengeroie
que par devant moy le verroie
pour la grant famé qui en court.
ROUIQON
Espoir qu'il vendra a la court
quelque temps, lors le pourrez voir.
JHBSUS
13165 Je vouldray compaignie avoir
pour aler en certain affaire
en lieu secret ou j'ay a faire :
Pierre et vous, Jehan, vous y vendrez,
et. Jaques, aussi me tendrez
13170 compaignie pour une espace,
elle seurplus en ceste place
attendera uostre retour.
13100 en terrible A. — 13113 Preijrne C. — 13129 cousteront B. — 13136 Pour ses B. — 13138 les scet B. — 13151
Qui lire le peuple <iez sciens A. Quainsi tout le peuple des sciens B. — 13152 Aucuns B. manque C. — 13156 Moy
Mesmes A. — 13163 vendra il B. C. — 13167 manque B. — 13172 Attendra A. B. G.
172
MISTER.E DE LA PASSION
s. PIERRE
Nous sommes ja mis en atour
pour vous suivi r par tous sentiers.
JHESUS
13175 Or cheminons, mes amis chiers,
tandis que nous avons loisir ;
si pouez, clerement clioisir
Tiiabor, la puissante montaigne :
montons dessus, nul ne s'y faigne ;
13180 je m'y veil aller déporter.
s. PIERRE
C'est grand peine de crupeter
montaigne de si grosse masse.
s. JEHAN
A pèlerins tout plains de lasse,
mal chaussés pour peine éviter,
13185 c'est ung grant traveil a porter.
s. JAQUES ZEBEDEY
Le cueur fait l'homme suppoitei'
quand joyeusement se repasse,
mes quand desplaisant on y passe
c'est grand peine d'ainsi monter
13190 montaigne de si grosse masse.
JHE5US
Tant avons penc, la Dieu grâce,
que le plus hault avons saisy.
Veez cy le lieu que j'ay choisy,
mes amis, pour vous informer
13193 d'aucun point qui peust conformer
la foy que vous avez en moy :
tenez vous en ce lieu tout quoy,
et de chose que vous voyez
trop esbayssans ne soyez ;
13200 mes regardez dévotement
l'admii'able contenement
que tantost me verrez sortir.
Icy doivent venir tes habiz de Jhesus blans et
sa face resplendissante comme d'or, et
doivent estre Moyse et Helie devant Jhesvs.
s. PIERRE
Frères, je ne m'ose partir
pour la merveille que je vois.
s. JEHAN
13203 Veez cy de beaulté le droit chois,
veez cy de liesse l'eslite ;
si très plaisamment y habite
qu'il n'est ennoy qui me mefface.
, s. JA :UES ZEBEDEY
Mes frères, regardez la face
13210 de nostre maistre clarissant :
onques soleil resplendissant
plus clerement ne resplendy.
s. JEHAN
C'est ung paradis assouvy,
une gloire excellant et plaine
13215 de voir sa doulce face humaine
passant le soleil eu lueur.
s. PIERRE
Ses habis ont changé couleur:
maintenant sont de tel samblance
qu'oncques nege ne fut plus blanche,
13220 tant sont beaux et délicieux.
HELIE, prophète.
Filz de Dieu hault et précieux,
paix soit a vous, honneur et gloire.
MOYSE, prophète.
Puissance, excellance et victoire
soit a vostre corps glorieux,
13225 filz de Dieu hault et précieux.
JHESUS
Helie, servant curieux,
Moyse, légiste notoire,
bien venez en ceste oratoire
approuver nos faiz vertueux.
HELIE
13230 Pour veoir vostre atour gi'acieux,
sertissons ce lieu peremptoire.
MOYSE
Filz de Dieu hault et précieux,
paix soit a vous, honneur et gloire.
Vos povres amis
13235 qu'en enffer sont mis
forment vous désirent,
plaindent et souspirent
qu'ainsi sont submis
a leurs ennemis
13240 qui les vous fortirent ;
pas ne les martirent,
seulement les tirent
en lieux ténébreux ;
la font plains piteux,
13243 forment désireux
qu'enfin vous remirent ;
oncques ne choisirent
jour si beneurcux.
0 journée très désirée,
13850 bien adjournee et beneuree
pour les humains,
quand nous seras tu préparée,
que la coulpe soit repparee
dont valons mains ?
13255 en pleurs et plains
13181 graoïper C. — 13182-13293 manquent C. feuillet déchiré. — 13193 Daucun fait pour vous B. -- 13202 Icy
se transfigure Jhesus A. — 13222 ou vous B. — 13223 excellente B.
SECONDE JOURNEE
173
(le (louleur plains,
tant gcniist la povro assemblée
et n'en pcust estre desscmblce,
dont je me pleins.
13260 Or ont oy doiilce nouvelle
do la très precellent pucclle
qui t'a porté :
Saint Siiueon le nous rcvello,
saint Jehan Baptiste ne lo celle,
13265 ains a ditté
pour vérité
qu'il a getté
la très jmrc caue et naturelle
à baptizer ta char nouvelle
13270 d'humanité.
IlELIE
() parfaicte bénignité,
com passion dure et amero
• ara celle saintisme merc
quand pourra voir
13275 la i)reciouse char et clerc
endurer martire et misère
pour nous ravoir ;
et doit pour voir
tout cueur sçavoir
1,18280 que l'esci'ipture considère
que la mort sera très austère
a l'ccevoir.
Tu souffreras peine excessive,
la plus dure et penetrative
85 qu'oncques homme mortel porta ;
envie en sera prnmotivc,
Iet ire la judieativo
en qui trop petit déport a,
Et ne cessera
13290 jusqu'elle t'ara
livré a oultrance
en haulte halance
de la croix, arbre de puissance,
qui tout nostre salut fera.
JHESIÎS
13205 Sur mon corps aocomply sera
ktout ce que las prophètes sains,
de foy et d'espérance sains,
ont adnoncé de ma venue;
la promesse sera tenue
13300 que mon pero aux humains a faicte.
s. JEHAN
Vecz cy une gloire pnrlaicte
ou toute lyesse est hantant.
s PIBRBE
Siie, ce lieu ci nous plaist tant
que jamès n'en voulons pni-tir;
13305 se vous lo voulez consentir,
jamès ne nous en l)ougeroiw ;
trois tal)ernacles y ferons,
l'ung poiu' vous, l'aultrc pour Moyso,
et le tiers tendra sa pourpiisc
13310 pour Hclie dedans tenir.
Ici/ vient une nuée couvrir la montaigne.
s. .)AQUE.S ZEBEDEY
Frères, regardez cy venir
la clere nueo qui s'euvre
et toute la montigne cueuvre
et l'enlumine par vertus.
[SiLEtE.]
DIEU LE PERE
Hic est filius meus dilectus
in quo michi bene complacui ;
c'est cy mon fllz, le bien amé Cristus
qui bien me plaist, ma puissance est en ly,
et commande qu'il soit oy
13320 en honneur et grant reverance.
s. PIERRE
0 quel merveilleuse éloquence !
do crainte no sçay quo je face :
il me convient choir sur ma face
par force d'esbayssement.
s. JAQUES ZEBEDEY
13325 Et raoy aussi pareillement :
je pers sens et ma force toute.
/ y prennent congié reveramment les deux pro-
phètes sans parler et s'en xa Moysa ou
limbe et Helye autre part ; et lors vient
Jhesus touchier ses appostres,
JHESUS
Levez sus, enffans, n'ayez doubte :
temps est que nous fas.sons départ.
s. PIERRE
Je regarde de part en part,
13330 mes je ne voy ame en cost estre
fors vous seulement, nosti'e maisti'e.
Ou sont les prophètes tournés ?
JHESUS
Hz sont en leura lieux retournés ;
sus ! frères, ame ne se faigne
13335 do devaller ceste montaigne
qui est bien pénible et bien grande.
Or, mes amis, je vous commande
que la vision advenue
13259 Je les plains B. — 13261 très manque B. — 13268 très man'/KC A. B. — 132S1 m<iH7U« B. — 13286 primi-
tiiie A. — 13297 et de loyaulle lî. C. — 13300 man'/uo A. — 13302 chantant B. — 13316 coinplaïuit B. C— 13326 /cy
s'absconce Moysc et Ilclie, et Jhesus en ses habits j remicr: dist A.
174
MISTERE DE LA PASSION
soit secret en vos cueiirs tenue;
13340 ne la déclarez ja en sommé
jusqu'à ce que le filz de l'homme
sera ressuscité de mort.
s. JEHAN
Sire, vérité nous remort
de confesser' pour ce mistere
13345 que filz estes de Dieu le père,
et de la haulte advision
jamès ne ferons mencion,
se de vostre vouloir ne vient.
JHESUS
Mes amis, aller nous convient
13350 en Jhei'usalcm besongner
pour tousjours le peuple enseigner
et tii'er a paît de salu.
s. THOMAS
Nostre maistre s'est bien voulu
muscer de nous, comme j'entens ;
13355 plusieurs ne sont pas bien contens,
je ne sçay pour quel aohoison.
JUDAS
Aussi n'a il point de raison :
il en a prius trois a sa poste
et nous peust sambler qu'il nous oste
13360 affin que ne voyons ses signes ;
mes a quoy sijnt ces trois plus dignes
que nous ? n'y a cil en tout bien
de nous qui ne les vaille bien ?
et samble qu'on nous fait injure.
s. JAQUES ZEBEDEY
133œ N'ayez pas contre nous murmure ;
nostre maistre scet bien qu'il fait,
et n'a point de faulte en son fait
dont arguer nous le devons.
s. PIERRE
Mes frères, que targer n'avons :
13370 nostre maistre est tout au plus près
du temple.
s. ANDRY
Or allons donc après,
Je voy foison do peuple ensemble,
qui a sa venue s'assemble
oir sa predicacion.
JHESUS
13375 Oste la malédiction,
peuple, qui en toy s'enrracine;
prens la très sainte médecine
qui se fait nommer penitance, ,
car le règne do Dieu s'advance, '
13380 comme dit saint Jehan au désert ; '';
cil qui Dieu de tout son cueur sert
et en sa loy est bien instruyt,
ne peust qu'il ne face bon fruit,
et le fruit qui en sourdera
13385 au règne divin trouvera.
Pharisiens, durs ypocrites,
les lois des prophètes escriptes
preschez a la gent populaire ;
de quoy vous ne voulez rien faire ;
13390 fardeaux leur sçavez apprester,'
dont vous ne voulez rien porter ;
très bien sçavez vous regarder
aux cerimonies garder
qui sont grosses et corporelles,
13395 mes les loys espirituelles
sont en vous faillies et mortes ;
le monde servez et ses sortes
et de Dieu servir ne vous tient ;
par dehors vostre corps maintient
13400 signe de penitance dure,
et par dedans c'est tout ordure,
et comme ung monument pai'c
par dehors de beau drap doré
et par dedens pert la cliarongne.
13105 Ypocristes, ceste besongnc
en la fin vous decepvera
et chacun en recepvera
de tel déserte tel salaire.
JHEROBOAN, premier pharisien.
Seigneurs, grandement doit desplaire
13410 aux scribes et pharisiens
et brief a tous les citoiens
contenus en la sinagogue
le despit et mauvais prologue
que ce Jhesus fait sans séjour
13415 On voit que de nuit et de jour
il blasmc nostre loy haultaine,
et samble qu'il ait pi-is ataine
de destruire nostre oi-donnance,
et croy que s'il avoit puissance
io^A^^? '^"'''''' '^•^ ^^^^ ^* sembler A.- 13371 donc mangue A.- 13388 r'resnhier B.- 13393 O vot seigneuries C-
13*03 de drap prépare A. - 13411 Et briefment a tons citoyens B.- 13414 sans science B.'- 13ilU croy Manque A,
SECONDE JOURNEE
170
13*80 volentiei's la voiiUist emblor.
Si fust bon de nous assoniblcr
jjour traictier de ceste matière,
affin de trouver la manière
que le peuple eu fust doposché.
MARnocEUS, deuxième pharisien.
iMïj Nous en sommes tant erapesché
briefment que je n'en sçay que dire.
11 ne scet parler sans mesdins
de nostrc appareil suffisant;
luy qui est povre homme et nieschant,
13430 connnont a hardemcnt en soy
de blasmer princes de la loy,
les présidons et les docteurs,
gouvernans et législateurs
en qui tant de sons se compront ?
NAASON, troisième pharisien.
13435 C'est folie qui le surprent
et qui en fin le trompera
par la mort qui Tatrapiiera
a dueil et a conflusion.
ELUCHIN, quatrième pharisien.
C'est une malédiction
134'i0 qui temprement luy courra sus
se nous en venons au dessus,
et ouy, combien qu'il demeure,
je me doubto bien qu'il n'en meuie
en finalle conclusion.
BANANIAS, cinquième pharisien.
13445 Pouoit il trouver action
plus briofve pour le depescher
que do nos cditz empeschcr
et la guerre a nous entreprendre ?
Pire party no pouoit prendre
13450 car se sa cause est assortie,
nous serons juges et partie
pour traictier sa mort, s'il le fault.
JOATHAN, sixième pharisien.
Mes encor le plus grand dcffault
que je sache et qui plus luo picque,
13455 c'est qu'il nous reprend en publique
si tost que nous sommes venu,
et tantost le peuple menu
qui croit bien de legior et trop
nous on prise de moins boaucop ;
\ 13460 s'est nostre honneur mendre tenue
NACHOR, septième phirisien.
Pis y a : nostre revenue
en diminue et nostre avoir;
car jadis nous soullions avoir,
nous I'hari.siens, la cryeo
13405 d'estre sainte gent et riglee,
de faire jeusnes, abstinences,
devocions, obédiences,
do tomr la loy au destroit,
et aiiLsi chacun ministroit
13470 offrandes largement au temple ;
chacun prenoit sur nous exemple,
nous estions appelés seigneui-s
et avions les pi-emiers honneur» ;
et or par ceste homme mauldit
13175 nostre fait est comme interdit :
chacun le suit, chacun l'honneurc,
tout luy vient, riens ne nous demeure,
tout le peuple luy -fait grant chiere
et nous sonmies mis en derrière :
13480 il cure et sanc hauit et bas
et fraint nos loys et nos sabas :
encor n'en osons nous parler,
car qui l'en vouldroit mutiller,
nous serions tantost assailly,
13485 car il a le peuple pour ly
qui est totalement séduit.
NATHAN, huitième pharisien.
Se nostre exploit bien se conduit
et sommes tous d'une alliance,
il est bien eu nostre puissance
13490 de luy rabaissier son oultrage ;
et l'en voit aussi par usage
telz séducteurs régner ung temps,
soit quatre, cinq, six ou sept ans ;
mes enfin vient justice vraye
13495 qui de leurs désertes les paye,
et vient en temps et en saison
leur maléfice a marrison;
et croy qu'ainsi luy eu vendra.
JACOB, premier scribe.
Croyez qu'a uous pas no tendra :
13500 n'a cil de nous qui ne s'emploie
de trouver moyen qu'en le ploie
a martyre et a passion ;
laissans toute occupacion
qui nous en pourroit retarder.
JHEROBOAN
13505 Vous estes tenus de garder
la loy, ung chacun en droit soy ;
vous estes scribes de la loy :
emploier vous y devez tous,
car il vous touche comme a nous.
13423 tout C— 1343Ï les discuteUis G.— 13433 Conducteurs et C— 13442 Et ojlB combien quil diffère B.C.— 13443
infère B. G.— 13444tres mauuaise B. C— 13450 se manqite C— 13461 II y a pis C — 13469 nous donnait C— 13471 a
neus B. C— 13479 aU derrière B.— 13497 Tout leur maléfice a raison A.— 13500 qui seinploye A.— 13503 Laissons V.
176
13510
MISTERE DE LA PASSION
13520
13525
et comparez ses maléfices.
JORRAN, deuxième scribe.
Mes plus, car par luy nos offices
eu vallent moins la quarte part :
le peuple do nous se deppart
pour suivir ce raeschant infâme,
13515 et se ne fust crainte, il n'est arae
qui ne laissist nos drois aller
pour le suivir.
MARDOCEUS
A brief parler
tout la sinagogue s'en sent,
et n'y en a pas ung de cent
qui ne soit séduit par ce point,
et cncor je no doubte point
qu'il n'empire de jour en jour,
car il s'efforce sans séjour
de nos subgetz traire et séduire :
a brief, il nous le fault destruire,
ou tout nostre fait ne vault rien.
YSACAR, troisième s.ribe.
Mes soigneurs, vous dittes très bien
et notalilement proposez ;
mes les moyens pas n'exposez
13530 de venir a nostre querelle :
pour fournir une chose telle,
est bien requis ung grant conseil.
Cest homme cy est non pareil :
au peuple beaux documcns donne,
13535 et quoy qu'il soit de sa personne,
il fait merveileuses verlus :
il redrosse clops et tortus,
paralitiques médecine,
les gens aveugles enlumine ;
135'.0 plus fort : aucuns font leurs recors
qu'il a ressuscite les mors ;
briefvoment il n'est mal si grief
qu'il ne garisse tost et brief.
Or voit ceste oeuvre ncmpareille
13545 le peuple, et la tient a meiA'cille,
et bien l'ayme et pour saint le tient
pour le grant bien qu'il en l'etient :
cai' l'homme, s'il n'est imparfait,
doit amer cil qui bien luy fait ;
13550 et donc se le peuple apparçoit
que de par nous la mort reçoit
sans tiltre, sans discussion, '
sans tesmoingz, sans probacion,
mendre bien de nous en tendra.
13555
13560
NAASON
Voire, ou peust estre le vouldra
délivrer de fait ou de force,
et se leur puissance s'efforce
nous le pourrons bien comparer
tant qu'on ne pourroit reparer
le dommage qui en vendroit.
ELÏACHIN
Naason, vous parlez a bon droit,
car le peuple est sedicieux,
si n'est pas le fait gracieux
de celuy qu'ung commun encharge ;
13565 et pourtant il fault trouver charge
sur ce Jhesus et mortel vice,
et puis le livrer a justice,
et lors n'y vauldra l'opposer.
BANANIAS
L'en ne sçaroit mieulx proposer :
13.570 Elyachin, je vous enssuis.
JOATHAN
De vostre querelle je suis,
ou ne trouve point qui mieulx die,
NACHOR
11 n'est ame qui vous desdie,
chacun l'accorde comme vous.
ELIACHIN
13575 Or regardons donc entre nous ;
s'il est qu'il le faille juger
de quoy le pourrons nous charger ?
icy gist la difficulté :
de quoy peust il estre noté
13580 pour le bien vivement attaindre ?
NATHAN
Cela ne nous fault il pas craindre,
nous avons des filtres foison :
tout premier par une raison,
car il est sceu qu'en plusieurs pas
1S85 il a commis plusieurs ti-espas
contre la loy pour la casser,
comme du saljat transgresser
et y oeuvrer, comme je treuve,
que la loy deffent et repreuve ;
13590 si peust estre aussi entechés
qu'il veut pardonner les péchés,
par quoy il ne peust contredire
qu'il se veult Dieu ou son filz dire,
qui est blasphème tout appert
13595 et beaucop de venin couvert
qu'on luy pourra lors ramener.
13518 sasent A. — 13525 et y nous le fault A. — 13537 tors C. — 13551 deux mors B. — 135/i2 Brief il nest pas
mal tant fort tenans B. C. — 13513 Dont il ne cure tous venans B. C. — 13546-7 le tiennent saint Pour le grant bien
quen lui remaint C. — 13549 cil a cil B. — 13553 tesmoignaige B. — 13564 quen A. — 13568 vendra B. — 13571
Très bien de vo B. — 13573 le desdie C. — 135S3 Tous prouuez B. C.
SHCONDIC .)()L'KNKH
177
YSACAR
N'y a 'lito 'f pi'Pndi'o et mener
et le faire eu chartre saillir ;
alors ne pourrons nous faillir,
fMÀM car se n'avons fais criminaulx
avaiit, les ferons tous nouveaiilx
par faulx tesnioingz ou aultrenient,
qu'il ou meure viUaiuement
connue ung faulx meurtiier recreu,
|i»Oj car tousjours nous serons creu
ou il n'ara point d'audience.
.IHEKOBOAN
Uemourons sui' celle sentence,
qu'en quoique lieu qu'il soit trouvé
coni homme infâme et reprouvé
f 13610 soit admcné en consistoire.
NicoDEMiîs, pharisien.
Seigneurs, il n'est pas bien notoire
que les moyens qu(! vous queroz
soient par droit délibérés
du fait de ce Jhesus icy,
[l36ij car posé qu'il fust ore ainsi
qu'il eust plus grans mefl'ais commis
que ceulx que luy avez sus mis,
la loy nous d'JFent et remort
de juger a l'homme sa mort
El3U20 ne discuter do son offence
jusqu'il soit oy en présence,
affiu qu'il soit questionné
et sagement examiné,
car il est de droit qu'il rosponde,
|l36ij affiu que le juge se fonde
dessus sa deposicion.
Saulve meilleur oppinioii,
par mon conseil soit appoiiitié,
avant que de riens soit traittié
|l3630 du fait de la mort d'iccluy,
qu'il soit premièrement oy,
et peust estre qu'en sa deffence
vous trouverez si peu d'oft'euce
qu'a mort ne l'oserez juger.
MARDOCEUS
flSKSô Tant qu'est de l'oir langager,
nous en sommes tous endurcis ;
nous contcndons qu'il soit occis
pourtant que nosti'e loy blas[)hcme.
Nous sçavons très bien, Nicodeme,
\VXA{) que le portez a rccellee
l)our ce qu'il est de Galilée
et vous estes d(> son pays ;
vous csU s prince des .luifz
qui les esci'ii)tures sçavez :
13645 cerchcz les bien, vous ne trouvez
que prophète de cougnoissaucc
en Galilée ait prins naissance :
le pays en est fortuné.
Or en est ccstuy .Ihcsu» né ;
ia(i50 si peust conséquence esti'o faicte
qu'il n'est Cristus ne viay prophète :
si ne s'i fault point arrester.
NAA8(JN
J'ay advisé pour le tempter
par une voye assés exquise :
136S5 nous avons une femme prise
et en adultei'C trouvée ;
bon est qu'elle luy soit menée
au temple voir qu'il en dii-a.
Soubtillement respondera
13660 s'il évite cesto falacc :
s'il dit qu'elle doit avoir grâce,
il dcsdit la loy de Judée
qui dit qu'elle soit lapidée
et l'ordonne a perdre la vie ;
13665 s'il dist qu'elle a mort desservyo
ou doit souffrir lapidement,
il se desdit et se desraent :
car en ses sermons no rocordc
que doulceur et miséricorde
13670 et que [litié soit en vigueur,
et il usera de rigueur
qui luy sera ung grand esclandre.
ELIACHIN
Veez la si très bonne demande
qu'on ne sçaroit trouver meilleure.
IIANAMAS
13CT5 Allons la fournir de cestc heuie,
tandis qu'il est au temple assis,
et affiu qu'il soit plus pensis
se le peuple le voit conffus.
Icy mectent la fetnmc ou millieud'eulx tous
mr la terre, et dit
NAASON
Cher maistiv, oncques repiis ne fus
136S0 do sentence non véritable,
et monstre ta bonté notable
que tu es de hault lieu venu.
Sur ung cas qui est advenu
nous voulons bien oir ta voix :
13685 ceste fennne icy que tu vois
a esté prise en adultère ;
13B97 In tHiinr/uc A. — 136(W recpu C. — ISTO') nous to\is A — ISfilfl mciir ou A. — '3C19 uiig lioiiiiiu' n mort A. --
l'rf()35 de 1h loy lengaiger C. — 13645 trouuere)! U. C. — 13656 dadultere achoiaonuee B. C. — 13686-87 aduUaire Or
nous voult moyse escripre U. G.
Pas. 12
178 MISTERE DE
or nous dist Moyse et dcclcro
en la loy qui fait a garder
que telz gens devons lapider ;
i3690 mes avant l'execucion
nous pussions bien devocion
d'en ouir ce qu'il vous on samble,
car nous congnoissons tous ensemble
que vous estes sage et soubtil.
Icij escript Jhesus en terre de son doit.
JOATHAN
13095 Mes quelle oppinion prent il
d'escripre de son doit a terre ?
NACHOR
Je n'y sçay apparence querre :
dont vient ryniaginacion ?
Maistre, saulvez la question
13700 que ce seigneur vous a touché.
JHESUS
Cil de vous qui est sans péché
et sans faulte viengnc bon erro
et gette la première pierre :
autre sentence je n'y couche.
NATHAN
13705 11 a proféré de sa bouche
les propres paroles et dittes
qu'il avoit en la terre eseriptes,
et nous a bien soUu et brief.
laj Jhesus escript de rechef de son doit
en terre.
JACOB
Encor escript il de rechief :
13710 ne sçay d'où vient ceste funiee.
JHEROBOAN
C'est de sa rage acoustumee,
qu'il ne daigne parler a nous.
JORRAN
Comment, seigneurs, ne voyez vous
quelz escriptures il nous point ?
13715 11 escript tout de point en point
nos péchés, vous le voiez bien.
MARDOCELS
J'y recongnois très bien le mien
qu'oncques a personne ne dis.
YSACAR
Si fay je les miens plus de dix,
137!;0 qu'il a escript en certain pas.
JHEROBOAN
Et moy.
NAASON
11 ne m'oublye pas.
LA PASSION
et atant me pars de la fcste.
ELIACHIN
Je voys après.
BANANIAS
Je suis bien beste
de moy tenir en ces partis ;
13725 tous mes compaignons sont partis
a ducil et a confFusion.
JOATHAN
Mes par quel revelaciou
peust il congnoistre nos meffais ?
grant admiracion en fais ;
13730 or est la chose bien nouvelle.
NATHAN
C'est le doable qui luy revelle ;
il use de l'art magicalle,
et sera la chose très malle
se nos haulx princes n'y pourvoient.
JHESUS
13735 Femme, ou sont ceux qui t'accusoient
tu n'as d'amo esté condampiiec.
JHEZABEL, la pescherresse.
Sire, grant grâce m'est donnée,
considei'é mon grant oultrage ;
et par vostre soubtil language
13740 ilz n'ont osé sur moy assoir
leur sentence.
JHESUS
Tu as dit voir,
et comme ilz ont Jîait je feray,
car point ne te condampneray :
va et te garde de meffaire,
i:f745 ne pèche plus, veille bien faire,
et bien t'en vendra en la fin.
JHEZABEL
0 prophète doulx et begnin
ou gist toute miséricorde,
de mon grand méfiait me recoi'de
13750 ou mon corps s'estoit adonne ;
or m'est doulceraont jiardonné,
par quoy tant que je viveray
au vice ne retourneray
dont tant ay esté diSamee,
13755 et est ma volenté fermée
de servir Dieu dorénavant.
SIMON, le pharisien,
Grant temps a que suis désirant
13688 qui fut B. — 13708 en brief G.
B. Et moy aussi C. — 13730 Et est G.
déchiré.
- 13720 a manque B. — 13721-22 man'iuent G. — 13723 Et moy apivs
13746 ne C. — 13750 ordonne B. — 13T57-13866 maivjuent C. feuillet
SECONDE .lOURNEE
179
d'avoir Jhesu» on ma poui'iirisc :
le peuple pi'andcment le pi'i«o,
13760 car il fait des vertu» foison ;
maintenant ay Iwnnc achoison
quand je le voy en ma présence.
Ne sçay s'il fera conscience
de venir mon lieu visiter ;
13765 devant luy me vois présenter,
si luy fcray une l'equeste.
Sire, j'ay ma viande preste
et bien prépare'; mon manoir,
s'il vous y plest venir manoir
13770 et y prendre la pacience,
selonc mon petit do science
je vous tendray honnestemcnt,
et vous pry aniourousemeut
qu'il ne me soit point escondit.
JHESU8
13775 Simon, ainsi que tu l'as dit,
ta demande soit accomplie.
SIMON
Or me suyvez, je vous supplie,
et admenez toute vo gent,
et tandis seray diligent
13780 d'aller faire la preparance.
JlIESl'S
Frères, nous avens grant pcnance
souffert ce jour, je le sçay bien :
allons sur le pharisien
prendre nostre rcffection.
s. MATHIEU
13785 De toute nostre affection
accomplirons vostre vouloir.
SIMON, pharisien.
Or ça, sire, venez vous seoir
et toute vostre compaignie,
et nous ferons cherc jolie
13700 de telz biens que pourrons avoii-.
RUBEN, juif.
Icy ne gaignons riens a voir,
chacun prengne place a la table.
AIÎIRON, juif.
Ue ma place me vois pourvoir,
icy ne gaignons rions a voir.
SAKPRET, varlet.
13795 Ça, s'il fault riens, je fais devoir
d'en servii-, s'il est proftitable :
buvez, foictcs chero notable,
mon maistre le veult.
JUDAS KCARIOTH
Il dit voir :
icy no gaignons ri«ns a voir,
13800 chacun prengne place a la table.
SIMON
Jhesus, prophète venei'able,
vous me soiez le bien venu.
SAFFRET
Chacun tranche di-u et menu
tant que viande durera :
13805 s'il n'en y a, on en rara,
j'ay fait bonne provision.
MAUELAINE
Or voy je la confusion
des grans pèches dont je suis plaine }
or voy la malédiction
13810 de l'horreur ou poché me maine ;
Or voy je la destniction
de ma povre nature humaine,
et s'il n'y a provision,
en malheure fus Madelaùie.
13815 Madelaino suis je nommée,
jadis gente et bien renommée
de bonne goneracion ;
Or me suis je en tout mal fermée,
tant que partout je suis blasmee
13820 pecherresse en perdicion ;
Ma beaulté, ma perfection
est tournée en tel vitupère
Que c'est alwminacion
par quel moyen et raocion
13825 j'ay tant courroucé Dieu, mon pore.
<) dolente et mesohantc famé,
o des aultrcs la plus infâme,
par quel point pourras éviter
La dure et destresseuse flamc
13830 d'enfer, ardant le corps et l'ame
sans jamès ame respiter?
Ta conlpe t'y veult ja citer,
justice t'y veult inviter,
raison, verit<; t'y proclame ;
13835 II n'est en moy d'y résister
s*a vous ne me viens présenter.
13769 bil vous plaist dy li. — 13770 Ce jour prcmirez la B. *- 18774 point manque U. — 13778 tout vostre A. —
13792 prende B. et plux hin. 138110 prengne B. — 13819 sUis Innommée B. — 13821 II mniiqttc un lers pour la régu*
lorité ih: la strophe A. B. — 13835 a moy B.
180
MISTKRr: DK LA PASSION
niisci'icordo, liaulto daine.
Rivicrc de miséricorde,
par qui tout pécheur se racoide
las'.o a Dieu pour son péché laver,
Ruisseau do paix et de concorde,
pour amollir la dure corde
de justice qui peust grever,
en quel lieu vous pourray trouver ?
13845 Je vous quicrs assés inceitainc,
mes Jhesus en est la fontaine
comme j'os en tous lieux prouver.
Et pour ma pensée achever,
jamés jour je ne cesscray
I3S50 jusqu'à ce que trouvé l'aray ;
c'est ccUuy qui me pei^st donner
grâce et ma coulpc pardonner,
et je le croy pour ma partie.
Or suis de nouvel advertie
13855 qu'il est en l'ostel de Simon,
le pharisien de grant nom :
s'y vois sans rester longuement
atout ma boitte et l'ongnement
qui est moult cher et vertueux,
13S(J0 duquel son saint corps précieux
sera atouché et onoinct.
SAKKRET
Qu'est eecy ? vous no buvez point :
ilz sont simples connue pucelles ;
et buvez fort : vignes sont belles,
138fô et pensez do vous appliquier.
SIMON
Mon cher maistre, je vous requicr
et vostre compaignie chère
que vous fassiez très bonne chère,
et vous me ferez bien joyeulx.
JHESUS
13870 Simon, les biens sont plantureux,
s'est la feste bien maintenue.
MADELEINE
Helas ! or suis je parvenue
a l'ostel que tant desiroie,
1 1 parfois mon bJn et ma joie,
13S75 le recours de ma giant dcstressc,
et si n'ay cueur ne hardiesse
de luy declaircr mon affaire.
Povre famé, que dois tu faire ?
seras tu hardie d'entrer
138S0 et ta maladie monstrer
a cil qui en est le vray mire ?
lînti'er ! comment l'as osé dire ?
pecherrossc désordonnée,
a tout mal faire habandonnee,
13885 se doit elle trouver en place
devant tant digne et sainte faco
comme le benoit filz do Dieu ?
suis je digne d'occuper lieu
devant le trésor de tous biens,
13890 qui suis puante comme fiens
])ar péché qui ainsi m'attourne ?
c'est mon meilleur que je retourne.
Retourner 1 femme, que dis tu ?
cueur vuide de toute vertu,
13895 qu'est il de ta bouche sailly ?
aras tu donc le cueur failly ?
veulz tu faiie ta demourance
au chasteau de désespérance ?
veulz tu prendre ta mansion
13900 au puteau de perdicion ?
mourras tu de soif asservye
devant la fontaine de vie ?
Nennil, il n'yra pas ainsi :
tu Tiras requerre mercy
13905 franchement, puisque tu l'as dit,
car oncques il ne l'escondit
a cueur conffès et repentant ;
helas ! et je me repens tant
qu'a mal ay volu consentir !
rjgio Ne tendra il qu'au repentir ?
ha! si fera, car veez cy honte
et paour qui si fort m'affronte
qu'a peu qu'ilz ne me font retraire.
J'ay deux poins de sorte contraire :
13915 l'ung est que se j'entre dedens
esclandrir pourray plusieurs gens
et le saint homme qui y dine,
et aussi que j'en suis indigne :
et d'autre part se je remains,
139i0 mes péchés vilz et trop grevains
me demourront, et en fin mort
éternelle, qui me remort.
Le meilleur sens que je y voie
13830 qui iifiniu'' A. — 13840 son min'iw A. — 13840 qui pst B. — 13848 querelle B. — 13849 resleraj B. — 13S59
mon cher A. — 13871 Est la l'esté B. Et si est la C. — 13875 liesse A. — 13880 luy demonstrer C. — 13883 que je
suis C. — 13S90 ,Ie suis A. — 13990 ponsseau B. de ta niencion C. — 13901 soyef C. assoyuie B. — 13915 se man-
'juc G. — 1:922 qui fort me C. — l.i92t ronseil que jy C.
SF.CdNDr. .lOURM'.r.
l«l
cVst (le tenir luoycnno voie ;
l.'iftjr. j'ontrerny détiens voireiiieiil
mes ce sera secrètement,
et ne soray pas au dessus,
mes aux \nc/. du très doulx Jliosus
in'iray (j^oter tout en pleurant,
i.WM hund)lcnient inercy requérant
du nieffait qui me (çriefvo moult.
Icy entre dedens aux piis Jliosus, et les oinct
et lavi' de larmes, et les essuie de ses chtf-
rei0\
SIMON
Saflfret, verso du vin partout,
il me samble qu'amc ne boit.
SAFKRET
11 ne fault que lever le doit,
13935 je suis prest comme ung chandelier.
Ri:HEX
Simon, a vérité pai'ler
ceste compaiguie est iufame.
SIMON
Comment, Rulien ?
nUBEN
Ue ceste famé
qui est entrée en ceste court:
13W0 vous sçavez la voix qui en court
et comment elle est diffamée.
ABIRON
Elle est si très mal renommée
que c'est grand pitio de son fait,
et s'a mon gré en estoit fait,
13915 elle allast quérir auti'es lieux.
nuHEN
Vostre honneur n'en vault pas de miculx,
vcu la compagnie haultaine.
SIMON
Ce me samble a voir Madelaine,
qui est si plaine do jeunesse.
ABIRON
i;t9jfl C'est voir, c'est celle pecherressc,
qui en Judée n'a pareille.
SIMON
Kt comment dea, je m'esmerveille
comment Jhesus que l'en renomme
tant saint et tant vertuable homme
13955 la seuffre si près aproucher :
c'est bien pour son lo» reproiichor :
j'en ay en mon cucur gi-ant anguoisse,
car posé qu'il ne la conguoisse
de renommée ne de famé
13900 (non obstant qu'elle est tant diffamo
que tout lo monde le rep(te),
nentinoins s'il estoit vray prophète,
comme plusieurs ont dénoncé,
cecy ne luy fust pas musse,
13965 aiii» en eust vraye eongnoissanee.
JHESIIS
Simon, ne te tourne a grevance,
img i)eu de chose t'ay a dire.
SIMON
Or le dis tout a ta plaisance :
volontiers l'cscouteray, sire.
JHESUS
13970 Je te dis que jadis estoicnt
deux dobteurs qui foison dévoient
de finance a ung usurier :
Les debtes de l'ung qui restoient
l)ien a chiq cens deniers montoient ;
13975 l'aultrc a cinquante a nombre entier.
Or n'ont do quoy paicr tous deux ;
s'il leur quitte que riens n'y clame,
si te demande lequel d'eulx
plus ferme son créditeur aine ?
SIMON
13980 11 me samble a mon jugement
que cil, a qui plus largement
a donné, luy est plus tenu.
JHESUS
Juste jugement as rendu
et cecy vient a mon entente.
13985 Vois tu ceste femme présente?
quand en ta maison suis entré,
tu ne m'as pas administré
de l'eaue pour mes pies laver :
et celle est venue arrouser
i;ie90 de larmes a grant haboudance
mes pies par vraye penitance ;
baisié ne m'as pas a l'entrée :
ceste de])uis qu'elle est entrée
ne scet son vouloir appaisier
l.'«)95 de mes piez tenir et baisier ;
tu n'as pas enoint mou chief d'huile :
ceste, comme sage et soubtille,
a enoint mes piez souffreteux
d'oingnement cher et précieux ;
l'.OOO dont pour cause qu'en moy a mis
139*2 si mau'/ue C— 139iC de ni'xniw C. — 13M7 Vme A. C — 13955 atoii.'liicr A. — 13959-00 foriiip. difforme A.
Np ses fais ne sa renommée Nonobtant elle est tant diffames C. — ia:6SOr dites a vostre C— 13975 .1 ] en B. C. — 139TO
l'hisser» son créditeur nvnie C. — 1398S I.tiv clonne C— 13983 masC — 1398S Y>p manqiir B. C. — 13989 Que cette C.
18g
MI STERE DE LA PASSION
très grant amour, luy sont remis
plusieurs péchés et paidennés.
Tu as tes jugemons donnés
que cil a qui l'en fait mains grâce
llOOS doit moins amer cil qui la passe :
or a ceste amour très parfaicto,
et grant grâce aussy luy est faicte.
Femme, pars toyet va en paix :
pardonnes te sont tes meffais
14010 et remis, je te le dénonce.
RUBEN
De quoy nous sert ceste responce?
qui est cest homme qui sermone,
qui ainsi les péchés pardonne ?
ic'est trop parlé en président.
ABIRON
14015 C'est blasphème tout évident
contre la majesté divine ;
je n'entendz point ceste doctrine :
c'est parlé trop parfondement.
MADELAINE
Je vous remeroy humblement,
14020 sire, de la miséricorde
qui par vostre doulceur s'accorde
que grâce me soit départie,
et des maintenant je vous prie
que bien souvent nous venez voir :
14025 corps et biens et tout nostre avoir
pour vous servir obligeron,
Marthe, ma seur, et Lazaron,
mon frère, qui ne vous het pas ;
logis avons de grmit compas
14030 et richesse assés, Dieu mercy ;
encor serons plus enrichy
de vostre visitacion.
JHESUS
Marie, j'ay intencion
de vous aller brief visiter.
MADELAINE
14035 Dieu nous veille grâce prester
que brief vostre veil s'i assigne,
et aussi que nous soions digne
de vous dignement recevoir.
JHESUS
Simon, de vostre bon vouloir
14040 vous mercions d'affection,
car tous en predicacion
allons chacun eu son degré.
SIMON
Mon cher maistre, ayez prins en gré :
l'ostel et tout le tenonient
14045 est eu vostre commandement
toutes les fois qu'il vous plaira.
MARTHE
Ne sçay que nous signifiera
l'atour dont Marie est ornée :
^ il a passé mainte journée
14050 que je ne la vis ainsi simple ;
mes de quoy luy sert ceste guimple
sur son palliot surauré ?
LAZARON
Elle a le vis tout esplouré :
d'où vient ceste merencolie ?
MARTHE
14055 11 me poiso de sa folie
tant que d'ennoy le cueur me font.
MADELAINE
Marthe, chère seur, mes jours sont
tournés en lamentacion :
divine visitacion
l'iOfio s'est dedens mon cueur imprimée,
qui de tous poins m'a réprimée
de la povre vie et immonde
que j'ay mené long temps au monde ;
mon cueur est tout a Dieu enclin :
11065 Jhesus, le prophète begnin,
m'a pardonné tous mes deffaultes.
MARTHE
Nouvelles sont bonnes et haultes,
Marie, Dieu en soit loué.
LAZARON
Vous avez bon conseil trouvé
14070 et grant bien vous en ad vendra.
L AVEUGLE NE
Helas ! qui me conffortera ?
helas ! et qui m'apportera
quelque povre petite aulmone?
Helas! et qui m'estrainera?
14075 mon corps pour luy Dieu priera
que chevance et santé lui donne.
14003 oy donnez G. — 14012-13 Ces deux rers dans A. viennent oprès le vers 14017. — 14020 Cher sire. C. — 14024
me venez C. — 14025 tout mon C. — 14029 Nous auons logeis a compas B. C. — 14053 visaige tout empleure G. —
14055 de sa grant C. — 140r>7 jeuz 15. yeux G. — 14059 Dune grant visitacion G 14066 pardonnecs mes B. Qui ma
C. — 14070 sourdera B. sauldra C. — 14075 cueur C.
SRCONDR JOURNEE
183
iiosn
11090
U09J
Je ci'io et permoiino,
je prie et jni-gomic j
j'ay beau sermonner,
Jo 110 voy i)crsonnc
qui son oueiir adonne
a me liciis donner.
11 ne tient pas a demander :
de braire mes voisins estonne.
11083 Ho ! a ce povro nveufflo n('',
tant potitemont fortuné,
veillez quelque donier donner I
helas ! il ne scet que disiier,
et s'a toute vuide sa i)cau.
Je taste cy sui' mon dra])cau
se l'en m'a jette quelque maille :
oy, tantost, baille luy baille,
il n'y a denier ne demy :
ung povre homme n'a point d'aniy,
si no s'i convient point attendre.
Hé ! veillez vostre aulmomie estendrc
sur le povre qui ne voit goûte.
A ce jour anio ne m'escoute,
ma teste pour néant se combat.
s. PHELIPE
Cest aveugle fort se débat
et fait sa voix voiler au vent.
s. JUDE
Je cuide qu'il n'a pas souvent
intanco tousjours a son aise.
s. RERTHELEMY
Nostro maistre, no vous desplaise
Uia5 s'ung point je vous veil demander :
je vous ay veu fort regarder
ce povre homme icy avougly ;
qui pécha, ses jjarens ou ly,
dont il est ainsi mal mené
14H0 comme si d'estre aveugle né?
oe luy vient par aucun péché.
JHE.SUS
Luy ne ses parons n'ont péché
chose dont tel privacion
aist eu par generacion ;
ains a reste faulte ap])orteo
affin que soit manifestée
et en luy se monstre et descucuvre
la voituable et divine oeuvre.
A l'oeuvre me fault estre mis
de mon ])ere qui m'a transmis
tandis que la journée dure ;
UlOO
un
14120
la nuit vendra binino et obscure,
que quand l'honime voulilra ouvrer
alors n'y pourra recouvi'er,
1MÎ5 et par cesto nuit proprement
s'entend le dermcr jugement,
car apn'-H icelluy temporo
oeuvre ne sera meritoro :
tant qu'on ce monde durer puis,
14130 sa parfaicte lumière suis
et sans luoy n'est il riens qui voie.
Icy Jhesus crache en terre et fait de la boe de
sa salire et de la terre, et enoinct les yeux
de l'aveugle né.
Mon aniy, adresse ta voie
es nageoueres de Siloé,
et tes yeulx qui Sont enboé
14135 lave par bonne diligence.
i,'aveugi.e
Cher sire, en vostre confidence,
es baingz de Siloé iray
et mes deux yeulx y laveray,
car ung très grant bien y espoire.
14140 Dieu doiiit que la chose soit voire .
j'y vois tastant a l'aventure.
Helas ! et n'est il créature
qui me conduit oultre ces rues ?
ce sont bien paroles parduos,
14145 mauvais garçons me desvoiroient
plus tost qu'ilz ne m'y conduiroient ;
j'y vois tout seul, c'est mon meilleur.
Se je feussc ung petit seigneur,
vai'lès me menassent par tout,
14150 mes povres gens n'ont [wint d'escout :
qui a assés, tout bien l'assault,
et qui n'a riens chacun luy tault ;
povres gens ne sont nés de merc
que pour porter peine et misère ;
14155 quand ilz ont bien, c'est contre droit.
Dieu mercy, j'ay allé si droit
que suis venu a mon désir.
Pour accomplir le bon plaisir
de Jhesus, cy m'abesseray,
14160 et mes yeulx tous deux laveray
ainsi qu'il le m'a commandé.
Icy se lace et reçoit reue.
1408S A moy B. C. — l'iOOfi mon aiilmonp lî. — I4n<17 poure homme A. — 14098 A cf mur C. — 14103 du tout
n. 0. — 14107 Cest liommc A. — 14109-10 Dont tel faillie hiy soit esi-h<-ue Que ilestre ne priue de veiie B. C. -
14122 brieue et A. — 14120 Jentens B. — 14)38 dresse la voye C. — 14133 Ens nogueres de siboe B. Et ten v« es
banoueres do syloo C. — l'.145 my saryeroient C. — 141SS fault B. — 141S7 Que jay attalnt a C.
184
MISTKRK DK LA PASSION
Or ay je le command gardé
de .Ihesus le prophète saint,
dont ung trcs graiit hien me reniaint,
mcû et m'a bien sa grâce estendue
quand ma veuc m'est huy rendue.
Loué en soit Dieu et son nom
et le prophète de renom
a qui Dieu donne tel vertu !
MOAB
U170 Neptalin, que regardes tu
eest homme qui s'en va de tire ?
NEPTAI.IN
Qui est il ?
MOAB
Se j'osasse dire,
j'eusse jugé tout maintenant
que c'est ce povro mendiant
m75 qui a passé cinq ans ou six
sur le chemin du temple assis
tousjours pour demander l'aumonne.
NEITAUN
11 pourtraict bien a sa personne,
et a voir son conteneniont
•l'ilSO je dy que c'est il proprement ;
aultre differance ne boute
fors que l'aultre n'y veoit goûte,
et cestuy il voit bel et liien.
MOAB
Quant au veoir, cela n'y fait rien,
l/.i85 car posé qu'aveugle fust né,
espoir l'ara Jhesus sané,
comme il fait de vertus très belles.
RU BEN
Vous tenez bien folles querelles
de dire que ce soit celluy.
ABIRON
l'ilOO II pourtrait assés bien a luy
qui de voir ne seroit soubtil,
mes de croire que ce soit il
c'est grant folie et grant besoing.
NEPTALIN
Messeigneurs, il n'est pas si loing
14195 que ne le puissions bien savoir.
l'aveugle
Beaux seigneurs, vous avez dit voir :
je suis coluy, n'en faictes doubte,
qui oncques nul jour ne vy goûte ;
. je suis celuy qui me seoye
14200 emprés le temple et mendyoie.
aveugle de droite nature.
RUBEN
Et d'où vient donc ceste avantiuo
que tu es a veoir escheus ?
l'aveugle
Très bien : l'homme qu'on dist Jhesus
14205 de terre et de sa cressemento
fit de la boe, et sans attente
présentement m'a envoyé
laver es baingz de Siloé :
lavé m'y suis, et. Dieu mercy,
l'iïio je voy tout der.
ABlRON
Comment cecy !
dis tu que t'a fait ce Jhesus ?
et ou est il ?
l'aveugle
Je n'eu sçay plus :
très volentiers je le verroye,
au moins je le remerciroye,
14215 se j'y sceusse adresser mes pas.
RUBEN
Ainsi ne t'en iras tu pas :
tu vendras compter ces moyens
par devant les pharisiens,
assavoir qu'ilz ou vouldront dire.
l'aveugle
14220 Pour homme qui sache mesdire
ne lerray pour don ne promesse
que la vérité ne confesse
tout ainsi qu'elle est advenue.
ABIRO.N
Seigneurs, a vostre bien venue
UÏ85 vous gard le grand Dieu d'Israël !
MARDOCEUS
Qu'est il advenu do nouvel,
Ruben, et vous, sire Abiron ?
BU BEN
Messeigneurs, nous vous le diron
sans vous faire long dialogue :
14230 en vostre haulto sinagogue
cest homme vous est présenté,
lequel se dist avoir esté
aveugle le cours de sa vie ;
or par ne sç^y quel fantaisie.
14170 ne reganles tu B. — 14171 manque B. — 14172 Ouy qui C. — 14176 Estoit sur le ohemin assis Du temple
demandaut A. — 141S1-S2. Je ny nietz quelque différence Fors que lautre estoit en caranoe B. G. — 14187 très
manque C. — 14200 De lez le C. — 14202 Et dont te vient ceste C. — 14211 ce fust jhesus C. — 14213 le trouueroye.
B. C. — 14217 Tu rendras compte de ces C. — 14289 faire longue dialogue B.
SECONDK JOrUM'K
183
1 '.sn:
UÎW
ÎMi^
UKÛ
»*S55
um)
WIMK,
IHÎTO
Wî:s
iju'il vous ooiniit(n'a plus u plain,
que JliUHUs u fait de sa nmiii,
PU costo preseuto jouniee
t<»snioiugue qu'il luy a doiune
voue dont oncquos ne joy,
JHEUOIIOAN
Rubeii, nous avons bieu oy
le cas qu'en termes vous mettez
dont hnultemeut vous acquite/
et faictes comme gcnt notable.
Oi-, vien ço, lionuuo miseiablo
et de fresle condicion.
As tu ceste imperfection
a ta gcncraoion eue
que d'estre né privé de veuc,
cf mme cest homme cy raconte ?
l'aveugle
Sire, non obstant que soit honte
de revollcr sa turpitude,
j'ay mis mon sens et mon estude
que du tout vérité diray ;
ce qu'il vous a dit est si vray,
qu'il n'y a riens desordonné :
je fus voirment aveugle né,
je nasquis en ccste miseï e ;
aveugle m'enffanta ma mère,
natui'e m'y voulut lyer,
et se le vouloye nyer
il seroit prouvé par plusieui's.
MARIWCEUS
Voire, mes pour estre plus scurs,
dis nous doncques comment tu vois.
l'aveugle
.le l'ay desja dit une fois,
et afiin qu'il soit plus notore
reppetcr le vous veil encore
pour vous bien du cas informer.
Cil qui Jhesus se fait nommer,
que vous avez veu en maintz lieux,
mist de la boe sur mes yeulx
et m'envoya sans moy grever
es baingz do Siloé laver ;
j'y allay et mes yeulx lavay,
et quand lavé fus, me trouvay
veant bien et beau, Dieu mercy.
NAASON
Et quand te fit Jhesus cecy,
je ne le tiens point a esbat ?
l'aveugle
Ce jour.
H»sn
USST)
EI.IACIIIS
Comment ! il est salmt
Cest honmie n'est iias en la garde
de Dieu, qui le sabat ne garde ;
i:'est ung pécheur, un homme infâme,
ung bons maudit de corps et d'ame,
qui ce jour a oeuvre conmiis»?
contre le command de Moyse.
Conmient ne scet il recouvrer
sur ung aultre jour pour ouvrer ?
il est de faulce conscience.
NICODEMUS
Kliachin, vostro sentence
bien ligerement consommez,
l'iSflO qui cest homme i>echeur nomnn«/.
Se pécheur est et liomme indigne,
comment peust il faire ung tel signe
ne tel médecine donner
que d'ung aveugle né saner?
14Ï95 il n'est raison qui s'i applique.
ELIACHIN
C'est &ntosme ou art de magique,
par ce point fault il qu'il ce face.
NICODEMUS
Ha ! monseigneur, c'est vostre grâce,
vous sçavez bien mieulx que ne ilittes
14300 plusieurs maladies petites
par charmes se peuvent guérir
et peust le deable secourir
aucuneffois apparamment ;
mes de guérir reallement
14305 ung si très merveilleux deffault,
il fault qu'il viengne de plus hault ;
jamès ne m'y consentiroye.
NEPTALIN
Nicodenms, et j'ensuyvroyo
assés bien vostre oppinion.
BANANIAS
ivîio C'est truffe et grant abusion
do Jhesus le prédicateur ;
c'est ung brouleur, ung séducteur
et par telz fais le peuple affolle.
NICODEMUS
Tel le confesse de parole
i'.3iri que son cueur desroent et dcsdit ;
ttîl le blasphème et mal en dit
qui voit plainement le contraire
et qui ja tant vouldroit atraii-e.
Mon amy, quel chose en dis tu
14320 de ce Jhesus ?
, 11Ï41 nous mettes lî. — 14245 fiagille C. — 142:5 Je mis C. — 14*59 voult B. C. — 14266 le veil bien U. C. —
B42K) consonne/ B. — 14S92 pourroit 0. — 142&5 U .'sl raison quil sy B. — 14310 tout Inifle et abusion B. C. — 1(301
'■^ iwuufiil C— 14304 soner B. C. — 14318 tm A. B,
186
MISTER R DE LA PASSION
L AVEUGLE
J'ai bien s-entu
qu'il est prophète vci tuable.
JHEROBOAN
Seigneurs, quoy que cest homme fable
croire ne puis qu'il soit ainsi
aveugle né : qui dit cecy,
l'isaj il nous sert d'une decevancc.
MOAB
Se do son fait avez doubtaucc,
n'en soiez janiès estrivans :
il a père et mère vivans ;
envolez les qucrre surpiez,
14330 et s'ilz sont bien interroguiés,
ilz diront voir ; si feront sens,
JHEROBOAN
Qu'en dites vous ?
MARDOCEUS
Je m'y consens :
l'oppinion est belle et bonne.
JHEROBOAN
Trotemenu, plus ne sermonne ;
i4:«5 il te fault faire ce voyage.
TROTEMENU
J'en feray bien mon parsonnage,
tellement qu'il n'y fauldra lien.
MARDOCEUS
Gongnois tu ses parens '.
TROTEMENU
Très bien,
car ce sont deux très povres gent
i'.340 qui ont de l'or et de l'argent
tout autant que s'il n'en fust point.
JHEROBOAN
Or te pars doncques sur ce point,
et comment qu'il soit les admainc.
TROTEMENU
Dieu leur envoie pute estraine !
1W45 me fault il courir sur les champs
pour admoner tolz deux nieschans,
ou il n'a gaignage ne plue ?
se j'alasse vci's roy ou duc,
pour ma peine me fut livrée
14350 ou hucque ou robe de livrée,
mais je perds icy tous mes pas.
Quoi qu'il soit, je n'oubliray pas
a reprendre ici mon allaine :
je sens ma bouteille trop plaine,
14355 il luy fault ung peu donner vent :
de boire grans traictz et souvent,
c'est mie ngle en médecine
pour avoir tantost sa poitrine
plate comme ces gros baris.
14360 Je suis armé pour tous péris,
j'en vois uiig peu plus grant emblure ;
je crois que vecy ma monture,
si fault que mon mand s'i appere.
Le grant Dieu vous saulve, beau pore,
14365 et vous eschcve de danger.
LE PERE DE l'aVEUGLE
Bien viengne ce gent messager
en uostrc povre maisoncelle.
Que vous plaist il ?
TROTEMENU
La chose est telle :
que les pharisiens vous mandent
14370 et très expressément commandent
que vous veniez par devers eulx
ligerement entre vous deux ;
ainsi m'est la charge baillée.
LA MERE
Helas 1 qu'a si noble asseml)leo
14375 a faire de si povres gens ?
TROTEMENU
Je ne .si,ay : soiez diligens
et vous orrez qu'ilz vous diront.
LE PEIIE
Ne sçay qu'ilz nous demanderont,
nous n'avons méfiait quelque chose.
TROTEMENU
14380 Je n'en sçay riens, mes je suppose
que c'est pour vostre filz qu'ilz tiennent,
dont ilz avec plusieurs maintiennent
que Jhesus l'a renluminé :
vous en serez exan\iné,
1 (385 gardez de sagement respondre.
LE PERE
Ha ! seur, ilz nous vouldront confondre
s'en nos faisane sommes pourveus :
les scribes heent ce Jhesus
143a2 quil soit voir ou fable A. soit liomine fable B. — 14S29 tout surpiez C. — 14339 labouriers B. C. — 14340 ne
mailles ne deniers B. G. — 14344 sanglante B. mal C. — 14346 marohans A. — 14347-50 manquent A. — 14351 Je. ny
parderai que mes pas A. — 14359 un beau gros B. G. — 14370 Et empressement vous B. G. — 14372 Le P, Moy
tout seulot T. mes vous tous deux B. G.
SECONDE JOURNEE
•^87
rt ont Pilit qilfi, s'il fist hommo
i WM qui Cristt nu proijlii'to lo nomitio,
il est ])ar vertu de l'edit
do la sinagopio maudit,
privo ot excoiimionié.
LA MERE
Bien y sera remédié :
14395 s'ilz nous demandent sur ces termes,
soions tous assourés et fermes
que nous n'en diions bien ne mal.
LE PEHE
C'est nostre moyen principal,
aultrement n'eschaperons nous.
TBOTEMENU
U'iOO Seigneurs, veez cy par devant vous
les gens dont vous m'avez chargé.
.IHEROBOAN
Sié toy, lu as bien besongné;
s'en seras paie liien et beau.
Or vien <;&, petit bonhommeau ;
U'iOS es tu tout certain et tout fidz
que ce soit icy vostre filz ?
regarde y bleu de point en point,
et comment qu'il soit no meus point,
car il touche ung fait très haultaiu.
LE PERE
l'.'iio Sire, sciez aussi certain
comme Dieu est au firmament
que c'est nostre filz proprement ;
il n'est qui m'en sceust décevoir.
JHEROBOAN
Toy, bonne dame, dit il voir?
IV1I5 vien dire ton oppinion.
LA MERE
C'est il, sire, et nul aultre non,
c'est mon filz, son corps, sa figure,
et qu'il soit vray je vous le jure,
soiez en tout acertené.
.IHEROHOAN
l'i'iM Voire, mes il ne fut pas né
aveugle, comme on nous disoit :
je tiens qu'il le contrefaisoit
affin qu'on eust pitié de ly.
LA MERE
Siro, il fut né tout avcugly
l'i'i25 ne puis qu'au monde fut venant
il ne vit jusqu'à maintenant.
tia mero suis qui lo portay
et qui aveugle l'enffantay :
honte no m'en fora dewliiv»
l'iVW et s'aultrement vouloio dire,
plusieurs scevent bien lo contraire.
MAHDOCEUS
Et comment se pourroit il faii-e
qu'il fust né aveugle ensement?
il voit maintenant clairement ;
l/i'iSi si fault que vous nous rendez cx)mpt(!
d'où cecy vient.
LE PERE
Quant a moy monte,
aultre compte n'en rondorons ;
publiquement confesserons
quo c'est nostre enlFant seui-ement ;
uuo aveugle né fut, mes comment
il voit huy no par quel moien
de par nous vous n'en sçarez rien :
interroguez le sur le fait,
il a attaiut aage parfait,
144-45 c'est raison qu'il parle par soy.
JHEROBOAN
Aultre chose n'arons de toy ?
tu n'en diras pro ne contraf
LA MERE
Se l'enffant veult, il vous comptra
de son euluniinacion :
14450 il a sens et discreciou,
responde comme bon luy âamble.
MARDOCEUS
Allez vous on tous deux ensemble,
puisqu'autro chose ne nous dites.
Ils s'pn vont.
NAASON
Seigneurs, ce ne sont que redittes
1M55 de nostre fait, nous pardons temps.
S'a mou veil estes consentons,
pour cestuy miracle dcscroitro
nous ferons par force congnoistrc
a ce meschant icy dessus
14460 que ce n'a pas esté .Ihesus
qui lo veoir luy a restauré.
JHEROBOAN
Or vien ça, homme malheuré,
si tourne devers nous ta face.
li;i>!'j Sont fait cdit I!. C. — 14396 asseurs B. — 14401 Les deux dont mauiei B. C. — 14414 femme C. — 14417
mon corps ma A. — 14418 Sa coul«ur et son estature B. C. — 14484 tant B. — 14485 Que puis B. C. — 14488 Je
loi nourrv H allaicle G. — 14436 ii nous C. — 14439 purement C, — 14448 dira C. — 14463 deuers moy A.
1RS
M I S T E R K D E LA PASSION
L AVEUGLE
Et que voulez vous que je faoo ?
JHEnonOAN
U46d_ Nous voulons que tu donnes gloire
a Dieu du miracle notoire
dont tu vois maintenant ainsi,
nou pas a ce Jh?sus icy ;
ne luy en donne ja l'honneui',
U4T0 car nous sçavons qu'il est pescheur,
homme qui n'est prudent no saige.
l'aveugle
S'il est pécheur cella ne sçay je,
mes je sais sceur que moy estant
aveugle né, il m'a fait tant
Ui75 qu'homme au monde ne peut voirmiotdx.
ELIACHLN
Et comment ouvrit il tes yeux ?
dis nous la droite vérité ?
l'aveugle
Une fois vous Tay recitj ;
quel bien pouvez voua présumer
l'ilSO aie tant de fois résumer?
le voulez vous tenir a niaistre?
voulez vous ses disciples e.~tre?
voulez vous sçavoir ses doctrines?
vous enquerez moult doses signrs,
1M85 ne sçay se les voulez apprendre.
JHER0B0AN
Nous fais tu tel erreur entendre?
honmie infâme de put alloy,
mauldit de Dieu et de la loy ?
et de rechief te maudissons :
14490 as tu pensé que nous feussions
disciples d'ung tel frivoUeur ?
a ta griefve perte et douleur
soie serf a cil que tu nommes,
disciples a Moyse sommes,
1 4495 non a aultre ; et sommes certains
que Dieu ses mystères haultains
a Moyse si revella
et que souvent a luy parla,
mes de Jhesus dont tu tiens plest,
14500 nous tous ne sçavons dont il est,
mes très fort le peuple traveille.
l'aveugle
En ce me donne grant merveille
que dont il est vous ne sçavez ;
et touteffois vous en avez
145(6 probacion si très parfaicte
par la miracle qu'il m'a faicte.
Mes ung point qui vous peust mouvoir
c'est que ne le voulez sçavoir ;
et jjour ce je vous prouveray
14510 que ce que distes n'est pas vray.
Cest homme sur moi créature
a fait oeuvre dessus nature ;
or vient le miracle total
de Dieu par don espccial ;
14515 or estes vous certains et sceurs
que Dieu n'entend point les pécheurs ?
dont puisque cest homme seroit
pécheur. Dieu ne l'exausseroit :
or l'a voulu tant exausser ;
14580 par quoy il nous fault confesser
que c'est ung homme saint et digne,
que la haulte bonté divine
noas a en ce monde envoyé.
BANANIAS
Va, meschant pescheur desvoyé,
14585 homme forfait, desplaisant monstre,
ton aveugleté note et monstre
que tu es en ce péché né.
Es tu donc si bien forcené
qu'a nous enseigner tu présumes,
1 1530 qui sçavons les lois et coustumes
que .Tuifz doivent maintenir ?
JHEB0B0AN
Qui rigueur luy vouldroit tenir,
il fust amèrement pugny.
JOATHAN
Il soufflra qu'il soit bany
14535 de la sinagogue notable.
JHEROBOAN
Or va donc, pécheur détestable,
après tes malédictions :
ensemble t'excommenions
et te nonçons pour débouté
14540 de tout nostre société,
habandonné d'ame et de corps.
NACHOR
Chassez le faulx villahi dehors,
il est digne par son oultrage
que chacun luy crache au visage,
14545 puisque nostre vouloir ne fait.
l'aveugle
Helas ! et je n'ay riens meffait,
seigneurs, que me demandez vous?
NATHAN
11 deust estre par mort deffait.
14469 manf(ue C. — 144"9 Que bien C. — 144S1 manque B. quil soit vostre maistre C. — 1448S orreur C. — 14497 A
cil moyse B. Icelui C. — 14511 Sur iiioy cest homme i,oure créature C. — 14513 DoDt vient B. C. — 14529 en B. le U^
— 14531 les juifz A. B, C. tenir K. C, — 14540 toute A. B, C. — 14542 Cliassier fault le C.
SHCd.MJK J0UIINH1-:
183
I. .VVELGLE
Hclas! et jo n'ay riens incffnit.
• JACOH
14JD0 Va, faulx aveugle conlrefl'ait,
janiès ne to voy devant nous.
i.'aveuqle
Helas! et je n'ay riens meffait,
seiRneurs, que me demandez vous
jonnAN
Laissons IVn paix, partons nous tous,
liôjj c'est povreté que do son fait.
I 'ir>G5
14570
Uhi:
14,'>.su
i.'aveuole
O (loulx créateur ti-es parfait,
vuciilcz moy envoier conffort :
tu vois que sans cause et a toi t
porte pugnicion cruelle
tout pour soustenir la quorollo
du doulx Jhesus qu'on doit amer.
Icy vient Jhesus.
JHESLS
Amis, ton ducil est moult amer,
mes porto tout en pacience ;
n'as tu pas parfaicle credenco
au fllz de Dieu ?
i.'aveugle
Helas ! cher sire,
qui est cil veuillei! le moy dire,
si que j'y croye pour le mieulx.
JHESUS
Tu l'as veu de tes propres yeulx,
ut est celluy qui parle a toy.
i/aveugle
Sire, de bon cueur je le croy
ne jamès n'en arez doubtance,
et en parfaicte obeyssance
comme a mon Dieu et vray saulveur
je vous rendz louange et honneur
en très humble adoracioii.
JHEPrs
Frères, j'ay mon inteiicion
d'aller au temple des Juifz
affin que d'eulx je soye ouys
pour faire aucune remonstrance.
■S. JEHAN
Sire, tout a vostre plaisance,
nous vous suyvi-ons ligerement.
llSSô
li 5i le la C, _ l'.5tiS(l.- .orporol/ D. C. - 145».
J.nO dro.l ma C. - J'.601 nosirc loy C. _ r,005 vous
RUHEN
Seigneui's, selonc mon jugement,
veez la Jhesus ce séducteur
qui de tant de maulx est acteui-
en destruisaiit la loy Moyse,
qui se promène; a sa devise
dedans le porchet Salomon.
ArmoN
Il m'est bien advis que c'est mon,
et qui vouldra croire mon dit
14590 nous en irons tout en subit
luy faire aucune question.
SALMANAZAH
J'ay d'y aller devocion,
et s'aucun de nous l'iatcrroguc
il sera bien fier et bien rogue
14595 s'il ne baille responce aucune.
nUBEN
Maistre, nous avons grand rancune
qu'aultrement a tes fais ne penses :
tendras tu nos anies suspences
en ce point tousjoui-s jusqu'en fin ?
14«K) se tu es Cristus, dis le, affin
que nostre foy en toy s'applique.
ABIRO.V
Se Giistus es, dis le en publique :
ce n'est point ung fait a celer.
JHESUS
Tant clerement m'oez parler
14(305 et jamès ne me voulez croire j
et que ma parole soit voire
mes oeuvres, mes fais, mon ouvrago
baillent de moy vray tesmongnage ;
mes pas ne créiez telz merveilles,
14610 car point n'estes de me» oeilles :
mes brebis entendent ma voix,
me suyvent et bien les congnois,
par moy vie ctcrnclle arout,
ne jamès ne dépériront,
14815 et de l'heure que les aray
jamès heure ne les lerray :
grant don m'a donné Dieu, mon peio,
a qui riens n'est qui se comi)ere,
et ce que mon père ara pris
14620 jamès ne luy sera surpris ;
et mon père et moy sonnnes uug.
SAI.MANAZAn
Concueilloz pierres en connnun !
^plakir c. - 14386 pourniaino D. C. - 145!« Jy a.v droit ma U
190 MI STERE
sus ! Juifz, lie vous faindez raie !
oez vous pas la blasphoinio
14625 dont cest enchanteur ey nous sort ?
RUBEN
Très bien le lapider dessert :
sus ! seigneurs, chacun s'i emploie.
ÏSACAR
Il fault que son cuidier se ploie ;
lapidez le blasphémateur,
11630 lapidez le faulx détracteur
qui la loy totalle destruit.
JHESUS
Mes amis, je vous ay instruit,
fait et monstre oeuvres très belles,
et se me lapide^ pour elles,
i/i635 tel vice fait motilt a reprendre.
ABIRON
Comment veulx tu cecy entendre ?
du bien pas ne te lapidons,
mes pour tant que nous entendons
blasphème partir de ta bouche
U640 qui trop aigrement la loy touche ;
si desers lapidement tel,
car toy qui es homme mortel
te veulx faire Dieu, c'est troii dit.
.IHESUS
N'est il pas en la loy escriiit
U645 (s'a l'entendre estes ententis) :
ego dixi : dii estis?
Dieu enseigne par le prophète
qui sa volonté ara faicte
se pourr'à nommer scurement
14650 Dieu, voire participalment.
Or ne peust faillir l'escripture
qui assigne deité pure
a celluy qu'a sanctifié
mon pore et au monde envoyé,
146» qui le nomme Dieu par essence.
Vous dittes que je fais offence,
et pourtant ay Dieu blasphémé
que filz de Dieu me suis nommé.
Se l'oeuvre mon pore ne fais,
14660 ne croyez n'en moy n'en mes fais :
et s'fln moy ses oeuvres voyez
et en moy croire ne daignez,
ayez en mes oeuvres créance,
si que vous ayez congnoissance
.T4665 que dedans moy Dieu, mon père, est
et moy en luy.
DE LA PASSION
SALMANAZAR
Tant me desplaist
le parler que costuy revelle
qu'il me ront toute la cervelle :
il n'est mauvaistié qu'il ne sache.
RUBEN
14670 Affin que justice s'en face,
je vous prie qu'il soit tenu.
Icy s'aconsc Jhesus d'eux.
ABIRON
Qu'est cecy '. qu'est il devenu ?
s'il n'est pris, j'en seray marry.
YSACAR
Soyez sceurs qu'il est escarry
14675 si tost que nous sommes levé;
mes se jamès il est trouvé,
le loudier, nous le destruirons.
JHESUS
Frères, d'icy nous en irons
oultre le fleuve do Jourdain
14680 pour ce peuple dur et soudain
qui fort désire mon contraire.
s. JEHAN
Sire, il est bon de nous retraire,
car ces Juifz ont telle envyo
sur vous, qu'ilz vous toldront la vie,
14685 si vous tiennent en leur jnercy.
LAZARON, malade.
Lassé, dolent, et qu'est cecy?
com grief mal le corps me dedre ?
je languis en peine et martire
qui m'a jusques au cùeur attaint.
14690 0 prophète saint,
en qui tout bien maint,
qui conffortes maint,
Jhesus, ou es tu de cest heure ?
Le mal qui m'estraint
14695 et le cueur me taint
me fust brief restraint
se tu feusses en ma demeure,
mes se ta personne demeure
longuement, la mort me contramt.
14623 no vous y A. — 14635 Cela sera C. — 14642 Que tu qui tà. — 14654 ma au monde C. — 14661 Et sans moyse
oeuures C. — 14666 Et je en luy B. G. — 14671 Hic Jhesus transieas per médium iUoi^um ibot. A. en marge. — 1468S
grant enuye G. — 14687 dédire B. — 14693 tu mdtviue B. — 14698 manque G.
s E C 0 N D K .) O U R N E K
m
MARTHE
14700 Laiiaroii, iiiuu l'roro, se plaint
du gi'icf mal qu'il a a porter ;
ma scur, allons lo visiter,
s^avoir qu'il voiill no qu'il dosire.
MABKI,A1NK
Son mal do plus on plus s'etiipirc
14706 et tousjours en son mal regrets
qu'il veult veoir Jhesus le prophète ;
il luy sanible qu'il guoriroit.
MARTHE
Las ! uiig grant bien pour luy scroit
se Jhesus on fust advertis ;
liTlO mes il n'est point en ces partis,
pur quoy il le puisl venir veoir.
MADELAINE
Nous lui forons très bien s(;avoir,
jo sçay assés près ou il est.
Ui"utaumont?
BRUTAUMONT
Damo, que vous plest ?
14715 devisez, et je lo feray.
MADELAINE
Mon amy, jo lo vous iliray :
le fleuve Jourdain passerez
et do sorcher no cesserez
jusqu'à ce que Jhesus voyez,
I47ï(i et s'il est que trouvé l'ayez,
recommandez moy bien a luy,
ot luy dittos que sou amy
Lazaron est en piteux point,
et que pour Dieu ne laisse point
14725 qu'il no le viengne secourir.
BRUTAUMONT
s'il MO tient qu'a le bien quérir,
vous en orrez nouvelle briefve.
r.735 et trop me sourvient
et la mort me vicut
ferir de sa darde,
largement me larde
quand il me souvient
14740 <lii mal qui me tient
eu sa dure garde.
0 Jhesus do grant vertu,
de toute bonté vestu,
ou es tu?
14745 a mon singulier besoing
se tu feusscs descendu,
mon bien me fiist prétendu
et rendu,
si feusse hors d'ung grant soing ;
14750 helas ! or es tu si lomg
que justice a destendu
son arc, et au résidu
la mort me tient par le poing.
MADELAINE
Mon tios cher ot honore frerc,
14755 vostre dueil ung pou se modère :
Jhesus vendra brief ceste fiart.
LAZARON
Ha ! seur, j'ay dolour tant amere,
que quand bien je le considère,
je craing qu'il no viengne trop tai-t.
MARTHE
14760 Frère, prenez cueur dcsonnès ;
guéri serez, je vous promès,
briefment, se Jhesus est venu.
LAZARON
Marthe, veoz cy mon dernier mes ;
croyez qu'il ne vendra jamès
14765 que la mort ne m'aist prévenu.
LAZARON
Ha ! quo mon estomac me griefve,
mon ventre, mes rains et mon pis.
MARTHK
Comment vous est ?
LAZARON
De pis en pis,
quelque viande que jo gouto,
en moy ne remaint grain ne goûte,
Et quand je regarde
lo mal qui mo larde
BRUTAUMONT
Siro, ung grant mal est survenu
a cil que vostro amy clamez :
c'est Lazaron que bien amez
qui est malade a grant foison,
14770 et se par vous n'a guerison,
il n'est qu'a son mal remédie,
ains vault que mort.
JHESUS
Sa maladie
n'est pas a mourii- proprement,
ainsois est pour l'exausscment
llTOi s' mitni/ui' H. C. — 11714 Ilruminhiont li. G.
rendu C. — 14707 lazaron clames A. Bi
— 14721 nous B. C. — 14727 aures C. — 14751 ilessuuilu B. tlel-
192 MISTKRK D li
14775 de la Dieu gloire en temps et lieu,
et affin que le filz de Dieu
en soit par luy gloriffié.
nnUTAUMONT
Tenez pour tout certiffié
que ses deux seurs Marthe et Marie
1 4780 font chère hien mate et marryo
de l'absence de vostre corps.
JHESIJS
Va, mon amy ; si leur record/,
que briefment les visiteray.
BRUTAUMONT
Vostre vouloir accompliray,
14785 cher sire, et atant me dépars.
LAZARON
Le cueur me part de toutes pars ;
seui"s, priez pour moy : plus n'en puis,
je suis ja de la mort a l'huis,
en mon fait n'a point de retour.
MADELAINE
14(90 Ha! frère, vecy piteux jour;
nous lairrcz vous de tel manière ?
BRUTAUMONT
Mes dfimoiselles, faictcs cliierc,
car pdur certain je vous anonce
que Jhè^us m'a baillié responce
14705 de vous venir brief visiter.
MARTHE
Las ! que nous pourra pourfiter,
quand nostre frère tend a fin ?
CELIUS
Mes notables dames, affin
que plus n'y pensez de ceste heure,
14800 je vous respond et vous asseuro
qu'il est mort et passe le pas.
ABACUT
Dieu doint qu'après celluy trespaa
l'ame do luy soit bienheureuse !
MADEr.AINE
0 moit douloureuse,
1 4S05 o mort rigoureuse
qui t'a fait emprendi-c
De si tost saillir
pour moy ja tollir
et mon frcle prendre ?
MARTHE
14810 0 amittié tendre,
LA PASSION
t'es tu voulu rendre
et sans coup fcrir ;
Cil qm te deubt prcndie
s'en va rendre en cendre ;
14815 o quel desplaisir !
CELIUS
Puisque mort l'a voulu saisi)-
cessez vostre dolent tristesse :
la mort est de tclz fais maistresse,
que riens n'en revient pour gémir
ABACUT
14820 N'y a que de l'ensevellir
comme il affiert a sa noblesse ;
non obstant que sa mort nous blesse
il en fault feire ung abrégé.
CELIUS
Il n'est armé ne haubrego,
14825 n'oncques bons si hault ne parla,
qui en fin n'aist passé par la,
et tous y passerons après.
ABACUT
Cclius, prenez yla près :
si soit en son suaire mis.
TUBAL
14830 Nous sommes ses prouchains amis,
prenons le corps conjointement
et l'empoi-tons reveramment
en son sercus pour l'enterrer,
GEDEON
A ce je veil bien labourer :
14835 or chacun le levé a puissance,
et le portons par ordonnance,
en disant nos devocions.
Ict/ remportent en son sercus,
[Pose.]
NEPTALIN
Ruben, pour les suspicions
qui peuvent nos amis mouvoii',
14840 par mon conseil nous ii'ons voir
Marie et Marthe, nos parentes,
qui sont tristes et moult dolentes
de leur bon frère Lazaron
qui est trespassé.
RUBEN
Nous iron,
14780 bien morle C. — 14781 Tour la sente de vostre eorps 15. — 14785 chef mon'/ue 1!. — 147117 tinit C. — 14802
restuy lî. C. — 11813 Ce qui C — .14816-17 l'our vous noyer de desptaisir Kt vous estraindre jtnr tristesse B. 'C.
— 14822 Nous obstant A. — 14S:i4 vcil je 1!. C. — 14835 se leue A. C. — 14S;'0 Kt alons tous B. C— 14844 defflne B. C.
,SECONUE JOURNEE
103
Iigi5 qui m'en cruiia, saim pliu parler
pour les uug petit consoler,
car bien sçay que moult leur onuuyo.
SIMON, lépreux.
.le vous y tcndray conipaigiiie,
mes chers soigneurs, mes qu'il vous plaise.
NEPTALIN
1 1850 Simon, nous en sonnncs bien aise :
de nous serez acompaigué.
SIMOxN
Or cheminons donc do bon pié,
que Dieu soit nostre conducteur.
CELIU.S
Or est le notable seigneur
14SK mis en terre, comme il appert,
et le scrcus bien recouvert :
retourner poons quand on veult.
MAPELAINE
Tant a mon cutur que plus n'eu peust
d'ennoy et de mellancolic.
RUBEN
14860 Ma chero dame, c'est folie
de toi dueil en vous amasser ;
riens n'est qu'il ne faille passer :
nous n'avons cy pas nostre cours
au monde poui' cstre tousjours.
14SGJ Ce vostre frère ostoit mortel :
c'est l'usage, tout homme est toi,
que la mort prcut tout par effort ;
mes prenez ung bon reconffort
en Dieu par bonne pacience.
NEPTALIN
14870 Marie, ce n'est [las science
de prendre destresse inféconde,
car par coustume elle redonde
au cucur de cil qui plus en prent.
SIMON
Oultrc plus ce que Dieu emprent
1 'i875 ne peust estre mis en deffault ;
nostre edit est que mourir fault :
qu'i vault donc le desconfoi ter ?
MARTHE
Dieu doint que le puissons porter
en bonne pacience et vrayc,
14880 car jainès n'est joye que j'aye,
tant que j'y mette ma pensée.
JHE8U8
Frères, retournons en Judée
besongncr pour aucuns affaires.
8. PIERRE
Comment, niaistrc, Juifz nagaircs
14885 vous queroient pour lapider,
et si ne vous sçariez garder
d'y retourner ?
s. JAQL'ES ZEBEDEY
Comme je sens,
ilz ont appliqué tout leur sens
a vous faire desloyaulté ;
14890 comment avez vous volonté
de faire en tel peuple séjour?
JHESUS
N'est il pas douze heures au jour
qui en plusieurs lieux et parties
ne sont pas cgalment parties ?
14895 s'en l'une ont aucun mal songé,
en l'aultre ont leur vouloir changé,
dont ccluy qui de jour amliuUc
ne doit doubter offence nulle,
car la lumière le conduit ;
14900 mes cil qui chemine de uuyt
tost offence ou commet deffault,
l)0ur tant que lumière en luy fault.
Et ainsi jamés ne pensez
qu'en ina compaignie offeuoez :
14905 lumière vous suis et conffoi-t.
Lazaron, le nostre amy, doi-t
et je m'en vois pour l'exciter
de son somme.
s. ANDRY
Moult pourfiter
luy peust cette dormicion ;
14910 s'il dort, c'est sa salvacion,
car quant ung malade repose
l'eu le tient pour très bonne chose
et ung signe qu'il sera sain.
JHESUS
Pour vous le dire tout a plain,
14915 Lazaron est mort et finy,
dont pour vous suis bien resjouy,
affm que vous ayez credence
que pas je n'estoie en présence ;
mes allons et le visitons.
11847 qui A. — 14S71 l'ci-oiiile A — 14884 les juifz A. — 14887 De retourner en ees assens H. C— 14893 jours cl A.—
14896 Laultie espoir a leur veil 13. C. — 14900 Mes celuy B. — 149J6 est mort C. — 14913 qui est très sain B. C— 14915
et enfouy C.
Pas;
13
194
MIS TE RE DE LA PASSION
S. THOMAS
14920 11 l'ault que nous nous ap))restous
ut allons avec ly mourir :
bien part qu'il veult sa mort quérir
puisqu'il nous remaino au pays
de ces faulx et mauldis Juifz
14925 qui l'ont en hayne mortelle.
SALMANAZAR
Seigneurs, par tout court la nouvelle
que Lazarou, le terrien
de Bethanie et citoien,
est de ce monde deffiné.
14830 Si ay mon veil déterminé
d'aller sçavoir s'il est ainsi.
ABIRON
Et nous y allons veoir aussi,
car son fait si touche a pluseurs.
MOAB
Et je vous suivi'ay, mes seigneurs :
14935 j'ay toute ma chose apprestee.
URUTAUMONT
Marthe, ma dame redoubtee,
je vois Jhesus venir illec
et tous ses disciples avec :
vous deussiez aller a l'encontro,
11940 veu que tousjours il vous demonstre
sig^e de grant dilection.
MARTHE
.l'y vois donc sans dilacion,
car moult sa parsonne désire.
Jhesus, mon très honoré sire,
14945 se vous eussiez icy esté,
je croy de ferme volenté
que mon frère ne fust pas mort ;
mes ung point me donne conffort,
c'est que je cuido liien sçavoir
14950 que tant que vous vouldrez avoir
de Dieu, il vous le donnera.
JHESUS
Ton frère ressuscitera,
Marthe, n'y metz doubtance aucune.
MARTHE
• Sire, l'oppinion commune
14955 est qu'au derrenier jugement
tous ressusciterons voirment,
et alors croy je sans doubler
qu'il debvera ressusciter,
mes cela ne me souffit mye.
JHESUS
14960 Tu dois croire que je suis vie
et vraye résurrection :
qui croist en moy sans fiction,
s'il est mort par mort coi"porelle,
il ara la vie éternelle ;
14965 et toute parsonne vivant,
s'en moy est fermement créant,
jamès n'a garde de mourir
ne mort éternelle encoui'ir.
Crois tu ce que tu as ouy ?
MARTHE
14970 0 mon bien cher seigneur, oy !
fermement en mon cueur ay creu
que tu es Crist, le filz de Dieu,
qui au monde est venu pour nous.
Icy retourne a Vostelet huche Marie, sa seur.
Madelaine, seur, levez vous :
14975 Jhesus, nostre maistre, est venu ;
venez a luy.
MADELAINE
Bien revenu
soit le prophète vertueux !
mon corps sera bien curieux
de l'aller voir incontinant.
TUBAL
149S0 Ou va Marie maintenant
qui se part si hastivenient ;
GEDEON
Elle s'en va au monument
de Lazaron a mon outeuto,
affln que son frei'C lamente
14985 et pleure toute sa- saoulée.
RUBBN
La bonne dame est désolée
de ce que fortune luy baille :
tant qu'il n'est couftort qui luy vaille,
tant est sa tristesse mortelle.
.SIMON, lépreux.
14990 Beaulx seigneurs, allons après elle
]iour la garder de desespoir.
ABIRON
Nous la confforterons espoir.
14928-24 muwiuant U.— 14925 si mortelle B. C— 14927 le grant terrien C— 1492S Et de A.— 14934 beaulx B.C.- 14955
« lexlreme B. C. — 14970 bien maiv/uc B. — 14979 tout dun tenant B. C. — 14986 bien désolée C. — 14988 qui naist A.
SEGOiNDE JOURNEE
leb
suyvons la brief, je vous »ui)ly,
car cueur lU: dcstresso reraply
14906 vault niieulx de bonne compaiguio.
laj se gecle Madelaine aux pies de Jhesus.
MADELEINE
Ha ! sir(> plain <lo courtoisie,
comniout nous avo/ eslongnc ?
comment avez vous tant targé ?
comment nous laissez vous ainsi ?
15000 se vous eussiez esté icy,
mon /rere ne fust pas fine,
car bien l'eussiez médecine
seulement de vostrc parole.
J'en prens tel dueil que je m'affole
15005 quand il me vient en souvenir.
.IHESUS
De plduror ni; mo puis tenir
et de frémir dedans moy mosmes
quant je vois tant d'hommes et femmes
qui pour Lazaron tel dueil niaineat.
s. HERTELEMY
15010 Moult piteusement se deraainent,
et tous ses plus (irochains amis
en font dueil.
JHESLS
Ou l'avez vous mis?
dites le, je le veil sçavoir.
MOAH
Très cher sire, venez le voir :
15015 veez cy le sercus ou il gist.
JHESUS
Le cueur de pitié me fremist,
tant que pour appi'ouver ce dueil
les lai'mes me chceut de l'oeil :
amittié veult qu'ainsi le face.
NEPTALIN
15040 Regardez la bénigne face
(le Jhesus mouillée do lermes.
MOAl)
Uien poons juger par ces termes
qu'il l'amoit de lealle amoui'.
TUBAL
Je n'entendz point ccste douleur :
15025 Jhesus qui a renluminé
celui qui aveugle estoit né
ne pouoil il faire aussi fort
que son oniy no fuHt pas mort,
puisqu'il l'amoit tant chèrement '.
JHESUS
150.S0 Descouvrez moy ce monument :
ostez la pierre de dessus.
MARTHE
Ha ! sire, ilz seroient deceus :
des quatre jours y est gisant,
par quoy peust cstre si puant
15035 qu'âme ne le scjnroit sentir.
JHE.su s
Pieça t'ay voulu advei-tir
que quand |>arfaitcmeut croiras
la gloire Dieu parceveras
et te sera manifestée.
ABACUT
15040 Sus donc! la pieri-e soit ostee ;
mes seigneurs, chacun s'i attire.
GEUUS
Et fust l'odeur quatre fois pire,
si metterons jus ce perron,
et après cella nous verron
150-'i5 de Jhesus quel pouoir il a.
Sus! levez !
TDBAL
Mes levez de la !
vous ne faictes que caqueter.
ABACUT
Mes vous nous faictes craventer
par vostre plet.
GEDEON
Est ce cela '.
15060 Sus ! levez!
CELIUS
Mes levez de la !
Halle aiuout !
ru BAI.
\'a, de par Dieu va !
elle commance a dcsmouter.
ABACUT
El n'est pas ainsi a oster.
Sus ! levez !
UEOEON
Mes levez de la!
15055 vous ne faictes que caqueter.
CELIUS
Mes vous nous faictes craventer.
Ça, a moy ! encor ung peu...., la !..
( )r garde ses piez qui vouldra
l»our double d'un pinsson tout vert.
15013 le moy je 0. — 15011 ll.i sire venez le veoir C. — 15018 perlent de lueil 0. — 15031 Kt estes C. — 15035 jkiui-
roit B. C. — 15037 prestement C. — 15043 mettrons notis B. — 15046 tenez 0. — 15062 monter C. — ISOfa Kt nest p««
aussi B. — 15055 fautes tuer C. — 15059 {Jarde A. li.
196
MISTERE DE LA PASSION
TUBAL
15060 Veez la le sercus tout ouvert :
sire, faictes vostre plaisir.
JHESUS
Père du ciel, par vray désir
vous rons grâces com vous gravez
que ma voix exaucée avez ;
15065 touteffois je congnois très bien
que jamès ne reffusez rien
et m'oez en tout mon affaire :
mes la prière vous veil faire
pour les assistans qui me voient,
150T0 affin que fermement ilz croient
qu'en ce monde m'avez transmis.
Lazaron, vien hors, beaux amis,
A hauHe voix :
je le veil et te le commande.
[Pose.]
Icy est Lazarun atout son suaire,
LAZARON
O que tu as puissance grande,
15075 o que tes fais sont vertueux,
benoist filz de Dieu glorieux
qui ciel et la terie comprens !
louanges et merci te rendz
de la haulte miséricorde
15080 que ta doulce bonté m'accorde
de raoy en vie ramener.
JHESUS
Desliez le sans sejcjurner
et le laissez aller sa voye.
MARTHE
0 frère, com parfaicte joye
15085 avons de vous veoir en vie!
La haulte bonté infinie
en ait grâces a grant monjoye!
LAZARON
Mes seurs, en piteux lieu estoie :
Jhcsus m'a fait grant courtoisie.
MADELAINE
15090 O frère, com parfaicte joye
avons de vous veoir en vie!
Jamès de nouvelle que j'oye
je ne seray plus i-esjoye.
l.AZARON
' A bonne heui'e ay la voix ouie
15093 du filz de Dieu qui tout resjoye.
MARTHE
0 frère, com parfaicte joye
avons de vous veoir en vie!
SIMON, lépreux.
La haulte bonté infinie
en ait grâces a grant monjoye !
Tonnerre.
LUCIFER
15100 Haro ! deables, par quelle voye
nous est Lazaron eschapés ?
BELZEBUTH
Je ne sçay, nous sommes trompés
le plus lourdement de jamès :
il estoit mis au limbe, mes
15105 il est venu tout maintenant
une voix haultement tonnant,
tant terrible et espouvantable
qu'en tout nostre enffer n'y a deablo
qui de paour ne se soit musse,
151)0 laquelle a haultement huche :
Lazai'on, vion acop dehors !
Si ne feusmes pas assés fors,
qu'il est vuidé de nostre porche
maulgré nous de fait et de force,
15115 et s'en est yssu tout joyculx.
LUCIFER
Hwo ! faulx serpent venimeux,
ardent de rage forcenée,
que maudite soit la journée
de ma pi-ime creacion :
15120 nos drois vont a perdicion,
nous pardons tout et sus et jus.
ASTAROTH
C'est ce faulx prophète Jhesus
qui nous a brassé ce brassin.
LUCIFER
Nous en serons destruis en fin,
i»i25 cela ne peut hors de ma teste :
par ces fais il est manifeste
que c'est propre celluy Cristus
qui par ses divines vertus
doit racheter l'humain lignage.
BERICH
15130 On congnoist l'ouvrier a l'ouvrage :
puisqu'il a puissance si haulte,
c'est il, je l'approuve sans faulte.
Vous voyez comment il exite
15060 descouuert B. C. — 15092-y5 manquent B. G. ri sont remplacés par les vers suivants attribués « Lazare : Kn
grans ténèbres habitoye Auec Jautres grant roinpaignie Et se jeusse plaoe assouuye Grans merueilles vous en diroye
— 15100 Haro ho deables par quel voye C. — 15121 partout jus et sus, G. — 15123 verse ce B.
SECONDE JOURNEE
197
les mors et qu'il les ressuf>cito
15135 tout par aultrcs moyens et ditz
que n'ont fait couU du temps jadis.
11 nous livre griefves batures
et hors des corps des creatui'cs
nous (léchasse et boute au doriùere,
15140 non pas par requestn ou prière,
mes nous banist hastivcment
de sa puissance pi-oprement
et do sa propi'e auctoiité.
l.UCIFBR
Autreffois' l'a Sathan tompté
15145 par diverse instigacion,
mes quant fit sa relacion,
il dist bien que c'estoit grant chose.
CERBEftlIS
Ou est il, Sathan ?
LUCIFER
Je suppose
qu'il le suyt partout et l'espie
15150 s'il pourra point avoir coppic
de quelque meffait qui luy viengne.
FERGAI.US
J'ay bien grand désir qu'il reviengne
affin que s'il ne l'a trompé
il puist avoir un recipe
15155 si que le grant deable l'emporte.
LUCIFER
Cerberus, songne de ta porte,
clos la bien, soie sur ta garde,
et quoy qu'il soit souvent regarde
qu'aucun ne te serve de lobe
15160 qu'après ne te pille et desrobe ;
le fait nous touche de trop près.
CERBERUS
J'ay mes habillemens tous prestz,
mes barres, mes grosses ferrures,
mes verrous, mes clefz, mes serrures ;
15165 et s'il est hardy d'y venir
et mon crochet le poust tenir,
jumès il n'en eschapcra,
je vous reepons.
LUCIFER
Or y perra,
je m'attens a ta diligence.
SATHAN
15170 Se le deable a mon fait ne pense.
je suis sur le point d'enrager :
tous les jours ay nouveau danger
par ce Jhesus, que Dieu confonde,
qui me fait tous les maulx du monrio.
15175 Je pers cy mon temi)8 après ly
et touteffois l'ay je assailly
jiar champ de diverse bataille,
et si ne sçay venir a taille
de le faire a mal pervertir :
15180 il fait tous mes gens convertir,
il jjresche, il jeune, il se traveille,
il fait miracle, il fait merveille;
encore de nouvelleté
Lazaron a ressuscité
15185 et tiré d'enffer le pullant.
Ha ! que Lucifer est dollant
maintenant et remply do rage
quand il apperçoit tel ouvi-age
qu'il pert ainsi son prisonniei- :
15190 il n'en est pas bon a .seignier,
tous les deables y chantent messe ;
il n'y a deable ne deablesse
qui ne bondisse au fons du puis ;
il me vient bien que pas n'y suis :
1.5195 j'eusse bien des poires d'angoisse.
Il n'est moyen que j'y congnoisse
pour ravoir mes loix coustumieres
sinon de trouver les manières
que ce Jhesus soit mis a mort,
15800 car tant a moy nuyre s'admoit,
que tout pers se je n'y pourvois :
aux princes de la loy m'en vois
pour les esmouvoir et tempter :
quand ilz orront ce fait compter,
158(fi il y ara belles matines.
Ici/ .l'en ra.
NEPTALIN
Enti'e tous les merveilleux signes
qu'oncqiies furent a la Dieu gloire,
cestuy est digne de mémoire
et bien esprouvé pour miracle.
MOAB
15810 Maintenant voyons sans obstacle
la puissance du doulx Jhesus.
SIMON, lépreux.
Il est fîlz de Dieu de la sus,
son oeuvre bien le manifeste.
15138 Et pluseurs m.iulx et injures C. — 151'il-2 Mes nous fait le bannissement B. C. De sa puissance seulement B. —
15144 compte A.— IMr* la C— 1516'i doux C— 15185 puant C— 1511S8 apperoeust B. C— 15198 Se nest B. 11 nest C. —
15800 injurier seffort C.
m
MISTRRR DK LA PASSION
• GEnEO.N
Seigneurs, démenons joye ot feste,
152i5 loons Dieu de volenté plaine
quand de sa grâce souveraine
nous veult si haulx fais reveller.
RUBEN
Salnianazar, a brief parler,
nous avons fort tenu querelle
15220 contre Jhesus et sa séquelle,
dont nous avons, je croy, mal fait :
nous voyons les vertuz qu'il fait
et la grant puissance qu'il a.
SALMANAZA.R
Ruben, pensez vous a cela ?
15225 avez vous admiracion
d'une meschante fiction ?
vous seriez tous les coups séduit.
RDBEN
Je prens la voie qui mieulx duit ;
qui vouldra si s'en tire arrière,
15230 mes je croy de pensée entière
qu'il est filz de Dieu tout puissant.
ABIRON
Je n'en suis pas csbayssant ;
Ruben, qui vouldra, si s'en fume :
se cueur n'est plus dur qu'une enclume,
15235 il fault dire pour vérité
que la puissante dcité
est en luy noblement unye.
TU BAL
Ainsi le croy.
SALMANAZAR
Et je le nye,
ce n'est rien qu'une abusion.
CEUUS
15840 Jhesus a puissance infinye,
ainsi le croy .
PHARES
Kt je le uyc,
ce n'est rien qu'une fantaisie.
ABACUT
C'est divine operacion.
NEMBROCH
C'est magique ou enchanterie.
SIMON, lépreux.
15245 Mes vraye demonstracion.
SALMANAZAR
Qui le croit, c'est très grant folie.
TU BAL
Mes pour avoir siUvaciun,
ainsi le croy.
PHARES
Et je le nye,
ce n'est rien qu'une abusion.
NEMBROCH
15250 Phares, j'ay bien inteucion
que nous en allons vous et moy
compter aux prestres de la loy
ce fait icy qui leur compote.
PHARES
11 est bosoing qu'on leur répète,
15855 car il leur touche.
SALMANAZAR
Il est tout vray,
et je vous accompaigneray,
affin que le fait mieulx se porte.
PHARES
Seigneurs, vostre noble consorte
vueille le grand Dieu conserver !
15200 Nous venons pour vous approuver
ung cas do nouvel advenu
qui sur tous aultres est tenu
de terrible admiracion,
et quant a la narracion
15265 veez cy qui bien la sçara faire.
NEMBROCH
Seigneurs, pour vous compter l'affaire,
puisque je suis a ce commiz,
plusieurs abusemens sont mis
au jour d'uy en la loy Moyse
15270 pour cause que n'avez pas prise
vengence des controdisans,
et ains qu'il soit oultro dix ans,
vous verrez que tout périra
qui de fait n'y remédiera ;
15275 et qu'il soit vray ce que je chante,
celluy Jhesus qui souvent hante
en ceste nobille cité,
a de nouveau ressuscité
Lazaron, le vaillant seigneur ;
15280 dont le peuple est on telle erreur,
brief, qu'il n'est pas né de bonne eure
cil qui ne l'adore et honeure,
et tous pour prophète le tiengnent.
JHEROBOAN
Tous les jours nouveaux cas surviengnent
15220 querelle B. cordelle C— 15222 quel vertu il fait 0.-15228 me (luit A.— 15232 obejss.int C — 15246 très manque
C. — i5Sx> tout maur/ue A. — 15259 confermer C. — 15260 raconter C. — 15265-76 manquent A. — 15272 passe dix ans
C. — 15277 Je vous denonoe pour verile A. — 15278 Que jhesus a A. — 1528i loue et honeure C. — 1.5283 ti.usjours G.
SFCONDE JOIJRNEK
1528:. par co malheureux boninie cy
qui le peuple si'duit oitui :
je ne sçay que uous eu ferons.
MAllDOCEUS
Kii la lia destruis on serons,
se n'est que justice s'en face.
15290 Le peuple l'a si fort en grâce
qu'il n'est riens que pour ly no foissinit.
et ainsi nos drois dépérissent
pur faulte do provision.
NAA.SON
.)c suis trop bien d'oppinion,
iSiftj affi'n qu'en ce conseil ayons,
qu'cnsauiblc nous nous retrayons
devers nos princes souverains,
nos cvesques, nos souverains,
et lors sous ombre pastoral
1.5300 tendrons ung conseil général
pour tuer cest homme mauldit.
ELIACHIN
Qu'on dites vous ?
IIANANIAS
11 a bien dit
fit bien devisé, ce nous semble.
JOATHAN
Or nous on allons tous ensemble
•15305 besongner, ains qu'il soit jJus tard.
N'ACHUK
Malabrin, amy, Dieu to gard !
Comment le fait uostro pontipho
et nostre hault prin«e Gayphe ?
est il point fort cmbcsongno ?
MALABIUN
15310 Je croy qu'il est bien emposelio
do plusieurs cas a dire voir ;
mes non obstant je vois sçavoir
Se vous arez point audience.
Cher sire, la haulte clémence
15315 vous accroisse i ouncur et tous bieus !
Messeigncui-s l.s pharisiens
sont venus a ce matinet,
et croy qu'ilz ont ung tantinet
a faire de vostre conseil.
CAYPHK
15320 Metz ces bancquiers on appareil,
n, n ri r.
oeH coussinH, ces Iwncs, ces scabelles,
et puis leur porte les uouvellet'
ipi'ilz entrent hardiment dodeau.
MAI.AHRI.N
Soigneurs, scribes et présidons,
15325 il ennuyé trop qui attcnt:
entrez.
NATHAN
Est monseigneur content ?
nous n'avons pas hasto trop grande.
MALABRIN
Entrez eus, puisqu'il le commande,
pour vostre fait ne plus no mains.
15330 II ara gi'ant besongno en mains,
quand pour vous ne la laissera.
JACOB
Ses serviteurs nous trouvera
a touto heure i)areillemont.
JHEBOKOAN
Sire, le grant Uieu qui ne ment
15335 de chose qu'il aist a congnoistre
vous veille honneur et sens accroistre,
comme vostre parsonue est digne I
CAYPHE
Seigneurs, chacun son lieu assigne,
chacun siée sans remanoii'
153/10 et en nostre petit manoir
vous sciez tous les bien venus.
JHEROBOAN
Sire, grans fais sont advenus
et ilo morveilleuso matière
qui la loy touche tout ontiei'C
I53'i5 par quoy plus en fault enquérir.
CAYPHE
11 fault donc envoyer quérir
Anne, nostre prédécesseur :
c'est ung bon consoillier et sceur
qui a beaucoup veu en son temps :
1.53.50 si ne seray pas consentons
que nous concluons riens sans ly.
JOB R AN
Il est bon qu'il y soit aussi
et n'a cil qui ne le désire.
CAYPHK
Maueourant.
19W
15292 nppelisseiit C. — 15294 tre?! U. C. — 15,303 mo B, mnnqw C.
se siée A. C, — 15348 ronseil G.
15321 corssins B.
15330 donne n C. — 1SS39
200
MISTKRR DE LA PASSION
MA.UCOURANT, messager.
Quevous plaist il, sire?
15355 laissez moy parfournir mes bouges.
CAYPHE
Va t'en quérir Anne de tire.
Maucourant?
MAUCOURANT
Quevous plaist il, sire?
CAYPHE
Passe avant ; le fault il tant dire ?
Tu dis : je vois, et no te bouges.
15360 Maucourant?
MAUCOURANT
Que vous plaist il, sire?
laissez moy parfournir mes bouges
pour ce qu'on y prent les plus rouges
a soy partir sans le desjung ;
j'ay prins deux moreeaulx en lieu d'ung
15305 pour fournir ung peu le pourpoint.
CAYPHE
Va en haste, et ne reste point,
noncer a Anne de par moy
que tous les maistres de la loy
l'attendent céans et qu'il viengne.
MAUCOURANT
15370 Mes qu'a aultre chose ne tiengne
qu'a mon devoir, tantost Tarez.
CAYPHE
Messeigneurs, vous attenderez
s'il vous plaist jusqu'à son retour.
Icy vient Nostre Dame a Jhesus humblement
et le saille en ceste fourme,
NOSTRE DAME
Mon enffant, mon bien et m'amour,
15375 la chose que plus je reclame,
que mon cueur plus désire et ame,
le recours de mon espérance,
ma doulce et parfaicte alliance,
comment vous est par vosti'c advis ?
15380 long temps a que je ne vous vis ;
par quoy j'en suis assés dolante.
JHESUS
Ma chère mère révérante,
puisque je vois vostre présence,
j'ay de joye tel aflluence
15385 qu'au monde u'ay chose plus chère.
NOSTRE DAME
0 filz, je feiz piteuse chère
15',oo
f
1540,1
des paroles qu'oy tous les jours :
pour ce que le peuple a recours
a vous et que le secourez :
15390 ces mauvais Juifz malheurés
vous heent a telle habondance
qu'ilz quicrent a toute puissance
vous faire quelque desplaisir.
JHESUS
Hz parvendront a leur désir
15395 et fault que de ma mort chevissent,
mes non pas si tost qu'ilz vousissent ;
mon père ne l'a pas permis ;
et de fait tous mes ennemis
s'assemblent au jour d'uy, affln
de traictier ma mort et ma fin :
c'est la chose que plus desiront
et quelque bien qu'en moy remirent
tous le tirent a mauvaistié.
NOSTRE DAME
Filz, le cueur me fend de pitié
quand j'os ceste parole amere :
V regardez la petite mère
qui en ses flans vous a porté;
I ne me faictes pas tel durté
t que je voye gent tant villaine
15410 livrer vostre nature humaine
a martii-e et a passion :
pensez que la compassion,
qui de vous me departiroit,
le cueur en deux me partiroit :
I5'il5 le dueil me seroit importable.
0 mon cher enffant amiable,
mon vouloir, mon bien, mon soûlas,
ne souffrez pas tel mal, helas !
regardez la crudelité
et la grant infidélité
que ces faulx Juifz vous feroient
s'a leur volonté vous tenoient ;
hors de leurs mains vous en allez,
bien l'evittez se vous voulez
par la deité tout puissant
dont je vous sçay vray possessant
des la vostre conception.
JHESUS
N'ayez en vous turbacion,
ma chère mère débonnaire,
I5'i30 car le voyage me fault faii'e
pour lequel je suis envoyé,
et que par moy soit ravoyé
le peuple forclos des jadis
du royaulme de paradis.
15420
15'!^
15357-59 man'iuent B. — 15365 prepoint B. — 15375 La rien née que B. C. — 15379 Comme A. — 153S7 que joy A.
15390 manque C. - 15'ins tnnt A, — 15412 quen C. — 15'.13 Que B. — 15421 vous manque A.
SECONDF JOURNRE
201
is'itis Toutes les nobles prophccies
dessus moy seront accomplies
et sus mon corps mat et lasso
n'en ai'a ja point trespasso
que tout no iiorto et accomplisse
15'.'iO comme la divine justice
a proposé et ordonné
ains qu'en ce monde fusse né.
Or n'est pas ceste heure venue
que Dieu, mon père, a retenue
15445 en sa prescience divine,
et pourtant, ma merc bénigne,
il fauldra que d'icy me parte.
Je vous lorray Marie et Marthe
pour vous consoler de vos ileulz ;
15450 demoui-ez avec elles deux
tant que nostre retour vendra.
NOSTRE DAME
Filz, mon vouloir obeyra
a vous sans y mettre contraire.
JHESUS
De .ludee me fault retraire
15455 pour.fuir mes persécuteurs.
Icy s'en vx Jhesus et ses apostres.
NOSTRE DAME '"'
0 mauvais .luifz traditeurs,
0 très desleaulx détracteurs,
peuple deffait,
Que vous a mon cher filz mefi'ait
154C0 qui trestant de bien vous a fait?
et vous querez
Sa mort et la délibérez 1
petitement considérez
sa charité,
15465 Son sens et sa nobilité
et sa très doulce humanité
très bien unye
A la deité infinye ;
pute et perverse progenie,
15470 vostre faulce bouche le nye
desloyaulment.
Mes vostre vif entendement
vient au contraire évidemment
et la faulce bouche desment,
15475 car les haulz signes
Dont vos raoï-telz yeux sont indignes
monstrcnt bien ses oeuvres divines ;
mes il estend miel sur espines,
dont ne vous monte :
15480 De ses oeuvres ne tenez compte
par faulx orgueil qui vous surmonte,
dont a confusion et honte
vous tournei'a.
Faulx peuple, qui t'excusera
15485 quand mon cher fllz te jugera ?
vivement lors t'aleguera
qu'il t'a fait nùculx
Qu'a i)euple qui soit sous les cieulx ;
et néanmoins tes fais sont tieulx
15490 que desloyaulment en tous lieux
tu l'as hay,
Regnyé et dc^obey,
et s'il est de toy envay,
se tu pculz il sera trahy !
15495 o faulce envye, j
Seras tu jamès assouvye,
trahison qui tout bien devye ?
quiers tu la lumière de vie
pour mettre a mort ?
15500 La veulz tu banir de son fort
et la bouter hors par effort?
puisque ta vie hez si fort,
la mort te viengne ;
La mort saille qui te retiengne
15505 et ton faulx vouloir la mort tiengne,
affin que jamès ne parviengne
a mon entl^nt.
[l'OSE.]
MAUCOURANT
Anne, le haultain triumphant
vous ci'oisse haultesso et honneur.
l»10 Gayphe, mon vaillant seigneur,
fust volontiers ains qu'il fut nonne
coppié de vostre pei-sonne,
pour appointier aucuns moyens.
ANNE
Messeigneurs les pharisiens
15515 n'y sont ilz pas a ce matin ?
MAUCOURANT
Oy, il y a gros hutin :
je ne sçay que deable il leur fault,
15438 naura C. — 15439 naccomplissp B. — 15449 vous deux C. — 15400 partant U. C. — 15470 pute bouche B. —
15478 Très hnulles de mémoire dignes A. — 15481 faulx manque C. — 15484 te pensera C. — 154y6 O faulse racine
assaruye B. C.. — Ir5li9 valeur H. G. — 15513 daucuns B. G.
202 M I S T R R R
et d'aultre part il ne m'en rhault :
j'ay d'aultres pensées assés.
ANNE
i.'iSïo .le te sieulx.
MAUCOURANT
Or vous avancez,
car ilz n'attendent que pour vous.
ANNE
Ça, mes gens, apprestcz vous tous :
il nous fault aller au conseil,
mettez vous tous en appareil,
15525 Roullart, Dentart et Gadifer ;
prenez ces gros maillés de fer
et vous en venez la grant trot.
ROULLART, premier sergent.
Vous ne sçarez aller si tost
que ne soions a vos talions.
DENTART, deuxième sergent.
15530 Puisqu'il fault que nous y allons,
il fust bon do son bec saisir
au mouvoir.
, GAWKER, troisième sergent.
Nous n'avons loisir :
nostre maistre sans nous s'en va.
ROULLART
Le sanglant gibet le couva !
15535 n'y pouoit on faire sans ly ?
DENTART
Se quelque meschant cust failly,
qu'il faulsist ja mettre en prison,
fust a raison ou sans raison,
ce fust le fait de nous sergens.
GADIFER
15540 II ne nous chaille des perdans,
mes que nous y ayons gaignage.
[Po.^E.]
ANNE
Seigneurs, tout ce noble bornage
gard Dieu de mal et d'eneombrier 1
CAÏHHE
.\nne, i-everand conseillii'r,
15d/i5 a joye soiez descendu.
Pieça vous avons attendu.
DR LA PASSION
15550
li^55
15560
15565
15570
15575
15580
15585
15590
ces haulx et notables seigneui-s
et moy, pour aucuns grans erreurs
de quoy vous orrez le procest.
ANNE
J'ymagine assés près que c'est
|)uisque j'y vois tel asseraWee.
JHEBOBOAN
N'ous devez sçavoir qu'a l'emblee,
en lieu secret et en couvert,
en lieu publique et descouvert,
Jhesus, ce meschant séducteur,
est de tant d'outrages acteur
que, s'es gens avoient puissance,
les ])ierres criroient vengence
contre luy pour le deppointier.
Si sommes venus pour traittier
sur ce fait pour trouver remède,
et est de force qu'on procède
a sa mort, nous n'en poons plus.
YSACAR
Qui ne veult perdre le surplus
et laisser le peuple séduire,
il est nécessaire qu'il muyre •
ou aultrement nous nous perdons.
ANNE
Messeigneurs, ung peu attendons
a juger d'une tel besongne :
n'est pas sage qui ne ressongne.
11 fault avant la depai-tie
ai'guer chacune partie
pour la vérité concevoir.
Rt premier, vous devez si^'avoir
que cest homme cy que vous dittes,
ne sçay par quelz fais ou mérites,
monstre signes tant redoubtables
que les plus grans et plus notables
a très grandes merveilles tiengnent
dont si grandes vertus luy viengnent.
Vous avez veu de fors miracles
sur meseaulx, sur demoniacles,
sur ladres, clops et contreffais,
lesquelz a sanés et reffais ;
de la fille oyste,s compter
qu'il fit aussi ressusciter ;
puis a finablement donné
lumière au povre aveugle né
qui oncques jour n'avoit veu goûte ;
mes encore la passeroute
15521 pour manque C. — 13532 Au partir A. — 155'i0 clmult C. — 15546 Grant pièce nous C. — 13547 mnnquf C.
— 15548 Et inoy pour aucuns grans dangers B. Et nioy or font aucuns dangiers C. — 15554 En publique et a descou-
uert B. G. — 13556 Si est de tant niaulx acteur A. Est tant de transgresse acteur B. Est de tant de destragees acteur
C. — 15337 (Jue se ces gens nauoient B. Que ses gens et luy avoient C. — 13571-72 arguer en partie A. lune et a
lautre partie, B, C. - 15577 très C. — 13582 muez C,
SECONDR JOTIRNER
•>on
(In tous les fais que nous savon,
c'est du bon seigneur Lazaron
qu'il a fait de; mort rt^lever ;
et pour son fait niioulx approuver,
ir^g:. il avoit csto plaincment
quatro jours en son monument :
cela a tout le monde sceu.
Or donc, considftr(i ot veu
les cas qui sont a préférer,
15600 aucuns poiu-roient inférer
qu'il fust Gristus, comme j'ay dit,
et si l'est, cil seroit mauldit
qui la main oscroit toucher
de riens sa personne cmpescher.
15605 Ov veil aidtrcs l'aisons attraire
et arguer la part contraire :
s'il est Gristus, comme on maintient,
a luy compete et appartient
tout le royaulmo de Judeo,
15610 connne l'oscripture est fondée,
laquelle tesmongne en son nom,
que Cristo debetur regnum ;
et ainsi se nous concédons
qu'il soit Grist, mal y procédons
15615 se nous no venons par arroy
le prendre et faire nostre roy
en ferme et vraye obeyssance.
Mes veez cy une répugnance
par quoy faire ne le poons :
15620 chacun scet comment nous avons
perdu plusieurs prérogatives
et loys efficaces et vives,
dont nostre fait vault beaucoup mains,
par la puissance des Romains
15625 qui guerroier nous ont vouliu
et nostre royaulme toUu,
tant que n'avons seigneur ne maistre
fors ainsi qu'il/, le veulent mettre,
et ainsi nous tiemient en getz
150.'i0 leurs tributaires et subgetz,
et pour nous plus mettre en danger,
font nostre roy d'ung estranger,
qui n'est que comme lieutenant
dessoubz l'empereur mantenant ;
15635 et donc se l'empereur peust voir
qu'aultre roy nous vueillons avoir
que cil qu'il nou^ commet et baille,
il vendra a grosse bataille
suhvertir toutes nos cités
inwo
15(M5
15650
15655
15660
15665
15670
15875
15680
15685
et mettre en tclz ncsoessit's
que morR ou vifz il nous prendra :
et alors qui nous detfendra '!
sera ce Jbesus assés fort,
luy qui n'a puissance no |iort,
n'alliance a prince du monde ?
Par quoy mon argument se fonde
qu'il nous doit estre reffu»»',
et seroit le peuple abusé
de soy mettre soub/. la baniere
d'ung roy qui en telle manière
ne luy pourroit porter sa bende.
MAnOOCEL'S
S'il est qui vostre fait entende,
Anne, vous ))i'oposoz très bien.
Il fait moult do signes, combien
que nous, qui congnoissons les loys,
n'arrestons point sur ces explois
que nionstrent luy et ses courlwns ;
et posé qu'ilz fcussent très bons
et pour le peuple endoctriner,
s'est il bon de les impugner
pour éviter plus grant dommage,
et quant est au commun langage
qui Grist le veult appropiior,
ce point leur voulions nous nyer.
Grist n'est pas ; et quand le seroit,
le rogne ne luy debveroit
tant pour sa personne meschante
com pour sa force insuffisante,
dont ses gens seroient fouUés.
NAASON
Doubtes nous sourdont de tous lés,
misères, craintes et eiTours ;
comme ont bien dit ces deux seigneurs
concluans sur cest homme infâme,
qu'il n'est pas digne du royalme.
Quant est de ly, de sa parsonne,
vrayment il n'y est pas ydonne
(cest point est approuv<'' de maint),
et touteft'ois, s'ainsi remaint,
tout nostre peuple le croira
et peust estre roy le fera
par une entreprise inexperte ;
et ainsi nous vendra la perte
que ces bons seigneui's ont toucliié.
CAYPHE
Messeigneurs, qui avez serchié
les meurs et vertus autentiques
15600 Autres C. — 15602 celuy C. — 15603 de In main C. — 15604 «iiproucher C. — 15006 Argue a la pour C. —
15CI3 consentons A. procédons C. - l.">fi29 es getz C. — 15637 Que cil qui nons a baille et commis. C. — 15638 Sur
nous atout ses amis C. — 15052 dict B. C, — 15657 caubons C. — 15672 mes C. -- 15<i75 a luj et B. Qui nest pas luy ne
C. — 15076 Voirement B. C. — 15079 en luy lî. C.
MISTEREDE LA PASSION
que baille Aristote es Etiqucs,
vous ne raonstrez pas en venue
que vous ayez bien retenue
sa docti'ine en moyen aucun.
15690 Dit il pas que le bien commun
précède le particulier
par droit et doit devant aller,
car bien plus a communaulté
et plus sortist de dignité?
15695 Et pour tenir ce document,
je dis qu'il est expédient
de tuer ung homme et destruyre,
si que tout le peuple ne muyre ;
mieulx vault qu'ung homme soit grevé
15700 et ung puissant peuple sauvé
que pour ung seul homme sauver
ung peuple se doye grever ;
et atant fais conclusion.
EUACHIN
Tenons ceste provision
15705 que le peuple en fault délivrer.
BANANUS
Se le voulions a mort livrer,
le meilleur nous est le plus brief,
car il nous porto si grant grief
que nostre loy se pert en vain.
CAYPHE
15710 Et je doncq, comme souverain
de la loy, baille cest edit
que ce mauvais homme et maudit,
en quelque lieu qu'il soit trouvé,
soit prins comme ung larron prouvé
15715 et admené par devers nous.
JOATHAN
A ce nous consentons nous tous :
il n'est moyen plus abrègent
CAYPHE
Or sus doncq ! il n'y aist sergent
bedeau courant n'aultre menistro
157S0 qui ne s'en voit guettier au tiltrc,
voire tout quoy sans mener bruit,
sçavoir s'il vendra ceste nuit
au temple faire ses sermons.
ANNE
Estes vous pretz ?
MALCiis, sergent a Cayphe.
Nous nous armons,
ISTfô mes soiez sceurs, s'on le rencontre,
qu'il ara si très mal encontre
qu'oncques il ne fut a telz nopces.
BRUYANT, deuxième sergent.
Allons m'en faire mes approches
portans nos haches tout en bas.
ESTONNÉ, troisième sergent.
15730 A quoy faire ?
BRUYANT
Pour les debas :
on ne scet du remontrement.
CAYPHE
Allez vous en secrètement
et faictes comme riens n'en fust.
ESTONNÉ
Se je pensasse qu'il y eust
15735 danger, fust d'arc ou d'arbalestre,
j'allasse croupir en nostre estre,
en nos charbons estudier.
MALCUS
Allez prendre xmg tel souldoier
a faire vostre garde corps !
ESTONNÉ
157'.0 Les plus hardis sont premiers more :
ne me parlez point de combattre.
ROULLART
11 n'est point saison de débattre ;
allons faire nostre envaye.
Icy s'en vont etdx six au temple.
JHESUS
Retourner veil en Bethanie :
157'i5 frères, mettons nous en chemin;
le temps s'en va fort a déclin,
et mon heure s'approchera.
s. PIERRE
Cher maistre, quand il vous plaira,
nous sommes pretz de mettre en voye,
15750 et que chacun de nous s'employe
comme vostre veil délibère.
MADBLAINE
Lazaron, mon très amé frère,
puis que feustes ressuscité,
d'esbat ne de joyeuseté
15755 ne feistes signe ne manière.
LAZARON
Seur, j'ay raison assés planiere,
car depuis ma mort corporelle
15686 en A. — 15700-1 sane, saoer B. — 15704 conclusion B. — 15710 Je le dy C. — 15727 mais ne fust B. C. — 157Î8
nos approches B. — 15729 baious contre bas C. — 15733 se riens C. — 15737 En mes B.
SECONDE JOURNEE
305
15760
lal»0
j'ay von mainte ohoso cruelle ;
par quoy quand on co |)Cnsei' suis,
de rions csjouir ne me puis.
Je penso aux peines et tonueiis,
aux |)lours et aux gemisseuions,
aux dures destresscs <l(mnees
aux povres anios condanipnocs,
15765 au ternie de pci'dicion,
au lieu de deaolacion,
au lieu de troj) terrible ardure,
au lieu de mort qui tousjours dure
sans son pacicnt alléger ;
15770 quand je pense a ce dur danger
ou j'ay choisy tant de dampnés,
et puis nous voy tous d'Adam nés
eu co péril vivre sur terre,
qui vouldi-a voit liesse querre :
15773 je ne la sçaroye sortir.
MARTHE
Cher frère, pour nous advertir
de nostre vie misérable,
et s'il no vous est trop grevable,
dictes nous aucunes nouvelles
de ces peines tant criminelles
en quoy ces povres âmes sont,
des cris et des pleurs qu'elles font :
ce nous sera bel exemplaire.
LA.ZAR0N
Marthe, seur, c'est ung lieu sans plaire ;
et a vous deviser les peines
dures, horribles et villaincs
dont ce malheureux lieu habonde,
toutes les langues de ce monde
ne le sçaroient l'ocenser
et parlassent eulx sans cesser.
C'est ung abisme de destresse,
ung hideux gouffre de tristesse
ou toute misère survient.
Rt puisque parler en convient,
sçavoir devez en ce party
que l'enffer total en ce vient
qu'il est on quatre pars party ;
et comment qu'il soit depparty,
chacune des pars assés nuit :
ou enffer est peine s'ensuit.
Et en la plus haulte partie
qui le limbe des pores est,
sont des piophctes grant pai'tie
et d'aultres a qui moult desplest
15785
115790
ri5795
15800
15805
15810
15815
15820
15825
15SaO
15835
158 'lO
158'.5
15850
que l'en diffère leui- procest,
eulx qui sont de gloire attentis :
mes espoir repaist les chctis.
Vient espérance la prudente
qui ung seul i)etit les esjoye,
puis ung vent do trop longue attente
vient fei'ir leur bien et leur joye ;
et lors Dieu scct s'il leur ennoye
qu'ainsi sont privés de lem* bien :
car qui n'a son Dieu, il n'a rien.
Kn l'aultre lieu qui est notoire
et bien ordonné par raison,
est l'enfer qu'on dit purgatoire
ou il y a d'ames foison
pugnies par grant achoison,
comme chacun a deaservy :
nul mal ne demeure impugny.
La sont en piteuse ordonnance
les âmes des bons ti-espasscs
ix)ur paracomplir leur penance
d'aucuns de leurs vices passés :
la ont ilz des tormens assés,
selonc ce que leurs péchés sont :
la peine au délit correspont.
L'aultre enfer qui plus bas desceut,
ou les sièges sont mal ornés,
est lieu par ténèbre indécent
et la sont les enffans morsnés
moult piteusement atornés,
qu'âme jamès ne les decoulpe :
fort plaint qui porte l'autruy coulpe.
Au plus bas est le hideux gouffre
tout de désespérance taint
ou sans fin art l'éternel souffi'e
de feu qui janiés n'est estaint ;
la sont les malheureux contraint
porter pardurablc tempcste :
ou espoir fault la mort est preste.
Hideux puis, abismes parfons,
Chartres de piteux for bandées,
tous plains de pecheui-s jusqu'au fons,
illec recevant leurs souldeos !
la crient âmes malheurees
en leur créateur blasphémant :
a trop poindre fault l'aymant.
Leurs armes sont mort [lardurable
et leur cry d'un piteux helas,
leur chançon d'un dueil misérable
sans jamès espoir de soûlas ;
15767 destre-sseure B. oruellp C. — 15769 se jamais pouoir C. — 15774 voise crosse C. — 15780 tant cruelles C. —
15791 tristesse n. C. — 15792 destresse B. C. — IjSO/i et qui C. — 15810 ung vient C. — 15SH qui par pou les noyé B. C.
— 15826 La sont par torineus renuersez B. 0. — 15827 les offences B. C. — 15828 ou le délit C. — 15831 incedent C. —
15835 qui par ce laultre G. — 15843 Hideux fer B. C. — 15846 Sont lec B. C. — 15849 C«r a trop B. C.
•306
le deablo les tient en ses las
15855 (jui est tout prest de les payer :
de tel service tel loyer.
MADELEINE
Krere, moult se doit (wniayer
cil qui ot faire ung tel rapport ;
je pry Dieu que de si dur port
15860 nous vueille en la fin préserver
et en tel estât conserver
qu'on sa gloire puissions manoir.
JUESUS
Paix soit en ce noble manoir
et a l'assemblée notable !
NOSTRE DAME
15865 0 fiiz, combien est delitablc
vostre corps de vei'tu orné.
MADELAINE
0 mon cher maistre charitable,
vous soyez le bien retourné.
MARTHE
•Jhesus, mal nous est agréable
15870 que tant nous avez séjourné.
LAZARON
Vostre venue poui-fitable
a ce dueil en joye tourné.
SIMON, lépreux.
Puisque Dieu vous a ramené,
vray saulveur, pour nous enseigner,
15875 pour vous et vos gens bienveigner
je vous semons en ma maison
a souper, et est bien raison
que je vous serve main et vespre,
car guery m'avez de ma lespre,
15880 il y a des jours grant foison.
JHESUS
iiiraon, sans nulle aultre achoi^^oll.
nous vous irons tous visiter.
MARTHE
Allons le souper apprester,
Simon, veez cy ma seur Marie
15885 qui a ce ne vous fauldra inio :
elle nous aidera aussi.
SIMON
N'oisine, la vostre mercy
que pour moy tant vous occupez.
Icy mcctent Us tables et ce qu'il y failli.
MI STERE DE LA PASSION
GADIFER
Gompaignons, nous sommes trompés ;
15890 retourner tout court nous convient,
car ce Jhesus ne va ne vient :
si n'y poons faire escarmuche.
ROULL.IRT
Peust estre scet il bien l'embûche :
si s'est ung iicu trait d'une i>art.
DENTART
15895 C'est ung malicieux poupart ;
il n'est pas en ce point a prendre.
MALCUS
Se vous luy sçavez huy apprendi'o
sa leçon, vous serez soubtis.
ESTONNÉ
Puisqu'il ne vient en ces partis,
15900 retournons devers nos seigneurs.
BRUYANT
Nous n'avons huy moyens meilleurs:
nous pardons cy nostre procest.
[Pose.]
SIMON
Sire, vostre souper est prest,
venez seoir, nous vous serviron.
MARTHE
15905 Prenez place quand il vous plest :
sire, vostre souper est prest.
jhesus
Icy ne ferons mes arrest,
de souper nous abregeron.
SIMON
Prenez le souper tel qu'il est.
15910 et une aultre fois mieulx aron.
MADELAINE
Sire, vostre souper est prest,
venez seoir, nous vous serviron.
Icy s'assient tous en ordonnance et sowpeut.
'JADIKBH
Seigneurs, devers vous retournon
.•enfsli'r Tt v;.,r îf f '"''"'■'"'^ ^- "''"'''" ^- - ^^'*™ '"""" «• ^- - 1^82 Briefment vous irons H C - 15900
lepjs B. l.. M vous iiionseiL'niur ]azaron veis oioulé fn-nnt l'VHV) n r jtiruo i >'""»"""o r>. u. loauy
15913 Seigneurs ^mhes B. C. '"""♦" """"f 1«W9 B. C. - 15912 7cy 6o«;,<.n( A. ),i,mî!i<- B. C. -
•SECONDE JOURNKE
207
(lu lion ou nous avoz transmis,
1J915 mes saclie/. ijuo .llu'sus s'est mis
hors lie la voye a son privé.
CAYPHE
Vous ne l'avez dont point trouvé !
«i'ou vient cecy ?
nOULIAUT
Il a tenu
qu'il n'est pas uu temple venu
159Ï0 ces jours le peuple sermonner.
DENTART
Pour vous advertanco donner,
l)lusicurs font giant solennité
do ce qu'il a ressuscite
ce Lazaron do Bethanye,
15925 et vont a grosse compaignie
tous les jours cniploier leurs pas
syavoir la vérité du cas,
et quand ilz le trouvent vivant
le tiengnent a merveille grant :
15930 si croyent on luy par ce point.
ANNE
Seigneurs, nous ne chevirons point
pour machiner no par onvye
tant que Lazaron soit en vie ;
car comme il a dit cy dessus,
15935 plusieurs croyent en ce Jhesus
a le voir, et qui m'en croira,
«oubtil moyen trouve sera
de ce Lazaron cy destruire.
JHEROHOAN
11 est nécessité qu'il muyre
159W ])our conserver nos citoiens,
mes dangereux sont les moyens ;
s'i penserons de longue main.
SIMON, lépreux.
Mon cher maistre doulx et humain,
prenez en gré la pacience :
15945 il me poisc en ma conscience
qu'il n'y a biens jjIus largement.
JHESUS
Des biens avons habondamment,
Simon, vostre mercy, beau sire.
MADEI.AINE
Je vien d'ung ongnenient eslire
15850 dessus tous aultres précieux.
a odoi'er délicieux
et poui- mon volloir mctti'o a chicf
le vois espandre sur le chief
du doulx Jhesus en pleine table.
15955 O choi- filz de Dieu amiable,
recevez en gré a présent
le doulz et gracieux présent
dont sur vous fais l'effusion.
JUDAS
Dont sert cesto pcrdicion ?
15960 n'est ce pas ongnenient pardu f
il vaulsist mieulx qu'il fust vendu,
et donné aux povres le pris :
de l'ai'gent que l'on en eust pris
n'est ce pas supertluité ?
15965 mes frères, en bonne équité
dittes qu'il vous en est advis ;
onc plus grant folie ne vis :
elle cuide faire ung grant bien,
et ce qu'elle fait ne vault rien
15970 ne ne porte quelque avantage.
s. THOMAS
Ce me saniblc bien grant oultrage
et largesse trop plantureuse
que de liqueur si précieuse
perdre ainsi, c'est très grant donmiage
s. BERTHBLEMY
15975 Elle monstre qu'el n'est pas sage,
ainsi connue Judas argue :
c'est toute chose superflue
qui ne vient a quoique prouffit.
JUDAS
Oncques femme aultrenient n'en lit :
15980 c'est leur nature, a tout compter,
que de perdre bien et gaster.
N'est ce pas mal fait ? attendu
que ce qu'elle a cy respandu
eust este vendu en brief temps
15985 trois cens deniers d'argent contons ;
or est pardu, dont n'ay pas feste.
JHESUS
A quoy portez vous tel moleste
contre cesto femme bénigne?
Bonne oeuvre et de mérite digne
15990 a vollu exploitior en moy,
et n'en devez avoir annoy :
eai' se tant des povres pensez,
tousjour» est des povres assés
auxquelz chacun de vous poui-ra
15995 faire aulmonnc quand il vouldra ;
15926 cas C. — 15941 tminijue C. — 15048 la vosli-e iiiel'i'y siie C. — 15U51 IH iloileur moiiJt ilelicieiis li. C. — 15954
De jhesns droit B. C. — 15s>55 aprH.ihle C. — 15972 si IS. — 15974 [.oui- noaut .est (loiiiiiiago B. C. — 15982 Ijibii fait
C. - 15980 Or le iieil B. C. — i:.98» oeuiiro ilo mérite 0.
208
MISTERE DE LA PASSION
16000
16015
mes vous ne m'arez pas tousjouis :
si ne vous doit cstre a rebours
se sa devocion la nieust
me bien faire quand elle peust.
En mon corps a fait cest ungture
segnifiant ma sépulture,
car quant oingdre me cuidera,
alors pas ne me trouvera :
si l'a provenu maintenant.
16005 Encore vous dis plus avant
qu'en quelque lieu que soit preschee
ceste euvangille et demonstree,
par tout sera mencion faicte
de la bonté qu'elle m'a faicte :
16010 tout le monde en orra nouvelle.
JUDAS
Suis je ainsi ravallé pour elle ?
or avant donc, je m'en tairay ;
mes se je puis, j'exploiteray
de faire telle trahison
que je raray ma porcion
que j'ay pardu a ceste fois ;
mes il fault reffraindre ma voix,
tant que j'aye lieu convenable.
JHESUS
Nous avons fait chcre honorable, ,
Simon, vostre mercy, beau sire.
SIMON
11 n'est besoing de cella dh-e,
cher maistre : tout mon tenement.
est en vostre commandement
a faire vostre bon plaisir.
JHESUS
Chers frères, il m'est prins désir
d'aller pour noncer vérité
en Jherusalem la cité :
nous y sommes bien désirés.
Pierre et vous, Jehan, vous en irez
en ce chasteau icy dessoubz
que vous voiez encontre vous,
lllec trouverez une ancsso
et sou asnon qui ne la losse :
desliez et la m'admenez.
s. PIERRE
10035 Sire, ainsi que vous l'ordonnez,
il sera fait sans attendue.
JHESUS ■
S'il est qui vous en redarguc
ou vous repreigne en cest affaire,
16020
16025
16030
dittes : le seigneur a a faire
16040 de ces deux; guerre n'en fera,
et tantost vous les laissera
et vous en vendrez sauvement.
s. JEHAN
Vostre begnin commandement,
cher maistre, irons exécuter :
16045 Pierre, il est temps de nous haster,
mettons nous a chemin bon erre.
s. PIERRE
Allons acop ces asnes querie
ainsi qu'il nous l'a commandé ;
mes quand j'ay bien tout regardé,
leœo je m'esbays qu'il en dispose :
nous n'avons point appris tel chose
qu'il prengne asnes pour soy porter ;
de riens ne se veult supporter,
tousjours traveille, tousjours peine,
16<^ et sa doulce nature humaine
au monde n'a point de repos.
s. JEHAN
Tant qu'il touche de ce propos,
je pense en moy et considère
que c'est pour aucun giant mistcre
10060 qui n'est point a nous assavoir :
allons faire nostre devoir
et sa bonne grâce en arons.
s. PIERRE
Veez cy l'asne que nous querons,
et emprès son asnon petit,
16065 comme nostre maistre avoit dit.
Jehan, regardez, c'est ung grant signe
que la prescience divine
est en luy : tesmoing en avons.
s. JEHAN
Fermement croire le devons ;
16070 aussi je n'y metz point doubtauce.
Pierre, je vous pry qu'on s'avance,
gardons que ne séjournons trop.
s. PIERRE
Je l'aray deslié acop :
ainsi l'anesse s'en vendra
16075 et l'asnon après la suyvra,
comme nature luy enseigne.
s. JEHAN
J'ay grant désir que l'heure vicngne
10009 manque C. — 16011 reparle B. ramponno C. — 16014 producion B. perdidon C. — 16019 notable B. — 16026
Daller pour anonoer A. prononcer C. — 16033 faon B. — 16038 contredit C. — 10040-41 De ces deux bestes que
qucrez Et lantost vous seront laissez C. — 16042 seurement B. C. — 16046 bonne B. grant C. — 16047 rest agne
B. — 1605S Tant quesl a moy B. C. - 16064 faon B. — 16071 Or sus pierre le temps sauance B. C.
SECOND !•: J 0 V R N K K
2W
que vers iiostro maistre soyons.
s. PiEnnp.
Hastons nous tant que nous pouons,
1G080 aultro renicde je n'y vois ;
je reminainc.
s. JEHAN
Après je m'en vois,
la chassant un pou le graiit pas.
s. PIERRE
Se Dieu plaist, nous ne fauldrons pas
de venir assés de bonne heure.
s. JEHAN
16085 Se nous faisons longue demeure,
nostre maistre est doulx et begnin :
si prendra garde au long chemin
que si tost n'avons peu parfaii'e.
s. PIERRE
Mon très cher maistre dcbonuaii-e,
16090 vostre command fourny avon;
veez cy l'anesse et son faon :
faii'e en pouez a vostre veil.
JHESUS
Frères, j'ay disposé et voil
monter sus pour cause certaine,
1G095 et dedens la cité haultaine
nous en irons.
s. ANDRY
S'il vous plest, maistre,
nos vestemens y voulons mettre
et vous vous serrez par dessus.
Ici/ metent leurs robes sur l'anesse et monte
Jhcsus sus et s'en vont en Jherusalem.
JHESUS
Vous dittes bien.
s. BERTHELEMY
Or montez sus,
16100 et chacun y tendra la main.
.s. PHELIPE
Frères, suy vous sans nul remain :
nostre maistre s'en va devant.
s. SIMON
Tantost serons appercevant
les peuples de liesse plains
1C105 faire joye par mons et plains
a ceste venue nouvelle,
car partout court fort la nouvelle
de la grant résurrection
du vaillant seigneur Lazaron
16110 que chacun tient a grant merveille.
s. JUDE
La joye sera nonpareille
que le i)cuplc y fera sans double,
car volenticrs ses dilz cscouto
et ja pioça no l'ont jieu voir,
16115 et doncq, mes qu'ilz puissent sçavoir
sa venue, ilz feront grant feste.
s. JAQUES ALPHEY
Pour monstrer joye manifeste,
chacun porte dedans ses palmes
de vcrdoicns rainsseaux de palmes :
16120 ce sera signe de liesse.
s. MATUI^
Nous en avons a grant largesse :
alloua nous en le grant chemin.
RUBEN
Gedeon, et vous, Neptalin,
bonnes nouvelles vous apporte.
GEDEON
16125 Est ce chose qui nous confforte
ou porte consolacion ?
RUBEN
Oy, et grant perfection,
et puisque dire le convient,
Jhesus, le saint prophète, vient
16130 la sainte cité visiter.
GEDEON
Est il vray?
HUBEN
Plus n'en fault doubler :
il vient pour nostre remonstrance
et ses bons amis confforter.
NEPTALIN
Est il vray ?
MOAB
Plus n'en fault doubler :
16135 sur l'asncsse est volu monter,
et vient par humble contenance
sans monstrer orgueil ne bobance ;
nous y pourrons moult profflter.
ABIRON
Est il vray?
TUBAL
Plus n'en fault doubler :
16140 il vient pour nostre remonstrance.
Partons nous en belle ordonnance,
allons a l'encontre de luy.
CELIUS
Abacut, n'est ce pas celluy
16078-86 mawiu,enl A. — 16082 En la chassant le C. — 16088 Que nostre voyc puissions faire A. — 16108 De sa
noble ressussitacion C. — 16137 bombance B.
Pas.
14
•2[Q MISTEÎIE
qui tel gloire manifesta
16145 quant Lazaron ressuscita,
le benoit prophète Jhesus ?
ABACLT
C'est il proprement, Celius :
allons à sa doulcc présence
luy faire honneur et révérence
16130 comme a nostre souverain roy.
RUBEN
Chacun se mette en bel arroy :
prenons de palrncs lieaux rinceaux,
draps dorés exquis et nouveaulx,
et les cstandons en la place,
16155 affin que l'asne dessus passe
du vray rédempteur d'Israël.
GEDEON
Vcez cy le doulx Emmanuel,
veez cy le rédempteur du monde,
veez cy le sauveur pur et monde
16100 qui nous doit a gloire avoyer.
NEPTALIN
O saint et bcneuré loyer
de nostro attente désirée,
bcnoite soit ceste journée
que nous te poons convoyer!
MO Al!
16165 Corps et biens voulons cmploier
a ta loange bien eurec,
o saint et ))oneuro loyer
de nostre attente desirec.
JHESUS
Pitié me constraint larmoier
18170 dessus toy, cite malheuree :
se tu sceusscs ta destinée,
de lermes te deusses noyer.
ABIRON
0 saint et beneuré loyer
de nostre attente désirée,
16175 benoite soit ceste journée
que nous to poons convoyer!
TUBAI.
Cause n'avons de simploier :
veez cy nostre roy, nostre sire,
le bien que nostre cucur désire,
16180 que les prophètes ont prédit.
Osanna filio David/
a joye soiez vous receu !
CELIUS
Hcnoif soies qui es venu
ou nom de Dieu, nostre vray pero !
16185 benoit soit le divin niistcre
DE LA PASSION
qui ung tel trésor nous envoyé !
ABACUT
Gcstcz ces rinceaux par la voye,
faisons jeus et esbatomens,
et estandons nos vestemens
16190 a la venue du seigneur.
RUBEN
O benoit saulvcur,
o vray rédempteur
d'humaine nature,
A toy soit honneur,
16195 puissance et valeur
sans fin no mesure !
GEDEON
Chantons, menons joye,
chacun se resjoye
a ceste venue.
JHESUS
16200 Le peuple festoie
et mon cueur larmoyé :
c'est liesse nue.
NEPTALIN
Saulveur benedict,
gendi-e de David,
16205 bien soiez venu.
JHESUS
Ce joyculx conduit
sera mal conduit
et bien .cher vendu.
MOAB
Chacun se concorde
16210 et sa voix accorde
faire beau record.
JHESUS
0 maie concorde,
qu'en faulcc discorde
vendra cest accord !
ABIRON
16215 Fille de Syon,
en devocion
ton niaistre reçoy,
qui vient mettre en toy
visitacion.
JHESUS
16220 Lameulacion,
dcsolacion
et piteux convoy
sur toy venir voy,
fille de Syon.
TUBAL
10225 0 noble cite,
16132 et rinsseaux C. — IflKiO mener C. — 161';7 leriiuijer C. — 161S2 vous maii'iac B. — 16190 de nostre G.
16Î10-12 manquent B. — 16213 inalle B. — 16223 benoite C.
SECONDE
grant joyeusete
doys en toy avoir,
qui vas recevoiiT
ta félicité.
JHESUti
16230 l'^n perplexité,
eu adversité
te voy promouvoir :
c'est piteux avoii-,
0 noble cité.
CEI.IUS
16235 Filz David, roy de majesté,
en qui gist puissance divine,
qui les aveugles enlumine
et aux mors sces la vie rendre,
a honneur puisses luiy descendre,
10240 et nous doint Dieu qu'a tousjours mais
dessoubz toy puissions vivre en paix
connne nous y avons fiance.
ABACUT
C'est uostrc bien, nostre espérance.
Osanna filio David!
16245 et benet/iclus qui venit
au nom du triumphant haultain !
Maintenant sonnues tout certain
de la nostre rcdompcion.
.IHESUS
Pour faire predioacion
162S0 et le peuple vers Dieu attrairo,
vers le temple me fault retraire,
car il y a des gens foison.
Jacob, scribe.
Veez cy la plus forte poison,
la rage plus desmesurcc
161856 qu'oncques fortune ait mesurée
depuis l'heure que me congnus :
tout le monde suyt ce Jhesus,
tout le monde luy fait hœmeur
et le tient pour roy et seigneur,
1G260 et nous sommes mis au derrière.
JORRAN
To\it le peuple luy fait tel chiere
pour ce que pic(,a ne le vy
que tout son courage est ravy
de luy dons et honneur parfaire,
JOURNEE
10265 et bi'iefnient il n'en peut |ilu» faire
s'il/, ne le i)ortent en leurs bran.
Y8ACAR
Ou luy estant robes et draps,
on luy chante moté», ]i8ealmes,
on luy gette rainceaux do palmes,
16270 comme eo fust Dieu de lassus.
JHEROBOAN
Briefinent nous en sommes deccus,
que tout nostre fait n'en vault rien ;
nous en pardons tout nostre bien.
Vous voyez qu'ilz le suyvent tous,
10275 et l'en ne tient compte de nous
ne de la justice civille
a cent pars, non pas a dix mille
que l'on souloit faire jadis.
MARDOCEUS
Nous ne procédons que par ditz
102SO et menaces de longue main :
telz fabuzes sont tout en vain,
nostre fait n'a point de conduitte :
nos princes l'ont ainsi conduite ;
ce sont tousjours de leurs fa(,'ons.
ANNE
1G285 Que voulez vous que nous façons ?
nous sommes dollans de ces festes
ne plus ne moins comme vous estes :
tant on avon coin vous avez.
CAYPHE
S'aucunc remède y sçavez,
16290 pour Dieu veilliez le nous appi'endre.
MARDOCEUS
Oy : il ne le fault que prendi'e
prestement i)ar cruel effort
et l'occire.
CAYPHE
11 seroit bien foi't !
Et quand est a ceste pensée,
10295 c'est msi advisé, Mai-docee ;
et mal conduit son avangarde
celluy qui la fin no regarde ;
mes il ne vient aultres consaulx
par coustume de jouvenceaux :
16300 si ne s'en fault pomt esbayr.
Comment pensez vous envahir
cest honnne cy soit près ou loing,
quand, s'il venoit qu'il eust bcsoing,
tout le monde seroit pour luy ?
211
16230 Ta A. — 16232-16235 nwii'iufnt C. — 16235 de dauid A. H. — 1623(i luist C. — 1623S fais la veue C. — 168^
il nen pcueul A. — 16266 porte entre ses br.ns B. — 16268 notes B. »t psealines B. C. — 10260 et palmes B. —
16283-4 Ce sont tousjours nos redicte Ce sont nos ditz et nos façons C. — 10201 Ouy bien .1. et ooinuicnl M. le preudrb
Ui C. — 16295 très mal aduises B. très mal pense C.
212
MISTICUK DE LA PASSION
A>NE
16305 II n'est pas bon a faire ainsi :
bien fault aultre heure regarder
a le prendre et appréhender.
Tant que le peuple ainsi le suyvo,
ne doublez jamés qu'il n'cstrivc
16310 a le prendre tant qu'il pourra.
CAYPHE
La chose se reffroidira
encor ung tantôt pour le miculx,
et tandis nous choisirons lieux
pour le surprendre a pié levé.
NAASON
16315 Puisqu'il est au temple arrivé,
je vois oir qu'il vouldra dire.
ELIACHIX
Et je vous cnsuivray de tire,
non pas pour oir ses paroles,
car a toutes ses paraboles
16320 je n'y acompte pas ung ail.
NACHOR
J'y vois aussi.
NATHAN
Et se j'y fail,
mes deulz en seront plus pesans.
RLBEN
Resjouissez vous, mes euffans :
veez ey vostre roy supernel.
LE PREMIER ENKFANT
16325 Bien viengne le roy d'Israël
pour son beau royaulmc ordonner;
a joye luy doint Dieu régner
et face son règne éternel!
LE DEUXIEME ENKFANT
Oncques Jherusalem ii'ot tel,
16330 et pour luy plus grant los donner
bien viengne le roy d'Israël
pour son beau royaulme ordonner.
LE TROISIEME ENFKANT
C'est le piteux Emmanuel
que Dieu a voulu admener
10335 pour nous régir et gouverner :
cnffans, faisons ce chant nouvel.
LE PREMIER ENFFANT
Bien viengne le roy d'Israël
pour son beau royaulme ordonner;
a joye luy doint Dieu régner
16340 et face son règne éternel!
NAASON
Os tu point le chant soUennel
que ces enffans icy te font ?
comment pour toy esjouis .sont
et font grant feste et resverie?
ELIACHIN
16343 C'est une droite mocqueric
de les oir chanter et braire.
NACHOR
Tu les deusses bien faire taire
de l'eure que tu les enteus,
car plusieurs en sont mal contens
16350 qui n'y voient raison quelconques
ne cause.
JHESUS
Ne leustes vous oncques
David en ses pseaulmes chantans
que de la bouche des enffans
est parfaicte la Dieu loange?
163K et pour tant ne vous soit estrange
s'ainsi font ; car se plus sçavoient,
moult volentiers l'aduonccroicnt ;
et tel loange est mieulx prisie
que vostre faulce ypocrisie
16360 qui ne contend qu'a mal venir.
Frères, plus ne me veil tenir
en ceste austère compaignie;
mes retournons en Bethanye
ou Marthe tousjours nous reçoit.
s. PIERRE
16365 II est bien besoing qu'ahisi soit,
car depuis que cy arrivasmes
nous ne beusmes ne ne mangeasmes,
et s'est tantost souleil couchant.
JUDAS, a part bj.
Je suis malostru et meschant,
16370 quant mon estât bien considère,
de moy tenir en tel misère
en ceste meschante consorte :
beaucop de povreté j'y porte
qu'il n'est mestier do revcller,
16375 comme de venir et d'aller,
de mourir de froit et de fain ;
et qui pis est, suis incertain
16305 bon manqui' A. nest bon a le prends B. G. — 16318 serinons B. C. — 16319 Car a ses fabuses par mons B. C.
— 16325 Bien viengnant A. — 10329-40 manruçnU C. — 16351 II est ainsi B. C. seigneurs leustes C. — 16352 son
psaulticr A. — 10358 choisie B. C. - 16362 progenie C. - 16368 tousjours B. - 16309 malheureux A.
SECONDE JOURNEE
213
quel Lion en la fin m'en vendi'a.
Jusiju'au mourir me souvendra
10380 de cest ohiguenient espandu,
et se mon engin n'est pardu,
je parveudray a mes attaintcs.
JHESUS
Comment le font ces dames saintes
en leurs bonnes dcvocions ?
MARTHE
16385 Très bien, puisque nous vous voyons,
nostre vray baston pastoral.
MADELAINE
11 ne nous pourroit estro mal
tant que de vous ayons coppie ;
mais la vostre mère Marie
10390 ne peust prendre en son cueur liesse,
ains pleure joui' et nuit sans cesse :
quelque chose a qui luy dcsplaist.
JHESUS
Ghere mère, comment vous est?
le viaire avez osplouré.
NOSTRE DAME
16395 Mon filz, moult avez deraouré
en la cité dont vous venez ;
vous et vos gens estes penés,
dont j'ay en mon cueur grant cnnuy
et sy croy que de ce jour d'uy
Ift'iOO ne trouvastes en la cité
qui ung peu vous ait présenté
de pain pour la fain estancher.
JHESUS
11 est ainsi.
NOSTRE DAME
0 mon filz cher,
tu es pain de vie éternelle,
16405 et s'endurcs souffrete telle !
mon cueur se doit bien douiouzer.
MARTHE
Jhosus, venez vous reposer
ung tantôt a vostre devise ;
tout est prest et la table mise,
16410 prenez ung peu retlection.
s. PIERRE
C'est bien grant malédiction
a ces Juifz de put alloy
qui ont fait si noble convoy
a nostre maistrc ccstuy jour,
16415 mais quand est venu au séjour,
il n'a eu amy si certain
qui ung seul morceau de son pain
luy ait donné; sont ilz bien chiens !
s. JEHAN
Hz craignent les phai'isions,
16420 les scribes et pontificaux
qui sont malicieux et caulx :
si les destruiroiont du corps.
Icy se tire Jhesus et Nostre Dame a pari.
NOSTRE DAME
0 cher filz, quant je me recoi-s
des piteux motz et douloureux,
16425 destresseux et mal savoureux
dont aultreffbis m'avez servye,
en disant que do coste vie
briefnient vous fauldra départir,
mon anic se voulsist partir
16430 de mon povre corps qui lui griefve,
et se la promesse s'achève
je sçay bien qu'ainsi en sera.
JHKSUS
Mère, l'heure s'aprochera
que la chose soit accomplie.
NOSTRE DAME
16435 Helas ! mon fllz, je vous supplie
que jamès vostre corps n'habite
en ceste cité tant maudite,
en qui tant avez d'ennemis ;
vous n'y avez si bons amis
16440 qui pour double de mal avoir
vous y osent pas recevoir ;
vous voiez qu'il n'y a personne
qui ung morceau de pain vous donne,
et deussiez vous de fain périr
16445 nul ne vous ose secourir.
Chacun dit huy : « .Te le regny, »
pour la doubte d'estre pugny ;
et sont ainsi accouardis
par ces pharisiens maudis
10450 dont riens fors trahison ne vient,
et dont, se la chose parvient
qu'en leurs mains vous soiez livré,
par qui serez vous délivré ?
pourra le peuple contredire ?
16386 Nostre ] Vostre A. — 16392 chose manqur A
B. C. — 16441 voulsissent C.
16406 te n. C. — 16412 sot aloy C. — 16421 forment subtili et
214
MISTRRR DE LA PASSION
1&455
1Û460
16465
16470
16475
164S0
16485
16490
16495
16500
VOUS voyez qu'il u'oze mot dire
pour ces pharisiens mauvais.
0 mon filz, n'y allez jamais,
ne veillez pas habandonner
vostre niere, pour vous donner
a ceulx qui vous veuUent destruire.
JHESUS
Ma mère, il me convient conduii'e
selon l'ordonnance et la vigie
a quoy l'escripture me rigle,
et pour endurer ceste peine
ay je formé ma char humaine
en vostre ventre vénérable,
et de ceste gent misérable
Ysaie disoit ainsi :
IIos filios enutrivi ;
ipsi autem spreverunt me !
Dit le prophète prénommé :
J'ay nourri mes enffans assés,
puis eslevés, puis exaulcés,
et puis m'ont desprisé en fin.
Vous y voiez ce peuple enclin
qui quiert que je soie deffait,
et si convient qu'ainsi soit fait
pour l'humaine redenipoiou,
et s'il y a dilacion
il n'est ame qui les délivre.
NOSTRE DAME
Ja Dieu ne me laisse tant vivre,
mon cher filz, que je le retarde ;
et mesmement quand je regarde
que pour elle a etfect mener
vous estes voulu incarner
en moy, noble journée feis.
Ja Dieu ne plaise, mon cher filz,
que j'empesche si haulte chose ;
mes ce que mon vouloir propose
par la bouche qui est ministre,
c'est vraye amour qui l'administre
et dilection si ardente
que nature est insouffisante
a ce que reparer l'en puisse.
Filz, c'est raison que j'obeysse,
ne je ne répugne jamès
a vostre veil, mes m'y soubmès ;
mais aussi n'est il pas licite
que moy, vostre mère petite,
ne debvez ung petit oir
et en aucuns cas obéir,
ou au moins passer ma requeste.
O filz tant doulx et tant honneste.
16505
10510
16515
16520
iœ25
16530
16535
16540
16545
16550
ou amour a mon cueur enté,
voy le ventre qui t'a porté,
voy les mameles en pitié
qui t'ont nourry et alaitié
le temps de ta tendre jeunesse,
et considère ma foiblesse
qui ja résister ne pourroit
au grief dueil qui me survendroit
a toy voir la mort endurer.
0 cueur, y sçarois tu durer?
te sçaroit constance deffendre?
nennil : douleur te feroit fendre
et depaitir par le millieu.
0 très beneuré filz de Dieu,
se ma requeste est opportune,
je quier de quatre choses l'une :
vous n'avez excusacion.
JHESUS
Faictes vostre iicticion,
ma chère mère révérante. .,
NOSTRE DAME
Pour ester ceste mort dolanto
qui deux cueurs pour ung occiroit,
il m'est advis que bon seroit
que sans vostre inoii et souffrance
se fist l'humaine délivrance ;
ou que s'il vous convient mourir,
que ce soit sans peine souffrir ;
ou se la peine vous doit nuyre,
consentez que premier je muyre ;
ou s'il fault que mourir vous voyo,
comme pierre insensible soie.
Filz, humblement vous ay servy :
si n'ay pas vers vous desei'vy
chose par quoy doyez débattre
a m'ottroier l'un de ces quatre,
car tous sont en vostre puissance.
JHESUS
Ma mère et ma doulce aliance,
a qui obeyssance doys,
ne vous desplaise ceste fois
s'il fault que je desobeysse
et vostre requeste escondisse :
ces quatre ne vous puis passer,
non pas l'une ; et devez penser
que l'escripture ne ment point.
Et pour respondre au premier point
que requérez, que sans mourir
les humains doyve secourir,
mourir me convient par envj-e
en adverissant Ysaie
16461 me fault C. — 16474 decharpy B. deguerpy C. — 164S4 oflert C. — 1G48S jobiiie a lî. G. — 1G503 considérez la
queste B. G. — 16508 ma A. B. — 10515 le cueur te A. — 10519 requier B.
SEGONDK JOURNEK
21Î
lfi555
I
16500
qui en RC8 eaintiHincs devis
a (lit (lo moy : Sicut ovis
<id occidcndum ducitur.
NOSTIIE I)\MK
0 filz, que ce parler m'est dur
et mal savourant a merveille !
.IHESUS
Il dit ainsi : Gomme l'oucille,
est mené a l'occision ;
il fault que l'exécution
de la mort sur moy se termiue.
he second point, mero bénigne,
auquel requérez que je nmyro
sans i)eine qui me juiisse iiuyre,
force est que ja ne l'obtenez ;
lor^ô cai' comme tous ceulx d'Adam nés
ont pesché jusqu'à vous et moy,
je, qui rinnnanitc ro(,'oy
pour tous les humains délivrer,
doy sur tout mou corjis endurer
excessive peine et amei'c :
oez Ysaie, ma mère,
et vous contentez a ses dilz ;
dit il pas : A 2)lanta pedis
iisque ad verticU meta.i
■ non est in eo s.initjs?
il me dénonce esti'O blecié
t;int que de la plante du pic
jusqu'au cliief en la part haultaine
n'y domourra partie saine
qui n'ait souiFrcte riostresseuze.
NOSTKE DAME j j/
O dolente mei-e angoisseuze ! i
o pitié, o compacion !
pourras tu voir tel passion
sur ton clier fdz exécuter ?
0 dueil incappable a porter,
quel cueur te sçara soustenir ?
JHESUS
Lo tiers ne i)oez obtenir,
ne jamès permettre ne doy
que mort vous piengne devant mov,
cai- vosti-e arae fauldroit descendre
la bas au limbe et moult attendre
eu plainte et lamentacion
jusques a mon asceiicion,
qui seroit chose moult obscure
et sambleroit que n'eusse cure
de vostre bien et vostre honneur.
Du quart no puis cstre donneur
non obstant qu'il me fust possilile.
10570
105-
ICÔSO
10585
10590
10595
10000
10005
10010
c'est que voua feussiez inoensible :
il ne seroit pas i)ei-tinent
que niere, qui si tendrement
ayme son filz, vist tel pitié
et son filz a tel mort traictié,
et do sa dure i)assion
n'eust en son cueur compassion.
Mes sur ce point vous confortez,
ma more, et constamment portez,
car du dueil do vostre pensée
serez du tout recompeucoe
en joie et exultacion
après ma resurrt ction ;
cai' alors vous visiteray
et vostre cuem\ confoiioray
de joye et i)arfaicte lumière.
NOSTKE DAME
10015 Cher filz, quoi que je vous lequiore,
pardonnez ma sim])licité ;
puisqu'il est de nécessité,
vostre bon vouloir en soit fait.
JHESl'S
Frères, pensez à vostre fait :
10020 ung peu reft'cction prenez,
si qu'avec moy vous on venez ;
car il est de nécessité
do retourner en la cité
l)our aucuns affaires certains.
s. JEHAN
166?5 Maistre, le plus doulx des humains,
ne faictes ja dilaciou :
tant qu'a nostre reffection,
nous la tenons pour toute prise.
JMESLS
Chero mère, en cesto pourprise
10030 ung petit je vous laisseray,
et briefment je retourneray
par dcvei-s vous, n'en ayez double.
NOSTRE DAME
Mon filz, <le ma volonté toute
a vous je me vcil consentir.
MARTHE
10635 Ma dame, laissez le paitir
hardiment, comme il ly plaira :
il vous promcet qu'il revendra,
je m'en tien pour tout asseureo.
10550 malueiUe C. — l(5.->8 meneo A. D.
16030.il voua C. — 10<.3S Iwnueiit B, C.
• 16572 conscrlcs U, conlermes C. 105S5 A dueil A. B. - 16600 me B. -
216
MISTERK DE LA PASSION
Icy se part Jhesiis et tous ses appostres et s'en
vont vers Jherusalem.
JHESUS
J'ay la char moult fort martirec
16640 de fain et ne sçay que mangier :
j'apperçois icy ung figuier
auprès de cesto sente la ;
je vois sçavoir se rien y a
pour ma doUant fain estancher.
Icy vient regarder soubz les feuilles et dit
Jhesus de rechief :
16645 J'ay beau ce figuier esplucher,
il y a des feulles grant somme,
mes sans fruit ; arbre, jamès homme
ne mengeusse fruit que tu portes,
et soient tes racines mortes,
16650 tu soies maudit et destruit,
tant que jamès ne portes fruit
pour ta grant imperfection !
s. SIMON
Veez la grant malédiction :
je ne sçay qu'il en advendra.
Icy vient Jhesus au temple, et doit avoir grant
foison Juifz ; c'est assavoir Ruben, Nepta-
lin, Moab, Abiron, lîabanus, Emilius,
Tubal, Celius, Manasses et d'autres plu-
sieurs.
nous n'en poons plus endurer.
ANNE
Sire, fault tout considérer :
niieulx vault de souffrir ung tel fol
10075 que d'emprendre sur nostre col
ung fardeau qui n'est point portable ;
il y a peuple innumcrable
qui a force revancheroit
ce Jhesus, qui le greveroit.
10080 Mes vecy comment on fera :
on l'orra, on l'escoutera
diligemment sans l'estriver,
a savoir s'on pourra trouver
a son parler erreur aucun,
10685 et s'on y en treuve nesung,
nos gens lors l'iront assallant
qui sur forme d'ung beau samblant
luy proposeront questions
soubtilles, ou solucions
10690 ne sçara trouver sans danger.
CAYPHE
C'est bien dit, il fault abréger,
qu'il ne soit du fait adverty.
JHEROBOAN
Nous deussions ore ostre party
d'y aller a grant compaignie :
10095 partons tost, que Dieu nous conduio !
Icy s'en vont tous escouter le sermon de Jhesus.
MARDOCEUS
16655 Au temple aller nous convcndra
hastivement, je le conseille :
on m'a ja soufflé en l'oreille,
aucun bien mon amy privé,
que Jhesus y est arrivé
10660 qui fait merveilles de prescher
et d'abatre et de tresbucher
nos ediz et nos drois legaulz.
CAYPHE
Oncques homme ne fit les maiilx
et la destourbance infinie
16065 que ce Jhesus et sa meignie
nous perpètre de jour en jour ;
et si n'y sçavons trouver tour
pour en depescher le pays.
Bons amis et leaulx Juifz,
16670 faisons jusqu'à la une vouste
et l'empoignons combien qu'il couste :
JHESUS
Erunt novissimi primi, '> l
erunt primi novissimi.
Mes amis, par ceste paroUe
je vous exhorte et vous recolle
16700 ce qu'aultreffois vous ay compté,
c'est que parfaicte hmnilité
soit en vous en toute manière
et orgueil débouté derrière,
et vous gardez bien des sermons
10705 des orgueilleux pharisiens,
c'est a dire de leur doctrine,
qui leur volonté ont encline
d'avoir les grans presumpciçns,
les los, les salutacions,
10710 les grans honneurs en plaine rue,
affin que de la gent menue
soient tenus pour bons et sages
/^
10645 cestuy arbre B.C.— 16650 Subitement B.Soubtillement C. — lOfioSprouuo C. — IGMO Font cbaoun jour de jour en
jour C— 10669 Mes amis B. G. — 16678 sur ce B. repugneroit C. — 16086 assemblant B. C— 16690 On ne saura se C —
16695 Bananicas. I.e dieu iHsrael nous B. G. — 16697 Et primi nouissimi A. B. C. — 16700 recite C. — 16710 vue C.
skcondf: journrk
21';
10715
16720
167Î5
1G730
16735
16740
16745
16750
167»
16700
et gens plains do soubtilz langages :
les lois esti'oites prcschcr seuUent,
mes tant soit pou tenir ne veulleuf,
il/, lèvent nstatus grovains,
ce sont enlx qui en font le mains ;
les grans fardeaux au peuple affullent,
mes au porter tousjours lecullent;
ilz faignent une vie sainte,
mes c'est ypociisio faintto
soubz l'habit do papclardie;
comment ont la char si hardie
eulx qui sont miroir et exemple
et premiers gouverneurs du temple,
et mettent rigorouses lois,
rudes editz, status e^^trois,
dont eulx mesnies no tieiment rien ?
Mes amis, gardez vous en bien,
n'ayez ymaginaeion
en leur mauvaise elacion :
tout vendra a néant a la fm.
S'ilz tiennent orguilleux chemin :
s'ilz ont argent, chovaulx et di'aps
et les grans honneurs a plain bras,
ce no dure ne que fumco
saillant de la flanmie allumée :
se lèvent si hault qu'ilz vouldront,
de néant viennent, a néant vendront ;
de leur oeuvre rien no so pert,
car Dieu qui voit tout en apert
rétribue a ces ypocrites
leurs loiers selonc leurs mérites ;
quant sont au temple et a la table,
vueuUent seoir a\i lien plus notable;
pour sambler gens d'auctorités,
estrivent pour leurs dignités
et veullent les bras trop hault tendre ;
mes Dieu les fera bien descendre,
et si au bas se trouveront
que jamés no relieveront :
lors sera mon dist accompli :
Erunt primi novissimi.
C'est a dire que les premiers,
au monde querans les liaulz lieux,
seront logés tous les derniers
dedans le royauliiie des ciculx.
Mes le danger est qu'a leurs yeux
ne voyent les humbles et lions
levés es haultes régions
pour sans fin en joye rogner,
et eulx descendre et tresbucher
au fons de l'onffer pardurable.
CAYPHK
Cest lioMunc icy compte le deablc
10765 et dit niotz qui sont a cremir,
tant qu'il me fait le cueur frémir
et tressuer de fhie angoisse.
ANNE
Pourquoy ?
CA.YPHE
Se Dieu honneur vous croisse,
entendez vo\is pas bien son cas ?
10770 oez vous pas les predicas
et la pensée qu'il nous garde ?
ANNE
Sy faisons très bien ; il nous larde
et nous attaint aucunement.
CAYPHE
Ce fait mon, le plus vivement
16775 qu'oncques feusmes en nostre vie.
Haro ! j'enrage, je desvye,
le cueur dedans me va partant :
il n'est homme, tant fust constant,
qui ne pardist cy pacieuce ;
16780 en corps, en cueur, eu conscience,
il nous a cecy dit tout oultre,
on le voit.
ANNE
Au moms, il le moutro
par sa parolle coustuniiere.
Mes, monseigneur, tenez manière,
10785 ne descouvrez point telz rancunes,
nous vendrons très bien a nos unes
et s'y samblera qu'on n'y touche.
CAYPHE
Je tarde a grant peine ma bouche
car son parler trop fort me point.
JHESIIS
16790 Or veil poursuyr l'aultre point
par lequel je veil inimer
et sensiblement arguer
que les humbles et les piteux
précéderont les orguilleux.
10795 Dieu, mon pore, d'oi gueil n'a cure,
car la plus noble créature
qu'on paradis avoit formée
par orgueil est tant dittbrmee
qu'elle est en l'eternal palu
10800 sans jamès espoir de salu.
Entre la meiguie dampnee
orgueil est la première née,
1071S uffublenl H. — 16720-27 loiz si rigoreuses Si rudes si mal aiiioureusos B. C. — 16732 sur neaul B. C. en fin A.
— 16740-1 part, apparl A. — 16745 honnorable C. — 16756 les derreniers B. C. — 16759 Ne voyez A. — 16774 Se fait
A. — 16781 cy mary/ur A. B. C. — 16791 Et lorguilleux C.
218
MISTER E DR LA PASSION
et de tant comme orgueil desplaist
a Dieu, humilité luy plaist :
16805 aux humbles doit le hault royalme,
aux enfflés rctoriielle flamme ;
orgueil l'amc en enfler déprime,
mes humilité lui exprime
sa béatitude : c'est Dieu.
16810 Or mettons chacun en son lieu,
l'humble régnant en paradis,
l'orgueilleux avec les mauldis :
ceulx qui se cuidoient ^rî'îjn'
sont bien alors novissimi.
16815 Traire le puis a aultre sens
pour ce que je congnois et sens
que plusieurs qui sont empeschés
de divers vices et péchés
ou de leur temps ont mis grant jiart,
16820 quant ilz per(,'oient qu'il est tart
ne font compte d'culx amender,
cuydans que Dieu doive garder
justice si destroite icy
qu'il ne leur peust faire mcrcy.
168Î5 Si fait, mes amis, pour certain,
car son pouoir est tant haultain
qu'il peust faire tous les derniers
aussi bien saintz com les premiers,
et pour adverir ma paroUe,
16830 je donne ccstc parabolle.
Le règne du ciel pardurable
est comparé et fait semblable
au père de famille ainsi
qui au premier matin yssi
1C835 pour trouver ouvriers a loyer
qu'il puist en sa vigne envoyer.
Vignerons trouva quant la vint
avec losquelz du pris convint,
qui en labourant sans séjour
16810 gaignoient un denier pour jour.
Sagement en oeuvre les mist
et en sa vigne les transuiist,
puis a tierce d'aultres trouva
lesquelz en sa vigne envoya,
16845 prometant que paies seroient
justement ce qu'ilz gaigneroient ;
a sixte aucuns aultres choisy
tt a nonne en transmist aussy.
Finablemcnt se transporta
16850 a onze heures et enhoita
a aucuns aultres laboureux,
disant : « Qu'estes vous cy oiseulx,
toute jour perdans vostre temps? »
Ceulx dirent : « Nous sommes restans,
16855 car ame ne nous embesongne. »
« Allez, dit il, en ma besongne
en ma vigne, et quant la serez,
avec les aultres labourrez. »
Lors chacun besongner s'en va,
16860 et quand la nuittee arriva,
ce hault maistre et soulitil seigneur
si va dire a son procureur :
« Huche, dit il, mes labouriers,
et paye a chacmi leurs deniers,
10S05 et fay que les derniers entrés
soient les premiers contentés. »
Lors vindrcnt ceulx qui labouroient
qui a onze venus estoient,
lesquelz ung plain denier receurent
16870 com les plus grans ouvriei's qui furent.
Lors pensserent les princiiiaulx
estre payés a plus hault taulx,
qui avoient toute journée
ouvré depuis la matinée:
16875 mes quand ce vint a les payer,
ilz n'eurent chacun qu'ung denier ;
lors en les payant murmuroiont
contre le seigneur et disoient :
« Ces ouvriers cy derniers venus
16880 ont ouvré une heure sans plus :
si nous tourne bien a courroux
qu'ilz gaignent autant comme nous
qui avons eu toute la peine
et l'ardeur du souloil grevaine. »
16885 Alors le seigneur respondy
a l'un d'eulx et dit : « !Mon amy,
je ne te fay injure aucune
en distribuant ma peccune :
convenisnKK nous pas du pris
16890 entre nous deux, quand je te pris,
que pour peine de ton labour
tu eusses ung denier, par jour ?
or es payé de bout en bout :
emporte le et t'en vas atout ;
16895 s'a cestuy derrain donner veil
tant comme a toy, qu'en as tu dueil ?
puis je pas faire a mou vouloir
du mien, qui qu'en doyvc douloir?
et ainsi voy ton oeil mauvais,
10900 et je suis bon en tous mes fais. »
Et par ce point, mes bons amis,
ces motz bien en substance mis
vous declairent par bonne voye
ce que nagueres vous disoie
ieS27 ses derreni rs 13. G. —
— 16873 toute la A. G. — 1687
16828 Autant saints coiunie li. G.
i toute la A.
1684S A lionne rjuil .\. — 10808 onze heures A. C.
SRCONDK JOURNER
219
lOSKKi qu'nu rogno du ciel aoquorir
ne fault craiiidro le tait venic,
car certes les desrains ouvrière
gaigncrout comme les preniiei'a
ainsi : Nociisimi primi
10910 sunl, etprimi novissimi ;
mes idusieurs y sont ovocqui'S
et hault appelés et huches,
nios très peu en y a d'eslus.
CAÏPHE
Jhesus, to soufflée au sui'|)lus :
16915 tu prens a sernioniior giant peine;
noua croyons ta doctrine saine
sans aucune hesitacion ;
mes une duljitaciou
te voulons bien faii'C mouvoir :
16980 neccessaire fust do sçavoir
en quel vertu c'est que tu monstres
les grans signes que tu deraonstres,
s'ilz sont célestes ou terrestres,
.le suis le hault prince des prostrés,
16925 et pour tant sçavoir m'appartient
comment nostre loy se maintient :
nagaires il nous fut compté
ung signe de grant cruaulté
que tu fis au temple en entrant,
16930 car sans y toucher peu ne gi'ant
tu gestas hors tous les vendeurs,
oiselleux, morciei-s et changeux-s
et tombas trestout leur baguage.
Par tout aussi court le langage
1C935 que tu ressuscites les mors :
donc de faire signes si fors,
qui t'en a donné le pouvoir?
JHESUS
Une question veil avoir
puisqu'a demander procédez,
16940 et se bien vous me respondez
a celle que je vous feray,
a la vostre responderay
sans dift'erer, soiez en sceurs.
.le vous demande, messeigneurs,
169-15 se le baptesme que prescha
Jehan Baptiste et hault anonça,
estoit il de Dieu suporncl,
c'est a dire venant du ciel,
ou d'humaine institucion ?
ANNE
16950 Entendez bien sa question,
elle est bien doubteuse a espondi'e ;
ne vous hastoz i)oint de l'espondre ;
il est rouge i)Our vous tromper,
et si n'en sçarez escbappei-
189K) s'au rcs|)ondre n'estes soubtil.
CAYI'HE
J'entens bien qu'il y a péril
et congnoy bien la maladie :
s'il est aucun de nous qui die
que ce baptesme vient des hommes,
10900 et nous l'ensuivons, destmis sommes
et nous fera le peuple ahan,
car ilz ont tousjours tenu Jehan
pour ung saint prophète esproiivé,
qui n'eust pas le peuple lavé
10905 de ce hault baptesme an()l)ly
se Dieu ne l'eust mesnie estalily ;
et se nous estoit ddveuu
dire que du ciel fust venu,
tantost ses responces seront :
16970 « Que ne creustes vous en ly dont ? »
Ainsi quoy qu'ayons nntrei)ris
de respondre, nous sommes pris,
car par falace nous procède.
ELIACHIN
Je vous ay trouvé bon remède
16975 i)ar quoy ce danger eschevons :
respondons que nous ne sçavons,
tous ses argumens sont sollus.
ANNE
C'est très bien dit, n'en parlons plus,
vêla très bonne évasion.
CAYPHE
16980 Raby, l'interrogacion
que tu nous fais de ce baptesme
et dont il sert a homme ou femme
nous est chose toute incongneue,
et puisque ne l'avons cougnue,
16985 nous ne dirons riens sur ce pas.
JHESUS
Aussi ne vous diray je pas
en quel pidssance fay mes fais.
Une aultre question vous fais :
ung homme fut qui deux filz ot ;
16990 au premier dist : « Va t'en bien tost
ouvrer en ma vigne que j'ay. »
Cil luy respondist : « Non feray ; »
mes depuis, meu de penitance,
(it a son père obeyssance ;
16995 si alla et bien besongna.
A l'aultrc filz vint et chargea
16911 Mais les plusieurs y sont voyez B. G. — 16919 faire et niouuoir G. — 16928 Ung grant signe de A. — 1
I,es oysclliers et les ihnngours B. G. — 10960 Se nous le disons A. — 16970 C. Comment Ji. disons que ncscauon»
B. C. — 16982-S3 La resjionoe te fais moy mesme Ne scauons dont il est venu A. — 16WS congnu A.
■220
MISTERR DR LA PASSION
qu'en la vigne allast faire exploist ;
cil respondist : « J'y vois tout droit ; »
neantmoins il n'y entra oncques.
17000 Or lequel de ces deux fils doncques
fit mieulx la volenté du père ?
JHEROBOAN
Le premier.
JHESUS
Gens plains de misère,
cecy demande pour vous mesmes :
les puhlicans et folles femmes
17005 vous précèdent et vallent mieulx
que vous au royaulme des cieulx.
Jehan pour vostre grant bénéfice
vint, qui la voye de justice
vous prescha, et ne creustes rien ;
17010 les publicans le creurent bien
et les meschantes pescheresses ;
et par vos langues janglerresses
dittes : « En la vigne m'en vois
pour bcsongner comme je dois, »
17015 mes vous n'y allez ne venez
ne poinct de la loi ne tenez,
ains répugnez toute saison
a vérité et a raison ;
vostre fait m'est tout apperceu.
17020 Ung pcrc do famille feu
qui jadis sa vigne planta
et d'une haye l'acosta
et fouy, et fit ens assoir
une tour et ung beau pressoir
et tout loua a laboureux
pour la gouverner tout par eulx ;
puis s'en alla en long voyage.
Quand vint au temps de moissonnage,
qu'il fallut cueillir la vandange,
le maistre du pays cstrange
aucuns ses serviteurs transmist
et leur enjoint et leur commist
qu'a sa vigne se transportassent
et que les fi'uis luy rapportassent ;
17035 mes quand vindrent en ce pourpris,
par les laboureurs furent pi-is:
l'un bâtirent, l'aultre navrèrent,
l'aultre occirent et lapidèrent
par leurs rebellions cruelles.
I70i0 Quand le maistre oyst ces nouvelles,
leur transmist aultres serviteurs
cueillir son fruit, mes trop plusieurs
qu'il n'avoit fait la fois première ;
17025
17030
17060
17005
mes tout jiar semblable manière
17045 en firent, dont luy cnnoya.
Finablement leur envoya
son filz pour voir qu'ilz en feroient,
et pensa qu'ilz s'ahontiroient
de faire a son filz dcsplaisir ;
17030 mes quand ce filz peurent choisir,
commancerent entre eulx a dire :
« Veez cy son filz, allons l'occire,
tant qu'il est a nostre avantage;
ainsi arons son héritage. »
17(fâ5 Lors le prindrent et le boutèrent
hors la vigne, la le tuèrent.
Et dont quand ce seigneur vendra
en sa vigne et cecy verra,
que fera il aux laboureux
qui ont esté tant rigoreux
vers son filz et vers sa megnie?
ANNE
Il n'est hom de nous qui ne die
que leur maie condicion
est digne de pugnicion,
et que ceulx qui l'ont voulu nuyro
fera exillier et destruirc
et que sa vigne baillera
a laboureux qu'il trouvera
plus doulx et de meilleur façon
17070 pour luy envoler sa moisson
en temps et lieu ; c'est bien droiture.
JHESUS
■ Leustcs vous oncques l'escripture
parlant d'une pierre trouvée,
aux ediffians réprouvée,
qu'ilz ne daignèrent mettre en oeuvre ?
touteflfois elle se decueuvre
si riche après a ung besoing
qu'elle est posée au chief du coing :
Dieu a fait cest oeuvre notable
qui est a vos y eulx merveillable.
Pour ce vous dis et vous proclame
que la vigne (c'est le royalme
de Dieu) vous sera dopcsti,
et a gens d'ung aultre parti
17085 sera donné pour faire fruit
meilleur que faire ne vous duit ;
tout bon fruit est en vous estaint.
CAYPHE
Oez comment il nous attaint
soubtilleraent de fors lardons ;
17090 pour Dieu, messeigneurs, regardons
17075
17080
17012 glangeresscs C. — 17013 Direz B. — 17014 Pour] Et B. C. besongnerai C. — 17025 le loua B. C. — 17026 a
par A. — 17029 Puis fallut B. — 17053 manque B. — 17062 homme de nous qui die A. — 17071 11 y a trop grant
t^onjeeture B. C. — 17077 a manque A. — 17082-83 est le royalme Que dieu vous fera desposti C.
s U C O N D li
sans plus différer qu'on le tiengnc ;
quoy qu'il soit no quoy qu'il adviongne,
jo n'en puis plus sans dcspaisior.
ANNE
Sire, vueillcz vous lapaisicr,
17095 la journée n'est pas pour nous :
vous voiez dessus et dessoubz
qu'il est entre ces gens tapis.
CAYPHK
Dea, c'est tousjours de pis en pis
qu'en ce point nous vient agresser.
ANNE
17100 Ne vous chault, laissons tout passer,
une aultre fois le prendrons miculx.
JHESL'S
Encor le royaulme des ciculx
est fait samblablc a ung grant roy
qui les nopces de grant arroy
17105 fit pour son filz mettre a honneurs,
et envoya ses serviteurs
dire aux invités qu'ilz vcnissent
et bricf aux nopces se rendissent,
lesquelz coujparoir n'y voui'oient.
17110 Quand ce roy vit qu'ilz diffei'oient,
envoya des aultros servans
ausquelz il a fait tcz commandz :
« Allez et nouvelles portez
a tous ceulx que j'ay invités,
17115 que mon disner et tout est prest
et qu'il/, se rendent sans arrost
aux nopces. » Mais ocz qu'ilz firent:
les aucuns en oubly le mirent,
les aultres se sont transportés
17180 en leurs villes et leurs cités
ou en leurs affaires pluseurs,
aultres prindrcnt les serviteurs
les batiient et mutilèrent,
aultres les prindrent et tuèrent.
17lfô Le roy ces nouvelles oy
qui n'en fut pas trop resjoy,
mes envoya ses fors guerriers
et mist a mort tous les meurtriers
et fit tout leur cité ardoir.
17130 Ce fait, voulst son propos mouvoir
et dit : « .l"ay fait tout mon appresle,
mes les invités a la feste
ne sont pas dignes d'y venir
n'a si très grant bien parvenir ;
i 17135 allez, » dit il lors a ses sers,
« aux voies, places et desers ;
J 0 i; R N H li
soiez d'assambler diligens
de toutes manières de gens. »
Ataiit ses servans s'en allèrent
17140 et bons et mauvais assembleront
et tant en quirent par leurs paincs
que leurs nopces sont toutes plaines.
Lors le roy entra et voulst voir
quplz gens il pouoit la avoir :
17145 si en choisit ung a la feste
atout ung habit deshonnestc,
auquel tantost vint remonstrer :
« Amy, comment osas entrer
dedans ce noble hostel royal
17150 sans ton vestcment nupcial ? »
Cil se teust, ne sceut que respondi-e,
et lors le roy pouj' le confondre
dit a ses ministres prochains :
« Liez le moy tost piez et mains,
17155 et envoyez le malheureux
en lieu obscur et ténébreux
ou sont pleurs et douleurs dedans
et grief estraignement do dens. »
Pourtant multi sunt vocati,
17160 plusieurs sont appelés a gloire,
patici vrro sunt eletti,
peu en vient a la jiossessoire.
CAYl'HE
Qu'est cecy ?
ANNE
Escoutcz encoire,
voir qu'il conclurra au surplus.
CAYPHE
I7lfô Quant a nioy, je n'en ourray plus,
c'est pour faire sentence briefve.
Advis m'est que le cueur me crieve
quand je l'os cy faire son compte,
et me sanible a nous très grant honte
17170 que tant le permettons a vivre.
ANNE
Nous en sarons en brief deUvro,
qui m'en croira ; mes, monseigneur,
vous sçavcz qu'il nous fault couleur
de luy imposer rage aucune.
CAYPHE
17175 II est vray.
ANNE
J'en ay trouvé une
pour le bien mettre a contredit :
vous sçavez qu'il est ung edit
par toute Judée imposé,
■>i\
17099 iciigresscr C. — 17100 laissez B. — 17124 Les aultres piindrent A. — 17133-34 de tenir Si ijranl bien lie dy pa-
rueiiir B. C. — 17145-6 entre cent Atout un); abit indescend B. C. — 17158 estandenicnt B. estraiuemcns C. — 17171
briel'ment B, C. Toute cftte tirade eut attribuée à Cuyphe G.
222
MI STERE DE LA PASSION
que s'il est homme si osé
17180 qu'il vuoillc empcscher les tribus
de l'empereur par quelque abus,
il est jugié a mort cruelle.
Veez cy doncques par quel cautelle
frauder et prendre le pourrons :
17185 embassadeurs luy envoirons
pour luy demander et prier
qu'il nous die s'on doit payer
tribus a l'empereur de Romme.
BANANIAS
Mes pourquoy cela ?
ANNE
0 simple homme,
17190 entendez vous point celle trompe ?
faillir ne peust qu'on ne le trompe,
se bien attaindre le sçavons :
car s'il dit que nous les devons,
il asservit la loy juifze
17195 et faulce la loy de Moyse
qui nous décrit qu'on quelque lieu
nous ne debvons riens fors a Dieu,
et sommes francs de tous impos ;
s'il respont a l'aultre propos
17200 que nous n'en devons rien baillier,
il ne s'en fault plus traveillier :
il est tout ordonné qu'il muyre.
CAYPHE
11 n'est hom qui sceust niieulx conduire
nostre fait par bonne ordonnance,
17205 mes encor, sauf la reverance
de monseigneur qui cy propose,
pour mieulx faire et fournir la chose,
quand l'cmbassade la ira,
il m'est advis que bon sera
17210 qu'il ait avec eulx six ou sept
des gens Herode.
ANNE
Dieu le scet :
au moins s'il fault en aucuns peins,
ilz en pourroient estrc tesmoings
pour relater qu'il ai-a fait.
JHEROBOAN
17215 Mes le prendre tantost de fait
et l'admener saulve tous drois.
CAYPHE
Ça, Nachor,- vous irez vous trois,
vous, Nathan, et Banauias.
NACHOR
Nous le voulions.
Icy se partent ces trois aux gens Herode.
NATHAN
Vecy le cas :
17220 Andalus et vostre meignie,
s'il vous jjlaist tenir compaignie
a nous trois et nous convoier,
nous vous en voulions bien prier
pour le recongnoistre tout sus.
ANDALUS, des gens Herode.
17225 Pour ou est ce aller ?
BANANIAS
Vers Jhesus ;
pour ce qu'il est bien mal en grâce,
messeigneurs vuellent qu'on luy brasse
ung brassin mal apotagé.
ANDALUS
Puisque vous en estes chargé,
17230 avec vous volontiers irons
et la vous accompaignerons,
mes gens et moy, sans nulle faulte.
NATHAN
C'est pour une entreprise haulte,
qui en pourra venir a chef.
NACHOR
17235 Je voy la Jhesus de rechef
qui fait sa predicacion :
proposez luy la question,
Bananias, bon conseillier.
BANANIAS
Pour vous me veil je traveillier
17240 de tout ce que je pourray faire.
Icy s''en vient a Jhesus et dit de rechief .
Jhesus, cher maistre débonnaire,
homme très saint et vertualile,
nous sçavons par raison prouvable
qu'en ton fait n'a que vérité
17245 et que par très bonne équité
la voye de Dieu nous enseignes,
sans ce que la parsonnc preignes
plus que l'aultre : tu fais tout ung
du roy et du petit commun.
17250 Pour ton oppinion avoir
devers toy venons, pour sçavoir
17203 honiine .jui inimilx .■oiiduioe B. - 17201 prouiden.-e C. - 17210 ayent A. Il y ait C. - 17219 Nous le
voulions manque C. - 17226 en manque 13. - 17232 quelque B. C. - 17235-38 attribués à yathan B. C. - 17239 veil
plus G.
se devons tribus a CeMi*
ou se nous no devons point, tar
plusieurs doublent les choses dites.
JHE8US
17255 Que 'ue teinptc/ vous, ypocrites,
(jui nie monstre/, ce beau sanililunt
pour aller venin assanihlant?
Haillez nioy cy quelque mounoyc,
HANANIAS
Puisqu'il a désir, qu'il la voye,
172(30 assavoir qu'il eu vcult jugicr.
NACHOR
Cher sire, vcla ung denier,
faictes en comme bon et sage.
JHESUS
Que signifie cestc ymage
et ceste superscription ?
NATHAN
17265 C'est la representacion
de César, l'empereur de Romme.
JHESLS
Donc je vous admoneste et somme
qu'a César rendez tel honneur
qu'il appartient a tel seigneur,
17270 et d'aultre part rétribuez
a Dieu ce que vous luy debvez :
si tendrez la voye i)lus sceure.
Frères, ne faisons plus demeure
en ceste faulcc conipaignic,
17275 mes retournons en Bethanic
ains qu'il soit plus tard, je le veil.
s. PIERRE
Nostre cher maistre, a vostre veil ;
nous avons beaucop attendu.
Icy s'en retourne Jhesus et ses apostres
HANANIAS
Est ce rougement rcspondu?
17280 c'est ung soubtil officiai.
ANDALUS
C'est ung homme qui scet de mal
tant qu'il n'est point a concevoir.
BANANIA8
On ne le Bçaroit décevoir
par voye qu'on y sceust trouver.
,17285 Pourtant penssons de retourner :
SECONDE JOURNEE
U0U8 y avons pardu nos pas.
223
Icy s'en retourne chacun en son lUu sans mot
dire, et Jhesus et ses apostres passent
devant le figuier mauldit de Dieu.
s. JEHAN // '~'
Nostre maistre, voyez vous pas
une chose de grant merveille
qui tous si fort nous esmerveille
17200 qu'il n'est qui le sceust alleguier ?
JHESUS
Qu'est ce, frères ?
s. JEHAN
Do ce figuier
que nagueres voulstes mauldire :
le vêla tout sec a bi'icf dire,
que jamès ne reverdira.
s. ANDRY
17295 Jamès fueuUe ne portera
ne fruit, et y fust il cent ans.
JHESUS
Pensez a vostre fait, enffans
et considérez vostre afl'aire,
car autant puis des hommes faire
17300 que du figuier avez veu tous ;
et pourtant ayez foy en vous
part'aicte et la vueiHez garder :
chose ne sçarez demander
a Dieu qui ne vous soit passée.
MARTHE
173(» Dame, de cueur et de pensée
faictes cherc et ne soyez mournc :
veez cy vostre filz qui retourne
et ses frères, c'est chose clcre.
NOSTRE DAME
Or loué soit Dieu, nostre père,
17310 mon cher filz, de vostre retour.
Hclas ! j'ay tant plouré ce jour
que je n'ay bien eu vostre absence ;
mes vostre très doulce présence
a ma joye ung peu recouvrée.
JHESUS
17315 Cessez, ma mère beueuree,
car reconfibrter vous vouldray ;
17fô8 Son doit li's tribus li. C. — 17259 le voye C. — 17268 tout liomieur C. — 17276 que le vuel C. — 172S0 Qno vous
semble duii lel iiustal U. C, — 172S2 receuoir C. — 172S3-8Ô "llriOués A Antiulua C. — 17289 loue fort que C. — 17309
vostre U.
MISTERli DE LA PASSION
tant comme avec vous me tendray,
tristesse ne vous blessera.
NOSTBE DAME
Je ne sçay combien ce sera,
17320 dont j'ay en mon cueur peu de joye,
mes Dieu, vostro père, y pourvoye
a vostre désir plus paifait.
[Pose.]
SATHAN
Je ne sçay que c'est de mon fait
ne quel deable me contredit ;
17325 je suis le deable plus maudit
qui soit es infernaulz abismes :
je faulx a tous mes sillogismes ;
• pourchasser ne sçay trahison
qui puist venir a meurison ;
17330 je vois, je tourne, je tompestc,
je me romps le groing et la teste
et si ne fais chose qui vaille,
ne jami's je ne ches a taille
de ce faulx Jhesus engigner;
17335 et brief il n'y vault le grongner,
je m'en vois en enffer le cours
a Lucifer querro secours,
combien que je seray froté,
cent contre ung.
LUCIFEU
Faictes silele,
17340 faulx ennemis, il le convient,
car j'apperçoy Sathan qui vient.
Cerberus, ouvre luy la poi-te,
car je suis tout sceur qu'il apporte
nouvelles dignes de mémoire.
CERBERUS
17345 S'il a failly a l'accessoire,
il ara cy sou principal,
mais ce sera d'ardant métal
dont il sera bien cstuvé.
LUCU-EU
Qu'est ce, Sathan ? qu'as tu trouvé ?
17350 d'où viens tu ore et de quel règne ?
SATHAN
Je ne sçay, maistre, je forcené,
j'ars, je brulo de part en part,
je m'en voy pendre a ung hapart,
se je ne suis tenu a force.
BERICH
17355 11 cuide eschapper de la torche
pour faire fort l'ensongniié.
LUCIFER
Astaroth, qu'il soit manie
ung tantinet en bourgeoisie.
ASTAROTH
Le voulez vous ?
LUCIFER
Mes je t'en prie :
17360 sus ! acop vien le moy saisir.
FATHAN
Helas ! maistre, je n'ay loisir ;
retourner me fault en courrio,
car ce Jhesus nous contrarie
et nous combat sy par delà,
17365 par la grant puissance qu'il a,
que tout se pert se ne le suis :
c'est la cause pourquoy je suis
devers vous venu si en haste.
LUCIFER
Dis tu vray ?
SATHAN
Oy, par ma pats ;
17370 toute jour ne fay que trayner.
FERGALUS
11 ment.
BERICH
Si le fault estrainer
d'une boulaye bien assise.
SATHAN
Ne me jouez point de mam mise :
j'appelle de tout le couvent.
FERGALUS
17375 Appeaulx y counoient souvent,
qui les y vouidroit recevoir ;
sus ! venez ung tantet sçavoir
que c'est d'ung joyeulx bring sentir.
SATHAN
J'appelle.
CERBERUS
Il fauldroit donc namptir
17380 et bien garnir la main du roy ;
mais puisque vous n'avez de quoy,
certes vous passerez par cy.
17318 ploissera 13.— 17320 a merrison A. aineusiron B. en ma r.iison C— 17333 Ne je ne puis cheir a taille C— 17335 niy
fault besongner C— 17340-41 monqunlt C— 1:344-97 manquent C— 17353 prendre A. —17356 ensongnie A. essonnye B.—
17f06 je ny suis B. — 17370-1 Se je mens faictes moy frotcr Toute jour ne fay que troter A. — 7372- 'illl ruanqucnl A.
SECONDE JOURNEE
225
S\THAN
Hclas! maistro, niorcy, mercy !
CCS ribcaulx icy )ne dctirent,
173S5 ilz nie cravantent et dcchiront
par tcniblo puguicion
saiis lettre no commission :
jo u'ay point apris tel usaigo.
LUCIKEU
Appelle, Sathan.
SATHAN
Aussi fay je,
17390 Lucifer, mes il no me vault.
ASTAROTH
Demandez luy s'il y fait chault :
voicy ung heaulmo en ))Ourgeois,
plus rouge que n'est feu grégeois,
qu'il ara en lieu de chappel.
LUCIKE»
17395 Sathan, relieve ton appel
et tu aras provision.
SATHAN
Toute l'orrible légion
des deables s'en puisse tuer !
LUCIFER
Ghauffeil?
CEHBERLS
Il commance a suer :
17400 venez le veoir se vous voulez.
LUCIFER
Or le frétez donc a tous les
et luy faictos sa couverture
en beau brasier.
ASTAROTH
C'est la moulture,
afflu qu'il ne soit morfondu.
SATHAN
1740J Je suis danipné, je suis perdu,
je suis en rage sans séjour :
mauldite soit l'eure et le jour
que le triumphant rad créa.
BERICH
Escoutcz le beau chant qu'il a,
17410 comment il est doulcement mis.
ASTAROTH
Ce seml)lc ung vieulx matin faniis,
huilant huit Jours en \ing tenant.
LUCIFER
Sathan, or me dis maintenant
ou est ce Jhesus n'en quel place.
SATHAN
17415 Je ne sçay : le dcable le sache !
il ne fait rions que sermonner ;
bricfmcnt s'en no le fait flner,
nous en serons tous accroupis.
II va tousjour» de pis en pis :
17420 il prcsche, il enseigne, il sermonne
et n'est pas huy bonne personne
qui n'est des siens.
LUCIFER
Voii-e ! mes quoy ?
les haulx gouverneurs de la loy
ne sont ilz pas de son accord ?
SATHAN
17425 Neunil, ilz le hecnta mort :
arae d'iceulx ne s'i encline,
car de luy ne do sa doctrine
ilz ne veullent oyr parler.
LUCIFER
Tant vault mieulx ; il t'en fault aller,
17430 toy et Berich, par bons moyens
par devers ces phaiisiens •
qui l'ont tousjours persécuté,
affin qu'il soit exécuté
et mis a mort sans plus sommer ;
17435 et les allez bien enflammer
comme bien faire le sçarez.
BERICH
Ça donc, le congé.
LUCIFER
Vous Tarez ;
estes vous tous deux mis appoint ?
SATHAN
Nennil, je vous veil dire ung point
17440 qui est a dessus et a triple :
ce Jhesus cy a mig disciple
qui se fait appeler Judas ;
oncques nul jour lo roy Mydas
ne fut plus remply d'avarice :
17445 or luy a il donne» l'office
dessus tout son gouvernement.
LUCIFER
Est il point mauvais garnement,
ce Judas qui est aulmonnier ?
SATHAN
Si mauvais qu'il ne vault denier,
17450 le plus traistro qui puisse naistre,
et brief il n'ayme point son maistro,
mes tousjoui-s en murmure et hongne.
17385 délirent B. — 17403 i"ost sa nourreture B. — 17412 Vtieillant C. Apres luy je vous ronoenant A. — 17413-14 Ot
ca ou est maintenant Ce jesus satlian ueu quel [tlai'e A. — 17415-16 Que lo sanglant dyablc le saiche 11 ma trop bien
fait ronssiner B. erissiner C.
Pas.
15
226
MI STERE DE LA PASSION
LUCIFER
Ha ! que c'est Jjien nostre bosongne !
Sathan, il fault quon le bâtisse
17455 si bien que son maistre trahisse
et le vende a bons deniers secs.
SATHAN
Laissez nioy fournir le procès :
je le niettray en telz moyens,
et Berich les pharisiens
17460 que nous en serons honourés.
LUCIFER
Courez, ribaulx, courez, courez
comme chiens a mont et a val ;
qu'en l'orrible puis infernal
puissiez vous revenir a joye !
Icy s'en va Berich aux pharisiens et Sathan
poursuit Jitdas.
NAASON
17465 Seigneurs légistes, a monjoye
vous doint Dieu honneur a jamès !
Advis m'est que ne parlez mes
de ce Jhesus, qu'en dites vous ?
CAYPHE
Nous nous en esbayssons tous,
17470 et briefment je n'en sçay que dire.
NATHAN
Ne sçay qu'il y a a redire
n'en quel lieu il prent son hantin,
mes il n'est point a ce matin
au temple venu sermonner.
ANNE
17475 11 se convient garde donner
qu'il ne se vousist estranger
de ce pays, pour grant danger
qui de ce se pourroit ensuivre ;
car s'il eschappe ainsi délivre,
17480 il pourra aultres nacions
tirer par predicaeions,
et quand plus fort se trouveront,
contre nous le deffenderont ;
si vouldroit nostre loy grever
17485 pour ses fabuscs eslever
dont le peuple est ainsi deceu.
CAYPHE
Anne, c'est soubtilment concau,
et pour doubter de l'cschapper
il le convient anticiper
17490 et faire sa prinse première.
JHEROBOAN
Voire, mes il y a manière
de le prendre et apprehendei',
et sur tout se fault bien garder
de le prendre au jour de la feste
17495 n'en heure qui soit magnifeste.
La pasque est près, vous le sçavez,
et se la volenté avez
de le prendre en celle saison,
il y ara peuple foison
17500 qtii très grant tumulte fera,
et forse le nous estera
a nostre grant confusion.
MARDOCEUS
Or prenons donc conclusion
et ung chemin soubtil et sage
17505 pour l'avoir a nostre advantage,
et chactm y pense en droit soy.
[Pose.]
JUDAS
Je pers cy mon temps, bien le voy :
je n'ai drap ne robe qui vaille,
je jeune toute jour et baille
17510 et sans souldees recevoir :
briefment il m'y convient pourvoir
et gaigner ou prendre en pourray.
.l'ay advisé que je feray :
les princes de la loy ensamble
17515 sont au jour d'huy comme il mo samble ;
je m'en iray tout a l'erablee
moy présenter a l'assemblée ;
mes se je puis venir a chef,
je brasserai ung tel mcschef
17520 que mes despens seront recoux,
mes ce sera bien aux chers coustz
de mon maistre : et vienne qui peult !
ELIACHIN
Seigneurs, i)uisque le conseil veult
procéder a toute rigueur
17525 a la mort do ce séducteur,
17454 la bâtisse B. le liaptise C. — 17458-59 nKnviueiit B. C. — 17460 Hricfraent nouuellos en ourrez B. C. — 17470
hen soauons B. C. — 17'.94 au delà feste A. en jour de feste C. — 17500 très bien C. — 17501 forsnn A. — 17521
l'eups A.
SECOND!-: JOURNEE
227
pour éviter niale foituiic
il convient le iiicndro a la bi'unc,
nffin que le peuple n'enchante.
IIANANIAS
Voiro, mes îles lieux ou il hante,
17530 qui nous en poui'ia informer ?
(juant nous ferons nos gens armer,
en quel lieu adresseront ilz?
JI'DAS
Seigneurs, vous estes mal soubtilz
qui tant mettez doubles a prendre
17535 ung homme ; je vous veil apprendre
les tours par quoy briefment Tarez.
Dites moy combien m(> donrez
de finance franc et delivi'e
ou cas que ce .Ihesus vous livre
17540 franchement a vostre vouloii'.
ANNE
En aras tu bien le pouoir
ains que procédons au surplus ?
jmiAs
De cela ne vous doulitez i)lus :
je le pense si bien livrer
17545 qu'il ne s'en sçai'a délivrer
se vous avez gens bien hal)illes ;
je s(,'ay ses fais et s(,'ay ses stilles
et ou il tient son obanye.
JOATHAN
Tu es doncques de sa maignie,
17^0 son disciple, a ce que j'entens ?
JUDAS
Ne vous chaille ; soiez contens
qu'il vous soit délivré et pris.
Convenez avec moy du pris :
c'est le plus foi't de mon affaire.
CAYPHF.
17555 Le pris y est très bon a faire :
qui te donra trente deniers,
le feras tu ?
JUDAS
Très volontiers,
je n'en requicr pas ung avec :
mes je seray payé tout sec
17560 avant q\ie j'en face ja couise.
ANNB
Voicy de quoy ; mes en ta bourse ;
y sont ilz trente bien comptés ?
JUDAS
Et aussi vous me prometoz,
se danger y est apparant,
17565 m'en porter dcffense et garant
encontre tous mes adversaires ?
CAYHHE
S'il y suiTicnt cas neccessaii'cs,
nous serong a ton avangarde.
JUDAS
Oi- «oiez donc sur vostre garde
17570 et vous pourvoiez do gens d'armes
cstoffés de bâton» et d'armes
en multitude plantureuse ;
car la chose est bien dangcreu.se
s'il n'est bien fait a rcocllee :
17575 plusieurs de ceulx de (ialilec
sont icy qui sont ses amis
a cause qu'il est du pays,
qui forsc y monstroront effors,
et se vos gens sont les plus fors,
17580 ilz en vendront a leur dessus.
NACHOn
En quel lieu hante il, ce Jhesus,
pour l'avoir' droit a l'avantage ?
JUDAS
11 a de coustume et d'usage
de hanter sur le tartUvet
17585 vers la montagne d'Olivet
en ung jardin qui est l)ien près.
Tenez vos gens <rai'mos tout près
a celle fin qu'au retourner
je les puisse bien emmener,
17590 quand la chose sera bâtie.
ANNE
11 y en ara grant partie,
de cela ne fault point doubler.
JUDAS
Et je m'en voy exécuter
mon fait par soulilille cautclle,
175fô et brirf orrez de moy nouvelle,
tenez vous pour tout asseuros.
CAVPHE
Et nous avons gens estorés,
tous près i)our toy acompaignier.
S. PIEHIIE
Cher raaistre, il est temps de songnlcr
17600 ou nostre pasquo se fei'a ;
ja tost au soir l'heure sera
que la loy nous rigle et ordoime
que chacune bonne parsonne
doit l'aigneau de pasques manger.
17547 et SOS stiUps A. B. C. — 1755i iiostre affaire B. C. — 175(« De meo C. — 1757S inonstreruient .\. B. Qui r
inonstreront leurs cirjrs C. — 175S1 janlinet G. — 17589 tous ainmener B. C. — 17392 ne fault il B.
228
MI STERE DE LA PASSION
i7B05 S'il vous plaist, voiliez moy charger
en quel manière, en quelz façons
et ou voulez que nous fassons
la pasque : il faut faire l'apreste.
JHESUS
Pierre, je veil qu'elle s'appreste
17610 pai' la manière accoustumee :
et affin que soit exprimée
la place, vous l'appresterez.
Pierre, et vous, Jehan, vous en irez
avec Jaques, nostre cousin,
17615 en la cité le droit chemin ;
en allant vous rencontrera
ung homme lequel portera
ung vaisseau d'eauc remply :
suivez le, et allez avec ly,
17620 et entrez ou propre demeure
ou vous sentirez qu'il demeure ;
et lors au seigneur de l'ostel
direz par moy : « Le cas est tel :
nostre maistre a dit et te mande
17625 que tu nous monstres place grande
en laquelle il puisse parfaire
sa pasque, qu'avec toy veult faire
et tous ses disciples unis. »
Alors vous monstrera logis
17630 et ung cénacle grant et hault ;
la préparez ce qu'il nous fault,
et puis nous nous y renderons.
s. JEHAN
Cher maistre, nous appointerons
tout ce qu'il nous est commandé.
PiRAGMON, porteur d'eaue.
17635 J'ay bien longuement retardé
d'aller ma besongne accomplir ;
temps est que je voisc remplir
mes deux vaisseaux a la fontaine,
car la haultc teste est prochaine
17640 qu'il m'en fauldra beaucop avoir.
Je m'en voy faire mon devoir
d'en quérir tandis qu'il est heure.
URiori, le maistre.
Ne faictes point longue demeure,
Piragmon, retournez bien tost.
PIRAGMON
17645 Je n'y veil riens que faire ung trot :
vous me rarcz cy pris cy mis.
s. PIERRE
Mes chers frères et bons amis,
nous sommes très bien ariivc,
et croy que nous avons trouvé
17650 ce que nostre maistre avoit dit.
s. JEHAN
Je n'y metz point de contredit :
veez cy ung homme atout deux seaulx
ou cruches ou aultres vaisseaulx
qui s'en va de l'oaue cspuisiei'.
s. JAQUES ZEBEDEY
17655 11 nous le fault laissier puisier,
et puis le suivrons bonne allure.
PIRAGMON
Veez cy fontaine clere et pure ;
grant plaisir prens a la vcoir naistre.
Pour ma panse ung petit rcpaistre
17660 voicy de pain ung bon loppin
a bouter en mon canepin ;
mais pour estre plus frais aux dens,
je le moilleray cy dedens,
s'en ara saveur plus friande.
17665 Ha 1 Dieu d'Israël, quel viande !
c'est bien pour avoir clere voix.
Or suis je chargé, je m'en vois
pour doubte de moy faire attendre.
S. PIERRE
Fi'eres, il nous convient entendre
17670 a suir nostre homme de tire.
s. JEHAN
Gardons en quel logis il tire
affin que pas ne le pardons.
s. JAQUES
' Pierre et moy, bien y entendons
et avons l'oeil tous doux ensemble.
s. PIERRE
17675 II est arresté, ce mo samble :
son logis est icy emprès.
s. JEHAN
Il nous convient euti'er après
acop sans nous tourner ailleurs.
s. PIERRE
Paix soit on cest hostel !
17605 nous charger B. C. — 17614 vostre B. C. — 17632 tous nous y C. — 17634 portew- d'eaue] valet A. — 17054
Qui vient de leaue puisier B. — 17658-65 man'/uent A. — 17671 quel lieu G. — 17G78 sans diuertir B. C.
SECONDE .lOURNEE
'220
un ION
Seigneui's,
17080 vous nie soioz les bien venus :
vous estes fort las ot rocreus,
repposez vous, mes qu'il vous plaise.
s. JEHAN
Nous somnties très bien a nostre aise;
Dieu veille garder le domaine !
URION
nos.'i Or me dittes qui vous admaine
et la cause aussi quelle est elle.
s. PIERRE
Sire, la vérité est telle
que nostre maistro droite voye
iey devers vous nous envoyé
17690 pour l'amittio qu'il a a vous,
et vous supplie de par nous
qu'il puist en vostre hostel assoir
et faire sa pasque ce soir,
comme son vouloir le désire.
URION
17695 Ha ! .Ihesus, le bon et douls sire,
je pry a Dieu qu'il le conserve
et qu'envye ja ne l'asserve
au veil de ses contredisans.
Groiez qu'il a moult de nuysans
17700 et d'envieux en la cité ;
mes puisque c'est sa volonté,
il me soit le très bien venu ;
grandement a luy suis tenu,
et repute a très grant honneui'
17705 que le bon et vaillant seigneur
me daigne venir visiter.
s. JAQUES
Il est temps de tout apprester
et que chacun son devoir face
do besongner.
URION
Veez cy la place
17710 en laquelle serez logés,
et ne veil que vous espargnez
utencille de mon hostel ;
])renez on d'autant et d'autel :
tant qu'il y a vous habandoiaic.
s. PIERRE
17715 La place est très notable et bonne
et très grandement nous souffit ;
celuy qui ciel et terre fit
vous rende vostre bienveillance.
URlON
S'il vous fault argent ne (manco
177Î0 ou viande a la ceno faire,
sur quanque me voulez meffairo,
ne m'espargnez en nul endroit.
s. JEHAN
Neunil, sire.
unioN
Vous avez droit,
car je le fais de bon couraige.
I77i85 Certes, messeigneui"s, encor ay je
des biens pour Jhosus soustenir,
et s'il fault aller ne venir,
employez ce maistre valet
et prenez en gré tel qu'il est,
17730 car autre faire ne le puis.
PIRAGMON
Maistre, je suis tel que je suis,
prestde bien boire et bien mengier.
s. PIERRE
Chacun pense de mesnagiei',
car le temps pas.se tout a cop.
17735 Messeigneui's, nous demourons trop
ot sommes très mal diligens
que ne faisons armer nos gens
et mettre en point a l'aventure,
car ja tost a la nuit obscure
17740 nostre marchant fera l'ospreuve ;
et s'il vient et il ne nous treuve,
tout nostre exploit sera rompu.
CAYPHE
11 est bien villain corrompu
qui si forte trahison baille
17745 a son maistre.
JHEROBOAN
Ne vous en chaille :
vous souffice que nous venons
a nostre fait.
ANNE
Sus ! conipaignons !
il ne soit si hardy soudart
qui n'aist ou javeline ou dart
17750 et tout prest son harnois de cojps,
affin que s'il fault aller hore
vous soiez tous pretz sans attente :
oyez vous ?
ROULLART
C'est bien mon entente.
17C93 a ce soir C. — 17700-88 mnnqui-nt G. feuillet déchiré. — 17725-32 inanfjuenl A. •
lo incsn,ige A. — 17735 séjournons B. — 17753 nostre B.
■ 17733 S. J. Pensons de faire
230
MISTKRE DE LA PASSION
homme de nous n'y met roffus ;
1T755 j'ay en lieu de mon viel paffus
prins mon arc et ma javeline.
DBNTART
Et j'ay ma vielle capeline
plus rouge que le feu d'enffer,
avec mon gros maillet de fer
17760 qui a la pointe bien aguo.
GA.DIFER
Et j'ay ma vielle besague
et une espee mal taillant
qui a bien sept piez de saillant :
c'est quanque je puis raraonner.
ANNE
17765 Cayphe, faictes atourner
acop vostre meignie toute.
CAYPHE
Mes gens sont prêt/,, n'en faictes double,
n'a cil qui ne soit ordonné.
Malcus, Bruyant et Estonné,
17770 Dragon, Malcuidant et Gueulu,
dormez vous ? qu'en lieu de salu
soyez sains de maies estraines !
MALCUIDANT
Happe, Dragon, c'est pour tes vaines,
entens tu ?
DRAGON
Mes tout au prieur.
ESTONNÉ
17775 Qui est ce la ?
GUEULU
C'est monseigneur
Cayphe, qui tous ses gens huche.
MALCUS
Il fault aller a l'escarmuche :
briefment il n'y vault le hongner :
armons nous.
BRUYANT
A quoy besougiier?
17780 y a il bataille ou assault ?
ESTONNÉ
J'amasse mieulx a faire ung sault
pour aller garder la cuisine,
car puisqu'on y frape ou butine
j'ay tel paour que le cueur me part :
17785 armons nous.
• MALCUIDANT
. Le deable y, ait part !
nous fault il aller a la guerre ?
MALCUS
Bé, nennil, c'est pour aller querre
ce .Ihesus, que mal jour luy viengne !
mes s'il eschet que je le tiengno,
17790 il luy sera bien cher vendu.
GUEULU
Aussi ont ilz trop attendu
a le faire pieça destruire.
CAYPHE
Est tout prest ?
DRAGON
N'oez vous pas bruire
nos armures et cliqueter ?
17795 nous sommes pretz pour emporter
une ville sans assiéger.
CAYPHE
Sy hardy homme de bouger,
et vous tenez sur vostre garde.
s. PHELIPPE
Il m'est advis que je regarde
17800 Judas qui vient tout assymply.
D'où venez vous, je vous supply.
Judas ? moult avez demeuré.
JUDAS
•Fay depuis beaucop labouré
pour nostre maistre et pour nos frères
17805 j'endure beaucop de misères
pour vous et a vostre faveur ;
a mal heure fus receveur,
oncques ne vint de mon conseil :
j'en ay la peine et le travail
17810 quand les aultres sont a reppos.
s. BERTHELEMY
Ne tenez jamès ce propos :
qui bon maistre sei-vir entend
par droit bon loier en attend.
Nous souffi'ons voirmènt de la paine,
17815 mais combien qu'elle soit grevaine
vray espoii' nous donne science
de la porter en pacience,
et que pour nostre affliction
arons la retribucion
17820 de gloire en parfaicte aUiance.
JUDAS
Quant a moy, c'est mon espérance
et est tout le confFort que j'ay.
17764 retourner B. — 17793 Estes vous [irestz C. — 17797-98 manquent C. — 17822 Et tout le coaffort que jy ay C
SECONDR JOURNEE
231
JHESUR
Mes trcs cher» amis, jo proiulray
congé a vostrc coiupaiguie,
178K) a vous, Marthe, et a vous, Marie,
et a vous, sire Lazaron ;
moy et mes frères eu irou
en la sainte cité de Dieu
parfaire uostre ccue au lieu
17830 que j'ay ordonné pour ce faire.
MARTHE
Helas ! et nous faut il dcifaira
de vostrc compaigiiie ainsi?
si la vous oust pieu faire cy
nous en eussions fait meilleur chère.
JHESUS
17835 Marthe, ma bonne hostesso et chcre,
cela n'ay je peu consentir,
mais je vous laisse au départir
ma mère, et vous la recommans.
MA.DELA.INE
Cher sire, tous vos bons connnandz
178'i0 accomplirons sans rions niosprendre.
NOSTRE DAME
0 filz, c'est donc au congé prendre ?
com triste ces parlers cscoutc :
encore du congé me doubte
qu'il ne soit pour tout et final,
I78'i5 dont jo sons mon cuour si tros mal
qu'a peu quo do larmes ne font ;
mes puisque ces choses se fout
par la providence divine,
jamès Dieu mon vouloir n'encline
17850 qu'il soit par mon veil retargé.
Mon filz doncques, jo prens congé
pleurant de pensée parfonde
comme a la chose de ce monde
do qui jilus me plcst le reppere.
17855 Je roquier a Dieu, vostre pore,
qu'il vous conserve et vous convoyé
si bien que briefment vous renvoyé
a la joyo de mon désir.
JHESUS
More, ne prenez desplaisir
178GO du deppart, n'en soyez morrio :
confortez vous avec Marie
et avec Marthe doulcement
en atte.idant bonignomont
que la volonté Dieu se face.
NO.STRE DAME
1780'. Très .sîdnte et précieuse face,
pour mon ilollant cicur appaiaier
au doppartir prens ung baisier
puisqu'aultr(! chose n'en aray,
car jamès tant que vous yerray
17870 je u'aray liesse on mon ame.
Icy s'en ra Jhesus et tous sêt appostres au lieu
de la cène.
MADBLAINE
Reconfortez vous, chère dame ;
j'ay espoir que brief le verrons
et que du voir possessei-ons
parfaictc joyo en nostre cueur.
NOSTRE DAME
17S75 Helas ! Marie, chère seur,
quel reconfort pourray je avoir,
quand tout le bien et tout l'avoir
que jamès je pouoye attendre
se part de moy ?
MARTHE *
Le congé prendre
17880 ne doit pas sambler si mauvais
veu que ce n'est pas pour jamais :
ung peu de temps va tost passant.
NOSTBE DAME
Dieu le scet qui est tout puissant,
mes j'en fais amere doùbtance.
LAZARON
17885 Je requier Diou par sa puissance
qu'il le garde d'adversité.
s. PIERRE
Bien appoint avons appresté :
veez cy nostre maistre Jhesus
et nos frères tretous venus ;
17890 n'y a que de se seoir a table.
JHESUS
Paix soit en cest hostel notable
et a tous habitans en luy !
URION
Hienveignant sire, il n'a celluy
de ma famille et de nous tous
178»5 qui ne soit très joyeux de vous
beaucop plus qu'on ne penseroit.
17834 Nous eussions fait meilleure A. — 17SV4 tousjours et C. — 17847 les choses B. C. — 17849 vueil C. — 17859
Ma inere G. — 17801 Déportes vous 'b. C. — 17868-69 autre nen puis auoir Car tant que vous pourray reuoir C. —
17878 pouoye «uoir B. — 17890 11 ny a ([vie de seoir B. Il nest que C.
232
MISTERE DE LA PASSION
PIRAGMON
Sire, qui se tlespescheroit
de souper, ce seroit bien fait :
vos gens ont paré et parfait
17900 vostre cenc très bien et beau :
il y a ung très bon agneau,
du pain, des laictues sauvages,
et si a de divers bruvages,
et ne fust que l'eaue et le vin.
JHBSUS
17905 Loué soit le père divin
qui de tant de biens nous pourvoit !
s. PIERRE
Tout est prest, comme chacun voit :
venez vous seoir, grands et menus.
JHESUS
Benedicite.
TOUS respondent.
Dominus.
JHEStlS
17910 Posita et apponenda
benedicat Dei dexlra.
' URION
Or ça, seigneurs, chacun se tiie
a son lieu, et vous premier, sire,
metez vous en ce lieu présent,
17915 et puis nous vous forons présent
des biens qui sont appareilliés.
Icxj chacun se siet.
JUDAS
Cher maistre, trop vous travailliez ;
laissez moy servir le couvent :
c'est a moy, je le fais souvent,
17920 sans vous donner si grand ensonne.
PIRAGMON
Et moy, qui suis sage personne,
y sçaray je de riens servir?
JUDAS
James ne suis las de servir ;
puisque je sens mon maistre assis
17925 je prens plus de peine que sis
et suis bien content de jeûner
pour luy son mes bien oi-donner.
Voist hardiment ou il vouldra,
jamès liomine no trouvera
17930 qui consonc mieulx a ses fais
ne qui face ce que je fais ;
et si ne luy plains point ma peine.
• URION
Sa personne est si très haultaine
qu'on no le pourroit trop prisier.
JUDAS
17935 Aussi m'a il fait son bourcier
et gouverneur de-sa dospenco:
c'est signe qu'il a confidence
en moy sur tout le demeurant.
URION
II vous a fait honneur très grant :
179'i0 gardez que n'en soiez ingrat !
PIRAGMON
Or tenez, asseez ce plat
et le mettez ou il doit estre.
JUDAS
Recevez en gré, nostre maistre ;
veez cy les preparacions
179'.r) que vous ont fait nos compaignons :
les mes sont suffisans et beaux.
JHESUS
Mes frères et amis leaulx,
que sur tous ay voulu choisir,
j'ay désiré par vray désir
17950 ceste pasquo avec vous manger
avant que viengno le danger
de la passion que j'attens.
URION
Pour Dieu, soigneurs, soicz contens
du povre hostel qui vous reçoit
17955 et n'espargnez riens qui y soit :
je le fais liberallement.
JHESUS
Nous sommes honorablement
bien serns et de bonne sorte.
JUDAS
Ça, qui veult boire ? j'en apporte,
17960 Pierre, Thomas, Berthelemy,
Jehan, et vous, Andry, mon amy,
ame son compaignon n'attende :
qui veult boire le haiiap tende,
je le serviray tout surpicz.
s. PIERRE
17965 Judas, beaucop vous traveilliez :
pour avoir consolacion
prenez ung peu reffoction ;
nous avons de vous grant pitié.
JUDAS
Je suis trop aise la moitié :
17970 ne vous chaille que je inangeusse.
JHESUS
Frère, prenez ung peu d'induce,
et venez au manger entendre
de cest agneau tant doulx et tendre :
la serimonie le vcult.
17911 Amen, ajoute m marge A. li. — 17933 Ires humaine C. — I79'i5 mes compaignoiis C.
X. — 17970 ment'ue li. menj.asse C. — 17973 A cest B. — 17974 La compiiignie si G.
17908 auons manque
SECONDE JOURNEE
233
JUDAS
17975 Sire, vosti'o parler me iiieust
et je n'y veil pas obvier.
Icy menjuent tous en taii/ plat l'aigneau do
pasques et tandis parle Nostre Dame.
NOSTBE DAME
Filz, je no te puis oublier ;
mon cher filz, do mes biens le mieulx,
las ! ou es tu ? consente Dieux
17580 que briefmcnt puisse avoir copie
(le ta présence drguerpio
a ma doleur très singulière,
et d'envye ton advei'sicre
te veille saulver et garder !
Icy se lieve Jhesus de la table et met ses pans
a sa çiinture et se çaint d'une touaille.
8. PIERRE
17985 Frères, il nous fault regarder
que Jhesus, noRtr(! maistre, pense :
il s'est levé portant silence
de table pour aucun misterc.
s. JEHAN
Ce nous seroit graut vitupère
17990 de deniourer assis ainsi.
s. JAQUES ZEBEDEY
Levons nous donc tretous aussi,
si verrons de ce fait la fin.
JHESUS
Mette/, moy en ce grant bassin
de l'eaue une quantité.
PIUAGMON
17995 Vous en arcz a graiil plante
puisqu'il ne tient a aultre chose :
tenez, ce n'est jias oaue rose,
mes frescho venant du beau puis.
JIIE.SUS
Approchez vous, Judas, et puis
18000 si verrez que je vous feray.
JUDAS
Et quoy, sire ?
JHESUS
Je laveray
vos piez humblement, venez près,
et a tous vos frères après.
qui vous sera bel exemplaire,
JUDAS
18005 Ce qui vous plaist me doit bien plaire ;
sire, je n'y contredis \)as.
s. THOMAS
Vêla bien ung merveilleux cas
et de grant admiracion.
N'est ce pas grant presumpcion
18010 a Judas de vouloii' souffrir
que son maistre se viengne offrir
devant luy pour tel chose faire ?
.s. PHELIPE
liriefment on ne s'en pourroit taire :
apparence n'est que j'y voyc.
s. PIERRE
18015 A quans coutz je le souffreroyel
ja Dieu no donne qu'il ni'adviengne
que mon maistre devant moy viengno
pour moy si bassement servir.
JHESUS
Pierre, il vous convient ensuivir :
1S020 baillez vos piez, si le serez.
s. PIERRE
Ha ! sire, et vous me laverez
les piez ? est ce chose advenant \
JHESUS
Ce que je te fuis maintenant
tu ne sces; après le sçaras.
s. PIERRE
18085 Sire, ja ne me laveras
les piez, ne souffrir ne le doy.
JHESUS
Tu n'aras point part avec moy
se laver tu ne te permetz.
s. PIERRE
Sire, en vostre vouloir me metz
18030 non pas les piez tant seulement,
mes mains et teste plainement :
lavez tout, ainsi qu'il vous plest.
JHESUS
Cil qui nettement lavé est
n'a point nécessité du corps,
18035 mes des piez laver, et alors
il sera tout mondifié.
Si peust estre certifié
que vous estes netz entre vous
et bien mondés, mes non pas tous;
18040 tel y a que peclié encombre.
s. JEHAN
Veez cy humilité sans nombre
et parfaictc amour entérine.
17997 .1.1 li'nuo A. — 1S002 ni v(!ncz C. — 18013 nrief C. — 18015 coups A. C. — 1801C d.iinl T.. — ISOSO les prcs B. C.
— 18027 Si nanis li. C. — 1803G .lu tout G. — 18037 Sil B.
234
MI STERE DE LA PASSION
que nostre vray maistro s'encline
(levant nous pour nous nettoyer.
s. ANDRY
lS0'i5 C'est tousjours pour nous advdyer
a dileetion fraternelle.
s. JAQOES ALPHEY
La chose ne fust pas itelle
se je l'osasse reffuser.
s. PHEUPPE
11 ne s'en fault point excuseï":
18050 vous ouez qu'il a respondu
a Pierre qui a contendu
soy excuser, cuidant bien faire.
s. MATHlEr
II nous le fault laisser parfaire,
puisque son vouloir s"i adonne.
s. BERTHELEMY
18055 II scet quel chose luy est bonne
et la fin pourquoy il le fait.
s. SIMON
Ce me semble ung estrango fait :
grant signe de charité tient.
s. JUDE
Il fait ce qu'il nous apportient
18060 et que faire nous luy deussons.
Icy les /aie tous et essuyé de la iouaille
dont il est çainct.
JHESUS
Frei'es, je los que parfassons
nostre souper en briefve espace :
chacun se remette en sa place,
et nous servez du demeurant.
JUDAS
18065 La vouldray estre labourant :
servis serez a soubhaidier.
PIRAGMON
Se je vous puis de riens aydier,
soit de porter ou bancs ou tables...
JHESLS
Mes frères chers et amiables,
18070 avez vous entendu le fait
de ce qu'orendroit vous ay fait ?
Chacun de vous me porte honneur
et m'appelle maistre et seigneur,
passé maintz jours et mamtcs nuys,
18075 et bien dittes, car je le suys ;
et donc se je, seigneur et maistre,
tant humblement me veil submeti'c
que d'avoir tous vos piez lavés,
par moy bel exemplaire avez
18080 que tant plus devez estre doulx
et sorviables entre vous
pour laver les piez volcntier
a ceulx qui en aront mestier ;
c'est exemple quant a ces fais
18085 que vous faciez comme je fais.
N'a gaircs que je vous disoie
comment fort désiré avoie
de faire avec vous ceste feste
en laquelle est assez honneste
18090 que je paye ma bien allée
a ceste dévote assemblée
en prenant ung congé piteux ;
et m'est ce souper deliteux,
car je n'ay plus iutencion
1S095 de prendre o vous reftéction,
ne buveray ne mangeray
jusqu'à ce que je le feray
par nouveau moyen ou hault règne
ou mon pcre domine et règne.
18100 Touteffois avant le partir
a tous vous vouldray départir
mon corps sacramentalement,
et faire le grant sacrement
qui a vostre salut vauldra
18103 et au peuple qu'après vendra.
Icy prent Jhesus le pain et benist et leur baille
tout en ordre et a Judas avec.
Chers enffans, prenez et mangez,
car cccy est mon corps; jugez
qu'il n'est refleetion plus digne.
s. PIERRE
0 haulte pi-udence divine,
18110 quel viande vallable et bonne,
quand nostre maistre si nous donne
son corps précieux par ses mains !
s. JAQUES
Je n'y en croy ne plus ne mains
en ce sacrement de noblesse
1S115 que la vierge, nostre maistresse,
en enffanta virginalenient.
s. ANDRY
Et moy je le croy fermement
et ay parfaicte confidence.
Icy prent Jhesus le vin et le benist sembla-
blement.
JHESUS
Voicz ce calice en présence
18050 voiez A. — 1S052 S™ C. — 18059 II a fait ce qnil appai-tient C. — 18062 brief B. C. — 18060 souhaitinr C. —
18070-85 man'iweiil C. — 18075 Bien dictes car ainsy le suis li. — 18081 seniissables B. — 18086 comme vous A. a que
je vous C. — 18089 En manque A. — 18090 Que man^ue A. — 18095 auec C. -- 18103 saint sacrement H. C — lâlU
bon maistre nous B. G.
SECONDE JOURNEE
235
18120 et buvez <ie oueur pur et fi'nnc,
car c'est i<^y mon propio sang;,
(le nouveau tostnmont establo,
qui pour moult do gont pourfitablc
piteusement s'eflbndora,
ISlïj par quoy au peuple fondera
do ses péchés rémission.
Icy leur donne a boire son sanr/.
s. JEHAN
G divine potacion,
quand je t(! reçoy en mon ame,
clmrit(' tout lo cuour nrcnttamnic
18130 en l'amour do mon créateur.
JHBSUS
Ce pain donc et ceste liqueur
qui mon corps et sang représente
prenez par vraye et bonne eutonto
en la remonibiance de moy.
18135 Mes eiiti'ans, chacun pense a soy,
et oez ce qu'on vous dii'a :
l'ung d'entre vous me trahira
et me livrera aux Juifz.
s. PIERRE
0 maistro, serez vous trahis
18140 par homme de la compaignie?
se c'est ung de votre meignie,
dittes le : nous le saisirons
et voyans tous lo destruirons ;
s'i prendront les autres exemple.
JHESUS
l8Ur) Ma parole est bien clere et ample :
l'un do vous s'applique et amord
- a trouver ma lin et ma mort ;
et non pourtant le iilz do l'homme
rigle son fait et va si comme
18150 l'escripture parle de ly ;
touteftbis douleur pour cely
par qui j'aray la traliison !
il puurriiit vouloir par raison
qu'oncques de mero ne fust né.
s. PHELIPPE
18155 Veez cy un cas mal ordonné
qui argue en nous grant dcffaulto.
s. HERTHELEMY
No sçay dont peut venir la faulto :
nous sonmios plusieurs en la sallo
tant de sa sorte commensalle
18160 comme de coulx qui n'en sont point ;
je no sçay penser sur ce point
auquel ces paroles s'adressent.
JHBSU8
Affln que doubtes ne tous presiicnt
je parle de mes commensaulx :
1816S l'ung de mes douze principaulx,
qui de sa main ose toucher
avec moy au plat pour manger,
me trahira sans nulle doubte.
Et notez ici que tous les aposlres ont muin de-
dans le plat et menjue Jhesus et Judas
aussi.
s. PIERRE
Si grant courroux eu moy se bouto
181*0 que boire ne manger ne puis.
Pour Dieu, mon maistre, se je suis
celuy qui vosti'e mort procure,
dittes le cler, car je n'ay euro
que me celiez vmg tel meffait,
18175 affin se j'ay vers vous méfiait
tous mes compaignons me dcstruisont.
S. JEHAN
Sire, vos parlors trop nous cuisent,
, que l'ung de nous traître sera.
Seray je cil qui ce foi'a,
18180 déclare l'en i)laiuc audience?
s. JAQUES ZEBEDEY
Ferai je vers vous tel offouce,
sire? qu'il me soit dit icy.
s. ANDRY
Sire, déclarez en présence :
foray je vers vous tel offouce?
s. HERTHELEMY
18185 Suis je traître en conscience ?
s. PHELIPPE
Et moy suis je traître aus.si ?
s. THOMAS
Ferai je ver» vous tel offence,
sire? qu'il me soit dit icy.
s. JAQUES ALPHEY
Et moy ay je traitto cocy,
18190 sire? a vostre dit m'en raporte.
s. SIMON
.le n'en veil pitii'^ no morcy,
sire, se j'ay traitté cecy.
s. JUUE
Se j'ay le villaiii cas baty,
il soit dit sans ce qu'on me porte.
s. MATHIEU
18195 Et moy , ay je traictié cecy ,
sire ? a vostre dit m'en raporte.
1S123 charitiible 13. C. — 181iiC-i!32 mnnqiunt C. feuillel déchiré. — 18138 deliuiera A. — 1S145 clere «i i»7Uc A. —
18147 Do trmmer H. — 181(i2 .ndiessent B. — 18167 ou plat a mengiiT B. — 1S1G9 se double B. — 18176 se deslrui-
beiit li. — 1817S traite A. — 18180 Deliurez leu U. — 1819i A mov se B.
I
236
MISTERD DR LA PASSION
Puisqu'on fait enqueste si forte,
numquid tune ego sum, raby'?
suis je pas leal en la sorte ?
18200 serez vous de par moy trahy ?
JHESUS
Tu l'as dit.
Icy fait S. Pierre ung signe a S. Jehan affin
qu'il le demande a Jhesus, et doit estre
S. Jehan emprès Jhesus.
s. JEHAN
Mon maistre et amy,
sur l'amour qu'a vous puis avoir,
vous pry que je puisse sçavoir
soit par paroles ou par signe,
1S205 celuy qui contre vous machine
de faiie telle trahison.
11 me prent inclinacion
do dormir (ne sçay que peust estre)
sur le geron de mon doulx maistre ;
18210 humblement m'y rcposeray.
Icy se couche sur la poitrine de Jhesus.
.lUDAS
Trop grant dcspit en mon cueur ay
de ce malheureux serviteur
qui doit estre ainsi proditeur
et son maistre en ce point séduire :
18215 il est digne de le destruiro
qui sçaroit son cueur desloyal.
Il m'en fait au cueur bien grant mal
quand j'os reciter cest article ;
que ne dit il en plain bouticlc
18220 qui c'est, affin qu'il fust lyé,
pris, raeurdry et expédié,
pour en depescher le partage ?
s. MATHIEU
Nostre maistre est très bon et sage :
il l'en fault laisser convenir.
s. JL'DE
18225 Bien scct que luy est advenir,
si bien qu'il n'est plus sceure chose :
cil qui la trahison propose
dira bien quand il sera temps.
s. JEHAN
Choses grans misteres portans
18230 habondamment et en grant somme
ay veues en mon présent sompno
qui en temps futur advendront,
qui revellees ne seront
par moy a parens ne amis,
18235 tant qu'il me soit de Dieu commis
dont ce hault bien m'est procédé .
JHESII.S
Jehan, nagaires m'as demandé
pour sçavoir qui celuy sera
qui faulcement me trahira ;
18240 et de mon gré tu le sçaras :
regarde a qui tu me verras
donner un morceau de pain taint,
c'est celuy.
Ici baille Jhesus le morceau de pain brun
a Judas.
Or le tiens estaint
et secret, n'en fais mencion
182''i5 devant ce que ma passion
soit faicte com je le désire.
s. JEHAN
C'est de vostre bonté, cher sire,
qui me monstrez signe d'amour.
SATHAN
Tu fais icy trop long demour,
18250 meschant homme couart et nice ;
que n'achevés tu ton office
dont tu as ja receu l'argent ?
que fais tu en tel meschant gent ?
va t'en achever ton ouvrage.
JUDAS
18255 La trahison de mon courage
ne se peust oster ne roffraindre :
le feu n'en sçaroient ostcdndrc
toutes les goûtes de la mer.
11 la me convient consommer,
182C0 je ne me puis plus contreffaire.
jHE.srs
Ce que tu fais haste de faire,
Judas, sans plus dilacion.
JUDAS
Il cuide ma dctraction
abastre par son langager,
18205 mes il ne soet point le danger
que je luy pourchasse a oultrance,
car gens d'armes a grant puissance
m'en voy qucrre pour le charger.
Je ne puis cy plus attargcr,
18270 le deable me pourmaine et guide,
il est mon ducteur et ma guide
et j'obeys a ses commandz :
mon ame et mon corps luy commandz
18198 Nonquid A. Nunquam B. — 18200 Pour faire tel prodifion B. — 18210 me li. — 18212 iiialhcnre B. — 18210 il
mnnqae A. — 18222 parcage A. — 18227 Et qui B. — 18233 Que C. — 18235 de dieu mmiqui' C. — 18238 que C. — 18243
Icy donne Jhems a. Judas la soupe en vin A. — 1S250 eornard lî. —18259 II le B. — 18261 h.->ste toy de C. — 18863 par
dilaeion C. — 18267 grant manque G. — 18268 ce charger B. — 18269 arrester C. — 18272 mnnijuc C.
SKCONDK .lOURNKE
237
comme du fait \o. droit motif.
s. JAIJI'ES AI.I'IIEY
18275 Ou s'en va Judas si liatif?
il est moult fort cmbcsongnc.
s. BERTHELBMY
Nostre niaistro luy a chai'gi!
quelque chose soubdaiMemcnt,
mes je no s(,>ay quoy no comment,
182S0 sinon que j'ymagine et pense
que c'est au fait de la despense
dont il a le gouvernement.
s. A.NDRY
•le ne l'ontrndz point aulti'emcnt,
cai' il a grant bcsongno eu mains.
JHESUS
i^2Sô Clicis aniiz et fiercs humains,
entretenez fraternité
on vraye et ferme charité ;
ne portez courroux ne rancune,
et s'il advient par chose aucune
18290 que disccncion s'i csmeuve,
la crainte do Dieu vous promeuve
a vostro prochain ordonner
si que tout veUliez pardonner ;
car qui n'ara a son prochain
182^ charité, sache de certain
que Dieu ne luy pardonnera,
^ ne de son mal pardon n'ara.
Faix soit toute vostre possesse,
paix soit toute vostre richesse :
paix est ung trésor et avoir
que meilleur ne pouez avoii' ;
et sur quancque je vous commande,
charité je vous recommande :
se de celle vous vous armez,
vrais filz de Dieu estes clamés ;
par charité poucz merir,
sans elle ouvrer n'est que périr.
Ghors enrt'ans, entendez moy tous,
encor ung peu suis avec vous
18310 et brief do vous me partiray,
et au lieu ou je sortiray
ne poez venii' de Of'sto heure.
s. PIERRE
Sire, en quel lieu n'en quel demeure
allez vous ? quel deffaultc avons
18315 pour quoy suivir no vous poons
quant chacun a vous se présente ?
JHESt:S
Ou je vois pour l'heure présente
18300
18305
maintenant pas ne me suyvroz,
mes cy après bien le forez
18320 quand plus grand force vous vendra.
s. PIERRE
l'ourquoy, sire, et a quoy tendra ?
allez vous si de.stroito voye
que suivi'o je ne vous i)ouri'oye ?
s'a la mort vous habandonnez,
18325 crainte pour ce ne me donnez,
cal' j'ay ma pensée ravye
de mettre ma mort et ma vie
pour vous, et je ne m'en desdis.
JHE,SUS
Et vrayement, Pierre, je te dis
18330 qu'ains que le coq chante deux fois
ceste nuit tu m'en nyras ti-ois,
et garde comment t'enhardis.
s. PIERRE
Sire, sauf vostro honneur, mes dis
et mon oppinion est telle
18335 que pour porter peine mortelle
et mourir avec vous en place
ne vous regniray, que je sache :
mon intencion y est ferme.
.IHESU8
Et a vous tous dis et afferme
18340 que tous ceste nuit me lairrez
et par crainte m'esclandii-ez,
que disciple avec moy n'aray ;
car est escript : Je frapperay
le pasteur ; lors s'espanderont
18345 les ouailles et s'en fuyront.
Mes quand je sei'ai exciti"
et de la mort ressuscité,
je vous verray en (îalilee.
s. PIERRE
Et se toute ceste assemblée
I8:fô0 vous nye de cueur inconstant,
je ne vous nyrai pas pourtant,
mes me tendray de vostro accord
et suivray a vie et a mort ;
je suis en ce point affermé.
8. JEHAN
18355 Quiconquos en soit defformé,
je tendray tousjours sa querelle.
s. ANDRY
De le suivir suis tout fermé,
quiconcques en soit deffermé.
s. JAQUES ZEBEDEY
Mon vouloir est tout conferraé
18298 Ircloiit A. — 18304 Kt se délie A. — 18305 proilameï 0. — 18323 Quensujure B. — 18326 toute rauyo C. —
18328 ja B. — 18329 brielment C. — 18330 Quaunnt C. — 18341 meselandrirez A. poUr paour vous inensiiyures C.
238
Ml STERE DE LA PASSION
18380 tenir loyauté naturelle.
s. UERTHELEMY
Quiooucques eu soit defformé,
je tcndray tQusjours sa querelle.
s. PHELIPE
Que je comnictte fuytc telle!
janiès je ne vcil vivre après.
s. THOMAS
18365 Ja ne doint l'essence immortelle
que je commette fuyte telle!
s. J\Ql=ES ALPHEY
Seray je reiirouché par elle,
il me tient au cucur de trop près.
s. MATHIEU
Que je commette fuyte telle!
18370 jamès je ne veil vivre après.
.s. SIMON
Et j'ose affermer par exprès
que pour paine ou pour mort avoir
on ne me sçara remouvoir
d'entresuyvir sa compaignie.
s. JUDE
18375 Je n'ay garde que je regnie
la foy que je luy doy porter.
JHESUS
Il est temjjs des tailles oster,
frères et amis, levons nous ;
si me veil mettre a doux genoux
18380 et faire a mon père prière
humblement en oeste manière :
Fere puissant, d'où puissance procède,
ou tout l)ieii tend et ou tout bien précède,
l'oy éternel sans jamès prendre fin.
Grâce et salut a mes amis concède,
et les pourvois de si très bon remède
que leur vouloir ne se tourne a déclin ;
Abba p^ter, mon hault père divin,
le monde laisse et dresse mon chemin
par devers toy que sans fui je possède ;
Geulx qui croiront en moy de cucur affiu
te recommans en temps futur, affin
que l'ennemy ne les griefvc ou deprede.
s. PIERRE
Frères, veez cy aultre raison :
183K) j'ay eutendu par l'oroison
que nostï-e niaistre a fait icy
que briefment nous laii'ra.
s. JEHAN
Gocy
me fait grant mal quant je l'cscoute.
s. .I.VQUES ZEnEDEY
Et pour la cause faisons double,
18100 et devons aller enqueraut
qui de nous sera le plus grant
et le chef après son départ.
s. PHELIPE
Vous parlez de très bomie part,
car il est assés jiaitinent
18405 qu'après celluy département
l'ung de nous soit chef et recteur,
auquel comme au gubernatcur
tous les aultrcs aront recours,
et qui pourra donner secours
18410 a cculx qui l'en vouldront requerre.
s. BERTHELE.MV
Qui est le plus ydoine?
S. THOMAS
Pierre ;
car nostre medstre aussi jadis
du royaulme de paradis
le fit claviger atferant.
s. SIMON
18415 N'y scroit pas Jehan plus séant,
qui est son parent bien prochain
et son amy le plus certain
qui soit en toute la maignie ?
s. 4UUE
Cher sire, ne l'oubliez mie
18420 a dire avant vostre recès :
nous sommes icy en procès
qui de nous sera le [ircmier.
JHESUS
Frères, l'usage coustuniier
est tel que les rois de la terre,
18425 quant les pays peuent conquerrc,
doniiuent sur coulx dessoubs culx,
et ceulx qui sont plus curieux
d'avoir sur les aultres puissance
a ceulx qui en ont congnoissance
18430 sont tenus les plus beneureux ;
pas ne vueil que soiez de cculx :
vostre fait est tout aultre chose.
Je veil que celluy qui propose
a la majorité coutendre
18435 devant vous soit comme le mendre,
et celluy qui est [irecesseur
soit comme le ministrateur.
Qui vous samble le plus notable,
ou celluy qui siet a la table
18440 ou celluy qui sert devant luy ?
18363, 18366, 18369 faulli' I!. — 1S374 Entretenir B. C. — 183S4 omii'/iir C. — 18386 les ] le A. — 18404 Jaque il est
C. — 18405 Apres son A. — 18414 affreant B. G. — 18415 niieulx seaut B. G. — 18418 en tout la compaiguie A. — 18-426
Régnent et sont dessus it'eulx A. — 18433 Mais vueil B. G. — 18436 possesseur G.
s !•: C 0 N D !•: J 0 l] R N R K
239
vous nie «lirez que c'est celuy
a qui est lo sei'vicc fait ;
or regardez donc a mon fait :
je suis entre vous et ministre
18S45 comme serviteur et ministre,
et vous estes les biencurés
qui avccquos moy dcmourez
et avez fait permansions
en toutes mes tem()tacioiis ;
is'iDO et comme mon porc me donne
le règne, je vous l'abandonne,
affin qu'a ma table seez,
avec moy buvez et mangez
en mon hault royaulmo de joyo ;
is'ijâ finableraont séant vous voye
sur les trosnes do majesté
jugeans par voye d'équité
les douze tribus d'Israël.
s. PIERRE
Doulx Jhcsus, vray Emmanuel,
lS'i60 fils de Dieu qui tous sces et vois,
a oir ta juteuse voix
nostre disoord devient paisible,
et cuide qu'il est impossible
que discord soit en ta présence.
.IHESUS
18165 Pierre, soies sur ta deffence,
car Satban ses engins assamblo
l)our vous tempter tretous ensemble,
et ja l'ung de tous a ravy ;
mes pour ce que bien m'as servy,
ISiTO pour toy ay supplié sans faille
affm que ta foy ne deti'aillp;
et toy convcrty et fait ferme
a la foi tes frères conferme
kalïin que ja ne dépérissent,
s. PIERRE
18475 Sire, vos ditz trop m'esljaysscnt :
ne vous ay je pas dit devant
que quelque homme au monde vivant
ja ne me sçara séparer
de vous pour tormont endurer ?
18'iSO je suis prest de vous secourir
soit eu chartro ou soit a mourir :
j'abandonne lo résidu.
JHESIS
Pierre, je t'ay ja respondu
que ta force est insuffisante
184S5 et qu'avant que eoste nuit chante
lo coq, si grant douleur aras
que plainement me regnira»
combien que ja vaillant te faces.
Or, mes chers frères, rendons grâces
18190 des biens que Dieu nous a promus.
Icy dient grâces tout bas.
IIRION
Seigneurs, bien soiez vous venus
et lo logis prenez en gré.
pinAaMoN
Tous ensemble graus et menus,
seigneurs, bien soiez vous venus.
s. PIERRE
18195 Nous sommes a vous fort tenus,
un chacun selon son degré.
URION
Seigneurs, bien soiez vous venus
et lo logis prenez en gré.
JHESUS
Puisque le jour est advespré,
iSôOO mes amia, nous nous partirons
d'icy, et a la part irons
qui bien de coustume nous est.
s. .IEHA.N
Il dit au jardin d'Olivet :
volontiers s'i va detrier
18505 iiour Dieu, son [lere, deprier
tousjours quand le soir est venu.
JHESLS
Mes amis, vous avez congneu
comment je vous ay envoyés
prescher aux peuples desvoyés
18510 en mainte saison dure et malo,
sans sac, sans souliei's et sans malle
et sans avoir liourse ou pocune :
vous a il fallu chose aucune
sur la voye allant et venant ?
.s. JAQUES ZEHEDF.Y
18515 Riens.
JHBSUS
Aultre temps est tnaintenant ;
je vous dis (et vous en souviengne) :
qui ara son sac, si le prengne,
et qui n'a glaves, bien en haste
vende sa robe et en achate,
1S520 car tant de niachinacions
douleurs et persecucions
verrez en un temps qui vendra,
que maulgré vous il convondra
qu'avec vous poitoz vostro vivre
18525 par les champs se vous voulez vivre.
1841-1-45 le ministre Coninie s^îruont qui administre A. — 18-451 }é le vous ordonne B. — 18452 que ma B. — 18457
vraye C. — 18458 lignées A. — 18461 manque B. — 18483 et je tay C. — 18495 moult B. C. — 18515 Non B. Sire nennil
C. — 18516 rliacun y entende C. — 18518 Ici se i>lace un ctrs ijui ne rime ù rien : Kt sa iiiale pareillement C.
I
240
MISTEKE DK LA F AS S ION
tant serez do co monde esclaves.
s. PIERRE
Sire, quand vous parlez de glaves,
veez en cy deux bien amassés.
JHESUS
11 peut souffire, c'est asscs ;
18530 or nous mettons donc a chemin
et nous transportons au jardin
ou aller avons entrepris.
[Pose.]
JUDAS
Seigneurs, je revien tout surpris,
et sachez que puis le partir
18535 j'ay eu grant peine de bâtir
mon fait pour éviter dangiers ;
je n'ay pas pour néant les deniers :
j'ay a faire a ung trop fin hoste.
ANNE
Comment va la besongnc?
JUDAS
A poste,
18540 non obstant qu'elle est dificille ;
mes s'il y eu avoit dix mille,
s'est il prins, je n'en double point.
Sont vos gens d'armes mis a point?
sont ils armés et fervostus?
18545 vous me verrez faire vertus
ja tost en fait de les conduire.
CAYPHE
Il les fauldra ung peu instruire
affin qu'ils ne soient trop leurs.
JUDAS
Faictes les inoy saillir tousjours
18550 et ne vous chaille ou je les maine :
je veil ostre leur capitaine
tout seulet pour les bien mener;
pour avoir prise plus certaine,
je veil estre leur capitaine.
ANNE
18555 Sus! compaignons, chacun se peine
de soy très bien enjliatonner.
JUDAS
Je veil estre leur capitaine
tout seulet pour les bien mener,
et vous me verrez ramener
18560 ja tost vostre fort adversaire.
CAYPHE
Es tu bien sceur?
JUDAS
Laissez m'en faire :
je n'abairay point a mon oriibre,
mes bailliez moy gens a grant nombre,
faictes saillir soudars piétons,
1S565 atout arcs, atout viretons,
gens de commun et bons hommeaux,
variez, souillons, gardechevaulx,
bedeaux, garsons et coquinaille ;
n'y ara si meschant mardaille
18570 que tout ne viengne a bon prouffit ;
car comme aultro fois vous ay dit,
je double qu'il ne soit recous,
et co seroit a mes chers couslz :
j'en humeroie la purée.
CAYPHE
18575 La chose sera asseuree
présentement, ne t'en soucie,
car tu aras grant compaignie
qui te secourra au besoing.
18537 lo deniers A. — 18544 fort vestus A. — 18:
18578 secourront IJ. — 18580 lost banye C. — 18580
EMILIUS
Aloul ce mailliet on mon poing
18580 je vouldray suivir l'obanye.
CELSIDON
Et j'iray pour deffendre ung coing
atout ce mailliet en mon poing.
RABANUS
Et fust ce quatre fois plus loing
tretout ainsy qu'on s'esbanye,
185fô atout ce mailliet en mon poing
je vouldray suivir l'obanyo.
NEMBROTH
J'y vois.
SALMANAZAR
Et je n'y fauldray mie,
j'ay bâton assés pour nous deux.
PHARES
Puisqu'il y a tel escremie,
18590 j'y vois.
EMILIUS
Et je n'y fauldray mie :
je porte ma picque jolie
pour moy frapper au milieu d'eulx ;
j'y vois.
NEMBROTH
Et je n'y fauldray mie,
i2 je nobeiray G, — 18573 coups A. — 18577 geiit yrant partie B.
la baiiye G. — 18589 escannye B.
SliCONDK JOIJIINEK
241
j'ay bâton nsscs pour nous deux.
ANNE
1855e Sont nirs gens los plus mal songncux?
ou sont trolous mes guisarmicrs?
ROULLAUT
Nous avons esté les premiers
et tous armés do pié eu cappo.
DENTART
Se co séducteur nous eschappo,
18000 on nou>' dcbvroil les yeux crever.
GADIKEH
N'est doubte que do le trouver,
qu'il no soit ja fouy arrière.
CAYPHE
Mes gens demeurent ilz derrière ?
Malcus, Estonné et Bruyant !
18605 Dragon, Gueulu et Malcuidant !
ou sont ja ces l'ibaulz meschans ?
MALCUS
Nous avons e.*té par les champs
par devant toute la couvée.
CAYPHE
l'i'cnez torchas grant assemblée,
18610 lanteines, lirandons et fallos
a grant quantité.
ANNE
Je le los,
car la nuit est ung petit brune,
si fault redoubler la fortune
qu'ilz ne faillent a leurs assens.
BRUYANT
18615 Nous en avons plus de cinq cens,
tous ardans, je vous en asseure.
CAYPHE
Pour avoir conduite plus sceure,
Banaiiias et vous, Nathan,
Mardocee et vous, Joathan,
18620 Jheroboan et vous, Nachor,
vous iiez avec eulx oncor,
et le fait niieulx s'en portera.
JHEROnOAN
Nous ferons ce qu'il vous plaira,
veez cy nos bâtons tous chargés.
JUDAS
18625 Sus! seigneurs; sus! plus n'atargez,
suivez moy tous en ordonnance,
n'homme si hardy no s'advance
fors ainsi que je luy diray;
tous droit au lieu vous conduiray
18630 ou nous chargerons nostre prise;
mes a le prendre est la maistrise.
MARDOCEUS
l'ar quel moyen ?
JUDAS
Four ce, seigneui-s,
qu'il a des disciples plusieurs,
et l'ung d'icculx qui sont ensemble
18635 si très proprement luy ressemble
que vous ne sçariez distinguer.
Or le congnois je au vray jugier
aussi tost que je le regarde,
et pourtant donnez vous de garde :
18640 celuy que baisier me verrez
a l'entrer, vous le saisirez ;
c'est le signe que je vous don.
BANANIAS
Le signe est très bol et très bon
et qui très bien la chose enseigne.
18645 Retendras tu bien ce.st enseigne,
Malcus ?
MALCUS
Oy dea, bien et beau :
je n'ay pas oreille de veau
ne sourde, que bien ne l'entende ;
mes je prie Dieu qu'on me pende
18650 parmy la gorge d'ung licol
que se je tiens le paillard fol
je l'estrtdnderay de si près
que le sang en sauldra après
par tous les joinctures des mains
18655 et des poingz.
ESTONNÉ
Cela, c'est du mains ;
il ara bien d'aultres hurtui-es
qui luy seront un peu plus dures
et plus dolentes, se Dieu plaist,
JUDAS
Compaignons, cessez vostre plaist :
18660 le moins bniit nous est le meilleur :
vous sçavez qu'ung tel cabuseur
a beaucoup de mauvaitié veu;
si le nous fault prendre improveu
se nous eu voidlons bien chcvh-.
MALCUIDANT
18665 Se je le puis acousuivir
et se m'attent que je le lye,
il sçara moult d'onchantorio
s'il on part sans laisser les plumes.
18611 A grant puis^s.•^nl•e B. C. — 18612 ung pi-tit peu \. — 18614 nhsens B. — 1S63S Tout tantost B. C. — 18648 rien
ne A. — 18654 joinglurcs A. — 18601 séducteur B.
Pas.
16
242
MISTERE DE LA PASSION
DRAGON
Malcuidant, ce sont tes coustumes,
18670 tu no fais tousjours que baver.
OUEULU
Suyvons pour danger eschcver
les aultres qui devant s'en vont.
Icy se partent pour aler au lieu.
JHESUS
Frcres, vos fais dangereux sont :
demeurez cy en ce retirait
18675 t£uit que je me soie retrait
ung peu pour prier Dieu, mon père,
dessus la passion aniero
que je sens moult fort approchant ;
et pour tant qu'il vous est touchant,
18680 priez par humble affection
pour éviter temptacion
affin, se vous estes tentés,
que du cucur pas n'y consentez :
pai'esse est mauvaise de soy.
18685 Pierre, venez avecques moy,
vous, Jchau, et Jaques, vostre frère.
Icy maine ces trois ung peu plus en avant.
Quand la peine bien considère
par laquelle me fault passer,
j'ay tel paour qu'il n'est a penser :
18690 mon ame se doulouze fort
et est triste jusqu'à la mort ;
trist-is est anima mea:
l'ame qui mon corps amé a
sur toutes les formes du monde
18695 sent en soy douleur si pai'fonde
qu'au siècle n'est point de pareille.
Mes chers amis, je vous conseille
qu'en ceste place vous tenez
et tousjours vous entretenez
18700 en oroison comme j'ay dit ;
cslongner me veil ung petit
de vous, car prier Dieu désire.
8. PIERRE
A vostre vouloir, mon cher sire :
ung chacun y tendra la main.
Icy se retrait Jhesus encore plus loing
et se met a genoux.
JHESUS
Père du ciel, créateur souverain,
de ces beaux cieulx ornateur primerain,
qui tout congnois par ton hault presçavoir,
Regarde moy, ton filz doux et humain,
fort engoissé d'un ennuy trop grevain
qu'il n'est en cueur d'homme de le savoir ;
J'apperçois bien la passion honteuze,
la dure mort, la peine despiteuze
qui s'appreste pour mon corps consommer :
Ce calice m'est durement amer ;
père piteux, s'il te samble possible,
oste le moy qui tant me veulz amer,
car le goûter me samble moult terrible.
Terrible m'est et la mort plus cruelle
qu'oncques portast créature moitellc ;
je la congnois, je la sens, je la vois,
La deitc me la présente telle,
la fresle char la redouble et sautelle
et tant la craint que n'a mes que la voix ;
L'ame reftuit a ta protection
qui de son corps prent tel compassion
que son grand dueil ne veult ou scet retraire :
Si te requier, père très débonnaire,
père jjiteux et des bcgnins le plus,
passe ce point s'il se peut ou doit faire :
j'ay moult de i)rine, suffise le surplus.
Le surplus est d'mie cnvye soubdaine
qui me banit de la vie mondaine,
et mes amis me pourchassent cecy ;
Mes moy voyant toute nature humaine
tant obligée a dommageable paine
qui sans cccy ne jieust avoir mercy,
Je suis tout prest et a toy me submis ;
le sensuel qui n'y consent jamcs
raison survaint et le corps n'y rebelle ;
L'esprit est prompt, non obstant la char frellc
et se submet a ta bénignité,
ja mon vouloir sensuel ne s'en mesle :
soit faicte donc ta haulte volenté.
Icy se lic've et vient aux trois apostres
et les trewcc dormans.
C'est a toy grant fragilité,
18745 Pierre, de si fort sommeillier ;
n'as tu peu avec moy veillier
une povre heure seulement ?
Veilliez, cnfTaus, songneusemcnt,
faictes a Dieu prière forte
18750 a celle fin qu'il vous coniTorto
si bien que par son confforter
1SB72 sen vont deuslnt C. — 186S7 la grKnt peino B. C. — 18703 voulente cher C. — 1S70C De i-e monde A. — 18708
humble et B. C. — 18709 Fort mnnciue B. C. - 18721-23 ntnuîuoii G. — 18733 procurent B. C. — 18734 martire C. —
18737-38 maiviuent B. — 18751 confforte A.
s K C 0 N D R J 0 i; R N K E
243
puissiez passer et éviter
les tcmptacions survonans.
Icy retourne Jhesxts prier.
s. pikrhe
Frères, nous sommes moult posans :
is7j3 nosti-e maistro est icy venu.
s. JKHAN
A prier Dieu somme» tcim :
bien ni('S(^liant ost cil qui sommeille
quand le uiai>tro peine et trnveillc
pour les tcmptacions fuir.
Ici/ prient ung peu, puis se dorment comme
dessus.
JHE.SUS
18760 l'ere, par ton divin plaisii-,
pour la grant paour qui me maistrie,
encore de recliicf tu prie
ipie ce calice point ne boyve
n(> la passion ne re<,'(iyve
1S765 que forment crains en mon courage ;
non obstant se l'humain lignage
par aultre point n'est racheté,
soit soubmise ma volante
et la tienne faicte et tenue.
Jcij retourne a scu apostrcs.
18770 Pierre, peu avez maintenue
vdstre al)stinence de dormir ;
temptacion devez crerair :
veillez ung petit, l'heure est briefve.
Jhe.iiis s'en retourne.
s. .UQUE.S ZEBEDEV
Vecz cy pénitence moult griefvc :
1S77D mes frères, ung peu vous levez.
s. JEH.VN
Nous avons les yeux t^uit grevés
qu'a pou les poons nous ouvrir.
s. PIERRE
C'est d'ennoy et de desplaisir,
qui de grant sommeil nous abat.
Icy prirnt ung peu et se dorment comme
dessus.
JHKSUS
18780 En moy sens le plus fort débat
qu'oncques endurast créature
pour le fait d'immaine nature,
qui ceste passion piteuse
attent tant triste et donloureuze
18783 qu'a peu que raison luy scet mettre
moyen que s'y veille submettre,
tant crsiint la sensualité.
0 tresor de divinité,
l)ere qui tout cueur a.<;suffi8,
18790 regarde ton benouré ftlz
et la tristesse de mon amo
qui a ce bosoing te réclame
n son besoing très singulier.
le;/ Jhesus sue sang.
Regarde les goûtes uouUer
18705 de sueur pénible a merveille,
de sueur connue sang vermeille
qui de tout mon corps me deppart
par la crainte qu'en moy s'espart.
0 père, ne ni'oublye niye,
18800 regarde la forte agonie
en quoy tu ni'.is constitué :
tel sang ne peust estrc sué
que la cause n'en .'■■oit active,
si très dure et pcnctrativo
18805 que le cueur ne peust plus souifrir.
0 père, a toy me viens offrir,
o père, a toy me recommans :
obéir vcil a tes commandz,
mes ceste passion me meult :
18810 mon pero, se faire se peust,
allégez moy ceste sentence.
DIEU LE HERE
J'ent(>ns la ))iteuso éloquence
de mon filz, le benoit Jhesus,
qui ses plainctz a vers moy promus,
1S8I5 soy recommandant a ma grâce :
c'est l)ien raison que je luy face
comme pore a son filz ami'
quand tendrement est reclamé ;
mes poui" ce que dame Justice
18820 quiert admende du maléfice
qui les humains a fait baiùr,
sou oppinion veil oyr,
savoir s'atant luy souffira.
Justice ?
JUSTICE
Ce qu'il vous plaira
188fô commandez moy, pore divin.
DIEU LE PERE
Est il plus amoureux chemin
que vous nous sceussiez ja trouver
pour nature humaine saulvcr ?
1S763 Queii ce A. — 1S773 Une heure petite et liriefue C. — 187S7 ma lî. — 18793 mnnque C. L'oiilication seinlqw^
qui nuit ne se tyotivr que tians A, écrite pitr extriiordinnire à iVii-rc roitfff. — 18800 a^ruyc B. .utoyblie C. — It^&t
uionjue B. — 1S818 sest A.
244
MISTERE DE LA PASSION
18830
18835
18840
18843
18850
18855
18860
18865
18870
18875
VOUS poez vous a mains passer
n'a mendrc pris recompenser ?
fault il pour les humains réduire
que Jhesus, mon cher enffant, muyre ?
voiez en quel point il est mis.
JUSTICE
Vous sçavez que m'avez promis :
je ne requier or ne richesse ;
tant seulement vostre promesse
tenez, et je suis assuffie.
DIEU LE PERE
0 Justice, très bonne amye,
voiez la grant perplexité
que son digne corps a porté
puis sa haulte incarnacion,
l'envye et pcrsecucion
dont oncques ne fut exempté,
mes persécuté et tenipté
a esté tousjouis jusqu'à cy
puis l'eure qu'en teri'e nasqui.
Justice, il a beaucop souffert ;
Justice, il s'est tousjours offert
a porter ceste dure charge
dont nature humaine le charge :
oncques jour n'ot joie mondaine,
oncques n'ot que traveil et painé,
oncques des siens ne fut prisé,
mes despité et desprisé
a esté tousjours et sera
tant que mort l'adevancera
se ceste rigueur luy tenez.
0 Justice, pitié prenez
de cil qui porte le meffait
d'aultruy et qui n'a riens meffait,
et vostre rigueur détendez.
MISERICORDE
0 Justice, condescendez-
au vouloir de Dieu, nostre juge :
son filz qui n'a aultre reffuge
par une crainte douloureuze
redoubte la mort angoisseuse
dont il est auprès de la porto ;
regardez la douleur qu'il porte
et qu'il souffre sans riens nieffaire,
quand de son précieux viaire
le sang jusqu'en terre dégoûte.
Or advisez donc s'il redoubte
passer le pas, et quelle guerre
le sens et le voulloir luy serre :
Justice, tauxez la valeur
de si précieuse licqueur ;
n'a goûte qui ne deust souffire
a vostre rigueur desconffiro
et qui ne soit bien souffisant
18880 aux humains cstre garissant.
Se plus luy voulez de dommage,
je proteste de vostre oultragc,
a discuter quand sera temps.
JUSTICE
Quoy que vous soiez protestans,
18885 Miséricorde, belle amye,
mon droit ne se perdcra mie,
no pour vostre hault langager
ne poez mon droit engager :
c'est mon pris, c'est mon payement
18890 et le total repparement
duquel ne quitteroye rien.
Et de fait vous arguez bien
qu'il n'a goûte qui de luy ysse
qui notablement ne soufflée
18895 a trouver ce haultain remède :
il est vray, je vous le concède,
mes pour montrer plus grand pointure
d'amour a humaine nature
et plus ardente charité,
18900 je veil qu'il me soit présenté
en l'arbre de la croix pendu,
fiché, cloué, mort estandu
tant que Famé a son pei'e l'cnde,
et n'est adniende que j'en prende
isoœ tant qu'en ce party le verray.
DIEU LE PERE
Justice, et jc-le vous donray
tout a vostre peticion,
ne jamès jour dilacion
n'y sera quise au retarder,
18910 mes pour le deffendre et garder
en ses très ameres douleurs,
je luy veil envoler secours.
Michel, illec vous transportez,
et Jhesus, mon filz, conffortez,
18915 comme il luy sera bien mestier.
MICHEL
De bon vouloir ferme et entiei'
accompliray vostre command.
DIEU LE PERE
Et pour fournir au demeurant,
Gabriel, prenez vostre adresse
18920 a la vierge, vostre maistrcsse,
et d'elle prenez cure et soing,
car il y sera bien besoing
de vostre consolacion.
la mort G. — 1SS72 regardez donc C. — 1S919-20 inlcncrlis G.
SECONDE JOURNEE
245
quand verra l'oxecucion
18925 (le son chej' tih aterminer.
GAimiEI.
Itoii Dieu qui rognez saus fincr,
j'en feray toute ililigouce.
Icy s'en vont.
ANNK
Nos genz font bien leur négligence
d'amener Jhesus de bon heure ;
18930 ilz font par trop longue demeure,
je ne sçay en quel point ilz sont.
CAYPHE
Sciez soeurs qu'ilz besongneront,
puisqu'ilz demeurent tel tempore,
mes ilz ne vendront pas encore :
18935 ilz espient je ne sçay ou.
ANNE
Je m'en vois reposer un pou ;
s'ilz l'admainent en mon manoir,
je le vous foray assavoir,
et puis nous penserons au fait :
i89/i0 oez vous?
CAYPHE
Ce sera bien fait ;
Malabrin, va, si le ramaine.
MALABRIN
Dieu le mette en maie sepmaine !
faut il la maintenant troter?. ..
Que c'estoit bien pour moy fréter,
18945 s'il m'eust ja cela oy dire !
[Pose.]
MICHEL
Jhesus, mon maistro et mon vray sire,
homme de très haulto vallue.
Dieu, vostre père, vous salue
et me fait icy transporter
18950 pour vous ung petit confforter,
non obstant que j'y soie indigne :
car une personne divine
estre conffortee d'ung ange,
c'est moult peu et ung piteux change,
18955 car anges et archanges tous
doyvent prendre conffort de vous ;
1S960
18965
18870
18975
18980
18985
18990
18995
19000
19005
mes je vous parçois en tel crainte
par dedans vostre cueur empreinte
que si peu de conffort n'arez
que mieulx a vostre aise serez.
Filz de Dieu, parfaicte puissance,
prenez en vous ferme constance ;
venez entrer en la bataille
de laquelle sans nulle faille
eschaperez victorieux ;
o hault filz de Dieu glorieux,
ne doubtez pas tant cest assault,
que n'ayez h; vouUoir plus hault
d'avoir l'ennemy desconffit ;
considérez quel grant prouffit
en ensuivra par ce moyen ;
ce beau rogne cclestien
seia par ce point restably :
homme honoré et tmobly,
qui en tel noblesse venu
sans fin sera vostre tenu,
et du bien qu'il possédera
tousjours grâces vous rcndera.
Levez sus, hault médiateur,
allez estre repparateur
de l'ofTence tant misérable
qui sans vous n'est point recouvrable;
venez rendre la chère paye,
puisque sans vous n'est qui la paye ;
pi-enez tost la pierre et la fonde
qui Golias tue et conffonde
sans jamès vertus recouvrer;
venez a ceulx confort livrer
qui sont en la chaitrc attendans
et de tout leur vouloir tendans
a voir vostre doulce présence.
JHESUS
0 père de magnificence,
bien voy que vers moy t'humilies
et qu'au besoing pas ne m'oublies
qui ce conffort m'as envoyé :
je ne me tiens pas oublié ;
ton benoit message m'efforce
et me donne vigueur et force
de paier ce dangereux pris
qui pour les humains ay empris :
père, a ton vouloir me conforme,
selon la manière et la forme
que tu le m'as constitué.
MICHEL
De par luy soyez salué,
mon maistre et mon roy supemel ;
1S953 par ung A.
19003 le manriue C.
- 1S954 et moult petit change A. -
• 19005 royal B.
18956 en vous C. — 18970 comme B. C. — 18988 donner B. ~
246
MIS T ERE DE LA PASSION
devers vostre père éternel
m'en revois au haultain estage.
Icy s'en va l'ang; et Jhesus vient a ses trois
disciples.
.IHESUS
Mes amis esveillier vouldray,
19035 cai" je voy venir la caterve
des Juifz mauvaise et proterve
qui vient pour moy foi't traveillier.
Frères, veillez vous esveillier :
le traditeur qui ma mort vcult
19040 s'aproche de cy tant qu'il peust
et toute sa puissance monstre :
levez sus, allons a l'eucontre
pour leur baillier plus plaine entrée.
s. PIERRE
Cher sire, ainsi qu'il vous agrée:
19045 le propos nous est moult grevain.
.THESUS
Frères, délaissons ce partage,
venez avec les autres seoir,
19010 et nous entretenons ce soir,
ensemble attendans l'aventure.
Jcy s'assemblent tous ensemble.
Grevés estes oultre mesure,:
pour conforter vostre appétit
reposez tretous ung petit ;
19015 tantost orrons quelques nouvelles.
Icy se reposent tous ensemble. jiius
Nous n'avons pas couru eu vain :
seigneurs, je voy la compaignie
de Jhesus tout ensemble unie ;
regardez les a beau loisir.
GADIFER
19050 11 le nous fault aller saisir :
j'en ay si grant fain que j'enrage.
JUDAS
Se vous voulez tout le ménage,
ilz sont bien a vostre vouloir.
JHEROBOAN
Des disciples n'en peut chaloii',
19Cfi5 ce sont povres gens de labeur ;
nous ne voulons que le docteur
pour corriger sa discipline.
JUDAS
Or vous souviengne donc du signe
que je vous baillay au partir ;
19060 sus ! compaignons, il fault sortir:
chacun se mette en ordonnance,
chacun appointe dart et lance
et vous maintenez par advis.
Regardez bien celluy au vis
19065 que je baiseray maintenant,
et y soiez la main tenant
et le liez a grant effort,
car il est homme grant et fort,
bien membre, agille et délivre :
19070 se de vos mains il se délivre,
vous ne le rarez pas tantost.
MALCUIDANT
Nous entendons au premier mot
19008 parage C. — 19013 Et pour C. — 19015 autres lî. C. — 19023 t'I fait A. tel frmir B. — 19086 vioil lupart C.
19027 tel f« V G. — 19032 larez beau repailer B. — 19(J60 faietes sortii- A.
JUDAS
Par diligences telles quelles,
il m'est advis que nous avon
passé le torrent de Gedron,
et veez cy au plus près de ly
19020 la ville de Gessemagny :
j'espoir que nous y trouveions
nostre maistre.
MALCUS
Sy le prendrons
et l'amenrons tel feur, tel vente ;
ferons, Roullart?
ROULLART
C'est mon entente
19085 qu'il vendra par devers nobis.
DENTART
Oncques vieulx lieppars arrabis
n'orent tel fain de dévorer
que nous avons de labourer
a la mort du faulx ypocrite.
NATHAN
19030 Son nom tant forment nous despite
que n'en poons oir parler.
. JUDAS
Tantost et sans plus loing aller
en vos poingz le vous livreray.
SECOND
tout ce qu'il nous faut bosongner.
limVANT
11 110 vous en fault plus songnor ;
19075 monstre/, le et il sera saisy
Cy pria cy mis.
JUDAS
Ave, Rahy t
maistre, d'ung bon jour vous salu !
Iry baise Jhcsiis a la bouche.
JHESUS
Amice, ad quid venisti,
qui me fais ce dévot salu?
19080 II t'ai-a moult petit valu :
o Judas, veey Jure somme :
soubz ombre d'un baisier polu
tu viens trahir le filz de l'ommo.
MARDOCEUS
Nostre prinse se parconsomme :
19085 soudars, prenez le et le liez ;
que séjournez vous ? vous voicz
que le vendeur le vous enseigne.
DRAGON
Ne sçay quel seing ne quel enseigne,
mes nous sommes tous esbays.
JHESUS
19090 Que querez vous cy, mes amis,
maintenant ?
GUEULU
Nous vous le dirons :
Jhesus de Nazareth quei'ons,
pour le prendre et appréhender.
JHESUS
11 ne le fault plus demander :
19095 ce suis je tout certainement.
Jcy cheent tous a la renverse et Judas aussi.
s. JEHAN
V'eez cy grant esbayssement,
frères, et chose bien diverse :
ilz sont tous cheus a la renverse
au seul mot qu'il ha i)roferé,
ROUI.LART
19100 Qui deablo nous a ateré ?
vecy bonne trosbucherie.
DENTABT
Quand j'ai bien tout considéré,
qui deable nous a ateré?
JUDAS
Aultroffois vous ay dccleré
190S4 parsonne C. — l'JiOO. 1!1|0S QupI B. C. — 191?1 que
lOlSUflaUiisC. -- iai',1 Q.Ki jic.ii ((»,. ivlfui-i- me puis G,
E JOURNEE 247
19105 qu'il scet beaucop d'enchanterie.
Levez sus, pute progenio ;
vous a ja la crainte altéré ?
GAUIKER
Qui doable nous a ateré?
vecy bonne tresbucbcrie.
JUDAS
19110 II scet beaucop d'enchanterie,
aultreffois l'ay je decleré.
Sus ! ribaulx. Dieu en ait maugré,
vous eschappera le villain ?
sailliez sus, s'i mettez la main :
19115 jamès ne Tarez en si belles.
MARDOCEUS
Les choses n'ea ii'ont pas telles,
nous le trousserons sans demeure.
JHESUS
Que demandez vous de ceste heure?
que querez vous en ce retret,
19120 seigneurs?
JHEHOBOAN
.Jhesus de Nazareth :
nous ne voulons aultre que ly.
JHESUS
J'ay ja dit que je suis celluy,
souffice que vous le sachez.
Icy cheent de rechef comme dessus.
S. PIERRE
Hz sont de rechief tresbuchés ;
191Ï5 j'ay esté fort espovpnté,
mes le cucur et la volenté
me revient a les ainsi voir.
s. JAQUES ZEBEDEÏ
Sire, quel mal peust il avoir,
se de nos espees petites
19130 nous frappons sur ces salalites
qui ainsi vous sont dcspitans ?
JHESUS
Souft'rez encore ung peu de temps
que leur emprinse se parface.
Levez vous sus de ceste place,
19135 gens : par moy confortés serez ;
Jhesus de Nazareth querez,
et je vous dis que je le suis.
EMILIUS
A peu se relever me puis,
tant ay la cervelle estourdie.
CELSIDON
19140 J'ay pris belle caille de puis :
a peu se relever me puis.
mnniu" A. — 19122 que je le suv C. — 19IS5 ospaote A. —
248
MISTERE DE LA PASSION
JUDAS
Meschaus gens, mal estes induis :
prenez ce trompeur, quoi qu'il dyc,
car d'arrester sur ces devis
19145 ce n'est riens qu'une coquardie.
RABANUS
A peu se relever me puis :
tant ay la cervelle estourdie.
MALCUS, parlant a Jhesvs.
Yillain, vous y lerrez la vie ;
c'est a vous que nous en voulons :
18150 venez moy aidier, compaignons,
il vault que prins, se j'ay secours.
BRUYANT
J'appointe les cordes tousjours
pour le lier bien et en haste.
MALCUS
Sus ! chacun y mette la pâte,
19155 nous Tarons saisi tout a cop.
s. PIERRE
Ce meschant cy s'advance trop,
et pour sa grant presumpcion
il en ara ce horion :
voist une aultre fois plus arrière.
Icy luy coppe l'oreille.
MALCUS
19160 Je n'ay talant de faire chiere,
j'ay ung mauvais coup a merveille;
haro ! et je n'ay qu'une oreille,
le ribault m'a l'aultre coupée.
JHESUS
Pierre, rehoute ton cspee :
19165 cil qui de glave frappera
de glave aussi pardu sera :
du glave as la commission
mes non pas l'execucion.
Penses tu que tant m'esbaysse
19170 que mon père prier no puisse,
et a mon veil transmettera
nombre d'auges qui montera
a plus de douze légions ?
Fault il pas que les visions
19175 aux sains prophètes révélées
soient en moy verifflees?
s'a ma passion tu obvies,
comment seront paracomplics
les escriptures de mon fait ?
19180 car il convient qu'ainsi soit fait.
Mon amy, approche de moy :
j'ay grant compassion de toy
du cop qui t'a esté donné,
et pour ce tu seras sané
19185 maiiftenant sans quelque moyen.
Icy luy remet Jhesus son oreille.
MALCUS
Ma besongne se porte bien,
puisque mon oreille est remise ;
mes nous vous jourons de main mise,
vous n'eschaperez pas pour tant.
MARDOCEUS
19190 Souldars, prenez le tout bâtant :
se vous valiez riens, il est vostre.
ROULLART
Qui en doubte qu'il ne soit uostre ?
je luy ay ja lié les poings
si très destroit et si fort joinctz
19195 que le sang en sault a pissot.
DENTART
Ton fait ne vault rien, meschant sot,
s'il n'est bien estraint d'une corde
par tout le corps.
ROULLART
Je te l'accorde ;
mes il convient faire en faisant.
19200 Approchez, villain paysant,
pugny serez a la rigueur.
JHESUS
Comme a ung larron malfaicteur
qui de preudomie n'a cure,
estes yssus pai' nuit obscure
19205 embatonnés habondamment
pour me prendre furtivement.
Touteffois ce mauvais désir
avez peu pieça accomplir :
quand tous les jours au temple estoie
19210 et que le peuple admonestoie,
pourquoy ne m'avez vous tenu ?
mes vecz cy vostre point venu :
vostre puissance ténébreuse
ou vostre envye hayneuze
19215 voulez dessus moy achever ;
mes puisque me voulez grever,
vostre subget me retenez
et a mes gens congé donnez :
en vostre volenté me metz.
S. PIERRE
19220 Frères, saulvons nous ou jamès :
veez cy gent toute forcenée :
ja ne verrons aultre journée
s'ilz nous tiennent, je vous proraès
19159 Ictj le coppe l'oreille A.— 19160 De glaue aussi périra A.— 191 98 Par my B.— 19200 vous villain paisant B. C— 19217
me tenez A. Retenez moy vostre subje B. C— 19218 Et donnez a mes gens congé B. C— 19223, 19235 je vouspromes] en leurs
âmes B. G.
SECONDE JOURNEE
249
s. JEHAN
Remède n'y voy desormés :
19225 la puissance leur est donnée.
8. JAQUES ZEBEDEY
Frères, saulvons nous ou jamès :
▼eez cy gent toute forcenée.
s. ANDRY
Je m'en vois.
s. BERTHEI.BMY
Et je m'en dcsmès;
la force m'est liabandounec.
s. PHELIPE
19230 Nostre mort est toute ordonnée,
se ne fuyons, c'est piteux mes.
8. SIMON
Frères, saulvons nous ou jamès :
veez cy gent toute forcenée.
s. JDDE
Ja ne verrons aultre journée
19835 s'ilz nous tiennent, je vous promès.
Icy s'en fuyent tous les disciples, et S. Pierre
et S. Jehan regardent de loing.
JHEROBOAN
RouUart, par trop longuement mes
a lier ce fauli garnement.
HOULLART
Il le fault lier sceurement :
que scet on qu'il peust advenir ?
MALCUS
19S40 S'il s'en scet maintenant fuii-,
je suis content que l'on me tonde.
MARDOCBUS
Est il bien ?
DBNTART
Mes le miculx du monde :
regardez dessus et dcssoubz.
BANASUS
Or l'admenez donc après nous;
19245 acoup chacun face devoir.
MALCLIDAVr
Ce ne sera pas sans avoir
des honons belle moncelle :
RouUart, tien ce bout de cordelle
et je tendray cest aultre cy ;
19SS0 tire de la.
ROULLART
Or tire aussi,
suyvons les aultres qui s'en vont.
OADIFER
Mes de quoy ser\irons nous dont,
nous sept on huit ? je m'en esmaye.
MALCUIDANT
Prenez moy gros bâtons de hayc
10C55 ou vos guisarmcs a rêvera,
et frappez a tort, a travers,
si tost que le verrez rester.
BSTONNÉ
Sus ! troussez avant, magister :
voiu venrez sei-monner ailleurs.
JUDAS
19260 Âme ne sonne mot, seigneurs;
en la cité faisons entrée;
car se la chose estoit monstree
au peuple, il s'y opposeroit.
DRAGON
Par pièces nous desi>eceroit :
19266 pourtant allons sans faire noise.
s. MATHIEU
Hela.s ! chei-s frères, il me [xiLse
de nostre roaistre doulx et chei'
que l'on veult ainsi empescher
sans occasion ne sans tiltre.
s. THOMAS
19270 Ha ! Judas, le mauvais trabitre,
il l'a bien faulcement vendu I
S. JAQl'ES ALPHEY
C'est desloyalmeut entendu
les advantages et bienffais
que par cy devant luy a fais,
19275 et l'en a mal rémunéré.
C'est a nous mal considéré
de l'avoir ainsy deguerpy ;
et pour estre vif decherpy
et y finer par mort chetive,
19280 je ne lairray que ne le suyve
pour danger qui soit apparent :
il est mon cousin et parent,
de forme et de corps luy ressemble,
et veil que nous mourons ensemble,
19195 puisque mieulx ne poons finer.
MALCUIUANT
Ce paillai't ne veult cheminer :
comment va il a pas d'evesquel
ROCLLART
Il vient bien envys a la tresque,
il voulsist tirer de l'arriére.
19229 sorta A. fuila C. — 192fô Ou il ne laroit pas un* n«i«e B. C.
230
MISTER E DE LA PASSION
MAI.CUIDA.NT
19290 Que no chassez vous par derrière?
n'espargnez point ces gros bâtons,
frappez dessus.
ESTONNÉ
Nous le bâtons
a puissance, mes riens n'y vault.
GUEULU, a S. Jaques qui suit.
Que quiert ce maistre, que luy fault,
19295 qui cy nous suit et nous espie ?
GADIFER
Prenez garde, c'est ung espie
qui nous poursuit sans dire mot.
s. JAQUES ALPHEY
Ha! messeigneurs, pour Dieu, la vie !
EMILIUS
Prenez garde, c'est ung espie.
DRAGON
19300 Nous en arons taïUost coppie:
je le tiens par le palliot.
BANANIAS
Prenez garde, c'est ung espie
qui nous poursuit sans dire mot.
s. JAQUES ALPHEY
J'aray ung très mauvEiis escot,
19305 je l'entendz bien, se je n'eschappc :
j'ayme mieulx a laisser la chappe
que mon corps y soit retenu.
DRAGON
Ha ! le ribault s'en fuit tout nu ;
regardez comment il labeure.
BOULLART
19310 Au moins le manteau nous demeure,
il ne s'en va pas trop chargé.
ESTONNE
Il sera tantust engagé
en la taverne ou nous irons
pour doffraior les compaignous
19315 au revenir de l'ambassade.
GADIFER
Ce villain cy est douleui' fade :
il ne veult chominoi' du pie
s'il n'est butiné et torchié
tousjours a chacun pas qu'il marche.
JHEROBOAN
19320 Seigneurs, regardons en quel marche
nous le menrons, ou sur Gayphe
qui est pour ccst an grant pontiphe,
ou sur Anne son preccsseui'.
MARDOCEUS
Il me semble pour le plus seur
19325 qu'il est bon qu'Anne l'aist premier
c'est ung bon juge et coustumier
ancien et de vie rusée ;
et si a sa fille espousec
Cayphe, qui content sera
19330 de cest honneur qu'on lui fera ;
pardonnez moy se je dis mal.
JOATHAN
Cayphe est notre principal,
mes a cause d'antiquité
il est bon qu'il soit jircscnté
19335 a Anne, son suire, devant.
NACHOR
Or le faictes marcher devant :
tout surpiez serons en son atre.
ESTONNÉ
11 ne tendra pas a bien batre,
entré est en maie sepmaine.
Notez que S. Pierre et S. Jehan suyvent Jhesus
de loing.
s. JEHAN
19:mo Pierre, vous voiez qu'on admaine
nostre maistre trop mal traictié.
s. PIERRE
J'en ay au cucur si grant pitié
que le cueur mo font tout en lermes,
et nous sonunes monstres mal fermes
19345 de le laisser a son besoing.
.le le vouldray suivir de loing
[lour voir quel chose Hz en feront.
s. JEHAN
.le pense bien qu'ilz le meurent
sur Anne pour l'examiner.
s. PIERRE
19350 Helas ! se tant puissions miner
que dedans la cour entreissoiie
secrètement en demussons,
nous veissions au moins la conduite,
et comment mal sera conduite
19355 la sentence sur l'innocent.
s. JEHAN
J'ay esté des fois plus de cent
leans pour porter du [loisson :
Anne et to\is ceulx de sa maison
19292 Chai-g.'Z B. C. — 19297 suit i-y U. i'.y mnwjue C. — 19310 nous] y B. C. — 19318 ii-y est moult fade A. — 19320
regardez B. — 19323 prédécesseur C. — 19324 le meilleur A. — 19326 et viani/ue B. — 19335. son sire A. B. C. — 19349
Chies B. Sus C. — 19350 Se tant nous iiuissions eheminer A. — 19357 porter poisson nouueau B. C. — li)35S me congnoist
bien et beau B. (î.
SECONDE JOURNEE
251
ino coiignoissoiit par loi manière
19300 qu'il n'y a porto ne barrière
qu'ilz no rn'oeuvrent isnel lo pas.
s. PIERRE
Et il/, ne me oongnoissent pas,
par quoy jamès n'y entreroye.
s. JEHAN
Si feriez se j'en requeroio :
19305 ilz vous lairront mes qu'ilz me voient.
s. PIERUE
Mes pis y a, cai' s'ilz savoient
que je t'eusse de la eonsorte,
il/, m'enclorroient dans la porte
et la mo feroient mourir.
s. JEHAN
19370 \'ous n'avez garde d'encourir
ce danger qui n'est pas menu,
car vous n'y estes pas congneu :
ne vous voient gueres de fois.
s. PIERRE
J'ay peur do ma peau toutoffois :
19375 Jehan, ne m'est pas jeu de parture;
mes au fort, voist a l'aventure :
je m'eiihardiray avec vous.
.IHEROBCVN
Hau ! portière, entendez a nous,
_ venez ^a et nous ouvrez l'huis.
■ MARCELLE , première chamberiere,
19380 Qui estes vous la?
JHEROBOAN
Qui je suis ?
je ne suis pas seul, ue te chaille :
nous sommes de gens grant batiiille
cjui avons graut besongne faicte.
MARCELLE
Admenez vous ce faulx prophète
que le peuple appelle Jhesus?
MARUOCEUS
Oy.
MARCELLE
Si serez bien venus :
mou maistre eu aia grant plaisir,
car bien syay qu'il a tel désir
de le voir que c'est uiig droit songe.
ROULLART
19390 Regardez, lo veoz cy qui songe
^TÎiSSS
le moron, est il bien pileux?
CASSANDBE, ficuxieme chamberiere.
Il fait très bien le marmiteuz,
mes regardez quel contenance.
MARCELLE
Or entrez |)ar belle ordonnance,
19395 vous et vostre mesgnio toute ;
mes gardez qu'aine ue a'i boute
s'il n'est de céans ou d'empros :
il m'est defFcndu par exprès
de la bouche de monseigneui'.
MALCUS
19400 Nous sommes tretous gens d'honneur,
do franc courage comme contes,
n'en doubtez.
CASSANDRE
Et di.nc tu t'y comptes?
os tu gens d'honneur et de nom,
sanglant bedeau ?
MALCUS
Et pourquoi non ?
19405 suis je de veil fer ou de poaultre ?
je vaulx ung homme comme ung aultre
a bouter en ung viel dcstroit.
OADIKER
RouUart, il fait le gibet froit,
le cueur me tremble de destress*.
ROULLART
19410 Veez cy des fagos a largesse,
il n'y fault que bouter le feu.
GAOIFER
Le veulx tu ?
DE.NTART
Goimueut ! le veulx tu ?
et par Dieu voila bien songé !
luy en faut il prendre congé,
19415 qui est plus volage que plume?
BRUYANT
Or souftie dedans et l'ahmie
d'ung bon soufflet.
DENTABT
Je n'eu ay nul ;
mes ou souflleray?
BRUYANT
Eu mon cul :
le tuyau y est d'avantage.
MALCUIDANT
19420 l'ar la prengiio lo feu passage
pour onti'or dedans la cité.
Icif alume le feu en la place.
19,359 I.ts v.irli>tz it la .■liiiinliii.'ii- B. C. — 19361 Si fevz qunnl U. C— 19373 Hz ne A. C. - 1937S a mniiqui' A. — 19379
ca munque A. — 19380 la »i i.i/iic li. C. - 19395 couipaiijuie .\. - 194(18 j/raiit l'ioit C. 19'ilO bourrées C. — 19413-14
intervertit B. C. — 19419 un est C.
252
MISTERE DE LA PASSION
s, JEHAN
19450 Dame, vers moy soyez humaine :
s'il vous plaist, la porte ouvrerez.
MARCELLE
Qui est ce la?
s. JEHAN
Vous le sçarez,
c'est des serviteurs de céans.
MARCELLE
Estes vous ce, Jehan, entrés ens ?
19455 allez ung peu chauffer le doit
a nostre feu.
s. JEHAN
Le temps le doit ;
pieça n'eus si froit que je sache.
s. PIERRE
Vous plairoit il point que j'entrasse,
dame, par vostre courtoisie?
MARCELLE
19460 Quête fault il?
s. PIERRE
Par vostre grâce
vous plairoit il point que j'entrasse?
Il fait si froit, je me chauffasse,
et je suys icy a la pluye ;
^ vous plairoit il point que j'entrasse,
I9'i05 dame, par vostre courtoisie?
MARCELLE
Vuydez, vous n'y entrerez mie
se de vous connaissance n'ay ;
qui es tu ?
s. PIERRE
Certes je ne sçay ;
je suis ung povre advanturé,
19470 qui suis cy tant ontfroiduré
que je ne sçay comment il m'est.
s. JEHAN
Dame Marcelle, s'il vous plaist,
laissez l'entrer a ma requesto :
il est bon preudhomme et honnestc,
19475 aussi bon que vous veistes huy.
MARCELLE
Le congnoissiez vous bien ?
s. JEHAN
Oy,
et vous respons de sa personne.
MARCELLE
Sur vostre asseurcment luy donne
congé d'entrer ens ceste fois.
s. PIERRE
19480 Vostre mercy, et je m'en vois
19440 Car la grant faullc quoii _v voit B. C. ~ 19448 qui A.— 19450 souueiaine C. — 19454 Ha estes vous entrez dedans
A. — 194dl Vous plaisoit il C. — 19478 Sur vostre rapport je luy B. G.
JHEROBOAN
Honneur, bonne prospérité
et ce que vostre cueur désire
vous doint Dieu, mon redoublé sire 1
19425 joyeulx serez comme je tien.
ANNE
Avez vous besongné ?
JHEROBOAN
Très bien,
si bien que vous serez content.
ANNE
Et ce Jhesus ?
JHEROBOAN
Il vous attent
la en bas en vostre auditoire.
ANNE
19430 Bien lyé ?
JHEROBOAN
Vous le poez croire : ♦
les sergens le gardent enclos.
ANNE
L'ont ilz point batu ?
JHEROBOAN
Ventre et dos,
tant comme ilz ont peu descharger.
ANNE
Il n'y a pas trop grant danger,
19435 non obstant qu'a bonne justice
sergent excède son office
qui touche sur le malfaicteur ;
mes de ce paillart séducteur
il ne me chault oomment il voit;
19440 car cil qui le peuple déçoit
ne peust trop de mal recevoir.
Je le vouldray maintenant voir
pour luy faire des questions.
JHEROBOAN
11 a ses excusacions
19445 toutes prestes pour vous respondre.
DRAGON
Ça, villain. Dieu vous puist confondre,
venez parler a vostre juge.
GUEULU
Vous estes taillié qu'il ne juge
vostre dure mort et villaine.
SECONDE JOURNEE
253
chauffer uug peu de l'aultre lez :
j'ay les ongles tant cngeltM
que je ne sçay comment j(! dure.
CASSANDRE
Cest homme a douleur grant froidure :
19i8ô comment se boute il près du feu !
11 m'est advis que je l'ay veu
bien souvent en cestc cité.
Vien ça, homme, dis vérité :
n'es tu pas disciple a celluy
lOiOO que monseigneur tient devant luy?
je te voy tout ainsy vestu.
s. PIERRB
Qui, moy?
CA.SSA.NDRE
Voire toy, qui es tu?
le t'oseray je demander ?
Messeigncurs, venez regarder
laiOJ cest homme, car je tiens qu'il est
des gens Jhesus de Nazareth ;
car avec luy rstoit tousdis.
s. PIERRE
Femme, regarde que tu dis :
advis m'est que le sens te fault.
CASSANDRE
19500 Je te congiiois bien, ne te chault :
je t'ay veu autrelï'ois au temple
avec luy.
s. PIERRE
C'est bourde tout emple,
qu'il ne la fault ja contredire,
ne je ne sçay que tu veulx dire ;
19505 qui est ce Jhesus ? quant a moy
je ne sçay, je ne le congnoy,
n'oncques son disciple ne fus.
li:y chante le coq hi première fuis.
BANANIAS
Veez cy ce Jhesus tout confus :
sire, vous ferez grant science
19510 d'examiner sa conscience,
sçavoir comment il s'est conduit.
ANNE
Vien ça, meschant homme et mal duyt ;
est il vray ce qu'on nous rapporte
de ton fait qui mal se comporte
19515 envers nous ])ar prcsumpcion ?
19520
19525
19530
On nous a fait rclacion,
je ne sçay «'elle est véritable :
par une voye détestable
en la loy et bien répugnant,
tu prens disciples maintenant
lesquelz enseignes a ta poste
par une doctiine reposte
que tu leur apprens a l'emblee ?
de quoy te sert ceste assaniblee ?
a quel cause les as tu pris?
quel doctrine leur as appris?
te souffit il pas avoir prise
la doctrine et la loy Moyse
sans maintenant tenir querelle
de forger une loy nouvelle?
On nous dit que tu estudies
a rompre nos cerimonies
pour prescher no sçay quelz fabuscs
si tu les enffrains, tu t'abuses,
19535 car jamès n'en pourroies chevir,
mes plus tost la mort encourir.
De qui nous fut la loy donnée ?
fut elle par homme ordoimee ?
crois tu qu'homme nous la donna?
19540 tu faulx, car Dieu seul l'ordonna ;
et puisque Dieu la pretendy
comment as le cueur si hardy
que d'auzer prescher le contraire ?
c'est vouloir le peuple retraire
19545 de la loy de son créateur
et frauder le législateur,
en quoy tu commetz cas do crime.
Encor t'es tu pris toy trezime
de meschans avec qui tu mains
et dis que n'en veulx plus no mains,
par quoy a plusieurs sambleroit
que ce nombre te serviroit
pour faire aucunes sorceries
ou charmes ou enchanteries
dont tu es ouvrier moidt soubtil.
De quel chose te servent il ?
tu les maines de ville en ville,
mal vestus d'une robe ville,
et vont truandant d'huys en huys
par oyseuse a quoy les induiz ;
maigres sont et meurent de fain ;
que ne vont ilz gaigner leur pain ?
ne de quoy t'estoit il mestier
de les tirer de leur mestier
19550
ire55
19560
19482 enfreslez H. rugelcj C. — 19485 Commo C. — 19487 Souucnt auau B. auant C. — 19488 bon homme A. — 19491
manqnr C. — 19i98 O femme esgardo B. C. — 10512 et WKmr/ui! B. mauldit C. — 19530 De songier C. — 195:i5 pourriez
A. — 19546 Et fraude A. B. A frauder C. — 19547 eongnois A. — 19550 Et que neu viulx ne plus ne mains C. —
19559-70 mtinqit^nl A.
254
19565
M 1 S T E R E DELA PASSION
dont haultcment pouoient vivre
pour ccste nicschant vie ensuivre?
En quoy je ne voy point de chois,
advis m'est que tu les doçois :
et pour mon sermon abroger,
19570 tu les metz en ung grant danger :
car s'en ta doctrine y a vice,
et ilz sont tenus par justice,
ilz n'en eschapei'ont jamais,
et les meschans n'en pcuent mais.
19375 Dis nous ])ar certaines enseignes
quel doctrine tu leur enseignes,
a quel fin, et d'où tu la tiens.
JHESl'S
Juge, dedans ton cueur maintiens
moult grant ardoncc de savoir
19580 ce que tous les jours as peu voir.
Tu demandes de ma doctrine,
et comment le peui)le endoctrine,
de quoy tu pculx congnoistre assés
sans interroguer, car tu sces
19585 que j'ay fait tout mon preschemcnt
plainemcnt et publiquement;
j'ay fait mes sermons et prologues
au temple et en vos sinagogues,
qui a tout le peuple est ouvert,
19590 et n'ay rien presché en couvert :
a moy celer n'ay consentu.
Et donc que m'interrogues tu ?
mes va et interrogue ceulx
qui tant m'ont oy devant culx :
19595 ceulx la te diront que j'ay dit
et se j'ay bien dit ou mesdit,
ou se ma doctrine est entière.
DRAGO.N
Et villain, est ce la manière
de rcspondr ' au pontiphc ainsy ?
19600 a qui parlez vous, sire, a qui ?
est ce le bien que vous sçavez ?
et pour ce que mespris avez,
vous en arez ceste soufflace.
Il le frappe.
ANNE
Tu dis vray, tu e^ en ma grâce,
19603 c'est fait d'ung très gentil vassal.
JHESU.S
Se j'ay mcspris ou parlé mal,
baille du mal tcsmoing ou preuve ;
et se mon parler bon se trouve,
a quel cause m'as tu féru ?
GUEULU
1%10 Oez du villain malotiii,
s'il ne se vouldroit rebeller.
DRAGON
Paix, vielz matin! faut il parler?
se ceste nuit icy vous dure,
vous en arez mainte plus dure,
19613 mes que nous en ayons l'ottroy.
ANNE
Sus ! ostez le de devant moy :
riens ne fais de l'examiner,
car je ne puis déterminer
de son fait ne de ses erreurs,
19620 se tous nos scribes et seigneurs
ne sont a l'examen pi'esens :
ilz ne doy vent pas cstre excmps ;
et pour ce qu'il est gramment tard,
RouUart, Gadifer et Dentart,
19625 voiez ceste coloin|)np haulte
qui soustient au milieu la vaulte :
menez l'i tost comment qu'il soit
et le liez si très estroit
qu'il n'ait pooir de s'en defFaire.
ROULI.ART
19030 N'en parlez plus, laissez nous faire ;
s'il eschappc, il sçara de l'art.
Passez avant, niaistro paillart,
a ce coup serez vous soudé.
GADIFER
Prcn le de la, dy, coquidé,
19635 et nous aydc ung peu, s'il te plest.
DKNTART
Songne de toy, tu n'as que jJet ;
je le tiens ferme, ne te chault.
MARCELLE
11 ne fait point icy trop chault,
je m'en voys pour chauffer, ma fois..
19640 II m'est advis que je congnois
cest homme cy qui est tant simple,
et croy de vray qu'il est disciple
a .Jhesus et qu'il est son maisti'e.
PHARES
Par celuy Dieu qui me fit naistre,
19615 je le croy a le voir au viz.
MARCELLE
Dy, bon homme, il nous est advis
19594 tant moult oy C. — 19596 maldit B. — 19603 Cfste A. — 19610 malouslru B. - 1!)C21 i-xaininer C. — 19632 vieulx
l)npelârt B. C. — 19635 iiuotniidi^ B. — 19643 et que ccat G. — 19644-43 Em'orcs pourroit il liicu nstro II lo fault regarder
nu vis B. C.
qiic tu c^ ilisciplc a Jhoaus :
est il vray, ne lo ccle plus ?
riens ne gaignes a le.celei'.
s. PIRRRE
10650 Fcinni(>, gardo ilo mcsparler :
tu 1110 fais luio giaiit offciice;
je to jure en ma conscience
et par le Dieu de paradis
qu'il n'est rien de ce que tu dis,
19655 ne je n'eu sçay choses quelconques :
Jhesus ne congnois, no vis oucques,
ne de riens oncques ne luy feus.
MALCUIDANT
C'est grant jilaisir d'avoir telz feus
a gens de graut froidure plains :
19660 j'ay tel froit aux picz et aux mains
que le cueur du ventre me tranible.
SALMANAZAR, coiisin a Mitlcus.
Bon honmic, vrayemcnt il me saniblo
que tu es disciple et faeteiu'
a Jhesus, ce graut enchanteur ;
19665 le sujet en rien ne t'excuse :
tu en es, ta langue t'accuse,
et est la chose deccleo
que tu es né en Galilée :
on te congnoist a la parole.
ESTONNÉ
19(570 II est do la maignie folle,
cent contre uug, ce meschant badin.
.SALMANAZAU
Ne te vois je pas au jardin
avec luy, quand il fut saisy?
advis m'est que je te choisy
19675 couppant l'oreille a mon cousin.
PHAllES
r.t dea, vcoz ey trop bon lourdin :
il fait le sourt; et viou ça, dy ;
ne te veis je pas au jardin
avec luy quand il fut saisy?
s. PIERRE
196S0 Kt je vous respons que ncimin;
sur mon serment je vous affy.
SALMANAZAR
l 'ourlant ne suis pas assuffy,
il faull chanter d'aultre raartin ;
ne te veis je pas au jardin
196S5 avec luy, quand il fut saisy?
advis m'est que je te choisy
couppant l'oreille a mon cousin.
s. PIERRE
Tourner puisse je a imte fm,
19674 II mest aduis C. - 19682 assouy. C. - 196SS puissnv
mmvue c. - 19704 »ui, pp,u,,uu B. C. - 19712 Je recongueu
255
SECONDE JOURNEE
et mourir de Dieu regnié,
10690 mauldit et cxcommuni.-,
se puis l'euro do ma naissance
j'eus do cost homme congnoissance,
de quoy me voulez accuseï^ .'
8ALMA.NAZAB
Tu t'en SCO» trop bien excuser •
1W5 je ne sçay qu'il .-n est on som.ne.
l'HARES
Advis m'est qu'on doit croire ung homme
a jurer si hoirihlement ;
espoh' que nostre jugement
fault aussi : et qu'il n'est i,as viav
19700 il est possible.
SALMANAZAR
Jo ne sçay,
mes il y a grant conjecture
Inj chante le coq la de.a^ieme fois, lors Jhesus
regarde a S. Pierre.
Icy sa part S. Pierre.
s. PIERRE
0 jwvre et fresle créature,
quel horreur m'est il advenu!
a quel meschief suis je venu !
10705 Or congnois je que j'ay faulsee
la foy quo dousse avoir monstrec
a mon niaislro leal et cher :
qui p(.ust plus griefvoment pécher ?
est il créature mortelle
19710 qu'oncques eut inconstance telle?
A ung seul regard qu'il m'a fait
j'ay recongueu que j'ay meffait ;
et pourtant je me partiray
et on quelque aultro jyart iray
19715 mou olience plourcr et plaindre,
ne jamès ne m'en vouidray faindre
tant que je sente avoir le don
par mon maistrc de vray pardon :
mon vouloir est a ce soubmis.
Icy s'en va plorer S. Pierre en la fosse.
HOULLART
19«0 Gadifer, to sandjlo il bien mis f
GADIKER
Il me samble qu'on ne peust mieulx ;
je A. — 19689 A' (li,.u uublve B. - 19694 veulx B. trop
A. Jay cougneu B. C.
•256
19725
19730
19735
19740
19745
19750
M I S T E R E
il voUeroit avant aux cieulx
qu'il se scoust de la depeschcr
ou s'en voist maintenant prescher,
brouiller et ramener les mors.
DENT ART
S'il a puissance, viengne hors
et desploie son mauvais art.
ROULLA.RT
Luy qui fait miracles si fors,
s'il a puissance, viengne hors.
GADIFER
11 est de travers et de tors
si fort lié, le faulx musart,
qu'il sçara beaucop de regnart
s'il s'en fuit.
DENTART
Alors comme alors,
os tu que je luy dis, RouUart ?
s'il a puissance, viengne hors,
et desploye son mauvais art.
ROL'LLART
Et il fera sa malle hart;
il a bien a penser aillicurs :
c'est la façon de telz brouilleurs
que le sens leur fault au besoing.
GADIFER
Veulz tu voir ung beau cop de poing
luy assoir droitement pour rire ?
DENTART
Bé, tu ne scaroles.
GADIFER
Mon beau sire,
me tiens tu encore si beste ?
ou le veulz tu voir?
ROULLART
Sur la teste.
Or avant donc, que je le voye.
GADIFER
Non feray, je me blaisseroye
a frapper : il y a trop d'os.
DENTART
Et en quel lieu donc ?
GADIFER
Sur le dos.
Or tien celoppin.
RODLLART
Torche.
GADIFER
Attache.
S'il lie fust lié a l'atache.
DE LA PASSION
tu l'eusses envoyé par bas.
GADIFER
Vous arcz de si fais csbas
pnnuyt toute vostre saouUee :
19755 vostre cruppe sera fraullee
a poste mocquaut et jouant.
ROULLART
Mes regardez Tort vil truant,
comment il fait bien la grimace ;
je n'eu ay pitié ne pitace
19760 ne que de la peau d'une vache.
ANNE
Est il bien lié a l'atache ?
je le veil ung peu aller voir.
DENTART
A peu s'il se peust remouvoir,
tant est serré près du pillier.
GADIFER
19765 11 est quitte de desbillier
son habit, il est bien atout.
ROULLART
l'ourquoy?
GADIFER
11 gerra tout debout,
pour estre ung petit mieulx a l'aise.
ANNE
Venez ça, maignie mauvaise,
19770 oez que je veil proposer :
je m'en vois ung peu reposer
t:int que l'aulbe du matin viengne.
De cest homme oy vous souviengne :
tant que vous amez vostre vie,
19775 gardez le bien, qu'il ne s'enfuye ;
veillez cmprès toute la nuyt
et affin qu'il ne vous emiuyt,
esbatez vous a quelque jeu.
ROULLART
Nostre esbat est ja tout pourveu :
19780 a riens ne nous voulions esbatre
si non a le torcher et batrc
et nous en mocquer entre nous.
ANNE
De cela je m'altens a vous
de luy faire peine et butin ;
19785 mes gardez que demain matin
vous m'en sachez rendi'c bon compte.
Icij s'en va Anne en sa chainbre.
19730 C ajoute : Pour estre mieulx n laise. — lO'Sl faulx dantart C. — 19739 manière a B. C. -
A. — 19753 fraiz B. — 19755 coulpe B. oroppe C. — 19760 vielz asne B. C.
19743 sarcz A. scaras
SECONDE JOURNEE
257
DENTART
Villain, vous ai-cz tant de honte,
avant que ccst(! nuit se passe,
s'arcz la charongne si lasse
19700 que vous ne vous sçarez bouger.
QADlFEn
11 est tant mauvais lo/.ongor
et de nature si villaine
qu'on ne luy peust faire de peine
selon ce qu'il a desservy.
ROUI.LART
19795 Ça, il est temps qu'il soit servy
puisque nostrc maistrc est en voye.
DENTART
Puisqu'il n'est ame qui nous voye,
• pour la doubte du sommeillier
il le fault ung peu resvcillier.
GADIKER
19S0O 11 y convient dresser la voye,
puisqu'il n'est anie qui nous voye.
ROtLLART
Comment?
DENTART
De torchons a monjoye,
dont il ara plus d'ung millier.
OADIFER
Et fust il fllz d'ung chevalier,
19805 puisqu'il n'est amo qui nous voye,
pour la doubte du sommeillier
il le l'ault ung peu resveilUer.
ROULLART
Qui commencera le premier?
qui m'en croira, nous sortirons.
^^ DENTART
^H'198l0 Tirons a les.
^^B GADIFER
I^^K Avant, tirons :
«^^Ê veez cy a chacun ung fostu.
V^^Ê ROULLART
«^K^ Par quel manière le fais tu,
I^^B aius que pi'ocedons jilus avant?
I^^V DENTART
I^H Le plus long a le coup devant
I^V 19815 ot le plus long après le suyt.
I OADIFER
Afiîn qu'il n'y ait point de vent,
, le plus long a le coup devant.
ROULLART
Je l'ay.
OADIPBR
Je tireray avant,
et puis on verra le déduit;
19820 je l'ay.
DENTART
N'eu va plus estrivant ;
il m'est deraouré etmio duit :
comment est le marché déduit?
ROULLART
Le plus long a le coup devant
et le plus long après le suyt.
DENTART
198S5 J'ay le plus long, sept piez ou huit :
mesurez.
GaDIFER
C'est par trop menty.
Par le marché qui est sorty
tu doys le premier cop eslii'e ?
DE.NTART
C'est vray.
ROULLART, eii luy baillant en la joue.
Or tien donc.
DENTART
Qu'est ce a dire ?
19830 dea, Roullart, tu t'advances trop.
GADIFBR
Tu dois avoir le premier cop :
n'est il pas ainsy devisé?
DENTART
As tu ce malice advisé ?
le deable y ait part tout a bout.
ROULLART
19835 C'est a tromperie et atout;
comment, n'cntens tu point le jeu?
DENTART
Le coquin pour qui je l'ay eu
le comperra, ou je fauldray :
a quel costé luy asserray
19840 une brongneo sans farcer?
GADIfER
Ha 1 que volentiei-s le verray !
DENTART
A quel costé luy asserray?
OADIFER
De la, et je luy en donrray
une de ça pour radresser.
DENTART
19845 Tien, va jouer.
118789 tant lasse B. G. — 1079! trop de C. — 19S04 de .•h.'UolicT M. — 108111 au lus A. — 19SH son iVsdi C. — 19Sl.'i
le mrtrt'/uc lî. — 19819 tu verras lî. — 198S9 /( frappe sur luy lî. — 19S31 Martin voj t près le dcable y court B. y croit C.
i
[ — 19810 faillir 1). — 19S'il-'i2 »u'H7«<hI A.
Pas.
i7
258
M I S T E R E D !■: LA PASSION
GADIFER
Tien, va dancer.
ROULLART
Ha dea, mon tour garder vouldray :
il m'en fault ung petit penser ;
a quel costé luy asserray
une brongnee sans farcer?
DENTART
19850 Or tien, vella pour toy armer,
je te donne caste huvete.
GADIFER
Ha dea, vecz cy bonne sornette :
ad vis m'est que mon tour cschappc.
ROULLART
Qui premier y vient, premier frappe.
19855 Je mo commance a eschaufer.
DENTART
Dca, tu nous trompes, Gadifer :
mo sers tu maintenant de truffes ?
tu luy as bien baillic dix buffes,
ou je n'en ay baillié que six.
GADIFER
19860 Aussi sont tes coups mieulx assis,
par quoy tu en dois avoir mains :
lu n'y assiés coup de tes mains
que les dois n'y soient escrips.
ROULLART
Combien sont ce ? Dentart, escrips :
19865 advis m'est que tu me seurmains.
DENTART
Aussi sont tes coups mieulx assis,
par quoy tu en dois avoir mains.
GADIFER
Je n'ay cure do vos escrips :
je frappe ou premier je l'attains.
ROULLART
19870 Et c'est ce de quoy je me plains
que je demeure tout pensis.
DENTART
Aussi sont tes coups mieulx assis
par quoy tu en dois avoir mains:
tu n'y assiés coup de tes mains
19875 que les dois n'y soient escrips.
GADIFER
11 samble qu'il soit tout cspris
de lepi'o conune uug vieil meseau,
tant a boursoufflé le museau
de horions qu'il a recous.
ROULLART
19880 Je ne puis mes frapper dessus,
tant suis las de peine et despit.
DENTART
Si nous repposons ung petit
icy, et en lieu do batures
combatons le de gians injures,
19885 tant que ceste nuit soit parfaicte.
GADIFER
N'est ce point icy le prophète
qui doit faire tant de vertus ?
ROULLART
Mes n'est ce pas celluy Cristus
qui doit racheter Israël ?
DENTART
19890 Comment Cristus sera il tel ?
sera ce ung larron tant infâme
qui Dieu et le monde diffame ?
le propos me samble bien lourt.
GADIFER
Rcspondez, villain.
DENTART
11 est sourt,
19895 Roullart ; eutens tu point cela ?
ROULLART
Non est, mes je croy bien qu'il a
ung peu les oreilles massives.
GADIFER
11 a espaules portatives
tout juste a porter horions.
DENTART
19900 Dist il pas ses breborions?
il barbote, ce m'est advis.
ROULLART
Preschez nous cy de vos devis,
maistre docteur de Galilée.
GADIFER
11 n'a plus si grant assemblée
19905 de gens après luy qu'il souloit.
DENTART
N'est ce pas celluy qui vouloit
faire en trois jours ung nouveau temple ?
maistre, baillez nous en exemple
qui estes si prompt au mesticr.
ROULluVRT
19910 Fy du coquin.
GADIFER
Fy du putier.
DENTART
Fy du paillait.
ROULLART
Fy du vray fol.
Beau sire, assiés luy sur le col
droitement ung très bon tatiii,
lOS-se lia ] Am A. An B. lion G. — 19S51 manque C. — 19853 sorte C. — 19S56 fraudes B. — 19865-69 maniuent A. -
10878-75 manquent A. — 19892 Que A. B. — 19913-14 beau hatiplart, papelart B. C.
SECONDE JOURNEE
2o9
affin qu'a ce villain matin
19915 faces toute la char frémir,
nENTAUT
Il nous fault ung petit dormir ;
on ne peut pas tousjours fraper :
si tu veulz, vas t'y occuper,
nous dormirons, qui m'en croira.
OADIKER
19920 l'endu soit il a qui tcnilia :
nous sommes las oultrc mesure.
L ACTEUR
Seigneurs en qui sens s'admcswe ,
sçavoir et vraye congiioissance,
par nusire simple demonstrmice
I992J et assés simplement bâtie
(ivef peu toir une partie
de ta vie de Jhesu Crist
comme l'ont baillié par cscript
les bons euvangelistes sains,
19930 de foy et de charité gains ;
et pour éviter vostrc cnnuy
nous ferons fin de ce jour d'uy
aux très grief ves extorcions,
peines et blasphemacions
19935 qu'en la maison d'Anne endura
tant comme celte nuit dura,
ou sa benoitc char offry
et tant de hontes y soufj'ry
qu'il n'est pas en humaine bouche
19940 que l'ofjcnce iotatle touche.
Donc, s'il vous plaist, en gré prenez
ce qui est fait; et retournes
demain a l'heure accoustumee :
si vous sera parconsommec
19945 la très pileuse passion
jusqu'à la résurrection.
Fin du second jour de la passion nostre
seigneur Jhesu Crist.
191)20 soit a qui il B.
1994U Qui A.
l',W23 Siauoir est C. — 19925 Kst asses A. — 19930 taincts 13. — 19932 lin manque A. —
TIERCE JOURNEE
DE LA PASSION NOSTRE SAULVEUR JHESU GRIST
Prologue.
Pour continuer la matière
qui est proffitabli' et entière
a cueurs plains de devocion,
19950 Laquelle traictc la manière
de la passion dure et fiere
qui fit nostre rédemption
Pour la nostre salvacion,
avant ceste incohacion,
19955 chacun de nous saluera
La vierge en contemplacion,
et dirons sans dilacion
humblement : Ave Maria.
[Ave Maria.]
Ce dévot salu accomply,
19960 seigneurs, humblement vous supply
qu'ung peu de silence prestes
et l'entendement apprestez
a incorporer la doulour,
charité et parfaicle amour
1 19965 ou ceste passion admaine
etjoinct nostre nature humaine;
pense:; que celuy qui s'instruit
en ceste oeuvre porte grant fruit,
et qu'il n'est histoire en ce monde
\ 19970 si fertille ne si féconde,
ne qui doyve mieulx faire entendre
le cueur au bien ou il doit tendre;
qui bien Vescoute et bien l'entend
a nul mal faire ne prétend.
19075 mes juge tout plaisir mondain
mauvais, decevable et soubdain,
et n'est adversité si forte
que tout paciemment ne porte :
car quant en memore luy vient
19980 la fortune qui luy survient,
aucunement se desmodere,
mes après quand il considère
que le fils de Dieu beneuré
a tant souffert et enduré
19985 pour mondifier nostre ordure,
il treuve que ce qu'il endure
n'est riens en regard de ta somme
que Jhesus voust porter pour l'homme.
Ainsi va son veil modérant
en ce miroir considérant
ou tout cueur pour son dueil mirer
se doit doulcement remirer;
et affin que vous y mirez
et humblement la remirez,
ce derost miroir pour le mieulx
vous ramenons devant les yeulx
sensiblement par parsonnages :
mirez vous, si serez bien sages ;
chacun sa forme y entrevoit ;
ÏOOOO qui bien se mire, bien se voit.
Dieu doint que si bien nous mirons
que par mirer nous remirons
après ceste vie mortelle
l'essence divine immortelL;
20005 qui règne sans jamès tarir.
19990
19995
19947 Prologus super tercia. etc. I). C. — 19949 compassion B. C. — 19950 par manière B. Et de plaine contrition
C. — Iflont I.a hanlte passion plainiere B. C. — 19958 Quendura A. — 10953 manque B. C. — 19963 doulceur B. C. —
19968 En ce liure B. C. — 19989 ses dueulz B. son ducil C. — 20004 I.a puissant essence immortelle B. C— 80Û(S Qui
règne en éternelle gloire A.
262
MI STERE DE LA PASSION
Seigrieurs, pour ung pou recourir
Se ce qui vous fut hier monslré,
au premier vous fut demonstré
le baptesme cler et expert
20010 que saint Jehan prescha au désert
comme nnnistre et précurseur
de Jhesu Crist, nostre seigneur ;
puis eustes figure certaine
quant au fait de la quarantaine
200)5 laquelle Jhesu Crist jcuna,
ou le deahle fort l'impugna ;
après eustes ostencion
comment ]}ar reprehencion
que saint Jehan a Herodc fist,
20020 il le décolla et occist ;
puis veistes que Jhesus cueilla
ses disciples et assembla ;
et puis mua l'eaue en vin
aux nopces de l'archedeclin ;
20025 au temple le veistes venir
et les vendeurs dehors bannir,
dont contre luy furent esmeus ;
et après de Nichodcmus
comment de nuyt la voye emprist
20030 d'estre disciple a Jhesu Crist;
et puis de la Samaritaine
qui vint puiser a la fontaine
qu'il converti par son preschier ;
puis de la fille au hault princier,
20035 et du fih de la veufce dame
auquel par grâce rendit l'ame ;
après fut par Jhesu sanee
la fille de la Chananee ;
après fut faicte mencion
20040 de la transfiguracion
ou il resplendy comme l'or
en la montagne de Thabor ;
puis veistes de la Magdeluine
qui des sept pechiés mortels jilaine
20045 ot son pardon par bon moyen
sus Simon le pharisien ;
après comment l'aveugle né
fut de p:-ir luy renluminé,
en quoy grant envye cueillirent
20050 les Juifz qui en murmurirent ;
puis eustes demonstracion
du vaillant seigneur Lazaron
que Jhesus de mort excita
et puissaument ressucita,
20055 dont les pharisiens plus fort
tendirent a trouve^' sa mort;
et après non pas longuement
vous fut montra de l'ongnement
de quoy Marie le vint oingdre,
20060 dont Juda^s se print a desjoindre
de l'amour du très doulx Jhesu
pour le grant despit qu'il en eu ;
après le peustes voir monté
sur l'asnesse en humilité
20065 et vint en la cyté louée
ou grant joye fut démenée;
puis avez veu plusieurs consaulx,
plusieurs moyens mauvais et faulx
que les pervers Juifz queroicnt,
20O70 sçavoir comment Jhesus tendraient ;
entre lesquels s'entrelarda
Judas et a eulx marchanda
que par vaillant trente deniers
il leur baillerait volontiers ;
20075 après ce fut la cène faicte
ou grant humilité purfaicte
sur ses disciples reprouva
quant a tous leurs piez leur lava :
la fut estably proprcmciit
20080 le saint et divin sacrement
qui a tous disciples vallu,
furs Judas, qui estoit poilu,
lequel tanlost veistes partir
pour sa trayson assortir,
20i)85 et puis en ung lieu jollivet,
que l'on dit jardin d'Olivet,
Jhesus veistes humilier
et Dieu, son père, deprier
pour la double et terrible crainte
20090 qu'il avoit en son cueur emprainte,
ou l'ange se magnifesta
et doulcement le conforta ;
après veistes Judas induire
ses satelites et conduire,
20095 pour venir prendre a la rigueur
Jhesus, nostre benoist sauveur,
et aussi tost qu'ils l'approucherent
veistes comment ils tresbucherent,
et puis de saint Pierre en avant
20006-112 remplacés A par les vers saivanls :
Pour rafifi-esciiir vostro mémoire
ou nostre jeu hier fliia
vous sauc-z que la deiuoura
que jliesus par la ^'eiit félonne
fut lie a une eolonipne
et la toute nuit villene
hatu piteusement mené
et déboute comme ung viel asno
par ks gens do ce niauldit aune.
20013 creatiue C. — 20021 oonsilla C. — 20029 aprist C. - '.OOSS Fui achelte le doulx G, — 20073 baillant G.
TIERCR JOURNKK
263
20100 qui couppa l'oreille au servant;
rie la le peustes veoir mener
et piteusement d 'mener
par les minisires Sathimas
jusqiies en la maison d'Annas,
Ï0105 OH saint Pierre ot si faible foi:
qu'il la renyn par trois foiz ;
puis veistes Anne aller coucher
et a sei serv mis eiieharyer
qu'ils le gardassent, comme ils firent,
20110 et grans villenies lui/ dirent ;
et par aussi tant labourasmes
que dessus ce point demourasmes.
Maintenant nous voidlons poursuivre
de Jhesus, comment on le livre
Ï0H5 a~Cayphe pour le myner,
affoncer et exaininer :
la verrez inquisicions,
faulx tesmoings, acctisacions
et tous les tours qu'on peust quérir
20120 a faire ung innocent mourir.
Après vous ferons ckmonstrance
de la dive désespérance
a' laquel Judas s'est donné
quand son rnaistre vit eondampué.
20125 /Vous terrezjde Pila te ausstj
qui se donna moult grant soucy
de trouver le< tours et moyens
pour appaiser les citoicns,
et fort a labourer se prist
iOi'M potir faire eschaper Jhestt Crist.
Et pour ce prolougiie abréger
et venir au fait sans targer,
nostre vouloir se délibère
a ce très glorieux mistere
20135 pour suir jusqu'à celle part
que le corps ara fait deppart
de la croix par ses bons amis
pour eslre en son sépulcre mis ;
et luy au sépulcre posant,
80U0 atant nous serons repposant.
Si vous prionijres^ humblement
qu'avant nostre commencement
~sîTence nous veillie; prester,
et brief nous verrez nprester.
ANNE
£0145 Or a Phebus tout chcminô
par l'iiotoii qui a pourniené
ses chi'vaulx do laidessc isnclle,
que par na course iialurello
il a circoHvolu grant erre
20150 et cii-cuy toute la terre,
tant que par «a face luysant
ce doulx luatlnot et plaisant
a si richement couloré
qu'il sanible pro|)renient doré.
80155 Le très gracieux Hespcrus
et Auroia sont apparus
qui la nouvelle ont assignée
lie la très douice matinée
ou tout cueur jôyeulx prent déduit.
20160 Et me samble que ceste nuit
en ha bien séjourné quarante
pour la grant pensée et ardente
que j'ay d'aeooniplir une chose
que je sens en mon cueur enclose,
20IC5 que pour dormir ne sommeillier
jami's ne la puis oublier;
et tant 1110 touche ce propos
que je n'ay point pris de repos
ceste nuit sinon a mal aise ,
20170 et n'est huy chose qui me plaise
tant que la mienne intaiicion
soit mise a execucion
et parconsommee du tout.
nOILLART
(juaut je regarde ce faulx glout
£0175 qui a semé tant de discordes
et tant fait de besongnes ordes,
mes deus me claquent do despit.
DENTART
Aïoit il hardiment res;)it,
le mauvais trahistre qu'il est?
GADIKEH
20180 11 aroit son sanglant gibet :
nos seigneurs l'ont trop mal en grâce.
ROLLLART
Il ne scet gueres qu'on luy brasse
d'avoir les bonnes gens gastés :
on luy a fait tous ses pastés ;
-. J S03 seruilours U. Aux qm-h i-o irnanil i que bien ehier C. — 2J113 nous voulons
ilile C. — 20115 mener <;— 2(H2:i A quelle A. A la quelle U. C. — 20137 po"!- ' ' ■>•.■••
20107 a le coucliiiir C. — 2J10S F.i a
lile C. — 20115 mener <; -
281 '«7 raileur C. — 201 W tru
- .. -, ._ ., .„. po"i' ses Ijwns A. — 20144 conuntilicer A. —
- -. — ,—, ..-'S moulu C. — 20155 vesperus 1). — 2J10." <ej le C. — 20174 jesgonlc «e niauuais B. — 20177
eraequent U. C. — 20184 li. Et quoy l) il a fait ses pastcs II. C.
264
M I S T E R R n F, LA PASSION
2018Û voist hardiment chauffer le four.
DENT ART
Je creveray bien de doulour
s'ung sanglant gil)et ne l'atrappe.
GADIFER
RouUart, avant qu'il nous eschappe,
vesperions le ung tantinet ;
20190 cinq ou six coups d'ung bon fouet
ce seroit droitement sa charge ;
il a si beau dos et si large
pour assoir beaux cops de bâton !
EOULLART
Avant donc ! or nous csbaton
20195 a le fournir de belles buffes.
DENTART
Dea, RouUart, comment ! tu le buffes !
tu n'attendz point tes compaignons ?
ROULLART
Je n'en puis mes : frappons, frappons
sur ce faulx truant séducteur.
20200 Tien, villahi.
nENTART
Tien, faulx enchanteur,
et taste quelz poires ce sont.
ANNE
Je m'apense que mes gens font
a ce matinet gracieux :
ilz sont nices et paresseux ,
20805 je m'attens qu'ilz sont endormis.
Oncques gens ne furent remis
si bien qu'ilz seront s'ainsi est.
Je vouldray aller voir que c'est
pour en estre ung petit plus soeur.
ung tantet cest officiai :
pour ceSque le chef luy fait mal,
20215 nous ly renfformons ung i)etit ;
est il pas bon?
ANNE
C'est si bien dit
qu'on ne sçaroit mieulx jargonner.
Or ça, il nous fault ordonner
de son fait ; nous séjournons trop :
20220 desliez le do la a cop
et prestement le m'admenez
par devant moy.
GADIFER
Or ça, venez,
nosire, deslier vous fault ;
mes vous serez lyé plus hault
2022j avant que viengne la vcspree.
RgULLART
Vostre orde charongne est entrée
en mal au par vostre péché.
DENTART
Comment estoit il ataché !
il n'avoit garde de fouir.
GADIFER
20230 Sus ! passez, il vous fault venir
parler a notre président.
Il rit!
ROULLART
Voire, du bout du dent :
c'est lisee d'ung antcnois.
20210 RouUart?
ROULLART
Que vous plaist, monseigneur?
ANNE
Dormez vous ?
ROULLART
Nrnnin, nous veillons.
ANNE
Que faictos vous ?
ROULLART
Nous resveUIons
ANNE
Aultrc remède je n'y vois
20235 pour en avoir brief jugement
que de le mener prestement
au prince des prostrés Cayphe,
qui pour cest an est grant pontiphe ;
si vault mieulx luy mener tout droit.
ROULLART
202'i0 Qui luy faisist justice et droit,
on le pendist, pour abréger.
ANNE
Ce n'est pas a ni us a juger
en tant qu'il touche son meffait ;
20195 brngps B. — 20197 répélé B. C. - 2(>201 poix C. — 20211 nennil B. C. _ 20252 en sirp C. — 2022S est il bien
B. C. — 20232 de la dent C. — 20239 Pour lexaminer a son droit B. C. — 20240 Qui luy tist B. G. On luy faisist A. —
20241 Qui le A.
TIERCE JOURNEE
265
son piocos luy sera tout fait
20215 selon justice et équito
et pugiiy a l'égalité
qu'il a ott'eneé et mal fait;
et afiin que tout soit pai fait
selon les termes do raison,
20250 scrgeus, menez le en la maison
tlo Gayiihe en cest appareil.
DENTART
Aussi y est tout le conseil
<les pharisiens, dos seigneurs,
des scribes et des gouverneurs
20255 qui au jour d'uy tiennent estât.
ANNE
Saluez le pontificat
do par raoy a honneur et joye,
et dittes que je luy envoie
par vous ce raeschant homme cy,
ï02on et qu'il on face tout aussy
qu'il luy samlilo qu'il est licite.
GADIKEn
Voulez vous point qu'on luy recite
ung peu de ses beaux fais passés ?
ANNE
Nennin non, il en scet asscs :
20265 il n'y fault ja qu'on luy declere,
et aussi no demourra guère
que j'iray pour voir l'assemblée.
ROULLART
Liesse vous soit acconiblee
et honneur tout vostre vivant !
20280 mes je no goray pas si grue
que je n'y paye ma corvée.
MALCUS
Et ou s'en va ccstc couvoe
maintenant ainsi espar duc?
DENTAUT
Tu n'es qu'une bc-ite vestue :
20285 voys tu point que nous emmenons
ce papelart que nous tenons
présenter a uostro hault chef?
BRUYANT
Ce ne sera pas sans meschof,
car nosseigneurs ne l'ayment goûte.
20290 11 sera puguy.
GADIKEU
Qui s'en double ?
ne chet il pas pugniciou
a sa folle presumpcion
par quoy nostre loy destiniit toute ?
ESTONNÉ
Ça, coinpaignons, chacmi s'i boute ;
20295 suyvons pour voir que ce sera :
jamès il n'en escbappera,
les deables l'ont bien avoyé.
CELSIDON
11 sera de nous convoyé
pour ouir qu'on en vouldra faire.
[FosK.]
202T0 Sus ! SUS ! faictes marcher avant
ce malheureux : il est grant heure.
DENTAUT
Marchez, que le deable y acqucurc
allez vous a pas d'espousee ?
MALCUIDANT
Et ou s'en va ceste couvée
20275 maintenant ainsi esparduc?
GADIKEU
Nostre proye est toute trouvée.
DRAGON
Et ou s'en va costc couvée ?
ROULLART
Nous allons faire une levée
Isur Gayphe.
GUEULU
[ On no scct qui rue,
I
20244 tost C. — 202'in la qualitu G. — 202TO ainsy G.
Woir que ce fi>r.'> li. iiuil fera C, — 20207 eimoye C. -
JUDAS
20300 Seigneurs, p usez a vostre afTairc:
veez cy celluy que heez tant
qu'on vous adniaine tout bâtant
a grand multitude et grant bruit.
Je leur ay livré cesto nuit
20305 en leurs mains si très bien, je pense,
qu'il n'y a sccu mettre deffence
qu'il n'ait esté pris et lyé ;
se j'ay bien fait ou folio,
ma conscience y est tenue :
20310 toutefFois je vous insynue
que vere vous mo suis acquité.
CAYPHE
Tu es de ton marché quitti :
riens demander ne t'en sçavons ;
il souffit puisque nous l'avons :
20315 la besongne est très bien fournie.
-20274 '•( 20277 ceste année C. — 20279 Chies B. - 20295 le pour
20299 veoir B. sauoir C. — 20310 le vous B. institue C.
906
MISTRRE DE LA PASSION
jLn.vs
Je m'en vois donc.
JHEROnOAN
Dieu te conduye !
tu tVs acquitt' Ijion tt bel.
ROUI.I.ABT
Sire, le grand Dieu d'Israël,
vous doint faire sa volonté !
20320 Anne, mon maistre rcdoubté
et vostro bon aniy féal,
pour ung présent especial
vous envoie ce malfacteur
comme au hault examinateur
20325 a qui telz causes ressortissent ;
quelz ses fais sont ne qu'ilz sortissent
vous en estes bien adverty,
comme il dit.
CAYPHE
11 n'a pas menty:
je s(,'ay de son gvicf maléfice
20330 bcaucop plus que je ne voulsissc ;
mes quoy? tout le monde en mui'mure :
si fault par nécessité pure
que son abus et son desroy
soit parvenu jusquos a moy.
20335 Or vien ça, homme infortuné,
bien a malheure fus tu né
pour mener la vie et la ruse
de quoy tout le monde t'accuse :
non obstant que je ne croy pas
20340 le mal rapport on plusieurs cas :
la mauvaistié seroit trop grande ;
or respons donc a ma demande :
est il vray que par ton preschor
tu veulx dosti'uire et empeschei'
20345 la haulto ordonnance et la riglo
ou la loy nous conduit et rigle ?
as tu ton arrogance prise
encontre la loy do Moyse ?
on nous dit que toy et les tiens
20350 la blasmes et compte n'en tiens,
et fais une nouvelle loy
dont on he scet parler que toy :
si convient que tu nous dénonces
d'eu vient la loy que tu adnonces,
20355 ou se Dieu le t'a revellee,
ou se tu l'as apostillee.
Se tu nous dis que de toy vicngne
ce n'est pas raison qu'en la tiengne,
car tu n'es pas d'auctoi ité
20360 pour la faire a ta volonté ;
se tu nous dis que Dieu l'a faicte,
tu te tiens donc pour grant prophète
quand Dieu t'approche de si près
qu'il te revello ses secrés,
20305 et te tiens comme tu conclus
aussi saint que Moyse ou plus,
in tant que tu veulx refformer
ce que Moyse voult former.
Or te dispose de respondre
20370 et do nous les moyens espondre
de ton fait connue tu l'entcns.
Respons, qu'est ce que tu allons ?
os tu point ma peticiou ?
JHERODOAN
11 n'a point de dovocion
20375 de vous faire responsc aucune.
MARDOCEUS
Si a, mes il craint la fortune ;
si pense qu'il respondera.
NAASON
Rien soubtilment s'i conduii'a,
s'il vous respond, qu'il ne mesprende,
20380 car a quelque party qu'il tende
il encourt inconvenieiit.
CAYPHE
Ne parleras tu aullreraent '.
tu es a justice soidimis :
est il vray que tu as commis
20385 les fais dont tu es accusé ?
on dit que tu as abusé
le peuple par ung faulx pratique
et que tu sces l'art de magique
pour en user quand il te plest.
20'jfM Respons.
ELUCHIN
Il n'a gueres do plait :
il est bien que vous le lardez.
CAYPHE
Qu'est cecy, seigneurs ? regardez
comment C3 meschant se maiiilient :
il samble que compte ne tient
20395 de choses que je luy demande.
11 y pert, car a ma demande
il no daigne respondre mol,
et si est tout cei'tain qu'il m'ot
hault et cler faire mon onquesle.
BANANIAS
10400 Aultre voye y convient que ceste,
20328 pas trop C. — 2,)343 tout C. — 20.ÎC0 s.i A. — 20373 Oy li. ~ 20377 Se A. - 20378 si mamue B. se C. — 20380
pvende B. prutenilc C. — 2ti3S7 portiquo G. — 20398 si suis B. C.
TIERCE JOURNEE
2(17
car vmis vnin/ quant n co point
qu'il ne \nu-U- ne rnspont point,
et est pnust estro uiig toui' d'oscollc,
nfliu qu'il no dyo parole
20'i05 qui luy soit préjudiciable.
CAYI'HE
Hannilias, homme notable,
s'il vous plaist, dittos les moyens
meilleurs et plus cspediens
pour venir a nostre querelle.
BANANIAS
SO'.IO Cher sire, la manière est telle,
puisqu'il vous plest que je le dye,
que puisqu'il met son estudie
a celer ses abusions,
que nous prenons conclusions
20'il5 do le sçavoir par aultro liout
et do serchor tesmoingz i)ar tout
qui de son fait ont peu congnoistre ;
[lar ce point pourrons nous accroistrc
son danger et le repprouver,
20'i20 car quand se vendra au prouver
il ne peust qu'il n'y ait pluseurs
qui tesmoingz seront des erreurs
en qiioy il a picça vescu,
et alors s'il est convaincu
20'i2r) d'a\ieun cas qui la mort requière,
il ne fault plus qu'on en enquicre :
nous avons nostre intencion.
RAYPHE
Vostre considoracion
procède d'un sons très soubtil :
E0430 .loathan, que vous en samble il ?
je vous veil bien oir encor.
JOATHAN
11 dit très bien.
CAYPHE
Et vous, Nachoi-,
déclarez en vostre pensée.
NACHOn
La manière e.st si bien pensée
2ûia') que jamès meilleur tour n'arez.
i NATHAN
Vecz cy donc connue vous ferez :
huchez moy vostre poui-suivant
et luy chargez tout d'ung suivant
qu'il voist publier liault et cler
80440 que s'il est qui sache parler
des fais Jhesus, pour luy ou contre,
viengne devant vous et se monstre
l)our faire sa relacion
sur peine de privacion
soiiâ de biens et grant peine de corps.
CAYPHK
C'est ti-es bien dit et je l'accors :
il sera fait sans nul deffault.
Maucourant ?
MAurounANT
Holn!
CAYPHE
Quel burgault!
flcz la manière qu'il a,
20'ijO qui rcspont aux seigneui-s : liola !
est il plain de bien et d'honneur ?
MALCQURANT
Qui est ce la ?
JACOB
C'est monseigneur
qui te huche ; l'as tu ouy ?
MAUCOUHANT
Qui s'en doulite? my Dieux, ouy,
20455 mes qui c'estuit je ne sçavoye.
Mon cher seigneur. Dieu vous doint joyc,
vous plaist il riens me connnandor ?
CAYPHE
Si fait ; mes il te fault mandei-
connue ung seigneur, ainsi qu'il samble.
20400 Or t'en vas [jublicr grant amble
par ceste cité haultc et bonne
que s'il est huy quelque personi.c
a qui ce .Ihesus aist meffait,
si se viengne opposer de fait
20105 plainement a sa délivrance,
et s'il est anie qui s'advance
a soy plaindre de son malice,
il ara raison et justice
tellement qu'il sera content.
MAUCOIUANT
20170 Sire, mon vouloir ne eontend
qu'a faire vostre bon plaisii' :
je voiz vosti'c niand accomplir
tout ainsy que le devisez.
Oez, oez, oez, oez,
20175 et soiez très bien escoutans,
tous citoieus et habitans
de ceste cité renommée.
t0411 la dye B. —20428 Vostre noble C. — 20431 en cuer C. — 2MM bien compassée C. — 204H ou tiinH7U<-
, — 8J447 delay C. — 20448 brugault B.
«tind A. Et en eust il tel X tant C.
S0459 et il me B. se nie C. — ï04(5(Usl maai.,c A homme B. C. —20470
268 M I S T E R E
Chose par moy vous est sommcc,
par Gayphc, nostro princier,
20480 qui grandement vous peust touchier :
sachez que nosseigneurs ont ore
Jhesus devant leur consistore,
lequel ont fait prendre et saisir
pour ce qu'il a fait desplaisir
£0485 a beaucop de gens et dommage ;
s'il est homme a qui il dommage
ou aist dommage ja pieça,
le viengno accuser par deçà,
et il ara bonne audience.
EMILIUS
20490 II vault que mort comme je pense,
et y en eust il telz dix mille.
RABANUS
Cecy se fait a fin civile
pour oyr les contredisans
et ceulx qui luy seront nuysans ;
20495 se j'y puis, je n'y fauldray pas.
NEMBROTH
Et je vous suivray le grant pas:
ja tost arons bien besongné.
RABANUS
Comment ?
NEMBROTH
Nostre escot est gaigné
se vous onsuyvez ma chançon.
EMILIUS
20500 Par quel point ?
NEMBROTH
Veez cy la façon :
nos seigneurs, comme vous sçavez,
se tiennent moult fort aggravés
de ce Jhesus qui trop les mort;
et brief ilz le hccnt a mort ;
20505 donc, se bien voulions besongner,
il ne nous fault que tesmongncr
contre luy de quel lieu qu'il sourde,
soit bien, soit mal, soit vray, soit bourde
ou menterie tout apporte,
20510 mes qu'a ce Jhesus tourne a jierte :
nous arons leur grâce sans faille
et se la bourde chet a taille
nous arons quelque don appart.
SALMANAZAR
Ce n'est pas parlé en eoquart,
DE Lk PASSION
20515 mes Ijien pensé a la pratique.
PHARES
Sus ! il est temps qu'on s'i applique,
qui veult riens faire : partons nous.
RUBEN
Gedeon, mou amy très doulx,
j'ay mauvaise nouvelle appris :
«0520 on nous dit que Jhesus est pris
et mis en la main des seigneurs.
GEDEON
Ce sont mauvais persécuteurs ;
s'ilz peuvent, ilz le destruiront.
NEPTALIN
Allons sçavoir qu'ilz en feront :
20525 ilz sont caulx et malicieux.
MOAB
Helas ! qu'a il meffait vers eulx,
qu'ilz en ont si forte hayne ?
ABIRON
C'est tout jiour la bonne doctrine
dont il a le peuple introduit.
JUBAL
20530 Allons y, tout le monde y fuit,
c'est ung grant signe qu'il est vray.
CELIUS
J'y vois.
ABACUT
Et je vous ensuivray,
car a le voir forment désire.
CAYPHE
Or, messeign?urs, je vous veil dire,
20535 puisque je vous voy tous ensemble,
pour quel cause je vous assemble
par le conseil des gouverneurs
qui sont cy assistans pluseurs.
11 est certain et vérité
20540 qu'on a devant moy présenté
cest homme de mauvais renom
nommé Jhesus de propre nom,
comme plusieurs en sont certains,
chargé do plusieurs cas hautains
20545 a discuter selon les lois ;
non obstant cola touteffois,
nous voulions bien de vous enquerre
20479 princher A. In grant B. — 20588 Ril C. — 20494 De ociilx A. — 20498 nostre estre est regaignc G. — 20510
ce mangue B. C — 205Î2 exécuteurs B. 0. — Sfi5'i0 moy] nous B. — 205Vi-4 tesinoingz, du moins A.
TIERCE JOURNEE
269
s'il ost homme do quelque terre
qui sache parler do ses faultea
2(»50 do cinq ou do six dos plus haultes,
cai- a dire tout en ung cop
je croy hion qu'il y en a trop,
si no scroit point fait on ha?te.
NEMimOTH
Mcsseiguours, je vous dy qu'il gastc
20555 toute la loy, et est perie
par sa fraude et sa tromperie :
il fait une grant assaniblee
<lo simples gens do (ialilcc
qui de la loy ne tiennent compte
20660 pour le suivir.
SALMANAZAR
Ce qu'il vous compte
est vray comme il vous signifie ;
et do fait je vous certifie
que j'ay esté en lieu et place
ou il a dit en plaine face
20565 ou le peuple estoit aune
qu'avant ce qu'Abraham fust né
il estoit engendré au monde;
sachez ou sa raison se fonde,
car elle m'est mal enteudible.
CAYPHE
20570 Vecz la chose bien impossible
et la plus folle de jamès,
s'il est vray.
SALMANAZAR
Je le vous promcs :
plusieurs parsonnes l'entendirent
dont les aucuns luy respondii'ont
20575 qu'il avoit ou corps Bolzebus.
CAYPHE
Je croy que voila beaux abus
contre raison et contre Dieu.
PHARES
Et je fus en ung aultre lieu,
non pas moy seul, mes cinq ou six
20580 ou il a sanés et guéris
malades par ne sçay quel signe
et usé d'art de médecine
l en nostre sabbat transgressant,
et quand du peuple la passant
20585 fut requis pourquoy le faisoit,
respondit que bien le pouvoit
et que Dieu ou rogne majeur
bosongnoit bien a celluy jour :
parquoy bien y pouvoit ouvrer.
CAYPHE
£0690 Aussi a bien considérer,
il 80 vcult portoi" ou avant
estrc filz de Diou le vivant,
pui.squ'il a samblable puissance.
JHBROBOAN
11 en donne assés demonstrancc
20595 a soy armer do toi vantisc.
RABANUS
C'est tout son tiltre et sa devise :
il a dit on ))lus do dis lieux
qu'il est descendu dos haulx cieulx,
et affin qu'il fust plus commun,
20600 dit que son père et luy sont ung.
Et ainsi usurpe et assigne
a luy la puissance- divine
qui est ung cas bien cnormal,
et dont il vendra u.ig grant mal
20605 se remède n'y est donnée.
CAYPHE
Veez cy chose mal ordonnée',
seigneurs, et 1res mauvais rapjjoi't ;
ung lions qui n'aroit point de port
en pa.sseroit de mort l'espreuvo,
20610 oncor attendu qu'on luy preuve
par tesmoingz tous ces cas icy.
Que vous en samble do cccy ?
je vous supply que vous pensez
s'il y a point couleur assés
Î0615 d'en faire l'execucion.
JHEROBOAN
Sire, soubz la correction
de vous et messcigneurs presens,
je vous diray ce que j'en sens :
il m'est advis que tous ces tiltros
20620 qu'ilz ont x'olatés par chappitres
n'ont pas couleur bien souffisante
pour ceste parsonne mcschante
traictier a mort selouc la loy.
MARDOCEUS
Il le me samblo quar.t a moy :
80625 quoy qu'il ait ainsy transgressé,
pour chose qu'on l'ait aggressé,
il n'en confesse quelque chose;
et nostre loy vcult et dispose
que le pécheur son mal gehisse
20030 et confesse avant qu'il périsse :
et il ne s'en advance pas.
Et d'aultro part, mettons le cas
qu'il oust parlé d'Eve et d'Adam
120551 a manque G. — 20556 sa manque A. — 2(»0i afiie B. — 20565 assamble A. — 20672 Sil est vray m<iivquf B. y-
Vous R. C. — 20r.<!3 tr.'s passmil n. C. — 20595 faiiilisp C. — 2;i5n',>-Gnn manquent .\. — 20603 inorn»! C. - 20004
Ong point iiiiil C. — 20(''â5 qui lait crprcssc E. car pose quil C. — 20U32 uyc^ tous lus <as C.
\
270
MISTERE DE LA PASSION
ou de Noe ou d'Abraham,
206S5 qu'il eust esté no devant eulx :
00 sont mos d'ung fronasieux
ou d'ung becjauuc ou d'ung folati-o,
qui requièrent de le bien bastre
sans pitié ou miséricorde
20640 affin que l)lus ne s'i adniorde;
mes de l'aller a mort juger
je ne l'oseroie songer.
D'aultre part, s'on dit qu'il s'csbat '
a enffraindro nostre sabat,
20655 il doit de la peine encourir
aucune, mes non pas moui'ir ;
par quoy, qui sa mort luy vouldra,
aultre chemin quérir fauldra
qui soit ung petit plus pointu.
CAYHHE
20650 Povre homme, que ne respons tu ?
es tu sourt, muet ou aveugle
qui te tiens icy confme ung bugle,
sans ce que tu ton fait procures ?
n'os tu point cy les grans injures
20655 que ces gens contre toy tesmoignent ?
n'os tu point comment ilz te poignent '.
qu'as tu que tu ne leur respons,
ou ne leur fais aucuns respons,
se tu sens avoir quelque droit '.
N.VASON
20660 11 n'en dira ja mot a droit ;
regardez luy baissier la chiere
vere la terre.
ELIACHIN
C'est sa manière :
n'y prenez point de si près garde.
nembroth
Je vous asseure qu'il letarde
20665 et empesche a toute rigueur
les drois de César l'empereur,
et ne cesse de machiner
vers luy pour le peui)le encliner
que la couronne soit fraudée
20670 et qu'il soit fait roy de Judoe,
qui vous doit mouvoir, messeigueurs,
comme gardes et [irotecteurs
des haultains drois imperiauls.
CAYPHE
As tu perpètre tant de maulx,
•20675 meschant séducteur et infâme ?
pretendz lu a nostre royal me ?
quel droit y peulz tu reclamer ?
es tu homme pour gouverner.
qui es plain de toute misère?
EMILIUi?
20680 Seigneurs, avant qu'on délibère
de son fait, vueillez nous ouir,
car nous le voulons convainquir
publiquement de cas de crisme.
C.iYPHE
(Jr sus donc ! tost, qu'on nous l'exprime,
20685 affin que nous expédions.
EMILIUS
Sire, nous vous certifions
pour vi'ay, mon compaignon et moj',
que devant plusieurs de la loy,
il dit et a fait la voix bruire :
20600 « J'ay bien puissance de destruire
ce temple et du tout deslier,
et puis de le roediffier
tant seulement en trois journées. »
GAYPHE
Veez la mensonges bien cornées
20695 et vantise bien évidente,
que parsonne tant imprudente
composast eu trois jours entiers
tel oeuvre ou plus de mil ouvriers
ont ouvré quarente ans passés :
20700 vous samble ce pas tiltre assés
pour l'occire de mort grevaino ?
JACOB
Ce n'est qu'une parole vaine,
cher sire, et a bien discuter
il ne s'i fault point arrester ;
20705 ne de le mettre a mort pourtant
je n'en suis pas bien consentant ;
la loy ne l'y peust promouvoir
et si seroit pour esmouvoir
le peuple a nostre honte grande.
JORRAN
211710 Ce nous seroit trop grant esclandre
de l'occire pour si petit,
et, comme nostre maistre a dit,
la cause est ung petit bien maigre,
mes pour le jioindre ung peu plus aigre,
20715 il vault mieulx que nous enqucrou
s'il est ne nieurtiier ne larron,
espio ou guaitour de chemins :
telz moyens sont trop mieulx affins
a nostre honneur pour le deffaire.
YSACAR
20720 11 n'y aroit gueres a faire,
veu qu'il emmaiuo aval les chauips
une grant tourbe de meschans
■2m3S le manque B. — 20642 sarojB C — 20662 sa) la B.— 20674 ces deffaulx B. G. — 20684 faictes vostre prohesme B.C.
-20694 ornées B. aournes C. — 20695 vantesie B, —20707 luyA. B. C. y mouuoir C. —20717 esjiieur C. — 20721 maine C,
TIKRCI-; .lOURNlîE
«71
207i5
î()730
2073j
207 'lO
20750
20755
I
20760
Ï07C5
qui sp vivent sans» labourer :
quant ilz ne socvont que disncr,
et incluent do tain et de froit,
ilz sont bien tost en ung destroit
l)outés pour faire uuc finesse.
CAVHIIE
Je meur de demi et de dostresRe
de ce cas qui forment ino touche;
les dens me serrent en la bouche
et ni'enfrto le cueur de despit ;
s'il fault que ccst lionniio ait rcspit,
mes jours finorout a douleur.
Vien va, homme jilaiu de malheur ;
que ne respons tu aux argus
qui sont tant poignans et agus
contre ta renonniiee et famé?
ne crains tu honto ne diflamo?
Tu os que ton honneur se lilesse,
et par ta bestise et simplesse,
tu le laisses habandonner !
JllEROnOAN
Vous y avez lieau sermonner,
il n'en fera ja aultro chose.
CVYPHE
Ça, est il homme qui propose
contre luy de l'avoir trouvé
faisant quelque larciu prouve,
ou robe ou meurtry aucun,
ou luy ou ses gens (c'est tout ung) ?
S'il en est qui sache nouvelle,
tout publiquement le revelle ;
c'est tout tant que nous demandons.
M.VUDOCEIiS
Monseigneur, nous nous abusons :
ame ne respont sur ce point.
CAYPHE
Si grant courroux au cueur me point
que je ne puis cest homme attaindre
qu'il semble qu'on me doyve estaindre.
le cueur, tant m'est il fort pressé;
mes j'ay ung aultro tour pensé
l)ar quoy je le pourray confondre
et le contraindray a l'cspondre.
Or vien ^a, meschant créature,
approche de moy : je t'adjure
par le Dieu vivant qui créa'
ciel et terre et quanqu'il y a
que tu me dies en ce lieu
se tu es Grist, le filz de Dieu,
qui des prophètes est prédit ?
Or me rospons la.
JUE;U8
Tu l'as dit.
Me» je vous dis bien plus avant
20770 que vous verrez dorénavant
le filz do l'homme en gloire clerc
seoir a la dexti-e Dieu, le père,
et venant du lieu superncl
dedans les imc4 du ciel
20775 en puissance et vertu active.
CAYI-HE
Veez cy blasphème la plus vive
<}.u'oncqucs mes j'ouysso en mon âge!
11 blasphème par son oultrage ;
qu'est il b&soing d'aller plus loingz
207S0 pour trouver contre lui tesmoingz ?
puisque le filz de Dieu se dit,
pul)liquement i/axphemavif.
Ici/ d<;schire Ciiyp}ie ses vesteinciis.
Vous mesmc la blasphème ocz : •
que vous en samble?
JHEROIIOAN
Ostez, ostez,
20785 il est coupable de mort griefve :
vous voicz comment il s'eslievo
contre la loy do tous costés.
CAYPHE
Seront telz erreurs supportés
dont ce meschant nostre loy griefve ?
Ï0790 que vous en samble?
MARDOCEUS
Ostez, ostez,
il est coupable de mort griefve !
CAYPHE
Se provision n'y mettez,
et sa grant mauvaitié s'achève,
vous nous verrez en saison bricfve
20795 i)ardus, exilliés et gastés :
que vous eu samble?
NAASON
Ostez, ostez ,
il est coupable de mort.griefve :
vous voyez comment il s'eslievc
contre la loy de tous costés.
CAYPHE
20800 Kt ainsi donc vous consentez
sa mort pour le cas abréger.
Ne reste que do le juger
de par le prevost criminel :
dis je bien ?
20726 HiW. sont tantosl A. — 20733 n] on B. C. — 20744 sopposi! B. — 20746 En faisant larrei-in prouup B. C— 20T4(^M
Miiiijwnt A.— 2075!) peusse B. G. - 20772 dieu manqw B. C. — 20773 Ptornfl B. C. — 20781-82 «l«n7it<-iiJ B. C. — Ï0788
les erreurs C. — 20791 en faisant briefuc C.
212
MISTERE DE LA PASSION
ELIACHIN
Mes très bien et bel ;
20805 nous sommes tous de ccst aocoid
qu'il est très coulpable de mort
sans ce que plus Tcxaminez.
CAYPHE
Bananias, déterminez :
vous samblc il que sa mort soit bonne ?
BANANIAS
80810 Oppinion de mort luy donne
et en suis du tout consentant.
CAYl'HE
Et vous, Joathan ?
JOATHAN
Tout autant,
a sa mort très consentant suis.
CAYPHE
Et vous la, Nachor ?
NACHOR
Je l'ensuys.
CAYPHE
20815 Jacob ?
JACOB
11 le nous fault dfffaire.
CAYPHE
Nathan?
NATHAN
Sa mort est nécessaire
et très proffitable a nous tous.
CAYPHE
Ysacar ?
YSACAR
Qu'interroguez vous?
chacun de nous tous se consent
20820 que s'il peust de morts souffrir cent,
qu'on les y face recevoir.
CAYPHE
Il ne fault plus conseil avoir
a ceste besongne conduyre :
vous estes tous contons qu'il muyre
20825 sans ce que riens nous discordons?
TOUS ENSEMBLE
Ftal ! fiai ! nous l'accordons
et sommes tretous d'une ligue.
CAYPHE
11 n'y fault plus quérir de brigue :
nous sommes d'accord sur ce point.
' S0830 Sergens, mettez vous en pourpoint,
Dragon, Bruyant et Estonné.
BRUYANT
Est ce villain habandoimé
a nostre bon commandement ?
CAYPHE
Oy ; faictes luy hardiment
20835 du sanglant pis que vous pourrez :
ja tant de mal ne luy ferez
que nous n'en soions bien content.
BRUYANT
Il suffit, puisqu'on vous entend,
nous nous tenons pour tous preschés.
MALCUIDANT
20840 Dieux ! qu'il est bien cheus sur ses piez
pour cstrc souldé de ses gages !
MALCUS
Ozes tu semer telz langages,
tiuant plus que ratruandy?
DRAGON
Devant nos seigneurs haulx et sages,
20845 ozes tu semer telz langages?
GUEULU
Au peuple preschés et langages
tout contre la loy.
Icy Hz bâtent Jhfsits et luy crachent
ail visage.
ESTONNÉ
Truant, dy,
ozes tu semer telz langages,
truant plus que ratruandy?
BRUYANT
20850 Paillard plus que rappaillardy.
MALCUIDANT
Fy du faulx trahitre enchanteur.
BRUYANT
C'est dommage qu'on ne l'ardy
passé dix ans, ce faulx barteur.
DRAdON
Fy du larron.
GUEULU
Fy du menteur.
ESTONNÉ
S0855 Fy du desleal garnement.
BRUYANT
Fy du plus mauvais scducteui'
qui soit dessoubz le fii'mament.
CAYPHE
Avant, compaignons, hardiment!
abillez le com vous sçavez.
20807 examiner Le faille (sic) C. — 20812 autretant B. C. — 20814 la numrjue lî. C. — 20826 Fiat nons nous v B. C. —
20827 liphe B. — 20828 brighe B. rebriche C. — 20844 qui sont sages A. — 20846 Kt au peuple presi'licr fralroulages
t,\ — 20847 L'indic'Hio'i scèuniu-c n'rxt pnx placée de mrme dans les ît inss. — 20S50 rapparlarJy A. — 20853 baraleur
C. — 20850 plus l'aulx C. — iOSiS roidement C.
TIERCE JOURNEE
273
MAI.CUIIlANT
Î0S60 Nous 1(! combaloiis roidcmciit.
JHEROBOAN
Avant! coinpaigiions, hardiment!
livi'tv. lo a peine ot a tormcnt
sans flcschir, congé m ave/..
JIAt-CUS
Il a (les coups si largement
20805 qu'il a, ce croy, les yeux crevés.
CAYPHE
Avant, conipaignons, hardiment!
abillez lo com vous sçavez.
Se je voy que voua y faignez,
larronceaux, je vous feray prendre.
BRUYANT
20870 Et puis après cela, quoy ?
CAYPHE
Pendre
a ung gibet pies contre mont.
BRUYANT
Sy ne nous y faindrons pas dont,
mes qu'il ne tiengne qu'a cella.
Estonné, prens lo par delà,
20875 asscons le cy tout en bas,
et puis nous prendrons nos esbas
a luy croqueter sur la teste.
ESTONNÉ
Seez vous cy, soi'cier deshonneste,
faictes un humiliatc.
20880 Fy !
MALCUIDANT
Qu'as tu ?
ESTONNÉ
Il est tant gasté
de cracher amont et aval
que le cueur me fait très grant mal
a le regarder en la face.
DRAGON
C'est très mal dit, saulve ta grâce :
|î0885 ce mot la luy est par trop beau.
ESTONNÉ
A le regarder ou museau,
veulx tu que je l'appelle ainsy ?
DRAGON
C'est bien dit.
GUEULO
Hé ! laissez cecy :
vous fondez ung maigre débat ;
[î0890 il est demain jour de sabat:
ho ! com|)aignous, advisons nous.
MALCI'S
Pour ce fault il qu'il soit escoux
ung peu plus solemnellement.
BRUYANT
Je veil sçavoir premièrement
20895 dont on veult que nous le batom.
JHEROBOAN
De poingz?
BRUYANT
Mes de bons gros bâtons:
sy ne nous blesserons pas tant.
ESTONNÉ
Or frappons sur luy a tâtons.
MAI.CUIDANT
De poingz?
ESI ON NÉ
Mes de bons gros bâtons.
DRAGON
20000 Ha ! compaignons, nous nous gâtons :
rifflou^" sans aller caquetant.
GIEUI.U
De poingz?
DRAGON
Mes de bons gros bâtons:
sy ne nous blesserons pas tant.
GUEULU
Tout en jouant et esbatant,
20905 je luy asserray ceste prune.
MAIXiUS
Et comme v;ullant combatant,
je luy en donray aussi une.
BRUYANT
Et dea, puisque chacun le paye
si serré, il fault que j'y voise :
80910 a ce coup faut il qu'il cs-saye .
ung petit combien ma main poiso.
MALCUIDANT
Par les patins Dieu quel jorroise !
oncques coup ne fut mieulx assis.
BRUYANT
Luy en donray je jusqu'à six
20315 d'ainsi faictes pour desjeuner?
DRAGON
On le pourroit bien desjeuner
de plus joyeulx raotz pour l'anaordro.
GUEULU
Dea, Bruyant, tu no tiens pas d'ordre :
tu y vas ung peu trop on haste.
2C8fi3 en auant A. — 208611 penJrn C. — 20S71 les pieï C. — 20872 y matique A. C. — 21S79 Fiiicloz y C. — 20880 lia de
Spnr le deable fy C. — 2l)SSI El dccrarhe ainont aual A. — 2088'. sauf vostre A. — 208P6 I)e bons poinpi C. — 208J8-99
I mnniuent C. — 2S9()i et en mocquant B. C. — 20906 Comment dea C. villain B. — 20910 E. Que veux lu U. je vueil
j quil essaye B.— 20915-16 m;m7«oi« A. — 20917 De si fois pour le mieulx amordre A.
Pas. 18
274
MISTERE DE LA PASSION
20920
20925
20930
ESTONNE
Voiro encore qu'il a la pâte
dure comme ung maillet de fer.
DRAGON
C'est la pâte au deable d'enfer :
elle rompt tout ce qu'elle ataint.
GUEl'LU
Ce villain cy est tout estaint
et tout difforme do figure,
et pour peine ne pour bature
il ne murmui'e ne se plaint.
CAYPHE
Que fait Malcuidant?
BRUYANT
11 se faint ;
je croy qu'il quite la parture.
MALCUIDANT
Et Dieu t'envoist maie adventure!
me vas tu Laillier ce reffraint?
EsTONNÉ
Ce villain cy est tout estaint
et tout difforme de figure.
DRAGON
11 a le groing trop bien empraint :
20935 il y appert mainte escripture.
GUEULU
Ce n'a pas esté sans hurtuie,
il a bien lourdement restraiut.
JHEROBOAN
Que fait Estunné?
MALCUIDANT
11 se faint,
je croy qu'il quite la parture.
ESTONNÉ
20940 Et Dieu t'envoist maie adventure!
me vas tu baillier ce rcflfraint?
BRUYANT
Il a le visage si taint,
si enfflé et si bien nourry,
que ce samble ung nieseau pourry,
20945 tant est let et deffiguré.
ESTONNÉ
11 est laidement painturé :
j'ay grant horreur du regarder.
MALCUIDANT
Gela est bon a admender ;
Estonné, n'es tu non plus sage ?
ESTONNÉ
80950 Gomment?
MALCUIDANT
Mussons luy le visage,
qu'on ne le voye tant soit peu,
et puis je sçay ung très bon jeu
a quoy nous nous occuperons.
ESTONNÉ
Quel jeu est ce ?
MALCUIDANT
Nous frapperons
20955 sur sa teste jusqu'au brisier ;
si luy ferons prophetisier
qui luy ara baillié la touche :
l'accordez vous ?
ESTONNÉ
Quant a moy touche,
j'en suis content. Or regardez
209Ù0 s'il a pas les yeulx bien bandés :
on ne luy voist nez ne menton.
DRAGON
C'est très bien dit : la les veut on ;
il n'y a que de frapper sus.
GUEULU
Or nous prophétise, Jhesus,
20965 qui t'a baillé ceste merolle.
BRUYANT
Par mon serment, il l'a eu belle :
tu as fait la cloche lever.
GUEULU
Il n'y sçaroit moyeu trouver,
il a sa science pardue.
ESTONNÉ
20970 Non a, mes elle est descendue
en son talion, tout en ung coing,
tellement quant vient au besoing
il ne s'en ayde pou no grant.
MALCUIDANT
Or prophetize maintenant
20975 qui t'a baillé cest horion.
DRAGON
Tu es tant sage et advenant :
or prophetize maintenant.
GUEULU
Je sçaray tout on ung tenant
se son sens vault un porion.
20980 Or prophetize maintenant
qui t'a baillé cest horion.
BRUYANT
Il nous songe icy le moron,
nos fais ne luy samblent que truffe^ |
resveillons le.
20924 ribault... destraint C. — 20928 fais tu B. G. — 20930 mal dauenturs B. G. — 20933 la ligure C. — 20938 fais tu G.
— 20g4r) poincture B. — 20947 de y G. — 20956 adeuiner G. — 20965 mezelle B. — 20967 la bosse lacer C. — 20971 joinct
B. — 20979 potiro B.
TIERCE JOURNEE
275
ESTONNÉ
De quoy?
BRUYANT
De liuffes ,
20985 tant que nous pourrons ramonnor.
MALCUIDANT
Pour raplatir ses grosses juffes
resveillons le.
DRAGON
De quoy?
MALCUIDANT
De buffes.
BRAGON
Et dea, Malcuidant, lu te truftes,
tu ne fais point tes coups sonner :
20990 resveillons le.
GUEULU
De quoy?
DRAGON
De bufl"es.
tant que nous pourrons ramoner.
Tien, tien.
BRUYANT
Tien, tien, va sermonner
et puis te fais appeler Grist.
CAYPHE
Hola ! conipaignons, il soufût ;
80995 cessez hardiment ce débat ;
ce que voua faictes n'est qu'esbat :
il en fault abréger la court
et tiaictier sa mort le plus court
que nous pourrons, c'est notre entente ;
21000 le batrc riens ne nous contente
se la mort ne vient en suivant.
, JHEROBOAN
Tant qu'il soit sur terre vivant
au cucur ne serons resjouys.
CAYPHE
Qu'en dittos vous, soigneurs juifz,
21005 de ce malheureux séducteur ?
n'avez vous pas ung beau ducteur
et ung endoctrineur notable ?
vous voyez la fin miseraljlc
a quoy il fault qu'il soit mené.
SAI.MANAZAR
21010 C'est ung mauvais bons forcené ;
mettez l'a mort comment qu'il tourne.
PHARES
Le peu[)le en est si fort mené,
gardez que jainés no retourne.
NEMBROTH
Toute la loy gaste et destournc,
81015 si nous veult do son erreur paistre.
EMILIUS
Ainsi va qui ainsi s'atourne :
péché ront le col a son maistre.
CAYPHE
 ce que de vous sentons naistre,
nos bons citoiens et amis,
81020 vous tous consentez qu'il soit mis
en la main de Ponce Pilato ?
CELSIDON
Il n'est arae qui y debate :
nous le requorous a puissance,
affin qu'il nous faco vengence
81025 des maux qu'il nous a apportés.
CAYPHE
Il vous sera fait, n'en doublez,
et Tarez tout a vostrc vueil ;
car oncques no voulus ne veil
contredire a vostre désir.
21030 Sergens, tost venez moy saisir
ce malfacteur cy par sa chappe,
et gardez qu'il ne vous eschappe
sur grans peines que vous arez.
BRUYANT
Qu'en ferons nous ?
CAYPHE
Vous l'amenrez
21035 après nous, le vous faut il dire ?
ESTONNÉ
Nostro maistre est douleur plain d'ire,
je ne sçay que dcablo il y fault.
MALCUIDANT
Et c'est par ce villain marpault,
a qui Dieu doint sanglant mal an !
CAYPHE
81040 Naason et vous, .Iheroboan,
Eliachin, Bananias,
Jacob, Ysacar, Pellia»,
Nachor, Mardocee, Nathan,
Jorran, sire, et vous, Joathan,
21045 si vous plest, de vo courtoisie,
venez moy tenir compaignie
a parfournir ccstc besongue,
car très grandement je ressongne
que n'en venons a nostre honneur.
JHEROBOAN
2iœo Très hault prince et puissant seigneur,
a vostro command le ferons.
81005 m«lheure B. — 21012 tips fort ponc B. C. — 21015 Et nous fait A. — 21019 Mes vous C. — 21028 Et aussi
croy que point ne vueil O. — 21033 Sur la peine désire enfferrez B. C. — 21036 doUnl C. — 21038 pour ce B. trayant
crapault C. — 21043 niardoceus A.
276
MISTERE DE LA PASSION
et grandement joyeulx serons,
se vos vouloirs sont assouvis.
Mes veez cy qui m'estoit advis :
21055 Anne, vostre prédécesseur,
est ung bon conseillier et sccur
qui a vcu beaucop de procès
do grans et terribles excès.
Si seroit bon qu'il y venist,
21000 affin que la main y tenist
quand se vendra a l'accuser.
CAYPHE
Ou ne sçaroit mieulx deviser :
il est moult honorable et vieulx,
dont le juge nous croira mieulx
21065 quand nostre rapport entendra.
!Maucourant ?
MAUCOURANT
Sire.
CAYPHE
Il te fauldra
quérir Anne tout prompteracnt,
et luy dis que présentement
se viengne rendre brief et tost
21070 dessus Pilate le prevost,
et que pour la cause qu'il scet,
il nous truuvei'a plus de sept,
illec attendans pa venue.
MAUCOURANT
Se mon entente n'est pardue,
21075 vous en orrez nouvelle brief.
Qu'on a de peine et de meschief
a servir ces seigneurs icy !
puis qu'ilz ont ung peu de soucy,
variez ne font que troteler.
CAYPHE
21080 II est temps de nous en aller :
le prevost est levé, je croy.
Seigneurs, mettons nous en arroy,
allons nous en tousjours devant.
Sergens, faictes marcher avant
210S5 ce malfacteur, entendez vous ,
et vous en venez après nous
sans plaidier : il n'est pas saison.
MAUCOURANT
Je croy que veez cy la maison
ou Anne tient sa manandie:
21090 il est grant temps que je luy die
mon message sans plus parler.
Sire, Dieu vous veille garder
et dcffendre vo corps de mal !
le gi'ant prince fai'crdota',
21095 aconipaigné des citoiens,
des scribes et pharisiens,
vous prie que plus n'attendez
et que tout surpiez vous rendez
dessus Pilate le grant juge.
ANNE
21100 Qu'i font ilz?
MAUCOURANT
Hz vont a refuge
pour ce moschant.
ANNE
Ho ! je l'entens,
c'est la chose a quoy je contendz
plus qu'a nulle chose qui soit.
MAUCOURANT
Il ne m'en chault, comment tout voit,
21105 mez ilz m'ont dit qu'après cela
que pour vray les trouverez la :
pourtant venez y, si vous plest,
et vous hastez.
ANNE
Je suis tout prest.
Ça, mes gens, chargez ces bâtons :
21110 il fault que nous nous esbatons
d'aller le grant pas et ysnel
dessus le prevost criminel ;
il me samble qu'on nous y huche.
ROUI.LART
C'est signe qu'il y a embûche
21115 puisqu'on nous mande a l'assemblée :
ilz y ont mené a l'emblee
hardiment ce frère frappart.
DENTART
Le sanglant gibet y ait part 1
nous en avons beaucop de peine.
JUDAS
21120 \'oy la mon maistre qu'on admaine
assés piteusement traictié,
et m'est advis que son traictié
piteusement se chevira
et que la mort s'en cnsuira :
21056 hault justicier B. C— 2105S Et de grans fais lî. C— 21Ù6C .1/. liau monseigneur C— 21069 bien et B. C— 21070
En lostel B. — 21074 paruenue C. — 21079 vadeler B. brider C. — 21081 Et nous amenez quant et quant G. — 21089
iiialandie C. — 210.)3 le corps B. G. — 21100 Quils l'ont ilz A. — 211C1 hola C. — Ï1102 pretens A. — 2U20 oninaine B.
— 21123 se portera C.
TIERGR JOURNEE
277
811Î5 il n'y a romcdo a son fait.
0 mauvais meurtrier qu'as tu fait ?
cueur dosleal qu'as tu pensû ?
que t'es tu meffait ?
qu'as tu oft'cnce ?
ÏU30 tu as commancé
un si grant meffait
que jamès n'en seras reffait
ne l'innocent rcscomponsé.
Par mon mauvais cucui' et terrible
81135 qu'oncques bien ne voust concevoir,
j'ay fait l'oftcnce plus horrible
que jamès oeil peust parcevoir :
le juste innocent et paisible
ay fait par fraude docevoii',
21140 et cuido qu'il n'est pas possible
de jamès pardon recevoir.
Saint homme juste et diligent,
Jhesus ou tous biens sont compris,
je fus de ta gcnt
81145 jadis et me pris;
et or pour ung pris
de meschant argent
mon pervers cueur et négligent
t'a vendu ; c'est par trop mespris.
81150 Maudite et perverse pecune,
quel bouche asscs te maudira,
cause de dueil et do rancune
et en qui tant a maudire ha ?
maudit soit le serf de fortune
21155 qui de la terre te tira,
quand par toy tel dcil me fortune
que jamès ne me partii'a.
0 maistre de vraye doctrine,
jadis a ton escoUo fus,
2U60 haulto discipline,
non pas de reftus ;
mal y entrcfus,
je n'en suis pas digne,
quand par ma trahison maligne
21165 je m'en party triste et confFus.
Ha ! chault brasier de convoitise,
plus ardant que brandons de fer,
qui cueui's humains brase et atize
d'estincelles de feu d'enfTer,
81170 de quel ardeur as tu esprise
ma volenté pour l'envorser ?
tu m'as adressé la poui'prise
d'enffor pour sans fin converser.
J'ay horreur de toy poBsessor,
21175 faulce pecune misérable :
tu m'as fait faire oeuvre de dcablo
dont jamès quitte ne seray;
pourtant je te repporteray
a ceulx qui de toy me doueront
81180 et qui les moiens me donneront,
dont condampné me trouveray.
Icy s'en ta Judas pour reporter l'arijent ;
item vient Saint Jehan a Nostre Dame.
8. JEHAN
Ma maistresse, je vous diray
nouvelle qui de mal lieu vient
et me poise bien qu'il convient
21lS> que j'en soye le messager :
nostre maistre est en grant danger;
ces desleaulx Juif/, le tiennent
en leurs mains, dont aucuns maintiennent
qu'ilz ont a sa mort pris adveu.
NOSTRE DAME
fl
21190 0 Jehan, mon très amo nepveu,
le sçavez vous de vérité ?
s. JUHAN
Oy, ma dame, j'ay esté
en sa compaignie tiusjours
jusqu'atant que les traictours
21195 le vindrent saisir au jardin
ou Judas monstra le chemin,
et alors, nous qui la estions,
pour la mort que trop redoubtions,
nous tournasmes tretous en fuite ,
81200 voyans qu'a si forte conduite
nous ne pourriesmes résister.
De la l'ont venu présenter
devant Anne le vieil pontiphe ;
de la l'ont mené a Caypho
81805 ou il a souffert, comme on compte,
largement de peine et de honte,
sans qu'en rien se soit deffendu ;
et maintenant j'ay entendu
qu'ilz le mainent par grant fureur
81810 sur le prevost de l'empereur
pour l'occire de mort honteuze.
NOSTRE DAME
Yeez cy nouvelle moult piteuse
qui au cueur me touche tant fort.
81128 Comment ti'g tu C. — 21120 Lns tu C. — 21155 dira C. — 211C5 traite et A. — 21179 donnèrent B. C. — 21181
ley gecte Juilas l'ari/enl i(a:r Juif:, etc. C. — 21187 si le A. — 211!<9 rimci u C. — 21191 bien pnr vi-rite A. — 2H94
jusques a A. C. — 21200 force conduite B. — 21Ï01 Noua ne pourrions B. C. — 21£02 lonl aie B. fui mené C. — 81803
lancien B, C. — 21213 griefuc B. C.
278 M I S T E R E
qu'il n'y a moyen de conffort
21815 si non do moy mettre en prière
devant la divine lumière,
qu'elle me veille conserver
et mon cher enffant préserver.
0 Dieu glorieux,
21220 0 père piteux,
0 divine essence,
qui de vostro doulce clémence
m'avez eslargi et donné
Filz tant beneureux,
81225 filz tant précieux,
de toi prefFerenoe
qu'il est une magnificence
avec vous du tout adonné.
Luy estant es cieulz
21230 ains qu'il fust mortieulz,
j'ay ferme credeuce
qu'il estait en vostre présence
sans estre a moy habandonné :
Or m'avez fait mieulx
21235 car mes heurs sont ticulx
que j'y ay part en ce :
si vous requier pour sa delience
de tant qu'il me fust ordonné.
Quand tel grâce vers vous conquis,
81240 ce fut vostre bonté divine
par quoy ce haultain filz acquis
qui vostre estoit sans nul termine :
si dis qu'a bonne heure uacquis
d'avoir ung filz de si hault signe ;
21245 père, oncques ne le vous r'equis,
n'oncques ne m'en repputay digne.
Et donc, mon père divin,
qui ce filz doulx et béguin
très enclin
21850 M'avez donné sans requeste,
a ma prière et affin
qu'il me soit tousjours affin
jusqu'en fin,
f Rendez le moy, c'est ma queste :
81855 je ne quier aultre conqueste,
je n'ay trésor ne acqueste
fors que ceste
Qui se rend a vos commandz ;
dont je le vous recommandz,
21860 aultrement sa mort est preste.
0 père du ciel triumphant,
DE LA PASSION
ivueilliez huy garder mon enflant
de ceste gent dure et villaine,
et se la délivrance humaine
21265 se peust trouver par aultre voie,
vostre doulce grâce y pourvoye
comme il est en vostre puissance :
pour vostre haulte obeyssance,
a quoy vostre filz veult contendre ;
21270 il ne contend a soy deffendre
du peuple qui l'a onvay.
Mon très doulx Dieu, pourveez y,
par voie plus expediente.
GABRIEL
Noble maistresse et reverente,
81275 pour Dieu car vous reconfibrtez
et tout paciamment portez
quant au fait du benoit saulveur,
vostre filz et nostre seigneur :
aultreffbis vous a il bien dit
21280 qu'il fault qu'en piteux contredit
il se voit a la mort livrer
pour le gendre humain délivrer,
par quoy vous ne pouez venir
a vostre requeste obtenir,
21285 mes grant conSbrt pourrez avoir
de moy, car je feray devoir
vers vous et vous conflbrteray
en vos dueilz ce que je pourray,
et seray en vostro avantgarde.
NOSTRE DAME
81290 Gabriel, ma très chère garde,
certes je ne m'en double mie.
Madelaine, ma doulce amie,
et vous mes seurs bonnes et belles,
avez vous ouy ces nouvelles
21295 qui me font au cueur grant couri'oux?
que vous samble il ? que ferons nous ?
lerrons nous mon cher filz mourir
sans l'assister ne secourir
en sa passion très amere?
21300 Compaignez la dolente mère
qui de dueil ne scet ou vertir.
MADELAINE
Je ne pourroie consentir
que sans moy feissiez deppart.
MARIE JACOBY
Je vous suivray en quelque part
21216 lineffable B. G. — 21235 oueurs A. jours C. — 21236 ny A. couqueste C. — 2125S se règle B. G. — 21875 car] que
A. G. — 21282«ianîiieB, -81289 sere B.— 21296 sembil B, — 21303 vous feissiez A. — 81304 par toute part B, ma ^ue C,
TIERCE JOURNEE
2)305 que VOUS allez, quoy qu'il adviengne.
MARIE SAI/)MK
La graco de Dieu nous surviengne
et nous doint tics bien adresser !
Icy s'en vont vers l'ostel Pilate.
879
CAYPHE
Barraquin, il te fault dresser
nostre chemin brief et en haste.
HAURAQuix, huissier de Pilate.
21310 Que vous fault ?
CAYPHE
Monseigneur Pilate
n'est il point en place sailly
ou nous puissions parler a ly,
tant seidement ung mot ou deux ?
HARRAQUIN
\'ous estes forment matinculx ;
21315 mes quel besongne vous achasso
maintenant ?
ANNE
Nous voulions qu'il face
ung petit exploit de justice
qui ressoitist a son office :
or le va quérir bien subit.
BARRAQUIN
81320 Je croy qu'il soit encor au lit,
affln qu'il n'y ait point d'estrif.
CAYPHE
Dis luy que le cas est hatif
et qui bien luy compotera.
BARRAQUIN
Je ne sçay s'il s'en hastera,
21325 mes je luy diray sans séjour.
Monseigneur, Mars vous doint bon jour
et la grant déesse Venus !
Veez cy tous ces Juifz venus
et leurs princes sacordotaulx
21330 qui sont plus enfilés que crappaux :
je ne sçay qu'il y a a dire.
PILATE, prevost de Jherusalem.
Est ce bien la parlé, beau sire?
tu monstres bien que tu sces peu :
se tu eusses quelque bien sceu,
21335 on eust ung peu d'honneur de toi.
2130j Et no vous l.iirray quoy quil vienpno B. man
2f3i3 chaîne B. cUieje C. — 21 iJO qui vient C. —21359
Or leur va dire de par moy
que je vendray tout maintenant.
BARRAQUIN
C'est pour ung cas qui est bien grant,
ce me samble a ce qu'on en voit.
PILATE
Î1340 Ne te ehaille pourquoy ce soit ;
dis leur seulement que je vien,
s'appareille sur toute rien
ma chayere honorablement ;
si metz des tappis largement
81345 comme tu sces qu'il sera bon.
BARRAQUIN
J'entendz très bien vostre sermon ;
venez, vous trouverez tout prest.
Seigneurs, attendez, s'il vous plest
ung bien petit, il le convient.
81350 Voicy monseigneur qui s'en vient
mes qu'il aist atourné son corps :
s'il vous ennuyé la dehoi's,
que n'entri'z vous en ce prétoire?
MARDOCEUS
Il est en nostre loy notoire
21355 et serimonies avons
que pas faire ne le devons,
car ceste nuit devons manger
la Pasque : si aroit danger
que poui' ce ne feussions poilus.
PILATE
21360 Seigneurs, reverance et salus
vous doint le Dieu que vous tenez !
Qui est ce que vous m'admenez
maintenant si hastivement ?
est il malfacteur ou comment ?
81365 quelz accusacions en somme
apportez vous contre cest homme ?
de quelz meffais le chargez vous ?
ANNE
Vous en pouez attendre a nous
que s'il n'estoit gi-and malfaicteur
81370 et de grans maulx perpetrateur,
nous ne feussions pas traveillie
de l'avoir en vos mains baillié :
cause y a jilus que ne pensez.
CAYPHE
Juge, tu peulx entendre asaés
21375 que cest homme de feulx alloy,
'lue C— 21316 sni-he 1). - 21328 t^3tous A.
Se pourtant 13. 0,
■ 21389 poures B.
MISTERR DE LA PASSION
21380
81385
81390
maudit de Dieu et de la loy,
n'avons pas icy admcné
qu'il ne soit bien examiné
d'examiuacion bien foitJ
en tant que nostrc loy coniport?,
et avons fait giant diligence
d'enquérir de sa griefve offence :
très digne de mort le trouvons,
mes pour ce que pouoir n'avons
de l'occire et expédier,
maxime de crucifier
(a quoy de tous poins contendons),
nous te le livrons et rendons
pour sentencicr du meffait.
PII.ATE
S'il a en vostre loy meffait
et commis aucuns cas de cr snies,
que ne le prenez vous meisnu s
et par vostre loy no jugez?
JHEROUOAN
Nous voulons que vous l'abiege/,
81395 car comme vous dit nostre maistre,
la mort a quoy le voulons mettre
ne chet point en nostre sentence.
P1LA.TE
Donnez moy doncques advertance
de quclz maulz s'est voulu racsler :
8l'i00 d'arrêter sur votre parler
ce n'est point mon intenciou.
CAYPHE
Nous avons accusacion
de fait tout certain et prouvé.
Et premier, nous l'avons trouvé
214(fô nostre peuple subvei tissant
et faulcement pervertissant
nos tradicions paternelles,
preschant et sermonnant contre elles,
cueillant familles et meignies
qui nos haultes ccrimonics
vueullent cmpescher et enfraindro.
Secondement, il veult contraindre
le peuple par autres abus
qu'ilz ne payent point de tribus
qui sont deubz a très grosse somme
a César, l'empereur de Romme ;
et dit que les Juifz sont francs
et qu'a tort les sommes soufFrans.
Et tiercemeut, qu'cncor vault pis,
81420 il se nomme roi des Juifz
81410
21415
que par raison ne doit ne peust.
Lesquelz cas se nyer les veult,
nous avons pour probacion
une belle informacion
81425 toute prouvée par tcsnioingz.
PILATE
Quoy qu'il soit des deux jircm'ers poins,
le tiers que vous m'avez noté
est cas de leze majesté,
car l'imperateur des Rommains,
81430 mon maistre soubz qui je remains,
toute la terre de Judée
a de royaulme defibndee
et divisé en trois parties
lesquelles sont trois tctrarchics,
21435 et quand en ce point la party,
il décréta en ce party
que quiconques roy se diroit
briefment de mort le pugniroit;
par quoy je me vueil appiestor
81440 sur ce point cy pour enquester
s'il a ceste presumpcion.
Icy interrogue Pilate Jhesus a part au prétoire.
Homs de fi'esle condicion,
il fault que tu soies ouys :
Te dis tu le roy dos Juifz?
81445 usurpes tu le nom de roy?
JHESUS
Est ce de toy que tu le dis,
ou s'aultrcs le t'ont dit do moy ?
PILATE
Que sçai'oy je parler de toy ?
je ne suis pas de ces partis,
21450 pourquoy de rien ne te congnoy
s'aultre ou toy ne m'en advertis.
Se tu presches ou pervertis,
se tu as usé mal ou bien,
penser dois que je n'en sçay li; n :
21455 Juif ne suis pas de naissance,
ce que je dis c'est a l'instance
des pontiphes et de ta gent
. qui t'accusent publiquement
d'estre malfaicteur desloyal
21460 et usurpeur de nom royal ;
je ne sçay pas se si grant nom
t'appartient, je pense que non :
81379 très forte C. — 213S2 Do scrutiner B. De seauoir et oyr de C. — 2138S baillons A. — 21397 vostre A. — 21102
Presche et sermonne A. B. C. — 21417 Car il A. - 21420 le roy A. — 21432 Est de ce royaulme fondée C. — 21436 11
diuisa et depparty A, — 21459 arrester Ç, '- 21444 estre roy A. -- 81453 ouurç G. -r- 81455 Je ne suis pas A. — 2140
cuide C.
T 1 !•: R C E J 0 U R N E K
281
c'est ou ma demande so fonde.
JHRSUS
Mon rcgno n'est pas do ce monde :
SHK) Be mes hault >sses y estoient,
mes ministii's bataiUi'ioient
que les Juil'z n'eussent l'ottroy
de nioy tenir.
PILVTE
Tu es donc l'oy?
(Iqui bien recueille tes dis,
21470 Is'eusuit très bien.
JUESUS
Tu le dis,
et m'as le nom do roy doimé ;
et pour ce suis je au monde né,
pour porter en tout mon langage
a vérité vray tesmongnage :
ei'i75 tout vray suppost d'humanité
qui tient la part de vérité
volentiors escoute ma voix.
PlLiVTE
Puisque la vei'iti' congnois
et que si fort advery t'as,
giiSO beau sire, guid est veritas?
Jcy se Itère Pilote et vietit dehors bien en haste
et dit aux Juifz :
Seigneurs Juifz et gouverneurs,
qui pour pugnir vos malfaicteurs,
pour juge m'avez suljrogué,
j'ay ce povre homme interrogué
SUKJ de qui la mort avez requis
et examine' et enquis
de son fait au mieulx que j'ay peu,
mes je ne trouve tant soit peu
qu'il soit coulpable des péchés
|U90 dont l'accusez et l'empeschez ;
il me samble bonne parsomio
et oroy que vous feriez aulmonno
de le laisser pour tel qu'il est :
se sa vie trop vous desplest,
jl<95 qu'il soit bany pour son trespas.
C.^.YPHE
Ha ! prevost, il ne soufflt pas ;
cela n'est pas solucion :
il a fait grant conimocion
pour soy faire roy promouvoir ;
JI500 il a fait le peuple csniouvoir
et diviser a grant mesleo
puis la terre do Galilée
jusque» cy, qui trop nous reinord.
C'est ung homme digne de mort,
21505 dcsloyal et suspicieux,
querant moyens sedicieux,
brouUeur, noiscur et scismatique,
qui est contre le bien publique
s'il cschappe par ce moyen.
PILATE
21510 Puisqu'il est donc Galileen,
en tant qu'il touche ceste marche
c'est a Herode le tetrarchc,
a moy riens : je n'y ay que voir ;
mes pour acquitter mon devoir
21315 et monstrer qu'a vous amour ay,
très volentiors luy envoiray
de tous ces cas icy chargé,
affin que par luy soit jugé
s'il a peine ou moi't desservye.
JHEROBOAN
21580 Vous tenez sa mort et sa vie :
n'estes vous pas prevost commis
pour pugnir tous les ennemis
de l'empereur ? donc puisqu'on trouve
cest homme faulx et qu'on luy preuve
21525 souffisamment, cause n'y voy
qu'il faille user de ce renvoy :
advis m'est que c'est ung jamès.
PILA.TE
Quant est a moy, je m'en desmés :
soie puissant ou non puissant,
81530 Herode est assés suffisant
pour en faire pugnicion ;
c'est de sa juridicion
et je ne l'emposcheray mie.
Barraquin, huche ma mcignie,
21535 fais les moy cy saulter avant.
BARRA.QLIN
On les laisse dormir devant,
car ilz sont encore en leurs plumes.
PILATE
Je t'en croy, ce sont leurs coustumes
de dormir belle matinée.
BARRAQUIN
21540 Griffon?
GRiFKo.\, premier tirant.
Hola!
11467 neussenl pas A. eussent B.— 21476 voye de A. — 21479 aduerty A. B. C. mas A. — 21493 proiiiocion A.
ay ay riens (juc C. — 21515 amour a vous B. — 21530 laisser G.
91513
282
MISTERE DE LA PASSION
BARRA QUIN
Malle journée
te vueille envoyer Tervagant !
Vêla monseigneur tout vagant,
aussi esseullé qu'ung vielz chien,
et tu dors cy?
GRIFFON
Et je croy bien:
21545 suis je trop petit pour ce faire?
BARRAQUIN
Glaquedent?
CLAQUEDENT, deuxième tirant.
Bé, je vien, je vien.
BAnaxQuiN
Et tu dors cy?
CLAQUEDENT
Et je croy bien :
ne te chault, ce n'est rien du tien ;
ne sçay je pas bien mon affaire?
BARRAQUIN
81550 Orillait?
ORlLLART, troisième tirant.
Mes qu'as tu a braire?
BARRAQUIN
Monseigneur te huche, tien, tien :
et tu dors cy?
ORlLLART
Et je croy bien :
suis je trop petit pour ce faire?
BARRA (JUIN
Brayart, tu fais la le haussaire :
£1555 vendras tu parler au prevost?
BRAYART, quatrième tirant. ,
Est ce pour escumer le rost?
j'ay ma narine toute preste.
BARRAQUIN
Veez cy meignee bien honneste!
gardez cy, se Dieu vous secourt ,
21560 ung peu quelz escuiera de court 1
ilz samblent qu'ilz y soient nés.
GRIFFON
Va, va, .si te cliie en ton nez!
rigoles tu les compaignons ?
ou sera ce que nous irons ,
21565 affin que chacun y entende?
BARRAQUIN
C'est monseigneur qui te demande :
le vous ay je pas recité ?
GRIFFON
Monseigneur le preposite,
boita dies a ce matin !
PILATE
21570 Qu'est cecy, parlez vous latin,
maistre Griffes? ce sont beaux mots.
Ça, ça, entendez au propos :
il n'est point saison de baver;
pensez de mon vueil achever
21575 en la forme qu'on vous dira.
CLAQUEDENT
Nul de nous n'y contrctUra,
soit bien ou mal, damp président.
PILATE
Tu es ung vaillant, Glaquedent ;
oncques tel de bruhier n'yssi.
21580 Prenez moy ce meschant icy
en ce point que vous le voiez
et prestement le convoyez
sur Herode avec ces seigneurs ;
menez luy et vous tenez sceurs
21585 qu'il n'eschappe par quelque voie.
Dittes luy que je luy envoie
comme subget de sa justice
a celle fin qu'il le justice,
selon qu'il s'en informera.
GRIFFON
21590 Monseigneur, on le vous fera
en ce point que vous le voulez ;
Glaquedent, pren a l'aultre lez,
et l'admenons a nostre mode.
CLAQUEDENT
Ou pourrons nous trouver Herode,
21595 a qui doit estre présenté?
PILATE
Il est venu en la cité
pour voir la feste solemnelle.
BRAYART
Nous en orrons bonne nouvelle :
je sçay bien ou il est logé.
ORlLLART
21600 Or en ferons ung abrégé :
séjour ne nous est point licite.
Ghassez avant cest ypocrite
raidement, il en est saison.
ANNE
Seigneurs, puisque rien ne faison,
21605 au temple nous convient retraire.
21554 Brians C. le mun'/tie B. — 21557 ma iiiiou toute appreste C. — 81565 Ne nous fais point note truande B. C.
- 21572 entendons B. — 21579 de Ijruohier B. de bouclie C. — 21598 bien nouuelle G.
TIERCE JOURNEE
nés
CAYPHK
Nous n'y mettons point do contraire,
bien y avons a bosongner.
j'aray bien la char si hardie
do la ro|i|iortor on ung mont
aux. faulx nicui'di'icrs qui dcceu m'ont
iiee>i et sont cause de ma rancune.
JUDAS
Ha ! traitre cueur et mensonger,
quel trahison as tu batio?
21010 comment as tu tant pervertye
ta conscience pour gaigner
que de frauder et cngignci'
cil qui te tint de sa partie?
helas ! t'en estoit il mestier?
21615 Helas ! il t'aroit fait dos biens
autant ou plus qu'a tous les siens,
comment n'as tu eu souffisance ?
Tout se passoit par tes moyens,
les aultres n'en avoient riens
21020 se n'estoit par ton ordonnance ;
Et par ta misère et mescbance,
tu l'as este vendre aux faulx cliiens
qui ne quierent que sa grevance !
l'eccune de maie accointance,
21025 peccune a mal heure inolleo,
peccunc de sang vioUee
de qui trahison me chargea,
inauldit soit cil qui te forgea
et qui en trouva la manière !
21630 et mauldite soit la minière,
la terre et le lieu ou tu creus !
et l'heure quand oncques te creuz.
0 a quel port suis pervenu !
0 quoi horreur m'est advenu !
21035 o désespérée monnoye !
l'erreur de toy le cueur me noyé;
tu es pris de si haulte chose
qu'a peu se regarder je t'oze.
Puis je donc a repos cesser
2l6'i0 pour toy tenir et possesser ?
nennin : l'horreur de toy tenir
me veult de ce monde banir
et cnvoier avec le deable
au fons de l'enfer pardurable :
210A5 je n'attens mes que l'heure viengne.
Peccune, jamès ne te tiengne,
peccune, jamès ne te voie
car tu m'as adressé la voie
d'éternelle dampnacion.
210U) Je voy la congr'ogacion
des faulx Juifz que Dieu maudie :
21608 cueur trite G. — 21022 las astre B. — 81630 maniera C. — 81632 manque B. G. — «639 donc manque C.
21653 forluns B. C. — 21o50 exil C. — 21660 mais que nous touche il B. Ç.— 21001 Se tu as fait de toy C.
Seigneurs, tenez vostre peccune;
peccavi, helas! j'ay péché
et fait tant énorme péché
qui est cause de mon péril.
ANNE
21660 Quid ad nos?
CAYPHB
Que nous en chaut il ?
se tu as deUnqué par toy
ou fait folie, si la boy ;
ton fait a toy seul appertient :
boy le, car il ne nous en tient
21605 ne de toy ne nous doit chaloir.
JUDAS
Ha ! gens de terrible vouloir,
je vous ay livré en vos mains
le plus juste sang des humains,
et s'il fault qu'a la mort parvieugne,
81670 c'est ma coulpe.
ANNE
Bien t'en con viengne ;
fais en le mieulx que tu pourras,
de nous aultre conffort n'aïas ;
se tu as bien fait, a bonne heure ;
se mal as fait, mal te demeure
21675 et en descherras en l'ordure.
JUDAS
Helas ! voicy response dure.
Ceulx a qui j'ay fait grant plaisir
sont contens de mon desplaisir :
ne leur chault de ma marrison.
81680 Telle est la fin de traliison,
car quand ung trahitre déchet,
chacun se rit, s'il luy meschet,
et ma trahison decherra,
car en la fin m'en mescherra.
81685 D'icy me pars, car tant ra'ennoye
que se plus icy demouroye,
mon cueur tant gros se trouvei-oit
que de dueil il se creveroit :
ailUeurs m'en vois quérir pasture.
284
MISTEREDE LA PASSION
MARDOCEUS
Î1C90 Soigneurs, vous voicz l'adventure,
que nostre argent nous est rendu :
ayons conseil au résidu
pour trouver moiens et façons
qu'il est bon que nous en façons,
21C95 car le perdre n'est pas décent.
NAASON
Mon oppinion condescent,
veu le cas ou sommes submis,
qu'ilz ne doyvent pas estre mis
ou tronc avec les aultres dons
81700 qu'au temple donnons et rendons.
Que je n'ay cause après? sy ay,
car ilz ont sang apprécié,
et sont le pris de mort humaine,
par quoy la peccunc est villaine
81705 et indigne de si saint lieu.
ELIACHIN
James ne tourne a nostre preu :
aultrement villenés serons,
mes veez cy que nous en ferons.
Achetons en ung champ de terre
21710 auquel on enfoue et enterre
les povres pèlerins passans
aval les chemins trespassans,
et cest achat parconsommé,
Alchedemac sera nommé
21715 le jardin, pour cause certaine.
CA.YPHE
Vostre raison est bonne et saine
et de cela suis bien a vous.
BA.NANIA.S
Si sommes nous entre nous tous.
Ce Judas est mal tempesté :
21720 voiez comment il a gotté
l'argent par terre en rappoi-tant.
ANNE
11 n'y demourra pas pourtant ;
lever le fault et séquestrer
tant que nous puissions rencontrer
21725 marchant qui le champ nous delivi'e
21730
21735
et tient mon corps a si grant charge
qu'il convient qu'elle s'en décharge,
et ne quiert que moyens de faire
affin qu'elle s'en puist doffaire.
Leur très humaine compaignie
qui jadis fut d'amour unye
se tourne en portubacion,
en pleur, en lamentacion
tant que mon ame het son corps
et le corps l'ame ; et sont concors
de faire leur département
villainement et putement,
a douleur, a honte, a diffame.
217-10 N'y a que de trouver quelque ame
qui en face la deppartie ;
mon ame fust desja partie
s'elle eust sceu a qui recourir
qui en ce l'eust peu secourir.
81745 Mon ame, ou sçaras tu sercher ?
tu ne peulz mieulx que de hucher
tous les deables d'enffer dampnés,
ennemis a ceulx d'Adam nés ;
car se tu as vei's eulx recours,
21750 ne double point d'avoir secours :
n'y a que do les compeller
venir par force d'appeller
et vecy proprement la forme :
Terrible meignie et difforme,
21755 deables ou bas abisme enclos,
faulx e?pritz de gloire forclos,
gendre mauldit et misérable,
dampné sous peine interminable
qui jamès ne vous peust finer,
21760 venez, pensez de cheminer !
Venez, deables! venez avant,
venez aidier vostre servant
qui très hault vous huche et appelle !
venez sa substance mortelle
21765 tuer, destruire et exilicr
ou atout le moins conseillier
comment je m'en depescheray .
[Pose.]
JUDAS
Mon ame est si lasse de vivre
LUCIFER
Deables, oez : je prescheray
deux mos de gracieux devis.
21770 J'ay entendu, ce m'est advis,
la voix de nostre serviteur,
21701 cause bonne C— 21700 nostre] grant C. — 21710 seno C. — 21720 tant B. C. — 21734 pleur et B, G. — 21735
son ame A. et son recors C. - 21746 dinuocquer B. C. — 21748 a] et A. B. C, — 21*56 esperiz A. B. C. — 21761 ca B.
— 21767 despereray B,
TIERGK JOURNEE
285
Judas, le mauvais traditeur,
qm de l'orl-eur qui le rcmofd
a liaultc vois huche la niorf,
21770 si n'est anie qui iuy coinpollc ;
l'ung après l'aultrc nous ai>p<'llo,
mes nous no sommps pas trop loing
pour Iuy aidier a ce besoing ;
secourir Iuy fault a puissance.
81780 Saultoz dehors, Désespérance,
ma fille et mon très amtî gendre,
venez a mon servant entendre
qui nous tous appelle si hault
et Iuy bailliez ce qu'il Iuy fault
21785 comme vous sçavcz la manière,
et en estes bien coustumiere
de les admcner par trouppcaux.
DESESPERANCE
Père Lucifer, se j'y faulx,
jamès ne me veil voir en place.
[POSB.]
21790 Meschant, que veulx tu que je face ?
a quel port veulz tu aborder ?
JUDAS
Je ne sçay : je n'ay oeil en face
qui oze les cioulx regarder.
DESESPERANCE
Se de mon nom veulz demander,
21795 briefment en aras demonstiance.
JUDAS
D'où viens tu ?
DESESPERANCE
Du parfont d'enffer.
JUDAS
Quel est ton nom ?
DESESPERANCE
Désespérance.
JUDAS
* Terribilité de vangenco,
horribilitc do danger,
Î1800 approche, et me donne allcgence,
se mort peust mon duoil alléger.
DESESPERANCE
Oy, très bien.
JUDAS
Et dont t'advance
pour mes joui's maudis kallonger.
DESESl'EnANCB
Je suis preste sans deccvancc
ïisœi pour faire ton cas abréger.
JUDAS
Désespérance, beto horrible,
le samblo mon cas si terrible,
qu'il me tient le cueur nmor cy ?
DESESPERANCE
II est do ligier entendible
81810 qu'a ton péché est impossible
de jamès acquérir mercy.
JUDAS
Helas ! mon maistre est tant begnin
et a pardonner tant enclin,
se j'aloye mercy prier
21815 Le me pardonroit il ?
DESESPERANCE
Nennin,
car qui sert do couvert venin,
la mort le suit" pour son loior.
JUDAS
James no l'oys sermonner
fors de pardonner, pardonner :
81820 c'est signe qu'il ayme le don.
DESESPERANCE
Quand est de pardon ordonner,
jamès ne te le peust donner :
ung trahitre n'a point de pardon.
JUDAS
Helas ! voirment, je l'ay trahy
21825 et a son mand desobey,
mes pitié est en sa commande.
DESESPERANCE
Mes tu es de Iuy tant hay
que de t'ozcr vcoir devant ly,
oncqucs honte ne fut plus grande.
JUDAS
21830 11 sembleroit donc qui t'orroit
que pardonner ne me pourroit,
Iuy qui a puissance divine ?
DESESPERANCE
Jo confesse que si fcroit,
mes jamès n'y consentiroit.
JUDAS
21835 Et pourquoy ?
DESESPERANCE
Tu n'en es pas digne.
n r 94Tîfi innorane B. C. — 21780 mon espérance C.
21773 me C. - 21774 s» A. - 21775 Se A. Iuy «""«"l"» l^, ^'^^^cT^l^ maulx m»ul.U, C. - 21S04 Si fait
:^^\:':z.::Tri'-..m?LJ^c:-n^^^^^ --y c. - 8i.15ee.es „e„„i„ c. _ 8is8.t.o.
quest B. C.
286
MISTERE DE LA PASSION
JUDAS
Quand a moy, j'argue que si,
et pourroit estre soustenu,
car souvent il a dit ainsi
qu'il est pour les pécheurs venu,
21810 et se pour pecheui-s descendy,
et il a mon péché congnu,
puisqu'a tous sa grâce estendy,
je l'aray, il y est tenu.
DESESPERANCE
Or prenons la que du gré mien
21845 je confesse ta raison bomie :
entre péchés a grant moyen :
l'ung est petit, l'aultre foisonne ;
il n'en est nul tel que le tien
car il touche trop sa parsonno,
21850 par quoy s'il fait aux aultres bien,
cela ne te toit ne te donne.
JUDAS
Et quand mon ame se traira
vers la doulce vierge Marie
et sa douleur luy retraira,
21835 requérant mercy, je varie,
a son filz grâce m'acquerra
car elle est sa mère et s'amye,
et ce que mère requerra,
• le filz ne l'escondira mye.
DESESPERANCE
21860 Oncques tel rage ne conffis
se ton veil a ce condescent,
car filz et mère as desconffis ;
c'est a la mère tout récent
ne jamès tu ne l'assuffis
21865 pour prier mille fois ou cent,
car qui blesse le corps du filz,
le cueur de la mère le sent.
JUDAS
Tu fais doncques conclusion
que de mort doy estre ravy,
21870 comment j'ay fait confession
en tant que je dis : peccavi,
puis ay fait satisffacion
en tant que les deniers rendy,
et puis eus tel contricion
21875 qu'a peu que cueur ne me fendy ?
DESESPERANCE
Geste confesse instituas
sans devocion de pensée;
et tout l'argent restituas
non pas a partie offensée ;
21880 du contrire t'esvertuas,
mes ce fut par rage amassée ;
par quoy quanque brassé tu as
n'est riens : la fleur en est passée.
JUDAS
Et dont mon ame est toute au deable,
21885 a sa dampnacion ?
DESESPERANCE
C'est force.
JUDAS
Et dampnee au puis pardurable
ne du remédier n'ay force ?
Rage restiainte, redoubtable
rendant redoulilee renforce !
21890 rouge rage plus ragiable
que la rage qui me refforce !
Mort, mort que me tiens tu suspens !
vien moy tost ferir de ta dai'de :
je me repens, je me repens,
2)895 et Désespérance me larde.
DESESPERANCE
Il ne fault ja qu'elle frappe ens
de dard, mes tien toy sur ta garde,
et puis après va, si te pens :
vecy ung las que je te garde.
JUDAS
21900 Mourray je ainsi las
cstranglé d'ung las,
sans quelque espoir de soûlas ?
o désespérance, helas !
la celle as
21905 ou la mort me veult attraire !
Dueilz de tous estas,
me quierent a tas ;
convoitise, grant tort as
qui les moyens m'apportas
et notas
dont je seuffre tel contraire.
Las ! que doy je faire ?
me fault il deffaire ?
m'est ceste mort nécessaire ?
pitié, m'es lu advereaire
<jui reffaire
me deusses ains mon trespas ?
DESESPERANCE
Riens n'y vault le braire
n'a mercy rctraire
21920 va t'en brief par mort deffaire,
21910
21915
21836 que si manque B. — 21845 trahison C. — 21847 forcenne B. — 21853 Deuers B. — 21856 Que son filz B. Qua C.
— 21860 confus B. C. — 21865 une foiz C. — 21S76 Telle C. constituas B. — 21SS0 Contrii-tion csuertuas A. — 21881
par une B. C. — 218S5 coiidempnacion B. C. — 21888 destrainte C. — 21S89 redouble B. C. — 21S9t ma garde B. C.
— 21904 La semble as C. — 21920 ta mort portrairë B. C.
TIERCE JOURNEE
287
de ton bon gré voluutaire
faii'c et taire,
il te fault passer ce pas !
JUDAS
lit coiuraent ?
DESESPERANCE
No l'on (loubtc pas :
21925 je te monstrcray ))ieii les tours.
Or regai'do cy mes atours,
se je suis pourTeue d'outilz
qui sont a mon mestier soubtilz :
j'ay mon rasoii', mon grant Cousteau,
21930 n'a cil qui no soit bon et beau,
bien tranchant et de bonne forge
pour toy copper acop la gorge ;
s'il te fault dagues ou poinssons,
j'en ay de diverses façons :
21935 tiens cestuy cy, fiers en ta pence
bien serrement et si t'avence ;
voicy les cordes et çaignons
que j'appareille aux compaignons
pour oulx cstranglcr tout acop :
219'.0 choisis, car tu ai'rostes trop ;
bas le fer tandis qu'il est chault.
JUDAS
Puisque désespérer me fault
Cl priver de toute espérance
et que le don d'espoir me fault,
21945 je n'ay plus mestier d'assurance :
al)rege moy, Désespérance ;
il est temps qu'a ma mort entendes.
DESESPERANCE
Quel mort est mioiUx a ta plaisance ?
JUDAS
Je te requier que tu me pendes.
DESESPERANCE
21950 A celle fin que trop n'attendes,
ce las icy me chargeras,
et toy mesmes te penderas,
c'est le plus beau de ton mestier ;
et je t'aidcray volentier
21955 pour toy depescher plus en haste.
JUDAS
Sus doncl je requier qu'on se haste
ou mon cueur partira de rage ;
a quoi gibet me pondéra je ?
W Désespérance, qu'en dis tu ?
DESESPERANCE
21900 Voicy ung vieil sehur tortu
qui a des bi'anches largement
et te soustendra puissamment :
monte sus, et je t'ayd(,'ray.
JUDAS
A ce sehur me penderay
21065 et m'estrangleray par le col,
mes avant nouray le licol
pour abroger le domoui'ant.
DESESPERANCE
Est il bieu fait ?
JUDAS
A las courant,
et est fort pour porter le fais.
21970 Deabics horribles et deffais,
tourbe villainc et interdite,
orde compaignie et maudite
en enffer pardurablcment,
je ne fais aultre testament
21975 si non qu'en l'éternelle flamme
vous habandonne corps et aine
sans jaraès espoir d'eschapper.
BERICH
Affin qu'on ne me puist tromper
je suis content d'estre notaire
21980 a ce noble testament faire :
veez cy mon papier appresté.
JUDAS
0 grief ve ponderosité
de rage, qui cueur me depporte,
fault il que desormes te porte
21985 en éternelle desplaisance ?
haulte tour de désespérance,
bastillee de cris piteux,
couverte de pleurs dcspitcux,
enclose de mur pardurable
21990 forgé et fait de main de deable,
fossoyee de puis parfons,
d'abismes sans rive ne fons,
dont les salles pour tout soûlas
sont paintes tout de las, helaa,
2i9ffj attens moy, terrible manoir :
par- dedens toy m'en vois manoir ;
attens moy, très horrible gouffre,
car sans fin en l'eternal souffre
vois mourir de mort douloureuse ;
22000 attens moy, chartre rigoreuse,
fourneau rouge de feu ardant,
fosse de serpens habondant,
rivière de puant bourbier :
a mon grief duoil et destourbier
tiOOj par dedans toy plonger m'en vois ;
21921 mnnjw A. bon grief B. - 21936 jusquaU manche B. C. — 21940 Choisis brief lu B. G. — 21950-51 maniuent C.
— 21960 vielz sus G. — 21964 A cestuy oy C. — 2i970 manque B. — 21971 eompaigne interdicte B. — 21973 pardorables
U. — 21984 je porte C. — 219'Jl fossillec B. feSsiliee C. — 21993 salas B. — 21995 répété B. -» 21996 manque Bi G.
288
MISTERE DE LA PASSION
mes au partir a haulto voix,
deablcs, dont j'ay fait les commaudz,
et corps et ame vous commandz.
Jcy se pend Judas.
BERICH
Désespérance, chcre seur,
«2010 est il mort?
DESESPERANCE
J"attcns que le cueur
soit crevé et par niy party ;
et puis tantost sera sorty,
il s'en vendra; tira ■cia.
BERICH
Je ne sçay que diable il y a,
Ï201Ô je ne l'os pousser ne toussir,
et touteffois n'en peust issir
son ame; mes qui la retient?
DESESPERANCE
Haro ! je sçay Jùen a quoy tient :
quand le lourdier sa foy brisa,
22020 il vint et son maistre baisa,
et par ceste bouche maligne
qui toucha a chose tant digne
l'ame ne doit ne peust passer.
BERICH
Si luy fault la pance casser,
22025 fendre, et tous les boyaulx tirer,
affin qu'il puist mieulx expirer :
le veulx tu, ma seur (
DESESPERANCE
Je l'ottroie.
Courons nous eu, j'ay uostre proie ;
n'y a que de tirer pays.
très belles filles de Sion,
s'ame vous en fait mencion,
que le me vueillcz enseigner.
MADELAINE
Aucuns nous vuellent tesmongner
220i'i qu'il a esté mené tantost
devant Pilate le prevost,
lequel bien cauteleusement
s'est dcpporté du jugement
et pour mieulx trouver la manière
22(K0 il l'a fait ramener arrière
sur Herode, le fel payen.
NOSTRE DAME
Pour Dieu, que nous trouvons moyen
de le suivir, ma chère amye,
car je u'ay joye ne demye,
22055 se je ne sçay comment il va.
MARIE JACOBY
Helas ! oncques ne les greva
le bon seigneur ne leur nuysy,
et si le tormentent ainsi,
sans y avoir cause assignée.
MARIE SALOMÉ
22060 Hz ont de long temps machinée
sa mort et ja ne s'en te ndront
jusques a ce qu'ilz parvendront :
je requier a Dieu qu'il l'en garde.
NOSTRE DAME
Amen ! mes seurs, l'heure me tarde
220œ que nouvelle en puissions ouir.
[Pose.]
[Pose ]
NOSTRE DAME
22030 0 mauvais et fêlions Juifz,
peuple bany de vérité,
ou est mon cnffant transporté ?
Helas ! en quel lieu le querray ?
helas ! et ou le trouveray ?
22035 helas ! qui m'en dira nouvelle?
Lignée mauvaise et cruelle,
que ne me rendez vous des or
mon filz, ma joye, mon trésor,
que tant j'aymc n'aultre ne quier.
22040 Helas ! humblement vous requier,
22015 tousser ne poussir A. — 22018 voy bien B.
22076 vostre fille désespérance C.
BERICH
Dcables, pensez du resjouir
de joie par rage meslee,
et hurlez a grande goullee
comme vielz loups tous affamés :
22070 vostre servant que tant anicz
s'en vient icy de grant randon
pour estre ensaisiné du don
de quoy vous payez vos soudas.
LUCIFER
Qui est ce, Berich ?
BERICH
C'est Judas,
22075 le trahitre plain d'arrogance.
LUCIFER
Qui l'admaine?
— 22011 Chies B. - 22066 vous desjouyr A. — 22068 huilez C.
TIERCE JOURNEE
HERICH
Désespérance :
vous eu on'oz tantost l'espitrc.
DESESl'EHANCE
Le vora cy, le mauvais tiahitre,
le veez cy, le faulx convoitcux,
22080 le veez cy, je croy, bien piteux,
le faulx ministre dcsleal.
Lucifer, mon pore iufei'nal,
je le vous rciidz, je le vous livre,
pour sans fin a destrosso vivre
2i085 comme vostre subget tenu.
LUCIFER
Il me soit le très mal venu.
Désespérance, chcrc fille,
vous estes prouvée soublillo ;
or le me baillez a sentir,
•22090 je le vueil acop engloutir
et du trahitro larronceau
ne vouldray faire qu'un morceau,
puisque je le tiens de ma pâte.
ASTAROTH
Veez la merveilleuse gargate :
22095 comment il l'a tost dévoré.
KERGAU'S
C'est ung goulfro desmesuré
ou il n'a live ni mesure ;
ce samble une vielle masure,
tant a grans mâchoires et lees.
CERBERliS
22100 Dix millions d'amcs dampnoes
n'y font no que f«ve en ung puis,
et si ont les museaux miculx cuis
et les cervelles miculx brûlées
que d'estre cent ans affulees
22105 d'ung fourneau de métal ardant.
ASTAROTH
Lucifer, vielz serpent mordant,
fier roy détestable et infâme,
quand vous arez fait de cestc ame,
rendez la nous a ung brief mot
22M0 pouc nous jouer ung petiot,
di-oit par manière do raviaiilx.
LliCIFER
Tenez, mes pctis driigonncaulx,
mes jeunes disciples d'escolle,
jouez en ung peu a la solle
22113 au lieu de crouppir au fumier.
DERICH
Ça, je veil soulier le premier.
c'est droit qu'il me soit présenté.
KEROAI.U8
Pourquoi, dea î
BKRICR
Je l'ay apporté
et fait toutes les diligences.
LUCIPBR
22120 Ocz Borich en ses deffcnces :
c'est raison qu'il y ait sa part.
CEKBERUS
Il ai-a son sanglant happart :
vostre puant plet nous afTolIe.
KBRGALU.S
Qui premier y vient, premier soUe :
22125 des premiers soit premier férus ;
n'est ce pas bien dit, Cerbenis ?
il ne fault point porter faveur.
CERBBRUS
C'est le plus court.
ASTAROTH
C'est le meilleur ;
Beiich, au moins as tu failly.
22130 Sus! deables, sus! a ly !
FEROAI.US
A ly :
Temps est de commancer l'osbat.
ASTAROTH
Le trahitre soit assailly,
sus ! deables, sus !
OERICU
A ly! a ly!
CEKBERUS
Puisque chacun y est sailjy,
22iœ il me fault courir au débat,
sus! deables, sus! a ly !
ASTAROTH
A ly !
Temps est do commancer l'esbat.
LUCIFER
Vous menez ung cmel sabat,
deables, fault il ainsi hurler ?
22140 vous faictes bondir et crouUer
tous les abismes infernaulx :
cessez, cessez, cessez, ribaulx ;
tarez vous nostie souldoier?
KERGALUS
Nennin, c'est pour le festoier
22145 en sa gracieuse estraince.
CERBERUS
Laissez parfaire la trainee :
22078 Veez cy le raaiiii.iis lu .\. veej le i-y partout C. — 22086 bien venu C. — 22088 première C. — SS089 serair C. —
22094 ung diable de (;. — 22106 sernent'c. — 22109 ung petit B. C. — 22110 ung tantinot C. — 28111 reuiaux B.
reuiaulx C. — 22112 liy.ibloz C. — 2213'< terrible B. C.
Pas. ^ 19
290
MISTERE DE LA PASSION
Lucifer, donnez nous adveu.
LUCIFER
Vous avez trop joué d'ung jeu,
il vous fault esbatrc d'ung aultre :
22150 menez le moi lance sur faultre
au puteau de perdicion,
et pour son exeoucion
jusques au fin fons le plongez.
BERICH
Si ara les bras bien rongés
22155 de serpens de maintes espèces :
il y en a do toutes pièces
plus haut que les mons d'Arménie.
LUCIFER
Passez avant, pute meignie ;
allez le moy ça chipotrer.
ASTAROTH
22160 II fust bon qu'il eust a l'entrer
la bénédiction jolie.
LUCIFER
Se ma pâte ne m'est faillie
et mon crochet ne m'est rompu,
il l'ara : Serpent corrompu,
22165 ministre de prodicion,
occis par desperacion,
privé de grâce et tout espoir,
va t'en au lieu de desespoir,
au lieu de mort dure et villaine,
£2170 porter interminable paine
et dueil sans espoir de salu,
et du desespei'é palu
ne te partes jour de ta vie,
mes a tous deables compaignie
22175 tenras, compaignon et affm,
tant que Dieu durera sans iin.
[Pose.]
BARRAQUIN
Sire tetrarche de grant bruit,
Jupiter qui le ciel conduit
.et le fait tournoi' a son veil
22180 vous garde de mal et de deil!
Pilate, mon maistre et seigneur,
commis do Gesar l'empereur,
grand prevost de cesto cité,
par ung cas de nouvelleté
22185 ung nouvel homme vous envoyé.
HEHODE
Et qui est il, que je le voie ?
que scet il faire de présent,
que Pilate m'en fait présent ?
il fault qu'il soit soubtil tout sus.
BARRAQUIN
22190 11 se fait appeler Jhesus ;
vous le verrez cy sans arrest.
HERODE
Est ce Jhesus de Nazareth,
qui fait tant de signes si grans ?
BARRAQUIN
Oy, cher sire, je vous crans,
22195 c'est il propre, il n'en fault doubtcr ;
et pour mieulx le vous présenter,
sommes grant foison gens venus.
HERODE
Par ma dame sainte Venus,
a qui je doy foy et hommage,
22200 non obstant la perte et dommage
que jadis Pilate me fît
quand mes gens destruit et occist,
joyoulx suis pour l'heure présente
do cest homme qu'il me présente ;
22203 admcnez le cy devant moy.
GRIFFON
Barraquin, compte luy pourquoy
nostre prevost luy a transmis.
BARRAQUIN
Sire, il a beaucop d'ennemis :
les pharisiens fort l'impugnont
22210 et de tout leur pouoir répugnent
qu'il n'aist délivrance plainiorc ;
Pilate voyant la manière
que les Juifz qui luy obicent
a juger sa mort ne soufficent,
22215 et qu'il est de vostre contrée,
vostre subget de Galilée,
et luy s'en voullant depeschier,
le vous transmet pour justicier
s'en son fait y a que redire.
HERODE '
22220 Par ma loy, on ne peust mieulx dire ;
c'est signe de benivolenco
qu'il nous on remect la sentence
et nous porte honneur et haultessc.
Jhesus, c'est a toy grant simplesse.
22150 Menez le battre plus que peaultre Prenez inoy lance sur lautre C. — 22152 Menez le a execucion B. C. — 22156-B7
I)e grosses oouluures espesses Qui luy tendront bien compaignie A. — 22159 chipostrer B. ca mnKque chappitrèr C. -^
221&4 II ara tost le eol rompu C. — 22105 perdicion G. — 22175 Seras A. C. — 22200 manque C. — 22213 Et que les A-
— 22215 pays B. C. -• 22216 De vos teuans et Vos subjitz B. C.
TIKRGK JOURNEE
201
Ï2225 co nie saniblo a dire lo voir,
que pieça ne m'es venu voir,
veu qu'en ma terre et seignorie
as prins ta jeunesse licurio :
tu es de ma terre natif,
î!!230 par quoy dois estre plus actif
do moy congreer et complaii'e,
faisant cliose qui me puist plaire;
touteffois assés grant pièce a
que tu as régné par deçà,
22235 et si n'es allé ne venu
ne jusqu'à ma court pervenu,
qui samble desobeyssance.
Or vois tu que j'ay la puissance
de ta vie ou ta mort juger :
22240 es tu donc Lien en mon danger ?
C'a esté mal considéré,
car do long temps ay désiré
de toy voir et nul aultre non,
car tu as le plus grant renom
22245 do tous ceulx qui sont a l'empire :
si as pris de deux poins le pire,
qu'aultrement ne m'as fréquenté.
Or me dy pourquoy c'a esté 3
parle, excuse toy hardiment,
2aJS0 et je t'orray btnignenient :
de ton bon los me resjoys,
car c'est l'honneur de mon pays
et de moy, il s'ensuit très bien.
Que dis tu ? parleras tu rien ?
22255 baille solucion aucune.
RODIGON
Ne sçay s'il vous porte rancune,
advis m'est qu"il ne rospont point.
.IHEROUOAN
Messeigneurs, j'ay pensé ung point
qui nuyre nous pourroit bien tost :
222C0 vous avez veu que le prcvost
a devers Ilerode envoyé
Jhesus, ce matin desvoyé,
pour luy faire tout son procès :
si fault redoubler les accès
22265 qui nous seroient dangereux :
Herode est assés curieux
et désire fort a ouir
uouTcllcs pour lo resjouir,
et prent plaisir de voir grans signes
22270 par art ou par oeuvres divine» ;
donc s'il advient que Jhesus face
aucun signe, il l'ara en grâce,
et peust estro qu'il trouvera
moyen qui le délivrera :
22275 si nous fault aller opposer
et tousjours plus fort accuser,
affîn qu'il n'eschappe pourtant.
MARDOCEUS
De ce suis je bien consentant :
c'est parlé d'ung homme ruzé.
YSACAR
22280 C'est soubtillement advisc :
allons pour fournir la besongne.
JA.C0B
11 est force qu'on y besongne,
ou nostre fait est abatu.
HERODE
Ça, Jhesus, que ne respons tu ?
22285 tu dois avoir en toy grant honte :
est il vray ce qu'on nous raconte
de ton fait et de tes meiitos ?
on dit que les moi-s ressuscites :
se tu as tel oeuvre entrepris,
22290 c'est ung miiacle de hault pris.
Or me dis donc la vérité
combien en as ressuscité,
et ou, et quel gens ilz estoient.
AMPHIARUS
Pour liens que vos ditz le côtoient,
22295 il ne respont ne mot ne son.
ANDALUS
Je n'entens point ceste leçon,
je croy qu'il dort ou qu'il sommeille.
GRONGNART
Voulez vous que je le resveille
d'une grongnee bien assise ?
HERODE
2Ï300 Grongnart, je deffens la main mise :
garde de luy toucher sur l'oeil.
GRONGNART
Et ou ? sur le nez donc ?
HERODE
Je veil
que tu le laisses tel qu'il est.
22237 me semble C. ^ 22254 bailleras tu 13. — 28262 ce fnulx chien renoye B. ce faulx traistre C. — £2868 pour aoy
B. — 22291 toute la C.
292
MISTERE DE LA PASSION
grongnaut
Le faulx villain tant me desplest
2230j qu'il m'enffle le cueur de despit :
on procède pour sou pourfit
et ne daigne encore respondre.
Le feu d'enffci' le puist confondre !
c'est ung villain rébarbatif.
HERODE
22310 Jhesus, tu sambles moult pensif :
parle a moy, et je t'en supplie.
RODIGON
Laisse ceste mélancolie,
parle a monseigneur quelque chose :
tu os l'horreur qu'on te propose,
22315 dont très bien délivrer te peust.
GRONGNART
Ou il ue daigne ou il ne voust :
oncques mes ne vy plus rebelle ;
ha! que je luy donroic belle
mes que je l'eusse a gouverner !
HERODE
Sces tu pas bien renluminer
les aveugles? c'est chose grande ;
c'est pour bien que je le demande,
car plusicui-B en ay on ma terre,
que j'envoiroye tantost queiTe
se tu t'y vouloies occuper,
car c'est une vertu sans per :
se tu l'as, il convient conclure
que tu es Juppin ou Mercure
ou ung du collège divin;
22330 et si dois estre plus enclin
d'avoir ung aveugle sané
eu la terre dont tu es né
que de faire oeuvres si haultaines
en ces aultres marches lointaines
22335 dont tu n'as pas sorti ton gendre,
mes plus, car tu peulz cy comprendre
que ceulx devant qui tu as fais
tes miracles et tes haulx fais
sont ceulx qui plus fort me requièrent
22340 et qui ta mort veullent et quierent,
dont tu as trop mal employé
le bien que tu as desployo
devant eulx en si hnult degré
quand ilz ne t'en scovcnt ja gré.
22.Î45 Mes fais devant moy signe aucun :
il me suffit seulement d'ung,
mes qu'il soit bien admiratif ;
il pourra bien estre si vif
que je te donray plain congé.
22320
22325
22355
22360
22365
RODIGON
22350 C'est assi's longuement songé,
s'oncques songeur assés songea.
JHEROBOAN
Sire, ne vous arrestez ja
sur ses signes et brouleraens :
ce ne sont riens qu'enchantomens
causés par art dyabolique.
MARDOCELS
Quanqu'il broulle, c'est par magique
et convocacion de deables,
qui sont vers luy tant agréables
qu'ilz font quanqu'il veult demander.
HERODE
Feras tu riens pour commander ?
maintendras tu ceste arrogance?
beau sire, se tu as puissance,
monstre moy cy quelque sinacle,
soit par magique ou par miracle,
et je te promès par ma loy
que je besongneray pour toy
encontre tous tes adversaires.
ELIACHIN
Quant a luy, en tous ses affaires
il est i-ebelle et obstinât
22.170 et a villains du pays plat
monstre plus tost signes greigncurs
qu'il ne feroit aux grans seigneurs ;
il ne suyt ({u'oisouses et testes,
publicans, pecheure manifestes,
22375 folles femmes habandonnees :
la va il faire ses menées
et c'est ce qui plus nous desplest.
HERODE
Je voy bien maintenant que c'est :
ce n'est qu'ung bemus, ung songeart,
ung ypocrito, ung fol coquart ;
il est tout fol, je le suppose.
Et comment dea! n'est ce autre chose?
j'ay cuidé passé des ans maint
que ce fust ung homme très saint,
fn qui fust venue des cieulx
la puissance d'ung de nos dieux,
mes j'ay maintenant bien sentu
qu'il n'a puissance ne vertu
et que son fait n'est qu'ung abus.
22390 Et pourtant comme ung coquibus
et comme ung vray fol et testu,
je veil qu'il soit do blanc veslu :
je ne luy sçay habit meilleur.
Grongnart ?
22380
22385
22306 respit B. C. — 22310 tu es douleur pensif B. G. — 22317 nojz C. — 22320 enluminer A. — 22327 las et B.
22.338 Telz miracles et telz B. C. — 22303 moy man'iue C. — 22379 venus G. —22386 dung motiquc B.
TIERCK JOURNEE
ao3
GRONGNART
J'entcns bien, monaeignour
28390 vous commando/, que je le veste
(le blaiio comme uik! sote boste
qui n'a no sens n'cntcndemcut.
HERODK
Tout juste ; prens l'habillement
d'ung de mes ses le plus cornu,
ÏS!400 et le metz d(?ssus son corps nu
comme bien faire le sçaras.
GRONGNART
Ung habillement riche aras :
vecz cy justement ta monture.
Regardez cy quel pourtraicture :
îï'iOJ il est tout sot a voir de loing ;
oncques je ne vy si sot groing :
monseigneur, regardez quel myne ;
est l'abit bon ?
RODIQON
11 y est digne
et droitement fait en lourdois.
GRONGNART
iHiO II a lourde teste et lours dois;
mes qu'il faisist une l'isee
bien estrange et bien dcsguisee,
ce seroit pour rire son sol.
RERODE
Sus! sergens, prenez vostre fol,
2Ï415 il est digne do mener paistro :
vous le nienrez a vostre maistro
atout ceste roble blanchie,
et luy direz que le mercye
du grant honneur qu'il m'a donné,
ÏS4Ï0 et que tout luy est pardonné
quanqu'il me fust oncques grevant,
et bons amis comme devant,
ne jamès mal talant n'arons.
BAHRAQUIN
Vostre vouloir accomplirons,
22'iî3 sire tctrarehe, a chère lye.
.luno, la déesse jolie,'
vous ait en sa protection.
NOSTUE DAME
Mon filz, plain de dilection,
ma très doulco fruiction
22430 que jamos siuil veil conquérir,
Ou es tu n'en quel iransion ?
ou pi-ens tu habitacion?
las ! je ne te sçay ou quérir.
MADRLAI.NE
Se Dieu vous veille secourir,
2S435 ma dame, |>cn8ons de courir :
j'apperçois des gens ung grant ost,
Kt pense qu'ilz vont requérir
le faire juger a mourir
dessus Pilate le prevost.
NOSTRB DAME
îï-iiO Helas ! ilz le tendront repost
et le feront si fort celer
que ne pourrons a luy parler,
car la porte clorront trop près
et nous dehors.
MARIE JACOB Y
Allons après,
22445 et auprès de luy nous tenons.
BARRAQDIN
Monseigneur, nous vous ramenons
tout acop nostre magisier.
PIIATE
Ha ! mau gré en ait Jupiter !
fault il qu'exécuter le doye ?
22450 c'estoit tout ce que je craignoie,
et poui- m'en do tous poins desmettre,
l'avoye la voulu transmelti'c,
et il m'est transmis de rechief !
GRIFFON
Pour vous compter le cas en brief,
22455 pour riens qu'Herode ait contendu,
il no luy a mot respondu
ne donné signe ne parole,
et pour sa contenance folo
il l'a fait adouber ainsi.
PII.ATE
28460 Haro ! quel desplaisir voicy !
a peu que je n'enrage d'ire.
BARRAQUIN
Et si vous oublioyo a dire
qu'Herode et toute sa famille
vous remercye des fois mille
82465 de l'honneur qu'en vous il a veu,
et très bon gré vous en a sceu
et est vostre amy de ceste heure.
HILATE
list il vrav ?
22400 vesl C. — 22'.04 rc>t;ariliuo B. G. — 2241.S dire A. remercje B. C. — 22441 couler C. — 82446 lamenom B. —
22'.ô6 rions A. — 82459 habiller B. — 22462 Et vous oy oublie C. — 28465 auez eu B. C. — 28'.68 oy je vous A.
MISTRRE DELA PASSION
BARUAQUIN
Jo VOUS en asseure,
et s'ung besoing vous sourveiioit,
22W0 il se mauldit s'il ne venoit
vous secoui'ir sans supplier.
PILATE
Haro ! je ne puis oublier
ce meschant quoy qu'il ait ineffait :
ne me chault qu'Herode en eust fait
8247b mes que j'en feusse deschargo
car le cueur m'a tousjours jugé
qu'enfin un grand mal m'en vendra.
Or ça, seigneurs, il convendra
ung peu vostre fait moderei' :
82480 vous avez peu considérer
mon fait et mes moyens en somme ;
vous m'avez admené cest homme
chargé de plusieurs desmerites,
digne de mort comme vous dites
22485 comme d'avoir fort subverty
vostre peuple et tout pcrverty
et beaucop de mal impourveu,
et touteftbis vous avez veu
que de toute ma diligence
82490 luy requis en vostre présence,
conjuré et examiné,
neantmoins il n'a déterminé
riens qui tourne a son préjudice
ne dont la royale justice
22495 doyve sa mort sentencier.
ANNE
Il ne s'en fault ja soucier
qu'il vous confesse chose aucune
qui tourne a sa maie fortune ;
il se taist pour tant qu'il luy touche,
22500 car on doit maudire la bouche
qui fait a son coips encombrier;
mes pourtant ne dois tu targier
de le juger, qui le juge es,
et vois le mal de tes subgès
82505 informé pai' probacion.
PILATE
Quant est a l'informacion,
se je tout seul l'eusse parfaicte
'vous la pourriez dire mal faicte
en moy de faveur arguant ;
22510 mes nennin, j'ay fait plus avant :
a Herode l'ay fait mener
qui est sage homme pour régner,
et neantmoins a ce que je voy,
cause n'y trouve ne que moy :
22515 qu'il soit vray, raison s'i consent,
car en forme d'ung innocent
le m'a renvoyé de son veil,
pour en faire ce que je veil ;
et quand je n'y voy point de filtre,
22520 n'Herode, no loy ne chapitre
ne conseille sa mort a juge,
voulez vous donc que je le juge
a mort souffrir pour vostre edit?
nennin, raison y contredit
22525 et tous nos drois pareillement.
Mes voicy pour faire aultrement
ung bon moyen que j'ay trouvé
ou il n'ara ame grevé
et tendrons la voye moyenne :
22530 vous avez coustumc ancienne
que quand j'ay plusieurs prisonniers,
malfaiteurs, larrons ou meurtriers,
qui pour leur mal mouiir convient,
quand vostre haulte Pasque vient,
22535 se j'en ay quatre, ou trois, ou deux,
vous pouez eslire l'ung d'eulx,
celuy qu'il vous plest je vous livre,
et par ce point il est délivre,
en signe de la délivrance
22540 d'iîgipte que vous eustes franche,
connne mieulx que moy le sçavcz :
en la loy escripte l'avez.
Or en y a en mes prisons
plusieurs qui par leurs mesprisons
22545 sont dignes que la mort les tance,
ne reste que de la sentance ;
entre lesquelz y en a ung
qui encontre le bien conmiun
a fait sedicieulx debas
22550 et est meurtrier, c'est Barrabas ;
vous le congnoissiez n'a celluy :
sy vous metz a choisir de luy
ou de Jhesus qu'on dit Christus.
CAYPHE
Nous nous conseillerons dessus,)
22555 et puis vous orrez la responce.
PILATE
Or abrégez, ou je vous nonce
que j'y querray ung brief moyen.
ANNE
Nostre fait se porte très bien :
22477 grant masohief B. C. — 22490 Lay C. cyte B. inaile C. — 22498 a manque B. C. — 22502 charger B. G.
22510 aultrement A. — 22513 Et manque A. — 22525 dieux G. — 22528 ame] homme B. C. — 22542 escriiJt B.
n'y a que do porsuador
ÎÎ500 tout le peuple pour demander
liarrabus, et .Ihesus destruire.
CAYl'HK
11 fault tout le commun instruire
de le requerre a toutes fins :
allons a parons, a cousins,
Î2565 a oncles, germains et nepveux,
et n'y espargnons foy no veux
ne sermons fais ou doux ou trois :
il fault bcsongner ceste fois
que Harrabas nous soit rendu
2Ï570 et en Jhesus en crois pendu :
vous, raesseigncurs, pourveez y.
ANNE
Mes amis, vous avez ouy
l'offre que le provost nous fait ?
RL'BEN
Bari'aLas doit estre deffait ;
22575 il est lari'on ambicieux,
faulx meurtrier et ccdicieux,
et Jhesus doit estre recous.
CAYPHE
Ha ! meschans gens, que dittes vous ?
ce Jhesus nostre loy destruit ;
22580 il vous déserte, il vous séduit :
s'il n'est occis, vous vous pardcz.
ANNE
Avant, meschans gens I demandez
Barrabas d'uug commun accord.
NEPTALIN
Vêla ung merveilleux recort !
82585 vostre parler pas ne souffit ;
oncques Jhesus ne nous meffit:
pourquoy requerrons nous sa mort ?
.IHEROHOAN
S'il y a honmie qui .«"admort
d'aller contre no.stro vouloir,
22590 nous l'en ferons si cher douloir
que jamès ne l'admendera.
EMILIUS
Nous ferons ce qu'il vous plaira,
messeigneurs, sans quelque rabas.
CELSIDON
Qui requerrons nous ?
MABDOCELS
Barrabas,
TIRRCR JOURNEE
22595 voire qu'il voufi soit délivré.
nARANUS
Et Jhesus, quoy ?
jonnAN
A moi't livré
la plus cruelle qu'on pourra.
NEMimOTH
Soiez sceurs qu'on le l'equerra
comme vous vouldrez, j'en suis plege.
296
PILATE
22600 Griffon?
(iRlKFON
Monseigneur.
* PILATE
Or t'abrège
comme ung diligent cscolier :
va t'en et dis au geoUier
que Barrabas soit desserré,
et l'admeine tout enferré
•>2605 par devant moy tost et errant :
je croy qu'il est en danger grant
qu'il n'y retourne mes en pièce.
GRIFFON
Ha ! que c'est une fine pièce
pour ung gibet bien affamé !
CLAQIEDENT
22610 C'est ung larron si mal famé
que chacun en est mal content.
BBAYART
Aussy ung vielz gibet l'atteut
pour luy faire sa sépulture.
GRIFFON
Brayart, vien tost a l'aventure :
22615 si m'aydcras a l'admener.
BRAYART
Ou a mener ou a trainci',
il ne m'en chault lequel ce soit.
BRUTAULT
Ou vas tu. Griffon, qui te voit?
tu sambles fort embesongné :
22620 tu as le museau rechigné
comme le groing d'un vielz lymier.
22559 a manque B. — 22565 niepoes et li. C. - 2Kp68 Kt tant faire cosle foiz B. C. — 22572 Ca mes amis »u«« B. C.
— 22579 De jhesus qui B. — 22593-9'4 altiihué.i tout «tliVrs à K. A. — 2?605 ouraiit C. — 22608 forte pièce B, —
22617 pourquoy ce soit A-
296
MISTERE DE LA PASSION
GRIFFON
Han dea, tu es sur ton fumier,
pour ce brais tu a si liault son :
baille moy ce nieschant garson
22625 que tu as en prison la bas.
BRUTAULT
Quel garson dis tu ?
GRIFFON
Ban abas ;
tu n'entens non plus qu'une giive.
BRUTAULT
Tien, tien, beau sire, plus n'estrive :
tu me fais trop laide grimace.
GRIFFON
22630 Ça, maistre, ça, saultez en place
tant que je vous empoigne ung peu :
vous serez roisin de Vimeu,
vendangé serez a l'eschelle. *
BARRABAS
Helas ! qu'est ce ?
GRIFFON
Qu'a mort cruelle
22635 mourras ; entens tu mon sermon ?
BRAYART
Et par ma loy ce feras mon ;
croy qu'il est maint plas beau chapeau
que d'avoir affublé ta peau :
jamès ne veil tel affulure.
BARRABAS
22640 Je m'en vois mourir bone allure,
je m'en tiens pour tout asseuré ;
pieça l'ay je bien espéré
et grandement l'ay desservy :
oncques Dieu n'amay ne servy,
22615 oncques bien ne feis en ma vie,
mes en rancune et en envye
et en yre ay tousjours vescu.
BRAVART
Et le blason de ton escu
sera d'ung beau gibet croisié,
22650 ou tu aras le corps brisié
et y mourras villainement.
GRIFFON
Sire, veez cy ce garnement
que j'admaine très bien lié.
PILATE
11 ne sera pas oublié :
22655 je croy qu'il sortira aillieurs
prestement. Or ça, mosseigneure,
veez cy Bairabau le lobcur,
le faulx meurtrier, le desrobeur
de toute mauvaitié noté ;
22660 veez cy Jhesus d'aultre costé
qui vous a presché et instruit
et monstre oeuvres de grant fiuit,
vostre Cristus, vostre saulvour ;
choisissez sans porter faveur
22665 lequel des deux voulez avoir
en Pasque.
EMILIUS
Il est bon a savoir :
c'est Barraban que nous querons.
CELSIDON
Barraban nous te requerrons :
nous voulons qu'il nous soit rendus.
PILATE
22670 Et que feray je de Jhesus,
vostre prophète, qui cy est ?
RABANU.S
Porte, porte, porte au gibet,
et surpiez le nous cruciffie.
PILATE
Vostre l'oy ?
SALMANAZAR
Ce mot nous desplest;
22675 porte, porte, porte au gibet.
PILATE
Seigneurs, attendez, s'il vous plest ;
cause n'y voy, je vous affie.
PHARES
Porte, porte, porte au gibet,
et surpiez le nous cruciffie.
PILATE
22C80 Comment, seigneurs, je me confie
a vous comme a gens de conseil,
par quoy de vous plus m'esnierveil
qui voulez que je me consente
de juger parsonne innocente,
22685 sans sçavoir comment ne pourquoy.
Vous prisez tant hault vostre loy,
tant fort les aultres deffiez,
et tant fort vous justiffiez
qu'il samble qu'âme ne vous vaille :
22690 regardez se vostre loy baille
que je face telz jugemens ;
ce n'est pas fait de justes gens :
pensez y, je vous en supplie.
22655 Que tu boutas arsoir la bas B. C. — 2262T grue ii, — 22628 Tien que plus neu C. — 22()3d se A.— 22644 ayme C.
— S2647 Et en larrecin ay A. — 22659 Qui le peuple a tant infeste B. G. — 22666 En vostre pasque C. — 2«672"ll soit
tost mené au gibet C. — 22674 Le qui vostre roy C. — 22677 asseure B. — 22687 desprisies A.
T I F, R C K .1 O U R N E K
•297
NEMnnOTH
Pi'cns lo tost cl le criioiffîo
82095 et loyc sou nom do la tori'c.
Pir.ATK
Et comment l'osez vous requorre?
vous estes forcenés, ce croy :
cmcifn-ay je vostre roy ?
la croix est la mort plus villaino
2Ï700 que puist porter nature; humaine ;
par quoy, s'il a mort desservye
et il convient finir sa vie,
passer vous pouez a mort mendi'e
que si noble sang en ci'oix pendre
22705 qui du sang royal se renomme.
JHEROBOAN
Ha ! prevost, jamès ne luy nomme :
ce langage trop près nous pince ;
noâtre roy n'est ne nostre prince,
nous le nyons et régnions,
22710 maudissons et excommenions,
car nous n'avons roy ne seigneur
se ce n'est Gesar l'empereur
a qui seul voulons obéir ;
et toy mcsmes le dois hair :
22715 car puisque notre roy se dit.
César offence et contredit,
ton maistre qui t'a cy commis.
PILATE
Or je vous diray, mes amis :
pour complaire a vostre désir
82720 et nionstrer que vostre plaisir
est le mien, et ne veil desplaire
a vous, mes de tous poins complaire,
Barraban vous delivreray ;
mes de Jhesus je vous dii'ay :
22725 pour ce que do juger sa mort
ma conscience me remord,
ung petit difl'crer vouldray
mes on tel point le vous mcttray
ou feray par mes bedeaux metti'o
22730 qu'il ne s'ozera onti-emettre
de jamès sortir nom de roy.
Sergens, mettez vous en arroy :
il vous fault cy faire ung exploit.
GRIFFON
u ne nous eu ehault quel il soit :
22735 surpiez l'ii'ons expédier.
PILATE
Allez raoy doiicqucs tost lier
ce Jhesus icy a l'atacho
et que serrement on l'atacho
de bonnes cordes bas et hault,
OnlFKON
iinw Tout ainsi vestu?
PILATE
Quel burgault!
entens tu riens, mouton cornu ?
GRIFFON
11 le fault despouillicr tout nu :
j'entens bien vostre maladie.
Ça, villain, Juppin vous maudie ;
82715 faictes vous cy le marmiteux?
Vostre paillart corps despiteux
sera maintenant refForraé.
ORILLART
11 a beau corps et bien foimc,
c'est dommage qu'il n'est bien sage.
BR4.TART
82750 11 a dos tout a l'avantage
pour recevoir beaux horions.
CLAQUEDENT
11 en ara dix millions
avant le diner.
GRIFFON
Je l'accorde :
or tire donc ce bout de corde
88755 pour le nouer a ce pillier.
CLAQUEDENT
S'il s'en savoit deseharpillier,
je dis qu'il c croit bien soubtil.
GRIFFON
Regardez, sire, vous plest il ?
est il bien lyé par amont ?
PILATE
227P0 Bien et beau.
GRIFFON
Or devisez dont
que vous en avez en propos.
PILATE
Je le vous diray en briefz mos ;
saultcz en piez quatre bedeaulx,
des plus grans et plus fors ribaulx,
28765 faictes moy dos verges friandes
huit ou dix bien longues et grandes,
et des courgees cordellees,
' de petis neuz tout dentelées,
et quant tout arez assorty,
28770 batcz le moy par tel pai ty
22694 brief B. C. — 22097 rnragcr, C. — 22702 Et y A. — 2270() Hacilt prpuost B. C. — î?723-4 mnniuent B. C.
— 22729 minr/ur C. — 22736 P. Griffon O. sire P. va moy lior B. C. — 2ïTa8 liieii serrcinont a relie B. C. estache B.
— 22740 lini?ault C. - 23744 Ca sire C. — 22740 gaiUart G. — 22755 Ijer C. — 28763-4 mangueni A. — «8767 de» ed-
rourgees A.
298
MISTERE DE LA PASSION
22780
22785
que sur tout son corps n'y ait place
ou il n'appere plaie ou trace :
sçarez vous bien faire cela ?
GRIFFON
Tant que vous nous direz hola,
22775 nous ne cesserons de frapper.
BROYEFFORT, varlet.
Et je me vouldray occupei-,
tandis que vous l'estrillercz,
a faire verges au plus près
pour avoir tousjours de nouvelles.
Tenez, veez en cy quatre belles :
chacun en preigne une pour soy.
GRIFFON
Veez cy pour nioy.
CLAQUEDENT
Et cy pour moy :
je m'en sçaray trop bien aidier.
PILATE
Griffon, tu ne fais que plaidier :
fiers dessus.
GRIFFON
Ne vous hastez point :
il nous convient mettre en pourpoint
avant que nous puissions i-iens faire.
PILATE
S'il y a larron deputaire
qui se faigne a le bien escourre,
il n'est qui le sache rescourre
qu'il ne soit pendu tout bâtant.
ORILLART
Et il ne tendra pas a tant :
je vois commancer la meslee.
GRIFFON
11 a ja la peau crénelée
des horions que je luy baille.
PILATE
Frapez fort, frapez, ribaudaille:
homme ne se mette en oubly.
CLAQUEDENT
Vous samble il donc que je luy faille ?
BARRAQUIN
Frapez fort, frapez, ribaudaille.
BRAYART
Nous le deschirons maille a maille :
on ne voit riens que sang sur ly .
PILATE
Frapez fort, frapez, ribaudaille :
homme ne se mette eu oubly.
Rendez le moy tant affaibly,
22805 tant mat par destresse grevaine
22790
22795
que sur tout son corps n'y ait vaine
qui ne soit a la mort navrée.
ORILLART
Il ara de nostre livrée
assés, qui ne luy plaira guère.
GRIFFON
22810 Ça, des verges.
BROYEFFORT
Combien ?
GRIFFON
Deux paire :
les myennes ne valent plus rien.
CLAQUEDENT
Broyeffort, tu nous fais bien braire :
ça, des verges.
BROYEFFORT
Combien?
CLAQUEDENT
Deux paire.
BROYEFFORT
Haro ! et tant dire !
ORILLART
Et tant faire !
22815 nous festons cy par ton moyen.
Ça, des verges.
BROYEFFORT ^
Combien?
ORILLART
Deux paire:
les myennes ne valent plus rien.
BROYEFFORT
Ôrillart l'escout doleur bien ;
il y pert bien de son eosté :
22820 il en a tant do sang esté
qu'on n'y congnoit ne cul ne teste.
ORILLART
Il ne fait qu'entrer a la feste :
au premier vendra le plus fort.
Baille des verges, dy, Broyeffort,
22825 ou tu seras mis en deffault.
BROYEFFORT
Haro ! deables, qu'il vous en fault !
qui gibet vous sçaroit fournir !
BRAYART
Ce n'est point cy pour le punir,
verges ne sont que pour enffans :
22830 a telz ribaulz gros et puissans
il fault bien retraintes plus fortes.
GRIFFON
Or nous devisons de quelz sortes,
affin que nous le combatons.
2*789 secourre G. - 22790 manque C. — 22811-3 manquent A. — 22822 en la B. — 22827 Qui] Qu-îl B. C.
TIKUGR JOURNEE
290
ORII.IAUT
Est co do poingz ou do bâtons,
8Ï835 affln que tu le nous assignes ?
BnAYAUT
Ncnnin, mes d'eacourgoos fines
ung peu nouées par les bous
de beaux gros nouz.
BROYEFKOUT
Que plaidez vous ?
veez cy tant que vous demandez.
p:late
2Ï840 Avant, garçons, vous vous rendez :
reprenez nllaino et vortu
et le me rendez tant batu
de tous lez qu'il n'y ait que batre.
GRIFFON
Kmpreu.
ORILLART
Et deux.
nUAYAUT
Et trois.
CLAQLEDENT
Et quatre,
2iS'k:> et le cinquième de surcroix.
GRIKKON
Telz mes faut il a ung folâtre :
empreu.
ORILI.ART
Et deux.
BRAYART
Et trois.
CLAQUEDKNT
Et quatre.
BROYEFKORT
Griffon, tu comptes sans rabatre :
pour ung cop tu en frappes trois.
GRIFFON
228no Quand ce sont dix, fais une crois,
je no le fais que pour esbatre :
empreu.
ORILLART
Et doux.
BRAYART
Et trois.
CLAQUEDENT
Et quatre ;
et le cinquième do surcroix
qui lui donna ?
GRIFFON
Se tu m'en crois,
22833 baUlo luy hardiment la touche.
BllOVEFFOnT
Il samblc que Brayart n'y touche,
mes par l'ame de mon bon perc,
il ne frapiio cop qu'il n'appero
une ployé de quatre dois.
Icy le bâtent une espace sans parUr.
[Pose.]
PILATE
22860 Ho ! il souffit pour cesto fois,
compaignons, cessez le souiplus :
il en a tant qu'il ne pcust plus ;
j'ay du regarder grand hidcur.
Seigneurs, regardez quel horreur,
22865 comment ce meschant est traitié :
n'est cueur qui n'en prengno pitié,
et fust plus dur que l'ayment.
GRIFFON
Chargez nous par vostre commaud
que nous ferons après cecy.
PILATE
22870 II me desplaist a voir ainsy,
tant porte terrible chastoy :
va, povre homme, va, revès toy ;
je croy que tes accusateurs
sont contons dos griefvos doleurs
22873 dont tu es asprement pugny.
ORILLART
Ne reste mais qu'il soit bany,
tant que jamés n'en soit nouvelle.
GRIFFON
Je l'ay advisé bien plus belle,
mes que monseigneur le permette.
PILAI E
22880 En quelz point veulz tu qu'on le mette,
Griffon ? dis nous en le motif.
GRIFFON
Sire, j'outous que ce chetif
s'est vanté par tout ce pays
qu'il est sire et roy dos Juifz,
828ffi c'est ung des poins qu'on luy declaire :
donc, se vous voulez bien complaire
aux Juifz qui de ce l'accusent
et qui le uycnt et reffusent,
je vous diray que nous ferons :
22890 d'habit do roy le vestirons
le plus villement qu'on pourra,
et aloçs on leur monstrora
ensanglanté de toutes pai-s,
et sera le roy dos conars
22893 en signe do dorrision.
Dis je bien ?
23844 Empreaf B. C. -
B.C.
■ Ï8864 Seigneurs juil'i voyeas A. — 22867 Ou il seroit G. — 82884 seigneur et A. — 2SS94 conura
300
MISTERE DE LA PASSION
PILATE
Ton oppinion
me plaist bien et me samble bonne.
CLAQUEDENT
Veez cy ung habit tout ydonne
dont il sera trop bien doué :
22900 cest ung viol pourpre tout troué,
plus deschiré qu'ung viel haillon.
BRAYART
Or ça doneques, or luy bâillon,
puisque monseigneur y consen .
Il est propre !
GRIFFON
Il en vault ung cent
22905 pour luy bien faire la grimace.
Ça, faulx paillart, saultez en place :
voicy dont vous serez vestu.
Tendez les bras.
CLAQUEDENT
Que ne fiers tu
si tost que tu vois qu'il recuUe ?
BRAYART
22910 Or tien, tien, papelart, affullc :
cest habit est a l'aventage.
ORILLART
Dieux ! quel roy !
GRIFFON
Dieux ! quel parsonnage !
il est trop bon a voir' de loing.
CLAQUEDENT
Il luy fault baillier en son poing
2S915 le ccptre, ou nous n'avons riens fait.
BRAYART
Veez cy ung roseau très bien fait
pour faire ung ceptre droit apposte.
ORILLART
Or l'asseons icy de coste,
en estât de regalité.
GRIFFON
22920 De fièvres soit il alité
que tant il nous donne de peine !
CLAQUEDEXT
Jupiter vous doint maie estreine !
folz, vous oubliez le meilleur :
puisqu'il est roy et gouverneur',
229>:5 ne fault il point qu'on le couronne ?
BROYEFFORT
Je luy vois faire une cour'onne
bien pi'opre selon son estât.
BRAYART
Tandis nous prendrions nostrc csbat
a luy ci'oqueter sur' la teste
22030 de gros roseaulx.
ORILIART
Or menez feste,
sire roy, maistr'e Aliboron.
GRIFFON
Hé ! ace rex Judeorum !
n'est pas la terre de Judée
bien eureuze et bien gouvernée
229^ d'avoir ung tel guberrrateur ?
Icy luy crachent au visage.
CLAQUEDENT
Fy du r'oy.
BRAYART
Fy du faulx menteur.
Fait on le roy d'ung tel conart ?
c'est dommage et pitié qu'on n'ar't
telz folz qui s'eslievent si hault.
BROYEFFORT
22910 Tenez, veez cy ce qu'il vous fault
pour le couronner haultement.
ORILLART
Veez cy riche coui'onnement
avec ces notables habis :
il n'y a saphir ne rubis
229i5 mes grosses espines piquantes.
GRIFFON
J'en voy icy je ne sçay quarjtes
qui luy feront mOult de meschicf ;
or luy asseons sur le chief :
couronnons ce roy autentique.
CLAQUEDENT
22950 Hay, deable !
BRAYART
Qu'as tu ?
CLAQUEDENT
Je me picque :
veez cy pour nous mauvais abus.
BROYEFFORT
Que vous estes bien coquibus
et bien brutes et bestiaulx I
n'y sçavez vous aultres consaulx ?
229Ô5 le remède y est cler et plain.
ORILLART
Et quel ?
BROYEFFORT
Prenez en vostre main
bons gros bâtons cours et corsus,
22902 habillon B. — 22yi6 rolleau li. - 22917 droit manque C— 22i)31 alixsboron B. Sire moistre aiborura C. — 22932
He] salue B. C. — 22937 cornard B. C. — 22940 luy fault B. - 22951 ung très C. - 22957 Jours et torcuz B. longs et
corissus C.
TIERCE JOURNEE
301
et frappez a puissance sua,
tant qu'elle y entre ou qu'elle brise.
ORIM.ART
22Ï60 C'est parlé de bonne devise/
nous en ferons en cos-te forme.
Sus ! sus! il failli qu'on luy enfornie
a force comment qu'il en voit.
Frappez de la.
GRIKFON
Qui bien le voist,
?2«55 il grigne de fine destressc :
veez cy couronne d(^ noblesse
pour uiig grant prince séculier.
CI.AQUEDENT
Elle est a tel pot tel eulicr
et selon la jambe la chausse ;
22970 de plus frappons et plus se hausse,
je ne sçay qui dealjle l'arreste.
BRAYART
11 a le gibet grosse teste :
a grand peine luy peut on joindre.
ORILLART
Regardez les espines poindre :
22975 il y en a de bien notrecs
et de telles qui sont outrées
jusques au fin fons du cerveau.
GRIFFON
Et vive nostre roy nouveau
qui tient maintenant court l'oyalle !
CLAQUEDENT
22980 II porte ung bien riche chappeau,
mes l'abit est ung petit salle.
BRAYART
Ou .sont ses escuiei's de salle ?
qu'ilz ne viennent icy par mens.
ORILLART
Sa grant meignie commeusalle
229SJ cuide qu'il face ses sermons.
Je vous requier que nous l'armons
de coups pour recapituler.
GRtl'KOX
Regardez le sang rideler
qui le museau luy ensanglante :
22990 ho ! faulcc parsoniio ineschanto,
je n'ay pitié do ta douleur
non phi;* que d'un vi(>lz fiiv<ilpui-
qu" ung gibet disiuo on lieu de jarbo.
CLAQUEDENT
Jouons nous a plumer sa barbe?
22995 elle est par trop longue saillant.
229S6 manque R — S2990 et senglanle U. —
23020 inhumanité B. C. - 2:t022 forineuî A.
BRAYART
Celiiy sera le plus vaillant
qui en ara plus giaiit poignée.
ORILLART
Je l'ay ja si ferme empoignée
que la char est venue après
£3000 et le sang cler.
GRIFFON
Souffle, va près,
et ne fault il pas que j'y soie?
je ne sçay a quoy je pensoio :
je le veil visiter ung peu.
PILATB
Sergens, il souffit de ce jeu,
23005 il a grant temjjs qu'on commança :
admencz le moy par de ça
tout juste en Testât ou il e."t.
Son martire tant me desplest
qu'a peu se regai'der le puis.
[Pose.]
23010 Regardez cy, seigneurs Juifz,
je cuide que vous direz ho
a ceste foiz. Ecce homo !
regardez cy quel douleur dure,
regardez que cest homme endure,
23015 s'oncques homme porta tel somme :
ayez ung regard qu'il est homme,
homme voire bien misérable.
Toute beste ayme son samblable :
le regard donc d'hiunanité
23020 modère vostre cruaulté ;
vostre frère est, vous le voiez,
et s'il est que fort meuz soiez
et avez pris rancune d'ire
qu'il s'est vostre roy voulu dire,
23025 regardez royaultc piteuse,
royaulté la plus malhcm-eusc
qui soit huy no jamès sera.
James plus roy no se fera :
trop aspre chastoy en raiiporte.
23030 Regardez quel couronne il porte,
quel manleau, quel ceptre royal :
en tout son corps seul tant «le mal
que janu's de niembro qu'il ait
no s'aydoi a : il en est fait.
23035 Acquito suis de mou office,
si vous i-equier qu'il vous sufïico,
22992 fiinilleur C. — 22995 miiiujue C. — 23010-1 maiviiurU B. C. —
302 M I S t E R E
et pardonnez le résidu.
NATHAN
Il fault qu'il soit eu croix pendu,
ou nous ne sommes point contentz.
JHEROBOAN
23040 Prévost, ce no sont que contens,
qui l'excuses et justifies ;
il fault que tu le crucifies,
ou le peuple braira toujours.
PILATE
Ha ! haulx dieux des temples majeurs,
23015 conseillez nioy ; las ! que fera je ?
veez cy la plus ardente rage
de peuple qui oucqucs fust veue;
veez cy rago tant desprouveue
que plus vient avant, plus s'espart :
23050 oncq leonesse ne lieppart
ne porta tel austérité.
Comment ! seigneurs, en vérité
je m'esbahis de vostre affaire :
quel douleur pouvez vous plus faire
23055 a ce povre homme? qui vous nieust?
il soutfre tant que plus n'en peust :
ja ne fault qu'il soit despointié,
il est dcsja mort a moittié ;
a sa mort tiavellicr ne fault,
23060 il est desja mort, autant vault ;
c'est ung povrc honune raffolé,
tout desmenbré, tout aifollé
qui u'attent que la mort le happe.
EMILIUS
Prévost, garde bien qu'il n'eschappe ;
23065 s'il n'est cruciffié très bien
et mis a mort, tu ne fais rien :
voyla nostre peticion.
CAYPHE
Tu quiers pour néant dilacion :
tu vois que le peuple s'efforce
23070 et qu'il fault qu'il muyrc : c'est force ;
depesche nous de telz erreurs.
PlLATE
Ha! messeigneurs.
ANNE
Quclz messeigueurs
s'il a dure mort desscrvye
et lu luy fais finer la vie,
23075 c'est la fin de telz malfaicteurs.
CELSIDON
Il a tant fait de telz horreurs
qu'il eu mourra.
DE LA PASSION
PlLATE
C'est par envye.
Ha ! messeigueurs.
MARDOCEUS
Quelz messeigueurs,
s'il a dure mort desservye?
RABANUS
230SO 11 a tant fait cy et aillieurs
que le peuple despacifie.
SALMANAZAR
Porte, porte, et le crucifie ;
veulx tu espargner telz broulleurs ?
PlLATE
Ha! messeigueurs !
NAASON
Quelz messeigueurs?
23085 s'il a dure mort desservye
et tu luy fais finir la vie,
c'est la fin de telz malfaicteurs.
ELIACUIN
Tu os cy les accusateurs
par lesquelz les meffais sçavons ;
23090 d'aultre part bonne loy avons
que nostre Dieu a ordonnée
et sentence en elle donnée
qu'il fault qu'il muyre en temps et lieu,
car il s'est fait le iîlz de Dieu,
23095 et dit beaucop d'aultrcs blasphèmes.
PlLATE
Que no le prenez vous vous mesmes
et le menez crucifier ?
vous m'en voulez ensongnier,
mes briefmeut ce n'est point ma charge.
ANNE
23100 Tu os le cas dont on le charge :
il s'est nommé, pour valoir mieulx,
le filz de Dieu en plusieurs heux,
ou cause de mort est enclose.
PILATE
Filz de Dieu, dea ! c'est aultre chose :
23105 quand devant l'avez accusé,
ce point n'avez pas proposé ;
si le fault examiner sus.
Icy rentre Pilote ait prétoire et y maine Jhesiis.
Or vien ça, parle a moy, Jhesus,
respons moy a ung tout seul point :
23110 dont es tu ? tu ne parles point?
23049 auilnt maniuc A. — 23051 antioipite C. —23052 messeignetirs A. — 23055 que vous A.
TIERCE JOURNEE
303
me portes lu tel arrogance ?
secs tu pas quo j'ay la puissance
do toy prcstcnu'iil délivrer
ou destruire et a mort livrer ?
23115 si portos on vain toi rancune.
JllESUS
Sur nioy n'aroyos puissance aucune
se do lassus ne l'eusses prise ;
donc se ta raison est niesprise,
péché y a tout apparant :
23120 toutcftbis l'a colluy plus graut
qui a toy m'a mis ot bailliô.
Pilate tient aux Juifz.
PILATB
Seigneurs, je suis csmcrveillic
que raison ne vouliez entendre,
mes indirectement contendi'e
23125 a la mort de cest homme icy ;
et s'est chastié par tel sy
que c'est cruaulto de le voir :
que veult on de luy plus avoir ?
Son méfiait en riens ne s'ai)prcuvc :
23130 plus l'examine et moins le treuvo
coulpable d'estro a mort jugié.
Pour Dieu, qu'on luy donne congié,
ou se faire ne le voulez
admenez le et vous en allez
23135 le juger par vostre justice,
cai' de moy ne de mon office
le jugement n'appartient pas.
BANANIAS
Prévost, tu commet/ giant trespas
os mandemens imperiauls,
23140 quant apperçois publiques maulx
et no les pugnis par rigueur.
Se tu laisses ce faulx brigucur,
tu n'es pas amy a Gesar :
il est legier a prouver, car
23145 tout homme qui roy se veult dire
aux lois César veult oontrcdire,
et tu le veulx icy souffrir.
JOATHAN
Se ne le fais a mort offrir,
César mauvais gré t'en soara
23150 et peut cstre te privera
de l'office qu'il t'a commise.
l'ILATE
Veoz cy gent a tout mal soubmise,
23116 aucune manque A. — 23122 moult merucillo G. —
— 83171 1res mmque A. — 23182 A ta beuigne créature
veez cy gent bien désespérée,
vecz cy gent la pis modérée
83155 qui soit, je croy, dessus la terre :
tout le cueur du ventre leur serre
de vcoir ce meschant homme en vie,
et si n'est quo pour une envye
qu'ilz ont contre luy pour ung rien.
[Pose.]
23160 0 povre homme, il me desplest bien
qu'il convient qu'a la moi't te juge ;
en malheure en fus oncques juge,
mes il mo fault obtempei'cr
I)our doubto de le comporcr :
23165 ce peuple en paix ne me laii'ra
jusqu'à ce qu'a son vcil l'ara.
[PosE.l
Or beaux seigneure, oez ma voix
puisque vosti'e courage vois
qui pour riens ne se veult reffraindrc
23170 de ce povre homme a mort contraindre,
neantmoins qu'il me sonne très mal,
je m'en vois seoir au tribunal
pour le juger comme il fauldra :
pourtant y viengne qui vouldra
23175 ouir la sentancc finable.
EMILIU.S
Ha ! faulx prophète misérable,
a ce cop seras tu deffait.
CELSIDON
Suivons, suivons, c'est nostre fait,
pour voir la chose teiininer.
ADAM, ow limbe.
83180 Doulx Dieu qui règnes sans finer
et qui tous bien voulz assigner
a moy ta povre créature,
Quand vouldras tu l'heure signer
quo tu nous dois mediciner
83185 ropparant notre fortfaicture ?
Quand vendra la bonne adventure
23139 Es] Et B. — 83142 l'aulx] fort B. — 23155 soit ne« B. 0.
B. A ta poure et petite C. — 231S6 tminquc C.
304
MISTERE DE LA PASSION
que ton cher filz la mort endure
pour nostre peiiie attcrminer?
L'attente nous est griefve et dure,
23190 et si grant espace nous dure
que ne le sçavons affiner.
EVE
Souveraine et divine essence
qui tous sces en ta prescience
et vois ce qui nous est mestier,
23195 Regarde nostre pcstilance
et douloureuze pacience
en quoy tu nous seuffres traictier.
Quand sera celuy temps entier
que de ta grâce et volentier
23200 verrons ta divine présence 'i
Helas ! quand tendrons le sentier
que David dedens son psaultier
chante en ta gi-ande révérence ?
[SlI.ETE.]
DIEU LE PERE
Temps est que la très griefve otfence
23205 dont le gendre humain est taché
soit adnullee et son péché
pardonné et le pécheur quitte
par le très glorieux mérite
de la passion a quoy s'offre
23210 mon filz Jhesus, et m'en fait offre
comme pris de redcmpcion ;
et pour faire exultaciou
a ce gendre humain qui l'attent
ou limbe forclos et latent,
23215 Michel, mon glorieux message,
vous irez faire le voiagc
jusquos au limbe ou ilz sont mis,
et la conifortez mes amis :
si leur direz que bien et brief
23220 seront allégés de leur grief
ou longtemps ilz ont habité.
MICHEL
Très souveraine trinité
qui régnez en gloire paifaiclo,
vostre volonté sera faicte
2:!225 nans quelconque intoi'mission.
[POSB
tant qu'il soit au limbe.]
Reprenez consolacion,
amis qui cy estes livrés :
temprement serez délivrés ;
vostre redempcion puissants
23230 très ydonne et très suffisante
est preste de faire rapport
a Dieu pour vous mener a port;
le fdz de Dieu très beneureux,
Jhesus, le doulx et gracieulx,
23235 s'est baillié de gré vohmtaires
en la main de ses adversaires
et s'humilie soul)z leur main
pour toy délivrer, gendre humain :
monstre toy loyal serviteur
23240 et mercye ton créateur
qui vient pour toy livrer secours.
ADAM
0 seul et souverain recours
a qui seul au bcsoing recours
en ma destresse criminelle,
23245 Mercy altens passé maintz jours
en longs et ennoyans séjours :
or m'esjouit caste nouvelle.
EVE
Haulte majesté éternelle,
qui de ta bonté supernplle
23250 nous donnes ccst espoir joyculx,
Gloire te rendons perhennelle
et l'ange qui le nous revelle
mercions do cueur gracieux.
YSAIE
Menons feste et jeuz plantureux
23255 a ceste nouvelle apportée,
qui a toute reconffortee
l'assemblée des douloureux.
EZECHIEl.
Longtemps avons esté piteux,
mes comme gent bien conffortee
23260 menons feste et jeuz plantureux
a ceste nouvelle apportée.
JHEUEMIE
Dieu sur tous fort et veitucux,
haulte puissance redoublée
en nous as tel j(}ye boutée
23265 que nous nous tenons bien heureux.
23196 prosistonre B. C. — 2ii'01 Ilelas manriiw C. — 23212 oxiillaoloii C. — 23219 Kt leur C. — 23:22 eternilo G. —
23235-6 volontaire, son aduersaire B. C. — 23237 .Soubz sa B. C. — 2323S te C. — 23233 très joyeux G. — 23260 jove
et A. — 23264 tel gloire A. — 232G5 Que nous nous tenons pour joyculx A.
T I !•: K G H J O U K N K K
305
UAVIU
Menons fosto et jfiuz planturoiix
a cestc iionvcllo apportée,
qui n toutes reconffoi'tec
rasscnil)l('o dos douloureux.
Ici/ doivent chanter quelque motet.
l.UCIKKR
S3i70 Doahlos oliscurs et teiiobroux,
tourbe dospiteusc et villaine,
qui est ce qui tel joye inaine
en nostre chartre horrible et noire ?
HERir.H
C'est le gendre humain.
LbCIKER
Haro! voire,
23275 est ce cela que j'ay ouy ?
quel doable l'a cy resjouy
ne quel maufl'és l'a fait chanter ?
CEniiERUS
Je cioy qu'il nous cuido enchanter
pour nous flajoller en l'oreille.
ASTAROTH
232S0 C'est le deable qui les resveille
et les fait dancer a l'ostol.
KERGAI.US
Voire, ou ung desespoir mortel
dont ilz sont ainsy forcenés
quand ilz se sentent condanipnés
23285 sans lin aux eternaul/. palus.
I.UCIKER
Ne m'en parle plus, Fergalus,
ne vous aultres, tour))es maudites :
il y a pis que ne me dittes;
je craing d'avoir ung quid pro quo.
23290 Haro ! deables, haro ! haro !
dragons venimeux et mauvais,
seurment ne me créez jamais
s'ilz n'ont en eulx ferme espérance
d'avoir bien briefve délivrance
23295 et d'eschapper d(> nos prisons.
BERICH
Lucifer, riens ne nous prisj>ns
s'ilz y scevent trouver cautolle,
car quant la chose scroit telle
prestement y remedyrons.
I.UCIKER
23300 Faulx serpcns, nous les pcrdcrons
et en serons dessaisiné :
je l'ay tousjours yrnaginé,
et ainsi nous en advendra
et que ce faulx Cristus vendra
233œ despoiller tout nostre héritage.
ASTAROTH
Ha ! inaistre, vous nous dictes rage :
tclz parler» nous sont mal scans :
puisqu'il?, sont condempnés céans
a quel cause en pai'tiront ilz ?
LUCIFER
23310 Deables, vous n'estes point subtilz :
autreffois vous ay fait cnqucrre
se Cristus estoit né en terre
dont tant de livres sont escripz,
et après arguz et astrifz
23315 fut dit que pour cause certaine
cil qui jeûna la quarantaine
estoit Cristus et le monstroit
par les haulx faiz qu'il demonsti-oit
passans les oeuvres de nature ;
23320 or ne sçay je se d'aventure
il est mort ou mis a mai'tirç,
et puis venist de fresche tire
délivrer tous nos prisonniers ?
KERGALUS
Je ne le crains pas deux dçniers
$3325 se c'est cil qui est dit dessus.
LUaFER
Il se fait appeler Jhcsus,
ung homme saint et vertuablc :
en tout nostre enfler n'y a deable
a peine qui ne le congnoisse,
23330 et a qui n'ait fait tant d'angoisse
qu'il n'est a dire ne sommer.
HERICH
Je le congnois bien au nommer:
c'est ung homme de haulte taille ;
mes s'il vient, il ara batttillc
23335 forte et terrible non pouiquant.
CERIIERUS
Tout on jouant, tout en mocquanl
je vueil tenir ma porte close
a celle fin que je m'oppose
s'il vient cy nos fors bourgs piliior.
LUCIFER
23340 Cerberus, il t'y fault voillier :
pendu seras se tu n'y suis.
23277 Not« le fuit 1!. in-nufeu G. - 23280 qui In B. - 232.S3 forinenez B. G. - 23292 Seulement A. B .ne xuiniw C.
- 23293 Silz nous .V. - 232-)5 no.tr.- puis A. - 2:t2'.X3-»ll .«..n/uciU A. - 23300 perJrous B. C. - 2331S quil faisoit C.
— 23322 puisl B. — 23330 il uait C. — 23339 l'aulz bourgs B.
1>.^S
20
306
MI STERE DE LA PASSION
SATHAN, qui est au monde.
Haro ! comment joyeulx je suis !
haro ! que j'ay joye attraiiiee,
confitte de rage enflammée
23345 d'avoir si très bien besongné !
j'ay tout gaigné, j'ay tout gaigné ;
j'ay fait ung hault fait, ung chef d'oeuvre
tant que tout le courage ra'euvre,
quand j'ay bien songé rie a rie :
iïeso Jhesus est mort, il est eu pic :
Pilate le va pour juger,
il ne me fault plus cy songer :
en enfler m'en vois tout bâtant
moitié hurlant, moitié chantant;
83355 car quand Lucifer le sçara,
bien sçay que tel liesse ara
que je seray la couronné,
car oncques ennemi dampné
n'exploita plus belle besongne.
23360 Lucifer, horrible segongne
au nit d'orgueil sans fin couvant,
esmouvcz deri'iere et devant
deables plus dru que père et niere.
LUCIFER
Gomment te va, Sathan, beau frère ?
23365 nous diras tu quelque miracle ?
SATHAN
J'ay fait le plus cruel massacle
que deable d'enffei' sçaroit faire.
LUCIFER
Comment?
SATHAN
Jhesus, nostre adversaire,
est prins, lyé et bretecqué,
23370 et est taillié d'esti-e croqué
se le deable n'y met la pâte :
il est de ceste heure a Pilate
qui le va condampner a mort.
LUCIFER
Que me dis tu, dea ?
SATHAN
Mon rapport
23375 est vray comme je le vous compte.
LUCIFER
Ha ! faulx ennemy plain de honte,
nous as tu cecy rapporté ?
faulx Sathan, tu as tout gasté ;
faulx ennemy terrible et noir,
23380 tu as destruit nostre manoir.
Se tu ne trouves les moicus
que de ce fait cy ne soit riens: ,
ce Jhesus cy nous destruira,
ce Jhesus nous desrobera :
23385 c'est pour ly que tous ces prophètes
ont maintenant telz joyes faictes ;
c'est pour ly qu'ilz jouent et chantent:
c'est pour ly que tout haalt se vantent
d'eschapper briefment malgré noua ;
23390 par luy pensent estre recous :
nouvelle leur en est venue.
Substance ville et corrompue,
chien enragé puant que fiens,
retourne bien tost d'où tu viens
23395 et treuve moyen de deffaire
ce que tu as cy voulu faire
ou villement le comperras.
A la femme Pilate iras
qui encore en son lit sommeille,
23400 et luy monstre par grant merveille
que tous ceulx, qui entenderont
et couppables se renderont
de la mort Jhesus le prescheur,
seront condampnés.
SATHAN
Soiez sceur
23405 que j'en feray devoir très grant.
LUCIFER
Or t'en va bruyant et tonnant :
que de tout l'àbisme dampné
soies tu conduit et mené !
Icy s'en va Sathan a la femme Pylate
qui doit estre en son lict.
SATHAN
Je n'ay pas mis trop longue espace
23410 a venir jusqu'en ceste place,
c'est Jherusalem la cité :
si m'est bien de neccessité
de quérir moiens pai" tromper
pour faire Jhesus eschapper,
23415 ou aultrement je suis destruit,
Lucifer m'en a bien histruit :
si ne puis faillir a mes gloses.
Femme qui droit cy te reposes,
enteus cy une advision
23342 Nous avons reporté ici l'indication scénique attribuée par G. à Lucifer v. 23340. — 23344 meslee A. — 23366
inarchacle G. — 23367 deable denger G. — 23369 bochequie G. — 23394 Fuys liabillement dont B. Kuis hastluement
C, — 23406 courant et bruyant li. brayant G. — 23413 par] pour A.
TlliUGt: JOURNKl
307
ii'iiO on point n'y a irabusiou.
Enlcns donc co (juc ji^ to sonnni' :
ton niaiy tient nng tros saint honnnu
innocent, ^n'onoijucs ne mcflit :
c'est Jhcsus qui s'aiipelic Crist,
23120 et par envye qui le mord
on le veult condanipiicr a mort,
dont ton niary doit estro juge.
Garde bien que point ne le juge,
car s'il luy assiet la sentence
23'.30 c'est contre Dieu et conscicuce,
et cy après le temps verrez
que toy et luy destruis serez
et porterez pugnicion
de la faulce execucion
23 '.35 qu'il en fera : bien t'en souvieugne;
garde que ja ne luy adviengne,
cmpesche le tant que pourras
ou villmnement en mourras,
et brief je le te certiffie.
LA FEMME PIL.VTE
23i'â0 O Venus en qui ji! nie fye,
l'alas, Jupiter et Mercure,
com vision laide et obscure
ay veu ennuit en mon dormant !
a vous, mes dieux, me recommand :
23145 j'ay bien mestier de vostro ayde,
car le cueur me tramlilc de hide
do ce que m'avez rcvellé.
que c'est pitié do les ouir.
LA KEMME IMLATE
O Sardine, il te fault courir
23465 a mon mary, sang nul moyen
luy dire qu'il se garde bien,
dessus quauqu'il se pcust melfairc,
do traveil a cest homme fair<',
quoique ce i)euple après ly crie ;
23470 et luy diz bien qui^ je luy prie,
s'il peust, que de leurs maiua l'exempte,
et que ceste nuit cy présente
j'ay eu de luy vision briefve,'
si très pondérable et si griefvc
23475 qu'encore le cueur m'en fi'CHiist,
laquelle en briefz termes me mist
que quiconque sera coupable
de sa mort, las et misérable
en douleur finera ses jours.
SABDINE
23480 Ma dame, sans faire séjours,
eu liens il n'y ara failly.
LA FEMME l'II.ATE
Reconmiande moy bien u ly,
et qu'il pense bien a son fait.
SABDINE
N'en doubtcz plus, il sera fait
231S5 du tout a vostrc volenté.
Icy s'en vient vers l'ilute.
[l'OSE.I
hy se lieve.
Je voy la grant peuple assamble
qui mainc grant noise et grant cry
23450 Sardine, qu'est ce, je te pry ?
dis moy que c'est, si le sçaray.
SARDINE, chamberiere.
Ma dame, je le vous diray
ainsi que je le puis entendre :
ce sont Juifz q\n ont fait prendre
23455 Jhesus, le saint homme et divin,
par ung vouloir (ilain de venin
qui meust d'envye dessus ly,
1 1 pourchassent vostre mai-y ,
et r(!quierent sans délayer
23lfo pour le mener crucifier,
dont les aucuns sont bien joyculs
et les aultres tant douloureux
l'ILATE
Or suis je assis en majesté
ou siège de haulte justice,
comme il affiert a mon office
pour faii'e jugement égal.
23490 Neantinoins, seigneurs, il me fait mal
du fait de ce i)ovre homme icy
que n'eu voulez prendre niercy,
ne pour batre no fort nieucr ;
ne poucï en vous reffrener
23495 l'ardeur qui le cueur vous enflanmic,
se ne luy voiez pai'tyr l'ame
hors du corps sans quelque reppas ?
SARniNE
Monseigneui-, vous plairoit il pas
que je vous comptasse deux mos
Î3500 ung peu appart ?
PILATE
Sur quel pTOfiOB ?
23425 iiui lea juif» mord A - 23154 Ce sont Ii-s. A. — 23492 yui .\. — 2ii9i vo» ctteur» le rcuti- B. C.
308
MI STERE DE LA PASSION
dis le biiof, je to lo commande.
SARDINE
Ma dame a vous se recommande,
sire, et vous prie en sa clamour
que sur le plaisir et l'amour
23:03 que jamès faire luy sçavez,
que ccst homme que vous avez
puist estre de la mort recous,
et comment qu'il soit, gardez vous
de le juger s'il fault qu'il muyre.
l'II.ATE
23510 Je ne luy veil aidier ne nuyre,
je ne m'en mesle quant a moy ;
mes je te prie, par ta loy,
qui la meust de faire ce maad ?
SARDINE
Elle a veu ennuyt en dormant
23515 grans merveilles et de grant monte
de ce Jhesus, comme elle compte,
et les vous dira cy apprcs ;
mes conunent qu'il soit, par cx])ré9
m'a dit que vous en deschargez,
23520 et gardez que ne le jugez
pour quelque couleur qu'on vous baille.
PILATE
Nous en ferons bien, ne te chaille,
se pourvoir y puis nullement.
Va t'en et luy dis hardiment
23525 que du fait de sa délivrance
j'en feray ma plahie puissance
a sa requeste.
SARDINE
Monseigneur,
nos dieux vueillent qu'a vostre honneur
en puissiez vostre main lever.
Icy s'en retourne a samaistresse.
PILATE
23330 Encore vouldray je esprouver
se ce peuple tant^^aisié
se seroit jamès rappaisié
■ ou qu'il se voulsist revocquicr.
Or, beaux seigneurs, je vous requicr
23535 en amour et vi-aye aniittié
que vous legardez en pitié
vostre roy, et vous modérez,
et ung petit considérez
sa malheuree seignoric.
EMILIUS
235'.o Oste le et le crucifie :
il nous fait mal a regarder.
.IHEROBOAN
Riens ne gaignos au retarder,
prevost, poui' néant fai.s le souit :
plus restes et plus noise sourt,
235'i5 plus diffères et plus s'efforce
le peuple de crier.
MARDOCEl'S
C'e>t force
qu'il muyre, on n'y peu.st secourir,
et se tu ne le fais mourir,
tu pei'S ton temps quant a ce point.
PILATE
23350 Ha ! gens, vous ne regardez point
en quel danger juge s'afuste
qui juge a mort ung homme juste ;
tel mort se doit bien soupeser
et a la balance peser :
23555 c'est grant chose que de mort d'honuno.
CAYPHE
Nous tendras tu en ceste somme?
demourrons nous icy nieshuy ?
Briefment lu n'es point vray amy
a César ne bien cordial,
23560 se cest homme tant bestial
ne fais mourir de mort amere.
II s'est fait roy, c'est chose clere,
et quiconcques roy se confesse.
la majesté de Gesar blesse :
23565 tu le sces mieulx qu'aultre quelconques;
et pourquoy diffères tu doncques
de juger sa mort détestable ?
PILATE
Voyla ung terrible notable ;
voyla tout mon fait abatu;
23570 je pour néant me suis debatu
a ce povre homme depescher ;
je crains tant César offcncer
que je n'oze désobéir :
si le nie convient envair
23575 et le juger soit tort soit droit;
aultrement grand mal m'en vendroit
cy après : je voy bien que c'est.
Or, mes amis, puisqu'il vous plrst,
pour avoir vostre bonne grâce,
23380 il fault que ce jugement face ;
mes avant veil laver mes mains
a la coustume des Romains
qui ont cest usage incité
23523 il puis A. — 23524 Vu donc B. C. — 23540 Osle lay C. — 23553 sapeser I".. — 2353S Biief C, — 235'35 que nous
quelconques G. — 23570 Je me suis pour riens B. je juttn^ue .\, — 2c57I A su deliuranoe penser B. C.
TIKRCE JOURNKE
309
en signe do mondicitii,
83585 et mes mains Ijji n laver en puis,
car do sa mort acteur ne suis
n'en riens consentant n'adhérant.
Rnrraquin ?
IIARRAQUIN
Sire reverand,
quel chose vous plaist il avoir ?
PILATE
23590 Metz de l'eaue ou pot lavoir,
appresto bassin et touaille,
et quand c'est fait, si mo le baille ;
j'ay grant liaste, abroge bien tost.
BAIIRAQUIN
Voicy tout |)rest, sire prevost :
23595 or lavez en bonne santé.
Icy lave Pilate ses mains.
PII,ATE
Seigneurs, je me tiens exempté
et mon courage net se sent
de la mort do cest innocent
homme juste que vous deffaictes ;
23600 pourtant regardez que vous faictes :
en me lavant je m'en descharge
de tout son sang et vous en charge,
et m'en tiens imiocent et monde.
EMILIUS
Tout son sang dessus nous rodonde,
23605 sur nous tous et sur nos enffans,
tant que jamès n'en soions frans,
se péché ou coulpe s'i fonde.
PILATE
Vous voiez comment je me monde
pour CCS cas qui sont moult pesans.
RABANUS
23610 Tout son sang dessus nous redonde,
sur nous tous et sur nos enffans.
Le crains tu tant ?
• PILATE
Le plus du monde.
SALMANAZAR
Pourquoy ?
PILATE
Les dangers y sont grans :
car vous vous monstrez trop engraus
23615 a trouver tours qu'on le confonde.
NEMBROTH
Tout son sang dessus nous redonde,
sur nous tous et sur nos enffans,
tant que jamos n'en soions frans.
se péché ou coulpe s'i fonde.
PILATE
ïMJO Je feray ma pieri-e et ma fonde
auffort s(ur ceste obligatoire ;
jiar vostre responce notoire
vous vous obligez grandement,
et sur elle mon jugement
23625 je vouldi-ay asseoir bien eu haste
en ce point : Je, Fonce Pilate,
garde par chartro bien fondée
de la prevosto de Judée,
soubz César mis en ces paities,
23C30 les accusacions ouyes
contre Jhesus eu sa présence,
je le condampne par sentence
en la croix pendre et ressortir,
et de la jamès ne partir
23635 tant que sa vie y soit finee.
NATHAN
Or est la chose terminée,
dont grant liesse en mon cuour ay.
PILATE
Or entendez que je diray.
Seigneurs Juifz, a vostre Tcil
236'i0 et a mon très singulier dueil,
ay condampne cest imiocent,
mes puisque chacun s'y consent,
je n'y puis ne doy obvier ;
touteffois pour expédier]
23615 tout ensamble proci's plusieurs,
j'ay encore deux malfaicteurs,
ifiauvais garuomens et larrons :
regardez se nous les lairrons
ou s'ilz iront a la justice.
ANNE
23650 Cher sire, il fault qu'on les justice
avant ceste feste prochaine.
PILATE
Griffon, va tost, si les admaine ;
sces tu qui ilz sont?
GRIFFON
Bien et beau :
j'en vouidray estre le Iwurreau
23655 ja tost pour les loger amont.
Icy s'en va au g<olie>\
Kuvre ta chartre, Bi-utaulraont,
et baille ces <loux pèlerins
23:,00 lauouiT B. — ?3591 Et nppreste C. — 23593 aliivge moy B. C. - 2359'. Vcez tout A. — ?;f597 ne se C. — Ï.'ÎOOI-IO
manquent H. C- 23025 biief et en C. - 23P30-1 révélés C. - 236'.3 ne ne C. - 236;0 Javl Je A. - 23651 Dcnant B. C.
— 23657 El me 0.
310
MISTKRK DR LA TAS S ION
qui ont cspié les chrniins
et desrobé maint bon marchant ;
SiiCGO je croy qu'il/ seront approchant
au gibet, puisque je l'emprens.
BRUTAUMONT
Voyla l'huis ouvert : or les preus
et les tire hors ung a ung.
GRirKON
Ha ! Tervagant, qu'il y fait brun !
S3&a elle est basse comme ungz cnffers.
BRUTAUMONT
Hz sont bien enfferrés de fers
et bien fermement atachiës.
GRIKKON
Oste leur hardiment les pies :
je croy bien qu'il le convendra.
nr.UTAUMONT
23670 Pourquoy ?
GRIFFON
Pour ce qu'on les pendra
par my le fons de leurs cerviaulx.
Ça, passez avant, larronceaux,
vous serez acoup dcpeschés.
DiSMAS, bon larron.
Dieu nous pardoint tous nos péchés,
23675 dont nous avons fait grosses sommes !
GRIFFON
Vous estes mainteuant preudommes,
mes c'est quand vous n'en pouez plus.
GESTAS, maicvais larron.
Comment donc ! sont nos joure conclus?
n'a il remède a nostre fin ?
DISMAS
23680 Frère, je voy bien que nennin :
n'y a que nous recommander
a Dieu, qu'il nous veille garder
nostre part en son hault royaulme.
GRIFFON
Ouy, ouy, c'est a Guillaume ;
23685 vous en irez régner aillieurs.
Prévost, veez cy ces deux pillicurs :
pensez de pourvoir a leur fait.
PILATE
Leur procès si est pieça fait :
nous les jugeons en la croix pendre
23690 et estre jusqu'à l'ame rendre
et que la leur vie doffinc
d'amere mort.
ORII.LART
Qu "1 médecine
pour confforter ung pacicnt !
(iESTAS
C'est doncques a bon essicnt :
23093 il nous fault passer ces destrois.
GRIFFX)N
Et vous ne parlez point des crois,
messeigneurs, icy en commun ?
il leur en fault une a chacun :
regardez ou nous les querrons.
PILATE
23700 Tu dis vray, nous y penserons.
Seigneurs, regardons entre nous
par quel moyen entendez vous
que ces meschans que vous voiez
soient tous trois cruciffiés ?
23703 les voulez vous tous d'une sorte,
ainsi que la coustume porte,
et qu'on l'a fait le temps jadis ?
Et cecy pour cause je dis,
car selon le crucifiment
23710 il fault que les croix proprement
soient aposte charpentées.
CAYPHE
Les croix qui seront adjoutees
pour les deux larrons a fin mettre
peuent bien d'une manière estre
23715 selonc la forme aceoustumee,
mes celle qui sera nommée
a Jhesus, ce meschant garçon,
nous la voulons d'aultre façon,
pour luy faire plus grand cselande.
PILATE
23720 Gomment?
CAYPHE
Nous la voulons plus grande,
plus lourde et aussi plus espesse,
et pour luy mettre d'aultre espèce
qu'aultres, et pour plus grant tourment
il y sera mis aultrement :
23725 par piez, par mains sera percié
et bien serrement affichié
en la ci-oix de grande haultesse
pour mourir en plus grant destresse,
douleur, peine et conffusion.
PILATE
23730 Avez vous ceste oppinion ?
83662 or] va et B. — 23666 en ferrez de bon fer C. — 23680;croy C— 236SS vault ja que tout f.nit B. C— 23690 jusqua 1,1
mort rendre A. — 23695 passer manque A. — 23699 la G. — 23708 vous dis B. G.— 23710-1 a parler proprement (jue les crois
soient charpentées B. G. — 23712 adressées B. ou nous ordonnées G. — 23718 Sera tout dung aultre A. —23723 grief B. G.
T I K R C K .1 0 IJ R N R R
311
n ost point up.'ifno a voir.
.IHEROHOAN
Nous le voulions ninsy avoir
pour son grant renom plus abati'c.
PILATB
Kt je n'y veil pas donc debatro :
2;i735 tantost le foi'ay exploiticr.
Griffon, va a mon charpentier,
et luy fais ti'ois croix composer
pour ti'ois inalfaiclcius exposer,
et s'il n'en a point de parfaictcs,
237'i0 dis luy que les deux soient faictes
en la manière accoustumee,
et que la tierce soit formée
jilus grande beaucop et plus lourde.
GRIFFON
Sans vous tenir cy plus de bourde,
23745 tout sei'a briefment apprcsté.
PILATE
liroyeffort, va d'aulti'e costé
au fevro et te rens a sa forge :
si luy dis que surpicz me forge
trois clous gi'ans et longz et pointus.
1150YEFFORT
23750 Puisque c'est pour clouer Cristus,
je ne vouldroye pas manger
pour les aller faire forger,
car il l'a desservy picça.
(illIFKON
Chaipeutier, mon amy, vien ça ;
23755 as tu maintenant nulles crois ?
I.E CIIAHPENTIER
Combien t'en faut il, Griffon ?
GlUFFON
Trois,
pour trois meschans plains de fourbet,
que je vois mener au gibet
comme infâmes et deshonncstes.
LE CHARPENTIER
23760 Veez en cy ja deux toutes prestes,
tant pesantes que c'est hideur.
GRIFFON
Elles sont de bonne grandeur,
c'est droit ma besongne sans faulte;
mes il m'en fault une plus haulte
23765 pour ung aultre fol qui la est.
IS, CHARPENTIER
Je n'ay point de bois qui soit prost
de si hault tronc ou haulto branche,
se ce n'est une vieille planche
qui est près de ccste maison
23770 des le temps du roy Salomon,
et est tant belle que merveille.
GRIFFON
Prens la doncqucs et l'appareille :
faire la fault comment qu'il soit,
car se monseigneur se coursoit,
23775 ton fait aroit bien mal fine.
LE CHARPENTIER
J'aray tout a cop machiné
mon fait, je m'en vois mettre a l'euvro :
il me samble que le cueui' m'euvre
de joye, quand je gaigne argent.
GRIFFON
23780 C'est la coustume de tel gent :
vous ne pensez qu'a la pcccune.
[Pose.]
BROYEFFORT
Fevre, le souleil et la lune
' te gardent avec Vulcanus !
nouveaulx cas nous sont survenus
23785 bien hatifz ainsi qu'il advient,
dont neccessairement convient
que brief tu besoingnes a nous.
LE FEVRE
A quoy faire ?
BROYEFFORT
A forger trois clous
desquel z nostre prevost propose
23790 faire ung grant fait.
LE FEVRE
N'est autre chose,
et si m'en fais ung si grant cry ?
'■ quelz clous te fault il, je te pry ?
-clous a huis ou clous a fenestre?
ou a ferrer chevaulx a destre ?
23795 di le tost pour expédier.
BROYEFFORT
Nenuiu, c'est pour ci-ucifier
23738 manque B. — 23739-'i4 remplncès pnr (?<•« quatre vers : Sil neii .nuoit qui feussent seiennea Lp? iU-ux seront
assez moyennes Kt lii tii-ri'iî plus granile assez G. Jentcns mieulx que vous ne pensez B. C. — 23756 Combien ten fault
O. il nien fault trois B. C. — 23701 firant hideur C. — 23775 mal beson|.'no A. — 237S7 quil fault que bosongnei! pour
nous A. — 23';93 ou| ot A.
312 MISTERE U
ung mauvais loudier entre mille
qu'on a saisy eu ceste ville,
pour clouer eu crois pies et mains.
LE FEVRE
23800 Est ce Jhesus ?
BROYEPFORT
Ne plus no mains :
mourir le fault par son oultrage.
LE FEVRE
Il n'y a pas trop grant dommage,
mes qu'on en aist fait bonne enqueste.
imOYEFFORT
Forge, forge et plus ne caqueté
23805 tout entre baves et risées.
Icy forge les clous.
LE CHARPENTIER
Veez cy trois croix bien composées,
s'oncques homme bien composa.
GRIFFON
Cil qui le nom leur imposa
se monstroit appert et sensible,
23810 car c'est torment le plus horrible
qui soit en ce monde régnant.
LE CHARPENTIER
Nous veulx tu preschcr niainlffliant?
tu es ung très bon coquai'deau.
Songne d'avoir ung tombereau
83815 pour les trayner tautost en sus.
GRIFFON
Vcez cy de quoy.
LE CHARPENTIER
Or chargeons sus
incontinant a peu de noise.
GRIFFON
Ha ! Jupin ! que ceste cy poise !
je n'en vis pieça nulle telle.
LE CHARPENTIER
83820 Elle est grosse et matérielle,
grande et largo de bout en bout.
GRIFFON
Il souffit, je m'en vois atout,
puisque j'ay prins ma fourniture.
Icy eminaine les trois croix en ung
tumbereau.
E r. A PASSION
LE FEVRE
Voicy clous a bonne pointure,
23825 et fust i)Our perser marbre bis,
s'ilz ne sont forgés en gros bis,
je n'en demande rien, beau sire.
BROYEFKORT
Encor y sçay je ung point a dire
qui me desplest et m'euargue.
LE FEVRE
23830 Comment?
BROYEFFORT
La pointe est trop ague :
fais les moy ung peu plus camus,
affin que ce meschant Jhesus
aist plus de peine et de tormens
. quand se vendra a l'entrer ens
23835 pour luy percier membre après membre.
LE FEVRE
Ton corps jamès ne se remembre
fors de sanglante mauvaittié.
Or tien, sont ilz bien atiaitif! ?
que t'en samble ?
BROVEFFORT
Hz sont bien appoint.
LE FEVRE
23840 Et d'argent ?
BROYEFFORT
Il ne s'en fault point,
je n'en ay point de charge, moy ;
monseigneur parlera a toy
qui te fera satisffier.
LE FEVRE
Ce sera a jamès payer,
23845 puisque je suis la assigné.
[POSE.I
HILATE
Il est temps qu'il soit ordonné
de la mort de ces malfaicteurs :
tout est prest ; pourtant, messeigneurs,
faictcs les admener ariiere,
23850 et advisez par quel manière,
VOUS voulez qu'ilz soient conduis.
ANNE
Nous voulions que Jhesus soit mis
au milieu de la compaignie,
238C9 expert B. C. — 23811 viuant A. — 23813 Et dea voicy beau B. — 23^20 grande et A. - 23S21 grosse et A. —
23823 Le mol tumbereau de l'indication seniique est remplacé dans C par huterel. — 23S28 peu a direB. C. — 23835
membre a membre B. C. — 23838 appointie A. '
TIERCK .lOfRNKF
:il3
aftiii que sa graiit villcnio
3855 soit a dextre ilc deux larrons,
et en ce point nous les nicrnons
tous trois conjointement dcffaii'O
sur la montagne de Calvaire 23895
qui est niout propice a tel/, gens.
CAYPIIE
2381)0 Se nous sonmies l)icn diligens,
affin qu'il soit niieulx reeonguu
de ceulx qui pour saint l'ont tenu,
ostons luy ccst abit de roy,
et le vestons en tel arroy
Ï38fi5 qu'il souloit aller jiar la voye, Î3900
affin que chacun si le voyo
en ses habis accoustûmés.
.IHEROBOAN
Monseigneur, bien déterminez :
eu ses habis le fault avoir,
23870 affin que chacun le puist voii-
et congnoistre plus de léger.
PII.ATE
Sus! sergens, allez abréger : ' 2330Ô
devestez moy ce malheureux,
ou je n'aray point paix a eulx :
S387D je voy bien que c'est de leur fait.
GRIKKO.N
Monseigneur, il vous sera fait,
ne vous doublez plus de cela. 83910
Orillart, tire par do la :
que tu es ung uicc hardel !
OUILLART
-.3880 Le faut il mettre en pourpointel?
il est a malhcurc venu.
ORIFFON 83915
Mes le fault desiioulier tout nu :
ainsi le veult la seiguorie.
CLAQUEDENT
Sire, que le deable s'en rie :
83885 n'en arons nous meshuy la fin?
GRIFFON
Or tire la, tire, cousin ;
Claquedeut, tu ne sers de rien.
fI.AQUEDE\T
Je ne puis.
lillIFFON Î3920
l'ourquoy?
HRAVART
11 dit bien,
car la r. be fort s'entretient
23890 et tellement a son dos tient, 83925
aux playcs qu'il a sur le corps.
que ne la (lourrons avoir hors,
KO nous ne l'arrachons a force.
ORll.l.AnT
Ce samble ung mouton (ju'on escorchc
la peau s'en vient avec l'abit.
CI.AQUEUENT
Tant a il plus nouveau labit :
ses playes luy sont ramentue».
ORIfKON
Ses robes luy sont deve8tu( s :
sire, commandez plus avant.
P1I.ATE
Prenez ses habis de devant
et l'en reveste/, tout a l'iicuie.
GRIFFON
Il sera fait, je vous asscure,
ainsi que vous le commandez.
PII.ATE
Or marchez devant.
ORILLART
Attendez
qu'il soit lyé bien et estroit.
Qui ses maulfais ne congnoisti-oil,
il pouiroit décevoir le monde.
HRAYART
S'il s'en fuyt, je veil qu'on me fonde.
Mes regardez cy quel docteur,
quel notable prédicateur,
quel excellant roy nous ai'on.
MARIWCEUS
Ave tu, rex Judeorvm .'
Citoiens Juifz, ça venez
et humblement vous encliuez
devant ce roy plain de vertus.
Icy s'enclinent devant luy.
NAASON
Are, rex!
ELIACHIN
He! ave, Cristus .'
hault roy des .luifz. Dieu te gart 1
GRIFFON
Dittes : ace, maistrc coquart ;
ce nom luy siet roieulx la raoittié.
PILATE
Seigneurs, il est assés mocquié,
et si bien qu'a tout expliquier
il n'y reste i)lus que mocquier :
il est traictié a peine telle
qu'il n'est créature mortelle
qui n'aist hideur du regai-dei'.
11 ne le convient mes larder ;
23S01 que soit nus C. — 2389U en auant 15. G. —
hel et B.
83902-8'. manquent C. fruillet déchiré. — 231M8 .\ve donc R. - 2U910
314
M I S T K R E DE L A P A S S I 0 N
menez le mourir, je vous prie,
si ferez aulmone fleurie,
se vous abrégez son trcspas;
23930 vous luy verrez passer le pas
et mourir icy en présent.
ANNE
Prévost, chacun de nous consent
qu'il soit admené bonne allure;
mes nous avons voulu conclure
23935 qu'il soit mené droit au milieu
des deux larrons jusques au lieu ;
et oultre, pour peine plus forte,
nous avons ordonné qu'il porte
sa croix mesmes sans aultre ayde.
PILATE
23940 Par tous nos dieux, j"ay moult grant liide
de la durté que vous luy faictes
comme dures gens, et telz estes
qui n'avez pitié ne demye ;
mes je ne vous desdii'ay mie,
239'i5 j'en suis content auffor-t aller :
allez le meurtrir, affoller,
je ne le pense ja deflendre.
GRIFFON
Tien, Jhesus, il te fault entendre
a poi'ter ce jolis fardeau.
CLAQUEDENT
23950 11 le portera bien et beau,
et se vistement ne le charge,
je luy donray si grant descharge
que je luy romperay l'eschigne.
PILATE
Trompeté, sonne la busine
23îfâ5 bien haultcment a voix effree,
affin que ceulx de la contrée,
officiers tout en gênerai,
montent prestement a cheval
pour s'en venir a la justice.
LA TROMPETE
23960 A cela ne seray pas nice:
si haultemcnt la sonnoray
que par sonner esbairay
tous ceulx qui sont en la citci.
Icy sonne la irompcle, ,
pour la mort de .Jhesus traittier.
ASCAMUS, premier chevalier.
Les Juifz l'ont tant fait guaittier
qu'ilz l'ont prins a leur avantage,
23970 et le mainent a grant oultrage
crucifier villaincment.
MARC ANTHOINE, deuxième chciudier.
.\ lions après habillement :
si fault que nous y comparons,
de paour que ne le compparons
23975 du prevost de l'imperateur.
CENTLHION
Regardez, vêla grant hideur :
qu'il est mis en piteux destrois,
quand ilz y font porter sa croix
en ung tant pénible chemin !
EMILION, troisième chevalier.
23980 Ils l'ont pris en quelque larcin,
car entre deux larrons l'emmainent.
ASCAMUS
Hz font bien doncques s'ilz se peinci t
de ti'aictier sa mort sans respit.
Icy s^en vont aii mont de Calv lire.
GRIFFON
J'ay au cueur dolour grant despit
23985 que ce vielz matin afFaictié
ne marche habillement du pié :
il est tant nice que le doablo.
ORILLART
Marchez, viel truant détestable :
portez vostre gibet avant.
BRAYART
23990 11 fait trop bien du cayment :
sus! passez, ribault; marchez fort.
CLAQUEOENT
Tire la devant, Broy effort :
fais le monter ceste carrière ;
tire fort.
BROYEFFORT
Mes boutez derrière :
23995 vous ne faistes riens que bourder.
CENTURION
Mes gens, il est nécessité
23965 que nous allons a l'assamblee ;
j'entens qu'elle s'est assamblee
23934 nous onnnqiif A. — 23946 meurtrier B.
Ï3990 le cayement A. — 23995 que flagollar C,
JULIE
première femme de Jherusalem.
0 femmes, venez regarder
23953 l'ompay B. —23900 Jattens A, — 239CS aguaittier A, —
TIKRCH JOURNEK
m:
la gi'niit pilio ; nvancpz vous :
•Iliosus, lo saint prophète et doulx,
(jui tant (le biens nous souloit faire
S'iiKX) et qui estoit tiiiit nécessaire
au povre peuple secourir,
s'en va piteusement mourir
a terrible exccucion.
VEnoNNE, deuxième femMe.
J'en ay si grant compassion,
iUX)5 Julio, ma chère compaigne,
qu'il n'est huy condbrt que je preigne,
' tant ay grant pitié en mon cueur.
PEIUJZINE, troixiemc femme,
Helas ! S'eronne, cherc seur,
helas ! qui nous conffortcra ?
2'iOio helas ! et qui nous moustrera
la sainte parole divine ?
Ha! très desli-able conviue,
Juifz desloyaulx et maudis,
occirez vous homme tant digue ?
21015 arez vous les cueurs si hardis ?
0 très doulx Dieu de paradis,
je te requior par ta puissance :
vueillos huy exaucer mes dis
et donne a ton filz pacience.
PASITHEE, quatrième femme.
i'iOsifl En pleurs et en plains,
Jhesus, je te plains,
saint honune et begniu,
Et fais mes reclains,
car ces gens voy plains
$4025 de couvert venin.
JULIE
Saint homme et divin,
expert et enclin
de nous contt'orter,
Tu t'en vas a fin,
qui sera affin
de nous supporter.
VERONNE
Helas! doulx Jhesus,
de toutes vertus
noblement ourué,
que sont devenus
les fais chers tenus,
le bien ordonné
que tu as donné
a tes bons amis ?
c'est mal guerdonné
d'estre ainsi mené
2'.03O
i'iOX,
i'Mù
ÎW
i',o:M
2'i055
rt a mort submis.
PEIirZINE
Jhesus, vray prédicateur,
après toy pleurons;
JhesuB,'vray prédicateur
et très soicmpnel docteur,
sans toy dcmuurons;
tu toloyes estre ducteur
et du peuple conducteur :
or te parderons;
helas! que ferons
qui n'avons consolateur ?
de douleur mourrons,
et pour ce, très bon pasteur,
après toy pleurons.
PASITHEE
Deconfortees demeurons
en la conduite de destresse,
destituées de liesse
de ce piteux département.
JULIE
S'iOOO Lamente très piteusement,
Jherusalem, cité louée.
Plains la piteuse destinée
qui t'adviont a ce pileux jour ;
complains et pleure sans séjour,
Î4065 dolenle cite malheuree ;
Se tu es triste et esplouroe
tu as bien cause de doulour,
car tu pers le bien et l'amour
dont tu deiBsses estre parée.
VERONNB
24070 0 haulte parsonne honorée,
la plus sainte dessoubz Its cieuy,
on te fait giand tort, se m'aist Dieux
chacun le voit, chacun le juge.
Maudit soit le desleal juge
24075 qui le jugement assigna,
et quand la sentence assis n'a
par droit, Dieu luy envoit mal au !
JHE3US
0 filles de Jhei-usalem,
dames de grans devocious,
24080 cessez vos lamcntaeions
dont au cueur prenez tel ennoy :
ne vueillez plus plourer sur moy
ne lamenter, dévotes femmes ;
mes veilliez plorer sur vous mesmes
24085 et sur vos enffans ensement;
car les longs jours vendront briefment
24000 liuy ''f'i'iM C. — UOH j.? »nmi</«.' C. — 2402.1 Des juifï im- <'omi>liiiiis A — 2102.4 Car ce sont g<>ns plnins A.
— 240j:t Nous nous perdions C. — 24054 très vray B. vray 0. — 24058 Desuuees C. — 24072 On te fait tort ainsy iny
liieux C. — 240W l'ar justes causes assignées B. C. — 24078. Killes de jherusalem nées B. C. — 24081 adnoy B. annoy (:•
316
MISTERK DE LA PASSION
qu'il/, diront par dolentes voix ;
« De Dieu sont les ventres benois
sterillcs qui oncq n'engendrèrent
24000 et mamelles qui n'allaitèrent. »
Et lors par grant destresse'd'ire,
ensamble se prendront a dire :
« Haultes montagnes, hastez vous
et tresbuchez par dessus nous; »
2'iO!)3 et aux basses : « Or vous ouvrez,
et pour la terreur nous couvrez. »
Car s'en moy, qui suis arbre vert,
tel fust de peine est descouvei't
et me traveille en ses accès,
84100 en eulz qui sont arbres tout secz
et vuides d'humeur vertuable,
que sera ce ?
GRIFFON
Par vosti'e dealile,
marchez avant, villain puant :
nous allez vous cy arguant?
24105 vous arez ja beaucop d'argus
et serez plus soubtil qu'Argus
se vous eschappez de la leste.
CAYPHE
Fi'appez fort sur dos et sur teste,
s'il ne marche ligierement.
NOSTRE DAME ' , .
24110 0 mon filz, mon seul peiisement,
mon seul bien, mou avancement
et le seul resjouissement
que jamos voye ;
Mon bien, m'amour, ma seule joye,
84115 ou es tu ore n'en quel voye ?
la triste nouvelle m'envoye
qui la sçara.
O mon filz, ou te trouvera,
en quel place te serchera,
84120 te tendra et embrassera
ta mère chère.
Qui pour toy a dueil a renchere
et fait la plus dolante chère,
la plus dure et plus adversiere
84125 a desmesure
Qu'oncques endurast cieatui'e ?
mon filz, ma doulce pourtrnictuie
et ma très araee nature,
t'ay je pardu ?
MADELAINE
24130 Mon doulx maistre, mon doulx Jhesu,
a quel port es tu pervenu ?
helas ! et qu'es tu devenu ?
cueur doloui'eux.
Triste, pensif et langoreux,
24135 estaint de soupii's l'igoreux,
reinply de pleurs mal savoureux,
que dois tu faire?
Ton maistre pers de qui l'alfairc
estoit pour toy faire et parfaire ;
24140 or le pers sans luy riens meffaire:
la mort le presse.
Quel dueil , quel courroux, quel tristesse,
quel haulte masse de destresse
mon cueur charge par tel oppresse
24145 que plus n'en peust!
0 fêlions Juifz, qui vous meust
d'occire cil qui vous promeust
a tout bien et tout bien vous veult ?
detraction,
S'ilSi) C'est tousJOTirs ta coudicion :
devant sers d'adulac-ion,
mes tu poins comme escorpiou,
voire en absence.
0 Jhesus, remply de science,
24155 souverain trésor de clémence,
qui de mes pochés indulgence
m'avoyes donné.
Es tu de moy habandonné
et pour estre en habandon né?
24160 Dieu a qui filz es ordonné
te veille aidier !
[Pose.]
JOSEPH D ARISMATIE
Chères dames, a mon cuidier,
se vous ne vous estes hatans,
jamès vous ne vendrez a temps
24165 que Jhesus ne soit a mort mis :
je et plusieurs de ses amis
l'avons ja veu mener sans faulte
chargé d'une croix grande et haidte
qui piteusement le traveille.
240&S De dieu ventres soient benois B. C. — 24089 ame n'B. — 24095 vallées or chus A. — 24096 pour la terre B.
Kt soubz la terre C. — 24097 sans moy C — 24098feu C. — 24106 que nulz C. — 24116-7 Ma douleur mes que je te vove
Sallegera A. — 241S2 et renchere C. — 24128 sainte nourreture B. mnnquc C. — 24134 douloureux B. — 2413r>-6 man-
quent B. G. — 24138 qui mtmr/iie A. •— 24143 manque G, — 2H44 apresse B, C, — 24151 oWaejon G. — 23159-60 ijt-
tertertis A, — 24160 est B, C,
T 1 E R G !•; J O IJ U N E E
Ml
241 ;o
21175
i
2'ilS5
24190
24195
24200
24205
21210
2'i2i:)
et n tel tourbe que mei'veille
a 11! iiKMioi' crueifior.
NOSTRE DAME
Hou I)i( u (lu je nie dois fier,
conifoflo iiioy par ta niorcy :
(ioulx Dieu, «luel nouvelle est ce cy ?
Iray je ou se je demourray ?
je suis seuro que je niouir'ay
se je vois voir la passion
et riiorii))lc pxccucion
qui se fait sur mon cher cnfTaut ;
le domourer m'est mieulx séant :
ja soit ce que pourtant ne vive,
car mon ame a mon corps estrivo
ot mort no les veult séparer.
Domourer ! comment demourcr ?
s'en ira mon fil/, a mort rendre
sans ce que je doye contendrc
a le suivir et secourir
et conforter jusqu'au mourir?
Conforter ! helas ! non feroye,
mes plus le dosconfortoroye
mille fois, car quand me verra,
le cueur de dueil luy fendera
et occira la triste mère.
Helas ! que pleust a Dieu, mon père,
puisqu'il l'ault qu'a la mort se rende,
qu'aml)dcux conjointement nous prende
sans faire separacion !
J'iray, c'est mou intencion.
Mon filz, lealle coinpaignie
t'ay tenu en ta pleine vie,
et de toy laisser a la mort
maintenant j'aroye grant tort,
et n'aroit excusance lieu.
MARIE JACOBY
Helas ! seur, demourez pour Dieu :
douleur le cueur vous partiroit ;
si vault mieulx, puisqu'il fault qu'il soit,
ung dollant que deux desconffis :
nous irons, ma seur et mon filz,
si rapporterons do la clioso.
NOSTRE DAMB
Ma doulce seur, je m'y oppose :
pour rien je n'en vcil estre exempte ;
mes, si plest Dieu, seray présente
a Unit 00 qui fait en sera :
Dieu, si luy plaist, conUbrtera
les cueurs de douleur affolés.
JOSEPH d'aRISMATIE
Dame, se venir y voulez.
il nous convondra mettre paino
(l'aller cestc rue foraine
pour le:( aller adevanccr,
21220 car jam('8 ne pourrons [lasser
jiar ceste grant rue ou ilz vont
pour la presse îles gens qui sont :
suyvez moy, et je vous nicnray.
KOjTRE DAME
Joseph, volontiers le feray :
21225 Dieu iiar sa grâce nous y mainc!
H'OSE.]
ORILI.ART
Ce paillart icy nous promaine
trop longuement, ce m'est advis
nUAYART
Si luy fault donner des renvis
d'ung bâton travers ses costés,
242,'» car oncques plus nice ne vis.
CLAQUEDENT
Si luy fault donner des renvis.
ANNE
Il n'yra ja que son devis,
scrgcns, se vous ne le bâtez.
GRIFFON
Si luy fault donner des renvis
24235 d'ung bâton travers ses costcs.
PILATE
Abrégez vous et le hastoz,
vous voiez ja qu'il est grant heure :
ou se ce non je vous assoure
que torchons voileront sur vous.
GRIFFON
21240 Que gibet le hasterons nous ?
il porte ung fardeau si pesant
qu'a peu s'il peust plus hay avant,
mes va tout courbé soubz le fais.
VERONNE
0 le plus paifait clés parfais,
21245 0 très vray Cristus a Dieu filz,
oncques a ame ne meffis,
et si portes peine tant dure
et ton corps béguin tant endure
qu'il n'est liuy plus piteux regard.
24850 Je rcquier a Dieu qu'il te gard
et te doint bonne pacience,
si vray qu'en parfaicto binocencc
24196 Que nous A. — 212IW Sp A. — 24212 eslrp pieSPiito H. fl. — 24î20 pourries B. C. — 24221 ou y vont \. — Î422S
lin remis B. C. — 21239 torches B. C. — 24240 yuel B. C. — 24245 très muniiie C. — 34Î51 innoran.Vc.
318 MISTKRE DE
toute ta vie as voulu maindro.
Helas ! ton cas est bien a plaindre ;
2'i255 quand ton corps es parties toutes
gette sueur a grosses gouttes,
il fault qu'il sente grief meschief :
si vouldray do ce cueuvrechief
torcher sa face précieuse,
■Ui60 qui jadis fut tant gracieuse
et ore est tant decouloree.
Icy demeure la face âe Jhesiis on, meurrechief.
[Pose.]
Or m'est l'cmprainte demouroe
du saint viaii'o précieux
dont je me tiens bien honorée
24^05 d'avoir joyau tant vertueux ;
Si sera mon corps curieux
a le garder de ma puissance
pour le doulx patron gracieux
dont il me monstre la samblancc.
LA PASSION
par quoy se la mort s'en ensuit,
cherc seur, tout pardu avons.
MARIE SALOMÉ
21290 Seur, pour Dieu, que nous la levons,
et par bouter ou par tirei'
faisons la ung peu respirer
se nous poons, ma seur bénigne.
MADELAINE
0 sainte créature et digne
2'i295 et des beneurees la plus,
or par'dons vostre filz Jhesus,
mon doulx maistre, mon doulx amy,
sans qui n'avons bien ne demy,
mes vivons sous tunbre de mort ;
2'.300 et s'il fault que par dur l'emort
nous vous perdons avecques luy,
mort, perce mon cueur plaiu d'ennuy
pour la grant douleur qui le mord.
SIMON, Cireneeii.
21270 11 est grant temps que je m'advance
et que je voise besongner
en Jherusalem, pour songner
de ce qui touche mon affaire ;
et m'est grandement ueccessaire
24275 que g'y voise tout maintenant.
Je voy cy grant peuple venant,
mes qu'ilz vont faire, je ne fi^ay ;
auffort ja ne retourneray :
j'iray passer tout par my eulx,
24280 car je tiens qu'il n'y a nul d'eulx
qui me face ja desplaisir.
GIUKFOX
Marchez, villain.
CLAQUEDENT
Je croy qu'il dort
24305 comment s'en va il chancellant 1
ORILLART
C'est quand il a veu en allant
ces plaidoires pleurer si fort :
il on a pris tel desconfFort
qu'il demourra, je croy, derrière,
PILATB
243)0 Que ne les chassez vous arrière ?
ce samblent femmes forcenées.
v
s. JEHAN
Ha ! ma dame, venez choisir
vostre cher cntFant, s'il vous plest :
regardez en quel point il est,
24285 comme sa face est difformee.
NOSTRE DAME
0 mon filz 1
Elle chet jMsmee.
MARIE JACOBY
La veez la pasinee :
le cueur luy fault, do sang luy fuit,
BRAYARÏ
Fuyez vous en, vieilles daiupnees,
ou vous arez des coups massis
sur vostre dos si bien assis
24315 qu'il n'y fauldra point renvoyer.
s. .lEHAN
Plus ne le poons convoier ;
mes dames, vous voiez le cas.
MADELAINE
Helas ! Jehan, nous ne lairrons pas
Marie, vostre honorée ante,
24320 qui le suit si très dcsplaisanto
24255 es] en B. C. — 21257 samble A. — 24263 gracieux C. — 24204 euree C. — 24277 qui vous A.
24286 pauliuee A. — 24295 Kt de plus A. — 24300 par maleure sort B. G. — 24301 Que nous vous C. -
G. — 24307 plaidoyeries C. •
- 24280 ceulxC.—
• 24302 aueugly B.
TIEUCE JOURNKK
319
qu'oni'qucs la.~ ciicur plus n'ciiduia.
MARIE .lACOliY
Se Dieu [ilaist, ou In ooiiduiia
tant qu'il luy plaira choniinor.
BBOYEKKORT
Nous lie faisons que trotinor :
2'i3œ je no «reii cosse de dilwti'o.
Ou eu doust avoir pendu quatre
depuis que nous sommes pai'ty.
PILATE
Demouire/ vous ou ce party ?
sergons, im peu vous avoye»,
GRIFFON
!;4330 11 u'cn peust plus, vous le voyez :
fault il qu'il soit tant replicqu(; ?
CLAQUEDENT
11 demeuri'o cy tout picqué
et si mourra aval les champs.
CENTURION
Prévost, vous perdez vostrc temps
24:î35 qui ainsi le chassez : holas !
vous voyez qu'il est si très las
qu'on ne luy peust plus peine offrir
n'aultre ti'aveil sans moi't soufiVir.
Regardez le fardeau qu'il porte :
21340 il n'est créature si forte,
tant oust le courage haittié,
qui n'eust assés a la moittié
de la charge qu'il a sur luy ;
il en est si fort affoibly
24345 qu'il n'attent que la mort le prehdo.
Commandez ung pou qu'on attende
pour y mettre provision.
PILATE
^'ous dittos bien, Centurion :
s'il porte charge et pesant fais,
24350 ce ne suis je pas qui le fais,
mes Juifz qui l'ont mal en grâce ;
que vous saniblo il bon qu'on en face !
et sur co nous conseillei\)ns.
CENTURION
Je vous diray que nous ferons
24355 pour éviter plus grant donnnage :
vêla ung paysant de village
qui s'en va droit a la cité ;
il sera do necccssité
qu'on le charge de ceste croix
24300 et, mais qu'il la (Wi-tc, je crois
qu'il ira, vou qu'il n'y a guaire,
ires bien jusqu'au mont do Calvaire,
et luy sera ung grant conffort.
PII.ATE
Il est bou homme, grant et fort
24:i65 poui' ung tel faideau soustenir.
Griffon, va, va, fais le venir,
et luy dis qu'il viengne exploitier
ung peu de chose.
ORIKFON
Volontier :
je luy diray bien a la lettre.
24370 Venez ça, venez, nostre maistre :
il vous fault suivir nostre i-outo.
Hay ! hau ! bon hommeau, os tu goûte ?
vien t'en parler a nosseigneurs.
SIMON, Circncen.
J'ay assés a entendre aillicurs :
24375 aller m'en fault a ma besougne.
ORILLART
Et fault il que ce villain hongnc ?
passez avant, vous y vendrez.
SIMON
Ha ! messeigueui-s, vous attendrez
que j'ay e de mon fait chevy.
GRIFFON
24380 Nous n'attendrons pas ne demy :
vous on vendrez de grant randou.
SIMON
Helas ! et que me demande on,
qui m'clforcez par tel moyen î
ORILLART
Tes cspaulles le sçaront bien
243S5 avant le retour, ne te chaille.
GRIFFON
Sire, je vous commetz et baille
ce bon hommeau en vostrc main.
CENTURION
Or vien ça, pai'le a moy, villain :
tu vas par les champs tout oiseux
24390 comme ung mcschant avautureux :
il to convient mettre a l'ouvrage.
SIMON
Helas ! messeigne'us, que fera je ?
vous m'avez si espovantc
que je n'ay cueur ne volenlé.
Ï4325 i-ombalru B. C— 24339 qufl fardeau il B, — 24344 Xoaulirioins quil est si B. C. — 84351 les juil* A. ces juif» ("..
— 24357 yui l'y seii va en la B. son vient C. — 24369 tout A lit B. C. — 24372 nous lu B. uoi C.
320
24395
MISTKRl': DK LA 1' AS S ION
ne membre que puisse lever :
et se vous me voulez grever,
j'appelle pour ma sauvegarde.
CENTURION
Nennin, bon homme, tu n'as gaide ;
mes, pour ce Jhesus supporter
2»00 qui ne peust mes sa croix porter
et demeure icy sans subside,
il fault que pour ly faire ayde
tu portes ccste croix sur toy.
SIMON
Ha ! messeigneurs, pardonnez moy :
24105 pour riens jamès ne le feroye,
car tant repproché en seroye
que jamès jour n'aroye honneur :
vous sçavoz le grant deshonneur
que c'est huy de la croix porter :
24410 certes j'aymeroye plus cher
mourir que faire tel office.
GRIFFON
Ort viel truant fctard et nic,^,
et remply de rébellion,
vous porterez, veillez ou non,
24415 ceste croix : chargez tost ce fais.
SIMON
Je m'oppose.
ORILLART
Villain parfais,
jouez vous de la reculoire?
SIMON
S'on me fait tort sans mes meffais,
je m'oppose.
BRAYABT
Villain parfais,
24420 vous arez tant de coups bienffais
qu'on vous cassera la mâchoire.
SIMON
Je m'oppose.
CLA-QUEDEN r
Villain parfais,
jouez vous de la reculoire?
BROYEFFORT
Tu quiers pour riens eschapatoire :
244J5 il te convient passer par la.
SIMON
Or avant donc, puisqu'ainsi va,
je feray vostrc volenté ;
mes il me poiso en vérité
de la peine que vous me faictes.
24430 0 Jhesus, de tous les prophètes
le plus saint et le plus begnin,
vous venez a piteuse fin
vou vostre vie vertueuse ;
quand vostre croix dure et honteuse
24435 pour vostre mort fault que je poi-to,
se c'est a tort, je m'en rapporte
a cculx qui vous y ont juge.
GRIFFON
Monseigneur, il est bien chargé :
cheminons raidement en voye.
SALMANAZAR
24440 J'ay grant désir que je le voye
fichié en ce hault tabernacle,
assavoir s'il fera miracle
qui l'en sache ramener jus.
CENTURION
Sergens, hastez moy ce Jhesus
24i45 et ces deux larrons aux costés :
s'ilz ne vueillent, si les bâtez
si bien qu'il n'y ait que redire.
CLAQUEDENT
A cella ne tendra pas, sire :
nous eu faisons nostre pouvoir.
[Pose.]
DIEU LE PERE
24450 Pitié doit tout cueur esmouvoir
a lamenter piteusement
le inartire et le grief tonnent
que Jhesus, mon cher filz, endure ;
il porte destresse tant dure,
24455 que puis que le monde dura
oncques homme tant n'endura,
laquelle ne peust mes durer
sans la mort honteuse endurer,
et n'ara son saint corps durée
24460 jusqu'à ce qu'il l'ait endurée ;
il appert, car plus va durant
et plus va tousjours endurant
sans quelque conffort qui l'allège ;
si convient que la mort l'aljrege
2'.46j et de l'exécuter s'appreste
pour satiff'aire a la rcqiioste
de dame Justice la flore,
qui pour requeste ne pi'iere
ne vcult riens de ses drois quitter.
24398 Neniiil B. C. — 21403 poui- soy lî. C. — 24412 Et vieulx B. Kt vici
" ■ ■ .■ ■ '" - 24424 néant B. — 24436 St _ .
- 24402 tousjours] toUrnieut C.
eillard truant et C. — 2A'ii't Vous sortirez B. C.
— 24415 Chargez ysnelliMuent le fais B. C. — 24424 néant B. — 24436 Se s.'est A. — 24449 ileuoir C. — 24450 Onrques
si dure 13. Homme si dure C. — 24460 ail A.
TIKUCli JOURNEE
321
■i'i'.70 Mk'licl, allez donc coiiffortcr
en ccste anicrc passion
mon filz, i)lain do dilcctiiin,
mon ciillant, mon tics anu- gendre,
qui sa doulco char va cstendie
21'i75 ou puissant arbre de la ci'oix.
MICIIKI.
Pore du ciel et roy des roys,
humblement a cherc assiniplyr
sera paifaicte et accomplye
vostre volento haulte et bonne.
S.U'HAN
2'i'i80 Lucifer, qui tiens la couronne
de l'horrible abisnie infernal,
nostre fait se porto très mal,
car tout nosti'e gouffre est deffait.
LUCIFER
I^ar quel moyen?
SATHAN
Je n'ay riens fait ;
24485 ce Jhcsus est a mor't livré
et n'a peu estre delivio
par moyen que j'y ayo mis :
toutcffois très fort m'entremys
"du temiiter la femme l'ilate,
21 '.90 mes la dosleable gargate
des Juif/, oncquc» n'a cessé,
et ont Pilate tant presse
qu'il l'a jugic a la mort rendre.
LUCIFER
Ha ! mauldit Sathau, va te pendre
24495 a ung gibet de feu ardant,
quant aultrement tu n'es gardant
les drois et les lois de l'ostel.
Va, dragon, serpent immortel,
et solicite de rechief
2'.500 se jamrs par coup de meschief
l'iourroit eschapper le surplus.
s.n-HAN
11 en est picq, n'y pensez plus :
il n'est qui l'on scout retarder.
11 n'y a que de bien garder
24505 nos huis et nos portes a force,
affin au moins s'il nous efforce
que nous y puissions résister.
LUCIFF.U
Cerborus '.
(EIIIIEIILS
Hola! maginler.
LUCIFER
l')t vous, mes drablos, dormez vous ?
24510 barrez nos huis a gros verrous,
tenez nos portes bien fermées,
et soie/, a grosses armées
devant pour les entretenir,
car tomproment verrez venir
24515 nostre adversaire faire rencz.
CERHERUS
Laissez le venir : s'il entre cns,
je veil qu'on m'arde le museau.
FERGALUS
Tout y est barré bien et beau :
comment donc y entreroit il ?
ASTAROTH
24520 Ou il sera trop plus soubtil
que nous doables trctous cnsendjio,
ou, par mon crochet, il mc^amble
qu'il y demourra s'il y vient.
SATHAN
Mon maistre, on ne scet qu'il advient :
21525 solicitez toujours icy
et pour voir la (in de cecy,
je m'en ii'ay faire une course.
LUCIFER
Affin que ton chemin s'accouree,
le deablc te puisse guider !
MICHEL
Icy s'en vient a la crois-.
24530 Filz de Dieu en qui regarder
tous les angles prennent liesse,
et dont la paifaicte noblesse
bouche ne sçaroit reciter,
qui pour les humains racheter
24535 as ton précieux corps offert
et tant de gi-icfz tormens souffert
que Dieu seul en congnoit le nombre,
et ce pour les ostor de l'ombre
de mort et les mettre a reiws,
24540 et qui encore a ce propos
veuls la mort pour eulx recevoir,
achevé et parfais ton devoir
et fais que ton vouloir appere
obeyssant a Dieu, ton père,
24545 qui fera a dame Justice
2i470 .Vliohcl] .Mon lilz It. — ;'4179 juste et H. — 244S0 Kny deiifer B. 0. — 244flS va serpent i-riicl B. C. — 245J5
Nous huis \. — 24512 a] en C. — 24515 r.mis B. rcns C. — 2l,M6 Laissez hanlieuient U. C. — 24522 aroliei C. — 2453S
Kt pour tous les .\. du lunilu'e C. — 21511 reeeuoir] endurer B.
P.VS.
21
322
MISTERE DE LA PASSION
présent de ce saint sacrifice
plus que tous aultres acceptable,
très vénérable et agréable
en odeur de suavité.
24550 Jadis estoit en grand vilté
et tenue en grant orfanté
la croix et de chacun maudite :
Or sera son nom l'edoubté
esaulcé et manifesté
24555 par ce très glorieulx mérite ;
Jadis très villaine estoit ditte
et toute parsonne interdite
qui son corps y ot présenté :
Or sera de ton sang conffitc
24560 par lequel sera desconffite
la mort et enffer desmonté.
Icy demeure Michel avec Jhesu Crist,
avec aucuns autres anges.
GKIFFON
Or avons nous tant cruppeté
que sonmies venus a grant haire
sur la montagne de Calvaire
245G5 a belle et grosse compaignie.
PILATE
Sus! sergens, perverse meignie,
vous fault il maintenant fester ?
vous deussiez tretout apprester,
entendis que vous estes cy.
24570 Ou sont ces trois croix ?
GRIFFON
Les veez cy
tantost appert les vous trairons.
Ceulx cy sont pour les deux larrons,
et veez cy pour cest ypocrite.
GAYPHE
Il convendra qu'i soit écrite,
24575 sans ce que plus y attendons,
la cause pour quoy nous pendons
ce Jhesus par- ceste manière.
PILA.TE
Vostre requeste est bien ligiere :
veez cy ung tableau tretout prc.-;t
24580 OU je l'escripray s'il vous plest,
et après nous l'atacherons
sur la croix.
ANNE
Nous vous en plions,
que vous y veillez consentir.
JHEROBOAN
Prévost, je vo\is veil advertir
24585 qu'il sera bon, se sommes sages,
de l'escripre en divers langages,
affin au moins que les passans
estrangiers ne passent pas sans
" entendre qu'il signifii'a.
PILATE
24590 Nous ferons tant qu'on l'escripra
par très bonne subtilité.
GRIFFON
Messeigneurs, tout est appresté :
croix ensemble, cordes et clous.
Pour tant regardez entre vous
24595 auquel vous voulez qu'on commance.
CAYPHE
11 me samble en ma conscience
que le plus court est le meilleur
de despecher ce frivoleur ;
car plus tost mourir le ferons
24600 et plus tost esjouis serons :
encor il a trop attendu.
GRIFFON
Le voulez vous avoir pendu
tout vestu ou en sa chemise ?
ANNE
Nennin, ce n'est pas la devise
24605 en quoy nous sommes consentu :
nous voulions qu'il soit devestu
tout aussi nu qu'ung ver de terre,
et pour prier ne pour requerre
ne luy laissez ne hault ne bas
24610 grmis ne moyens ne petis draps,
dont il sceust couviir ung seul point.
ORILLART
Vous le voulez avoir au point
qu'il yssi du ventre sa mère ?
JHEROBOAN
Justement.
GRIFFON
C'est grand vitupère :
24615 mes neantmoins, soit honneur ou blasme,
vous Tarez.
BRAYART
Il est tant iufarne
qu'on ne le peust trop villener.
CLAQUEDENT
Abrégeons, sans plus mot sonner.
Ça, villain, venez a la feste :
24620 il n'y ara ne cul ne teste
24556 estri; B. — 24562-662 manijuent 0. feuilM déchiré.
TIKRCE JOURNKE
323
qui ja vous demeure a couvert.
OUU,I,ART
Gcst habit cy ci-t mal ouvert :
je u'on vey uul lie tel esi)ece.
imOYBKKORT
Fourquoy?
CI.AQUEDENT
Il est tout d'une pièce
24625 tissus tout en bas et dessus.
imOYEKFOHT
Ne t'en chault, non, oste luy jus :
ce sera pour nostre butin.
Tendez les bras, villain matin,
laissez vous uug peu desbillier.
\f Icy le détestent tout nu.
1/
NOSTUE DAME
2'.630 Las ! qui me s^ara conseillier
et de mou grief dueil resveilliei',
en quoy mon povro cueur se uoye
Kt est sur point de perillier ?
se mort le veiiist exillier
24035 je la quier et si me rcuoyc ;
Hé, mon filz, quand je te tenoyc,
eu toy tout mon soûlas ])rcnoye
et tout bien pour moy rallier ;
Or te pers par (liteuse voye :
2i«iO or convient il que ta mort voye :
filz, je ne te puis oublier.
Mes seurs, je vous veil supplier
ou nom de Dieu le triumphant
que nous approchons mon enifant
21645 et passons oultre ceste presse.
MARIE JACOBY
Pour quelque tourment ou destiesse
ne vous lairrons, ma seur bénigne,
mes ou que vostrc corps chemine,
nous vous ensuivrons do bon cueur.
MARIE SALOMÉ
2'i650 Regardez la, ma chère seur,
la plus graut pitié qu'oncques fut :
ilz ont ja i)reparé le fust
ou il doit (>stro a inoi't tiaittié ;
si l'ont si très nu despointié
246Bj que sur tout son corps n'a ilenrec.
NOSTRK DAME
O faulce gent désespérée,
246-
£4680
o trayson desmesureo
qui a son vouloir vous demoinc,
Honneui- as trop vitupérée
24060 et bien est de toy séparée :
rage d'envye te surmaine.
Dure gent de cruel domaine,
prens pitié do nature humaine :
«'honneur eusses considérée,
24665 Tu ne feusses pas si villaiue
de la desnucr si très plaine,
tu l'as par trop déshonorée.
Icy met Nostre Daine ung drap devant Jhesus,
Helas ! mon enifant débonnaire,
mou cher trésor très necccssaire,
84670 du plus doulx et begnin affaire
qu'oncques iiaquist dcssoubz les cieuls,
A toy couvrir me fait retraire
maternelle amour voluntaire,
et se plus je te pousse faire,
de bon cueur fust fait, ce scet Dieux.
Mes nennin, on te veult deffaire
et a ta merc tant meffaire
que de meurtrir et a mort traire
son cher enffant devant ses yeulx.
Quel dueil ! quel piteux exemplaire !
mon filz, ne te vueille desplaire,
s'au partir pour tout mon salaire
te baise quand je ne puis mieulx.
CENTURION
Griffon, tu es bien cochevieulx
24685 que tu ne fais sortir arrière
ces femmes,
C.RIFKON
Saultez la bai'iiere,
plaidoires, il vous est besoing,
ou vous arez sur vostre groing ;
que tous les dcables y aient part!
ORII.LART
24690 Seigneurs, or vous triez appai-t,
voir comment nous besougnerons,
et se bien le crucifirons,
ainsi que vous le demandez.
MARDUCEL'S
Il est bon que vous l'estcudcz
24695 sur terre et l'atachez du tout
avant qu'on le dresse sur bout ;
vous en serez mieulx a vostre aise.
CAYPBB
L'oppinion n'est pas mauvaise :
ilz en |>ourront mieulx besouguer.
V
21623 voy A. B. — 21025 pardessus U. — 241)64 Se lioiiu«ur asseï cuiisideie 0. — 240OS /•■;/ jxii t a Jheaus uh<j ce»-
(nclief \ mect le bras... U. -^ 24074 sceusse A. — 21081 bieu perisseu» A. «ivhe vieulx C. — 246S& ne maïujue A. -•
24689 tous luy diables B. C.
324
MISTERE DE LA PASSION
BRAYABT
2iT0O 11 ne vous en fault plus songner,
mes nous en ferons tout ainsi.
Sus ! villain, estandcz vous cy :
il fault que vostre oïde chaiongne
soit prestement mise en besongne
24705 a vostre sanglant encombrier.
GRIFFON
J'attacheray ce bras premier
affln que la chose se haste ;
truant, estendez ceste pâte ;
je vous pense si bien serrer
•.4710 que ne vous sçarez desserrer.
Broyeffort, de quoy sers tu la ?
ou sont ces trois clous?
BROÏEFFOBT
Les voyla
si très jires de toy : voys tu goûte ?
GRIFFON
Fault il pourtant qu'on me les boute
24715 au visage ? quel demiseau !
or me baille ung peu ce marteau,
et pviis tu verras fjùre rage.
OBILLABT
Frappe tout ens.
GRIFFON
Aussi fera je
mes qu'on me laisse faire ung pou .
24720 veez cy le plus rebelle clou
dont oncques mes je feusse accointe.
CLAQLEDENT
Le fevre les forgea sans pointe.
Est il tout dedens ?
GRIFFON
Seurement :
il tient si bien et serrement
24725 qu'il n'est qui le sceust arracher.
BROYEFFORT
Je vouloye icy attachei'
et clouer ceste main deçà,
mes bien trois dois d'instance y a
de la paulme jusqu'au pertuis,
247?G pourquoy attacher ne luy puis
s'aultruy no m'y dresse la voye.
GRlFFùN
Tu n'es qu'ung droit ours de Savoie :
laisse nioy tout seul convenir,
je luy feray bien advenir,
24735 ou n'y demourra vaine entière.
BUAYABT
Or nous devise la manière
pour voir se nous y accordons.
GRIFFON
Prenez moy ces deux gros cordons
que j'ay a son poignet serrés,
24740 et tirez tant que vous pourrez,
vous quatre, jusqu'aux nerfz desjoindre,
tant que vous faciez la main joindre
au partuis qui est fait pour elle.
CLAQL'EDENT
L'oppinion est bonne et belle :
24745 benist soit qui telle la baille.
GRIFFON
Or tirez fort, fort, ribauldaille :
la main y vient, ou peu s'en fault.
BROYEFFORT
11 n'est pas bcsoing que j'y faille.
Or tirez fort.
BRAYART
Fort, ribauldaille.
24750 J'ay paour que cueur ne luy faille
au tirer.
CLAQUEDBNT
Mes que nous en chault ?
Or tirez fort.
GRIFFON
Fort, ribauldaille :
la main y vient, ou peu s'en fault.
ORILLART
Y vient elle droit ?
GRIFFON
Autant vault :
24755 mes que ce clou y soit souldé,
oncques arbaleste bondé
ne tendit de meilleur façon.
BANANIAS
Le coquin ne dit mot ne son
pour chose que faire sachiez.
GRIFFON
24760 ^'cez en la deux très bien fichiés ;
allons aux piez lance sur faultre.
ELIACHIN
Il les fault croisier l'un sur l'aultre,
pour l'avoir depesché plus brief.
GRIFFON
Au prime veez cy le meschief :
247fô lourdement faillions a nos trais.
ELIACHIN
Comment ?
21710 detîerrer I!. — 24713 voy A. B. C. — 24723 Si entre ung peu plus ini'ement B. C. — 24725 .ibatic B. C. — 2472B
,Ie ine A. me vouloye icy esbatro B. G. — 24731 "lyj luy C. — 24737 accorderons C, — 24747 il vient A. — 24754 elle
encore B. C. — 24755 fonciez C — 21761 lani'ez C '
T I V. a c !•; .1
GRIFKON
Les piez sont tous rctrais
qui ne se pourront atiror
jusqu'au trou.
iNAASON
11 les tault tirer
tretout ainsi ne plus ne mains
8i770 comme vous avez fait les mains :
par ce point vous les y mcnrez';
m'entendez vous ?
GRIFFON
Vous le verrez,
mes que j'aye noué ma corde.
MADELAINE
0 pitié, 0 niisci'icorde,
2477') o doulx .Ihesus par qui s'accorde
tout pécheur a rémission,
Uoulce fontaine de concorde,
quant de tes haulx fais me recorue
on te fait grant cxtorcion.
MARIE JACOBY
24780 Faulcc et perverse nacion
et plaine d'obstinacion,
comment as tu ozé penser
De mettre a execucion
cil qui pour ta salvaoion
84785 a tousjours pcné sans cesser?
MARIE SALOMÉ
Kn la fin en seras (lugnie,
cruelle et fausse progenie,
et desja le t'a bien noté ;
Lignée a tout mal faire unye
2'i790 et de tout honneur dos-garnie,
tu as tout nostre bien osté.
s. JEHAN
0 fontaine de charité,
lumière sans obscurité,
vous délaissez nostre partie
24795 En si gi'ande perplexité
que toute joyc en vérité
est de nostre cuem* départie.
GRIFFON
Nostre besongne est assortie
1res bien, .lupitor soit loué !
0 U R N E K 3i5
H9no je tiens qu'il est si bien cloué
que jamès vif n'en juirtira.
OHII.LART
Oncques corde a arc ue tira
mieuix que font les nerfz de son corps :
ou coinpteroit bien par dehors
24805 ung a ung les os qui y sont.
HRAYART
Je regarde aval et amont
se les clous tiennent bien dedens.
GRIFFON
Or y va essaier aux dens,
savoir comment tu les aras.
PILATB
248(0 Ça, (,«, laissez moy ces fatras :
puisque l'escript est ataché,
faittes que l'arbre soit fiché
et asceuré de toutes pars ;
ne faictes plus oy les coquars,
■îiSiri dresse/, inoy croix et crucifis,
affin que soient ussuffis
•es Juifz qui tant l'ont grevé.
BROVEFFORT
Il sera tout surpifz levé
amont, bien honteux etconffus.
PII.ATE
24S20 Prenez moy lances et pall'us,
guisarnies, picquts, estondars,
eschelles, grans perches et dare ;
chacun soudart la main y tiengno
et chacun son costé soustiengne
24825 de bonne puissance et reaile.
Amont!
GRIFFON
Amont !
■ rl-AQUEDENT
Halle bois!
ORILLART
Halle!
Soustehez la.
BRAYART
Mes soustenez!
tout le fais dessus nou-< devalle.
Amont !
BROYKFFORT
.\mont !
GRIFFON
Halle bois !
CLAQUKDKNT
Halle!
247G7 ptuent li. G. - 24770 iinus auons fait B. — 24787 FaulsB pl inaiHlite B. C. — 247J7 rorps B. — 84803 nerfi
foibles pt fors B. C. — 24!-04 On nomliroroit par tout son corps B. C. — 2'..'13 Et attarlife B. — 84820 moy mnnqur B.
.— 24822 çr.ins perrhps] f suillons B. C,
320
24830
MI STERE DE LA PASSION
oncques je n'euz charge sy malle:
je me romps se vous ne venez.
Amont !
ORILLART
Amont !
BRA.YART
Halle bois!
BROYEPFORT
Soustenez la.
GRIFFON
Mes soustenez!
CENTURION
Ha! compaignons, vous vous penez
8*835 et prenez peine largement ;
mes vous arez bon payement
ja tost, mes que vous retournez
CLAQUEDENT
Nous sommes si bien attournés
qu'avons tant fait que veez le la.
ORILLART
24840 II est amont cahu oaha :
nous en pouons bien depporter.
BBAYART
Le deable l'en puist emporter,
que tant il nous a fait do paine !
BROYEFFORT
S'il ne l'emporte, si l'entraine :
24845 je n'en fais mise ne recepte.
Regardons se la croix est droite,
et puis la bloquerons par bas.
GRIFFON
Es tu la Jhesus ? or t'esbas ;
as tu beau temps? es tu bien aise?
24850 presche nous cy, mes qu'il te plaise,
de tes fais du temps ancien,
ANNE
Prévost, nous n'entendons pas bien
la cause de cest escriptel :
il ne debvroit pas estre tel
24855 comme il est, soubz correction ;
tu metz l'intitulacion
en trois langues comme je voy :
Jhesus de Nazareth, le roy
des Juifz ; ainsi l'as escript :
touteffois ce n'est pas bien dit
et nous tourne a grant préjudice.
CAYPHE
En l'escriptuie a très grant vice,
et ne debvroit pas estre telle
qu'il soit roy, mes qu'il s'y appelle
248G:) contre droit et a très grant tort,
par quoy pugnicion de mort
a encouru, comme il appert.
JACOB
Il dit vray, nostre honneur s'y pert :
prevost, il n'est pas bien ainsi.
PILATE
24870 Messeigneurs, quod scripsi scri'psi.
Halle ! et en murmure qui vouldra,
car ce que j'ay escript icy
est fait et escript demourra.
JORRAN
Soyez doue seur qu'il tournera
24875 a la confusion de tous,
car tout homme qui le lira
en tendra mains compte de nous.
PILATE
Je n'en puis, mes souffice vous
qu'a vous ay obtempéré trop ;
24880 encore me poise il beaucop
quant oncques j'en fus empesché.
Puisque Jhesus est depesché,
commandez nous que nous ferons.
CENTURION
Crucifiez ces deux larrons
24885 en la forme qu'on les doit mettre :
l'un a dextre, l'aultre a senestre;
c'est, je cioy, leur intencion?
YSACAR
Vous dittes vray, centurion :
la les voulions nous avoir mis.
GRIFFON
24890 Hz sei'ont tantost bien remis,
puisqu'ilz sont en mes mains livrés ;
ilz seront surpiez délivrés
et pendus a deux beaux gibi's.
Venez ça, larronccaux mauvais,
24895 maudis de Dieu et de nature,
veez cy pour vostre sépulture :
jamès vous ne sçai'ez saillir.
DISMAS
Se par mort nous fault deffaillir
a estre eu la croy asservy,
25000 plaindre n'en devons ne gémir,
car nous l'avons bien desservy.
GESTAS
Trop mallement avons cbevy
de nous en bien faire emploier.
ORILLART
Ung mauvais inaistre avez servy
i en arez A. — 24S39 que le vêla B. G. — 24S40 quahuin G. — 24854 debueroit A. — 24855 soulz] sans B. — 24877
comptel de bien B. C. — 24880 prise il B. — 24894 larronceux A. —25004 Cest ung mauuaie maistre seruy B. G.
24860
T I R R G R
«5005 dont rocovo/. si diii' loyer.
imWART
Qui doit poiidro, il no poust noior
se le gibet no va nouant ;
cola c'est ung ver tout truant :
tout le monde le doit savoir.
GRIKFON
25010 ^"ous vous tenez la au bavoii-,
et si ne m'aidez peu ne gi'ant.
CLAQUEDENT
Nous y venons tout accourant
Sus ! compaignons, chacun s'i boute :
pendons ces deux lan-ons en route
85015 tout ainsi qu'a mcsscigneurs plest.
HliOYEKKORT
Aussi est .Ihesus tout seulet :
il n'attent riens que compaignie.
(iniKFON
Si l'ara tmtost bien série
et de gens do haultc taçon.
25020 Vcez cy ung aussi faulx garçon
qui soit de ci a Pampelune.
OniLI.AHT
Gestuy no vault niioulx d'une plume :
c'est juste a tel pot tel cullier.
GRIFFON
Aydez raoy a les habillier,
25025 et puis les dresserons amont.
Ici/ les lUtil aux croix et tendis pirlera Sathan,
et quant il: seront liés, les dressent sans
parler.
SATHAN
Tout mon entendement se fout
et se rongo de malle rage
que j'ay cy brassé ung ouvrage
qui toute ma science excède,
25030 et n'y ay peu mettre remède
quand je l'ay cuidé retarder.
Jadis par soubtilment larder
le monde feis cheoir en ruyne
et bannii- de gloire divine
fô035 par iennne et par decepcion ;
et ore sa redenipcion
j'ay cuidé par femme empescher,
mes il ne m'y vault le prescher ;
j'ay du tout failly a mes trais,
25040 car Juifz ont les ciieurs pourtrais
85010 ou bauoir B. C. — 25021 de si A. jusques a B. C.
sin Dauoir brasse tel mal brassin B. C. — 25063 sus] sur B.
JOURNEE 327
de sanglante onvyc si fort
qu'il fnult que .Ihesus seuffre mort.
Le voyla ja cruciffié
le doal)]o m'a bien avoyé
£5045 d'avoir tant quis et tant trassÂ
que j'ay ce brouet cy brassc'i
qui nous tournera a tel perte !
Que dira la tourbe disporte
de dampnés quant cecy sçara ?
25050 quelz plains ! quelz hideux cria ara,
se par puissance vertueuse
despouille la chartre hideuse
des habitateurs anciens !
miculx me vaulsist livrer aux chiens
25055 que de moy trouver en tel fouUe.
Kncore tendray pié a boulle
et ne m'en iray point si tost,
mes me tendray icy rcpiiost
autour de ceste croix maudite
25060 pour veoir la fin et la conduite
que ce Jhcsus cy sortira ;
et quand son ame partira,
se je puis asseoir sus ma pâte,
elle s'en vendra Ia.sse et matto
25005 avec moy au puis ténébreux.
PII.ATE
Sont pendus ces deux maleureux
compaignons? sont ilz depeschés?
CENTURION
Respondez, folz pre.sumptueux :
sont pendus ces deux malheureux?
GRIFFON
25070 Mes que j'aye lie ce gueux,
vous n'en serez plus empeschés.
JHEROBOAN
Sont pondus ces deux malheureux
compaignons? sont ilz depeschés?
OniLLART
Je croy qu'ilz y sont atachés
£5075 et si bien a leur aise pendent
que se jamès ilz en descendent,
ilz sçaront bien du bas voiler.
EMII.IUS
Jhesus, tu as beau flajollor,
car tu as le vent d'avantage
fôoso regarde le noble ménage
de quoy tu es accompaigné.
— fôO'iO CCS juifz A. — 25045-0 El ay bien uiuse dun cous-
C.
328
M I S T E R E D K LA PASSION
CELSIDON
Tu n'es guercs embcsongné :
sermonne deux raos au besoing,
tu sei'as ouy de bien loing,
25085 car tu es logié hault assés.
RABANUS
Or descend de la si tu sces
et saulte droit cy au milieu ;
aultroflbis t'es fait filz de Dieu,
vien bas en celle confidence.
NEMBROTH
25090 II n'entend pas ceste loquence,
il a bien a penser ailllieurs.
Dieu gart ce roy des frivoUeurs,
le séducteur de Galilée,
qui a nostrc loy adnullee
25095 et gasté de tout son pouvoir !
SALMA.NAZAR
Ja ne luy fault ramontevoir,
puisqu'il en a sa ponitance.
PHARES ,
C'est ung prophète d'ignorance :
s'il eust sceu les choses futures,
25100 SOS peines qui tant luy sont dures
eust bien évité de haulte heure ;
mes nennin, c'est raison qu'il pleure
et lamente ses vioulx delis.
JHESUS
Pater mi, dimitle illis,
25105 nam nesciunt quod fuciunt ;
pore qui tes servans eslis,
en qui mains toutes choses sont,
tu vois de quelz gens je suis pris
qui piteusement me defFont :
25H0 pardonne leur s'ilz ont mespris,
car ilz ne sceveat pas qu'ilz font.
DISMAS
0 vénérables citoiens
de Judée la noble terre,
vous voiez les piteux moyens
25115 do la mort qui ja nous vient querro ;
bien l'ay desservy, je le tiens,
ma coulpe m'y oblige et serre :
priez Dieu qu'entre ses hauls biens
le don de mercy nous dessei're.
GESTAS
25120 0 terrible mort forcenée,
ta dai de doncques m'attaindra ?
et ne m'y vault il force née ?
ame a mon secours ne vendra ?
m'as tu donné tel destinée,
25125 Dieu, qui de pi'csent m'adveudra ?
que maudite soit la journée,
quand oncques père m'engendra!
NACHOR
Ung peu saluer nous fauldra
nostre Cristus qui est si sage.
25130 Regardez ung peu au visage,
seigneurs, vostre roy bien piteux,
le senglant fol pi-esuuiptueux,
qui tant nous a fait de dommage.
NATHAN
Tient il maintenant son barnage,
25135 et sa grant court entre ces deux?
regardez ung peu au visage,
seigneurs, vostre roy bien piteux.
JACOB
C'est ung notable parsonnage
pour faire ung roi bien soignorcux,
25140 je ne s^ay de quel héritage.
s'il n'est le roy des malheureux,
YSACAU
Ce sont filtres de hault parage :
mes l'oy qui se renomme d'eux
tient il maintenant son barnage
25l'.5 et sa grant court entre ces deux?
JHEROBOAN
Vaast du mauvais fol périlleux
qui a voulu le peuple instruire
de pouoir le temple dcstruire
et en trois jours recdiffîer !
MARDOCEUS
25150 Tu t'es par trop voulu fier
en ton faulx art, j'en suis tosmoing;
car quand c'est venu au besoiug,
le deable a qui tu as servy
te laisse a la mort asservy,
25155 tant qu'il n'est par art de magique
ne par mal ou ton corps s'applique
que tu en saches eschapper.
NAASON
Ainsi scet l'ennemy tromper
ceulz qui usent de telz abus ;
25160 ou est ore ton Belzebus
en qui puissance boutoycs hors
les aultres ennemis dos corps ?
en quel party est il latent ?
ELIACHIN
Au bas enlfor ou il l'attent
£5165 pour ardoir au feu eternal.
25092 des malheureux G.— 25105 Quia A. — Jam B. C. — 2:;111 pas man'iue B. G.— 25115 Qua A. — 25128 conuendra
B. G. — 25132-7 mnnqumt A. — 25U3 dieux A. — Î5146 Va B. Vath G. — 25151 tesmoing] certain A. — 25152 est
venu A. — Î5161 Qui par puissance hau'.a hors A. — 25163 pitié est il a tant B. G.
T 1 !•: R C !•; .JOURNEE
320
Rfgaido, .Iliesu.", se ton iiinl,
011 ta nialico cstoit bien preste,
iiiaintenant redomle en ta teste :
cuidoicK tu tDusjouis rogner?
25170 ouidoies tu tousjours ineiior
guerre contre la sinaguoguo ?
ouidoies tu estre si roguo
que nous no te puissions grever ?
BANANIAS
Va, va sermonner et bavei'
«)t75 contre la loy et nos decrés ;
va, si revelle nos secrés
pour complaire au peuple menu :
regarde s'il est cy venu
pour toy délivrer de nos mains ;
85180 sains domourons et tu remnin»
a mort, a ta confusion.
JOATHAN
Est ce cy ce hault champion
et ce puissant Ennnanucl
qui doit régner en Israël ?
8')1S5 est ce cy ce trésor haultnin
que les prophètes pour ceitain
ont adn()nc(i venir au monde ?
Dieu et nature le conftbnde !
il n'est pas digne do tel nom
25100 ne tel honneur.
ANNE
Je croy que non,
et pense liien qu'il se modère
et que son mettait considère
dont il a le peuple abusé.
ROm.LART
Est ce cy cest ouvrier rusé,
25105 cest artiste de hauls séjours,
qui doit maçonner en trois jours
ung si hault temple et si massis ?
GADIKER
11 est illec trop mal assis
pour l'avoir tantost achevé.
DENTABT
25200 Es tu ce la, dis, fol desvé •
qui as fait voiler tel vantise
que de destruire la pourpriso
du noble temple Salonion ?
je pense que ce feras mou
25205 tantost, mes qu'on te laisse faire.
MAI.Cl'IDANT
S'il en veult un nouveau reffaire
sur trois joui-s, connno il s'est vanté,
il est la très bien attinté.
Jhesus, fay ung tein|>le nouveau
25210 acou|), car au lieu de marteau
tu as trois elous a grosso» [wintos
au travers de tes nieiiibres pointe»,
et en lieu do bois pour ouvrer
tu peuz d'ung gibet recouvi'ei"
85215 qui t'estoiid les nerfz et les vaines.
DRAGON
Ou sont tes tromperies vaincs,
•Jhesus, et tes enchantemens ?
OUEUI.U
Toi qui as peines si grcvaines,
ou sont tes tromperies vaincs?
BKAYART
85220 Tes cuvrcs n'ont pas esté saines,
on le voit aux departeraens ;
et se tu les soustiens, tu mens
quant pour elles suett'res tclz paincs.
ESTONNÉ
Ou sont tes tromperies vaines,
85225 Jhesus, et tes enchantemens?
on voit que les cabusemens
dont tu t'es faint faire miracles
sui' mors et sur demoniacles
n'avoient |)as l)on fondement,
'25230 mes ont esté fais faulcemeut
par deables énormes et pesmes :
il y iiert, car pour ton cas mesmes,
tu ne scez les moyens trouver
do toy délivrer et saulver,
85235 mes te laisses mourir a honte.
MALABRIN
Tu ne vaulx rions pour fin de compte,
Jhesus, ne ta pute meignie.
MAUCOUBANT
Prophète, os tu que je te compte (
tu ne vaulx riens pour fin de compte.
JHKROBOAN
25ï'.o Vostre parler riens ne luy monte :
il a trop beu de villenio.
EMILIL'S
Tu ne vaulx riens pour fin de compte,
Jhesus, ne ta pute meignie.
Se ta pute bouche le nye
85245 et veult a ce mettre debas,
descend d'illec et vien en bas :
si tendrons ta puissance seuro
CELSIDON
11 n'a loisir.
RABANIS
11 n'est pa
s heure:
2J1KJ scjours] atours IS. toius C. — 25212 Dont tu as tes orJcs m.iius joinctes U. C. — ?r.2l7 enseignemens C —
ffi318-ï5 maii'/ueiit A. — ;522<5 )•.■;«•(<! C. — 252 '0 fainteinent C.
330
MISTERE DE LA PASSION
il f ault l)ion qu'il pence aultre part.
ORIFFON
25250 Se tu y peuz riens, si lal)eure.
NEMBROTH
11 n'a loisir.
ORIU.AUT
Il n'est pas heure.
S'il y scettour, je vous asseurc,
qu'il en sauldra ou tost ou tart.
SALMANAZAR
11 n'a loisir.
CLAQUEDENT
11 n'est pas heure:
85855 il fault hien qu'il pence aultre part.
GESTAS
Jhesus, n'as tu point de regard
a ton danger qui est patent ?
os tu devenu tant begard ?
vois tu point la mort qui t'attcnt ?
25260 Chacun a toy raourdrir content:
merveille n'est qu'il ne te meust,
car sage qui son fait entend
esohappe la mort quand il peust.
DISMAS
0 meschant et malheuré homme
25265 OU toutes bontés sont pei'ies,
porte pas Jhe-jusassés somme
sans que plus avant l'injuries ?
Par tes paroles mal séries
tu le blasphèmes grandement,
25270 et sur ton fait riens ne varies
qui est sur point de dampnenient.
GESTAS
Va, meschant, es tu si engraut
de mourir icy devant tous ?
voys tu point nostre doleur grant
25275 se par luy ne sommes rescoux ?
. Se tu es Gristus, ça dessoubz
descendu pour nature humaine,
que ne te saulves tu et nous
qui mourrons cy de mort villaine ?
DISMAS
25280 Chctif de faulco conscience,
grant tort as de l'iujuriei- :
se nous mourons poui' nostre offi nco,
desservy avons tel loyer;
Mes luy qui est sans dévier
25285 saint et juste, plain d'innocence,
meurt a tort sans riens foher :
s'a grant tort donc qui plus l'otfence.
Nous avons la mort desservie
et il oncques ne meffit rien ;
25290 il n'a que mal en nostre vie,
et il oncques ne fit que bien.
0 doulx Jhesus, que j'ayme et tien,
en qui j'ay parfaitte fiance,
quand seras au royaume tien,
25295 ayes de mon fait souvenance.
JHESUS
Grans biens a ceste heure meris
pour ta créance et ferme foy ;
pour ce hodie mecum eris
in paradiso ; or me croy,
25300 car certainement je te dis
que pour le désir qu'en toy voy,
ceste journée en paradis
seras coUocqué avec moy.
DISMAS
Mon Saulveur, mon souverain roy,
25303 en celle attente désirée
paciamment la mort reçoy :
Dieu doint qu'elle soit beneuree !
25310
25315
25320
25325
25330
NOSTRE DAME
Parfonde tristesse enserrée,
comment soustenir te pourray ?
Ou iray ?
que feray ?
que diray ?
tant d'ire ay
que le cueur me part ;
Je ne sçay
se l'essay
que j'essay
commençay
ou s'il fait dcppart.
Se mort qui espart
et qui tout deppart
me prent pour sa part,
mon dueil si se part
et ma vie languoi'ee ;
Se vie me gard
que mort n'ait regard
de passer l'esgard,
je commence tart
ma douleur desmesuree.
0 rigueur enrigouree,
mort d'un grief mors couloureo,
moult tarde ta demeurée
a la triste et csplouree
qui liens qu'a sa fin ne regarde ;
V
25258 coquait A. — 25209 bliismes trop B. G. — 25285 S.nint et juste en s,on B. C. — 2528C lexouier G. — 25296-9
manrjuint B. U- — 25300 Car] Et B. G.— 25301 voy) vien B. —25305 manque B. G. — 25312 martr/ue A. — 25317
manque A. — 25321 (jue C. — 25323 se départ B. — 25326 nait] nen G,
TIKRCK JOIJRNRR
331
;r,.iHr> Tu es lùcii dcsespcree,
de ci'udolitô parée:
quant tu me vois préparée
et do tout bien séparée
que no nie fiers tu de ta darde ?
25:uo Faulco mort de terrible garde,
c'est ta coudicion paillarde
d'cstre tousjours niée et fctarde
a ceulx a qui leur vie tarde,
qui sans cesser t'aiipcllcnt en plourant ;
ïjliS Et ceulx que le monde plus gaidc
et qui quiei'ent leur avangarde
contre toy, ton oeil les regarde
et au parfont du cueur les larde
si très serre qu'ilz cheont tout mourant.
Ainsi me fais, tu me vois labourant
ou ung fier dueil qui me vient acourant
et ne me veulz ce piteux deraonrnnt
expédier.
Mon (ilz, mon filz, a vous veil obvier,
mon doulz.enliant, mon beneuré loyer,
est ce bien fait de sa mère oublier
en tel manière?
Regardez moy, filz, je vous fais prière :
recougnoissez vostre mero très cherc
qui pour vous fait si très dolente chère
en plains piteux !
Jhesus, mon filz, mon enlfant gracieux,
ma portée, mon trésor précieux,
se fait ainsi le départ do nous deux ?
25363 o départie
A grief torraent et douleur départie,
au descontibrt et courroux de paitie!
raere du filz estre par mort partie,
quel dur l'emort !
Filz, regardez coste terrible mort
ou s'il vous fault par cnvye estre mort,
atout le moins que nous mourons d'acort 1
ainsi le veil.
Filz, passez moy le désir de mon veil ;
vivre sans vous ne me sera que dueil,
mourir o vous jamos ne plains ne dueil :
ce m'est aqueste.
Il ne me chault de la mort deshounesto :
il me suffit, je ne veil mort que ceste ;
mon cher enfiant, passez ceste requeste,
je vous supplie.
Ung corps, ung sang et une nicsme vie
par une mort requiert estre ravye :
tout ung sommes, vous ne l'ignorez mie,
«K«î5 je le »vay bien.
Ung corps sommes, car le Tostre est du mien,
vostre pur sang de moy engendre lien ;
01' se respand tant qu'il n'y a mes rien :
o quel destresse !
Et ainsi pers mon trésor, ma richesse,
se ceste mort vous surprcot et me lesse ;
ha ! rude mort, tourne a moy ta rudesse :
fais tout onny
' Sans séparer ce qui est tant uny :
ou laisse tout, assés il est pugny,
ou prcns mon filz et me happe avec luy,
je suis heureuse.
Mort despite de despit rigoreuse,.
mort dolente de douleur douloureuse,
mort hardie, hardiesse oultrageuse,
veulx tu desjoiudre
Les deux conjoints qu'amour a voulu joindre,
l'ung séparer, l'aultre de ton ilart poindre?
iissanible tout, ou tout poindre ou despoiudrc :
S540J (ilz, non fera ;
Face la mort du pis qu'elle pourra,
pende ton corps si hault qu'elle vouldra,
ja séparer de toy ne me s(;ara
pour quelque peine.
Se ton corps pend en ceste croix haultaine,
mon ame y pend par pitié qui m'y mai ne,
et n'as sur toy plaie tant soit grevaiiic
que je ne sente.
Filz, ta douleur m'est au cueur bien récente;
du dueil me dueil qui t'occist et craventc,
mes trop plus crains que la mort ne l'absente
avant que moy.
0 dure mort, j'ay dcffiance a toy :
je te detl'y, mort de Ires put alloy,
fais moy passer par la plus dui'c loy
que tu sçaras ;
Lesse mou filz, gremt chai'ité feras ;
fais moy Iraussir, très doulcc me seras :
le plus granl dueil d'ung cop abesseras
8M25 qu'oncques fust ué.
Filz beneuro, filz bien assaisonné,
fllz gracieux, filz bien moriginé,
corps des vivans mieulx complectiouué,
o beauté pure,
Choix des humaius, fleur de toute nature,
riche couleur, parfaicte pourtrailure,
rcgai-d piteux, très bénigne stature,
face sacrée,
Face luysant, franchement figui'ee,
Î5351 flol dexil C. — 25301 En] El C. — fô36G a grant deppartie A. dure dcparlie C. — 25307 et (fiief dueil B. —
2536S mnnque lî. C. — 25376 ce dueil B. C. — 253») moy la B. 0. — 25384 njez mie B. — 25390 pars A. liesse C. —
Ï53»2 tourne inoy A. — 25405 manque B. C. — 2â41J ton pouoir ne oongnoy B. C
332
MISTERE DE LA PASSION
es tu ce la si très desfiguree,
blesme des yeux, tout de sang purpureo,
dur entreniès ?
Filz, es tu ce, je ne te congnoy mes,
qui vas mourant ? ne fadviimgno jamès :
en croix te rendz, a la mort te submcs
sans desservir.
Hardie mort, veulx tu mon filz tollir,
mon fort miner, mon trésor demollir ?
c'est la vie, l'ozes tu assaillir,
25U5 mort aljsourdie,
Prompte a grever, a mal faire hardie ?
helas ! mon filz, il fault que je le die,
ce mal, ce dueil, colle grant maladie
par moy vous vient ;
Par moy est ce que cecy vous survient ;
par moy est ce que douloir vous convient ;
peine, traveil, tout cecy vous advient
par fraelcté
D'avoir en moy prins vostre humanité,
car, elle ostee, vostre divinité
tenant le lieu second en trinité
mise a délivre,
Ke vous seroit que de régner et vivre,
joye sortir, gloire parfaicte enssuyvre ;
humanité a ccste mort vous livre
ou vous régnez.
C'est donc, mon filz, quanque de moy tenez
douleur, langueur, peine que soustenez
et mort finalle a laquelle venez ;
85'iC5 et de vous tiens
Joye, santé, honneur en tous maintiens,
vivre, régner, et ce dont me soustiens ;
et donc, mon filz, se j'ay part a vos biens
especiaulx.
Souffrez au moins quej'aye pai-t aux niaulx,
car les plus grans me sont les principaulx :
mourons tout ung : aultrenient, se j'y faulx,
tort me ferez.
0 mon enifant, mon fait considérez,
donner ma part jà ne delibei'ez ;
j'ay part en vous, se bien la modérez,
trop plus féconde
Qu'aultres raercs, plus précieuse et monde :
car aux cnffans qu'elz engendrent au monde,
n'ont qu'une part, le père a la seconde :
tout estes mien,-
Homme mortel n'y peust reclamer rien :
se père avez, il est celestien ;
et donc, mon filz, pour Dieu gardez vous bien
25485 par tel pointure
D'haliandonner ainsi a l'aventure
mon droit, ma part, mon sang et ma nature ;
s'ainsi est fait, a la dure parture
je m'y oppose.
Pervers Juifz ou envie reppose,
trahitres chiens, contre vous je propose :
valiez vous huy d'habandonner tel chose ?
respondez tous.
Helas ! mon filz, je retourne vers vous,
voiez mon dueil, mon tristable courroux,
et de vos yeux tant précieux et doulx,
regardez celle
Qui vous conceut pure vierge et pucelle,
qui vous nourrit de sa tendre mamelle,
et me dittes de ma douleur mortelle
qui reste plus.
JHESUS
Mnlinr, ccce filius tut<s:
femme, ayez cueur et pacience bonne,
cessez ce dueil ; se de mort suis perçus
prenez en gré le filz que je vous donne,
Vostre nepveu, qui de vostre parsonne
songnera bien après mon grief trcspas :
t ( . prenez la, Jehan, vostre mcre l'ordonne,
servez la bien et ne la laissez pas.
s. JEHA.N
25510 Helas I quand j'esgarde mon cas,
mon maistrc et mon très doulx seigneur,
vous me faictes moult grant honneur
de moy ainsi recommander
vostre mère et moy commander
255)5 qu'a maistresse et mère la tiengne;
ja Dieu ne plaise qu'il ni'adviengne
que ma mère et chère maistresse
pour quelque perte je delesse ;
volontiers l'acompaigneray
25520 et pour ma mère la tendray,
non obstant que ne suis pas digne
que dame tant sainte et bénigne
soit bailliee et mise en ma garde.
0 mon maistre, quand je regarde
255i5 vostre mort sans quelque avangarde,
je m'esbahis,
N'assés esbayr ne me imis,
quand ces faulx et mauvais Juifz,
remplis d'envye,
2rrâ30 Vous veuUent huv tollir la vie
25A3') Kilz es tu cp qui on ce point te moiz lî. G, — 25'.50 Par moy souffrez par moy mort vous seurnient Fi. C. —
25453 i'ragelite C. — 25456 Séant B. — 25457-60 maniuent A. —26461 Ou vous venez B. C. — 25463 tous prenez B. C.
- 25470 au moin: ) aussi B. C. — 25471 les plus ç-ranb] les meilleurs B. C 25479 quelles .\. quelle B quell nbré-
flé C. — 25490 enuie] rain de mort B. C.
85525 Vostre fait et ce que je partie B. C,
35507 Pensera C, —25509 Gardez h B- C — 25521 Comlnen que C,
T 1 !•: H C !■; J 0 U K N !■: K
333
sans nvoir la mort dossiTvyc,
<l(>iit vosti'e iiioro
Porte (lestresse tant amere
qu'il n'est cueur qui le considère ;
S553ri quoi dosconrtbi't !
Kt cucor me saiiihle bien fort
que pour luy donnei- resconfort
vous m'avez i>ns,
Qui suis do douleur tant espri»
25540 que je ne sçay en quoi pouri)ris
traire me puisse.
Pensez vous donc que je souffi.sse
a ce que reoonfibrt luy feisse
do ces griefz deulz,
ijS'iô Quand je ne s<,ny qui do nous deux,
veu la grant multitude d'culz,
doit plus soutiVir ?
On doit sou reconllort querii'
de celluy qui peust secourir
io^iho et donner joyo;
Mes quand a nioy, je ne pourroye,
car de tout mon bien la monjoye
pcrs a ce jour.
O haultc dame de valour,
25555 très sainte et précieuse flour,
corps bencdict,
Vous oez que mon mnistic a dit :
il vous a voulu par son dit
ma more eslire.
NOSTRE DAME
25560 Jehan, je n'y veil pas contredire :
ja soit ce que moult piteux change
je face au jour d'uy, quand je cliauge
pour mon partait filz naturel
ung filz adoptif et nouvel,
S5565 pour Dieu pur honmie viatiur,
pour le seigneur le serviteur
et pour le maistrc le disciple,
ma triste contenance et simple
refrène sa perplexité;
25570 a la divine volonté
du tout mon vouloir se conforme :
faco de mon filz en In forme
que son perc l'a préparée.
MA.DEIAINE
0 dame de vertu parce
25575 et des aultres la plus consUmte,
vostro rcsponce est tant plaisante
que tout cueur en est allégé.
PHARES
Jhcsus, c'est a toy trop songé,
25535 Quel] Kt lî. C. - 25539 surpris B. C. — 25542
2>)579 est reiu-oui'hu C. — 255U;i bric f Je B. C. — 25615
et 08 rcprouché grandement
25580 qui demeures ey longuement
en cestc croix tant diffamée ;
que n'as tu ore réclamée
l'ayde de Dieu a ta misei-e '!
puisque tu dis qu'il est ton pore,
25.585 il te secourra sans faillir.
RABANUS
Ci'eez que s'il eust peu saillir,
il n'y eust pas tant attendu.
ORIFKON
Je l'y ay si bien cstendu
qu'il ne s'en sçaroit remouvoir.
.IHEROHOAN
25590 Avant, .Ihesus ! fais' ton devoir,
abroge le cas, il n'est tel :
se tu es le roy d'Israël
descend jus de ceste croix haulte,
et nous croirons a toy sans faulte :
25595 or besongne acop sur ce point.
ORILLART
Parlez hault, il ne vous ot point :
il pense a sa merencolie.
MAR1)0CEU.S
Maintenant on voit sa folie
ot le venin qu'il a couve :
25600 il a bien les aultres saulvc,
et il en demeure en la fange.
GESTAS
Jhesus, il me vient bien esti-ange,
toy qui as fait les more revivre,
que ta force ne nous dclivi'e :
256(6 s'a ce faire estoics puissant,
tu os bien maudit et meschant
que tu_ ne nous fais délivrance ;
mes tu n'as pouoir ne puissance
et es povre homme, ainsi le crois.
^610 Ha! villaine et mauditte croix,
fault il qu'en toy fmo mes jours ?
he ! n'est il confort ne socoui's
qui de mort respitei' me puist?
ne me chausist dont il vonist,
25615 fust par faux tours ou véritables,
fust de Dieu ou de tous les deables,
mes que de mort eschaper peusse.
KRAYART
Compaignons, moult volentier sceusse,
après jeux et esbatomeus,
25620 que nous ferons des vestemens
de Jhesus et de ses consoi-s.
iloiic Hum'/itc A. — 25561 moult) ninu C. — 3S5G4 adobtil C. -
verluablos A. — 25617-8 ptuKe, si-uli c A.
334
Ml STERE DE LA PASSION
GRIFKON
Il n'y convient brigues ne sors :
ilz sont tous miens selon raison.
CLAQUEDENT
Mes pourquoy dea ?
GRIFFON
Pour l'achoisou
25625 que je les ay exécutes :
c'est l'usage en toutes cités
que le bourreau a la despouiUe.
BROYEFFORT
Sces tu qu'il est ? riens ne nous brouille :
comment qu'il voist de ces larrons,
25630 des habis de Jhesus arons
nostre part, et sera sorty.
0R1LI.ART
C'est raison que tout soit party : ,
chacun de nous y a son droit :
se tu les as pendus, bien soit ;
25635 aussi t'avons nous bien aidié.
CLAQUEDENT
Autant a celluy qui tient pié
comme celluy qui escoicboit.
GRIFhX)N
Je suis bien content qu'ainsi soit :
regardons brief sans nous debatre
25640 que nous sommes.
ORILLART
Nous sommes quatre
qm sommes cy trotous ensemble.
BROYEFFORT
Nous sommes cinq, comme il me semble :
niesseigneurs, comptez a vostre aise.
GRIFFON
Tu n'en es point, ne te desplaise, ,
25645 tu as ung peu trop lourt mus^eau.
BROYEFFORT
Au moins eu aray je un moiceau :
j'ay esté icy sans séjour
et vous ay servis tout ce jour :
qu'aray je pour toutes mes paines ?
CLAQUEDENT
25650 Tu aras les fièvres quartaines,
pour affubler en lieu de chappe.
BROYEFFORT
Prens ce marché, qu"il ne t'eschappe :
tu n'aras do ce mois si bon.
BRAYART
Ay je bien party do façon?
25655 veez cy quatre pars divisées
et si justement composées
qu'on n'y sçaroit oster ne mettre.
GRIFFON
Veez cy pour moy.
ORILLART
Voyla bon maistre :
il scet bien prendre le meilleur.
BRAYART
25660 Et ça pour moy.
CLAQUEDENT
Quel gouverneur !
et puisque chacun prent la sienne,
j'aray ceste.
ORILLART
Et veez cy la mienne :
je ne perdcray meslmy tout.
Mes pour achever tout a bout
25665 tandis que nous sommes tous prestz,
partissons ceste robe apprès,
et que chacun en ait sa pièce.
GRIFFON
11 n'est pas bon qu'on la despiece,
veu qu'elle est d'estrange facture,
25670 tout d'une pièce et sans cousture ;
mes jouons nous a jeu de sort
qui l'ara.
ORILLART
J'en suis bien d'accord
sans que de rien te contrcdie ;
si convient donc qu'on cstudie
25675 de quel sort nous la sortirons.
Tirons au los.
BRAYART
Avant! tirons :
qui a le plus long il emporte.
CLAQUEDENT
Ce jeu la n'est point a ma sorte,
pour les grans fraudes qui y'sont.
BRAYART
25680 Or en devise ung aultre dont
qui soit ung jietit plus joyeulx.
Griffon, tu as veu tant de jeux.
et sces des fatras plus de dix :
se tu sces riens si le <ious dis
25685 et nous ensuyvrons ta querelle.
GRIFFON
Nostre conduite sera telle,
comme vous orrez deviser :
2563Ï quil soit ileparty 0. — 25037 Par raison que cil qui escorehe IS. C. — 25638 G. FaUlt il quil soit iiinsi B. cest
force II est coquart qui ne le croit O. Puisquil fault passer ce destroU B. C. — 25639 Esgardoiis B. G. — 25640 A auolr
gaiges B. C. — 25t)47 Sil a en vous bieii ne honnour B. C. — 25652 Prens la si B. — 25658 aga du B. C. — 25663 man'jue
C. — 25664 tout debout B. debas C. — 25666 ceste] ce A. ceste cy B. C. — 25676 a loz B. — 25681 Qui soit ung peu
plus joyeulx jeu B. C. — 25682 Griffon tu en as beaucoup veu B. C,
TIKRGE .lOURNKE
335
il me l'ault ung peu rctounier
en la cité comnio jVspoirc
25600 pour quorre ma grande douloirc
dont je coup[)c les haatereaux,
])our froissier n ees larroiiceaux.
les genoulz tantost au scrain ;
pensez quelque jeu bien souldain,
25005 et en allant ii la cité
je penseray d'aultre costé
se jo trouveray quelque esbat.
ORII.l.AUT
Aino de nous n'y met débat:
va et retourne ygncUcmout.
SATHAN
25700 Changer me fault habillement
et muer ung*^cu ma figure,
affin que malice procure
contre ce meschant qui s'en va :
se le deable ne le couva,
25705 je luy feray tantost injure.
Povre homme de fresle nature,
en quel lieu te V(>ulz tu retiairo ?
GRIKKON
Eu ung lieu ou j'ay bien att'aire :
laisse iiKiy aller mon chemin.
SATHAN
25710 Arrostc, arreste, mon cousin,
je veil parler a toy deux mos :
bien sçay que tu as en pi-Ofios
et sur quoy t'en vas garmentant.
«niPKON
Le seps tu bien?
SATHAN
•le t'en dis tant :
25715 tu te ronges la teste fort
poui' trouver quelque jeu do sort
dont si bien puisses besonguer
qu'a celluy jeu puisses gaigner
ung meschant et bien simple habit
25720 qui fut Jhcsus.
GRIFFON
C'est très bien dit :
no s(,'ay qui te l'a i-evcllc.
SATHAN
Rien uc me peust estre celle,
jo l'ay bien sceu appcrcevoir.
Se tu veulx ung bon jeu savoir,
257K) ung t'en apiu-endray bien appoint
par lequel tu ne fauldras point
de gaigner surpiez celle i-obc,
et n'est tiichci'ie ne lobe
qui ja t'en sache faire tort.
GRIFFON
25730 Tu m'csbahis de ton rapport :
si n'y ay créance ne fois.
SATHAN
Je te dis encore une fois
que quand ce gentil jeu s<;aias
et par mon sens en useras,
^735 tu ne fauldras point de crocquicr
la robe.
CHIFFON
Kt donc, je te requiei'
que tu me monstres la manière.
SATHAN
Elle est assés ample et plainiere.
Geste cy tes yeulx grans et gros :
25740 voy tu ceste piecete il'os
de six quarrures bien quarree?
mes que je l'aye ung [wu («u'ee,
tu verras et diras de fait
qu'oncques plus beau jeu ne fut fait.
25715 Regarde, est il bien a l'ecquarrc?
Premièrement en ceste quarrc
metz ung point, affin qu'il appere
que c'est en despit Dieu le père;
en ceste ara deux points assis
25750 en despit du l'ere et du Fils ;
puis trouves trois en ce costé
en despit de la triuité ;
les quatre icy aront leurs gistcs
en despit dos cuvangelistes
25755 qui la loy de Dieu esciHpront ;
a ceste aultre coste seront
cinq |>oints bien assis en despit
des cinq [ilayes de .llicsu Crist
que tu vois en ceste croix la.
GRIFFON
25700 Des cinq playes ? comment cela ?
tu ne monstres pas que veu l'ayes
il a plus de dix mille playes ;
en trop bas nombre les ravalles.
25690 giaat douloueie .\. — 25692 «•[•oqilici- 1), .ouppor C. — 25009 vistcmeiit A. —25706 l'oible C. — 2371Ï si'Hy
uvov/ur A. — 25719 hien nufti'juc C. —25735 gaigner C. — 25739 GoUe tes yeulx qui suiit «i gros B. C. — £741
rarruzes C. — 2574S ou iiuni de B. — £5756 Huître manque C. — 25757 bieu munyue B. — 2576S 11 en y a C
336
257Gj
Ml STERE UE LA PASSION
2577;
25780
25785
25790
25795
25800
SATHAN
Je te parle dos principall-s
qui percent les membres Jhesus.
GRIFFON
Et doucq tu mens comme dessus,
car se des grandes me devises,
il n'en y a que quatre assises ;
j'ay bien regardée chacune.
SATHAN
Il en ara bricf encore une
qui la cinquième parfera :
te souffise que cinq sera
en dcspit dos cinq playes diltcs;
et autant de fois ces mos distes
que vbus getterez de pointure.
GRIFFON
Veez cy encore une quari'ure :
quans peins y fault il au surplus !
SATHAN
11 y fault six poins et non plus,
et c'est la pointure plus haulte,
laquelle y est pointe sans faultc
eu despitant eu fais et dis
toute la court de paradis.
Je n'y sçaroie plus prcscher,
et pourtant je te veil noncer
que tu ne sçaras soubz les cieulx
trouver jeu qui te vaille mioulx
pour gaigncr.
GRIFFON
Je croy bien que non.
Et, beau sire, dy moy son nom
de ce beau jeu nouveau fondé.
SATHAN
Tu le dois appeler ung dé,
qui est ung nom de grant haultcur.
GRIFFON
Et s'on enquiert de l'inventeur,
que diray je?
SATHAN
Sans quérir fable,
tu diras que c'a fait le deable :
ja mensonge n'en encourras,
et touteiibis que tu jourras
ou toy ou aultruy par bon hct,
et chance ne vient a souhet,
se c'est ung point, par vitupère
si dy : va en despit du l'ero !
s'il n'y a que deux poins, si dis :
va en despit le Dieu le filz
et du Père conjointement !
et ainsi tout consequemment
25805 comme devant monstre t'avoyc ;
et s'en ce point dresses ta voye,
quiconquos en veille hongner,
tu ne fauldras point do gaigncr
autant qu'il voudra de financ:.
GRIFFON
25810 J'en feray ma plaine puissance
de maugréer et regnier,
et poui' plus tost expédier,
amy, d'icy nous partirons ;
je m'en voy vers mes compaignons
25S15 pour leur apprendre le mcstier.
SATHAN
Hz y jourront si voulentier
qu'on no les en sçara lavoir.
[l'OSE ]
GRIFFON
Compaignons, voulez vous sçavoir
ung jeu bien jolis et notre ?
GRILL ART
25820 Or avant, qu'il nous soit monstre,
car nous ne demandons pas mieulx.
GRIFFON
Gettez tretous icy vos yeulx :
regardez quel outil veez cy.
CLAQLEDENT
Ou deable as tu trouvé cecy,
25825 Gridbn? grandement m'esmerveil:
oncques mes je ne vy pareil
ne si beau jeu dont m'en souviengne.
GRIFFON
Ne vous doit clialoir dont il vienne :
prenons la robe de Jhosus,
25830 et puis gettons ce dé dessus,
et cil qui pourra si la gaigne.
ORILLART
Il fauldra donc qu'on nous enseigne
comment le jeu ci se comporte.
GRIFFON
Cil qui a plus do points l'emporte :
25835 je n'y voy point d'aultre ordonnance,
et se deux gettent une chance,
il fault qu'ilz gettent de nouveau.
25765 le corps de G. — 25772 Te sut/i.sh- quainsi 11. — 25777 l':iiilt] a B. — 2577S i-in(| poins B. — 25797 ton lait B. C. —
25798 a ton hait B.C.— 257t9-800 si delihcre P:t iliz B. C. — 25801 Se ce sont deux mal cntresis B. entresaisis C, — 25815
leur manque \. — 25821-2 Nous uattendons autre denrée a. Voicy juste nostre marée B. C. — 258ÏS-31 manquenl C.
TIEUCK JOIRNKE
3.T7
CI.AQliEDENT
Lo jeu me semble bon et beau :
jo m'y jourray très volontier.
!;58'.o Qui commaiicera le premier ?
il nous le fault dire en commun.
GniFKON
Il ne peust chaloir, c'est tout uug :
qui l'a, si grtto a l'aventure.
BKAYAUT
Veoz la, commance la parture
25845 puisqu'on ne m'y contredit point.
Haro ! je n'ay gcttc qu'ung point,
qu'en dcspit de Dieu ce puist estro !
GniFFON
Comment ! os tu ja si bon maistre,
et sans ce qu'on le faist appris ?
ORILLART
25850 Kt je n'en ay guère» plus pris :
j'en ay deux, ma part en est faittc ;
mau gré en ait lo faulx prophète
que je voy la crucifié !
CLAQUEDENT
.le suis uiig peu i)lus hault monté,
25855 j'en ay trois pour toute ma paine ;
que la trinité souveraine
en ait mau gré et nialc graco !
GRIFFON
Laissez moy geltor, faictes place
tant que jo soye ung peu as.<is.
25860 Tenez la, j'en ay getté six :
il n'en fault plus tenir sermon,
ceste robe est myonne.
BRAYART
C'est mon :
le deable en puist romi)re sa pâte !
l'avons nous pardu si en liatc
25865 par tes t'alaces et tes trompes ?
et ce l'aulx jeu dont tu nous ti'ompcs,
maudit soit qui lo composa !
ORILLART
Voire, et qui appris le nous a !
du perdre tout le cueur me deust.
GRIFFON
25870 Ne m'en cliault, soit maudit qui peust!
puisque j'en tiens la grigneur pièce,
vous ne la verrez mes en pièce :
elle s'en vendra avec moy,
l'II.ATE
Messeignours, grans merveilles voy,
Ï5875 je n'ay point appris ceste chose :
la journée s'est bien tost close ;
on ue voit comme point sur terre.
CENTURION
Tout le cueur ou ventre me serre
do la crainte qu'en moy s'espart ;
85880 gardez comment il samble tai t
et comment ténèbre foi.sonne,
et si n'est pas encore nonne :
si fault que le cifel se desvoye.
ANNE
Messeigneurs, so Dieu vous doint joye,
25885 ja tant de plait n'en fault tenir :
veystes vous oncques advenir
eschpse de soleil ? créez
que c'est cela que vous veez :
si ne s'en fault point esbahir.
RUHEN
»890 Et deusist le monde faillir
sans jamès avoir temps futur,
si fait il un temps bien obscur,
bien ton-iblo et esbahissant.
ASCANUS
Toiyours va en obscurcissant :
fô895 il n'est cueur qui n'en soit estnus.
JHESUS
Deus meus, Deux nwtts,
ut quid dereliqxiisti me ?
mon Dieu, mon père de lassus,
qui vois quanque tu as forme,
25900 Regarde ton fils trop pugny,
qui n'a inefTait ne folié ;
he'y! lama sabathatiy ?
Dieu, comment m'as tu oublié ?
BROYEFFORT
Oez, seigneui-8, il a huchié
25905 Helias, ung de vos prophètes ;
pourtant regardez que vous faites ;
s'il vient, il le délivrera.
YSACAK
Or laissez voir s'il y viendra :
il nous y convient tous entendre.
JORRAN
Î6910 Je pense qu'il a bel attendre:
il est bien loing de son secours-
25S'.l Si sabrege il est oppuiluii li, C. — ïâffiO Toute la cour B.C. — 25^(30 tenei la de qaoy veo la six B. Tel» C.
- 25Se5 fabusi's li. C. — tlimi couiptcs li. — 25872 mes] iiieii A. — 255^81 fiisoniio B. — 25S95 freiiieux B. fonneux f.
Pas.
22
338
M 1 S T E H E D E I^ A PASSION
.lACOU
S'il huche Helyas pour descendre,
je pense qu'il a bel attendre.
JOATHAX
Helyas lui pourroit bien rendre
2591Ô les champs, s'il y a son recours.
YSACAR
Je pense qu'il a bel attendre :
il est bien loing do son secouri
Nous y serons avant trois jours
que la fin n'en soit reniiree.
JHESUS
25920 Nature humaine désirée,
mon très cher et très anié gendie.
i-icio, j'ay soif très serrée
de toy ton héritage rendre ;
J'ay ma char pour toy martiree
2j9* autant qu'elle se peust conaprendro :
la langue seule est demouree
qui n'en ara pas sa part mendi-e.
RU BEN
Ce Jhesus se commanco a rendre :
il se complaint de soif qu'il a.
SALMANAZAR
28930 Je pourvoiray bien a cella,
puisque je l'ay en mon mémoire :
je luy donray tantost a boire
assés pour sa soif estaucher :
veez cy bruvage riche et cher
^935 pour bien engresser homme maigic :
il est de fiel et de vin aigre
avec du niyerre mis par niy. __
PHARES
Tu dis vray, tu es mon auiy ;
mes comment luy en donras tu '.
SALMANAZAR
25940 Très bien : j'ay icy revestii
une espouge d'ysope amerc ;
si convient que je la modère
sur ung beau roseau droit et long
pour lui mcniistror, et adonc
25945 il n'ara garde d'cnyvrer.
JORRAN
Avant, pense de labourer ;
acop : c'est fait d'homme do bien,
SALMANAZAR
Or tien la donc, prophète, tien,
boy de ce gentil vin paré:
25950 ce n'est ypocras ne claré,
c'est bruvage d'autre manière.
NEMHUOTH
Il retourne la teste arrière :
il en a ung petit tato,
mes si tost qu'il en a gout(^ ,
25955 ce n'est point bien ce qu'il demande.
ASCANUS
11 a la langue trop friande ;
il auiast mieulx ung bon loppiii
de pain et ung godet de vin
a fourrer ung petit ses dens.
SALMANAZAR
25900 Je luy boute a force dedens,
mes tant qu'il peut il y répugne.
RABANl'S
11 a assés maie fortune;
puisque ce boire ne luy plaist,
laissez le la pour tel qu'il est :
25905 il souffit qu'il ait essayé.
CENTURION
Chacun doit bien cstre eft'rayc
d'esgarder le souleil ou ciel :
ne sçay se c'est temps naturel,
mais la ténèbre m'esbahit.
JHESUS
25970 Co>isummalum est! il suffit :
toute l'escripture sommée
qu'oncques homme de moy escript
est de ceste heure consommée :
Maintenant est aterminee
25975 ce mistere et la passion,
dont la fin est deteiininee
do l'humaine redempciou.
NOSTRE UAME
0 grievfe separacion,
des dolentes la plus piteuse !
25980 o mort terrible et despiteuse,
regai-de en quel langueur je suis :
je te reclame et tu nie fuis ;
mort, comment peulz tu consentir
mon cueur tel destresse sentir?
25985 que ne l'abas et desconffis ?
Mon enflant, mon gendre, mon filz,
lielas ! tu t'en vas au trespas !
Helas ! et ne me laisse pas,
qui par toy seul me dois conduyre ;
25990 il me souffit qu'avec toy muyre :
25912-15 maiviii-nt A. — 259ï2 saiee H. — 25923 lonl iiio» C — 25931 Kt puisque je lav en mémoire C, — 25937 mirre
8. luen-e C. — 25U42 Fichie pai- lame do ma iiierc A. laT le B. — 25915 de si-iiyurei- C. — 25001 tant miiiquc A. —
25965 assaye C. — 25968 lomps imuviiic B. — 25972 moy] mon 1!.— 25973 aoheuee C.
TIKRCK JOURNEE
SJ9
tout bien ai-ay quand j'y inourray,
et quand sans loy je dcmoui-ray,
ce nio sera mort plus que dure.
MADRLAIN'R
Tout son cor|)s tel destresse endure
2590,') qu'il n'en peust plu» sans rendre l'anio :
confl'ortez vous, dévote dame,
ung peu sur votre piteux cas.
JHESUS
U Pater, in ma nus tuas
cuiriiiiand'i Kiiirittim mcum:
Î6000 par la puissance que tu as,
mon père, et par ton digne nom,
Je n'ay mes jour se cestuy non,
je me pars du règne mondain,
et au partir, par piteux son,
2C005 mon espcrit rendz en ta main.
Ici) encline Jhestis le chef et rend l'esperit ;
et doit tramhler la terre, les pierres se
fendre , jilusieurs mors ressuscitei-; le
voile du temple doit partir et rompre en
deux.
SATH.V.N
Veez cy ung cas si très soubdaiu
que je ne syay trouver conseil ;
de ce Jhosus cy m'esmerveil :
il est mort, sa fin est venue,
ïooio mes que son ame est devenue,
je n'en s^ay rien, n'en quel party
il s'en va, non il est verty ;
si non que je fais très grand double
qu'en nostrc manoir ne se boute
26015 pour rompre portes et verroux
et nous de^truirc et pillicr tous,
et crains que ja ne soit bien près :
et pourtant je m'en cours ajjprés
])our le devancer si je puis.
/(•(/ s'en tu en enff'er.
ULHK.N
Oncques mais dont je me recors
aïo» n'oys voix humaine si forte.
NOSTBE DAHR
O mon fllz, troi> me desconfoiU»
ma dure et desplaisantc vie :
ou es tu î
Ictj chiet pasmee soutii la croim,
MAUELAINB
La vêla ravye
«t uheute pasmee sur terre.
«lUFKON
26030 Cueur n'est qui de pitié ne serre
a voir cestc femme esplourec,
qui est sur terre demeurée
evanouye de courroux.
ORII.LART
Hoitons la arrière entre nous,
26035 que nous n'oyons plus tel brarie.
Vuidez d'icy.
MAUBLAINE
Vierge Marie !
CLAQUEDENT
Poussez avant, vuidez cest estre :
se vous voulez voii- vostre maisti'e,
si l'nllez de loing regarder.
hy emportent Nostre Dame arrière.
IMLATE
«io^o Centurion, veillez gardei'
ces malfaiteurs pour une espace ;
je me dépars de ceste place,
car les grans signes que je voys
m'esbaysscnt et sens et voix,
26045 tant qu'a i)eu s^ay je ung seul mot dire.
CENÏIKION
Je le feray volontiers, sire :
a mou devoir pas ne tendra.
Icy s'en va Pilate et ses gens avec.
CKNTUHION
wioïu Ksmerveillii' très fort je suis
de ce Jhesus qui en mourant
a geste ung cry si puissant
veu la foiblesse de son corps.
26050
KUBKN
Je croy que le monde fauldra ;
oncques tel/, fais ne fin-ent veus :
la terre tramljle sus et jus,
tant que tout homme est esbahy ;
i ce cestuy A. C, — 20020 Graus inerueilles eu mou «^ueur traU B. C. — 200aîl-2 Do t'est homme ioy- eu mou-
lu a, gelle ung my si graut li. C. — 26028 Or es (u A. — 26036 oi'Oe mesgnie B. C. — Ï6037 Vous ne poue» plue
cstre lî. C, — 2Gl.>Vi d*3 ceste plat-ej pour une espace A. — 26015 se Je scay mot dire B. C;
26002 ce cestuy A. C.
faiit Qui
si près
340
Ml STERE DE LA PASSION
les lierres se fendent iiar niy
tant que riens ne demeure entier.
ASCANUS
Le fouir nous cust bien mestier
26055 ou muscer dessoubz les montaignes ;
oncques plus liorribles enseignes
ne furent sur terres nionstrces :
ténèbres se sont donionstrecs
encore plus fort que devant.
EMILIUS
26000 Cheminez de cy en avant
pour voir graus csbaysseraens :
vous verrez plusieurs monuniens
tous ouvers, je vous certiffic ;
mes que cela nous signifie,
26063 il n'est qui en sache parler.
CENTURION
Le vray ne se poust plus celer :
qui n'a créance, c'est simplessc ;
le fait de Jhesus est tout cler,
qui tous nous esbahit et blesse :
26070 Desservy n'a pas tel destresse
qu'il a enduré en ce lieu :
par quoy vrayement je confesse
qu'il estoit le vray fils de Dieu.
[Pose. |
s. DENIS, d'Athènes.
Seigneurs, oncques mais ne fut veu
26075 que Nature, la bonne ouvrière,
se devoyast en tel manière
que nous la voyons au jour d'uy ;
vous savez tous, n'y a celluy,
que Jupiter, le dieu haultain
26080 séant ou trosne souverain,
a gouverné le firmament
de long temps si très justement
qu'en ceste monarchie haulte
oncques ne fut veue deffaulte:
20085 tout est fait a juste compas,
jamais n'y fut trouvé trcspas,
ne que rien delaissast son ordre
ou astronomie peust mordre,
ne ti'ouvei' quelque defl'aillance,
26090 comme bien eut la conguoissance
nostre Aristole Lautenticque
qui dit ou segond de phisicque
en ce point : Se nous comparons
2605i eust] est .V. — 26058 admonstreeij B. C. —
force 15. — 26122 Et le dl'oit U. — 26128 assiinplje
tout le temps que congueu avons
20095 au temps de philosojjhes seurs,
nos plus anciens predecesseui's,
et avons ce bien retenu
que nous et eulx avons congnu,
nous ne trouvons par rigle aucune
26100 qu'où ciel soit riens fait par fortune ;
et comme s'il voulsist prouvei-
qu'on n'y sçaroit faulte trouver.
Oncques n'y ot faulte que ceste,
qui est tant clere et magnifeste
26105 qu'oncques horreur n'y advint tel :
ceste esclipse est desnaturel
voire, et si fort contre nature
qu'il n'est tant saige créature
qui le sceust sauver par raison.
EMPEDOCLES
26110 Vous parlez de bonne achoison,
Denis, nostre docteur très sage ;
oncques ne fut en nostre eage
ce que de ceste heure seurvient :
que vous en samble il?
s. DENIS
11 convient
26115 et est de foice de conclure
que la lune se desnature
et ait changié tout nouveau cours
car elle est de quatorze jours
assise en l'opposicion
26120 du souleil pour la manssiou ;
or est de son lieu remuée
et de droit point interposée
entre la terre et le souleil,
qui par ung moyen despareil
26125 nous cause ceste esclipse cy.
EMPEDOCLES
Et que jugez vous par cecy,
nostre maistre ? je vous supplie,
car la chiere avons assouplie
très tant que nous ne pouons plus.
s. DENIS
26130 Quant a moy, je dis et conclus
qu'il fault que le haut moniteur,
dieu de la terre et gouverneur,
sueufire par aucune adventure,
ou que la totale facture
26135 du monde ainsi qu'elle est constrmcte
soit brief résolue et destruicte :
je n'y voy point d'autre motif.
EMPEDOCLES
L'argument est bon et actif
20059 Eiicor liliis fortes B. — 2007'i-13y nwiniui-iU A. —26115 est
B. —26131 iiniioueur B.
TIKIIGR .lOURNRR
341
l't ost la cause assés prouvablo.
ISlI.KTE.j
niEi; LE PERE
261 M Or est mon clier filz veiierablo
passé le pas très destresscux
do la mort, las et angoissoiix,
par piteuse cxecusion ;
ilemenoz lamentacion,
2M'àh anges, en très piteux arroy
pour la mort de vostre bon roy
qui a a ceste heure souffert
et son précieux corps offert
a la passion douloureuse ;
26150 lamentez sa moi't rigoreuze,
le doulouzer ne cessez mie,
mes averissez Ysaie,
qui de vous a ces vers assis,
en disant : A ngeli pacis
26155 dolentes amare flchunt;
tous ceulx qui furent et seront
ne se pourroient trop contraindre
a sa mort lamenter et plaindre :
toute nature y condescont,
86160 toute nature sa mort sent
et maine tristesse et douleur
de la itiort de son créateur;
et bien sçay qu'ainsi la sentez,
si veil que chant de pleur chantez
26165 sans autre cousolacion.
Ici/ chantent les anges Kyrie eleison
de ténèbres, ung ver ou devx.
RAPHAËL
Cité de Syon,
exultacion
et joye délaisse,
Desolacion
26170 et confusion
prens pour ta liesse;
Quand ton roy te lesse,
ta couronne cesse,
ton bien se deppart,
26175 Tu pers ta noblesse,
tu pers ta richesse,
tu n'y as mais part.
L'RIEL
Jherusalem belle,
201 so
88185
26190
86195
26200
26805
26210
cite solempnello,
quel mal as tu fait?
Serpente cruelle,
poignant et mortelle,
recongnois ton fait ;
Combien as meffait
qui as huy defl'ait
ton Crist, ton saulvenr!
Pleure ton meffait
vil et controffait,
congnoy ton erreur.
MICHEL
O noble Judée,
noblement fondée
d'ancienneté.
Lors fus bien mondée ;
or as mal gardée
la nobilité.
Quand par cruaullé
tu as débouté
ton leal pasteur
Tout pour sa bonté ;
venge tel durté,
haultain créateur.
QABRIEL
0 vierge bénigne,
des aultres plus digne,
prenez reconffort ;
Se la gont maligne
a mis en ruyne
vostre cher conffort.
Prenez ung remort
que sa chère mort
est tant pourfîtablc :
Car gendre humain mort
sera mis a port
de gloire notable.
NOSTRE DAMS
Gabriel, ma gai'do amiable,
86215 combien que ceste mort compère,
la volonté de Dieu, mon père,
soit faicte et sa digne plaisance ;
car j'ay en moy ferme espérance
que mon filz ne me laissera,
20220 mes au tiers jour suscitera
et revendra de mort a vie :
201/iO Or est mon cher filz humble et pieu A. — 26147 Qui tel examen n B. C. — 26152 auertisseï B. C. — 26163 la]
le n. les C. — 86172 ta lesse C. — Ï6185 huy manque B. — 26192 Et danciennete C. — 20197 As de loy boule B. C.
— 26207 cliei| chief H. — 26211-2 Que sans ce hault port Lomme ne«st depport B. C— 26213 flnahle B. C. — 268U
feablo B. C. — 26220 ressuscitera C.
MISTRUR DK LA PASSION
c'est ma foy, m'anie y. est ravye,
il n'est qui m'en sceust séparer.
IPosE.l
S.VTHAN
Je n'ay gueres mis a virer
20825 jusque» en l'infernal abisme.
Lucifer, oez que j'exprime :
fort bâtir nos portes convient :
veez cy l'ame Jhesus qui vient
pour nous despoullier cent contre uug.
LUCIFER
26830 Sus ! deables, horrible commun,
serrez ces portes a puissance,
bendez verroux en habondance,
chargez barres plus d'ung millior
et gardez bien de sommillier :
26235 tantost verrez nostre advei'sairc.
CERBERUS
Roy Lucifer, laissez moy faire :
pour pouoir qu'il sache moustrer
je luy deffendray bien l'entrer ;
j'ay atTuté nostre portai
862''é0 de grosses roches de métal
aussi grandes que haulx chasteaux,
et mis plus de mille barreaux
tout an travers de l'ouverture.
FERGAI.US
Metz y encor a l'aventure
86245 ce gros levier fiché de bout.
ASTAROTH
Aventurons tout contre tout :
ennemis danipn(;s, il est heure,
il est besoing qu'on y laboure,
car s'il y entre a sa demande,
86250 nous avons la perte plus grandi-
que jamès nous puist advenir.
CERBERUS
Or laissez hardiment venir :
se tout le deable ne l'emporte
il ne rompera pas la porte ;
26855 il y a defFense beau tas.
L ESPERIT JHESUS
Attolite portas.
principes, reslras et elenamini, porte eternal>'!!,
et introibit rex glorie.
LES AMES DU LIMBE
Quis est iste rex glorie ?
i.'esperit
Dnminm fortis et potens, dominus potens
in prelio : Attolite portas, etc.
LES AMES
Quis est iste rex glorie ?
i.'esperit
Deus virtutKin ipse est rex glorie: Attolite, etc.
l'y doivent cheoir les portes quand Jhesus
/'rappera sa croix encontre.
Kaulx deable de gloire privé,
pour riens as vers moy estrivé
/V, et clos encontre moy tes portes :
26260 la conffusion en repportes,
et j'ay la victoire obtenue :
i\ longtemps as icy détenue
humaine lignée enfermée,
qui i)ar moy sera deffermee
262as niaugré toy sans riens empesclior :
le pris m'est vendu assés cher :
j'en ay dure mort endurée,
fs) par quoy puissance m'est livrée
de ta possession pillier,
86270 toy desrober et despoullier
des bons habitants que tu tiens ;
trop es encontre eulx esroguié .
et sans fin seras subjuguié
a cesto crois puissante et digne,
20275 a ce hault et terrible signe
dont a présent me vois saisy :
par la croix seras dessaisy
de toute la force et vertu
dont trop as esté revestu,
26280 et frustré de tous tes faulx las.
TOi:s les deahles
Helas! helas! helas! helas!
veez cy ung teri'ible chastoy !
l'esperit jhesus
prent Adam par la main et dit :
Adam, amis, paix soit o toy
et tous tes filz justes et bons :
86285 en ces ténébreuses prisons
avez lamenté grant espace :
je vous menray en aultre place
ou tout vostre soûlas prendrez,
et en ce lieu tous m'attendrez
86290 jusqu'à ce qu'au ciel monteray ;
et loi"s je vous transporteray
I affaicte G. — 26259 forbatu vers moy B. G.
■ 2G2S9 Et illeo tous inatt(>ndei-ez B. C. '
— 26262 retenue B. 0. — 2626S donnée A. - 26272 arrotruie C.
T 1 1', R C R .1 0 M R N F K
Mis
en mon royaiilmo pardiirnbli'.
ADA.M
0 nolile secours agréable,
[iris de ehore reilenipcion,
2029;) souverain confort charita})le,
liaultainc repparacion !
^; O parfaicte compassion
trop enclinec vers les hommes !
benoite soit la passion
î(>»X> par laquelle rachatés sommes I
s. JEHAN IIAI'TISTK
0 souverain mediateui"
de Dieu et de nature humaine,
jadis fus prcuonciat(iur
de ta venue souveraine ;
26305 Ma parole ne fut pas vaine
quant te nonnnay agmts Dei,
lîar par ta bonté d'amour plaine
ht follis pecalii Mundi.
EVE
Benoite soit la digne ancelle
et le ventre en Dieu conforté
de la beneuroe pucelle
qui si digne fruit a porté !
Nous voyons sa divinité
qui (le servitude nous livre,
et par elle est huy présent»;
ce hault bien qui nous en délivre.
DAVID
0 secours de doité pure,
long temps vous avons attendu
et clamé par songneuse cure
ïtt;i20 comme don de Dieu prétendu ;
Or y avons tant attendu,
tous couvers de dueil a monjoye.
que vous y estes descendu
a nostre siiigiiliere joye.
\SAIE
sa^iir, Ov n'est il riens qui nous eunoyc.
puisq\ie nous voyons la présence
de la haulte magnificence
qui a sa gloire nous avoye.
K7.KCHIEI.
Tout nostre grief dueil est en voye
Sfimo et avons de joye afflnence,
contemplans la divine essence
' dont le voir tout bon cueur esjoye.
JHEREMIE
Hcnoit soit il qui ceste joie
nous a dressé a nostre otleuce !
56310
«631.-)
2ftm c'est la divine providence
du doulx Jhesus qui noua couToyn.
le;/ Ic'x emmtiine Jhcsus hors d'enfer rt les
)iiet en quelque lieu rli'terinini', ut tandin
font grnnt tempeste les diables en rnfer.
I.DCIKRn
Dcables, j'enrage, je me noie,
j'ai-s tout comme -rouge fomaise,
je forcené, je me despnige
26340 par le coun-oux qui me dctoil.
CERRERI.'S
On nous fait tort, on nous fait tort,
et de cestuy desrobemcnt
j'en appelle au grant jugement,
car le fauls .Ihesus n'y a droit.
I.IIOIPEU
Ï634S Ton appel riens ne nous vauldroit :
Jhesus, qui la chose a ba«tie,
si seroit la juge et partie ;
mes pour l'avoir ce qu'il nous cmble
suivez apprès luy tous ensemble :
26350 si pourrez la proye resconrre.
ASTAROTH
Apres coup perdu n'est nul courre :
nous sommes cy tant courbatus
et de rage tant abatns
qu'il no nous tient plus de courrie.
CERBERUS
263rK. Haro ! quel forte deablerie
et quel rage desmesuree !
or est comme désespérée
la fontaine de Taitarus.
I.DOIKER
Quel cherc fais tu, Cerberus ?
26360 que tout le deable te couva !
tout est pardu? comment en va^
a il tout pillii' au depitart ?
CERIlEUrS
Nennin, que le deable y ait part!
il demeure encore a foison
2636r. do dampnés en nostre maison
au fons de nostre entfer la bas ;
mes il a joué du cabas
trop lourdement pour une foU.
car il emporte le droit chois
26370 et la fleur de nostre héritage.
262y7 paifonde B. C. — 25307 ta voyi' C. — 26309 dijrnn ccll»- B. — 26311 la mnn.iu,r B. — 26313 mMviur U. •'.. —
26332 le veu G. icsjoye B. — 2o345 ny peniendroU B. — 26:'.i7 11 seroit la juge B. C. — 9W58 lomhnhis B. C. -
Ï03C0 Quel B. tous les deablcs A.— 26362 A il tout pillie &<• part en paît B. C,
344
MISTRRE DE LA PASSION
W
LUCIFER
Ha ! rain de redoublée rage
en ville substance enserrée,
mortel et venimeux bruvage,
poison puant, mort desserrée;
26375 Mort, mort, ou es tu enserrée?
gette l'oeil au dueil ou je suis :
ma fille de raoy engendrée,
partout te quiers, et tu me fuys !
Passe ça, Sathan.
SATHAN
Je ne puis :
26380 le hault braire ne vous y vault :
je suis tué ou peu s'en fault ;
plus ne remue pié ne teste.
LUCIFEB
Dragon pourry, puante beste,
serpent hideux, vieulx cocodrille,
26385 ta substance puant et ville
ne mourra pas si doulcement :
vien test.
8ATHAN
Je ne puis aultrement ;
encore vois je trop en haste.
LUCIFER
Pourquoy ?
SATHAN
Je cloche d'une pâte :
26390 a peu me puis je remouvoir.
Hclas !
LUCIFER
Fergalus, dit il voir?
cloche il si fort qu'il va huant ?
FERGALUS
Nennin, mes il fait le truant,
si très bien que c'est grand pitié.
BERICH
26393 C'est ung faulx larron affaictié :
il en rôtira la lainproye,
car c'est par ly que nostre proye
est pardue si meschamment.
LUCIFER
Me dis tu vray ?
SATHAN
Le ribault ment
26400 par le faulx cueur de sa tripaille,
et l'appelle en champ de bataille
s'il me charge de tel meschanee ;
car j'ay fait ma pleine puissance
par moyens cauteleux et faulx
SO'iOâ de garder les droits infernaulx
sur tous les deables de l'ostel.
LUCIFER
Laissons ce desespoir mortel
qui le cueur de rage me noyé :
plus en parlons et plus m'ennoye ;
26'.t0 ce qui est paidu est pardu;
mes poussons bien au résidu,
w, de le garder inieulx qu'il pourra.
BERICH
C'est bien chante.
LUCIFER
Or y perra
qui fera meilleur ambassade.
26415 Sathan, va faire une passade
et rapporte, se tu me crois,
ces deux larrons qui sont en croix
ilz ne pouent longuement vivre.
SATHAN
Se tout surpiez ne les vous livre
26420 tous deux liés et bretecqués,
j'accorde que vous m'applicquez
par tous les infernaulx manoirs.
LUCIFER
Or va doncques, que tous les noirs
de l'orrible lieu désolé
26425 te ramainent ars ou brûlé !
|1'0SE.|
JHEROBOAN
Seigneurs de la loy de Judée
qui la chose avez regardée
du fait de l'execucion
de Jhesus et sa passion,
26430 vous pocz voir signes moult grans,
au point de sa mort apparans
dont chacun se peust esbayr,
et me font tout le cueur frémir ;
et briefment je n'en sçay que dire,
264;s si non que je doute et admire
qu'enfin ung grant mal ne nous vienguo,
mes au moins quoy qu'il en adviengne,
puisqu'il va en la croix mourant,
il fault pourvoir au demeurant
26440 pour l'expédier, qui pourra.
'CAYPHE
Devisez, et on vous orra ;
26371 Ha dur rain A. 26387 Vien tost manqueat C. — 26395 repprouue A. — 26399 mescliant B. C. — 26402
me reste B. C. — 26408 mesnoye C. — 26412 sauluer B. besongner C. — Ï6420 broquetiers C, —20421 mapplicquiers
C. — 26127 tormitiee A. — 26M1 Qui me fait tout B. Qui me font C. — 20441 oscoutera C.
TIKRGR .lOURNRR
345
Jhei'oboan, comptez le cas.
JHEnOBOAN
J'advij'c, siro Gayphas,
qu'il est par coustumo annuelle
80'iij nostre festo ti-es solennelle
(le l'asques que très fort gardon ;
si m'est ad vis qu'il n'est pas bon
a nous qui sommes les pasteui's,
que les corps de ces malfaicteurs
2C'i50 demeurent eu la croix pendus
ce sabat.
CAYPHE
Vos dit/, entendus,
vous dittes bien a l'abrégé ;
mes il nous fault avoir congé
do Pilate, nostre prevost,
2Ci55 et qu'il les aljrege plus tost
de mourir, si ne sont fines.
ANNE
C'est bien dit, or vous en venez ;
nous en allons tousjours devant.
fPoSE.]
Icy s'en viennent les pharisiens a Pilate.
CAYPHE
Sire prevost, le hault mouvant
20100 qui ce beau ciel gouverne et guide
vous envoyt conffort et aydo,
et veille accroistre tos honneurs.
PILATE
Que demandent ces bons seigneurs
qui cy viennent en nostre bostel ?
CAYPHE
2e'.fl5 Sire prevost, le cas est tel :
vous s(,'avez qu'a nostro requeste
trois gens de vie deshonneste
sont mis en la croix pour mourir :
si vous venons cy requérir
20470 pour éviter jjIus grant danger
qu'il vous pleust leur mort abréger ;
car ilz ont langui longuement
en leur croix a très grant torment ;
leur peine doit assés souffire.
20'.75 Et aussi vous sçavez, cher sire,
qu'il est nostre sabat et feste
que chacun sabbatize et feste
haultement en faisant devoir :
si seroit grant honte de voir
86480 leurs cor|)s la poser tout ce jour ;
et pourtant sans plus de séjour
envolez rompre leurs gcnoulx,
affin qu'ils meurent voyan» tous,
et puis seront ostés arrière.
Pll.ATE
2M85 Ti'es chers seigueui"», vostre prière
m'est commandement ; et pensez
que j'ai du desplaisir assés
du fait de Jhesus,' ce prophète,
ne qu'oncques sentence en fust faite ;
86490 je m'en vois beaucoup souciant,
mes en moy toujours conffîant
que me serez coadjuteui-s,
vrais amis et bons protecteurs,
s'aucun grief me souigt de ce fait :
864^ par vous j'ay fait ce que j'ay fait,
et suis content qu'ainsi demeure.
ANNE
Sire prevost, je vous asseure
que jamès jour plus n'en sera,
et quand la chose se fera
86500 qu'aucuns sa pai-tie tendront
ou que sa mort venger vouidront,
vous et nous de voloir commun
nous tendrons et serons tout ung
pour porter bende a tous vcnans.
PILATE
86505 C'est bien dit. Venez ça, sergens,
si ferez ung petit d'office :
allez vous en a la justice
atout douloires et cousteaux,
et desmembrez ces larronceaux
26510 comme vous en sçavez l'usagé.
BRAYART
Et .Ihesus, quoy ?
PILATE
Es tu peu sage !
escoutez quel butoi' veez cy :
tu le depeschcras aussy ;
il n'entend goûte, ce villain.
BRAYART
26515 Et si le dittes plu» a plain :
ainsi demande qui ni> scct,
el y en eust il trente et sept,
je les depescheray surpiez.
PILATE
Sus ! compaignons, marchez, marchez,
26'i51 vos ilitz entendus] soient des 'enJus B. G. — 86i56 si seront A. — 264SÏ eouper les A. erocquicr lenrs B. — Ï6483
douant tous A. — ÏG'iUO Que je... soullraiit B, — 30192 conducteurs B. — 204»3 Vrais ndjutours ot B. — 864M manque
C. — 2d500 Kt ([uaucuns .V. B. C.
S'iC,
MISTF. RR DR LA PASSION
26520 alloz luy tenir compaitmie.
ORILI.ART
Et moy la.
CLA.QUEDENT
Je n'y fauldray raie :
j'y porteray ma grant douloire.
GRIFFON
Rt moy après donc.
BROYEFFORT
Mi dieux voire,
la chose en vauldra mieux d'asaés.
LONGIS
20525 Messcigneurs, qui par la passez,
ou allez vous tout de ceste heure ?
BROYEFFORT
Sire Longis, Dieu vous secuoure !
qu'en voulez vous maintenant faire ?
nous allons au mont de Calvaire
2(i53n pour la mort de Jhesus haster ;
s'il vous y plaisoit transporter,
nous vous y tendrons bonne route.
LONGIS
Ah ! messeigneurs, je ne voy goutte,
vous le sçavez do temps ancien.
^R\YART
2(i535 Ne vous chault, nous vous menrons bien :
la voie y est très belle et plaine.
LONGIS
En vouidriez vous jirendre la paino?
et se grever ne vous cuidoie,
volentier prendroie la voie
26540 atout ma lance que je tien.
BRAYART
Cela ne nous grèvera rien
s'il vous y plest acheminer :
je me chargé de vous mener
et ramener se mestier est.
LONGIS
26545 Me demandez vous s'il me plest ?
mes très grandement vous supplie.
BROEYFFORT
Or cheminons.
LONGIS
Et je l'ottrie,
car des longtemps ay eu désir
de faire a Jhesus desplaisir,
26,">50 et se vous me donnez licence
encore luy feray je offence,
comment qu'il en doye advenir.
CLAQUEDENT
On ne le peust trop bien pugnir,
et comme ung meschant condam|)né
26555 on veult qu'il soit habandonné
a tout le monde en gênerai.
DISMAS
Helas ! que je poi-te ung grief mal
et une peine longue et dure !
ma vie trop longuement dure
26560 en ceste terrible misère ;
je demande la mort amere
qui mes regrés ne veult ouyr.
GESTAS
J'ay douleur tant dure a souffrir
que je ne puis mourir ne vivre.
BRAYART
26.565 Tu en seras tantost delivie,
fais bonne chère haidiement :
veez cy ton dernier .sacrement
de ceste heure tout préparé.
ORILLART
Assiezly ung coup bien serré
26570 qui le mette en son dernier point.
BRAYART
Va, va, ne t'en soucye point,
il en ara bien plus de dix.
GRIFFON
Et je depeschoray tandis
cest aultre meschant par deçà.
BRAYART
20573 Passez ça, ribauls, passez ça ;
vous n'aurez si bon os en cuisse
qu'on ne rompe, mes que je puisse :
veez cy mon instrument tout prest.
0ISMAS
Loué soit Dieu, puisqu'il luy plest
26580 moy mener a ceste fortune ;
ce n'est pas Dieu qui me fortune,
mais mon mauvais gouvernement :
je meurs a juste jugement,
j'ay très bien la mort desservye.
26585 Pour quoy, Jhesus, doulx fruit de vie,
26522 Je porte ma grant douloiiere C. — 20523 Et nous après B. mait dieu B. ■
pnpleroye B. C. — S6546 en prie B. en supplie C. — 26566 hardiment A.
■ 26537 vouldrez B. — 265.'S9 iny Irons.
TIRRCF. .10 II H NFF
3'i:
qui ton paradis rae promèf,
a cesto (liiro departio
n\oii nme en ta gai-dc coniiuet/..
HRAYART
Vous ne caquetoicz ja mes :
SfiSflO jambes n'arez qun je ne froisso.
CLAQLEUENT
Il a bien dos poires d'angoisse :
achetez en se vous voulez ;
le sang en raye do tous lés
jusqucs au plain de la niontaigni\
GRIFFON
afir>95 Kt cestuy cy, pelle il châtaigne ?
regardez comment j'y labeure.
OE8TA8
Ha ! maudit soit le jour et l'heure
que Dieu au monde mo fit naistre !
je no deusse pas icy esti'e,
S66no se ce misérable Jhesus
eust volu montrer ses vertus :
mes nennin, senshiy est failly.
et laisse mourir nous et ly
de mort honteuze et malheureo.
GRIFFON
iti60.i Ta chan, ligue est a mort livrée:
tu pers temps de braire si hault.
ORIIXAHT
11/ sont tous deux moits, autant vault :
il/, commencent a pipeter.
[PosE.l
HniiVKKFORT
Ça, lergctts, il nous t'ault hastrr ;
puisque ces deux mauvais larrons
sont depeschcs, nous les lerruns,
Î66Î0 et irons meurtrir ce .Ihcsus
hastivement.
HRAYART
Je m'y conclus ;
veez cy ina grande liesague
qui est bien tranchant et ague :
je l'aray ciocquio prestement.
GRIFFON
88625 Nostro fait est rompu.
HRAYART
Comment ?
tu en fais par ti-op l'esbahy.
GRIFFON
Jhesus est mort, regardez y :
l'ame luy est du corps saillie,
ce seroit a nous grand foUio
Ï6630 de luy casser i s ne jointures ;
laissons le a toutes adventures :
puisqu'il est mort, il nous souftit.
I.ONGIS
Oncques vivant no me meffit,
mes ncaiitmoins si ne plains je pas
266.S5 qu'il ait ore passe le pas ;
chacun dit que sa mort est bonne,
mes au cueur grant onnuy mo donne
que je n'ay sa mort provenu.
Auftbrt, puisque j'y suis venu,
88640 je vouldi-ay emploier ma voye,
car s'il est de vous qui m'avoyo
et veille ma lance conduyre,
ung coup ara affin qu'il nmyre,
s'il n'est mort de ceste heure cy.
Onil.I.ART
S06«5 J'en suis content.
HRAYART
Kt moy aussi.
Ça, venez, je vous conduiray,
et boutez fort quand je diray :
bien vous metti-ay, je vous proraès.
LONQIS
Suis je bien ?
BRAYART
Le mieulx de janiès,
geœ-O tout en droit le dextre costé.
LONGIS
Aussi y est ma volonté ;
tu n'as pas mal choisy le lieu :
SflCOl sa vertu B. C. — 2(>602 son sens est B. C. — S6608 pipoler B. — «ViU sublime A. — Î6681 lUstiuement
Je le veil et B. C. — 20020 trop fort B. C. — 26641 est mmviue C. — 2661S en bon «mai» B. en bi^n endroit C.
MICHEL
Cesto anie voiUdray emporter
26610 au lieu de gloire «îiUuminé
ou le doulx Jhesus a mené
ses amis pour les confforter.
SATHAN
Kt ceste vouldray transporter
au lieu do rago fulminé,
20615 ou le deablo est déterminé
de ses souldoiers torraenter.
Icy emporte saint Michel le bon larron au
lieu ou les prophètes sont, et Sathan em-
porte le mauvais larron en enfer.
348
MISTERE DE LA PASSION
or entre doncques de par Dieu ;
s'il vit, j'ay paour qu'il ne le sente.
BROYEFFORT
26655 Vous y avez fait belle sente :
le sang en descend a oultrance
tretout au long de vostre lance ;
tel coup fait Inen a ressongner.
LONGIS
Comment peut homme mort soigner ?
86660 je le tiens a bien grand merveille.
GRIFFON
La lance en est toute vermeille,
tant est couUo habondarament.
CENTURION
11 n'y a pas sang seulement,
mes avec le sang eaue clere,
86665 qui signifie aucun mistere
dont nous n'avons pas la science ;
et me samble eu ma conscience
que cest homme qui cy est mort
est injustement et a tort
86670 condampné a tel vitupère :
n'est si beste a qui il n'apperc,
les signes l'ont bien tesmoignié;
vray fllz de Dieu l'ay je jugié,
je l'ay dit et encore dis,
86675 quand le hault roy de paradis
monstre pour luy ces signes cy.
Mes gens, doppartons nous d'icy :
quand Jhesus et ces deulx regarde,
ilz n'ont mes que faire de garde :
86080 ilz sont tous mors do mort cruelle.
MARC ANTHOINE
Allons en porter la nouvelle
a Pilate, nostre prevost.
EMILItS
Mes qu'il l'oye dire tantost,
il s'en donra moult grant soucy.
Icy s'en reviennent devers Pilate,
LONGIS
86685 0 Jhesus, je te cry mercy
de tant que je t'ay offensé,
ne jamès n'avoye pensé
que tu feusses si haultc chose
comme Centurion propose.
26690 Tu es doulx et plain de clémence,
et en icelle confidence
le pur sang qui de toy dégoûte,
la chère et précieuse goûte
prendray et mettray sur mes yeux,
26695 espérant qu'il m'en soit de mieulx
et que ma veue se ravoye.
Ly reçoit veue,
0 Jhesus, vérité et voye
et salut qui point ne desvoye
pour tous pécheurs enluminer,
86700 Raison veult que louer te doye
car nagueres point ne veoie ;
or m'as voulu grâces donner
Et ta pitié habandonner,
quand ma veue destituée
26705 m'as rendue et restituée.
BROYEFFORT
Nostre besongne est achevée :
compaignons, pensons du retour.
Icy s'en vont les tirans devers Pilate,
JOSEPH d'Arismathie.
Charité et parfaicte amour
ne se peust tenir enfermée,
26710 mes fault qu'elle soit deff'ermee
et que doulcement s'abandonne
vers cil a qui elle s'adonne ;
pour ce le dis que loyalment
ay servy et celeemcnt
86715 le doulx Jhesus durant sa vie :
si ne le delaisseray mie
qu'a sa digne et sainttisme face
service apprès sa mort ne face
pour monstrer que son servant soye.
26664 1e maïuiue B. C. — 26668 i-e jliesus qui B,
A. si reuoye G. ~- 26714 receleeinent A.
Icy s'en vient a Pilate.
26720 Sire prevost, Dieu vous doint joye
et soit vostre honneur maintenu !
PILATE
Vous soiez le ties bien venu,
sire Joseph d'Arismathie !
Qui vous chasse en ceste partie
20725 maintenant si hastivemeut ?
JOSEPH
Le terrible esbahissement
des signes qui sont apparus
au point de la mort de Jhesus
- 26677 départez vous B. C. - 26685 te prie B. - 26696 manque
qui! tout cliacim craint et admire,
SOTM m'mlinaineiit devers vous, cher sii'O,
pour une i-cquestc obtenir.
PILATE
Joscpli, il convient la venir
que la chose s'est mal conduicto,
combien que j'en doye estre quictc :
Î6735 en riens coupable je n'en suis :
ç'ont fait ces envieux Juif/,
qui m'ont fait faiie jugement
de force et violentemeut
pour complaire a leur arrogance.
JOSEPH
267'i0 Quant au regard de l'excusance,
s'il est mort a droit ou a tort,
je n'en argue riens : au fort
Dieu scet tout, le juste jugeur.
PlIATK
Il est vrav.
JOSEPH
Poui' ce, monseigneur,
«6745 pour le peuple pacifier
je viens icy vous supplier
que si grant grâce me soit faicte
que le corps d'icelluy prophète
me soit ottroyé et rendu :
86750 de par moy sera deppendu
pour l'honneur d'humaine natui'e,
et puis mis en sa sépulture,
comme la loy a conunandé.
PILATB
Joseph, c'est très bien demandé
26755 et vous en sçay gré a merveille,
mes certes fort je m'esmerveille
se Jhesus est desja passé
et par mort oultre trespasssé
ainsi que vous le maintenez.
26700 Centurion, qui en venez,
dittes nous s'il est mort ou non.
CENTURION
Prévost, pour faire brief sermon,
Jhesus si a fine sa vie.
PILATE
Or ça, Joseph d'Aiismathie,
26765 pour l'onneui- de vostre parsonne ,
le coips de Jhesus je vous donne :
aile/, et si l'ostez Ijien tost.
JOSEPH
Vostre mercy, sire prevost.
TlKRCt: JOURNEE
tout surpic/. m'en vois abréger.
340
Î6770 Or Dieu me doint l)ien bcsongncr !
oncqucs mes je n'obtins requcsto
dont mon cuour si eust plus grant festc ;
quel bien puis je plus demander ?
NICOUEMUS
Joseph, Dieu vous veille garder
26775 de honte et de mauvais blasphème !
JOSEPH
Bien soiez venu, Nicodemc,
et receu a joye haultaine !
je cuide que Dieu vous admaine
pour moy conduire en ceste affaire.
NICODEMUS
26780 Comment va? qu'avez vous a faire,
qui vous en allez si en hastc ?
JOSEPH
Je reviens du prevost Pilate
devers lequel j'ay obtenu
de ravoir le corps de Jhcsu,
26785 et s'il vous plest ung peu attendra,
vous m'aydere/. a le despendre,
car tout seul fournir n'y pourroyc.
NICODEMUS
De la nouvelle j'ay grant joye,
cai' maint yver et maint esté
26790 j'ay son povrc disciple esté
secrètement, dont joyeux suis
s'aucun service faire puis
qui luy soit bon et acceptable.
JOSEPH
Querons le moyen convenable
26795 qu'il nous fault en ce fait avoii-.
NICODEMUS
Il fault premièrement savoir
en quel lieu le pourrons i>orter.
JOSEPH
De cela ne fault point doubler :
j'ay ung jardin bien jolict,
26800 assés près du lieu ou il est,
auquel j'ay fait, n'a pas gramment,
massonner ung beau monument
pour moy mettre et mes bon amis ;
ncautmoins oncq homme n'y fut mis :
Î6805 s'il y est, le premier sera.
20731-46 maniuiiit A. — 267'ili si-igneur C. — 267'.7 Allln que grao<> B. — 26753 on In loy est B. C. — itîTj5-6i maa-
i/uent H. C. — 26760 Vostru petiiioii vous B. C. — 20767 et len osIpz tanlost H. ostcrfl C. — 26771 roquesle jo neiii
B. C. — 26772 Dont uion eueui- feust au^sy joyoul.\ H. i-st aussi joyeulx C. — 26775 inauuai.'< blosiiie C. — S67U7 bou-
tiT ij. r..
350
MISTERE DE LA PASSION
NICOUEMUS
S'ou me ci'oist on s'advancera
do Ty mettre très noblement ;
veez cy la manière comment :
pour le saint corps ensevelir,
215810 Joseph, vous en allez quérir
ung drap ou une toillc fine,
de la meilleure dont on fine :
sera pour Tenvellopper ;
taudis, je me vois occuper
26815 pour acheter en quelques lieux
d'ongnemens les plus pi'ecieux
qu*on sache trouver pour finance
JOSEPH
Apportez en grant hahondance,
})Our le fait richement fournir.
NICODEMUS
26820 Laissez harcUment convenir :
combien qu'il m'en doye couster,
j'ay empcnssé d'en api)ortei*
si largement qu'il suffira.
lA MARCHANDE DE SOYE
Je pense que grant temps sera
26835 de mètre avant ma marchandise :
j'ay de toilles de mainte guise,
de sidonnes et de cendaulx,
soyes, satins blancs et vermaulx,
joyeuls et plaisans au regart.
JOSEPH
26830 Dame, nostre grant Dieu vous gail
et croisse chevance et honneur !
LA MARCHANDE
Hien viengnez vous, noble seigneur
vous fault il huy chose que j'aye ?
voulez vous fin cendal ou soye
2(3835 ou quelque aultre fine denrée?
voicy toile si bien ouvrée
que de meilleure n'est il point.
26808 J. Or dittes donc N- vo'icy comment B. C - 268^4-87 remplacés datxs A par les vers suivouts :
JOSEPH
Chacun de nous se reudera
mes quil ait fourni ses exploU.
justement aux pies de la croix,
pour faire nostre volonté.
.Mumyê, dieu vous doint santé!
monstrez moy ung beau drap de lin
le plus délie et plus fin
quon trouue large de trois lez.
viiiioNNi':
Puisque si riche le voulez,
monseigneur, certes vous larez;
36 cuide bien que vous direz
quoncques ne veistes tel quil est.
Or le desployons, si vous plest,
pour le voir du long et du large;
si verrez se (-est vostre charge
aftin que ja\ e vostre argent.
JOSKPH
Certes le drap est bel et gent
pour faire ce que ja y compris :
mamye, or me dites le prix
quil coustera, je vous en prie
VERONMK
Sire Joseph darismathie.
six deniers dor.
JOSEPH
Il Itîs vaull bien .
veronne, suns rabalre rien,
tenez, les veez la tout contint.
VK BONNE
Orjepry dieu omnipotent
qua tel oeuure les puissiez metlie
qu«n la fin dieu vous doint transmettra
en son règne celestiel.
NICODEMUS
Mon amy, le dieu disrael,
te maintienne en prospérité !
LESPICIER
Monseigneur, dieu vous doint santé!
vous plait il rien de nïon mcstier?
je vous seruiray volentier
daucunc^espece aromatique,
se vous voulez nardus, pistique,
flu baulme, odorant synanomme,
et si ay dongnoment grant somme
fais de myerre et dalloue.
NICODEMUS
De cest ongnement tant loue
il couuient que tu me deliures.
LESPICIER
En voulez vous beaucoup ?
NICODEMUS
Cent liureù
ou enuiron auoir men fault,
LHSPICIER
Vous serez seruy sans deffault
de ces oingtures souueraines :
veez cy deux boites toutes plaine.-s
de myerre et dalloues très fine ;
tenez, sentez a la narine,
monseigneur, silz nont pas bon goût.
NICODEMUS
Combien me coustera tretout ?
gy veil desploier mou trésor.
LESPICIER
Monseigneur, deux cens besaus dor
vous cousteront ces ongnemens.
NICODEMUS
Or tien, les voyla tout contans,
dedans ce sachet bien comptes,
LESPICIER
A vous, sire, hien men attens
quilz y sont comme recomptes :
quant vous plaist, si les conportez.
ces ongnemens tant précieux ;
le hault gubernateur des cieulx
vous les doint si bien emplier
quilz vous faeent multiplier
vos biens en pardurable gloire !
Cest pour faire oeiiure de mémoire,
puisque tant at:lit'tc en lia.
r 1 K R CK J O L R N E E
351
JOSBPH
Vecy qui ihc vieutbien a |H)iut:
que me coustoi'a ce gidonne ?
L\ .MA11CHAN[)E
26810 Celtes, inonsgeigneur, il se donne
pour dix bcsans d'argent content.
.lOSEI'H
C'est beaucop.
LA. MARCHANDE
Il cousteta tant,
ou je le vous donne on fin don ;
mais aussi s'il n'est bel et bon,
•■len'ij pour lo prix le mo rcndorc/.
JOSEPH
i'uisque l'ien n'en i-abaterez,
vêla vostre argent tout compté.
I,A MARCHANDE
•lo prie au roy de niajoslo
qu'il le vous doint a joye user :
Ï6S50 on ne vous en peust abuser,
la denrée est saine et entière.
on ue aauroit nniulx recouvrer
que l'ongnement que je vou» baille.
NICODEMUS
Que coustera tout ?
l'espioier
Ne vous cliaille,
ï687â monseigneur, je vou» congnois bien,
après vou» ne puis perdre rien :
je voy a vostre chlore active
que vostre besongne est liastive ;
aie/, ou vous ave/, empi'is,
mm et en tant qu'il toiichc du pris,
bien d'acort en serons tousjoui-s.
NICODEMl'S
Je m'en revoys doncques le couiv ;
niaistre, le grant Dieu vous avant !
.\ ce que je vois percevant,
«6885 [j'ay trop longuement séjourné :J
je voy Joseph la retouru",
et u'attent sinon après moy.
II'OSK.)
MCODEMUS
Se vous avez liqueur bien chiere
en fait d'ongnemens excellans,
liien flairrans et bien redolans,
26855 niaistrc espicier, je vous supply
que mon vouloir soit accomply,
et que m'en monstre/, largement.
1,'E8P1C1ER
11 fault savoii' premiei-ement
laquelle espesse plus louez.
NICODEML'S
26860 Je veil du mine et aloés
nieslés en ongnement décent,
bien quatre vins livres ou cent,
selon qu'on m'en fera raison.
l'espicieu
Celuy qui en prent grant foison
268*» en a meilleur compte par droit :
est ce cy ce qu'il vous fauldroit (
l'ongnement e?t de grant valeur.
.NICODEMLS
•le demande tout du meilleur,
et que j'en donne ce qu'il vault.
l'espicier
Ï0870 Tenez, vêla quanqii'il vous fault;
pour denier qu'on sceusist trouver.
Sire Joseph, comme je voy,
vous monstrez bonne diligence.
JOSEPH
*6S90 Nicodeme, il fault qu'on counnance
acop a faire nostre appreste ;
veez cy l'eschielle tonte preste,
tenailles de fer et martcaulx.
NICOUEMUS
I/Cs bras di^ la croix sont bien liaulx .
ï68»5 autrement n'y peut on avaindre.
JOSEPH
Ur i^a, il ne se fault point faiiidre :
je m'en vois a force de corps
aiTacher ces gros clous dehors ;
tenez vous ung petit plus bas :
26900 quand j'aray d.'scloué ung bi-as,
il vous convient forme tenir
de ce digne corps soustenii-,
affm qu'il ne chee par terre.
NICODEMUa
Il ne vous en fault phis l'equerre :
26905 j'y monstrcrai très bon devoir.
JOSEPH
Ce clou n'est pas bon a ravoir,
ne sçay qui si bien l'a fiché.
ÏSS43 rapportez C. — 26853 daournemens B. — 26857 iiionstriez B. — 26861 de cens C. — M880 f>i'i>w/i«« C.
rr«iil cours C. — 268.*5 iiw.if]iu- B. C. n'existe pus A. — 26888 comiiient v» A. — 2691* Je y (er»y C.
-26882 le
352
Ml STERE DE LA PASSION
NICODEMUS
Joseph, a ce que je puis veoir,
ce clou n'est pas bon a ravoir.
JOSEPH
26910 Que froide nuit puist il avoir
qui si fort l'y a ataché!
MCODE.MUS
Ce clou n'est pas bon a ravoir.
JOSEPH
Ne sçay qui l'a si bien fiché.
Auffort j'en ay ung depesché,
26915 mes vccy qui ne tient pas moins.
NICODEMUS
Il n'est pas si tost deffiché.
JOSEPH
Auffort j'en ay ung depesché.
NICODEMUS
Mes que cil la fust arraché,
il ne prndist plus par les mains.
JOSEPH
26920 Auffort j'en ay ung depesché,
mes vecy qui no tient pas moins.
NICODEMUS
La, tirez fort.
JOSEPH
Point ne m'y fains,
mes aussi devant soustenez.
NICODEMUS
Vous avez paine, je le plains :
26925 la, tirez fort.
JOSEPH
Point ne m'y fains;
il m'est avis que je l'atain ,
baillez moi mou marteau.
NICODEMUS
Tenez ;
la, tirez fort.
JOSEPH
Point ne m'y fains,
mes aussi devant soutenez.
NICODEMUS
26930 Je le tiens, or vous en venez
aux pies, et puis vous arez fait.
JOSEPH
Pour mettre nostre oeuvi'e au parfait,
je vois tirer le clou des pies
de puissance.
NICODEMUS
Ne vous faigniez,
20935 car le clou qui y est bouté,
je croy bien qu'il est vérité,
est terrible, grant et pointu.
JOSEPH
Je tirerai de tel vertu
que je l'aray ains que je fine.
NICODEMUS
209io 0 saint corps précieux et digne,
maint grant bien nous as prétendu.
JOSEPH
0 faulx Juifz et gent maligne,
pour bien mal luy avez rendu.
NICODEMUS
Toute sa vie a contendu
269'.5 le très doulx et piteux Jhesu
de leur donner ayde et conffort.
JOSEPH
Helas ! or luy est cher vendu,
car janiès ilz n'ont attendu
tant qu'ilz aient traictié sa mort.
26950 Le cueur me remord
de toy tenir mort,
saint corps honoré,
Qui pour nostre apport,
salut et depport,
28955 as tant labouré.
Ta noble ame cstoit ravie
et plevic
a Dieu souverainement;
Or es tu mort par envye,
26960 fruit de vie,
par injuste jugement.
NICODEMUS
Il ne se peust faire aultrement,
c'est fait, le conseil en est pris :
nosseigneurs ont par trop mespris
26965 qu'il osast vers eulx contredire ;
mes vrayement on peust bien dire
qu'oncques homme de mère né
ne fut si durement pené
qu'il a esté ains le trespas.
JOSEPH
26970 11 est clair, ne le voit on pas ?
le corps en porto les enseignes.
[POSB.J
NOSTRE DAME
Mes seurs et mes chères compaignes,
26908-9 nuiii/jtti'nl A. — 26912-3 manquent A. — 2ii0i6-7 mimquciU A. —26918 ce dou A. ocslu>- C. — 26920-1
munnaenl A. — 2692'i-9 maifiu,cnt A. — 26932 Je eroy bien quil tient fort X fait B. C. — 26933-4 maii'/uenl.B. C. —
•-0933-6 i.itcn-crtL-i B. C. — 20'J36 C^iiinie on peust cougnoistre en vérité A. — 2o944-6 mait'iucnt C.
TIERCE J 0 U R N E E
353
tirons nous ung peu vers la croi» :
il m'est advis que j'apperçois
20'j75 la Joseph Cl Nicodemus,
qui do Icallc amour pi'onius
dospeudont le corps de mon filz
s. JEHAN
Ma dame, il est vi'ay, ce sont ilz ;
j'en parle ainsi comme il me sanible.
MARIE JACOBY
2G980 Nous irons devers eulx ensemble,
mes se me créez sur ce point,
cherc seur, vous n'y vendrez point,
car quand despendre le verrez,
je suis sceure que vous merrcz
86985 le ducil amer et hors des termes,
et tel haboudance do lermes
que vostre cueur se fondera.
NOSTRE DAME
s'il plaist Dieu, ma seur, non sera ;
a mon pouoir m'entretendray,
26990 mes pour rions je no me tendray
quo mon fil/,, mou sang et mon gendre,
que j'ay nourri souof et tendre,
mon aray, de mes bienz le mieulx,
ne voye despendre a mes yeux ;
26995 je voil savoir qu'il doveudra,
qui l'ara, qui le retendra
et en quoi lieu il sera mis
de ses bons et leaulx amis.
Dieu, son père, m'a invité
27000 présente a sa nativité,
présente a circoncision
et a sa i)resentacion
au temple et digne receptoire,
pi'esente a sa vie notoire
270(S en amour et parfait soûlas,
et présente a sa mort, holas !
com dur l'emort et angoisseux
et oom tresperçant angoisse euz,
cueur do mère triste et dolente !
27010 et doncques ja Dieu ne consente
que fi'agilito d<! nature
me toile a vooir sa sépulture
et quo [iresente je n'y soie !
MARIE SAI.OMÉ
Suy vro la nous fault droite voye :
27015 elle y va sans i)lus prolonger.
MADEI.AINE
Riens ne l'on feioit altarger :
anu>ur naturelle l'v maino.
JOSEPH
Ha ! que co clou m'a fait de paino !
il estoit fichié si pai-font
27020 que la sueur m'en vient au front
de tii'cr et des traveulz foi's
que j'y ay pris.
NICODEMUS
Puisqu'il est hora,
c'est le plus fort do mes debas ;
n'y a que le poi'ter embas,
270Î5 qui noua sera assés grevant.
JOSEPH
Or descendez doncques devant,
et soustenez a toute force
vostre costé la.
NICODEMUS
Je m'efforce
de mon pouoir quant a cella,
27030 mes aussi soie/- sceuis do la :
emploicz vostre force toute,
il est bien besoing.
JOSEPH
N'aiez doubte,
je n'y serai pas cndormy.
NOSTRE DAME
Ça mon enffant, ya mon amy,
27035 ça mon trésor, ça ma richesse !
Rendez moy la seule iwssesse
que jamos au monde je quier ;
helas ! humblement tous requier
que je l'ayc do ma partie,
27040 et ja n'en face deppartie
de le baisier et accoller
tant que mon cueur se puist saoller
et ung bien petit resjouir,
pidsque de luy n'ay peu jouir
27015 vivant comme j'eusse voulu,
puisque vivant me fut toUu,
et violentement ravy,
ot mort sans l'avoir desservy,
au moins qu'a sa dolente mère,
27050 après celle mort tant amere,
son très cher cnrt'ant soit rendu.
JOSEPH
Nous avons beaucoup attendu,
dame: ensevelir le convient.
261)81 .Si' vous ne U. vous me C. — 26984 uiourrej! A. II. meure» C. — Î6985 de»] de C. — 26897 icmendra C. —27001
Il sa A. c. — 27008 iiitini/Hi; C. aii(:oisseux H. — 27021 de trnvaulx A. — i7024 a bas C. — ?7043 unu Unt soit peu
B. C. — 270'i9 ([lie sa A. C. ((ui sa U.
I'as.
i3
354
27055
MISTERE DE LA PASSION
27060
27065
27070
27075
27080
27^85
27090
27005
27100
on ne scet qui va no qui vient :
s'il vous plest-, vos pleurs cesserez,
et ataut vous en passerez,
tant qu'il soit mis en son sercus.
NOSTRB DAME
en tenant Jhesus sur son giron.
.Ihesus, mon cher enflant Jhesus,
m'aniour, de mon bien le seurplus
et riens plus,
qui tant plus
vivant a ta mère très chiere,
Mon bien, ma parfaicte lumière,
ma joye dernière et première,
las ! quel chiere,
quel manière
tient mon cueur plain de desconfort,
Quand j'ay perdu tout mou confort,
mon amy, mon fJz, mon deppoi't,
que tiens mort ?
fauke mort,
comment as tu eu l'hardement
De prendre mon filz seulement
sans moy tuer conjointement ?
maisenient,
faulsement,
tu t'es encontre moy portée.
Mon enflant, ma tendre portée,
tu me laisses desconffortee,
absentée,
desmontee
de tout bien qui me peust venir.
Helas ! mon très doulx souvenir,
jadis te souloie tenir
en désir
et plaisir,
au temps de ta tendre jeunesse.
Sur mon giron a grant liesse,
en regardant ta doulce espesse,
ton humblesse,
ta simplesse
qui de beaulté cstoit monjoye ;
Et la mille fois te baisoye,
en baisant mon cueur appaisoyo,
te pensoye,
te gardoye
moult songneusement, ce scet Dieux,
Tant que mère ne pourroit mieulx ;
las ! CCS baisiers ne sont pas tieulx,
roy des cieulx,
quand mes yeulx
te voyent mort de mort honteuse,
De mort terrible et doulouieuac,
et ta sainte char précieuse,
27105 vertueiise
et piteuse,
deschiree de tous costés.
NICODEMUS
Ma dame, pour Dieu escoutez :
vous voiez que la nuit approche,
27110 et ces Juifz, plains de reproche,
nous pourroient bien empescher ;
pour Dieu, souffrez nous depescher
d'enoiudre ce précieux corps.
NOSTRE DAME
Mes chers amis, je m'y accors,
27115 mais Dieu scet que c'est bien envis.
0 mon filz, ou sont les devis,
les doulx parlers, les très beaux ditz
dont tu me conffortoies jadis
pour mon povre cueur resjouir?
27120 helas ! or n'ay je peu jouir
de toy quand au monde vi voies,
ja soitce que tout mien estoies,
homme rien n'y pouoit clamer ;
ce m'est maintenant moult amer
27125 qu'après la mort et ce grief dueil
ne te puis tenir a mon vueil
pour passer ma dure destresse.
s. JEHAN
Ma dame et ma chère maistresse,
pour Dieu appaisez vos doleurs.
27130 et souffrez que ces bons seigneurs
parfacont ce qu'ilz ont empris.
Icy l'ennoignent et puis le mettent ou suaire.
MADELAINE
0 mon cher-maistre de hault piis,
descendu du souverain règne,
le plus parfait qui jamés règne,
27135 quel chose avez vous desservye
qu'ainsi vous voy privé de vie,
dont mon cueur veult de larmes foudre ?
Faulx Juifz, Dieu vous pui^t confondre!
pensez bien que vous avez fait :
27140 oncques ne fut vou tel meffait,
oncques ne fut euvye telle,
n'oncques hayne plus mortelle
ne fut monstree a creatui'e :
c'est vostre perverse nature
27145 qui jamès en paix n'a dure,
tant qu'il ait la mort enduré
27061 Que C. — 27068 a fort C. — 27070 Que] Et B. G. ^ 27075-3 Mauuaisiîineiit Et faulsseineiit C. — 271 IS tu rac
i-onsoloyes B. Dont ine soulojes [larlur C. — 27121-2 viuoys, estojb C. — 2712J pouoil- G. — 27141 mainjue C. —27142
Oncques ne fut liayue plus mortelle G. — 27146 Tant que cil a mort endure B. G.
TIERCK JOURNEE
355
qui onuquos ne l'a desservy,
dont enfin vous soro/. servy
(lo i)eine et terrilile vangencc ;
271M c'est nia tby, c'e^t mou esperanco :
que le croatcui' infiny
délaisse ung tel fait iinpuguy,
jamès croire ne le pourroye.
JOSEPH
Or ça, seigncui-s, chacun s'emiJoic
a7J55 de nostre besongne parfaire :
le corps est mis en son suaire,
enoinct tics précieusement.
NICODEMUS
Portons le donc au monument
doulcement par bonne manière ;
27160 levez devant et nioy derrière,
nous l'y arons prestement rais.
NOSTRE DAME
O mes très chers et vrays amis,
ne me hastez [loint de si près
mon entrant, car je meurs apprès,
27ifô si j'eslongne sa di)ulce face.
MARIE JACOBY
{Ihcre seur, il fault qu'il se face,
vous ne lo faictes que grever ;
pour Dieu soiiIVrez les achever :
ce qu'ilz font porte grant mistere.
Icy lo mettent dins le monument.
NO.^TRE DAME
ÏTiro 0 vray Dieu et éternel père,
qui de riens ciel et terre fis,
pourquoy me donnas oncques fllz
qui point ne te le demandoie,
quant sur terre fault que je soie
^7175 dosoUee de telz dejiors
qu'a tel desplaisir je te pers ?
0 saint archange Gabriel,
o message espiritucl
do la souveraine contrée,
27180 ou est celle joye notrec
que me promis en ton salut ?
il semble que peu me valut :
povrement treuve ta promesse,
quand pour liesse j'ay tristesse
î/isr» plus grande que femme vivant,
et est ma povre ame estrivant
a la mort qui ne la vcult prendre.
JOSEPH
Il est si bien qu'a tout comprendre
on ne l'y syaroit miculx poseï'.
NICODEMUS
miOO Volenticrs vous os proposer,
mes faulte y a eu nosti-e fait,
car encor n'avons nous riens fait
se le monument ne fermons.
JOSEPH
Vostre oppinion confermous :
27195 fermeture n'y convient querro
aulti-e que cesto grosse pierre :
tout justement y, fermera.
s. JEHAN
Vous dittes vray, mes tant y a
qu'elle est a merveille pesante.
NICODEMUS
87Î00 Nous avons force suffisante
assés pour l'y bien convoyer.
JOSEPH
Se chacun s'i veult employer,
nous en vendrons bien au dessus ;
or levez fort de la, sus !
s. JEHAN
Sus!
27205 Elle est presque bien en sa place ;
oncques mes nul jour que je sache
je ne levay si grant fardeau.
JOSEPH
Seurement elle est bien et beau :
nostre ex|>loit est bien abrégé,
47210 et atant nous pi'endrons congé
a ces vaillans daines et bonnes.
NOSTRE DAME
Discrètes et sages personnes,
messeigneuis remiilis de science,
de vostre bonne diligence
27215 vous remercions de bon cuew.
JIAUlE SALOME
Partons nous d'icy, belle seur,
vous et ces bonnes dames saintes,
et cessez vos cris et vos plaintes
au nom du haultain créateur.
NOaTRE DAME
«220 0 mon filz, o mon vray ducteur,
ou mon cueui' a son seul renvoy,
me fault il séparer de toy ?
27148 soiez B. — 27160 saur m^inque A. — 27175 de toutes para A. — 271S2 11 semble qui' pou niait vallu B. —
27197 seruira li. C. — 27198 vra^] bien B. C. — 87201-2 maiviuent A.— 27203 Pour un venii- A. — W207 leue A. U. -
27216 belle' .hierc B. C.
356
MISTERE DE
Helas ! quel départie amci'c,
quand celle que tu tiens a mcrc
27225 te laisse de la mort perçus
et rasolu en ton sarcus!
moult envis m'eslongno du lieu ;
je requier ton père, c"est Dieu,
que brief de toy nouvelle j'oye,
27230 et que brief mon cueur se rcsjoye
a voir ta résurrection.
MADELA.INE
Allons en nostre mansion,
ma dame, il est bon, ce me samble ;
et la nous conseillons ensemble
27235 de nostrp destresse grevaine.
NOSTRE DAME
Dévote dame Madolaine,
très bien je m'y veil consentir.
CAYPHE
Seigneurs, je vous veil advertir
d'ung point qui fort touche la loy :
27240 s'il vous plest venez avec moy,
deux mots vouldiay diie tantost
a Pilate, nostre prevost,
qui forment touchent nostre cas.
ELIACHIN
Nous ne vous délaisserons pas,
27245 mes vous suyvrons cy et aillieui's.
BARRAQUIN, huissiev.
Que demandent ces bons seigneurs
qui cy viennent en si grant haste ?
CAYPHE
Bairaquiu, monseigneur Pilate
est il bien foTt embesoingnié ?
BARRAQUIN
27250 Nenuil, mes il est renfifroignié
si qu"a pou qu'il ne pisse sang :
il est appuyé sur son banc
ou il est en sa fantasio,
et tellement se fantasie
27255 que depuis nonue no fina ;
je no S(,'ay que gibet y a :
LA PASSION
pieça ne fut si mal bailly.
ANNE
Pourrons nous ja parler a luy, •
seulement deux mots ? fais l'essay.
BAIlRAQtlN
27260 J'en fais grand double et si ne sçay,
car il est mallement fume
plus que je n'ay accoustumé,
mais au fort j'en foray devoir.
YSACAR
Aussi, beau sire, allez sçavoir
27265 s'on y pouri-a trouver moyens.
BARRAQUIN
Cher sire, ces pharisiens
sont icy a grant compaignio.
PILATE
Tay toy, beau sire, je t'en prie,
de leur venue n'ay je cure ;
27270 mau gré Jupiter et Mcrcui-e,
quant oncques je n'entremis d'culx !
BARRAQUIN
Harau ! comment il est cnieulx !
on n'osera tantost mot dire ;
et deust U ore euraigicr d'ire,
27275 si diray je comme j'entcns.
Monseigneur, entreront ilz ens,
ou se l'en leur donrra congié?
ilz ont la hors assés songié :
penssez ung petit sur cela.
PILATE
27280 Attendent ilz encores la ?
je l'avoye ja oublié ;
je suis tant merencolié
que je ne sçay que devenir.
BARRAQUIN
Que diray je ?
PILATE
Fay les venir:
87285 que Juppin en aist bonne feste !
BARRAQUIN
Ça, seigneui's, vostre place est preste
entrez ens, monseigneur l'ordonne.
27241-2 inail'jucHt A. — 272'i3 Jusque sur le [ireUDst bon pas A. — 2r2-i4 Kl nous ne B.
27246-S9 maii'jiu'dt A. — 27274 ore manque B. — 272S5 bouue] nulle C
. 27,
oueur bejrnin A .
TIKRCK lOURNRE
357
JHEnOBOAN
Nous luy clonuons l)eaiicop d'cssonno,
mes tout desservirons en fm.
CAYPHE
87890 Cher sire, le trosne divin
vous soit mansion pardui'ablo !
a vostre parsonno honorable
venons de rechief a refuge ;
mes pour Dieu ne vous poiso, juge,
872fl5 se poui" nous avez tant de peine.
PILATE
Venez au point qui vous admaine :
c'est assés inte rlocuté.
CAYPHE
Monseigneur, il est vérité
que pour le fait de ce Jhesu
27300 qui de la croix est despendu
nous est survenu en subit
comment eu son vivant a dit
que de l'heure que mort seroit
dans ti'ois jours rcssascitei'oit,
ï'Mj qui nous donne un très grant soucy.
PILATE
l'it bien, quand il seroit ainsi,
que voulez vous que je vous face ?
CAYPHE
Qu'il vous plaise de vostre grâce
nous baillier des gens esprouvés,
87310 des plus hardiz que vous avez,
lesquelz bien et songneusenient
voisent garder le monument :
nous sommes contens de paier
a chacun d'iceulx bon loior,
87315 mes qu'ilz facent devoir très bien.
PILATE
Quant a moi, je n'y entens rien :
pour quel cause a cecy pensez ?
ANNE
Cher sire, il y a cause assés ;
j'eiitens nostre maistre, je croi :
87330 il se double, aussi fay je, moy,
que les disciples de celluy,
qu'il a assamblé et cueuUy
grant foison, par malice aucune
ne viengnent par nuit a la brune
87385 l'emblcr, emporter et mu.icier,
et puis au peuple publier
et pi-escher de commun accort
qu'il est ressuscité de mort.
Or seroit ceste erreui- dernière
87330 pire beaucop que la première,
car tout le monde en luy croiroit
et en croyant nous laisseroit :
ainsi de riens n'aroit servy
la mort ou l'avons asservy,
87335 mes vendroit ceste occision
a nostre grant confusion
et de la sinagoguc toute.
PILATE
Se vous y mettez si grant doubte
que ses disciples ne s'assemblent,
87340 qu'ilz viennent de nuit et qu'ilz emblent
par malice que vous pensez,
vous avez des gardes assés :
prenez trois de nos chevaliers
des plus espars, des plus legiers
87345 qui en facent la diligence.
CENTURION
Se croire voulez ma science
et donner gaiges competens
tant que mes gens soient contens,
j'ay ti'ois chevaliers esprouvés,
87350 hardis et vaillans, gens trouvés,
qui ne quierent que telz hemees
et pnt fait grant foison d'armées
ou haultement ce sont portés.
JORRAN
Par vosti'e gré les nous prestez,
8735Ô vaillant seigneur Centurion :
tous ensamble vous en prion,
en payant haultement leui-s gaiges.
CENTURION
Ne me servez point de langaiges
pom- décevoir les compaignons.
MARDOCEUS
87360 Quoy qu'il soit, nous responderons
de les contenter piaincment.
CENTURION
Sy les arez donc prestement.
Or ça venez donc, Ascanus,
87888 de peine C. — 87805 tant de] de la B. — 87307 quon voua en B. C. — 27309 Prendre rhenaliers esprounei
n. C. — 87314 son B. C. — 87325 et le nous desiioyer B. C. — 87388 B et C ,ijoulent cm drux n'i-s : Qui nous porteroil
pranil enoombre C. Il dit bien si (rrant que sans nombre ; liuiemf les tfrn ^^33-6 prrrrilnnl 87389. — Î7360 res-
pondons A. 0.
358
MISTRRE DE LA PASSION
Marc Aiithoine et Emilius,
27365 ces bous seigneurs biep ontendez
qui vous pi'ient que vous gardez
le monument ou Jhesus gist ;
trois jours seulement, il souffit
qu'âme du monde ne le prende ;
27370 et faictes si bien qu'on leur rende
la dedans au bout de trois jours.
ASCANUS
Nous y ferons si bons séjours
et guaites si continuelles
qu'ilz en orront bonnes nouvelles,
27375 et deussions nuit et jour veillier.
MARC ANTHOINE
11 fault nos harnois babillier
et aboucler bien nos cuirasses :
prenons nos mailletz et nos hacbes
et nous en allons tous surpiez.
EMILIUa
27380 Nous sommes si bien habilliés
qu'il n'y fault pièce de ferraille :
allons nous en vaille que vaille
sur le lieu veoir que ce sera.
ASCANUS
Seigneurs Juifs, ung point y a,
27385 que j'ay cy tout par moy noté :
se le corps estoit ja osté
ou qu'on l'eust ravy de cestc heure,
le blasme nous tourneroit seure ;
toutefFoiz nous n'en pourrions mais.
CAYPHE
27390 De ce ne vous doubtez jamais :
pie a pié avec vous yrons
et le corps nous vous livreions
en son tombeau reallenient :
puis signerons le monument
27395 de nos seaulx ensiauble tous,
affin que pour vous et pour nous
n'y puist avoir decepcion.
RUBEN
C'est dit de bonne oppinion ;
or nous partons donc sur ce point.
Icy s'en vont les pharisiens avec les chevaliers
jusques au monument.
ANNE
27400 Nous sommes venus bien a point :
de doubler plus n'est ja mestier,
car vecy le corps tout entier
et le monument bien fermé.
CAYPHE
Or fault il qu'il soit confermé
27'i05 de seaulx et de signatures
(car on ne scet des adventures),
au moins qn'on n'y puist emblcr rien :
ung chacun y mette le sien,
et laissons ces bons seigneurs cy.
JOATHAN
27 '(10 J'en suis content.
YSACAR
Et moy aussi :
j'ay icy ma place assignée.
JHEROBOAX
La pierre est, je croy, bien signée;
il n'ystera pas, je suppose,
que nous n'en saichons quelque chose :
27415 bien les pouons laissier ainsi.
CAYPHE
Seigneurs, nous vous laissons icy
et a Dieu vous recommandons.
Icy s'en retournent les pMrisiens en teun
lieux.
ASCANUS
Or ça, mes enffants, or gardons,
que nous n'ayons point de repproche.
EMILIUS
27420 S'il y a villain qui ajjproche
ne disciple ne papelart,
je luy donray tel hatiplart
que le deable l'emportera.
MARC ANTHOINE
On verra qui vaillant sera
27425 et qui portera la baniere :
guaitez devant et moy derrière :
lune luit et la nuyt est pieste.
ASCANUS
Qui vouldra avoir sui- la teste
viengne cy, j'eserye chacun.
L ACTEUR
27430 Seigneurs et notable commun,
qui vous estes tenus comme unf/
peuple de rassize p>~udence,
Et avez sans moleste aucun
273S:l-'tlS mirt /!»■!«( A. — 273iS Le dv'ahle B.
27432 notable B. C,
•87122 tel harat C. — 27430 l'actkur] pbolooue finable B. C. —
TIRRCR .lOURNRR
:iô\)
entendu le fait opportun
27i35 de la parfaicte obédience
Que Jhesus tint en la présence
lie son père, quand mort souff'ry,
■mirez vous en ta pwiience
a laquelle pour nostrc o/fence
87'i'.û sa précieuse char ouffry.
Ci finerohs la passion
que par grant occupacion
avons par devant vous tnonstree ;
Dimanche avons intencion
CT445 que de sa résurrection
partie vous soit demonslree :
Prions a la vierge honorée
que si bien la nous doint monstrer
qu'en ta région bieneuree
«7*50 la digne face et décorée
de son fiU nous puist demonatrer.
Fin du tiers jour de la passion nostre
stigmur Jhisu Crist.
27'i'i4-6 manqui'itl A. — Ï7'i47 Piinnt n In A. - 274'i8 layons peu A. If nous B.
QUARTE JOURNEE
DE LA PASSION NOSTRE SAULVEUR JHESU GRIST
Prologue ou Adam, iiostre premier père,
nous obligea par sa meschance :
Resurrexi et adhuc tccum sum. David en eust bien congnoissance
Avant que façons mencion quand il prononça si serré :
de la hiulte exposicion 87iKj Astiteiiint rcgcs terre;
27/i55 du thcume de nostrc matière les Juifz, les Saduceens,
Qui sert a la déduction, les scribes et pharisecns
moyen et consommation se dévoient tous eslever
de gloire parfaicte et entière, pour Crist exillier et grever,
La hfiulte vierge tresoriere, 27490 lesqueh si grairt guerre luy firent
27'.GO Marie de grâce aulmonniere, qxCen guerroiant a mort le mirent ;
qui oncq a mal ne varia, et ce fut ce que vous moustrasmes
Saluerons par bonne manière le dernier jour que nous jouasmes
et en devocion planiere, joyeusemint unis ensamble,
en disant : Ave Maria. Ï74œ et comnteiisasmes,ce me me samble,
[Ave Maria. I comment Anne, le chien félon,
Resurrexi et ailhuc tecuin sum. traicta le doulx Jfu-su selon
Les paroles cy proposées rudesse et inhumaniti',
proffitablement exposées
peuent grandement proffiter,
et les volt jadis reciter
?7'i70 David, le psalmiste autentique, toute nuys sans avoir repos,
lequel en esprit prophétique 87500 et pour ataindre a son propos,
les vit, les proposa et dit au matinet a fadjourner
longtemps ains que Crist descendit vous le peustes voir admener
touchant sa résurrection, chiés Cayphe, la le laissèrent
87175 après qu'il eust fait mencion ou ses peines renouvellerent,
de la passion douloureuse 87505 car la fut il questionné,
et repprouche ygnomenieuse mocqué, batu et viUonné,
que le fih Dieu devait souffrir crachié son precieulx visaige,
et son précieux corps offrir nccusé pav faulx tesmoignaige,
27180 pour nous oster de la misère rt pui^ finabUment transmis
27'i52-584 iii.m'jruciK C. feuillet déchir,'. — 87460 maïuiue B. — 87471 esi)(!rit .^V. B. — 27477 iuhomineuse li. — 27487
ei; les B. — 27488 Deuoipiit porter et leuer B. — 27495 Et lina le jeu A. — ï7'.<,)G-5ÔO moit'iueiU .\. — XH^^ Sa rudesse
B. L'i pince des troix verx eAt Ini-tsée en bhinr R. -- 87501 a lailjouniee B.
362
MISTRRE DELA PASSION
27510 a Pilate pour estre mis
a la mort par terrible instance ;
après veistes la repentance
de Judas qui mal contendy
quant j^ar desespoir se pendy;
87515 après peustes considérer
Pilate très fort différer
de la mort du benoist Jhesus,
nonobstant les cri;! et aryus
que les Juifz lui obissoient,
27520 qui sa mort vouloir ne cessoient ;
après le fit Pilate bàtre
par mauvais tyrans trois ou quatre
pour euider Juif-- appaisier
qui plus s'efforçaient de noysier,
27525 mais avant peustes voir la mode
comment de Pilate a Herode
la paix fut faicte bel et bien
par Jhesus qui en fut moyen ;
de la femme Pilate aussy
27530 vistes la crainte et le soucy
dont elle print moult largement
pour doubte que ce jugement
ne fust rendu par son mary,
dont puis orent le ciieur marry ;
27535 après toutes dilacions,
si fortes opposicions
furent par les Juifz fermées
et tant de menaces formées
que Pilate comme contrains
27540 le jugea en lavant ses tnains;
puis le veistes sa croix chargier,
mener mourir a l'abregier
entre deux larrons tous infâmes,
plaindre et gémir les bonnes femmes
27545 sa doulce mère regreter,
ses amis moult fort lamenter
de leur maistre qu'ils ont perdu
dont leur cueur ont moult esperdu :
la fut le fil: de Dieu loué
27550 piteusement en croix cloué,
la souffry grans desrisions,
grans hontes, grans illusions
* et finablemen t mort amere,
voyant sa doulce et chiere m-ere :
27555 d'ilec le veistes despendv,
son corps en sépulcre estendu
par Joseph et Nicodemus
de vraye charité esm,us ;
lors fid le sépulcre signé
275C0 par Juifz au cueur obstiné,
et gardes a l'entour commis
pour la doubte que ses amis
ne s'i venissent assambler
par nuit obscure pour l'ambler ;
27560 ou chacun sergent laboura
et la nostre jeu demoura.
Or peiist donc feablement dire
le doulx rédempteur, notre sire :
■Mon peuple, j'ay pour toy souffert
87570 pour toy me suis en croix offert,
pour toy ay la mort endurée,
mon ame du corps séparée,
mon costé perde et fendu;
quand tu l'aras bien entendu
87575 et votilu en ton cueur fermer,
tu es bien tenu de m'amer
sur toutes les choses mondaines,
mes noti obstant toutes ces paines
a ton salut ires nécessaires
27580 que m'ont baillié mes adversaires,
contendens a ce point venir
pour moy de ta sorte banir
comme oublié, mort et transi,
j'ay fait plus fort : resuirexi,
27585 et primus dormiencium
vivo et adhiic sum tecum.
Or viens a l'exposicion :
apprcs la dure passion
que j'ay endurée sur moy,
27590 j'ay fait ma résurrection,
et encore suis avec toy :
ressuscité suis, et le croy,
et par ma puissance infinye
ay mon ame au corps reunie
87595 en vraye unité parsonnelle
par conversion immortelle,
car mon corps est gloriffiê
et de tous deffatdx expié
qui n'attent que monter en glore;
27600 neantmoins avec toy suis encore
par visitacion et grâce;
ne te lerray quoy que je face,
quoy qu'au, trosne tnon père soie,
que de gra-^e ne te pouri-oye
27605 pour toy conduire et gouverner
et finabliment admener
en mon royaulme perdurable.
27538 fermées B, — 27545 lamenter B. Nous suppIt*ons regreter. — 27555 veistes] peustes veoir B. — 87Ô5G Et son
B. — 27557 Ou Joseph et A. — 2755S A ajoute deux vers : Jhesus de la croix deppelijirent Et dans le sépulcre le
mirent. — 27559 Lors] La B. — 27560 les "juifz A. — 27561 mani/ue B. — 27502 douMe que ses bons B, — 27505 ser-
gent] garde .A, _ 27594 a mon corps A. remise G. — 27598 expire B. C,
Q n A R T R
Et puisque tant est pourfilahlc
tel résurrection havllnine
870)0 a iotalle nature humaine,
il est assés expédient
qu'après tel accomplissemciit
que nous avons fait ctj devant
en la passion descripvant,
87615 que sur elle nous arrestons
et subtilloment la traictons
selon qu'a Jhesu Crist plaira
et la science nous donra ;
et pour In traittier et déduire,
fitSd je pry Dieu qu'il veille conduire
tous nos entendemens, affin
que nous la puissons traire a fin
a l'honneur du très doulx Jhesu
et a nostre bien et salii.
srKX> La matit re en est bien joyeuse,
bien proffitableet fructueuse;
seigneurs, pour Dieu, or l'entendez,
quois et paisibles vous rendez,
et sur briefs moti de cueur entier
27630 tantost la nous verrez traittier.
ASCANUS
Ghevaliei's, seigneurs et amis,
vous sçavez qu'on nous a commis
a garder cestuy monument ;
[irenons y gai'dfî telloraent
que nostre honneur y soit saulvé
et le cori)s de Jhesus trouvô
dedans cette tierce journée
qui nous a esté ordonnée
pour le rendre et restituer.
MARC ANTHOINE
27040 Mieulx nous fauldroit faire tuer
qu'il y eust faulte de par nous ;
oniploier nous y devons tous,
car nostre honneur y pend très fort :
vous sçavez le terrible effort
de ces Juifz do put alloy
qui contre le dict de leur loy
l'ont occts par voye ilhcite ;
si donliteiit qu'il ne ressuscite
a leur grande confusion :
et ainsi par provision,
_ S7635
87645
27650
lOT'RNEE
lK)ur avoir leur chemin <lrc«fiié,
ce sont a l'ilato adreH^iô
qui onsanihle nous a livi-c»
pour gens vaillans et asseurés,
S76&5 renommés do proesse liaidte ;
et dont, s'il vient qu'il y ait faulte,
no8tre bon loz s'abaissera
et de tel heure ce sera
qu'a jamés serons delx)utés.
EMII.U!.S
27060 Marc, je croy que vous vous doublez,
qui nous faictes cy si grant compte ;
«o la chose si près vous monte,
il ne fault qu'escarrir la place.
MARd ANTHOINE
Emilius, sauf vostre grâce,
87605 ne me bailliez [loint ce tatin ;
je croy s'il venoit au hutin
ou il eust gens d'armes grant somme,
j'y vauldroyc aussi bien ung homme
comme vous, voyla mon record.
ASCANUS
27670 Sus ! mcsscigneurs, soyons d'accord,
il ne fault ja parler si hault :
chacun de nous vault ce qu'il vault,
on congnoist vos fais et vos ditz,
et se n'estiez hommes hardis,
27075 vous n'eussiez pas eu ceste charge
de quoy Centurion vous charge
au commandement du prevost.
Et consentiroye assés tost
avec vous, Marc Anthonius :
27080 chacun scct que celluy Gristus
avoit des disciples foison,
et dit on que de sa maison
on avoit dix ou douze au mains,
que ses jirivés, que ses germains,
27685 et encore a l'aydo d'eulx
en avoit bien soixante et deux
tous a luy comme l'on suppose.
Or prenons donc au pis la chose,
que tous ses disciples s'unissent
27690 et a gx-ant puissance veuissent
ouviir et rober le tombeau,
quel remède la ?
EMILIIJS
Parlez beau :
quand la chose en ce point vendi-oit.
laisser faire les convendroit,
.303
87610 larrestons li. — 27620 l'rii'Z dieu quil nous C. — 27628 puissions A. — 87027 or] car U. — 27689 Kt voulcntien
B. C. — 27(J39 restorer B.— 27645 ces faulx juifz A. — 27a5'i afferme!: B. — 87055 Et gens dune H. T.. — 87058 r«nera B.
l'e fera C. — 87607 il y eust li. — 27672 nous] vous C. — 87675 nestcs B. — Ï7i)76 vous] nous B. — 87680 cristus]
jhesns B. C. — 276*<7 Tous en son roininauii r-e suppose B. C. - 87690 oy venissent B. G.
364
27G95
27700
27705
27710
27715
27720
27725
27730
MIS T ERE DE
car c'est fait d'homme mal sensible
d'assaillir ce qui n'est possible,
car en fin luy en vient contraire;
n'y aroit que de nous retraire
devers les princes bonne alleure
pour leur racoinpter l'aventure
affin d'y poui-voir par grant seing.
MARC ANTHOINE
Et pour tant est il bien besoing
de penser a tous telz baguettes
et de nous tenir aux aguettes :
au moins, s'en le vient deff'ermer,
que nous puissions bien attermer
que ce n'est pas nostre pai'esse.
A.SCANUS
11 n'y ara pas si grant presse;
le corps, ce croy, nous demourra.
EMILIUS
On ne scet.
AiCANUS
Viengue qui pouiTa :
au point ou je nous voy assis,
mes qu'ilz ne viengnent plus de six
contre nous trois, c'est deux contre ung,
je croy tant de nostre commun
que nous les euvoirons pour bas.
MAKC ANTHOINE
Je ne s^ay du fait des debas
qui aroit la part plus mauvaise,
mes il ne l'aront pas bien aise
qu'il n'y ait ung bel espourris.
EMILIUS
Ces harnois cy sont ilz pouriys ?
ces salades nous siéent ilz mal ?
sont ces brancs a ruer lavai ?
sont ces espees vermoulues ?
ASCANUS
Ce sont armeures esmolues,
aussi cleres que fin argent :
preu, deux, et trois.
MARC ANTHOINE
Vive tel gent,
telz chevaliers, vaillans soudars 1
or viengne de ces papellars
cy hardiment demy douzaine ;
s'ilz eschappent maie sepmaine,
onoques je ne fus si dollant.
EMILIUS
Venir ? ilz n'en ont pas tallant.
LA PASSION
je croy qu'il ne leur en souvient.
ASCANUS
Comment qu'il soit, il nous convient
27735 garder que sommeil ne nous prende.
MARC ANTHOINE
C'est bien dit, chacun y entende
pour autant qu'il luy peut touchier.
JACOB, scribe.
Cayphe, notable princier,
le grant Dieu vostre honneur maintiengne!
27740 il est besoing qu'il vous souviengne
d'ung peu de chose survenue
qui de nouvel est advenue
et touche fort la sinagogue ;
et pour abréger mon prologue,
27745 vous sçavez que par nostre cnhort
Jhesus a esté mis a mort
et en la croix exécuté
par le moyen et volonté
de la justice criminelle.
27750 Or court maintenant la nouvelle,
tant qu'elle est a nous advertie,
comment Joseph d'Arimathie
l'a despendu furtivement
et mis en ung beau monument
27755 euoinct de myrro et d'alloué,
et brief il l'a autant loué
qu'il eust fait ung bien notable homme,
luy encore qui se renomme
mis en office impérial.
27760 Par quoy je dis qu'il a fait mal,
et croy que ne l'ignorez mie,
car homme mort en infamie
ne doit homme de bien toucher
s'il ne veult son bien empescher.
27765 Or est le dit Joseph venu,
a prins le corps et retenu,
tout sans nostre sceu et sçavoir,
par quoy je dis qu'il doit avoir
pugnicion sur toute rien.
MARDOCEUS
27770 Jacob, vous proposez très bien,
mes avant que nous concluons
d'ung tel fait, oyons et voyons
deux motz, car il y a danger
27696 Denuoycr B. C. — 27701 Pour leur ponruoir a leurs boas poins B. G. — 27703 tous manque B. — 27707 lacesse
n. lachesse C. — 27719 esprouue B. — 27721 mallettes B. G. — 27722 a val C. — 27724 vermolues B. — 27725 Aussi cler
que le bel argent B. C. — 277i6 Preuf B. C. — 27727 houspailliers B. houssepailliers C. — 27729 une douzaine C. —
27732 Venir voire ilz nont B, G. — 27735 preigne G. — 27751 diuertie B. G. — 27753 songneusement C.
Q U A U T E
(l'ung hoiniiic de bien Icdangor
27775 s'il n'y a caimu suffisante;
Josepli est parsonne puissante,
ung lionuno de bien et d'honneur,
et officier de l'cnipereiH'
des plus anciens de •ludce.
JACOU •
277S0 11 est vray, et la s'est fondée
ma raison, qui point ne deffault :
car de tant que l'omnie est plus hault,
et a plus grnnt bien cvocqué,
quant il chct qu'il a delinqué,
27783 sa pugnicion est plus griefve.
YSACAK
Vostrc raison est bonne et Ijriefve
et vient de bon entendement :
Josei)h a failly grandement
s'il a commis ce que vous dittes;
277W ce ne sont pas choses petites
a luy qui tant se loue et prise
do commettre une telle emprise,
se n'est par le congé de nous.
JOATHAN
Kt messeigneurs, que diriez vous,
27795 s'il fault que le lait se dcscueuvi-e,
se Joseph avoit fait cest oeuvre
par la licence du prevost ?
fust en publique ou en repost,
il m'est advis qu'il le peut faire.
YSACAR
27800 Non fait.
JOATHAN
11 fault donc qu'on declaire
les causes qui l'empescheront.
YSACAH
Tout surpiés bailliés vous seront
ainsi que je le puis entendi-e.
Je confesse quant au despendre
27805 que Pilate licitement
en peust donner congé vrayement,
voire a gens qui sont dessoubz soy
ne ne sont point do nostro loy,
comme sergens et gens d'office,
27810 bourreaux, exploitour.s de justice :
ceulx la doyvont exécuter,
pendre, deppendre et emporter;
mes a nous qui bien maintenons
la loy (jue du grant Dieu tenons,
27815 si no la devons viollor,
no nous en devons point meslcr ;
.1 O U K N E li
et s'il estoit necuessité
connue pour bien de la cité
ou pour quoique autre grant affaire,
27820 encor no le devons point faire,
si non par congé des recteui'H
des princes, des législateurs
qu'ilz ce voulsissent consentir.
Oi' veil au propos rovortir :
27826 Joseph de nostre loy se tient
et nostio ordonnance entretient;
si dy qu'il ne pouoit de fait
achever le fait qu'ii a fait
se n'estoit par nostre vouloir,
27830 et qui brief l'en feroit douloir,
on ne luy foroit que raison.
CAYPHE
J'entendz assés près l'achoi-son,
seigneui-s, qui vous meult a ce dire ;
mes poui- la chose miculx conduire,
27835 avant que j'en puisse ordonner,
ouyr vous vcil déterminer
s'il est rai.son qu'il soit pugny ;
et par le vray Uieu infiuy,
s'il est coupable sur ce pas,
27840 la mer no l'en laveroit pas
qu'il n'en ait sa pugnicion.
BA.NANIAS
Cher sire, soubz correction,
a bien le fait considérer,
on peust par droit délibérer
27815 que Joseph par ses mesprisons
convient pugnir par deux raisons :
l'une en tant qu'il a fait office
do gent de la laye justice
dont l'eu peust arguer sa famé
27850 puisqu'il despend ung homme infâme,
et encore que costc olFence
a commis sans nostre licence
et si pies du haultahi sabbat;
la seconde raison l'abat,
278OT et veil qu'elle soit exprimée :
car la commune renommée
a ja passé grand temps couru
qu'il est des disei|ilcs Jhesu
ses ceriinonies tenant ;
27860 il le montre bien maintenant :
chacun le juge qui l'entend,
car il n'a pas esté content
de l'avoir servy en sa vie
s'il n'a après sa mort ravye
365
27779 iifluaiicfz B. C. — 2779i) li.iles B. C. — 27798 ou eu reposl B. — 27806 voiii-meut C. — 27808 (jui H. C. — 27S2J
<:i:] si B. se C. — 27827 poniroit B. deflairo C. — 27828 le fait ne latTairo C. — 27849 eu glose, iiu-dessiu Ua mot faine :
.1. renouiiuee. A. — 27859 teuu U.
I
366
27865
MISTEKE DE LA PASSION
«7870
27875
27880
27885
27890
27895
27900
^7005
27910
sa char uiiu'to jus de la croix;
par quoy sans plus douliter, je crois
qu'il est de cculx de sa cordelle.
JORRAN
Quant a cela, la chose est telle
que Josi ph passé grant espace
a la ronoramce et la grâce
d'avoir ce Jhesus bien a main
et de luy faire soir et main
moult de services beaux et gens ;
et tant a luy comme a ses gens
il s'est monsti'é tousjours bien large:
par quoy s'on l'occupe et le charge
d'avoir failly en ceste clause,
je tiens que ce n'est point sans cause,
car il est ung de ses complice-.
NAA.S0N
Pour mieulx advertir ses malice»,
dont il y poust avoir foison,
il soit mis en bonne prison
par mon conseil très bien serré,
bien encepé, bien enfferré
tant qu'il n'eu saille de ce mois ;
lors s'il se voit en telz destrois,
il congnoistra de ces meffais,
lesquelz a perpètres et fais
au dommage de nostrc loy,
ANNE
Voire, mes je me doubte, moy,
qu'il n'en sourde sedicion
après la malédiction
que do ce Jhesus avons eue :
le peuple très fort s'en argue
et en font a part leur recort
que c'est sans cause et a grant tort
que Jhesus a pardu la vie
et que ("'a esté par envye,
ne la sentence n'est pas bonne;
mes cela ne nous toit ne donne,
car on ne peust, au fort aller,
aux folz deffendre le parler :
tousjours bavent gens en derriei'e;
mes je le dy pour la manière
que se ce Joseph faisons prendre
si brief, nous pourrions bien mesproudre
veu qu'il est homme bien cremeu
et que le peuple est tant esraeu
qu'il n'y a manière en son fait.
EUACHIN
Toutcffois fault il qu'il soit fait
et qu'il soit pris comment qu'il soit,
car brief s'on ne l'en pugnissoit,
maulx en pourroient venir grant somme :
n'est ce pas fait d'ung mauvais honune,
27915 luy qui est de nostre alliance
de nostre loy et cognoissance,
de soy allier a l'omblee
a ceste maudite assemblée
de Jhesus et ses compaignons
279i0 que toujours tant hay avons ?
Bien veult nostre loy despiter :
quand il a veu exécuter
cest homme cy par son malice
et mourir par vraye justice
2792J au gibet de la croix pendant,
l'a voulu estre deppendanl
et sans nous cvocquer au faire.
NACHOR
U se monstre nostre adversaire
comme on peust juger par ce iioint ;
27930 puisqu'a nostre ennemy se joint,
il ne se monstre pas amy,
mes ainçois se monstre ennemy
et est digne qu'on le pugnice
ou qu'a toujours on le banice
27935 de nostre congregacion.
CAYPHE
C'est doncques vostre intencion
qu'il soit prins a toute rigueui',
et comme ung desleal brigueur
soit pugny de prison cruelle ?
NATHAN
279i0 Nous sommes tous do la querelle :
qu'il soit prins tout présentement
et admené soubtillemont
loger par dedens nos prisons,
et alors que nous le tondrons,
27945 nous jugerons de son oifence,
s'il doit souffrir moit par sentence
ou sn la prison doit souffire ?
CAYPHE
Estes vous tous de ceste tire ?
n'y mest pardonne contredit ?
JHEROBOAN
27950 Nous ensuyvons ce qu'il a dit,
il n'y a celluy qui réplique :
puisqu'a nous grever il s'applique,
nous luy devons guerre mener.
JACOB
FaictcB le prendre et admener
27879 couiplices; discipli-s U. - 27880 aooinplir A. — 27881 a foison C. — 27923 son] sa B. — 27930 qua] que A. —
27932 se rend B. C. — 27933 bannisse B. C. — 27934 Et que ja;nais il ne se unisse B. G. — 27938 tel mauuais brigueur
B. très mauuais trompeur C. — 279-43 lojjie B. G. — 27916 lobtendrons K. — 27952 guerroier B. C.
Qb'ARTIi JOURNEE
?7W>3 tandis qu'il csl eu cesto ville :
la ooulpo est si oi'do et si ville
(ju'oii 110 l'on [xiiirioit trop [Higiiii'.
GAYPHE
Faictos moy mes sorgoiis venir
en assos grosse coniiiaigiiie,
i7960 et pour dimbto de l'escariuyi-,
faictes les armer uiig petit.
MAUUOCEUS
J'en feray a vostre appétit :
vos comuiand/- ne sont pas cliargeii».
367
aUBULU
Ou veri'a ja qui en ara
s'il HOU» fault vii-or a l'esquart.
Levez sus, bedeaux et sergeus,
279()5 courcux, piétons et godoiinaillo,
armez vostre timbre d'escaille,
si venez devers monseigneur.
BRUYANT
Je ne suis pas trop bien as.sour,
se je n'ay ma teste ferrée.
ESTONNK
27970 Qui que soit hardy batailleur,
je ne suis pas trop bien asseur.
DRAGON
Maleuidaiit, tu trembles de peur,
que tu as la gorge .serrée ?
MALCUIDANT
Je ne suis i)as trop bien asseur,
Ï7975 se je u'ay ma teste ferrée.
GLEl'LU
Puisque j'empoigne ma plommee,
je suis hardiz comme ung héron.
BRUYANT
Une teste est tost assommée,
I puisque j'empoigne ma plommee.
ESTONNÉ
27980 S'il convient qu'il y ait armée
Dieu scet quel butin nous aron.
MALCUIDANT
Puisque j'empoigne ma plomnioe,
L je suis bardy comme ung héron.
r DRAGON
Qui voudra, nous nous en iron
27985 devers monseigneur qui nous huche ;
nous sommes pris pour fere embusche
_ a tous propos, tarabara.
27090 Monseigneur, Dieu vous sauft et gard !
veez cy vostre gent assemblée.
CAYPHB
II y a notable assamblee
quand vous estes tous assanjblos ;
a vosti'c samblant vous samblez
27995 tretous eschappés de bon heu :
il le me samble.
ESTONNÉ
Voir a Dieu,
nous samblons ain.si qu'il vous plaist :
au fort ce qui y est y est;
je croy qu'on n'y a pris no mis.
JORRAN
SSOOO Ils no sont point trop endormis
et croy que s'il venoit au boire,
ilz aroient tantost memoiic
de recorder une leçon.
CAYPHE
Ça, soigneurs, vecy .la façon
28005 et la matière a quoy je vicn :
je croy que vous congnoissez bien
ung officier, ung gouvei-ncur
de nostre sire l'empereur,
nommé Joseph d'Arismathie ?
MAIXIUIDANT
28010 Je sçay bien en quelle pai-tic
il est de ceste heure présente,
et quant a moy, je me présente
de l'aller quérir, si le faidt.
BRAGON
.Nous le congnoissons sans dert'ault
28015 tretous ensemble sus et jus ;
c'est cil qui despendist Jhesus
et le niist en son monument.
CAYPHE
Tu dis vray, c'est il voirement,
et pour cause qu'il a failly,
2S020 c'est raison qu'il soit as.«ailly
pour mettt-e a execucion ;
si avons prins conclusion
que vous, sergens, allez grant erre
27900 cscreniie B. C. — 279()5 eocuiiiuiille C. — 27'.170 Mtilleur A. — 27070 jai hapiw A. — 87U77-8S iiKiii-jucnl A. —
27987 taribara C. — 279.^9 Je suis uiif? dangereux coquart A. — Î799e Or laissons ceoy de par dieu A. — HOW-ÏSOOl
manquent A. — 28005 Sergens « mou propos reuien A. — ÎSOi-4 11 eu ii parle bien et hauU B. C. — 88018 justement lî. C.
^ 2S02;i grant erre] bâtant A.
368 M 1 S T E K E
en la cité ou sui' la terre,
28025 ou que vous en arcz nouvelle ;
le prendre/! par bonne cautellc
et l'adnienez par devant nous.
GUEULU
Et après ?
ELUCHIN
Et, sire, est ce a vous,
que nous en devons rendre compte ?
28030 allez faire ce qu'il vous compte,
et puis retournez droite voye.
GUEL'LU
Pardonnez moy, je me jouoye
et aloye a la bonne foy ;
mais atendez vous bien a moy
28035 qu'avant qu'il soit heure de nonne
vous Tarez en propre parsonne,
ou jamès je ne vueil mangier.
NACHOR
Sus! soudars, allez abregier :
admenez le présentement,
28040 et vous maintenez tellement
qu'au peuple n'en soit mencion
pour doubtc de sedicion
qui tost se pourroit esmouvoir.
BRUYANT
Le fault il tant ramentevoir ?
28045 nous sçavons bien jusques a la. ■
Sus ! compaignons, qui l'a il l'a,
au jour d'huy est nostro journée :
alons m'en faire une traineo
et fuster lieux dru et menu ;
28050 se le faulx mastin est tenu.
Dieu scet qu'il sera pourbondy.
ESTONNÉ
On verra qui sera hardy,
s'il vient aux horions donner.
[Pose.]
MADELAINE
Helas ! bien doy grand dueil mener,
28055 et par tristesse démener
mon povro cueur qu'en pleurs se noyé !
DE LA PASSION
Qui pourra mon dueil extimer
et le grand courroux exprimer
qui tout mon corps trouble et dcsvoye ?
2S060 Moult me tarde que je te voye,
doulx Jhesus, vérité et voye
aux pécheurs et port de salu ;
Ta doctrine ensuivre soulo e
et toy oir quand je vouloie :
28065 helas ! maistre, or t'ay je pardu !
MARIE JACOBY
0 doulx Jhçaus, que feray
ou iray
a ma dure desplaisance ?
en ta deft'aulte niourray
28070 et chei'ray
en i)iteuse doleance ;
Jadis fug nostre espérance
soure et franche
pour nos deffaulx corriger ;
28075 or es tu mort sans doubtance :
ta puissance
ne l'a volu retarger.
MARIE SALOMÉ
Vray Jhesu Crist , proiihete saint et digne,
aux malades très sainte médecine,
port de salut aux périls de la mer.
Tu m'as nourry en ta sainte dqctrine,
et j'ay receu ta doulce discipline
que tout bon cueur doit fermement amer ;
Or t'ay i)ardu, qui forment m'est amer,
or t'ay pardu, n'y vault le reclamer,
dont j'ay tel dueil qu'a peu que je no fine ;
Faulce envye, qui tan fais a blasmer,
quand tousjours fais tes ministres armer
contre les bons et les poingz connue espine !
MADELAINE
28090 Seurs, de voslre grâce bénigne
oez, s'il vous plaist, ma raison :
pour faire des plaintes foison,
nostre cher maistre, a dire voir,
ne pouons trouver ne ravoir ;
28095 vous sçavez que la mort l'a piis
dont les Juifz ont tant mespris,
qu'il n'est bouche qui le sceut dire ;
mes pour honorer le bon sire
après sa moi't comme devons,
28100 puisqu'en vie ne le trouvons.
28024 Partout et que vous querez tant A. — 28025 Que de luy vous ayez nouuelle B. C. — 28026 Et puis par soubtille
A. — 28027" Prenez le et nous ladmenez A. — 280i8 Monseigneur ne vous souciez A. — 28029-34 mongiient A. — 28031
rauenez C. — 28035 Auant A. — 28044-53 remplacés dans A. par les quatre vers suàanls : Nous y ferons si bon deuoir
Que vous en serez bien eoulens Sus partons seigneurs il est temps Chacun pense de cheminer. — 28048 hayniee C. —
28051 prebojidy li. — 28056 cueur] corps B. Mon corps quant en C. — 28059 mon sens touclie et siniploye B. C. —
28060 manque B. C. — 28069 deffense B. — 28075 en grant constance B. — 2t079 maladifz B. — 28084 niest manque
B. — 28088 amer C. — 28096 les faulx juifz A.
QUARTIi JOURNEK
369
allons inVii de coimumis accois
oindre SDii très précieux corps
au saint «epulcre ou il est mis.
MAUIK JACOHY
Marie, je vous ai |)roiiiis,
28105 et aussi a fait nia seur ehcrc
do vous suivir en tel manière
qu'il vous |ilaira nous osmouvoir.
MAUIE SAI.OMÉ
Nous forons par 1res bou devoir
qu'il vous plaira que nous façons,
28110 et nous ensuivrons les façons
comme vous les deviserez.
MAUELAINE
Clierc sour, avec moy vendrez:
l)icnez vostrc boite chacune,
et vous fournissez de pecune
28115 pour acheter oiignemcns chiers ;
nous irons sur les cspieiei's
quérir ce qui est nécessaire
pour oindre le corps debouuaire
de Jhesus, nostre doulx seigneur.
MARIE JACOBY
S8120 Le plus brief nous est le meilleur :
allons m'en, que Dieu nous conduie !
[Pose.]
de quel/, jculz vous sçavez jouer ;
vostre pi'occ» est ja tout fait.
BRUYANT
Chacun congnoisl ja vostre fait,
vous no si'i'ez pas oul)lir'.
œiw Sus! compaiguous, qu'il soit lyé
par les |>oinga d'une bonne corde.
ESTONNÉ
J'en suis coûtent.
MALCIilUANT
Et je l'accorde :
il n'est point seuremcnt ainsi.
JOSEPH
Comment ! je n'entendz point cccy ;
88145 en quoy ay je peu tant nicsprcudrc ?
DRAGON
On le vous fera bien entendre
avant qn'il soit guaires d'espace ;
sus! sus! escarrissez la place,
il n'est pas saison de pi'cschcr :
Î8150 il fault le i)ays depescher
de vostre sanglante charongne.
JOSEPH
Veez cy douloureuse besongne
de moy si nidement tiaictier,
et feusse je ung mauvais meurtrier,
28155 si me grevez vou.*, ce scet Dieux.
OUEULl'
'Aussi ne vauls tu guaires inieulx.
28125
MALCUIUANT
Compaignons, menons chère lye :
veez la .loseph que nous querons.
DRAGON
Tu dis vray, tantost prcstz serons
pour l'agripper par son poui-point.
Ça, maistre, ne rebellez point :
faictes vous icy le gro.sbis ?
vous verrez par devei^s nobis :
passez avant Icgcrcmont.
JOSEPH rl'Arixriiathie,
28130 Messeignours, allez doulccment :
quel chose me demandez vous?
GUEULIJ
Vous le sçaroz a vos chers coutz
avant qu'il soit guaires plus tard;
Ivous estes ung mauvais paillard :
Ï8I35 ce scet on bien, sans plus huer,
Seigneuis, veez cy vostre adversaire :
regardez qu'on en vouldra faire
pour l'abréger tout d'une tire.
JOSEPH
2SI60 Gaypho, et vous Anne, beau sire,
est ce de vostre asscntement
qu'on me traicte si rudement
par (lovant vostre smagogue ?
CAYPHK
Josei)h, ne soyez point si rogue :
i»i(& il n'en fault ja si hault parler;
lions 110 vous en voulons celer
aflin qu'il n'y aist tant sougio.
Ouy, c'est do nostre congié,
et non pas sculonient de nous,
Î8170 mes par l'cnhortemeut de tous
2S101 I.yons nous de H. C. — 28102 Daler oiiigiire son digne B. C. — 2S107 pourinouuoir lî. C. — 28108 II nons
fault la rliose esinouuoir U. C. - 28100-10 manqu-iit A. — 28U1 Tout ce que A. — 28127 greliis A. grobis B. —88138
coups A.— 28135 parler C. — 28130 pas] bas B. — iSUi dacturd A. — ïSliS aourdez <le eesle C. — ÏS167 soit proloDgi»
' B. 0.
Pas.
370
MISTERE DE LA PASSION
les scribes et pharisiens.
JOSEPH
Volontiers orray les moyens
de quoy vous me voulez charger.
NAASON
Joseph, pour le cas abregei',
28175 messeignours les princes haultains
sont informés et bien certains
d'uug cas bien villain et bien ort
qui par vous et par vostre enhort
a esté de nouveau commis.
28180 On dit que vous avez desmis
et deppendu de la croix jus
le corps de ce mauvais Jhesus
que la justice avoit fait pendre :
cj n'est pas a vous a deppendre,
28185 comme il samble a mes bons seigneurs ;
et pour les faultes et eri'eurs
de vous qui sont désordonnées
et qui nous sont des or données
par très btlle infoimacion,
28190 vous en arez pugniciou
correspondant a vostre ottVnce.
JOSEPH
Messeigneurs, de vostre licence
vous m'orrez ung peu, s'il vous plaist :
je ne sçay pas s'il vous desplest
28195 de mon cas a si dure somme
que pour ensevelir ung homme
vous me doyez si fort pugnir ;
et a la vérité venir
je ne veil pas nyer le fait •
28200 moy mesme ne l'ayo fait :
je l'ay fait on propre pai'sonne
voire pour Dieu et en aulmonne,
comme en ayant compassion
de la piteuse passion
28205 qu'il a euduree et soutferte
sans inelFait ne quelque desserte,
comme l'en dit; je n'en sçay plus.
Et pour ni'excuser au surplus,
j'ay raisons en quoy je me fonde :
28210 des le commencement du monde
vous sçavez que nos premiers pères
ont tenu a bien graiis misteres
de baillier noble sépulture
au corps d'humaine créature ;
28215 de Seth avez leu, n'a cely,
comment jadis ensevely
noblement son cher pcre .Vdani \
28220
28225
vous lisez aussi d'Abraham
comment Ysaac et Ysmael,
ses filz, luy firent ung tombel
bien riche et d'apparence grosse,
en quoy y avoit double fosse
lequel au champ d'Esron assirent
ou quel après sa mort le mirent ;
de David aussi avez leust
que riche sépulture il eust,
et d'autres une infinité
qui leur notable parenté
ont décoré finablement
28230 par les enterrer noblement
et baHlier riche sépulture.
ELUCHIN
J'entendz que vous voulez conclure,
mes tout ne vault jias une amende ;
nous sçavons bien que Dieu commende
28235 que nos mors devons ordonner
et riches monumens donner
voire a chacun selonc son cas,
mes la loy ne commande pas
qu'ung homme deffait et infâme,
28240 mort en croix a très grand diffame
a la confusion de ly,
soit en ce point ensevely
que vous avez fait ce Jheeus;
mes deust avoir esté mis jus
28245 par bourreaulx et par gens meschan*,
et entrayné aval les champs,
bouté en terre comme ung chien.
JOSEPH
Messeigneurs, je l'ay fait pour bien,
pour honneur de nature humaine
et pour la fcste souveraine
de Pasque qui nous est présente,
en quoy n'est pas chose décente
qu'ung corps mort en croix demouiast,
que le sabbat ne violast;
et ne cuide en riens avoir vice,
car par licence de justice
du prevost a qui je l'ay pris
je l'ay lait.
JACOB
C'est par trop mespris,
et veil bien que vous soiez ;?age
28260 qu'oncques si très mauvais brassage
ne brassâtes en vostre vie.
ANNE
Vous avez la mort desservye,
28250
28255
28178 aci'orl B. C. - 28181 El jus de l.i croix despeudu B. C. — 28186 faulses erreurs G. — 28213 noble] nostre A. —
28214 de Ihuinaine nature B. — 28223 daffrau G. — 28225-6 leu, en B. G. — 28230 Par] Pour B. — 28214 deust] daust
" ^°ust B. peut C. — 28260 ouur.igo B. C.
Q U A U T K
Joseph, et la proue/, en gi'é ;
vostre cas et<t au hault degré
ïSios iiiig i)eu plus que vous ue pensez.
JOSEPH
De colla in'osbahis assés
que de mort doyve estre attern;
seulement d'avoir enterré
ung homme juste et innocent :
28270 quand il y en aroit ung cent,
si n'y chet pas telle amertume.
C.VYPHE
Joseph, c'est tousjours vo coustunie
de vous seivir de vos brocquars :
vous nous tonci! poiu- bien cocqunrs,
2S275 qui coulpables nous exprimez
d'ung houime que vous exstime/.
si très innocent que vous dictes.
JOSEPH
Se de la bouche y contreditte»,
vostre cueur nyer ne le peust ;
282S0 et ne sçay .se de riens vous nieus^t
l'eccUpse et les horribles signes
et merveilleuses disciplines
que toute la terre encourut
a l'heure que Jho.sus mourut :
28285 telz merveilles a grant foison
monstrent qu'il est mort sans raison,
quand toute nature s'admoit
a iilaindrc et doulouzei- sa mort ;
vous l'avez veu, vous le sçavez,
28290 très bien congnoisaance en avez,
et encor ne voulez gehir
qu'a grant tort l'avez fait niourii'
et passer ce destresseux j)as ;
mes plus, il ue vous souffit i)as
88295 de l'avoir grevé en sa vie,
s'encor par vostre rude envye
vous ne voulez nyer la terre,
nu i)ovre corps qu'on ne l'enterre :
et me voulez a mort livrer
28300 pour l'avoir voulu délivrer
de la croix après son trespas !
ANNE
Dea, Joseph, parlez par compas :
vous nous servez de gros lauguaige,
JOSEPH
Je dis vray et assés langue ay je
2S305 pour vous tcsmoiugner veriti' :
c'est par vostre infidélité
que le bon prophète est deftait ;
JOURNEE
oncques riens ne vous a mettait,
et tousjours vous l'avez hay,
«8310 et finableraent fut trahy
par vous, n'y vault le contredit.
CAYPUB
llaro! et plus dit et pis dit :
bon gré Dieu, venez ça, Bergen.s,
prenez le et le mcctez leans,
28315 boutez l'en bien fortes prisons :
janiès nostre loy ue prisons
s'il n'en ineui-t av^nt qu'il eschappe.
BRUYANT
N'ous estes mieulx pris a la trappe
qu'un viel rcgnard, oit pautonnier.
ESTONNB
28320 Je croy que maille ne denier
ne l'en sçaroit faire eschapper.
Chassez avant.
MALCUIDANT
11 fault frapper
dessus luy autant qu'on pourra,
ou aultremeut il deniourra,
2S325 car il y vient par trop envis.
JOSEPH
Dncques si graut rigueur ne vis
ne justice si très cruelle ;
et quand est a inoy, j'en appelle
a la court de l'imperateur.
JORRAN
28330 Allez tousjours, maislre docteur ;
on ot bien vos conclusions,
mes sauves vos bonnes raisons
vous aâ'ullerez la tournelle.
JOSEPH
O haultc puissance éternelle,
28335 vray gubernateur de justice,
tu vois la terrible injustice
dont a présent je suis servy,
et sans avoir riens desservy
mes tant seulement pour bien faire 1
28340 tu secs ce qui m'est ueccessaire :
confforte moy par ta morcy. ,
UHAQON
Malabriu, tien ce maistre cy
et le me loge la dcssoubz
détiens celle boite a caillouz :
371
î;S2()7 estrc Hitintjur C. — ZSStiH Sans plus pour 1(. L. — 28272 Josi-ph mati^iue C. — 28274 l)i<Mi a C. — 2^^^88 Pc faire
luleur a B. 0.— 28iyi gésir C. — 28296 Sapres (Jub sa mort csl rauye H. C. — 28299 EtJ Or A. — 28319 orl viiulx B. C.
- 28333 afflubcrea C . — 2!>338 le auoir C. — 28344 Dans cesto boite de .\. voulte C.
372
28345
MISTER P: de la PASSION'
et t'en tien seur, je m'en desrnès.
MALABRIN, geoUer.
Il no m'eschappei-a janiès
qu"il ne paie sa bien venue,
puisqu'il est de la retenue
et des habitaus de l'ostel.
GUEULU
28350 Pour toy dire, le cas est tel
que nos souverains citoiens
les scribes et pharisiens
l'ont très gi'audement mal en grâce :
garde donc comment qu'il se face
28355 qu'avarice ne te surmonte;
sur ta vie rend leur bon compte,
quand ilz le te demanderont.
MALABRIN
Le demandent quand ilz vouldront.
je le pense si bien serrer
28360 et si fermement enferrer
que jamès il n'en partira,
ou il fault dire qu'il sera
ung bon joueur de passe passe ;
et a celle fin qu'il ne passe
28365 hors des prisons sans m'appeller
ne qu'on ne puist a luy parler
ne le visiter jour ne nuys,
je vouidray très bien sceller l'huis
pour en estre plus sccur encore.
BRUYANT
28370 Puisqu'il est en ton oratore,
garde le au niieulx que tu pourras.
Icy s'en revont les sergens.
CAVPHE
Comment va?
ESTONNÉ
11 est mis la bas,
enferré de fers bien pesans,
NACHOR
Ce n'a pas esté a luy sens
i8375 d'impugner nostrc majesté ;
mes qui croira ma volonté,
pour le brassin qu'il a brassé.
le jour de la pasque passé,
villainenient il en mourra,
283S0 et puis en parle qui pourra,
car il n'en ara aultre chose.
CAYPHE
Soyez sceur que je le propose
et l'ay bien en intencion.
NATHAN
Ce sera demonstracion
28385 aux autres et terrible exemple
que nous, guberuateurs du temple,
avons puissance manifeste;
mes en tant qu'il touche la feste,
nous la lairrons passer ainçois,
[Pose.]
MADELAINE
28390 11 m'est advis que j'apperçois
l'ostel ou devons adrecier.
MARIE JACOBY
Je congnoy très ))ien res))icier :
il est vray, veez la sa maison;
il n'y a pas longue saison
28395 qu'il me vendit de l'ongnement.
MARIE SA LOMÉ
Pi'endre nous en fault largement,
mes seurs, et du plus précieux,
affin que le coi'ps du piteux
Jhesus soit doulcenient enoint.
l'espicier
28400 Ça, mes dames, vous fault il point
de mes denrées gracieuses ?
car j'en ay d'aussi précieuses
et d'aussi joyeuses a veoii'
qu'on sçaroit trouver pour avoir :
28405 veez cy baulme fin et loué,
veez cy de myrre et d'aloé
ongnement doré très décent,
et briefment j'en ay plus de cent :
vous y avez très beau choisir.
MADELAINE
28410 11 parle bien a mon plaisir ;
28346 Auant quil meschaiipe B. C. — 28347 11 me paiera 13. C. — 2S351-2 manquenl A. — 28353 Nosseigjieurs loiit très
A. — 28355 Que malioe B. G. — 28356 Mais en saiches rendre 13. G. — 28302-3 seara Des encliantemens belle masse 13. G.
— 28374 Je pensse quil cliaee aux fouans B. eourans G.— 283S3 bonne C. — 28389 ensois A. — 28398-9 très piteux De
jhesus en soit partout oingt B. C. — 28402 de très A. — 28403-4 maH'jucnt A. — 2S'jU7 Uigneur dore et très C. —
28408-36 )-cm2>lacés dans A par h's sept cers suivants :
tlourcz, mes dames, eomme il sent ;
veez la noble ongnemeiil, ce croy,
et fut pour oindre ung puissant roy
ou Icmpereur de tout le monde.
MADEL.VI.M,
Lodcur qui dicelluy redonde
nous trespereo jusques au eueuv.
Or nous dictes, mon bon s iu'neur
g i; A K T K
saichons se nous pourrons rions faire.
MAIllK JACOBY
Mon très chiei' ninistro (l('l)onnaire,
sans tenir si lonfçs parleniens,
monstrcz nous de vos oignemons
*S415 bien chiei-s et grande quantité',
car nous avons grant voulcnté •
d'y eniploior uiig très lion pris.
l'espiciku
Vous en aroz d'aussi liien pris
qui soit en ce monde, je croy ;
28'iiO et fust il pour cnoingdrc ung roy,
s'est il bien prcciculx et digne :
toneu, sente/, a la nai'ine,
si vous semblera sans mentir
ung paradis a le sentir ;
SS'.aT) si a tel oignement céans
que s'ung roy, prinee ou autre gens
en sont bien enoings «ne fois,
on les gardera plus d'ung mois
sans quelque putréfaction.
MARIE SALOMÉ
Î8430 Vêla une digne unction
qu'on doit bion garder on renchierc.
l'espicier
Aussi coustc elle pour bien chiere :
mesehans gens jamais n'en ont goutte.
MADEI.AINE
Ne nous chault combien elle couste :
Î8'i35 nous sçarons bien ou l'argent prendre ;
mais dictes nous sans plus attendre
quel argent de nous vous arez,
et ces ti'ois boistes emplirez
de cil qui est de piis plus hault.
l'espicier
ssv'iO Le seurfaire riens ne vous vault,
tout a ung mot je vous diray :
vos trois boittes vous enipliray
pour cent besans, sans riens laisser.
MARIE JACOBY
N'en pourroit on riens rabaisser ?
284'iD cher raaistre, soiez nous bognin.
l'espicier
En loyaulté, dame, nennin ;
oroiez que je n'y gaigne guaire,
et se pour moins le pousse faire
vous n'en iriez pas escoudites.
MARIE SALOMÉ
28450 Or avant! puisque vous le dictes:
veez la vostre argent tout content.
.1 0 IJ R N K K
l'espicier
S'il vous en faiilt cnourc autant
après la fin de cestuy ci,
venez moy voir.
MADRLAI.NB
Vostre mercy :
' iSKf) si nous en faiilt, noii.s revendrons.
Or ya, mes seurs, considérons
quel chose avons a besongner.
.MARlIi SALOMÉ
Nostre fait est d'aller songner
de mcctre gentement ap|ioint
28400 ces fins ongiKnnens.
MADELAINE
C'est le iM)inf,
et regarder qu'il nous fauldra ;
et si tost que le jour sauldra,
au monument nous eu irons,
MARIE JACOBY
Vostre bon conseil ensuyvrons,
28465 et sera de nous deux tenu.
Jcy vont mètre apoint leurs oignemens.
8. JAQUES ALPHBY
Vray Dieu, que m'est il advenu ?
qu'est mon cher maistre devenu,
Jhesus, tout mon affection ?
Qui m'a mon seigneur retenu,
88470 qui long temps m'a entretenu
en vraye consolacion ?
0 pute et faulce nacion,
.luifz, plains d'obstinacion,
quel rigueur avez maintenu
Î8475 D'avoir livré a passion
vostre roy sans compassion,
par vous mort en la croix tout nu ?
O faulce gent et nephaire,
preste a faire
Î8480 tout mal et iniquité,
as tu osé tant meffaire
que deffaire
le juste plain d'équité ?
Cueui's plains do crudelité
373
28420 manque C. — 2S438 boiietes C. — 284:tfl-40 De cpst ongncniput noble et .li^Mif Lespii-irr En vente dame b«ui-
gne A.— 2844(1 vérité B. C— 28449 irez A. B. séries G. — 28454 «dieu vous dv A. — 28458 penser C. — 2S465 trei bien
retenu B. — 18470 endootrine C. - 28473 Foulx juifz A. — Ï84ï3 en tel eruaiilte li. C.
37'.
M I S T R R I'. n F. L A P A S S I 0 N
28485 et durté,
luy rendez vous tel salaire
que pour monstrer vérité
a porté
la mort qui plus doit dcsplaire ?
RU BEN
28490 Jaques, cher frero débonnaire,
cessez vos lanieutacions ;
tels dueilz et telz afflictions
bien souvent, qui n'y remédie,
sont cause de grant maladie
28495 et d'inconvenians bien grans :
ne sciez donc point si engraus
de vous en telz pleurs esmoiivoir,
qui vous pourroient promouvoir
en maladie très grevaine.
GEDEON
88500 Beau frère, il vous fault mettre paiup
de vous ung peu reconforter :
l'omme ne doit jamès porter
tant de dueil en son cueur exprès,
qu'il luy en soit de pis apprès
S8&0& ne dont il puist blecier sou sens.
s. JAQUES ALPHEY
La plus grand douleui" que je sens
est quand me vient en remenbrance
que je poi'toie sa samblanco
de sa doulce face vermeille
28510 si très proprement que merveille :
et estions tout d'une estature
et cousins germains par nature :
or ont ces faulx Juifz ouvré
tant qu'ilz l'ont a la mort livré
28515 sans cause et très injustement.
NEPTALIN
Pour pleur ne pour gémissement
que vostre cueur puist recorder,
ne pouez sa mort retarder ;
c'est fait, le conseil eu est prins,
28580 mes s'ilz ont bien fait ou mesprins,
ilz le trouveront en la fin.
RUBEN
Ilz sont plains de couvert venin
et de mauvaise ypocrisie,
car soubz l'ombre de sainte vie
285S et par une fainte justice
ont trouvé le plus grant malice
dont jamès homme s'advisa.
s. JAQUES ALPHEY
0 Jhesus, moult peu te prisa
ceste gent terrible et mortelle,
28530 que de toy livrer a mort telle
sans loy et sans riens confesseï'.
GEDEON
11 convient vostre pleur cesser
et prendre ung peu rcfl'cction :
chacun scet bien l'exactiou
28535 a quoy ilz l'ont voulu conti'aindre ;
mes se tousjours le voulez plaindre
et tousjours tristesse endurer,
celtes vous n'y pourrez durer ;
vous l'avez grant pièce plouré
28540 sans mengcr, c'est trop labouré :
au moins prenez quelque substance.
s. JAQUES ALPHEY
Ghers frères, créez sans doubtanco
que le boire ne le manger
ne pourroit mes deulz allogei-,
28545 tant en ay, Dieux en soit loué:
et de fait j'ay a Dieu voué
que jamès je ne mangeray
jusqu'à tant que je le verray
ressuscité devant ma face.
NEPTALIN
88550 Auffort vostre vouloir se face ;
vous avez doncqucs vray espoir
qu'il ressuscite, et de le voir
briefment par divine puissance ?
s. JAQUES ALPHEY
J'y ay si pai'faicte espérance
28555 qu'on ne m'en pourroit remouvoii'.
RUBEN
Dieu nous en doint briefment avoir
nouvelle qui soit poni-fitable.
Jcy est S. Pierre en la fosse tout par soy.
s. PIERRE
O fragille homme et variable,
des meschans le plus misérable,
28560 ou est ton cher maistre envoyé,
Jhesus, le doulx et amiable,
qui t'avoit si très agréable ?
pourquoy ne l'as tu convoyé ?
Ton cueur doit bien estre ennoyé,
g85fô en pleurs et en larmes noyé
pour sa grand douleur importable.
Quand si tost as esté ployé
28497 duelz G. — 2S503 exprès] porter G. — 2S504 Qui luy en scet A. n supporter G. — 2SM0 qu.i mor.ioiUe A. — 2S51i
tous a. C. — 28513 maudis A. — 2S526 la plus G. — 28535 ont A. — 28538 pourriez G. - 28510 et fort laboure B. C. —
2S534 fiance C. — 28555 desmouuoir B. C. — 28558 fraille C. — 28564 auoye B. C
que par trois fois l'as rognoyé :
doulx Dieu, soies nioy pitoialtle.
8*570 0 Jhosus, vraie sa|jieuco,
j'ay envers toy coniiiiis oH'cuso
laquelle nuit et jour recordo ;
Je t'ay laissié par négligence,
dont j'ay blcssié ma conscience
8S575 et me tient peehié de sa corde ;
Mes en toy est miséricorde,
laquelle tous pécheurs concorde
a ta doulce benivolence ;
Se désespoir ne me discoi'de,
«8580 j'ay bon espoir qu'il me raccorde
a toy par vraie confidence,
•l'ay souftei't par grant pacience
en Cfiste fosse longuement
en plorant très amèrement
88585 sans manger ne prendre pasture
pour la douloureuse avanture
qui m"a nouvellement sourpris.
Partir me veil de ce pourpri»,
assés y ay fait stacion ;
88590 par pleur no lamentacion,
ne par regret que sache faire,
mon très cher maistre débonnaire
nullement ravoir no pourroye.
Pourtant je me veil mettre en voye :
28595 j'iray mes frères visiter
losquelz me pourront conffortor
dp. mon douloureux dcseonffort;
car homme seul n'a nul confibrt:
s'est bon que sui- sa douleur forte
ïSfiOfl il quiere qui le reconfforte.
Mes chiers frères doncques querray
ne s<^^ay ou je les trouveray
n'en quel pai't ont leur tabernacle,
se ce n'est au lieu du cénacle
28S05 auquel .Ihesus sa cène fit.
// s'en va.
[Pose..!
Loué soit le doulx .Icsu Crist
qui de sa grâce m'a mené
si très bien que j'ay assen(;
di'oit au lieu ou mes frères sont :
SSfitû il m'est advis que grand dueil font
QUARTE.IOURNEE
de nostrc maiotre comme moy.
375
|F08E.1
Frères, Dieu vueille vostrc amioy
convertir en parfaictc joye !
s. ANDRY
Pierre, Dieu nous doint trouver voie
28815 par quoy nous soyons resjoy»,
car nous sommes Ai très merris
que ne sçavons quel part tourner.
s. PIERRE
Mes frères, bien devons mener
grand dueil et graus pleurs démener
28020 quand nostre fait bien considère ;
Quand cil qui nous souloit donner
doctrine et reffcctionner
nos âmes par divin mistere,
Est mort en si gr-ant vitupère ;
88825 or demeurons nous cy sans père,
sans pasteur pour nous gouverner ;
■ II. n'est ducteur qui nous appere :
si doublons que, ne le compère
nostre amo avant le deffiner.
8. ANDRY
28630 .Ihesus, or es tu pai ty
et verty
hors de nostre compaignie ;
en quel lieu n'en quel party
es sorty,
28635 nous ne le congnoissions mie :
Si menons dolente vie
et ravye
en telz lamentacions
que par deslealle envye
28640 qui devye
as souffert tclz passions.
8. JEHAN, l'evangi-listt-.
.Ihesus, nostre bon conducteur,
nostre maistre, nostre pasteur,
que si long temps avons servy,
886'i5 luifz t'ont monstre leur vigueur,
et ont destendu leur rigueur
de t'avoir a mort asservy,
Eulx que tousjours tu as servy,
de bien et d'houneui' resservy,
88650 comme leal prédicateur :
Or t'ont de vie descvrv :
28577 péchez C — 28594 me inett ay a la B. C. — 88619 plains C. — 2s625 demourra nuslre repère B. C. — ÏSOaj
gouuerneur B. — 88(i?8 double A. —28648 que] qui A. C. lu] les A. B. C.
376
MISTERE DE LA PASSION
lielas ! qu'avoics tu desscrvj',
quand pour bion portes tel douleur ?
s. JAQUES ZEUEDEY
Noua plaignons en ton absence
28655 ta présence
que plus no poons avoir,
et plorons sans arrestauce
la sentence
que t'avons veu recevoir ;
28660 Nous poons bien concevoir
tout pour voir
que nul/, lions qui janiès dure
ne se pouri'oit promouvoir
pour avoir
28665 peine plus terrible et dure.
s. HERTHELEMY
Quand jadis avec nous régnas,
doulx Jhcsus, tu nous gouvernas
si bien et si paisiblement ;
Si douloement nous ordonnas
28670 et ta doctrine nous donnas
qui est de tout bien fondement ;
Or demourrons piteusement
sans chief et sans gouvernement
en doubte du faulx Sathanas
£8675 Qui nous peust grever grandement
et blessier iiostre entendement,
se de nous compassion n'as.
s. THOM.iS
Gens la plus flore du monde,
toute immonde,
28680 quel horreur avez vous fait?
faulz Juifz, Dieu vous confonde !
vostre fonde
a bien l'innocent défiait
Le plus saint, le plus parfait
28685 en son fait
qui jamos on vous se fonde :
si convient que tel mefFait
tout mal fait
Bn vostre teste redonde.
s. SIMON
J88690 O gent a tout mal ordonnée,
que maudite soit la journée
qu'envye ton sens retourna.
Quand nostre lumière donnée
dont nostre anie est enluminée,
28695 par toy de nous se destourna !
Jadis il nous enlumina
et la gloire détermina
de la haultaine jubilee ;
Nostre bien oncq puis ne régna
28700 ne nostre foi lumière n'a
puisque tu l'as obnubilée.
s. JL'DE
Gomment s'enflame courage
de tel rage
comme ces Juifz maudis,
28705 quand ung homme juste et sage
tout son aage
leur monstre beaux fais et ditz.
Sans leur porter contredis
ne mesdis
28710 mes très utille language?
comment iceulx interdis
si hardis
firent faire tel oultrage ?
s. MATHIEU
C'a fait cnvye la fetarde
28715 qui toute bonne oeuvre retarde
et jamès ne songe que mal.
Qui janiès a bien ne regarde,
mes tousjours rancune en eueur garde
meue d'ung vouloir desleal.
0 Jhesus, pasteur cordial,
qui du liault ciel impérial
descendis pour nostre avant garde.
Quand en ce misérable val
fus no ducteur especial,
de nos ennemis n'avions garde.
s. PHELIPE
Or remaint nostre assamblee
ainsi comme la gallee
esseulleo
sans gouvernail sur la mer ;
287,'iO Ce inonde est bion mer sallee :
a la longue et a la lee
grand niesleo
de ventz y peust on sommer ;
Fortune y veult droit calmer,
28735 et si fait fort reclamer
et nommer •
sa très variable allée;
Or nous y veust comprimer,
et n'y sçavons reprimer
287'éO ne rimer,
car nostre guide est fallee.
28720
28725
G. —28631 Pour tout voir C. — 28681 Maudis A. — 28691 la maniui' C. — 28695 Est par toy
, — 28700 Ne] Quî B. G. - 28710 prouffltable eniiort B. C. — 28711 assourdi/ B. C. — 28713
28657 résistance B. G.
morte et retourna B. C. — 2S7UU -Nej yuj b. g. - ÏS710 proutHtable eniiort B. C. — 28711 assourdi/ B. C. — 28713
Que de auolr mis a mort B. G. — 2S72I ciel"] lieu C. — 2872i nostre A, C. — 28728 Exillee .\. — 28738 expri'iier A
88741 allée C.
g i; A R T !•: jour n i-; k
28745
28755
S. ANDRY
Puisque la chose est la tournoo
pt tjun l'a voulu Dieu ainsi,
par [ileurs no par quelque soucy
certes ne le poons avoii'.
s. JAQUES ZEBKDEY
Certes, Amlry, vous dictes voir :
riens n'y vault ne plorer ne plaindre,
combien que je no m'en puis faiudre
toutes les fois qu'il m'en souvient.
s. IlERTHELEMY
SST^O Or, mes frères, il nous convient
icy secrètement tenir,
et pour nos vies soustenir
ensemble nos inestiers ferons,
jusques a tant que nous orrons
aucune joyeuse nouvelle.
s. THOMAS
Vostre raison est bonne et belle :
no«s le ferons très volentier.
s. MATHIEU
En tant qu'il touche mon mostier
qui estoit de change et de compte,
quant est a moy, je n'en tien compte :
jamès je n'y retourneray,
mes volentiers vous ayderay
on vosti'e besoing et affaire,
soit a prescher ou soit a faire
quelque mestier que vous vouldrez.
S. SIMON
Avecques noua donc vous tendrez,
Mathieu, nostre frère très cher,
et vendrez avec nous prescher,
s'il est besoing pour nostre vie.
s. JUDE
A cella nul de nous n'obvye :
chacun est tenu d'y penser
s. PHELIPE
Premier, nous fauldra conunaucer
en nous tenir en oroison
sans vuidier de nostre maison,
pour double de ces fnulx Juifz
desquels nous sommes tant hays
qu'ilz n'en peuent oir parler.
.s. AN DRY
Il est bon de nous recelei'
pour double de peine encourir :
28780 Jhesus nous veille secourir,
SI luy plaist, par sa doulce grâce :
377
[PoM.l
287G0
28705
28770
28775
A8CANUS
Chacun sa diligence face
do garder très bien son costé.
EMIUU8
Affin qu'âme ne nous mefface,
Î8785 chacun sa diligence face.
MARC XNTHOINE
Trassons tout autour de la place,
que le corps ne nous soit osté.
ASCANUS
Chacun sa diligence face
de garder très bien son eosté.
EMILIUS
«8790 Chacun s'i est très bien posté
jusqu'à ceste heure et en grant point
si nous vendroit très mal appoint
qu'il nous fust eniblé a la fin.
MARC ANTHOINE
Pourquoy le dittcs vous ?
EMIMVS
Afifin
Ï8795 que chacun si soit sur sa garde ;
car le fait nostre honneur regai-de,
et y pend fort, vous le sçavez.
ASCANUS
Kniilius, se paour avez,
il n'y a miculs que d'escarrii-,
28800 car quand est a moy, pour mourir
de la place ne bougeray.
EMILIUS
Pourquoy dittcs vous que paour ay?
no meraillez point de ce blasme ;
quand a moy, jusqu'à partir l'ame
28805 le monument ne laisscray.
MARC ANTHOINE
Si vaillanmicnt m'y conduiray
que je cuide qu'il y perra.
ASCANUS
Qui y vendra on le verra
si hardy d'y mettre le pié,
28810 s'il ne se trouve escanaouchic
tellement qu'il s'en sentira.
EMILIUS
Homme ne s'i embatora :
nous en poons estre tous sccui-s.
mf ^V""l«-1'' P»""!»"^ ;;">■»»• 1-- - Ï8r.-,1 sooremem A. - ÏS;5i aurons C. - isn^ l.„..r )s K. - 28Î79 pein.l
. a qui vomira qui ven.lra H. Or ,-.1 «r vieugne qu. p )ur,« G. - 88818 e,nb.trera B.
0
37S
MISTKRK DE I. A PASSION
MARO ANTHOINE
Il a des disciples plusieurs ;
28815 se tout estoit bien assamblé
le corps nous pourroit estre eniblé
et l'avy a grosse bataille.
ASCANUS
Ayez vous peur do tel gcntaille?
EMILIUS
S'il y a si hardy qui faille,
888?0 VOUS le verrei! bien respillier.
MARC ANTHOINE
Trestout n'en vault pas une maille :
je ne craing point telle piétaille,
et fussent ilz plus d'ung millier.
Pour le guet ung pou resveillier,
28825 levons nous tous d'une brigade,
et allons faire une virade
tretout autour du monument
par moyen de resveillement,
savoir s'il y a quelque émbusche.
ASCANUS
S'il est ribault qui s'i enibuscbe,
quelqu'il soit, estrange ou pi'ive,
et il y puet esti-e trouvé,
il ne fauldra pas a la feste,
car les espaulles et la teste
je luy pourfenderay tout cns.
EMILIUS
11 n'y a ne bestes ne gens :
nous y avons beau tournoyer.
MARC ANTHOINE
11 est bon de soy emploier,
et n'y venist il jamès arae,
88840 car nous serions trop infâme
de le perdre négligemment :
Car on dit tout communément
en ung ver que j'ay retenu,
qu'il vault raieulx au commancement
288 'i5 prévenir qu'estre prévenu.
EMILIUS
Le guaitier souvent et menu
nous est le meilleur par raison ;
mes je le que nous reposon
ung petit après ce traveil ;
28850 mes gardons bien que le sommeil
ne nous surprengne. Vous voyez
que nous sommes tant advoyés
que nous ne sçavons desquelz traire:
28830
288,S5
je prendray mon graut badelaire,
28855 si le metray soubz ma caboche,
a celle fin que s'on approche
je soye plus prest au hutin.
MARC ANTHOINE
Vecy pour donner beau tatin
a ung villain quand je m'argue:
28860 c'est une vieille besague
qui poise comme ung vieulx mortier.
ASCANUS
Viengne qui vouldra nous guettier,
nous sommes bruyans comme feu.
EMILIUS
Oncques ribaulx escoux ne fu
28865 par la manière qu'il sera.
MARC ANTHOINE
Qui en ara, il en ara :
il s'en fault rapporter au juge.
Icy se rassient et leurs hâtons soiibz eiilx.
LUCIFER
Deables de Finfernal déluge,
en cruelz tormens estaudus,
28870 serpens dampnés et confondus
en feu ardant et pardurable.,
niauldis soubz peine interminalile
tant qu'éternité ara cours,
venez moy bien tost a secours,
98875 car la rage m'a pénétré.
SATHAX
Haro ! Lucifer est entré,
ce m'est advis, en sa fumée ;
escoutez la quelle hemee :
il maine ung très cruel sabbat.
ASTAROTH
28880 Ainsi fait il quand il s'esbat;
ce sont les beaux jeux qu'il scet faire
que de crier, hurler et braire
comme ung lou de rage affamé.
BERICH
Qui est ce qu'il a reclamé
28885 maintenant a si grans destrois ?
2881S B. et C. ajoutent le vers 28821. — 28819-21 manquent A. — 28825 toute la C. — 28828-41 nianiuent A.
— 28835 pourfendre C. — 28837 tournier B. — 28842 Et si dit on B. C. — 28851-67 remplacés A par les vers suivants :
Ne nous surprende M. A, emilius Cest bien dit or nen parlons plus Et esi'outons tout bas et hanit Car certes sil v
vient'ribault Oncques ne fut a tel reffuge — 2SS71 linfernal feu B. C. — 28873 trinite C. — 28877-9 roullecte Escoutez
la quel chanconnecte 11 nous chante au proficiat B. 0.
>)V ARTK .lOURNKK
■.n'.>
FERGALUS
11 n'en huche no deux ne trois :
il a tout d'ung cop appelée
la grant région désolée
de tous ceulx qui sont en enfer.
CEKIIERUS
2S890 Laissons cosauios reschauH'cr
en ce braisier, eu ccst chault estie :
il fault aller parler au maistrc
a ce mandement gênerai.
LUCIKKU,
Couvin maudit, gendre infernal,
288»r> monstres divers, substances villes,
ors sorpeus, hideux cocodrilles,
vieulz aspics, horribles dragons,
vendrez vous point ?
SATHAN
Nous nous bousous ;
j'ai desja chaussé mes grans botes
ïsaûo aussi ternyes qu'oscarbotes
de ratizer en ces fourneaulx.
l.UCIKEU
Ung tel larron porto il houseaux
qui n'a cheval n'autre mouture ?
SATHAN
Si ay, d'aussi belle statui'e
28905 qu'on sçaroit finer pour denier.
LUCIFER
Kt de quoy ?
SATHAN
D'ung vieil usuiier,
du fin fonds du puteau party,
qui a le dos si trcs rosty
qu'on y cuiroit bien eschaudés.
' LUCIFER
18910 Dis tu donc ?
SATHAN
Gomment l'entendez ?
Et s'ay mes belles haquenees
do ces putains hal)andonnoos
crouppans au bordeau pour l'argent.
LUCIFER
Fais tu tes chevaulx de tel gent ?
28915 tu no dois pas croupir au peaultre.
SATHAN
Maistre, j'en ay puis d'ung, puis d'autre,
qui n'ont ne séjour no repos.
Mes ce ne fait rions au pro|>o.>> ;
veez cy tous les deables ouneinblo.
289Î0 et n'y a celluy qui ne tranibln
a vous ouir braire si hault;
dictes leui- quel chose il vous fault,
et ilz fourniront la demande.
LUCIFER
Ha ! Sathan, la cause y est graude,
28925 terrible, penetrable et dui'e :
vous souvient il i>oiut do l'injure
dont ce Jhesus nous a lobé»,
qm nous a ainsy desrobés
et despouillié nostrc manoir
88930 qu'il n'y a laissio remanoir
saint prophète ne patriarche
qu'il n'aist fait vuidier de cest arche
ou jamès ne seront reclus?
BERICU
Harau ! maistre, n'en parlez plus :
28935 ducil ramontu tousjours agriefve,
et tout lo couraige me crevé
touteft'oiz que vous en parlez.
ASTAROTII
Les wallequins furent foules
bien laidement, au dire voir ;
28940 se vous pensez a les ravoir,
Lucifer, d'ung coussin nuisez.
LUCIFER
l'ourquoy dea ?
FBRGALUS
Vous vous abusez :
entendez vous point qu'il veult dire?
nous n'y avons peu contredire,
2S945 ne pouons encore do fait :
tout est perdu, il eu est fait,
jamais n'y attendez plus rien.
LUCIFER
Nenuil, mais voicy ou je vien :
depuis que l'esprit de Jhesus
28950 nous a desrobés sus et jus,
réservé le peuple dampné,
ou quel lieu s'est il destourué ?
ou se tient il ne en quel place ?
CERBERUS
Il n'a celluy qui riens en sache
2895r> du colliege Leviatan.
LUCIFER
Kt toy en sces tu riens, Sathan ?
28887 dun son C. — 28-i91 ce hault B. C. — 2889A Commun B. C. — 2S900 noires que C. — 28907-10 nia/i7u«ii« A. —
28911 Jay mes cheuaulx mes B. C. — 28912 De mes B. — 28916 Ojl jen ay puis dun puis dautre B. C— 28920 ne «miii/ur
A. — 28930 ne manoir G. — 2893i-">5 m/tntwnl A. — 28941 Ay l'omment fera C. — 2S9-19 esperit B. C. — 28950 8 r«H-
placéx A 2>ar les v#r« iuirants : Quest il deuenu ce jhesus Ou est son esperit tourne Sathan qui las tant espie.
380
MISTRRE DR LA PASSION
si bien l'as espié tousjours
et essayé par tant de tours,
tu en dois sçavoir quelque chose,
2S900 ou, quant est a moy, je suppose
que deable n'y scet bouter groing.
SATHAN
Le sens m'est failly au besoiiig,
ne sçay qui deable m'a tenu ;
je ne sçay qu'il est devenu :
28965 il m'est eschappé bien et beau,
LUCIFER
Et sou corjis ?
SATHAN
Il est au tombeau;
au moins ainsi le croy je, moy.
LUCIFER
Me respons tu cy par je croy ?
escoutez, mes deables, qu'il dit ;
28970 passez avant, deable maudit,
allez sçavoir comment il va,
ou oncqucs deable ne trouva
son sanglant museau mieulx escous.
SATHAN
J'y vois, magister, taisez vous :
28975 ne me tensez point si en haste,
et je vous promès par ma pâte
qu'a mon retour orrez nouvelles
de Jhesus ou laides ou belles,
telles que je les tiouveray,
2S980 mes vostre benisson aray
s'il vous plaist, avant que je pai-te.
LUCIFER
Va, que de forte fièvre quaite
chaulde comme feu infernal
soit seinct ton museau desleal
2S985 et affuUé par tel contraire
que jamès ne cesses de braire !
Icy s'en ta Sathan vers le tombeau.
[SlLEÏE.I
DIEU LE PERE
Or est la nuit très désirée,
très haultcdne et très bien euree,
pleine d'honneur et de vertus,
28990 que mon filz le benoit Jhesus
doit retourner de mort a vie,
et par sa puissance infinie
puissamment doit ressusciter,
après qu'il a voulu porter
28995 de mort la terrible pointure
pour le bien d'humaine nature
qu'il a remise en liberté ;
la nuit qui n'a point d'obscuité,
la nuit qui plaisant rcgart a,
29000 la nuit de qui David chanta
disant on ses pieulx regrés
ainsi : Et nox sicui dies
plene illumivabitur ;
prophetizant du temps futur,
29005 David chanta a voix haultaine
que ceste nuit de joie plaine
seroit par raison ordonnée
comme ung beau jour enluminée :
or la vouldray je enluminer
29010 et a mon filz déterminer
d'anges par exultacion
tout pour sa résurrection
qui en elle sera parfaicte
selonc la lettre du prophète
29015 qui de bon cueur la désira.
Mes angles, il vous convendra
a ceste nuytee présente
faire feste très excellente
de vostre vray roy et seigneur,
29020 affin que la dure douleur
que pour sa mort avez sortie
soit en plaisance convertye,
quand ressusciter le verrez.
MICHEL
Ce que vous nous commanderez,
29025 nostre bon Dieu, nostre cher maistre,
sera accomply sans y mettre
ung seul point de dilacion,
esperans que la mancion
du ciel en sera resjouye.
RAPHAËL
29030 La vostre volonté ouye,
incontinant l'acomplirons
et le doulx Jhesus servirons
a sa bénigne vol enté.
DIEU LE PERE
Four monstrer la grant majesté,
29035 la dignité, la grant puissance
que nostre divine ordonnance
monstrera ceste nuit eu terre,
je veil que vous allez grant erre
au monument ou il est mis
290'i0 pour exterrir ses ennemis
28963 quel gibet B. C. — 28972 Ou] Car B. G. — 28974 mon maistre B. C. — 28978 ou bonnes ou B. — 28980 vostre]
une B. C. — 2S99S na obscurité B. G. — 89008 beau] vray G. —.29015 deuisa G. — 29018 preocllente B. C. — 29027 point]
peu C.
QUARTli JOrRNEE
381
qui s'ctlofccnt a le gai-dcr,
et i)our noncer et commander
aux bonnes dames qui vctidi'oiit
comment elles se niaintcndront
29045 pour la vcrito publier;
et ne vouldray i)as oublier
de metti'c a execucion
ce dont David fait mançion
quand il dit : Terra Intnuit
20050 et finalittr convertit
dum surgcret et cetera,
la terre briefniont tremblera
quand ressuscitera mon fdz,
dont très fort seront descouftis'
29055 les Juif/, de voidoir cruel.
Allez, Michel et Raiihacl,
et faictes bonne diligence ;
Gabriel est en la présence
de nostre pucelle Marie
29000 qui do sa tristesse marrie
a son pouoir la resconfforte ;
mes foy n'est pas en elle morte :
_ tousjours a tenu et tcudi'a
\ que son filz briefnient revendra
29065 vivant en corps gloriffié,
et s'est tousjours son cucur fié
en sa bcneuroe promesse,
et briefnient a joye et liesse
veiTa la promesse adverir,
MICHBI,
29070 Pcre, vostre divin plaisir
allons faire a chère jolie.
RAPHAËL
Et je vous tendray conipaignie :
tantost au monument serons.
Tandis nous nous rcsjouirons
29075 en ce paradis glorieux
a chanter motès gracieux
par devant le trône divin :
chantons ensemble, Séraphin,
par gracieuse mélodie.
SERAPHIN
29080 J'y veil mettre mon estudie
a moduler dittiez serains
pour resjouir les souverains
do liesse haulte et nouvelle,
car jouinee si sollennelle
29085 requiert bien de mener soûlas.
Icy se doit ferc ung grant tempeste en enfler
et nir la terre pour faire trembler.
EUILItS
Oncques mes je ne fus si las
ne senty douleur si tenant
ainsy que je fais maintenant ;
je tremble tout comme une fueille
29090 et n'ay mcnbre qm' bien me vucille,
tant suis mat et adventuré.
MAKC ANTHOINE
Et l'eusse sur mes dens juré,
le résister riens ne m'y vault :
dormir sur la terr(! me fault ;
29095 je sens mon corps tant traveillier
que ne pourroyc ])lus vcillier,
dont je meurs de dueil et d'augaigne.
ASCANUS
Viengno qui peust, soit perte ou gaigne,
et deusse estre mort ou pendu,
29100 coucher me fault tout estendu ;
seigneuiTs, veilliez se vous voulez :
la terre tremble de tous lés
tellement que c'est grant merveille.
EMILIUS
Cil qui pourra yeillier si veille;
29105 quant a moy, j'en quitte ma part.
MARC ANTHOINE
En tel destresse nompareillc
cil qui pourra veillior si veille.
ASCANUS
Le sommeil tant fort me traveillc
que me veez la ja mis appart :
29110 cil qui pourra veillier si veille;
quant a moy, j'en quitte ma part.
[SlLETE.]
ley les cher.aliers s'endorment, puis les angles
ostent la pierre de l'huit dit monument; lors
Jhesus ressuscite portant une croix vermeille,
et les angles demeurent assis sur la pierre
du dit motmment.
NOSTRE DAME
Depuis le douloui-eux dcppart
Î90VJ-50 Dedans son psciuillii!i- ou il dist Terra tremult et qiiieiiit (ou cunulenit) A. — 29066 cueur] corps .\.— 19069
«duenir li. C. — 29071 fournir a cliiere Ije B. C. — 2907i reposarons B. C. — 29080 .le voulilrav ja metr« B. C. — Sgoa5
Car tant sccus B. C. — 2009fi Hrief que je ne puis B. nuiiv/ur C. — 29097 de gnisiiie C. _ JsxVj".' u | et B.
382
MISTERE DE LA PASSION
très angoisseux qu'eu moy s'espart
pour toy, mou filz,
29115 cherc joyeuse je ne feis
fors lamenter toujours appart ;
J'ay souffert si dure penance
et douleur a telle habondance,-
sans point cesser,
29120 qu'il n'est huy cueur qui peust penser
ma très amere desplaisancc,
Mon onffant, quand je te perdis
et que mort ou la ci'oix pendis
en douleur dure ;
29125 bien amas humaine nature
quand pour luy tes br-as estendis :
Et ta povre mère piteuse
voyant ccste peine honteuse
qu'on te faisoit,
29130 Dieu scet lors s'elle se taisoit
de voir douleur tant angoisseuse.
Mes non obstant ta passion,
mon dueil, ma lamentacion
dont je fus et suis oppressée
£9135 Pour la cruelle extorciou,
la piteable exaction
ne m'a pas si fort transgressée
Que j'aye en rien ma foy blessée
ne vraye "espérance laissée ;
29140 mes croy sans variaeiou
Qu'en la journée coinmancee,
a la joye de ma pensée,
verray ta résurrection.
29155 dy : Exsurgam dihtculo.
JHESUS
Ma très chère mère et lealle,
la paix du ciel imperialle
ayez en vostre humilité.
NOSTRE DAME
Mon filz, ma liesse totalle,
29160 ma seulle gloire principalle,
bien soiez vous ressuscité ;
[par foy et ardant charité]
En mes plaintes vous attendoye
et a vous seul voir entendoye
i9165 comme du tout a vous ravye.
JHESUS
Si vucil donc que vostre oeil me voie,
car en liesse et en grant joie,
suis revenu de mort a vie.
NOSTRE DAME
Helas ! mon beneuré enffant,
29170 se de mort estes triumphant,
ceste mort seule souffîra.
JHESLS
Soiez vostre cueur appaisant,
car la mort et son dart pesant
jamès ne me dominera.
29175 Vivant suis en perhennité,
et en amoureuse unité
tousjours avec vous demourray.
Icy Jhesus part et s'evanoyst d'elle.
NOSTRE DAME
Louée en soit la trinité
que mon cher filz s'est présenté
29180 a moy ! plus joieuse en seray.
GABRIEL
Poursuyvez vostre inteiicion,
29145 ma maistresse très honorée :
vosti-e ferme foy beneuree
pi'esentement s'adverira.
NOSTRE DAME
Exsurge^ gloria maa,
levé toy, ma gloire parfaicte,
20150 psalteriurn et cithara,
mélodie doulcement faicte;
Ne laisse ta mère deffaicte,
désolai am in seculo,
mais selon la voix du prophète
MADELAINE
Mes seuls, oyez que je dii'ay :
droit au monument sans séjour
nous fault aller aius qu'il soit jour,
et le doulx Jhesus oinderons ;
29185 plus matin nous en reviendrons,
et de moins serons apparceues.
MARIE .TiCOBY
Vos raisons très bien entendues,
Marie, point n'y debatons :
il est heure que nous partons ;
29120 puist li. G.— 29125 aym.is B. G.— 29127 I) .« C oJouteiU contrairement au rhythmc des strophes : En la croix
la ou tu fus mis. — 29134 fort pressée B. C. — 29137 angoissée B. en{;i-essee G. — 29144 vostre] ceste B. C. — 2914?;
ma dame G.— 29147 saduerera U.— 29119 reffaicte B. C.— 29151 Ma mélodie très parfaiote B. G.— 29155 diliculo B. —
29162 Ce vers, contraire au rhythmc l'c la strophe, nous semble Interpolé. — 29164 voir manque C. contendoie B. —
29182-3 Faisons au monument retour Auant quil soit le point du jour B. C. — 29181 Kt] Ou A.— 29185 y renderons A.
or A RTF.
29100 que Dieu soit ou aostre convoy !
Icy s'en vont cm monument.
MARIE SAI.OMÉ
Daines, selono co que je voy,
iioiw sommes bien on adveutui'o
qu'on poitaot ceste digue oingtui-e
nous ne pardons nostre voyage.
2'J19.") .)'ay cy pensé on mon courage
que quand lo doulx .Ihesus fut uii;:
au sépulcre [lar ses luiiis,
une grande pierre et quarree
fut portée et mise a l'entrée,
Ï9200 qui poise tant qu'a souhaidier ;
et donc, qui nous pourra aidicr
a l'oster et la remouvoir ?
seules ne la pourrons mouvoir
qui sommes povres fameletes,
i92(K et ainsi toutes nos apprestes
aront esté faictes en vain.
MAUELAINB
Mes ung point y a plus gi-evain,
car les faulx luifz plains d'errour
ont mis gardes tout a l'entour,
29210 dont approcher n'y oserons.
MARIE JACOBY
,\pprochez vous, seurs, si ferons :
la besongne va mieulx assés
a nostre veil que ne pense/. :
je voy la pierre révolue,
29215 elle est de devant l'huis tolue :
je ne sçay qui l'a peu tiurner.
MARIE SALOMB
L'entrer ne nous peust detouiuer :
l'huia est tout ouvert bas et hault;
et encore, qui mieulx. nous vault,
19220 je voy les gardes bien remis,
car ilz sont couchés endormis
comme pourccaulx a la renverse.
MADELAINE
Cousoilliez vous donc qu'on traverse
hardieiiieut tout au milieu d'oulx i
MARIE JACOBY
tï022û Dieu (^st miséricordieux ;
si luy plaist, il nous aydera :
entrons dedens.
MARIE SALOMÉ
Qui s'en faindra
s'en voist a l'ostol reposer,
car le corps m'en vois arrouser
«30 de ce-* unctions redolentes.
J 0 LI R N p; K 383
/cy entrent au monument et regardent
partout,
MAPËLAINE
Las ! bien devons estre dolentes !
mes seurs, regardez la dolcur :
le corps de nostre doulx seigneur
nous" est emblé et transpoi-té.
MARIE JACOBY
29235 Helas ! et qui l'a emporté,
mon très cher maislre delwnnaire?
il n'y a mes que le suaire
ou son corps fut ensevely.
MARIE 3AU>MB
Doulx Dieu, qui a esté cely
29210 qui a voulu mettre sa cure
a l'oster de sa sépulture?
helas ! que n'a il attendu
que nous trois eussions espandu
dessus son corps nostre unction ?
29245 j'en ay si grant compassion
que j'en sens mon cueur tout transy.
MADELAINE
Chères dames, regardez cy :
de grant paour tout lo cueur me tremble
de ces deux jouvenceaux ensemble
292j0 qui sont sur ceste pierre assis.
MARIE JACOBY
Leurs vestemens sont refulcis
d'une blancheur clere a merveille,
et a l'ung la face vermeille
eomuK; foudre venant du ciel.
MARIE SAIX)MÉ
2»25i Son regard est si très cruel
que je n'ose lever la cherc.
MADEI.AINE
Fom' l'espovantable lumière
Je ne ra'oze bouger aussi.
MICHEL
Femmes, que qucrez vous icy
29260 en plorant si piteusement ?
querez vous en ce monument,
qui est lieu propre pour les moi-s,
do .Ihesus le précieux corps ?
c'est en vain, car en vérité
29265 sachez qu'il est ressuscité,
et n'en faictes quelque donblance.
29193 (loul.e i;. - 29199 Koil posant fut A. -j
Iï9232 regardon» B. - 29254 nouuel B. C.
par manuni» tour A. — 29215 Et toute a lorre descendue B. C. -
leuer B. — 29262 To'ite» trois de coramuiu .icors A.
384
MI STERE DE LA PASSION
RAPHAËL
N'avez vous pas en remambraiice
les paroles qu'il vous disoit
quand en Galilée regnoit ?
Ï9270 souvent il vous preschoit en somme
qu'il falloit que le filz de l'homme
fust es mains des pécheurs haillié
et puis en la croix traveillié,
en quoy la mort receveroit,
89275 et comme il ressusciteroit
puissamment au troi/.ierae jour.
Allez, et dictes sans séjour
aux apostres que l'assemblée
totallc voist en Galilée,
29280 car yla les précédera,
et la chacun voir le pourra,
comme il vous a dit aultreffois.
MARIE JACOHV
Ma seur, avez vous pas les voix
de ces haulz messagers ouy ?
MARIE SALOMÉ
29285 Marie, chère seur, ouy ;
je les ay très bien entendu,
dont j'ay eu le cueur espardu
et presque tout evanouy.
MADELAINE
Mon cueur craint et est resjouy
Î9290 de ce que leur ay ouy dire.
Allons aux disciples de tire,
et si leur portons ces nouvelles
qui sont terribles et moult belles :
je ne sçay qu'il en adveudra.
MARIE JACOBY
29295 s'en viengne après moy qui vouldra !
se je puis, j'y seray première
pour leur reciter la manière
de ce que nous y avons veu.
Icy se mectent a rotje.
ASOANUS
Haro ! que m'est il advenu ?
29300 ay je dormi ou j'ay veillié?
oncques ne fus tant traveillié
ne si durement molesté
comme j'ay maintenant esté,
tellement suis je corbatu.
MARC ANTHOINE
2930ri Je n'ay ne force ne vertu,
ne membre qui me puist porter.
EMILIUS
Il n'est cueur qui puist raconter
la disme de mon grand csmoy,
quand tout de force et niau gré moy
29310 me suis icy trouvé dormant.
ASCANUS
Ha ! meschant honniio et meci'eant
que je suis, et malheureux homme 1
je porte de dueil si grant somme
que j'en souffre jusqu'au cueur fendre.
MARC ANTHOINE
29315 Je ne sçay nostrc fait entendre ;
dui'ement nous est mesvenu :
qu'est le corps Jhesus devenu ?
veez cy le monument ouvert :
s'en est il allé ?
EMILIUS
11 y pert :
89320 oroiez qu'il nous est eschappé.
Oncques homme ne fut trompé
]iar la manière que nous somme".
ASCANUS
Nous sommes les plus raeschans hommes
qu'oncques Dieu fit au siècle naistre ;
29325 que dira tantost nostre maistre
qui nous tient pour gens esprouvés,
quan(f plainement serons trouvés
les plus infâmes de jamès ?
sçavez vous bien qu'il n'y est mes ?
89330 encor y ai je mon recours.
MARC ANTHOINE
Vous y pourriez queiir trois jours :
soiez tous sceurs qu'il est party.
ASCANUS
C'est par vous.
MARC ANTHOINE
Vous avez ment}'!
ne m'imposez point lascheté;
29335 j'ai mieulx gardé de mon costé
que vous et de meilleur party.
EMILIUS
James il ne fust dcparty
se vous eussiez songneux esté.
C'est par vous.
ASCANUS
Vous avez mentv !
292S3 Marie B C.
29295 pourra B. C. -
- 292S8 après tout B. C. — 20289 Tout inoii cueUr si est A. -
29304 corps batu A, — 29316 aduenu B. C. — 25)321 frappe A.
29293 '>ioii bonnes et bien C. —
QUAHTK .lOlIRNKK
3R5
29340 110 in'iinposoz |)()iiit Inschoté.
Tout ce mal nous est lovcrty
par vostro gruiid lucschanccto :
vous l'avez prins et emi>orté,
qui qu'en ait le moyen basty.
Î93'i3 C'est jiai' vous.
EMII.IUS
Vous avez nienty !
ne m'imposez point lascheté;
j'ai mieulx gardé de mon costc
que vous et de meilleui' party;
et qui me dira : « C'est par ty »,
29350 j'en appelle do champ de gage.
MARC ANTHOINE
Mcsseigiieurs, cessons ce langage ;
se par tel point nous coniporlons,
nostrc l'ait rompons ot gastons.
Se vos corapaignons accusez,
29355 pourtant ne vous en excusez,
et si pourroit tel coup courir
qu'on nous feroit tous trois mourir,
car il y a danger assés,
et i)lus bcaucoi) que ne pense/. ;
29360 si nous fault tenir aultre voye :
c'est que chacun' do nous s'avoyc
et nous en allons tous unis
présenter devant les Juif/,
pour nous excuser contre tous.
ASCAM.S
293ii5 Noire, mes que leur dirons nous,
quand d'eulx interrogués serons ?
MARC ANTHOINE
IMaiucnient nous attermcrons
de fait et franche volonté
que Jhesus est ressuscité
29370 et ramené de mort a vie.
EMILIUS
\'oirc, mes vous ne comptez mie
que nous les ferons crever d'ire.
.MARC ANTHOINE
Ne vous chaille qu'ilz sachent dire :
nous ne poons voie trouver
29375 pour mieulx le noslre honneur sauver,
et vcez c\' la cause pourquoy :
se nous affeiinons, vous et moy,
qu'aucuns se soient assemblé
par nuit qui ont ce corps cmbli',
29380 nous alléguons nostre mesehance,
et ne vauldra riens l'excusaiice,
car c'est fait de mauvaise iront
({ui ont le eucui' si négligent
que par faulte do .soy gai'der
29385 se laissent surprendre et fraudei' ;
mes se nous disons que ce signe
soit fait par puissance divine,
cela riens nostre honneur ne menst,
car encontre Dieu nul ne jieust
29390 qu'il ne fasse le vouloii' sien.
ASCANUS
Marc Anthoine, vous dictes bien;
et quand vendroit au conformer,
je s^^ai'oio bien affornu'r
sur Dieu et sur tout tant que j'ay
Xrxyj qu'il est ressuscite pour vray,
qu'oncquos riens ne cuiday toii' mieulx,
que je l'ay choisy de mes youlx
yssir du tombeau tout vivant.
EMII.IL'S
Se la mort m'estoit au devant
29400 et on me voulloit conjurer,
j'en osci'oy autant jurer
que vous m'en dictes sur cela.
MAUC. ANTHOINE
Taisiez vous : quand nous vendrons la,
le vray en seray confessant.
Jcy s'en retournent aux Pharisiens.
MADELAINE
29105 Ghors amis, le Dieu tout [luissant
vous maintienne on sa sainte grâce !
je viens maintenant de la place
ou le corps .Jhesus fut pose ;
mes aucuu l'a ja deiiosc
29110 et (5sté de son digne lieu.
s. PlKnRE
.Jhesus, mon maistre ! benoit Dieu,
qui a ceste faulte commise
d'avoir du sépulcre démise
sa précieuse hmnanité ?
s. JEHAN
29U5 J'en vois sçavoir la vérité,
car jamés nul jour bien n'aray
jusqucs a ce que je sçaray
que le .saint corps est devenu.
s. l'IBRRE
Pour en s(;avoir le contenu,
29520 se je puis, premier y vendray.
29349 paily B, C. — 2y351 icsi.ez li. C. - 2\'3&i laiilx .\. — 29378-U asMiiililez. eiiibicz H. - 293S0 i(;ii.irtlic(- 1'..
C. — miSl lepeiisnncc, maucaise /ctlme île lexcuiauce B. — 293W df] a H. C. — ï9Hi9 ja dispose B. — Î9U5 tost
Sf'auoîr .\.
Pas.
25
386
MlSTERE DE LA PASSION
Icy s'en vont S. Pierre et S. Jehan au monu-
ment, et vient S. Jehan devant.
MADEI.AINE
De mon pouvoir je vous siiivray
pour sçavoir que vous trouverez.
Icy s'en v.i Madelaine devant les autres
Maries.
MARIE JACOBY
Chère seur, nous irons api)rcs,
se vous inc eroiez.
MARIE i;ALOMÉ
Je le veil.
MARIE JACOBY
29425 Allons doncques, je le conseil,
, tout ))ellement après ces hommes :
ilz sont plus soubtilz que ne sommes
pour sçavoir tout ce qui eu est.
Et s^en vont bien bellement après.
s. JEHAN
J'ay si bien couru sans arrest
29430 que premier suis au monument.
Regarder veil présentement
pour sçavoir s'il y est ou quoy.
Il regarde sans entrer ens.
Qu'est ce cy ? je n'y apparçoy
fors les draps dont il fut couvert.
s. PIERRE
29135 Le monument est il ouvert
ou nostre maistre fut posé ?
s. JEHAN
D'y entrer n'ay je esté osé,
mes j'ay regardé par dehors.
s. PIERRE
Trouvez vous riens ?•
s. JEHAN
Tant qu'est du corps,
29410 il ne s'y est point admonstré.
s. PIERRE
Puisque dedens n'avez entré,
vous ne pouez sçavoir le vi'ay ;
mes quant a moy, j'y entreray :
si sçaray tout de point en point .
s. JEHAN
29445 Comment en va ?
s. PIERRE
Il n'y est point ;
il n'y a mes que les liiisseux
et le suaire précieux
dont son chef fut ensevely ;
je l'ay trouvé tout appart ly
29450 et tout des aultres devise',
Icy entre S. Jehan au uicnumcnt.
s. JEHAN
Quand j'ay bien par tout advisé,
vous dictes la vérité pure :
allons compter ceste aventure
a nos frères, je le consens.
s. PIERRE
29455 Je pense que nous ferons sens,
car de le quérir cy cntour
il n'y fault ja faire retour,
ce seroit abus a nous deux ;
or l'allez compter a l'ung d'eulx
29460 ou a tous comme vous vouldrez,
et je vous suivray bien après ;
mes aultre chose veil sçavoir.
s. JEHAN
Je m'en vois donc faire devoir
de l'adnbncer a nos amis.
Icy s'en vu S. Jehan aux apostres ;
S. Pierre demeure derrière.
MADELAINE, Seule.
29465 Helas ! qui est cil qui a mis
et tiré hors de ce tombeau
le corps du doulx Jhesus tant beau,
qui tousjours tant de bien m'a fait {
cil m'a bien de joye deffait
29470 et mis en duoil et en tristesse ;
cil m'a bien toUu ma liesse
et mis en piteux desconffort ;
faulx Juifz, c'est de vostro effort,
qui oncques jour bien no luy feistes ;
29475 au mohis puisque vous me tolistes
mon cher maistre en terre vivant,
souffire devoit en avant,
et souffrir au moins que je l'eusse
a faire ce que je volusse.
29480 Xennil, vous ne l'avez vollu :
vif et mort me l'avez tollu ,
vif et mort me voulez grever
pour vostre faulx cueur esprouver
29423 alons C. — 2942 i-j Ou voulez vous i[ue. nous tournons M, J . Syur je lo que nous retournons B. C. — £94^9
Veez vous A. — 29440 11 nest point cy atlemonstre A. — 29454 je my B. C. — 29463-4 Falotes en a vostre vouloir Car
au vostre me suis submis B. G. — 29466 Hors du tombeau et trait enssus B. G. — 2)467 de mon maistre jliesus B. C. —
29473 fort B. C.
QI'ARTK .lOMRNRK
en tout mal sans coy jamcs faiiidi'c ;
-'^',85 si le vouidia ploufor et plaindre
mon cucur de tonte sa vert».
MIOlKl.
Femme, je te piy, que quicra tu,
faisant tel tristesse et tel pleur ?
MADELMNE
Helas ! je quiers mon doulx seigneur
Ï9400 qu'on a du monument esté ;
je ne sçay qui l'a ompoi"té
pour nosti-e unctioii emposchei-.
0 doulx Jho.sus, mon maiatrc cher,
ou mon recoui-s souloio avoir,
Î949J que je désire plus a voir
qu'on ne sçai'oit penser ne dire !
foi vient Jhexus par derrière en forme d'un
jardinier.
JIIESUS
Femme, que quiors tu cy ?
MADELAINE
Cher sire,
je te pry jiar humilité,
se tu l'as pi'is et emporlt',
29J00 ne me le celle \mut, amis ;
dy moy en quel lieu tu l'as mis,
car porter le veil et remettre
a mon gr('".
JHESUS
Marie !
MADEl-AINE
0 mon maistre,
si vous plaist, je m'enclineray
2050j et vos dignes pii's baiseray :
ce sera grant bien à ma bouche.
JHESUS
Cesse, Marie, ne m'atouclie,
et vueilles ton cucur appaisier
de costc heure mes pii's haisier,
205)0 car encore n'ay pas monté
a la haultaine majesté
de la doxtre de Dion, mon pero ;
car puisque ce divin mistere
de mon hault rossuscitement
Î9515 ne crois pas en cueur fermement,
foiblc foy te veult empescher
que ne me pous ne dois toucher.
Mes va et dys a mes disciples
387
qui (mur moy sont triste» et simples
Ï05Ï0 je m'en vois do ce monde cy
a mon Dieu et au vostre aussy,
a mon pcrc éternellement
et au vostre prochainement,
qui s'entend que devant leurs yeulx
2«5ïj ilz me verront monter aux cieûlx
lie haullo gloire reflulcy.
Jhesus s'eranouyt.
MA BELAI NE
Or est mon cueur hors de soucy
ot privé de toute douleur,
quand .Ihesus, mon ties doulx seigneur,
î!»30 de mort a vie est revenu
et, qui |)lu8 est, il est veuu
apparoir a moy pdr sa grâce :
c'est bien raison donc que je feco
sa haulte volonté bénigne,
Î8535 et la vraye essence divine
en dois mercier sans cesser.
Je voy cy mes seui-s approcher,
lesquelles grant osmoy surmonte ;
si sera ton que je leur compte
a)510 ce que j'ay peu voir et ouyr
pour ieui'8 cueurs ung peu rosjouyr.
Chères seurs, cessez pleui-s et plains,
prenez cueurs de Uesse plains,
car certes bien le devez faire.
MAKIE JAcnuv
»5i5 Comment?
MAbKLAINB
Jhesus le débonnaire,
nostrc luaistrc, est i-essuscité.
MARIE 8ALOMÉ
Jhesus ?
MADELAINE
Ouy eu. venté :
je l'ay rccongnu sans doubtanco,
j'ay veu sa forme et sa semblance ;
K)550 il ne s'est point a moy cel»; ;
plus fort : il a a moy parlé
et devisé très grant espace.
MARIE JACOBY
Vee« cy nouvelle l'oiUtreiMisse
Î9491 ou on la porte B. C. — 29199 cMliij .Milporle B. C. — 2^00 beaux duulx amis B. C. — KOlO-eœ manqacM C.
feuillet déchiré. ■» Ï9jïl A mon peru A. B. — Ï9522 A mon dipu A. B.
38»
MISTKRE DE LA PASSION
(les nouvelles qui oncqucs furent !
295jr> mes affîn que ]>lus nous asseurent,
l'avez vous bien coiignu, Marie ?
MADELAINE
James nul jour je n'en vai-ie,
et en soiez au'si certaine
comme j'ay a nom Madelaine :
29560 mes raisons sont toutes notores.
MARIE SALOMÉ
Helas ! que ne le scevent ores
les apostres tout a leur veil !
jo s(;ay bien qu'ilz ont tant de dueil
que cueur ne le pourroit penser.
MADELAINE
29565 Aussi leur alloy jo anoncei'
quand je vous ay cy rencontrées :
tempiement leur seront inonstroes
nouvelles de joie infinie.
MARIE JACOBY
Et nous vous tendrons compaignie,
29570 s'il plaist la haulte majesté.
MADELAINE
Or y allons tost.
vos pies dignes et précieux ?
JHESUS
Femmes, allez de cueur joieulx
29590 faire aux aposties mencion
de cestc résurrection,
et leur dictes que leur allée
se face brief en Galilée,
car la me pourront voir vivant
29595 comme souvent par si devant
leur ay voulu faire sçavoir.
Icy se part Jhesus sotibdainemcn' .
MADELAINE
Très doulx .Ihesus, vostre vouloir
accomplirons joieusement.
Mes seurs, allons bastivcment
29000 ce haultain message fournir.
MARIE JACOBY
J'ay si grant désir d'y venir
que l'aller ne m'est point grevable.
Icy vient Jhesus a l'encontre.
JHESUS
Avete,
humbles dames de grand value ;
de Dieu, mon père, vous salue
qui règne et régnera sans fin.
MARIE .JACOBY
29575 Jhesus, iiostre maistrc bcgnin,
Jhesus, nostre leal pasteur,
Jhesus, nostre vray conducteur
qu'en tant de soupire avons quis,
or avons tous plaisirs conquis
29580 a veoii" vostre doulce présence :
mes plaise vostre humble clémence
que vos pies- puissions atoucher.
JHESUS
Vueillez les hardiment toucher :
n'ayez en vous aucune doubte.
Icy s'inclinent toutes trois et baisent ses pie;,
MARIE SALOMÉ
295S5 Jhesus, mon espérance toute,
quel bien nous pourroit plus venir
que lie vous veoir, et tenir
Ici/ doit eslre S. Pierre par soy arrière
des autres apostres
s. PIERRE
O Dieu, créateur parduraljle,
mon père et mon facteur haultain,
29605 qui tout gouvernes par ta main
quauqu'il est ne jamès sera,
ne sçay quand l'heure approchera
que j'aye ung peu de resconlFort
sur le douloureux dcsconffort
29610 que pour mon doulx maistrc ay receu.
Jhesu, mon doulx maistre Jhesu,
en grand [lerplexité me mes ;
helas ! te verray je jamès ?
Jhesus, mon très amoureux sire,
29615 Dieu scet comment je te désire,
et en tdV forment desii-ant
jo croy que je m'en voys mourant.
S'il est vray que de mort t'excites
et qu'en vie tu ressuscites
29620 comme tu en as la puissance,
ayes de mon fait souvenance :
vraye amour en toy m'a lyé ;
29557 a nul joui- iiy varie li. — 2U360 toutes] aussi B. — 29565 alia^ A. — 29568 .Se ja |juis ne vuus. doublez mie B. ~
29570 a la B. — 29571 Or y venez donc J. aue te B. — 2y5S2 .Tpprmnher H. — 29602 points] riens B. — 29603 mon père
sperit:ible B. — 29601 O mon créateur souuerain B. — 29608 petit de eonlfort B. C. — 29620 bien en as C.
QUARTi: ini^RNKF
s'a eo, befomg; m'as (mbiiô,
je no sçay uii's ou ooiisoil qucrro.
389
JHEsi;.s
îixiîS Faix soit o t(iy, mon amy Pierre,
oonffort et joyc sus et jvis ;
je suis ton cher maistro Jhesus
qui ay receu ta penitnuce :
et pour toy donner espérance,
89C30 saches que i-essuscité suis
haulti'inont comme je le puis
par ma divine prepotance.
S. PIERRE
l'iii eeste vraye confidence
vueil demourcr toute ma vie,
29C35 et de rcchief je vous mereie,
mon cher maistre, mon seul recours,
qu'il vous plaist me donnei' secours
on ma piteuse pacienco ;
et requicr mercy de l'oirence
29fl'i0 que j'ay fait vers vous, roy des rois,
car je vous renyay trois fois
par mon vouloir desordonné.
JHESUS
Pierre, amy, tout t'est pardonné :
le péché ne fut pas si gi'ant
êt)6'.5 qu'est ma grâce large et imissant
a miséricorde et pardon.
S. PIERRE
De ce hault et excellent don
soiez vous loué sans cesser !
Il 1/ se part Jhesus subitement .
I Pose. |
MADELAINE
Frères, vueillez vous a<lvancer
89050 d'ouir le sahit a vos aines !
s. A.vnnv
Que nous diront ces saint(>s dames
qui si fort vieiment devei-s nous ?
MA.RIE JA.CORY
Mes amis, resjouissez vous
en Dieu qui tout biin cueur confoi-te,
80<1.V) cai' la nouvelle vous n|)porte
la plus liaultaine qui puist twti-e.
s. JAQUES ZBHBDEY
De qui ?
MARIE JAOOIIY
Ik» .llicsUH, nostre maistre,
eeluy i|ue plus ainaates oncque«.
8. IIERTHEI.EMY
Qu'en est il ?
MARIE JACOHY
Sans doubles quelconques,
W680 poui- venté nous aifcrinous
qu'il est suscité.
s. ANDBY
Telz sermons
ne sont pas bons a controuver
qui n'est bien sceui- do les prouvei-
tellement qu'il soit tout notoire,
SOeCTi car par une telle invéntoire
plusieurs se [Murroient abuser.
s. THOMAS
Dames, ne vueillioz pas user
de telles paroles soudaines,
se vous n'en estes si certaines
ïsero qu'on ne vous en puist accuser.
MARIE SALOMÉ
Nous ne faisons amc nmser :
ce sont choses vrayes et plaines.
s. BERTHELEMT
Dames, ne vueilliez pas user
de telles paroles soubdaines.
MADEIJVINE
89tt75 Se nous y voulons proi)Oser
choses véritables et saines,
posé qu'elles soient haultaines,
vous no les pouez reffuser.
S. THOMAS
Dames, ne vueillez pas user
S9S80 de telles paroles soubdaines,
se vous n'eu estes si certaines
qu'on ne vous en puist accuser.
MARIE JACOBY
Kiens ne vous venons exposer
que souffisamment ne prouvons :
sg685 tous trois ensemble veu l'avons
et avons ses pies atouchiés,
tenus en nos mains et baisiés
el honorés par grant estude ;
29G37 plaist iiian^ui' A. — 296'>0-l manquent B. C. — 8964e Dont jr suis oocaiionne B. C. — S9&19 dieu vous
viieillp adiianrpr B. C. — 29650 Et donner saint B. C. — £9651 femmes B. — i96ô6 Qui plus il<> joyc vous doit paistir
B. G. — 290:.9 doubtance B. — 29661 ressusoiti- C. — Î9C71-88 manquent A. C. — S9688veuerei B. Ix-uevs C.
390-
MISTRRK DE LA PASSION
encor pour plu» grant certitude,
29890 veez cy Marie Madelaine
qui en sa doulce char Immaiue
le dit ja avoir veu deux fois.
MADELAINE
Sur la créance et sur la fois
que j'ay a Dieu, mon créateur,
29C95 il est vray.
s. SIMON
Sauf le vostre honneur,
Madelaine, très chère amye,
nous ne vous en dédisons mie ;
bien pouez dire a nous ensemble
qu'ainsi est, ou qu'il le vous semble,
29700 et cuido qu'il fault la venir,
car on voit souvent advenir
quand on pert ung amy leal,
et pour cause qu'il en fait mal,
on le requiert par mainte voye :
89705 il samble tousjours qu'on le voie,
ou peust estre qu'on n'en voit rien,
et vient cela par le moyen
d'une bien forte fantasie
qui tousjours songe et fantasie
89710 ce qui lui touche au cuour plus fort.
s. JUDE
Simon, je suis de vostre accord,
et ne puis croire ceste clause ;
et je veil assigner la cause :
s'il fust ja de mort relevé
affiu que son fait fust prouvi'
et plus pleinement apparu,
fust il point plus tost comparu
a nous tous ensemble qui sonnnes
ses vrais serviteurs et ses hommes
qu'aux femmes de legier courage
qui en ung si hault tesmoignage
ne sont creues nulle saison ?
s. MATHIEU
Jude, amy, vous avez raison
et ne le croiray de cest an :
veez la Pierre et veez la Jehan,
veez la Jaques d'aultre costé
qui passé long temps ont esté
ses secrétaires de plus près
et qui ontsceu de ses secrès
29730 plus qu'homme jamès ne sçara ;
devant eulx se transfigura
en la montaigne de Thabor, *
et beaucop de secrès encor
29715
89780
89725
qu'il ne fault ja ramontevoir :
£9735 a eulx se deust il apparoir
premier, s'il en fust quelque chose ;
mes non a : par quoy je suppose
qu'il n'est pas de mort surrexi.
s. PHELIPE
Et je suis dos vostres aussi :
i9740 quant a moy, quiconque ou estrivo,
jamès nul jour tant que je vive
je ne croiray quoy qu'on me face ;
se je ne le voy face a face
je me tendray au contredit,
29745 et comme vous avez cy dit
point n'y metz d'oppoticion
que si haulte apparicion
ne puist manifester a tous,
mes principallement a nous
29750 se deust la chose demonstror ;
et puis s'il se vouloit moiistrer
a ces dames de haulz maintiens,
faire le doit, car moult de biens
lui ont fait au temps qu'il rogna.
s. ANDRY
89755 Leur rapport fin ne raison n'a,
car avec Jhesus, nostre chef,
avons souffert tant do meschief,
par quoy doua nostre collège
d'ung très singulier privilège
29760 quand il nous dit ces motz plaisans
qu'avec luy nous sciions seans,
jugeans par jugement cruel
les douze tribus d'Israël.
Or puisqu'a nous tant se fia
29765 que ces motz nous signiffia,
nous lairroit il comme incertains
pour monstrer ses secrès haultains
aux estranges? ce sont durs signes.
s. HERTHELEMV
Ce sont paroles femenynes
89770 qui ne servent rien que pour rire :
on scet que femmes scevent dire
ainsi que leur vouloir les meust.
s. JAQUES ZEBEDEY.
Quand a cela, y croit qui voult;
ja n'en fault plus avant aller :
29775 on ne les peust qu'ouir parler,
mes quant pour ma part, riens n'y compte.
MADELAINE
Mes seigneurs, vous ne tenez coni|)te
de la nouvelle pi'oposee.
29695 le manque B. C. — 29099 nous lî. — 29725 et manqur B. — 29735 A ceulx soeust il iloti B. C. — 29749 prinri-
paument euuers B. C. — 29761 nous manque C. — 29763 lignées A. — 29772 leur] le A. — Ï977() Mes ou ny a regard
ue compte B. Mais uy regarde ne ne conte C-
Q V A R T K
et n'en faictisi qu'une risée
29780 eouinio d'une chose non ferme ;
mes je vous [iromès et atternie
que la nouvelle est véritable :
Jhosus, mon maistre charitable,
avons veu île mort restauré,
ii97sr> l'avons tenu et adoré
ou nous espérons grans mérites.
s. THOMAS
Ma chère amie, vous lu dittes,
s'allcz ces nouvelles ^lortant ;
je ne vous en croy pas pourtant,
29790 et en ce point je demourray
que jamès je ne le cioiray
jusques a ce que l'aray ven.
s. JAQl'ES ALPHEV
O mon très doulx maistre JLesu
que j'ayme de paifaicte amour,
89795 quand verray je l'heure et le jour
qu(^ j'aray approbaciou
de ta grand résurrection
que tant a veoir je désire ?
mon maistre et mon souverain sire,
29800 de qui le saint uoni soit loué,
souviengne toy que j'ay voué
a toy que de quelconques mes
mon corps no goustera janiès,
et dcusse de fain cstre moi's,
29805 jusques a tant que ton saint corps
voie en plaine vie remis.
Ici/ s'appert Jhesus subitement.
JHESUS
Paix soit o vous, mes doulx amis!
affm qu'on vos eueurs ne se liouto
quelque suspicion ou doul)te,
29810 je viens cy pour vous resjouir,
et s'il vous plest ma voix ouir
incontinant mettez la table.
RUHEN
Voez en cy une assés notable
qui tantost y sera assize.
GEDEON
29Sir> Tenez, vecz la la nappe mise:
no reste qu'apporter le pain.
NEPTALIN
Tenez, vecz en cy do bon grain :
.lOI'RNKK 3«1
il me fait a sentir grant bien.
Icy brise Jhe.ius lu pain et en donne a S. Jaques
en fniianl la croix dcsstts.
JHE8US
Jaques, mon très cher fi'oi-e, tien,
t98ÎO monjrue et pren rcflTection,
et do parfaicte intoncion
tien ; et croy que le filz de l'homnic,
qui de tourmens {wrta grant !>oinine,
de mort a vie est revenu.
.s. JAQIIKS ALPHEV
20885 Mon doulx maistre, mon clior tenu,
qui passion as soustenu
a qui nulle ne se compère.
Tu nous soyes le bien venu !
maintenant ay je bien congnu
898.10 que tu m'es vray amy et pero,
Quand en ma piteuse misère
ta doulco gi-acc me conffere
confort et m'as entretenu ;
Or congnoy je ce hault mistiîre :
89835 ta l'esurrection est clero;
de mort l'effort a» pi-evenu.
/ry se part Jhesus subitement.
UIBEN
Doulx Dieu, et qu'est il devenu?
il s'est acop evanouy.
OEDEO.N
Nous n'en avons guaires jouy :
89840 si doit bien estro reclamé.
rP<wK.|
laj sa plaint Joseph en la prison.
JOSEPH d'Arismathie.
Doulx .Ihosus que j'ay tant amé
et i)our qui je suis tant blasnié,
vueilles ouir mou oroison ;
Tu me vois icy diffamé,
S98'.s en ceste prison affamé,
sans ciiusc et a grand déraison ;
Et si n'y a aultre achoison
297X8 Et nll.z B. C. — 29807 ihers B. C. — 29815 Elle est bien scsl B. C. — 29S10 El du poin dessus liel el bien A.
— 2<>817-S m'<n'i,i-iH A. - 29823 innislre i-liiur tenu B. — 89831 je] par B. C. —898^ Que de ta B. C. est «inm/iw B. C.
- 29S3I1 leffort] le fait 0. — 29810 Son s.iiiit nom en soit A. - 29858 qui non suis B. 29813 ouir] examiner C. — »8iD
l>es juitz qui mont enlTerini- lî. G.
392
M I S T 1<: R K DE r. A PASSION
fois que ton coi'lis que moult prison
ay au saint sépulcre fermé ;
29850 Pour toy suis pugny sans raison,
et par toy do ceste prison,
s'il te plaist, scray deffermé.
S'en ce lieu icy mal famé,
let et horrible et difforme,
29853 je meurs par aucune aventure.
Tu en seras troi) blasphémé
et ton saint nom plus infamé
que do me donner ouveiturc ;
Les -luifz en feront murmure
29860 et si diront par grant injure :
Joseph fut très mal informé
D'avoir mis eu sa sépulture
cil qui l'a en la chartre obscure
délaissé mourir enfermé.
29803 En ccst espoir suis confermé,
Jhesus, qui les mors suscitas
et tant de miracles fait as
quand en ce monde pouvoyes vivre,
que par toy je seray délivre
29870 quand te plaira : j'ay ceste foy.
Icy Jhesus entre dans la prison par Jessouhz
et le b lise.
JHESUS
Amy Joseph, paix soit a toy !
n'ayes ja doubte en ton courage
pourtant se tu voys mon visage
de lumière resplendissant.
• 29875 Qui suis je selonc ton samblant?
je voy bien que ton sens varie.
JOSEPH
Raby, tu me sambles Helye,
a la face que luysant as.
JHESUS
Joseph, Helie ne suis pas;
29SS0 i-egarde moy, je suis celly
que tu as mesme ensevely,
Jhesus, propre fdz de Marie.
JOSEPH
Doulz Jhesus donequcs, je te prie,
puisqu'a moy indigne te monsti'es,
29S85 que le sépulcre me denionstres
en qnoy ton digne corps posay.
JHESUS
Vien t'en, je te le monstreray ;
il n'y a prison n'aultre chose
tant soit bien fermée ne close
29890 qui ja t'y face empeschement.
Iry le iiiahie rers le sepulrrc.
JOSEPH
C'est le sépulcre proprement
ou je vous mis pour ma partie.
JHESUS
Or t'en va en Arismatliie,
et quand la aras fait retour,
29895 jusques au quarantième jour
ne te bouge de ta maison ;
car il est l'heure et la saison
qu'a mes disciples je m'appere.
JOSEPH
Je me teudray en mon reppei'e
29900 a vostre gré, mon cher seigneur;
je vous mercy de la doulceur
que vous avez vers moy gardée.
Icy s'esvanouyt Jhcnis.
-MARDOCEUS
Seigneurs et princes de Judée
qui avez l'adniinistratoire
29905 de la loy liaulte et peremptoiro
a laquelle sonnnes submis,
avez vous ja en oubly mis
Joseph, nostre grand adversaire,
qui tant nous a voulu meft'aire
29910 pour porter la bende Jhesus?
N.VASON
II avoit esté dit dessus
et conclu en plam consistoire
que pour son offense notoire,
après la pasque solennelle,
29915 il en mourroit de mort cruelle :
or est ja la pasque passée :
parquoy, connne dit Mardocoe,
de sa mort traictier convendra.
CAYPHE
Mes leaulx amis, qui vouldra,
29920 il en sera tout a cop fait.
ELIACHIN
Mes vous en prions tous de fait,
car très foit offencé nous a.
29833-01 Cfll-- atrophe eal m cfrs de sept sylhibfs. B. C. — 298Ô3 Celuv qui en la A. — 29864 Laissie B. Laisser C. —
29568 pouviez B. pouez C. — 29S70 dieu plaira jeu ay la foy B. C. — 29»71 C remplwe liaux l'indiration scéilique le
baise par la brise. — 29884 tu tes denionstre C. — 29885 tu nie monstres \\, Que le sépulcre me çoit monstre C. — 29891
Regarde ajoutr par \. Voicy le sépulcre voirement B. C.
QUAHTF. lOURN K R
3»J'-!
Malnl)riii?
r.WPHE
M AI, A mu. \
Monseiguem-.
CAYPHK
Vieil (;a.
On a ioy dctoriniiK'!
ÎOOÎS que ce .Toso|ih soit adiiioiK'
devant iiiesseigneui'B qui cy sont :
va le quoiir.
MAI.AIIRIN
Vous Tarez dont
incontinant sans sans plus i)lai(lifir.
dont oncques hoinrao ouyi«t |>arler :
j'ai trouvi- l'huis sniu desceller
ïfiftjo et si l'uy trouvé verroiiillic-,
serré, bcndé et ratrouillii- ;
et s'est Joseph hors transport)* !
DRAGON
Les diables si l'ont emporté
l>ar eiichaiitenient, soie<s sueuiit.
(iUBULi; X
SiK):>.'> Vieil le compter a imsueigneuis,
nffin, s'ilz veulent, qu'ilz le trassent.
MAI.ÀBRIN
Une fols fault il qu'ilz U: sachent,
je leur vois compter de i-oideur.
Ça, sergens, venez moy aidier :
Ï9930 que mal disnés puissiez vous e-^tre !
BRUYANT
Qui l'a commandé ?
MALABRIN
Vostre maistro:
ne faictos point le contredit.
BRUYANT
Nous y courrons puisqu'il l'a dit,
vueillons ou non maulgri' nos deiis.
MALABRIN
89935 Joseph a bon temps ci dedens.
encor n'est il pas on allé :
veez cy l'huis scellé et Imrh'
tout ainsy que je le laissay.
Haro!
ESTONNÉ
Y est il ?
MALABRIN
Je ne sçay,
29940 je 1(! quiers cy de point en point :
mes brief
ESTONNÉ
Tu ne le treuves point ?
est ce ce que tu veulx hongner?
MALABRIN
Ou me peust tout vif meshaiguer,
s'il ne s'en est esvauouy !
MALCUIDANT
S994a 11 s'en est bien et beau fouy :
croiez qu'il y a tromperie.
MALABRIN
^'eez cy la plus forte faerie
Mcsseigneurs, une grand hideur
89960 VOUS est advenue au jour d'uy :
.Joseph est do prison sailly,
et si ne sçay par quel partuis :
j'ay trouvé fermé tous les huis
do verrous bien especiaulx,
89965 scellés et hurlés de vos soaulx
sans y avoir quelque fracture,
et s'est hors de la fermetui'O ;
je ne S(;ay comment j'en foray.
CAYPHK
Que dis tu, dea?
MALABRIN
Il est tout vray :
89970 vos sergens si l'ont veu eulx meismes.
CAYPHE
Veez cy les plus horribles criâmes
qui oncques furent pourpensés.
Anne, dictes que vous pensez :
que ferons nous de cest exploit?
ANNB
89975 Puisqu'il est fait, il faut qu'il soit:
tous remèdes en sont forclos ;
mes d'ung homme en ce point enclos
sans riens deffermei" en saillir,
c'est bien pour soy ti-op esbahir,
899S0 et je m'en esmerveille moult.
BANANIAS
Il fauldra enquérir paitout
ou il est, c'est noccessitc,
pour mieulx sçavoir la venté
299:î0 (lignes h. — 29938 Bciu sire .>sl il iloii.- Iri>p petit H. C. — 2SW. iiasj vos U. C. — XlXn Vovs tu C. bulle B. C
— 89938 Iny laissie B. laisse C. — 29943 esi'orcliier C. — 89950-1 miiii-j%ent B. C. — Ï9958 Joseph] mon huuiuie B. C. —
21KJ55 nos seigneurs B. C. — 899j(i facsnt B. — 8i)<>58 la teneur B. C. — 29965 Je y treuue attaobiei vos seaulx B. C. —
89909 tout] si B. aussi C. —29970-1 niesmes, i-resmes U. — 29982 ne en quel eyte B. C. — 29983 l'our 9<-auoir toute la A.
394
Ml STERE DE LA PASSION
de ce fait par soubtil chemin.
JOATHAN
S9985 C'est bien dit.
30015 que se mi darà? piiint n'y vise;
je vois dire vostre venue.
Jcy viennent les irais chevaliers.
ASCANUS
Dieu gart Malabiiu,
et te doint d'argent pleine tasse !
MALABRIN
Messeigneuis, Dieu vous doint sa grâce !
veez la ung salut bien assis.
ASCANUS
Ou sont messeigneurs?
MALABRIN
Tous pensifz
Î9990 Hz songent en leur siguagogue :
n'a celluy qui ne soit plus rogue
et plus enfilé iju'ung rat pelle.
EMILIU.S
Pourrions nous point estre apellé
pour compter deux mos de besongne ?
MALABRIN
£999j Je na s^ay par Dieu : je resongne
d'y aller tant que Dieu le scet;
c'est icy a dire en secret :
tout le ménage est bien trompé :
Joseph leur est huy eschappé,
30000 dont près qu'ilz ne crèvent d'engaigne,
et sont plus enfilés qu'une graigne
qu'ilz n'ont veau a leur dessus.
MARC ANTHOINE
Encor y a il pis : Jhesus,
qu'ilz ont fait mourir a tel claiu,
S0Û05 est ressuscité.
MALABRIN
Pour certain?
haro ! quel rengrege vecy !
ASCANUS
Pour aussi vray que tu es cy :
il est dcsja tout manifeste.
MALABRIN
Si ara taiitost belle leste ;
30010 mes qu'ilz oyent ces beaux devis,
ilz en enrageront tous vifz
et s'enfileront comme ung ciapault :
mes voit autfort, il ne m'en chault :
droit par manière de devise,
Seigneurs, le grant Die\i vous salue
et voas gard, nobles conseilliers !
Voy la trois gentilz chevaliers
30020 qu'a vostre portai laissés ay,
mes qu'ilz demandent, je ne sçay :
ilz ne veulent riens descouvrii'.
Qu'en feray je ?
CAYPHE
Fais les venir :
s'orrons qu'ilz vouldront proposer.
JOATHAN
300?,T J'espère par présupposer
par ma foy que ce sont ces trois
que nous commismes l'autre fois
d'aller garder ce monument.
ANNE
Croyez que ce sont ilz voirment :
30030 quand ilz ont bien par tout gard('',
peut estre qu'ilz ont regardé
que Jhesus du sépulcre n'yst
et qu'il se passe et se pourrist :
eulx qui sont cauteleuse gent
30035 s'en viennent quérir leur argent,
voulans estre sallariés.
CAYPHE
C'est raison qu'ilz soient payés,
car ilz ont eu peines plusieurs.
NACHOR
C'est raison.
MALAURIN
l^ntrez eus, .seigneur? :
30040 le baing est ehault, on le vous mande.
ASCANUS
Allons, puisqu'on le nous commande ;
auliort aller, je ne les crains.
EUILIUS
Princes des prostrés souverains,
29984 soubtilz moyens B. C. — 29991 rouge C. — 30003 a il pis oe B. G. - 30004 elnin] uliam C. — 3Û0Û6 veez cv
A. — 30015 yuose mydave A. Cause (espiice en blawj poiul u_v vise B. Cora se que point je ne vise C. - 30018 Et garil
vos nobles B. ses, nobles G. — 30029-38 manquent A. — 30039 Entrez seigneurs légèrement A.
I
Q U A R T !■:
Diou soit en vostre compaigiiie !
OA.YPHE
30015 Diou guvii l'assonibleo jolie
et leur doiiit bon jour touteflbis !
Que (lient les g-entilz gallois ?
connnent s'est leur exploit porté?
Jhcsus est il l'essuscité ?
30050 je croy qu'il no luy en souvient.
MARC ANTHOINE
Puisque dire lo vous convient
du point dont nous examinez,
par vostre gré m'en pardonnez
se j'en dis riens aux préjudices
30055 de vous tous et de vos complices ;
ne vous en vucillicz csniouvoir,
une fois le vous fuult sçavoir,
si vault mieiUx cnnuit q\ic demain :
Jkcsus, le prophète haultain,
30060 est relevé de mort a vie.
CAYPHE
Kscoutez cy quel dcableric,
quel dueil, quel passion, quel rage;
escoutez quel liideux langage
pour un cueur humain depaisier!
NATHAN
30065 Sire, vueillez vous appaisier :
par trop se ti aveille d'ire lions,
EMILIUS
C'est tout pour voir que nous dirons.
NACHOR
Hz se jouent : que vous pensez ?
JAcoa
Hola ! compaignons, c'est assés :
30070 comptez le cas aiusy qu'il va.
ASCANIIS
>'e m'appeliez point jeu cela,
afiin qu'il n'y aist point d'estrif:
Jhcsus est régnant liomnie vif,
je ne sçay s'il vous en desplest.
JORRAN
Me.sseigneurs, sçavoz vous qu'il est?
no proferez point telz paroles,
car elles sont lourdes et foies
et moult priUouses a compter :
car tel vous pouri-oit escouter,
combien qu'en esbatant lo dictes,
qui les tondroit pour vray redietes
et y vouldroit adjouster foy,
et ainsy img aultre après soy
30075
30080
.1 0 II R N K K
et tonsjours au dernier le |iir«,
30085 car mauvaise nouvelle empire
en la bouche d'ung frivoleur :
ainsi en sourdoroit erreur
telle qu'on no pourroit abatrc,
EMtI.IL'8
l'ensez vous qu'il se vueille esbalre
30090 a donner boiu'des n entendre?
prenez ou vous le vouldrez prendre :
je dis connne il a dit devant
que Jhesus est homme vivant
sensiblement comnic vous estes.
ANNE
30095 Taisiez vous, taisiez, foies bestes :
nou.« semez vous ces boui'des cy
pour nous faire entendre cecy ?
Taisiez vous, que plus n'en oyons,
car de desplaisir nous noyons,
3O10O puisqu'il nous vient quelque pai-sonue
qui de ce .Ihosus nous sermonne,
car do luy ce n'est qu'ung abus.
MARC ANTHOINE
.Je ne s^ay, sire, quel Jhesus :
TOUS le mettez a graut rabat,
30i05 mes par le gloi'ieux sabat
qui est vosti'o joui' solorapnel,
il est issi do son tombel
raaulgré nous et tout uostrc |K)rt.
CAYPHE
Veez cy le plus cruel raporl
.30110 qu'oncques homme oyst prononcer;
c'est assés pour ung cuour porscr
de dueil et en quatre pars fondre,
et n'est qui m'en sache deffeudro
que je ne meurre de courroux.
YSACAR
;t0115 Siro, pour Diou appaisie/. vous,
telz nios n'yssent de vostre bouche;
je sçay bien que le fait vous touche,
mes il fault que vous le passez:
s'ilz se sont ung peu elTorccs,
301Î0 il fauldra bien qu'ilz se modei-ent.
CAYPHE
Vous ouyez que tous pei-sevei-ent
fermes en une oppinion ;
si fault par inquirioion
qu'on leur face aultre chemin prendre.
UARUOCEUS
30125 O faulces gens, l'en vous deust pendre
305
30055 ne des vosln>s li. — 30064 despei-ier 0. — 3C067 pour tout vray que lu disons A. — 3Û07S nioull mauijuf
|p<>rilleuses B. G. — 30084 au] le B. C. — 30093 homni.'] de fait B. C. —,30099 Tensoz vous que nous (l,i fin mtinquf) C.
— 30103 sire nir/fiyuc jhesHs réitelti A. li. — 30107 yssu C. — ."Oll.S nous li. — 30119 Sili sont ung petit eHVonss«i B.
effrayez C. — 30121 voie/ B. C. — 301Ï3 vojc dncUon B. 0. — 30J25 on vous puist pondre 11.
396
M I S T K R E DR LA PASSION
a iing gibet et estranglcr
rl'avoir laissié Jliesus omblor :
dont tout vostre fait est rompu.
NAASON
Vous avez esté corrompu
30130 et séduit par force d'argent
de ses disciples et sa gent
qui vous ont sceu bien abruver,
et puis pour vostre honneur sauver
vous nous servez de vos ponnees :
30135 elles sont ung peu trop pellees ;
portez les aultre part reffalre.
ELUCHIN
Pensez si bien a vostre affaire
que vous vouldrez : s'il est trouvé
encontre vous sceu et prouvé
30140 qu'il y aist en vous faulte aucune,
et que par argent ou peccuue
ayez le corps Jhesus vendu,
il vous sera bien cher rendu ;
car par la verge de Moyse
30145 vostre char en sera subraise
a tel dueil que vous en mourrez.
.\SCANUS
Vous ferez ce que vous vouldrez,
mes s'en vous n'y a mesprison
vous ne nous ferez que laison,
.30150 car en riens nous n'avons raespris ;
mes vous estes si bien appris
de gens injustement pugnir
que ne vous en sçavez tenir:
ne créiez point que pour menace
30155 ne pour honte que l'en nous face
n'yrons encontre de nos ditz :
j'ay dit et de rechief le dis
que Jhesus en corps et en ame
est yssu de dessoubz sa lame
30160 pour aussi vray que je vous voy.
ANNE
Or bien <,:a doncques, respons moy :
se du fait tu as ou la vcue,
que ne doffeniloi.s tu l'issue
affin qu'il ne s'en fust party ?
ASCANUS
30165 Nous estions tous en tel party
et en si giant |)erplexité
qu'il nous sambla que la cité
et toute la terre trembla.
E.MII.ILS
La veuo si fort nous troubla
.30170 que tandis qu'il yssit dehois
a terre cheusmes comme mors
de paour de fouldre et de tempeste,
et n'eusse bougé pié ne teste
qui m'eust donné cinq cens besans,
30175 tant estoie mas et pesans,
et tous mes compaignons aussi.
MARC ANTHOINE
Mes plus fort : nous estans ainsy,
je ne s'çay pas se c'estoit songe
ou vision ainsi qu'on songe,
30180 femmes ouysmes qui qucrroient
le corps Jhesus et fort ploroicnt
qu'il n'estoit plus en son tombeau ;
lors perceusmes ung jouvenceau
ayant le vis resplendissant
301 S5 conmie fouldre du ciel yssant
qui la ])ierre a terre versa
et puis aux femmes dénonça :
« Ne querez plus dorénavant
le corps Jhesus: il est vivant.
30190 Allez a ses disciples dire
que bien tost s'en voisent de tire
en Gtdilee : la ira
si brief qu'il les pi'ocedeia. »
Kt beaucop de menus sermons
30195 que pour tout vray vous affermons,
mes compaignons et moy vrayment.
ANNE
Or me dis donc par ton serment,
qui estoient ces femmes la
a qui ce jouvenceau parla,
30200 comme vous nous faictes entendre?
pourquoy ne les alliez vous prendre
affin qu'en feussions informés ?
BANANIAS
Aviez vous paour ainsi armés
et (stophés de bonnes haches?
30205 il pert bien que vous estes lasches,
couars et pleins de recraudise :
s'en vos cueurs eust eu vaillandise,
vous en eussiez eu piet ou elle.
ASCANUS
II ne fault que dire prenez le,
30210 qui vous ot ainsy caqueter :
qu'or pleust a mon dieu Jupiter
qu'a nostre point eussiez esté,
30132 nbeuurer H. b.iliiller C. — 30134 pellees B. C. - 30139 et] ou B. C. — 301'i0-l manquent C. —30142 le corps jhesus]
ce séducteur B. C. — 30147 pourrez C. — 30155 Nerubescenre quon B. C. — 30165 tou.s munque B. C. — 30177 dormalis
B.C. —30181 jhesus et] et de ce B. C. — 30191 Que leur chemin vueillenteslire B.C. — 30196 Qui ne lait veu pareillement
B, C. — 30202 Seussent du fait nous H, C. — 30206 couars] gras B. mas C. reoraindise B. recreandisc C. — 30208 eu)
ou C. - 30209 tenez le B. C.
guA
voir comiiioiit vous feussiez jwi'tc
et conduit (le liaultes lii(,'oiia ;
30215 pensez vous que, se nous cusson»
nous peu tetiii' en nostre estage,
nous n'e\issions point tenu visage
et barbe d'homme a tous oostés?
si eussions, ne vous en doubtez.
.10220 Mes contre tel merveilleux signe
qui se fait par vertu divine
comme nous croions sans doubtoi',
il ne s'i fait pas bon bouter :
aussi, vous le sçavez assés,
30225 nous (>stans ainsi renvei-sés
a terie par terrible instance,
estoit il on nostre puissance
de deftendre et de retenir
aux fenmies l'aller et venir?
30230 vous |)ouez congnoistre que non.
CAYPHE
Par le vi'ay Dieu et par son nom,
vous estes trois mauvais barteurs,
et comme desloyaulx menteurs
en riens nous no croyons vos ditz.
EMII.IUS
30235 Nous ne sommes point csbahis
se peu de bien tenez de nous :
vous avez peu veoir devant vous
.Ihesus faire tant de miracles
sur muetz, sur demoniacles,
3fl2'éO et oncqui>s n'y voulustes croii-e :
tendrez vous donc pour chose voire
chose di> quoy jioint ne farçons?
ANNE
Vous estes trois mauvais garçons
et en vos malices unis ;
302^5 briefmcnt vous eu serez pugnis
si serrement qu'il y perra.
MARC ANTHOINE
Autfort, qui nous en pugnira,
nous serons pugnis sans mcffaire ;
mes aussi vous le pouez faire,
:J0250 que vous avez emprisonné,
injurie et villeué
Joseph, le notable seigneur,
ou vous n'avez guaire d'ouneur,
qui vo\is en osast i)ien l'cmettre.
ASCANIJS
;»2^ Puisqu'il fault parlei' a la lettre,
la chose soit ainsy partie :
rendez Josejih d'Arisniatie
302iri que] point A. — 3()21(i de lier courage
vo^l^i^lr■s li. voulstes C. — .';02'i2 nous vous ili'si
Kt se C. — 30275 roinprenons B. taisons fort C -
IITK lOURNEK
397
I
que vous avez sans mcspiisons
enfermé d<îden» vo» prisons,
30260 et s'a ce vous voulez comprendre
nous nous faisons fort de vous rendre
Jhesas que nous avons ganlé
au sépulcre.
CAYPHB
C'est bien lardi- !
Très bien vos cautellet» entons,
3026Ô et sur ce point sonnnes contons :
faictes que .Ihesus sçit rendu,
car .Josoi>h n'est mort uo pendu,
en Arismatie demeure,
et y envoirons de «este heure
30Ï70 [Miur l'admcuer, s'il est bcsoing.
EMIUliS
Kt aussi ne soyez eu soing :
ce n'est pas chose trop cellei!
que .Ihesus est en (jalilee :
se do .Ios<!ph pouez (iner,
30*75 nous vous promettons d'admencr
.Ihesus, se le cas le requiert.
JOATHAN
Qui plus de la matière enquicrt
et plus est fol, ce m'est advis :
Caiphe, cessons ces devis
30880 de paour qu'il n'en sourde contraire ;
faictes ces chevalière retraire,
et vuidier du parquet grand omble,
et puis ayons conseil ensemble,
car je veil mouvoir une <loubte
30285 qui en mon courage se boute,
ou il chet argumcns bien foi-s.
CAYI'HE
J'en suis content.
MALABRIN
Vuidcz deliors,
soigneurs, faictes d'icy deppart;
messeigncurs parleront a part,
30290 puis vous orrez votre libelle.
ASCANtS
< )uyl, ilz nous la bauUiront belle :
nous en sei-ons très bien roU'ais.
JOATHAN
Seigneui-s, jwur pourvoir a nos fais,
je regarde plusieui-s daugiers :
A. — 30217 Que nous l'ussions A. — 'SOîSi barrelteurs C. — 30MO
ssons H. disons C. — 30*51 oseroit C. — 30260 sur re nous C — 30271
.30291 bailleront B. Je oruis quilt luy bailleront A.
398
30295
MISTEREDE LA PASSION
vous avez a ces chevaliers
une grand matière entamée;
mes s'elle estoit parconsomniee,
ce seroit pour nous fort restraindre :
vous les avez voulu contraindre
30300 qu'ils nous facent Jhesus avoir,
mes vous ne pourriez pas vouloir
s'il est vif qu'il nous fust rendu :
tout nostrc fait seroit pardu,
mes trop mieulx nous vault qu'il s'estrangc
30305 de nous en ung pays estrange,
que jamès n'en oyons parler :
par ce jioint pourrons mieulx celer
sa résurrection par droit,
s'il est vray que suscité soit :
30310 au moins se la nouvelle a cours,
nous le pourrons nyer tousjours,
qui que le nous aist exposé.
CAYPHE
Joathan, c'est bien proposé :
mes comment en ferons nous dont ?
JO.VTHAN
30315 Veez cy deux voies qui y sont
dont il nous fauldra prendre Tune :
ou les corrompre par peccune
et les tirer de nostre bcnde
a force, ou que l'argent se prende,
30320 tant qu'ilz facent cheoir ce bruit;
ou les prendre de belle nuit
tous trois par soubtille manière
et les getter en la rivière
ou leur trancher les hastereaux.
JHEROBOAN
303J5 Tant qu'il touche ces deux consaulx,
très volentiers je vous escoute,
mes le dernier ne me piaist goûte,
quoy qu'il soit du premier en soy ;
et veez cy la raison pourquoy :
30330 se ces trois nous faisons mourir,
c'est pour ung danger encourir
bien terrible de deux costés :
l'ung est car ilz nous sont prestes
de Pilate, nostre prevost,
'30335 qui le sçaroit ou tard ou tost,
et pour soy venger de l'erreur
en resoriproit a l'empereur
que ses gens avons fait occii'e,
et voyla pour nous tous dcstruire ;
30340 l'aultre qui vault pis que le sept
si est, que se le peuple scet
et ouyt, combien qu'il diffère,
que nostre rigueur se jirefcre
sur ces trois pour les mettre a mort,
30345 chacun jugera nostre tort
et que Tarons fait par cnvye
pour ce que Jhesus est en vye :
lors sera Jhesus élevé ;
adonc nous sera repprouvé
30350 mille fois la mort du brigueur,
et comment a toute rigueur
y procedasmes en derrière;
ainsi desmourrons en l'arriére
sans seignorie et sans pouoir :
30355 mes pis, le menu peuple, espoir,
encontre nous s'eslevera,
qui ensemble nous destruii'a
de mort honteuse a desmesure ;
et ainsi dont je vueil conclurre
30360 qu'il vauldroit mieulx pour ce cop rompre
))ar force d'argent les corrompre
que d'y quérir aultres sentiers.
ANNE
Je vous escoute volentiers,
Jhoroboan : subtillement
30363 proposez et prudentemcnt,
et n'est courage qui vous oye
qu'a vous ouyr ne se resjoie ;
vous avez l'art de rhétorique,
et sçavez toute la pratique
30370 que doit avoir bon orateur,
et comme un sage consiUteur
je me tiens de vostro partie.
NACHOR
La chose est très bien assortie :
on ne la pourroit mieulx songer ;
30375 mes encor y gist il danger
qu'ilz n'y veuUcnt pas consentir.
NATHAN
Je cuide bien d'eulx tant sentir
que si feront, sauf vostre grâce :
il n'est chose qu'argent ne face :
30380 argent courrouce, argent relessc;
argent abat, argent redresse ;
argent donne, argent toit office j
argent corrompt droit et justice
et d'aultres choses cent milliers.
30296 Ja une B. C. — 30301 valoir A. Vouldriez pas vouloir C. — 30321 sur une B. C. — 30328 du] dit A. — 3033'
rescrira C. — 30338 arions A. — 30340 les sept C. — 30342 quil] quon C. — 30344-7 quand mors les scaront Tous leurs
oppinions arout Que Jhesus sera surrexi Et qua tort leur ferons reoy B. C. — 30350 begueur C. — 30300-i les cor-
rompre, le cop rompre A. — 30368-9 «t'i/i'/iteiK A, — 30370 Vous estes prudent orateur A. — 30380 resjoye A. — 30i81
l'ait joye A.
QUARTE JOUUNKR
r»9
TAYPHE
30385 Fay rctoiii'iier ces chevnliei-s,
la sinngogiio los désire ;
et les hasU".
MAI.AimiN
Voleiiticrs, siro,
vous les aiez a peu do plest.
Chevaliers, rentrez s'il vous plaist ;
30390 vostre fait est tout appoiutié.
ASCANUS
II/, ont bien loiigueiiiont traictio
et fuit (les devis inig grand tas.
CAYPHE
Ça, messoigneurs, veez cy le cas :
nous avons pensé a l'erreur
du fait de Jhesus l'enchanteur,
DU rudement vous comportez
eu tant que vous nous rapportez
nouvelle do luy forte a croire,
([ue ne ci'oions pas estre voire
no croirons tant que siècle dure :
car ee nous samble chose dure
a ouir et tout impossible
qu'ung homme mortel et passible
qu'on a pu vivant tant grever,
après la mort pui.st relever ;
co ne soroit pas seulement
folie, mes abuscment,
par toute la loy do Judée :
car vous S(,avez qu'il a fondée
et presché une loi nouvelle ;
et donc se cecy se revelle,
grand meschief nous en advendra,
car tout le monde so tendra
a la loy qu'il a connnanccc,
et sera la nostro laissée
qui n'est ne d'Eve m; d'Adam,
ne de Xoé ne d'Abraham :
Dieu en fit la fondaciou.
Neantmoins vostre rolacion
avons paciemment receu,
et ont messeigneurs très bien sceu
30305
30100
30'iOj
:;0110
, 30'il5
80420
30i35
30U0
qu'a celluy sépulcre gai'dci-
V0U8 vous este» laissic frauder,
et que des disciples grant somme
30425 do Jhesus, ce malheureux homme,
se sont sur la nuyt assombh?
et qu'ilz vous ont le corps erablé :
la chose est ja notoire et clere ;
chacun le scet et considère
30430 qu'ilz ont ce fait furtivement.
Confessez le tant seulement :
rémission vous est donnée,
la chose vous est pardonncc
et le Jmrdonnous de rechief.
EMII.IUS
Prince, ce seroit giant meschief
que pour recouvrir vos offcnccs
nous naviions tant nos consciences
de mentir si evidamment :
ja ne le dirons aultremcnt ;
bien noas gouvernez en entfant.
Jhesus, victeur et tiiumpliant,
est vivant du tombeau sailly ;
nous n'avons erré ne failly;
nous l'avons gardé contre tous
30445 et encore demandons nous
nos gages pour ces ti'ois journées
pour nos poncions ordonnées,
combien que despit en ayez;
et se nous no sommes payés,
;i0450 maulgi'é vous nous eschapperons
et publiquement prescherons
que Jhesus maulgi'é vostro effort,
comme Dieu tout puissant et fort,
est ressuscité en vray estre.
ANNE
304K Ha ! seigneurs, par le Dieu cclestrc,
voas estes gens comtois et sages :
• modérez un peu vos langages
et ne tenez plus ce chemin :
prenez de nous ung courtois vin
30460 pour nourrir amour et concoixle,
et vous tenez de nostre corde :
en vostre raercy nous mettons
et de tous poins nous submettons
a passer tout par vostre esgart,
30465 ou cas que vous arez regai't
a gai'der l'honneur qu'en vous pose.
MARC ANTHOINE
0 dea ! voila bien aulti-e chose :
vous reffraindoz ung peu vosti-c ii'C.
30387 El le A. — 30400 sieile] ricl C. — 30102 ouir) hiik homm.- B. - 30103 ung iii.ia'iur A. ^ 30117 iio<-| '"^fj- -
Sont voulu dp nuyt assembler A. — 30437 sont venu lanibler A. — 30137 blessissions B. bk'ssions C. — 304» 1
lîostre escient IS. C. — 30157 couralges B. C. — 30162 nous) vous C.
■ 30167 lela Psl nultro B. f.
400
MISTEHK DE LA l'ASSlON
Dictes ce que vous vouldrez dire
30170 et doulceiuent nous vous oi tous.
JMnDOCEUS
Regardez quel vin nous donroiis
après noises et tous debas,
et en tous lieux ot hault et bas
que jamos vous vous tiouvercz,
30i75 ])ar serment vous affcrmorez
que les disciples de Jbesus
ont par nuit levé le sercus
et ravy leur maistre dedens.
ASCANUS
Nous mentirons par my nos dens :
30180 il n'est rien qui ce moyen vaille.
NAASON
Et bien, de cella ne vous chaille :
s'il est tout vray, pour vray s'en voit,
se c'est mcnty, bien nionty soit :
tousjours serez creus en l'enqueste ;
30485 accordez nous ceste requeste,
voire pour bien le desservir.
F.MILIUS
J'entens bien : on nous veult servir
d'ung beau dard de corrupcion.
MARC ANTHOINE
Vous nous faictes cy mencion
30490 d'estre faulceres et baveux
en payant un vin gracieux :
je ne sçay quel vin ne quel saidce,
mes s'il fault que mon serment faulce
pour devenir menteur en fin,
30495 j'en aray ung si bon lopin
qu'il n'y fauldra point retourner.
ASCANUS
Regardez que voulez donner
habillement.
ELIACHIN
11 faut svavoir
quel argent vous voulez avoir',
30500 et après vous serez souldés.
EMILIUS
Faictes ottre.
BANANYAS
Mes demandez;
faire le devez, ce me samble,
et puis nous penserons ensemble
se Testât le pourra souffrir.
MARC ANTHOINE
30505 N'osez vous quelque chose offrir ?
avarice vous retient bien.
JOATHAN
Aussi vous ne demandez rien :
la demande vous appartient.
NACHOV,
Nous tenons cy halle de nyent :
30510 conmie le plus fol je m'advancc :
gens chevaliers, pleins de vaillance,
serez vous ce bruit apaisans
se vous avez cinq cens besans
de fin or du coing de la ville ï
ASCANUS
30515 En voulez vous donner dix mille?
vous nous rabaissiez \mg i)eu trop.
CAYPHE
Dix mille, ce seroit beaucop :
vous nous mettez fort en renchere.
EMILIUS
Aussi vendons nous chose cherc
30520 et de grant precieusetc'.
ANNE
Et que vendez vous?
EMILIUS
Vérité,
qui est trésor a l'espriser
qu'on ne pourroit assés piiser :
vous nous faictes bien rabaissier
30525 quand vérité nous fault laissiei'
l)our mentir a vostre querelle.
NATHAN
La sonmie est ung peu trop cniello :
s"il vous plaist, vous en quitterez.
MARC ANTHOINE
11 fault que vous considérez
30530 que quand son disciple fraudastes
et de le livi-er marchandastes
en vos mains, sauve sa deffenco,
ce fut petite rescompence,
baillier trente deniers en somme
3fô35 pour avoir la mort d'ung tel homme ;
et si ne passa pas avant,
que vous eustes maistre et servant :
le maistre a la croix se rendy,
le faulx disciple se pendy :
30510 si vous fut vostre argent rendu ;
et par ce tout bien entendu,
se par vostre énorme péché
eustes sa mort a grant marché,
sa vie vous sera vendue
30545 de tant plus cher a la vallue,
pour ce que la voulez estaindre.
30478 tire C. — ; 04S0 que B, C. — 30i84 Uci|Ueste lî. - 30«I9 quel Hnance B. C. — 30509 cy viatique A. — SOJIl
Oenlilz hommes B. C. — 30517 seigneurs cest B. C. - 30521 Et que r.ous A. — 30522 a bien in iser A. eks [.rier
B. — 30523 midiîiie A. — 30532 sauf B.
Q U Ul T K .1 0 U R N K K
iOl
MAllDOCEl s
Voiis voulez noslre fait attaindrc
par trop foit, dont ave/, mespris ;
mes dictes eu regard du pris
3œjO que nous en irons rabatant.
ASCANUS
Riens, fions, vous en payerez tant :
il n'en fault ja tant faire noisc;
et de fait encor il nio poisc
que nous ne l'avons rais plus hault.
CAYPHE
30555 Ung petit reti'iiii'c vous fault,
si conduirons do cest affaii'O.
EMILItS
Volentiers.
et nostrc prince Oaiphas
30580 qui cy est iiresent, si luy pleit,
en fera la niiso et le prcst,
et nous prometrms a luy rendre.
CAYPHB
Je le s\-ara_v bien ou reprendre,
et ne vous en souciez plus.
JACOB
30585 Est ce fait ? sommes nous conclus ?
y savez vous plus qu'esplucher ?
JHBÇOROAN
Il n'y a que de les hucher
et leur délivrer leur argent.
|P0SE.|
CAYPHE
Ça, qu'est il de faire ?
on besonge si dangei'ouse,
fault bien prudence cauteleuse;
30360 vous avez leur rapport ouy ;
aront ilz ccsto somme ?
ANNE
Ouy,
il no so poust faire nultrcniont.
MARDOCEUS
11 fault bien qu'ilz l'ayent voirement :
nous no pouons plus délayer.
JACOH
30565 Voire, mes s'il vient a payer,
ou prendrons nous somme si ample ?
JORRAN
Ouvi'ir fault tous les trous du temi)le,
et ce qui est pour la fabrique
il fault qu'on le motte et applique
0570 a faire ces solucions.
YSACAU
Nous ferons des exactions
sur le peuple toutes nouvelles,
et gi'ossos tailles et gabelle?
a tous costos larges et grandes,
575 et ferons croistro les offrandes
sur le peuple a si grosse monte
que tost vendrons a nostro compte
soit par jihas ou soit par nephas;
CAYPHE
Ça, chevaliei's et vaillant gent,
30S0O messeigneurs ont cy ordonné
que cest argent vous soit donné.
Le veez cy, vous l'emijorterez,
mes avant vous prometorez
sur tons les dieux de vostre loy.
30595 lie tenir leaulté et foy
sur ce que vous ferons promettre :
c'est de tesmoigner a la lettre
par tout et devant gens quelconques
que Jlirsus ne suscita oncques,
30600 et que SOS disciples sui'viudrent
qui le corps levèrent et [irindrent
en dormant sur la nuit obscure.
EMILIUS
Chacun de nous promet et jure
de tesmoigner qu'ainsi se fit.
JACOB
30605 Or levez les mains.
Icij lievent les mains.
ANNE
Il souffit.
Tenez, raectez en vostre bourcc ;
veez la de besans belle source
pour fourrer vostre canepin.
MARC ANTHOINK
Allons partir noslre butiu
306)0 rie a rie, a chacun sa pièce.
ASCANUS
Je ne vous desdiroic en pièce,
car aussi fault il bien qu'il soit,
/cy s'en tont partir ensemblr.
30547 entuiulre B. C. — 30551 autant A. — 301)53 l'ait] fault A. — 3tt66 La vo)c a Irouuer ncst |«is aiii(il« B. C. —
0507 les trésors A. — 30584 buucicz] essouicz B. — 3ti5S6-7 manquent C. — 3U5SU rc5»uscita A. C. — 306(fâ iiieltei
Iles mains '',. — 30612 munnu,!- C.
Pas
26
402
MISTERE DE LA PASSION
ELIXCHIN
Nous avons fait ung bon exploit
d'avoir ces soudards corrompus- :
30615 aultrement nous estions rompus
et nostre fait tout esclandry.
NAA.S0N
A nostre honneur bien eatendy
cil qui premier l'a pourpensé.
EMILIUS
Savez vous que j'ay cy pensé,
30620 en nostre butin partissant '(
MARC ANTHOINE
Et quoy ?
EMILIUS
Ung moyen suffisant
pour avoir fourrée la patc :
allons a monseigneur Pilate »
porter nostre bourde premier;
30685 il est de donner coustumier :
mes que très bien y procédons,
il nous donnera de beaux dons,
car la nouvelle luy plaira.
ASCANUS
Or y allons, qui m'en croira :
30630 je croy que nous ferons que sage.
MARC ANTHOUNE
Allons dont sans plus de language :
si gaignerons pour l)ien mentir.
[Pose. |
s. LUC
Cleophas, temps est de partir
tandis que le temps est umbrage,
30635 pour aller en nostve voyage,
c'est en Emaus le bon chasteau.
CLEOPHAS
Le temps est gracieux et beau
et n'a pas trop ardant chaleur :
le partir nous est le meilleur'
30ê40 ou cas que vous y consentez.
s. LUC
• Veez cy nos bourdons apprestës :
il ne fault que nous mettre en voie.
CLEOPHAS
Le Dieu d'Israël nous convoyé !
il fait ung beau jour et plaisant
30645 qui vault mieulx que souleil luysant
a gens qui vont par le chemin.
le y se mecleiit a loye et tendis viennent les
chevaliers vers Pilate,
MARC ANTHOINE
Prévost, le grand dieu Apolin
accomplice vostre désir !
se vous avez ung peu loisir
30650 de besongner a nos parsonnes,
nous vous dirons nouvelles bonnes
et que vous orrez volontier.
CII.ATE
Aussi m'en est il bien mestior
qu'aucune nouvelleté j'oyo
306» qui ra'esjouyssc et me resjoye
et qui voit mon cueur appaisant,
car il est tant triste et pesant
que c'est le plus triste des tristes.
EMILIUS
Je cuide que pieça n'ouystes
30*660 nouvelle a vous plus agréable.
PILATE
Ha ! fortune très variable,
variant variableraent,
tu m'as fait faire ung jugement
dessus l'innocent et le juste
30665 le plus faulx et le plus injuste
qu'oncques juge sentencia !
ho ! que dure sentence y a !
plus m'ennuye, tant plus y pense,
car jamès juste resconipense
30670 n'y sçaroie rescompcnsor
pour riens que j'y sceusse pencer ;
mes ma malheuree pensée
en est très bien l'ecompensee
en très depiteux pensement;
30675 par ma loy ma pensée ment,
car de dueil en a au surplus
si grant charge, qu'el ne pcust plus.
Pour complaire a ces faulx Juifz
je me suis eu ung danger mis
30680 d'estre privé de mon office :
pour complaire a leur maléfice
je me suis mis en ung destroit
ou nul d'eulx ne me congnoistroit
se fortune me vouloyt nuyre :
30622 de largent en haste A. — 30630 que sage] si^auoir B. C. — 30631-2 maurjumit B. C. — 30033 partir] mouuoir
B. C. — 30642 en] a B. G. — 30640 peu manque C. — 30654 nouuelle B. C. — 30655 inosleesse B. par quoy jaye
liesse C. — 30674-5 manquent B. C. — 30676 Qui a tant de dueil A. — 30678 faulx] maudis A. — 30682 mis manque ('..
Q I : A R T E
30685 une foys m'en verray dostruire,
c'est ma foy, le cueur me le dist.
ASCANUS
Taisiez vous, sire, c'est mal dist :
ja ne vous fault en tel dueil traire,
car nouvelles tout au contraire
30690 apportons a vostrc [jlaisance.
Je croy que vous avez doubtance
que Jhesus de mort no l'clieve,
par quoy cy npW's ne vous gi-icfve
la sentence que vous donuastcs,
30695 quand en croix mourir le jugeaste» '<
ne créez jamès telz sermons,
car tous li-ois nous vous affci'mons
sur la foy et la leaulté
qu'a to\is nos dieux de majesté
30700 devons en vray honnnage rendre
qu'il est mort, aussi mort que cendre
et que jamcs n'en lievcra.
PILATE
Qui est celluy qui le sçara ?
vous pouez savoir a grant peine
30705 se la chose est faulce ou certaine :
tout le monde en parle en derrière,
et est la voix si coustuniicrc
qu'elle voUn jusqucs aux ciculx.
MARC ANTHOINE
11 n'est qui le puist sçavoir mioulx
33710 que nous trois, tout bien regarde :
le moniunent avons gardé
puissanniient et de bonne taille,
tous fcriues eu Ijonnc bataille
pour le deffcndre a toutes mains.
PILATK
30715 Mes a quoy estes vous certains
que ce Jhesus n'est point vivante
est le corps encore gisant
ou sépulcre ou on le posa ?
EMILIUS
Nennil, sire, mes pis y a :
30720 très bien nous sommes contenus :
mes ses disciples sont venus
par nuit en armes asscs fors,
lesquelz si ont emblé le corps
et ont/', cauteleusenient.
l'ii.ATK.
30725 Donc vous portâtes meschamraent
(piand il/, vous sourvindrcnt ainsy :
que ne gettastes vous ung cry ?
J 0 U K N K K 403
tantost le peuple y fust couru,
et eussiez esté secouru ;
.30730 mes vous l'avez laissic embler,
par quoy il pouri'a ja sambicr
que de ce mal soicz contens,
participans et consenteus
de leurs inTasions malignes,
:t0735 et par con.scqucnt estes dignes
il'avoir tranché les hastereaux,
car auteurs et douuans consaulx
on doit [lugnir par poix égal.
A.SCANU8
Ha ! sire, vous entendez mal ;
30740 pardonnez moy se je le dis :
ces faulx disciples dessus dis
ne l'ont pas omble ne receu
en veillant no de nostre sccu,
mes ont guaitié nos ennemis
30745 'que nous feussions tous endormis.
Ainsi, nous dormans d'aventure
])ar la pesance de nature
qui ne peust pas tousjoui-s veillier,
mes luy esconvient sommeillier
30750 aucuncffois quoy qu'on s'efforce,
sont venus de fait et de force
prendre lo cori)s entour myuuit
et l'emporter s;uis mener bruit
enterrer dessoubz une aultre arche,
30755 mes en quel terre n'en quel mai-che,
nous trois n'en sçavons plus avant.
FII.ATE
Vostre fait va pis que devant,
et vous iiionstrez gens très luesclians
pour deux poins qui vous sont touchans.
30760 Kt premier estes a pugnir
qui alléguez vostre dormir,
veu que pour hommes esprouvés
et gens dignes de foy trouvés
on vous bailla loi"8 l'avengarde
30766 de pi'endrc a ce sépulcre gai-de,
et connue las et recrcans
avez esté trouvés dormans,
par quoy a deshonneur et honte
vous trois n'avez aceu rendre compte
30770 de ce que vous avez empris.
D'aultro part vous avez mespris :
car quand nu^chant homme s'excuse
et en s'excusant il s'accuse,
c'est petite excusacion
3071S laillie B. - 30723 ont eniporlo li. 0. - 307Î4 El érable B. C. — 307ÎG souppridrent A.— 3073Î-3 le ra«l fussiez
LonsentOM» Pnitieipiuis H .itou.-b.ins H. .lechellaos Piirlioipiaua et .•onseutKiis C. —30737 «gens B. C. — S0743 de
mawiue B, - 30747 pes.inteur C. - 3U749 Ansois se veult reffor.-iller B. C. - 3075Ï comme a iiiNnuil B. C. - 3076»
Vous qui A. — 30763 lov 1 lait B. C.
404
30775
I)ien digne de puguicion :
vous eu avez fait ensement,
car niaisement et faulcemeiit
vous mentez, et vous veil desdire :
comment osez vous icy dire
30780 par vostre faulz cueur négligent
que ses disciples et sa gent
qui vivant l'ont voulu servir
soyent venus son coi'ps ravir
dehors du tombeau remouvoir ?
30785 comment le pouez vous savoir ?
EMILIUS
Nous avons veu qu'ilz l'ont recous.
PILATE
Et vous dormiez, ce dictes vous ?
vous cuydez cy vous excuser
pour autruy a tort accuser ?
30790 tout vostre fait ne vault pas maille. ■
Allez, mauvaise ribaudaille,
allez, orde et pute maignie,
allez, perverse progenie,
passez, troussez hors de ma voie,
30795 que jamès nul jour ne vous voie :
vous avez parlé aux Juifz ;
faulx larrons, vous estes séduis ;
servez vous de venin couvert ?
se jamès jour au descouvert
30800 je vous puis en ung méfiait prendre,
je vous feray tiayner et pendre,
et se ce ne fust pour l'honneur
de nostre sire l'empereur
a qui je suis et qui vous estes,
30805 tout a cop vous feisse les testes
voiler des espaules tous trois ;
allez, allez ; une aultre fois
je vous retrouveray a part.
MARr ANTHOINE
Or sus ! que le deable y aist part !
30810 quel serventois !
EMILIUS
Pas trop pieulx.
ASrANlIS
Est ce cy le vin gracieux
que nous avons pour nostre paino ?
MARC ANTHOINE
Je n'y rentreray de sopmaine :
MISTKRE DE LA PASSION
il cy gist ung mauvais escot.
[Pose. |
s. LUC
30815 Gleophas, nous ne disons mot,
nous en allons icy busant :
quand on s'en va tout devisant,
on en va plus joieulx par droit,
et la lasse qu'on y reçoit
30820 ne donne pas tant de labites.
CLEOPHAS
Il est ainsy que vous le dictes :
on en va plus aise d'assés.
s. LUC
Or' chantez ce que vous pensez :
il m'est advis qu'il nous ennoic.
CLEOPHAS
30825 Frère, chanter se je vouloye,
la chançon seroit bien piteuse :
je pense a la mort douloureuse,
a la terrible passion
et dolente execucion
30830 qu'on a fait au prophète saint
que tout le peuple pleure et plaint
si foi-t qu'il n'est plus de pitié.
s. LUC
0 frère, il a esté traictic'
bien piteusement, Dieu le scet,
30835 et le jour des fois plus de sept,
toutes les fois qu'il m'en souvient,
si grand doleur au cueur me vient
que je ne le puis oublier.
CLEOPHAS
Il se souffrit prendre et lier
30840 et admener boutant, tirant,
sus Anne, le mauvais tirant,
par les mains de faulx garnemens,
et la souffrit tant do toui'mens
que Dieu seul en congnoit le nombi'c.
s. LUC
sos^iS Mes parlez de l'horrible encombre,
des letz mots, des illusions,
des tormens, des derrisions
qui luy furent fais en l'ostel
de Gaiphe; et fut mené tel,
30850 craché son précieux viaire
30777 niauuaisement C. — 30783 ayeiit venu A. — 30785 pourries B. C. — 30786 Emilius ne fait 2>iis il'
Que [C. Qui] sauez vous quil a B. C, — 30792-3 maijfnee, fauloe progeuiee A. — 307!'0 à ces A. aux fau
Quel bien veij-'nant A. — 30S1C bcsant C. — 30S21 est manque B. — 30824 aduuie B. — 30S'cO hâtant C.
'Intcrricptioii :
faulx C. — 30810
Q U A R T !•:
sur le mauvais jugo advei'sairo,
Pilato, que Dieu puist iimuldiro ;
et la n'est liomine qiii scout dire
lesgi'ans hidimis qu'il ondMi'ii;
MSSr. je no s(,'ay conuncnt il dura
veu le sang qui do luy eourust,
i^t in'osbahys qu'il n'y inourust
lo joui- plus de coût mille fois.
CI.EOl'llAS
Mes parlez de riiurriblo cioix
iiisoo qu'apprés ce luy firent porter
pour sou [jovre corps oraventoi',
tout jircst do la mort recevoir ;
quel pitié c'ostoit <le le voir,
lo povre homme tant fort blossc-,
308or> tout difforme, tout deffacé,
. ploiei' soubz ceste croix posante,
qu'il n'est personne si puissante
qui n'eust eu a souffrir beaucop 1
s. LUC
Gloophas, nous en parlons trop :
30870 de ccsto matière il souffit.
CLEOPHAS
Pourquoy, Luc ?
s. LUC
Le cueur m'atendrit
quand ma pensée s'i affonde ;
il n'est si dur cueur en ce monde
qui ne se deust de larmes fendre
3087") a voir ses piteux bras esteudre
en coste croix tout au travers :
la eussiez veu ses povres nci'fs
tous rompre par fortes tractures,
desevrer veinfs et joincturcs,
30880 parforer ses pies et ses mains.
0 tii'ans, o cucurs inhumains,
o meurtriers, o cueurs sans pitié,
avez vous a tel mort traictio
celluy qu'oncques no vous meffit ?
n.EOPHAS
30885 Mes parlez moy quel douleur fit
Marie, sa mère piteuse :
s'oncques femme fut douloureuse,
elle l'estoit lors, je m'en vaut,
quand elle vit son cher enffant,
30890 des humbles lo jilus gracieux
et des begnins le plus piteux,
en ce gros arbrier estendu
comme une corde en l'are tendu.
.1 0 U R N R R 403
et de troio clous a grosses pointes
30895 vit perser pié-s et mains et jointes
et atachor a ce gros arbre.
s. LLC
O cueur plus dur que le noir marbre,
qui do plourer se fust tenu
a voir ce povre homme tout nu
30900 dresser par ces mauvais gloutons
a dar», a lances, a bâtons?
après ce que son |)itcux chef
a terrible peine cl nieschief
d'cspines courono estoit,
30905 tout lo corps sur les clous |K>rtoit :
le coriis d(! toutes pai's se font,
car la pesiuitcur y descent ;
le corps se veult en bas retraire,
les clous estrivent au contraire ;
30910 la veoit on ses plnyes ouvrir,
. le sang de toutes pars courir
comme l'uisscaux d'uno fontaine,
et luy estant en ceste paine
que ces faulx meurtriers lui faisoient,
30915 Dion scet quelz mot/, ilz y disoient :
il n'cstoit point de tel horreur.
Les ungs l'impugnoient d'erreur,
les aultrcs de l'art de magique ;
aultres l'appeloiont enchanteur,
309S0 l'ung le mocque, l'aultre le pique ;
Rricf tout 11' plus mauvais pratique
qu'on sçaroit penser ilz luy font :
et le doulx .Ihosus ne repi)lique,
mes souffre, et mot ne leur resiwnt.
CI.KOI'HAS
30925 Tout le cueur on larmes me font
quand me souvient du maléfice ;
car c'est la plus grand injustice
qu'oncques homiue mortel pensa ;
cil qui premier la comman(,'a
30930 puist deffiuer de mort villaine !
le;/ Bt'evi Jh<:iHs en fourme tic pèlerin.
JHESl'S
Amis, je pry Dieu qu'il vous maine
au vouloir de vostro courage.
s. LUC
Frère, bon oeuvre et bon voyage
SnSr.l Sus] Clicz B. — SOSSS yue bouche si ne sjuroil iliro C. — 308C1 f<>°anenter B. C. — 30871 me ralendrist C
— 30878 par les contractures B. G. — 30879 Crorquier desseurer [C. dessarer] des B. C— 308.81 cupurs] chien» B. C. —
3Û8S7 migoisseuce B. C. — 30892 abre B. C. — 30897 mabre B. dur« pierre C. — 30904 eouronnes B. C. — 30908 le unt
C- - 30907 man'iue H. - 30986 du man(tu.e B.
406
.MISTER F. DK LA PASSION
vous doint faire Dieu, si luy plest:
m>rD vous samble/. honimn prompt et prest
pour faire ung voiago loiiigtaiu.
JHESUS
Qui est ce parler si liaultain
que vous allez cy recollant,
et vous plaindez cy en allant
30910 comme gens tristes et remis ?
CLEO P H AS
Qu'est ce a dire cy, beaux amis ?
comment ! n'en sces tu aultre chose ?
quand a moy, je tiens et suppose,
puisque tu viens nostre chemin,
309'i5 que tu as esté pèlerin
en Jherusalem tout seulet :
or me dis doncques, s'il te plet,
comment ne sces tu des nouvelles
bien piteuses et bien cruelles
30950 qui ces jours y sont advenues?
s. LUC
Grans merveilles y sont venues
depuis trois journées en sus.
JHESUS
Quelles?
CLKOPHAS
Du prophète Jhosus
de Nazareth la cité bonne,
30955 qui fut doulce et sainte parsonne,
prophète très juste et parfait,
puissant par pai'ole et par fait,
bon devant Dieu et tout le monde,
et comment par leur coulpe immonde
30960 nos prostrés et princes haultains,
d'envye et de rancune plains,
l'ont mis en condampnacion,
et en grand detestacion
l'ont jugé a crucifier :
30965 cela nous faisoit soucier
naguaires allant nostre voye.
s. LUC
James espérance n'avoye
qu'il fust mort a tel deshonneur,
veu le grand port et la faveur
30970 qu'au peuple eust trouvé pour secours ;
mais avons espéré tousjours
que ce fust cil Emmanuel
qui le royaulme d'Israël
devoit oster de servitude,
30975 et desmouvoir la charge rude
qui le travcille sans bcsoiiig ;
mes nous nous en trouvons bien loing,
car depuis sa vie flnee
veez cy ja la tierce journée
:1098fl que nous demourons tous pcnsis.
CLEOPHAS
Nostre fait en est moult rassis,
et en demourons a l'arriére,
Dieu le scet.
JHESUS
far quelle manière ?
CLEOPHAS
Gai' il estoit nostre ducteur,
30985 nostre maistre, nostre pasteur :
ne sçavons qu'il est devenu ;
mes depuis qu'est il advenu ?
aucunes femmes de nos gens,
de bon vouloir et diligens,
30990 ont le sépulcre visité,
et nous ont moult espouanté
a leur retour, car ilz ont dit
que du prophète dessus dit
n'ont point trouvé le corps dedens,
30995 mes afferment par motz prudcns
qu'elles ont eu la vision
des anges sans illusion,
qui leur ont dit et recité
que Jhesus est ressuscité :
3i000 ce seroient moult grans misteres ;
et depuis aucuns de nos frères
s'en coururent hastivement
qui la chose pareillement
et en la manière trouvèrent
31005 que les femmes leur racontèrent ;
car quand le corps ne virent point,
s'en retournèrent sur ce point
a leurs compaignons le noncer.
JHESUS
O folle gent de fol penser
31010 et en cueurs pesans et tardis
a ci'oirc les fais et les dis
que les prophètes par escript
vous ont dénoncé et escript !
savez vous pas qu'il a fallu
31015 pour le bien et pour le salu
de totalle nature humaine
que Cristus ait souifert tel paine ?
savez vous jias que neccessaire
estoit sa, mort et salutaire,
31020 et que mort luy falloit porter
et de la moit ressusciter
et ainsi rentier en sa gloire ?
cela vous deust estre notoire
30987-S il est ndueiui Qun G. — 3099ji ilz] elles A. elle B, —30996 Qnilz A. aiUilsion G. — 3099S-9 sur ce poiul cy,
estoit surrexi B. G. — 31003 moult manrjiie A. — 31010 en cor B. G. — 31013 manque B.
:tl030
31035
31 OW
QUARTE
sfi reRci'i])tiin^ eussiez enquise ;
31025 regardez moy <lc|)uis Moyse
le» prophètes qui ont esté :
il/, ont cecy maguifesté ;
niosmes Moyso on volt parler
qui dit qu'a l'agneau innuoler
Uieu avoit CCS mol/, assortis :
os c-ic IV 1111)1 fnuigetis ;
cela vouloit estro figure
de riuimolaciou très dure
que Jhesus devoit recevoir,
ncantmoins qu'il n'y devoit avoir
en quelque part du corps de ly
quelque os froissié ne demoly,
quoi qu'il endurast mort amore.
s. LUC
11 parle très bien, très cher frère,
3i0i0 et, a bien l'escriptuie prendre,
il nous le fait très bien entendre :
car quand Jhesus fut mort en crois,
et on fut venu a eulx trois
pour rompre et brisier les os d'eulx,
trop bien on les rompit aux deux,
mes a luy on ne le fit mie.
JHESUS
Vous avez aussi d'Ysaie,
qui en tant de lieux que merveille
parle de la peine iniparcille
que (Iristus devoit endurer
pour ses bons aniis délivrer ;
n'a il pas en uug lieu touchié
que depuis la plante du pié
jusqucs au chicf n'ara paitie
31055 qui de douloir ne soit partie ?
Jheremye s'en est il teu ;
nemiil, il l'a bieu rainentu,
quand il dit telz mots ; Plangilis,
0 130.Ï omnes qui transitin
31060 secii.1 niatn, et cetera:
Jheremye considéra
que la douleur que souflreroit
Cristus en soy jamès n'aroit
pareille peine supportable
310C5 ne jamès ne seroit semblable.
Daniel pas ne le cella :
haultement |)arla sur cela,
quand les sepmaines mist eu nombre,
que Cristus aroit cest encombre.
Et se deinando/. l'achoison
quant au fait de la traysou
31050
31070
.1 0 U K N K R
que Judai) a son maiHti« fit,
lisez le psnimisle David :
très bien y trouverez awùii
3107S ung ver qui dit : Homo pacis,
qui 8'entend que son bon amy,
comme son mortel onnoniy,
le doit supplanter et trahir,
et la pourrez vous ensuir
31080 les malédictions en Higno
que 1(> prophète luy assigne
pour le trnhitre .salarier.
CLKOI'HAS
Oncqucs n'ouys mieulx declarier
cecy : oncques ne l'entendis,
s, LUC
3tog.s Qui bieu considère ses ditz,
il n'est rien au monde plu-î vray.
JHESUS
Maintenant toucher vous vouldi-ay
qu'il est force qu'il res.suscite :
Jonas clerement le l'ocite
31090 en parlant au Dieu d'Abraliam,
quand il chanta : \itiim ineam
leva)is de rorrupcione ;
Jonas dit : Dieu a ordonui'
que ma vie soit élevée
31095 et de cori-ompre presoivee,
et luy niesmes la figura
quand dedens la mer domoura
trois jours et trois nuis [uiur deniaine
ou ventre de la grant balaine,
.31100 dont depuis tout vivant yssi.
Sainson la figura aussi
quand maulgré les Philisteeus,
les portes de leurs citoiens
emporta hors, tant estoit fort ;
31105 qui figuroit que par eft'ort
Cwistus devoit par iKitillier
les portes cl'enfl'er despouiller.
David eu ung aultre sermou
dit : Non dabis saneUttn itium
SlllO x-idere corrupcionem,
et nolando huiic sermonem
il veult dire et s'est conffié
que le vray corps sanctiflié
do Grist après .«a passion
31115 ne scntiroit corrupcion,
par quoy il n'en fault point doubler
qu'il doit de moi-l if^suseiter.
Après dit David clerement
407
310l.'9 que laipnel C. — 31O50 Qiia jhesus se deuoit liiircr A. — 31058 pugnitifi B. pingatift C. — 31061 dit «insjr U
f A. — 31064 par paiiie imporlalile B. par manqw C. — 31088 Pour liiv son salaire payer B. C. — 31092 tn<m<7«t* T. —
t8109'i Qua A. — 31106 .Ihesu<rist deuoit batillier A. — 31113 Qua A. "
408
MI STERE DE LA PASSION
que Jhesu Ciist iluit puissamment •
31120 au Iiault ciel faire ascension
après sa resuri'ection,
et d'aultres beaulx tiltres assés
que i'ay laissés et trespassés
pour cas de briefté maintenant.
3H25 De Jhesus vous souffice ataut,
et de sa mort n'ayez plus soiug :
j'ay bien mcstier daller plus loing,
et vous demourez, ce nie sanible.
Icy feint Jhesus dealer plus loing et les
pèlerins le retiennent.
CI.EOPHAS
Ha ! sire, demourons ensemble :
31130 soiez avec nous, s'il vous ple.'^t ;
veez cy nostre logis tout prcst.
Ou voulez vous aller meshuit ?
vous voicz qu'il est presque nuit
et va la journée a déclin.
s. i-uc
31135 Vous estes tout las de chemin ;
sire, tenez nous compaignie,
car nostre ame avez i-esjouye
a vous ouir ainsi parler.
JHESUS
Je suis content au fort aller
31140 ceste fois a vostre requeste.
CI.EOPHAS
Mon hoste, est la viande preste ?
ajjportez nous tost a manger.
l'oste
Volentiers, seigneurs, sans danger
en arez, et de plusieurs nietz
31145 et de bon vin je vous promés.
Tenez, veez cy bon pain, bon vin,
du meilleui' certe et du plus fin
que j'aye point dans mon hostel.
s. LUC
Vive tousjours ung hoste tel
31150 qui ainsi scet servir ses gens!
Cher pèlerin, plain de grant sens,
mangez et faictes bonne chère,
u'espaignez chose tant soit chère :
vous nous ferez plaisir haultain.
Icy brise Jhesus le pain tellement qu'il
sanible estre coppé.
JHESUS
31155 Tenez, enfl'ans, vêla du pain :
meugoz, ne le reffuscz pas.
Icy s'esvanout/t Jhesus d'eulx.
s. LUC
Qu'est ce cy, ainy Cleophas ?
qu'est ce pèlerin devenu ?
CLEOPHAS
Kn vérité, j'ay bien congneu
31100 a l'ompre le pain seulement
que c'est Jhesu Crist proprement
qui s'est voulu manifester
a nous.
s. LUC
11 n'en fault point doubtoi- :
maintenant m'en voj' recordant.
CLEOPHAS
31165 N'estoit pas nostre cueur ardant
en nous du beneuré Jhesu,
quand a la voye s'apparu
a nous, et qu'il nous recordoit
les esci'iptures et glosoit
31170 que les prophètes autentiquos
ont escript, lesquelles cantiques
bien averries ont esté
[lar luy?
s. LUC
Ouy, en vérité ;
tout tant qu'il nous a sermonné
31175 et le vray motif admené
de nos doubte.s de point en point,
j'ay sentu mon cueui' en tel point
qu'on ne le sçaroit concevoii-.
CLEOPHAS
11 nous convient d'icy mouvoir
311S0 prestement sans plus séjourner,
et aux disciples retourner,
affin que ce fait exposé
leur soit.
S. LUC
C'est très bien proposé :
a ce me veil bien consentir;
31185 mes ains que nous puissions partir,
nostre hoste nous convient payer.
CLEOPHAS
C'est raison, il le fault huchier,
affin qu'il soit content de nous.
31120 assumpcion G. — 31140-7 m i
A. —31168 proposoit B oti~r. -^
niqaent B. C. — 31149 ronileaa inromphl B. C.
3117Ô Nous a entendement donne K. —
- 31155 amis C. — 31159 recongnu
Q U A R T !•:
^ Ça, nostro hosle !
1,'OSTE
Je vois a vous.
:iil90 Ça, vous faultil chose que j'ayo?
s. I.IJC
Neiuiil, mes il fault qu'on vous paio
de ce que du vostre on avons ;
regaidcz que nous vous dcvon»,
et puis vous serez contante.
I.'OSTE
3119:) l'ayez a vostie volcnté.
Mes je n"entondz point vos adaires :
vous estiez icy trois nagaires ;
ou est le troisième sailly ?
CLEOPHAS
Ne vous chault, nous payerons pour ly ;
31200 veez la trois deniers de César,
et se le taux est trop eschar,
nous sommes près de l'admender.
l'ostb
Plus n'en vouldroie demander,
vous me i)ayez très largement :
31205 mais il me poise grandement,
que mesuy vous partiez d'icy.
s. LUC
C'est force, il le convient ainsy :
grant mei'cy de toutes vos paines ;
nous avons nouvelles soubdaines
31210 par quoy nous n'y pourrons gésir.
l'oste
Mes amis, a vostro iilaisir;
le grant Dieu vous soit en aide,
a joye et a santé vous guide
sans encombrier et sans reproche !
s. i.uc
3tîf5 Grant niercy. La nuit fort approche
et si trait le jour a déclin :
il nous fuuldra haster chemin
et nous haster pai' tel façon
que nos frères trouver puisson
31220 tretous assamblés en ung lieu,
et leur dirons, s'il plest a Diiu,
chose dont seront bien joieulx.
[PosE.I
CI.EOPHAS
Loué soit le Dieu vertueux,
que si bien sommes arrivés
I 0 U R N F, R
.)12S5 que nos freroa avons trouTés :
il nous convient entrer dctlans.
8. LUC
Si ferons nous. Dieu soit ceanit 1
CLEOPHAS
Dieu gard tout !
s. ANDRY
Uien sciez venus,
mes bons frères et chers tenus :
3IÏ3U d'où venez vous ne ilo quel part?
s. JAQl ES ZF.IIEDEY
\'eu encore qu'il ciil si tard,
je croy qyc bien estes lassés;
sçavez lien de nouvel ?
8. LUC
Assés;
une nouvelle a mon entente
31235 vous dirons la plus excellente
que janiès escouter pourrez.
s. PHELIPE
Et quelle est elle ?
s. LUC
Vous Tarez.
Naguaircs nous nous en alKon
nous deux, moy et mon compaignon,
31240 de cestc cité en l'smaulx,
et la nous devisions des maulx
qu(! nostro maistre avoit souffert,
et comment l'avoycut offert
les .luifz de rage enivré
3l2'i5 en la ci'ois et :i mort livré,
de la conduite et la manière;
nous parlans de cestc matière,
s'apparust en nostre chemin
Jhesus ainsy qu'ung pèlerin,
31250 et vint avec nous grant espace;
qui plus est, entra en la place
ou nous allasmrs héberger,
et si nous donna a manger
du )iain qu'il bctiist de sa bouche.
s. MATHIEU
31255 C'est une chose qui trop touche,
et se n'estes bien asseuri's
des parlers que vous pi-offerez,
gardez vous de les affenncr :
très fort vous en fei-ez blasmer,
31200 et y aroit raison notoire,
se vous nous voulez faii-e accroire
chose qui fut a reprocher.
s. BERTHKLEMY
Vous nous en ferie* enipescher,
409
pS1199 forons B. C. — 31205 Dieu vous coniliiye seureineut A. — 312e<i-13 m<iiK/u«ii/ A.
Uain B. C. — 31233 Scauons A. — 31241 nous manque B. C. — 3124A de grant rage A. -
— 31211 Sans bUme el uns
' 31257 propheriei C.
410
M 1 S T E R R D K L A PASSION
et blcssier iiostre conscience.
OLEOPHAS
31265 Croyez nous, vous ferez science,
la chose est toute véritable :
le saint prophète charitable,
sensiblement congneu l'avons,
tout certainement le si,-avons ;
31270 on ne nous en pourroit hors mettre.
s. ANDRY
Et quand vous veistes nostre raaistre,
fut vostre sons assés soubtil
do congnoistre que c'estoit il
d'ung seul l'egard prescntornonl ?
s. LUC
31275 Nennil, il vint bien longuement
avec nous en ceste façon,
avant que nous le congneusson ;
en nostre pas se disjtosoit
et en allant nous cxposoit
31280 par tesmoingnagos manifestes
les escriptures des prophètes
et bailla par similitude,
si bien qu'il n'est engin si rude
qui ne l'eust entendu très bien,
31285 et cela nous fit tant de bien
qu'oncques chose ne fut mieulx mise.
La nous commença a Moyse
et de la vint a Ysaie
et d'Ysaie a Jheremye,
31290 de Jheremye a Daniel,
a David, a Ezechiel,
et tout posé en si bel ordre
qu'il n'est homme qui y sceust mordre ;
la exposoit ses escriptures,
31295 rapportoit ses belles figures,
comment tout estoit acomply
en Jhesus et si bien remply
que faulte n'y a d'ung seul point.
s. THOMAS
Quant a moy, je ne le croy point ;
31300 et suis tousjours en cest espoir
qu'il se doit a nous api)aroir
des premiers se la chose est vraye,
et jusques a ce que veu l'aye
sensiblement devant mes yeulx,
31305 je ne le croiray, se m'aist Dieux,
pour double de la decevance.
s. JAQUES ZEBEDEY
Serons nou» en celle doubtance
sans sçavoir le deffinitif,
se nostre maisti'e est mort ou vif?
31310 S'il est vivant, comme on raconte,
j'ay cest espoir et fais mon compte
que brief en arons vision.
s. THOMAS
J'ay pris une conclusion,
mes frei'es et bons habitans,
31315 de moy retraire l'our ung temps
et aller ailleurs besongner
pour tousjours ma vie gaigner,
pour deux poins qui m'en donnent garde.
Le premier est quand je regarde
31320 que nostre maisti'o avons pardu,
si ay une espace attendu,
attendant qu'il ressuscitast
et humblement nous confortast;
or n'avons de luy riens peu voir :
31325 si ay advisé d'y pourvoir.
Le second point pourqudy je doubte,
c'est qu'en grant cr'ainte et en grant doubte
nous sommes cy et joui's et nuys ;
et se ces desleaulx Juifz
313.30 nous y peuleut apparcevoir,
la mort nous ferons recevoir
comme a nostre maistre il/, ont fait.
Pourquoy j'ay pensé a mon fait
de changer ung peu mon repère,
31335 car j'ay souffert tant de misère
avec vous que j'en suis tout mas :
je m'en vois.
s. BEHTHELEMY
Cher amy Thomas,
puisqu'a nous voulez congé prendre
nous ne le vous pouons deft'cndre ;
31310 le Dieu tout puissant vous couduye !
s. SIMON
Quant est a moy, que que s'en suye,
de nostre hostel et territore
je ne m'en iray pas encore ;
je ne sçay qu'il en advendra.
Icy se part S. Thomas des autres et lors doit
venir S. Pierre et S. Jehan et S. Jaques le
mineur et se doivent tenir ensemble.
CLEOPHAS
31345 Je suis sceur que Jhesus vendra
se monstrer a nous biiefvement,
ear riens ne sçay plus seurement
que je l'ay devant mes yeux veu.
31293 qui si-eust que C. — 31311 quant a moy monte B. C. — 31330 peuent H. r„ point H. — 31333 je pense C. — 31.;46
Monstrez a nous prochainement B. Monsirer C.
QUARTE
8. JUDE
Coraïuent l'avez vous rocongncu ?
3l;t50 faictes en un(< pou meneion.
CLEOPHAS
Congnu l'ay a la fraction
(lu pain benist qu'il nous bailla,
lequol sensiblcniput sanibla
estro (l'ung (in Cousteau party ;
:i:t55 et quand il nous l'eust doparty,
en moment s'absconsa de nous.
s. 1,1'C
11 est ainsi,
Icy vient Jhesii.t suubdainement on millicii
d'eulx,
JHESUS
Paix soit o vous !
Mes chors fieres, n'ayez ja crainte
ne paour eu vos cueurs empraintc :
31300 je suis Jhesus, ne doublez riens,
qui pour vous leconli'orter viens,
apportant nouvelle joieuso.
s. MATHIEU
Veez cy chose bien merveilleuse,
assés pour esbahir ung homme.
s. l'HEUPE
31365 Est ce ung esprit ou ung fantôme
qui nous fait ceste domonstrance ?
il a proprement la semblancc
de nostre cher maistre Jhesus.
s. BEnTHELE.MY
Je crains que ne soyons deccus,
31370 qui sommes icy assamblcs.
JHEStS
Dont estes vous ainsi troublés,
ne pourquoy avez tolz pensées
par dedens vos cueurs amassées?
rega'rdez mes pies et mes mains :
31375 se suis je, soyez tous certains;
vous le sçarez : tastez moy, car
ung esprit n'a os ne char
comme vous me voyez avoir;
vous pouez regarder et voir
31380 dedans mes mains les conclaveures
et en mes pi('s les transfixeures
que dedans la croix enduray.
M' s. ANURY
^k Se ce miracle icy est vray,
^^B il touche mistcre excellant.
^^ s. JEHAN
31385 C'est ung fait si très pi'ecellant
.1 O U U N K F.
que nous ne !o sçavons aitaindro.
.IHRSUB
Affiu que vous ne puiat rcniaindro
liens pour vostrc foy retai'ger,
jiar le boire et par le menger
31390 vueil qu'il vous soit manifesté
que je suis vray ressuscit»! ;
avez vous icy quelque clio«e
qu'on puisse manger ?
ti. PIERRE
Je suppose,
sire, qu'il y en a vrayment ;
31395 mes ce n'est pas si largement
ne si bon qu'on pourroit bien dire.
JHK.SUS
Or l'appoi-tez.
s. ANORY
Volentiei-s, sii-c,
j'en vois faire la diligence.
Sire, prenez en pacience :
31*00 veez cy du miel bien assoily
et ung peu de poisson roty ;
c'est toute la provision.
JHESUS
Bien me souffit la porcion;
s'il vous plest, du pain me ilonncz :
3l'i05 si mangeray.
s. JAQUE.S ZEBEDEY
Sire, tenez,
et prenez en gré tel qu'il est.
JHESUS
Il est bon et très bien me pUst.
Premier benitre le vouldray
et puis devant vous mangeray :
31410 par ce point sçarez de certain
se je suis en vray corps humain
ressuscité de mort a vie.
Icy Jhesus mengue,
s. KERTHELBMY
Ce n'est pas icy fantasio
n'esprit qui nous puist décevoir :
3H15 tout cler pouons apparcevoir
qu'il est vray homme naturel.
s. JAQLES AlPHEY
Ung esprit vi'ayment n'est pas tel:
vous voyez qu'il mangue et boit,
laquelle chose no ferait
314ÏO s'il estoit angle ou esperis.
Qu'en dictes vous?
411
31353 visablflinem U. visiblem.Mit G. -31359 terreur B.C. -31377 «nii/«« H. — 31380 clauBurcs C — SI*"* miel «a»-
711^ C. sorty A. — 31101 poison H. — 31404 mapporlej B, C. — 31410 serez plu» rerUiii A. — 31418 inciigui A.
412
s. SIMON
Je suis soui'pris
si fort que ne sçay que juger.
JHESUS
Frères, jugez par ce manger
dont nous avez veu cy repaistre
31425 que je suis Jhesus, vostre niaistre,
l'essuscité corn vous voyez,
et pourtant plus n'y variez.
Icy aspire Jliesus sur ses apostres.
Frères ciiaritables et doulx,
prenez le saint Esprit eu vous,
31430 par lequel tel puissance arez
qu'a quiconqucs vous iiardourez
les péchés, pardonnes seront
a ceux qui les confesseront,
et a ceulx a qui les vouldrez
31435 retenir, vous les retendrez,
tant arez la puissance liaulto :
ne doublez sans quelque deffaulte.
Affin que soicz plus lyés,
tenez, mangez de ces reliez
3U40 qui sont devant moy demeuré.
s. ANURY
Ha ! mon très cher maistre honoré,
louange te devons bien rendre,
quand il t'a pieu ta grâce estendrc,
et qu'en ce point tu nous consolles.
JHESUS
31445 Mes amis, vecz cy les paroUes
que benigncment vous disoie
quand avec vous régnant estoie :
certes il est neceossité
que les escrips qui ont esté
31450 de moy fais en la loy Moyse
soient remplis par la devise
qu'ilz ont esté prophétisés
des prophètes auctorizés.
Sçavoir devez qu'il est escript
31455 devant l'advencmcnt du Crist
qu'il luy falloit souffrir doulour
et lever de mort au tiers jour,
et presclier en son digne nom
penitance et remission
31460 des péchés, et de tous ces poins
serez preuves et vrais tesmoingz;
et comme mon pero haultain
m'envoya au règne mondain,
finaWement je vous transmés
31465 par tout le monde desormès
pour prescher mon nom a voix haulte
MISTER E DE LA PASSION
Icy s'esvanouyl Jkesu.i comme dessus.
s. JL'DE
Qu'est Jhesus devenu ?
s. MATHIEU
Sans faulte,
esbahir je ne m'en puis trop,
comment il s'est si très acop
31470 ovanouy ; c'est forte chose.
s. PHELIPE
Veu que nostre porte estoit close
par nous qui sommes cy presens,
comme a il peu entrer dedans?
ce me samble ung cas bien nouvel,
31475 veu qu'il a corps matériel
comme nous et de tel figure.
s. ANDRY
Il fault par ce moyen conclure
que son corps est glorifié,
et lui est ce don octroie
31480 de par la divine puissance.
s. JAQUES ZEBEDEV
11 a fait moult grant alligence
a nos simples entendemens
de nous faire lei preschemens
qu'il nous a nagueres appris :
31485 j'y ay ung si grant bien compris
que j'entendz bien en place mainte
les fais de l'escripture sainte
que devant n'entendoye pas.
s. BERTHELEMY
Aussi j'cntons en plusieurs pas
31490 escrips qu'oncques mes ne congnus,
lesquelz je S(,'ay estre venus
en Jhesu Crist, nostre seigneur.
s. JAQUES ALPHEV
11 nous a fait ung grant honneui'
et bien sa grâce habandonnee,
314^ quand puissance nous a donnée
de retenir et pardonner
les péchés et pardon donner :
c'est une noble liberté.
s. SIMON
Se VOUS croyez ma volonté,
31500 nous nous tendrons entre nous hommes
encore une espace ou nous sommes
sans ambuler par le pays,
car nous sommes forment hays
31421 espris A. — 3142S-37 se Irouvi'nt placés dans U et C après le rets 314fi5. — 31450 la manque B. — 31455 De
ladueinent jhesu crist C. — 31401 premiers B. C. -> .3i471 fut B. C. — 3149<t auez ma C. — 31501 ung petit B. C.
QUART1-: JOURNEE
413
rie CCS Juifz et peu nmés.
8. JlIDE
31505 11/, sont conli'c nous animés
si très fort quo lo cucur leur part :
nous nous tcuilrons icy appart
sui' le soir et clorrons les huis,
en servant par jours et par nuys
31510 Dieu, nostre pero et frcateur.
8. MATlIIEi;
J'ay espoir quo nostre pasteur,
•Ihesus, brief nous eonflVirtera
et les moyens nous monstrcra
comment conduire nous devons.
s. PHELIPE
31515 Ou se tient il ?
s. MATHIEU
Nous ne sçavons,
ame de nous n'en est expert ;
a celluy qu'il veult il s'appert
et aux aultres se musco et celle.
s. PHELIPE
Je plie l'essence éternelle
31520 que brief nous le doint voir a joye.
s. THOMAS, seul.
La nuyt est assés bonne et quoye :
je m'en puis bien, ce croy je, aller
avec mes frères consoUor.
Est ce mon miculx? je croy que ouy,
31525 pour sçavoir s'ilz ont riens ouy
depuis qu'ensamblc les laissay.
Sont il/, pas ccans? je ne s(,-ay :
je n'y voy entrer amc née,
et si est leur porte fermée ;
31530 bucquier ung bon cop m'y fauldra,
sçavoir se parsonne en sauldra
des bons frères de nostre cloistrc
qui mon nom veille recongnoistrc.
Je ne sçay s'ilz sont endoi-mis.
31535 Hola!
Fiei-l a l'uys.
s. piEnriE
Qui estes vous?
s. THOMAS
.\niis :
31532 De vous B. — 31554 face 0. — 31556 UoU
manque B.
s'il voua plaist, je suis do céans.
s. JEHAN
Voslre nom?-
' s. THOMAS
Thomas.
s. PIERRE
Entrez ens.
Paidonnez moy, je vous rcquier,
s'ung peu vous avons fait songier,
31540 car en si grant crainte vivons
que nos portes ouvrir n'osons
se nous ne sçavons bien a qui.
S. THOMAS
Depuis que je vous relinqui
l'aultricr comme siniiilc paisonno,
31545 est il quelque nouvelle bonne
quo me sachez compter ne dire?
s. ANDRY
Ouy bien : Jhesus, nosti-e sire,
s'est depuis a nous apparu.
Et vous, quoy ?
S. THOMAS
Je n'en ay riens veu.
s. ANDRY
31550 Riens, non?
s. THOMAS
Non, quoique chose nce.
s. JAQUES ZKREDEY
Veez cv la huitième journée
qu'en cesle propre mansion
a nous fit apparicion
droit en sa propre fomie hiunaiuo,
31555 et que ce soit chose certaine,
il mangea et but avec nous.
s. THOMAS
Dire poucz, quand est de vous,
ce qu'il vous plaira : je l'ori-ay ;
mes James rions je n'en croiray
31560 tant quo j'aray v<>u les fixures
de clous, les playes et blessures.
Se vous avez veu quelque cori>»
quelque esperit des anciens nioi-s,
que sçavez vous se c'estoit il ?
31365 je vouldray estro plus soubtil :
quant j'aray bien veu ces cinq plaies
dedans son corps plaines et vraies,
et mon doy bouté y aray.
lors diray je qu'il scia vray.
31570 mes i)our quérir vos alibis,
je n'en croy riens.
uul nous B. C. - 31558 manque C. - 31500 flchures B. - 31566 bion
414 MISTERE DE
Icu s'appert Jhesus comme dessus au milieu
d'eulx tous.
JHESUS
Pax sit vobis !
Mes t'ieres, la paix souvei'ainc
vous octroie parfaicte et plaine !
De rechief vous viens visiter
31575 pour vos courages confforter.
Thomas, mon disciiile, ça vieu :
regarde et considère bien
se ce suis je sans quelque double ;
approche ton doit et le boute
31580 en la playe de mon costé
dont il fut moult de sang osté ;
regarde mes pies et mes mains,
se ce sont ilz ne plus ne mains :
se foy as eu petite ou nulle,
31585 or ne soies plus iucreduUe,
mes servant discret et loyal.
s. THOMAS
Mon Dieu, mon sire espeeial,
tel te confesse,
JHESUS
Amis Thomas,
pour ce qu'a présent veu tu m'as,
31590 ton sire et ton Dieu me rcvellcs;
benois soient tous ceulx et celles
qui ce luistere n'ont point veu
et de bon courage l'ont creu :
ma gloire en aront a la fin.
s. THOMAS
31595 Loué soit mon perc divin,
et te mcrcy d'ardant désir
quand il t'a pieu moy resjouyr
de cesto visitacion :
je croy ta résurrection,
31600 je croy que tu es celluy meismes
qui pour nos pèches et nos ciismcs
en crois a la mort endurée.
Icy s'esvanouyt Jhesus nomme dessus.
s. BERTHELF.MY
Il n'a guaires fait domouree
depuis qu'il nous est survenu :
31005 a portos closes est venu
et a portes closes party.
s. JAQUES ALPHEY
Thomas, tenez nosti-e party,
31601 man'iUP B. — 31613 LaurfZ touchée et detteliue C.
31629-30 loue 9oH dieU et le vers suivant )naiiqueiU C.
LA PASSION
ne jamès tel doul)te n'ayez
que tel suscitement nycz;
31610 avoir n'en pouez plus vray signe,
■ car sa char précieuse et digne
a deacouvert et toute nue
avez atouchee et tenue :
c'est signe de bien grant amour.
s. THOMAS
31615 Jamès je n'en doubte nul jour,
j'en ay vraye approbacion.
Icy viennent les trots Maries a Nostre Dame.
MADELAINE
Honneur, glorificacion
et le règne qui tousjours dure
vous doint Dieu, dame sainte et pure,
31620 après ceste vie mondaine!
NOSTRE DAME
Chère Marie Madelaine,
ma compaigue, ma doulce seur,
Dieu vous doint joie a vostre cueur
telle que jamès ne deffine
31625 et gard de pensée maligne
la vostre compaignie aussi !
Comment vous est ?
MARIE JACOBY
\'ostre mercy,
doulce seur au cueur humble et pieu :
il nous est liieii.
NOSTRE DAME
Loué soit Dieu,
31630 qui vous doint parfaicte liesse !
MARIE SALOMÉ
Et vous, nostre cherc maistresse,
il vous est bien a l'avefiant ?
NOSTRE DAME
Très bien. Dieu mercy ; maintenant
il ne me pourroit aller mal,
31635 puisque mou trésor principal,
mon cnffant, mou bien, mon avoir
a voulu souvenance avoir
de moy et m'a fait demonstrance
que de la mort et son oultrance
31640 est relevé victorieux,
et en sou saint corps glorieux
que dedans mon ventre forma
le misterc demonstré m'a
do sa résurrection clicre;
31616 belle B. C. — 31028 preu B. et pieu manquent G. —
^660
Q U A R T K
3J845 par quojKJ'oii fcriiy incilleui' cliei'o
tant qu'au siocle pourray durei'.
MADKI.AISE
Ma (luiuu qu'oïl iliiit Imuoiei'
sur toutes les femmes du monde,
vosti-o liaulte joye se fonde
31650 sur fondement certain et forme,
ot quant a ce je voua afferme
que .Ihesus, mon très doulx soigneur,
maulgré Juil'z et leur erreur
est ressuscité de ceste heure :
31655 n'est riens dont je soye plus sceure,
car de sa très humble vertu
il m'a, sa giace, eonseutu
que je l'ay ja veu par doux fois
en aussi bon point touteffois
que nous sommes et que vous estes,
MARIE JACOBY
Ce sont choses si manifestes
que nous ne le poons nyer.
Bien s'est voulu humilier
quant après sou suscitement,
31(565 de sou très doulx consentement,
pour nos doUans cueure appaiaier
nous a souH'eit srs pics baisier
tOBtes trois d'ung comnmn accord.
NOSTRE DAME
Qui est au monde le l'ecord
31670 qui plus me jiourroit resjouyr (
quel nouvelle pourroy je ouir
pour quoy plus do plaisir amasse?
O mon entt'ant, ta more lasso
par toy grant détresse souffrit
31675 quand ton [irecieux corps s'offrit
a la croix terrible et grevaine
pour délivrer nature humaine
qui alloit a perdioion ;
mes celle desolacion
3)680 m'est tournée en parfaicte joye,
et ne reste mes que je voye
ta glorieuse asccncion.
MARIE SALOMÉ
Vous avez donc intcncion
que briefment l'heure approchera
3168.') que lassus ou ciel montera
a la dcxtre de Dieu, son père?
NOSTRE UAMK
.l'ay espoir qui; briefment m'appere,
fc^ et que je le voie partir.
J o 11 R N K V.
.MABEI.AI.NE
Or Dieu nou» veille dopartii-
31690 s'aniour et sa grâce i>rc»ter,
que nous le imission» voir monter
en honneur et haultc excellence !
II'nsB.)
s. PIERRE
Le temps se met en api>arcncc
de soy mettre au beau, se Dieu plest.
s. ANDRV
31695 Se le temps se tient ou il est
et la nuit se parcontinue,
la mer ara grant contenue
«le toiLs pescheurs avnnturcux.
S. JAQUE.S ZEBEDEY
Aussi fait il bon temps i)our eulx,
31700 si très joieulx qu'a souhaidiei'.
S. PIERRE
Qui me vouldi'a venir aydier,
tandis que le beau temps nous dure,
j'iray pescher.
s. BBRTHBLEMT
A l'aventure
je suis tout prest de commancer,
31705 car aus.si nous fault il penser
de soustenii' la povre vie.
s. JAQUES ALPHEY
.Je vous y tendray conn>aignic
plus volentiei-s que ne vouldrez.
s. PIERRE
Thomas, aussi vous y vendre/.,
.S1710 se vosti-e bon vouloir l'accorde.
s. THOMAS
.le n'y veil point metti'C discorde :
il fault que chacun s'i emploie,
car il n'a forme do inounoyo
en l'ostel, puis que j'y revins.
». JEHAN
31715 Quelque forme d'argent ne tins,
il a plus de six joui-s pas.«t''s.
S< PIERRE
Nous irons nous sept, c'est assés ;
et vous quatre cy demourrez
qui continuelment prierez
41.5
11640 iiumqui: C. — 31650 liaullain A. — 3165;) Il iiest A. — 31682 Sa A. — 31690 Son amour et graoc B. — 31698 De
pescherrez B. pescherie C. — 317U3 a laueulure] son nieii requiert sniw rinte lî. C. — 31713 il n») y ot B. — 31717
Quans sommes nous S. A. sept S. P. eest assez B. G. — 31718-19 remplacés . Puisque sept frères y vendrout Le»
aullres iey deniourront En leurs deuocions tretous Et requerrons a dieu pour nous B. C.
416
MISTERE DE LA PASSION
3i720 pour nous a Dieu qu'il nous conserve.
s. SIMON
Je pry a Dieu qu'il nous préserve
de mal et de tout encombrier.
s. JUDE
Dieu vous doint si bien besongnier
que nous en ayons joie enfin !
Icy s'en vont peschcr S. Pierre, Jehan,
Jaques Zebedey, Jaques Alphey, Thomas
et Berthelemy, et les autres demeurent.
31750 d'entrer ens.
S. JEHAN
Chacun s'i accorde.
s. JAQUES ALPHEY
Je m'en vois dénouer la corde.
Sus ! c'est fait, tirons dedons bort.
s. A.NDRY
11 nous convient nager d'accort
nous six pour tirer conti'o val,
31753 et Pierre ira au gouvernai
qui bien conduyra nostre nef.
s. JAQUES
C'e.st bien dit.
s. JEHAN
31725 Frères, mettons nous a chemin ;
chacun s'en viengne et plus ne tarde.
s. AN DRY
Quand je vous voy bien et regarde,
nous sommes sept hommes bien pris ,
qui avons le meslier appris
31730 des a pou que nous fumes né.s.
s. JAQUES ZEBEDEY
Se nous ne sommes fortunes,
a ce que le temps s'appareille,
nous devrions faire merveille
d'avoir du poisson bel et gent
31735 et par conséquent de l'argent,
s'il est que marée se vende.
s. BERTHELEMY
Ce qu'on pourra prendre on le i)rende,
au moins on s'en' mettra en paine :
je voy la mer clere et serame,
81740 et nette conmie ung beau cristal.
s. THOMAS
Je ne s^ay se j'csiiere mal,
mes j'ay espoir que nous peschons
largement.
s. PIERRE
Or nous depeschons
acop sans faire long procès;
31745 veez cy ja. les bateaux tous près
et tretous les habillemens.
s. ANDRY
Il n'est fors que d'entrer dedens
et nager a toute puissance.
s. JAQUES ALPHEY
C'est le point, il fault qu'on s'avancu
[PosK.]
s. BERTHELEMY
Sus ! halle le tref !
je suis ja de nager tout las.
s. THOMAS
.\rons nous bon vent ?
s. BERTHELEMY
A soulas :
31760 il n'est mes besoin de rimer ;
tantost serons en plaine mer,
il n'est que d'apprester les roiz.
s. PIERRE
Enffans, nous sommes ceste fois
assés avant ; nos retz fault tendre :
317(» j'ay espoir de largement prendre ;
il fault nos seines desployer.
s. JAQUES ALPHEY
Ça, que Dieu nous veille envoyer
bonne niaree a ccste fois !
s. JEHAN
Or est a ce coup cy la roiz
31770 de tous costés bien estenduc.
s. ANDRY
S'elle est a son droit bien tendue,
nous en arons ou miel ou cire.
Icy posent ung peu.
s. JAQUES ZEBEDEY
Vous samble il point temps qu'on la
le jugement vous en comnietz. [tire?
s. BERTHELEMY
31775 Pour nous expédier de tire.
31729-41 remplacés .4. par ces trois vers : Pour pescher poissons de hault pris Se la chose ne tourne niai S, T. Le
temps est bien especial — 31733 maii'jue B. — 31736 vente C. — 31741 Après ce te) s, B e( C répètent le vers 31738; C.
ajoute un second vers faux et sans rime : Mais a tout le moins je espère — 31751 dénouer] des vouer B. — 31754 six
sj- par espii'ial B. C, — 31760 nager C. — 31766 saurez B. seigucii C. — 31708-0'J A cesle fois bonne uiarce Or est la roix
a lesparee B. C.
(i C A K T K .1 0 V R N li E
'.17
vous samble il |ii>iiit trnips qu'on la
s. THOMAS I tire?
(Jii;iii(l est a cela, il fault tliic;
Hii"il y a poisson ou jamos ;
vous s a ml) le il point temps qu'on la
s. JAQUES ALI'HEY [lil'O?
:M780 Le jugement vous on commet/.:
je no m'y oongnois point bien, mes
je (loul)te que trop ne targoon».
s. PlEnRE
Or, tirez, tirez, eonipaignons,
tirez la roiz do vive main,
:il785 car je cuidc estre tout certain
qu'il y ait (les poissons grant tas.
s. ANDRY
l'as n'y faulfgrant force de bras :
elle est de ligiere façon.
s. JAQUES ZEHEDEV
Qu'est ce cy ? il n'y a poisson ;
31790 vêla lavai le dernier bout
de la rois.
s. THOMAS
Conmient ! e.st ce tout ?
le ménage est trop bien pugny ;
il n'y a poisson ne deniy
dont ung chat se sceut desjeuncr.
s. HEUTHELEMY
31795 H nous fault la nef ramener
plus près du bort a granl foison,
car nous pardons noftre saison
en ccste mer .si très parfondc :
nostre rois si bas s'i affonde,
31S0O et n'i jircnons chose qui .soit.
s. JEHAN
Nageons fort, tant que nostre exploit
se tire ung pitit |ilus avant.
que vostrc fait est cinposché
de ce que riens n'avez penché ;
31810 mes veuillez vostre roix conduire
au dexti'e de vostre navire,
et largement en trouverez.
s. THOMAS
Par son comniaudenieul ferez,
mes chei's frères, qui m'en croira.
s. FIEIIRE
31815 Je ne sçay qu'il eu advcudia
ne qui c'est qui a nous parolle,
mes seulement a sa parole
laclieray la roix par manière
qu'il a dit.
s. ANDRY
La chose est ligierc :
31820 il ne couste riens d'essayer.
s. JAQUES ZEBEUEY
Il fault cy ung peu délayer,
attendans que le poisson vicngne.
s. MATHIEU
C'est bien raison qu'il nous souviengne
d'estre en bonnes oraisons nijs
318^ I)our nos frères et bons amis
qui sont ore a la pescheric
et qui adventurent leur vie,
l)0ur nos neccessilés acquerre.
s. PUBLIPE
S'ilz sont ou iiar mer ou par terre,
31830 Dieu les garde d'adversité !
/ei/ iiVii/ Jhesi'X slir te 2>oi't.
JHESUS
Mes bons amis, Dieu vous avant
et vous doiut sa paix salutaire !
31805 avez vous quelque puhnentairc
ne chose qu'on puisse manger !
s. JEHAN
Nennil.
JHESUS
•l'apperçoy le danger
.s. BERTUElJiMY
La rois a cy assés esté :
il est temps de nous attirer
a l'assamblcr et la tirer
pour voir cemment la chose va.
s. JAQUES AI.PHBY
31835 Nous verrons tantost qu'il y a :
chacun se mette a la iielote.
s, THOMAS
J'apperçoy bien a voir la flote
qu'il y en doit avoir grant mont :
sus! conipaignons, amont!
r,17?4 la ploy U. C. — 31704 se peust C. — 317'.ti port 1). — 0I8I6 «jui la conseille lî. 0. - 31S17 Mrs ve.-v tout appa-
reille B. C. — 31818 pour en faire B. C. — 31836 Jespoirc quil y a poiston A. — 31S37 J-ipcn-oy bien a la façon A. —
3i839 l^s rondrau viaurjut- lî, G.
Pas. ^'î
ii8
MISTERE DK LA PASSION
s. AN DRY
Amont !
31S40 chacun sa puissance y employé!
les poissons qu'i sont poisent monlt ;
sus! compaignons, amont!
s. PIERRE
Amont!
11 en y a tant que tout rout
et que tout l'eschigne m'en ploie :
3)8-15 sus! compaignons, amont!
s. BEllTHELEMY
Amont!
chacun sa puissance y employé!
s. PIERRE
Veez cy la plus belle monjoie
de poissons qu'oncqucs mes fut veue,
et si n'est jias la rois roniime,
31850 dont bien devons estro esmaiés.
s. JEHAN
Pierre, janiès ne me créiez
se ce n'est Jhcsus, nostre sire,
qui nous est icy venu dire
nostre manière de pcscher.
s. PIERRE
3t855 Si n'est qui m'en sache empescher
que tantost devers luy ne voise ;
il n'y a pas trop longue toise,
tout surpiez me voudi ay trouver :
il me fault ma robe lever
31860 et nioy aventurer tout oultre.
Icy s'en va S. Pierre tout seul sur la mer
au port ou Jhesus est,
s. JAQUES ALPHEY
Pierre bien parfaicte amour moustre
a nostre maistre, a tout entendre,
quand il ne nous vcult pas attendre,
que nous l'eussions mené a no.
s. THOMAS
31SC5 Nageons au bateau, je le lo,
et admenons nostre niaree.
s. PIERRE
Tressainte parsonne honorée,
mon maistre et mon tresdoulx seigneur,
vous nous faictcs mig grant honneur
31870 quand de nous vous plaist souvenir ;
par vostre bon conseil tenir
avons pris poisson largement.
JHESUS
Apportez m'en présentement
tant qu'a nostre diner souffico.
s. PIERRE
31875 C'est bien raison que j'obeysse
et me rigle a vostre rapport ;
je vois traire la roix a port ;
si verrez toute nostre prise.
Icy descendent les autres après,
s. ANDRY
Qui a mis en ceste pourprise
31880 ce brasier et ce poisson sus ?
s. JAQUES ZEliEDEY
C'a fait nostre maistre Jhesus ,
qui est ja assis pour mangier.
JHESUS
Frères, venez moy compaignier
hardiment, je le vous commando :
31885 si partirez a la viande
que je vous ay cy appresteo.
s. JAQUES ZEIÎEDEY
J'ay nostre marée comptée :
nous avons que bars, qu'aigrefins,
que saulmoiis, que gros niarsoins,
31890 plus de cent et cinquante trois.
s. BERTHELEMY
Je m'esbais bien que nos roix
ne sont tout en pièces voilées,
mes je n'y voy mailles foullces
ne plus que quand on les y mist.
s. THOMAS
31895 Puisqu'ilz sont a terre, il souffit :
)iour avoir consolacion
prenons ung peu reft'ection,
car nostre maistre nous appelle.
s. ANDRY
Est il ce?
s. PIERRE
Ma créance est telle
31900 que c'est il, dont j'ay bien grant joye.
s. JEHAN
Interroguier ne l'oseroye,
car je me tiens trctout asseur
que c'est il.
s. JAQUES AI.PMEY
Le hault créateur
en soit loué de bon vouloir !
31857 II ny a pas longue voyo C. — 31864 nou B. voU G. — 318.88 esci-ouis B. esgreCtins (J.
Ksse cil Al La fin du vers manque G.
■ 31Syl nostre A. —31899
QUARTE JOUllNElî
419
JHESUS
31905 Ne souffrez pas deffaulto avoif :
venez et mangez tous ciisonible.
Regardez de-nioy qu'il vous .samblo
se je suis vivant restably,
et n'ayez pas mis en l'oubly
31910 de vous transporter cy après
en Galilée ou par exprès
feray nianifestaciou
quant a ma résurrection
sur Thabor, la montaignc liaulte.
s. ANimv
31915 En ce n'y aia point de fnulte,
sire, nous tendrons ce pai'ty.
Icij Jhesui s'csnanouyt comme dessus.
s. JA.QUKS ZEUEDEY
Nostre niaistre s'est deppaity :
il n'a gucres fait long devis.
Si seroit bon a mon advis
31920 que nostre marée atournons
et en nostre hostel retournons,
si en ferons nostre i)roffit.
s. HERTHEI.EMY
Jaquts, vous avez très bien dit :
poi-tons tout et nous en allons,
/et/ s'en retournent.
SATHAN
319;5 Deables maudis, deablos fêlions,
ennemis de gloire forclos,
ne me tenez plus vos huis clos :
ouvrez moy prestement la porte,
car telz nouvelles vovis apporte,
31930 dont vous me devez fcstoier.
LLCIKEK
Comment va nostre souldoicr?
as tu fait ung nouvel ouvrage
digne de mémoire ?
SATHAN
C'est 1 âge
du beau brassiii que j'ay brasse :
31035 avant qu'il soit ung mois passé
vous eu verrez bel exemplaire!
ASTAROTII
Compte le donc sans si hnult braire l
si orrons quel bout va devant.
I.UC'lKEK
Avant qu'on parle [ilus avant
31910 asseure moy pour vérité
se Jhesus est rcssiucité
qui nous a mené si grant guerre '. '
SATHAN
(k'cy est ja vielz comme terre :
il est ressuscité sans doubtc,
31915 et ja plus de cinq fois en route
il s'est a ses gens apparu :
or appam, or disparu :
je ne s^ay que gibet il brasse;
et d'aultre costé je dcsbrasso
31930 tout tiuit qu'il fait entièrement,
ne tout sou ressuscitement
ne lui vauldra pas une osiere,
cai- j'ay ja trouvé la manière
que les Juifz n'en cioyent rien.
KERGALUS
31955 Or nous eu compte le moyen,
et ne nous fais point trop long compte.
SATHAN"
Deables, je vous dis et voua compte
que quand j'ay esté ad\crty
que Jhesus estoit reveity
31960 tout en vie apprès son ti-espas,
sachez que je ne dormis pas.
Les chevaliers bien l'adnonceroDt
et pour tout vray le tesmoignereut
aux princes do la loy Moyse,
31965 mes je leur ay tel pusce mise
en l'oreille et si bien empraiiite
que la nouvelle en est estainte,
car aloi's trouvay les sentiers
de corrompre les chevaUei's
31970 et dire de communs accors
qu'on leur avoit emblé le corps ;
et de fait ilz l'ont prononcé
et en tant de lieux anoncc
que jamos Juif n'y croira,
31975 et ainsi Jhesus demourra
sans peuple qui le veille ensuivre,
par quoy nous avons a délivre
ces faulx Juifz comme dessus.
LICIKER
Les as tu doue ainsi dcceus
31980 en leur ccste atache baillant ?
pw ma pâte tu es vaillant :
il n'y a deable qui te vaille;
ma grant couronne je le baille
31918 long] ilB lî. — 31925 maudis) ilespis B. — 31928 présentement n. C. — 31940-1 sur ce point cy, sarrexi B. C. —
H1907 en man'iuc IJ. —31974 si uy A. — 319;7 nous a dicipli deliure B, nous .■> este de)iure Ci
420
qui est d'jing treppié tout aidant,
31985 comnio le deablc mieulx gardant
les drois de l'infernal pallu.
Mes tout ton fait u"a riens vallu,
se tu ne vas veoir de plus belles
pour sçavoir certaines nouvelles
31990 que ce faulx Jhesus devendra,
qu'il fera et ou il mendia
ce très desleal gendre humain
qu'il a osté de nostrc main :
sçavoir le veil a ceste fois.
SATHAN
31995 Mon maistre Lucifer, j'y vois,
mes je vous prie a ung brief mot
que vous me baillez Astaroth
et Berich i)0ur moi conipaignier.
BERICH
Nous convient il la voyager?
32000 trop long temps a que je n'y fus.
LUCIFER
Allez, que des eternalz feus
vous puist on les museaux brûler !
Icy s'en vont eulx trois.
s. A.NDRY
Frères, entendez moy parler :
chacun ses compaignons assemble,
32005 et nous en allons tous ensemble
sur la montaigne en Galilée,
laquelle est Thabor appelée.
Partons nous sans faire séjour,
car j'espoire que dans brief jour
32010 Jhesus se doit manifester.
s. JAQUES ZEBEDEY
Cy ne nous fault plus arrester,
mes frères et amis très doulx ;
pourtant s'il est aucun de vous
ayant aucun amy par voie,
32015 s'il a désir que Jhesus voie
en ceste appariciou belle,
je lui conseille qu'il l'appelle,
et puis l'admainc avec nous tous.
S. JAQUES ALPHEY
C'est bien dit; ça, que dictes vous,
3i020 Ruben, mon très chier compaignon,
Neptalin et vous, Gedeon,
Moab et cculs de vostre sorte ?
serez vous de nostre consorte ?
re-*pondic vous fault sur ce iioint.
Ml STERE Dli LA PASSION
HUBE.V
32025 (Juant a moy, je n'y fauldray jioint;
vous me faictos ung grand plaisir,
car de le voir ay lel désir
qu'il n'est bons qui le sceut penser.
MOAB
Pour moy ung petit rapaisicr
32030 des douleurs que j'ai enduré
depuis que fut a mort livré
nostre cher maistre débonnaire,
je veil bien le voiage faire,
car s'une fois voir je le puis,
3J035 il m'est advis que guery suis
entièrement de tout mon dueil.
GEDEON
Ces nouvelles sont a mon veil
les plus plaisantes qu'oncques furent,
puisque les frères nous asseurcnt
320'éO que le doulx Jhesus y verrons.
s. BERTHEl.EMY
Venez, et nous vous y menrons, .
puisqu'a Voir Jhesus contendez.
NEPTALIN
Pour nous tant soit peu n'attendez :
quand faire vouldrez départie,
32045 nous serons de vostre partie ;
partez quand vous vouldrez partir,
affin que nous puissions partir
aux biens dont on vous partii a.
s. MATH I AS
Chacun de nostre part ira
32050 si tost que vous vous pat tirez,
et pourtant en la part irez
dont vous nous faictes mencion.
JOSEPH, le Jititc.
J'aroie grant aftéction
que je puisse estre aussi du nombre ;
32055 pour ce, se je ne vous encombre,
s'il vous plaist, je vous suiveray.
RUBEN
Aussi volentiers le verray,
qu'oncques je mengeay en mon aage.
ABIRON
S'il [ilaist a Dieu, aussi ira je :
32060 il est temps de ne. us abréger.
TUI'AL
Je ne fauldray pas au voiage.
CELirs
S'il plaist a Dieu, aussi ira je.
ABACUT
Plus le désire en mon courage
lilDQl ne ou iloinourra C. mourra U. — ClUUi pour une foiz B. C. — 3190C hricf iiuiii'juc G. ~ 32013 vous] nous C.
3201S tous mniiqite A. — 32040 partir mniviuc C. — 32054 aussi minf/ue C. — 3205S menge A.
OTTAHTI'; lOURNKK
421
quo le lioiio nn \o manjfpr.
TIBAI.
3Î0OJ S'il jilaist a Dieu, aussi ira je:
il est temps de nous abréger.
s. PIEHRE
Allons nous eu sans jilus targor ;
nous sonuiuîs giant tas assenihlés :
toutes boiiucs gens inc saniblcz
32070 qui a bien mettez vostre estude.
s. JEHAN
Nous sonnnes grosse multitude,
quand j'ny bien partout regardé.
s. SIMON
De Dieu soions nous tous gai'dé
et conduit si tost et si bricf
3J075 quo vooir puissons de rcchief
cel(iy quo sui' tous ilcsiions.
MO A H
Se longuement ainsi tii-ons,
tantost en arons vive enseigne,
AHIUON
Je commaiice a voir la montaigne
ou Jhesus nous doit précéder.
TUHAI,
Mon cueur de lecsse se baigne :
je commance a voir la montaigno,
CEI.IL'S
De cheminer nul no se faigno :
a ce nous fault il accorder.
ABACl'T
0S5 Je conunanco a voir la montaigno
ou .Ihesus nous doit procéder.
s. MATHIEU
11 n'est mes saison de tarder :
montons amont, petis et grans.
JOSEPH, le Juste.
Vous dictes bien.
Icij uiontent amont.
[FosE.l
Icy s'appert Jhesus de rechief.
JHESUS
Mes chers enffans
qui vous estes voulu unir
et enseinl)le en ce lieu venir
a mon command especial,
la paix du lieu celestial
V0U.1 soit liuy a lou.i ottroyce!
s. SIMON
^îOO.'i O sainte parsonne louée,
grâces vous rendons et mercis
quand nos cueui's do double ob^ctirois
enlumines d(> tii clémence
par la lumière do crodence,
3!ilOO si bien que t.; croions en sonniie
estre fil/, de Dieu et vray homme
relevé par |)ouoir divin.
s. THOMAS
Jhesus, noslre mai^ti-e béguin,
celuy qu'a tort on empescha,
3S105 le juste qu'oncqucB ne pécha,
quand tu fus en In croix cloui-,
ton nom soit bonoit et loué
quand tu nous fais si bieueureux
que ton digne corps précieux
;«M0 tu nous daignes faire ap|)aroir.
JOSEPH, le Juste.
0 digne et l'overand miroir,
di: tout bien la similitude,
dont de))pend la béatitude
que nous devons plus désirer,
3*115 a toy voir, a toy remirer
tout bon cueur se regarde el mirej
car tu es médecin et mire
pour pouoir cueurs dollans mirer.
MOAB
Je ne puis assés a<lmirer
3Î120 ton saint corps, car tant plus l'admire ;
a toy voir et toy remirer
tout bon cueur se regarde et mire.
ABIRON
A les louanges aspirer
cueur humain ne i>ourroit souflire,
3«Î5 qui as peu la mort desconftrc
et mau gré la mort respirer.
TUBAI.
A toy voir, a toy remirer
tout bon cueur se regarde et mire,
car tu es médecin et mire
3Î130 pour pouoir cueurs dollans mirer.
CELIUS
A ton fait bien considérer,
Jhesus ou tout bien sont compris,
il n'est bonis qui sceut mettre a pris
la valleur de ta grant puissance.
JHSSUS
32135 Frères, ayez eeste espérance
que pai' la loy Dieu ordonnée
32081-C manquent A. — 32082 Je voy lout a plaiii B. C. — 32115-30 Le» refrains da rondeau mnnqueni A.
MISTERE DE LA PASSION
toute puissance m'est donnée
pai-tout et en ciel et en terre
pour saulver tous ceulx qui requerre
32140 et invocquer youldront mon nom
en toute tribulacion
quoy qu'elle soit penetrative.
ABACUT
Veez cy merveille admirative
la plus merveillant de jamés,
32145 et en grant doubtance me mes
de ce que je voy a mes yeulx
qu'oncques riens ne cuiday veoir mieulx,
que je voy Jhesus proprement,
sa face, son contenement,
32150 et sa très bénigne samblance ;
mes d'autre part j'ay grant doubtance
s'il est possible et liien licite
qu'ung homme mortel ressuscite :
veez la ma difficulté toute.
s. THOMAS
32155 Abacut, jaraès n'ayez doubte
de cela, c'est vérité plaine ;
car ja soit que nature humaine
ne puist a cecy parvenir,
toutefibis nous devons tenir
32160 que cil est Dieu, qui peust tout faire.
JHESUS
N'y veilliez mettre aucun contraire,
car jamos plus vray ne direz ;
et pourtant cy après irez
au monde et serez diligens
32165 de prononcer a toutes gens
du baptesme le hault mistere,
les baptizant ou nom du Père,
du Filz et du saint Esperit,
et, comme autreffois vous ay dit,
32170 leur baillerez enseiguemcns
de garder les commandemens
qu'aultreffois vous ay prononcés :
publiquement les anoncez
a garder a toutes et tous.
s. PHELIPE
32175 Helas! sire, nous lerrez vous
en ce très misérable val,
sans avoir ducteur principal ?
a qui pourrons nous recourir?
JHESUS
Je seray pi'est a secourir
32180 a toutes les neccessités
dont vous serez fort incités
en ce monde de toutes pars.
car pourtant se de vou« me pars
quant a présence corporelle,
32185 ma présence espirituelle
avec vous fera mansion
jusqu'à la consommacion
en la fin de ce siècle cy.
JOSEPH, le Juste.
Ha ! cher sii'e, vostre raercy,
32190 moult de haulx biens nous avez fait
et faictcs encore de fait,
et plus que desservy n'avons.
Iry s'esvar.oiiyi Jhesus comme de.siis.
s. MATHIAS
Ou est Jhesus ?
s. PHELIPE
Nous ne sçavous :
le corps a agille et expert
.32195 par quoy ou il veult il s'appert,
et quand il luy plaist, il s'abseonce.
s. PIERRE
Qui croire vouidra ma responce,
nous nous en irons a l'ostel
en louant le Dieu immortel
32200 qui nous povres gens désolés
a de sa grâce consolés
si bien que de mieulx nous en est.
s. ANDRY
Nous nous eu irons, s'il vous plcst,
tous ensemble en nostre demeure
32205 prier de bon cueur sans demeure
a la divine pourveance
qu'elle guide nostre ordonnance
pour le mieulx comme il luy plaira.
RUBEN
Nul de nous n'y contredira :
32210 partons ; que Dieu qui lassus règne
en son saint et glorieux règne
soit en nostre protection !
Icy s'en retournent en leur logis.
[Pose.]
s. SIMON
J'aperçois nostre mansion,
32139 pernuer ceulx B. C— 3216S benoit B,— 32170 Leurs A.— 32181 fort incites] nécessites B. C— 32203 vous] dieu B.
32204 logis B. G.— 32205 Et nous tendrons tousjours subjitz B. C— 32212 guide et conuoy A.— 32213-20 manjuent A,
iRl A R T K JOUR N E K
423
mes nmis sages ot pnulens ;
33815 force est que nous entrons deilcns,
et puis clorron» de pao\ir dos doul)tcR
les huis et les fenestres toutes,
que ces Juif/, ne nous y sachent.
s. JUDE
Les mauvais tirans nous menacent
32820 de |faire moui'ir a douleur.
NOSTRE n\MK
Mes seurs en Dieu, nostie seigneui',
s'a mon vueil vous plcst consentir,
je vous veil d'ung point advortir
dont vous vous tendiez bien eureuses.
MADELAINB
32825 S'il y a nouvelles joyeuses,
nostre maistresse singulière,
racontez nous en la manière
et vous nous ferez grant plaisir.
NOSTHE DAME
Pour ce que tout vostrc désir
32830 est d'oir le rapport plaisant
de Jhesus, mon très cher enffant,
en qui tant vostre cueur se fie,
je vous dis et vous certifie
que biiefment montera ou ciel
32235 a Dieu, son cher père éternel,
qui par grâce me le donna,
et le don qu'en terre oi'donna
veult traire en son noble royalme.
MARIE JACOBY
llelas ! Marie, chcre dame,
38240 nous donrra pas Dieu lors sa grâce
que ce hault mistere se face
devant nous ? le verrons nous point?
MAKIE SALOMÉ
Il nous est advis sur ce point
que puisque vous estes sa mère,
38245 ce baultaiu et puissant mistere
ne sera pas que n'y soyez ;
c'est raison que vous le voyez :
vous y devez estrc présente.
NOSTRE DAME
Je n'en pense pas estre exempte :
32250 se Dieu plest, présente y seray
et devant mes yeux le verray
monter au trosne pardurable.
MADELAINE
0 nostre maistresse honorable,
miroir d'honneur et de prudence,
3!2:w plaise vous do vostre licence,
que nous voua y accompaignona ;
au moins avec vous y ferons
le mistere qui so fera.
MARIE JACOBT
0 quel grant noblesse sera
38800 de voir ce noble corps humain
monter au trosne souverain I
tout le ciel s'en esjouira.
NaSTRB DAME
J'ay espoir qu'il st! montrera
lors en sa force tout a plain.
MARIE SALOMÉ
38865 0 quel grant noblesse sera
de voir ce noble corps humain !
NOSTRE DAME
Lors sera cil qui laissera
ses amis au règne mondain.
MADELAINE
0 quel grant noblesse sera
32870 de voir ce noble corps humain
monter au trosne souverain!
tout le ciel s'en esjouira.
Ma dame que servir devons,
que nous trois avec vous soions
38275 pour voir ceste feste joyeuse.
NOSTRE DAME
Je me tendray [wur bien eureuse
s'avecques moy vous plest venir ;
et pour plus briefment pai'venii-
a ce bien que tant desirons,
38280 se vous me croiez, nous ii-ons
vers les apostres de ceste heure,
car je cuide estre toute seure
qu'ilz y seront tous a ce jour.
MARIE JACOBY
Or nous partons donc sans séjour:
38885 Jhesus nous conduye a bon port !
Icy s'en vont les Maries vers les apostres.
[Pose.]
PILATE
Seigneurs, est il quelque rajwrt
qu'on face mes de ce Jhesus ?
qu'en dittes vous ? n'en parle on plus
de ses fais aval la cité ?
38221 je vous pry oycs moy A. — 38249 absepte C. — 32256-72 «i<jn^u<«( A. — 38888 asseure B.
M I s T !■: R E DR LA PASSION
3J290 est il mort ou l'cssuscité ?
est il nul de vou« qui le isaclie ?
vous qui allez en mainte place
et en mains lieux divers, et donequrs
dittes moy nouvelles quelconques
32293 pour rcsjouir : vous songez trop.
BARRAQL'IX
Fi'evost, on nous en dit beaucop
et plus que savoir n'en vouldroic,
mes pour riens no le vous diroie :
ce ne sont point choses a diio,
32300 car a fureur et a grant ire
vous pourroient tost csniouvoir.
PILATE
Si les me convient il savoir,
et deusse forcener de rage 1
Ha ! qu'il me poise en mon courage
32305 de la mort de ce liault prophète
que j'ay jugé a la requcste
de ccste lignée interdite !
que l'heui'e puist estre maudite
qu'a leur rcqueste obtemperay !
32310 bien sçay qu'en la fin en mouriay
de mort honteuse et villenable.
LA FEMME PILATK
Ha ! mon très cher frère amiable,
vous estes tant prudent et sage,
comment dittes vous tel langage ?
32315 ne sçay comment l'osez penser :
bien pourriez les dieux offencer
par itelles paroUes dire,
et pourroit cheoir sur vous l'ire
des dieux et sur vostre maison.
PILATE
32320 Taisez vous, ce seroit raison,
je l'ay bien et beau desservy :
aux Juifz me suis asservy,
et par leur faulx exhortement
j'ay fait le plus faulx jugement
32325 qu'oneques pensa homme vivant.
LA FEMME PILATE
Tousjours dittes pis que devant ;
il vous fault ces plaintes cesser,
et n'y vueillez jamès penser :
s'il est mal, ainsi demourra,
38330 s'il est bien jugé, bien sera,
et n'en prenez jamès ennoy,
car je cuide tant qu'est a moy
que jamès parler n'en orrez.
PILATE
Vous direz ce que vous vouldrez.
32335 mes enfin il m'(>n mescherra,
et mon estât en decherra
briefment, il n'e.i fault point doubtor.
Que n'abrogcs'tu de comnter
le cas dont j'ay icy touché ?
BARRAQUIN
323'iO Vos plaintes m'en ont empesché ;
mes puisque tant le desirez,
auffort aller vous le sçarcz,
et tousjours sous correcciou
vray est.
PILATE
Abrège ton sermon :
323'.5 ne fay point le long langager.
BARRAQUIN
Puisque tant le fault abréger,
le cas est tel que je vous compte :
tout le monde si tient son compte
que Jhesus qui en croix est moi t
383r)0 est suscité après sa mort,
et dit on huy tout en appert
qu'il se demonstre et qu'il s'appert
a ses disciples et ses gens,
et fait sermons et preschemens,
32355 comme l'aultrier on me disoit,
ne plus ne moins comme il faisoit
, avant qu'il fust en croix pendu.
PILATE
Quand j'ay bien tretout entendu,
tu me racomptes grans merveilles.
CENTURION
32360 Prévost, se tu t'en esmerveilles,
neantmoins tu le dois ainsi croire ;
chacun y tient son consistoire :
cy ung, cy deux, cy trois, cy quatre.
L'ung dit que vous l'avez fait bati-e ;
38365 aultre dist : il a mal jugi<> ;
aultres : il a interroguié
en mains pas et en mainte clause,
et si n'y a sceu trouver cause
sur quoy il l'eust deu condampner
32370 a le faire en la croix pener.
Briefment, quant est de ceste charge,
tout le monde vous en encharge,
cessant toute excusacion.
PILATE
Taisiez vous en. Centurion ;
32375 quelconques s'en veille meller,
vous seul n'en devez point pai'ler,
et estes blasmé des premiers :
car vos trois meschans chevaliers,
38297-8 vouldrion, dirion B. C. — 32302 Si] Se A. — 32317 Par si fleres B. C. — 32339 je vous ay B. C. — 3234
manquent A. — 32348 maintient et compte B. G. — 32370 pîrcier G. — 32372 Tretout le monde vous en charge B.
»$390
3î39ri
mrschans et de moRi'liaiit nrioy.
32380 Ifsquclz trois soiibz l'oiubro do moy
vous avpz aux .luifz prfsli's,
fi'i sont tios mpsclianiiiioiit poit^'s,
et mal a 1(mu- hniunui' venu,
qu'ilz ne sccvcnt quVst devenu
32885 le corps JhpsuR ; et dit on plus
que tous ont esté corrompus
par puissance d'argent content,
et ont Juif/ exploitii' tant
qu'ilz les ont attraits de leur sorte.
CENTURION
S'ilz ont mal fait, je m'en rapporte
a leur bonne discrecion ;
s'il y a PU cori'upcion,
auffort ti'os bien leur en conviengne.
Mes comment que la chose adviengne
ne qui qui en soit excusé,
vous en estes fort accuse'»
de luy avoir fait grant injure,
et brief tout le monde en murmure,
et la coulpe sur vous so couche.
PII.ATK
38400 Leur murnmre moult peu me touche :
s'aucuns s'en veuUent esmouvoir,
ce sont ces gens mêmes, espoir,
gens de commun, gent populaire
qui ne servent i-iens que de braire
toute jour a perte et a gaigne.
Je croy bien qu'ilz en ont engaigno
et ne s'i sont point consentu,
mes ilz n'ont force ne vertu :
je n'en fais ne compte ne mise ;
mes demandez aux gens d'église,
assavoir s'il/, nj'en blasmcront ;
je croy qu'ilz m'en garaudiront
envers tous et encontre tous,
CENTl'RION
[Non est dea.
PILATB
Si est, je le trouve.
CENTl'RION
Rien, rien, non est.
. PILATE
Je le vous picuve.l
CENTURION
Tant vault pis, car c'est contre vous:
la voix commune veult courir
que les Juifz l'ont fait mourir
par la faulse et mauvaise envye
Ql'ARTR JOURNF.F,
.IMÏO
425
S8405
. SS410
415
3*4Ï5
aîoo
38435
384 iO
38445
38450
38455
38460
38465
qu'il/, ont eu sur sa bonne vie.
Trop ))ien dit on, quand \ea oy»le»,
au premier très fort contcndiste»
de gardei- qu'il ne fust delTait ;
mes quoy ? cela ne fut riens fait,
sn mort ne s'en retanla point;
car quand vint au principal point
que vous le poviez délivrer
ou a vie ou a inoit livrer,
comme ung homme mal tempéré
a eulx avez obtempéré ,
par quoy tout le monde vous juge
ung très faulx et desleal juge,
et y pensoz bien au surplus.
PII.ATK
Ho ! il souffit, n'en jiai'lons plus,
car tel iiarler m'a moult despieu :
j'en ay fait le niieulx que j'ay pou
f t oncoi'c chacun me griofve !
Vien ça, Rarraquin : parachevé
l'ofTot de ta narracion.
HARRAQUIN
Quant a la suscitacion
de Jhosus, selon qu'on tesmongne,
c'est une approuvée bcsongne :
oultre on dit que plusieurs ostans
en terre, moi-s passé long temps,
sont suscités et levés sus
avec le prophète Jhesus,
et ilepuis sont magnifesté
a plusieurs gens do la cité.
et monstrent fais innumerables
a ouir bien espouantables ;
mes en tant que le surplus wucho,
Jhesus ont confessé de bouche
estre vray fliz de Dieu le vif.
PI LAIE
Veez la ung mot ponetratif
pour percer ung cucur de douloui s !
Je me suis bien doublé tousjours
qu'il no fust conmie tu le dis,
mes ces parvers Juifz maudis
me crioyont a tel effort
que je l'ay condampné a mort
poui- éviter plus grant nuy.sance ;
et s'il vient a la congnoissanco
lie Tibère, oniporour do Rommi>,
et il scot qu'il estoit saint homme
très utille pour le pays,
je seray de luy tant hays
38381 a CCS A. — 32393 souuicngno U. — 38403 gens populaire A. 0. _ SJUI noieront n. noICoironl C. — .32112 ciiide
quilz mon sortiront H. C. — 32114-5 «i>iii7iirn( A. — 32428 contredites A. — 32433 pense C. — 32448 Et pour »p-
prouer B. C.
426
MISTEREDE LA PASSION
que mourir bricf m'en convendra,
et au mieulx qu'il m'en advendra
si je ne suis mort ou tué,
32470 du tout seray destitué
et desniis de mon hault office.
CENTURION
Vous y estes si très propice
et si soubtil en tous amès
que je ne croiroie jamès
38475 que l'empereur vous en déboute ;
et se de ce fait avez doubte, ■
rescripvez moi aux sénateurs,
aux conseilliers et gouverneurs
de Romme, en leur donnant joyaulx
32480 a part bien precieulx et beaulx :
pour vous vers l'empereur seront
et bien vostre paix vous feront,
ja si courroucé ne sera.
PILATE
Guaire de temps ne demourra
32485 que j'en feray par ce moien.
[Pose.]
Icy viennent les Maries avec les apostres.
s. A.NDRY
Resjouissez vous en tout bien,
frères, et faisons bonne chère :
veez cy nostre maistresse cherc,
la mère de nostre seigneur,
32490 qui cy vient.
s. PIERRE
Faisons luy honneur,
comme bien faire le devon.
NOSTRE UAME
A ceste dévote union
doint Dieu salut de corps et d'ame 1
s. JEHAN
A nostre cougregaoion
32495 bien venez, nostre chei'c dame ;
chacun do nous tant vous reclame
que raconter ne le sçavon ;
car point d'aultro recours n'avon
pour resconforter nos douleurs.
s. JAQUES ZEBEDEY
3S00 Nous n'avons point d'espoir ailleurs :
puis que nostre maistre pardimes,
a vous du tout nous attandismes
pour nostre foy soliciter.
32473 ametz B. endrois G. — 32486 Resjouissons la B. C. -
manqueiU A. — 32543 Je ne quiers pas grant mengerie B,
NOSTRE DAME
S'en riens je vous puis profiter
32505 ou vous avancer' près ou loing,
j'en appelle Dieu a tesmoing
que je m'y vouldroie emploier
sans attendre le supplier
pour l'honneur de Jhesus mon filz
32510 a qui comme leaulx et fidz
avez compaignie tenue.
s. BERTHELEMY
Vous soiez la très bien venue,
nostre conffort et vraye adresse,
et ces femmes de grant noblesse
32315 qui vous ont volu compaignier !
MADELAINE
Chers frères, Dieu vous doint gaignier
son regard qui est perdurable !
s. MATHIEU
. Temps sera de mettre la table
et la viande préparer
32520 pour recevoir et honorer
nostre maistresse que veez cy,
et de sa compaignie aussi
songnei'ons bien, s'il plaist a Dieu.
s. SIMON
Vous devisez très bien, Mathieu :
32525 bien le vault sa digne parsonne,
et avecques ce, puis hier nonne,
nous ne mangeasmes que du pain
ung bien petit, par quoy la fain
nous commance fort a surprendre.
s. JUDE
32530 Selonc ce que je puis entendre,
pour plus anticiper le soir,
qui vouldra .se peult très bien seoir ;
les biens que Dieu nous a prestes
sont ordonnés et apprestés
32535 dont pas n'avons grant affluence.
s. PIERRE
Chacun prendra eu pacience,
c'est le plus fort puisqu'il est prest :
nostre maistresse, si luy plest,
de bien peu se tendra contente.
NOSTRE DAME
32510 Pierre, c'est très bien mon entente :
les biens très eschars y seront
quand bien ne me contenteront :
peu me souffit, je vous affie.
s. PIERRE
0 ma maistresse, je vous prie,
32515 et aussi fout mes compaignons,
-32?2'i très mawiue C, - 32526 aueo A, B. C. — 32531-3
y U A 11 T K
que sans plus d'cxcusncions
vous vous secz en costo ploce.
NOSrnE DAME
A mis Pierre, sauf vostre grâce,
tes us no sont pas poustuniiors :
i'aictes seoir les frères premiers
S2550 tinisjours en iilaces plus» honneste»,
et puis entre nous femmelettes
nous serrons bien tout a nostro aise.
s. JEHAN
Ghei'e dame, ne vous desplaise,
32X>h soit chose estrangc ou coustumiere,
vous vous y serrez la première,
ou mcshuy no nous y serrons :
c'est raison, faire le devons,
vrayo cliarito nous y lie.
NOSTRE DAME
:î2500 C'est do la vostre courtoisie
que si grant honneur me voulez :
vostre mercy !
s. THOMAS
Vous le valiez :
si ne vous devons pas extordre.
Ça, chacun se mette en son ordre,
3?5r>5 chacun so siée appartement,
et a mon petit scntement
do mon pouoir vous serviray.
RUBEN
Thomas, et je vous aideray
volontiers, c'est bien mon office ;
38570 nonobstant tant qu'est de service,
il sera ligierement fait.
NOSTUE DAME
Amy Pierre, c'est vostre fait
devant costo reffoction
faire la bénédiction,
32575 car mon filz Jliesus ou ses joure
l'avoit do coustume tousjours,
et nous le devons ensuyr.
s. PIERRE
Maistresse, a vous veil obéir,
obstant que pas ne m'appartiongne.
Ici/ l'ail Piervo la benedicion en ba^.
s. THOMAS
32580 Seigneurs, chacun content so tiengne
des biens que Dieu nous a laissés.
s. JAQUES ALPHEY
11 souffit ti'os bien, c'est assés ;
et tant qu'il touche la pitance,
elle est large a grant habondance
JOnUNKK 427
.32t>85 et beaucop plus qu'il ne nous fault.
s. PHELIPB
De nous, frères, riens ne nouii cbault :
nous ne poons trop peu avoir ;
mes que ja veille recevoir
noslre maistresse l'ordinaire,
32590 il nous souffit.
NOSTRE DAME
Bien me doit plaire,
car les bien» largement y sont.
s. HEHTUELEHY
Or faictes lM>nne clïere dont,
ma dame, et puis nous parlerons
do nostre niaisti-c et vous dirons
.32595 ce que nous en sçavons de vray.
NOSTRK DAME
Dieu scot que volontiers l'orray,
et aussi fera Madelaine
et mes scui's.
MADELAINE
Soiez en certaine :
c'est la chose que plus désire.
Icy s'apert Jhesus devant eulx.
JHE.SII8
.38600 l'aix soit o vous !
8. JEHAN
C'est nostre sire,
nostre maistre et nostre vray chief.
JHESUS
Frères, a vous vicn de rechief
faire manifestacion
do ma ressuscitacion
32605 pour oster la fragilité
de la vostre incrédulité,
et que plus ne vous y boutez
ne jamés de nioy ne doublez.
S'aucun y a qui en aist double,
38810 chacun on bonne foy se boute
que vrayment ressuscité suis
et que jamés mourir ne puis.
Knsuyvez mes commanderaens
et allez faire prcschcmons
32015 par tout le monde universel,
preschans le hault fait solennel
de l'euvangilo : qui croira
en elle et baptizé sera
sera sauvé sans faute nulle.
325'.S-r>9 man'iurnt A. — SSrxi) Ghers frères cest de vostre graoe A. — 32570 tant qu'] quant G. — 32578 Maistre G.
— Sasi dieu manijue A. — 325S0 nou<] noz B. C. — 32598 Et mes seura] Que vec^- U. C. — 32018 celle B. C. — 38CJ9
Sera salut B.
428
32620
MISTER E DE LA PASSION
et qui en sera incredullc
sei'a en fin a grief torment
condampné iiorduiablement ;
et do ceulx qui en nioy croiront,
iteulx signes s'en ensuyvront :
32025 en mon nom feront grans miracles,
ilz guériront demoniacles,
nouvelles langues parleront
et les serpens porter pourront ;
se mortel bruvage regoyvent,
32030 ja ne leur nuyra quoy qu'ilz boivent ;
sur malades mettront leurs mair.s,
qui tantost seront saufz et sains,
et beaucop d'aultres grans misteres.
Et pourtant, mes très araés frères.
32035 ja plus loin n'allez ne venez :
en Jherusalem vous tenez
attendans le don du hault signe
du saint Esprit benoit et digne.
Jehan que le peuple assés piisa
32640 dedans l'eaue me baptiza,
signifiant mendicité,
mes pour avoir en charité
vos courages mieulx attisés
vous serez briofment Ijaptisés
32645 au saint Esprit parfaictement.
s. PIERRE
Par vostre bon commandement,
sire, gouverner nous voulons.
JHESUS
Avant que nous nous en allons
au lieu ou je vous veil mener,
32650 j'ay voulu en moy ordonner
de prendre avec vous mon repas,
s. ANllUY
Nous ne le reffuserons pas,
maistre, bien y sommes tenu.
Icy se siet Jhcsus a table [emprés Nostre
Dame] au dessus d'eulx et luy font tous
honneur, et après qu'ilz oit tnangé,font
samblant de dire grâces tout bas.
NOSTRE DAME
Mon cher filz, Jnen soiez ^■enu
32655 et a joie en vie remis !
tous vos frères et bons amis
a vous veoir sont forment joyculx.
JHESUS
Ma mère, je me deppars d'eulx
et de vous corporellement.
32060 mes espii'ituellement
avec vous demouriay sans fin.
NICODEMUS
Joseph, mon très leal affin,
mon cher aniy et compaignon,
j'ay grant exultacion
32665 en mon cueur quant j'ay oy dire
comment Jhesu Crist, nostre sire,
vous a de prison délivré,
pourquoy vous avez retrouvé
vostre terre et vostre pays
32670 maulgré les desloyaulx Juifz
qui a vous nuyre contendoient.
JOSEPH d'A rismathie.
Certes, Nichodeme, ilz tendoient
a ma mort a toute rigueur
tant seulement pour la faveur
32675 que vous et moy a Jhesus feismes,
quand de la croix le despendismcs ;
et m'en ont très fort occupé,
mes j'ay de leurs mains échappé
la mercy mon maistre Jhesus.
NICODEMUS
32680 Aussi se sont ilz bien formus
encontre moy pour me deffalro,
et .s'ilz l'eussent bien osé faire,
ilz m'eussent par leur fol désir
fait ung si mortel desplaisir
32685 que ma mort s'en feust ensuivye.
JOSEPH
Jhesu Crist m'a sauvé la vie,
Nichodeme, je vous prometz ;
et de luy ne doublez jamès
quoy que ces mauvais Juifz dient
32690 qui cnpugnent et contredient
sa résurrection très haulte :
il est ressuscité sans faulte
et ainsi fermement le crois,
car ainsi bien que je vous vois
32695 je l'ai veu en humaine forme
sans riens corrompu ne difforme,
et m'a jusques cy amené.
NICODEMUS
Leur sens a esté fourmené
" et retourné bien au revers,
32700 quant les faulx traistres parvers
32623-4 manquent A. — 32040 me maiv^ue B. baptisera G. — 32651 De minqae C. — 32601 A ojoute : Et si seray tous
jours enclin A vous guider par bon aduis — 32602-727 manquent A. — 32304 Jay eu grant exaltaclon C. — 326(i8 trouue
B. — 3S674 fureur B. — 32678 Je suis C. — 32680 fort meuz C. — 32689 faulx juifs si en C. — 32698 fort mené C.
y i: A R T !•: j o u r n i-: k
'r,".l
110 niius (Jiit trouvi- a loiir viicil.
JOSEPH
.le soay liieii (pi'ilz mouifiit do diioil;
mais que vo\illoiit ilz contiodire
oiiooro ?
NICODEMUS
Hz n'en scevent quo tliio.
"?705 tant sont esbayz et couffuz ;
ilz sont aussi i-oiigrs qiio fous
do la honte qu'on leur en dit.
JOSEPH
C'est ung mauvais gendi-c maudit,
envieux et plain do rancune.
NICODEMUS
32710 Encor dit on que par peocune,
pour niioulx leurs cautolles atteindre,
ilz ont trouvé moyen d'e^teindrc
le bruyt qui se magnifestoit
que Jhesus suscite ostoit,
32715 et par mailles et par deniers
ont corrompu les chevaliers
qui le monument ont gardé.
JOSEPH
Quant j'ay bien partout regardé,
c'est une gent dure et maligne..
NICODEMUS
32720 Aussi la puissance divine
briefiuent sur eulx dcsscndcia
et tellement s'en vengera
qu'aux aultrcs seront exeniplaiic ;
mais pour la doubtc d'oulx desplaiie,
32725 il est bon de nous despasser.
JOSEPH
Nous lairi'ons leur fureur passer
ung petiot par bon advis.
.IHKSLS
Frères, entendez mon devis :
le haultain jour est adjourné
32730 que Dieu, mon père, a ordonné
qu'en joie et exultacion
je face es cieulx ascension
ot qu'en ma pro|)ro forme humaine
je voise sortir la domaine
32735 de gloire liaulte et beneuree
que mon père m'a préparée
sans temps mes en éternité,
ot pour coste mondanité
qui est caducquo et transiuuablo
32710 aray le règne pardurablo
ou il n'a plaintes ni douloui's.
Au jour d'uy a quarante jours
que lie la mort res.su»citay,
et puis i)our vosli-e proufit ny
32745 fait apparicions plusieurs
IK)ur vous extirper tous erreur»
et mener a vraye lumière ;
et pour regarder la manière
de mou asconcion liaiiltaine
32750 qui sera on l'heure prochaine,
mes frères, tous vous unirez
et de ce lieu vous en irez
en la montaignc d'Olivct,
sus Inquollo maint olive est :
32755 s'i menrez ma more bonign?,
et la la puissance divine
manifestée vous sera.
s. PIERRE
Sire, chacun s'adrancera
de faire vostre bon plaisir.
Icy s'estaxoiiyt Jhesus 'omine dessus.
NOSTRE DAME
327CO Mon seul et souverain dosir
que plus je désire en ce monde
et ma pensée plus parfondc
est de voir a ma volonté
mon fdz monter en majesté
32765 a la dcxtre do Dieu, son perc.
8. ANDRV
Quand la chose bien considère,
ce sera ung fait de grant los.
s. nERTHKI,EMY
Partons nous d'icy, je le los :
avançons nous de voiager.
S. J\(IUBS ZEOEDEV
32770 Nous ne gaignons rions de targer :
ung petit hastci' nous convient,
affin se iiostre maistre vient
il nous treuve tous approstt's.
s. MATHIAS
.laques, baultemcut protestez :
32775 vostre raison bien se consonne;
toujours est diligence bonne,
soit sur homme ou soit sur enfl'ant.
[Pose.)
32711-2 att.'iiUre, pstandr.' li. - 3>T23 siTa C. - 32729 aduomi U. — 327S0 terrours II. - 3275» Eus ou liu.l mont R.
430
MISTERE DE LA PASSION
MARIE SALOME
Loué soit Dieu le triomphant
quand si beneurés nous serons
3;7S0 que ce hault mistere verrons !
j"ay grant désir que l'eure approelie.
MARIE JACOBY
De blasrae et de villaiu l'eproche
nous vueille Dieu contregarder !
[SlLETK.J
ADAM
EniTans, bien devons habonder
327S5 en liesse et joie excellante,
car en la journée presante
Jhesus, nostre vray rédempteur,
comme puissant triomphateur
en l'arche du ciel montera, .
32790 et lors il nous transportera
avec luy en parfaietc joye,
en quoy de tout bien la inoujoye
nous pourrons contempler sans fin.
EVE
Loue soyez tu, roy divin,
3i795 très bon Dieu qui tout procuras
et qui règnes et régneras
sans règne jamais terminer,
quant il t'a pieu aterminer
celle saison tant désirée
32800 que bien sera rémunérée
de son loyer très bieneureux
nostre ame ou logis glorieux
qu'a tes amis as préparé.
YSAIE
Or est le péché reparé
32605 que le premier perc pécha,
qui nostre salut erapescha
et nous tint long temps en tenebi-e,
nous privans de gloire célèbre
que nous deussions avoir conquise;
82810 or l'avons si long temi)s requise
que, s'il plaist Dieu, en cestuy jour
au gloiieux throne majour
en serons doués noblement.
JHEREMYE
Quel joye ! quel envoisement !
32815 quelz chants par joyeux entrechanges
menrront huy anges et archanges !
par tous les thrones souverains
leur dictiés, leurs motès scrains
qui vouldront a festoyer querre
32820 feront resonner ciel et terre
en l'armonnie do leurs voix.
Doulx Jhesus qui tous cueurs pouivoys
de vraye consolacion,
quel bien, quel retribucion
32825 te forons nous pour les bicnfaiz
qu'a ceste journée nous fais ?
Vers toy n'avons point desservy
qu'a mort te soyes asservy
pour nous mener a tel haultesse
32830 plaisant, singulière en noblesse,
et pour tel bien distril)uer
ne te pouons aèribuer
restribucion bien condigno,
penssans et adniiraus com digne
32835 est la haulte bouté do toy !
EZECHIEL
Jhesus, nostre Dieu, nostre roy,
nostre remède salutaire,
nostre salut très neucessaire, '
sans qui nostre fait n'ostoit l'ion,
3iS'iO de bon, hault et singulier' bien
nous fais huy pai'ticipans estre,
et de la mansion terrestre
nous transfères a la plus haulte
ou jamais nul jour n'arons faulte,
328'iD remiraus de ta clere face
la vision qui nous reface
de tant que cueur peut désirer,
et desirans toy remirer
en parfaietc finicion,
32850 n'arons quelque imperfection '
qui jamais dessus nous s'applique.
DAVID
Jadis en esprit prophétique
de ceste ascension beaux diz
ay prophctizé quand jo diz
32855 que Dieu feroit ascension
en haulte jubilacion,
en voix de trompes bien sonnans
et d'instrumens bien ressounans |
si tiens qu'a telle envoysorie
32860 toute la grant chevallerie
des haulx cieulx s'i employera.
32790S61 maiijifnt A. — 32793 pourras li. poiu'iras C. — 32830 singulier et haultesse B. C. — 32839 Sus (ou
Bas) B; — 32840 nous mnnjue C.
Q U A R T 1-: J O U K N K K
<31
ADAM
0 quel gruiit liowRC sera
a nous do montor on tel joye!
il m'est ja l)icn advi» que j'oyo
3Ï865 la liesse qui s'i fera.
EVE
Tout paradis ressonuei-a :
angle n'aia qui iic s'esjoye.
YSAIE
0 quel grant liesse sera
a nous de monter en toi joye!
.niEREMYE
;!2870 JjOrs quand Jhesus s'oslievora
par dessus les cieulx tout en voie,
Dieu scet par quel exquise voie
son pore le recevra.
EZECHIEI.
() quel grant liesse sera
:i.i875 a nous de monter en tel joyel
il m'est ja bien advis que j'oyc
la liesse qui s'i fera.
DAVin
Lors quant eslevés nous ara
on ce royaume pardural)le,
;!2880 y ara festj inestimable,
car angles seront tous certains
que leurs beaux sièges et haultains
dont les deables furent gcctés
seront de par nous habités
32885 et par nos ensuyvans remplis,
quant les jours seront acomplis
do celle repai'acion.
ADAM
A toy soit adoraciou,
bon Dieu qui règnes sans finer!
Devers toy allons cheminer :
vers tçy nostre voye s'adresse.
s. JEHAN BAPTISTE
Joye sans jamais terminer
arons et parfaicte liesse,
a voir ton immense haultessc
32895 rognant sans jamais décliner.
LB BON LARH0N
Devers toy allons cheminer :
vers toy nostre voye s'adresse,
car tu os la voye et l'adresse
|)our iieloi'iiis aterminer.
s. JEHAN BAPTISTE
32900 Bien vol/, jadis déterminer
quant les .Juifz m'inteiroguercnt
dn mon baplcsme et qu'ilz doubtorent
par folyo qui les surprist
que nioy mesiiies ne fcusse Christ :
32905 jo leur i-espoiuly sur ce pan,
que cil Cristus n'estoye pas,
qu'il aroit puissance divine
et que je n'estoye pas digne
do deslier et desnocr
32910 la coui-roye do son soler;
alors dis je bien V(^ritô :
huy veons nous la dignité,
le hault siège, lo ])arfait lieu
que ce bcnoist aigneau de Dieu
32915 sortira au haultain emiiire.
LB BON LABnON
Kt moy qui des mauvais le pire
ay rogné des ans i)lus de vint,
si grant félicité m'advint
qu'a l'euro qu'il fut mis en croix
32920 pour mourir, jo fus l'ung des trois
pour mettre a cxecucioii.
Quant j'apercou l'extoi'cioii
qu'on luy faisoit et le martire,
j'en ruiî pitié et luy dis : » Sire,
32925 qui reçoys icy passion,
ayes de moy compassion
quand tu Vendras en ton royalme ! »
Et lors au salut de mon ame
estre me promit par beaux ditz
32930 ce jour o luy en pai'adis ;
ft la promesse s'ensuivy,
car tost apri-s mon t résidas vy
l'essence divine de fait
qui est ung païadis parfait ;
3'î935 mais encoi-es j'atcns briefment
avoir de joye accroissement,
quant en celle haultc contrée
si a plain me sera nionstree
qu'il n'y ara quelque deffault.
ADAM
32940 Chanter et resjouir nous fault,
enrt'ans, en ce bonoit re])perc :
Adam suis, vostre premier pore,
qui la chanson commanceray,
et ja tost vous presenteray
32945 devant la haultc trinité.
YSAIB
Or chantons en vraie unité
pour demonstrer esjouyssance.
32379 AU lieu (jui veult lictermincr A. — 3S880-91 iiinn^iicnl A. — 3289* Im fin du rcrj mnnquf C. — 32S95
Kequcrant G. — 32900-939 man'iueiit A. — 3ÎJ22 jo sceii C. — 32.>40 Pour granilo f.'st.- dome[u>r Kt liesse sun» nul
ilelTault Chanter A. vous li. C. — 3iB42 Je adani suis voblre amicn père iî. C — 32943 (presenteray B. C.
432
MISÏERE DE LA PASSION
Il u doivent chanter quelque motet ou chose
joyiwe.
|l'nsE.]
s. PIERRE
Nous avons fait graiit diligence
de cheminer grans et menus ;
3;9:o Dieu mei cy, nous sommes venus
sur la mc^ntaigno d'Olivct.
s. ANDRY
11 est vray ; tautost se Dieu jilest,
de Jhcsus nouvelles arons :
scions tandis en oroisons
329:5 attendaus son adveneuient.
Icy s'appert Jhesus comnie dessis entre eub:.
JHESUS
Paix soit 0 vous pleuierement,
euttans de Dieu et bous amis !
comme aultretfôis vous ay promis,
de recbief vous viens visiter
32960 affin que me voyez monter
par nia puissance superncUe
en la région éternelle
dont premièrement desceudy.
Enffans, a pâtre exivi
3ï965 olim et teni in mundum;
iterum relinquo eum
et ad patrem me transféra,
et quia isia pro/fero
iristicia tos implevit.
32970 Frères, connne je vous ay dit,
de mon père jadis yssi
et m'en vins eu ce inonde cy :
maintenant le monde delesse
et a mon père me radresse ;
* 32975 mes pourtant ne vous oubliiay
car briefriient je vous envoiray
le saint Esprit sanctifiant
qui vous sera rectifiant
en toute voie véritable.
3-;980 Et quand ce bault don cliaiittiltlc,
l'esprit qui tous vivans excède,
l'esprit qui du Père procède,
en ce monde fera voiage,
il baillera vray tesmoignage
3i9sr) de mon fait, et vous l'ensuivrez,
car vray tesmoignage en donrez
par paroles très magnifestes;
car avec moy feustes et estes
tousjours des le commancement
32990 mes secrétaires privement.
Ce dis je affin que ne soyez
soubvertis ou scaiidalizés,
car pour mon nom manifester
arez largement a porter
32995 doleurs et tribulacions,
peines et pei secucions
ou moult souffrir vous convendra :
mes apris ce l'heure vendra
que ceulx qui vostre mort vouldi ont
33000 au jugement de Dieu vendront
recevoir leur honteux salaire;
et tous ces maulx vous vouldi ont faire,
car de moy n'ont compte tenu
ne mou père ne moy congnu,
33005 mes nyé par leurs contredis.
Ces choses icy je vous dis
affin, se vous voyez que vieiignc
leur heure, qu'il vous en souviengne :
de cecy riens ne vous disoye
33010 devant, car avec vous j'estoyc,
et maintenant suis avoy»';
a celluy qui m'a envoyé ;
c'est mon père en majesté grande,
et nul de vous ne me demande
33015 ou je voys n'en quel lieu je monte ;
mes pour ce que cecy vous compte,
tristesse a vostre cueur lemply.
Frères, le temps est accomply
qu'il fault que de vous me depparte ;
33020 c'est expédient que je parte, *
car s'au ciel ne monte en ce point
le saint Esprit ne vendra point,
et quand en mon règne seray
■de l'envoier m'advanceray.
33025 Moult d'aultres exhortacions,
preschemeus et moiiicions
vous eusse bien a enhortcr,
mes vous ne le pouez porter
n'entendre la vérité plaine
33030 pour la fragilité humaine
de vous qui n'est pas conformée ;
mes quand bien sera refformee
et par le saint Esprit relfaicto.
32948 abreganre B. .ibregn C. — 32957-8 aymez, prouiiez lî. — 3S97S laliflbiil C. — 329S1 Lcspoir A. li. C. — 329S2
Lespoir B. G. — 3:'.027 onuoyer B. — 33032 mnnr/ue B.
g r AKT1-;
alors la veriui pat-faicto
3:so:j5 pourrez concevoir et coitipronilre :
vucillo/, l'on vrnyo foi entendre,
mes aniia et frères dcvotz :
orphuHos non relinqu tm vos,
orphelins pas ne deniourrez :
33010 devant vous monter me verre/
en l'arche de gloire infinie,
je laisse vostrc t-ompaignie
quant a corporelle présence,
mes ma grâce et ma providence
330'.5 avec vous sans fin demourra;
drsplaisanee vous accourra
quand de vous departy soray,
mes de rechief je vous verray,
et vostrc cueur s'esjouira
33050 du tout et cesto joye ira
a félicité pardurable,
ne jamès par fortune instable
homme no la vous ostera.
RU BEN
Puisque le fait se portera
33055 ainsi que de vous l'entendons,
cher sire, nous vous demandons
s'en ce temps cy restitui'o/,
et de servitude osterez
tout le royaulnie d'Israël ?
NEPTAI.IN
33000 Ruben deniamlo bien et bel :
tousjours avons eu espei-ance
que par la vostre provoancc
serons relevés et re^sours;
dictes nous quand vendront les jours ?
33065 car très fort nous en doubtions.
JHESUS
Amis, cessez ces questions
qui sont fortes a desserrer :
trop font rontoiulcuient eri'or,
qui sagement ne s'i contient ;
33070 car a vous pas il n'appartient
en la vie m rlelle estaii»
s^avoir les niomons et les temps
desquelz mon pore en sa puissance
a retenu la congnoissance ;
33075 mes aultre don receverez
briefiiieut, car vous [lerceveroz
manoir on vostre cueur couti'it
la puissance du saint Esprit,
et me sei'ez loyaulx tesmomgz
33080 en toutes terres près et loingz,
en Iherusaloiu renommée.
JOCKNKK
433
on Saraario et en Judeo
et jusqu'à la fin de la terre
pour la gloire du ciel ncquerrc
33085 qui est mon royaulnie infiny,
.lohari, mon singtdior amy
mou cher disciple et vray servant,
ung temps qui passa par avant
quand la mort en croy endnray,
3300O ma more vous rccommanday,
affin qu'après ma mort amei-e
toiyoui-s la tenissiez a merc
et elle son filz vous tenist
et que bien vous entretenist.
33095 Kt ce foi» je pour la doulvour,
charité et parfaicte amour
qu'a elle vous sentz avoir grande :
de rechief vous la reconunande,
et comme a chaste et sceure gai-do
3.1100 je la conimotz en vostre garde
pour la bien seuromont garder.
8. JEHAN, l'evangeliste.
Puisqu'il le vous plest commander,
mon cher maistre, c'est courtoisie
de laquelle je vous mercye
3310» très humblement a deux genoulx.
JHESl s
Frères, je prcns congé de vous,
je me pai-s de vostre consorte
et vers mon père me transporte,
et atant fine mon devis.
NOSTRE DAME
33110 Adieu Jhesu Crist, mon cher filz :
vous allez en gloire divine,
dont parfaicte joie entérine
domaine plus qu'oncquos ne fois.
JUESUS
Mère doulce en fais et en ditz
33115 et des humbles la plus biuigne,
vers Dieu, mon pore, m'achemine
et au partir adieu vous dis.
Icy munie Jhesus ou ciel acvcqucs waiiis angles
et Ion se doivent les jjatriarches absconscr.
MO A 11
Précieux roy do paradis,
qui vit oncques plu-» noble o
331 so a iwu se regarder je l'ose,
tant est le misterc haultaiii.
hoso ?
33030 alteiulro C. — ;i30(55 nous nous <-ii doublons A. — J3Û77 Mouuoir A.— 33081 lalosce C. — 330SIÎ uiontres B. C.
33094 Pour qui'lquc dui'il qui lui veiiist A. — 33095 doulour A.
Pas. 28
MISTERE DE LA PASSION
ABIRON
Or peust chacun estre ccitain
que la deité souveraine
est en luy si parfaicte et plaine
33125 qu'il en peust a son veil user
sans engins humains abuser :
nous le voyons devant nos yeulx
sensiblement monter aux cieulx
sans soy grever ne travaillier.
TU BAL
33130 Assés ne .m'en puis raerveillier :
si hault fait no vis oncques mes.
Ne le revoirons nous jaraos ?
fait il deppartie fmable ?
nostre assemblée piteable
33135 demourra toute désolée
sans luy.
Icy sont deux angles en hault.
RAPHAËL
Hommes de Galilée,
que vous tenez vous en estant,
ne pourquoy regardez vous tant
ce raisterc qui se consoniiue ?
33140 Veez cy Jhesus, vray Dieu et homme,
qui par deité haulte et forte
est ravy de vostre consorte :
ne vueillez penser ne doubler
que jamés il doyvc habitei'
33145 cprpoi'ellemeut avec vous,
mes vous tenez asseurés tous
que droit en la forme et manière
qu'il monte, en pai faicte lumière,
de ce liaultain lieu descendra
33150 au jugement, quand il vendra
juger toute humaine lignée.
NOSTRE DAME
L'ascension est achevée
de Jhesus, mon filz très begnin ;
maintenant au trosne divin.
33155 est sa belle forme eslcvee.
ABACUT
Sa puissance est bien csprouvee ;
maintenant croions sans deffault
que sa vertu tout peult et vault
et qu'il est filz de Dieu le père.
RU BEN
33160 11 n'a cil a qui il n'appere :
présentement congnu l'avons,
dont de bon cueur remercions
Dieu, nostre père créateur.
s. MATH I AS
Puisque nostre leal ducteur,
33165 Jhesus, nostre gouveinement,
s'est departy présentement
de nostre compaignie ainsy
et nous a delaissiés icy,
je los que plus ne séjournons,
33170 mes a nostre ostel retournons
tous enseml)le par bon advis.
s. PHELIPE
Nous ensuyrons vostre devis,
Mathias, par bonnes raisons ;
la nous tendrons en oraisons
33175 avec nostre chero maistresse,
attandans la haulte promesse
que nostre maistre nous a fait.
. JOSEPH, le Juste.
C'est le plus beau do nostre fait.
Partons, mettez nous a chemin ;
331S0 le vray Dieu qui règne sans fin
vueille estro nostre eondueteiw !
[POSE.J
Icy vient Jhesus en paradis
JHESUS
Salut, reverance et honneur,
victoire, etei-uelle puissance,
hommage et vraye obeyssance
33185 de quanque vous avez créé
soit a vous, mon père honoré
en qui tout bien est contenu !
DIEU LE PERE
Mon fils, bien soiez vous venu
et receu a haulte noblesse !
331U0 a noble et parfaicte haultesse
soiez retourné par de ça !
désiré estes grant pièce a,
affin qu'a vostre advenement
liesse et hault festoiement
33195 feussent fais en haultesse plaine
331Cc-7 yeiniilacés A par Snst prrsentemeiit departy. - 3319-- desirez G.
QUARTE JOURNKE
jiar toute la court eouveraino
resjouir chacun a som entre ;
venez vous stoir a ma dcxlre,
vo»tre siège y est proparé.
JHESIS
33;(X) Riche est et nchenient paré :
par i-aison lue doit bien souffire.
DIEL- LE PERE
Mes angle?, vee/. cy vostre sire,
vostre roy, vostro capitaine
qui d'une région loingtaine
33:;o5 au jour d'huy vous est reverty
par un arroy bien assorty.
Venez et luy rendez hommage,
comme a chief de noble heiilagc
ou de gloire avez affluence.
Icy viennent tous les anges adorer Nustre
Seigneur, chacun a son ordre.
i35
MICHEL
33Ï10 Haulte prefference
et magnificence
soit au bon seigneur
qui a tel honneur
vient cy en présence!
GABRIEL
33Ï15 C'est nosti-e deffence,
c'est nostro potence,
nostre gouverneur.
URIEL
Uaultc prefference
et magnificence
33Ï20 soit au bon soigneur !
CHERUBIN
C'est toute excellance,
toute joie immense,
([uaiiil en tel haulteur
le liault créateur
33:^25 luy fait assistance.
SERAPHIN
Haulte prefference
et magnificence
soit au bon seigneur
qui a tel honneur
33230 vient cy en présence !
dieu' LE PKRK
C'est mon filz, c'est ma sapience,
mon hoir parfait et naturel.
.Vngles, par ung chant solennel,
csmouvez nous dame Musique,
33Î35 applicans dame Rcthorique
a doulx et aru:onieux sons ;
chantez nous uiutOK et uhansoui)
fulci» de doulee mélodie,
ot briefnient chacun lay» nous die
33440 les plu» somptueux qu'il poui'ra,
et nostre cour s'esjouira
en l'armonic do vos voix,
MICHEL
Raphaël, coramancer m'en vois
de voix donice et consolative;
33245 qui vouldra de vous si in'ensuyve:
je voys la fesle entériner.
RAPHAËL
Joyo nous y fait incliner
a ceste nouvelle venue.
GABRIEL
La compaignie y e«t tenue,
3;t;&0 car a nostre roy festoier
trop ne nous pouons iinploier.
Cy chmtent tous les anyes.
[SlLETB.J
.IUE.SL'S
.Mon père tout bon et tout sage,
or ay je acomply le voiage
dont vou.s me chargcastes jadis
331SÙ quand de ce haultaiu paradis
m'envoyastes la bas au monde
pour relever la coulpe immonde
qui obligeoit lignage humain
en ung lieu de ténèbres plaiii :
33Î60 or ay pour luy mort endiu'ee,
or ay l'offence repparee,
or ay accomply les escrips
qui de nioy ont esté escrii>s :
vos bons amis sont a délivre ;
33265 les veez cy tous ; je vous les livre
<le leurs oflences francs ot quittes.
DIEU LE PERE
Mon beneurc filz, les acquites
avez fait bien nutablcment
l)ar haulte voie et tolteineut
33270 que toute humaine créature
iauiés tant que le siècle dure
a vous obligée en sera
et grâce vous en reudera
s'elle considère son fait.
3327J 11 iouffil, le devoir est fait.
3319ci Et vous see/ en mou B. a ma C. — 33206 assouy. — 33221-8 maitq'ttnl C. — 3,323t nous] vous C. — 33239 Uv>]
li'« A. C. — 3. 240 quon A. G. — 33246 Je men voys la feste ontamer A. - 33Ï,">1 nous] vous C. — 33255 de] en A.
^436
MISTERE UE LA PASSION
leparee est la dure perte,
la porte du ciel est ouverte
a ceulx qui quérir la vouldront.
Nos chers apostres se tendront
33^80 en ung lieu encor une esiiace,
et uostre haultain don de grâce
leur envoîrons prochainement
en la manière proprement
comme vous leur avez promis.
JHESLS
33285 Mes frères sont et mes amis,
mon père ; je vous remercie
de la bénigne courtoisie
que de par moy leur promettez.
[Pose.]
s. BERTHELEMY
Gueres ne sommes arrestés
33290 a faire icy noetrc retour,
s. MATHIAS
Mes frères en parfaicte amour,
puisqu'il a pieu a .Jhesu Grist
qui pour nous char humaine ju'ist
es flancs de la vierge pucelle
33293 nous faire révérence telle
que nous prendre et nous evocquer
et a son service applicquer
par dessuz toutes uascions,
plus parfaictes devocions
33300 devons aussi avoir ensemble
trop plus qu'aultres gens, ce me semble,
et vacquer au divin service,
recongnoissans le bénéfice
que nous a vouUu ordonner
33305 celluy qui tout bien peust donnei'
et en qui grâce est habondant.
s. .lEHAN
Il nous a fait honneur si grant
quant eu tous ses fais excellans
il nous a fait ses chambellans
33310 et secrétaires principaulx
les plus près et especiaulx
qu'en ce monde ait voulu choisir.
s. THOMAS
Si doit estre nostre désir
a le servir sans destrier,
33315 a l'invoquer et deprier
qu'il nous envoyé le guerdou,
le très noble et précieux don
qu'il nous a iiromis de sa bouche,
et j'espère, en tant qu'il me touche,
33320 qu'il n'y aia point défaillance.
JOSEPH, le Juste.
Nous avons parfaicte espérance
de voir la promesse adverir,
et qu'il nous vouldia secourir
de ce don de haultain envoy
33325 pour nous confermcr en sa foy
et oster dubitacion.
s. MATHIAS
Dieu doint que la promission
se puist adverir en brief terme !
car jamès n'arons le cueur ferme
33330 tant que le don s'accomplira.
[Pose.]
SATHAN
Astaroth !
ASTABOTH
II enragera :
malle mort te puist entester !
te fault il ainsi tempester,
fauls serpent au feu condampné ?
BEUICH
33335 II brait comme ung lou forcené,
je ne sçay que deable il luy fault.
SATHAN
Se je sceusse crier si hault
que je pousse estonner tous ceulx
qui sont en gloire tant joieulx,
33340 volentiers je m'y emploiasse
afiin que je lc;\r empeschasse
a faire leui's chans et esbas
qui sont au jour d'uy hauls et bas
a ceste grant recei)cion.
333i5 0 quel maudite ascencion,
et que grandement me dosplest !
ASTAROTH
Ue qui ?
SATHAN
De ton sanglant gibet
33288 Leurs A. — 3328f> morcye B. C. —33292-9 manquent A. — 3)29() inuooquer C. — 33300-301 Nous ronuient
tenir ee me semble En oraisons tretous ensemble A. — 33308-15 remplacés A imr Que nul ne searoit exprimer Si le
(leuons tousjours .imer. — 33314 destrier] de ouer B. — 33310 Kn attendant le bault A. — 33322 ad\ienir B. €. —
33332 soiibiter B. C. — 33337 peusse B. C. — 33339 tant] si B. C.
aasi»
33360
Q U A R T K
qui lo ool to puisl encorder !
le to fault il tant reeorder?
33350 as tu point do ton nuisoau vou
monster es oioulx ce faulx Jlinsu
qui a nostre pidie adnionco ?
ASTAnOTII
Au joui- d'uy n'en vy chose née,
(luisqu'il convient qu'on le te die;
U-oyi liion j'ay ouy mélodie
d'angles doulcenicnt accorder,
mes quand j'ay cuido regarder
amont ceste chose diverse,
je suis tombé a la renverse,
les picz dessus, comme unjr crappault,
par quoy de ce qu'on fit la hault
je n'en sçay riens, tant fus frappé.
BEHICH
Tout ainsi ay je esté trompé :
je cuiday lever la paupière
33365 pour r(^garder quelle lumière
c'estoit qui reluisoit d'amont,
mes jo fus frappé par le front
miculx qu'ung veau n'est d'une massue,
par quoy je n'ay |)eu veoir l'yssue
33370 du fait ne la conclusion.
Mes que fu ce ?
SATHAN
L'ascension
de Jhesus que Dieu puist niauldirc !
ASTAnOTH
Quelle ascension ? qu'est ce a dire ?
qu'il nous soit plus a plain compté.
SATHAN
33375 C'est a dire qu'il est monté
maulgré nous et maugré nos yeulx
en hault par dessus tous les cieulx
pour gloire parfaictc acquérir.
HEIllCH
Je ne l'iray pas la quérir,
:«380 puisqu'il a pris si hault manoir.
ASTAROTH
11 est hors de nostre prenoir,
riens ne noua vault le conspirer :
qu'est il de faire ?
SATHAN
De virer
Aux infernaulx de belle pousse
33385 et leur racomptcr la bcscousso
comment nous sommes acroupis.
! C) I T H N R i-,
HKniCH
Kt qui aroit sa plioc c«oou.s»e
ires bien sans mercy ne rescouiiitc
a l'entrei' ?
ASTAIKJTH
Ce Dcroit le pis.
33300 Mais si m'atens je entre «tampis
de Corberus, nosti'o portier,
comme beaux aux en uug mortier
par force de lourde» buiturcs.
HKRICH
Courons a toutes adventures :
33395 a l'ostcl uous fault ra|>ostir.
ASTABOTH
Ce ne sera \>as sans sentir
des miches de nostre couvent.
BERIGH
Bé ! nous en sentons bien souvent,
par quoy no m'en fait point si mal.
SATHAN
33400 Quant a moy i)ar esi)ecial
je m'y l'apostis bien envis,
car je m'atens d'estre servis
d'une pitance renforcée.
ASTAROTH
Se la feste y est commencée,
■33V& les compaignoDs aront mal guust.
BERIC»
Soit qu'il peut, au diable voyt tout,
il nous convient pa.sser par la.
Hau ! Lucifei' !
LUCIPBR
Qu'est la ? qu'est la ?
d'où me viennent ces estradeurs ?
ASTAROTH
33410 Ce sont vos trois ambassadcui's
qui reviengnent cy bien en haste.
LUCIFER
Comment va l'exploit ?
SATHAN
Par ma pâte,
ix>y Lucifer, appaisiez vous,
car il n'a pas tenu a nous :
33415 plus diligens ne veistes oncques.
LLCIKER
Comment ! vous n'avez riens fait doncquea 1
33358 emiucni-e H. C. — 33356 re.onler B. — 33362 fus] suis A. — 33370 ne] de A. — 33380-81 II est hors de noitra
prenoir S. Retournons en nostro manoir Raconter reste grant destrousse Mes se nous raeeuons la trousse A. —
33382-406 ntan'iufHl A. — 33383 viser C. — 33:195 repposer C 33401 My en retourne C. — 33402 sorbi» a — 33403
potenee C. — 33408 (jue la p. esse la G. — 33409 Dou viennent res gentils courï-urs H. C.
438
M I S T R R R DR LA PASSION
s'avez tant eerchio boys et hayes .
KERGALUS
Cerberus, aprestc boullayes ;
a ce que j'eiitcns dos devis
33420 nos troys gens aront du remis
pour radoucir ung peu leurs vaines.
CERBERL.S
Veez en cy quelques deux douzaines,
cinglant droitement a l'eslite.
LUCIFER
Or ça, progenie mauldite,
33i25 serpens interditz et dampnés,
horribles monstres forcenés,
catherve d'envie imprimée,
vous ne m'avez point imprimée
la manière de vostre cas.
FERGA.LLS
33430 Hz eussent uiesticr d'avocatz
pour plaidoyer ung pou leur cause,
car comme j'entons par leur clause
leur fait n'est point droitement net.
CERIiERUS
11 y a eu crime en leur fait
33435 bien grand encore, ou je m'abuse.
LUCIFER
Ne m'escouez point de la muse,
comptez moy le fait tout au cler.
SATHA.N
Riens je ne vous en veil celer,
le cas est tel que je vous dis :
33440 ce Jhesus est en paradis
monté en grant gloire anobly
et a mené avecques ly
tous ces anciens pères humains,
patriarches, iirophetes sains,
33445 eu tel multitude a compter
que quand je les ay veu monter
je suis près forcené de rage.
LUCIFER
Faulx ennemy d'humain lignage,
pourquoy ne t'en tins tu bien près
33450 ou que tu ne courus apprès
pour en recouvrer par les champs
. dix ou douze des plus raeschans
et traîner en nostre fournaise ?
SATHAN
Vous en parlez bien a vostre aise :
33455 de vous ne de nous paour n'avoient,
car tous resplendissans estoicnt
comme ung soleil de grant lueui',
et quand je vy cesto liideui-,
je oheus le museau contre terre,
33460 tout confus, puis m'en vins grant erre
poui' vous dire la vérité.
LUCIFER
Le deable vous a rapporté,
faulx larrons et tous vos consors,
car a tormens hideux et fors
33465 sera vostre groing hutiné.
Cerbenis ?
CERBERUS
Hola ! Domine,
commandez et nous vous orrons.
LUCIFER
Pren moy ces trois mauvais larrons,
puis les traine bas eu la cuve
33470 et la les me plonge et estuve
tout ens au gibet estendus,
les pies encontremont pendus,
en grant brasier et avivé,
et quand les aras estuvé
33475 tant qu'ilz trcssuent de meshaing,
Fergalus leur fera ung baing
de beau plonc et de beau métal ,
bruyant comme feu infernal ;
de grande radeur de bouUir
33480 je les apprendray a faillir
une aultre fois a leurs attaintes.
ASTAROTH
Nous avons cy unes estraintes
dont nostre groing sera servy.
CEHHERUS
Ça, enffans, dictes : Pec-avi;
33485 vous arez le baing, je m'en double.
KERICH
Helas ! maistre, une seule goûte
de mercy pour tous nos rabas !
LUCIFER
Passez, riliaulx, en bas, on bas ;
passez quei'ir vostre salaire :
33490 qu'a peine et a terrible haire
puissiez de mort estre pugnis !
Icy se lieve S. Pierre par dessus tous les
autres apostres.
s. PIERRE
Frères qui sommes cy unis,
33417-36 manquent A. — 33432 la causs C. — 33434 .;uMi((n;«'.', faultn C. enoime B. — 33 137 ens plus au olair A. — 3343 S
ne vous y vault B, fault C. — 3,3451 rescourre A. — 33452 Ou V ou VI B. C. — 33461 vous] venir B. — 33464 creueulx A,
— 33469 a bas a lestuue B. G. — 33473 a vlue C. — 33478 Viuanl G. — 334S8 restraintes B, G. — 33490 et a] et en A.
OIARTF, JOURNKK
ise
labourons pour nostrc salu :
sçavoir dovo/. qM'il a fallu
33495 aecomplii' les esciip» piiso»
qui ont esté pioplictizos
par le nu)y(^u du saint Ksprit
parlant par la bouche David,
do Judas qui fut lo ductour
33500 de ceulx qui nostre bon pasteur
vindront par nuit au jardin prendre ;
et devez s(;avoir et cntondro
que trente deniers leur vendy,
de quoy coulpabic se rendy,
33!i05 car leur argent leur rapporta
et au milieu d'eulx le gcttn
qui d'eulx fut reprins et ravy,
et leur dit Judas : Peccnti
tradendo sanguinern jttstum !
33:)io 11 dit en criant a hault ton :
« J'ai péché coin faulx et injuste
d'avoir livré le sang du juste ! "
Alors fit satisfacion
et si monstra coutrieion ;
mes en Dieu ot si peu d'cspoii'
qu'il se pendit i>ar desespoir.
De ei^st ai'geiit dont j'ay comiité
qui par Judas fut r(\ectté
les Juifz qui le reloveront
depuis ung champ en achetèrent,
et fut en maint, lieu revollo
qu'Alchedemac fut appelle
cestuy champ par mainte jiaisonne,
qui en leur langage ainsi sonne
comme champ de sang, c'est leur dit;
bien doit estrc champ de sang dit
quand pour l'acheter quitte et franc
fut vendu le précieux sang
di' Jhesus par piteuse encombre.
33r»3û Judas donc fut de iio-stre nombre,
mes par son infidélité
obtint le champ d'iniquité,
car sans quérir miséricorde
il s'est estranglé d'une corde,
335.35 crevé par le milieu du corps,
ses entrailles luy saillent hors :
oncques telle hideur ne vit,
et de cecy parle David
et fait belles uarracions
33540 des grandes malédictions
dont devoit estre récepteur
ce faulx disciple et producteur
dont en ceste forme chanta :
3351 ri
.!3520
33525
SU domua ejus dciertn
33545 W tion sit qui iiihabiltl;
et la (in de son labit est
que David chante sus et jus :
et episcojiatitm ejuji
post hune accijuat aller;
S3X>0 en quoy David volt dénoter
qu'uDg aultre prendroit l'eveschii'
de cil qui nou-s a rcnoucié
et «croit jioaé en son lieu.
Kt pourtant, mes frères en Dieu,
33555 pour la prophccle avérer
et Dieu, nostrc sire, honorer
comme chacun de vous désire,
il nous convient ung homme eslire
qui ou lieu Judas sera mis.
s. JEHAN, l'ecangeliste.
33M0 Pierre, vous dictés voir; amis,
Foions y tretous diligens :
veez ey ung grant nombre de gens
qui ont volu grant peine mettre
a suivir Jhesus, nostre maistre ;
33565 soit ung o.slu qui près ou loing
puist estre aveequcs nous tesmoing
que Jhesus est vray surrexi
et de tous les liaulz fais aussi
qu'il fit puis l'entrée de l'an
33570 du saiutisme Baptiste Jehan
jusqu'à la journée présente.
s. MATHIAS
Tout rassaml)lee se présente
a vous et s'i veult accorder ;
mes du moyen de procéder
33575 il y fault trouver quelque voie.
s. JAQLE.S ALPHBY
Vee/. cy que regardé j'avoye :
il m'est advis qu'assamblés sommes
environ cent ou six vint hommes
ou gist grand circonspection ;
33580 pour éviter confusion
en tout la multitude d'eulx
élisons en seulement deux
des plus humbles et véritables,
des plus sceurs et plus charitables
33585 par ung consentement commun ;
puis de ces deulx prenons en ung
par ung moien qu'on sortira,
et cil a qui le sort ira
fera le douzième de nous.
. JOSEPU, le Justi'.
33590 Â ce nous consentons nous tous,
33495 passes C. — 33509 Tr.idpns C.
}M-endroiis lî. C
33-,oo ari'hedemnrli A. — :i.3539 fist B. en fist C— 3aK0 «lecr^ter C. — S3JS6 en
40
M I S T R R !■ D F L A PASSION
n'est ame qui y contredie,
mes premier fault qu'on estudie
a trouver cos deulx.
s. SIMON
CVst le mioiilx.
Pierre, vous estes le plus vieulx,
33595 nostie ducteur, nostre rccouis
a qui nous venons a secours :
s'il vous plest, doux en nommerez
que i)lus ydonnes trouvoro/
entre toute la compaignio.
s. PIERRE
33600 Frères, je ne présume in\'o
de moy devant vo\is advancer,
mes s'il vous plaisoit dénoncer,
des deux tantost nous conclurons.
RUBEN
Nennil, mes nous vous requérons
33605 que les nommez a vosti'c veil.
s. PIERRE
Puisqu'ainsi vous plest, je lo veil ;
sans parsonne trop hault prisier
et sans ame aussi desprisier
de toutes ces saintes parsonnes,
33610 combien que tous soient ydonnes,
principallement deux en nomme :
premièrement img devost homme,
vray disciple, c'est Mathias,
et Joseph qu'on dit Barsabas,
33615 aultrement le Juste appelle.
s. JAQUES ZEBEDEY
Advis m'est qu'il a bien parlé :
je suis de son consentement.
s. PIERRE
Et vous. Jaques?
s. JAQUES ALPHEY
Pareillement.
s. PIERRE
Et vous ?
s. ANDRY
Je tiens vostre querelle.
s. PIERRE
33620 Et vous ?
s. JUDE
La chose est bonne et belle ;
n'en demandez plus, car j'entens
que les frères en sont contens,
et n'est homme qiii s'i discorde.
NEPTALIN
Brief tout le couvent s'i accorde
33625 que ces deux soient acceptés.
s. MATHIAS
Seigneurs, grant honneur nous poi tez
Dieu nous le doint bien desservir
et Jhesu Crist si bien servir
que son vouloir jiuissions parfaire.
s. PHELIPE
33030 Encor est le plus fort a fairp,
car des deux par moyen aucun
il nous fault convenir en ung
qui soit le douzième et non i)lus.
s. MATHIEU
Or parconcluons au seurplus
33635 et faisons pour estre plus seurs
comme nos bons prédécesseurs
en l'ancien testament faisoient :
quand de deux choses double avoieut
et n'avoient couleur aucune ^
336'.0 de prendre l'aultre plus que l'une,
leur volenté a Dieu soubmise
et sa grâce premier requise,
gestoient sort ou qu'il allast
affin que Dieu en disposast
33645 ainsi que bon luy sembleroit ;
et qui par ce point en feroit,
je croy qu'il n'y aroit que bien.
s. BERTHELEMY
Mathieu, vous proposez très bien,
et vostre rapport moult prisons.
s. JEHAN
33650 Oi' nous mettons en croisons
.tous ensemble comme il propose
a celle fm que Dieu dispose
du fait ainsy qu'il luy plaira.
GEDEON
Ung chacun s'i consentira
33655 de bon cueur et obeyssant.
s. ANDRY
Dieu souverain et tout puissant,
tout gouvernant, tout nourrissant
quanqu'il vient par creacion ;
A qui tout est obeyssant
33660 et qui es le vray congnoissant
du secret de l'intencion.
Donne nous vi'aye ostencion
de faire icy élection
a toy agréable et servant,
33665 Pour avoir restauracion
de la dure transgression
de Judas, le mauvais servant.
s. JEHAN
Ça, Pierre, procédons avant :
33594 Pierre] Plus B. — 33603 conclurions B. — .33608 raesprisier G.— 33634 partoul laissons B. pour conclurre G.
33648 parlez G. — 33662 manqiie G. intencion B. — 33664 feruant A.
QUARTE .lOURNRR
veez cy nos deux gens sepaivn :
83670 ça, veez cy nos sors préparés
comme le commun les assign.T;
Tuiig on y a qui n ung sifrno
lie quoy a part signé l'avons
par l'accoi'cl de nos compaignons ;
33075 le second de signe n'a point :
s'avons consenti sui' ce point
que vous les tendiez en vos mains,
et culx deux qui sont incertains
ou est le signe n'en quel lieu
aViSO vendront tirer ou nom do Dieu,
et celluy a qui eseherra
le signe subrogué sera
au lieu qui est ja devisé.
s. PIERRE
Jehan, vêla ti'es bien advisé ;
33683 veez cy les sors tous telz qu'ilz sont.
s. JAQUES ZEBEDKY
Mathias, or approchez dont
et choisissez a votre advis.
441
s. MATHIAS
Je le feroye bien envis
devant Joseph, nostro cher frère
33690 tirez, Joseph.
JOSEPH, le Juste.
Je vous plevis :
je le feroye bien envis.
s. MATHIEU
Choisissez sans plus de devis,
la chose n'est [las si amere.
s. MATHIAS
Je le feroye bien envis
33695 devant Joseph, nostre cher frère.
s. PIERRE
11 convient que l'ung se modère ;
toutett'ois il on est graut temps :
Mathias, soyez consentens,
soy excuser tant rions n'y vaiJt.
s. MATHIAS
33700 Ça, do par Dieu, puisqu'il le fault,
je m'y consens en ce party :
je prens cestuy.
JOSEPH
Et moy cestuy.
soubz la proveance divine.
s. BEHTHELEMY
Or regardez qui a le signe :
:!i705 celly doit possesser du lieu.
R. JRHAS'
C'est Mathias.
H. JAQUES AI.PHEV
l^>ué soit Dieu
puisque la chose est advenue '.
Il fauldra a sa bienvenue
le conforinei- en son estât.
8. PIERRE
33710 Cher Mathias, proficint :
puisque le hault vouloir divin
a mené nostre doubto a (in
et vous a donné cest honneur,
ou lieu du mauvais traditeur
.33715 nostre douzième vous prenons,
et le siège vous ordonnons
pour en joir paisiblement
et nous aider scinblablement
a nosti-e inistere conduire.
s. MATHIAS
3.T720 Combien que peu vous puisse duire,
aussi que ma simple parsonne
ne se reppute pas ydonue
a estre si hault colloequé,
puisque Dieu m'y a evocqué
337Î5 je mercie sa bienveillance
quand a si bonne poui-veance
il m'a par sa grâce accepté
que je suis douzième compté
eu un si reverand collège,
33730 et tien pour ung hault privilège
a quoy sa majesté divine
m'evocque au jour d'uy, moy indigne ;
Dieu le me doiut bien desservir
et Jhesu Crist si bien servir
33735 que mon sauvement s'i parface.
JOSEPH
Mathias, amy, preu vous face
ce bénéfice gracieux !
nous tous sommes liés et joioux
que Dieu vous ait fait ceste grâce.
s. MATHIAS
33740 J'occupe une notable place
dont baimy est le malheureux.
MOAB
Mathias, amy, preu vous face
ce bénéfice gracieux !
s. MATHUS
Dieu me doint le temps et l'espace
33745 d'ostre au labourer si songneux
que par mon devoir curieux
■ S3670 sers séparez B. nos] deux C. — 33679-80 nen quelle espesse Vendront tirer chacun sa piet-e B. C. — SS706 le
lieu B. — 33710 proflcial C. — 337Ï0 que bien peu vous puist B. C. — 33738 tous inaniue A. — 33748-S. Les rrfraint
miinquent A.
iiO
M I s T R R R DE LA f A S S I 0 N
enfin voj'e sa doulce face 1
ABIRON
Mathias, aray. preu vous face
ce bénéfice gracieux !
33750 nous tous sommes liés et joieux
que Dieu vous a fait ceste grâce.
JUBAL
La charge qu'il prent et embrasse
puist estre a sa salvacion !
CEUUS
Mes amis en devocion,
33755 tous ensemble icy nous tenons
et humblement nous maintenons
en oroizon sans point cesser;
car je cuide de vray penser
que temprement sera le jour
33760 que Jhesus du tro.sne majeur
nous envoira le saint Rsprit ;
requérons le de cueur eontrict,
que de nostro fait luy souviengne !
ABACUT
J'ay grand désir que l'heure adviengne
33765 que nous le voyons advenir :
Dieu doint que briefment puist venir
en lumière nous habiter,
qui nous pourra plus proffiter
que chose qui soit en ce monde.
JHESUS
33770 Mon père en qui tout bien habonde
et soubz qui haulte pourveance
le monde prent sa gouvernance
et nature son fait conduit,
le terme est ja comme déduit
33775 et le temps bien près révolu
que vostre bonté a volu
former une conclusion
au fait de la provision
de mes disciples bien aimés
33780 affin qu'il?, t'eussent confermés
du saint Rsprit, nostre pareil,
lequel leur donrra vray conseil,
vraie charité et fervence
de foy, de paix, de pacience,
33785 pour résister aux ennemis :
ce noble don leur ay promis
par quoy je vous requier et prie
qu'au jour d'uy leur soit adverie
la promesse que je leur fis.
DIEU LE PERE
33790 .Ihesus, mon très bencui'é filz,
nous sommes ung pouoir, ung veil,
et ce que vous voulez je veil
ne jamès n'y puis dissentir
mes me veil du tout consentir
33795 que vos bons amis et loyaulx,
vos disciples especiaulx,
obtiengnent la promission.
JHESUS
Quant a la consolacion
que le saint Esprit leur fera
33800 quand ainsi les confortera,
ce hault don leur est ottroié,
et vueil qu'il leur soit envoyé
eu ceste journée présente ;
ce don de grâce leur présente
3380) eu ma foy pour la publier.
DIEU LE PERE
Hz ne sont pas a oublier :
bien ont ce noble don gaigné,
car tousjours vous ont compaigné
en toutes vos temptacions,
33810 et ont eu moult de passions
avec vous en plusieurs partis ;
or sont moult doubtoux et craiutifz
pour la cause de vostre absence,
mes tantost aront affluence
33815 de puissance et de hardement
par ce divin embrasement
qui du tout les promovera.
JHESUS
Charité les esmouvera
a nostre nom manifester ;
33820 mes premier pour les apporter
ung grant son du ciel vouldrons faire
pour mieulx disposer leur affaire
a recevoir ce don parfait.
DIEU LE PERE
Mon filz, ainsi tout sera fait :
33825 cy lo que nous nous advenson.
Icy soit fait ung grant son a manière de
tonnerre et doit descendre le saint Esprit
en façon de feu et de langues sur toute
la compaignie.
33747 distne facfi B. C— 33752-3 Dieu si le faoe pnr sa grâce Pour la nostre saluacion A. — 33765 De ce que briefment
doit venir B. C. — 33766 Si que nous voyons aduenir B. C. — 33774-825 sont surchargés des corrections peu raisonnées
nUn lecteur du A" W siècle C. — 33778 promission A.— 337S0 soient B, — 33813 assenée B.— 338?2 leur] nostre B.
QUARTF JOURNRR
443
s. ANDRY
Doulx Dieu, qui ost ce haultain boii
que j'os si très hault résonner ?
oncques mes jo u'ouys sonner
(lo si merveilleuse fnçon.
s. l'IERnK
33830 Frères, il fuult que nous ijcuson
de nos cueurs a Dieu ordonner
s. JEHAN
Doulx Dieu, qui est ce haultain son
que j'os si très hault résonner ?
Mes amis, n'ayez soupeçon :
33835 veilliez vos eucurs arraisonner ;
car c'est Diou qui nous veult donner
le saint Es[irit, il est saison.
MADEIAINE
Doulx Dieu, qui est ce haultain son
que j'os si très hault resonner?
338W oncques mes je u'ouys sonner
do si merveilleuse façon.
s. THOMAS
Veez cy grant admiiacion :
chers fi'sres, croyons de vray tous
que le saint Esprit est sur nous
33845 tout soubitcmcnt descendu :
VOUS avez le son entendu
qui s'est fait icy en soubdain ;
si voiez nostre logis plain
de langues et do feu ensemble,
33850 qui est ung signe, ce me sanible,
que de Jhesus sommes amés
quand il nous a tous enflammés
de son amour divinement.
s. jaqi;es alphey
Les langues font signiflmcnt
que Dieu qui tout bon cuour reflforce
nous a huy donné sens et force
de divers languages entendre.
S. .IAQUES ZEBEDEY
Il est bien ligier a comprendi'e :
cestuy feu jiouons voir poser
et dessus nos chiefz repposer:
n'y a celluy en ccste part
qui n'en ait porciou ot part ;
encor depuis qu'il est venu
je suis plus hardy devenu
33805 mille fois que devant n'estole.
I^k s. IIERTHEI.E.MY
^^L N'a gueres que tant redoubtoie
^^B ces faulx Juifz a dire voir
^^M que jamès ne m'eusse ose voir
33885
3.3860
devant eulx par quelque moyen,
33870 mes je n'ay mes double de rien ,
et tant bien asseuré nie sens,
que se j'en veoye deux cens,
qu'ilz m'eussent jureo ma mort,
au cueur n'aroye ja reniort
33875 de leur prescher et tesmningner
la foy Jliesus, sans ressongner
leurs menaces ou mauvais ditz.
8. SIMON
Mon amy, tout autel vous dis :
je suis en ccste oppiiiion
.33880 que pour quelque pugnicion
qu'on sceuxist sur moy exercer,
je ne luiroie a dénoncer
Jhesus sur toute ci'eature.
s. JunE
i'our menace ne pour baturc
qu'on me sceust ou ]>eust inférer
ne cesseray de proférer
le nom de Jhesus par devant
toute créature vivant :
c'est ma resolucion toute.
». PHELIPB
Naguaires estoie en grant double,
mes maintenant sens ma foy ferme
par le saint Esprit qui coufermc
toute ma volcnté et sens.
RIJBEN
Il m'est advis que bien j'entens
3.3895 toutes les langues qu'oncques furent
et tous les esciips qu'oncques sceurent
les sains prophètes deviser.
8. MATHIA8
Il ne nous fault riens exposer,
car celluy qui tout peut comprendre
33900 nous donne la force d'entendre
ce qui nous est d'utilité.
NOSTBE DAME
Haulte irinité,
parfaicte unité,
singulière essence,
.\ ta majest(î
soit huy potesté,
los et prefference !
Car par ta clémence
en nostre présence
nous as envoyé
L'esprit de science,
qui nostre creence
a fortifié.
33905
33910
S!<35 a roisonier B. — 3,3853 Ile] En D. C.
dénoter B. — 33900 proteste H. profère C,
3:!^^ e>i<e aille B. — 3;t87t Encore nnroye j,i r.-confjrl B. •
s. PIERRE
Crainto qui dévoie
33915 nous mettoit en voie
de grant inconstance ;
Mes ta grâce advoyo
nos cueurs et convoyé
en ferme constance.
s. AN DRY
339J0 Don de grant puissance,
don de grant vaillance,
don de reconfFort,
Tu viens a l'instance
que vraye alliance
33925 nous donne coutibrt.
s. JAQUES ZEHBDEY
Tu es nostre fort,
noBtre chasteau fort
et nostre advengarde :
Quelque desconffort
33W3Û n'y fera 011011;,
si tu es en garde.
s. JEHAN, l'ecangeliste.
Ta grâce regarde
nos cueurs et les garde
de destresse dure :
33935 L'ame ce feu larde
qu'il samble qu'elle hardo
par ceste soudure.
s. BERTHELEMY
0 très sainte ardure,
par qui toute ordure
33940 se met a déclin :
Qui telle l'endure
tant qu'elle luy dure
a bien est enclin.
s. THOMAS
0 père divin
33945 qui règnes sans un
en gloire éternelle,
Bien a la parfin
te monstres affin
a nostre querelle.
s. JAQUES ALPHEY
33950 Gloire perhennelle,
honneur superuelle
soit a toy, Jhesus,
Qui liesse telle
nous rens et si belle
33955 pour nous mettre sus !
s. PHELII'E
Nous feusmes reclus
M 1 S T K R F. D K LA PASSION
et de dueil inclus
avant sa venue ;
Or sommes conclus
33960 de non craindre plus
doleur survenue.
s. MATHIEU
Don de grant value,
chacun te salue
de vouloir parfait ;
33965 Bien avons congnue
l'heure cher tenue
qu'en nous as parfait.
s. SIMON
Nostre piteux fait
estoit moult deflfait
33970 et moult désolé :
Or nous as reffait,
esté tout meffait
et reconsolé.
s. JUDE
Trop avons celle
33975 et trop peu parlé
des fais Jhesu Crist :
Le fait recello
sera revellé
par le saint Esprit.
s. MATHIAS
33980 Quand il nous esprit,
nostre cueur comprit
vertu très certaine ;
Tout bien nous apprit
quand il nous surprit
33985 de l'arche haultaine.
JOSEPH, te Juste.
0 bonté puraine,
o richesse plaine,
o ferme sçavoir.
Quel joye seraine
33990 en la vie humaine
Ijoons plus avoir ?
S. LUC
Tu es nostre avoir,
précieux a voir,
joieux a saisir,
33995 Digne a recevoir
hault a parcevoir,
soubtil a choisir.
CLEOPHAS
En nostre plaisir
n'avons desplaisir,
34000 scrupule ne doubte ;
33935 Tant nostre ame larde B. C. — 33950 ini-lus B. C. — 33957 de] en C. recludz B. C-
Et comme G. — 33973 parconsole B. C. — 33989 manque B. — 33998 désir C.
33970 Et moult] Comme B.
QUARTK JUURNKK
4i5
31010
:î1015
Mes y veult gosiv
vray aidant dosir
iiui crainte redoute.
BUBEN
Ma pensée toute
l 84005 s-ans que riens je double
charité l'esprend ;
Vraye foy la boute
a la voye et route
qui tout bien apprend.
GEDEON
Kngin ne comprend
ta vertu 110 prinid,
tant par est féconde !
Celluy qu'elle emprcnd
anie ne surprend,
tant la garde et monde !
NEPTALIN
O miroir du monde,
bonté très parfondc,
rubis reluisant,
Tu es nostre fonde,
1020 et on toy se fonde
nostre espoir plaisant.
ABIRON
Ducteur bien duisant,
docteur bien lisant,
prédicateur sage
ïi025 Du ciel procédant,
tu nous es rendant
ung grant avantage.
TIJBAL
() liaultain message
a qui doit hommage
>30 toute créature,
Par ce hault ouvrage
sens en mon courage
moult ardant pointure.
CEI.IUS
0 deité pure,
0 parfaicte cure
pour cueurs maladis,
Ta bont('' nous cur(>,
nostre bien procure
en fais et en dis.
A.HACUT
34010 Au temps de jadis
moult bien entendis
aux prophètes sains.
Par leur bouche dis,
beaux fais cl bien dis
34045 des lempx inccrlalna.
MO AU
Or n'en fais |>oint mainM,
car avec nous mains
(l nous fais cntciuh-u
Langages haultains,
34050 divers et loingtains
et au vray coniproudrc.
M^DELAINB
Donc a grâces rendre
a loy les mains tendre
ensemble devons,
3i055 Quand en simple cendre
fais tel don descendre
que nous i-ecovon».
MARIE .lACOBY
Pas ne desservons
ce que nous trouvons
34060 soubz ta doulcc face :
Se bien le servons,
bel exemple avons;
Dieu nous doint l'espace !
MARIE SALOMÊ
Précieuse face,
34065 ta bonU; nous face
les cueurs resjouir ;
Et si les parface
qu'en la haulle place
en puissions jouir !
s. PIERRE
34070 Frères, vous avez peu ouir,
chacun en soy tout maintenant,
le saint Esprit sur nous venant
qui par grâce nous a fermés
et très fermement conformés
34075 en l'amour de Dieu, nostre sire ;
par quoy je conclus et veil dire
qu'en tant plus parlait e«-tat sommes,
et plus nous devons monstrcr honmtes
a Dieu servir et honorer,
34080 car nous devons considérer
qu'en plus grande perfection
chet plus grande dcvocion
pour i>arvenir de bien en niieuls.
s. MATHIAS
Si (larfaicte la nous doint Dieux
34085 qu'au liaultain estât ou il regno
le voyons en bcncuro règne
qui jami-s ne terminera !
34002 wia;i7iic B. Nostrr> bon dcsir C. - 34015 1») li-, cl widiiîue B. C. - 340Î4 Dominateur B. IViiion'itre C.
Au] o B. — 34053 A] ICt B. C. — 31055 tendro 0. — SlOfil gne.^ B. C. — 34070 ««noir B. sentir C.
■34040
446
MISTKRE DE LA PASSION
Moralité finable.
Et commencera
DIEU I.E PERE
Mon filz, nccessito sera
d'evocquer la court souveraine
34090 après la mission haultaine
du saint Esprit digne d'honnour
qui est nette et parfaicte amour
de nous doux et vrayo union,
JHESUS
Déclarez vostre oppinion,
34095 mon père de begnin affaire,
et de ce qui vous plaira faire
n'y ara point de contredit.
DIEU LE PERE
Cher fllz, comme je vous ay dit,
vous sçavez qu'il n'a pas gramment
31100 le saint Esprit divinement
avons envoyé et transmis
pour confoi tel' vos bons amis
la dessoubz au monde attendans
et de tout leur vouloii- tondans
31105 a parfaicte salvacion,
car au faict de la mission
avoit jadis mencion faicte,
et parle Joël le prophète
sur ceste proposicion :
34110 Effundam spiritum meum
super omne, et cetera ;
sur toute char qui vivera,
dit Joël, qui de nous le prit,
j'effonderay mon esperit
31115 largement, dont vos filz et filles
propheteront choses soubtilles,
et beaucop d'aultres motz exprès
qui la s'entresuy vent apprès ;
et David prophétisa sus
31120 qui dist : Flabit spiritus ejus,
que le saint Esprit, uostrc per,
doit inspirer et occuper
les vrais courages des humains
qui seront prépaies et sains.
34125 Or puis donc que ces prophecies
sont parfaictes et accomplies,
et que pour tout humain lignage
avez terminé le voyage
(font avez esté voyageur,
31130 et qu'a triomphe et grant honneur
estes devers nous rcverty,
posé que ne soiez party
de nous quant a divine essence,
l'esté d'evocquer en présence
34135 dame Justice l'excellente
et enquérir s'elle est contente
de ceste repparacion.
JHESUS
Fere, vostre narracion
me sanible haultement attainte :
31140 Justice jadis s'est moult plainte
et a grand rigueur procedoit
pour ses drois qu'elle pretendoit
luy estre deubz en grosse somme
pour l'ofi'euce du premier honune,-
34145 Icsquelz je cuide avoir payé
et si très bien satisfié
qu'a Justice je n'en doy rien.
^ DIEU LE PERE
Mon filz Jhesus, je le sçay bien :
le gendre huii;aiu vous a cousté
34150 du cher sang de vostre costé,
dont en le rachetant si cher
monstrates combien l'avez cher;
Justice l'a peu bien veir,
mes neantuioius il est bon d'ouir
34155 quelle chose elle vouldra dire.
JHESUS
Et je n'y veuil pas contredire :
volentiers en verray l'airoy.
DIEU LE PERE
Michel ?
MICHEL
Xostre souverain roy,
quel est vostre commandement ?
DIEU LE PERE
31160 Alez assembler haultement
nostre court a son de busine,
qu'a nostre majesté divine
viengnent prestement comparoir,
et nous faictes cy apparoir
34165 angles, archangles, chérubins,
trosnes, potestés, séraphins,
dominacionj, princeaultés,
31107 termission D. — 3110S ysaie B. — 31114 de mon B. G. — 34121 père B. — 31127-30 man'juent A. — 31131 Par
vous qui esles A. — 341S3 De nous] Voire B. C. — 34153 veir] clioisir B. C. — 34154 fait il bon B. — 3415li-293 man-
'liwnt A remplacés ainsi . Justice J. (jue vous ptaist cher sire Me veez cy en vostre présence Auecques dame sapience
Paix vérité miséricorde. — 34167 principalites C.
Q U A H r !•: .1 0 U R N K E
447
vertus, pt a|)ros nous cytoz
Justice, l'aix, Miseritoidc,
3 '.470 Vérité qui est de leur corde
avec ma dame Snpicuce :
avoir les voulons eu preseucc
|ioiu- ouir ung pou leur rapport,
MICHEL
Dieu éternel, puissant et fort,
3il7j puisqu'il vous plaist a le-! mander,
bien sçay qu'a vostrc commander
vendront sans aucun intervalle.
Toute la cour cclestialle
qui habite le firmament,
34)80 venez et comparez brii fmcnt
au mandement du créateur,
comme son inunenso haulteur
m'en a donné charge et office :
vous pi'emieie, dame Justice,
3'il85 estes a la court invitée,
Miséricorde y est comptée,
Paix, Sapience et Vérité ;
chacune en son auctorité
y viengne faire comparenco.
JUSTICE
34190 11 y a bien grant apparence
que nous accomplissons son mand,
car son hault et divin command
ne voulons jamais cscoiiduiro.
SAPIENCE
Bon Dieu qui on ce hault empire
3411)5 règnes devant et dessus tous,
nous comparons par devers vous
sans vostrc mand mettre en absence,
savoir que vostre providence
a de nouveau ilcterminé.
DIEU LE PERE
34200 Le cas vous sera terminé
présentement on audience.
Très saigc dame Sapience,
pour vous narrer le cas en brief,
vous savez le niellait très grief
31205 dont le premier homme pécha,
qui tant son salut empescha
qu'il en fut en enfer rccludz
le temps de cinq mille anx et jiIuk
ou moult de tournicns n passéo
34810 comme la court le scct anses ;
il n'est besoiiig qu'on le roeoixie :
a ce propos Miséricorde,
la bonne dame que vecy,
moue dn pitié et raercy,
34215 voyant l'omme ain.iy depuisc
et en ténèbres expulsé
haultement pour luy ]iroposa ;
mais Justice tost s'opposa
a ceste humaine délivrance,
34220 domaudant a très fort instance
grant somme en reparacion
pour la diti! transgression,
laquol somme luy competoit
ainsi connue elle pi-otestoit.
34225 Quant au fait fut bien pix)cedé,
et alors luy fut demandé
se l'omme la iiourroit payer,
dist que non, voulant dcclairer
que pour i-iens que l'onmie sceust faire,
34230 il ne luy i)ourroit satisfaire,
tant se tonoit elle offenceo ;
par quoy, la chose bien penssee,
fut conclu que Dieu seul scroit
qui Justice satisfiroit
31235 et non pa< Dieu tant seullenicnl,
mais Dieu incarné proprement,
et pour ce qu'en nostre unité
a numei'able trinité
de persomies bien distinguées
31210 furent lors doubles assignées
et questions haultes et bonnes,
a savoir qui des trois personnes
prendroit ceste incarnacion ;
sur quoy baillia conclusion
31215 dame Sapience la sage,
qui de ce présent arbitrage
des parties fut juge esleue,
que mon fil/, de haultc value
ceste incarnacion prendroit
31250 et que mieulx le devoit par droit,
et la bas eu la vie humaine
pi-endroit ceste charge grevaine
conmie les prophètes jadis
l'avoyent nonce par beaux ditz.
34255 Ne fut pas tel l'api^intcment?
SAPIEiNCE
Hault créateur du firmament.
34104 Le cuphle ii moi lu cl <i nii.* s. pieruu pour svi-iknte B. — 34211 3e Iiomcc A « ««<• iiuttv plac i cf. />*««
loin V. 34294. — 31220 a très forl] .1 forte C. — 3424S Et que B. — 34*50 mieulx le deuoir prendroit C.
448
MlSTEKli DE LA 1' A S S I 0 N
34;-60
miroii' d'éternelle lumière,
il fut en la forme et manière
que vous l'avez cy recollé.
MISERiaORDE
Vous avez récapitule
en briefz termes et tout déduit
comme le procès fut conduit :
vrayment vous feisje une requeste
. assés l'aisonnablc et honneste
34265 qu'il vous plcu>ist mercy livrer
aux humains it les délivrer,
car d'eux moult grant pitié prenoye
quant leur fait bien consideroye,
que poui' une trangression
34270 avoient telle pugnicion
on une charte obtenebree
qui si longtemps avoit durée ;
le temps me sembloit et les jours
qu'ilz eussent mercy et secours,
34275 et veant leur grant doleance
je requis pour leur allegence,
a laquelle moult contendy.
JUSTICE
Et sur ce je vous respondy
que non obstant vos intercès
34280 a la fin de vostre procès
jamais ne me consentiroye
jusqu'à ce que le droit ai'oye
que je me sentoye estre deu,
et que de mon droit et mon deu
34285 je seroye satisfiee,
tant que seroit veriffiee
la sainte escripture authentique
que soubz vision prophétique
les anciens avoyent escript ;
34200 et tant que de tout leur escript
n'aroit mot qui ne feust remply
et plenierement acomply
a qui qu'il tournast préjudice.
DIEU LE PERE
Faictes l'appoint, dame Justice,
et considérons vostre faict :
vous semble il que pour ce mettait
ayez eu juste recompense ?
vous est point advis que l'oflbnce
de l'omme soit bien rcpparee ?
la chose bien considérée,
vous n'avez cause de vous plaindre,
et se riens y sentez remaindre,
dedairez la cy sans attente.
34295
34300
34303
34310
34315
34320
34325
34330
31335
34340
3 1345
3 '.350
JUSTICK
Hault juge, je me tiens contente
de cueur, de pensée et de bouclie,
et en tant que l'offence touche
qu'Adam, premier homme, conmiist
quand la pomme en sa bouche mist,
je croy bien qu'il y eust grant faulte,
mes j'ay repparence si haulte,
tant précieuse a regarder
que je n'oze plu'^ demander
et n'argue plus du meffait.
niEU LE PERE
Je cuide avoir bien satisfait
a la haulte offre que je feis,
quant mon hault et bien aimé filz
ay laissé en la croix estendre
pour vostre recompense rendre ;
a vostre vouloir l'ay rendu
en la croix tout mort estendu :
en sacrifice l'avez pris ;
or regardez quel plus hault pris
a jamais recevoir querez.
JHESUS
Justice, se plus requérez
avoir de reparacion,
declairez vostre intencion ;
avoir ne pouez plus parfaicte
que celle que je vous a\ faicte,
et en peult la raison telle estre :
Adam au paradiz terrestre
prist delict ou fruit qu'il choisy ;
contre cela je fus saisy
par nuit au jardin d'Olivet
ainsi comme malfaiteur est,
et mené par sergons terribles
en la main de mes fers nuisibles.
Adam vit l'arbre delictable,
plaisant luy fut et agréable,
dont tantost la main y tendy ;
Ung aultre arbie eus trop plus grevable
d'une croix grande et redoubtablc
en quoy mes deux bras cstendy.
Adam de fol cuider usa
quant vame gloire l'abusa
o pouoir divin contendant;
Humblesse contre reffusa
quant tout le monde n^accusa,
n'oncq ne me fut mot respondant.
Gloutomiie Adam fort tempta,
car du fruit défendu goûta
34261 dit C. — 34:03 Voii-ement 1!. C. — 34205 pleust C. — 34288 les visions B. — 34294-3 II iiest ja besoing quon
recorde Le procès qui fut pii-ca fait A. ~ 34296-34347 C. est presque tout e/Tacé. — 3'.313 l'ris ou toute valeur redoiide
A.— 31314-84 man'jlieilt A.— 34319 moult fort H.
QUARTE JOURNEE
440
contPiulant d'en esti'o saoullo ;
De goustcr bien cher me eoimta,
car en la croix on m'agousta
de vin aigre et de fiel mcslc.
34355 Adam trop en liasto chey,
Ciir tost a Dieu desobey
pour le dolent fr\iit ou il mort ;
Avec constance ne niechey,
car fermement ay obcy
34360 a mon pero jusqu'à la mort.
J'ay esté accusé a tort,
soufl'ert opprobres et laidureu
et toutes les plus graus injures
qu'oncques homme mortel souffry :
34365 mes joes aux frappans offry,
comme la prophecie chante;
j'ay soustenu la croix pesante,
porté sur le mont de Calvaire,
j'ay souffert mes membres detraire
34370 de grans clous et parfons fichiés,
et perciés mes mains et mes pies,
mon chef d'cspines couronner,
mon corps tout de sang randonner,
mes nerfz tendre de la pesance,
34375 mon costé percier de la lance,
sang et eaue en départir,
mou corps mourir, l'ame pai'tir,
puis mon humanité posoi',
ou saint sépulcre reposer,
3'i3S0 mettre mes amis a délivre,
au tiers jours lever et revivre,
monter au ciel ; dont au surplus,
Justice, que voulez vous plus ?
c'est raison que sur vous me fonde.
JUSTICE
34385 0 vray saulveur de tout le monde,
vraye fontaine de clémence,
0 vray rédempteur pur et monde,
0 parfaicte magnificence,
Je no quiers plus de i-escorapeuse,
ceste m'est de trop graiit haultem' ;
o doulce et beneuree offence
qu'as eu ung tel rédempteur !
SAPIENCK
Doulx Jhesus, filz de Dieu le père,
vray roy de l'arche souveraine,
14393 a qui vivant ne se comperc
en la povre vie mondaine,
La rescompeuse est si haultainc
ja pal- vous faicte a la pai-fin
que toute créature humaine
34*00 est a vous tenue sans fin.
VERITE
Justice, V0U8 este» pnyco
d'ung trésor de haulle stature,
quand Dieu vous a Halisficc
de son filz pour vostre paslure ;
34405 0 toy, humaine créature,
voy et considère ton fait,
et regarde ung peu ta nature
com grant honneur Dieu hiy a fait.
MISBIMCORDE
Quel honneur pouoit il plus faire
34410 a ta povre fragilité ?
dont la pouoit il plus parfaire
que d'en vestir sa deité ?
O beneuree humanité,
ta grant loange cent pars soune
a4415 quand de la haultc trinito
cucuvrcs la seconde parsonne.
PAIX
Qui eust janics os<' penser,
qui est l'entendement si gain
que tant s'eust voulu abaissiei'
344Î0 le roy du tix>sne souverain
Que pour sauver lignage humaiu
eust esleu sa chambre et sa celle
pour mucer trésor si haultain
es flans d'une vierge [lucelle ?
SAPIENCK
34425 Juge, puisque la chose est telle
que vostre iilz a tant ouvré
qu'il a rescous et recouvré
la beaulté de nature humaine
et l'a rendue entière et saine
34130 que plus n'oseroit demander,
ne reste mes que d'accorder
ces quatre dames moult prisées
qui jadis furent divisées
pour les questions devant dittes.
DIEU LB PEaE
34435 Dame Sapience, or nous dittes
quel concordance y voulez mettre,
et elles vous vouidront promettre
d'en faire tout par vostre dist.
S.U>IENCE
Il me souvient du roy David
3i440 qui chanta aucuns joicus mos
qui servent a nostre propos,
et cuidc qu'il vit en esprit
34353 on lajrousta C. - 3435.'< Aiiis C. — 34365 frappans;] crapaux B. — 34371 Kl m,inque C. — 3S375 roste| corps C. —
^84376 et manque B. — 34377 lamp] larmes B. — 1'43»6 Vraye] O la B. C. — »4414 sans personne B. — 344Î4 de la B. C.
344Î5-87 Le ms. C est tout efface.
Pas.
80
/i50
34445
34450
34455
34460
34465
34470
MISTERE DE LA PASSION
34475
31480
344?:
34490
ce fait icy, car il escript
sur ce : Veritas de terra
orta est, et Justicia
de siimmo celo prospexit ;
Vérité, comme dit David,
est engendrée de la terre,
qui s'entend, sans plus glose querre,
que cil qui en éternité
est voie, vie et vérité
a pris sa doulce char fleurie
es flans de la vierge Marie
qui de luy fut mère et nourrice ;
et quand il parle de Justice
qui regarda du ciel en hault,
se traire a mon propos le fault,
j'entens que Justice a gardé
et songneusement regardé
se c'estoit le pi-ix précieux
dont les prophètes glorieux
par haulte et divine dispence
luy prometoient recompence ;
or trouve Justice qu'oy
car comme vous avez oy,
le pris y est tant acceptable
tant précieux, tant agréable
que nature humaine tient quitte
et toute la franchist et quitte
de ce que luy pouoit devoir,
ne James n'en requiert avoii'
point d'aultre satisfacion.
DIEU LE PERE
Or venez a conclusion,
dame Sapience, il est heure.
SA.PIENCE
Je conclus pour voie plus sceure
que puisque cette autorité
a eu de fait véracité
et que ce ver doulx et sery
de David sy est advery,
adverir nous fault en aveuit
le ver qui est joignant devant,
moult noble et hault, ou il y a
escript : Misericordia
et Veritas obviaverunt
sibi, et osculate sunt
sibi Pax et Justicia ;
David ainsy prophetiza
que deux dames que la recorde.
Vérité et Miséricorde,
après toutes guerres passées,
doulcement se sont enibrassees ;
et dit après consequamment
que Justice et Paix doulcement
pour toute discorde appaisier
34495 se sont volu entrebaisier :
si ces deux poius sont parconclus,
je ne sçay que demander plus :
nostre sentence est terminée.
VERITE
Dame d'honneur enluminée,
34500 en moult haulte fin nous posez,
et tant sagement proposez
qu'on n'y sçaroit plus répliquer.
David veult ti'es bien appliquer
ces deux vers et de grant manière :
34505 car quant a la guerre première
que Justice aux humains tenoit
quand en prison les maintenoit,
aucunement je tins sa corde
contre dame Miséricorde
34510 qui moult fort procedoit pour eulx,
et de tant que querelle y eus
et qu'aux humains est faicte grâce,
je luy requier que je l'embrasse
en signe de paix et d'amour.
MISERICORDE
34515 0 Vérité, dame d'honneur,
vostre amour m'est bien acceptée,
si ne veil pas estrc exceptée
de vous embrasser en présence.
Icy embrassent l'une Vautre Miséricorde
et Vérité.
PAIX
Et vous, dame de grant vaillance,
34520 Justice, haulte parsonniere,
rigle directe et droituriere
pour baillier a chacun le sien,
encore me souvient il bien,
contre Miséricorde feustes,
34525 et accorder ne luy voluste^
aucune requeste nouvelle :
aucunement en faveur d'elle
je tins encontre vous partie,
mes a la nostre départie
34530 pour la fin de toute querelle.
Justice toute boime et belle,
ung baisier requérir vous veil.
JUSTICE
Paix, chère dame, a vostre veil,
et do bon cueur je vous l'ottroie.
34451 Ait B. — 34457 pouoir B. — 34465 Et ne veult comme auez A. — 34466-71 manquent A. — 34476-7 manqnml
A. — 3347S Que puisque ce doulx ver A. — 334S0 Veoir B. — 34485 Sibi) Se se B. — 34488 Qui C. — 34502 requerre A,
— 34503-4 manquent A. — 34505 première guerre A. — 34519 prudence B. C. — 34524 Que contre G.
g U A R T K
Icy elles se baisent.
DIEU I.E PEKE
31535 Or est faictc i)ar haulto voyc
la rcdenipcion des humains ;
or sont par moyens trc» haultaius
les quatre dames en accord,
ou jamès n'y ara discord
31540 tant est l'accord seurement fait.
Angles, pour conclurre le fait
mettez vous en belle ordonnance :
chantez par doulcc concordance,
menez joie parfaicte et plaine
345-15 tant que la région haultaine
en l'arraonye de vos sons
icsonne [lar doulces chansons.
[SlLETE.J
Prologue final et total.
Seigneurs, qui demonstracion
avez eu de la jiassion
34550 de nostre saulvcur Jhesu CrisI,
JOURNEE 451
Et de sa résurrection
et gloriettsa ascension
et mission du saint Esprit,
se riens avons dit ou escripi,
34555 ou mat fait ou mal ordonna,
pour Dieu qu'il nous soit pardonné :
le cray sentier voulons tenir
sans faulte ou erreur soustenir;
s'erreur disons ou expliquons
34560 des maintenant la recoquons,
souhmettans nos fais et nos signes
a vos correctioni bénignes,
ou a ceulx qui parceu l'aront
ou qui mieulx faire le sçaront :
34565 nous contendons chacun en soy
tenir chemin de vraye foy,
sans y riens changer ne muer
qui puist au contraire arguer,
Ne faire a la foy vitupère;
34570 et pour finer nostre mistere
joieusement d'honneur promus.
Et que la fin ni;ileur appere,
rendons grâces a Dieu le Père,
chantans : Te Ueum laudamus !
• Fin du quart jour de la passion nostre
seigneur Jhesu Crist.
31535 L'indication scéniquc n'existe i;itc dans A. - 3453U ara] a B. — 31547 Silbtb n'ejciile daiu aucun de»
trois mxs. — 34553 naoion B. — 34571-74 La fin est effacée C. — 34573 noatre B. C.
GLOSSAIRE
Aage, l'ifK' : s'il vient on nvnnl ange, s' (7 ilnienl grand.
55M.
Abayer. aboyfr : je n'iibairay point a mon ombre, jfi nr
mf tromperai pas, ia5(>2.
Abillep,i)-i-«ii(7er, 20867; habillier, préparer, iMi,Sn3!16.
^7:^^l), cf<\
Aboissonner : je suis très nin) alioisaonnA, ta botsaon
commence mal pour moi, 3781.
Abouclep, 27377.
About. place, lieu où l'on se met, 11189, etc.
Abouter, concorder, 8223; s'abouter, xe loger, 3565.
Abréger, faire rite, 20769; a'abreger, se dépêcher,
2'é23fl, etc.
Abrevep, abréger, 4895.
Absconoer (s'), ae cacher, H9i9, «"".
Absenter, éloigner, 25416, etc.
Absourdl, sourd, 25445.
Abusement, erreur, 7549, etc.
Abusion, alius, 4512.
Accointe (estre), avoir connaissance, 24721.
Accombler. donner en abondance, 20268.
Accouardir, rendre peureux, 16'»48.
Accourser, arrourcîr, 24528.
Accroupir ; nous en serons tous accroupis, ruinés^ per-
dus, 17418; Bi. .«., 33386.
Acertené. eerlnin, 7180, etc.
Acertener, instruire, 4272, etc.
Acliarier, amener, charrier, 3793.
Achasser, chasser, 21315.
Achoison, occasion, cause, 268, etc.
Aconauyvre, atteindre, 81S ; aconsuivir, 1S6C5.
Acop. Inut de suite, 4532, etc.
Acourer, frapper au eo-ur. 25351.
Acqueste, acquêt, 21250, 25377.
Acquit, action de s'acquitter, 8867.
Acteur, auteur, 322, etc.
Actif, .f/fiiré. 20877.
Adevancer, devancer, 5798.
Adeviiier, deviner, 926,
Adgesir : part. pass. adjute, accouchée^ 4059.
Adjournement, point du jour, 4192.
Adjourner. faire Tuiîtrc (en partant du jour), Ï080, etc. ;
a l'adjonrner, au point du jour, ÎTS'M ; pari. pnti.
.adj.iurni'. 2019.
Adminisiratoire, 29904.
Admlratif, admiral'le, £2!47.
Admordre : aniordre, mettre en appétit. 2' 91T : «"admiir-
ilrc, se prendre, t03\, etc.
Adonner, accorder, 10898.
Adouber, équiper. 7605, etc.
AoovN. .\donis, T498.
Adrecier, se iliriger, 2*.39l ; adresser, assigner, SI17Î.
Adresse, flirection, 11123. etc.
AdrcssemenI, direction, 7100.
Advanturé. égaré, 19469.
Advenement, venue. 36.35.
Adverir. S91S. Vnij. Averir.
Adversiere. ennemie, 17983.
Advertance. 15921, etc.
Advertir, connaître, s'enquérir de, 87380, etc.
Advesprer, arriver au soir, 1S499.
Advlslon, vision. 69ô5, etc.
Advocate, 2422.
Advoutrie, adultère, 10795.
AfralctK, affélé, 23985.
Atlhire, ma.ic, m<ini.>>v dV(re, 1724, .'«28. etc.
AfTalUer, arranger, 23838.
AfTectiva, faculté daffection, Î63J.
AfTier, promettre, 32543.
Affln, parent, proche, 4428, etc.
AfTolblier, affaiblir. HC2.
AfToncer, étudier à fond,WK>, MHIO.
Affonder, aller nu fond, 30872, etc.
Affronter, attaquer de front, 13912.
AfftaUer, a/fubler, 22910; mettre, imposer. 18718; afl^iller
1.1 tournelle, être mis en prison, 283.13.
Affulure, a/fublement, 28639.
Af ftiter , a».»m>lir, 26S39 ; s'afiister, se mettre, s'rmpé
fier. i3Kl,
Aggravanc*, 9;tl9.
Aggresser. agresser, attaquer, 170B9, tle.
Agios: faut il l'airo tant d'agios 1 faul-it faire tant dt
faeons 1 3843.
Agonter, plair» au goùi, 1I2SS.
GLOSSAIRE
Agrever, devenir plus gr-ive, 28935.
AOBIPPABT, 448.
Agu, aigu, ï:3830, etc.
Aguettes, aguets, 87704.
Aham, peine, 10168; ahan, 16961.
Aherdre (s'), s'attnrher, s'obstiner, 72S6.
Aboutir (s*), avoir honte, 17048.
Aider : se m'aist Dieux, 1387.
Aillot, petit ail, 4788.
Ainçois, mais, 1402, etc.
Aisier, mettre à rai5f,5660, etc.
Alibi : pour quérir vos alibis, pour entrer d'ms vos
imaginations, 31570.
Aliboron, 22931.
Aliter, coucher^ 5612.
Allée : je paie ma bien allée, 18090.
AUeniere, étui à alênes, 4710.
Allons m'en, allons nous en, 1135, 1240, 7296.
Alloué, a/ot's, S7755.
AUoy : mort terrible de dur alloy, 16"^5.
Aloser, louer, 3346, etr.
Ambdeuz, tous deux, 2610, etc.
Amble (grant), au plus vite, 20160.
Amblee (a I). Voy. Emblée.
Ambler. Voy. Embler.
Ambuler, marcherj 12443.
Ame, personne, 7321, 17C62, etc.: rnasc, ame de nous n v
est venu, 98'6; il n'ara ame grevé, 22528.
Amender, s'améliorer, 7784.
Amendrir, amoindrir, 259.
Aménité, SSO.
Amet, piège, ruse: s'ilz nous tiennent en leurs ann'-s,
19223 en note, 19235 en note ; et si soubtil en tous
amès, 32473.
Amiable, 120, etc.
Amoderer, adoucir, i^\ régler ^ 2hil&; arranger, £59*2.
Amour, fém., 8004.
Ance, anche, tuyau, 4349.
Ancelle, servante, 1880, etc.
Anchois, avant, 2532, etc.
Angle, ange, 205, etc.
Annoy, 9336. Voy. Ennoy.
Ante, tante, 24319.
Antenois, de l'année passêcy spec. jeune animal d'un
an: il rit du bout du dent, c'est risée d'ung antenois,
20233.
AorneFf orner, 5578.
Aourer, adorer, 6003, etc.; monos,, 6816.
Apenser, 20202.
Apoint, 2192. Voy. Appoint.
Apolin, 30647; Apolo, 7483, 7497.
Aposte, en 2)îace,convenablemenlfGS37, etc. Voy. Poste.
Apostiller, amplifier, 20356.
Apotagé, arrangé comme un potnge, 17228.
Appaisier, contenir, em,pécher, 29308.
Appareiller (s'), s'égaler, 5263.
Apparoir, apparaître, 6630, etc.; s'apparoir, 32195.
Appatis, domaines : courez moy tous nos appatis, 1714.
Appert, évident, 9864, etc. ,■ habile, 23809; en appert,
oucertement, 9097.
Appoint ; mal appoint, désagréable, 3767.
Appointement, sentence, 3232, etc.
Appointier, arranger, 13628.
Apprécier, payer, 21702.
Apprendre : apprendra aller, apprendre à marcher,
7783,
Appresser, ap2yrocher, 5736.
Appreste, prépnratif, 4626, etc.
Apprestement, 5926.
Aprochement, 10602.
Arabe, Arabie, 6069, 8799.
Arbaleste, niasc, 24756.
Arbrîer, madrier, 30892.
Arche, sommet, 10645, ^(c; tombeau, 30754.
Archedeclin, 20024; (nom jiropre), 11289, etc.
Archeprestrise, souverain pônti/icat, 9>4:ï.
Ardence, ardeur, 19579.
Ardre, brûler, 1037, etc.; pirU pass, ars, 11277.
Ardure, brûlure, 12333.
Argu, soupçon, 11295; au phir., discussions, raisonne-
ments, 187, etc.
Arguer, reprocher, 754 ; s'arguer, se fâcher, 27894.
Arismetique, 2523.
Armée, expédition en armes, 27352, etc.
Aroyer (s'), se mettre en ordre, 5419.
Arrabi, enragé, 19026.
Arr es tance, 28657.
Arrestoison, retard, 10342.
Arroy, ordre, 5000, etc.
Assaisonné, venu en temps utile, 5572.
Assener, arriver, 28608.
Assens, direction, 1S014.
Assenser, indiquer, 9256.
Assentement, consentem''nt, 28101.
Asservir ; de riens ne nous asservons, 365.
Asseurement, assurance, 19478.
Asseurer, devenir szir, 29555.
Assimply, abattu, attristé, 1133, etc.; humble, 1007G,
Assortir, établir, 12343; s'assortir, se joindre, .',844.
Assourfi, convaincu, 8501, etr.
Assouvir, terminer, 552, etc. ; part. pass. , complet, iS2i3.
Assuffir, satisfaire, 18837.
Assumer, prendre pour soi, 3234.
Atache, pot eau, i97bi.
Ataindre, toucher, 6095.
Ataine. gageure, 13417.
Atampir, écraser, 33390.
Aterer, Jeter à terre, 1910G, etc.
Aterminer, arriver au terme, 18925, etc.
Atouchement, contact, 7367.
Atoucher, 13861, 29507.
Atoumer, parer, 5118, etc.; arranger, 6828, etc.
Atout, avec, 4652, etc.
Atre, cour, 19337.
Attainte, but, 16382; faillir a ses attaintes, échouer dans
son entreprise, 33476.
Attendre (s*), n'en remettre, 9419.
Attendue, attente, 16036.
Attinter, embarrasser, 25208.
Attirer, ordonner, 6821 ; s'attirer a, s'employer à, 15041 .
Auffort, 23621. Voy. Fort.
Aulmonne, bonne œuvre, 21492, etc.; aulmone fleurie,
23928.
Aulmonuiere, distributrice, 2717 ; miséricordieuse, 6947.
Auner, asse7nbler, 20565.
AuRORA. 20156.
Austérité, /c'rocif^, 2.3051.
Autel, tel, 13043; prenez en d'autant et d'autel, tant que
vous voudrez, 17713.
Avaindre, atteindre, 26895.
Avancer, faire prospérer, 26883.
Averir, donner pour vrai, vérifier, 6990, etc.
GLOSSAIRE
Aveugleté, 145S6.
Aveugllr. 1/.1U7, iUH.
Avoyer^ conduire, 5217, fie.
Ayde, rim. tm ide, 593.
Aymant, trysiU., acier très-dur
l'ayinant, 15819.
trop poindre fiult
BASILOtHE, 95'i6.
Badelaire, coutelas, 28854.
Bague, peut objet, 5513 ; au plur., bagages, 4191.
Baguette, dim. de bague, -4700, etc. ; bagatelle, Ï7703.
Bahut, coffre, 5335.
Baigner : mon ciieur de leesse se baigne, 3S081.
Baille luy baille, loc. iron., ii(i9s.
Baing, ijuin : le baing est l'bault, tout est prit, ,"t0040.
Bancquier, banquette, 153iS0.
Baptlzement, 10236, etc.
Barbe : tenir barbe d'homme, faire résiulnncr. 30218.
Barbelé, petite barbe, 4652.
Barbeter, terme de musique, 3846. Voy. Marmole.
Barboter, remuer les livres, 19901 ,
Barge, barque, 6828.
Bartenr, trompeur, 20853, «<".
Bary, baril, 11001,
Basilique, basilic, 7316.
Bastlller, munir de bastilles, 21987.
Bâtant, trèa-vilo, 9151; tout bâtant, tout de suite,
7S52, et\
Batilller, assiéger (f), batailler (f), 31106.
Batlr, disposer, travailler, 17451, 18193.
Batnre, coups, 15137, etc.
Bandin, baudet, 4634.
Bave, 6.(iv(rdaj/e, 23805.
Baver, bavarder, 18670.
Baveux, médisant, 3049U.
Bavoir : se tenir au bavoir, bavarder, 2501(1.
Beau : parler beau, doucement, 27692; vous y avez très
beau choisir,!/ y a beau -oup de choi.T, i^i'^; vous
l'orrez belle, 3S51 ; jamès ne Tarez en si belles, 19115;
ilz nous la baulJront belle (s. e. la balle), au fig.,
30291 ; du plus belles, 31988.
Bec^aune, 20O37; bejaune, rim. en ane, 6368.
Bedel, goujat, 18508. Voy. Sanglant.
Begard, nigaud, 25258.
Bblot, dim. d'Isabeau, 7826.
Bamna, sot, 22370.
Bende : porter bende a tous venans, .''unir pour résister,
26504.
Benedict. 16203, etc.
Beneuré. bienheureux, 261, etc.
BeneysBon, bénédiction, 5)fô, etc.
Bénignité, 117'i7, etc.
Benltre. béair, 31408.
Benivolence, 2902, etc.
Benoit. bnii,2mm.
Benysson. 2J43. Voy. Beneysaon.
Bornage, ■iis^miblée de seigneurs, 7210, etc.
Besague. 17761, etc.
Bescousse, tromperie, 33385.
Besitre, désastre, 916.
Besoing, extrémité, excès, 14193.
Besongnes, choses nécessaires, 5336.
Bestial, b.'te, 22953.
Biens, au sens spécial cTaliments, 13870, etc.
Bienvalgner, bien accueillir. 15875.
Bievre, castor, 63i4.
Bigot. umA.
Blaaphemaoio» 19034.
Blasphème, fém., wr,6
Blasphemie, 11021.
Bloquer, a.i.iujrttir, Ï48i7.
Boban, vanité, ^U'^.
Bobance, ostentation, 16137.
Boe, boue, 142IX), ««<•.
Boire, «M A(; , ÎI602, 21664.
Boite a caillou, prison, £«34i.
Bombarde, pierrier, 1056;!.
Bona diea, 21500.
Bonhommeau, 14104, etc.
Bonnement, 33.
Bottne, 4727.
Bouchete, petite bouche, 9408, etc.
Bouge, sac, bourse, 5335, etc.
Bouillir : part. pais, boulu, 7992.
Boulaya, verge de bouleau, 17372, 33118.
BouUe. Voy. Ké.
Bourder, dire det bourdes, 23995.
Bourdon, bâton de pilerin, 30611.
Bourgeois (en), à la façon bourgeoise, 1739.'.
Bourgeoisie (tn), iron., bourgeoisement, 17358.
Boursier, qui lient la bourse, 11109, etc.
Bouter, pousser, 7614, etc. ; repousser, 9021.
Boutlole, masc, hôtel, maison, 18219.
Bracquemart, sorte d'épie, 7043.
Brandonner, agiter des brandons, 1701.
Brarie, cris, 26035.
Braaer, emliraser, 211iJ."i.
Brassage. Voy. Brasser.
Brasser, au /;/. 421; tout tel que nous l'avont bretii
le l'aull boire, 447 ; m. s., 7821, etr. ; qui noua ■ braa<
cebrassin, 1512:1; qu'on luy brasse ungbrasain,172S8;
si Ires mauvais brassage ne brassatea, t8261.
Braasin. Voy. Braaaar.
Brebiete. brebis, 4089.
Breborlons, prières, 19900.
Brehaigne, stérile, 801, etc.
Breteoqner, *m))ris«nn«", 23369; enchaîner, 20120, etc.
Bric . estre pris au brie, être pris au piège. 921.
Brierment, 24086.
Brieftë. ;r80:.
Briet, nom de chien, 4733, 4781.
Brigade (virer la), s'enfuir, 7084.
Briguenr, intrigant, 2793S, etc.
Bring. brin, branche, 17378.
Brocquart, mot piquant, 28^73.
Brongnee. coup, 19840, etc.
Brouet : au fig., je leur ay brasaé ce brouet, 929.
Brouillas, brouillard, 4310.
Bronlement, opération magique, £2353.
Brooleur. (jui lirouille, sorcier, 14312, etc.
Brouiller, faire des sorcellerie, 19725, «te.
Brubier (?i : oneques tel de bruhier n'yssi, 21579.
Bnoqnler, frapper, 3I53U.
Buffe, soufflet, 1985'^.
BufTer, frapper, 20196.
Bagla, buffle, iOeSa.
Burganlt (I) : quel burgaull 120448, 22740.
Burler, munir de la bulle, 29037, 29965.
Baser, bouder, 30816.
Bnsine, sorte de trompette, 3761 , etc.
Bttslner, sonner de la trompette, 3747.
Butor, 26512.
456
GLOSSAIRE
Cabas : jouer du cabas, eacroquci-, 2C367.
Caboche, tftc, 28855.
Cabusement. tromperie, 25226.
Cabuseur, trompeur, 18661.
Cahu caha, rahin cafta, 24840.
Caignon, petite ceinture, lien, 21937.
Caille : prcndrR une caille de puis, toml>er par terre,
IM'.O.
Calmer, faire le calme plat, 28734.
Camus, au /ig., 7395.
Canepin, gibecière: au f!g., fourrez vos canepins, maii-
qez, 12941 ; bouter en mon canepin, «i. s., 17661, et''.
Cantique, féin., 31171.
Capeline^ sorte de casque, 7527.
Cappe : de pié en cappe, 18598.
Carculler, calculer, 2523.
Carence, 74
Caterve, troupe, 7504, eto.
Cault, rusé, 7344, etc.
Cauteleuaemont, arec ruse, 220'i7.
Cautelle, )•««•>, 7134, etc.
CaTilIacion, chicane, 10591.
Cayment. mendiant, 23990.
Celestlal, 352, etc.
Celestien, 298, etc.
Celestre, 203, etc.
Celle, chambre, 4106.
Cellny, cely (n'a, n'y a), sans e.cceptinn, 5904, 8215. etc.
Celsitnde. 2098.
Cendal, élo/fe de soie, 26827, etc.
Cent : cent contre ung (s. e. je gage), 86229.
Ceptre, .sceptre, 1934, etc.
Cercher, aepchep, chercher, 13645, etc.
Cercns, 1694. Voy. Sepcus.
Cerne, cercle, 5255.
Cerner, entourer, 2i29.
Chalemelle (jouer de la), parler, 11237.
Chaloir, importer: ne vous chaille, 2537.
Champs (rendre les), rappeler ù la rie, 25914.
Chance, point qu'on amène aux rlés, 25~i36.
Chandelier. Voy. Prest.
Chandelle. Voy. Souffler.
Chanter, dire, réciter. 10730.
Chanterie, 3834.
Chapeau, couronne : au fig., il est maint plus beau cha-
peRu, il y a bien des chose.': plus agréables, 22637.
Chartre, prison, 433, etc.
Chastoy, punition, 6228, etc.
Châtaigne (pellar), s'amuser, 7524, 86595.
Chausse. Voy. Jambe, Tirer.
Chayere, chaire^ 21343.
Cheminer le pas, 5803.
Cheoir .■ s'il cliet, s'il arrive, 2480.
Chère, chiere, visage, 1357, etc. : a chère lye, la mine
joyeuse, 22425 ; bonne chiere, 7278, etc.
Chevance, bien, avoir, 14076.
Chevetain, chef, capitaine, 8443,
Chevir, renir à bout, 2755, etc.
Chlpotrer, tourmenter, 22159.
Choisir, aiiercecoir, 4268, etc.
Choix, élite, 8S11, 13205.
Chosette, dim. de chose, 8115.
Cbyeaaet, petit chien, 12316.
Circonclr, 5979.
Clroonvolu, 20149.
Circuir. entourer, ?129 ; tâcher, 7339.
Circuits, circonférence, 286.
Clain. clameur, 30004.
Claré. l'in épicé, 25950.
Clarir, respleniHr, 13210.
elle clic, onom , 5516.
Cliquaille, menu butin, 7591.
Cliquer, pétiller. 9.38.
Cloant, agrafe, 4700.
Cloche : ils sont fi-otés a grosse cloche, le mieux pos^
sihte, 10533.
Clocher, boiter, lOrjSO, etc.
Clop, boiteux, 13537, 15583.
Cloto, 7499.
Cloye. rtaie, 4776.
Cochevieulx .lorte d'alouette : au fg., imiiécile, 24684.
Cocodrille, 26384, etc.
Cocquart, sot, 2.-274.
Cocquols (en), niaisement, 1294?.
Coffln, panier, 4722.
Cognlclon, 2625.
Cointoler, parer. 4678.
Colege. société, 1095?.
Command, ordre, 4948, etc.
Commeotre, compromettre, 2709.
Commun, communauté, 20230.
Compaignier, accompagner, 4426, etc.
Comparer, payer, i, etc.
Comparnit. 3772.
Compas, mesure, 14029.
Compasser, mesurer, 2123, etc.
Compeller, forcer, appeler en justice, 21751; compeller
a, répondre à, 21775.
Complectionné, 25428.
Comprendre (se), .•:'accor<ler, 30260.
Comturber, troubler, 6168.
Conart, sot, 22894, 22937. Voy. Cornart.
Concierge, gardien, 7200.
Conclaveure, trace de clou, 31380.
Conclus, résolu, 6516, etc.
Concorder, collationner, 9138.
Cencuelllir, ramasser, 11678, 14622.
Condescendre, consentir, 9654, etc.
Condigne. 3448, etc.
Conduit, cortège, réception, 16206.
Conduite, 21300.
Confesse, nreu. 2iS76.
Confflre, /■<!»•(•, 21860; imbiber, 24559.
Congneus, connaissances, 9234.
Congnoistre de, avouer, 27887.
Congreer. plaire, 22231.
Consentir; part. pass. consentu, .5294, etc.
Consolatif, 2069.
Consumer, renir a bout, 10876.
Consonner, s'accorder, 3154, etc.
Consorte, 3591, etc.
Consulteur, 30371.
Contendre, s'e/Jurcer, 10698, etc.
Contenemant, manière de se tenir, 13201, 14179. 32149.
Contenue, abondance, 31697.
Content, querelle, 23040; c'est content de vérité, c'est
aller contre la vérité, 2268.
Contraict, estropié, 13141.
Contraire, dissension, 30280.
Contre sus, fém., terme de musique, 3837.
Contredit, jugement contradictoire, 2238.
Contrepenser, réfléchir, 10803.
(î L 0 s s A I R y.
4.-.7
Contrire. 2i.<8:).
Controversie, i't'tOl.
Convainquir. 2068?.
Convenant, 3010.
Convenient, convennhU, r>01.
Ccnvenir, se réunir^ :i410.
Converser, habiter, ÎHn.
Convine, "usevihlèe, S4012.
Convoy. e.trofle, 5489, etr.
Convoyer, rondiiire, 5370, ete.
Oopple, prociftion, communiration. 15150, etr.
Coppier. fournir, donner communi'alion, iôôli.
Coquardeau. not, 93$i:i.
Coquardie, sottise, 191',5.
Coquart. iiinllnril, 112:!6, etr.
Coquibus, sot. 22390, 22952.
Coquidé. sot, 19634.
Coqulnaille. 18368.
Corbatre. 29304. Voy. Conrbatre.
Corde (de nostre), île notre pnrli, 30461 : »i. s., 341'0.
Cordelle. rorrte, chaîne, 3S54, etc. : il est de sa conlcllo,
.;.• .in Uande, 27867.
Cordellé, /•.(/£ de corde, 22767.
Cornart, snl, 22894 en note, 22937 en note.
Corner, sonner du cor, 50694 ; rorner Jirise, sonner la
prise. 1702.
Cornette, 5.'>36.
Cornu, bi:,irre, 22399.
Corpulence, corps, 10374.
Corruptif, qui corrompt. 7949.
Gorsu, c/ui a du corps, 22957.
Côtoyer, toucher, 22294.
Coucher, exposer, 8972.
Couleur, ruse, 17173.
C:anloa, rolombe, 10429, 11850; piyeon, 1139i; poiilon
tul)é, pigeon pattu, 7606.
Conlpe, /(>««<!, 1293, etc.
Cour frtM ^*>ii de cours, powr M rime), 5257.
Conrbatre, 26352.
Courbon, ronipa>7non, 15657.
Coureux, coureur», 27965.
Coargee. ètririère. 22767.
Courre, rourir : après roup perd» n'est nul courre ,
26351.
Courrle, artion de courir, 17362, 26151.
Courroy ; souUiers de rourroy, -routiers rorroyés, 4710.
Cours (le), au plus vite. 2437, 17336; le grant cours, tu.
.••■., 10681.
Courser, courroucer, 23774.
Cousin : tant est bien mon petit rousin, tant je l'aime,
5495; suis je vostre cousin? est-ce que je voua aimef
Coussin (muser d'ung), perdre son temps (?), 6785, 2S941 .
Coustz : n ses chers coustz, A son grand détriment,
4782, ete.
Couvent, assemblée, 17918, etc.
Couver : le sanglant gibet le couva. 15534 ; que tout le
dcable te couva, 263C0.
Couvitt, rf^uniort, 3912, etc.
Coy, Iranciuille, 4597.
Crachier, act., couvrir de crachats, 27507, 308.">O.
Cranter, affirmer, 22194.
Craventer, crever, 15048, etc.
Crappaux : s'il gelloit jusques aux crappaux, 4849. Vo</.
EnffM.
Credence, croyance, 4980.
Crédulité, croyance, 4124, ete.
Craeur, c,fateur, 5812.
Cremeur. crainte, 1397, etc.
Cremir. craindre, 16765, etc.; part. 7>"»« cr^mMi. 270-7
Créneler, ai, /Ig., 22794.
Cressementa. salive, 14t05. .
Crimlnal. 13600.
Crocquler, attraper, S57^,
Crois : quand ce sont dix, Taia une crois, StSU).
Croquer : gringotez et c.-oquez vos notes, 3845 ; <ij /g.,
2:i:i70.
Croqueter. frapper, Î0877, etc.
Crotar : or le fais court, qu'il ne »e croie, lil,.,7.
Cruches de plarro, 1126;}.
Crudellt«, 2465, ete.
Crupeter, gravir, 13181, etc.
Cruppe, croupe, 4779, etc.
Cryee, réputation, 13464.
Cnelller, recueillir, 20021.
Coldiar, arrogance, 14628.
Coller. Vn;/. Pot.
Cy pris oy mis, tout autsilit, 17646, *le.
Damp, seigneur, 81577.
Dampnement, 1846, etc.
Danger ; ({u'ils sont de faim en grand danger, 462.1 ;
refus, 31143.
Bans, dedans, 11101.
Dard, hameçon, 30488.
Darde, dard, 81893.
Dea, mono»., exelam., 38413, tic.
Deabla, dtsyt., 437; le deable, beaucoup de elioses éton-
nantes, 18764; je ne sc«y qui deable l'arreele, 82V7I,
Voy. Sanglant.
Deablerle, 614i\
Deablos. 3g',4.
Debltoribus noatris, 6781.
Décent, convenable, 6692.
Decevance, 21804, etc.
Decberpir. déchiqueter, 19278.
Déceler, tranrher. 8647, ete.
Deconfortar, 24056.
Décoré, illustre, 8953.
Decoste, à côté, 4629, etc.
Decoulper. excuser, 15834.
Déduire (se), se réjouir, 12173.
Déduit, amusement, 4677, etc.
Deffacer, défîgurei-, 30865.
DefTaire, tuer, 1428.
Deffaulte, faulle, 2480 ; ma)ique, r.667, etc.
DefTermer, détacher, 0988.
Defflcher, 26916.
Deffonder. dépouiller, 390, de.
Delayance, retard, 66.35.
Délayer, attendre, 3(ft64, ete.
Délicieux, qui ril dans let délieet, 11771,
Delitable, délectable, 576, ete.
Delitenx, délectable, 66S6, et-.
Délivre, suhst., délirrnnce, Î5457.
Délivra, adj., délivré, 95, etc. ; alerte, 19089.
Délivrer, ccni'r à bout de, 7757.
Demaina, domaine, 834, etc.; eontluile, 84662; frm.
32T34.
Demanevar, laisser échapper, 04S0.
Demis, aboli, 9S48.
Demiseau, damoiseau, 84715.
458
GLOSSAIRE
Demogdorgon, dieu ^aïenf 7500.
Semoniacle, 12261.
Demoniaclerie, 12258.
DemoDStrance, 3203, etr.
Demour, demnire, 18349.
Demourance, 11719, etc.
Demouree, retard, 4006, etr,
Demussons (enj, en cnchelte, 12866, 19352.
Demy : pitié ne demye, aucune pitié, 23943; nous n'atten-
drons pas ne demy, pas le moins du. monde, 2i3SJ.
Denonceur, 10;9j, etc.
Denrée, chose, 24655.
Dent, 7nasc., 2u232.
Deo gracias, 4311.
Départ, déchirement, 9198.
Département, départ, 7554, ' (''.
Départie, départ, 8286, etc.
Depert, départ, 27175.
Depesclier, débarrasser, 42â2.
Déport, pitié, 13288.
Déporter (se), s'abstenir, 1500, 22048; aller en se dicer-
tissant, 51C9.
Depossesser, 1509.
Depostir. enlever, 17083.
Deppointier, mettre en mourais point, 243,!; accuser,
15559. Foy. Despointier.
Depporter. donner un délai, attendre, 2771.
Depreder, piller, violenter, 18393.
Deprier, prier, 18505, etc.
Depalser, 34215.
Deputaire, rnaucais, 22788.
Députer, envoyer, 11052.
Desbatre (se), se quereller, 9813.
Desbillier, dévêtir, 19765, 24629.
Desbrasser, défaire, 31949.
Descharpillier, détacher, 22756.
Deschaulx, déchaussé, 1289.
Desconffît, lassé, ïn-ajjaô/e, 8161.
DesconfTort, 7362.
Desduire, amuser, 8117.
Désert, jierdu, ruiné, 10464.
Déserte, récompense, 11990 ; service, 13iOS, elc.
Désespérance, 2178!), etc.
Desevrir. séparer, 28651.
Desguiser ; part. pjss. desguisé, étrange, 22412.
Desirier, désir, 1055.
Desjeuner, act., 20916 ; se desjeuner, 31794; estre des-
jeuné, 4305.
Desjung, action de rompre le jeûne, 15303.
Desmerite, 22483.
Desmesure (a), 1207, etc.
Desmoderer {se)fperdre la modération, 19081.
Desmonter, démunir, 270S1.
.Desmouvoir, enlever, 30975.
Desnaturel, contre nature, 26106.
Despacifier, 23081.
Despaisier, perdre le calme, s'agiter, 17093; se despai-
sier, 26339.
Despasser (se), gagner le large, 327 :i5.
Desperacion, 22166.
Despit, odieux, 3018.
Despiter, fâcher, 19030.
Despitens, furieux, 7319.
Desplaisamment, 1457.
Despointier, maltroiter,'iiZ<}'î>l ', mettre en mauvais état,
24654.
Desrain, dernier, 16907.
Desrobement, 26342.
Desroy, désordre, 2932, Î0333. etc.
Dessaisiner, déposséder, 23301.
Dessembler, séparer, 13258.
Desserrer, résoudre, 33067.
Desserte, salaire, 12894; sans quelque desserte, s,ins le
mériter, 28206.
Desservir, mériter, 2()04, etc. ;se desservir, être récom-
pensé, 6578.
Dessirer, déchirer, 1412.
Dessus, terme de musique, 3838, 174W; «la-., chez, 22439.
Destendre, déployer, 28646.
Destourbance, 16664.
Destourber, créer des embarras à, 6109.
Destourbier, peine, 22004.
Destresseux, 16580, 28293.
Destroit, subst., endroit retiré, 194Û7 ; en telz destrois,
dans une telle détresse, 27886 ; adj., rigoureux, 16823 ;
au destroit, étroitement, 13468.
Desvé, fou, 7308.
Desver, devenir fou, 10482.
Desvier, perdre le sens, 16776.
Desvoyer, égarer, 12537, 14145.
Detestacion, 30963.
Detrier (se), séjourner, 18504.
Devaller, descendre, 13335.
Devis, discours, 3218, etc.
Devises, paroles, 5266.
Dévoiler, .s*" répandre en volant, 7234.
Dextre, droit, 6891, etc.
Diablerie, 3833.
Dictlé, comjtosition poétique, 3658, etc.
Diffame, subst., 662; adj., 13960.
Difformer, 2638.
Dilaclon, délai, 57, etc-
Dilection, 14941, etc.
Diligenter, faire diligence, agir, 9325.
Discipline, exécution, 7270; désastre, 7693
Discort, discorde, 24, 27, etc.
Discuter, se détacher, tomber, 10190.
Diseteux, pauvre, 0699.
Disme, dixième partie, 29308.
Dismer, prendre pour la dîme, 22993.
Disné (estre), 29930.
Dispencer, donner la permission : dispencez inoy donc
du faillir, 671.
Dispert, dispersé, 25048.
Dissentir, être en désaccord, 12 !6S, elc.
Dissonance, l'esaocord, 2386.
Distracteur, séducteur, 10675.
Dittier, 5506. Voy. DlcOé.
Divers, étrange, 33358.
Diversoire, auberge, 5718.
Dateur, douleur, (pris adverb.) beaucoup, 19310, 21036,
22818, 23984.
Domine, puissance, 5399; fém., 6227.
Domine, lat., 33466.
Doré : ongnement doré, 28407.
Dormicion. 1'i9j9.
Double, terme de musique, 3839; a sept doubles, au
septuple, 1200.
Doubtance,6607, etc.
Doubte, fém., 3769, et: ; pour doubte, de peur, 7294.
Doubter, redouter, 5428; se doubler, douter, 20290.
Doucet, 3867 ; douloet, 5513.
G li 0 s s A I R K
AM
Douer, 21179, ef.
Oouloir. reijrelter, 2j10; sn ilouluir, sV/T/iV/T, 1130, rlf.
Douloire, doloirf, 25690, elr.
DoulouzeF, se plaimlre, 135'', etr.
Doutance, 15S1. Voi/. Doubtance.
Dragant, {/ommf adr<ujiiiUr : nn'sh-z du ilrn^ant nvcf
r.-igo, 12267.
Dragonneanlx, 22112.
Drapeau, fnanf<;au, 14'J90 ; drappoaulx, lanyi^ft^ 5153.
Drapelez, Innges^ttli^.
Droiturier, 2738, etc.
Dubilacion, 4244, etn.
Ducteur, nuide, 10,367, rtr,
Dulre, duyre, convenir^ 12026, ^(r. ,■ i'iixfî(fnt*r, iWT, etr,
Durté, 23941.
Eaue, irixi/ll., 17618, 17994, rir.
Ecquarre, éfjuet'i'e, 2.5745.
Edifier, munir, 597.
Edire. déifèter, 14389.
Effondre, répandre, 34114.
Effree (pour offreee) : a voix effre*», (Xune voir rctnilin-
x.iiilr, 23S55.
Effroy, riolence, 2262.
Elacion. nrrognnce, 10695, etc.
Embasaateur, nmbasf^adeur, 1717.
Embatonner, armer, 18556, 19205.
Embatre (s'I, venir rapidement, 2SS12.
Embesongner, empêcher, 6.588, et \
Emble (grand), 30282. Vot/. Amble.
Emblée (a 1'), ctandestinem-iit, 15552, '■('■.
Embler, ravir, 13420, etc.
Emblure. allure, 14361.
Emcombrier, embarras, empêchement, 5^7, etc.
Emmanteler, 4799.
Empescher, embarrasser, 16817 ; tracasser, 32104.
Empreindre, marijuer, 20934, ete,
Emprendre, entreprendre, 107, 3102, etc.
Emprès, nupr'''^, 4617, etc.
Empreu {terme de Jeu), eu prenii-fr, 22844.
Emprinse, entreprise, 19133 ; emprise, 27793.
Enarguer, fâcher, 23S2S).
Enboer, rouvrir de boue, 14134.
Encement, ensement, de «iif me, 8061 , etc.
Enceper, mettre en cep, 278vj4.
Enchanterie, 152i4, etc.
Encharger, recommander, 20108 ; acculer, 32372.
Encombre, fém., 33529.
Encontre, rencontre, 14939.
Encorner, insinuer, souf/ter, 7440.
Encourir, ert(rej)ren'/re, 10010; tomber, arriver, 10108.
Endurci, accoutumé, li636.
Enferme, infirme, malade, 4434,
Enffançon, petit enfant, 5480, «le,
Enffançonnet, petit enfant, 5621 . et\
Enfferrer, 27SS4.
EnfOé, orûrweiV/ew.T;, 16S06; excité, monté: plus onflU'S
qun crappaux , 21330 ; plus enfâés qu'une j^paigne,
30001.
Euffroidurer, 19470.
Enfouer, enfouir, 21710,
Engaigne, colère, 10479, etc.
Engendre, /'e'm., acte d'engendrer, 40SI, 4152.
Engendrement. ;iénéralion, 7142.
Engigner, tromper, 21612.
Engin, esprit, 707, etc. ; moyen, 907.
Engrant, désireux, empretté, tSOU, etc.
Engreger, t'aggraver, ISflO.
Engroailr, 40<M.
Enhort. «mkOTt, conseil, JSSi, etc.
EnhortemenI, conseil, tStTO.
Enliorter, comêiller, 33027 ; parler, 1(W50.
Enluminacion, 14449.
Enluminer, briller, 53t1 ; rendre la vue à. 1353B.
Ennojr, '-n'iui, 14859 ; rim. en ol, 3526.
Ennnyt. cette nuit, 4843, etc.
Enoingdre, 13801, 2S420, etc.
Enormal, prodigieux, {0603.
Enquerre, enquérir, 6675, 8701 .
Ens, <ie<i>iiu, 10186.
Ensaiainer, <(ii«ir, 22072.
Ensongniier, embarrasser, affairer, 173.50.
Enionne. .souci, 17920 ; au plur., U733.
Enssuivre, suivre, 13570, etc.: ensuyvir, B971, etc.
Eut, rim. eu ent, 729.
EntallenM, désireux, 3S2S.
Entecher, infecter, 10337.
Entendible. 20569, etc.
Entendis, tandis, 24569.
Entante, ce A r/uoi on l'enlenrl, 7801, etc. : ee qu'on en-
tend, 9095, e(e.
Ententif (estre), s'occuper, 1562, 14645.
Enter, /'rer, 5007.
Enterln, ender, 10318, etc. : sincère, 3,i7l, etc.
Entériner, rendre complet, 33240.
Entester. fropper sur la tile, 33332.
Entre vous deux, d rous deux, 14372.
Entrechange, acte fTalterner, 3S315.
Entrecongnoistre (s*), 1315.
Entrelarder (•'),.« faufiler, 20071.
Entremès. dirertistement pendant le repos, 12077 ; a*
fin., ;r>437.
Entremetre (■'). »'0<!cup«-, 47271 .
Entrestre, assister, 21162,
Entresuyvir, 18374,
Entretenement, entretien, 0745.
Envair, "ttaquer, 23574.
Envaye, incursion, 15743.
Envers : cy envers, de ee eôlé-el, 6067.
Enverser, venrer«er, 21171.
Envis, milgré soi, 8113, etc.
Envoisement, réjouissance, 32814.
Envoyserie, réjouissance, 328U).
Eqoal. C'i'il. 256.
Equalitë, 10117.
Equiparaat, équivalent, 374.
Erre, course ; grant erre, fou» de suite, 50 e(e ; fém.,
lionne et grant erre, pro»i;)(emen», 4317 ; bonne erre,
ri(e, 11261, e(e.
Esbanoy, dirertitsemeni, 4714.
Esbanyer (s'), se divertir, 18584.
Esbatement, 12030.
Esbatre : en esbatani, en plaisantant, 300%.
Escaille, plai.<iam., armure, 27966.
Escarbote, escarUot, 28900.
Escarmonchler, combattre, frotter, 28810,
Escarmuche, 7305, etc.
Escarmye. bataille, 27930.
Escarrir la place, rider la place, S;663. etc.
Eschapper. fiire parlir, 7846.
Eschar. minime, mesquin, 31201, etc.
Escheoir : part. pas», eacbeut. 9777.
-'iCO
G L O S S A 1 R E
Eschever. èriter, 3(W1 ; jtréxprrer, ploirini':-. l'i'îeri.
Esclandir, esdandrir. ditfnmfr, 4158, etc.
Esclandre, srandale, 13108, flf.
Escondir, refuser, 1377'i, ef.
Esconsser. racher, 7ii2,
Esconvenir, élre nécessaife, falloir, 3 7'i9.
Escorpion, :^4152.
Escourgee, 22836. Voy. Coupgee.
Escûurre, secoufy, 2ii~S9; ne m'esoouoz point il*' la muse,
*!• me contoz pns d" lialiri-rni'S, 33'i3C; jyirt. })n,«.<.,
pscoux, 20892, etc.
Escout, aiti'icnce, 4518.
Escremie, bataille, 18589.
Escroter. ih'crotter, torcher, 10515.
Esdresser, redresser, 3697.
EBgard, moment, 1483.
E^ouir, 7101, etc.
Esjouyssance, 32947.
Eslargir, ''onner libéralement, 2i22','>.
Eslite : a l'eslite, au choix, 33423.
Eslongner, s'éloigner de, 4024, etc.
Esmayer, èpoui:anter, 15857, etc.
Espace, A"')».. 13170.
Espardre (s'), se disperser, 1087.
Espars, alerte, 27344.
Especial, 8579.
Esperique, sphèrique, 275.
Espesse, apparence, 27089.
Espie, masc, espion, 19296, etc.
Espier, dépouiller, 788.
Espinoche^ morceau, aiguiïlette, 63.9.
Espirituel, 11659.
Esplourer, couvrir de pleurs, 16394.
Espoir, adv., peut-être, 704, etc.
Espondre, e.vpliquer, 6418, etc. ; part. pass. cspoiis, 9635.
Espourris. mêlée, 27719.
Espousee (aller a pas d'), aller lentement, 20273.
Esprendre, allumer, 3201.
Espriser. 30.522.
Espurgement, 10250.
Espurger, 10251.
Esquarl (virer a !'), s'enfuir, 27989. Voi/. Escrrrir.
Esroguié, arrofjant, 26272.
Esseullé, seul, 21543, etc.
Essoine, souffrance, peine, 9547, etc.
Estable, stable, 10268.
Eslancher la fain, 16402, etc.
Estature, £96, etc.
Estatat, 16716.
Estauré: en inale heure fus esi&nvè, maudite soit l'heure
qui t'a vu naître, 3262.
Estelle, étoile. 5285, etc.
Estoffer, estopher, garnir, 17571, 30204.
Estorer, ]irèparer, 17597.
Estradeur. batteur d'estrade, 33409.
Estraignement de dens. 17158.
Estraine : a l'estraine, 5104; Dieu leur envoyé pute cs-
traiiir, l'.314.
Estrainee, étrenne, 22145.
Estrainte : unes estraintes, des toui^nents, 33i77.
Estrange, étranger, 8474, etc.
Estranger, éloigner, 17470.
Estrir, dispute, 30072 ; opposition, 21321, etc.
Estriner, èlrenner, 5542.
Estriver. aller contre, 7187, etc. ; en estiiver, douter.
11321 ; s'estriver, s'opposer, 16309.
Estudie. élude. 20412.
Estuver, brûler, 10522.
Et cetera, 9580.
Eternal, 2063, 7299, etc.
Ethiope. Ethiopie, 10655.
Euvangille, fém., 16007, 32617.
Evaser, liouccr une échappa' oire, 9117.
Evesque; aller a pas d'evesque, aller lentement. 19ÎS7.
Evocqaer, appeler, ,33296.
Examiner. 1627.
Exaulcer, élever, 8917.
Exciter, exiter, éreilh-r, 002, etc.
Excusacion, 2506, et-.
Excusance, 24203, etc.
Exemple, fém., 8653.
Exillier. endontmager, 24634.
Expenser, imaginer, 6779.
Expier, purifier, 27598.
Expirer, e.vhaler, 10002.
Exploiteur, exécuteur, 27810.
Exploitier, terminer, 1605.
Exterrir, effrayer, £9040.
Extorcion. tourment, 3:922,
Extordre, smi-itraire, 32563.
Exultaclon, 1981, etc.
Fabler, raconter, 14322.
Fabuze, tromperie, 16281 ; fabuse, 17485.
Façon : de façon, de bonne façon, 6768, ef.
Facteur, fauteur, 19663, etc.
Facture, création, 295, etc.
Fade, mal portant, faible, 12100, etc.
Faerîe, enchantement, 22947.
Faille, faite, 18470, etc.
Faillir, faute, 8471.
Fain (avoir), avoir désir, 7520.
Faindre, se lasser, renoncer à, 1265, etc.
Faire : eomment le fait ? comment va ? 15307.
Falace, ruse, 676, etc.; fallace, 2431 ; sans fallaee, sans
se tromper, 3134.
Fallee, faillie, S8741.
Famé, renom, 7909, etc.
Famée, bruit, renommée, 1644.
Famis, affamé, 912, ««t.
Fantasier (se), se laisser aller à son imagination, 2725 î,
Faon, petit de l'animal, 16091.
Farcer, faire une farce, 7822, etc.
Fatras, 256S3.
Fatrouillier, barricader, 29951.
Faulcere, faussaire, 30490.
Faultre. Voij. Lance.
Feablement, loyalement, 27567.
Fel, cruel, perfide, 9998.
Fenir, finir, 2730, etc.
Ferial, de fête, 3864.
Ferir : part. pass. féru, 22125.
Fermail, agrafe, 4241.
Fermer, fixer, maintenir, 12275.
Ferre, paille, 5051.
Ferré, 27969.
Fervestu, vêtu de fer, 18544.
Fester, chômer, ne rien faire, 22S15, 24567.
Festivité, 4915, etc.
Fêtard, iJaresseux, 24412, etc.
Feur, marché : tel feur tel vente, comme nous le trou-
verons, 19083.
GLOSSAIRE
m
Fève (poy de la), mi pom' rii-e, l'ÙTu
Fevre, forgeron, 23747, <■(<■.
Fiance, 0570, etc.
Fid, siîr, 14405.
Flena, /imle, 13890, <■(<•.
Figruranlment, /iyurémnH, Ua.
Flnable, r.928, <'<c.
Finablement, 1S455.
Finance, mncnili; 96 ; ait ptur., argent, 5885.
Finep, //«ir, 7040, etc.; «loitnV, 6805, etc.; Ilncr de .«•
jiiocurfr, KJ41, 26812.
Finesse, mauvais coup, 20727.
Finicion, 32849.
Fixure, 31560. Voy. ïransflxeure.
Fl^oller, Iremblir au, vent, 25078 ; souffler, 23279.
Flora, 7502.
Flote, grande quantité, 31837.
Fois, foiz (iiu, lieu de foi, pour la riine), 20105, 29093.
Foison, (i''r., beaucoup, 111345; graiit foison, m. s. ,22197.
Foisonné, abon'Uml, 2022.
Folâtre, fou, 206:t7.
Folier, faire folie, 20308.
Fonde, fondation, 5084, etc.
Fonde, fronde, 18985, etc.
Forain, écarté, 24218.
Forbanir. Voy. Fourbanir.
Force ; c'est force, il est nécessaire, il faut, 23540.
Forcener, jierdrc ie sens, 20339.
Forclorre, exclure, 32 ; enfermer, 15433, etc.
Forcompter, faire nxauvais compte, 0530.
Forfaire (se), commettre un délit, H763.
Forfaiture, 2547.
Formouvoir, émouvoir fortement, 32684).
Fors bourgs (car. faulz bourgs), faubourgs, 23339.
Forse, peut-être, U19, 2965, 3766, etc.
Forsen, folie, 048, etc.
Forsete, ciseaux, 4720.
Fort: mes a le trouver gist le fort, mais le dif/icile est
de le trouver, 5404 ; au fort, au bout du compte
11732 ; au fort aller, m. s., 11070; voit aull'ort, m. s,,
30013 ; auffort aller, m. s., 30042.
Fortirer, enlever, 13240.
Fortitude, 3350.
Fortune, malheur, 7294, etc.
Fortuné, malheureux : ie pays eu est fortuné, a }tour
cela nue mauvaise chance, 13648.
Fortuher, rendre malheureux, 21156.
Fossoyer, iimiii'r de fossés, 21991.
Fourbanir, banir, 666, etc.
Fourbet, ruse, malice, 23757.
Fourme, s'mblant (dins l'indic. scén. qui auil X>5j.
Fourmener, fourcoyer, 32098.
Fournir, garnir, 2820, etc.; fournir une demande, fiin-
une demande, 13675.
Fourrer la pale, donner de l'argent, 30622.
Fraeleté, fragilité, 25453.
Frainte, r«;)(«rf ; sans frainte ne corrupeion, sans que
mon corps ait été endommagé ou souillé. 4989.
Frappart (firepe), 21117.
FrauUer, frotter, 19755.
Fremier : tout le cueur mo iVemje, 1239.
Frenasieux, fou, 200'30.
Frivolleur, trompeur, diseur de eho.^es frivoles, 14401.
Froid : que froide nuit puist il avoir ! impréc., 26910.
Fronsser : fronssez de vostre orde narine, 1698.
Fructns ventris, 6782.
FrulotioB. joulttiinee, tUSO.
Tu, feu, 7350.
Fnltir, 1368.
Fnlclr, munir, 4938.
Fulminer, 2M14.
Fnmee, iiiée hiiarre, i31iO ; entrer en fumer, /« mettre
en colère, igSn.
Fumer (■•}, se mettre en eoltr», 15S33 ; ntre fumé, être
fâché, d« mauvaise humeur, 2TM1.
Fnst, bols, 24008.
Fnsler, fouiller, 28040.
Gages (garder !•■), être timple tpectateur, 7612.
Oalgoaga, gain, 14347.
Oaigae, gain, 10478; braire a perte et a gaigne, it tort et
à travers, 32405. Voy. Oalag.
OalBg : parlera gaing et > perte, à tort ri à trnr.rt,
8238.
OallM, galère, SSmj.
Oallols, bons compagnimt, 30047 ; lae^s au gtlloia, 4731.
Oarandlr, défendre, 32412.
Garde corps, garde du corps, 15730.
Gardechevaulx, 18567.
Cargate. gorge, 3917, 22004 ; parole, 24490.
Garmenter, lamenter, 25713.
Gaoltibb (fiwra), bon rivant, 10841,
Gahir, avouer, 28201 .
OaUae, poule, 12240.
Gendre, genre, 4, elr.
OentalUe, 28818.
Germain, parent, 27C84.
Getz, iiropr. fera, liens Ijiour tenir les pietU dfs fau-
cons), 15<i20. •
Gibet: il aroit son sanglant gibet, il n'aurait riVn, 20180;
dequi? — de ton sanglant gibet, 33347; adverb.,énor'
mémeni, diablement : il faille gil>et froit, 10408; il ■
le gibet grosse teste, 22402; adv., diable: qui gibet
vous sçaroit fournir ? 22827 ; que gil>et le lusIeruD»
nous I 24240 ; je ue si;ay que gilwt y a, 27256 ; je ne sfay
que gibet il brasse, 314>48.
Glppoa, >u;io/i, 4679, 4713.
Glave, épee, 18518, etc. ; fém., lanee, 3260.
Glosa : ne puis faillir a mes gloses,>e ne pui» m» Irom»
per (iafi-H mon calcul, 23417.
Glout, eoquin, 20174.
Gloutonnie, gloutonnerie, 10603.
Oobitre (^) : et m'auurez comme ung gobilre, Oij.
Godet, verre, 6347, etc.
Godonallle, réunion de godons, de goujats, 27965.
GouUee, ce qui refnplit la gueule, 2Î06S.
Grâce, réitutation, 27870.
Graigne, grenouille, [Vmi. Voy. Eafflé.
Grain ne gonta, le moins du monde, 10462, 14732.
Grandelet, 0398.
Gras : lifinoranee est ung peu trop graase. 2,' 13.
Greigneur, plus grand, 4285, etc.
Grevain. lourd, 1763.
Grevance, 953, etc.
Grever, alourdir, 18776.
Grigner, pleurer, 22965.
Gringoter. 3»v45. Voy. Croquer.
Grive : tu ncntens non plu» qu'une prive, 2S6S7.
Grommand,'.^OHrmrm^, 2315.
Grommet. gourmet, iiZ7l.
Gronder, se plaindre, 8096.
Grongnae. coup sur la figure, 22299.
462
GLOSSAIRE
Gros bis : forgés en gros bis, excellcmmenty 23820. Voy.
Grosbis.
Grosbis (faire le), faire des manières, 2S127.
Grue, au A;/., niais^ 20280.
Guaitier, faire le [luet, 28846.
Gttbernateur, 4289, ctr.
Guerdon, récompenae, cadeau^ 171, etc.
Guerdonner, rècotupen^er, 24040.
Gueux, 3898, 7526.
Guide, /em., 28741.
GuiLi'AUME (c'est aj, à d'autres : ouy, ouy, c'est a Guil-
laume, 23584.
Guimple, ijuitnpe^i'tOoi.
Guisarme, hache, 19256, etc.
Guisarmier, armé de guisarme, 18590.
Habilemens, a^/rès, 6831, 31746; outils, 15102,
Habilité, adresse, 12084.
Habillier. Voy. Abiller.
Kabitateur, 1523, >ir.
Habondanl, 244U.
HaboDder, 3486.
Hahay, interj., 10829.
Haire (a grant), à yrand' peine, 24563.
Haitié, dispos, 12305.
Halle ; nous tenons cy halle d»' nyent, nous parlons
2)0 ur rien, 30509.
Halle bois, 24826.
Haller, drrsser, 68 il, etc.
Hantin, séjour, 17472.
ïlaparl, crochet ù pendre, I2i34, etc. ; il ara son Singlant
hapart, il n'aida rien, 22122.
Happer, aoripper, i3063.
H%rdel. trtUfiVn, 23879.
Kardement, courage, 33815.
Hare, exclam, pour exciter un chien, 4781.
Karpaille, troupe de voleurs, 12450.
Hart, corde ; il fera sa malle hart, il ne fera rien, iyi37.
Hasterel, nuque, cou, 25691, 303;4, 30736.
Batiplart, coup du plat de la main, ^i2il.
Kauberjon, cotte de mailles, 7595.
Haubreger, anner du haubert, l48i'».
Hault ; de haulte eure, de bonne heure, 4510.
Haultain, haut, 3290.
Haultesse, grandeur, 21405.
Haussaire, fier, 21554.
Hay, en axant, 10540, 24242.
Heaulme, trisyll., 17392.
Hemee, bataille, tumulte, 7607, 27351, 28878.
Héron : iiardiz comme un héron, 27977.
Hesperus, ;<^155.
ltLet,Joie, 25797.
Hide, frayeur, ï3440, etc.
Hideur, état hideux, 7303, rtc.
Hochete, hochet, 5514, 5518.
Hongner, grogner, 17452, etc.
Hons, homme, 30066.
Horribilité, 049, etc.
Houseau, botte, 28902.
Houser (se), se botter, 28898.
Housser, passer par les verges, 1 520.
Houssu ; beneisson houssue, bénédiction accompag née
d'aspersion, 3971.
Hucher, appeler, 15110, etc.
Hucque, bonnet, capuchon, 14350.
Huiler, hurler, 17412.
Humblesse, humilité, 3696, etc.
Humer : j'en bumeroie la pwree, c'est moi qui en souffri-
rais, 18574.
Humiliate, 20879.
Hurture, heurt, 3949.
Hutin, querelle, 7589.
Hutiner, maltraiter, 74î3, etc.
Huvete, rhapeau de fer, 7597 ; au fig., coup sur la tête,
19851.
Huy, aujourd'hui, 6904, etc.
lUec, là, 6545, etc.
XUusion, raillerie, 30846.
Hz, elles, 30992.
Impareil, 31049.
Imperateur, 4288, etc.
Imperer, imposer, 8993.
Xmplecion, accomplissement, 9088.
Importable, qu'on nr peut porter, 15415, 28560.
Importun, inopportun, 2355.
Imprimer, empreindre, 4128.
Improuver, contredire, 8295.
Improveu, imprécu, soudain, 11730, etc.
Impotence, 2155, etc.
Impugner, attaquer, 8423, etc.
Inciter, susciter, 23583.
Incohacion, 19954.
Incorporer, s'assimiler, ii7'~>.
Increé, 4875.
Induce, délai, 8320, 17971.
Induire, instruire, 20093.
Infect, infecté, 1345.
Infinable, interminable, 2568.
Informateur, 10801.
Informer, garnir, 551, etc.
Innuer, f'ire entendre, 10791.
Inobedience, 949, etc.
Inquiricion, recherche, 'SOWS.
Inquisicion, recherche, 2026.
Instance, contrainte, 30226.
Insynuer, faire connaître, 20310.
Intellectif, 598.
Xntercès, intercession, 34279.
Interlocuter, 27297.
Interlocutoire, ï240 ; épisode, intermède, 159.
Intermission, intervalle, 23225.
Interroguer, interroger, 6331.
Intitulacion, 8451.
Introduire, instruire, 1424, etc.
Inventoire, 29065.
Ire, colère, 6107, etc.
Isnel, ysnel, subtil (en parlant du fcu)^ rapide, 2^5,
etc. ; ysnel le pas, rapidement, 5803.
Issir, yssir, sortir^ 810, etc.
Itel, Ici, 7244.
Ja, déjà : ja soit ce que, quoique, 6902,
Jambe : selon la jambe la chausse, 22969.
Jamèj, à Jamais, 22430.
Janglerresse, bavarde, 17012.
Jaquete (de mailles), 7601.
Jarbe, ijcrbe, 1032, etc.
Jengle, bavardage, 8737.
^fisne. Jeûne, rim. avec règne, 7916.
Jeu de parture, jeu sans importance, 19375.
Jeunesse : c* estait la plus belle jeunesse d'enlTant qu'on
GLOSSAIRE
i«3
pcnsl regardop d'acil, 9-il1 ; é(/at*ement.^ ih- M Jeu-
nesse, I39'.9.
Jherarohie, hièrnri:hie, 302.
Joindre les mains, rendre hommnije, 9 )43.
JoUJni/eii.r, 137S9.
Joliel, 25799.
Jollivet, 200Sd.
Jorroise.pi'un'^ de Jouarre, «m fig., 2t)912. Vnij, Prune
Jour, /■(•m., 16S53.
Joyeuseté, 121)75, etc.
Jubaee, Jubilation, 28698.
Judicatif, r/ui foil fonction dtjuge, 11307, 132S7.
Juffe, Joue, 2U9S6.
Jngenr, 267'i:!.
Juis, Juif : la imrion juifze, 95.S3, ets .
June, Jfiine, 12816.
JuNO, 7503, 22'i26.
JnpiN, Juppin, -'.97, 2232S, 227«, 23S18, 27285 ; Jupitor,
■i-iAiS, 23.'i'il, Ï7270, 30211.
Juppé, 'i778.
Justicier, 215S8, etc.
Juyverie. nation Juive, 0222.
Kalendrier de bois, 4723, 5521.
Kallenger, deiiinider injuxtice, 21803.
Labit, désastre, 23896, eU. ; labitc, fèm., 791, etc.
Labourer. traraiUer, 7St)6, etr.
Laboureux, ouvrier, 16851.
Labourier, travailleur, 16863.
LiACHEsis. T490.
Ladre, lépreux, 15583.
Lame, pirrre tombale, 7957, 30159.
Lamproye : il cii rôtira la lainproye, (7 en paiera tes
frais, 26390.
Lance surfaultre, aufifj,, rmmddmf^m«f»t, 22150, 24761.
Langaige : servir de langaiges, donner de belles paroles,
2735S.
Langager, tenir langage, 830(, etc. ; sulist., dis -oureiii;
.■i23'.5
Languoré, l'ingoureux, 25324.
Lapidement, 13666.
Largesse : a largesse, en abondance, 6829.
Larmoyer : mon cueur larinye, 4021.
Larronceau, 20869.
Lasse, lassitude, 8157, etc.
Lasseté, lassitude, 4545.
Lassus, 'ù haut, 661, etc.
Latéral, 770.
Laval. .11 bas, 8831, 27722, etc.
Lavoir: pot lavoir, bassin pour se lacer, 23,^9l.
Lay, laïque, 27848.
Lay, terme de musique, 33239.
Lé. large, 22099, etc. : a la longue et a la lee, en long el
lar:/,; 28731.
Ledanger, outrager, 27774.
Léger, legier (de), ficitement, 6017, etc
Leonesse, lionne, 23050.
Lerme, riin. en erme, 1338.
Lés, lez, ';ûlé, 1850, <■('•.
Libelle: vous orrez vostre libelle, t'ows enteu'lrez ce qui
vnus concerne, 30290,
Lice, lisse, chienne, 7756,
Lieppart, léopard, 1902'î.
Lièvre : je le si;ay plus courant qu'ung lièvre, >i' le siis
mieu.v qu''un lièvre ne court, 6345.
Ligne, lignage, 0062.
LignoUat (au), bien fait «n parUxnt de la ehatuiurf, «(
par ext. Joli, élégant, 5501.
Hng*, de lin, 4708.
LlTrss, distribution faite par les granilt : hurque ou
robe de livrée, 14350 ; iiu fig. , 11 ara de aoitre livra»,
22808.
Lobe, tromperie, 15150, etc.
Lober, tromper, 28027,
Lobenr, trompeur, 2S657.
Loer, conseiller, 28848.
Loire, piège, leurre, lOOOi.
Loqneaoe, parole, 7177, etc,
Los, louanges, 4020, >(". ; renommée, 7K5, etc. ; a los,
nu los, au sort, 19810, ÏEe76.
Loture, lavage, 10340.
Loudier, vaurien, 14677, Ï3707.
Lourdiar. terme dinjure, 221110.
Loordois (en), grossièrement, 4730, 12042, 82400.
Losenger, perfide, 10701.
Lyé.ioyi-u.r, 12488.
Hachefrala : ce nom appliqué àunhommttsl la m^ine
ijijure qu'animal, 4815.
Macliouere, 4636.
■lagical, 13732.
Magique, magie, 7S89, etc.
Hagister, 19258, «le.
Magnifier, 3625.
Mahom, 4443; Mahomet, 7482, 740t; Mahommet, 4339,
60S6.
Maignee, famille, 10932.
Malgnie, fimille, 4422, etc.
n^llB, jiet été monnaie, 14001.
mailliet, arme, 7601, etc.
Main, matin, 15878, 27872.
Main : avoir quelqu'un bien a main , être trés-tié avec,
27871 ; ne me joues point de main mise, ne mette: pas
la main sur moi, 17373; jn deffens la main mil», m.
s.. 22,300.
Mains, moins, rim. en ains, 3115.
Mainsaé, puîné, 1004.
Maisement, mauvaisement, 27(V75, 30777.
Maisoncell», petite maison, 14307.
Maistrier, dominer, 13761.
Maistriae, coup de maître, 186:11.
Majeur, fém., m<y"<-urc <f u» syllogisme, 8520.
Mal, nuxuvais, 2663 .
Maléfice, méfait, 2487.
Malement, 10685, etc.
Mallieuré, matheureu.v, 1145, etc.
Malice, masc, 2483, 2668, etc.
Mallete, iirtite malle, 11824.
Malostrn. malheureu.r, 16380, lOOIii.
Manandie, séjour, £1080.
Mancion, mansloa, séjour, 19K>, etc.
Mand, ordre, 4301, etc.
Mande, mnine, 12987, i:W3.
Manendise, diynaine, 11307.
Mangeoner», 4630, 46%.
Manière : tenei manière, eontenes-rous, 15781 ; il n'v «
manière en son fait, il tie sait plt^t se mesurer, 270 00
Manoir, demeurer, rester, 6015, etc.: subst., dememte,
118.2.
Marche, frontière : de nos marches, ie ehet lao») SM i.
Mardaill», canaiUe, 7705, etc.
\6i
GLOSSAIRE
Marmiteux (faire le), élrc triste, 19392, 22745.
Marmote : barbetez comme marmote, 3S'i6.
Marmouserie, dépit, 713S.
Marmouset, petitr image, 5326. «
Marpaull. terme d'injure, 21038.
Harrir, fiicher, 14780.
Marrison, 2yeine, 13497, etc.
Mars (le dieu), 21326.
Martin : il fault chanter d'auUre martin, il fout parler
d'outre ehose, 19683.
Martirer, martyriser, 9999, etc.
Massacle, massacre, 23366.
Massis, massif, 10598, etc.
Mat, abattu, 6861, etc.
Matlienot, matelot, 6830 eti note.
Matines : au fiij., il y ara belles matines, 15205.
Hatinet, 15317, etc.
Hauffés, mauvais génie, diable, 23277.
Mauvaistié, 14669 ; mauvaitié, 18662.
Medeciner, guérir, 1353S.
Meignie, 16801. V'oy. Maignie.
Membrn, 1378.
Ménage, séjour, 10546.
Mencion, proposition. 30489.
Mendre, moindre, 506, etc.
Menée, acte, 22376.
Menistrer, servir, 25944.
Mengeaille, 4328.
Mensonge, fém., 20694.
Menterie, 20509.
Mercier, remercier, 9162.
Mercure, 7483, 22328, 23441, 27Ï70.
Merelle, jeton, au /ig., coup, 20965.
Merencolié, 27282.
Merencolye, tristesse, 10604, etc.
Merir, récompenser ; Dieu vous le mire, 8118; mériter,
18306, etc.
Merrir, 4387. Voi/. Marrir.
Merveillable, étonnant, 5722, etc.
Merveillant, merveille'ux, 32144.
Meschance, malheur, 1898 ; méchanceté, 2923, etc.
Mescliant, malheureux, pauvre, 4530.
Mesclief, mescliief, malheur, 1250, etc.
Mesclieoir, mésavenir, 32335.
Mesdit, mauvaise parole, 1253.
Mesel, lépreur, 15582, etc.
Mesliaigner, mutiler, 29943.
Meshaing, blessure, 1235, 33471.
Mesliuy, aujourd'hui, 108,0, etc. ; meshuit, 31132.
Mesnage, domaine, 7410.
Mesouen, dorénavant, 11110.
Mtsparler, mal parler, 19650.
Mesprendrs, prendre mal, 26964.
Mespresure, faute, 258.
Mespiison, faute, 79, etc.
Message, messager, 4955.
Messe: au /ig., tous les deables y chantent messe, 15191.
Mestier, besoin, 4864, etc.
MesTenir, mésavenir, 29316.
Meurison, maturité, 17329.
Miel : nous en arons ou miel ou cire, 31772.
Mierre, myrrhe, 6639, etc.
Mignot, mignon, 12062.
Minière, mine, 21630.
Ministrateur, serviteur, 18437.
Ministrer, offrir, 13469.
Mirable, 5268.
Bliracle, fém., 14506.
Mire, médecin, 13881, etc.
Mirer, regarder, 19991, etc.
Mise : je n*en fais ne compte ne mise, 32409.
Misericors, 1641, 1660.
Mistere, fém., 2125.
Misterial, mystique, 460.
Mocion, émotion, 3012.
Mode, t'ém., ^manière, 27525.
Moisonnage, 17028.
Moleste, masc, action de molester, 7387, 27433.
Moller, mouler, fondre, 21625.
Mon (ça), ccrics, 9263 ; of/irm., c'est mon, 2953,14588; ce
sera mon, 7261 ; ce fait mon, 16774 ; ce feras mon, 22636.
Moncelle, monceau, 19247.
Mondanité, vie mondaine, 32738.
Monde, pur, 5081, etc.
Monder, puri/ier, 10318, etc.
Mendicité, pureté, 23584.
MondiBer, purifier, 18036, etc.
Monicion, avertissement, 2604, etc.
Monjoye, grande quantité, 685, etc. : prééminence, pcr~
fection, 2892, etc. ; pris adverb., 5139.
Monstree, montre, action de montrer, 8431.
Monte, importance, valeur, 23515, 30576.
Monter, itnporter, 15479, etc.
Morcelet, petit morceau, 6350.
Mordre ; part. pass. mors, 1512.
Moriginer, 1379.
Moron (songer le), rêvasser, 19392, 209S2.
Mortier ; quelque chose soubz le mortier, anguille sous
roche, 7147.
Motet, terme de musique, 3835, 5001.
Mouffles, gros gants d'hiver, 4721, 4848.
Mourne, morne, 17306.
Moustarde (le pot a la), le derrière, 7615.
Mouton, hélier, 22741.
Mouvoir, exciter, 2>ousser, 1352.
Moye, mienne, 10242.
Moyen, miYieu, 3214 ; alfaire, 15513; intervalle, 21846;
intermédiaire, 27528,
Murmurir, murmurer, 2005J.
Murtrir, tuer, 7904.
Musardie, sottise, 8598.
Knsart, sot, 19731.
Muse. Voy. Escourre.
Muser, ^'oy. Coussin.
Musette, 4092, etc.
Musser, cacher, 757, etc. ; muscer, 7732.
HvDAs, 17443.
Myner : au fi g., 20115.
MvNCRVE, 7503.
Myniera, S',2. Yoy. Minière.
Nageouere, piscine, 14133.
Nager, nariguer, 6813.
Naissement, 65.35.
N&ve, bateau, 10868.
Navrer, blesser, 17037.
Nayf, naturel, 845.
Ne ; il ne nous demourra visage qui de griffes ne soit
deffait, tout notre visage sera, etc., 7636; n'est ne Dieu
ne deable qui nous laisse prendre, ni Dieu, ni
diable, etc., 7924; jambe n'arez que je ne froisse,
toutes vos jambes seront froissées, 25590.
GLOSSAIRE
465
Ntf : rhosn n«e, rien, 33853.
Nannll, 551)0.
Nennin. non, r>'i9fl, r<r.
Nephaire, icéténit, ÏS'iTS.
Nephas, ^795.
Nercy, noirci, 1154.
Nesung, <iuci(n, 16685.
Nice, sot, -.mn, etc.
Nichil. :i7Si.
No (a), (?» ramn/K, 31?04.
No, )io(i-e, 968, f(c. '
Nobilitë, (>'i6, elc.
Nobille, nobli; 15?i7.
Nobis, 10025, 28128.
Noiseur, querelleur, 21507.
Noisier. fitire noise, 2164, <•(■.•.
Noncer, d/iKoncpr, 15367, etc.
Nosire. 20.i23.
Notable, parole remarquable, 23568.
Notre, de première nualilë, 6299, etc.
Nouer, noijer, 25007.
Nouvelet, 9870.
Nouvelleté, 3480, etc.
Noyaulx, houtona, 4848.
Noyer : do despl.aisir nous noyons, nous mourons de
(lépil, 30099.
Numerable, .■(4238.
Nuysance, 32461.
Nuyttee, 4508, etc.
O, ai-ec, 10976, (■<(•.
Obanye, assemblée, 17548 ;ar»ie« convoquée, 18580. foy.
Ost.
Obduracion, endurcissement, 10121.
Obédience, 1397, etc.
Obicer, mnlredire, 22213 ; opposer, 27519.
ObUgatoire, fétn., obligation, 23621.
Ûbnubiller, obscurcir, 3132, 28701.
Obstant, nonobstan), 32j"(0.
Obstinât, 22369.
Obtenebré, ténébreux, 34271.
Obumbrer, couvrir de son ombre, 3190.
Obvier, rontredire, 10871, etc. ; remontrer, 25354.
Occision, ino, etc.
Occupassion, peine, embarras, 10107.
Occuper, accuser, 2787G.
Odorer, 1J951.
Oeille, brebis, 5;i5 ; oueille, 16557.
Oeuvre, masi\, 27796.
Off^ncement, 2067, (•(/•.
OiTendre : pnrt. pass. offendu, 2517.
Office, A»i.,2315l.
Oracial : (■•.■st ung soublil officiai, 17280; iron., 20213.
OInture, "icd'oii, 12624, etc.
Oiselet, 1U772.
OIseleux, marchaml Soiseaux, 1693Ï.
Oiseuse, oyseuse, oisiveté, 9891, etc.
Olivct, 17:>!-5, JSJ03, 2U0S0, : 2753, 32951.
Oagnement, onction, 9626 ; onguent, 15949, etc.
Onny, c[ial, 3007 ; tout a. l'onni, égalemen', 7621, elc,
Opresse, opprcss-on, 10121, 24144.
Oratoire, fém., 1322S.
Orfanté, abandon, 24551.
Original, 1,507.
Orme (peller 1') : je croy qu'il fait meilleur ioy qu'il l«
l'ait allci' jeller l'orme, 11220.
Pas.
Omatanr, 18706.
Ort, sale, (0762, elc.
Oalara, osier, 4700, etc.
Oat, mtsc., armée, 22't30; /Vm., oti b(nye, armé* eon-
roijuée, grand* réunion, 18580 en note.
Catanclon, 20017, 3:1602.
Oultrage, e.refs, cri'm*, 1201, etc.
Oultranca, 31630.
Oaltrepaaaa, subst. fém., nte plu* »Ura, 540, n663.
Ouvrant, om-rabte, 4761.
Ouvrar, Ir iv iill«r, 7638.
Paffns, sorte de pique, 17756, etc.
Paire (invar, au plur.), 22810.
Palab, 23141.
Paletoc, manteau de berger, 4725.
PalUot, vêlements de soit, 14052, 19301, «(«.
Palus, m irais, 12336, ««<•.
Pana, 7199.
Paneron, petiit corbeille, 6932.
Papelardle, 16722.
Papelart, 202S0, etc.
Par : tout par elle, tout* seule, 4194 ; avec pari, pris ,
12.S94.
Paracomplir, 15824, etc.
Parconclure. :i3034.
Parconsommer, 19944, ''('-.
Pardre. pndre, 9199, elc.
Pardurabla, 4Ï0, elr.
Parer, préparer, 2847.
Parfln (a la), <'i»A't, 33947.
Parfond, profond, 2842, etc.
Parfourmer, parfaire, 7453.
Parfournir, garnir eompléli ment, 10588, 15355.
Paroir, paraitre, 5276, etc.
Partage, lieu, 19008.
Partldpalment, 14650.
Partie, lieu, pays, 5825.
Partir, séparer, déchirer, 9224 ; partager, 30600.
Partnla, ouverture, 29962. Yoy. Fartaia.
Partare, partie. Jeu, 20920, etc.
Party, lieu, pays, 5716, elc. ; èlat, 8030.
Pas, af/irm.. 16141.
Passade, promenade, 20.415.
Passe routa : des prudontes la pasae route, i/ue nulle M
.turpa.^se en prudence, 4232 ; m. »., 7360 ; m. »., 15600.
Passer : accepter, 10921 ; accorder, 12298; faire passer,
27127 ; se passer, se contenter, 4580, 4602, etc.
Pasta, palte, rim. en osie, 3750.
PasM : on luy a fait tous ses pasMs, eon a/faire est
réglée, 20184.
Paalonrrle, *««( de pasteur, 4848, etc.
Pautonnier, (erwie d'injure, ribaud, 28319.
Favae, paré, 7492.
Peaultre, grabat, paillasse : croupir an peaaitre, 28015.
Psanltre, aorte if alliage métallique, 19406.
Paccavi. ÏM84.
Pecune, peccuna, argent, 7625, etc.
Peller : elles sont ung peu trop pellers, vous voutrM nous
en faire un peu trop aca-ttire,3l)i3(>. V'oy» CkaMlgaa,
Orma.
Pelote : chacun se mette a la pelola, à ^i irsogne, 31836.
Penance, pénitence, 1313, etc.
Pener, se donner de la peine, 11448,
Penatratir, 13284, «c
Pcaaetiara, panetière, 470Ci
30
466
GLOSSAIRE
Penaé, pensée, 3398.
Pensement, pensée, 7712, etc.
Penser, s'occuper, 4622; act., soigner, 27095.
Pensis, pensif, 13677,
Per, sem'tlable, 10774.
Percevoir, 16820.
Perçus, fr'ippé, 12213, etc.
Perdurable, 27607, etc.
Perhennel, éternel, 23251.
PeriUisr, être en péril, 24633.
Périr (se), se tuer, 11525.
Permancion, permansion, séjour, 3454, etc.
Perpetrateur, 21370.
Perron, b!o<: de pierre, 15043.
Perce. Voy. Gaigne, Gaing.
Pertuis, trou, 24729.
Pesance, 4S90, etc.
Peser, élre pénible : ne vous poise, 2539.
Pesme, cruel, 25231.
Petiot (ang), un peu, 7781.
Petit (nng), un peu, S660, etc.
Plias. 3785.
Pbebds, 20145.
Pheton, Phaèton, 20146.
Pic (en estre), être perdu, 922, 23350, 24502.
Fié : tenir pié a bouHe, ne pa^ quitter le jeu, 25056.
Pieça, il y a longtemps, 5401, etc.
Pièce, espace de temps, 28539, etc.
Piétaille : il fault desploier ma piétaille, il faut jouer
des jambes, 4331 ; homme de pied, irnn., 28822.
Pieu, pieu.r, 2870 ; pieulx, disyll., 29001, 30810.
Fiez (sur). Voy. Surpies.
Piller, fouler aux pieds, 11843.
Pillete, inslrum,ent « carder la laine, 12273.
Pillier de taverne, 4307.
Pinsson: pinsson tout vert (jeu de mots sur les homo-
nymes pinçon et pinson), 15059.
Piper, résonner, 435il.
Pipeter, râler, 26608.
Pirouet, toton, 5538.
Pis, poitrine, 14729.
Pissot (a), ùjet continu, 19195.
Pitace : je n'en ay pitié ne pitaoe, 19759.
Piteable, 5721, etc.
Piteux, attendri, 655S ; triste, 9331.
Placete, petite place, 4520.
Plaidoire, disputeuse, 24307, 24687.
Planier, abondant, 15756.
Fiante, qu-mtitè, 1028, etc. ; a planté, ttijonOomment.
7194.
Plasmacion, 230.
Plasmateur, 563, etc.
Plege, garant, 22599.
Plet, langage, 15049.
Plevir, engager, 9501.
Plice, relisse, 871, 33387.
Floi, pli, 4727.
k*loissier, plier, 1917.
Plommee, massue plombée, 10489, itC.
Ployé, plaie, 22859.
Plue, épluehure , vnlg. grattage, Itti'ili
^iucqaaiiie, menu butin, 7591 en note.
Piume. Yoy. Souffler.
Pocesser, 11822. Voy. Possésser.
Poignie, poignée, 6788.
Poindre, peindre^ 13714.
Poindre, piquer, i
Poinsson, poignard, 7600.
Point, état : vous me samblez en petit point, 1475 ; argu-
ment, 2436.
Pointure, p/^Ki-c, 9486, 12679 ;2)o;Kt qu'on amène au.r
(lés, 25775, 25779.
Poire : taste quelz poires ce sont (en parlant de coups),
20201 ; poires d'angoisse, 15195.
Poison, fém., au /!g., 1C253.
Poissant: pour moy il est assés poissant, assez bon,
4603.
Point, souillé, 9776 ; réprouvé, 21359; polu , 19082, etc.
Pommette, petite pomme, 8081.
Pondérable, 23474.
Ponderosité, 21982.
Ponnee, insolence, 30134.
Porce, porche, rim. en orce, 3719.
Porchet, petit porche, 14587.
Porion, poireau, 20979.
Port, importance, puissance, 15644 ; conduite, 30108 ;
support, 30969.
Portatif, 19898.
Portière : le fruit dont elle est portière, Cenfant qu'elle
porte, 4215; subsl. (s. e. brebis), 4750.
Pose, espace de temps, 5519.
Possesse, avoir, 18298, etc.
Possésser, être en possession, 984 ; posséder, 6562, etc
Possessoirp, fém., possession, 17162.
Poste, conrenance, 19521, etc. ; a poste, comme il faut,
18539; a ina poste, à mon pouvoir, 4630.
Postis, porte, 1501.
Pot : elle est a tel pot tel culier, elle convient bi^n,
22968; m. »., 25023.
Putacion, 18127.
Potages ^pour tousj, 7611.
Potence, béquille, appui, 3302, 3524, etc.
Potesté, puissance, 307, etc.
Pouloir (?), pouvoir : nous y peulent apparcevoir, 31330.
Poupart, 7644; iron., 15895.
Pourbondir, faire lever, chasser, 28051.
Pourchasser a, tendre à, 8560.
Pourmener, 1.^270.
Pourpenser, 29972, etc.
Pourpuintel, petit pourpoint, 23880.
Pourporter, 12880.
Pourpre, m^isc, morceau de pourpre, 22900.
Pourpris, enclos, lieu, 1209, etc.
Pourprise, enclos, lieu, 6888, etc.
Poursuir, poursuivre, 20135, etc
Poursuivant, 10541.
Pourtraicture, 24127.
Pourtraire a, ressembler d, 288, etc.
Pourveance, 1897, etc.
Pousse : de belle pousse, en hr'tte, 33384.
Pousser, respirer fortement, 22015.
Pouvoir, absol. .* je ne sçay se tout y pourra (s. e. tenir).
129t9; cela ne peut hors de ma teste (s. e. sortir),
15123.
Pragois, de Prague, 4720.
Pratique, mnse., 20387, 30921.
Precellance. e.rcellence prééminente, 328, etc.
Precellant, 1727, etc.
Precesseur, supérieur,\i&k2^.
Precieusetë, 3!'S20.
Prédicat, épithèle, 16770.
Preelictj Choisi entre tous, 7034.
GLOSSAIRE
étn
Preeminanca, 5110.
PrefTerenoe, yirééminence^ 2153, 33810.
Prellateur, combattant, 330.
Prem«raln, pfcmitr, 2744.
Premis, mis en avant, 2797.
Prénommé, suadit, 2742.
Prenolr : il ost hors du iiustre prenoir, de notre atteintt,
:«38i.
Prenonoiatenr, 26303.
Prenoncer, annoncer iVavance, 8213.
Prenostiquer, jifonostiquer, 53®.
Preparance, 13780.
Préparatoire, endroit ou Von préparr, 5029 ; <iu plur,,
préparatifs, 6762.
Preparement, 12957.
Prepotence, 407, ''le.
Prepotent, trés-puiisant, 330, etc.
PresQavoir, prfscience, 8592, etc.
Preschement, prédication, 19585.
Présenter (se) de, t'o/frir pour, 28012.
Président : parler en président, excellemment, 6776 ;
ai'rc autorité, 14014.
Prest ; je suis prest comme -ung chandelier, 13935.
Preu, en premier, 27726. Voy. Empren.
Preu, pro/it, 21706, etc.
Prieur, patron, maitre, 17774.
PriUeux, périlleux, 30078.
Primerain, 373. Voy. Premerain.
Prinoeaulté, principauté, 34107.
Princier, prince, 8995, etc.
Principié, ayant eu un commencement, 251.
Privé (on), en petit comité, 0470.
Pro ne contra, 144'è7.
Probacion, '2617, etc.
Proceat, procès, suite, 15549, 15902.
Procurer, se charger de, 2075.
Prodicion, trahison, 22165.
Proditeur, traitre, 18213.
Profilciat, 3807.
Progenie, race, 919, etc.
Prolieme. proloijue, 8450.
Prolonger, retarder, 27015.
Promission, 2036, etc.
Promotif, <iai excite, 13286.
Promouvoir, exciter, 26976.
Propheter, 3'ill6.
Prophetisse, 8C5'^.
Propice, atjréable, utile, 5491.
Proposer, mettre en avant, 8662; lendre, 18433.
Propre, capable, intelligent, 8671; adr., proprement,
15127.
Proterve, méchant, 19036.
Proveance, providence, 33062.
Proverbe, litre, 3153; parole remarquable, 7062.
Provision, action de pourvoir, 15293.
Troxlm», proche, 4867.
Prune, au fiO-t coup, 10532.
Psealme, Irùyll., 16268; pseaulme, trityll., 186i.
Publican, 10172,
Publique, puhlic, 14602.
Pugnivimus, 7390.
Puir, pui r, 7948.
Puissant de corps, arrivé A l'âge d'homme, 8863.
Pnllant, puant, 15185.
Pulmentaire, mets, 31805.
Puraiai 1972, etd
PwgaoloB, purifleatlon, (SMl.
Porporé, empourpré, 25430.
Put, sale, igno'ile, 433, rlc.
Pntaan, marais, gouffre, 13900, etc.
Pntlar, terme ilinjure, débauché, 10910.
Quand ; quand det rilsoni, quant auw raisons, At2S.
Quant, ailj., en quel nomOre, 4360.
Qnarre, 25746.
Que, comme, 2;t393.
Que sa ml daràfi'ta/i'-n^T 30015.
Quai, s'emploie dans des loc. conim« celle-ci: quel»
messeigneur» t à quoi ^strt de dire messeigneurs I
23072.
Quaralla (tenir la), <f(r« de tavis de, 33619.
Quid pro quo, 23289.
Quoy, 13197. Voy. Coy.
Quoyamant, tranquillement, 8614.
Rabat, diminution, 22593, etc.
Raby, maitre (en hébreu), 16980, 18198, 19078.
Radresse, direction, 3974.
Radresser (sa^, aller vers, 32974.
Raffoler, abimer, pousser à bout, 23061,
Rage : voua dictes rage, tous dites des cKoêe* extraor'
• linaires, 2,3306.
Ragiable. 21890.
Raidesse, raideur, 201 i7.
Rain, rameau, nu /ig., 7845, etc.
Ramentavolr, rappeler à la mémoire, 2813 ; ramentc-
\i)ir, 2407, etc. ; part. pass. rainentu, 23S97, etc.
Ramonner, ramasser, 177&i.
Randlr, errer, courir rapidement, 1300, ««c. ; aci., r«n-
<lir villes, chasteaux et for», 4334.
Randon (de grant), au plus vite, 12071, etc.
Rapostir, retourner, 33:t95, etc.
Rappalllardlr, rendre gueur, 20S50.
Rapporter, faire rapport, £4209.
Rasolu, résolu, 27226.
Rassis, pourru, 3467 ; déprimé, dinUniM, 30081.
Rassoter, radoter, 10820.
Ratizer, allirrr souvent, 28901.
Ratruandir, rendre mendiant, 20843.
Ravalluer, restituer, 2759, etc.
Ravel, Jeu, 22111.
Ravoir, 13805, etc.
Ravoyer, remettre en la roi», 10991,
Ravy, pâmé, 26028.
Real, réel, 2125.
Realement, réellement, 6132.
Rebeller a, se révolter contre, 6191.
Rabouter, remettre, 19164.
Recaler, ■•••cher, 28778.
Recallee la), en cachette, 13640, 17574.
Récépissé, 3767.
Récepteur, 3,i541.
Réceptif, i;ui' reçoit, 3188.
Receptoire, réception, 27003.
Recès, déinrt, 18420.
Recipe, 15154.
Recitateur, chroniqueur, 8549.
Reclain, jriére, 24023.
Reclinatore, lit de repos, 1S88, etc.
Receler, i epasser (dans l'esprit), 8318, etc.
Reoordar. rappeller, 12402, etc.
Raoort, mention, souvenir, 7056, etc. ; aebt 27899t
468
GLOSSAIRE
■Hecourir, reprendre^ 20006.
Recous, rcscous, Voy. Rescourre.
Recouvrance, li'419.
Recrandise, lAchelé, 30206.
Recréant, fatigué^ \ 0766.
Recreu. ronvnin'^u d'un crime^ 13604; fatigué^ 176S1.
Reculoire Ijouer de la), reculer, 24417.
Redarguer, hinmer, 16037.
Redolent, .idoratU, 29230, etc.
Redonder, ilèborder, 5083, etc.
Réduire, ntmener, 18S.il.
Refreclionner, 2S622.
Reffonder, restaurer, 3690.
Refforcer, forcer, 21891.
Reffraindre, empêcher, 9874.
Refrrener, empêcher, 5245.
Reffuir, se réfugier, 18724.
Refulcir, pourvoir, 876, etc.
Regalité, 9702, etc.
Regnart, ruse, 19732.
Règne, royaume, 0170 ; séjour, 1496.
Régner, vicrc, 4162.
Relainquir, relinquip, laisser, 613, etc.
Relessier, apaiser, 30380.
Remain, nrrêl, retard, 10909, etc.
Remaindre, rester, attendre, 9174.
Remanoir, rester, 15339.
Remède, fém., 7152, etc.
Remembrance, 10152, etc.
Remetre, réprimander, 2020G, etc.; part. pnss. rpmis,
repoussé, 4688; abattu, 30940; du remis, au fig., des
coup.', 33420.
Remetz, 1362.
Remirer, regarder, 12399, etc.
Remontrement, 15731.
Remordre, préoccuper péniblement, 7873; interdire,
13618.
Remouvoir, remu-r, 7394 ; empêcher, 18373.
Rencheoir, retomber, 12647.
Renchere, eni-hère, 9791, etc.; a renchere, fn grande
quantité, 24122.
Rencz (faire), se faire faire plaça, 24514.
Renfformer, remettre en bonne forme, 20215.
Renforce. 21SS9.
Rengrege, 'fugmentation, 30006.
Rengregement, aggravation, 7250.
Renluminer, rendre la rue ô, 14383.
Rente, ^^''/ejnent, 2533.
Renvers, renverse, 75il.
Renvi, propr. augmentation de la mise au jeu, au fig,,
reiloublemcnt i.he coups, 21228.
tt^nvoy, refuge, 4993.
fîeonde ; .t la reonde, à la ronde, 6211.
Replecion, 618.
Repasser, 13187. Voy. Respasser.
Repondre, caiher : part. puss. repost, 22440,
Reppairier, revenir, 2737.
ttepparaison, 2273.
Repparateur, 18980.
Repparement, 29S9, etc.
Repparence, réparation, 34310.
Reppas, dé/ai, 23497,
Reppere, lieu oi'< l'on riiiient, 491, etc.
fteppos, caché, 842.
Repprouche, fém., 27477.
Répugnance, contridictioU, 8686, <■(".
Rescourre, rattraper, 26350; j)ni'f. pass., rescoux, 4783;
délivré, recoax, rattrapé, 17520.
Rescousse, secours, 33388,
Resjouir ; sans quelque amo qui nous resjoye, 1967; i>ion
esperit se resjoye, 3626.
Respasser, soulager, 12397.
Respillier, repousser, 28820.
Respiter, donner un délai, épargner, 13831
Respons, réponse, 2065S.
Resservir, fournir, 28649.
Ressongner, craindre, 7632, etc.
Ressourdre, rel, ver, 9367, 33063.
Ressuscitation, 32604.
Rester, s'arrêter, 19257.
Restraindre, séparer, 5941, etc.
Resveillement, 28828.
Resverie, réjouissance, 16344,
Retarger, retarder, 11936, fie.
Retournée (faire), 862, etc.
Retrainte, dureté, 228)1.
Retraire, se diriger, 10S5; raconter, 3480.
Retrait, retret, endroit où l'on se relire, 287, 19119
Revanger, 11430.
Révéler de, révéler à, 10006.
Revenue : a ma bien revenue, 11156; revenu, 1346),
Reveramment, en révérance, 4945.
Revertir, retourner, 2639, etc.
Revocquier, rétracter, 23533.
Révolu, retourné, 29214.
Ribauldaille, troupe deribauds, 7329, etc.
Ribault, 7400.
Rie a rtc, juste, 23349, 30610.
Rideler, découler, 22988.
Rien, chose, 21342,
Riffler, frapper, 7399; tuer, 7870.
Rlgle, règle, 3414.
Rigoler, se moquer de, 21563.
Rimer, ramer, 2S740, etc.
R nceau, raineau, 16152, etc.
Rober, voler, 20747, etc.
Robin, le mouton, 4782.
Roc, tour au jeu d'échecs : il n'y venist roc ne roy, il
n'y vint per.'i0Hne,Si66.
Roideur (de), tout droit, 29958.
Roisin, raisin : vous serez roisin de Viineu, vendangé
serez a l'eselielle, 22632.
Roix, filet, 10874, etc.
Rompre : part. pass. rout, 4577.
Rouge, rasé, 3779, etc.
Rougement, liabilement,ViTi9.
Route (en), sur le champ, 25014.
Roy, ordre, 8865.
Roj aime, rim. en ame, 2803, 7910.
Rudesse, mal, 7690.
Ruer, ,;c(!!r, 5062.
Saba, 0069, 8799.
Sabbatizër, célébrer, 26477.
Sachet, sac, 8080.
Sacre, prodige; chose sainte, 5218.
BaiUant, hauteur, 17763.
BaiUir, .':nrlir, 440.
Baintisme, très-saint, 5924, etc.
Saisine, 249S,
Saisir, garnir, 15531.
Balvacion, 1069, etc.; réfutation, 2560.
GLOSSAIRE
IG9
Samblance, 13218, et,-.
Sanctlsme, :il74.
Saner, fjiti'fir^ 1590, etc.
Sanglant, èitithéte injurieuse : finnglant bodcau, l(M(l'i ;
s. iloalil.i, «9 ; s. gibet, 15534, Wc. ; s. hapart, 221Ï2 :
8. [lis, ia32, etc.; sanglante aepma'me, 10X42.
Saoulée, 14U85, ef.
Sapience. 205S, cir.
Saquement, lestement, 7982.
Sarrazinois, 4725.
Satalite. s.itrllite, 19130 ; satelito, 2()()',11.
Satisfner, satisfaire, 23843.
Saturne, 740S.
Sanice : si Iny ffrnv bien vostre saulce,.;> ne enus m''n<'~
gérai pas auprès de lui, 7825.
Saulve, sauf, 1721S.
SauteUer, sautiller, 5657.
Sauvement, 4000.
Sauver, réfuter. 2437, 2740, etc.
Savoie (oufs de), 24732.
Savourable, 577.
Savourer, a-coir du {joût, 16556.
Scabelle, escabeau, 15321 .
ScELioN (?), 7503.
Scourre, secouer, 11S44.
Sec, comptant (en parlant d'argent), 17456, 17559.
Secret, se-ri^tement, 13339.
Segongne, cigorine, 23.360.
Sehur, snreau, 21060, 21964.
Seignier. snigner : il n'en est pas bon a aeignier, 15190.
Seignoreux, puissant, 25139.
Seing, si, me, 190'^8.
Seminateur, 12740.
Seminer, semer, 12742.
Sens : faire sens, apir sagement, 29455.
Sensible, en possession de ses facuUés,19't'H ; intelligent,
23^09.
Sensuel, des sens, 1S733.
Sentement, odeur, 79'.7 ; sentimeni, 12746.
Sentenoier, 213S9, rlc.
Sentir : part. pass. sentu, 1420, etc.
Sepmaine. l'oy. Sanglant.
Sercher, chercher, 8271, etc.
Sercus, cercueil, 12212, etc.
Seri, doux, 4657, etc.
Serpente, serpent, 10821, etc.
Serre, force, 8025 ; prison, 401 ; serre tenir, f acharner, 40.
Serrement, fortement, 21936, etc.
Serrer, enfermer, 278'3.
Serventois, au fig., 4737, 30810.
Servir d'une chose, servir une chose, 14325.
Seuiet, 185r.2, etc.
Seur, rim. en en, 537.
Seure, dessus, 2738S.
Seurmanoir, dépasser, 19S65.
SiCHAR. SIchem, 11555.
SiooNMC, flidon, 12265.
Sidonne. loile tn^s-fine, 2a827.
Signer, marquer, 1419, etc.
Signiflance, 5220, etc.
Signifiment, 33854.
SUance. /'«'»i.,227.
Silete, terme de musique, 647, 2875, 383Ï, 3864,4914,
,-tc. : silence, 17339.
Simplement, peu habilement, 9325.
Simplesse, abattement, tristesse, 1108.
Simplet, t095e.
Simploier, a'altritler, 1S1T7.
Slnaolc, signe, 22303.
Soçon, compagn'in, 11624.
Sol, sotil, 22413.
Salas, Boulas, ennsolnllon, 6856, tie. ; ■ «oula*, à eirw
joie, 31759.
Saler, soulier, 10245.
SoUctter, surteillir, 24525.
SoUe, sorte de Jeu, 22114.
SoUoir, sonloir, avoir eoutuma de, 6100, etc.
Sommer, faire ta lomme d'un compte, 'Mi', ritumer,
2047S.
Sommterement. snmm'iirement,ii80n.
Singeart, rérasseur,iiXî9.
Songer, 4328: on ne la pnurroil mieuU Mager, o» »•■ ('■
.i.ittr<n'l tii(<!i«,i; imaginer, 3 1:174. Vo.v. lloro».
Songner, s'occuper, 4321 ; aongner du bee, pemrr <V M
mnngeaille, 7525.
Borcerie. sorcellerie, 19553.
Sornette, 54.S7, 19ï$2.
Sorte, compagnie, 10934, etc.
Sortir, obtenir par le sort, 834, tte..; partenir par sa
destinée, 18311 ; tirer au sort, 19S09.
Soubtir, subtil, 9928.
Soubtll : ou pr.mver giat le loubtil.to dif/leulli "t dant
In prcure, 8.871.
Soubzmareher, fouler aux pieds, "TS?.
Soucier, jifèoccupcr, 1611 ; allrisler, 30965.
Soudain ; si soudain, 14W.
Soudas, .■:oldals, 22073.
Sonder, payer, 19633. Voy. Souldor.
Sonef, suave, 1531.
Soufflsance, 2528.
Soufflace. soufflet, 19603.
Souffler : souffler la plume, boire, 6362; souffler U chan-
delle, donner un camouflet, 11231.
Soufft-ete, disette, manque, 16405, 16rv80.
Souhaldler, souhaiter : tant qu'a «onhaidier, tant qu'on
peu' imaginer. 29200; «i trea joieulx qu'a «oubaidi»
aussi Joi/eu.v qu'on saurait le touhailer, SilO .
Sonldee. paiement, 7986, etc.
Soulder, payer, 20841.
Souldre, résoudre, 9616.
Soulier, Jouer A la solle, 22116.
Souillon, valet d'armée, 18567.
Souppe. tranche de pain, 11276.
Souppeçon. fém., soupçon, 5699.
Sources (a grans), en grande quantité, 8135.
Sourdre, se lever. 439 ; faire lever, 5577.
Sourvenir. tromper, circonvenir, 307*6. Voy. Sarvsa'J*
Souvenir : il ne luy en aouvient, il n'y tonge guère,
30050.
Subit (en), iue>i(<-m(>nt, 14590.
Subjit, s„Jet, 10736.
Snbjugnier, 26273.
Sublimé, 3193.
Submetre. subordonner, 7158.
Subroguer, 21483.
Subscide. secours, 592. ,
Substance, tu'isistance, 2S5il.
Substraire, sou.,>lraire, 9703.
Subvertir, 15639, «le.
Sulr, sui'iir, 17670, etc.
Suire, beau-pire, 19335.
SolTir, suivre, 10339, «le.
470
GI.OSSAIRE
Suivre a, jiremire garde n, 12351.
Sulphurieax, 1700.
Supernel, 204, et'',
Superscription, 17264.
Suppediter, supplanter, 7901.
Supperlatif, suprême, 2070.
Supplanter, 2164.
Supplir l?), suppléer : raison supplest au résidu, 2521.
Suppost, sujet, 967, etc.; compagnon, 11241.
Sur, che-, 13783, etc. Voy. Sus.
Surauré, iiorè par dessus, 14052.
Surpiez, »np piez, sur Je champ, 668, etc.
Surprendre, enlever par surprise, 14620.
Surrexi, ressusc-itè, 29738, etc.
Survaincre, 18739.
Survenir, souvenir, 2/301.
Eus, cliez, 21 046; sus et jus, dit haut en bas, 28015.
Euscitacion, 32440.
Suscitement, 31664.
Susciter, ressusciter, 32350.
Suspens, suspendu, 66, etc. ; privé de, 426.
Suspicieux, suspect, 21505.
Suyr. 5473. Voy. Sulr.
Sy : par tel sy, en telle manière, 23126.
Tabour, tambourin, 4729.
Tacon, pièce de cuir, 4717.
Taille : venir a taille, venir à bout, 15178; clieoir a taille,
«i. s., 17333.
TaiUier : vous estes tailliés, vous avez la chance. 19448 ;
il est taillié, il est en passe, 23370.
Taint, livide, 1154, etc.
Tant que, tout ce que, 14950.
Tantet, tantinet, 4349, etc.
Tarabara : a tous propos, tarabara, 27987.
Tarder, arrêter, contenir, 16788.
Tardif, ai'artce, 9929.
Tardivet, 17584.
Targer, tarder, 5158, etc. ; s'arrêter, 5830.
Tas : beau tas, beaucoup, 26255.
Tatin, coup, 4348, et".
Taulir, 14152. Voy. Tolir.
Tanxer, taxer, 2615, etc.
Te Penm, 34574.
Tel : par tel, en telle façon, 11724.
Tempester, agiter violemment, 21719.
Tempore, temps, 7055, etc.
Temprement, promptement, 13440, etc.
Ténèbre, 25969, 32807.
Tenebrosité, 473.
Tenement, domaine, 5^0, etc.
Teneur, terme de musique, 3836.
Termine, terme, 3998, etc.
Terquoy, poix, 4712.
Terribilité, 21798.
Terrien, habitant du territoire, 14927; de terre, 10942.
etc.
Terronoir, territoire, 6321.
TzRVAG&NT, dieu païen, 21541, 23664.
Thabsc, 6069, 6835, 8798.
Theume, thème, 27455.
Timbre, (en plaisant.) tête, 27966.
Tira via (italien), va-t-en, 22013.
Tirant, bourreau, 7752 ; tyran, 8010.
Tiaz, Tyr, 12265.
Tire : estes vous tous de ceste tire? vous rangez-vous.
tous à cet avis? 27948; il en y a trop longue tire, c'est
trop long, 4342; de tire, tout droit, 5679, etc.
Tirer ; Belot t ire ta chaulse (sobriquet d'une cham hrièrc -,
7S26.
Toise, étendue, 31857.
Tolir, enlever, 3704 , etc. ; cela ne nous toit ne donne.
cela nous est indifférent, 27900; part. pass. toUu,
11939, etc.
Tomber, aci., 16933.
Toucher : r'est une chose qui trop touche , est trop
grave, 31S55.
Torche : il reçoit la torche, il est frotté, 3787,
Torcher, fcdHre, 3788, f('-.
Torchon, coup, 7312.
Torchonner, battre, 3782, etc.
Tortue (ro/i.sidérèe comme un reptile renimeure}, 737,'^,
10825.
ToualUe, serviette, 23591.
Tour d'escoUe,ritsc, 20403.
Tourbe, Iroupe, 3831, etc.
Tournelle. Voy. AffuUer.
Tousdis, toujours, 19497.
Toussir, tousser, 22015.
Tout : par tout la ville, 9319 ; par tous les joinetures,
18054.
Tracer, suivreàla trace, chercher ,liS^. Voy. Trasser.
Tracture, action de tirer, 30878.
Traditeur, 15456, etc.
Trahltre, traître, 19270.
Traict, direction, 5472.
Trainee, manière de prendre les oiseaux : au, fiu ,
l'omme est frappé a la trainee, 920 ; série, 22146.
Transflxeure, phiie causée par un instrument perçant.
31381.
Transgrès, transgression, 17.
Transmuable, changeant, 32739.
Transsir, passer, 1707.
Trasser, chercher, 28786, etc.
Traveil, fatigue, souffrance, 13, etc.
TraveiUier, fatiguer, 4412.
Travers ; c travers, 3801.
Tref, màt, 31757.
Tresbucherle, 19101, etc.
Tresorlere, 4939.
Trespas, infraction, 2681, etc.
Trespercer, transpercer, 7316.
Tresque, danse, 1928<.
Tressuer, suer beaucoup, 16767,
Tretous, tous, 6819, etc.
Trin, triple, 256, 1041)7.
TripaiUe, 26400.
Triple, terme de 'inusique, 17440.
Trompe, tromperie, 17190, etc.
Trot (le grant), au plus vite, 15527.
Troteler, trotter, 21079.
Trotiner, 24324.
TronlAe. terme de musique, un trouble continué, 3840.
Voy. Triple,
Trousser, c»i«i-er, 12041, e/c; marcher, 1925S.
Trouver : gens trouvés, gens qui font précisément l'af-
faire, 27350.
Tmage, tribut, 1465.
Truander, mendier, 19559.
Trawat, mendiant ; c'est ung ver tout truant, c'est un
proverbe qui court les rues, 25008.
Truffe, tromperie, 14310, etc.
OLOSSAl RK
m
Trnffep, tromper : truffer 1« dent, Sf palier if mnngrr,
077'..
Tube. V'>y, Coulon.
Tumer, (o«iô*»r, 7488.
TurbacloB, 3'i57f etc.
Turte, tnicrtei-rll'\ 6fl27.
Umblesae, :!028, etc.
Umbrage, (■ l'ombre, 30634.
Un ; uns chnns, des chants, 4AÔ7.
Une ; ils en ont pour une, <issei pnur une foitt, 105S7; n
\ines, à «05 ff'ii)!. 1678(>,
Ungture. tfiOOO.
Usurpeur, 21460.
Utenoille, 17712.
Vaast. interj. de mépris, 2M46.
Vacant, errant, 1177.
Vagant, allant 'le droite et de gaurlte, 21542.
Vaine, prière : (j'on., c'est pour tes vaines, 17773.
Value, valeur, 3332.
Vantise, prétention vaine, 2G593, etr.
Varlance, 4042.
Varier, dire au contraire, 21855; te détouriur, 27461 ;
hésiter, 29557, 29876.
Vaulte, voûte, 19626.
Veil, volonté, S74, etc.
VendioioB, 9785.
Vendre : la les vent on, il n'en manque pas, 20962.
Vengement, 25S0.
Vent, bruit, querelle, 19816; vent ne soye, aucune trace.
9i54.
Vente, Voy. Fenr.
Venu», 6392, 7483, 7496, 21327, 22198, 23440.
Ver, ver.i, proverbe, 5469, 25008, etc.
Vermeillet, 9399.
Vers (yeuxt, yeux bleU'Vert, 9400.
Versatille, ci deux tranchants, 899.
Vertir, tourner, 8908, etr.
Vertu, miracle, 18545.
Vertuable, 500, etc.
Vesperier, ou fig., bafouer, 20189.
Viaire. visage, 807, etc.
TlaBd», aUmmt; 11157, llflBS.
VlatauF, 2450, itc.
Viault<, condition vil», £470.
Villain du pays plat, campagnard, tt.770.
ViUenable, /i'»i(<-ii r, .32311.
Vlllener, honnir, 21707, etc.
Vlllonner, outrager, S7506.
Tin ; ung eoortots vin, au Itg., un lion pot-4f-vin, 30450;
m. .«.,-30471, etc.
Vlnage, impôt sur le vtn .* au flg., 7413.
Tirade, tour, 28826.
Vlreton, trait iCarbalite, 18565.
Vlrtuaulté. rertu, ordre d'anges, 308.
Visage (tenir), faire face, 30S17.
Vitupère, action honttui; 2320 ; hIAme, 10103, He.
Vitupérer, blâmer, 24050. '
Vivra (sa), 20723.
Via, visage, 9187, etc.
Vo, rostre, 226, etc.
Voir, vrai, 6286, etr.
Voirement, vraiment, 8£3{; roirment, 14tM.
Voirre, verre, 938.
Voiler: Hz 8<:arontbien du bas voiler, ils sauront de boni
tours (métaph. empruntée i\ la fauconnerie), t5077.
Tuell. Voy. Vetl.
VuLCAHUs, 2îr<3.
Vuyder, vider la place, 10466.
Walleqaln,]i<^c« (Titoffe destinée au foulage: au /Ig., 1*1
walW'quins furent foulés bien laidement, tS038.
Y fau lieu de lui;, 30915.
VcAsiis, 7501 .
Tdee, image, type, 270.
Tdone, apte, 303, etc.
Via. là, 1.573, etc.
Vpocras, 25950.
TsAManiM, le loup, 4773.
Taia, 7500.
TaaaI. Voy. Isnel.
Tsslr. Voy.
SBPBimos, 7502
! VON. — IMPRIMBRIB f ITRAT Alt»*, «P» 0«NTII.. 4.
ERRATA
232 Su2>primez les parenthèses. 11818
774 /-« rers a une syllabe rie trop, H311
1387, 1510 povoir, lisez pouoir. 11415
2853 Lise: littoral. 11757
302iS Lisez quoi que. 11758
3141 Place: à la fin du vers un ;. 11875
32U Supprimez la virgule après cil. 11876
3215 Suppritnez la virgule après lien. 11906
3',S2 ce, lisez se. 122»
W23 d'envyp, lisez demye. , 12396
5138 qui, lisez que. 12543
4322 Lise: qu'il. W.V,
1C()3 Adopte: la leçon du ms. A, duysant au lieu de I't5i6
poissant. 14896
4940 Supprimez la virgule après reffaite. 15731
4058 Supprimez la virgule après demonstree. 20223
5571 Lise: doulceur. 21766
^612 Supprimez ta virgule après alité. 22827
5ol3 Placez une virgule après humilité. 13350
COiO Lisez enquerez. Î5352
0206 Placez un ; après pays. 25387
0786 Lisez vostre. 25476i
0861 Supprimez la virgule après las. 85942
"104 Placez une virgule après feste. 26813
7207 trop, lises cop. 27271
(428 Supprime: la virgule après sire. 28147
7889 11 faudrait un blanc après ce vers. 28200
7920 Lisez n'en aye. 28273
8S31 Lisez lavai. 30290
8856 Lise: qu'ilz. 30695
1)620 Lise: ongnemenl. 34279
9027 Lise: longuement.
Lises Teil.
Lisez veej ci si.
Lise: couches.
Placez un ; après fait.
Supprimez le ; après parfait.
Supprimez ta virgule après qui.
Supprimez la virgule après p«rseTerera.
Placez une virgule après dame.
Lisez paatés.
Supprimez les virgules après hny et tir».
me, lisez ne.
Placez un 1 à la fin du vers.
Remplacez le î par un ;.
Remplacez In virgule pjr un ;.
Lisez renrontrement.
Lise; no sire.
Lise: a tout.
Remplacez te ! par u»l
Lisez il en est pir.
Lisez demeurant.
Lisez engendré.
Lisez l'amoderei.
Lisez l'amodere.
Lisej ce sera.
Lisez je m'entremis.
Lisez qu'il.
Ajoutez que au commeneemtnt du teri.
vous, lises nous.
Lises vostre.
Remplaces le 1 par un point.
Lises intercè*.
0
PQ
1357
P2G8
1878
Greban, Amoul
Le mystère de la passion
d'Amotdd Greban
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