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Full text of "Leçons sur la physiologie et l'anatomie comparée de l'homme et des animaux / faites à la Faculté des Sciences de Paris par H. Milne Edwards"

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LEÇONS 


SUR 


LA   PHYSIOLOGIE 

ET 

L'ANATOMIE  COMPARÉE 

DE   L'HOMME  ET  DES  ANIMAUX. 

TOME    TROISIÈME. 


&3. 


Paris.  -     Imprimerie  de  L.  Maktinet,  rue  Mignon.  -2. 


LEÇONS 


sua 


LA  PHYSIOLOGIE 


L'ANATOMIE  COMPAREE 

DE  L'HOMME  ET  DES  ANIMAUX 

FAITES  A  LA  FACULTÉ  DES  SCIENCES  DE  PARIS 

1>AU 

H.   1BIJLNE  ËBWARD§ 

0.  L.   H.,   C.  L.   N. 

Doyen  de  la  Faculté  des  sciences  de  Paris,  Professeur  au  Muséum  d'Histoire  naturelle  ; 

Membre  de  l'Institut  (Académie  des  sciences)  ; 

des  Sociétés  royales  de  Londres  et  d'Edimbourg  ;  des  Académies 

du  Stockbolm,  de  Saint-Pétersbourg,  de  Berlin,  de  Konigsberg,  de  Copenhague,  de  Bruxelles, 

de  Vienne,  de  Turin  et  de  Naples  ;  de  la  Société  Hollandaise  des  sciences  ; 

de  l'Académie  Américaine  ; 

De  la  Société  des  Naturalistes  de  Moscou  ; 

des  Sociétés  Linnéenne  et  Zoologique  de  Londres;  de  l'Académie 

des  Sciences  naturelles  de  Philadelphie  ;  du  Lycéum  de  New-York  ;  des  Sociétés  d'Histoire  naturelle 

de  Munich,  Somerset,  Montréal,  l'île  Maurice;  des  Sociétés  Entomologiques 

de  France  et  de  Londres;  des  Sociétés  Ethnologiques  d'Angleterre 

et  d'Amérique ,  de  l'Institut  historique  du  Brésil  ; 

De  l'Académie  impériale  de  Médecine  de  Paris; 

des  Sociétés  médicales  d'Edimbourg,  de  Suède  et  de  Bruges;  de  la  Société  des  Pharmaciens 

de  l'Allemagne  septentrionale; 

Des  Sociétés  d'Agriculture  de  Paris,  de  New -York,  d'Albany,  etc. 


TOME    TROISIÈME 


PARIS 


LIBRAIRIE    DE  VICTOR   MASSON 

PLACE    DE   L'ÉCOLE-DE-MÉDECINE 

M  DCCC  LVIII 

Droit  de  traduction  réservé. 


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Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

Open  Knowledge  Commons 


http://www.archive.org/details/leonssurlaphys03miln 


LEÇONS 


SLR 


LA   PHYSIOLOGIE 

ET 

L'ANÂTOMIE  COMPARÉE 

DE  L'HOMME  ET  DES  ANIMAUX. 


VINGTIÈME  LEÇON. 

DE  LA  CIRCULATION  DU   SANG. 

Histoire    de    la    découverte    de    ce    phénomène. 

§  1.  —  La  découverte  de  la  circulation  du  sang  date  du 
xvii-  siècle,  et  la  gloire  en  appartient  à  Guillaume  Harvey. 

Mais,  de  même  que  toutes  les  autres  conquêtes  les  plus  bril- 
lantes de  la  science ,  cette  découverte  fut  préparée  peu  à  peu 
par  les  efforts  d'un  grand  nombre  d'observateurs  ,  et  l'homme 
de  génie  qui  y  attacha  son  nom  n'avait,  pour  accomplir  son 
œuvre ,  qu'à  ajouter  un  petit  nombre  de  faits  à  ceux  constatés 
par  ses  devanciers ,  à  en  saisir  l'enchaînement  et  à  en  déduire 
les  conséquences. 

Et  que  l'on  ne  pense  pas  qu'en  caractérisant  de  la  sorte  les 
services  rendus  à  la  physiologie  par  l'illustre  Harvey,  je  veuille 
en  affaiblir  le  mérite;  loin  de  là.  Je  veux  faire  ressortir 
ce  qui,  à  mes  yeux,  élève  Harvey  bien  au-dessus  de  ses 
prédécesseurs  et  de  ses  contemporains.  L'esprit  inventif  dont 

1 


Etat 

de  la  science 

avant 

Harvey. 


2  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

la  Nature  l'avait  doué  ne  manquait  pas  à  plusieurs  de  ceux  qui, 
avant  lui ,  s'étaient  engagés  dans  la  même  voie  ;  mais  ce  qu'il 
avait  à  un  plus  haut  degré  et  ce  qui  lui  a  permis  d'arriver  au 
but  dont  ses  devanciers  avaient  pu  tout  au  plus  soupçonner 
vaguement  l'existence ,  c'est  cette  compréhension  lucide ,  ce 
jugement  prompt  et  sûr,  ce  bon  sens  exquis,  qui  le  guidaient 
toujours  dans  l'appréciation  des  faits,  dans  la  déduction  des  con- 
séquences à  en  tirer  et  dans  le  choix  des  preuves  qu'il  invoquait 
pour  étayer  ses  doctrines.  Harvey  était  une  de  ces  intelligences 
d'élite  qui ,  au  premier  coup  d'œil ,  démêlent  le  vrai  du  faux  , 
qui  s'élèvent  à  des  hauteurs  assez  grandes  pour  pouvoir  em- 
brasser l'ensemble  des  choses  connexes,  mais  qui  n'aiment  à 
marcher  que  sur  un  terrain  solide,  qui  raisonnent  toujours  juste 
et  qui  savent  exprimer  clairement  les  idées  qu'ils  ont  conçues. 
Aussi  exerça-t-il  une  grande  et  heureuse  influence  sur  les 
études  physiologiques.  La  découverte  de  la  circulation  du  sang 
n'est  pas  son  seul  titre  de  gloire,  et  son  nom  reviendra  sou- 
vent dans  le  cours  de  ces  Leçons.  Mais ,  je  le  répète ,  cette 
importante  découverte  était  un  fruit  arrivé  presque  à  maturité 
lorsqu'il  lui  fut  donné  de  le  cueillir,  et,  par  conséquent,  avant 
de  rendre  compte  de  son  œuvre,  il  me  faudra  exposer  ici  l'en- 
chaînement des  faits  dont  la  science  avait  été  enrichie  suc- 
cessivement par  les  observateurs  qui  lui  avaient  préparé  les 
voies. 

S  2.  —  Les  médecins  de  l'antiquité  la  plus  reculée  avaient  re- 

Connaissances  «7  1  i 

acquises     connil  que  chez  l'Homme,  ainsi  que  chez  les  Animaux,  dont  ils 

par  les  anciens  1  7  ^  ' 

deT^cSe  étudièrent  parfois  la  structure  pour  s'éclairer  sur  la  constitution 
du  corps  humain,  le  sang  se  trouve  contenu  dans  un  vaste  sys- 
tème de  tubes  membraneux,  et  que  ces  tubes  sont  en  connexion 
avec  le  cœur,  organe  charnu  dont  les  battements  se  succèdent 
à  de  courts  intervalles.  Des  récits  qui  datent  des  temps  héroïques 

Ascié  iadcs  de  ^a  Grèce  nous  montrent  les  premiers  Asclépiades  comme 
ayant  recours  à  l'incision  des  vaisseaux  sanguins  dans  le  traite- 


OBSERVATIONS    PRELIMINAIRES. 


ment  de  quelques  maladies  (1),  et  Hippocrate  ,  qui  vivait  il  y  a 
deux  mille  trois  cents  ans  ,  n'ignorait  pas  la  direction  que  plu- 
sieurs de  ces  conduits  suivent  dans  l'intérieur  de  notre  corps. 
Il  savait  aussi  que  dans  le  voisinage  des  veines  se  trouvent 
d'autres  tubes  auxquels  on  a  donné  depuis  lors  le  nom  d'ar- 
tères, et  il  enseignait  que  le  cœur  est  un  organe  de  nature 
charnue ,  creusé  de  cavités  ;  mais  le  respect  religieux  que 
les  Grecs  avaient  voué  aux  morts  ne  permettait  ni  à  Hippo- 
crate ni  à  ses  disciples  de  se  livrer  à  des  recherches  anato- 
miques  sur  la  structure  du  corps  humain,  et  les  notions 
vagues  que  l'on  possédait  à  ce  sujet  n'étaient  puisées  que 
dans  l'inspection  rapide  et  superficielle  des  viscères  de  quel- 
ques Animaux  immolés  devant  les  autels,  ou  dans  l'étude 
des  formes  extérieures  de  l'Homme.  La  dissection,  ou  l'art 
d'isoler  par  le  couteau    les    diverses    parties    constitutives 


(1)  Homère,  dont  les  poè'mes  con- 
stituent une  espèce  d'encyclopédie  de 
la  science  que  possédaient  les  Grecs 
vers  le  ix'siècle  avant  Jésus-Christ,  ne 
parle  pas  de  la  saignée  ;  mais,  s'il  faut 
en  croire  un  auteur  du  Ve  siècle,  Etienne 
de  Byzance  (a),  cette  opération  aurait 
été  connue  des  médecins  de  l'armée 
d'Agameranon.  En  effet,  il  rapporte  que 
l'un  d'eux,  Podalire,  (ils  d'Esculape 
et  frère  de  IMacbaon,  au  retour  du 
siège  de  Troie,  l'aurait  pratiquée  sur 
une  malade  dont  la  guérison  lui  valut 
la  souveraineté  de,  la  Chersonèse.  Ce 
serait  la  première  saignée  dont  on 
aurait  conservé  le  souvenir,  et,  d'après 
une  fable  rapportée  par  Pline,  je  suis 
porté  à  croire  que  celte  pratique  avait 
pris  naissance  dans  la  haute  Egypte  : 
<>n  effet,  ce  naturaliste  nous  dit  que  les 


Hippopotames,  quand  ils  sont  devenus 
trop  obèses,  ont  l'habitude  de  se  per- 
cer la  veine  de  la  cuisse  en  s'appuyant 
conire  un  roseau  aigu,  et  que  ces 
Animaux  ont  enseigné  ainsi  aux  mé- 
decins à  praiiquer  des  opérations  ana- 
logues (6).  Or,  ce  récit  ne  s'applique 
pas  au  Cheval  marin  (ou  Syngnathe), 
comme  le  suppose  l'auteur  d'un  ou- 
vrage estimable  sur  l'histoire  de  la 
médecine  (c),  mais  au  grand  Pachy- 
derme qui  habite  les  rivières  de  l'in- 
térieur de  l'Afrique  et  qui  se  trouve 
dans  la  hante  Egypte.  C'est  évidem- 
ment une  fable;  mais  cette  fable  n'a 
pu  nous  arriver  que  de  l'Egypte. 

Du  temps  d'Hippocrate,  la  saignée 
se  pratiquait  sur  plusieurs  veines  dif- 
férentes dont  la  posilion  était  bien 
connue. 


(a)  Stepliani  Byzanlini  De  urbibus.  Trad.  lat.  par  Berkelius,  p.  686,  art.  Syrna. 

(6)  Plinii  Historiarum  mundi  liber  VIII,  chap.  XL,  26. 

(c)  Daniel  Leclerc,  Histoire  de  la  médecine,  in-4,  1702,  t.  I,  p.  50. 


Aristole. 


k  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

de  l'organisme ,  n'existait  pas  encore,  et  les  observateurs  ne 
pouvaient  acquérir  que  des  idées  incomplètes  et  confuses  tou- 
chant la  conformation  et  les  usages  des  organes  intérieurs  dont 
ils  devinaient  l'existence  (1).  Aussi  Aristote  lui-même,  dont  les 
connaissances  anatomiques  étaient  bien  supérieures  à  celles 
d'Hippocrate ,   n'a-t-il  pu  jeter  que  peu  de  lumières  sur  les 


(1)  Les  moyens  d'étude  dont  dispo- 
saient les  Asclépiades  ont  été  très  mal 
appréciés  par  quelques  écrivains  mo- 
dernes, et  il  est  surprenant  qu'Hip- 
pocrate,  tout  en  commettant  beaucoup 
d'erreurs  anatomiques,  ait  pu  acquérir 
les  connaissances  qu'il  possédait  tou- 
chant la  structure  intérieure  du  corps 
de  l'Homme.  Cette  question  a  été  très 
bien  traitée  par  Lauth  («).  Je  dois  faire 
remarquer  cependant  que  Galien  a 
beaucoup  vanté  les  connaissances  ana- 
tomiques d'Hippocrate,  et  ajoute  que 
dans  les  anciennes  familles  médicales 
on  exerçait  les  enfants  à  l'étude  de 
l'anatomie  non-seulement  par  la  lec- 
ture et  l'écriture,  mais  encore  par  les 
dissections  qu'on  leur  faisait  faire  (b)  ; 
mais  ce  passage  me  semble  être, 
comme  l'éloge  des  Germains  par  Ta- 
cite, une  critique  des  contemporains 
de  Galien  plutôt  qu'un  tableau  de  ce 
qui  existait  réellement  à  l'époque  dont 
il  parle. 

Dans  beaucoup  d'ouvrages  on  attri- 
bue à  Hippocrate  la  connaissance  de 
divers  faits  anatomiques  importants 
qui  furent  introduits  dans  la  science 
par  Aristote,  et  cette  confusion  résulte 
de  ce  que  plusieurs  des  écrits  géné- 
ralement attribués  au  père  de  la  mé- 
decine  ne  lui  appartiennent  pas  en 


réalité,  et  sont  postérieurs  même  aux 
livres  de  ce  dernier  naturaliste.  Tels 
sont  le  Traité  sur  le  cœur  et  le  Traité 
des  chairs,  ainsi  que  divers  fragments 
du  Traité  des  os,  et  ce  que  l'on  y  dit 
du  système  sanguin  est  certainement 
basé  sur  lesobservationsd'Aristote.  Ce 
point  a  été  très  bien  établi  par  les  re- 
cherches d'un  des  médecins  les  plus 
érudits  de  l'époque  actuelle,  M.  Liltré, 
dont  les  travaux  sur  Hippocrate  por- 
tent le  cachet  d'une  saine  et  savante 
critique  (c). 

Le  mot  ceXe^,  qui  correspond  à  celui 
de  veina  (ou  vene)  dans  les  langues 
latines,  était  d'abord  employé  dans 
une  acception  plus  large  qu'il  ne  Test 
de  nos  jours.  On  l'appliquait  non-seu- 
lement aux  vaisseaux  sanguins  en  gé- 
néral, mais  aussi  à  d'autres  conduits 
qui  appartiennent  au  système  glandu- 
laire, et  apr/ipia  signifiait  générale- 
ment, pour  Hippocrate  et  ses  disciples, 
d'une  part  le  tube  aérifère  qui  va  de 
l'arrière-bouche  aux  poumons,  et  qui 
est  connu  encore  aujourd'hui  sous  le 
nom  de  trachée-artère  ;  d'autre  part, 
les  artères  proprement  dites  qui  par- 
tent du  cœur  et  qui  longent  les  veines. 
Les  Asclépiades  croyaient  que  tous  ces 
canaux  formaient  un  seul  système  de 
tubes  aérifères,  et  ils  n'avaient  sur  le 


(a)  Laulh,  Histoire  de  l'anatomie,  t.  I,  p.  38  et  suiv. 

(b)  Galien,  De  anatomicis  administrationibus,  liv.  II,  cliap.  i. 

(c)  Liltré,  Œuvret  d'Hippocrate,  introduction,  1839,  1. 1,  p.  382,  384,  etc. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  D 

questions  physiologiques  dont  l'examen  nous  occupe  en  ce 
moment.  On  lui  doit  cependant  la  connaissance  de  quelques 
faits  importants.  Ainsi  il  fut  le  premier  à  constater  que  les 
veines  communiquent  avec  le  cœur,  ou  en  naissent,  pour  me 
servir  d'une  expression  qui,  tout  en  étant  moins  juste,  rend 
mieux  sa  pensée;  que  des  vaisseaux  s'étendent  aussi  du  cœur 
aux  poumons ,  et  que  les  cavités  du  cœur,  de  même  que  les 
veines,  sont  remplies  de  sang  (1). 


mode  de  distribution  des  veines  que 
des  notions  extrêmement  vagues,  sou- 
vent même  très  fausses. 

Ainsi,  Polybe,  gendre  d'Hippocrate 
et  auteur  d'un  écrit  intercalé  dans  le 
Traité  de  la  nature  de  l'Homme,  ou- 
vrage dont  la  première  portion  seule- 
ment appartient  à  Uippocrate,  parle 
des  veines  comme  venant  de  la  têle, 
pour  descendre  le  long  du  dos  et  se 
porter  jusqu'aux  pieds,  ou  bien  encore 
pour  se  distribuer,  les  unes  aux  vis- 
cères de  la  poitrine  et  de  l'abdomen, 
les  autres  aux  bras  et  aux  mains  (a). 
Ce  passage  a  été  placé  aussi  dans  la 
compilation  connue  sous  le  nom  de 
Traité  de  la  nature  des  os,  par  Hip- 
pocrate. 

On  voit  également,  par  la  description 
des  veines  placée  dans  le  deuxième 
livre  des  Épidémies,  qu'Hippocrale 
lui-même  n'avait  que  des  notions  très 
vagues  touchant  la  disposition  de  ces 
vaisseaux  (6). 

La  distinction  entre  les  veines  et  les 
artères,  que  l'on  attribue  générale- 
ment à  Praxagore   (c),   paraît  avoir 


été  faite  avant  le  temps  d'Hippocrate, 
par  Diogène  d'Apollonie  et  par  Eury- 
phon  (rf). 

(1)  Aristote,  en  abordant  l'histoire 
des  veines,  a  fait  connaître  les  opi- 
nions de  ses  devanciers  touchant  le 
mode  de  distribution  de  ces  vaisseaux, 
et  il  donne  à  celte  occasion  des  extraits 
assez  étendus  des  écrits  de  Syennesis 
de  Chypre,  de  Diogène  d'Apollonie  et 
de  Polybe.  Il  crilique  avec  raison  ce 
qu'ils  avaient  dit  de  l'origine  des 
veines  dans  la  tête,  et  il  établit  qu'elles 
naissent  du  cœur  (e). 

«  Il  y  a,  dit-il,  dans  la  poitrine,  en 
avant  de  l'épine  du  dos,  deux  veines 
(ou  vaisseaux)  dont  l'une,  plus  petite 
et  située  plus  à  gauche  et  plus  en 
arrière  que  l'autre,  porte  le  nom 
d'aorte  (/").  »  11  parle  aussi  de  la  bifur- 
cation de  ces  deux  vaisseaux  vers  la 
partie  inférieure  de  l'abdomen  et  des 
principales  branches  qui  en  dépendent; 
mais  il  suppose  que  les  ramifications 
de  l'aorte  deviennent  des  nerfs  vers 
leurs  extrémités  {g). 

La  description   qu'Aristote   donne 


(a)  Traité  de  la  nature  de  l'Homme  (Œuvres  d'Hippocrate,  édit.  de  Lillré,  t.  VI,  p.  59). 

(b)  Op.  cit.,  t.  v,  p.  121. 

(c)  Voyez  Hecker,  Geschichte  der  Heilkunde,  t.  I,  p.  219. 

(d)  Litlré,  De  quelques  points  de  chronologie  médicale,  dans  l'introduction  aux  Œuvres  d'Hippo- 
crate, p.  202. 

(e)  Aristote,  Histoire  des  Animaux,  Irad.  par  Lecamus,  t.  I,  liv.  111,  p.  11". 

(f)  Op.  cit.,  y.  123. 
\g)  Op.  cit.,  p.  133. 


6  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

École  §  3.  —  Lorsque,  à  la  suite  des  conquêtes  d'Alexandre  de 

d'Alexandrie.     _T       Al    .  ,    .  .  ,  ,  .  ..... 

Macédoine,  Je  génie  des  Grecs  vint  réveiller  1  antique  civilisation 
de  l'Egypte,  et  que  les  grandes  institutions  scientifiques  fondées 
par  les  Ptolémées  dans  la  cité  nouvelle  d'Alexandrie  eurent 
porté  leurs  fruits,  l'étude  anatomique  du  corps  humain  cessa 
d'être  réputée  un  sacrilège  et  fournit  bientôt  aux  physiologistes 
d'utiles  lumières.  Les  usages  de  ce  singulier  pays  devaient  con- 
tribuer puissamment  à  y  donner  aux  études  médicales  cette 
direction  nouvelle ,  car  partout  l'image  de  la  mort  s'y  perpé- 
tuait sous  mille  formes ,  et  l'embaumement  des  cadavres  avait 
depuis  longtemps  rendu  l'idée  des  autopsies  familière  à  tous  les 
esprits.  Mais  ce  qui  influa  davantage  sur  la  marche  de  la 
science ,  ce  fut  la  protection  large  et  éclairée  que  les  succes- 
seurs du  disciple  d'Aristote  accordèrent  aux  philosophes.  On 
raconte  que  les  souverains  de  l'Egypte  ne  se  contentaient  pas 
de  prodiguer  leurs  trésors  dans  l'intérêt  de  la  science  ,  mais  se 
plaisaient  à  entendre  les  leçons  et  à  partager  les  travaux  des 


du  cœur  est  également  entachée  de  veine,  c'est-à-dire  la  veine  cave,  naît 
quelques  erreurs  graves.  Ainsi  il  dit  de  la  cavité  qui  occupe  à  droite  la 
que,  chez  les  grands  Animaux,  le  cœur  partie  supérieure  du  cœur  (a).  Or, 
est  creusé  de  trois  cavités.  Cette  asser-  cela  ne  peut  s'appliquer  qu'à  l'oreil- 
tion  a  été  diversement  interprétée  par  lette  droite,  et  je  ne  vois  aucune  rai- 
les  anatomistes  modernes  :  les  uns  son  de  supposer  qu'Arisloîe  ait  cru  à 
pensent  qu'il  a  pris  pour  un  ventri-  l'existence  d'un  ventricule  placé  entre 
cule  moyen  la  portion  basilaire  de  les  deux  cavités  auxquelles  on  donne 
l'aorte,  d'autres  supposent  que  cette  aujourd'hui  les  noms  de  ventricule 
même  cavité  moyenne  n'est  autre  chose  droit  et  ventricule  gauche.  Au  lieu 
qu'une  dépendance  du  ventricule  de  décrire  trois  cavités  là  où  il  n'y  en 
droit.  Mais  il  me  paraît  plus  probable  a  que  deux,  il  a  omis  de  faire  men- 
qu'il  faut  expliquer  ce  passage  autre-  tion  de  la  quatrième  cavité  qui  existe 
ment,  et  que  la  cavité  de  droite  est  en  réalité  et  qui  paraît  avoir  échappé 
l'oreillette  veineuse,  la  cavité  moyenne  à  ses  investigations,  savoir  :  l'oreillette 
le  ventricule  droit,  et  la  cavité  gau-  gauche  ,  que  probablement  il  ne  dis- 
ette le  ventricule  gauche.  En  effet,  linguait  pas  de  l'oreillette  droite. 
Aristote  dit  positivement  que  la  grande 

(a)  Aristote,  Histoire  des  Animaux,  p.  125. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  7 

savants  dont  ils  s'entouraient.  Pline  nous  assure  que  ees  princes 
allaient  même  assister  aux  dissections  qui  se  pratiquaient  jour- 
nellement au  Musée,  magnifique  établissement  dont  la  création 
restera  leur  plus  beau  titre  de  gloire  (1).  Là,  en  effet,  était 
réuni  par  leurs  soins  tout  ce  qui  devait  assurer  la  culture  et  le 
développement  de  l'intelligence.  Le  philosophe  y  trouvait  à  la 
fois  le  calme,  le  loisir,  le  bien-être  nécessaires  aux  travaux  de 
l'esprit,  et  les  instruments  d'étude  que  réclame  l'investigation 
delà  Nature.  Son  existence  était  assurée  ;  une  riche  bibliothèque 
lui  était  ouverte,  de  vastes  collections  étaient  formées  pour  son 
usage,  et  il  pouvait  aller  tour  à  tour  puiser  dans  les  récits  des 
observateurs  passés  la  connaissance  des  découvertes  accom- 
plies, ou  interroger  la  matière  pour  en  arracher  de  nouveaux 
secrets  (2). 


(1)  Voyez  Sprengel,  Histoire  de  la 
médecine,  t.  I,  p.  Zi27. 

(2)  La  création  de  l'École  d'Alexan- 
drie est  due  au  fondateur  de  la  dynas- 
tie des  rois  grecs  de  l'Egypte ,  Pto- 
lémée  Lagus,  appelé  aussi  Ptolémée 
Soter,etelledate  d'environ  troissiècles 
avant  l'ère  chrétienne.  Ce  souverain 
aimait  beaucoup  les  sciences,  les  lettres 
et  les  arts  ;  il  orna  de  magnifiques  bâ- 
timents la  ville  naissante  d'Alexandrie, 
y  établit  une  bibliothèque  immense, 
et  y  appela  un  grand  nombre  de 
philosophes  auxquels  il  assura  une 
existence  honorable  dans  un  palais 
nommé  Musée.  Son  fils  et  successeur, 
Ptolémée  Philadelphe,  se  livra  avec 
ardeur  à  la  culture  des  sciences  et 
s'occupa  beaucoup  de  zoologie  ;  il 
forma  la  première  ménagerie  connue, 
et  y  réunit  une  multitude  d'Animaux 
rares.  Il  acheta  la  bibliothèque  formée 
par  Aristote,  et  ne  négligea  rien  pour 
accroître  ses  recherches  bibliographi- 
ques :  ainsi  il  paya  aux  Athéniens  la 


valeur  d'environ  Z|0  000  francs  de 
notre  monnaie  actuelle,  pour  obtenir 
la  permission  de  faire  copier  les  ou- 
vrages de  Sophocle,  d'Eschyle  et  d'Eu- 
ripide, et  l'emplacement  de  la  biblio- 
thèque du  musée  appelé  le  Bruchion 
étant  devenu  insuffisant,  il  destina  au 
même  usage  le  temple  de  Sérapis;  en- 
fin il  porta  à  700  000  le  nombre  de 
volumes  dont  l'École  d'Alexandrie  se 
trouva  ainsi  dotée.  Les  savants  réunis 
au  Musée  y  vivaient  en  commun  sous 
la  présidence  d'un  prêtre,  et  les  études 
anatomiques  y  excitèrent  un  grand  in- 
térêt. Tous  les  princes  de  la  dynastie 
des  Lagides  accordèrent  à  cet  établis- 
sement une  généreuse  protection  ; 
mais  la  direction  des  études  ne  tarda 
pas  à  changer  d'une  manière  fâcheuse, 
et  les  discussions  s'y  substituèrent  à 
l'observation  de  la  Nature.  Un  autre 
coup  grave  porté  à  la  prospérité  de 
l'École  d'Alexandrie  fut  la  destruction 
de  sa  bibliothèque  principale  dans  l'in- 
cendie du  Bruchion  par  Jules  César. 


Hérophile. 


8  HISTOIRE    DE    LA.    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

L'école  d'Alexandrie  donna  bientôt  à  la  science  deux  anato- 
mistes  illustres  dont  les  noms  ne  doivent  pas  être  oubliés  ici  : 
Hérophile  et  Érasistrate.  Leurs  ouvrages  ne  sont  pas  arrivés 
jusqu'à  nous ,  mais  leurs  découvertes  n'ont  pas  eu  le  même 
sort  (1). 

Depuis  longtemps  les  médecins  avaient  remarqué  dans  di- 
verses parties  du  corps  des  pulsations  qui  ressemblaient  aux 


Au  commencement  du  111e  siècle  de 
l'ère  chrétienne  ,  Caracalla  supprima 
la  réunion  scientifique  du  Musée;  en- 
fin, vers  la  fin  du  iv*  siècle,  l'em- 
pereur Théodose  ordonna  la  démoli  - 
lion  du  temple  de  Sérapis,  et  l'on 
ignore  ce  que  devinrent  les  débris  de 
l'ancienne  bibliothèque  fondée  par 
Ptolémée  Philadelphe  et  accrue  par 
l'adjonction  de  celle  de  Pergame 
qu'Antoine  y  avait  fait  transporter 
sous  le  règne  de  Cléopâlre.  Mais,  mal- 
gré son  état  de  décadence,  l'École 
d'Alexandrie  exerça  pendant  toute 
l'antiquité  une  influence  considérable 
sur  les  éludes  médicales.  Ce  fut  là  que 
Galien  acquit  en  grande  partie  les 
connaissances  anatomiques  qu'il  nous 
a  léguées,  et  il  conseilla  à  ses  contem- 
porains de  s'y  rendre  pour  y  étudier 
l'osléologie.  Mais  il  paraît  que  la  dis- 
section y  était  tombée  en  désuétude, 
car  Rufus  d'Éphèse ,  qui  vivait  au 
temps  de  Trajan  (ou  peut-être  d'Au- 
guste), en  parle  comme  d'une  chose 
qui  se  pratiquait  jadis.  Sous  la  domi- 
nation du  Bas-Empire,  l'École  d'A- 
lexandrie reprit  cependant  quelque  im- 
portance ,  et  ii  paraît  qu'au  ve  siècle 
on   y    fit   quelques    dissections   (a). 


Elle  jouissait  encore  de  beaucoup  de 
célébrité  au  commencement  du  vu* 
siècle,  et  Paul  d'Égine,  qui  paraît  avoir 
vécu  vers  cette  époque,  y  étudia.  Mais 
en  6/|0,  après  qu'Alexandrie  eut  été 
prise  et  pillée  par  Amrou,  l'un  des 
lieutenants  du  calife  Omar,  tous  les 
livres  qui  y  restaient  furent  brûlés  par 
l'ordre  de  ce  chef,  et  à  dater  de  ce 
jour  l'École  cessa  d'exister  (6). 

(1)  Quelques-uns  des  écrits  qui 
portent  le  nom  d'Hippocrate,  et  qui 
donnent  sur  la  structure  du  cœur  et 
des  vaisseaux  sanguins  des  notions 
beaucoup  plus  exactes  que  celles  dont 
on  trouve  les  traces  dans  les  œu- 
vres authentiques  de  ce  grand  mé- 
decin, paraissent  dater  aussi  des  pre- 
miers temps  de  l'École  d'Alexandrie. 
Tel  est  le  Traité  du  cœur,  qui  ne 
figure  pas  dans  la  liste  des  livres 
d'Hippocrate  dressée  par  Érotien,  et 
qui  contient  non-seulement  l'indica- 
tion de  l'existence  des  deux  oreillettes, 
mais  aussi  quelques  détails  sur  les 
valvules  situées  à  l'embouchure  des 
artères.  L'auteur  de  ce  traité  suppose 
du  reste  que  les  oreillettes  servent, 
comme  les  soufflets  d'une  forge,  pour 
y  attirer  de  l'air. 


(a)  Laulh,  Histoire  de  l'anatomte,  p.  118. 

(6)  Freind,  Histoire  de  la  médecine  depuis  Galien  jusqu'au  xvi*  siècle,  t.  I,  p.  i. 
—  Voyez  aussi  ,  au  sujet  de  l'incendie  de  la  bibliothèque  d'Alexandrie,  les  notes  de  Sylvestre  de 
Sar.y,  dans  sa  traduction  de  la  Relation  de  l'Egypte,  par  Abd-Allalif,  p.  240. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  9 

battements  du  cœur.  Hippocrate  avait  plus  d'une  fois  parlé 
de  ce  phénomène  (1)  ;  Aristote  avait  reconnu  qu'il  est  dû 
aux  mouvements  du  sang ,  et  qu'il  se  produit  dans  tout  le 
corps  au  même  moment  (2)  ;  mais  Hérophile  fut  le  premier 
à  faire  une  étude  attentive  du  pouls  et  à  constater  l'isoehro- 
nisme  des  battements  du  cœur  et  des  artères,  fait  dont  nous 
verrons  bientôt  l'importance  physiologique.  Hérophile  signala 
aussi  les  différences  qui  s'observent  dans  l'épaisseur  des  parois 
des  veines  et  des  artères  ;  enfin  il  distingua  nettement  les  deux 
sortes  de  vaisseaux  qui  relient  les  poumons  au  cœur  (S). 

Érasislrate  ,  qui  était  contemporain  d'Hérophile  ,  et  qui  se  , Extraie. 
livra  à  l'investigation  de  la  structure  du  corps  humain  avec  non 
moins  d'ardeur,  enrichit  la  science  d'un  autre  fait  dont  la  con- 
naissance était  également  un  préliminaire  nécessaire  de  la  dé- 
couverte de  ïïarvey.  Il  constata  le  jeu  des  valvules  qui  dans 
l'intérieur  du  cœur  séparent  les  deux  étages  de  cavités  dont  ce 
viscère  est  creusé,  et  il  y  a  quelque  lieu  de  croire  qu'il  avait 
entrevu  les  vaisseaux  chylifères ,  qui  peuvent  être  considérés 
comme  une  dépendance  et  un  complément  de  l'appareil  circu- 
latoire (4). 


(1)  Hippocrate  paraît  avoir  élé  le 
premier  à  employer  le  mot  pouls 
(acpu-j'ao;)  dans  le  sens  que  l'on  y  donne 
aujourd'hui  ;  mais ,  en  général  ,  ce 
terme  ne  s'appliquait  qu'aux  batte- 
ments violents  des  artères  qui  s'obser- 
vent dans  divers  cas  pathologiques. 

(2)  Histoire  des  Animaux,  liv.  Ilf, 
chap.  xix. 

(3)  Hérophile  était  disciple  de 
Praxagoras  de  Cos,  un  des  derniers 
représentants  de  la  familles  des  Asclé- 
piades.  Il  vivait  du  temps  de  Pto- 
lémée  1er  (ou  Soter),  et  il  jouissait 
d'une  très  grande  célébrité  comme 
anatomiste.    Les  noms  qu'il  imposa 


à  plusieurs  des  parties  constitu- 
tives du  corps  humain  sont  con- 
servés jusqu'à  ce  jour,  et  c'est  sur- 
tout en  traitant  du  système  nerveux 
que  nous  aurons  à  parler  de  ses  tra- 
vaux. Il  remarqua  ia  différence  de 
structure  qui  existe  entre  les  divers 
vaisseaux  qui  sont  en  connexion  avec 
le  côté  veineux  du  cœur,  et  il  appela 
veine  artérieuse  celui  qui  va  du  ven- 
tricule droit  aux  poumons,  tandis  qu'il 
nomma  artère  veineuse  la  veine  pul- 
monaire des  anatomistes  modernes. 

(k)  Ni  les  anciens,  ni  les  modernes, 
ne  me  semblent  avoir  rendu  justice  à 
Érasistrate  :  les  uns  l'ont  calomnié , 


10  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

L'éclat  dont  brilla  l'école  d'Alexandrie  sous  les  premiers 
Lagides  ne  tarda  pas  à  se  ternir.  Le  Musée  perdit  par  l'incendie 
une  grande  partie  de  sa  riche  bibliothèque  ;  ses  professeurs,  au 
lieu  d'observer  la  Nature,  s'épuisèrent  en  vaines  argumenta- 
tions, et  l'on  y  abandonna  les  dissections  ;  mais  cette  institution 
continua  néanmoins  à  exercer  une  grande  influence  sur  les 
études  médicales,  et  elle  compta  parmi  ses  élèves  le  plus  grand 
anatomiste  de  l'antiquité  :  Galien  (1). 


et  les  autres  lui  ont  fait  porter  tout  le 
poids  d'une  erreur  dont  il  n'est  pas 
l'auteur.  Celse  a  prétendu  qu'Érasis- 
trate  avait  eu  la  cruauté  de  disséquer 
vifs  des  hommes  condamnés  à  mort  et 
livrés  à  ses  investigations  par  les  sou- 
verains de  l'Egypte  (a).  Tertullien  a 
accusé  Hérophile  du  même  crime  (6). 
Mais  ces  imputations,  que  les  compi- 
lateurs se  plaisent  à  répéter,  ne  pa- 
raissent reposer  que  sur  des  bruits 
populaires  dont  l'exagération  est  fa- 
cile à  comprendre,  et  dont  la  fausseté 
semble  démontrée  par  les  erreurs 
mêmes  dont  ces  anatomistes  n'ont  pas 
su  se  préserver  touchant  la  vacuité 
des  artères  (c). 

Quant  à  l'idée  des  fonctions  pneu- 
matiques des  artères,  Érasistrate  l'a 
trouvée  enracinée  depuis  longtemps 
dans  l'esprit  de  tous  les  maîtres  de  la 
science,  et  si  Galien,  pour  combattre 
cette  erreur,  s'est  attaqué  à  lui  plutôt 
qu'à  Aristote,  c'est  probablement  parce 
qu'il  jouissait  de  plus  d'autorité  aux 
yeux  des  contemporains  de  l'illustre 
médecin  de  Pergame,  et  qu'il  avait 
développé  d'une  manière  plus  nette 
cette  fausse  doctrine. 

Effectivement,  M.  Littré  a  fait  voir 


que  l'erreur  professée  par  Érasistrate 
existait  du  temps  d'Hippocrate.  Il  en 
signale  même  des  traces  dans  les  opi- 
nions attribuées  à  Diogène  d'Apol- 
lonie,  qui  est  antérieur  à  llippocrate. 
Empédocle  d'Agrigente ,  qui  vivait 
cinq  cents  ans  avant  Jésus-Christ,  ad- 
mettait aussi  que  les  canaux  connus  de 
nos  jours  sous  le  nom  d'artères  sont 
vides  de  sang  et  occupés  par  de  l'air. 

Érasistrate  doit  une  partie  de  sa 
célébrité  populaire  au  rôle  qu'il  joue 
dans  Phistoire»de  Stratonice  et  d'An- 
tiocbus,  fils  de  Séleucus  Nicanor,  roi 
de  Syrie.  Il  naquit  dans  l'île  de  Céos, 
et  selon  Pline  il  était  petit-fils  d' Aris- 
tote. Il  étudia  la  médecine  sous  Chry- 
sippe  le  Cnidien,  et  il  paraît  avoir  ter- 
miné ses  jours  par  le  poison.  Ses 
ouvrages  ne  sont  pas  arrivés  jusqu'à 
nous;  mais  Galien  et  Cœlius  Aurelia- 
nus  nous  ont  transmis  quelques-unes 
de  ses  opinions,  et  pendant  plus  de 
quatre  siècles  après  sa  mort  il  eut  de 
nombreux  sectateurs.  11  paraît  avoir 
découvert  l'existence  des  vaisseaux 
chylifères. 

(1)  Galien  naquit  à  Pergame,  ville 
de  l'Asie  Mineure,  sous  le  règne  de 
l'empereur  Adrien ,  en   131  de  l'ère 


(a)  Celsus,  De  re  medica,  lib.  I. 

(b)  Terlullien,  De  anima,  c.  10. 

(c)  Voyez  D.  Leclerc,  Histoire  de  la  médecine,  t.  II,  p.  42  et  28, 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  11 

§  4.  —  Nous  avons  déjà  vu  qu'Hippocrate,  Aristote,  Héro-  Gaiien. 
phile  et  Érasistrate  connaissaient  l'existence  de  deux  sortes  de 
tubes  membraneux  et  ramifiés,  qu'ils  distinguaient,  ainsi  qu'on 
le  fait  encore  de  nos  jours,  sous  les  noms  d'artères  et  de  veines. 
Quand  on  examine  ces  organes  sur  le  cadavre ,  on  trouve  en 
général  les  veines  gorgées  de  sang,  tandis  que  les  artères  sont 
presque  vides ,  et  cette  circonstance  avait  conduit  tous  ces  phy- 
siologistes à  penser  que  les  veines  sont  les  seuls  vaisseaux 
sanguins  et  que  les  artères  sont  destinées  à  contenir  de  l'air. 
Aristote  considérait  ces  derniers  tubes  comme  formant  avec  la 
trachée-artère  un  vaste  système  de  conduits  pneumatiques  (1), 
et  Érasistrate  paraît  avoir  insisté  davantage  encore  sur  cette 
doctrine  erronée. 

Galien,  au  contraire,  découvrit  la  vérité. 

A  l'aide  de  quelques  expériences  très  simples ,  pratiquées 
sur  des  Animaux  vivants ,  Galien  établit  que  les  artères ,  de 
même  que  les  veines ,  sont  des  Vaisseaux  sanguins. 

chrétienne.  Il  étudia  Panatomie  pen-  (1)  Aristote,  après  avoir  décrit  Tar- 
dant plusieurs  années  à  l'École  d'A-  tère  (ou  trachée)  qui  s'étend  de  Par- 
lexandrie,  mais  il  paraît  s'être  adonné  rière-bouche  aux  poumons ,  ajoute 
principalement  à  la  dissection  des  que  le  cœur  y  est  attaché  par  des  li- 
Animaux  dont  l'organisation  se  rap-  gaments  creux,  et  que  si  l'on  souffle 
proche  le  plus  de  la  nôtre.  Il  voyagea  dans  ce  tube,  on  voit  Pair  passer  jusque 
beaucoup  et  habita  souvent  Piome,  où  dans  le  cœur  ;  cette  observation,  dit-il 
il  jouissait  de  la  confiance  de  Marc  encore,  est  à  la  vérité  plus  difficile 
Aurèle.  Après  la  mort  de  ce  prince  il  à  faire  dans  certains  Animaux;  mais 
retourna  en  Asie  Mineure,  où  il  mou-  le  passage  est  manifeste  dans  les 
rut  à  un  âge  très  avancé.  Ses  princi-  grandes  espèces  (a).  Ailleurs  il  ex- 
paux  ouvrages  sont  ceux  intitulés  :  plique  davantage  sa  pensée.  «  Il  part 
De  usu  parlium  corporis  humant,  du  cœur,  dit-il,  des  vaisseaux  qui  se 
et  De  anatomicis  administrationibus  portent  aux  poumons  ,  et  dont  les 
librinovem.  Une  excellente  traduction  rameaux  se  divisent  comme  ceux  de 

des  œuvres  de  Galien,  accompagnée      la   trachée  :  artère Ces  rameaux 

de  notes  précieuses  par  M.  Daremberg,  n'ont  aucune  communication  avec  ces 

est  actuellement  en  voie  de  publication.  vaisseaux;  mais  par  le  contact  réci- 

(a)  Aristote,  Histoire  des  Animaux,  liv.  I,  trad.  de  Lecamus,  t.  I,  p.  41. 


12  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

En  effet ,  il  vit  que  les  artères  laissent  échapper  du  sang 
quand  on  les  ouvre ,  et  que  ce  sang  ne  vient  pas  d'ailleurs , 
mais  y  existe  naturellement.  Pour  s'en  assurer,  il  plaça  autour 
d'un  de  ces  vaisseaux  deux  ligatures  à  quelque  distance  l'une 
de  l'autre,  de  manière  à  interrompre  toute  communication  entre 
une  portion  de  l'artère  et  le  reste  du  système  vasculaire  ;  puis, 
ayant  fendu  longitudinalement  le  vaisseau  ainsi  isolé,  il  reconnut 
que  sa  cavité  était  occupée  par  du  sang  et  ne  contenait  pas 
autre  chose  (1). 

Cette  découverte  était  fondamentale.  On  sut  alors  qu'il  existe 
dans  toutes  les  parties  du  corps  de  l'Homme  et  des  Animaux 
supérieurs  deux  ordres  de  vaisseaux  sanguins  qui,  d'une  part, 
communiquent  avec  les  cavités  du  cœur,  et ,  d'autre  part,  se 
ramifient  jusque  dans  les  parties  les  plus  éloignées  de  l'orga- 
nisme. 

D'autres  observations  apprirent  aussi  à  Galien  qu'il  existe 
des  communications  entre  ces  deux  systèmes  de  vaisseaux ,  de 
sorte  que  le  sang  peut  passer  facilement  des  uns  dans  les 
autres,  et  néanmoins  il  fut  conduit  à  reconnaître  que  ce  liquide 
n'est  pas  identique  dans  les  veines  et  les  artères. 

On  doit  encore  à  Galien  la  connaissance  de  plusieurs  faits 
anatomiques  dont  nous  apprécierons  mieux  l'importance  quand 
nous  serons  plus  avancés  dans  l'étude  de  l'histoire  de  la  circu- 
lation du  sang.  Ses  descriptions  du  cœur  et  des  vaisseaux  san- 
guins sont,  il  est  vrai,  entachées  de  quelques  erreurs  graves, 
mais  elles  sont  bien  plus  complètes  que  tout  ce  qui  avait  été 
écrit  par  ses  devanciers,  et  durant  le  moyen  âge  elles  satisfirent 
pleinement  les  physiologistes. 

proque  ,  les   vaisseaux  qui    viennent  (1)  Les  expériences  de  Galien  sur 

du  cœur  reçoivent  l'air  et  le  font  pas-  les  fonctions  des  artères  sont  exposées 

ser  au   cœur,  où  leurs  troncs  s'ou-  dans  un  petit  traité  intitulé  :  An  san- 

vrent  (a).  »  guis  in  arleriis  natura  contineatur. 

(a)  Op.  cit.,  fi.  45. 


OBSERVATIONS    PRELIMINAIRES. 


13 


§  5.  —  Pendant  plus  de  treize  siècles  les  opinions  de  Galien       État 
firent  loi  dans  les  écoles  médicales,  et  si,  de  loin  en  loin,  les    atomiques 
anatomistes  consultaient  la  Nature,  ce  n'était  pas  pour  contrôler  ie  moyenne 
la  parole  du  maître,  mais  seulement  pour  faciliter  l'intelligence 
de  ses  écrits.  Le  moyen  âge  n'ajouta  donc  rien  aux  découvertes 
accomplies  par  les  anciens,  et  ce  fut  à  l'époque  de  la  renais- 
sance, quand  l'esprit  de  libre  examen  commença  à  se  répandre      Époqil0 
partout ,  que  la  question  dont  l'étude  nous  occupe  ici  fit  de   reJsesa*ce 
nouveaux  progrès  (1). 


(I)  Les  Arabes,  qui,  pendant  le 
moyen  âge,  furent  les  principaux  dé- 
positaires de  la  science  acquise  par  les 
anciens,  ne  contribuèrent  en  rien  aux 
progrès  de  Fanatomie,  et  l'on  com- 
prend qu'il  devait  en  être  ainsi,  puis- 
que les  Yiahoméians,  ainsi  que  les 
Juifs,  respectent  la  loi  de  Moïse,  d'a- 
près laquelle  celui  qui  touche  un  ca- 
davre est  réputé  impur.  Ce  fut  en 
Italie  que  les  études  analomiques 
commencèrent  à  se  raviver.  L'em- 
pereur Frédéric  II  décréta  en  1213 
qu'à  l'École  de  médecine  de  Salerne 
tout  chirurgien  devait  étudier  Fana- 
tomie du  corps  humain  pendant  une 
année  au  moins,  et  que  chaque  année 
on  eût  à  faire  la  dissection  d'un  ca- 
davre (a).  Mais  en  1300,  une  bulle 
de  Boniface  VIII,  relative  à  l'ense- 
velissement des  morts,  vint  mettre  de 
nouveau  obstacle  aux  dissections,  et 
une  permission  expresse  émanée  du 
saint-siége  devint  nécessaire  pour  tout 
examen  anatomiqûe  de  cadavre.  En 
1482,  l'université  de  Tubingue  obtint 
de  Sixte  IV  une  autorisation  spéciale 
pour  faire  des  dissections  ;  mais  le 
nombre  des  sujets  dont  on  pouvait 


disposer  dans  l'intérêt  des  études 
médicales  était  très  restreint.  Ainsi 
Mundini ,  qui  professa  Fanatomie  à 
l'université  de  Bologne ,  au  com- 
mencement du  xive  siècle,  ne  put, 
dans  l'espace  de  onze  années,  dissé- 
quer plus  de  deux  ou  trois  cadavres. 
Au  commencement  du  xvte  siècle,  les 
dissections  commencent  à  devenir 
plus  fréquentes ,  et  Bérenger  de 
Carpi ,  qui  occupa  la  chaire  d'ana- 
tomie  à  Bologne  de  1502  à  1527,  eut 
l'occasion  d'étudier  plus  de  cent  su- 
jets ;  mais  il  devint  un  objet  de  Fani- 
mad version  publique  et  fut  accusé 
d'avoir  disséqué  des  hommes  vivants. 
Vers  la  même  époque,  on  ouvrit  des 
ampbithéâtres  de  dissection  à  Padoue 
ainsi  qu'à  Rome  et  à  Vérone  (b).  Au 
commencement  du  xvF  siècle,  Dubois, 
plus  connu  sous  le  nom  de  Syluius, 
et  Ch.  Etienne,  l'un  des  membres  de  la 
famille  des  Etienne,  si  célèbre  dans 
l'histoire  de  la  typographie,  inau- 
gurèrent aussi  les  études  analomiques 
à  Paris.  Mais  l'utilité  des  dissections 
ne  commença  à  être  généralement 
comprise  qu'après  la  publication  des 
grands  travaux  anatomiques  de  Vésale, 


(a)  Codex  legum  antiquarum  Lindenbrogi.  Franckfurti,  1613. 

(6)  Voyez  Laut'n,  Histoire  de  l'anatomie,  l.  I,  p.  291,  298  et  suiv.,  314,  etc. 


Vésalc. 


14  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

Galien,  guidé  par  des  vues  théoriques  plutôt  que  par  l'ob- 
servation ,  avait  été  conduit  à  penser  que  les  cavités  creusées 
des  deux  côtés  du  cœur,  et  en  continuité  les  unes  avec  la  veine 
cave ,  les  autres  avec  l'artère  aorte,  communiquaient  librement 
entre  elles  à  l'aide  de  trous  pratiqués  dans  la  cloison  charnue 
qui  sépare  les  ventricules  entre  eux.  Mais  lorsque ,  le  scalpel  à 
la  main,  on  commença  à  vérifier  sur  le  cadavre  humain  la  des- 
cription des  viscères  que  nous  avait  léguée  l'anatomiste  de  Per- 
game ,  on  ne  tarda  pas  à  reconnaître  que  cette  disposition 
n'existe  pas  ;  que  la  cloison  médiane  du  cœur  n'est  point  per- 
forée, et  que  le  sang  ne  saurait  passer  ainsi  d'un  ventricule  à 
l'autre. 

Ce  premier  pas  vers  la  connaissance  plus  parfaite  de  l'appa- 


qui,  le  premier,  osa  contredire  Galien. 
Enfin,  en  1564,  Charles  IX  fonda  à  la 
Faculté  .de  Paris  deux  cours  publics 
d'anatomie. 

Vésale,  dont  l'influence  fut  si 
grande  sur  cette  branche  des  sciences 
naturelles,  naquit  à  Bruxelles  en  1514t 
et  fit  la  majeure  partie  de  ses  études 
anatomiques  à  Paris,  où  il  éprouva 
beaucoup  de  difficultés  à  se  pro- 
curer des  cadavres.  Il  acquit  néan- 
moins en  peu  d'années  une  connais- 
sance si  profonde  de  la  structure  du 
corps  humain,  qu'à  l'âge  de  vingt- 
neuf  ans  il  put  rectifier  de  nombreuses 
erreurs  commises  par  Galien,  et  pu- 
blia un  des  plus  beaux  ouvrages  que 
la  science  possède.  Son  livre,  intitulé 
De  humani  corporis  fabrica  libri 
septem,  et  imprimé  à  Basle  en  1543, 
fait  époque  dans  l'histoire  de  l'ana- 
tomie,  et  les  figures  qu'il  y  joignit 
sont  dessinées  avec  une  si  grande 
perfection,  que  quelques  auteurs  les 
ont  attribuées  au  Titien.  En  1537, 
Vésale,  après  avoir  pratiqué  la  chi- 


rurgie dans  les  armées  de  Charles- 
Quint,  devint  professeur  d'anatomie 
à  l'université  de  Padoue  ;  il  enseigna 
ensuite  cette  science  à  Bologne  et  à 
Pise;  en  1543,  il  se  rendit  auprès  de 
Charles-Quint  comme  médecin,  et  il 
conserva  le  même  emploi  auprès  du 
successeur  de  ce  prince,  le  roi  d'Espa- 
gne Philippe  II,  On  assure  qu'en  1 564 
un  grand  malheur  le  frappa  :  appelé 
à  faire  une  autopsie,  il  s'aperçut,  dit- 
on,  que  le  sujet  dont  il  venait  d'ouvrir 
largement  la  poitrine  n'était  pas  mort, 
et,  déféré  pour  ce  fait  à  l'inquisition, 
il  fut  obligé  d'entreprendre  un  pèle- 
rinage en  terre  sainte.  Quoi  qu'il  en 
soit,  il  se  rendit  à  Jérusalem,  et  au 
retour  il  fit  naufrage  sur  les  côtes  de 
l'île  de  Zante.  Pour  plus  de  détails  à 
ce  sujet,  je  renverrai  le  lecteur  à  un 
ouvrage  publié  récemment  par  M.  Bur- 
graeve,  professeur  d'anatomie  à  l'uni- 
versité de  Gand,  intitulé  :  Etudes  sur 
André  Vésale,  précédées  d'une  Notice 
historique  sur  sa  vie  et  ses  écrits, 
in-8,  1841. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  15 

reil  circulatoire  date  du  milieu  du  xvie  siècle  et  a  été  fait  par 
l'illustre  Yésale,  qui  porte  à  bon  droit  le  titre  de  fondateur  de 
l'anatomie  moderne  (1). 

§  6.  —  En  1553,  on  alla  plus  loin.  Un  contemporain  de  Michel servet. 
Yésale  ,  Michel  Servet ,  qui  avait  étudié  la  médecine  à  Paris , 
mais  qui  s'occupait  de  controverses  religieuses  plus  que  de 
science ,  et  qui  périt  misérablement  sur  le  bûcher,  victime  de 
la  farouche  intolérance  du  réformateur  genevois  Calvin  ,  émit 
alors,  au  milieu  d'une  foule  d'idées  bizarres  et  fausses  sur  la 
formation  de  l'âme  ,  une  idée  vraie  et  importante  sur  les  mou- 
vements du  sang.  Il  devina  que  ce  fluide  va  du  ventricule  droit 
au  ventricule  gauche  en  passant  à  travers  les  poumons,  et  que 
c'est  dans  les  poumons,  non  dans  le  cœur,  que  par  son  mélange 
avec  l'air  il  change  de  nature. 

Je  dis  que  Michel  Servet  devina  ces  'choses  ;  car,  en  lisant 
son  ouvrage ,  je  ne  saurais  croire  qu'il  les  ait  constatées.  En 
effet,  il  n'en  fournit  aucune  preuve  ;  ses  écrits  portent  le  cachet 
d'un  esprit  spéculatif  et  aventureux  ;  il  n'était  pas  observateur, 
et,  pour  les  besoins  de  son  argumentation,  il  entoure  d'une 
foule  d'assertions  extravagantes  l'énoncé  d'une  vérité  inaperçue 
jusqu'alors.  Ainsi,  après  avoir  expliqué  comment  le  sang  passe 
du  côté  droit  dans  le  côté  gauche  du  cœur  par  la  voie  détournée 
des  vaisseaux  pulmonaires,  il  explique  du  même  ton  de  confiance 

(1)  Un  anatomiste  célèbre  de  l'École  les  opinions  de  Galien  (6)  ;  mais  il  ne 

de.  Bologne,  Bérenger  de  Carpi,  avait  tarda  pas  à  déclarer  que  le  tissu  de 

déjà  dit,  en  1521,  que  les  trous  de  la  cette    cloison  est  ni  moins  épais  ni 

cloison  interventriculaire  du   cœur  ,  moins  compacte  que  le  reste  du  cœur, 

très  distincts  chez  le  Bœuf  et  les  au-  et  ne  saurait  livrer  passage  à  une  seule 

très  grands  Animaux  ,  ne  se  voient  goutte  de  sang.  Il  est  bon  de  noter,  en 

qu'avec  beaucoup  de  difficultés  chez  passant,  que  ces  trous  n'existent  pas 

l'Homme    (a) ,  et  Vésale    en    admit  davantage  chez  le  Bœuf  ou  chez  tout 

d'abord  l'existence  par  déférence  pour  autre  Mammifère. 

(à)  Carpi,  Commentarii  cum  amplissimis  additionibus  super  anatomia  Mundini.  Bologne,  1521, 

p.  CCCXLI. 

(i)  Vésale,  De  corporis  humani  fabrica,  lib.  VI,  cap.  xv  (Opéra  omnia,  1. 1,  p.  517  et  519,  édit. 
de  1725). 


16  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

comment  l'esprit  vital  ainsi  élaboré  se  transforme  en  esprit 
animal  dans  les  petites  artères  du  plexus  choroïde  ;  il  admet 
comme  un  fait  avéré  que  les  nerfs  sont  la  continuation  des 
artères  et  forment  un  troisième  ordre  de  vaisseaux  ;  enfin  il 
décrit  avec  la  même  précision  apparente  les  voies  par  lesquelles 
l'air  arrive  du  nez  jusque  dans  les  ventricules  du  cerveau,  et  le 
démon  y  pénètre  pour  y  assiéger  l'âme. 

Le  temps  a  relégué  dans  un  juste  oubli  la  plupart  de  ces 
idées  physiologiques;  mais  l'opinion  émise  ici  pour  la  première 
fois  au  sujet  du  transvasement  du  sang  des  veines  dans  les 
artères  par  l'intermédiaire  du  poumon  est  devenue  plus  tard  une 
vérité  démontrée ,  et  sera  toujours  pour  le  pauvre  Servet  un 
titre  de  gloire  (1). 


(1)  Michel  Servet  naquit  en  1509 
à  Villa-Nueva,  clans  l' Aragon,  et  se 
livra  d'abord  tout  entier  a  des  études 
théologiques;  mais  ayant  émis,  dans 
un  écrit  sur  la  Trinité,  des  opinions 
contraires  aux  dogmes  de  la  religion 
catholique,  il  fut  condamné  par  l'in- 
quisition et  obligé  de  quitter  l'Espagne. 
Il  vint  alors  à  Paris,  où  il  étudia  la 
médecine  et  professa  les  mathémati- 
ques. Vers  15&0,  il  alla  s'établir  auprès 
de  Lyon,  puis  il  fit  divers  voyages  en 
France  et  en  Allemagne,  se  livrant 
avec  ardeur  à  des  prédications  qui  lui 
attirèrent  sans  cesse  et  de  toutes  parts 
des  persécutions  nouvelles.  En  1553, 
il  se  trouva  à  Vienne,  en  Dauphiné,  et 
y  publia,  sous  le  voile  de  l'anonyme, 
le  livre  de  controverse  qui  servit  de 
base  aux  accusations  de  Calvin,  et  qui 
a  valu  à  son  auteur  une  juste  célébrité 
parmi  les  physiologistes   (a).  Calvin, 


qui  était  fortement  attaqué  dans  cet 
écrit  dont  il  connaissait  l'auteur,  dé- 
nonça Servet  à  l'archevêque  de  Lyon. 
Arrêté  par  l'ordre  de  ce  prélat,  Servet 
parvint  à  s'évader,  et  se  dirigea  sur 
Genève,  ne  s'imaginant  pas  que  Cal- 
vin, qui  venait  de  réclamer  de  Fran- 
çois 1er  la  tolérance  pour  ses  coreli- 
gionnaires, emploierait  lui-même  la 
violence  pour  assurer  le  triomphe  de 
ses  idées.  Mais  Calvin,  ayant  décou- 
vert sa  retraite,  le  fit  arrêter  et  fit 
prononcer  contre  ce  malheureux  une 
sentence  barbare.  A  son  instigation, 
Servet  fut  brillé  vif  à  Genève,  et  l'ou- 
vrage qui  servait  de  prétexte  à  cette 
sentence  fut  jeté  dans  le  bûcher  par 
la  main  du  bourreau.  L'exemplaire  de 
ce  livre,  que  la  Bibliothèque  impé- 
riale de  Paris  possède,  porte  encore 
les  traces  des  flammes  au  milieu  des- 
quelles, pour   la   honte   éternelle  de 


(a)  Christianismi  reslitutio.  Totius  Ecclesice  apostolicœ  ad  sua  limina  vocatio  in  integrum 
restiluta  cognitione  Dei ,  fidei  Christi,  justificalionis  nostrœ ,  regenêrationis  baptismi  et  cœnœ 
Domïni  manducationis.  Hestituto  denique  nobis  regno  cœlesti,  Babylonis  impiœ  captivitate  solutd 
et  Anticlivitto  cum  suis  penitus  destructo.  i  vol.  in-8. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  17 

Mais  la  découverte  du  phénomène  auquel  on  donne  de  nos 
jours  le  nom  de  circulation  pulmonaire  ne  pouvait  exercer 
aucune  influence  sur  la  marche  des  études  physiologiques  ,  car 
elle  resta  longtemps  ignorée  de  tous  ceux  qui  cultivaient  les 


Calvin ,    Michel  Servet    termina  ses 
jours  le  26  octobre  1553. 

Pendant  longtemps  on  n'avait  géné- 
ralement que  des  notions  très  incom- 
plètes des  vues  physiologiques  de 
Servet;  car  son  livre  est  extrêmement 
rare  (a),  et  l'on  n'en  avait  donné  que 
des  extraits  insuffisants.  M.  Flonrens 
a  donc  rendu  un  véritable  service  à 
la  science  en  faisant  connaître  d'une 
manière  complète  la  portion  du  Chri's- 
tianismi  restitutio  où  se  trouvent 
consignées  les  idées  de  cet  esprit  bi- 
zarre au  isujet  du  mouvement  du 
sang  et  de  la  formation  des  esprits. 
Dans  un  opuscule  écrit  avec  la  clarté 
et  l'élégance  qui  caractérisent  à  un 
haut  degré  le  style  de  M.  Flourens,  ce 
savant  a  discuté  d'une  manière  appro- 
fondie et  impartiale  les  droits  de  Har- 
vey,  de  Servet,  de  Fabricius  d'Aqua- 
pendente  et  des  aunes  anatomistes 
de  la  même  époque,  aux  préliminaires 
de  la  découverte  de  la  circulation  ou 
à  cette  découverte  elle-même.  C'est 
un  écrit  que  tous  les  naturalistes  li- 
ront avec  plaisir  et  profit  (6). 

Le  passage  dans  lequel  Servet  parle 
de  la  communication  du  ventricule 
droit  du  cœur  avec  le  ventricule  gau- 
che par  l'intermédiaire  du  poumon 
est  parfaitement  clair,  et  suffisamment 
explicite  pour  montrer  que  ce  physio- 
logiste s'était  formé  une  idée  juste  du 


transport  du  sang  du  système  veineux 
dans  le  système  artériel,  mais  prouve 
aussi  qu'il  ne  connaissait  pas  la  cir- 
culation du  sang,  c'est-à-dire  le  mou- 
vement rotatoire  de  ce  liquide  dans 
l'organisme.  Voici  ce  passage  : 

«  Vitalis  spiritus  in  sinistro  cordis 
»  ventriculo  suam  originem  habet  , 
»  juvantibus  maxime  pulmonibus  ad 
»  ipsius  generalionem.  Est  spiritus 
n  tenuis ,  caloris  vi  elaboratus,  flavo 
»  colore,  ignea  potentia,  ut  sit  quasi 
»  ex  puriori  sanguine  lucidus  vapor, 
»  substantiam  in  se  continens  aqua?, 
»  aeris  et  ignis.  Geueratur  ex  facta  in 
»  pulmonibus  mixtione  inspirati  aeris 
»  cum  elaborato  subtili  sanguine , 
»  quem  dexter  ventriculus  cordis  si- 
»  nistro  communicat.  Fitautem  com- 
»  municatio  hase,  non  per  parielcm 
»  cordis  médium,  ut  vulgô  credilur, 
»  sed  magno  artificio  à  dextro  cordis 
»  ventriculo ,  longo  per  pul moues 
»  ductu,  agita tur  sanguis  subtilis  :  à 
»  pulmonibus  praeparatur,  flavus  effi- 
»  citur,  et  à  vena  arteriosain  arteiïam 
i>  venosam  transfundilur.  Deinde  in 
»  ipsa  arteria  venosa  inspirato  aeri 
n  miscetur  etexpirationeà  fuligine  rc- 
»  purgatur.  Atque  ità  tandem  à  sinis- 
»  tro  cordis  ventriculo  totum  mixtmn 
»  attrahitur,  apta  supellex,  ut  fiât  spi- 
»  ritus  vitalis. 
»  Quôd  ità  per  pulmones  fiât  com- 


(a)  11  parait  qu'il  n'existe  aujourd'hui  que  deux  exemplaires  de  cette  édition  de  l'ouvrage  de  Serve!, 
l'un  à  la  bibliothèque  impériale  de  Paris,  l'autre  à  h  bibliothèque  impériale  de  Vienne  en  Auliiche; 
mais  vers  la  fin  du  siècle  dernier  (en  1791)  on  en  fit,  à  Nuremberg,  une  réimpression  page  pour  page 
et  sous  la  même  date. 

(b)  Flourens,  Histoire  de  la  découverte  de  la  circulation  du  sang.  1  vol.  in-18,  Paris,  1854. 

III.  2 


18  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

sciences.  En  effet,  l'ouvrage  dans  lequel  Michel  Servet  en  parle 
est  un  livre  de  théologie  relatif  à  la  réforme  du  christianisme  , 
que  l'on  jeta  dans  le  bûcher  où  Calvin  faisait  brûler  vif  son  in- 
fortuné rival  ;  peu  d'exemplaires  échappèrent  aux  flammes  , 


»  municalio  et  praeparatio,  docet  con- 
»  junctio  varia  et  communicatio  venae 
»  arteriosae  cuin  arteria  venosa  in 
»  pulmonibus.  Confirmât  hoc  magni- 
»  tudo  insignis  venae  arteriosae,  quae 
»  nec  talis,  nec  tanta  facta  esset,  nec 
»  tam  à  corde  ipso  vim  purissimi  san- 
»  guinis  in  pulmones  emitteret,  ob 
»  solum  eonim  nulrimenlum,  nec  cor 
»  pulmonibus  hac  ratione  serviret  ; 
»  cùm  praesertim  anteà  in  embryone 
»  solerent  pulmones  ipsi  aliundè  nu- 
»  triri ,  ob  membranulas  illas  ,  scu 
»  valvulas  cordis,  usque  ad  boram 
»  nalivitatis  nondnm  opertas,  ut  docet 
»  Galenus.  Ergô  ad  alium  usum  effun- 
»  dilur  sanguis  à  corde  in  pulmones 
»  bora  ipsa  nativiiatis,  et  tam  copio- 
»  sus.  Item,  à  pulmonibus  ad  cor  non 
»  simplex  aer,  sed  mixtus  sanguine 
»  mittitur  per  arteriam  venosam  : 
»  ergô  in  pulmonibus  fit  mixlio.  Fla- 
»  vus  ille  color  à  pulmonibus  dalur 
»  sanguini  spiriluoso,  non  a  corde. 
»  In  sinistro  ventricule  non  est  locus 
»  capax  lantaeet  tam  copiosae  mixtio- 
»  nis,  nec  ad  flavum  elaboratio  illa 
»  sufficiens.  Demum,  paries  ille  me- 
»  dius,  cum  sitvasorum  et  facultatum 
»  expers,  non  est  aptus  ad  communi- 
»  cationcm  et  elaborationem  illam, 
»  licet  aliquid  resudare  possil.  Eodem 
»  artificio  ,  quo  in  hepate  fit  trans- 
»  fusio  à  vena  porta  ad  venam  cavam 
»  propter  sanguinem,  fit  etiam  pul- 
»  mone  transfusio  à  vena  arteriosa  ad 
»  arteriam  venosam  propter  spiritum. 
»  Si  quis  hac  conférât  cum  iis  quae 
»  scribit  Galenus  lib.  VI  et  VIE  De  usu 


»  partium,  veritatem  penitus  intelli- 
»  get,  ab  ipso  Galeno  non  animadver- 
»  sam.  Ille  itaque  spiritus  vitalis  à  si- 
»  nistro  cordis  ventriculo  in  arteriis 
»  totius  corporis  deindè  transfunditur, 
»  ità  ut  qui  tenuior  est  superiora  petat, 
»  ubi  magis  adhuc  elaboratur,  prœ- 
»  cipuè  in  flexu  retiformi ,  sub  basi 
»  cerebri  .sito,  in  quo  ex  vitali  fieri  in- 
»  cipit  animalis,  ad  propriam  rationa- 
»  lis  animae  sedem  accedens.  Iterum 
»  ille  fortins  mentis  ignea  vi  tenua- 
»  tur,  elaboratur ,  et  perficitur ,  m 
»  tenuissimis  vasis  seu  capillaribus- 
»  arteriis.  quae  in  plexibus  choroïdi- 
»  bus  sitae  sunt,  etipsissimam  mentem 
»  continent.  Hi  plexus  intima  omnia 
»  cerebri  pénétrant,  et  cerebri  ventri- 
»  culos  interne  succingunt,  vasa  illa 
»  secum  complicata  et  contexta  ser- 
»  vantes,  usque  ad  nervorum  origines, 
»  ut  in  eos  sentiendi  et  movendi  fa- 
»  cultas  inducatur. 

»  Vasa  illa  miraculo  magno  tenuis- 
»  sime  contexta,  tametsi  arteriae  dican- 
»  tur,  sunt  tamen  fines  arteriarum, 
»  tendentes  ad  originem  nervorum, 
»  ministerio  meningum.  Est  novum 
»  quoddara  genus  vasorum.  Nam,  si- 
»  eut  in  transfusio  à  venis  in  arterias 
»  est  in  pulmone  novum  genus  vaso- 
»  ru»,  ex  vena  et  arteria,  ità  in  trans- 
»  fusione  ab  arteris  in  nervos  est 
»  novum  quoddam  genus  vasorum, 
v  ex  arteriae  tunica  et  méninge  : 
»  cum  praesertim  méninges  ipsae  suas 
»  in  nervis  tunicas  servent.  »  (Voyez 
Flourens,  Op.  cit.,  p.  203.) 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  19 

et  ils  ne  devinrent  l'objet  de  quelque  attention  qu'un  siècle  plus 
tard,  lorsque  les  contemporains  envieux  de  l'illustre  Harvey, 
après  avoir  nié  obstinément  les  vérités  mises  en  lumière  par  ce 
grand  expérimentateur ,  s'efforcèrent  de  prouver  que  son  seul 
mérite  était  celui  de  propagateur  des  connaissances  acquises  par 
ses  devanciers,  ou,  pour  me  servir  des  expressions  mêmes  de 
l'un  de  ses  détracteurs ,  «  d'avoir  fait  circuler  la  découverte  de 
la  circulation  » . 

§  7. —  L'idée  heureuse  de  Michel  Servet,  touchant  le  passage  Colombo. 
du  sang  d'un  ventricule  à  l'autre  par  l'intermédiaire  des  vais- 
seaux du  poumon ,  s'est  présentée  aussi  à  l'esprit  de  quelques 
autres  anatomistes  du  xvie  siècle.  Vers  la  même  époque,  deux 
professeurs  célèbres  de  l'école  italienne ,  Colombo ,  de  Pa- 
doue  (1),  et  Césalpin,  de  Pise ,  arrivèrent  au  même  résultat. 

Césalpin  alla  plus  loin  encore.  Il  dit  que  les  veines  portent  césaipin. 
au  cœur  les  matières  nutritives,  et  que  les  artères  les  distribuent 
dans  toutes  les  parties  du  corps.  Il  remarqua  aussi  que  les 
veines  se  gonflent  quand  on  y  applique  une  ligature,  et  que  ce 
gonflement  a  lieu  toujours  au-dessous  du  point  comprimé, 
jamais  au-dessus  (2). 

(1)  RealdusCOLUMBUS,  de  Crémone,  ('2)  André  Césalpin  ,  d'Arezzo  en 

était  un  disciple  de  Vésale  ;  il  ensei-  Toscane,  enseigna  la  médecine  à  Pise, 

gfca  successivement  l'analomie  à  Pa-  et  résida  ensuite  à  Rome,  auprès  du 

doue,  à  Pise,  à  Rome,  et  il  publia  à  pape   Clément  VIII.    C'était   un  des 

Venise,  en  1559,  un  traité  intitulé  :  hommes  les  plus   éminents    de    son 

De  re   anatomica  libri  quindecim,  siècle  ;  il  fut  le  premier  à  avoir  une 

dans  lequel  il  dit  que  la  cloison  située  idée  de  la  méthode  naturelle  pour  la 

entre  les  ventricules  du  cœur  ne  livre  classification  des  plantes,  et  l'on  peut 

point  passage  au  sang,  ainsi  qu'on  le  le  considérer  comme  le  créateur  de 

pensait,  mais  que  ce  liquide  est  porté  l'anatomie  végétale.  C'est  lui  aussi  qui 

du  ventricule  droit  au  poumon  par  la  a  introduit  dans  la  science  le  mot  cir- 

veine  artérieuse,  puis  passe  avec  l'air  culation  du  sang  [a),  et  il  a  bien  dé- 

par  l'artère  veineuse  dans  le  vcnlri-  prît  la  manière  dont  le  sang  traverse 

cule  gauche  du  cœur.  le   système  circulatoire  pulmonaire  ; 

(a)  Cœsalpinus,  Quœstionum  peripatelicarum  lit.  V,  p.  125  (voy.  Fiourcns,  Op.  cit., p.  19). 


Découverte 
des  valvules 
des  veines. 


20  HISTOIRE    DE    LA   DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

§  8.  —  Vers  la  même  époque,  une  autre  découverte  pré- 
paratoire de  la  grande  découverte  de  Harvey  s'accomplit  peu 
à  peu  :  celle  d'une  multitude  de  petits  replis  membraneux  qui7 
placés  d'espace  en  espace  dans  l'intérieur  des  veines ,  y  consti- 
tuent des  valvules  comparables  à  ces  soupapes  du  cœur  dont 
Érasistrate  avait  jadis  étudié  le  jeu. 

Une  des  premières  observations  sur  ces  organes  est  due  à 


mais  je  ne  puis  admettre,  avec  mon 
savant  collègue  et  ami ,  M.  Isidore 
Geoffroy  Saint- Hilaire,  qu'il  ait  connu 
la  circulation  tout  entière  (a).  Cette 
opinion  est  fondée  sur  un  passage  de 
son  traité  De  plant is,  dans  lequel  il 
dit  que,  chez  les  Animaux,  nous 
voyons  l'aliment  conduit  par  les  vei- 
nes au  cœur  comme  à  l'officine  de  la 
chaleur  innée,  et  ayant  acquis  là  sa 
dernière  perfection,  être,  par  les  ar- 
tères, distribué  dans  tout  le  corps  (b]. 
Mais  il  n'y  parle  pas  du  retour  du 
sang  des  organes  où  ce  liquide  a  été 
ainsi  distribué,  et,  par  conséquent, 
je  ne  vois  dans  ce  passage  que  l'idée 
d'un  phénomène  de  distribution  ou 
d'irrigation,  et  non  pas  de  circula- 
tion, tel  que  nous  l'entendons  aujour- 
d'hui, c'est-à-dire  de  passage  continu 
dans  un  système  de  vaisseaux  formant 
un  cercle  complet.  Ailleurs,  il  est 
vrai,  Césalpin  parle  du  passage  de  la 
chaleur  naturelle  des  artères  dans  les 
veines  et  des  veines  dans  le  cœur,  et 
il  dit  même  quelques  mots  d'un  mou- 
vement de  flux  et  de  reflux  du  sang 
dans  les  extrémités.  C'est  par  ce  re- 
tour du  sang  vers  le  cœur  qu'il  s'ex- 


plique le  gonflement  des  veines  au- 
dessous  des  ligatures  (c)  ;  mais  il  ne 
lie  pas  entre  elles  toutes  ces  idées,  et, 
pour  apercevoir  dans  ses  écrits  l'indi- 
cation de  l'ensemble  du  phénomène 
de  la  circulation  du  sang,  il  faut  con- 
naître déjà  ce  phénomène  tel  que 
Harvey  l'a  exposé.  Césalpin  dit  nette- 
ment que  le  sang  circule  dans  les 
poumons  pour  se  rendre  du  côté 
droit  au  côté  gauche  du  cœur  (d), 
mais  il  ne  paraît  avoir  eu  qu'une 
idée  vague  de  la  circulation  générale, 
et  ne  pas  avoir  saisi  les  relations  de 
toutes  ces  choses  entre  elles  :  car  il 
admet  encore,  avec  les  anciens,  que  la 
cloison  du  cœur  est  perforée  et  que 
le  sang  passe  directement  d'un  ven- 
tricule dans  l'autre.  D'ailleurs,  en  sup- 
posant même  que  cet  homme  de 
génie  eût  réellement  deviné  l'en- 
semble du  phénomène  de  la  circula- 
tion du  sang,  il  n'étaya  de  preuves 
suffisantes  aucune  de  ses  conjectures, 
et  la  démonstralion  scientifique  de  ce 
grand  fait  physiologique  ne  fut  donnée 
qu'un  demi-siècle  plus  tard  par  l'il- 
lustre Harvey. 


(a)  Isidore  Geoffroy  Saint-Hilaire,  Histoire  naturelle  générale  des  Règnes  organiques,  1. 1,  p.  44. 

(b)  Cœsalpinus,  Deplanlis,  lib.  I,  cliap.  h,  p.  3,  1583. 

(c)  Caesalpinus,  Quœstionum  medicarum  lib.  II,  p.  234. 

(d)  Voyez  à  ce  sujet  Floureus,  Histoire  de  la.  découverte  de  la  circulation  du  sang,  p.  17. 


Etienne. 


Cannanus 

et  Eustacliius. 


OBSERVATIONS    PRÉLIMINAIRES.  21 

un  chirurgien  français  également  célèbre  comme  anatomiste  et 
comme  érudit,  Charles  Etienne.  Il  trouva  dans  quelques  ra- 
meaux de  la  veine  porte  des  valvules  qu'il  appela  des  apophyses, 
et  qu'il  compara  aux  valvules  du  cœur  (i). 

Cannanus,  professeur  d'anatomie  à  Ferrare,  aperçut  des 
replis  valvulaires  de  même  nature  dans  la  veine  azygos,  qui 
s'étend  entre  les  deux  veines  caves  (2),  et  Eustachius  fit  con- 
naître l'existence,  non-seulement  de  la  valvule  qui  porte  aujour- 
d'hui son  nom  et  qui  se  trouve  au  débouché  des  veines  caves  , 
mais  aussi  de  soupapes  analogues  situées  à  l'orifice  des  veines 
propres  du  cœur,  appelées  veines  coronaires  (3). 

Enfin  Fabricius  d'Aquapendente ,  professeur  à  Padoue ,  sans  d,A^tudseni 
avoir  connaissance  de  ces  faits  isolés  et  imparfaitement  observés, 
lit  une  étude  spéciale  du  système  de  valvules  dont  les  veines 
des  membres  et  de  la  plupart  des  organes  sont  pourvues  (h); 
il  remarqua  qu'elles  sont  disposées  de  façon  à  empêcher  le 


(1)  Ch.  Etienne,  frère  de  Robert 
Etienne,  l'un  des  imprimeurs  les  plus 
habiles  et  des  érudits  les  plus  versés 
dans  la  connaissance  des  langues  clas- 
siques, naquit  à  Paris  vers  1503,  et 
mourut  à  Genève  en  1559.  Ses  observa- 
tions sur  la  structure  des  veines  sont 
consignées  dans  l'ouvrage  intitulé  : 
De  dissectione  partium  corporis  hu- 
mant libri  très,  15Zi5. 

(2)  Cannanus  communiqua  ce  fait  en 
15Z|7  à  Amatus  Lusitanus,  qui  le  consi- 
gna clans  un  ouvrage  intitulé  :  Curatio- 
num  medicinalium  centuriœ  septem 
(1551).  Celui-ci  ajoute  que  le  sang  de 
la  veine  azygos  ne  peut  couler  que  dans 
un  sens,  car  l'air  que  l'on  insuffle  dans 
ce  vaisseau  se  trouve  arrêté  par  les 
valvules  (loc.  cit.,  cent.  1,  cur.  51). 

(3)  B.  Eustachi  exerça  la  médecine 
à  Rome,  et  lit  un  grand  nombre  d'ob- 
servations intéressantes  sur  la  structure 


du  corps  humain.  Nous  venons  plus 
tard  qu'on  lui  doit  la  connaissance  du 
canal  thoracique,  de  diverses  parties 
de  l'appareil  auditif  et  des  glandes 
surrénales.  11  mourut  en  157Z|.  Ses  ob- 
servations sur  les  valvules  des  veines 
sont  consignées  dans  ses  Opuscula 
analomica,  publiés  en  1563  (p.  289). 
(k)  Fabricio,  surnommé  d'Aqua- 
pendente, parce  qu'il  naquit  dans 
celte  petite  ville  des  États  romains 
(en  1537),  était  disciple  de  Fallope 
et  professa  pendant  plus  de  cinquante 
ans  à  l'université  de  l'adoue,  où  il  fit 
construire  à  ses  frais  un  amphithéâtre 
d'anatomie.  On  lui  doit  des  recherches 
nombreuses  sur  la  constitution  de 
l'œuf  des  Mammifères  et  la  connais- 
sance de  plusieurs  particularités  de 
structure  du  corps  humain.  L'étude 
approfondie  qu'il  fit  des  valvules  des 
veines  contribua  sans  aucun  doute  à 


22  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

sang  de  refluer  vers  le  bas ,  et  il  pensa  qu'elles  devaient  servir 
à  soutenir  ce  liquide.  Mais  il  ne  fit  aucune  application  de  ces 
découvertes  à  la  théorie  générale  du  mouvement  du  sang  dans 
l'organisme. 
Harvey.  §  9.  —  Tel  était  l'état  de  la  science,  lorsqu'un  jeune  disciple 

de  Fabricius  d'Aquapendente,  imbu  des  idées  anatomiques  de 
l'école  de  Padoue,  mais  peu  satisfait  des  doctrines  physiolo- 
giques qu'on  y  enseignait ,  entreprit  une  série  de  recherches 
nouvelles  sur  les  usages  du  cœur  et  sur  les  mouvements  du 
sang. 

C'était  Guillaume  Harvey  (1). 

préparer  les  voies  pour  la  découverte  bricius,  le  père  Paul  Servite,  qui  est 
de  la  circulation  du  sang  (a);  mais  il  plus  connu  sous  le  nom  de  Scarpi. 
n'avait  que  des  idées  très  vagues  et  Mais  cette  assertion  ne  repose  sur  au- 
tres incomplètes  sur  les  usages  de  ces  cime  base  solide,  et  c'est  avec  moins 
soupapes.  Ainsi  que  le  remarque  avec  d'apparence  de  raison  qu'on  a  voulu 
beaucoup  de  justesse  M.  Flourens,  lui  attribuer  aussi  l'honneur  de  la 
«  les  valvules  des  veines  sonlla  preuve  découverte  de  la  circulation  du  sang, 
anatomique  de  la  circulation  du  sang  Cette  question  historique,  dont  plu- 
(la  preuve  qu'il  fait  circuit,  retour,  sieurs  écrivains  se  sont  occupés  dans 
qu'il  revient  sur  lui-même,  qu'il  cir-  ces  dernières  années,  a  été  très  bien 
cule)  ;  mais  Fabrice  ne  vit  pas  cette  discutée  par  Senac  {g),  par  un  des 
preuve,  il  ne  vit  que  le  fait,  et  n'en  rédacteurs  d'une  revue  anglaise  (h), 
tira  pas  la  conséquence  importante  et  mieux  encore  par  M.  Flourens  (ijj. 
qu'Harvey  seul  en  a  su  tirer  (6).  »  (1)  William  Harvey  naquit  en 
Pieresc(c),  Wal3eus(c?),  Fulgence(e)  159S,  à  Folkstone,  petite  ville  delà 
et  quelques  autres  écrivains  (f),  ont  côte  sud  de  l'Angleterre,  voisine  de 
attribué  la  découverte  des  valvules  Douvres.  Son  éducation  scientifique 
des  veines  ù  un  contemporain  de  Fa-  fut  commencée  à  l'université  de  Cam- 

(a)  Hieronymi  Fabrici  ab  Aquapendenle,  De  venarum  ostiolis  (Opéra  omnia  anatomica  ei  phy- 
siologica,  ôdit.  de  1738,  p.  450,  pi.  1  à  8). 

(b)  Flourens,  Op.  cit.,  p.  24. 

(c)  Gassendi,  Viriillust.  N.  C.  T.  de  Pieresc  vita,  1641,  lib.IV,  p.  222. 

(d)  "Walœus,  Epistolce  duœ  de  motuchyli  et  sanguinis.  Lugd.  Batav.,  1645. 

(e)  Opère  delpadre  Paolo,  etc.,  1687,  vita  del  Padre,  p.  44. 

(f)  Daru,  Histoire  de  Venise,  t.  V,  p.  632. 

Biancbi  Giovani,  Biografia  di  fra  Paolo  Scarpi.  2  vol.  in-8,  Zurich,  1836. 

; Voyez  aussi  Brullé,  Note  pour  servir  ù  l'histoire  de  la  circulation  du  sang  (Mém.  de  l'Acad. 

de  Dijon,  1854). 

(g)  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  t.  II,  p.  21  et  suiv. 
(7i)  London  and  ~\Yestminster  Revieiv,  1838,  vol.  XXIX,  p.  158. 
(i)  Flourens,  Op.  cit.,  p.  24  et  p.  109. 


9% 


TRAVAUX    DE    HARVEY. 

«  Lorsque  je  commençai  à  étudier,  non  pas  dans  les  livres, 
mais  dans  la  Nature  et  à  l'aide  de  vivisections,  les  mouvements 
du  cœur,  la  tache  me  parut  si  difficile,  nous  dit  Harvey,  que 
j'étais  presque  tenté  de  penser,  comme  Fracastor,  que  Dieu 

seul  pouvait  les  comprendre Mais  ;  en  y  apportant  chaque 

jour  plus  d'attention  et  de  soins,  en  multipliant  mes  vivisections, 
en  employant  à  ces  expériences  une  grande  variété  d'Animaux, 
et  en  recueillant  beaucoup  d'observations,  j'ai  cru  enfin  être 

arrivé  à  la  connaissance  de  la  vérité Depuis  lors  je  n'ai  pas 

hésité  à  communiquer  mes  vues ,  non-seulement  à  quelques 
amis  ,  mais  au  public ,  dans  mes  leçons  d'anatomie.  Elles  ont 
■été  accueillies  avec  faveur  par  les  uns,  avec  blâme  par  d'autres  : 
d'un  côté,  on  m'a  imputé  à  crime  de  m'être  écarté  des  pré- 
ceptes de  mes  devanciers  ;  d'autre  part,  on  a  exprimé  le 
désir  de  me  voir  développer  davantage  ces  nouveautés  qui 
pourraient  bien  être  dignes  d'attention.  Enfin,  cédant  aux  con- 
seils de  mes  amis,  je  me  suis  décidé  à  employer  la  voie  de  la 
presse  pour  soumettre  au  jugement  de  tous  mes  travaux  et 
moi-même.  » 

Telles  sont  à  peu  près  les  expressions  dont  Harvey  se  sert 


bridge  et  achevée  à  Padoue,où  il  étn-  ce  monarque,  Charles  Ier,  accorda  à 

dia  la  médecine  pendant  cinq  années  ,  ses  travaux  la  protection  la  plus  libé- 

sous  la  direction  de  Fabricius  d'Aqua-  raie.  En  1652,  Harvey  publia  sur  la 

pendente,  deCasseriusetdeMinadous.  génération  un  grand  travail  qui  aurait 

Il  exerça  ensuite  la  médecine  à  Lon-  suffi  pour  le  placer  en  première  ligne 

dres  ;  en  1609 ,  il  fut  chargé  de  l'un  parmi  les  physiologistes  de  son  épo- 

des  grands   hôpitaux    de  cette    ville  que,   mais  qui  est  loin  d'avoir  rim- 

(l'hôpital   de   Saint-Bartbolomé,  près  porlance  de  son  livre  sur  les  mouve- 

Smithfields),  et  en  1615  il  fut  nommé  ments  du  cœur  et  du  sang, 
professeur  d'anatomie  et  de  chirurgie  11  avait  préparé  aussi  un  ouvrage 

au  Collège  des  médecins.  C'est  dans  sur  la  génération  des  Insectes  ;    mais 

cette  chaire  qu'il  commença  à  exposer  le  manuscrit   en  fut  détruit  par   la 

ses  vues  relativement  au  mouvement  populace  de  Londres ,  qui  pilla  son 

du  sang.    La    célébrité   qu'il   acquit  logement  durant  la  guerre  civile.  Il 

bientôt  lui  valut  le  titre  de  médecin  mourut  en   1657,  à  l'âge  de  quatre- 

du  roi  Jacques  Ier,  et  le  successeur  de  vingts  ans. 


%k  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA.    CIRCULATION. 

pour  motiver  la  publication  de  son  livre  (1)  ;  il  s'en  excuse 
presque,  et  cependant  ce  livre  est  un  chef-d'œuvre  (2).  Non- 
seulement  il  contient  une  des  découvertes  les  plus  importantes 
de  la  physiologie ,  mais  il  est  écrit  avec  une  méthode  si  par- 
faite ,  que  peut-être  Bacon  songeait-il  aux  recherches  de  son 
modeste  et  sage  compatriote  lorsqu'il  traçait  de  main  de  maître 
les  règles  à  suivre  dans  les  investigations  scientifiques  (3). 

§  10.  —  Harvey  étudie  d'abord  les  mouvements  du  cœur,  et 
ne  s'occupe  en  premier  lieu  que  de  la  portion  principale  de  cet 
organe  :  celle  qui  correspond  aux  ventricules  (ft). 

Lorsqu'on  ouvre  la  poitrine  d'un  Animal  vivant  et  qu'on 
enlève  la  capsule  dont  le  cœur  est  entouré,  on  voit,  dit-il,  que 
cet  organe  se  meut  et  se  repose  alternativement.  Cela  est  surtout 
facile  à  constater  chez  les  Animaux  à  sang  froid,  tels  que  les 
Grenouilles,  les  Serpents,  les  Poissons,  les  Crabes,  les  Coli- 
maçons, ou  bien  encore  chez  les  Animaux  à  sang  chaud,  le 


(1)  Exercitatio  anatomica  de  mota  en  1628  ;  mais  ce  dernier  semble  avoir 
cordis  et  sanguinis  in  Animalibus.  été  écrit  en  1619,  et  dès  1616  Uarvcy 
In-Zi,  Francofurti,  1628,  cap.  i,  p.  20.  avait  exposé  publiquement  clans  ses 

(2)  «  Ce  petit  livre  de  cent  pages,  leçons  la  série  d'observations,  d'expé- 
dit  M.  Flourens,  est  le  plus  beau  riences  et  de  déductions  qui  forment 
livre  de  la  physiologie.  »  (Op.  cit.,  la  base  de  sa  théorie.  La  date  de  1616 
p.  30.)  est  donnée  par  un  manuscrit  de  Har- 

Néanmoins  Aubry  ,  l'un  des  con-  vey,  intitulé  De  anatomia  universa, 

temporains  de  Harvey,  nous  apprend  qui  paraît    être   perdu   aujourd'hui, 

que  la  publication  de  ce  chef-d'œuvre  mais  qui  existait  encore  à  la  biblio- 

iit  diminuer  énormément  la   clientèle  thèque  du  Musée  Britannique,  à  l'épo- 

médicale  de  son  auteur.  Il  paraît,  du  que  où  le  Collège  des  chirurgiens  de 

reste,  que  les  praticiens  de  son  temps  Londres  fit  publier  la  grande  édition 

faisaient  très  peu  de  cas  du  jugement  des  œuvres  de  ce  physiologiste  (b). 

de  cet  homme  de  génie,  dont  le  bon  (à)  Caput  n  :  Ex  vivorum  dissec- 

sens  était  si  remarquable  (a).  tione,  qualis  sit  cordis  motus.  (Exer- 

(3)  Le  Novum  organum  de  Bacon  citatio  anatom.  de  motu  cordis  et  san- 
parut  en  1620,  et  le  livre  de  Harvey  guinis,  p.  21.) 

(a)  Aubry,  Letters  and  Lives  of  Eminent  Persons. 

(b)  Opéra  omnia. 

—  Voyez  la  vie  de  Harvey  placée  en  lète  de  ce  livre,  p.  31 . 


TRAVAUX    DE    HARVET.  25 

Chien,  par  exemple ,  quand  le  cœur  est  déjà  affaibli  et  semble 
près  de  mourir. 

Le  mouvement  du  cœur  est  accompagné  de  trois  phénomènes 
principaux  : 

1°  Au  moment  de  l'action ,  il  se  relève ,  sa  pointe  frappe 
contre  la  poitrine ,  et  son  battement  se  fait  sentir  au  dehors. 

2°  Il  se  contracte  de  toutes  parts,  mais  principalement  dans  le 
sens  transversal,  ainsi  qu'on  peut  facilement  s'en  convaincre  en 
extirpant  le  cœur  d'une  Anguille  vivnnte  et  en  le  plaçant  sur 
une  table. 

3°  Il  devient  dur  comme  se  durcit  l'avant-bras  quand  les 
tendons  tirent  sur  les  doigts  pour  les  faire  mouvoir. 

Lorsqu'on  observe  ce  phénomène  chez  les  Poissons  et  les 
autres  Animaux  à  sang  froid  ,  tels  que  les  Grenouilles  ou  les 
Serpents ,  on  voit  aussi  que  le  cœur  devient  plus  pâle  lorsqu'il 
se  meut  de  la  sorte,  et  qu'il  prend  au  contraire  une  couleur 
rouge  plus  intense  pendant  le  repos. 

Harvey  en  conclut  que  le  battement  du  cœur  est  un  mouve- 
ment de  contraction  qui  détermine  le  rapetissement  des  ventri- 
cules creusés  dans  son  intérieur  et  l'expulsion  de  la  charge  de 
sang  logée  dans  ces  cavités  ;  que,  pendant  le  repos,  les  ventri- 
cules se  remplissent  de  nouveau  ;  et  il  ajoute  que,  pour  se  con- 
vaincre mieux  encore  du  rôle  de  cet  organe,  il  suffit  de  percer 
une  de  ses  cavités ,  car  alors  on  voit  le  sang  être  lancé  au 
dehors  avec  force  par  la  plaie,  chaque  fois  qu'un  battement  se 
produit  (1). 

Depuis  l'antiquité,  on  avait  remarqué  l'isochronisme  des  bat- 
tements du  cœur  et  des  pulsations  des  artères  ;  mais  on  ne 
s'était  pas  bien  rendu  compte  de  la  nature  de  ces  mouvements. 
Galien,  se  fondant  sur  les  résultats  d'une  expérience  mal  faite , 
supposait  que  hdiastole,  ou  dilatation  de  ces  vaisseaux,  dépendait 

(1)  Op.  cit.,  p.  21  et  22. 


26  HISTOIRE    DE    LÀ    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

d'une  puissance  qui  résiderait  dans  leurs  parois  et  qui  leur  vien- 
drait du  cœur  (1).  Harvey  fait  voir  que  les  choses  ne  se  passent 
pas  ainsi  :  que  les  pulsations  du  cœur  et  les  pulsations  des 
artères  sont  des  mouvements  de  nature  différente  ;  que  celles 
des  artères  consistent  dans  un  mouvement  de  diastole;  celles 
du  cœur,  au  contraire,  dans  un  mouvement  de  systole;  que  la 
diastole  des  artères  ne  correspond  pas  à  la  diastole  du  cœur, 
mais  à  la  contraction  de  cet  organe  ;  et  qu'il  y  a  antagonisme 
entre  les  mouvements  de  ces  deux  portions  du  système  vascu- 
laire.  11  établit  que  c'est  au  moment  où  les  ventricules  se  con- 
tractent que  les  artères  se  gonflent,  et  que  c'est  parce  que  le 
cœur,  en  se  contractant ,  injecte  une  nouvelle  quantité  de  sang 
dans  les  artères ,  que  celles-ci  sont  distendues  et  frappent 
contre  le  doigt  de  l'observateur. 

Ce  fait  fondamental ,  qui  peut  -  être  avait  été  vaguement 
entrevu  par  Aristote  ,  mais  qui  n'avait  été  nettement  expliqué 
ni  bien  compris  par  aucun  des  prédécesseurs  de  Harvey,  sert 
de  point  de  départ  pour  de  nouvelles  expériences  dont  décou- 
leront de  nouvelles  déductions.  Mais  ,  avant  d'aller  plus  loin, 
Harvey  veut  consolider  mieux  encore  les  bases  de  son  édifice. 


(1)  Galien  s'appuyait  sur  une  expé-  cette  expérience,  et  constata  la  persis- 
rience  dans  laquelle,  ayant  ouvert  Ion-  tance  des  battements  de  l'artère  au- 
gitudinalement  une  artère  sur  un  dessous  comme  au-dessus  de  la  liga- 
Animal  vivant,  et  y  ayant  introduit  ture,  pourvu  que  le  sang  continue  à 
un  tube  pour  le  passage  du  sang,  couler  librement  dans  le  tube  à  l'aide 
il  avait  vu  le  vaisseau  battre  comme  duquel  la  continuité  est  maintenue 
d'ordinaire  au-dessous  de  la  plaie,  jus-  entre  les  deux  portions  du  vaisseau 
qu'à  ce  qu'il  eût  serré  fortement  les  séparées  par  la  ligature,  il  est  à  pré- 
parois artérielles  sur  le  tube,  à  l'aide  sumer  que  dans  l'expérience  de  Galien, 
d'une  ligature;  ce  qui,  suivant  lui,  le  sang  s'était  coagulé  dans  le  lube 
détermine  la  cessation  du  pouls  dans  et  avait  obstrué  le  passage,  accident 
la  portion  de  l'artère  située  au  delà  qui  se  produit  très  souvent  dans  des 
du  point  comprimé  (a).  Harvey  répéta  opérations  de  ce  genre. 

(a)  Galenus,  An  sanguis  conlineatur  in  arteriis.  [Opéra,  édit.  de  Venise,  1525,  1. 1,  p.  60. 


TRAVAUX    DE    HARYEY.  27 

Il  étudie  donc  avec  plus  d'attention  les  rapports  qui  existent 
entre  les  battements  du  cœur  et  les  pulsations  des  artères.  ïl 
observe  que  le  pouls  s'affaiblit  dans  les  artères  quand  le  ventri- 
cule gauche  ne  bat  que  faiblement,  et  s'y  arrête  quand  celui-ci 
ne  se  contracte  plus.  Il  fait  voir  qu'il  en  est  de  même  pour 
l'artère  veineuse  ou  artère  pulmonaire,  quand  les  mouvements 
du  ventricule  droit  deviennent  languissants  ou  s'arrêtent.  Il 
rappelle  aussi  que  c'est  au  moment  où  le  cœur  bat  que  le  sang 
s'échappe  avec  le  plus  de  force  d'une  artère  ouverte,  et  il  con- 
state par  des  vivisections  que  le  sang,  en  sortant  d'une  blessure 
faite  à  l'artère  pulmonaire ,  forme  un  jet  plus  violent  quand  le 
ventricule  droit  se  contracte.  Ce  n'est  donc  pas  une  dilatation 
des  artères  qui  appelle  le  sang  dans  l'intérieur  de  ces  vaisseaux  ; 
c'est  l'arrivée  d'une  ondée  de  liquide  qui  détermine  cette  dila- 
tation, et  la  cause  de  ces  deux  phénomènes  est  la  même,  savoir  : 
la  contraction  des  ventricules  du  cœur  (1). 

Mais  le  cœur  ne  se  compose  pas  seulement  des  ventricules  ; 
chez  tous  les  Animaux  vertébrés,  cet  organe  renferme  aussi 
une  ou  deux  cavités,  que  l'on  connaît  sous  le  nom  d'oreillettes; 
et  l'on  savait,  par  les  observations  de  Gaspard  Bauhin  et  de  Jean 
Riolan,  que  les  battements  de  ces  diverses  parties  n'ont  pas 
lieu  en  même  temps  (2).  Harvey  étudie  ces  mouvements  chez 
les  Poissons,  où  ils  sont  plus  lents  et  plus  distincts  que  chez 
les  Animaux  des  classes  supérieures,  et  il  voit  qu'il  y  a  toujours 
alternance  entre  les  contractions  du  ventricule  et  les  contrac- 
tions de  l'oreillette  (3).  11  reconnaît  que  l'oreillette  devient  pale 
et  se  vide  quand  elle  se  contracte,  et  qu'au  moment  où  le  sang 
est  ainsi  expulsé  de  sa  cavité ,  le  ventricule  situé  au-dessous  se 


(1)  Caput  ni  :  Arteriarwn  motus  (1621).  —  J.  Riolani  filii  Anthropoiira- 
qualis  exvivorum  dissectione.  (P.  2U  phia,  lib.  IU,  cap.  xn.p.  372  (1626). 
et  25.)  (3)  Caput  iv  :   Motus  cordis  et  au- 

(2)  G.  Bauhini  Theatrum  anato-  ricularum  qualis  ex  vivorum  dissec' 
micum,  lib.    XI ,   cap.    xxi,   p,  225  iione.  (P.  25  à  29.) 


28  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

relâche  et  se  remplit.  Enfin,  par  une  expérience  très  simple, 
Harvcy  montre  qu'il  n'y  a  pas  seulement  coïncidence  entre  ces 
faits,  mais  que  l'entrée  du  sang  dans  le  ventricule  est  déterminée 
par  la  systole  de  l'oreillette.  En  effet,  d'un  coup  de  ciseaux  il 
enlève  la  pointe  du  cœur  et  ouvre  largement  le  ventricule;  le 
sang  contenu  dans  cette  poche  charnue  s'en  échappe ,  mais  un 
nouveau  jet  se  produit  chaque  fois  que  l'oreillette  se  contracte. 

Harvey  constata  aussi  que,  chez  les  Animaux  dont  le  cœur 
est  pourvu  de  deux  ventricules  et  de  deux  oreillettes,  les  choses 
se  passent  de  la  même  manière  :  les  deux  ventricules  se  con- 
tractent à  la  fois,  et,  pendant  les  instants  de  repos  qui  suivent 
ce  battement,  les  deux  oreillettes  se  contractent  à  leur  tour. 

Ainsi ,  ajoute  ce  grand  et  prudent  physiologiste ,  tout  nous 
conduit  à  penser  que  l'oreillette  ,  abondamment  remplie  par  le 
sang  des  veines,  dont  elle  est  pour  ainsi  dire  le  réservoir,  se  con- 
tracte d'abord  et  pousse  ce  liquide  dans  le  ventricule  ;  que 
celui-ci ,  rempli  à  son  tour,  se  contracte  aussi  et  envoie  dans 
les  artères  le  sang  qu'il  a  reç.u  de  l'oreillette  ;  que  le  ventricule 
gauche  envoie  ainsi  le  sang  dans  tout  le  corps  par  le  moyen  de 
l'aorte  et  de  ses  branches ,  et  que  le  ventricule  droit  l'envoie 
aux  poumons  par  le  vaisseau  appelé  veine  artérieuse,  lequel,  par 
sa  structure  et  ses  fonctions,  est  en  réalité  une  artère  (1). 

Vous  remarquerez  que  Harvey  ne  présente  toutes  ces  vérités 
que  comme  des  choses  probables;  et  avant  d'apporter  de  nou- 
veaux arguments  à  l'appui  de  ses  conclusions,  il  achève  l'exposé 
de  ses  vues,  et  examine  ce  que  devient  le  sang  lancé  par  le  cœur 
dans  ces  deux  systèmes  d'artères,  question  dont  la  solution, 
ajoute-t-il,  aurait  été  depuis  longtemps  résolue  si  les  anatomistes 
avaient  donné  à  l'organisation  des  Animaux  inférieurs  la  même 
attention  qu'ils  accordent  à  la  structure  du  corps  de  l'Homme (2). 
Et  j'insiste  sur  cette  pensée ,  non-seulement  parce  qu'elle  est 

(1)  Caput  v  :  Cor  dis  motus  actio  et         (2)  Op.  cit.,  p.  32. 

functio.  (P.  29.) 


TRAVAUX    DE    HARVEY.  29 

vraie  en  elle-même ,  mais  parce  qu'elle  s'applique  également 
bien  à  beaucoup  d'autres  sujets  et  n'a  fait  jusqu'à  ce  jour  que  peu 
de  progrès. 

Aussi  est-ce  chez  les  Poissons  que  Harvey  cherche  d'abord  à 
se  rendre  compte  du  cours  du  sang.  Là,  dit-il,  aucune  difficulté 
ne  se  présente,  et  il  suffit  de  quelques  vivisections  pour  recon- 
naître que  le  sang,  reçu  d'abord  dans  un  sac  membraneux 
analogue  à  l'oreillette  du  cœur  de  l'Homme,  est  poussé  par  cet 
organe  dans  un  ventricule  unique  qui ,  à  son  tour,  l'envoie 
dans  un  tube  ou  artère  chaque  fois  qu'il  vient  à  battre ,  c'est- 
à-dire  à  se  contracter.  Chez  les  Grenouilles ,  les  Lézards ,  les 
Serpents  et  d'autres  Animaux  analogues  qui  ont  des  poumons, 
le  passage  du  sang  des  veines  clans  les  artères  est  également 
facile  à  constater,  car  les  deux  ventricules  du  cœur  de  l'Homme 
n'y  sont  représentés  aussi  que  par  un  ventricule  unique.  Le 
même  résultat  s'obtient  de  la  même  manière  chez  l'embryon 
des  Animaux  supérieurs ,  car  avant  la  naissance  un  grand  trou 
de  forme  ovalaire  fait  communiquer  l'oreillette  droite  avec 
l'oreillette  gauche ,  et  le  sang  qui  vient  du  système  veineux 
peut  arriver  ainsi  dans  cette  dernière  cavité  sans  pouvoir  ensuite 
rebrousser  chemin,  à  cause  du  jeu  d'une  valvule  membraneuse 
dont  cet  orifice  est  garni.  Une  autre  voie  est  également  ouverte 
au  sang  veineux  pour  arriver  dans  les  artères  au  moyen  d'un 
vaisseau  qui  s'étend  de  l'origine  de  la  veine  artérieuse  (  ou 
artère  pulmonaire)  à  l'aorte ,  de  sorte  que  cette  grande  artère 
semble  naître  par  deux  racines  des  deux  ventricules  du  cœur. 
Mais,  après  la  naissance,  ces  deux  routes  ne  restent  pas  libres, 
et  il  faut  alors  que  le  sang  de  la  veine  cave  passe  du  ventricule 
droit  dans  l'artère  pulmonaire ,  puis  traverse  ces  organes  pour 
revenir  ensuite  parles  veines  pulmonaires  jusque  dans  le  ven- 
tricule gauche,  et  de  là  dans  l'aorte  (1). 

(1)  Caput  vi  :  Quibus  viis  sanguis      ventriculo  cordis  in  sinistrum  defe- 
èvena  cava  in  arterias,  vel  è  dextro      ratur.  [V.  32  à  '61). 


30  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

Harvey  s'applique  donc  à  prouver  que  le  sang  peut  effecti- 
vement filtrer  à  travers  la  substance  du  poumon  pour  passer  de 
l'un  des  systèmes  de  vaisseaux  pulmonaires  dans  l'autre  ;  il 
invoque ,  à  l'appui  de  son  opinion  ,  le  sentiment  du  «  savant  et 
habile  anatomiste  »  Columbus,  dont  j'ai  déjà  exposé  les  vues; 
et  ce  qui  est  plus  important,  il  explique,  mieux  que  ne  l'avait 
fait  Galien,  comment  les  trois  valvules  sigmoïdes  placées  à  l'en- 
trée de  l'artère  pulmonaire  empêchent  le  sang  qui  a  été  poussé 
dans  ce  vaisseau  par  la  contraction  du  ventricule  de  retourner 
en  arrière  pour  refluer  dans  cette  cavité,  et  le  forcent  de  couler 
sans  cesse  vers  les  poumons  (1). 

Mais  il  ne  suffisait  pas  de  savoir  que  du  sang  est  porté  de  la 
sorte  de  la  veine  cave  jusque  dans  l'aorte,  en  suivant  la  voie 
détournée  du  double  système  des  vaisseaux  pulmonaires  ;  Harvey 
dut  se  demander  aussi  quelle  est  la  quantité  de  ce  liquide  qui 
traverse  sans  cesse  le  cœur  et  les  poumons ,  et  c'est  l'étude  de 
cette  question  qui  le  conduit  à  trouver  qu'il  doit  nécessairement 
y  avoir  dans  l'organisme ,  non-seulement  distribution ,  mais 
circulation  du  sang  (2). 

Jusqu'alors  on  pensait ,  avec  Galien ,  que  le  sang  se  forme 
dans  le  foie,  et  que  les  veines  naissent  de  cet  organe  pour  aller 
porter  ce  liquide  ait  cœur.  On  pouvait  donc  croire  que  de  nou- 
velles quantités  de  liquide  arrivaient  sans  cesse  dans  le  ventri- 
cule droit  et  servaient  à  entretenir  le  flux  du  suc  nourricier, 
qui ,  après  avoir  traversé  le  poumon  et  le  ventricule  gauche 
du  cœur,  se  répandait  par  les  artères  dans  toutes  les  parties  du 
corps.  C'était  là,  en  effet,  l'idée  la  plus  simple  et  celle  que 
paraissent  avoir  eue  d'une  manière  plus  ou  moins  complète 


(1)  Caput  vn  :  Sanguinem  de  di'x-  (2)    Caput    vni  :    De    copia  san- 

tro  ventriculo  cordis  per  pulmonum  guinis  transeuntis  per  cor   è  vents 

parenchyma  perrneare  in  arteriam  in  arterias ,    et  de  circulari  motu 

venosam  et  sinistrum  ventriculum.  sanguinis.  [Op.  cit.,]).  /il.) 


{Op.  cit.,  p.  37àZiO.) 


TRAVAUX    DE    HARVEY.  31 

tous  les  prédécesseurs  et  les  contemporains  de  Harvey.  Mais, 
en  observant  la  quantité  de  liquide  qui ,  dans  un  temps  donné, 
est  lancée  dans  les  artères  par  les  contractions  du  cœur,  Harvey 
comprit'  que  les  choses  ne  pouvaient  se  passer  de  la  sorte  ;  que- 
tout  ce  sang  ne  saurait  être  sans  cesse  fourni  par  les  sucs  ali- 
mentaires ;  que  les  veines  se  videraient  bientôt  si  elles  ne  pui- 
saient qu'à  cette  source,  et  que  ,  d'autre  part,  les  artères  ne 
pourraient,  sans  se  rompre,  recevoir  à  chaque  instant  de  nou- 
velles charges  de  liquide,  si  ces  tubes  membraneux  ne  le  lais- 
saient s'écouler  par  leur  extrémité  opposée.  Il  arriva  donc  à 
penser  que  le  sang  des  artères  devait  pouvoir  passer  dans  les 
veines,  et  se  mouvoir  ainsi  sans  cesse  dans  un  cercle  fermé. 
Effectivement ,  il  constata  bientôt  que  le  sang  envoyé  du  ven- 
tricule gauche  du  cœur  dans  toutes  les  parties  de  l'organisme,  par 
l'aorte  et  les  branches  de  ce  vaisseau,  revient  par  les  veines  dans 
les  cavités  droites  du  cœur,  de  la  même  manière  que  ce  liquide 
est  ensuite  transmis  du  ventricule  droit  aux  poumons  et  des  pou- 
mons aux  cavités  gauches  du  cœur  par  les  artères  et  les  veines 
pulmonaires.  Le  sang  revient  donc  à  son  point  de  départ,  pour 
parcourir  de  nouveau  la  route  qu'il  a  déjà  suivie  et  exécuter  un 
mouvement  circulaire. 

§  11.  —  L'idée  de  la  circulation  du  sang  se  trouvait  donc 
complétée  et  exprimée  de  la  manière  la  plus  nette ,  je  dirai 
même  de  la  manière  la  plus  poétique  ;  car,  pour  mieux  rendre 
sa  pensée ,  Harvey  emprunte  à  Aristote  une  grande  et  belle 
comparaison.  De  même  que  les  planètes  circulent  dans  l'espace 
en  parcourant  toujours  la  même  orbite ,  qui  n'a  ni  commence- 
ment ni  fin,  l'eau  circule  entre  la  terre  et  le  ciel  quand,  après 
être  tombée  sous  la  forme  de  pluie  ou  de  rosée  pour  humecter 
et  féconder  le  sol ,  elle  s'évapore  sous  l'influence  des  rayons  du 
soleil,  et  va  former  des  vapeurs  destinées  bientôt  à  se  condenser 
et  à  descendre  de  nouveau.  C'est  aussi,  dit  Harvey,  en  parcourant 
un  cercle  analogue,  que  le  sang  nourricier  de  l'organisme  se 


32  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

répand  du  cœur  dans  toutes  les  parties  du  corps  pour  y  porter 
la  chaleur  et  la  vie  ,  puis,  refroidi  et  vicié  par  son  contact  avec 
ces  parties,  il  revient  au  cœur  y  reprendre  ses  qualités  premières, 
et  retourne  ensuite  encore  une  fois  aux  organes  d'où  il  était 
venu.  Pour  compléter  ce  tableau,  il  manquait  à  Harvey  de 
connaître  le  rôle  des  poumons  et  l'influence  de  l'air  dans  cette 
restauration  des  propriétés  excitantes  du  sang  ;  il  attribue  à  tort 
cette  action  au  cœur,  qu'il  considère  comme  la  source  de  la 
vie  ;  mais  néanmoins  l'image  qu'il  nous  offre  du  mouvement 
des  fluides  nourriciers  dans  l'intérieur  de  l'économie  animale 
est  vraie,  complète  et  saisissante. 

Cependant  cette  idée  d'une  circulation  du  sang  n'était  encore 
qu'une  vue  de  l'esprit,  et,  pour  l'élever  au  rang  d'une  vérité 
scientifique,  il  fallait  démontrer  qu'en  effet  le  fluide  nourricier 
coule  sans  cesse  du  cœur  aux  organes,  puis  des  artères  dans  les 
veines  ,  et  des  veines  dans  les  artères ,  en  passant  de  nouveau 
par  le  cœur  et  les  poumons.  C'est  ce  que  Harvey  ne  manqua 
pas  de  faire,  et  ici  encore  l'excellence  de  sa  méthode  et  la  droi- 
ture de  son  jugement  se  révèlent  à  chaque  pas. 

Aujourd'hui  il  serait  inutile  de  développer  tous  les  arguments 
dont  ce  grand  physiologiste  lit  usage  pour  étayer  sa  doctrine  ; 
mais,  pour  prouver  que  le  sang  circule,  en  effet,  comme  Harvey 
le  dit ,  je  crois  devoir  citer  quelques  -  unes  des  expériences 
auxquelles  il  eut  recours. 

§  12.  —  Les  Reptiles  peuvent  vivre  très  longtemps  après 
qu'on  leur  a  ouvert  largement  le  corps  et  qu'on  a  mis  leur 
cœur  à  nu.  Harvey  profita  de  cette  circonstance  pour  étudier 
expérimentalement  la  marche  du  sang  dans  les  gros  vaisseaux 
qui  avoisinent  cet  organe.  Il  ouvrit  donc  la  cavité  viscérale  d'un 
Serpent  vivant ,  et  observa  les  mouvements  du  cœur  ;  puis  il 
comprima  avec  des  pinces,  à  quelque  distance  au-dessous  de 
cet  organe,  la  veine  cave  qui  va  y  déboucher,  et  il  vit  qu'au 
bout  de  quelques  instants  la  portion  du  vaisseau  située  au-dessus 


travaux  de  karvey.  33 

du  point  ainsi  oblitéré  devint  vide  de  sang  ;  le  cœur  perdit  en 
même  temps  sa  couleur  rouge  intense  et  ses  mouvements  s'af- 
faiblirent ;  mais ,  en  faisant  cesser  l'obstacle  qui  s'opposait  au 
cours  du  sang  veineux  vers  le  cœur,  tous  ces  accidents  ces- 
sèrent, et  les  phénomènes  de  la  circulation  se  produisirent  de  la 
manière  ordinaire.  Ensuite  il  comprima  de  la  même  façon  l'ar- 
tère aorte  à  quelque  distance  du  cœur,  et  vit  que  ce  vaisseau,  au 
lieu  de  se  vider  comme  l'avait  fait  la  veine,  se  gonfla  beaucoup 
au-dessus  du  point  oblitéré  ;  enfin ,  le  cœur  prit  en  même 
temps  une  teinte  plus  foncée ,  et  parut  comme  surchargé  du 
sang  qui  s'accumulait  dans  son  intérieur. 

D'autres  expériences  tirent  voir  que  le  sang  arrivait  dans  les 
membres  par  les  artères  et  retournait  au  cœur  par  les  veines. 

Si  l'on  place  une  ligature  autour  du  bras  d'un  Homme  et  qu'on 
la  serre  fortement ,  le  pouls  cesse  de  se  faire  sentir  au  poignet 
et  dans  toutes  les  artères  situées  au-dessous  du  point  comprimé; 
mais,  immédiatement  au-dessus  de  ce  point,  c'est-à-dire  du 
côté  du  cœur,  il  en  est  tout  autrement  ;  les  artères  battent  avec 
plus  de  force  que  d'ordinaire,  et  se  gonflent  comme  si  le  flux  du 
sang  dans  leur  intérieur  venait  heurter  l'obstacle  qui  s'oppose  à 
son  passage.  La  main  et  l 'avant-bras  conservent  leur  couleur 
ordinaire,  ne  se  gonflent  pas,  et  semblent  seulement  s'engourdir 
et  se  refroidir.  Mais  si  l'on  vient  alors  à  relâcher  un  peu  la  liga- 
ture, cet  état  de  choses  change  complètement  :  le  pouls  se  rétablit 
au-dessous  du  lien  et  cesse  d'avoir  une  intensité  insolite  au-des- 
sus ;  le  sang  reprend  évidemment  son  cours  dans  ces  vaisseaux, 
qui  sont  logés  profondément  dans  le  membre,  et  il  se  distribue 
dans  l'avant-bras  et  dans  la  main,  comme  d'ordinaire.  Mais  les 
veines  superficielles  du  bras  sont  encore  comprimées  par  la 
ligature,  et  le  sang  qui  arrive  dans  le  membre  par  les  artères, 
ne  pouvant  plus  retourner  au  cœur  par  l'intermédiaire  de  ces 
mêmes  veines,  s'accumule  en  partie  au-dessus  du  lien  ;  la  main 
se  gonfle  et  ces  derniers  vaisseaux  deviennent  saillants  et  gorgés 
m.  3 


34  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

de  sang.  Entre  la  ligature  et  le  cœur  rien  de  semblable  ne  se 
voit.  Enfin,  vient-on  à  enlever  le  lien  qui  oblitérait  ces  veines, 
on  les  voit  se  dégorger  aussitôt ,  et  tout  signe  de  tuméfaction 
disparaît  dans  les  parties  inférieures  du  membre  (1). 

Ainsi  l'oblitération  de  ces  deux  ordres  de  vaisseaux  déter- 
mine des  phénomènes  inverses.  Dans  l'artère,  le  sang  s'accu- 
mule entre  le  cœur  et  l'obstacle  ;  dans  la  veine,  c'est  du  côté 
opposé ,  c'est-à-dire  au  delà  du  point  obstrué ,  que  le  sang 
s'amasse.  On  en  peut  donc  conclure  que  dans  les  artères  le 
sang  coule  du  cœur  vers  les  extrémités  ;  dans  les  veines ,  des 
extrémités  vers  le  cœur. 

Enfin,  l'anatomie  vint  fournir  à  Harvey  une  dernière  preuve 
de  la  direction  constante  et  nécessaire  du  sang  des  extrémités 
vers  le  cœur,  dans  l'intérieur  de  ces  vaisseaux.  Il  étudia  le  jeu 
des  valvules ,  dont  son  maître  ,  Fabricius  d'Aquapendente , 
avait  fait  connaître  l'existence  dans  la  plupart  des  veines,  et  il 
vit  que  ces  replis  membraneux  étaient  toujours  disposés  de 
façon  à  permettre  le  passage  du  sang  vers  le  cœur,  mais  à 
empêcher  le  reflux  de  ce  liquide  en  sens  contraire.  Pour  en 
fournir  la  preuve,  dit  Harvey,  il  suffit  de  serrer  médiocrement 
le  bras  d'un  Homme  ,  ainsi  que  cela  se  pratique  pour  l'opéra- 
tion de  la  saignée  ;  les  veines  de  l'avant-bras  se  gonflent  et  leurs 
valvules  y  produisent  l'apparence  de  nœuds.  Si  alors  on  presse 
avec  les  doigts  sur  la  portion  d'une  de  ces  veines  sous-cutanées 
comprises  entre  deux  de  ces  étranglements ,  de  manière  à  la 
vider,  et  si  l'on  maintient  la  pression  sur  l'extrémité  inférieure 
de  l'espace  ainsi  déprimé ,  on  voit  que  le  sang  ne  rentre  pas 
dans  la  veine  restée  vide  ,  bien  que  l'entre-deux  des  valvules 
suivantes  soit  gorgé  de  liquide  ;  mais  le  vaisseau  se  remplit  dès 
qu'on  permet  au  sang  de  remonter  par  le  bas  (2).  11  est  facile 
de  se  convaincre  aussi,  par  des  expériences  du  même  genre, 

(1)  Harvey,  Op.  cit.,  cap.  xi.  (2)  Op.  cit.,  cap.  xm. 


TRAVAUX    DE    HARVEY.  35 

qu'on  peut  faire  marcher  le  sang  de  bas  en  haut  dans  une  veine, 
mais  que  les  valvules  arrêtent  le  liquide  quand  on  cherche  à  le 
pousser  en  sens  contraire ,  c'est-à-dire  du  cœur  vers  les  extré- 
mités. J'ajouterai  que,  dans  une  publication  subséquente, 
Harvey  rendit  compte  d'une  autre  expérience  encore  plus  dé- 
cisive. Quand  sur  un  Animal  vivant  on  coupe  en  travers  une 
artère ,  la  carotide ,  par  exemple ,  le  sang  continue  à  couler 
avec  force  de  la  portion  des  vaisseaux  qui  est  en  communication 
avec  le  cœur,  mais  cesse  presque  aussitôt  de  sortir  du  tronçon 
qui  a  été  de  la  sorte  séparé  de  cet  organe  d'impulsion.  Yient-on 
à  couper  de  la  même  manière  une  veine ,  le  sang  coule  au  con- 
traire pendant  longtemps  de  la  portion  inférieure  du  vaisseau , 
et  le  tronçon  situé  du  côté  du  cœur  n'en  fournit  que  peu  ou 
point  (1). 

Ainsi,  quelle  que  soit  la  manière  dont  on  attaque  la  question, 
on  arrive  toujours  au  même  résultat  :  toujours  on  voit  que,  dans 
les  artères,  le  sang  va  du  cœur  aux  membres  ;  dans  les  veines, 
des  membres  vers  le  cœur. 

§  13.  —  Si  j'avais  à  faire  ici  l'histoire  des  erreurs  de  la 
science,  tâche  qui  serait  aussi  fatigante  qu'inutile,  il  me  fau- 
drait parler  de  l'opposition  vive  et  opiniâtre  que  la  doctrine  de 
la  circulation  rencontra  pendant  longtemps.  On  nia  d'abord  le 
fait  ;  puis,  quand  la  vérité  ne  pouvait  plus  être  voilée  par  les 
sophismes,  on  chercha  à  dépouiller  l'illustre  Harvey  de  la  gloire 
que  lui  donnait  sa  découverte  :  on  l'accusa  de  plagiat.  Mais, 
ainsi  que  l'observe  avec  raison  un  des  historiens  de  cette 
découverte ,  le  grand  mérite  est  toujours  probe ,  et  le  nom  de 
Harvey  est  sorti  pur  de  tous  ces  débats.  La  faculté  de  médecine 
de  Paris  se  montra  particulièrement  contraire  à  ces  idées  nou- 
velles ,  mais  elles  eurent  pour  défenseurs  Descartes ,  qui  les 
approuva  (2),  et  Louis  XIY,  qui,  pour  les  propager,  institua  au 

(1)  Harvey,  Exercitatio  altéra  ad  (2)  En  16Zi/j,  Descartes  écrivait  à 

J.  Riolanum.  (Opéra  omnia,  p.  120.)      Beverwick  :  «  Je  suis   entièrement 


36  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

Jardin  des  plantes  médicinales  une  chaire  spéciale  (1)  ;  aussi  ne 
tardèrent-elles  pas  à  être  généralement  reçues.  Aujourd'hui  il 
peut  sembler  presque  oiseux  d'en  discuter  les  bases  (2). 


»  d'accord  avec.  Harvaeius  touchant  la 
»  circulation  du  sang,  et  je  le  regarde 
»  comme  le  premier  qui  ait  fait  cette 
»  admirable  découverte  des  petits  pas- 
»  sages  par  où  le  sang  coule  des  ar- 
»  tères  dans  les  veines,  qui  est,  à  mon 
»  sens,  la  plus  belle  et  la  plus  utile 
»  que  l'on  pust  faire  en  médecine.  » 
(Lettres  de  M.  Descartes,  in-&,  Paris, 
1657,  p.  /i38.)  Pour  la  date  de  cette 
lettre,  voyez  l'édition  de  M.  Cousin, 
t.  IX,  p.  158. 

(1)  Cet  établissement  scientifique, 
appelé  aujourd'hui  le  Muséum  d'his- 
toire naturelle,  fut  fondé  en  1635,  et 
la  chaire  d'anatomie  instituée  spécia- 
lement pour  la  propagation  des  dé- 
couvertes nouvelles  date  de  1673  ; 
elle  fut  occupée  par  Dionis  ,  dont  les 
leçons  eurent  un  grand  succès  et  con- 
stituèrent la  base  d'un  ouvrage  publié 
sous  le  titre  à'Anatomie  de  l'Homme 
suivant  la  circulation,  etc. 

(2)  Lorsque  la  découverte  de  la  cir- 
culation du  sang  fut  annoncée  au 
public,  elle  fut  qualifiée  d'absurdité 


par  presque  tous  les  médecins,  et 
bientôt  un  des  disciples  du  célèbre 
anatomiste  de  Paris,  J.  lUolan,  se  ren- 
dit l'écho  des  critiques  dont  elle  était 
l'objet  (a).  D'autres  ouvrages,  tombés 
depuis  longtemps  dans  un  juste  oubli, 
parurent  aussi  contre  les  idées  de 
Harvey  (b)  ;  mais  sa  doctrine  ne  tarda 
pas  à  avoir  des  partisans,  parmi  les- 
quels on  doit  citer  en  première  ligne 
Ent  à  Londres  (c),  Rolfink  à  Iéna  (d), 
et  Slegel  à  Hambourg  (e).  Harvey 
lui-même  prit  aussi  la  plume  pour 
défendre  ses  opinions  (f),  et  peu  a  peu 
la  vérité  se  fit  jour.  Enfin,  l'illustre 
Descartes  vint  déclarer  que  la  circu- 
lation du  sang  avait  été  si  clairement 
prouvée  par  Harvey,  qu'elle  ne  pouvait 
plus  être  mise  en  doute  «  que  par  ceux 
»  qui  sont  si  attachés  à  leurs  préjugés 
»  ou  si  accoutumés  à  mettre  tout  en 
»  dispute,  qu'ils  ne  savent  pas  dis- 
»  tinguer  les  raisons  vraies  et  cer- 
»  laines  d'avec  celles  qui  sont  fausses 
»  et  probables  (g).  » 
Mais  alors  était  déjà  commencée  la 


(a)  Primirose,  Exercitationes  et  animadversiones  in  librum  llarvei  de  motu  cordis  et  circula- 
tione  sangidnis.  In-4,  Londini,  1  630. 

(6)  ^Emylius  Parisanus,  Lapis  Lydius  de  motu  cordis  et  sangidnis.  Venetiis,  1635. 

—  Veslingius,  Observ.  anatom.  et  epist.med.  Hafniaî,  1G64. 

—  J.  Riolan,  Enchiridium  anatomicum  et  pathologicum,  1648,  et  Manuel  anatomique  Ctpd* 
thologigue,  Paris,  1653. 

Pour  plus  de  détails  au  sujet  de  cette  discussion,  on  peut  consulter  le  chapitre  relatif  à  la  decou* 
verte  de  la  circulation  dans  l'Histoire  de  la  médecine  par  Sprengel,  trad.  franc.,  t.  IV,  p.  85. 

(c)  Ent,  Apologia  pro  circulatione  sangidnis.  In-8,  Londini,  1641. 

(d)  Piolfinkius  ,  Epist.  duce  ad  Th.  Bartholinum  de  motu  chyli  et  sangidnis,  1641. 

(e)  Slegel,  De  sangidnis  motu  commentarius .  In-4,  Hamburgi,  1650. 

(f)  Descartes,  De  la  formation  du  fœtus  (Œuvres,  édit.  de  M.  Cousin,  t.  IV,  p.  451). 

Cet  ouvrage  ne  fut  publié  qu'après  la  mort  de  Harvey,  en  1644  ;  mais,  ainsi  que  Cuvier  l'a  fait 
remarquer  dans  ses  Leçons  sur  l'histoire  des  sciences  ,  Harvey  eut  le  bonheur  de  voir  ses  idées 
adoptées  de  son  vivant  par  ce  grand  philosophe,  car,  dès  1644,  dans  une  lettre  adressée  à  Jean  dô 
Beverwick,  il  s'était  prononcé  nettement  à  cet  égard  (Lettres,  n°  76,  p.  438). 

(g)  Harvey,  Exercitationes  duce  anatomicœ  de  circulatione  sangidnis  ad  Johannem  Riolctnum  fil, 
Botcrodami,  1649,  1671. 


OBSERVATIONS    COMPLÉMENTAIRES.  37 

Je  ne  m'arrêterai  donc  pas  davantage  sur  ce  point;  mais  Passage  du  sang 

.        r>  vi  •  i  \  dans 

je  terai  remarquer  qu  il  manquait  une   chose   importante  a  les  capillaires. 
la  démonstration  de  la  grande  vérité  découverte  par  Harvey  : 
c'était  une  preuve  directe  du  passage  du  sang  des  artères  dans 
les  veines. 

§  \h.  —  Du  reste,  cette  preuve  ne  manqua  pas  longtemps,    observations 
et  nous  la  devons  à  Malpighi.  En  examinant  au  microscope  le     Maip^iu. 
poumon  d'une  Grenouille  vivante ,  il  vit  le  sang  circuler  dans 
les  vaisseaux  de  cet  organe,  et  passer  des  artères  dans  les  veines 
par  une  multitude  de  canaux  d'une  ténuité  extrême  qui  sont 


seconde  phase  de  la  discussion  :  ne 
pouvant  plus  nier  le  fait,  les  adver- 
saires de  Harvey  prétendirent  qu'il 
n'avait  rien  de  nouveau  ,  et  l'on  tor- 
tura de  toutes  les  manières  les  écrits 
des  anciens  ou  des  prédécesseurs 
immédiats  de  ce  grand  physiologiste 
pour  en  faire  sortir  l'idée  d'une  circu- 
lation du  sang.  Les  uns  prétendirent 
la  trouver  dans  les  ouvrages  d'Hippo- 
crate,  d'autres  dans  les  écrits  de  Salo- 
mon  ou  de  Platon  ;  d'autres  encore 
l'attribuent  à  un  auteur  du  ive  siècle 
de  l'ère  chrétienne,  Nemesius,  évêque 
d'Émèse;  à  Michel  Servet,  à  Césalpin, 
ou  à  Scarpi(a)  ;  on  a  argué  de  quelques 
passages  de  pièces  de  Shakespeare  pour 
prouver  que  c'était  du  domaine  pu- 
blic (6),  et,  de  nos  jours  encore, 
l'auteur  d'une  histoire  de  l'anatomie, 
Portai,  affirma  que  l'un  des  disciples 
de  Vésale,  Vasseur  (ou  le  Vasseur), 
en  savait  presque  autant  que  nous  au 
sujet  de  ce  phénomène  (c).  Mais  tous 
ces  dires  ne  sauraient  résister  à  un 
examen  impartial  et  approfondi.  Sé- 
nac  fit  justice  des  prétentions  de  plu- 


sieurs des  détracteurs  de  Harvey,  et 
les  historiens  les  plus  récents  de  la 
science,  tout  en  faisant  à  Servet  et  à 
Césalpin  une  large  part  de  gloire,  re- 
connaissent que  Harvey  fut  le  premier  à 
prouver  que  le  sang  circule.  «  Lorsque 
Harvey  parut ,  dit  M.  Flourens,  tout, 
relativement  à  la  circulation,  avait 
été  indiqué  ou  soupçonné,  rien  n'était 
établi.  »  J'ajouterai  :  Oui  1  tout  avait 
été  indiqué  ou  soupçonné ,  mais  rien 
n'avait  été  compris.  En  effet,  si  Michel 
Servet  avait  compris  ce  qu'est  la  circu- 
lation du  sang,  il  n'aurait  pas  imaginé 
que  les  artères,  en  se  terminant ,  de- 
viennent des  nerfs,  disposition  qui  au- 
rait rendu  toute  circulation  impossible  ; 
et  Césalpin,  qui  faisait  aller  la  chaleur 
des  artères  dans  les  veines ,  supposait 
que  les  veines  portent  le  sang  au 
foie  et  aux  intestins.  M.  Flourens  fait 
remarquer  aussi  avec  raison  que  Fa- 
bricius  d'Aquapendente,  qui  est  venu 
longtemps  après  Césalpin,  et  qui  a  si 
bien  étudié  la  structure  des  valvules 
veineuses  ,  ne  connaissait  cependant 
pas  la  circulation  du  sang. 


(a)  Voyez  Haller,  Elementa  physiologiœ,  t.  II,  p.  240  et  suiv. 

(b)  T.  Ninimo,  In  the  Shakespeare  Society's  Papers,  vol.  II,  p.  109. 

(c)  Voyez  Flourens,  Histoire  de  la  découverte  de  la  circulation  du  sang,  p.  26. 


38  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

tout  à  la  fois  les  ramu seules  terminaux  des  premiers  et  les 
racines  des  seconds.  Il  fut  témoin  du  même  spectacle  en  obser- 
vant le  mésentère  de  ces  Animaux ,  et  peu  de  temps  après , 
Leeuwenhoek ,  en  se  servant  également  du  microscope,  vit  le 
sang  circuler  comme  un  torrent  rapide  dans  les  vaisseaux 
de  l'aile  de  la  Chauve-Souris ,  de  la  queue  des  Têtards  et  de 
la  nageoire  de  divers  Poissons  (1). 

La  circulation  du  sang,  que  Harvey  n'avait  pu  apercevoir 
qu'avec  les  yeux  de  l'esprit,  est  devenue  dès  lors  visible  pour 
les  yeux  du  corps  ,  et  la  découverte  de  Malpighi  est  venue  cou- 
ronner dignement  l'œuvre  de  son  illustre  devancier.  Le  mou- 
vement impétueux  du  sang,  qui,  poussé  sans  relâche  parles 
battements  du  cœur,  parcourt  les  artères  et  se  précipite  ensuite 
dans  les  veines,  pour  retourner  à  son  point  de  départ  et  recom- 
mencer bientôt  après  le  même  trajet ,  est  un  des  phénomènes 
physiologiques  les  plus  beaux  à  contempler.  ïl  faut  le  voir  pour 
se  former  une  idée  de  la  grandeur  du  spectacle  que  nous  offrent 
ainsi  des  organes  trop  petits  pour  être  aperçus  à  l'œil  nu,  et, 
en  l'observant,  on  est  tenté  de  répéter  ces  mots  que  les  ento- 
mologistes ont  pris  pour  devise  :  Natura  maxime  miranda  in 
minimis. 

Ainsi,  dès  lors,  il  fut  établi  de  la  manière  la  plus  évidente  que 

(1)  La  découverte  de  la  circulation  tout  de  1700  à  1709  (h).  Le  spectacle 

capillaire,  par  Malpighi  (a),  date  de  de  la  circulation  du  sang,  vu  au  mi- 

1661.  Les  premières  observations  de  croscope,   fut  ensuite   vulgarisé   par 

Leeuwenhoekparaissent  avoir  été  faites  Molyneux  (c) ,  Cowper   (d)  ,  Chesel- 

en  1669,  mais  furent  multipliées  sur-  den  (e),  Baker  (f),  etc. 

(a)  Malpighi,  De  pulmonibus  epistola  II  (Opéra  omnia,  t.  II,  p.  141). 

(6)  Leeuwenhoek  ,  Letter  concerning  the  Circulation  of  the  Blood  in  Tadpoles  [Philos.  Trans    ■ 
1700,  t.  XXII,  P.  447). 

• —  Circulation  of  the  Blood  in  Butts  (  loc.  cit.,  p.  552  ). 

—  Circulation  of  the  Blood  in  Fishes  (Op.  cit.,  t.  XXVI,  p.  250  et  444). 

■ —  Voyez  aussi  Arcana  Naturœ,  t.  IV,  epist.  65  et  67. 

(c)  W.  Molyneux,  A  Letter  concerning  the  Circulation  ofthe  Blood  (Philos.  Trans.,  1685,  t.  III, 
p.  1236). 

(d)  W.  Cowper,  An  Account  of  diverse  Schemes  of  Arteries  and  Veins ,  etc.  (Philos.  Tram., 
1702,  t.  XXIII,  p.  1182). 

(e)  Cheselden,  Anatomy  ofthe  Human  Body,  pi.  30,  fig.  3. 

(f)  Baker,  The  Microscope,  ruait  easy,  1742,  p.  120  et  suiv. 


OBSERVATIONS    COMPLÉMENTAIRES.  39 

chez  l'Homme  et  tous  les  Animaux  qui  s'en  rapprochent  le  plus 
par  leur  organisation,  c'est-à-dire  chez  tous  les  Vertébrés,  le 
sang  circule  dans  un  système  de  vaisseaux  qui  le  portent  tour 
à  tour  dans  les  organes  de  la  respiration,  où  ce  fluide  entre  en 
relation  avec  l'atmosphère,  et  dans  les  diverses  parties  de  l'éco- 
nomie, où  siègent  la  nutrition,  la  sensibilité  et  le  mouvement  ; 
que  le  cœur  est  l'agent  moteur  qui  détermine  cette  circulation  ; 
que  les  artères  servent  à  conduire  le  sang  des  cavités  du  cœur 
dans  les  diverses  parties  du  corps  ;  que  les  veines  le  ramènent 
au  cœur  ;  que  ces  deux  ordres  de  vaisseaux  se  continuent  les 
uns  avec  les  autres  à  l'aide  de  canalicules  d'une  grande  ténuité 
qui  se  trouvent  dans  la  substance  de  tous  les  organes,  et  que  l'on 
nomme  des  vaisseaux  capillaires  ;  enfin,  que  le  cœur,  les 
artères  ,  les  capillaires  et  les  veines,  ne  forment  qu'un  seul  et 
même  système  de  conduits  qui  représente  un  cercle ,  car  il 
fait  retour  sur  lui-même  et  n'a  ni  commencement  ni  fin. 

§  15.  —  A  l'époque  dont  je  viens  de  parler,  l'étude  anato-     Preuves 

...  ,  fournies  par  les 

inique  de  ce  vaste  assemblage  de  tubes  îrrigatoires  présentait  injections 
de  grandes  difficultés.  Effectivement ,  après  la  mort  les  artères 
se  vident,  et  lorsqu'on  disséquant  les  veines  on  vient  à  couper 
les  ramuscules  qui  en  dépendent,  le  sang  dont  elles  sont  rem- 
plies s'écoule,  et  alors  elles  s'affaissent ,  de  façon  qu'elles  de- 
viennent ,  de  même  que  les  petites  artères ,  peu  distinctes  des 
parties  molles  circon voisines.  Mais  ,  vers  la  fin  du  xyne  siècle, 
on  inventa  des  procédés  de  démonstration  qui  permirent  de 
suivre  tous  ces  vaisseaux  jusque  dans  leurs  plus  petites  divi- 
sions, et  de  rendre  bien  visibles  sur  le  cadavre  les  communica- 
tions capillaires  qui  les  relient  entre  eux.  Depuis  longtemps , 
on  avait  imaginé  de  pousser  de  l'eau  ou  d'insuffler  de  l'air  dans 
le  système  vasculaire  de  diverses  parties  dont  on  voulait  exa- 
miner la  structure ,  et  quelques  anatomistes  contemporains  de 
Malpighi  substituèrent  à  ces  fluides  des  matières  qui,  liquéfiées 
par  la  chaleur,  peuvent  être  introduites  de  la  même  manière 


/jO  HIST01BE    DE    LA   DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION, 

dans  les  canaux  sanguifères,  mais  qui,  en  se  refroidissant  ensuite, 
reprennent  leur  état  solide,  et  maintiennent  par  conséquent  les 
vaisseaux  distendus  :  de  la  cire,  par  exemple  ;  et,  afin  de  rendre 
la  détermination  des  diverses  parties  de  l'appareil  circulatoire  plus 
facile,  on  eut  soin  de  colorer  diversement  les  matières  dont  on  rem- 
plissait ainsi  les  artères  et  les  veines.  Bientôt  l'art  des  injections 
anatomiques  fut  porté  très  loin  par  Swammerdam  et  par 
Ruysch  (1);  on  en  fit  usage  journellement  dans  les  écoles,  et 
l'on  s'en  servit  même  pour  démontrer  la  continuation  directe 


(1)  Ces  deux  anatomistes,  dont  j'ai 
déjà  eu  l'occasion  de  parler  dans  le 
cours  de  ces  Leçons  (a),  portèrent  à 
un  haut  degré  de  perfection  l'art  des 
injections  angiologiques,  qui  était  pres- 
que ignoré  avant  eus  ;  mais  quelques- 
uns  de  leurs  prédécesseurs  avaient 
fait  utilement  usage  de  procédés  ana- 
logues (6).  Ainsi  Galien  paraît  s'en  être 
servi  dans  ses  études  sur  la  structure 
du  foie,  et  Bérenger  de  Carpi,  qui 
vivait  au  commencement  du  xvi"  siè- 
cle, avait  eu  recours  à  l'injection  de 
l'eau  au  moyen  d'une  seringue,  pour 
mieux  observer  la  disposition  des 
veines  des  reins.  Eustachi ,  Willis, 
Glisson,  de  Graaf,  et  quelques  autres 
anatomistes  du  xvne  siècle,  employè- 
rent aussi  des  liquides  diversement  co- 
lorés pour  en  remplir  certaines  veines 
dont  ils  voulaient  suivre  le  trajet,  et 
J.  Riolan,  le  contemporain  de  Harvey, 


avait  su  tirer  un  bon  parti  de  l'insuf- 
flation de  ces  vaisseaux.  Bellini  paraît 
s'être  servi  de  matières  fusibles  pour 
les  injections,  et  vers  la  même  époque 
(c'est-à-dire  1660),  de  Graaf  employa 
le  mercure  à  des  recherches  analo- 
gues. Mais  Swammerdam  fut  le  pre- 
mier à  faire  avec  habileté  des  pièces 
de  démonstration  à  l'aide  des  injec- 
tions colorées;  il  se  servait  de  cire, 
et  ses  préparations  excitèrent  à  un 
haut  degré  la  curiosité  et  l'admira- 
tion parmi  ses  contemporains.  Son 
compatriote  Ruysch  acquit  dans  cet 
art  une  habileté  plus  grande  en- 
core, et  contribua  davantage  à  mettre 
en  honneur  ce  procédé  d'investiga- 
tion (c).  Depuis  lors,  tous  les  anato- 
mistes en  ont  fait  usage,  et,  parmi  les 
auteurs  dont  les  injections  fines  ont 
contribué  à  nous  faire  connaître  la 
disposition   des  vaisseaux  capillaires 


(a)  Voyez  tome  I,  p.  42  et  p.  115. 

(b)  Voyez  Fontenelle,  Éloge  de  Ruysch  (Hist.  de  l'Acad.  des  sciences,  1731,  p.  102). 
—  Haller,  Methodus  studii  medici,  Hermani  Boerhaave,  1751,  t.  I,  p.  251  et  433. 

■ —  Portai,  Hist.  de  l'anatomie,  t.  III,  p.  265. 

(c)  Fréd.  Ruysch  naquit  à  la  Haye  en  1638  ,  et  professa  l'anatomie  à  Amsterdam;  il  mourut  en 
1731 .  Ses  préparations  anatomiques  étaient  si  bien  faites  et  conservées  avec  tant  d'art,  que  Fonlenelle 
en.  parla  clans  les  termes  suivants  :  «  Tous  ces  morts  ,  sans  dessèchement  apparent ,  sans  rides  ,  avec 
»  un  teint  fleuri  et  des  membres  souples,  étaient  presque  des  ressuscites  ;  ils  ne  paraissaient  qu'endor- 
»  mis,  tout  prêts  à  parler  quand  ils  se  réveilleraient. Les  momies  deM.  Ruysch  prolongeaient  en  quelque 
»  sorte  la  vie,  tandis  que  celles  de  l'ancienne  Egypte  ne  prolongeaient  que  la  mort.  »  .(  Fonlenelle, 
Éloge  de  Ruysch,  dans  Hist.  de  l'Acad.  des  sciences,  1731,  p.  103.)  Malheureusement  Ruysch  fit  de 
ses  procédés  d'injection  un  secret  qui  n'a  pas  été  révélé. 


TRAVAUX    SUBSÉQUENTS.  /jl 

des  artères  dans  les  veines.  En  effet,  si  l'on  pousse  dans  une 
artère  une  de  ces  injections  convenablement  préparée ,  on  fait 
parvenir  celle-ci  non-seulement  dans  les  divisions  capillaires 
qui  terminent  les  ramifications  de  ce  vaisseau ,  mais  aussi  dans 
les  veines  qui  naissent  de  ces  capillaires,  et  qui  se  réunissent 
successivement  entre  elles  comme  les  racines  d'un  arbre  se 
réunissent  pour  en  constituer  le  tronc.  A  l'aide  de  ce  procédé 
d'investigation,  on  arriva  peu  à  peu  à  constater  que  les  artères 

sanguins,  je  dois  citer  surtout  Albinus,  fraîches  la  disposition  des  petits  vais- 

Lieberkûhn ,  Prochaska  et  Berres  (a).  seaux.  Dans  le  premier  cas,  on  emploie 

Les  préparations  de  Ruysch  ont  été  généralement  de  la  cire  mêlée  à  de  la 

achetées  par  le  czar  Pierre  Ier  et  trans-  graisse  en  diverses  proportions,  ainsi 

portées  à  Saint-Pétersbourg;  celles  de  qu'à  de  l'essence  de  térébenthine,  et 

Lieberkiïhn  et  de  Prochaska  sont  con-  colorée  par  du  vermillon  ou  du  bleu 

servées  dans  le  cabinet  de  Vienne,  et  de  Prusse  parfaitement  broyés;  mais 

sont  si  parfaites,  que,  dans  ces  der-  pour  remplir  les  capillaires,  le  vernis 

nières  années,    elles  ont  pu    servir  donne  de  meilleures  résultats.  L'im- 

aux     recherches     histologiques     de  mersion  des  petites  pièces  ainsi  in- 

M.  Henle  (b).  jectées  dans  du  baume  de  Canada  ,  ou 

Divers  écrits  ont  été   publiés  sur  dans  quelque  autre  liquide  résineux, 

Part  des  injections  angiologiques  (c).  donne  aux  tissus  de  la  transparence, 

Les  procédés  à  employer  doivent  va-  et  permet  de  mieux  voir,  sous  le  mi- 

rier  suivant  qu'on  veut  faire  des  pré-  croscope,  le  trajet  des  capillaires.  Pour 

parafions  destinées  à  être  conservées,  les  travaux  de  recherches,  les  injec- 

ou  bien   que   l'on   ne*  cherche  qu'à  tions  à  la  gélatine  ou  au  saindoux  sont 

mettre  en  évidence  sur    des  pièces  plus  commodes,   et  quand  il  s'agit 

(a)  Albinus,  Academicarum  annotalionum  liber  tertiiis,  1756. 

—  Lieberkiihn,  Disser.t.  de  fabrica  et  actione  villorum  intestinorum  tenuium,  1760. 

—  Prochaska,  Disquisitio  anatomico-physiologica  organisant  corporis  humani  ejusque  proces- 
sus vitalis.  Vienne,  1812,  chap.  IX,  p.  92  et  suiv. 

—  Berres,  Anatomia  microscopica  corporis  humani.  Vienne,  1837,  in-fol. 
(6)  Voyez  Henle,  Traité  d'anatomie  générale,  trad.  par  Jourdan,  t.  II,  p.  3. 

(c)  Homberg,  Sur  les  injections  anatomiques  (Hist.  de  l'Acad.  des  sciences,  1 699,  p.  38). 

—  Rouhault,  Sur  les  injections  anatomiques  (Mém.  de  l'Acad.  des  sciences,  1718,  p.  219). 

—  Vater,  De  inject.  cerœ.  coloratœ  utilit.  ad  viscerum  struct.  genuinam  deteg.,  1731. 

—  Monro,  An  Essay  on  the  Art  of  Injecting  (Edinb.  Med.  Essays,  t.  I) ,  et  Tentamina  circa 
methodum  partes  animantium  affaire  injiciendi,  1741. 

—  Lieberkiihn ,  Sur  les  moyens  propres  à  découvrir  la  construction  des  viscères  (Mém.  de 
l'Acad.  de  Berlin,  1748,  p.  28). 

—  Duméril,  Essai  sur  les  moyens  de  perfectionner  l'art  de  l'anatomiste.  Paris,  1803. 

—  Bogros,  Quelques  considérations  sur  la  squelettopée  ;  des  injections  et  de  leurs  divers  pro- 
cédés. Thèse  de  concours,  1819. 

—  Lauth,  Nouveau  Manuel  de  l'anatomiste,  1827,  8"  sect.,  chap.  v,  p.  693  et  suiv. 

—  Voyez  aussi,  à  ce  sujet,  Berres,  Op.  cit.,  p.  17  et  suiv. 
■ —  Straus,  Traité  d'anatomie  comparative,  t.  I,  p.  90. 

■ — Harting,  Het  Mikroscoop,  t.  11,  p.  171,  et  Monlhl'j  Joum.  of  Med.  Sciences,  1852,  3°  série, 
t.  XIV,  p.  245. 


l\2  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION, 

se  distribuent  dans  toutes  les  parties  du  corps  humain ,  sauf 
quelques  couches  membraniformes  dont  la  vitalité  est  obscure, 
telles  que  l'épiderme,  et  que  partout  elles  s'y  résolvent  en  un 
système  de  tubes  capillaires  dont  naissent  les  veines  ;  de  sorte 
que  dans  tous  les  points  de  l'organisme  il  y  a  continuité  directe 
entre  les  vaisseaux  qui  apportent  le  sang  du  cœur  et  ceux  qui 
sont  chargés  d'effectuer  le  retour  de  ce  liquide  (1). 
observations       Les  travaux  accomplis  de  la  sorte  sur  la  constitution  de 

sur  l 

les  Animaux   l'appareil  circulatoire  portèrent  d'abord  presque  exclusivement 

inférieurs.  l  l  l 

sur  l'Homme  et  les  Quadrupèdes  qui  s'en  rapprochent  le  plus. 
Déjà  dans  le  xviie  siècle,  Swammerdam ,  Willis  (2)  et  quelques 
autres  anatomistes  étendirent,  il  est  vrai ,  leurs  recherches  aux 
Animaux  inférieurs.  Leurs  successeurs  multiplièrent  les  inves- 
tigations de  ce  genre;  mais  c'est  de  nos  jours  seulement ,  et 

de  mettre  en  évidence  les  vaisseaux  salines  dont  le  mélange,  dans  l'inté- 

d'un  petit  calibre,  on  obtient  souvent  rieur  des  vaisseaux,  donne  naissance  à 

d'excellents   résultats  en  employant,  un  précipité  :  par  exemple,  le  chro- 

soit  de  la  peinture  à  l'huile  bien  broyée  mate   de    potasse    et    l'acétate    de 

avec  une   certaine  quantité  d'essence  plomb  (a). 

de  térébenthine,  soit  un  précipité  de  (1)  Un  anatomiste   hollandais,  E. 

chromate  de  plomb  récemment  formé  :  Blancard  ,    de  Middelbourg,    paraît 

car  la^  matière  colorante  tenue  ainsi  avoir  été  le  premier  à  prouver,  au 

en  suspension  dans   l'eau  est   d'une  moyen  des    injections  ,    que  les  der- 

grande  ténuité   et  pénètre  très  bien  nières  artérioles  communiquent  avec 

dans  les  capillaires  ;  mais,  par  le  re-  les  premières  veinules  (6).  Des  résul- 

pos,  les  particules  salines  s'agglomè-  tats    analogues    furent   obtenus   par 

rent  entre  elles,  et  le  précipité  ne  peut  J.-C.  Lange  (c),  W.  Cowper  (d),  Jan- 

plus  servir  aussi  utilement.  Dans  ces  kins    (e)  et  plusieurs   autres    anato- 

dernières    années,   quelques   anato-  mistes. 

mistes  ont  eu  recours  aussi  à  l'injec-  (2)   Th.   Willis  ,   médecin  anglais 

tion  successive  de  deux  dissolutions  d'une  grande  célébrité,  naquit  en  1622, 

(a)  Krause.  Voyez  Mandl,  Manuel  d'anatomie  générale,  p.  193. 

—  Doyère,  Sur  un  nouveau  procédé  d'infections  anatomiques  (Comptes  rendus  de  l'Acad.  des 
sciences,  1841,  t.  XIII,  p.  75). 

(6)  Blancard  ,  De  circulatione  sanguinis  per  fibras,  1667  (voyez  Sprengel,  Hist.  de  la  médecine, 
t.  IV,  p.  134). 

(c)  Langii  Dissert,  de* circulatione  sanguinis.  Lipsise,  1680. 

(d)  W.  Cowper,  Anatomy  of  Human  Bodies,  1697. 

(e)  G.  Jankins,  De  ratione  venas  corporis  humani  angustiores  inprimis  cutaneas  ostendendi , 
1762  (E.  Sandifort,  Thésaurus  dissertationum,  t.  II,  p.  237,  pi.  4). 


TRAVAUX    SUBSÉQUENTS.  43 

sous  l'influence  de  la  puissante  impulsion  imprimée  aux  études 
zootomiques  par  le  génie  de  Cuvier,  que  l'on  est  arrivé  à  con- 
naître la  manière  dont  la  circulation  du  sang  s'effectue  chez  les 
Mollusques,  les  Vers,  les  Crustacés  et  les  Insectes,  qui  forment 
à  eux  seuls  plus  des  neuf  dixièmes  du  Règne  animal.  Cepen- 
dant, pour  acquérir  une  idée  complète  de  la  circulation  et  de 
ses  instruments ,  il  ne  suffit  pas  de  connaître  l'anatomie  et  la 
physiologie  de  l'Homme ,  il  faut  avoir  étudié  de  la  même  ma- 
nière tout  le  vaste  ensemble  des  Êtres  animés. 
§  16.  — ■  Jusque  dans  ces  derniers   temps,  on  admettait    variations 

/      i  ...  ,  ,  ,  i  dans 

généralement  qu  il  existe  une  dépendance  nécessaire  entre  k  constitution 
toute  fonction  physiologique  et  l'organe  à  l'aide  duquel  cette  circulatoire. 
fonction  s'exerce  ;  de  telle  sorte  que  la  présence  de  la  faculté 
suppose  l'existence  de  l'organe  ,  et  que  l'absence  de  l'organe 
entraîne  la  disparition  de  la  faculté.  Or,  le  cœur,  les  artères  et  les 
veines  étant,  comme  nous  venons  de  le  voir,  les  instruments 
de  la  circulation,  les  physiologistes  devaient  donc  penser  que 
là  où  ces  organes  viennent  à  manquer  en  totalité  ou  en  partie, 
la  circulation  ne  doit  plus  avoir  lieu. 

Chez  divers  Animaux  invertébrés,  les  Insectes,  par  exemple, 
les  recherches  les  plus  attentives  faites  par  les  anatomistes  les 
plus  habiles  n'ont  amené  la  découverte  ni  de  veines  ni  d'artères. 
On  en  a  conclu  d'abord  que  chez  ces  êtres  il  ne  pouvait  y 
avoir  une  circulation  de  sang,  et  que  les  fluides  nourriciers 
devaient  être  en  repos  dans  l'organisme  ou  ne  s'y  mouvoir 
que  par  un  phénomène  d'imbibition  lent  et  incomplet. 

Cette  opinion  a  été  professée  par  Cuvier  (1),  et  chez  tous  les 


et  publia  en  1672  un  ouvrage  intitulé  travaux  importants  sur  l'anatomie  du 

De  anima  brutorum,   contenant  les  cerveau.  Il  mourut  à  Londres  en  1675, 

résultats  de  ses  recherches  sur  l'ap-  et,  quelques  années  après,  une  édition 

pareil  circulatoire  de  l'Écrevisse,  de  complète  de  ses  œuvres  fut  publiée  à 

l'Huître  et  de  quelques  autres  Ani-  Genève  par  les  soins  de  Blasius. 

maux  inférieurs.  On  lui  doit  aussi  des  (1)  Mémoire  sur  la  manière  dont 


lacunaire. 


kk  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

Animaux  où  l'existence  d'une  circulation  ne  pouvait  être  révo- 
quée en  doute  ,  les  anatomistes  ont  supposé  qu'ils  devaient 
nécessairement  découvrir  des  veines  et  des  artères  aussi  bien 
qu'un  cœur. 

Mais  il  me  sera  facile  de  montrer  que  la  Nature  ne  s'astreint 
pas  à  ces  règles ,  et  que  le  grand  phénomène  physiologique 
découvert  par  Harvey  est  plus  général  qu'on  ne  le  supposait  ; 
que  la  circulation  du  sang  peut  avoir  lieu  dans  des  organismes 
où  les  veines,  les  artères  et  le  cœur  lui-même  viennent  à  man- 
quer successivement  ;  que  l'appareil  circulatoire  peut  s'obtenir 
à  moins  de  frais,  et  que  les  fonctions  dévolues  à  ces  divers  agents 
peuvent  être  remplies  à  l'aide  d'instruments  d'emprunt  d'une 
grande  simplicité, 
circulation  Je  démontrerai,  en  effet,  que  chez  des  Animaux  d'une  struc- 
ture moins  parfaite  que  ceux  étudiés  par  Harvey,  les  espaces 
ou  lacunes  qui  existent  entre  les  diverses  parties  solides  de  l'éco- 
nomie tiennent  souvent  lieu  de  vaisseaux  sanguins,  et  que  les 
seules  conditions  à  remplir  pour  l'établissement  de  la  circulation 
sont,  d'une  part,  la  communication  libre  entre  toutes  les  par- 
ties du  système  de  cavités  où  le  fluide  nourricier  se  trouve 
logé ,  et,  d'autre  part ,  la  présence  d'un  organe  moteur  quel- 
conque susceptible  de  déterminer  dans  ce  liquide  des  courants 
généraux. 

Lorsque  mes  études  sur  les  Crustacés ,  les  Insectes  et  les 
Mollusques  m'eurent  conduit  à  émettre  pour  la  première  fois 
cette  opinion ,  je  la  vis  repoussée  de  toutes  parts  (1)  ;  on  la 

se  fait  la  nutrition  dans  les  Insectes  que  j'ai  publiés  en  4  8A5  sur  la  circu- 

(Mém.  de  la  Soc.  d'hist.  nat.  de  Pa-  lation  (a)  ;  pour  la  critique  de  mes 

ris,  an  VII  (1798),  p.  3U).  opinions,    on  peut  consulter  divers 

(1)  Voyez,  à  ce  sujet,  les  Mémoires  articles  insérés  dans  le  journal    de 

(a)  Milne  Edwards  ,  Du  mode  de  distribution  des  fluides  nourriciers  dans  l'économie  animale 
(Ann.  des  sciences  nat.,  3"  série,  t.  III,  p.  257). 

—  Observations  et  expériences  sur  la  circulation  chez  les  Mollusques  (loc.  cit.,  p.  289). 

—  Milne  Edwards  et  Valençiennes  ,  Nouvelles  observations  sur  la  constitution  de  l'appareil 
circulatoire  chez  les  Mollusques  (  loc.  cil.,  p.  307). 


TRAVAUX    SUBSÉQUENTS.  Ù5 

disait  d'abord  contraire  à  tous  les  principes  d'une  saine  physio- 
logie, et  aujourd'hui  encore,  bien  qu'elle  soit  adoptée  parla 
plupart  des  naturalistes  qui. ont  fait  des  Animaux  inférieurs  une 
étude  spéciale,  elle  semble  inadmissible  aux  yeux  des  anato- 
mistes  qui  ont  borné  leurs  investigations  à  la  structure  du  corps 
de  l'Homme  ou  des  Animaux  les  plus  rapprochés  de  nous  par 
leur  mode  d'organisation.  Mais  je  ne  crains  pas  d'affirmer  que 
c'est  l'expression  de  la  vérité ,  et  en  ce  moment  je  ne  m'ar- 
rêterai pas  à  réfuter  les  arguments  dont  on  a  fait  usage 
pour  me  combattre,  soit  directement ,  soit  d'une  manière  dé- 
tournée. 

Un  simple  exposé  des  faits  suffira,  je  pense,  pour  convaincre 
tous  ceux  qui  veulent  voir,  et  ce  serait,  messieurs ,  faire  un 
mauvais  usage  de  votre  temps  et  du  mien  que  d'entrer  dans 
des  discussions  qui  aujourd'hui  portent  sur  les  mots  plutôt  que 
sur  les  choses.  En  effet,  on  ne  dit  plus  que  l'appareil  circula- 
toire se  compose  toujours,  et  nécessairement,  d'un  double  sys- 
tème de  tubes  membraneux  et  ramifiés,  tels  que  le  sont  nos 
veines  et  nos  artères,  et  l'on  reconnaît  que  chez  les  Animaux 
inférieurs  le  sang  peut  se  mouvoir  dans  de  grandes  cavités  où 
se  trouvent  également  inclus  les  viscères ,  les  muscles ,  les 
nerfs,  etc.,  cavités  qui  se  prolongent  dans  tous  les  interstices 
que  les  lamelles  ou  les  fibres  constitutives  de  ces  organes 
laissent  entre  elles  ;  mais  on  dit  que  ces  cavités  ne  sont  autre 
chose  que  des  veines  ou  des  artères  d'une  forme  particulière , 
des  sinus,  et  que  par  conséquent  les  faits  dont  j'arguë  n'ont 


M.  Guérin  («),  et  un  rapport  très  éîen-  Je  discuterai  les  points  en  litige  à 

du  fait  par  AI.  Robin  sur  le  phlébenté-  mesure  qu'ils  se  présenteront  dans  le 

risme,  sujet  du  reste  tout  à  fait  étran-  cours  de  ces  Leçons, 
ger  à  l'objet  qui  nous  occupe  ici  (b). 

{a)  Revue  Cuviérienne,  4844,  p.  418  et  suiv.  ;  1845,  nB  2,  p.  69,  etc. 

(6)  Robin,  Rapport  sur  les  communications  de  M.  Souleyet ,  relatives  à  la  question  désignée 
ious  le  nom  de  phléhentérisme  (Mém.  de  la  Soc.  de  biologie,  1852,  t.  IV,  p.  167  et  suiv.). 


46  HISTOIRE    DE    LA    DÉCOUVERTE    DE    LA    CIRCULATION. 

rien  de  nouveau.  C'est  là,  comme  on  le  voit,  une  simple  dis- 
pute sur  les  mots  ;  pour  l'écarter,  il  me  suffira  ,  je  le  répète , 
d'exposer  les  faits,  et  c'est  ce  que  je  commencerai  à  faire  dans 
la  prochaine  Leçon. 


VINGT  ET  UNIEME  LEÇON. 

De  l'irrigation  physiologique  chez  les  Zoophytes;  appareil  gastro-vasculaire  des 
Acalèphes  et  des  Coralliaires.  —  Circulation  cavitaire  chez  les  Molluscoïdes  de  la 
classe  des  Bryozoaires.  —  Circulation  semi-vasculaire  chez  les  Tuniciers. 

§  1 .  —  Lorsqu'on  réfléchit  aux  phénomènes  généraux  de  la     Nécessité 
nutrition,  à  l'accroissement  de  volume  que  subit  tout  corps  physiologique. 
vivant  pendant  une  période  considérable  de  son  existence ,  et 
à  la  nécessité  où  sont  tous  les  êtres  animés  d'introduire  du 
dehors  et  d'incorporer  à  leurs  organes  des  matériaux  nou- 
veaux, assimilation  qui  est  une  condition  de  cet  accroissement, 
on  comprend  aussitôt  la  nécessité  non  moins  impérieuse  d'un 
fluide  nourricier  pour  tous  les  Animaux ,  ne  fut-ce  que  pour 
distribuer  dans  les  diverses  parties  de  l'économie  les  matières 
que  celles-ci  doivent  s'assimiler,  car  les  fluides  seuls  jouissent 
de  la  mobilité  indispensable  à  une  translation  de  ce  genre. 

Toujours,  en  effet,  la  nutrition  s'exerce  à  l'aide  d'un  liquide 
qui  tient  en  dissolution  ou  en  suspension  des  matières  assimi- 
lables ,  et  nous  avons  déjà  vu  que  ce  liquide  est  aussi  le  véhicule 
à  l'aide  duquel  l'oxygène  nécessaire  à  l'entretien  de  la  combus- 
tion respiratoire  est  introduit  dans  les  profondeurs  de  l'orga- 
nisme. Chez  tous  les  Animaux  il  y  a  un  liquide  nourricier,  mais 
cet  agent  physiologique  n'est  pas  toujours  de  même  nature  : 
tantôt  c'est  l'eau  qui  arrive  directement  du  dehors  dans  les 
cavités  intérieures  de  l'organisme ,  et  qui  est  chargé  seulement 
de  matières  alimentaires  plus  ou  moins  élaborées  par  le  travail 
digestif;  d'autres  fois,  au  contraire,  c'est  un  suc  particulier 
dont  la  composition  et  les  propriétés  nous  sont  déjà  connues  : 
c'est  le  sang. 

Sous  le  rapport  qui  nous  occupe  ici,  il  y  a  donc  une  première    Différences 

,..         .  \/it  ■•  -,  dans  le  mode 

distinction  a  établir  entre  les  Animaux  dont  1  irrigation  physio-   d'irrigation. 


gastrique. 


48  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

logique  s'établit  directement  à  l'aide  des  liquides  alimentaires, 
et  ceux  où  elle  s'effectue  au  moyen  du  liquide  spécial  qui  porte 
le  nom  de  sang  ;  et  à  cette  différence  en  correspond  une  autre 
qui  dépend  de  la  nature  des  organes  ou  instruments  affectés  au 
service  de  cette  portion  du  travail  nutritif.  Dans  le  premier  cas, 
l'appareil  d'irrigation  n'est  autre  que  l'appareil  digestif  lui- 
même;  dans  le  second,  c'est  un  système  de  cavités  qui  ne  com- 
munique pas  directement  au  dehors,  et  qui  reçoit  les  matières 
nutritives  par  l'intermédiaire  des  organes  de  la  digestion. 

irrigation  Occupons-nous  d'abord  du  premier  de  ces  deux  modes  de 
distribution  des  sucs  nourriciers ,  de  celui  que  j'appellerai 
l 'irrigation  gastrique. 

Le  moment  n'est  pas  encore  venu  pour  nous  d'étudier  l'ap- 
pareil digestif  considéré  dans  ses  rapports  avec  ses  fonctions 
principales,  qui  sont  l'élaboration  des  matières  alimentaires; 
mais  il  nous  faut  l'examiner  ici  comme  servant  de  réservoir  au 
fluide"  nourricier  et  effectuant  le  renouvellement  de  ce  fluide 
dans  les  diverses  parties  de  l'organisme. 

Zoophytes  §  2.  ~  C'est  dans  l'embranchement  des  Zoophytes  seule- 
ment que  la  cavité  gastrique  et  ses  dépendances  cumulent  les 
fonctions  digestives  et  irrigatoires ,  et  ce  caractère  d'infériorité 
physiologique  ne  se  rencontre  même  pas  chez  tous  ces  Ani- 
maux, mais  est  général  dans  la  grande  division  des  Cœlen- 
térés ,  qui  comprend  la  classe  des  Coralliaires  et  celle  des 
Acalèphes  (1). 

Le  nom  d'Animaux  parenchyrnateuoc,  que  Cuvier  appliquait 
à  tort  à  certains  Vers,  conviendrait  parfaitement  à  ces  Zoophytes, 
car  leur  cavité  digestive  est  creusée  directement  dans  la  sub- 


(1)  Cette  division  a  été  établie  par      exposé    ailleurs  les  raisons  qui  me 
MM.   Frey   et  Leuckart   («) ,  et  j'ai      portent  à  l'adopter  (6). 

(a)  Êeitràge  z-ur  Kenntniss  Wlrbelloser  Thière  des  Norddeutschen  Mceres,  18-17,  p.  37; 

(b)  Milne  Edwards,  Histoire  naturelle  des  Coralliaires,  t«  I,  p.  3, 


Cœlentérés. 


CHEZ   LES   ZOOPHYTES.  ^9 

stanee  de  leur  corps  ;  il  n'existe  autour  des  parois  de  ce  réservoir 
aucun  espace  vide  où  les  liquides  de  l 'organisme  puissent  s'accu- 
muler, et  c'est  par  un  phénomène  d'imbibition  seulement  que 
ces  substances  peuvent  pénétrer  de  son  intérieur  dans  la  profon- 
deur des  tissus  voisins.  Aussi  occupe-t-elle  presque  tout  le  corps, 
et  l'épaisseur  des  parties  solides  qui  l'entourent  n'est  jamais  con- 
sidérable. Du  reste,  sa  disposition  varie,  et  les  modifications  qui 
s'y  remarquent  entraînent  des  différences  importantes  dans  la 
manière  dont  s'opère  l'irrigation  nutritive. 

La  forme  la  plus  simple  de  cet  appareil  à  double  fonction  sertuianens. 
se  voit  chez  ces  Animaux  singuliers,  que  depuis  longtemps  les 
zoologistes  connaissaient  sous  le  nom  de  Sertulariens,  et  que 
Ton  rangeait  dans  la  classe  des  Polypes,  mais  que  l'on  sait  aujour- 
d'hui être  les  individus  nourriciers  ou  représentants  agames  du 
type  Acalèphe.  Une  cavité  cylindrique  occupe  toute  la  longueur 
de  leur  corps  et  communique  librement  au  dehors  par  la  bouche, 
qui  est  située  au  centre  de  la  couronne  de  tentacules  dont  leur 
extrémité  antérieure  et  contractile  est  garnie.  L'eau  de  la  mer, 
où  ces  Zoophytes  vivent ,  pénètre  dans  cette  cavité,  et  y  porte 
des  matières  alimentaires  qui  paraissent  y  être  digérées,  car 
elles  s'y  réduisent  en  particules  fort  ténues  ;  d'autres  corpus- 
cules qui  semblent  provenir  des  parois  de  la  cavité  y  flottent 
également,  et  le  liquide  nourricier  ainsi  constitué  est  agité  par 
des  courants  rapides.  On  le  voit  monter  d'un  côté  pendant 
qu'il  descend  de  l'autre,  et  circuler  ou  plutôt  tourbillonner  dans 
toutes  les  parties  du  corps. 

Cavolini ,  zoologiste  napolitain ,  à  qui  l'on  doit  beaucoup  de 
recherches  intéressantes  sur  la  physiologie  des  Zoophytes,  fut 
le  premier   à   étudier  ce  mode  d'irrigation  (1).  Spallanzani 

(1)  Ces  courants    paraissent  avoir      Loeffling  (a)  et  par  Ellis  (6);  mais  Ca- 
ëlé  vaguement  aperçus  dès  1755  par      volini  fut  le  premier  à  les  faire  réelle- 
fa)  Loeffling,  Beschreib.  Zwoer  xarten  Cora'len  (Abhandlunuen  der  Schwedischen  Akad.,  1  752, 
t,  XIV,  p.  122). 
(6)  Ellis ,  Essai  sur  l'histoire  naturelle  des  CoralHnes,  irad.  franc.,  1156,  p.  1i7, 
111.  k 


50 


CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 


l'observa  vers  la  même  époque,  et  depuis  lors  un  grand  nombre 
d'autres  naturalistes  en  ont  été  témoins  ;  mais  on  n'est  pas 
encore  bien  fixé  sur  la  cause  de  ces  courants.  M.  Grant  les 


ment  connaître.  Voici  comment  il 
s'exprime  à  ce  sujet  :  «  Un  fenomeno 
»  assai  singolare  nella  economia  délie 
»  Sertolare  si  è  un  movimento  che  si 
»  osserva  nel  interiore  del  corpe  corne 
»  in  un  proprio  tubo.  L'esteriore  cor- 
»  neo  invoglio  ordinariamente  trans- 
»  parente  chieude  e  veste  il  corpo 
»  molle  dell'  animale,  il  quale  si  vede 
»  essere  formato  corne  di  un  ammasso 
»  granelloso.  fn  mezzo  di  questo  cor- 
»  pore  per  una  linea  a  lungo  si  vede 
»  che  una  simile  granellatura  venga 
»  transporlata  con  motto  vorlicoso  da 
»  un  fluido,  che  non  si  arriva  a  dis- 
n  tinguere  :  mei  ce  di  questa  agitazione 
»  se  vede  che  quelle  bricciolette  di 
»  materia  ora  vengono  porlate  in 
»  giro ,  ora  in  una  corrente  salgono 
»  in  sopra ,  or  discendono  :  e  questo 
»  fenomeno  accade  cosi  nel  tronco 
»  principale,  che  nei  rami,  fino  a  toc- 
»  care  gli  organi  polipiformi  :  e  dura 
»  ciô  finchè  viva  la  Sertolara,  ancor- 
»  chè  i  suoi  organi  siano  stretlamente 
»  retirati.  Io  primo  pensava  poter 
»  questo  essere  il  cibo,  che  per  questa 
»  agitazione  si  rompa  edeverisca  per 
»  distribuirsi  in  alimento  al  Polipo, 
»  sicome  nel  suo  Polipo  vede  il  Trem- 
»  blay.  Ma  ora  son  porlato  a  credere 


»  essere  quello  canale  un  posto  a  lungo 
»  del  corpore,  che  faccia  l'ufficio  di 
»  cuore,  siccome  cora  di  semigliante 
»  nelle  ruche  si  osserva  :  e  nel  salire 
»  e  scendere  di  quel  fluido,  salgono  e 
»  discendono  ancora  quelle  briccio- 
»  letle,  le  quale  sono  il  materiale  da 
»  servire  per  l'accrescimento  del  cor- 
»  pore  delT  animale  (a).  » 

Spallanzani  n'a  ajouté  rien  d'impor- 
tant aux  faits  constatés  par  Cavolini  (6). 
Mais  depuis  une  vingtaine  d'années,  ce 
curieux  phénomène  a  été  étudié  d'une 
manière  plus  complète,  et  l'on  a  pu  re- 
dresser quelques  erreurs  commises  à 
ce  sujet  par  ce  dernier  observateur. 

En  effet,  Cavolini  pensait  que  la 
cavité  cylindrique  où  ces  courants  ont 
leur  siège  ne  communiquait  pas  avec 
la  bouche  (c),  et  un  voyageur  allemand, 
à  qui  l'on  doit  la  connaissance  de 
beaucoup  de  faits  curieux,  M.  Meyen, 
a  adopté  la  même  manière  de  voir  (d); 
mais,  ainsi  que  MM.  Fleming  (e), 
Ehrenberg  (f)  et  Lister  s'en  sont  con- 
vaincus^), cela  n'est  certainement  pas, 
et  c'est  une  seule  et  même  cavité  qui 
fait  office  d'estomac  et  de  système 
irrigatoire  en  même  temps  qu'elle 
sert  à  la  respiration  (h). 

M.  Van  Beneden  résume,  dans  les 


Polipi  marini.  In-4,  Napoli,  1785,  p.  4 20. 
269. 


(a)  Cavolini,  Memorieper  servire  alla  storià  de' 

(b)  Spallanzani,  Viaggi  aile  Due-Sicilie,  t.  IV,  p 

(c)  Cavolini,  Op.  cit.,  p.  197. 
\d)  Meyen,  Vêler  Polypen  (Nov.  Act.  Acad.  Cœs 

Suppl.  1  ,  p.  187  elsuiv.). 

(e)  Fleming,  Observ.  on  the  Natural  History 
Philos.  Journ.,  1820,  vol.  II,  p.  82). 

(f)  Ehrenberg,  Die  Corallenthiere  desRothen  M 

(g)  Lister,  Some  Observations  on  the  Structure 
and  of  Ascidiœ  (Philos .  Trans.,  1834,  p.  305). 

(h)  Milne  Edwards,  Observ.  sur  la  circulation  (Ann.  des  sciences  nat..  1845,  3e  série,  t.  III, 
p.  266,  et  Voyage  en  Sicile,  1. 1,  p.  67). 


.  Leop.  Car.  Nalurœ  curiosorwn,  1834,  t.  XVI, 

of  the   Sertularia  gelatinosa  of  Pallas  (Edinb. 

eeres,  p.  7  5.  Berlin,  1834. 

and  Functions  of  Tubular  and  Cellular  Polype 


CHEZ    LES    ZOOPHVTES.  51 

attribue  à  la  présence  de  ciîs  vibrantes  sur  quelques  parties  de 
la  surface  interne  de  l'espèce  de  tube  organisé  qui  constitue 
le  corps  de  ces  Animaux  ,  et  il  me  semble  très  probable 
qu'il  en  est  ainsi ,  car  nous  verrons  bientôt  que,  chez  d'autres 


termes  suivants,  l'état  de  nos  con- 
naissances à  ce  sujet  : 

«  Pour  peu  que  l'on  observe  de  ces 
Polypes  en  vie,  on  voit  distinctement 
celte  communication.  Gavolini  a  donc 
eu  tort,  dans  ce  sens,  de  comparer  ce 
liquide  au  sang  des  Animaux  supé- 
rieurs, et  M.  Lister  n'a  pas  été  plus 
heureux  en  le  comparant  à  la  circu- 
lation des  Chara.  Pour  qu'il  y  ait  ana- 
logie avec  la  circulation  des  Chara,  il 
aurait  fallu  que  la  cavité  fût  close  de 
toutes  parts,  et  M.  Lisier  savait  ce- 
pendant que  cela  n'est  point.  Du 
reste,  c'est  une  question  très  difficile 
à  résoudre  que  celle  de  la  significa- 
tion du  liquide  charrié  dans  la  sub- 
stance commune.  La  cavité  qui  con- 
tient le  liquide  est  en  communication 
directe  avec  l'estomac,  et  le  liquide 
peut  passer  de  l'estomac  dans  la  ca- 
vité et  retourner  dans  l'estomac,  et 
même  ressortir  par  la  bouche. 

»  D'après  cela,  îa  cavité  serait  plu- 
tôt une  dépendance  de  l'estomac,  ou 
plutôt  un  appareil  digestif  commun, 
comme  le  pense  M.  Milne  Edwards. 
Mais,  d'un  autre  côté,  le  liquide  est 
chargé  de  globules  comme  le  sang'des 
Animaux  supérieurs.  Ces  globules 
ont  à  peu  près  la  même  forme  et  le 
même  volume.  Quand  on  les  voit  en 
mouvement  pour  la  première  fois,  on 
croit  avoir  sous  les  yeux  un  vaisseau 
d'un  Animal  vertébré.  On  voit  quel- 


quefois le  sang  dans  les  capillaires 
des  Animaux  supérieurs,  après  avoir 
coulé  dans  tel  sens,  s'arrêter  tout  à 
coup  ou  rebrousser  chemin,  ce  qui  se 
produit  de  même  dans  ces  tiges  de 
Polypes  ;  seulement  les  globtdes,  dans 
les  Polypes,  semblent  doués  d'une 
aclivité  propre  beaucoup  plus  pro- 
noncée que  celle  que  l'on  observe 
chez  les  Vertébrés.  iNous  ne  pouvons 
attribuer  le  mouvement  de  ce  liquide 
à  l'action  péristaltique,  les  parois  res- 
tant dans  une  immobilité  absolue. 
Xous  n'avons  pas  remarqué  que  le 
mouvement  du  liquide  fût  régulier, 
comme  le  dit  M.  Lister  :  il  est,  au  con- 
traire, sujet  à  de  grandes  irrégularités. 
»  Ce  sont  donc  là  les  principaux 
phénomènes  de  la  circulation  qui  se 
produisent  ici  dans  les  Polypes,  et  l'on 
ne  doit  pas  s'étonner  que  Gavolini  ait 
comparé  le  liquide  en  mouvement  des 
Polypes  au  sang  rouge  des  Vertébrés. 
D'après  ce  que  nous  venons  de  dire, 
ce  mouvement  circulatoire  représente 
à  la  fois,  et  le  cours  des  aliments,  et  la 
circulation  du  sang.  Aussi  est-ce  là  la 
signification  que  nous  croyons  devoir 
lui  donner.  Nous  voyons  les  divers 
appareils  se  fondre,  si  l'on  peut  s'ex- 
primer ainsi,  les  uns  dans  les  autres 
chez  les  Animaux  inférieurs,  et  il 
n'est  pas  étonnant  de  voir  ceux-ci 
conserver  des  caractères  de  l'un  et  de 
l'autre  appareil  (a).  » 


(a)  Van  Beneden ,  Mém.  sur  les  Campanulaires  des  entes  d'Osiende  ,  p.  17  (Mém.  de  l'Acad.  de 
Bruxelles,  t.  XVII). 


52  CIRCULATION    DES    FLUIDES   NOURRICIERS 

Zoophytes  ,  tels  sont  en  effet  les  agents  moteurs  des  fluides 
nourriciers  ;  mais  jusqu'ici  on  n'est  point  parvenu  à  bien 
démontrer  l'existence  de  ces  cils  (1). 

Dans  la  plupart  des  Sertulariens  ,  où  les  individus  se  multi- 
plient par  bourgeonnement  et  restent  unis  entre  eux  de  façon 
à  constituer  des  touffes  ou  des  ramuscules ,  la  cavité  gastro- 
irrigatoire  du  Polype  souche  se  continue  dans  l'axe  du  corps 
de  tous  les  Polypes  qui  en  dérivent ,  et  le  fluide  nourricier  qui 
s'y  trouve  est  commun  à  tous  les  membres  de  ces  singulières 
associations.  Les  courants  irrigatoires  passent  librement  d'un 
individu  à  un  autre .  et  par  conséquent  il  y  a  non-seulement  un 
transport  rapide  des  sucs  nourriciers  dans  toutes  les  parties  de 
l'organisme  de  chacun  de  ces  petits  Zoophytes  ,  mais  une  sorte 
de  circulation  générale  pour  tout  le  groupe  formé  par  ces  Ani- 
maux agrégés,  et  les  matières  alimentaires  ingérées  dans  l'es- 
tomac de  l'un  d'eux  profitent  à  toute  la  colonie. 

Je  dis  une  sorte  de  circulation.  En  effet,  le  phénomène  qui 
s'observe  dans  le  fluide  nourricier  des  Sertulariens  ne  mérite 
pas  tout  à  fait  le  nom  de  mouvement  circulatoire  :  c'est  plutôt 
un  tourbillonnement  qui  tantôt  s'établit  sur  un  point  assez 
limité,  d'autres  fois  devient  général,  et  donne  naissance  à  des 
courants  circulaires  comme  ceux  que  l'on  détermine  dans  l'eau 
d'un  vase  en  y  imprimant  une  impulsion  rotatoire.  En  général, 


(1)    Quelques    observateurs  attri-  du  corps  de  ces  Zoophytes  m'ont  tou- 

buent  ces  courants  à  des  contractions  jours  paru  peu  ou  point  contractiles  ; 

des  parois  molles  de  la  cavité  irriga-  et  bien  qu'il  m'ait  été  impossible  de 

toire  des  Sertulariens  :  MM.  Ehren-  voir  des    cils  vibratiles  dans  Tinté- 

berg  [a)  et   Lôven,  par  exemple  (6).  rieur  de  la  cavité  gastrique,  je  suis 

Mais  je  ne  partage  pas  cette  opinion  :  persuadé  qu'ils  y  existent ,  ainsi  que 

les  parois  de  la  portion  non  protractile  M.  Grant  le  suppose  (c). 

(a)  Ehrenbèrg,  loc.  cit. 

(b)  Lijven,  ISidrati  till  Kdnnedomen  af  Slârjtena  Campanularia  och  Syncoryna  (Vetenskaps-Acd' 
demiens  Handlingar,  1835,  p.  205),  et  trad.  dans  les  Annales  des  sciences  naturelles,  1841, 
2' série,  t.  XVIII,  p.  100. 

(c)  Grant,  Qutlints  of  Comparative  Anatomy,  1841,  p.  314, 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  53 

le  courant  monte  d'un  côté  du  tube  gastrique  et  redescend  de 
l'autre  côté  ;  mais  les  particules  en  mouvement  ne  reviennent 
pas  nécessairement  à  leur  point  de  départ,  et  il  n'y  a  rien  de 
iixe,  ni  dans  la  direction  suivie  par  le  liquide,  ni  dans  le  trajet 
qu'il  parcourt  (1). 

Ce  tourbillonnement  irrigatoire  a  été  observé  chez  la  plupart 
des  Serlulariens  (2),  mais  parait  manquer  dans  quelques  espèces 
où  les  cavités  digeslives  des  divers  individus  d'une  même  co- 
lonie ne  communiquent  pas  librement  entre  elles  :  ainsi  M.  Yan 
Beneden ,  qui  a  fait  une  étude  attentive  de  ces  Animaux ,  n'a 
aperçu  aucun  phénomène  de  ce  genre  chez  les  Corynes  et  les 
Hydractinies  (3). 

(1)  M.  Loven  a  insisté  avec  raison  tion  ;  mais   cette    opinion  n'est  pas 

sur  le  caractère  irrégulier  de  ces  cou-  admissible  (c). 

rants,  et  a  observé  aussi  que  les  parti-  (2)  La  disposition  de  la  cavité  tu- 
cules  qui  flottent  dans  le  fluide  nour-  bulaire  où  ces  courants  s'observent 
ricier  semblent  parfois  être  animées  a  été  très  bien  représentée  par 
d'un  mouvement  propre  (a).  M.  Van  M.  Lister  chez  les  Tabulaires  et  les 
Beneden  a  constaté  la  persistance  de  Sertulaires  (d),  et  se  voit  mieux  en- 
ces  mouvements  dans  les  globules  core  dans  les  planches  qui  accom- 
après  leur  sortie  du  corps  des  Campa-  pagnent  les  Mémoires  de  M.  Van 
nulaires  (6),  et  il  me  paraît  probable  Beneden.  Ce  dernier  a  étudié  cette 
qu'ils  sont  produits  par  des  portions  circulation  avec  beaucoup  d'attention 
de  l'épithélium  vibralile  délachéesdes  dans  les  Tubulaircs  proprement  dits, 
parois  de  la  cavité  irrigatoire  de  ces  les  Eudendrium  et  les  Campanu- 
Zoophytes.  laires  (e). 

M.  Meyen,  qui  a  étudié  ce  mouve-  M.  Allman  a  observé  le  mêmephé- 
ment  chez  les  Campanulaires,  le  con-  nomène  dans  une  espèce  d'eau  douce 
sidère  comme  étant    une    oscillation  à  laquelle  il  a  donné  le  nom  de  Cor- 
comparable  à  la  circulation  alternante  dylophora  lacustris  (/"). 
des  Salpa,  dont  il  sera  bientôt  ques-  (3)  M.  Van  Beneden  n'a  pas  observé 

(a)  Lôven,  Observations  sur  le  développement  et  les  métamorphoses  des  genres  Campanulaire 
et  Syncoryne  (Ann.  des  sciences  nat.,  1841,  2°  série,  t.  XV,  p.  161). 
(6)  Van  Beneden,  Mém.  sur  les  Campanulaires,  p.  19. 

(c)  Meyen,  Beitrâge  zur  Zoologie  gesammell  auf  einer  Reise  um  die  Erde  (Nova  Acta  Acad. 
Cœs.  Leop.  Carol.  Natures  curiosorum,  vol.  XVI,  Suppl.  1,  1834,  p. 192). 

(d)  Lister,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1834,  pi.  8,  fig.  1  ;  pi.  9,  fig.  c2. 

(e)  Van  Beneden,  Recherches  sur  V embryologie  des  Tubulaires  (  Mém.  de  V Acad.  de  Bruxelles, 
t.  XVII,  pi.  1,  fig.  2  et  7  ;  pi.  4,  fig.  7). 

—  Mém.  sur  les  Campanulaires  (loc.  cit.,  pi.  1,  Gg.  3,  4). 

(f)  Allman  ,  On  Vie  Anatomy  and  Physiology  of  Cordyhphora  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  367, 
pi.  25,  fig.  2  et  3). 


54  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

§  3.  —  Dans  les  Stéphanomïes  ,  les  Physophores  et  les 
autres  Aealèphes  que  Cuvier  désignait  sous  le  nom  d'Hy- 
drostatiques ,  mais  que  la  plupart  des  naturalistes  actuels 
considèrent  comme  étant  des  colonies  ou  agrégats  de  petits 
Zoophytes  fort  voisins  des  Sertulariens,  la  disposition  du  sys- 
tème irrigatoire  ne  diffère  que  peu  de  celui  dont  je  viens 
de  parler  (1).  L'estomac  de  chaque  individu  se  prolonge  en 


de  courants  dans  le  liquide  nourricier 
dans  ces  deux  genres  (a). 

(1)  L^s  individus  astomes  (que  je 
désignais  jadis  sous  le  nom  d'organes 
pyriformes)  communiquent  avec  le 
canal  commun  de  la  même  manière 
que  le  font  les  individus  nourriciers 
(ou  organes  proboscidi formes),  et  c'est 
principalement  à  l'extrémité  de  la 
grande  cavité  dont  ils  sont  creusés 
que  les  cils  vibratiles  destinés  à  mettre 
le  fluide  nourricier  en  mouvement 
sont  très  développés.  La  disposition 
générale  de  ce  système  gastro-vascu- 
laire  se  trouve  indiquée  dans  le  Mé- 
moire que  j'ai  publié  en  18/rl  sur  la 
Stephanomia  conforta  (b)  ,  et  clans 
l'ouvrage  plus  récent  de  M.  Sars  (c), 
mais  a  été  étudiée  d'une  manière 
beaucoup  plus  complète  par  M.  Vogt, 


dans  son  beau  travail  sur  les  Sipho- 
nophores  de  la  mer  de  Mce  (d). 

Chez  les  Physalies,  la  disposition  de 
cet  ensemble  de  cavités  est  encore  à 
peu  près  la  même,  si  ce  n'est  que  le 
canal  commun  des  Stéphonomies  est 
remplacé  par  un  vaste  réservoir  com- 
pris entre  les  deux  lames  de  la  grande 
vessie  hydrostatique ,  à  la  face  infé- 
rieure duquel  tous  les  individus  poly- 
piformes  prennent  naissance.  La  com- 
munication entre  les  estomacs  ou 
suçoirs  et  l'espace  qui  entoure  la  ves- 
sie aérienne  avait  été  indiquée  par 
01  fers  (e)  et  Eschwald  (/"),  et  a  été  ob- 
servée de  nouveau  par  M.  de  Qualre- 
fages((/).  Lesson  dit  avoir  souvent  vu 
ce  réservoir  du  fluide  nourricier  rem- 
pli d'une  matière  d'apparence  chy- 
meuse  ,  de  couleur  rouge  (h). 


(a)  Van  Beneden,  Recherches  sur  l' embryologie  des  Tributaires  (Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles, 
t.  XVII). 

(6)  Milne  Edwards,  Observations  sur  la  structure  et  les  fonctions  de  quelques  Zoophytes  ,  etc. 
(Ann.  des  sciences  nat.,  184.1,  2*  série,  t.  XVI,  p.  217). 

(c)  Sars,  Fauna  littorulis  Norvegiœ,  184(5,  p.  33  et  suiv. 

(d)  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  1854,  1"  partie,  p.  45, 
64,  70,  81,  89,  etc.,  pi.  11,  14,  cte. 

Voyez  aussi  Leuckart ,  Zoologische   Uiitersuchungen  ;   erstes  Heft.  Siphonophoren  ,  1853, 

p.  13. 

(e)  Olfers,  Ueber  die  grosse  Seeblase  (Mém.  de  l'Académie  de  Berlin  ,  1831,  p.  159). 

(f)  Eschwald,  Observ.  nonnullœ  circa  fabricant  Physaliœ  (Mém.  de  l'Acad.  de  Saint-Pétersbourg, 
1824,  t   IX,  p.  433). 

(g)  Qualrefages,  Mémoire  sur  l'organisation  des  Physalies  (Ann.  des  sciences  nat.,  1854, 
4*  série,  t.  II,  p.  122  et  134,  pi.  3,  fig-.  1). 

—  Voyez  aussi  Leuckart ,  Ueber  den  Bau  der  Physalien  (  Zeitschrift  fur  wissenschaftlichc 
Zoologie,  185! ,  Bd.  III,  p.  189),  et  Annales  des  sciences  naturelles,  1852,  3"  série,  t.  XVIII, 
p.  202). 

(h)  Lesson,  Voyage  de  la  Coquille,  t.  II,  p.  17,  et  Histoire  des  Aealèphes,  p.  541. 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  55 

manière  de  tube ,  pénètre  dans  la  tige  commune  à  laquelle 
tous  ces  individus  sont  suspendus ,  et  s'y  continue  avec  un 
canal  commun  situé  dans  l'épaisseur  de  cette  tige  ;  et  ici , 
de  même  que  chez  les  Sertulariens  ,  on  distingue  un  fluide 
en  mouvement  qui  charrie  des  corpuscules  d'une  grande 
ténuité. 

§  !i.  —  Mais  chez  les  Zoophytes  qui  naissent  des  Sertulariens,  Acaièphes. 
et  qui  constituent  les  représentants  parfaits  ou  sexués  du  type 
Acalèphe ,  le  système  cavitaire  se  complique  davantage,  et  la 
division  du  travail  tend  à  s'y  introduire  quant  aux  fonctions 
digestives  et  irrigatoires.  Une  portion  vestibulaire  et  centrale 
de  l'appareil  devient  plus  spécialement  chargée  de  l'élaboration 
des  matières  alimentaires  et  constitue  un  estomac  bien  délimité, 
tandis  que  la  portion  périphérique  devient  inapte  à  recevoir  des 
matières  solides  d'un  volume  un  peu  considérable,  et  ne  laisse 
passer  que  les  liquides  plus  ou  moins  nourriciers  qui  ont  été 
préparés  dans  la  cavité  digestive. 

Le  premier  pas  vers  cette  séparation  entre  la  portion  gastrique 
et  la  portion  irrigatoire  de  cette  cavité  à  fonctions  multiples 
résulte  du  développement  d'un  certain  nombre  de  cloisons 
membraneuses  dans  son  intérieur.  Ces  cloisons  se  portent , 
comme  autant  de  rayons,  de  la  circonférence  de  la  cavité  com- 
mune vers  le  centre,  de  façon  à  diviser  sa  portion  périphérique 
en  autant  de  loges  ;  mais  elles  ne  s'étendent  pas  jusqu'à 
l'axe  du  corps ,  et  laissent  au-dessus  de  la  bouche  un  espace 
libre  dans  lequel  les  aliments  pénètrent  facilement  du  dehors. 
Lorsqu'il  n'y  a  que  peu  de  ces  cloisons ,  les  loges  qui  entou- 
rent l'estomac  central  sont  très  grandes,  et  les  substances  ali- 
mentaires non  digérées  peuvent  y  arriver  aussi  bien  que  les  sucs 
déjà  élaborés  ;  mais ,  à  mesure  que  le  nombre  des  divisions 
augmente ,  les  parties  reculées  du  système  cavitaire  se  rétré- 
cissent de  plus  en  plus  ,  et ,  tout  en  se  laissant  pénétrer  par  les 
liquides  renfermés  dans  l'estomac  et  par  les  particules  solides 


56  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

de  petites  dimensions  que  ces  liquides  peuvent  charrier ,  elles 
se  refusent  au  passage  des  aliments  dont  le  volume  serait  plus 
considérable. 

Gomme  exemple  de  ce  mode  d'organisation,  je  citerai  d'abord 
la  Carybdée  marsupiale ,  Médusaire  en  forme  de  cloche,  où  la 
cavité  digestive  occupe  toute  l'étendue  du  corps ,  mais  se  trouve 
divisée  en  deux  portions  :  l'une,  centrale  et  libre,  qui  commu- 
nique directement  avec  le  dehors  par  l'intermédiaire  de  la 
bouche;  l'autre  périphérique  et  subdivisée  en  quatre  loges  de 
moindre  capacité  qui  entourent  l'estomac  vestibulaire  dont  elles 
sont  la  continuation ,  et  ne  reçoivent  guère  que  des  matières 
liquides  ou  pulpeuses  dans  leur  intérieur  (1). 

Chez  les  Pélagies,  cette  disposition  se  perfectionne  davan- 


(1)  Pendant  mon  séjour  à  Nice,  en 
18/|0,  j'ai  eu  l'occasion  de  disséquer 
de  nouveau  quelques  Carybdées,  et 
de  reconnaître  que,  chez  les  indivi- 
dus adultes,  la  portion  périgastrique 
de  la  cavité  digestive  occupe  tonte 
la  largeur  de  l'ombrelle  de  ces  Mé- 
duses ,  et  se  trouve  séparée  seule- 
ment en  quatre  grandes  loges  par 
autant  de  lignes  d'adhérence  de  la 
paroi  inférieure  de  cette  cavité  avec 
sa  paroi  supérieure.  Ces  loges  ont  par 
conséquent  une  grande  largeur,  et 
c'est  du  milieu  de  leur  bord  externe 
ou  inférieur  que  naît  le  canal  dont 
est  creusé  le  centre  de  chacun  des  ten- 
tacules marginaux  du  disque.  Dans 
un  individu  que  j'avais  observé  à 
Naples  en  1827,  il  m'avait  semblé  que 
ces  quatre  loges  périgaslriques  élaient 
beaucoup  plus  étroites  et  laissaient 
entre  elles  un  espace  plein  assez  con- 


sidérable, comme  on  peut  le  voir 
dans  la  figure  jointe  à  ma  note  sur  la 
structure  de  ces  Médusaires  (a).  Cette 
particularité  dépendait  peut-être  d'une 
différence  d'âge  ou  d'espèce  ;  mais 
je  n'oserais  pas  affirmer  qu'il  n'y  ait 
pas  eu  à  ce  sujet  quelque  erreur  de 
ma  part. 

Le  mode  d'organisation  décrit  ci- 
dessus  ressemble  beaucoup  à  ce  qui 
existe  dans  les  Cunina,  Esch.,  et  les 
autres  genres  dont  M.  Gegenbauer, 
d'Iéna  ,  a  formé  la  petite  famille  des 
JEginidœ.  Chez  ces  Médusaires,  l'es- 
tomac central  est  très  grand  et  se 
prolonge  tout  autour  de  sa  circonfé- 
rence, sous  la  forme  de  six,  huit  ou 
même  seize  loges  radiaires  dont  la 
cavité  communique  avec  les  canaux 
creusés  dans  l'axe  des  tentacules  mar- 
ginaux (6). 


(a)  Milne  Edwards,  Observ.  sur  la  structure  de  la  Méduse  marsupiale  (Ann.  des  sciences  nat., 
1833,  t.  XXVIII,  p.  253,  pi.  12,  fig.  1,  et  Règne  animal  de  Cimer,  Zoophytes,  pi.  55,  fur.  1  a. 

(b)  Gegenbauer,  Versuch  eines  Systems   der  Mednsen  (  Zeitschr.  fur  wissenschaft.  Zoologie, 
1856,  Bd.  VIII,  p.  259,  pi.  10). 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  57 

tage;  car  les  cloisons  qui  divisent  de  la  sorte  les  parties  pro- 
fondes du  système  cavitaire  commun  se  multiplient,  et  autour 
de  l'estomac  central,  situé  au-dessus  de  la  bouche,  il  existe  seize 
loges  longues  et  étroites  qui  conduisent  le  fluide  nourricier 
jusqu'au  pourtour  de  l'espèce  de  disque  formé  par  le  corps  de 
ces  Acalèphes,  et  le  transmettent  même  à  des  canaux  creusés 
dans  l'épaisseur  des  filaments  tentaculaires  dont  le  bord  de  ce 
disque  est  garni  (1). 

Chez  d'autres  Médusaires ,  la  délimitation  entre  la  portion 
digestive  et  la  portion  irrigatoire  de  ce  système  de  cavités  se 
prononce  davantage;  la  multiplicité  de  ces  divisions  loculaires 
est  portée  si  loin,  que  l'estomac  central  semble  être  entouré  par 
un  système  de  canaux  radiaires  plutôt  que  par  des  chambres 
périphériques,  comme  chez  les  Acalèphes  dont  il  vient  d'être 
question.  Ainsi,  chez  les  Équorées,  la  portion  centrale  de- 
meure libre  et  reçoit  les  aliments  non  digérés,  comme  chez  les 
espèces  précédentes  ;   mais  la  portion  périphérique  affecte  la 


(1)  J'ai  représenté  celle  dispo-  qu'un  liquide  coloré  injecté  dans  l'es- 
sition  avec  beaucoup  de  détails  dans  lomac  par  la  bouche  se  répand  aussi- 
dès  planches  relatives  à  l'anatomie  de  tôt  dans  les  cellules  périgastriques 
la  Pelagia  noctiluca,  Pér.  et  Les.,  qui  jusqu'au  bord  de  l'ombrelle,  et  pénètre 
font  partie  de  l'atlas  de  la  grande  édi-  jusqu'à  l'extrémité  des  huit  tentacules 
tion  du   Règne  animal    de    Cuvier.  marginaux. 

Chacune  des  loges    périgastriques  se  Dans  les  Cyanées,  la  disposition  de 

termine  par  deux  prolongements  co-  l'appareil  gustro-vasculaire  est  à  peu 

niques,  et,  dans  l'angle  formé  par  la  prèsla  même  que  chez  les  Pélagies(6). 

réunion  de  ces  deux  branches,  il  y  a,  Dans  le  genre  Polyxenia,  d'Esch- 

de  deux  en  deux    loges,   un  orifice  scholtz ,    l'appareil    gastro-vasculaire 

servant  d'entrée  à  un  canal   creusé  paraît  être  également  disposé  comme 

dans   Taxe    du  filament   tentaculaire  chez  les  Pélagies  (c). 
qui  naît  de  ce  point  (a).  11  en  résulte 

(a)  Zoophvtes  du  Règne  animal  de  Cuvier  (édition  Masson),  pi.  45,  fig.  i  et  46,  fig.  1,  1  a 
et!  b. 

—  Voyez  aussi  mon  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  p.  69,  pi.  1,  fig.  1,  représentant  le  système  cavitaire 
injecté  en  rouge. 

(b)  Milne  Edwards,  Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Zoophytes,  pi.  47,  fig.  1  a. 

(c)  Eschsclioltz,  System  dev  Acalephen,  18"29,  p.  118. 

—  Forbcs,  Op.  cit.,  p.  32,  pi.  4,  fig.  2. 


58  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

forme  de  canaux  étroits  propres  seulement  au  passage  de  l'eau 
plus  ou  moins  chargée  de  matières  nutritives,  et  constitue  un 
appareil  vasculaire  plus  ou  moins  bien  développé  (1). 

Enfin  la  séparation  entre  la  portion  gastrique  et  la  portion 
irrigatoire  de  la  cavité  commune  des  i\calèphes  devient  encore 
plus  distincte  chez  un  grand  nombre  d'autres  espèces  où  l'esto- 
mac central,  au  lieu  de  se  prolonger  vers  le  bord  de  l'ombrelle 
en  forme  de  loges  ou  de  caecums ,  est  en  communication  avec 
un  système  de  vaisseaux  parfaitement  caractérisés.  Ces  canaux 
prennent  toujours  naissance  tout  autour  de  l'estomac  central , 
et  se  portent  vers  le  bord  du  disque ,  où  ils  communiquent 
entre  eux.  Leur  disposition  varie,  du  reste  :  tantôt  elle  est  très 
simple  ;  d'autres  fois  elle  se  complique  davantage,  et  permet 
une  véritable  circulation  des  liquides  nourriciers. 

Dans  sa  forme  la  plus  simple ,  cet  appareil  gastro-vasculaire 
consiste  en  un  réservoir  central  qui  n'est  autre  chose  que  l'es- 
tomac, et  en  quatre  canaux  centrifuges  disposés  en  croix  et 
allant  déboucher  dans  un  canal  circulaire  situé  près  du  bord  du 
disque,  et  donnant  à  son  tour  naissance  à  une  série  de  petits 
canaux  creusés  dans  l'axe  des  tentacules  marginaux.  Les 
Océanies  ,  les  Sarsies  et  les  Thaumantias  nous  offrent  ce  mode 
d'organisation  (2). 

(1)  Dans  VÉquorêe  violacée  de  la  moser  entre  elles  de  façon  à  constituer 

Méditerranée,  j'ai   compté  soixante-  un  canal  marginal  annulaire  (a). 
quatorze  de  ces  canaux  radiaires  qui  M.  Huxley  a  fait  connaître  un  mode 

parlent  de  l'estomac  et  se  dirigent  vers  de  structure  très  analogue   chez  les 

le   pourtour  du   corps  en  suivant  la  Médusaires  du  genre  Oceania,  et  il  a 

face  inférieure  du  disque  ou  ombrelle.  remarqué  que  chez  les  jeunes  indi- 

C'est  le  long  de  la  paroi  inférieure  de  vidus  les  canaux  radiaires  sont  étroits, 

ces  loges  tubulaires  que  sont  suspenr  mais  s'élargissent  par  les  progrès  de 

dus  les  organes  reproducteurs.  A  leur  l'âge  (b). 
extrémité,  elles  m'ont  paru  s'anasto-  (2)  La  disposition   de  ce   système 

(a)  Milne  Edwards,  Observations  sur  la  structure  et  les  fonctions  de  quelques  Zoophytes,  etc. 
(Ann.  des  sciences  nat.,  1841,  3*  série,  t.  XVI,  p.  196,  pi.  1,  fig.  1  a,  1  b). 

(b)  Huxley,  On  the  Anatomy  and  Affinities  of  the  Family  of  the  Méduses  (Philos.  Trans.,  1849, 
p.  421,  pi.  37,  fig.  11,  12  et  15). 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES. 


59 


Chez  les  Bérénices  de  Pérou  et  Lesueur  (1) ,  et  chez  les 
Médusaires  dont  Forbes  a  formé  le  genre  Willsia,  cet  appareil 
se  complique  un  peu  plus  :  les  canaux  périgastriques  sont  au 


gastro-vasculaire,  très  simple,  a  été 
fort  bien  représentée  chez  les  Sarsies 
et  les  Tiaropsis  par  M.  Agassiz  (a), 
et  chez  les  Thaumantias ,  etc.,  par 
E.  Forbes  ,  naturaliste  très  distingué 
d'Edimbourg  ,  qui  est  mort  récem- 
ment (6).  Dans  le  genre  Circé,  de 
Mertens  (c),  le  nombre  de  ces  vais- 
seaux radiaires  est  de  huit,  et  ils  nais- 
sent vers  la  partie  inférieure  de  la 
cavité  gastrique  centrale,  de  façon  à 
remonter  le  long  des  parois  du  pé- 
doncule central  pour  gagner  la  face 
inférieure  du  disque  (cl). 

La  conformation  du  système  gastro- 
vasculaire  paraît  être,  sous  ce  der- 
nier rapport,  à  peu  près  la  même  chez 
l'Acalèphe  que  M.  Délie  Chiaje  a  figuré 
sous  le  nom  de  Di.anaea  luculana; 
seulement  cet  anatomiste  a  repré- 
senté chacun  des  canaux  radiaires, 
ainsi  que  le  canal  marginal ,  comme 
étant  formé  de  deux  tubes  parallèles, 
disposition  qui,  probablement,  n'existe 
pas(e).  Une  forme  intermédiaire  entre 


celle  de  l'appareil  gastro-vasculaire 
des  Circés  et  des  Thaumantias,  etc., 
se  voit  dans  le  genre  Hippocrene  de 
M.  Agassiz  (/"). 

Dans  le  genre  Stomobrachium,  de 
M.  Brande,  les  canaux  périgastriques 
naissent  ,  comme  chez  les  Thau- 
mantias ,  immédiatement  sous  le 
disque  ,  mais  sont  au  nombre  de 
huit ,  ainsi  que  cela  a  été  constaté 
par  M.  Sars  chez  son  Oceania  octo- 
costata  (g) ,  espèce  que  M.  Ehren- 
berg  a  décrite  ensuite  sous  le  nom 
de  Melicertum  complanulatum  (h), 
et  que  Forbes  a  appelée  Stomobra- 
chium octocostatum  (i),  ou  de  douze, 
comme  cela  se  voit  chez  le  Stomo- 
brachium lenticulare  (j). 

On  compte  six  de  ces  rayons  gastro- 
vasculaires  dans  une  espèce  que 
M.  Agassiz  a  considérée  comme  une 
variété  de  son  Sarsia  mirabilis  (k). 

(1)  Péron  et  Lesueur,  Tabl.  des 
caract.  gén.  des  Méduses  (Arch.  du 
Muséum,  1809,  t.  XIV,  p.  326). 


(a)  Agassiz,  Contributions  to  the  Natural  History  of  the  Acalephœ  of  North  America  (Mem.  of 
the  American  Acad.  of  Arts  andScience,  4850,  t.  IV,  p.  239,  pi.  4,  fig.  1,  2  ;  pi.  6,  fig.  4). 

(6)  Forbes  ,  A  Monograph  of  the  British  Naked-Eyed  Medusœ ,  p.  4,  p.  15,  fig.  1,  pi.  8  , 
fig.  2  a,  etc. 

(c)  Brandt,  Ausfùhrliche  Beschreibnng  der  von  G.  H.  Mertens,  auf  seiner  Weltumsegelung  beo- 
bachteten  Schirmquallen  (Mém.  de  l'Acad.  de  Saint-Pétersbourg,  1838,  6*  série,  t.  II,  p.  358, 
pi.  3,  fig.  7). 

(d)  Forbes,  Op.  cit.,  p.  34,  pi.  1,  fig.  2. 

(e)  Délie  Chiaje  ,  Descrizione  e  natomia  degli  Animali  invertebrati  délia  Sicilia  citeriore  , 
pi.  142,  fig.  1  et  2. 

(f)  Agassiz,  loc.cit.,  p.  262,  pi.  1,  fig.  1. 

(g)  Sars ,  Beskrivelser  og  iagttagelser  over  nogle  mœrkelige  eller  nye  i  havet  ved  den  Ber- 
genske  kyst  levende  Dyr.  ln-4.  Bergen,  1835,  p.  24,  pi.  4,  fig.  9a,  96. 

(h)  Ehrenberg,  Ueber  die  Akalephen  des  Rothen  Meeres  <Mém.  de  l'Académie  de  Berlin,  1835, 
I.XXII,  p.  255,  pi.  8,  fig.  6). 
(i)  Forbes,  loc.  cit.,  p.  31,  pi.  4,  fig.  1  a,  1  6. 
(j)  Forbes,  Op,  cit.,  pi.  20,  fig.  la,  16,  le. 
(k)  Agassiz,  loc.  cit.,  pi.  4,  fig.  1. 


60 


CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 


nombre  de  six  et  se  dichotomisent  deux  fois,  de  sorte  que 
vers  le  bord  de  l'ombrelle  ils  constituent  trente-deux  branches 
qui  vont  déboucher  dans  le  canal  marginal  (1). 

Chez  d'autres  Médusaires ,  les  ramifications  de  la  portion 
périphérique  du  système  gastro-vasculaire  deviennent  beaucoup 
plus  nombreuses,  et  s'anastomosent  entre  elles  de  façon  à  con- 
stituer dans  le  voisinage  du  bord  de  l'ombrelle  un  réseau  à 
mailles  assez  serrées  (2).  Cette  disposition  est  très  remarquable 
chez  une  espèce  de  Médusaire  très  commune  sur  nos  côtes , 
que  Cuvier  a  désignée  sous  le  nom  de  Rhisostome,  à  raison 


(1)  Forbes,  Op.  cit.,  p.  20,  pi.  1, 
fig.  la,  lb,  Ie. 

(2)  Les  Géronies  présentent  une 
structure  intermédiaire  entre  ces  deux 
formes.  Dans  le  jeune  âge  leur  appa- 
reil gastro  -  vasculaire  est  organisé 
comme  chez  les  Thaumantias,etc.  Six 
canaux  radiaires  simples  se  rendent 
de  la  cavité  centrale  au  canal  annu- 
laire du  bord  de  l'ombrelle  ;  mais 
M.  Gegenbauer  vient  de  constater  que, 
par  les  progrès  de  l'âge,  il  part  de  ce 
dernier  canal  un  certain  nombre  de 
vaisseaux  centripètes  qui  s'avancent 
dans  l'épaisseur  de  l'ombrelle,  au  mi- 
lieu de  l'espace  compris  entre  les  ca- 
naux radiaires  primitifs  (a).  Dans  les 
individus  observés  par  ce  naturaliste, 
ces  canaux  secondaires  étaient  termi- 
nés en  cul-de-sac;  mais  il  est  pro- 
bable que  par  les  progrès  du  déve- 
loppement, ils  s'anastomosent  entre 
eux,  et  que  le  tronc  principal  de  chaque 


groupe  va  déboucher  dans  l'estomac 
ou  cavité  centrale,  de  façon  à  ressem- 
bler alors  en  tout  à  l'appareil  gastro- 
vasculaire  des  Aurélies. 

Ces  canaux  centrifuges  se  voient 
très  bien  dans  la  figure  que  Péron  et 
Lesueur  ont  donnée  de  la  Geronia 
heœaphylla  (b)  ;  mais  la  nature  n'en  a 
été  bien  connue  que  depuis  la  publi- 
cation des  recherches  de  M.  Gegen- 
bauer. 

Il  est  à  noter,  du  reste,  que  des 
transformations  analogues  s'obser- 
vent dans  l'appareil  gastro-vasculaire 
des  Aurélies  pendant  le  très  jeune 
âge,  comme  on  peut  le  voir  par  les 
figures  dont  M.  Sars  a  accompagné 
son  Mémoire  sur  le  développement  de 
ces  Animaux  (c),  et  je  ne  comprends 
pas  comment  l'existence  de  tous  ces 
vaisseaux  ait  pu  être  révoquée  en 
doute  par  un  naturaliste  d'Edim- 
bourg, M.  Reid  (d). 


(a)  Gegenbauer,   Versuch  eines  Systems  der  Medusen  (Zeitschr.  fur  wissench.  Zool.,  1856, 
Bd.  VIII,  p.  255,  pi.  8,  fig.  iG). 

(6)  Voyez  l'Atlas  de  la  grande  édition  du  Règne  animal,  Zoophytes,  pi.  52,  fig.  3. 

(c)  Sars ,   Ueber  die  EntwiekelUng   der  Médusa  aurita  und  der  Cyanea  capillata   (  Archiv  fur 
Naturgeschichte,  1841,  Bd.  1,  9"  série,  tab.  2  et  3). 

(d)  Reid,  Observ.  on  the  Development  of  the  Médusa:  (Ami.  and  Mag.  ofNat.  Hist.,  1848,  2' série, 
vol.  I,  p.  32). 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  61 

d'une  anomalie  singulière  de  l'appareil  digestif  dont  nous  aurons 
à  nous  occuper  plus  tard  (1). 

Enfin,  chez  les  Aurélies,  qui  abondent  aussi  sur  quelques 
parties  de  notre  littoral ,  les  canaux  périgastriques  forment 
également  un  lacis  vasculaire  assez  riche  dans  toute  la  portion 
périphérique  de  l'ombrelle  ,  et  il  y  a  un  degré  de  plus  dans  la 
division  du  travail  irrigatoire.  En  effet,  chez  les  divers  Aca- 
lèphes  dont  j'ai  parlé  jusqu'ici,  ce  sont  les  mêmes  canaux  qui 
paraissent  servir  indifféremment  pour  l'aller  et  le  retour  du 
fluide  nourricier,  et  l'irrigation  physiologique  semble  s'effectuer 
par  des  mouvements  de  fluctuation  irréguliers  plutôt  que  par 
une  véritable  circulation.  Mais  chez  les  Aurélies,  on  voit  partir 
de  la  cavité  centrale  du  système  gastro-vasculaire  deux  ordres 
de  canaux  qui  communiquent  entre  eux  à  leur  extrémité  péri- 
phérique par  l'intermédiaire  du  canal  marginal.  Les  uns  se 
ramifient  et  forment  par  l'anastomose  de  leurs  branches  un  lacis 
de  vaisseaux  presque  capillaires  qui  se  terminent  tous  dans  le 

(1)  Bien  qu'il  n'y  ait  pas,  comme  de  leur  étendue,  mais  donnent  ensuite 
d'ordinaire,  une  bouche  centrale  entre  naissance  à  une  foule  de  branches  la- 
ies bras  du  Rhizostome  ,  l'estomac  létales  qui  s'anastomosent  irréguliè- 
est  situé  de  la  même  manière  que  rement  entre  elles  et  constituent  un 
chez  les  autres  Médusaires,  clans  l'axe  réseau  vasculaire  dont  les  mailles  sont 
du  corps  ,  et  constitue  une  grande  d'autant  plus  serrées  qu'elles  sont  si- 
cavité  qui  se  prolonge  en  forme  de  tuées  plus  près  du  bord  de  l'ombrelle, 
quatre  loges  au-dessus  des  racines  des  D'autres  canaux,  au  nombre  de  huit, 
bras,  et  donne  naissance  à  seize  ca-  naissent  de  la  partie  inférieure  de  la 
naux  périphériques  qui  occupent  la  cavité  gastrique  ,  autour  du  point  où 
face  inférieure  du  disque  et  irradient  se  trouve  d'ordinaire  la  bouche  ,  et 
vers  le  bord  de  cet  organe.  Un  de  ces  descendent,  en  se  ramifiant,  dans  les 
canaux  naît  assez  près  de  l'axe  du  bras  ou  tentacules  labiaux,  où  plu- 
corps,  au-dessus  de  chacun  des  qua-  sieurs  de  leurs  branches  se  terminent 
tre  ovaires,  et  trois  autres  du  bord  par  des  orifices  buccaux  ,  disposition 
externe  de  chacun  des  prolongements  qui  a  valu  à  ces  Zoophytes  le  nom  de 
delà  cavité  gastrique  centrale  ;  tous  Rhizostomes  [a). 
sont  simples  dans  la  première  moitié 

(a)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  pi.  0,  Gg.  i,  et  Zoophytes  du  Règne  animal  de  Cuvief, 
pi.  50,  représentant  un  Rliizoslome  injecté. 


62  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

canal  circulatoire  creusé  dans  le  bord  du  disque  ;  les  autres  se 
portent  en  ligne  droite,  et  sans  se  diviser,  de  ce  canal  marginal 
à  l'estomac  central,  et  paraissent  servir  de  préférence  au  trans- 
port des  sucs  qui  de  l'estomac  se  rendent  dans  les  diverses 
parties  de  l'organisme  ,  tandis  que  les  canaux  rameux  sem- 
blent destinés  à  opérer  le  retour  du  fluide  nourricier  vers  cette 
cavité. 

Dans  la  famille  des  Béroïdiens ,  ou  Acalèphes  Ciliobran- 
ches  (1),  on  trouve  des  représentants  des  principales  formes 
du  système  irrigatoire  dont  les  Médusaires  viennent  de  nous 
offrir  des  exemples  ;  mais  chez  quelques  espèces  cet  appareil  se 
perfectionne  davantage ,  et  le  perfectionnement  porte  tantôt  sur 
la  distinction  des  rôles  entre  les  canaux  efférents  et  afférents 
au  réservoir  central  constitué  par  l'estomac ,  d'autres  fois  sur 
la  division  plus  complète  du  travail  entre  la  portion  digestive  et 
la  portion  vasculaire  de  l'ensemble  de  cavités  dont  le  corps  de 
ces  Zoophytes  se  trouve  creusé. 

Comme  exemple  de  la  première  de  ces  modifications,  je  citerai 

(1)  Ces  deux  sortes  de  canaux,  péri-  dépendants  de  chacune  de  ces  cavités; 

gastriques    alternent  entre  eux.   Les  les  quatre  autres  partent  de  la  portion 

canaux  simples  sont  au  nombre   de  centrale  de  l'estomac,   au-dessus  de 

huit,  et  naissent  des  angles  des  loges  l'origine  des  tentacules  labiaux  et  en- 

de  la  cavité  gastrique  qui  sont  situées  tre  les  bras  de  l'espèce  de  croix  formée 

entre  les  racines  des  bras  et  qui  cor-  par  l'origine  des  quatre  loges  péri- 

respondent  aux  ovaires.   Les  autres,  gastriques.  Le  tronc  médian  de  chacun 

en  même    nombre,   sont   également  deceshuit  systèmes  rameux  va  débou- 

simples  à  leur  origine,  mais  ne  tardent  cher  dans  le  canal  marginal,  en  face 

pas  à  donner  naissance  latéralement  à  du  point  oculifonne.  Enfin,  ce  canal 

deux  grosses  branches  rameuses,  puis  marginal  donne  à  son  tour  naissance 

à  quelques  ramuscules  de   moindre  à  une  multitude  de  canaux  simples  et 

importance.  Quatre  de  ces  canaux  ra-  capillaires  qui  occupent  l'axe  des  fila- 

meux  naissent  du   milieu  des  loges  ments  marginaux  dont  le  disque  est 

gastriques  dont  il  vient  d'être  ques-  garni  (a).  M.  Ehrenberg,  qui  a  fait  un 

tion,  entre  les  deux  canaux  simples  excellent  travail  sur  l'organisation  de 


(a)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  T,  p.  10,  pi.  10,  fig.  1  a,  et  Zoophytes  du  Règne  animal 
de  Guvier,  pi.  48,  fig.  1  a. 


CHEZ    LES    ZOOPHTTES.  63 

les  Béroés  proprement  dits,  dont  j'ai  fait  connaître  le  mode  d'or- 
ganisation il  y  a  environ  quinze  ans  (1) .  Chez  ces  Acalèphes,  l'es- 
tomac est  situé  au  sommet  de  l'espèce  de  bourse  ovalaire  formée 
par  le  disque  ou  corps  de  l'Animal,  et  donne  naissance,  comme 
chez  les  Médusaires ,  à  des  canaux  radiaires  qui ,  au  nombre 
de  huit ,  suivent  les  huit  ambulacres  ou  côtes  frangées  dont  la 
surface  du  disque  est  garnie.  Ces  canaux  vont  déboucher  dans 
un  vaisseau  marginal  annulaire,  et,  chemin  faisant,  ils  fournissent 
de  chaque  côté  une  multitude  de  branches  transversales  qui , 
chez  les  jeunes  individus,  sont  peu  ramifiées  et  se  terminent  en 
cul-de-sac  ,  mais  qui,  par  les  progrès  du  développement ,  s'a- 
vancent de  plus  en  plus  dans  les  espaces  intercostaux  et  s'y 
anastomosent  entre  elles  de  façon  à  constituer  un  réseau  capil- 
laire très  riche.  Deux  autres  canaux,  que  j'appelle  des  vais- 
seaux périgastriques  inférieurs ,  naissent,  également  de  l'esto- 
mac et  vont  se  terminer  dans  le  vaisseau  annulaire  du  bord 
du  disque  ;  mais  ils  suivent  la  face  interne  ou  inférieure  de 
l'espèce  de  cloche  formée  par  celui-ci ,  et  ils  fournissent  laté- 
ralement un  grand  nombre  de  branches  transversales  dont 


ces  Médusaires ,  a  vu  que  chez   les  nent  avec  les  vaisseaux  rnmeux,   se- 

jeunes  individus  les  ramifications  des  raient  bifurques  vers  le  bout  (6). 
canaux  périphériques  sont  beaucoup  Dans  Y  Aurélia  limbata,  observée 

moins  nombreuses  que  chez  les  indi-  par  Mertens,   le  système  gastro-vas- 

vidusplus  avancés  en  âge.  On  lui  doit  culaire  offre  les  mêmes  caractères  que 

aussi  de  très  bonnes  figures  de  Pap-  chez  V Aurélia  aurita  ;  mais  le  réseau 

pareil  gastro-vasculaire  (a).  formé  par  les  anastomoses  des  canaux 

La  disposition  de  ces  canaux  péri-  ramifiés  est  beaucoup  plus  riche  (c). 
gastriques  paraît  être  à  peu  près  la  (1)  Milne  Edwards ,  Observations 

même  dans  le  genre  Sthenonia  d'Esch-  sur  la  structure  et  les  fonctions  de 

scholtz,  si  ce  n'est  que  les  vaisseaux  quelques  Zoo phy  tes,  etc.  (Ann.  des  se. 

simples  qui,  chez  les  Aurélies,  alter-  nat.,  18M  ,  2e  série,  t.  XVI,  p.  207). 

(o)  Ehrenberg,  Ueber  die  Akalephen  des  Rothen  Meeres  und  den  Organismus  der  Medusen  des 
Ostsee  [Abhandlungen  der  K.  Akad.  der  Wissenchaften  zu  Berlin,  1835,  p.  181,  pi.  1,  %.  1  ; 
pi.  a,  fig.  1  à  12  ;  pi.  3,  fig.  1  à  5). 

(b)  Eschscholtz,  System  der  Akalephen,  p.  59,  pi.  4,  fig-.  1. 

(c)  Brande,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Académie  de  Saint-Pétersbourg ,  1838,  6*  série,  t.  II,  pi  10 
fig-  2). 


64  CIRCULATION  DES  fluides  nourriciers 

les  ramuscules  s'anaslomosent  avec  le  réseau  capillaire  super- 
ficiel dépendant  des  vaisseaux  costaux  ou  périgastriques  supé- 
rieurs (1). 

Ces  Béroés ,  de  même  que  les  autres  Acalèphes,  sont  d'une 
transparence  si  parfaite,  qu'en  les  observant  à  l'état  vivant,  il 
est  facile  de  voir  tout  ce  qui  se  passe  dans  l'intérieur  de  leur 
corps,  et,  en  les  étudiant  de  la  sorte  ,  j'ai  eu  souvent  l'occa- 
sion de  constater  l'existence  de  courants  rapides  dans  les 
diverses  parties  de  ce  système  irrigatoire  et  d'y  reconnaître 
une  véritable  circulation  du  fluide  nourricier,  marquée  par  le 
déplacement  des  globules  que  ce  fluide  tient  en  suspension.  Je 
voyais  le  courant  se  diriger  de  l'estomac  vers  les  diverses  par- 
ties du  corps  dans  les  deux  canaux  profonds ,  et  remonter  en 
sens  inverse  du  vaisseau  annulaire  jusque  dans  l'estomac,  par 
les  huit  canaux  sous-costaux.  L'estomac  est  donc  ici  le  réservoir 
central  de  l'appareil  irrigatoire,  et  le  fluide  nourricier  circule 
dans  le  double  système  de  canaux  qui  est  en  communication 
avec  cette  cavité. 

Chez  les  autres  Acalèphes  Cténophores,  l'appareil  irrigatoire 
ne  présente  plus  les  réseaux  capillaires  dont  les  Béroés  sont 
pourvus ,  et  se  trouve  réduit  aux  gros  troncs  qui  naissent  de 
l'estomac  ou  qui  longent  les  bords  des  parties  analogues  au 
disque;  mais,  sous  un  autre  rapport,  il  est  au  contraire  plus 
parfait,  car  il  est  disposé  de  façon  à  pouvoir  fonctionner  sans 
le  concours  de  l'estomac.  En  effet,  la  partie  centrale  du  système 
gastro-vasculaire  se  trouve  divisée  en  deux  portions  par  un 
étranglement  contractile  ;  une  première  portion  vestibulaire  re- 
çoit les  aliments  et  les  digère,  puis  les  fait  passer  dans  la  portion 
profonde  ou  post-stomacale  qui  est  en  communication  directe 
avec  les  canaux  irrigatoires. 


(1)  toc.  cit.,  p],  6,  fig.  1  et  h.  et  Zoophytës  du  Règne,  animal  de  Cuvief, 
pi.  56,  fig.  1. 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  .    65 

Ce  mode  d'organisation ,  que  j'ai  rencontré  d'abord  dans  un 
petit  Acalèphe  de  la  Méditerranée,  dont  j'ai  formé  le  genre 
Lesueuria,  se  retrouve,  à  peu  de  chose  près  ,  non- seulement 
dans  les  genres  Eucharis  et  Chiaia  ,  mais  aussi  chez  les 
Cestes  (1).  Dans  les  Cydippes  (ou  Pleurobrachies) ,  la  démar- 


(1)  Dans  les  Lesueuria  (a),  la  pre- 
mière portion  du  système  gastro-vascu- 
laire,  ou  chambre  pharyngienne  ,  qui 
communique  librement  au  dehors  par 
la  bouche,  située  à  son  extrémité  infé- 
rieure, est  très  grande  et  occupe  l'axe 
du  corps.  Elle  fait  l'office  d'un  estomac, 
et  communique  par  son  extrémité  su- 
périeure avec  une  seconde  chambre 
que  je  désigne  sous  le  nom  de  ventri- 
cule chylifère.    Cette    cavité  s'élève 
verticalement  jusqu'à   la  face  supé- 
rieure du  corps  où  se  trouve  le  sys- 
tème nerveux  central  ;  elle  s'y  termine 
en  cul-de-sac,  et  son  entrée  est  garnie 
de  cils  vibratiles.  Deux  ordres  de  ca- 
naux naissent  de  sa  partie  inférieure: 
les  uns,  au  nombre  de  quatre,  s'élè- 
vent en  divergeant,  et  ne  tardent  pas 
à   se  bifurquer  pour  former  les  huit 
canaux  costaux  dont  la  disposition  est 
à  peu  près  la   même  que   chez  les 
Béroés,   sauf  qu'ils  ne   donnent  pas 
naissance  à  un  réseau  intermédiaire. 
A  leur  extrémité  inférieure,  ces  vais- 
seaux verticaux  contournent  le  bord 
des  lobes  dont  le  corps  est  garni  laté- 
ralement, et  se  réunissent  deux  à  deux 
près  du  point  d'insertion  des  quatre 
tentacules  situés  à  la  base  de  ces  ap- 
pendices. Là  ils  donnent  chacun  nais- 
sance à  un  petit  vaisseau  qui  longe  en 
dessous  le  tentacule  correspondant,  et 


à  un  vaisseau  marginal  qui  suit  le  bord 
inférieur  du  corps  et  communique  à  son 
tour  avec  les  canaux  périgastriques  in- 
férieurs. Enfin,  ces  derniers,  au  nom- 
bre de  deux  paires,  remontent  en  lon- 
geant l'estomac,  et  vont  déboucher  à  la 
partie  inférieure  du  ventricule  chyli- 
fère ,  de  façon  à  constituer  le  second 
ordre  de  canaux  dont  il  a  été  question 
ci-dessus  comme  dépendant  de  ce  ré- 
servoir central.  Les  courants  ne  sont 
pas  réguliers  dans  ce  système  irriga- 
toire,  mais  ils  m'ont  paru  avoir  la 
même  direction  que  chez  les  Béroés. 

La  disposition  de  l'appareil  gastro- 
vasculaire  est  à  peu  près  la  même  dans 
le  genre  Chiaia.  La  figure  que  M.  Délie 
Chiaje  a  donnée  d'un  de  ces  Acalèphes 
sous  le  nom  d'Alcinoe  papillosa  man- 
que d'exactitude  (6).   Les  principales 
différences,  comparativement  à  ce  qui 
se  voit  chez  le  Lesueuria ,  tiennent  : 
1°  au  mode  d'origine  des  canaux  cos- 
taux intermédiaires  qui  appartiennent 
aux  petites  côtes  ambulacraires,  et  qui 
naissent  d'un  tronc  périgastrique  situé 
vers  le  tiers  de  leur  longueur,  tandis 
que  les  canaux  costaux  externes,  de 
même  que  tous  ceux  des  Lesueuria,  se 
continuent  avec  les  troncs  périgastri- 
ques par  leur  extrémité'  supérieure; 
2°  à  l'existence  d'une  multitude  de  pe- 
tites branches  latérales  qui  se  terminent 


(a)  Milne  Edwards,  Observations  sur  la  structure  et  les  fonctions  de  quelques  Zoophyles  (Ann. 
des  sciences  nat.,  2"  série,  t.  XVI,  p.  203,  pi.  3  et  4,  fig.  1). 

(b)  Délie  Chiaje,  Memoria  sulla  storia  e  notomia  degli  Animali  senza  vertèbre  del  regno  di 
Napoli,  t.  IV,  p.  7,  pi.  51,  fig.  1  et  2,  et  Descriz.  e  notom.  degli  Anim.  invert.,  pi.  150,  fig.  1 
et  2. 


m. 


66  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

cation  entre  l'estomac  et  la  portion  irrigatoire  du  système  gastro- 
vasculaire  est  encore  plus  prononcée.  Mais  la  portion  vasculaire 
de  ce  système  est  moins  développée ,  et  le  mouvement  de  va- 
et-vient  du  fluide  nourricier  s'effectue  à  la  fois  dans  chaque 
canal. 

Chez  les  Vélelles,  que  les  recherches  récentes  de  plusieurs 
naturalistes  tendent  à  faire  considérer  comme  des  Acalèphes 
composés  dont  l'individu  central  aurait  seul  un  appareil  digestif, 
et  les  autres  ne  serviraient  qu'à  la  reproduction ,  le  système 


en  caecums,  et  qui  correspondent  aux 
lignes  d'insertion  des  rangées  trans- 
versales de  filaments  locomoteurs  (a). 

Dans  les  Acalèphes  que  M.  Agassiz 
a  décrits  sous  le  nom  de  Bolina  alata, 
la  conformation  du  système  gastro- 
vasculaire  paraît  être  la  même  que 
chez  le  Lesueuria ,  bien  que  ce  na- 
turaliste ne  fasse  pas  mention  des 
deux  paires  de  canaux  longitudi- 
naux intermédiaires  qui  existent  chez 
ce  dernier  (6).  Il  paraît  que  M.  Agas- 
siz ne  connaissait  pas  les  observations 
dont  ce  Zoophy te  avait  été  l'objet  ;  car 
il  dit  qu'avant  lui  on  ignorait  complè- 
tement la  disposition  de  ces  vais- 
seaux (c). 

Si  l'on  jugeait  de  l'organisation  des 
Cestes  par  les  figures  que  MM.  Esch- 
scholiz  (d)  et  Délie  Chiaje  (e)  en  ont 
données,  on  croirait  que  l'appareil 
gastro  -  vasculaire  de  ces  Acalèphes 
diffère  beaucoup  de  celui  des  Le- 
sueuries  et  des  Chiaies  ;  mais  il  n'en 


est  pas  ainsi.  La  disposition  de  la 
cavité  gastrique,  du  ventricule  chyli- 
fère  et  des  deux  ordres  de  canaux 
périgastriques  est  essentiellement  la 
même.  (/)  En  effet ,  le  sommet  de  la 
cavité  stomacale  qui  occupe  l'axe  du 
corps  se  continue  avec  une  cavité 
cylindrique  grêle  et  verticale  qui  va 
se  terminer  en  cul-de-sac  sous  la  fos- 
sette dorsale,  et  qui  donne  naissance 
inférieurement  à  quatre  canaux  péri- 
gastriques ascendants.  Ceux-ci  s'élè- 
vent en  divergeant  de  façon  à  simuler 
les  quatre  côtés  d'une  pyramide  ren- 
versée, et  se  divisent  chacun  en  deux 
branches,  dont  l'une  monte  jusqu'au 
bord  supérieur  du  corps,  et  se  recourbe 
ensuite  en  dehors  pour  suivre  en  des- 
sous l'ambulacre  ou  rangée  de  franges 
ciliaires  dont  ce  bord  est  garni  ;  l'au- 
tre se  recourbe  en  bas,  et  descend  jus- 
que vers  les  deux  tiers  de  la  face  laté- 
rale du  corps,  où  il  se  recourbe  brus- 
quement en    dehors   pour  marcher 


(a)  Milne  Edwards,  Note  sur   l'appareil  gastro-vasculaire  de  quelques  Acalèphes  Cténophores 
(Ann.  des  sciences  nat.,  1857,  4°  série,  t.  VII,  pi.  14). 

(b)  Agassiz,  Contributions  to  the  Nalural  History  of  the  Acalephœ  of  North  America,  part.  2, 
p.  357,  pi.  7  et  8  (Mem.  of  the  American  Acad.,  t.  II,  1850). 

(c)  hoc.  cit.,  p.  356. 

(d)  Eschscholtz,  System  der  Acalephen,  p.  14,  pi.  1,  R§.  1  a,  1  6. 

(e)  Délie  Chiaje,  Memorie  sulla  storia  e  notomia  degli  Animali  senza  Vertèbre  di  Napoli,  t.  IV, 
p.  14,  pi.  52,  fig.  2. 

(f)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1857,  t.  VII,  pi.  15). 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  67 

irrigatoire  est  également  une  dépendance  de  l'estomac,  mais 
toute  sa  portion  vasculaire  acquiert  un  développement  sans 
exemple  chez  les  Zoophytes  que  nous  venons  de  passer  en 
revue.  Un  des  naturalistes  les  plus  habiles  de  la  Suisse , 
M.  Vogt,  en  a  fait  récemment  une  étude  approfondie,  et  a  trouvé 
que  les  canaux  rameux  qui  partent  de  l'estomac  se  répandent 
dans  les  diverses  parties  du  disque  commun  ,  et  font  commu- 
niquer entre  eux  tous  les  individus  agastriques ,  ou  organes 
reproducteurs  de  ces  singuliers  Zoophytes  (1). 


parallèlement  à  la  précédente  jusqu'à 
l'extrémité  des  lobes  latéraux  ou  ailes, 
bien  qu'il  n'y  ait  sur  son  trajet  au- 
cune trace  d'ambulacres.  Parvenus  à 
l'extrémité  pointue  des  ailes  qui ,  en 
s'allongeant  excessivement,  donnent  à 
ces  Acalèpbes  la  forme  d'un  ruban,  ces 
deux  vaisseaux  se  réunissent  et  débou- 
chent dans  un  vaisseau  marginal  infé- 
rieur qui  longe  le  bord  frangé  infé- 
rieur et  se  réunit  à  son  congénère 
sur  le  devant  de  la  bouche.  Enfin,  un 
canal  vertical,  appelé  vaisseau  péri- 
gastrique  inférieur,  se  dirige  de  ce 
point  vers  la  base  du  ventricule  chy- 
lifère  en  longeant  l'estomac,  et  com- 
plète sur  cbaque  face  du  corps  le 
cercle  circulatoire. 

Dans  le  genre  Pleurobrachie  de 
Fleming  (ou  Cydippe  d'Escbschollz), 
la  cavité  centrale  donne  également 
naissance  à  deux  séries  de  vaisseaux 
dont  les  uns  sont  ascendants  et  vont 
s'ouvrir  dans  les  huit  canaux  costaux  ou 
ambulacraires,  et  dont  les  autres,  au 


nombre  de  deux  seulement,  descendent 
le  long  des  ^organes  appendiculifères 
et  représentent  les  vaisseaux  périgas- 
triques  inférieurs  des  Béroïdiens  ordi- 
naires; mais  il  n'existe  pas  de  canal 
marginal  inférieur  pour  relier  entre 
elles  les  extrémités  inférieures  de  tous 
ces  vaisseaux  verticaux,  qui  se  termi- 
nent par  conséquent  en  culs-de-sac.  Il 
est  aussi  à  noter  que  tous  ces  vais- 
seaux, au  lieu  d'être  étroits  et  cylin- 
driques comme  dans  les  espèces  pré- 
cédentes ,  sont  très  larges ,  et  que 
dans  l'intérieur  de  chacun  d'eux  ,  on 
voit  à  la  fois  deux  courants  en  sens 
contraire,  dirigés  l'un  du  centre  à  la 
circonférence  du  système  irrigatoire, 
l'autre  de  la  circonférence  vers  la  ca- 
vité centrale  (a). 

(1)  Ces  divers  canaux  périgastriques 
sont  tapissés  d'un  tissu  qui  a  tous  le3 
caractères  d'un  organe  sécréteur,  et 
qui  pourrait  bien  remplir  les  fonctions 
d'un  appareil  hépatique.  Xous  revien- 
drons avec  plus  de  détail  sur  ce  su- 


(a)  Voyez,  au  sujet  de  l'appareil  gastro-vaseulaire  de  ces  Animaux  :  - 

Audouin  et  Milne  Edwards  ,  Observ.  sur  le  Beroe  pileus,  insérées  par  Cuvier  dans  la  2*  édition 
de  son  Règne  animal,  1830,  t.  III,  p.  2S1. 

—  Milne  Edwards,  Zoophytes  de  l'Atlas  delà  grande  édition  du  Règne  animal,  pi.  56,  fig,  3  6, 
et  Note  sur  l'appareil  gastro-vaseulaire  de  quelques  Acalèphes  Cténophores  (Ann.  des  sciences 
nat.,  1857,  -ie  série,  t.  Vil,  pi.  16,  fig.  2). 

—  Agassiz,  Contributions  to  the  Nat.  Hist.  of  the  Acalephm  of  North  America,  p.  313, 
pi.  2  à  i. 


68  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

Les  organes  moteurs  qui  déterminent  les  courants  irriga- 
toires  chez  les  Acalèphes  sont  faciles  à  découvrir  chez  beaucoup 
d'espèces  et  paraissent  être  partout  les  mêmes.  Ce  sont  des 
cils  vibratiles  qui  garnissent  la  surface  interne  d'une  portion 
plus  ou  moins  considérable  des  canaux  gastro-vasculaires.  Chez 
les  Béroés,  par  exemple,  ces  filaments  épithéliques  se  trouvent 
en  grand  nombre  dans  le  canal  marginal  et  dans  les  parties 
voisines  du  lacis  vasculaire  (1).  On  les  distingue  également 
chez  les  Lesueuries  et  les  Cydippes ,  mais  ici  les  contractions 
générales  du  corps  viennent  aussi  en  aide  à  la  circulation ,  et 
je  suis  porté  à  croire  que  les  mouvements  de  systole  et  de 
diastole  qui  se  remarquent  dans  le  disque  des  Médusaires  et 
qui  servent  à  la  natation  concourent  au  même  but  (2). 


jet ,  lorsque  nous  étudierons  les  or- 
ganes.de  la  digestion,  et  je  me  borne- 
rai à  ajouter  ici  quelques  mots  relatifs 
à  la  disposition  de  ces  canaux. 

On  trouve  au  fond  du  sac  fusiforme 
central  qui  constitue  l'estomac  de  la 
Vélelle  deux  rangées  d'ouvertures  qui 
conduisent  dans  des  canaux  larges  et 
sinueux.  Ceux-ci  se  dirigent  vers  le 
bord  du  disque  en  se  ramifiant  et  en 
s'anastomosanl  entre  eux,  de  façon  à 
former  un  réseau  épais  et  serré  sous 
sa  face  inférieure.  La  masse  brune 
et  spongieuse  ainsi  constituée  sur- 
monte les  individus  astomes  qui  en- 
tourent l'individu  nourricier  ,  et  ces 
canaux  sont  en  communication  directe 
avec  la  cavité  dont  chacun  de  ces 
corps  polypiforme  est  creusé.  Enfin, 


le  réseau  vasculaire  se  prolonge  dans 
le  limbe  du  disque,  et  ses  rameaux 
remontent  jusque  sur  les  côtés  de  la 
lame  verticale  dont  ce  disque  est  sur- 
monté. MM.  Délie  Chiaje,  Hollard  et 
Krôhn,  n'ont  connu  que  la  portion 
centrale  de  ce  système  gastro-vascu- 
laire,  et  l'ont  considérée  comme  étant 
le  foie  ;  M.  Vogt  l'a  fait  connaître 
d'une  manière  plus  complète  (a). 

(1)  Mil  ne  Edwards  ,  Observations 
sur  la  structure  de  quelques  Acalè- 
phes (Ann.  des  se.  nat.,  1841,  2e  sér., 
t.  XVI,  p.  213). 

(1)  C'est  par  des  contractions  péri- 
slaltiques  de  la  membrane  dont  les 
canaux  gastro-vasculaires  sont  ta- 
pissés que  M.  Elirenberg  explique 
les  courants  non  -  seulement  chez  les 


(a)  Délie  Chiaje,  Descriz.  e  Notomia  degliAnim.  senza  vertèbre,  t.  IV,  p.  106. 

—  Hollard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Vélelles  (Ann.  des  sciences  nat.,  18-45,  3"  série, 

t.  m,  p.  251). 

—  Rrôhn ,  Notiz  ùber  die  Anivesenheit  eigenthùmlicher  Luftkanàle  bel  Yelella  und  Porpita 
(Erichson's  Archiv  fur  Naturgeschichte,  1S48,  Bd.  I,  p.  30). 

—  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  Impartie,  Genève,  1854, 
p.  17  et  suiv.,  pi.  1,  fig.  4,  8  et  9;  pi.  2,  fig\  12,  1 5  et  16. 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  69 

Je  dois  ajouter  qu'un  naturaliste  allemand,  M.  Will,  pense 
que  tous  les  vaisseaux  en  communication  avec  la  cavité  digestive 
sont  renfermés  dans  un  autre  système  de  canaux  qui  les  accom- 
pagneraient partout  et  qui  serviraient  à  contenir  un  fluide  nour- 
ricier spécial  ;  mais  cette  opinion  paraît  être  dénuée  de  fonde- 
ment ,  et  l'appareil  gastro-vasculaire  est  le  seul  qui ,  chez  les 
Acalèphes ,  semble  pouvoir  servir  à  l'irrigation  nutritive  de 
l'organisme  (1). 

§  5.  —  La  classe  des  Coralliaires  (ou  Polypes  proprement 
dits)  nous  offre  une  série  de  termes  correspondants  aux  princi- 
pales formes  de  l'appareil  irrigatoire  que  nous  venons  de  passer 
en  revue  chez  les  Acalèphes. 

Ainsi  le  mode  d'organisation  que  nous  avons  rencontré,  dans 


Classe 

des 

Coralliaires. 


Aurélies  ,  mais  aussi  chez  les  Bé- 
roes,  etc.  (a).  J'avouerai  n'avoir  jamais 
pu  voir  ces  mouvements  péristaltiques, 
et  je  suis  au  contraire  certain  du  rôle 
actif  des  cils  vibratiles  dont  j'ai  eu  sou- 
vent l'occasion  d'étudier  le  jeu  chez 
les  Béroés. 

M.  Buscli  a  vu  aussi  les  courants  du 
liquide,  nourricier  être  produits  par 
l'action  de  cils  vibratiles  chez  les  Mé- 
dusaires  du  genre  Sarsia  ;  mais  il 
y  a,  indépendamment  de  cela  ,  des 
mouvements  irréguliers  qui  dépen- 
dent, soit  de  l'injection  d'une  nouvelle 
quantité  de  liquide  de  l'estomac  dans 
les  vaisseaux,  soit  des  contractions 
partielles  du  corps.  D'après  M.  Busch, 


la  direction  des  courants  irrigatoires 
se  renverserait  d'une  manière  pério- 
dique ,  à  peu  près  comme  chez  les 
Tuniciers  (6). 

(1)  Suivant  Will, les  vaisseaux  gas- 
tro-vasculaires  des  Béroés  et  des- Mé- 
duses seraient  bordés  par  un  espace 
libre  contenant  un  liquide,  ou  plutôt 
se  trouveraient  logés  dans  un  canal 
que  cet  auteur  considère  comme  étant 
un  véritable  vaisseau  sanguin  (c)  ; 
mais  il  n'a  pu  jamais  y  apercevoir  de 
courant,  et  les  anatomistes  qui  ont 
cherché  à  vérifier  ses  observations 
sont  tous  arrivés  à  des  résultats  né- 
gatifs (d). 


(a)  Ehrenberg,  Ueber  die  Akalephen  des  Rothes  Meeres  (Acad.  de  Berlin,   1835,  et  Ann.  des 
sciences  nat.,  2*  série,  t.  IV,  p.  295). 

(b)  Busch  ,  Beobachtungen  iiber  Anatomie  und  Entwickelung  einiger  Wirbellosen  Seethiere  , 
•1852,  p.  3. 

(c)  Will,  Horaz  Tergestinœ,  p.  34. 

—  Siebold  cl  Stannius,  Nouveau  Manuel  d' anatomie  comparée,  1. 1,  p.  G4. 

(d)  Voyez  Frey  et  Leuckart ,   Beitràge  S!«'  Kenntniss   Wirbelloser    Thiere  ,   mit  besonderer 
Berûcksichtigung  der  Fauna  des  Norddcutschen  Meeres,  1847,  p.  38. 

—  Forbes,  A  Monogr.  of  Ihe  Brit.  Naked-Eyed  Médusa:,  p.  6. 

—  Milne  Edwards,  Note  sur  l'appareil  gastro-vasculaire  de  quelques  Acalèphes  (Ann .  des  sciences 
nat.,  1857,  3e  série,  t.  VII). 


70  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

les  générations  sertulariennes  des  Acalèphes  se  retrouve  chez 
l'Hydre  d'eau  douce ,  devenue  célèbre  par  les  expériences 
curieuses  de  Tremblay. 

La  disposition  dont  les  Médusaires  du  genre  Pélagie  nous  ont 
offert  un  exemple  existe,  à  peu  de  chose  près,  chez  les  Lucer- 
naires,  les  Actinies  et  la  plupart  des  autres  Zoanthaires. 

Enfin  la  ressemblance  est  également  frappante  entre  l'appa- 
reil gastro-vasculaire  des  Aurélies  ou  des  Rhizostomes,  et  le 
système  à  la  fois*  digestif  et  irrigatoire  de  presque  tous  les 
Alcyonaires. 

Effectivement,  chez  l'Hydre,  que  la  plupart  des  zoologistes 
rangent  clans  cette  classe  (1),  le  corps  de  l'animal  est  trans- 
formé en  une  sorte  de  gaine  cylindrique,  et  la  cavité  stomacale 
qui  en  occupe  tout  l'intérieur  sert  à  la  fois  à  la  digestion  des 


(1)  La  cavité  stomacale  de  l'Hydre  tentaculaires  se  terminaient  dans  un 

se  rétrécit  inférieurement,  mais  s'étend  anneau  vasculaire  placé  autour  de  la 

jusque  dans  le  pied  de  l'animal,  et  bouche    (d).    Mais   M.    Ehrenberg  a 

envoie  des  prolongements  cylindriques  trouvé  qu'ils  débouchent  directement 

dans  l'intérieur  des  brasou  tentacules  dans  la  cavité  stomacale,  et  a  donné  une 

dont  la  bouche  est  entourée.  Corda  (a),  très  belle  figure  où  cette  disposition  se 

Laurent  (6),  Erdl  (c)  et  plusieurs  au-  voit  (e).  Les  observations  de  M.  Siebold 

très  naturalistes  avaient  remarqué  des  confirment  celles  de  M.  Ehrenberg,  et 

mouvements  oscillatoires  dans  le  li-  le  premier  de  ces  naturalistes,  dont 

quide  dont  ces  canaux   tentaculaires  l'habileté  comme  micrographe  est  bien 

sont  remplis,  mais  n'avaient  aperçu  connue ,  assure  que  le  mouvement  du 

aucun  phénomène  analogue  dans  l'es-  liquide  n'est  pas  dû  seulement  aux 

tomac,    ni    aucune    communication  contractions  générales  du   corps,  et 

directe  entre  ces  parties.  Gruithuisen  dépend  en  partie  de   l'action  de  cils 

avait  même  supposé  que  les  canaux  vibratiles  d'une  grande  ténuité  (/"). 


(a)  Corda,  Anatome  Hydrœ  fuscœ  (Acta  Academiœ  Cœsareœ  Leopoldino-Carolinœ  Naturœ  curio- 
sorum,  t.  XVIII,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  1837,  2»  série,  t.  VIII,  p.  364). 

(b)  Laurent,  Recherches  sur  l'Hydre  et  l'Eponge  d'eau  douce  [Voyage  de  la  Bonite,  Hist.  nat., 
4844,  Zoophytologie,  p.  55). 

(c)  Erdl,  Ueber  die  Organisation  der  Fangarme  der  Polypen  (Miiller's  Archiv  fur  Anat.    und 
PhysioL,  1841,  p.  431). 

(d)  Gruithuisen,  Einleitung  in  das  Studium  des  Arzneykunde,  1824,  p.  154  (Isis,  1828,  t.  XXI, 
p.  506). 

(e)  Ehrenberg,  Ueber  das  Massenverhâllniss  der  jetât  lebenden  Kiesel-Iafusorien,  etc.  (Mém.  de 
l'Acad.  de  Berlin  pour  1836,  p.  154,  pi.  2,  fig.  1). 

(f)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  t.  I,  p.  42. 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  71 

matières  alimentaires  et  à  la  distribution  des  fluides  nourriciers 
dans  l'ensemble  de  l'organisme  (1). 

Chez  les  Lucernaires,  la  bouche,  qui  est  entourée  d'un  voile 
labial  prolongé  en  manière  de  trompe,  donne  dans  une  grande 
cavité  digestive,  dont  la  partie  supérieure  se  prolonge  dans  le 
disque  oral  jusqu'à  l'extrémité  des  bras,  mais  s'y  trouve  divisée 
en  quatre  loges  par  autant  de  cloisons  périgastriques  radiaires  ; 
disposition  qui  rappelle  tout  à  fait  ce  qui  existe  chez  les  Péla- 
gies  (2). 

Chez  les  Actinies  ou  Anémones  de  mer,  ainsi  que  chez  les 
autres  Zoanthaires,  le  bord  labial  de  la  cavité  générale  du  corps 


(1)  D'après  son  mode  d'organisation, 
ce  Zoophyte  semble  cependant  avoir 
plus  d'analogie  avec  la  forme  sertu- 
larienne  du  type  Acalèphe,  et  devoir, 
par  conséquent,  prendre  place  dans  la 
classe  précédente  ;  mais  cette  question 
d'appréciation  des  affinités  zoologi- 
ques ne  saurait  être  traitée  ici  (a). 

(2)  Les  figures  que  j'ai  données  de 
la  structure  interne  de  la  Lucernaria 
auriculata  (b)  s'accordent  très  bien, 
sous  ce  rapport ,  avec  les  observations 
publiées  quelque  temps  après  par 
M.  Sars  sur  le  Lucernaria  quadri- 
cornis  (c). 

Plus  récemment,  M.  Owen  a  décrit 
un  système  de  canaux  qui  longeraient 
la  cavité  digestive  et  se  bifurqueraient 
dans  les  bras  ;  mais  les  parties  que  cet 
anatomiste  a  prises  pour  des  tubes  sont, 
suivant  toute  apparence,  les  quatre 
pilastres  qui  garnissent  les  parois  de  la 
cavité  générale   et   font  saillie   dans 


l'intérieur  de  celle-ci  (d).  Depuis  la 
publication  de  la  note  de  M.  Owen, 
j'ai  eu  l'occasion  d'examiner  de  nou- 
veau la  structure  des  Lucernaires,  et 
je  me  suis  assuré  de  l'exactitude  des 
figures  que  j'avais  publiées  quelques 
années  auparavant. 

Il  est  aussi  à  noter  que  la  descrip- 
tion que  MM.  Frey  et  Leuckart  ont 
donnée  des  loges  périgastriques  du 
disque  des  Lucernaires  n'est  pas 
exacte.  Ils  pensent  que  les  cloisons  qui 
séparent  entre  elles  ces  loges  corres- 
pondent au  milieu  de  chaque  bras  ou 
lobe  tentaculaire,  et  qu'il  y  a  huit  de 
ces  loges  en  forme  de  caecums  (e),  tan- 
dis qu'eu  réalité  le  nombre  de  ces 
prolongements  de  la  cavité  générale 
n'est  que  de  quatre,  et  les  cloisons 
radiaires  qui  les  séparent  correspon- 
dent à  la  base  des  angles  rentrants 
formés  par  la  réunion  de  deux  tenta- 
cules conjugués  avec  leurs  voisins. 


(a)  Voyez  Milne  Edwards,  Histoire  naturelle  des  Coralliaires,  t.  I,  p.  3. 

(6)  Milne  Edwards,  Zoophytes  de  i'Allas  du  Règne  animal,  pi.  63,  fig.  1  s,  1  c. 

(c)  Sars,  Fanna  littoralis  Norwegiœ,  1846,  p.  22. 

(d)  Owen,   On  Lucernaria  inauriculata  (Report  of  the  19th  Meeting  of  the  Brit.  Assoc.  for  the 
Advanc.  of  Science,  1849,  Trans.,  p.  78). 

(e)  Frey  et  Leuckart,  Beitrdge  zur  Kenntniss  Wirbelloser  Thiere,  1847,  p.  11. 


72  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

se  renverse  au  contraire  en  dedans,  à  peu  près  comme  nous 
l'avons  vu  chez  les  Pleurobrachies ,  et  forme  une  sorte  de  ves- 
tibule gastrique  tabulaire  suspendu  au  centre  de  cette  cavité. 
La  digestion  tend  à  se  localiser  dans  ce  premier  estomac,  et  ce 
sont  principalement  les  sucs  nourriciers,  mêlés  à  de  l'eau  de 
mer,  qui  pénètrent  plus  loin  dans  la  seconde  chambre. 
Celle-ci  peut  donc  être  comparée  au  ventricule  chylifère  des 
Béroïdiens,  mais  son  mode  de  conformation  rappelle  davantage 
celui  de  l'estomac  des  Équorées.  En  effet,  une  multitude  de 
cloisons  partent  de  ses  parois  pour  se  diriger  vers  l'axe  du 
corps,  mais  n'y  arrivent  pas  et  laissent  au-dessous  de  l'estomac 
un  espace  libre,  tandis  que  tout  à  l'entour  elles  divisent  la  cavité 
commune  en  une  série  de  loges  étoilées  dont  le  fond  se  prolonge 
en  forme  de  tube  dans  l'intérieur  des  tentacules  correspon- 
dants (1).  Nous  étudierons  plus  en  détail  la  structure  de  cet 
appareil,  lorsque  nous  nous  occuperons  des  organes  de  la 
digestion  ,  et  je  me  bornerai  à  ajouter  ici  que  les  parois  de 
ce  système  de  cavités  sont  garnies  de  cils  vibratiles  qui  font 
naître  des  courants  dans  les  fluides  nourriciers  dont  il  est 
rempli.  Mais  ces  courants  ne  constituent  pas,  à  proprement 
parler,  une  circulation,  et  déterminent  plutôt  des  tourbillonne- 
ments partiels  (2). 


(1)  A  ce  sujet,  on  peut  consulter  ('!)  La  découverte  de  ces  cils  vibrâ- 
tes recherchesde  Lesueur,  MM.  ïeale,  tiles  chez  les  Actinies  est  due  au  pro- 
Delle  Chiaje,  Dana,  Hollard,  Haitne,  fesseur  Sharpey,  de  l'université  de 
etc.  (a).  Londres   (6),  et    ce  physiologiste   a 

(a)  Lesueur,  Obs.  on  Several  Species  of  the  Genus  Actinia  (Joum.  of  the  Acad.  ofNat.  Sciences 
of  Philadelphie!,,  vol.  I,  p.  180,  pi.  8,  fig.  1,  4,  5,  8). 

—  Teale,  On  the  Anatomy  of  Actinia  coriacea  (  Trans.  ofthe  Leeds  Philos.  Soc,  vol.  I).  Voyez 
Johnston,  Hist.  ofthe  British  Zoophytes,  1847,  vol.  I,  p.  184). 

—  Délie  Chiaje,  Descri%ione  e  Notomia  degli  Anim.  Invert,  délia  Sicilia  citeriore,  t.  IV,  p.  127 
et  130,  pi.  152,  fig-    11,  et  pi.  154,  fîg\  1). 

—  Dana,  Zoophytes,  p.  34  (United  States  Exploring  Expédition  under  Capt.  Wilkes,  1846). 

—  Hollard,  Monographie  analomique  du  genre  Actinia  (Ami.  des  sciences  nat.,  3e  série,  t.  XV, 
p.  256). 

—  Haime,  Hé  moire  sur  le  Cérianthe  (Ami.  des  sciences  nat.,  1°  série,  t,  I,  p.  371,  etc.). 

(b)  Sharpey,  Edinburgh  Médical  and  Surgical  Journal ,  vol.  XXXIV. 


CHEZ    LES    ZOOPHYTES.  73 

Ce  mode  d'organisation  est  plus  facile  à  comprendre  chez  les 
Alcyonaires ,  parce  que  là  les  diverses  parties  de  l'appareil 
gastro-irrigatoire  sont  plus  nettement  séparées  ;  mais  en  général 
cet  appareil  s'y  complique  aussi  davantage. 

Prenons  pour  exemple  l'un  des  Polypes  de  ces  Zoophytes 
agrégés  que  j'ai  trouvés  sur  les  côtes  de  l'Algérie  et  que  j'ai 
désignés  sous  le  nom  d' A  Icyonides  (1).  Le  corps  presque  cylin- 
drique et  très  allongé  de  l'Animal  est  creusé  dans  toute  son 
étendue  d'une  grande  cavité  au  sommet  de  laquelle  se  trouve 
suspendu  le  tube  gastrique,  formé  par  le  renversement  en  dedans 
du  bord  labial  de  la  bouche.  Cet  estomac  communique  directe- 
ment avec  la  cavité  générale  par  son  extrémité  inférieure, 
mais  cette  extrémité  est  garnie  d'un  sphincter  ou  anneau  mus- 
culaire, qui,  en  se  resserrant,  la  transforme  temporairement  en 
un  sac  lorsque  les  aliments  y  arrivent  du  dehors  et  doivent  y 
être  digérés,  mais  qui  se  relâche  et  rend  le  passage  libre  quand 
ces  matières  ont  été  désagrégées  par  le  travail  digestif  et  doivent 
pénétrer  dans  la  cavité  située  au-dessous  ('2).  La  portion  cen- 
trale de  celle-ci  est  libre  et  constitue  un  vaste  réservoir  analogue 


donné  également  une  très  bonne  des-  que  l'on  puisse  suivie  au  microscope 

cription  du  système  cavitaire  de  ces  les  mouvements  du  fluide  nourricier 

Animaux  (a).  11  a  vu  aussi  que  des  dans  leur  intérieur  (6). 

courants  rotatoires  s'établissent  parfois  (1)  Ce  nom,  ayant  été  employé  pré- 

d'une  manière  indépendante  dans  les  cédemment  dans  une  autre  acception, 

tentacules  et  dans  l'estomac  central.  n'a  pu  être  conservé,  et  j'y  ai  subsli- 

Des  phénomènes  du  même  genre  ont  tué  celui  de  Paralcyonium  (c). 

été  observés  avec  plus  de  détail  par  (2)  Pour  suivre  cette  description,  .il 

M.  deQuatrefagescbezlesEdvvardsies,  serait  utile  d'avoir  sous  les  yeux  les 

Actiniens    dont    presque    toutes   les  figures  que  j'ai  données  de  l'organisa- 

parties  sont  assez  transparentes  pour  tion  des  Alcyonides  {d),  ou  d'y  substi- 


(a)  Sharpey,  article  Cilia  (Todd's  Cyclopœdia  of  Anatomy  and  Pliysiology,  1836,  t.  I,  p.  614» 
%.  297). 

(6)  Quatrefages,  Mém.  sur  les  Edwardsies  ,  nouveau  genre  de  la  famille  des  Actinies  (Ann.  des 
sciences  nat.,  2°  série,  t.  XVIII,  p.  99,  pi.  2,  fig.  12,  etc.). 

(c)  Milne  Edwards,  Histoire  des  Coralliaires,  t.  I,  p.  129. 

(d)  Milne  Edwards,  Mém.  sur  un  nouveau  genre  de  la  famille  des  Alcyoniens,  le  genre  Alcvo 
nide  {Ann.  des  sciences  nat.,  1835,  2*  série,  t.  IV,  p.  323,  pi.  12,  fig.  3  et  i). 


7/j.  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

au  ventricule  chylifère  des  Béroïdiens  ;  mais,  vers  le  dehors, 
elle  est  subdivisée  en  huit  loges  ou  gouttières  longitudinales  par 
autant  de  cloisons  membraneuses  qui  donnent  attache  aux 
organes  génitaux,  et  qui,  dans  leur  portion  supérieure,  vont  se 
fixer  tout  autour  de  l'estomac  tabulaire  dont  il  a  été  déjà  ques- 
tion. Les  espaces  intercloisonnaires  ainsi  circonscrits  forment 
donc  autour  de  l'estomac  huit  canaux  verticaux  disposés  en  un 
faisceau,  et  l'extrémité  de  chacune  de  ces  loges  périgastriques  se 
prolonge  non-seulement  dans  l'intérieur  du  tentacule  circum- 
buccal  correspondant,  mais  jusqu'à  l'extrémité  de  chacun  des 
appendices  digitiformes  ou  franges  dont  ces  tentacules  sont 
garnis.  Il  en  résulte  donc  que,  pendant  la  contraction  de  l'ori- 
fice inférieur  de  l'estomac,  le  corps  de  ces  Animaux  est  occupé 
par  un  vaste  système  de  cavités  closes  qui  renferme  le  fluide 
nourricier  en  mouvement  et  qui  se  compose  d'une  chambre 
centrale  ou  réservoir  principal  (  le  ventricule  chylifère),  et  de 
huit  loges  périphériques  dont  la  partie  supérieure  se  continue 
en  forme  de  canal  autour  de  l'estomac  et  jusque  dans  l'intérieur 
des  tentacules.  C'est  donc  là  un  appareil  irrigatoire  bien  com- 
plet, mais  qui  est  en  continuité  avec  l'estomac,  et  communique 
librement  avec  le  dehors  par  l'intermédiaire  de  cet  organe, 
quand  le  sphincter  pylorique  vient  à  se  relâcher  (1). 

Ce  mode  d'organisation  est,  pour  ainsi  dire,  la  reproduction 


tuer  celle  d'un  des  polypes  du  Co-  vement  circulatoire  du  fluide  nourri- 
rail  (a)  ou  du  genre  Gorgone  (6),  ou  cier  a  été  observé  dans  l'intérieur  des 
bien  encore  une  Cornulaire  (c).  canaux  périgastriques  par  M.  Erdl, 
(1)  Chez  les  Vérétilles,  où  l'organi-  qui  le  considère  comme  étant  produit 
sation  de  l'appareil  gastro-vasculaire  uniquement  par  l'action  de  cils  vibra- 
est  à  peu  près  le  même  que  chez  les  tiles  situés  sur  les  parois  de  ces  ca- 
Alcyonaires  cités  ci-dessus,  le  mou-  vités  (d). 

(a)  Milne  Edwards,  Zoophytes  du  Règne  animal  de  Cuvier,  pi.  80,  fig.  1  b. 
(6)  Idem  (  loc.  cit.,  pi.  19,  fig.  la,  16). 

(c)  Idem  (loc.  cit.,  pi.  65,  fig.  3  6). 

(d)  Erdl,  Ueber  die  Organisation  der  Fangarme  der  Polypen  (Mdller's  Archiv  fur  Anat.  und 
Physiol,  1841,  p.  425). 


CHEZ    LES   ZOOPHYTES.  75 

de  ce  que  nous  avons  vu  chez  les  Béroïdiens  du  genre  Pleuro- 
brachie  ;  mais  chez  la  plupart  des  Alcyonaires  l'appareil  gastro- 
vasculaire  se  complique  davantage,  afin  de  mieux  assurer  la 
distribution  du  fluide  nourricier  dans  l'épaisseur  de  la  portion 
basilaire  du  corps  dont  le  développement  donne  lieu  à  la  for- 
mation de  ce  que  l'on  nomme  un  Polypier.  Effectivement,  chez 
tous  ces  Coralliaires,  le  système  gastro-vasculaire  ne  se  compose 
pas  seulement  du  réservoir  central  et  des  canaux  périgastriques 
simples  dont  il  vient  d'être  question,  mais,  de  même  que  chez 
les  Béroés,  se  prolonge  sous  la  forme  de  vaisseaux  rameux  dont 
les  branches  se  répandent  partout  dans  la  substance  du  tissu 
sclérenchymateux  et  y  constituent,  par  leurs  anastomoses,  un 
lacis  capillaire  très  serré  (i). 

(1)  J'ai  étudié  ce  système  vasculaire  les  Gorgones  (c),  les  Cornulaires  (d), 

avec   beaucoup  d'attention  chez  les  etc.,  et  semble  avoir  été  vaguement 

Alcyons  ou  Lobulaires.  On  trouve  sur  indiqué  par  M.  Délie  Chiaje  dans  son 

les  parois  de  la  cavité  commune,  ou  Mémoire  sur  le  système  aquifère  des 

ventricule  cbylifère  (surtout  vers  le  Animaux   invertébrés;  mais  presque 

fond),  un  nombre  assez  considérable  tous  les  canaux  dont  cet  anatomiste 

de  petits  orifices  distribués  irréguliè-  parle  ne  sont  évidemment  autre  chose 

rement,  qui  sont  l'origine  d'autant  de  que  le  réservoir  central  et  les  conduits 

tubes  capillaires,  et  ceux-ci  se  ramifient  périgastriques   des    Polypes     (e).   Le 

dans  la  substance  du  sclérenchyme  ,  même   auteur  en   dit  aussi  quelque 

et  s'anastomosent  fréquemment  entre  chose  dans  un  ouvrage  plus  récent  (/"). 

eux,  de  façon  à  établir  un  réseau  in-  Enfin  Will  a  publié  également  quel- 

termédiaire  percé  de  quelques  pores  ques   observations    à  ce  sujet ,  et  a 

et  commun  à  tous  les  individus  agrégés  découvert  des  cils  vibratiles  dans  l'in- 

dont  se  compose  une  même  colonie  (a).  térieur  des  canaux  gastro-vasculaires 

Un  mode  d'organisation  analogue  se  des  Alcyons  ;  mais  je  ne  saurais  ex- 

voit  chez  le  Corail  proprement  dit  (6),  pliquer  que  par  des  erreurs  d'obser- 

(«)  Milne  Edwards,  Observ.  sur  les  Alcyons  proprement  dits  (Ann.  des  sciences  nat. ,  1835, 
2=  série,  t.  IV,  p.  338,  pi.  15,  %.  7  et  9  ;  pi.  16,  ûg.  4  et  0). 

(6)  Milne  Edwards,  Notes  de  la  deuxième  édition  de  l'Histoire  des  Animaux  sans  vertèbres  ,  par 
Lamarck,  1836,  t.  II,  p.  469,  et  Zoophytes  de  V Atlas  du  Règne  animal,  1838,  pi.  8,  fig.  1,  la 
et  16. 

(c)  Annot.  de  l'ouvrage  de  Lamarck,  Hist.  des  Anim.  sans  vertèbres,  t.  II,  p.  464. 

(d)  Milne  Edwards,  Zoophytes  de  V Atlas  du  Règne  animal,  pi.  65,  fig-.  3  b. 

(e)  Délie  Chiaje  ,  ilemorie  sulla  storia  e  notomia  degli  Animait  sen%a  vertèbre  del  regno  di 
Napoli,  1828  ,  t.  II,  p.  2"Ï3. 

(f)  Délie  Chiaje,  Bescri%.  e  notomia  degli  Anim.  invertebrati  délia  Sicilia  citeriore ,  1841,  ou 
plutôt  1846,  t.  IV,  p.  32,  etc. 


76  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

On  voit,  par  tout  ce  qui  précède,  que  chez  les  Âlcyonaires 
la  division  du  travail  est  bien  près  de  s'établir  entre  la  portion 
digestive  et  la  portion  irrigatoire  du  système  de  cavités  com- 
munes qui,  chez  les  Zoophytes  inférieurs,  tient  lieu  à  la  fois 
d'un  estomac  et  d'un  appareil  circulatoire.  Pour  que  la  sépa- 
ration soit  complète,  il  suffirait  de  l'occlusion  permanente  de 
l'orifice  inférieur  du  vestibule  gastrique  ;  car  ce  système  de 
cavités  se  trouverait  alors  divisé  en  deux  parties  :  une  poche 
digestive  et  une  chambre  viscérale  servant  à  loger  cette  poche, 
ainsi  que  les  autres  viscères,  et  renfermant  le  fluide  nourricier 
qui,  déjà  élaboré  par  l'action  de  l'estomac,  doit  être  distribué 
dans  toutes  les  parties  de  l'organisme. 

Cette  disposition  ne  se  réalise  jamais  chez  les  Zoophytes  des 
deux  classes  dont  je  viens  de  parler,  mais  se  rencontre  chez 
une  foule  d'autres  Animaux  invertébrés. 
Embranchement  §  6.  —  Afin  de  ne  pas  interrompre  ici  l'enchaînement 
Mollusques,  naturel  de  ces  modifications  organiques,  je  laisserai  de  côté, 
pour  le  moment,  les  Zoophytes  supérieurs  dont  se  compose  la 
division  des  Échinodermes,  et  je  choisirai  mes  exemples  dans 
l'embranchement  des  Mollusques. 

Chez  tous  les  animaux  de  cette  grande  division  zoologique , 
de  même  que  chez  les  Échinodermes ,  les  Annelés  et  les  Ver- 
tébrés, la  cavité  digestive  est  distincte  de  la  cavité  générale  ou 
viscérale  et  n'y  débouche  plus. 


vation  ce  que  ce  dernier  naturaliste  seaux  verticaux  externes  n'est  proba- 

dit  d'un  système  de  vaisseaux  qui ,  blement  pas  autre  chose  que  la  ligne 

par  le  bas,  seraient  en  communication  de  rencontre  du  bord  externe  de  ces 

avec  le  réseau  vasculaire  du  scléren-  cloisons  avec  les  parois  cylindriques 

chyme  et  suivraient  les  deux  bords  du  corps,  et  ses  vaisseaux   internes 

des  cloisons  périgastriques  pour  ga-  sont,    suivant  toute   apparence,    des 

gner  la  base  des  tentacules  et  s'y  ra-  dépendances  de  l'appareil  de  la  gé- 

mifler.  Ce  qu'il  a  pris  pour  les  vais-  nération  (a). 

(a)  Will,  Blutgefàsssy stem  von  Alcyoniiim  palmatum  (Froriep's  Neue  Notixen,  1843,  Bd.  XXVIII, 
n-  599,  p.  68). 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  77 

Les  Bryozoaires  (1),  animaux  qui  ont  été  jusque  dans  ces  ciasse 
derniers  temps  confondus  avec  les  Coralliaires ,  sous  le  nom  Bryozoaire 
de  Polypes,  mais  qui  doivent  occuper  les  rangs  inférieurs  de  la 
division  des  Mollusques,  nous  offrent  ce  mode  d'organisation 
réduit  à  sa  plus  grande  simplicité.  Le  tube  intestinal  ,  en 
forme  d'anse,  est  suspendu  par  ses  deux  extrémités  au  milieu 
d'une  grande  cavité  viscérale  qui  est  remplie  d'un  liquide 
nourricier  en  mouvement,  et  ici,  de  même  que  chez  les  Coral- 
liaires, ce  sont  principalement  des  cils  vibratiles  fixés  aux  parois 
de  ce  réservoir  commun  qui  déterminent  les  courants  dont 
ce  liquide  est  agité  (2).  Il  existe  donc  chez  ces  Animaux  un 


(1)  Les  zoologistes  anglais  désignent 
cette  classe  de  Molluscoïdes  sous  le  nom 
de  Polyzoa ,  parce  que  cette  expres- 
sion avait  été  introduite  dans  la  science 
par  Thompson  (a),  plusieurs  années 
avant  la  publication  du  Mémoire  dans 
lequel  M.  Ehrenberg  lit  usage  pour  la 
première  fois  du  terme  Bryozoa  (b). 
Les  datés  ont  été  très  bien  établies 
par  M.  Busk  (c),  et  l'on  est  générale- 
ment d'accord  aujourd'hui  pour  ad- 
mettre que  les  questions  de  ce  genre 
doivent  être  décidées  par  la  chrono- 
logie; de  telle  sorte  .  que  pour  les 
classes  et  les  familles ,  aussi  bien  que 
pour  les  espèces,  le  nom  le  plus  an- 
cien doit  toujours  prévaloir.  On  pour- 
rait donc  croire  que  j'ai  tort  de  per- 
sister dans  l'emploi  du  nom  donné  à 
ma  division  des  Polypiers  tuniciens  par 
M.  Ehrenberg  ;  mais  les  auteurs  qui 
y  substituent  le  mot  Polyzoa  n'ont  pas 
remarqué  que  Thompson  n'a  jamais 


donné  ce  nom  à  une  classe,  mais  à  un 
animal  (ou  tout  au  plus  à  un  genre), 
et  que  ce  naturaliste  n'a  jamais  songé 
à  l'appliquer  aux  Flustres,  aux  Es- 
chares  ,  aux  Cristatelles ,  etc.  Pour 
s'en  convaincre,  il  suffit  de  lire  le  titre 
du  Mémoire  de  Thompson  :  On  Poly- 
zoa, a  new  Animal  discovered  as  an 
inhabitant  of  some  Zoophytes  ;  toith 
the  Description  of  thenewly  institu- 
ted  Gênera  Pedicellaria,  Vesicularia 
and  their  Species.  C'est  donc  un  nom 
générique  que  l'on  a  transformé  en 
un  nom  de  classe,  et  cette  transfor- 
mation n'ayant  été  faite  que  postérieu- 
rement à  l'introduction  du  nom  Bryo- 
zoa pour  désigner  la  classe  compre- 
nant les  Polyzoa  de  Thompson,  ainsi 
que  les  Polypes  à  panaches  des  an- 
ciens naturalistes,  les  Eschares,  etc., 
n'a  aucun  droit  d'ancienneté  sur  celui 
dont  je  me  sers  ici. 

(2)  Les  courants  qui   s'établissent 


(a)  Thompson,  Zoological  Researches  and  Illustrations.  Cork,  1830,  cart.  5. 

(6)  Ehrenberg ,  Beitrdge  zur  Kenntniss  der  Covallenthiere  des  Rot  lien  Meeres,  1833,  et 
Symboles  physlcœ,  Animalla  evertebrata,  1831. 

(c)  Busk,  On  the  Prlority  of  the  Term  Polyzoa  for  the  Âscidian  Polypes  (Ann.  and  Mag.  ofNat. 
Hist.,  1852,  2«  série,  t.  X,  p.  352). 


78  CIRCULATION    DES    FLUIDES   NOURRICIERS 

système  particulier  de  cavités  interorganiques  pour  servir  à 
l'irrigation  nutritive  ;  mais  cette  cavité  n'est  autre  chose  que 
l'analogue  de  la  chambre  viscérale,  ou  abdomen  des  Animaux 
supérieurs. 

L'appareil  digestif  flotte  au  milieu  du  liquide  nourricier,  qui 
baigne  directement  aussi  les  muscles,  les  téguments  et  les  autres 


dans  le  liquide  cavitaire  chez  ces  Ani- 
maux n'avaient  pas  échappé  à  l'atten- 
tion des  anciens  micrographes.  Trem- 
blay fait  mention  des  mouvements 
que  révèlent  les  corpuscules  tenus  en 
suspension  dans  ce  liquide  chez  le 
Polype  à  panaches  des  eaux  douces,  ou 
Lophopus  cristallinus  (a)  ;  mais  ces 
courants  n'ont  été  réellement  décrits 
que  dans  ces  dernières  années  par 
Dumortier,  de  Bruxelles.  Ce  zoologiste, 
en  parlant  de  ces  Bryozoaires,  s'ex- 
prime "dans  les  termes  suivants  : 

«  Il  n'existe  dans  les  Lophopes  ni 
cœur,  ni  artères,  ni  vaisseaux,  et  ce- 
pendant la  circulation  y  est  aussi  réelle 
que  dans  les  Animaux  supérieurs. 
L'espace  contenu  entre  le  système 
cutané  et  les  intestins  de  chaque  in- 
dividu forme  une  grande  cavité  com- 
muniquant avec  la  cavité  générale  et 
remplie  d'un  liquide  incolore  :  ce  li- 
quide est  le  sang,  qui  occupe,  par 
conséquent,  tout  le  vide  laissé  par  les 
viscères.  Dans  le  sang  sont  contenus 
des  globules  de  forme  et  de  grandeur 
différentes  déjà  observés  par  Tremblay 
et  par  Carus  (6),  et  des  globules  de 
mucus  qui,  entraînés  par  le  sang,  en 
montrent  la  circulation.  En  examinant 


au  microscope  un  Polype  bien  déve- 
loppé, on  voit  le  sang  monter  dans  la 
cavité  individuelle,  se  porter  vers  les 
bras  et  redescendre  de  l'autre  côté, 
tandis  qu'une  partie  entre  dans  les 
bras,  s'y  met  en  contact  avec  le  sys- 
tème respiratoire,  s'y  oxygène,  et  re- 
descend ensuite  dans  le  torrent  de  la 
circulation.  Celte  circulation  ne  res- 
semble en  rien  au  phénomène  de  la 
circulation  animale ,  telle  que  nous 
l'observons  dans  les  Animaux  supé- 
rieurs, puisqu'elle  a  lieu  dans  la  cavité 
générale,  et  elle  rappelle  entièrement 
la  cyclose  des  végétaux  aquatiques; 
comme  chez  ces  derniers ,  c'est  un 
mouvement  de  rotation  imprimé  au 
fluide  respiratoire.  Mais  ce  qui  est 
encore  bien  plus  remarquable,  c'est 
que  la  circulation  est  commune  à  tous 
les  Polypes  formant  le  Polypier,  et  que 
le  sang  élaboré  par  l'un  d'eux  profite 
à  tous  les  autres.  C'est  ce  qu'il  est  fa- 
cile de  déterminer  avec  certitude  ,  en 
suivant  attentivement  les  globules 
contenus  dans  le  sang  ;  alors  on  verra 
que  le  sang  se  porte  d'un  individu 
dans  l'enveloppe  générale,  et  ensuite 
dans  tous  les  autres  (c).  » 

Une  circulation  analogue  a  été  con- 


(a)  Tremblay,  Mém.  pour  servir  à  l'histoire  d'un  genre  de  Polypes  à  bras,  1744,  3e  mémoire, 
t.  II,  p.  146. 

—  Pour  la  synonymie  très  embrouillée  de  ces  Animaux,  voyez  Van  Beneden  ,  Recherches  sur  les 
Bryozoaires  fluvialiles  de  la  Belgique  (  Mém.  de  l'Académie  de  Bruxelles ,  1848,  t.  XXI,  p.  23). 

(6)  Carus,  Anatomie  comparée,  t.  II,  p.  301,  et  Tab.  illustr.,  fasc.  3,  p.  8. 

(c)  Dumortier ,  Recherches  sur  V anatomie  et  la  physiologie  des  Polypes  composés  d'eau  douce 
{Bulletin  de  l'Académie  de  Bruxelles,  1835,  t.  II,  p.  435). 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  79 

organes,  et  qui  se  répand  dans  Ions  les  interstices  ou  lacunes 
que  les  fibres  ou  les  lamelles  constitutives  de  ces  parties  laissent 
entre  elles. 

§  7.  —  Dans  la  classe  des  Tuniciers,  et  chez  les  Mollusques      Classe 
proprement  dits,  de  même  que  chez  tous  les  Animaux  supé-     Tuniciers 
rieurs  des  deux  embranchements  dont  nous  aurons  bientôt  à 

statée  dans  les  autres  genres  de  Bryo-  pense  qu'il  en  existe  sur  la  face  ex- 
zoaires  d'eau  douce  dont  se  compose  terne  du  tube  digestif  aussi  bien  que 
l'ordre  des  Hijppocrepes  de  M.  Ger-  sur  la  face  interne  de  la  cavité  viscé- 
vais  (a),  soit  par  MM.  Van  Beneden  raie.  Mais  M.  Allman,  qui  vient  de 
et  Dumortier,  soit  par  d'autres  na-  publier  un  travail  très  étendu  sur  les 
turalistes  (6) ,  et  des  phénomènes  Bryozoaires  d'eau  douce  de  la  Grande- 
du  même  ordre  ont  été  observés  chez  Bretagne,  pense  que  ces  appendices 
divers  Bryozoaires  infundibulaires ,  épithéliales  ne  se  trouvent  que  sur 
tels  que  les  Flustres,  les  Tendras,  les  cette  dernière  surface  (/). 
Vésiculaires  ,  les  Pédicellines  ,  etc.,  Divers  faits  ont  porté  quelques  na- 
par  MM.  Farre,  Nordmann ,  Van  Be-  turalistes  à  penser  que  cette  cavité 
neden,  etc.  (c).  périgastrique  peut  communiquer  di- 
Les  cils  vibratoires  qui  remplissent  rectement  au  dehors  par  Pintermé- 
le  rôle  d'organes  moteurs  dans  ce  diaire  d'une  ou  de  plusieurs  petites 
système  d'irrigation  sont  difficiles  à  ouvertures  (g) ,  et  l'on  en  a  conclu 
distinguer,  et  ont  échappé  aux  investi-  qu'ici,  de  même  que  chez  les  Coral- 
gations  de  la  plupart  des  naturalistes,  liaires  et  les  Acalèphes,  l'eau  doit 
de  M.  Nordmann ,  par  exemple  (d);  pouvoir  y  arriver  directement  de 
mais  leur  existence  a  été  constatée  par  l'extérieur  et  s'y  mêler  au  fluide 
M.  Van  Beneden  (e) .  Cet  observateur  nourricier.  Mais  les  choses  ne  parais- 
fa)  Gervais,  Recherches  sur  les  Polypes  d'eau  douce  (Ami.  des  scienccsnat.,  1837,  t.  VII,  p.  77). 

(b)  Gruithuisen,  Einleitung  in  das  Studium  der  Arxneykunde,  1 824,  p.  -1 54  (Isis,  i  828,  t.  XXI, 
p.  506). 

—  Von  Heyden,  Beobachtungen  ûber  deii  Kreislauf  in  den  Fangarmen  der  Pluraatella  cristata 
[Isis,  1828,  t.  XXI,  p.  505). 

—  Nordmann,  Mikrographische  Beilrâge  %ur  Naturgesch.  der  Wirbellosen  Thiere,  1832,  Bd.II, 
p.  75.  —  Recherches  microscopiques  sur  l'anatomie  et  le  développement  de  la  Plumatella  cam- 
panulata  (  Voyage  dans  la  Russie  méridionale,  par  M.  A.  de  Demidoff,  1840,  t.  III,  p.  721). 

(c)  Farre,  Obs.  on  the  Minute  Structure  of  someofthe  Higher  Formes  ofPolypi  (Philos.  Trans., 
1837,  p.  387,  dans  le  Valkeria  cuscuta,  Flem.,  p.  403). 

—  Nordmann ,  Voyage  de  Demidoff,  t.  III,  p.  699,  et  p.  723. 

—  Van  Beneden,  Recherches  sur  l'anatomie,  la  physiologie  et  le  développement  des  Bryozoaires 
qui  habitent  la  côte  d'Ostende,  p.  10  (extrait  des  Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  XVIII,  dans  le 
genre  Laguncula  et  dans  le  genre  Pedieellina,  p.  74.  Mém.,  t.  XIX).    - 

(d)  Nordmann,  Op.  cit.  (Voyage,  t.  III,  p.  722). 

(e)  Van  Beneden,  Quelques  observations  sur  les  Polypes  d'eau  douce  (Bulletin  de  V Académie  des 
sciences  de  Bruxelles,  1839,  t.  VI,  p.  276,  et  Ann.  des  se.  nat.,  2e  série,  t.  XIV,  p.  222). 

—  Dumortier  et  Van  Beneden,  Histoire  naturelle  des  Polypes  composés  d'eau  douce  (extrait  de» 
Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  1850,  t.  XVI,  p.  84). 

(f)  Allman,  A  Monograph  of  the  Fresh  Water  Polyzoa  (Ray  Society,  1856). 

(g)  Siebold,  Nouveau,  Manuel  d'anatomic  comparée,  1. 1,  p.  43. 


80  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

nous  occuper,  la  division  du  travail  physiologique  fait  un  pas 
de  plus  :  les  canaux  d'irrigation  ne  sont  pas  chargés  à  la  fois 
de  conduire  le  fluide  nourricier  et  de  le  mettre  en  mouvement  ; 
leur  rôle  est  borné  à  la  première  de  ces  fonctions,  et  un  agent 
moteur  spécial  détermine  le  courant  circulatoire.  Nous  verrons 
ailleurs  que  la  Nature  constitue  parfois  l'organe  moteur  en  em- 
pruntant aux  canaux  conducteurs  un  tronçon  de  tube  qu'elle 
élargit  et  qu'elle  rend  contractile  ;  mais,  chez  les  Tuniciers,  ce 
n'est  point  par  adaptation  ou  par  voie  d'emprunt  que  cet  instru- 
ment est  obtenu  ;  c'est  une  création  spéciale,  une  partie  de  l'or- 
ganisme qui  n'avait  pas  de  représentant  chez  les  Molluscoïdes 
inférieurs.  Un  tissu  nouveau,  que  l'on  appelle  musculaire, 
concourt  alors  à  la  formation  de  l'appareil  circulatoire,  et  y 
constitue  une  espèce  de  pompe  foulante  qui  remplace  avec 
avantage  les  batteurs  représentés  par  les  cils  vibra tiles. 

En  effet,  on  trouve  chez  les  Tuniciers  un  réservoir  spécial  à 
parois  contractiles  qui  communique  avec  les  canaux  d'irriga- 
tion ;  qui,  en  se  remplissant,  reçoit  une  portion  du  sang  contenu 
dans  une  partie  de  ce  système,  et  qui,  en  se  vidant,  lance  ce 
liquide  dans  une  direction  opposée;  ou,  en  d'autres  mots,  un 
cœur  proprement  dit. 

Les  premières  conséquences  de  ce  perfectionnement  sont 
faciles  à  prévoir,  L'action  des  cils  vibratiles,  qui  sont  les  prin- 

sent  point  se  passer  de  la  sorte,  et  les  facilement  dans  l'estomac,  mais  dont 

orifices  destinés  à  livrer  passage  aux  aucune    parcelle   n'arrivait   dans    la 

œufs ,  dont  nous  aurons  à  parler  plus  cavité    périgastrique    (a).    Le  même 

tard,  ne  semblent  pas  permettre  l'en-  résultat   a   été  obtenu  par    M.   Van 

trée  des  fluides  ambiants  dans  Tinté-  Beneden   (6).    M.    Allman    a    répété 

rieur  du  système  cavi taire.  En  effet,  ces  expériences ,  et  il  pense  que  les 

Dumortier  a  fait  vivre  des  Alcyonelles  orifices  dont  MM.  Mayen  (c)  et  Van 

dans   de   l'eau   chargée  de   diverses  Beneden    font  mention  étaient  acci- 

matières  colorantes  qui   pénétraient  dentels  (d). 

(a)  Dumortier,  Op.  cit.  (Bulletin  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  II,  p.  438). 

(6)  Dumortier  et  Van  Beneden,  Hist.  nat.  des  Polypes  composés  d'eau  douce,  p,  107. 

(c)  Mayen,  Naturgeschichte  der  Polypen  (Isis,  1828,  p.  1225), 

(d)  Allman,  Op.  cit.,  p.  23. 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  81 

cipaux  agents  moteurs  de  l'appareil  d'irrigation  chez  les  Coral- 
liaires,  les  Acalèphes  et  les  Bryozoaires,  ne  peut  être  que  très 
faible,  et  les  courants  excités  de  la  sorte  sont  vagues  et  irrégu- 
liers. Le  cœur,  à  raison  de  la  grandeur  de  sa  capacité  et  de  la 
rapidité  de  ses  mouvements  de  systole  et  de  diastole,  lance  le 
liquide  avec  bien  plus  de  force  et  imprime  aux  courants  qu'il 
produit  des  directions  constantes.  Mais  ces  améliorations  ne 
sont  pas  les  seuls  changements  que  la  création  d'un  cœur 
entraîne  à  sa  suite,  et  pour  bien  saisir  la  série  de  modifications 
qui  vont  se  dérouler  sous  nos  yeux  dans  la  structure  du  système 
circulatoire,  il  est  nécessaire  de  tenir  compte  de  l'influence 
exercée  par  tout  le  liquide  en  mouvement  sur  les  parties  voi- 
sines de  l'organisme,  et  dans  cette  étude  la  pathologie  viendra 
à  notre  aide. 

§  8.  —    Les    chirurgiens    ont   remarqué   depuis   long-       vues 
temps    que  clans   les    cas    où ,    chez  l'Homme ,  un  liquide  suriHormaiion 
irritant,  du  pus  ou  de  l'urine,  par  exemple,  se  fraye  acci-    vaisseaux. 
dentellement  une  route  entre  les    organes  pour  se  porter  au 
dehors,  la  voie  qu'il  parcourt  consiste  d'abord  en  une  série 
de  lacunes  irrégulières  préexistantes  dans  le  tissu  conjonctif 
interorganique  ;  mais  que,  sous  l'influence  du  liquide  en  mou- 
vement, ce  tissu  ne  tarde  pas  à  se  condenser  tout  à  l'en  tour,  à 
endiguer  pour  ainsi  dire  le  courant  et  à  se  transformer  en  une 
membrane  adventive  tout  à  fait  distincte  des  parties  voisines. 
Dans  les  fistules  anciennes  le  trajet  parcouru  par  le  liquide 
irritant  se  trouve  ainsi  régularisé  et  transformé  en  un  canal  à 
parois  propres,  ou  tube  excréteur  accidentel. 

Les  phénomènes  pathologiques  sont  des  phénomènes  du 
même  ordre  que  les  phénomènes  physiologiques  normaux,  et 
par  conséquent  nous  devons  nous  attendre  à  voir  apparaître 
quelque  chose  d\analogue  aux  conduits  tabulaires  de  ces  fis- 
tules chez  les  Animaux  où  le  fluide  nourricier  répandu  dans 
l'ensemble  de  lacunes  ou  espaces  que  les  divers  organes 
m.  6 


82  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

laissent  entre  eux,  se  trouve  mis  en  mouvement  par  un  organe 
d'impulsion  puissant  et  à  effet  constant.  Nous  devons  nous 
attendre,  dis-je,  à  voir  les  courants  s'endiguer;  les  lacunes 
que  ces  courants  traversent,  se  régulariser  et  se  transformer 
en  canaux  à  parois  propres  ;  en  un  mot,  le  système  irrigatoire 
se  constituer  en  un  vaste  ensemble  de  vaisseaux  sanguins  ayant 
une  existence  indépendante  des  parties  voisines  et  pourvus 
de  tuniques  particulières.  Ce  ne  seront  plus  des  réservoirs 
dont  la  forme  est  déterminée  par  les  organes  d'alentour  ;  ce 
seront  des  tubes  qui  s'isoleront  de  plus  en  plus.  Mais  si  les 
choses  se  passent  de  la  sorte,  la  transformation  du  système 
lacunaire  en  un  système  vasculaire  ne  doit  pas  s'effectuer  par- 
tout avec  la  même  facilité ,  et  nous  devons  trouver  entre  ces 
deux  formes  extrêmes  une  multitude  d'états  intermédiaires 
dans  lesquels  le  cercle  circulatoire  sera  constitué  en  partie 
par  des  lacunes,  en  partie  par  des  vaisseaux  à  parois  indépen- 
dantes ;  nous  pourrons  prévoir  aussi  quelles  sont  les  portions 
de  la  route  suivie  par  le  sang  qui  doit  subir  d'abord  cette 
transformation,  et  quelles  sont  les  parties  où  le  caractère  pri- 
mitif et  imparfait  de  l'appareil  irrigatoire  se  conserveront  le 
plus  longtemps. 

Or  les  faits  fournis  par  l'anatomie  comparée  sont  en  parfait 
accord  avec  ces  vues  théoriques.  La  Nature  ne  s'est  pas 
astreinte  à  ne  produire  des  vaisseaux  sanguins  qu'à  l'aide  de 
procédés  de  ce  genre,  et  je  montrerai  plus  tard  que  souvent 
elle  en  crée  de  toutes  pièces  ;  mais  dans  les  organismes  nais- 
sants, et  dans  la  plupart  des  Animaux  inférieurs,  tout  se  présente 
à  nous  comme  si  le  système  irrigatoire  était  formé  par  l'en- 
semble des  cavités  ou  lacunes  interorganiques  dont  une  portion 
de  plus  en  plus  considérable  subirait  des  modifications  ana- 
logues à  celles  dont  je  viens  de  parler,  et  se  transformerait  en 
vaisseaux  par  le  fait  du  développement  d'une  tunique  membra- 
neuse particulière  dans  les  points  de  contact  des  courants  avec 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  83 

les  tissus  d'alentour,  tunique  qui  ne  serait  d'abord  représentée 
que  par  une  lamelle  de  tissu  hyalin  revêtue  d'une  simple  couche 
d'épithélium  plus  ou  moins  rudimentaire ,  mais  qui  se  perfec- 
tionnerait peu  à  peu  et  finirait  par  constituer  un  tube  indépen- 
dant des  parties  circonvoisines. 

§  9.  —  J'ignore  si  c'est  réellement  par  un  mécanisme  de  conséquences 
ce  genre  que  les  vaisseaux  sanguins  se  constituent  chez  la  plu-  cette  théorie. 
part  de  ces  Animaux,  et  c'est  seulement  en  traitant  de  leur 
embryologie  que  nous  pourrons  discuter  cette  question  ;  mais 
quoi  qu'il  en  soit  à  cet  égard,  l'état  final  du  système  irrigatoire 
se  présente  tel  qu'il  devrait  être  si  l'hypothèse  que  je  viens 
d'exposer  était  l'expression  de  la  vérité,  et  cette  hypothèse  nous 
permet  non-seulement  de  coordonner  les  faits  et  les  relier  entre 
eux,  mais  de  prévoir  ce  que  l'observation  va  nous  révéler.  Elle 
présente  donc  tous  les  caractères  qu'on  est  en  droit  de  deman- 
der à  une  théorie  scientifique,  et  en  la  prenant  ici  pour  guide, 
nous  faciliterons  singulièrement  l'étude  des  modifications  nom- 
breuses dont  l'appareil  circulatoire  des  Mollusques,  des  Insectes 
et  des  Crustacés  va  nous  fournir  des  exemples. 

D'après  cette  théorie  de  la  formation  des  vaisseaux  sanguins 
aux  dépens  des  lacunes  interorganiques,  il  faut  admettre  que  la 
facilité  plus  ou  moins  grande  avec  laquelle  cette  métamorphose 
pourra  s'effectuer  sera  subordonnée  à  trois  conditions  variables 
suivant  les  espèces  et  suivant  les  parties  de  l'organisme  :  1°  la 
rapidité  et  la  régularité  du  courant  sanguin  dans  un  point  donné  ; 
2°  le  degré  de  la  puissance  excitante  du  liquide  en  mouve- 
ment; 3°  le  degré  d'excitabilité  des  tissus  que  le  courant 
traverse. 

Toutes  choses  étant  égales  d'ailleurs,  ce  sera  donc  dans  le 
voisinage  du  cœur  et  autour  des  courants  formés  par  le  liquide 
nourricier  lancé  de  cet  organe  vers  les  dernières  parties  du 
corps,  que  les  vaisseaux  devront  commencer  à  se  substituer 
aux  lacunes.  Le  système  artériel  devra  donc  précéder  le  système 


$ll  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

veineux  dans  la  série  des  perfectionnements  successifs  introduits 
dans  l'appareil  irrigatoire  des  Animaux.  Les  parois  des  artères 
devront  aussi  arriver  partout  à  un  plus  haut  degré  de  dévelop- 
pement que  les  parois  des  canaux  par  lesquels  le  sang  revient 
lentement  au  cœur. 

Si  l'intensité  du  courant  était  la  même  dans  tout  le  cercle 
circulatoire,  et  si  les  tissus  parcourus  par  ce  courant  étaient 
partout  également  aptes  à  donner  naissance  à  des  membranes 
nouvelles,  ce  serait  dans  le  segment  de  ce  cercle  occupé  par  le 
sang  fraîchement  chargé  d'oxygène,  que  le  développement  des 
parois  vasculaires  devrait  s'effectuer  de  préférence  ;  car  nous 
savons  que  le  sang  qui  a  respiré  jouit  d'une  puissance  vivifiante 
bien  plus  grande  que  le  sang  veineux,  à  l'aide  duquel  la  nutrition 
des  organes  s'est  déjà  effectuée.  Ce  seraient  donc  les  canaux 
sanguins  de  l'appareil  respiratoire  et  ceux  par  lesquels  le  sang 
artérialisé  sort  de  cet  appareil,  qui  revêtiraient  les  caractères  de 
vaisseaux  tubulaires ,  avant  que  les  portions  du  cercle  circula- 
toire, occupées  par  le  sang  veineux,  eussent  éprouvé  des  modi- 
fications du  même  ordre. 

Ainsi,  imaginons  pour  un  instant  un  système  irrigatoire 
constitué  à  l'aide  des  espaces  ou  lacunes  interorganiques,  et 
dans  lequel  le  courant  sanguin,  tout  en  suivant  la  même  route, 
changerait  périodiquement  de  direction,  et,  en  partant  du  cœur, 
irait  tantôt  dans  un  sens,  tantôt  en  sens  inverse,  mais  où  la 
respiration  serait  localisée ,  les  vaisseaux  devraient  se  constituer 
d'abord  dans  l'appareil  respiratoire  tant  cutané  qu'interne,  et 
pourraient  exister  sans  qu'il  y  eût  ni  artères  ni  veines.  Mais  si 
le  courant  se  dirigeait  toujours  dans  le  même  sens  et  allait 
des  branchies  au  cœur,  par  exemple ,  ce  serait  les  artères  et 
les  canaux  branchio  -  cardiaques  qui  acquerraient  des  parois 
propres  avant  les  canaux  veineux.  Enfin,  lorsque  cette  dernière 
portion  du  cercle  circulatoire  se  canaliserait  à  son  tour  et  affec- 
terait la  forme  de  vaisseaux,  ce  serait  la  grande  lacune  périgas- 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  85 

trique  ou  cavité  viscérale  qui  persisterait  le  plus  longtemps  sous 
sa  forme  primitive  de  réservoir  du  fluide  nourricier. 

Or  ce  sont  précisément  là  les  divers  degrés  par  lesquels  nous 
allons  voir  passer  l'appareil  de  la  circulation  à  mesure  que  nous 
nous  élèverons  des  Bryozoaires  vers  les  Mollusques  les  plus 
parfaits,  ou  bien  encore  des  Insectes  aux  Animaux  articulés, 
qui,  sous  ce  rapport,  sont  les  mieux  organisés. 

§  10.  ■ —  En  effet,  la  première  forme  de  l'appareil  irriga-    circulation 

.  /  alternante 

toire,  moitié  lacunaire,   moitié  vasculaire,  que  nous  avons       chez 

.     ,   .,  .  '   i-    /         i  i         •««-    11  les  Timicicrs. 

imagine  il  y  a  un  instant,  se  trouve  réalisée  chez  les  Mollus- 
coïdes  de  la  classe  des  Tuniciers.  Là,  en  effet,  il  y  a  un  cœur; 
mais  le  courant  circulatoire  que  cet  organe  détermine  se  ren- 
verse périodiquement  à  des  intervalles  très  courts,  et  le  sang, 
qui  change  alternativement  de  direction,  est  contenu  dans  des 
vaisseaux  tabulaires  près  de  la  surface  du  corps,  ainsi  que  dans 
l'appareil  branchial;  mais  dans  le  reste  de  l'économie  il  circule 
dans  la  cavité  abdominale  et  dans  les  lacunes  interorganiques. 
Ce  curieux  phénomène  du  changement  périodique  dans  la 
direction  du  courant  circulatoire  a  été  observé  d'abord  chez  les 
Biphores  ou  Salpa ,  par  un  voyageur  hollandais,  Van  Hasselt, 
et  se  voit  chez  tous  les  Tuniciers  (1)  ;  mais  c'est  chez  quel- 

(1)  C'est  en  1821,  étant  dans  les  après,  Eschscholtz,  sans  avoir  eu  com- 

mers  de  l'Inde,  que  Van  Hasselt  fit  munication    des  observations  de  ce 

connaître  ces  singuliers  changements  naturaliste,  constata  le  même  fait  (6). 

dans  la  direction  du  courant  circula-  MM.   Quoy   et    Gaimard    l'observent 

toire  chez  les  Salpa  ;  il  en  donna  une  aussi  chez  quelques  Animaux  de  la 

bonne   description,  mais  ne  comprit  même  famille  pendant  leur  deuxième 

pas  bien  le  mode  de  constitution  du  voyage  de  circumnavigation  (c);Meyen 

système  irrigatoire  [a).  Peu  d'années  également  {<!).  M.  Lister  a  aperçu  un 

(a)  Extrait  d'une  leltrede  Van  Hasselt,  datée  do  Builenzorg,  Java,  le  12  août  1821,  et  publiée 
dans  Y  Algemeene  Konst-en-l.etterbode  (Bulletin  des  sciences  naturelles  de  Férussac,  1824,  t.  IT, 
p.  212,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  t.  III,  p.  78). 

(b)  Eschscholtz  ,  Bericht  iiber  die  zoologische  Ausbeute  wâhrend  der  Reise  von  Kronstadt  bis 
S.  Peter  und  S.  Paul  (Isis,  1825,  t.  XVI,  p.  738). 

(c)  Quoy  et  Gaimard,  Voyage  de  l'Astrolabe,  part,  zool.,  1834,  t.  III,  pi  561. 

(d)  Meyen,  Beilràge  zur  Zoologie  gesammelt  auf  einer  Reise  van  die  Erde.  Erste  Abth.  iiber  dis 
Salpen  (Nova  Acta  Naturœ  curiosorum,  1832,  p.  XVI,  p.  37G), 


86  CIRCULATION    DES   FLUIDES    NOURRICIERS 

CircheziGn    ques  Asci(lies  dont  ]a  portion  abdominale  du  corps  prend  un 
les  Ascidies,  plus  grand  développement,  les  Clavelines  de  nos  côtes,  par 
exemple,  qu'il  est  le  plus  facile  à  étudier.  Je  choisirai  donc  une 
de  ces  Ascidies  à  long  pédoncule  pour  en  faire  ici  la  démons- 
tration. 

§  11.  —  Le  cœur  des  Clavelines  (1)  est  situé  à  la  partie 


phénomène  du  même  ordre  chez  une 
Ascidie  composée  dont  on  a  formé 
plus  récemment  le  genre  Pérophore  [a). 
Enfin  je  l'ai  constaté  chez  les  Ascidies 
simples  aussi  bien  que  chez  les  Cla- 
velines, les  Botrylles,  etc.,  et  chez  les 
Pyrosomes  (6). 

Plus  récemment ,  la  circulation  al- 
ternante a  été  observée  chez  le  Salpa 
par  MM.  Krohn  (c) ,  Van  Beneden , 
Huxley  (d).  J'en  ai  été  souvent  témoin. 
Enfin  ,  M.  Vogt  en  a  fait  une  étude 
très  approfondie  (e). 

(1)  L'existence  d'un  cœur  chez  les 
Ascidies  simples  a  été  constatée  par 
Cuvier(/"),  et  Savigny  a  entrevu  cet 
organe  chez  quelques  Ascidies  com- 
posées (g)  ;  mais  ces  anatomistes  émi- 
nents,  n'ayant  étudié  la  structure  de 
ces  Animaux  que  sur  des  individus 
conservés  dans  l'alcool ,  n'ont  pu  en 
connaître  l'appareil  circulatoire  que 


d'une  manière  très  imparfaite,  et  gui- 
dés par  les  idées  régnantes  à  cette 
époque,  ils  ont  cru  apercevoir  des 
artères  et  des  veines  qui  n'existent  pas. 
Carus  (h)  a  pris  le  sillon  du  sac  bran- 
chial pour  une  aorte ,  et  M.  Délie 
Chiaje,  qui  avait  peut-être  mieux  ob- 
servé que  ses  devanciers  la  disposition 
du  réseau  vasculaire  du  sac  branchial, 
est  tombé  dans  des  erreurs  non  moins 
graves  touchant  les  vaisseaux  qu'il 
suppose  partir  du  cœur.  Je  crois  même 
devoir  dire  que  la  figure  qu'il  donne 
du  système  circulatoire  d'une  Ascidie 
simple  de  nos  mers  (le  Cijnthia  mi- 
crocosmus,  Sav.)  est  tout  à  fait  fan- 
tastique (i).  Des  injections  faites  au 
mercure  lui  avaient  fait  croire  aussi  à 
l'existence  de  valvules  qui  perme  t- 
taient  le  passage  du  sang  dans  une 
direction  seulement,  disposition  qui 
ne  saurait  exister  chez  des  Animaux 


(a)  Lister,  .Some  Observ.  on  the  Structure  and  Functions  of  Tnbular  and  Cellular  Polypi  and 
ofAscidiœ  (Philos.  Trans.,  1834,  p.  381). 

(b)  Milne  Edwards,  Observ.  sur  les  Ascidies  composées  des  côtes  de  la  Manche,  1841,  p.  6  et 
suivantes  (extrait  des  Mém.  del'Acad.  des  sciences,  t.  XVIII ,  et  Ami.  des  sciences  nat.,  1840, 
2"  série,  t.  XIII,  p.  76). 

— ■  Sur  la  circulation  du  sang  chez  les  Pyrosomes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1839,  28  série, 
t.  XII,  p.  375). 

(c)  Krohn,  Observ.  sur  la  génération  des  Biphores  {Ann.  des  sciences  nat.,  1846,  3e  série, 
t.  VI,  p.  128). 

(d)  Huxley,  Observ.  on  the  Anat.  and  Physiol.  of  Salpa  and  Pyrosoma  (Philos.  Trans.,  1851, 
p.  572). 

(e)  Vog-t,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  2'  mémoire,  p.  32. 

(f)  Cuvier,  Mém.  sur  les  Ascidies  et  leur  anatomie  (Mém.  du  Muséum,  1815,  t.  11,  p.  10,  et 
Mém.  pour  servir  à  l'histoire  des  Mollusques,  in-4,  1817). 

(g)  Savigny,  Mém.  sur  les  Animaux  sans  vertèbres,  1816,  2«  partie. 

(h)  Carus,  Beitrâge  zur  Anatomie  und  Physiologie  der  Seescheiden  (Ascidiœ)  (Mcckel's  Deulsches 
Archiv  fur  die  Physiologie,  1816,  Bd.  II,  p.  578). 

(i)  Délie  Chiaje,  Mem.  sulla  storia  e  notomia  degli  Animali  senza  vertèbre  ciel  regno  di  Napoli, 
1828?,  t,  III,  p.  193,  pi.  46,  fig-.  13. 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  87 

inférieure  de  la  masse  viscérale,  et  se  trouve  renfermé,  de  même 
que  l'estomac,  l'intestin  et  les  organes  générateurs,  dans  l'es- 
pèce de  sac  formé  par  la  tunique  interne  ou  péritonéale  (1). 
C'est  un  tube  musculaire,  élastique,  recourbé  en  forme  d'anse 
et  ouvert  près  de  chacune  de  ses  extrémités.  Ses  fibres,  dispo- 
sées comme  autant  d'anneaux,  se  contractent  successivement 
et  produisent  ainsi  une  série  de  rétrécissements  ou  étranglements 
qui  commencent  à  une  des  extrémités  de  l'organe,  et  s'avancent 
rapidement  vers  l'extrémité  opposée,  de  manière  à  rappeler  les 
contractions  vermiculaires  d'un  Lombric,  ou  mieux  encore  les 
mouvements  péri stal tiques  de  l'intestin  grêle  d'un  Mammifère. 
Chacune  de  ces  constrictions  ambulatoires  pousse  devant  elle 
le  liquide  dont  la  cavité  du  cœur  est  remplie,  et  l'expulse  au 
dehors  par  l'extrémité  à  laquelle  ces  mouvements  vont  aboutir; 
pms  la  portion  du  tube  située  en  arrière  reprend  sa  forme  pre- 
mière et  se  remplit  de  nouveau  par  son  extrémité  opposée. 
Pendant  un  certain  temps  les  contractions  se  succèdent  dans  le 
même  sens,  d'arrière  en  avant,  par  exemple,  et  chaque  étran- 
glement pousse  une  nouvelle  ondée  de  sang  dans  la  portion  du 
cercle  irrigatoire  où  la  première  est  déjà  arrivée,  de  façon  à 
produire  un  courant  assez  rapide  dans  toutes  les  parties  de  l'or- 
ganisme. Mais,  après  quelque  temps,  ce  mouvement  péristal- 

où  le  courant  circulatoire  se  renverse  firme    les  résultats  auxquels  j'étais 

périodiquement,  ainsi  que  cela  se  voit  arrivé. 

chez  tous  les  Tuniciers.  C'est  en  étu-  (1)  Voyez  les  figures  anatomiques 

diant  ces  Mollnscoïdes  à  l'état  vivant,  de  la  Claveline  lépadiforme  que  j'ai 

que  j'ai  pu  découvrir  la  véritable  na-  données  dans   mon  Mémoire  sur  les 

ture  de  leur  appareil  circulaloire  (a),  Ascidies  composées  des  côtes  de   la 

et   les    observations    faites  plus   ré-  Manche  (pi.  2,  fig.  1),  et  dans  l'Atlas 

cemment   sur    le    même   sujet    par  des  Mollusques  de  la  grande  édition 

M.  Van  Beneden  (6)  et  quelques  au-  du  Bègne  animal  de  Cuvier  (pi.  127, 

1res  zoologistes  ont  pleinement  con-  fig.  2«). 

(a)  Milne  Edwards,  Observations  sur  les  Ascidies  composées  des  cotes  de  la  Manche,  in-4,  1841 
(Mém.  de  l'Acad.  des  sciences,  t.  XVIII). 

(b)  Van  Beneden,  Recherches  sur  l'embryologie,  l'anatomie  et  la  physiologie  des  Ascidies  simples 
(Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  1847,  t.  XX,  p.  22). 


88  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

tique  s'alanguit,puis  s'arrête  complètement,  et  la  circulation  se 
trouve  interrompue;  bientôt  cependant  il  se  ranime  de  nou- 
veau, mais  en  sens  inverse,  c'est-à-dire  en  commençant  à  l'ex- 
trémité du  cœur,  où  il  allait  se  terminer,  et  en  se  propageant  vers 
l'extrémité  opposée.  Le  sang  est  alors  poussé  d'avant  en  arrière, 
et  la  circulation  se  rétablit  inversement  à  ce  qui  se  voyait 
l'instant  d'avant  :  le  courant  qui  partait  du  cœur,  et  que  l'on 
aurait  appelé  un  courant  artériel,  est  remplacé  par  un  courant 
afférent  ou  veineux,  et  la  portion  du  cercle  irrigatoire  qui 
envoyait  le  fluide  nourricier  au  cœur  représente  maintenant  le 
système  efférent  ou  artériel.  Puis  les  contractions  vermicu- 
laires  qui  se  dirigent  ainsi  d'avant  en  arrière  s'arrêtent,  pour 
être  suivies  d'une  nouvelle  série  de  contractions  s'effectuant 
d'arrière  en  avant,  et  à  chacun  'de  ces  changements  de  direc- 
tion correspond  un  changement  semblable  dans  toutes  les 
parties  du  flux  circulatoire,  de  façon  que  périodiquement  le 
sens  du  courant  se  renverse. 

Ce  cœur  tubulaire  est  suspendu,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  au 
fond  de  la  cavité  abdominale,  et  ses  deux  extrémités  correspon- 
dent aux  deux  côtés  opposés  de  cette  cavité  qui  est  occupée 
par  le  sang,  ainsi  que  par  les  viscères.  Il  en  résulte  que  les 
contractions  péristaltiques  du  cœur,  lorsqu'elles  se  dirigent 
d'arrière  en  avant,  déterminent,  dans  l'espace  compris  entre 
la  masse  viscérale  et  la  paroi  ventrale  du  corps,  un  courant 
ascendant  et  font  naître  par  voie  d'appel,  du  côté  dorsal  de  la 
même  cavité,  un  courant  descendant.  Or  la  cavité  viscérale  qui 
est  le  siège  de  ces  courants  se  continue  supérieurement  avec 
deux  larges  canaux  situés  sur  les  deux  faces  opposées  du  sac 
pharyngien  ou  respiratoire  dont  la  structure  nous  est  déjà 
connue,  et  ces  sinus  communiquent  entre  eux  par  les  canaux 
transversaux  et  les  autres  vaisseaux  dont  les  parois  de  cet 
appareil  branchial  sont  garnies  (1).  Il  en  résulte  donc  que  le 

(1)  Voyez  tome  U,  p.  19. 


CHEZ    LES   MOLLUSCOÏDES.  89 

courant  circulatoire ,  en  partant  de  l'extrémité  antérieure  du 
cœur,  remonte  par  la  partie  antérieure  de  la  cavité  abdominale 
dans  le  sinus  branchial  antérieur,  traverse  l'appareil  respira- 
toire d'avant  en  arrière,  puis  redescend  dans  la  cavité  abdomi- 
nale dont  il  longe  la  face  dorsale,  et  rentre  dans  le  cœur  par 
l'extrémité  opposée  à  celle  dont  nous  l'avions  vu  sortir.  Mais, 
ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  cette  circulation  s'arrête  bientôt  et  ne 
tarde  pas  à  s'établir  en  sens  inverse,  c'est-à-dire  que  le  courant 
monte  le  long  de  la  partie  dorsale  de  la  grande  lacune  périgas- 
trique,  traverse  l'appareil  branchial  d'arrière  en  avant ,  et  des- 
cend par  le  sinus  antérieur  et  la  portion  correspondante  de  la 
cavité  viscérale  jusqu'au  cœur  (1). 

§  12. — La  circulation  régulière  du  fluide  nourricier  dans 
l'intérieur  de  la  grande  chambre  viscérale,  et  sans  le  concours 
d'aucun  vaisseau  ni  artériel,  ni  veineux,  est  facile  à  constater 
chez  les  Ascidiens  dont  je  viens  de  parler,  car  il  existe  un  espace 
considérable  entre  la  masse  viscérale  et  les  parois  de  la  cavité 
où  le  sang  se  trouve  répandu,  et,  à  raison  de  la  transparence 
parfaite  des  téguments,  on  peut  voir  au  microscope  les  mouve- 
ments du  liquide  et  suivre  de  l'œil  les  globules  dans  tout  le 
trajet  que  je  viens  d'indiquer  (2). 

§  13.  —  Chez  beaucoup  d'Ascidies  composées,  telles  que  les 

(1)  Si  les  observations  de   Meitens  ce  rapport,  ils  ne  diffèrent  pas  des 

sur  la  circulation  chez  les  Appendi-  Ascidiens  ordinaires, 

culaires  qu'il  a  décrits  sous  le  nom  (2)  Il  y  a    aussi  une  autre  circon- 

(VEikopleura  sont  exactes,  le  renver-  stance  qui  facilite  singulièrement  la 

sèment  périodique  du  courant  sanguin  constatation  du  fait  important  de  la  cir- 

n'existerait  pas  chez   tous  les  Tuni-  culation  lacunaire  dans  toute  la  région 

ciers  (a);  mais  il  paraît  que  les  mou-  abdominale  du  corps  chez  ces  Mollus- 

vemenls  du   liquide    nourricier   sont  coïdes  :  c'est   que   le  sac   péritonéal 

difficiles  à   bien   voir  chez  ces   Ani-  qui  limite  la  cavité  abdominale  donne 

maux  (6),  et  il  est  probable  que,  sous  souvent  naissance  à    des  prolonge- 

(a)  Mertens,  Beschreibung  der  Eikopleura  (ilém.  de  l'Académie  de  Saint-Pétersbourg,  6«  sériei 
Sciences  math.phys.  nat.,  1831,  t.  I,  p.  213). 

(b)  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  2e  mémoire,  p.  79. 


90 


CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 


Amourouques  et  les  autres Polycliniens,  la  disposition  de  l'appa- 
reil irrigatoire  est  la  même  que  chez  les  Clavelines  ;  mais,  dans 
quelques  genres  Voisins,  l'abdomen  se  raccourcit  et  se  confond 
davantage  avec  la  portion  thoracique  du  corps  où  se  trouve 
l'appareil  respiratoire,  et  il  en  résulte  quelques  légères  diffé- 


ments  comparables  à  des  doigts  de 
gant ,  et  ces  appendices,  en  se  dé- 
veloppant, constituent  des  tubes  mem- 
braneux qui  occupent  Taxe  des  fila- 
ments radiciformes  ou  stolons  par 
lesquels  ces  Animaux  adhèrent  à 
leur  base  de  sustentation  et  se  multi- 
plient par  bourgeonnement.  Or,  le 
sang  passe  librement  de  la  cavité  ab- 
dominale dans  chacun  de  ces  caecums 
et  y  circule  comme  dans  le  reste  du 
corps,  en  changeant  de  direction  cha- 
que fois  que  les  contractions  péri- 
staltiques  se  renversent  (a).  Le  phé- 
nomène de  la  circulation  extra-vas- 
culaire  est  là  d'une  telle  évidence,  que 
si  les  physiologistes  de  cabinet,  qui  se 
refusent  encore  à  admettre  mes  vues 
à  ce  sujet,  voulaient  étudier  avec  un 
peu  d'attention  les  Clavelines  dont  on 
trouve  un  grand  nombre  sur  les  côtes 
de  la  Bretagne  ainsi  que  sur  le  litto- 
ral de  la  Méditerranée,  ils  cesseraient, 
je  présume,  de  discuter  sur  ce  point. 
La  connaissance  de  ce  mode  de  cir- 
culation lacunaire  permet  de  com- 
prendre facilement  un  phénomène  fort 
curieux  que  M.  Lister  avait  observé 
chez  les  Pérophores  quelque  temps 
avant  la  publication  des  faits  dont  je 
viens  de  parler,  mais  qu'il  avait  ex- 
pliqués d'une  manière  erronée  :  c'est 
le  passage  du  sang  d'un  individu  à  un 


autre  de  la  même  colonie  par  l'inter- 
médiaire des  stolons  radiciformes  sur 
lesquels  ces  Ascidiens  sociaux  pren- 
nent naissance.  M.  Lister  avait  con- 
staté l'existence  de  deux  courants  en 
sens  contraires  dans  l'intérieur  de  ces 
prolongements,  et  il  avait  supposé  que 
des  vaisseaux  partant  du  cœur  se  por- 
taient d'un  individu  à  un  autre  pour 
servira  cette  circulation  commune (6). 
Mais  une  étude  attentive  de  l'organi- 
sation de  ces  Ascidiens  m'a  convaincu 
que  ces  canaux  sont  simplement  les 
caecums  péritonéaux  qui  se  prolon- 
gent dans  les  stolons,  et  qui,  au  lieu 
de  s'oblitérer  par  les  progrès  du  dé- 
veloppement des  jeunes  individus  nais- 
sant à  leur  extrémité,  restent  perméa- 
bles, et  établissent  ainsi  une  commu- 
nication permanente  entre  les  cavités 
viscérales  de  tous  les  individus  pro- 
venant d'une  même  souche ,  à  peu 
près  comme  cela  se  voit  chez  les  Ser- 
tulariens  et  chez  les  Coralliaires  du 
genre  Paralcyonium  (c).  Or  la  cavité 
viscérale  étant  elle-même  un  réser- 
voir du  fluide  nourricier,  et  ce  fluide 
circulant  dans  toutes  les  parties  inoc- 
cupées de  cette  chambre,  on  com- 
prend facilement  que  celui-ci  doit 
pénétrer  non-seulement  dans  les  pro- 
longements tubuliformes  qui  naissent 
de  la  poche  péritonéale,  comme  cela  se 


(a)  Milne  Edwards,  Observations  sur  les  Ascidies  composées  des  côtes  de  la  Manche,  p.  10, 
45,  etc. 

(b)  Lister,  Op.  cit.  {Philos.  Trans.,  1834,  p.  380,  pi.  xi,  fig.  2  et  3). 

(c)  Voyez  ci-dessus,  page  73. 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  91 

renées  clans  la  position  du  cœur  et  dans  la  direction  des  espaces 
interorganiques  qui  servent  de  canaux  pour  le  passage  du  sang 
entre  ce  réservoir  contractile  et  les  vaisseaux  de  l'appareil 
respiratoire  (1). 
Je  dis  vaisseaux  de  l'appareil  respiratoire.  En  effet,  là  les 


voit  chez  les  Clavelines ,  mais  doit 
passer  dans  les  dilatations  terminales 
de  ces  tubes  qui  constituent  la  cavité 
abdominale  d'autres  individus. 

(1)  Le  cœur  est  logé  dans  un  péri- 
carde mince  et  transparent.  Chez  les 
Polycliniens  ,  il  est  très  allongé  et  se 
trouve  au-dessous  de  l'intestin  et  de 
l'ovaire,  à  l'extrémité  inférieure  de 
l'abdomen.  Chez  les  Didémiens,  il  est 
logé,  avec  l'ovaire,  dans  l'anse  formée 
par  l'intestin,  et  chez  les  Botrylliens 
il  est  remonté  auprès  de  l'estomac, 
contre  le  fond  du  sac  branchial. 

Chez  les  Ascidies  simples,  il  occupe 
aussi  une  position  analogue  et  se  com- 
pose d'un  long  tube  fusiforme,  légère- 
ment courbé,  qui  se  contracte  d'arrière 
en  avant,  assez  souvent  de  suite,  quel- 
quefois cent  quatre-vingts  fois  (a) , 
puis  se  repose  et  recommence  bientôt 
ses  contractions  en  sens  inverse.  Lors- 
que le  mouvement  péristaltique  se 
dirige  de  la  bouche  vers  l'anus,  le 
sang  m'a  paru  entrer  dans  le  cœur 
principalement  par  une  fente  siluée 
vers  les  deux  tiers  antérieurs  du  sac 
respiratoire  et  y  arriver  du  sinus 
branchial  antérieur ,  ainsi  que  des 
vaisseaux  voisins  du  système  tégu- 
mentaire,  puis  remonter  à  côté  de  la 
masse  viscérale  et  de  l'anus  dans  le 


sinus  dorsal,  pour  traverser  ensuite 
les  canaux  branchiaux  ainsi  que  le 
réseau  de  l'enveloppe  tégumentaire,  et 
rentrer  dans  le  sinus  ventral.  Il  m'a 
semblé  aussi  que,  lorsdu  renversement 
du  mouvement  circulatoire,  le  courant 
suivait  partout  une  direction  inverse, 
comme  cela  se  voit  chez  les  Clavelines  ; 
mais  Mi  Van  Beneden  pense  que  chez 
les  espèces  d'Ascidies  simples  dont  il 
a  étudié  la  circulation,  ce  renverse- 
ment détermine  seulement  dans  les 
canaux  du  sac  branchial  un  mouve- 
ment de  va-et-vient,  et  que  pendant  les 
contractions  d'avant  en  arrière  le  sang 
traversait  celte  portion  de  l'appareil 
irrigaloire  d'avant  en  arrière  pour 
aller  s'accumuler  dans  les  franges 
tentaculiformes  situées  du  côté  opposé 
du  sac  branchial  (6).  C'est  un  point  qui 
me  paraîtrait  devoir  être  examiné  de 
nouveau. 

Dans  l'espèce  d'Ascidie  simple  voi- 
sine des  Boltenies  dont  M.  W.  Mac- 
leay  a  formé  le  genre  Cijstingia,  il 
pai'aît  que  le  cœur  présente  quatre 
orifices  (c). 

D'après  les  observations  de  M.  Busch , 
on  aurait  pu  croire  que  dans  le 
genre  Appendiculaire  (dont  il  a  dé- 
crit une  espèce  sous  le  nom  d'Eu- 
rycercus  pellucidus  )  le  cœur  serait 


(a)  Milne  Edwards,  Sur  les  Ascidies  composées,  p.  6,  pi.  3,  fig.  1  ;  pi.  7,  fig.  i. 

(b)  Van  Beneden  ,   Recherches  sur  l'embryologie ,    Vanatomie   et   la  physiologie  des  Ascidies 
simples  (  Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  1847,  t.  XX,  p.  23). 

(c)  W.  Macleay,  Anatomical  Observations  on  ihe  Natural  Group  of  Tunica ta  {Trans.  of  the 
Lïnnean  Soc,  1825,  vol.  XIV,  p,  545). 


92  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

canaux  ne  paraissent  pas  être  de  simples  lacunes  ménagées  entre 
les  parties  voisines,  mais  des  tubes  réguliers  constitués  par  une 
tunique  membraneuse.  Nous  en  avons  déjà  étudié  le  mode  de 
distribution,  et  par  conséquent  je  ne  m'arrêterai  pas  davantage 
sur  ce  sujet  ;  mais  je  dois  ajouter  que  chez  les  Ascidies  simples, 
où  l'organisme  semble  se  perfectionner  davantage,  les  canaux 
par  lesquels  le  sang  se  distribue  dans  les  téguments  près  de  la 
surface  extérieure  du  corps  paraissent  avoir  acquis  également 
des  parois  membraneuses  et  constituer  des  tubes  vascu- 
laires  indépendants  (1).  Là  où  nous  pouvons  supposer  l'exis- 
tence d'une  respiration  diffuse  accessoire,  nous  voyons  donc 
l'organisation  de  l'appareil  d'irrigation  se  modifier  comme  dans 
l'appareil  branchial ,  tandis  que  dans  les  parties  profondes  où 
les  tissus  doivent  être  moins  vivement  excités  par  l'influence 
vivifiante  de  l'oxygène  absorbé,  les  cavités  parcourues  par  le 
sang, conservent  le  caractère  de  simples  lacunes  comme  chez 
les  Molluscoïdes  les  plus  dégradés, 
circulation  §  14.  —  La  disposition  de  l'appareil  circulatoire  est  à 
les  pyrosomes  peu  près  la  même  chez  les  Pyrosomes  (2)  ;  mais  chez  les 
les  Bières.  Biphores  (3)  elle  diffère  davantage  de  ce  que  nous  venons  de 
voir  chez  les  Ascidiens ,  ce  qui  du  reste  était  facile  à  prévoir, 
d'après  ce  que  nous  savons  déjà  du  mode  d'organisation  de  l'ap- 


traversé  par  l'œsophage  à  peu  près  (2)  Voyez  Huxley,  On  the  Anat.  of 
comme  il  l'est  par  le  rectum  chez  Salpa  and  Pyrosoma  (Phil.  Trans., 
les  Acéphales  (a)  ;  mais  M.  Vogt  a  1851,  p.  582,  pi.  17,  fig.  1). 
reconnu  que  cette  disposition  n'existe  (3)  Voyez  les  figures  de  l'appareil 
pas  (6).  circulatoire  des  Biphores  que  j'ai  des- 
(1)  M.  Délie  Chiaje  a  très  bien  re-  sinées  à  Nice  en  18^0,  et  que  j'ai  pu- 
présenté  ces  vaisseaux  sous-cutanés  bliées  dans  la  grande  édition  du  flé- 
chez YAscidia  mentula  ou  Phallusia  gne  animal  de  Cuvier  (  Mollusques  , 
mamillata,  Sav.  (c).  pi.  122,  fig.  1,  23). 


(a)  Busch  ,  Deobacht.  ilber  Anat.  uni,  Entwick.  einiger  Wirbellosen  Seethiere,  p.  H 8,  pi.  16, 
fig.  9. 

(b)  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée ,  2e  mémoire,  p.  77. 

(c)  Délie  Chiaje,  Descriz.  e  notom.  degli  Anim.  invertebr.,  pi.  84,  fig.  2. 


CHEZ    LES    M0LLUSC01DES. 


93 


pareil  respiratoire  de  ces  Animaux  (1).  Effectivement,  le  cœur 
est  situé,  comme  d'ordinaire,  au-dessous  de  la  masse  viscérale, 
et  son  extrémité  antérieure  communique  directement  avec  un 
grand  sinus  longitudinal  qui  occupe  la  ligne  médiane  inférieure 
du  corps,  tandis  que  son  extrémité  opposée  débouche  dans  le 
sac  péritonéal  ou  cavité  de  l'abdomen  (2).  Des  canaux  transver- 
saux qui  simulent  les  vaisseaux  branchiaux  des  Ascidies  vont 
de  ce  sinus  inférieur  à  un  sinus  analogue  qui  est  situé  du  côté 
opposé  de  la  grande  cavité  pharyngienne,  et  celui-ci  commu- 
nique à  son  tour  avec  les  canaux  dont  la  branchie  est  creu- 
sée (3).  Enfin  ces  derniers  débouchent  postérieurement  dans  la 


(1)  Voyez  tome  II,  p.  21. 

(2)  Cet  organe  est  tabulaire  comme 
chez  les  autres  Tuniciers ,  mais  se 
trouve  divisé  en  trois  ou  un  plus  grand 
nombre  de  chambres  par  des  étran- 
glements, de  façon  à  ressembler  beau- 
coup à  ces  petits  instruments  de  verre 
composés  de  trois  boules  que  Ton  em- 
ploie dans  les  analyses  organiques 
pour  faire  barboter  les  gaz  dans  un 
liquide  absorbant,  et  que  l'on  appelle 
laveurs  de  Liebig.  Ce  cœur  est  logé 
dans  un  sac  ou  repli  membraneux  que 
l'on  doit  considérer  comme  un  péri- 
carde et  y  est  suspendu  par  une  mem- 
brane qui  en  occupe  un  des  côtés. 

Meyen  a  décrit  deux  de  ces  rétré- 
cissements chez  le  Salpa  micro- 
nata  (a)  ;  M.  Eschricht  en  a  trouvé 
trois  chez  le  Salpa  cordiformis  (b). 

Je  dois  faire  remarquer  ici  que 
j'appelle  côté  dorsal  du  corps  des  Bi- 
phores  celui  où  se  trouve  le  ganglion 


nerveux  central  qui  est  surmonté  d'un 
organe  oculiforme  ,  et  qui  peut,  par 
conséquent,  être  considéré  comme 
l'analogue  du  cerveau  des  Mollusques 
proprement  dits.  Mais  divers  zoolo- 
gistes, se  fondant  sur  d'autres  con- 
sidérations, appelaient  cette  partie  du 
corps  la  face  ventrale  :  M.  Huxley,  par 
exemple. 

(3)  M.  Huxley  pense  que  la  branchie 
n'est  creusée  que  par  un  grand  sinus 
simple  régnant  dans  toute  sa  lon- 
gueur (  Op.  cit. ,  p.  570  )  ;  cela  paraît 
être  chez  les  jeunes  individus.  Mais  , 
chez  l'adulte,  j'ai  constaté  l'existence 
d'une  disposition  plus  complexe  ,  et 
mes  observations  ont  été  confirmées 
par  celles  de  M.  Vogt.  Il  existe 
dans  la  bande  branchiale  ,  outre  le 
sinus  médian,  deux  canaux  margi- 
naux ,  et  toutes  ces  cavités  commu- 
niquent entre  elles  par  des  branches 
verticales  (c). 


(a)  Meyen,  Uebei'  die  Salpen  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  eurios.,  t.  XVI,  p.  376). 

(6)  Eschricht,  Anatomisk-Physiologiske  Undersôgelser  over  Salpeme ,  1840,  p.  26  (Mém.  de 
l'Acad.  de  Copenhague,  t.  VIII). 

(c)  Voyez  mes  planches  dans  le  Règne  animal  de  Cuvier  ,  MOLLUSQUES  ,  pi.  122  ,  fig.  1,  et  la 
description  que  M.  Vogt  donne  dans  son  deuxième  Mémoire,  p.  34. 


9/t  CIRCULATION    DES    FLUIDES    NOURRICIERS 

cavité  abdominale,  de  façon  que  lorsque  les  contractions  du 
cœur  s'établissent  d'arrière  en  avant,  c'est  en  passant  par  ces 
dernières  voies  que  le  sang  expulsé  de  cet  organe  y  revient  (1)  ; 
et ,  quand  les  contractions  se  dirigent  en  sens  contraire ,  ce 
liquide  se  répand  d'abord  dans  l'espace  compris  entre  les  vis- 
cères et  les  parois  membraneuses  de  la  cavité  abdominale, 
pour  aller  de  là  dans  la  branchie  ,  puis  gagne  l'extrémité 
antérieure  du  sinus  dorsal,  descend  par  les  canaux  transver- 
saux dans  le  sinus  inférieur,  et  rentre  dans  le  cœur  par  l'extré- 
mité antérieure  de  cet  organe  (2).  Mais,  indépendamment  de 
ces  canaux  principaux,  il  y  en  a  de  secondaires,  et  les  uns  et 
les  autres  donnent  naissance  à  une  multitude  de  brandies  dont 
les  anastomoses  forment  un  lacis  capillaire  très  riche  dans  toute 


(1)  Dans  les  Biphores  observés  par 
Meyen,  le  nombre  des  pulsations  qui 
se  succédaient  dans  un  même  sens 
était  de  douze  (à). 

M.  Vogt  a  vu  le  changement  de  di- 
rection se  faire  avec  une  grande  régu- 
larité de  deux  minutes  en  deux  mi- 
nutes (6). 

(2)  La  présence  du  sang  dans  la 
cavité  abdominale  des  Biphores  est 
surtout  facile  à  constater  chez  les 
espèces  où  le  corps  est  garni  posté- 
rieurement de  grands  prolongements 
spiniformes,  et  où  la  poche  péritonéale 
forme  dans  la  base  de  ces  prolonge- 
ments des  culs-de-sac  ;  car  les  viscères 
ne  pénètrent  pas  dans  ces  portions 
appendiculaires  de  la  chambre  viscé- 
rale, et  le  sang  circule  seul  dans  leur 
intérieur,  où  il  forme  deux  grands 
courants. 


Les  canaux  transversaux  qui  unis- 
sent les  deux  sinus  longitudinaux 
entre  eux  correspondent  pour  la  plu- 
part aux  bandes  musculaires  dont  la 
chambre  pharyngienne  est  entourée, 
et  leur  direction  varie  un  peu  suivant 
que  ces  bandes  sont  parallèles  et  peu 
distantes,  ou  bien  que  celles  des  deux 
ou  trois  paires  antérieures  se  réunis- 
sent supérieurement  vers  le  sommet 
de  la  branchie.  M.  Huxley  pense  que 
ces  canaux  sont  tous  des  lacunes  pro- 
duites par  la  non-adhérence  des  deux 
tuniques  entre  elles  sur  certains  points 
et  leur  soudure  sur  d'autres  (c).  Mais 
M.  Vogt  combat  cette  opinion,  et  a  re- 
connu que  c'est  dans  l'épaisseur  même 
de  la  tunique  interne  qu'ils  sont  creu- 
sés (d).  Du  reste,  ces  deux  zoologistes, 
ainsi  que  M.  Leuekart  (e),  s'accordent 
à  considérer  ces  canaux  comme  étant 


(a)  Meyen,  Op.  cit.  (Nova  Acta  Nat.  cur.,  t.  XVI,  p.  377). 

(b)  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  2°  mémoire,  p.  32. 

(c)  Huxley,  Observ.  on  Vie  Anat.  and  Physiol.  of  Salpa,  etc.  (Philos.  Trans..  1851,  p.  570). 

(d)  Vogt,  Recherches  sur  les  Animaux  inférieurs  de  la  Méditerranée,  2e  mémoire,  p.  32. 

(e)  R.  Leuekart,  Zoologische  Untersuchungen,  1854,  Bd.  II. 


CHEZ    LES    MOLLUSCOÏDES.  95 

l'étendue  de  la  surface  du  corps  (1).  Quant  à  la  nature  de  ces 
canaux,  ils  paraissent  être  des  cavités  creusées  dans  le  tissu  de 
la  tunique  du  corps,  et  ne  pas  avoir  de  tuniques  propres  bien 
distinctes  des  tissus  voisins.  Du  reste,  quoi  qu'il  en  soit  de 
ce  dernier  point ,  nous  voyons  donc  que  chez  les  Biphores, 
de  même  que  chez  les  autres  Tuniciens,  l'appareil  circulatoire 
se  compose  en  totalité  ou  en  partie  de  simples  lacunes  ,  et  que 
toujours  la  grande  lacune  périgastrique,  ou  cavité  abdominale, 
forme  ici,  comme  chez  les  Bryozoaires,  le  principal  réservoir 
du  fluide  nourricier. 

dépourvus  d'une   tunique  propre,  et  leurs  parois  sont  revêtues  d'une  mera- 

comme  étant,  par  conséquent,  des  la-  brane  indépendante  des  parties  voi- 

cunes  simples,  mais  non  des  vaisseaux  sines. 

proprement  dits.  Cela  me  paraît  évi-  (1)  M.  Leuckart  a  trouvé  que  chez 

dent  pour  plusieurs  ;  mais  quelques-  les  Biphores  très  jeunes  ce  réseau  est 

uns  sont  si  réguliers  et  si  nettement  beaucoup  plus  simple  (a). 

définis,  que  je  suis  porté  à  croire  que 

(a)  Rud.  Leuckart,  Zoologische  Untersuehungen,  2  Heft,  p.  43. 


VINGT-DEUXIEME  LEÇON. 

De  la  circulation  du  sang  chez  les  Mollusques. 

Cone'nSeis°ns  §  ^  —  ^ans  la  dernière  leçon,  nous  avons  vu  que  le  sys- 
tème irrigatoire,  confondu  avec  l'appareil  digestif  chez  la  plu- 
part des  Zoophytes,  en  devient  distinct  chez  les  Malacozoaires 
inférieurs ,  et  présente  chez  les  Tuniciers  quelques  perfection- 
nements ultérieurs. 

En  effet,  chez  les  Bryozoaires  ,  qui  constituent  la  première 
classe  de  la  division  des  Molluscoïdes  ,  nous  avons  vu  les 
mêmes  organes  servir  à  contenir  le  fluide  nourricier  et  à  le 
mettre  en  mouvement ,  tandis  que  chez  les  Tuniciers  l'impul- 
sion circulatoire  est  donnée  par  un  organe  spécial  ;  mais  la 
direction  du  courant  ainsi  déterminée  n'est  pas  constante ,  et 
chaque  portion  du  système  de  cavités  que  le  sang  traverse  rem- 
plit tour  à  tour  les  fonctions  d'une  artère  et  celles  d'une  veine. 

Mais  dans  le  sous-embranchement  des  Mollusques  propre- 
ment dits  dont  l'étude  va  maintenant  nous  occuper,  on  trouve 
d'ordinaire  un  degré  de  plus  dans  la  division  du  travail  irriga- 
toire ;  ce  ne  sont  plus  les  mêmes  canaux  qui  servent  tour  à 
tour  à  la  distribution  du  fluide  nourricier  mis  en  mouvement  par 
le  cœur,  et  au  retour  de  ce  fluide  des  diverses  parties  du  corps 
à  l'organe  central  d'impulsion  ;  il  y  a  partage  des  rôles  :  le 
cercle  circulatoire  se  divise  en  deux  moitiés  distinctes,  l'une 
artérielle,  l'autre  veineuse,  et  ce  résultat  important  est  obtenu 
par  l'introduction  de  quelques  replis  membraneux  disposés  en 
manière  de  soupapes  autour  des  orifices  du  cœur.  Mais  ce  n'est 
pas  tout.  Ces  valvules,  en  ne  permettant  au  sang  de  se  mouvoir 
que  dans  une  direction  donnée,  paraissent  augmenter  l'influence 


CIRCULATION    DU    SANG    CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.        97 

excitante  des  courants  afférents  sur  les  tissus  que  ces  courants 
traversent,  car  on  voit  en  même  temps  ceux-ci  s'endiguer,  et 
les  canaux  qu'ils  parcourent  se  revêtir  de  parois  membraneuses 
dont  l'existence  est  parfaitement  indépendante  de  celle  des 
organes  circonvoisins. 

Ainsi  se  trouve  réalisé  un  nouveau  perfectionnement  que  la 
théorie  nous  avait  conduit  à  prédire  :  le  système  circulatoire 
se  compose  en  grande  partie  de  tubes  ou  vaisseaux  propres  qui 
servent  à  la  distribution  du  fluide  nourricier,  tandis  que  le 
retour  de  ce  liquide  ne  s'effectue  encore  en  totalité  ou  en  partie 
que  par  l'intermédiaire  de  voies  empruntées  aux  parties  voisines, 
c'est-à-dire  à  l'aide  des  espaces  ou  lacunes  interorganiques 
revêtues  seulement  d'une  légère  couche  membraniforme  dont 
la  formation  semble  être  partout  une  conséquence  du  contact 
du  fluide  nourricier  avec  les  tissus  vivants. 

Chez  les  Mollusques  proprement  dits ,  il  existe ,  en  effet , 
des  artères  qui  reçoivent  le  sang  mis  en  mouvement  par  le 
cœur;  mais,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt,  ces  tubes  ne 
se  constituent  parfois  que  dans  le  voisinage  de  cet  organe 
d'impulsion,  et,  dans  certaines  parties  éloignées  de  l'économie, 
ce  sont  encore  des  lacunes  irrégulières  qui  en  tiennent  lieu.  Cet 
état  imparfait  de  la  portion  artérielle  du  cercle  circulatoire  est, 
en  effet,  facile  à  constater  chez  quelques  grosses  espèces  de  Gas- 
téropodes de  nos  côtes,  lesHaliotides,  par  exemple,  et  donne,  ce 
me  semble,  un  nouveau  degré  d'intérêt  aux  vues  théoriques 
qui  nous  guident  en  ce  moment. 

Nous  rencontrerons  aussi  chez  les  Mollusques  une  multitude 
de  nuances  analogues  dans  l'état  de  la  portion  veineuse  du 
cercle  circulatoire  :  tantôt  elle  ne  se  composera  que  de  lacunes 
interorganiques,  et,  d'autres  fois,  une  portion  plus  ou  moins  con- 
sidérable de  ce  système  de  cavités  se  sera  canalisée  d'une  manière 
régulière  et  revêtue  même  d'une  tunique  membraneuse  bien 
distincte  des  parties  circonvoisines,  de  façon  à  constituer  des 
in,  7 


98  CIRCULATION    DU    SANG 

tubes  ou  vaisseaux  sanguins  -,  mais  je  ne  connais  pas  encore 
d'exemple  d'une  transformation  complète  de  ces  trajets  veineux 
en  veines  proprement  dites,  et  toujours  dans  ce  grand  embran- 
chement le  système  veineux  est  constitué  en  partie  par  les 
lacunes  ou  espaces  interorganiques. 

Pour  bien  saisir  l'enchaînement  des  faits  anatomiques  que 
nous  allons  passer  en  revue,  il  est  nécessaire  de  tenir  également 
compte  d'une  autre  tendance  de  la  Nature  dans  le  perfectionne- 
ment des  organismes,  savoir,  la  centralisation  des  forces  ou  la 
substitution  d'un  instrument  unique  et  puissant  à  deux  ou  plu- 
sieurs instruments  similaires  et  faibles. 

Ces  principes  posés,  faisons-en  l'application  à  l'étude  de  l'ap- 
pareil circulatoire  dans  chacune  des  grandes  divisions  ou  classes 
du  sous-embranchement  des  Mollusques ,  et  occupons-nous 
d'abord  du  type  le  moins  parfait,  celui  des  Acéphales  (1). 

§  2.  —  Cette  classe,  comme  nous  l'avons  déjà  vu  en  faisant 
les  Acéphales  l'histoire  des  organes  de  la  respiration ,  se  compose  de  deux 

abrancnes.  °  r  1  l 

groupes  principaux,  les  Brachiopodes  et  les  Lamellibranches. 
Mais  il  faut  y  rapporter  aussi  un  petit  groupe  de  Mollusques 
qui  ne  peut  prendre  place  ni  dans  l'une  ni  dans  l'autre  de  ces 
divisions  naturelles,  et  qui  mérite  cependant  de  fixer  un  instant 
notre  attention  :  c'est  le  genre  Dentale.  On  y  trouve  un  état  de 

(1)  Willis,  médecin  anglais  du  xvne  lusques  de  la  classe  des  Acéphales, 

siècle,  a  fait  connaître  d'une  manière  Son  ouvrage  (6)   est  accompagné  de 

passablement  exacte  la  disposition  du  magnifiques  planches  ;  seulement  il 

cœur  et  des  gros  troncs  artériels  chez  est  à   regretter  que  les  figures  ana- 

l'Huître(a);  mais  c'est  à  Poli,  habile  tomiques  qu'il  donne  aient  été  des- 

anatomiste    napolitain   de   la  fin   du  sinées  d'après  des  modèles  en  cire, 

siècle  dernier,  que  la  science  est  re-  au  lieu  d'être   faites  d'après  nature, 

devable  de  presque  tout  ce  que  nous  La   plupart  de   ces  pièces   anatomi- 

savons  touchant  le  mode  de  confor-  ques  se  trouvent  dans  les  collections 

mation  de  cette  portion  de  l'appareil  du  Muséum    d'histoire    naturelle    à 

circulatoire  chez  la  plupart  des  Mol-  Paris. 

(a)  Willis,  De  anima  Brutorum.  în-4,  1672,  p.  39,  pi.  2,  fig.  1. 

(b)  Poli ,  Teslacea  utrlusque  SicUiœ  eorumque  historia  et  anatome,  tabulis  œneis  illustrata, 
1791-5,  2  -vol.  in-folio  ;  suivi  d'un  fascicule  posthume  formant  le  commencement  du  tome  III,  publié 
par  M.  Délie  Chiaje  avec  la  date  de  1826,  et  resté  inachevé. 


Circulation 
chez 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  99 

dégradation  de  l'appareil  circulatoire  dont  je  ne  connais  pas 
d'autre  exemple  chez  les  Mollusques  proprement  dits ,  et  c'est 
par  voie  d'emprunt  seulement  que  la  Nature  paraît  y  avoir 
pourvu  aux  instruments  mécaniques  destinés  à  donner  l'impul- 
sion au  courant  circulatoire.  En  effet,  les  recherches  récentes 
de  M.  Lacaze,  professeur  à  la  faculté  des  sciences  de  Lille, 
nous  ont  appris  que  les  Dentales  n'ont  pas  de  cœur  propre- 
ment dit  ;  mais  ,  dans  la  région  anale ,  vers  le  point  où  cet 
organe  contractile  se  trouve  chez  les  autres  Acéphales,  on  voit 
un  réservoir  ou  sinus  sanguin  qui  est  traversé  par  le  rectum,  et 
cette  portion  terminale  du  tube  digestif  est  animée  de  mouve- 
ments pulsatiles  qui  doivent  avoir  pour  conséquence  de  dilater 
ou  de  rétrécir  l'espace  circonvoisin  occupé  par  le  sang.  Par 
conséquent ,  ce  sinus  anal ,  quoique  privé  de  mouvements 
propres,  doit  être  apte  à  remplir  les  fonctions  d'un  cœur  et  à 
pousser  le  fluide  nourricier  dans  le  vaste  système  de  cavités  où 
la  circulation  doit  s'effectuer  (1). 

(1)  Les  Dentalks  ,  comme  nous  sinus  abdominal  qui  occupe  la  ligne 
l'avons  déjà  vu  ,  sont  des  Mollusques  médiane,  et  qui  me  semble  pouvoir 
Acéphales  abranches  qui  respirent  être  comparé  à  une  immense  oreillette 
principalement  au  moyen  du  manteau  impaire  dans  laquelle  une  multitude  de 
cutané  dans  lequel  corps  est  engaîné,  canaux  latéraux  viendraient  aboutir, 
en  partie  à  l'aide  de  l'eau  introduite  Antérieurement  le  sinus  anal  com- 
dans  le  rectum  (a)  ;  et  c'est  autour  de  munique  avec  un  grand  sinus  pe- 
la poche  formée  par  cet  instrument  dieux  ;  et  sur  les  côtés ,  il  est  en  con- 
accessoire  de  respiration  que  se  trouve  tinuité  avec  deux  gros  vaisseaux  qui 
le  sinus  sanguin  tenant  lieu  du  cœur  se  rendent  au  manteau  et  s'y  réunis- 
des  Acéphales  lamellibranches  ordi-  sent  sur  la  ligne  médiane  pour  consti- 
uaires  (6).  La  portion  dilatée  et  puisa-  tuer  un  tronc  impair,  lequel  s'étend 
tile  de  l'intestin  ainsi  disposée  avait  jusqu'à  l'extrémité  postérieure  du 
été  prise  pour  un  véritable  cœur  par  corps,  et  a  reçu  le  nom  de  vaisseau 
quelques  conchyliologistes  (c).  En  ar-  palléal  inférieur. 
rière ,  ce  sinus  anal  (  ou  péri-anal,  Un  autre  vaisseau  médian  ,  relié  au 
Lacaze)  communique  avec  un  grand  précédent   par    un   réseau   intermé- 

(a)  Voyez  tome  II,  p.  92. 

(6)  Lacaze-Duthiers,  Histoire  de  l'organisation  et  du  développement  du  Dentale,  vr  partie  (Ann. 
des  sciences  nat.,  1857,  4*  série,  t.  VII,  p.  8,  pi.  2,  fig.  1,  2  et  i). 

(c)  Clark,  On  the  Animal  of  Dentalium  Tarentinum  (Ann.  of  Nat.  Hist.,  1849,  2e  série, 
vol.  IV,  p.  323  et  suiv.) 


100  CIRCULATION    DU    SANG 

L'appareil  irrigatoire  des  Dentales  offre  une  autre  particu- 
larité dont  nous  trouverons  quelques  exemples  chez  les  Mol- 
lusques plus  élevés  en  organisation ,  mais  dont  l'existence  est. 
également  un  indice  d'imperfection  physiologique.  Le  système 
de  cavités  dont  se  compose  l'appareil  irrigatoire  n'est  pas  com- 
plètement fermé,  et  communique  en  dehors  à  l'aide  de  certains 
orifices  à  lèvres  contractiles.  11  en  résulte  que  l'eau  ambiante 
peut  y  pénétrer  directement,  et  se  mêler  au  sang  quand,  pour 
le  service  de  la  locomotion  ,  l'Animal  a  besoin  de  gonfler  la 
portion  abdominale  ou  pédieuse  de  son  corps,  et  qu'une  partie 


diaire ,  occupe  la  face  dorsale  de  la 
portion  antérieure  du  manteau,  et  va 
déboucher  dans  un  sinus  sus-pha- 
ryngien qui  se  trouve  entre  les  tenta- 
cules et  qui  renferme  dans  son  inté- 
rieur les  ganglions  cérébroïdes.  Ce 
réseuvoir,  de  petite  dimension,  com- 
munique à  son  tour  avec  le  sinus  anal 
par  deux  canaux  latéraux  (a). 

Enfin  il  existe  aussi  un  grand  sinus 
sanguin  qui  entoure  la  niasse  linguale, 
et  qui  communique  en  arrière  avec 
une  série  de  lacunes  comprises  entre 
les  lobules  du  foie,  et,  par  leur  inter- 
médiaire, avec  le  sinus  abdominal. 

Tous  ces  vaisseaux  et  sinus  sont  en 
connexion  avec  des  cavités  intermé- 
diaires plus  étroites  qui  forment  par 
leur  réunion  un  réseau,  mais  qui  sont 
de  simples  lacunes  inlerorganiques 
plutôt  que  des  vaisseaux  proprement 
dits ,  ainsi  que  l'a  fort  bien  établi 
M.  Lacaze. 

Dans  l'état  actuel  de  la  science,  il 
serait  difficile  de  se  former  une  idée 
nette  du  trajet  suivi  par  le  sang  dans 
cet  appareil  irrigatoire,  car  la  direc- 


tion des  courants  n'a  pas  été  consta- 
tée. M.  Lacaze  a  vu  chez  l'embryon 
des  contractions  brusques  se  déclarer 
dans  la  portion  postérieure  du  sinus 
pédieux,  ainsi  que  dans  le  sinus  abdo- 
minal et  le  sinus  anal ,  mais  il  n'a 
aperçu  aucun  vestige  de  valvules;  de 
sorte  que  le  mouvement  des  liquides 
est  probablement  oscillatoire. 

C'est  sur  la  face  inférieure  du  sinus 
anal  que  M.  Lacaze  a  trouvé  de  chaque 
côté  un  petit  orifice  en  forme  de  bou- 
tonnière, qui  est  pourvu  de  muscles 
dilatateurs  et  qui  établit  une  commu- 
nication directe  enlre  ce  réservoir 
sanguin  et  l'extérieur  (b).  Cet  anato- 
miste  m'a  rendu  témoin  des  expé- 
riences dans  lesquelles,  en  introdui- 
sant quelques  gouttes  d'un  liquide 
coloré  par  une  de  ces  ouvertures  ,  il 
fait  passer  l'injection  dans  les  sinus 
sanguins. 

Je  dois  ajouter  que  l'organe  signalé 
plus  anciennement  par  M.  Deshayes 
comme  étant  le  cœur  du  Dentale  pa- 
raît être  une  dilatation  pharyngienne 
du  tube  digestif  [c). 


(a)  Lacaze,  Histoire  du  Dentale  (loc.  cit.,  pi.  3,  fig.  1  et  2  ;  pi.  i,  fîg.  1  et  2). 

(b)  Laca/e,  loc.  cit.,  pi    2,  fig.  \,   2  et  3. 

(c)  Deshayes,  Anat,  et  Monogr.  du  genre  Dentale  (Mém.  de  la  Soc.  d'hist.  nat.  de  Paris,  4825, 
t.  H,  p.  333). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  101 

du  fluide  nourricier  ainsi  étendue  peut  s'écouler  à  l'extérieur 
quand  l'Animal  est  obligé  de  diminuer  considérablement  de 
volume.  Cette  disposition  rappelle  ce  que  nous  avons  déjà  vu 
chez  un  grand  nombre  de  Zoophytes ,  et  montre  que  chez  les 
Dentales  la  valeur  physiologique  du  sang  doit  être  beaucoup 
moindre  que  chez  les  Mollusques  ordinaires;  mais,  lorsque  nous 
étudierons  le  mécanisme  des  mouvements  dans  cette  grande 
division  zoologique ,  nous  verrons  que  les  forces  mises  en  jeu 
pour  l'accomplissement  de  ces  actes  sont  très  souvent  emprun- 
tées à  l'appareil  circulatoire. 

§  3.  —  Je  ne  m'arrêterai  que  peu  sur  l'histoire  des  Brachio-       ordre 

des 

podes  ,  parce  que  nous  ne  connaissons  encore  que  d'une  BracMopodes 
manière  très  imparfaite  la  structure  de  leur  appareil  circula- 
toire. En  effet,  c'est  principalement  sur  des  individus  conservés 
dans  l'alcool  que  l'anatomie  de  ces  petits  Mollusques  a  été 
faite,  et  dans  ces  circonstances  il  est  très  difficile  d'arriver 
à  des  résultats  certains,  relatifs  au  mode  de  distribution  des 
canaux  que  l'on  rencontre  ou  à  la  détermination  des  fonctions 
des  réservoirs  en  communication  avec  ces  conduits.  Aussi  les 
zoologistes  sont-ils  fort  divisés  d'opinion  sur  ce  sujet,  et  je  ne 
saurais  résoudre  la  question  en  litige,  n'ayant  jamais  eu  l'occasion 
de  disséquer  un  de  ces  Animaux.  Je  me  bornerai  donc  à  dire 
que  chez  ces  Mollusques,  ainsi  que  Cuvier  l'a  découvert  chez 
les  Lingules  (1),  et  que  M.  Owen  l'a  constaté  ensuite  chez  les 
Orbicules  (2)  et  chez  les  Térébratules  (3),  il  existe  de  chaque 

(1)  Cuvier,  Mémoire  sur  l'anatomie  (3)   Owen,  Lettre  sur   l'appareil 

de  la  Lingule  (Mémoire  sur  les  Mol-  de  la  circulation  chez  les  Mollusques 

lusques,  et  Ann.  du  Mus.,  t.  I,  180'J).  de  la  classe  des  Brachiopodes  (Ann. 

('2)  Owen,  On  the  Anatomy  of  Bra-  des  se.    nat.,  3e  sér.,  18i5,  t.  III, 

chiupoda  and  more  especially  of  the  p.  315). 

Gênera   Terebratula   and    Orbicula  —  On  the  Ànatomy  of  Terebratula, 

(Trans.  of  the  ZooL  Soc.of  London,  in  Davidson's  Brilish  fossil  irachio- 

1835,  vol.  i,  p.  1/|5,  pi.  2_  et  23  ; —  poda   {Palœontological    Society    of 

Ann.  des  sciences  naturelles,  2e  sér.,  London,  1853,  p.  lli). 
1S35,  t.  III,  p.  52,. 


102  CIRCULATION    DU    SANG 

côté  du  corps  une  poche  d'apparence  charnue  qui  a  été  consi- 
dérée par  ces  anatomistes  comme  étant  un  cœur.  On  y  distingue 
une  portion  principale  nommée  ventricule ,  et  une  portion 
accessoire  ou  vestibulaire  qu'on  appelle  Y  oreillette.  On  admet 
assez  généralement  aussi  que  le  sang  veineux,  répandu  dans 
un  vaste  système  de  cavités  de  forme  irrégulière,  dont  la  por- 
tion principale  entoure  les  viscères,  pénètre  dans  ces  oreillettes, 
puis  dans  les  ventricules  qui,  par  leur  extrémité  antérieure, 
donneraient  naissance  à  une  artère  dont  les  branches  se  distri- 
bueraient d'une  part  dans  l'épaisseur  du  manteau,  d'autre  part 
dans  les  muscles  et  les  viscères,  d'où  ce  fluide  reviendrait  par 
des  canaux  veineux  vers  les  oreillettes.  Mais  je  dois  ajouter  que 
les  observations  les  plus  récentes  tendent  à  faire  donner  une 
autre  interprétation  à  ces  dispositions  organiques.  Suivant 
M.  Hancock,  dont  j'ai  eu  souvent  à  citer  avec  éloge  les  tra- 
vaux sur  l'anatomie  des  Mollusques  ,  les  organes  considérés 
jusqu'ici  comme  des  cœurs  n'appartiendraient  pas  à  l'appareil 
circulatoire,  et  le  principal  organe  moteur  du  sang  serait  une 
vésicule  appendue  au  tube  digestif  et  assez  semblable  au  cœur 
des  Tuniciers.  Mais  cela  me  paraît  peu  probable  (1). 


(1)   M.  Owen  ,  dont  j'examinerai  palléal;  ceux-ci  se  réunissent,  à  leur  tour 

plus   tard  les   opinions   touchant  la  pour  constituer  une   cavité  veineuse 

nature  des  cavités  veineuses  chez  les  dorsale  ,  qui  communique  aussi  avec 

Brachiopodes,   décrit  de  la  manière  une  autre  série  de  sinus  veineux,  les- 

suivante    l'appareil    circulatoire    des  quels  occupent  la  chambre  abdominale 

Térébratules  :  et  ressemblent  à  la  cavité  péritonéale 

Chaque  ventricule  fournit  deux  ar-  des  autres  animaux.  Enfin  le  sinus 
tères,  dont  l'une,  la  plus  petite,  se  commun  ainsi  formé  communique 
distribue  aux  viscères  et  aux  muscles,  avec  les  oreillettes,  qui  présentent  l'ap- 
et  l'autre  répand  ses  branches  sur  la  parence  de  deux  entonnoirs  à  parois 
moitié  voisine  des  deux  lobes  du  man-  plissées  et  débouchent  dans  les  ventri- 
teau,  où  ces  vaisseaux  vont  se  termi-  cules  correspondants  par  leur  som- 
ner  dans  un  sinus  veineux  marginal  met.  Les  parois  de  toutes  ces  cavités 
dont  les  branches  centripètes,  en  se  paraissent  être  revêtues  d'une  tunique 
réunissant,  concourent  à  former  de  membraneuse  d'une  délicatesse  ex- 
chaque côté  du  corps  un  grand  sinus  trême ,  qui   remplirait  à  la  fois  les 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  103 

§  k.  —  Du  reste ,  la  duplicité  des  organes  moteurs  et  des      ordre 

des  Acéphales 

vaisseaux  distributeurs  du  sang ,  qui ,  suivant  Cuvier  et  lamellibranches. 
M.  Owen  ,  serait  générale  dans  l'ordre  des  Brachiopodes  ,  se 
rencontre  indubitablement  chez  certains  Acéphales  lamelli- 
branches ;  mais,  dans  cette  grande  division  zoologique,  elle  ne 
se  présente  que  d'une  manière  exceptionnelle ,  et  la  tendance 
évidente  de  la  Nature  dans  la  constitution  de  ce  dernier  type 
de  Mollusques ,  est  de  centraliser ,  de  fondre  ces  parties 
similaires  sur  la  ligne  médiane,  de  façon  à  remplacer  par  un 
instrument  unique  ces  instruments  pairs  qui,  chez  les  Bra- 
chiopodes, semblent  se  répéter  à  droite  et  à  gauche  du  corps 
de  l'animal. 

Le  Lamellibranche  qui  présente  ce  mode  d'organisation  se 

fonctions  d'un  péritoine  et  d'une  poche  la  disposition  des  sinus  qui ,  chez  les 

veineuse  (a).  M.  Owen  a  vu  aussi  que  Térébratules ,  conduirait  le  sang  aux 

ce  sinus  abdominal  se  continue,  entre  oreillettes  ;  il  pense  que  ces  cavités  ne 

les  lobes  du  foie  et  les  masses  glandu-  reçoivent  que  le  sang  artérialisé  dans 

laires  de  l'appareil  reproducteur,  et  il  les  lobes  du  manteau,  mais  il  n'expli- 

ajoute  que  les  œufs,  ainsi  que  les  cel-  que  pas  comment ,  dans  cette  hypo- 

Iules  spermatiques,  se  développent  le  thèse,  la  circulation  s'accomplirait  dans 

long  des  canaux  veineux  formés  par  le  reste  de  l'organisme  (d). 
des  prolongements  du  sinus  viscéral;  Tel  était  l'état  de  nos  connaissances 

de  sorte  que  les  produits  du  travail  à  ce  sujet,  lorsque  M.  Huxley  entreprit 

reproducteur  sont  baignés  par  le  sang  de  nouvelles  recherches  sur  la  structure 

dans  l'intérieur  de  ces   dépendances  des  Brachiopodes,  et  émit  des  doutes 

des  réservoirs  péritonéaux  ou  grands  sur  la  nature  des  organes  qui  sont  géné- 

sinus  veineux,   comme   la   première  ralement  considérés  comme  étant  les 

portion  de  l'appareil  reproducteur  l'est  cœurs  de  ces  Mollusques.  Il  a  cru  voir 

dans  cette  cavité  elle-même  (6).  Chez  que  ces  poches  s'ouvrent  au  dehors 

les  Lingules,  la  disposition  des  cavités  par  un  petit  orifice  et  ne  sont  pas  en 

veineuses  est  à  peu  près  la  même  (c).  continuité    avec  des  vaisseaux  arté- 

Je    dois    ajouter    que    M.   Gratiolet  riels,  comme  le  pense  M.  Owen.  Enfin 

n'est  pas  d'accord  avec  M.  Owen  sur  M.  Huxley,  dans  un  des  genres  de  la 

(a)  Owen,  On  the  Anatomy  of  Terebratula  (Davidson's  British  fossil  Brachiopoda,  p.  15).  - 
(6)  Owen,  Lettre  sur  la  circulation  chez  les  Mollusques  Brachiopodes  (Ann.  des  sciences  nat., 
1845,  3-  série,  t.  III,  p.  316). 

(c)  Vogt,  Anat.  der  Lingula  anatina  (Neue  Denkschr.  der  Allgem.  Schiveizer  Gesellsch.,  1843, 
t.  VII). 

(d)  Gratiolet,  Recherches  sur  l'anatomie  de  la  Térébratule  australe,  pour  servir  à  l'histoire 
des  Brachiopodes  (Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences,  1853,  t.  XXVII,  p.  47). 


104 


CIRCULATION    DU    SANG 


conformation  trouve  très  communément  dans  la  Méditerranée,  et  les  zoolo- 

du  cœur.  .  , 

gistes  le  désignent  sous  le  nom  &  Arche  de  Noé.  Poli  nous  en 
fait  connaître  la  structure,  et  il  nous  apprend  que  deux  cœurs 
latéraux,  composés  l'un  et  l'autre  d'une  oreillette  et  d'un  ven- 
tricule, donnent  chacun  naissance  à  une  artère  principale  qu'il 
appelle  une  aorte,  mais  que  ces  deux  troncs  ,  avant  de  distri- 


famille  des  Térébratules ,  nommé 
lihynchonella ,  a  trouvé  deux  paires 
de  ces  mêmes  parties  latérales  en 
communication  avec  les  cavités  péri- 
gastriques  (a). 

Au  moment  de  mettre  cette  feuille 
sous  presse  ,  je  reçois  l'analyse  d'un 
Mémoire  de  M.  Hancock  (b)   sur  le 
même  sujet,  et ,  si   les  observations 
de  cet  anatomisle  sont  exactes  ,  on 
sera   conduit    à    modifier    beaucoup 
les  idées  que  l'on  avait  touchant  la 
structure    de    l'appareil    circulatoire 
de  ces  Animaux.   En  effet ,  d'après 
M.  Hancock  ,  le  véritable  cœur  des 
Brachiopodes  serait  une  vésicule  py- 
riforme  et  musculaire  attachée  à  la 
face  dorsale  de  l'estomac  et  en  com- 
munication avec  deux  ordres  de  ca- 
naux ;  quatre  de  ceux-ci,  faisant  fonc- 
tions d'artères  ,  conduiraient  le  sang 
aux  organes  de  la  reproduction ,  au 
manteau  et  au  tube  alimentaire,  et  le 
cours  du  fluide  y  serait  accéléré  par 
l'action  d'un  certain  nombre  de  vési- 
cules pulsatiles  en  connexion  avec  leur 
tronc.  Une  partie  de  ce  sang  passerait 
ensuite  dans  un  système  de  lacunes 
superficielles  logées  dans  les  lobes  du 
manteau  ainsi  que  dans  les  parois  de 
la  chambre  viscérale,  puis  reviendrait 
par  deux  canaux  particuliers  dans  un 


autre  système  de  lacunes  interviscé- 
rales, qui  la  transmettrait  au  cœur  par 
l'intermédiaire  des  lacunes  dont  l'œso- 
phage est  entouré.  Une  autre  portion 
du  sang  arriverait  également  des  ca- 
naux artériels  par  des  lacunes  situées 
dans  l'intérieur  des  bras,  et  reviendrait 
aussi  au  cœur  par  les  grands  sinus 
péri -œsophagiens.  Quant  aux  réser- 
voirs qui  entourent  la  masse  viscé- 
rale, et  qui  sont   en  communication 
avec  les  sinus  rameux  du  manteau, 
ainsi  qu'avec  les  organes  considérés 
généralement  comme  étant  les  cœurs 
latéraux  ,   M.   Hancock  pense  que  ce 
sont  des  cavités  aquifères  comparables 
aux  poches  membraneuses  en  com- 
munication avec  la  chambre  respira- 
toire des  Céphalopodes  et  servant  pro- 
bablement à  l'excrétion  des  produits 
urinaires.  Le  travail  de  M.  Hancock 
n'a  pas  encore  été  publié  d'une  ma- 
nière complète  ,  et ,  dans  l'état  actuel 
de  la  question,  il  me  semblerait  témé- 
raire de  se  prononcer  sur  les  questions 
qu'il  soulève.  Mais,  quoi  qu'il  en  soit, 
le  caractère  général  de  l'appareil  cir- 
culatoire des  Brachiopodes  paraît  être 
toujours  à  peu  près  le  même  que  chez 
les  autres   Mollusques,  et   s'accorder 
très  bien  avec  les  vues  développées 
dans  le  texte  de  ces  Leçons. 


(a)  Huxley,  Contributions  to  the  Anatomy  of  the  Brachiopoda  (Proceedings  of  the  Roy.  Soc.  of 
Loridon,  1854,  t.  VII,  p.  106). 

(b)  Hancock,  On  the  Organisation  of  Brachiopoda  (Procced.  of  the  Roy.  Soc,  1857,  t.  VIII, 
d.  467). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  105 

buer  leurs  branches  aux  organes  où  ils  doivent  porter  le  fluide 

nourricier,  se  réunissent  entre  elles,  sur  la  ligne  médiane 

du  dos,  pour  constituer  un  système  de  vaisseaux  médians  et 

impairs  (1). 

Chez  tous  les  autres  Mollusques  du  même  ordre,  la  centrali-     Rapports 
,      ,      .  .  .  -in  ^u  cœur 

sation  est  portée  plus  loin  et  atteint  les  ventricules  du  cœur  avec  ie  rectum. 

aussi  bien  que  les  artères.  On  leur  trouve,  en  effet,  un  ventri- 
cule unique  donnant  naissance  à  un  système  de  vaisseaux  arté- 
riels impairs.  Mais,  ici  encore,  ce  ventricule  médian  semble 
résulter  du  rapprochement  et  de  la  fusion  de  deux  cavités  laté- 
rales qui  auraient  rencontré  sur  leur  route  une  portion  de 
l'intestin  ;  car,  chez  presque  tous  les  Lamellibranches,  la  cavité 
du  cœur  est  traversée  d'avant  en  arrière  par  le  rectum,  dispo- 
sition dont  on  se  rendrait  difficilement  compte,  si  l'on  suppo- 
sait que  cet  organe  d'impulsion  était,  dès  le  premier  moment  de 
sa  création  dans  l'embryon,  une  poche  simple  et  impaire  (2). 


(1)  Poli,  Testacea  ulriusque  Sici- 
ٜ,  1795,  t.  II,  p.  132,  pi.  25, 
fig.  2. 

(2)  Pour  faire  bien  saisir  ce  résul- 
tat, il  esl  bon  de  se  rappeler  non- 
seulemenl  les  deux  états  extrêmes 
dont  je  viens  de  parler,  mais  aussi 
quelques  formes  intermédiaires,  et  no- 
tamment la  disposition  que  j'ai  fait 
connaître  chez  la  Pinne  marine. 

Il  est  bien  évident  que  si  les  déter- 
minations de  Cuvier,  de  M.  Ovven  et 
de  M.  Vogt  sont  exactes,  les  deux 
cœurs  latéraux  de  l'Arche  doivent 
correspondre  aux  deux  cœurs  qui 
occuperaient  également  les  côtés  du 
corps  chez  les  Bracbiopodes,  et  que 
l'artère  principale  qui  se  dirige  en 
avant,  ou  aorte  antérieure  ,  avec  ses 
deux  racines  venant  de  ces  deux 
cœurs,  quoique  simple  et  impaire  dans 
la  plus  grande  partie  de  sa  longueur, 


représente  les  deux  vaisseaux  laté- 
raux qui ,  en  partant  des  organes  en 
forme  de  cœur,  se  dirigent  également 
en  avant  chez  ces  mêmes  Brachio- 
podes.  Sous  ce  rapport,  il  y  aurait 
donc  dans  ces  deux  types  unité  de 
plan  en  ce  qui  est  fondamental,  et  les 
différences  dépendraient  seulement 
d'un  commencement  de  centralisa- 
tion des  deux  moitiés  du  système 
irrigatoire  chez  l'Arche. 

Mais  les  deux  racines  de  l'aorte  qui 
se  réunissent  ainsi  sur  la  ligne  mé- 
diane du  dos  de  l'Arche  passent  sur 
la  face  supérieure  de  l'intestin,  et  con- 
stituent, par  conséquent,  une  sorte 
de  pont  au-dessus  de  cet  organe.  Les 
deux  aortes  postérieures  qui  naissent 
de  l'extrémité  opposée  des  cœurs  de 
ce  Mollusque  se  réunissent  de  la  même 
manière  sur  un  plan  moins  élevé,  et 
elles  constituent  ainsi,  avec  les  aortes 


Position 
du  cœur. 


106  CIRCULATION    DU    SANG 

Dans  la  grande  majorité  des  cas,  le  ventricule  du  cœur  ainsi 
constitué  se  trouve  au  milieu  de  la  région  dorsale  du  corps, 
directement  sous  la  charnière  qui  réunit  les  deux  valves  de  la 


antérieures,  une  sorte  de  cadre  ou 
d'anneau  au  milieu  duquel  se  trouve 
comprise  la  portion  postérieure  de 
l'intestin. 

Maintenant,  si  l'on  imagine  un  de- 
gré de  centralisation  de  plus ,  ces 
quatre  racines  aortiques  se  raccourci- 
ront, les  cœurs  viendront  se  placer  de 
chaque  côté  de  l'intestin,  et  les  racines 
aortiques  antérieures  passant  au-des- 
sus de  cet  organe,  tandis  que  les  ra- 
cines aortiques  postérieures  passent 
au-dessous,  le  rectum  se  trouvera 
serré  dans  un  anneau  vasculaire.  Puis 
la  centralisation  faisant  de  nouveaux 
progrès  dans  la  moitié  inférieure  de 
cet  arfneau,  les  deux  racines  aortiques 
postérieures  se  trouveront  remplacées 
par  un  tronc  médian  impair,  et  les 
deux  ventricules  réunis  entre  eux  au- 
dessous  du  rectum,  tandis  que  l'an- 
neau vasculaire  dont  cet  intestin  est 
ceint  continuera  à  être  formé  supé- 
rieurement par  les  racines  aortiques 
antérieures. 

Enfin,  si  la  centralisation  fait  encore 
un  pas  de  plus,  ces  racines  se  confon- 
dront avec  le  ventricule  unique  dont 
elles  proviennent,  celui-ci  les  absor- 
bera pour  ainsi  dire,  et  ne  donnera 
plus  naissance  qu'à  une  aorte  anté- 
rieure impaire  et  médiane  ;  mais  ce 
vaisseau  restera  toujours  au-dessus 
du  rectum,  et  par  conséquent  l'an- 
neau cardiaque,  tout  en  se  resserrant, 
ne  pourra  pas  s'effacer,  et  une  portion 
de  l'intestin  se  trouvera  entourée  par 


le  cœur  dont  la  paroi  interne  ne  tar- 
dera pas  à  s'amincir  et  se  souder  à  sa 
surface,  de  façon  à  cesser  d'en  être 
distinct,  ce  qui  complétera  le  mode 
d'organisation  propre  à  la  plupart  des 
Lamellibranches. 

Or ,  l'état  intermédiaire  dont  la 
théorie  nous  fait  prévoir  la  possibilité 
se  trouve  réalisé  chez  la  Pinne  ma- 
rine (a).  Le  cœur  proprement  dit  se 
trouve  à  la  face  inférieure  du  rectum, 
et  c'est  de  la  partie  postérieure  du 
ventricule  médian  ainsi  placé  que  naît 
l'artère  aorte  postérieure  dont  le  tronc 
d'origine  marche  pendant  quelque 
temps  sous  cet  intestin.  Mais  ce  ven- 
tricule unique  donne  naissance  en 
avant  à  deux  aortes  très  grosses  et  très 
courtes  qui  remontent  au-dessus  du 
rectum  et  s'anastomosent  aussitôt 
pour  former  une  aorte  antérieure  im- 
paire :  par  conséquent  ,  le  rectum 
ne  passe  pas  encore  dans  la  cavité  du 
ventricule,  mais  se  trouve  embrassé 
par  un  cercle  vasculaire  dont  le  seg- 
ment inférieur  est  constitué  par  le 
ventricule  et  le  segment  supérieur  par 
les  deux  racines  aortiques. 

De  là  au  mode  d'organisation  en 
apparence  si  singulier  de  la  plupart 
des  Lamellibranches,  il  n'y  a  qu'une 
nuance,  savoir,  l'élargissement  des  ra- 
cines aortiques,  et  leur  envahissement 
par  le  ventricule  dont  elles  provien- 
nent. 

Cette  théorie  nous  permet  aussi  de 
ramener  au  type  commun  une  dispo_ 


(a)  Milr.e  Edwards,  Recherches  faites  pendant  un  voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  28. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  107 

coquille,  et  il  reçoit  le  sang  de  deux  oreillettes  qui  en  occupent  les 
côtés  ;  mais  il  est  quelques  espèces  où  la  tendance  à  la  concen- 
tration modifie  davantage  la  forme  de  cet  organe,  en  déterminant 


sition  anormale  du  cœur  chez  quel- 
ques Lamellibranches  où  cet  organe 
n'est  plus  traversé  par  le  rectum  et  se 
trouve  placé  au-dessus  de  cet  organe. 

Effectivement,  si  la  centralisation 
dont  nous  venons  de  parler  était 
accompagnée  de  la  disparition  des 
aortes  postérieures  ou  seulement  de 
l'atrophie  de  l'une  des  racines  de  cette 
portion  du  système  artériel,  il  est  évi- 
dent que  le  rectum  ne  se  trouverait 
plus  embrassé  par  un  anneau  vascu- 
laire,  et  que  les  ventricules,  cédant 
au  mouvement  qui  les  rapproche  à  la 
fois  de  l'aorte  antérieure  et  de  la 
ligne  médiane,  viendraient  se  joindre 
à  la  face  supérieure  de  l'intestin  pour 
y  constituer  un  ventricule  unique  à 
cavité  libre. 

Or,  c'est  là  précisément  ce  qui  s'ob- 
serve chez  le  Taret.  Le  cœur  de  ce 
Mollusque  n'est  pas  traversé  par  le 
rectum,  comme  l'est  celui  de  presque 
tous  les  Lamellibranches  ;  mais  aussi  il 
ne  fournit  pas  d'aorte  postérieure  [a). 


Les  Anomies  forment  également 
une  exception  a  la  règle  dominante 
touchant  le  passage  du  rectum  à  tra- 
vers le  cœur  des  Lamellibranches,  et 
ici  encore  les  artères  aortiques  posté- 
rieures manquent  (6). 

Chez  l'Huître  (c),  le  cœur  ne  se 
trouve  plus  dans  la  même  région  du 
corps  que  le  rectum,  et  la  centralisa- 
tion de  ses  diverses  parties  peut  s'ef- 
fectuer sans  qu'aucun  obstacle  méca- 
nique du  même  genre  s'y  oppose. 
Aussi ,  chez  ce  .Mollusque ,  la  cavité 
du  ventricule  est  libre  comme  dans 
les  deux  genres  précédents. 

Ainsi,  toutes  ces  anomalies  appa- 
rentes rentrent  dans  la  loi  générale. 

Le  passage  du  rectum  dans  l'inté- 
rieur du  ventricule  se  voit  très  bien 
dans  les  figures  que  Poli  a  données  de 
cet  organe  chez  la  Pholade  xd),  la 
.Moulette  des  peintres  (e),  les  Solé- 
curtes  (/*)  ,  les  Vénus  (g) ,  les  Pé- 
toncles (h),  les  Pectens  (i)  et  les 
Moules  (/). 


(a)  Poli,  Testacea  utriusque  Siciliœ,  t.  H,  pi.  29,  fig.  3  et  7. 

(6J  M.  Deshayes,  dans  son  Traité  de  conchyliologie,  t.  I,  p.  54,  a  dit  que  le  cœur  des  Tarets  est 
traversé  par  le  rectum  ;  mais  il  a  été,  je  crois,  le  premier  à  rectifier  cette  erreur  dans  son  Hisl.  nat. 
des  Mollusques  de  l'Algérie,  1846,  t.  I,  p.  64,  pi.  8,  fig.  1  et  2. 

—  Frey  et  Leuckart,  Beitrâge  sur  Kenntniss  Wirbelloser  Thiere,  1847,  p.  51. 

—  Quatrefages,  Mém.  sur  le  genre  Taret  (Annales  des  sciences  naturelles,  1849,  3'  série,  t.  II, 
p.  47,  pi.  2,  fig.  1). 

(c)  Poli,  Testacea  utriusque  Siciliœ,  t.  H,  p.  194. 

■ — Garner,  On  the  Anatomy  of  Lamellibranchiate  Mollusca  (Trans .  of  the  Zoological  Soc.  of 
London,  1841,  vol.  II,  p.  91). 

—  Lacaze-Duthiers,  Mém.  sur  l'organisation  de  l'Anomie  (Ann.  des  sciences  nat.,  1854,  4*  série, 
t.  II,  p.  16,  pi.  2,  fig.  2). 

(d)  Poli,  Op.  cit.,  t.  I,  pi.  7,  fig.  8,  et  pi.  8,  fig.  7  et  8. 

(e)  Idem,  ïbid.,  pi.  9,  fig.  11  et  12. 

(f)  Idem,  ibid.,  pi.  13,  fig.  7. 

(g)  Idem,  ibid.,   pi.  20,  fig.  10. 

(?i)  Arcapilosa  (Poli,  Op.  cit.,  pi.  26,  fig.  14). 
(i)  Poli,  Op.  cit.,  pi.  27,  fig.  12. 
(j)  Idem,  ibid.,p\.  31,  fig.  7. 


Tuniques 
du  cœur. 


108  CIRCULATION    DU    SANG 

le  rapprochement  des  deux  oreillettes.  Ainsi,  chez  le  Pétoncle 
poilu,  ces  deux  poches  sont  latérales  et  bien  distinctes  entre  elles 
à  la  partie  postérieure  du  ventricule,  mais  en  avant  elles  se 
rencontrent  et  se  confondent  sur  la  ligne  médiane  (1).  Enfin, 
chez  les  Huîtres,  la  fusion  des  oreillettes  est  encore  plus  com- 
plète, et,  au  lieu  d'occuper  les  côtés  du  ventricule,  elles  sont 
refoulées  au-dessus  et  en  arrière  de  cet  organe,  où  il  est  facile 
de  les  reconnaître  à  raison  de  leur  couleur  brune  (2) . 

La  position  du  cœur  peut  varier  un  peu,  mais  il  est  toujours 
placé  au-dessus  de  la  base  des  branchies,  et  logé  dans  une  cavité 
dont  les  parois  présentent  la  disposition  qui  s'observe  d'ordi- 
naire dans  les  points  de  l'économie  animale  où  des  parties 


(1)  Poli,  qui  a  fait  connaître  cette 
disposition  chez  le  Pétoncle  auquel  il 
conserve  le  nom  linnéen  iïAreq  pi- 
losa,°  représente  l'oreillette  commune 
s'avançant  beaucoup  sous  l'aorte  an- 
térieure, et  se  prolongeant  en  arrière 
du  ventricule,  sous  la  forme  de  deux 
grosses  cornes  [a). 

(2)  Le  cœur  de  l'Huître  se  trouve 
refoulé  vers  le  milieu  du  corps,  entre 
la  masse  viscérale  de  l'abdomen  et  le 
grand  muscle  abducteur  des  valves  (6). 
Au  premier  abord,  on  pourrait  penser 
que  ce  déplacement  doit  tenir  à  quel- 
que changement  important  dans  le 
plan  général  de  l'organisme  de  ces 
Mollusques  comparés  aux  autres  La- 
mellibranches ;  mais  cela  n'est  pas, 
et  l'anomalie  est  facile  à  expliquer. 
En  effet,  les  particularités  de  structure 
que  présentent  les  Huîtres  comparées 
aux  Pinnes,  ou  même  aux  Madrés, 
aux  Anodontes ,  etc.  ,  tiennent  en 
partie  à    la    disparition   du    muscle 


abducteur  antérieur  des  valves,  qui 
se  trouve  déjà  fort  réduit  chez  les 
Pinnes  ,  et  en  partie  à  une  courbure 
ou  reploiement  du  corps  du  côté  dor- 
sal ,  disposition  qui  fait  chevaucher 
le  muscle  postérieur  au  -  dessus  de 
la  face  supérieure  de  l'abdomen,  et 
transforme  la  région  cardiaque  en 
une  espèce  de  fosse  au  fond  de  la- 
quelle le  cœur  se  trouve  entraîné 
par  la  descente  des  branchies  vers  le 
bord  inférieur  du  corps.  L'intestin  , 
il  est  vrai,  ne  suit  pas  le  cœur  clans 
ce  déplacement  ;  mais,  pour  expliquer 
la  séparation  entre  ces  deux  organes, 
il  suffit  de  supposer  que  l'une  des 
deux  racines  aortiques  qui,  chez  la 
Pinne,  s'étendent  en  manière  de  pont 
au-dessus  du  rectum,  et  maintiennent 
le  ventricule  suspendu  au-dessous  de 
ce  tube,  ait  avorté;  car  alors  le  cœur 
pourra  s'éloigner  plus  ou  moins  de  la 
face  inférieure  de  l'intestin,  sans  que 
la  loi  des  connexions  soit  violée. 


(a)  Poli,  Testaeea  utriusqve  Siciliœ,  t.  II,  p.  142,  pi.  26,  fig.  43  et  14. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  29,  fig.  7  et  8. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  109 

mobiles  frottent  souvent  les  unes  contre  les  autres,  soit  par  le 
jeu  normal  des  organes,  soit  par  l'effet  d'un  état  pathologique. 
En  effet,  les  surfaces  en  contact  se  revêtent  alors  d'une  mem- 
brane mince  et  lisse  qui  se  continue  de  l'une  à  l'autre  de  façon 
à  constituer  une  poche  où  se  trouve  emprisonnée  une  certaine 
quantité  de  liquide.  Lorsque  ce  sont,  deux  surfaces  presque 
planes  qui  frottent  l'une  contre  l'autre,  comme  dans  les  arti- 
culations des  os  de  nos  membres  ,  il  en  résulte  une  poche 
simple  dont  une  moitié  adhère  à  chacune  de  ces  surfaces; 
mais  lorsque  la  friction  a  lieu  entre  la  surface  extérieure  d'un 
organe  arrondi  ou  cylindrique  qui  se  meut  dans  une  cavité 
où  il  est  suspendu ,  le  revêtement  membraneux  se  complique 
davantage  et  constitue  une  double  tunique  ou  plutôt  un  sac 
dont  une  moitié,  repliée  en  dedans,  encapuchonné  l'organe  et 
y  adhère,  tandis  que  l'autre  moitié  l'entoure  à  distance  et  adhère 
aux  parties  circonvoisines.  C'est  une  disposition  analogue  en 
tout  à  celle  dont  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  parler  en  décrivant 
la  plèvre  dont  les  poumons  sont  entourés  (1),  et  que  nous  allons 
rencontrer  maintenant  autour  du  cœur,  chez  tous  les  Animaux 
où  cet  organe  est  conformé  de  la  manière  ordinaire. 

La  tunique  ainsi  constituée  porte  le  nom  de  péricarde  (2)  ; 
son  feuillet  interne  adhère  à  la  surface  externe  du  cœur,  et  son 
feuillet  externe  constitue  une  capsule  lâche  tout  autour  de  cet 
organe.  Chez  les  Acéphales  lamellibranches  elle  est  bien  déve- 
loppée (3),  mais  sa  cavité  n'est  pas  toujours  parfaitement  close, 
et.  se  continue  parfois  avec  des  espèces  de  cavernes  dont  un 

(1)  Voyez  tome  II,  p.  Zi09.  parois  du  sac  péricardique  sont  for- 

(2)  En  général,  quand  on  parle  du      mées. 

péricarde,  on  ne  fait  allusion  qu'an  sac  (o)  Les  Anomies  font  exception  à 
formé  par  le  repli  externe  de  cette  cette  règle.  Le  cœur  de  ces  singuliers 
double  tunique,  sac  dans  l'intérieur  Mollusques, aulieu  d'êtrelogé, comme 
duquel  le  cœur  semble  être  suspendu,  d'ordinaire,  dans  une  chambre  parti- 
bien  qu'en  réalité  il  soit  logé  dans  une'  culière  ménagée  entre  ia  base  des 
duplicalure  de  la  membrane  dont  les  branchies,  fait  saillie  au  dehors  et  se 


Structure 
Hu  cœur. 


110  CIRCULATION    DU    SANG 

organe  voisin  est  creusé,  et,  par  l'intermédiaire  de  celui-ci, 
communique  même  avec  le  dehors  (1). 

La  structure  intérieure  du  cœur  a  été  étudiée  avec  soin  chez 
plusieurs  Lamellibranches.  Le  ventricule  est  une  poche ,  en 
général  pyriforme,  dont  les  parois  ,  d'une  délicatesse  extrême, 
renferment  dans  leur  épaisseur  un  grand  nombre  de  faisceaux 
musculaires  (2)  qui  souvent  font  saillie  et  s'entrecroisent  dans 
sa  cavité.  Il  communique  avec  les  ventricules  par  deux  orifices 
qui ,  en  général ,  sont  situés  latéralement,  et  ont  la  forme  de 
fentes  ou  de  boutonnières  dont  les  bords  seraient  disposés  de 
façon  à  se  tendre  et  à  se  rapprocher,  quand  ils  sont  poussés 
de  dedans  en  dehors ,  et  à  s'écarter,  au  contraire,  quand  ils 


voit  à  nu  au  fond  de  la  concavité  dor- 
sale résultant  de  la  courbure  du 
corps  (a).  M.  Lacaze,  qui  a  fait  bien 
connaître  cette  disposition  curieuse , 
pense  que  le  péricarde  s'est  peut-être 
soudé  au  cœur,  de  façon  à  se  confon- 
dre avec  cet  organe  (6)  ;  mais  je  suis 
porté  à  croire  qu'il  manque  complète- 
ment, et  que  c'est  un  prolongement 
de  la  peau  seulement  qui  constitue  ici 
la  tunique  externe  du  cœur. 

Je  dois  ajouter  que  M.  Deshayes 
considère  le  péricarde  des  Acéphales 
comme  étant,  pour  ainsi  dire,  une  dé- 
pression sacciforme  du  manteau.  Mais 
cette  opinion  ne  repose  sur  aucun 
raisonnement  plausible  (c). 

En  général,  les  oreillettes ,  aussi 
bien  que  le  ventricule,  sont  logées 
dans  le  péricarde  ;  mais ,  chez  les 
Huîtres,  ce  sac  n'entoure  que  le  ven- 
tricule. 


(1)  Cette  communication  entre  le 
péricarde  et  la  cavité  de  l'appareil 
urinaire,  ou  organe  de  Bojanus,  a  été 
brièvement  indiquée  chez  l'Anodonte 
par  Garner  (d),  mais  n'a  été  bien  dé- 
montrée que  tout  récemment  par  les 
recherches  de  M.  Lacaze,  qui  l'a  étu- 
diée principalement  chez  l'Anodonte, 
la  Lutraire  solénoïde,  la  Pholade,  les 
Bucardes,  les  Corbules,  etc.  Il  ne  l'a 
pas  trouvée  chez  les  Pectens,  les  Spon- 
dyles,  la  Moule  et  la  Pinne  (e). 

(2)  M.  Deshayes  dit  que  les  parois 
du  cœur  sont  garnies  de  tissu  fibreux; 
je  n'en  ai  pu  apercevoir  aucune  trace, 
et  je  présume  que  ce  sont  les  muscles 
propres  de  cet  organe  que  ceconchylio- 
logiste  appelle  des  faisceaux  fibreux, 
expression  qui,  dans  le  langage  ana- 
tomique,  a  une  tout  autre  significa- 
tion (/■). 


(a)  Poli,  Testacea  utriusque  Siciliœ,  t.  H,  p.  148. 

(b)  Lacaze-Duthiers,  Mém.  sur  l'Anomie  (Ann.  des  sciences  liât.,  1854,  t.  II,  p.  16). 

(c)  Deshayes,  Mollusques  de  l'Algérie,  t.  I,  p.  322,  etc. 

(d)  Garner,  On  the  Anat.  of  Lamellibr.  Conchifera  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  1841,  t,  II,  p.  92). 

(e)  Lacaze-Duthiers,  Mémoire  sur  l'organe  de  Bojanus  (Ann.  des  sciences  nat.,  k°  série,  1855, 
t.  IV,  p.  273,  pi.  6,  fig.  3,  etc.). 

{/")  Deshayes,  Mollusques  de  l'Algérie,  t.  I,  p.  155,  etc. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  111 

supportent  une  pression  même  très  légère  en  sens  contraire. 
Cette  disposition  est  facile  à  constater  par  l'injection  d'un  liquide 
coloré  :  si  l'on  pousse  l'injection  dans  l'oreillette,  on  la  voit 
pénétrer  aussitôt  dans  le  ventricule  par  la  voie  que  je. viens 
d'indiquer;  mais  si  l'on  cherche  à  faire  passer  le  liquide  du 
ventricule  dans  l'oreillette,  on  n'y  parvient  pas. 

Les  deux  oreillettes,  qui  d'ordinaire  sont  parfaitement  symé-  conformation 
triques  et  longent  le  ventricule  comme  une  paire  d'ailes,  ont  oreillettes. 
des  parois  encore  plus  minces,  mais  sont  également  pourvues 
de  fibres  musculaires,  de  façon  à  pouvoir  se  contracter  et  à  se 
relâcher  alternativement,  et,  lorsqu'on  observe  ces  mouvements 
chez  des  animaux  vivants,  on  voit  qu'ils  alternent  avec  ceux 
du  ventricule.  Les  oreillettes  se  resserrent  donc  quand  le  ven- 
tricule devient  flasque  et  y  envoie  une  ondée  de  sang  ;  puis  le 
ventricule  se  contracte  à  son  tour  et  expulse  ce  liquide,  mais 
ne  saurait  le  renvoyer  dans  les  oreillettes,  à  cause  des  val- 
vules dont  il  vient  d'être  question,  et  ne  peut  que  le  lancer 
dans  les  artères  qui  sont  également  en  communication  avec  sa 
cavité. 

Ç  5.  —  Le  système  artériel  naît  ordinairement  du  ventricule     système 

°  J  artériel. 

par  deux  troncs  impairs  qui  sont  situés  sur  la  ligne  médiane  du 
dos  et  qui  se  dirigent  l'un  en  avant,  l'autre  en  arrière.  Pour  les 
désigner,  on  emprunte  en  général  à  l'anatomie  humaine  le  nom 
d'aorte;  mais  quelques  naturalistes,  peut-être  avec  raison,  pré- 
fèrent les  appeler  seulement  artères  principales. 

Le  tronc  antérieur,  que  je  nommerais  artère  céphalique,  si 
ces  Mollusques  n'étaient  pas  dépourvus  d'une  tête  distincte, 
est  toujours  le  plus  gros,  et  présente  souvent  à  sa  base  une 
petite  dilatation  que  l'on  a  comparée  au  bulbe  aortique  des  Ver- 
tébrés inférieurs,  mais  qui,  en  général,  ne  paraît  pas  être  un 
organe  d'impulsion  (1).  Ce  vaisseau  médian  se  dirige  horizon- 

(1)  Poli  a  observé  chez  la  Venus  rable  de  l'aorte  antérieure,  situé  à 
Chione  un  renflement  plus  considé-      une  assez  grande  distance  du  ventri- 


112  CIRCULATION    DU    SANG 

talement  en  avant  jusque  auprès  de  la  bouche,  et,  chemin  fai- 
sant, donne  naissance  à  plusieurs  branches  dont  les  plus  impor- 
tantes sont  :  1°  une  artère  abdominale  postérieure,  qui  des- 
cend vers  la  partie  postérieure  de  la  masse  viscérale  ;  2°  une 
grande  artère  gastrique,  qui  distribue  ses  rameaux  à  l'esto- 
mac, au  foie  et  aux  parties  voisines  ;  2°  une  artère  pédieuse 
antérieure,  qui,  chez  les  espèces  dont  le  pied  est  très  développé, 
les  Mactres  et  les  Bucardes,  par  exemple,  est  la  plus  grosse  de 
toutes  ;  li°  les  artères  tentaculaires,  qui  se  distribuent  aux  appen- 
dices labiaux  et  envoient  également  des  rameaux  à  la  partie 
antérieure  du  manteau.  Enfin,  arrivée  au-dessus  du  muscle 
abducteur  antérieur  de  la  coquille,  cette  aorte  antérieure  fournit 
des  branches  à  cet  organe,  et  se  divise  en  deux  troncs  pour 
descendre  le  long  du  bord  libre  du  manteau.  Le  tronc  aortique 
postérieur  longe  l'intestin  rectum ,  donne  des  branches  au 
muscle  abducteur  postérieur  et  aux  muscles  rétracteurs  du  pied, 
puis  se  bifurque,  pour  embrasser  la  base  des  siphons  et  y  distri- 
buer des  branches  chez  les  espèces  qui  sont  pourvues  de  ces 
organes,  et,  dans  tous  les  cas,  pour  longer  le  bord  postérieur  et 
inférieur  des  deux  lobes  du  manteau  et  s'y  ramifier  d'une  ma- 
nière variable,  suivant  les  espèces  (1). 


cule,  et  qu'il  appelle  un  cœur  accès-  pellerai  les  artères  tergales  moyen- 

soire  (a).  La  V.   florida  lui  a  pré-  nés  ;  elles  se  distribuent  principale- 

senté    le    même    mode    d'organisa-  ment  dans  la  portion  supérieure  du 

tion  (b),  mais  il  n'a  trouvé  rien  de  manteau  qui  tapisse  la  partie  renflée 

semblable  dans  d'autres  espèces  du  de  la  coquille   nommée   le   crochet. 

même  genre,   savoir  :  les  V.  verru-  Chez  les  Bucnrdes,  ces  artères  sont 

cosa,  V.  gallina,  V.  Iceta.  très  grosses,  et   chez  les  Pinnes  (c) 

(1)  J'ajouterai  que,  chez  la  Mactre,  elles  sont  remplacées  par  une  série  de 

l'aorte  antérieure  fournit  d'abord  deux  quatre  vaisseaux  de  moyenne  gran- 

petites  branches  ascendantes   qui   se  deur.  Une  artère  ter  gale  antérieure 

dirigent  vers  la  charnière,  et  que  j'ap-  naît  du  même  tronc  ,   au-dessus  du 


(a)  Poli,  Testacea  utriusque  Siciliœ ,  t.  II,  p,  89,  pi.  20,  fig.  40. 

(b)  Idem,  ibid.,  t.  II,  p.  98. 

(c)  Voyez  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  28. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  Ho 

§6.  —  Le  sang  qui  part  du  cœur  se  trouve  ainsi  distribué   Terminaison 
dans  toutes  les  parties  du  corps,  et,  à  l'aide  d'injections  fines,  on      artères. 
peut  suivre  les  vaisseaux  artériels  jusqu'à  ce  qu'ils  se  soient 


muscle  antérieur,  et  se  distribue  de 
la  même  manière  dans  la  portion  voi- 
sine du  manteau. 

L'artère  abdominale  postérieure 
qui  naît  de  la  face  inférieure  de  l'aorte 
antérieure,  à  peu  de  distance  du  cœur, 
n'est  que  peu  développée  chez  la 
Mactre  et  chez  la  l'inné,  où  elle  ne 
m'a  paru  se  distribuer  qu'aux  parois 
de  la  cavité  viscérale  ;  mais  chez  la 
Bucarde  elle,  est  plus  grosse  et  donne 
des  branches  aux  parties  voisines  de 
l'appareil  digestif.  Enfin,  chez  la  Pho- 
lade,  elle  prend  un  développement  très 
considérable,  et  répand  ses  branches 
dans  toute  la  portion  postérieure  du 
pied,  comme  on  peut  le  voir  dans  la 
belle  figure  de  l'appareil  circulatoire 
de  ce  Mollusque,  publiée  par  M.  Blan- 
chard. Chez  les  Bucardes,  il  y  a  aussi 
une  petite  artère  abdominale  acces- 
soire qui  naît  un  peu  plus  en  avant  et 
se  distribue  de  la  même  manière. 

L' artère  gastrique  est  beaucoup 
plus  grosse  que  toutes  les  précé- 
dentes. Chez  les  Bucardes,  elle  se 
divise  en  trois  branches  principales 
qui  se  recourbent  diversement  entre 
les  circonvolutions  du  tube  intestinal, 
pour  se  répandre  dans  la  masse  vis- 
cérale. Chez  la  Mactre,  deux  de  ses 
branches  seulement  sont  remarquables 
par  leur  volume,  et  l'une  suit  le  bord 
inférieur  de  l'estomac  jusqu'à  l'extré- 
mité du  cul -de -sac  de  cet  organe, 
tandis  que  l'antre  plonge  entre  les 
intestins  et  les  lobes  du  foie.  Chez  la 
Pholade,    la    disposition  de   l'artère 


gastrique  paraît  être  à  peu  près  la 
même  que  chez  les  Bucardes.  Chez 
la  Pinne  marine,  ce  vaisseau  est  plus 
grêle ,  et  l'aorte  antérieure  fournit 
plus  en  avant  plusieurs  petites  artères 
gastriques  accessoires  qui  semblent 
tenir  lieu  de  quelques-unes  de  ses 
branches. 

Chez  la  Maclre  et  la  Bucarde,  Yar- 
tère  pédieuse  est  très  grosse  et  semble 
être  la  continuation  du  tronc  aorlique, 
dont  elle  n'est  cependant  qu'une  bran- 
che. Elle  descend  le  long  du  bord  an- 
térieur de  l'abdomen,  puis  se  recourbe 
en  avant  pour  gagner  l'extrémité  du 
pied.  Pendant  ce  trajet,  elle  donne  aux 
faisceaux  musculaires  de  cette  région 
du  corps  et  aux  organes  génitaux  un 
grand  nombre  de  branches,  dont  une, 
plus  grosse  que  les  autres  ,  peut  être 
distinguée  sous  le  nom  iïartère  pé- 
dieuse postérieure  ;  celle  -  ci  se  re- 
courbe en  arrière  et  se  distribue  dans 
toute  la  portion  inférieure  et  posté- 
rieure du  pied.  Chez  la  Pinne,  cette 
dernière  constitue  même  la  continua- 
tion du  tronc  principal ,  la  partie 
antérieure  du  pied  étant  presque  rudi- 
mentaire.  Cette  disposition  se  voit 
aussi  chez  PAnodonte,  où  l'artère  ab- 
dominale antérieure  fournit  presque 
tout  le  sang  qui  se  distribue  à  la  masse 
viscérale  ainsi  qu'au  pied  (a). 

Les  artères  tentaculaires  naissent 
de  l'aorte  antérieure,  vers  le  même 
point  que  la  pédieuse;  elles  suivent 
la  face  interne  de  ces  appendices  et 
donnent  des  branches  à  chacune  des 


(a)  Voyez  Langer,  Das  Gefàss-System  (1er  Tekhmmchel  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  4855, 
t.  VIII,  pi.  1,  fig-.  1). 

lit.  '  8 


Syslèmc 
veineux. 


H  Jx  CIRCULATION    DU    SANG 

divisés  en  ramuscules  d'une  grande  ténuité.  Mais  les  parois 
de  ces  tubes  membraneux  deviennent  d'une  texture  de  plus 
en  plus  lâche  ,  et  le  réseau  capillaire  par  lequel  ils  se  ter- 
minent semble  ne  plus  avoir  de  parois  propres  et  être  limité 
seulement  par  les  brides  du  tissu  connectif  qui  unit  entre  elles 
les  diverses  lames  ou  fibres  constitutives  des  organes ,  et  qui 
se  revêt  d'une  couche  extrêmement  mince  de  tissu  épithélique. 
Ainsi,  -.'ans  le  manteau,  par  exemple,  on  voit  les  canaux  artériels 
se  résoudre  peu  à  peu  en  un  réseau  de  lacunes  vasculiformes, 
et  tous  les  trajets  artériels  constituer  de  la  sorte  un  lacis  de 
canaux  sans  parois  tubulair.es, 

En  introduisant  un  liquide  coloré  dans  les  espaces  étroits  qui 
existent  entre  les  faisceaux  musculaires  du  pied  d'une  Mactre  ou 
d'une  Bucarde,  ou  bien  encore  dans  les  petites  cavilésirrégulières 


rides  transversales  dont  ceux-ci  sont 
garnis. 

Enfin  l'aorte  antérieure  se  termine 
par  plusieurs  petites  branches  dont  les 
unes  pénètrent  dans  le  muscle  adduc- 
teur antérieur,  et  les  autres  se  rami- 
fient dans  les  parties  voisines  du 
manteau. 

L'artère  aorte  postérieure  naît  delà 
partie  inférieure  et  postérieure  du 
ventricule.  Chez  la  Pinne  marine,  elle 
se  trouve  direciement  au-dessous  du 
rectum;  mais,  chez  la  Mactre,  elle  se 
place  un  peu  latéralement  par  rapport 
à  ce  dernier  organe,  et  d'autres  fois, 
chez  la  Pholade,  par  exemple,  elle 
remonte  au-dessus  ;  ce  qui  du  reste 
arrive  toujours  à  une  distance  plus  ou 
moins  considérable  du  cœur.  Il  est 
aussi  à  noter  qu'immédiatement  après 
sa  sortie  de  la  poche  péricardique,  ce 
tronc  présente  un  élargissement  pyri- 
forme  ,  semblable   au  bulbe  qui  se 


voit  à  l'origine  de  l'aorte  antérieure 
chez  d'autres  espèces,  telles  que  la 
Pholade  (a). 

Chez  la  Pinne,  ce  vaisseau  est  grêle 
et  donne  bientôt  naissance  à  l'artère 
du  muscle  adducteur  postérieur  et  à 
l'artère  anale  qui  longe  la  face  infé- 
rieure de  l'intestin  jusqu'à  l'anus; 
puis  il  se  recourbe  en  haut,  et  gagne 
le  bord  dorsal  du  manteau,  où  il  se 
bifurque  pour  donner  à  chaque  lobe 
palléal  une  de  ses  branches.  Enfin, 
chacune  des  artères  palléales  posté- 
rieures ainsi  constituées  fournit  une 
branche  marginale  qui  suit  le  bord 
postérieur  du  manteau,  et  une  branche 
inférieure  qui  descend  derrière  le 
muscle  adducteur  et  se  distribue  dans 
la  plus  grande  partie  du  manteau. 
Chez  la  Mactre,  l'aorte  postérieure  est 
beaucoup  plus  grosse,  et  les  branches 
descendantes  des  deux  artères  pal- 
léales postérieures  contournent  la  base 


(g)  Blanchard,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  1  et  3. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACLTHALES.  115 

qui  entourent  les  viscères,  et  qui  correspondent  par  conséquent 
à  l'espace  périgaslrique  ou  chambre  abdominale  des  Mollus- 
coïdes,  on  voit  que  l'injection  pénètre  également  dans  le  réseau 
capillaire  dont  il  vienl  d'être  question,  soit  directement,  soit  par 
l'intermédiaire  de  canaux  rameux  et  régulièrement  tracés.  On 
voit  aussi  que  ce  même  liquide,  après  avoir  traversé  divers 
canaux  ou  sinus  dont  je  parlerai  avec  plus  de  détail  dans  un 
instant,  pénètre  d'autre  part  dans  un  système  de  vaisseaux  dont 
les  branchies  sont  pourvues,  et  que  ces  vaisseaux,  à  leur  tour, 
après  s'être  divisés  en  une  multitude  de  branches,  continuent 
leur  route  vers  les  oreillettes  du  cœur  en  se  réunissant,  comme 
les  racines  d'un  arbre,  et  débouchent  enfin  dans  ces  réservoirs, 
de  sorte  que  le  cercle  circulatoire  se  trouve  complété  (1). 
D'après  les  résultats  de  cette  expérience  et  d'après  un  grand 


des  siphons  pour  gagner  le  bord  infé- 
rieur du  manteau  ;  chemin  taisant, 
elles  donnent  naissance  à  des  branches 
qui  s'avancent  jusqu'à  l'extrémité  de 
ces  tubes,  et  qui,  chez  les  l'holades, 
offrent  un  très  grand  développement. 
Enfin,  chez  la  Mactre,  ce  sont  les 
branches  terminales  de  l'aorte  posté- 
rieure qui  envoient  leurs  ramuscules 
dans  toute  la  partie  inférieure  du  man- 
teau, tandis  que  chez  les  Pholades 
celte  portion  du  manteau  reçoit  le 
sang  par  l'intermédiaire  des  branches 
de  l'aorte  antérieure. 

Dans  les  Tarets,  où  l'aorte  posté- 
rieure, manque,  les  artères  palléales 
postérieures  naissent  de  l'aor;e  anté- 
rieure, à  peu  de  distance  de  l'artère 
gastrique,  et  leurs  branches  margi- 
nales, qui  sont  extrêmement  longues, 
se  dirigent  directement  en  arrière  en 
passant  au-dessus  du  cœur  (a). 


On  remarquera  peut-être  que  dans 
cette  description  du  mode  de  distribu- 
tion des  artères  chez  les  Lamelli- 
branches, je  ne  renvoie  pas  aux  tra- 
vaux que  M.  Desliayes  a  publiés  sur 
l'anatomie  de  ces  Mollusques,  dans  le 
grand  ouvrage  sur  l'Algérie  publié 
aux  frais  de  l'État.  La  raison  en  est 
que  M.  Deshayes  ne  paraît  avoir  jamais 
disséqué  une  portion  quelconque  de  ce 
système  vasculaire  ;  il  s'est  borné  à 
représenter  des  fragments  de  l'orga- 
nisme dans  diverses  positions,  et  d'or- 
dinaire il  ne  fait  voir  ni  d'où  viennent 
les  branches  artérielles  que  son  peintre 
a  dessinées,  ni  où  elles  vont.  Les  nom- 
breuses figures  qu'il  a  données  ne  me 
semblent  donc  pouvoir  être,  sous  ce 
rapport,  d'aucune  utilité  aux  anato- 
misles. 

(1)  Mes  premières  expériences  à  ce 
sujet  portèrent  sur  la  Pinne  marine,  la 


(a)  Quatrefages ,  Mém.  sur  les  Tarets  (Ann,  des  sciences  nat.,  li 
fig.  1). 


),  3*  série,  t.  XI,  pi. 


116  CIRCULATION    DU   SANG 

nombre  d'auiresfaitsqu'il  serait  trop  long  d'exposer  ici,  je  conclus 
que  chez  ces  Mollusques  la  portion  veineuse  du  système  irriga- 
toire  est  encore  dans  un  état  d'imperfection  analogue  à  celui  que 
nous  avons  déjà  reconnu  chez  les  Tuniciers  et  chez  les  Dentales; 
qu'il  est  constitué  essentiellement  par  les  lacunes  ou  espaces 
que  les  organes  ou  les  éléments  constitutifs  des  organes  laissent 
entre  eux;  que  ces  espaces  tendent  à  se  régulariser  de  plus 
en  plus  sous  la  forme  de  canaux  arborescents  et  que  ces  canaux 
tendent  à  s'endiguer,  pour  ainsi  dire,  par  suite  de  la  consolida- 
tion croissante  du  tissu  connectif  qui  les  entoure  et  du  dévelop- 
pement d'une  membrane  tubulaire  qui  revêt  leurs  parois;  mais 
que  cette  transformation  n'est  jamais  complète,   et  que  les 
vides  interorganiques  de  diverses  parties  du  corps  constituent 
toujours  une  portion  importante  du  système  de  cavités  que  le  sang- 
traverse  pour  retourner  des  branches  terminales  des  artères 
jusqu'aux  organes  de  la  respiration,  qui,  à  leur  tour,  le  ren- 
voient au  cœur.  Je  sais  que  tous  les  physiologistes  ne  partagent 
pas  ma  manière  de  voir  à  cet  égard  :  les  uns  nient  les  faits  dont 
j'arguë,  les  autres  y  donnent  une  interprétation  différente  ;  ce- 
pendant j'ai  la  conviction  que  je  suis  dans  le  vrai  (1).  La  ques- 

Mactre  et  l'Huître  (a);  celles  que  j'ai  des  autres  parties  du  corps,  un  tissu 

faites   ensuite   avec  M.  Valenciennes  conjonctif  qui  ne  laisse  subsister  que 

avaient  pour  objet  les  Bucardes,  les  des  lacunes  très  étroites,  et  qui  res- 

Vënus  et  les  Solens  (6J.  semble  à  une  substance  spongieuse. 

(1)  L'étude  de  cette  question  pré-  Ces  cavités  irrégulières  sont  occu- 

sente  chez  les  Lamellibranches  beau-  pées  par  le  sang,  et  servent  d'intermé- 

coup  plus  de  difficultés  que  chez  la  diaire  entre  les  ramuscules  terminaux 

plupart  des  autres  Mollusques,  parce  des   artères   et   les   canaux  plus  ou 

que  la  chambre  viscérale  n'est  pas  moins  vastes  qui  conduisent  ce  liquide 

libre,  et  qu'il  existe  dans  le  pied,  ainsi  vers  des  réservoirs,  d'où  il  passe  dans 

que  dans  l'épaisseur  du  manteau  et  le  cœur,  soit  directement ,  soit  par 

(a)  Mi'oe  Edwards,  Rapport  sur  des  recherches  faites  en  Sicile  (Moniteur  universel  du  47  no- 
vembre i  844,  et  Observ.  et  expériences  sur  la  circulation  chez  les  Mollusques  (Ann.  des  sciences 
nat.,  4845,  3"  série,  t.  III,  p.  304). 

(b)  Milne  Edwards  et  Valenciennes,.  Nouvelles  observations  sur  la  constitution  de  V appareil  cir- 
culatoire chez-  les  Mollusques  (Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences,  4845,  t.  XX,  p.  750, 
et  Ann.  des  sciences  nat.,  3"  série,  t.  III,  p.  307), 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  117 

tion  me  semble  assez  importante  pour  devoir  être  discutée  à 
fond  dansées  Leçons;  mais,  pour  pouvoir  juger  sainement  de  la 
valeur  des  raisons  alléguées  de  part  et  d'autre,  il  est  nécessaire 


l'intermédiaire  de  l'appareil  rénal  et 
des  appendices  branchiaux.  La  ques- 
tion en  litige  est  donc  celle-ci  :  Faut-il 
considérer  ces  cavités  comme  des 
veines  proprement  dites  qui  se  se- 
raient développées  d'une  manière 
énorme  et  qui  auraient  perdu  en 
même  temps  la  forme  de  tubes  pour 
emprunter  celle  des  lacunes  inter- 
organiques, ou  bien  doit-on  les  regar- 
der comme  étant  formées  essentielle- 
ment par  ces  lacunes  dont  les  parois, 
constituées  à  l'aide  des  organes  ou 
portions  d'organes  circonvoisins  ,  se- 
raient restées  à  nu  ou  se  seraient 
revêtues  d'une  couche  mince  de  tissu 
hyalin  ou  même  épithélique  ? 

M.  Robin  a  adopté  la  première  de 
ces  interprétations ,  et  il  se  fonde 
principalement  sur  l'existence  d'une 
couche  mince  de  tissu  homogène  qui, 
dans  les  branchies  de  l'Anodonte,  ta- 
pisse les  capillaires,  mais  qu'il  recon- 
naît ne  pas  être  isolable  des  parties 
voisines  (a) ,  et  qu'il  appelle  a  une 
sorte  de  vernis  »  (b). 

Les  conclusions  que  M.  Keber  a 
tirées  de  ses  recherches  intéressantes 
sur  la  structure  de  l'appareil  circula- 
toire de  l'Anodonte  sont  également 
en  opposition  avec  ce  que  je  dis  ici 
touchant  la  nature  lacunaire  du  sys- 
tème veineux  des  Lamellibranches  ; 
mais  les  faits  qu'il  a  observés  me 
semblent ,  au  contraire,  venir  à  l'ap- 


pui de  l'opinion  que  je  soutiens.  En 
effet,  chez  l'Anodonte,  il  n'y  a  pas 
de  cavité  viscérale  libre,  et  les  fais- 
ceaux musculaires  du  pied  sont  unis 
à  la  surface  externe  du  tube  alimen- 
taire et  des  glandes  adjacentes  par  un 
tissu  spongieux  de  couleur  jaunâtre, 
qui  se  continue  avec  la  tunique  interne 
des  vaisseaux    tubulaires  ;    un  tissu 
analogue  se  trouve   dans  l'épaisseur 
du  manteau  et  tapisse  toutes  les  ca- 
vités occupées  par  le   sang   veineux. 
M.  Keber  en  conclut  que  ces  cavités 
sont  des   veines   ordinaires   à  parois 
propres  (c).  Mais  elles  ne  me  parais- 
sent pas  avoir  ce  caractère  ,    et  cet 
anatomiste    reconnaît    qu'elles    vont 
déboucher  dans  un  sinus  situé  à  la 
partie   supérieure   de  l'abdomen ,  et 
renferment  les  principaux  centres  ner- 
veux, de  façon  que  les  ganglions  et 
leurs  connectifs  baignent  dans  le  sang 
veineux.  II  a  trouvé  aussi  que  le  ré- 
servoir ainsi  constitué  est  en  continuité 
avec  les  gaines  des  principaux  nerfs. 
Quant  au  tissu  jaunâtre  dont  tout  ce 
système  de  cavités  est  tapissé,  il  est 
extrêmement  mince  et  adhère  intime- 
ment aux  parties   circonvoisines  ,  de 
façon  qu'il  n'affecte  que  rarement  la 
forme  tubulaire.  La  plupart  des  es- 
paces occupés  par  le  sang  veineux  me 
paraissent  donc  être  chez  l'Anodonte, 
comme  chez   les  autres  Mollusques, 
des  lacunes  interorganiques ,  sur  les 


(a)  Robin,  Rapport  sur  le  phlébentérisme,  p.  120  (Mém.  de  la  Soc.  de  biologie,  1851,  t.  III). 
(6)  Loc.cit.,  p.  122. 

(c)  Keber ,  Beitrage  %ur  Anatomie  und  Physiologie  der  Weichthiere.  Kônigsbcrg,  1851,  p.  27 
et  suivantes. 


118  CIRCULATION    DU    SANG 

d'avoir  sous  les  yeux  l'ensemble  des  faits,  et  cet  ensemble  nous 
manque  encore  :  nous  ne  le  posséderons  que  lorsque  nous 
aurons  étudié  le  mode  de  circulation  chez  les  autres  Mol- 
lusques, ainsi  que  chez  les  Insectes  et  chez  les  Crustacés,  et 
par  conséquent  je  renverrai  cette  discussion  à  une  de  nos  pro- 
chaines leçons. 

§  7.  —  Du  reste,  quels  que  soient  les  noms  que  l'on  donne 
aux  réservoirs  et  aux  canaux  par  lesquels  le  sang  veineux  re- 
vient des  artères  vers  le  cœur,  qu'on  les  appelle  des  lacunes  ou 
des  sinus,  on  est  assez  généralement  d'accord  pour  admettre 
que  chez  tous  les  Mollusques  Acéphales  dont  l'étude  nous 
occupe  en  ce  moment,  les  espaces  qui  entourent  les  viscères 
reçoivent  le  sang  veineux  et  le  transmettent,  soit  directement 
aux  oreillettes,  quand  il  n'y  a  pas  d'appareil  spécial  pour  la  res- 
piration ,  comme  cela  a  lieu  chez  les  Brachiopodes,  soit  par 


parois  desquelles  une  couche  de  tissu 
épithélique  s'est  constituée  comme 
dans  l'intérieur  des  gros  troncs  vascu- 
laires,  plutôt  que  des  vaisseaux  propre- 
ment dits,  qui  se  seraient  développés 
de  façon  à  revêtir  tous  les  organes 
et  à  renfermer  dans  leur  intérieur  le 
système  nerveux. 

Quoi  qu'il  en  soit ,  M.  Keber  a 
trouvé  aussi  que,  dans  le  point  où  les 
principaux  canaux  veineux  débou- 
chent dans  le  sinus  situé  vers  le  haut 
de  l'abdomen  ,  près  de  la  base  des 
branchies  ,  il  y  a  un  petit  appareil 
musculaire  disposé  de  façon  à  pouvoir 
empêcher  le  passage  du  sang  et  à  dé- 
terminer la  turgescence  du  pied  et  des 
bords  du  manteau. 

La  structure  de  l'appareil  circula- 
toire de  PAnodonle  a  été  étudiée  aussi 
dans  ces  derniers  temps  par  un  natu- 
raliste autrichien,  M.  Langer.  Cet  au- 
teur a  constaté  beaucoup  de  faits  inté- 


ressants relatifs  à  la  disposition  des 
canaux  veineux  qui  se  ramifient  dans 
les  glandes  de  Lîojanus  avant  de  ver- 
ser le  sang  dans  les  oreillettes  du 
cœur,  et  il  a  trouvé  sur  les  parois  des 
intestins  un  certain  nombre  de  veines 
proprement  dites  qui  se  rendent  au 
sinus  médian;  mais  il  n'a  ajouté  que 
peu  de  choses  aux  observations  de 
M.  Keber  sur  les  autres  parties  du 
système  veineux.  Il  considère,  il  est 
vrai,  la  substance  spongieuse,  dont 
les  interstices  servent  au  passage  du 
sang  veineux,  soit  dans  l'épaisseur  du 
manteau,  soit  dans  le  pied,  comme 
étant  un  tissu  vasculaire  particulier 
auquel  il  applique  ,  comme  l'avait 
déjà  fait  M.  lïohin  ,  le  nom  de  tissu 
é'reclile  ;  mais  la  description  et  les 
figures  qu'il  en  donne  prouvent  que, 
loin  d'être  des  tubes  capillaires  ana- 
stomosés entre  eux,  et  indépendants 
des  parties  voisines,  c'est  un  assem- 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  119 

l'intermédiaire  des  branchies,  lorsque  ces  organes  existent, 
comme  chez  tous  les  Lamellibranches. 

Je  ne  pourrais,  sans  entrer  dans  une  multitude  de  détails 
fatigants  à  suivre,  décrire  ici  la  disposition  de  toutes  les  cavités 
irrégulières  qui  constituent  ainsi  le  système  veineux  de  ces 
Mollusques  ;  mais  il  est  deux  points  sur  lesquels  je  crois  devoir 
insister  avant  de  passer  à  l'examen  des  vaisseaux  branchiaux  :  communication 
le  premier  est  relatif  aux  voies  par  lesquelles  une  portion  du 
fluide  nourricier  retourne  au  cœur  sans  traverser  les  bran- 
chies; le  second  touche  à  la  manière  dont  le  sang  se  distribue 
dans  l'appareil  rénal  en  se  rendant  des  principaux  réservoirs 
veineux  vers  le  système  des  vaisseaux  branchiaux. 

Chez  les  Brachiopodes ,  où  la  respiration  est  cutanée  et 
s'effectue  principalement  à  la  face  interne  du  manteau,  la  plus 
grande  partie  du  sang  traverse  cet  organe,  et,  en  rentrant  dans 


directe 
du  système 

veineux 
avec  le  cœur. 


blage  confus  de  cavités  polymorphes, 
irrégulières ,  comparable  aux  mailles 
du  tissu  conjonctif  ou  cellulaire  des 
Animaux  supérieurs,  et  dont  les  pa- 
rois se  confondent  avec  la  substance 
des  organes  adjacents.  La  plupart  des 
canaux  veineux  que  M.  Langer  a  dé- 
crits ne  ressemblent  guère  davantage 
à  des  vaisseaux  proprement  dits.  Ce 
sont  des  sinus  plus  ou  moins  dendri- 
formes  dans  lesquels  les  lacunes  d'a- 
lentour débouchent  directement  et 
dans  lesquels  on  n'aperçoit  pas  de  pa- 
roi tabulaire  indépendante  du  tissu 
spongieux  sanguilére  qui  se  continue 
dans  Tépaisseurde  tous  les  organes(a). 
Quant  à  la  continuité  d'une  couche 
épilhélique ,  depuis  l'intérieur  des 
vaisseaux  proprement  dits  jusque  sur 
la  paroi  de  toutes  les  petites  cavités 


veineuses  microscopiques  dont  se 
compose  ce  système  intermédiaire , 
je  n'en  vois  aucune  preuve  suffisante, 
et  lors  même  que  tous  ces  méats  se 
tapisseraient  de  la  sorte,  je  n'y  verrai 
pas  moins  les  représentants  des  es- 
paces interorganiques  ordinaires,  car 
nous  savons  que  ces  espaces  acquiè- 
rent un  revêtement  de  ce  genre  par- 
tout où  ils  doivent  servir  à  contenir 
des  liquides  et  à  être  le  siège  de  frot- 
tements :  autour  du  cœur  et  des  pou- 
mons ,  par  exemple. 

Lés  points  en  discussion  ici  ont  été 
discutés  récemment  avec  beaucoup 
de  soin  par  M.  Lacaze,  à  l'occasion  de 
ses  recherches  sur  l'organisation  du 
Dentale  ,  et  cet  analomisle  partage 
complètement  mon  opinion  à  ce  su- 
jet [b). 


(a)  Langer,  Das  Gefâss-System  der  Teichmuschel,  II  Abth.,  p.  2,  pi.  1,  fig.  1  ;  pi,  2,  fig.  16 
(extrait  des  Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1850,  l.  XII). 

(b)  Voyez  Annales  des  sciences  naturelles,  1857,  4e  série,  t.  VII,  p.  14  et  suiv. 


l'20  CIRCULATION    DU    SANG 

les  oreillettes,  s'y  mêle  avec  le  sang  veineux  qui  a  circulé  dans 
les  parties  intérieures  du  corps  et  qui  n'a  pas  reçu  le  contact 
du  fluide  respirable  ;  puis  une  portion  de  ce  mélange  retourne 
aux  organes  par  les  artères,  et  une  autre  portion  passe  de  nou- 
veau dans  le  manteau  pour  se  mettre  encore  une  fois  en  rapport 
avec  l'oxygène  (1). 
conduits  Chez  les  Lamellibranches,  une  grande  partie  du  sang  qui  a 
du'mànieau.  circulé  dans  le  manteau  revient  aussi  d'une  manière  directe 
dans  les  oreillettes  par  des  canaux  particuliers  (2)  ;  mais  ici  le 
manteau  n'est  plus  l'organe  principal  de  la  respiration ,  ce  sont 
les  branchies;  une  portion  du  fluide  nourricier  accomplit  donc 
le  cercle  circulatoire  et  rentre  dans  le  cœur  sans  passer  par  ces 
organes  ;  tandis  que  l'autre  portion,  celle  qui  se  rend  aux  viscères 
et  qui  reste  à  l'étal  de  sang  veineux  chez  les  Brachiopodes,  suit 
une  autre  route  ,  et,  en  passant  par  les  branchies  pour  aller  au 
cceuF,  s'y  artérialise  d'une  manière  complète.  Par  conséquent, 
il  y  a  encore  ici  quelque  chose  de  très  analogue  au  fait  physio- 


(1)  Voyez  ci-dessus,  page  102.  manteau  va  déboucher  dans  le  vais- 

(2)  M.  Garhera  été  le  premier  à  an-  seau  branchio-cardiaque,  dans  le  voi- 
noncer  qu'une  partie  du  sang  veineux  sinage  du  cœur  (6).  Chez  la  Mactre,  je 
rentre  dans  les  oreillettes  sans  avoir  tra-  n'ai  pas  trouvé  d'anastomoses  de  ce 
versé  les  branchies  ,  mais  il  n'indique  genre,  mais  j'ai  vu  un  tronc  veineux 
pas  quelle  est  la  partie  de  l'organisme  qui  vient  directement  de  l'organe  de 
qui  la  fournit  (a),  et  ce  fait,  dont  la  cou-  Bojanus  déboucher  de  la  même  raa- 
naissance  était  nécessaire  pour  arriver  nière  dans  les  canaux  branchio-car  - 
à  des  idées  justes,  touchant  le  mode  diaques,  entre  les  branchies  et  les 
de  circulation  chez  ces  Mollusques,  a  m-eillettes.  Dernièrement ,  M.  Langer 
été  nettement  établi  par  les  injections  a  vu  aussi  que ,  chez  l'Anodonte,  une 
que  j'ai  pratiquées  il  y  a  une  quinzaine  portion  considérable  du  sang  qui  a 
d'années  sur  la  Pinne  marine.  J'ai  fait  circulé  dans  le  manteau  arrive  aux 
voir  que  le  tronc  formé  de  chaque  côté  oreillettes  du  cœur  sans  avoir  traversé 
du  corps  par  les  principales  veines  du  l'appareil  branchial  (c). 


(a)  Garner,  On  ihe  Anatomy  of  Lamellibranchiate  Mollusca  (Trans.  of  the  Zool.  Soc.  ofLondon, 
1841,  vol.  11,  p.  91). 

(6)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  28. 

(c)  Langer,  Das  Gefdss-System  der  Teichmuschel,  Il  Abtheil.,  p!.  1,  fig.  2,  pi.  2  (extrait  des 
Mm.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1856,  t.  XII). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  ï"21 

logique  que  nous  offrent  les  Brachiopodes  ;  si  ce  n'est  que  ce 
résultat  est  obtenu  d'une  manière  inverse.  Le  sang  qui  arrive  au 
cœur  est  toujours  un  mélange  de  sang  qui  a  traversé  l'appareil 
respiratoire  et  de  sang  qui  provient  directement  des  veines  ; 
mais,  dans  cet  ordre,  c'est  le  sang  des  viscères  qui  s'artérialise 
"  complètement  au  lieu  de  rester  veineux,  et  c'est  le  sang  du  man- 
teau qui,  au  lieu  d'être  devenu  essentiellement  artériel,  échappe 
à  l'action  des  instruments  spéciaux  de  la  respiration  (1). 

§  8.  —  Il  est  également  essentiel  de  noter  que  chez  les     Passage 

.  du  sang  dans 

Lamellibranches  la  plus  grande  partie  du  sang  qui  revient  des      î-organe 

,  -,  -  i       t  '    -  i    i  •       i    ~  i  ^e  Bojanus. 

viscères  et  des  autres  parties  de  la  région  abdominale  du  corps 
ne  se  rend  pas  directement  aux  branchies,  mais  traverse  d'abord 
un  organe  sécréteur  qui  paraît  remplir  les  fonctions  d'un  appa- 
reil urinaire.  On  doit  la  connaissance  de  ce  fait  important  à  un 
anatomiste  de  Wilna,  Bojanus  (2),  et  l'on  donne  souvent  le  nom 

(1)  Pour  se  rendre  compte  de  la  ma-  neux  du  manteau  sont  moins  bien  ca- 
nière  dont  le  retour  du  sang  s'effec-  ractérisés  ,  et  le  sang  veineux  passe 
tue,  je  renverrai  à  la  figure  du  système  directement  des  cavités  du  tissu  spon- 
circulatoire  de  la  Pinne  marine  que  gieux  qui  occupe  toute  l'étendue  de  cet 
j'ai  dessinée  pendant  mon  voyage  en  organe  tégumentaire  dans  les  oreil- 
Sicile  (a)  :  on  y  voit  que,  sur  la  partie  lettes  du  cœur  (6). 
postérieure  de  chacun  des  lobes  du  (2)  Bojanus,  dont  j'ai  déjà  eu  l'oc- 
manteau,  les  branches  de  l'artère  pal-  casion  de  citer  le  beau  travail  sur 
léale  sont  accompagnées  d'une  veine  l'anatomie  de  la  Tortue,  pensait  que 
qui,  dans  le  voisinage  du  cœur,  reçoit  l'organe  urinaire  des  Anodontes  était 
une  branche  venant  de  la  portion  anté-  un  poumon,  et  c'est  à  l'appui  de  cette 
rieure  du  manteau,  et  que  le  tronc  singulière  opinion  qu'il  a  fait  connaître 
commun  ainsi  constitué,  après  avoir  le  passage  du  sang  veineux  dans  cette 
côtoyé  pendant  quelque  temps  le  vais-  glande.  Son  Mémoire  sur  la  circula- 
seau  branchio- cardiaque  correspon-  tion  chez  ces  Mollusques  fut  publié 
dant,  y  débouche  tout  près  de  sa  ter-  d'abord  en  allemand  ,  mais  reproduit 
minaison  dans  l'oreillette.  en  français  avec    des   commentaires 

Chez  l'Anodonte,  les  canaux  vei-  par  Blainville  (c). 

(a)  Milne  Edwards,  Recherches  anatomiques  et  jihysiologiques  faites  pendant  un  voyage  en 
Sicile,  t. 1,  pi.  28. 

(6)  Langer,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  8. 

(c)  Bojanus,  Mém.  sur  les  organes  respiratoires  et  circulatoires  des  Coquillages  bivalves  en 
général,  et  spécialement  sur  ceux  de  l'Anodonte  des  cygnes  (Joum.  de  phys.,  de  chim.  et  d'hist. 
nat.,  1819,  p.  108,  pi.). 


122  CIRCULATION    DU    SANG 

de  ce  savant  à  la  glande  dont  je  viens  de  parler  ;  mais  c'est  sur- 
tout par  les  recherches  récentes  d'un  des  anciens  disciples  de 
cette  école ,  de  M.  Xacaze  ,  que  ce  point  de  l'histoire  physio- 
logique des  Mollusques  a  été  bien  fixé. 

M.  Lacaze  a  vu  que  chez  la  Lutraire  le  sang  veineux  venant 
de  la  masse  viscérale  par  les  canaux  ou  les  lacunes  qui  existent 
entre  les  diverses  parties  renfermées  dans  l'abdomen ,  se  rend 
dans  des  canaux  veineux  dont  la  réunion  constitue  un  gros 
vaisseau  impair  placé  entre  les  deux  muscles  postérieurs  du 
pied,  et  appelé  sinus  médian  inférieur.  Cette  cavité  est  sur- 
montée par  l'organe  de  Eojanus  ;  et,  quand  on  l'ouvre,  on  voit 
que  ses  parois  sont  criblées  d'une  multitude  de  pertuis  qui 
débouchent  dans  les  parties  voisines  de  cet  appareil  sécréteur. 
Enfin,  vers  son  extrémité  postérieure,  le  sinus  médian  se  con- 
tinue sous  la  forme  de  quatre  branches  qui  se  contpurnent  vers 
le  haut  pour  aller  se  ramifier  dans  d'autres  portions  de  l'organe 
de  Bôjanus.  Là  tous  ces  canaux  veineux  se  résolvent  en  capil- 
laires qui,  peu  a  peu,  se  réunissent  entre  eux  pour  former,  vers 
la  surface  de  la  glande,  des  canaux  efférents  dont  deux  princi- 
paux, situés  latéralement,  communiquent  d'autre  part  avec  les 
vaisseaux  des  branchies  et  peuvent  être  désignés  sous  le  nom 
de  sinus  branchiaux  (1). 

La  disposition  de  ce  système  de  canaux  est  à  peu  près  la 
même  chez  les  autres  Mollusques  Lamellibranches  (2) ,  et  elle 

(1)  Souvent  on  donne  à  ces  canaux  fausses,  et  je  préfère  le  nom  de  sinus 
le  nom  d'artères  branchiales,  m  y  branchial  employé  par.  M.  Lacaze  (a), 
étendant  l'expression  empruntée  à  (2)  Chez  les  Pectens,  le  résultat  phy- 
ranalomie  humaine  et  employée  pour  siologique  est  le  même,  mais  la  dis- 
désigner les  vaisseaux  qui  portent  le  posilion  des  voies  par  lesquelles  le 
sang  du  cœur  aux  branchies  des  Pois-  sang  arrive  des  viscères  à  l'organe  de 
sons.  Mais  l'emp'oi  de  ces  termes  Bojanus  est  un  peu  différenie  ;  les 
ne  peut   donner    ici    que  des   idées  lacunes  inteilobulaires  du  l'oie  donnent 

(a)  Lacaze,  Mém.  sur  l'organe  de  Bojanus  [Ann.  des  sciences  nat.,  1855,  4°  série,  t.  IV,  pi.  6, 
fig.  2). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  123 

ressemble  d'une  manière  frappante  à  celle  que  nous  aurons 
bicnlôt  à  étudier  dans  la  portion  de  l'appareil  circulatoire  des 
Vertébrés,  et  que  l'on  connaît  sous  le  nom  de  système  de  la 
veine  porte. 

Mais  la  totalité  du  sang  veineux  de  la  masse  viscérale  ne 
traverse  pas  l'organe  de  Bojnnus.  Les  lacunes  veineuses,  situées 
près  des  muscles  abducteurs  des  valves,  donnent  naissance  à  des 
canaux  qui  communiquent  directement  avec  les  sinus  bran- 
chiaux (1). 

Cet  ensemble  de  canaux  veineux  ne  revêt  jamais  d'une  ma- 
nière complète  le  caractère  vasculaire  ,  et  dans  une  portion  plus 


naissance  à  deux  veines  bien  consti- 
tuées qui  gagnent  la  base  de  la  partie 
intérieure  du  pied,  puis  plongent  dans 
la  substance  du  corps  de  Bojanus  et 
s'y  ramifient.  Le  sang  venant  de  la 
portion  postérieure  de  l'abdomen,  où 
se  trouvent  les  organes  génitaux,  est 
recueilli  aussi  par  des  veines  arbores- 
centes qui  le  versent  dans  la  glande  de 
Bojanus  (a). 

Chez  l'Anodonle,  le  sinus  médian, 
dont  MM.  Keber  et  Langer  ont  fait 
connaître  la  disposition  (b) ,  reçoit  le 
sang  de  la  masse  intestinale  par  des 
veines  tabulaires  et  dendriformes  très 
bien  constituées  (c).  C'est  un  réceptacle 
cylindrique  situé  sous  le  péricarde, 
entre  les  deux  corps  de  Bojanus,  aux- 
quels il  envoie  des  branches.  Celles- 
ci  se  ramifient  dans  les  parois  de  ces 
organes  à  la  manière  des  lacis  vascu- 
laires  que  l'on  désigne  communément 


sous  le  nom  de  rete  mirabile ,  et  les 
canaux  efférents  de  ce  système  vont 
déboucher  dans  les  oreillettes  du 
cœur  (d). 

(1)  Cette  communication  directe  des 
cavités  veineuses  d'une  portion  du 
manteau  et  des  muscles  avec  les  sinus 
veineux  des  branchies  est  facile  à 
constater  chez  la  Pinne  marine,  où  je 
l'ai  signalée  en  1845  (e).  Plus  récem- 
ment M.  Lacaze  a  constaté  des  faits  du 
même  ordre  chez  la  plupart  des  Mol- 
lusques lamellibranches,'/'),  et  M.  Lan- 
ger a  très  bien  représenté  ces  com- 
munications entre  les  sinus  branchiaux 
et  les  cavités  lacunaires  dépendantes 
de  ce  qu'il  appelle  le  réseau  érectile 
du  manteau  {g)  ;  mais,  d'après  les 
recherches  de  VI.  Lacaze  ,  il  paraît  y 
avoir  des  variations  assez  grandes 
dans  la  disposition  de  ces  canaux  sui- 
vant les  espèces. 


(a)  Lacaze,  Mém.  sur  l'organe  de  Bojanus  (Ann.  des  sci:nces  nat.,  1855,  t.  IV,  pi.  6,  fig.  1). 

(b)  Vojcz  ci-dessus,  |'age  1t~. 

(c)  Langer,  Uns  Gefâss-System  der  Trichmusch  l,  2"  partie,  pi.  1,  fig.  1. 

(d)  Langer,  loc  iil.;  pi.  I,  fig.  2,  ni  pi.  2,  lig.  7. 
(ej  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sale,  t.  I,  p.  159. 

(f)  Lacaze,  Op.  cit.  {Ann.  des  sciences  nat.,  1855,  t.  IV,  p.  232  et  suiv.), 

(g)  Langer,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  8. 


124 


CIRCULATION    DU    SANG 


imperfection  ou  moins  étendue  de  son  parcours  il  est  constitué  par  les 
dveiSneutme  lacunes  ou  espaces  qui  existent  entre  les  muscles  du  pied  ,  les 
circonvolutions  des  intestins,  les  lobes  du  foie,  ou  qui  entourent 
ces  viscères,  de  sorte  qu'en  poussant  au  hasard  un  liquide  coloré 
dans  une  partie  quelconque  de  la  cavité  abdominale,  on  est 
presque  sûr  de  voir  l'injection  pénétrer  jusque  dans  les  sinus 
qui  conduisent  vers  les  branchies.  Ce  fait  a  été  établi  par  les 
expériences  que  j'ai  publiées  il  y  a  une  dizaine  d'années  ou  que 
j'ai  faites  peu  de  temps  après,  en  commun  avec  M.  Valen- 
ciennes  (1).  Le  même  résultat  ressort  pleinement  aussi  des 
recherches  entreprises  plus  récemment  par  M.  Quatrefages  sur 
les  Tarets  (2),  et  par  M.  Lacaze  sur  un  grand  nombre  des  Acé- 
phales de  nos  côtes  (3).  Quelquefois  même  la  totalité  du  système 


(1)  Voyez  ci-dessus  ,  page  116. 

(2)  Voici  en  quels  termes  M.  Quatre- 
fages s'est  exprimé  à  ce  sujet  :  «  En 
injectant  un  Tarel  par  le  cœur,  on 
voit  les  artères  se  dessiner  nettement,  et 
sur  quelques  unes  de  mes  préparations 
j'ai  injecté  des  ramuscules  qui  avaient 
certainement  1/50  de  millimètre  au 
plus.  Mais  si  l'on  continue  de  pousser, 
quelque  faible  que  soit  la  pression  em- 
ployée, on  voit  bientôt  la  matière  à 
injection  se  répandre  dans  les  inter- 
valles (lacunes)  qui  séparent  les  or- 
ganes. Nulle  part  on  n'aperçoit  rien 
qui  ressemble  à  des  vaisseaux  veineux 
nettement  circonscrits.  Je  n'oserais 
dire  d'une  manière  absolue  qu'il 
n'existe  pas  une  seule  veine  propre- 
ment dite  dans  les  Tarets,  c'est-à-dire 
pas  un  seul  vaisseau  apportant  du 
sang  veineux  des  organes  vers  l'artère 
branchiale.  Toutefois  des  expériences 
très  nombreuses,  faites  en  variant  le 
mode  d'injection  autant  que  possible, 


m'autorisent  jusqu'à  présent  à  penser 
qu'il  en  est  ainsi.  En  injectant  par  le 
cœur,  avec  tous  les  ménagements  pos- 
sibles, j'ai  rempli  toutes  les  lacunes 
de  la  masse  viscérale.  En  injectant 
d'arrière  en  avant  par  l'artère  bran- 
chiale, j'ai  rempli  de  même  toutes  les 
lacunes  de  ces  mêmes  organes.  En  in- 
jectant dans  une  des  lacunes  elles- 
mêmes,  je  remplissais  le  système 
entier  et  j'arrivais  dans  l'artère  bran- 
chiale (a).  » 

(3)  Les  passages  suivants  suffisent 
pour  faire  connaître  les  résultats  ob- 
tenus à. ce  sujet  par  M.  Lacaze  : 

«  Dans  la  Lutraire,  comme  dans 
l'Anodonte,  la  Mulette  des  peintres  et 
beaucoup  d'autres,  on  trouve,  en  in- 
jectant et  poussant  un  liquide  au 
hasard  dans  la  masse  splanchnique, 
un  système  de  lacunes  qui  finit  par  se 
résoudre  en  quelques  veines,  lesquelles, 
par  leur  réunion,  donnent  naissance  à 
quelques  gros  troncs,  dont  la  fusion 


(a)  Quatrefages,  Mém.  sur  les  Tarets  (Ann.  des  sciences  nat.,  1849,  3°  série,  t.  XI,  p.  54). 


CHEZ  LES  MOLLUSQUES  ACÉPHALES.  425 

veineux  ne  semble  être  formée  ainsi  que  par  des  lacunes  irré- 
gulières. Mais,  d'autres  fois,  les  principaux  canaux  efférents, 
soit  aux  branchies,  soit  aux  organes  de  Bojanus,  se  canalisent, 
et  se  revêtent  même  d'une  tunique  tabulaire,  de  façon  à  con- 
stituer de  véritables  vaisseaux.  11  y  a  donc  ici  divers  degrés  de 
perfectionnement  dans  la  constitution  du  système  veineux , 
mais  les  espaces  périgastriques  et  d'autres  lacunes  interorga- 
niques concourent  toujours  à  le  former. 

Cette  portion  veineuse  de  l'appareil  circulatoire  des  Lamelli-  Corai«a,i01' 
branches  paraît  offrir  aussi  parfois,  sinon  toujours ,  une  autre  rextérieiir- 
particularité  remarquable  analogue  à  celle  que  j'ai  déjà  signalée 
chez  les  Dentales,  et  que  l'on  assure  exister  également  chez  les 
Térébratules  (1)  :  savoir,  des  communications  plus  ou  moins 
directes  avec  l'extérieur  par  des  orilices  au  moyen  desquels  ce 
liquide  peut  venir  se  mêler  au  sang,  ou  bien  une  portion  de  celui- 
ci  être  évacuée  au  dehors.  En  effet,  nous  avons  déjà  vu  que  chez 
beaucoup  d'autres  Mollusques  Acéphales  l'espèce  de  caverne  ou 
de  vestibule  logé  dans  chacun  des  corps  de  Bojanus  communique 
non-seulement  avec  l'extérieur  par  des  orifices  situés  sur  le 
trajet  du  courant  branchial  efférent ,  mais  aussi  avec  la  cavité 
du  péricarde  (2).  Or,  M.  Langer  assure  avoir  bien  constaté 
l'existence  d'autres  orifices  qui  de  cette  même  cavité  péricar- 
dique  conduiraient  dans  la  partie  voisine  du  système  vasculaire, 
et  il  pense  que  c'est  à  l'aide  de  l'eau  introduite  par  cette  voie 
dans  la  portion  spongieuse  ou  érectile  de  l'appareil  circulatoire 
que  le  pied  de  ces  Animaux  se  gonfle  quand  cet  organe  est 

produit  bientôt  un  dernier  vaisseau  ramifient  à  la  manière  habituelle  au 

médian,    c'est-à-dire    le  sinus  mé-  milieu  des  lobules  du  foie.  »  {Loc.  cit., 

dian  (a),  p.  288.) 

»  En  poussant  le  liquide  par  les  la-  (1)  Voyez  ci-dessus,  pages  100  et 

cimes  périjécorales,  il  est  facile  d'in-  10Zi. 
jecter  les  vaisseaux  veineux,  qui  se  (2)  Voyez  ci- dessus,  page  110. 

(a)  Lacaze,  Mém.  sur  l'organe  de  Bojanus  (Ann.  des  sciences  nat.,  &'  série,  t.  IV,  p.  283), 


126 


CIRCULATION    DU    SANG 


appelé  à  agir  comme  instrument  de  locomotion.  Quelques 
analomistes  avaient  attribué  ces  phénomènes  de  turgescence  à 
l'action  d'un  système  particulier  de  vaisseaux  aquifères  ;  mais 
j'ai  depuis  longtemps  constaté  que  les  canaux  décrits  sous  ce 
nom  ne  sont  en  réalité  qu'une  portion  du  système  des  lacunes 
veineuses.  Si  les  observations  de  M  Langer  sont  exactes  (et  je 
suis  disposé  à  croire  qu'il  n'a  pu  se  tromper  à  cet  égard),  il  en 
résulterait  donc  que  chez  les  Mollusques  Acéphales  l'appareil 
irrigatoire  ne  serait  pas  fermé  et  communiquerait  directement 
avec  le  milieu  ambiant,  ainsi  que  cela  a  lieu  chez  la  plupart 
des  Zoophytes ,  où  cet  appareil  ne  se  compose  que  d'instru- 
ments d'emprunt  (1). 


(1)  On  sait  depuis  longtemps  que  la 
plupart  des  Mollusques  Acéphales  ont 
la  faculté  de  gonfler  très  rapidement 
leur  pied,  et,  lorsqu'on  comprime  cet 
organe  pendant  qu'il  est  dans  cet  état 
de  turgescence,  on  voit  souvent  s'é- 
chapper de  sa  surface  des  gouttelettes 
ou  même  des  petits  jets  de  liquide. 
M.  Délie  Chiaje  a  attribué  ce  phéno- 
mène à  l'existence  d'un  système  de 
vaisseaux  aquifères  analogues  à  ceux 
dont  il  croyait  avoir  constaté  la  pré- 
sence chez  les  Mollusques  supérieurs; 
mais  il  ne  donna  aucune  description 
anatomique  de  ces  canaux  (a).  Vers  la 
même  époque,  M.  Baer  remarqua  sur 
le  pied  des  Anodonles  et  des  Mou- 
lettes  des  pores  qui  paraissaient  servir 
à  l'entrée  de  l'eau  dans  les  cavités 


dont  le  pied  est  creusé  (6).  M.  Délie 
Chiaje  a  représenté  aussi  plus  récem- 
ment une  série  de  petits  pores  à  l'ex- 
trémité de  cet  organe  chez  le  Solen 
siliqua  et  le  Solecurtus  strigula- 
tus  (c).  Gainer  a  observé  aussi  un 
orifice  analogue  chez  les  Psammobies 
et  les  Bucardes  (d).  Enfin  M.  Siebold 
considère  comme  des  vaisseaux  aqui- 
fères en  communication  avec  ces  ori- 
fices certains  canaux  sous  -  cutanés 
qu'il  a  insufflés  chez  la  Pinna  nobi- 
lis  (e),  et  une  cavité  dont  Treviranus 
avait  mentionné  l'existence  dans  le 
pied  du  Solen  ensis  (/").  Les  recher- 
ches que  je  fis  sur  le  système  cir- 
culatoire des  Mollusques,  en  1844, 
me  parurent  décisives  pour  établir 
que  les  canaux  dits  aquifères  de  ces 


(a)  Délie  Chiaje,  Descrizione  di  un  nuovo  apparato  di  canali  acquasi  scoperto  negli  Ànimali 
invertebrali  [Mem.  sulla  sloria  e  nolom.  degli  Anim.  senza  verteb.,  t.  II,  p.  208). 

(6)  Baer,  Bemerk.  ùber  die  Enlwickel.  der  Muscheln  und  ùber  ein  System  von  Wassergefiïssen 
in  diesen  Thieren  (Froriep's  Notizen,  1827,  t.  XIII,  p.  5). 

(c)  Délie  Cliiaje,  Descriz.  e  nolom.  degli  Anim.  inverleb.,  t.  III,  p.  60,  pi.  90,  fig.  1  et  2. 

(d)  Garner,  On  ihe  Anat.  of  the  Lamellibranchiate  Conchifera  (Trans.  of  the  Zool.  Soc.  t.  II, 
p.  100,  pi.  48,  fig.  2  et  3). 

(e)  Sielold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anat.  comp.,  1. 1,  p.  277. 

(/)  Treviranus,  Die  Erscheinungen  und  Cesetze  des  Orgcmischen  Lebens,  1831,  t.  I,  p.  276. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    ACÉPHALES.  127 

Les  sinus  veineux  des  branchies,  clans  lesquels  le  sang  de  la 
région  abdominale  arrive  après  avoir  traversé  les  glandes  de 
Bojanus,  sont  situés  parallèlement  de  chaque  côté  du  corps 
et  longent  la  base  de  l'appareil  respiratoire.  Ils  offrent  en 
général  la  structure  de  vaisseaux  proprement  dits,  et  envoient 
à  chacun  des  replis  verticaux  des  branchies  un  canal  afférent 
qui  y  porte  le  sang  destiné  à  subir  l'influence  de  la  respi- 
ration (1).  Des  ramuscules  qui  se  détachent  à  angles  droits 
de  ces  vaisseaux  veineux  vont  s'anastomoser  avec  d'autres  tubes 
capillaires  dirigés  en  sens  inverse,  c'est-à-dire  du  bord  libre 
vers  le  bord  adhérent  ou  base  de  la  branchie,  et  là  ces  canaux 
afférents  ou  vaisseaux  branchio-cardiaques  s'ouvrent  à  leur 
tour  dans  un  grand   vaisseau  placé  parallèlement  au  sinus 


Vaisseaux 
branchiaux. 


Animaux  ne  sont  en  réalité  qu'une 
portion  du  système  veineux  général; 
et  depuis  lors  ce  résultat  a  été  dé- 
montré de  nouveau  par  les  expériences 
de  M.  AgasMz  sur  les  .Maetres,  et  les 
recherches  récentes  de  M.  Langer  sur 
les  Anodontes.  Mais  M.  Agassiz  a  vu 
sur  les  côlés  du  pied  des  ftjaclres  une 
rangée  de  pores  qui  lui  ont  paru  s'ou- 
vrir dans  ces  cavités,  et  non-seule- 
ment livrer  passage  à  l'eau  que 
l'animal  introduit  dans  cet  organe  de 
locomotion,  mais  aussi  laisser  échap- 
per cette  eau  mêlée  de  sang,  quand  le 
pied  se  contracte  avec  violence  (a). 
M.  Langer  pense  que  ces  orilices 
étaient  accidentels  et  le  résultat  de 
ruptures  (6);  mais  si  ses  observations 
relatives  à  la  communication  du  sys- 
tème circulatoire  avec  l'extérieur,  par 
l'intermédiaire  du  péricarde  et  de  la 
cavité  de  l'organe  de  Bojanus ,  chez 
l'Anodonle ,  sont  exactes,  il  n'y  aurait 


rien  d'improbable  dans  l'existence  d'o- 
rilices  analogues  dans  d'autres  parties 
du  corps.  A  l'époque  où  je  taisais  mes 
recherches  sur  la  circulation  des  Mol- 
lusques, j'ai  été  souvent  trappe  delà 
rapidité  avec  laquelle  le  liquide  aqueux 
accumulé  dans  le  pied  des  Phoiades 
s'en  échappe  ;  mais  il  me  semblait  que 
c'était  un  phénomène  de  transsudalion 
dû  au  relâchement  des  tissus,  et  ana- 
logue à  ce  que  l'on  obtient  sur  le  ca- 
davre humain  dans  des  expériences 
d'hydrotomie  suivant  le  procédé  de 
Lacauchie ,  plutôt  qu'une  évacuation 
localisée  et  s'etlectuantpar  des  ouver- 
tures particulières.  Nous  aurons  bien- 
tôt à  revenir  sur  ce  sujet  à  l'occasion 
du  prétendu  système  aquifère  des 
Gastéropodes. 

(t)  Ce  système  de  vaisseaux  affé- 
rents de  l'appareil  respiratoire  atteint 
son  plus  haut  degré  de  développement 
chez  les  espèces  où  les  deux  feuillets 


(a)  Agassiz,  Ueber  das  Wassergefàsssystem  der  Mollusken  (Zeitschr.  fur  wissenschaft.  Zool  von 
Siebolu  und  Kôliiker,  1856,  t.  VII,  p.  17G). 

(6)  Langer,  Das  Gefàss-System  der  Teichmuschel,  2  Ablh.,  p.  19  et  suiv. 


128  CIRCULATION    DU   SANG 

veineux  de  la  branchie  de  chaque  côté  du  corps,  et  communi- 
quant par  sa  face  interne  avec  l'oreillette  correspondante. 

Ainsi  se  trouve  complété  le  cercle  circulatoire.  En  effet,  le 
sang,  poussé  par  les  contractions  des  ventricules  du  cœur,  pé- 


de  chaque  branchie  sont  écartés  entre 
eux  pour  fournir  à  l'appareil  repro- 
ducteur des  chambres  incubatrices , 
comme  cela  se  voit  chez  les  Ano- 
dontes ,  les  Pinries  ,  etc. 

Chez  ces  derniers ,  chacune  des 
quatre  branchies  est  pourvue  d'un 
grand  vaisseau  longitudinal  qui  occupe 
le  bord  correspondant  de  la  face  supé- 
rieure ou  basilairede  l'appareil,  et  qui 
donne  naissance  non -seulement  aux 
veines  branchiales  descendantes  qui  se 
ramifient  pour  constituer  le  réseau 
respiratoire,  mais  à  un  égal  nombre  de 
branches  transversales  qui  longent  le 
bord  des  cloisons  interlocutoires  et  vont 
s'anastomoser  avec  leurs  congénères 
provenant  de  la  branche  voisine,  ou 
bien  débouchent  dans  un  sinus  veineux 
prébranchial  qui,  dans  toute  la  moitié 
postérieure  de  l'appareil  respiratoire, 
marche  entre  les  deux  grands  canaux 
veineux  disposés  ainsi  de  chaque  côlé 
du  corps  et  recouvre  le  vaisseau  effé- 
rent  ou  canal  branchio-cardiaque  (a). 

Chez  les  Anodonles,  la  disposition 
de  ces  vaisseaux  est  un  peu  différente 
et  se  complique  davantage.  Les  troncs 
veineux  qui  sortent  du  corps  de  Boja- 
nus  forment  de  chaque  colé  un  tronc 
longitudinal  qui  suit  le  bord  supérieur 
de  la  ligne  de  soudure  des  feuillets 
adjacents  des  deux  branchies  entre 
elles ,  et  donne  naissance  à  une  série 
de  branches  descendantes  comparables 
à   des  dents  de  peigne  ;  celles-ci  se 


dirigent  vers  le  bord  inférieur  de  la 
branchie  et  fournissent ,  chemin  fai- 
sant ,  une  foule  de  ramuscules  qui 
s'en  détachent  à  angles  droits  et  s'ana- 
stomosent entre  eux  par  des  capil- 
laires verticaux,  de  façon  à  constituer 
un  treillis  vasculaire  à  la  face  interne 
des  loges  ménagées  entre  les  deux 
feuillets  de  chaque  branchie.  Un  autre 
vaisseau  longitudinal  situé  au-dessous 
du  précédent  reçoit  des  branches  qui 
naissent  d'un  réseau  superficiel  étendu 
sur  les  surfaces  adjacentes  des  deux 
branchies  (par  conséquent,  la  face 
externe  de  la  branchie  interne  et  la 
face  interne  de  la  branchie  externe  ). 
Ce  tronc  longitudinal  profond  est  un 
vaisseau  efférent  ou  branchio  -  car- 
diaque et  se  déverse  dans  l'oreillette 
correspondante  du  cœur.  Un  autre 
tronc  efférent,  dont  les  branches  pec- 
tiniformes  sont  disposées  de  la  même 
manière  à  la  surface  du  feuillet  inté- 
rieur de  la  branchie  interne,  longe  le 
bord  supérieur  de  celui-ci  et  va  dé- 
boucher dans  la  partie  antérieure  de 
l'oreillette  correspondante.  Enfin  un 
troisième  vaisseau  efférent  reçoit  les 
branches  ascendantes  du  réseau  su- 
perficiel du  feuillet  externe  de  la  bran- 
chie externe  et  longe  la  ligne  d'attache 
de  cette  branchie  au  manteau.  Il 
communique  librement  avec  le  réseau 
veineux  du  manteau  ,  ainsi  qu'avec 
l'oreillette.  Cette  partie  de  l'apparei' 
circulatoire  ,  dont  une  portion  seule- 


fa)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  1. 1,  pi.  28, 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  129 

notre  dans  les  artères  et  se  distribue  à  toutes  les  parties  du 
corps,  puis  passe  dans  le  réseau  lacunaire  général,  d'où  il  re- 
vient, par  les  méats  ou  canaux  interorganiques  plus  larges,  vers 
le  cœur,  en  suivant  à  la  fois  trois  routes  principales.  La  plus 
grande  partie  est  versée  par  des  sinus  ou  par  des  veines  dans 
le  réseau  capillaire  de  l'appareil  urinaire,  pour  aller  de  là  aux 
branchies  ;  une  seconde  portion  se  rend  directement  aux  organes 
respiratoires,  et,  de  même  que  la  portion  précédente,  traverse 
les  réseaux  capillaires  de  cet  appareil  qui  le  déversent  à  leur  tour 
dans  les  canaux branclno-cardiaques ;  enfin,  la  troisième  por- 
tion du  sang  veineux,  après  avoir  passé  dans  le  manteau,  arrive 
également  dans  les  vaisseaux  branchio-eardiaques,  et  s'y  mêle 
au  sang  artériel  qui  vient  des  branchies ,  puis  le  tout  entre  dans 
l'oreillette  correspondante  qui  le  rend  au  ventricule,  d'où  nous 
l'avions  vu  partir. 

§9.  —  Dans  la  classe  des  Gastéropodes,  le  mode  de  con-      ciasse 
stitution  de  l'appareil  circulatoire  est,  au  fond,  le  même  que  Gastéropodes 
chez  les  Acéphales,  mais  revêt  le  plus  souvent  des  caractères 
secondaires  un  peu  différents  (1).  Ainsi,  nous  n'y  trouvons 

ment  avait  été  vue  par  Bojanus  et  par  d'Éolidiens  ,  on  n'a  pu  jusqu'ici  aper- 

M.  Robin  (a),  a  été  étudiée  derniè-  ce  voir  aucune  trace  de  l'existence  d'un 

rement  avec  beaucoup  de  soin  par  cœur ,  et  chez  les  larves  des  Gastéro- 

M.  Langer  (6).  podes,  en  général,  cet  organe  n'appa- 

Chez  les  Tarets ,  au  contraire ,  le  raît  qu'assez  tard.  11  serait  donc  pos- 
système  des  canaux  afférents  est  fort  sible  qu'il  y  eût  clans  cette  classe  une 
simplifié,  et  consiste  en  deux  sinus  qui  dégradation  plus  grande  de  l'appareil 
longent  les  côtés  de  l'abdomen,  puis,  circulatoire,  qu'on  ne  l'admet  généra- 
plus  en  arrière ,  se  réunissent  entre  lement  ;  mais,  d'après  l'ensemble  des 
eux  pour  constituer  un  vaisseau  bran-  faits  connus  aujourd'hui,  il  me  paraît 
chial  impair  et  médian  (c).  peu  probable  que  le  cœur  puisse  uian- 

(1)   Dans  quelques  petites  espèces  quer  complètement  chez  aucun  Gasté- 

(a)  Bojanus,  Op.  cit.  (Isis,  1819,  et  Journal  de  plujsique,  1  819,  p.  116,  Gg.  3  et  i). 

■ —  Robin,  Rapport  sur  le  phlébentérisme,  p.  120  {Mémoires  de  la  Société  de  biologie,  1851, 

t.  ni). 

(6)  Langer,  Das  Gefàss-System  der  Teichmuschel,  1 1  Abth.,  p.  10  et  suiv.,  pi.  1,  fig.  2  ;  pi.  2, 
fig.  7  à  11  (extr.  des  Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  XII). 
—  Voyez  Carus,  Icônes  zootomieœ,  pi.  19,  fig.  6. 
(c)  Quatrefages,  Op.  cit.  {Ann.  des  sciences  nat.,  3'  série,  t.  XI,  pi.  2). 

m.  y 


130  CIRCULATION    DU    SANG 

aucun  exemple  de  cette  dispersion  des  forces  motrices  qui 
existe  chez  les  Acéphales  inférieurs ,  où  deux  cœurs  sem- 
blables en  tout  entre  eux ,  mais  situés  sur  les  côtés  du  corps , 
concourent  à  pousser  le  sang  dans  un  même  système  d'artères. 
cœur.  Ici  le  cœur  est  toujours  centralisé  et  ne  présente  qu'un  ventri- 
cule unique  qui ,  d'ailleurs  ,  n'est  presque  jamais  traversé  par 
l'intestin  ou  par  aucun  autre  organe.  Quant  aux  oreillettes,  nous 
retrouverons  les  mêmes  modifications  que  dans  la  classe  pré- 
cédente ;  seulement  la  disjonction  et  la  duplicité,  qui  étaient  le 
cas  le  plus  ordinaire  chez  les  Acéphales,  ne  se  présenteront  (pie 
rarement  à  notre  observation  chez  les  Gastéropodes ,  et  la 
fusion  de  ces  organes  en  une  oreillette  unique  sera  le  cas  le 
plus  ordinaire. 

ropode  adulte.   Quoi  qu'il  en  soit ,  pode,  le  cœur  est  facile  à  reconnaître 

parmi  les  espèces  chez  lesquelles  la  et  ne  présente  aucun  indice  de  dégra- 

recherche  en  a  été  jusqu'ici  infruc-  dation  (c). 

tueuse  ,  je  citerai  les  Amphorines  et  II  est  aussi  à  noter  que  chez  les 

les    Zéphirines    de    M.    de    Quatre-  Limnopontia  de Johnston  (ou  Chalais, 

fages  (a) ,  ainsi  que  le  Rhoclope  Ve-  de  Quatrefages),  qui  paraissent  ne  dif- 

ranii    décrit   par    M.    Kôlliker  (b).  férer  que  très  peu  des  précédents,  le 

Quant  aux  petits  Mollusques  appelés  cœur  est  conformé   comme    d'ordi- 

Actéonies ,  chez  lesquels  le  cœur  a  naire  (cl). 

échappé   aux  recherches   de   M.   de  Le  Sagitta  bipunctata,  que  la  plu- 

Quatrefages,  je  considère  la  question  part  des  zoologistes  rangent  dans  l'oi'- 

comme  résolue  par  les  observations  dre  des  Mollusques  Gastéropodes,  mais 

de  Souleyet  sur  un  genre  très  voisin  que  d'autres  considèrent  comme  étant 

nommé  Âctèon  par  Oken  et  Èlysie  un  Annélide,  paraît  être  dépourvu  de 

par  Risso.  Chez  ce  dernier  Gastéro-  tout  organe  comparable  ù  un  cœur  (c)s 

(a)  Quatrefages,  Mëm.  sut'  les  Gastéropodes  phlëbentcrés  (Ann.  des  sciences  nat. >  i  844,  2"  série, 
t.  I,  p.  136,  150,  167,  etc.). 

(b)  Kôlliker,  Rhopode,  nuove  gênera  di  Gasleropodi  (Giornale  deW  Inslilitto  LOmbardO,  1847, 
t.  XVI). 

(c)  Allmann,  On  the  Anatomy  of  Actiuon  (Ann.  of  Nat.  llisl.,  1845,  vol.  XVI;  p.  148). 

—  Souleyet,  Voyage  de  la  Bonite  (Ihst.  nat.,  t.  II,  p.  485,  pi.  24  D,  fig'.  4). 

—  Idem,  Mèm.surle  genre  Actèon  (Journal  de  conchyliologie,  1850,  t.  I,  p.  5). 

(d)  AMer  et  Hancock,  On  a  Proposed  New  Order  of  Gastcropodous  Mollusca  (Ann.  of  Ndt.  UiSl., 
2'  série,  vol.  I,  p.  413,  pi.  20,  fig.  7). 

(e)  Darwin,  Observ.sur  la  structure  et  sur  la  reproduction  du  genre  Sagitta  (Ann.  des  sciences 
nat.,  1844,  3"  série,  t.  I,  p.  362). 

—  Krohn,  Anat.  Beobacht.  iiber  die  Sagitta  bipuilclata,  p.  8,  et  Observations  analomiques  el 
physiologiques  sur -le  Sagitta  (Anm  des  sciences  nat.,  1845,  3«  série;  l.  III,  p.  108). 


CHEZ    LES    MOLLI SOLES    GASTÉROPODES.  131 

De  même  que  chez  les  Acéphales,  le  cœur  des  Gastéropodes 
est  placé  dans  la  région  dorsale  de  l'abdomen,  mais  il  n'occupe 
que  très  rarement  la  ligne  médiane  du  corps  et  se  trouve  d'or- 
dinaire rejeté  obliquement  vers  le  côté,  soit  à  droite ,  soit  à 
gauche  ,  suivant  la  position  des  branchies.  Le  ventricule  a  des 
parois  charnues  d'une  épaisseur  assez  grande  et  bat  avec  rapi- 
dité (1  j.  Les  ouvertures  qu'il  présente  sont  toutes  garnies  de 
valvules  ,  de  façon  que  le  sang  ne  peut  en  sortir  que  pour  aller 
dans  l'aorte  et  ne  saurait  y  rentrer  par  la  même  voie.  Enfin  le 
péricarde  est  en  général  complètement  fermé ,  mais  ici  encore 
sa  cavité  communique  parfois  avec  une  poche  membraneuse 
qui  me  parait  correspondre  à  la  cavité  dont  l'orga'ne  de  Bojanus 
est  creusé  chez  les  Lamellibranches  (2). 

§  10.  —  C'est  chez  les  Ormiers  ou  Haliotides  que  la  confor-  système  artériel 
mation  du  cœur  des  Gastéropodes  se  rapproche  le  plus  de  ce  HailoUdes. 
qui  existe  d'ordinaire  chez  les  Acéphales.  Effectivement,  chez 
ces  Gastéropodes  on  trouve  deux  oreillettes  placées  symétrique- 
ment sur  les  côtés  du  ventricule  ,  et  celui-ci  embrasse  le  rec- 
tum (3).  Il  est  situé  un  peu  à  gauche,  au-dessus  du  fond  de  la 
chambre  respiratoire  ,  près  de  la  base  des  deux  branchies  que 


(1)  M.  Troschel  a  compté  de  30  à  que  le  péricarde  est  ouvert  de  la  sorte, 
ZiO  battements  du  cœur  par  minute  et  nous  reviendrons  bientôt  sur  l'in- 
chez  les  Limnées  (a).  terprétation  qu'il  convient  de  donner 

Binny  évalue  le  nombre  de  ces  pul-  à  ce  fait, 
salions  à  environ  55  chez  les  Coli-  (3)  Cette  disposition  a  été  constatée 

maçons  lorsque  le  temps  est  chaud,  et  par  Cuvier  (b)  ;  mais  tout  ce  qui  suit 

y  a  remarqué  une  diminution  quand  est  tiré  de  mon  travail  sur  la    cir- 

il  irritait  l'animal  (b).  culation    du    sang  chez  les  Mollus- 

(2)  C'est  principalement  dans  la  fa-  ques  (d). 
mille  des  Doris  et  chez  les  Iléléropodes 

(a)  Troschel,  De  Llmnaceis  «w  Gasleropodis  pulmonalis  quoi  noslris  in  aquis  vivunl,  Disseil. 
inaug'.  Berol.,  1834,  p.  18. 

(6)  Amos  Binny,  The  terreslrial  Air  Breathing  Mollusks  of  the  United  States,  vol.  I,  p.  238. 

(c)  Cuvier,  Mém.  sur  l'Haliotide,  ou  Oreille  de  mer  {Mém.  sur  les  Mollusques). 

(d)  Milne  Edwards,  Mém.  sur  la  dégradation  des  organes  de  la  circulation  chez  les  Patelles 
et  les  Haliotides  (Voyage  en  Sicile ,  t.  I ,  p.  1(53,  pi.  26  et  27,  et  Ami,  des  sciences  nat.,  1847, 
3«  série,  t.  VIII,  p.  37). 


lo2  CIRCULATION    DU    SANG 

nous  avons  vues  garnir  la  voûte  de  cette  cavité  (1  ) .  Un  tronc  arté- 
riel principal  naît  de  ce  ventricule  et  correspond  à  l'aorte  anté- 
rieure des  Lamellibranches;  mais  il  se  dirige  d'abord  en  arrière 
vers  la  paroi  postérieure  et  inférieure  du  péricarde.  Presque 
aussitôt  son  passage  en  dehors  de  cette  poche ,  il  se  recourbe 
en  avant  et  fournit  une  grosse  artère  viscérale  qui  envoie  ses 
branches  aux  divers  organes  contenus  dans  l'abdomen  (2). 
L'aorte  donne  ensuite  au  manteau,  à  l'estomac  et  aux  parties 
voisines  divers  rameaux  d'une  moindre  importance,  mais  ne 
change  pas  notablement  de  diamètre  jusqu'à  son  arrivée  au- 
dessus  de  la  masse  charnue  de  la  bouche.  Jusque-là  ses  parois 
membraneuses  sont  bien  constituées ,  sa  forme  est  cylindrique 
comme  d'ordinaire,  et  sa  structure  ne  diffère  en  rien  de  celle 
de  tout  autre  vaisseau  sanguin  bien  conformé  ;  mais  dès  son 
passage  à  travers  une  cloison  qui  sépare  la  cavité  abdominale 
de  la  région  céphalique  du  corps,  elle  change  complètement  de 
caractère  ;  ses  parois  se  confondent  avec  la  couche  membra- 
niforme  dont  est  tapissée  la  grande  cavité  qui  occupe  la  portion 
postérieure  de  cette  région  et  qui  loge  le  pharynx,  les  muscles 
de  la  langue  et  même  le  cerveau.  Le  sang  artériel  se  répand 
donc  dans  cette  cavité  ,  baigne  tous  ces  organes,  pénètre  dans 
les  lacunes  qu'ils  laissent  entre  eux,  et  s'avance,  entre  les  parois 
delà  bouche  et  celles  de  la  chambre  péristomienne,  jusque  dans 
les  lèvres. 

(1)  Voyez  tome  U,  page  64.  lobes,  et  donne  naissance  à  de  nom- 
Ci)  L'aorte  postérieure  des  Lamelli-  breux  rameaux  («).  Ainsi  les  princi- 
branches  me  paraît  être  représentée  pales  différences  entre  la  disposition 
par  un  vaisseau  grêle  cpii  se  dirige  en  du  cœur  et  des  gros  vaisseaux  chez 
avant,  donne  des  branches  au  rectum,  les  Haliotides  comparées  aux  Lamelli- 
et  s'avance  dans  l'épaisseur  du  man-  branches  semblent  dépendre  du  ren- 
teau  jusqu'à  la  fente  interbranchiale  versement  de  la  portion  postérieure 
qui  sépare  cet  organe  en  deux  lobes.  du  tube  intestinal  et  du  cœur  en  avant 
Là  cette  artère  palléale  se  bifurque  et  au-dessus  de  la  portion  antérieure 
pour  longer  les  bords  de  ces  deux  du  dos. 

(a)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  pi.  26,  fig1.  i. 


CHEZ   LES   MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  133 

Dans  la  tête  de  l'Haliotide ,  le  tronc  aortique  se  trouve  donc 
remplacé  par  les  méats  interorganiques  qui  entourent  l'extré- 
mité antérieure  du  tube  digestif  et  qui  deviennent  ainsi  un 
réservoir  sanguin  (1).  Mais  si  le  système  artériel  emprunte  de 
la  sorte  à  l'appareil  de  la  digestion  des  cavités  pour  le  passage 
du  sang,  il  fournit  à  son  tour  un  lieu  de  refuge  à  une  partie  des 
organes  dont  cet  appareil  se  compose.  En  effet,  si  l'on  ouvre 
longitudinalement  la  portion  antérieure  du  tronc  aortique,  on 
voit  que  ce  vaisseau  sert  de  gaine  à  la  base  de  la  langue  lorsque 
celle-ci  se  rétracte.  Je  reviendrai  plus  tard  sur  cette  disposition, 
quand  je  ferai  connaître  le  mode  d'organisation  de  l'appareil 
buccal  des  Mollusques  ;  mais  j'insiste  dès  aujourd'hui  sur  ce 
fait  anatomique ,  car  il  nous  fournit  un  nouvel  exemple  de  la 
tendance  de  la  Nature  à  satisfaire  aux  besoins  nouveaux  des 
organismes  en  voie  de  perfectionnement  à  l'aide  d'emprunts 
avant  que  d'avoir  recours  à  des  créations  spéciales. 

C'est  par  l'intermédiaire  du  grand  sinus  céphalique  que  le 
sang  artériel  parvient  de  l'aorte  dans  le  canal  sanguin,  qui  se 
dirige  d'avant  en  arrière  dans  l'épaisseur  du  pied  charnu  de 
l'Haliotide,  et  qui  représente  l'artère  pédieuse  des  Lamellibran- 
ches, mais  qui  n'a  pour  parois  qu'un  tissu  membraniforme  très 
mince ,  et  qui,  dans  la  plupart  de  ses  divisions,  mérite  à  peine 
le  nom  de  vaisseau  proprement  dit. 

Lorsqu'en  poussant  un  liquide  coloré  dans  le  cœur  d'une 
Haliotide  vivante ,  je  vis  pour  la  première  fois  l'injection  rem- 
plir le  tronc  aortique,  ses  branches,  et  jusqu'à  des  capillaires 
d'une  grande  délicatesse  dont  les  parois  de  l'estomac ,  des 
intestins  et  du  manteau  sont  pourvues,  puis  se  répandre  tout 
à  coup  dans  toutes  les  lacunes  interorganiques  dont  le  cerveau 
et  le  pharynx  sont  entourés ,  je  pensai  que  quelque  rupture  de 

(1)  Voyez  les  figures  2,  pi.  26,  et  1,  rèil  circulatoire,  des  Haliotides,  cité 
pi.  27,  de  mon  Mémoire  sur  l'appa-      ci-dessus. 


13/i  CIRCULATION    PU    SANG 

vaisseau  avait  déterminé  un  épanchement  accidentel.  Mais  en 
renouvelant  mes  injections  avec  les  précautions  nécessaires 
pour  éviter  toute  déchirure  des  parois  vasculaires ,  j'arrivai 
toujours  au   même  résultat   :   toujours  le  liquide  coloré  se 
répandait  dans  les  espaces  irréguliers  dont  je  viens  de  parler 
et  allait  baigner  les  muscles  du  pharynx ,  le  cerveau  et  les 
parties  voisines,  et,  en  faisant  alors  une  autre  expérience,  je 
vis  que  ce  singulier  phénomène  ne  dépendait  d'aucun  accident, 
mais  représentait  au  contraire  ce  qui  doit  avoir  lieu  dans  la  cir- 
culation normale  du  sang  artériel  de  ce  Mollusque.  Effective- 
ment, en  poussant  l'injection  au  hasard  dans  une  des  lacunes 
situées  autour  de  l'arrière-bouche,  je  vis  avec  non  moins  de 
régularité  le  liquide  coloré  continuer,  d'une  part,  sa  route  ordi- 
naire pour  remplir  les  canaux  artériels  du  pied,  et  remonter, 
d'autre  part,  dans  l'aorte  jusqu'au  cœur,  ainsi  que  dans  les 
branches  latérales  de  ce  grand  vaisseau  sanguin.  Or,  un  résultat 
semblable  ne  saurait  s'expliquer  par  l'hypothèse  d'une  déchirure 
des  parois  des  méats  dans  lesquels  l'injection  était  introduite, 
et  d'ailleurs  le  fait  de  la  présence  de  l'appareil  lingual  dans  la 
cavité  du  tronc  aortique,  dont  j'ai  déjà  fait  mention,  ne  pouvait 
laisser  aucun  doute  touchant  l'existence  d'une  communication 
normale  et  libre  entre  la  portion  vasculaire  et  la  portion  lacu- 
naire du  système  de  cavités  ainsi  injectées.  J'en  conclus  donc 
que  dans  la  région  céphalique  du  corps,  qui  n'existait  pas  chez 
les  Mollusques  inférieurs  et  qui  commence  à  se  développer 
chez  les  Haliotides,  le  système  artériel  est  dans  un  état  d'imper- 
fection comparable  à  celui  que  le  système  veineux  nous  a  offert 
chez  les  Acéphales  et  que  le  système  irrigaloire  presque  tout 
entier  nous  présente  chez  les  Tuniciens  ;  qu'il  ne  s'est  pas 
encore  constitué  sous  la  forme  de  vaisseaux  ou  tubes  membra- 
neux, et  que  c'est  par  l'intermédiaire  des  lacunes  ou  espaces 
interorganiques  que  la  distribution  du  sang  s'effectue. 

ïl  parait  que  quelques  anatomistes  préfèrent  expliquer  autre- 


CHEZ    LES   MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  135 

ment  cet  état  de  choses,  et  supposent  que  le  vaisseau  artériel, 
en  arrivant  dans  la  tète  de  l'Haliotide,  au  lieu  de  se  résoudre  en 
lacunes  interorganiques,  se  dilate  et  se  complique  de  façon  à 
former  un  vaste  sinus  à  parois  membraneuses,  dont  les  branches 
se  prolongeraient  dans  tous  les  interstices  que  les  organes 
circumbuccaux  laissent  entre  eux  ou  que  les  faisceaux  constitu- 
tifs des  muscles  pharyngiens  circonscrivent.  Mais  c'est  là  une 
hypothèse  qui  ne  me  semble  guère  admissible,  et  qui,  de  proche 
en  proche,  nous  conduirait  à  ne  voir  dans  tout  le  système  cavi- 
taire  des  Bryozoaires  ou  des  Zoophytes  qu'une  aorte  arrivée  au 
maximum  de  son  développement  et  servant  à  loger  dans  sa 
cavité  tous  les  viscères.  Ce  singulier  abus  de  mots  ferait  donc 
naître  les  idées  les  plus  fausses  touchant  la  structure  des  Ani- 
maux inférieurs  ;  mais  c'est  m'arrêter  trop  longtemps  sur  des 
discussions  de  ce  genre,  et  je  me  hâte  de  revenir  à  l'exposé  pur 
et  simple  des  faits  que  nous  offre  l'étude  anatomique  et  physio- 
logique des  Mollusques  Gastéropodes. 

Pour  ne  pas  interrompre  l'examen  des  parties  dont  la  com- 
paraison me  semble  nécessaire  à  faire,  je  laisserai  de  côté  pour 
le  moment  l'histoire  du  système  veineux  de  l'Haliotide ,  et  je 
passerai  tout  de  suite  à  l'étude  des  canaux  artériels  chez  les 
autres  Gastéropodes. 

§11.  —  Par  la  conformation  du  cœur,  ainsi  que  par  plu-    Fissureiies. 
sieurs  autres  particularités  de  structure ,  les  Fissureiies  res- 
semblent beaucoup  aux  Haliotides,  et  il  est  probable  que  leur 
système  artériel  présente  les  mêmes  caractères  ;  mais  c'est  là 
un  point  que  l'observation  n'a  pas  encore  décidé. 

Les  Patelles,  que  Cuvier  rangeait  dans  un  autre  ordre,  mais  système  artériel 
que  l'on  devrait  rapprocher  davantage  des  Haliotides  dans  nos     PaSes. 
classifications  zoologiques,  ressemblent  aussi  à  ces  dernières 
par  l'état  de  dégradation  de  leur  système  artériel  ;  leur  aorte  est 
même  plus  incomplète,  car  presque  aussitôt  après  sa  naissance 
elle  perd  le  caractère  vasculaire ,  et  sa  cavité  se  confond  avec 


136  CIRCULATION   DU    SANG 

les  lacunes  péripharyngiennes  avant  qu'il  ait  donné  naissance 
à  la  grande  artère  viscérale.  La  disposition  de  ces  méats  inter- 
organiques est,  du  reste,  essentiellement  la  même  que  chez  l'Ha- 
liotide,  seulement  ils  sont  plus  vastes,  et  la  cloison  qui  les  sépare 
de  la  cavité  abdominale,  au  lieu  d'être  simplement  bombée,  se 
prolonge  en  arrière,  de  façon  à  constituer  une  longue  poche  ter- 
minée en  cul-de-sac  et  servant  de  gaine  à  la  base  de  l'appareil 
lingual,  lequel,  au  lieu  de  se  loger  dans  l'intérieur  de  l'aorte , 
comme  dans  le  genre  précédent,  est  pourvu  d'un  organe  pro- 
tecteur spécial.  Mais  cette  gaine  linguale  vient  à  son  tour  en 
aide  au  système  artériel,  et  constitue  un  vaste  réservoir  sanguin 
dont  naissent  non-seulement  les  artères  du  pied ,  mais  aussi 
l'artère  gastrique.  C'est  même  par  cette  voie  qu'on  arrive  le 
plus  facilement  à  injecter  la  totalité  du  système  artériel  de  ces 
Mollusques ,  tant  sont  libres  et  faciles  les  communications  entre 
la  chambre  céphalique  et  les  vaisseaux  destinés  à  porter  le  sang 
du  cœur  à  tous  les  organes  (1). 
système  artériel  L'état  d'imperfection  du  système  artériel  que  j'ai  fait  con- 
oicabrions,  etc.  naître  chez  les  Haliotides  et  les  Patelles  a  été  retrouvé  aussi , 
quoique  à  un  moindre  degré  ,  chez  les  Oscabrions  et  chez 
divers  Hétéropodes  (2)  ;  mais  chez  tous  les  autres  Gastéropodes 


(1)  Chez  ce  Mollusque,  le  cœur  se  même  gaîne  que  naissent  les  artères 

trouve  sur  la  région  dorsale,  immé-  gastrique  et  pédieuse  (a). 

diatement  derrière  la  chambre  pal-  (2)  Chez  les  Firoles  ,  ce  mode  de 

léale,  du  côté  gauche.  Le  ventricule  est  terminaison  des  troncs  artériels  s'ob- 

placé  obliquement  en  travers  derrière  serve  non  -  seulement  dans  la  tête  , 

l'oreillette,  et  l'aorte  qui  en  part  plonge  comme  chez  les  Haliotides,  les  Pa- 

immédiatement  dans  la  cavité  abdo-  telles  et  les  Oscabrions ,   mais  aussi 

minale  située  au-dessous,  fournit  une  dans  le  pied  et  dans  la  région  caudale 

petite  branche  viscérale,  et  va  débou-  du  corps.  Ces  Mollusques  sont  d'une 

cher  dans  la  cavité  péripharyngienne  transparence   hyaline  si  grande,  que 

sur  le  côté  de  la  base  de  la  gàîne  lin-  partout,    excepté   dans   le  petit    sac 

guale.  C'est  du  côté  opposé  de  cette  pyriforme logeant  l'appareil  hépatique, 

(a)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  pi.  27,  frg.  4. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES. 


137 


dont  la  structure  est  suffisamment  connue  (1) ,  il  en  est  autre- 
ment, et  l'aorte  revêt  la  forme  d'un  tube  à  parois  propres 
jusque  dans  ses  dernières  divisions. 

Les  Oscabrions ,  qui ,  par  l'ensemble  de  leur  organisation , 
s'éloignent  beaucoup  des  précédents ,  et  même  de  tous  les 
autres  Gastéropodes  ,  ressemblent  cependant  encore  aux  Halio- 
tides  par  le  nombre  et  la  position  des  oreillettes  dont  le  cœur 
est  pourvu  ;  mais  ils  offrent  dans  la  disposition  de  ces  cavités 


l'estomac,  etc. ,  et  appelé  nucléus  a&- 
dominal ,  011  peut  voir  à  travers  les 
téguments  la  disposition  des  organes 
intérieurs  ainsi  que  les  mouvements 
du  fluide  nourricier.  Or,  M.  Huxley 
a  constaté  de  la  sorte  que  la  grande 
artère  aorte ,  en  traversant  d'arrière 
en  avant  la  cavité  générale  du  corps, 
donne  naissance  à  une  artère  pédieuse 
qui,  après  avoir  fourni  à  la  rame  cau- 
dale une  branche  dite  métapodiale , 
pénètre  dans  la  nageoire  pédieuse  et 
s'y  termine  brusquement  par  un  ori- 
fice béant  (a).  M.  R.  Leuckart  a  con- 
firmé l'exactitude  de  cette  observa- 
tion, et  a  reconnu  de  plus  que  l'artère 
métapodiale  se  termine  d'une  manière 
analogue,  et  que  l'aorte  céphalique, 
parvenue  sous  la  masse  buccale  ,  s'é- 
largit en  forme  de  trompette  et  perd 
ses  parois  propres  en  se  confondant 
avec  celles  de  la  lacune  péripharyn- 
gienne.  Des  fibres  musculaires  dis- 
posées en  manière  de  sphincters 
garnissent  ces  embouchures,  et  c'est 
seulement  avec  des  espaces  interorga- 
niques ou  un  réseau  lacunaire  que  ces 
vaisseaux  se  continuent  (6). 


Je  suis  porté  à  croire  que  chez  la 
Cannai re  l'aorte  céphalique  se  perd 
aussi  dans  un  sinus  péripharyngien. 

(1)  Peut- être  cependant  serait-ce 
d'une  disposition  de  ce  genre,  moins 
étendue  que  chez  les  trois  Gastéro- 
podes dont  il  vient  d'être  question, 
que  dépendrait  une  particularité  ana- 
tomique  observée  chez  les  Doris  par 
MM.  Aider  et  Hancock.  On  lit  en  effet 
dans  le  bel  ouvrage  de  ces  auteurs  sur 
les  Mollusques  Nudibranches  de  l'An- 
gleterre, que  chez  les  Doridiens  il 
existe  au-dessus  de  la  masse  buccale 
un  organe  d'apparence  glandulaire  qui 
reçoit  souvent  beaucoup  de  sang  de 
l'aorte,  et  qui  semblerait  être  analogue 
à  une  des  glandes  vasculaires  sans 
canal  excréteur,  telles  qu'on  en  trouve 
chez  les  Animaux  supérieurs.  Celte 
dernière  supposition  me  paraît  peu 
probable,  et  je  suis  d'autant  plus  porté 
à  croire  à  l'existence  d'un  réservoir 
lacunaire  dans  ce  point,  que  MM.  Ai- 
der et  Hancock  ne  paraissent  pas  avoir 
eu  recours  à  des  injections  pour  s'é- 
clairer sur  la  nature  de  la  partie  dont 
ils  ont  signalé  la  présence  (c). 


(a)  Huxley,  On  the  Morphology  of  Cephalous  Mollusca,  as  illustrated  by  the  Anatomy  of  certain 
Heteropoda  and  Pteropoda  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  32,  pi.  2,  fig.  1  et  G). 

(6)  Rud.  Leuckart,  Der  Ban  der  Heteropoden  (Zoologische  Untersuchungen  ,  Heft  II F,  p.  5, 
pl.  4,  fier.  1). 

(c)  Aider  et  Hancock,  Monogr.  of  the  British  iS'vdibranchiate  Mollusca,  p.  1C. 


138  CIRCULATION    DU    SANG 

une  anomalie  singulière  :  savoir,  une  double  communication 
avec  le  ventricule  (1). 
système  artériel     §  12.  — -  Chez  les  autres  Gastéropodes,  le  système  artériel  ne 
Gastéropodes  présente  aucune  particularité  assez  importante  pour  que  nous 

ordinaires.  A.  ...  ,.  p 

nous  y  arrêtions  ici,  L  aorte  antérieure  fournit  toutes  les  branches 
destinées  aux  divers  organes  ;  sa  structure  est  partout  tubulaire 
et  son  mode  de  distribution  ne  varie  que  peu  :  aussitôt  après  sa 
sortie  du  péricarde,  elle  donne  naissance  à  une  grande  artère 
viscérale  qui  se  ramifie  dans  le  foie,  les  organes  reproducteurs 
et  les  parois  de  l'intestin.  L'aorte  traverse  ensuite  d'arrière  en 
avant  la  portion  antérieure  et  libre  de  la  cavité  abdominale  ; 
fournit,  chemin  faisant,  des  branches  aux  parois  de  cette  cavité 
et  au  manteau,  ainsi  qu'à  l'estomac  et  aux  organes  voisins  ; 
donne  naissance  aux  artères  pêcheuses  dont  la  marche  est  tou- 
jours récurrente;  enfin  va  se  terminer  sous  la  masse  buccale 
par  des  ramifications  destinées  soit  à  l'appareil  pharyngien,  soit 

(1)  L'appareil  circulatoire  des  Osca-  M.  Middendorff,  naturaliste  russe  , 
brions,  ainsi  que  Cuvier  l'a  constaté,  à  qui  l'on  doit  une  très  bonne  mono* 
diffère  beaucoup,  sous  certains  rap-  graphie  anatomique  d'une  grande  es- 
ports,  de  celui  des  autres  Mollusques.  pèce  d'Oscabrion  nommée  Chiton  Stel- 
Le  cœur,  parfaitement  symétrique  et  lerî,  a  constaté  que,  dans  le  voisinage 
situé  sur  la  ligne  médiane,  à  la  partie  de  la  masse  buccale,  l'aorte  se  termine 
postérieure  du  dos,  se  compose  d'un  dans  un  grand  sinus  péripharyngien 
ventricule  et  de  deux  oreillettes  ,  qui  est  évidemment  analogue  au  sinus 
comme  chez  la  plupart  des  Mollusques  céphalique  des  Haliotides  et  des  Pa- 
inférieurs.  Ces  oreillettes  débouchent  telles.  C'est  de  ce  sinus  que  naissent  la 
chacune  dans  la  première  de  ces  ca-  grande  artère  viscérale  dont  la  direction 
vités  par  deux  orifices  (a).  Dans  l'état  est  récurrente,  et  une  paire  de  canaux 
de  contraction  ,  la  portion  du  ventri-  latéraux  qui  entourent  la  base  du  pied 
cule  située  entre  ces  paires  d'orifices  et  me  paraissent  tenir  lieu  d'artères 
se  resserre  de  façon  à  ressembler  à  un  pédieuses.  Le  sinus  artériel  de  la  tète 
vaisseau,  et  il  part  de  l'extrémité  anté-  communique  aussi ,  comme  nous  le 
rieure  du  cœur  une  artère  principale  verrons  bientôt,  avec  les  canaux  affé- 
ou  aorte  qui  se  porte  en  ligne  droite  rents  de  l'appareil  branchial  (6). 
jusque  dans  la  région  céphalique. 

(a)  Cuvier,  Mém.  sur  l'Hallotide,  etc.,  pi.  5,  %.  10  et  14  (Mém.  sur  les  Mollusques). 

(b)  Middendorff ,  Beitrâge  %u  einer  Malacozoologia  Rossica  (Mém.  de  l'Acad.  des  sciences  de 
Saint-Pétersbourg,  6e  série,  Sciences  nat-i  t.  VI,  p.  132,  pi.  8,  fig.  5,  etc.). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  139 

aux  téguments  de  la  région  céphalique  du  corps  (1).  Le  ventri- 
cule du  cœur  n'offre  aussi  dans  sa  structure  et  sa  forme  que  peu 
de  variations  ;  mais  il  n'en  est  pas  de  même  pour  l'oreillette, 

§  13.  — Je  ferai  remarquer  d'abord  que  la  position  de  cet 
organe  relativement  au  ventricule  varie.  Chez  les  Gastéropodes 
que  j'ai  réunis  dans  l'ordre  des  Prosobranches,  de  même  que 


Système 

branchio-car- 

diaque, 


(1)  Cette  description  sommaire  s'ap- 
plique surtout  au  Buccin  et  aux  genres 
voisins,  ainsi  qu'au  Colimaçon,  dont 
j'ai  représenté  avec  beaucoup  de  dé- 
tails l'appareil  circulatoire  dans  les 
planches  d'un  de  mes  ouvrages  (a). 
L'arbre  aorlique  se  divise  à  peu  près 
de  même  aussi  chez  les  Limaces  (6)  ; 
mais  chez  quelques  autres  Gastéro- 
podes, la  disposition  du  système  arté- 
riel est  un  peu  différente. 

Ainsi ,  chez  I'Aplysie  (c)  ,  Tarière 
gastrique  provient,  commed'ordinaire, 
de  l'origine  de  l'aorte ,  fournit  non- 
seulement  des  branches  à  l'intestin, 
au  foie,  etc.,  mais  donne  naissance, 
dans  le  même  point,  à  une  grande 
artère  œsophagienne  dont  les  ramu- 
scules  forment  un  riche  réseau  sur 
les  parois  de  l'estomac  et  de  l'œso- 
phage, où  elles  tiennent  lieu  des  ar- 
tères que  ces  parties  reçoivent  direc- 
tement de  l'aorte  chez  les  genres  dé- 
crits ci-dessus.  Aussitôt  après  avoir 
fourni  ce  vaisseau  ,  et  avant  de  sor- 
tir du  péricarde ,  l'aorte  se  courbe 
brusquement  sur  elle-même  et  se  di- 
late latéralement  pour  constituer  une 
poche  en  forme  de  crête ,  dont  les 
usages  ne  sont  pas  connus.  Aussitôt 
après  être  sortie  du  péricarde  ,  l'aorte 


donne  naissance  à  plusieurs  petites 
artères  destinées  au  rectum  et  aux 
parties  voisines  ;  puis  elle  traverse  la 
cavité  abdominale  sans  fournir  aucune 
branche,  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  arri- 
vée près  du  cerveau.  Là  elle  donne  à 
droite  et  à  gauche  une  paire  d'artères 
pédieuses  situées  l'une  au-devant  de 
l'autre  ,  et  elle  traverse  ,  de  concert 
avec  l'œsophage ,  l'anneau  nerveux  , 
pour  aller  se  ramifier  dans  les  or- 
ganes copulateurs  aussi  bien  que  dans 
les  diverses  parties  de  la  tête.  Il  est 
aussi  à  noter  que  les  deux  grandes 
artères  pédieuses,  en  se  portant  en 
arrière  sur  les  côtés  de  la  cavité 
abdominale,  fournissent  chacune  une 
grosse  branche  aux  lobes  latéraux  du 
corps  qui ,  chez  les  Aplysiens ,  tient 
lieu  de  manteau. 

Le  développement  énorme  du  voile 
céphalique,  chez  les  Téthys,  a  amené 
aussi  une  modification  correspondante 
dans  les  branches  céphaliques  du  sys- 
tème artériel  chez  ce  Mollusque.  Une 
artère  médiane,  qui  se  ramifie  dans  la 
portion  inférieure  de  ce  voile ,  repré- 
sente l'aorte  céphalique  de  I'Aplysie, 
et  une  paire  de  gros  vaisseaux,  qui 
se  distribuent  dans  la  portion  frontale 
de  ce  même  voile,  paraissent  corres- 


(a)  Recherches  faites  pendant  un  voyage  en  Sicile,  t.  I.  (La  planche  25  représente  l'appareil 
circulatoire  du  Triton,  et  les  planches  20,  21 ,  celui  du  Colimaçon.) 

(6)  Pouchet,  Recherches  sur  l'anatomle  et  la  physiologie  {les  Mollusques.  Tn-4,  1842,  1"  livr., 
p.  14. 

(c)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  23, 


\[[0  CIRCULATION   DU   SANG 

chez  les  Pulmonés  et  les  Hétéropodes,  l'oreillette  est  située 
devant  le  ventricule,  tandis  que  chez  ceux  dont  j'ai  formé  le 
groupe  naturel  des  Opisthobranches,  c'est  d'arrière  en  avant 
que  le  sang  arrive  de  l'oreillette  dans  le  ventricule,  et  cela 
quelle  que  soit  la  position  de  l'appareil  respiratoire  par  rapport 
au  cœur  (1). 


pondre  aux  petites  artères  tentaculaires 
de  ce  dernier  Gastéropode  (a). 

Dans  le  genre  Jands,  dont  M.  Blan- 
chard a  fait  connaître  l'organisation, 
les  artères  sont  distribuées  à  peu  près 
comme  chez  les  Aplysies  ;  mais  l'aorte 
ne  présente  à  sa  base  ni  courbure  ni 
dilatation  cristiforme  (b).  La  même 
disposition  se  voit  chez  les  Éolides 
proprement  dits  (c). 

Chez  les  Carinaires  (d) ,  le  même 
plan  préside  encore  à  la  distribution 
des  -vaisseaux  artériels  ;  seulement 
l'artère  gastrique  est  très  courte  et 
l'aorte  d'une  longueur  remarquable. 
L'artère  pêcheuse,  après  s'être  bifur- 
quée  ,  va  se  terminer  dans  la  portion 
postérieure  du  corps ,  qui  me  paraît 
être  l'analogue  du  pied  des  Gastéro- 
podes ordinaires ,  et  fournit  près  de 
son  origine  une  branche  impaire  pour 
la  nageoire  ventrale,  que  l'on  compare 
généralement  à  ce  pied  ,  mais  qui  me 
paraît  correspondre  plutôt  à  une  por- 
tion du  voile  labial  des  Téthys  et  des 
larves  de  la  plupart  des  Gastéropodes. 
Du  reste,  il  est  probable  que  chez  les 


Carinaires  ,  de  même  que  chez  les 
Firoles,  dont  il  a  déjà  été  question  (e), 
la  portion  terminale  du  système  arté- 
riel est  constituée  par  des  trajets  lacu- 
naires seulement. 

Je  dois  ajouter  que  si  la  figure 
que  M.  Délie  Chiaje  a  donnée  du 
système  artériel  du  Pleur obranchi- 
dium  Meckelii  est  exacte,  il  y  au- 
rait chez  ce  Mollusque  une  aorte  pos- 
térieure qui  fournirait  des  branches 
aux  tentacules  aussi  bien  qu'aux  deux 
côtés  de  toute  la  région  abdominale 
du  corps  if).  Mais  je  crois  qu'il  doit  y 
avoir  là  quelque  erreur  d'observation. 

D'après  le  peu  de  mots  que  Berke- 
ley et  Hoffmann  ont  dits  du  système 
circulatoire  chez  les  Cérithes,  on  voit 
que  la  disposition  du  cœur  et  des  ar- 
tères doit  être  à  peu  près  la  même  que 
chez  le  Triton  {g). 

(t)  Ce  caractère  anatomique  permet 
de  classer  les  Mollusques  Gastéropodes 
d'une  manière  bien  plus  naturelle  que 
ne  l'avait  fait  Cuvier,  en  se  fondant 
sur  les  modifications  de  l'appareil 
branchial  (h). 


(a)  Milne  Edwards,  Op.  cit.,  pi.  24,  fig.  2. 

(6)  Blanchard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Mollusques  Gastéropodes  de  l'ordre  des  Opistho- 
branches (Ann.  des  sciences  nat.,  1849,  3e  série,  t.  XI,  p.  84,  pi.  3,  fig.  2). 

(c)  Aider  et  Hancock,  Monogr.ofthe  British  Nudibranchiate  Mollusca,  Fam.  3,  pi.  8,  fig.  1. 

(d)  Milne  Edwards,  Observations  sur  la  structure  et  les  fonctions  de  quelques  Zoophytes,  Mol- 
lusques et  Crustacés  des  côtes  de  la  France  {Ann.  des  sciences  nat.,  1842,  2e  série,  t.  XVII!, 
p.  325,  pi.  11,  fig.  1). 

(e)  Voyez  ci-dessus,  page  136. 

\f)  Délie  Chiaje,  Descriz.  e  notom.  degli  Anim.  senza  vertèbre,  pi.  52,  fig.  14. 

(g)  Berkeley  et  Hoffmann,  Descript.  of  the  Anat.  Structure  of  Cerithium  telescopium  (Zoolog. 
Journal,  vol.  V,  p.  433). 

(h)  Milne  Edwards,  Note  sur  la  classification  naturelle  des  Mollusques  Gastéropodes  (Ann.  des 
sciences  nat.,  1848,  3°  série,  t.  IX,  p.  102,  et  Voyage  en  Sicile,  1. 1,  p.  181). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  1/|1 

L'oreillette  des  Gastéropodes  peut  être  définie  par  sa  position 
à  l'intérieur  du  péricarde,  mais  parfois  ce  vestibule  du  cœur 
se  confond  presque  avec  les  cavités  qui  y  amènent  le  sang 
de  l'appareil  respiratoire.  Ce  caractère  d'infériorité  organique 
se  rencontre,  par  exemple,  chez  beaucoup  d'Éolidiens,  où  un 
grand  canal  branchio-cardiaque  en  forme  de  poche  membra- 
neuse, atténué  postérieurement  et  élargi  en  avant ,  occupe  la 
ligne  médiane  du  dos  et  se  continue  avec  l'oreillette  unique 
située  à  son  tour  derrière  le  ventricule  (1).  Une  disposition 


(1)  Cette  disposition  a  été  constatée 
par  Souleyet,  chez  VÉolide  de  Cuvier, 
où  les  angles  antérieurs  de  l'oreillette 
se  continuent  également  avec  une 
paire  de  sinus  branchio  -  cardiaques 
antérieurs.  Il  en  résulte  que  l'oreillette 
est  ici  en  quelque  sorte  le  carrefour 
où  les  trois  canaux  branchio-cardia- 
ques  se  réunissent  pour  constituer  le 
vestibule  du  cœur  (a). 

11  est  probable  que  les  portions  de 
l'appareil  circulatoire  que  M.  Quatre- 
fages  a  décrites  chez  son  Éolidine  ,  et 
qu'il  a  considérées  comme  étant  deux 
oreillettes  en  forme  d'entonnoir  s'ou- 
vrant  dans  la  cavité  générale  du  corps, 
ne  sont  autre  chose  que  les  parties 
latérales  du  fond  de  la  poche  mem- 
braneuse constituant  le  sinus  branchio- 
cardiaque  médio -dorsal  et  l'oreil- 
lette (6). 

Dans  d'autres  espèces  où  le  sinus 
branchio-cardiaque  est  disposé  de  la 
même  manière  sur  la  partie  médiane 


du  dos ,  un  étranglement  correspon- 
dant au  point  de  rencontre  de  ce  sys- 
tème avec  le  péricarde  sépare  ce  ré- 
servoir de  l'oreillette  ,  qui  est  alors 
arrondie  ,  disposition  qui  a  été  très 
bien  constatée  par  MAI.  Hancock  et 
Embleton  chez  VEolis  papillosa  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  les 
Phyllirhoés,  l'oreillette,  qui  est  unique 
et  en  forme  d'entonnoir ,  paraît  se 
confondre  avec  les  cavités  que  le  sang 
traverse  pour  rentrer  dans  le  cœur  ; 
mais  la  respiration  n'étant  pas  loca- 
lisée chez  ces  Gastéropodes  A  bran- 
ches ,  il  n'y  a  pas  de  sinus  branchio- 
cardiaque  (d). 

J'ajouterai  que  chez  d'autres  Hété- 
ropodes,  notamment  chez  les  Firoles, 
l'oreillette  paraît  avoir  des  parois  in- 
complètes ,  de  façon  que  le  sang  ré- 
pandu dans  la  chambre  péricardique 
pénétrerait  directement  dans  sa  cavité 
par  des  permis  situés  entre  ses  fais- 
ceaux charnus  (e). 


(a)  Souleyet,  Voyage  delà  Bonite,  Zool.,  t.  II,  p.  427,  Atlas,  Mollusques, pi.  24  B,  ûg.  i. 

(b)  Quatrefages  ,   Mém.  sur  l'Éolidine  ■paradoxale  (Ann.  des  sciences  nat.,   1843,  2e  série, 
t.  XIX,  p.  290,  pi.  ll.fig.  3). 

(c)  Hancock  et  Embleton,  On  the  Anal,  of  Eolis  (Ann.  of  Nat.  Hist.,  new  séries,  1848,  vol.  I, 
p.  99,  pi.  IV,  fig.  4). 

(d)  H.  Mùller  et  Gegenbaur,  Ueber  Pliyllirhoe  buceplialum  (Zeilschr.  fur  vjissenschaftl.  Zoologie, 
1854,  t.  V,  p.  365). 

(e)  R.  Leuckart,  Op.  cit.  (Zoolo(jische  Untersuchungcn,  Heft  III,  p.  5). 


Î42  CIRCULATION    DU    SANG 

très  analogue  se  voit  chez  les  Téthys,  où  un  vaste  sinus 
branchio-cardiaque  pyriforme  s'étend  sur  tout  le  milieu  du  dos, 
depuis  le  cœur  jusqu'à  l'extrémité  postérieure  du  corps  (1). 

Mais,  chez  d'autres  espèces  de  la  même  famille,  les  canaux 
branchio -cardiaques  ne  se  réunissent  pas  en  un  sinus  commun 
derrière  le  cœur,  et  arrivent  séparément  à  l'oreillette,  qui  alors 
est  mieux  délimitée  (2). 

Enfin  la  distinction  entre  l'oreillette  et  les  cavités  qui  y  ver- 
sent le  sang  devient  tout  à  fait  nette  chez  les  Tritons,  les  Hélices 
et.  les  autres  Gastéropodes  où  l'appareil  respiratoire  se  localise 
le  plus  et  où  le  canal  branchio-cardiaque  revêt  la  forme  d'un 


(1)  Chez  les  Téthys,  les  branchies 
ne  se  prolongent  pas  sur  la  région 
céphalique  du  corps ,  ainsi  que  cela 
a  lieu  chez  les  Éolidiens  ,  dont  je 
viens-  de  parler,  mais  s'arrêtent  au 
niveau  du  cœur  ;  aussi  le  sinus 
branchio  -  cardiaque  n'offre  pas  les 
deux  prolongements  antérieurs  en 
forme  de  cornes  qui ,  chez  les  précé- 
dents, s'avancent  de  chaque  côté  du 
ventricule  ,  et  il  n'est  représenté  que 
par  le  sac  situé  en  arrière  de  l'oreil- 
lette {a). 

(2)  Ainsi,  dans  le  Janus,  M.  Blan- 
chard a  trouvé  que  les  vaisseaux  effé- 
rentsdes  branchies  se  réunissent  entre 
eux  pour  constituer  un  nombre  consi- 
dérable de  canaux  branchio-cardia- 
ques  ,  et,  en  définitif,  quatre  troncs, 
dont  deux  postérieurs  ,  qui  ramènent 
le  sang  du  tiers  postérieur  de  l'appa- 
reil respiratoire,  et  pénètrent  dans  la 
partie  postérieure  de  l'oreillette,  et 


deux  antérieurs  qui  reçoivent  le  sang, 
de  toutes  les  branches  répandues  sur 
la  portion  moyenne  et  antérieure  du 
corps;  ces  troncs  débouchent  sur  les 
côtés  de  l'oreillette,  et  s'y  confondent 
avec  ce  réservoir,  de  façon  à  lui  don- 
ner la  forme  d'an  croissant  (6). 

Chez  les  Tritonies,  cet  organe  ne 
reçoit  plus  que  deux  sinus  branchio- 
cardiaques  qui  sont  très  larges ,  et  il 
se  confond  avec  eux  ,  de  façon  à  res- 
sembler à  une  besace  placée  en  travers 
sur  le  dos  de  ces  Mollusques,  et  tenant 
au  cœur  par  le  milieu  de  son  bord 
antérieur.  Chacun  de  ces  sinus  vesli- 
bulaires  se  continue  à  son  tour  avec 
deux  canaux  branchio  cardiaques  qui 
longent  les  côtés  du  dos,  l'un  en 
avant,  l'autre  en  arrière,  et  reçoivent 
le  sang  apporté  par  les  vaisseaux  effé- 
rents  des  branchies.  Cuvier  a  donné 
une  très  bonne  ligure  de  l'appareil 
circulatoire  des  Tritonies  (c). 


(a)  Miluc  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  24,  fig.  2. 

(b)  Blanchard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Opisthobraiiches  (Ami.  des  sciences  liai.,  IS-i-3, 
3'  série,  t.  XI,  p.  85,  pi.  3,  fig.  1). 

(c)  Cirvier,  Mém.  sur  le  genre  Tritoma  (Ann.  du  Muséum,  1802,  1. 1,  p.  480). 
—  Voyez  aussi  Aider  et  Hancock,  Bril.  Nudibr.  Nollusc.,  Faim  2,  pi.  1 ,  fig1.  1. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  l/lO 

vaisseau  tubulaire  jusqu'à  son  entrée  dans  l'oreillette,  dont  le 
volume  est  cependant  très  considérable  (1). 

§  lli.  —  Les  voies  par  lesquelles  le  sang  revient  des  ramus-  système rànan 
cules  terminaux  du  système  artériel  vers  les  organes  respira-  Gastéropodes. 
toires,  ou  bien  directement  vers  le  cœur,  varient  également, 
mais  sont  toujours  fournies  principalement  par  les  espaces 
interorganiques  dont  les  parois  se  revêtent  peu  à  peu  d'une 
couche  membraniforme  de  plus  en  plus  complète,  et  tendent  à 
se  transformer  ainsi  en  tubes  indépendants  des  organes  voi- 
sins. Une  partie  de  ce  système  de  cavités  veineuses  est  formée 
par  la  chambre  viscérale,  et,  comme  la  portion  antérieure  de 
cette  chambre  est  d'ordinaire  beaucoup  plus  grande  que  les 
viscères  qui  s'y  logent,  elle  forme  un  réservoir  veineux  d'une 
capacité  considérable.  La  portion  postérieure  de  cette  même 
chambre  est  au  contraire  si  complètement  garnie  par  l'intes- 
tin, le  foie  et  les  glandes  génératrices,  que  le  sang  ne  trouve 
inoccupés  que  des  espaces  étroits,  sinueux  et  canaliculi formes, 
entre  les  bords  de  ces  organes,  et  que,  pour  donner  à  ces  lacunes 
la  forme  de  vaisseaux  proprement  dits,  il  suffit  du  développe- 

(1)  Chez  les  Haliotides,  où  le  cœur  réunissent  en  un  tronc  commun  où 
est  pourvu  de  deux  oreillettes ,  les  aboutissent  beaucoup  d'autres  fa- 
deux  branchies  portent  chacune  à  muscules  venant  soit  de  la  voûte  de 
leur  face  externe  un  vaisseau  branchio-  la  cavité  pulmonaire,  soit  de  l'organe 
cardiaque  qui  se  rend  directement  à  sécréteur  qui  est  situé  au  fond  de  cet 
cet  organe  (a);  mais  chez  les  Gastéro-  appareil  près  du  cœur  ,  et  qui  me 
podes  à  une  seule  oreillette ,  tels  que  semble  être  l'analogue  de  l'organe  de 
le  Triton  (6),  il  n'y  a  aussi  qu'un  seul  Bojanus;  La  disposition  générale  du 
tronc  branchio  -  cardiaque.  Chez  le  réseau  vasculaire  du  poumon  de  ces 
Colimaçon  ,  ce  vaisseau  naît  d'un  ré-  Gastéropodes  a  été  assez  bien  repré- 
seau  pulmonaire  très  beau  dont  les  sentée  par  Treviranus  (c) ,  mais  se 
branches  principales  ,  au  nombre  de  voit  plUs  distinctement  dans  les  figures 
trois,  sont  disposées  comme  les  bar-  que  j'en  ai  données  (d). 
bules  et  les  barbes  d'une  plume,  et  se 

(a)  Milno  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  2G,  fig\  1  et  2. 
(6)  Milne  Edwards,  Op.  cit.,  pi.  25. 

(c)  Treviranus,  Beobachtungen  aus  der  Zootomle  und  Physiologie,  t.  1,  pi.  8,  fig.  5S. 

(d)  Milhe  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  20,  fig-.  1  et  2  ;  pi.  21,  fig-.  1  et  2. 


lllll  CIRCULATION    DU    SANG 

ment  d'une  tunique  membraneuse  aux  dépens  du  tissu  con- 
nectif  d'alentour. 
sySiè,ne veineux  U  n'est  aucun  Gastéropode  où  ce  mode  de  constitution  du 
l'Apte,  système  veineux  soit  plus  facile  à  constater  que  chez  l'Aplysie. 
Là,  excepté  peut-être  dans  la  masse  assez  compacte  formée 
par  le  foie  et  les  autres  viscères  vers  l'arrière  de  l'abdomen, 
il  n'existe  aucun  trajet  veineux  ayant  la  forme  tubulaire,  et 
c'est  par  des  lacunes  irrégulières  ménagées  entre  les  faisceaux 
musculaires  du  pied  ou  du  manteau  que  la  plus  grande  partie  du 
sang  revient  des  branches  terminales  des  artères  dans  la  cavité 
abdominale.  Lorsqu'on  dissèque  seulement  des  individus  qui 
ont  séjourné  longtemps  dans  de  l'alcool  ou  quelque  autre  liqueur 
conservatrice,  cette  grande  chambre  périgastrique  qui  s'étend 
des  bords  de  la  bouche  jusque  vers  les  deux  tiers  postérieurs  du 
corps  semble  être  tapissée  par  une  membrane  péritonéale  par- 
faitement continue  ;  mais  quand  on  examine  des  individus  frais, 
on  voit  que  le  tissu  de  cette  tunique  est  très  lâche  et  se  com- 
pose d'une  multitude  de  brides  ou  de  iilaments  entrecroisés 
dans  toutes  les  directions,  de  façon  à  constituer  une  couche 
feutrée  dont  les  vides  disparaissent  par  la  pression,  mais  livrent 
facilement  passage  aux  liquides.  Le  vaste  réservoir  veineux 
ainsi  formé  se  continue  postérieurement  sous  la  forme  d'un 
canal  qui  contourne  le  côté  gauche  de  la  masse  viscérale  res- 
serrée sous  la  coquille  de  l'animal,  et  qui  va  déboucher  clans 
le  vaisseau  afférent  de  la  branchie. 

Ce  sinus  branchial,  que  les  anatomistes  ont  comparé  tantôt  à 
une  veine  cave,  d'autres  fois  à  une  artère  branchiale,  est  tapissé 
d'une  tunique  membraniforme  plus  parfaite  que  dans  le  reste 
du  système  de  cavités  veineuses:  mais  ses  parois  sont  encore 
criblées  d'une  multitude  de  permis  qui  établissent  autant  de 
communications  avec  les  lacunes  sous-cutanées  ou  interfibril- 
laires  des  parties  voisines.  L'existence  de  ces  ouvertures  et  des 
communications  entre  l'abdomen  et  la  branchie  par  l'intermé- 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  1^5 

diairede  ce  canal  n'avait  pas  échappé  à  Cuvier;  mais  cet  ana- 
tomiste  illustre  ne  soupçonnait  pas  que  le  sang  y  arrivait  par  la 
cavité  générale  du  corps,  et  pensait  que  les  pertuis  dont,  je  viens 
de  parler  servaient  seulement  à  l'absorption  des  liquides  épan- 
chés et  au  mélange  de  ces  liquides  avec  la  masse  du  sang  en 
circulation  dans  les  veines  (1).   Le  fait  est  cependant  que  les 


(1)  Je  fois  menlion  ici  des  observa- 
tions de  Cuvier  et  de  l'interprétation 
qu'il  donnait  à  ces  faits  analomiqucs , 
parce  que  plusieurs  auteurs ,   après 
avoir  repoussé  sans  examen  préalable 
mes  vues  touchant  le  mode  de  consti- 
tution  de  l'appareil   circulatoire  des 
Mollusques,  ont  voulu,  lorsqu'ils  se 
trouvaient   obligés  d'en   reconnaître 
la  justesse,  les  attribuer  à  d'autres. 
Ainsi ,  on  a  dit  que    la   circulation 
veineuse  extra  -  vasculaire  ,   chez  les 
Aplysies ,   était    connue  de  Cuvier  ; 
mais  tous  ceux  qui  examineront  d'une 
manière  impartiale  la  question,  recon- 
naîtront que  cela  n'est  pas;  que  Cuvier 
pensait  que  les  pertuis  dont  il  avait 
constaté  l'existence  dans  les  parois  du 
grand    canal   afférent   à  la   branchie 
étaient  des  espèces  de  bouches  absor- 
bantes à  l'aide  desquelles  ces  canaux 
pouvaient  recevoir  de  la  cavité  abdo- 
minale, non  pas  du  sang ,   mais  les 
liquides  épanchés  destinés  à  être  mê- 
lés au  sang;  de  sorte  ,  ajoute-t-il,  que 
les  veines  font  ici  l'office  de  vaisseaux; 
absorbants  ;   enfin  ,  pour   rendre   sa 
pensée  plus  clairement  encore,  il  ter- 
mine en  disant  :  «  C'est  [d'après  ces 

»  faits  que  j'ai  pensé  que  le  système 

»  absorbant  cesse  entièrement  dans 

»  les  Mollusques  (a).  » 


Duvernoy  s'est  expliqué  non  moins 
nettement  dans   le  passage  suivant , 
dans  les  Leçons  d'anatomie  comparée 
de  Cuvier  :   «  Nous  rappellerons  en- 
»  core   ici   ces   parties    centrales  de 
»  l'arbre  dépurateur  qui,  dans  l'Aply- 
»  sie,  sont  percées  d'ouvertures  très 
»  sensibles  dans  la   portion  qui  tra- 
»  verse  la  cavité  viscérale,  ouvertures 
»  qui  permettent  l'absorption  par  le 
»  tronc  ou  la  souche  de  l'arbre  nu- 
»  tritif.  Cependant  on  peut  dire  que, 
»  dans  ce  type,  le  système  vasculaire 
»  sanguin  est  complet ,  que  les  deux 
»  arbres  nutritifs  et  dépurateurs»  (ex- 
pression que  Duvernoy  emploie  pour 
désigner    le    système   artériel   et   le 
système  veineux)   «  sont  liés  par  un 
»  réseau  capillaire,  et  que  le  fluide  ne 
»  s'épanche  point  dans  les  lacunes  ; 
»  il    reste   renfermé   et  circule  dans 
»  l'ensemble   de  ses  réservoirs ,  qui 
»  forment  encore  ici  un  système  de 
»  vaisseaux  clos  {b).  » 

M.  Van  Bencden  était  probablement 
arrivé  plus  près  de  la  connaissance  de 
la  vérité  ,  car,  en  1835  ,  il  a  dit  : 
«  Après  des  recherches  minutieuses 
»  sur  les  organes  de  la  circulation 
»  dans  les  Aplysies ,  je  crois  avoir 
»  reconnu  une  véritable  fusion  avec  le 
»  système  aquifère  de  Délie  Chiaje  (c).  » 

[Mém.  sur  les  Mollusques,  et  Ann.  du 


(a)  Cuvier,  Mém.  sur  le  genre  Aplysie,  p.  14  et  15 
Muséum,  1802,  t.  I). 

(6)  Duvernoy,  Additions  aux  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier,  2°  édition,  1839,  t.  VI, 
p.  538. 

(c)  Van  Bencden,  Résultais  d' un  voyage  fait  sur  les  bords  de  la  Méditerranée  {Comptes  rendus 
de  i Académie  des  sciences,  1835,  1. 1,  p.  S"30). 

m.  10 


l/l6  CIRCULATION    DU    SANG 

veines  proprement  dites  manquent  partout  ou  presque  partout 
dans  le  corps  de  l'Aplysie,  et  que  c'est  par  le  moyen  des 
méats  interorganiques,  méats  au  nombre  desquels  il  faut  ranger 
la  cavité  abdominale  elle-même,  que  le  sang  arrive  à  la  branchie 
pour  y  subir  le  contact  de  l'air,  et  après  avoir  traversé  les 
canaux  capillaires  dont  cet  organe  est  pourvu,  regagner  le  cœur 
par  l'intermédiaire  du  vaisseau  branchio-cardiaque. 
systèmeveineux  Une  expérience  très  facile  à  faire,  et  que  je  répète  souvent 
colimaçons,  dans  mes  leçons  publiques,  prouve  qu'il  en  est  à  peu  près  de 
même  chez  le  Colimaçon  (1).  En  effet,  si  l'on  détermine  un 
commencement  d'asphyxie  chez  un  de  ces  Mollusques,  atin  de 
l'empêcher  de  contracter  son  corps  d'une  manière  fâcheuse,  et 
qu'ensuite  on  injecte  un  liquide  coloré  dans  la  grande  cavité 
viscérale  où  flottent  l'estomac ,  les  organes  copulateurs ,  les 
principaux  nerfs  et  beaucoup  d'autres  organes,  on  verra  bientôt 
ce  liquide  pénétrer  dans  les  lacunes  qui  avoisinent  le  manteau, 

Mais  il  m'est  impossible  de  voir  clans  plus  singulières.  J'ai  prouvé,  au  con- 
certe conclusion  ,  restée  dix  ans  sans  traire,  que  la  prétendue  exception  est. 
autre  développement,  un  titre  sérieux  la  règle  commune  pour  tout  l'embran- 
à  la  découverte  de  la  circulation  lacu-  chement  des  Mollusques, 
naire,  ni  chez  l'Aplysie  ni  chez  aucun  (1)  Pour  plus  de  détails  au  sujet  de 
aulre  Mollusque.  ces  expériences,  voyez  mon  Mémoire 
Je  ferai  voir  aussi,  dans  quelques  sur  la  circulation,  inséré  au  Compte 
instants,  que  les  droits  de  M.  Pouchet  rendu  des  séances  de  l'Académie  des 
à  cette  découverte  ne  sont  pas  mieux  sciences  du  3  février  18/i5,  et  publié 
établis ,  et,  lorsqu'en  18/i3,  M.  Qua-  aussi  dans  les  Annales  des  ^sciences 
trel'ages  annonça  que  chez  les  Éoli-  naturelles  (c)c  J'ai  fait  voir  que  les 
diens  le  sang  circule  dans  la  cavité  communications  en  question  entre  les 
abdominale  (a),  ainsi  que  je  l'a  vais  con-  vaisseaux  sanguins  et  les  cavités  lacu- 
staté  quelques  années  auparavant  chez  naires  sont  assez  libres  pour  laisser 
beaucoup  de  Molluscoïdes  (6) ,  on  nia  passer  des  matières  solides  aussi  bien 
généralement  le  fait ,  ou  bien  on  le  que  des  liquides, 
considéra  comme  une  anomalie  des 

(a)  Quatrefages,  Mém.  sur  i'Eolidina  (Ann.  des  seienc.nat.,  4843,  2«  série,  t.  XIX,  p.  190). 

(&)  Milne  Edwards,  Observations  sur  les  Ascidies  (  Mém.  de  L'Acad.  des  sciences,  t.  XVIII,  et 
Comptes  rendus,  1839,  t.  IX,  p.  591). 

(c)  Observations  et  expériences  sur  la  circulation  chez  les  Mollusques  (Ann.  des  sciences 
vat.,  3°  sério,  t.  Ht,  p.  289,  et  Voyage  en  Sicile,  1. 1,  p.  89). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  147 

puis  arriver  dans  les  vaisseaux  pulmonaires,  les  remplir  et 
passer  souvent  dans  les  conduits  afférents  de  l'appareil  respira- 
toire, peut-être  même  jusque  dans  le  cœur  (1).  A  l'aide  d'in- 
jections pratiquées  de  la  sorte,  on  voit  aussi  que  le  grand  réser- 
voir veineux  formé  par  la  cavité  périgastrique  communique 
en  arrière  avec  les  espaces  qui  existent  entre  les  lobules  du 
foie  et  les  autres  organes  resserrés  dans  la  portion  postérieure 
du  sac  péritonéal  et  occupant  la  région  du  corps  appelée, 
à   raison   de   sa  forme  ,  le  tortillon.   Ces  espaces   figurent 
souvent  des  arborisations,  et  on  les  prendrait  volontiers  pour 
des  vaisseaux  rameux,  si  la  dissection  ne  venait  montrer  que 
ce  ne  sont  pas  des  tubes  à  parois  indépendantes  des  parties 
voisines,  mais  de  simples  lacunes  limitées  par  la  lame  périto- 
néale  à  tissu  lâche  dont  les  viscères  voisins  sont  revêtus  (2). 


(1)  L'existence  de  communications  tion  par  les  vaisseaux  lymphatiques 

entre  le  système  vasculaire  et  la  cavité  chez  les   Animaux    vertébrés.    Aussi 

abdominale  avait  été  aperçue  chez  la  M.  Pouchet  n'a-t-il  jamais  revendiqué 

Limace  ,  en  18Zi2  ,  par  M.   Pouchet ,  l'idée  que  je  crois  m'appartenir,  et  ce 

professeur  de  zoologie  à  Rouen  ;  mais  sont  seulement  quelques  commenta- 

ce  naturaliste  supposait  que  les  per-  teurs  qui  ont  voulu  la  lui  attribuer, 

tuis  en  question  constituaient  un  sys-  Je  crois  devoir  ajouter  que  des  faits 

tème absorbant, et  servaient  à  l'entrée  du  même  ordre  avaient  été  aperçus, 

des  liquides  extra  vases  dans  les  veines  mais  d'une  manière  moins  complète , 

aussi  bien  qu'à  l'exhalation  opérée  par  en  1816,  par  Erman  (6). 
les  artères  (a).  D'après  sa  manière  de  (2)  M.  Erdl  a  décrit  un  réseau  vei- 

voir,  le  passage  des  liquides  dans  la  neux  dans  l'appareil  digestif  du  Coli- 

cavité  générale  du  corps  était  un  phé-  maçon  (c) ,  et  la  figure  qu'il  en  donne 

nomène  collatéral  au  mouvement  cir-  a  été  reproduite  par  Carus  et  Otto  (d)  ; 

dilatoire,  à  peu  près  comme  l'épan-  mais  ,   ainsi   que  le  fait  remarquer 

chement  de  la  sérosité  dans  le  tissu  M.  Siebold,  les  vaisseaux  en  question 

cellulaire  d'un  membre  et  sa  résorp-  paraissent  être  des  artères  (e). 


(a)  Pouchet,  Recherches  sur  l'anatomie  et  la  physiologie  des  Mollusques.  In-4,  Paris,  1842. 
Cet  ouvrage  a  été  interrompu  à  la  page  24,  à  l'endroit  où  l'auteur  aborde  la  description  du  système 
veineux. 

(6)  Erman,  Wahmehmungen  ùbtr  das  Blut  einiger  Molluskcn  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin, 
1819,  t.  VI,  p.  199). 

(c)  Erdl,  Dissert,  inaug.  de  Helicis  Algirœ  vasis  sanguiferis,  1840  (d'après Siebold). 

(rf)  Carus  et  Otto,  Tab.  Anat.  corn]},  illustr.,  pars  vr,  pi.  2,  flg._5. 

(e)  Siebold  et  Slannius,  Nouveau  Manuel  d'analomie  comparée,  t,  I,  p.  325. 


illS  CIRCULATION    DU    SANG 

Un  canal  qui  longe  le  bord  concave  de  l'abdomen  est  mieux 
endigué  et  conduit  beaucoup  de  sang  vers  la  branchie  ;  mais 
tout  en  ayant  la  forme  d'un  vaisseau  tabulaire,  il  en  mérite  à 
peine  le  nom,  tant  sont  faciles  les  communications  de  sa  cavité 
avec  les  lacunes  d'alentour  (1).  Enfin  on  voit  aussi  par  ces 
mêmes  injections,  poussées  au  hasard  dans  la  cavité  abdomi- 
nale, que  tout  le  sang  n'est  pas  obligé  de  traverser  l'appareil 
respiratoire  pour  retourner  au  cœur,  car  une  partie  peut  y 
arriver  par  un  système  de  canaux  et  de  vaisseaux  disposés 
comme  ceux  de  l'organe  de  Bojauus ,  chez  les  Lamelli- 
branches (2). 

Une  observation  qui  date  de  1822  et  qui  est  due  à  Gaspard, 
mais  qui  avait  complètement  échappé  à  l'attention  des  physio- 
logistes jusqu'au  moment  où  la  discussion  des  expériences 
dont  je  viens  de  parler  eut  occupé  divers  écrivains,  trouve  ainsi 
une.  explication  facile.  Gaspard  avait  vu  que  lorsque  le  Coli- 
maçon étend  le  pied  pour  ramper,  le  sang  s'épanche  librement 
dans  la  cavité  abdominale  et  vient  baigner  les  viscères  (3) .  En 
effet,  ce  liquide  y  afflue  alors  en  plus  grande  quantité  que 
d'ordinaire;  mais  ce  réservoir  n'est  pas  seulement  un  diver- 
ticulum,  il  fait  partie  du  cercle  circulatoire. 


(1)  Tous  ces  canaux  et  méats  vei-  considère  comme  appartenant  à  une 
neux  ont  été  injectés  de  la  sorte  dans  poche  pulmonaire,  est  l'analogue  du 
les  préparations  qui  sont  représentées  système  vasculaire  rénal  des  Colima- 
dans  les  planches  20  et  21  de  mon  çons,  des  Haliotides,  etc.  (a). 
Voyage  en  Sicile.  (3)  Voici  dans  quels  termes  Gaspard 

Cet  appareil  vasculaire  est  encore  s'exprime  :   «  Le  sang  de  l'Escargot 

plus    développé  chez   les   Haliotides  »  mérite  de  fixer  un  moment  notre 

{Op.  cit.,  pi.  26,  fig.  1  et  2).  »  attention.  Il  est  contenu,  non-seule- 

(2)  Je  suis  porté  à  croire  que  le  ré-  »  ment  dans  les  organes  de  la  circu- 
seau  vasculaire  que  Souleyet  a  trouvé  »  lation  ,  mais  il  est  encore  épan- 
à  l'arrière  de  l'oreillette  ,  chez  l'Ac-  »  ché,  principalement  quand  l'Animal 
téon  ou  Élysie  ,  et  que  ce  naturaliste  »  voyage ,  dans  la  cavité  où  sont  les 

(a)  Souleyet,  Voyage  de  la  Bonite  (Hist.  nat.t  t.  II,  p.  484,  pi.  24  D,  fig   4  et  5). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  149 

Chez  le  Triton,  la  disposition  du  système  veineux  est  à  systèm^eux 
peu  de  chose  près  la  même  que  chez  le  Colimaçon,  si  ce  n'est  Tntons,  etc. 
que  les  canaux  afférents  de  l'appareil  respiratoire  se  rendent  à 
des  branchies  au  lieu  d'aller  à  un  poumon,  et  que  les  vaisseaux 
qui  portent  le  sang  de  la  cavité  abdominale  dans  l'appareil  qui 
me  semble  devoir  être  assimilé  à  l'organe  de  Bojanus,  et  con- 
sidéré comme  une  glande  urinaire ,  sont  développés  d'une 
manière  énorme  (1). 

La  transformation  des  lacunes  veineuses  en  tubes  vasculaires  système  veineux 

,  j  \  des  Dons. 

à  parois  indépendantes  des  parties  voisines  tait  plus  de  progrès 
chez  d'autres  Gastéropodes.  Ainsi  j'ai  trouvé  dans  le  manteau 
de  l'Haliotide  des  veines  très  bien  délimitées,  et  il  m'a  semblé 
en  apercevoir  aussi  dans  diverses  parties  de  la  masse  viscérale 
de  ce  Mollusque.  Chez  lesDoris,  MM.  Hancock  et  Embleton 
ont  observé  dans  le  foie  un  système  de  veines  bien  caracté- 
risées qui  conduisent  le  sang  de  cet  organe  aux  branchies  ; 
mais  dans  les  autres  parties  de  l'organisme  ils  n'ont  pu  décou- 
vrir rien  de  semblable,  et  il  leur  a  paru  que  le  retour  du 
fluide  nourricier  s'y  effectue  par  les  lacunes  interorganiques 
seulement. 

D'après  ces  anatomistes ,  il  y  aurait  aussi  chez  les  Doris 
exagération  d'une  disposition  dont  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de 
signaler  l'existence  chez  les  Lamellibranches,  et  que  j'ai  con- 
statée également  chez  les  Haliotides,  les  Tritons  et  les  Colima- 
çons :  savoir,  le  passage  direct  d'une  portion  du  sang  veineux 

»  viscères  digestifs  et  génitaux  ,  qui  »  point   contenu    et  épanché  de   la 

»  nagent  dans  ce   sang ,  de  manière  »  même  manière.  Ce  phénomène  m'a 

))  qu'en  incisant  la  paroi  qui  sépare  »  singulièrement  frappé,  et  je  ne  con- 

»  la  trachée  et  le  ventre,  on  l'en  voit  »  nais  rien  d'analogue  dans  les  autres 

»  sorlir  par  un  jet  abondant  et  con-  »  Animaux  (a).  » 

»  tinu.  Lorsque  l'Animal  est  retiré  et  (1)  Voyez  mon    Voyage  en  Sicile, 

»  caché  dans  sa  coquille,  le  sang  n'est  t.  I,  pi.  25. 

(a)  Gaspard,  Mémoire  physiologique  sur  le  Colimaçon  (Journal  de  physiologie  do  Magendie, 
4822,  t.  II,  p.  337), 


150  CIRCULATION    DU    SANG 

dans  le  canal  branchio-cardiaquc,  et  son  mélange  avec  le  sang 
artériel  qui  arrive  de  l'appareil  respiratoire  pour  pénétrer  dans 
le  cœur  et  être  distribué  par  cet  organe  dans  toutes  les  parties 
de  l'économie.  En  effet,  MM.  Hancock  et  Embleton  tirent  de 
leurs  nombreuses  observations  sur  ces  Mollusques  celte  conclu- 
sion, un  peu  exagérée  peut-être ,  que  le  sang  apporté  aux  sinus 
veineux  des  branchies  par  les  veines  hépatiques  est  la  seule 
portion  du  fluide  nourricier  en  circulation  qui  passe  dans  ces 
organes,  et  que  tout  le  sang  des  autres  viscères,  des  muscles  et 
des  parties  superficielles  de  l'économie,  après  avoir  traversé  un 
système  de  cavités  lacunaires  sous -cutanées  creusées  dans  le 
manteau,  est  versé  directement  dans  l'oreillette  par  deux  canaux 
latéraux.  Ici  la  respiration  cutanée  remplirait  donc  un  rôle  plus 
considérable  que  chez  la  plupart  des  autres  Gastéropodes  (1). 

Les  auteurs  que  je  viens  de  citer  ont  été  conduits  aussi  à 
considérer  comme  un  cœur  accessoire  une  vésicule  pulsatile 
qui  se  trouve  dans  le  voisinage  du  cœur  et  qui  est  en  commu- 
nication avec  un  système  de  canaux  rameux  dont  nous  aurons 
à  parler  par  la  suite.  MM.  Hancock  et  Embleton  pensent  que 
ces  canaux  s'anastomosent  avec  les  branches  hépatiques  de 
l'artère  aorte,  et  que  ce  système,  qu'ils  comparent  à  une  veine 
porte ,  déboucherait  dans  le  péricarde.  Mais  dans  l'état  actuel 
de  nos  connaissances  à  ce  sujet ,  cette  opinion  ne  me  paraît  pas 
admissible ,  et  je  suis  porté  à  croire  que  la  vésicule  en  question, 
ainsi  que  son  canal  de  communication  avec  le  péricarde,  sont 
des  dépendances  de  l'appareil  rénal,  car  nous  avons  vu  aussi  le 
péricarde  s'ouvrir  dans  une  poche  ou  vésicule  de  Bojanus, 
chez  les  Lamellibranches  (2). 

Quant  aux  variations  d'une  importance  secondaire  qui  se 

(1)  Aider  et  Hancock,  Monogr.  of  (2)  M.  Leuckart  interprète  aussi  de 

the  British  Nudibr.  Moll.  (  voyez  les  la  sorte  les  observations  de  MM.  Han- 

septième  et  huitième  pages  du  texte  cock  et  Embleton ,  et  considère  le  sac 

relatif  aux   planches  1  et  2,  Fam.  1).  pulsatile  en  question  comme  l'ana- 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES,  i  51 

remarquent  dans  la  disposition  du  système  de  lacunes,  de  ca- 
naux ou  de  vaisseaux  dont  se  compose  le  segment  veineux  du 
cercle  circulatoire  chez  les  divers  Gastéropodes ,  je  crois  inutile 
de  m'y  arrêter  ici,  et  je  me  bornerai  à  indiquer  quelques-unes 
des  sources  où  il  faudrait  puiser  pour  obtenir  de  plus  amples 
renseignements  à  ce  sujet,  ou  pour  trouver  une  description  plus 
complète  des  autres  parties  de  l'appareil  irrigatoire  de  ces  Mol- 
lusques. 

On  doit  à  M.  Huxley,  professeur  de  zoologie  à  l'École  des  système  veineux 
mines,  en  Angleterre,  des  observations  intéressantes  sur  la  cir-  Fh-oics. 
culation  lacunaire  chez  les  Firoles  et  les  Atlantes,  où  la  transpa- 
rence des  tissus  permet  de  constater  de  visu  la  route  suivie  par 
le  sang  dans  l'organisme  vivant  (1).  31.  Leuckart  est  arrivé  à 
des  résultats  analogues  en  étudiant  divers  Mollusques  de  la 
même  famille ,  et  ce  naturaliste  distingué  a  reconnu  que  l'ap- 
pareil circulatoire  n'affecte  la  forme  tubulaire  que  dans  la  por- 
tion basilaire  du  segment  artériel  (2). 

logue  du  réservoir  urinaire   dont  il  ces  singuliers  Mollusques  ,  et  le  tube 

sera  question  ailleurs  (a).  alimentaire,  ainsi  que  le  système  ner- 

(1)  Chez  les  Firoles,  le  mode  de  veux,  y  baigne.  M.  Huxley  a  vu  aussi 

distribution  des  artères  est  à  peu  près  très   distinctement    le    sang  circuler 

le  même  que  celui  indiqué  ci-dessus  dans  tous  les  espaces  existants  entre 

chez  la  Carinaire  ;  mais  ,  ainsi  que  je  les  intestins  et  les  parois  de  la  cavité 

l'ai  déjà  dit,  les  principaux  vaisseaux,  viscérale;  il  n'a  pu  découvrir  nulle 

au  lieu  de  se  ramifier  comme  d'ordi-  part  la  moindre  trace  de  veines,  et  il 

naire,   sont  tronqués  et  se  terminent  ajoute  :  «  Fiioloides  ihen  alTords  the 

par  des  orifices  contractiles  d'où  le  sang  »  most  complète  ocular  démonstration 

s'échappe  dans  les  lacunes  voisines,  »  of  the  truth  of  M.  JMilne  Edwards's 

disposition  qui  semble  devoir  offrir  de  »  views  with  regard  to  the  nature  of 

l'analogie  avec  celle   que  l'aorte  ce-  »  the  circulation  on  the  Mollusca  that 

phalique  nous  a   présentée  chez  les  »  can  possibly  be  desired  (6).  » 
Haliotides  ,  etc.  Le  sang  veineux  tra-  (2)  M.   Leuckart  a  confirmé  le  fait 

verse  librement  la  grande  cavité  qui  de  la  circulation  du  sang  à   travers 

occupe  la  presque  totalité  du  corps  de  la  grande  cavité  du  corps  et  dans  les 

(a)  R.  Leuckait,  Op.  cit.  (Zool.  Untcrsuch.,  Heft  III,  p.  55). 

(ft)  Huxley,  On  the  Moi-phology  of  the  Cephalous  Mollusca  as  illustrated  by  the  Anatonuj  o\ 
certain  Heteropoda  and  Pteropoda  collected  during  the  Voyage  of  H.  M.  S.  Rattlesnake  in  1846- 
1850  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  32). 


^52  CIRCULATION    DU    SANG 

systèm™e„x  ,  Les  observations  de  M.  Quatrefages  sur  l'état  plus  ou  moins 
Éoiides.  dégradé  de  l'appareil  circulatoire  chez  les  Éolidiens  ont  été  le 
point  de  départ  de  beaucoup  de  recherches  anatomiques  sur  ce 
groupe  de  Mollusques  et  sur  les  genres  voisins  (1).  Un  jeune  chi- 
rurgien de  la  marine  de  beaucoup  de  mérite,  M.  Souleyet,  a 
fait  voir  que  cette  dégradation  est  moins  grande  qu'on  ne  le 
pensait  d'abord,  et  a  très  bien  décrit  le  système  de  canaux 
branchio-cardiaques  qui  chez  ces  Animaux  ramène  le  sang  des 
organes  de  la  respiration  au  cœur  ;  mais  à  son  tour  il  est  tombé 
dans  des  exagérations  contraires,  lorsqu'il  a  affirmé  que  le 
système  veineux  des  Éolidiens  était  composé  de  vaisseaux 
semblables  à  ceux  des  Animaux  supérieurs  (2).  Eniin,  le  même 


lacunes  intcrorganiques  de  la  niasse 
viscérale ,  chez  les  Firoles  ;  mais  ce 
naturaliste  pense  qu'une  portion  du 
sang  rentre  de  ces  cavités  clans  le 
cœur  sans  aller  aux  branchies,  et  qu'il 
ne  fait  qu'osciller  dans  ces  derniers 
organes  ,  où  il  n'y  aurait  qu'un  seul 
vaisseau  (a). 

Dans  le  genre  Atlante  ,  qui  appar- 
tient aussi  à  l'ordre  des  Hétéropodes, 
la  disposition  du  cœur  et  des  artères 
est  à  peu  près  la  même  que  chez  les 
Carinaires,  et  M.  Huxley  a  vu  le  sang 
veineux  revenir  vers  le  cœur  en  tra- 
versant la  cavité,  viscérale,  dont  la  ca- 
pacité est  très  considérable  (6). 

(1)  M.  de  Quatrefages  a  été  le  pre- 
mier à  signaler  l'existence  d'une  cir- 
culation extra-vasculaire  chez  les  Gas- 
téropodes, et,  bien  qu'il  ait  cru  d'abord 
à  une  dégradation  plus  grande  que 


celle  existant  réellement  chez  les  Éoli- 
diens, le  service  qu'il  a  rendu  ainsi  à 
la  science  est  très  considérable. 

(2~)  Dans  un  de  ses  premiers  écrits 
sur  ce  sujet,  Souleyet  avait  annoncé 
l'existence  de   veines  qui  porteraient 
le  sang  des  viscères,  etc.,  aux  bran- 
chies ,  et  notamment  la  présence  de 
deux  de  ces   vaisseaux   qui  rappor- 
teraient  le   sang  de  la   masse  buc- 
cale et  qui  seraient  des  satellites  de 
Tarière    aorte    (c)  ;    mais   l'examen 
des    préparations    anatomiques    sur 
lesquelles  il  se  basait  m'a  convaincu 
que    ces    prétendus    vaisseaux   san- 
guins  n'étaient   en    réalité   que   des 
brides  membraneuses.  MM.  Hancock 
et  Embleton  décrivent  sous  le  nom  de 
veines   les   vaisseaux  branchio  -  car- 
diaques ;  mais  ils  reconnaissent  que 
dans  le   système  sous-tégumentaire 


(a)  Leuckart,  Zoologische  Untersuchungen,  drilles  Heft,  1854,  p.  53  et  54. 

(6)  Huxley,  Op.  cit.  (Philos.  Tram.',  4853,  p.  37,  pi.  3,  fig.  2,  3,  4). 

(c)  A.  von  Nordmann,  Versuch  einer  Monographie  des  Tergipes  Edwardsii  (Mém.  de  l'Acad. 
des  sciences  de  Saint-Pétersbourg  ,  Savants  étrangers,  t.  IV,  et  Ami.  des  sciences  nat.,  1846  , 
3«  série,  t.  V,  p.  i-10). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  153 

sujet  a  été  traité  par  M.  Nordmann  (1)  et  par  M.  Blanchard, 
dont  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  citer  les  travaux  (2). 


ces  canaux  communiquent  avec  les 
sinus  interorganiques  (a).  Enfin,  dans 
leur  dernier  ouvrage,  MM.  Hancock 
et  Aider  disent  qu'il  leur  a  été  impos- 
sible de  bien  déterminer  la  roule  sui- 
vie par  le  sang  pour  aller  des  artères 
dans  ces  vaisseaux  branchio-cardia- 
ques  (qu'ils  nomment  toujours  des 
veines  ) ,  mais  qu'ils  sont  convaincus 
que  cela  a  lieu  comme  chez  les  autres 
Nudibranches  (b).  Or,  voici  comment, 
dans  le  même  ouvrage,  ils  s'expliquent 
sur  ce  mode  de  circulation  :  «  Chez 
»  les  Éolidiens,  disent-ils,  tout  le  sang 
»  envoyé  aux  divers  organes  passe 
»  dans  1rs  grands  sinus  abdominaux 
»  ou  espaces  interviscéraux,  et  de  là 
»  pénètre  dans  le  tissu  cellulaire  de  la 
))  peau  pour  aller  en  partie  aux  pa- 
»  pilles  branchiales,  et  retourner  en- 
»  suite  au  cœur  par  des  veines  effé- 
»  renies  qui  se  réunissent  pour  former 
»  trois  gros  troncs .  lesquels  débou- 
»  client  dans  l'oreillette  et  reçoivent 
»  aussi  le  sang  qui  arrive  des  sinus  au 
»  tissu  cellulaire  sous- cutané  aussi 
»  bien  que  le  sang  qui  a  respiré  dans 
»  les  branchies  (c).  » 

Ainsi  tous  les  observateurs,  à  l'ex- 
ception de  M.  Souleyet,  sont  aujour- 
d'hui d'accord  pour  admettre  que 
chez  les  Éolidiens  le  sang  veineux 
passe  dans  les  lacunes  interorganiques, 
question  que  la  commission  chargée 


de  l'examen  des  travaux  de  MM.  Qua- 
trefages  et  Souleyet  avait  cru  devoir 
laisser  indécise  (cl). 

(1)  M.  Nordmann  se  prononce  de 
la  manière  la  plus  positive  sur  le  fait 
de  la  circulation  veineuse  lacunaire 
chez  son  Tergipes  Edwardsii  ;  mais, 
en  citant  ses  observations  sur  ce  point, 
je  dois  faire  toutes  réserves  au  sujet 
des  opinions  émises  par  ce  zoologiste 
sur  le  mécanismede  la  circulation  et  sur 
plusieurs  autres  points  de  la  physiolo- 
gie et  de  l'anatomie  des  Éolidiens  (e). 

(2)  Voici  dans  quels  termes  cet  ana- 
tomiste  si  habile  dans  l'art  des  injec- 
tions s'exprime  a  ce  sujet ,  en  parlant 
des  Éolidiens  du  genre  Janus  :  «  Le 
»  sang  conduit  aux  organes  par  les  ar- 
»  tères,  s'épanche  ici,  comme  chez  tous 
»  les  Gastéropodes,  dans  la  cavité  gé- 
»  néraledu  corps  et  dans  tous  les  méats 
»  intermusculaires.  Il  pénètre  ainsi 
»  dans  les  cirrhes  branchiaux,  où  il 
»  existe  un  véritable  canal,  le  rameau 
»  hépatique.  Mais  ce  canal  afférent  des 
»  branchies ,  très  distinct  du  réseau 
»  quand  l'injection  y  a  pénétré,  offre 
»  sur  tout  son  trajet  des  branches  qui 
»  ne  sont  limitées  également  que  par 
»  les  muscles  et  tous  les  tissus  envi- 
»  ronnants.  Le  sang,  ayant  de  la  sorte 
»  pénétré  dans  les  organes  respira- 
»  loires ,  est  repris  ensuite  par  un 
»  système  de  vaisseaux  efférents  (/").  » 


(a)  Souleyet,   Observations  anatomiques  sur  les  genres  Actéon,  Eolide,  etc.  (Comptes  rendus, 
1845,  t.  XX,  p.  81). 

(b)  Hancock  et  Embleton,   On  the  Anatomy  of  Eolis  (Ann.  of  Nat.  Hist  ,  1848,  new  séries, 
vol.  I,  p.  101). 

(c)  Aider  et  Hancock,  Monogr.  of  the  Brit.  Nitdibr.  Moll.,  Fam.  3,  genre  13  ;   6°  page  du  texte 
dépendant  de  la  pi.  7,  fam.  3. 

(d)  Op.  cit.,  p.  15. 

(e)  Is.  Geoffroy  Saint-Hilairc,  Rapport  sur  plusieurs  Mémoires,  etc.,  relatifs  aux  Mollusques 
Gastéropodes  dits  Phlébentérés  (Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences,  1851,  t.  II,  p.  41). 

(f)  Blanchard,  Organisât,  des  Opisthobranches  (Ann.  des  se.  nat.,  1849,  3°  série,  t.  XI,  p.  85). 


des 

Oscabrions, 

Planorbes,  etc. 


154  CIRCULATION    DU    SANG 

>      -        Le  système  irrigatoire  des  Oscabrions  a  été  étudié  avec 
beaucoup  de  soin  par  M.  Middendorff  (1). 

Le  professeur  von  Siebold  s'est  également  convaincu  de 
l'absence  de  veines  à  parois  propres  chez  l'Agrion  (2),  et 
M.  Moquin-Tandon  a  observé  directement  la  circulation  du 
fluide  nourricier  dans  la  cavité  abdominale  des  Planorbes  , 
ainsi  que  la  manière  dont  les  viscères  y  baignent  (3).  Enfin, 
on  doit  aussi  à  M.  Franz  Leydig  un  travail  approfondi  sur  l'ap- 
pareil circulatoire  de  la  Paludine  vivipare ,  et  la  figure  sché- 
matique qu'il  en  a  donnée  montre  mieux  peut-être  que  toute 
autre  l'ensemble  de  vaisseaux  et  de  lacunes  à  l'aide  desquels 
l'irrigation  physiologique  s'effectue  chez  les  Gastéropodes  (4). 


(1)  Les  recherches  de  M.  Midden- 
dorff sur  les  Oscabrions  (a)  sont  éga- 
lement confirmatives  des  résultats  que 
j'avais  publiés  quelques  années  aupa- 
ravant sur  l'état  lacunaire  d'une  por- 
tion plus  ou  moins  considérable  du 
système  veineux  chez  tous  ces  Ani- 
maux. Il  a  trouvé  que  le  grand  sinus 
artériel  de  la  tête  communique  non- 
seulement  avec  l'artère  gastrique  et 
les  canaux  latéraux  du  pied,  mais 
débouche  aussi  directement  dans  deux 
grands  canaux  veineux  situés  parallè- 
lement aux  précédents,  à  la  base  des 
branchies,  et  fournissant  le  sang  à  ces 
organes.  De  grandes  lacunes  veineuses 
s'élèvent  aussi  en  forme  d'arcs  trans- 
versaux des  sinus  latéraux  sur  la  ré- 
gion dorsale  du  corps  ,  et  dans  toutes 
ces  cavités  les  parois  paraissent  être 
formées,  non  par  une  membrane  con- 
tinue et  distincte  des  parties  voisines, 
mais  par  celles-ci  et  le  tissu  connectif 
qui  les  revêt.  Le  sang,  après  avoir  tra- 
versé les  blanchies  qui  occupent  les 


deux  côtés  du  corps  ,  passe  dans  un 
canal  branchio- cardiaque,  puis  dans 
les  oreillettes ,  et  chacun  de  ces  or- 
ganes ,  comme  nous  l'avons  déjà  dit, 
le  verse  dans  le  ventricule  unique  par 
deux  orifices,  l'un  antérieur  et  l'autre 
postérieur. 

(2)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau 
Manuel  d'anat.  comp.  ,  t.  I,  p.  325 
et  326. 

(3)  Moquin-Tandon,  Observ.  sur  le 
sang  des  Planorbes  (Ann.  des  sciences 
nat.,  1851,  3e  série,  t.  XV,  p.  U9). 

{Il)  Leydig,  Ueber  Paludina  vivi- 
para,  ein  Beitrag  zur  nahern  Kennt- 
niss  dièses  Thieres  in  embnjologis- 
cher ,  anatomischer  and  histologis- 
cher  Beziehung  (  Zeitschr.  fur  wis- 
sensch.  Zoologie,  1850,  Bd.  II,  p.  169, 
pi.  13,  fig.  69). 

J'ajouterai  que ,  d'après  les  figures 
et  la  description  un  peu  vague  que 
M.  Délie  Chiaje  a  données  de  l'appareil 
circulatoire  du  G  aster  opter  on  Mec- 
kelii,  il  est  probable  que  les  canaux 


(a)  Middendorff ,  Op.  cit.  (Mm.  de  l'Acad.  de  Saint-Pétersbourg,  6e  série,  Sciences  naturelles, 
t.  VI,  p.  133,  pi.  8,%.  5,  etc.). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  155 

§  15.  —  Cet  état  lacunaire  du  système  veineux,  et  Hmper- c™ication 
fection  que  nous  avons  rencontrée  parfois  dans  la  portion  ter-  systèmevemeux 
minale  du  système  artériel,  ne  sont  pas  les  seuls  indices  de  l'extérieur. 
dégradation  qui  se  remarquent  dans  l'appareil  circulatoire  des 
Gastéropodes;  d'après  des  observations  qui  deviennent  chaque 
jour  plus  nombreuses ,  il  n'est  guère  permis  de  douter  de 
l'existence  de  communications  directes  entre  les  réservoirs  san- 
guins et  l'extérieur  chez  plusieurs  de  ces  Mollusques,  commu- 
nications à  l'aide  desquelles  une  certaine  quantité  d'eau  pour- 
rait pénétrer  directement  dans  ces  cavités  et  s'y  mêler  au 
Huide  nourricier,  ou  bien  une  portion  de  celui-ci  s'échapper  de 
l'organisme  quand  l'Animal  éprouve  le  besoin  de  diminuer 
considérablement  le  volume  total  de  son  corps,  Des  phéno- 
mènes de  cet  ordre  ont  été  vus  chez  des  Gastéropodes  dont  les 
tissus  sont  assez  transparents  pour  permettre  à  l'observateur 
de  suivre  de  l'œil  tous  les  mouvements  du  sang  dans  l'intérieur 
de  l'organisme,  et  la  communication  du  système  irrigatoire 
avec  l'extérieur  a  été  constatée  expérimentalement  chez  d'au- 
tres espèces  dont  les  téguments  opaques  s'opposent  au  genre 
d'exploration  dont  je  viens  de  parler. 

Ainsi  MM.  H.  Millier  et  Gegenbaur  ont  trouvé  chez  les 
Phyllirhoés,  Mollusques  pélagiques  de  l'ordre  des  Hétéropodes, 
dont  les  tissus  sont  d'une  grande  transparence  et  dont  l'organi- 
sation est  très  simple,  un  vaste  sac  membraneux  et  contractile 
qui  paraît  être  l'analogue  du  corps  de  Bojanus,  ou  appareil 
urinaire  dont  il  a  été  déjà  question  chez  les  Lamellibranches  , 
et  qui  communique,  d'une  part,  avec  l'extérieur,  à  l'aide  d'un 

veineux  du  pied  de  ce  Mollusque  sont  des  figures  de  ces  canaux,  mais  sans 

pour  la  plupart  de  simples  lacunes  préciser  davantage  le  trajet  suivi  par 

et  débouchent  dans  la  cavité  abdo-  le  sang  (b). 
minale  (a).    Souleyet  a  donné   aussi 

(a)  Délie  Chiaje,  Bescriz.  et  nolom.  degli  Anhn.  invertebr.,  t.  11,  p.  87,  pi.  55,  0e,  4. 
(6)  Souleyet,  Voyage  de  la  Bonite,  Zool.,  t.  11,  p.  46:>,  pi.  26,  %.  13. 


156 


CIRCULATION    DU    SANG 


orifice  contractile,  et,  d'autre  part,  avec  la  chambre  péricar- 
dique  :  or,  ils  ont  reconnu  que  cette  dernière  cavité  fait  partie 
du  grand  système  de  réservoirs  veineux  (1). 

M.  R.  Leuckart  a  aperçu  une  disposition  analogue  chez  les 
Firoles ,  où  un  sac  contractile,  situé  tout  à  côté  du  cœur,  com- 
munique avec  l'extérieur  par  un  grand  orifice  cilié ,  et  exécute 


(1)  Ce  sac  bojanien,  que  MM.  Quoy 
et  Gaimard  avaient  considéré  comme 
élant  probablement  un  utérus  (a),  et 
que  Souleyet  a  décrit  sommairement 
comme  étant  un  sinus  veineux  dorsal 
analogue  au  sinus  branchio-cardiaque 
des  Éolidiens  (6),  débouche  au  dehors 
par  un  orifice  garni  de  cils  vibratiles 
entouré  de  fibres  musculaires  annu- 
laires et  situé  sur  le  côté  du  corps,  à 
quelque  distance  de  l'anus.  Antérieu- 
rement il  se  termine  par  un  col  étroit 
qui  est  également  pourvu  tant  de 
fibres  musculaires  constricteurs  que 
de  cils  vibratiles,  et  qui  débouche  à  la 
partie  postérieure  du  sac  péricar- 
dique.  Cette  disposition,  signalée  par 
M.  R.  Leuckart  (c),  a  été  étudiée  avec 
beaucoup  de  soin  par  MM.  H.  Millier 
et  Gegenbaur.  Ce  grand  réservoir 
a  des  mouvements  pulsatiles  qui  ne 
correspondent  pas  à  ceux  du  cœur,  et 
il  est  rempli  d'un  liquide  aqueux  dans 
lequel  on  n'aperçoit  pas  de  corpuscules 
organiques  semblables  aux  globules 
du  sang.  Le  sac  péricardique ,  dans 
lequel  il  débouche,  est  au  contraire 
occupé  par  du  sang,  et  communique 
sur  divers  points  avec  la  cavité  géné- 
rale du  corps,  laquelle  est  aussi  un 


sinus  veineux.  Le  cœur  baigne  donc 
dans  le  sang  (ainsi  que  cela  se  voit 
aussi  chez  les  Crustacés  )  ,  mais  il 
n'existe  aucune  communication  directe 
entre  son  intérieur  et  celle  du  sinus 
péricardique ,  de  sorte  que  l'eau  qui 
arrive  directement  du  dehors  dans  le 
sac  bojanien,  et  qui  passe  de  cet  or- 
gane dans  le  péricarde,  où  elle  se  mêle 
avec  le  sang,  ne  pénètre  pas  immé- 
diatement dans  le  système  artériel , 
et  ne  peut  que  se  répandre  dans  les 
lacunes  veineuses  voisines  ou  dans  le 
grand  réservoir  formé  par  la  cavité 
générale  du  corps.  MM.  Gegenbaur 
et  II.  Millier  considèrent  ce  sac  comme 
étant  un  organe  excrétoire  compa- 
rable à  l'appareil  urinaire  des  autres 
Mollusques ,  mais  servant  aussi  à  in- 
troduire de  l'eau  du  dehors  dans  les 
cavités  veineuses  (d). 

J'ajouterai  que  ces  naturalistes  n'ont 
aperçu  aucune  trace  de  vaisseaux  pro- 
prement dits  pour  effectuer  le  retour 
du  sang  distribué  au  loin  dans  l'éco- 
nomie par  les  artères  qui  partent  du 
ventricule  du  cœur,  et  qui  paraissent 
être  disposées  à  peu  près  comme  chez 
les  Firoles. 


[    (a)  Quoy  et  Gaimard,  Voyage  de  l'Astrolabe,  Zool.,  1830,  t.  II,  p.  405,  pi.  28,  iig.  10. 

(b)  Souleyet,  Voyage  de  la  Bonite,  Zool.,  t.  II,  p.  403,  pi.  24,  fig.  3. 

(c)  R.  Leuckart,  Nachtrdgliche  Bemerkungen  ûber  den  Bau  von  Phyllirhoe  (Archiv  fur  Natur- 
geschichte,  1853,  t.  I,  p.  250). 

(d)  H.  Millier  et  Gegenbaur,   Ueber  Phyllirhoe  bucephalura  (Zeitschrift   fur  wissenschaftliche 
Zoologie,  1854,  t.  V,  p.  364  et  suiv.,  pi.  19,  fig.  1  et  5). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    GASTÉROPODES.  157 

souvent  des  mouvements  de  diastole  et  de  systole,  niais  qui 
d'ordinaire,  tout  en  recevant  de  l'eau  à  chaque  dilatation  ,  n'en 
expulse  pas  au  dehors  au  moment  de  sa  contraction.  M.  Leuc- 
kart  pense  que  ce  sac  est,  de  même  que  le  réservoir  bojanien 
desPhyllirhoés,  un  organe  bojanien  dont  la  cavité  communique 
avec  la  poche  péricardique  et  verse  de  l'eau  dans  les  sinus  Vei- 
neux avec  lesquels  cette  cavité  communique  (1). 

Un  mode  d'organisation  qui  se  rapproche  beaucoup  de  ce 
que  nous  venons  de  voir  chez  ces  divers  Hétéropodes,  a  été 
découvert  chez  un  Gastéropode  ordinaire  par  M.'  Leydig.  Cet 
anatomiste  a  trouvé  que  le  sac  bojanien  qui  est  logé  sous  la 
voûte  de  la  chambre  respiratoire,  et  qui  y  débouche  par  un 
orifice  particulier,  est  aussi  en  connexion  avec  les  cavités  vei- 
neuses voisines  du  cœur  (2). 

Enfin  ,  dans  cette  classe ,  de  même  que  dans  celle  des  Mol- 
lusques Acéphales,  des  communications  entre  le  système  irriga- 


(1)  Le  sac  bojanien  des  Firoles  est  sphincters.  Cet  anatomiste  a  reconnu 
situé  entre  le  rectum  et  le  cœur  ;  il  se  des  globules  du  sang  dans  le  liquide 
contracte  et  se  dilate  alternativement,  aqueux  dont  le  réservoir  en  question 
et  se  remplit  à  chaque  instant  d'eau  est  rempli,  et  il  a  vu  que  les  injections 
qui  y  pénètre  par  un  orifice  placé  du  à  la  gélatine  y  arrivent  très  facilement 
côté  droit  du  corps  ,  et  il  baigne  dans  du  système  des  cavités  veineuses  ; 
le  sang  veineux  (a).  M.  Leuckart  enfin  il  a  vu  aussi  les  vaisseaux  san- 
pense  que  ce  réservoir  contractile  guins  voisins  se  vider  brusquement 
communique  intérieurement  avec  le  quand  on  vient  à  ouvrir  ce  réser- 
cœur ,  dont  l'oreillette  a  des  parois  voir  (c). 

trouées  (b).  Il  est  aussi  à  noter  qu'en  injectant 

(2)  Je  reviendrai  ailleurs  sur  cet  le  système  veineux  lacunaire  des  Do- 
appareil  rénal  ,  et  je  me  bornerai  à  ris ,  j'ai  souvent  vu  le  liquide  coloré 
ajouter  ici  que,  d'après  M.  Leydig,  il  sortir  par  le  pore  rénal;  mais  je 
y  aurait  au  fond  du  sac  bojanien  plu-  m'expliquais  ce  fait  en  supposant  que 
sieuis  orifices  donnant  dans  la  cham-  quelque  rupture  s'était  produite  dans 
bre  péricardique  et  garnis  de  fibres  les  parois  des  canaux  veineux  de  la 
musculaires  disposées  en   forme   de  glande  urinaire. 

(a)  Huxley,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  33,  pi.  2,  ûg.  2,  3  c;. 

(b)  Louckart,  Beitr.  zur  Naturgesch.  de)'  Cephalophoren  (Zool.  Untersuchujigen,  t.  III,  p.  57), 

(c)  Leydig,  Ueber  Paludina  vivipara  (Zeitschi'.  fur  wissensckaftl-  Zool.,  1850,  t.  II, p  .  176). 


158  CIRCULATION    DU    SANG 

toire  et  l'extérieur  paraissent  pouvoir  s'établir  quelquefois  par 
d'autres  voies.  Ainsi  M.  Agassiz  a  reconnu  que  le  pore  situé 
vers  le  milieu  du  pied,  chez  les  Gastéropodes  du  genre  Pyrule, 
est  l'orifice  d'un  canal  rameux  en  continuité  avec  le  système 
veineux  général  (1). 

îl  paraîtrait  donc  que  chez  divers  Gastéropodes,  de  même 
que  chez  certains  Mollusques  Acéphales  et  beaucoup  de 
Zoophyles,  l'appareil  irrigatoire  n'est  pas  complètement  fermé 
et  peut  communiquer  plus  ou  moins  directement  avec  l'exté- 
rieur, disposition  dont  l'existence  a  été  annoncée  il  y  a  une 
douzaine  d'années  par  un  naturaliste  très  habile  de  la  Belgique, 
M.  Van  Beneden,  mais  n'avait  pas  été  suffisamment  prouvée  par 
cet  auteur  (2).  Le  nom  de  système  aquifère  ,  que  M.  Délie 
Chiaje  a  donné  à  une  portion  du  système  veineux,  se  trouve 
donc  justifié  jusqu'à  un  certain  point  ;  mais,  dans  l'état  actuel 
de  la  science,  je  ne  vois  aucune  raison  pour  admettre  avec  ce 
naturaliste  distingué  qu'il  y  ait  chez  les  Mollusques  un  système 
particulier  de  tubes  destiné  à  contenir  l'eau  absorbée  ainsi  du 
dehors  (3). 

(1)  Cet  orifice  pédieux  est  assez  de  M.  Délie  Chiaje  »  ,  et  que  l'eau 
grand  pour  recevoir  un  tuyau  de  peut  pénétrer  dans  les  réservoirs  vei- 
plume ,  et  les  ramifications  du  canal  neux  (notamment  la  grande  cavité 
qui  en  part  se  terminent  librement  péri-intestinale)  par  des  orifices  di- 
dans  la  cavité  abdominale.  M.  Agassiz  rects  situés  clans  diverses  parties  du 
s'est  assuré  qu'une  injection  colorée  corps  ,  par  exemple  dans  l'organe  de 
introduite  par  cette  voie  pénètre  très  Bojanus.  Ces  vues,  présentées  sous 
facilement  dans  les  autres  parties  du  forme  de  propositions,  n'ont  pas  été 
système  veineux  (a).  développées  par  cet  auteur  (6). 

(2)  M.  Van  Beneden  a  été  conduit  à  (3)  Il  règne  dans  les  écrits  des  natu- 
penser  qu'il  y  avait  cliez  divers  Mol-  ralistes  une  grande  confusion  au  sujet 
lusques  «  une  véritable  fusion  du  sys-  de  ce  que  M.  Délie  Chiaje  nomme 
tème  veineux  avec  le  système  aquifère  l'appareil  aquifère  ou  hydropneuma- 


(a)  Agassiz,  Ueber  dus  Wassergefâss-System  der  Mollusken  (Zeilschrift  fur  whsenschafll.  Zoo  ■ 
loyie,  1856,  t.  VII,  p.  176). 

(b)  Van  Beneden,  Sur  la  circulation  dans  les  Animaux  inférieurs  (Comptes  rendus  de  l'Acad. 
des  sciences,  1845,  t.  XX,  p.  517). 


Classe 
des 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    PTÉROPODES.  159 

§  16.  —  Nous  ne  savons  que  peu  de  chose  au  sujet  de  la 
circulation  du  sang  chez  les  Ptéropodes.  On  a  trouvé  chez  tous    ptérop'odes 
ces  petits  Mollusques  Pélagiens  un  cœur  composé  d'un  ventri- 
cule et  d'une  oreillette  situés  un  peu  sur  le  côté,  vers  la  partie 


tique  des  Mollusques;  et,  pour  pou- 
voir discuter  utilement  la  question  de 
l'existence  ou  de  l'absence  de  commu- 
nications directes  entre  le  système 
sanguin  et  l'extérieur ,  il  est  néces- 
saire d'en  dire  quelques  mots. 

Vers  1825,  M.  Délie  Chiaje  annonça 
l'existence  d'un  système  de  canaux 
aquifères  dans  le  corps  de  quelques 
.Mollusques  Gastéropodes,  et  notam- 
ment du  grand  Triton  de  la  Méditer- 
ranée ,  et  quelques  années  après  il 
publia  un  Mémoire  spécial  sur  cet 
appareil  chez  les  Annélides  et  les 
Zoophytes,  aussi  bien  que  chez  les 
Mollusques;  puis  il  revint  sur  le 
même  sujet,  d'abord  dans  son  Manuel 
d'anatomie  comparée,  et  ensuite  dans 
son  grand  ouvrage  Sur  les  Animaux 
sans  vertèbres  de  Naples ,  où  il  mo- 
difie en  partie  ses  premières  vues  (a). 

Ce  qu'il  appela  le  système  aquifère 
du  Triton  et  des  autres  Gastéropodes 
consiste  en  deux  choses  :  1°  des  ca- 
naux qui  sont  creusés  dans  la  masse 
charnue  du  pied  et  qui  communiquent 
avec  la  cavité  abdominale  (6)  ;  2°  en 
une  cavité  qui  débouche  au  dehors 
par  un  orifice  situé  sous  l'intestin 
rectum,  et  qu'il  supposait  conduire 
également  dans  la  cavité  abdominale. 
Mais  les  canaux  du  pied  ne  sont  autre 


chose  qu'une  portion  du  système  vei- 
neux ,  et  l'orifice  extérieur  dont  il 
vient  d'être  question  en  dernier  lieu 
est  celui  du  sac  membraneux  qui 
renferme  les  organes  urinaires  ou 
analogues  du  corps  de  Bojanus.  Or, 
chez  le  Triton,  je  crois  pouvoir  affir- 
mer que  ce  sac  ne  débouche  point 
dans  la  cavité  abdominale  et  se  trouve 
fermé  au  bout,  absolument  comme  la 
poche  que  Cuvier  a  appelée  le  sac  de 
la  viscosité  chez  le  Colimaçon. 

Là,  par  conséquent,  il  n'existe  pas 
de  système  hydropneumatique;  mais 
nous  venons  de  voir  que  chez  les 
Firoles,  les  Phyllirhoés,  et  peut-être 
aussi  chez  les  Limnées  ,  des  dépen- 
dances de  ce  réservoir  rénal  ou  sac 
bojanien  paraissent  communiquer  avec 
le  système  veineux,  de  façon  à  consti- 
tuer la  portion  vestibulaire  d'un  ap- 
pareil hydraulique  dont  la  portion  pro- 
fonde serait  représentée  par  le  système 
irrigatoire  sanguifère. 

L'appareil  aquifère  ou  respiratoire 
interne  de  l'Aplysie  ,  que  M.  Délie 
Chiaje  signale  dans  son  premier  Mé- 
moire ,  et  qu'il  décrit  avec  plus  de 
détails  dans  son  dernier  ouvrage , 
n'est  autre  chose  que  la  cavité  abdo- 
minale et  la  portion  périphérique  du 
système  veineux  lacunaire  de  ces  Mol- 


(a)  Dcllc  Chiaje,  Su  di  un  nuovo  apparato  di  canaliper  la  circolazione  dell'aque  nelle  interne 
vie  del  corpo  dei  Molluschi  Gasteropodl  Testacei  (Giorn.  medico  Nap.,  1825). 

■ —  Memorie  sulla  stona  e  notomia  degli  Anim.  sema  vertebr.  del  regno  diNapoli,  t,  II,  p.  259 
<ît  suiv.,  1825  (ou  plutôt  1828). 

—  Inslituzioni  di  anatomia  e  physiologia  comparativa,  1832,  t.  I,  p.  278. 

[b)  Iielle  Chiaje,  Memorie,  t.  II,  p.  260. 


160  CIRCULATION    DU    SANG 

postérieure  du  dos ,  donnant  naissance  par  sa  partie  anté- 
rieure à  une  artère  aorte,  et  recevant  le  sang  des  organes  res- 
piratoires par  un  vaisseau  branchio-cardiaque  bien  constitué. 
Enfin,  d'après  quelques  expériences  faites  sur  des  Pneumo- 
dermes  conservés  dans  l'alcool ,  il  paraîtrait  qu'ici,  de  même 
que  dans  les  autres  classes  de  Mollusques  dont  j'ai  déjà  parlé, 
la  cavité  abdominale  fait  partie  du  système  veineux  et  commu 
nique  librement  avec  les  canaux  afférents  des  brancbies  (1).  La 


lasques.  En  1835 ,  M.  Van  Beneden 
avait  annoncé  qu'il  croyait  avoir  re- 
connu une  véritable  fusion  du  sys- 
tème veineux  de  l'Aplysie  avec  le  sys- 
tème aquiière  de  M.  Délie  Chiaje  (a). 
Mais  ce  dernier  anatomiste  n'adopta 
pas  celte  opinion  ;  il  décrit  toujours 
la  cavité  abdominale  de  ces  Animaux 
comme  appartenant  à  leur  système 
aquifère,  et,  quant  au  mode  de  circu- 
lation du  sang  chez  les  Mollusques , 
il  déclare  formellement  ne  pouvoir  se 
l'expliquer  :  «  La  circolazione  venosa 
»  délie  Aplisie  ,  dit-il ,  e  stata  (inora 
»  un  problema  ed  ancora  per  me 
»  d'impossibile  soluzione  (b).  »  Or, 
j'ai  fait  voir  ci-dessus  que  la  chambre 
viscérale  de  ces  Gastéropodes  fait  par- 
lie  intégrante  du  système  veineux  (c) , 
et,  quant  aux  communications  directes 
de  ce  système  avec  l'extérieur,  je  n'en 
vois  aucune  trace. 

Le  système  aquifère  que  M.   Délie 
Chiaje  décrit  sur  les  Téthys  (d) ,  et 


qu'il  considère  comme  distinct  du 
système  circulatoire  ,  n'est  aussi 
qu'une  portion  du  réseau  lacunaire 
veineux  (e). 

Enfin,  les  parties  que  ce  naturaliste 
considérait  comme  représentant  son 
système  aquifère  chez  les  Acéphales, 
sont,  d'une  part,  les  lacunes  vei- 
neuses du  pied  chez  les  Lamelli- 
branches, et,  d'autre  part,  la  cavité 
pharyngienne  et  le  cloaque  chez  les 
Salpa  (f). 

Quant  aux  divers  organes  que 
M.  Délie  Chiaje  désigne  sous  le  nom 
d'appareil  aquifère  ,  chez  les  Cépha- 
lopodes, nous  y  reviendrons  à  la  fin 
de  cette  Leçon. 

(1)  Lorsque  M.  Valenciennes  et  moi 
avons  annoncé  ce  résultat,  nous  n'a- 
vions pu  étudier  l'appareil  circulatoire 
des  Ptéropodes  que  sur  quelques  indi- 
vidus conservés  dans  l'alcool  (g)  ; 
mais,  plus  récemment,  M.  Uuxley  a 
eu  l'occasion  d'observer  plusieurs  de 


(n)  Van  Beneden,  Résultats  d'un  voyage  fait  sur  les  bords  de  la  Méditerranée  (Comptes  rendus 
de  l'Acad.  des  sciences,  1835,  t.  I,  p.  -230). 

(b)  Délie  Chiaje,  Descrizione  e  notomia  degli  Animali  invertebr.  délia  Sicilia  citeriore,  t.  II,  p.  71 . 

(c)  Voyez  ci-dessus,  page  126. 

{d)  Délie  Chiaje,  Op.  cit.,  t.  II,  p.  36. 

(e)  Milne  Edwards,  De  l'appareil  circulatoire  de  la  Téthys  (Voyage  en  Sicile,  t.  I ,  p.  1 40  et 
sniv  ). 

(f)  Délie  Chiaje,  Memorie  sugli  Animali  s enza  vertèbre,  t.  II,  p.  269. 

(y)  Milne  Edwards  et  Valenciennes  ,  Nouvelles  observations   sur   la  constitution  de  l'appareil 
circulatoire  chez  les  Mollusques  (loc.  cit.). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPODES.  161 

constitution  de  l'appareil  circulatoire  des  Ptéropodes  semble 
donc  être  la  même  que  chez  les  Gastéropodes  (1).  C'est  chez 
les  Hyales  que  la  disposition  des  gros  troncs  artériels  a  été  le 
mieux  observée  (2). 

§  17.  —  Dans  la  classe  des  Céphalopodes,  l'appareil  de  la 
circulation  offre ,  en  général ,  un  nouveau  degré  de  perfection- 
nement. Chez  tous  les  Mollusques  dont  il  a  été  question  jus- 
qu'ici ,  le  sang  mis  en  mouvement  par  les  contractions  du  cœur 


Classe 

des 

Céphalopodes. 


ces  Mollusques  à  l'état  vivant ,  et  il 
n'a  pu  apercevoir  aucune  trace  de 
veines  proprement  dites  (a). 

(1)  Souleyet  pense  que  chez  les 
Cléodores  ,  les  Cuviériës  et  les  Spi- 
nales,  l'oreillette  communique  avec 
une  poche  pyriforme  qui  adhère  au 
manteau  et  qui  serait  une  espèce 
de  diverticulum  destiné  à  recevoir  le 
sang  pendant  que  le  premier  de  ces 
organes  est  en  repos  (b)  ;  mais  je  crois 
qu'il  doit  y  avoir  là  quelque  erreur 
d'observation  ,  et  que  la  poche  en 
question  ne  communique  qu'avec  le 
péricarde,  comme  cela  se  vo.it  pour  la 
poche  de  Bojanus  chez  les  Lamelli- 
branches et  la  poche  hyaline  des  Hété- 
ropodes,  et  le  sac  pulsatile  des  Doris, 
mentionné  ci-dessus  (page  156).  En 
efièt,  ce  réservoir  ne  me  paraît  pas 
devoir  être  autre  chose  que  la  poche 
diaphane  observée  par  M.  Huxley,  la- 
quelle débouche  dans  la  cavité  du 
manteau  par  un  petit  orifice  (c),  et 


communique  en  général  ,  d'autre 
part ,  avec  la  cavité  du  péricarde. 
M.  Gegenbaur  a  trouvé  que  chez  tous 
les  Ptéropodes,  excepté  les  Pneumo- 
dermes  ,  la  disposition  de  cet  organe 
est  essentiellement  la  même  que  chez 
les  Hétéropodes  (d). 

(2)  Cuvier  a  constaté  l'existence 
d'un  cœur  chez  VHyale,  à  droite,  vers 
le  tiers  postérieur  de  l'abdomen  (e). 
M.  Van  Beneden  a  vu  que  cet  organe 
se  compose,  comme  d'ordinaire,  d'une 
oreillette  et  d'un  ventricule;  il  a  ajouté 
aussi  quelques  détails  sur  la  direction 
de  l'aorte  et  des  vaisseaux  branchio- 
cardiaques  (f).  Enfin  Souleyet  a  donné 
de  cet  appareil  une  figure  meilleure 
que  celles  publiées  par  les  deux  ana- 
tomistes  que  je  viens  de  citer  [g). 

Dans  le  Clio,  le  cœur  est  placé  à 
peu  près  de  même  et  donne  naissance 
à  une  aorte  que  Cuvier  a  décrite  sous 
le  nom  de  veine  branchiale  (h).  Il  est 
aussi  à  noter  que  le  réseau  vasculaire 


(a)  Huxley,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  42). 

(b)  Souleyet,  Voyage  de  la  Bonite  (Hist.  nat.,  t.  II,  p.  62). 

(c)  Huxley,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1853,  p.  42). 

(d)  Gegenbaur,  Kolliker  et  H.  Millier,  Bericht  ûber  einige  im  Herbste  1 852  in  Messina  angestellte 
vergleichend-anatomische  Untersuchungen  (Zeilschr.  furwissensch.  Zool.,  1853,  t.  IV,  p.  309). 

(e)  Cuvier,  Mém.  concernant  l'anatomie  de  l'Hyale,  p.  5  (Mém.  sur  les  Mollusques,  et  Ann.  dit 
Muséum,  1-804,  t.  IV). 

(f)  Van  Beneden,  Mém.  sur  l'anatomie  des  genres  Hyale,   Êliodore.  et   Cuviérie  (Exercices 
zootomiques,  p.  43,  pi.  3,  fig.  1 ,  et  Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  Xlt). 

(g)  Souleyet,  Op.  cit.,  t.  II,  p.  120,  Atlas,  Mollusques,  pi.  9,  fig.  3  et  4. 

(h)  Cuvier,  Mém,  sur  le  Clio  borealis,  p.   8    (Mém.  sur  les  Mollusques,  et  Annales  du  Muséum 
1802,  I.  I). 


III. 


11 


162  CIRCULATION    DU    SANG 

est  envoyé  dans  toutes  les  parties  du  corps.  Ce  cœur  est  donc, 
pour  me  servir  du  terme  communément  employé  par  les  phy- 
siologistes, un  cœur  artériel ,  et  le  passage  du  fluide  nourricier 
dans  l'appareil  branchial  n'est  assuré  que  par  un  effet  indirect 
ou  secondaire  de  cet  agent.  Mais,  chez  la  plupart  des  Cépha- 
lopodes, il  n'en  est  plus  de  même  :  la  division  du  travail  s'établit 
entre  la  portion  nourricière  et  la  portion  respiratoire  de  l'appa- 
reil de  la  circulation  ;  le  sang  est  toujours  mis  en  mouvement 
dans  les  canaux  irrigatoires  de  l'ensemble  de  l'économie  par  le 
cœur  artériel  ;  mais  un  autre  organe  d'impulsion  vient  accélérer 
et  régulariser  sa  marche  à  travers  chacune  des  branchies.  11 
y  a  donc  là  des  cœurs  branchiaux  aussi  bien  qu'un  cœur  aortique. 
Mais  cette  complication  nouvelle  de  l'organisme  n'existe  que 
chez  les  Céphalopodes  dibranchiaux  qui ,  du  reste ,  sont  les 
principaux  représentants  de  ce  type  ivlalacologiquc  ,  et  chez  les 
Nautiles  il  n'y  a  ,  de  même  que  chez  les  Gastéropodes  ,  qu'un 
cœur  aortique. 

Il  est  essentiel  de  noter  aussi  que,  dans  la  classe  des  Cépha- 
lopodes, le  système  veineux  est  constitué  d'une  manière  beau- 
coup plus  parfaite  que  chez  les  autres  Mollusques  ;  une  portion 
de  ce  système  est  toujours  formée  par  des  méats  interorga- 
niques, mais  dans  la  plus  grande  partie  de  son  étendue  il  revêt 
la  forme  de  tubes  membraneux  à  parois  indépendantes  des 

que  cet  anatomiste  avait  cru   aper-  avait  cru  apercevoir  un  renflement 

cevoir  dans  les  nageoires  de  ce  Mol-  en  forme  de  bulbe  sur  le  trajet  de 

lusque  ne  consiste,  comme  l'a  constaté  l'aorte  (6);  mais,  d'après  les  obser- 

M.  Eschricht,  qu'en  une  réunion  de  valions  deSouleyet,  cette  disposition 

faisceaux  musculaires  (a).  Les   véri-  n'existerait  pas  (c).  Chez  les  Cléodores, 

tables  vaisseaux   branchio-cardiaques  le  ventricule  du  cœur  est  situé  devant 

sont  situés  ,  comme  d'ordinaire,  der-  l'oreillette  (d). 
rière  l'oreillette.    M.    Van   Beneden 

(a)  Eschricht,  Analomische  Unlersuchungen  iiber  die  Clione  borealis.  In-4,  Copenh.,  4 838 . 
(6)  Van  Beneden,  Rech.  ahat.  sur  le  Pneumoderme  violacé  (Exercices  zootomiques,  p.  49,  ci 
Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  l.  XI). 

(c)  Sonleyet,  Voyage  de  la  Bonite(Hist.  Mai.,  t.  II,  p.  264). 

(d)  Huxley,  Morphol.  of  Cephalous  Mollusca  (Philos.  Trans.,  IRTi.0.,  p.  42). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPOPES.  1C3 

parties  voisines ,  et  se  compose  par  conséquent  de  vaisseaux 
proprement  dits. 

Le  cœur  artériel,  que  l'on  peut  toujours  considérer  comme  le  cœur  artériel, 
centre  de  l'appareil  irrigatoire,  est  situé  dans  une  poche  mem- 
braneuse (t)  sur  la  ligne  médiane,  et  occupe  la  face  inférieure 
de  la  région  abdominale  du  corps.  En  se  rappelant  la  position 
de  cet  organe  chez  les  Lamellibranches  ,  on  pourrait  donc 
croire  au  premier  abord  qu'ici  ses  connexions  anatomiques 
ne  sont  plus  les  mêmes  que  chez  ces  Mollusques  inférieurs; 
mais  les  différences  sont  plutôt  apparentes  que  réelles  et  dé- 
pendent seulement  de  la  manière  dont  le  corps  est  recourbé. 
Nous  avons  déjà  vu  que  pour  ramener  le  plan  organique  des 
Gastéropodes  à  celui  de  ces  Lamellibranches,  il  fallait  supposer 
le  corps  de  ceux-ci  recourbé  obliquement  en  dessus,  de  façon 
à  placer  le  rectum  et  l'anus  au-dessus  du  dos  (2).  Chez  les  - 
Céphalopodes,  c'est  le  contraire  :  la  courbure  s'est  effectuée  du 
côté  vertical,  et  c'est  à  la  face  inférieure  de  l'abdomen  que  le 
canal  intestinal  vient  aboutir.  Or,  le  cœur  semble  avoir  suivi  le 
mouvement  opéré  par  le  rectum,  et  par  suite  de  ce  déplace- 
ment, sans  changer  ses  rapports  avec  cet  organe,  être  venu  se 

(1)  Le  péricarde  des  Céphalopodes  est  vrai,  n'avait  trouvé  aucune  sépa- 
est  intimement  uni  aux  lames  mem-  ration  entre  eux,  chez  le  Nautile  (a); 
braneuses  qui  constituent  le  péritoine  mais  les  recherches  plus  récentes  de 
et  qui  forment  les  deux  grandes  poches  M.  Valenciennes  montrent  que  la 
urinaires  que  Cuvier  désignait  sous  le  chamhre  péricardique  est  complète- 
nom  de  sacs  veineux,  parce  que  les  ment  fermée  (6)  et  ne  se  continue 
corps  spongieux  des  troncs  veineux  y  pas  dans  le  siphon  qui  traverse  les 
sont  logés.  Il  ne  paraît  pas  y  avoir,  diverses  chambres  dont  la  coquille  de 
comme  chez  quelques  Lamellibran-  ce  Céphalopode  est  pourvue,  ainsi  que 
ches  et  plusieurs  Gastéropodes,  des  l'avait  supposé  Buckland  (c). 
communications  entre  ces  sacs  et  la  (2)  Voyez  tome  II,  page  80. 
cavité   du   péricarde.   M.    Owen ,  il 

(a)  Owen,  Mem.  on  the  Pearly  Nautilus,  p.  32. 

(6)  Valenciennes,  Nouvelles  recherches  sur  le  Nautile  flambé  (Archives  du  Muséum,  t.  II,  p.  283 
et  301). 

(c)  Bucktaml,  Geology  and  MinerdloQV  considérai  with  Refermée  io  Kalwal  Thêèlogy  vol.  1, 
p.  317. 


lf)&  CIRCULATION    Dl    SANG 

loger  au-dessous  de  sa  portion  terminale,  à  la  face  inférieure 
de  l'abdomen. 

§  18.  —  Le  ventricule  forme,  comme  d'ordinaire,  la  partie 
principale  du  cœur:  mais  c'est  à  tort  que  beaucoup  d'auteurs 
le  considèrent  comme  étant  privé  d'oreillettes.  Si  l'on  dissèque 
seulement  des  Animaux  conservés  dans  l'alcool,  on  n'aperçoit, 
il  est  vrai,  aucune  trace  de  ces  derniers  organes,  et  le  ventri- 
cule parait  ne  recevoir  le  sang  que  par  une  ou  deux  paires  de 
grosses  veines  branchiales  ;  mais  si  l'on  étudie  l'organisation 
de  ces  Mollusques  sur  des  individus  vivants,  sur  une  Seiche, 
par  exemple.,  il  est  facile  de  voir  que  ces  canaux,  dans  leur  état 
normal,  se  dilatent  en  manière  de  réservoirs,  et  que  leurs  parois, 
garnies  de  fibres  musculaires,  se  contractent  fréquemment  pour 
envoyer  le  sang  dans  le  ventricule.  Ce  sont,  par  conséquent, 
des  oreillettes  ;  mais ,  en  général,  ils  sont  peu  développés  et 
affectent  la  forme  de  gros  vaisseaux.  Chez  le  Nautile,  où  ces 
canaux  sont  au  nombre  de  quatre,  ils  ne  paraissent  pas  suscep- 
tibles d'une  grande  dilatation.  Chez  les  Céphalopodes  dibran- 
chiaux,  ils  ne  sont  qu'au  nombre  de  deux  et  sont  souvent  très 
renflés,  ce  qui  les  rend  fusiformes  (1).  Quoi  qu'il  en  soit,  ils 

(1)  Chez  la  Seiche ,  ces  sinus  vesti-  Dans  le  Poulpe,  ces  réservoirs  sont 

bulaires,  ou  oreillettes,  sont  très  déve-  fusiformes  et  assez  vastes  (e). 

loppés ,  et  ont  été  désignés  sous  ce  Dans  l'Argonaute  ,  ils  ont  la  même 

dernier  nom  par  Swammerclam  (a-),  forme  que  chez  le  Poulpe  (/"). 

Hunter  (6)  et  plusieurs  autres  natu-  Enfin,  chez  les  Calmars,  ils  sont  tout 

ralisles   (c)  ;   mais  Cuvier  les  appelle  àfaittubulaires;  mais  on  y  voit,  chez  les 

veines  pulmonaires  (d).  très  jeunesindividus,  despulsations(#). 

(a)  Swammerdam,  Iliblia  Naturœ,  1738,  t.  II,  p.  892,  pi.  52,  %.  1. 

(6)  Hunter,  in  The  Descript.  and  Illustrated  Catalogue  of  the  Physiol.  Séries  of  Camp.  Anat. 
contained  in  the  Muséum  of  the  Collège  of  Surgeons,  vol.  II,  p.  143,  pi.  21. 

(c)  Délie  Chiaje,  Descriz.  e  notom.  degli  Anim.  invertebr.,  t.  I,  pi.  42. 

—  Mayer,  Analecten  fur  vergleichende  Anatomie,  1835,  pi.  5,  fig,  1. 

(d)  Cirvier,  Sur  les  Céphalopodes,  et  leur  anatomie,  p.  45  (Mém.  sur  les  Molhisques). 

(e)  Monro,  Anatomy  of  Fishes,  1785,  pi.  42. 

—  Dolle  Cliioje,  loc.  cit. 

—  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  pi.  11. 

(/")  Poli,  Testacea  utriusque  Sicilien,  182G,  t.  III,  p.  21,  pi.  43,  fig-,  4. 
(g)  Idem,  Op.  cit.,  pi.  18,  p.  135. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPODES.  165 

se  dirigent  transversalement  de  la  base  des  branchies  vers  le 
ventricule ,  sur  les  côtés  duquel  ils  débouchent.  Les  orifices 
auriculo-ventriculaires  sont  toujours  garnis  de  replis  valvulaires 
qui  empêchent  le  retour  du  sang  vers  les  branchies,  et  des 
soupapes  de  même  nature  sont  placées  à  l'origine  des  grosses 
artères  qui  partent  du  ventricule.  Ce  dernier  organe  est  très 
développé  et  varie  un  peu  dans  sa  forme  ;  mais  il  ressemble  au 
cœur  des  Lamellibranches  plus  qu'à  celui  des  Gastéropodes,  et, 
de  même  que  chez  les  premiers,  il  donne  naissance  à  deux  artères 
principales  :  une  aorte  antérieure  et  une  aorte  postérieure.  En 
général,  ses  fibres  musculaires  se  prolongent  un  peu  sur  la  base 
légèrement  renflée  de  ces  vaisseaux,  qui  se  trouvent  ainsi  pour- 
vus d'un  bulbe  contractile  (1). 


(1)  Chez  les  Calmars,  le  ventricule 
artériel  est  un  peu  fusiforme  et  dis- 
posé d'une  manière  presque  symé- 
trique ,  suivant  la  ligne  médiane  du 
corps.  De  chaque  côté ,  il  reçoit  un 
des  troncs  auriculaires ,  et ,  par  ses 
deux  extrémités  antérieure  et  posté- 
rieure, il  donne  naissance  aux  deux 
aortes  :  à  l'aorte  antérieure  par  devant, 
et  à  l'aorte  postérieure  par  derrière  (a). 
Mais,  chez  d'autres  Céphalopodes,  sa 
conformation  devient  très  irrégulière, 
et  les  particularités  que  l'on  y  remar- 
que semblent  dépendre  principale- 
ment d'un  mouvement  de  torsion  par 
suite  duquel  cet  organe  s'est  placé 
obliquement  en  travers,  de  telle  sorte 
que  l'aorte  postérieure  naît  du  bord 
antérieur  du  cœur  entre  l'insertion 
des  deux  troncs  auriculaires,  et  l'aorte 
antérieure  se  trouve  rejetée  tout  à  fait 


de  côté.  Ici  le  tronc  auriculaire  gau- 
che, l'aorte  postérieure,  le  tronc  auri- 
culaire droit,  puis  l'aorte  antérieure, 
naissent  donc  à  peu  près  sur  la  même 
ligne  transversale  ,  et  le  ventricule 
s'élargit  en  dessous  en  forme  de 
panse  (6). 

Dans  la  Seiche,  on  remarque  aussi 
une  courbure  très  forte  du  ventricule, 
qui  prend  presque  la  forme  d'une 
cornemuse  ;  mais  il  n'y  a  pas  de  tor- 
sion, comme  chez  le  Poulpe,  et  l'aorte 
postérieure  naît,  comme  chez  le  Cal- 
mar, du  bord  postérieur  de  cet  or- 
gane ,  ainsi  que  cela  se  voit  très  bien 
dans  la  figure  dessinée  par  Hunier  et 
publiée  dans  le  Catalogue  descriptif 
du  Musée  du  Collège  des  chirur- 
giens de  Londres  (c)  ,  après  avoir 
été  insérée  par  E.  Home  dans  un  de 
ses  Mémoires  {d). 


(a)  Voyez  Treviranus,  Beobacht.  ans  der  Zootomie  und  Physiol.,  -1839,  t.  I,  pi.  8,  lig.   52. 
—  Voyez  aussi  la  planche  19  de  mon  Voyage  en  Sicile,  t.  1. 

(b)  Voyez  le  même  ouvrage,  pi.  11,  ou  l'Atlas  du  Règne  animal,  Mollusques,  pi.  1  c. 

(c)  Hunter,  in  The  Descriptive  and  Illustrated  Catalogue  of  the  Physiological  Séries  of  Cpmp. 
Anat.  contained  in  the  Muséum  of  the  R.  Collège  of  Surgeons  in  London,  1834,  vol.  II,  pi.  22. 

(d)  Home,  An  Account  of  the  Circul.  in  Vernies  (Phil.  Trans.,  1817,  pi.  1  et  2,  et  Lectures  on 
Comp.  Anat.,  t.  IV,  pi.  44  et  45). 


16G  CIRCULATION    Uli    SANG 

Ancres.  §  19.  —  L'aorte  antérieure,  qui  est  la  principale  artère  du 
corps ,  fournit  une  paire  d'artères  palléales  ,  puis  plonge  dans 
la  cavité  abdominale  à  côté  de  l'estomac  ,  longe  ensuite  l'œso- 
phage, donne  des  ramuscules  à  ces  organes,  ainsi  qu'au  foie 
et  à  l'entonnoir,  pénètre  dans  la  tête,  et  se  bifurque  pour  se 
terminer  par  autant  de  branches  qu'il  y  a  de  bras  ou  tentacules 
insérés  autour  de  la  bouche.  L'aorte  postérieure,  qui  est  très 
développée  chez  le  Calmar,  fournit  des  rameaux  à  l'intestin  et 
à  la  partie  postérieure  du  manteau  ;  chez  le  Poulpe,  elle  est 
au  contraire  très  grêle ,  et  il  existe  à  la  partie  postérieure  du 
cœur  un  troisième  tronc  ou  aorte  accessoire  qui  se  rend  direc- 
tement aux  glandes  reproductrices. 

vaisseaux        §  20.  —  Les  canaux  ou  sinus  auriculaires  se  continuent 

branchio-car-    ,    .  ,      -,  ,  ,  -,  i  •    1  •  •  1 

diaques.  latéralement  avec  la  veine  branchiale ,  gros  vaisseau  qui  longe 
le  bord  inférieur  et  libre  de  la  branchie  dans  toute  son  étendue, 
et  reçoit  de  chaque  côté  les  branches  efférentes  fournies  par 
les  nombreuses  rangées  de  touffes  vasculaires  dont  cet  organe 
se  compose. 

Dans  le  Nautile,  le  ventricule  esta  fices  auriculo-ventriculaires  sont  for- 
peu  près  quadrilatère  et  disposé  sy-  mées  de  deux  replis  semi-lunaires  qui 
métriquement ,  les  deux  paires  de  se  renflent  et  se  rapprochent  quand 
troncs  auriculaires  ou  branchio-car-  le  fluide  circulatoire  les  pousse  de 
diaques  y  débouchant  latéralement  ;  dedans  en  dehors ,  mais  se  rabattent 
mais  le  renversement  est  d'ailleurs  quand  le  courant  tend  à  s'établir  des 
complet,  car  c'est  de  son  bord  pos-  branchies  vers  le  cœur.  Dans  le  Poulpe, 
térieur  que  naît  l'aorte  antérieure,  et  deux  valvules  sigmoïdes  semblables 
l'aorte  postérieure,  ou  petite  aorte,  aux  précédentes  garnissent  l'entrée 
part  de  son  bord  antérieur,  comme  on  de  la  grande  aorte  (b)  ;  mais,  chez  les 
peut  s'en  assurer  par  l'inspection  des  Calmars  et  les  Onycoteuthes  ,  on  n'y 
belles  planches  anatomiques  publiées  trouve  qu'une  valvule  unique.  La 
par  M.  Owen  (a).  même  disposition  existe  à  l'orifice  de 

Les  valvules  qui  garnissent  les  ori-  l'autre  tronc  aortique  (c). 

(a)  Owen,  Memoir  on  the  Pearly  Nautilus.  In-4,  i  832,  pL  5  et  G  (et  aussi  dans  les  Annales  des 
sciences  nat.,  1833,  t.  XXVHI,  pi.  3,  fig-.  1  et  2). 

(6)  Cuvier,  Mém.  sur  les  Céphalopodes,  et  leur  anatomie,  p.  22,  pi.  3,  fig-.  4  (Mêm.  sur  les 
',  Mollusques). 

(c)  Owen,  Cephalopoda  (Todd's  Cyclop.  of  Anal,  and  Physiol.,  vol.  I,  p.  542,  fig-.  227). 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPODES.  167 

§  21.  —  La  disposition  du  système  veineux  des  Céphalo-     système 

*  veineux. 

podes  offre  moins  d'uniformité. 

Chez  le  Poulpe  (1),  il  existe  à  la  face  externe  de  chaque  bras  p«»ipe. 
deux  grosses  veines  sous-cutanées  qui  sont  des  tubes  mem- 
braneux pourvus  de  tuniques  parfaitement  distinctes  des  tissus 
d'alentour.  Ces  vaisseaux  ,  après  avoir  reçu  beaucoup  de  bran- 
ches sous-cutanées  et  s'être  anastomosés  entre  eux  à  l'aide  de 
canaux  transversaux,  se  réunissent  deux  à  deux  à  la  base  des 
espaces  inter-tentaculaires,  et  les  huit  troncs  ainsi  formés  s'ana- 
stomosent à  leur  tour  pour  constituer  de  chaque  coté  de  la  tête 
une  veine  faciale  ,  laquelle  se  joint  à  sa  congénère  pour  don- 
ner naissance  à  un  gros  tronc  médian.  La  veine  céphalique 
impaire  ainsi  formée  passe  au-dessus  de  l'entonnoir,  dont  elle 
reçoit  des  rameaux,  et  longe  la  paroi  inférieure  de  l'abdomen 
jusque  dans  le  voisinage  du  cœur  aortique,  où,  après  avoir  reçu 
une  paire  de  gros  vaisseaux  sur  la  disposition  desquels  je  revien- 
drai bientôt,  elle  se  divise  en  deux  branches,  appelées  ajuste  titre 
veines  caves,  qui  se  recourbent  en  dehors  pour  aller  gagner  la 
base  des  branchies  et  y  déboucher  dans  les  cœurs  branchiaux. 
De  grosses  veines  venant  des  glandes  génitales  et  du  manteau 
se  rendent  au  même  point,  de  sorte  que  tout  le  système  cutané 
se  trouve  abondamment  pourvu  de  veines  proprement  dites  (2). 
Mais  le  sang  veineux  des  parties  profondes  des  bras,  de  la  tête 
et  de  toute  la  portion  antérieure  de  l'abdomen,  suit  une  autre 
route.  Il  arrive  par  les  méals  intermusculaires  dans  un  grand 
sinus  qui  entoure  la  bouche,  traverse  la  cavité  céphalique  et  ses 

(1)  Pour  suivre  avec  facilité  la  des-  postérieure  de  la  veine  céphalique  ; 
cription  du  système  veineux  de  ces  que  des  veines  propres  aux  parois  du 
Animaux,  il  serait  utile  d'avoir  sons  cœur  se  rendent  directement  à  la 
les  yeux  les  sept  planches  qui  le  re-  veine  cave  gauche ,  et  que  c'est  dans 
présentent  dans  mon  travail  sur  la  les  tubes  péritonéaux  que  vont  s'ou- 
circulation  chez  les  Mollusques.  vrir  les  veines  génitales  dont  la  por- 

(2)  J'ajouterai  qu'une  grosse  veine  tion  supérieure  est  renflée  en  forme 
hépatique  débouche  dans  la    partie      de  sinus. 


168  CIRCULATION    DU    SANG 

dépendances,  de  manière  à  baigner  la  masse  musculaire  de  la 
bouche ,  le  cerveau  et  la  plupart  des  autres  parties  de  la  tête  ; 
puis,  en  passant,  entre  l'œsophage  et  les  parois  de  la  gaine  péri- 
tonéalc  qui  entoure  ce  conduit,  arrive  dans  une  énorme  poche 
qui  n'est  autre  chose  que  la  chambre  viscérale  limitée,  comme 
chez  les  Animaux  vertébrés ,  par  une  membrane  séreuse  ana- 
logue en  tout  au  péritoine.  Les  glandes  salivaires  postérieures  , 
le  jabot ,  l'estomac  proprement  dit,  le  caecum  pylorique,  l'aorte 
antérieure  ,  et  d'autres  parties  encore,  sont  renfermées  dans 
cette  même  cavité  et  y  flottent  dans  le  sang  veineux  ainsi  emma- 
gasiné dans  cette  sorte  de  grande  lacune  périgastrique.  Au 
delà  du  sac  péritonéal  que  je  viens  de  décrire,  la  tunique  viscé- 
rale adhère  aux  parois  de  l'intestin,  de  façon  à  ne  laisser  aucun 
vide  pour  le  passage  du  sang.  Mais  le  fond  de  ce  sac  est  ouvert 
de  chaque  côté ,  et  verse  son  contenu  dans  deux  gros  tubes 
membraneux  qui  contournent  la  masse  viscérale  et  vont  débou- 
cher à  l'extrémité  postérieure  de  la  grande  veine  céphalique. 
En  effet,  ces  émonctoires  abdominaux  sont  précisément  les 
deux,  grosses  veines  dont  il  a  déjà  été  question  comme  venant 
s'anastomoser  avec  le  tronc  céphalique  immédiatement  au- 
dessus  de  l'origine  des  deux  veines  caves.  Quelques  anato- 
mistes,  avant  de  connaître  leur  mode  d'origine  dans  la  chambre 
viscérale,  les  désignaient  sous  le  nom  de  veines  caves  antérieures; 
mais,  afin  de  rappeler  leur  caractère  spécial,  je  préfère  les 
appeler  tubes  péritonéaux  (1).  Ainsi,  la  totalité  du  sang  veineux 

(1)  Ainsi  que  je  me  suis  toujours  voir  sanguin  qui  occupe  toute  la  re- 
plu à  le  reconnaître ,  c'est  à  M.  Délie  gion  dorsale  du  corps  de  ces  Mol- 
Chiaje,  le  digne  élève  et  successeur  de  lusques  (a).  Mais  M.  Délie  Cliiaje 
Poli,  qu'appartient  le  mérite  d'avoir  n'avait  pas  reconnu  l'existence  des 
constaté  cette  communication  directe  communications  qui  relient  cette  ca- 
entre  les  tubes  péritonéaux,  ou  veines  vite  au  système  lacunaire  de  la  tôle, 
caves  antérieures,  et  le  grand  réser-  et  il  la  considérait  comme  étant  seu- 

(a)  Délie  Clnajc,  Descrh.  e  notom.  degli  Auimali  inverlcbrali,  vol.  I,  p.  47. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPODES.  169 

se  trouve  amenée,  soit  par  le  système  des  veines  sous- cutanées 
et  leurs  dépendances ,  soit  par  le  système  lacunaire  de  la  tête 
et  la  cavité  abdominale,  aux  deux  veines  caves  qui,  à  leur  tour, 
versent  ce  liquide  dans  les  cœurs  branchiaux. 

Les  deux  veines  caves  et  les  deux  tubes  péritonéaux  dont  il 
vient  d'être  question  présentent  dans  leur  structure  une  parti- 
cularité fort  remarquable.  Ces  gros  vaisseaux  sont  garnis  d'une 
multitude  d'appendices  qui  ressemblent  à  des  végétations  et  qui 
se  laissent  gonfler  par  le  sang.  Nous  examinerons  dans  un 
autre  moment  quelles  peuvent  être  les  fonctions  de  ces  singu- 
liers corps  spongieux ,  et  je  me  bornerai  à  ajouter  ici  qu'ils 
sont  suspendus  librement  dans  deux  poches  membraneuses 
situées  sur  les  côtés  du  péricarde ,  et  commençant  au  dehors 
par  des  ouvertures  spéciales  pratiquées  à  la  voûte  de  la  cavité 
respiratoire. 

Les  deux  cœurs  veineux  dans  lesquels  les  veines  caves  vont  cœurs  veineux, 
déboucher  sont  situés  à  la  base  des  branchies,  et  consistent 
chacun  en  un  sac  ovoïde  simple,  à  parois  charnues,  et  remar- 
quable par  sa  teinte  brunâtre  (1).  L'entrée  de  ces  réservoirs  con- 
tractiles est  garnie  d'une  valvule  bilabiale  qui  s'oppose  à  la  sortie 
du  sang ,  et  à  l'extrémité  opposée  naît  le  vaisseau  afférent  de 
la  branchie  qui  porte  à  bon  droit  le  nom  d'artère  branchiale. 
Celle-ci  monte  le  Ions-  du  bord  externe  et  adhérent  de  la  brail- 


lement un  sinus  veineux,  tandis  que  un  petit  appendice  en  forme  de  poche  ; 

j'ai  fait  ypk  qu'elle  n'est  autre  chose  quelques  anatomistes  l'ont  considéré 

que  la  chambre  viscérale  elle-même  comme  une  oreillette  (6),  mais  à  tort, 

et  qu'elle  fait  partie  nécessaire  du  sys-  car  il    ne  constitue  pas  une  pompe 

terne  circulatoire  (a).  vestibulaire  entre  la  veine  cave  et  le 

(1)  Chez  la  Seiche  et  chez  le  Cal-  ventricule  branchial.  M.  Owen  pense 

mar,  on  remarque  au  bord  inférieur  que  c'est  le  représentant  de  la  seconde 

de  chacun  de  ces  cœurs  branchiaux  branchie  des  Nautiles  (c). 

(a)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  p.  123. 

(b)  Mayer,  Analeclen  fur  vergleichende  Anatomie,  p.  61. 

(c)  Descript.  and  Illuslr.  Catalogtie  of  the  Mus.  of  the  Coll.  ofSurg.,  vol.  II,  p.  144. 
—  Owen,  Mem.  on  the  Pearly  Nautilus,  p.  31. 


170  CIRCULATION    DU    SANG 

(.'hic,  et  se  comporte  de  la  même  manière  que  le  vaisseau  affé- 
rent situé  sur  le  bord  opposé,  c'est-à-dire  donne  naissance  à 
une  double  série  de  branches  destinées  à  se  ramifier  dans  les 
feuillets  vasculaires  dont  cet  organe  se  compose  et  à  s'y  anasto- 
moser avec  les  ramuscules  du  vaisseau  cfférent ,  de  façon  à 
Résumé,  former  avec  ceux-ci  un  réseau  capillaire  continu.  Le  cercle 
circulatoire  se  trouve  ainsi  complété  ;  et  en  résumé  nous  voyons 
que  le  sang  veineux,  pressé  par  les  contractions  des  cœurs 
branchiaux  et  ne  pouvant  rentrer  dans  les  veines  caves  à  raison 
du  jeu  des  valvules  dont  l'entrée  de  ces  cœurs  est  pourvu, 
monte  par  les  artères  branchiales  dans  l'appareil  respiratoire , 
et  y  devient  artériel ,  puis  arrive  dans  les  veines  branchiales , 
qui,  en  se  dilatant,  constituent  des  sinus  auriculaires  et  versent 
ce  liquide  dans  le  cœur  aortique  ;  que  ce  second  organe  d'im- 
pulsion envoie  le  sang  dans  toutes  les  parties  du  corps  par  un 
système  complet  de  vaisseaux  artériels;  enfin,  que  le  sang, 
redevenu  veineux  en  traversant  les  divers  tissus  de  l'économie, 
est  ensuite  ramené  vers  les  cœurs  branchiaux  par  un  système 
mixte  de  tubes  membraneux  ou  veines  proprement  dites  et  de 
méats  ou  espaces  interorganiques  dont  la  cavité  céphalique  et 
la  cavité  péritonéale  font  partie. 
système  veineux     La  disposition  du  système  veineux  est  la  même  dans  les 


îles 


calmars     genres  Élédone  et  Argonaute  ;  mais,  chez  les  Calmars  et  les 

et  tl6S  SbicIigs. 

Seiches  ,  on  y  remarque  une  modification!  importante.  La 
chambre  viscérale  s'oblitère  dans  toute  la  portion  antérieure 
de  l'abdomen  aussi  bien  que  dans  les  parties  plus  profondes  du 
sac  péritonéal ,  et  il  en  résulte  que  l'espace  libre  dont  le  sang- 
veineux  peut  profiter  pour  revenir  de  l'extrémité  antérieure  de 
l'animal  vers  les  cœurs  branchiaux  se  trouve  resserré  dans 
la  région  céphalique.  Dans  toute  la  portion  post-cervicale  du 
corps,  le  système  veineux  se  trouve  donc  constitué  à  l'aide  de 
tubes  membraneux  à  parois  propres;  mais,  dans  la  tête,  le 
système  lacunaire  existe  toujours  et  prend  même  plus  d'impor- 


CHEZ  LES  MOLLUSQUES  CÉPHALOPODES.  171 

tance  que  chez  les  Poulpes ,  car  c'est  par  son  intermédiaire  que- 
presque  tout  le  sang  des  tentacules  et  des  autres  organes  eépha- 
liques  revient  dans  le  tronc,  et  la  grosse  veine  céphalique  qui 
longe  en  dessous  la  paroi  du  ventre  pour  aller  constituer  les 
deux  veines  caves ,  au  lieu  de  naître  d'un  système  de  veines 
sous -cutanées,  sort  directement  de  la  cavité  céphalique  vers  la 
base  du  cou.  Cette  disposition  entraîne  quelques  autres  modifica- 
tions dans  le  mode  de  distribution  des  veines  viscérales ,  mais 
ces  particularités  n'ont  pas  assez  d'importance  pour  que  nous 
nous  y  arrêtions  ici. 
Dans  l'ordre  des  Céphalopodes  tétrabranchiaux ,  dont  nous  système  veineu 

,  .  du 

ne  connaissons  aujourd'hui  qu'un  seul  représentant,  le  Nautile,  Nautile, 
la  disposition  du  système  veineux  parait  se  rapprocher  beaucoup 
de  ce  qui  existe  chez  le  Calmar  et  la  Seiche,  sauf  que  les  veines 
caves  se  divisent  chacune  en  deux  troncs  pour  se  rendre  direc- 
tement aux  branchies  correspondantes  et  y  constituer  les  ana- 
logues des  artères  branchiales ,  puisque  les  cœurs  veineux 
manquent  chez  ces  Mollusques;  mais  il  est  à  noter  qu'ici,  de 
même  que  chez  les  Seiches ,  il  y  a  un  appareil  valvulaire  placé 
à  l'entrée  du  vaisseau  afférent  de  chaque  branchie,  de  façon  à 
empêcher  le  reflux  du  sang. 

M.  Owen  et  M.  Yalenciennes,  qui,  l'un -et  l'autre,  se  sont 
occupés  de  l'analomie  des  Nautiles  ,  ont  constaté  aussi  que  la 
veine  céphalique  n'est  pas  complètement  fermée  dans  sa  portion 
sous-abdominale,  mais  que  ses  parois  sont  percées  d'un  nombre 
considérable  de  pertuis  qui  donnent  directement  dans  la  cavité 
abdominale  située  au-dessus  et  qui  doivent  laisser  passer  le 
sang  (1).  Ainsi ,  suivant  toute  probabilité,  la  chambre  viscé- 

(1)  M.  Owen  a  décrit  et  figuré  une      constaté  l'existence    chez   les    Aply- 
quinzaine  de  ces  orifices  et  les  a  corn-      sies  (a).  M.  Valenciennes  en  a  compté 
parés  aux  pertuis  dont  Cuvier  avait      davantage ,  et  a  remarqué  que  la  dis- 
fa)  Owen,  On  the  Pearly  Nauïûus  {Ann.  des  se.  na'.,  t.  XXVIII',  pi.  3,  fig-.  2). 


172  CIRCULATION    DU    SANG 

raie  fait  partie  du  système  veineux  chez  ce  Mollusque  aussi 
bien  que  chez  les  Céphalopodes  dibranchiaux. 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  gros  troncs  veineux  qui  se  rendent 
aux  branchies  sont  garnis  de  corps  spongieux  comme  chez  les 
Céphalopodes  dibranchiaux,  et  que  ces  organes  sont  logés  dans 
des  poches  ouvertes  extérieurement  ;  mais  rieu  ne  nous  auto- 
rise à  penser  que  l'eau,  en  arrivant  du  dehors  dans  ces  cavités, 
puisse  trouver  dans  ces  grappes  vasculaires  des  orifices  pour 
pénétrer  directement  dans   le  système   circulatoire  (1).   Les 


position  des  fibres  musculaires  entre 
lesquelles  ces  trous  sont  pratiqués  est 
telle,  qu'en  se  contractant,  celles-ci 
doivent  pouvoir  ouvrir  ou  fermer  le 
passage  entre  la  veine  et  la  cavité 
abdominale  (a). 

(t)  Les  corps  spongieux  qui  gar- 
nissent les  grosses  veines  chez  tous 
les  Céphalopodes  varient  un  peu  dans 
leur  structure  et  leur  disposition. 

Chez  les  Nautiles,  leur  mode  d'or- 
ganisation paraît  être  assez  simple. 
Ils  adhèrent  aux  quatre  vaisseaux 
que  j'appelle  les  veines  caves,  mais 
que  M.  Owen  nomme  artères  bran- 
chiales ,  et  y  forment  des  masses 
ovoïdes  composées  d'une  multitude  de 
follicules  ou  petits  caecums  membra- 
neux réunis  en  houppes  et  creusés 
de  cavités  qui  débouchent  dans  la 
veine  correspondante  (6).  M,  Valen- 
ciennes  distingue  dans  chacune  de  ces 
agglomérations  glanduliformes  deux 
portions ,  l'une  frisée  et  d'un  aspect 
plus  spongieux  ,  l'autre  composée  de 
follicules  simples  (c).  C'est  probable- 
ment à  cause  de  ces  différences,  ob- 


servées d'abord  sur  les  veines  de  la 
paire  supérieure  seulement ,  que 
M.  Owen  ne  compte  de  chaque  côté 
que- trois  de  ces  corps  glanduliformes, 
tandis  que  ,  d'après  M.  Valenciennes , 
il  y  en  aurait  quatre  paires.  Le  corps 
spongieux  de  chacune  des  quatre 
veines  en  question  se  trouve  logé  dans 
un  compartiment  spécial  de  la  poche 
membraneuse  qui  les  renferme,  et  ces 
poches  communiquent  avec  la  cavité 
branchiale  par  un  pore  situé  un  peu 
en  avant  et  en  dedans  de  la  base 
des  branchies  antérieures.-  M.  Owen 
avait  pensé  que  ces  poches  étaient  en 
continuité  avec  la  chambre  péricar- 
dique,  mais  M.  Valenciennes  a  reconnu 
qu'elles  en  sont  distinctes  et  complè- 
tement aveugles. 

Chez  les  Céphalopodes  dibran- 
chiaux,  cet  appareil  glanduliforme  est 
plus  développé  et  s'étend  sur  les 
veines  abdominales  ou  tubes  périto- 
néaux,  ou  même  jusque  sur  les  veines 
palléales  postérieures.  Chez  les  Loli- 
gopsis  ,  il  ne  consiste  cependant  qu'en 
trois  pairesdegrappes  spongieuses  bien 


(a)  Valenciennes,  Recherches  sur  le  Nautile  flambé  (Archives  du  Muséum,  t.  11,  p.  287). 

(b)  Owen,  Mem.  on  the  Pearly  Nautilus,  p.  32,  pi.  6,  fig.  1. 

(c)  Valenciennes,  Op.  cit.  (Arch.  du  Muséum,  t.  II,  p.  286,  pi.  10,  fvg.  2), 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES    CÉPHALOPODES.  lJo 

liquides  étrangers  à  l'économie  ne  peuvent  arriver  dans  le  sang 
que  par  voie  d'absorption  ,  comme  chez  les  Animaux  supé- 
rieurs, et  bien  que  ce  passage  de  l'extérieur  à  l'intérieur  par 
imbibilion  s'opère  parfois  très  rapidement  chez  ces  Mollusques, 
tous  les  faits  les  mieux  avérés  tendent  à  montrer  que  le  système 
de  cavités  irrigatoires  où  le  sang  circule  est  fermé  de  toutes 
parts. 

§  22.  —  En  terminant  l'étude  de  l'appareil  circulatoire  des  La  circulation 

est  complète 

Céphalopodes ,  je  ferai  remarquer  aussi  que  chez  ces  Animaux,      chez  iM 

Céphalopodes. 


délimitées  et  appartenant,  l'une  aux 
veines  abdominales  ,  la  deuxième  à  la 
terminaison  de  la  veine  céphalique,  et 
la  troisième  à  la  portion  externe  des 
veines  caves  (a). 

Chez  le  Poulpe  ,  ces  appendices  vei- 
neux garnissent  les  tubes  péritonéaux 
et  les  veines  caves  dans  presque  toute 
leur  étendue  ,  et  consistent  en  une 
multitude  de  poches  d'un  aspect  fram- 
boise ,  ou  plutôt  d'arbuscules  mem- 
braneux à  rameaux  courts  et  gros,  qui 
se  laissent  facilement  gonfler  par  le 
sang  ou  par  les  injections  colorées 
que  l'on  pousse  dans  le  système  vei- 
neux. Pour  donner  une  idée  de  l'as- 
pect de  ces  corps  ainsi  remplis ,  je 
renverrai  aux  planches  de  mon  Mé- 
moire sur  la  circulation  chez  les  Mol- 
lusques, et,  pour  montrer  leur  dispo- 
sition dans  l'état  de  vacuité ,  je  citerai 
les  figures  données  par  M.  Délie 
Chiaje  (6)  et  Mayer  (c). 

Chez  l'Argonaute,  ils  sont  beaucoup 


moins  nombreux  et  développés  que 
chez  le  Poulpe  {cl). 

Chez  les  Calmars,  ces  corps  spon- 
gieux sont  plus  courts  et  moins  dila- 
tables ,  mais  s'étendent  sur  la  portion 
terminale  de  la  grande  veine  cépha- 
lique  et  sur  les  veines  palléales  aussi 
bien  que  sur  les  quatre  vaisseaux  dont 
il  vient  d'être  question  (e). 

Enfin,  c'est  chez  les  Seiches  que  cet 
appareil  atteint  son  plus  haut  degré 
de  développement;  il  recouvre  toutes 
les  grosses  veines  qui  avoisinent  les 
cœurs  branchiaux,  et  il  se  compose 
d'une  multitude  de  prolongements 
membraneux  en  forme  de  poches 
branchues  et  irrégulièrement  fron- 
cées (/■). 

il  est  aussi  à  noter  que  ces  corps 
spongieux  sont  très  contractiles  et 
présentent  souvent  des  mouvements 
rhythmiques  de  systole  et  de  diastole. 
Quand  on  les  comprime ,  ils  laissent 
suinter  un  liquide  blanchâtre  ou  jau- 


(a)  Grant,  On  the  Structure  and  Characters  of  Loligopsis  (Trans.  of  the  Zool.  Soc.  of  London, 
vol.  I,  p.  25,  pi.  2,  fig.  8). 

(b)  Délie  Chiaje,  Descris,,  e  notom.  degli  Anim.  invertebr.,p\.  19,  fig.  1 

(c)  Mayer,  Anakcten  fur  vergl.  Anat.,  pi.  5,  fig.  1. 

(d)  Van  Beneden,  Mém.  sur  l'Argonaute,  pi.  3,  fig.  5  (Exercices  zootomiques,  et  Mëm.  de  l'Acad. 
de  Bruxelles,  t.  XI). 

(e)  Voyez  mon  Voyage  en  Sicile,  t.  I,  pi.  18. 

(/")  Hunter,  voyez  Cat.  du  Mus.  du  Coll.  des  Chirur,,  t.  Il,  pi.  11  et  12. 


174  CIRCULATION    DU    SANG 

non- seulement  le  sang  doit  passer  plus  régulièrement  et  plus 
vite  à  travers  l'appareil  respiratoire ,  mais  que  la  totalité  de  la 
masse  de  ce  fluide  est  obligée  de  suivre  cette  voie  pour  retour- 
ner des  divers  organes  vers  le  cœur  aortique.  Chez  les  Mol- 
lusques des  autres  classes,  une  portion  de  ce  liquide  revient 
aux  artères  sans  avoir  traversé  les  branchies,  et  par  conséquent 
on  peut  dire  que  chez  ces  Animaux  la  respiration  est  incom- 
plète; mais  ici  ce  n'est  plus  un  mélange  de  sang  artériel  et  de 
sang  veineux  qui  arrive  à  l'aorte,  c'est  du  sang  artériel  pur. 
Nous  verrons  plus  tard  que  des  différences  du  même  ordre  se 
rencontrent  parmi  les  Vertébrés. 
Résumé.  Nous  voilà  donc  conduits,  par  des  transitions  graduées,  depuis 
l'appareil  irrigatoire  grossier  et  incomplet  des  Zoophytes  infé- 
rieurs, jusqu'à  un  système  hydraulique  dont  presque  toutes 
les  parties  semblent  avoir  été  créées  à  seule  fin  de  servir  au 
transport  du  fluide  nourricier  du  siège  de  la  respiration  dans 
tous  les  organes  et  de  ces  organes  à  l'appareil  respiratoire. 

nâtre  qui  ne  ressemble  pas  du  tout  au  aux  organes  dont  j'ai  fait  connaître 

sang  et  qui  est  évidemment  le  produit  la  disposition  chez  le  Triton  (d),  et 

d'une   sécrétion.  Les  naturalistes  ne  me  semblent  devoir   être  considérés 

sont  pas  encore  fixés  sur  les  fonctions  comme  les  analogues  de  l'organe  de 

de  ces  corps  spongieux  :  les  uns  les  Bojanus  chez  les  Mollusques  lamelli- 

considèrent  comme  une  sorte  de  di-  branches. 

verticulum  destiné  à  emmagasiner  Je  dois  ajouter  que,  dans  l'opinion 
temporairement  une  portion  du  sang  de  M.  Van  tieneden,  ces  corps  spon- 
veineux  quand  le  passage  de  ce  fluide  gieux  ,  ainsi  que  le  corps  de  Bojanus, 
dans  les  branchies  se  trouve  gêné  (a)  ;  serviraient  à  établir  une  communica- 
d'aulres  y  voient  des  branchies  accès-  lion  directe  entre  les  cavités  veineuses 
soires  (b).  Mais,  d'après  diverses  con-  de  l'organisme  et  l'extérieur,  de  façon 
sidérations  dont  il  sera  question  ail-  à  permettre  l'entrée  de  l'eau  du  de- 
leurs  ,  je  suis  porté  à  croire  avec  hors  et  son  mélange  avec  le  fluide 
M.  Mayer  (c)  que  ce  sont  des  glandes  nourricier  à  peu  près  de  la  même 
urinaires.  Us  ressemblent  beaucoup  manière  que  cela  a  lieu  chez  les  Po- 

(a)  Owen,  Mem.  on  the  Pearly  Nautilus,  p.  32. 

(b)  Valenciennes,  Op.  cit.  (Arch.  du  Mîiséum,  t.  II,  p.  286). 

(c)  Mayer,  Analecten  fur  vergleichende  Anatomie,  1835,  p.  54. 

(d)  Milne  Edwards,  Voyage  en  Sicile,  i.  1,  pi.  4  8. 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES.  175 

A  chaque  pas  nouveau  vers  ce  but,  nous  avons  vu  la  division 
du  travail  physiologique  s'établir  davantage  et  les  instruments 
d'emprunt  céder  la  place  à  des  instruments  spéciaux. 

Ainsi,  chez  les  Acalèphes  et  les  Polypes,  nous  avons  vu  un 
seul  système  de  cavités  servir  à  la  fois  comme  appareil  digestif 
et  comme  appareil  irrigatoire. 

La  séparation,  déjà  essayée  d'une  manière  temporaire,  et 
pour  ainsi  dire  avec  timidité,  chez  quelques-uns  des  Zoophytes 
dont  je  viens  de  parler ,  devient  complète  chez  les  Bryo- 
zoaires ;  mais  c'est  la  cavité  commune  seulement  qui  sert  à 
la  fois  à  abriter  tous  les  organes  intérieurs  et  à  contenir 
le  fluide  nourricier  en  mouvement.  Là  il  n'existe  aucun 
organe  spécial  d'impulsion  pour  assurer  la  distribution  de  ce 
liquide  dans  les  diverses  parties  du  corps,  et  ce  sont  des  cils 
vibratiles,  agents  qui,  chez  les  Animaux  les  plus  simples,  ser- 
vent à  effectuer  la  locomotion  ,  la  préhension  des  aliments  et  le 

types  et  les  Médusaires ,  où  la  cavité  ques.  Mais  ce  sont,  je  le  répète,  des 

digestive  est  confondue  avec  le  sys-  cavités  terminées  en   cul-de-sac  qui 

tème  irrigatoire  (a).  Mais  je  ne  saurais  ne  se  prolongent    pas  dans  tout  le 

partager  cette  manière  de  voir,  et  chez  corps,   comme  le   suppose    M.   Sie- 

les  Mollusques  Céphalopodes  le  sys-  bold,  et  qui  ne  méritent  pas  plus  le 

tème  de  cavités  dans  lequel  le  sang  nom  d'un  système  aquifère  que  ne 

circule  ne  me  semble  avoir  aucune  le  mériterait  la  vessie  urinaire  d'un 

communication    directe  avec  Texte-  Poisson. 

rieur.  Les  orifices  qui  se  voient  sur  la  tête 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  poches  de  quelques   Céphalopodes  ,  tels  que 

membraneuses  dans  lesquelles  cetap-  VOctopus  Verany  (d),le  Tremoctopus 

pareil  glandulaire  se  trouve  suspendu  violaceus  (e) ,  ne  me  paraissent  pas 

constituent  la   majeure  partie  de  ce  davantage  constituer  un  appareil  aqui- 

que  M.  Délie  Chiaje   (b)   et  M.   Sie-  fère  ;  ils  donnent  seulement  dans  des 

bold  (c)  décrivent  comme  formant  un  poches  cutanées  sans  communication 

appareil  aquifère   chez  ces  Mollus-  avec  les  cavités  intérieures. 

(a)  Van  Bencden,  Sur  la  circulation  dans  les  Animaux  inférieurs  (Comptes  rendus  de  l'Acad. 
des  sciences,  1845,  t.  XX,  p.  519). 

(b)  Délie  Chiaje,  Deseriz.  e  notom.  degli  Anim.  invertebr.,  t.  I,  p.  53  (Apparalo  aquoso  o  idro° 
pneumatico) . 

(c)  Siebold  el  Slannius,  Nouveau  Manuel  d'anat.  comp.,  1. 1,  p.  389. 

(d)  Wagner,  Zeitschr.  fur  die  organische  Physik,  1828,  t.  11,  p.  225. 

(e)  Délie  Chiaje,  Descrix-.  e  notom.  degli  Animait  invertebrati,  pi.  11,  fig-.  10. 


1  7G  CIRCULATION    DU    SANG 

renouvellement  du  fluide  respirable ,  qui  y  déterminent  des 
courants  faibles  et  irréguliers. 

Dans  la  classe  des  Tuniciers,  nous  avons  vu  la  division  du 
travail  faire  un  pas  de  plus  :  un  organe  spécial  d'impulsion,  un 
cœur,  est  chargé  de  faire  circuler  le  sang;  mais  il  le  fait  tantôt 
dans  un  sens,  tantôt  dans  un  autre  ,  et  ce  sont  les  mêmes  voies 
qui  servent  tour  à  tour  au  passage  du  sang  artériel  et  du  sang- 
veineux. 

Dans  la  classe  des  Acéphales,  la  circulation  cesse  d'être  alter- 
nante, et,  comme  conséquence  d'un  perfectionnement  dans  la 
structure  du  cœur,  dont  les  orifices  se  garnissent  de  valvules, 
la  distinction  s'établit  entre  les  conduits  artériels  et  les  conduits 
veineux.  Nous  avons  vu  en  même  temps  ces  conduits  se  rendre 
en  partie  indépendants  des  organes  d'alentour  et  se  constituer 
partiellement  en  tubes  à  parois  propres. 

Chez  les  Gastéropodes ,  nous  avons  vu  ce  système  d'endi- 
guement  des  courants  circulatoires  faire  de  nouveaux  progrès, 
et  les  forces  motrices  de  la  circulation  se  centraliser  davantage. 

Enfin ,  chez  les  Céphalopodes ,  la  division  du  travail  s'est 
introduite  dans  le  mécanisme  de  la  circulation.  Le  cœur  aortique, 
qui ,  chez  les  Mollusques  moins  élevés  en  organisation ,  suf- 
fisait à  pousser  le  sang  à  travers  le  réseau  capillaire  de  l'ap- 
pareil de  la  respiration  aussi  bien  que  dans  les  canaux  nour- 
riciers de  l'organisme,  reste  chargé  de  ce  dernier  rôle  seule- 
ment, et  une  nouvelle  pompe  foulante  se  trouve  appelée  à  lancer 
le  sang  dans  les  vaisseaux  respiratoires. 

Nous  avons  vu  aussi  que  ces  perfectionnements  successifs 
ont  porté  d'abord  sur  les  organes  d'impulsion ,  puis  sur  les 
canaux  distributeurs  du  fluide  nourricier  ou  les  canaux  qui 
amènent  au  cœur  le  sang  artérialisé.  La  portion  veineuse  du 
cercle  circulatoire  n'a  participé  que  plus  tard  à  ce  changement, 
et  c'est  peu  à  peu,  par  petites  portions,  qu'elle  a  été  pourvue 
de  tuyaux  de  conduite  à  la  place  des  vides  interorganiques  à 


CHEZ    LES    MOLLUSQUES.  177 

travers  lesquels  le  sang  se  mouvait  d'abord.  Chez  les  Mol- 
lusques supérieurs ,  la  presque  totalité  du  cercle  circulatoire 
se  trouve  ainsi  composée  de  tubes  membraneux  qui  lui  appar- 
tiennent en  propre;  mais  chez  aucun  Animal  de  cet  embran- 
chement la  substitution  des  vaisseaux  sanguins  aux  méats 
interorganiques  ne  s'achève,  et  toujours  une  portion  plus  ou 
moins  considérable  du  système  veineux  se  trouve  constituée  à 
l'aide  de  ces  cavités  d'emprunt;  toujours  aussi  la  chambre  vis- 
cérale fait  partie  du  système  irrigatoire  et  constitue  un  vaste 
réservoir  pour  le  sang  veineux. 

Chez  les  Vertébrés,  nous  trouverons  que  de  nouveaux  per- 
fectionnements ont  été  introduits  dans  la  constitution  du  sys- 
tème circulatoire;  mais,  avant  d'en  aborder  l'étude,  il  nous  faut 
redescendre  vers  les  Animaux  les  plus  inférieurs,  et  passer  en 
revue  les  divers  états  de  ce  même  appareil  dans  la  grande  divi- 
sion des  Entomozoaires  ou  Animaux  annelés. 

Nous  aborderons  ce  sujet  dans  la  prochaine  Leçon. 


II.  12 


VINGT-TROISIEME  LEÇON. 

De  la  circulation  du  sang  chez  les  Crustacés ,  les  Arachnides  et  les  Myriapodes. 

considérations  §  l'«  —  Lorsqu'on  veut  se  rendre  bien  compte  d'un  grand 
préliminaires.  ensemble  fle  faits ,  il  est  bon  de  ne  pas  les  envisager  toujours 
au  même  point  de  vue  et  de  parcourir  en  divers  sens  le  champ 
que  l'on  se  propose  d'explorer.  Aussi,  sacrifiant  l'arrangement 
symétrique  des  matières  de  ces  Leçons  à  l'utilité  pratique, 
je  me  propose  de  ne  pas  suivre  aujourd'hui  la  marche  que  j'ai 
adoptée  jusqu'ici  pour  l'étude  des  modifications  de  l'organisme 
chez  les  divers  Animaux,  et,  au  lieu  de  procéder  du  simple  au 
composé ,  je  prendrai  pour  point  de  départ  ceux  des  Entomo- 
zoaires  dont  l'appareil  irrigatoire  est  le  plus  complet,  et  j'en 
étudierai  ensuite  la  dégradation  progressive.  Cela  aura  aussi 
l'avantage  de  rendre  plus  directes  les  comparaisons  entre  les 
choses  connexes ,  car  ce  sont  les  Animaux  articulés  les  plus 
perfectionnés  sous  ce  rapport,  dont  le  système  irrigatoire  res- 
semble davantage  à  celui  des  Mollusques  supérieurs ,  que  nous 
avons  étudiés  dans  la  dernière  Leçon. 

Les  Entomozoaires ,  ou  Animaux  annelés ,  forment  deux 
grandes  divisions  naturelles  :  celle  des  Vers  et  celle  des 
Arthropodaires ,  ou  Animaux  articulés.  Le  mode  de  constitu- 
tion de  l'appareil  circulatoire  diffère  beaucoup  dans  ces  deux 
groupes.  Mais  dans  la  seconde  de  ces  sections,  comprenant  les 
Insectes ,  les  Myriapodes ,  les  Arachnides  et  les  Crustacés ,  ce 
système  offre  la  plus  frappante  analogie  avec  tout  ce  que  nous 
venons  de  rencontrer  parmi  les  Malacozoaires. 

En  effet,  si  nous  examinons  d'abord  le  système  irrigatoire 
dans  la  classe  des  Crustacés,  nous  y  reconnaîtrons  toutes  les 
crustacés,    dispositions  fondamentales  que  nous  avons  rencontrées  chez  la 


Appareil 

circulatoire 

des 


CIRCULATION    DU    SANG    CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  179 

plupart  des  Gastéropodes  et  des  Lamellibranches,  ainsi  que  chez 
quelques  Céphalopodes,  c'est-à-dire  dans  l'immense  majorité 
des  Mollusques. 

Prenons  d'abord  les  Crustacés  les  plus  élevés  en  organisa- 
tion :  les  Décapodes,  qui  ont  pour  représentants  principaux 
les  Crabes,  les  Homards,  les  Écrevisses  et  les  Langoustes. 

On  sait  depuis  longtemps  qu'il  existe  chez  ces  Animaux ,  sur     Appareil 

1  *->  i         A  r.ircntafmre 


circulatoire 


la  ligne  médiane  du  dos,  vers  le  milieu  de  la  région  du  corps      ,  <*<* 

°  7  u  x  Décapodes. 

que  les  entomologistes  appellent  le  thorax  ,  un  organe  charnu 
et  puisa tile  qui  est  le  cœur  (1).  On  sait  aussi  que  des  tubes  mem- 
braneux et  ramifiés  partent  de  cet  organe  pour  se  répandre  au 
loin  dans  l'économie.  Ces  faits  ont  été  constatés  par  les  recher- 
ches de  Swammerdam  sur  le  Bernard  l'Ermite,  singulier 
Crustacé  qui  se  blottit  dans  la  coquille  vide  de  certains  Mol- 
lusques et  qui  abonde  sur  nos  côtes  ;  par  les  dissections  du 
Homard,  faites  il  y  a  deux  siècles  par  Willis,  et  parles  obser- 
vations de  quelques  autres  anatomistes.  Mais,  il  y  a  trente  ans, 
on  ignorait  encore  quelle  est  la  direction  suivie  par  le  sang 
dans  l'organisme  de  tous  ces  Animaux,  et  quelles  sont  les  voies 
par  lesquelles  ce  liquide,  après  avoir  servi  à  nourrir  les  tissus 
vivants,  revient  à  l'appareil  respiratoire  (2).  En  1827,  désireux 
de  combler  ces  lacunes  ,  je  m'associai  à  un  de  mes  amis , 

(1)  L'existence  du  cœur  chez  les  dam  (d)  et  des  autres  naturalistes 
Palémons  ou  Salicoques  a  été  consta-  qui  ont  étudié  l'appareil  circulatoire 
tée  par  Harvey  au  commencement  du  des  Crustacés  antérieurement  à  l'é- 
xvi]e  siècle  (a) ,  et  la  circulation  du  poque  indiquée  ci  -  dessus  ,  je  ren- 
sang  a  été  observée  d'abord  par  Leeu-  verrai  à  l'introduction  historique  du 
wenhoek,  puis  par  Baker  (6).  Mémoire  sur  ce  sujet  que  j'ai  publié 

(2)  Pour  plus    de  détails  sur  les  en  commun  avec  V.  Audouin  (e  . 
travaux  de  Willis  (c),  de  Swammer- 

(à)  Harvey,  Exercitatio  anatomica  de  motu  cordis,  1628,  p.  29. 

(b)  Leeuwenhoek,  Arcana  Naturœ,  t.  IV,  epist.  84  et  86. 
—  Baker,  The  Microscope  made  Easy,  p.  129  (1742). 

(c)  Willis,  De  anima  brutorum.  In-4,  London,  1672,  p.  43,  pi.  3,  fig.  1. 

(d)  Swammerdam,  Biblia  Naturaz,  t.  I,  p.  204. 

(e)  Audouin  et  Milne  Edwards  ,   Recherches  anatomiques  et  physioloyiques  sur  ta  circulation 
dans  les  Crustacés  (Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  283). 


180  CIRCULATION    DU    SANG 

Victor  Audouin,  observateur  habile  dont  les  travaux  sur  la 
structure  des  Insectes  font  époque  dans  l'histoire  de  l'entomo- 
logie (1  ),  et,  par  les  recherches  auxquelles  nous  nous  livrâmes 
en  commun ,  nous  obtînmes  les  résultats  dont  je  vais  rendre 
compte. 
Direction        §2.  —  On  savait  que  le  cœur  est  situé  dans  l'espace  corn- 

du  courant  ,  i  i  i  •  i  *         «  i  t 

circulatoire,  pris  entre  les  branchies  dont  les  flancs  de  ces  Crustacés  sont 
garnis ,  mais  on  ne  savait  pas  si  le  sang  mis  en  mouvement  par 
les  contractions  de  cet  organe  se  rendait  aux  diverses  parties 
de  l'économie  ou  se  dirigeait  vers  l'appareil  respiratoire,  ou, 
en  d'autres  mots ,  on  ne  savait  pas  si  ce  cœur  était  veineux 
ou  artériel,  et  l'on  ignorait  dans  quelle  direction  le  mouvement 
circulatoire  s'effectuait.  Or,  pour  comprendre  le  mécanisme  de 
l'irrigation  nutritive  chez  les  Crustacés,  il  fallait  nécessaire- 
ment être  fixé  sur  ce  point,  et,  pour  résoudre  la  question,  nous 
eûmes  recours  à  des  expériences  qui  sont  faciles  à  répéter  (2). 
En  étudiant  l'appareil  de  la  respiration,  nous  avons  vu  que, 
chez  les  Crabes,  les  branchies  en  forme  de  pyramides  feuille- 
tées dont  les  côtés  du  thorax  sont  garnis  présentent  sur  leurs 
faces  opposées  deux  gros  canaux  longitudinaux  qui  se  rétrécissent 
en  allant  delà  base  au  sommet  de  ces  organes  (3),  et  qui  commu- 

(1)  V.  Audouin  naquit  à  Paris  en  (2)  Ces  expériences,  faites  d'abord 

1797,  et  mourut  en  1841.  Il  s'occupa  sur  le  Maia  squinado,  grande  espèce 

principalement  d'entomologie,  et  fut  de  Décapode  Brachyure  qui  est  corn- 

le  premier  à  étudier  d'une  manière  mune  sur  les  parties  rocheuses  des 

philosophique  la  structure  de  la  char-  côtes  de  la  Normandie  et  de  la  Bre- 

pente  solide  des  Insectes.  Pour  plus  tagne  ,   furent  ensuite  répétées  sur 

de  détails  sur  sa  vie  et  ses  travaux ,  les  Homards  et  sur  un  grand  nom- 

on  peut  consulter  les  articles  nécrolo-  bre    d'autres    Crustacés    du    même 

giques  insérés  dans  les  Annales  des  ordre  (6). 

sciences  naturelles  et  dans  le  Recueil  (3)  Voyez  tome  If,  page  128. 
de  la  Société  d'agriculture  (a). 

(a)  Serres,  Chevreul  et  Milne  Edwards,  Discours  sur  V.  Audouin  (Ann.  des  sciences  nat.,  1841, 
•2'  série,  t.  XVI,  p.  356). 

—  Milne  Edwards,  Notice  sur  la  vie  et  les  travaux  de  V.  Audouin  (Séance  annuelle  de  la 
Société  centrale  d'agriculture,  1850). 

(b)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ami.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  303). 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  181 

niquent  entre  eux  par  des  réseaux  capillaires  pratiqués  dans 
l'épaisseur  de  chacune  des  lamelles  branchiales.  Ces  canaux 
sont  des  vaisseaux  sanguins ,  et  le  premier  point  à  déterminer 
était  la  direction  suivant  laquelle  le  sang  les  parcourt.  Pour 
nous  en  assurer,  nous  coupâmes  en  travers  une  des  pyramides 
branchiales  sur  un  Crabe  vivant,  et,  après  qu'une  certaine 
quantité  de  sang  se  fut  écoulée  par  l'extrémité  tronquée  des 
deux  vaisseaux  ainsi  ouverts ,  nous  aspirâmes ,  à  l'aide  d'une 
pipette,  le  liquide  qui  restait  dans  chacun  d'eux.  Le  vaisseau 
situé  à  la  face  interne  de  la  branchie  ne  nous  fournit  de  la  sorte 
que  peu  de  sang  et  demeura  ensuite  complètement  vide,  avec 
sa  lumière  béante.  Le  vaisseau  situé  sur  la  face  externe  de 
la  branchie  donna,  au  contraire,  du  sang  en  abondance,  et,  à 
peine  vidé ,  se  remplit  de  nouveau. 

Cette  expérience ,  répétée  souvent  et  variée  de  diverses  ma- 
nières, donna  toujours  le  même  résultat,  et  prouva  jusqu'à  l'évi- 
dence que  le  canal  externe  est  le  vaisseau  afférent  qui  apporte 
le  sang  veineux  à  la  branchie ,  et  que  le  canal  interne  est  le 
vaisseau  efférent  par  lequel  le  sang,  devenu  artériel,  sort  de 
l'appareil  respiratoire  pour  aller  de  nouveau  entretenir  l'exci- 
tation vitale  dans  tous  les  tissus  de  l'organisme. 

Mais  le  sang  qui  arrive  ainsi  aux  branchies  vient-il  du  cœur 
et  va-t-il  ensuite  directement  se  distribuer  aux  diverses  parties 
de  l'économie?  ou  bien  est-ce  sur  le  trajet  du  sang  artériel  que 
se  trouve  placé  l'organe  moteur  de  l'appareil  circulatoire? 
En  d'autres  mots,  le  cœur,  dont  l'existence  et  la  position  étaient 
connues  depuis  si  longtemps,  est-ce  un  cœur  veineux  ou  un 
cœur  artériel?  ou  bien  encore  cet  organe  reçoit-il  un  mélange 
du  sang  qui  arrive  des  diverses  parties  de  l'économie  à  l'état 
veineux  et  du  sang  qui  sort  des  branchies  à  l'état  artériel? 
Toutes  ces  hypothèses  avaient  été  professées  tour  à  tour,  et  des 
expériences  nouvelles  pouvaient  seules  trancher  la  question. 

Ayant  enlevé  la  carapace  de  manière  à  mettre  à  découvert  le. 


482  CIRCULATION    DU   SANG 

cœur  d'un  grand  Crabe  vivant,  nous  ouvrîmes ,  comme  dans 
l'expérience  précédente,  le  vaisseau  externe  ou  afférent  de  l'une 
des  branchies,  et,  au  lieu  d'y  puiser  du  sang  à  l'aide  de  notre 
pipette,  nous  y  insufflâmes  de  l'air  ;  mais  nous  ne  vîmes  aucune 
bulle  de  gaz  arriver  dans  le  cœur.  Nous  incisâmes  ensuite  le 
vaisseau  interne  ou  efférent,  et,  à  peine  avions-nous  poussé  un 
peu  d'air  dans  ce  canal,  que  des  bulles  se  montrèrent  dans 
l'intérieur  du  cœur. 

Ce  résultat ,  convenablement  vérifié ,  nous  apprit  donc  que 
le  vaisseau  efférent  de  la  branchie  est  en  communication  directe 
avec  le  cœur,  et  que  le  vaisseau  qui  apporte  le  sang  veineux  à 
l'appareil  respiratoire  ne , l'est  pas.  Donc,  c'est  du  sang  arté- 
riel ,  et  non  du  sang  veineux ,  qui  traverse  le  cœur.  Par  con- 
séquent aussi  ce  cœur  est,  non  un  cœur  veineux,  mais  un 
cœur  aortique  ,  et  les  vaisseaux  que  l'on  en  voit  partir  pour  se 
ramilier  dans  les  diverses  parties  du  corps  sont,  non  pas  des 
veines,  mais  des  artères. 

Ainsi  chez  les  Crustacés ,  de  même  que  chez  les  Mollusques, 
le  sang  poussé  par  les  contractions  du  cœur  pénètre  dans  un 
système  de  vaisseaux  distributeurs  de  ce  liquide,  c'est-à-dire 
clans  les  artères ,  revient  à  l'état  veineux  de  tous  les  points  de 
l'organisme  vers  les  branchies ,  traverse  l'appareil  respiratoire 
de  dehors  en  dedans ,  et ,  après  y  avoir  repris  le  caractère  de 
sang  artériel,  retourne  au  cœur  pour  recommencer  de  nouveau 
le  cercle  que  je  viens  de  décrire. 

La  totalité  du  sang  qui  arrive  au  cœur  pour  être  distribuée 
dans  l'organisme  a-t-elle  passé  ainsi  dans  l'appareil  respiratoire? 
ou  bien  le  sang  artériel  qui  sort  de  cet  appareil  se  mêle-t-il  au 
sang  veineux  qui  aurait  suivi  quelque  autre  route,  et  est-ce  un 
mélange  de  ce  genre  qui  pénètre  dans  le  cœur  ?  Cette  question 
ne  se  trouve  pas  décidée  par  les  expériences  dont  je  viens  de 
parler,  et,  pour  la  résoudre  d'une  manière  simple,  il  faut  exa- 
miner de  plus  près  que  nous  ne  l'avons  fait  jusqu'ici  la  consti- 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  183 

tution  du  système  circulatoire  des  Crustacés.  Avant  de  nous  en 
occuper,  étudions  donc  l'anatomie  de  cet  appareil. 

§  3.  —  Le  cœur  des  Crustacés  décapodes  est  une  poche  Cœur 
charnue  de  forme  presque  quadrilatère,  dont  les  fibres  muscu- des  DecaP°des- 
laires  sont  disposées  de  façon  à  déterminer  alternativement,  par 
leurs  contractions ,  des  mouvements  de  systole  et  de  diastole. 
Le  premier  de  ces  deux  effets  résulte  du  raccourcissement  des 
faisceaux  charnus  qui  vont  d'un  point  à  un  autre  sur  les  parois 
de  cet  organe;  le  second,  par  l'action  des  fibres  qui,  tout  en 
se  terminant  d'un  côté  dans  ces  mêmes  parois ,  vont  prendre 
leur  point  d'appui  au  dehors  sur  les  parties  voisines  de  la  char- 
pente solide  du  corps.  A  l'aide  de  ces  dernières  insertions  mus- 
culaires et  des  vaisseaux  qui  partent  du  cœur,  cet  organe  se 
trouve  suspendu  dans  un  espace  libre  qui  est  limité  par  une 
membrane  délicate  et  qui  a  été  considéré  par  quelques  anato- 
mistes  comme  étant  une  oreillette  servant  à  contenir  le  ventri- 
cule ,  mais  qui  n'est  en  réalité  autre  chose  qu'une  chambre 
péricardique.  Les  canaux  branchio-cardiaques  y  débouchent  de 
chaque  côté ,  et  par  conséquent  le  sang  se  répand  librement 
dans  l'espace  compris  entre  ses  parois  et  la  surface  externe  du 
cœur.  Ce  dernier  organe  baigne  donc  dans  le  sang,  et  c'est  en 
passant  par  des  orifices  pratiqués  dans  ses  parois  que  ce  liquide 
arrive  dans  la  cavité  contractile  dont  il  est  creusé  (1).  Deux  de  ces 

(1)  Les  premières  recherches  faites  Lors  de  la  publication  de  ce  travail, 

par  Audouin  et  moi  sur  la  constilu-  nous  pensions  aussi  que  les  tuniques 

tion  de   l'appareil    circulatoire    des  membraneuses  du  cœur  se  prolon- 

Crustacés  nous  avaient    conduits    à  geaient  sans  interruption  dans  toute 

penser  que  les  canaux  branchio-car-  l'étendue  de  cette  surface,  et  que  les 

diaques    se    continuaient   jusqu'aux  deux  paires  d'orifices  supérieurs  dont 

orifices  situés  sur  les  côtés  du  cœur,  l'existence  avait  été  déjà  signalée  par 

et  que  le  sang  ne  se  répandait  pas  sur  M.  Lund  (6)  n'étaient  que  des  fossettes 

la  face  supérieure  de  cet  organe  (a).  à  fond  imperforé.  Mais,  peu  de  temps 

(a)  Audouin  et  Milne  Edwards ,  Recherches  sur  la  circulation  dans  les  Crustacés  (Ami.  des 
sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  353). 

(6)  Lund,  Zweifel  an  dem  Daseyn  eines  Circulationssystems  bei  den  Crustaceen  (Isis,  1825, 
t.  XVI,  p.  593). 


iSll  CIRCULATION    DU    SANG 

orifices  occupent  les  côtés  du  cœur  vis-à-vis  de  la  terminaison 
des  canaux  branchio-cardiaques  ;  les  autres,  au  nombre  de 
quatre,  sont  placés  par  paires  à  sa  face  supérieure,  et  tous  sont 
garnis  de  valvules  bilabiées  qui  sont  disposées  de  façon  à  livrer 
facilement  passage  au  fluide  ambiant  quand  celui-ci  les  presse  de 
dehors  en  dedans,  mais  qui  se  resserrent  et  se  ferment  quand  la 
pression  s'exerce  en  sens  opposé  (1).  Lors  du  mouvement  de 


après,  les  observations  de  M.  Straus- 
Durkheim  sur  le  cœur  des  Limules  (a), 
ainsi  que  les  recherches  de  M.  Krohn 
sur  les  Écrevisses  (6),  et  de  MM.  Lund 
et  Schultz  sur  les  Crabes,  vinrent  jeter 
un  nouveau  jour  sur  ce  sujet  (e),  et  un 
examen  plus  approfondi  de  la  struc- 
ture de  cet  organe  chez  le  Tourteau, 
les  Homards  et  les  Squilles ,  me  con- 
vainquirent de  l'erreur  dans  laquelle 
nous  étions  tombés  relativement  au 
mode  de  communication  du  cœur  avec 
la  chambre  péricardique  et  les  canaux 
branchio-cardiaques  (d). 

M.  Straus  considère  cette  chambre 
comme  étant  une  oreillette  ;  mais  cette 
détermination  ne  me  semble  pas  ad- 
missible. On  ne  donne  pas  le  nom 
d'oreillette  à  un  simple  sinus  ou  ré- 
servoir sanguin  servant  de  vestibule 
au  ventricule  du  cœur,  mais  à  une 
poche  contractile,  une  sorte  de  cœur 
accessoire,  qui  fonctionne  à  la  manière 
d'une  première  pompe  foulante  pour 
alimenter  le  jeu  de  la  pompe  ventri- 
culaire,  ou  cœur  principal,  en  injec- 


tant, à  chaque  contraction,  une  nou- 
velle quantité  de  sang  dans  celui-ci. 

Or,  la  cavité  péricardique  est  bien 
un  réservoir  vestibulaire,  mais  non 
un  cœur  accessoire  ou  organe  d'im- 
pulsion, et  par  conséquent,  sous  le 
rapport  physiologique,  il  ne  saurait 
être  assimilé  à  une  oreillette.  Au  point 
de  vue  anatomique,  cette  détermina- 
tion ne  me  semble  pas  plus  acceptable, 
car  l'oreillette,  quand  elle  existe,  pré- 
cède le  ventricule  et  ne  loge  jamais 
celui-ci  dans  son  intérieur. 

(!)  Les  auteurs  qui  ont  décrit  le  cœur 
de  ces  Crustacés  ne  sont  pas  d'accord 
sur  le  nombre  et  la  position  des  ori- 
fices afférents  du  cœur.  Hunter,  qui 
les  mentionne  sous  le  nom  d'orifices 
veineux,  en  admet  quatre  paires,  une 
paire  à  la  face  supérieure  de  cet  or- 
gane (e) ,  et  trois  paires  sur  les  cô- 
tés (f).  D'après  M.  Lund,  il  n'y  en 
aurait  que  deux  paires  situées  l'une  et 
l'autre  à  la  surface  supérieure  du 
cœur  (g).,  et  dans  le  premier  travail  pu- 
blié par  Audouin  et  moi  sur  ce  sujet, 


(a)  Straus,  Consid.  gén'.jiur  l'anatomie  comparée  des  Animaux  articulés,  p.  346  (1828). 
(6)  Krohn,  Vêler  das  Gefdss-System  des  Flusskrebses  {Isis,  4834,  p.  524). 

(c)  Lund  et  Schultz,  Fortgesetzte  Unters.  ùber  das  System  des  Kreislaufes  bei  den  Crustaceen 
(Isis,  1830,  t.  XXIII,  p.  1222). 

(d)  Milne  Edwards,  Histoire  naturelle  des  Crustacés,  t.  I,  p.  103  (1834),  et  article  Crustacés  , 
dans  le  Dictionnaire  universel  d'histoire  naturelle,  t.  IV,  p.  399  et  suiv.  (1844). 

(e)  Descript.  and  Illustr.  Catalogue  of  the  ihiseum  of  the  Collège  of  Surgeons,  vol.  II,  p.  136, 
pi.  15,  fig.  1. 

(f)  Op.  cit.,  p.  137,  pi.  16,  fig-.  1. 
{g)  Lund  ,  Op.  cit. 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  185 

diastole,  déterminé  par  la  contraction  des  faisceaux  musculaires 
qui ,  en  partant  du  cœur,  \ont  prendre  leur  point  d'appui  sur 
les  parties  voisines  du  squelette  tégumentaire ,  le  sang  pénètre 
donc  de  la  chambre  péricardique  dans  l'intérieur  du  cœur,  en 
passant  par  les  orifices  dont  il  vient  d'être  question  ;  et  lors  de  la 
systole  résultant  de  la  contraction  des  muscles  intrinsèques  du 
cœur,  le  liquide  ainsi  introduit  se  trouve  comprimé ,  mais  il 
ne  peut  plus  retourner  dans  le  réservoir  formé  par  la  cavité 
péricardique,  et  il  s'échappe  par  les  autres  ouvertures  dont  le 
cœur  est  pourvu.  Ces  dernières  constituent  l'entrée  du  système 
artériel ,  et  leurs  bords  sont  garnis  de  valvules  dont  le  jeu  est 
l'inverse  de  celui  des  valvules  des  orifices  afférents  ,  car  elles 
permettent  la  sortie  du  liquide ,  mais  ne  le  laissent  pas  rentrer. 
A  chaque  battement  du  cœur,  une  ondée  de  sang  est  donc  lancée 
dans  le  système  artériel,  et,  dans  le  mouvement  de  dilatation  qui 
y  fait  suite ,  cet  organe  se  charge  d'une  nouvelle  quantité  de 
liquide ,  puisée  dans  le  réservoir  au  milieu  duquel  il  se  trouve 
suspendu. 

§  k.  —  Le  système  artériel,  qui  naît  du  cœur,  se  compose  système anériei 
de  trois  parties,  une  antérieure  et  céphalique,  une  moyenne  et    Décapodes, 
viscérale ,  une  postérieure  et  inférieure. 

La  portion  antérieure  consiste  en  un  tronc  médian  que  l'on 
a  nommé  artère  ophthalmique,  mais  qu'il  serait  préférable  d'ap- 
peler artère  céphalique,  et  de  deux  vaisseaux  latéro-antérieurs, 


une  paire  d'orifices  latéraux  avait  été  tomie'a  été  faite  jusqu'ici,  les  ouver- 
la  seule  aperçue  (a).  Enfin  M.  Owen  tures  en  question  sont  au  nombre  de 
parle  de  deux  paires  de  ces  orifices  :  trois  paires  :  deux  paires  à  la  face 
une  supérieure  et  une  latérale  (b)  ;  supérieure  du  cœur,  et  une  paire  sur 
mais  de  nouvelles  recherches  m'ont  le  côté  et  un  peu  en  dessous,  en  face 
convaincu  que  toutes  ces  indications  de  l'embouchure  des  canaux  branchio- 
sont  plus  ou  moins  fautives,  et  que  cardiaques, 
chez  tous  les  Décapodes  dont  l'ana- 

(a)  Recherches  sur  la  circulation  dans  les  Crustacés  (loc.  cit.,  t.  XI,  p.  357). 

(6)  Owen,  Lectures  on  the  Comp.  Anat.  of  Invertebr.  Animais,  1843,  p.  174,  fig.  91. 


186  CIRCULATION   DU   SANG 

ou  artères  antennaires,  qui  représentent  une  première  paire  de 
branches  de  ce  tronc  médian ,  mais  qui  naissent  à  côté  de  sa 
base,  et  tirent  leur  origine  directement  de  la  portion  antérieure 
du  cœur  (1). 

L'artère  céphalique  occupe  la  ligne  médiane,  passe  au-des- 
sus de  l'estomac ,  aux  parois  duquel  elle  fournit  quelques 
branches ,  gagne  la  région  frontale  de  la  tête ,  et  y  envoie  une 
branche  impaire  ,  puis  donne  naissance  à  une  paire  de  vais- 
seaux qui  sont  les  artères  ophthalmiques  proprement  dites.,  et 
qui  pénètrent  dans  les  pédoncules  oculaires  pour  se  distribuer 
aux  différentes  parties  de  l'appareil  de  la  vision.  L'artère  cépha- 
lique se  recourbe  ensuite  en  bas,  devient  récurrente ,  fournit 
des  ramuscules  au  cerveau ,  et  va  se  terminer  au-devant  de 
l'œsophage,  près  de  la  lèvre  supérieure. 

Les  artères  antennaires  sont  d'un  calibre  plus  fort,  et  se 
portent  obliquement  en  avant  et  en  dehors  sur  les  côlés  de 
l'estomac ,  vers  le  bord  antérieur  de  la  carapace  ,  pour  se  ter- 
miner dans  les  antennes  externes ,  après  avoir  fourni  plusieurs 
grosses  branches  à  l'estomac,  au  système  tégumentaire,  etc.  (2). 

(1)  Le  mode  de  distribution  de  ces  que  côté  du  corps  la  cavité  branchiale; 
artères  est  à  peu  de  chose  près  le  3°  une  artère  gastrique  qui  se  répand 
même  chez  le  Tourteau  (a)  et  chez  le  sur  les  parties  latérale  et  postérieure 
Maia  squinado  (b) ,  parmi  les  Déca-  de  l'estomac  ;  W  une  grosse  artère 
podes  Brachyures.  cutanée  antéro- supérieure,   qui  se 

(2)  Chez  le  Tourteau,  par  exemple,  recourbe  en  dehors,  au-dessus  des 
chacune  des  artères  antennaires  four-  organes  de  la  génération  et  du  foie, 
nit  :  1°  une  petite  branche  interne  gagne  les  côtés  du  thorax ,  et  se 
destinée  à  la  portion  voisine  de  l'ap-  recourbe  en  arrière  jusque  sur  la  par- 
pareil  génital  ;  2°  une  grosse  artère  tie  postérieure  et  latérale  de  la  ré- 
dorsale  qui  donne  des  branches  aux  gion  branchiale  de  la  carapace  ;  5°  une 
faisceaux  musculaires  placés  entre  le  artère  mandibulaire  qui  distribue  ses 
sommet  de  la  voûte  des  flancs  et  la  branches  aux  muscles  des  mandibules 
carapace,  puis  se  ramifie  dans  la  por-  et  aux  parties  voisines  du  derme  ; 
tion  du  derme  qui  recouvre  de  cha-  6°  une  artère  antennulaire  qui  se  di- 

(a)  Milne  Edwards,  Allas  de  la  grande  édition  du  Règne  animal  de  Cirvier,  Crustacés,  pi.  1. 

(b)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Rech,  sur  la  circulation  dans  les  Crustacés  (loc.  cit.,  pi.  24). 


CHEZ   LES   CRUSTACÉS,  187 

Une  paire  d'artères  hépatiques  naît  de  la  face  inférieure  du 
cœur,  vers  le  tiers  antérieur  de  cet  organe,  et  ces  vaisseaux 
distribuent  leurs  branches  dans  toutes  les  parties  du  foie  (1). 

La  portion  postérieure  du  système  artériel  naît  sous  la  forme 
d'un  tronc  unique  qui  part  de  la  partie  postérieure  et  inférieure 
du  cœur  et  se  divise  presque  aussitôt  en  deux  vaisseaux  impairs, 
dont  l'un  se  dirige  directement  en  arrière  au-dessus  de  l'in- 
testin ,  et  a  été  désigné  sous  le  nom  d'artère  abdominale  supé- 
rieure; l'autre,  appelé  artère  sternale,  plonge  entre  les  viscères 
pour  gagner  la  face  inférieure  du  thorax ,  y  donne  naissance  à 
une  artère  abdominale  inférieure ,  puis  se  recourbe  en  avant 
et  fournit  les  artères  pédieuses  et  maxillaires;  enfin,  à  la  ren- 
contre de  l'œsophage ,  il  se  divise  en  deux  branches  pour 
se  terminer  dans  la  partie  antérieure  et  inférieure  de  la  tête. 

rige  en  dedans,  sous  le  front,  donne  entre  l'estomac  et  la  région  branchiale 
des  branches  aux  muscles  gastriques  pour  se  ramifier  dans  la  portion  cor- 
antérieurs  et  se  termine  dans  les  pe-  respondante  du  foie,  et  une  brandie 
tites  antennes  ;  7°  une  branche  eu-  postérieure  qui  se  distribue  dans  la 
tanée  antéro-inférieure.  portion  latérale  et  moyenne  du  même 

Chez  le  Maia  squinado  ,  la  dis-  viscère.  Puis  les  deux  troncs  s'ana- 
position  des  artères  antennaires  est  à  sîomosent  sur  la  ligne  médiane,  don- 
peu  près  la  même  (a).  Mais  chez  le  nent  naissance  à  une  branche  impaire, 
Homard,  où  ces  vaisseaux  acquièrent  et  forment  un  gros  tronc  médian  qui 
un  très  grand  développement  ,  ils  se  porte  en  arrière  sous  l'intestin,  se 
descendent  sur  les  parties  latérales  bifurque  en  avant  de  l'artère  sternale, 
de  la  région  céphalique  et  se  1er-  et  se  ramifie  dans  la  portion  posté- 
minent  dans  l'intérieur  des  antennes  rieure  du  foie, 
externes  par  des  troncs  très  gros  (6).  Chez  le  Homard,  les  deux  artères 

(1)    Chez  le   Maia   squinado ,    la  hépatiques  restent    distinctes ,    et  le 

disposition   de   ces  artères  £St  assez  tronc   impair    dont    il   vient  d'être 

remarquable  (c).  Elles  plongent  verli-  question  se  trouve  représenté  par  une 

calement  dans  le  foie  et  donnent  nais-  paire  de  branches  postérieures  (d).  Il 

sance  chacune  à  deux  grosses  bran-  en  est  de  même  chez  l'Écrevisse  (e). 
ches  :  une  antérieure  ,   qui   s'avance 

(a)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Aiin.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  pi.  24). 
:    ib)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ibid.,  pi.  29,  fig.  1). 
(e)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ibid.,  pi.  26,  fig.  1). 

(d)  Audouin  et  Milne  Edwards,  loc.  cit.,  pi.  28,  fig.  2. 

(e)  Schlemm,  De  hepate  de  bile  Crustaceorum  et  Molluscoriim  quorumdam  [Dissert:  iïiaug.). 
Berolini,  1854,  p.  10,  pi.  I,  fig.  i. 


188  CIRCULATION    DU    SANG 

Chez  les  Décapodes  brachyures,  les  artères  abdominales  supé- 
rieures et  inférieures  sont  très  grêles ,  tandis  que  l'artère  ster- 
nale  est  d'un  calibre  très  fort;  mais,  chez  le  Homard  et  les 
autres  Décapodes  macroures ,  l'artère  abdominale  supérieure 
offre  au  contraire  un  développement  très  considérable,  et  l'ar- 
tère sternale  semble  en  être  une  branche  (1). 
cœur  et  artères  §  5.  —  Dans  l'ordre  des  Stomapodes  ,  la  conformation  du 
squiiies.  cœur  et  le  mode  de  distribution  des  artères  diffèrent  un  peu 
de  ce  que  nous  venons  de  voir  chez  les  Décapodes ,  mais  la 
manière  dont  le  sang  circule  est  toujours  la  même.  En  effet, 
chez  les  Squilles,  le  cœur,  au  lieu  d'être  ramassé  dans  la  por- 
tion moyenne  du  thorax ,  s'étend ,  sous  la  forme  d'un  gros 
vaisseau  contractile,  depuis  l'estomac  jusqu'à  l'extrémité  posté- 
rieure de  l'abdomen,  et  l'on  remarque  à  sa  face  supérieure 
cinq  paires  d'orifices  par  lesquels  le  sang  dont  la  chambre 
péricardique  est  remplie  pénètre  dans  son  intérieur  (2).  Un 

(1)  Le  tronc  commun  de  l'artère  aux  deux  dernières  paires  de  pattes 

abdominale  supérieure  et  de  l' art ère  thoraciques  (d). 

sternale  présente  chez  le  Homard  un  (2)  Dans  la  première  figure  qui  a  été 

léger  renflementen  forme  de  bulbe  (a).  donnée  de  cet  organe  par  Audouin  et 

Le  premier  de  ces   vaisseaux  ,  que  moi  d'après  une  Squille  qui  avait  sé- 

Hunter    a    appelé     Vaorte    descen-  journé  longtemps  dans  l'alcool,   les 

dante  (6) ,  longe  la  face  supérieure  deux  premières  paires  de  ces  orifices 

de  l'intestin  et  donne  naissance  à  une  sont  masquées  par  des  fragments  de 

paire  de    grosses   branches  latérales  matières  albumineuses  coagulées  qui 

vers  le  tiers  postérieur  de  chaque  an-  simulaient  des    vaisseaux   (e)  ;  mais 

neau  de  l'abdomen  (c).  V artère  sler-  leur  véritable  disposition  a  été  repré- 

nale  descend  vers  la  face  inférieure  du  sentée  dans   les    planches    que    j'ai 

thorax,  au  niveau  delà  troisième  paire  insérées   dans  la  grande  édition   du 

de  pattes  thoraciques,  et  c'est  de  l'ar-  Règne  animal  de  Cuvier  (/"),  ainsi  que 

tère  abdominale  inférieure  que  nais-  dans  mon   ouvrage  sur  les  Crusta- 

sent  les  artères  pédieuses  destinées  ces  (g). 

(a)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XI,  pi.  28,  fig.  1). 
(&)  Voyez  Descript.  and  Illustr.  Catalogue  of  the  Mus.  of  the  Collège  of  Surgeons,  vol.  II,  p.  126, 
pi.  15,   fig.  1  et  2;  pi.  16,fig.  1. 

(c)  Audouin  et  Milne  Edwards,  loc.  cit.,  pi.  29,  fig.  1. 

(d)  Loc.  cit.,  pi.  29,  fig.  1. 

(«)  Audouin  et  Milne  Edwards,  Recherches  sur  la  circulation  (loc.  cit.,  pi.  32) 
\f)  Milne  Edwards,  Atlas  du  Règne  animal.  Crustacés,  pi.  55  bis. 
(g)  Milne  Edwards,  Histoire  des  Crustacés,  t.  II,  p.  514,  pi.  9,  fi'g\  10. 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  189 

seul  tronc  cephaliqiie  naît  de  l'extrémité  antérieure  de  cet 
organe,  et  fournit  successivement  les  artères  antennaires  et  an- 
tennulaires  aussi  bien  que  les  artères  ophthalmiques.  Le  cœur 
donne  à  chaque  anneau  du  corps  une  paire  d'artères  trans- 
versales qui,  après  avoir  distribué  des  branches  aux  viscères, 
aux  muscles  du  tronc  et  aux  téguments,  pénètrent  dans  les 
pattes  ou  autres  appendices  analogues.  Enfin,  l'artère  sternale 
et  l'artère  abdominale  inférieure  ne  se  trouvent  représentées 
que  par  un  vaisseau  médian  extrêmement  grêle  (1). 

On  voit  donc  qu'ici  le  système  artériel  est  fort  simplifié. 
Chez  quelques  autres  Crustacés ,  tels  que  les  Limules  (2)  et  les 


(1)  Ce  vaisseau  est  accolé  à  la  face  in- 
férieure de  la  chaîne  ganglionnaire,  et 
fournit  dans  chaque  anneau  une  paire 
de  petites  branchies  qui  se  rendent 
aux  muscles  voisins,  mais  ne  consti- 
tuent pas,  comme  chez  les  Décapodes, 
les  artères  pédieuses  (a). 

(2)  Le  cœur  des  Limules  est  allongé 
comme  celui  des  Squilles,  mais  beau- 
coup plus  large  et  plus  charnu.  Il  est 
suspendu  aussi  dans  une  chambre 
péricardique  qui  fait  fonction  de  réser- 
voir sanguin,  et  il  présente  à  sa  face 
supérieure  plusieurs  paires  d'orifices 
afférents  dont  la  forme  est  celle  de 
petites  boutonnières  transversales  (6). 
M.  Vander  Hôven  en  a  donné  une 
figure,  et  a  compté  sept  paires  de  ces 
ouvertures  qui  sont  pourvues  cha- 
cune de  deux  petites  valvules  semi- 
lunaires  (c). 

A  l'extrémité  antérieure  du  cœur, 
située  vers  le  milieu  du  céphalo- 
thorax ,  nait  une  artère   céphalique 


impaire  qui  se  dirige  en  avant  et  se 
bifurque  bientôt.  Enfin ,  de  chaque 
côté,  le  cœur  fournit  sept  paires  de 
vaisseaux  transversaux  dont  le  mode 
de  distribution  n'a  pas  encore  été  étu- 
dié d'une  manière  sufiisan  te. 

Chez  les  Branchipes,  dont  Bénédict 
Prévost  a  étudié  le  mode  d'organisa- 
tion, le  cœur  a  la  forme  d'un  gros 
vaisseau  dorsal  étendu  depuis  la  tête 
jusque  dans  le  pénultième  anneau  de 
l'abdomen,  au-dessus  de  l'intestin,  et 
se  trouve  subdivisé  par  une  série  d'é- 
tranglements correspondants  aux  di- 
vers segments  du  corps  (d).  Toutes  les 
loges  ou  ventricules  ainsi  constitués 
(au  nombre  de  dix-huit  ou  dix-neuf) 
se  contractent  simultanément  et  lais- 
sent voir  pendant  la  diastole  deux 
échancrures  latérales.  Bénédict  Pré- 
vost n'a  pas  osé  se  prononcer  sur  les 
fonctions  de  ces  boutonnières;  mais 
ÎM.  Budge  a  vu  que  ce  sont,  en  effet, 
des  orifices  afférents  garnis  de  valvules. 


(a)  Milne  Edwards,  Atlas  du  Règne  animal  de  Gwtier,  Crustacés,  pi.  5G,  fig.  1. 

(b)  Straus,  Considérations  sur  l'anatomie  des  Animaux  articulés,  p.  346. 

(c)  Vander  Hôven,  Recherches  sur  l'histoire  naturelle  et  l'anatomie  des  Limules.  Leydc,  1838, 
p.  19,  pi.  2,  fig.  9. 

(d)  B.  Prévost,  Mém.  sur  le  Chirocêphale  (Hist.  des  Monocles,  parL.  Jurine,  1820,  p.  222). 


190  CIRCULATION   DU    SANG 

Branchipes  ,  le  cœur  est  disposé  à  peu  près  de  même  que  chez 
les  Squilles  ;  mais,  en  général,  il  tend  à  se  concentrer  davan- 
tage, et  l'on  trouve  ainsi  beaucoup  de  formes  intermédiaires 
entre  les  deux  termes  extrêmes  que  je  viens  de  décrire  (1). 
système  §  6.  —  Le  sang  artériel  est  distribué  dans  toutes  les  parties  de 
des  Décapodes,  l 'économie  par  ces  vaisseaux,  dont  les  parois  sont  membraneuses 
et  dont  les  ramifications  atteignent  un  grand  degré  de  finesse; 
mais  le  retour  du  fluide  nourricier  vers  l'appareil  respiratoire, 
où  il  doit  reprendre  ses  qualités  vivifiantes,  n'est  pas  assuré 

Ce  dernier  observateur  a  aperçu  aussi  Chez  les  Isopodes,  cet  organe  a 

une  valvule  à  l'extrémité  postérieure  également  la  forme  d'un  vaisseau  dor- 

du  cœur  (a).  sal,  mais  il  n'occupe  que  la  région  ab- 

La disposition  du  cœur  est  à  peuples  dominale  du  corps,  et  dans  le  thorax 

la  même  chez  VArtemia,  petit  Crustacé  il  se  rétrécit  de  façon  à  représenter 

branchiopode  très  voisin    du  précé-  une  artère  céphalique  seulement.  Celte 

dent  (6);  ainsi  que  chez  VIsaura  (c),  disposition   a  été  observée  par  Tre- 

et  chez  les  Limnadies,  qui  appartien-  viranus    chez    l'Aselle   d'eau    douce 

nent  au  même  ordre  (d).  {Asellus  vulgaris,  Latr.)  et  cbez  le 

(1)  Ainsi,  chez  I'Apus  cancrifor-  Porcellio  scaber  (f).  MM.  Brandt  et 

mis,  qui  appartient  au   même   ordre  Ratzburg   ont   mieux  représenté   les 

que  les  Branchipes  et  les  Artémies,  vaisseaux  qui  en  partent  chez  cette 

MM.  Berthold,  Krohn  et  Zaddacb,  ont  dernière  espèce    (g).    Enfin  il  a  été 

constaté  que  le  cœur  affecte  aussi  la  décrit  avec  un  peu  plus  de  détail  par 

forme  d'un  gros  vaisseau  dorsal  sub-  M.  Lereboullet  dans  son  travail  sur  les 

divisé  en  une  série  de  loges  par  des  Cloportides.  Le  cœur  proprement  dit 

étranglements  incomplets ,  mais  que  s'étend  depuis  le  cinquième  anneau 

cet  organe  ne  s'étend  que  depuis  le  du  thorax  jusqu'à  la  base  du  dernier 

céphalothorax  jusque  auprès  du  dou-  segment  abdominal,  et  se  trouve  en 

zième  segment  thoracique  (e).  connexion   latéralement  avec  quatre 

(a)  Budge,  Bemerkungen  ûber  Branchipus  paludosus  (Verhandhmgen  des  Naturhistorischen 
Vereines  der  Preussischen  Rheinlande,  1846,  p.  93). 

(b)  Joly,  Histoire  d'un  petit  Crustacé  (Artemia  salina)  auquel  on  a  faussement  attribué  la 
coloration  en  rouge  des  marais  salants  méditerranéens  ,  Montpellier,  1840,  p.  20,  pi.  3,  fig.  1, 
et  Afin,  des  sciences  nat.,  2"  série,  t.  XIII,  p.  239. 

(c)  Joly,  Recherches  %oologiques,  analomiques  et  physiologiques  sur  t'Isaura  cycladoides  (Ann. 
des  sciences  nat.,  1842,  2'  série,  t.  XXVII,  p.  323). 

(d)  Lereboullet,  Obs.  sur  le  eccur  et  la  circul.  dans  la  Limnadie  de  Hermann,  etc.  (Institut, 
1848,  t. XVI,  p.  328). 

(e)  Berthold,  Beitrage  %ur  Anatomie  des  Krebsartigen  Kiefenfusses,  Apus  cancriformis  (Isis, 
1830,  t.  XXIII,  p.  690). 

—  Krohn,  Ueber  ein  gegliedertes  Herz  im  Blattfusse  (Froriep's  Notix-en,  1836,  t.  XLIX, 
p.  305,  fig.  1  et  2). 

—  Zaddach,  De  apodis  cancriformis  anatome  et  historia  evolutionis  (Dissert,  inaug1.).  Bonnœ, 
1841,  p.  17,  pi.  2,  fig.  10,  etc. 

(/■)  Tre\iranus ,  Vermischte  Schriften,  1816,  Bd.  I,  p.  58,  etc.,  pi.  8,  fig.  46,  et  pi.  9,  fig.  55. 
(g)  Brandt  und  Ratzeburg,  Medizinische  Zoologie,  1833,  Bd.  II,  p.  75,  pi.  15,  fig.  38. 


CHEZ   LES   CRUSTACÉS.  191 

de  la  même  manière,  et  ne  s'effectue  pas  à  l'aide  d'un  système 
de  tubes  comparables  aux  artères.  Le  sang  veineux  se  répand 
dans  les  espaces  de  forme  irrégulière  que  les  divers  organes 
laissent  entre  eux ,  et  c'est  en  passant  par  ces  lacunes  qu'il 
arrive  à  l'entrée  des  canaux  afférents  des  branchies.  Les  por- 
tions de  la  cavité  abdominale  qui  sont  inoccupées  par  les  vis- 
cères font  toujours  partie  de  ce  système  de  méals  veineux,  et 
constituent  même ,  chez  beaucoup  de  Crustacés,  les  principaux 
réservoirs  où  ce  liquide  s'accumule  avant  de  pénétrer  dans 


paires  de  canaux  qui  paraissent  y  ap- 
porter le  sang  de  l'appareil  bran- 
chial. Antérieurement,  il  se  continue 
sous  la  forme  d'un  vaisseau  plus 
étroit  qui  longe  l'intestin  en  dessus 
jusqu'à  l'estomac ,  où  il  se  divise  en 
trois  branches,  savoir  :  une  artère 
céphalique  médiane  qui  passe  sur  l'es- 
tomac, et  deux  artères  latérales.  Le 
cœur  proprement  dit  fournit  égale- 
ment par  son  extrémité  antérieure  une 
paire  d'artères  viscérales.  Chez  les 
jeunes  Cloportes  ,  M.  Lereboullet  a 
vu  sur  les  côtés  du  cœur  des  bou- 
tonnières munies  de  valvules,  mais  il 
n'a  pu  distinguer  aucune  trace  de 
vaisseaux  transversaux  dont  il  avait 
aperçu  les  parois  chez  des  individus 
adultes.  Il  a  reconnu  aussi  l'existence 
d'une  valvule  à  l'entrée  de  l'artère 
qui  naît  de  l'extrémité  antérieure  du 
cœur,  vers  la  partie  postérieure  du 
thorax  (a). 
Chez  les  Daphnies,  le  cœur  est  au 


contraire  très  ramassé  et  a  la  forme 
d'une  poche  musculaire  arrondie  si- 
tuée à  la  partie  antérieure  du  thorax, 
et  présente  au-dessus  un  orifice  affé- 
rent (b).  Schaeffer  avait  cru  que  cet 
organe,  dont  les  battements  sont  très 
précipités  et  s'élèvent  parfois  à  plus  de 
deux  cents  par  minute,  était  divisé  en 
deux  loges  (c). Mais  M.  Straus  a  reconnu 
que'-sa  cavité  est  en  réalité  simple  (d), 
et  la  poche  que  Gruithuisen  a  décrite 
comme  étant  un  cœur  veineux  situé 
au-dessous  du  cœur  artériel  est  pro- 
bablement une  simple  dilatation  de  la 
chambre  péricardique  (e).  Perty  a 
cru  apercevoir  un.  second  cœur  situé 
au-dessous  de  l'intestin,  près  de  la 
tête,  chez  ces  petits  Crustacés  (f)  ; 
mais  rien  de  semblable  n'a  été  vu  par 
les  autres  naturalistes  qui  ont  étudié 
la  structure  de  ces  Animaux. 

Jurine  a  fait  connaître  la  position 
et  la  forme  du  cœur  chez  les  Cyclops. 
Cet  organe  consiste  en   une   poche 


(a)  Lereboullet,  Mèm.  sur  les  Crustacés  de  la  famille  des  Cloportides,  p.  102,  figi  150,  pi.  7,  et 
fig.  151,  pi.  8  (exlr.  des  il/cm.  de  la  Soc.  d'hist.  nat.  de  Strasbourg,  1853). 

(b)  Lereboullet,  Obs.  sur  le  cœur  des  Limnadies  et  des  Daphnies  [Institut,  1848,  t.  XVI,  p.  328). 

(c)  Schaeffer,  Von  den  geschwanzten  xackigen  'W'asserflohen  (Abhandlungeii  von  Insecten,  1764 
Bd.  I;  p.  274). 

—  Voyez  aussi  Jurine,  Histoire  des  Monocles,  p.  193. 

(d)  Straus,  Mém.  sur  les  Daphnies  (tient,  du  Muséum  d'hist.  nat.,  t.  V,  p.  412). 

(e)  Gruithuisen,  Ueber  die  Daphnia  simiatMitZ  ihren  Blutkreislauf  (Nov.  Acta  Acad.  Nat.  curios 
t.  XIV,  p.  404,  pi.  22,  fig.  6). 

(f)  Perty,  Beitrage  %ur  Kenntniss  der  Fauna  monacensis  (Isis,  1832,  t.  XXV,  p.  725). 


192  CIRCULATION    DU    SANG 

l'appareil  respiratoire.  Le  sang  baigne  donc  les  muscles ,  le 
système  nerveux  et  les  viscères,  dont  il  n'est  séparé  que  par 
une  couche  mince  de  tissu  connectif  analogue  à  celui  dont  tous 
les  organes  sont  d'ordinaire  revêtus  ou  par  une  sorte  de  vernis 
épithélique. 

Ainsi,  chez  les  Homards  et  les  Écrevisses,  l'espace  qui 
occupe  la  portion  moyenne  et  inférieure  de  l'abdomen,  qui  loge 
la  chaîne  ganglionnaire,  et  qui  se  trouve  limité  en  dessus  et  sur 
les  côtés  par  les  muscles  de  la  queue,  et  en  dessous  par  les 
téguments  communs,  estrempli  de  sang  veineux  et  communique 
librement  avec  les  vaisseaux  des  branchies.  Pour  s'en  assurer, 
il  suffit  d'un  petit  nombre  d'expériences  que  j'ai  souvent  répétées 
devant  le  public. 

Si  l'on  fait  une  petite  piqûre  à  la  membrane  tégumentaire 
de  la  face  inférieure  de  l'abdomen,  de  façon  à  ouvrir  la  cavité 
en  question,  on  voit  s'écouler  en  abondance  un  liquide  qui 
bientôt  se  coagule  spontanément,  et  qui  est  évidemment  du 
sang. 

Si,  au  lieu  de  faire  sortir  du  sang  hors  des  cavités  qui  sont 
destinées  à  le  contenir,  on  en  détermine  la  coagulation  à  l'aide 
de  la  chaleur,  et  qu'ensuite  on  ouvre  le  corps  de  l'animal,  on 
trouve  un  magma  albumineux  qui  est  bien  reconnaissable  et  qui 
occupe  la  portion  libre  de  la  cavité  abdominale,  ainsi  que  les 
autres  lacunes  interorganiques. 

ovalaire  qui  repose  sur  l'intestin,  im-  il  a  aperçu  une  poche  pyriforme  qui 

médialement  sous  la  division  située  lui  semble  devoir  jouer  le  rôle  d'une 

entre  le  deuxième  et  le  troisième  seg-  oreillette  (a). 

ment  du  squelette  tégumentaire  ;  il  M.  Nordmann  a  trouvé  un  cœur  de 

bat  de  112  à  120  fois  par   minute,  forme  ovalaire  dans  le  premier  seg- 

et  sa  cavité  paraît  être  simple.  Jurine  ment  thoracique  du  corps  de  TErga- 

a  cru  en  voir  sortir  deux  vaisseaux  ce-  silius,  petit  Crustacé  parasite  qui  res- 

phaliques  ,  et  au-dessous  de  ce  cœur  semble  beaucoup  aux  précédents  (6). 

{a)  L.  Jurine,  Histoire  des  Monocles,  1820,  p.  57,  pi.  4,  fig.  2  ;  pi.  5,  fig.  4. 
(6)  Nordmann,  Nikrogr.  Beitr.,  1832,  Bd.  H,  p.  H. 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  193 

Enfin,  si  après  avoir  fait  sortir  le  sang  par  une  ponction  de 
la  cavité  viscérale,  on  injecte  dans  cette  même  cavité  un  liquide 
coloré,  on  voit  celui-ci  se  répandre  dans  les  espaces  intermus- 
culaires, et  bientôt  après  remplir  tout  le  système  des  vaisseaux 
afférents  de  l'appareil  branchial. 

Chez  les  Squilles,  la  grande  lacune  médiane  ainsi  limitée 
règne  dans  presque  toute  la  longueur  du  corps  et  constitue  le 
principal  réservoir  veineux  (1).  Mais,  chez  les  Décapodes,  des 
espaces  ménagés  entre  les  muscles  de  la  base  des  pattes  thora- 
ciques  et  les  téguments  communs  constituent  de  chaque  côté 
du  corps  une  série  de  sinus  d'une  capacité  encore  plus  consi- 
dérable qui  communiquent  directement  avec  les  vaisseaux  affé- 
rents des  branchies  situées  immédiatement  au-dessus.  Chez 
les  Décapodes  Brachyures,  ces  réservoirs,  auxquels  on  a  donné 
le  nom  de  sinus  branchiaux,  constituent  même  la  portion  la 
plus  importante  du  système  veineux  et  présentent  une  disposi- 
tion curieuse,  mais  qu'il  serait  trop  long  de  décrire  ici  (2). 

Ç  7 .  —  Les  vaisseaux  qui  distribuent  le  sang  veineux  aux     vaisseaux 

u  *  .  "  branchiaux. 

organes  respiratoires,  et  qui  naissent  de  ces  sinus  latéraux,  occu- 
pent la  face  externe  des  pyramides  branchiales ,  et ,  ainsi  que 


(i)  II  ne  faut  pas  confondre  ce  pro-  poche  formée  par  la  tunique  séreuse 

longement  médian  de  la  cavité  viscé-  de  cette  glande  à  moitié  vidée  par  la 

raie  qni  sert  de  réservoir  veineux  avec  putréfaction  que  Duvernoy  a  prise  pour 

ce  que  Duvernoy  a  décrit  sous  le  nom  un  sinus   veineux;    enfin,  l'humeur 

de  grand  sinus  veineux  des  Squilles,  laiteuse  qu'il  dit  y   avoir  trouvée  ,  et 

et  qu'il  dit  entourer  l'intestin.  Les  re-  qu'il  considère  comme  du  sang  coa- 

cherches  de  cet  anatouiiste  avaient  été  gulé,  n'était  en  réalité  que  les  détri- 

faites  sur  des  individus  qui  avaient  tus  laissés  par  le  tissu  hépatique  (a), 
macéré   pendant  longtemps   dans  de  (2)  Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet, 

l'alcool  trop  affaibli  et  dont  le  foie  je  renverrai  au  Mémoire  publié  par 

s'était  réduit  à  l'état  d'une  matière  Audouin  et  moi  il  y  a  trente  ans  (6). 
pultacée  semi-liquide.    Or ,  c'est  la 

(a)  Duvernoy,  Mém.  sur  quelques  points  d'organisation  concernant  les  appareils  d'alimentation 
et  de  circulation  et  l'ovaire  des  Squilles  (Ann.  des  sciences  nat.,  2'  série,  t.  VIII,  p!.  2,  fig.  4). 

(b)  Audouin  et  Milne  Edwards ,  Recherches  sur  la  circulation  chez  les  Crustacés  (Ann.  des 
scisnces  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  355  et  suiv.,  pi.  26,  fig.  2  et  i  ;  pi.  27,  fig.  1  ;  pi.  30,  fij.  i  et  2). 

m.  13 


19/|  CIRCULATION    DU    SANG 

nous  l'avons  déjà  vu,  fournissent  de  chaque  côté  des  branches 
qui  se  ramifient  dans  les  feuillets  ou  les  filaments  dont  ces  or- 
ganes se  composent.  Le  réseau  capillaire,  ainsi  constitué,  donne 
naissance  du  côté  opposé  à  des  vaisseaux  efférents  qui  se 
réunissent  d'une  manière  semblable  dans  les  canaux  verticaux 
situés  à  la  face  interne  de  chaque  branchie  (1).  Enfin,  ces  der- 
niers conduits,  qui,  à  raison  de  leurs  fonctions  aussi  bien  que 
de  leurs  rapports  anatomiques,  sont  appelés  canaux  branchio- 
cardiaques,  pénètrent  dans  le  thorax,  au-dessus  des  sinus  bran- 
chiaux, se  recourbent  en  haut,  suivent  la  face  externe  de  la 
voûte  des  flancs,  et  vont  s'ouvrir  tous  ensemble  de  chaque  côté 
du  cœur,  dans  la  chambre  péricardique. 
sinus  Cette  cavité,  comme  nous  l'avons  déjà  vu,  est  séparée  de  la 

p  ncardlque.  ^^j.g  vjscéraie  située  au-dessous  par  un  plancher  mem- 
braneux, et  elle  est  fermée  de  toutes  parts,  excepté  là  où  les 
canaux  branchio-cardiaques  y  débouchent  (2).  Chez  les  Déca- 
podes Brachy ures,  elle  est  limitée  postérieurement  par  le  bord 

(1)  On  doit  à  Treviranus  quelques  ce  sinus  est  en  forme  de  cul-de-sac  ; 
observations  sur  la  circulation  du  sang  mais  vers  le  milieu  des  cinq  premiers 
dans  les  organes  respiratoires  des  anneaux  abdominaux ,  il  reçoit ,  de 
Crustacés,  et  ce  physiologiste  pense  chaque  côté,  un  canal  branchio-car- 
que  les  deux  courants  en  sens  con-  diaque  qui  vient  de  la  branchie  corres- 
traire  qui  se  voient  au  microscope  pondante  et  qui  monte  de  la  base  de  la 
dans  chaque  brin  des  houppes  bran-  fausse  patte  jusque  sur  le  dos,  en  con- 
ciliâtes des  Squilles  sont  contenus  tournant  la  face  latérale  du  corps  (6). 
dans  un  seul  et  même,  canal  (a).  Chez  les  Décapodes  ,  les  canaux 

(2)  Chez  les  Squilles,  la  chambre  branchio-cardiaques  occupent  la  ré- 
péricardique  s'étend  depuis  le  bord  gion  thoracique  du  corps ,  et  varient 
postérieur  de  l'estomac,  situé  vers  le  un  peu  quant  à  leur  nombre  et  à  leur 
tiers  postérieur  de  la  carapace,  jus-  conformation,  suivant  le  nombre  et  le 
qu'au  bord  antérieur  du  dernier  seg-  mode  d'insertion  des  branchies  ;  mais 
ment  abdominal,  et  occupe  presque  le  toujours  il  ne  s'en  trouve  qu'une  seule 
tiers  de  la  largeur  de  la  face  dorsale  paire  par  segment,  et  ils  suivent  l'an- 
du  corps.  Dans  sa  moitié  antérieure,  gle  rentrant  formé  par  la  rencontre  de 

(a)  Treviranus,  Beobachtungen  aus  der  Zootomie  und  Physiologie,  1839,  t.  I,  pi.  G,  fig.  38. 
(6)  Milne  Edwards ,  Histoire  naturelle  des  Crustacés,  pi.  9,  %.  2  et  3,  et  Crustacés  de  l'Atlas 
du  Règne  animal  de  Olivier,  pi.  56,  fig.  1  a  et  1  c. 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  195 

du  premier  segment  abdominal  qui  s'avance  assez  loin  dans 
l'intérieur  du  thorax,  et,  par  conséquent,  elle  n'est  guère  plus 
grande  que  le  cœur;  mais,  chez  les  Macroures,  elle  s'étend 
jusque  sous  le  bord  postérieur  de  la  carapace,  et  chez  les 
Squilles,  elle  occupe  toute  la  longueur  de  l'abdomen. 

Ainsi,  chez  tous  les  Crustacés  supérieurs,  la  totalité  du  sang 
qui  arrive  au  cœur  a  traversé  préalablement  l'appareil  respira- 
toire, et  si  quelques  anatomistes  admettent  que  chez  ces  Ani- 
maux le  sang  veineux  se  mêle  au  sang  artériel  pour  être  ensuite 
repris  par  la  pompe  cardiaque  et  lancé  dans  les  artères,  c'est 
parce  qu'ils. n'ont  pas  connu  l'existence  du  plancher  membra- 
neux qui  sépare  complètement  la  chambre  péricardique  des 
sinus  veineux  situés  au-dessous.  Cette  cloison  est  en  effet  très 
facile  à  rompre,  et  lorsqu'on  fait  des  injections  sans  observer 
toutes  les  précautions  convenables,  il  arrive  souvent  qu'elle  se 


l'épimérite,  qui  y  constitue  la  voûte  trois  ou  quatre  vaisseaux  efférents 
des  flancs,  et  l'apodème,  qui  se  détache  débouchent  dans  chacun  d'eux  (a). 
de  celle-ci  en  manière  de  cloison,  Chez  les  Brachyures,  les  canaux 
pour  former  la  rangée  supérieure  des  branchio-cardiaques  ne  sont  qu'au 
cellules  thoraciques  dont  je  ferai  con-  nombre  de  cinq  de  chaque  côté  du 
naître  la  structure  lorsque  je  traiterai  corps,  et  ils  s'anastombsent  de  façon 
du  squelette  tégumentaire  de  ces  Ani-  à  se  terminer  dans  le  sinus  péricar- 
maux.  dique  par  deux  ou  trois  orifices  fort 
Chez  le  Homard  et  la  plupart  des  rapprochés ,  ainsi  que  cela  se  voit 
autres  Macroures,  on  compte,  de  cha-  chez  le  Tourteau  (6 1 ,  le  Maïa  (c) ,  etc. 
que  côté,  six  canaux  branchio-car-  La  tunique  membraneuse  qui  les 
diaques  qui  s'élèvent  en  convergeant  revêt  est  très  mince,  mais  bien  dis- 
entre eux  et  se  réunissent  de  façon  à  tincte,  et  se  continue  avec  celle  qui 
déboucher  presque  au  même  point  tapisse  la  chambre  péricardique.  Cette 
dans  la  partie  latérale  du  sinus  péri-  dernière  adhère  supérieurement  au 
cardique.  Quelques-uns  de  ces  canaux  derme  situé  au-dessus  ;  mais  elle  reste 
ne  reçoivent  donc  que  le  sang  venant  isolée  en  passant  sous  le  cœur,  et  y 
d'une  ou  de  deux  branchies  ,  mais  constitue  une  cloison  complète ,  quoi- 
dans  la  partie  moyenne   du   thorax  que  très  délicate. 


(a)  Audouin  el  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  pi.  31 ,  fig\  1  et  2) 
(6)  Milne  Edwards,  Crustacés  de  V Atlas  du  Règne  animal,  pi.  1. 
(c)  Audouin  et  Milne  Edwards,  loc.  cit.,  pi.  26,  fig-,  3. 


circulatoire 

chez 

les  Crustacés 

inférieurs. 


196  CIRCULATION    DU   SANG 

déchire,  lésion  qui  établit  aussitôt  une  communication  anormale 
entre  le  cœur  et  la  portion  veineuse  du  cercle  circulatoire  et 
en  impose  aisément  à  l'expérimentateur;  mais  des  dissections 
bien  conduites  ne  laissent,  ce  me  semble,  aucune  incertitude 
sur  la  clôture  complète  de  ce  réservoir  sanguin  (1). 
Appareil  §8.  —  Chez  tous  ces  Crustacés  le  système  artériel  est  bien 
complet  et  se  trouve  constitué  par  des  vaisseaux  à  parois  propres  ; 
le  passage  du  sang  de  l'appareil  respiratoire  jusque  dans  la 
chambre  péricardique  s'opère  à  l'aide  de  tubes  membraneux,  et 
c'est  seulement  dans  la  portion  veineuse  du  cercle  circulatoire, 
c'est-à-dire  entre  le  réseau  terminal  des  artères  et  les  branchies, 
que  les  vaisseaux  sanguins  manquent  et  sont  remplacés  par  les 
espaces  lacunaires  interorganiques  dont  les  parois  sont  formées 
essentiellement  par  les  muscles,  les  viscères  ou  les  téguments 
circonvoisins,  et  sont  tapissées  seulement  par  une  couche  mince 
de  ce  tissu  connectif  qui  se  retrouve  presque  partout  dans  l'éco- 
nomie, et  que  les  anthropotomistes  désignent  d'ordinaire  sous 
le  nom  de  tissu  cellulaire.  Mais,  chez  les  Crustacés  inférieurs, 
l'appareil  irrigatoire  paraît  se  dégrader  beaucoup  plus ,  et  la 

(i)  C'est  delà  sorte  que  je  m'expli-  toure  le  cœur,  disposition  qui  entraî- 
que  l'erreur  commise  par  un  illustre  nerait  le  mélange  du  sang  veineux 
anatomiste  anglais,  J.  Hunter,  et  ac-  arrivant  des  diverses  parties  du  corps 
cueillie  avec  confiance  par  plusieurs  avec  le  sang  artériel  venant  de  l'appa- 
auteurs  plus  récents.  rcil  respiratoire  par  les  canaux  bran- 
Dans  un  travail  qui  est  resté  en  chio -cardiaques  {a).  Aussi  MM.  Owen 
portefeuille  pendant  plus  de  quarante  (6)  et  Carpenter  (c)  assignent-ils  ce 
ans  après  la  mort  de  son  auteur,  et  caractère  mixte  à  la  circulation  chez 
qui  a  été  publié  par  les  soins  de  les  Crustacés,  et  ce  dernier  la  compare 
M.  Owen  en  183Zi,  Hunter  représente  sous  ce  rapport  à  ce  qui  existe  chez 
les  lacunes  veineuses  du  thorax  comme  les  Reptiles.  Mais  le  mélange  en  ques- 
se  confondant  avec  l'espace  qui  en-  tion  n'a  pas  lieu. 

(a)  Descriptive  and  Illustrated  Catalogue  ofthe  Physiol.  Séries  ofComp.  Anat.  Contained  in  tht 
Mus.  of  the  Collège  of  Surgeons  in  London,  1834,  vol.  II,  p.  138  et  suiv.,  pi.  17,  fig.  1  ;  pi.  18, 
%.  4. 

(6)  Owen,  Lectures  on  the  Comparative  Anatomy  and  Physiology  of  the  Invertebrate  Animais, 
1843,  p.  179. 

(c,  Carpenter,  Principles  of  Comparative  Physiology,  1854,  p.  244. 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  197 

plupart  des  observateurs  qui  ont  étudié  attentivement  les  phé- 
nomènes de  la  circulation  chez  les  Branchiopodes ,  les  Ento- 
mostracés  et  les  Siphonostomes ,  s'accordent  à  penser  que  les 
courants  artériels,  aussi  bien  que  les  courants  veineux,  s'éta- 
blissent dans  un  système  de  lacunes  ou  de  canaux  endigués 
seulement  par  les  organes  circonvoisins  (1). 


(1)  Les  recherches  de  MM.  Frey  et 
Leuckart  tendent  à  établir  que  l'appa- 
reil circulatoire  des  Mysis  se  compose 
seulement  d'un  cœur  cylindrique  éten- 
du dans  toute  la  longueur  du  thorax 
et  percé  de  trois  paires  d'orifices  effé- 
rents,  d'un  vaisseau  céphalique  mé- 
dian ouvert  à  son  extrémité  anté- 
rieure, et  d'un  système  de  lacunes 
interorganiques  (a). 

D'après  les  observations  de  Zin- 
ker  {b)  et  celles  qui  lui  sont  propres, 
M.  Siebold  pense  que  chez  les  Am- 
phipodes,  le  système  artériel  est  très 
rudimentaire,  et  que,  dans  la  presque 
totalité  de  son  trajet,  le  sang  circule 
dans  des  lacunes  ou  espaces  inter- 
organiques dépourvus  de  parois  pro- 
pres (c).  Le  cœur  de  ces  Crustacés, 
des  Crevettes  {Gammarus),  par  exem- 
ple, a  la  forme  d'un  vaisseau  dorsal, 
et  occupe  la  portion  thoracique  du 
corps.  M.  Caspary  y  a  observé  une 
série  d'étranglements  situés  vers  le 
milieu  des  troisième,  quatrième,  cin- 
quième et  sixième  anneaux  du  thorax, 
et  a  vu  qu'il  se  contracte  avec  beau- 


coup de  rapidité;  il  a  compté  plus  de 
deux  pulsations  par  seconde  (d). 

Le  même  mode  d'organisation  a  été 
observé  chez  la  Chevrolle  (Caprella 
linearis)  par  MM.  Frey  et  Leuckart. 
Le  cœur  a  la  forme  d'un  vaisseau  dor- 
sal étendu  depuis  la  tête  jusqu'à  l'ori- 
gine du  tubercule  abdominal,  et  pré- 
sente cinq  paires  d'orifices  afférents 
garnis  de  valvules.  Une  artère  cépha- 
lique (ou  aorte)  naît  de  l'extrémité 
antérieure  du  cœur  ;  mais  ces  au- 
teurs n'ont  pu  découvrir  aucun  autre 
vaisseau  sanguin  afférent  ,  et  dans 
toutes  les  autres  parties  du  corps  les 
courants  formés  par  le  sang  se  trou- 
vent dans  les  lacunes  interorgani- 
ques (e).  Ce  que  M.  Goodsir  a  dit  des 
artères  et  des  veines  qui  se  verraient 
dans  les  antennes  de  ces  petits  Crus- 
tacés s'applique  évidemment  aux  deux 
courants  en  sens  opposés  qui  se  voient 
facilement  dans  les  divers  appen- 
dices (/■). 

M.  Zaddach,  qui  a  fait  une  étude 
très  approfondie  de  l'organisation  de 
TApus  cancriforme,  pense  que  chez 


(a)  H.  Frey  et  R.  Leuckart ,  Beitrcige  %uv  Kenntniss  wirbelloser  Thiere  des  Norddeutschen 
Mètres,  1847,  p.  421,  pi.  2,  6g.  14. 

(6)  Zinker ,  De  Gammari  pulicis  historia  naturali  atque  sanguinis  circuitu  commentât™. 
lente,  1832. 

(c)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  vol.  I,  p.  452. 

(d)  Gammarus  puteanus  beobachtet  von  R.  Caspary  (Verhandl.  des  Naturhist.  Vereines  der 
Preussischen  Rheinlande  und  'Westphaliens ,  1849,  p.  44,  pi.  2,  fis?.  19). 

(«)  Frey  et  Leuckart,  Beitr.  zur  Kenntniss  wirbelloser  Thiere  des  Norddeutschen  Meeres,  p.  1 04, 
pi.  2,  fiç.  20. 

(/")  H.  Goodsir,  On  a  New  Genus  and  Six  Neiv  Species  of  Crustacea  (Edinburgh  New  Philosoph. 
Journal,  1842,  vol.  XXX1I1,  p.  184). 


198  CIRCULATION    DU    SANG 

Chez  la  plupart  des  Crustacés  inférieurs,  où  la  respiration 
est  cutanée  et  diffuse,  il  ne  parait  y  avoir  aucune  distinction 
bien  nette  entre  le  sang  artériel  et  le  sang  veineux.  Le  même 
courant  traverse  successivement  diverses  parties  du  corps,  et 
c'est  dans  le  voisinage  immédiat  du  cœur  seulement  qu'on  peut 
reconnaître  si  ce  courant  s'éloigne  ou  se  rapproche  de  cet 


ce  Crustacé  le  système  artériel  est 
confondu  avec  le  système  veineux, 
et  que  la  presque  totalité  du  cercle 
circulatoire  est  formée  par  des  ca- 
naux lacunaires  seulement.  En  lais- 
sant de  côté  quelques  particularités 
de  nomenclature  adoptées  par  ce  na- 
turaliste, on  voit  que  le  cœur  est 
suspendu  dans  une  cavité  péricar- 
dique  faisant  fonction  de  sinus  san- 
guin ,  et  que  de  l'extrémité  anté- 
rieure de  cet  organe  le  courant  se 
répand  dans  la  région  céphalique , 
gagné  la  face  slernale  du  corps,  passe 
en  partie  dans  les  pattes  branchiales  , 
en  partie  dans  un  système  d'anses  vas- 
culaires  creusées  à  la  face  interne  de  la 
carapace  ;  puis  revient  dans  un  grand 
sinus  ventral ,  gagne  la  partie  posté- 
rieure de  l'abdomen,  et  rentre  dans 
le  cœur  par  la  cavité  péricardique , 
dont  la  portion  postérieure  est  cloi- 
sonnée en  dessous  par  une  membrane, 
mais  dont  la  portion  antérieure  se 
continue  avec  la  région  céphalique 
de  la  cavité  viscérale  (a). 

M.  Budge  a  observé  aussi  la  circu- 
lation lacunaire  chez  les  Branchipes: 
les  courants  sanguins,  dit  ce  physio- 


logiste, ne  sont  pas  renfermés  dans  des 
vaisseaux,  mais  sont  libres  entre  les 
organes,  bien  qu'ils  offrent  une  régu- 
larité remarquable  (6). 

Gruilhuisen  a  décrit  avec  beaucoup 
de  soin  la  route  suivie  par  les  princi- 
paux courants  sanguins  dans  le  corps 
des  Daphnies  ;  mais  il  n'a  pu  aperce- 
voir des  vaisseaux  à  parois  propres 
que  dans  le  voisinage  immédiat  du 
cœur  ;  dans  les  parties  périphériques 
du  système  circulatoire,  ainsi  que  dans 
les  trajets  veineux,  il  n'a  pu  découvrir 
aucune  trace  de  parois  tubulaires  (c). 

L'absence  de  vaisseaux  proprement 
dits  dans  une  grande  partie  du  corps 
de  TArgule  foliacé  avait  été  depuis 
longtemps  signalée  par  Jurine  (ils  (d). 

Les  observations  plus  récentes  de 
M.  Vogt  rectifient  des  erreurs  commises 
par  ce  naturaliste  relativement  à  la  po- 
sition du  cœur,  et  tendent  à  établir  que 
dans  quelques  parties  de  l'organisme 
le  sang  circule  dans  des  vaisseaux  tu- 
bulaires. Mais ,  dans  d'autres  parties  , 
M.  Vogt  n'a  pu  découvrir  aucune  trace 
de  parois  propres  autour  des  cavités 
qui  renferment  ce  liquide  (e). 

Suivant  M.  Nordmann,  la  circula- 


fa)  B.-G.  Zaddach  ,  De  Apodis  cancriformis  anatome  et  historia  evohitionis.  In-4 ,  Bonnse  , 
1841,  p.  15  et  suiv.,  pi.  1  et  2,  fig.  10  à  17. 

(b)  Budge  ,  Bemerkung  ûber  Branchipus  paludosus   (  Verhandl.  des  Naturhist.   Vereines  der 
Preussischen  Rheinlande,  1840,  p.  94). 

(c)  Gruithuisen,  Ueberdie  Daphnia  simiawnd  ihren  Blutkreislauf  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios., 
t.  XIV,  p.  399,  pi.  24,%.  6). 

(d)  Jurine  fils,  Mém.  sur  VArgule  foliacé  (Ann.  du  Muséum,  "1806,  t.  VII,  p.  439). 

(e)  Vogt ,  Beitràge  zur  Naturgeschichte  der  schweizerischen  Crustaceen  (Neue  Denkschrift . 
der  Allgem.  Schiveizer  Gesellsch.  fur  die  gesammten  Naturwissenschaften,  1843,  Bd.  VII). 


CHEZ    LES    CRUSTACÉS.  499 

organe.  Ainsi  la  division  du  travail  physiologique  et  la  spé- 
cialité des  instruments  paraît  diminuer  de  plus  en  plus  à  mesure 
que  l'on  descend  dans  la  série  Carcinologique;  mais  ici  la  dé- 
gradation ne  paraît  être  jamais  portée  aussi  loin  que  chez  les 
Molluscoïdes  inférieurs,  car  le  cœur  semble  ne  manquer  chez 
aucun  représentant  de  ce  type  (1).  Nous  voyons  également  que 


tion  du  sang  est  complètement  lacu- 
naire chez  les  Siphonostomiens,  dont 
il  a  composé  le  genre  Achthères.  Le 
cœur  de  ces  Crustacés  parasites  est 
placé  dans  la  partie  antérieure  du 
céphalothorax ,  et  a  la  forme  d'un  sac 
allongé,  étroit  en  avant  et  élargi  en 
arrière.  Le  sang,  mis  en  mouvement 
par  les  contractions  de  cet  organe ,  se 
meut  librement  dans  la  cavité  générale 
du  corps  ainsi  que  dans  des  sillons  ou 
lacunes  ménagées  dans  d'autres  par- 
ties ,  et  l'on  ne  saurait  y  établir  au- 
cune distinction  analogue  à  celle  qui 
existe  d'ordinaire  entre  les  artères  et 
les  veines  (a). 

Dans  le  Dichelestiox,  le  cœur  pa- 
raît avoir  la  forme  d'un  vaisseau  na- 
viculaire  qui  s'étend  depuis  le  ganglion 
cérébroïde  situé  au  milieu  du  bouclier 
céphalique  jusque  vers  le  milieu  du 
second  anneau  thoracique.  M.  Rathke 
n'a  pu  découvrir  chez  ce  Crustacé 
aucun  autre  vaisseau  sanguin  (6). 

MM.  Pickering  et  Dana  ,  à  qui  l'on 
doit  une  très  bonne  monographie  ana- 
tomique  du  Caligus  americanas  ,  ont 
très  bien  vu  le  mouvement  circula- 


toire du  sang  chez  ce  petit  Crustacé  , 
mais  ils  n'ont  pu  distinguer  le  cœur. 
D'après  le  jeu  de  quelques  valvules 
qu'ils  ont  remarqué,  il  est  cependant 
probable  que  cet  organe  se  trouve 
placé,  comme  d'ordinaire,  sur  le  dos, 
entre  le  milieu  de  la  région  céphalique 
et  le  premier  anneau  thoracique. 
Quant  aux  courants  circulatoires,  ils 
s'établissent  dans  les  espaces  inter- 
musculaires et  autres  lacunes  ;  souvent 
ils  deviennent  oscillatoires  (c). 

On  ne  sait  encore  que  fort  peu  de 
choses  relativement  à  l'appareil  circu- 
latoire des  Cirripèdes.  Poli  a  reconnu 
l'existence  d'un  cœur  situé  vers  la 
partie  postérieure  de  la  région  thora- 
cique du  corps,  chez  les  Analifes  (cl)  ; 
mais  ni  Cuvier  (e) ,  ni  M.  Martin 
Saint-Ange  (f),  n'ont  pu  voir  distinc- 
tement cet  organe  ,  et  ce  dernier  ana- 
tomiste  pense  que  les  canaux  avec 
lesquels  il  communique  ne  sont  pas 
de  véritables  vaisseaux  sanguins,  mais 
des  cavités  creusées  dans  la  substance 
même  des  organes. 

(1)  Chez  les  Pycnogonides ,  où, 
jusqu'en  ces  derniers  temps,  l'appareil 

ur  Naturgeschichte  der  wirbellosen  Thiere,  1832, 


(a)  Nordmann  ,  Mikrographische  Beitrdge 
Bd.  II,  p.  73. 

(6)  Rathke,  Bemerkungen  ùber  den  Bau  des  Dichelestium  Slurionis  und  der  Lernae  Apoda  stellata 
(Nova  Acla  Acad.  Nat.  curios.,  vol.  XIX,  p.  153). 

(c)  Pickering-  and  Dana  ,  Description  of  a  Species  of  Caligus  (American  Journal  of  Science  and 
Arts,  1838,  vol.  XXXIV). 

(d)  Poli,  Testacea  utrmsque  Siciliœ,  t.  I,  p.  xlviii,  pi.  i,  fig.  13. 

(e)  Cuvier,  Mém.  sur  les  Animaux  des  Anatifes  et  des  Balanes,  p.  12  (Mém.  sur  les  Mollusques, 
et  Mém.  du  Muséum,  t.  II). 

(f)  Martin  Saint-Ange,  Mém.  sur  l'organisation  des  Cirripèdes,  1835,  p.  18  (tiré  des  Mém.  des 
Sav.  étrang.,  Acad.  des  sciences,  t.  VI). 


200  CIRCULATION    DU    SANG 

cet  organe  occupe  toujours  la  ligne  médiane  dorsale,  et  que, 
dans  les  espèces  où  la  respiration  est  localisée,  il  se  loge  dans 
la  région  du  corps  où  les  branchies  ont  leur  siège.  Ainsi,  il  est 
placé  dans  le  thorax  chez  les  Décapodes  et  les  Amphipodes, 
tandis  que  chez  les  Squilles  et  les  Isopodes ,  où  les  organes 
respiratoires  sont  relégués  à  l'arrière  du  corps,  il  se  loge  en 
majeure  partie  dans  la  région  abdominale.  Enfin,  je  rappellerai 
aussi  que  partout  où  la  distinction  entre  le  sang  artériel  et  le 
sang  veineux  est  possible  à  établir,  on  voit  que  c'est  sur  le 
trajet  du  sang  artériel  que  cet  organe  d'impulsion  se  trouve 
placé.  C'est  donc  un  cœur  aortique  ou  artériel  qui  existe  chez 
les  Crustacés  aussi  bien  que  chez  les  Mollusques. 
Disposition        §  9.  —  Dans  la  classe  des  Arachnides,  le  mode  de  cir- 

générale  ,      .  ,  ,  ,  A 

de  l'appareil  culation  du  sang  est ,  a  peu  de  chose  près,  le  même  que 
chez  e    chez  les  Crustacés.  Chez  les  espèces  les  plus  dégradées  du 

les  Arachnides.  .-,  .,  -i    \     n    •  t        1  i  -,    r 

premier  de  ces  groupes,  1  appareil  a  1  aide  duquel  ce  phéno- 
mène s'accomplit  est  peut-être  plus  incomplet  encore  que  nous 
ne  l'avons  trouvé  chez  les  Crustacés  inférieurs;  mais  dans  les 
espèces  dont  l'organisation  est  au  contraire  le  plus  perfec- 
tionnée ,  nous  rencontrons  un  ensemble  d'instruments  physio- 
logiques semblables,  en  tout  ce  qui  est  essentiel ,  au  système 

circulatoire  avait  échappé  aux  recher-  qui  est  divisé  en  une  série  de  trois 

ches  des  naturalistes,  et  où  le  mouve-  loges,  et  qui  reçoit  le  sang  dans  son 

ment  des  fluides  alimentaires  dans  les  intérieur  par  son  extrémité  postérieure 

appendices  tabulaires  de  l'estomac  est  ainsi  que  par  deux  paires  d'ouvertures 

très  remarquable  (a),  le  cœur  est  con-  latérales   (c).    Cet  organe   ne   paraît 

formé  de  la  manière   ordinaire  (6).  donner  naissance   à   aucune   artère; 

C'est   une  poche   cylindrique  placée  mais  on  en  voit  partir  de  grands  cou- 

au-dessus  de  l'intestin,  qui  s'étend  de-  rants  sanguins  qui  se  répandent  dans 

puis  la  base  de  la  tète  jusqu'au  bord  les  diverses  parties  du  corps, 
antérieur  du   tubercule  abdominal , 

(a)  Quatrefâges,  Mém.  sur  l'organisation  des  Pycnogonides  (Ami.  des  sciences  nat.,  1845, 
3°  série  ,  t.  IV,  p.  76). 

(6)  Zinker,  Untersuchungen  ùber  die  Pycnogoniden  (Arch.  fur  Anatom.  und  Phys.  von  Millier, 
1852,  p.  383). 

(c)  Krohn,  Ueberdas  Herz  und  den  Blutumlauf  in  den  Pycnogoniden  (  Archiv  fur  Naturge 
schichte,  1855,  Heftl,  p.  6,  pi.  1,  fig\  3). 


CHEZ    LES    ARACHNIDES.  201 

circulatoire  des  Crustacés,  savoir  :  un  cœur  aortique  pour 
mettre  le  sang  en  mouvement ,  des  vaisseaux  artériels  par- 
faitement développés  pour  distribuer  ce  liquide  à  tous  les 
organes ,  des  canaux  constitués  aux  dépens  des  espaces  inter- 
organiques et  servant  à  ramener  le  sang  veineux  des  diverses 
parties  de  l'économie  vers  les  organes  respiratoires ,  puis  enfin 
des  tubes  membraneux  ou  vaisseaux  pneumocardiaques  qui  le 
conduisent  de  ces  organes  au  cœur.  Cette  ressemblance  avait 
été  nettement  indiquée  il  y  a  environ  vingt  ans  par  Audouin , 
mais  a  été  surtout  mise  en  lumière  par  les  recherches  ré- 
centes de  l'un  de  nos  anatomistes  les  plus  habiles ,  M.  E.  Blan- 
chard. 

Dans  la  description  de  l'appareil  circulatoire  des  Arachnides 
que  je  vais  présenter  ici,  je  prendrai  comme  exemple  principal 
le  Scorpion,  parce  que  l'organisation  de  cet  Animal,  étudiée 
successivement  par  Treviranus,  Newport,  M.  Léon  Dufour  et 
M.  Blanchard,  est  aujourd'hui  mieux  connue  que  celle  de  toute 
autre  espèce  de  la  même  classe  (1). 


(1)  Les  premières  recherches  de  question  ci-dessus ,  fut  le  premier  à 
quelque  importance  dont  l'appareil  en  donner  l'explication  qui  est  ad- 
circulatoire  des  Arachnides  ait  été  mise  aujourd'hui  (6).  Vers  la  même 
l'objet,  sont  dues  à  Treviranus  et  époque,  Dugès  arriva  à  un  résultat 
datent  de  1812  (a).  Mais  les  zoologistes  analogue  (c).  Newport  fit  faire  des 
restèrent  encore  pendant  plus  de  vingt  progrès  nouveaux  et  très  importants 
ans  sans  avoir  des  idées  justes  et  nettes  à  l'histoire  anatomique  de  cette  fonc- 
relativement  à  la  route  parcourue  par  tion  chez  les  Arachnides,  bien  que  les 
le  sang  dans  l'organisme  de  ces  Ani-  vues  physiologiques  de  cet  auteur 
maux,  et  Audouin,  éclairé  par  les  soient  loin  d'être  toutes  admissibles  (d). 
découvertes  relatives  à  la  circulation  Enfin,  à  une  époque  encore  plus  lé- 
chez   les    Crustacés   dont    il    a    été  cente,    M.   Léon  Dufour  apporta  de 


(a)  Treviranus  ,  Ueber  den  innem  Bau  der  Arachniden.  In-4, 1842. 

(6)  Audouin,  article  Arachnida  (Todd's  Cyclopœdia  of  Anatomy  and  Physiology,  1836,  vol.  I, 
p.  206). 

(c)  Dugès,  Traité  de  physiologie  comparée,  \  836, 1. 1,  p.  443,  et  Observations  sur  les  Aranéides 
(Ann.  des  sciences  nat.,  2»  série,  t.  VI,  p.  483). 

(d)  Newport ,  On  the  Structure ,  Relations  and  Development  of  the  Nervous  and  Circulatory 
Systems  in  Myriapoda  and  Macrourous  Arachnida  (Philos.  Trans.,  1843,  p.  243). 


Cœur 
du  Scorpion. 


202  CIRCULATION    DU    SANG 

§  10.  —  Le  cœur  du  Scorpion  est  un  gros  vaisseau  longi- 
tudinal qui  se  trouve  sur  la  ligne  médiane  du  côté  dorsal  du 
corps,  et  qui  occupe  la  portion  élargie  de  l'abdomen  dans  toute 
son  étendue.  Il  est  renfermé  dans  un  sac  péricardique  en  forme 
de  gaine  qui  repose  sur  le  foie,  et  il  est  recouvert  immédiatement 
par  la  peau.  Les  parois  de  ce  cœur  sont  très  charnues  (1),  et  une 
série  d'étranglements  le  divisent  en  huit  loges  ou  chambres 
qui  semblent  être  autant  de  petits  cœurs  élémentaires  ou  ven- 
triculites  placés  à  la  file  (2).  Effectivement,  ils  se  répètent 
exactement  quant  à  leur  organisation ,  et  sont  pourvus  chacun 
d'une  paire  d'expansions  musculaires  en  forme  d'ailes  et  d'une 


nouvelles  observations  à  l'appui  de 
l'opinion  qui  lui  est  propre  (a).  Mais 
nous  ne  connaissons  d'une  manière 
satisfaisante  l'appareil  circulatoire  de 
ces  Animaux  que  depuis  la  publi- 
cation du  beau  travail  de  M.  Blan- 
chard (b). 

(1)  Les  fibres  musculaires  intrinsè- 
ques du  cœur  forment  deux  couches  ; 
les  unes  sont  longitudinales,  les  au- 
tres circulaires. 

(2)  Les  étranglements  qui  divisent 
ainsi  le  cœur  du  côté  dorsal  ne  sont 
que  peu  marqués  pendant  la  vje  ou 
quand  cet  organe  est  distendu,  mais 
deviennent  très  prononcés  après  la 
mort  ainsi  que  pendant  les  fortes  con- 
tractions. M.  Léon  Dufour,  qui  criti- 
que vivement  le  nom  de  chambre  ou 
ventricule  appliqué  à  ces  portions  du 
cœur,  a  beaucoup  insisté  sur  cette 
circonstance  (c).  Mais  la  tendance  à  la 
répétition  sérialaire   ne   dépend  pas 


seulement  des  rétrécissements  dont  il 
vient  d'être  question.  Chaque  com- 
partiment ou  ventriculite  est  pourvu  : 
1°  d'une  paire  d'ailes  charnues  ou  ex- 
pansions musculaires  qui  vont  se  fixer 
à  la  paroi  dorsale  du  squelette  tégu- 
mentaire,  et  qui  se  composent  cha- 
cune de  deux  paires  de  faisceaux  char- 
nus ;  2°  une  paire  d'orifices  afférents 
en  forme  de  boutonnières,  situés  à  la 
face  dorsale  de  l'organe  ;  3°  d'une 
paire  de  valvules  placées  dans  sa  ca- 
vité et  formées  chacune  par  un  repli 
de  la  tunique  interne.  Ces  valvules 
sont  situées  latéralement  ;  leur  bord 
interne  est  libre ,  et ,  en  se  rabattant 
contre  les  parois  du  cœur,  elles  recou- 
vrent et  bouchent  complètement  les 
orifices  afférents  situés  auprès. 

M.  Blanchard  (d)  a  donné  de  ces  cla- 
pets des  figures  plus  vraies  que  ne 
l'avait  fait  Newport  (e), 


(a)  Léon  Dufour,  Histoire  anatomique  et  physiologique  des  Scorpions  (Mêm.  de  l'Académie  des 
sciences,  Savants  étrangers,  t.  XIV,  p.  294  et  suiv.),  et  Observations  sur  l'anatomie  des  Scorpions 
(Ann.  des  sciences  nat.,  1851,  3°  série,  t.  XV,  p.  249). 

(b)  Blanchard,  L'organisation  du  Règne  animal,  classe  des  Arachnides,  1856,  p.  74  et  suiv. 

(c)  Léon  Dufour,  Histoire  anatomique  des  Scorpions  (loc.  cit.,  p.  599). 

(d)  Blanchard,  Organisation  du  Règne  animal,  Arachnides,  pi.  5,  fig.  2,  3,  4. 

(e)  Newport,  On  the  Struct.,  etc.,  of  Myriopoda  and  Macrourous  Arachnida  (Philos.  Trans., 
1843,  pi.  15,  fig.  33-37). 


artériel. 


CHEZ    LES    ARACHNIDES.  203 

paire  d'orifices  afférents.  Ces  ouvertures  sont  placées  à  la  face 
dorsale  du  cœur,  et  dans  l'intérieur  de  cet  organe  on  voit  tout 
auprès  de  chacun  d'eux  un  repli  membraneux  disposé  en 
manière  de  valvule,  qui  laisse  le  passage  libre  quand  le  fluide 
ambiant  le  presse  de  dehors  en  dedans ,  mais  qui  se  rabat  et 
ferme  l'entrée  du  ventriculite  quand  le  courant  tend  à  s'établir 
en  sens  inverse. 

Le  système  artériel,  qui  naît  du  cœur,  chez  ces  Arachnides,     système 
se  compose  de  deux  vaisseaux  médians,  l'un  antérieur,  l'autre 
postérieur,  qui  semblent  être  la  continuation  de  cet  organe  lui- 
même,  et  d'une  paire  de  vaisseaux  latéraux  dépendants  de  cha- 
cun des  ventriculites  ou  chambres  cardiaques. 

L'artère  impaire  qui  naît  de  l'extrémité  antérieure  du  cœur 
est  communément  désignée  soits  le  nom  d'aorte.  Elle  pénètre 
dans  le  céphalothorax  en  descendant  obliquement  vers  le  cer- 
veau, et,  parvenue  à  cet  organe,  se  bifurque  pour  entourer 
l'œsophage  et  gagner  la  face  ventrale  du  corps.  Chemin  faisant, 
elle  fournit  de  chaque  côté  les  artères  pédieuses ,  antennaires, 
cérébrales,- ophthalmiques  et  plusieurs  autres  qui  se  distribuent 
aux  viscères,  aux  muscles  et  aux  téguments  de  la  région  céphalo- 
thoracique.  Enfin  les  deux  crosses  aortiques  se  réunissent  au- 
dessous  du  tube  alimentaire  pour  constituer  un  vaisseau  impair 
qui  se  porte  en  arrière  en  longeant  en  dessus  la  chaîne  nerveuse 
ganglionnaire.  Cette  artère  récurrente ,  que  les  uns  appellent 
une  aorte  abdominale ,  d'autres  une  artère  spinale ,  est  très 
grêle  ,  mais  fournit  plusieurs  branches  aux  organes  placés  à  la 
face  sternale  du  corps  (1). 

(1)  Newport,  à  qui  l'on  doit  la  con-  résultats  si  rapprochés  de  la  vérité, 
naissance  de  tous  les  faits  les  plus  M.  Blanchard,  qui  a  fait  ses  recher- 
importants  relatifs  au  mode  de  distri-  ches  sur  des  individus  vivants,  et  a 
bution  de  ces  artères,  n'a  eu  l'occasion  injecté  tous  les  vaisseaux,  dont  il  a 
de  disséquer  que  des  Animaux  con-  donné  de  très  beaux  dessins,  a  con- 
servés dans  l'alcool,  et  il  est  surpre-  firme  la  plupart  des  faits  annoncés 
nant  qu'il  ait  pu  arriver  ainsi   à  des  par  cet  habile  observateur.  Il  est  bien 


204  CIRCULATION    DU    SANG 

L'artère  médiane  postérieure ,  qui  naît  de  l'extrémité  posté- 
rieure du  cœur,  est  désignée  par  la  plupart  des  auteurs  sous  le 
nom  à'artère  caudale.  Elle  repose  sur  l'intestin  et  règne  dans 
toute  la  longueur  de  la  portion  étroite  ou  caudiforme  de  l'abdo- 
men, où  elle  fournit  à  chaque  segment  une  paire  de  branches 
latérales. 

Enfin  les  artères  qui  naissent  par  paires  des  parties  laté- 
rales du  cœur,  et  qui  sont  désignées  sous  le  nom  &  artères 
hépatiques ,  se  ramifient  dans  le  foie.  On  en  compte  huit 
paires  (1). 

Tous  ces  canaux  sont  des  tubes  membraneux  à  parois  minces 
et  assez  résistantes  (2)  ;  ils  se  ramifient  dans  la  profondeur  des 
divers  organes  et  y  forment  comme  un  chevelu  d'une  grande 
finesse  qui  se  continue  avec  une  multitude  d'interstices  ou  espaces 
étroits  compris  entre  les  fibres  musculaires  et  les  autres  par- 
ties constitutives  de  l'organisme.  Ces  lacunes  forment  l'origine 
système  du  système  veineux ,  et  elles  sont  tapissées  par  une  couche  de 
tissu  hyalin  qui  endigue  pour  ainsi  dire  le  courant  sanguin. 
Des  canaux  veineux  plus  gros  et  produits  de  la  même  manière 
font  suite  à  ce  réseau  capillaire ,  et ,  dans  les  points  où  le  sys- 
tème tégumentaire  ,  en  se  soulevant  pour  former  des  crêtes , 
laisse  un  vide  entre  sa  face  interne  et  la  masse  musculaire  ou 
viscérale  sous-jacente,  la  circulation  emprunte  ces  espaces  pour 

à  regretter  que  Newport  n'ait  pas  vécu  m'en  convaincre  par  l'examen  de  ses 

assez  longtemps  pour  donner  suite  à  injections. 

ses  grands  travaux  :  il  est  mort  en  (2)  M.  Blancbard  pense  qu'ils  sont 

185/j.  pourvus  de  trois   tuniques,   savoir  : 

(1J  Pour  plus  de  détails  sur  le  mode  une  tunique  musculaire  qui,  dans  les 

de  distribution  des  artères  du  Scor-  gros  troncs,    présenterait  des  fibres 

pion,    je    renverrai    à    l'ouvrage  de  longitudinales  aussi  bien  que  des  fi- 

M.  Blanchard,  intitulé  :  De  l'organi-  bres  circulaires;    une  tunique  mem- 

sation  du  Règne  animal.  Cet  anato-  braneuse  interne  et  une  tunique  mem- 

miste  en  a  fait  une  étude  minutieuse  braneuse    externe    d'une  délicatesse 

et  des  plus  exactes,  ainsi  que  j'ai  pu  extrême  (a). 

(a)  Blanchard,  Op.  cit.,  p.  77. 


veineux. 


CHEZ    LES    ARACHNIDES.  205 

en  faire,  soit  des  canaux,  soit  des  réservoirs  ou  sinus  vei- 
neux (t). 

Les  voies  ouvertes  ainsi  au  sang  veineux  et  empruntées  au 
système  général  des  méats  interorganiques  s'endiguent  de  plus 
en  plus  complètement  à  mesure  que  les  courants  qui  les  tra- 
versent deviennent  plus  puissants ,  et  quelques-uns  des  gros 
troncs  se  trouvent  même  revêtus  par  une  couche  membrani- 
forme  et  un  épithélium  assez  distinct.  Enfin  ,  les  principales 
rigoles  veineuses  ménagées  de  la  sorte  entre  les  muscles  et  les 
téguments  communs  ,  ou  entre  les  lobes  du  foie ,  commu- 
niquent souvent  entre  elles  et  vont  verser  leur  contenu  dans 
deux  grands  réservoirs  longitudinaux  situés  à  la  face  ventrale 
de  la  portion  renflée  de  l'abdomen ,  et  formés  par  la  tunique 
commune  des  organes  pulmonaires  (2).  Cette  enveloppe  mem- 
braneuse et  résistante  constitue  un  sac  qui  se  continue  par  ses 
deux  extrémités  avec  les  canaux  veineux  du  céphalothorax,  d'une 
part,  et  de  l'abdomen,  de  l'autre,  et  qui  est  resserré  entre  chaque 
poumon ,  de  façon  à  représenter  une  série  de  quatre  poches 
arrondies  (3).   Le  tissu  aréolaire,  condensé  en  manière  de 

(1)  La  portion  veineuse  du  cercle  disposition  anatomique  fort  remarqua- 
circulatoire  avait  entièrement  échappé  ble  à  l'aide  de  laquelle  le  passage  du 
aux  investigations  de  Newport  ,  qui  sang  en  sens  inverse  de  la  direction 
cherchait  à  expliquer  le  retour  du  sang  normale  ne  peut  avoir  lieu  des  ré- 
des  diverses  parties  du  corps  vers  les  servoirs  veineux  thoraciques  dans  les 
poumons  par  des  vaisseaux  qu'il  assi-  canaux  veineux  des  membres.  Les 
milait  au  système  de  la  veine  porte  muscles  extenseurs  et  fléchisseurs  des 
des  Animaux  supérieurs  (a).  pattes  sont  placés  de  façon  à  fermer 

C'est  à  M.  Blanchard  que  l'on  doit  le  passage   quand  ils  viennent   à  se 

la  connaissance  des  canaux  veineux  contracter   fortement   ou  qu'ils  sont 

des  Arachnides,  dont  l'existence  avait  pressés  de  bas  en  haut  par  le  liquide 

été  soupçonnée,  mais   pas  constatée,  contenu  dans  le  tronc, 
par  Audouin  et  Dugès  (6).  (3)  Ces  quatre  sinus  pulmonaires,  qui 

(2)  M.  Blanchard  a  fait  connaître  une  communiquent  librement  entre  eux  de 

(a)  Newport,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1843,  p.  293). 

(6)  Blanchard  ,  De  l'appareil  circulatoire  et  des  organes  de  la  respiration  dans  les  Arachnides 
Ami.  des  sciences  nat.,  1849,  3'  série,  t.  XII,  p.  325). 


206  CIRCULATION    DU    SANG 

membrane  dont  les  parois  de  ces  sinus  pulmonaires  sont  compo- 
sées, manque  sur  les  points  où  naissent  les  replis  qui  forment 
les  lamelles  constitutives  des  poumons ,  et  par  conséquent  le 
sang  veineux  ,  en  arrivant  dans  ce  point,  pénètre  dans  les  es- 
paces intermembranulaires  que  ces  expansions  foliacées  offrent 
dans  leur  intérieur.  Ces  dernières  lacunes  débouchent  du  côté 
opposé  dans  un  système  de  canaux  pneumocardiaques  dont  la 
disposition  est  en  tout  comparable  à  celle  des  vaisseaux  bran- 
chio-cardiaques  des  Crustacés ,  et  plus  particulièrement  des 
Squilles.  Ceux-ci  contournent  les  flancs  et  vont  s'ouvrir  à  leur 
tour  dans  le  sinus  vestibulaire  formé  par  le  péricarde.  On  en 
compte  sept  paires,  dont  trois  naissent  des  poumons  de  la  pre- 
mière paire ,  une  de  chacun  des  deux  poumons  suivants ,  et 
deux  du  poumon  postérieur  (1).  Enfin  leur  embouchure  supé- 
rieure correspond  aux  sept  paires  d'orifices  pratiqués ,  comme 
nous  l'avons  déjà  vu,  à  la  paroi  dorsale  du  cœur,  et  le  sang- 
artériel  qu'ils  versent  dans  la  chambre  péricardique  pénètre 
par  ces  fentes  jusque  dans  l'intérieur  du  ventricule  aortique. 
Résumé.  §  11.  —  En  résumé,  nous  voyons  donc  que  le  sang  contenu 
dans  le  cœur  dorsal  est  pressé  parla  contraction  de  cet  organe, 
mais  ne  pouvant  en  sortir  par  les  orifices  dorsaux,  à  raison  du 
jeu  des  valvules,  s'engage  à  la  fois  dans  trois  directions  diffé- 
rentes ,  en  avant  par  l'aorte ,  en  dessous  par  les  artères  hépa- 
tiques, et  en  arrière  par  l'artère  caudale.  Distribué  par  les 

chaque  côté  du  corps,  sont  reliés  aussi  imparfaitement  vus  par  Treviranus, 

les  uns  aux  autres  par  une  série  deçà-  qui  les  prenait  pour  des  artères  (b). 

naux  veineux  transverses.  M.  Blanchard  Audouin  et  Dugès  (c)   en  ont  mieux 

en  a  donné  d'excellentes  figures  (a),  apprécié  les  fonctions  ;  M.  Blanchard 

(1)  Les  canaux  pneumocardiaques  a  été  le  premier  à  les  faire  bien  con- 

des  Arachnides  n'avaient  été  que  très  naître  (d). 

(a)  Blanchard,  Organisation  du  Règne  animal,  Arachnides,  pi.  6,  fig.  1,  2. 
(6)  Treviranus,  Ueber  den  innern  Bau  der  Arachniden,  p.  10,  pi.  1,  fig.  7. 

(c)  Audouin,  Arachnida  (Todd's  Cyclop.,  1836,  vol.  I,  p.  206). 
—  Dugès,  Traité  de  physiologie  comparée,  1838,  t.  II,  p.  445. 

(d)  Op.  cit. 


CHEZ    LES    ARACHNIDES.  207 

branches  de  ces  vaisseaux  dans  toutes  les  parties  du  corps , 
le  liquide  nourricier  passe  dans  les. canaux  veineux  empruntés 
aux  méats  interorganiques,  et  parvient  dans  les  sinus  pulmo- 
naires placés  de  chaque  côté,  à  la  face  ventrale  de  l'abdomen. 
De  là  le  sang  veineux  s'engage  dans  les  conduits  dont  les  lames 
respiratoires  des  poumons  sont  creusées  (.1) ,  et ,  en  sortant  de 
celles-ci  à  l'état  de  sang  artériel,  il  est  reçu  par  les  vaisseaux 
pneumocardiaques  qui  le  versent  dans  le  sac  péricardique. 
Enfin  de  ce  dernier  réservoir  il  rentre  dans  le  cœur,  d'où  nous 
l'avions  vu  partir,  et,  sous  l'influence  des  contractions  de 
cet  organe  d'impulsion,  il  parcourt  de  nouveau  le  même  cercle 
circulatoire. 

Le  cœur,  à  raison  de  la  disposition  de  sa  tunique  muscu-  Mécanisme 
laire  et  des  points  d'attache  qu'une  partie  de  ses  fibres  charnues  ia  circulation. 
prennent  au  dehors  sur  le  squelette  tégumentaire,  agit  non- 
seulement  comme  une  pompe  foulante  pour  chasser  le  sang 
dans  les  artères ,  mais  exerce  aussi  une  aspiration  sur  le  sang 
qui  le  baigne  ,  et ,  à  mesure  qu'il  enlève  au  sinus  péricardique 
des  ondées  de  liquide ,  il  se  fait  un  mouvement  d'appel  corres- 
pondant dans  les  canaux  pneumocardiaques  qui  alimentent  ce 
réservoir.  Le  passage  du  sang  à  travers  l'appareil  respiratoire 
s'effectuerait  donc  à  l'aide  de  ce  seul  mécanisme,  mais  pourrait 
ne  pas  être  assez  rapide  pour  satisfaire  toujours  aux  besoins 
physiologiques  des  Arachnides,  et  la  Nature  a  assuré  cette  por- 
tion du  service  delà  circulation  d'une  manière  plus  complète,  à 
l'aide  d'un  mécanisme  fort  curieux  dont  nous  devons  la  con- 
naissance à  M.  Blanchard.  Des  ligaments  qui  s'étendent  de  la 
face  inférieure  du  péricarde  à  la  voûte  des  poches  pulmonaires, 
sont  disposés  de  façon  à  comprimer  celles-ci  chaque  fois  que  le 

(1)  L'existence   de  ces  canaux  ca-      avait  été  soupçonnée,  plutôt  que  con- 
pillaires  dans  l'épaisseur  des  parois      statée,  par  ïreviranus  (a). 
des  feuillets  respiratoires  du  Scorpion 

(a)  Treviranus,  Beobachtungeîi  ans  der  Zootomie  uni  Physiologie,  1839,  t.  I,  p.  28,  pi  6 
fij.  42. 


208 


CIRCULATION    DU    SANG 


cœur  bat,  et  la  pression  ainsi  exercée  fait  affluer  le  sang  dans 
les  vaisseaux  pneumocardiaques.  Il  est  aussi  à  noter  que  les  mou- 
vements généraux  de  l'Animal  tendent  aussi  à  accélérer  le  cours 
du  sang  veineux  en  comprimant  ou  en  dilatant  alternativement 
les  espaces  qui  sont  ménagés  entre  les  muscles  et  qui  font 
office  de  conduits  veineux ,  de  sorte  que  l'abord  de  ce  fluide 
dans  l'appareil  respiratoire  se  trouve  facilité  précisément  dans 
les  moments  où  la  revivification  doit  en  être  la  plus  active. 

§  12.  —  Les  mêmes  caractères  généraux  se  retrouvent  dans 
l'appareil  circulatoire  des  autres  Arachnides  pulmonaires  ;  mais 
on  remarque  cependant  dans  la  conformation  de  quelques-unes 
de  ses  parties  des  modifications  qu'il  importe  de  signaler. 

Ainsi  dans  les  Télyphones,  où  le  cœur  et  l'aorte  ressemblent 
extrêmement  à  ce  que  nous  venons  de  voir  chez  le  Scorpion, 
Télyphones    l'artère  médiane  postérieure  ou  caudale  est  réduite  à  un  état 
presque  rudimentaire  (1). 

Chez  les  Araignées  du  genre  Épéire,  ce  dernier  vaisseau  est 
encore  plus  dégradé  (2) ,  et  chez  les  Mygales ,  il  manque  com- 
plètement, de  façon  que  le  système  artériel  tout  entier  dépend 
soit  de  l'aorte ,  soit  des  artères  hépatiques  (3). 

Chez  ces  Aranéides,  on  voit  aussi  le  cœur  se  centraliser 
davantage  ;  il  a  toujours  la  forme  d'un  gros  vaisseau  dorsal 
incomplètement  subdivisé  en  plusieurs  chambres  successives; 
mais  le  nombre  de  ces  compartiments  et  des  orifices  qui  donnent 
accès  au  sang  dans  son  intérieur  diminue.  Ainsi,  chez  les  Mygales, 
on  ne  trouve  plus  que  quatre  paires  de  ces  boutonnières  (4). 


Aranéides 
ordinaires. 


(1)  Blanchard ,  Organisation  du 
Règne  animal ,  Arachnides  ,  pi.  10, 
fig.  1. 

(2)  Blanchard,  Sur  l'appareil  cir- 
culatoire des  Arachnides  (Annales  des 
sciences  naturelles  ,  1849 ,  3e  série, 
t.  XII,  pi.  6). 


(3)  Blanchard,  Organis.  du  Règne 
anim.,  Arachnides,  pi.  15. 

(Û)  D'après  les  observations  de 
M.  Leydig,  les  jeunes  Lycoses  n'au- 
raient qu'une  paire  de  ces  orifices ,  et 
la  portion  périphérique  du  système 
artériel  serait  fort  dégradée  (a). 


(a)  Leydig,  Zvrfeinem  Bau  der  Arthropoden  (Miiller's  Archiv  fur  Anat.,  1855,  p.  455,  pi.  13, 
fig.  15). 


CHEZ    LES    ARACHNIDES.  209 

Chez  les  Ségestries,  où  nous  avons  vu  l'appareil  respira-    ségesiries. 
toire  composé  à  la  fois  de  poumons  et  de  trachées  (1),  les  sinus 
sanguins  qui  accompagnent  ces  organes  présentent  une  modi- 
fication très  remarquable. 

Les  réservoirs  veineux  formés  par  les  poches  pulmonaires  de 
la  première  paire  sont  disposés  comme  chez  le  Scorpion  et  les 
Aranéides  ordinaires;  mais  dans  ceux  delà  seconde  paire,  qui, 
au  lieu  de  renfermer  des  poumons ,  entourent  des  trachées  ,  la 
cavité  occupée  par  le  sang  semble  se  continuer  sans  interrup- 
tion dans  un  espace  libre  ménagé  entre  les  deux  (uniques  de 
ces  tubes  aérifères  et  se  ramifier  ainsi  au  loin  dans  l'économie. 
En  effet,  M.  Blanchard  a  constaté  qu'un  liquide  coloré  injecté 
dans  les  sinus  pulmonaires  pénètre  dans  l'épaisseur  des  parois 
des  trachées  et  entoure  d'une  couche  mince  le  tube  dont  la  face 
interne  est  en  contact  avec  l'air  (2).  On  ne  sait  pas  encore  bien 
comment  le  sang,  qui,  suivant  toute  probabilité,  doit  occuper 
de  la  même  manière  les  lacunes  intermembranulaires  des  tra- 
chées ,  s'y  renouvelle  ;  s'il  s'échappe  par  l'extrémité  rameuse 
de  ce  système  de  vaisseaux  aérifères  pour  se  répandre  dans  les 
méats  veineux  des  organes ,  ou  s'il  revient,  dans  le  réservoir 
pulmonaire  pour  passer  ensuite  dans  les  canaux  pneumocardia- 
ques,  et  de  là  dans  le  cœur.  Mais,  quoi  qu'il  en  soit  à  cet  égard, 
M.  Blanchard  pense  que  c'est  principalement  par  l'intermé- 
diaire de  cette  portion  du  fluide  nourricier  que  la  respiration 
s'effectue. 

§13.  —  Chez  les  Arachnides  trachéennes,  cette  portion  péri-     Appareji 
trachéenne  du  système  lacunaire  veineux  parait  acquérir  plus  de5irci 
d'importance,  et  sa  perméabilité  aux  liquides  a  été  constatée  par 
M.  Blanchard  chez  le  Phalangium  ou  Faucheur,  dont  le  cœur 
et  le  svstème  artériel  se  trouvent  au  contraire  fort  réduits. 


,1)  Voyez  lome  II,  page  147.  piration  dans  les  Arachnides  (Ann. 

(2)  Blanchard,  De  l'appareil  de  la  des  se.  nal.,  1849,  3'  série  ,  t.  XII, 

circulation  et  des  organes  de  lares-  p.  330'. 

ni.  14 


Arachnides 
trachéennes. 


210 


CIRCULATION    DU    SANG 


Jadis  on  pensait  qu'il  n'existait  point  d'appareil  circulatoire 
chez  les  Arachnides  trachéennes  (1).  Chez  le  Faucheur,  cepen- 
dant, ce  système  ne  diffère  que  peu  de  ce  que  l'on  trouve  chez 
les  Araignées  pulmonées  (2).  Il  est  probable  que  chez  les 
Galéodes  la  disposition  de  l'appareil  circulatoire  doit  être  à  peu 
près  la  même  ,  et  qu'il  y  a  aussi  un  cœur  chez  la  plupart  des 
Arachnides  trachéennes  inférieures  ;  mais,  chez  ces  dernières,  le 
système  artériel  paraît  se  réduire  de  plus  en  plus,  et  dans  quel- 
ques représentants  dégradés  de  ce  type  les  investigations  les 
plus  attentives  n'ont  encore  conduit  à  la  découverte  d'aucun 
organe  spécial  pour  le  service  de  l'irrigation  physiologique. 
Ainsi,  chez  les Tardigrades ,  qui  doivent  être  rapportés  à  cette 
classe  d'Animaux ,  M.  Doyère  a  pu  décrire  minutieusement  les 
moindres  filaments  nerveux ,  mais  il  n'a  pu  apercevoir  aucune 
trace,  ni  de  vaisseaux  sanguins,  ni  même  de  cœur,  et  le  fluide 
nourricier  lui  a  paru  être  contenu  seulement  dans  les  lacunes 
interorganiques  (3). 


(I)  Latreillc  s'exprime  de  la  manière 
la  plus  nelte  à  ce  sujet  dans  le  Règne 
animal  de  Cuvier  (a)  et  ailleurs;  tout 
en  admettant  l'existence  d'un  cœur 
rudimenlaire,  il  ajoute  qu'à  raison  du 
défaut  de  circulation ,  ces  Animaux 
pourraient  constituer  dans  nos  sys- 
tèmes zoologiques  une  classe  particu- 
lière (b). 

(2)  Le  cœur  des  Phalangiens  est  si- 
tué de  même  que  chez  les  autres 
Arachnides,  mais  il  est  très  grêle  et 
divisé  seulement  en  trois  "chambres 
pourvues  chacune  d'une  paire  d'ori- 
fices afférents.  En  avant,  il  se  continue 


sous  la  forme  d'une  artère  aorte  qui 
fournit  des  branches  gastriques,  oph- 
thalmiques,  etc.  ;  mais  on  n'a  pu  le 
suivie  jusqu'à  la  face  inférieure  du 
corps,  ni  en  voir  naître  des  artères 
pédieuses.  Le  cœur  fournil  aussi  quel- 
ques branches  latérales  analogues  aux 
artères  hépatiques,  et  à  son  extrémité 
postérieure  on  trouve  un  vaisseau 
médian  qui  paraît  être  le  représentant 
des  canaux  pneumocardiaques  (c). 

(3)  M.  Schuhze  avait  cru  apercevoir 
chez  le  Macrobioïus  un  vaisseau  dor- 
sal et  des  vaisseaux  latéraux  (d).  Mais 
M.  Doyère  a  reconnu  que  les  cavités 


(a)  Seconde  édition,  t.  IV,  p.  272. 

(b)  Latreillc,  Familles  naturelles  du  Règne  animal,  1825,  p.  317. 

(c)  Blanchard,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1849,  t.  XII,  p.  335,  pi.  8,  fig.  1). 

(d)  C.-A.  Schultze,  Macrobiotus  Huflqndii.  In-4,  Berlin,  1834. 


CHEZ    LES    MYRIAPODES.  211 

§  lli.  —  L'étude  que  nous  venons  de  faire  de  l'appareil  circu-     APPami 
latoire  chez  les  Crustacés  et  les  Arachnides  nous  permettra  de  danïia  classe 

des 

passer  rapidement  sur  l'examen  de  ce  système  chez  les  Myria-  Myriapodes. 
podes  ,  car  nous  ne  rencontrerons  chez  ces  Animaux  aucune 
disposition  organique  particulière,  à  noter.  On  ne  connaît  pas 
bien  les  voies  par  lesquelles  le  sang  revient  des  diverses  parties 
du  corps  vers  le  cœur  ;  mais  il  y  a  tout  lieu  de  croire  que  c'est 
au  moyen  de  canaux  empruntés  au  système  lacunaire  que  ce 
transport  s'effectue  comme  chez  les  autres  Arthropodaires,  car 
on  n'a  pu  découvrir  aucune  trace  de  veines  proprement  dites  (1). 
Quant  au  système  artériel,  il  ressemble  extrêmement  à  ce  que 
nous  venons  de  trouver  chez  les  Scorpions,  avec  cette  différence 
cependant  que  le  cœur  ou  vaisseau  dorsal  règne  dans  presque 
toute  la  longueur  du  corps,  et,  se  trouvant  divisé  en  autant  de 
ventriculites  qu'il  traverse  d'anneaux,  le  nombre  de  ces  petites 
chambres  cardiaques  est  très  considérable  (2) .  Ainsi  Newport 
en  a  compté  plus  de  160  chez  quelques  espèces  de  Scolopen- 
drides,  et  chacune  de  ces  divisions  est  pourvue  d'une  paire  . 


décrites  sous  ce  dernier  nom  ne  sont  bres  cardiaques,  ou  ventricules,  son! 

que  des  lacunes  interorganiques  (a),  au  nombre  de  : 

et  ni  ce  zoologiste,  ni  M.  Siebold,  n'ont  15  chez  les  Lithobies  et  les  Scutîgéfes 

pu  trouver  aucune  trace  d'un  vaisseau  21  chez  les  Scolopendres. 

*         ,    ,                 .    .              .,.  46  chez  le  Mecistoceplialus  maxillaris. 

dorsal  chez  ces  Animaux  (6).  73  chez  le  SpiroboluS. 

(1)  Ce  que  M.  Kutorga  appelle  une  160  chez  les  Gonibregmatus. 

veine  cave  n'est  autre  chose  que  le  Ces  divisions  du  cœur  sont  séparées 

vaisseau  dorsal  ou  cœur  des  Myria-  par  des  étranglements  et  des  replis 

podes,  et  ce  qu'il  a  considéré  comme  membraneux    internes.     Elles    sont 

une  artère  aorte  est  le  vaisseau  récur-  beaucoup  plus  prononcées  chez  les 

rent  qui  est  désigné  ici  sous  le  nom  Scolopendriens  ou  Myriapodes  Chilo- 

d'artère  spinale  (c).  podes  que  chez  Jes  Iulides  ou  Chilo- 

(2)  Newport  a  trouvé  que  les  cham-  gnathes  (a"). 

(a)Doyère,  Mém.  sur  les  Tardigrades  (Ami.  des  sciences  nat.,  1840,  2«  série,  t,  XIV,  n.  309 
et  310). 


(b)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'amtomie  comparée.  1. 1,  p.  517, 

(c)  Kutorga,  Scolopendres  morsitantis  anatome,  1834. 

(d)  Newport,  Op.  cit.,  p.  274  et  suiv. 


212  CIRCULATION    DU    SANG 

d'orilices  afférents  situés  latéralement  (1).  Un  sinus  péricardique 
formé  par  une  gaine  membraneuse  entoure  ce  long  vaisseau 
dorsal,  et  y  fournit  le  sang  que  ses  contractions  doivent  envoyer 
dans  les  artères  auxquelles  il  donne  naissance.  Celles-ci  con- 
sistent essentiellement  eu  une  paire  de  branches  transversales 


(1)  La  structuré  du  cœur  et  du 
système  artériel  des  Scolopendres  a  été 
étudiée  avec  beaucoup  de  soin  par 
Newport.  Cet  habile  observateur  a 
trouvé  que  cet  organe  est  logé  dans  un 
sac  membraneux  ou  péricarde  qui 
adi«*ii  à  chaque  ventricule  sur  la 
ligne  médiane,  tant  en  dessus  qu'en 
dessous,  et  qui  laisse  de  chaque  côté 
un  espace  libre  pour  servir  de  sinus 
veslibulaire.  Des  prolongements  qui 
en  partent  de  chaque  côté  ,  d'anneau 
en  anneau,  paraissent  être  les  ana- 
logues-des  canaux  pneumocardiaques 
des  Arachnides. 

Le  cœur  lui-même  est  formé  :  i  "  d'une 
tunique  séreuse  externe  qui  est  en 
continuité  avec  le  péricarde;  2°  d'une 
l unique  membraneuse  interne,  et 
'6"ùg  deux  tuniques  musculaires,  l'une 
externe,  dont  la  contraction  se  fait 
principalement  dans  le  sens  longitu- 
dinal, et  une  interne,  composée  en 
partie  de  libres  longitudinales ,  mais 
surtout  de  fibres  transversales.  Enfin, 
des  faisceaux  charnus  disposés  en 
forme  d'ailes  triangulaires  partent  des 
côtés  de  chaque  division  du  cœur 
pour  aller  s'insérer  aux  parties  voi- 
sines de  la  voûte  dorsale  du  système 
tégumentaire  ;  chacune  de  ces  ailes  se 
compose  de  deux  faisceaux  muscu- 
laires :  l'un  ,  antérieur,  se  dirige  un 
peu  en  avant,  pour  se  fixer  au  bord 
antérieur  du  tergite  correspondant; 
l'autre,  plus  petit,  va  prendre  son 
point  d'attache  au  bord  postérieur  de 


la  même  pièce  du  squelette  tégumen- 
taire. De  même  que  chez  les  Arach- 
nides ,  ces  ailes  ou  muscles  extrinsè- 
ques servent  à  dilater  le  cœur,  tandis 
que  les  muscles  intrinsèques  de  cet 
organe  produisent  la  systole  quand  ils 
se  contractent. 

Les  ventriculites  ,  au  nombre  de 
vingt  et  un,  comme  cela  a  été  déjà  dit, 
sont  un  peu  dilatés  et  arrondis  vers 
leur  extrémité  postérieure  ,  rétrécis 
vers  le  milieu  et  élargis  encore  à 
leur  extrémité  antérieure,  mais  moins 
qu'en  arrière  ;  des  étranglements  très 
prononcés  les  séparent  entre  eux,  et 
c'est  au  point  de  réunion  de  chacun 
de  ces  détroits  avec  la  chambre  car- 
diaque suivante  ,  que  sont  situés  les 
orifices  afférents  ,  lesquels  sont  placés 
par  paires  ,  un  peu  obliquement,  sur 
la  face  dorsale  de  l'organe.  A  l'inté- 
rieur, des  replis  en  forme  de  valvules 
établissent  aussi  une  séparation  entre 
les  chambres,  qui  se  succèdent  ainsi  et 
paraissent  s'opposer  au  reflux  du  sang 
d'avant  en  arrière.  Enfin  chacune  de 
ces  chambres  cardiaques  donne  nais- 
sance latéralement  à  une  paire  d'ar- 
tères  transversales  dont  les  branches 
se  distribuent  aux  viscères  et  aux  par- 
ties latérales  du  corps. 

L'aorte,  qui  fait  suite  au  cœur  en 
avant ,  pénètre  dans  la  tête  et  va  se 
terminer  près  du  cerveau,  dans  la 
région  frontale ,  où  elle  fournit  les 
artères  ophthalmiques,  etc.  A  sa  base, 
on  en  voit  naître  deux  crosses  qui 


CHEZ    LES    MYRIAPODES.  213 

fournie  par  chaque  ventricuïite,  et  en  une  aorte  d'où  naît  une 
artère  céphalique  et  deux  crosses  qui  embrassent  l'œsophage 
pour  constituer  à  la  face  inférieure  du  tube  digestif  une  artère 
spinale  récurrente,  comme  chez  les  Scorpions. 

En  résumé,  nous  voyons  donc  que,  chez  tous  les  Animaux 
articulés  de  la  division  des  Gnathopodaires,  l'appareil  circula- 
toire présente  les  mêmes  caractères  généraux,  et  se  compose 
d'un  cœur  aortique  dorsal,  d'un  système  de  vaisseaux  artériels 
et  d'une  série  de  cavités  interorganiques  tenant  lieu  de  veines. 


sont  les  analogues  des  artères  latérales 
fournies  par  chacune  des  chambres 
cardiaques  précédentes,  et  qui  forment 
autour  de  l'œsophage  un  collier  vas- 
culaire.  Cet  anneau  fournit  latérale- 
ment une  paire  d'artères  mandibu- 
laires,  et  sur  la  ligne  médiane  sternale 
une  artère  spinale  antérieure  et  une 
artère  spinale  récurrente  ou  posté- 
rieure ,  laquelle  donne  une  paire  de 
branches  dans  chaque  segment  du 
corps  et  distribue  le  sang  aux  par- 
lies  voisines  ainsi  qu'aux  muscles  des 
pattes,  etc. 

Chez  les  Lithobies  ,  la  disposition 
de  l'appareil  circulatoire  est  à  peu  près 
la  même  que  chez  les  Scolopendres, 
sauf  un  peu  d'inégalité  dans  le  volume 
des  ventriculiteset  une  réduction  dans 
leur  nombre,  qui  est  en  accord  avec 
celui  des  segments  du  corps. 

Il  en  est  encore  de  même  chez  les 
Scutigères  ;  mais  ici  les  ventriculiles 


n'acquièrent  leur  développement  com- 
plet que  de  deux  en  deux  ,  et  les 
chambres  intermédiaires  sont  très  ré- 
duites ,  mode  de  conformation  qui 
semble  conduire  vers  celui  des  Iules. 
Chez  ces  derniers  Myriapodes,  chaque 
segment  du  corps ,  ainsi  que  nous  le 
verrons  plus  tard,  résulte  de  la  fusion 
de  deux  anneaux  ou  zoonites,  et  porto 
deux  paires  de  pattes.  Un  seul  ventri- 
cuïite y  correspond  ,  mais  chacune  de 
ces  chambres  cardiaques  paraît  résul- 
ter de  la  fusion  des  parties  qui,  chez 
les  Scolopendrides  ,  constituent  deux 
ventriculiles  <  car  on  en  voit  partir 
deux  paires  d'artères  transversales  au 
lieu  d'une  seule. 

Pour  plus  de  détails  sur  le  mode  de 
distribution  du  système  artériel  des 
Myriapodes,  je  renverrai  au  mémoire 
de  Newport,  dont  la  plupart  des  faits 
précédents  sont  lires.  (Philos.  Trans., 
1843.) 


VINGT -QUATRIEME  LEÇON 


De  la  circulation  du  sang  chez  les  Insectes, 


Découverte 

du  vaisseau 

dorsal. 


§  1.  —  Vers  le  milieu  du  xviï  siècle,  Malpighi  ù  Bologne, 
et  Swammerdam  à  Utrecht,  observèrent  l'un  et  l'autre,  chez 
divers  Insectes  à  l'état  de  larves,  un  organe  pulsatile  qui  occupe 
la  ligne  médiane  du  dos,  et  qui  leur  sembla  devoir  être  un 
cœur  (1).  Mais,  bientôt  après,  Lyonnet,  dont  les  recberches 
délicates  sur  l'anatomie  de  la  chenille  du  Cossus  excitèrent  l'ad- 
miration générale  ,  éleva  des  doutes  sérieux  sur  la  nature  de 


(1)  Malpighi  observa  les  mouve- 
ments de  systole  et  de  diastole  du 
vaisseau  dorsal  chez  le  Ver  à  soie,  et 
Il  considéra  cet  organe  comme  étant 
formé  par  une  série  de  petits  cœurs  (a). 
Swammerdam  eu  donna  une  descrip- 
tion plus  détaillée  chez  l'Abeille  ,  la 
chenille  des  Vanesses  ,  la  larve  de 
l'Orycte  nasicorne  et  du  Strationrys  ; 
il  en  signala  aussi  l'existence  chez 
plusieurs  autres  Insectes  (6).  Réau- 
mur  crut  avoir  trouvé,  un  vaisseau 
analogue  à  la  face  ventrale  du  corps , 
chez  les  larves  de  Tenthrédines,  et 
se  demanda  si  ce  ne  serait  pas  un 
tronc  veineux  (c).  Bonnet,  qui  paraît 
avoir   vu  aussi  les  mouvements  du 


sang  ,  en  conclut  qu'il  devait  y  avoir 
chez  les  Insectes  des  veines  aussi 
bien  que  des  artères ,  et  il  regarda 
comme  très  probable  l'existence  d'une 
maîtresse  veine  à  la  face  inférieure 
du  cœur  (d). 

Enfin  Comparetti,  induit  sans  doute 
en  erreur  par  quelque  apparence  mal 
interprétée ,  et  se  laissant  entraîner 
par  son  imagination  ,  a  affirmé  qu'il 
existe  chez  les  Insectes  un  double  sys- 
tème vasculaire  complet  (e). 

limiter,  qui  ne  s'était  pas  trompé 
sur  les  fonctions  du  vaisseau  dorsal 
des  Insectes,  paraît  avoir  pris  les  ailes 
flbro-musculaires  de  cet  organe  pour 
un  système  artériel  (/"). 


(a)  Dissertatio  epistolica  de  Bombyce,  1669  (Optra  omnia,  1686,  vol.  H,  p.  15). 
(6)  Swammerdam  ,  Biblia  Natures  ,  etc.,  p.  467,  pi.  19,  fig.  1   (Abeille)  ;  p.  311 ,  pi.  27,  fig.  3 
(Oryctes);  p.  577,  pi.  34,  fig.  6  (Vanesse),  etc. 

(c)  Réaumur,  Mém.  pour  servir  à  l'histoire  des  Insectes,  1740,  t.  V,  p.  103. 

(d)  Bonnet,  Contemplation  de  la  Nature  {Œuvres,  1781,  t.  IV,  1"  partie,  p.  90  et  301). 

(e)  Comparetti ,  Dinamica  animali  degli  Insetti,  p.  237  et  suiv.  (1800). 

(f)  Voyez  Descript.  and  lllustr.  Catalogue  of  the  Physiological  Séries  of  Comp.  Anat,  in  the 
Muséum  of  the  Collège  of  Surgeons  in  London,  1834,  vol.  II,  p.  31. 


CIRCULATION    DU    SANG    CHEZ    LES    INSECTES.  215 

ce  vaisseau  dorsal  (i) ,  et,  à  la  fin  du  siècle  dernier,  Georges 
Cuvier ,  après  avoir  fait  de  cette  question  une  étude  spéciale , 
acquit  la  conviction  de  l'absence  de  toute  circulation  propre- 
ment dite  dans  la  classe  des  Insectes  (2). 

L'autorité  de  Cuvier  était  si  grande,  et  son  opinion  paraissait 
si  bien  fondée,  que  tous  les  naturalistes  n'hésitèrent  pas  à 
adopter  cette  manière  de  voir,  et  l'on  citait  le  défaut  de  cir- 
culation chez  les  Animaux  à  respiration  trachéenne  comme  un 
exemple  éclatant  de  la  juste  pondération  des  instruments  phy- 
siologiques dont  les  êtres  vivants  sont  pourvus.  En  effet,  on 
disait  que  le.  sang  des  Insectes  ne  circulant  pas  dans  l'orga- 
nisme et  ne  pouvant  aller  chercher  l'air  dans  un  point  déter- 
miné de  l'économie,  tel  qu'un  poumon  ou  une  branchie ,  il 
fallait  que  l'air  allât  chercher  le  sang,  et  que,  par  conséquent, 
l'existence  de  trachées  était  commandée  en  quelque  sorte  par 
l'absence  d'un  cœur  et  de  vaisseaux  sanguins  (3),  Aujourd'hui 


(1)  Lyonnet  fit  une  étude  très  atten- 
tive du  vaisseau  dorsal  de  la  chenille 
du  Cossus ,  et  décrivit  minutieuse- 
ment les  faisceaux  musculaires  dont 
cet  organe  est  pourvu  ;  mais  n'ayant 
pu  découvrir  ni  artères  ni  veines  en 
communication  avec  la  cavité  dont  il 
est  creusé,  il  fut  conduit  à  penser  que 
le  liquide  contenu  dans  son  intérieur 
ne  servait  pas  à  la  nutrition.  Lyonnet 
continua  cependant  à  donner  à  ce  tube 
le  nom  de  cœur  (a). 

(2)  Cuvier  chercha,  tantôt  par  l'in- 
jection du  mercure  ou  d'un  liquide 
coloré,  tantôt  par  l'insufflation,  à  dé- 
couvrir si  le  vaisseau  dorsal  donnait 
naissance  à  quelques  ramifications,  et, 


s'étant  convaincu  de  l'absence  de  tout 
système  vasculaire  périphérique,  il  en 
conclut  que  cet  organe  ne  pouvait  être 
un  cœur  (6). 

(3)  M.  Marcel  de  Serres,  qui  publia 
en  1819  un  travail  spécial  sur  le  vais- 
seau dorsal  des  Insectes,  adopta  comme 
un  principe  incontestable  :  «  qu'un 
cœur  ne  peut  point  exister  sans  vais- 
seaux sanguins,  tout  comme  les  vais- 
seaux sanguins  sans  cœur  »  ,  et  il 
s'appliqua  à  prouver  que  ce  vaisseau 
n'est  point  un  organe  de  circulation, 
mais  un  organe  destiné  à  élaborer  la 
graisse  (c). 

Celte  opinion  a  été  réfutée  par  Hé- 
rold  ,  qui  cependant  n'a  pas  mieux 


(a)  Lvonnel,  Traité  anatomique  de  la  Chenille  du  saule,  1762,  chap.  XI,  p.  412  à  428,  pi.  12, 
fig.  1. 

(6)  Cuvier,  Mémoire  sur  la  manière  dont  se  fait  la  nutrition  chez  les  Insectes  (Mém.  de  la 
Soc.  d'hist.  nat.  de  Paris,  1798,  an  vn,  p.  34). 

(c)  Marcel  de  Serres,  Suite  des  observations  sur  les  usages  du  vaisseau  dorsal  (Mém.  du 
Muséum,  1819,  t.  V,  p.  59). 


Absence 

d'arlères 

et  de  veines, 


216  CIRCULATION    DU    SANG 

encore  quelques  entomologistes  pensent  que  la  respiration  tra- 
chéenne implique  la  non-existence  d'une  circulation  du  sang,  et 
que,  chez  les  Insectes,  le  fluide  nourricier  ne  se  répand  dans 
l'organisme  que  de  proche  en  proche ,  par  imbibition. 
Découverte       §2.  —  Cependant  l'observation  directe  des  phénomènes  de 

do  la  circulation  i  .    ...  ,  ,         T  .  ,■ 

chez  la  nutrition ,  chez  des  Insectes  vivants ,  a  renverse  toutes  ces 
idées,  et  a  montré  que,  non-seulement  le  sang  circule  dans  le 
corps  de  ces  Animaux  ,  mais  y  circule  avec  rapidité. 

Cette  découverte  appartient  à  M.  Carus.  Quelques  anciens 
micrographes ,  il  est  vrai,  avaient  aperçu  des  courants  dans 
diverses  parties  du  corps  de  trois  ou  quatre  Insectes ,  dans  les 
pattes  de  la  Puce  ou  les  ailes  des  Sauterelles ,  par  exemple  (1); 
mais  leurs  observations,  restées  incomplètes ,  ne  suffisaient  pas 
pour  prouver  que  le  sang  circule  dans  l'organisme  de  ces  Ani- 
maux ,  et  n'avaient  pas  fixé  l'attention  des  physiologistes.  Aussi 


apprécié  les  fonctions  du  vaisseau  «  Animalculo  ita  constituto,  contenta 
dorsal  des  Insectes.  Il  attribue  à  cet  »  ejus  omnia,  potissimum  vero  san- 
organe  une  action  analogue  sur  les  »  guis,  quam  forlissime  agilantur; 
sucs  nourriciers  répandus  dans  l'ab-  »  sanguis  fermentescensper  vasa  san- 
domen,  et  leconsidèrecomme  servant  »  guinea  e  corde  in  alas  propelletur, 
à  agiter  ces  liquides  sans  y  déterminer  »  simulque  aer  e  pulmonibus  eu  adi- 
un  mouvement  circulatoire  [a).  »  getur  (b).  » 

(1)  Ce  phénomène  avait  été  aperçu  Backer  a  dit  aussi  quelques  mots 
par  Swammerdam  chez  des  Papillons  de  courants  qu'on  peut  apercevoir 
qui ,  près  d'achever  leur  métamor-  dans  les  pattes  des  Punaises  et  les 
phose,  ont  encore  les  ailes  dans  un  état  ailes  des  Sauterelles  (c).  Enfin,  des 
de  mollesse  très  grande  ;  mais,  d'après  mouvements  analogues  avaient  été  si- 
la  manière  dont  il  le  décrit,  on  n'aurait  gnalés  chez  la  larve  de  la  Puce  pal- 
pas été  fondé  à  en  déduire  l'existence  Rôsel  (d),  et  dans  les  pattes  de  cet  in- 
d'une  véritable  circulation  du  sang.  secte  à  l'état  parfait  par  Lyonnet  (e). 
En  effet,   voici  tout  ce  qu'il  en  dit  : 

(a)  Herold,  Physiologische  Untersuchungen  iiber  das  Rùckengefdss  der  Inseclen  {Schriften  der 
Gesellschaft  «tir  Bejorderung  der  gesammten  Naturudssenschaflen  «m  Marburg,  1 823  ,  Bd.  J, 
p.  41). 

(b)  Swammerdam,  Biblia  Naturœ,  vol.  11,  p.  5S9. 

(c)  Backer,  The  Microscope  made  Easy,  1742,  p.  130. 

(d\  Rôsel,  Die  %u  der  Monatlich  herausgekommenen  Insecten-Belusligung  gehôriqe  Sammlung 
der  Milcken  und  Schecken,  Bd.  II,  p.  1  5. 

(e)  Lesser,  Théologie  des  Insectes,  avec  des  remarques,  par  Lyonnet,  1742,  t.  Il,  p.  84. 


CHEZ    LES    INSECTES.  217 

lorsque  M.  Carus,  en  étudiant  des  larves  d'Éphémères,  vit  des 
courants  sanguins  parcourir  tout  le  corps  et  revenir  sans  cesse 
à  leur  point  de  départ  en  suivant  une  route  déterminée  ,  ce 
naturaliste  éminent  iit ,  je  le  répète ,  une  véritable  décou- 
verte (1). 


(I)  Les  premières  observations  de 
Carus  sur  la  circulation  chez  les  In- 
sectes furent  faites  sur  de  petites  lar- 
ves de  VAgrion  puella  et  l'Éphé- 
mère (a).  Dans  un  second  Mémoire,  le 
même  auteur  étendit  sa  découverte  et 
constata  le  mouvement  circulatoire 
chez  des  Insectes  à  l'état  adulte  aussi 
bien  que  chez  des  larves  (b). 

Les  observations  de  M.  Carus  furent 
confirmées  par  celles  de  M.  Wa- 
gner sur  les  Nèpes ,  etc.  (c) ,  et  de 
M.  Ehrenberg  sur  des  Mantes,  proba- 
blement au  moment  de  la  dernière 
mue  (d). 

En  1833,  la  circulation  du  sang 
chez  les  larves  des  Éphémères  fut 
étudiée  et  représentée  avec  beaucoup 
de  soin  par  M.  Bowerbank  (e). 

En  1835,  M.  Tyrrell  observa  la  cir- 
culation chez  la  Mouche  domestique 
aussi  bien  que    chez  divers   Névro- 


ptères ,  tels  que  les  Phryganes ,  les 
Hémérobes ,  etc.  if). 

Dugès  a  constaté  l'existence  du 
même  phénomène  chez  des  larves  de 
Dytisques  (g)  ;  plusieurs  autres  natu- 
ralistes ont  fait  des  observations  ana- 
logues, et  j'ajouterai  qu'à  diverses 
reprises  j'en  ai  fait  l'objet  de  démons- 
trations publiques  dans  mon  cours 
d'entomologie  au  Muséum  (h).  Enfin, 
M.  Verloren  a  multiplié  encore  da- 
vantage les  faits  du  même  ordre,  et  a 
donné  une  liste  de  quatre-vingt-dix 
espèces  réparties  dans  toutes  les  gran- 
des divisions  de  la  classe  des  Insectes 
où  les  courants  circulatoires  avaient 
été  vus  soit  par  lui-même,  soit  par 
ses  devanciers  {%). 

Aujourd'hui,  tous  les  naturalistes, 
excepté  M.  Léon  Dufour,  admettent 
donc  l'existence  d'une  circulation  du 
sang  chez  les  Insectes,  et  attribuent  ù 


(a)  Carus,  Entdeckung  eines  einfachen  vom  Herzen  aus  beschleunigten  Blutkreislaufes  in  den 
Larven  netzfluglicher  Insecten.  Leipzig,  1821. 

(b)  Carus  ,  Fernere  Untersuchungen  iïber  Blutlauf  in  Kerfen  (Nov.  Acta  Acad.  I.eop.  Naî. 
curios.,  1831,  vol.  XV,  pars  2,  p.  3,  pi.  51). 

(c)  Wagner,  Beobachtungen  uber  den  Kreislavf  des  Blutes  und  den  Bau  des  Rûckengefdsses 
beiden  Insecten  (Isis,  1832,  p.  320  et  778,  tab.  2). 

(d)  Humboldt,  Bericht  ûber  die  naturhist.  Reisen  von  Ehrenberg  und  Hemprich,  1826,  p.  22. 

(e)  Bowerbank,  Observ.  on  the  Circulation  of  Blood  in  Insects  (Enlomological  Magazine,  1833, 
vol.  I,  p.  239,  pi.  2). 

(f)  J.  Tyrrell,  On  the  Circulation  of  the  Blood  in  Insects  {Abstracts  of  the  l'apers  prînted  in 
the  Philosoph.  Trans.,  1835,  t.  III,  p.  317). 

(g)  Dugès,  Traité  de  physiologie  comparée,  t.  II,  p.  441. 

(h)  Voyez  Ann.  des  sciences  nat.,  1845,  3e  série,  t.  III,  p.  270,  et  les  Comptes  rendus  de 
l'Acad.  des  sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  33. 

(i)  Verloren  ,  Mém.  en  réponse  à  la  question  suivante  :  Eclairer  par  des  observations  nouvelles 
le  phénomène  de  la  circulation  dans  les  Insectes  (Mémoires  couronnés  de  l'Académie  de  Bruxelles, 
1847,  t.  XIX). 

—  Von  den  Ernàhrungs  Functionen  bei  den  Insecten  (Holldndische  Beilrage  von  den  dnatom. 
vnd  physiol.  Wissensrhaften,  1S48,  Vd.  I,  p.  303). 


218  CIRCULATION    DU   SANG 

Ces  jeunes  Insectes,  dont  la  vie  est  aquatique,  ont  les  tégu- 
ments si  minces  et  si  transparents ,  qu'en  les  plaçant  sous  le 
microscope  on  peut  voir  dans  l'intérieur  de  leur  corps ,  et ,  en 
les  observant  de  la  sorte  à  l'état  vivant ,  M.  Carus  reconnut 
que  le  sang  se  meut  avec  rapidité  dans  leur  organisme,  et  forme 
sur  la  ligne  médiane  du  dos  un  large  courant  dirigé  d'arrière 
en  avant.  Il  vit  ensuite  le  liquide  nourricier  serpenter  entre  les 
organes  contenus  dans  la  tête,  et  former  sur  les  parties  latérales 
et  inférieures  du  corps  de  grands  courants  dirigés  d'avant  en 
arrière,  puis  rentrer  dans  le  courant  dorsal  à  l'extrémité  pos- 
térieure de  l'abdomen.  D'autres  courants  secondaires  formaient 
pour  ainsi  dire  des  anses  dans  diverses  parties  du  corps,  telles 
que  les  appendices  caudaux  et  les  feuilles  respiratoires.  En  un 
mot,  il  y  trouva  tout  ce  qui  constitue  une  véritable  circulation  du 
sang,  mais  une  circulation  dont  la  plus  grande  partie  se  faisait 


la  petitesse  ou  à  la  rareté  des  globules  crois,  en  principe,  que  dans  les  Ani- 

charriés  par  ce  liquide  l'impossibilité  maux  où  il  y  a  une  circulation  gé- 

où  l'on  se  trouve  quelquefois  d'aper-  nérale  d'air,    celle-ci   remplace   ou 

cevoir  au  microscope  ce  mouvement  exclut  la  circulation  générale  du  sang 

des  fluides  nourriciers.  M.  Léon  Du-  ou  d'un  liquide  analogue.  Ces  deux 

four  a  mis  une  grande  persévérance  systèmes  circulatoires  sont  incompa- 

à  soutenir  les  opinions  de  Cuvier  à  ce  libles  (a).  » 

sujet.  Dans  son  travail  sur  l'anatomie  M.  Léon  Dufour  développe  les  mê- 
des  Hémiptères,  il  désigne  le  cœur  des  mes  vues  en  traitant  des  Ortho- 
Insectes  sous  le  nom  de  cordon  dor-  plères  (.6).  Il  reconnut  que  chez  les 
sal ,  parce  qu'il  lui  refuse  même  le  Bourdons  le  vaisseau  dorsal  est  tubu- 
caractère  d'un  vaisseau,  et  chez  la  leux  ;  mais  il  soutint  qu'il  ne  renfer- 
Corée  bordée,  par  exemple,  il  le  dé-  niait  aucun  liquide  (c).  Enfin ,  dans 
crit  comme  n'offrant  aucune  cavité  une  publication  plus  récente,  il  dé- 
intérieure ;  enfin  il  résume  de  la  ma-  clare  que,  dans  son  opinion,  ce  pré- 
nière  suivante  l'ensemble  de  ses  re-  tendu  vaisseau  dorsal  est  un  organe 
cherches  :    «  C'est  un  fait  établi  ,  je  sécréteur  (d). 

(a)  Léon  Dufour,  Recherches  anatomiques  et  "physiologiques  sur  les  Hémiptères,  1833,  p.  275 
el  27G  (extrait  des  Mémoires  des  Savants  étrangers,  t.  IV). 

(b)  Recherches  anatomiques  et  physiologiques  sur  les  Orthoptères  ,  les  Hyménoptères   el  les 
Nêvroptèrts,  p.  23  (extrait  des  Mémoires  des  Savants  étrangers,  1841,  t.  VII). 

(c)  hoc.  cit.,  p.  120. 

(d)  Léon  Dufour,  Etudes  anatomiques  et  physiologiques  sur  une  Mouche,  p.  57  (extrait  de* 
Mémoires  des  Savants  étrangers,  1845,  t.  IX  ). 


CHEZ   LES    INSECTES.  219 

sans  le  concours  de  tubes  de  conduite  et  par  l'intermédiaire 
seulement  des  espaces  libres  laissés  entre  les  divers  organes 
de  l'économie. 

Bientôt  les  résultats  annoncés  par  M.  Carus  furent  pleine- 
ment confirmés  par  les  observations  de  plusieurs  naturalistes; 
et  ils  sont ,  en  effet,  très  faciles  à  vérifier  chez  tous  les  Insectes 
dont  les  téguments  sont  suffisamment  transparents  pour  per- 
mettre l'emploi  d'un  microscope  puissant ,  et  les  globules  du 
sang  suffisamment  gros  et  opaques  pour  rendre  le  mouvement 
du  liquide  qui  les  charrie  saisissable  à  l'œil. 

Peu  de  temps  après  la  publication  de  la  découverte  impor- 
tante due  à  M.  'Carus,  la  structure  du  vaisseau  dorsal  nous  fut 
plus  complètement  dévoilée  par  les  recherches  délicates  de 
M.  Straus-Durkheim  sur  l'anatomie  du  Hanneton  (1),  et  dès 
ce  moment  les  physiologistes  purent  se  former  une  idée  nette 
des  caractères  les  plus  importants  du  mode  de  circulation  du 
sang  chez  les  Insectes. 

§  3.  —  Le  vaisseau  dorsal,  comme  je  l'ai  déjà  dit .  occupe  vaisseau  dorsal 

-ii  >         -i     i  ii  -,  nu  cœur. 

la  ligne  médiane  du  dos ,  et  s  étend  dans  toute  la  longueur  du 
corps.  Il  se  trouve  presque  immédiatement  sous  la  peau,  et, 
lorsque  les  téguments  sont  à  demi  transparents,  on  en  aperçoit 
le  contour  et  les  mouvements  sans  ouvrir  l'Animal.  Lorsqu'on 
le  met  à  nu  par  la  dissection,  on  voit  qu'il  ne  présente  pas  la 
même  structure  dans  toute  son  étendue,  et  qu'il  se  compose  de 
deux.portions  bien  distinctes  :  l'une,  antérieure,  qui  est  simple- 
ment tubulaire  et  qui  ne  se  contracte  pas  ;  l'autre,  postérieure, 
qui  est  plus  large,  plus  compliquée  dans  sa  structure,  et  qui  est 
animée  d'un  mouvement  intermittent  régulier.  Cette  dernière 
portion  constitue  donc  plus  particulièrement  le  cœur  des  Insectes. 

(1)  L'ouvrage  de  .\!.  Straus  porte  .sur  l'anatomie  comparée  des  Ani- 

essentiellernent  sur    Tanatomie    des  maux  articulés.  Il  fut  publié  eu  1828, 

Hannelons  à  l'état  parfait,  mais   est  et  renferme  une    série   de  planches 

intitulé  :   Considérations    générales  magnifiques. 


220  CIRCULATION    DU    SANG 

Chez  le  Hanneton,  où  sa  structure  a  été  décrite  avec  le  plus 
grand  soin  par  l'anatomiste  que  je  viens  de  citer,  elle  occupe, 
de  même  que  chez  la  plupart  des  autres  Animaux  de  cette  classe, 
toute  la  longueur  de  l'abdomen,  et  se  trouve  fixée  à  la  voûte  du 
squelette  tégumen taire  de  cette  région  par  sept  paires  d'expan- 
sions membraniformes  que  l'on  désigne  généralement  sous  le 
nom  d'ailes  du  cœurii).  Ces  appendices  latéraux  naissent  chacun 
par  une  espèce  de  tendon  du  bord  antérieur  de  l'anneau  cor- 
respondant de  l'abdomen,  et  vont  en  s'élargissant  vers  le  cœur, 
où  ils  constituent  deux  lames,  une  supérieure,  qui  s'insère  sur 
les  côtés  de  cet  organe,  l'autre  inférieure,  qui  se  porte  en  dessous 
et  va  se  réunir  à  son  congénère  de  façon  à  y  former  une  sorte 
de  plancher  qui  sépare  le  cœur  delà  cavité  viscérale.  Un  espace 
libre,  mais  fermé  en  dessus  comme  en  dessous,  se  trouve  ainsi 
ménagé  de  chaque  côté  de  la  portion  cardiaque  du  vaisseau 
dorsal  par  la  réunion  de  ces  expansions  membraniformes ,  et 
elle  constitue  la  poche  péricardique ,  où  le  sang  se  répand 
pour  baigner  le  cœur  et  pénétrer  ensuite  dans  l'intérieur  de 
cet  organe  (2).  Ici  ce  réservoir  vestibulaire  mérite  donc  mieux 

(1)  M.   Straus    considère  ces  ailes  longemenls  triangulaires  sonl  en  pelit 

comme  étant  formées  uniquement  de  nombre  ,  et,  d'après  les  observations 

lanières  fibreuses  réunies  de  manière  récentes  de  MM.  Cornaliaetde  Filippi, 

à  constituer  une  membrane  [a)  ;  mais  ils  sont  entremêlés  de  filaments  jau- 

je  pense  qu'elles  renferment,  comme  nàtres  et  ramifiés  qui  seraient  creux 

chez  les  Crustacés  et  les  Myriapodes,  et  tubiformes  (c). 
des   fibres   musculaires  fournies  par  (2)  Cette  disposition,  qui  n'avait  élé 

les  muscles  extrinsèques  du  cœur.  qu'imparfaitement  saisie  par  M.  Straus, 

Lyonnet,  qui  a  donné  une  très  bonne  a  été  très  bien  observée  par  Kewport. 

ligure  de  ces  parties  chez  la   chenille  C'est  la  chambre  péricardique  ainsi 

du  Cossus,  les  considère  aussi  comme  constituée  qui  donne  naissance  à  l'es- 

étant  essentiellement  musculaires  (6).  pace  clair  remarqué  par  ce  natura- 

Dans  le   Ver  à  soie,  les  faisceaux  liste  de  chaque  côté  du  vaisseau  dor- 

musculaires  dont  se  compose  ces  pro-  sal  chez  les  Asiles,  les  Bourdons  (d). 

(a)  Straus,  Considérations  sur  l'anatomie  comparée  des  Animaux  articulés,  p.  357. 

(b)  Lyonnet,  Traité  anatomique  de  la  Chenille  du  saule,  p.  414. 

(c)  Cornalia ,  Monografta  del  Bombice  del  gelso,  p.  137,  pi.  8,  fi  g.  102  (1856). 

(d)  Newport,  art.  Insf.cta  (Todd's  Cyclop.  nfAnat.  and  Physiol,  vol.  II,  p.  i)78,  fïg\  434). 


CHEZ    LES    INSECTES.  221 

que  chez  les  Crustacés  le  nom  d'oreillette  du  cœur,  sous  lequel 
on  le  désigne  souvent ,  car,  à  raison  de  la  disposition  des  fibres 
musculaires  des  ailes  cardiaques,  il  semble  pouvoir  agir  comme 
un  instrument  d'impulsion  et  pousser  le  sang  dans  le  ventricule 
ou  cœur  proprement  dit. 

Celui-ci  est  en  général  un  peu  fusiforme  (1)  et  présente  une 
série  d'étranglements  plus  ou  moins  marqués  qui  se  prononcent 
surtout  au  moment  de  la  contraction  et  qui  le  divisent  en  un 
certain  nombre  de  segments  ou  ventriculites.  Ce  qui  caracté- 
rise principalement  ces  petites  chambres  cardiaques ,  ce  sont 
les  orifices  afférents  qui,  disposés  par  paires,  en  occupent 
les  parties  latérales ,  et  des  replis  membraneux  intérieurs  qui 
en  divisent  la  cavité  et  qui  sont  disposés  comme  des  portes 
d'écluses. 

Le  nombre  des  orifices  afférents  ou  auriculo-ventriculaires 
du  cœur  des  Insectes  paraît  être  le  plus  ordinairement  de  huit 
paires ,  mais  se  trouve  parfois  réduit  à  cinq  ou  six ,  ou  même 
davantage  encore  ;  et ,  lorsqu'ils  ne  régnent  pas  dans  toute  la 
longueur  de  l'abdomen ,  c'est  à  la  partie  postérieure  de  cette 

(1)  Eu  général,  chez  les  Insectes  genre  Chironomus  (b).  Chez  la  larve 

adultes,  cette  portion   cardiaque  du  du  Pompilius  viaticus ,  M.  Verloren 

vaisseau  dorsal  est  un  peu  fusiforme,  a  trouvé  une  dilatation  analogue,  mais 

sa  partie  moyenne  étant  légèrement  moins  forte  (c). 
renflée  (a)  ;   mais  M.  Verloren  a  re-  Ce  mode  de   conformation  est   au 

marqué  que,  chez  les  larves,  sa  plus  contraire  plus  prononcé  chez  quelques 

grande    ampleur   est   à   l'arrière  du  Insectes  aptères.  Ainsi,  chez  le  Meno- 

corps.    Près  de   son   extrémité  pos-  pon    pallidum  ,   M.    VVedl  a   trouvé 

térieure,  on  y  remarque  même,  chez  l'extrémité    postérieure   du    vaisseau 

quelques  espèces,  une  dilatation  très  dorsal  dilatée  en  une  poche  contrac- 

prononcée   :  par  exemple ,   chez   les  tile  ovalaire  ,  à  laquelle  il  réserve  le 

larves   aquatiques    des   Diptères   du  nom  de  cœur  {d). 

(a)  Exemples  :  Hanneton.  Voyez  Straus,  Op.  cit.,  pi.  8,  Car.  7  et  9. 

—  Lucanus  cervas.  Voyez  Newport,  Insecta  (Todd's  Cyclopœdia,  vol.  II,  p.  977,  fig.  433). 

(b)  Verloren,  Sur  la  circulation  dans  les  Insectes,  p.  31,  pi.  2,  fïg.  1  à  4  ;  pï.  3,  fig.  5  à  7. 

(c)  Loc.  cit.,   pi.  6,  fig.  22. 

(d)  Wedl,  Ueber  das  Herz  von  Menopon  pallidum  (Silïiuujsbericht  dev  Alcad.  der  Wissmçhafteh 
su  Wien,  1855,  t.  XVII,  p.  173,  fig.). 


222  CIRCULATION    DU    SANG 

région  qu'on  les  rencontre  (1)  :  ils  sont  placés  chacun  vers  le 
milieu  de  l'anneau  abdominal  correspondant ,  et  dirigés  à  peu 
près  verticalement  ;  mais  leurs  deux  lèvres ,  au  lieu  de  se  ter- 
miner par  un  bord  libre ,  comme  on  pourrait  le  croire  à  la 


(1)  L'existence  de  huit  paires  de  ces 
orifices  a  été  constatée  chez  le  Han- 
neton par  M.  Straus  (a),  et  chez  les 
Sphinx  et  divers  autres  Lépidoptères 
par  Newport  (6),  chez  le  Rhyncho- 
phore  par  M.  Verloren  (c),  chez  la 
Sauterelle  verte  par  M.  Blanchard  (d), 
chez  la  larve  du  Corethra  plumiformis 
par  M.  Wagner  (e). 

Mais ,  dans  le  Lucane  cerf-volant , 
Newport  n'a  pu  en  trouver  que  sept 
paires. 

Le  même  naturaliste  n'en  a  trouvé 
que  cinq  paires  chez  le  Bourdon  ter- 
restre (/").  Chez  les  larves  de  Caloso- 
mes,  il  paraît  n'exister  que  quatre 
paires  (g),  ainsi  que  chez  les  Mou- 
ches (h). 

Enfin,  chez  les  Phasmes ,  on  n'en 
distingue  qu'une  seule  paire  (i). 

Du  reste,  la  détermination  du  nom- 
bre exact  de  ces  orifices  présente 
souvent  de  très  grandes  difficultés,  et 
dans  beaucoup  de  cas  il  est  impos- 
sible d'être  sûr  qu'aucun  d'entre  eux 
n'ait  échappé  à   l'œil.    M.   Verloren 


pense  qu'il  y  a  toujours  une  paire 
d'ouvertures  pour  chacun  des  seg- 
ments de  l'abdomen  occupés  par  la 
portion  cardiaque  du  vaisseau  dorsal, 
ce  qui  donnerait  aussi  huit  paires  pour 
les  larves  du  Chironomus,  puisque  ce 
physiologiste  a  pu  s'assurer  de  leur 
présence  dans  les  onzième  et  dou- 
zième segments,  et  que  la  portion 
abdominale  du  corps  se  compose  de 
six  autres  anneaux. 

D'après  cette  méthode  d'évaluation, 
M.  Verloren  attribue  neuf  paires  de 
ces  orifices  à  la .  larve  du  Pompilus 
viaticus,  et,  du  reste,  il  a  constaté 
directement  ce  nombre  chez  la  larve 
de  l'Éphémère  (j). 

D'un  autre  côté,  il  me  paraît  évi- 
dent que  chez  les  Phasmes  il  n'y  a 
qu'une  paire  d'orifices  afférents  et  une 
paire  d'ailes,  ce  qui  suppose  une  seule 
chambre  cardiaque ,  et ,  d'après  les 
observations  de  M.  |  Nicolet ,  la  même 
structure  se  rencontrerait  chez  les 
larves  du  Cyphon  lividus  (k). 


(a)  Straus ,  Considérations  sur  l'anatomie  comparée  des  Animaux  articulés,  p.  356,  pi.  8, 
fig.  7). 

(b)  Newport,  Insecta  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  PhysioL,  vol.  II,  p.  977). 

(c)  Verloren,  Op.  cit.,  p.  45. 

(d)  Blanchard,  Op.  cit.  (Ann.  des  se.  nat.,  t.  IX,  p.  386  et  392). 

(e)  Wagner,  Ueber  Blutkôrperchen  der  Regenwût'mern,  Blutegeln  und  Dipterenlarven  (Mùller's 
Archiv  fur  Anat.  und  Pays-,  1835,  p.  312,  pi.  5,  fig.  14). 

(f)  Newport,  loc.  cit.,  p.  977. 

(g)  Burmeister,  Handb.  der  Entomologie,  p.  165. 
(h)  Blanchard,  loc.  cit.,  p.  397. 

(i)  Miiller,  Ueber  die  Enlwick.  der  Eier  und  des  Ruckengefàsses  bei  den  hisecleil  (  Nova  Acta 
Acad.  Nat.  cunos.,  t.  XII,  pi.  50,  fig.  2). 

(j)  Loc.  cit.,  p.  46. 

(k)  Nicolet ,  Sur  la  circulation  du  sang  che&  les  biseetes  (Comptes  rendus  de  l'Académie  det 
sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  540). 


CHEZ    LES    INSECTES.  223 

première  vue,  se  replient  en  dedans  et  en  avant,  de  manière 
à  s'avancer  comme  un  bec  de  flûte  dans  l'intérieur  du  cœur. 
Les  doubles  replis  membraneux  ainsi  constitués  de  chaque 
coté  du  vaisseau  dorsal  ont  une  forme  semi- lunaire  et  s'écar- 
tent l'un  de  l'autre  quand  cet  organe  se  dilate  ;  mais  ,  lors  du 
mouvement  contraire ,  le  voile  constitué  par  la  lèvre  anté- 
rieure de  chaque  orifice  s'applique  contre  le  voile  correspon- 
dant formé  par  le  prolongement  de  la  lèvre  postérieure ,  et 
ferme  le  passage. 

A  l'aide  de  cet  appareil  valvulaire ,  dont  le  jeu  parait  être  le 
même  chez  tous  les  Insectes,  le  sang  peut  donc  pénétrer  du  ves- 
tibule péricardique  dans  le  cœur,  mais  ne  peut  pas  refluer  du 
cœur  dans  ce  réservoir  (1). 

Il  est  aussi  à  noter  qu'en  s'avançant  obliquement  l'une  vers 
l'autre,  les  deux  valvules  bilabiales  d'une  même  paire  divisent 
intérieurement  le  cœur  en  autant  de  compartiments  ou  loges 
qui  communiquent  entre  elles  par  l'espace  médian  ou  fente 
comprise  entre  ces  replis  latéraux.  Or,  cette  disposition  vient 
encore  en  aide  au  mouvement  circulatoire. 

En  effet,  quand  le  cœur  s'est  rempli  de  sang  par  les  voies 
dont  il  vient  d'être  question ,  il  se  resserre;  mais  les  contrac- 
tions de  ses  divers  segments  ont  lieu  d'une  manière  successive 
d'arrière  en  avant ,  et  les  clapets  intérieurs  que  je  viens  de 
décrire  s'opposent  au  retour  du  liquide  du  ventrieulite  qui 
bat  dans  celui  qui  a  cessé  de  se  contracter,  et  l'obligent  à  se 
diriger  en  totalité  vers  la  tête  (2  . 

(1)   La  découverte  de  ces  valvules  valvulaires    manquent   complètement 

est  due  à   M.  Straus,  qui  a  très  bien  dans   le   vaisseau  dorsal  du  Bombyx 

indiqué   leurs  principaux,  caractères;  du  mûrier  (6). 
mais  leur  jeu  a  été  mieux  décrit  par  (2)  Des  opinions  contradictoires  sur 

M.  Verloren  (a).  les  fonctions  de  ces  replis  valvulaires 

M.  Cornalia  pense   que  ces  replis  intérieurs  du  vaisseau  dorsal  des  ln- 

[a)  Sur  la  circul.  dans  les  Insectes,  p.  ~ii  et  suis.  [Mém.  cour,  de  l'Acad.  de  Briucelles,  l.  XIX), 

(b)  Cornalia,  Monografia  del  Bombke  del  yelso,  p,  135. 


22/t  CIRCULATION    DU    SANG 

§  II.  —  La  portion  antérieure  ou  aortique  du  vaisseau  dorsal 
ne  présente  ni  expansions  latérales  en  forme  d'ailes,  ni  orifices,  et 
constitue  un  simple  tube  membraneux.  Chez  les  larves  et  quel- 
ques Insectes  adultes,  tels  que  les  Spectres,  où  le  corps  est 
tout  d'une  venue,  ce  vaisseau  se  prolonge  en  ligne  droite  de 
l'abdomen  dans  le  thorax ,  et  ne  s'infléchit  que  pour  pénétrer 
dans  la  tête.  Mais',  dans  la  plupart  des  Insectes  adultes,  le 
thorax  étant  séparé  de  l'abdomen  par  un  étranglement,  le 
vaisseau  dorsal  est  obligé  de  se  courber  pour  suivre  la  direction 
de  la  voûte  dorsale  du  squelette  tégumentaire  ,  et  forme  un 
coude  plus  ou  moins  prononcé  en  arrivant  au  thorax.  Il  est 
facile  de  voir  qu'il  n'y  donne  naissance  à  aucune  branche. 
Arrivé  dans  l'intérieur  de  la  tête  et  sous  le  ganglion  cérébroïde, 
il  s'accole  à  la  face  supérieure  de  l'œsophage  et  débouche  dans 
le  système  lacunaire  interorganique ,  soit  directement  par  son 
extrémité  tronquée,  soit  par  l'intermédiaire  de  deux  ou  d'un 
plus  grand  nombre  de  divisions  très  courtes. 
système         §  5.  —  La  totalité  du  sang  mis  en  mouvement  par  les  con- 

lacunaire.  "       .  ,       ,  .  . 

tractions  de  la  portion  cardiaque  du  vaisseau  dorsal  traverse 
donc  la  portion  aortique  de  cet  organe  et  se  déverse  dans  la 
cavité  de  la  tête.  Mais ,  soit  que  ce  tube  artériel  se  bifurque 
avant  de  s'ouvrir  ou  qu'il  se  termine  brusquement  par  une  extré- 

sectes  ont  été  émises  par  M.   Straus  triculaires).  M.  Verloren  a  fait  retnar- 

tl'une  part,  et  M.  Verloren  de  l'autre.  cpier  avec  raison  que  cette  théorie  du 

Le  premier  (a)  pense  que  la   diastole  mécanisme  de  la  circulation  du  sang 

delà  pénultième  chambre  cardiaque  a  chez  les  Insectes  n'était  pas  en  accord 

lieu  au  moment  de  la  contraction  de  avec  les  faits  (6)  ;  mais  il  est  tombé,  ce 

la  dernière  de  ces  loges,  et  ainsi  de  me  semble,  dans  l'exagération  oppo- 

suite;  en  sorte  que  chaque   veniri-  sée ,  en  n'accordant  aucune  influence 

cule  se  remplirait  à  la   fois  par  son  à  ces  replis  membraneux,  si  ce  n'est 

extrémité  postérieure,  c'est-à-dire  par  pour  diriger   le  courant   afférent  en 

le  détroit  interventriculaire,    et  par  avant  pendant  la  diastole, 
les  orifices  latéraux  (ou  auriculo-ven- 

(«)  Straus,  Considér.  sur  l'anat.  comp.  des  Anim.  articulés,  p.  558. 

(b)  Veiiorcu,  Op.  cil.,  p.  5-2  et  suiv.  (Mém.  couronnés  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  XIX). 


CHEZ    LES    INSECTES.  225 

mité  béante,  on  voit  le  sang  qui  s'en  échappe  circuler  ensuite 
dans  les  espèces  de  canaux  irréguliers  formés  par  les  espaces 
vides  que  les  divers  organes  circonvoisins  laissent  entre  eux, 
et  il  me  parait  bien  démontré  que  l'aorte  ne  donne  naissance  à 
aucun  système  vasculaire  rameux  à  l'aide  duquel  ce  liquide 
serait  transporté  de  la  tête  dans  les  autres  parties  de  l'orga- 
nisme (1).  Ce  sont  les  portions  inoccupées  de  la  grande  cavité 
viscérale  qui  servent  de  conduits  pour  le  sang  et  qui  sont  par- 
courues par  les  maîtres  courants  que  l'on  aperçoit  sur  les  parties 
latérales  et  inférieures  du  corps,  d'où  ces  courants  vont  gagner 
la  partie  postérieure  de  l'abdomen ,  et  rentrer  dans  le  cœur 
après  avoir  baigné  les  divers  organes  placés  sur  leur  route. 


(1)  Les  observations  de  AI.  Bovver- 
bank  sur  la  circulation  cliez  la  larve 
de  l'Éphémère  concordent  très  bien 
avec  celles  de  M.  Carus  touchant  le 
fait  du  déversement  du  sang  de  l'ex- 
trémité antérieure  du  vaisseau  dorsal 
dans  la  cavité  de  la  tète  ;  mais  ce  mi- 
crographe pense  que  les  grands  cou- 
rants latéraux  qui  se  dirigent  vers 
l'extrémité  postérieure  du  corps  sont 
renfermés  dans  des  canaux  distincts 
de  la  grande  cavité  abdominale,  bien 
qu'en  communication  libre  avec  cette 
cavité  au  point  de  jonction  des  divers 
anneaux  (a). 

M.  Millier  a  considéré  comme  étant 
des  vaisseaux  sanguins  certains  fila- 
ments qui,  chez  les  Phasmes,  s'étendent 
de  la  portion  aortique  du  vaisseau  dor- 
sal au  sommet  des  ovaires  [b),  opinion 


qui  a  été  partagée  par  Newport  (e). 
Mais  des  recherches  ultérieures  prou- 
vent que  ce  ne  sont  que  des  trachées 
accompagnées  de  brides  cellulaires, 
et  que  le  vaisseau  dorsal  ne  donne 
naissance  à  aucune  branche  dans  cette 
partie  du  corps  (d). 

Newport  pense  qu'il  existe  un  ca- 
nal vasculaire  le  long  de  la  face  su- 
périeure de  la  portion  abdominale  de 
la  chaîne  ganglionnaire;  il  le  désigne 
sous  le  nom  de  vaisseau  sus-spi7ial,  et 
il  soupçonne  qu'il  provient  de  l'extré- 
mité antérieure  du  vaisseau  dorsal  de 
la  même  manière  que  naît  l'artère 
récurrente  sus-spinale  chez  les  Scolo- 
pendres (e).  Mais  toutes  les  observa- 
tions des  autres  naturalistes  tendent 
à  faire  rejeter  cette  opinion. 


(a)  Bowerbank,  Obs.  on  the  Circul.  ofthe  Blood  in  Insects  (Entom.  Mag.,  1833,  vol.  I,  p.  2-iI). 

(b)  J.  Miiller,  Ueber  die  Entivickclung  der  Eier  in  Eierstock  bei  den  Gespenstheuschrecken 
und  eine  neuendeckte  Verbindung  des  Rïtckengefdsses  mit  den  Eierstôcken  bei  den  Insecten  (Nova 
Acta  Acad.  Nat.  curios.,  1825,  vol.  XII,  p.  553,  pi.  50,  fig-.  2). 

(c)  Newport,  Insecta  (Todd's  Cyclop.,  vol.  II,  p.  979). 

(d)  Blanchard,  De  la  circulation  dans  les  Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1848,  3"  série,  t.  IX, 
p.  368). 

(e)  Newport,  Insecta  (Todd's  Cyclop.,  vol.  II,  p.  980). 


III. 


15 


226  CIRCULATION    DU    SANG 

Ces  canaux  principaux  sont  en  continuité  avec  d'autres  lacunes 
ménagées  entre  les  muscles  ou  entre  les  faisceaux  dont  ces 
muscles  se  composent,  ou  bien  encore  au  milieu  de  la  masse 
viscérale,  et  les  grands  courants  envoient  dans  le  réseau  ainsi 
constitué  des  branches  secondaires  qui ,  après  s'être  ramifiées 
à  leur  tour  et  avoir  serpenté  entre  les  diverses  parties  solides 
de  l'organisme ,  rentrent  dans  quelque  courant  principal  pour 
regagner  le  vaisseau  dorsal  (1). 

Dans  les  parties  transparentes  du  corps  on  voit  le  sang  cir- 
culer ainsi  dans  une  multitude  de  canaux  interorganiques  plus 
ou  moins  bien  endigués,  pénétrer  dans  les  pattes  (2),  parcourir 


(1)  M.  Blanchard  pense  que  le  sang 
arrive  dans  l'espace  péricardique  au 
moyen  d'un  certain  nombre  de  canaux 
transversaux  à  parois  mal  définies  par 
du  tissu  cellulaire  condensé  qui  se  por- 
tent en  forme  d'arcades  en  suivant  la 
face  interne  de  l'arceau  dorsal  des  di- 
vers segments  abdominaux  du  sque- 
lette tégumentaire  ,  et  qui  avaient  été 
signalés  par  Newport  chez  les  Sphinx 
à  l'état  de  nymphes  (a),  mais  qui  sont 
plus  distincts  chez  les  Dytisques  (6). 
Ce  sont  les  analogues  des  canaux 
branchio-cardiaques  des  Crustacés  et 
des  canaux  pneumocaidiaques  des 
Arachnides. 

(2)  La  circulation  du  sang,  dans  les 
pattes  de  quelques  Insectes,  est  aidée 
par  l'action  de  faisceaux  musculaires 
qui  sont  situés  près  de  l'articulation  de 
la  jambe  avec  la  cuisse,  et  qui,  en  se 


contractant  d'une  manière  régulière, 
impriment  un  mouvement  plus  vif  au 
courant  dont  cette  partie  est  traversée. 
M.  Behn  a  découvert  ce  phénomène 
chez  de  jeunes  Notonectes,  et  l'a  con- 
staté aussi  dans  les  genres  Corixa  , 
Plea,  Naucora,  Nepa  et  Remettra. 
Il  croit  l'avoir  aperçu  aussi  chez  les 
Keduves  et  les  Ilydromètres  ;  mais  il 
n'a  pu  rien  voir  de  semblable  chez 
d'autres  Hémiptères  ,  tels  que  les 
Pucerons  (c).  Il  attribuait  les  batte- 
ments à  une  espèce  de  valvule  mem- 
braneuse ;  mais  M.  Léon  Dufour  pense 
que  le  mouvement  en  question  est  dû 
aux  muscles  ordinaires  des  jambes. 
Du  reste,  ce  dernier  analomiste  n'ad- 
met pas  l'existence  des  courants  cir- 
culatoires observés  par  M.  Behn  (c/). 
M.  Verlohren  a  constaté  ce  phéno- 
mène dans  les  pattes  du  Tettigonia 


{a)  Newport,  art.  Insecta  (Totld's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  vol.  II,  p.  979). 
(6)  Blanchard,  De  la  circulation  dans  les  Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  3»  série,  t.  XV, 
p.  381). 

(c)  Behn,  Découverte  d'une  circulation  du  fluide  nutritif  dans  les  pattes  de  plusieurs  Insectes 
Hémiptères,  circulation  qui  est  indépendante  des  mouvements  du  vaisseau  dorsal  et  se  trouve 
sous  la  dépendance  d'un  organe  moteur  particulier  {Ann.  des  sciences  nat.,  1835,  2-  série,  t.  IV, 
p.  5,  et  Mûller's  ArcKiv  fur  Anat.  und  Physiol.,  1835,  p.  554,  pi.  13,  fig.  13  et  14). 

(d)  Léon  Dufour,  Lettre  sur  le  mouvement  observé  par  M-  Behn  dans  les  pattes  des  Insectes 
Hydrocorises  {Ann.  des  sciences  nat.,  1835,  t.  IV,  p.  313). 


CHEZ    LES    INSECTES.  227 

les  ailes  quand  ces  appendices  membraneux  ne  sont  pas  des- 
séchés (1),  en  un  mot,  se  répandre  partout;  et  si,  à  l'aide  d'in- 
jections colorées,  on  étudie  les  connexions  qui  existent  entre 
les  cavités  où  la  présence  des  courants  sanguins  a  été  con- 
statée et  le  reste  de  l'économie,  il  est  facile  de  voir  que  le 
système  imgatoire  ainsi  constitué  pénètre  dans  la  profondeur 
de  tous  les  organes  et  doit  pouvoir  permettre  le  renouvellement 
rapide  du  fluide  nourricier  dans  tous  les  points  où  le  travail 
vital  rend  le  passage  de  ce  liquide  nécessaire. 

§  6.  —  Les  recherches  de  M.  Blanchard  tendent  même 
à  établir  qu'à  l'aide  de  certaines  parties  de  ce  système  lacu- 
naire, les  relations  entre  le  fluide  nourricier  et  le  fluide  res- 
pirable  sont  rendues  plus  directes  et  plus  régulières  qu'on  ne 
le  soupçonnait.  Il  a  vu  que  si  l'on  pousse  un  liquide  coloré 
soit  dans  le  vaisseau  dorsal ,  soit  dans  la  cavité  abdominale, 
non-seulement  les  diverses  lacunes  intermusculaires  et  inter- 

viridis  {a),  des  larves  d'Éphémères,  avec  ceux  de  l'organe  pulsatile  dont 

etc.  il  vient  d'être  question ,  et  ne  parais- 

II  est  probable  que  quelque  chose  sent  pas  dépendre  de  ceux  du  vaisseau 

d'analogue  existe  chez  certains  Dip-  dorsal. 

tères ,  car  Degeer  parle  de  battements  (1)  La  circulation  du  sang  dans  les 

analogues  à  ceux  d'une  artère  dans  ailes  de  l'Hémérobe  perle  a  été  très 

les  pattes  des  Ornithomyies  (6).  bien  étudiée  par  M.  Bowerbauk.  Les 

Quant  aux  courants  qui  se  voient  principauxcourantssuiventladirection 

dans  les  pattes  de  ces  divers  Insectes,  des  grandes  nervures  de  la  base  vers 

M.  Behn  pense  qu'ils  ne  sont  pas  limités  le  sommet  de  ces  organes  et  revien- 

par  des  parois  propres.  L'un  de  ces  nent  le  long  de  la  nervure  marginale  ; 

courants,situé  près  du  bord  postérieur  ils  sont  situés  dans  des  canaux  au 

de  la  jambe,  se  dirige  du  tronc  vers  centre  desquels  se  trouvent  les  troncs 

l'extrémité  du  membre  ;  l'autre ,  qui  trachéens  (c). 

marche  en  sens  inverse  ,  en  occupe  M.  Mcolet  a  étudié  le  même  phé- 

le  bord  antérieur  ;  enfin,  ils  sont  sac-  nomène  dans  les  élytres  des  Cocci- 

cadés,  et  leurs  mouvements  coïncident  nelles  {d). 

(a)  Verloren,  Op.  cit.  (Mém.  couronnés  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  XIX,  p.  82,  pi.  7,  %.  26). 

(6)  Degeer,  Mém.  pour  servir  à  l'histoire  des  Insectes,  t.  VI,  p.  287. 

(e)  Bowerbank  ,  Observ.  on  the  Circulation  of  the  Blood  and  the  Distribution  of  the  Tracheœ 
in  the  Winy  ofChrysopa  Perla  (Entomol.  Magaz.,  1837,  vol.  IV,  p.  179,  pi.  15,  fig.  1-4). 

(d)  Nicolet,  Note  sur  la  circulation  du  sang  chez  les  Coléoptères  (Ann.  des  sciences  nat.,  1847, 
3»  série,  t.  V,  p.  60). 


228  CIRCULATION    DU    SANG 

viscérales  s'en  remplissent  aussitôt ,  mais  que  les  trachées 
se  teignent  dans  toute  leur  longueur.  L'injection,  quand  elle 
est  bien  laite ,  ne  pénètre  pas  dans  l'intérieur  de  ces  tubes 
aérifères ,  mais  se  répand  en  couches  minces  dans  l'espace 
compris  entre  leurs  tuniques.  Or,  suivant  toute  probabilité  , 
le  sang  doit  pouvoir  pénétrer  là  où  pénètre  l'injection,  et  par 
conséquent  il  est  à  présumer  qu'une  portion  du  fluide  nour- 
ricier s'introduit  dans  l'épaisseur  des  parois  des  trachées,  dont 
la  tunique  externe  constituerait  un  canal  rameux  occupé  à  la 
fois  par  un  cylindre  creux  de  sang  et  un  cylindre  central  formé 
par  l'air  et  séparé  du  premier  par  la  tunique  trachéenne  in- 
terne. 

Si  cette  couche  de  sang  interposée  était  en  repos,  sa  présence 
n'influerait  d'une  manière  notable  ni  sur  la  respiration,  ni  sur 
la  circulation;  mais  s'il  se  renouvelle  rapidement,  et  s'il  y  a  là 
un  courant,  comme  le  pense  M.  Blanchard,  le  service  de  l'irri- 
gation se  trouverait  assuré  d'une  manière  bien  plus  parfaite 
qu'on  ne  le  supposait,  et  nous  aurions  là  un  nouvel  exemple  des 
ressources  que  la  Nature  peut  trouver  dans  la  simple  adaptation 
d'instruments  d'emprunt  à  des  fonctions  nouvelles  ;  car  ces 
conduits  péritrachéens,  qui  fourniraient  des  arborisations  non 
moins  touffues  ni  moins  bien  circonscrites  que  celles  résultant 
d'un  système  vasculaire  spécial,  ne  seraient  encore  que  des 
dépendances  du  système  lacunaire  général.  Du  reste,  dans 
l'état  actuel  de  la  science,  il  serait  difficile  de  se  prononcer 
quant  à  l'importance  du  rôle  que  les  espaces  péritrachéens  peu- 
vent remplir.  L'existence  de  courants  dans  ces  lacunes  tubi- 
formes  n'a  pas  encore  été  constatée,  et  nous  ne  savons  pas  bien 
comment  les  liquides  répandus  dans  la  cavité  viscérale  y  pé- 
nètrent ou  en  sortent  (1). 

(1)  Les  extraits  suivants  feront  con-  «  Souvent,  à  l'exemple  de  mes  de- 

naîtreles  observations  de  M.Blanchard  vanciers,  dit  ce  naturaliste,  j'avais 
et  les  conséquences  qu'il  en  déduit  :         examiné  par  transparence  des  larves 


CHEZ    LES    INSECTES.  229 

Quoi  qu'il  en  soit,  nous  voyons  que  chez  les  Insectes  il  y  a 
en  réalité  une  circulation  active,  bien  qu'il  ne  paraisse  y  avoir 
chez  ces  Animaux  ni  ramifications  artérielles,  ni  veines,  et.  que 


de  Névroplères  et  de  Diptères.  Comme 
eux,  je  m'étais  convaincu  de  l'existence 
du  mouvement  circulatoire,  des  mou- 
vements du  vaisseau  dorsal,  du  mou- 
vement et  de  la  direction  des  cou- 
rants dans  les  espaces  interorganiques. 
J'étais  convaincu  de  l'exactitude  de 
leurs  observations  sous  ces  divers 
rapports.  Mais  je  ne  pouvais  ra'em- 
pècher  de  soupçonner  qu'il  existât 
quelque  chose  de  plus...  » 

Il  eut  donc  recours  aux  injections 
avec  du  bleu  de  Prusse  délayé  dans 
de  l'essence  de  térébenthine,  et  en 
procédant  de  la  manière  suivante  : 

<•  Mon  premier  soin,  dit-il,  était 
d'ouvrir  l'animal  par  la  partie  supé- 
rieure et  de  dégager  le  vaisseau  dor- 
sal dans  toute  sa  longueur.  Celte  pré- 
paration achevée,  je  pratiquais  une 
ouverture  dans  l'une  des  chambres 
postérieures,  et  tout  aussitôt  j'y  faisais 
pénétrer  l'injection...  En  disséquant 
la  tète  d'individus  ainsi  injectés,  en 
mettant  à  nu  les  ganglions  cérébroïdes, 
je  distinguai  sans  peine  la  portion  aor- 
lique  du  vaisseau  dorsal  passant  sous 
ces  centres  nerveux,  s'élargissant  un 
peu  et  fournissant  quelques  branches 
fort  courtes.  M.  Newport  avait  déjà 
vu  cette  terminaison  chez  la  Vanesse 
de  l'ortie.  Mais,  sous  le  poids  de  l'in- 
jection, l'extrémité  du  vaisseau  et  les 
petites  branches  qui  en  dérivent  se  di- 
lalent  considérablement.  On  voit  de 
la  manière  la  plus  distincte  les  parois 
vasculaires  devenir  de  plus  en  plus 
minces,  ou  de  moins  en  moins  résis- 
tâmes. Ces  branches  s'évasent  alors 
vers  leur  extrémité  et  retiennent  dif- 


ficilement le  liquide  injecté.  Enfin,  on 
voit  que  le  vaisseau  dorsal  se  termine 
dans  la  portion  supérieure  de  la  tête, 
que  là  ses  parois  finissent.  Cette  ex- 
périence répétée  un  grand  nombre 
de  fois  sur  les  espèces  les  plus  diffé- 
rentes, il  n'y  avait  plus  moyen  d'en 
douter:  Le  vaisseau  dorsal  ne  pré- 
sente point  de  branches  sur  son  trajet , 
et  ses  divisions  antérieures  ne  sont 
en  réalité  que  des  indices  de  bran- 
ches; elles  ne  se  prolongent  pas  même 
jusqu'à  la  partie  tout  à  fait  antérieure 
de  la  tète.  Continuant  à  injecter  des 
Insectes  par  leur  vaisseau  dorsal,  je. 
m'attachai  à  y  faire  passer  une  assez 
grande  quanlité  de  liquide.  L'injec- 
tion se  répandait  naturellement  dans 
la  cavité  de  la  tête,  puis  dans  celles  du 
thorax.  » 

Mais  ce  n'était  pas  tout  :  ayant 
placé  la  préparation  dans  l'eau,  l'in- 
jection répandue  dans  ces  lacunes  s'en 
échappa ,  et  ces  cavités  se  vidèrent  : 
mais  le  système  trachéen  resta  coloré 
par  le  liquide  injecté.  M.  Blanchard 
acquit  la  conviction  que  cette  colora- 
tion n'était  due  ni  à  la  teinture  de  la 
surface  externe  des  parois  de  ces  tubes 
aérifères,  nia  l'introduction  de  l'injec- 
tion dans  l'intérieur  de  ceux-ci,  mais  à 
sa  présence  entre  les  deux  tuniques 
membraneuses  de  ces  conduits,  et  cela 
jusqu'aux  extrémités  les  plus  déliées. 

»  L'injection,  ajoute  M.  Blanchard, 
a  suivi  ici  le  trajet  que  suit  le  fluide 
nourricier.  Traversant  le  vaisseau 
dorsal,  elle  s'est  répandue  dans  toutes 
les  lacunes  inlerorganiques.  Parvenue 
dans  les  lacunes  avoisinant   l'origine 


230  CIRCULATION    DU    SANG 

le  sang ,  mis  en  mouvement  par  les  contractions  du  cœur  et 
porté  dans  la  tête  par  la  portion  aortique  du  vaisseau  dorsal, 
ne  trouve,  pour  se  distribuer  dans  les  diverses  parties  de  l'éco- 


des  tubes  respiratoires,  elle  s'est  in- 
troduite entre  les  deux  tuniques  tra- 
chéennes (a).  » 

Il  obtint  le  même  résultat  en  pous- 
sant l'injection  directement  dans  les 
lacunes  interorganiques,  dans  la  cavité 
abdominale,  par  exemple. 

Enfin,  M.  Blanchard  donna,  dans 
la  grande  édition  du  Règne  animal 
de  Cuvier,  plusieurs  belles  figures 
représentant  le  système  trachéen  co- 
loré de  la  sorte  (b). 

Ces  résultats  furent  vivement  com- 
battus par  divers  naturalistes.  Ainsi 
M.  Léon  Dufour  les  repousse  :  d'abord 
parce  que,  suivant  cet  auteur,  il  n'y 
aurait  pas  de  circulation  chez  les  In- 
sectes ;  en  second  lieu  ,  parce  que  le 
vaisseau  dorsal  ne  lui  paraît  pas  mé- 
riter ce  nom  ;  et  troisièmement,  parce 
qu'en  injectant  des  liquides  colorés 
dans  l'abdomen  de  divers  Insectes ,  il 
n'a  pas  vu  les  trachées  se  colorer  (c). 

M.  Joly  partage  l'opinion  de  M.  Léon 
Dufour,  et  conclut  de  ses  recherches 
à  ce  sujet,  d'abord  que  l'espace  inter- 
membranulaire  dans  lequel  M.  Blan- 
chard pense  que  le  sang,  ainsi  que 
l'injection,  pénètre,  n'existerait  pas,  et 


que  les  deux  membranes  qui  consti- 
tuent les  gros  troncs  trachéens  sont 
contiguës  l'une  à  l'autre;  secondement, 
que  c'est  dans  l'intérieur  même  des 
trachées,  c'est-à-dire  dans  le  canal 
aérifère  lui-même,  que  les  injections 
de  M.  Blanchard  auraient  pénétré  par 
suite  de  la  déchirure  de  ces  vais- 
seaux (d). 

M.  Dujardin  nie  également  l'exis- 
tence d'un  espace  libre  entre  les  tu- 
niques des  trachées,  et  s'est  élevé  aussi 
contre  les  conclusions  que  M.  Blan- 
chard avait  tirées  de  ses  injections  au 
sujetd'une  circulation  péritrachéenne. 
Il  pense  que  la  couche  externe  de  ces 
tubes  est  formée  par  une  substance 
sarcodique  que  sécréterait  la  tunique 
interne  ou  épidermique,  dont  le  fil  en 
spirale  ne  serait  qu'un  simple  épais- 
sissement,  et  qui  serait  en  contact 
direct  avec  cette  tunique  interne  (e). 

M.  Nicolet  a  fait  aussi  quelques  ob- 
servations qui  ne  sont  pas  favorables 
à  l'existence  d'une  circulation  péri- 
trachéenne, et  ajoute  : 

«  En  présence  de  lacunes  toujours 
pleines  de  sang,  et  dans  lesquelles  il 
se  meut  sans  cesse ,  l'infiltration  de 


(a)  Blanchard,  Sur  la  circulation  dans  les  Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1848,  3*  série, 
t.  IX,  p.  372  à  376). 

(b)  Atlas,  Insectes,  pi.  76,  fig,  1  et  2  (  Sauterelle  verte  );  pi.  87,  fig.  1  (Pentatoma  grisea)  ; 
pi.  100,  fig.  1  et  2  (.■Eshna  forcipata);  pi.  107,  fig-.  1  (Abeille);  pi.  160,  fig.  1  (Musca  vomi- 
toria). 

(c)  Léon  Dufour,  Sur  la  circulation  des  Insectes  (Actes  de  la  Société  Linhéenne  de  Bordeaux, 
1849,  t.  XVI,  et  Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  28,  101  et  163). 

(d)  Joly,  Mém.  sur  l'existence  supposée  d'une  circulation  péritrachéenne  chez  les  Insectes 
(Mém.  de  l'Acad.  des  sciences  de  Toulouse,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  1849,  3"  série,  t.  XII, 
p.  306). 

—  Joly,  M.  Blanchard,  et  Circulation  péritrachéenne  des  Insectes.  Réfutation  de  cette  théorie 
antiphysiologique  (Gaz.  méd.  de  Toulouse,  février  1852). 

(e)  Dujardin,  Résumé  d'un  Mémoire  sur  les  trachées  des  Animaux  articulés  et  sur' la  prétendue 
circulation  péritrachéenne  (Comptes  rendus  de  VAcad.  des  sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  674). 


CHEZ    LES    INSECTES.  231 

nomie,  et  pour  revenir  ensuite  au  cœur,  que  les  rigoles  ou 
lacunes  ménagées  entre  les  divers  organes  ou  entre  les  mem- 
branes et  les  fibres  dont  ces  organes  se  composent. 


ce  fluide  entre  les  membranes  tra- 
chéennes paraît  non-seulement  super- 
flue, mais  encore  inutile  et  plutôt  con- 
traire que  favorable  au  phénomène 
de  l'oxydation  ;  car  si  le  but  de  la  na- 
ture, en  répandant  dans  toute  l'éten- 
due du  système  organique  des  Insectes 
une  innombrable  quantité  de  conduits 
aérifères,  a  été  de  mettre  en  prompt 
contact  avec  l'air  la  plus  grande 
masse  possible  de  fluide  nourricier, 
l'exiguïté  de  l'espace  compris  entre 
les  membranes  trachéennes,  exiguïté 
qui  ne  peut  être  mise  en  parallèle 
avec  l'étendue  des  lacunes,  ne  permet 
pas  d'y  admettre  l'entrée  d'une  suffi- 
sante quantité  de  sang  pour  satisfaire 
à  la  rapide  combustion  d'oxygène  que 
la  plupart  de  ces  Animaux  doivent 
nécessairement  exiger  (a).  » 

Duvernoy  regarde  l'existence  d'un 
interstice  entre  les  deux  membranes 
trachéennes  comme  étant  incontes- 
table ;  mais  il  ne  croit  pas  que  le  pas- 
sage du  sang  dans  cette  lacune  circu- 
latoire soit  démontré  ,  et  à  plus  forte 
raison  la  circulation  de  ce  fluide  dans 
l'épaisseur  des  parois  des  vaisseaux 
aérifères  (6). 


M.  de  Filippi  a  fait  des  expériences 
à  ce  sujet,  et  tout  en  confirmant  plei- 
nement l'existence  de  l'espace  en 
question,  il  ne  pense  pas  que  le  sang 
y  pénètre  (c). 

M.  Agassiz  reprit  à  son  tour  l'exa- 
men de  cette  question,  et  arriva  aux 
mêmes  conclusions  que  M.  Blanchard. 
M.  Bassi  également  {d). 

Enfin,  M.  Blanchard  a  invoqué  ,  à 
l'appui  de  son  opinion  touchant  les 
usages  des  lacunes  intermembranu- 
laires  des  trachées,  les  résultats  des 
expériences  dans  lesquelles  MM.  Ales- 
sandrini  ,  de  Filippi ,  Bassi  et  lui- 
même,  avaient  vu  ces  tubes  se  colorer 
sous  l'influence  de  l'injection  de  cer- 
taines matières  colorantes  dans  l'es- 
tomac (e). 

M.  Blanchard  a  trouvé  que  l'indigo 
et  la  garance  étant  absorbés  de  la 
sorte,  colorent  le  sang,  et  c'est  à  la 
présence  d'une  couche  mince  de  ce 
sang  coloré  qu'il  attribue  la  teinte 
bleue  ou  rose  constatée  dans  les  pa- 
rois des  trachées  (f). 

M.  Joly  a  répété  ces  expériences, 
mais  n'est  arrivé  qu'à  des  résultats 
négatifs,  et  il  en  conclut  que  le  régime 


(a)  Nicolet,  Sur  la  circulation  du  sang  chez  les  Insectes  (Comptes  rendus  de  l'Académie  des 
sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  541). 

(b)  Voyez  les  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences,  1849,  t.  XXVIII,  p.  34. 

(c)  De  Filippi,  Alcune  osservaxioni  anatomico  fisiologiche  sulV  Insecli  in  générale,  ed  in  parti- 
cularesul  Bombice  del  gelso,  p.  4  et  suiv.  (extrait  du  tome  V  des  Annales  de  l'Académie  d'agri- 
culture de  Turin,  1851). 

(d)  Agassiz,  Note  sur  la  circulation  des  fluides  chez  les  Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1851 , 
3«  série,  t.  XV,  p.  358). 

—  Bassi,  Rapport  fait  au  congrès  de  Venise  sur  le  passage  des  substances  introduites  dans  le 
système  trachéen  des  Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  3°  série,  t.  XV,  p.  370). 

(e)  Bassi,  Rapport,  etc.  (Ann.  des  sciences  nat.,  3*  série,  t.  XV,  p.  362). 

(f)  Blanchard  ,  Nouvelles  observations  sur  la  circulation  du  sang  et  la  nutrition  chez  les 
Insectes  (Ann.  des  sciences  nat.,  3e  série,  t.  XV,  p.  371). 


232  CIRCULATION    DU    SANG. 

Résumé         §  7.  —  Nous  voilà  donc  ramenés  à  un  état  de  choses  fort 
i.i  circulation  analogue  à  ce  que  nous  avions  rencontré  dans  les  rangs  infé- 
rieurs de  l'embranchement  des  Malacozoaires. 

Nous  voyons  qu'ici  encore  l'irrigation  sanguine  s'effectue 
essentiellement  à  l'aide,  non  pas  d'un  système  de  tubes  flexi- 
bles et  rameux  disposés  en  manière  de  cercle,  mais  au  moyen 
de  canaux  irréguliers  dont  la  forme  est  déterminée  par  celle 
des  organes  circon voisins. 

Nous  avons  vu  que  chez  les  divers  Mollusques,  ainsi  que 
chez  les  Crustacés  et  les  Arachnides,  des  vaisseaux  propre- 
ment dits  se  substituent  à  ces  canaux  dans  une  certaine  éten- 
due de  l'appareil  circulatoire,  mais  qu'une  portion  plus  ou 
moins  considérable  de  cet  appareil  se  compose  toujours  de  ces 
espaces  interorganiques  auxquels  j'ai  donné  le  nom  de  lacunes. 

Nous  pouvons  donc  maintenant  mieux  apprécier  que  nous 
n'aurions  pu  le  faire  en  abordant  l'histoire  de  la  circulation, 
les  objections  faites  par  quelques  anatomistes  à  la  théorie 
dont  j'ai  si  souvent  fait  usage,  aujourd'hui  et  dans  les  leçons 
précédentes ,  pour  coordonner  et  expliquer  les  modifications 
diverses  de  l'appareil  irrigatoire  chez  les  Animaux  Invertébrés. 

Je  ne  m'arrêterai  pas  à  discuter  l'opinion  de  ceux  qui  disent  : 
La  circulation  ne  peut  se  faire  qu'à  l'aide  d'un  appareil  circu- 
latoire; l'appareil  circulatoire  ne  peut  être  constitué  que  par 
un  cœur,  des  artères  et  des  veines  :  par  conséquent,  partout  où 

de  la  garance  ou  de  l'indigo  n'exerce  sang  coloré  s'est  interposé  entre  leurs 

aucune  action  sur  les  trachées.  Enfin  tuniques  (a). 

il  pense  que  lors  même  que  ces  or-  J'ajouterai  que  M.  Blanchard  a  ré- 
ganes  se  coloreraient,  cela  s'explique-  pondu  à  toutes  ces  objections  par  la 
rait  par  la  teinture  de  la  surface  de  publication  de  ses  observations  sili- 
ces tubes  qui  sont  baignés  par  le  sang,  des  faits  du  même  ordre  chez  les  Ara- 
et  ne  prouverait  pas  du  tout  que  le  cbnides  à  respiration  trachéenne  [b). 

(a)  .loly,  Nouvelles  expériences  tendant  à  réfuter  la  prétendue  circulation  péritrachéenne  des 
Insectes  (Mém.  de  l'Acad.  des  sciences  de  Toulouse,  1852). 

(6)  Blanchard ,  De  l'appareil  circulatoire,  etc.,  dans  les  Arachnides  (Ann.*des  sciences  nat., 
1840,  3"  série,  1.  XII,  p.  31$))'. 


RÔLE  DES  LACUNES  INTERORGANIQUES.         233 

il  y  a  circulation,  il  faut  que  ces  vaisseaux  sanguins  existent. 
Il  y  a  là  ce  que  les  logiciens  appellent  pétition  de  principe,  et 
le  vice  d'un  pareil  raisonnement  est  évident.  Il  me  semblerait 
également  superflu  d'examiner  l'argument  de  ceux  qui  disent  : 
La  circulation  ne  peut  s'effectuer  qu'à  l'aide  de  vaisseaux  san- 
guins; les  Insectes  n'ont  pas  de  vaisseaux  sanguins  :  donc  ils 
n'ont  pas  de  circulation. 

Je  passe  sur  les  arguments  qui,  réduits  à  leur  plus  simple  ex- 
pression et  mis  à  nu,  ne  consistent  que  dans  un  raisonnement  de 
ce  genre,  et  j'arrive  tout  de  suite  à  la  seule  difficulté  sérieuse  (1). 


(1)  Dans  les  discussions  auxquelles 
la  question  de  la  circulation  lacunaire 
ou  semi-lacunaire  chez  les  Animaux 
inférieurs  a  donné  lieu  depuis  une 
dizaine  d'années,  soit  directement, 
soit  d'une  manière  indirecte,  on  a  en 
général  mêlé  à  ce  qui  touche  au  mode 
de  constitution  de  l'appareil  sangui- 
fère  des  Mollusques  beaucoup  de  cho- 
ses qui  y  sont  complètement  étran- 
gères ou  qui  n'influent  en  rien  sur  les 
conclusions  générales  auxquelles  je 
suis  arrivé.  Ainsi,  divers  écrivains  ont 
supposé  que  cette  interprétation  des 
faits  se  confondait  avec  la  théorie  dite 
du  phlébentérisme  ,  dont  j'aurai  à 
parler  dans  une  autre  partie  de  ce 
cours.  Or,  ce  sont  des  choses  parfaite- 
ment distinctes.  Chez  les  Animaux  les 
plus  dégradés,  l'intestin  peut  se  rami- 
fier et  tenir  lieu  d'un  système  irriga- 
loire,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  chez 
les  Acalèphes  et  les  Coralliaires  ;  une 
disposition  analogue  peut  se  rencon- 
trer chez  des  Animaux  plus  élevés  en 
organisation,  où  la  division  du  travail 
est  devenue  complète  entre  l'appareil 
digestif  et  le  système  sanguifère.  Elle 
peut  même  y  venir  en  aide  à  la  dis- 
tribution des  matières  nutritives  dans 


les  diverses  parties  de  l'organisme  ; 
mais  elle  n'est  pas  liée  alors  d'une 
manière  nécessaire  à  tel  ou  tel  mode 
de  constitution  de  l'appareil  circula- 
toire, et  l'état  lacunaire  d'une  portion 
plus  ou  moins  considérable  du  trajet 
veineux  n'est  en  aucune  façon  subor- 
donné à  cette  forme  rameuse  et  vas- 
culaire  des  prolongements  de  l'intes- 
tin. Le  mot  phlébentéré ,  appliqué  par 
M.  de  Quatrefages  à  des  Mollusques 
chez  lesquels  une  portion  de  l'appa- 
reil se  ramifie  à  la  manière  des  vais- 
seaux sanguins ,  ne  signifiait  pas  du 
tout  que  ces  tubes  rameux  représen- 
taient ou  tenaient  lieu  de  veines,  mais 
seulement  qu'ils  avaient  l'apparence 
de  vaisseaux. 

Quelques  écrivains,  je  le  répète,  con- 
fondent entre  elles  toutes  ces  choses, 
et,  pour  combattre  les  unes,  s'attaquent 
souvent  aux  autres,  de  façon  que  la 
plus  grande  confusion  a  été  introduite 
dans  une  discussion  qui  aurait  pu  être 
très  simple  et  parfaitement  intelligi- 
ble pour  tout  le  monde.  C'est  par  suite 
de  mélange  de  questions  non  con- 
nexes dans  un  travail  de  M.  Robin 
sur  le  phlébentérisme,  qu'il  me  serait 
difficile,  sans  consacrer  a  ce  sujet  trop 


234  CIRCULATION    DU    SANG. 

M.  Audouin  et  moi,  en  faisant  connaître,  il  y  a  trente  ans,  les 
cavités  veineuses  qui  existent  à  la  base  des  branchies  chez  les 
Crustacés  supérieurs,  et  qui  se  continuent  avec  les  espaces 
ménagés  entre  les  divers  viscères ,  avions  signalé  l'existence 
d'une  couche  mince  de  tissu  conjonctif  qui  en  tapisse  les 
parois,  et  qui  nous  a  paru  être  de  même  nature  que  le  tissu  dé- 
signé sous  le  nom  de  cellulaire  dans  la  plupart  des  ouvrages 
sur  l'anatoinie  humaine.  Une  couche  membraniforme  de  même 
nature,  ou  quelque  chose  d'analogue,  tapisse  aussi  la  cavité 
abdominale  des  Mollusques  où  le  sang  s'accumule,  et  l'on  en 
trouve  des  traces  plus  ou  moins  évidentes  dans  tous  les  gros 
canaux  qui  livrent  passage  à  ce  liquide  et  qui  sont  limités  d'ail- 
leurs par  les  muscles,  les  téguments,  ou  d'autres  organes  cir- 
convoisins.  Quelques  anatomistes  préfèrent  donc  voir  dans 
ces  cavités,  non  pas  des  lacunes  ou  espaces  interorganiques 
employés  à  constituer  ou  à  compléter  le  système  irrigatoire , 
mais  des  vaisseaux  proprement  dits,  des  veines  ou  des  artères 
qui  se  développeraient  d'une  manière  excessive,  et  qui,  au  lieu 
d'offrir  la  forme  de  tubes  membraneux,  s'étendraient  de  façon 
à  se  mouler  sur  les  parties  voisines  et  à  les  envelopper  (1). 

de  place,  d'examiner  ici  la  suite  de  trouve  séparé  de  leur  tissu  par  une 
raisonnements  à  l'aide  desquels  ce  substance  homogène  et  transparente 
jeune  analomiste  arrive  à  conclure  (6).  Mais  ,  dirait-il  que  le  cœur  ne 
que  l'idée  d'une  dégradation  de  l'ap-  baigne  pas  dans  la  sérosité  chez 
pareil  circulatoire  est  une  idée  fausse,  un  malade  affecté  d'hydropéricardUe, 
et  que  ce  système  n'est  incomplet  parce  qu'un  feuillet  du  péricarde  re- 
chez  aucun  Animal  (a).  vêt  la  surface  du  tissu  charnu  de  cet 
(1)  Le  savant  professeur  de  physio-  organe,  ou  que  la  sérosité  abdominale 
logie  de  la  Faculté  de  médecine  de  ne  touche  ni  l'estomac,  ni  le  foie,  ni 
Paris  déclare  que  l'idée  d'une  circu-  les  interstices,  parce  qu'une  lame  pé- 
lation  lacunaire  chez  les  Mollusques  ritonéale  recouvre  tous  ces  viscères? 
est  une  idée  fausse,  parce  que  le  sang  Or,  chez  les  Mollusques,  le  sang  oc- 
ne  baigne  pas  à  nu  les  organes  et  se  cupe  la  cavité  du  péritoine  où  ces 

(a)  Robin,  Rapport  sur  les  communications  de  M.  Soulexjel,  relatives  à  la  question  désignée  sous 
le  nom  de  Phlébentérisme,  p.  131  (Mém.  de  la  Soc.  de  biologie,  1851,  t.  III). 

(b)  Bérard,  Cours  de  physiologie,  t.  III,  p.  399, 


RÔLE   DES    LACUNES   INTERORGANIQUES.  235 

A  mesure  que  l'on  descendrait  des  Animaux  supérieurs  vers  ceux 
dont  la  structure  est  de  moins  en  moins  parfaite,  on  trouverait 
donc  un  système  veineux  qui  serait  de  plus  en  plus  développé,  et 
qui ,  tout  en  conservant  son  caractère  primitif,  logerait  peu  à 
peu  dans  son  intérieur  les  viscères  et  tous  les  autres  organes. 
Ce  serait  une  veine  transformée  en  un  vaste  sinus  qui  tiendrait 
lieu  du  sac  péritonéal  chez  les  Poulpes  ,  les  Aplysies  et  les 
autres  Mollusques  où  les  viscères  baignent  dans  le  sang,  et  ce 
serait  un  vaisseau  développé  de  la  même  manière,  de  façon  à 
tapisser  toutes  les  cavités  interorganiques  de  l'Insecte ,  qui 
constituerait  le  système  irrigatoire  de  ces  Animaux.  C'est  seule- 
ment à  la  condition  d'admettre  ces  hypothèses  qu'on  peut  dire, 
avec  un  des  jeunes  analomistes  de  l'École  de  médecine ,  que 


organes  sont  suspendus,  exactement 
comme  la  sérosité  occupe  cette  grande 
lacune  périgastrique  chez  l'Homme. 
La  même  thèse  a  été  longuement  sou- 
tenue par  M.  Robin  dans  un  rapport 
sur  les  discussions  entre  M.  Quatre  - 
fages  et  Souleyet.  M.  Robin  déclare 
aussi  que  le  mot  dégradation  doit  être 
rayé  de  la  science  (a). 

L'expression  d'appareil  circula- 
toire incomplet  dont  j'ai  souvent  fait 
usage  pour  désigner  un  système  irri- 
gatoire dans  lequel  une  portion  du 
cercle  sanguifère  me  semble  être  con- 
stituée par  des  réservoirs  ou  des 
canaux  empruntés  aux  vides  inter- 
organiques ,  et  non  pas  des  tubes  ou 
vaisseaux  proprement  dits,  a  été 
aussi  l'objet  de  critiques  fort  vives. 
On  m'a  objecté  que  ces  cavités  étant 
indiquées  par    une  sorte  de  texture 


membraniforme,  le  cercle  circulatoire 
est  un  système  de  cavités  closes,  et, 
par  conséquent,  un  système  com- 
plet (b).  Mais,  du  moment  que  le  sys- 
tème cavitaire  général  est  devenu  dis- 
tinct de  la  chambre  digestive,  ce  sys- 
tème est  en  général  fermé,  et  si  on  le 
considère  comme  un  appareil  hydrau- 
lique d'irrigation ,  il  sera  cependant 
d'autant  plus  incomplet  qu'il  offrira 
d'une  manière  plus  limitée  le  carac- 
tère tubulaire.  Du  reste,  la  clôture  du 
système  irrigatoire  ne  paraît  pas  être 
une  disposition  aussi  constante  qu'on 
le  supposait  jadis  ,  et  nous  avons  vu 
que  chez  beaucoup  de  Mollusques  où 
une  portion  de  l'appareil  circulatoire 
est  composée  de  vaisseaux  bien  con- 
stitués, il  existe  des  voies  de  commu- 
nication directes  entre  les  réservoirs 
sanguifères  et  l'extérieur  (c). 


(a)  Robin,  Rapport  sur  la  question  désignée  sous  le  nom  de  Phlébentérisme  (Mém.  de  la  Soc  de 
biologie,  1851,  t.  Ht,  p.  131). 

(b)  Voyez  Bérard,  Cours  de  physiologie,  t.  III,  p.  599. 

(c)  Voyez  ci-dessus,  pages  100,  126,  etc. 


236  CIRCULATION    DU    SANG. 

chez  aucun  Animal  ce  système  circulatoire  n'est  incomplet,  et 
que  le  mot  lacune ,  employé  pour  désigner  une  portion  de  ce 
système,  doit  disparaître  de  la  science  anatomique. 

Mais  voyez  où  cela  conduirait.  La  chambre  viscérale  serait 
la  cavité  de  la  poche  péritonéale  quand  le  sang  n'y  pénètre  pas, 
et  serait  constituée  par  une  veine  transformée  en  sinus  quand  ce 
liquide  y  afflue.  A  mesure  que  la  circulation  devient  plus  obs- 
cure et  plus  incomplète,  le  système  des  vaisseaux  sanguins  se 
compliquerait  et  se  développerait  davantage,  et  chez  les  Mollus- 
coïdes  inférieurs  il  constituerait  la  totalité  du  système  cavitaire 
du  corps.  Enfin,  si  nous  poussons  cette  hypothèse  jusqu'à 
sa  dernière  limite  pour  en  mieux  faire  ressortir  l'inadmissi- 
bilité, nous  verrons  que  la  veine,  devenue  sinus  abdominal  ou 
chambre  viscérale,  deviendrait  aussi  une  cavité  digestive  chez 
les  Polypes  et  les  Acalèphes. 

Il  suffit,  je  crois,  de  dégager  ces  idées  de  tous  les  acces- 
soires dont  on  les  a  entourées  et  d'en  présenter  l'ensemble 
pour  les  faire  rejeter.  Les  personnes  qui  ne  se  sont  familiarisées 
qu'avec  l'anatomie  de  l'Homme  ou  des  Animaux  dont  la  struc- 
ture se  rapproche  le  plus  de  la  nôtre,  ne  peuvent  que  difficile- 
ment se  résoudre  à  croire  que  dans  d'autres  groupes  zoolo- 
giques les  veines  ou  les  artères  manquent  et  sont  remplacées 
tant  bien  que  mal  par  les  méats  ou  vides  que  les  divers  solides 
de  l'organisme  laissent  entre  eux  ;  mais  les  naturalistes  qui  étu- 
dient les  phénomènes  de  la  vie  chez  les  Animaux  marins  des 
classes  inférieures  ne  douteront  pas  de  l'existence  de  ces  em- 
prunts physiologiques. 

Quant  à  l'argument  tiré  de  l'existence  d'une  couche  mem- 
braniforme  de  tissu  conjonctif  sur  les  parois  de  ces  cavités,  je 
ne  saurais  y  voir  un  motif  pour  considérer  ces  espaces  comme 
des  veines  dilatées  plutôt  que  des  lacunes  interorganiques,  car 
un  tissu  analogue  se  rencontre  partout  dans  les  vides  laissés 
par  les  organes,  et  des  couches  membraniformes  semblables  se 


RÔLE    DES    LAGUNES    liNTERORGANIQUES.  237 

développent  partout  dans  ces  vides  lorsqu'un  liquide  excitant 
autre  que  le  sang  vient  à  s'y  accumuler  (1). 

La  manière  dont  j'interprète  et  dont  je  groupe  les  laits  que 
nous  offre  l'étude  du  système  irrigatoire  chez  les  Animaux  inté- 
rieurs me  parait  donc  être  la  plus  simple  et  la  plus  naturelle. 


(1)  M.  Owen  considère  Ja  couche 
plus  ou  moins  membraniforme  dont 
les  sinus  veineux  sont  revêtus  comme 
étant  l'analogue  de  la  tunique  interne 
des  veines  proprement  dites ,  et ,  en 
partant  de  cette  idée ,  il  arrive  aux 
conclusions  suivantes  : 

«  Bien  que  dans  les  grands  vides  de 
la  chambre  abdominale  situés  entre 
les  viscères  et  les  muscles,  la  tunique 
des  sinus  veineux  soit  disposée  comme 
un  péritoine  ;  qu'elle  paraisse  remplir 
aussi  les  ['onctions  d'un  péritoine  ;  que 
le  fluide  contenu  dans  son  intérieur 
ait,  indépendamment  de  ses  usages 
les  plus  importants,  à  tenir  lieu  de 
sérosité  péritonéale,  et  qu'en  outre 
l'anatomiste  pourrait,  à  raison  de  cette 
similitude  de  fonctions,  être  autorisé 
à  appeler  les  cavités  des  sinus,  des 
lacunes  inter viscérales,  et  les  parois 
de  ces  sinus  un  péritoine  ;  cependant, 
en  se  guidant  par  des  considérations 
d'homologie  plutôt  que  par  l'analogie, 
il  devra  plutôt  les  nommer  sinus  vei- 
neux abdominal  et  tunique  veineuse. 
Du  reste,  comme  question  de  fait,  il 
n'y  a  aucune  différence  réelle  ou  es- 
sentielle entre  cela  et  un  système  clos 
d'artères  et  de  veines,  mais  seulement 
un  état  morphologique  qui  s'éloigne 
du  caractère   typique  des  organes  de 


circulation  ;  qui,  à  la  vérité,  s'en  éloi- 
gne à  l'extrême,  mais  qui  n'égarera 
que  difficilement  le  zootomiste  qui 
serait  préparé  a  des  faits  de  cet  ordre 
par  les  découvertes  de  Hunter,  telles 
qu'on  les  voit  par  les  descriptions  et 
les  figures  de  ses  préparations  rela- 
tives au  système  veineux  dans  la 
classe  des  Tnsectes  et  des  Crusta- 
cés (a).  » 

Pour  mieux  fixer  les  idées  à  ce  sujet, 
M.  Owen  cite  ensuite  quelques  pas- 
sages tirés  des  manuscrits  de  Hunter, 
mis  au  jour  par  ses  soins  quelques 
années  après  la  publication  du  travail 
fait  sur  la  circulation  chez  les  Crusta- 
cés par  M.  Audouin  et  moi.  On  y  lit  : 

«  Les  veines  des  Insectes  paraissent 
être  simplement  la  membrane  cellu- 
laire; mais  ce  sont  des  canaux  régu- 
lièrement formés,  quoique  ni  aussi 
distinctement  cylindriques  que  chez 
les  Quadrupèdes,  etc.,  ni  se  ramifiant 
avec  la  même  régularité.  Elles  parais- 
sent être  ou  remplir  les  interstices 
situés  entre  les  flocons  de  graisse,  les 
cellules  aériennes,  les  muscles,  etc., 
et,  par  conséquent,  on  pourrait,  jus- 
qu'à un  certain  point,  les  appeler  la 
membrane  cellulaire  de  ces  diverses 
parties  (6).  » 

J'ajouterai  que,  dans  le  même  ma- 


(a)  Owen,  On  the  Anatomy  of  the   Terebratula  (  Davidson's  British  fossil  Brach'wpoda,  vol.  I, 
p.  16,  Palœontogr.  Soc.,  1853). 

(b)  Hunterian  MS.  Catalogue  (Descript.  and  illustn  Catal.  of  the  Physlological  Séries  of  Comp. 
Anat.  coiitained  in  the  Muséum  of  the  P..  Collège  of  Surgeons  m  London,  1834,  vol.  II,  p.  31). 


238  CIRCULATION    DU    SANG. 

La  théorie  que  j'ai  exposée  nous  a  permis  de  lier  entre  eux  tous 
ces  faits,  et,  souvent,  de  les  prévoir.  Malgré  les  objections  qui 
y  ont  été  faites  et  qui  roulent  sur  les  mots  plutôt  que  sur  les 
choses,  je  continuerai  donc  à  m'en  servir.  Mais,  tout  en  pen- 
sant que  c'est  en  grande  partie  par  l'adaptation  de  olus  en 
plus  complète  du  système  lacunaire  au  service  de  l'irrigation 
nutritive  que  le  système  circulatoire  se  constitue  d'abord  et  se 
perfectionne  ensuite  chez  les  Mollusques  et  les  Animaux  arti- 
culés, je  suis  loin  de  croire  que ,  dans  tous  les  cas,  la  Nature 
fasse  usage  des  mêmes  moyens  pour  effectuer  la  production 
des  conduits  sanguifères ,  et  ici ,  de  même  que  pour  la  respi- 
ration ,  dont  l'étude  nous  a  déjà  occupés ,  nous  verrons  que 
dans  d'autres  circonstances  elle  ne  procède  point  par  voie  d'em- 
prunt, et  a  recours,  de  prime  abord,  à  des  créations  organiques 
spéciales.  Les  Animaux  dont  nous  aurons  à  nous  occuper  dans 
la  prochaine  Leçon  nous  en  fourniront  des  exemples. 

nuscrit,  Hunter  parle  d'un  Ver  à  soie  jecte,  on  trouve  la  matière  à  injection 
qui  est  injecté  et  qui  montre  «  les  disposée  principalement  en  grandes 
grandes  cavités  qui  tiennent  lieu  de  masses  (b).  » 
veines,  et  dans  lesquelles  les  tubes  J'ajouterai  que  pour  avoir  des  no- 
glandulaires  filiformes  flottent  et  s'im-  tions  exactes  sur  les  cavités  veineuses 
bibent  des  matériaux  pour  leurs  sécré-  ainsi  décrites  par  Hunter*  il  suffit  de 
lions  respectives  (a).  »  jeter   les  yeux  sur  les  planches  où 

Au  sujet  des  Crustacés ,  M.  Owen  ce  grand  anatomiste  les  figure  chez  le 

cite  aussi  le  passage  suivant  :  Homard,  et  où  l'injection  est  repré- 

«  Les  veines*  dans  cette  classe  d'A-  sentée  remplissant  par  grandes  masses 

nimaux,  de  même  que  chez  les   in-  irrégulières  toutes  les  parties  de  la 

sectes  ailés,   ont    principalement  la  cavité  viscérale  et  de  ses  annexes, 

l'orme  de  grandes  cellules  irrégulières,  Quanta  la  nature  du  tissu  qui  ta - 

comme  si  le  tissu  conjonctif  ou  mem-  pisse  les  lacunes  sanguifères  chez  lés 

brane  cellulaire  de  l'animal    renfer-  Animaux  invertébrés,  je  renverrai  aux 

niait   le  sang ,  et,  lorsqu'on  les  in-  observations  de  M.  Leydig  (c). 

(a)  Catalogue  (loc.  cit.,  p.  30).  • 

(b)  Loc.  cit.,  p.  138. 

(c)  Leydig,  Zum  feinem  Bau  der  Arthropoden  (Milliers  Archiv,  485S,  p.  455). 


VINGT -CINQUIÈME  LEÇON. 

Delà  circulation  dans  le  sous-embranchement  des  Vers.  —  Mode  de  constitution  des 
vaisseaux  propres  de  ce  système.  —  Disposition  de  ces  vaisseaux  chez  les  Turbel- 
lariés  et  les  Trématodes.  —  Appareil  circulatoire  des  Annélides.  —  Vaisseaux 
rudimentaires  des  Helminthes  et  des  Rotateurs.  —  De  l'appareil  circulatoire  dans 
la  classe  des  Échinodermes. 

§  1.  —  Dans  la  grande  division  des  Vers,  comprenant  les     système 

vasculaire 

Helminthes ,  les  Turbellaries  ,  les  Annélides  et  quelques  autres  indépendant. 
Animaux  inférieurs ,  la  cavité  générale  du  corps  est  occupée 
par  un  liquide  qui  ressemble  au  sang  des  divers  Invertébrés 
dont  l'étude  vient  de  nous  occuper  ;  mais  d'ordinaire  il  existe 
aussi  chez  ces  Entomozoaires  un  autre  fluide  qui,  par  ses  pro- 
priétés physiques,  diffère  beaucoup  du  premier,  et  qui  se 
trouve  renfermé  dans  un  système  de  vaisseaux  particuliers. 

Cet  appareil  vasculaire  est  facile  à  distinguer  chez  les  Vers, 
où  ce  sang  proprement  dit  est  d'une  couleur  différente  de  celle 
des  autres  liquides  de  l'organisme  ,  et  n'a  pas  échappé  aux 
recherches  des  premiers  anatomistes  qui  se  sont  occupés  de 
l'étude  de  ces  Animaux  ;  mais,  lorsque  toutes  les  humeurs  pré- 
sentent la  même  teinte ,  il  est  souvent  difficile  d'en  reconnaître 
la  présence ,  et  il  reste  encore  beaucoup  d'obscurité  à  ce  sujet, 
en  ce  qui  concerne  les  Rotateurs  et  les  Vers  intestinaux. 

Il  me  paraîtrait  inutile  de  revenir  ici  sur  l'étude  du  fluide 
cavitaire  ou  de  traiter  d'une  manière  spéciale  des  espaces  qui  en 
sont  les  réservoirs  ;  ce  que  nous  savons  de  la  disposition  d'il 
système  lacunaire  chez  les  autres  Invertébrés  nous  suffit  pour 
en  donner  une  idée  exacte  ,  et  je  m'occuperai  donc  immédiate- 
ment de  l'examen  du  système  de  vaisseaux  qui ,  chez  les  Vers, 
vient  s'ajouter  à  ce  système  irrigatoire  d'emprunt,  et  qui  est 
destiné  à  devenir  la  partie  fondamentale  de  l'appareil  circula- 
toire chez  les  Animaux  des  classes  élevées. 


Mode 

de  formation 

de 

ces  lubes. 


240  CIRCULATION    DU    SANG 

Ce  système  vasculaire  se  compose  de  canaux  qui  ne  sont  pas 
empruntés  aux  espaces  vides  ou  lacunes  que  les  divers  organes 
laissent  entre  eux,  consistent  en  des  tubes  à  parois  indépen- 
dantes des  parties  circonvoisines,  et  qui  semblent  se  former  de 
toutes  pièces.  Pour  faire  bien  comprendre  ce  qui  me  paraît  être 
le  mode  d'organisation  et  de  production  de  ces  conduits  sangui- 
fères ,  il  ne  sera  pas  inutile  de  rappeler  les  modifications  que 
nous  avons  déjà  vues  s'opérer  par  les  progrès  du  développe- 
ment dans  la  disposition  des  canaux  gastro-vasculaires  des 
Béroés. 

On  doit  se  rappeler  que  j'ai  trouvé  des  différences  très 
grandes  dans  la  conformation  de  cet  appareil  irrigatoire.  Chez 
les  jeunes  individus,  les  canaux  radiaires  qui  se  dirigent  de 
l'estomac  vers  le  bord  du  disque  cupuliforme  pour  s'ouvrir  dans 
le  canal  marginal  sont  simples  ou  ne  présentent  latéralement 
que  de  petits  prolongements  en  forme  de  doigts  de  gant;  mais, 
chez  les  individus  plus  avancés  en  âge,  ces  appendices  csecaux 
sont  beaucoup  plus  longs,  et,  au  lieu  d'être  simples,  se  ramifient; 
enfin,  chez  des  individus  qui,  à  en  juger  par  leur  grande  taille, 
sont  encore  plus  vieux ,  les  branches  de  ces  mêmes  canaux , 
au  lieu  de  se  terminer  toutes  en  culs-de-sac ,  se  rencontrent, 
s'ouvrent  les  unes  dans  les  autres  à  leurs  points  de  jonction, 
et  constituent  par  leurs  anastomoses  un  réseau  vasculaire  dont 
les  mailles  deviennent  de  plus  en  plus  nombreuses  et  serrées. 
Au  premier  abord ,  on  pourrait  croire  que  les  canaux  gastro- 
vasculaires  ,  en  s'avançant  ainsi  dans  la  substance  du  corps  de 
l'Animal,  seraient  de  simples  excavations  creusées  dans  cette 
substance,  et  résulteraient  seulement  d'un  phénomène  de  désas- 
similation  ou  résorption  qui  s'effectuerait  dans  une  direction  dé- 
terminée. Mais,  en  examinant  les  choses  de  plus  près,  on  voit 
que  l'extension  de  ces  canaux  est  due  à  un  travail  plu  s  complexe. 
Les  tubes  gastro-vasculaires,  de  même  que  l'estomac,  ont  pour 
parois  une  membrane  continue  qui  leur  appartient  en  propre  , 


CHEZ    LES    VERS.  2/j.l 

et  le  cul-de-sac  par  lequel  chacun  d'eux  se  termine  reste  fermé 
jusqu'à  ce  qu'il  ait  rencontré  une  autre  branche  du  même  sys- 
tème à  laquelle  il  se  soude  avant  de  se  perforer  pour  débou- 
cher dans  son  intérieur.  11  faut  donc  que  le  tissu  constitutif  des 
parois  de  ces  tubes  préexiste  dans  les  points  où  leur  allongement 
s'effectue,  et,  pour  se  former  une  idée  nette  de  ce  phénomène 
organogénique,  il  faut  se  représenter  le  vaisseau  comme  étant  un 
cylindre,  d'abord  plein,  qui  s'allonge  à  son  extrémité  par  suite 
de  la  production  des  nouvelles  portions  de  son  tissu,  et  qui,  en 
même  temps,  se  creuse  d'une  cavité  disposée  suivant  son  axe. 
La  pression,  ou  quelque  autre  influence  exercée  par  l'extrémité 
qui  s'accroît  de  la  sorte,  amène  l'atrophie  et  la  résorption  de  la 
substance  des  tissus  voisins,  et  le  tube,  tout  en  restant  fermé,  se 
fraye  ainsi  une  route  dans  cette  substance  jusqu'à  ce  qu'il  ren- 
contre un  autre  vaisseau  de  même  nature  auquel  il  se  soude  ; 
puis ,  la  cavité  se  creusant  toujours  de  plus  en  plus  dans  la 
même  direction,  et  un  travail  analogue  s'effectuant  en  sens 
opposé  dans  le  tube  auquel  il  s'est  uni,  la  cloison  qui  les  sépare 
se  perfore  et  l'anastomose  s'établit. 

Des  phénomènes  organogéniques  du  même  ordre  paraissent 
s'établir  chez  les  Vers  dans  d'autres  points  de  l'économie  et 
amener  la  formation  d'un  système  de  vaisseaux  à  parois  propres 
qui  ne  débouchent  ni  dans  l'appareil  digestif  ni  dans  le  système 
lacunaire  général ,  et  qui  est  complètement  clos,  sauf  les  com- 
munications que  la  perméabilité  de  ses  parois  permet  avec  les 
cavités  d'alentour. 

C'est  de  la  sorte  que  les  vaisseaux  sanguins  proprement  dits 
semblent  se  constituer  chez  les  Annélides,  par  exemple.  Ainsi, 
chez  les  jeunes  Térébelles ,  le  service  de  l'irrigation  physiolo- 
gique se  fait  pendant  les  premiers  temps  de  la  vie  à  l'aide  de  la 
cavité  générale  du  corps  et  des  autres  parties  du  système  lacu- 
naire qui  contient  un  fluide  nourricier,  comme  nous  l'avons 
déjà  vu  chez  les  Mollusques  et  les  Animaux  articulés  ;  mais, 
m.  16 


Vaisseaux 

sanguins 

des 

Turbellariés. 


242  CIRCULATION    DU    SANG 

à  une  période  plus  avancée  de  leur  développement,  on  com- 
mence à  distinguer  dans  l'organisme  de  ces  petits  Vers  marins 
un  certain  nombre  de  vaisseaux  dont  le  contenu  est  différent,  et 
ne  tarde  pas  à  acquérir  la  teinte  rouge  qui  rend  le  sang  propre- 
ment dit  si  facile  à  reconnaître  chez  la  plupart  des  Animaux  de 
cette  classe  (1).  Ces  vaisseaux  sanguins,  indépendants  du  sys- 
tème cavitaire,  sont  d'abord  en  petit  nombre,  et  ne  paraissent 
fournir  que  peu  de  branches  ;  mais  ,  par  les  progrès  du  travail 
organogénique,  ils  se  développent  beaucoup,  et  finissent  par 
former  un  appareil  très  complexe  dont  les  diverses  parties  se 
dessinent  nettement  par  tout  le  corps,  à  raison  de  la  couleur 
particulière  du  fluide  renfermé  dans  leur  intérieur. 

§  2.  —  Chez  les  Némertiens ,  qui  prennent  place  dans  la 
classe  des  Turbellariés  fondée  par  M.  Ehrenberg,  il  existe, 
indépendamment  de  l'appareil  irrigatoire  constitué  par  la  cavité 
viscérale  (2),  un  système  circulatoire  vasculaire  bien  distinct, 


(1)  J'ai  constaté  l'apparition  tardive 
des  vaisseaux  sanguins  chez  beaucoup 
de  jeunes  Annélides  ,  et  ce  fait  me 
semble  avoir  une  certaine  importance 
pour  la  zoologie  ;  car  chez  les  Verté- 
brés la  formation  du  système  circula- 
toire est  un  des  premiers  résultats  du 
travail  embryogénique  (a). 

(2)  Chez  les  Némertiens  ,  la  cavité 
générale  du  corps  qui  loge  les  viscères, 
et  qui  contient  un  fluide  nourricier 
commun,  est  tapissée  par  un  tissu 
membraniforme  et  subdivisée  en  qua- 
tre portions  principales.  Une  première 
partie,  ou  chambre  céphalique,  est 
limitée  en  arrière  par  une  cloison 
transversale  ou  diaphragme  membra- 
neux incomplet,  et  loge  les  ganglions 
cérébroïdes  ainsi  que  les  parties  an- 


térieures de  l'appareil  digestif  et  du 
système  vasculaire.  La  portion  post- 
céphalique  de  la  cavité  générale  s'é- 
tend dans  toute  la  longueur  du  corps 
et  se  trouve  incomplètement  divisée 
par  des  cloisons  verticales  membra- 
neuses auxquelles  sont  fixés  les  vis- 
cères :  un  de  ces  compartiments  con- 
stitue une  chambre  médiane  et  loge 
dans  une  portion  de  son  étendue  l'ap- 
pareil digestif;  les  deux  autres,  situés 
latéralement,  renferment  les  organes 
reproducteurs.  Un  liquide,  en  général 
incolore,  mais  tenant  en  suspension 
des  corpuscules  organisés  et  compa- 
rables aux  globules  du  sang  (6),  est 
répandu  dans  les  chambres  cépha- 
lique et  médiane  de  ce  système,  et  y 
remplit  tous  les  espaces  qui  ne  sont 


(a)  Milne  Edwards,  Observ.  sur  le  développement  des  Annélides  (Ann.  des  sciences  nat,,  1845, 
8*  série,  t.  111,  p.  157  et  suiv.). 

(6)  Voyez  ci-dessus,  tome  I,  page  106. 


CHEZ   LES    VERS.  243 

mais  d'une  grande  simplicité,  et  qui  rappelle  beaucoup  ce  qui  se 
voit  chez  les  jeunes  Animaux  dont  il  vient  d'être  question, 
quand  leurs  vaisseaux  sanguins  commencent  à  se  montrer. 

Ainsi  chez  les  Cérébratules  à  sang  rouge  dont  M.  de  Quatre-  Némertiens 
fages  a  étudié  la  structure  avec  beaucoup  de  soin,  on  distingue 
facilement  trois  troncs  longitudinaux  situés  immédiatement 
sous  les  téguments  et  placés,  l'un  sur  la  ligne  médiane  du  dos, 
les  autres  sur  les  côtés  du  corps.  Ces  vaisseaux  plus  ou  moins 
flexueux  ont  des  parois  membraneuses  bien  distinctes  et  offrent 
partout  à  peu  près  le  même  diamètre.  Ils  s'anastomosent  direc- 
tement entre  eux  à  l'extrémité  postérieure  du  corps.  Dans  la 
région  céphalique,  ils  sont  également  en  communication  di- 
recte, mais  d'une  manière  un  peu  moins  simple  :  chaque  tronc 
latéral  se  divise  en  deux  branches ,  l'une  que  j'appellerai 
frontale,  continue  à  se  porter  en  avant  et  se  réunit  à  son  con- 
génère sur  la  ligne  médiane,  de  façon  à  former  une  grosse 
anse  vasculaire  marginale  ;  l'autre,  que  je  nommerai  branche 
cérébrale,  contourne  les  ganglions  cérébroïdes  du  système  ner- 
veux, et,  après  avoir  décrit  ainsi  la  figure  d'une  c/a,  se  joint  à 
la  fois  à  son  congénère  et  au  vaisseau  médian  dorsal  qui  se 
termine  en  ce  point  (l).1 

pas  occupés    par    les  viscères ,  les  touristes  ;  mais  jusqu'en  ces  derniers 

muscles  ou  d'autres  organes;  il  pa-  temps  on  a  généralement  confondu 

raît  pénétrer  aussi  dans   les  chain-  avec  ces  organes  le  système  nerveux, 

bres  latérales   ou    génitales  ,   et  les  qui  est  souvent  coloré  en  rouge  ou 

mouvements   généraux  du   corps  le  en  jaune  dans  toute  sa  portion  cen- 

ballottent    dans    divers    sens.  Mais ,  traie. 

jusqu'ici,  on  n'y  a  pas  aperçu  distinc-  M.  Rathke  a  reconnu  l'erreur  dans 

tement  des  courants  circulatoires  ré-  laquelle  ses  prédécesseurs  étaient  tom- 

guliers  (a).  bés  à  ce  sujet  (b)  ;  mais,  tout  en  resli- 

(1)  L'existence  de  vaisseaux  sali-  tuant  au  système  nerveux  les  parties 

gains  chez  les  Némertiens  a  été  con-  qui  y  appartiennent ,   il  n'a   donné 

statée  par  un  grand  nombre  d'ana-  que  fort  peu  de  détails  sur  les  vais- 

(a)  Quatrefages,  Mém.  sur  la  famille  des  Némertiens  (  Voyage  en  Sicile,  t,  II,  p.  151  et  suiv.,  et 
Ann.  des  sciences  nat.,  3=  série,  t.  VI). 
(&)  Rathke,  Deilrâge  mr  vergleichenden  Amtomie  und  Physiologie,  1842,  p.  103. 


2/j/j  CIRCULATION    DU    SANG 

Il  paraît  y  avoir  aussi  chez  la  plupart  des  Némertiens  deux 
autres  troncs  longitudinaux  moins  développés ,  qui  sont  logés 
plus  profondément  et  suivent  les  côtés  de  la  cavité  digestive. 
Les  injections  faites  par  M.  Blanchard  montrent  que  ces  vais- 
seaux s'anastomosent  aussi  avec  les  précédents  par  leur  extré- 
mité antérieure  ;  mais,  de  même  que  le  vaisseau  dorsal,  ils  ne 
se  ramifient  pas.  Les  vaisseaux  sous-cutanés  latéraux  sont  unis 
entre  eux  de  distance  en  distance  par  des  canaux  transversaux, 
mais  on  n'a  pu  apercevoir  chez  ces  Vers  presque  aucune  trace 
de  ces  ramifications  dendroïdes,  ni  de  ces  lacis  capillaires  qui, 
chez  les  Animaux  à  circulation  puissante,  servent  à  conduire 
les  fluides  nourriciers  dans  la  profondeur  de  toutes  les  parties 
de  l'organisme  (1). 

seaux  sanguins  proprement  dits,  et  il  cœurs  les  ganglions  cérébroïdes  en- 
n'a  pas  expliqué  la  cause  de  la  fausse  tourés  d'une  anse  ou  d'un  sinus  vas- 
détermination  adoptée  par  MM.  Délie  culaire  (d);  mais  tous  les  observateurs 
Chiaje  ,  Dugès,  Ebrenberg  et  John-  qui  ont  parlé  de  ces  organes  comme 
son  (a);  aussi  M.  OErsted  a-t-il  per-  les  centres  de  l'appareil  circulatoire 
sisté  a  considérer  les  ganglions  céré-  se  sont  accordés  à  dire  que  jamais  on 
broïdes  comme  des  cœurs  (h).  M.  de  n'y  aperçoit  de  pulsations. 
Quatrefages  a  établi  nettement  la  dis-  (1)  M.  Blanchard  a  représenté  ces 
tinction  entre  ces  divers  organes,  et  vaisseaux  injectés  chez  le  Cerebra- 
a  été  le  premier  à  faire  bien  connaître  tulus  liguricus  ;  on  voit  les  troncs 
les  principales  dispositions  du  sys-  latéraux  se  terminer  dans  une  lacune 
tème  vasculaire  des  Némertiens  en  ovalaire  qui  loge  de  chaque  côté  de 
général  (c).  M.  Williams,  qui  a  écrit  l'extrémité  antérieure  du  canal  diges- 
plus  récemment  sur  le  même  sujet,  tif  un  des  ganglions  cérébroïdes,  et  qui 
continue  à  désigner  sous  le  nom  de  se  continue  en  avant,  sur  les  côtés  du 

(a)  Délie  Chiaje,  Mem.  sulla  storia  e  notomia  degli  Animali  senza  vertèbre  del  regno  di  Napoli, 
t.  II,  p.  408. 

—  Dugès ,  Aperçu  de  quelques  nouvelles  observations  sur  les  Planaires  et  plusieurs  genres 
voisins  (Ann.  des  se.  nat.,  1830,  t.  XXI,  p.  75,  pi.  2,  fig.  5). 

—  Ehrenberg,  Symbolce  Physicœ  :  Animalia  Evertebrata,  dec.  1. 

—  Johnson,  Miscellanea  %oologica  [Magazine  of  Zoology  and  Botany,  1837,  t.  1,  p.  533, 
pi.  17,  fig.  6). 

(6)  A. -S.  Œrated,  Entwurf  einer  systematischen  Eintheilung  und  speciellen  Beschrelbung  der 
Plattwùrmer  auf  mikroscopischen  Untersuchungen  gegrûndet,  1844,  p.  17. 

(c)  Quatrefages,  Études  sur  les  types  inférieurs,  Mém.  sur  la  famille  des  Némertiens  (Milite 
Edwards,  Quatrefages  et  Blanchard,  Voyage  en  Sicile,  t.  II,  p.  174  et  suiv.,  pi.  18,  fig.  1  et  1  a, 
pi.  16,  fig.  1  ;  pi.  21,  fig.  1). 

(d)  T.  Williams,  Report  on  the  British  Annelida  (Rep.  of  the  British  Associât,  for  Ihe,  Advan™ 
cernent  of  Science,  vol.  XXI,  1852,  p.  189). 


CHEZ    LES    VERS.  9/l5 

La  disposition  de  l'appareil  irrigatoire  paraît  être  essentielle- 
ment la  même  chez  tous  les  Némertiens,  et  le  sang  renfermé 
dans  ce  système  de  grands  canaux  y  est  mis  en  mouvement  par 
la  contraction  des  parois  des  divers  vaisseaux  dont  il  vient 
d'être  question.  Mais  les  courants  ainsi  déterminés  sont  inter- 
mittents et  irréguliers  dans  leur  direction,  de  sorte  que  la 
circulation  est  oscillatoire  et  que  le  fluide  poussé  tantôt  d'ar- 
rière en  avant  par  l'action  de  l'un  des  troncs  latéraux,  passe 
dans  les  vaisseaux  longitudinaux  voisins ,  tandis  qu'à  d'autres 
moments  les  contractions  de  l'un  de  ces  derniers  le  font  couler 
en  sens  contraire.  Il  est  aussi  à  noter  que  chez  les  Némertiens 
ces  vaisseaux  sanguins  ne  présentent  sur  aucun  point  de  leur 
trajet  des  réservoirs  contractiles  qui  puissent  être  considérés 
comme  faisant  fonction  de  cœurs.  Beaucoup  de  zoologistes ,  il 
est  vrai,  ont  décrit  sous  ce  nom  certaines  parties  de  la  tête  des 
Némertiens,  mais  M.  de  Quatrefages  a  fait  voir  que  ces  pré- 
tendus cœurs  ne  sont  en  réalité  que  les  ganglions  cérébroïdes 
autour  desquels  s'appliquent  les  branches  internes  des  vais- 
seaux latéraux  (1). 

Nous  voyons  donc  que  chez  ces  Vers  le  sang  se  meut  dans 
un  cercle  de  tubes  fermés  et  doit  revenir  sans  cesse  à  son 
point  de  départ.  On  peut  donc  dire  que  chez  ces  Animaux  la 
circulation  est  complète  ;  mais  on  doit  remarquer  que  le  sys- 
tème vasculairc  dont  ils  sont  pourvus,  considéré  comme  appa- 
reil irrigatoire,  n'est  guère  qu'une  simple  ébauche  et  ne  saurait 
fonctionner  que  d'une  manière  très  imparfaite. 

bulbe  pharyngien.  Il  y  a  donc  ici  en  tion  avec  l'anse  vasculaire  céplialique 

tout  cinq  vaisseaux  longitudinaux  («).  sont  évidemment  les  anses  circum- 

(1)  Dugès  a  observé  la  contractilité  ganglionnaires  décrites  ci-dessus,   ou 

des  vaisseaux  sanguins  chez  le  Pro-  les  analogues  des  lacunes  figurées  par 

stoma  armata;  mais  les  poches  pel-  M.  Blanchard  (6). 
lucides  qu'il  dit  être  en  communica- 

(a)  Blanchard  ,  Recherches  sur  l'organisation  des  Vers  (Voyage  en  Sicile,  t.  III,  p,  305.  pi    6 
fig.  5). 
{b)  Dugès,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  mt.,  1830,  t.  XXI,  p.  75), 


Planaires. 


Classe 
des 

Nématoïdes. 


246  CIRCULATION    DU    SANG 

§  3.  —  Chez  d'autres  Turbellariés ,  les  Planaires  par 
exemple,  le  système  vasculaire  est  bien  plus  rudimentaire,  et, 
quoique  les  canalicules  dont  il  se  compose  se  ramifient  dans 
les  diverses  parties  de  l'organisme  et  s'anastomosent  parfois 
entre  eux ,  il  n'offre  pas  dans  son  ensemble  une  disposition 
circulaire,  et  le  liquide  qui  s'y  trouve  inclus  n'est  animé  proba- 
blement que  de  quelques  mouvements  oscillatoires  obscurs  (1). 

§  k>  —  Chez  les  Vers  intestinaux  de  la  classe  des  Néma- 
toïdes ,  tels  que  les  Strongles  et  les  Ascarides  ,  on  ne  trouve 
aussi  que  des  vestiges  d'un  appareil  circulatoire  composé  de 
quelques  canaux  très  grêles  et  sans  réservoir  pulsatile  bien 
caractérisé  (2);  mais,  dans  la  classe  des  Annélides,  au  con- 


(1)  Les  organes  que  Dugès  et  quel- 
ques autres  observateurs  ont  décrits 
comme  constituant  le  système  vascu- 
laire des  Planaires  (a)  appartiennent 
en  majeure  partie  au  système  ner- 
veux" de  ces  Animaux  (6).  Mais 
M.  Blanchard  a  reconnu  l'existence 
de  canaux  qui  suivent  le  trajet  de 
nerfs,  ainsi  que  d'une  espèce  de  réser- 
voir ou  de  lacune  qui  entoure  la  masse 
ganglionnaire  céphalique.  Toutes  ces 
parties  se  laissent  injecter,  et  les  rami- 
fications de  ces  vaisseaux  forment 
même  un  réseau  capillaire  assez 
riche  (c)  ;  mais,  d'après  leur  mode  de 
distribution  ,  il  me  paraîtrait  difficile 
qu'il  pût  y  avoir  là  une  véritable  cir- 
culation des  fluides  nourriciers,  et  il 
me  semble  probable  qu'ils  ne  sont  le 


siège  que  de  mouvements  oscillatoires, 
car  ils  ne  font  pas  retour  sur  eux- 
mêmes  ,  et  ils  sont  trop  grêles  pour 
que  l'on  puisse  supposer  l'existence 
d'un  double  courant  dans  l'intérieur 
de  chacun  d'eux.  Il  est  aussi  à  noter 
que  chez  les  Planaires,  aussi  bien  que 
chez  les  autres  Vers  auxquels  Cuvier 
donnait  le  nom  de  parenchymateux,  il 
existe  une  cavité  viscérale  qui  sert  de 
réservoir  à  un  liquide  albumineux,  et 
qui  joue  probablement  un  rôle  impor- 
tantdans  l'irrigation  physiologique  (d). 
(2)  Chez  les  Ascarides,  on  trouve  à 
la  face  interne  du  système  musculaire 
sous-cutané  deux  bandes  longitu- 
dinales de  structure  spongieuse  qui 
constituent  chacune  un  tube  (e)  dans 
l'intérieur  duquel  se  trouvent  deux 


(a)  Dugès,  Recherches  sur  l'organisation  et  les  mœurs  des  Planaires  (Ann.  des  sciences  nat., 
1828,  t.  XV,  p.  161). 

—  Idem,  Aperçu  de  quelques  observations  nouvelles  sur  les  Planaires,  etc.  (Ann.  des  sciences 
nat.,  1830,  t.  XXI,  p.  85). 

—  Merlens,  Ueber  den  Bail,  verschiedener  an  der  See  lebender  Planarien  (Mém.  de  l'Acad.  de 
Saint-Pétersbourg,  1833,  6e  série,  t.  II,  p.  1). 

—  Schulze,  De  Planariarum  Vivendi  ratione  et  structura  penitiori  (Dissert,  inaug.).  Berol.,  18  30  . 
(6)  Quatrefages,  Mém.  sur  quelques  Planaires  marines  (Voyage  en  Sicile,  t.  II,  p.  72  et  suiv.) . 

(c)  Blanchard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Vers  (Op.  cit.,  t.  III,  p.  77,  pi.  6,  fig.  1). 

(d)  Quatrefages,  loc.  cit.,  p.  52. 

(e)  Ce  sont  ces  tubes  longitudinaux  qui  ont  été  considérés  comme  des  vaisseaux  circulatoires  par 
M.  Cloquet  (Anatomie  des  Vers  intestinaux,  1824,  p.  38,  pi.  1,  fig.  2  ;  pi.  2,  fig.  3). 


CHEZ    LES    VERS.  ^47 

traire,  les  organes  d'irrigation  se  développent  et  se  perlée» 
tionnent  beaucoup. 

§5.  —  Chez  presque  tous  les  Annélides,  l'irrigation  orga- 
nique s'effectue  aussi  à  l'aide  de  deux  appareils  :  le  système 
cavitaire  général  et  ses  annexes ,  où  se  trouve  un  liquide  séro- 
sanguin ,  et  un  système  vasculaire  où  circule  le  sang  propre- 
ment dit.  Ces  deux  appareils  ne  communiquent  pas  entre  eux,  et 


Appareil 
circulatoire 

des 
Annélides. 


vaisseaux,  l'un  superficiel,  l'autre  pro- 
fond. Les  vaisseaux  profonds  situés 
ainsi  de  chaque  côté  du  corps  s'ana- 
stomosent directement  entre  eux  au 
niveau  de  l'œsophage ,  de  façon  à  y 
former  une  arcade  dont  une  des 
branches  est  légèrement  dilatée  de 
manière  à  constituer  une  très  petite 
ampoule  .  qui  communique  aussi  par 
des  canaux  anaslomotiques  avec  les 
vaisseaux  sous -cutanés  superficiels. 
Enfin  ,  ceux-ci  communiquent  égale- 
ment avec  les  vaisseaux  profonds  ou 
internes  vers  l'extrémité  postérieure 
du  corps  (a).  M,  Blanchard  a  constaté 
que  les  injections  passent  des  uns  dans 
les  autres,  et  qu'ils  constituent  un 
cercle  dans  lequel  le  fluide  peut  se 
mouvoir  d'une  manière  continue  ; 
mais  ce  système  de  canaux  ne  paraît 
pas  donner  naissance  à  des  ramifica- 
tions vasculaires,  si  ce  n'est  peut-être 
dans  la  région  pharyngienne  ;  par  con- 
séquent son  rôle  dans  l'irrigation  phy- 
siologique ne  peut  être  que  très  faible, 
et  il  est  à  présumer  que  la  distribu- 
tion des  fluides  nourriciers  s'effectue 
principalement  par  l'intermédiaire  du 


système  cavitaire  général  et  de  ses 
dépendances. 

Cet  anatomiste  a  trouvé  la  même 
disposition  dans  les  vaisseaux  des 
Strongles  ;  mais,  chez  les  Spiroptères 
ou  Spirures,  il  a  constaté  l'existence 
de  branches  anaslomotiques  transver- 
sales et  de  ramifications  extrêmement 
grêles  (b). 

M.  Blanchard  est  parvenu  à  injec- 
ter un  système  de  vaisseaux  sous- 
cutanés  très  fins  chez  les  Échino- 
rhysqces.  Ce  sont  des  canaux  longi- 
tudinaux, au  nombre  de  dix-huit  à 
vingt,  qui  se  trouvent  reliés  entre  eux 
par  une  multitude  de  branches  trans- 
versales simples,  de  façon  à  repré- 
senter un  treillis  fort  régulier  (c).  Il 
existe  aussi  à  la  face  interne  de  la 
grande  cavité  viscérale  de  ces  Ani- 
maux deux  tubes  longitudinaux  d'un 
calibre  très  considérable  qui  se  lais- 
sent facilement  injecter  et  qui  ressem- 
blent beaucoup  aux  vaisseaux  latéraux 
des  Némertes  (d)  ;  à  leur  extrémité 
postérieure  ils  se  terminent  en  culs- 
de-sac,  et  en  avant  ils  se  bifurquent 
pour  envoyer  une  branche  à  la  base 


(a)  Blanchard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Vers  {Voyage  en  Sicile,  t.  III,  p.  224,  pi.  18, 
fig.  In). 

(6)  Idem,  loc.  cit.,  p.  288,  pi.  20,  ûg,  1  a. 

(c)  Idem,  loc.  cit.,  p.  294,  pi.  24,  fig.  5  e. 

(d)  Cloquet,  Anal,  des  Vers  intestinaux,  1824,  p.  85,  pi.  5,  jîg;  3,  pi  G,  fig-.  13. 
Voyez  aussi  : 

—  YYestrumb,  De  Helminthibus  acanthocephalis  comment,  hist.  anat.,  p.  48  (1821). 

—  Burrow,  Echmorhynchi  strumosi  anatome,  183G,  (ig.  1  et  8. 


Système 
cavi  taire. 


l2h&  CIRCULATION    DU    SANG 

l'on  remarque  en  général  que  le  développement  de  l'un  est  en 
raison  inverse  de  l'importance  acquise  par  l'autre. 

Ainsi  que  nous  l'avons  déjà  vu  en  traitant  de  la  respiration, 
c'est  essentiellement  par  l'intermédiaire  du  premier  de  ces  sys- 
tèmes irrigatoires  que  les  relations  entre  l'organisme  et  l'atmos- 
phère s'établissent  chez  plusieurs  Animaux  de  cette  classe  (1). 
Le  liquide  cavitaire  est  alors  fortement  chargé  de  globules; 
il  est  mis  en  mouvement  par  des  cils  vibratiles ,  et  il  occupe 
des  réseaux  de  canaux  capillaires  sous-cutanés  aussi  bien  que 


de  la  trompe,  et  l'autre  au  cou  ;  mais 
ils  ne  paraissent  pas  donner  naissance 
â  des  ramifications  (a).  Enfin,  ils  sont 
remplis  par  un  liquide  albuminëux. 
Les  helminthologistes  sont  incertains 
quant  aux  usages  de  ces  canaux.  Il 
est  aussi  à  noter  que  les  bandelettes 
ou  lemnisques  qui  flottent  dans  la 
cavité"  du  corps  de  ces  singuliers  Vers 
intestinaux  renferment  un  canal  lon- 
gitudinal à  branches  rameuses  (6),  et 
que  divers  auteurs  rapportent  aussi 
ces  vaisseaux  à  l'appareil  circula- 
toire (c)  ;  mais  on  n'est  pas  parvenu 
à  les  injecter,  et,  suivant  Mehlis,  cha- 
cun de  ces  organes  communiquerait 
au  dehors  par  un  pore  venuciforme  , 
ce  qui  ferait  supposer  qu'ils  sont  des 
instruments  de  sécrétion  (d). 

L'organe  rubani forme  qui  se  voit 
chez  le  Filaire  des  poissons  présente 
une  structure  d'apparence  vasculaire 


comme  celle  des  lemnisques  de  PÉchi- 
norhynque  (e). 

Enfin,  parmi  les  Vers  que  l'on  con- 
fond généralement  sous  le  nom  de 
Filaires  ou  Gordius,  il  en  est  qui,  par 
leur  mode  d'organisation,  se  rappro- 
chent davantage  des  Annélides  de  la 
famille  des  Nais,  et  qui  ont,  comme 
celles-ci,  un  vaisseau  dorsal  et  un  ou 
deux  vaisseaux  abdominaux.  Berthold 
a  décrit  un  appareil  de  ce  genre 
chez  le  Gordius  aquaticus  (/").  Mais 
M.Blanchard,  sans  vouloir  en  con- 
tester l'existence,  n'est  point  parvenu 
à  le  retrouver  (g).  Les  Filaires  des 
Corneilles  décrits  par  Ecker  ont  aussi 
un  vaisseau  dorsal  dont  la  partie  an- 
térieure ou  pharyngienne  est  pulsatile, 
et  un  collier  vasculaire  qui  ressemble 
beaucoup  à  ce  que  l'on  voit  chez  cer- 
tains Annélides  (h). 

(1)  Voyez  tome  fi,  p.  99  et  suiv. 


(a)  Blanchard,  Rech.  sur  l'organisation  des  Vers  (  Voyage  en  Sicile,  t.  III,  p.  293). 
(6)  Goeze,  Versuch  einer  Naturgeschichte  der  Eingeweidwurmer,  p.  1417. 

—  Rudolphi,  Entozoorum  historia  naturalis,  t.  I,  p.  254. 

—  Cloquet,  Anat.  des  Vers  intestinaux,  p.  83. 

(c)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anut.  comp.,  t.  I,  p.  134. 

(d)  Creplin,  Novae  observ.  de  Entozois,  mit  Bemerkungen  von  Mehlis  (Isis,  1831,  p.  82). 

(e)  Siebold,  Helminthologische  Beitràge  (Archiv  fur  Naturgesch.,  1838,  t.  I,  p.  311). 

(f)  Berthold,  Ueber  den  Bau  des  Wasserkalbes  :  Gordius  aquaticus.  Gcettingue,  1842,  p.  12. 

(g)  Blanchard,  loe.  cit.,  p.  280. 

(h)  Ecker,  Ueber  das  Gefâss-System  in  eingepuppten  Filarien  (Archiv  fur  Anat.  und  Physiol. 
von  Muller,  1845,  p.  506,  pi.  15,  %.  3  et  4). 


CHEZ    LES    VERS.  2/|9 

l'espèce  de  réservoir  formé  par  la  chambre  viscérale.  Chez  les 
Branehclîions,  par  exemple,  la  cavité  abdominale  communique 
librement  avec  des  canaux  pratiqués  dans  l'épaisseur  des  parois 
du  corps,  et  notamment  dans  les  appendices  foliacés  qui  recou- 
vrent le  dos  et  constituent  des  organes  respiratoires.  Ces  canaux 
se  ramifient  à  la  manière  des  vaisseaux  sanguins  dans  les  bran- 
chies des  Crustacés  ou  des  Mollusques,  et  ils  sont  pourvus  aussi 
de  parois  membraneuses  distinctes  (1).  Ce  sont  par  conséquent 
des  vaisseaux  à  sang  blanc  en  communication  directe  avec  le 
système  lacunaire  général,  de  la  même  manière  que  nous  avons 
vu  le  système  artériel  se  continuer  avec  les  méats  ou  espaces 
interorganiques  chez  beaucoup  d'autres  Invertébrés  ;  et  M.  de 
Quatrefages,  qui  a  été  le  premier  à  faire  bien  connaître  cette 
disposition,  y  voit  les  vestiges  d'un  appareil  vasculaire  par- 
ticulier dont  tous  les  Animaux  supérieurs  à  sang  rouge  sont 
pourvus,  savoir,  le  système  des  vaisseaux  lymphatiques .  Nous 
reviendrons  sur  ces  analogies  lorsque  nous  étudierons  spécia- 
lement les  vaisseaux  blancs  des  Vertébrés ,  et  je  me  bornerai 
à  ajouter  ici  que  les  arborisations  vasculaires  dont  il  vient  d'être 
question  sont  également  très  développées  chez  plusieurs  Anné- 
lidessétigères,  les  Phyllodocés,  par  exemple  (2),  et  que  dans 

(1)   Lorsqu'on  pousse   un    liquide  moire  de  M.  de  Quatrefages  sur  l'ana- 

coloré  dans  le   réseau  dendroïde  de  tomie  et  la  physiologie  de  ces  Sang- 

l'une  de  ces   feuilles  branchiales,  on  sues  branchifères  [a). 

voit  l'injection  se  répandre  autour  de  Déjà,  en  1849,  M.  de  Filippi  avait 

l'appareil  digestif   et  pénétrer  dans  indiqué  l'existence  d'un  système  lacu- 

tous  les    autres  appendices   respira-  naire  sans  parois  membraneuses  aussi 

toires.  J'ai  déjà  eu  l'occasion  de  parler  bien  que  d'un  système  vasculaire  pro- 

des  fonctions  de  ce  système  lacunaire  prement   dit  chez   quelques  Hirudi- 

lorsque  je  faisais  l'histoire  de  la  res-  nées  :  les  Clepsines,  par  exemple  (b). 

piration,  et  pour  plus  de  détails  à  ce  (2)  Les  arborisations  vasculaires  qui 

sujet,  je  renverrai  à  l'intéressant  Mé-  se  remarquent  sur  les  branchies  folia- 

(a)  Quatrefages,  Etudes  sur  les  types  inférieurs  de  l'embranchement  des  Annelés  (Ann.  des 
sciences  nat.,   1852,  3"  série,  t.  XVIII,  p.  306  et  suiv.). 

(b)  F.  de  Filippi,  Observ.  sopra  un  nuove  génère  (Hsementeria)  di  Anellidi  délia  famiglia  délie 
Sanguesughe,  p.  8  (extr.  délie  Memorie  délia  R.  Acad.  délie  Scienze  di  Torino,  1849,  2°  série, 
t.  X). 


250  CIRCULATION    DU    SANG 

quelques  cas  le  liquide  cavitaire  qui  y  circule  et  qui  occupe 
aussi  la  chambre  viscérale  est  coloré  (1).  Chez  les  Lombrics , 
les  espaces  libres  qui  entourent  les  viscères  sont  très  réduits, 
et  par  conséquent  la  portion  lacunaire  du  système  irrigatoirc 
n'offre  que  peu  d'importance.  Enfin,  chez  les  Sangsues,  ces 
espaces  sont  presque  entièrement  oblitérés,  et  par  conséquent 
ce  sont  les  vaisseaux  sanguins  proprement  dits  qui,  seuls  ou 
presque  seuls ,  effectuent  le  transport  des  fluides  nourriciers 
dans  l'intérieur  de  l'organisme. 
Syst.  vascuiaire  §  6.  —  Le  système  vasculaire  proprement  dit  qui  se  trouve 
Annéiides.    surajouté  à  l'appareil  irrigatoire  lacunaire  des  Annélides,  et  qui 


cées  de  ces  Vers  furent  prises  d'abord 
pour  des  vaisseaux  sanguins  (a).  Mais 
M.  Williams  a  constaté  que  ce  sont 
des  dépendances  du  système  cavitaire 
général,  et  que  les  vaisseaux  sangui- 
fères  ne  pénètrent  pas  dans  ces  ap- 
pendices (6). 

Les  ramifications  dendroïdes  creu- 
sées dans  l'épaisseur  des  lamelles  bran- 
chiformes  dont  les  rames  pédieusesdes 
Néréides  sont  garnies  à  leur  extrémité 
sont  également  des  canaux  parcourus 
par  le  liquide  cavitaire  seulement; 
mais  ici  on  trouve  à  la  base  des  pieds 
un  réseau  vasculaire  à  sang  rouge  qui 
sert  aussi  à  la  respiration  (c). 

Enfin  les  canaux  qui  occupent  le 
centre  des  appendices  tentaculiformes 
dont  l'extrémité  céphalique  est  garnie 
chez  les  Térébelles  {d)  appartiennent 
aussi  au  système  lacunaire  général,  et 
ces  organes  sont  dépourvus  de  vais- 
seaux à  sang  rouge  (e). 

(a)  Audouin  etMilne  Edwards,  Annélides  des  côtes  de  la  France  [Ann.  des  sciences  nat.,  1833, 
t.  XXIX,  p.  247,  pi.  1 G,  %.  3). 

(b)  Williams,  Report  on  the  British  Annelida  (Report  of  the  21  st  Meeting  of  tlie  British  Associa- 
tion for  the  Advancement  of  Science,  1851,  p.  198,  pi.  4,  jig.  15). 

(c)  Williams,  loc.  cit.,  p.  197,  pi.  4,  fig.  14. 

(d)  Milne  Edwards,  Règne  animal  de  Cuvier,  Annélides,  pi.  1  6. 

(e)  Williams,  loc.  cit.,  p.  194. 

(f)  Idem,  ibid.,  p.  172. 


(1)  M.  Williams  a  constaté  l'exis- 
tence d'un  liquide  péritonéal  ou  cavi- 
taire chargé  de  corpuscules  rouges 
chez  le  Glycera  alba.  Le  sang  pro- 
prement dit,  ou  liquide  intra- vascu- 
laire ,  est  d'une  teinte  rougeàtre 
moins  intense  et  ne  charrie  pas  de  glo- 
bules. La  cavité  commune  ou  viscé- 
rale se  prolonge  dans  la  base  des 
pieds,  et  de  là  se  continue  dans  l'axe 
des  appendices  branchiaux  qui  sont 
fixés  sur  ces  membres.  M.  Williams 
s'est  convaincu  de  l'absence  complète 
de  vaisseaux  sanguins  proprement 
dits  dans  les  parois  de  l'espèce  de 
caecum  ainsi  constitué  par  chacune  de 
ces  branchies,  et  il  a  vu  que  le  liquide 
cavitaire  circule  dans  leur  intérieur 
sous  l'influence  d'un  épithélium  vi- 
bratile  dont  les  parois  de  cette  por- 
tion du  système  lacunaire  sont  gar- 
nies (/). 


CHEZ   LES   VERS.  251 

renferme  le  sang  coloré  en  rouge  chez  la  plupart  de  ces  Vers, 
se  compose  de  tubes  à  parois  propres  dont  les  plus  gros  sont 
toujours  pourvus  de  fibres  musculaires  ,  de  façon  à  pouvoir  se 
contracter  et  se  relâcher  alternativement.  C'est  par  l'effet  de 
ces  contractions  que  le  sang  est  mis  en  mouvement  ;  mais  les 
courants  ainsi  déterminés  n'ont  pas  une  direction  constante,  et, 
bien  qu'il  n'y  ait  pas  ici  le  renversement  périodique  et  régulier 
dont  les  Tuniciers  nous  ont  offert  le  singulier  spectacle,  la  cir- 
culation est  souvent  oscillatoire ,  et  parfois  le  sang  parcourt 
alternativement  les  mêmes  vaisseaux  en  sens  inverses. 

Un  seul  et  même  plan  fondamental  semble  avoir  présidé  à  la 
constitution  de  l'appareil  circulatoire  de  tous  les  Annélides  ; 
on  remarque,  il  est  vrai ,  dans  le  nombre  et  la  disposition  des 
vaisseaux,  des  différences  très  considérables  ;  mais  ces  modifi- 
cations ,  qui ,  au  premier  abord ,  masquent  souvent  le  tracé 
typique,  ne  le  rendent  pas  méconnaissable,  et,  pour  saisir  les 
rapports  qu'elles  ont  entre  elles ,  il  suffit  de  les  analyser. 

En  procédant  de  la  sorte,  on  voit  que  les  différences  dépendent 
principalement  de  trois  tendances  organiques  dont  l'influence 
se  fait  sentir  de  plus  en  plus  fortement  à  mesure  qu'on  s'élève 
des  espaces  inférieurs  vers  ceux  dont  la  structure  a  été  perfec- 
tionnée au  plus  haut  degré. 

L'une  de  ces  puissances  modificatrices  du  plan  organique  de 
l'appareil  circulatoire  des  Annélides  est  la  tendance  des  parties 
congénères  à  se  montrer  d'abord  isolément  sur  les  côtés  du 
corps ,  puis  à  se  rapprocher  entre  elles  et  à  se  confondre  sur  la 
ligne  médiane. 

Une  seconde  cause  de  diversité  est  la  centralisation  croissante 
des  agents  moteurs  de  la  circulation  et  la  tendance  de  la  Nature 
à  établir  la  division  du  travail  entre  les  conduits  de  distribution 
et  les  réservoirs  distributeurs. 

Enfin,  la  troisième  circonstance  dont  nous  aurons  à  tenir 
compte  en  cherchant  à  expliquer  les  modifications  de  l'appareil 


252  CIRCULATION    DU    SANG 

sanguifère  des  Annélides ,  est  l'extension  progressive  des 
branches  de  chacun  des  troncs  principaux ,  d'où  résulte  des 
communications  anastomotiques  de  plus  en  plus  nombreuses 
entre  toutes  les  parties  de  cet  appareil ,  ainsi  que  l'abondance 
croissante .  des  rameaux  irrigatoires  et  la  richesse  du  réseau 
vasculaire  produit  par  leurs  divisions  terminales. 

Les  principaux  matériaux  employés  à  la  constitution  de  cet 
appareil  hydraulique  sont  un  certain  nombre  de  gros  tubes 
longitudinaux  de  chacun  desquels  partent  des  branches  trans- 
versales en  plus  ou  moins  grande  abondance.  Les  uns  appar- 
tiennent essentiellement  aux  téguments  de  l'Animal ,  les  autres 
sont  surtout  en  relation  avec  le  canal  digestif,  et  ils  forment 
ainsi  deux  systèmes  que  j'appellerai  le  système  cutané  et  le  sys- 
tème viscéral. 

Le  système  cutané  se  compose  tantôt  de  deux  vaisseaux  lon- 
gitudinaux situés  sur  les  flancs  de  l'Animal,  plus  ou  moins 
rapprochés  entre  eux  à  la  face  inférieure  du  corps  ;  tantôt  d'un 
tronc  unique  et  médian  que  l'on  désigne  sous  le  nom  de 
vaisseau  ventral,  et  que  l'on  peut  considérer  comme  le  résultat 
de  la  fusion  des  deux  canaux  dont  je  viens  de  parler.  Dans  la 
forme  la  plus  simple  de  ce  système ,  ces  deux  troncs  latéraux 
ne  communiquent  entre  eux  que  par  les  ramifications  terminales 
de  leurs  branches  internes;  mais ,  chez  les  espèces  dont  l'orga- 
nisation est  plus  perfectionnée ,  ils  sont  unis  directement  par 
une  série  de  tubes  transversaux  qui  occupent  la  face  ventrale 
du  corps  et  qui  peuvent  être  appelés  les  vaisseaux  commissu- 
raux  inférieurs.  Enfin  les  troncs  eux-mêmes  se  rapprochent 
et  s'anastomosent  par  leurs  deux  extrémités  de  façon  à  former 
un  cercle  vasculaire  ;  puis,  ce  rapprochement  s'effectuant  dans 
toute  leur  longueur,  les  deux  moitiés  du  système  se  trouvent 
représentées  par  un  vaisseau  central  impair  et  médian. 

Pour  bien  comprendre  la  série  de  modifications  qui  se  ren- 
contrent dans  la  disposition  de  la  portion  viscérale  de  l'appa- 


CHEZ    LES    VEP.S.  253 

reil  circulatoire,  il  faut  y  distinguer  deux  systèmes  de  vais- 
seaux ,  l'un  dorsal ,  l'autre  sous-intestinal ,  et  se  représenter 
chacun  de  ces  systèmes  comme  étant  composé  virtuellement , 
sinon  en  réalité ,  de  deux  moitiés  placées  symétriquement  à 
droite  et  à  gauche  de  la  ligne  médiane  et  tendant  à  se  rappro- 
cher pour  se  confondre  entre  elles. 

Les  deux  troncs  dorsaux,  là  où  ils  sont  séparés  l'un  de 
l'autre,  communiquent  entre  eux  par  une  série  de  branches 
transverses  auxquelles  je  donnerai  le  nom  de  vaisseaux  com- 
missuraux  supérieurs. 

Les  deux  moitiés  du  système  vasculaire  sous-intestinal  pré- 
sentent une  disposition  semblable,  et  sont  reliées  aussi  au  tronc 
dorsal  par  des  canaux  verticaux  qui  passent  sur  les  côtés  du 
tube  digeslif  et  qui  peuvent  être  appelés  les  vaisseaux  commis- 
suraux  profonds.  Yers  l'extrémité  antérieure  du  corps ,  ces 
branches  anastomotiques  latérales  sont  souvent  au  moins  aussi 
développées  que  les  troncs  dont  elles  partent,  de  façon  que  le 
vaisseau  dorsal  semble  se  continuer  sans  interruption  avec  le 
vaisseau  sous-intestinal  et  former  autour  de  l'œsophage  un  gros 
collier  vasculaire. 

Enfin  le  sang  passe  aussi  des  vaisseaux  sous-cutanés  dans 
le  système  dorsal,  ou  de  celui-ci  dans  les  premiers,  par  des 
branches  transversales  (ou  latéro-dorsales  ) ,  et  toutes  les  par- 
ties de  l'appareil  circulatoire  se  trouvent  ainsi  en  communication 
plus  ou  moins  facile  les  unes  avec  les  autres. 

En  résumé,  cet  appareil  se  compose  donc  généralement  de 
trois  portions  principales  plus  ou  moins  indépendantes,  ou  sys- 
tèmes de  vaisseaux  :  un  système  cutané  latéral  ou  ventral  ;  un 
système  dorsal  ou  sus-intestinal ,  et  un  système  abdominal  ou 
sous-intestinal. 

Voyons  maintenant  l'emploi  que  la  Nature  fait  de  ces  divers 
matériaux  organiques  chez  les  différents  Animaux  de  cette 
classe. 


Système 
vasculaire 

des 
Hirudinces. 


254  CIRCULATION    DU    SANG 

§  7.  —  Dans  l'ordre  des  Hirudinées,  ou  Sangsues  (i),  les 
deux  moitiés  du  système  vasculaire  cutané  sont  toujours  dis- 
tinctes ,  tandis  que  la  centralisation  est  au  contraire  complète 
dans  le  système  vasculaire  viscéral. 

On  trouve  donc  toujours -chez  ces  Annélides  un  tronc  dorsal 
médian  et  deux  troncs  latéraux. 

Chez  un  petit  nombre  d'entre  eux ,  les  Malacobdelles ,  par 


(1)  L'appareil  vasculaire  des  Sang- 
sues a  été  l'objet  de  beaucoup  de  tra- 
vaux anatomiques.  Les  principaux 
troncs  superficiels  ont  été  signalés  par 
Dillenius  (a),  Bibiena(è)  et  Cuvier(c). 
Ce  dernier  a  injecté  les  branches  ana- 
stomotiques  qui  unissent  entre  eux 
les  vaisseaux  latéraux,  mais  il  n'a 
pas  découvert  les  relations  qui  exis- 
tent entre  ceux-ci  et  le  vaisseau  dor- 
sal. De  nouvelles  observations  sur  ce 
sujef  furent  faites  ensuite  par  Tho- 
mas (d),  Home  (e),  Johnson  (/"),  liaus- 
mann  (g),  Bojanus  (h)  et  quelques 
autres  naturalistes,  mais  sans  qu'il  en 
résultât  aucun  progrès  bien  notable. 
M.  Délie  Chiaje  fut,  je  crois,  le  pre- 
mier à  bien  faire  connaître  le  tronc 
ventral  qui  est  en  connexion  avec  le 
système  nerveux  ;  mais,  tout  en  con- 


statant les  anastomoses  des  branches 
de  ce  vaisseau  avec  celles  du  vaisseau 
dorsal,  il  ne  saisit  pas  les  relations 
de  cette  portion  de  l'appareil  vascu- 
laire avec  celles  dont  les  troncs  laté- 
raux constituent  la  partie  fondamen- 
tale, et  il  ne  put,  par  conséquent,  se 
former  une  idée  juste  de  la  circula- 
tion chez  ces  Annélides  (i). 

En  1828,  la  disposition  des  vais- 
seaux sanguins  de  la  Sangsue  fut  étu- 
diée d'une  manière  plus  approfondie 
par  M.  J.  Millier  (/)  et  par  Weber  (k), 
ainsi  que  par  Dugès,  de  Montpellier  {l), 
et  encore  que  ce  dernier  n'ait  pas  bien 
interprété  tous  les  faits  qu'il  avait 
constatés,  on  lui  doit  beaucoup  d'ex- 
cellentes observations.  Peu  de  temps 
après,  M.  Brandt  donna  une  descrip- 
tion et  des  figures  plus  complètes  de 


(a)  Dillenius,  De  Hirudine  (Ephem.  Acad.  Nat.  cur.,  1719,  cent,  vn  et  vin,  p.  338). 

(b)  Bibiena  ,  De  Hirudine  sermones  quinque  (Comment.  Instit.  Bonon.,  1791,  t.  VII,  p.  55, 
pi.  2). 

(c)  Cuvier,  Sur  les  Vers  qui  ont  le  sang  rouge  [Bulletin  de  la  Soc.  philom.,  1802,  p.  121). 
i —  Leçons  d'anatomie  comparée,  1805,  t.  IV,  p.  413. 

(d)  Thomas,  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  naturelle  des  Sangsues.  In-8,  1806,  p.  56  et 
suiv. 

(e)  Home,  Lectures  on  Compar.  Anat.,  t.  IV,  pi.  39,  fig.  3. 

(/■)  Johnson,  A  Treatise  on  the  Médicinal  Leech.  In-8,  1816,  p.  115. 

(g)  Hausmann,  Anatomische-physiologische  Untersûchungen  uber  den  Blutegel.  Berllner,  1817. 

(Il)  Bojanus,  Bau  des  Blutegels  (Isis,  1817,  p.  881,  et  1818,  p.  2089). 

(i)  Délie  Chiaje,  Memorie  sulla  storia  e  notomia  degli  Animali  senza  vertèbre  del  regno  di 
Napoli,  1823,  t.  I,  p.  20,  pi.  1,  fig.  1. 

(j)  J.  Millier,  Ueber  den  Kreislauf  des  Blutes  bei  Hirudo  vulgaris  (Meckel's  Archiv  fur  Anatomie 
iind  Physiologie,  1828,  p.  22,  pi.  1,  fig.  1  et  2). 

(k)  E.  Weber,  Ueber  die  Enlwickelung  des  Medicinischen  Blutegel  (Meckel's  Archiv,  1828  , 
p.  400  et  suiv.). 

(I)  Dugès,  Recherches  sur  la  circulation,  la  respiration  et  la  reproduction  des  Annélides 
Abranches  (Ann.  des  sciences  naturelles,  1828,  t.  XV,  p.  309,  pi.  8,  fig.  2). 


CHEZ    LES    VERS.  255 

exemple ,  le  système  viscéral  est  peu  développé  et  ne  paraît 
consister  que  dans  le  vaisseau  dorsal  et  ses  branches  ;  l'appa- 
reil vasculaire  ne  se  compose  alors  que  de  trois  troncs  longitu- 
dinaux ,  l'un  supérieur  et  adhérent  au  canal  digestif,  et  deux 
latéraux ,  placés  sous  la  peau  :  le  système  sous-intestinal 
manque  (1). 
Mais,  dans  la  grande  majorité  des  cas,  l'appareil  circulatoire 


l'ensemble  de  cet  appareil  (a),  et  plus 
récemment,  de  nouveaux  éclaircisse- 
ments sur  divers  points  ont  été  ob- 
tenus par  les  recherches  de  MM.  de 
Qnatrefages,  Gratiolet  et  Williams  (6). 

Pour  l'historique  des  travaux  faits 
sur  ce  sujet  pendant  la  première  par- 
tie du  siècle  actuel,  on  peut  consulter 
les  ouvrages  de  M.  Otto  (c)  et  Moquin- 
Tandon  [d),  ainsi  qu'un  article  de 
Oken  (g). 

Depuis  quelques  années,  l'appareil 
circulatoire  a  été  étudié  aussi  avec 
soin  chez  plusieurs  autres  Hirudinées 
dont  il  sera  parlé  ci-dessous. 

(1)  Chez  les  Malacobdelles,  le  sang 
est  incolore,  et  par  conséquent  les 
vaisseaux  sont  plus  difficiles  à  distin- 
guer. Mais  M.  Blanchard  est  parvenu 
à  les  injecter  et  en  a  donné  de  très 
belles  figures.  Le  vaisseau  dorsal  suit 
les  sinuosités  de  l'intestin  à  la  face 
supérieure  duquel  il  adhère,  et  fournit 
en  arrière  quelques  rameaux  à  la  ven- 


touse anale  ;  mais  il  n'a  point  de  bran- 
ches dans  les  deux  tiers  de  sa  lon- 
gueur :  vers  l'extrémité  antérieure  du 
corps,  il  envoie  aux  téguments  des 
ramifications  nombreuses,  et  il  se  ter- 
mine en  avant  par  deux  branches  qui 
embrassent  la  ventouse  buccale,  mais 
ne  forment  pas  de  collier  œsophagien 
et  ne  donnent  pas  naissance  à  un  vais- 
seau sous-intestinal.  Les  troncs  laté- 
raux occupent  les  côtés  de  la  face  in- 
férieure du  corps,  et  fournissent  en 
dedans,  ainsi  qu'en  dehors,  des  bran- 
ches rameuses  en  assez  grand  nombre, 
maisilsne  s'anastomosent  directement 
entre  eux,  ni  par  leur  extrémité,  ni 
par  des  vaisseaux  commissuraux  (f). 
D'après  les  observations  de  M.  Odier, 
la  dégradation  de  l'appareil  circula- 
toire serait  beaucoup  plus  considé- 
rable chez  les  Branchiobdelles,  petites 
Hirudinées  qui  vivent  sur  les  bran- 
chies des  Écrevisses.  En  effet,  cet  au- 
teur n'a  pu  y  découvrir  qu'un  vaisseau 


(a)  Brandt  et  Ilalzebourg,  Medicinische  Zoologie,  1829,  Bd.  I,  p.  261,  pi.  29  B,  %.  8,  9,  10 
et  11. 

(b)  Quatrefages  ,  Planche  analomique  inaérée  dans  l'Atlas  de  la  grande  édition  du  Règne  animal 
de  Clavier  (ArraÉLiDES,  pi.  24,  fig.  1,  1  a). 

—  Williams,  Reports  on  the  British  Annelida  (Rep.  of  the  Brit.  Associât,  for  the  Advanc. 
of  Science,  1851,  p.  159). 

—  Gratiolet,  Mém.  sur  le  système  vasculaire  de  la  Sangsue  médicinale  et  de  l'Aulastome  vorace 
(Ann.  des  sciences  nat.,  1850,  3"  série,  t.  XIV,  p.  169,  et  Comptes  rendus,  t.  XXXI,  p.  699). 

(c)  Otto,  Der  Medicinische  Biutegel.  Weimar,  1835,  p.  65  et  s.uiy. 

(d)  Moqmn-Tandon,  Monographie  de  la  famille  des  Hirudinées,  2'  édit.,  1846,  p.  133  et  suiv. 

(e)  Oken,  Amnerkungen  zu  vorstehender  Abhandlung  Délie  Chiaje's  (Isis,  1832,  p.  635). 

\f)  Blanchard,  Second  Mémoire  sur  l'organisation  des  Malacobdelle's  (  Ann.  des  sciences  nat., 
1849,  3"  série,  t.  XII,  p.  268,  pi.  5,  fig.  1  et  2). 


256  CIRCULATION    DU    SANG 

des  Hirudinées  se  complète  davantage ,  et  l'on  trouve  aussi  un 
système  vasculaire  sous-intestinal  dont  les  deux  moitiés  se 
confondent  sur  la  ligne  médiane  de  façon  à  entourer  la  chaîne 
ganglionnaire  du  système  nerveux  comme  une  sorte  de  gaine 
vasculaire.  Il  y  a  donc,  chez  ces  Annélides  suceurs,  quatre 
troncs  longitudinaux,  un  médio-dorsal ,  un  médio-ventral  et 
deux  latéraux. 

Les  branches  qui  partent  de  ces  vaisseaux  longitudinaux, 
soit  pour  les  réunir  entre  eux ,  soit  pour  porter  le  sang  dans  les 
parties  voisines,  sont  en  petit  nombre  et  ne  se  ramifient  que 
peu  chez  quelques  espèces ,  telles  que  les  Clepsines  (1)  ;  mais 


dorsal  se  recourbant  autour  de  l'œso- 
phage pour  former  ensuite  un  vaisseau 
sous-intestinal  ;  et  il  n'a  trouvé  au- 
cune trace  du  système  vasculaire  sous- 
cutané  (a).  Les  recherches  plus  ré- 
centes de  M.Henleont  donné  à  ce  sujet 
les  mêmes  résultats  (6)  ;  et  comme  les 
Branchellions  ont  le  sang  rouge  et  les 
téguments  assez  transparents,  on  peut 
croire  que  les  troncs  latéraux  dont 
les  autres  espèces  de  la  même  famille 
sont  pourvues  manquent  effective- 
ment ici.  Les  observations  que  j'ai  eu 
l'occasion  de  faire  sur  ces  petits  Ani- 
maux tendraient  également  à  établir 
la  non  -  existence  de  vaisseaux  laté- 
raux. Mais  je  conserve  encore  beau- 
coup de  doute  à  cet  égard,  parce 
qu'il  arrive  souvent  que  là  où  le  sys- 
tème sous-cutané  est  bien  développé, 
il  cesse  d'être  visible  momentané- 
ment, par  suite  de  la  contraction  de 
ses  diverses  parties  et  du  reflux  du 
sang  dans  les  vaisseaux  du  système 
viscéral. 


(1)  M.  Budge,  à  qui  l'on  doit  une 
monographie  anatomique  très  étendue 
du  Clepsina  bioculata  de  Savigny, 
décrit  de  la  manière  suivante  l'appareil 
vasculaire  de  ce  Ver  (c).  On  y  voit,  de 
même  que  chez  les  autres  Hirudinées, 
quatre  troncs  longitudinaux  :  un  mé- 
dio-dorsal, deux  latéraux  et  un  abdo- 
minal. Le  vaisseau  dorsal  présente 
dans  sa  longueur  quatre  portions  as- 
sez distinctes.  La  portion  postérieure 
ou  anale  est  un  peu  dilatée,  surtout 
vers  le  milieu,  et  reçoit  :  1  °  un  nom- 
bre assez  considérable  de  branches 
simples,  recourbées  en  forme  d'anses, 
venant  de  l'extrémité  du  vaisseau 
ventral  et  correspondant  à  la  ventouse 
postérieure  ;  2°  une  paire  de  troncs 
intermédiaires  qui  viennent  des  vais- 
seaux latéraux  et  qui,  chemin  faisant, 
s'anastomosent  avec  des  branches 
transversales  dont  il  sera  bientôt  ques- 
tion. La  portion  suivante  du  vais- 
seau dorsal  est  grêle ,  et  correspond 
à  la  région  gastrique  postérieure  du 


(a)  Odier,  Mém.  sur  le  Branchiob délie  (Mém,  de  laSoc.  d'hist.  nat.  de  Paris,  1823,  1. 1,  p.  73). 

(6)  Henle,  Ueber  die  Gattung  Branchiobdella  (Miiller's  Archiv  fiir  Anat.  und  Physiol.,  1835, 
p.  575). 

(c)  J.  Budge,  Clepsina  bioculata  (Verhandïungen  des  naturhistorischen  Vereines  der  Preus- 
BÎschen  Rheinlande  und  Westphaliens,  1849,  Bd.  VI,  p.  106  et  suiv.). 


CHEZ    LES    VERS. 


257 


elles  offrent  en  général  un  développement  très  considérable,  et    vaisseaux 

,  lin  l'e  la  Sangsue. 

forment  chez  la  Sangsue  médicinale  un  ensemble  fort  complexe. 
Elles  tendent  à  se  répartir  uniformément  dans  toute  la  longueur 
du  corps,  et  dans  chacun  des  anneaux  ou  segments  dont  celui- 
ci  se  compose  leur  disposition  est  à  peu  près  la  même. 

Ainsi ,  dans  la  Sangsue  médicinale ,  le  vaisseau  dorsal  qui 
adhère  assez  intimement  à  la  face  supérieure  du  canal  digestif 
s'étend  dans  toute  la  longueur  du  corps  et  offre  d'espace  en 
espace  de  légères  dilatations.  Antérieurement  il  se  bifurque ,  et 
les  branches  qu'il  forme  ainsi  représentent  les  deux  moitiés 
primitives  de  ce  système.  De  chaque  côté  on  en  voit  partir  aussi 


(ube  digestif;  elle  s'anastomose  avec 
des  vaisseaux  qui  entourent  les  quatre 
dernières  paires  de  caecums  gastriques, 
et  reçoit  aussi  quatre  paires  de  bran- 
ches transversales  venant  du  vaisseau 
intermédiaire  dont  il  a  été  fait  men- 
tion ci-dessus.  La  troisième  portion 
du  vaisseau  dorsal,  correspondant  à  la 
région  gastrique  antérieure,  ne  donne 
des  branches  qu'à  sa  partie  antérieure, 
et  se  fait  remarquer  par  les  flexuosités 
nombreuses  qui  s'y  observent  quand 
l'Animal  est  dans  l'état  de  repos.  Des 
étranglements  se  prononcent  alors 
aux  points  de  courbure  et  divisent  le 
tronc  en  une  série  de  quinze  petites 
chambres  dont  l'entrée,  située  en  ar- 
rière, est  garnie  d'une  sorte  de  val- 
vule formée  par  un  tubercule  arrondi 
et  attaché  à  la  paroi  par  un  pédoncule 
très  fin.  La  portion  antérieure  ,  ou 
œsophagienne,  du  vaisseau  dorsal  est 
très  grêle  et  ne  donne  de  branches 
qu'à  son  extrémité  antérieure,  où  elle 
se  bifurque  pour  aller  s'anastomoser 


avec  le  vaisseau  ventral.  Trois  paires 
de  branches  qui  naissent  de  la  partie 
antérieure  de  la  portion  tlexueuse  et 
renflée  du  vaisseau  médio-dorsal  se 
dirigent  aussi  en  avant,  et  après  avoir 
formé  des  anses  dans  la  région  cépha- 
lique  du  corps,  vont  déboucher  éga- 
lement dans  le  vaisseau  ventral.  Enfin, 
les  troncs  latéraux  sont  unis  entre  eux 
par  un  vaisseau  transversal  dans  cha- 
que anneau  du  corps,  et,  ainsi  que 
M.  de  Filippi  l'a  constaté  par  des  in- 
jections, ils  communiquent  aussi  avec 
le  vaisseau  ventral  par  leur  extré- 
mité (a).  Comme  d'ordinaire,  le  sang  se 
dirige  en  général  d'arrière  en  avant 
dans  le  vaisseau  dorsal ,  et  en  sens 
contraire  dans  les  vaisseaux  latéraux 
ainsi  que  dans  le  vaisseau  ventral; 
mais  les  valvules  situées  dans  le  pre- 
mier de  ces  troncs  longitudinaux  ne 
s'opposent  pas  complètement  au  re- 
flux de  ce  liquide  ,  et  parfois  se  ren- 
versent tout  à  fait  en  arrière,  de 
façon  à  permettre  au  courant  de  s'é- 


(«)  De  Filippi,  Memoria  sugll  Anellidi  délia  famiglia  délie  Sanguisughe,  1837,  p.  7. 
—  Budge,  loc.  cit.,  p.  106,  pi.  0,  fig.  24  à  27. 

m.  17 


258  CIRCULATION   DU    SANG 

une  série  de  branches  transversales  dont  les  unes  contournent 
latéralement  le  tube  digestif  pour  aller  s'anastomoser  avec  le 
vaisseau  abdominal ,  envoient  leurs  ramifications  dans  les 
parois  de  ce  tube  et  constituent  ainsi  les  vaisseaux  dits  eommis- 
suraux  profonds,  mais  dont  les  autres  vont  rejoindre  les  vais- 
seaux latéraux  ou  sous-cutanés,  et  représentent,  par  conséquent, 
les  vaisseaux  commissuraux  latéro-dorsaux.  Vers  le  tiers  posté- 
rieur du  corps,  le  tronc  médio-dorsal  fournit  aussi  une  branche 
impaire  qui  se  dirige  en  arrière  et  se  distribue  à  l'intestin.  Le 
vaisseau  médian  sous-intestinal,  ou  tronc  abdominal,  enve- 
loppe ,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  la  chaîne  nerveuse  (1) ,  et  l'on 


tablir  d'avant  en  arrière  dans  toute 
la  longueur  du  vaisseau  médio-dorsal. 

Dans  une  première  publication , 
M.  de  Filippi  avait  annoncé  que  chez 
les  Clepsines  les  branches  transver- 
sales des  vaisseaux  latéraux  commu- 
niquaient directement  avec  la  cavité 
digestive  (a).  Mais,  plus  récemment, 
ce  naturaliste  a  rectifié  lui-même  cette 
erreur  (6). 

D'après  M.  Leydig,  l'appareil  cir- 
culatoire de  ces  Hirudinées  serait  plus 
complexe;  car,  indépendamment  du 
tronc  médio-dorsal  du  vaisseau  ven- 
tral, des  troncs  latéraux  et  des  bran- 
ches transversales  dont  il  a  été  ques- 
tion ci-dessus,  ce  naturaliste  décrit  un 
grand  sinus  ventral  qui  loge  le  canal 
intestinal  dans  son  intérieur,  et  qui 
communiquerait,  par  une  série  de 
branches    anastomotiques     transver- 


sales, avec  chacun  des  vaisseaux  laté- 
raux (c).  Mais  je  suis  porté  à  croire 
que  la  compression  employée  pour 
étendre  l'animal  sur  le  porte-objet 
du  microscope  a  pu  déterminer  des 
ruptures  intérieures,  et  faire  commu- 
niquer les  vaisseaux  proprement  dits 
avec  le  système  lacunaire  et  la  cavité 
viscérale.  M.  Leydig  a  vu  aussi  les 
branches  anastomotiques  transversales 
se  dilater  en  forme  d'ampoules. 

(1)  On  avait  d'abord  pensé  que  le 
vaisseau  abdominal  des  Sangsues  était 
simplement  accolé  au  cordon  ner- 
veux (d)  ;  mais  aujourd'hui  tous  les 
anatomistes  qui  ont  étudié  d'une  ma- 
nière approfondie  le  système  circula- 
toire des  Hirudinées  s'accordent  à 
dire  que  la  chaîne  ganglionnaire  y  est 
renfermée  (e),  disposition  dont  il  est 
d'ailleurs  assez  facile  de  trouver  l'ex- 


(o)  De  Filippi,  Littera  al  D.  Rusconi  sopra  l'analomia  e  lo  sveluppo  dalle  Clepsine,  1839,  p.  8 
(extr.  du  Giornale  dclle  scienz-e  medico-chirurgicale  di  Pavia,  vol.  XI,  fasc.  61). 
(6)  Attidell  ottava  retmione  degli  scienaiati  italiani.  Genova,  1846,  p.  522. 

(c)  Fr.  Leydig',  Zwn  Circulations und  Respirations-System  von  Neplielié  und  Clepsina  (KôHikgr, 
Zweiter  Bericht  von  der  Zootomischen  Anstalt  %u  Wûrzburg,  1849,  p.  16,  pi.  2,  %.  9). 

(d)  Dugès,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1828,  t.  XV,  p.  309). 

(e)  Johnson,  Treat.  on  the  Médicinal  Leech,  p.  115. 
—  J.  Mùller,  Op.  cit.  (Meckel's  Archiv,  1828). 

»-=  Moquin-Tandon,  Monogr.  des  Hirudinées,  p.  134, 


CHEZ    LES    VERS.  259 

y  remarque  d'espace  en  espace  des  élargissements  correspon- 
dants aux  divers  ganglions  dont  cette  chaîne  se  compose  ; 
enfin  il  se  bifurque  antérieurement  comme  le  vaisseau  dorsal , 
et  s'anastomose  avec  les  branches  terminales  de  celui-ci  en 
embrassant  l'œsophage.  Les  troncs  latéraux  du  système  sous- 
cutané  sont  très  développés  et  s'unissent  entre  eux  aux  deux 
extrémités  du  corps,  de  façon  à  former  un  cercle  complet.  Les 
vaisseaux  transverses  ou  commissuraux  inférieurs  (1),  qui  les 
unissent  directement  entre  eux  d'anneau  en  anneau,  sont  aussi 
d'un  calibre  considérable,  et  fournissent  une  multitude  de  bran- 
ches dont  les  unes  établissent  entre  ces  troncs  des  anastomoses 
directes  et  les  autres  se  distribuent  tant  à  l'appareil  tégumentaire 
qu'aux  viscères  voisins.  Des  branches  anastomotiques  latéro- 
dorsales  naissent  aussi  de  ces  troncs  latéraux ,  et ,  ainsi  que  je 
l'ai  déjà  dit ,  vont  les  relier  aux  branches  transversales  corres- 
pondantes du  vaisseau  dorsal.  Enfin  il  est  aussi  des  rameaux 
qui  se  détachent  de  ces  mêmes  troncs  pour  se  distribuer  direc- 
tement dans  les  parties  voisines  de  l'enveloppe  générale  du 
corps  (2) ,  et  pour  se  rendre  aux  vésicules  contractiles  que 
divers  naturalistes  avaient  considérées  à  tort  comme  étant  des 
poches  pulmonaires  (3).  La  quantité  de  sang  qui  arrive  ainsi 
à  ces  derniers  organes  est  souvent  si  considérable,  qu'on  les 

plication  si,  primitivement,  le  système  médicinale  constituent  un  réseaubeau- 

vasculaire  sous-intestinal  se  compose,  coup  plus  riche  qu'on  ne  le  suppo- 

ainsi  que  la  théorie  nous  porte  à  l'ad-  sait    (a).    Le    tissu    spongieux    que 

mettre,  de  deux  moitiés  qui  tendent  quelques   auteurs    avaient   considéré 

à  se  confondre  sur  la  ligne  médiane.  comme  un  plexus  de  vaisseaux  hé- 

(1)  Branches  latéro- abdominales  paliques  (6),  paraît  résulter  unique- 
de  Dugès.  ment  de  l'entrelacement  des  ramus- 

(2)  M.  Graiiolet  a  fait  voir  que  les  cules  variqueux  de  ces  vaisseaux  sous- 
ramifications    sous-cutanées  fournies  cutanés; 

par  les  troncs  latéraux  chez  la  Sangsue  (3)  Voyez  tome  II,  page  10/u 

(a)  Gratiolet,  Mém.  sur  l'organisation  du  système  vasculaire  de  la  Sangsue  médicinale  et  de 
l'Aulastome  vorace,  pour  servir  à  V histoire  des  mouvements  du  sang  dans  les  Hirudinées  [Ann. 
des  sciences  nat.,  3e  série,  1850,  t.  XIV,  p*  490], 

(6)  Moquin-Tandon,  Op.  cit.,  p.  109. 


260  CIRCULATION    DU    SANG 

prendrait  facilement  pour  des  réservoirs  remplis  de  ce  liquide, 
et  je  suis  porté  à  croire  que  cette  circonstance  a  induit  en  erreur 
quelques  observateurs  (1).  En  effet,  il  me  semble  probable  que 
les  vésicules  contractiles  qui  occupent  les  côtés  du  corps  chez 
les  Branchellions ,  les  Néphélis  et  les  Piscicoles ,  et  qui  ont 
été  décrites  sous  le  nom  d'ampoules  sanguifères  ou  même  de 
cœurs  ,  ne  sont  autre  chose  que  des  organes  de  ce  genre  dont 
les  parois  sont  très  riches  en  vaisseaux  capillaires,  mais  dont  la 
cavité  ne  reçoit  pas  le  sang  dans  son  intérieur.  Quoi  qu'il  en 
soit,  ces  sacs  pulsatiles  paraissent  jouer  un  certain  rôle  dans 
l'acte  de  la  respiration  ainsi  que  dans  le  mécanisme  de  la  circu- 
lation (2). 


(1)  M.  de  Filippi  a  observé  ces  vé- 
sicules chez  les  Néphélis  ainsi  que 
chez  les  Sangsues  et  les  Hœmopis  ;  il 
les  considère  comme  des  réservoirs 
sanguifères  et  leur  donne  le  nom  de 
cœurs  (a). 

(2)  M.  Leydig,  qui,  le  premier,  a 
étudié  la  structure  intérieure  des 
Branchellions,  ou  Sangsues  branchi- 
fères,  a  signalé  l'existence  de  ces 
vésicules  contractiles,  et  a  décrit  la 
disposition  des  principaux  troncs  vas- 
culaires  de  ces  Annélides  (b)  ;  mais 
il  n'a  pas  bien  saisi  les  relations  de 
ce  système  avec  l'appareil  irrigatoire 
lacunaire  ,  partie  très  intéressante  de 
l'histoire  des  Branchellions  dont  on 
doit  la  connaissance  à  M.  de  Quatre- 
fages  (c). 

Chez  le  Brancheliion  Orbignyensis 
de  ce  dernier  auteur,  la  cavité  géné- 
rale du  corps  remplit,   comme  nous 


l'avons  déjà  vu,  un  rôle  très  impor- 
tant dans  l'irrigation  physiologique 
ainsi  que  dans  la  respiration  (d).  Le 
système  vasculaire  sanguin  est  peu 
développé  ,  mais  les  parties  princi- 
pales de  celui-ci  sont  disposées  comme 
dans  les  autres  Annélides  du  même 
ordre.  On  trouve  par  conséquent  un 
vaisseau  médio-dorsal ,  deux  troncs 
latéraux  et  un  vaisseau  abdominal. 
Ce  dernier  enveloppe  ,  comme  d'or- 
dinaire, la  chaîne  ganglionnaire  et  est 
accompagné  par  un  vaisseau  surnu- 
méraire qui ,  à  son  extrémité  pos- 
térieure ,  communique  directement 
avec  les  vaisseaux  latéraux.  Ces  der- 
niers s'anastomosent  également  avec 
le  vaisseau  dorsal  par  des  branches 
transversales  qui  ne  se  ramifient  pas; 
ils  donnent  aussi  des  branches  à 
l'intestin  ,  et  fournissent  ,  du  côté 
externe  ,   une   série  de  petits  troncs 


(a)  F.  de  Filippi,  Memoria  sugli  Anellidi  délia  famiglia  délie  Sanguisughe.  In-4e,  Wilario,  1 837, 
p.  7. 

(6)  Fr.  Leydig,  Anatomisches  ùber  Brancheliion  und  Pontobdella  (Zeitschrift  fur  ivissenschaft- 
liche  Zoologie,  1851,  Bd.  III,  p.  315). 

(c)  Quairefages  ,  Études  sur  les  types  inférieurs  de  V embranchement  des  Annelés  :  Mém.  Sur 
le  Brancheliion  (Ann.  des  sciences  nat.,  4  852,  3°  série,  t.  XVIII,  p.  278). 

[d)  Voyez  ci-dessus,  tome  II,  page  \  00. 


CHEZ    LES    VERS. 


261 


§  8.  —  Le  mouvement  du  sang  dans  l'intérieur  de  l'appa-    Mouvement 
reil  vasculaire  des  Hirudinées  dépend  principalement  des  con-       <*« 

./>,,.,  .,  i       t       ■  -.  .les   Hirudinées. 

tractions  qui  se  manifestent  d  une  manière  rhythmique  dans  la 
plupart  des  gros  troncs  longitudinaux  ,  et  notamment  dans  le 


qui  se  dirigent  en  dehors  et  se  ren- 
dent chacun  à  une  ampoule  à  parois 
musculaires  logées  dans  un  prolon- 
gement de   la  cavité   viscérale  pra- 
tiqué à  la  base  de  chacune  des  feuilles 
branchiales.   Là   ces  ampoules ,   qui 
ressemblent  à  autant  de  petites  poches 
sanguifères,  sont  baignées  par  le  fluide 
cavitaire  qui  revient  du  réseau  capil- 
laire dont  ces  organes  respiratoires 
sont  creusés;  mais   elles  n'envoient 
dans  ceux-ci  aucune  branche.  M.  de 
Quatrefages  s'en  est   assuré  à  l'aide 
d'injections  délicates  fa),  et  comme  le 
réseau  sanguin  cutané  est  peu  consi- 
dérable, l'action  de  l'air  sur  le  sang 
doit  se  faire  principalement  par  l'in- 
termédiaire du  liquide  cavitaire.  L'au- 
teur que  je  viens  de  citer  considère 
ces  vésicules  contractiles  comme  des 
cœurs  ,   et ,  en  effet ,  si  ce  sont  réel- 
lement des   réservoirs  sanguins,  ils 
doivent  agir  comme  autant  de  petites 
pompes  foulantes,  et  concourir  à  la 
production  du    mouvement  circula- 
toire ;   mais  je  conserve  encore  quel- 
que doute  à  cet  égard,  et  je  suis  porté 
à  croire  que  ce  sont  des  poches  à  pa- 
rois vasculaires  analogues  aux  vési- 
cules que  Dugès  avait  prises  pour  des 
poumons  chez  les  Sangsues  (voy.  ci- 
dessous,  page  263). 

Chez  le  Branchellion  Torpedinis  , 
ces  ampoules    sanguifères  paraissent 


être  en  moindre  nombre  que  dans  l'es- 
pèce précédente,  où  M.  de  Quatrefages 
en  a  trouvé  dans  chaque  appendice 
branchial.  En  effet,  M.  Leydig  n'en  a 
compté  que  onze  paires  distribuées 
dans  les  branchies  de  la  première 
paire,  de  la  quatrième,  de  la  septième, 
et  ainsi  de  suite ,  de  trois  ea  trois  , 
jusqu'à  la  trente  et  unième  paire  ;  les 
cinq  derniers  feuillets  en  étant  dépour- 
vus ,  ainsi  que  ceux  des  deuxième, 
troisième  ,  cinquième  et  sixième 
paires,  etc.  (6). 

M.  Troschel  a  décrit  une  disposi- 
tion analogue  dans  le  système  vascu- 
laire des  Piscicoles.  Chez  ces  Hirudi- 
nées, il  existe  de  chaque  côté  du  corps 
onze  paires  de  vésicules ,  saillantes 
sous  la  peau,  qui  se  contractent  d'une 
manière  rhythmique  ,  et  qui,  d'après 
cet  auteur  ,  reçoivent  du  sang  en 
abondance  pendant  l'état  de  diastole. 
M.  Troschel  les  considère  comme  des 
branchies  (c). 

Peut-être  faudrait -il  rapprocher 
également  des  ampoules  sanguifères 
du  Branchellion  les  organes  contrac- 
tiles en  forme  de  vessies  que  M.  Ley- 
dig a  trouvés  à  la  partie  antérieure  du 
corps  chez  les  Pontobdelles  ;  mais  ces 
réservoirs  contractiles,  au  lieu  d'être 
des  ampoules,  sont  des  anses  dilatées. 
Ils  dépendent  des  vaisseaux  latéraux 
et  sont  logés  dans  les  éminences  ver- 


fa)  Quatrefages,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XVIII,  p.  303,  pi.  7,  %.  1,  2  et  3). 
(6)  Leydig,  toc.  cit.,  p.  316,  pi.  9,  fig.  1. 

(c)  Troschel ,  Piscicola  respirans  (Archiv  fur  Naturgeschichte ,  1850,  Bd.  I,  p.  24,  pi.  2, 
fig.  A  et/). 


262  CIRCULATION    DU    SANG 

vaisseau  dorsal  et  dans  les  deux  vaisseaux  latéraux  (1).  Le 
plus  souvent  les  vaisseaux  médians  demeurent  resserrés,  et  les 
troncs  latéraux ,  qui  sont  plus  gros  et  plus  musculaires ,  se 
contractant  alternativement,  poussent  le  sang  de  droite  à  gauche 
ou  de  gauche  à  droite  ;  mais,  dans  d'autres  moments,  le  vais- 
seau dorsal  entre  aussi  en  jeu,  et  le  sang  y  coule  ordinairement 
d'arrière  en  avant  (2).  Chez  quelques  Animaux  de  cette  famille 


ruqueuses  situées  près  du  cou.  On  en 
compte  huit  paires  (a). 

Je  dois  ajouter  que  M.  Siebold  et 
M.  Leydig  ont  vu,  chez  les  Néphélis,  de 
chaque  côté  du  corps,  une  série  d'am- 
poules sanguifères  qui  sont  en  com- 
munication avec  les  vaisseaux  trans- 
versaux, et  qui  renferment  dans  leur 
intérieur  un  organe  particulier  dont  la 
surface  est  garnie  de  cils  vibratiles  (6). 

(l)C'est  à  tort  que  divers  auteurs 
ont  annoncé  l'existence  d'un  cœur 
chez  les  Hirudinées.  Ainsi,  l'organe 
dont  du  Rondeau  a  parlé  sous  ce  nom 
n'est  autre  chose  que  la  matrice  de  la 
Sangsue  (c).  C'est  la  bourse  de  la  verge 
qu'au  premier  abord  Knolz  avait*  prise 
pour  un  cœur  [cl).  C'est  aussi  une 
portion  de  l'appareil  mâle  qui  consti- 
tue le  prétendu  cœur  de  la  petite  Hi- 
rudinée  dont  Dutrochet  a  formé  son 


genre  Trochète  (e).  D'autres  anato- 
mistes  ont  appliqué  le  nom  de  cœur 
aortique  au  vaisseau  dorsal,  et  celui 
de  cœurs  branchiaux  aux  troncs  laté- 
raux (f).  Mais  un  cœur  est  un  réser- 
voir contractile,  et  non  un  simple 
tuyau  de  distribution  à  parois  mus- 
culaires. Or,  chez  les  Hirudinées,  de 
même  que  chez  presque  tous  les  au- 
tres Annélides,  la  division  du  travail 
entre  les  organes  d'impulsion  et  les 
organes  de  distribution  ne  s'est  pas 
encore  effectuée,  et,  par  conséquent, 
ce  serait  donner  des  idées  fausses  que 
d'appeler  l'un  quelconque  de  ces  vais- 
seaux un  cœur. 

(2)  Ce  passage  alternatif  du  sang 
d'un  vaisseau  latéral  dans  celui  du 
côté  opposé  du  corps  des  Sangsues 
a  été  très  bien  décrit  par  M.  J.  Mill- 
ier (g)  ,  par  Weber  {h)  et  par  Du- 


(fl)  Leydisr,  Op.  cit.  (Zeitschr.  fur  Wissenschaftl.  Zool.,  Bd.  III,  p.  319). 
(&)  Siebold,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  t.  I,  p.  216. 

—  Leydig-,  Zum  Circulations  uni  Respirations-System  von  Nephelis  und  Clepsina  (Kolliker, 
Ziveiter  Bericht  von  der  Zootomischen  Anstalt  %u  Wûrzburg,  1849,  p.  14,  pi.  2,  fig\  16). 

(c)  Du  Rondeau,  Mém.  sur  la  Sangsue  médicinale  (Journ.  de  pliys.,  1782,  t.  XX,  p.  284  ; 
—  Mém.  Acad.  de  Brux.,  1783,  t.  III,  p.  1  53). 

(d)  Knolz,  Naturhistorische  Abhandlung  iiber  die  Blutegel,  1820. 

(e)  Dutrochet,  Note  sur  une  Annélide  d'un  genre  nouveau  (Bulletin  de  la  Société  philomatiquc, 
1817,  p.  130). 

(f)  Millier,  Ueber  den  Kreislaufdcs  Bhites  bel  Hirudo  vulgàpis  (Meckel's  Archiv  fur  Anat.  und 
Phys.,  1828,  p.  24  et  siiiv.). 

—  Wagner,  Bemerkungen  ùber  Délie  Chiaje's  Abhandlungen  (Isis,  1832,  p.  G35). 

(g)  1.  Mùller,  Ueber  den  Kreislauf  des  Blutes  bel  Hirudo  vulgaris  (Meckel's  Archiv  fur  Anat. 
und  Physiol.,  1828,  p.  22,  pi.  1,  fig\  1,  et  par  extrait  dans  la  Physiologie  de  Burdach,  t.  VI, 
p.  103). 

(h)  Weber,  Ueber  die  Entwiclcelung  des  Medicinischen  Blulegels  (Meckel's  Archiv  fur  Anat.  und 
Physiol,  1828,  p.  399). 


CHEZ    LES    VERS,  263 

on  distinguo ,  dans  l'intérieur  de  ce  dernier  vaisseau ,  des 
valvules  pédonculées  (1)  ;  mais  le  jeu  de  ces  organes  parait  être 
toujours  très  imparfait  et  ne  pouvoir  empêcher  le  reflux  du  sang 
d'avant  en  arrière. 

La  circulation  est  donc  oscillatoire  et  irrégulière  chez  les 
Hirudinées.  Des  courants  en  sens  inverses  s'établissent  alter- 
nativement dans  un  même  vaisseau ,  et  un  autre  indice  de 
l'imperfection  avec  laquelle  cette  fonction  s'y  exerce  nous  est 
fourni  par  le  défaut  d'harmonie  et  de  solidarité  dans  le  jeu  des 
différentes  parties  de  l'appareil  sanguifère.  Souvent  on  voit  le 
passage  du  sang  devenir  presque  nul  dans  une  portion  du  sys- 
tème vasculaire  pendant  qu'il  est  très  actif  dans  d'autres,  et  il 
est  rare  que  le  mouvement  circulatoire  s'effectue  à  la  fois  dans 
tout  l'organisme  ;  mais  partout  ce  fluide  parait  susceptible  de 
passer  d'un  vaisseau  dans  un  autre,  et,  s'il  revient  sur  ses  pas, 

gès  [a).  Ce  dernier  a  remarqué  aussi  fecluant  indépendamment  de  la  cir- 
que la  direction  du  courant  est  tou-  culation  générale  dans  les  organes 
jours  en  sens  inverse  dans  les  deux  qu'il  supposait  être  des  poches  respi- 
vaisseaux  latéraux  .  de  sorte  que  le  raioires  (6).  Nous  avons  vu  ailleurs 
cercle  circulatoire  s'établit  principa-  que  ces  poches  n'appartiennent  pas  à 
lement  dans  le  plan  horizontal  et  l'appareil  respiratoire  (  t.  tl,  p.  104). 
suivant  les  bords  du  corps.  Dugès  a  (1)  Ces  valvules  en  forme  de  mas- 
vu  également  qu'à  certains  moments  sue  ont  été  observées  chez  le  Piscicola 
la  circulation  s'active  dans  les  vais-  geometra,  d'abord  par  J.  Léo  (c), 
seaux  médians  et  dans  les  branches  puis  par  M.  Troschel  (c/).  Ainsi  que  je 
qui  se  distribuent  à  divers  viscères.  l'ai  déjà  dit,  M.  Budge  a  observé  une 
Mais  il  a  donné  une  interprétation  er-  disposition  tout  à  l'ait  semblable  chez 
ronée  des  phénomènes  qui  se  mani-  les  Clepsines  (e)  ,  et  AL  Leydig  en  a 
festent  dans  ce  cas,  et  il  a  été  conduit  constaté  aussi  l'existence  chez  les 
de  la  sorte  à  admettre  une  circulation  Branchellions  (f). 
pulmonaire, oupeiiie  circulation,  s'ef- 

(a)  Dugès,  Recherches  sur  la  circulation,  la  respiration  et  la  reproduction  des  Annclides 
Abranches  iAun.  des  sciences  nat.,  1828,  t.  XV,  p.  300). 

(6.1  Loc.  cit.,  p.  314,  pi.  8,  flg.  -2. 

(e)  Léo,  l'c'.cr  einije  Ausgezewhneïe  anntomlschc  und  physiolayische  Verhàllnisse  der  Pisci- 
cola geometra  (Muller's  Archiv  fur  Anat.  und  Pliysiol.,  1835,  p.  421,  pi.  11,  Gg.  II,. 

{di  Troschel,  Piscicola  respirons  l Archiv  fur  Salurgesch.,  1850,  p.  24). 

(e)  J.  BnHçre,  Clepsinabioculata  (Yerhandl.  des  Naturhist-.  Vereins  der  Preussischcil  Rheinlande, 
1840,  p.  108,  pi.  2,  fig.  2G  et  27). 

if)  I-eyilig,  Op.  ci!.  (Zeitschr.  fur  wïssenschapl.  Zoo!.,  185),  l.  111,  p.  317); 


2G/J.  CIRCUL.VTION    DU    SANG 

ce  n'est  point,  suivant  toute  probabilité,  parce  que  le  canal  où  il 
coule  se  termine  en  cul-de-sac  :  c'est  seulement  par  suite  d'un 
changement  dans  la  direction  des  contractions  ondulatoires 
sous  l'influence  desquelles  il  se  meut  (1). 

On  voit  donc  que  l'on  n'est  pas  en  droit  d'appliquer  aux  divers 
vaisseaux  des  Hirudinées  les  noms  d'artères  et  de  veines. 
Effectivement,  il  n'y  a  ici  aucun  centre  d'impulsion  ou  point  de 
départ  du  courant  ;  le  sang  ne  se  rend  pas  alternativement  d'un 
appareil  artérialisateur  aux  divers  organes  sur  lesquels  son 
action  doit  s'exercer  et  amener  sa  transformation  en  sang  vei- 
neux; enfin,  chaque  vaisseau  peut  être  le  siège  d'un  mouve- 
ment de  va-et-vient.  Ce  serait  par  conséquent  donner  une  idée 
fausse  des  choses  que  d'employer  ici  des  termes  qui  supposent 
une  division  du  travail  irrigatoire  dont  l'introduction  ne  s'ef- 
fectue que  chez  des  Animaux  à  organisation  plus  parfaite  (2). 
Appareil  §9-  —  Dans  la  grande  division  des  Annélides  Chétopodes, 
del Tnnïes  la  tenctaûce  à  la  centralisation  des  deux  moitiés  de  l'appareil 
chétopodes.  circuiat0ire  porte  sur  le  système  vasculaire  cutané  aussi  bien 
que  sur  les  deux  systèmes  vasculaires  viscéraux,  et  amène  sou- 
vent la  substitution  d'un  tronc  longitudinal  impair  et  médian 
aux  deux  troncs  latéraux,  qui  restent  distincts  chez  les  Biru- 


(1)  M.  Gratiolet,  n'ayant  pas  trouvé  pareil  vasculaire  des  Sangsues  ;  mais, 
de  communication  entre  les  branches  comme  l'application  en  était  complé- 
terminales  des  vaisseaux  sous-cutanés  tement  arbitraire,  chacun  a  agi  sui- 
des Sangsues,  a  cru  pouvoir  en  con-  vant  sa  fantaisie,  et  les  désignations 
dure  que  le  sang  ne  circule  que  dans  les  plus  contradictoires  ont  été  adop- 
le  système  vasculaire  viscéral,  et  ne  tées.  Ainsi,  les  uns  appellent  le  vais- 
serait  animé  que  d'un  mouvement  seau  dorsal  une  veine,  les  autres  une 
oscillatoire  dans  le  plexus  sous-cu-  artère,  et  les  mêmes  divergences  se 
tané  (a)  ;  mais  cette  opinion  ne  me  rencontrent  quant  à  la  détermination 
paraît  pas  fondée.  des  vaisseaux  latéraux.  11  ne  faut  donc 

(2)  Beaucoup  d'anatomistes  ont  fait  attacher  aucune  importance  à  cett'e 
usage  de  ces  noms  en  décrivant  l'ap-  nomenclature. 

[a)  Gratiolet,  Op ,  cit.  (Ami.  des  sciences  nat.,  1850,  3*  série,  t.  XIV,  p.  190). 


CHKZ    LES    VERS.  265 

dinées.  Mais  cette  tendance  s'exerce  d'une  manière  moins  uni- 
forme, et  parfois  le  système  dorsal,  ainsi  que  le  système  sous- 
intestinal,  y  échappent  en  partie.  Il  en  résulte  que  nous  ren- 
contrerons parmi  les  Chétopodes  des  modifications  beaucoup 
plus  nombreuses  dans  la  disposition  générale  de  l'appareil 
sanguifère;  mais,  à  l'aide  des  principes  déjà  posés,  il  nous  sera 
toujours  facile  d'y  retrouver  le  même  plan  fondamental  que  chez 
les  autres  Annélides. 

Ainsi,  de  même  que  chez  les  Sangsues,  le  système  vasculaire 
dorsal  des  Chétopodes  est  toujours  représenté  par  un  tronc 
impair  et  médian  dans  la  portion  antérieure  du  corps  ;  mais 
souvent  il  est  formé  par  deux  vaisseaux  longitudinaux  et  paral- 
lèles dans  tout  le  reste  de  son  étendue. 

Chez  les  Eunices,  par  exemple,  il  règne  dans  toute  la  por- 
tion moyenne  et  postérieure  du  corps  deux  vaisseaux  marchant 
côte  à  côte  le  long  de  la  ligne  médiane  du  dos,  au-dessus  du 
tube  digestif,  et  c'est  seulement  dans  la  région  pharyngienne 
qu'ils  se  réunissent  en  un  tronc  impair  (1). 

Chez  les  Hermelles,  cette  dualité  du  système  vasculaire  dor- 
sal se  voit  aussi  dans  la  portion  moyenne  du  corps,  où  les  deux 
troncs  longitudinaux  sont  même  beaucoup  plus  écartés  entre 
eux  que  chez  les  Eunices;  mais,  en  arrière  aussi  bien  qu'en 
avant,  on  les  voit  se  rapprocher,  puis  se  réunir  pour  former  un 
tronc  impair  et  médian  (2). 

(1)  Cette  disposition,  que  j'ai  fait  anneaux  du  corps  ,  mais  double  dans 

connaître  chez  l'Eunice  sanguine  (a),  tout  le  reste  de  son  étendue,  tandis 

se  voit  aussi  chez  les  Polydores,  Anne-  que  le  vaisseau  ventral  présente  une 

lides  de  la  famille  des  Anciens  qui  se  disposition  inverse  :  unique  et  médian 

rapprochent  beaucoup  des  Spw.  M.  de  dans  la  plus  grande  partie  du  corps, 

Quatrefages  a  trouvé  que  le  vaisseau  il  se  bifurque  antérieurement  (6). 

dorsal  est  simple  dans  les  premiers  (2)  J'ai  trouvé  aussi  que,  dans  toute 

(a)  Milne  Edwards ,  Recherches  pour  servir  à  l'histoire  de  la  circulation  du  sang  chez  les 
Annélides  (  Ann.  des  sciences  nat.,  1838,  2e  série,  t.  X,  p.  204,  et  Atlas  dit  Règne  animal  de 
Cuvier,  Annélides,  pi.  1  a,  fig.  2). 

(6)  Quatrefages,  Sur  la  circulation  dans  les  Annélides  {Ann.  des  sciences  nat.,  1850,  3'  série, 
t.  XIV,  p.  282). 


266  CIRCULATION    DU    SANG 

Enfin,  chez  les  Néréides,  les  Néphélis,  les  Arénicoles,  les 
Térébelles,  les  Sabelles,  etc.,  de  même  que  chez  les  Hirudinées, 
ce  rapprochement  s'est  effectué  dans  toute  la  longueur  du  corps, 
et  le  système  dorsal  est  constitué  par  un  tronc  longitudinal  im- 
pair et  médian  (1). 

Le  système  abdominal  ou  sous-intestinal  nous  offre  des 
exemples  analogues  de  centralisation  à  divers  degrés.  Ainsi, 
chez  les  Hermelles,  on  y  trouve  deux  troncs  parallèles  dans  la 
portion  moyenne  du  corps,  et,  de  même  que  pour  le  système 
dorsal,  ces  deux  moitiés  se  confondent  en  un  tronc  longitudinal 
unique  vers  l'extrémité  céphaiique,  ainsi  que  dans  toute  la  por- 
tion postérieure  du  corps. 

Enfin  des  modifications  du  même  ordre  se  rencontrent  dans 
la  constitution  du  système  vasculaire  cutané.  Tantôt  il  y  a  deux 
troncs  latéraux  situés  à  la  face  inférieure  du  corps  :  chez  les 
Pléiones,  par  exemple  (2);  d'autres  fois  ces  deux  vaisseaux  laté- 

cette  portion  moyenne  du  système  vas-  (2)  Hunter  a  été  le  premier  à  faire 
culaire  dorsal  des  Hermelles,  les  deux  connaître  cette  disposition  remarqua- 
troncs  longitudinaux  sont  réunis  entre  ble  (d).  Une  description  plus  complète 
eux  d'anneau  en  anneau  par  des  bran-  de  l'appareil  circulatoire  des  Pléiones 
ches  commissurales  transversales  (a).  a  été  donnée  par  M.  Grube  (e).  Mais 
M.  de  Quatrefages  a  vérifié  ces  observa-  ni  l'un  ni  l'autre  de  ces  anatomistes 
tions,  et  il  a  ajouté  aux  faits  que  j'avais  n'ont  rapproché  ces  faits  de  ceux  que 
constatés  plusieurs  résultats  intéres-  nous  offre  l'Arénicole  (/).  Il  est  aussi 
sants  relativement  au  mode  de  distri-  à  noter  que  Hunter  signale  l'existence 
bution  des  branches  de  ce  système  (6).  de  plexus  vasculaires  très  développés 
(1)  Voyez  les  figures  que  j'ai  don-  entre  les  vaisseaux  laléro-inférieurs  et 
nées  de  l'appareil  circulatoire  de  ces  les  pieds. 
Animaux  (c). 

(a)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat  ,  2e  série,  t.  X,  p.  208,  pi.  11,  fig.  3). 
(6)  Quatrefages,  Mémoire  sur  la  famille  des  Hermelliens  (Ann.  des  sciences  nat-,  1848,  3e  série, 
t.  X,  p.  40,  pi.  2,  fig.  1). 

(c)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  2°  série,  t.  X,  pi.  10  à  13,  et  Annélides  du 
Règne  animal  de  Cuvier,  pi.  1,  fig.  1  ;  pi.  1  a,  fig.  1  et  3  ;  pi.  1  6  ;  pi.  1  c,  lig.  1  et  2). 

(d)  Voyez  Descriptive  and  Illuslrated  Catalogue  of  the  Physiological  Séries  of  Comparative 
Anatomy  containedin  the  Muséum  of  the  R.  Collège  of  Surgeons  in  London,  1834,  vol.  II,  p.  135, 
pi    14,  fig.  10. 

(e)  A.-E.  Grubc,  De  Pleione  carunculata  dissertatio  %ootomica.  In-4  ,  1837,  p.  19,  pi.  1, 
fig.  2. 

(/)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  V  série,  t.  X,  p.  213,  pi.  13,  fig.  1  a,  et 
Annélides  du  Règne  animal,  pi.  1,  fig.  1  a). 


CHEZ    LES    VERS.  267 

raux  sont  rapprochés  au  point  de  se  toucher  presque,  disposi- 
tion qui  se  voit  chez  les  Néphélis  (1).  Mais,  dans  la  grande 
majorité  des  cas,  ils  sont  confondus  dans  toute  leur  longueur 
ou  représentés  seulement  par  un  tronc  médian  simple  et  adhé- 
rent à  la  paroi  inférieure  de  la  cavité  viscérale  :  par  exemple, 
chez  les  Néréides,  les  Eunices,  les  Térébelles,  les  Sabelles,  les 
Arénicoles,  etc. 

Chez  un  petit  nombre  d'Annélides  Chétopodes,  l'appareil 
vasculaire  se  complique  davantage,  par  suite  du  développement 
de  quelques  branches  anaslomotiques  secondaires  qui  se  trans- 
forment en  troncs  longitudinaux  surnuméraires.  Ainsi,  chez 
les  Arénicoles,  chacune  des  branches  transversales  latéro-dor- 
sales  fournit  une  petite  branche  sous-cutanée  qui  se  porte  en 
arrière  et  se  termine  par  un  ramuscule  anastomotique  dans  le 
tronc  latéro-dorsal  suivant.  Chez  les  Pléiones,  ces  branches 
récurrentes  se  développent  davantage,  et  se  continuant  les  unes 
avec  les  autres,  forment  de  chaque  côté  du  corps  un  tronc 
longitudinal  surnuméraire  qui  relie  entre  elles  toutes  les  bran- 
ches transversales  du  système  dorsal  (2).  Des  complications 
analogues  se  manifestent  dans  le  système  vasculaire  viscéral 
des  Arénicoles,  et  l'on  rencontre  aussi  chez  certaines  Anné- 
lides  diverses  modifications  dans  le  mode  de  distribution  ou 
d'anastomose  des  branches  secondaires  de  chacun  des  troncs 
longitudinaux  ;  mais  ces  variations  dans  les  détails  ne  changent 
rien  d'essentiel  au  plan  général  de  l'appareil  circulatoire  de 
ces  Animaux,  et  n'ont  pas  assez  d'importance  pour  nous  ar- 
rêter ici. 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  quelques  Annélides  Chétopodes, 

(1;  Je  n'ai  pas  aperçu  débranches  (2)   Voyez   ci -après,   page  '273, 

commissurales  entre  ces  deux  vais-      note, 
sea  u    (a). 

(a)  Milne  Edwards,  Annélides  du  Règne  animal  do  Gitvier,  pi.  1  a,  fig.  3  a. 


268  CIRCULATION    DU    SANG 

de  même  que  chez  les  Hirudinées  inférieures  ,  l'appareil  vas- 
culaire  s'appauvrit  et  ne  présente  plus  que  deux  troncs  longi- 
tudinaux, l'un  dorsal,  appartenant  au  système  viscéral,  l'autre 
inférieur,  et  représentant  le  système  sous-cutané.  Ce  mode 
d'organisation  se  voit  chez  les  Tubifeœ{\). 
organes         §  10.  —  Les  organes  moteurs  dans  l'appareil  circulatoire  des 

moteurs  du  sang     .  ,,.  ,  ~,    /  -.  . 

chez       Annelides  Chetopodes  sont,  en  premier  heu,  les  vaisseaux  dis— 

les  Annelides        ..  A 

chetopodes.  tributeurs  eux-mêmes,  qui  ont  des  parois  plus  ou  moins  mus- 
culaires. Dans  tous  les  gros  troncs,  et  principalement  dans  le 
vaisseau  dorsal,  on  remarque  en  effet  des  mouvements  pulsatiles 
qui  se  propagent  d'une  manière  péristaltique  et  poussent  le 
liquide  devant  eux.  Chez  beaucoup  de  ces  animaux,  les  troncs 
vasculaires  qui  agissent  de  la  sorte  ne  présentent  dans  leur 
conformation  rien  de  particulier  ;  mais,  chez  d'autres,  ils  se 
modifient,  dans  certaines  parties  du  cercle  circulatoire,  de 
façon  à  devenir  des  agenls  d'impulsion  plus  puissants  :  on  les 
voit  s'y  dilater  au  point  de  constituer  des  espèces  de  poches  ou 
réservoirs  contractiles  dont  la  capacité  est  très  grande  relative- 
ment à  celle  des  canaux  adjacents,  et  à  chaque  contraction 
ils  lancent  alors  dans  ceux-ci  une  ondée  de  sang  plus  consi- 
dérable. Enfin  l'appareil  circulatoire  se  perfectionne  aussi  par 
la  voie  des  emprunts  physiologiques  ,  et ,  dans  quelques 
espèces ,  on  voit  les  organes  respiratoires  venir  en  aide  aux 
organes  moteurs  du  sang,  et  contribuer  par  leurs  contrac- 
tions et  leurs  dilatations  alternatives  à  y  activer  le  courant 
irrigatoire. 

Comme  exemple  d'un  appareil  circulatoire  dont  les  vaisseaux 
principaux  remplissent  les  fonctions  d'organes  moteurs ,  sans 
offrir  dans  leur  conformation  aucune  particularité  qui  soit  de 
nature  à  favoriser  cette  action,  je  citerai  celui  des  Néréides  (2). 

(1)  Voyez  ci-après,  page  275.  mentaire,  comme  cela  a  lieu  chez  la 

(2)  Le  vaisseau  dorsal  des  Néréides  plupart  des  Annelides,  et  se  trouve 
n'adhère  pas  à  la  surface  du  tube  ali-      remonté  contre  la  voûte  de  la  cavité 


CHEZ    LES    VERS.  269 

Le  vaisseau  dorsal  de  ces  Vers  ne  se  dilate  nulle  part  de  façon  à 
constituer  un  réservoir  où  le  sang  puisse  s'accumuler,  et  il  se 
contracte  successivement  dans  toute  sa  longueur  pour  pousser 
ce  liquide  de  la  partie  postérieure  du  corps  vers  la  tête. 

Chez  les  Eunices,  la  localisation  du  travail  moteur  se  prononce 
davantage,  et  là  où  les  vaisseaux  sont  appelés  à  y  intervenir 
d'une  manière  puissante,  non-seulement  leurs  parois  deviennent 
plus  musculaires,  mais  leur  capacité  augmente  ;  de  façon  que 


viscérale,  de  façon  à  être  entièrement 
sous-cutané.  Il  est  assez  grêle  dans 
toute  sa  longueur,  et  ne  fournit  que 
peu  de  branches  dans  la  région  pha- 
ryngienne du  corps;  mais  au  niveau 
du  commencement  de  l'œsophage  il 
envoie  au  tube  digestif  une  série  nom- 
breuse de  vaisseaux  impairs  qui , 
après  un  trajet  assez  long,  vont  se 
ramifier  dans  les  parois  de  cet  organe, 
et  qui  représentent  les  branches  paires 
ou  commissn  raies  profondes,  à  l'aide 
desquelles  le  système  dorsal  des  au- 
tres Annélides  s'anastomose  avec  le 
système  sous-intestinal.  Dans  chaque 
anneau,  à  partir  du  septième  ou  hui- 
tième ,  le  tronc  dorsal  donne  éga- 
lement naissance  à  une  paire  de 
vaisseaux  transversaux  qui  vont  se 
rendre  aux  pieds  correspondants,  et 
qui  représentent  la  portion  dorsale 
des  vaisseaux  latéraux  à  l'aide  des- 
quels le  système  dorsal  des  Uirudinées 
communique  avec  les  troncs  longitu- 
dinaux du  système  vasculaire  cutané. 
Mais  ici  ces  vaisseaux  transverses  ne 
débouchent  pas  directement  dans  le 
tronc  cutané  inférieur  correspondant 
aux  deux  vaisseaux  latéraux  en  ques- 
tion, ils  s'anastomosent  seulement  avec 


les  ramifications  terminales  des  bran- 
ches latérales  que  ce  dernier  envoie 
aussi  à  la  base  des  pieds.  Ce  vaisseau 
ventral  paraît  tenir  lieu  à  la  fois 
des  deux  paires  de  troncs  longitudi- 
naux qui,  dans  la  forme  typique  sim- 
ple de  l'appareil  vasculaire  des  Anné- 
lides, occupent  la  face  inférieure  du 
corps,  et  appartiennent,  l'une  au  sys- 
tème cutané,  l'autre  au  système  vis- 
céral. En  effet ,  ce  tronc  ventral 
impair  et  médian  fournit  dans  cha- 
que segment  du  corps  une  paire  de 
branches  transversales  qui  se  bifur- 
quent et  envoient  un  rameau  dans 
l'appareil  tégumentaire  pour  s'y  ana- 
stomoser avec  les  divisions  terminales 
du  système  dorsal,  et  un  autre  dans 
les  parois  du  tube  digestif,  où  il  s'ana- 
stomose pareillement  avec  les  bran- 
ches gastriques  du  vaisseau  dorsal. 
Il  est  aussi  à  noter  qu'à  l'extrémité 
antérieure  du  corps  les  branches  ana- 
stomotiques  du  vaisseau  dorsal  et  du 
vaisseau  ventral  se  réunissent  par 
l'intermédiaire  d'un  réseau  capillaire 
extrêmement  riche  appartenant  à 
deux  paires  de  grandes  vésicules  mem- 
braneuses dont  les  usages  ne  sont  pas 
encore  bien  connus  (a). 


(a)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat-,  2e  série,  t.  X,  p.  210,  pi.  12,  fig.  1,  et 
Annélides  du  Règne  animal,  pi.  1  a,  fig.  1). 


270 


CIRCULATION    DU    SANG 


l'effet  produit  sur  le  courant  circulatoire  par  chacune  de  leurs 
contractions  devient  plus  grand.  Ainsi,  dans  la  région  pharyn- 
gienne, le  vaisseau  dorsal  est  très  dilaté,  et  constitue  un  gros 
tube  charnu  fusiforme  et  onduleuxqui  pousse  avec  force  le  sang 
vers  la  tête,  et  chacune  des  branches  transversales  du  vaisseau 
médian  sous-cutané  ou  ventral,  avant  de  se  rendre  au  pied  et 
à  la  branchie  correspondante ,  offre  un  renflement  en  forme 
d'anse  pulsatile  dont  les  contractions  impriment  une  nouvelle 
impulsion  au  sang  destiné  à  ces  organes  (1).  Si  l'on  voulait 


(1)  Pour  plus  de  détail  au  sujet  de 
l'appareil  vasculaire  des  Eunices,  je 
renverrai  à  mon  Mémoire  sur  la  cir- 
culation chez  les  Annélides.  Ce  sont 
probablement  les  anses  vasculaires 
contractiles  de  la  région  sternale  du 
corps  que  M.  Délie  Chiaje  avait  prises 
pour  des  poches  ou  ampoules  sangui- 
fères  ;  mais  je  dois  ajouter  que  la  des- 
cription donnée  par  cet  anatomiste  de 
l'appareil  circulatoire  de  l'Eunice  gi- 
gantesque et  de  VE.  cuprea  (a)  ne 
s'accorde  presque  en  rien  avec  ce 
que  j'ai  vu  et  figuré  chez  VE.  san- 
guinea. 

Les  observations  plus  récentes  de 
M.  de  Quatrefages  s'accordent  très 
bien  avec  les  miennes,  et  ce  natura- 
liste a  ajouté  des  détails  nouveaux 
sur  la  structure  des  parois  du  vaisseau 
dorsal  impair  auquel  il  donne  le  nom 
de  cœur  proboscidien  ,  parce  que  cet 
organe  d'impulsion  est  situé  au-dessus 
de  la  trompe  pendant  la  rétraction 
de  celle-ci  (6). 

La  description  que  M.  Williams  a 


donnée  de  cet  appareil  circulatoire  ne 
diffère  aussi  en  rien  d'essentiel  de  ce 
que  j'en  avais  dit,  sauf  un  seul  point. 
M.  Williams  croit  que  les  dilatations 
en  forme  d'anse  dont  j'ai  signalé 
l'existence  à  la  base  de  chacun  des 
vaisseaux  des  branches  transversales 
du  tronc  abdominal  sont  accidentelles 
et  ne  se  rencontrent  pas  dans  l'état 
ordinaire  (c).  Je  n'ai  pas  eu  l'occasion 
d'examiner  de  nouveau  ce  point  de- 
puis la  publication  du  Mémoire  de 
M.  Williams  ;  mais,  d'après  les  sou- 
venirs que  m'ont  laissés  mes  recher- 
ches faites  en  1837,  je  suis  persuadé 
que  ses  critiques  ne  sont  pas  fondées. 
J'ajouterai,  d'ailleurs,  qu'il  a  mal  in- 
terprété ma  pensée  lorsqu'il  suppose 
que  les  dilatations  vasculaires  dont  j'ai 
parlé  pouvaient  être  assimilées  aux 
vésicules  contractiles  ou  au  préten- 
dues poches  pulmonaires  des  Sang- 
sues. 

Dans  le  genre  Siphonostoma  ,  ou 
Chlorema  ,  il  existe  aussi  à  la  partie 
antérieure   de  la  région  dorsale  du 


(a)  Délie  Chiaje ,  Memorie  sulla  storia  e  notomia  degli  Animait  senx-a  vertèbre  del  regno  di 
Napoli,  t.  Il,  p.  396. 

(6)  Quatrefages,  Sur  la  circulation  des  Annélides  (Ann.  des  sciences  nat.,  1850,  3e  série, 
t.  XIV,  p.  283). 

(c)  Williams,  On  Vue  British  Annelida  (Report  of  the  21«  Meetingofthe  Brit.  Associât.,  1852, 
p.  184). 


CHEZ    LES   VERS.  271 

donner  à  ces  dilatations  vasculaires  contractiles  le  nom  de  cœur, 
il  faudrait  donc  dire  que  chez  les  Eunices  il  y  a  un  cœur  dorsal 
dans  la  région  céphalique,  et  plusieurs  centaines  de  cœurs  abdo- 
minaux disposés  par  paires. 

Chez  les  Térébelles,  le  vaisseau  dorsal  présente  dans  la  por- 
tion antérieure  du  corps  une  disposition  analogue,  et  y  constitue 
un  gros  tronc  médian  à  parois  très  contractiles  dont  l'extrémité 
antérieure  envoie  un  rameau  à  chacune  des  branchies  (1).  Cet 
organe  devient,  par  conséquent,  comparable  à  un  cœur  pulmo- 


corps  un  gros  tronc  médian  qui ,  au 
niveau  de  l'estomac,  se  bifurque  pour 
donner  naissance  à  deux  vaisseaux 
dorsaux  dont  la  disposition  rappelle 
celle  du  système  correspondant  chez 
les  Hermelles  :  car  vers  le  milieu 
du  corps  ils  se  réunissent  de  nouveau 
pour  former  un  tronc  impair  ;  mais  ici 
une  branche  anastomotique  impaire 
se  prolonge  entre  les  deux  tronçons 
impairs  de  ce  système  dorsal.  Un 
vaisseau  abdominal  médian  représente 
le  système  inférieur  dans  la  moitié 
postérieure  du  corps,  et  communique 
avec  un  collier  vasculaire  vers  sa  par- 
tie antérieure  ;  mais  depuis  ce  point 
jusqu'aux  branches  dont  l'extrémité 
céphalique  du  corps  est  garnie ,  ce 
système  est  formé  par  deux  troncs 
laléro-inférieurs  (a). 

(1)  Le  tronc  dorso-branchial,  ou 
portion  pharyngienne  et  musculaire 
du  vaisseau  dorsal,  qui  fait  ainsi  l'office 
de  cœur  pulmonaire  chez  les  Téré- 
belles, est  un  peu  fusiforme  et  libre 
dans  presque  toute  son  étendue,  mais 


se  fixe  au  tube  digestif  par  ses  deux 
extrémités.  Il  reçoit  le  sang  non-seu- 
lement de  la  portion  moyenne  et  pos- 
térieu  re  du  vaisseau  dorsal,  qui  est  très 
grêle,  mais  aussi  d'une  sorte  de  gros 
collier  vasculaire  qui  entoure  l'origine 
de  l'estomac  et  qui  résulte  du  dévelop- 
pement considérable  de  la  première 
paire  de  branches  anastomotiques 
allant  du  vaisseau  sous-intestinal  au 
vaisseau  dorsal.  Il  est  aussi  à  noter 
qu'une  branche  accessoire  impaire  et 
médiane  naît  du  point  de  réunion  de 
ce  collier  avec  le  tronc  dorsal,  et  s'a- 
vance au-dessous  de  la  portion  car- 
diaque de  celui-ci  en  envoyant  des 
rameaux  aux  parois  de  la  partie  pha- 
ryngienne du  tube  digestif.  Enfin,  les 
anses  formées  par  les  branches  trans- 
verses du  vaisseau  dorsal  sont  très 
grandes  et  très  lâches  dans  toute  la 
portion  antérieure  du  corps  où  elles 
flottent  dans  la  cavité  viscérale. 

Chez  le  Terebella  nebulosa,  la  por- 
tion gastrique  du  vaisseau  dorsal , 
quoique  grêle,  est  très  bien  consti- 


(a)  Qualrefages,  Mém.  sur  la  famille  des  Chlorémiens  (Ann.  des  sciences  nal.t  1849,  3"  série, 
t.  XII,  p.  298,  pi.  9,fig.  3,  et  pi.  10,  fig.  1). 

—  Max.  Miiller,  Observationes  anatomicœ  de  Vermibus  quibusdam  maritimis  (Dissert,  inaug.). 
Berolini,  1852,  p.   11,  pi.  2,  fig.  16,  17. 


272  CIRCULATION    DU    SANG 

naire,  et  le  sang  qui,  après  avoir  traversé  l'appareil  respiratoire, 
circule  d'avant  en  arrière  dans  le  vaisseau  abdominal  et  ses  dé- 
pendances, est  poussé  surtout  par  les  contractions  rhythmiques 
des  branchies  elles-mêmes.  Ces  arbuscules  se  resserrent  et  se 
déploient  alternativement  :  quand  ils  s'étendent,  le  sang  revenant 
du  vaisseau  dorsal  y  afflue  en  abondance,  et  ils  demeurent  d'un 
rouge  vif;  mais  au  moment  de  la  contraction,  ils  deviennent 
presque  incolores,  et  la  plus  grande  portion  du  sang  dont  ils 
étaient  gorgés  est  chassée  de  leur  intérieur  dans  le  système 
vasculaire  central. 

Chez  les  Arénicoles,  les  branchies  sont  aussi  des  agents  d'im- 
pulsion que  l'appareil  circulatoire  emprunte  à  l'appareil  de  la 
respiration,  mais  les  moteurs  propres  constitués  à  l'aide  du 
système  vasculaire  lui-même  sont  plus  développés  et  plus  puis- 
sants. Le  vaisseau  dorsal  impair  qui  règne  dans  toute  la  longueur 
du  corps  est  élargi  et  pulsatile  dans  sa  portion  moyenne,  et,  à  la 
partie  antérieure  de  l'estomac,  il  forme,  en  se  réunissant  avec 
les  branches  du  vaisseau  sous-intestinal,  un  sinus  assez  vaste 
qui,  de  chaque  côté,  communique  aussi  avec  le  tronc  sous- 
cutané  abdominal  par  un  gros  vaisseau  descendant,  sur  le 
trajet  duquel  se  trouve  une  poche  contractile  de  forme  ovalaire. 
On  peut  donc  dire  avec  raison  que  chez  les  Arénicoles  il  existe 
de  chaque  côté  du  corps,  entre  le  système  vasculaire  dorsal 
et  le  système  vasculaire  sous-cutané  inférieur,,  un  véritable 
cœur  (1). 

tuée  (a)  ;  mais,  chez  le  T.  conchilega,  de  détails,  mon  Mémoire   sur  la  cir- 

elle  tend  à  s'atrophier,  et  la  presque  culalion  chez  les  Annélides  et  le  tra- 

totalité  du  sang  qui  arrive  au  tronc  vailde  M.  Williams, 

dorso-faranchial  vient  du  vaisseau  sous-  (1)  L'appareil  circulatoire  des  Are- 

intestinal  par  l'intermédiaire  du  collier  nicoles,  dont  l'étude  n'avait  été  faite 

postpliaryngien  (6).  Voyez,  pour  plus  que  d'une  manière  très   incomplète 

(a)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  X,  pi.  10,  fig.  1,  et  Annélides  du  Règne 
animal  de  Cirvier,  pi.  1  b). 

(b)  Milne  Edwards,  Op.  cit.  {Ann.  des  sciences  nat.,  t.  X,  pi.  11,  fig.  1,  el  Annélides  du  Règne 
animal,  pi.  i  c,  fig.  1). 


CHEZ    LES    VERS.  273 

Chez  les  Lombrics,  on  trouve  à  la  même  place  une  série 
d'anses  qui  se  portent  du  vaisseau  dorsal  au  vaisseau  sous- 
cutané  abdominal,  et  qui,  à  raison  du  mode  de  contraction  de 
leurs  parois,  offrent,  en  général,  un  aspect  moniliforme  ;  ces 
troncs  anastomotiques  remplissent  les  mêmes  fonctions  que  les 
deux  cœurs  de  l'Arénicole,  mais  ils  ne  constituent  pas  comme 
ceux-ci  des  réservoirs  contractiles  annexés  aux  canaux  sangui- 
fères,  et,  par  conséquent,  ne  doivent  pas  être  désignés  sous  le 
même  nom  (1). 


par  Cuvier  (a)  ,  Ev.  Home  (6)  et 
M.  J.  Millier  (c),  et  dont  j'ai  donné 
une  description  détaillée  en  1837  [d), 
présente  aussi  dans  le  mode  de  distri- 
bution des  vaisseaux  plusieurs  parti- 
cularités qu'il  est  bon  de  noter  ici. 
Ainsi,  dans  la  portion  antérieure  et 
dans  la  portion  postérieure  du  corps, 
les  vaisseaux  transversaux  qui  vien- 
nent des  flancs  se  rendent  au  système 
vasculaire  viscéral  ,  et  débouchent , 
comme  d'ordinaire,  dans  le  tronc  dor- 
sal ;  mais  ceux  qui  occupent  la  por- 
tion moyenne  du  corps,  et  qui  corres- 
pondent aux  branchies  des  sept  pre- 
mières paires,  ne  se  rendent  pas  à  ce 
vaisseau  ,  et  vont  s'anastomoser  avec 
le  tronc  inférieur  du  système  vascu- 
laire viscéral,  ou  vaisseau  sous-intesti- 
nal. Celui-ci  s'élargit  beaucoup  avant 
de  s'ouvrir  dans  le  sinus  ou  collier 
vasculaire  œsophagien,  et  se  trouve 
représenté  dans  la  portion  pharyn- 
gienne du  tube   digestif   par    deux 


branches  latérales.  Les  branches  ver- 
ticales qui  unissent  le  vaisseau  sous- 
intestinal  au  vaisseau  dorsal  sont  très 
nombreuses,  et,  indépendamment  des 
anastomoses  multipliées  qu'elles  of- 
frent entre  leurs  ramuscules,  elles 
sont  reliées  entre  elles  de  chaque  côté 
de  l'estomac  par  un  gros  vaisseau  lon- 
gitudinal surnuméraire  qui  débouche 
antérieurement  dans  le  sinus  œsopha- 
gien. 

Jedois  ajouterque,  d'après  M.Grube, 
le  vaisseau  sous-intestinal  ne  serait 
pas  simple  et  impair  comme  je  le 
crois,  mais  représenté  par  deux  troncs 
contigus.  Ce  naturaliste  admet  aussi 
l'existence  d'un  vaisseau  intestinal  su- 
périeur qui  serait  accolé  à  la  face  infé- 
rieure du  vaisseau  dorsal  (e).  Mais  la 
description  que  M.  Williams  a  donnée 
plus  récemment  de  l'appareil  circula- 
toire de  ce  Ver  ne  diffère  pas  notable- 
ment de  ce  que  j'en  avais  dit  (/"). 
(1)  L'appareil  circulatoire  des  Lom- 


(a)  Cuvier,  art.  Arénicole  du  Dictionnaire  des  sciences  naturelles,  t.  II,  p.  475  (1816). 

(b)  Home,  Circul.  in  Vernies  (Philos.  Trans.,  1817,  pi.  3,  fig.  2  et  3). 

(c)  Mùller,  article  sur  la  circulation,  inséré  dans  le  Traité  de  physiologie  de  Burdach,  trad.  franc. , 
t.  VI,  p.  167. 

(d)  Milne  Edwards,  Op.  cit.,  t.  V,  p.  485  (Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences,  1837,  et  Ann. 
des  sciences  nat.,  1838,  2°  série,  t.  X,  p.  213,  pi.  13,  fig.  1,  1  a,  et  AnNélides  du  Règne  animal 
de  Cuvier,  pi.  1). 

(e)  A,  E.  Grube,  Zur  Anatomie  und  Physiologie  der  Kiemenwûrmer.  In-4,  Konigsb.,  1838, 
p.  10,  pi.  1,  fig.  1,  3  et  8. 

(f)  Williams,  Op.  cit.  (Rep.  of  the  Brit.  Associât.,  p.  189,  pi.  3.  fig.  10). 


III. 


18 


27/i  CIRCULATION    DU    SANG 

L'appareil  circulatoire  des  Naïs  et  des  Polyophthalmes  se 
rapproche  davantage  de  celui  de  l'Arénicole,  sous  le  rapport 
des  organes  moteurs;  car  ceux-ci  consistent  principalement  en 


bries  a  été  étudié  successivement  par  un 
grand  nombre  d'anatomistes,  tels  que 
Willis(a),Leo(6),Dugès(c),Morren(d), 
de  Quatrefages  (e),  Williams  [f).  Je 
n'en  donnerai  pas  ici  une  description 
détaillée,  et  je  me  bornerai  à  dire  que 
l'on  distingue ,  chez  ces  Vers ,  trois 
troncs  principaux  impairs  et  médians  : 
le  vaisseau  dorsal  (  que  M.  Morren 
appelle  V  artère  aorte  )  ;  le  vaisseau 
sous-intestinal  (ou  artère  ventrale  du 
même  auteur) ,  et  le  vaisseau  sous- 
cutané  abdominal  (ou  veine  cave  de 
M.  Morren),  qui  s'étendent  dans  toute 
la  longueur  du  corps  et  donnent  cha- 
cun naissance  à  une  multitude  de 
branches  transversales  dont  la  dispo- 
sition rappelle  assez  exactement  ce 
que  nous  avons  déjà  vu  chez  les  III— 
rudinées  :  car  les  arcades  vasculaires 
sous -cutanées  descendent  verticale- 
ment du  vaisseau  dorsal  au  vaisseau 
abdominal  en  donnant  naissance  à 
une  foule  de  ramuscules  sous-cuta- 
nés. Enfin  d'autres  branches ,  en 
partant  de  ces  mêmes  branches  dor- 
sales ,  embrassent  le  tube  digestif  et 
vont  s'anastomoser  avec  le  vaisseau 
sous-intestinal ,  de  façon  à  constituer 
les  analogues  des  vaisseaux  commis- 
suraux  profonds.  Dans  toute  la  portion 
moyenne  et  postérieure  du  corps  , 
ces  vaisseaux  gastriques  ne  présentent 


rien  de  remarquable  ;  ils  sont  très 
grêles  et  se  ramifient  beaucoup  dans 
les  parois  du  tube  alimentaire.  Mais 
en  avant ,  et  surtout  dans  la  portion 
du  corps  où  se  trouvent  les  ovaires , 
ils  naissent  directement  du  vaisseau 
dorsal,  et  constituent  une  série  de  gros 
troncs  indivis  qui  sont  disposés  en 
manière  d'arceaux  verticaux  et  ont 
des  parois  très  musculaires  :  par  le 
fait  de  la  contraction  de  leurs  fibres 
circulaires,  ces  anses  œsophagiennes 
(  qui  constituent  l'appareil  auquel 
M.  Morren  a  donné  le  nom  de  cœur) 
s'étranglent  d'espace  en  espace  et 
prennent  ainsi  un  aspect  moniliforme  ; 
mais  elles  ne  sont  pas  réellement  com- 
posées d'une  série  de  vésicules,  ainsi 
qu'on  pourrait  le  supposer  au  premier 
abord,  et,  pendant  la  vie  de  l'Animal, 
ces  étranglements  se  déplacent  d'une 
manière  péristallique  ,  de  façon  à 
pousser  le  sang  du  système  dorsal 
dans  le  système  sous-intestinal.  Il  est 
aussi  à  noter  que  ce  dernier  vaisseau 
donne  naissance  à  beaucoup  de  bran- 
ches cutanées  aussi  bien  qu'aux  bran- 
ches gastriques  dont  il  a  déjà  été 
question ,  et  que  ,  par  l'intermédiaire 
des  anastomoses  capillaires  ainsi  éta- 
blies, le  sang  mis  en  mouvement  par 
les  contractions  des  anses  œsopha- 
giennes se  porte,  non-seulement  d'a- 


(a)  Willis,  De  anima  brutorum,  p.  18,  pi.  i,  %.  1  (1676). 

(b)  Léo,  De  structura  Lumbrici  terrestris  (Dissert,  inaug.).  In-4,  Kdnigsberg',  1820. 

(c)  Morren ,  De  Lumbrici  terrestris    historia  naturali  neenon  anatomia  tractatu's.  ln-4  , 
Bruxelles,  1829,  p.  152  et  suiv.,  pi.  23  et  24. 

(d)  Dugès,  Recherches  sur  la  circulation,  etc.,  des  Annélides  Abranches  (Ann.  des  sciences 
nat.,  t.  XV,  p.  299,  pi.  8,  fig.  1). 

(e)  Voyez  l'Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Annélides,  pi.  21  bis. 

(f)  Williams,  Rep.  on  the  Brïtish  Annelida  {Brit.  Ame,  1851,  p.  179,  pi.  3,  fig.  7). 


CHEZ    LES    VERS.  275 

une  paire  de  veinules  pulsatiles  situées  sur  les  côtés  de  la  por- 
tion pharyngienne  du  tube  alimentaire  (1). 
§11.  —  Indépendamment  des  modifications  de  l'appareil 


vant  en  arrière  dans  le  système  sous- 
intestinal  ,  et  de  là  dans  le  système 
dorsal ,  mais  aussi  de  ce  dernier 
dans  les  branches  sous-cutanées  du 
vaisseau  dorsal ,  lequel  se  continue 
aussi  directement ,  par  son  extrémité 
antérieure,  avec  le  tronc  sous-cutané 
abdominal  qui  est  très  contractile 
dans  toute  son  étendue.  Le  nombre 
des  anses  œsophagiennes  qui  rem- 
plissent ainsi  les  fonctions  d'agents 
moteurs  principaux  paraît  varier  sui- 
vant les  espèces,  car  les  auteurs  sont 
loin  de  s'accorder  à  ce  sujet,  et  il  est 
probable  que  les  dissidences  d'opinion 
dépendent  des  différences  spécifiques 
dans  les  Animaux  dont  la  dissection 
a  été  faite  ,  plutôt  que  de  quelque 
erreur  d'observation.  Ainsi  M.  Mor- 
ren  en  a  compté  le  plus  ordinairement 
cinq  paires,  quelquefois  jusqu'à  sept 
paires  ;  Dugès  en  décrit  sept  à  huit 
paires. 

(1)  L'appareil  circulatoire  des  Vais 
tient  à  la  fois  de  celui  de  l'Arénicole 
et  de  celui  du  Lombric.  Il  ressemble 
à  ce  dernier  par  la  disposition  géné- 
rale des  vaisseaux,  et  au  premier  par 
l'existence  d'une  seule  paire  de  gros- 
ses poches  contractiles  qui  font  l'of- 
fice de  cœurs.  M.  Williams  a  décrit 
ces  organes  comme  appartenant,  l'un 


au  vaisseau  dorsal,  l'autre  au  vaisseau 
ventral,  et  occupant ,  l'un  la  face  su- 
périeure, l'autre  la  face  inférieure  du 
corps  (a)  ;  mais  le  fait  est  qu'ils  sont 
latéraux,  et  ils  paraissent  être  placés, 
comme  chez  l'Arénicole  ,  sur  le  trajet 
des  deux  gros  troncs  anastomotiques 
qui  unissent  le  vaisseau  dorsal  au 
vaisseau  sous-intestinal.  Il  est  à  noter 
que  ces  poches  cardiaques  battent 
alternativement,  et  que  non-seule- 
ment le  vaisseau  dorsal ,  mais  ses 
principales  branches  sont  également 
contractiles.  Pour  plus  de  détails 
relatifs  au  trajet  des  vaisseaux  et 
de  leurs  anastomoses ,  je  renverrai 
aux  travaux  de  Gruithuisen  (b) ,  de 
Dugès  (c) ,  de  M.  d'Udekem  (d)  et  de 
M.  P.  Doyère  (e),  en  faisant  remar- 
quer toutefois  que  les  observations  de 
ce  dernier  diffèrent  à  certains  égards 
de  ceux  de  ses  prédécesseurs  et  au- 
raient besoin  de  confirmation. 

Chez  le  Naïdien  dont  M.  Henle  a 
formé  le  genre  Enchytrœus,  il  y  a 
aussi  deux  troncs  médians,  qui  sont 
unis  entre  eux  antérieurement  par 
un  collier  vasculaire  et  par  trois  pai- 
res de  branches  transversales  ;  mais 
ce  physiologiste  n'a  aperçu  de  mou- 
vements pulsatiles  que  dans  le  tronc 
dorsal ,  et  il  est  aussi  à  noter  qu'il 


(a)  Williams,  Op.  cit.  (Brit.  Associât.,  1851,  p.  182,  pi.  3,  %.  8).  • 

(6)  Gruithuisen,  Ueber  Nais  diaphana  (Nova  Acta  Acad.  curios.  Nat.,  1828,  t.  XIV,  p.  413). 

(c)  Dugès,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1828,  i.  XV,  p.  297). 

(d)  D'Udekem,  Histoire  naturelle  du  Tubifex  des  ruisseaux,  p.  20 ,  pi.  2,  fîg.  1  à  3  (extr.  des 
Mém.  couronnés  par  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  XXVI). 

(e)  P.  Doycre,  Essai  sur  l'anatomie  de  la  Nais  sanguinea,  p.  10,  fig.  9  et  10  (extr.  des  Mém. 
de  la  Soc.  Linnéenne  de  Normandie,  1856,  t.  X). 


276  CIRCULATION    DU    SANG 

circulatoire  que  j'ai  déjà  signalées  comme  dépendantes  d'un 
développement  insolite  de  quelques  parties  de  ce  système  de 
vaisseaux,  il  en  est  d'autres  qui  sont  dues  à  la  même  cause, 
mais  qui  se  lient  d'une  manière  spéciale  au  perfectionnement 
du  travail  respiratoire,  et  qui  ont  essentiellement  pour  but  de 
mieux  assurer  les  rapports  entre  le  sang  et  l'eau  aérée  dont 
l'animal  est  entouré.  Cette  condition  se  trouve  réalisée  par 
l'extension  des  vaisseaux  sanguifères  dans  l'intérieur  des  appen- 
dices membraneux  qui  s'élèvent  à  la  surface  du  système  tégu- 
mentaire  dans  diverses  parties  du  corps  et  qui  naissent  le  plus 
souvent  à  la  base  des  pattes.  Nous  avons  déjà  vu  que  chez 
quelques  Annélides,  tels  que  les  Phyllodocés  et  les  Branchel- 
lions,  les  vaisseaux  sanguins  ne  pénètrent  pas  dans  l'intérieur 
des  appendices  foliiformes  qui  constituent  les  branchies  de  ces 

n'a  pu  découvrir  aucune  ramification  antérieure  de  l'estomac  chez  les  Aré- 

allant  de  ces  gros  vaisseaux  dans  les  nicoles  ;  un  vaisseau  dorsal  pharyn- 

parties  voisines  (a).  gien  part  de  ce  sinus  pour  se  rendre 

Dans  le  genre  Stylaria,  qui  appar-  à  la  tête  ,  et  de  chaque  côté  de  ce 

tient  aussi  à  la  famille  des  Naïdiens  ,  même  réservoir  médian  se  trouve  une 

M.  0.  Schmidt  a  constaté  l'existence  poche  arrondie  et  pulsatile  qui  envoie 

de  trois  paires  d'arcs  vasculaires  con-  le  sang  dans  un  vaisseau  abdominal 

tractiles  analogues  aux  vaisseaux  mo-  sous-cutané  ;  enfin  il  existe  aussi  à  la 

niliformes  des  Lombrics  (6).  face  inférieure  du  tube  digestif  un 

Les  I'olyophthalmes,  dont  M.  de  autre  vaisseau  impair  et  médian  dans 

Quatrefages  a  fait  connailre  le  mode  lequel  le  mouvement  circulatoire  s'ef- 

d'organisation  ,   sont  des    Annélides  fectue  d'avant  en  arrière,  tandis  que 

Abranches  qui  vivent  dans  la  mer  et  dans  toute  la  portion  dorsale  du  sys- 

qui  ressemblent  à  certains  égards  aux  tème  vasculaire  le  courant  est  dirigé 

INaïdiens,  mais  forment  une  famille  d'arrière  en  avant.  M.  de  Quatrefages 

distincte.   Leur  sang  est  d'un  rouge  désigne  sous  le  nom  de  cœur  l'en- 

intense  et  circule  dans  un  réseau  in-  semble  formé  par  le  sinus  médian  et 

testinal  très  riche  qui  vient  se  ter  mi-  les   deux   poches    sanguifères'  laté- 

ner   antérieurement    dans   un    sinus  raies  (c). 
analogue  à  celui  situé  à   l'extrémité 

(a)  Henle ,  Ueber  Enchytrœus ,  eine  Neue  Anneliden-Cattung  (Miiller's  Ai'chiv  fur  Anat.  Und 
Physiol.,  1837,  p.  82,  pi  6,  fig.  5). 

(b)  Sclimidt,   Beitràge  zur  Anatomie  und  Physiologie  der  Naïden  (Miiller's  Archiv  fur  Anat. 
und  Physiol.,  1846,  p.  412,  pi.  15,  fig.  3,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  3°  série,  t.  VII,  p.  180). 

(c)  Quatrefages,  Mém.  sur  la  famille  des  Polyophthalmiens  (Ann.  des  sciences  nat.,  1850  , 
3"  série,  t.  X11I,  p.  17,  pi.  2,  %.  5). 


CHEZ    LES    VERS.  277 

Vers ,  ou  bien  s'arrêtent  dans  la  portion  du  système  cavitaire 
général  qui  oceupe  la  base  de  ces  organes;  mais,  en  général,  ils 
s'y  avancent  de  manière  à  mettre  le  liquide  qu'ils  contiennent  en 
rapport  direct  avec  le  fluide  respirable,  et  les  canaux  sanguifères 
qui  se  répandent  ainsi  dans  l'appareil  branchial  dépendent 
toujours  des  vaisseaux  transversaux  à  l'aide  desquels  le  système 
dorsal  s'anastomose  avec  le  système  sous-cutané  ou  abdominal. 
Tantôt  ce  sont  des  anses  fort  simples  qui  se  prolongent  de  ces 
troncs  anastomotiques  dans  l'intérieur  de  chaque  branchie  ; 
d'autres  fois  ce  sont  des  ramifications  plus  ou  moins  nombreuses 
qui  s'interposent  entre  la  portion  ventrale  et  la  portion  dorsale 
de  chacune  de  ces  mêmes  branches,  de  façon  que  le  sang  tra- 
verse un  réseau  capillaire  respiratoire  en  passant  de  l'un  de  ces 
systèmes  vasculaires  dans  l'autre  (1). 

fl)  En  observant  le  mode  de  distri-  reil  respiratoire  des  Hermelles  le  cou- 

bution  des  vaisseaux  sanguins  dans  les  rant  afférent  et  le  courant    efférent 

branchies  des  Hermelles  ,  j'avais  été  s'établiraient    dans    l'intérieur    d'un 

conduit  à  penser  que  chacun  de  ces  même  vaisseau  (a). 

filaments  renferme  deux  canaux  san-  Ce   naturaliste   a  décrit   un  mode 

guifères  naissant ,  l'un  de  la  branche  d'organisation  analogue  dans  les  ap- 

correspondante  du  système  vasculaire  pendices  branchiaux  des  Glycères,  des 

dorsal,  l'autre  de  la  branche  trans-  Polydores ,  etc.  Chez  tous  ces  Ani- 

versale  du  système  cutané  abdominal,  maux,  chaque  appendice  branchial  ne 

et    s'anastomosant  entre   eux.    Mais  serait  creusé  que  d'un  seul  canal  san- 

M.  de  Qualrefages,  qui  a  étudié  plus  guifère  terminé  en  cul-de-sac  et  com- 

récemment  l'organisation  de  ces  An-  muniquant  par  sa  base  avec  les  deux 

nélides,  assure  que  chaque  appendice  ordres  de  vaisseaux  à  l'aide  desquels 

branchial    ne    renferme   qu'un    seul  le  sang  y  arrive  et  en  sort  (6). 

vaisseau  d'où  partent  latéralement  de  En  terminant  ce  qui  est  relatif  aux 

petites  branches   terminées    en  am-  Annélides ,  j'ajouterai  que  M.  Leydig 

poules ,  et  que  ce  canal  unique  com-  a  signalé  une  disposition  très  singu- 

munique  par  sa  base  avec  les  deux  Hère  chez  le  Lumbriculus  variegatus, 

vaisseaux  qui  se  portent  de  ce  point,  où  le  vaisseau  dorsal  paraît  donner 

l'un  au  tronc  dorsal,  l'autre  au  tronc  naissance  à  des  appendices  terminés 

abdominal  ;  de  sorte  que  dans  l'appa-  en  ampoule  (c). 

(a)  Qualrefages,  Mém.  sur  la  famille  des  Hermelliens  (Ann.  des  sciences  nat.,  1848,  3e  série, 
t.  X,  pi.  2,  fig.  3,  G  et  9). 

(b)  Qualrefages  ,  Sur  la  respiration  des  Annélides  (Ann.  des  sciences  nat.,  1850,  3e  série, 
XIV,  p.  292) 

(c)  Leydig',  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  436. 


278  CIRCULATION    DU    SANG 

§  12.  —  Quant  à  la  structure  intime  des  vaisseaux  sanguins 
des  Annélides  ,  je  me  bornerai  à  dire  qu'une  tunique  interne 
amorphe  et  dépourvue  d'épithélium  paraît  tapisser  partout  ces 
canaux  et  se  trouve  revêtue  extérieurement  d'une  tunique 
adventive  formée  de  tissu  connectif  plus  ou  moins  modifié  ; 
enfin,  qu'entre  ces  deux  couches  on  trouve  dans  la  plupart  des 
petites  branches,  ainsi  que  dans  les  gros  troncs,  du  tissu  mus- 
culaire dont  les  fibrilles  sont  dirigées  longitudinalement  aussi 
bien  qu'en  travers  (1). 

§  13.  —  En  résumé,  nous  voyons  que  chez  tous  les  Anné- 
lides, le  système  vasculaire  est  disposé  suivant  un  même  plan, 
bien  que  chez  les  uns  il  soit  fort  simplifié ,  tandis  que  chez 
d'autres  il  se  complique  et  se  perfectionne  beaucoup  (2).  C'est 


(1)  Pour  plus  de  détails  sur  l'his- 
tologie de  ces  vaisseaux,  je  renverrai 
aux  observations  de  M.  Leydig  portant 
principalement  sur  les  Hirudinées  (a). 

(2)  Au  premier  abord,  l'appareil  vas- 
culaire des  Échiures  semble  s'éloigner 
beaucoup  de  celui  des  autres  Annélides; 
mais  en  l'examinant  attentivement,  on 
y  retrouve  le  même  plan  fondamental 
que  chez  les  Chétopodes  ordinaires. 
A  la  face  supérieure  du  tube  digestif, 
il  y  a  un  vaisseau  impair  et  médian 
qui  correspond  au  vaisseau  dorsal  et 
qui  présente  vers  le  milieu  de  la  ré- 
gion pharyngienne  une  petite  dilata- 
tion pulsatile.  Un  peu  plus  en  arrière, 
il  donne  naissance  à  une  paire  de 
troncs  descendants  qui  embrassent  le 
tube  digestif  en  manière  de  collier  et 
débouchent  dans  un  vaisseau  sous-in- 
testinal. Enfin  on  trouve  encore  sur 
la  ligne  médiane  un  troisième  tube 
médian  et  impaire  qui  est  accolé  au 


cordon  nerveux  et  qui  correspond  au 
vaisseau  sous-cutané  abdominal. 

Mais  les  branches  transversales 
qui  naissent  de  ces  divers  troncs  la- 
téraux sont  loin  de  présenter  la  ré- 
gularité qui  se  remarque  d'ordinaire 
chez  les  Annélides,  et  le  caractère 
segmentaire  de  l'organisation  tend  à 
s'effacer.  M.  de  Quatrefages,  en  décri- 
vant l'appareil  circulatoire  de  ces  Vers, 
a  donné  le  nom  de  cœur  abdominal 
à  une  dilatation  du  vaisseau  sous- 
cutané  abdominal  qui  se  voit  dans  le 
point  où  celui-ci  s'anastomose  avec 
l'extrémité  antérieure  du  vaisseau 
sous-intestinal  ;  il  appelle  aussi  cœur 
intestinal  une  dilatation  analogue  de 
ce  dernier  tronc  dans  le  point  où  le 
collier  vasculaire  du  système  dorsal 
y  débouche,  et  il  nomme  cœur  dorsal 
le  bulbe  qui  se  voit  sur  le  trajet  de 
la  portion  pharyngienne  du  vaisseau 
dorsal  ;  mais'  ces  diverses  parties  un 


(a)  Leydig,  Lehrbuch  dev  Histologie,  p.  436  (4  857). 


CHEZ    LES    VERS.  279 

chez  les  Arénicoles  qu'il  présente  les  caractères  les  plus  élevés, 
et  nous  verrons  bientôt  qu'il  existe  à  certains  égards  une  res- 
semblance frappante  entre  le  mode  d'organisation  de  l'appareil 
circulatoire  de  ces  Vers  et  celui  des  Animaux  vertébrés  les  plus 
simples.  Mais,  avant  d'aborder  l'étude  anatomique  de  ces  der- 
niers ,  il  nous  reste  encore  à  examiner  quelques  Invertébrés 
que  jusqu'ici  j'avais  laissés  de  côté  pour  ne  pas  rompre  l'en- 
chaînement naturel  des  faits. 

§l/j.  —  Je  ne  m'arrêterai  que  peu  sur  l'étude  du  mode 
d'irrigation  organique  dans  les  autres  classes  de  la  grande 
division  des  Vers,  parce  qu'il  règne  encore  beaucoup  d'incer- 
titude au  sujet  de  l'existence  d'un  appareil  circulatoire  spécial 
chez  ces  Animaux.  La  plupart  d'entre  eux  sont  pourvus  de 
vaisseaux;  mais  les  Helminthologistes  sont  partagés  d'opinion 
au  sujet  des  fonctions  de  ces  tubes,  et,  dans  l'état  actuel  de 
la  science,  il  ne  me  semble  pas  possible  de  trancher  nettement 
la  question. 

Ainsi ,  dans  la  classe  des  Trématodes  ,  dont  les  principaux 
représentants  sont  les  Douves  ou  Fasciolaires ,  on  voit  un  sys- 
tème complexe  de  vaisseaux  à  parois  propres  qui  se  ramifient 
dans  les  diverses  parties  du  corps  ;  on  a  distingué  des  courants 


Appareil 

vasculaire' 

des 

Trématodes. 


peu  élargies  du  système  vasculaire  ne 
me  semblent  pas  mériter  ces  noms, 
car  ils  n'ont  pas  le  caractère  de  réser- 
voirs sanguins.  Il  est  aussi  à  noter  que 
chez  l'Échiure,  les  branches  impaires 
qui  se  portent  du  vaisseau  abdominal 
vers  l'intestin,  et  qui  se  ramifient  dans 
le  mésentère,  sont  très  développés  («). 
L'appareil  circulatoire  des  Ster.v 


aspis  n'est  encore  que  très  impar- 
faitement connu,  mais  paraît  avoir  de 
la  ressemblance  avec  cel ui  de  VEchiura 
Gœrtnerii  (b),  et  la  disposition  géné- 
rale des  vaisseaux ,  chez  tous  ces 
Échiurides  ,  a  une  grande  analogie 
avec  celle  qui  s'observe  chez  les  Si- 
ponculides  dont  il  sera  bientôt  ques- 
tion (c). 


(a)  Quatrefages,  Mém.  sur  l'Échiure  de  Gœrlner  (Voyage  e?i  Sicile,  t.  II,  p.  230,  pi.  25,  fig\  1  a, 
et  pi.  26,  fig-  &  ;  —  Ami.  des  sciences  nat  ,  1847,  3°  série,  t.  VII,  p.  324  et  suiv.). 

(6J  Krolin  ,  Ueber  den  Sternaspis  Thalassemoides  (Archiv.  fur  Anat.  und  Physiol  1842 
p.  420). 

—  Muller,  Observationes  analomicœ  de  Vermibus  quibusdam  marinis  (Dissert,  inau"  )  Berlin 
1852,  [i.  4,  pi.  1,  fi-.  13). 

(c)  Voyez  ci-après,  page  300. 


280  CIRCULATION    DU    S4NG 

dans  leur  intérieur,  et  M.  Blanchard  a  pu,  malgré  leur  petitesse, 
les  injecter  d'une  manière  admirable.  Ce  naturaliste  n'hésite 
pas  à  les  considérer  comme  formant  un  appareil  circulatoire , 
et  effectivement  ils  en  offrent  bien  l'aspect.  Mais  les  observa- 
tions les  plus  récentes  dont  ces  organes  ont  été  l'objet  ne  sont 
pas  favorables  à  cette  opinion  ,  et  la  plupart  des  helmintholo- 
gistes  les  regardent  aujourd'hui  comme  appartenant  à  un  appa- 
reil excréteur  :  car  ils  assurent  que  ce  système  arborescent 
débouche  directement  au  dehors  par  un  orifice  particulier;  que 
le  liquide  en  mouvement  dans  son  intérieur  se  dirige  toujours 
des  parties  périphériques  vers  cette  ouverture,  et  que  souvent 
on  le  voit  sortir  par  cette  voie.  La  question  en  litige  ne  porte 
donc  pas  sur  l'existence  ou  l'absence  d'un  appareil  vasculaire  , 
mais  sur  la  clôture  de  ce  système  ou  sa  communication  libre 
avec  l'extérieur ,  et  sur  la  nature  des  courants  dont  il  est  le 
siège  (1). 

§15.  —  Pour  mieux  préciser  les  faits,  prenons  quelques 
exemples. 
Amphistomes.  Les  Amphistomes ,  Vers  intestinaux  de  forme  conique  ,  qui 
se  rencontrent  assez  souvent  dans  l'estomac  du  Bœuf,  présen- 
tent vers  la  partie  postérieure  du  dos  une  petite  poche  ovalaire 
que  j'appellerai  la  vésicule  de  Laurer,  tant  pour  ne  rien  préju- 
ger quant  à  ses  fonctions  que  pour  rappeler  le  nom  de  l'anato- 
miste  qui  en  a  fait  connaître  l'existence  (2).  Deux  gros  vais- 


(1)  Ces  courants  ont  été  observés  (2)  On  doit  à  ce  naturaliste  une 

d'abord  chez  le  Distomum  militare,  bonne  monographie  anatomique  de 

par  M.  Ehrenberg  (a)  ;  M.  Nordmann  l'Amphistome ,  publiée  sous  la  forme 

en  a  ensuite  signalé  l'existence  chez  de  thèse.   Les  figures  qui  accompa- 

le     Diplozoon     et     quelques    autres  gnent  ce  mémoire  sont  très  nettes  (c). 
Vers  (6). 


(a)  Ehrenberg,  Symbolœ  physicce.  Anim.  evertebr.  (decas  1,  feuille  1). 

(6)  Nordmann,  Mlkrographische  Beitrâge  %ur  Naturgeschichte  der  ivirbellosen  Thieren ,  t.  I, 
p.  69  (Ann.  des  sciences  nat.,  d 838,  i"  série,  t.  XXX,  p.  392). 

(c)  Laurer,  Disquisitiones  anatomicœ  de  Amphistomo  conico.  ln-4,  Gryphiœ,  1830. 


CHEZ    LES    VERS.  281 

seaux  parlent  de  ce  réservoir,  longent  les  branches  de  l'appareil 
digestif,  gagnent  l'extrémité  antérieure  du  corps,  et,  chemin 
faisant ,  donnent  naissance  à  une  multitude  de  rameaux  dont 
les  divisions  se  répandent  dans  toutes  les  parties  voisines  et  s'y 
terminent  en  culs-de-sac.  Ces  tubes  membraneux  constituent 
donc  un  système  vasculaire  arborescent  à  branches  chevelues 
très  fines ,  et ,  d'après  Laurer,  la  vésicule  centrale  dont  ils 
partent  communiquerait  avec  l'extérieur  à  l'aide  d'un  pore 
dorsal  ou  foramen  caudale  ;  mais  M.  Blanchard ,  qui  a  injecté 
cet  appareil  et  qui  en  a  donné  de  très  belles  figures,  n'a  pu 
y  découvrir  aucun  orifice ,  et  considère  la  poche  en  question 
comme  étant  une  espèce  de  cœur.  Je  suis  porté  à  croire  cepen- 
dant que  Laurer  ne  s'était  pas  trompé ,  car  l'existence  du 
foramen  caudale  paraît  avoir  été  constatée  d'une  manière  indu- 
bitable par  plusieurs  bons  observateurs  chez  divers  Trématodes 
fort  voisins  des  Amphistomes  (1). 


(1)  Les  premiers  observateurs  qui  appela  cisterna  chijli  la    vésicule  à 

parlèrent  de  l'existence  d'un  orifice  laquelle    aboutissent ,    comme    nous 

caudal ,  ou    foramen.  dorsale  ,  chez  l'avons  vu  ci-dessus  ,  les  principaux 

divers  Trématodes,  le  prirent  pour  troncs  (e).    M.    Nordmann   a   trouvé 

un  anus  (a).   Mehlis   a   réfuté  celte  à    la   partie   postérieure  du    corps ., 

opinion  (b),  et  annoncé  que  le  pore  en  chez   les    Diplostomes  ,    une   poche 

question  communique  avec  des  vais-  analogue  qui  s'ouvre  au  dehors  par 

seaux  que  Hudolphi  (c)  et  Bojanus  (d)  un   orifice  contractile  et  qui  expulse 

avaient  déjà   aperçus  dans  le  corps  de  temps  en  temps  le  liquide  con- 

de  quelques-uns  de  ces  Vers  intes-  tenu  dans   son    intérieur,    mode  de 

tinaux.    Laurer,  qui  a   étudié   avec  déjection  que  ce  naturaliste  a  rendu 

beaucoup  de  soin  cet  appareil  chez  apparent   en    plaçant    ces    Animaux 

l'Amphistome  ,  le  considéra  comme  dans  un  liquide  coloré.  M.  Nordmann 

étant   un    système   chylifère ,    et    il  décrit  aussi  un  système  de  canaux 


(a)  Baer,  Beitrdge  %ur  Kenntniss  der  Niedern  Thiere  (Acta  Acad.  Leop.  Nat.  cur.,  vol.  XIII, 
p.  536,  561,  611,  et  Nochein  Wortilber  den  After  der  Distomen,  Heusinger,  vol.  II,  p.  197). 

—  Nardo,  Ueber  den  After  der  Distomen  (Heusinger's  Zeitschrift  fur  die  Organ.  Physik,  1827, 
Bd.  I,  p.  68). 

(b)  Rudolplii,  Entozoorum  synopsis,  1819,  p.  337. 

(c)  Bojanus,  Enthelminthica  (Isis,  1821 ,  t.  VIII,  p.  162). 

(d)  Mehlis,  Observ.  anat.  de  Distomate  hepatico  et  lanceolato ,  1825,  p.  16  et  suiv. 

(e)  Laurer,  Disquisitiones  anatomicœ  de  Amphistomo  conico  ,  1830,  p.  10  et  suiv. 


282  CIRCULATION    DU    SANG 

Distomes.  Ainsi,  M.  Van  Beneden  a  observé  chez  le  Dislomum  lereti- 
colle  une  poche  médiane  et  contractile  qui  est  évidemment 
l'analogue  delà  vésicule  de  Laurer,  et  qui  communique  directe- 
ment au  dehors  par  l'intermédiaire  d'un  pore  caudal,  car  ce 
naturaliste  a  vu  le  liquide  de  ce  réservoir  être  excrété  par  cette 
voie.  La  vésicule  en  question  est  aussi  en  communication  avec 
deux  tubes  qui  suivent  les  côtés  du  corps  et  qui  constituent 
l'appareil  dont  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  dire  quelques  mots  en 
parlant  des  prétendues  trachées  aquifères  de  ces  animaux. 
Enfin,  M.  Van  Beneden  a  reconnu  également  que  les  vaisseaux 
rameux  qui  se  trouvent  dans  le  voisinage  de  ces  tubes,  et  qui 
avaient  été  décrits  par  d'autres  helminthologistes  comme  un 
appareil  circulatoire,  s'ouvrent  à  leur  tour  dans  ces  mêmes 
tubes  et  n'en  sont  que  des  branches  (1). 

assez  complexe  qu'il  considère  comme  tions  seraient  la  conséquence  d'une 
étant  en  communication  avec  ce  ré-  perforation  accidentelle  (d),  et  que 
serveir  et  comme  constituant  un  ap-  M.  Diesing  avait  précédemment  énon- 
pareil  circulatoire  ;  mais  il  me  paraît  ce  une  opinion  analogue  au  sujet  des 
évident  qu'une  grande  partie  des  or-  Ampliistomes  (e). 
ganes  qu'il  appelle  des  vaisseaux  ne  (1)  Dans  un  premier  travail  sur  les 
sont  autre  chose  que  les  oviductes  (a).  Vers  cestoïdes  ,  SI.  Van  Beneden  s'é- 
M.  Dujardin  a  observé  aussi  plu-  tait  déjà  prononcé  en  faveur  de  la 
sieurs  fois  l'orifice  en  question  (6);  non-existence  d'un  appareil  circula- 
M.  Owen  a  eu  également  l'occasion  toire  chez  les  Trématodes  aussi  bien 
d'en  constater  l'existence  (c);  et,  que  chez  les  Tœnioïdcs  (/)  \  mais 
comme  nous  le  verrons  bientôt,  l'ex-  c'est  surtout  dans  un  Mémoire  spé- 
pulsion  d'un  liquide  par  cette  voie  a  cial,  publié  postérieurement  aux  re- 
été  remarquée  par  plusieurs  helmin-  cherches  de  M.  Blanchard  ,  qu'il  a 
thologistes.  Je  dois  ajouter  cependant  fait  connaître  les  faits  indiqués  ci- 
que,  d'après  M.  Blanchard,  ces  excré-  dessus  (g). 

(a)  Nordmanii ,  Mikrographische  Beitràge  zur  Natuvgeschichte  der  ivirbellosen  Thiere  ,  1S32, 
BJ.  I,  p.  37  et  suiv  ,  pi,  4,  fig.  5  et  G,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XXX,  p.  270  et  suiv.,  pi.  19, 
fig.  1  et  2. 

(b)  Owen,  On  tlie  Anatomy  ofDistuma  clavatum  (Trams,  of  the  Zool.  Soc,  vol.  I,  p.  41). 

(c)  Dujardin,  Histoire  naturelle  des  Helminthes,  p.  383. 

(d)  Blanchard,  Recherches  sur  l'organisation  des  Vers  (Ann.  des  sciences  nat.,  18  17,  3°  série, 
t.  vil,  p.  110,  et  Voyage  en  Sicile,  1. 111). 

(e)  Diesing,  Monographie  der  Gallungen  Amphisloma  und  Diplodiscus  (  Annalen  des  Wiener 
Muséums  der  Natuvgeschichte,  183G,  t.  V,  p.  237). 

(f)  Van  Beneden,  Recherches  sur  la  Faune  littorale  de  la  Belgique:  Vers  cestoïdes,  p.  48  (extr. 
des  Mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  1850,  t.  XXV). 

(g)  Van  Beneden,  Note  sur  l'appareil  circulatoire  des  Trématodes  {Ann.  des  sciences  nat.,  1852. 
3'  série,  t.  XVII,  p.  23). 


CHEZ    LES   VERS.  283 

Les  recherches  encore  plus  récentes  de  M.  Aubert,  de  Aspidogaster. 
Breslau ,  sur  la  structure  des  Aspidogaster,  conduisent  à  des 
résultats  analogues,  et  tendent  à  établir  que  tout  ce  système  n'est 
en  réalité  ni  un  appareil  circulatoire,  ni  un  organe  respiratoire, 
comme  on  l'avait  supposé  tour  à  tour,  mais  bien  un  appareil 
secrétaire  diffus  destiné  à  excréter  des  matières  dont  l'organisme 
doit  se  débarrasser,  et  comparable,  par  conséquent,  à  l'appareil 
urinaire  des  animaux  supérieurs  (1). 

Il  nous  paraît ,  en  effet ,  très  probable  que  les  vésicules  de 
Laurer  et  ses  dépendances  immédiates  représentent  ici  l'appareil 
de  Bojanus  que  nous  avons  déjà  étudié  chez  les  Mollusques. 
Mais  faut-il  en  conclure  que  tous  les  vaisseaux  en  communica- 
tion plus  ou  moins  directe  avec  ce  réservoir  appartiennent  à  un 
système  sécréteur  disséminé  dans  toutes  les  parties  de  l'écono- 
mie, et  qu'il  n'existe  chez  ces  Vers  aucun  vestige  d'un  système 
circulatoire?  Je  ne  le  pense  pas  ;  souvent  la  disposition  de  ces 
vaisseaux  ressemble  tant  à  ce  qui  existe  chez  divers  Annélides  où 
leur  nature  n'est  pas  incertaine,  qu'il  me  semblerait  bien  diffi- 
cile de  ne  pas  les  considérer  comme  étant  du  même  ordre,  et 
d'ailleurs  les  découvertes  récentes  faites  par  plusieurs  analo- 
mistes,  relatives  aux  relations  de  l'appareil  circulatoire  ou  de 
l'appareil  urinaire  chez  divers  Mollusques,  permettent  de  sup- 
poser que  l'existence  de  la  communication  entre  ces  vaisseaux 
et  l'extérieur  au  moyen  de  l'organe  bojanien  ne  serait  pas  in- 

(1)  M.  Aubert  (a)  a  trouvé  que,  braneux  jusque  vers  le  tiers  antérieur 
chez  ces  Vers ,  le  for  amen  caudale  du  corps,  où  il  se  termine  en  cul-de- 
est  tout  à  fait  terminal,  et  commu-  sac,  mais  communique  latéralement 
nique  avec  deux  réservoirs  ovalaires  avec  un  vaisseau  flexueux  dont  les 
qui  correspondent  à  la  vésicule  de  branches  se  répandent  dans  les  di- 
Laurer  et  qui  se  continuent  chacun  verses  parties  de  l'organisme  (6). 
sous  la  forme  d'un  gros  tube  mem- 

(a)  Hermann  Aubert,  Ueber  das  Wassevgefdss-System,  die  Geschlechtsverhdltnisse,  dicEibildung 
des  Aspidogaster  und  Vergleichung  anderer  Trematoden(Zeitschr.fiir  wissenschaftl.  Zool.,  1S55, 
Bd.  VI,  p.  349). 

(b)  Op.  cit.,  p.  354,  pi.  14,  fig-.  1  et  3. 


28/l  CIRCULATION    DU    SANG 

compatible  avec  leurs  fonctions,  comme  canaux  d'irrigation.  Je 
suis  donc  porté  à  croire  que  la  divergence  d'opinion  entre 
M.  Blanchard  et  les  autres  zoologistes  que  je  viens  de  citer  dé- 
pend de  l'existence  dîme  fusion,  tantôt  plus,  tantôt  moins  intime 
de  l'appareil  circulatoire  des  Trématodes,  avec  un  appareil 
excréteur,  et  que,  par  conséquent,  la  vérité  se  trouve  entre  les 
deux  interprétations. 

§  16.  —  Pour  se  convaincre  de  l'existence  d'un  système  de 
vaisseaux  ayant  tous  les  caractères  essentiels  de  l'appareil  circu- 
latoire tel  qu'on  le  rencontre  chez  les  Annélides,  il  suffît,  ce  me 
semble,  de  jeter  les  yeux  sur  les  figures  dans  lesquelles 
M.  Blanchard  a  représenté  ces  canaux,  figures  dont  j'ai  eu  sou- 
vent l'occasion  de  constafer  l'exactitude  en  les  comparant  avec 
la  nature. 
Douves  §  17.  —  On  voit  ainsi  que  chez  la  Douve  du  foie,  par  exemple, 

il  existe  sur  la  ligne  médiane  du  dos  un  vaisseau  longitudinal 
qui  se  divise  antérieurement  en  deux  branches,  et  qui,  de 
chaque  côté,  émet  une  multitude  de  rameaux  dont  les  divisions 
dendroïdes  se  répandent  dans  toute  l'étendue  de  la  surface 
dorsale  du  corps  et  y  constituent  un  lacis  capillaire  très  riche  (1). 
D'autres  vaisseaux  disposés  à  peu  près  de  la  même  manière, 
mais  beaucoup  plus  grêles,  se  voient  à  la  face  inférieure  du 
corps.  Mehlis,  à  qui  l'on  doit  la  connaissance  de  la  disposition 
générale  de  ces  divers  canaux,  pensait  que  le  vaisseau  dorsal 
débouchait  au  dehors  par  un  pore  situé  à  son  extrémité  posté- 
rieure ;  mais  M.  Blanchard  n'a  pu  trouver  aucune  trace  de 
l'existence  d'un  orifice  de  ce  genre,  et  pense  que  ce  système 
vasculaire  est  complètement  clos  (2). 

(1)  Voyez  le  travail  de  M.  Blan-  Sicile,  t.  III,  pi.  /j,  fig.  16  et  le. 

chard  sur  l'organisation  des  Vers  in-  (2)  Mehlis  pensait  que  ces  vaisseaux 

testinaux,  avec  les  planches  qui  Tac-  communiquaient  non  -seulement  au 

compagnent  ,  dans  notre  Voyage  en  dehors  par  le  pore  caudal  (a),  mais 

(a)  Mehlis  ,   Observationes  anatomicœ  de  Distomate  hepalico  et  lanceolato,  p.  18.  Goettingse, 
1825. 


CHEZ    LES    VERS.  285 

Chez  les  Monostomes  ,  le  système  vasculaire  est  non  moins  Monosiomes, 

-1/1/  •  i-D  •  /  •        Holostomes, 

développe  ;  mais,  au  heu  d  un  vaisseau  dorsal  médian,  on  voit       etc. 
de  chaque  côté  un  tronc  qui  s'atténue  à  ses  deux  extrémités  et 
qui  donne  naissance  à  une  multitude  de  ramuscules  déliés. 

On  remarque  des  variations  assez  grandes  dans  la  disposition 
de  ces  vaisseaux  chez  les  diverses  espèces  où  l'étude  en  a  été 
faite  ;  mais  ici,  de  même  que  chez  les  Annélides,  ces  différences 
ne  paraissent  tenir  qu'à  l'existence  de  divers  degrés  de  centra- 
lisation des  deux  moitiés  du  système  qui  tendent  à  se  confondre 
sur  la  ligne  médiane,  d'abord  vers  la  partie  postérieure  du  corps, 
puis  de  plus  en  plus  loin  vers  la  tête  (1).  . 

Quant  au  mouvement  du  liquide  contenu  dans  l'intérieur  de     Courams. 


aussi  avec  la  cavité  digeslive,  et  con- 
stituaient une  sorte  d'appareil  chy- 
lifère  ;  mais  M.  Blanchard  s'est  assuré 
que  les  liquides  colorés  poussés  dans 
l'estomac  ne  pénétraient  jamais  dans 
le  système  vasculaire. 

(1)  Ainsi,  chez  les  Polystomes  {a), 
de  même  que  chez  les  Monostomes  (6), 
les  troncs  latéraux  sont  séparés  dans 
toute  la  longueur  du  corps,  et,  en  se 
réunissant  par  leur  extrémité  posté- 
rieure ,  ne  donnent  pas  naissance  à 
un  tronc  médian. 

Chez  les  Amphistomes  ,  comme 
nous  l'avons  déjà  vu,  les  deux  moitiés 
du  système  sont  également  distinctes 
et  écartées,  sauf  dans  une  petite  éten- 
due, où  ils  sont  représentés  par  la 
vésicule  de  Laurer  (c). 

Chez  le  Brachylœmus  Erinacei  (d), 
elles  sont  confondues  sur  la  ligne  mé- 
diane dans  toute  la  moitié  postérieure 


du  corps  ,  de  façon  que  la  portion 
centrale  du  système  a  la  forme  d'un  Y. 

Enhn,  chez  les  Douves,  la  centra- 
lisation s'étend  dans  les  quatre  cin- 
quièmes de  la  longueur  du  corps ,  de 
sorte  que  le  tronc  médian  devient  la 
partie  principale  de  l'appareil ,  et  les 
troncs  latéraux  sont  courts  et  fort  rap- 
prochés l'un  de  l'autre ,  ainsi  qu'on 
peut  le  voir  en  consultant  les  figures 
données  par  AI.  Blanchard  (e'. 

Chez  l'iloLOSTOME  du  Renard  ,  la 
portion  centrale  du  système  vascu- 
laire qui  est  représentée  en  arrière 
par  un  tronc  médian  et  en  avant  par 
deux  branches,  est  très  peu  dévelop- 
pée ;  mais  la  portion  périphérique  est 
formée  par  un  réseau  de  canaux  ra- 
meux  plus  gros  que  d'ordinaire,  et  à 
la  face  inférieure  du  corps  on  remar- 
que une  série  de  vaisseaux  transver- 
saux (/).. 


(a)  Blanchard,  loc.  cit.,  pi.  6,  fig.  A. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  6,  fig.  3. 

(c)  Idem,  ibid.,  pi.  10,  fig.  1b,  1c. 

(d)  Idem,  ibid.,  pi.  6,  fig.  2. 
{e)  Idem,  ibid.,  pi.  4,  fig.  1. 

(f)  Idem,  ibid.,  pi.  7,  fig.  1  ell  a. 


Vers 
cestoïdes. 


286  CIRCULATION    DU    SANG 

ces  divers  vaisseaux,  il  paraît  être  oscillatoire  seulement  (1),  et 
il  y  a  lieu  de  supposer  qu'en  général  les  courants  sont  établis, 
non  par  la  contraction  d'un  réservoir  sanguin  ou  des  parois 
vasculaires ,  mais  par  l'action  de  cils  vibratiles  dont  les  gros 
troncs  seraient  garnis  (2). 

§  18.  ■ —  Chez  les  Vers  intestinaux  de  la  famille  des  Cestoïdes, 
M.  Blanchard  a  trouvé  un  certain  nombre  de  canaux  sous- 
cutanés  très  grêles  qui  semblent  constituer  un  appareil  circu- 
latoire rudimentaire,  mais  qui  suivent  les  espaces  intermuscu- 
laires sans  offrir  de  ramifications.  On  ne  sait  d'ailleurs  rien  sur 
le  mouvement  des  liquides  dans  ce  système  (3). 


(1)  M.  Nordmann  pense  que  chez 
le  Diplozoon  paradoxum  il  existe  de 
chaque  côté  du  corps  deux  vaisseaux 
longitudinaux  à  branches  rameuses , 
dans  l'intérieur  desquels  il  indique 
des  "courants  dirigés  en  sens  con- 
traires. 11  y  aurait  donc  là,  dans  chaque 
moitié  du  système,  un  cercle  vascu- 
laire  complet. 

M.  Kôlliker  a  trouvé  chez  les  Tri- 
stuma  papillorum  un  vaisseau  médio- 
dorsal  qui  est  contractile  et  qui  four- 
nit latéralement  des  ramuscules.  Ce 
zoologiste  décrit  aussi  sur  les  côtés  du 
corps  d'autres  vaisseaux  rameux, 
mais  ceux-ci  communiquent  avec  l'ex- 
térieur par  des  pores,  et  il  les  consi- 
dère comme  constituant  un  appareil 
respiratoire  (a). 

(2)  M.  Nordmann  a  remarqué  que 
le  mouvement  circulatoire  est  souvent 
très  vif,  sans  qu'il  y  ait  ni  contraction 
ni  dilatation  appréciables  dans  les  vais- 
seaux (b). 


M.  Dujardin  a  constaté  l'existence 
de  cils  vibratiles  placés  de  distance  en 
distance  dans  l'intérieur  de  quelques- 
uns  des  vaisseaux ,  chez  les  jeunes 
Distomes  ;  mais  il  pense  que  d'autres 
vaisseaux  en  sont  dépourvus  et  servent 
au  retour  du  liquide  (c). 

M.  Mayer  a  vu  aussi  des  cils  vibra- 
tiles en  connexion  avec  les  vaisseaux 
latéraux  chez  YOctobothrium  de  l'A- 
lose, mais  il  pense  qu'ils  ne  sont  pas 
logés  dans  ceux-ci  et  ne  produisent 
pas  un  mouvement  circulatoire  {d). 

(3)  Chez  le  Taenia  de  l'Homme, 
M.  Blanchard  a  injecté  quatre  vais- 
seaux longitudinaux  très  grêles  qui 
sont  reliés  entre  eux  par  un  grand 
nombre  de  branches  transversales  et 
simples,  ou  seulement  bifurquées  de 
façon  à  représenter  une  sorte  de 
treillis  fort  uniforme.  Ces  canaux  ne 
paraissent  avoir  aucune  communica- 
tion avec  les  autres  cavités  du  corps , 
et  M.  Blanchard  les  décrit  comme. 


(a)  Kôlliker,  Ueber  Tristoma  papillosum  (  Zweiter  Bericht  von  der  Zootomischen  Anslalt  m 
Wûrzburg,  1849,  p.  23  et  24,  pi.  2,  %.  1). 
(6)  Nordmann,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XXX,  p.  392). 

(c)  Dujardin,  Histoire  naturelle  des  Helminthes,  1845,  p.  384. 

(d)  Meyer,  Beitràge  zur  Anatomie  der  Entozoon,  1 841 ,  p.  23. 


CHEZ    LES    VERS. 


287 


§  19.  —  On  ne  sait  encore  que  fort  peu  de  chose  au  sujet  des  J0at^eeurs 
de  l'appareil  circulatoire  des  Rotateurs;  les  parties  qui  ont  été 
décrites  sous  le  nom  de  vaisseaux  sanguins  par  plusieurs  natu- 
ralistes ne  paraissent  pas  mériter  ce  nom  ,  et  il  est  probable 
que  l'irrigation  nutritive  s'effectue  principalement,  sinon  exclu- 
sivement, à  l'aide  du  liquide  cavitaire  (1).  Mais  la  petitesse  de 
ces  Animaux  rend  la  solution  de  cette  question  très  difficile. 


ayant  des  parois  membraneuses  dis- 
tinctes. Deux  des  troncs  longitudinaux 
sont  situés  près  clu  bord  latéral  du 
corps  en  dehors  du  tube  alimentaire, 
et  les  deux  antres  à  peu  près  à  égale 
distance  des  précédents  et  de  la  ligne 
médiane  ;  les  branches  transversales 
sont  parfois  au  nombre  de  plus  de 
trente  par  anneau  (a).  Chez  le  Tœnia 
serrata,  ces  vaisseaux  sont  plus  grêles 
et  les  branches  transversales  moins 
régulières  (b).  Chez  le  Tœnia  cucu- 
merina,  la  disposition  est  à  peu  près 
la  même  (c). 

M.  Blanchard  a  décrit  des  vaisseaux 
disposés  à  peu  près  de  la  même  ma- 
nière, mais  avec  beaucoup  moins  de 
régularité  chez  le  CaryophyUœus  mu- 
tabilis.  Les  troncs  longitudinaux  sont 
au  nombre  de  dix,  et  les  traverses 
situées  à  la  même  hauteur  ne  s'éten- 
dent que  d'un  tronc  à  celui  qui  l'avoi- 
sine  (d). 

Il  est  d'ailleurs  à  noter  que  jusqu'ic 


aucune  communication  n'a  été  consta- 
tée entre  ces  canalicules  sous-cutanés 
et  les  gros  tubes  longitudinaux  qui  se 
voient  sur  les  côtés  du  corps  des  Vers 
Tamioïdes,  et  qui  sont  considérés  par 
M.  Van  Beneden  comme  étant  les  ana- 
logues des  canaux  en  rapport  avec  la 
vésicule  de  Laurer,  chez  les  Distomes. 
Quelques  auteurs  ont  décrit  ces  ca- 
naux latéraux  et  leurs  branches  ana- 
stomotiques  comme  constituant  nn 
appareil  circulatoire  (e)  ;  mais,  suivant 
la  plupart  des  naturalistes,  ils  repré- 
senteraient l'appareil  digestif  (/). 
M.  Van  Beneden  pense  que  ce  sont 
des  organes  sécréteurs,  opinion  sur 
laquelle  nous  aurons  à  revenir  plus 
tard. 

J'ajouterai  que,  suivant  ce  dernier 
naturaliste,  la  circulation  serait  entiè- 
rement lacunaire  chez  tous  ces  Vers 
intestinaux  (g). 

(1)  Les  parties  que  M.  Ehrenberg 
a  considérées  comme  étant  des  vais- 


fa)  Blanchard,  Rech.  sur  l'organisation  des  Vers  {Voyage  en  Sicile,  t.  III,  p.  153,  pi.  14, 
%■  !)• 

(b)Loc.  cit.,  pi.  14,  flg.  2. 

(c)  Loc.cit.,  p.  147,  pi.  14,  fig.  4. 

(d)  Op.  cit.,  p.  147,  pi.  7,  fig.  5,  5  a. 

(e)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anatomle  comparée,  1. 1,  p.  1 36. 

(f)  Carlisle,  Observ.  upon  the  Structure  and  Œconomy  of  those  Intestinal  Worms  called  Tœniat 
(Trans.  of  the  Linn.  Soc,  1794,  t.  II,  p.  251). 

—  Délie  Clriaje,  Mem.  sulla  storia  e  notomia  degli  Anim.  senza  vertèbre  di  Napoll,  t.  I,  p.  141 
et  suiv.  (  Il  considère  à  tort  ces  canaux  comme  débouchant  au  dehors  dans  chaque  anneau.) 

—  Eschricht,  Anat.  Phys.  Untersuch.  iïber  die  Bothryocephalen,  p.  57  (extrait  des  Mém.  de 
l'Acad.  des  cur.  de  la  Nat.,  t.  XIX,  supplém.). 

—  Owen,  Lectures  on  the  Cmnparaiive  Anatomy  "of  the  Invertebrate  Animais,  1855,  p.  70. 

—  Blanchard,  Op.  cit.  (Voyage  en  Sicile,  t.  III,  p.  152). 

(g)  Van  Beneden,  Rech.  sur  la  faune  littorale  de  Belgique  (Vers  cestoïdes),  p.  39  et  suiv. 


238 


CIRCULATION    Dt    SANG 


Système 

vasculaire 

des 

Eclrinodcrmes. 


§  20.  —  Les  Vers  ne  sont  pas  les  seuls  Invertébrés  chez 
lesquels  un  système  spécial  de  tubes  sanguifères  se  trouve 
ajouté  au  système  lacunaire  à  l'aide  duquel  l'irrigation  nutri- 
tive s'effectue  en  totalité  ou  en  partie  chez  tous  ces  Animaux. 
On  en  voit  déjà  des  exemples  dans  l'embranchement  des  Zoo- 
phytes(l). 


seaux  sanguins  (a)  paraissent  être 
principalement  des  bandes  muscu- 
laires (6). 

M.  Udekem  a  décrit  avec  plus  de 
détails  un  réseau  de  filaments  qui  se 
voient  dans  les  lobes  ciliés  de  la  La- 
cinularia  socialis  ,  et  qui  paraissent 
être  en  connexion  avec  les  tubes  déjà 
mentionnés  sous  le  nom  de  canaux 
aquifères  ;  il  pense  que  ce  sont  des 
vaisseaux  et  que  cet  ensemble  de  par- 
ties constitue  un  système  circula- 
toire (c)  ;  mais  les  observations  plus 
récentes  de  M.  Huxley  (d)  et  de 
M.  Leydig  ne  sont  pas  favorables  à 
cette  manière  de  voir,  et  ce  dernier 
considère  le  fluide  contenu  dans  les 
espaces  inlerorganiques  comme  tenant 
lieu  de  sang  (e). 


(1)  Je  crois  inutile  de  m'arrêter  ici 
sur  les  suppositions  que  quelques  na- 
turalistes ont  faites  relativement  à  une 
circulation  du  sang  chez  les  Infu- 
soires,  car  les  moyens  d'observation 
dont  nous  disposons  ne  nous  permet- 
tent pas  de  constater  des  phénomènes 
de  ce  genre  chez  ces  animalcules  mi- 
croscopiques. On  voit,  il  est  vrai,  chez 
beaucoup  de  ces  petits  êtres,  des  vési- 
cules pulsatiles,  qui,  chez  les  Kolpo- 
des,  par  exemple,  se  contractent  d'une 
manière  rhythmique  ,  et  quelques  au- 
teurs ont  cru  pouvoir  les  considérer 
comme  des  cœurs  (f),  tandis  que  d'au- 
tres ont  pensé  que  ce  sont  des  cavités 
respiratoires  (</),  ou  bien  encore  des 
organes  éjaculateurs  [h).  Tantôt  elles 
sont  sphériques  [i)  ;  d'autres  fois  elles 


(a)  Ehrenberg,  Die  Infusionsthierchen,  1838,  p.  415. 

(6)  Dujardin,  Histoire  naturelle  des  Infusoires,  1841,  p.  589. 

■ —  Rymer  Jones,  Hotifera  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  t.  IV,  p.  413). 

—  Siebold,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  1. 1,  p.  181. 

(e)  Udekeni,  Note  sur  le  système  circulatoire  de  la  Lacinulaire  sociale  (Ann.  des  sciences  nat., 
1850,  3°  série,  t.  XIV,  p.  14G). 

(d)  Huxley,  Lacinularia  socialis.  A  Contribution  to  the  Analomy  and  Physiol.  of  the  Hotifera 
(Trans.  of  the  Microscopical  Society,  1852,  t.  I,  p.  1). 

(e)  Fr.  Leydig,  Ueber  den  Bau  und  die  Systematische  Stellung  der  Bàderthiere  (Zeitschr.  fur 
tuissenschaftl.  Zool.,  1855,  t.  VI,  p.  7"). 

(fi  Wicgmann  ,  Bericht  ûber  die  Fortschritte  der  Zoologie  (Archiv  fur  Naturgeschichte ,  1835, 
t.  I,  p.  12). 

—  Pouehet,  Rech.  sur  les  organes  de  la  circulation  ,  de  la  digestion  et  de  la  respiration  des 
Animaux  infusoires,  1849,  p.  3,  pi.  1 ,  fig.  2,  etc.), 

—  Siebold,  Nouveau,  Manuel  d'anatomie  comparée,  t.  I,  p.  19. 

(g)  Spallanzani,  Observ.  et  expér.  sur  les  Animalcules  (Opuscules  de  physique,  1. 1,  p.  248). 

—  Dujardin  ,  Mém.  sur  l'organisation  des  Infusoires  (Ann.  des  sciences  nat.,  1838,  2*  série, 
t.  X,  p.  305). 

- —  Erdl,  Ueber  den  Kreislauf  der  Infusorien  (Mullers'  Archiv,  1 841 ,  p.  278). 

(Il)  Ehrenberg,  Organisation  in  der  Richtung  des  kleinsten  Raumes,  3e  partie,  1834,  elh'oiw. 
rech.  sur  l'organisation  des  Infusoires  (Ann.  des  sciences  nat.,  1835,  2e  série,  t.  111 ,  p.  285  et 
suiv.,  pi.  12,  fig.  10,  15,  19,  etc.). 

(i)  Exemple  -.Levcophryspatula.  Voyez  Elirenberg,  Infusorien  Thiere,fl.  32,  fig.  1. 


*  CHEZ    LES   ÉCHINODERMBS.  289 

En  efïetigdans  la  classe  des  Échinodermes  ,  comprenant  les 
Holothuries  y  les  Astéries  et  les  Oursins,  la  cavité  générale  du 
qo/ps  et  ses  dépendances  renferment,  comme  je  l'ai  déjà  ditvun 
fluide  qui  ne  paraît  différer  en  rien  du  sang  incolore  des  autres 
Animaux  invertébrés,  et  qui  remplit  ici,  suivant  toute  appa- 
rence, des  fonctions  analogues  (1) .  Mais  on  trouve  en  outre  un 


Système 

vasculaire 

sous-cutané. 


donnent  naissance  à  des  prolonge- 
ments radiaires  vasculi formes  ou  ren- 
flés en  ampoule  vers  la  base  (a). 
Il  est  aussi  à  noter  que  leur  nombre 
est  très  variable.  Ainsi,  chez  certains 
Paraméciens,  on  n'en  voit  qu'une  seule, 
mais  on  en  distingue  deux  chez  les 
Trichodiens,  trois  ou  quatre  chez  des 
Trachéliens,  et  l'on  en  compte  même 
quatorze  ou  quinze  chez  les  Amphi- 
leptus  (b). 

(1)  Vers  la  fin  du  siècle  dernier, 
Monro  publia  quelques  observations 
sur  le  système  vasculaire  des  Our- 
sins (c);  et,  dans  un  de  ses  premiers 
ouvrages,  Cuvier  donna  une  descrip- 
tion sommaire  d'une  portion  de  ce 
système  chez  les  Holothuries  et  les 
Astéries  (d).  Konrad  fit  aussi  des  ob- 
servations sur  l'anatomie  de  ces  deux 
animaux  (e)  ;  mais  ce  sont  les  tra- 


vaux de  M.  Tiedemann  ,  entrepris  à 
l'instigation  de  l'Académie  des  scien- 
ces, qui  ont  contribué  le  plus  au  pro- 
grès de  cette  partie  de  l'histoire  ana- 
tomique  des  Zoophytes  (/").  M.  Délie 
Chiaje  a  publié  aussi  des  travaux  con- 
sidérables sur  ce  sujet  (g),  et  l'on  doit 
également  à  MM.  Volkmann,  Valentin, 
Millier  et  Quatrefages  des  observations 
intéressantes  sur  les  vaisseaux  de  ces 
Animaux  (h)  ;  mais  leur  circulation  ne 
nous  est  encore  connue  que  d'une  ma- 
nière très  incomplète.  En  18^0,  j'avais 
commencé  des  recherches  à  ce  sujet, 
et  quelques-uns  de  mes  dessins  ont 
été  publiés  dans  la  grande  édition  du 
Règne  animal  de  Cuvier  ;  mais  je  n'ai 
pas  eu  l'occasion  de  résoudre  la  plu- 
part des  questions  dont  je  désirais 
obtenir  la  solution,  et  par  conséquent 
mon  travail  est  resté  inédit. 


(a)  Exemple  :  Paramecium  Aurélia.  Voyez  Ehrenberg,  Infusorien  Thiere  ,  pi.  39,  fig.  6,  et 
Dujardin,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1838,  2«  série,  t.  X,  pi.  15,  fig.  E,  3). 
(6)  Voyez  les  belles  planches  du  grand  ouvrage  de  M.  Ehrenberg  [Infusorien  Thiere). 

(c)  Monro,  The  Structure  and  Physiology  of  Fishes,  1785,  p.  67. 

(d)  Cuvier,  Leçons  d' anatomie  comparée,  1805,  t.  IV,  p.  414. 

(e)  Konrad,  De  Asteriarum  fabrica  (Dissert,  inaug.,  cum  tab.).  Hâte  (sans  date). 

(f)  F.  Tiedemann,  Anatomie  der  Rohren-Holothurie,  des  Pomeranzfarbigen  Seeslerns  und  Steirt- 
seeigels,  1816,  fol. 

(g)  Délie  Chiaje,  Memorie  snlla  sloria  e  notomia  degli  Animali  senza  vertèbre  del  Regno  di 
Napoli,  t.  I ,  p.  98  et  suiv.  (1823) ,  et  Descrizione  e  notomia  degli  Animali  invertebrati  délia 
Sicilia  citeriore,  t.  IV,  p.  18  et  suiv.  (1841). 

(h)  Volkmann,  Ueber  das  Gefdss-System  der  Meersterne  (Isis,  1838,  t.  XXX,  p.  513). 

—  Valentin,  Anatomie  du  genre  Echinus  (Monographies  d' Échinodermes,  par  Agassiz,  1841). 

—  Quatrefages ,  Mém.  sur  la  Synapte  de  Duvernoy  (Ann.  des  sciences  nat.,  1842,  2*  série, 
t.  XVII,  p.  58). 

—  Millier,  Anatomischen  Studien  ûber  die  Echinodermen  (Archiv  fur  Anat.  und  Physiol, 
1850,  p.  117). 

—  Idem,  Ueber  den  Bau  der  Echinodermen,  1854,  p.  79,  84,  elc. 


III. 


19 


290  CIRCULATION    DU    SANG 

système  de  tubes  à  parois  membraneuses  qui  n'a  aucune  com- 
munication directe  avec  le  système  lacunaire,  et  qui  constitue 
évidemment  un  appareil  irrigatoire  spécial  (1).  Une  portion  de  ce 
système  est  en  connexion  avec  le  tube  digestif,  et  l'on  y  remar- 
que un  tronc  vasculaire  principal  dont  les  parois  sont  con- 
tractiles, et  dont  les  ondulations  impriment  un  mouvement  cir- 
culatoire au  fluide  qui  en  occupe  l'intérieur.  D'autres  canaux, 
reliés  entre  eux  par  un  vaisseau  circumbuccal,  garnissent  les 
parois  de  la  grande  cavité  viscérale,  et  se  prolongent  dans  l'in- 
térieur des  tentacules  rameux,  dont  l'extrémité  antérieure  du 
corps  est  entourée.  Mais,  jusqu'ici,  on  n'a  pu  constater  d'une 


(1)  L'existence  d'un  liquide  aqueux 
en  assez  grande  quantité  dans  la  ca- 
vité viscérale  du  corps  chez  les  Échi- 
nodermes  avait  conduit  d'abord  la 
plupart  des  naturalistes  à  penser  que 
cette  cavité  devait  communiquer  li- 
brement avec  le  dehors,  et  que  c'était 
de  l'eau  seulement  qui  la  remplissait. 
Mais  les  observations  de  M.  de  Quatre- 
fages,  de  M.  Williams  et  de  quelques 
autres  physiologistes  sur  la  constitu- 
tion de  ce  liquide,  tendent  à  établir 
que  c'est  un  suc  nourricier  comparable 
en  tout  au  sang  qui  occupe  aussi  la 
cavité  générale  du  corps  chez  les  Mol- 
lusques et  les  Animaux  articulés  (a). 
11  est  possible  que  dans  quelques  cas 
des  pores  puissent  permettre  l'entrée 
d'une  certaine  quantité  d'eau  qui  vien- 
drait se  mêler  à  ce  liquide  nourricier  ; 
mais  jusqu'ici  des  communications  de 
ce  genre,  quoique  souvent  annoncées, 
n'ont  pas  encore  été  démontrées  d'une 


manière  satisfaisante,  et  quoi  qu'il  en 
soit  à  cet  égard,  il  me  paraît  bien  évi- 
dent que  le  liquide  cavitaire  joue  un 
rôle  très  important  dans  les  phéno- 
mènes ordinaires  de  l'irrigation  nu- 
tritive. 

La  cavité  viscérale  qui,  chez  les 
Échinodermes,  renferme  ce  liquide, 
ainsi  que  l'appareil  digestif  et  les  or- 
ganes de  la  génération,  est  limitée  par 
le  système  tégumentaire,  et  répète  par 
conséquent  la  forme  générale  du  corps. 
Elle  est  donc  à  peu  près  cylindri- 
que chez  les  Holothuries  ,  presque 
sphérique  chez  les  Échinides,  et  ra- 
diaire  chez  les  Astéries.  Une  mem- 
brane très  fine,  de  la  nature  des  tuni- 
ques séreuses,  en  tapisse  les  parois  et 
porte,  tantôt  dans  toute  son  étendue, 
tantôt  sur  certains  points  seulement, 
des  cils  vibratiles  dont  les  mouve- 
ments flabellaires  déterminent  dans  le 
liquide  cavitaire  des  courants  plus  ou 


(a)  Quatrefages,  Mém.  sur  la  cavité  du  corps  des  Invertébrés  (Ann.  des  sciences  nat.,  1850, 
3'  série,  t.  XIV,  p.  302). 

—  T.  Williams,  On  the  Blood  Proper  and  Chylaqueous  Fluid  of  Invertebrate  Animais  (Philos. 
Trans,,  1852,  p.  605  et  suiv.). 

—  On  tht  Mechanism  of  Aquatic  Respiration  {Ann.  of  Nat.  Hist.,  1853,  2-  série,  vol.  XII , 
p.  853). 


CHEZ    LES    ÉCHIXODERMES.  291 

manière  satisfaisante  aucune  communication  directe  entre  ces 
deux  systèmes  de  vaisseaux,  et  la  plupart  des  anatomistes  pen- 
sent aujourd'hui  qu'ils  sont  complètement  indépendants  l'un 
de  l'autre.  On  s'accorde  généralement  à  regarder  le  système 
vasculaire  viscéral  comme  étant  un  appareil  circulatoire,  et  l'on 
attribue  le  plus  ordinairement  au  système  cutané  d'autres 
usages.  Je  suis  porté  à  croire  cependant  que  tous  ces  ca- 
naux sont  des  organes  d'irrigation  nutritive,  et  doivent  être 
considérés  comme  des  ébauches  d'un  système  circulatoire 
spécial. 

§  21 .  —  Dans  l'état  d'incertitude  où  nous  sommes  sur  le  rôle 
physiologique  de  la  plus  grande  partie  du  système  vasculaire  des 
Échinodermes,  je  ne  crois  pas  devoir  m'arrêter  à  en  donner  ici 


moins  vifs.  M.  Sharpey,  qui  a  été  le 
premier  à  observer  ce  phénomène,  a 
vu  que,  dans  chaque  rayon  de  l'Étoile 
de  mer ,  il  y  a  deux  courants  centri- 
fuges qui  occupent  la  ligne  moyenne 
de  ces  prolongements  :  l'un  immédia- 
tement sous  les  téguments  de  la  paroi 
supérieure  ou  dorsale,  l'autre  sur  le 
plancher  ou  paroi  inférieure  de  la  cavité 
viscérale,  et  le  liquide  ainsi  mis  en 
mouvement  revient  vers  le  centre  du 
corps  en  suivant  les  parties  latérales 
des  rayons.  D'autres  courants  analo- 
gues lèchent  pour  ainsi  dire  la  surface 
des  cœcums  gastriques  qui  s'avancent 
dans  l'intérieur  des  rayons,  et  tous 
ont  une  direction  constante,  de  sorte 
qu'il  s'établit  ainsi  une  véritable  cir- 
culation dans  toutes  les  parties  de 
la  cavité  viscérale  et  de  ses  dépen- 
dances (a). 


Le  mouvement  ciliaire  a  été  con- 
staté aussi  par  M.  Sharpey  sur  presque 
toutes  les  parties  de  la  cavité  viscérale 
des  Oursins,  et  les  courants  y  baignent 
d'une  manière  très  régulière  les  bran- 
chies internes  ou  feuilles  basilaires  du 
système  ambulacraire,  ainsi  que  la 
surface  du  tube  digestif,  etc. 

M.  de  Quatrefages  a  trouvé  que 
chez  les  Siponcles  le  liquide  cavitaire 
circule  aussi  d'une  manière  régulière 
dans  la  cavité  viscérale  :  im  courant 
sous -cutané  se  porte  d'arrière  en 
avant,  et  le  courant  récurrent  longe 
la  masse  viscérale.  Si  l'on  interrompt 
la  communication  entre  la  partie  an- 
térieure et  la  portion  postérieure  de 
la  cavité  commune,  le  mouvement 
circulatoire  se  continue  d'une  manière 
indépendante  dans  chaque  portion 
ainsi  isolée  (6). 


(a)  Sharpey,  Cilia  (Todd's  Cyclopcedia  of  Anat.  and  PhysioL,  1836,  vol.  1,  p.  616), 

(b)  Quatrefages,  Mém.  sur  la  cavité  du  corps  des  Invertébrés  (Ann.  des  sciences  nat.,  1850, 
3*  série,  t.  XIV,  p.  317). 


292  CIRCULATION    DU    SANG 

une  description  détaillée,  et  je  me  bornerai  à  en  faire  connaître 
brièvement  les  caractères  principaux. 
Système         Le  système  vasculaire  sous-cutané  de  tous  les  Échinodermes 
sous-cutané   proprement  dits  se  compose  essentiellement  de  cinq  tubes  lon- 


des 


Échinodermes  gitudinaux  qui  occupent  le  milieu  des  grandes  bandes  muscu- 

pédicGlltîs 

laires,  étendues  d'une  extrémité  du  corps  a  l'autre,  et  accolées 
aux  parois  de  la  cavité  générale  où  flottent  les  viscères.  Ces 
vaisseaux  paraissent  être  fermés  à  leur  extrémité  postérieure, 
mais  s'ouvrent  antérieurement  dans  un  canal  annulaire  qui 
entoure  l'orifice  buccal  et  qui  envoie  des  prolongements  dans 
chacun  des  tentacules  dont  se  compose  la  couronne  labiale. 
Des  tubes  terminés  en  culs-de-sac  sont  suspendus  à  ce  même 
anneau  vasculaire,  et  paraissent  servir  de  réservoir  pour  le  fluide 
qui  reflue  des  tentacules,  quand  ceux-ci  se  contractent.  Enfin, 
chez  la  plupart  des  Animaux  de  cette  classe,  les  vaisseaux  longi- 
tudinaux donnent  naissance  latéralement  à  des  branches  simples 
qui  se  rendent  aux  vésicules  ou  feuillets  situés  à  la  base  des  ap- 
pendices ambulacraires  et  y  débouchent  (1).  Il  est  aussi  à  noter 
que  ce  système  de  vaisseaux  sous-cutanés  est  pourvu  de  cils 
vibratiles  qui  mettent  en  mouvement  le  liquide  contenu  dans 
son  intérieur.  Beaucoup  de  naturalistes  pensent  que  ce  liquide 
n'est  autre  chose  que  de  l'eau  de  mer  qui  pénétrerait  directe- 
ment dans  le  canal  circumbuccal  par  des  orifices  particuliers, 
et  ils  désignent  en  conséquence  cette  portion  de  l'appareil  vas- 
culaire sous  le  nom  de  système  aquifère  (2).  Mais  cette  opinion 


(1)  Celle  dénomination  a  été  appli-  dessus  (a),  tandis  que  le  système  aqui- 

quée   par  différents    auteurs    à  des  fère  dont  il   est  quesiion   dans  les 

choses     essentiellement      distinctes.  Mémoires  de  M.  Délie  Chiaje  est  le  sys- 

Ainsi  le  système  aquifère  dont  parle  tème  cavitaire  général  du  corps  (6). 
M.  Siebold  consiste  dans  le  système  (2)  M.  Krohn  pense  que  les  parois 

de  vaisseaux  sous-cutanés  décrit  ci-  de  ces  feuillets  sont  creusées  d'un  vais- 
fa)  Siebold  et  Stannius,  Nouveau  Manuel  d'anat.  comp.,  t.  I,  p.  102, 
(fc)  Voyez  ci-dessus,  tome  H,  page  8. 


CHEZ   LES    ÉCH1N0DERMES.  293 

ne  paraît  pas  être  fondée  :  je  n'ai  jamais  pu  découvrir  aucun 
indice  de  l'existence  d'une  communication  libre  et  directe  entre 
les  vaisseaux  sous-cutanés  des  Échinodermes  et  l'extérieur  ;  je 
suis  même  très  porté  à  croire  qu'ils  s'anastomosent  avec  le 
système  vasculaire  viscéral,  et  qu'ils  font  réellement  partie  de 
l'appareil  circulatoire. 

Les  tubes  sous-cutanés  dont  il  vient  d'être  question  ne  don- 
nent jamais  naissance  à  des  ramifications  dendroïdes.  Les  vais- 
seaux qui  accompagnent  le  tube  digestif  fournissent  au  contraire     Système 
à  cet  organe  une  multitude  de  branches  dont  les  divisions  et     *£££ 
les  subdivisions  successives  constituent  un  lacis  capillaire  fort 
remarquable. 

Chez  les  Holothuries  surtout,  ce  système  circulatoire  profond 
prend  un  très  grand  développement,  et  présente  une  multitude 
de  houppes  vasculaires  qui  sont  enchevêtrées  au  milieu  des 
ramifications  de  l'appareil  respiratoire  ;  mais  il  y  a  simplement 
contiguïté  entre  ces  vaisseaux  et  les  trachées  aquifères  qui 
constituent  l'appareil  branchial  interne  de  ces  Animaux  (1),  et 
jamais  les  vaisseaux  sanguins  ne  se  ramifient  dans  l'épaisseur 
des  parois  de  ces  organes,  comme  cela  a  lieu  chez  les  Mollus- 
ques, les  Crustacés  et  les  Animaux  supérieurs.  Le  tronc  con- 
tractile qui  parait  tenir  lieu  de  cœur  est  logé  dans  le  repli 
membraneux  qui,  à  la  manière  d'un  mésentère,  fixe  l'appareil 
digestif  dans  la  cavité  viscérale.  Du  côté  opposé  du  tube  intes- 
tinal se  trouve  un  autre  vaisseau  qui  peut  être  considéré  comme 
une  veine,  car  le  sang  poussé  par  le  cœur  tubiforme  doit  s'y 
rendre  après  avoir  traversé  le  réseau  capillaire  interposé  ;  mais 
on  ne  sait  pas  comment  le  fluide  nourricier  retourne  de  cette 

seau  marginal  et  de  diverses  ramifi-      avec  le  système  irrigatoire  général  (a). 
cations  ;  mais  il  ne  s'explique  pas  au  (1)  Voyez  tome  II,  page  10  et  sui- 

sujet  des    relations  de  ces  vaisseaux      vantes. 

(a)  Krohn,  Ueber  die  Anordnung  des  Nervensystems  der  Echiniden  und  Holothurien  M»  Allge- 
mcinen  (Miiller's  Atchiv  fur  Ariat.  und  Physiol.,  1841,  p.  5,  note). 


29/t  CIRCULATION    DU    SANG 

veine  intestinale  au  cœur  pour  recommencer  le  mouvement 
circulatoire  (1).  Il  serait  donc  possible  qu'il  n'y  eût  ici  qu'une 
oscillation,  un  mouvement  de  va-et-vient,  au  lieu  d'un  courant 


(1)  C'est  chez  les  Holothuries  que 
l'appareil  vasculaire  est  le  mieux  con- 
nu (a).  Les  cinq  vaisseaux  longitudi- 
naux que  l'on  peut  désigner  sous  le  nom 
de  vaisseaux  ambulacraires  princi- 
paux, à  raison  de  leurs  rapports  avec 
les  appendices  locomoteurs,  occupent, 
comme  je  l'ai  déjà  dit,  le  milieu  des 
cinqbandes  musculaires  longitudinales 
qui  garnissent  en  dedans  les  parois  de 
la  grande  cavité  viscérale  formées  par 
les  téguments  et  le  panicule  charnu 
sous-cutané.  Des  canaux  secondaires 
partent  à  angle  droit  de  ces  troncs 
principaux,  et,  après  avoir  marché 
entre  la  peau  et  les  muscles  longitu- 
dinaux, se  montrent  à  nu  sur  la  paroi 
interne  de  la  cavité  viscérale  ;  ils  ne 
se  divisent  pas  et  ne  s'anastomosent 
pas  ;  mais  chacun  d'eux,  parvenu  à  la 
base  de  l'un  des  appendices  ambula- 
craires, y  pénètre  après  s'être  renflé 
en  forme  de  petite  ampoule.  Les  troncs 
longitudinaux  dont  naissent  ces  vais- 
seaux ambulacraires  secondaires  se 
rétrécissent  peu  à  peu  vers  l'arrière 
du  corps,  et  ne  m'ont  paru  s'anasto- 
moser ni  entre  eux,  ni  avec  les  vais- 
seaux du  système  viscéral.  Par  leur 
extrémité  antérieure  ils  pénètrent  dans 
l'anneau  cartilagineux  qui  entoure  le 
pbarynx,  et  y  donnent  naissance  à  une 


couronne  de  vaisseaux  tentaculaires 
qui  se  ramifient  dans  les  appendices 
labiaux,  et  à  autant  de  tubes  terminés 
en  culs-de-sac  qui  se  portent  en  ar- 
rière et  flottent  librement  dans  la 
cavité  viscérale.  Ces  derniers  organes, 
que  M.  Délie  Chiaje  a  décrits  sous  le 
nom  de  sacs  foligniens  (6),  et  que  la 
plupart  des  auteurs  appellent  tubes  de 
Poli ,  ont  des  parois  contractiles ,  et 
paraissent  servir  de  diverticulumspour 
recevoir  le  liquide  qui  reflue  des  ca- 
naux des  tentacules  correspondants 
lorsque  ces  appendices  se  contractent. 
Les  troncs  ambulacraires  se  recour- 
bent ensuite  en  dedans  et  en  arrière 
pour  longer  la  partie  antérieure  du 
tube  digestif,  et,  d'après  M.  Tiede- 
mann,  ils  s'anastomosent  latéralement 
entre  eux  dans  ce  point  de  rebrousse- 
ment  de  façon  à  constituer  un  anneau 
vasculaire  labial  (c).  Mais  M.  Millier 
pense  qu'ils  ne  présentent  qu'une 
simple  dilatation  latérale,  et  pas  de 
communication  directe  [d).  Quoiqu'il 
en  soit,  ils  ne  tardent  pas  à  se  termi- 
ner dans  un  anneau  vasculaire  pha- 
ryngien, au  côté  duquel  se  trouve 
appendu  un  sac  membraneux  à  col 
étroit  qui  fait  également  fonction  de 
réservoir,  et  qui  est  considéré  par 
M.  Délie  Chiaje  comme  étant  une  es- 


(a)  Voyez  la  figure  anatomique  que  j'en  ai  donnée  dans  la  grande  édition  du  Règne  animal 
(Zoophytes,  pi.  18)  :  —  vl,  vaisseaux  ambulacraires  principaux;  —  t,  vaisseaux  tentaculaires  ;  — 
t',  vésicules  foligniennes  ;  — va,  anneau  vasculaire  œsophagien  ;  — p,  réservoir  ou  sae  pharyngien  ; 

—  vi,  artère  mésenlérique  ;  —  vr ,  rete  mimbile  ;  —  vm,  artère  intestinale  ;  —  ve,  veine  intestinale  ; 

—  va,  branche  anastomotique  de  ce  dernier  vaisseau. 

(6)  Délie  Chiaje,  Descriz.  enotom.  degli  Animait  Invertebrati,  t.  IV,  p.  21. 

(c)  Tiedemann,  Anat.  der  Rôhren-Holothurie,  p.  20,  pi.  2,  fig.  4. 

(d)  Muller,  Anatom.  Studien  ûber  Echinodermen  (Archiv  fur  Anat.  uni  Physiol. ,  1850, 
p.  144). 


CHEZ    LES    ÉCH1N0DERMES.  295 

> 

à  direction  constante.  On  est  également  dans  l'ignorance  au 
sujet  de  la  manière  dont  le  fluide  nourricier  se  meut  dans  les 
vaisseaux  longitudinaux  du  système  sous-cutané;  mais  on  a  pu 


pèce  de  cœur.  Les  parois  de  cet  organe 
sont  effectivement  contractiles,  et  je 
l'ai  souvent  vu  chasser  brusquement 
dans  les  vaisseaux  pharyngiens  le  li- 
quide dont  il  était  rempli  ;  mais  je 
n'y  ai  jamais  vu  de  pulsations,  et  je  ne 
pense  pas  qu'il  influe  d'une  manière 
régulière  sur  le  mouvement  circula- 
toire du  fluide  contenu  dans  le  sys- 
tème vasculaire  dont  il  dépend,  mou- 
vement qui  résulte  essentiellement  de 
l'action  de  cils  vibratiles  dont  ces 
canaux  sont  garnis  intérieurement. 

M.  Tiedemann  a  ligure  deux  de  ces 
vessies  pharyngiennes  ;  mais  dans  les 
espèces  que  j'ai  eu  l'occasion  d'exa- 
miner, il  n'y  en  avait  qu'une,  ainsi 
que  chez  celles  étudiées  par  M.  Délie 
Chiaje,  et  je  suis  porié  à  croire  que 
c'est  le  nombre  normal. 

Les  appendices  foligniens  sont  en 
même  nombre  que  les  tentacules,  et, 
en  général,  on  en  trouve  irois  pour 
chaque  tronc  ambulacrairc. 

Le  système  vasculaire  intestinal  des 
Holothuries  se  compose  de  deux 
troncs  principaux  qui  longent  le  tube 
digestif  et  qui  sont  séparés  par  ce 
viscère.  Celui  que  j'appellerai ,  avec 
M.  Délie  Chiaje  ,  Vàrtère  mésenté- 
riqUe ,  est  logé  clans  l'épaisseur  du 
mésentère  et  forme  une  anse.  Sa  por- 
tion moyenne,  élargie  irrégulièrement 
et  très  contractile,  paraît  remplir  les 
fonctions  d'un  cœur;  à  ses  deux  ex- 
trémités il  s'atténue  extrêmement,  et 
tout  le  long  de  son  bord  intestinal  il 
donne  naissance  à  une  multitude  de 
branches  qui,  logées  dans  l'épaisseur 
du  mésentère,  se  dirigent  vers  le  tube 


digestif.  Dans  leur  première  moitié, 
ces  ramuscules,que  l'on  peut  nommer 
artères  gastriques ,  ne  présentent 
rien  de  particulier  ;  mais  les  branches 
qui  naissent  plus  en  arrière  offrent 
au  contraire  une  disposition  très  re- 
marquable. Chacun  de  ces  vaisseaux 
se  divise  en  un  grand  nombre  de  ra- 
muscules  disposés  en  manière  do  pin- 
ceau ou  de  houppe  dont  les  divers 
brins  s'anastomosent  ensuite,  entre 
eux  pour  reconstituer  un  vaisseau 
unique.  L'espèce  de  rete  mirabile 
ainsi  constitué  se  trouve  entremêlé 
avec  les  ramifications  aquifères  de 
l'appareil  respiratoire,  et  les  vaisseaux 
qui  en  parlent  pour  se  diriger  vers 
l'intestin  vont  déboucher  dans  une 
artère  intestinale  qui  longe  la  ligne 
d'insertion  du  mésentère,  et  envoie  à 
son  tour  une  multitude  de  branches 
sur  les  parois  de  la  portion  voisine 
du  tube  digestif.  Il  est  aussi  à  noter 
que  cette  artère  intestinale  se  continue 
en  arrière  beaucoup  au  delà  de  l'extré- 
mité du  rete  mirabile.  J'ai  pu  l'injec- 
ter dans  toute  sa  longueur,  jusqu'au 
cloaque;  mais  elle  m'a  paru  ne  plus 
fournir  de  branches  dans  toute  sa 
moitié  postérieure. 

Le  vaisseau  auquel  on  peut  donner  le 
nom  Aç.  veine  intestinale  longe  le  bord 
libre  du  tube  digestif  dans  toute  son 
étendue,  et  envoie  dans  les  parois  de 
ce  tube  une  multitude  de  petites  racines 
(|tii  s'anastomosent  avec  les  branches 
terminales  des  artères  gastriques  et 
intestinale-.  Un  gros  vaisseau  ana- 
stomotique  transversal  établit  une 
communication   directe  entre  le  tiers 


290  CIRCULATION    DU    SANG 

observer  ce  phénomène  dans  les  grands  conduits  dont  les  ten- 
tacules labiaux  sont  creusés,  et  l'on  a  reconnu  qu'un  double 
courant  y  est  établi  :  le  liquide  se  porte  de  la  base  au  sommet 


antérieur  et  le  tiers  postérieur  de  cette 
veine,  qui  est  assez  grosse  dans  sa  por- 
tion moyenne,  mais  devient  extrême- 
ment grêle  vers  les  deux  extrémités 
du  tube  digestif. 

Les  anatomistes,  comme  je  l'ai  déjà 
dit,  sont  partagés  d'opinions  au  sujet 
des  relations  de  ce  système  vasculaire 
viscéral  avec  le  système  vasculaire 
sous-culané. 

M.  Tiedemann  pense  qu'il  n'existe 
aucune  communication  directe  entre 
ces  deux  ordres  de  vaisseaux  (a). 

M.  Délie  Chiaje,  au  contraire,  dé- 
crit l'artère  mésentérique  et  la  veine 
intestinale  comme  débouchant  dans 
le  vaisseau  annulaire  œsophagien  qui 
appartient,  ainsi  que  nous  l'avons 
déjà  vu,  au  système  sous-cutané  (6). 
M.  Millier  se  prononce  nettement  en 
faveur  de  l'opinion  du  premier  de  ces 
naturalistes,  et  considère  l'appareil 
circulatoire  comme  étant  formé  par 
le  système  vasculaire  viscéral  seule- 
ment (c).  Je  suis  porté  à  croire  cepen- 
dant qu'il  existe  en  ce  point  des  ana- 
stomoses entre  les  deux  systèmes  ;  seu- 
lement les  liquides  ne  me  paraissent 
pas  pouvoir  passer  de  l'anneau  œso- 
phagien dans  les  vaisseaux  intestinaux, 
à  raison  probablement  de  quelques 
valvules,  et  ces  divers  vaisseaux  sont 


extrêmement  grêles  à  leur  extrémité 
supérieure.  Du  reste,  quoi  qu'il  en 
soit  de  ces  anastomoses,  il  me  paraît 
évident  que  le  mouvement  des  liquides 
doit  être  presque  sinon  complètement 
indépendant  dans  ces  deux  portions 
du  système  vasculaire,  et  que,  par 
conséquent,  il  n'y  a  chez  ces  Animaux 
que  des  courants  circulatoires  par- 
tiaux. 

Chez  les  Synaptes  ,  qui  appartien- 
nent au  même  ordre  que  les  Holo- 
thuries, l'appareil  vasculaire  est 
moins  compliqué.  Les  vaisseaux  sous  - 
cutanés  longitudinaux  ne  donnent  pas 
naissance  à  des  branches  latérales,  et 
il  ne  paraît  y  avoir  rien  d'analogue 
au  rete  mirabile.  M.  de  Quatrefages, 
qui  a  été  le  premier  à  faire  bien  con- 
naître la  portion  du  système  vascu- 
laire sous-cutané  qui  correspond  aux 
troncs  ambulacraires  et  à  l'anneau 
labial  chez  ces  Zoophytes,  n'avait  pu 
découvrir  aucune  trace  des  vaisseaux 
intestinaux  (d)  ;  mais  l'existence  de 
ceux-ci  a  été  constatée  plus  récem- 
ment par  M.  J.  Millier,  qui  a  trouvé 
aussi  les  sacs  foligniens  disposés 
comme  chez  les  Holothuries  (e).  On 
voit,  par  une  figure  de  la  Fistulaire 
brune  donnée  par  MM.  Quoy  et  Gai- 
mard  ,  que  ces  caecums   sanguifères 


(a)  Tiedemann,  Anat.  der  Ruhr  en-Holothurie,  p.  21. 

(b)  Délie  Chiaje,  Mém.  sulla  storia  e  notom.  degli  Anim.  senza  vertèbre,  t.  I,  p.  100,  pi.  9, 
fig.  6. 

(c)  Miiller,   Ueber  den  Bau  der  Echinodermen,  p.  17  (extrait  des  Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin 
î>oi»*1853). 

(d)  Quatrefages,  Mém.  sur  lo •■Synapte  de  Duvernoy  (Ann.  dessciene.nat.,  1842,  2°se'rie,  t.  XVII, 
p.  58,  pi.  4,  fig.  1,  et  pi.  5,  fig.  5). 

(e)  J.  Miiller,  Analomische  Studien  ùber  die  Echinodermen  (Archiv  fur  Anat.  und  Physiol., 
1850,  p.  129). 

—  Ueber  Synapta  digitata,  und  ûber  die  Erx-eugung  von  Schnecken  in  Holothurien,  1852,  p.  3. 


CHEZ    LES    ÉCHINODERMES.  297 

de  ces  appendices  en  longeant  leurs  parois,  et  revient  en  sens 
contraire  en  suivant  l'axe  de  leur  cavité. 

§  22.  —  Dans  la  grande  famille  des  Oursins ,  ou  Échinides  , 
la  disposition  générale  de  l'appareil  circulatoire  est  à  peu  près 
la  même  que  chez  les  Holothuries,  si  ce  n'est  que  la  portion 
viscérale  de  ce  système  est  beaucoup  moins  développée  (1). 


deviennent  quelquefois  très  longs,  et 
leur  développement  paraît  être  en 
rapport  avec  celui  des  tentacules  buc- 
caux (a).  Dms\e Cladolabes  peruanus, 
M.  Millier  a  compté  près  d'une  cen- 
taine de  ces  appendices  qu'il  désigne 
sous  le  nom  de  vésicules  de  Poli  {b). 

D'après  M.  Millier,  le  système  vas- 
culaire  viscéral  fournit  des  branches 
aux  tentacules  et  aux  parois  du  corps 
par  l'intermédiaire  d'un  anneau  œso- 
phagien ;  mais  tous  ces  vaisseaux  se- 
raient parfaitement  indépendants  du 
système  cutané  auquel  ce  naturaliste 
donne  le  nom  de  système  aquifère. 

(1)  Chez  les  Échinides  ,  l'appareil 
vasculaire  ressemble  beaucoup  à  celui 
des  Holothuries,  et  se  compose  aussi 
de  deux  ordres  de  vaisseaux  :  d'un 
système  sous-cutané,  et  d'un  système 
viscéral.  Le  premier,  comme  d'ordi- 
naire, consiste  essentiellement  en  cinq 
vaisseaux  ambulacraires  principaux 
qui  se  portent  d'un  pôle  du  corps  à 
l'autre,  et  qui  fournissent  à  droite  et 
à  gauche  une  série  de  branches  se- 
condaires transversales,  lesquelles  se 
rendent  chacune  à  l'un  des  feuillets 
sous-ambulacraires.  Ces  vaisseaux  lon- 
gitudinaux débouchent  inférieurement 
dans  un  vaisseau  circumpharyngien. 

Le  système  vasculaire  viscéral  est 


moins  bien  connu.  Chez  les  Spatan- 
gues  (c),  un  cœur  constitué  par  un 
gros  vaisseau  fusiforme  à  parois  char- 
nues est  logé  dans  le  mésentère,  près 
de  la  portion  antérieure  du  tube  di- 
gestif. Je  n'ai  pu  bien  distinguer  le 
mode  de  terminaison  de  son  extré- 
mité postérieure  ;  mais  en  avant  et  à 
gauche,  il  se  prolonge  en  une  artère 
mésentérique  qui,  après  avoir  suivi 
pendant  quelque  temps  le  bord  interne 
de  l'intestin,  et  y  avoir  formé  un 
coude  abrupt  d'où  partent  des  artères 
intestinales,  se  divise  en  deux  bran- 
ches dont  l'une,  descendante,  va  au 
côté  gauche  de  la  bouche  ,  et  m'a 
paru  s'y  anastomoser  avec  l'anneau 
vasculaire  déjà  mentionné;  l'autre, 
ascendante,  se  porte  en  avant,  puis  en 
haut,  et  va  se  terminer  au  point  de 
réunion  des  vaisseaux  ambulacraires, 
près  des  pores  génitaux.  Un  autre 
vaisseau  qui  occupe  le  bord  opposé  de 
la  portion  antérieure  du  tube  digestif, 
et  qui  correspond  à  la  veine  intesti- 
nale des  Holothuries,  m'a  semblé  dé- 
boucher aussi  dans  l'anneau  vasculaire 
circumbuccal,  et  je  suis  porté  à  croire 
qu'il  communique  du  côté  opposé  avec 
l'extrémité  postérieure  du  cœur. 

JNos  connaissances  sont  encore  plus 
imparfaites  au  sujet  du  mode  de  dis- 


(a)  Quoy  et  Gaimard,  Voyage  de  l'Astrolabe,  Zoophytes,  pi.  8,  fig.  3. 

(b)  Millier,  Op.  cit.  (Archiv,  4850,  p.  145). 

(c)  Milne  Edwards,  Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Zoophytes,  pi.  11  bis,  fig.  1, 1  a,  1  b. 


298  CIRCULATION    DU    SANG 

Les  Astéries,  ou  Étoiles  de  mer,  nous  offrent  également  les 
mêmes  caractères  essentiels;  mais  on  remarque  dans  quelques 
parties  de  l'appareil  vasculaire  des  différences  plus  considé- 
rables. Ainsi,  dans  la  région  dorsale  du  corps,  on  trouve  un 
large  cercle  vasculaire  qui  communique  tout  autour  avec  des 
branches  radiaires  dont  les  ramifications  se  distribuent  aux 


tributiondes  vaisseaux  chez  les  Oursins 
proprement  dits,  et  les  descriptions 
qui  en  ont  été  données  successivement 
par  MM.  Tiedemann,  Délie  Chiaje  et 
Valentin,  sont  en  désaccord  sur  beau- 
coup de  points  essentiels.  Le  cœur 
est  situé  à  côté  de  l'œsophage,  à  peu 
près  comme  chez  les  Spatangues.  D'a- 
près M.  Délie  Chiaje,  cet  organe  ne 
serait  qu'une  ampoule  très  semblable 
à  celle  qui  est  appendue  à  l'anneau 
vasculaire  œsophagien  des  Holothu- 
ries (a)  ;  mais  M.  Valentin  y  a  trouvé 
une'  structure  très  complexe  (6),  et 
l'on  s'accorde  généralement  à  recon- 
naître qu'il  en  part  un  vaisseau  qui  se 
dirige  vers  l'anus  et  va  déboucher 
dans  un  cercle  vasculaire  entourant 
l'orifice  terminal  de  l'intestin.  Une 
autre  artère  descend  du  cœur  vers  la 
lanterne,  ou  appareil  buccal,  et  paraît 
s'y  anastomoser  avec  un  anneau  vas- 
culaire œsophagien.  Il  y  a  aussi  une 
artère  intestinale  qui  suit  l'un  des 
bords  du  tube  alimentaire  ;  enfin,  on 
trouve  également  du  côté  opposé  de  ce 
tube  un  autre  vaisseau  qui  paraît  cor- 
respondre à  la  veine  intestinale  des 
Holothuries;  mais  les  rapports  ana- 
tomiques  de  tous  ces  vaisseaux  sont 
très  obscurs.  Il  règne  encore  plus 
d'incertitude  au  sujet  des  connexions 
de  ce  système  vasculaire  viscéral  avec 


le  système  cutané.  M.  Délie  Chiaje  dé- 
crit cinq  vaisseaux  pharyngiens  comme 
unissant  l'anneau  œsophagien  à  un 
autre  cercle  vasculaire  qui  entourerait 
la  bouche  comme  chez  les  Holothuries  ; 
ils  s'anastomoseraient  également  avec 
les  cinq  vaisseaux  ambulacraires  qui 
régnent  tout  le  long  du  sillon  médian 
situé  entre  les  deux  rangées  des  ap- 
pendices foliacés  de  chaque  appareil 
ambulacraire. 

M.  Valentin  pense,  au  contraire, 
que  chacun  de  ces  divers  organes 
est  pourvu  de  deux  vaisseaux  fai- 
sant fonction  d'artère  et  de  veine,  et 
que  l'un  de  ceux-ci  s'anastomoserait 
avec  l'anneau  vasculaire  anal ,  tandis 
que  l'autre  communiquerait  avec  le 
cercle  vasculaire  labial  (c).  N'ayant 
pas  eu  l'occasion  d'injecter  les  vais- 
seaux des  Oursins,  comme  je  l'ai  fait 
pour  ceux  des  Spatangues,  je  n'oserais 
me  prononcer  sur  cette  question; 
mais  l'opinion  de  M.  Valentin  me  pa- 
raît peu  probable. 

M.  Millier  a  constaté  aussi  l'ana- 
stomose des  troncs  ambulacraires 
avec  le  vaisseau  annulaire  labial,  et 
les  communications  de  ceux-ci  avec 
les  vésicules  foligniens  (ou  vésicules 
de  Poli,  Millier)  ;  mais  il  n'a  pas  vu 
de  connexions  entre  ce  système  de 
canaux  et  les  tentacules  buccaux. 


(a)  Dello  Chiaje,  Descriz.  e  notnmia  degli  Anim.  invertébr.,  t.  IV,  p.  45,  pi.  124,  fu\  2. 
(6)  Valentin,  Anat.  du  genre  EchinOs,  p.  92,  pi.  7,  lîg.  125,  etc.,  1841  (  dans  Agassiz,  Mono 
graphie  des  Echinodermes  vivants  et  fossiles). 
(c)  Valentin,  loc.  cit.,  p.  t)3. 


CHEZ    LES    ÉCHI1N0DERMES, 


299 


divers  viscères  sous-jacents.  Un  vaisseau  descendant,  qui  paraît 
faire  fonction  de  cœur  et  représenter  l'artère  mésentérique  des 
Holothuries,  s'anastomose  aussi  avec  cet  anneau  dorsal  ;  mais 
on  n'est  pas  encore  fixé  quant  aux  relations  de  cet  organe  avec 
le  système  circumbuccal  (1). 

§  23.  —  Les  Siponcles  et  les  autres  Animaux  dont  Cuvier  a 


(1)  Le  système  vasculaire  des  Asté- 
riks,  dont  M.  Tiedemann  a  donné  de 
très  belles  figures  ,  présente  le  même 
plan  général  que  celui  des  Holothuries; 
mais  ce  plan  est  modifié  quant  aux 
détails  secondaires.  Le  cœur  ,  organe 
fusiforme  à  parois  épaisses  et  brunâ- 
tres, est  placé  à  peu  près  comme  chez 
les  Échinides,  et  donne  naissance  à  un 
vaisseau  ascendant  qui  va  déboucher 
dans  un  grand  cercle  vasculaire  dor- 
sal. Cet  anneau  correspond  au  vais- 
seau circum-anal  des  Oursins,  et  com- 
munique :  1°  avec  dix  vaisseaux  ra- 
diaires  qui  suivent  la  face  supérieure 
des  appendices  caecaux  de  l'estomac  et 
s'étendent  ainsi  jusqu'à  l'extrémité  des 
cinq  rayons  ;  2°  avec  un  égal  nombre 
de  vaisseaux  appartenant  aux  organes 
génitaux,  et  3°  des  branches  gastri- 
ques (a).  Un  anneau  vasculaire  œso- 
phagien se  trouve  près  de  la  face  op- 
posée du  corps,  et  s'anastomose  avec 
cinq  branches  radiaires  sous-inlesti- 
nales  qui  se  ramifient  également  sur 
les  caecums  gastriques,  etc.  Enfin,  il 
existe  aussi  autour  de  la  bouche  un 
troisième  vaisseau  avec  lequel  s'anasto- 
mosent les  cinq  troncs  ambulacraires 
qui  s'avancent  le  long  de  la  paroi  infé- 
rieure des  rayons  et  se  comportent 
comme  les  vaisseaux  du  même  nom 


chez  les  Échinides.  La  même  dissi- 
dence d'opinion  qui  existe  au  sujet  des 
connexions  du  système  des  vaisseaux 
viscéraux  avec  les  vaisseaux  ambula- 
craires chez  les  Holothuries  et  les 
Échinides  se  reproduit  ici.  M.  Tiede- 
mann n'a  pu  découvrir  aucune  com- 
munication entre  l'anneau  labial  et  le 
système  vasculaire  viscéral.  M.  Délie 
Chiaje,  au  contraire ,  assure  que  les 
cinq  vaisseaux  sous-intestinaux  qui 
s'avancent  dans  les  rayons  à  la  face 
inférieure  des  caecums  gastriques  en 
naissent  directement  (6). 

Il  est  aussi  à  noter  que  des  ampoules 
groupées  autour  de  l'œsophage  et 
correspondantes  aux  sacs  foligniens 
des  Holothuries  naissent  également 
de  l'anneau  labial  chez  les  Astéries, 
et  que,  chez  ces  dernières,  il  paraît  y 
avoir  aussi  une  communication  entre 
cet  anneau  et  un  organe  dont  les 
fonctions  ne  sont  pas  connues  et  au- 
quel on  a  donné  le  nom  de  sac  calci- 
fère  ou  poche  à  sable. 

Chez  les  Comatules,  le  cercle  vas- 
culaire dorsal  qui,  chez  les  Oursins, 
entoure  l'anus,  paraît  être  remplacé 
par  un  réservoir  central  situé  au 
fond  d'une  cavité  creusée  dans  le 
calice  tégumentaire  du  corps  et  don- 
nant naissance  aux  mêmes  vaisseaux 


(a)  Tiedemann,  Anat.  der  Rohren- Holothurie,  pi.  8. 

—  Voyez  aussi  V Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Zoûphytes,  pi.  2,  %.  i . 

(6)  Délie  Chiaje,  Descriz.  e  notom.  degli  Auim.  invert.,  pi.  13,  fig.  12. 


Système 

vasculaire 

des 

Echinodermes 

Apodes. 


300  CIRCULATION    DU    SANG 

formé  le  groupe  des  Échinodermes  Apodes  sont  également 
pourvus  de  quelques  vaisseaux  sous-cutanés  et  gastriques;  mais 
les  premiers  ne  présentent  pas  la  disposition  radiaire  qui  se 
remarque  chez  les  Échinodermes  proprement  dits ,  ou  Échino- 
dermes pédicellés,  et,  sous  ce  rapport,  le  mode  d'organisation 
de  ces  Animaux  presque  vermiformes  se  rapproche  davantage 
de  ce  que  nous  avons  vu  chez  les  Annélides  (i). 


que  nous  avons  vus  chez  les  Asté- 
ries (a). 

(1)  Chez  les  Sipoxcles,  que  la  plu- 
part des  zoologistes  rangent  dans  la 
classe  des  Échinodermes,  mais  qui,  à 
beaucoup  d'égards,  s'éloignent  consi- 
dérablement du  type  propre  à  ce 
groupe  de  Zoophytes  ,  l'appareil  vas- 
culaire paraît  être  très  réduit.  Un 
vaisseau  longitudinal  sous  -  cutané 
longe  le  cordon  nerveux  et  envoie  à 
droite  et  à  gauche  des  rameaux  aux 
téguments.  A  l'extrémité  antérieure 
du  corps  il  se  recourhe  pour  gagner 
le  pharynx,  et  paraît  s'y  anastomoser 
avec  un  vaisseau  qui  longe  le  tube 
digestif,  ainsi  qu'avec  des  canaux 
creusés  dans  les  tentacules.  Ce  système 
vasculaire  a  été  décrit  sommairement 
par  M.  Délie  Chiaje  ,  et  avec  plus 
d'exactitude  par  M.  Grube  (6). 

Le  premier  de  ces  naturalistes  a 
représenté  un  sac  folignien  (ou  sac  de 
Poli) ,  très  grand,  comme  étant  appendu 
sous  la  hase  des  tentacules;  et  suivant 
M.  Grube,  il  v  aurait  deux  de  ces  ré- 


servoirs accolés  à  la  partie  antérieure 
du  tube  digestif.  Mais  M.  T.  Williams, 
qui  a  étudié  plus  récemment  la  struc- 
ture de  ces  Animaux,  assure  qu'il 
n'existe  aucun  organe  de  ce  genre,  et 
que  c'est  la  disposition  variqueuse  des 
troncs  vasculaires  qui  en  avait  imposé 
à  ses  prédécesseurs  (c). 

J'ajouterai  que  chez  les  Bonellies, 
comme  chez  les  Échiures,  dont  j'ai  eu 
déjà  l'occasion  de  parler  (d),  il  y  a  un 
système  vasculaire.  encore  plus  simple 
qui  paraît  être  formé  sur  le  même 
plan  que  celui  des  Siponcles,  sauf 
l'absence  des  vésicules  dont  il  vient 
d'être  question.  Ainsi,  M.  Schmarda 
y  a  trouvé  un  vaisseau  sous-cutané 
longitudinal  qui  accompagne  le  cor- 
don nerveux  ganglionnaire,  qui  four- 
nit des  branches  à  droite  et  à  gauche, 
et  qui  antérieurement  se  divise  en 
deux  troncs  pour  suivre  les  bords  de 
l'appendice  proboscidiforme  dont  l'ex- 
trémité céphalique  de  ces  Animaux 
est  garnie.  Un  autre  tronc  longitudi- 
nal naît  de  deux  branches  marginales 


(a)  Heusinger,  Anatomische  Untersuchung  ùber  Comalula  mediterranea  (Zeitschrift  fur  die  orga- 
nische  Physik,  Bd.  III,  p.  373). 

—  Miiller,   Ueber  den  Bau  des  Pentacrinus  caput-Medusse  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin,  1841, 
p.  ï'-36,  pi.  5,  fig.  12). 

(6)  Délie  Chiaje,  Mem.  sulla  storia  degli  Anim.  senza  vertèbre  di  Napoli  (1823,  vol.  I,  p.  13, 
pi.  1 ,  fig.  6). 

—  E.  Grube,  Yersuch  e'mer  Anatomie  des  Sipunculus  nudus    (  Miïller's  Archiv  fur  Atiat.  und 
Physiol.,  1837,  p.  248  etsuiv.,  pi.  11,  fig.  1-5). 

(c)  Williams,   On  the  Blood  Proper  and  Chylaqweous  FLuid  of  Invertebrate  Animais  (Philos. 
Trans.,  1852,  p.  608). 

(d)  Voyez  ci-dessus,  page  278. 


CHEZ    LES    ÉCH1N0DERMES.  SOI 

§  24.  —  On  voit  donc  qu'il  nous  reste  beaucoup  à  apprendre 
au  sujet  de  la  disposition  anatomique  et  des  fonctions  du  système 
vasculaire  chez  les  Échinodermes.  Pour  remplir  ces  lacunes,  il 
faudrait,  d'une  part ,  avoir  recours  à  l'injection  des  vaisseaux, 
afin  d'en  rendre  le  trajet  bien  visible  et  d'en  découvrir  les 
anastomoses;  mais,  d'autre  part ,  ne  pas  négliger  l'étude  des 
phénomènes  de  la  circulation  chez  les  espèces  dont  les  tégu- 
ments présentent  assez  de  transparence  pour  permettre  à  l'ob- 
servateur de  voir  ce  qui  se  passe  dans  l'organisme  pendant 
l'exercice  delà  vie,  condition  qui  ne  se  trouve  réalisée  que  chez 
les  Synaptes. 

Si,  comme  on  le  pense  généralement,  le  système  vasculaire 
sous-cutané,  dit  aquifère,  est  indépendant  du  système  vas- 
culaire viscéral,  nous  aurions  ici  un  exemple  d'organes  d'irri- 
gation partiels  et  non  coordonnés.  En  effet,  des  liquides  qui  ne 
paraissent  différer  en  rien  d'essentiel,  qui  semblent  être  tous 
également  aptes  à  entretenir  le  travail  nutritif,  et  qui,  par  con- 
séquent, méritent  au  même  degré  de  porter  le  nom  de  sang, 
se  trouvent  logés  dans  trois  systèmes  de  cavités  :  la  chambre 
viscérale,  les  vaisseaux  propres  du  tube  digestif  et  de  ses 
annexes,  et  les  canaux  sous-cutanés,  dont  les  appendices  ambu- 
lacraires  et  les  tentacules  buccaux  sont  des  dépendances.  Un 

de  la  portion  terminale  du  même  ap-  chez  ces  Animaux,  de  même  que  chez 
pendice  et  accompagne  le  tube  diges-  les  Échiures,  il  y  a  sur  le  trajet  des 
lif,  sur  lequel  on  aperçoit  aussi  un  deux  troncs  principaux,  vers  le  tiers 
troisième  tronc  longitudinal  qui  paraît  antérieur  du  corps,  un  petit  renfle- 
être  une  dépendance  du  vaisseau  sous-  ment  en  forme  de  bulbe  qui  paraît 
cutané  et  qui  est  comparable  à  l'artère  être  dénature  musculaire.  Ces  bulbes 
intestinale  des  Holothuries.  Enfin  ,  ont  été  considérés  comme  des  cœurs 
ces  gros  troncs  se  bifurquent  l'un  et  rudimentaires;  mais  jusqu'ici  rien  ne 
l'autre  à  leur  extrémité  inférieure  prouve  qu'Assoient  des  organes  d'im- 
pour  se  ramifier  dans  l'appareil  res-  pulsion  (a). 
piratoire.  Il  est   aussi   à  noter  que 

(e)  Schmarda,  Zur  Naturgeschichte  der  Adria  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1852,  t.  H,  p.  i\9, 
pi.  5,%.  \\). 


302  CIRCULATION    DU   SANG   CHEZ   LES   ÉCHINODERMES. 

mouvement  circulatoire  anime  ces  liquides  dans  chacun  de  ces 
appareils  d'irrigation ,  et,  chez  la  plupart  des  Échinodermes, 
c'est  principalement  par  l'intermédiaire  du  fluide  contenu  dans 
le  système  de  canaux  superficiels  ou  ambulacraires  que  les 
relations  doivent  s'établir  entre  l'organisme  et  le  milieu  respi- 
rable  ambiant.  Mais  cette  multiplicité  d'agents  indépendants 
entre  eux  est  loin  d'être  un  indice  de  supériorité  physiolo- 
gique; et  là  où  le  travail  irrigatoire  se  perfectionne,  nous  avons 
vu  la  centralisation  des  forces  s'établir,  et  un  seul  système  bien 
constitué  prendre  la  place  de  tous  ces  instruments  grossiers. 

Telle  est  aussi  la  disposition  qui  se  rencontre  chez  les  Ani- 
maux vertébrés  dont  l'étude  nous  occupera  dans  la  prochaine 
Leçon. 


VINGT -SIXIÈME  LEÇON. 


De  la  circulation  chez  les  Animaux  vertébrés.  —  Appareil  circulatoire 
des  Poissons. 


§  1.  —  Dans  l'embranchement  des  Vertébrés ,  l'appareil  de  Mode 
la  circulation  atteint  un  degré  de  perfection  dont  on  ne  connaît  LvlwJk 
aucun  exemple  dans  les  autres  divisions  du  Règne  animal  ;  mais  aJ  v^Ss. 
dans  les  rangs  les  plus  inférieurs  de  ce  groupe ,  il  ressemble 
beaucoup  à  ce  que  nous  avons  déjà  vu  dans  la  classe  des  Anné- 
lides,  et,  dans  les  premiers  temps  de  l'existence,  chez  tous  ces 
Animaux ,  on  y  remarque  des  dispositions  organiques  qui  rap- 
pellent, à  certains  égards ,  le  mode  de  structure  du  système 
irrigatoire  de  beaucoup  d'Invertébrés  inférieurs  ,  bien  qu'à 
aucune  époque  de  la  vie  embryonnaire, du  Vertébré,  il  ne  puisse 
être  considéré  comme  le  représentant  de  ce  système  dans  un 
Zoophyte  ,  un  Mollusque  ou  un  Entomozoaire  quelconque. 
L'hypothèse  de  la  formation  d'une  série  zoologique  s'étendant 
depuis  la  Monade  jusqu'à  l'Homme ,  et  résultant  d'une  série 
d'arrêts  de  développement  dans  la  réalisation  du  plan  orga- 
nique d'après  lequel  le  corps  humain  se  constitue,  est  donc  tout 
aussi  fausse  quand  on  l'applique  à  cette  portion  de  l'économie 
que  lorsqu'on  la  présente  comme  l'expression  des  ressemblances 
et  des  différences  qui  existent  dans  l'ensemble  de  l'organisme 
chez  tous  les  êtres  animés.  Non,  l'embryologie  des  Animaux 
supérieurs  n'est  pas  ,  comme  vous  l'entendez  répéter  souvent 
dans  une  autre  École,  le  tableau  mobile  de  Tanatomie  comparée. 
Une  idée  pareille  ne  pourrait  que  vous  égarer  dans  vos  études  ; 
mais ,  pour  acquérir  des  notions  justes  relatives  au  mode  de 
constitution  de  l'appareil  irrigatoire  dans  l'ensemble  de  la  Créa- 
nt. 20 


30^  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

lion  zoologique  ,  il  est  plus  nécessaire  de  tenir  compte  des 
états  transitoires  de  cet  appareil  chez  les  Vertébrés  que  chez 
les  Animaux  inférieurs ,  parce  que  les  changements  qu'il  subit 
sont  plus  considérables  et  tendent  davantage  à  effacer  les  ana- 
logies primordiales  qui  s'y  rencontrent  partout. 

Nous  avons  vu  que  chez  la  plupart  des  Animaux  inférieurs 
les  lacunes  ou  espaces  libres  qui  se  creusent  dans  la  substance 
des  tissus,  ou  qui  sont  ménagés  entre  les  organes,  jouent  un  rôle 
très  important  dans  la  constitution  du  système  de  cavités  à 
l'aide  duquel  les  fluides  nourriciers  se  répandent  dans  les 
diverses  parties  de  l'économie  ;  mais  que ,  chez  certaines 
espèces ,  les  canaux  de  distribution  ne  sont  plus  des  instru- 
ments empruntés  aux  parties  voisines,  et  se  forment  de  toutes 
pièces  à  l'aide  de  matériaux  qui  leur  sont  propres.  Ce  dernier 
procédé  organogénique  paraît  être  pour  ainsi  dire  exceptionnel 
dans  le  travail  de  développement  des  Invertébrés,  et  ne  s'est 
révélé  à  nous  d'une  manière  bien  distincte  que  chez  les  Anné- 
lides;  mais,  dans  l'embranchement  des  Vertébrés,  il  devient 
prédominant ,  et ,  si  l'on  s'en  tenait  à  l'étude  de  ceux-ci  lors- 
qu'ils sont  parvenus  à  l'état  adulte,  on  pourrait  facilement  croire 
qu'il  n'en  existe  pas  d'autre.  En  effet,  pour  apercevoir  nette- 
ment chez  un  Vertébré  des  organes  d'irrigation  nutritive  qui 
soient  comparables  aux  lacunes  sanguifères  des  Mollusques,  des 
Crustacés  et  des  Insectes  ,  il  faut  remonter  aux  premiers  temps 
de  la  vie  embryonnaire. 

Lorsque  l'appareil  circulatoire  commence  à  se  constituer 
dans  le  germe  du  Vertébré,  on  voit  effectivement,  dans  l'épais- 
seur de  l'espèce  de  disque  organoplastique  appelé  blastoderme, 
dont  l'être  en  voie  de  développement  est  alors  composé,  une 
multitude  d'espaces  de  forme  irrégulière  qui  sont  limités  par 
la  substance  commune  de  ce  blastoderme  et  qui  sont  occupés 
par  un  liquide;  bientôt  ces  cavités,  en  s'étendant,  viennent  à 
communiquer  entre  elles  ,  et  lorsque,  par  suite  de  la  formation 


CHEZ    LES    VERTÉBRÉS.  305 

du  cœur,  le  liquide  dont  elles  sont  remplies  est  mis  rapidement 
en  mouvement,  on  voit  les  lacs  et  les  détroits  résultant  de 
cet  assemblage  de  lacunes  se  régulariser  peu  à  peu  ;  les  cou- 
rants principaux  semblent  s'endiguer;  des  membranes  d'un 
tissu  particulier  se  développent  sur  leurs  bords,  et  forment,  pour 
les  contenir,  des  tuyaux  à  parois  indépendantes  des  tissus 
d'alentour.  En  un  mot,  on  voit  se  produire  ici,  par  la  transfor-. 
mation  de  ces  lacunes  en  tubes,  un  système  vasculairc  compa- 
rable ,  sous  ce  rapport ,  au  système  circulatoire  de  la  plu- 
part des  Animaux  inférieurs.  Mais  ce  travail  organogénique  ne 
donne  jamais  des  résultats  analogues  à  ceux  obtenus  chez  les 
Invertébrés  ,  car  il  s'effectue  avant  que  les  grandes  cavités  qui 
forment  la  partie  principale  de  l'appareil  irrigatoire  de  ces  der- 
niers se  soient  constituées  ;  et  à  aucune  période  de  la  vie 
embryonnaire  le  système  ainsi  obtenu  ne  ressemble  en  rien  ,' 
sauf  son  mode  d'origine,  au  système  circulatoire  lacunaire  ou 
semi-lacunaire  de  l'un  quelconque  des  Animaux  inférieurs  dont 
l'étude  a  fait  l'objet  de  nos  précédentes  Leçons. 

Pendant  que  ces  canaux  s'établissent  dans  les  parties  péri- 
phériques du  blastoderme  des  Vertébrés,  un  corps  particulier 
de  forme  cylindrique  se  montre  dans  la  région  centrale  de  l'or- 
ganisme en  voie  de  développement ,  se  creuse  d'une  cavité,  se 
renfle  en  manière  de  bulbe,  acquiert  des  parois  contractiles,  et 
devient  le  point  d'origine  d'un  système  de  vaisseaux  propre- 
ment dits,  qui  envahissent  peu  à  peu  toutes  les  parties  de  l'éco- 
nomie et  se  mettent  en  communication  avec  les  précédents, 
dont  l'existence  ne  doit  être  que  transitoire.  Les  courants  cir- 
culatoires s'établissent  alors  dans  l'organisme  naissant,  et  bien- 
tôt le  vaisseau  pulsatile  central  dont  il  vient  d'être  question 
change  de  forme  et  devient  chez  tous  les  Vertébrés  ordinaires 
un  cœur  bien  caractérisé  (1). 

(1)  J'exposerai  avec  détail  le  mode      cœur  lorsque  je  traiterai  du  dévclop- 
de  formation  de  ces  vaisseaux  el  du       peinent  de  l'embryon  des  Vertébrés; 


300  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Appareil  §  2.  —  Mais  il  est  un  Vertébré  chez  lequel  l'appareil  vascu- 
circubtoire  ^.^  ^  jjeu  ^  gyjjjj.  cefje  dernière  métamorphose,  continue 
rAmphyoxus.  ^  ge  développer  d'une  manière  plus  uniforme,  et  prend  ainsi 
beaucoup  de  ressemblance  avec  le  système  circulatoire  des 
Annélides  les  plus  élevés  en  organisation.  C'est  l'Amphyoxus  , 
que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  citer  comme  étant  le  représentant 
le  plus  dégradé  du  type  zoologique  dont  dérivent  tous  les  Ver- 
tébrés. Chez  ce  singulier  Animal,  la  circulation  s'opère  à  l'aide 
d'un  ensemble  de  vaisseaux  sanguins  assez  complexe;  mais  la 
division  du  travail  ne  s'établit  pas  nettement  entre  les  agents 
d'impulsion  et  les  organes  de  distribution;  il  n'y  a  pas  de  cœur 
proprement  dit,  et  le  sang  est  mis  en  mouvement  par  les 
parois  des  vaisseaux  eux-mêmes ,  qui ,  sur  beaucoup  de  points, 
se  dilatent  et  deviennent  contractiles.  Il  y  a  donc  ici  une  multi- 
tude de  bulbes  vasculaires  pulsatiles  très  analogues  à  ceux  que 
nous  avons  rencontrés  chez  divers  Annélides  :  les  Eunices , 
par  exemple;  mais  il  n'y  a  pas  de  réservoir  central  agissant  à 
la  manière  d'une  pompe  foulante:  il  n'y  a  pas  de  cœur  propre- 
ment dit,  ou,  si  l'on  voulait  donner  ce  nom  aux  portions  dila- 
tées et  contractiles  des  tubes  irrigatoires,  il  faudrait  dire  que 
chez  l'Amphyoxus  il  existe  une  centaine  de  cœurs  répartis  sur 
divers  points  du  trajet  circulatoire.  Effectivement,  on  en  trouve 
non-seulement  à  chacun  des  troncs  principaux  du  système 
vasculaire,  mais  aussi  à  la  base  de  chacune  des  branches  qui 
longent  les  arcs  pharyngiens  dont  se  compose  l'appareil  respira- 
toire, et,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  vu,  le  nombre  de  ces  arcs 
s'élève,  chez  les  individus  adultes,  à  plus  de  cinquante  paires  (1). 

(1)  C'est  principalement  aux  obser-  serves  dans  l'alcool,  il  leur  avait  été 

valions  de  M.  J.  Millier  que  l'on  doit  impossible   de  se    former   des   idées 

la  connaissance  de  l'appareil  circula-  justes  à  ce  sujet,  tandis  que-M.  Millier, 

toire  de  VAmphyoxus.  Plusieurs  na-  en  observant  au  microscope  de  jeunes 

turalistes  s'étaient  occupés  avant  lui  individus   à  l'état  vivant,  a   pu  voir 

de  l'anatomie  de  ces  Animaux;  mais  tous  les  principaux  courants  sanguins, 

n'ayant  étudié  que  des  individus  cou-  à  raison  de    la  grande   transparence 


CHEZ    LES    VERTÉBRÉS.  307 

Par  cela  seul  que  chez  l'Amphyoxus  l'appareil  circulatoire 
est  dépourvu  d'un  organe  central  d'impulsion ,  on  ne  saurait 
appliquer  aux  divers  vaisseaux  constitutifs  de  ce  système  les 
noms  ^artères  et  de  veines  ;  car  ces  mots,  créés  pour  la  dési- 
gnation des  tubes  sanguifères  qui  partent  du  cœur  ou  qui  y  arri  • 


des  tissus  (a).  Ce  dernier  auteur  dé- 
signe sous  le  nom  de  cœur  artériel 
un  gros  vaisseau  longitudinal  qui  oc- 
cupe ta  ligne  médiane  et  longe  en 
dessous  la  grande  cavité  branchiale 
ou  pharyngienne,  qui  présente  dans 
toute  son  étendue  un  calibre  uniforme, 
et  qui  se  contracte  d'arrière  en  avant. 
De  chaque  côté  ce  vaisseau  inférieur 
donne  naissance  à  des  branches  ascen- 
dantes (ou  artères  branchiales,  Mill- 
ier) qui  remontent  le  long  des  arcs 
branchiaux  correspondants,  et  qui  pré- 
sentent à  leur  base  un  renflement 
contractile  ou  bulbe  qui  mériterait  le 
nom  de  cœur  tout  aussi  bien  que  le 
tronc  médian  dont  il  vient  d'être  ques- 
tion. Chez  les  jeunes  individus,  on  voit 
environ  vingt-cinq  de  ces  bulbilles  de 
chaque  côté  de  l'appareil  respiratoire, 
mais  chez  les  adultes  il  y  en  a  cin- 
quante ou  davantage.  A  l'extrémité 
antérieure  de  la  chambre  branchiale, 
le  vaisseau  médian  inférieur  (au  cœur 
artériel)  se  bifurque  et  forme  deux 
arcs  ascendants  contractiles  que 
M.  Mulier  assimile  aussi  à  des  cœurs 
(herzartige  Âorlenbogeri).  Ces  crosses, 
auxquelles  cet  auteur  applique  égale- 
ment le  nom  de  ductus  Botati,  se 
réunissent  au-dessus  de  la  bouche 
pour  s'anastomoser  avec  un  autre  tronc 
médian  dorsal    (Aorte,    Millier)    qui 


longe  la  voûte  de  la  cavité  respira- 
toire et  communique  probablement 
avec  l'extrémité  supérieure  des  vais- 
seaux branchiaux. 

A  son  extrémité  postérieure,  le 
vaisseau  pharyngien  inférieur,  ou  cœur 
artériel,  se  recourbe  et  se  continue 
ensuite  avec  un  autre  tronc  médian 
qui  est  également  contractile  et  qui 
occupe  la  face  supérieure  de  la  portion 
de  l'appareil  digestif  appelée  caecum 
hépatique  ;M.  Millier  lui  donne  le  nom 
de  cœur  de  la  veine  cave.  Enfin,  à  la 
face  inférieure  du  même  caecum  de 
l'intestin,  se  trouve  un  autre  tronc 
médian  dont  les  parois  sont  également 
contractiles  ;  aussi  M.  Millier  y  donne- 
t-il  le  nom  de  cœur  de  la  veine  porte. 

En  résumé,  nous  voyons  donc  que 
tous  les  gros  troncs  du  système  vascu- 
laire  sont  des  organes  d'impulsion,  et 
qu'aucun  d'entre  eux  ne  constituant 
un  réservoir  contractile,  ne  mérite 
réellement  le  nom  de  cœur.  La  systole 
de  ces  différents  vaisseaux  se  fait  suc- 
cessivement et  ne  se  renouvelle  que 
lorsque  l'ondée  de  sang,  ainsi  mise  en 
mouvement,  a  accompli  le  cercle  cir- 
culatoire tout  entier.  Le  liquide  est 
poussé  d'arrière  en  avant  dans  le  vais- 
seau pharyngien  inférieur  et  passe  de 
là  dans  le  vaisseau  pharyngien  supé- 
rieur ou  aorte,  en  traversant  de  bas  en 


(a)  iliiller,  l'eber  den  Bau  und  die  Lebenserscheinungen  der  Brancliiosloma  Lunibricum  (Costa), 
Amplivoxus  lanceolatus  (Yarrcl),  1844,  p.  29,  pi.  5,  fig.  1. 

—  Voyez  aussi  Quairefages  ,  Mém.  sur  l'Amphyoxus  (  Voyage  en  Sicile  ,  I.  II,  p.  12,  pi.  13, 
fig.  i  ). 


ordinaires. 


308  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

vent,  ont  une  signification  précise  :  ils  impliquent  des  rapports 
anatomiques  qui  n'existent  pas  ici,  et  ils  n'ont  aucune  liaison  avec 
la  nature  du  sang  qui  traverse  telle  ou  telle  portion  du  cercle 
irrigatoire  (1).  Il  est  aussi  à  remarquer  que  tous  les  vaisseaux 
sanguifères  de  l'Amphyoxus  paraissent,  avoir  la  même  structure 
et  jouir  des  mêmes  propriétés.  La  division  du  travail  physiolo- 
gique ne  s'est  pas  encore  introduite  dans  l'appareil  circulatoire 
de  cet  Animal,  bien  que  déjà  la  direction  du  courant  soit  devenue 
constante  et  que  le  même  conduit  ne  serve  pas  tour  à  tour  au 
passage  du  fluide  nourricier  en  sens  contraire,  ainsi  que  cela 
se  voit  chez  divers  Invertébrés  inférieurs. 
caractères  §3-  —  Mais,  chez  tous  les  Vertébrés  ordinaires,  les  choses 
de  E™areii  ne  se  passent  pas  de  la  sorte ,  et,  avant  même  que  le  mouve- 
îes  vSébrés  ment  circulatoire  se  soit  établi,  l'organisme  se  trouve  pourvu 
d'un  cœur  ou  réservoir  sanguin  qui,  agissant  à  la  manière  d'une 
pompe  foulante ,  chasse  le  sang  dans  une  portion  du  cercle 
vasculaire  et  se  remplit  avec  le  fluide  contenu  dans  l'autre  por- 
tion de  ce  même  cercle  irrigatoire.  Ce  cœur  devient  le  centre 
d'action  de  tout  le  système  hydraulique,  lors  même  que  certains 

haut  les  deux  crosses,  et  probablement  supérieurs,  ce  sont  des  artères  qui 
aussi  la  série  des  vaisseaux  bran-  portent  le  sang  veineux  du  cœur  au 
chiaux.  Dans  le  vaisseau  sous-hépa-  poumon,  de  même  qu'elles  portent  le 
tique  (ou  cœur  de  la  veine  porte ,  sang  artériel  du  premier  de  ces  or- 
Miillér),  le  courant  s'établit  d'arrière  ganes  à  toutes  les  parties  de  l'écono- 
en  avant,  et  les  contractions  de  ce  mie,  et  que  ce  sont  des  veines  qui 
vaisseau  alternent  avec  celles  du  vais-  rapportent  le  sang  artériel  de  l'appareil 
seau  intestinal  (ou  veine  cave,  Millier).  respiratoire  aussi  bien  que  le  sang 
Enfin,  il  existe  encore  d'autres  veines  veineux  de  l'ensemble  de  l'organisme 
qui  côtoient  l'aorte  dorsale,  mais  vers  le  cœur.  Appliquer  le  nom  d'ar- 
dont  les  connexions  n'ont  pas  été  net-  tères  à  tous  les  vaisseaux  qui  portent 
tement  constatées.  Il  est  aussi  à  noter  le  sang  artérialisé,  ou  celui  de  veines 
que  les  contractions  des  gros  troncs  a  tous  ceux  contenant  le  sang  qui  n'a 
sont  très-énergiques  et  te  renouvol-  pas  encore  respiré,  serait  donc  dé- 
lent dans  chacun  de  ces  vaisseaux,  à  tourner  ces  expressions  de  leur  véri- 
environ  une  minute  d'intervalle.  table   acception   et    faire  naître   une 

(1)  En   efi'et,   nous  avons  déjà  vu  confusion  inutile, 
que  chez  l'Homme  et  tous  les  Animaux 


CHEZ    LES    VERTÉBRÉS.  309 

troncs  de  distribution  continuent  à  être  contractiles,  et.  y  vien- 
nent encore  en  aide  pour  mettre  le  sang  en  mouvement.  Par 
conséquent ,  chez  tous  les  Vertébrés  ordinaires ,  de  même  que 
chez  l'Homme,  c'est-à-dire  chez  les  Mammifères,  les  Oiseaux, 
les  Reptiles ,  les  Batraciens  et  les  Poissons  proprement  dits  , 
l'appareil  circulatoire  se  compose  de  trois  parties  principales , 
un  cœur,  des  artères  et  des  veines. 

§  h.  —  Le  cœur  occupe  toujours  la  région  inférieure  ou  P°silion 
sternale  du  tronc,  et  se  trouve  placé  en  arrière  du  pharynx  et 
au-dessous  de  la  portion  œsophagienne  du  canal  alimentaire , 
soit  dans  le  voisinage  de  la  tête  quand  celle-ci  n'est  pas  séparée 
du  tronc  par  un  cou  plus  ou  moins  allongé ,  comme  chez  les 
Poissons,  soit  à  une  distance  assez  grande  de  l'extrémité  cépha- 
lique  dans  la  portion  thoracique  de  la  cavité  splanchnique , 
lorsque  la  forme  générale  du  corps  entraîne  un  refoulement  des 
viscères  vers  l'arrière  du  tronc,  ainsi  que  cela  se  voit  chez  les 
Mammifères,  chez  les  Oiseaux  et  même  chez  les  Reptiles.  Le 
volume  de  cet  organe  est  toujours  assez  considérable  et  ses 
parois  sont  garnies  d'une  couche  épaisse  de  fibres  charnues. 
Intérieurement  il  est  divisé  en  deux  ou  plusieurs  cavités,  et  offre 
la  forme  d'un  sac  musculaire  qui  serait  suspendu  à  la  voûte 
d'une  loge  particulière  à  l'aide  des  gros  vaisseaux  par  l'inter- 
médiaire desquels  il  est  en  rapport  avec  le  reste  de  l'appareil 
circulatoire. 

La  chambre  cardiaque  se  constitue  de  bonne  heure  dans  péricarde, 
l'embryon  par  l'écartement  des  parties  dont  le  cœur  est  entouré, 
et  le  tissu  organoplastique  aux  dépens  duquel  toutes  ces  parties 
se  développent  se  modifie  d'une  manière  particulière  à  la  sur- 
face de  la  lacune  ainsi  constituée,  et  y  donne  naissance  à  une 
membrane  analogue  à  celle  dont  toutes  les  grandes  cavités  du 
corps  se  tapissent,  soit  chez  les  Vertébrés,  soit  chez  les  Animaux 
inférieurs.  Cette  tunique  prend  ici  le  nom  de  péricarde,  et  elle 
s'étend  sur  la  surface  extérieure  du  cœur  aussi  bien  que  sur 


310  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

P 

les  parois  de  la  chambre  qui  loge  ce  viscère,  de  façon  à  y  for- 
mer une  double  enveloppe.  Chez  quelques  Poissons,  la  cavité 
ainsi  constituée  communique  avec  la  poche  péritonéale  qui 
tapisse  l'abdomen  (1)  ;  mais  cette  disposition  est  exceptionnelle, 
et  chez  les  Mammifères  ,  les  Oiseaux ,  les  Reptiles,  les  Batra- 
ciens et  même  chez  tous  les  Poissons  osseux  ordinaires,  le  sac 
péricardique  est  complètement  fermé. 

Chez  les  Poissons,  des  brides  s'étendent  souvent  entre  le 
feuillet  cardiaque  et  le  feuillet  externe  de  cette  double  tunique, 
de  façon  à  fixer  le  cœur  par  divers  points  dans  la  cavité  qui  le 
renferme.  On  trouve  des  filaments  analogues  chez  quelques 


(1)  Moni'o  a  découvert  chez  la  Raie 
un  prolongement  infunclibuliforme 
qui  part  de  la  partie  postérieure  du 
sac  péricardique,  et  se  divise  bientôt 
en  deux  tubes  membraneux  dont  les 
parois  adhèrent  à  l'œsophage  et  dont 
l'extrémité  débouche  dans  la  cavité  de 
l'abdomen.  A  raison  de  l'obliquité  de 
ces  canaux,  les  liquides  ne  passent  pas 
de  la  cavité  du  péritoine  dans  le  péri- 
carde, mais  ils  suivent  facilement  la 
direction  inverse  (a). 

Meckel  a  constaté  l'existence  d'une 
disposition  analogue  chez  plusieurs 
espèces  de  Raies,  chez  la  Torpille,  le 
Marteau,  l'Ange  et  divers  Squales,  de 
sorte  qu'il  la  considère  avec  raison 
comme  étant  commune  à  tout  l'ordre 
des  Plagioslomes  (b). 

M.  Baer  a  trouvé  que  chez  l'Estur- 
geon il  y  a  aussi  une  communication 
entre  le  sac  péricardique  et  la  cavité 


abdominale  (c).  Les  Chimères  présen- 
tent le  même  caractère,  et  il  est  à 
noter  que  chez  ces  Sturioniens,  le 
conduit  péricardique  est  simple  au 
lieu  de  se  bifurquer,  comme  cbez  les 
Plagiostomes. 

Enfin,  chez  les  Ammocètes,  une 
large  fente  établit  de  chaque  côté  cette 
communication  d'une  manière  encore 
plus  directe,  et  le  péricarde  ne  semble 
être  qu'un  appendice  du  péritoine  (d); 
mais  lorsque  le  développement  de  ces 
Poissons  s'achève,  cet  orifice  se  ferme, 
car  chez  les  Lamproies  le  péricarde 
est  complètement  clos  (e). 

Chez  les  Myxines,  le  péricarde  com- 
munique également  avec  la  cavité  du 
péritoine  par  un  large  orifice  situé  à 
droite,  près  de  la  dernière  blanchie, 
et  allant  déboucher  dans  l'abdomen,  à 
côté  du  col  de  la  vésicule  biliaire  (/). 


(a)  Monro,  The  Structure  and  Physiology  of  Fishes  explained,  p.  23,  pi.  2,  n"  22  et  23,  et 
pi.  18,  fïg.  1,  n-  10  et  11. 

(6)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  24G. 

(c)  Baer,  Zweiter  Bericht  von  der  Anstalt  in  Kœnigsberg,  1819,  p.  34. 

(Y)  Mùller,  Vergleichende  Anatomie  der  Myxinoiden  {Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin,  1839,  p.  138, 
publié  en  1841). 

(e)  Meckel,  loc.  cit. 

(f)  Millier,  Op.  cit.,  p.  177  et  suiv. 


CHEZ  LES  VERTÉBRÉS.  31.1 

Reptiles  (1);  mais,  chez  les  Vertébrés  supérieurs,  des  adhérences 
de  ce  genre  ne  s'établissent  que  dans  l'état  pathologique ,  et 
les  deux  surfaces  en  rapport  sont  non-seulement  lisses,  mais 
lubrifiées  par  un  liquide  séreux  qui  en  facilite  le  glissement 
quand  le  cœur,  en  se  contractant ,  change  de  forme  et  de 
position. 

La  structure  du  péricarde  est  semblable  à  celle  de  la  plèvre 
et  des  autres  membranes  séreuses.  On  y  distingue  une  couche 
superficielle  formée  de  tissu  épithélique  pavimenteux  et  une 


(1)  Ces  brides,  dont  l'existence  a 
été  signalée  vers  le  milieu  du  xvne  siè- 
cle par  Severini  (a),  sont  particulière- 
ment développées  et  nombreuses  chez 
les  Esturgeons  ;  elles  ressemblent  à 
des  ligaments  et  vont  s'attacher  prin- 
cipalement à  la  région  antérieure  du 
ventricule  (6). 

Chez  la  grande  Lamproie,  on  en 
trouve  ordinairement  trois  :  une  s'é- 
tend entre  le  péricarde  et  le  ventri- 
cule; une  autre  se  fixe  à  l'oreillette, 
et  la  troisième,  qui  est  très  large  et 
ressemble  moins  à  un  ligament,  se  dé- 
tache de  la  veine  cave  et  se  porte 
en  avant  entre  le  ventricule  et  l'oreil- 
lette, pour  se  terminer  antérieurement 
par  un  bord  libre  (c).  Chez  la  Lam- 
proie de  rivière,  ces  brides  sont  très 
grêles  et  échappent  facilement  à  l'ob- 
servation. 

Chez  les  Poissons  osseux,  elles  sont 


moins  communes,  mais  ne  manquent 
pas  toujours;  ainsi,  elles  ont  été  ob- 
servées chez  Y Anarrichas  lupus  par 
Broussonnet  (d);  chez  le  Congre  (Mu- 
rœna  conger),  par  Tiedemann  (e),  et 
chez  le  Cobitis  fossilis,  ainsi  que  chez 
l'Anguille  et  plusieurs  autres  Muré- 
niens ,  par  Meckel  (/)  ;  mais  elles 
n'existent  pas  chez  les  Myxines,  où 
ce  dernier  anatomiste  avait  cru  en 
voir  (</). 

Des  adhérences  filiformes  entre  le 
cœur  et  le  sac  péricardique  se  remar- 
quent aussi  chez  les  Chéloniens  (h),  et 
paraissent  exister  constamment  dans 
l'ordre  des  Sauriens.  Elles  se  retrou- 
vent aussi  chez  beaucoup  d'Ophi- 
diens (*). 

Chez  les  Oiseaux  et  les  Mammifères, 
des  brides  de  ce  genre  n'existent  pas 
dans  l'état  normal. 


(6) 


Marcus  Aurelius  Severinus,  Zootomia  democratica,  p.  169  (1045). 

Baer,  loc.  cit.,  p.  32. 

Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  241. 

Carus,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  II,  p.  220. 

Meckel,  loc.  cit.,  p.  240. 

Broussonnet,  Observ.  sur  le  Loup  marin  (Mém.  de  l'Acad.  des  sciences,  1785,  p.  169). 

Tiedemann,  Anatomie  des  Fischherzens,  p.  5  (1809). 

Meckel,  Op.  cit.,  p.  237. 

Millier,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  (Acad.  de  Berlin,  1839,  p.  178). 

Bojanus,  Anat.  Test.  Europ.,  p.  152. 

Meckel,  Op.  cit.,  p.  297. 

Meckel,  Op.  cit.,  p.  300. 


312  APPAREIL    DE    LÀ    CIRCULATION 

couche  profonde  composée  de  filaments  de  tissu  élastique  qui 
adhère  d'une  part  à  la  surface  du  cœur,  d'autre  part  aux  or- 
ganes circonvoisins  (1).  Chez  les  Poissons,  il  tapisse  une 
cavité  particulière  qui  est  située  au-devant  de  l'abdomen  et 
séparée  de  celui-ci  par  une  cloison  tendineuse  à  laquelle  on 
donne  souvent  le  nom  de  diaphragme  (2).  Chez  les  autres  Ver- 


(1)  Chez  quelques  Poissons,  l'union 
entre  le  feuillet  externe  ou  pariétal  du 
péricarde  et  les  parois  de  la  chambre 
cardiaque  est  si  intime,  que  plusieurs 
anatomisles  n'en  ont  pas  reconnu  la 
présence.  Ainsi  Perrault  a  cru  que 
cette  poche  manquai  t  chez  le  Squale(a) , 
et  Vicq  d'Azyr  ne  l'a  aperçue  chez 
aucun  Poisson  cartilagineux  (b);  mais 
l'erreur  commise  par  ces  auteurs  a  été 
rectifiée  par  Cuvier  (c). 

Dans  quelques  cas  très  rares,  le  pé- 
ricarde parait  avoir  avorté  dans  son 
développement  chez  les  Animaux  su- 
périeurs, et  même  chez  l'Homme. 
Ainsi,  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur 
l'anatomie  pathologique  signalent  l'ab- 
sence de  cette  membrane  chez  quel- 
ques individus  (d). 

La  couche  fibreuse  du  péricarde  est 
très  mince,  mais  bien  distincte,  et  se 
continue  avec  la  tunique  externe  des 
gros  vaisseaux  sanguins  à  l'aide  des- 
quels le  cœur  est  comme  suspendu. 
Elle  est  plus  développée  dans  la  por- 
tion pariétale  de  cette  double  tunique 


que  dans  la  portion  réfléchie  qui 
adhère  à  la  surface  du  cœur. 

Chez  les  Batraciens ,  la  couche  épi- 
thélique,  dont  la  surface  libre  du  pé- 
ricarde est  garnie  ,  porte  souvent  des 
cils  vibratiles.  D'après  M.  Mayer,  ces 
filaments  se  trouveraient  chez  les 
Urodèles  aussi  bien  que  chez  les  Ba- 
traciens Anoures  ;  mais  M.  Leydig 
n'en  a  pas  vu  chez  la  Salamandre  ter- 
restre et  le  Protée,  et  il  pense  qu'ils 
n'existent  que  chez  les  Anoures  (e). 

(2)  La  chambre  cardiaque  des  Pois- 
sons, qu'on  appelle  quelquefois  le  tho- 
rax de  ces  animaux,  est  située  immé- 
diatement en  arrière  des  branchies, 
dans  l'angle  rentrant  que  les  arcs 
hyoïdiens  postérieurs  forment  en  gé- 
néral dans  la  région  sous-pharyn- 
gienne. 

Chez  les  Lamproies,  les  parois  de 
cette  chambre  branchiale  sont  formées 
par  une  capsule  fibro- cartilagineuse 
qui  termine  en  arrière  l'espèce  de 
charpente  externe  dont  l'appareil  bran- 
chial est  pourvu  (/"). 


(a)  Terrault,  Description  anatomique  d'un  Renard  marin  (le  Squalus  vulpes,  Lin.),  Mêm,  pour 
servir  à  l'histoire  des  Animaux,  t.  I,  p.  123. 

(b)  Vicq  d'Azyr,  Deuxième  Mémoire  sur  l'anatomie  des  Poissons  (  Œuvres,  t.  V,  p.  198  et 
218). 

(c)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  2"  édit. ,  t.  VI,  p.  33G. 

(d)  Baillie,  On  the  Want  of  a  Pericardium  in  the  Human  Body  (Trans.  of  a  Soc.  for  the 
Improvem.  ofMcd.  and  Chirurg.  Knowledge,  t.  I,  pi.  91). 

—  Breschet,  Mém.  sur  un  vice  de  conformation  congénitale  des  enveloppes  du  caïur  (Répertoire 
général  d' anatomie,  t.  I,  p.  212). 

(e)  Leydig,  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  412  (1857). 

(f)  Voyez  Born,  Observ.  anat.  sur  la  grande  Lamproie  (  Anii.  des  sciences  nat.,  1828,  t.  XIII, 
pi.  l.fig.  1). 


CHEZ    LES    VERTÉBRÉS.  SI 3 

tébrés,  cette  poche  membraneuse  se  trouve  entre  les  poumons, 
vers  la  partie  antérieure  de  la  chambre  viscérale  commune  ou 
dans  l'étage  supérieur  de  cette  cavité,  là  où  le  thorax  est  dis- 
tinct de  l'abdomen.  Chez  les  Oiseaux,  elle  adhère  aux  sacs 
aériens  circonvoisins  (1),  et ,  chez  les  Mammifères,  elle  est  en 
rapport  avec  les  deux  cloisons  membraneuses  qui  dépendent 
des  plèvres  et  qui  constituent  le  médiastin  (2). 

§  5.  —  Nous  avons  vu,  dans  les  Leçons  précédentes  ,  que  cœur. 
chez  les  Animaux  Invertébrés  le  cœur  reçoit  toujours  du  sang 
artériel  et  pousse  ce  liquide  dans  le  système  de  vaisseaux  chargés 
de  le  distribuer  dans  toutes  les  parties  de  l'organisme  où  la 
nutrition  s'effectue.  Chez  les  Vertébrés,  il  n'en  est  pas  de  même  : 
le  cœur  a  pour  fonction  invariable  d'envoyer  directement  le 
sang  à  l'appareil  respiratoire  ;  c'est  seulement  quand  sa  struc- 
ture se  complique  et  se  perfectionne  qu'il  se  trouve  en  rapport 
direct  avec  le  système  artériel  général.  Il  est,  avant  tout,  un 
cœur  veineux,  et  le  rôle  qu'il  remplissait  toujours  dans  les 
autres  embranchements  du  "Règne  animal  est  ici  une  annexe  qui, 
dans  certaines  classes,  vient  s'ajouter  à  son  mode  d'action 
constant. 


(1)  L'espace  ainsi  circonscrit  con-  paiement  à  la  portion  fibreuse  de  ce 
stitue  ce  que  Cuvier  appelait  la  cellule  muscle  qui  porte  le  nom  de  centre 
du  cœur  (a)  ,  mais  ne  communique  phrénique  (c).  En  avant,  elle  est  unie 
pas  avec  les  réservoirs  aériens  ,  et  à  la  partie  moyenne  du  sternum  par 
se  trouve  seulement  accolé  à  ceux-  du  tissu  conjonctif  ,  et  en  arrière 
ci  (6).  elle  est  séparée  de  la  colonne  verte - 

(2)  Ainsi,  chez  l'Homme,  la  cham-  brale  par  l'œsophage,  et  les  autres 
bre  limitée  par  le  feuillet  externe  ou  organes  contenus  dans  le  médiastin 
pariétal  #du  péricarde  a  la  forme  postérieur;  enfin,  latéralement,  elle 
d'un  cône  dont  la  base  est  tournée  en  est  en  rapport  avec  les  plèvres,  qui  la 


bas,  et  adhère  au  diaphragme,  princi-      séparent  des  poumons. 


(a)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VII,  p.  42G. 

{b)  Voyez  Sappey,  Recherches  sur  l'appareil  respiratoire  des  Oiseaux,  pi.  4,  fig.  3. 

(c)  Voyez  tome  II,  page  407. 


Mk  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Perfectionnera.      La  partie  essentielle  du  cœur  de  l'Animal  vertébré,  celle  qui 

successifs 

de  cet  organe  ne  manque  jamais,  est  le  ventricule  veineux  et  sa  pompe  d'ali- 

chez  Jgs   divers 

vertébrés,  mentation  constituée  par  l'oreillette  correspondante,  où  vien- 
nent déboucher  les  grosses  veines  du  corps.  Le  service  irriga- 
toire  de  l'appareil  de  la  respiration  se  trouve  donc  assuré  de 
prime  abord;  et  chez  un  grand  nombre  de  ces  Animaux,  la  dis- 
tribution du  sang  artériel  dans  les  diverses  parties  de  l'écono- 
mie, ou  la  circulation  générale,  n'est  qu'une  conséquence  secon- 
daire du  flux  du  sang  dans  les  vaisseaux  de  la  petite  circulation. 
Mais  lorsque  l'organisme  se  perfectionne,  l'impulsion  imprimée 
à  ce  liquide  se  renouvelle  après  son  passage  dans  les  poumons, 
et  le  sang  artériel,  reçu  dans  une  oreillette  particulière,  est  lancé 
directement  dans  le  système  artériel  de  la  grande  circulation 
par  les  contractions  du  cœur.  Ce  résultat  s'obtient  d'abord  par 
voie  d'emprunt,  car  c'est  le  ventricule  veineux  qui  est  alors 
chargé  de  ce  surcroît  de  travail  ;  mais  bientôt  une  seconde 
pompe  ventriculaire  vient  s'ajouter  au  système  d'organes  mo- 
teurs constitué  par  le  cœur,  et  l'on  voit  alors  réunis  dans  un 
même  organe  quatre  cavités  contractiles  qui  forment  en  quel- 
que sorte  deux  cœurs  :  un  cœur  artériel  et  un  cœur  veineux. 

Il  en  résulte  que  l'appareil  circulatoire  affecte  chez  les  Ver- 
tébrés proprement  dits  trois  formes  principales. 

L'un  de  ces  types  est  caractérisé  par  l'existence  d'un  cœur 
qui  se  compose  de  deux  cavités  seulement,  et  qui  ne  reçoit  que 
du  sang  veineux.  Il  appartient  essentiellement  à  la  classe  des 
Poissons. 

Le  second  type  se  reconnaît  à  l'existence  d'un  cœur  à  trois 
cavités,  savoir  :  deux  oreillettes  et  un  ventricule  où  le  sang 
artériel  et  le  sang  veineux  viennent  se  mêler  pour  être  distri- 
bués ensuite  dans  les  artères  de  la  grande  et  de  la  petite  circu- 
lation, mode  de  structure  qui  appartient  exclusivement  aux 
Batraciens  et  aux  Reptiles. 

Enfin,  le  troisième  type  diffère  des  deux  précédents  par 


CHEZ    LES    VERTÉBRÉS.  315 

l'existence  de  quatre  cavités  cardiaques,  la  séparation  complète 
entre  la  portion  artérielle  et  la  portion  veineuse  du  cœur,  dis- 
position qui  fait  passer  le  sang  deux  fois  dans  cet  organe  d'im- 
pulsion pour  compléter  le  cercle  circulatoire,  et  l'indépendance 
des  vaisseaux  qui  naissent  des  deux  ventricules ,  mode  d'or- 
ganisation par  suite  duquel  tout  mélange  entre  le  sang  rouge 
vermeil  qui  a  subi  l'action  de  l'air,  et  celui  qui  est  devenu  noi- 
râtre par  l'effet  de  son  emploi  dans  le  travail  nutritif,  est 
rendu  impossible. 

Cette  dernière  forme  de  l'appareil  circulatoire  est  propre  aux     Résumé 
Oiseaux  et  aux  Mammifères,  et  c'est  pour  exprimer  ces  diffé-  ces  différences. 
renées  que  les  zoologistes  appellent  ces  animaux  des  Vertébrés 
à  circulation  double  et  complète,  tandis  qu'ils  appellent  les  Pois- 
sons des  Vertébrés  à  circulation  simple,  et  les  Reptiles,  des 
Vertébrés  à  circulation  double  et  incomplète  (1). 

On  rencontre  aussi  dans  cet  embranchement  quelques  for- 
mes intermédiaires,  soit  transitoires,  soit  permanentes,  et 
l'étude  de  ces  passages  d'un  type  organique  à  un  autre  est  très 
importante  lorsqu'on  veut  se  former  une  idée  générale  des 
procédés  employés  par  la  Nature  pour  constituer  l'appareil  cir- 
culatoire des  Animaux  vertébrés.  Nous  y  accorderons  donc  une 
attention  sérieuse.  Mais  ce  sont  les  trois  formes  dominantes 
dont  nous  aurons  à  nous  occuper  principalement,  et  afin  d'en 
faciliter  la  description,  je  ne  traiterai  en  ce  moment  que  des 
Poissons,  renvoyant  à  la  Leçon  prochaine  tout  ce  qui  est  relatif 
aux  Batraciens  et  aux  Reptiles,  et  réservant  l'étude  des  organes 

(1)  Ces  expressions  ne  doivent  pas  vient  de  l'une  des  moitiés  du  système 

être  prises  dans  un  sens  rigoureux,  et  circulatoire   n'est  pas  envoyée   dans 

doivent  signifier  seulement  qu'en  fai-  l'autre   moitié;   enfin,    que  chez  les 

sant  le  tour  du  cercle  irrigatoire,  le  Mammifères  et  les  Oiseaux,  la  totalité 

sang  ne  passe   qu'une  fois  dans   le  du  sang  artériel  et  la  totalité  du  sang 

cœur  chez  les  Poissons;  que  chez  les  veineux  traversent  le  cœur  sans  se 

l«eptiles  il  y  passe  en  partie  deux  fois,  mêler, 
mais  que  la  totalité  du  liquide  qui  re- 


316  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

circulatoires  des  Oiseaux  et  des  Mammifères  pour  une  autre 
séance. 
Appareil         §6.  —  Dans  la  classe  des  Poissons  ,  les  veines  qui  rap- 

circulatoire      „iai  •       i         t  .  •         n  /• 

des  Poissons,  portent  le  sang  noir  des  diverses  parties  du  corps  se  reunissent 
à  la  partie  antérieure  de  l'abdomen  pour  constituer  un  grand 
réservoir  ou  sinus  à  parois  membraneuses.  Chez  les  Poissons 
osseux,  ce  sinus  est  appliqué  contre  la  cloison  postérieure  de 
la  chambre  cardiaque  ;  mais  chez  les  Plagiostomes  il  est  logé 
dans  le  péricarde  (1),  et,  chez  les  uns  comme  chez  les  autres, 
il  débouche  dans  l'oreillette  du  cœur.  Enfin,  l'orifice  auricu'lo- 
veineux  qui  établit  cette  communication  est  souvent  garni  de 
valvules  disposées  de  façon  à  empêcher  le  reflux  du  sang  (2). 
cœur.  Le  cœur  des  Poissons,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  se  compose 

essentiellement  de  deux  sacs  contractiles  :  une  oreillette  et  un 
ventricule;  mais  on  y  trouve  aussi  presque  toujours,  à  la  sortie 
de  cette  dernière  cavité,  un  autre  réservoir  appelé  le  bulbe 


(1)  Ainsi,  chez  la  Raie,  ce  sinus  est  (-)  Cet  orifice  est  pourvu  de  deux 

disposé   transversalement  à  la  partie  valvules  semi-lunaires  chez  la  Carpe  {d), 

postérieure  du  sac  péricardique  («).  la  Perche  (e),  la  Truite  (/"),  VOrthra- 

Chez  la  Perche,  au  contraire,  le  ré-  goriscus ,   la   Baudroie,   les   Plagio- 

servoir  veineux  précardiaque  est  placé  stomes,  l'Esturgeon,  etc.,  mais  en  est 

entre  le  péricarde  et  la  cloison  dia-  dépourvu  chez  beaucoup  de  Poissons 

phragmalique  qui  sépare  !a  chambre  osseux  (g). 

cardiaque  de  la  cavité  abdominale.  Un  Chez  les  Ables  (Leuciscus)  et  quel- 
orifice  pratiqué  au  milieu  de  sa  paroi  ques  autres  Poissons  ,  ces  valvules 
antérieure  le  fait  communiquer  avec  sont  pourvues  de  fibres  musculaires 
roreillelte  (6J.  La  position  du  sinus  striées  ,  et  Ton  remarque  sur  leurs 
veineux  est  la  même  chez  les  Salmo-  bords  des  prolongements  en  forme 
nés  (c).  d'ampoules  simples  ou  multiIobées(/i). 


(a)  Voyez  Monro,  The  Struct.  and  Physiol.  ofFishes,  pi.  2,  11°  38. 
(6)  Guvier,  Histoire  des  Poissons,  1. 1,  p.  5H,  pi.  7,  fig.  t. 

(c)  Agassiz  et  Vogt ,  Anat.  des  Salmonés,  pi.  K,  fig.  2  (extrait  des  Mémoires  dé  la  Société  des 
sciences  naturelles  de  Neufchdtel,  1845,  t.  III). 

(d)  Owen,  Lectures  on  the  Comparative  Anatomy  and  Physiology  of  the  Vertébrale  Animais 
Fishes,  p.  256. 

(e)  Duvernoy,  Œuvres  anatomiques ,  t.  II,  p.  470,  pi.  0,  fig.  3. 

(f)  Cuvicr,  loc.  cit. 

(a)  Agassiz  et  Vogt,  Op.  cit.,  p.  111. 

(h)  Lcydig,  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  411,-  fig.  163. 


CHEZ    LES    POISSONS.  317 

artériel,  dont  le  jeu  est  plus  ou  moins  semblable  à  celui  des 
deux  précédents  (1).  Le  sang,  en  sortant  du  sinus  dont  il  vient 
d'être  question,  traverse  donc  trois  chambres  cardiaques  dis- 
tribuées en  enfilade,  et  reçoit  dans  chacune  de  ces  cavités  une 
nouvelle  impulsion  qui  le  dirige  vers  l'appareil  respiratoire. 
Chez  l'embryon,  ces  trois  réservoirs,  séparés  par  des  étrangle- 
ments, sont  placés  sur  une  même  ligne  droite (2),  et  quelquefois 
ils  conservent,  à  peu  de  chose  près,  cette  position  chez  l'adulte  (8); 
mais,  en  général,  les  progrès  du  développement  amènent  un  mou- 
vement de  rotation  dans  le  cœur,  et  l'oreillette  vient  chevaucher 
au-dessus  du  ventricule  ou  même. au-dessus  du  bulbe,  et  oc- 
cupe la  partie  supérieure  ou  dorsale  de  cet  organe  au  lieu  d'en 
constituer  l'extrémité  postérieure  [h).  Néanmoins  les  relations 

(1)  Ce  bulbe  manque  chez  les  Cy-  nectes  rhombus),  la  moitié  antérieure 

clostomes  (a),  de  l'oreillette  recouvre  la  moitié  pos- 

|(2)  Nous  étudierons  le  mode  de  dé-  térieuredu  ventricule  (e). 
veloppement  de  cet  organe  lorsque  Chez  le  Gymnarchus,  il  n'y  a  aussi 
nous  nous  occuperons  spécialement  de  que  la  moitié  antérieure  de  l'oreillette 
l'embryologie,  et  je  me  bornerai  ici  à  qui  s'avance  de  la  sorte,  mais  elle  re- 
indiquer quelques  figures  où  la  dispo-  couvre  la  presque  totalité  du  ventri- 
sition  indiquée  ci-dessus  se  trouve  re-  cule  (/). 
présentée  (b).  Chez  la  Carpe,  l'oreillette  est  située 

(3)  Par  exemple ,  chez  les  Myxi-  sur  la  même  ligue  transversale  que  le 
noïdes  (c)  et  chez  quelques  Poissons  ventricule,  au-dessus  et  à  gauche  de 
osseux,  tels  que  le  Scorpœnascrofa(d).  cet  organe  [g). 

(4)  Ainsi,  chez  la  Barbue  {Pleuro-  Chez  la  Perche  (h),  la  Truite  (i),  la 

(a)  Miiller,  Vergl.  Anat.  dér  Myxinoiden  (Acad.  de  Berlin,  1839,  p.  192). 
(6)  Voyez  :  Rathke,  Bildungs-und  Entiuickelungs-Geschichte  des  Blennius  viviparus  (Abhandl. 
zur  Bild.  und  Entw.  Gesch.  der  Menschen  und  Thiere,  t.  II,  pi.  3,  fig.  29,  33). 

—  De  Filippi,  Memoria  sulla  Sviluppo  del  Ghiozzo  d'aqua  dolce  (Gobius  fluviatilis) ,  pi.  1, 
fig.  1  1  (extrait  des  Ann.  unit),  di  medicina,  1841).  —  Sunto  di  alcune  osseri).  sulV  embryologie/, 
de  Pesci,  pi.  1,  fig.  2  et  3  ;  pi.  2,  fig.  3,  etc.  (extrait  du  Giornate  deli  Islituto  Lombardo,  1845, 
t.  XII). 

—  Vogt,  Embryologie  des  Salmonés,  pi.  4,  fig.  89,  91,  etc.  (extrait  de  V Histoire  naturelle  des 
Poissons  d'eau  douce  de  l'Europe  centrale,  par  Agassiz). 

—  Quatrefages,  Mém.  sur  l'embryologie  des  Syngnathes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1842,  2"  série, 
t.  XVIII,  pi.  7,  fig.  1  et  3). 

(c)  Miiller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  pi.  7,  fig.  6,  et  3°  partie,  pi.  2,  fig.  6). 

(d)  Tiedemann,  Anatomie  des  Fischherzens,  pi.  2,  fig.  20. 

(e)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pli  2,  fig.  23. 

(/")  Duverney,  Note  sur  le  Gymnarchus  niloticus  (Ann.  des  sciences  nat.,  3e  série,  t.  III,  pi  5> 
fig.  6). 

(g)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  51  et  52. 

(h)  Cuvier,  Histoire  naturelle  des  Poissons,  t.  I,  pi.  8,  fig.  2,  7  et  8. 

(I)  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmonés,  pi.  A,  fig.  3. 


o!8  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

physiologiques  ne  changent  pas,  et  toujours  c'est  l'oreillette  qui 
reçoit  d'abord  le  sang  veineux  et  qui  le  transmet  au  ventricule, 
d'où  ce  liquide  passe  dans  le  bulbe  pour  pénétrer  ensuite  dans 
le  système  artériel, 
oreillette.  L'oreillette  est  en  général  plus  volumineuse  que  les  autres 
parties  constitutives  du  cœur,  et  déborde  le  ventricule  de 
chaque  côté.  Sa  forme  varie,  et  ses  parois,  minces  et  mem- 
braneuses, sont  garnies  de  faisceaux  musculaires  disposés  en 
manière  de  trame  et  faisant  quelquefois  saillie  dans  son  inté- 
rieur (1)  ;  mais  sa  cavité  est  toujours  simple,  et  des  vestiges 
d'une  cloison  ne  s'y  observent  que  chez  le  Lepidosiren,  animal 
qui  tient  du  type  du  Batracien  plus  encore  que  du  type  caracté- 
ristique du  Poisson  (2) .  L'orifice  auriculo-ventriculaire  en  occupe 


Lotie  (et),  et  beaucoup  d'autres  espèces,  de  l'appareil  locomoteur  ;  ils  se  rami- 

l'oreillette  s'avance  davantage  et  che-  fient  et  s'anastomosent  souvent  entre 

vauche  aussi  sur  le  bulbe  artériel.         •  eux  ;  enfin  ils  ne  sont  séparés  que  par 

Enfin,  il  est  d'autres  Poissons  où,  très  peu  de  tissu  connectif  intermé- 

ce  mouvement  s'exagérant  encore  (la-  diaire  (/"). 

vantage,  l'oreillette  se  trouve  placée  (2)  Chez  le  Lepidosiren  annectens, 

entièrement  ou  presque  entièrement  l'oreillette  est  simple  comme  chez  les 

au-devant  du  ventricule  et  au-dessus  Poissons  ordinaires  (g),  mais  chez  le 

du  bulbe  :  chez  les   Raies   (b) ,   les  Lepidosiren  paradoxa  elle  est  divisée 

Squales  (c),  YEsox  Bellone  [d),  et  l'Om-  en  deux  loges  par  une  cloison  in'com- 

bre  ou  Salmo  thijmallus,  Lin.  (e),  par  plète  qui  est  composée  de  faisceaux 

exemple.  musculaires  entrecroisés.   L'oreillette 

(1)  Chez  les  Poissons,  de  même  que  gauche  est  en  communication  avec  les 

chez  les  autres  Vertébrés,  le  lissu  mus-  veines  pulmonaires  ,   tandis  que    la 

culaire  du  cœur  se  compose  de  fibres  droite  reçoit  les  veines  caves.  Il  y  a 

striées,  et  les  faisceaux  primUifs  for-  donc  chez  cet  Animal  deux  oreillettes, 

mes  de  ces  fibres  sont  plus  grêles  et  mais  la  cloison  qui  les  sépare  est,  pour 

plus  granulés  que   dans  les  muscles  ainsi  dire,  à  claire-voie,  et  laisse  par- 
fa)  Tiedemann,  Anatomie  desFischherzens,  pi.  2,  fig.  18. 
(6)  Monro,  Struct.  of  Fishes,  pi.  1 ,  %.  4. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  1,  iîg.  1  ;  pi.  2,  fig.  6,  elc. 
(c)Idem,  ïbid.,  pi.  2,  fig.  9. 

(d)  Idem,  ibid.,  pi.  3,  fig.  30,  31. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  3,  fig.  34  et  35. 

(f)  Leydig,  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  410. 

(g)  Owen,  Description  of  the  Lepidosiren  annectens  (Trans.  of  the  Linnean  Society,  vol.  XVIII, 
p.  34  4). 


CHEZ    LES    POISSONS. 


319 


d'ordinaire  le  plancher,  et  porte  des  valvules  dont  le  jeu  empêche 
tout  passage  rétrograde  du  sang  (1). 

Le  ventricule  a  des  parois  charnues  très  épaisses.  11  a,  en 
général,  la  forme  d'une  pyramide  dont  la  base  est  dirigée  en 
avant  (2)  ;  ses  fibres  musculaires  sont  disposées  sur  deux  plans 


lout  un  passage  assez  facile  d'une  ca- 
vité clans  l'autre  (a). 

(1)  Ces  valvules  sont  en  général  au 
nombre  de  deux,  ainsi  que  cela  se 
voit  chez  la  Perche  (b)  ;  mais  chez  la 
Raie  ,  il  y  en  a  trois  (c)  ;  et  chez 
VOrthragoriscus  on  en  trouve  quatre, 
dont  deux  plus  grandes  et  deux  acces- 
soires (d).  Le  plus  ordinairement  elles 
ont  les  bords  libres  et  sont  semi- 
lunaires;  mais  quelquefois  des  brides 
charnues  qui  naissent  des  parois  du 
ventricule  viennent  s'y  fixer.  Ce  mode 
d'à 'tache  se  voit  chez  la  Perche  (e), 
mais  est  plus  développé  chez  l'Estur- 
geon. 

Chez  les  Squales,  l'orifice  auriculo- 
ventricnlaire  est  garni  d'un  voile  val- 
vulaire  unique  très  délicat,  dont  le 
bord  libre  est  attaché  à  son  pourtour 
par  plusieurs  points  (/'). 

M.  J.  Davy  compte  six  valvules  au- 


riculo-ventriculaires  chez  la  Tor- 
pille (g). 

(2)  Le  cœur  des  Poissons  présente 
des  formes  très  variées.  Le  ventricule 
est  globuleux  chez  l'Or  thragoriscus  {h}, 
l'Esturgeon  (*')  ,  la  grande  Roussette 
(ou  Scyllium  canicula)  (j),  etc.  ;  ova- 
laire  chez  la  Baudroie,  les  Myxines, 
les  Bciellostomes  (k);  pyriforme  chez 
le  Lépisostée  (l)  et  le  Polyptère  (m)  ; 
en  forme  de  losange  chez  le  Bro- 
chet (n),  chez  la  Haie  ronce  (o),  etc.  ; 
chez  le  Requin  ,  il  est  au  contraire 
presque  deux  fois  aussi  large  que 
long  (p). 

M.  Tiedemann  a  remarqué  qu'en  gé- 
néral il  existe  une  certaine  ressem- 
blance entre  la  forme  du  cœur  et  les 
proportions  du  corps  du  Poisson  (q), 
mais  cette  règle  souffre  de  nombreuses 
exceptions  (r). 

Le  ventricule  et  le  bulbe  offrent  chez 


fa)  Hyrll ,  Lepidosiren  paradoxa  Monographie  (Mém.  de  VAcad.  de  Bohême,  1845,  5e  série, 
t.  V,  p.  638,  pi.  1,  fig.  3). 

(6)  Voyez  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  8,  fig.  7. 

(c)  Tiedemann,  Anat.  des  Fischherzens,  pi.  1,  fig.  4,  etc. 

(d)  Voyez  Wellenberg,  Observ.  anat.  de  Orthragoriseo  mola,  fig.  4. 

(e)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  p.  512. 
(/")  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  341. 

(g)  J.  Davy,  Exp.  and  Obs.  on  the  Torpédo  (Research.,  Phijsiol.  and  Anat,,  t.  I,  p.  91). 

(h)  Wellenberg,  Op.  cit.,  fig.  4. 

(i)  Tiedemann,  Anatomie  des  Fischherzens,  pi.  2,  fig.  12. 

(j)  Idem,  ibid.,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  9. 

(ft)  Miiller,  Vergleichende  Anatomie  der  Myxinoiden  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839, 
pi.  2,  fig.  5). 

(Z)  Mûlier,  Ueber  den  Ban  und  die  Grenzen  der  Ganoiden,  pi.  2,  fig.  1 ,  et  pi.  3,  fig.  1  (Mém.  de 
l'Acad.  de  Berlin,  1844). 

(m)  Miiller,  Op.  cit.,  pi.  3,  fig.  2. 

(n)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  46. 

(o)  Idem,  ibid.,  pi.  1,  fig.  1. 

(p)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  206. 

(q)  Tiedemann,  Op.  cit.,  p.  18. 

[r)  Voyez  Meckel,  loc.  cit. 


Ventricule 
du  cœur. 


III. 


21 


3b20  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

qui  sont  souvent  très  nettement  séparés  entre  eux  (!)  et  for- 
ment intérieurement  des  colonnes  charnues  assez  puissantes. 
Sa  cavité  se  contourne  pour  communiquer  en  dessus  et  en 
arrière  avec  l'oreillette,  en  avant  et  en  dessous  avec  le  bulbe  (2). 


l'Esturgeon  une  disposition  très  sin- 
gulière .qui  en  masque  pour  ainsi  dire 
la  forme.  La  surface  de  cette  portion 
du  cœur  est  garnie  d'une  vingtaine 
de  lobes  arrondis  qui  sont  séparés 
entre  eux  par  des  sillons  profonds 
et  qui  ont  un  aspect  spongieux. 
Leur  structure  paraît  être  très  vascu- 
laire  ,  et  ils  ne  communiquent  pas 
avec  l'intérieur  de  l'organe.  Plu- 
sieurs anatomistes  considèrent  ces 
appendices  comme  étant  de  nature 
glandulaire  [a),  et  Meckel  a  cru  pou- 
voir les  assimiler  à  un  thymus  (6).  On 
y  trouve  des  fibres  mêlées  à  beaucoup 
de  cellules  nucléolées  et  une  espèce  de 
lymphe  contenant  des  granules  (c). 

Du  reste,  on  ne  sait  rien  de  précis 
relativement  à  leurs  usages. 

(1)  La  séparation  entre  les  deux 
couches  musculaires  du  venlricule  est 
si  marquée  chez  quelques  Poissons, 
qu'il  semble  y  avoir  une  cavité  acces- 
soire dans  l'épaisseur  de  ses  parois. 


Celte  disposition  a  été  constatée  pour 
la  première  fois  par  Dœllinger  chez 
des  Cyprins,  et  cet  anatomiste  consi- 
déra l'espèce  de  sac  ainsi  formé 
comme  étant  le  représentant  du  ven- 
tricule droit  du  cœur  des  Vertébrés 
supérieurs  (d),  opinion  qui  a  été  adop- 
tée par  Eschscholtz  (<?),  mais  qui  ne 
paraît  pas  être  fondée,  ainsi  que  nous 
le  verrons  quand  nous  étudierons  le 
mode  de  développement  de  cet  or- 
gane. Ce  dédoublement  de  la  tunique 
musculaire  a  été  observé  aussi  par  Oli- 
vier chez  l'Espadon  (/'),  par  M.  Halhke 
chez  le  Brochet  (g),  et  par  Meckel 
chez  le  Saumon,  etc.;  mais,  ainsi  que 
le  font  remarquer  ces  derniers  anato- 
mistes, elle  dépend  souvent  d'une  al- 
tération cadavérique,  et  durant  la  vie, 
il  paraît  y  avoir  presque  toujours  des 
adhérences  faibles  entre  les  deux  cou- 
ches musculaires  en  question  (/i). 

(2)  Chez  le  Lepidosiren  paradoxa, 
la  cavité  du  ventricule  est  divisée  par- 


(a)  Valsalva  (Morgagni,  Epistolœ  anatomicœ,  XV,  art.  2,  t.  II,  p.  70). 

—  Kuhl,  Beilrâge  zur  Zoologie  und  vergleich.  Anal.,  1820,  p.  138. 

—  Koelreuier,   Observ.  splanchnologicie  ad  Acipenseris  rutheni   anatomen  spécialités  (Novi 
Comment.  Acad.  Petrop.,  1771,  t.  XVI,  p.  511,  pi.  14,  fig-.  1). 

—  Baer,  Bericht  von  der  Anat.  Anst.  zu  Kœnigsberg,  1819. 

—  Carus,  Tab.  Anat.  comp.  illustr.,  pars  VI,  pi.  4,  fig1.  4. 

(b)  Meckel,  Analomie  comparée,  t.  IX,  p.  218. 

(c)  Stannius,  Handb.  der  Zootomie,  2°  édit.,  1. 1,  p.  238. 

—  Leydig-,  Anatomische  histologische  Untersuchurigen  ûber  Fische  und  Heptilietij  p.  35. 

(d)  Dœllinger,  Ueber  dan  eigentlichen  Bau  des  Fischherzens  (Wetterauer  Annalen  ,  1811, 
t.  II,  p.  311,  24). 

(e)  Eschscholtz,  Ueber  die  Bildung  der  rechten  Herzkammer  (Beitruge  zur  Naturkunde  ans  den 
Ostsee-Provinzen  Busslands  von  Pander,  Dorpat,  1820,  p.  148,  pi.  2,  fig.  7). 

(f)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  1. 1,  p.  512. 

(g)  Ràlhke,  Ueber  die  Herzkammer  der  Fische  (Meckel's  ArcMv  fût  die  Physiol.,  1826,  t.  1; 
p.  152. 

(h)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  210. 
- —  Ralhke,  loc.  cit. 

—  Cuvier,  loc.  cit. 


CHEZ    LES    POISSONS.  321 

Le  volume  du  ventricule,  comparé  à  celui  du  corps  de  l'Ani- 
mal, varie  beaucoup  chez  les  divers  Poissons,  et,  d'après  les 
observations  recueillies  par  Broussonnet,  Tiedemann  et  Mec- 
kel,  il  paraîtrait  y  avoir,  en  général,  un  certain  rapport  entre  le 
développement  de  cet  organe  et  l'activité  du  travail  respiratoire 
ou  le  degré  de  puissance  de  l'appareil  locomoteur.  Ainsi,  chez 
les  Poissons  volants,  qui,  de  tous  les  Animaux  de  cette  classe, 
sont  ceux  dont  les  mouvements  musculaires  sont  les  plus  ra- 
pides et  les  plus  violents,  le  cœur,  dépouillé  de  ses  parties 
accessoires,  représente  à  peu  près  les  ~  &n  P°ids  total  du 
corps,  tandis  que  chez  la  Carpe  et  les  autres  Cyprins,  ce  viscère 
ne  constitue  qu'environ  -^  du  même  poids  (1). 

Le  bulbe,  ou  chambre  antérieure  du  cœur,  consiste  en  un  Buibe  artériel. 
renflement  de  la  base  du  gros  vaisseau  qui  naît  du  ventricule 


tiellement  en  deux  loges  par  une 
cloison  charnue  qui  part  de  sa  base  et 
se  dirige  vers  l'orifice  auriculo-ven- 
triculaire,  mais  ne  l'atteint  pas,  et  se 
termine  sur  un  tubercule  fibro-carli- 
lagiueux  auquel  se  fixent  aussi  quel- 
ques brides  venant  de  la  cloison  auri- 
culaire (a). 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  quel- 
ques Poissons  des  brides  charnues  en 
très  grand  nombre  occupent  Tinté- 
rieur  du  ventricule  et  peuvent  même 
diviser  incomplètement  sa  cavité  en 
deux  étages ,  disposition  qui  a  été 
constatée  chez  les  Trigles  et  quelques 
autres  espèces  par  Treviranus  ;  mais 
les  compartiments  ainsi  formés  n'ont 
rien  de  particulier  clans  leurs  fonc- 
tions et  ne  méritent  en  aucune  façon 
les  dénominations  de  ventricule  droit 


et  de  ventricule  gauche  qui  leur  ont 
été  données  par  cet  anatomiste  distin- 
gué (b). 

(1)  Les  pesées  faites  par  la  plupart 
des  anatomistes  sont  peu  comparables 
entre  elles,  parce  que  tantôt  l'intestin 
avait  été  vidé  ainsi  que  l'ovaire,  tan- 
dis que  d'autres  fois,  l'abdomen  était 
plus  ou  moins  chargé  d'œufs  ou  de 
matières  alimentaires.  Mais  les  re- 
cherches de  Meckel ,  qui  paraissent 
avoir  été  faites  avec  assez  de  soin, 
tendent  à  montrer  que  les  variations 
dans  le  volume  du  cœur  se  lient  à 
certaines  différences,  soit  dans  l'âge, 
soit  dans  la  manière  de  vivre  des 
Poissons.  Pour  plus  de  détails  à  ce 
sujet,  on  peut  consulter  la  Monogra- 
phie de  M.  Tiedemann  (c)  et  VAnato-^ 
mie  comparée  de  Meckel. 


(a)  Hyrtl,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Académie  de  Bohême,  1845,  t.  V,  p.  639,  pi.  i,  %.  3), 

(b)  Treviranus,  Beobach.  iiber  die  Organe  des  Blulumlaufs  und  einige  andere,  damit  in  Ver- 
bindung  stehende  Theile  bel  den  Âmpftibïeh,  Fischen  und  Wirbellosenthieren  (Beobachlungen 
aus  der  Zootomie  und  Physiologie,  1839,  t.  I,  p.  7,  pi.  2,  fig.  10  à  13). 

(c)  Anatomie  des  Fischhei'xens,  p.  (3. 


322  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

et  qui  se  dirige  en  avant.  Le  volume  de  cette  troisième  chambre 
cardiaque  est  moins  considérable  que  celui  des  deux  autres  ; 
quelquefois  même  elle  ne  se  développe  pas  (IV;  mais,  en 
général,  elle  est  pyriforme.  Ses  parois  sont  garnies  de  fibres 
musculaires  assez  puissantes  chez  quelques  Poissons  ;  chez  la 
plupart,  cependant,  elles  ne  présentent  guère  que  des  faisceaux 
de  tissu  élastique,  et  c'est  à  raison  de  son  élasticité  plutôt  que 
de  ses  contractions  actives  que  ce  réservoir  pousse  le  sang  en 
avant  pendant  que  le  ventricule  est  en  repos  (2). 


(1)  Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  le 
bulbe  manque  chez  les  Cyclostomes. 

Duvernoy  a  trouvé  que  chez  la  Chi- 
mère arctique  le  bulbe  artériel  manque 
également,  ou  plutôt  n'est  représenté 
que  par  une  légère  dilatation  de  la 
portion  correspondante  de  l'artère  qui 
sort  du  cœur  pour  se  rendre  aux  bran- 
chies (a). 

Chez  les  Plagiostomes,  le  bulbe  est 
caractérisé  par  la  structure  muscu- 
laire de  ses  parois  ;  mais  en  géné- 
ral il  est  cylindrique  et  à  peine 
élargi  (b).  Chez  les  Cyprins,  au  con- 
traire, il  est  très  renflé  (c). 

('2)  M.  Briïcke  a  publié  récemment 
des  observations  intéressantes  sur  la 
structure  intérieure  du  bulbe  aortique 
de  divers  Poissons,  et  il  pense  qu'en 
général  les  parois  de  ce  réservoir  ne 
sont  pas  pourvues  de  fibres  muscu- 
laires. 

Celles-ci   sont    bien    caractérisées 


chez  l'Esturgeon  et  impriment  au 
bulbe  des  mouvements  de  contraction 
indépendants  de  ceux  du  cœur  ;  mais 
chez  les  Poissons  osseux  le  bulbe  aor- 
tique, après  s'être  laissé  fortement  dis- 
tendre par  le  sang  au  moment  de  la 
systole  du  ventricule,  revient  seule- 
ment sur  lui-même  et  ne  paraît  pas 
avoir  une  tunique  charnue  bien  déve- 
loppée. Les  fibres  élastiques  qui  revê- 
tent intérieurement  ses  parois  sont 
disposées  en  faisceaux  entrecroisés  et 
font  plus  ou  moins  saillie  dans  son 
intérieur  ;  quelquefois  ils  acquièrent 
un  très  grand  développement  et  y 
constituent  un  tissu  caverneux.  Celle 
disposition  est  très  marquée  dans  les 
genres  Cyprinus,  Tinca,  Abramis  et 
Chondrostoma  (cl)  ;  elle  l'est  aussi, 
mais  à  un  moindre  degré,  dans  les 
genres  Barbus  et  Leuciscus  (e) ;chez  la 
plupart  des  Poissons,  et  notamment 
chez  le  Brochet  et  le   Silure  (f) ,  la 


[a)  Duvernoy,  Sur  deux  bulbes  artériels  faisant  fonction  de  cœurs  accessoires,  qui  se  voient 
dans  les  artères  innommées  de  la  Chimère  arctique  (Ann.  des  sciences  nat.,  2e  série,  t.  VIII, 
p.  38,  pi.  3  A,  fig.  2). 

(6)  Voyez  les  figures  du  cœur  de  divers  Squales  ou  Raies,  dans  la  Monographie  de  Tiedemann 
(Anat.  des  Fischher zens,  pi.  1  et  2). 

(c)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  52  et  55. 

(d)  Briicke,  Beitrdge  sur  vergleichenden  Anatomie  und  Physiologie  des  Gefciss -System,  (Deuk- 
schriften  der  Akad.  der  Wissenschaften  au  Wien,  1 852,  t.  III,  p.  265). 

(e)  Briicke,  loc.cit.,  pi.  25,  lig.  21. 
(/')  Idem,  ibid.,  pi.  25,  lig.  18  et  19. 


CHEZ    LES    POISSONS.  323 

Enfin,  l'orifice  qui  en  forme  l'entrée  est  pourvu  de  valvules 
qui  sont  disposées  de  façon  à  empocher  le  reflux  du  sang  (1),  et 
souvent  on  trouve  des  replis  analogues  à  l'extrémité  antérieure 
de  ce  réservoir  contractile,  ou  même  dans  presque  toute  sa 
longueur. 

Le  premier  de  ces  modes  d'organisation  est  dominant  chez 
les  Poissons  osseux  ordinaires;  le  second  ne  s'ohserve  que  chez 
les  Plagiostomes  et  les  Poissons  dont  M.  Agassiz  a  formé  un 
ordre  particulier  sous  le  nom  de  Ganoïdes  (2).  Mais  il  est  à 


structure  des  parois  du  bulbe  est  au 
contraire  assez  simple. 

M.  Leydig  a  trouvé  que  chez  les 
Poissons  Ganoïdes  ,  les  Chimères,  les 
Plagiostomes  et  les  Lepidosiren  ,  de 
même  que  chez  les  Batraciens ,  le 
bulbe  est  pourvu  de  fibres  musculaires 
striées  ;  tandis  que  chez  les  Poissons 
osseux  cet  organe  ne  paraît  avoir  que 
des  fibres  musculaires  lisses  dont  les 
contractions  sont  toujours  lentes  et  ne 
se  produisent  pas  d'une  manière  rhytb- 
mique  (a). 

(1)  Ces  valvules  ventriculo-aorti- 
ques  manquent  chez  le  Lepidosiren 
paradoxa  (6).  Elles  sont  formées  par 
des  replis  de  l'endocarde ,  et  chez  les 
Ganoïdes  et  les  Squales  elles  sont  ren- 
forcées par  des  fibres  élastiques  logées 
dans  leur  épaisseur  (c). 

(2)  M.  3.  Millier,  qui  a  été  le  premier 
à  appeler  l'attention  des  naturalistes 
sur  ce  caractère  anatomique  des  Ga- 
noïdes, le  considère  comme  étant  ab- 


solu (d).  Mais  M.  Vogt  a  trouvé  que 
l'appareil  valvulaire  du  bulbe  est 
simple  chez  diverses  espèces  très 
voisines  de  VAmia,  où  ces  valvules 
sont  cependant  multiples  (e). 

Chez  la  plupart  des  Poissons  osseux 
il  n'existe  qu'une  seule  paire  de  ces 
valvules  à  l'entrée  du  bulbe  arté- 
riel. Ce  sont  deux  replis  semi-lunaires 
de  la  tunique  interne  du  cœur ,  dont 
la  concavité  est  dirigée  en  avant  et 
dont  les  bords  libres  se  rencontrent 
lorsque  le  sang  les  pousse  vers  le  ven- 
tricule. M.  Tiedemann  a  donné  de  très 
bonnes  figures  de  ces  organes  chez  la 
Carpe  et  le  Salmo  hucho  (f). 

M.  Millier  a  dressé  une  liste  assez 
longue  des  espèces  où  ce  caractère 
anatomique  a  été  constaté  (g). 

Chez  le  Poisson  lune  [Orthragoriscus 
mola),  le  cercle  valvulaire  se  compose 
de  quatre  replis  semi-lunaires,  dont 
deux  grands  et  deux  petits  (h). 

Evrard  Home  a  avancé  que  chez  la 


(a)  Leydig,  Handbuch  der  Histologie,  p.  410. 

(6)  Hyrtl,  Lepidosiren  paradoxa  (Mém.  de  l'Acad.  de  Bohême,  t.  V,  p.  639). 

(c)  Leydig,  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  112. 

(d)  Miiller,  Mém.  sur  les  Ganoïdes  (Ann.  des  sciences  nat.,  1845;  3*  série,  t.  IV,  p.  13). 

le)  Vogt,  Observ.  sur  les  caractères  qui  servent  à  la  classification  des  Poissons  Ganoïdes  (Ann. 
des  sciences  nat.,  1845,  t.  IV,  p.  60). 

If)  Voyez  Tiedemann',  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  54  et  18. 

(g)  J.  Miiller,  Op.  cit.,  p.  16. 

(h)  Wellenberg,  Observ.  anat.  de  Orthragorisco  mola,  pi.  25,  fig.  4. 


3"2^  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

noter  que  lorsque  ces  valvules  sont  très  nombreuses,  ainsi  que 
cela  se  voit  chez  le  Lépisostée,  où  l'on  en  compte  quinze,  leurs 
bords  se  correspondent  moins  exactement  que  là  où  il  n'y  en  a 


Baudroie  (Lophius  piscatorius)  le 
bulbe  n'est  pas  organisé  de  la  même 
manière  que  chez  les  autres  Poissons 
osseux  (a)  ;  mais  les  observations  de 
Hunter  (6)  et  de  Meckel  (c)  contredi- 
sent ses  assertions  à  ce  sujet. 

Dans  l'ordre  des  Plagiostomes,  les 
valvules  du  bulbe  sont  multiples.  Chez 
quelques  Poissons  de  ce  groupe,  il  en 
existe  deux  rangées,  composées  cha- 
cune de  trois  replis  semi-lunaires,  et 
placées,  l'une  à  l'entrée,  l'autre  à  la 
sortie  de  cette  dilatation  artérielle. 
Cette  disposition  se  voit  chez  divers 
Squales  ,  tels  que  le  Milandre,  ou 
Gallus  communis  (d),  et  la  petite  Rous- 
sette „  ou  Scyllium  catulus  (e)  ;  mais 
dans  d'autres  espèces  de  la  même  fa- 
mille, l'appareil  valvulaire  se  com- 
plique davantage,  et  ces  appendices 
membraneux  forment  trois  cercles 
placés  à  la  file.  Ce  dernier  mode  d'or- 
ganisation se  voit  chez  la  grande  Rous- 
sette ,  ou  Scyllium  canicula  (f) ,  et 
le  Requin  renard  ,  ou  Carcharias 
vulpes  (g). 

Chez  le  Marteau  (Zygœna malleus) , 
il  y   a   aussi  trois  rangées  de    val- 


vules ;  mais  celles  de  la  rangée  posté- 
rieure sont  au  nombre  de  cinq,  tan- 
dis que  celles  des  autres  rangées  sont, 
comme  d'ordinaire  ,  au  nombre  de 
trois  (h). 

11  est  aussi  à  noter  que  chez  les  Pla- 
giostomes le  bord  antérieur  de  ces  val- 
vules présente  d'ordinaire  un  petit 
renflement  en  forme  de  bouton,  et 
qu'une  bride  tendineuse  s'étend  sou- 
vent de  ce  bord  vers  la  partie  anté- 
rieure des  parois  du  bulbe,  de  façon 
à  maintenir  plus  solidement  ces  replis 
dans  une  position  normale  à  l'axe  du 
canal,  lorsque  le  sang  tend  à  les  re- 
fouler en  arrière. 

Dans  la  famille  des  Raies,  le  nom- 
bre des  valvules  devient  en  général 
plus  considérable.  Quelquefois  il 
n'existe  que  trois  rangées  de  ces  re- 
plis semi-lunaires:  chez  la  Torpille  (?'), 
et  le  Céphaloptère  (j),  par  exemple. 
Mais  en  général  il  y  en  a  davantage  réu- 
nis en  trois  ou  quatre  rangées,  comme 
dans  les  genres  Hexanthus ,  Heptan- 
chus  ,  Centrophorus  et  Trygon  (le)  ; 
chez  les  Raies  proprement  diles,  il  en 
existe  cinq  rangées,  comme  cela  se 


(a)  Home,  Philos.  Tram.,  18]  3,  p,  234. 

(b)  Voyez  Catalogue  of  the  Physiolog.  Séries  of  Comp.  Anat.  of  tlie  Mus.  of  the  Collège  of 
Surgeons,  vol.  H,  p.  36. 

(c)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  235. 

(d)  Hunter,  voyez  Catal.  of  the  Mus.  of  the  Coll.  of  Surgeons,  t.  Il,  p.  39. 

(e)  Meckel,  Op.  cit.,  t.  IX,  p.  229. 

(f)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  10. 
{g)  Meckel,  Op.  cit.,  t.  IX,  p.  229. 

(h)  Idem,  ibid.,  p.  230. 

(i)  1.  Davy,  Experiments  and  Observations  on  the   Torpédo  (Researches ,  Physiologie  al  and 
Anatomical,  t.  1,  p.  91). 
(j)  Hunter,  loc.  cit.,  p.  38. 
(k)  Owen,  Lectures  on  the  Comp.  Anat.  ofVertebr.  Animais  :  Fishes,  p.  257. 


CHEZ    LES    POISSONS. 


325 


qu'une  seule  paire,  et  par  conséquent  elles  remplissent  moins 
bien  leurs  fonctions. 

Il  est  aussi  à  noter  que  le  cœur  reçoit  des  filets  nerveux 
provenant,  soit  des  rameaux  pharyngiens  des  pneumogastriques, 
soit  du  sympathique  (1). 


voit  chez  la  Raie  commune,  ou  Rata 
rubus  (a),  et  la  Raie  blanche,  ou  Baia 
balis  (b). 

Enfin,  c'est  parmi  les  Poissons  Ga- 
noïdes  que  le  nombre  des  valvules  du 
bulbe  est  le  plus  variable  et  s'élève  le 
plus  haut. 

Chez  I'Estdrgeon  (Acipenser  stu- 
rio)  il  existe  trois  cercles  valvulaires 
qui  sont  composés  ordinairement  de 
quatre  valvules  chacun  (c)  ;  mais  quel- 
quefois on  trouve  cinq  valvules  à  la 
rangée  antérieure  (d),  etl'existence  de 
quatre  rangées  a  été  constatée  chez  le 
Sterlet  (ou  Acipenser  ruthenus)  (e). 

Chez  le  Polyodon,  ou  Spatularia,  il 
y  a  trois  rangées  de  valvules,  comme 
chez  l'Esturgeon  (/). 

Chez  I'Amia,  l'entrée  du  bulbe  aor- 
tique  est  garnie  de  deux  rangées  de 
valvules  sigmoïdes  ;  l'un  de  ces  cercles 
est  composé  de  six  valvules,  l'autre  de 
cinq.  Enfin,  l'extrémité  antérieure  du 
bulbe  est  garnie  de  deux  rideaux  mus- 
culaires qui  tiennent  lieu  d'une  troi- 
sième rangée  de  valvules  (g). 

Chez  le  Polypterus,  M.  Millier  a 
trouvé  dans  l'intérieur  du  bulbe  trois 
séries  longitudinales  composées  cha- 


cune de  neuf  valvules,  et  chez  le 
Lépisostée  le  même  naturaliste  a 
compté  cinq  séries  longitudinales  de 
huit  valvules  chacune  (h).  Il  est  aussi 
à  noter  que  ces  valvules  sigmoïdes  sont 
garnies  de  freins,  excepté  celles  de  la 
rangée  antérieure,  qui  sont  les  plus 
développées. 

Le  Lepidosiren  paradoxa  s'éloigne 
des  Poissons  par  la  structure  du  bulbe 
aortique  aussi  bien  que  par  l'existence 
de  deux  oreillettes  et  d'un  commen- 
cement de  division  dans  la  cavité  du 
ventricule.  En  effet,  cette  portion  ba- 
silaire  de  l'aorte  est  contournée  en 
spirale  et  présente  dans  son  intérieur 
deux  replis  longitudinaux  disposés  de 
la  même  manière,  qui  se  rencontrent 
par  les  bords  et  qui  tendent  à  diviser 
sa  cavité  en  deux  canaux,  dont  l'un 
est  en  rapport  avec  les  vaisseaux  pul- 
monaires, l'autre  avec  la  portion  bran- 
chiale du  système  artériel  qui  en 
part  («).  Nous  verrons  bientôt  que 
chez  les  Batraciens  celte  disposition  se 
perfectionne  davantage. 

(1)  Ces  nerfs  s'anastomosent  avec  un 
ganglion  situé  au  bord  de  la  valvule 
auriculaire,  et  forment  dans  les  parties 


(a)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig1.  5. 

(b)  Meckel,  Anatomie  comparée,  p.  231. 

(c)  Carus,  Baer,  Meckel, 

(d)  Hunier,  Calai,  of  the  Mus.  of  the  Collège  of  Surgeons,  t.  II,  p.  38. 

(ei  Kœlrcuter,  Oïserv.  splanch.  in  Aapenseris  rulheni  anat.    (Novi  Comment.  Acad.  Pelrop., 
t.  XVI,  p.  524,  pi.  14,  fig.  5). 

(f)  Yogi,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  3°  série,  t.  IV,  p.  60,  pi.  9,  ûg.  2). 

(g)  J.  Wùller,  Ueber  den  Bau  und  die  Grenzen  der  Canoiden ,  pi.  5,  fig.  2  (Mém.  de  Berlin 
pour  1844). 

(h)  Mùler,  Mém.  sur  les  Ganoïdes  (Ann.  des  sciences  nat.,  p.  14). 
(i)  Hyrtl,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Bohême,  1845,  t.  V,  p.  640). 


326  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

syst&me  §  7.  —  Le  cœur  ainsi  constitué  donne  naissance  à  un  gros 
vaisseau  médian  qui  se  dirige  en  avant,  et  qui  est  le  tronc  d'ori- 
gine de  tout  le  système  artériel.  Chez  le  Poisson  adulte,  il  est 
assez  difficile  de  saisir  au  premier  abord  la  disposition  de 
l'ensemble  de  cette  portion  de  l'appareil  circulatoire  ;  mais , 
chez  l'embryon ,  cela  est  au  contraire  fort  aisé,  et  la  connais- 
sance des  modifications  qui  s'y  effectuent  par  les  progrès  du 
développement  facilite  singulièrement  l'étude,  non- seulement 
de  l'angiologie  dans  cette  classe,  mais  aussi  des  rapports  que 
les  vaisseaux  de  ces  Animaux  peuvent  avoir  avec  ceux  des 
Vertébrés  supérieurs.  En  effet ,  le  système  artériel  affecte 
d'abord  la  même  disposition  chez  tous  ces  êtres,  et  c'est  seule- 
ment par  suite  des  progrès  du  travail  organique  que  les  par- 
ticularités propres  aux  divers  types  secondaires  de  ce  grand 
embranchement  zoologique  s'y  manifestent.  Cela  est  si  vrai 
que,  pour  acquérir  les  notions  dont  nous  avons  besoin  en  ce 
moment,  nous  pourrions  choisir  comme  exemple  le  système 
vasculaire  naissant  d'un  Reptile,  d'un  Oiseau  ou  d'un  Mammi- 
fère aussi  bien  que  celui  d'un  Poisson,  et  que  tout  ce  que  je 
vais  dire  de  ce  dernier  est  également  applicable  aux  autres. 
Mode  Ainsi,  chez  l'embryon  du  Poisson,  de  même  que  chez  celui 

dedu05tèmè°n  du  Poulet,  du  Chien  ou  du  Lapin  (1),  on  voit  d'abord  naître  de 
a0chez"e     l'extrémité  antérieure  du  cœur  un  tronc  vasculaire  qui  a  reçu 
le  nom  d'aorte  ascendante,  et  qui  se  divise  à  droite  et  à  gauche 

voisines   du    cœur    un   réseau    très  leraent  de  l'organogénie  des  Verté- 

viche  (ff).  brés,    et  je  me  bornerai  à  indiquer 

(1)  Nous  reviendrons  sur  l'étude  du  ici  quelques-unes  des  figures  où  l'on 

développement  des  vaisseaux  sanguins,  peut   voir   la  disposition  décrite  ci- 

lorsque  nous  nous  occuperons  spécia-  dessus  (6). 

{a)  Leydig,  Lehrbuch  der  Histologie,  p.  413. 

(&)  Voyez  :  Baer,  Untersuchungen  ûber  die  Entwickelungsgeschichte  der  Fische,  -1835,  fig.  20 
et  22. 

—  Rathke,  Bildungs-und  Entwiekehmgs-Geschichte  des  Blennius  viyiparus  (Abhandlungen  %ur 
Bildungs-und  Entw.  Gesch.  des  Menschen  und  Thiere,t.  II,  pi.  3,  fig.  22-24). 

—  Vogt,  Embryologie  des  Salmones  (Histoire  naturelle  des  Poissons  d'eau  douce  d'Europe, 
par  Agassiz,  pi.  3,  fig.  71,  72,  86  ;  pi.  h,  fig.  90  et  91). 


l'embryon. 


CHEZ    LES    POISSONS.  327 

en  un  certain  nombre  de  branches  courbées  en  forme  de  crosses 
ou  d'arcs.  Ces  branches  se  portent  en  dehors ,  contournent 
le  tube  digestif,  et  se  réunissent  ensuite  au-dessus  de  cet  organe, 
de  façon  à  former  de  chaque  côté  du  corps  du  jeune  embryon  en 
voie  de  formation  un  tronc  récurrent  qui  va  s'anastomoser  avec 
son  congénère  pour  constituer,  sur  la  ligne  médiane,  un  vaisseau 
impair  situé  du  côté  dorsal  du  canal  alimentaire.  Cette  artère  se 
dirige  d'avant  en  arrière,  fournit  des  branches  aux  diverses 
parties  de  l'organisme,  et  porte  le  nom  d'aorte  dorsale.  Ainsi 
la  portion  aortique  du  système  artériel  se  compose  de  trois 
parties  :  un  tronc  d'origine,  ou  aorte  ascendante;  un  tronc 
récurrent,  ou  aorte  dorsale,  et  deux  séries  d'arcs,  ou  crosses, 
qui  réunissent  ces  troncs  entre  eux  et  qui  sont  à  la  fois  les 
branches  du  premier  et  les  racines  du  second. 

Chez  quelques  Poissons  dont  l'étude  nous  occupera  bientôt 
d'une  manière  plus  spéciale,  les  crosses  aortiques  postérieures, 
ou  arcs  vasculaires  les  plus  rapprochés  du  cœur,  ne  subissent 
aucune  transformation  ultérieure,  et  garnissent,  chez  l'adulte, 
le  bord  inférieur  des  derniers  arcs  branchiaux.  Mais  chez  tous 
les  Animaux  de  cette  classe,  plusieurs  de  ces  branches  transver- 
sales, et,  en  général,  même  toutes,  ne  tardent  guère  à  se  garnir 
de  ramuscules  qui  se  répandent  dans  les  feuillets  pectiniformes 
dont  l'appareil  branchial  se  compose,  et  alors  la  communica- 
tion entre  la  portion  cardiaque  des  crosses  aortiques  et  la  por- 
tion dorsale  ou  abdominale  de  ces  mêmes  crosses  cesse  d'être 
directe ,  et  n'a  lieu  que  par  l'intermédiaire  du  réseau  capillaire 
des  branchies. 

Il  en  résulte  que  dans  la  forme  typique  de  l'appareil  circulatoire      Aorîe 

1  «/ii  i  j.  ascendante, 

des  Poissons,  la  première  portion  du  système  aortique  ne  dis-        ™ 
tribue  le  sang  que  dans  les  branchies,  et  constitue  un  tronc  ra-    1)rancliiale- 
meux  auquel  les  anatomistes  donnent  le  nom  d'artère  branchiale. 
§  8.  —  Les  variations  qui  s'observent  dans  la  disposition 
de  cette  portion  cardio-branchiale  du  système  artériel  dépendent 


328  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

toutes,  soit  du  nombre  des  crosses  aortiques,  soit  de  l'indé- 
pendance ou  de  la  centralisation  plus  ou  moins  grande  de  ces 
vaisseaux  vers  leur  origine. 
Arcs  aoriiques,  Les  crosses  aortiques  se  constituent  successivement  d'avant 
en  arrière,  et  l'on  en  compte  jusqu'à  sept  paires  (1);  mais 
il  est  rare  que  tous  ces  vaisseaux  aient  une  existence  perma- 
nente, et,  le  plus  ordinairement ,  les  premiers  formés  s'atro- 
phient et  disparaissent  avant  que  les  derniers  se  soient  bien 
constitués;  enfin  d'autres  fois  quelques-uns  de  ceux-ci  pa- 
raissent avorter,  de  sorte  que,  chez  l'Animal  parfait,  le  nombre 
de  ces  arcs  vasculaires  ne  dépasse  que  rarement  quatre  ou  cinq 
paires  (2). 


arlères 

branchiales 

propres. 


(1)  En  les  désignant  sous  des  numé- 
ros d'ordre ,  je  compterai  par  consé- 
quent d'avant  en  arrière,  et  ce  seront 
les  arcs  aortiques  les  plus  rapprochés 
du  cœur  qui  porteront  les  numéros 
les  plus  élevés, 

(2)  L'existence  de  sept  paires  d'arcs 
aortiques  dans  l'embryon  des  Poissons 
osseux  a  été  constatée  chez  la  Brème 
(Abrarnis  Blicca)  par  M.  von  Baer.  Le 
premier  correspondait  au  premier  arc 
hyoïdien,  c'est  à-dire  aux  cornes  de 
l'hyoïde  du  Poisson  adulte;  les  quatre 
suivants  reposaient  sur  les  quatre 
paires  d'arcs  branchiaux;  le  sixième 
appartenait  à  l'arc  pharyngien,  et  le 
septième  embrassait  la  partie  posté- 
rieure du  pharynx,  un  peu  en  arrière 
des  précédents  (a). 

M.  Vogl  n'a  distingué  que  six  paires 
de  ces  arcs  aortiques  chez  l'embryon 
de  la  Truite  palée,  et  la  crosse  hyoï- 
dienne correspondante  aux  cornes  de 


l'hyoïde,  qui  avait  été  la  première  à 
paraître,  s'était  atrophiée  avant  la  for- 
mation des  crosses  postérieures  qui 
correspondaient  aux  os  pharyngiens. 
Puis  cette  dernière  paire  d'arcs  vascu- 
laires s'est  atrophiée  à  son  tour,  et  le 
nombre  des  crosses  aortiques  s'est 
trouvé  réduit  à  quatre  paires  (6). 

Chez  l'embryon  des  Lamproies,  on 
voit  très  distinctement  les  sept  paires 
d'arcs  vasculaires  d'abord  à  l'état  de 
crosses  simples,  puis  se  garnissant  la- 
téralement de  franges  capillaires  pour 
constituer  les  branchies  (c).  Là  ces 
vaisseaux  suivent  donc  tous  une  mar- 
che ascendante  dans  leur  développe- 
ment, et  arrivent  également  à  la  forme 
typique  ;  tandis  que  chez  les  Poissons 
osseux,  le  premier  et  les  deux  der- 
niers ont  un  mode  de  développement 
récurrent,  et  finissent  par  disparaître 
pendant  que  les  quatre  intermédiaires 
se  perfectionnent. 


(a)  Baer,  Uiitersuchungen  iiber  die  EnUvickelungs-Geschichte  der  Fische,  p.  27. 

(b)  Vogt,  Embryologie  des  Salmones,  p.  226  (Histoire  naturelle  des  Poissons  d'eau  douce  de 
l'Europe  centrale,  par  Agassiz,  1842). 

(C)  M.  S.  Schulize  ,  Die  Entwickelungs-Geschichte  von  Petromyzon  Planeri ,  pi.  5,  %.  3,  et 
pi.  6,  fig.  1  (Natuurkundlge  Verhandelingenvan  de  Hollandsche  Maatschappij  des  Wetenschappen 
te  Harlem,  4  856). 


CHEZ    LES    POISSONS. 


329 


Effectivement,  dans  la  grande  division  des  Poissons  osseux, 
chaque  arc  branchial  reçoit  un  de  ces  vaisseaux,  et  en  général 
le  tronc  dont  ceux-ci  naissent  ne  fournit  pas  d'autres  bran- 
ches (1).  Il  y  a  par  conséquent  quatre  paires  de  crosses  ou 
artères  branchiales  propres. 

Chez  les  Plagiostomes,  ou  Sélaciens,  ordre  dans  lequel  le 
nombre  des  branchies  est  plus  considérable,  on  compte  toujours 
cinq  paires  de  ces  mêmes  artères. 

Enfin,  dans  l'ordre  des  Cyclostomes,  il  en  existe  six  ou  sept 
paires  (2). 


(1)  Chez  les  Esturgeons  et  les  au- 
tres Poissons  de  la  division  des  Ga- 
noïdes,  où  il  existe  à  la  face  interne 
de  l'opercule  une  branchie  acces- 
soire {a),  le  Lépisoslée,  par  exemple, 
on  trouve  l'analogue  de  la  première 
paire  d'artères  branchiales  propres 
des  Plagiostomes,  tandis  que  ces  vais- 
seaux manquent  chez  les  Poissons 
osseux  ordinaires.  11  y  a  par  consé- 
quent, chez  ces  Ganoïdes,  cinq  paires 
de  crosses  comme  chez  les  Plagio- 
stomes (6). 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  le  Po- 
lypterus  bison(c)  et  le  Spatularia(d), 
qui  prennent  place  dans  le  même 
groupe  zoologique,  mais  qui  n'ont  pas 
de  branchie  accessoire,  la  disposition 
du  système  vasculaire  est  encore  la 
même.  En  effet,  M.  Mùller  a  constaté 


l'existence  d'une  branche  artérielle 
qui  se  détache  de  chacune  des  artères 
branchiales  propres  de  la  première 
paire  pour  se  rendre  à  l'opercule,  et 
qui  représente  soit  l'artère  de  la  bran- 
chie accessoire  des  Esturgeons,  soit 
la  crosse  aortique  antérieure  chez  les 
Sélaciens. 

La  Chimère  arctique  présente  aussi 
cinq  paires  d'artères  branchiales  pro- 
pres (e). 

(2)  Chez  le  Pricka  (Pteromyzon 
fluviatilis)  (/],  et  chez  le  Edellostoma 
heterosoma  ,  il  y  a  sept  de  ces  vais- 
seaux d'un  côté,  et  six  seulement  de 
l'autre  ((/). 

Chez  le  Myxine  glutinosa,  il  n'y  en 
a  que  six  paires  (h). 

On  en  trouve  également  six  paires 
chez  les  Lepidosiren  (?'). 


(a)  Voyez  tome  II,  p.  237. 

(b)  Millier,  Ueber  den  Bau  und  die  Grenzen  des  Ganoiden  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin,  1844, 
p.  133,  pi.  2,  fig.  1. 

(c)  Millier,  Fernere  Bemerkungen  ùber  den  Bau  der  Ganoiden  (Bericht  der  Acad.  der  Wissensch. 
m  Berlin,  1846,  p.  69  et  suiv.). 

(d)  Mùller,  Ueber  den  Ban  und  die  Grenzen  der  Ganoiden,  pi.  5,  fig.  3. 

(e)  Duvernoy,  Note  sur  deux  bulbes  artériels,  etc.  (Ann.  des  sciences  nat.,    1837,  2«  série, 
t.  VIII,  pi.  3,  fig.  2). 

.   (f)  Railike,  Bemerkungen  ilber  den  innern  Bau  der  Pricke,  pi.  .3,  fig.  38  (1825). 
{g)  Voyez  Mùller,  Vergleichende  Anatomie  der  Myxiwidcn,  pi.  7,  fig1.  3. 
(h)  Idem,  ibid.,  pi.  7,  fig'.  6. 
li)  Bischoff,  Lepidosiren  paradoxa  (Ann.  des  sciences  nat.,  2e  série,  t.  XIV,  pi.  9,  fig.  3). 


330  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Mode  Dans  quelques  cas ,  l'artère  branchiale  commune  se  bifurque 

de  l'artère  presque  aussitôt  après  sa  naissance,  et  les  crosses  du  côté  droit 
sont  complètement  séparées  de  celles  du  côté  gauche  ;  d'autres 
fois ,  les  deux  troncs  longitudinaux  résultant  de  cette  bifurca- 
tion ne  sont  distincts  que  dans  la  moitié  antérieure  de  leur  lon- 
gueur, et  se  trouvent  confondus  en  un  vaisseau  médian  impair 
dans  leur  partie  postérieure  ou  cardiaque;  mais  le  plus  souvent 
cette  espèce  de  centralisation  s'étend  dans  toute  leur  longueur, 
et  un  seul  tronc  médian  donne  naissance  à  tous  les  arcs  vas- 
eulaires  ou  artères  branchiales  secondaires  (1).  Enfin,  ces  der- 
nières peuvent  être  indépendantes  dès  leur  origine ,  ou  bien 
se  trouver  d'abord  réunies  entre  elles  en  nombre  plus  ou  moins 
grand,  et  affecter  divers  modes  de  groupement. 

(1)  Comme  exemple  de  cette  cen-  division  analogue   et  comme   repré- 

tralisation  complète  dont  résulte  un  sentant   un  état  intermédiaire  entre 

tronc  branchial  impair  dans  toute  la  les  deux   formes    dont  je    viens  de 

longueur  de  la  région  hyoïdienne,  je  parler. 

citerai  la  Myxine  (a)  ;  tandis  que  chez  Chez  les   Lepidosiren,  la  division 

une  autre  espèce  de  la  même  famille ,  médiane  de  ce  système  de  vaisseaux 

le  Bdellostoma  helerotrema,   l'artère  se  prolonge  jusque  dans  le  voisinage 

branchiale  commune  n'est  simple  que  du  cœur,  de  sorte  que  le  tronc  aortique 

dans  la  moitié  postérieure  de  cette  ré-  basilaire  ou    branchial  commun  est 

gion,  et  se  trouve  représentée  anté-  extrêmement  court ,  et  les  arcs  ou 

rieurement    par  une  paire  d'artères  crosses  naissent  presque  directement 

branchiales  communes  (6).  Le  mode  du  bulbe  cardiaque  (d). 

d'organisation  qui  se  remarque  chez  Une    disposition    analogue   se  re- 

les  Raies,  les  Squales  et  divers  Pois-  marque  chez  le  Gymnote  (e)  et  chez  le 

sons  osseux ,  où  les  deux  premières  Gymnarchus  niloticus  ,  où  le  bulbe 

artères  branchiales  propres  de  chaque  commun  donne  directement  naissance 

côte    naissent    d'un   tronc   commun  à  six  artères  branchiales  dont    deux 

provenant   de  la    branchiale  primi-  se  bifurquent  de  façon  à  constituer, 

tlve  ou  impaire  (c),  peut  être  con-  comme  d'ordinaire ,  quatre  paires  de 

sidéré  comme  une  conséquence  d'une  ces  vaisseaux  {f). 

(a)  Miiller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  erster  Theil,  pi.  7,  fig.  6. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  7,fig.  3. 

(c)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1  ;  pi.  2,  fig.  8,  9  ;  pi.  4,  fig.  40. 

(d)  Bischoff,  Lepidosiren  paradoxa  (Ann.  des  se.  nat.,  2"  série  ,  t.  XIV,  pi.  9,  fig.  3-5J. 

(e)  Délie  Chiaje,  Dissert  suW  anatom.  umana  comparata  e  pathol.,  t.  I,  pi.  46. 

(f)  F6rg  et  Duvernoy,  Remarques  sur  l'appareil  pulmonaire  du  Gymnarchus  niloticus   (yl)i?2. 
des  sciences  nat.,  1853,  3'  série,  t.  XX,  p.  154,  157,  pi.  1,  fig.  5  et  6). 


CHEZ    LES    POISSONS.  331 

Ainsi,  chez  quelques  Poissons  osseux,  tels  que  les  Anguilles, 
toutes  les  crosses  ou  artères  branchiales  propres  naissent  sépa- 
rément d'un  tronc  médian  et  impair ,  ou  artère  branchiale 
commune  (1). 

Chez  la  Carpe  et  le  Brochet,  il  n'en  est  plus  de  même  :  les 
crosses  des  deux  premières  paires  sont  confondues  à  leur  base, 
et  par  conséquent  l'artère  branchiale  commune  ne  donne  nais- 
sance qu'à  trois  paires  de  branches  ,  savoir,  les  deux  paires 
d'artères  branchiales  propres  destinées  aux  troisième  et  qua- 
trième arcs  branchiaux,  et  une  paire  d'artères  branchiales  in- 
termédiaires qui  bientôt  se  bifurquent  pour  constituer  les  artères 
branchiales  propres  des  deux  premières  paires  (2). 

Chez  les  Perches ,  les  Saumons ,  les  Truites  et  beaucoup 
d'autres  Poissons  osseux  ,  le  nombre  des  divisions  secon- 
daires du  système  artériel  cardio  -  branchial  est  encore  le 
même  ;  mais  le  mode  de  groupement  des  artères  branchiales 
propres  est  différent  :  celles  des  deux  premières  paires  naissent 
isolément,  et  ce  sont  celles  des  deux  paires  postérieures  qui 


(1)  Ces  vaisseaux,  au  nombre  de  Tarière  branchiale  commune,  près  du 
quatre  paires,  naissent  à  égale  dis-  bulbe.  Les  artères  branchiales  propres 
lance  les  uns  des  autres,  et  la  portion  de  la  première  paire  naissent  beau- 
indivise  de  l'artère  branchiale  com-  coup  plus  en  avant  de  l'extrémité  an- 
muneest  très  longue.  Ghezje  Chimœra  térieure  du  tronc  médian  (6). 
monstrosa,  il  y  a  cinq  paires  d'artères  (2)  Voyez  la  ligure  des  vaisseaux 
branchiales  propres  qui  sont  toutes  sanguins  de  la  Carpe,  donnée  par  Du- 
indépendantes  dès  leur  sortie  du  verney  (c),  et  celle  du  cœur  du  Bro- 
ironc  médian  commun  (a).  chet,  par  M.  Tiedemann  (cl). 

Chez  le  Polypterus  Bichir,  les  trois  Le   mode    de   groupement  de  ces 

dernières  artères  branchiales  propres  vaisseaux  est  à  peu  près  le  même  chez 

de    chaque    côté    proviennent   d'un  le  Lépisostée. 
tronc  intermédiaire  qui  se  détache  de 

(a)Valeirtin,  Ueber  lias   Central-Nervensystem  und  die  Nebenherzen  der  Ghimsera  mousti'osa 
(Mûller's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol.,  1842,  p.  25,  pi.  2,  fig.  6). 

(b)  Mùllcr,  Ueber  den  Bail  und  die  Grenzen  dev  GanoideniMem.de  L'Acad.  de  Berlin,  1844, 
pi.  3,fig.  2). 

(c)  Duverney,  Œuvres  analomiques,  t.  H,  pi.  9,  lig-.  18  (1761). 

(d)  Tiedemann,  Anatomie  des  Fischherzens,  pi.  4,  fig.  46. 


332  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

de  chaque  côté  sont  réunies  à  leur  base  en  un  tronc  intermé- 
diaire (1). 

Enfin ,  chez  la  plupart  des  Poissons  de  la  famille  des  Raies , 
cette  jonction  basilaire  des  crosses  branchiales  est  portée  encore 
plus  loin,  et ,  bien  que  le  nombre  de  ces  vaisseaux  soit  plus 
considérable,  l'artère  branchiale  commune  ne  fournit  de  chaque 
côté  que  deux  troncs  secondaires  :  l'un  situé  postérieurement 
très  près  du  bulbe  aortique,  et  se  divisant  bientôt  pour  don- 
ner naissance  aux  artères  branchiales  propres  des  trois  der- 
nières paires  ;  l'autre  terminant  le  système  antérieurement,  el 
fournissant  les  artères  branchiales  propres  des  deux  premières 
paires  (2). 

D'autres  modifications  intermédiaires  se  remarquent  aussi 
chez  divers  Poissons ,  mais  n'offrent  pas  assez  d'importance 
pour  que  nous  nous  y  arrêtions  ici  (3) . 


(i)  Cette  disposition  a  été  très  bien  (3)  Ainsi,  chez  le  Squalus  mni- 

représentée  chez    le    Saumon,    par  cula,  où,  de  même  que  chez  les  autres 

Monro  (a),  et  chez  la  Truite,  par  Lau-  Sélaciens,    il  y  a  cinq  paires  d"ar- 

rillard  (6).  tères  branchiales    propres ,   le   tronc 

Il  est  aussi   à  noter  que  chez  la  principal  ou  impair  donne  naissance 

Truite  la  seconde  artère  branchiale  à  quatre   paires  de  branches  :  celles 

propre   naît    très    près    de    l'artère  de  la  paire  antérieure  se  bifurquent 

branchiale  intermédiaire  ,  qui  fournit  comme  chez  les  Raies  pour  former 

les  artères  branchiales  propresdesdeux  les  artères  branchiales    propres  des 

paires  postérieures,  de  façon  à  se  con-  deux  premières  paires  ;  celles  de  la 

fondre  presque  avec  ce  vaisseau  (c).  paire   suivante    sont   bien   isolées   à 

(2)  Ce   mode  de  conformation  se  leur  origine,  mais  celles  des  deux  cler- 

rencontre  chez  la  Raie  blanche  (Raid  nières    paires    naissent    presque  au 

bâtis),  dont  Monro  a  faitl'analomie  {d),  même  niveau ,  les  unes  au-dessus  des 

ainsi  que   chez  la  Raie  commune  (e)  autres  (g). 
et  la  Torpille  (f). 

(a)  Monro,  The  Structure  and  Physiology  of  Fishes,  pi.  26,  fis'.  1. 

(6)  Laurillard,  Atlas  des  Poissons,  dans  la  grande  édition  du  Règne  animal  de  Cuvier,  pi.  2, 
fig.  1  et  2. 

(c)  Voyez  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones  (loc.  cit.,  p.  116,  pl.L,  fig.  1). 

(d)  Monro,  Struct.  and  Anat.  of  Fishes,  pi.  1,  fig.  4. 

(e)  Tiedeinann,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1. 

(f)  Idem,  ibid.,  pi.  2,  fig.  8. 

(g)  Idem,  ibid.,  pi.  2,  fig.  9. 


CHEZ   LES   POISSONS.  333 

§9.  —  Les  artères  branchiales  propres  suivent  en  général  Artérioies 
le  bord  inférieur  des-  arcs  branchiaux  correspondants,  et  sont  "tiïSÏS! 
logées  dans  la  gouttière  dont  ces  os  sont  creusés.  Chemin  fai- 
sant ,  elles  fournissent  une  double  série  d'artérioles  destinées 
aux  appendices  lamelliformes  qui  garnissent  inférieurement  ces 
mêmes  arcs  ;  elles  diminuent  de  calibre  à  mesure  qu'elles  se 
divisent  de  la  sorte,  et  elles  se  terminent  à  l'extrémité  supérieure 
de  l'appareil  respiratoire  sans  y  avoir  aucune  communication 
directe  avec  les  portions  postbranchiales  du  système  artériel. 
La  totalité  du  sang  lancé  par  le  cœur  dans  l'artère  branchiale  se 
distribue  donc  aux  feuillets  branchiaux ,  et  les  artérioles  qui  le 
contiennent  forment  à  la  surface  de  ces  appendices  un  réseau 
capillaire  très  riche  à  l'aide  duquel  la  respiration  s'effectue. 

Ce  lacis  vasculaire  fournit  à  son  tour,  près  du  bord  externe  de 
chaque  lamelle  branchiale,  un  vaisseau  récurrent  qui  gagne  le     origine 
bord  inférieur  de  l'arc  branchial,  et  y  débouche  dans  un  système  épibranchiaies, 
de  vaisseaux  efférents  à  l'aide  desquels  le  sang  devenu  artériel      raSes 
continue  sa  route  pour  gagner  l'aorte  dorsale  et  se  distribuer     dorsale." 
dans  les  diverses  parties  de  l'organisme  (1).  Les  anatomistes 

(1)  Le  mode   de  distribution   des  rieure  de  l'arc  branchial,  et  se  trouve 

vaisseaux  sanguins  dans  les  feuillets  par  conséquent  immédiatement   au- 

branchiaux  des  Poissons  a  été  étudié  dessus  de  la  ligne  de  partage  des  deux 

par  Rosenthal,  Dœllinger,  Treviranus,  séries  de  feuillets  pectiniformes  dont 

M.  Alessandrini,  M.  Hyrtl  et  plusieurs  ces   arcs  sont  garnis.  Elle  envoie  à 

autres  anatomistes  (a),  chacun  de  ces  feuillets  une  artériole 

Chez  les  Poissons  osseux,  l'artère  qui  en  occupe  le  bord  interne,  et  qui 

branchiale  propre  longe,  comme  je  donne  à  son  tour  naissance  à  deux 

l'ai  déjà  dit,  le  milieu  de  la  face  infé-  séries  de  ramuscules.   Ceux-ci  s'en 

(a)  Rosenthal,  Ueber  die  Structur  der  Kiemen  (Verhandlungen  der  Gesellschaft  Naturforschen- 
dev  Freunde  %u  Berlin,  1829,  1. 1,  p.  1,  pi.  1,  fig.  1-4). 

—  Dœl'inger,  Ueber  die  Vertheilung  des  Blutes  in  den  Kiemen  der  Fische  (ilém.  de  l'Acad.  de 
Bavière,  1837,  t.  II,  p.  785,  pi.  I,  ùg.  3  et  4). 

—  Hyrtl,  Beob.  aies  der  Gebiete  der  vergl.  Gefdsslehre  (Medicinische  Jahrb.  des  Oesterreich. 
Slaates,  1838,  p.  235). 

—  Treviranus,  Bewegung  des  Bluts  in  den  Kiemen  (Beobachtungen  ans  der  Zootomie  und  Phy- 
siologie, 1839,  1. 1,  p.  8,  pi.  4,  flg.  17). 

—  Alessandrini,  Observationes  super  intima  branchianun  structura  Piscium  cartilagineorum 
{NoviComment.  Acad.  scient.  Bonon.,  t.  IV,  p.  329). 

—  Agassiz  et  Vogt,  Anat.  des  Salmones,p.  120,  pi.  0,  fig1.  1. 

—  Williams,  Organs  of  Respiration  (Todd's  Cyclopœdia  of  Anat.,  Supplem.,  1855,  p.  288). 


334  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

donnent  en  général  à  ces  vaisseaux  le  nom  de  veines  bran- 
chiales, parce  qu'ils  sont  jusqu'à  un  certain  point  comparables 
aux  veines  pulmonaires  qui,  chez  l'Homme  et  les  autres  Ver- 


détachent  presque  à  angle  droit  et 
se  portent  parallèlement  sur  les  deux 
laces  opposées  du  feuillet  auquel  ils 
appartiennent,  puis  se  divisent  chacun 
en  deux  ou  plusieurs  branches  prin- 
cipales dont  les  subdivisions  forment 
sur  la  surface  des  replis  transversaux 
de  la  membrane  branchiale  un  lacis 
de  capillaires  d'une  grande  délica- 
tesse. En  général,  il  y  a  une  de  ces 
artérioles  transversales  pour  chacun 
des  replis  ou  rides  du  feuillet,  et,  sui- 
vant M.  Hyrtl,  ces  petits  vaisseaux 
offriraient  à  leur  base  un  renflement 
bulbeux  (a).  Du  côté  opposé,  c'est-à- 
dire  vers  le  bord  externe  du  feuillet, 
ce  réseau  vasculaire  se  résout  peu  à 
peu  en  branches  efférentes  (dites  vei- 
neuses) qui  paraissent  être  beaucoup 
plus  nombreuses  que  les  ramuscules 
artériels  afférents ,  et  qui  débou- 
chent dans  un  vaisseau  situé  sur  le 
bord  externe  du  feuillet  (b).  Enfin,  ce 
dernier  vaisseau  marginal  ,  parvenu 
à  la  base  de  ces  appendices ,  passe 
sur  le  côté  de  l'artère  branchiale  et 
va  déboucher  latéralement  dans  un 
autre  tronc  qui  marche  parallèlement 
à  celle-ci,  mais  plus  profondément 
entre  elle  et  l'arc  branchial ,  et  qui 
est  l'artère  épibranchiale  (ou  veine 
branchiale  des  auteurs),  c'est-à-dire 
le    vaisseau   efférent  commun     aux 


deux  séries  d'appendices  pectini- 
formes  dont  la  branchie  se  com- 
pose (c). 

Chez  les  Squales,  où  les  deux  feuil- 
lets branchiaux  congénères  sont  réu- 
nis dans  presque  toute  leur  longueur 
par  une  cloison  connective ,  l'artère 
branchiale  se  comporte  à  peu  près  de 
même  que  dans  les  espèces  précé- 
dentes ;  mais  au  lieu  d'un  seul  tronc 
efférent  ou  artère  épibranchiale,  il  y 
en  a  deux,  et  celles-ci  se  trouvent  sur 
les  côtés  de  l'artère  branchiale  au  lieu 
de  lui  être  superposées  (d).  11  est  aussi 
à  noter  que  les  petites  branches  vas- 
culaires  qui  sortent  des  lamelles  se 
réunissent  par  groupes  de  dix  ou 
douze  pour  constituer  des  troncs  plus 
gros  et  moins  nombreux,  lesquels 
vont  déboucher  d'espace  en  espace 
dans  le  vaisseau  épibranchial  corres- 
pondant (e). 

Dans  VOrthragoriscus  mola,  où  la 
disposition  des  vaisseaux  branchiaux 
a  été  étudiée  avec  soin  par  M.  Ales- 
sandrini,  les  capillaires,  au  lieu  de 
former  un  réseau  à  mailles  à  peu  près 
quadrilatères,  sont  disposés  en  géné- 
ral transversalement  sur  les  deux  sur- 
faces des  replis  membraneux  dont 
chaque  face  des  feuillets  branchiaux 
est  garnie  (/). 


(«.)  Hyrlt,  Medicinische  Jahrbûcher  des  Oesterreichisclien  Staales,  ueue  Foilselz. ,  t.  XV,  1838. 
(&)  Voyez  Rosenthal,  loc.  cit.,  pi.  1,  fig.  3. 

(c)  Voyez  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  8,  fig.  0. 

(d)  Alessandrini,  Op.  cit.  (Novi  Comment.  Acad.  Bonon.,  t.  IV,  pi.  30,  lig.  1,  2  et  3). 
(ejldèm,  ibid-,  pi.  28  et  29. 

—  Alessandrini ,  De  Piscium   apparaiu  respirationis,  lum  speciàtim  Orthragorisco  (  Novi 
Comment.   Acad.  scient.  Bononiensis,  1839,  t.  III,  p.  329). 
(/')  Idem,  ibid.  (Novi  Comment.  Acad.  scient.  Bonon. ,  t.  III,  pi.  32,  fig.  9). 


CHEZ    LES    POISSONS.  335 

tébrés  supérieurs ,  reçoivent  le  sang  après  son  passage  dans 
l'appareil  respiratoire  ;  mais  ce  mode  de  désignation  est  vicieux 
et  doit  tendre  à  donner  une  idée  fausse  des  choses.  En  effet, 
les  vaisseaux  efférents  dont  il  est  ainsi  question  n'ont  rien  de 
la  nature  des  veines  et  correspondent  à  la  portion  dorsale  des 
crosses  aortiques.  Ils  sont  en  quelque  sorte  les  racines  du 
système  artériel  général ,  et  il  me  semble  préférable  de  les 
appeler  artères  épibranchiales. 

La  disposition  de  ces  vaisseaux  est  assez  semblable  à  celle 
des  artères  branchiales  propres  ,  si  ce  n'est  qu'ils  marchent  en 
sens  contraire  et  qu'ils  grossissent  à  mesure  qu'ils  s'avancent 
de  la  partie  inférieure  vers  l'extrémité  dorsale  de  l'appareil 
respiratoire  (1).  Ils  sont  logés  aussi  dans  le  sillon  creusé  à  la 
face  inférieure  des  arcs  branchiaux,  mais  plus  profondément, 
et,  lorsqu'ils  sont  arrivés  sous  la  base  du  crâne,  ils  s'anasto- 
mosent entre  eux  pour  constituer  les  troncs  d'origine  de  l'aorte 
dorsale  (2). 

(1)   Chez    les  Raies,  au  lieu  d'un  artères  épibranchiales  ne  suivent  pas 

seul   de  ces  vaisseaux  épibranchiaux  une  marche  aussi  régulière,  etnaissenl 

accompagnant   chaque   artère   bran-  par  deux  branches,  l'une  antérieure, 

chiale  propre,  il  y  en  a  deux  qui  se  l'autre  postérieure,  qui  se  réunissent 

réunissent  en  un  seul  tronc  au  mo-  vers  le  milieu  de  chaque  arc  branchial 

ment  où  ils  sortent  de  l'appareil  res-  pour  constituer  un  tronc  ascendant, 

piratoire  (a).  On  remarque  aussi  chez  lequel  se  dirige  vers  la  base  du  crâne 

ces  Poissons  des  troncs  anaslomoti-  et   va   concourir  à  la    formation  de. 

ques  qui  relient  entre  elles  les  artères  l'aorte  dorsale.  Ceux  venant  des  bran- 

épibranchiales  vers  le  milieu  de  leur  ches  des  deux  dernières  paires  se  con- 

trajet.  fondent  en  une  seule  paire  de  racines 

Chez  les  Myxinoïdes,  ces  vaisseaux  aortiques,  et  les  six  vaisseaux  ainsi 

donnent  aussi  naissance  à  des  bran-  constitués  se  réunissent  en  un  même 

chesanastomotiqueslongiludinalesqui  point    pour   former  l'aorte   dorsale, 

contournent  les  orifices  branchiaux  en  L'artère    viscérale  naît  aussi   de  ce 

forme  d'anneau  (6).  point  de  rencontre  des  artères  épi- 

(2)  Chç.zVOrthragoriscusmola,les  branchiales. 

[a)  Monro,  Structure  and  Physiology  of  Fishes,  pi.  1 ,  fig.  5. 
—  Guider,  Histoire  des  Poissons,  1. 1,  p.  514. 

(&)  Miiller,   Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden ,    3e  partie,  pi.  i ,   fig.  1   [Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin 
pour  1839). 

m.  9       22 


oob  APPàREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Disposition        &  10.  —  La  disposition  que  je  viens  d'indiquer  est  en  général 

particulière  . 

des       commune  à  toutes  les  crosses  qui  établissent  le  passage  entre 

arcs  aortiques 

chez       la  portion  cardiaque  et  la  portion  rachidienne  du  système 

l'Amphipnous 

etie       aortique,  ou,  en  d  autres  mots,  entre  l'artère  branchiale  et 

Lepidosiren. 

1  aorte  dorsale,  et  chez  tous  les  Poissons  elle  se  rencontre 
dans  plusieurs  de  ces  arcs  vasculaires.  Mais ,  dans  quelques 
espèces,  la  forme  embryonnaire  persiste  dans  une  portion  de 
ce  système  de  vaisseaux ,  et  l'on  rencontre  quelques  artères 
branchiales  propres  qui  ne  se  ramifient  pas,  et  se  continuent 
directement  jusqu'à  l'aorte  dorsale  de  façon  à  représenter  dans 
leur  portion  supérieure  les  artères  épibranchiales  et  à  ne  pas 
être  séparées  de  celles-ci  par  un  réseau  capillaire,  Ce  sont 
par  conséquent  des  arcs  aortiques  simples ,  et  nous  verrons 
bientôt  qu'ils  sont  tout  à  fait  comparables  aux  crosses  de  l'aorte 
chez  les  Vertébrés  à  respiration  pulmonaire. 

Ainsi,  chez  le  Cuchia  du  Gange  (ou  Amphipnous),  dont  j'ai 
déjà  fait  connaître  l'appareil  respiratoire  anormal  (1),  les  artères 
branchiales  propres  de  la  dernière  paire,  après  avoir  contourné 
l'appareil  hyoïdien  sans  y  fournir  aucun  ramuscule ,  se  réu- 
nissent directement  entre  elles  pour  constituer  sur  la  ligne 
médiane  l'aorte  dorsale  ,  tandis  que  les  artères  branchiales  des 
arcs  antérieurs  se  terminent  comme  d'ordinaire  par  un  lacis 
capillaire  respiratoire  (2). 

(1)  Voyez  ci-dessus,  lome  H,  p.  237  postérieures,  parvenues  à  l'extrémité 

et  p.  382.  supérieure  de  l'appareil  hyoïdien,  se 

('2)  L'artère  branchiale  commune  du  recourbent  en  arrière,  et  se  réunissent 
Cuchia  est  très  longue  et  se  termine  entre  elles  sur  la  ligne  médiane,  au- 
antérieurement  par  trois  blanches  qui  dessous  de  la  dixième  vertèbre,  pour 
sont  à  peu  près  de  même  calibre.  Deux  constituer  le  tronc  de  l'aorte  dorsale, 
de  ces  branches,  qui  sont  paires,  con-  La  troisième  branche  de  l'artère  bran- 
slitUentles  arcs  vasculaires  postérieurs  chialc  commune  est  impaire,  et  repré- 
et  suivent  les  arcs  branchiaux  de  la  sente  en  réalité  la  continuation  de  ce 
dernière  paire ,  lesquels,  ainsi  que  vaisseau.  Elle  se  porte  en  avant,  four- 
nous  l'avons  déjà  vu,  sont  dépourvus  hit  de  chaque  côté  des  artères  bran- 
d'appendices  pectiniformes.  Ces  crosses  chiales  propres  aux  arcs  branchiaux 


CHEZ    LES    POISSONS,  Oo7 

Un  mode  d'organisation  analogue  se  rencontre  chez  les 
Lfepidosiren ,  que  la  plupart  des  zoologistes  rangent  aussi  dans 
la  classe  des  Poissons.  En  effet,  chez  ces  Animaux ,  de  même 
que  chez  YAmphipnous,  quelques-uns  des  arcs  vasculaires  qui 
naissent  de  l'artère  branchiale  commune  se  ramifient  comme 
d'ordinaire  à  la  surface  des  lamelles  branchiales,  et  ne  commu- 
niquent avec  l'aorte  dorsale  que  par  l'intermédiaire  d'un  réseau 
capillaire  dont  les  canaux  efférents  constituent  les  troncs  épi- 
branchiaux,  ou  veines  branchiales  de  la  plupart  des  auteurs  ; 
mais  d'autres  branches  de  celte  même  artère  basilaire  forment 
des  arcs  continus  et  indivis  qui  débouchent  directement  dans 
le  système  aortique  postbranchial  (1). 


de  la  deuxième  et  troisième  paire,  qui 
sont  branchifères,  et  se  termine  anté- 
rieurement en  se  ramifiant  sur  les  po- 
ches respiratoires  dont  les  arcs  bran- 
chiaux de  la  première  paire  sont 
garnis.  De  pelits  vaisseaux  analogues 
aux  artères  épibranchiales  ordinaires 
(ou  veines  branchiales  des  auteurs)  re- 
çoivent le  sang  qui  a  traversé  ces  ré- 
seaux capillaires,  et  vont  déboucher 
dans  les  crosses  postérieures  avant  que 
celles-ci  aient  quitté  l'appareil  hyoï- 
dien pour  aller  constituer  l'aorte  (a). 
(1)  Chez  le  Lepidosiren  annectens, 
l'artère  branchiale  commune,  aussitôt 
sa  sortie  du  cœur,  se  divise  en  deux 
paires  de  gros  vaisseaux  qui  se  cour- 
bent en  dehors  et  bientôt  se  bifur- 
quent à  leur  tour  pour  constituer  ainsi 
quatre  paires  d'artères  branchiales 
propres.  La  première  de  celles-ci 
donne  en  avant  une  branche  qui  va 
se  ramifier  dans  la  branchie  accessoire 
ou  hyoïdienne,  puis  continue  sa  route 
le  long   du  bord  inférieur  du  pre- 


mier arc  branchial,  et  va  concourir 
à  la  formation  de  l'aorte  dorsale  sans 
avoir  donné  naissance  à  aucune  rami- 
fication branchiale.  Le  second  arc  vas- 
culaire  est  également  indivis,  et  se 
comporte  de  la  même  manière,  si  ce 
n'est  qu'au  moment  de  se  recourber 
au-dessus  de  l'appareil  hyoïdien,  il 
fournil  une  très  petite  branche  qui  se 
rend  aux  branchies  externes.  Les  ar- 
tères branchiales  propres  des  deux 
paires  suivantes  se  ramifient  au  con- 
traire dans  les  appendices  dont  les 
trois  derniers  arcs  branchiaux  sont 
garnis,  et  envoient  aussi  chacune  un 
rameau  aux  branchies  externes.  Le 
réseau  capillaire  résultant  des  divi- 
sions de  ces  deux  derniers  troncs 
donne  naissance  à  deux  vaisseaux  effé- 
rents, ou  artères  épibranchiales,  qui 
vont  s'anastomoser  avec  l'extrémité 
supérieure  des  deux  crosses  précé- 
dentes, et  former  ainsi  de  chaque 
côté  un  gros  vaisseau  unique.  Enfin, 
les  deux  troncs  ainsi  constitués  se  joi- 


(a)  3.  Taylor,  On  the  Respivatovy  Organs  and  Air-Bladder  of  Certain  Fishes  of  the  Ganges 
(Edinburgh  Journal  of  Science,  1831,  new  séries,  t.  V,  p.  47). 


338  AFPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

11  en  résulte  que  ehez  les  Amphipnous,  de  même  que  chez 
les  Lepidosiren ,  une  portion  seulement  du  sang  lancé  par  le 
cœur  vient  respirer  dans  les  appendices  branchiaux ,  et  qu'une 
portion  plus  ou  moins  considérable  de  ce  liquide  arrive  dans 


gnent  entre  eux  sur  la  ligne  médiane 
pour  constituer  l'aorte  dorsale  ;  mais 
chacun  d'eux  fournit  à  son  origine 
un  gros  vaisseau  qui  se  rend  au  pou- 
mon du  côté  correspondant.  Ainsi,  le 
sang  qui,  en  parlant  du  cœur,  traverse 
les  deux  premiers  arcs  vasculaires, 
arrive  dans  les  racines  de  l'aorte  sans 
avoir  respiré  ;  tandis  que  la  portion  du 
même  liquide  qui  s'est  engagée  dans 
les  deux  arcs  vasculaires  postérieurs 
s'y  transforme  en  sang  artériel  avant 
d'arriver  au  même  point  où  il  se  mêle 
au  précédent,  et  le  mélange  ainsi 
formé  se  divise  de  nouveau  en  deux 
courants,  dont  l'un  va  aux  poumons 
et  l'autre  pénètre  dans  l'aorte  dor- 
sale (a). 

Chez  le  Lepidosiren  paracloxa,  la 
disposition  de  cette  portion  du  système 
circulatoire  est  à  peu  près  la  même, 
si  ce  n'est  que  l'artère  branchiale 
commune  ne  se  divise  qu'en  trois 
paires  d'arcs  vasculaires,  et  que  les 
artères  pulmonaires  sont  en  continuité 
directe  avec  les  artères  branchiales 
propres  de  la  dernière  paire.  Les  deux 


premières  paires  de  crosses  sont  sim- 
ples, et  vont  former  'directement  les 
racines  de  l'aorte  dorsale,  comme  chez 
le  Lepidosiren  annectens  (6). 

Quant  aux  veines  pulmonaires  qui 
ramènent  le  sang  des  poumons,  elles 
longent  le  côté  externe  de  ces  organes 
et  se  réunissent  en  un  tronc  impair, 
lequel  débouche  dans  le  cœur  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  le  Po- 
lyptèee  les  artères  de  la  vessie  nata- 
toire naissent  aussi  des  derniers  vais- 
seaux efférents,  ou  artères  épibran- 
chiales ,  avant  leur  réunion  pour 
constituer  l'aorte  dorsale;  mais  lesang 
qui  y  arrive  a  traversé  en  totalité 
le  réseau  capillaire  branchial,  et  il 
n'existe  pas,  comme  chez  Y  Amphi- 
pnous et  chez  les  Lepidosiren ,  des 
communications  directes  entre  l'artère 
branchiale  ou  aorte  cardiaque  et  l'a- 
nalogue de  l'artère  pulmonaire  ou 
l'aorte  dorsale  (d).  Il  en  résulte  que 
cette  poche,  dont  la  disposition  ana- 
tomique  ressemble  tant  à  celle  des 
poumons  d'un  Lepidosiren,  ne  reçoit 
que  du  sang  déjà  artérialisé. 


(a)  Voyez  la  figure  que  M.  Peters  a  donnée  de  ce  système  vasculaire  (Ueber  einen  dem  Lepidosiren 
annectens  verwandten  Fisch  von  Quellimane  (Miiller's  Archiv  fur  Anat.  and  Physiol.,  1845,  p].  1, 
fig.  3).  —  Les  principaux  vaisseaux  ont  été  très  bion  représentés  aussi  par  M.  Owen  (Lectures  on 
the  Comp.  Anat.  of  the  Vertebr.  Animais,  1846,  p.  266,  fig.  71). 

(6)  Bischoff,  Descript.  anat.  du  Lepidosiren  paradoxa  (  Ann.  des  sciences  nat.,  1840,  2"  série, 
t.  XIV,  pi.  9,  fig.  5). 

—  Hyrtl;  Lepidosiren  paradoxa  Monographie  (Abhandl.  der  Bohmischen  Gesellschaft  der  Wis- 
senschaften,  1845,  5-  série,  t.  III,  p.  642,  pi.  4,  fig.  2). 

—  Duvernoy,  Cours  d'histoire  naturelle  (Revue  zoologique  de  la  Société  cuviérienne,  1846, 
pi.  1,  fig.  1,  d'après  Hyrtl). 

(c)  Owen,  Descript.  ofthe  Lepidosiren  annectens  (Trans.  of  the  Linn.  Soc,  vol.  XVIII,  p.  348, 
pi.  26,  fig.  2). 

(d)  Miiller,  Fernere  Bcmerkungen  ûber  den  Ban,  der  Ganoiden  (Bericht.  Acad.  Berlin,  1846, 
p.  72). 


CHEZ    LES   POISSONS.  339 

l'aorte  dorsale  sans  avoir  subi  l'influence  vivifiante  de  l'eau 
aérée  dont  l'appareil  respiratoire  est  baigné.  Chez  l'Aniphipnous, 
c'est  donc  toujours  un  mélange  de  sang  artériel  et  de  sang- 
veineux  qui  se  distribue  à  l'économie ,  et,  d'après  les  calibres 
respectifs  des  vaisseaux  qui  arrivent  à  l'aorte  dorsale  sans 
avoir  traversé  les  branchies,  et  de  ceux  qui  s'y  ramifient  avant 
de  déboucher  dans  cette  artère ,  on  peut  voir  que  dans  ce  mé- 
lange la  proportion  de  sang  veineux  l'emporte  de  beaucoup  sur 
celle  du  sang  artérialisé.  Mais,  chez  les  Lepidosiren,  il  en  est     °Tis™ 

r  des  artères 

autrement,  car  les  arcs  aortiques  postérieurs  ne  se  rendent  pas    pulmonaires 

chez  Ibs 

intégralement  à  l'aorte  dorsale;  chemin  faisant,  ils  fournissent  Lepidosiren. 
de  chaque  côté  une  branche  considérable  qui  va  se  ramifier  dans 
les  sacs  pulmonaires  dont  ces  Animaux  sont  pourvus  ,  et  de  la 
sorte  une  portion  considérable  du  sang  qui  coule  dans  leur 
intérieur  dévie  de  la  route  directe  pour  aller  subir  l'influence 
de  la  respiration  aérienne,  puis  revient  au  cœur  à  l'état  de 
sang  artériel  par  l'intermédiaire  de  veines  pulmonaires  parti- 
culières. Il  en  résulte  donc  que  le  sang  veineux  est  déjà  mêlé  de 
sang  artériel  avant  de  s'engager  dans  le  système  des  vaisseaux 
branchiaux,  où  une  portion  de  ce  liquide  doit  respirer  de 
nouveau  et  une  autre  passer  directement  dans  le  système  irri- 
gatoire  général  de  l'organisme. 

Mais  ce  mode  de  circulation  est  tout  à  fait  exceptionnel  dans    Disposition 
la  classe  des  Poissons,  et ,  dans  l'immense  majorité  des  cas,  la  epibraLiîaTes 
totalité  du  sang  veineux  qui  entre  dans  le  cœur  passe  dans   les  pJSLns 
les  branchies  ,  comme  nous  venons  de  le  voir,  et  n'arrive 
aux  artères  chargées  de  le  distribuer  dans  les  diverses  par- 
ties de  l'économie  que  par  l'intermédiaire  des  vaisseaux  effé- 
rents  de  l'appareil  branchial.  Quelquefois  une  portion  du  sang 
veineux  apporté  à  l'appareil  respiratoire  par  les  artères  bran- 
chiales ne  traverse  pas  les  lamelles  des  branchies  propre- 
ment dites,  et  se  dévie  un  peu  de  la  route  ordinaire  pour 
traverser  une  sorte  de  branchie  accessoire  :  chez  YHeterotis, 


ordinaires. 


Origine  de 

l'aorte  dorsale 

et 

autres  artères 

du  conv?. 


o/j.0  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

par  exemple  (1)  ;  mais  toujours  la  totalité  ou  la  presque  totalité 
du  sang  passe  dans  les  artères  épibranchiales,  ou  vaisseaux 
efférents  de  l'appareil  respiratoire,  lesquels  donnent  naissance 
à  l'ensemble  de  la  portion  irrigatoire  du  système  artériel. 

§11.  —  Voyons  donc  maintenant  commentées  canaux  cen- 
trifuges chargés  de  porter  le  sang  artériel  dans  tous  les  organes 
prennent  naissance  et  se  répandent  dans  l'économie. 

Pendant  que  les  vaisseaux  épibranchiaux  sont  encore  logés 
dans  l'appareil  hyoïdien,  ils  fournissent  quelques  artères  qui 
sont  destinées  à  porter  le  sang  aux  parties  voisines.  Telles  sont 
les  artérioles  nourricières  des  lamelles  branchiales  (2),  l'artère 


(t)  M.  Hyrtl  a  trouvé  que  l'appen- 
dice branchial  en  forme  de  Limaçon 
placé  au  sommet  de  la  cavité  respira- 
toire reçoit  une  branche  de  l'artère 
branchiale  propre  de  la  dernière  bran- 
chie,  et  fournit  un  vaisseau  qui  va  dé- 
boucher dans  l'artère  épibranchiale 
(ou  veine  branchiale  des  auteurs)  cor- 
respondante. Ainsi,  le  sang  suit  dans 
cet  organe  ia  même  marche  que  dans 
les  branchies  proprement  dites  (a). 

Une  structure  analogue  se  retrouve 
chez  les  Clupéacés  qui  possèdent , 
comme  VHeterotis,  une  de  ces  bran- 
chies accessoires  en  forme  de  lima- 
çon (6). 

J'ajouterai  que  chez  les  Poissons  de 
l'ordre  des  PLAGiosTOMES,qui  à  l'état 
fœtal  sont  pourvus  de  branchies  ex- 
ternes (c),  ces  appendices  filiformes 
renferment  chacun  une  anse  vasculaire 
dont  les  connexions  varient  suivant 
la  position  de  ces  organes  transitoires. 


Dans  les  branchies  externes  qui  nais- 
sent directement  de  l'appareil  hyoï- 
dien et  qui  sont  fixées  au  bord  des 
ouïes,  ces  vaisseaux  sont  en  continuité 
avec  ceux  des  branchies  internes  ,  et 
constituent  autant  d'anses  anastomo- 
tiques  entre  les  artères  branchiales 
propres  et  les  artères  épibranchiales 
correspondantes  ;  mais  ceux  qui  ap- 
partiennent aux  branchies  externes 
qui  naissent  des  évents  sont  fournis 
par  les  branches  du  réseau  admirable 
dépendant  de  la  pseudo-branchie  dont 
j'aurai  bientôt  à  parler  (cl). 

(2)  Les  artères  nourricières  des 
branchies  naissent  de  l'artériole  effé- 
rente  des  feuillets  branchiaux ,  et  se 
ramifient  dans  la  substance  de  ces 
appendicespectiniformes,  de  façon  à  y 
former  un  réseau  capillaire  indépen- 
dant de  celui  qui  sert  d'intermédiaire 
entre  les  artères  branchiales,  ou  vais- 
seaux afférents,  et  les  artères  épibran- 


(a)  Hyrtl,  Beitrâgt  zur  Anatomie  von  Heterotis  Ehrenbergii  (  Denkschriften  der   Akad.  der 
Wissensch.  zu  Wien,  t.  VIII,  p.  73,  pi.  3,  fig.  1). 
(6)  Hyrtl,  Ueber  die  Accessorischen  Kiemenorgane  der  Clupeaceen  (Op.  cit.,  1855,  t.  X,  p.  47). 

(c)  Voyez  tome  II,  page  215. 

(d)  Cornalia,   Sulle  branchie   transitorie  dei  fe'ti  Plagiostomi,  p.  1.6,  pi.  4, fig.  10,  14 ,  12,  etc. 
(extrait du Giorn.  dell'  Istituto  Lombarde-,  t.  IX,  Milan,  1857). 


CHEZ    LES    POISSONS.  ol\ï 

coronaire  du  cœur  (1),  et  les  artères  hyoïdiennes,  dont  les  bran- 
ches se  distribuent  aux  parties  inférieures  de  la  tête  et  des 
parois  abdominales,  et  concourent  à  former  les  organes  vascu- 
laires  appelés  pseudo-branchies,  dont  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de 
dire  quelques  mots  en  traitant  de  la  structure  de  l'appareil 


chiales,  ou  vaisseaux  efférents.  Le  sang, 
après  avoir  traversé  ce  réseau  nourri- 
cier, est  ramené  au  cœur  par  les 
veines  de  Duverney,  dont  il  sera  ques- 
tion plus  loin  (a). 

(1)  L'artère  coronaire  naît  ordinai- 
rement de  la  pénultième  artère  épi- 
branchiale  (ou  veine  branchiale  des 
auteurs),  vers  la  partie  inférieure  de 
l'arc  branchial,  et  se  porte  directe- 
ment en  bas  et  en  arrière  pour  aller 
se  ramifier  dans  l'épaisseur  des  parois 
du  ventricule  et  des  autres  parties  du 
cœur  (6).  Suivant  Cuvier,  cette  artère 
naîtrait  du  vaisseau  épibranchial  an- 
térieur chez  la  Perche  (c). 

J'ai  remarqué  que  chez  YOrthrago- 
riscus  mola ,  la  disposition  de  ces 
vaisseaux  est  moins  simple  ;  ils  pren- 
nent un  développement  très  considé- 
rable, et  sont  au  nombre  de  deux, 
l'un  antérieur  et  inférieur ,  l'autre 
postérieur  et  supérieur.  Chaque  artère 
épibranchiale  (  ou  veine  branchiale 
des  auteurs)  de  la  première  paire  , 
près  de  son  extrémité  antérieure , 
donne  naissance  à  une  artère  assez 
forte  qui  bientôt  se  bifurque  ;  une  de 
ses  branches  se  porte  en  avant,  fournit 
des  rameaux  à  la  langue,  puis  se  re- 
courbe en  bas  et  en  arrière  pour  gagner 
la  mâchoire  inférieure  ;  l'autre  se  re- 


courbe en  dedans  et  en  arrière  pour 
aller  s'anastomoser  avec  un  vaisseau 
analogue  fourni  par  la  deuxième  artère 
épibranchiale  ;  le  tronc  ainsi  formé 
reçoit  bientôt  une  troisième  artère 
provenant  de  l'artère  épibranchiale 
suivante,  et  ensuite  se  joint  avec  son 
congénère  pour  constituer  un  vaisseau 
impair  et  médian  qui  se  recourbe  en 
bas  et  en  arrière,  passe  sous  l'artère 
branchiale  commune,  et  se  divise  en 
deux  branches,  dont  l'une  se  distribue 
aux  muscles  du  cou  et  l'autre  constitue 
Vartère  coronaire  inférieure.  Les  ar- 
tères épibranchiales  de  la  quatrième 
paire  fournissent  aussi  à  leur  extré- 
mité antérieure  une  paire  de  vaisseaux 
analogues  aux  précédents,  qui  s'ana- 
stomosent toutde  suite  sur  la  ligne  mé- 
diane, et  forment  ainsi  une  seconde 
artère  médiane.  Celle-ci  gagne  aussi 
la  face  inférieure  de  l'appareil  hyoï- 
dien, et  s'y  divise  en  deux  branches, 
l'une  destinée  aux  parois  de  la  cham- 
bre respiratoire,  l'autre  au  cœur:  cette 
dernière  est  Vartère  coronaire  supé- 
rieure. Il  est  aussi  à  noter  que  les 
troncs  d'origine  de  ces  vaisseaux  four- 
nissent plusieurs  petites  artères  nour- 
ricières aux  parois  des  artères  bran- 
chiales. 


(a)  Miiller,  Vergleichende  Anatomie  der  Myxinoiden,  dritter  Fortsetz.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin 
pour  4839,  pi.  3,fig.  1). 

—  Agassiz  et  Yogi,  Anat.  des  Salmones,  pi.  0,  fig.  4. 

(6)  Voyez  Agassiz  etVogt,  Anatomie  des  Salmones,  p.  125,  pi.  K,  fig.  2. 
(c)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  p.  514,  pi.  17,  fig.  1. 

—  Voyez  aussi  Laurillarrl,  Atlas  des  Poissons  de  la  grande  édition  du  RPtjne  animal  de  Cuvier, 
pi.  2,  fig.  1. 


3/|i>  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

respiratoire  des  Poissons  (1).  Elles  s'y  divisent  en  une  multitude 
de  minuscules  capillaires  qui  bientôt  se  réunissent  de  nouveau 
entre  eux  pour  constituer  un  tronc  commun  destiné  à  porter 
le  sang  aux  yeux  (2). 

Le  mode  de  jonction  des  vaisseaux  efférents  des  branchies 


(1}  Voyez  tome  H,  p.  238. 

(2)  Chez  les  Poissons  osseux  ordi- 
naires qui  n'ont  que  quatre  paires  d'ar- 
tères branchiales  propres ,  les  artères 
hijoïdiennes  (ou  hxjoïdales  d'Agassiz, 
artères   operculaires     de    quelques 
auteurs  )   se  détachent  des  vaisseaux 
épibranchiaux  (ou  veines  branchiales) 
de  la  paire  antérieure ,  vers  le  tiers 
inférieur  de  celle-ci ,  et  côtoient  l'arc 
branchial     correspondant     jusqu'au 
basihyal.  Elles  remontent  alors  le  long- 
dès  cornes  hyoïdiennes,  et  traversent 
la  joue  pour  pénétrer  entre  les  muscles 
élévateurs  de  la  mâchoire  inférieure. 
Pendant  ce  trajet ,    chacune  d'elles 
fournit  divers   rameaux  aux  parties 
voisines,  puis  rentre  sous  la  voûte  de 
la  chambre  respiratoire  pour  s'y  bifur- 
quer et  envoyer  «ne  de  ses  branches 
sous  le  crâne,  au  elle  s'anastomose  avec 
le    cercle    aortique    ou    céphalique , 
l'autre  danslapseudo-branchie corres- 
pondante. Ce  dernier  organe,  comme 
nous  l'avons  déjà  vu  (a) ,  ressemble 
beaucoup  aux  branchies  proprement 
dites  par  sa  structure,  et  les  branches 
de  l'artère    hyoïdienne  se  ramifient 
dans  les  feuillets  qui  le  constituent  et 
y    forment   un  lacis   vasculaire   très 
riche.  Enfin,  les  capillaires  de  ce  ré- 
seau  se  réunissent  entre  eux   pour 
constituer  les  racines  des  artères  effé- 
rentes  ,   dites   veines  pseudo  -  bran- 
chiales, qui,  après  avoir  gagné  la  voûte 


du  palais  et  s'y  être  anastomosées 
entre  elles  à  l'aide  d'une  branche 
transversale,  se  rendent  dans  l'inté- 
rieur des  yeux,  et  s'y  ramifient  dans 
les  ganglions  vasculaires  appelés  corps 
rouges  de  la  choroïde  ou  glandes 
choroïdiennes. 

Ainsi,  le  sang  artériel  qui  a  déjà 
traversé  l'appareil  respiratoire,  et  qui 
est  contenu  dans  les  artères  hyoï- 
diennes, traverse  un  système  capil- 
laire accessoire  de  la  nature  de  ceux 
que  les  anatomistes  désignent  sous  le 
nom  de  rete  mirabile,  avant  que  d'ar- 
river aux  yeux.  On  doit  la  connais- 
sance de  cette  disposition  curieuse  à 
M.  J.  Millier,  qui  en  a  fait  l'objet  de 
recherches  très  approfondies  chez  le 
Gadus  callarias  (6).  MM.  Agassiz  et 
Vogt  ont  trouvé  cette  portion  du  sys- 
tème circulatoire  disposée  exactement 
de  la  même  manière  chez  la  Truite  (c). 
Il  est,  du  reste,  à  noter  que  le  rete 
mirabile  des  pseudo-branchies  ne  lire 
pas  toujours  son  origine  des  artères 
hyoïdiennes.  Ainsi,  chez  le  Brochet,  il 
est  formé  par  des  branches  du  cercle 
céphalique. 

Chez  les  Ganoïdesqui  sont  pourvus 
d'une  branchie  accessoire  ou  opercu- 
laire,  et  qui  ont  par  conséquent  cinq 
paires  d'artères  épibranchiales  aussi 
bien  que  cinq  paires  d'artères  bran- 
chiales propres,  les  artères  épibran- 
chiales antérieures  ou  accessoires  don- 


fa)  Voyez  ci-dessus,  (orne  II,  page  238. 

\u)  Mûller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  {Acad.  de  Berlin  pour  i  839,  pi.  3,  fig\  1 3,  et  pi.  4,  fig.  3). 

(c)  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Satmones,  p.  ■ISO,  pi.  K,  fig.  2,  et  pi.  L,  fig.  1,  2,  3. 


CHEZ    LES    FOISSONS.  Sftô 

ou  artères  épibranchiales  varie  un  peu  ;  mais,  en  général,  ces 
tubes  sanguifères  se  réunissent  de  façon  à  former  de  chaque 
côté  de  la  base  du  crâne  un  tronc  qui  se  dirige  obliquement  en 
arrière  et  en  dedans,  pour  aller  s'unir  à  son  congénère  et  con- 


nent  naissance  de  chaque  côté  de  la  tête 
à  l'artère  operculaire  ou  hyoïdienne  , 
laquelle  se  rend,  comme  d'ordinaire,  à 
la  pseudo-branchie.  Mais  le  vaisseau 
efférent  du  plexus  vasculaire  formé  par 
ses  ramuscules  terminaux  (ou  veine 
pseudo-branchiale  des  auteurs)  ne  se 
rend  pas  directement  au  plexus  cho- 
roïdien,  et  pénètre  dans  le  crâne  pour 
y  remplir  le  rôle  d'une  carotide  in- 
terne (a). 

Chez  les  Plagiostomes,  la  pseudo- 
branchie  est  représentée  par  les  replis 
peclinifornes  qui  garnissent  la  partie 
terminale  des  évents  et  qui  reçoivent 
une  grosse  artère  provenant  de  la 
partie  moyenne  de  l'artère  épibran- 
chiale  accessoire  ou  antérieure, et  ana- 
logue ,  par  conséquent ,,  à  l'artère 
hyoïdienne  ou  operculaire  des  Pois- 
sons osseux  (6).  D'après  M.  Millier,  le 
tronc  efférent  de  cette  pseudo-branchie 
descendrait  vers  la  voûte  palatine  , 
et  irait  se  ramifier  dans  l'œil  et  les  par- 


ties voisines  de  la  face  et  de  l'encé- 
phale (c). 

Des  recherches  récentes  de  M.  Hyrtl 
tendraient  à  établir  que  le  sang  ne  suit 
pas  celte  direction  et  reviendrait  de  la 
pseudo-branchie  vers  l'aorte  ;  mais  les 
observations  de  cet  analomiste  ne  me 
sont  pas  encore  suffisamment  connues 
pour  que  je  puisse  en  apprécier  la 
valeur  {d). 

Le  corps  que  les  anatomistes  dési- 
gnent sous  le  nom  de  glande  cho- 
roïdienne  est  aussi  un  rete  mirabile 
ou  ganglion  vasculaire,  logé  entre  le 
feuillet  fibreux  et  le  feuillet  vasculaire 
de  la  choroïde  où  il  contourne  la  por- 
tion terminale  du  nerf  optique  (e). 

Pour  plus  de  détails  au  sujet  du 
mode  de  structure  de  ces  lacis  vascu- 
laircs,  je  renverrai  au  grand  travail 
de  M.  Muller,  inséré  dans  son  ouvrage 
sur  l'anatomie  comparée  des  Myxi- 
noïdes  (f),  et  à  son  second  Mémoire 
sur  les  Ganoïdes  (g). 


(a)  Millier,  Ueber  den  Bau  und  die  Grenzen  der  Ganoiden  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin,  1844). 

(b)  Le  trajet  de  ces  artères  chez  le  Marteau  a  été  figuré  par  MM.  Carus  et  A.  Otto  (Tab.  anat. 
comp.,  pars  vu,  pi.  4,  fig.  2  et  3). 

(c)  Miïller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839,  p.  236). 

(d)  Hyrtl,  Sur  le  système  vasculaire  des  Raies  (Institut,  1857,  n°  1239,  p.  325). 

(e)  Voyez  à  ce  sujet  :  Eichwald  ,  De  Selachis  Aristotelis  spécimen  inaugurale.  Wilna  ,  1819, 
p.    37. 

—  Owen,  Gâtai,  ofthe  Mus.  of  the  Coll.  of  Surgeons,  t.  III,  p.  1-45. 

—  Wliarton  Jones,  On  the  so-called  Choroid  Gland  of  the  Fish's  Eye  (Lond.  Med.  Gazette,  1837, 
2"  série,  1. 1,  p.  651 ,  fig.  1). 

—  ïreviranus ,  Beobachtungen  aus  der  Zootomie  und  Physiologie,  t.  I,  p.  20,  pi.  5  et  6, 
fig.  32-35. 

—  Erdl,  Bisquisitiones  de  Piseium  glandula  choroideali  (Dissert,  inaug.,  Munich,  1839,  fig,). 

—  Millier,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  (Mém.  de  V  Acad.de  Berlin  pour  1839,  p.  254). 

(f)  Miiller,  Von  Gefàsses-System  der  Nebenkiemen  und  accessorischen  Athmen  Organe  und  von 
der  Nebenkiemen  der  Fische  (voyez  les  Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839,  p.  213  et  suiv.). 

(g)  Miïller,  Fernere  Bemerkungenuber  den  Bau  der  Ganoiden  (Bericht  der  Akad.  der  Wissensch. 
zm  Berlin,  184G,  p.  68). 


2ikk  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

stituer  avec  lui  l'artère  principale  du  corps  appelée  l'aorte 
dorsale  (1). 

Les  artères  épibranchiales  antérieures  se  divisent  en  deux 


(1)  Chez  la  Perche,  les  vaisseaux 
efférents  des  branchies  postérieures 
se  réunissent  de  chaque  côté  à  celles 
de  la  paire  précédente,  avant  que  de 
s'anastomoser  avec  les  crosses  aor- 
tiques  formées  par  la  réunion  des  ar- 
tères épibranchiales  des  deux  paires 
antérieures  (a). 

Chez  la  Truite,  l'artère  épibran- 
chiale  antérieure  se  réunit  à  la  sui- 
vante, et  constitue  de  la  sorte  un  vais- 
seau assez  gros  qui  se  porte  en  dedans 
et  en  arrière  pour  se  joindre  à  son  con- 
génère et  former  avec  lui  un  tronc 
médian  qui  est  le  commencement  de 
l'aorte,  et  qui,  à  une  certaine  dis- 
tance, reçoit  de  chaque  côté  les  vais- 
seaux efférents  des  deux  branchies 
postérieures,  unis  préalablement  entre 
eux,  ou  tout  au  moins  fort  rapprochés 
l'un  de  l'autre  (6).  Ce  mode  de  grou- 
pement se  voit  aussi  chez  le  Thon  (c). 

Chez  la  Baudroie,  il  n'y  a  que  trois 
paires  d'artères  épibranchiales ,  et 
celles  des  deux  dernières  paires  se 
réunissent  de  chaque  côté,  en  sorte 
que  l'appareil  respiratoire  ne  fournit 
en  définitive  à  l'aorte  que  deux  paires 
de  racines  (d). 

M.  Hyrtl  a  constaté  récemment  une 
particularité  remarquable  dans  la  dis- 
position des  racines  de  l'aorte  dorsale 


chez  le  Lépisostée.  Les  deux  vaisseaux 
afférents  des  branchies  antérieures  se 
réunissent  directement  entre  eux  sur 
la  ligne  médiane,  et  constituent  un 
premier  tronc  aortique  impair  qui  se 
dirige  en  arrière.  La  paire  suivante  des 
artères  épibranchiales  se  comporte  de 
même,  et  constitue  un  second  tronc 
aortique  qui  se  dirige  en  arrière  au- 
dessous  du  précédent,  et  s'anastomose 
bientôt  avec  lui.  Enfin,  les  vaisseaux 
efférents  de  la  troisième  et  de  la  qua- 
trième branchie  se  réunissent  de 
chaque  côté  en  un  seul  tronc  qui  va  se 
joindre  à  son  congénère  pour  former 
un  troisième  tronc  médian.  Ce  dernier 
est  plus  gros  que  le  précédent,  dont  il 
longe  la  face  inférieure,  et,  après  s'être 
confondu  avec  lui ,  constitue  l'aorte 
dorsale.  lia  par  conséquent  à  la  base 
du  crâne  trois  vaisseaux  médians  et 
impairs  qui  sont  superposés,  et  qui  se 
réunissent  successivement  entre  eux 
pour  constituer  l'aorte  dorsale  (e). 

Chez  les  Esturgeons  ,  les  artères 
épibranchiales,  en  quittant  l'appareil 
hyoïdien  pour  aller  constituer  l'aorte 
dorsale,  ne  s'appliquent  pas  contre  la 
base  du  crâne,  mais  pénètrent  dans  des 
cavités  creusées  dans  la  substance  des 
parois  cartilagineuses  de  cette  boîte 
céphalique.    il  est  aussi  à  noter  que 


(a)  Voyez  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal,  Poissons,  pi.  2,  fîg.  i. 

(b)  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones,  p.  119,  pi.  L,  fig.  2. 

(c)  Eschricht  etMiiller,   Ueber  die  arteriosen  und  venosen  Wundernetze  {Mcm.  de  l'Acad.  de 
Berlin  pour  1835,  pi.  3,  fig.  6). 

(d)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  255. 

(e)  Hyrll,  Ueber  dus   Arteriensystem  des  Lepisosteus  (Sitzungsbericht  der  Aead.  der  Wissen 
schaften  von  Wien,  1852,  t.  Vlll,p.  234). 


CHEZ    LES    POISSONS. 


345 


branches  au  moment  où  elles  sortent  de  l'extrémité  supérieure      artère 

1  cepnalique. 

de  l'appareil  respiratoire  pour  gagner  la  base  du  crâne  :  l'une 
de  ces  branches  se  recourbe  en  arrière  pour  s'anastomoser 


les  troncs  des  deux  côtés  du  corps 
s'y  croisent  avant  de  s'anastomoser 
sur  la  ligne  médiane  (a). 

Chez  les  Sélaciens  ou  Plagio- 
stomes,  le  mode  de  groupement  des 
vaisseaux  efférenlsde  l'appareil  respi- 
ratoire n'est  pas  tout  à  fait  le  même 
que  chez  les  Poissons  osseux  ordi- 
naires. Il  y  a  une  artère  épibrançbiale 
pour  chaque  demi-branchie  ou  série 
de  lamelles  branchiales,  et  ces  vais- 
seaux s'anastomosent  entre  eux  deux  à 
deux  en  dehors  aussi  bien  qu'en  dedans 
decbaqueloge  respiratoire, de  manière 
à  former  quatre  anneaux  vasculaires, 
suivis  d'une  artère  épibranchiale  sim- 
ple qui  dépend  de  la  demi-branchie 
renfermée  dans  la  cinquième  loge  res- 
piratoire (6).  Tous  ces  vaisseaux  s'ana- 
stomosent aussi  entre  eux  par  une 
série  de  troncs  placés  au-dessus  des 
cloisons  interbranchiales,  vers  le  mi- 
lieu de  leur  longueur,  et,  du  côté  ex- 
terne ,  d'autres  anastomoses  les  font 
communiquer  avec  une  des  branches 
de  l'artère  de  la  nageoire.  Enfin,  un 
tronc  correspondant  à  chacune  des 
cloisons  interbrancliiales  naît  de  l'ex- 
trémité interne  de  ces  mêmes  anneaux 
vasculaires,  et  constitue  lapor'ion  ter- 
minale du  système  efférent.  Ces  der- 
niers troncs  correspondent  donc  à  la 
portion  sous -crânienne  des  artères 
épibranchiales  chez  les  Poissons  os- 
seux, et   constituent  également  les 


racines  de  l'aorte.  Ils  sont  au  nombre 
de  quatre  de  chaque  côté  de  la  tête, 
et  chez  les  Squales  ils  restent  isolés 
jusqu'au  moment  où  ils  se  rencontrent 
sur  la  ligne  médiane,  pour  donner 
naissance  à  l'aorte  dorsale  (c).  Mais 
chez  les  Raies,  le  premier  et  le  second 
de  ces  vaisseaux  se  réunissent  pour 
former  un  tronc  commun,  et  par  con- 
séquent le  nombre  des  racines  de 
l'aorte  se  trouve  réduit  à  trois 
paires  [d). 

Chez  la  grande  Lamproie,  il  naît  une 
artère  afférente  de  chaque  demi-bran- 
chie, et  sauf  la  première  et  la  der- 
nière de  chaque  série,  ces  vaisseaux 
se  réunissent  deux  à  deux  avant  d'aller 
constituer  le  tronc  aortique  dorsal.  Il 
y  a  par  conséquent  de  chaque  côté 
huit  racines  aortiques  dont  deux  sont 
simples  et  six  prennent  naissance  dans 
les  moitiés  contiguè's  de  deux  sacs 
branchiaux. 

Lnfin,  chez  les  Myxines,  le  tronc 
médian  dans  lequel  tous  les  vaisseaux 
afférents  des  branchies  viennent  se 
rendre  successivement,  se  continue  en 
avant  entre  les  deux  artères  céphali- 
ques,  où  il  forme  une  artère  céphalique 
accessoire,  et,  après  avoir  fourni  plu- 
sieurs brandies  latérales  etavoir  beau- 
coup diminué  de  calibre,  il  s'anasto- 
mose avec  la  partie  antérieure  du 
cercle  aortique  (e). 


(a)  Hyrtl,  Op.  cit.  (Sitzungsbericht  der  Akad.  der  Wîssensch'.  %u  Wien,  t.  VIII,  p.  236). 

(b)  Voyez,  pour  la  disposition  de  ces  branchies,  la  treizième  Leçon,  t.  II,  p.  244. 

(c)  Hyrtl,  loc.  cit. 

{&)  Monro,  Structure  of  Fishes,  pi.  1,  fig\  5. 

—  Marlin-Saint-Ange,  Circulation  considérée  chez  le  fœhis,  etc.,  fig.  29. 

(e)  Muller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  3"  partie,  pi.  1,  fie;.  1. 


3/|6  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

avec  le  vaisseau  efférent  de  la  branchie  suivante,  et  concourir, 
comme  nous  le  verrons  bientôt,  à  la  constitution  de  l'aorte 
dorsale  ;  l'autre,  au  contraire,  se  porte  en  avant  et  distribue 
ses  rameaux  dans  toute  la  portion  antérieure  et  supérieure  de 
la  tête.  On  la  désigne  ordinairement  sous  les  noms  d'artère 
carotide  ou  ÏÏ  artère  céphalique,  et  il  est  à  remarquer  qu'en 
général  ce  vaisseau  s'anastomose  avec  son  congénère  sous  la 
base  du  crâne,  de  façon  à  clore  en  avant  l'espèce  de  fourche 
formée  par  les  racines  de  l'aorte  dorsale,  et  à  donner  ainsi 
naissance  à  une  sorte  d'anneau  vasculaire  que  les  anatomistes 
désignent  ordinairement  sous  les  noms  de  cercle  artériel  ou  de 
cercle  céphalique  (1). 


(1)  11  existe  des  variations  nom- 
breuses dans  le  mode  d'origine  et  de 
division  des  artères  de  la  tête  des 
Poissons. 

Ainsi,  chez  les  Salmonés  ,  où  la 
disposition  de  ces  vaisseaux  a  été  étu- 
diée avec  beaucoup  de  soin  par 
MM.  Agassiz  et  Vogt,  V artère  caro- 
tide ou  céphalique,  formée  de  la  sorte 
par  Tune  des  branches  de  la  bifurca- 
tion de  l'artère  épibranchiale  anté- 
rieure ,  ou  vaisseau  efférent  de  la 
première  branchie,  se  divise  presque 
immédiatement  en  deux  troncs  prin- 
cipaux ,  savoir  :  une  artère  faciale, 
ou  carotide  externe,  et  une  artère 
encéphalo-palatine ,  ou  carotide  in- 
terne (a).  Quelquefois  cependant  ces 
vaisseaux  naissent  isolément. 

V artère  faciale  accompagne  le  tronc 
du  nerf  trijumeau,  et  envoie  des  ra- 
meaux à  l'orbite,  aux  fosses  nasales, 
aux  muscles  des  joues,  à  la  peau  du 
museau,  etc.  (b). 


V artère  carotide  interne  ou  encé- 
phalo-palatine se  divise  bientôt  en 
deux  branches.  Une ,  externe  ,  dite 
artère  orbito-palatinc  ,  qui  pénètre 
dans  l'orbite ,  envoie  des  rameaux 
aux  muscles  oculaires,  passe  ensuite 
dans  les  fosses  nasales  ,  où  elle  four- 
nit du  sang  à  la  membrane  pitui- 
taire,  va  de  là  aux  coins  de  la  bouche, 
et  s'y  termine  dans  les  os  et  les  tégu- 
ments de  la  partie  antérieure  de  la 
face.  L'autre  branche,  dite  artère  en- 
céphalo-oculaire,  semble  être  la  con- 
tinuation de  la  carotide  primitive,  et 
se  réunit  à  sa  congénère  pour  former 
la  portion  antérieure  du  cercle  ar- 
tériel et  donner  naissance  à  un  tronc 
médian  impair,  lequel  fournit  à  son 
tour  les  artères  cérébrales  et  les 
artères  oculaires. 

Les  artères  cérébrales  se  bifur- 
quent, et  leurs  deux  branches,  dirigées 
l'une  en  avant,  l'autre  en  arrière,  s'a- 
nastomosent sur  la  ligne  médiane,  de 


(a)  Exemple  :  la  Truite  (voyez  Agassiz  et  Vogt,  Op.  cit.,  pi.  L,  fig.  3). 
(6)  Voyez  Agassiz  et  Vogt,  Op.  Cit.,  pi.  K,  fig.  1 . 


CHEZ    LES    POISSONS. 


3/i7 


L'aorte  dorsale  occupe  la  ligne  médiane  et  s'étend  dans  toute  Aorte  dorsale 

1  tJ  et  ses  branches. 

la  longueur  du  corps,  au-dessous  de  la  colonne  vertébrale. 
Dans  la  région  abdominale,  elle  est  appliquée  contre  la  face 
inférieure  du  corps  des  vertèbres,  ou  logée  dans  un  sillon  dont 


façon  à  constituer  à  la  base  de  l'encé- 
phale un  rhombe  artériel  qui  est  l'ana- 
logue du  cercle  de  YVillis,  dont  j'aurai 
à  parler  bientôt  en  traitant  des  Ver- 
tébrés supérieurs,  et  qui  donne  nais- 
sance aux  artérioles  de  l'encéphale, 
ainsi  qu'à  une  artère  impaire  accolée 
à  la  face  inférieure  de  la  moelle  épi- 
nière  (a). 

Le  cercle  artériel  céphalique  ou 
aortique  est  mieux  caractérisé  chez 
les  Gades,  comme  on  peut  le  voir 
dans  une  très  belle  ligure  donnée  par 
M.  Millier  (6). 

Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  cet  anato- 
miste  a  trouvé  que  chez  les  Ganoïdes 
qui  sont  pourvus  d'une  branchie  ac- 
cessoire, le  vaisseau  efférent  de  la 
pseudo-brancliie  constitue  la  carotide 
interne,  et  pénètre  directement  dans 
la  cavité  crânienne.  Chez  les  Lépisos- 
téesla  carotide  interne  se  résout  aussi 
en  un  réseau  plexiforme,  et  la  caro- 
tide externe  ou  faciale  naît  directe- 
ment de  la  première  artère  épibran- 
chiale  proprement  dite. 

11  est  aussi  à  noter  que  chez  le 
lolyptèreM.  Millier  a  trouvé  les  caro- 
tides internes  représentées  par  un 
vaisseau  impair  qui  naît  du  point  de 
jonction  des  artères  épibranchiales  et 
traverse  la  base  de  l'os  occipital  (c). 

Chez  la  Chimère  arctique,  le  mode 


d'origine  de  ces  vaisseaux  n'est  pas 
tout  à  fait  le  même  que  chez  les  Pois- 
sons ordinaires.  Le  premier  vaisseau 
afférent,  ou  artère  épibranchiale  anté- 
rieure, pénètre  dansla  cavité  crânienne 
pour  remplir  le  rôle  d'une  carotide 
interne,  et  le  second  vaisseau  efférent, 
qui  d'ailleurs  concourt  comme  les  sui- 
vants à  la  formation  de  l'aorte  dorsale, 
donne  naissance  à  une  artère  carotide 
antérieure  dont  les  branches  se  distri- 
buent à  l'orbite  [cl). 

Chez  la  liaie,  le  cercle  aortique  n'est 
pas  fermé  en  avant  et  l'encéphale  re- 
çoit le  sang  par  deux  paires  d'artères  : 
l'une,  antérieure,  qui,  d'après  M.  Mill- 
ier, naîtrait  de  la  pseudo-branchie, 
comme  chez  les  Ganoïdes,  et  qui  pa- 
raît mériter  plus  particulièrement  le 
nom  de  carotide  interne  (e)  ;  l'autre 
qui  provient  du  cercle  aortique  en 
arrière  du  point  de  réunion  des  ar- 
tères épibranchiales  de  la  première  et 
de  la  seconde  paire,  et  qui  est  désignée 
ordinairement  sous  le  nom  de  carotide 
interne  postérieure,  mais  qui  paraît 
être  l'analogue  de  l'artère  vertébrale 
des  Mammifères.  Parvenue  dans  la 
cavité  crânienne,  cette  dernière  s'ana- 
stomose avec  sa  congénère  de  ma- 
nière à  constituer  un  anneau  vascu- 
laire  assez  semblable  au  cercle  de 
Willis,  dont  l'extrémité  postérieure  se 


(a)  Agassiz  et  Vogt,  Op.  cit.,  pi.  L,  dg.  3  à  6. 

(b)  Miiller,  Vergl.  Anat.  der  Myxlnoiden  (Mém.de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839,  pi.  3,  fig.  13). 

(c)  Miiller,  Ferntre  Bemerk.  uber  den  Bau  der  Ganoiden  (Bericht  der  Akad.  zu  Berlin,  184G, 
p.  68). 

(d)  Stannius  et  Siebold,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  t.  II,  p.  112, 

(«)  Miiller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  [Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839,  p.  23(3). 


oliS  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

elles  sont  creusées  ;  mais,  dans  la  région  caudale,  elle  se  trouve 
en  général  engagée  dans  une  sorte  de  canal  à  claire-voie 
formé  par  les  racines  des  apophyses  épineuses  sous-verté- 
brales (1).  Chemin  faisant,  elle  fournit,  au  niveau  de  chaque 


prolonge  en  une  artère  spinale  mé- 
diane (a). 

M.  Hyrtl  a  communiqué  dernière- 
ment à  l'Académie  de  Vienne  de  nou- 
velles observations  sur  la  disposition 
des  artères  céphaliques  des  Raies, 
mais  je  ne  connais  son  travail  que  par 
l'extrait  fort  court  qui  en  a  été  donné 
par  le  Journal  de  l'Institut  (b). 

On  retrouve  encore  le  même  plan 
organique  fondamental  chez  les  Myxi- 
noïdes,  mais  avec  d'autres  modifica- 
tions d'une  importance  secondaire  : 
ainsi  les  branches  qui  correspondent 
aux  artères  céphaliques  sont  exces- 
sivement allongées  et  ne  s'anasto- 
mosent entre  elles  que  très  loin  de 
l'appareil  branchial,  tout  près  de  la 
bouche,  et,  ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit, 
une  artère  médio-céphalique  impaire 
se  voit  dans  l'espace  qui  les  sépare  (c). 

(1)  En  général,  l'aorte  dorsale  est 
d'un  calibre  assez  uniforme  et  se  ré- 
trécit  graduellement  d'avant  enarricre; 
mais,  chez  plusieurs  Cyprinoïdes,  elle 
se  dilate  en  forme  de  sinus  sous  chaque 
vertèbre  abdominale. 

Chez  les  Esturgeons,  ce  tronc  arté- 
riel est  logé  dans  une  gaine  cartilagi- 
neuse ou  un  sillon  plus  ou  moins 
profond  situé  à  la  face  inférieure  de 
la  colonne  vertébrale ,  et  ses  parois 


y  adhèrent  très  intimement  :  d'après 
M.  Stannius,  elles  ne  seraient  même  re- 
présentées que  par  le  périchondre  {cl); 
un  ligament  fibro-élastique  longitudi- 
nal fait  saillie  dans  ce  canal  (e).  Les 
Spatulaires  présentent  une  disposition 
analogue. 

Chez  plusieurs  Squales  et  chez  di- 
vers Poissons  osseux  ordinaires,  tels 
que  l'Alose,  le  Hareng,  le  Brochet  et 
le  Silure,  l'aorte  ventrale  est  logée  dans 
un  sillon  creusé  à  la  face  inférieure  de 
la  colonne  vertébrale  et  n'est  pourvue 
d'une  tunique  élastique  qu'à  sa  face 
inférieure;  des  bandes  aponévrotiques 
passentd'unbord  à  l'autre  de  ce  canal, 
d'espace  en  espace,  en  manière  de 
sangles,  et  dans  les  intervalles  le  vais- 
seau ainsi  bridé  en  dessous  se  renfle. 
De  même  que  chez  les  Esturgeons,  il 
y  a  dans  ce  même  canal  un  ligament 
qui  vient  du  crâne,  et  la  tunique  élas- 
tique paraît  être  un  prolongement  de 
celte  bande.  Lorsque  l'aorte  est  libre, 
elle  n'est  pas  toujours  placée  sur  la 
ligne  médiane  du  corps.  Ainsi,  chez 
VEsox  Bellone  et  le  Sphyrœna  Spel, 
elle  est  à  gauche  (/").  Chez  les  Syn- 
gnathes, ce  vaisseau  se  trouve  dans  un 
sillon  pratiqué  à  la  face  inférieure  du 
rein  gauche,  et  chez  YEcheneis  il 
adhère  au  rein  droit  ;  chez  VEngraulis 


(a)  Voyez  Monro,  Structure  of  Fishes,  pi.  1,  ûg.  5. 
(6)  N°  1239,  30  septembre  1857,  p.  324. 

(c)  Mùller,   Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  3  Fortsetz.,  pi.  1,  fig\  1  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin 
pour  1839). 

(d)  Voyez  Stannius  et  Siebold,  Handb.  der  Zootomie,  2°  édit.,  t.  Il,  p.  243. 

(e)  Baèr,  Bericht  der  anatom.  Anstalt  zu  Kœnigsberg,  1819,  p.  27. 
(/■)  Stannius,  loc.  cit.,  p.  243. 


CHEZ    LES    POISSONS.  3/l9 

espace  intervertébral,  une  paire  d'artères  intercostales  qui  dis- 
tribuent leurs  branches  aux  muscles  du  tronc  et  de  la 
queue  (1).  Enfin  elle  donne  aussi  naissance  à  un  grand  vais- 
seau qui  est  chargé  de  porter  le  sang  aux  viscères  abdomi- 
naux (2),  et  qui  fournit  à  la  vessie  natatoire  une  branche  dont 


il  est  logé  dans  la  substance  de  cette 
glande  (a). 

(1)  Chez  la  Perche  (b)  et  l'Aspe,  ou 
Leuciscus  aspius  (c)  ,  il  existe  une 
paire  d'artères  intercostales  correspon- 
dante à  chaque  vertèbre.  Il  en  est  de 
même  chez  les  Truites,  dans  le  très 
jeune  âge  [d)  ;  mais,  par  les  progrès  du 
développement,  ce  caractère  d'unifor- 
mité disparaît,  et  l'on  ne  trouve  qu'une 
paire  de  ces  vaisseaux  pour  deux 
ou  trois  espaces  intervertébraux  (e). 
Quoi  qu'il  en  soit,  une  de  leurs  bran- 
ches remonte  le  long  des  apophyses 
épineusesdes  vertèbres  et  va  se  ramifier 
dans  les  muscles  de  la  région  dorsale  du 
corps,  ou  même  dans  la  nageoire  mé- 
diane dont  cette  partie  est  garnie  ; 
une  autre  branche  se  porte  en  bas,  en 
suivant  la  direction  des  côtes,  et  se 
distribue  de  la  même  manière  aux 
muscles  et  aux  téguments  de  la  por- 
tion ventrale  du  corps.  Les  artères 
intercostales  qui  se  prolongent  dans 
les  nageoires  abdominales,  et  qui  cor- 
respondent par  conséquent  aux  ar- 
tères iliaques  et  crurales  des  Ver- 
tébrés supérieurs,  sont  un  peu  plus 
développées  que  les  autres,  mais  ne 
présentent  du  reste  aucune  particula- 
rité importante. 

Une  autre  série  de  petites  branches 


artérielles  naît  aussi  de  chaque  côté, 
soit  de  la  face  inférieure  de  l'aorte  dor- 
sale, soit  des  intercostales,  et  se  distri- 
bue aux  reins  et  à  la  vessie  natatoire. 

Les  artérioles  qui  se  rendent  à  la 
moelle  épinière  ont  une  origine  ana- 
logue. 

(2)  Chez  les  Poissons  osseux,  la  plu- 
part des  artères  destinées  aux  viscères 
abdominaux  naissent  d'un  tronc  uni- 
que qui  se  détache  de  l'aorte  dorsale 
presque  aussitôt  la  naissance  de  celle- 
ci,  traverse  la  portion  antérieure  des 
reins,  et  se  montre  à  découvert  au- 
dessus  de  l'œsophage,  pour  se  porter 
ensuite  obliquement  en  arrière  et  en 
bas.  La  manière  dont  cette  artère 
abdominale  (ou  artère  cœliaque,  Cu- 
vier)  se  ramifie,  varie  un  peu  suivant 
les  espèces.  Ainsi,  dans  la  Truite  (/), 
elle  fournit  quatre  branches  princi- 
pales : 

1°  Une  artère  intestinale,  dont  les 
principales  divisions  sont  :  une  ar- 
tère gastro  -  splénique,  qui  suit  la 
grande  courbure  de  l'estomac,  envoie 
beaucoup  de  ramuscules  à  cet  organe, 
et  va  se  terminer  dans  la  rate  ;  une 
artère  gastro-hépatique,  qui  passe  à 
droite  de  l'estomac,  longe  la  petite 
courbure  de  cet  organe,  y  distribue 
des  ramuscules ,  fournit  au  foie  une 


(o)  Hyrtl,  Das  uropoëtischB  System  der  Knochenfish.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  II,  p.  23). 

(b)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  7,  fig.  1. 

(c)  Carus  et  A.  Otto,  Tab.  Anat.  Comp.  Illustr.,  pars  vi,  pi.  4,  fig.  1. 

(d)  Vogt,  Embryologie  des  Salmones,  pi.  4  a,  fig.  9  1. 

(e)  Agassiz  et  Yogt,  Anatomie  des  Salmones,  pi.  K,  fîg.  1. 

(/")  Voyez  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones,  pi.  K,  fig;  2. 


350  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

les  ramuscules  forment  clans  l'intérieur  de  cet  organe  les  plexus 
vasculaires  connus  sous  le  nom  de  corps  rouges  (1  ). 

La  plupart  des  artères  ne  présentent  rien  de  bien  remarquable. 
Celles  qui  se  rendent  aux  nageoires  pectorales,  et  qui  peuvent 


artère  hépatique  et  aux  appendices 
pyloriques  plusieurs  ramuscules,  puis 
se  termine  comme  l'a  précédente  dans 
la  raie;  enfin  deux  artères  mésenté- 
riques  qui  suivent  les  deux  bords 
opposés  de  l'intestin  jusque  dans  le 
voisinage  de  l'anus. 

2°  Une  artère  de  la  vessie  nata- 
toire, qui  est  très  grêle  et  qui  longe  la 
face  inférieure  de  cet  organe. 

3°  Deux  artères  spermatiques,  qui 
se  logent  dans  le  sillon  pratiqué  à  la 
face  inférieure  des  ovaires  ou  des  testi- 
cules, et  y  fournissent  des  ramuscules 
dont  la  disposition  rappelle  un  peu 
celle  des  barbes  d'une  plume. 

Chez  la  Perche, le  mode  de  distribu- 
tion de  ces  vaisseaux  est  à  peu  près  le 
même  (a). 

Chez  la  RaieJ'artère  abdominale  est 
remplacée  par  deux  troncs  impairs 
qui  naissent  de  l'aorte,  à  quelque  dis- 
tance l'un  de  l'autre  (6).  On  donne  gé- 
néralement le  nom  d'artère  cœliaque 
au  premier  de  ces  vaisseaux,  dont  les 
branches  se  distribuent  principale- 
ment à  la  valvule  spirale  de  l'intestin, 
au  foie  et  à  l'estomac.  Le  second,  ap- 
pelé artère  mésentérique,  fournil  des 
rameaux  au  pancréas  et  à  l'intes- 
tin (c).  D'autres  branches  de  l'aorte 
naissent  plus  en  arrière  et  se  distri- 


buenlà  l'oviducte,  etc. Enfin  les  artères 
rénales,  au  lieu  de  consister  en  une 
multitude  de  branches  provenant  des 
intercostales, sont  fournies  par  un  gros 
tronc  qui  naît  de  la  partie  postérieure 
de  l'aorte  ventrale,  s'avance  le  long 
des  reins  en  y  donnant  des  ramus- 
cules, fournit  une  branche  épigaslrique 
et  va  se  terminer  dans  la  nageoire  de 
l'anus  (d). 

(1)  Voyez  ci-dessus,  t.  II,  p.  377. 
Le  mode  d'origine  et  de  distribu- 
tion des  artères  de  la  vessie  natatoire 
varie  beaucoup.  Tantôt  elles  naissent 
directement  de  l'aorte,  comme  nous 
venons  de  le  voir  chez  la  Perche;  d'au- 
tres fois  elles  proviennent   du  tronc 
cœliaque  (chez  la  Morue,  par  exem- 
ple), et,  ainsi  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion 
de  le  dire,  elles  sont  quelquefois  four- 
nies par   les   artères    épibranchiales 
postérieures  (e).  M.  J.  Millier,  qui  en 
a  fait  une  étude  attentive,   distingue 
dans  leur  mode  de  distribution  quatre 
formes  principales.  Ainsi,  chez  cer- 
tains Poissons  (la  Carpe,  par  exemple), 
ces  vaisseaux  se  résolvent  en  petites 
touffes    de    capillaires   disposées    en 
éventail  et   disséminées  sur  presque 
toute  la  surface  interne  de  la  vessie 
natatoire.  Dans  le  second  type,  leurs 
ramuscules  terminaux  se  réunissent 


(a)  Voyez  Olivier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  7,  fig.  1,  et  pi.  8,  fig.  2  et  3. 
—  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal  Je  Olivier,  Poissons,  pi.  2,  fig.  1. 
(6)  Voyez  Monro,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  5. 

(c)  Monro,  Op.  cit.,  pi.  3. 

(d)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  222  (2a  édit.). 

(e)  Voyez  ci-dessus,  page  330. 


CHEZ    LES    POISSONS.     ■  35  L 

être  désignées  sous  le  nom  d'artères  claviculaires  (1),  offrent 
parfois  un  petit  renflement  que  plusieurs  anatomistes  ont  con- 
sidéré comme  étant  un  bulbe  contractile  propre  à  pousser 
le  sang  vers  les  parties  périphériques  de  l'appareil  circulatoire  ; 


en  petits  paquets  radiés,  et  se  localisent 
plus  que  clans  le  cas  précédent,  de 
façon  à  constituer  des  ganglions  vas- 
culaires  rudimentaires ;  mode  d'orga- 
nisation qui  se  voit  chez  le  Brochet. 
Dans  le  troisième  type,  l'artère  se  di- 
vise en  plusieurs  branches  et  constitue 
ensuite  un  gros  rete  mirabile  en 
forme  de  houppes,  dont  les  canaux 
efférents  se  dirigent  vers  le  bord  de 
l'organe  pour  se  ramifier  ensuite  au 
loin  (exemples  :1a  Morue,  la  Lotte,  la 
Perche,  etc.).  Enfin,  le  quatrième  type 
est  caractérisé  par  l'existence  de  ré- 
seaux admirables  en  forme  de  faisceaux 
bipolaires,  disposition  qui  se  voit  chez 
les  Anguilles  (a). 

Chez  les  Ganoïdes,  les  vaisseaux 
sanguins  de  la  vessie  aérienne  ne  se 
résolvent  pas  en  ganglions  sanguins, 
mais  se  distribuent  tout  de  suite  dans 
les  parois  de  cet  organe,  sous  la  forme 
de  réseaux  capillaires  ordinaires. 


On  doit  à  M.  Quekett  de  très  bonnes 
figures  représentant  le  mode  d'arran- 
gement des  vaisseaux  sanguins  dans 
les  corps  rouges  et  les  autres  parties 
de  la  vessie  natatoire  chez  divers  Pois- 
sons, et  plus  spécialement  chez  l'An- 
guille et  la  Morue  (6). 

(1)  L'existence  de  ces  renflements 
en  forme  de  bulbes,  sur  le  trajet  des 
artères  claviculaires,  a  été  constatée 
à  peu  près  en  même  temps  par  Du- 
vernoy  chez  la  Chimère  arctique  (c) 
et  par  M.  J.  Davy  chez  la  Torpille  (d). 
Duvernoy  et  M.  Valentin  (e)  ont  con- 
sidéré ces  organes  comme  des  cœurs 
accessoires.  Mais,  d'après  les  observa- 
tions récentes  de  M.   Leydig,  il  paraît 
que  les  bourrelets  dont  ces   artères 
sont  entourées  ne  sont  pas  de   na- 
ture  musculaire  (  f).  Du  reste,  lors 
même  qu'ils  seraient  contractiles,  rien 
ne  nous  autoriserait  à   penser  qu'ils 
pourraient  accélérer  le  cours  du  sang. 


(a)  Miiller,  Yergl.  Anat.  der  Myxinoiden  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour.  1  839,  pi.  5). 
Voyez  aussi  à  ce  sujet  :  De  la  Roche,  Observ.  sur  la   vessie  aérienne  des  Poissons  (Ann.  du 
Muséum,  1809,  t.  XIV,  p.  20-2  et  suiv.)- 

—  Cuvier,  Rapport  sur  le  Mémoire  de  M.  de  la  Roche  {loc.  cit.,  p.  176). 
—  Idem,  Histoire  naturelle  des  Poissons,  1. 1,  pi.  7,  fig.  1. 

—  Rathke,  Zur  Anatomie  der  Fische  (Mùller's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol.,  1838,  p.  413, 
pi.  12,  fig.  3,  4  et  9). 

—  Treviranus,  Beobacht-  aus  der  Anat.  und  Physiol.,  1839,  t.  I,p.  19,  pi.  5,  fig1.  31. 

—  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VIII,  p.  710. 

(6)  Quekett,  On  a  Peculiar  Arrangement  of  Blood-Vessels  in  the  Air-Bladder  of  Fishes  {Trans. 
of  the  Microscop .  Soc.  of  London,  1844,  p.  99,  pi.  12  et  13). 

(c)  Duvernoy,  Note  sur  deux  bulbes  artériels  faisant  fonction  de  cœurs  accessoires  che%  la 
Chimère  arctique  (Ann.  des  sciences  nat.,  1837,  2°  série,  t.  VIII,  p.  35,  pi.  3,  fig.  1). 

(d)  J.  Davy,  Exp.  and   Observ.   on  the  Torpédo  (Research.,  Physiol.   and  Anat.,  1839  ,t.  I, 
p.  43,  pi.  I,  fig.  3). 

(e)  Valentin,  Ueber  das  centrale  Nervensystem  und  die  Nebenherxen   der  Chimœra   monslrosa 
(Mùller's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol.,  1842,  p.  42,  pi.  2,  fig.  G). 

(f)  Leydig,  Zur  Anatomie  und  Histologie  der  Chimœra  monstrosa  (Mùller's  Archiv  fur  Anat. 
mal  Physiol.,  1851,  p.  256). 


LU. 


23 


352  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

mais  ces  prétendus  cœurs  accessoires  ne  paraissent  pas  être  de 
nature  musculaire,  et  lors  même  qu'ils  seraient  contractiles, 
leur  action  aurait  plutôt  pour  effet  de  retarder  le  passage  de  ce 
liquide  (1  ) . 

Je  dois  faire  remarquer  aussi  que  chez  le  Thon  les  princi- 
pales branches  de  l'artère  abdominale  oucœliaque  présentent 
une  disposition  analogue  à  celle  que  nous  avions  déjà  ren- 
contrée sur  le  trajet  des  artères  hyoïdiennes.  En  effet,  elles 
se  divisent  en  houppes  de  vaisseaux  très  grêles  qui  bientôt 
se  réunissent  de  nouveau  pour  constituer  des  troncs  de  dis- 
tribution ,  et  elles  constituent  de  la  sorte  des  lacis  capil- 
laires que  les  anatomistes  désignent  sous  le  nom  de  rete  mi- 


En  eilet,  Tarière  ne.  présente  dans  ce 
point  aucune  valvule  qui  puisse  em- 
pêcher le  reflux  de  ce  liquide,  et  l'o- 
bliger à  couler  vers  le  système  capil- 
laire avec  une  vitesse  plus  grande 
quand  le  vaisseau  se  rétrécirait,  et,par 
conséquent,  toute  constriction  de  ce 
genre  aurait  pour  effet  de  ralentir  le 
courant  plutôt  que  de  l'accélérer. 

(ljLes  artères  claviculaires (que  les 
anatomistes  désignent  aussi  parfois 
sous  les  noms  d'artères  scapulaires, 
artères  axillaires ,  artères  innomi- 
nées,  etc.)  naissent  en  général  sous 
la  base  du  crâne,  mais  varient  beau- 
coup dans  leur  mode  d'origine.  En 
effet,  tantôt  elles  proviennent  directe- 
ment de  l'aorte,  ainsi  que  cela  se  voit 
chez  la  Perche,  la  Baudroie  et  la 
Raie;  d'autres  fois  elles  sortent  des  ra- 
cines de  l'aorte,  chez  les  Gades,  par 
exemple  (a)  ;  et  d'autres  fois  encore 


elles  sont  fournies  par  le  tronc  com- 
mun des  deux  artères  épinranchiales 
antérieures,  disposition  qui  se  ren- 
contre chez  le  Brochet.  Quoi  qu'il  en 
soit,  ces  vaisseauxse  portent  en  arrière, 
côtoient  le  bord  des  os  de  l'épaule, 
et  se  divisent  d'ordinaire  en  deux 
branches  principales,  dont  l'une  longe 
la  ligne  latérale  du  corps  et  l'autre 
va  se  terminer  dans  la  nageoire  pec- 
torale. 

Il  est  à  noter  que,  chez  les  Raies,  ces 
artères,  dont  le  volume  est  très  con- 
sidérable, envoient  vers  la  tête  une 
grosse  branche  anastomotique  qui 
communique  avec  la  série  entière  des 
vaisseaux  efférents  des  branchies,  ou 
artères  épibranchiales,  le  long  du  côté 
externe  de  l'appareil  respiratoire  (a). 
Chez  le  Thon,  ces  artères  naissent 
plus  en  arrière  que  l'artère  viscé- 
rale (6). 


(«)  Monro,  The  Structure  ofFishes,  pi.  1,  fig.  &  et  5). 

(6)  Eschricht  et  Millier,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  4  835,  pi.  3,  %.  6)* 


CHEZ    LES    POISSONS.  35o 

rabile  (1).  Une  disposition  analogue  a  été  observée  citez  des 
Squales  (2). 

§  12.  — -La  portion  veineuse  de  l'appareil  circulatoire,  qui     système 

i/i  i  1  i  -i  veineux 

est  chargée  de  ramener  le  sang  de  toutes  les  parties  du  corps  des  poissons. 
des  Poissons  jusque  dans  le  cœur  se  compose  de  deux  systèmes 
principaux  de  vaisseaux  à  parois  minces.  L'un  de  ces  systèmes 
appartient  essentiellement  aux  muscles  et  aux  autres  organes  de 
la  vie  de  relation,  et  l'on  peut  le  désigner  sous  le  nom  de  sys- 
tème veineux  rachidien,  à  raison  de  ses  rapports  intimes  avec 
la  colonne  vertébrale  et  ses  dépendances.  L'autre  est  spécia- 
lement affecté  au  service  des  viscères  abdominaux ,  et  on  l'ap- 
pelle généralement  le  système  de  la  veine  porte ,  ou  système 
viscéral.  Enfin  ,  il  est  encore  un  troisième  système  veineux 
qui  dépend  de  l'appareil  hyoïdien,  mais  qui  n'offre  que  peu 
d'importance  :  on  lui  a  donné  le  nom  de  système  bronchique  t 
ou  veine  de  Duvernoy. 

Ces  divers  systèmes  sont  liés  entre  eux  d'une  manière  plus 
ou  moins  intime,  et  ils  vont  tous  verser  le  sang  dans  un  grand 
réservoir  veineux  qui  est  en  quelque  sorte  le  vestibule  de  l'oreil- 


(1)  Ces   réseaux  capillaires,  situés  (2)  Chez  VAlopias  vulpes,  un  rete 

sur  le  trajet  du  sang  artériel  qui  se  mirabile  diffus,  composé  de  branches 

rend  aux  principaux   organes  de  la  artérielles  et   veineuses,  s'étend  sur 

digestion,  se  voient  près  de  la  surface  presque  toute  la  surface  de  l'estomac 

inférieure  du  foie,   et  constituent  un  et  du  gros  intestin  (6). 

nombre  considérable  de  mèches  vas-  Chez  le  Squale-nez,  ou  Lamna  cor- 

culaires  de  forme  conique,  dans  les-  nubica,  une  disposition  analogue  se 

quelles  on  trouve  des  veines  disposées  voit  à  la  partie  antérieure  de  l'abdo- 

de  la  même  manière,  mais  sans  com-  men,  près  de  l'œsophage.  Les  plexus 

munication  avec  les  arlérioles.  On  en  vasculaires  ainsi   constitués  ressem- 


doit    la  connaissance    au  professeur      blent  à  ceux  du  Thon  (c). 
Eschricht,  de  Copenhague  (a). 


(a)  Eschricht  et  Miiller,  Ueber  die  arteribsen  und  veniisen  Wundemetze  an  der  Leber  und  einen 
merkwùrdigen  Baudieses  Organes  beim  Thunfische  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1835,  p.  10 
etsuiv.,  pi.  2  et  3,  fig.  1 ,  3  et  A). 

(6)  Al.  Barth,  De  retibus  mirabilibus  (Dissert,  inaug\,  Berlin,  1837,  p.  9,  fig-.  1). 

(c)  Mùller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden  [Mém\  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839,  pi,  5). 


Oùll  APPAREIL    DE    LA.    CIRCULATION 

lette  du  cœur,  et  qui  est  connu  des  anatomistes  sous  le  nom  de 
sinus  de  Cuvier,  ou  sinus  précardiaque. 

Pour  embrasser  d'un  seul  coup  d'œil  l'ensemble  de  cet  appa- 
reil vasculaire,  il  est  bon  d'observer  la  circulation  chez  un  très 
jeune  Poisson,  dont  les  tissus  offrent  encore  assez  de  transpa- 
rence pour  nous  permettre  de  distinguer  les  courants  sanguins 
jusque  dans  les  parties  les  plus  profondes  de  l'organisme  :  une 
petite  Truite  nouvellement  éclose ,  par  exemple  (1).  On  voit 
alors  que  chacune  des  artères  intercostales  est  accompagnée 
d'une  veine  qui  se  dirige  vers  la  face  inférieure  de  la  colonne 
vertébrale  et  y  débouche  dans  un  vaisseau  longitudinal  situé 
de  chaque  côté  de  la  ligne  médiane  au-dessous  de  l'artère  aorte. 
Ces  deux  troncs  longitudinaux,  appelés  veines  cardinales,  sont 
d'abord  accolés  l'un  à  l'autre,  ou  confondus  en  un  seul  vaisseau, 
et  se  portent  directement  d'arrière  en  avant  depuis  l'extrémité 
postérieure  delà  queue  jusque  dans  l'abdomen  ;  mais,  vers  la 
partie  antérieure  de  cette  chambre  viscérale,  ils  s'écartent 
entre  eux  pour  gagner  la  partie  latérale  du  corps,  et  reçoivent  le 
sang  qui  revient  de  la  tête  par  une  paire  de  vaisseaux  dits  veines 
jugulaires,  lesquelles  se  dirigent  d'avant  en  arrière.  Le  tronc 
commun  formé  de  chaque  côté  du  corps  par  la  réunion  de  la  veine 
cardinale  et  delà  veine  jugulaire  a  reçu  le  nom  de  canal  deCuvier, 
et  se  porte  en  dedans  vers  son  congénère  pour  aller  concourir 
à  former  avec  lui  le  sinus  veineux  précardiaque. 

La  disposition  du  système  de  la  veine  porte  est  moins  simple. 
Les  veinules  qui  naissent  sur  les  parois  de  la  portion  postérieure 
de  l'intestin  se  réunissent  pour  constituer  un  vaisseau  principal 
qui,  situé  à  la  partie  inférieure  de  l'abdomen,  se  dirige  d'arrière 

(1)   Nous  étudierons  plus  tard  les      nilive  dont  il  est  question  ici,  et  dont 
diverses  formes  par  lesquelles  l'appa-       on  trouve  de  très  bonnes  figures  dans 
reil  veineux  des  Poissons  passe  avant      l'ouvrage  de  M.  Vogt  (a). 
que  d'acquérir  la  forme  presque  défi- 
fa)  Vogt,  Embryologie  des  Salmones,  pi.  4,  fig.  91,  etc. 


CHEZ    LES    POISSONS.  355 

en  avant,  et,  chemin  faisant,  reçoit  des  branches  des  autres 
portions  du  canal  digestif.  Parvenue  au  foie,  cette  veine  s'y  en- 
fonce et  s'y  ramifie  de  façon  à  y  constituer  un  lacis  vasculaire 
très  riche,  dont  les  branches  se  rejoignent  ensuite  de  nouveau  . 
pour  reformer  un  tronc  veineux  auquel  on  donne  le  nom  de 
veine  hépatique.  Enfin,  cette  dernière  veine  va  se  déverser 
comme  les  autres  dans  le  sinus  précardiaque. 

Telle  est  la  composition  générale  du  système  veineux  des 
jeunes  Poissons.  Voyons  maintenant  comment  chacune  des 
parties  constitutives  de  cet  appareil  est  disposée  chez  l'Animal 
parfait. 

§  13.  —  Les  courants  sanguins  qui   retournent  au  coîur      voines 

.         .  cardinales 

varient  beaucoup  dans  leur  mode  de  groupement,  et  ont  une  et  leurs 
tendance  remarquable  à  se  disjoindre,  pour  ainsi  dire,  sur  cer- 
tains points,  de  façon  à  reconstituer  des  capillaires  plus  ou 
moins  comparables  au  réseau  veineux  que  nous  avons  vu  se 
développer  sur  le  trajet  des  veines  viscérales  dans  l'intérieur 
du  foie,  et  donner  au  système  de  la  veine  porte  son  caractère  le 
plus  important.  Cette  disposition  est  toujours  plus  ou  moins 
marquée  dans  quelques-unes  des  veines  qui  traversent  les  reins, 
et  il  en  résulte  qu'une  portion  du  sang  qui  revient  des  parties 
postérieures  du  corps  par  les  veines  cardinales  est  distribuée 
dans  la  substance  de  ces  glandes  à  la  manière  du  sang  artériel, 
puis  ce  sang  est  réuni  de  nouveau  dans  des  troncs  veineux  qui 
le  conduisent  vers  le  cœur.  Il  y  a  donc  chez  les  Poissons  une 
veine  porte  rénale  aussi  bien  qu'une  veine  porte  hépatique.  On 
en  doit  la  découverte  à  un  anatomiste  danois,  Jacobson,  et  l'on 
donne  souvent  le  nom  de  cet  observateur  au  système  circula- 
toire rénal  ainsi  constitué  (1). 

(1)  Jacobson,  dont  le  travail  sur  le       tiles  et  des  Oiseaux,  parut  en  1821  (a). 
système  veineux  des  Poissons,  des  Rep-      n'a    indiqué  sa  découverte  que  d'une 

(a)  Jacobson,  De  syslemate  venoso  peculiari  in  permultis  Animalibus  ohservaio.  Copenhague. 


rénale. 


o50  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION' 

voir»  poriH  Chez  les  Poissons,  où  ce  mode  d'organisation  est  le  mieux 
caractérisé,  tels  que  les  Baudroies  et  les  Gymnotes,  la  veine 
caudale,  ou  portion  postérieure  de  la  veine  cardinale,  après 
avoir  reçu  les  branches  veineuses  de  toute  la  portion  posté- 
rieure du  corps,  arrive  dans  la  cavité  abdominale,  et  là  se  divise 
en  deux  branches  ;  mais  celles-ci,  au  lieu  de  poursuivre  leur 
route  vers  le  cœur,  ainsi  que  le  font  les  veines  cardinales  de 
l'embryon,  plongent  dans  la  substance  des  reins  et  s'y  divisent 
en  rameaux  dont  le  chevelu  constitue  un  réseau  capillaire  ;  puis 
les  canalicules  de  ce  lacis,  venant  à  se  réunir  de  nouveau,  devien- 
nent les  racines  d'un  système  de  veines  rénales  efférentes,  et  se 
continuent  en  avant  avec  la  portion  antérieure  des  veines  car- 
dinales, lesquelles,  après  s'être  réunies  aux  veines  jugulaires, 
vont  déboucher  dans  le  sinus  précardiaque.  La  veine  cardinale 
primitive,  qui  d'abord  s'était  bifurquée  seulement  dans  la  cavité 


manière  très  succincte,  et,  bien  que  taient  que  des  veines  ordinaires  qui 
les  principaux  résultats  qu'il  annonça  suivaient  une  marche  récurrente  (6), 
aient  été  bientôt  après  confirmés  Mais  cette  opinion  repose  sur  des 
par  les  recherches  de  Nicolai  (a) ,  observations  incomplètes  ou  erronées, 
la  plupart  des  anatomistes  ont  cru  et  les  nouvelles  recherches  faites  de- 
devoir  lévoquer  en  doute  l'existence  puis  quelques  années  sur  ce  sujet  par 
d'une  veine  porte  rénale,  et  inter-  plusieurs  anatomistes  habiles,  et  sur- 
pré  ter  d'une  autre  manière  le  cours  tout  par  M.  Bonsdorff,  de  Helsingfors, 
du  sang  dans  cette  portion'  de  l'ap-  et  M.  le  professeur  Uyrtl,  de  Vienne, 
pareil  circulatoire.  Ainsi  Cuvier,  Mec-  mettent  hors  de  toute  contestation 
kel  ,  Duvernoy  ,  M.  Owen  et  plu-  l'existence  d'une  circulation  veineuse 
sieurs  autres  naturalistes  éminents  portale  plus  ou  moinsdéveloppée  dans 
ont  pensé  que  les  prétendues  veines  cette  classe  d'animaux  (c). 
rénales  efférentes  de  Jacobson   n'é- 

(a)  Nicolai,  Untersuchungen  ùber  den  Verlan f  und  die  Vertheilung  der  Veinen  bel  einigen 
Vôgeln,  Amphibien,  und  Fischen  (Isis,  4  826,  1. 1,  p.  404). 
(6)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  p.  516. 

—  Meckel,  Anatomie  comparée.,  t.  IX,  p.  266. 

—  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  2*  édit.,  t.  VI,  p.  262. 

—  Owen,  Lectures  on  the  Comp.  Anat.  and  Physiol.  ofthe  Vertebrate  Animais,  p.  251. 

(c)  Bonsdorff,  Bidrag  till  Blodkarlsystemets  jemfôrande  Anatomie.  Portven  systemel  hos 
Gudus  Lota  (Acta  Soc.  scient.  Fennicœ,   1852,  t.  III,  p.  571,  pi.  9). 

Hyi'il ,  Das  uropoëtische  System  der  Knochenftsche  (Denkscliriften  der  hais.  Akad.  der 
Wissenschaflen  zu  Wién,  1851,  t.  II,  p.  27). 

—  Slannius,  Ilandbuch  der  Zootnmie,  2e  édit.,  1854,  t.  Il,  p.  247. 


CHEZ    LES    POISSONS.  357 

abdominale  pour  constituer  en  avant  les  deux  troncs  à  l'aide 
desquels  la  plus  grande  partie  du  sang  veineux  de  la  partie  post- 
céphalique  du  corps  est  versée  dans  les  jugulaires,  se  trouve 
donc  interrompue  vers  le  milieu  de  son  cours,  et  sa  moitié  pos- 
térieure ou  caudale  ne  communique  avec  sa  moitié  antérieure 
que  par  l'intermédiaire  d'un  réseau  capillaire  dont  la  portion 
postérieure  constitue  les  veines  rénales  afférentes,  et  la  portion 
antérieure  forme  les  veines  rénales  efférentes  ou  veines  rénales 
proprement  dites  ;  enfin  les  tronçons  antérieurs  des  deux  veines 
cardinales  qui  font  suite  à  ces  veines  efférentes,  et  qui  peuvent 
être  désignées  sous  le  nom  de  veines  abdominales  (1),  repré- 
sentent, comme  nous  le  verrons  bientôt,  les  veines  azygos  des 
Vertébrés  supérieurs  (2). 

Chez  la  plupart  des  Poissons,  cette  transformation  n'est  pas 
aussi  complète  :  une  des  divisions  de  la  veine  caudale  plonge 
dans  la  substance  du  rein  et  s'y  ramifie,  tandis  que  sa  partie 
antérieure  forme,  comme  dans  le  cas  précédent,  une  veine 
rénale  efférente,  et  entre  ces  deux  points  elle  s'atrophie  ;  mais 


(1)  Quelques  anatomistes  appellent  chez  les  Diodons,  les  Tétrodons,  les 
ces  vaisseaux,  des  veines  caves  posté-  Triacanlhes  ,  les  Rubans  (Cepola)  et 
Heures  (a);  mais,  ainsi  que  nous  le  quelques  Siluroïdes  ;  seulement  la 
venons  bien  lot,  ils  ne  sont  pas  les  veine  caudale  ne  se  bifurque  pas 
analogues  de  la  veine  cave  inférieure  avant  de  plonger  dans  la  substance  des 
de  l'Homme  et  des  autres  Vertébrés  reins  pour  s'y  ramifier  (b).  Cette  der- 
supérieurs,  et  par  conséquent  ils  ne  nière  disposition  se  rencontre  égale- 
doivent  pas  porter  le  même  nom.  ment  chez  la  Lotte,  où  elle  avait  été 

(2)  M.  I-lyrtl  a  constaté  ce  mode  aperçue  par  Nicolai  (c),  et  où  elle  avait 
d'organisation  chez  les  Merluches  et  été  démontrée  d'une  manière  1res 
les  Scorpénoïdes  du  genre  Pterois.  satisfaisante  par  M.  Bonsdorff,  qui  en 
Une  structure  analogue  existe  aussi  a  donné  une  excellente  figure  (d). 


(a)  Monro,  Structure  ofFishes,  p.  il. 

—  Olivier,  Anat.  comparée,  t.  VI,  p.  257. 

—  Meckel,  Anat.  comparée,  t.  IX,  p.  261. 

(b)  Hjrtl,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  II,  p.  34,  pi. 9,%.  2). 

(c)  Nicotoi,  Op.  cit.  (Isis,  1826,  p.  404). 

(d)  Bonsdorff,  Bidrag  till  Blodkdrlsystemets  j'emfQrande  Anatomie   (Acta  Socictatis  scientia- 
rum  Fenniriz,  1852,  t.  III,  p.  447,  pi.  9). 


358  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

l'autre  branche  continue  sa  roule  vers  le  cœur  sans  subir 
aucune  interruption  de  ce  genre ,  et  va  constituer  l'une  des 
veines  abdominales  sans  avoir  changé  de  caractère  (1).  Dans  ce 
cas,  les  reins  ne  reçoivent  qu'une  petite  portion  du  sang  vei- 
neux de  la  queue,  la  plus  grande  partie  de  ce  liquide  conti- 
nuant directement  sa  route  par  le  grand  vaisseau,  qui  prend 
successivement  les  noms  de  veine  caudale  et  de  veine  abdo- 
minale, ou  branche  terminale  de  la  veine  cardinale.  Mais  le 
système  portai  n'en  existe  pas  moins  dans  les  glandes  uri- 
naires,  car  il  y  a  toujours  un  certain  nombre  des  veines  du 
dos  ou  veines  intercostales  qui  ,  au  lieu  d'aller  déboucher 
directement  dans  les  troncs  cardinaux  ,  pénètrent  dans  la 
substance  des  reins,  s'y  ramifient,  et  s'anastomosent  par  leurs 
ramuscules  terminaux  avec  les  racines  des  veines  rénales  effé- 
rentes  (2), 


(i)  Lorsque  les  reins  sont  agglomé- 
rés dans  toute  leur  longueur,  la  veine 
caudale,  devenue  ainsi  la  veine  ab- 
dominale (ou  veine  cardinale,  Hyrtl), 
reste  sur  la  ligne  médiane  et  reçoit 
des  veinules  des  deux  moitiés  de  cet 
organe.  Mais  lorsque  les  reins  se  divi- 
sent en  deux,  suivant  leur  longueur, 
ce  vaisseau  s'applique  d'ordinaire  sur 
le  bord  interne  du  rein  droit,  et  y  re- 
çoit une  partie  des  veinules  efférentes 
du  rein  gauche  aussi  bien  que  toutes 
celles  du  rein  droit;  les  autres  vei- 
nules efférentes  du  rein  gauche  se 
déversent  directement  dans  la  veine 
rénale,  qui,  tout  en  naissant  dans  celte 
glande,  représente  le  tronc  cardinal 
gauche  et  va  constituer  la  veine  abdo- 
minale gauche  (a).  Quelquefois  c'est 
l'inverse  qui  s'observe,  et  c'est  contre 
le    bord    du  rein  gauche  que  s'ap- 


plique la  veine  cardinale  non  inter- 
rompue :  chez  les  Erythrines  ,  par 
exemple. 

(2)  Ainsi  M.  Hyrtl  a  constaté  que 
chez  les  Plagiostomes,  où  la  veine 
caudale  ne  porte  pas  de  sang  aux  reins, 
les  veines  intercostales  vont  se  rami- 
fier dans  ces  organes  ,  et  constituent 
les  veines  afférentes  du  système  de 
.lacobson. 

Chez  le  Brochet,  le  Cottus  quadri- 
cornis,  le  Scorpœna  scrofa,  VExoce- 
tus  exsiliens,  les  Gymnodontes  et  quel- 
ques Siluroïdes,  toutes  les  veines  cos- 
tales deviennent  ainsi  des  veines 
rénales  afférentes,  et  chez  le  Mugil 
cephalus  six  paires  de  ces  vaisseaux  se 
comportent  de  la  même  manière  (b). 

Cuvier  avait  cru  que  chez  la  Perche 
et  la  plupart  des  autres  Poissons,  les 
veines    costales    se    rendaient  à    un 


(a)  Hyrlt,  Das  uropoëtische  System  der  Knochehfischê  (Mém.  de  Vienne,  t.  II,  p.  33,  pi.  10,  fig.  i). 
(bjîdem,  Md.,p.  35. 


CHEZ    LES    POISSONS.  359 

Ainsi,  qu'il  y  ait  ou  non  interruption  dans  la  portion  rénale 
des  veines  cardinales,  ces  vaisseaux  se  trouvent  représentés 
dans  la  partie  antérieure  de  l'abdomen  par  les  deux  veines  abdo- 
minales, qui  vont  se  réunir  aux  veines  jugulaires  derrière  la 
tête.  Quelquefois  ces  deux  troncs  sont  de  même  calibre  (1)  ; 
mais  en  général  ils  sont  très  inégalement  développés,  et  celui 
du  côté  droit  est  d'ordinaire  beaucoup  plus  gros  et  plus  long 
que  celui  du  côté  gauche  (2). 


tronc  rachidien  situé  au-dessus  de  la 
moelle  épinière,  dans  l'intérieur  du 
canal  vertébral,  et  recevant  aussi  en 
avant  des  branches  veineuses  des 
reins,  tandis  que  plus  en  arrière  des 
branches  anastomotiques  ramaient 
uni  à  la  veine  caudale.  C'est  même  sur 
cette  disposition  qu'il  s'est  appuyé 
pour  révoquer  en  doute  les  décou- 
vertes de  Jacobson  (a).  Mais  M.  Hyrtl 
a  constaté  que  ce  vaisseau,  auquel 
M.  Owen  a  donné  le  nom  de  veine 
neuralis  (b),  est  un  tronc  lymphatique 
et  ne  contient  pas  de  sang  (c). 

(1)  Par  exemple,  chez  les  Diodons, 
les  Tétrodons  et  le  Schilbé  (d). 

(2)  Exemples  ;  Tinca  ,  Exocetus  , 
Anthias  ,  Anableps  ,  Clinus ,  Ammo- 
dytes,  Periophthalmus,  Coryphœna, 
Loricaria ,  Centriscus  et  Syngna- 
thus  (e). 

Chez  la  Lotte  cette  inégalité  est  très 
peu  marquée  (/"). 

Quelquefois  l'une  de  ces  veines 
manque  complètement  :  celle  de  gau- 
che chez  le  Cepola  rubescens,  et  celle 
de   droite  chez  V  Erythrinus  unitœ- 


niatus.  Knfin,  chez  d'autres  Poissons, 
il  n'existe  qu'une  seule  veine  rénale 
médiane  qui  ne  se  dévie  à  droite 
que  tout  près  de  l'extrémité  antérieure 
de  la  colonne  vertébrale;  notamment 
chez  les  Gonnelles  (g). 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  veines 
rénales  présentent  souvent  sur  un  ou 
plusieurs  points  de  leur  longueur  des 
dilatations  en  forme  de  sinus.  Chez  le 
Tétrodon ,  chacun  de  ces  troncs  con- 
stitue ainsi  un  sinus  arrondi  après  sa 
sortie  des  reins,  mais  en  général  c'est 
dans  l'intérieur  de  ces  organes  que 
ces  réservoirs  sont  ménagés.  Chez 
Y  Anableps  tetrophthalmus,  le  Trigla, 
VOreosoma,  le  Blepsias,  etc.,  la  veine 
rénale  du  côté  droit  présente  un  grand 
sinus  réniforme;  chez  le  Sphijrœna 
picuda  ,  le  Cobitis  fossilis,  VArgen- 
tina,elc. ,  ce  vaisseau  en  offre  deux,  qui 
sont  placés  l'un  en  avant  de  l'autre, et 
chez  la  Tanche  il  y  a  tout  un  chape- 
let de  ces  sinus;  enfin, chez  le  Tétrodon 
maculatus,  chacune  de  ces  veines  se 
renfle  de  la  sorte  dans  son  point  de 
jonction  avec  la  jugulaire  (h). 


(a)  Cuvier  et  Valenciennes,  Histoire  naturelle  des  Poissons,  t.  I,  p.  516,  pi.  7,  fig\  i. 

(b)  Owen,  Lectures  on  the  Comp.  Anat.  ofthe  Vertebrate  Animais,  p'.  251. 

(c)  Hyrtl,  loc.  cit.,  p.  36. 

(d)  Idem,  ibid.,  p.  33. 

(e)  Idem,  ibid.,  p.  33. 

(f)  Voyez  Bonsdorff,  Op.  cit.  (Mém.  de  la  Soc.  Finnoise,  t.  III,  pi.  9,. 

(g)  Hyrtl,  Op.  cit.,  p.   33. 
(h)  Idem,  ibid.,  p.  34. 


360  APPAREIL    DE    LA.    CIRCULATION 

ïl  est  aussi  à  noter  que  chez  quelques  Poissons  les  veines 
abdominales  se  dilatent  beaucoup  ,  et  communiquent  même 
avec  des  sinus  caverneux  situés  à  la  partie  supérieure  de  la 
cavité  viscérale.  Cette  disposition  se  voit  dans  la  famille  des 
Raies,  et  se  trouve  portée  très  loin  chez  les  Lamproies  (1). 

Pendant  leur  trajet  vers  le  sinus  précardiaque,  les  veines 


(1)  Je  reviendrai  bientôt  sur  l'étude 
des  sinus  veineux  des  Lamproies,  et 
je  me  bornerai  à  ajouter  ici  que  Monro 
a  trouvé  chez  la  Raie  des  sinus  san- 
guins très  considérables  qui  sont  for- 
més, soit  par  les  veines  abdominales 
dont  le  tronc  est  très  dilaté,  soit  par 
les  branches  anastomotiques  qui  unis- 
sent entre  eux  ces  deux  vaisseaux, 
et  par  des  réceptacles  situés  au- 
dessus  des  organes  génitaux  (a). 
M.  Natalis  Guillot  a  étudié  de  nou- 
veau ces  sinus,  et  les  considère 
comme  étant  formés  principalement 
par  un  tissu  caverneux  ou  lacu- 
naire (b).  Ces  réservoirs  veineux,  que 
Ton  désigne  sous  le  nom  de  sinus  de 
Monro,  ont  été  trouvés  aussi  chez  les 
Squales  par  M.  Robin.  Voici  la  des- 
cription que  ce  dernier  anatomiste  en 
donne  :  a  Chez  les  Squales  comme  chez 
les  Raies,  ce  réservoir  se  remplit  lors- 
qu'on injecte  le  vaisseau  lymphatique 
de  la  ligne  latérale  du  corps  ;  comme 
chez  les  Raies  aussi,  on  le  remplit  en 
poussant  une  injection  d'air  par  une 
des  veines  situées  sur  les  côtés  de  la 
colonne  vertébrale.  En  remplissant 
ce  réservoir  par  l'insufflation  de  l'air, 
on  peut  très  facilement  en  étudier  la 
disposition, surtout  pour  ce  qui  con- 


cerne la  structure  des  parois  et  les 
filaments  fibreux  entrecroisés  que  pré- 
sente l'intérieur  du  réservoir,  sur  les 
côtés  et  en  avant,  près  de  l'abouche- 
ment dans  le  sinus  de  Cuvier  de  la 
veine  qui  lui  fait  suite  et  de  laquelle 
il  n'est  qu'une  sorte  d'appendice.  Cet 
abouchement  se  fait  de  chaque  côté  par 
un  orifice  très  étroit  relativement  à  la 
capacité  du  réservoir.  Chez  les  Raies, 
chez  les  Squales,  mais  plus  facilement 
chez  ces  derniers,  on  peut  remplir  le 
réservoir  lacuneux  en  poussant  l'in- 
jection par  la  veine  caudale.  Les  parois 
du  réservoir  sont  très  minces,  de  cou- 
leur rosée,  analogue  à  celle  des  parois 
des  oreillettes,  et  elles  ont  un  aspect 
aréolaire  ,  lâche,  dû  à  des  faisceaux 
d'un  tissu  rongeâtre  ,  diversement 
entrecroisés.  Le  réservoir  lui-même, 
dans  sa  portion  la  plus  large,  est  divisé 
en  deux  lobes,  l'un  à  droite,  plus 
grand,  et  l'autre  à  gauche,  plus  petit. 
Cette  division  en  deux  lobes  est  due 
à  l'existence  d'une  cloison  située  sur 
la  ligne  médiane  de  la  colonne  verté- 
brale :  du  reste, cette  cloison  est  incom- 
plète ;  elle  est  percée  d'un  grand  nom- 
bre de  trous  très  larges, permettant  une 
facile  communication  d'un  des  lobes 
du  réservoir  dans  l'autre  (c).  » 


(a)  Monro,  The  Structure  of  Fishes,  p.  17. 

(b)  Natalis  Guillot,  Sur  un  réservoir  particulier  de  la  circulation  des  Raies  [Comptes  rendus  de 
l'Acad.  des  sciences,  1845,  t.  XXI,  p.  1179). 

(c)  Robin,  Communication  sur  le  système  veineux  des  Raies,  etc.  {Joitmal  de  l'Institut,  1845  , 
t..  XIII,  p.  429). 


CHEZ    LES    POISSONS.  361 

abdominales  reçoivent  plusieurs  branches  ,  notamment  la 
veine  spermatique,  qui  revient  des  testicules  ou  de  l'ovaire  (1), 
et  un  petit  tronc  qui  appartient  à  la  vessie  natatoire.  Enfin,  les 
veines  jugulaires  (2),  auxquelles  ces  deux  grands  vaisseaux  se 
réunissent  d'ordinaire  avant  que  de  déboucher  dans  le  sinus 
précardiaque  (3),  proviennent  des  parties  latérales  de  la  tête,  et 
reçoivent  en  général  quatre  branches  principales,  savoir  :  une 
veine  cérébrale,  une  veine  oculaire,  une  veine  faciale  interne 
et  une  veine  faciale  externe.  En  général,,  ces  veines  de  la  tête 
suivent  le  trajet  des  principales  artères,  et  il  est  à  noter  aussi 
que  les  veines  jugulaires  communiquent  entre  elles  par  un  tronc 
anastomotique  assez  large,  et  constituent  en  général,  derrière 
les  orbites,  un  sinus  plus  ou  moins  vaste  (4). 

(1)  Ces  veines  accompagnent  les  (U)  Ce  sinus  se  trouve  entre  la  base 
artères  spermatiques,  et,  après  avoir  du  crâne  et  le  sommet  de  l'appareil 
passé  au-dessus  de  l'estomac,  traver-  hyoïdien  (cl).  M.  Hyrtl  le  désigne  sous 
sent  l'extrémité  antérieure  des  reins  le  nom  de  bulbe  ojihthalmique  de  la 
pour  aller  déboucher  dans  les  veines  veine  jugulaire  (e).  Il  est  extrême- 
cardinales  (a).  ment  développé  chez  les  Squales,  et 

(2)  Veines  cardinales  antérieures  constitue  de  chaque  côté  des  branchies 
de  quelques  auteurs.  un  vaste  réservoir  qui  s'étend  dans 

(3)  Suivant  quelques  anatomistes,  les  cavités  orbilaires  (f). 

les  deux  veines  jugulaires  du  Thon  Les  veines  qui  y  rapportent  le  sang 
se  réuniraient  pour  former  un  tronc  des  diverses  parties  de  la  tête  for- 
commun  qui  irait  s'ouvrir  directe-  ment  de  chaque  côté  quatre  troncs 
ment  dans  le  sinus  précardiaque  (6).  principaux,  savoir  :  1°  une  veine  cé~ 
Mais  on  voit,  par  les  recherches  de  rébrale,  qui  sort  de  la  cavité  crânienne 
MM.  Eschricht  et  Millier,  que  ces  vais-  par  le  trou  du  nerf  optique  ;  T  une 
seaux  débouchent  comme  d'ordinaire  veine  oculaire,  qui  vient  de  l'œil  et 
sur  les  deux  côtés  du  sinus  corn-  longe  le  nerf  optique;  o"  une  veine 
m  un  (c).  faciale  interne  ,  qui  occupe  le  bord 

(o)  Voyez  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  7,  fig.  4,  et  pi.  8,  fig.  2. 

—  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones,  pi.  K,  fig.  2. 

(6)  Owen,  Lectures  on  the  Comp.  Anat.  of  the  Vertebrate  Animais,  p.  251. 

(c)  Eschricht  et  Millier,  Ueber  die  arteribsen  und  venbsen  Wundemetze  an  der  Leber  des  Thun- 
fische  (Mém.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1835,  pi.  3,  fig.  1  e). 

(d)  Voyez  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  7,  fig.  1. 

(e)  Hyrtl,  Sur  les  sinus  caudal  et  céphalique  des  Poissons  (Ann.  des  sciences  nat.,  1843,  2"  série, 
t.  XX,  p.  225,  pi.  7,  fig.  8). 

(/)  Robin,  Sur  le  système  veineux  des  Poissons  cartilagineux  (Comptes  rendus  de  l'Acad.  des 
sciences,  1845,  t.  XXI,  p.  12S2). 


362 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Système 
'  de 


§  \  h .  —  Le  système  de  la  veine  porte  hépatique  est  formé , 
ia  veine  porte  comme  je  l'ai  déjà  dit,  par  les  veines  de  l'intestin,  de  l'estomac 
et  de  la  rate,  dont  les  troncs  terminaux  se  ramifient  dans  le 
foie  (1),  et  par  les  veines  hépatiques  qui  naissent  du  réseau 


inférieur  de  l'orbite  ;  U°  une  veine  fa- 
ciale externe ,  qui  se  trouve  au  bord 
externe  du  muscle  masséler.  Ces  vais- 
seaux suivent  en  général  les  artères 
correspondantes,  et,  arrivés  au  bord 
postérieur  de  l'orbite,  ils  débouchent 
dans  le  bulbe  ophthalmiquedela  veine 
jugulaire.  Ce  sinus  est  mis  en  com- 
munication avec  son  congénère  par 
un  tronc  anastomotique  transversal. 
Chez  la  Truite  il  est  peu  développé  (a); 
mais,  chez  d'autres  Poissons,  tels  que 
les  Silures,  il  acquiert  un  volume  assez 
considérable  (6). 

La  veine  jugulaire  se  dirige  ensuite 
en  arrière,  sur  les  côtés  de  la  base  du 
crâne,  et,  arrivée  près  de  la  ceinture 
scapulaire,  reçoit  la  veine  abdominale. 
Enfin  le  tronc  qui  résulte  de  l'union 
de  ces  deux  vaisseaux,  et  qui  peut 
être  désigné  sous  le  nom  de  veine 
cave  antérieure,  se  porte  en  dedans,  et 
"va  s'unir  à  son  congénère  pour  former 
derrière  l'oreillette  le  sinus  de  Cuvier, 
ou  sinus  précardiaque,  qui  est  par  con- 
séquent le  représentant  d'une  veine 
cave  antérieure  commune  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  veines 
qui  naissent  du  réseau  capillaire  de 
la  choroïde  se  ramifient  de  nouveau 


dans  le  ganglion  vasculaire  ,  et  s'y 
entremêlent  avec  les  divisions  du  ré- 
seau admirable  artériel  dont  il  a  été 
question  ci-dessus. 

(1)  Chez  quelques  Poissons,  tels  que 
les  Cyprins  et  les  Lottes,  la  majeure 
partie  du  sang  venant  des  organes 
génitaux  est  versée  également  dans  la 
veine  porte  hépatique  (d),  et  il  paraî- 
trait même  que  chez  le  Silurusglanis, 
une  des  grosses  branches  de  la  veine 
caudale  concourt  à  la  formation  de  ce 
système  (e) 

Il  est  aussi  à  noter  que  chez  les 
Cyprins,  où  le  foie  entrelace  ses  lobes 
avec  les  replis  de  l'intestin,  la  veine 
porte  est  en  quelque  sorte  diffuse,  car 
les  veinules  viscérales  y  pénètrent 
directement,  sans  s'être  réunies  au 
préalable  en  un  ou  plusieurs  gros 
troncs.  Mais  cette  disposition  est  ex- 
ceptionnelle, et,  en  général,  ces  vais- 
seaux se  groupent  de  la  manière  sui- 
vante : 

Tantôt  toutes  les  veines  viscérales 
se  réunissent  en  trois  troncs  qui  pénè- 
trent isolément  dans  le  foie  (exemple, 
Cottus  scorpius),  ou  bien  ne  forment 
que  deux  troncs  principaux  avant 
d'entrer  dans  cet  organe,  disposition 


(a)  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones,  p.  131,  pi.  K,  fig.  2. 

(6)  Hyrtl,  Sur  l'appareil  vasculaire  des  Poissons  (Ann.  des  sciences  riat.,  1843,  t.  XX,  pi.  7, 
fig.  8). 

(c)  Voyez  Monro,  Anat.  ofFishes,  pi.  2. 

—  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  26,  fig.  1  et  2  ;  pi.  7,  fig.  1. 

—  Agassiz  et  Vogl,  Op.  cit.,  pi.  K,  fig.  2. 

—  Bonsdorff,  Op.  cit.  (Mém.  de  la  Soc.  de  Finlande,  t.  III,  pi.  9). 

(d)  Rathke,  Ueber  die  Leber  und  das  Pfortader-System  der  Fische  (Meckel's  Archiv  fur  Physiol., 
182(1,  p.  126),  et  Mém.  sur  le  foie,  etc.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1826,  t.  IX,  p.  169). 

(e)Nicolai,  Uutersuchungeri  iiber  den  Verlauf  und  die  Vertheilung  der  Venen  bei  einigen 
Vôgeln,  Amphibien  und  Fischen  (Isis,  1826,  1. 1,  p.  413). 


CHEZ    LES    POISSONS.  363 

vaseulaire  ainsi  constitué,  et  se  terminent  antérieurement  par  un 
seul  tronc,  lequel,  presque  aussitôt  après  sa  sortie  de  ce  viscère, 
débouche  dans  le  sinus  précardiaque,  vers  le  milieu  de  la  paroi 
postérieure  de  ce  réservoir,  et  constitue  l'analogue  du  vaisseau 


que  M.  Bathke  a  trouvée  chez  le  Bro- 
chet, l'Éperlan,  le  Hareng,  les  Épino- 
ches  ,  divers  Pleuronectes,  etc. ,  et 
qui  existe  aussi  chez  le  Spatulaire  (a) 
et  le  Gymnote  (';).  D'autres  fois  la  plus 
grande  partie  de  ces  veines  forme  un 
seul  tronc,  mais  il  y  a  encore  des  pe- 
tits rameaux  qui  pénètrent  isolément 
dans  le  foie,  ainsi  que  cela  se  voit 
chez  la  Perche,  la  Lotte,  l'Alose,  le 
Silure,  etc.  Enfin,  d'autres  fois  encore 
tous  ces  vaisseaux  se  réunissent  en  un 
seul  tronc  avant  d'arriver  au  foie  ; 
genre  de  centralisation  qui  se  ren- 
contie  chez  l'Anguille,  la  Lotte,  le 
Goujon,  les  Truites,  etc.  (c). 

En  général,  les  principales  branches 
sont  disposées  d'une  manière  assez 
simple.  Ainsi,  chez  les  Salmones,  deux 
troncs  veineux  longent  l'intestin  dans 
toute  sa  longueur  et,  après  l'avoir 
abandonné  en  avant,  se  réunissent  en 
un  seul  tronc  qui  s'anastomose  avec 
une  seconde  branche  venant  de  la 
rate  et  de  l'estomac.  Une  troisième 
branche,  venant  également  de  la  rate, 
longe  la  partie  postérieure  de  l'esto- 
mac et  reçoit  des  ramuscules  des  ap- 
pendices pyloriques.  Enfin  ces  diverses 
branches  se  réunissent  en  un  seul 
tronc,  à  la  face  interne  du  foie,  près 


du  point  où  le  conduit  biliaire  s'ouvre 
dans  la  vésicule  du  fiel  ;  ce  tronc  pé- 
nètre dans  celte  glande  et  s'y  divise 
en  rayonnant  {d). 

Je  ferai  remarquer  aussi  que  souvent 
le  tronc  principal  de  la  veine  porte  se 
divise  en  plusieurs  branches  avant  de 
pénétrer  dans  la  substance  du  foie, 
disposition  qui  a  été  très  bien  repré- 
sentée chez  la  Lotte  par  M.  Bons- 
dorff  (e). 

Chez  les  Plagiostomes  du  genre 
Marteau  (Zygœna,  Cuv.),  la  partie 
postérieure  du  tronc  principal  de  la 
veine  porte,  ou  veine  mésentérique. 
présente  une  disposition  très  singu- 
lière. Au  lieu  d'être  logée  comme  d'or- 
dinaire à  l'extérieur  de  l'intestin,  elle 
se  trouve  dans  la  cavité  de  ce  tube, 
insérée  au  bord  du  grand  repli  mem- 
braneux qui  faitsaillie  dans  l'intérieur 
du  gros  intestin,  et  y  constitue  l'appen- 
dice nommé  valvule  spirale.  Duver- 
noy,qui  a  fait  connaître  cette  particula- 
rité, a  trouvé  aussi  que  les  parois  de 
cette  portion  de  la  veine  porte  sont  très 
épaisses  et  d'apparence  musculaire; 
aussi  suppose-t-il  qu'elle  est  pulsatile 
et  remplit  les  fonctions  d'un  cœur  vei- 
neux {f). 

Cette  disposition  n'a  été  observée 


(a)  Alb.  Wagner,  De  Spatulariarum  anatome  (Dissert,  inaug.,  Berolini,  1848,  (ig.  4). 

(b)  Délie  Chiaje,  Dissertazioni  sull'  Anatomia  umana  comparata  e  pathologica,  t.  I,  p.  94. 
pi.  46. 

(c)  Ralhke,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  IX,  p.  171). 
{d)  Agassiz  et  Vogt,  Op.  cit.,  p.  133,  pi.  K,  fig.  2. 

{e)  Bonsdorff,  Op.  cit.,  (Mém.  de  la  Soc.  Finnoise,  t.  III,  pi.  S). 

(f)  Duvernoy,  Sur  quelques  particularités  du  système  sanguin  abdominal  et  du  canal  alimen- 
taire de  plusieurs  Poissons  cartilagineux  (Ann.  des  sciences  nat.,  1835,  2°  série,  t.  III  n  274 
pl.  10,  fig.  2). 


36/l  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

qui,  chez  l'Homme  et  les  autres  Vertébrés  supérieurs,  est  connu 
sous  le  nom  de  veine  cave  postérieure. 

Chez  la  plupart  des  Poissons,  aucune  autre  veine  ne  vient 
déboucher  dans  ce  tronc  terminal  du  système  hépatique  ou 
veine  cave  postérieure  ;  mais  chez  quelques  Ganoïdes,  ce  vais- 
seau acquiert  plus  d'importance  et  ressemble  davantage  à  ce 
que  nous  trouverons  chez  les  Vertébrés  supérieurs.  En  effet, 
il  prend  naissance  vers  la  partie  postérieure  de  l'abdomen ,  où 
il  s'anastomose  avec  les  veines  cardinales  ou  abdominales,  et 
en  s' avançant  vers  le  cœur  il  reçoit  les  veines  provenant  de 
la  vessie  aérienne  (1). 


chez  aucun  antre  Plagiostome,  si  ce 
n'est  dans  une  espèce  indéterminée 
voisine  des  Milandres.  Mais  je  dois 
ajouter  que  chez  la  Lamproie  le  tronc 
principal  de  la  veine  porte  est  égale- 
ment logé  dans  un  repli  intérieur 
de  la  tunique  muqueuse  de  l'intes- 
tin (a). 

Enfin  il  y  a  aussi  de  grandes  varia- 
tions dans  le  mode  de  groupement 
des  veines  hépatiques  qui  naissent  des 
ramuscules  de  la  veine  porte,  et  qui 
sortent  du  foie  pour  se  rendre  vers  le 
cœur. 

Ainsi,  chez  VEsoœ  Bello?ïe,  le  Cy- 
dopterus  Lumph,  la  Blennie,  l'An- 
guille, les  Salmones,  le  Silure,  l'Estur- 
geon, etc.,  ces  veines  se  réunissent 
toutes  en  un  seul  tronc  qui  va  débou- 
cher au  milieu  du  sinus  commun.  Chez 
la  Tanche,  le  Goujon,  la  petite  Brème, 
le  Brochet,   les  Pleuronectes ,    etc., 


il  y  a  deux  de  ces  troncs.  Enfin, 
chez  la  Perche,  la  grande  Brème,  le 
Chabot  scorpion,  etc. ,  on  en  trouve 
trois.  Du  reste,  ces  variations  ont 
peu  d'importance,  car  elles  se  ren- 
contrent parfois  dans  les  différentes 
espèces  d'un  même  genre  naturel  :  par 
exemple, chez  l'Épinoche  (Gasterosteus 
spinachia),  il  y  a  deux  troncs  hépa- 
tiques, tandis  que  chez  le  Gasterosteus 
aculeatus  et  le  G.  pungitius  ,  il  n'y 
en  a  qu'un  seul. 

Pour  plus  de  détails  sur  l'origine  et 
le  mode  de  groupement  des  branches 
constitutives  de  la  veine  porte,  je  ren- 
verrai au  Mémoire  déjà  cité  de 
M.  Ralhke,  et  à  un  travail  plus  récent 
sur  le  même  sujet  par  M.  Schmid  (fc). 

(1)  Cette  disposition,  dont  nous  de- 
vons la  connaissance  a  M.  J.  Mill- 
ier (c), offre  beaucoup  d'analogie  avec 
le  mode  d'organisation  de  cette  por- 


(a)  Magendie  et  Desmoulins ,  Note  sur  l'anatomie  de  la  Lamproie  (Journal  de  physiologie  de 
Magêndie,  1822,  t.  II,  p.  229). 

—  Ralhke,  Anatomische-physiologische  Bemerkungen  (Meckel's   Deutsches  Archiv  fur  die 
Physiologie,  1823,  t.  VIII,  p.  51). 

(b)  F.  Gh.    Schmid.    Vêler  die  Leber  und  das  Pfortadersystem  der  Fische  (Dissert,  inaug., 
Augsbourg,  1849). 

(c)  J.  Mùller,  Fernere  Bemerkungen  ûber  den   Bau  der  Ganoiden  (Bericht  der  Akad.  der 
Wissensch.  %u  Berlin,  1846,  p.  68). 


CHEZ    LES    POISSONS. 


i65 


Chez  le  Thon,  plusieurs  des  gros  troncs  de  la  veine  porte 
présentent  une  disposition  très  remarquable  :  elles  commu- 
niquent entre  elles  par  des  branches  anastomotiques,  et  ces 
rameaux,  ainsi  que  plusieurs  des  ramuscules  terminaux,  au 
lieu  detre  simples,  comme  d'ordinaire,  se  subdivisent  en  une 
multitude  de  capillaires  rangés  parallèlement  comme  les  fils 
d'un  écheveau,  puis  se  réunissent  de  nouveau  en  un  tronc  com- 
mun avant  de  déboucher  dans  le  vaisseau  auquel  ils  se  rendent 
pour  pénétrer  dans  la  substance  du  foie.  Ces  houppes  vasculaires, 
ou  réseaux  admirables,  pour  me  servir  du  terme  généralement 


tion   du  système   vasculaire  chez  le 
Lepidosiren  paradoxa;  mais  chez  ce 
dernier  les  veines  pulmonaires,  au  lieu 
de  déboucher  dans    la    veine   cave, 
se    rendent    directement   au   cœur. 
La   portion  postérieure    du   système 
des  veines  cardinales  est  représentée 
par   deux   veines  caudales    qui  cô- 
toient l'aorte,  et  qui  viennent  s'ap- 
pliquer   sur   le    bord    externe   des 
reins  ,  où  elles  reçoivent  les  veines 
ovariennes  et  donnent  naissance  aux 
veines    afférentes    ou    veines    arté- 
rieuses  des  reins.    Mais  elles  ne    se 
terminent  pas  dans  ces  organes,  et 
vont  s'anastomoser    de  chaque   côté 
avec  une  des  veines  costales  qui  vient 
des  parois  latérales  de  l'abdomen  et 
débouche  dans  la  veine  cave  corres- 
pondante. Les   veines  efférentes  des 
reins  naissent  sur  le  bord  opposé  de 
ces  glandes,  et  constituent  les  veines 
caves.  Celle  de  gauche  est  très  grêle  et 
déverse  tout  de  suite  une  portion  deson 
contenu  dans  sa  congénère  ,  à  l'aide 
de  plusieurs  branches  anastomotiques 
transversales.    La  grosse   veine  cave, 
située  à  droite,  se  dirige  directement 


en  avant,  se  loge  dans  un  sillon  du 
bord  dorsal  du  foie, où  elle  reçoit  direc- 
tement les   veines  hépatiques,    puis 
débouche   dans   l'oreillette    (a).  Une 
paire  de  veines  caves  antérieures,  for- 
mées par  la  réunion  des  veines  jugu- 
laires et  claviculaires, se  rendent  aussi 
à  l'oreillette,  et  sont  mises  en  commu- 
nication avec  les  veines  caves  posté- 
rieures à  l'aide  d'une  paire  de  bran- 
ches   anastomotiques    longitudinales 
qui  correspondent  aux  veines  cardi- 
nales ou  abdominales  des  Poissons,  et 
qui  portent  le  nom  de  veines  azijgos. 
Il  est  aussi  à  noter  que  chez  cet 
Animal  la  veine  porte,   après  avoir 
formé  un  tronc  principal  très  court,  se 
divise  en  deux  branches  artérieuses  ou 
afférentes, l'une  inférieure,  l'autre  su- 
périeure, qui  reçoivent  diverses  bran- 
ches gastriques.  Les  veinesefférenlesde 
ce  système,  ou  veines  hépatiques  pro- 
prement dites,  ne  se  réunissent  pas  en 
un  ou  plusieurs  troncs  hors  du  foie, 
mais  débouchent  directement  dans  la 
portion  de  la  grande  veine  cave  qui 
adhère  à  la  face  supérieure  de  cet 
organe  (6). 


(a)  Hyrtl,  Lepidosiren  paradoxa  Monogn 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  3,  fig.  3. 


hie  {Mém.  de  l'Acad.  de  Bohême,  t.  V,  pi.  5) 


366  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

usité  par  les  anatomîstes,  rappellent,  jusqu'à  un  certain  point, 
les  lacis  capillaires  que  ces  mêmes  veines  vont  former  dans 
l'intérieur  du  foie  et  que  les  veines  afférentes  des  reins  consti- 
tuent dans  la  profondeur  de  la  substance  de  ces  organes  ; 
mais  au  lieu  d'être  en  connexion  avec  le  tissu  d'une  glande, 
ce  chevelu  vasculaire  se  trouve  ici  à  nu  (1). 

Chez  quelques  Squales,  où  la  veine  porte  ne  présente  rien 
de  particulier,  une  disposition  analogue  s'observe  dans  les 
veines  hépatiques  qui  sortent  du  foie  pour  déboucher  dans  le 
sinus  précardiaque  (2). 

Enfin  il  est  aussi  à  noter  que  dans  l'estomac  de  la  Loche 
des  étangs ,  où  nous  avons  vu  un  travail  respiratoire  s'accom- 
plir (3),  les  ramuscules  veineux  se  prolongent  en  forme  de 
houppes  dont  la  structure  rappelle  beaucoup  celle  des  ganglions 
vasculaires  de  la  vessie  natatoire  de  quelques  Poissons  (k). 
veines  c  \ 5  —  Enfin  les  veines  de  Duvernov,  ou  veines  hyoïdiennes, 

de  Duvernoy.         ,  °  •'     -  •> 

qui  rapportent  le  sang  fourni  à  l'appareil  respiratoire  par  les 


(1)  Ces  mèches  de  vaisseaux  capil-  où  il  y  a  aussi  des  capillaires  arté- 
laires  se  trouvent  pour  la  plupart  près  riels,  mais  dont  l'origine  n'a  pas  été 
de  la  face  postérieure  du  foie,  et  sont  déterminée.  M.  Millier  n'a  trouvé  rien 
mêlées  à  celles  formées  par  les  artères  de  semblable  chez  les  autres  Plagio- 
gastriques,  hépatiques,  etc.  Mais  il  ne  stomes  dont  il  a  fait  l'anatomie  (b). 
paraît  y  avoir  aucune  communication  (3)  Voyez  tome  II,  page  383. 
anastomotique  entre  ces  deux  ordres  (/i)  M.  Treviranus  a  trouvé  que 
de  vaisseaux  (a).  les  veines  gastriques  du  Cobitis  fos- 

(2)  M.  Millier  a  trouvé  ce  mode  silis  constituent  des  houppes  qui  ont 
d'organisation  chez  le  Lamna  cornu-  beaucoup  d'analogie  avec  un  rete  mi- 
bica.  Les  mèches  vasculaires  formées  rabiîe  diffus  ;  disposition  qui  ne  se 
par  les  divisions  chevelues  des  veines  voit  pas  chez  la  plupart  des  Poissons, 
hépatiques  constituent  à  la  partie  an-  lors  même  que  la  membrane  mu- 
térieurede  l'abdomen,  de  chaque  côté  quense  intestinale  est  très  vasculaire, 
de  l'œsophage, une  masse  volumineuse  comme  chez  les  Trigles  (c). 


(a)  Eschricht  et  Miiller,  Ueber  die  arteriôsen  und  venosen  Wundemetze  an  der  Leber  und 
elnen  merkivurdigen  Bau  dièses  Organes  beim  Thunflsche  (Mém.  de  l'Acad.  de  Derlinpour  1835, 
p.  6,  pi.  2  et  3). 

{b)  Eschricht  et  Millier,  loc.  cit.,  p.  21. 

(c)  Treviranus,  Beobachtungeu  aus  der  Zoctomie  and  Physiologie,  crslcs  Ucfl,  183'J,p.  19. 


CHEZ    LES    POISSONS.  3G7 

artères  nourricières  des  branchies,  débouchent  aussi  directe- 
ment dans  le  sinus  veineux  commun,  près  de  son  entrée  dans 
l'oreillette  (1). 

Si  le  Lepidosiren  est  bien  réellement  un  Poisson,  ainsi  que 
le  pensent  presque  tous  les  zoologistes  du  jour,  il  faut  noter 
encore  ici  l'existence  exceptionnelle  de  veines  pulmonaires.  En 
effet,  le  sang  qui  a  été  distribué  aux  poumons  de  ces  singuliers 
animaux  par  les  artères  pulmonaires  provenant  des  artères  bran- 
chiales, revient  directement  au  cœur  par  deux  veines  situées  à 
la  face  supérieure  de  ces  organes,  et  se  réunit  en  un  tronc 
unique  pour  aller  déboucher  dans  l'oreillette,  au  point  où  ce 
réservoir  se  confond  avec  la  terminaison  des  veines  caves  (2). 


(I)  Les  radicules  veineuses  prove- 
nant des  artères  nourricières  des  feuil- 
lets branchiaux  naissent  sur  les  deux 
faces  de  la  lame  cartilagineuse  qui  se 
trouve  dans  l'intérieur  de  ces  appen- 
dices, et  elles  vont  se  réunir  dans  une 
veine  marginale  située  au  côté  interne 
de  chaque  feuillet,  parallèlement  à  la 
branche  marginale  de  l'artère  bran- 
chiale. Les  veines  disposées  ainsi  sur 
les  deux  faces  de  chaque  feuillet  dé- 
bouchent dans  un  tronc  basilaire  qui 
longe  le  milieu  du  bord  inférieur  de 
l'arc  branchial,  et  qui  va  s'anastomo- 
ser avec  ses  congénères  pour  consti- 
tuer sur  la  portion  basilaire  de  l'ap- 
pareil hyoïdien  une  paire  de  veines 
longitudinales  situées  au-dessus  de 
l'artère  branchiale  commune.  Enfin 
ces  deux  veines  principales  se  réunis- 
sent postérieurement  en  un  ironc 
commun  qui  traverse  le  péricarde 
pour  aller  déboucher  dans  le  sinus 


précardiaque  (a).  La  "portion  radicu- 
laire  de  ce  système  veineux  hyoïdien 
avait  été  d'abord  considérée  comme 
appartenant  au  système  lymphati- 
que (6).  Mais  sa  véritable  nature  a  été 
constatée  par  M.  Millier  (c)  ainsi  que 
par  MM.  Agassiz  et  Vogt. 

On  voit  donc  qu'il  existe  dans  cha- 
que feuillet  branchial,  de  deux  côtés 
de  la  lame  cartilagineuse  médiane,  un 
lacis  vasculaire  profond  composé  des 
vaisseaux  nourriciers,  et  un  lacis  su- 
perficiel formé  par  les  vaisseaux  res- 
piratoires. Sur  les  arcs  branchiaux  la 
veine  hyoïdienne  se  trouve  à  peu  de 
distance  de  l'extrémité  du  connectif 
des  feuillets  ;  vient  ensuite  l'artère 
branchiale  propre;  plus  profondé- 
ment encore  le  vaisseau  épibranchial 
(dit  veine  branchiale) . 

(2)  L'orifice  auriculaire  du  Lepido- 
siren n'est  pas  garni  de  valvules. 

Je  ferai  remarquer  aussi  que  les 


(n)  Agassiz  et  Vogt,  Anatomie  des  Salmones,  p.  128  et  suiv. 

(6)  Fohmann,  Bas  Saugadersystem  der  ^YirI^ellhiere,  p.  34,  pi.  9,  ûg.  3. 

(c)  Millier,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  3°  partie  (Acad.  de  Berlin,  1830,  p.  200). 

III.  24 


3GS 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Sinus 

des 

■veines  caves. 


Valvules 
des  veines. 


§  'i  6. — Le  sinus  précardiaque,  que  l'on  pourrait  appeler  aussi 
la  veine  cave  commune,  est  donc  le  point  de  réunion  de  toutes 
les  veines  du  corps.  C'est  un  grand  réservoir  disposé  transver- 
salement, relevé  et  atténué  des  deux  côtés,  et  situé  tantôt  entre 
les  lames  aponévrotiques  qui  limitent  en  avant  la  cavité  abdo- 
minale (1),  tantôt  dans  l'intérieur  du  péricarde,  derrière  et  au- 
dessus  du  cœur  (2). 

Un  genre  de  perfectionnement  qui  acquiert  beaucoup  d'impor- 
tance chez  les  Vertébrés  supérieurs  commence  à  s'introduire 
dans  le  système  veineux  des  Poissons,  et  consiste  dans  la  forma- 
tion de  certains  replis  de  leur  membrane  interne,  disposés  en  ma- 
nière de  valvules  et  servant  à  empêcher  le  reflux  du  sang.  On  en 
trouve  à  l'entrée  des  principales  veinesdansle  sinuscommun(â). 

§  17.  — -  On  voit,  par  tout  ce  qui  précède,  que  le  système 
veineux  des  Poissons  ordinaires  est  constitué  de  façon  à  former 
avec  les  artères  un  ensemble  de  tubes  clos,  et  que  l'appareil 
circulatoire  de  ces  Vertébrés  n'emprunte  jamais,  pour  se  com- 


veines  pulmonaires  de  cet  Animal  re- 
çoivent à  leur  extrémité  postérieure 
quelques  branches  anastomotiques  ve- 
nant des  parois  de  l'abdomen  (a).  Le 
tronc  commun  des  veines  pulmonaires 
s'accole  à  la  veine  cave  postérieure, 
mais  n'y  débouche  pas  (6). 

(1)  Chez  les  Poissons  osseux ,  ce 
grand  sinus  veineux  est  très  bien  re- 
présenté dans  la  figure  de  l'anatomie 
de  la  Perche  donnée  par  Cuvier  (c), 
et  se  voit  également  dans  les  planches 
relatives   à   l'anatomie    du    Saumon 


dans  l'ouvrage  de  Monro  (d).  Chez  le 
Thon,  ses  parois  sont  garnies  d'un  ré- 
seau lâche  de  fibres  musculaires  (e). 

(2)  Chez  les  Plagiostomes. 

(3)  Monro  a  très  bien  représenté  ces 
valvules  chez  la  Raie  (f)  et  chez  le 
Saumon  (g)» 

J'ajouterai  que  chez  les  Plagiostomes 
il  y  a  des  canaux  lymphatiques  qui 
entourent  certaines  veines ,  ainsi  que 
nous  le  verrons  aussi  chez  les  Ba- 
traciens (h). 


(a)  Hyrll,  Lepidosiren  paradoxa  (Mëm.  de  Bohême,  1845,  t.    III,  pi.  3,  fig.  2); 

(b)  Owen,  On  the  Lepidosiren  unnectens  (loc.  cit.,  pi.  26,  fig.  2). 

(c)  Cuvier,  Histoire  des  Poissons,  t.  I,  pi.  7,  fig.  1. 

- —  Voyez  aussi  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal,  Poissons,  pi.  2,  fig1.  1. 

(d)  Monro,  Struct.  and  Physiol.  of  Fislies,  pi.  20,  fig.  1  et  2  ;  pi.  28  61  20. 

(e)  Leydig,  Anat.  histol.  Untersuch.  iiber  Fische  und  Reptilien,  p,  25. 

(f)  Monro,  Struct.  ofFishes,  pi.  2. 

(g)  Op.  cit.,  pi.  26,  fig.  2. 

(U)  Leydig,  Beilr.zurmikrosc.  Anat.  undEntwich.  der  Rochen  und  Raie,  p,  69,  et  Anat.  Unlers: 
iiber  Fische  und  Reptilien,  p.  25. 


CHEZ    LES   POISSONS.  369 

pléter,  la  grande  cavité  viscérale  qui,  chez  la  plupart  des  Inver-    Dégradation 
tébrés,  remplit  les  fonctions  d'un  réservoir  sanguin.  Mais,  chez  veiileufclel  ia 
quelques  Poissons  cartilagineux,  on  aperçoit  des  indices  d'une     amproie- 
dégradation  organique  qui  parait  constituer  un  degré  inter- 
médiaire entre  ces  deux  formes  d'appareil  irrigatoire.  En  effet, 
chez  les  Lamproies,  une  portion  considérable  du  système  vei- 
neux semble  être  formée  par  une  série  de  lacunes  plutôt  que  par 
des  vaisseaux  proprement  dits,  et  plusieurs  des  canaux  par- 
courus par  le  sang  veineux  n'ont  guère  pour  parois  que  les 
organes  circonvoisins  tapissés  d'un  peu  de  tissu  conjonctif  plus 
ou  moins  condensé  en  forme  de  membrane  (1).  Il  existe  chez 
ces  Poissons  une  veine  caudale  disposée  comme  d'ordinaire  et 
se  bifurquant  à  son  entrée  dans  l'abdomen,  où  elle  forme  deux 
veines  cardinales  qui  longent  de  chaque  côté  l'artère  aorte 
abdominale  ;  mais  au-dessous  de  ces  vaisseaux  il  règne  dans 
presque  toute  la  longueur  du  tronc  un  énorme  sinus  médian 
qui  occupe  le  milieu  des  reins  et  qui  reçoit  tout  le  sang 
venant  de  ces  organes,  ainsi  que  des  ovaires  ou  des  testicules 
situés  au-dessous.  Les  veines  de  ces  viscères  sont  aussi  des  sinus 
ou  des  canaux  sans   parois  bien  distinctes,  plutôt  que  des 
tubes  vasculaires  ordinaires,  et  le  grand  réservoir  rénal  com- 
munique avec  les  veines  cardinales  par  un  grand  nombre  de 
pertuis  (2).  Enfin  ,  celles-ci  débouchent  dans  le  sinus  pré- 
cardiaque  où  viennent  aussi  se  terminer  une  série  de  sinus 
céphaliques   qui  tiennent  lieu  de  veines  jugulaires  ,   et  qui 
paraissent  être  des  lacunes  interorganiques  seulement  (3). 

(1)  Cet  état  de  dégradation  du  sys-  trabécules  sont  de  texture  fibreuse, 
tème  veineux  chez  les  Lamproies  a  (3)  Lorsqu'on  injecte  le  système  vei- 
été  brièvement  indiqué  par  M.  Du-  neux  de  ces  Animaux  par  la  partie  pos- 
méril,  en  1812  (a).  térieure  du  corps,  on  voit  se  remplir 

(2)  Ainsi  que  l'a  fait  remarquer  d'abord  les  vaisseaux  et  les  sinus  de 
M.  Relzius,  ce  grand  réservoir  con-  la  région  abdominale  ,  puis,  dans  la 
siste   en  un  tissu  spongieux  dont  les  région  céphalique ,  une  cavité  mé- 

(a)  Duméril ,  Dissertation  sur  la  famille  des  Poissons  Cycloslomes,  suivie  d'un  Mémoire  sur 
l'anatomie  des  Lamproies,  p.  52. 


370  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Chez  les  Myxinoïdes,  ces  anomalies  ne  s'observent  pas,  et  le 
système  veineux  est  constitué  à  peu  près  de  la  même  manière 
que  chez  les  Poissons  ordinaires  (1). 


«liane  qui  est  traversée  par  l'artère 
branchiale  et  qui  communique  de 
chaque  côté  avec  des  sinus,  dans  l'in- 
térieur de  chacun  desquels  se  trouve 
suspendue  une  des  poches  branchiales. 
Enfin  on .  reconnaît  que  toutes  ces 
veines  communiquent  aussi  très  libre- 
ment avec  une  grande  lacune  labiale 
qui  occupe  la  partie  antérieure  et 
inférieure  de  la  tête.  Sur  des  Lam- 
proies très  fraîches,  j'ai  trouvé  toutes 
ces  lacunes  occupées  par  du  sang  , 
et,  en  y  poussant  un  injection  colorée, 
j'ai  vu  les  veines  abdominales  se  rem- 
plir. 

(1)  Quelques  particularités  assez  im- 
portantes dans  la  marche  et  le  mode 
de  groupement  des  veines  se  remar- 
quent cependant  chez  ces  Cyclostomes. 
Ainsi  les  deux  veines  jugulaires  com- 
munes ne  sont  pas  disposées  symétri- 
quement. Celle  du  côté  gauche  se  porte 
en  ligne  droite  de  la  partie  antérieure 
et  latérale  de  la  tête  vers  l'abdomen,  en 
passant  au-dessus  des  sacs  branchiaux, 
et  va  s'anastomoser  comme  d'ordi- 
naire avec  l'extrémité  antérieure  de 
la  veine  cardinale  du  même  côté  (a). 
Mais  le  tronc  jugulaire  du  côté  droit, 
arrivé  vers  le  milieu  de  l'appareil  bran- 
chial, descend  sur  la  ligne  médiane 
sternale, longe  l'artère  branchiale  com- 
mune, et  se  porte  à  gauche,  où  il  dé- 
bouche dans  la  veine  cave  commune, 


près  de  l'entrée  de  celle-ci  dans  l'oreil- 
lette (6). 

La  veine  caudale,  en  entrant  dans 
la  cavité  abdominale,  devient  comme 
d'ordinaire  la  veine  cardinale  gau- 
che, qui  se  placé  à  côté  de  l'aorte  et 
reçoit  les  veines  intercostales  du 
même  côté  ,  etc.  Une  veine  cardinale 
droite  ,  plus  petite ,  prend  naissance 
sur  le  rein  du  côté  droit ,  s'anasto- 
mose avec  sa  congénère  par  une 
multitude  de  petits  vaisseaux  trans- 
versaux, et  va  enfin  se  confondre  avec 
ce  tronc  à  la  partie  antérieure  de 
l'abdomen.  La  veine  cardinale  gauche, 
après  avoir  reçu  le  sang  apporté 
ainsi  par  la  veine  cardinale  droite 
et  par  quelques  veines  gastriques, 
constitue  une  veine  cave  antérieure 
qui  se  courbe  à  gauche  du  cardia,  se 
joint  à  la  jugulaire  correspondante,  et 
débouche  dans  l'oreillette  après  avoir 
reçu  aussi  la  veine  hépatique  et  la  ju- 
gulaire droite  réunies  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  veines 
costales  s'anastomosent  entre  elles  par 
une  double  série  de  branches  longi- 
tudinales,de  façon  à  former  de  chaque 
côté  des  mailles  quadrilatères  qui  en- 
tourent les  glandes  sous-cutanées  (d). 

La  veine  porte  est  formée  princi- 
palement parla  veine  mésentérique, 
qui  longe  l'intestin  et  qui  reçoit  des 
branches  des  veines  des  organes  gé- 


(a)  Voyez  Millier,  Vergl.  Anal,  der  Uijxinoidcn,  l"  partie,  pi.  7,  fig.  1, 

(b)  Reizius,  Mëm.  sur  l'anatomie  delà  Myxine  (Ann.  des  sciences  nat.,  1828|  l.  XIV,  pi.  9, 
lig.  2,  n»  9).  -       '     ■ 

(c)  Voyez  Retzius,  loc.  cit.,  lig.  \  5. 
[il)  Idem,  ibid.,  iigi  3,  n°  lïi. 


CHEZ   LES    POISSONS.  371 

§  18. — Pour  terminer  cette  esquisse  de  l'histoire  anatomique   commune- 

\      •     tions  d6^  vçinos 

de  l'appareil  circulatoire  des  Poissons,  il  me  reste  encore  a  si-  avec  des 
gnaler  une  disposition  très  remarquable  du  système  veineux.  îympSques. 
Divers  canaux  qui  ne  contiennent  pas  de  sang  viennent  débou- 
cher dans  les  veines  caudales  et  dans  les  veines  de  la  tête,  mais 
leurs  orifices  terminaux  sont  garnis  de  valvules  qui  s'opposent  à 
l'entrée  du  sang  dans  l'intérieur  de  ces  vaisseaux,  tout  en  lais- 
sant passer  les  liquides  de  l'intérieur  de  ceux-ci  dans  le  système 
circulatoire.  Lorsque  nous  étudierons  l'appareil  lymphatique, 
nous  reviendrons  sur  l'examen  de  ces  tubes  que  les  naturalistes 
désignent,  mais  probablement  à  tort,  sous  le  nom  de  canaux 
mucipares  '(!),.  et  je  me  bornerai  à  ajouter  ici  que  l'organe 

nitaux  et  une  partie  des  veines  de  rieure  de  ce  réservoir  et  se  distribuent 

l'estomac,  ainsi  qu'une  branche  ve-  dans  le  foie.  La  veine  hépatique,  ou 

liant  des  parois  latérales  du  corps.  veine  efférente  de  cet  organe,  traverse 

Parvenu  près  du  foie,  ce  tronc  se  di-  la  capsule  cartilagineuse  qui  loge  le 

late  et  forme   une  grande  poche  ou  péricarde,  et  débouche  dans  la  veine 

sinus  (a), que  quelques  anatomistesont  cave  commune,  au  confluent  des  veines 

considéré  comme  une  espèce  de  cœur  jugulaires,   par  conséquent  sous  la 

accessoire  ,  car  on  y  voit  des  puisa-  portion  de  ce  vaisseau  qui  correspond 

tions  (6)  ;  mais,  comme  M.  Miiller  le  au  sinus  précardiaque  des  Poissons 

fait  remarquer,  ce  réservoir  n'est  pas  ordinaires. 

pourvu  de  valvules  intérieurement,  et  Pour  plus  de  détails  sur  ce  sujet,  on 

les  faisceaux  de  fibres  dont  ses  parois  peut  consulter  lesdescriptionsdonnées 

sont  garnis  paraissent  être  composés  par  M.  Retzius  et  M.  Mûller  (c). 

principalement  d'un  tissu  jaune,  élas-  (1)  Voyez  à  ce  sujet  les  travaux  de 

tique,  et  non  de  tissu  musculaire.  Les  M.  Hyrtl,  de  MM.  Agassiz  et  Vogt,  et 

veines  afférentes,  ou  veines  artérielles  de  M.  Robin,  etc.  (d). 
du  foie,  naissent  de  l'extrémité  anté- 

(a)  Voyez  Retzius,  loc.  cit.,  pi.  9,  fig.  1. 

(b)  Miiller,  Bemerkungen  ûber  eigenthûmlkhe  Herzen  des  Arterien-und  Venensystems  (Archiv 
fur  Anat.  und  Physiol.,  1842,  p.  477). 

(c)  Retzius,  Bidrag  till  àder-och  Nerfsystemets  Anaiom.it  hos  Myxine  glutinosa  (Vetenskops- 
Academiens  Handlingar  for  1822,  p.  233,  pi.  3) ,  trad.  en  français  dans  les  Ann.  des  sciences 
nat.,  1828,  t.  XIV,  p.  148. 

—  Miiller,  Vergl.  Anat.  der  Myxinoiden,  3°  partie  (Mêm.  de  l'Acad.  de  Berlin  pour  1839, 
p.  186  et  suiv.). 

(d)  Hyrtl,  'Ueber  die  Caudal-und  Kopf-Sinuse  der  Fische  (Miiller's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol., 
1843,  p.  224). 

—  Sur  les  sinus  caudal  et  céphalique  des  Poissons,  et  sur  le  système  des  vaisseaux  latéraux 
avec  lesquels  ils  sont  en  connexion  (Ann.  des  sciences  nat.,  1843,  2*  série,  t.  XX,  p..  214). 

—  Robin,  Note  sur  un  appareil  particulier  des  vaisseaux  lymphatiques  chez-  les  Poissons 
(Journal  de  V Institut,  1845,  t.  XIII,  p.  144  et  .452). 


372  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION    CHEZ    LES    POISSONS. 

pulsatile  découvert  dans  la  queue  de  l'Anguille  par  Marshall- 
Hall,  et  décrit  par  ce  physiologiste  comme  étant  un  cœur  acces- 
soire (1),  appartient  à  ce  système  ,  et  non  à  l'appareil  circu- 
latoire. 


(1)  Marshall-Hall,  A  Critical  and 
Expérimental  Essay  on  the  Circula- 
tion ofthe  Blood,  1831,p.l70,pl.  10. 

M.  J.  Davy  a  remarqué  dans  les  ap- 
pendices accessoires  mâles  des  Raies 
et  des  Torpilles  une  cavité  pulsatile 
qui  renfermait  du  sang,  et  que  cet  au- 


teur considère  comme  un  cœur  acces- 
soire ;  mais  il  n'a  pas  fait  connaître  les 
relations  de  ce  réservoir  avec  le  sys- 
tème vasculaire  (a).  D'après  les  nou- 
velles observations  de  M.  Hyrtl,  il  pa- 
raît que  cet  organe  appartient  au  sys- 
tème lymphatique  (6). 


(a)  i.  Davy,  On  the  Maie  Organs  of  some  of  the  Cartilaginous  Fishes  {Philos.  Trans.  ,  1839, 
p.  445). 

(6)  Hyrtl,  Sur  le  système  vascul.  des  Raies  (l'Institut,  1857.  t.  XXV,  p.  325). 


VINGT -SEPTIEME  LEÇON. 

De    l'appareil    circulatoire    dans    la    classe    des    Batraciens, 

§  1.  —  L'étude  de  l'appareil  circulatoire  des  Batraciens  ^gj™ 
offre  beaucoup  d'intérêt,  parce  que  ce  système,  adapté  successi- 
vement au  service  d'une  respiration  branchiale  et  d'une  respi- 
ration pulmonaire  chez  le  même  individu ,  présente  à  certains 
égards  ,  d'abord  les  caractères  de  l'appareil  circulatoire  des 
Poissons,  puis  ceux  de  ce  même  appareil  chez  les  Vertébrés 
supérieurs.  Son  étude  nous  permet  donc  de  bien  saisir  les  res- 
semblances fondamentales  qui  peuvent  exister  dans  le  système 
vasculaire  de  tous  ces  Animaux ,  malgré  les  différences  qui  se 
rencontrent  chez  ceux  dont  le  mode  de  respiration  varie,  et 
de  bien  apprécier  les  modifications  que  cette  différence  physio- 
logique entraîne  dans  la  structure  de  cette  portion  de  l'orga- 
nisme. 

Les  Batraciens  offrent  des  exemples  de  quatre  formes  prin- 
cipales de  l'appareil  circulatoire,  suivant  que  ces  animaux  res- 
pirent à  l'aide  de  branchies  externes  seulement;  qu'ils  possèdent 
des  branchies  internes  sans  avoir  en  même  temps  des  poumons; 
qu'ils  ont  à  la  fois  des  branchies  et  des  poumons  ;  ou  bien 
qu'ils  ne  respirent  qu'à  l'aide  de  ces  derniers  organes. 

S  2.  —  Le  cœur  de  ces  Animaux  (-\)  se  compose  d'une     structure 

•    J  L  dit  cœur. 

série  de  trois  cavités  contractiles  qui  correspondent  par  leur 

(1)  Le  cœur  des  Batraciens  est  situé  la  région  jugulaire,  au-devant  du 
à  peu  de  distance  de  la  tète,  presque  foie  ;  chez  les  Anoures,  il  est  placé 
immédiatement  derrière  l'appareil  plus  en  arrière.  En  général,  il  est  sus- 
hyoïdien.  Chez  les  Pérennibranclies  pendu  librement  dans  le  péricarde, 
et  chez  les  têtards  des  Batraciens  mais  chez  la  Grenouille  il  y  est  fixé 
Abranches ,  il  se  trouve  au  milieu  de  postérieurement  par  un  frein  aponé- 


374  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

position  et  leurs  usages  à  l'oreillette,  au  ventricule  et  au  bulbe 
aortique  du  cœur  des  Poissons.  Chez  les  Batraciens  qui  ne 
respirent  que  par  des  branchies,  ainsi  que  cela  a  lieu  chez  les 
Têtards  pendant  le  jeune  âge,  la  première  de  ces  pompes  car- 
diaques est  simple  comme  dans  la  classe  précédente.  Mais  ce 
mode  d'organisation  n'est  que  transitoire,  et  chez  le  Batracien 
adulte,  soit  que  celui-ci  respire  tout  à  la  fois  par  des  branchies 
et  des  poumons,  ou  qu'il  ne  possède  plus  que  des  poumons  , 
l'oreillette  est  divisée  en  deux  loges  par  une  cloison  verticale, 
ou  plutôt  il  existe  deux  oreillettes,  dont  la  disposition  rappelle 
ce  que  nous  avons  déjà  vu  chez  le  Lepidosiren  (1).  Effective- 
ment l'une  de  ces  loges,  celle  du  côté  droit,  communique  avec 
le  système  veineux  général  du  corps ,  tandis  que  celle  du  côté 
gauche  reçoit  le  sang  artériel  qui  revient  des  poumons  par  les 
veines  pulmonaires  (2).  Du  reste,  ces  deux  loges  débouchent 
dans  le  ventricule  par  un  orifice  commun  ou  très  près  l'un 

vrotique,  et  chez  les  Salamandres  un  propres  à  distinguer  les  premiers  des 

ligament  analogue  s'étend  tout  le  long  Ophidiens,  des  Sauriens  et  des  Chélo- 

de  son  bord  droit  (a),  niens.  Meckel  pensait  aussi  que  les 

(1)  Voyez  ci-dessus,  page  318.  Batraciens  ont  généralement  un  cœur 

(2)  Depuis  Harvey  (b)  jusque  dans  à  oreillette  uniloculaire ,  mais  il  dé- 
ces  dernières  années,  les  anatomistes  couvrit  que  chez  le  Pipa  la  cavité  de 
pensaient  que  les  Batraciens  avaient  cet  organe  est  divisée  en  deux  loges 
tous  un  cœur  à  une  seule  oreillette,  par  un  voile  membraneux  (e).  M.  J. 
et  dans  la  méthode  de  classification  Davy  a  trouvé,  de  son  côté,  que  le 
des  lleptiles  par  Alex.  Brongniart  (c),  cœur  présente  la  même  structure  chez 
que  Cuvier  a  toujours  suivie  (d),  cette  la  Grenouille  et  chez  le  Crapaud  (/"). 
particularité  de  structure  est  employée  Plus  récemment  ces  résultats  ont  été 
comme  un  des  principaux  caractères  étendus  aux  Salamandres  par  M.  Mar- 

(a)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  287. 

(b)  Harvey,  Exercit.  anat.  de  motu  cordis,  cap.  xvn. 

(c)  Brongniart,  Essai  d'une  classification  naturelle  des  Reptiles,  1805. 

(d)  Cuvier,  Règne  animal,  t.  II,  p.  101  (28  cuit.,  1829). 

—  La  même  opinion  était  soutenue  en  1829  par  Aliéna,  Commentatio  ad  quœstionem.  Systematice 
enumerentur  species  indigence  Replilhtm  ex  ordine  Batrachiorum,  addita  anius  sallem  speciei 
anatome,  etc.,  p.  54.  Lcyde,  1829. 

(e)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  287. 

if)  J.  Davy,  Observ.  on  the  Structure  of  the  Heart  of  Animais  of  the  Genus  P.ana  (Jamcson's 
New  Philos.  Journal,  1828,  t.  V,   p.  ICO,  et  Research-,  Physiol.  and  Anat.,\o).  I,  p.  135  et 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  375 

de  l'autre,  et  leur  séparation  ne  semble  pas  pouvoir  influer 
notablement  sur  le  cours  du  sang  (1). 
Le  ventricule ,  dont  les  parois  sont  très  charnues  et  d'une 


tin  Saint- Ange  (a),  à  la  Sirène,  à  l'Am- 
phiume  et  auProtéepar  M.  Owen(fi), 

Dans  la  plupart  des  traités  d'anato- 
mie  comparée,  on  cite  le  Menobran- 
chus  et  Y  Axolotl  comme  faisant  ex- 
ception à  cette  règle  et  comme  n'ayant 
qu'une  seule  oreillette  (c).  Cependant 
chez  ces  deux  Batraciens  la  portion 
auriculaire  du  cœur  est  divisée  plus 
ou  moins  complètement  en  deux  loges. 
Ainsi,  M.  Calori  a  trouvé  que,  chez 
l'Axolotl,  l'oreillette,  en  apparence 
unique,  est  divisée  intérieurement  en 
deux  cavités  ou  loges  dont  l'une , 
grande  et  située  en  avant,  reçoit  les 
veines  caves,  et  une  postérieure,  plus 
petite,  reçoit  les  veines  pulmonaires  (rf). 
M.  Mayer  a  trouvé  aussi  dans  l'inté- 
rieur de  la  cavité  auriculaire  du  cœur 
du  Menobranchus  une  saillie  charnue 
qui  la  divise  incomplètement  en  deux 
loges  (e). 

M.  Hyrtl  a  trouvé  que  chez  le 
Proteus  anguinus  (ou  Hypochthon 
Laurentii),  la  cloison  qui  sépare  les 
deux  oreillettes  s'étend  jusqu'à  l'ori- 
fice ventriculaire ,  mais  est  incom- 
plète (/•). 


M.  Stannius  pense  qu'il  en  est  de 
même  chez  la  Cécilie  [g). 

(1)  En  général,  la  séparation  des 
oreillettes  est  peu  ou  point  distincte 
extérieurement,  et  ces  organes  sont 
situés  plus  ou  moins  à  gauche  au- 
dessus  du  ventricule. 

Chez  le  Siren  lacertina,  la  forme 
des  oreillettes  est  rendue  très  bizarre 
par  l'existence  d'un  nombre  considé- 
rable de  prolongements  ou  digitations 
frangées  qui  en  garnissent  les  parties 
latérales,  et  qui  se  replient  en  dessous 
de  façon  à  embrasser  le  ventricule 
en  dehors  [h).  A  l'intérieur,  ces  loges 
sont  garnies  d'une  sorte  de  treillis 
formé  de  faisceaux  charnus  ;  l'oreil- 
lette artérieuse  est  petite  et  commu- 
nique avec  le  ventricule  par  un  orifice 
ovalaire  situé  à  côté  de  l'ouverture  au- 
riculo-ventriculaire  droite,  mais  dis- 
tincte de  celle-ci.  Les  veines  pulmo- 
naires y  débouchent. L'oreillette  droite 
ou  veineuse  est  très  grande  et  com- 
munique avec  le  sinus  commun-  des 
veines  caves  (i). 

Chez  YAmphiuma,  les  oreillettes 
sont  moins  développées,  moins  fran- 


ffl)  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang  considérée  chez  le  fœtus  de  l'Homme,  et  compara- 
tivement dans  les  quatre  classes  des  Vertébrés.  1  feuille  sans  date. 

(b)  Owen,  On  the  Structure  of  the  Heart  in  the  Perennibranchiate  Balrachia  (Trans.  of  the 
Zool.Soc,  1835,  vol.  I,  p.  213). 

(c)  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  2"  édit.,  t.  VI,  p.  335. 

(d)  Calori,  SulU  anatomia  dell'  Axolotl  comrnentario  ,  p.  45,  pi.  3,  fig.  12  (extrait  des  Mém.  de 
l'Institut  de  Bologne). 

(e)  Mayer,  Analecten  fur  Yergleichende  Anatomie,  1835,  p.  73. 

(f)  Hyrti,  Berichtigungen  iiber  den  Bau  des  Gefâss-Syslems  von  Hypochlhon  Laurentii  (Medici- 
nische  Jahrbïœher  des  Oesterreichischen  Staates,  1844,  t.  XLV1I1,  p'.  258). 

(g)  Stannius  et  Sicbold,  Nouveau  Manuel  d' anatomie  comparée,  t.  I,  p.  235. 
(h)  Owen,  l'oc.  cit.,  pi.  31,  fig.  1. 

■ —  Rusconi,  Amours  des  Salamandres  aquatiques,  pi.  5,  fig.  7. 
fi)  Owen,  loc.  cit.,  fig.  2. 


376  APPAREIL  DE  LA  CIRCULATION 

structure  caverneuse  intérieurement  (1),  est  arrondi  et  ne  pré- 
sente rien  de  remarquable,  si  ce  n'est  que  sa  portion  postérieure 
est  quelquefois  divisée  en  deux  loges  par  une  cloison  charnue  (2). 
Son  orifice  auriculaire  est  garni  de  valvules  plus  ou  moins  bien 
constituées  (3),  et  antérieurement  il  débouche  dans  le  bulbe. 
Enfin  on  aperçoit  dans  son  tissu  beaucoup  de  filaments  nerveux, 
mais  les  centres  ganglionnaires  n'y  sont  pas  très  nombreux  (4). 


gées  latéralement  et  placées  plus  à 
gauche  (a). 

Chez  le  Menobranchus ,  les  oreil- 
lettes sont  très  lisses  à  l'extérieur,  et 
la  cloison  qui  les  sépare  est  placée 
transversalement  (b). 

Chez  le  Protée,  la  portion  auriculaire 
du  cœur  est  très  large  et  arrondie 
latéralement  (c). 

Chez  les  Grenouilles ,  et  surtout 
chez  les  Crapauds  ,  elle  est  peu  déve- 
loppée et  embrasse  latéralement  et  en 
arrière  le  tronc  aortique,  ainsi. que 
la  base  du  ventricule  (d)  ;  tandis  que 
chez  les  Salamandres  (e) ,  de  même 
que  chez  le  Ménopome,  elle  est  située 
tout  à  fait  à  gauche  du  ventricule  (/"), 
ainsi  que  chez  l' Axolotl  [g). 

(1)  M.  Briicke  a  trouvé  que  chez 
les  Batraciens  Anoures,  les  faisceaux 
musculaires  dont  la  tunique  charnue 
du  ventricule  est  formée  circonscri- 
vent une  multitude  de  petites  cavités 
irrégulières  qui  communiquent    les 


unes  avec  les  autres,  et  qui  débouchent 
dans  un  espace  libre  situé  près  de  l'ori- 
fice auriculo-ventriculaire  (h), 

(2)  Chez  le  Siren  lacertina,  où  celte 
disposition  existe,  la  cloison  ventricu- 
laire  s'étend  dans  la  moitié  postérieure 
du  cœur,  et  se  termine  en  avant  par 
un  bord  concave  dirigé  vers  l'orifice 
aortique.  La  surface  interne  du  ven- 
tricule est  réticulée  par  des  colonnes 
charnues.  Enfin  le  bord  inférieur  de 
la  cloison  interauriculaire  est  attaché 
aux  parois  du  ventricule  par  une 
bride  charnue,  et  présente  de  chaque 
côté  un  petit  prolongement  membra- 
neux en  forme  de  valvule  (i). 

(3)  Ces  valvules,  comme  je  viens  de 
le  dire,  sont  très  peu  développées  chez 
la  Sirène. 

(/i)  Les  nerfs  du  cœur  de  la  Gre- 
nouille proviennent  des  pneumogas- 
triques, et  présentent  sur  leur  trajet 
plusieurs  centres  ganglionnaires  com- 
posés d'utricules  médullaires.   Quel- 


fa)  Cuvier,  Mém.  sur  un  genre  de  Reptiles  nommé  Ampliiuma  [Mêm.  du  Muséum,  1827,  t.  XIV, 
pi.  2,  fig.  1  et  2). 

(b)  Mayer,  Analecten  fur  vergl.  Anat.,  p.  73,  pi.  7,  fig.  4. 

(c)  Délie  Chiaje,  Ricerche  anatomico-biologiehe  sul  Proteo  serpentino,  pi.  2,  fig,.  1. 

(d)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  285. 

(e)Funk,  De  Salamandres  terrestris  vita  tractatus,  pi.  1,  fig.  1. 

(f)  Voyez  Mayer,  Analecten  fur  vergl.  Anat.,  pi.  7,  fig-.  3. 

(g)  Calori,  Op.  cit.,  pi.  3,  fig.  13. 

(h)  Briicke,  Beitrage  %ur  vergleichenden  Anatomie  und  Physiologie  der  Gefàss-Systems  (Mém. 
de  l'Académie  des  sciences  de  Vienne,  1852,  t.  III,  p.  355,  pi.  22,  fig.  12  et  13). 

(i)  Owen,  On  the  Struct.  of  the  Heart  in  the  Perennibr.  Ratrachia  {Trans.  of  the  Zool.  Soc, 
t.  I,p.  210,  pi.  31,  fig.  3). 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  377 

Dans  les  premiers  temps  de  la  formation  du  cœur  chez  l'em- 
bryon de  tous  les  Vertébrés  ,  on  remarque  entre  le  ventricule 
et  le  bulbe  un  étranglement  plus  ou  moins  allongé  que  l'on 
désigne  d'ordinaire  sous  le  nom  de  détroit  de  Haller,  en  l'hon- 
neur du  physiologiste  célèbre  de  Berne,  qui,  vers  le  milieu  du 
siècle  dernier,  fut  un  des  premiers  à  bien  observer  le  dévelop- 
pement de  cet  organe.  Chez  les  Poissons,  de  même  que  chez 
les  Vertébrés  supérieurs,  ce  détroit  ne  tarde  pas  à  disparaître  et 
devient  seulement  l'orifice  artériel  du  ventricule  ;  mais  chez  les 
Batraciens,  au  contraire,  il  persiste,  et  il  acquiert  souvent  une 
longueur  considérable  (1).  Chez  la  Sirène,  où  il  est  un  peu 
contourne  en  spirale,  il  est  garni  de  valvules  à  ses  deux  extré- 
mités (2). 


ques-uns  de  ces  ganglions  sont  logés  valvules  plus  petites  sont  placées  à 

clans  la  cloison  interauriculaire  ;  d'au-  l'extrémité  antérieure  du  détroit, là  où 

très  se  trouvent  dans  le  ventricule,  à  commence  le  bulbe  (d). 

la  base  des  valvules  auriculo-ventri-  M.  Hyrll  a  signalé  aussi  l'existence 

culaires  (a),  de  deux  séries  de  ces  valvules  chez  le 

(1)  Chez  les  têtards  du  Triton,   ce  Protée  (e). 

détroit    est  très  allongé  ,   en   forme  Chez  le  Menopoma,  cette  structure 

de  tube  dont  l'extrémité  antérieure  est  encore  plus  développée,  chacpie 

est  renflée  pour   constituer  le  bulbe  rangée  de  valvules  se  composant  de 

aorlique    (6)  ;  chez    le    Monobran-  quatre  languettes  membraneuses  (/). 

chus,  il    est   plus   court  et  presque  II  est  aussi  à  noter  que  le  détroit 

droit  (c) .  de  Haller  est  quelquefois  un  peu  renflé 

(2)  M.  Owen  a  trouvé  à  la  base  de  vers  le  milieu,  et  constitue  alors  le 
ce  détroit  deux  valvules,  dont  une  bulbe  accessoire,  ou  bulbe  postérieur 
grande  et  l'autre  rudimentaire.  Deux  dont  l'existence  a  été   signalée  par 

(a)  Ludwig,  Ueber  die  Heranerven  des  Frosches  (Miïllcr's  Archiv  fur  Anat.  und  Physioï.,  1848, 
p.  139,  pi.  5). 

—  Bidder,  Ueber  functionell  verschiedene  und  rdumlich  getrennte  Nervencentra  im  Frosch' 
herxen  (Miiller's  Archiv,  1852,  p.  168,  pi.  5). 
— ■  Valentin,  Grundriss  der  Physiologie,  p.  551,  fig.  376. 

(b)  Rusconi,  Amours  des  Salamandres  aquatiques,  pi.  5,  fig.  4. 

(c)  Mayer,  Analecten  fur  vergleichende  Anatomie,  pi.  7,  fig.  4. 

(d)  Owen,  Op.  cit.  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  1. 1,  p.  216). 

(e)  Hyrtl,  Berichtig.  uber  den  Bau  des  Gefdss-Systems  von  Hypochthon  (Medicln.Jahrb.,t.  XLVIIÏ, 
p.  259). 

(/■)  Hunter,  Gen.  Observ.  on  Pneumobranchiata  (Descript.  and  Illustrated  Catalogue  of  the 
Physiological  Séries  of  Comp.  Anat.  contained  in  the  Muséum  of  the  Collège  of  Surgeons  in 
London,  t.  II,  pi.  23,  fîg-.  2). 


378 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Système 
aortique. 


Vaisseaux 
branchiaux 
des  Têtards. 


Le  bulbe  aortique,  qui  fait  suite  au  détroit  de  Haller,  est  en 
général  très  développé,  et  présente,  chez  quelques  espèces,  une 
disposition  curieuse  dont  nous  apprécierons  plus  tard  l'impor- 
tance. En  effet,  chez  la  Grenouille  et  le  Crapaud,  sa  cavité  est 
incomplètement  divisée  en  deux  canaux  parallèles  par  des  replis 
membraneux  longitudinaux  dont  les  bords  se  rencontrent,  mais 
restent  distincts  (1). 

§  S.  —  C'est principalement  dans  la  disposition  delà  portion 
antérieure  du  système  aortique  que  résident,  les  grandes  diffé- 
rences dont  j'ai  annoncé  l'existence  chez  les  Batraciens,  où 
l'appareil  respiratoire  est  constitué  suivant  les  quatre  types  rap- 
pelés ci-dessus,  et,  pour  bien  saisir  l'ensemble  de  ces  modifi- 
cations, il  est  nécessaire,  de  suivre  le  développement  de  ces  vais- 
seaux dans  l'embryon. 

Chez  tous  les  Batraciens,  le  tronc  aortique  qui  fait  suite  au 
bulbe  artériel  du  cœur  se  divise  presque  aussitôt  en  une  double 
série  d'arcs  ou  de  crosses  ,  et  chez  l'embryon  ces  arcs  vascu- 
laires,  après  avoir  embrassé  le  tube  digestif,  vont  se  réunir  au- 
dessus  de  celui-ci  pour  constituer  l'aorte  dorsale.  Par  congé- 


quelques  anatomistes  chez  certains 
Batraciens,  tels  que  le  Protée  (a). 

(1)  Les  deux  replis  longitudinaux 
qui  divisent  incomplètement  le  canal 
du  bulbe  chez  les  Batraciens  Anoures 
mentionnés  ci-dessus  ont  été  signalés 
par  M.  Hyrtl,  comme  étant  tout  à  fait 
semblables  à  ceux  que  cet  anatomiste 
a  trouvés  chez  le  Lepidosiren  para- 
cloxa  (6). 

Quelque  cbose  d'analogue  ,  mais 
moins  bien  développé,  se   remarque 


chez  le  Siren  lacertina.  Un  bourrelet 
saillant  se  détache  de  la  paroi  supé- 
rieure du  bulbe,  se  prolonge  dans 
toute  sa  longueur,  -et  offre  en  dessous 
des  sillons  qui  correspondent  aux 
artères  formées  par  la  division  de 
l'extrémité  antérieure  de  cette  portion 
aortique  du  cœur  (c). 

Une  disposition  semblable  a  été 
trouvée  chez  l'Axolotl  par  M.  Ga- 
lon [d\. 


(a)  Del!e  Cliiaje,  Ricerche  anatomico-biologiche  sul  Proteo  serpenlino,  pi.  2,  fig.  1. 
—  Hyrtl,  Op.  cit.  (Med.  Jalirb.  des  Oesterreich.  Staates,  1844,  t.  XLV1I1). 
■ —  Stannius  et  Siebold,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  I.  II,  p.  230. 
(/.■)  Owen,  loc.  cit.,  p.  21  G,  pi.  31 ,  fig.  3  g. 

(c)  Hyrtl,  Lepidosiren  paradoxa  Monographie  (Mém.  de  Bohême,  t.  III,  p.  041). 

(d)  Calori,  Op.  cit.,  p.  45. 


CHLZ    LES    BATRACIENS*  379 

quent,  la  disposition  de  ces  crosses  aortiques  est  d'abord  la  même 
que  chez  l'embryon  des  Poissons,  sauf  le  nombre,  car  chez  les 
Batraciens  il  n'en  existe  que  quatre  paires.  Mais  cet  état 
n'est  que  transitoire,  et  bientôt  chacune  des  crosses  des  trois 
premières  paires  donne  naissance  latéralement  à  une  petite 
anse  vasculaire  qui  se  développe  dans  la  branchie  externe  cor- 
respondante. Ces  anses  secondaires,  d'abord  simples,  se  ramifient 
et  se  multiplient  à  la  file,  de  façon  à  constituer  dans  chaque 
branchie  externe  deux  vaisseaux ,  marchant  parallèlement  et 
communiquant  entre  eux  par  des  réseaux  capillaires  (1).  A 
mesure  que  la  branchie  externe  grandit,  ces  deux  vaisseaux, 
dont  l'un  est  afférent  ou  centrifuge,  l'autre  efférent  et  centri- 
pète, grossissent;  la  quantité  de  sang  qui  y  pénètre  devient  de 
plus  en  plus  considérable,  et  lorsque  leur  développement  est 
achevé,  l'un  d'eux  constitue  le  prolongement  de  la  portion  in- 
férieure ou  cardiaque  de  l'arc  aortique  dont  il  dépend,  tandis  que 
l'autre  devient  le  commencement  de  la  portion  dorsale  du  même 
arc  ;  car,  en  général ,  la  partie  intermédiaire  de  la  crosse  primitive 
comprise  entre  les  points  d'origine  de  ces  deux  troncs  bran- 
chiaux s'atrophie  et  disparaît.  Ainsi,  par  suite  de  ces  change- 
ments organogéniques,  l'arc  aortique,  qui  primitivement  était 
simple  et  continu,  se  trouve  divisé  en  deux  parties  :  une  artère 
branchiale,  qui  part  du  bulbe  pour  se  ramifier  dans  la  branchie 
externe  correspondante,  et  un  vaisseau  efférent,  ou  artère  épi- 
branchiale,  qui  ressemble  à  une  veine  par  son  mode  d'origine 
dans  le  réseau  capillaire  branchial,  et  qui  va  contribuer  à  la 
formation  de  l'aorte  dorsale  (2). 

(i)  Il  paraît  que  chez  le  Protée,  où  seulement  et  ne  se  résolvent  pas  en  un 

lès  globules  du  sang  sont  remarqua-  réseau  de  véritables  capillaires  {a). 
blement    grands  ,   les   vaisseaux  des  (2)  Chez  la  Grenouille,  cette  trans- 

iilaments   branchiaux     sont    ondulés  formation  des  arcs  aortiques  en  deux 

{a)  Hyrll,  Op.  cit.  (Mcdicin.  Jahrb.,  1844,  t.  XL VIII,  [h  200). 


380  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Le  mode  d'organisation  de  la  portion  centrale  du  système 
artériel  ressemble  alors  à  ce  qui  existe  chez  les  Poissons,  avec 
cette  différence  cependant  que  les  arcs  aortiques  de  la  quatrième 
paire,  toujours  très  grêles  et  confondus  à  leur  base  avec  ceux 
de  la  paire  précédente,  débouchent  dans  l'aorte  dorsale  sans 
s'être  ramifiés  dans  l'appareil  respiratoire ,  et  que  les  artères 
branchiales  formées  parles  trois  premières  paires  de  crosses  se 
terminent  dans  un  réseau  capillaire  situé  à  l'extérieur  du  corps, 
au  lieu  de  se  ramifier  pendant  leur  trajet  le  long  des  arcs 
branchiaux  de  l'hyoïde. 

Ce  mode  de  circulation  est  très  nettement  caractérisé  chez 
les  larves  des  Tritons  (1),  et  se  voit  aussi  chez  les  Têtards  de  la 
Grenouille  pendant  les  premiers  moments  de  la  vie.  Mais  chez 
ces  derniers,  une  modification  importante  ne  tarde  pas  à  s'y 
manifester.  Des  ramifications  naissent  tout  le  long  de  la  portion 
hyoïdienne  des  artères  branchiales ,  et,  après  avoir  formé  un 
réseau  capillaire  dans  les  franges  membraneuses  dont  les  arcs 
branchiaux  se  garnissent,  se  réunissent  de  nouveau  pour  con- 
stituer des  vaisseaux  efférents  qui  débouchent  dans  les  racines 

vaisseaux  réunis  par  un  système  ea-  J'ajouterai  à  ce  qui  a  été  dit  ci- 

pillaire  respiratoire   n'est  pas  conv  dessus,  qu'à  une  certaine  époque  des 

plète  ,    et  chaque   artère  branchiale  métamorphoses,  le  tronc  de  chacune 

propre  communique  aussi  avec  l'ar-  des  artères  branchiales  ,  avant   son 

tère  épibranchiale  par  un  canal  ana-  entrée  dans    la    branchie  ,  commu- 

stomotique  très  large,  disposition  sur  nique  avec  le  vaisseau  efférent  cor- 

laquelle  je  reviendrai  bientôt  (a).  respondant  par   deux    ou   plusieurs 

(1)  La  disposition  générale  de  ces  petits  canaux  anastomotiques  irans- 

vaisseaux  chez  la  larve  du  Triton  a  versaux,  qui  plus  tard  se  réduisent  à 

été  très  bien  étudiée  et  représentée  un  seul, 
par  M.  Rusconi  (b). 

(o)  Lambotle,  Ob'serv.  anal,  et  ph'gsiol.  sur.  les  appareils  sanguins  et  respiratoires  des  Batra- 
ciens Anoures  (Méni.  couronnés  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  183S,  t.  XIII,  fig.  21). 

(&)  Mauro  Rusconi,  Descrizione  anatomica  degli  organi  délia  circolazione  délie  larve  délie 
Salamandre  acqualiche.  Pavia,  1817,  pi.  1,  fig.  6. 

—  Amours  des  Salamandres  aquatiques  et  développement  du  têtard  de  ces  Salamandres, 
1821,  pi.  5,  fig.  1  à  i. 

—  Voyez  aussi  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang,  fig.  25. 

■ —  Carus  et  V.  Otto,  Tabuke  Anatomiam  comparativam  illustrantes,  pars  vi,  pi.  5,  fig.  1. 


branches. 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  381 

aortiques  correspondantes. La  portion  terminale  du  système  vas- 
culaire  respiratoire  s'atrophie  en  même  temps  que  ces  rameaux 
nouveaux  se  développent,  et  bientôt  les  branchies  externes 
cessent  d'exister,  mais  les  branchies  internes  qui  viennent  de 
se  constituer  remplissent  les  mêmes  fonctions  :  et  chez  ces  Tê- 
tards, de  même  que  chez  les  larves  des  Tritons,  un  réseau  vas- 
culaire  branchial  se  trouve  placé  sur  le  trajet  du  sang  qui  se 
rend  du  cœur  à  l'aorte  dorsale;  seulement  ce  réseau  ,  au  lieu 
d'appartenir  à  des  appendices  cutanés  externes,  comme  chez  ces 
derniers,  naît  sur  les  arcs  de  l'appareil  hyoïdien  et  constitue 
les  branchies  internes. 

En  ce  qui  concerne  les  arcs  aortiques  des  trois  paires  anté-      Artères 
Heures,  le  premier  de  ces  deux  modes  d'organisation  persiste  dMPàwml- 
pendant  toute  la  vie,  chez  les  Batraciens  Pérennibranches,  c'est-à- 
dire  chez  les  Protées,  les  Sirènes,  les  Axolotls,  les  Ménobran- 
ches,  etc.  Mais  les  crosses  aortiques  postérieures  ne  restent  pas 
simples  comme  chez  la  larve  du  Triton,  et,  en  se  développant, 
changent  complètement  le  caractère  de  l'appareil  respiratoire. 
En  effet,  des  phénomènes  organogéniques,  analogues,  à  ceux 
que  nous  avons  vus  se  produire  sur  le  trajet  des  arcs  vasculaires 
des  trois  premières  paires  dans  le  point  où  les  branchies  ex- 
ternes prennent  naissance,  se  manifestent  dans  un  point  du 
trajet  de  chacun  de  ces  vaisseaux.  Deux  organes  nouveaux,  les 
poumons,  se  développent  dans  le  voisinage  de  ces  arcs  aortiques 
postérieurs,  et  à  mesure  qu'ils  se  forment,  des  branches  venant 
de  ceux-ci  se  ramifient  dans  les  parois  de  ces  sacs  membra- 
neux, où  elles  s'anastomosent  avec  d'autres  vaisseaux  dépen- 
dants de  la  portion  centripète  du  système  circulatoire  enfin  ;  la 
partie  dorsale  de  ces  arcs  aortiques  postérieurs  s'atrophie  à 
mesure    que  les  branches  pulmonaires  se  développent  :  de 
sorte  que  ces  crosses,   au  lieu  de  devenir  des  artères  bran- 
chiales comme  celles  des  paires  précédentes,  deviennent  des 
artères  pulmonaires. 


3§2  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

C'est  ainsi  que  se  trouve  réalisée  la  troisième  l'orme  de 
l'appareil  circulatoire  des  Batraciens  :  celle  qui  est  propre  aux 
Pérennibranches. 

Chez  ces  Animaux,  en  effet,  le  bulbe  aortique  donne  nais- 
sance à  trois  paires  d'artères  branchiales  qui,  après  avoir  suivi 
le  bord  inférieur  des  arcs  hyoïdiens  correspondants,  vont  se 
ramifier  dans  les  branchies  extérieures,  et  à  une  paire  d'artères 
pulmonaires  qui  se  recourbent  en  arrière  pour  aller  distribuer 
une  portion  du  sang  veineux  aux  poumons  (1). 


(1)  Ainsi  chez  V Axolotl ,  où  la  dis- 
position de  ces  vaisseaux  a  été  briève- 
ment indiquée  par  Cuvier  (a)  et  étudiée 
avec  beaucoup  de  soin  par  M.  Calori , 
le  tronc  aortique  commun,  ou  bulbe, 
fournit  quatre  paires  d'arcs  vasculaires 
dont  les  troncs  antérieurs  naissent 
isolément  et  les  deux  derniers  sont 
confondus  à  leur  base  de  chaque  côté. 
Les  trois  premiers  arcs  constituent  les 
artères  branchiales,  qui  se  portent  en 
avant  eten  dehors,  longent  le  bord  in- 
férieur des  arcs  hyoïdiens  correspon- 
dants, et  sur  les  côtés  du  cou  se  déta- 
chent du  corps  pour  pénétrer  dans 
les  branchies,  dont  elles  occupent  le 
bord  antéro-inférieur  (6).  Là  elles 
donnent  naissance  à  une  double  série 
de  ramuscules  qui  pénètrent  dans  les 
franges  branchiales,  s'y  ramifient,  et 
constituent  vers  le  bout  de  ces  ap- 
pendices filiformes  un  réseau  capil- 
laire d'où  naissent  les  racines  du 
vaisseau  branchial  efférent  correspon- 
dant (c).  Celui-ci  va  déboucher  dans 


un  tronc  récurrent  ou  artère  épibran- 
chiale  qui  longe  le  bord  postéro-supé- 
rieur  de  la  branchie,  pénètre  dans  le 
cou,  et  va  sur  la  paroi  supérieure  de  la 
cavité  viscérale  s'anastomoser  avec  ses 
congénères  du  même  côté  pour  con- 
stituer les  racines  de  l'aorte,  etc.  Les 
arcs  aortiques  de  la  quatrième  paire 
contournent  aussi  l'œsophage  en  se 
portant  obliquement  en  arrière  et  en 
dehors  ;  puis  parvenus  sur  les  côtés  du 
cou,  se  bifurquent  pour  aller  d'une 
part  s'anastomoser  avec  les  racines  de 
l'aorte,  d'autre  part  se  distribuer  aux 
poumons,  dont  ils  occupent  la  face 
externe  (d). 

Chez  le  Siren  lacertina,  la  qua- 
trième paire  d'arcs  aortiques  paraît 
manquer,  et  les  artères  pulmonaires 
naissent  des  crosses  de  la  troisième 
paire,  au  delà  du  point  où  celles-ci 
sont  interrompues  par  le  système 
capillaire  branchial  ;  ces  artères  sont 
par  conséquent  des  branches  des  ra- 
cines aortiques  ou  artères  épibran- 


(a)  Clavier,.  Recherches  analomiques  sur  les  Reptiles  regardés  encore  comme  douteux  par  les 
naturalistes  (Humboldt  et  Bonpland,  Recueil  d'observations  de  zoologie  et  d'anatomie  comparée, 
1811,  t.  I,  p.  114). 

(6)  Calori,  Sull'  anatomia  dell'  Accololl  commentario,  Bologne,  1852  (extrait  des  Mémoires  de 
l' Académie  des  sciences  de  l'Institut  de  Bologne,  t.  III). 

le)  Calori,  toc.  cit.,  pi.  4,  fig-.  17. 

(rfjldem,  ifiirf.,Jpl.  4,  fig.  18. 


oôo 


CHEZ    LES    BATRACIENS. 

Les  vaisseaux  qui  reçoivent  le  sang  fourni  à  l'appareil  pneu- 
matique par  ces  dernières  artères  n'ont  pas  de  représentants 
dans  l'appareil  circulatoire  des  Poissons  ordinaires  ou  des  jeunes 
larves  de  Batraciens  ;  ce  sont  des  organes  de  création  nouvelle 
qui  sont  introduits  dans  l'économie  pour  répondre  aux  besoins 
qu'entraîne  le  perfectionnement  de  la  respiration  chez  les 
Vertébrés  supérieurs.  Ils  consistent  en  veines  qui  naissent  du 
réseau  capillaire  des  parois  des  poumons ,  et  qui  vont  directe- 
ment au  cœur  pour  y  déboucher  dans  l'oreillette  droite. 

Le  sang  qui,  en  sortant  du  cœur,  au  lieu  de  s'engager  dans 


chiales  postérieures  ,  vaisseaux  effé- 
rents  que  les  anatomistes  désignent 
généralement  sous  le  nom  de  veines 
branchiales  (a). 

Chez  le  Protée,  ce  système  de  vais- 
seaux se  centralise  davantage  :  le  tronc 
commun  de  l'aorte  se  divise  d'abord  en 
une  paire  de  branches,  et  bientôt  celles- 
ci  se  bifurquent  pour  former  une  artère 
branchiale  antérieure  qui  reste  simple, 
et  un  rameau  postérieur  qui  à  son 
tour  se  divise  en  deux,  afin  de  consti- 
tuer les  artères  branchiales  propres 
des  deux  derniers  arcs  (b).  Les  trois 
paires  d'arcs  vasculaires  ainsi  formées 
portent  le  sang  auxbranchies  externes, 
mais  à  la  base  de  ces  appendices  elles 
sont  unies  aux  vaisseaux  efférents  cor- 
respondants    (  ou    artères    épibran- 
chiales)  par  des  anastomoses  directes  ; 
de  sorte  que  la  plus  grande  partie  du 
liquide  qui  les  traverse    n'arrive  pas 
dans  l'appareil  respiratoire  et  passe 


directement    dans    les    racines    de 
l'aorte  (c). 

Le  mode  d'origine  des  artères  pulmo- 
naires est  le  même  que  chez  la  Sirène. 
Il  est  aussi  à  noter  que,  par  suite 
de  la  position  de  l'anastomose  entre 
l'arc  vasculaire  pulmonaire  et  le  sys- 
tème aortique,  le  sang  qui  se  distribue 
à  la  tête  est  plus  complètement  arté- 
rialisé  que  celui  destiné  au  tronc.  En 
effet,  les  artères  carotides,  etc.,  nais- 
sent de  la  portion  antérieure  du  sys- 
tème  aortique   avant  que  celui-ci  ait 
reçu  les  deux  branches  anastomoti- 
ques    qui   y  déversent  une  portion 
du  courant  veineux  dont  le  reste  va 
aux  poumons.  Lorsque  la  respiration 
aérienne  est  interrompue  et  que  les 
poumons  sont  affaissés,  ces  anasto- 
moses servent  aussi  au  passage  de 
presque  tout  le  sang,  qui  dans  le  cas 
contraire   traverse   ces    derniers   or- 
ganes. 


(u)  Cuvier,  Reptiles  douteux  (loc.  cit.,  p.  107,  pi.  11 ,  fig.  2  et  3). 

—  Owen,  On  the  Structure  ofthe  Heart  in,  the  Perennibranchiate  Batrachia  (Trans.  of  the 
Zool.  Soc,  vol.  I,  p.  21",  pi.  31,  fig.  1  et  3). 

(b)  Configliachi  et  Rusconi,  Del  Proteo  anguino  di  Laurcnti  monographia  ,  1819,  p.  70,  pi    4 
fig.  8. 

—  Délie  Chiaje,  Ricerche  anat.-biol.  sul  Proteo  serpentino,  pi.  3,  fig.  3. 

(c)  Hyrtl,  Op.  cit.  (Médian.  Jahrb.,  184  4,  t.  XLV11I,  p.  258). 


III. 


25 


38/j.  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

les  artères  pulmonaires,  s'avance  dans  les  artères  branchiales 
et  arrive  dans  les  panaches  cervicaux,  où  la  respiration  aqua- 
tique a  son  siège,  passe,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  dans  le  réseau 
capillaire  branchial,  puis  revient  en  sens  inverse  par  les  ar- 
tères efférentes  de  ces  appendices, et  ces  vaisseaux,  en  se  réunis- 
sant entre  eux,  vont  constituer  l'artère  dorsale,  sur  la  disposi- 
tion de  laquelle  je  reviendrai  bientôt. 

Ce  mode  de  circulation,  qui  se  voit  aussi  chez  la  larve  du 
Triton  à  une  certaine  période  de  la  vie,  se  retrouve  à  peu  de 
chose  près  chez  le  Têtard  de  la  Grenouille ,  lorsque  celui-ci  a 
déjà  des  poumons  et  que  ses  métamorphoses  cependant  ne  sont 
pas  encore  achevées.  Mais  il  n'est  permanent  que  chez  les 
Pérennibranches.  En  effet,  chez  tous  les  Batraciens  dont  la  res- 
piration devient  exclusivement  pulmonaire  quand  ils  sont  à 
l'état  parfait,  tout  le  système  capillaire  branchial  disparait 
complètement,  et,  de  même  que  chez  l'embryon,  le  sang  passe 
directement  du  cœur  dans  l'aorte  dorsale  par  des  crosses  non 
interrompues. 
Mode  Je         ]y[ajs  comment  la  continuité  se  rétablit-elle  entre  la  portion 

transformation  * 

des  vaisseaux  cardiaque  et  la  portion  dorsale  du  système  aortique,  et  comment 

branchiaux  l  l  ". 

en  crosses    }es  crosses  qui,  dans  la   première  période  embryologique, 

aortiques  chez  J       '  l  r  *■;■'■ 

les  Batraciens  reliaient  l'artère  dorsale  au  cœur,  peuvent-elles  se  reconstituer? 

Abranches.  . 

A  première  vue,  on  pourrait  croire  que  cela  doit  nécessiter 
de  grands  travaux  organogéniques  et  entraîner  de  nouvelles 
complications  dans  l'économie  de  ces  Animaux.  Mais,  en  réalité, 
rien  n'est  plus  simple,  ni  plus  facile  à  obtenir  ;  car  ,  pour 
réaliser  ce  changement  physiologique  si  important,  il  suffit  de 
l'élargissement  de  quelques  anastomoses  entre  les  vaisseaux 
préexistants,  et,  en  effet,  c'est  de  la  sorte  que  les  choses  se 
passent. 

Pour  bien  comprendre  les  phénomènes  qui  se  produisent 
ainsi  dans  l'organisme  des  Batraciens  ,  il  est  utile  de  connaître 
les  procédés  employés  par  la  Nature  pour  obvier  aux  inconvé- 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  385 

nients  résultant  de  l'oblitération  accidentelle  d'une  artère  dans 
le  corps  humain.  Lorsque,  par  suite  de  la  pression  exercée  par 
une  ligature  ou  toute  autre  cause,  un  de  ces  vaisseaux  vient  à 
être  oblitéré  dans  une  portion  de  sa  longueur,  le  sang  ne  peut 
plus  passer  directement  dans  la  portion  du  tube  placée  au  delà 
de  l'obstacle;  mais  la  circulation  tend  néanmoins  à  se  continuer 
dans  les  parties  auxquelles  les  branches  de  l'artère  ainsi  barrée 
se  distribuent,  des  voies  de  communication  latérales  se  for- 
ment entre  les  deux  portions  du  tronc  situées  en  amont  et  en 
aval  de  l'obstacle,  et  la  continuité  du  système  irrigatoire  se  réta- 
blit, soit  par  le  fait  de  la  simple  dilatation  de  ramuscules  anasto- 
motiques  préexistants,  soit  à  l'aide  d'une  production  nouvelle  de 
canaux  de  jonction.  C'est  sur  la  connaissance  de  ce  mode  de 
rétablissement  du  courant  sanguin  dans  les  parties  dont  le  tronc 
artériel  afférent  a  été  oblitéré ,  que  repose  la  méthode  générale- 
ment employée  par  les  chirurgiens  pour  le  traitement  de  cer- 
taines blessures  ou  maladies  des  grosses  artères,  telles  que  les 
anévrysmes,  et  c'est  à  l'aide  d'un  travail  réparateur  analogue 
que  les  portions  du  système  artériel  situées  en  amont  et  en 
aval  des  branchies  des  Batraciens  se  retrouvent  en  continuité, 
lorsque  le  sang  cesse  de  traverser  le  réseau  capillaire  qui  les 
reliait  Tune  à  l'autre  dans  ces  organes  de  respiration  aquatique, 
phénomène  dont  l'atrophie  de  ceux-ci  est  nécessairement 
accompagnée. 

Effectivement,  le  professeur  Rusconi ,  de  Pavie,  auteur  de 
plusieurs  ouvrages  importants  sur  l'histoire  naturelle  des  Batra- 
ciens, a  trouvé  à  la  base  de  chacune  des  branchies  de  la  larve 
du  Triton  une  petite  branche  capillaire  qui  naît  du  vaisseau  affé% 
rent,  et  qui,  au  lieu  de  se  ramifier  dans  ces  organes,  va  s'anasto- 
moser directement  avec  la  portion  voisine  du  tronc  efférenl  (1). 


(1)  Cette   branche   anaslomolique      M.   Rusconi  a  données  de  l'appareil 
basilaire  se  voit  dans  les  figures  que      circulatoire  de  la  larve  du  Triton,  ou 


386  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Tant  que  le  sang  poussé  dans  l'artère  branchiale  par  les  contrac- 
tions du  cœur  trouve  une  voie  facile  à  suivre  pour  se  rendre  de 
cette  artère  dans  le  réseau  respiratoire  des  branchies,  cette  petite 
branche  anastomotique  reste  très  grêle  et  n'a  aucune  fonction  im- 
portante à  remplir  ;  mais  lorsque  les  branchies  commencent  à  se 
flétrir  et  que  les  vaisseaux  qui  les  traversent  se  rétrécissent  ou 
s'effacent,  le  chemin  de  traverse  préparé  au  moyen  de  cette  ana- 
stomose capillaire  s'élargit,  de  plus  en  plus  et  une  portion  du  sang 
s'y  engage  pour  aller  de  l'artère  branchiale  à  l'artère  épibran- 
chiale,  ou  racine  de  l'aorte,  sans  traverser  la  branchie.  A  une 
certaine  période  de  la  métamorphose,  la  portion  basilaire  de 
chaque  artère  branchiale  se  trouve  ainsi  terminée  par  deux 
troncs  de  grosseur  à  peu  près  égale ,  l'un  se  continuant  en 
dehors  pour  pénétrer  dans  le  panache  branchial  et  s'y  ramifier, 
l'autre  se  recourbant  en  haut  et  en  arrière  pour  déboucher 
directement  dans  le  vaisseau  efférent  de  cette  même  branchie, 
dans  le  point  où  cette  artère  épibranchiale  rentre  dans  l'inté- 
rieur du  corps  pour  constituer  une  des  racines  de  l'aorte.  Les 
changements  en  sens  inverse  qui  s'effectuent  de  la  sorte  dans 
la  branche  appendiculaire  et  la  branche  anastomotique  de 
l'artère  branchiale  se  prononçant  davantage,  cette  branche  de- 
vient bientôt  la  continuation  du  tronc  de  ce  vaisseau,  l'autre  un 
rameau  accessoire.  Puis  enfin  le  rameau  terminal  ou  branchial, 
s'atrophiant  à  mesure  que  les  branchies  cessent  de  fonctionner, 
finit  par  disparaître  entièrement,  et  le  canal  anastomotique  établit 

Salamandre  aquatique  (a).    Mais  les  a  publié  plus  tard  sur  la  circulation 

divers  degrés  de  son  développement  dans  les  divers  Vertébrés  comparés 

et  les  modifications  correspondantes  au   fœtus  de  l'Homme  (6).  Ces  der- 

sont  mieux  représentés  dans  le  tableau  nières  figures  ont  été  reproduites  dans 

lithographie   que  M.  Martin  St-Ange  divers  ouvrages  élémentaires  (c). 

(a)  Rusconi,  Descriz.  anat.  degli  organi  délia  circolazione  délie  larve  délie  Salamandre  acqua- 
liche,  pi.  \ ,  fig.  C,  et  Amours  des  Salamandres,  pi.  5,  fîg.  •&. 

(fc)  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang  considérée  chez  le  fœtus  de  l'Homme,  etc.,  iig1.  24 
à  27. 

(c)  Milne  Edwards,  Éléments  de  zoologie,  3e  partie,  p.  221,  fig.  307,  3G8  et  309. 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  387 

une  continuité  complète  entre  les  portions  cardiaque  et  dorsale 
des  crosses  aortiques  qui  auparavant  se  trouvaient  séparées  par 
le  réseau  capillaire  respiratoire.  Ces  crosses  reprennent  donc 
le  caractère  qu'elles  avaient  chez  l'embryon  avant  la  formation 
des  branchies,  et  le  sang  lancé  dans  l'aorte  cardiaque  passe 
directement  dans  l'aorte  dorsale. 

Les  choses  se  passent  à  peu  près  de  la  même  manière 
chez  les  Têtards  à  branchies  internes,  et  c'est  de  la  sorte  que 
chez  tous  les  Batraciens  à  respiration  exclusivement  pulmo- 
naire la  quatrième  forme  de  l'appareil  circulatoire  se  trouve 
réalisée. 

Chez  ceux-ci,  en  effet,  le  bulbe  aortique  donne  naissance 
à  deux  systèmes  artériels,  l'un  destiné  aux  poumons,  l'autre  à 
l'ensemble  de  l'organisme, et  ce  dernier  se  compose  d'un  certain 
nombre  de  crosses  qui  embrassent  l'œsophage  à  droite  et  à 
gauche,  pour  aller  s'anastomoser  dans  la  région  dorsale  et  con- 
stituer l'aorte  descendante,  les  carotides  et  les  autres  artères 
du  corps.  Ainsi  le  vaisseau  qui,  chez  le  Têtard,  était  une  artère 
branchiale  devient  le  commencement  de  l'aorte,  et  les  crosses 
aortiques  représentent  la  portion  basilaire  du  système  vascu- 
laire  des  branchies. 

$  II.  — Pendant  que  ces  changements  s'opèrent  dans  le  tracé  Mode  d'origine 

"  l  *■  des  artères 

des  grandes  voies  de  la  circulation,  des  modifications  d'une  im-  pulmonaires 

°  '  et  des 

portance  secondaire  s'effectuent  dans  le  mode  de  distribution    carotides. 
de  diverses  artères  qui  naissent  de  ces  troncs,  et,  pour  les  faire 
connaître,  il  est  nécessaire  de  préciser  davantage  la  disposition 
anatomique  de  ces  vaisseaux  chez  l'adulte. 

Le  premier  exemple  que  je  choisirai  pour  cette  étude  est  le 
Menopoma  alleghanensis,  grand  Batracien  de  l'Amérique  sep- 
tentrionale, qui  ressemble  beaucoup  aux  Tritons  et  perd  ses 
branchies  comme  eux ,  mais  conserve  de  chaque  côté  du  cou 
un  orifice  respiratoire.  En  effet,  chez  ce  Batracien,  le  système 
artériel,  tout  en  prenant  la  forme  caractéristique  de  notre  qua- 


388  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

trièmc  type,  no  s'éloigne  du  reste  que  fort  peu  de  l'état  pri- 
mordial (i). 

Ainsi  le  tronc  commun  de  l'aorte,  un  peu  renflé  en  bulbe  à 
son  extrémité  antérieure,  s'y  divise  en  quatre  paires  de  crosses 
qui,  après  avoir  contourné  le  pharynx,  vont  toutes  s'anastomoser 
entre  elles  de  chaque  côté  de  la  face  supérieure  de  cette  portion 
du  tube  digestif;  mais  ces  crosses  se  développent  inégalement,  et 
celles  de  la  deuxième  et  de  la  troisième  paire  deviennent  les  plus 
grosses,  tandis  que  les  arcs  de  la  quatrième  paire  restent  extrême* 
ment  grêles  ;  enfin  ce  sont  surtout  les  deux  grosses  branches  dont 
il  vient  d'être  question  qui,  en  se  réunissant  en  un  tronc  commun 
de  chaque  côté,  forment  les  racines  de  l'aorte,  lesquelles  con- 
vergent pour  constituer  sur  la  ligne  médiane  la  grande  artère 
du  corps  ou  aorte  dorsale.  Il  est  aussi  à  noter  que  la  branche 
anastomotique  postérieure  qui  naît  de  la  troisième  crosse  un 
peu  avant  cette  jonction,  et  qui  va  rejoindre  le  quatrième 'arc 
vasculaire,  est  très  forte,  et  que  c'est  clans  son  point  de  réunion 
avec  la  quatrième  crosse  que  celle-ci,  devenue  l'artère  pulmo- 
naire, se  porte  en  arrière  pour  aller  gagner  les  poumons.  Il 
en  résulle  que  l'artère  pulmonaire  a  deux  racines,  une  posté- 
rieure et  inférieure,  formée  par  le  quatrième  arc  ou  crosse 
aorlique,  et  une  antérieure  et  supérieure,  provenant  de  la  bifur- 
cation terminale  du  troisième  arc. 

On  comprend  donc  facilement  que  des  variations  considéra- 
bles dans  le  mode  d'origine  des  artères  pulmonaires  puissent 
être  déterminées  par  un  développement  ultérieur  inégal  de  ces 
diverses  branches  anastomotiques.  En  effet,  si  le  quatrième  arc 

(1)  Les  parties  principales  du  système  de  M.  Owen  en  1834  ,  dans  le  Cata- 

artériel  du  Ménopome  ont  été  très  bien  logue  du  musée  anatomique  et  physio- 

représentéesdans  un  travail  posthume  logique  du  Collège  des  chirurgiens  de 

de  limiter,  qui  a  été  publié  par  lessoins  Londres  (a). 

(a)  Descript.  and  Mus  ira  ted  Catalogue  of  the  Physiological  Séries  of  Comparative  Analomy 
contain'd  in  the  Muséum  of  the  noyai  Collège  of  Surgeons  in  London,  I.  II,  pi,  23  et  2L 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  389 

vaseulaire,  déjà  très  grêle  chez  le  Ménopome,  vient  à  s'atro- 
phier et  à  disparaître,  les  artères  pulmonaires  seront  une  conti- 
nuation des  crosses  de  la  troisième  paire, et  si  ces  dernières  en- 
voient la  totalité  deleur  sang  dans  la  branche  postérieure  ou  pul- 
monaire, qui  chez  le  Ménopome  est  seulement  une  des  branches 
de  la  bifurcation  terminale  de  ces  vaisseaux,  l'autre  branche  qui 
s'anastomose  avec  la  deuxième  crosse  pour  constituer  la  racine 
de  l'aorte  se  flétrira  à  son  tour,  et  pourra  disparaître  de  l'orga- 
nisme. Or,  il  en  résultera  que  les  crosses  aortiques  de  la  troi- 
sième paire  formeront  alors  à  elles  seulesles  artères  pulmonaires, 
et  que  l'aorte  dorsale  aura  essentiellement  pour  origine  une 
seule  paire  de  grandes  crosses  constituées  par  les  arcs  vascu- 
laires  de  la  deuxième  paire. 

Des  changements  analogues  peuvent  s'opérer  dans  les  arcs  Mode  a-origine 
aortiques  de  la  première  paire.  De  même  que  chez  les  Poissons,  puiLraaiï, 
le  premier  arc, après  avoir  quitté  l'appareil  hyoïdien,  fournit  en  cmotl  es' 
avant  l'artère  carotide  ou  céphalique,  et  se  recourbe  ensuite  en 
travers  pour  s'anastomoser  avec  le  second  arc  ou  crosse  aor- 
tique  principale.  Il  suffira  donc  de  l'atrophie  de  cette  portion 
terminale  et  anastomotique  des  arcs  de  la  première  paire  pour 
que  ceux-ci  deviennent  les  artères  carotides  seulement  et  cessent 
d'avoir  des  connexions  avec  les  racines  aortiques. 

Enfinles  nombreux  exemples  de  coalescence  des  divers  troncs 
vasculaires  que  nous  avons  déjà  rencontrés,  soit  chez  les  Pois- 
sons, soit  chez  les  Animaux  invertébrés,  nous  permettent  de 
prévoir  que  dans  la  classe  des  Batraciens  il  pourra  y  avoir  des 
variations  dans  la  disposition  des  artères  qui  soient  dépendantes 
de  la  même  cause,  et  que  par  l'effet  d'une  tendance  croissante 
à  la  centralisation  ,  certaines  branches  vasculaires,  au  lieu  de 
naître  isolément  du  bulbe  aortique,  pourront  être  confondues  en 
un  tronc  commun  dans  une  étendue  plus  ou  moins  considérable 
de  leur  trajet. 

Ces  diverses  modifications  se    trouvent  réalisées  chez  les 


390  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Batraciens  à  respiration  exclusivement  pulmonaire,  et  les  con- 
sidérations que  je  viens  de  présenter  nous  permettent  de  retrou- 
ver dans  le  plan  organique  de  tous  ces  Animaux  le  même  type 
essentiel  quant  à  la  disposition  du  système  artériel. 

Ainsi,  chez  les  Tritons,  le  tronc  aortique  commun ,  ou  bulbe 
artériel,  se  divise  à  son  extrémité  antérieure  en  trois  paires  de 
vaisseaux  qui  se  recourbent  en  avant  et  en  dehors.  Les  bran- 
ches de  la  paire  postérieure  constituent  les  artères  pulmonaires; 
celles  de  la  paire  moyenne  forment  à  elles  seules  les  crosses  de 
l'aorte,  et  vont  se  réunir  assez  loin  en  arrière,  sous  la  colonne 
vertébrale,  où  elles  deviennent  l'aorte  ventrale;  enfin  les  bran- 
ches de  la  première  paire  se  recourbent  en  avant  et  constituent 
les  artères  carotides.  Chez  l'Animal  parfait  ces  dernières  ne  pré- 
sentent plus  de  trace  des  troncs  anastomotiques  qui  primitive- 
ment les  reliaient  en  haut  et  en  dehors  aux  autres  racines  aor- 
tiques;  et,  au  lieu  d'avoir  la  forme  de  crosses,  elles  se  portent 
presque  directement  en  avant  et  en  dehors  vers  la  tête,  où  elles 
se  distribuent.  Les  artères  pulmonaires  sont  le  résultat  de  l'a- 
trophie des  arcsvasculaires  de  la  quatrième  paire  et  du  dévelop- 
pement de  la  portion  anastomotique  qui  primitivement  réunis- 
sait ceux-ci  aux  arcs  aortiques  de  la  troisième  paire.  En  effet, 
bien  qu'il  n'y  ait  plus  rien  dans  leur  conformation  qui  indique 
ces  différences  primordiales,  elles  représentent  en  réalité  les 
portions  du  système  vasculaire  qui  chez  la  larve  constituent  : 
1°  un  tronc  commun  aux  arcs  aortiques  des  troisième  et  qua- 
trième paires;  2°  la  portion  du  troisième  arc  aortique  comprise 
entre  le  point  où  il  sesépare  de  l'arc  postérieur  en  dessous  et  le 
point  où,  en  dessus  et  en  dehors,  il  se  bifurque  pour  s'anastomo- 
ser d'une  part  avec  les  racines  aortiques  venant  du  deuxième  arc 
vasculaire,  et  d'autre  part  avec  le  quatrième  arc,  là  où  celui-ci  va 
prendre  les  caractères  d'une  artère  pulmonaire;  3°  enfin  la  por- 
tion terminale  du  quatrième  arc  situé,  au  delà  de  son  point  de 
jonction  avec  la  branche  anastomotique  dont  il  vient  d'être  ques- 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  391 

tion.  La  branche  anastomotique  qui  chez  la  larve  unit  le  troi- 
sième are  vasculaire  au  second  ne  disparaît  pas ,  et  par  consé- 
quent chez  l'adulte  l'artère  pulmonaire  se  trouve  aussi  reliée  aux 
crosses  de  l'aorte  par  un  canal  de  jonction,  et  peut  recevoir  du 
sang,  soit  directement  du  cœur  par  sa  portion  basilaire,  soit  des 
crosses  de  l'aorte  par  cette  branche  anastomotique  qui  est, 
pour  ainsi  dire,  une  seconde  racine  du  système  artériel  pulmo- 
naire (1). 

La  disposition  de  tous  ces  vaisseaux  est  à  peu  près  la  même 


(1)  Ce  mode  d'origine  des  artères 
pulmonaires  se  voit  très  bien  dans  les 
ligures  du  système  artériel  du  Triton 
publiées,  il  y  a  environ  quarante  ans, 
par  M.  lîusconi  (a),  et  se  trouve  égale- 
ment représenté  dans  le  tableau  donné 
plus  récemment  par  M.  Martin  Saint- 
Ange  (6).  D'après  M.  Belle  Cbiaje,  les 
trois  branches  de  l'aorte  primitive  de 
chaque  côté  seraient  réunies  à  leur  base 
en  un  tronc  commun  très  court  (c). 

La  disposition  de  ces  vaisseaux  est 
à  peu  près  la  même  chez  les  Sala- 
mandres terrestres,  mais  s'y  rapproche 
un  peu  plus  de  la  forme  embryonnaire 
commune.  En  eiîet  ,  M.  Briicke  a 
trouvé  chez  ces  Animaux  les  représen- 
tants des  quatre  paires  d'arcs  vascu- 
laires.  Les  deux  derniers  arcs  de 
chaque  côté  naissent  de  l'aorte  par 
un  tronc  commun  qui  bientôt  se  bi- 
furque :  sa  branche  antérieure,  qui 
constitue  le  troisième  arc  et  qui  est 
très  courte,  va  déboucher  presque  tout 


de  suite  dans  le  deuxième  arc,  tandis 
que  sa  branche  postérieure  continue 
à  se  porter  en  dehors,  et,  après  avoir 
reçu  un  rameau  anastomotique  ve- 
nant de  la  portion  externe  du  deuxième 
arc  (ou  racines  aortiques  du  même 
côté),  se  recourbe  en  arrière  pour  aller 
aux  poumons.  Ici  l'artère  pulmonaire 
résulte  donc  du  développement  du 
quatrième  arc  branchial,  et  sa  racine 
externe,  constituée  par  la  branche 
anastomotique  fournie  par  les  racines 
de  l'aorte,  est  d'une  importance  se- 
condaire (d). 

La  disposition  générale  de  ces  vais- 
seaux, chez  ces  Batraciens  Urodèles  , 
a  été  représentée  aussi  par  Funk,  mais 
d'une  manière  moins  exacte  (e). 

Chez  le  Pipa,  les  artères  pulmo- 
naires partent  aussi  directement  ou 
presque  directement  du  tronc  aor  tique 
commun  ;  elles  sont  très  allongées  et 
conservent  la  forme  d'une  troisième 
paire  d'arcs  (/"). 


(a)  Rusconi,  Circol.  délie  larve  délie  Salamandre  acqualiche,  pi.  1,  fig.  8  et  9,  et  Amours  des 
Salamandres,  pi.  5,  fig.  6. 

(6)  Martin  Saint-Ange,  Op.  cit.,  fig.  27. 

(c)  Délie  Cuiaje,  Dissertazioni  sull'  anatomia  umana,  comparata  e  patologica  ,  t.  I,  p.  41, 
pi.  11,  fig.  1 . 

{d)  Briicke,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1852,  t.  III,  pi.  23,  fig.  16). 

(e)  Funk,  De  Salamandrœ  terrestris  vita  tractatus,  p.  17,  pi.  3,  fig.  7  et  8. 

(f)  Mayer,  Beitrâge  zu  einer  anatomischen  Monographie  der  Rana  pipa  (Mém.  de  l'Acad.  des 
curieux  de  la  Nat.,  t.  XII,  pi.  9). 

—  Carus  et  V.  Otto,  Tab.Anat.  compar.  illuslr.,  pars  vi,  pi.  5,  fig.  2. 


392  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

chez  les  Grenouilles  et  chez  les  Crapauds,  mais  la  centralisation 
des  gros  troncs  devient  plus  grande  et  les  différences  entre 
l'état  adulte  et  l'état  emhryonnaire  plus  considérables  (1).  Effec- 
tivement l'aorte,  en  sortant  du  cœur,  se  divise  en  deux  troncs 
seulement,  qui  se  portent,  l'un  à  droite,  l'autre  à  gauche,  pour 
constituer  les  crosses  ou  racines  de  l'aorte  dorsale,  et,  chemin 
faisant,  chacun  de  ces  arcs  fournit  d'abord  une  artère  carotide 
en  avant ,  et  plus  loin  une  artère  pulmonaire  qui  se  dirige 
en  arrière  (2).  Les  anatomistes  n'ont  pas  encore  suivi  pas  à 
pas  tous  les  degrés  par  lesquels  le  système  vasculaire  du 
Têtard  passe  successivement  pour  revêtir  cette  dernière  forme  ; 
mais ,  par  analogie  ,  il  est  permis  de  croire  que  la  trans- 
formation résulte,  d'une  part,  de  la  centralisation  de  la  portion 
basilaire  des  arcs  vasculaires  des  deux  premières  paires,  et, 
d'autre  part,  de  la  disparition  de  toute  la  portion  inférieure  des 

(i)  Swammerclam,  qui  fut  le  pre-  professeur  Bonsdorff  ,    de    Helsing- 

mier  à  étudier  anatomiquement  l'ap-  fors  (rf). 

pareil  circulatoire  de  la  Grenouille,  a  n  est  aussi  à  noter  que  les  princi- 

donné   une  assez  bonne  description  paUx  vaisseaux  sanguins  du  Pipa  se 

des  principales  artères  de  ce  Batra-  trouvent  figurés  dans   l'ouvrage   de 

cien  («).  Mais  l'ensemble  de  ce  système  m.  Carus  (e). 

a  été  mieux  représenté  par  quelques  (2)  chez  le  Têtard,  le  tronc  formé 
auteurs  modernes,  et  notamment  par  par  la  bifurcation  de  l'aorte  ascen- 
M.  Délie  Chiaje ,  de  Naples  (6).  Plus  dante  se  subdivise  presque  aussitôt  ; 
récemment ,  M.  Briicke  a  figuré  aussi  mais  chez  la  Grenouille  adulte  il  s'al- 
d'une  manière  plus  exacte  le  mode  longe  beaucoup  ,  de  façon  que  les 
d'origine  de  ces  vaisseaux  (c).  artères  carotides  et  pulmonaires  nais- 
Le  mode  de  division  et  de  distri-  sent  de  la  partie  antérieure  de  la 
bution  des  artères  du  Crapaud  a  été  crosse  aortique,  à  une  certaine  distance 
étudié  avec  beaucoup  de  soin  par  le  de  cette  bifurcation  (/"). 

(a)  Swammerclam,  Biblia  Naturœ,  t.  II,  p.  381,  pi.  49,  fig.  3. 

(b)  Dissertazioni sull'  anatomia  umana,  comparata  epatologica,  1. 1,  pi.  19,  fig.  1. 

On  cite  également  à  ce  sujet  un  opuscule  de  Burow  intitulé  :  Dissertatio  de  vasis  sanguiferis 
Banarum,  cum  tab.  œil.  (Regiom.,  1834);  mais  je  n'ai  pas  eul'occasion  de  consulter  ce  travail. 

(c)  Briicke,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  111,  pi.  23,  fig.  14). 

(d)  Bonsdcrff,  Bidrag  till  Blodkàrlsystemets  jemforande  Anatomie.  Det  arteriella  Kârlsystemet 
hos  Paddan  (Actes  de  la  Société  Finnoise,  4  852,  t.  III,  p.  447,  pi.  5). 

(e)  Carus  et  V.  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  5,  fig.  2. 

(0  Lambotte,  Observations  anatomiques  et  physiologiques  sur  les  appareils  sanguin  et  respi 
ratoire  des  Batraciens  Anoures,  fig.  21 'et  22  (Mém,  couronnés  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  1838, 
t.  XIII). 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  393 

arcs  de  la  troisième  et  de  la  quatrième  paire  :  de  sorte  que  la 
branche  anastomotiqne  que  nous  avons  vue  se  porter  du  second 
au  troisième  arc,  et  devenir  chez  les  Tritons  une  seconde 
racine  de  l'artère  pulmonaire ,  devient  l'unique  origine  de  ce 
dernier  vaisseau  et  le  transforme  en  une  simple  branche  de  la 
crosse  aorlique  (1).  Il  est  aussi  à  noter  que  les  artères  pulino 


(1)  Suivant  M.  Lamboite,  la  trans- 
formation de  l'appareil  circulatoire 
ne  serait  pas  tout  à  fait  aussi  simple 
chez  le  têtard  de  la  Grenouille,  où 
l'apparition  des  branchies  internes 
constitue  une  période  intermédiaire 
entre  les  deux  états  que  nous  avons 
examinés  chez  les  larves  du  Triton. 

En  effet,  cet  anatomiste  a  trouvé 
que  chez  le  Têtard,  dont  les  branchies 
internes  sont  très  développées  et 
dont  les  poumons  sont  déjà  bien  for- 
més ,  le  premier  arc  vasculaire  ne 
contribue  pas  à  la  formation  de  l'aorte 
dorsale  ,  mais  fournit  à  la  base  de  la 
branchie  correspondante  un  tronc 
qui,  après  avoir  donné  naissance  à  un 
rameau  sous-maxillaire,  longe  la  por- 
tion branchifère  de  ce  premier  seg- 
ment de  l'appareil  respiratoire  dont  il 
reçoit  le  sang  par  plusieurs  ramuscules 
anastomotiques.  Ce  tronc  joue  par  con- 
séquent le  rôle  d'une  artère  épibran- 
chiale ,  et  il  va  constituer  l'artère 
carotide.  Le  vaisseau  efférent  de  la 
deuxième  branchie  naît  aussi  de  la 
base  de  l'artère  branchiale  propre  cor- 
respondante ,  longe  toute  la  portion 
branchiale  de  celle-ci,  et  reçoit,  chemin 
faisant,  à  l'aide  de  plusieurs  branches 
anastomotiques  ,   le   sang  arlérialisé 


dans  ses  ramifications  capillaires,  puis 
quitte  l'appareil  hyoïdien  pour  se  re- 
courber en  arrière,  et  former  avec  son 
congénère  les  deux  racines  de  l'aorte 
dorsale.  Les  artères  branchiales  propres 
des  deux  dernières  paires  se  compor- 
tent autrement  :  vers  l'extrémité  supé- 
rieure et  externe  de  l'appareil  hyoïdien 
elles  s'anastomosent  directement  avec 
les  vaisseaux  efférents  (  ou  veines 
branchiales  des  auteurs),  et  ceux-ci, 
unis  entre  eux  par  une  grosse  bran- 
che anastomotique,  vont  former  en- 
suite, l'un  l'artère  cutanée  cervicale, 
l'autre  l'artère  pulmonaire.  A  l'époque 
des  dernières  métamorphoses  de  la 
Grenouille,  ce  serait  donc  l'atrophie 
de  la  portion  hyoïdienne  des  artères 
branchiales  des  deux  premières  paires, 
et  de  la  portion  également  hyoïdienne 
des  artères  épibranchiales  (ou  veines 
branchiales)  des  deux  paires  posté- 
rieures, qui  donnerait  à  l'aorte  et  à 
ses  dépendances  leur  mode  de  con- 
formation définitive  (a), 

La  disposition  des  vaisseaux  bran- 
chiaux du  têtard  de  la  Grenouille 
avait  été  étudiée  précédemment  par 
plusieurs  anatomistes  ,  et  notamment 
par  M.  Rusconi  et  par  M.  Calori  , 
mais  d'une  manière  moins  précise  (b). 


(a)  Lambotte,  loc.  cit.,  p.  13  ot  suiv.,  fig\  24  et  22. 

(b)  Rusconi,  Développement  de  la  Grenouille  commune,  p.  50,  pi.  A,  fig1.  14. 

—  Calori,  Descriptio  anatomica  branchiarum  internarum  gyrini  Banœ  (Novi  Comment.  Acad. 
scient.  Inst.  Bononiensis,  1S42,  t.  V,  p.  111,  pi.  11,  fig.  5  à  7). 


3(.Vi  APPAREIL   DE    LA   CIRCULATION 

naires  ne  servent  pas  uniquement  à  porter  le  sang  aux  organes 
de  la  respiration,  mais,  chemin  faisant,  donnent  naissance  à  des 
rameaux  qui  se  distribuent  à  la  peau  et  à  d'autres  parties  voi- 
sines (1). 

Je  pourrais  citer  ici  d'autres  variations  dans  le  mode  d'ar- 
rangement des  vaisseaux  qui,  chez  les  Batraciens  adultes,  pro- 
viennent des  arcs  aortiques  de  l'embryon  ;  mais  les  exemples 
que  je  viens  de  faire  connaître  me  semblent  devoir  suffire  pour 
donner  une  idée  de  la  constitution  de  cette  portion  de  l'appareil 
circulatoire,  et  pour  montrer  comment  un  même  tracé  orga- 
nique fondamental  peut  se  prêter  à  l'introduction  de  différences 
de  structure  très  considérables  chez  les  diverses  espèces  qui 


(1)  M.  J.  Davy  a  remarqué  que  chez 
le  Crapaud  le  tronc  de  l'artère  pulmo- 
naire se  divise  en  deux  branches,  dont 
l'une  se  rend  au  poumon  correspon- 
dant, et  l'autre  va  se  ramifier  dans  la 
peau,  sur  les  côtes  de  la  région  cervi- 
cale, et  y  donne  naissance  à  un  réseau 
vasculaire  en  rapport  avec  les  glan- 
dules  sous-cutanées ,  que  l'on  désigne 
quelquefois,  mais  à  tort,  sous  le  nom 
de  parotides  Ça). 

Chez  la  Grenouille,  on  trouve  de 
chaque  côté  du  corps  une  grande  ar- 
tère sous-cutanée  qui  est  formée  par 
la  réunion  de  deux  branches  venant, 
l'une  de  l'aorte,  l'autre  de  l'artère 
pulmonaire.  M.  Lambotte  a  fait  voir 
que  chez  le  Têtard  ce  vaisseau  est  la 
continuation  de  l'artère  épibranchiale 
de  la  troisième  paire,  qui,  en  sortant 
de  la  branchie  dont  elle  dépend ,  s'a- 
nastomose, d'une  part  avec    l'artère 


branchiale  dont  elle  est  la  satellite, 
d'autre  part  avec  le  tronc  de  la  qua- 
trième artère  épibranchiale.  Or,  chez 
l'adulte,  ce  dernier  vaisseau  constitue 
l'artère  pulmonaire,  et  la  branche 
anastomotique  dont  je  viens  de  parler 
en  dernier  lieu  forme  la  racine  pos- 
térieure (ou  pulmonaire)  de  l'artère 
cervicale  cutanée ,  tandis  que  la  ra- 
cine antérieure  de  cette  même  artère 
n'est  autre  chose  que  l'arc  vasculaire 
de  la  troisième  paire  (6).  M.  Gratiolet, 
qui  ne  paraît  pas  avoir  connu  le  tra- 
vail de  M.  Lambotte,  a  trouvé  aussi 
que  l'artère  sous-cutanée,  fournie 
ainsi  par  l'artère  pulmonaire ,  se  dis- 
tribue à  la  peau  du  tronc  aussi  bien 
qu'à  celle  de  la  tête  (c). 

Chez  l'Amphiume  et  le  Ménopome, 
l'artère  pulmonaire  fournit  des  bran- 
ches à  l'œsophage  (d). 


(a)  .T.  Davy,  On  the  Acid  Fluid  secreted  by  the  Common  Toad  (Philos.  Trans.,  1826  ;  et   Re- 
searches,  Physiological  and  Anatomical,  1839,  t.  I,  p.  111). 

(b)  Lambotte,  Op.  cit.  (Mém.  couronnés  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  XIII,  p.  17  et  35,  %.  21 
et  22). 

(c)  Gratiolet,  Note  sur  le  système  veineux  des  Reptiles  (Journal de  l'Institut,  1853,  t.  XXI,  p.  61). 

(d)  Owen,  Op.  cit.  (Trans.  ofthe  Zool.  Soc,  vol.  I,  p.  217). 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  395 

dérivent  d'un  type  classique  commun,  et  qui  appartiennent  par 
conséquent  à  un  même  groupe  zoologique.  Je  ne  m'arrêterai 
donc  pas  davantage  sur  ce  point,  et  je  me  hâterai  de  terminer 
cet  examen,  un  peu  aride,  de  l'appareil  circulatoire  des  Batra- 
ciens, en  indiquant  la  disposition  de  la  portion  périphérique  du 
système  artériel. 

§  5.  —  Les  artères  qui  naissent  de  l'aorte  pour  distribuer     Mode  de 

i  -,  •  i  .        .  ,    x  distribution  des 

Je  sang  aux  diverses  parties  du  corps  varient  un  peu,  quant  a     artères. 
leurs  points  d'origine,  mais  ne  présentent  rien  de  bien  impor- 
tant à  noter. 

L'aorte,  comme  on  a  pu  le  voir,  est  simple  à  sa  naissance, 
mais  bientôt  se  divise  en  deux  crosses,  dirigées  une  à  droite, 
l'autre  à  gauche,  qui  embrassent  le  tube  digestif,  pour  reconsti- 
tuer au-dessus  de  celui-ci  un  tronc  unique,  l'aorte  dorsale. 
Cette  réunion  a  lieu  dans  la  région  cervicale  chez  les  Pérenni- 
branches  et  les  Urodèles,  mais  se  fait  beaucoup  plus  loin  en 
arrière  chez  les  Batraciens  Anoures,  où  les  crosses  ou  racines 
de  l'aorte  dorsale  sont  très  longues.  Il  est  aussi  à  noter  que 
chez  ceux-ci  l'aorte  ventrale  se  termine  dans  le  point  où  elle 
donne  naissance  aux  artères  des  membres  postérieurs,  tandis 
que  chez  les  Urodèles  et  les  Pérennibranehes,  de  même  que 
chez  les  Têtards ,  elle  se  continue  en  constituant  l'artère 
caudale. 

Le  sang  est  porté  à  la  tête,  d'abord  par  les  deux  artères  caro- 
tides, dont  nous  avons  déjà  vu  le  mode  d'origine  et  dont  les  bran- 
ches se  distribuent  principalement  à  la  langue  et  aux  parties  voi- 
sines de  la  bouche  (1)  ;  puis  par  une  paire  d'artères  vertébrales 

(l)  Les  artères  carotides  de  la  Gre-  merdam  (a),  mais  dont  la  nature  n'est 

nouille  sont  très  courtes,  à  raison  de  la  pas  encore  bien  connue.  M.  Huschke, 

brièveté  de  la  région  cervicale  chez  qui  en  a  fait  l'objet  d'un  travail  spécial, 

ces  Animaux,  et  présentent  sur  leur  considère  ce  corps  comme  étant   un 

trajet   un    renflement   grisâtre  dont  rete  mirabile,  et  pense  que  c'est  un 

l'existence  a  été  signalée  par  Swam-  vestige  des  branchies  antérieures  aifo- 

(«)  Swammcrdam,  Diblia  Naturœ,  p.  382,  pi.  49,  fig.  3. 


396  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

qui  proviennent  des  crosses  aortiques.-  En  général,  les  artères 
des  membres  antérieurs  ,  ou  artères  brachiales  ,  sont  fournies 
aussi  parles  crosses  aortiques,  quelquefois  par  l'aorte  dorsale. 


phiées  (a).  Mais  M.  Stannius  n'y  a  pas 
trouvé  la  structure  caractéristique  de 
ces  réseaux  vasculaires,  et  il  est  porté 
à  croire  que  c'est  une  glande  ganglion- 
naire comparable  à  une  thyroïde 
rudimentaire  (b).  M.  Briicke  a  publié 
plus  récemment  de  nouvelles  obser- 
vations sur  cet  organe  singulier,  et 
y  a  reconnu  un  tissu  spongieux  san- 
guifère  (c)  ;  mais,  d'après  les  obser- 
vations de  M.  Leydig,  faites  principa- 
lement sur  la  Rainette,  ce  renflement 
vasculaire  paraît  être  composé  essen- 
tiellement de  fibres  musculaires  entre- 
lacées en  réseau  (rf). 

L'artère  abdominale  (ou  mésenté- 
rico-cœliaque)  fournit  en  général  l'ar- 
lèrehépatique,  aussi  bien  que  les  ar- 
tères coronaires  de  l'estomac  et  l'artère 
mésentérique  antérieure  ,  qui  forme 
par  ses  anastomoses  une  série  d'arcs 
sur  le  bord  postérieur  de  l'intestin. 

Voyez,  pour  la  distribution  de  ces 
vaisseaux  ,  la  figure  qu'en  a  donnée 
M.  Délie  Chiaje  (e).  Il  y  a  cependant 
dans  cette  représentation  plusieurs 
inexactitudes ,  notamment  en  ce  qui 
touche  à  l'origine  de  l'artère  linguale. 

Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  le  système 
artériel  du  Crapaud  a  été  étudié  avec 
beaucoup  de  soin  par  M.  Bonsdorff,  et 
comme  le  travail  de  cet  anatomiste,  pu- 
blié en  suédois,  est  peu  connu,  je  crois 
devoir  en  donner  ici  un  extrait  (/). 


Vaorte ,  à  très  peu  de  distance  du 
cœur,  se  divise  en  deux  crosses  qui  se 
dirigent  en  dehors  pour  gagner  les 
côtés  de  l'œsophage,  puis  se  recourber 
en  haut  et  en  arrière,  et  se  joindre 
comme  d'ordinaire  sur  la  ligne  mé- 
diane, où  elles  constituent  l'aorte  dor- 
sale. Pendant  ce  trajet ,  chacune  de 
ces  crosses  fournit  cinq  branches  prin- 
cipales ,  savoir,  une  artère  carotide 
externe,  une  artère  pulmo-cervicale, 
une  artère  laryngienne,  une  artère  occi- 
pitale et  une  artère  sous-clavière  ou 
brachiale. 

V artère  carotide  externe  se  porte 
en  avant  sur  les  côtés  du  cou,  consti- 
tue bientôt  le  sinus  ou  ganglion  caro- 
tidien,  dont  il  a  déjà  été  question  et 
dont  partent  deux  branches,  savoir  : 
1°  Y  artère  linguale,  qui,  à  son  tour, 
donne  naissance  à  un  rameau  muscu- 
laire destiné  aux  muscles  mylo-hyoï- 
diens,  sterno-hyoïdiens  ,  génio-glos- 
ses,  etc.,  et  à  une  artère  sublinguale  ; 
2°  une  artère  pharyngienne  ascen- 
dante. 

L'artère  pulmo-cervicale  est  d'un 
fort  calibre  et  se  divise  bientôt  en  deux 
branches:  1°  Y artère  pulmonaire,  qui 
se  porte  en  arrière  et  se  distribue  au 
poumon,  où  elle  forme  deux  rameaux 
principaux,  l'un  superficiel,  l'autre 
profond  ;  2°  Yattèfe  occipito-dorsale^ 
qui  continue  à  se  diriger  en  dehors, 


(a)  Huschke,  Utber  die  Karotidendruse  einiger  Amphibien  (Tiedemann's  Zeitschr.  fur  Physiol., 
t.  IV,  p.  113,  pi.  6,  fig.  7). 

(b)  Stannius  et  Siebold,  Nouv.  Manuel  d'anatomie  comparée,  t.  H,  p.  237. 

(c)  Briicke,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  III,  p.  355,  pi.  23,  fig\  15). 

(d)  Leydig',  Anat.  histol.  Untersuch.  ûber  Fische  und  Reptilien,  p.  56. 

(e)  Voyez  Délie  Chiaje,  Dissertazioni  sull'  anatomia  umana,  comparata  e  palologica,  1. 1,  pi.  10. 

(f)  Bonsdorff,    Bidrag  till  Blodkdrlsystemets  jemforande  Anatomiei.  Det   arteriella   Kdrl- 
sijstcmet  hos   Paddan  (Acta  Societatis  scientiarum  FennicK,  1852,  t.  III,  p.  447,  pi.  5). 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  397 

Une  grosse  branche  impaire  naît  de  ce  dernier  tronc,  soit  dans  le 
point  même  où  il  commence,  ainsi  que  cela  se  voit  chez  les  Batra- 
ciens Anoures,  soit  plus  en  arrière,  et  se  rend  au  foie,  à  l'estomac 


conlourne  les  muscles  de  la  région 
parotidienne,  et  s'y  bifurque  pour  con- 
stituer une  artère  cutanée  dorso-sca- 
pulaire,  et  une  petite  artère  maxillaire 
interne,  laquelle  traverse  la  région 
temporale,  et,  parvenue  à  la  face,  y 
distribue  des  ramuscules  aux  muscles 
voisins  et  à  l'oreille  interne. 

V artère  laryngienne  naît  de  la 
crosse  aortique,  très  près  des  deux 
précédentes,  et  se  dirige  obliquement 
en  dedans,  puis  fournit  une  branche 
palatine  ascendante  et  un  rameau  au 
muscle  hypoglosse. 

L'artère  occipitale  gagne  la  région 
dorsale  du  cou  et  donne  naissance  : 
l°à  une  branche  destinée  aux  muscles 
élévateurs  de  l'épaule  ;  2°  à  une  artère 
cervicale  qui  se  recourbe  en  arrière, 
se  prolonge  jusqu'au  sacrum,  et  four- 
nit ,  chemin  faisant ,  des  rameaux 
musculaires,  des  rameaux  rachicliens 
destinés  à  la  moelle  épinière ,  des 
ramuscules  lombaires  et  des  branches 
anaslomotiques  allant  aux  artères  ré- 
nales; 3°  à  une  artère  méningienne 
postérieure  qui  pénètre  dans  la  cavité 
du  crâne ,  se  réunit  à  sa  congénère 
et  forme  à  la  base  du  cerveau  un 
réseau  vasculaire  ;  l\°  à  une  artère  tem- 
porale qui  s'avance  sur  les  côtés  de  la 
région  du  même  nom,  et  y  fournit  une 
branche  maxillaire  externe  et  une 
branche  sous-orbitaire  destinées  l'une 
et  l'autre  à  la  face. 

V artère  sous-clavière  ou  brachiale 
naît  de  la  crosse  aortique,  derrière 
l'artère  occipitale,  et  se  porte  en  de- 
hors pour  pénétrer  dans  le  membre 
thoracique.  Dans  la  région  axillaire 


elle  fournit  :  1-  une  artère  thoracique 
externe  qui  se  distribue  aux  muscles 
de  la  poitrine  et  de  l'abdomen  ;  2°  une 
artère  thoracique  externe  accessoire 
qui  va  aux  muscles  de  la  région  cer- 
vico-dorsale  ;  3°  une  artère  sous-sca- 
pulaire  ;  Zi°  une  artère  circonflexe  de 
l'humérus  qui  se  distribue  aux  muscles 
de  l'épaule,  et  5°  une  artère  brachiale 
profonde  qui  descend  sur  la  face  ex- 
terne de  l'avant-bras  et  va  se  terminer 
dans  la  main.  L'artère  sous-clavière, 
que  l'on  appelle  souvent  artère  axil- 
laire dans  la  région  du  même  nom,  et 
artère  brachiale  proprement  dite  après 
son  entrée  dans  le  bras,  descend  le 
long  de  la  face  antéro  -  interne  de 
la  patte  jusqu'à  la  main,  fournit,  che- 
min faisant,  une  artère  circonflexe  an- 
térieure, des  branches  cutanées,  mus- 
culaires ,  etc.  Dans  l'avant-bras,  elle 
prend  le  nom  d'artère  radiale ,  four- 
nit une  branche  récurrente,  et  se  ter- 
mine par  deux  branches  carpiennes, 
une  palmaire  et  l'autre  dorsale,  dont 
naissent  les  artères  des  doigts,  etc. 

La  portion  descendante  de  la  crosse 
aortique  fournit  une  artère  œsopha- 
gienne. Après  sa  réunion  avec  son 
congénère ,  ce  tronc  prend  le  nom 
d'aorte  abdominale,  et  fournit  aussitôt 
V artère  mésentérico-cœliaque,  qui  est 
très  grosse,  et  se  dirige  en  arrière  pour 
gagner  le  cardia,  où  elle  se  divise  en 
deux  branches  :  1°  une  artère  cœlia- 
que  dont  naissent  une  artère  coronaire 
antérieure  de  l'estomac,  laquelle  distri- 
bue des  ramuscules  à  la  partie  droite 
de  ce  viscère,  au  foie  et  à  la  vésicule 
biliaire,  et  une  artère  coronaire  posté- 


J98 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


et  à  l'intestin.  Une  autre  branche  impaire  quitte  l'aorte  dans  la 
région  lombaire  pour  se  ramifier  également  dans  le  tube  in- 
testinal. Enfin,  entre  les  origines  de  ces  deux  vaisseaux,  l'aorte 
ventrale  fournit  une  paire  d'artères  ovariennes  (ou  testiculaires), 
une  paire  d'artères  rénales,  et  quelques  autres  rameaux  de 
moindre  importance.  Quant  aux  artères  des  pattes,  elles  sont 
d'abord  simples,  mais  dans  le  voisinage  du  genou  elles  se 
bifurquent,  et,  parvenues  dans  les  pieds,  leurs  branches  s'ana- 
stomosent et  donnent  ensuite  naissance  à  une  double  série  d'ar- 
tères digitales  qui  longent  les  doigts  latéralement. 


riéure  de  l'estomac;  2°  une  artère 
mésentérique  qui  va  à  l'intestin  grêle 
et  à  la  rate. 

Dans  la  région  postérieure  de  l'ab- 
domen ,  l'aorte  fournit  des  artères 
surrénales  et  rénales.  Ces  dernières 
donnent  naissance  aux  artères  ova- 
riennes et  à  des  artères  lombaires. 

Enfin,  l'aorte  se  bifurque  pour  con- 
stituer les  deux  artères  iliaques  pri- 
mitives, qui  s'écartent  l'une  de  l'autre 
pour  se  rendre  aux  membres  posté- 
rieurs, et  prennent  le  nom  d'artères 
ischiatiques  quand  elles  sont  sorties 
du  bassin.  Pendant  ce  trajet,  elles 
fournissent:  1°  une  artère  vésico-épi- 
gastrique  dont  les  principales  bran- 
dies s'avancent  vers  le  thorax  et  se 
distribuent  dans  les  parois  de  l'abdo- 
men ;  2°  une  artère  crurale  ou  fémorale 
qui  se  divise  en  circonflexe  fémorale 
interne  et  circonflexe  iliaque  ;  3"  une 
artère  circonflexe  fémorale  externequi 
se  rend  à  la  région  coccygienne  et  aux 
muscles  fessiers  ;  W  une  artère  fémo- 


rale profonde  ;  5°  une  artère  articu- 
laire supérieure  externe  qui  contourne 
le  genou  ;  6°  une  artère  jambière  su- 
périeure qui  donne  des  rameaux  aux 
muscles  du  mollet.  Enfin,  vers  le 
bas  de  la  cuisse,  elle  se  bifurque  pour 
constituer  Vartère  tibiale  postérieure 
et  Vartère  tibiale  antérieure,  qui  se 
rendent  à  la  patte  et  y  donnent  nais- 
sance aux  artères  digitales. 

La  disposition  des  gros  troncs  arté- 
riels est  à  peu  près  la  même  chez  le 
Pipa  (a). 

Chez  le  Ménopome,  les  artères  bra- 
chiales naissent  de  l'aorte  dorsale,  très 
loin  du  point  de  jonction  des  deux 
racines  de  ce  tronc  (6). 

Il  en  est  de  même  chez  l'Axolotl  (c) 
et  chez  le  Protée  (d).  J'ajouterai  que 
chez  ces  Pérennibranches  l'artère  hé- 
patique provient  directement  de  l'aorte 
ventrale,  en  arrière  de  l'artère  cœ- 
liaque,  et  l'intestin  reçoit  le  sang  par 
une  série  nombreuse  de  rameaux  qui 
naissent  également  de  ce  vaisseau  (e). 


(a)  Carus  el  Ollo,  Tab.  Anat.  compar.  illitstr.,  pars  vr,  pi.  5,  fig\  2. 

(6)  Hunier,  Op.  cit.  {Catalogue  ofthe  Mus.  of  the  Coll.  ofSurg.,  vol.  II,  pi.  24). 

(c)  Calori,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  18. 

(d)  Configliaclii  et  Rusconi,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  8. 

—  Délie  Cliiaje,  Ricerche  anat.  biol.  sul  Proteo  serpentine-,  1840,  pi.  4,  fig1.  1. 

(e)  Calori,  Op.  cit. 

—  Délie  Cliiaje,  Op.  cit.,  t.  I,  pi.  19. 


veineux. 


nés  caves 
antérieures. 


rénale. 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  S99 

§  6.  —  Le  système  veineux  général  présente  une  disposi-  système 
tion  assez  semblable  à  ce  que  nous  avons  vu  chez  les  Poissons. 
Ainsi ,  chez  la  Grenouille ,  le  sang  est  ramené  de  la  tête 
par  une  paire  de  veines  jugulaires  et  une  paire  de  veines  ver- 
tébrales antérieures  qui  vont  constituer  près  du  cœur  une  paire  vei 
de  veines  caves  antérieures  ;  celles-ci  reçoivent  aussi  les 
veines  des  membres  thoraciques  et  vont  déboucher  dans 
l'oreillette  (1). 

Les  veines  qui  ramènent  le  sang  des  membres  postérieurs  Veine  porte 
sont  formées  par  la  réunion  de  deux  branches  principales,  la 
veine  ischiatique  et  la  veine  iliaque  externe,  et,  parvenues  dans 
l'abdomen,  elles  se  divisent  chacune  en  deux  troncs,  dont  l'un 
va  s'anastomoser  avec  son  congénère  pour  donner  naissance  à 
la  veine  abdominale,  sur  laquelle  je  reviendrai  bientôt,  et  dont 
l'autre  constitue  la  veine  afférente  des  reins.  Celle-ci  vient 
s'appliquer  contre  le  bord  externe  de  ces  glandes,  où  elle  se  par- 

(l)  On  doit  à  M.  Gruby  un  travail  vers  les  clavicules  et  aller  déboucher 
très  approfondi  sur  le  mode  de  distri-  dans  la  veine  axillaire  (6). 
bution  des  veines  de  la  Grenouille  (a),  Suivant  M.  Gratiolet,  ce  système  de 
et  cet  anatomiste  a  signalé  dans  la  veines  sous-cutanées  ne  se  retrouve- 
marche  des  veines  sous-cutanées  de  rait  pas  chez  la  Salamandre  terrestre, 
la  portion  supérieure  du  corps  une  où  les  ramuscules  venant  de  la  peau 
disposition  remarquable.  se  déversent  dans  les  veines  inler- 

En  effet ,   le  sang  des   capillaires  costales,  qui  à  leur  tour  débouchent 

sous-cutanés  de  la  tête  et  du  dos  est  dans  le  système  de  la  veine  porte 

reçu  par  une  grosse  veine  qui ,   de  rénale  (c). 

chaque  côté,  part  de  la  face,  passe  La  disposition  générale  du  système 

près  des  omoplates  ,  gagne  les  côtés  veineux  du  Pipa  se  voit  très  bien  dans 

de  l'abdomen,  et,   parvenue  dans  la  une  figure  donnée  par  MM.  Carus  et 

région  lombaire,   abandonne  la  peau  V.  Otto  (d). 
pour  traverser  les  muscles ,  remonter 

(a)  Gruby,  Recherches  anatomiques  sur  le  système  veineux  de  la  Grenouille  (Ami.  des  sciences 
nat.,  1842.  2«  série,  t.  XVII,  p.  209,  pi.  9  et  10). 

(b)  Gruby,  Op.  cit.,  p.  223. 
—  Voyez    aussi  la  figure  du    système    veineux    du  Rana  maïujereccia,   par  II.   Délie  Cliiaje 

(Dissertazionï  suit'  anatomia  umana,  comparata  epatol.,  t.  I,  pi.  12). 

(c)  Graliolet,  Note  sur  le  système  veineux  des  Reptiles  {Journal  deV  Institut,  1853,  t.  XXI,  p.Gl). 

(d)  Carus  et  Otto,  Tab.  Alla  t.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  5,  fig.  2. 

m.  26      . 


Veine  cave 
inférieure. 


/|00  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

lagc  en  deux  branches  qui  se  ramifient  dans  leur  substance. 
D'autres  branches,  venant  des  oviductes  et  d'une  grande  veine 
dorso-lombaire,  se  répandent  aussi  dans  ces  organes  et  com- 
plètent un  système  porte  rénal,  analogue  à  celui  que  nous 
avons  déjà  rencontré  chez  les  Poissons  (1). 

Les  veines  efférentes  des  reins  se  rassemblent  dans  un  sinus 
à  la  surface  interne  de  ces  glandes,  et  vont  constituer  la  veine 
cave  ventrale  ,  qui  remonte  vers  le  cœur  en  passant  au-dessus 
du  foie. 


(1)  Swammerdam  avait  remarqué 
ia  direction  de  ces  veines,  mais  sans 
se  rendre  compte  de  la  manière  dont 
elles  se  comportent  dans  les  reins,  et 
c'est  à  Jacobson  qu'on  doit  réellement 
la  découverte  du  système  de  la  veine 
porte  rénale  chez  les  Batraciens  aussi 
bien  que  chez  les  Poissons  (a).  Les 
vues  de  cet  anatomiste  relativement  à  la 
marche  du  sang  dans  ce  système  ne 
furent  pas  admises  de  prime  abord 
par  tous  les  auteurs ,  par  Duvernoy 
par  exemple,  mais  ont  été  pleinement 
confirmées  par  les  recherches  plus 
récentes  de  MM.  de  Marlino,  Gruby  et 
Délie  Chiaje  (b) ,  ainsi  que  par  les  ob- 
servations de  M.  Mcolucci  sur  l'ana- 
lomie  des  Tritons  (c).  M.  de  Martino, 
un  étudiant  la  circulation  chez  des 
Animaux  vivants,  a  vu  que  la  direction 
suivie  par  le  sang  est  bien  celle  indi- 
quée ci-dessus. 
Chez  la  Grenouille,  que  j'ai  choi- 


sie comme  exemple,  une  des  bran- 
ches terminales  de  la  veine  porte 
rénale  se  ramifie  en  forme  d'arbre 
sur  la  face  dorsale  des  reins,  et  ses 
ramuscules  se  dirigent  de  dehors  en 
dedans,  puis  se  réfléchissent  en  dessous 
pour  aller  concourir  à  constituer  le 
réseau  capillaire.  L'autre  branche  mar- 
che le  long  du  bord  externe  du  rein 
jusqu'à  l'extrémité  antérieure  de  cet 
organe,  et,  chemin  faisant,  reçoit  huit 
branches  qui  viennent  des  oviductes 
et  une  grosse  veine  dorso-basilaire  qui 
vient  des  muscles  de  la  région  lom- 
baire. Enfin,  cette  branche  externe  de 
la  veine  porte  rénale  fournit  du  côté 
interne  cinq  branches  qui  se  ra- 
mifient dans  la  substance  des  reins, 
comme  celles  de  l'autre  branche,  et 
forment  avec  elles  le  réseau  capillaire 
dont  naissent  les  veines  rénales  effé- 
rentes (d). 


(a)  Jacobson,  De  systemate  venoso  peculiaH  in  permultis  Animalibus  observato,  p.  3. 

(6)  Délie  Chiaje,  Ricerche  anatomico-biologichc sul  Proteo  serpentino,  p.  7,  pi.  l.Naples,  1840. 

—  Monographia  sul  sistema  sanguigno  degli  Animait  Rettlli  (Dissertazioni  sulï  anatomia 
umana,  comparata  e  patologica,  1847,  t.  I,  p.  19). 

—  A.  de  Marlino,  Mém.  sur  la  direction  de  Ici,  circulation  dans  le  système  rénal  de  Jacobson 
chez  les  Reptiles,  etc.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1841,  2°  série,  t.  XVI,  p.  305). 

■ —  Gruby,  Recherches  analomlqucs  sur  le  système  veineux  de  la  Grenouille  (Ann.  des  sciences 
nat.,  2e  série,  t.  XVII,  p.  214). 

(c)  Nicolucci,  Sul  sistema  nervoso  e  circolalorio  délia  Salamandra  acquajuola.  Naples,  1852. 

(d)  Gruby,  loc.  cit.,  pi.  9,  fig-.  2,  3,  5,  et  pi.  10,  fig.  6  et  7. 


CHEZ    LES    BATRACIENS,  ftOl 

Tout  le  sang  veineux  qui  revient  des  membres  postérieurs  ne 
suit  pas  cette  route  à  travers  les  reins. 

Les  veines  fémorales  et  iliaques  externes  fournissent,  comme 
nous  l'avons  vu,  vers  le  bord  du  bassin,  une  paire  de  branches 
anastomotiques;  après  s'être  réunies  de  chaque,  côté  en  un  tronc 
commun,  elles  viennent  se  confondre  en  un  tronc  impair  qui 
occupe  la  ligne  médiane  de  la  paroi  inférieure  de  l'abdomen  et 
se  dirige  vers  le  foie,  où  il  se  partage  en  trois  branches  :  deux 
de  celles-ci  s'enfoncent  directement  dans  la  substance  de  cette 
glande  pour  s'y  ramifier;  l'autre  se  recourbe  d'abord  en  bas,  et 
reçoit  deux  troncs  formés,  l'un  par  les  veines  des  intestins  et  de 
la  rate,  l'autre  par  les  veines  de  l'estomac  (1)  ;  puis,  elle  va  aussi 
se  ramifier  dans  le  foie  et  compléter  ainsi  le  système  de  la  veine 
porte  hépatique,  mais  avant  de  s'y  engager,  elle  donne  nais- 
sance à  une  petite  veine  qui  se  rend  directement  au  cœur  (2). 
Les  veines  efférentes  hépatiques  naissent  du  réseau  capillaire  de 
la  veine  porte,  et  se  réunissent  vers  le  milieu  du  bord  postérieur 
du  foie  pour  déboucher  dans  la  veine  cave  ventrale,  laquelle  se 
termine  dans  l'oreillette. 

Enfin  les  veines  pulmonaires,  qui  forment  sur  chacun  des  pou-      VeineS 
nions  un  tronc  assez  gros,  se  rapprochent  entre  elles,  et  s'avancent  i'Lllmoiiaiiej 
sous  la  veine  cave  postérieure  pour  aller  déboucher  très  près 
l'une  de  l'autre  dans  l'oreillette  du  cœur  S  .  Mais  je  dois  faire 

(1)  M.  Hyrtl  a  trouvé  que  les  bran-  reelement  de  la  veine  porte  au  creur, 
chesde  la  veine  porte  constituent  sur  la  sans  traverser  le  foie,  n'a  été  signalée 
paroi  supérieure    du   pharynx    une      que  chez  la  Grenouille  (6). 

sorte  de  rete  mirabile  qui  ressemble  (3)  M.  Délie  Cbiaje  a  représenté  ces 

presque   à   un    tissu  érectile   et  qui  veines  comme  se  réunissant  aux  veines 

s'anastomose  avec  plusieurs  veines  de  axillaires  (c),  mais  leur  trajet  a  été 

la  tète  (a).  indiqué  avec  beaucoup  de    précision 

(2)  Cette  branche,  qui  se  rend  cli-  par  M.  Gruby  {cl). 

fa)  Hyrtl,  Uebev  einige  Wunclemetxe  bei  AmphiMen  (Medicïaische  Jalirbilchcr  des  Oésterrei- 
chischen  Staates,  1842,  N.  F.,  BJ.  XXIX,  p.  2(50). 
(6)  Gruby,  loc.cit.,  pi.  9,  fig.  1. 
(f)  Délie  Chiaje,  Op.  cit.,  t.  I,  pi.  10,  fig.  10. 
(d)  Gruby,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1  842,  2e  série,  l.  XVII,  p.  221). 


des  veines. 


4G2  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

remarquer  que  ces  vaisseaux  ne  ramènent  pas  toujours  la  to- 
talité du  sang  qui  a  été  porté  aux  poumons  par  les  artères  pul- 
monaires :  ainsi,  chez  le  Protée,  une  portion  considérable  de  ce 
liquide  est  versée  dans  la  veine  cave  abdominale  par  des  branches 
veineuses  venant  de  la  surface  dorsale  de  ces  organes  (1). 
structure  §7.  —  Les  veines  de  la  Grenouille  ne  présentent  dans  leur 
intérieur  que  fort  peu  de  valvules ,  mais  elles  offrent  dans 
plusieurs  points  une  autre  particularité  fort  remarquable.  En 
effet,  plusieurs  des  gros  troncs  ont  des  parois  musculaires  et 
sont  le  siège  de  battements  rhythmiques.  Ce  fait,  observé  par 
Haller  et  par  quelques  autres  naturalistes,  a  été  complètement 
établi  par  les  expériences  de  M.  Flourens  (2). 

Ainsi  les  pulsations  qui  ont  lieu  dans  les  deux  veines  caves, 
les  veines  iliaques,  les  veines  axillaires  et  les  veines  pulmo- 


(i)  Les    veines  pulmonaires  infé-  le  Polypterus  Bichir,  dont  les  veines 

Heures  qui,  chez  le  Protée,  vont  direc-  de    la   vessie   pneumatique    versent 

tement  à  l'oreillette ,  sont  très  grêles  tout  leur  sang  dans  le  système  de  la 

et  avaient  échappé  aux  recherches  de  veine  cave  (b). 

Ruseoni   et   Conflgliachi.   Celles  qui  (12)  Haller  avait  remarqué  ces  batle- 

occupent  la  face  dorsale  de  ces  organes  ments  dans  les  gros  troncs  veineux  de 

sont  au  nombre  de  quatre  ou  cinq,  et  la  Grenouille,  mais  il  considérait  ces 

débouchent  en  partie  dans  les  veines  mouvements  comme  étant  analogues  à 

ovariques,  en  partie  dans  la  veine  cave  ceux  qui  se  voient  danscertaines  veines 

postérieure.  M.  Ilyrtl,   a  qui  l'on  doit  chez  les  Vertébrés  supérieurs,  où  ce 

la  découverte  de  cette  disposition  eu-  phénomène  est  d'une  tout  autre  na- 

rieuse,  s'est  assuré  qu'il  n'y  a  rien  de  ture  (c).  Plusieurs  autres  naturalistes 

semblable  chez  le  Triton,  où  les  pou-  en    avaient    également   dit   quelques 

nions  sont  cependant  fixés  à  la  paroi  mots  :  Spallanzani ,  par  exemple ,  les 

dorsale  de  l'abdomen  par  une  bande  avaient  signalés  chez  les  Tritons  et  les 

membraneuse  (a).  Rainettes  (d).  Enfin,  les  expériences 

Sous  ce  rapport,  le  Protée  établit  donc  de  M.  Flourens  ont  prouvé  de  la  ma- 
ie passage  entre  les  Vertébrés  pulmo-  nière  la  plus  nette  l'existence  d'une 
nés  ordinaires  et  les  Poissons,  tels  que  force  contractile  propre  dans  les  pa- 

(a)  Hvrll,  Berichtigungen  ûber  den  Bau  des  Gefâss-Sustems  von  Hypochlhon  Laurenlii  (Medi- 
dnische  Jahrbiicher  des  Oesterreichischen  Staates,  1844,  t.  XL VIII,  p.  258). 

(b)  Voyez  tome  H,  page  367. 

(c)  Haller,  Mém.  sur  le  mouvement  du  sang,  p.  319,  etc. 

(d)  Spallanzani,  Expériences  sur  la  circulation,  p.  4  35,  304. 


vnîculaire. 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  AOo 

naires,  sont  complètement  indépendantes  des  contractions  du 
cœur.  M.  Flourens  a  vu  que  ces  battements  persistaient  quand, 
à  l'aide  de  ligatures,  il  avait  interrompu  toute  communication 
entre  ces  vaisseaux  et  le  cœur.  Ils  continuent  même  après  que 
le  cœur  a  été  extirpé. 

11  est  aussi  à  noter  que  chez  les  Batraciens,  les  grosses  veines 
de  l'abdomen  sont  contenues  dans  des  canaux  lymphatiques  (1), 
et  que  parfois  leur  surface  est  garnie  de  petits  prolongements 
en  forme  de  glomérules  qui  flottent  dans  le  liquide  ambiant  (2). 

§8.  —  Les  faits  anatomiques  que  nous  venons  de  passer  Cûurs du sang 
en  revue  montrent  que  le  mode  de  circulation  du  sang  varie    le  SSÉtèmÉ 
beaucoup  dans  la  classe  des  Batraciens,  mais  présente  chez 
tous  ces  Animaux,  quand  ils  sont  arrivés  à  l'état  parfait,  un 
caractère  commun ,  dont  l'importance  physiologique  est   très 
grande. 

Nous  avons  vu  que  chez  les  Poissons,  de  même  que  chez  les 
Invertébrés  les  plus  parfaits,  le  sang  ne  parcourt  qu'un  seul 
cercle  vasculaire,  et  que  tout  ce  liquide ,  lancé  dans  le  système 
artériel  par  les  contractions  du  cœur,  passe  successivement  dans 
le  système  capillaire  respiratoire,  puis  dans  le  système  capil- 


rois  de  ces  vaisseaux  (a).  M.  Hyrtl  a  crite  plus  en  détail  dans  une  autre 

obtenu  des  résultats  analogues  chez  le  partie  de  ce  cours  {d). 

Protée  (6).  (2  M,  Leydig,  en  étudiant  ces  ap- 

M.  Leydig  a  reconnu  des  fibres  mus-  pendices  au  microscope,   a   reconnu 

culaires  striées  dans  ces  veines  puisa-  que  ce  ne  sont  pas  de  simples  caecuins, 

tiles  (c).  mais  des  anses  vasculaires  en  com- 

(1)  Cette  disposition  singulière  des  munication  avec  la  veine  par  leurs 

vaisseaux  lymphatiques,  dont  on  doit  deux  extrémités  (e). 
la  connaissance  à  M.  Panizza,  sera  dé- 


(o)  Flourens,  Expériences  sur  la  force  de  contraction  propre  des  veines  principales  dans  la 
Grenouille  [Ann.  des  sciences  nat.,  1833,  t.  XXVUI,  p.  65). 

(6)  Hyrtl,  Berichtigungen  ûber  den  Bau  des  Gefâss-Systems  von  Hypochthon  Laurentii  tilediri- 
nisehe  Jahrbûcher  des  Oesterreichischen  Staates  ,  1844,  t.  XL VIII,  p.  258). 

(c)  Leydig,  Anat.-histol.  l'ntersuch.  iiber  Fische  und  Reptilien,  p.  57. 

(d)  Panizza,  Riflessioni  sopra  il  sistema  linfatico  dei  Rettili.  Paria,  1845. 

te)  Leydig,  AnatomUch-histologische  Untersuchungen  ûber  Fische  und  Reptilien,  p.  57. 


du 

art 

et  du 

sang  veineux. 


llOll  APPAREIL    DR    LA    CIRCULATION 

faire  nourricier  avant  de  revenir  à  son  point  de  départ.  Mais 
chez  les  Batraciens  dont  le  développement  est  achevé ,  il  en  est 
autrement.  Il  y  a  deux  cercles  vasculaires  ;  il  y  a  une  grande 
et  une  petite  circulation  dans  chacune  desquelles  le  sang,  parti 
du  cœur,  revient  à  cet  organe  avant  de  s'engager  dans  le  cercle 
complémentaire,  et  ces  deux  cercles  se  confondent  dans  l'in- 
térieur de  cet  organe,  de  sorle  que  le  sang  venant  de  l'un  de 
ces  systèmes  vasculaires  s'y  mêle  toujours  avec  celui  venant  de 
l'autre. 
Mélange  En  effet,  c'est  du  ventricule  unique  du  cœur  que  naissent  les 
ang  ariénoi  deux  courants,  qui  bientôt  se  séparent  pour  aller ,  l'un  aux  pou- 
mons par  les  artères  pulmonaires,  l'autre  au.  réseau  des  vais- 
seaux nourriciers  de  tout  le  corps  par  l'intermédiaire  de  l'artère 
aorte.  Le  sang  qui  revient  des  poumons  pénètre  dans  l'oreillette 
gauche;  celui  qui  revient  de  l'ensemble  de  l'organisme  est 
reçu  dans  l'oreillette  droite  ;  mais  ces  deux  oreillettes  déversent 
leur  contenu  dans  le  ventricule  unique,  et  par  conséquent  là 
les  deux  courants  se  mêlent  et  se  confondent. 

Il  en  résulte  que,  même  chez  les  Batraciens  où  l'appareil 
pulmonaire  est  le  plus  développé,  tels  que  les  Salamandres  et 
les  Grenouilles,  l'effet  utile  de  la  respiration  est  fort  minime, 
car  le  sang  artérialisé  par  le  contact  de  l'air  dans  les  pou- 
mons vient  se  mêler  dans  le  ventricule  du  cœur  avec  tout  le 
sang  veineux  qui  revient  des  diverses  parties  du  corps  ,  et 
c'est  une  portion  de  ce  mélange  qui  se  distribue  de  nouveau 
dans  le  système  irrigntoire  de  l'organisme,  tandis  qu'une  autre 
portion  retourne  aux  poumons.  Les  capillaires  nourriciers  ne 
reçoivent  donc  que  du  sang  imparfaitement  artérialisé;  et  lors- 
qu'on examine  avec  attention  les  diverses  portions  de  cet  appa- 
reil circulatoire,  on  voit  que  la  proportion  de  sang  artériel  ainsi 
délayé,  pour  ainsi  dire,  dans  du  sang  veineux,  doit' être  très 
faible,  car  les  artères  pulmonaires  sont  fort  grêles  comparati- 
vement à  toutes  les  autres  divisions  vasculaires  qui  naissent  de 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  ftOB 

l'aorte  commune,  et  par  conséquent  le  filet  sanguin  qu'elles 
débitent  doit  être  toujours  plus  ou  moins  mince  par  rapport  au 
courant  qui,  engagé  dans  le  système  artériel  général,  revient 
au  cœur  à  l'état  de  sang  veineux. 

Cette  faiblesse  de  l'action  pulmonaire  dépendante  de  la  struc- 
ture de  l'appareil  de  la  circulation  peut,  il  est  vrai,  se  trouver 
compensée  en  partie  par  la  respiration  cutanée.  Presque  (ous 
les  Batraciens  ont  la  peau  nue,  et  le  sang  contenu  dans  les 
nombreux  vaisseaux  qui  viennent  s'y  ramifier  peut  y  subir 
facilement  l'influence  de  l'air;  aussi  avons-nous  vu  que  chez 
ces  Animaux  la  respiration  cutanée  acquiert  une  grande  impor-, 
tance  (1).  Il  en  résulte  que  le  sang  veineux  qui  des  parties  pro- 
fondes de  l'organisme  revient  au  cœur  est  déjà  mêlé  à  une 
certaine  proportion  de  sang  artérialisé  dans  les  vaisseaux  sous- 
cutanés,  et  que  celui-ci  vient,  pour  ainsi  dire,  en  aide  au  sang 
artériel  élaboré  en  petite  quantité  dans  les  poumons. 

Mais  il  est  des  Batraciens  chez  lesquels  cette  ressource 
manque  presque  complètement,  car  leur  peau,  au  lieu  d'être 
nue  comme  celle  de  la  Grenouille,  est  revêtue  d'écaillés.  Les 
Cécilies,  qui,  à  raison  de  leur  forme  et  de  l'absence  de  pattes, 
ont  été.  pendant  longtemps  rangées  par  les  naturalistes  dans 
l'ordre  des  Serpents,  mais  qui  sont  en  réalité  des  Batraciens 
apodes,  nous  offrent  un  exemple  de  ce  mode  d'organisation,  et 
par  conséquent]chez  elles  la  respiration  cutanée  ne  saurait  être 
que  très  faible  (2). 

Chez  les  Batraciens  Pérennibranches  la  pauvreté  de  la  circu- 
lation pulmonaire  est  compensée  en  partie  par  l'appareil  bran- 


(1)  Voyez  tome  I,  page  503.  diffère  que  peu   de   celui  des  Gre- 

(2)  L'appareil  circulatoire  des  Ceci-       nouilles  (a). 
lies  a  été  décrit  par  M.  Rathke,  et  ne 


(a)  Rallike,  Bemerkungen  iiber  mehrere  Korpertheile  dev  C.œrWh  aftnnlala  (Miiller's  Archh 
fur  Anal,  und  Phy&iol:,  1852,  p.  352  et  sùîv.,  pi.  9,  fig.  1). 


40G  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

cbial  situé  sur  le  passage  du  sang  qui  se  rend  du  cœur  aux 
diverses  parties  de  l'organisme  ;  mais  il  est  à  remarquer  que 
les  panaches  respiratoires  dont  cet  appareil  se  compose  ne  peu- 
vent guère  fonctionner  utilement  quand  l'animal  est  hors  de 
l'eau,  et  que,  d'un  autre  côté,  les  poumons  cessent  d'artérialiser 
le  sang  qui  les  traverse  quand  l'animal  est  submergé.  Dans  l'un 
et  l'autre  cas  ,  il  y  a  donc  une  portion  du  sang  qui,  en  circu- 
lant, échappe  à  l'action  de  l'oxygène  ambiant;  et  pour  que  le 
travail  respiratoire  ait  toute  l'activité  dont  il  est  susceptible,  il 
faut  que  l'animal  soit  dans  l'eau  pour  utiliser  ses  branchies  et 
qu'il  puisse  venir  souvent  à  la  surface  de  ce  liquide  pour  satis- 
faire aux  besoins  de  la  respiration  pulmonaire  (1).  Et  encore  la 
totalité  de  son  sang  ne  sera-t-elle  pas  toujours  soumise  à  l'in- 
fluence de  cette  fonction  ;  car  nous  avons  vu  que  l'une  des 
branches  terminales  des  arcs  vasculaires  postérieurs  va  en  gé- 
néral s'anastomoser  avec  les  racines  de  l'aorte ,  sans  passer 
ni  par  les  branchies,  ni  par  les  poumons. 
Rapports         §  9.  —  Je  ferai  remarquer  aussi  combien  les  transitions  sont 
les  Batraciens  graduelles  entre  le  mode  d'organisation  typique  de  l'appareil 
circulatoire  dans  les  deux  classes  de  Vertébrés  Anallantoïdiens, 
les  Batraciens  et  les  Poissons.  Les  ressemblances  n'existent 
pas  seulement  entre  la  disposition  du  système  vasculaire  chez 
le  têtard  du  Batracien  et  le  Poisson ,  soit  à  l'état  d'embryon, 
soit  à  l'état  adulte;  mais  les   deux  formes  qui  sont  si   dis- 
tinctes chez  les  principaux  représentants  de  ces  groupes  se 
rapprochent  et  se  confondent  chez  quelques  espèces  qui  sem- 
blent lier  les  deux  classes  entre  elles.  Ainsi,  soit  que  l'on  range 
le  Lepidosiren  dans  la  classe  des  Poissons,  soit  qu'on  le  place 

(l)  Il  paraîtrait ,  d'après  les  obser-      vient  que  très  rarement  à  la  surface 
valions  de  M.  Hyril,  que  le  Protée  ne      de  l'eau  pour  respirer  l'air  (a). 

(a)  Hyril,  Derichtigungen  ùber  den  Bau  des  Cefdss-Systems  von  Hypochlhon  Lanrenlii  (Medici 
nische  Jahrbùrher  des  Oe'sterreichischen  Staates,  1844,  t.  XLVIII,  p.  257). 


entre 

Batrac 

et  les  Poissons. 


CHEZ    LES    BATRACIENS.  !l01 

parmi  les  Batraciens,  nous  voyons  que  cet  animal,  par  le  mode 
de  constitution  de  son  appareil  circulatoire,  aussi  bien  que  par 
la  disposition  des  organes  de  la  respiration,  diffère  à  peine  des 
Batraciens  Pérennibranches,  tels  que  l'Axolotl  et  la  Sirène, 
d'une  part,  et  des  Poissons  des  genres  Polyptère,  Amia  et  Lé- 
pisostée  de  l'autre. 

Les  caractères  que  l'on  peut  invoquer  pour  établir  ici  la  ligne 
de  démarcation  n'ont  aucune  fixité,  et  par  conséquent  ne  peu- 
vent avoir  que  peu  d'importance  dans  la  Nature. 

J'insiste  sur  ce  point ,  parce  que  les  auteurs  se  forment 
souvent  des  idées  fausses  touchant  la  circonscription  des  familles 
ou  des  classes  zoologiques.  On  les  représente  d'ordinaire  comme 
ayant  des  limites  parfaitement  nettes  et  comme  pouvant  être 
définies  à  l'aide  de  quelques  mots.  Cela  est  vrai  pour  les  types 
ou  représentants  ordinaires  de  la  plupart  de  ces  groupes,  mais 
ne  l'est  pas  pour  ces  groupes  eux-mêmes;  car  presque  toujours 
ceux-ci  se  rencontrent  et  se  confondent  plus  ou  moins  complè- 
tement entre  eux  sur  quelques  points  de  leur  circonférence. 
Les  discussions  qui  se  sont  élevées  depuis  quelques  années^ 
parmi  les  zoologistes ,  sur  la  place  que  le  Lepidosiren  doit 
occuper  dans  nos  systèmes  de  classification ,  fournissent  la 
preuve  de  ce  que  j'avance  ici,  et  montrent  combien  certaines 
espèces  intermédiaires  se  ressemblent,  soit  qu'elles  dérivent 
du  type  ichthyologique,  et  qu'elles  revêtent  la  plupart  des  carac- 
tères des  Batraciens ,  soit  que  le  tracé  organique  propre  à  ce 
dernier  y  ait  été  modifié  par  des  emprunts  faits  au  plan  anato- 
mique  du  Poisson.  Mais  c'est  là  un  sujet  qui  est  du  domaine 
de  la  taxinomie  zoologique  plutôt  que  de  la  physiologie  ou  de 
l'amitomie,  et  par  conséquent  je  ne  m'y  arrêterai  pas  ici,  et.  je 
passerai  tout  de  suite  à  l'étude  de  l'appareil  circulatoire  dans  la 
classe  des  Reptiles. 


VINGT -HUITIEME  LEGON. 


De  la  circulation  du  sang  chez  les  Pieptiles. 


Caractère 

général 

de  l'appareil 

circulatoire 

des  Reptiles. 


§  \ .  — ■  Dans  cette  grande  division  de  l'embranchement  des 
Vertébrés,  de  même  que  chez' les  Batraciens,  il  y  a  toujours 
mélange  d'une  portion  plus  ou  moins  considérable  de  sang 
veineux  avec  le  sang  artériel;  mais  les  deux  cercles  vascu- 
laires  tendent  à  se  juxtaposer  seulement  et  à  se  compléter  l'un 
l'autre,  au  lieu  de  se  confondre,  et  par  conséquent  nous  rencon- 
trons ici  de  nouveaux  perfectionnements  dans  l'appareil  irriga- 
loire(l).  En  effet,  le  cœur,  composé  de  deux  oreillettes  et  d'un 
ventricule  unique  chez  la  plupart  des  Reptiles,  montre  chez  plu- 
sieurs de  ces  Animaux  une  tendance  à  se  diviser  en  quatre  ca- 
vités, deux  ventricules,  aussi  bien  que  deux  oreillettes,  et  par- 
fois même  cette  séparation  devient  complète,  de  façon  que  le 
sang  veineux  reçu  dans  une  des  moitiés  de  l'organe  ne  pénètre 
pas  dans  l'autre,  qui  ne  reçoit  que  du  sang  artériel.  Mais,  dans 
tous  les  cas,  ces  deux  portions  du  fluide  nourricier  se  mêlent  plus 
ou  moins  complètement  avant  d'être  distribuées  dans  le  système 
capillaire;  car  ici,  de  même  que  chez  les  Batraciens,  l'aorte 
dorsale  résulte  de  la  réunion  de  deux  ou  de  plusieurs  crosses 
paires,  et  lorsque  la  portion  ventriculaire  du  cœur  est  complè- 
tement divisée  en  deux  loges,  dont  une  est  artérielle  et  l'autre 
veineuse,  ces  deux  racines  de  l'aorte  naissent  de  ces  deux  moitiés 
du  cœur,  de  façon  à  conduire  dans  la  grande  artère  du  corps 
un  courant  de  sang  veineux  aussi  bien  qu'un  courant  de  sang 
artériel,  et  le  mélange  de  ces  deux   liquides  est  rendu  plus 


(1  )  Claude  Perrault  ,  le  célèbre 
architecte  à  qui  l'on  doit  la  colonnade 
du  Louvre  et  un  recueil  important  de 
recherches  sur  Tanatomie   des  Ani- 


maux, fut,  je  crois,  le  premier  à  con- 
stater ce  mode  de  circulation  chez 
une  grande  Tortue  de  l'Inde.  Ce  na- 
turaliste émineht  mourut  en  1688; 


APPAREIL    DE   LA   CIRCULATION    CHEZ    LES    REPTILES.  ft09 

complet  par  une  communication  directe  ouverte  en  Ire  ces 
crosses,  près  de  leur  origine. 

§2.  —  D'autres  différences  clans  l'appareil  circulatoire  des 
Reptiles,  comparé  à  celui  des  Batraciens,  dépendent  d'une  cen- 
tralisation plus  grande  dans  la  portion  antérieure  du  cœur,  et  la 
division  du  travail  se  prononce  davantage  dans  les  gros  vais- 
seaux qui  sortent  de  cet  organe.  Chez  l'embryon,  la  conforma- 
tion de  ces  parties  est  à  peu  près  la  même  dans  ces  deux  classes 
d'Animaux.  Le  cœur  offre  en  avant  un  bulbe  arrondi  qui  est 
séparé  du  ventricule  par  un  rétrécissement,  ou  détroit  de  Haller, 
très  bien  marqué,  et  l'aorte  se  divise,  comme  d'ordinaire,  en  une 
double  série  d'arcs  vasculaires  (1).  Mais,  par  les  progrès  du 
développement,  le  bulbe  tend  de  plus  en  plus  à  se  rapprocher 
du  ventricule,  se  confond  avec  lui,  et  finit  par  disparaître  plus 
ou  moins  complètement  (2),  de  façon  que  le  cœur  ne  se  trouve 
composé  que  de  deux  étages,  une  portion  auriculaire  et  une 
portion  ventriculaire. 

La  séparation  longitudinale  que  nous  avons  vue  s'établir  d'une 

mais  le  mémoire  contenant  la  décou-  (1)  [Nous  reviendrons  plus  tard  sur 

verte  dont  je  viens  de  parler  ne  fut  le  mode  de  développement  de  l'appa- 

publié  que  fort  longtemps  après  (a).  reil  circulatoire  de  ces  Animaux,  et, 

Perrault  se  livra  à  l'exercice  de  la  pour  le  moment,  je  me  bornerai  à  ren- 

médecine  avec  distinction  ;  c'était  un  voyer    aux   travaux    publiés  sur   ce 

bomme  remarquable  par  sa  douceur  sujet  par  MM.  Baer,  Hatbke  et  Agas- 

et  sa  bienfaisance.  Il  est  donc  fâcheux,  siz  (c). 

pour  la  réputation  morale  de  Boileau,  (2)  Chez  les  Scinques,  le  bulbe  est 

que  ce  poète  ait  osé  le  désignerai!  très  réduit,  mais  se  voit  encore  bien 

mépris  du  public  en  l'appelant  «  mé-  distinctement  à  la  face  antérieure  du 

dpcin  ignorant  »  et  a  assassin  »  (6).  cœur  (<$)• 

(a)  Perrault,  Description  anatomique  d'une  grande  Tortue  des  Indes  (Mém.  pour  servir  à 
l'histoire  naturelle  des  animaux,  t.  III,  2e  partie,  1732,  p.  190). 

(b)  Boileau  Despréaux,  Art  poétique,  chant  IV,  et  Épigramme  à  un  médecin. 

(c)  Baer,  Ueber  die  Entwickelungsgeschichte  der  îhiere,  t.  H,  p.  159  (1837). 

—  Ralhke,  Enhvickelungsgeschichte  der  Natter  (Coluber  natrix),  pi.  4,  fig.  1  à  9,  etc.  (1839), 
et  Entivickelung  der  Schildkroten,  1848,  p.  210  et  suiv. 

—  Agassiz,  Contributions  to  the  Natural  History  ofthe  United  States  of  America,  t.  II,  p.  594 
M  suiv.,  pi.  14,  fig.  4,  etc.  (1857). 

(d)  Dp  Natale,  Ricerche  anatomiche  sullo  Scinco  variegato,  p.  3R,  pi.  2,  fig1.  1  (extrait  des 
Mém.  de  YAcad.  de  Turin,  2e  série,  t.  XIII,  1852). 


/jlO  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

manière  incomplète  dans  le  commencement  de  l'aorte  commune 
chez  quelques  Batraciens,  se  perfectionne  chez  les  Reptiles,  et 
amène  une  distinction  complète  entre  le  système  artériel  pul- 
monaire et  le  système  artériel  général.  Enfin,  le  mouvement 
de  retrait  qui  fait  disparaître  le  bulbe  semble  se  prolonger  et 
s'étendre  à  la  base  des  arcs  aortiques,  de  sorte  que  souvent  les 
principaux  troncs  artériels ,  au  lieu  de  naître  comme  des 
branches  d'un  tronc  commun ,  partent  directement  du  ven- 
tricule. 

Ces  diverses  modifications  ne  se  prononcent  pas  toujours  au 
même  degré,  et  venant  à  se  combiner  avec  celles  qui  s'effec- 
tuent dans  la  structure  du  cœur,  déterminent  des  variations 
nombreuses  et  importantes  dans  la  constitution  de  l'appareil 
circulaire  chez  les  divers  Reptiles. 

Pour  l'étude  de  cet  appareil,  je  choisirai  comme  premier 
exemple  la  Tortue,  (1). 

(1)  La  plupart  des  faits  fondamen-  vations  sur  le  même  sujet  (b).   En 

taux  relatifs  à  la  structure  de  l'appa-  1781,  Gottwaldt  ajouta  quelques  faits 

reil  circulatoire  des  Tortues  ont  été  nouveaux  relatifs   à   l'anatomie    des 

constatés  par  les  anatomistes  du  xvne  Carets  (c).  En  1808,  Wrisberg  publia 

siècle  ou  du  commencement  du  siècle  des  recherches  sur  le  cœur  de  la  Tor- 

suivant  :  ainsi  Perrault  d'abord,  puis  tue  franche,  ou  Chelonia  Miàas  (d). 

Méry  et  Duverney,  contribuèrent  à  faire  Mais  le  travail  le  plus  approfondi  sur 

connaître  la  disposition  du  cœur  et  ce  point  d'anatomie  physiologique  est 

des  gros  vaisseaux  {à).  Peu  de  temps  la  belle  monographie  de  Bojanus  sur 

après,  Bussière  à  Londres,  et  Morgagni  la  Tortue  bourbeuse  (e).  J'aurais  aussi 

à  Pa vie,  publièrent  de  nouvelles  obser-  à  citer  ici  les  recherches  plus  récentes 

(a)  Perrault,  Op.  cit. 

—  Duverney,  Observations  sur  la  circulation  du  sang  dans  le  fœtus,  et  description  du  cœur 
de  la  Tortue  et  de  quelques  autres  animaux  (Mém.  de  l'Acad.  des  scienees,  1699,  et  Œuvres 
anatomiques ,  t.  II,  p.  458). 

—  Méry,  Description  du  cœur  d'une  grande  Tortue  d'Amérique  (Mém.  de  l'Acad.  des  sciences, 
1703,  p.  457,  pi.  12,  fig.  1  à  8). 

(b)  Bussière,  An  Anatomical  Description  of  the  Heart  ofLand  Tortoises  from  America  (Philos. 
Trans.,  1710,  p.  170,  pi.  n"  328,  fig.  1  à  4). 

—  Morgagni,  Adversaria  anatomica  quinta,  animadversio  xvii  (1719)  (Opéra  omnia,  t.  II, 
p.  153). 

(e)  Gottwaldt,  Physikalisch- anatomische  Bemerkungen  ûber  die  Schildkroten.  Niirnberg,  1781. 

(d)  Wrisberg,  Obsei'V.  anat.  de  corde  Testudinis  marinœ  Midas  dicta:  (Commentalianes 
Societatis  scientiarum  Gottengensis,  1808,  t.  XVI,  p.  48,  fig.). 

(e)  Bojanus,  Anatome  Testudinis  europœœ,  in-fol.  Vilnse,  1819-1821. 


CHEZ    LES    REPTILES. 


411 


&  3.  —  Le  cœur  des  Chéloniens,  de  même  que  celui  de  la       cœur 

des  Cliéloiiiens. 

plupart  des  autres  Reptiles,  se  compose  de  deux  oreillettes  et 
d'un  seul  ventricule. 

Cet  organe  est  situé  sous  les  poumons,  immédiatement  au- 
devant  du  foie  ,  et  la  poche  séreuse  qui  le  renferme  se  confond 
en  arrière  avec  la  membrane  péritonéale  dont  cette  glande  est 
revêtue.  Il  est  bon  de  noter  aussi  qu'au  lieu  d'être  suspendu 
librement  dans  le  péricarde,  comme  chez  les  Vertébrés  supé- 
rieurs, le  cœur  des  Tortues  ressemble  à  celui  des  Poissons  par  la 
manière  dont  il  est,  pour  ainsi  dire,  amarré  dans  sa  loge  par  des 
cordons  fibreux  en  nombre  plus  ou  moins  considérable  (1).  11 
est  grand  et  de  forme  ramassée  ;  en  général,  il  est  même  beau- 
coup plus  large  que  long. 

Les  oreillettes  ,  peu  distinctes  extérieurement ,  débordent 
le  ventricule  en  avant  et  sur  les  côtés.  Celle  de  droite  est 
la  plus  volumineuse,  et  reçoit  le  sang  venant  du  système 
veineux  général.  Les  veines  pulmonaires  débouchent  dans 
celle  de  gauche.  A  l'intérieur,  ces  deux  organes  sont  séparés 
entre  eux  par  une  cloison  membraneuse  qui  parfois  est  per- 
forée, mais  qui,  en  général,  est  complète  ,  et  s'étend  en 
arrière  jusque  sur  la  grande  valvule  auriculo-ventriculaire  , 


do  Treviranus  et  de  quelques  autres  forte  que  les  autres,  se  fixe  au  sommet 

naturalistes  (a).  du  ventricule  (6),  et  contiendrait,  d'a- 

(1)  Le  péricarde  est  grand  et  épais  ;  près  Bojanus  ,   une   des    veines   du 

postérieurement  il  est  uni  à  la  mem-  cœur  (c)  ;  mais  cette  disposition  ne 

branc  qui  revêt  le  foie,  et  il  adhère  paraît  pas  être  constante,  car  souvent 

aussi  à  la  surface  du  cœur  par  un  Meckel  n'a  pu  découvrir  dans  cette 

nombre  plus  ou  moins  considérable  bride  aucune  trace  de  l'existence  d'un 

de  brides  filiformes ,  dont  une  plus  vaisseau  sanguin  (d). 


(a)  Treviranus,  Bau  des  Ilerzens  der  Schildkrolen,  etc.  (Lieobachluhgen  aus  der  Zoolomie  und 
Physiologie,  I.  Heft,  p.  2,  1839). 

(6)  Duverney,  Observ.  sur  la  circulation  du  sang  dans  le  fœtus,  et  description  du  cœur  de  lu 
Tortue  [Acad.  des  sciences,  1699,  et  Œuvres  anatomiques ,  t.  II,  p.  459,  pi.  6,  fig.  3). 

—  Goltwaldt,  PhysikaUsch-Anatoinische  Beobachtungen  ûber_  Schildkroten,  pi.  C,  fig-.  3  (i  781). 

(c)  Bojanus,  Anatome  Testudinis  europœœ,  pi.  29,  fig.  160. 

(</)  Meckel,  Anat.  comp.,  t.  IX,  p.  297. 


/il 2  APPAREIL    DE    LA    CIKGULATION 

laquelle  (constitue  la  paroi  postérieure  de  ces  cavités  vestibu- 
laires  (1). 

L'orifice  par  lequel  les  veines  caves  débouchent  dans  l'oreil- 
lette droite  est,  en  général,  simple  et  garni  de  valvules  qui  ne 
laissent  entre  elles  qu'une  fente  en  forme  de  boutonnière  (2)  ; 
quelquefois  les  deux  veines,  caves  se  terminent  séparément  dans 
cette  chambre  vestibulaire,  et  il  paraîtrait  même  que  chez  le 
Caret  la  veine  cave  d'un  côté  du  corps  seulement  s'y  ouvrirait, 
tandis  que  l'autre  se  rendrait  directement  au  ventricule  (3). 
L'une  des  veines  pulmonaires  présente  la  même  anomalie  chez 


(1)  L'existence  d'une  cloison  in  ter- 
auriculaire  perforée  a  été  constatée 
par  Munniks  chez  le  Cinosterne  scor- 
pioïde,  ou  Terrapene  tricarinata  de 
Merrem  (a). 

Treviranus  a  trouvé  aussi  que  chez 
laCistudede  la  Caroline  (Terrapene 
çltfusq,  Merrem),  les  deux  oreillettes 
communiquent  entre  elles  (6). 

(2)  Duverney  qui,  vers  la  fin  du 
xvnc  siècle,  a  très  bien  décrit  la  struc- 
ture du  cœur  des  Tortues  d'après 
une  grosse  espèce  américaine  indé- 
terminée, compare  à  deux  paupières 
les  valvules  de  l'ouverture  unique  par 
laquelle  le  sinus  veineux  commun 
débouche  dans  l'oreillette  droite,  et 
fait  remarquer  qu'un  faisceau  de  fibres 
fixées  à  leur  angle  externe  s'épanouit 
sur  le  fond  de  celte  cavité  (c). 

L'orifice  unique  des  deux  veines 
caves  avec  ses  deux  valvules  a  été 


très  bien  figuré  par  Bojanus  chez  la 
Tortue  bourbeuse,  ou  Cistude  d'Eu- 
rope (d). 

(3)  Treviranus  a  trouvé  que  chez 
VEmys  reticulata,\VE.  serraia  et  la 
Cistude  de  la  Caroline  (ou  Terrapene 
clausa),  les  deux  veines  caves  débou- 
chent séparément  dans  l'oreillette  (e). 

Le  même  anatomiste  a  décrit  avec 
beaucoup  de  détails  le  mode  de  ter- 
minaison anormal  de  l'une  des  veines 
caves  dans  le  ventricule  chez  le  Caret 
(ou  Chelonia  imbricata) .  La  cloison 
interauriculaire  se  compose  de  deux 
feuillets  qui  s'écartent  entre  eux  aux 
approches  du  ventricule,  et  c'est  dans 
l'espace  médian  ainsi  constitué  que 
débouche  le  tronc  des  veines  caves 
d'un  côté.  Il  n'y  a  pas  de  valvules  aux 
bords  de  cet  orifice,  et  la  gouttière  où 
il  est  situé  se  continue  avec  la  cavité 
dit  ventricule  (/"). 


(a)  Munniks,  Observ.  deanatomia  Testudinis  scorpioidis  (  Otiservaliones  variai,  Groriingue , 
1805,  p.  43). 

(b)  TreviranuSj  Ueobachtungen  aus  der  Zootomie  und  Physioloyie,  1. 1,  p.  5,  pi.  1 , .%.  5  et  G. 

(c)  Duverney,  Op.  cit.  {Œuvres,  t,  II,  p.  400,  pi.  (5,  fig.  6,  et  pi.  8,  fig.  13,  BB). 

(d)  Bojanus,  Op.  cit.,  pi.  29,  iig.  169. 

(e)  Treviranus,  Beobachtungen  aus  der  Zootomie  und  Physioloyie,  I.  Hoft,  S.  h. 
(/)  Idem,  ibid.,  p.  4,  pi.  2,  fig.  8,  o. 


CHEZ    LES    REPTILES.  /l  1  3 

la  Tortue  marquetée,  ou  Chersine  tessellata  de  Merrem  (1). 
Mais  chez  tous  les  autres  Ghéloniens  examinés  jusqu'ici ,  ces 
deux  vaisseaux  débouchent  clans  l'oreillette  gauche  par  un  orifice 
commun  ou  par  deux  orifices  très  rapprochés  (2) .  . 

L'orifice  ventriculaire  de  chacune  de  ces  oreillettes  en  occupe 
la  base,  et,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  se  trouve  garni  d'une  val- 
vule quadrilatère  qui  naît  de  la  cloison  interauriculaire,  où  elle 
se  confond  avec  sa  congénère  pour  constituer  une  espèce  de 
grand  voile  tendu  en  travers  au-devant  dû  ventricule.  Les 
bords  supérieur  et  inférieur  de  cette  valvule  commune  (c'est-à- 
dire  ses  bords  dorsal  et  sternal)  adhèrent  aux  parois  du  cœur, 
mais  ses  deux  bords  latéraux  sont  libres,  et  laissent  ainsi  de 
chaque  côté  une  fente  qui  se  dilate  quand  le  sang  pousse 
d'avant  en  arrière  l'espèce  de  soupape  ainsi  constituée,  mais 
se  ferme  quand  ce  liquide,  pressé  par  les  contractions  du  ven- 
tricule, tend  à  refluer  dans  les  oreillettes  (3). 

(1)  C'est  aussi  dans  l'espace  laissé      et,  par  conséquent,  tient  lieu  de  sou- 
par  l'écartement  des  deux  feuillets  de      pape  (b). 

la   cloison  interauriculaire,    près  de  Treviranus  a  représenté  les  deux 

leur  bord  ventriculaire,  que  l'une  des  orifices  terminaux  des  veines  pulmo- 

veines  pulmonaires  débouche  et  verse  naires   dans    l'oreillette    droite   chez 

son  sang  dans  le  ventricule  chez  ce  VEmys  reticulata  (c). 

Chélonien  ;  disposition  qui  a  été  con--  L'existence    d'un    repli  valvulairc 

statée  par  Treviranus  (a).  simple,  à  l'orifice  de  l'artère  pulmo- 

(2)  Chez  la  Cistude  d'Europe,  l'ori-  naire,  a  été  constaté  chez  la  Tortue 
lice  commun  des  deux  veines  pulmo-  indienne  par  Guthrie  (d).  ■ 

naires,  situé  à  l'angle  postérieur  et  (3)  La  disposition  générale  de  celle 
interne  de  l'oreillette  gauche,  est  de  valvule  se  voit  dans  les  figures  don- 
forme  semi-lunaire  et  n'est  pas  pourvu  nées  par  Duverney,  mais  a  été  repré- 
de  valvules,  mais  la  cloison  interauri-  sentée  d'une  manière  beaucoup  plus 
culaire  le  recouvre  en  grande  partie  nette  par  Bussière  et  par  Duvernoy(e). 
au  moment  de  la  systole  des  oreillettes,  Cependant  la  disposition  des  orifices 

(a)  Treviranus,  Op.  cit.,  p.  5. 

(b)  Voyez  Bojanus,  Op.  cit.,  pi.  29,  %.  108. 

(c)  Treviranus,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1  et  2  q,  q'. 

(d)  Observ.  on  the  Structure  of  the  Heart  of  the  Tcstudo  indica  (Zool.  Journ  al,  16-  î),  t.  IV, 
p.  322). 

(e)  Duverney,  Op.  cit.  (Œuvres,  t.  II,  pi.  8,  fig.  17). 

—  Bussière,  Op.  cit.  (Philos.  Transi.,  1710,  pi.  n"  328,  fig.  2  a). 

—  Duvernoy,  Atlas  du  Règne  animal  de  Olivier,  Reptiles,  pi.  2,  fig.  3. 


îlll\  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Le  ventricule,  arrondi  et  en  général  très  large,  a  des  parois 
musculaires  fort  épaisses  et  dont  la  portion  interne  présente  une 
structure  réticulée  ou  caverneuse.  Les  petites  cavités,  ainsi 
circonscrites  par  des  faisceaux  charnus,  communiquent  entre 
elles  ainsi  qu'avec  la  grande  cavité  centrale,  et  ordinairement 
les  colonnes  musculaires  qui  se  prolongent  en  dedans  divisent 
l'intérieur  du  ventricule  en  deux  loges  principales ,  situées 
l'une  à  droite,  l'autre  à  gauche.  Cette  dernière,  beaucoup  moins 
grande  que  la  loge  ventriculaire  droite,  est  en  communication 
avec  l'oreillette  gauche,  et,  au  moment  de  sa  dilatation,  reçoit  le 
sang  artériel  chassé  par  la  contraction  de  celle-ci  ;  mais  elle  ne 
donne  naissance  à  aucune  artère,  et  le  liquide  dont  elle  s'est 
chargée  de  la  sorte  est  obligé  de  passer  ensuite  dans  l'autre 
compartiment  du  ventricule.  Elle  mérite  donc  le  nom  de  loge 
artérielle  ,  mais  c'est  à  tort  que  beaucoup  d'anatomistes  la 
considèrent  comme  étant  un  ventricule  distinct.  La  loge  veineuse, 
ou  loge  principale  dans  laquelle  débouche  l'oreillette  droite, 
présente  au  contraire  trois  orifices  qui  sont  l'origine  des  vais- 
seaux destinés  à  porter  le  sang  aux  poumons  aussi  bien  que 
dans  le  système  circulatoire  général  (1). 

auriculo-ventriculaires  n'est  pas  tout  à  dans  le  ventricule  unique  du  cœur  des 

fait  aussi  simple  que  ces  anatomisles  Chéloniens,  et  il  existait  jusqu'à  ces 

le  supposaient.  En  effet,  jV].  Briicke  derniers  temps  de  grandes   incertitu- 

a  reconnu  que  chacune  de  ces  ouver-  des  au  sujet  du  mode  de  distribution 

lures  est  garnie,  du  côté  externe,  du  sang  artériel  et  veineux  dans  l'inté- 

d'un  petit   rebord  membraneux  qui  rieur  de  cet  organe.  Mais  M.  Briicke 

représente  une  seconde  valvule  rudi-  a  fait  à  ce  sujet  des  expériences  sur 

menlaire  opposée  à  la  première.  Du  des    Animaux,   vivants  et  me  paraît 

reste,  ce  prolongement  de   la    lèvre  avoir  résolu  la  question  d'une   raa- 

externe  de  l'orifice  est  rigide  et  ne  nière  très  satisfaisante.  En  effet,  il  a 

fait  pas  office  de  soupape  («).  constaté  qu'au  moment  de  la  diastole 

(1)  11  y  a  eu  beaucoup  de  discussions  du  ventricule,  les  cavilés  situées  dans 

entre  les  anciens  anatomisles  au  sujet  cette  portion  du  cœur  ne  se  colorent 

du  nombre  et  des  usages  de  ces  coin-  pas  de  la   même  manière  ;  la  partie 

partiments  plus   ou    moins  distincts  qui  dépend  de  la  loge  droite  et  qui 

(a)  Briicke,  Beitrtige  zur  vergl.  Anat.  und  Physiol.  des  Gefass-Syslems  (Mém.  de  l'Acad.  de 
Vienne,  1852,  t.  111,  p,  336). 


CHEZ    LES    REPTILES.  A '15 

Il  on  résulte  que  chez  les  Cbéloniens,  de  même  que  chez  les 
Batraciens,  il  y  a  un  mélange  du  sang  artériel  et  du  sang  vei- 
neux qui  s'opère  dans  l'intérieur  du  ventricule  ;  mais  ce  mé- 
lange est  moins  complet  qu'on  ne  serait  porté  à  le  supposer  au 
premier  abord  ;  car,  à  l'aide  de  quelquesdispositions  très  simples, 
dont  nous  devons  la  connaissance  à  un  observateur  habile  de 
l'école  de  Vienne,  M.  Briicke,  la  plus  grande  partie  du  sang- 
contenu  dans  la  loge  artérielle  se  rend  à  l'aorte,  et  il  n'en  passe 
que  très  peu  dans  l'artère  pulmonaire.  En  effet,  M,  Briicke  a 
reconnu  que  dans  le  mouvement  de  systole  du  ventricule,  les 


communique  directement  avec  l'orifice 
auiïculo-ventriculaire  du  même  côté, 
c'est-à-dire  avec  l'oreillette  du  sys- 
tème pulmonaire  ,  prend  une  teinte 
vermeille  ,  tandis  que  la  partie  où  se 
trouve  la  loge  principale,  et  où  dé- 
bouche l'oreillette  faisant  suite  aux 
veines  caves,  se  colore  en  rouge  som- 
bre. On  en  peut  conclure  que  le  pre- 
mier de  ces  compartiments  se  remplit 
de  sang  artériel,  le  second  de  sang 
veineux  (a). 

M.  Driicke  désigne  donc  la  portion 
gauche  du  ventricule  sous  le  nom  de 
cavum  arteriosum,  et  il  appelle  ca- 
vum  venosum  la  portion  située  au 
milieu  et  à  droite  où  arrive  le  sang 
noir. 

Chez  la  Tortue  bourbeuse,  ou  Cis- 
tudo  europeea  (Emys  europeea  de 
Schwcigger),  il  n'existe  aucune  cloison 
entre  ces  deux  portions  du  cœur  (6), 
et  il  paraît  en  être  à  peu  près  de 
même  chez  quelques  autres  espèces, 
telles  que  la  Tortue  grecque.  Mais 
chez  d'autres  Cbéloniens  les    brides 


charnues  se  ramifient  et  se  prolongent 
davantage  entre  ces  deux  loges  ,  de 
manière  à  constituer  quelquefois  une 
cloison  assez  bien  caractérisée,  quoi- 
que toujours  incomplète. 

Ainsi,  chez  le  Caret  {Chelonia  im- 
bricata,  Schw.),  la  séparation  entre  les 
deux  loges  est  très  développée  (c).  En- 
fin, chez  la  Tortue  franche,  ouChelonia 
Midas ,  la  cloison  ventriculaire  ainsi 
constituée  est  percée  seulement  par  un 
trou  ovalaire  qui  est  situé  sous  le  fond 
de  la  valvule,  auriculo  -  ventriculaire 
droite ,  de  façon  à  être  bouché  par 
celle-ci  quand,  au  moment  de  la  sys- 
tole de  l'oreillette  ,  elle  vient  ù  être 
distendue  par  le  sang  veineux  et  à  se 
gonfler  sous  la  pression  ainsi  exercée, 
lien  résulte  que,  au  moment  de  l'en- 
trée du  sang  veineux  dans  le  ventri- 
cule, le  passage  de  la  loge  principale 
dans  lalogearlérieusc  se  trouve  fermé. 
La  disposition  de  ces  parties  se  voit 
assez  nettement  dans  une  coupe  du 
cœur  de  cette  Tortue  marine,  publiée 
par  MAI*  Car  us  et  V.  Otto  [d). 


(«)  Briicke,  Unters.  ùber  vergl.  Anal,  uni  l'hys.  des  Gefàss-Systcms  [Hé m.  de  l'Acad.  de 
Vienne,  1852,  t.  III,  p.  335). 
(b)  Briicke,  Op.  cit.,  p.  339. 

(<)  Voyez  Treviranus,  Op.  cit.,  p.  4,  p!.  2,  fig.  S  cl  9. 
(d)  Carus  et  V.  Otto,  Tabulai  Anat.  cçmpar.  illustr  ,  pars,  vi,  pi.  5,  fig\  4  (1843). 


III. 


21 


/j/16  APPAREIL    DE    LA    CiP.CULATION 

deux  portions  de  cet  organe  ne  se  contractent  pas  tout  à  fait  en 
même  temps  ;  c'est  la  portion  correspondante  de  la  loge  prin- 
cipale, ou  loge  droite,  qui  agit  d'abord,  et  qui  pousse  le  sang 
veineux  dont  elle  est  remplie  dans  les  artères  pulmonaires  aussi 
bien  que  dans  le  système  aortique;  mais,  vers  le  milieu  du 
temps  occupé  par  ce  mouvement,  l'entrée  des  vaisseaux  de  la 
petite  circulation  est  fortement  resserrée  par  la  contraction  de 
fibres  charnues  annulaires  dont  les  artères  pulmonaires  sont 
garnies  à  leur  origine,  et,  par  conséquent,  la  seule  voie  libre  pour 
l'écoulement  du  reste  de  l'ondée  sanguine,  pendant  la  seconde 
moitié  de  la  systole,  est  celle  offerte  par  les  orifices  des  troncs 
aortiques.  Or,  c'est  précisément  alors  que  la  loge  artérielle  du 
ventricule  entre  en  jeu,  et,  en  se  contractant,  déverse  son  con- 
tenu dans  la  loge  principale.  Le  sang  artériel,  dont  elle  était 
gorgée ,  ne  se  mêle  donc  qu'avec  le  reste  du  sang  veineux  con- 
tenu dans  cette  dernière  pompe,  et  ce  mélange,  riche  en  sang 
vermeil,  passe  presque  en  totalité  dans  les  vaisseaux  de  la 
grande  circulation. 

Je  dois  ajouter  que  le  passage  presque  direct  du  sang  veineux 
de  l'oreillette  droite  dans  l'embouchure  du  système  pulmonaire 
est,  en  général,  favorisé  aussi  par  l'existence  d'une  éminence 
charnue  qui  est  terminée  par  un  cartilage  ou  un  petit  os  conique, 
et  située  entre  l'orifice  auriculo-ventriculaire  droit  et  la  loge 
artérieuse  du  ventricule,  de  façon  à  s'opposer  un  peu  au  passage 
du  sang  veineux  de  droite  à  gauche,  et  à  diriger  le  courant  formé 
par  ce  liquide  vers  l'embouchure  des  artères  pulmonaires  (1). 

(1)  Ce  petit  osselet  a  été  découvert  chures  aortiques,  et  sa  pointe  est  en- 
par  Bojanus,  dans  le  cœur  de  la  Tor-  veloppée  clans  un  faisceau  musculo  - 
tue  bourbeuse  (C.  europœa)  ;  il  est  de  tendineux  qui  recouvre  comme  une 
forme  conique  et  un  peu  arqué  (a).  valvule  les  abords  de  l'artère  pulmo- 
Sa  base  est  dirigée  vers  les  embou-  naire  du  côté  gauche. 

(a)  Bojanus,  Anatomia  Testudinîs  europœœ,  pli  29,  figa  170-172. 


CHEZ    LES    REPTILES.  fi  17 

La  direclion  des  divers  orifices  favorise  aussi  ce  mode  de  répar- 
tition du  sang  (1). 

Les  orifices  des  artères  sont,  comme  d'ordinaire,  garnis  de 
valvules  qui  s'écartent  pour  laisser  sortir  le  sang,  et  qui  se  rap- 
prochent quand  le  ventricule  se  dilate. 

§  A.  —  Le  cccur  des  Ophidiens  (2),  au  lieu  d'être  élargi       cœur 

•  >  «  •  -i         des  Ophidiens. 

comme  celui  des  lortues,  est  très  allonge,  mais  du  reste  il  y 
ressemble  beaucoup  par  sa  composition ,  et  il  est  situé  aussi 
très  loin  de  la  tête  (3).  Les  deux  oreillettes  sont  complètement 


(1JM.  Mayer  a  étudié  avec  beaucoup 
de  soin  ces  particularités  de  struc- 
ture chez  la  Testudo  tessellata,  et  y 
attribue  une  influence  très  grande  sur 
la  direclion  des  courants  de  sang  ar- 
tériel vers  les  orifices  de  l'aorte  et  du 
sang  veineux  vers  l'embouchure  des 
vaisseaux  pulmonaires  (a). 

Celte  bande  charnue  se  porte  obli- 
quement du  sommet  de  la  loge  prin- 
cipale du  ventricule  à  la  partie  anté- 
rieure de  sa  paroi  inférieure,  et  tend 
à  diviser  la  cavité  de  cette  loge  en 
deux  portions  dont  l'une  renferme 
l'orifice  de  l'artère  pulmonaire ,  et 
l'autre  les  orifices  aorliques.  Le  rôle 
de  celte  colonne  charnue  dans  le  mé- 
canisme de  la  circulation  a  été  très 
nettement  indiqué  par  Gulhrie  (6). 

(■2)  Les  principaux  travaux  sur  le 


système  circulatoire  des  Serpents  sont 
ceux  de  MM.  Schlemm,  lïetzius,  .Tac- 
quart  et  Briicke  (c).  M.  Martin  Saint- 
Ange  a  donné  aussi  une  figure  de 
l'intérieur  du  cœur  de  la  Couleuvre 
à  collier  (d).  Enfin  ,  tout  récemment, 
M.  Rathke  a  publié  des  observations 
sur  le  cœur  et  les  artères  des  Amphis- 
bènes ,  Reptiles  serpentiformes  que 
Cuvier  rangeait  dans  l'ordre  des  Ophi- 
diens, mais  que  la  plupart  des  zoolo- 
gistes du  jour  considèrent  comme  ap- 
partenant au  groupe  des  Sauriens  (e). 
(3)  Chez  les  Orvets,  le  cœur  est  silué 
très  près  de  la  région  pharyngienne  ; 
mais,  chez  la  plupart  des  Serpents,  il 
est  placé  vers  le  quart  de  la  longueur 
du  corps,  ainsi  que  cela  se  voit  chez 
la  Couleuvre  à  collier  (f)  et  chez  le 
Python  {g). 


(a)  Mayer,  Kreislauf  des  Blutes  bel  den  Amphibien  (Analeeten  fur  verglcichende  Anatomie, 
p.  45,  pi.  G,  fig-.  1). 

(b)  Guthrie,  Obs.  onthe  Strucl.  of  the  Heart  of  llie  Testudo  indica  (Zool.  Journ.,  1829,  t.  IV, 
p.  324). 

(c)  Schlemm,  Analomische  Bcschreibung  des  Blutgefâss-Sgslems  der  Schlangen  (Zeitschr.  fur 
Physiologie  von  Treviranus,  182G,  t.  II,  p.  101,  pi.  7). 

—  Retzius,  Anatomisk  undersvkning  ôfver  nàgra  delar  af  Python  bivillatus  (Mém.  de  l'Acad. 
de  Stockholm,  1829,  p.  81,  et  Isis,  1832,  t.  I,  p.  511). 

—  Jacquart ,  Mémoire  sur  les  organes  de  la  circulation  chez  le  Serpent  Python  {Ann.  des 
sciences  nat.,  1855,  4e  série,  t.  IV,  p.  321,  pi.  9,  10  et  H). 

— .  Briicke,  Op.  cit.  [Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1852,  t.  III,  p.  342. 
((/)  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang,  fig.  20. 

(e)  Rathke,    Uiitersuchitngcn  liber  die  Aortcnwurzeln  der  Saurieu  (Dcnkschrift  der  Akad.  der 
Wissensch.  zu  Wien,  t.  XIII,  1S57). 

(f)  Milnc  Edwards,  Éléments  de  zoologie,  3e  partie,  p.  205,  fi^.  359. 

(g)  Jacquart,  loc.  cit.,  pi.  9,  Gg.  1. 


Z[18  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

séparées  entre  elles,  et  leurs  parois  sont  garnies  intérieurement 
de  piliers  charnus.  Chez  le  Python,  que  je  choisirai  ici  comme 
exemple  principal,  parce  que  l'anatomie  vient  d'en  être  laite 
avec  beaucoup  de  soin  par  M.  Jacquart,  l'un  des  aides  natura- 
listes attachés  au  Muséum,  les  orifices  des  deux  grands  troncs 
veineux  (savoir,  d'un  côté  le  sinus  formé  par  la  veine  jugulaire 
droite  et  la  veine  cave  postérieure,  de  l'autre  la  veine  jugulaire 
gauche)  sont  très  rapprochés,  et  protégés  par  un  appareil  valvu- 
lairc  commun  qui  se  compose  de  deux  voiles  membraneux 
comparables  à  des  paupières  et  séparés  entre  eux  par  une  fente 
allongée.  L'ouverture  qui  conduit  dans  le  ventricule  est  occupée 
par  une  grosse  valvule  semi-circulaire  dont  la  base  se  continue 
avec  le  bord  postérieur  de  la  cloison  interauriculaire  (1). 

L'oreillette  gauche,  à  peu  près  de  moitié  plus  petite  que  la 
précédente,  reçoit  le  sang  du  poumon  par  un  orifice  pratiqué  à 
la  partie  postérieure  de  sa  paroi  supérieure  et  dépourvu  de  val- 
vules. Son  orifice  auriculo-ventriculaire  est  disposé  comme 
celui  de  l'oreillette  droite  (2). 

Le  ventricule  du  cœur  des  Serpents  est  divisé,  comme  celui 
des  Tortues  marines,  en  deux  loges  (3),  par  une  cloison  charnue 

(1)  La  face  postérieure  ou  ventricu-  chaque  orifice  uuc  soupape  semi-lu- 
lairc  de  celte  valvule  est  convave,  et      naire  plus  distincte  (6,\ 

son  bord  libre  est  attaché  aux  parois  (3)  Toute  la  portion   périphérique 

du  ventricule  par  des  piliers  fibreux  de  chacune  de  ces  loges  est  subdivisée 

qui  en  occupent  les  angles  (a).  en  une  multitude  de  petites   cavités 

(2)  La  valvule  auriculo-ventriculaire  accessoires  par  des  trabécules  char- 
gauche  forme  avec  celle  de  droite,  à  nues  ou  tendineuses,  qui  se  réunissent 
laquelle  elle  est  unie  par  sa  base,  une  entre  eux  de  façon  à  constituer  une 
espèce  de  voile  transversal  qui  adhère  sorte  de  trame  irrégulière  ou  de 
au  bord  postérieur  de  la  cloison  inler-  masse  caverneuse.  Cette  disposition 
auriculaire,  et  qui  ressemble  beaucoup  compliquée  a  été  très  bien  mise  en 
à  l'appareil  correspondant,  chez  les  évidence  par  les  préparations  analo- 
Torlucs,  mais  qui    forme   ici,    pour  iniques  de  M.  Briickc  (c). 

(a)  Voyez  Jacquart,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  4°  série,  l.  IV,  pi.  10,  fig'.  7,  n"  0,  et 
fig.  8,  n*  15). 

(6)  Jacquart,  loc.  cit.,  pi.  10,  11-.  11,  et  pi.  11,  fig\  10,  il'  1. 

(c)  Briickc,  Deitrâge  zur  vergleich.  Anal,  und  Physiol.  des  Cefâss-Syslems  (Mém.  de  l'Acad.  de 
Vienne,  1852,  t.  III,  p.  312,  pi.  19,  fiç.  G  et  7). 


CHEZ    LES    REPTILES.  A'10 

incomplète  qui  s'étend  longiludinalement  du  sommet  ou  pointe 
de  cet  organe  vers  sa  base,  et  qui  correspond  à  un  léger  sillon 
visible  à  l'extrémité  (1).  La  loge  artérieuse,  ou  loge  gauche,  est 
très  petite ,  et  n'a  d'autre  orifice  que  l'ouverture  auriculo-ven- 
triculaire  par  laquelle  le  sang  rouge  y  arrive,  et  le  pertuis  prati- 
qué dans  la  cloison  qui  la  sépare  de  la  loge  principale  du  ven- 
tricule. Ce  trou  est  situé  immédiatement  derrière  la  base  des 
deux  valvules  auriculo-ventriculaires,  et  se  trouve  bouché  par 
elles  quand  ces  soupapes  s'abaissent  pour  laisser  entrer  le  sang 
des  oreillettes  dans  le  ventricule  (2). 

La  loge  principale,  ou  loge  droite  du  ventricule,  est  très  spa- 
cieuse, et  sa  cavité  est  incomplètement  subdivisée  en  deux  com- 
partiments, ou  niches,  par  un  pilier  charnu  ou  bourrelet  qui 
adhère  à  sa  paroi  dorsale  et  se  porte  de  son  sommet  vers  l'em- 
bouchure des  troncs  artériels.  L'un  des  compartiments  ainsi 
délimités  est  situé  du  côté  ventral ,  et  présente  à  sa  partie 
antérieure  l'orifice  de  l'artère  pulmonaire ,  disposition  qui  lui 
vaut  le  nom  de  vestibule  ou  sinus  pulmonaire  ;  l'autre  occupe 
la  partie  supérieure  ou  dorsale  du  ventricule  droit,  et  l'on  peut 
l'appeler  le  vestibule  aortique,  parce  qu'il  donne  naissance  aux 
deux  aortes,  dont  les  orifices,  de  même  que  celui  de  l'artère 
pulmonaire,  sont  pourvus  chacun  de  deux  valvules  sigmoïdes. 
Enfin,  il  est  aussi  à  noter  que  l'orifice  de  la  loge  artérieuse  du 

(1)  Celle  cloison  charnue  naît  du  laissé  libre  entre  la  loge  antérieure  du 

fond  de  la  cavité  du  ventricule,  et  se  ventricule  et    la  loge  principale  ou 

porte  vers  la  paroi  antérieure  ou  auri-  veineuse  de  cet  organe.  La  structure 

culaire  de  cette  chambre,  mais  n'y  de  cette  cloison  a  été  décrite  avec 

arrive    pas  complètement ,  et  c'est  beaucoup  de  soin  par  M.  Jacquart.  Un 

l'espace  laissé  entre  son  bord  infé-  sillon  y  correspond  extérieurement  (a), 

rieur  concave  et  la  base  des  deux  \ al-  (2)  MM.    Ilopkinson    et    Pancoast 

vules  auriculo-ventriculaires  adossées  ont  décrit  cette  disposition   chez  le 

l'une  à  l'autre  qui  constitue  le  passage  Python  réticulé  (6). 

(a)  Jacquart,  loc.  cit.,  p.  329,  pi.  10.  fig.  S,  et  pi.  M,  fig.  10. 

(6)  Hopkinson  and  Pancoast,  On  the  Viscéral  Artatomy  of  Vie  Python  (Trans.  of  the  American 
Philosnph.  Society,  1835,  new  série?,  vol.  V,  p.  130). 


/i"20  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

ventricule  est  placé  à  la  partie  antérieure  de  cette  portion  aor- 
tique  de  la  loge  principale,  et  se  trouve,  par  conséquent,  séparé 
de  l'embouchure  de  l'artère  pulmonaire  par  le  bourrelet  charnu 
dont  il  vient  d'être  question  (1). 

Il  résulte  de  ces  dispositions  organiques  qu'au  moment  de  la 
diastole  de  la  portion  ventriculaire  du  cœur  et  de  la  contraction 
des  deux  oreillettes,  le  sang  artériel  venant  des  poumons,  et 
contenu  dans  l'oreillette  gauche,  va  remplir  la  petite  loge  gauche 
du  ventricule,  et  le  sang  veineux  renfermé  dans  l'oreillette 
droite  pénètre  dans  la  loge  ventriculaire  principale.  Puis,  au 
moment  de  la  systole  du  ventricule,  la  portion  du  sang  veineux 
contenu  dans  le  compartiment  inférieur  de  cette  dernière  loge 
s'en  écoule  par  l'orifice  de  l'artère  pulmonaire,  pendant  que  la 
portion  du  même  liquide  contenue  dans  le  vestibule  aortique,  et 
le  sang  artériel  qui  y  arrive  de  la  loge  ventriculaire  gauche  par 
le  pertuis  de  la  cloison,  se  mêlent  et  pénètrent  dans  les  aortes. 
M.  Brùcke  a  remarqué  aussi  que  la  loge  artérieuse  ne  se  vide 
que  pendant  la  seconde  moitié  de  la  systole  ventriculaire,  et  que 
dans  le  même  moment  le  bourrelet  cloisonnairede  la  loge  prin- 
cipale s'applique  contre  l'orifice  de  l'artère  pulmonaire  et 
l'obstrue  |  de  telle  sorte  que  chez  les  Serpents,  de  même  que 
chez  les  Tortues,  le  sang  vermeil,  tout  en  passant  dans  le 
ventricule  où  arrive  aussi  le  sang  veineux,  ne  retourne  pas 
aux  poumons  et  se  rend  dans  les  vaisseaux  de  la  grande  circu- 
lation (9). 

(1)  La  colonne  charnue  qui  consli-  sus  des  orifices  aorliques,  tandis  que 
lue  celte  cloison  incomplète,  ou  boar-  l'orifice  de  l'artère  pulmonaire  est 
relet,  adhère  à  la  paroi  dorsale  du  situé  beaucoup  plus  de  côté  dans  le 
ventricule  par  son  bord  supérieur,  et  compartiment  inférieur  (a). 
son  bord  inférieur,  qui  est  libre ,  fait  (2)  Le  sang,  reçu  par  tous  les  or- 
saillie  entre  les  deux  portions  de  la  gancs,  n'en  est  pas  moins  un  mélange 
loge  principale.  Antérieurement  celte  de  sang  veineux  et  de  sang  artériel  ; 
bande  musculaire  se  termine  au-clcs-  seulement,  à  l'aide  de  la  disposition 

(a)  Voyez  Jacquarl,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  4°  série,  t.  IV,  pi.  10,  fijf.  8). 


CHEZ    LES    REPTILES.  &21 

§  5.  —  Chez  quelques  Sauriens,  la  structure  du  cœur  est  à 
peu  près  la  même  que  dans  les  deux  groupes  dont  je  viens  de 
parler  (1).  Ainsi,  chez  les  Lézards  et  les  Yarans,  le  ventricule 
est  partagé  en  deux  loges  par  une  cloison  plus  ou  moins  com- 
plète, et  la  loge  artérieuse  dans  laquelle  débouche  l'oreillette 
gauche  ne  donne  naissance  à  aucun  vaisseau,  mais  verse  le 
sang  qu'elle  a  reçu  dans  la  loge  principale,  où  se  trouvent  les 
orifices  des  artères  aortiques ,  aussi  bien  que  celui  de  l'artère 
pulmonaire  ;  enfin  des  dispositions  analogues  à  celles  dont  les 
Ophidiens  et  les  Chéloniens  nous  ont  déjà  offert  des  exemples 
tendent  à  y  diriger  le  sang  veineux  plus  particulièrement  vers 
cette  dernière  ouverture ,  tandis  que  le  sang  artériel  se  porte 
de  préférence  vers  les  artères  du  système  aortique  (2). 


Coeur 

des  Sauriens 

ordinaires. 


observée  par  M.  Briicke,  la  totalité  ou 
la  presque  totalité  du  sang  rendu  arlé- 
riel  dans  les  poumons  se  trouve  uti- 
lisée dans  la  circulation  générale,  et 
c'est  du  sang  veineux  presque  pur  qui 
retourne  aux  poumons  (a). 

(!)  Chez  la  plupart  des  Sauriens 
ordinaires,  le  cœur  est  situé  très  près 
du  cou,  au-dessus  de  la  portion  anté- 
rieure du  sternum  ;  mais  chez  le 
Varan  il  se  trouve  plus  en  arrière. 
Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet,  on 
peut  consulter  un  travail  récent  de 
M.  Rathke  (b).  En  général,  le  sommet 
du  ventricule  adhère  au  péricarde  par 
un  filament  court  et  épais.  Chez  le 
Pseudopus  Pallasii ,  on  trouve  une 
quinzaine  de  ces  brides  (c). 

(2)  Chez  le  Varan  (Psammosaurus 
griseus),  le  ventricule  est  divisé  comme 
d'ordinaire  en  deux  loges  inégales, 
dont  l'une,  moins  grande,  mais  plus 


musculaire  que  l'autre,  est  placée  à 
gauche  et  au-dessus  de  celle-ci.  La 
cloison  qui  sépare  ces  deux  cavités 
n'est  percée  qu'en  avant,  immédiate- 
ment derrière  l'orifice  auriculaire 
droit,  et  le  passage  ainsi  ménagé  entre 
les  loges  artérieuse  et  veineuse  du 
ventricule  est  garni  de  brides  char- 
nues ou  tendineuses.  La  loge  arté- 
rieuse, ou  gauche,  présente  au  milieu 
une  cavité  assez  spacieuse  dans  la- 
quelle débouche  l'oreillette  gauche,  et 
tout  autour  des  cavités  accessoires  très 
irrégulières,  ménagées  entre  les  co- 
lonnes et  trabécules  charnues  dont  ses 
parois  sont  garnies  ;  elle  ne  commu- 
nique d'ailleurs  qu'avec  la  loge  vei- 
neuse. Celle-ci  est  plus  grande  que  la 
précédente  et  se  trouve,  comme  d'or- 
dinaire ,  incomplètement  subdivisée 
en  deux  portions  pai'  le  bourrelet  ou 
pilier  musculaire   dont  il  a  été  déjà 


(a)  Briike,  Op.  cit.,  p.  342. 

(b)  H.  Ralhke,  Untevsucluinqen  iiber  die  Aortenwurzeln ,  und  die  von  ihnen  ausgehenden 
Arterien  der  Saurier,  p.  9  (extr.  des  Dcnkschriften  der  Akad.  der  Wissensch.  zu  Wien.,  -1 857, 
t.  XIII). 

(e)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  300. 


/j22  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Chez  le  Caméléon,  la  structure  du  cœur  se  simplifie  môme 
davantage,  et  les  deux  loges  dont  il  vient  d'être  question  se  con- 
fondent (1). 

Mais  chez  d'autres  Sauriens  ordinaires,  tels  que  les  Iguanes, 
la  portion  ventriculaire  du  cœur  présente  un  mode  de  con- 
formation très  différent.  Une  cloison  incomplète,  qui  paraît 
correspondre  à  la  bande  charnue  que  nous  avons  rencontrée 


question  chez  d'autres  Reptiles.  Ce 
pilier,  saillant,  adhère  à  la  cloison 
Interloculaire  et  se  dirige  vers  les 
ouvertures  du  système  artériel  ,  de 
telle  sorte  que  le  compartiment  de 
gauche  où  débouche  la  loge  arté- 
rieusc  renferme  l'orifice  de  l'aorte 
gauche,  et  le  compartiment  de  droite, 
qui  est  de  beaucoup  le  plus  grand, 
contient  l'ouvert ure  auriculo- venlri- 
eulaire droite  et  l'ouverture  de  l'ar- 
tère pulmonaire ,  ainsi  que  celle  du 
tronc  aorlique  droit  (a).  M.  Briïcke, 
à  qui  l'on  doit  une  étude  très  atten- 
tive de  la  structure  du  cœur  de  ce 
Saurien ,  a  reconnu  que,  lors  des 
mouvements  de  diastole  des  ventii- 
cules,  la  loge  gauche  prend  une  teinte 
rouge  clair,  qui  est  due  à  rentrée 
du  sang  artériel,  tandis  que  la  loge 
droite  devient  d'un  rouge  sombre, 
ce  qui  dépend  de  l'abord  du  sang 
noir  venant  de  l'oreillette  droite.  Le 
sang  qui  s'engage  dans  l'artère  pul- 
monaire est  aussi  d'une  teinte  foncée, 
tandis  que  dans  les  aortes  ce  liquide 
est  plus  vermeil.  J'ajouterai  que 
1\1.  Corli,  dans  sa  Monographie  analo- 
mique  du  Psammosaure,  Reptile  de  la 
famille  des  Varaniens,  désigne  la  por- 


tion inférieure  ou  veineuse  de  la  loge 
droite  ,  sous  le  nom  de  ventricule 
droit,  et  appelle  spatium  interventr.i- 
culare  le  sinus  ou  compartiment  arté- 
riel qui  est  en  communication  directe 
avec  la  loge  gauche  ou  loge  artérieuse, 
à  laquelle  cet  analomisle  applique  le 
nom  de  ventricule  gauche  (6). 

Le  cœur  du  Fouette-queue  d'Egypte 
(Uromastix)  ressemble  à  celui  des 
Varans  (c). 

Chez  les  Lézards,  la  cloison  inter- 
loculaire du  ventricule  est  moins  déve- 
loppée et  paraît  offrir  plusieurs  permis, 
indépendamment  de  la  grande  ouver- 
ture située  à  sa  partie  antérieure,  près 
des  orifices  auriculo-venlriculaires.  Il 
est  aussi  à  noter  que  le  bord  supérieur 
de  l'appareil  valvulaire  dont  ces  der- 
niers orifices  sont  garnis,  se  prolonge 
contre  une  partie  saillante  des  parois 
du  ventricule,  de  façon  à  constituer 
une  espèce  de  gouttière  transversale, 
destinée  à  conduire  le  sang  artériel  de 
la  loge  gauche  dans  la  loge  principale 
du  ventricule  (c/). 

Le  même  mode  d'organisation  pa- 
raît exister  chez  le  Oecko  (lJlatydac- 
tylus  guttalus)  et  le  Bibes  Pallasii. 

(lj  Duvernoy  a  constaté  que  chez  le 


{a)  Voyez  Brikko,  Deitrcige  z-ur  vergleicltenden  Anatomie  und  Physiologie  des  Gefass-Systems, 
g  c,  EiJcchseii  (tlém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  111,  p.  344  et  suiv.,  [il    5,  fi^.  8). 

(b)  Cor:i,.De  systemate  vascrum  Ptammosaîiri  grisei,  p.  13  et  suiv.  Vienne,  1847. 

(c)  Brikkn,  O/j   cit.,  p.  3(9. 

(d)  Duvernoy,  Leçons  d' anatomie  comparée  de  Cu\iir,  2'  éilil.,  I   VI,  p.  320. 
—  Miii'IÏH  Sain:-Angp,  Circulation   fi-'.  ï>-2. 


CHEZ    LES    REPTILES. 


Û23 


dans  l'intérieur  tic  la  loge  veineuse  du  cœur  du  Python  et  de 
beaucoup  d'autres  Reptiles,  se  développe  de  façon  à  diviser 
cette  cavité  en  deux  chambres,  qui  ont  chacune  non-seulement 
une  entrée  auriculaire, mais  une  sortie  dans  le  système  artériel. 
Ce  sont,  par  conséquent,  deux  ventricules;  celui  de  gauche,  il  est 
vrai,  n'est  que  peu  développé,  et  semble  être  seulement  une 
dépendance  de  l'autre,  mais  il  donne  naissance  à  l'aorte  gauche. 
Le  ventricule  droit,  dans  lequel  débouche  l'oreillette  veineuse, 
loge  l'orifice  de  l'autre  crosse  aortique,  ainsi  que  l'orifice  de 
l'artère  pulmonaire  (1). 

Le  cours  du  sang  vermeil  qui  arrive  des  poumons  peut  donc 
se  continuer  jusque  dans  le  système  artériel  aortique  par  l'inter- 
médiaire de  ce  ventricule  gauche  de  nouvelle  création,  pendant 
que  le  sang  noir  versé  dans  l'oreillette  droite  par  l'ensembledes 
veines  du  corps  traverse  le  ventricule  droit  pour  se  rendre,  en 
partie  au  moins,  dans  l'artère  pulmonaire.  Mais  le  mélange  du 
sang  veineux  et  du  sang  artériel  a  encore  lieu,  d'abord  dans 
l'intérieur  du  cœur,  puis  dans  le  système  irrigatoire-,  car  la  cloi- 
son interventriculaire  est  largement  perforée,  et  les  deux  crosses 
aorliques  qui  naissent,  l'une  du  ventricule  artériel,  l'autre  du 
ventricule  veineux,  se  réunissent  bientôt  pour  constituer  la 
grande  artère  longitudinale  du  corps  ou  aorte  dorsale,  et,  par 
conséquent,  les  deux  courants,  dont  les  points  de  départ  sont 
différents,  ne  tardent  pas  à  se  confondre. 

Caméléon  ordinaire  le  ventricule  pré-  sans  que  lescompaitimenls  ainsi  for- 
sente  en  avant  un  enfoncement  circu-  mes  puissent  être  comparés  aux  loges 
laire  qui  est  commun  aux  orifices  des  distinctes  du  cœur  des  Lézards.  Il  est 
deux  oreillettes,  et  plus  à  gauche  un  aussi  à  noter  que  les  parois  du  ven- 
autre  enfoncement  où  se  trouvent  les  triculc  ont  une  structure  très  caver- 
embouchures  des  artères  aorliques  et  neuse  (a). 

pulmonaires.  La  cavité  du  ventricule  (1)  Voy.  Cuvier,  Anal,  comp.,  t.  VI, 

se  bifurque  à  droite  et  ù  gauche,  mais  p.  321. 

(a)  Duvcrnoy,  Leçons  d'àtiatomie  comparée  do  Cimier,  2"  cdil.,  t.  VI,  p.  321. 


k^ll  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

cœur  §  6.  —  Enfin  ,  dans  la  famille  des  Crocodiliens  (1),  la  divi- 

des 

crocodiliens.  sion  du  travail  fait  un  pas  de  plus;  la  cloison  interventricu- 
laire  se  complète,  et  les  deux  ventricules  se  trouvent  entièrement 
séparés  l'un  de  l'autre.  L'oreillette  droite,  parfaitement  distincte 
de  la  gauche ,  recouvre  en  dessous  la  base  du  ventricule,  et 
reçoit  les  grosses  veines  du  corps  par  un  orifice  pratiqué  à  sa 
paroi  supérieure  et  pourvu  de  valvules,  à  peu  près  comme  chez 
les  Tortues  et  les  autres  Reptiles.  Le  ventricule  droit,  situé 
auprès,  a  des  parois  charnues  très  épaisses,  et  reçoit  le  sang 
veineux  de  l'oreillette  par  une  large  ouverture  dont  les  bords 
sont  garnis  de  valvules.  Enfin,  à  sa  partie  antérieure,  ce  ven- 
tricule présente  deux  autres  orifices  qui  sont  très  rapprochés 
et  garnis  également  de  valvules  :  l'un  appartient  à  l'artère  pul- 
monaire et  se  trouve  au  fond  d'un  petit  sinus  (2),  l'autre  est 
l'entrée  de  la  crosse  aortique  droite.  L'oreillette  gauche,  beau- 
coup moins  développée  que  sa  congénère  et  logée  en  majeure 
partie  au-dessus  des  gros  vaisseaux  du  cœur,  reçoit  par  sa 
partie  antérieure  et  interne  les  veines  pulmonaires,  et  le  sang- 
artériel  qui  arrive  ainsi  dans  sa  cavité  passe  ensuite  dans  le 
ventricule  gauche.  Celui-ci  est  situé  au-dessus  du  ventricule 
droit;  son  orifice  auriculaire  est  pourvu  de  valvules,  comme 
d'ordinaire,  et  à  sa  partie  antérieure  cette  chambre  artérieuse 
donne  naissance  à  la  seconde  crosse  aortique.  il  n'existe  aucun 
passage  direct  entre  les  deux  ventricules,  et  par  conséquent  le 
sang  veineux  qui  arrive  des  deux  parties  du  corps,  et  le  sang 
artériel  qui  vient  des  poumons,  ne  se  mêlent  pas  dans  le  cœur, 
ainsi  que  cela  a  lieu  chez  les  autres  Reptiles;  mais  ce  mélange 
ne  tarde  pas  à  s'effectuer  dans  les  gros  troncs  artériels,  à  l'aide 

(1)  Le  cœur  de  ces  Reptiles  est  logé  (2)  C'est  ce  sinus,  situé  à  la  partie 

en  partie  entre  les  deux  lobes  du  foie,  moyenne  de  la  base  du  cœur,  qui  a  été 

et  se  trouve  plus  loin  de  la  lète  que  considéré  comme  une  troisième  loge 

chez  les  autres  Sauriens.  par  Cuvier  (a). 

(a)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  1"  édit.,  t.  IV,  p.  221  (1805). 


CHEZ    LES    REPTILES.  425 

d'une  disposition  anatomique  fort  simple  :  savoir,  d'une  part,  communication 
l'établissement  d'une  communication  directe  entre  les  deux  les  deufcrosses 
crosses  aortiques,  au  moment  même  de  leur  sortie  du  cœur,  et, 
un  peu  plus  loin,  la  réunion  de  ces  deux  vaisseaux  en  un  tronc 
unique  (1). 


(1)  La  structure  du  cœur  et  de  ses 
dépendances  n'était  pas  bien  connue 
de  Cuvier,  qui  admettait  l'existence  de 
pertuis  conduisant  d'un  ventricule  à 
l'autre,  et  qui  a  cru  devoir  distinguer 
trois  loges  ventrieulaires  (a).  En  1824, 
une  très  bonne  description  en  fut 
donnée  par  un  analomiste  américain 
peu  connu,  Hentz  (b),  et  les  observa- 
tions de  celui-ci  furent  confirmées  par 
ïlarlan  (c)  ;  mais  quelques  années 
après,  M.  Martin  Saint-Ange,  tout  en 
arrivant  au  même  résultat  en  ce  qui 
concerne  la  non  -  perforation  de  la 
cloison  interventriculaire,  méconnut 
l'existence  de  l'orifice  de  communi- 
cation entre  la  base  des  deux  troncs 
aortiques,  et  donna  de  la  sorte  une 
idée  fausse  du  mode  de  circulation  du 
sang  chez  ces  Reptiles  (c/).  Cette  erreur 
fut  relevée  d'abord  par  Panizza  (e), 
puis  par  M.  Mayer  et  par  quelques 


autres  naturalistes  (/").  Aujourd'hui, 
on  est  généralement  d'accord  sur  ce 
point  d'anatomie  physiologique ,  et 
tous  les  auteurs  les  plus  récents  dé- 
crivent le  cœur  des  Crocodiliens  à  peu 
près  comme  l'avait  fait  Hentz,  il  y  a 
plus  de  trente  ans.  11  est  aussi  à  noter 
que  Duvernoy,  tout  en  confirmant  les 
observations  de  ses  prédécesseurs , 
quant  à  l'existence  de  l'orifice  ana- 
stomolique  ,  dit  for  amen  Panizzœ  , 
avait  supposé  que  cette  ouverture  se 
rétrécissait  et  s'oblitérait  même  com- 
plètement par  les  progrès  de  l'âge  (g)  ; 
mais  M.  Poey  a  constaté  qu'il  en  est 
tout  autrement  (h).  Plus  récemment, 
la  persistance  du  trou  de  t'anizza  et 
l'absence  de  perforations  dans  la  cloi- 
son interventriculaire  ont  été  consta- 
tées aussi  chez  un  nombre  considé- 
rable de  Caïmans  et  de  Crocodiles 
adultes  par  M.  Crisp  {i). 


(a)  Cuvier,  Leçons  d' 'analomie  comparée,  t.  IV,  p.  221  (1805). 

(b)  N.  M.  Hentz,  Some  Observations  ok  the  Anatomy  and  Physiulogy  of  the  Alligator  ofNorth 
America.  Communicated  to  the  American  Philosophical  Society  in  1820  {Transactions  of  the 
American  Philosophical  Society,  1825,  new  séries,  vol.  II,  p.  210,  pi.  2). 

(c)  Letter  from  D'  Harlan  to  N.  M.  Hentz,  containing  some  further  Observations  on  the  Phy- 
siology  of  the  Alligator  (Trans.  of  the  Amer.  Philos-.  Soc.,  \ol.  II,  p.  226). 

(d)  Martin  Saint- Ange,  Circulation  du  sang  considérée  chez  le  foetus  de  l'Homme,  et  comparati- 
vement dans  les  quatre  classes  des  Vertébrés,  lilhogr.  in-ïbl. 

(c)  Panizza,  Soprail  sistema  linfalico  dei  Rettili  (Ricerche  zoolomiche,  p.  12,  Pavie,  1833). 
(/■)  Mayer,  Analecten  fur  vergleichende  Anatomie,  1835,  p.  45. 

—  Bischoff,  l'eber  den  Bau  des  Crocodil-Herzens ,  besonders  von  Crocodilus  Lucius  (Mùiler's 
Archivfùr  Anat.  und  Physiol.,  1836,  p.  1,  pi.  1). 

—  Van  der  Hoeven  ,  Over  het  Hart  der  KrokodiUen  (Tijdschrift  voor  natuurlijke  Geschiedenis 
en  Physiologie,  1839,  t.  VI,  p.  151). 

—  Briicke,  Op.  cit.  (Mêiti.  de  Vienne,  t.  III,  p.  350). 

(g)  Duvernoy,  Note  sur  la  structure  du  cœur  des  Crocodiliens  (Journal  de  l'Institut,  1838, 
p.  233,  et  Leçons  d'anat  comp.  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  317). 

(h)  Poey,  Circulation  del  Crocodilo  (Memorias  sobra  la  historia  natural  de  la  isla  de  Cuba, 
t.  I,  p.  158,  pi.  23,  et  Append.,  p.  435,1853). 

{i)  Crisp,  On  the  Heart  of  Reptiles  [Médical  Times,  1855,  l.  X,  p.  321). 


des 

ordinaires. 


/i'2G  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Pour  bien  saisir  les  conséquences  de  ces  anastomoses,  il  est 
nécessaire  de  connaître  la  disposition  du  système  artériel  de  ces 
Animaux. 
crosses  §  7.  —  Chez  la  plupart  des  Reptiles,  le  système  artériel 
a°Sricns  présente  à  sa  sortie  du  cœur  une  disposition  analogue  à  celle 
que  nous  avons  déjà  vue  chez  les  Batraciens  et  les  Poissons  , 
mais  qui  s'éloigne  davantage  de  la  forme  primitive  qui  est  com- 
mune à  l'embryon  de  tous  ces  Vertébrés.  Toujours  les  crosses 
aortiques  sont  paires  et  forment  une  sorte  d'anneau  vasculaire 
autour  de  l'œsophage  ;  mais  la  symétrie  de  ces  arcs  artériels 
est  moins  complète,  et  la  moitié  droite  de  cette  portion  du  sys- 
tème tend  à  acquérir  une  importance  de  plus  en  plus  grande. 

Quelquefois,  chez  les  Scinques,  par  exemple,  on  reconnaît 
encore  bien  distinctement  trois  paires  d'arcs  vasculaires  qui 
sont  conformés  à  peu  près  de  même  que  chez  les  Batraciens, 
et  dont  la  première  paire  constitue  les  artères  carotides,  et  les 
secondes  les  deux  crosses  de  l'aorte,  tandis  que  les  troisièmes 
forment  les  artères  pulmonaires  (1). 

Chez  les  Lézards ,  les  transformations  des  arcs  vasculaires 
sont  portées  plus  loin,  et  par  suite  de  divers  changements  dont 
il  est  facile  de  se  rendre  compte  lorsqu'on  étudie  le  mode  de 
développement  du  système  circulatoire  de  ces  Animaux,  non- 
seulement  les  deux  crosses  aortiques  sont  dès  leur  naissance 
distinctes  du  tronc  commun  des  artères  pulmonaires,  mais  la 
symétrie  de  ces  vaisseaux  se  perd  en  partie.  L'une  des  crosses 

(I)  Chez  les  Scinques,  le  système  trois  branches  recourbées  en   forme 

artériel   ressemble  beaucoup  à  celui  d'arcs  ou  de  crosses    :  la  première 

des   Batraciens    Anoures.    En    effet,  paire  de  ces  arcs  vasculaires  constitue 

M.  de  Natale  a  trouvé  que  chez  ces  les  artères  carotides;  la  seconde  paire 

Sauriens  le   cœur    fournit  en  avant  forme  les  crosses  ou  racines  de  l'aorte 

deux  troncs  qui  se  dirigent  en  avant  dorsale  ,   et  la   troisième  fournit  les 

et  en  dehors,  l'un  à  droite,  l'autre  à  artères     pulmonaires  ,   ainsi    qu'une 

gauche,  et  qui  se  divisent  chacun  en  paire  d'artères  musculo-cutanécs  [a). 

(a)  G.  de  Natale,  Uicerche  anatomlclie  sullo  Scincovariegato,  1852,  p.  38,  pi.  i,  fi£.  9  (extr, 
des  Mém.  de  VAcad.  de  Turin,  2*  série,  t.  XIII]. 


CHEZ    LES    REPTILES.  A27 

aortiques  ,  celle  qui  se  recourbe  à  gauche  ,  reste  simple  et  ne 
donne  naissance  à  aucune  branche,  tandis  que  l'autre,  située 
à  droite,  fournit  tout  le  système  artériel  de  la  tête  et  de  la  por- 
tion antérieure  du  corps.  Néanmoins  les  arcs  carotidiens  con- 
servent leurs  relations  primitives  avec  la  portion  dorsale  ou 
récurrente  des  crosses  aortiques,  et  contribuent  aussi  à  la  for- 
mation de  l'aorte  dorsale  ;  de  sorte  que  ce  dernier  vaisseau  a  en 
réalité  quatre  racines,  et  qu'on  voit  de  chaque  côté  du  cou  deux 
crosses  aortiques  qui  se  confondent  supérieurement,  savoir,  une 
crosse  principale  ou  postérieure,  et  une  crosse  accessoire  ou 
antérieure  dont  nait  la  carotide  correspondante  (1). 


(1)  M.  Rathke  vient  de  publier  un 
travail  très  approfondi  sur  la  disposi- 
tion et  le  mode  de  formation  de  cette 
portion  du  système  aortique  chez  le 
Lézard  et  un  grand  nombre  d'autres 
Sauriens  (a). 

Chez  l'embryon  du  Lézard, de  même 
que  chez  le  têtard  du  Batracien  ,  il 
part  du  cœur  trois  paires  d'arcs  vas- 
culaircs  qui,  après  avoir  contourné  les 
côtés  du  cou,  se  réunissent  pour  con- 
stiper les  deux  racines  de  l'aorte  dor- 
sale (6).  Les  arcs  de  la  paire  posté- 
rieure donnent  naissance  aux  artères 
pulmonaires  ,  et ,  par  les  progrès  du 
développement,  leur  portion  termi- 
nale, qui  allait  déboucher  dans  l'aorte 
dorsale,  se  flétrit  et  disparaît  ;  de  façon 
qu'ils  cessent  d'avoir  la  forme  de 
crosses,  et  que  l'aorte  dorsale  ne  con- 
serve de  chaque  côté  que  deux  ra- 
cines formées,  l'une  par  l'arc  de  la  se- 
conde paire,  ou  arc  principal,  et  l'autre 
par    l'arc  antérieur,  ou   arc   caroli- 


dien.  Enfin,  la  concentration  delà  por- 
tion inférieure  ou  cardiaque  de  ces 
quatre  crosses  amène  dans  leur  dis- 
position une  autre  modification  im- 
portante ,  car  celles  de  la  première 
paire  se  confondent  à  leur  base  avec 
la  deuxième  crosse  du  côté  droit,  de 
manière  à  en  devenir  des  dépen- 
dances. 

Il  en  résulte  que  chez  le  Lézard 
adulte  il  ne  part  du  cœur  que  deux 
crosses  aortiques,  et  que  celle  du  côté 
gauche  reste  simple  et  ne  produit  au- 
cune branche  ,  tandis  que  celle  du 
côté  droit  donne  presque  immédiate- 
ment naissance  à  une  paire  de  crosses 
carolidiennes  ou  crosses  antérieures, 
lesquelles,  après  avoir  fourni  les  caro- 
tides et  quelques  autres  rameaux  cer- 
vicaux, se  recourbent  en  arrière  et  en 
haut  pour  aller  se  joindre  aux  crosses 
aortiques  principales  et  concourir  à  la 
formation  de  l'aorte  dorsale  (c). 
La  disposition  de  ces  vaisseaux  est 


{a)  Ratlikc,  Unlcrsuchungen  ùber  die  Aartenwurzeln  und  die  von  ihnen  ausgehenden  Arlerien 
der  Saurier,  1857  (extr.  des  tlém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  XIII). 

(b)  Ratlikc,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  5,  0  cl  7. 

(c)  Ilvril,  Dcob.  aus  dem  Gebiethe  der  vergl.  Gefâsslehre  medicin.   Jahresb.  des   Oesterreich. 
Slaatcs,  1838,  1.  XXIV,  pi.  3,  flg.  2. 

—  Ralhkc,   Op.  cit.,  pi.  2,  fi-.  4. 


/j28  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Chez  d'autres  Sauriens  ,  cette  portion  du  système  artériel 
éprouve,  par  les  progrès  du  développement,  des  changements 
plus  grands ,  et  chez  l'Animal  adulte  on  ne  trouve  de  chaque 
côté  du  cou  qu'une  seule  crosse  au  lieu  de  deux.  En  effet: ,  la 
partie  récurrente  et  terminale  des  ares  carotidiens  s'atrophie  et 
disparaît,  de  façon  que  la  branche  anastomotique,  qui,  chez  le 
Lézard,  s'étend  de  la  base  de  chaque  carotide  primitive  à  la 
racine  aortique  et  complète  en  dessus  la  crosse  accessoire , 
n'existe  plus.  Ce  mode  d'organisation  se  voit  chez  le  Caméléon 
d'Afrique  et  chez  les  Monitors  ou  Varans.  Chez  les  Ophidiens 
proprement  dits ,  les  arcs  vasculaires  de  la  pénultième  paire 
sont  aussi  les  seuls  qui  concourent  à  la  formation  de  l'aorte 
dorsale,  et,  par  conséquent,  de  même  que  chez  les  Chéloniens, 
il  n'y  a  de  chaque  côté  qu'une  crosse  aortique  simple  (1). 


àpeuprèslamêmechezleStellion(a),  mesure  que  le  travail  organogénique 

le  GTecko  (6),  l'Iguane  (c),  le  Lyriocé-  s'avance,  chacune  de  ces  paires  d'arcs 

phalc  (cl),  l'Ameiva  (e),  elc.  tend  à  s'isoler  par  sa  base  et  à  consti- 

II  est  aussi  à  noter  que  tons  ces  tuer,  aux  dépens  du  tronc  commun, 

vaisseaux,  à  leur  sortie  du  cœur,  sont  un  vaisseau  particulier  qui  est  pourvu 

unis  entre  eux  par  du  tissu  fibreux,  de  d'un  orifice  distinct  dans  le  ventricule, 

façon  qu'au  premier  abord  ils  ne  pa-  Les  crosses  de  la  troisième  paire  for- 

raissent  former  qu'un  seul  tronc  ;  dis-  ment  ainsi  l'artère  pulmonaire  et  ses 

position  qui  en  a  imposé  à  quelques  deux  branches.  Mais  la  division  qui 

anatomisles.  s'établit  entre  la  portion  moyenne  et 

(1) On  voit,  parles  belles  recherches  la  portion  antérieure  du  tronc  vascu- 

de  M.  lîathke  sur  le  développement  de  laire  commun  des  crosses,  et  qui  com- 

la  Couleuvre,  que  chez  ces  Animaux  le  mence  au-devant  des    arcs   de    la 

système  aortique  se  compose  d'abord,  seconde  paire,  se  dirige  obliquement, 

comme  chez  les  autres  Reptiles,  de  de  façon  à  passer  entre  l'origine  de 

trois  paires  d'arcs  vasculaires  qui  se  ces  deux   vaisseaux  et  à  laisser  au- 

réunissent  latéralement  pour  donner  devant  d'elle  le  point  de  naissance  de 

naissance  aux  racines  de  l'aorte.  A  l'arc  droit,  tandis  qu'elle  isole  l'orifice 


(a)  Voyez  Blanchard,  Organisation  du  Règne  animal,  Reptiles,  pi.  49  (t85G). 

(b)  Dclle  Clriajc,  Dissertazioni  sull'  anatomia  umana ,  comparata  e  patologica ,  t.  I,  pi.  il, 
%•  1- 

(c)  Carus,  Tabulœ  Anatomiam  comparativam  illustrantes,  pars  vi,  pi.  5,  fig;  5.  " 

(d)  Rallikc,  Op.  cit.,  pi.  2,  flg-,  3. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  \ ,  %.  6. 


CHEZ    LES    REPTILES.  ^"29 

§  S.  —  Chez  les  Crocodiliens ,  des  changements  analogues 
ont  lieu  dans  la  série  des  arcs  vasculaires  primitifs,  et  amènent 
un  mode  de  groupement  analogue  des  gros  troncs  artériels  ; 
mais  il  s'opère  en  même  temps  un  mouvement  de  torsion  plus 
complet  dans  le  faisceau  de  tubes  qui  naît  ainsi  du  cœur,  et  il 
en  résulte  que  l'orifice  de  la  crosse  aortique  gauche  se  trouve, 
ainsi  que  l'orifice  de  l'artère  pulmonaire,  dans  le  ventricule 
droit,  tandis  que  l'orifice  de  la  crosse  droite  se  trouve  dans  le 
ventricule  gauche.  A  raison  de  la  division  complète  de  la  por- 
tion ventriculaire  du  cœur  en  deux  cavités  distinctes,  ces  deux 
moitiés  du  système  aortique  deviennent  par  conséquent  tout  à 
fait  isolées  l'une  de  l'autre  ;  mais  si  leur  individualisation  se 
prononce  davantage  sous  ce  rapport ,  elle  devient  moins  com- 
plète au  dehors  du  cœur.  En  effet,  la  cloison  qui  sépare  la 


Crosses 

aorliqucs 

des 

Crocodiliens 


de  l'arc  gauche,  et,  en  s'avançant  vers 
le  cœur,  prolonge  cette  branche  arté- 
rielle jusque  dans  le  ventricule.  Il  en 
résulte  que  le  troisième  canal  longi- 
tudinal basilaire  résultant  de  ces  cloi- 
sonnements appartient  en  commun  à 
la  crosse  moyenne  droite  et  aux  deux 
crosses  antérieures.  Puis  la  portion 
terminale  de  ces  derniers  arcs  vascu- 
laires ,  située  au  delà  de  l'origine 
des  branches  qu'ils  fournissent  à  la 
tète,  s'atrophie,  et  ces  vaisseaux,  qui 
étaient  primitivement  les  racines  an- 
térieures de  l'aorte  dorsale,  cessent 
de  communiquer  avec  ce  tronc,  de- 
viennent seulement  les  artères  caro- 
tides et  se  présentent  sous  la  forme  de 
branches  dépendantes  de  la  crosse 
aortique  du  côté  droit.  Enfin  les  ana- 
stomoses des  arcs  de  la  troisième  paire 
avec  le  tronc  aortique  dorsal  s'obli- 


tèrent et  disparaissent  également,  de 
façon  que  les  racines  de  cetie  aorte 
ne  se  trouvent  plus  composées  que  de 
deux  crosses  correspondantes  aux  arcs 
vasculaires  moyens  (a). 

Ce  mode  d'organisation  ne  se  voit 
pas  chez  tous  les  Reptiles  que  Cuvier 
rangeait  dans  l'ordre  des  Ophidiens  , 
et  sous  ce  rapport,  comme  dans  beau- 
coup d'autres,  les  Angdis  ne  diffèrent 
pas  notablement  des  Lézards;  aussi 
est- on  assez  généralement  d'accord 
aujourd'hui  pour  les  considérer  comme 
des  Sauriens  serpentiformes  ,  et  les 
désigner  sous  les  noms  de  Saurophi- 
diens  ou  de  Cyclosaures  (b).  Effec- 
tivement ,  chez  le  Scheltopusik  ou 
Psodopus  Pallasii ,  il  y  a  de  chaque 
côté  deux  crosses  qui  sont  presque  de 
même  grosseur,  qui  se  réunissent 
pour  former  la  racine  aortique  corres- 


(a)  Voyez  Rathkc  ,  Enliuickelungsgesehichte  der  Natter ,1339 ,  p.  100  et  suiv.,  pi.  4,  n>.  13 
et  14, 

(6)  Voyez  Dume'ril  etBibron,  Erpétologie,  t.  V,  p.  318, 


koO  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

portion  basilaire  des  deux  crosses  aortiques  ne  s'étend  pas  tout 
à  fait  jusqu'à  l'embouchure  de  ces  vaisseaux  dans  les  ventri- 
cules, et  laisse  un  espace  libre  appelé  foramen  Panizzœ, 
ou  pertuis  aortiqae,  par  lequel,  ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit ,  ils 
communiquent  entre  eux  (1). 

C'est  de  la  sorte  que  se  trouve  réalisée  la  double  disposition 
qui  maintient,  chez  les  Crocodiliens,  le  caractère  général  du 
mode  de  circulation  commun  à  tous  les  Reptiles,  bien  que  le 


pondante.  La  crosse  postérieure  est  la 
crosse  aorliquc  proprement  dite  ,  et 
c'est  de  la  convexité  de  la  crosse  an- 
térieure que  naît  la  carotide  (a). 

Chez  VÀcontias  Meleagris  et  PO- 
phisanrus  ventralis ,  l'anse  formée 
par  Parc  carolidien  s'allonge  et  de- 
vient un  peu  plus  grêle  (6). 

Chez  les  Sauriens  ,  il  y  a  des  pas- 
sages entre  les  deux  formes  extrêmes 
mentionnées  ci-dessus,  et,  chez  quel- 
ques-uns de  ces  Reptiles,  l'oblitération 
de  la  branche  anaslomotique  qui  relie 
Parc  carotidien  à  la  crosse  aorliquc  ne 
paraît  s'effectuer  que  très  tardivement. 
Ainsi,  chez  le  Caméléon  d'Afrique, 
comme  je  l'ai  déjà  dit ,  on  ne  trouve 
aucune  trace  de  celte  portion  dorsale 
de  la  crosse  carotidienne  (c)  ;  mais, 
chez  une  autre  espèce  du  même  genre 
(le  Chamœleon  planiceps),  il  existe  une 
branche  anastomotique  excessivement 
grêle  qui  unit  la   portion  antérieure 


de  cet  arc  vasculaire  à  la  racine  de 
l'aorte  (&. 

Chez  Vlsliurus.amboinensis  et  le 
Basilicus  mitratus ,  celte  branche 
anastomotique  est  très  grêle  (e) ,  et 
chez  le  Sauvegarde  (Podinema  ou 
Tejus  teguixin)  elle  s'oblitère  par  les 
progrès  de  l'âge  (/")• 

Chez  les  Psammosaurus  griseus  (g), 
ainsi  que  chez  le  Varanus  bivitta- 
lus  (h],  le  V.  niloticus  et  le  V.  or- 
natus ,  cette  branche  anastomotique 
manque  complètement,  de  même  que 
chez  les  Crocodiliens. 

(1)  C'est  parce  que  l'on  attribuait 
généralement  la  découverte  de  ce  per- 
tuis à  Panizza,  que  M.  Briicke  a  donné 
au  passage  interaortique  le  nom  de 
cet  anatomiste.  Mais  cette  découverte 
appartient  en  réalité  à  Ilentz  (i),  et 
par  conséquent  je  préférerai  appeler 
cet  orifice  anastomotique  le  pertuis 
aortique. 


(a)  Barkow,  Zootomische  Deobachtungen,  1851,  p.  27,  fig.  13. 

—  Ralhkc,  Unters.  ûber  die  Aortenivurzeln,  pi.  1,  fig.  5  [Acad.  de  Vienne,  1857,  t.  XIII). 
(6)  Rathkc,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig-.  1  et  2. 

(c)  Délie  Çhiajc,  Op.  cit.,  t.  I,  pi.  22,  fig.  10. 

—  Rathk'è,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  10. 

(d)  Idem,  ibid.,  p.  27,  pi.  2,  fig.  0. 
(c)  Idem,  ibid.,  pi.  2,  fig.  8. 

(f)  Briicke,  Bcitr.  xttr  vergl.  Anal,  und  Physiol.  des  Cefâss-Syslcms  (Denkschriflcn  der  Akad. 
der  Wissensch.  xu  Wien,  1852,  1. 111,  p.  350). 

(</)  Corii,  De  systemate  vasorum  Psammosauri  grisei,  pi.  1,  fig.  1. 
(/i)  Rallike,  Op.  cit  ;  p    30 ,  pi.  3,  fig.  1. 
{i}  Voyez  ci-ilcssus,  page  425. 


CHEZ    LES    REPTILES.  /loi 

cœur  de  ces  Sauriens,  au  lieu  de  n'offrir,  comme  d'ordinaire, 
qu'un  seul  ventricule  ,  soit  divisé  en  deux  portions  parfaite- 
ment distinctes  :  l'une  pour  le  sang-  artériel ,  l'autre  pour  le 
sang  veineux.  En  effet ,  chez  les  Crocodiliens,  le  sang  rouge 
venant  des  poumons  ne  se  mêle  pas  au  sang  noir  dans  l'inté- 
rieur du  cœur  et  passe  tout  entier  du  ventricule  gauche  dans 
la  crosse  aortique  du  côté  droit,  tandis  que  le  sang  veineux, 
versé  dans  le  ventricule  droit,  s'écoule  en  partie  dans  l'artère 
pulmonaire  et  en  partie  dans  la  crosse  aortique  du  coté  gauche. 
Mais  avant  même  que  la  crosse  aortique,  traversée  ainsi  par 
le  courant  du  sang  artériel  ,  ait  fourni  aucune  branche  de 
distribution,  le  mélange  de  ce  sang  avec  le  sang  noir  de  l'autre 
crosse  commence  à  s'effectuer  à  l'aide  du  passage  que  forme 
le  pertuis  de  Panizza,  et  plus  loin  ce  mélange  s'achève  lorsque 
les  deux  crosses  s'anastomosent  dans  l'abdomen  pour  consti- 
tuer l'aorte  dorsale  (1). 


(1)  Les  naturalistes  sont  partagés 
d'opinion  relativement  au  rôle  du 
pertuis  aortique.  Hentz  pensait  qu'à 
raison  de  la  disposition  des  parties 
voisines,  cet  orifice  ne  devait  livrer 
passage  qu'à  très  peu  de  sang,  quand 
le  Crocodile  respire  librement;  mais 
que  la  gène  produite  dans  la  circula- 
tion pulmonaire,  par  la  suspension  de 
la  respiration,  devait  déterminer  l'é- 
coulement d'une  portion  du  sang  vei- 
neux dans  la  crosse  aortique,  par  cette 
voie,  quand  l'animal  reste  sousl'eau(a). 
M.  Bischoiï  a  émis  une  opinion  analo- 
gue (6)  ;  mais,  ainsi  que  le  fait  remar- 
quer M.  tfriïcke ,  rien  ne  nous  auto- 
rise à  admettre  que  la  suspension  des 


mouvements  respiratoires  entraîne 
l'interruption  de  lacirculationdans  les 
vaisseaux  du  poumon  (c),  et  il  est  plus 
probable  que  dans  tous  les  cas  un 
mélange  partiel  des  deux  courants  se 
fait  à  travers  ce  pertuis.  Il  est,  du 
reste,  à  noter  qu'à  raison  du  voisinage 
des  valvules  dont  l'orifice  de.  chaque 
tronc  aortique  est  garni,  ce  trou  de 
communication  est  bouché  pendant 
que  ces  soupapes  sont  relevées,  c'est- 
à-dire  pendant  la  plus  grande  partie 
de  la  durée  du  mouvement  de  systole 
du  ventricule.  En  effet,  le  pertuis  se 
trouve  placé  immédiatement  en  avant 
de  la  base  de  la  valvule  semi-lunaire 
inférieure  de  l'aorte  droite  et  de  la 


(a)  llcntz,  Op.  cit.  (Trans.  of  Ihe  American  Philosophical  Society  of  Philadelphia,  1835,  New 
Séries,  vol.  II,  p.  222). 

(b)  BiscliolT,  Op.  cit.  (Miiller's  Arcliiv  fur  Anal.  Und  Physiol.,  1836,  p.  7). 

(c)  Brûcke,  Op.  cit.  (Mém.  de  VAcad.de  Vienne,  1852,  t.  III,  p.  350). 


Ut. 


28 


/|32  APPAREIL    DE    LA    CIUCULAÎION 

Du  reste,  le  perfectionnement  introduit  dans  la  structure  du 
cœur  des  Crocodiliens  n'en  a  pas  moins  une  influence  considé- 
rable sur  le  mode  de  distribution  du  sang  artériel  chez  ces 
animaux.  Le  pertuis  aortique ,  ou  for  amen  Panizzœ,  ne  peut 
livrer  passage  qu'à  une  petite  quantité  de  sang  veineux,  et  par 
conséquent  tous  les  organes  dont  les  artères  naissent  de  là 
crosse  aortique  droite,  avant  la  jonction  de  celle-ci  avec  la 
crosse  veineuse  ou  crosse  gauche,  doivent  recevoir  un  mélange 
dans  lequel  le  sang  vermeil  domine,  tandis  que  ceux  dont  les 
artères  naissent  du  point  de  jonction  des  deux  crosses,  ou  plus 
loin,  en  arrière,  doivent  recevoir  du  sang  veineux  mêlé  au  sang- 
artériel  en  proportion  bien  plus  grande.  Or  les  parties  qui  se 
trouvent  dans  la  première  de  ces  deux  conditions  sont  précisé- 
ment celles  où  l'excitation  vitale  a  besoin  d'être  la  plus  puis- 
sante; car  ce  sont  le  cerveau,  les  organes  des  sens,  les  organes 
de  préhension,  etc.,  tandis  que  les  parties  où  l'irrigation  se  fait 
avec  du  sang  moins  complètement  artérialisé,  sont  les  viscères 
abdominaux,  le  train  de  derrière  et  la  queue. 
Système         §  9.  —  P°ur  sen  assurer,  il  suffit  de  jeter  un  coup  d'œil 
arlériedefénéral  rapide  sur  le  mode  de  distribution  des  principales  artères  d'un 
crocodiles.    c|e  ceg  grancis  Repiiles. 

valvule  semi-lunaire  supérieure  de  l'aorte  gauche  que  dans  la  direction 

l'aorte  gauche,  de  façon  qu'il  n'est  à  contraire  (a),  et,  par  conséquent,  il 

découvert  que  lorsque  ces  soupapes  paraîtrait  que  ce  serait  du  sang  arté- 

sont  abaissées  pour  fermer  rentrée  du  riel  qui  irait  se  mêler  au  sang  veineux 

système  artériel.   C'est  donc  pendant  plutôt  que  du  sang  noir  qui  se  déver- 

l'intervalle  compris  entre  l'arrivée  de  serait  dans  le  courant  du  sang  rouge, 

deux    ondées   successives    dans    ces  Ainsi  tout  s'accorde  à  faire  penser  que 

vaisseaux  que  les  abords  du  pertuis  malgré  l'existence  du  pertuis  aorti- 

aorliquc  sont  libres,  il  paraîtrait  aussi,  que,  la  portion  de   sang  artériel  qui 

d'après  les  observations  de  Panizza,  circule  dans  les  vaisseaux  de  la  têle  et 

que  le  passage  par  ce  pertuis  a  lieu  des  pattes  antérieures  ne  doit   être 

plus  facilement  de  l'aorte  droite  dans  mêlée  que  de  fort  peu  de  sang  veineux. 

(a)  Panizza,  Sulla  structura  del  cuore  e  sulla  circidaxionedelsangue  del  Grocodilus  (IJibliollieca 
italiana,  t.  LXX,  p.  87). 


CHEZ    LES    REPTILES.  fiOO 

Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  les  deux  troncs  aortiques  naissent 
isolément  du  cœur;  mais,  à  leur  origine,  ils  adhèrent  entre  eux 
et  sont  enveloppés  dans  le  péricarde,  de  façon  à  former  avec  le 
tronc  de  l'artère  pulmonaire  un  faisceau  en  apparence  simple. 
Ils  sont  l'un  et  l'autre  très  renflés  à  leur  base,  et  c'est  de  l'es- 
pèce de  bulbe  ou  de  sinus  ainsi  formé  par  l'aorte  du  côté  droit 
(ou  aorte  artérieuse)  que  naît  le  tronc  commun  des  deux  artères 
carotides.  Ce  vaisseau  est  une  artère  brachio-céphalique.  Effec- 
tivement, après  s'être  dégagée  du  péricarde,  elle  fournit  presque 
aussitôt  une  grosse  branche  qui  porte  le  sang  au  membre 
antérieur  du  côté  gauche  et  constitue  l'une  des  artères  sous- 
clavières.  Une  autre  branche  semblable  prend  naissance  un 
peu  plus  loin  de  la  crosse  aortique  elle-même  et  va  se  distri- 
buer dans  le  membre  thoracique  du  côté  opposé.  Chacune  de 
ces  artères  sous-clavières  fournit  aussi  une  artère  cervicale 
qui  s'avance  directement  vers  la  tête.  Enfin,  le  vaisseau  mé- 
dian, ou  tronc  carotidien  commun  dont  je  viens  de  parler,  gagne 
la  base  du  crâne,  et  s'y  bifurque  pour  former  de  chaque  côté 
du  cou  une  des  artères  carotides  dites  primitives ,  lesquelles 
se  divisent  bientôt  en  carotides  externes ,  carotides  internes  et 
en  quelques  autres  branches  ,  pour  aller  se  ramifier,  d'une 
part  aux  mâchoires,  etc.,  d'autre  part  au  cerveau,  aux  yeux  et  à 
diverses  parties  de  la  face  (1).  La  crosse  aortique  gauche,  qui 

(1)  La  disposition  de  celte  portion  par  quelques-uns  de  ses  devanciers. 
du  système  artériel  des  Crocodiliens  Les  deux  grosses  artères  qui  nais- 
diffère  notablement  de  ce  qui  existe  sent  de  la  crosse  aortique  et  qui  se 
chez  les  autres  neptiles,  et  la  déler-  dirigent  vers  la  base  du  cou  ont  été 
mination  des  artères  carotides  a  donné  considérées  par  Cuvier  comme  four- 
lieu  à  des  divergences  d'opinion  assez  nissant  chacune  la  carotide  et  la  sous- 
grandes;  mais  M.  Rathke  vient  de  clavière  du  côté  correspondant  ;  et  s'il 
publier  sur  ce  sujet  des  recherches  en  était  ainsi,  il  faudrait  donner  à  ces 
très  complètes  qui  lèvent  toutes  les  deux  vaisseaux  les  noms  de  troncs 
incertitudes  et  qui  permettent  de  corn-  brachio-céphaliques  (a).  Mais,  ainsi 
prendre  la  cause  des  erreurs  commises  que  l'ont  constaté  Meckel  et  lleniz, 

(a)  Cuvier,  Leçons  d'analomie  comparée,  I"  edil.,  t.  IV,  p.  280. 


k2>tl  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

naît  du  ventricule  veineux ,  ne  fournit  aucune  branche  dans 
la  région  cervicale  :  arrivée  sous  la  colonne  vertébrale,  elle 
s'anastomose  avec  la  crosse  du  côté  droit;  mais  avant  de  s'y 
unir,  elle  fournit  une  grosse  artère  viscérale,  qui,  étant  plus  forte 
que  sa  portion  anastomolique,  semble  même  être  la  continuation 
du  tronc  primitif,  tandis  que  la  branche  de  jonction  semble  être 
une  dépendance  de  ce  dernier.  L'artère  viscérale  ou  cœliaque 
distribue  ses  branches  à  l'estomac,  au  foie,  à  la  rate,  etc. 
Enfin,  l'aorte  dorsale,  constituée  par  la  réunion  de  la  crosse 


les  deux  carotides  sont  fournies  par 
un  tronc  commun  qui  provient  de 
Tune  de  ces  branches  aorliques,  et 
l'artère  qui  naît  de  celle  située  à  droite 
n'est  pas  une  carotide  comme  le  sup- 
posait Cuvier  (a}.  Pour  éviter  toute 
confusion,  j'appellerai  donc  ici  la  pre- 
mière grosse  branche  qui  se  détache 
de  la  crosse  aortique  droite,  Y  artère 
brachio  -  céphalique,  et  la  seconde 
(celle  qui  se  trouve  à  gauche),  l'arbre 
brachio-cervicale. 

Les  observations  de  M.  Van  der  Hœ- 
ven  tendaient  à  faire  penser  que  les 
deux  modes  d'organisation  décrits 
par  Cuvier  et  par  Meckel  apparte- 
naient à  des  espèces  différentes  (6)  ; 
mais  les  recherches  récentes  de 
M.  Rathke  établissent  que  chez  tous 
les  Crocodiliens  la  disposition  nor- 
male de  ces  vaisseaux  est  la  même,  et 
qu'il  y  a  toujours  chez  ces  Reptiles 
trois  artères  allant  de  la  base  du  cou 
vers  la  tête,  savoir  :  une  carotide 
commune  au  milieu  et  de  chaque  côté 
du  cou ,  une  artère  collatérale  qui 


accompagne  le  nerf  pneumogastrique 
et  la  veine  jugulaire  correspondante, 
et  qui  va  sous  la  base  du  crâne  s'ana- 
stomoser avec  une  des  branches  de  la 
carotide  du  même  côté.  Ainsi  la  pre- 
mière grosse  branche  qui  sort  de  la 
crosse  aortique,  et  qui  porte  le  nom 
d'artère  brachio  -  céphalique,  donne 
naissance  à  la  carotide  commune  im- 
paire, à  la  sous-clavière  gauche  et  à 
l'artère  collatérale  du  cou  du  même 
côlé  ;  tandis  que  la  seconde  branche, 
ou  artère  brachio-cervicale,  fournit  la 
collatérale  du  côlé  droit  et  la  sous- 
clavière  correspondante.  Ces  deux  ar- 
tères collatérales  du  cou  n'ont  pas 
été  observées  chez  d'autres  heptiles, 
mais  paraissent  être  les  représentants 
de  branches  ascendantes  qui  se  ren- 
contrent dans  la  même  position  chez 
certains  Oiseaux,  ainsi  que  nous  le 
verrons  dans  la  prochaine  Leçon  (c). 
Je  suis  donc  porté  à  croire  que  la  dis- 
position mentionnée  par  Cuvier  n'était 
pas  une  anomalie,  comme  Duvernoy 
semblait  le  supposer  {d),  mais  que  ce 


(a)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  328. 

■ —  Hentz,  Op.  cit.  (Trans.  of Vie  American  Philos.  Soc,  New  Séries,  1825,  vol.  II,  p.  221). 

(b)  Van  der  Hœvcn,  Op.  cil.  (Tijdschrift  voor  Natuurlijke  Geschiedenis  en  Physiologie,  183'J, 
t.  VI,  p.  155,  fig-.). 

(c)  Ratlike,  Ueber  die  Carotiden  der  Krokodile  uni  der  Vogel  (Miiller's  Archiv  fur  Anat.  une 
Phrjsiol.,  1850,  p.  184),  et  Untersachung  iiber  die  Aortenwuneln  (exlrail  des  Mém.  de  l'Acad. 
de  Vienne,  t.  XIII,  1853,  p.  43,  pi.  5,  fit?.  8). 

(d)  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  205. 


CHEZ    LES    REPTILES.  &35 

du  côté  droit  et  la  branche  anastomotiqne  terminale  de  la  crosse 
gauche,  continue  à  se  porter  en  arrière  sous  la  colonne  verté- 
brale, et,  chemin  faisant,  fournit  des  artères  intercostales,  une 
artère  mésentérique  antérieure,  des  artères  rénales,  les  artères 
des  membres  postérieurs  et  une  artère  mésentérique  posté- 
rieure; enfin,  elle  prend  le  nom  d'artère  caudale,  et  distribue 
sa  dernière  ramification  dans  la  queue. 

On  voit  donc  que  le  sang  distribué  aux  divers  organes  n'est 


grand  analomiste,  ayant  négligé  d'exa- 
miner le  mode  de  terminaison  des 
deux  artères  dont  il  avait  reconnu  la 
présence  à  la  base  du  cou,  avait  pris  la 
collatérale  droite  pour  le  pendant  de 
la  carotide  commune,  laquelle  aurait 
été  alors  la  carotide  primitive  gauche. 
Il  est  aussi  à  noter  que  M.  Haihke  a 
trouvé  que  chez  quelques  jeunes  Croco- 
diliëns  l'artère  carotide  commune,  au 
lieu  de  sortir  tout  d'une  pièce  du 
tronc  brachio-céphalique,  était  formée 
par  la  réunion  de  deux  branches  pro- 
venant l'une  de  ce  tronc,  l'autre  de 
l'artère  brachio-cervicale  ,  de  façon 
que  la  symétrie  était  presque  com- 
plète dans  celte  portion  du  système 
circulatoire.  J'ajouterai  que  le  tronc 
carotidien  commun  (ou  médian),  quel 
qu'en  soit  le  mode  d'origine ,  reste 
simple  et  impair  jusque  dans  le 
voisinage  du  crâne,  où  il  se  bifurque 
pour  constituer  les  deux  carotides 
dites  primitives,  qui  sont  très  cour- 
tes (a),  et  qui,  après  avoir  fourni 
chacune  une  artère  sous-maxillaire 
dans  laquelle  l'artère  collatérale  corres- 


pondante vient  se  terminer  (6) ,  don- 
nent naissance  aux  artères  faciales  ou 
carotides  externes,  et  encéphaliques, 
ou  carotides  internes,  ainsi  qu'à  quel- 
ques autres  branches  dont  le  mode  de 
distribution  a  été  étudié  par  M.  Hyrll 
et  par  M.  Rathke. 

Enfin ,  M.  Ilyrtl  a  remarqué  aussi 
que  la  plupart  de  ces  vaisseaux  for- 
ment souvent  sur  leur  trajet  des  ré- 
seaux anastomotiques  plus  ou  moins 
développés.  Ainsi ,  une  des  branches 
de  la  maxillaire  externe  ,  qui  se  rend 
au  repli  interne  de  l'oreille  externe,  y 
constitue  un  rete  mirabile  très  bien 
caractérisé.  L'artère  maxillaire  interne 
forme  également  un  réseau  semblable, 
qui  accompagne  le  nerf  dentaire,  et  il 
y  a  aussi  des  divisions  anastomotiques 
fréquentes,  et  même  un  véritable  rete 
mirabile  dans  les  fosses  nasales,  sur  le 
trajet  des  branches  terminales  de  la 
carotide  interne  (c). 

Duvernoy  a  donné  aussi  quelques 
détails  relatifs  aux  artères  du  tronc  et 
des  membres  du  Caïman  à  lunettes, 
tirés  d'un  dessin  inédit  de  Cuvier  (â). 


(a)  Ralhke,  Ueber  die  Aorteniviirzeln ,  pi.  5,  fig.  \  et  3. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  5,  flg.  i. 

(c)  Hyrll ,  Ueber  einige  Wundemetze  bei  Amphibien  (Medicimsche  Jahrbilcher,  1842,  nouvelle 
série,  t.  XXIX,  p.  258). 

(d)  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  205. 


436  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

pas  de  même  qualité  partout  :  celui  qui  arrive  à  la  tête  et  aux 
membres  antérieurs  doit  être  du  sang  artériel  mélangé  de  très 
peu  de  sang  veineux  ;  celui  qui  se  rend  par  l'aorte  dorsale  aux 
membres  postérieurs  et  à  la  queue  doit  être  plus  chargé  de  sang 
noir,  puisque  de  nouvelles  quantités  de  ce  liquide  ont  pu  arriver 
dans  cette  portion  du  système  artériel  par  la  branche  anasto- 
rnotique  terminale  de  la  crosse  gauche;  enfin  le  sang  qui  cir- 
cule dans  les  vaisseaux  du  foie,  de  la  rate  et  de  l'estomac  doit 
être  principalement  du  sang  veineux,  car  la  majeure  partie  du 
courant  vient  du  ventricule  droit,  et  du  sang  vermeil  n'a  pu  y 
arriver  que  par  le  pertuis  aortique  et  par  la  branche  anastomo- 
tique  qui  représente  la  portion  terminale  de  la  crosse  gauche 
ou  la  racine  aortique  du  même  côté  :  or  ces  voies  de  commu- 
nication sont  étroites  et  semblent  être  disposées  de  façon  à 
livrer  passage  au  sang  veineux  dans  la  portion  du  système  aor- 
tique où  se  trouve  le  sang  rouge  plutôt  qu'à  se  laisser  traverser 
en  sens  contraire. 
système  artériel  §  10.  —  On  rencontre,  même  chez  les  différentes  espèces 
ordinaire^  de  Crocodiles,  quelques  variations  clans  le  mode  de  groupement 
et  de  distribution  de  quelques-unes  de  ces  artères.  Cependant 
la  disposition  du  système  artériel  est  aussi  à  peu  près  la  même 
chez  tous  les  Sauriens,  où  le  cœur  ne  possède  qu'un  seul  ventri- 
cule. Les  modifications  qui  s'y  remarquent  dépendent  principa- 
lement de  divers  degrés  de  rapprochement  entre  la  portion 
basilaire  des  artères  carotides  et  sous-clavières. 

Ainsi,  chez  les  Lézards,  les  Iguanes,  les  Geckos  et  la  plupart 
des  autres  Sauriens  ordinaires,  les  deux  artères  carotides  pri- 
mitives sont  distinctes  dès  leur  origine  ou  tout  au  moins  dès 
leur  sortie  du  péricarde,  et  les  artères  sous-clavières  naissent 
l'une  et  l'autre  de  la  portion  postérieure  de  la  crosse  aortique 
droite,  très  loin  des  vaisseaux  précédents  (1). 

(1)  L'ensemble  du  système  artériel  M.  Blanchard ,  chez  le  Gecko  et  le 
«1  été  représenté  chez  le  Stellion  par      Caméléon  par  M.  Délie  Chiaje,  et  chez 


CHEZ    LES    REPTILES.  /|37 

Chez  les  Varaniens,  au  contraire,  les  deux  carotides  primi- 
tives sont  confondues  à  la  base  du  cou  en  un  tronc  impair,  ou 
carotide  commune,  et  les  deux  artères  sous-clavières  provien- 
nent aussi  d'un  vaisseau  impair,  mais  celui-ci  naît  encore  de  la 
portion  récurrente  de  la  crosse  aortique  droite,  très  loin  du 
précédent  (1). 


l'Iguane  par  MM.  Carus  et  V.  Otto  [a). 
M.  Tiedemann  a  dit  quelques  mots 
de  ces  vaisseaux  chez  le  Dragon  (b). 
Enfin,  M.  Hyrtl  a  décrit  les  crosses 
aortiques  du  Lézard  (c),  et  M.  Rathke 
a  étudié  avec  beaucoup  de  soin  les 
artères  'de  la  tête  et  du  cou  chez 
l'Iguane  et  plusieurs  autres  Sauriens 
du  même  groupe.  Pour  plus  de  détails 
à  ce  sujet,  je  renverrai  au  mémoire  de 
cet  anatomiste  (cl). 

(1)  Ainsi ,  chez  le  Psammosaurus 
griseus,  dont  le  système  artériel  a 
été  étudié  avec  beaucoup  de  soin 
par  M.  Corti ,  le  faisceau  artériel  qui 
sort  du  cœur  (ou  conus  arteriosus) 
se  compose,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  de 
l'artère  pulmonaire ,  et  de  la  por- 
tion basilaire  des  deux  crosses  aorti- 
ques^). Le  tronc  aortique  du  côté  droit 
fournit  au  cœur  les  petites  branches 
appelées  artères  coronaires  anté- 
rieures ou  droites ,  et  artères  coro- 
naires postérieures  ou  gauches,  puis 
bientôt  après  donne  naissance  à  un 
gros  tronc  carotidien  commun,  qui  se 
porte  en  avant,  et  ne  se  bifurque, 
pour  constituer  les  artères  carotides 


primitives  droite  et  gauche,  qu'au  ni- 
veau de  la  division  de  la  trachée  en 
bronches.  Beaucoup  plus  loin  la  même 
crosse  aortique  fournit  un  autre  tronc 
impair  qui  se  porte  également  en 
avant  pour  former,  en  se  bifurquant, 
ies  deux  artères  sous-clavières. 

L'artère  carotide  commune  (ou  mé- 
diane) donne  naissance  :  1°  à  une 
brandie  dite  artère  mammaire  in- 
terne,  d'après  la  nomenclature  em- 
ployée en  angiologie  humaine  ,  qui, 
après  avoir  envoyé  un  ramuscule  au 
péricarde  ,  se  recourbe  en  arrière  et 
en  bas,  et  se  bifurque  pour  longer  la 
paroi  inférieure  de  la  cavité  viscérale 
et  aller  s'anastomoser  avec  les  artères 
épigastriques,  dont  il  sera  question 
plus  loin  ;  2°  à  des  petites  artères 
bronchiques. 

Chacune  des  artères  carotides  ré- 
sultant de  la  bifurcation  de  ce  tronc 
commun  impair  fournit  en  dessous 
une  branche  à  la  trachée,  et  en  dessus 
une  branche  aux  muscles  du  cou  ; 
puis  donne  naissance  à  une  artère 
pharyngienne  qui  à  son  tour  se  divise 
pour    fournir   un   rameau   hyoïdien 


(a)  Blanchard,  Organisation  du  Hègne  animal,  Reptiles,  pi.  19. 

—  Délie  Chiaje,  Dissertazionï  sull'  anatomia  umana,  comparata  epatologica,  t.  I,  pi.  22,  et 
pi.  21. 

—  Carus  et  V.  Otto,  Tab.  Ànat.  compar.  illustr.,  pars  vr,  pi.  5,  fig.  5. 

(6)  Tiedemann,  Anatomie  uni  Naturgeschichte  des  Drachens,  p.  24  (1811). 

(c)  Hyrtl ,  Beobachtungen  ans  dem  Gebiete  der   vergleichenden   Gefàsslehre    {Medicinische 
Jahrbiicher  des  Oestevreichischen  Staates,  1838,  t.  XXIV,  p.  381.  pi.  3,  fig.  2). 

(d)  Rathke,  Untersuch.  ilber  die  Aortenwurzeln,  p.  15  et  suiv.,  pi.  3. 

(e)  Voyez  Corti,  De  systemate  vasorum  Psammosauri  grisei,  p.  19  et  suivantes,  pi.  1 ,  fig.  1 . 


&38  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Enfin,  chez  les  Crocodiliens,  ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  les 
carotides  et  les  sous-clavières  se  rapprochent  à  leur  base,  et 
c'est  par  l'intermédiaire  d'une  paire  de  branches  aortiques  seu- 


et  une  artère  maxillaire  externe.  Ces 
carotides  donnent  également  naissance 
a  une  artère  cervicale,  dont  une  des 
branches  pénètre  dans  le  canal  verté- 
bral pour  concourir  à  la  formation  de 
l'artère  myélique  dont  il  sera  bientôt 
question-  Enfin*  elles  se  divisent  cha- 
cune en  une  artère  carotide  externe  et 
une  carotide  interne  (a). 

La  carotide  interne  pénètre  dans  le 
crâne  et  s'y  divise  en  plusieurs  bran- 
ches dont  une  côtoie  le  nerf  optique  et 
s'anastomose  avec  l'artère  ophthalmi- 
que.  Quelques  autres  branches  se  dis- 
tribuent aux  diverses  parties  de  l'en- 
céphale (b),  et  une,  postérieure,  se 
réunit  à  sa  congénère,  et  forme  une 
arcade  cérébrale  postérieure  (ou  arcus 
Willisii),  qui  à  son  tour  donne  nais- 
sance à  une  artère  récurrente  impaire 
à  laquelle  M.  Corli  donne  le  nom 
û'arteria  myelica  (c).  Cette  dernière 
longe  la  face  inférieure  de  la  moelle 
épinière  ,  et  reçoit  de  nombreuses 
branches  anastomoliques  venant  des 
artères  carotides  et  des  artères  verté- 
brales (d). 

L'artère  carotide  externe  fournit  à 
la  face  plusieurs  branches  dont  les 
principales  sont  :  une  artère  maxil- 
laire interne,  qui  envoie  des  ramus- 
cules  à  l'oreille,  aux  muscles  tempo- 
raux et  aux  parois  de  la  bouche;  fournit 
une  artère  alvéolaire  inférieure,dcsli- 
née  principalement  à  la  mâchoire  infé- 


rieure, et  une  artère  buccale  inférieure 
qui  se  ramifie  dans  la  paroi  inférieure 
de  la  bouche  ;  des  artères  sns-orbi- 
tairesou  frontales,  uneartère  ophthal- 
mique  et  une  alvéolaire  supérieure.'- 

Les  artères  sous-clavières  résultant 
de  la  bifurcation  du  tronc  impair  déjà 
mentionnée  vont  aux  membres  anté- 
rieurs, et  donnent  préalablement  nais- 
sance à  plusieurs  branches  spinales  et 
à  l'artère  vertébrale,  qui  s'avance  de 
chaque  côté  de  la  colonne  vertébrale  et 
fournit  des  ramuscules  aux  muscles 
profonds  du  cou,  ainsi  que  des  bran- 
ches anastomoliques  allant  déboucher 
dans  l'artère  myélique.  L'artère  sous- 
clavière  gagne  ensuite  la  région  de 
l'aisselle  où  elle  prend  le  nom  d'artère 
axillaire*  et  donne  naissance  à  une 
artère  thoracique  externe  (ou  mam- 
maire externe  ).  Parvenues  dans  les 
pattes  antérieures,  les  artères  axillaires 
changent  encore  de  nom  et  deviennent 
les  artères  brachiales.  Enfin,  cette 
même  artère  se  bifurque  dans  l'avant- 
bras,  et  y  constitue  les  artères  cubitale 
et  radiale,  dont  les  branches  termi- 
nales sont  les  artères  digitales  (e). 

La  crosse  aorlique  gauche  est  grêle 
et  se  recourbe  au-dessus  des  voies 
aériennes  et  digestives,  puis  se  porte 
en  arrière  pour  constituer  une  des 
racines  de  l'aorte  dorsale  sans  avoir 
donné  naissance  à  aucune  branche  ; 
mais,  quand  elle  est  arrivée  très  près 


(a)  Corli,  De  systemate  vasorum  Psammosauri  grisei,  pi.  2,  fig.  4,  et  pi.  3,  fig.  G. 

(b)  Idem,  ibid.,p\.  3,  fig.  6. 
(c)Idem,  i&ùi.,pl.  3,fig.  7. 
(d)  Idem,  ibid.,  pi.  2,  fig.  5. 

{e)  Idem,  ibid.,  pi.  1,  fig.  1  ;  pi.  4,  fig.  8  et  9. 


CHEZ    LES    REPTILES.  439 

lement  que  le  sang  se  rend  du  cœur  à  toute  la  portion  brachio- 
céphalique  du  corps. 
On  remarque  aussi  quelques  variations  dans  le  point  d'origine 


de  son  point  de  jonction  avec  la  crosse 
aortique  principale  ,  elle  fournit  un 
tronc  qui,  à  raison  de  son  volume, 
semble  même  en  être  la  continuation, 
circonstance  qui  a  valu  souvent  à  cette 
crosse  le  nom  d'aorte  viscérale.  En 
effet,  l'artère  qui  en  naît  ainsi  est  une 
artère  viscérale  ou  raésentérique  com- 
mune, dont  lesramaeuxse  distribuent, 
d'une  part  à  l'œsophage,  d'autre  part 
aux  intestins  (a). 

V aorte  dorsale,  formée  par  la  con- 
tinuation de  la  crosse  droite ,  ainsi 
renforcée  par  son  anastomose  avec 
l'extrémité  de  la  crosse  gauche,  mar- 
che d'avant  en  arrière  sous  la  colonne 
vertébrale,  et  fournit  bientôt  une  ar- 
tère cœliaque  dont  une  des  branches 
se  recourbe  en  avant  pour  se  ramifier 
dans  les  parois  de  l'estomac,  et  con- 
stitue Yartère  gastrique  antérieure 
ou  coronaire  de  l'estomac,  et  une 
autre  Yartère  hépatique.  Des  artères 
intercostales  ,  des  artères  spermati- 
ques  et  des  artères  rénales  naissent 
aussi  de  l'aorte  pendant  son  trajet 
dans  la  portion  moyenne  de  la  cavité 
abdominale,  et  vers  le  niveau  du 
bassin  il  part  aussi  de  ce  tronc  médian 
deux  paires  d'artères  qui  sont  desti- 
nées principalement  aux  membres 
postérieurs  (6).  Celles  de  la  paire 
antérieure,  appelées  artères  iliaques 


internes,  on  artères  hypogastriques, 
fournissent  de  chaque  côté  une  bran- 
che qui  se  distribue  dans  les  parois 
de  l'abdomen  et  va  s'anastomoser  en 
avant  avec  l'artère  thoracique  interne 
(ou  mammaire  interne)  dont  il  a  déjà 
été  question.  Elles  envoient  aussi  beau- 
coup de  rameaux  aux  muscles  du  bas- 
sin, et  vont  se  terminer  à  la  partie 
interne  des  cuisses  (c). 

La  paire  suivante  constitue  les  ar- 
tères iliaques  externes,  et,  aprèsavoir 
pénétré  dans  la  cuisse,  prennent  les 
noms  d'artères  fémorales  ou  artères 
crurales.  Enfin  elles  se  divisent  en 
branches ,  appelées  artères  tibiales 
antérieures  et  artères  tibiales  posté- 
rieures {(1). 

On  désigne  quelquefois  sous  le  nom 
d'artère  sacrée  la  portion  du  tronc 
aortique  qui  est  située  au  delà  du 
point  d'origine  des  artères  iliaques 
externes.  Elle  fournit  ici  des  branches 
appelées  spermatiques  externes  ,  qui 
vont  principalement  aux  organes  gé- 
nitaux. Enfin,  la  portion  terminale  de 
l'aorte  prend  le  nom  d'artère  caudale, 
et  fournit  des  branches  latérales  à 
mesure  qu'elle  s'avance  vers  l'extré- 
mité de  la  queue. 

La  disposition  des  artères  est  la 
même  cbez  les  Varans  proprement 
dits  (e). 


(a)  Corti,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1  et  3. 
(6)  Idem,  ibid.,  pi.  \,  fig\  1. 
(c)Idem,  ibid.,  pi.  4,  fig.  8. 

(d)  Idem,  ibid.,  pi.  6,  fig.  dl-14. 

(e)  Ralhke,  Unters.  iiber  die  Aortenwurzeln,  p.  30  et  suiv.,  pi.  3,  fig.  1-5  (Acad.  de  Vienne, 
t.  XIII). 


l\JiO  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

et  dans  le  mode  de  division  des  artères  qui,  chez  les  Sauriens, 
se  distribuent  aux  viscères  et  aux  autres  parties  de  la  région 
postérieure  du  corps;  mais  ces  particularités  de  structure  n'ont 
pas  assez  d'importance  pour  que  nous  nous  y  arrêtions  ici. 
système  artériel  §11  —  Chez  les  Ophidiens,  le  système  irrigatoire  présente  la 
ophidiens,  même  conformation  générale  que  chez  les  Sauriens,  mais  se  sim- 
plifie un  peu  à  raison  de  l'absence  de  membres,  et  la  tête  étant 
très  petite,  les  artères  carotides  deviennent  fort  grêles  et  même 
le  plus  souvent  l'une  d'elles  disparaît  plus  ou  moins  complè- 
tement. Il  est  aussi  à  noter  que  les  artères  vertébrales  se 
trouvent  représentées  aussi  par  un  tronc  médian  qui  dépend 
de  la  crosse  aortique  du  côté  droit,  et  qui  ressemble  beaucoup 
à  l'aorte  antérieure  que  l'on  voit  naître  du  point  de  jonction 
des  racines  aortiques ,  chez  les  Poissons  du  genre  Myxine. 
Les  artères  intercostales  naissent  avec  une  grande  régularité, 
d'abord  de  cette  artère  vertébrale,  puis  de  la  portion  récurrente 
de  la  crosse  aortique  droite,  et  plus  en  arrière  de  l'aorte  dor- 
sale qui  y  fait  suite.  Enfin  les  artères  de  l'estomac ,  du  foie  et 
des  intestins  ne  proviennent  pas  d'un  tronc  principal,  analogue 
à  l'artère  cœliaque  de  la  plupart  des  Reptiles,  mais  se  détachent 
successivement  de  l'aorte  dorsale  (1). 

(lj  Le  système  artériel  a  été  étudié  la  tête  [a).  Chez  la  Couleuvre,  il  n'y  a, 

avec  beaucoup  de  soin  chez  la  Cou-  depuis  le  cœur  jusqu'à  la  tête,  qu'un 

leuvre  à  collier,  par  M.  Schlemm  (de  seul  tronc  carotidien,  que  Cuvier  ap- 

Berlin),  et  chez  le  Python,  par  M.  Jac-  pelle  une  carotide  commune,  et  que 

quart.  Ce  dernier  a  trouvé  deux  petites  M.  Schlemm   désigne    sous  le   nom 

artères  carotides  qui  naissent  de   la  d'artère  céphalique.  Parvenu  sous  le 

crosse  aortique  droite  par  un  tronc  crâne,  cette  carotide  se  ramifie,  comme 

commun  ;  mais  il  a  reconnu  que  le  d'ordinaire,  du  côté  gauche,  et  donne 

degré  de  développement  de  l'un  de  naissance   à  une    branche  occipitale 

ces  vaisseaux  est  très  variable,  suivant  qui  tient  lieu  de  carotide  droite,  passe 

les  individus,  et  que  parfois  la  caro-  à  travers  la  nuque,  gagne  le  côté  du 

lide  droite  ne  se  prolonge  pas  jusqu'à  pharynx  et  se  ramifie  comme  le  ferait 

(a)  Jacquart,  Mém.  sur  les  organes  de  la  circulation  du  Serpent  Python  (Ann.  des  sciences  nat., 
4e  série,  t.  IV,  p.  339,  pi.  9,  fur.  1  et  3). 


CHEZ    LES    REPTILES.  kM 

S  12.  —  Chez  les  Chéloniens ,  la  svmétrie  originelle  du  système  artériel 
système  artériel  est,  au  contraire,  mieux  conservée,  même  que  châonïem. 
chez  la  plupart  des  Sauriens,  et  sauf  le  point  de  départ  des  gros 
troncs  là  où  ils  adhèrent  entre  eux  pour  former  un  faisceau 
précardiaque,  ceux-ci  sont  disposés  à  peu  près  identiquement  à 
droite  et  à  gauche  de  la  base  du  cou.  Ainsi  chez  la  Tortue 
bourbeuse,  par  exemple,  un  tronc  commun  qui  est  situé  pres- 
que sur  la  ligne  médiane,  et  qui  naît  de  la  crosse  droite  de 
l'aorte  très  près  du  cœur,  se  porte  en  avant,  et  se  divise  bientôt 
en  une  paire  d'artères  carotides  et  une  paire  d'artères  sous- 
clavières.  Les  premières  sont  très  grêles  et  longent  la  trachée 
latéralement  ;  les  dernières  sont  fort  grosses  et  se  recourbent 
en  dehors,  en  forme  d'arcs,  pour  gagner  les  membres  anté- 

une  carotide  ordinaire  (a).  L'ensemble  paraît,  tandis  que  la  portion  céplialique 

du  système  artériel  de  la  Couleuvre  à  persiste  et  reçoit  le  sang  par  une  ana- 

collier  a  été  représenté  d'une  manière  slomose  qui  s'établit  entre  une  de  ses 

plus  complète  par  M.  Délie  Chiaje  (6).  branches  et  celle  du  côté  opposé  :  par 

M.  Rathke  vient  de  publier  de  nou-  exemple,    chez  le  Vipera   berus,  le 

velles  observations  sur  la  disposition  V.  prester,  le  Scythale  coronatum , 

des  carotides  chez  les  Serpents.  Il  a  VOligodon  subtorquatum ,  VHilicops 

trouvé  que,  dans  le  jeune  âge,  les  deux  angulatus,    le    Spilotes   variabilis, 

troncs  sont  disposés  symétriquement,  VElops  micinctus,  le  Leptophis  lio- 

et  que  cette  disposilion  est  permanente  cercus ,  YHerpedodryas  Bernieri  et 

dans  un  grand  nombre  d'espèces,  telles  YHomalosoma  lutrix  (c). 

que  la  Couleuvre  à  collier  (ou  Tropido-  Il  est  aussi  à  noter  que  chez  quel- 

notus  natrix),  VEunectes  murinus ,  ques  Serpents  l'artère  maxillaire  in- 

Python  tigris,  P.javanicus,  P.  hiero-  terne  forme  un  rete  mirabile  derrière 

glyphicus,  Boa  constrictor,  Hydrophis  la  glande  venimeuse  ;  disposition  que 

gracilis,  H.  striatus,  H.  schistosus,  M.  Hyrtl  a  constatée  chez  le  Vipera 

Typhlops  reticulatus,  Echidna  arie-  Bedi  et  le  V,  Chersea.  Cet  anatomiste 

tans,  Crotalus  Iwrridus,  etc.;  mais  que  n'a  trouvé  rien   d'analogue  chez  le 

chez  d'autres  toute  la  portion  cervicale  Coluber  JEsculapii,  le  C.  austriacus 

de  l'une  de  ces  artères  se  flétrit  et  dis-  et  le  C.  natrix  {d). 

(a)  Schlemm,  Anatomische  Beschreibung  des    Blutgefass-systems  deï  Schlangen  (Zeitschr.  fur 
Physiologie  von  Treviranus,  t.  II,  pi.  7,  fig.  4  et  5). 

(6)  Délie  Chiaje,  Dissertaz-ioni  sull'  anatomia  uinana,  comparata  e  palologica,  t.  I,  pi.  20. 

(c)  Rathke  ,  Bemerkungen  ûbev  die  Carotiden  der  Schlangen  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne, 
1856). 

(d)  Hyrtl,  Ueber  einige  Wundernetze  bel  Amphibien  (Medirinische  Jahrbûeher  des  Oesterrei- 
chischen  Staates,  1842,  nouvelle  série,  t.  XXIX,  p.  260). 


hk*2  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

rieurs.  11  est  aussi  à  noter  que  chez  ces  Animaux  les  petits 
troncs  anastomotiques  qui,  dans  l'état  embryonnaire,  unissent 
la  portion  basilaire  des  artères  pulmonaires  aux  crosses  aor- 
tiques,  sont  plus  ou  moins  persistants.  Eniin,  je  ferai  remar- 
quer encore  que  dans  toute  sa  portion  antérieure  la  crosse 
aortique  du  côté  gauche  est  presque  aussi  grosse  que  sa  con- 
génère, et  qu'elle  ne  devient  grêle  qu'après  avoir  donné  nais- 
sance aux  artères  cœliaques  et  mésentériques,  et  à  quelques 
autres  troncs  qui  partent  de  sa  portion  terminale  (1). 
Système  veineux  §13.  —  Le  système  veineux  général  des  "Reptiles  ressemble 
Rejmeg.  beaucoup  à  celui  des  Batraciens.  Il  aboutit  tout  entier  ou  en 
majeure  partie  à  un  sinus  à  parois  contractiles,  qui  débouche 
dans  l'oreillette  droite  du  cœur  par  un  orifice  dont  les  bords 
sont  garnis  de  valvules  ;  mais  il  n'y  a  guère  que  le  sang  de  la 
tête  et  des  parties  antérieures  du  corps  qui  revient  ainsi  direc- 
tement du  système  capillaire  général  au  centre  de  l'appareil 
circulatoire,  et  celui  des  parties  postérieures  du  corps  et  des 
viscères  abdominaux  traverse  des  systèmes  capillaires  intermé- 
diaires appartenant  l'un  au  foie,  l'autre  aux  reins  (2). 


(I)  Pour  plus  de  détails  sur  le  mode  gros  troncs  artériels  chez  le  T.  ra- 
de distribution  des  artères  de  la  Tor-  diata  (c). 

tue  bourbeuse,  je  renverrai  ù  la  belle  MM.  Carus  et  V.  Otto  ont  représenté 

Monographie  de  Bojanus,  où  toutes  ces  mêmes  troncs  chez  le  Chelonia 

les  branches,  aussi  bien  que  les  troncs  Midas  ,  où  un  tronc  brachio-cépha- 

principaux,  ont  été  figurées  avec  le  lique  commun,   ou  aorte  antérieure, 

plus  grand  soin  (a).  naît  de  la  crosse  aortique  droite  et 

L'ensemble  du  système  artériel  a  été  fournit  les  deux  artères  sous-clavières 

très    bien  représenté   par    M.    Délie  ainsi  que  les  deux  carotides  primi- 

Chiaje,  chez  le  T.  grœca  (b).  tives  [d). 

Duvernoy  a  figuré  la  disposition  des  (2)  La  découverte  du  système  porte 


(a)  Bojanus,  Analome  Testudinis  europœœ,  pi.  20,  fig.  8-2;  pi.  24,  fîg.  118;  pi.  28,  fig\  139; 
pi.  29,fig.  160,  161,  162,  etc. 

(b)  Délie  Clnaje,  Dissertazioni  mil'  anatomîa  umana,  comparata  e  patologica,  t.  I,  pi.  23. 

(c)  Duvernoy,  Atlas  des  Reptiles  du  Règne  animal  de  Cuvier,  pi.  2,  ûg.  1. 

(d)  Caïus  et  V.Olto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  5,  fig-.  4. 


CHEZ    LES    REPTILES.  kk-O 

Pour  donner  en  peu  de  mots  une  idée  générale  de  cet  en-      veines 

des 

semble  de  vaisseaux,  je  choisirai  d'abord  les  Serpents,  parce    ophidiens. 
qu'à  raison  de  l'absence  de  membres  chez  ces  Animaux,  la 
disposition  en  est  plus  simple  que  chez  les  autres  Reptiles,  et 
aussi  parce  que  la  structure  en  a  été  très  bien   étudiée  par 
M.  Délie  Chiaje  et  par  M.  Jacquart. 

Chez  le  Python,  le  sang  de  la  tête  et  de  la  partie  antérieure 
du  corps  est  conduit  au  cœur  par  une  paire  de  veines  jugu- 
laires et  par  une  grosse  veine  vertébrale.  La  veine  jugulaire 
gauche,  après  avoir  pénétré  dans  le  péricarde,  se  recourbe  à 
droite  et  va  déboucher  isolement  dans  l'oreillette.  L'autre  veine 
jugulaire  reçoit  à  son  extrémité  postérieure  la  veine  vertébrale 
et  la  veine  azygosi;!),  puis  s'unit  à  la  veine  cave  postérieure,  et 
constitue  ainsi  le  sinus  qui  débouche  dans  l'oreillette  droite. 

Les  veines  caudales,  en  arrivant  dans  l'abdomen,  forment 
deux  troncs  qui,  après  avoir  reçu  diverses  branches  venant  de 
l'intestin  ou  des  organes  voisins,  et  avoir  formé  des  anastomoses 
avec  le  système  de  la  veine  porte  hépatique,  se  rendent  aux 
reins  et  s'y  ramifient. 

Une  veine  rénale  efférente  naît  de  chacune  de  ces  glandes  et 
se  dirige  en  avant.  Ces  deux  vaisseaux  se  réunissent  bientôt  en 
un  tronc  unique  qui  constitue  la  grande  veine  cave  postérieure. 

Les  veines  de  l'intestin  et  de  l'ovaire,  dont  diverses  branches 


rénal  des  Reptiles   est  due  à  Jacob-      cis  que  par  les  travaux  plus  récents 
son  (a).   Nicolaï   en  a  fait  également      de  MM.  Délie  Chiaje  et  Jacquart  (<j). 
l'objet  de  ses  recherches  (6),  mais  le  (l)  M.  Jacquart  désigne  le  premier 

mode  de  constitution  de  ce  système  et       de  ces  vaisseaux  sous  le  nom  de  veine 
ses  rapports  avec  les  autres  parties  de       azygos  antérieure. 
l'appareil  veineux  n'ont  été  bien  éclair- 
ai) Nicolaï,   Utilersucli.  ûber  den  Verlauf  uud  die  Yerlheilung   der  Vernit,  (Isis,  18:20,  1.1, 
p.  408). 

(b)  Délie  Chiaje,  Monographia  sulï  systema  saaguigno  degh  animait  Reltili  (Dissertaiioni  mil' 
tinatomia  umana,  comparata  e  patologicd  ,  t.  I,  p.  10  et  suiv.). 

if)  Jacipiart,  Mém.  sur  les  organes  de  la  circulation  chez  le  Serpent  Pgthon  (Aiin.  des  sciences 
Hat.,  1855,  4e  série,  t.  IV,  p.  345  cl  suiv.). 


litllX  APPAREIL    DE    LA    C1KCTLAT10N 

se  sont  anastomosées  avee  les  branches  de  la  veine  porte  rénale, 
se  réunissent  peu  à  peu  en  une  grosse  veine  porte  hépatique 
qui  pénètre  dans  le  foie  et  s'y  ramifie.  Enfin  les  veines  hépa- 
tiques efférentes  qui  naissent  du  réseau  capillaire  ainsi  formé 
se  déversent  directement  dans  la  veine  cave  postérieure,  sans 
se  réunir  en  un  ou  plusieurs  gros  troncs,  et  cette  veine  cave, 
comme  je  l'ai  déjà  dit,  se  termine  dans  l'oreillette  droite  du 
cœur,  après  s'être  confondue  avec  la  jugulaire  correspon- 
dante (1). 
veines  Chez  les  Sauriens,  la  disposition  du  système  veineux  se  eom- 

sauriens.  plique  davantage  par  suite  de  l'existence  des  membres;  mais 
le  système  porte  rénal  perd  de  son  importance  ,  car  une 
grande  partie  du  sang  qui  revient  de  la  région  postérieure  du 
corps  n'y  entre  pas,  et  se  rend  directement  dans  le  système 


(1)^  M.  Délie  Chiaje  a  trouvé  que  sultats  des  observations  plus  récentes 

chez  la  Couleuvre  le  réseau  veineux  de  M.  Jacquart  (c). 

sous-culané  et  les  veines  intercostales  M.  Gratiolet  a  remarqué  aussi  que 

se  déversent  en  grande  partie  dans  quelques  branches  veineuses  forment 

une  veine  abdominale  qui  longe  en  un  réseau  intermédiaire,  ou  système 

dessous  les  parois  de  la  cavité  viscé-  portai,  dans  les  capsules  surrénales  (d). 

raie,  et   va   s'anastomoser    près  du  11  est  aussi  à  noter  que  M.  Briicke  a 

cloaque  avec  les  veines  afférentes  ré-  trouvé   dans  l'intérieur   de  la  veine 

nales.  Il  signale  aussi  l'existence  d'une  porte  hépatique,  chez  la  Couleuvre, 

dilatation  du  tronc  de  la  veine  porte  une  disposition  très  singulière   :   ce 

hépatique,  qui  est  contourné  en  spi-  vaisseau,  contourné  en  spirale,  comme 

raie  près  du  foie  (a).  La  figure  qu'il  je  l'ai  déjà  dit,  est  garni  d'une  sorte  de 

donne  des  veines  rénales  efférentes,  bourrelet  qui  fait  saillie  dans  son  inté- 

de  la  veine  cave  postérieure  et  des  rieur  et  qui  décrit  aussi  une  hélice, 

branches  que  celle-ci  reçoit  du  sys-  M.  Briicke  considère  ce  mode  d'orga- 

tème  de  la  veine  porte  hépatique  (6)  nisation  comme  étant  destiné  àégaliser 

s'accorde  aussi  très  bien  avec  les  ré-  le  courant  sanguin  (e). 


(a)  Délie  Chiaje,  Op.  cit.,  {Dissert. suit'  anatomia  umana,  comparata  e  patol.,  1. 1,  pi.  7,  fig.  I). 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  13,  fig.  1. 

(c)  Jacquart,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1855,  V  série,  t.  IV,  p.  345  et  suiv.,  pi.  9,  fig.  i 
et  2  ;pl.  11,  fig.  12). 

(d)  Gratiolet,  Note  sur  le  système  veineux  des  Reptiles  {Journal  de  l'Institut,  1853,  t.  XXI, 
p.  60). 

(e)  Briicke,  Beitr.  zur  vergl.   Anal,   und  Physiul.   des  Gefàss-Syxtems  {Mém.  de  l'Acad.  de 
Vienne,  1852,  t.  III,  p.  364,  pi.  24). 


CHEZ    LES    REPTILES.  Û/l5 

de  la  veine  porte  hépatique  ,  par  l'intermédiaire  d'une  veine 
sous-cutanée  située  dans  la  paroi  intérieure  de  l'abdomen.  Les 
relations  de  cette  veine  sont  à  peu  près  les  mêmes  que  chez 
la  Grenouille  (1).  Enfin  une  portion  du  sang  de  la  queue  et,  des 
pattes  postérieures  parait  pouvoir  retourner  au  cœur  sans  tra- 
verser ni  les  reins  ni  le  foie,  mais  en  passant  par  une  double 
série  de  petites  branches  anastomotiques  (2)  qui  lient  entre  elles 
les  veines  intercostales,  et  qui  débouchent  dans  les  veines 
caves,  près  du  cœur  (3). 


(1)  Voyez  ci-dessus,  page  Ziul. 

2)  Ce  sont  les  représentants  des 
veines  cardinales,  ou  azygos,  dans 
cette  portion  du  corps. 

(3)  M.  Délie  Chiaje  a  trouvé  que  chez 
le  Lézard  les  veines  des  pattes  posté- 
rieures, en  s'approchanl  du  bassin  , 
se  divisent  chacune  en  trois  branches: 
une  interne  et  postérieure,  qui  consti- 
tue le  tronc  principal  de  la  veine  rénale 
afférente  ;  une  seconde,  antérieure  et 
inférieure ,  qui  va  s'unir  à  sa  congé- 
nère pour  former  la  veine  sous-abdo- 
minale; et  une  troisième,  moyenne  et 
supérieure,  qui  est  très  grêle  et  qui  va 
s'anastomoser  avec  les  veines  verté- 
brales. La  veine  médiane  sous- abdo- 
minale, ainsi  constituée,  longe  la  paroi 
inférieure  du    ventre,  et  y   reçoit , 
chemin    faisant,  les   veinules    sous- 
cutanées;  enfin,   parvenue    dans  le 
voisinage  du  foie,  elle  reçoit  aussi  une 
grosse  veine  thoiacique  récurrente,  et 
va  ensuite  déboucher  dans  la  veine 
porte ,   laquelle    est    formée  par   la 
grande  veine  intestinale    et   ses  af- 
fluents. Les  veines  rénales  efférentes 
se  réunissent,  comme    d'ordinaire, 


pour  constituer  la  veine  cave  posté- 
rieure [a).  Celle-ci,  en  passant  le  long 
du  foie,  reçoit  les  diverses  branches 
veineuses  qui  sortent  du  foie,  et  va 
s'unir  à  la  veine  jugulaire  droite,  qui 
reçoit  près  de  son  embouchure  la 
veine  sous  -  clavière  gauche ,  et  se 
termine  dans  l'oreillette  droite,  à  côté 
de  sa  congénère  (6). 

M.  Délie  Chiaje  a  représenté  le 
système  veineux  du  Caméléon  à  peu 
près  de  la  même  manière  (c). 

Suivant  Nicolaï,  la  disposition  du 
système  porte  rénal  serait  un  peu 
différente  chez  le  Crocodile.  La  veine 
caudale  médiane,  arrivée  dans  l'abdo- 
men, se  partage  en  deux  troncs  qui, 
après  s'être  réunis  aux  veines  ischia- 
tiques  et  crurales  de  chaque  côté  , 
s'avancent  jusqu'aux  reins,  et  là  se 
divisent  chacun  en  deux  branches 
principales.  L'une  de  celles-ci  consti- 
tue le  système  afférent  rénal;  l'autre, 
plus  grosse  que  la  précédente,  conti- 
nue sa  route  vers  le  foie  et  s'y  divise. 
Les  veines  rénales  efférentes  sortent, 
comme  d'ordinaire,  de  la  face  interne 
des  reins  et  se  réunissent  pour  consti- 


(n)  Délie  Chiaje,  Op.  cit.,  pi.  8,  fig.  1. 
(6)  Idem,  ibld.,  pi.  14,  fig.  1. 
U')  Idem,  ibid.,  pi.  9. 


Veines 

des 

Chéloniens. 


ft/|6  APPAREIL    DE    LA.    CIRCULATION 

Chez  les  Tortues,  le  système  veineux  de  Jacobson  se  réduit 
davantage  encore;  la  presque  totalité  du  sang  qui  revient  de  la 
queue  et  des  membres  postérieurs  trouve  des  voies  faciles  pour 
aller  vers  le  cœur  sans  traverser  la  substance  des  reins,  et  les 
veines  qui  sortent  de  ces  glandes  pour  constituer  en  quelque 
sorte  les  racines  de  la  veine  cave  postérieure,  sont  grêles  et  peu 
nombreuses:  aussi  ce  dernier  vaisseau  n'offre-t-il  qu'un  petit 
calibre  jusqu'à  ce  qu'il  ait  passé  sous  le  foie  et  reçu  de  cet  organe 
les  veines  efférentes  du  système  de  la  veine  porte  hépatique.  11 
serait  trop  long  de  décrire  ici  le  trajet  et  les  anastomoses  très 
compliquées  de  tous  ces  vaisseaux,  et  je  me  bornerai  à  ajouter 
que  les  veines  vertébrales  prennent  ici  un  grand  développe- 
ment aussi  par  les  veines  abdominales  (1). 


tuer  la  veine  cave  postérieure.  Enfui 
celle-ci  se  joint  à  la  veine  cave  anté- 
rieure au-dessus  du  cœur  (a). 

(1)  Le  système  veineux  de  la  Tortue 
bourbeuse  a  été  étudié  avec  le  plus 
grand  soin  par  Bojanus,  et  parfaite- 
ment représenté  dans  les  belles  plan- 
ches qui  constituent  la  partie  essen- 
tielle de  l'ouvrage  de  cet  anatomiste. 
Chez  ce  Reptile,  le  système  des  veines 
portes  prend  un  très  grand  dévelop  - 
pement  et  reçoit  la  majeure  partie  du 
sang  qui  revient  de  la  queue  et  des 
membres  postérieurs,  aussi  bien  que 
des  intestins.  En  effet,  ce  système  est 
formé  principalement  par  une  paire 
de  grosses  veines  abdominales  (ou 
veines  ombilicales,  Bojanus)  qui  lon- 


gent le  plastron  stcrnal  et  vont 
former  dans  la  substance  du  foie  une 
grande  arcade  anastomotique,  laquelle 
reçoit  aussi  les  veines  mésentériques 
ou  veines  portes  ordinaires  ,  et  donne 
naissance  aux  rameaux  destinés  à  dis- 
tribuer le  sang  veineux  dans  la  pro- 
fondeur de  cette  glande  (b). 

Chacune  de  ces  veines  abdominales 
tire  principalement  son  origine  de 
trois  troncs  situés  à  la  partie  posté- 
rieure du  bassin,  savoir  :  1°  la  veine 
fémorale,  qui  arrive  de  la  cuisse  (c)  ; 
2°  la  veine  caudale  et  ses  affluents  (d)  ; 
et  3°  la  veine  hypogastrique  (e),  qui 
revient  des  organes  génitaux  externes, 
remonte  vers  la  région  lombaire  et  y 
reçoit  quelques  grosses  branches  four- 


fa)  Nlcolaï,  Untemichungen  ùber  den  Verlaufund  die  Vei'theilunrj  der  Venen  bei  êtnigen  Vàrjeln, 
Amphibien  und  Fischen  (Isis,  182G,  1. 1,  p.  408). 

(h)  Ces  veines  abdominales  ou  ombilicales  sont  dé.-lgnccs  ;  ar  la  letlrc  X  dons  les  planches  do 
Bojanus  et  se  voient  dans  les  figures  124  et  128. 

(c)  Bojanus,  Anatome  Testudinis  europeece,  fig\  124,  t. 

(d)  Idem,  ibid.,  iig.  124,  s. 

(e)  Idem,  ibid.,  iig.  124  ,  q,  p,  s. 


CHEZ    LES    REPTILES.  kkl 

Le  sang  veineux  de  toutes  les  parties  du  corps  se  réunit  ici 
dans  un  grand  sinus  commun  formé  par  la  jonction  de  la  veine 
cave  postérieure  et  des  deux  veines  caves  antérieures  résul- 
tant de  la  réunion  des  carotides  et  des  sous-clavières  de  chaque 
coté  du  cœur.  Ce  réservoir,  comme  nous  l'avons  déjà  vu,  dé- 


nies par  le  système  des  veines  verté- 
brales ou  veines  azygos  (a). 

Une  de  ces  branches  anastomoti- 
ques,  qui  réunit  ainsi  la  veine  hypo- 
gaslriquc  aux  veines  vertébrales,  est 
le  point  d'origine  du  système  des 
veines  afférentes  rénales  ,  ou  veines 
portes  de  Jacobson.  Effectivement , 
en  passant  près  des  reins,  elles  four- 
nissent plusieurs  branches  qui  se 
ramifient  dans  la  substance,  de  ces 
glandes  et  qui  donnent  naissance  aux 
veines  rénales  efférentes  (6).  Ces  der- 
nières se  réunissent  à  des  veines  pro- 
venant des  ovaires  ou  des  testicules, 
et  constituent  sur  la  ligne  médiane  un 
tronc  impair  qui  n'est  autre  chose 
que  la  veine  cave  postérieure  (Bojanns 
l'appelle  veine  spermatique),  et  qui 
s'avance  obliquement  vers  le  foie  (c), 
traverse  cet  organe  et  va  déboucher 
dans  le  grand  sinus  veineux  cardia- 
que. Chemin  faisant ,  elle  reçoit  les 
veines  hépatiques  ou  vaisseaux  efi'é- 
rents  du  système  de  la  veine  porte 
hépatique  (d). 

Le  sang  de  la  tète  et  du  cou  revient 
vers  le  cœur  en  partie  par  les  veines 
jugulaires,  mais  principalement  par 
les  veines  vertébrales  antérieures  ou 
cervicales  ,  qui  débouchent  dans  les 
veines  axillaires  et  qui  reçoivent  aussi 


des  branches  anaslomotiques  de  la 
portion  dorsale  du  système  des  veines 
vertébrales  que  nous  avons  déjà  vues  se 
déverser  en  partie  dans  les  veines 
hypogastriques,  à  l'extrémité  posté- 
rieure de  l'abdomen. 

Enfin,  les  veines  caves  antérieures, 
résultant  de  la  jonction  des  veines 
jugulaires  et  sous-clavières  (ou  axil- 
laires) de  cliaque  côté,  débouchent, 
de  même  que  la  veine  cave  posté- 
rieure, dans  un  grand  sinus  veineux 
situé  au-dessus  du  cœur  et  s'ouvrnnt 
dans  l'oreillette  droite. 

J'ajouterai  que  les  veines  intercos- 
tales se  rendent  dans  les  veines  ver- 
tébrales ou  azygos,  et  s'anastomosent 
aussi  non-seulement  entre  elles,  mais 
aussi  avec  le  tronc  des  grosses  veines 
abdominales  (ou  veines  ombilicales), 
de  façon  que,  suivant  les  circonstan- 
ces, le  sang  qu'elles  transportent  peut 
arriver  au  cœur,  soit  par  les  veines 
caves  antérieures,  soit  par  le  système 
de  la  veine  porte  hépatique,  soit  enfin 
par  le  système  de  la  veine  porte  rénale 
et  la  veine  cave  postérieure  (e);  mais  la 
voie  la  plus  large  et  la  plus  fréquentée 
paraît  être  celle  formée  par  les  troncs 
hypogastriques,  et  les  veines  abdomi- 
nales qui  font  suite  à  ces  vaisseaux  et 
qui  vont  se  distribuer  dans  le  foie. 


(a)  Bojanus,  Op.  cit.,  fig.  124,  l. 

(b)  Idem,  ibid.,  fig.  424  ,  o. 

(c)  Idem,  ibid.,  fig.  12  4,  s  ;  fig.  128,  : 

(d)  Idem,  ibid.,  fig.  128,  fig.  178,  etc. 

(e)  Idem,  ibid.,  fig.  124  et  127. 

III. 


IÎ-.  150,^;  fis,  161,*,  etc. 


29 


ll'lS  APPAREIL    DK    LA    ClBCULAÏION 

bouche  à  son  tour  dans  l'oreillette  droite,  et  par  conséquent, 
pour  achever  l'élude  du  cercle  irrigatoire  de  ces  Animaux,  il 
ne  nous  reste  plus  qu'à  examiner  les  vaisseaux  de  la  petite  cir- 
culation, c'est-à-dire  l'artère  et  la  veine  pulmonaires. 
vaisseaux        §lk. —  L'artère  pulmonaire,  qui,  chez  les  Batraciens,  est 

de  la  petite  "  '  7    17  t 

circulation.  une  simple  branche  de  l'aorte,  s'isole  chez  les  Reptiles,  et  naît, 
comme  nous  l'avons  déjà  vu,  par  un  orifice  distinct  placé  dans 
la  portion  veineuse  du  ventricule  unique,  ou  dans  le  ventricule 
droit,  quand  il  existe  deux  ventricules  distincts.  Elle  adhère 
d'abord  aux  crosses  aortiques,  et  contribue  à  former  ainsi  le 
faisceau  vasculaire  auquel  on  donne  les  noms  de  conus  arterio  - 
sus  (1)  :  mais  bientôt  elle  s'en  dégage,  remonte  un  peu  à  gauche, 
et  se  divise  en  deux  troncs,  dont  l'un  se  porte  directement  en 
dehors  et  à  gauche,  puis  se  recourbe  plus  ou  moins  en  arrière 
pour  gagner  le  poumon  correspondant,  tandis  que  l'autre  se 
dirige  en  sens  opposé,  passe  au-dessus  de  la  base  des  crosses 
aortiques  et  se  rend  de  la  même  manière  au  poumon  droit  (2). 
Les  veines  pulmonaires  ne  présentent  aussi  rien  de  bien 
particulier.  Elles  se  réunissent  de  chaque  côté  en  un  tronc 
commun  qui  se  rapproche  de  son  congénère  pour  déboucher  à 
côté  de  celui-ci  dans  l'oreillette  gauche,  ou  se  confond  même 
avec  lui,  et  l'orifice  tantôt  simple,  tantôt  double,  qui  termine  ce 
système,  est  garni  de  valvules  pour  empêcher  le  reflux  du  sang 
de  l'intérieur  du  cœur  (S). 

(1)  Chez  les  Crocodiles,  ce  vaisseau  rai,  les  branches  de  chacune  des  ar- 
est  renflé  en  forme  de  bulbe  à  sa  tères  pulmonaires  se  ramifient  exclu- 
base,  comme  le  sont  aussi  les  deux  sivement  dans  le  poumon  conespon- 
troncs  aortiques  (a).  dant  ;  mais  ,    chez    le   Python,   celle 

(2)  Chez  les  Serpents  qui  n'ont  qu'un  du  poumon  droit  envoie  une  grosse 
seul  poumon  bien  distinct,  tels  que  les  branche  au  petit  poumon  (c). 
Couleuvres ,   Tarière  pulmonaire,   ne  (3)   Nous  avons  vu  ci-dessus   que 
forme  qu'un  seul  tronc  ;6).  En  gêné-  chez  quelques  Chéloniens  il  existe  des 

(a)  Voyez  Martin  Saint-Ange,  Circulation,  fig.  17  et  18. 

(6)  Echlemm,  Op.  cit.  (Zeitschrift  fur  Physiologie  von  Trcviranus,  t.  11,  p.  118). 

(c)  Jacquart,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  4e  série,  t.  IV,  pi.  9,  lig.  \). 


CHEZ    LES    REPTILES.  /lÛ-9 

La  petite  circulation  est  complétée  de  la  sorte;  mais,  chez  les 
Serpents,  le  réseau  capillaire  respiratoire  des  poumons  reçoit 
aussi  du  sang  provenant  de  l'aorte  dorsale  et  en  verse  dans 
la  veine  porte  (1). 


anomalies  dans  le  mode  de  terminai- 
son d'une  des  veines  pulmonaires  (a). 
(1)  Le  réseau  capillaire  du  poumon 
des  Serpents  est  aussi  en  communica- 
tion avec  d'autres  vaisseaux  de  la 
grande  circulation,  et  notamment  avec 
une  série  des  brandies  qui  naissent  de 
l'aorte  dorsale  et  cpii  se  distribuent 
dans  la  portion  membraneuse  de  ce 


viscère,  tandis  que  les  artères  pulmo- 
naires proprement  dites  se  ramifient 
dans  la  portion  réticulée.  Des  veines 
correspondantes  aux  artères  pulmo- 
naires accessoires  vont  déboucher  dans 
le  tronc  de  la  veine  porte.  La  disposi- 
tion de  ces  divers  vaisseaux  a  été 
étudiée,  d'abord  par  M.  Hyrtl  (6),  puis 
par  M.  Calori  (c). 


(a)  Voyez  ci-dessus,  page  413. 

(b)  Strena  anatomica  de  novis  pulmonum  rasis  in  Ophidiis  nvperrime  observatis  rerum 
gnaris  oblata  a  J.  Hyrll,  ad  solemnem  cathedra  anatomicœ  uiaugurationem.  Prague,  1837. 

(c)  Calori,  De  vasis  pulmonum  Ophidiorum  secundariis  observationes  nova:  (Novi  Commentarii 
Academice  scientiarum  Bonuniensis,  1842,  t.  V,  p.  375). 


VINGT -NEUVIEME  LEÇON. 

De  l'appareil  circulatoire  chez  les  Oiseaux. 

Tendances        S  1 .  —  En  passant  en  revue  l'appareil  eirculaloire  chez  les 

de  la  Nature  ••■■■*»  t»  m  i 

dans       Poissons,  les  Batraciens  et  les  Reptiles,  nous  avons  vu  que  dans 

la  constitution  ,,...  i      i  )         i  i  it* 

de  cet  appareil,  chacune  de  ces  grandes  divisions  de  1  embranchement  des  ver- 
tébrés, son  mode  de  conformation  s'éloigne  de  plus  en  plus 
de  celui  qui  est  commun  à  tous  ces  Animaux  pendant  les  pre- 
mières périodes  de  la  vie  embryonnaire,  et  que  les  divers  types 
permanents  qu'il  nous  offre  ainsi  se  distinguent  des  formes 
transitoires  primaires  par  des  caractères  plus  ou  moins  impor- 
tante. L'étude  des  Oiseaux,  dont  nous  avons  maintenant  à  nous 
occuper,  nous  montrera  ces  mêmes  tendances  se  prononçant 
d'une  manière  encore  plus  marquée. 

En  effet,  l'appareil  circulatoire  des  Oiseaux  ressemble  d'abord 
en  tout  à  celui  des  jeunes  embryons  des  Poissons,  des  Batra- 
ciens et  des  Reptiles  ;  mais  cet  état  n'est  que  transitoire ,  et  de 
même  que  chez  ces  divers  Vertébrés  inférieurs,  toutes  les  parties 
dont  ce  système  irrigatoire  se  compose  se  perfectionnent,  et  ici  ce 
perfectionnement  est.  porté  plus  loin  que  dans  aucune  des  classes 
précédentes.  Du  reste,  en  s'élevant  ainsi  en  organisation,  il  ne 
passe  par  aucune  des  formes  propres  à  l'état  permanent  du 
même  système  chez  les  Animaux  inférieurs.  Ce  n'est  pas  le 
système  circulatoire  du  Poisson  qui  se  perfectionne  pour  con- 
stituer le  système  circulatoire  des  Reptiles,  ni  celui-ci  qui,  en  se 
développant  plus  complètement,  devient  un  appareil  circulatoire 
d'Oiseau.  Chacun  de  ces  systèmes  se  constitue  à  l'aide  d'un  fonds 
commun  ;  mais  pour  arriver  à  la  forme  qui  lui  sera  propre,  il 


APPAREIL    DE    LA   CIRCULATION    CHEZ    LES    OISEAUX.  4-51 

suit  nue  route  différente  de  celle  qui  a  été  parcourue  par  le  mémo 
système  chez  les  autres  Vertébrés.  Quelques  anatomistes,  se 
laissant  séduire  par  de  vogues  ressemblances,  ont  été  con- 
duits à  croire  que  la  Nature,  en  créant  cet  appareil,  marchait 
toujours  dans  la  même  voie,  et  jalonnait,  pour  ainsi  dire,  la 
route  en  laissant  à  chaque  étape  une  des  formes  organiques 
par  lesquelles  tous  les  Vertébrés  devaient  passer,  mais  qui 
n'étaient  que  des  formes  transitoires  pour  les  êtres  les  mieux 
doués,  tandis  qu'elles  deviennent  permanentes  pour  ceux 
qui  restaient  en  chemin.  Je  ne  connais  air  une  série  d'organes 
dont  les  modifications  paraissent,  au  premier  abord,  aussi 
favorables  à  cette  hypothèse  de  la  transmutation  des  espèces; 
mais  ici.  de  même  que  partout  ailleurs,  elle  ne  résiste  pas  à  un 
examen  sérieux  et  ne  peut  conduire  qu'à  donner  de  ces  choses 
une  idée  fausse  1). 

S  *2.  —  Le  cœur  des  Oiseaux  est  partagé,  comme  relui  des  Enveloppement 
Crocodiles,  en  deux  moitiés  parfaitement  distinctes,  et  com- 
posées chacune  d'un  ventricule  el  d'une  oreillette.  Il  se  perfec- 
tionne même  plus  que  chez  ces  Reptiles,  car  la  division  du 
travail  physiologique  3  est  portée  plus  loin,  el  le  ventricule  droit 
esl  affecte  exclusivement  au  service  de  la  circulation  pulmo- 
naire; mais,  pour  arriver  a  cet  état,  le  eveur  des  Oiseaux,  en 
partant  d'une  forme  qui  lui  est  commune  avec  celui  de  l'em- 
bryon des  Poissons,  des  Batraciens  et  des  Reptiles,  ne  passe 
par  aucun  des  modes  d'organisation  qui  sont  définitifs  chez  ces 
Vertébrés  inférieurs,  et  dès  qu'il  cesse  d'être  semblable  a  celui 
d'un  Vertébré  quelconque,  il  offre  des  caractères  propre-  aux 
Vertébrés  à  sang  chaud. 

1    Les  opinions  que  j'ai  cru  devoir  indignées  aussi,  pour  la  plupart,  dan? 

combattre  ici  sont  soutenues  par  le  un  opuscule  du  même  savant,  sur  ce 

professeur  d'anatomie  comparée   au  qu'il   nomme    Yanatomie   transeen- 

Muséum  d'histoire  naturelle,  et  sont  étante  (a). 

-  ares,  Précis  d'anatmie  transcendante  appliquée  à  la  physiologie.  In-8,  Paris,  1842.  ' 


452  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

En  effet,  nous  avons  vu  que  chez  les  Vertébrés  inférieurs,  où 
la  séparation  commence  à  s'établir  entre  les  parties  droite  et 
gauche  de  cet  organe,  c'est  d'abord  dans  la  portion  auriculaire 
que  le  cloisonnement  s'opère,  de  façon  que  chez  les  Batraciens 
et  la  plupart  des  Reptiles  il  y  a  deux  oreillettes  et  un  seul  ven- 
tricule. Chez  les  Oiseaux,  le  travail  organogénique,  à  l'aide 
duquel  le  cœur  acquiert  peu  à  peu  le  mode  de  constitution  qui 
lui  est  propre,  suit  une  autre  direction.  Le  cloisonnement  com- 
mence dans  la  portion  ventriculaire  du  cœur  et  s'y  achève  avant 
que  la  séparation  soit  devenue  complète  entre  les  deux  ventri- 
cules (1).  11  y  a  donc  chez  l'Oiseau  à  l'état  d'embryon,  comme 
chez  les  Batraciens  ou  le  Reptile  à  l'état  adulte,  un  cœur  à  trois 
loges  ou  un  cœur  à  quatre  loges  incomplètement  séparées  ;  mais 
chez  l'embryon  de  l'Oiseau,  c'est  la  portion  ventriculaire  qui 
est  double  et  la  portion  auriculaire  qui  est  simple  ou  incom- 
plètement séparée;  tandis  que  chez  les  Batraciens  et  les  Rep- 
tiles, c'est  la  portion  auriculaire  qui  est  double  et  la  portion 
ventriculaire  qui  est  simple  ou  incomplètement  divisée.  Ainsi 
le  cœur  d'un  Reptile  adulte  n'est  jamais  la  représentation  per- 
manente de  l'une  quelconque  des  formes  transitoires  du  cœur 
de  l'Oiseau. 
structure        Je  ne  vois  rien  d'important  à  noter  relativement  à  la  position 

du  cœur. 

ou  à  la  forme  extérieure  du  cœur  dans  cette  classe  d'Animaux  ("2)  : 


(1)  Nous  reviendrons  sur  ce  sujet  sur  la  ligne  médiane  à  la  partie  anté- 
lorsque  nous  étudierons  le  développe-  rieure  du  thorax,  immédiatement 
ment  des  Animaux  vertébrés,  et  pour  derrière  la  cloison  diaphragmalique 
des  détails  plus  précis  relativement  à  antérieure,  et  le  sac  péricardique  qui 
l'établissement  tardif  de  la  cloison  le  renferme  adhère  en  arrière  à  la  cloi- 
inter-auriculaire  ,  je  renverrai  aux  son  cliaphragmatique  postérieure  (6), 
écrits  de  M.  Baer  (a).  et  sur  les  côtés  au  réservoir  pneuma- 

(2)  Le  cœur  des  Oiseaux  est  situé  tique  cervical  (c).  La  forme  de  cet  or- 
fa)   Voyez  son   article   sur   le  développement  des  oiseaux ,  dans  le  Traité  de  Physiologie  par 

Burdach,  t.  III,  p.  303. 

(6)  Voyez  tome  II,  page  400. 
(e)  Voyez  tome  II,  pa^e  354, 


CHEZ    LES    OISEAUX.  453 

mais  cet  organe,  d'un  volume  considérable  (1),  offre  dans  sa 
structure  intérieure  quelques  particularités  qui  ne  se  rencontrent 
pas  ailleurs.  Le  ventricule  droit,  beaucoup  moins  développé  que 
le  ventricule  gauche  ,  enveloppe  en  quelque  sorte  celui-ci  dans 
une  moitié  de  sa  circonférence,  et  la  section  transversale  de  sa 
cavité  présente  par  conséquent  la  forme  d'un  croissant.  Mais  ce 
qui  est  plus  digne  de  remarque,  c'est  la  disposition  de  sa  valvule 
auriculaire.  En  effet,  cette  soupape,  au  lieu  d'être  formée  comme 
d'ordinaire  par  des  languettes  membraneuses  dont  le  bord  est 
retenu  à  l'aide  de  cordons  fixés  aux  parois  du  ventricule,  se  com- 
pose d'une  grande  lame  charnue  qui  semble  être  une  portion  de 
la  paroi  interne  du  ventricule,  détachée  de  la  cloison  interventri- 
culaire.  Cette  dernière  est  convexe,  et  l'oritice  auriculo-ventri- 
culaire  se  trouve  dans  l'espace  compris  entre  elle  et  la  valvule 


gane  est  toujours  conique  :  chez  le  Coq 
il  est  allongé  et  aigu  (a)  ;  mais  chez 
d'autres  Oiseaux,  tels  que  l'Autruche, 
il  est  large  et  court.  Les  oreillettes  en 
occupent  les  parties  antérieures  ,  su- 
périeures et  latérales;  elles  sont  pe- 
tites et  ne  se  prolongent  que  peu  en 
forme  d'aurieules  ;  celle  du  côté  droit 
est  la  plus  grande. 

(1)  M.  J.  Jones  a  fait  récemment 
une  série  assez  nombreuse  d'obser- 
vations comparatives  sur  les  rapports 
qui  existent  entre  le  poids  du  cœur  et 
le  poids  total  de  l'organisme  chez  di- 
vers Vertébrés,  et  il  a  trouvé  que  chez 
les  Oiseaux  le  développement  relatif 
de  ce  viscère  est  le  plus  considérable. 
Chez  le  Dindon  sauvage  [Meleagris 
gallopavo),  son  poids  était  d'environ 
l/279e  du  poids  du  corps  ;  chez  un 
Chat -Huant   d'Amérique    [Syrnium 


nebulosum),  l/220e;chez  un  Vautour 
(le  Coathartes  atratus),  1/1  î  3e,  et  chez 
le  Tantale  d'Amérique  {T.  loculator), 
de  1/I03eetmême  de  1/100°  du  poids 
total. 

Chez  les  Reptiles  que  M.  Jones  a 
examinés  sous  ce  rapport,  le  cœur  ne 
constituait  que  de  1/354°  à  1/592* 
du  poids  du  corps. 

Enfin,  chez  les  Mammifères,  le 
rapport  entre  le  poids  du  cœur  et  le 
poids  du  corps  s'est  trouvé  n'être 
quelquefois  que  de  1 :  280,  et  ne  s'est 
pas  élevé  au-dessus  de  1  :  128. 

Il  est  aussi  à  noter  que,  chez  les 
Oiseaux,  les  battements  de  cet  organe 
sont  plus  fréquents  que  chez  les  autres 
Vertébrés  ;  on  en  observe  rarement 
moins  de  110  par  minute,  et  chez 
quelques  espèces  on  en  compte  d'ordi- 
naire environ  200  (6). 


(a)  Voyez iM lias  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Oiseaux,  pi.  3,  fig-.  1. 

(6)  J.  Jones,  Investigations  Chemical  and  Physiological  relative  to  certain  American  Verte- 
brata,  p.  74  et  suiv.  (extrait  AesMém.  de  la  Soc.  Smithsonienne  à  Washington,  1856). 


hbll  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

musculaire  dont  il  vient  d'être  question,  de  façon  que,  quand 
celle-ci  vient  à  se  contracter  au  moment  de  la  systole,  elle  s'ap- 
plique contre  cette  cloison  et  ferme  le  passage  (1). 

La  valvule  auriculo-venlriculairc  du  côté  gauche  ne  présente 
pas  cette  structure  et  n'offre  rien  de  particulier  (2).  Les  parois 
charnues  de  ce  ventricule  artériel  sont  d'une  grande  épais- 
seur (3),  et  l'orifice  qui  sert  à  la  sortie  du  sang  est  placé  comme 


(1)  Le  jeu  de  cette  valvule  charnue 
dépend  aussi  de  la  direction  de  ses 
fibres  qui  sont  disposées  obliquement 
en  travers.  Quand  celles-ci  se  relâ- 
chent, l'arc  de  cercle  décrit  par  cette 
lame  musculaire  est  plus  grand  que 
celui  représenté  par  la  paroi  inler- 
ventriculaire  et  embrassé  par  la  pre- 
mière. Son  bord  antérieur  adhère  au 
bord  externe  de  l'orifice  auriculo- 
ventriculaire,  et  son  bord  libre  est 
dirigé  obliquement  en  arrière  vers  la 
pointe  du  cœur.  Enfin,  il  existe  aussi 
un  faisceau  charnu  saillant  qui  garnit 
le  bord  interne  de  l'orifice  auriculo- 
ventriculaire,  et  concourt  aussi  à  le 
fermer  au  moment  de  la  systole.  La 
structure  et  le  mécanisme  de  cette 
valvule  ont  été  bien  observés  par 
Blumenbach  (a), 'et,  pour  en  avoir  une 
idée  nette,  il  suffit  de  jeter  les  yeux 
sur  les  figures  de  l'intérieur  du  cœur 
du  Cygne,  données  par  MM.  Carus  et 
V.  Otto  (b).  Mais,  pour  plus  de  délails 
sur  la  structure  et  le  jeu  de  cet  appa- 
reil ,  je  renverrai  à  un  travail  spécial 
de  M.  King  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  le  ventricule 
droit  ne  présente  que  peu  ou  point  de 


faisceaux  charnus  saillants  à  son  in- 
térieur, et  qu'il  ne  s'étend  pas ,  à 
beaucoup  près,  jusqu'à  la  poinie  du 
cœur.  Enfin,  les  valvules  qui  garnis- 
sent l'entrée  de  l'artère  pulmonaire 
sont  très  épaisses  et  souvent  attachées 
à  de  petits  styles  cartilagineux  ou 
même  osseux,  logés  dans  les  parois  du 
vaisseau  {d). 

(2)  La  valvule  auriculo-ventriculaire 
gauche  se  compose  d'un  voile  mem- 
braneux qui  naît  du  bord  de  l'ouver- 
ture, et  qui  est  divisé  en  deux  ou  trois 
portions  dont  les  bords  libres  sont 
comme  déchirés  et  donnent  attache 
à  une  multitude  de  filaments  tendi- 
neux. Ceux-ci  vont  se  fixer,  par  leur 
extrémité  opposée,  tantôt  directement 
sur  les  parois  du  ventricule,  tantôt 
sur  un  ou  plusieurs  mamelons  charnus 
qui  font  saillie  à  la  surface  interne  de 
celte  cavité  ;  disposition  qui  se  voit 
chez  la  Grue  et  l'Autruche. 

(3)  En  général,  les  parois  du  ventri- 
cule gauche  sont  deux  ou  trois  fois 
plus  épaisses  que  celles  du  ventricule 
droit.  On  y  remarque  ordinairement 
un  grand  nombre  de  piliers  charnus 
plus  ou  moins  entrelacés. 


(a)  Blumenbach,  Spécimen  physiologiœ  comparatœ  inter  Animalia  calidi  sanguinis  vivipara  et 
ovipara,  1789,  p.  13. 

(6)  Carus,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  6,  fig.  2,  3,  4  et  5. 

(c)  Owen,  Aves,  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  t.  I,  p.  332). 

(d)  King,  On  the  Safty  Valve  in  Birds  {Guy's  Hospital Reports,  1837,  t.  II,  p.  1G3,  pi.  3). 


artériel. 


CHEZ    LES    OISEAUX.   "■      *  &55 

d'ordinaire  à  sa  partie  antérieure  et  interne.  Elle  conduit  dans 
l'aorte,  et  ses  bords  sont  garnis  de  trois  valvules  semi-lunaires, 
au  lieu  de  deux,  comme  chez  les  Reptiles. 

L'oreillette  gauche  communique,  d'autre  part,  avec  les  veines 
pulmonaires  qui  débouchent  à  sa  paroi  supérieure  dans  une 
espèce  de  sinus  séparé  de  la  portion  auriculaire  ou  extérieure 
de  ce  réservoir  par  un  bourrelet  charnu  (1). 

L'oreillette  droite  est  également  subdivisée  de  la  sorte  en 
deux  loges,  savoir,  un  sinus  où  aboutissent  trois  veines  caves, 
et  une  portion  auriculaire ,  inférieure  et  externe ,  qui  est  très 
musculaire  (2). 

§  3.  —  Le  système  irrigatoire  qui  part  du  cœur  est  disposé  système 
primitivement  de  la  même  manière  que  chez  les  Batraciens  et 
les  Reptiles,  mais  en  se  développant  il  éprouve  d'autres  modifi- 
cations et  se  trouve  réduit  aux  vaisseaux  qui,  chez  les  Tortues, 
ainsi  que  chez  les  Crocodiles  et  la  plupart  des  autres  Sauriens, 
constituent,  d'une  part  l'artère  pulmonaire,  d'autre  part  la 
crosse  aortique  du  côté  droit  et  ses  dépendances.  Ici  la  crosse 
aorlique  gauche  disparaît  de  bonne  heure,  et  il  n'existe  aucune 
communication  directe  entre  les  vaisseaux  qui  naissent  des 
deux  ventricules  du  cœur,  et  qui  reçoivent,  l'un  du  sang  arté- 
riel, l'autre  du  sang  veineux. 

Par  conséquent,  chez  les  Oiseaux,  le  mélange  du  sang  noir 
et  du  sang  vermeil,  que  nous  avons  vu  s'effectuer  toujours,  chez 

(1)11  est  également  à  noter  que  dans  pelée  fosse  ovale,  qui  correspondu 

la  portion  appendiculaire  ou   auricu-  l'orifice  de  communication  inter-auri- 

laire  de  l'oreillette,  les  colonnes  char-  culaire  chez  l'embryon, 

nues  dont  les  parois  de  cet  organe  sont  Le  sinus  ou  la  portion  veslibulaire 

garnies  y  prennent  beaucoup  de  dé-  de  l'oreillette  est  séparée  de  la  portion 

veloppement.  appendiculaire  par  des  brides  cliar- 

(2)  On  remarque  aussi  dans  l'oreil-  nues  valvulaires,  dont  la  disposition 

lelle  droite,  à  la  cloison  qui  la  sépare  chez  PEmeu,  ou  Casoar  à  casque,  a  été 

de  sa  congénère,  une  dépression  ap-  décrite  avec  détail  par  M.  Oweu  (a). 

(û)  Owen,  Aves  (Todd's  Cyclop.  ofAnat.  and  Physiol,  1. 1,  p.  330,  fig.  167). 


456  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

les  Reptiles  et  les  Batraciens,  soit  dans  l'intérieur  du  cœur,  soit 
tout  près  de  l'origine  du  système  artériel,  n'a  lieu  nulle  part; 
la  totalité  du  fluide  nourricier,  après  être  revenu  des  diverses 
parties  de  l'organisme,  passe  dans  les  poumons  et  y  subit  l'in- 
fluence de  l'air  ;  la  totalité  de  ce  liquide  traverse  aussi  deux  fois 
le  cœur  pour  achever  son  trajet  circulatoire  :  et  c'est  pour  expri- 
mer ces  caractères  physiologiques  que  l'on  dit,  dans  le  langage 
concis  employé  par  les  zoologistes ,  que  les  Oiseaux  sont  des 
Animaux  à  circulation  double  et  complète. 
Aorte.  §  ix.  —  Ainsi  toutes  les  artères  de  la  grande  circulation  nais- 
sent d'un  tronc  unique:  l'artère  aorte,  qui,  en  se  dégageant  du 
ventricule  gauche,  se  recourbe  à  droite  et  en  haut,  passe  sur  le 
côté  de  la  bronche  droite  et  de  l'œsophage,  gagne  la  face  infé- 
rieure de  la  colonne  vertébrale,  et  se  dirige  ensuite  directement 
en  arrière  jusqu'à  l'extrémité  postérieure  du  corps  (1). 

Aussitôt  après  sa  naissance  et  avant  de  se  recourber  en  forme 
de  crosse,  ce  gros  tronc  envoie  vers  la  tête  et  les  ailes  une  paire  de 
vaisseaux  appelés  brachio-céphaliques  (2),  qui  sont  en  général 
très  gros,  et  qui  ne  tardent  pas  à  se  bifurquer  pour  constituer 
les  artères  carotides  et  les  artères  sous-clavières  (3).  Les  pre- 

(1  )  Chez  quelques  Oiseaux  la  crosse  rieure  ou  antérieure,  l'autre  supérieure 
aortique  est  fort  dilatée,  et  se  rétrécit  ou  postérieure  (6). 
assez  brusquement  peu  après  avoir  (3)  Les  deux  troncs  brachio-cépha- 
gagné  la  face  inférieure  de  la  colonne  liques  naissent  souvent  si  près  du 
vertébrale,  bien  qu'elle  n'ait  fourni  cœur,  qu'au  premier  abord  il  semble 
dans  ce  point  aucune  branche  impor-  y  avoir  trois  artères  partant  directe- 
tante.  Cette  disposition  a  été  signalée  ment  de  ce  dernier  organe.  Il  est  aussi 
par  Barkow  chez  le  Pigeon  de  roche  à  noter  que  chez  beaucoup  d'Oiseaux 
{Columba  Livia)  (a).  ces  deux  premières  branches  de  l'aorte 

(2)  Avant  de  donner  naissance  aux  sont  si  grosses,  que  la  portion  suivante 

troncs  brachio-céphaliques,  l'aorte  de  la  crosse  aortique  elle-même  semble 

fournit  aux  parois  du  cœur  deux  petites  être   une  simple  branche   du   tronc 

artères  dites  coronaires,  l'une  infé-  commun  dont  elles  partent.  Du  reste, 

(a)  Barkow,  Disquisitiones  recentiores  de  arteriis  Mammalium  et  Avium  {Nova  Acta  Acad.  Nat. 
curios.,  t.  XX.pl.  34,  fig-.  40). 

(6)  Voyez  E.  Halm,  Com)nentatio  de  arteriis  Anatis,  pi.  4,  fig.  4. 


Carotides. 


CHEZ    LES    OISEAUX.  657 

miers  remontent  côte  à  côte,  au  milieu  des  muselés  qui  gar- 
nissent en  avant  la  portion  cervicale  de  la  colonne  vertébrale,  et 
arrivés  sous  la  base  du  crâne,  ces  vaisseaux  se  divisent  chacun 


ie  volume  relatif  des  artères  brachio- 
céphaliques  et  de  la  crosse  aortique 
dépend  des  rapports  qui  existent  entre 
le  développement  des  parties  que  ces 
vaisseaux  sont  destinés  à  nourrir  :  sa- 
voir, d'une  part,  la  tète  et  les  ailes  ; 
d'autre  part,  les  pattes  et  l'abdomen. 
Ainsi,  chez  l'Aigle,  dont  le  vol  est  puis- 
sant, l'aorte,  après  avoir  fourni  les 
deux  artères  brachio  -  céphaliques  , 
n'est  guère  plus  grosse  que  ces  bran- 
ches, tandis  que  chez  l'Autruche,  dont 
les  ailes  sont  rudimentaires,  ces  der- 
nières sont  très  grêles,  et  l'aorte  con- 
tinue à  avoir  un  calibre  considérable. 
Les  carotides  primitives  naissent  en 
général  d'une  manière  symétrique , 
comme  cela  se  voit  chez  le  Coq  (a), 
les  Pigeons,  tous  les  Rapaces,  l'Autru- 
che d'Afrique,  l'Aptéryx  (6),  etc.  ;  mais 
il  arrive  souvent  qu'elles  proviennent 
toutes  les  deux  du  tronc  brachio- 
céphalique  gauche  ;  disposition  qui 
paraît  être  surtout  très  commune  chez 
les  Passereaux,  où  elle  a  été  constatée 
dans  beaucoup  d'espèces  par  Bauer, 
par  Meckel   et  par   M.  Stannius  (c). 


Meckel  l'a  observée  aussi  chez  le  Nan- 
dou, ou  Autruche  d'Amérique,  et  chez 
le  Toucan.  Chez  le  Flamant ,  c'est 
au  contraire  le  tronc  céphalique  droit 
qui  fournit  les  deux  carotides  primi- 
tives (d).  Il  est  aussi  à  noter  que  par- 
fois les  deuv.  carotides  primitives 
restent  confondues  en  un  tronc  impair 
jusque  vers  la  partie  supérieure  du 
cou  :  chez  le  Pic  vert  (e),  la  Pie  (/)  et 
la  Grèbe  {g),  par  exemple.  Du  reste, 
lors  même  que  ces  deux  vaisseaux  sont 
distincts  dès  la  région  claviculaire  et 
naissent  des  deux  troncs  brachio- 
céphaliques,  ils  ne  sont  jamais  placés 
symétriquement  de  chaque  côté  du 
cou  ,  mais  remontent  vers  la  tête, 
en  marchant  accolés  l'un  à  l'autre  , 
et  sont  le  plus  ordinairement  refoulés 
à  gauche  (h). 

Chez  les  Perroquets,  l'une  des  ca- 
rotides primitives  est  souvent  beau- 
coup plus  grêle  que  l'autre,  et  dans 
quelques  espèces  ces  artères  ne  sont 
représentées  que  par  un  tronc  unique  ; 
disposition  qui  a  été  observée  chez  les 
Cacatoès  par  Meckel  (■/).  Enfin,  on  voit 


(a)  Voyez  l'A tlas  du  Règne  animal,  Oiseaux,  pi.  3,  fig.  1. 

(6)  Owen,  On  Ihe  Anatomy  onthe  Southern  Aptéryx  (Trans.  ofthe  Zool.  Soc,  vol.  II,  p.  273, 
pi.  52,  fig.  2). 

(c)  Bauer,  Disquisitiones  circa  nonnullarum  Avium  systema  arteriosum.  Berlin,  d 825. 

—  Meckel,  Zur  Geschichte  des  Gefàss-Systems  der  Yogel  (Archiv  fur  Anat.  und  Physiol., 
1826,  p.  19,  et  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  364). 

—  Stannius  et  Siebold,  Nouveau  Manuel  d'anatomie  comparée,  1. 1,  p.  339. 

(d)  Meckel,  loc.  cit. 

(e)  Neugebauer,  Systema  venosum  Avium,  pi.  49,  fig.  2  (extrait  des  Mém.  des  curieux  de  la 
Nature,  t.  XXI). 

(f)  Bauer,  Op.  cit.,  fig.  5. 

(g)  Barkow,  Op.  cit.  (Archives  de  Meckel,  1829,  pi.  8,  fig.  1). 

(h)  Voyez  une  figure  de  l'appareil  circulatoire  de  la  Poule,  dessinée  par  Hunier  (Descriptive  and 
illustrated  Catalogue  ofthe  Physiolog.  Séries  ofCompar.  Anat.  contained  in  Ihe  Muséum  of  the 
Collège  of  Surgeons  in  London,  t.  II,  pi.  25). 

(i)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  367. 


458 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


en  deux  branches  principales  :  une  artère  carotide  externe  qui  se 
rend  à  la  face,  et  une  artère  carotide  interne  qui  pénètre  dans  le 

Artères  A 

Miw-ciavièrcs,  crâne  (1),  Les  artères  sous-cîavières  se  portent  en  dehors  pour 


aussi  quelquefois  ces  deux  carolides 
naître  séparément  et  se  réunir  en  un 
seul  tronc  vers  le  milieu  du  cou.  Cela 
a  été  observé  par  iVilsch  et  par  Meckel 
chez  le  Butor  (a),  mais  ne  se  rencontre 
pas  chez  tous  les  individus  de  celte 
espèce  (6). 

(1)  Le  mode  d'origine  et  de  distri- 
bution des  branchés  des  artères  caro- 
tides varie  un  peu,  et  pour  l'indiquer 
ici  avec  précision,  je  choisirai  comme 
exemple  l'Oie,  animal  dont  le  système 
artériel  a  été  étudié  avec  beaucoup  de 
soin  par  F.  Bauer  et  par  Hahn  (c).  A  la 
base  du  cou  il  naît  de  chaque  artère  ca- 
rotide primitive  :  1°  une  petite  artère 
thyroïdienne  inférieure  dont  partent 
un  rameau  bronchique  et  un  rameau 
laryngien  inférieur  ;  2°  une  artère 
œsophagienne  inférieure  ou  ascen- 
dante, dont  l'extrémité  supérieure, 
s'anastomose  avec  une  branche  de  la 
thyroïdienne  supérieure;  3°  une  ar- 
tère cervicale  ascendante  antérieure, 
ou  artère  sous-cutanée  du  cou  ;  U"  une 
artère  vertébrale,  qui  pénètre  dans  la 
série  de  trous  pratiqués  à  la  base  des 
apophyses  transverses  des  vertèbres 
cervicales,  fournit  une  artère  inter- 
costale antérieure ,  ainsi  qu'une  série 
de  branches  spinales,  et  se  termine 
près  de  la  tête  en  s'anastomosant  avec 


l'artère  occipitale  ;  5°  enfin  une  artère 
cervicale  transverse  dont  naît  une 
branche  sous-cutanée  supérieure  [d). 
Arrivée  près  de  la  tète  ,  l'artère 
carotide  primitive  fournit  quelques 
ramuscules ,  puis  se  divise  en  deux 
branches  :  une  artère  carotide  externe 
et  une  artère  carotide  interne.  Cette 
dernière  fournit  presque  immédiate- 
ment une  artère  occipitale  qui  souvent 
naît  directement  de  la  carotide  primi- 
tive, donne  des  ramuscules  aux  mus- 
cles voisins,  et  s'anastomose,  comme 
je  l'ai  déjà  dit,  avec  l'extrémité  supé- 
rieure de  l'artère  vertébrale  (e).  Par- 
venue sous  la  base  du  crâne,  la  caro- 
tide interne  pénètre  dans  un  canal 
osseux  et  se  bifurque  pour  constituer 
une  artère  carotide  cérébrale  et  une 
artère  ophthalmique  interne.  Celle-ci, 
après  avoir  fourni  une  branche  occi- 
pitale, entre  dans  la  fosse  temporale 
et  donne  naissance  à  de  petits  ra- 
meaux qui  s'anastomosent  avec  deux 
branches  provenant ,  l'une  de  l'artère 
ethmoïdale,  l'autre  de  l'artère  ophthal- 
mique externe,  et  constituent  près  de 
la  base  du  nerf  trijumeau  un  lacis  vas- 
culairetrès  remarquable, appelé  plexus 
temporal.  Puis  celte  artère  fournit  des 
ramuscules  aux  muscles  masséters  et  à 
l'articulation  de  la  mâchoire,  au  globe 


(fl)Nitscli,  Observationes  de  Avium  arteria  carotide  communi.  Halle,  1829. 
— ■  Meckel,  loc.  cit. 

(b)  Barkow,  Anatomisch-pathologisclie  Untersuchungen ,  vorzûglich  ùber  das  Schlagadersyslem 
der  Yogel  (Meckel's  Arch.  fur  Anat.,  1829,  p.  378). 

(c)  Bauer,  Disquisitiones  circa    nonnullarum    Avium   systema  arterinsum  (Thèse,   Berlin, 
4  825). 

—  E.  Hahn,  Commentatio  de  arteriis  Anatis.  Hanovre,  1830. 

(d)  Voyez  Hahn,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig-.  1 . 
(e)ldem,  Md.,\>\.  1,  fie;.  2. 


CHEZ    LES    OISEAUX.  Û.59 

aller  se  distribuer  aux  ailes;  mais,  avant  d'y  arriver,  elles  four- 
nissent de  chaque  côté  une  artère  thoracique,  dont  le  calibre,  très 
considérable,  est  en  rapport  avec  le  grand  développement  des 


de  l'œil  (artères  ciliaires  postérieures), 
à  la  paupière  inférieure  et  à  l'appareil 
lacrymal  ;  elle  se  relie  aussi  aux  ar- 
tères voisines  de  la  face  par  diverses 
anastomoses. 

Vartère  cérébrale,  constituée  par 
l'autre  branche  terminale  de  la  caro- 
tide interne ,  s'engage  dans  le  canal 
osseux,  dit  carolidien  ,  et  y  donne 
naissance  à  une  artère  ophthalmique 
externe  qui  longe  le  rete  mirabile  tem- 
poral dont  il  vient  d'être  question  ,  y 
fournit  des  rameaux,  puis  donne  nais- 
sance à  d'autres  petits  plexus ,  ainsi 
qu'aux  artères  elhmoïdales,  aux  ar- 
tères ciliaires  antérieures,  etc. 

En  poursuivant  sa  route  vers  le  cer- 
veau, cette  même  artère  carotide  céré- 
brale donne  naissance  à  une  artère 
sphéno-maxillaire,  et  arrive  bientôt 
dans  l'intérieur  de  la  boîte  crânienne  où 
elle  se  réunit  à  sa  congénère,  puis  s'en 
sépare  de  nouveau  et  se  divise  en  deux 
branches,  une  antérieure,  l'autre  pos- 
térieure. La  première  fournit  au  cer- 
veau plusieurs  ramuscules  qui  portent 
les  noms  des  parties  auxquelles  ils 
se  rendent  ;  l'un  de  ceux-ci,  en  s'ana- 
stomosant  avec  son  congénère,  consti- 
tue la  portion  antérieure  de  l'anneau 
vasculaire  appelé  cercle  de  Willû. 
La  branche  postérieure  a  reçu  le  nom 
d'artère  communicante,  parce  qu'elle 
va  s'anastomoser  avec  les  artères  céré- 
brales profondes,  puis  se  réunir  à  sa 
congénère  pour  déboucher  dans  l'ar- 
tère spinale,  qui  se  trouve  à   la  face 


inférieure  de  la  moelle  épinière  (a). 
Vartère  carotide  externe  ou  artère 
faciale  se  recourbe  en  avant  pour  ga- 
gner la  joue,  et  fournil  d'abord  une 
artère  laryngienne  supérieure  et  une 
artère  linguale,  qui  se  ramifient  dans 
la  région  hyoïdienne  et  dans  les  di- 
verses parties  de  la  paroi  inférieure 
de  la  bouche.  La  carotide  externe 
donne  ensuite  naissance  à  une  artère 
maxillaire  interne  qui  monte  vers  la 
fosse  temporale,  fournit  des  branches 
à  un  réseau  vasculaire  appelé  plexm 
maxillaire,  et  va  se  distribuer  dans 
la  région  frontale  de  la  face.  Enfin 
le  tronc  de  la  carotide  externe  gagne 
la  mandibule  supérieure  et  s'y  divise 
en  beaucoup  de  rameaux  dont  plu- 
sieurs s'anastomosent  avec  les  autres 
artères  de  la  face  (6). 

Chez  les  Oiseaux  dont  la  tète  est 
surmontée  d'une  crête  érectile,  le 
Coq,  par  exemple ,  une  des  branches 
terminales  de  cette  artère  mandibu- 
laire  prend  un  très  grand  développe- 
ment et  gagne  le  front  pour  aller  se  ré- 
pandre dans  cet  appendice  cutané  (c). 
Le  mode  de  division  de  l'artère  ca- 
rotide primitive  que  nous  venons 
d'étudier  chez  l'Oie  ne  se  rencontre 
pas  chez  tous  les  Oiseaux.  Ainsi,  chez 
la  Pie,  ce  tronc,  au  lieu  de  se  bifur- 
quer, se  partage  en  trois  branches 
presque  égales  en  grosseur,  dont  deux 
sont,  comme  d'ordinaire,  les  carotides 
interne  et  externe,  et  l'autre  est  l'ar- 
tère  occipitale,  qui    en   général   est 


(a)  Voyez  Baucr,  Op.  cit.,  Ilg',  4. 

(6)  Idem,  ibid,,  flg.  2. 

(ç)  Voyez  Curus  et  V.  Otto,  Tab.  Anal,  compai:  illuslr.,  pars  VI,  pi.  C,  fy.  7. 


/(.60  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

muscles  de  la  poitrine  auxquels  ce  vaisseau  se  rend.  Il  est  aussi 
à  noter  que  ces  artères  carotides  se  prolongent  jusque  dans  le 
voisinage  du.  bassin  et  fournissent  à  la  peau  du  ventre  une  multi- 
tude de  branches.  Le  réseau  vasculaire  ainsi  formé  reçoit  aussi 
du  sang  par  diverses  branches  des  artèresdela  région  pelvienne, 
et  il  constitue  quelquefois  un  plexus  sons-cutané  extrêmement 
riche,  où  la  circulation  du  sang  doit  se  faire  avec  une  grande 
activité  :  il  paraît  être  en  rapport  avec  les  fonctions  de  cette- 
partie  du  corps,  lorsque  les  Oiseaux  couvent  leurs  œufs;  et 
Barkow,  à  qui  l'on  en  doit  la  connaissance,  le  désigne  sous  le 
nom  de  rete  mirabile  de  l'appareil  d'incubation  (1). 


fournie  par  la  carotide  interne  (a\ 
Chez  le  Coq,  l'artère  laryngienne  est 
très  développée  et  provient  aussi 
directement  de  la  carolide  primi- 
tive (6). 

Chez  la  Grèbe,  les  différences  sont 
plus  considérables  (c).  On  ne  trouve  à 
la  base  du  cou  qu'une  seule  artère 
carolide  qui  provient  du  tronc  bra- 
chio-céplialique  gauche,  et  qui  passe 
dans  l'espèce  de  canal  osseux  formé 
à  la  face  antérieure  des  quatre  ou 
cinq  vertèbres  de  la  porlion  moyenne 
du  cou  par  le  rapprochement  des 
apophyses  épineuses  inférieures.  Ce 
tronc  impair  ne  se  divise  en  carotides 
droite  et  gauche  qu'à  peu  de  distance 
de  la  têle,  et  il  fournit  près  de  son 
extrémité  inférieure  :  1°  une  arlère  cer- 
vicale sous-cutanée  antérieure  qui  re- 
monte le  long  de  la  trachée,  et  forme  de 
chaque  côté,  à  la  partie  supérieure  du 
cou,  une  série  d'arcs  anastomotiques 


avec  l'artère  cervicale  sous-culanée  la- 
térale et  une  branche  de  l'artère  occi- 
pitale ;  2°  une  artère  œsophagienne  an- 
térieure ascendante  ;  3"  une  branche 
considérable  qui  se  divise  bientôt  pour 
constituer  plusieurs  rameaux  dont  les 
plus  importants  sont  l'artère  verté- 
brale gauche  et  l'artère  cervicale 
transversale  gauche,  laquelle  donne  à 
son  tour  naissance  à  l'artère  sous- 
cutanée  latérale  déjà  mentionnée.  Du 
côté  droit,  celte  arlère  sous-cutanée 
latérale  du  cou  naît  directement  de 
Tarière  sous-clavière  dans  le  point 
correspondant  à  l'origine  de  la  caro- 
tide commune  du  côlé  gauche. 

Le  mode  d'origine  et  de  distribu- 
tion des  carotides  est  à  peu  près  le 
même  chez  le  !'ic  vert  (d], . 

(1)  Souvent  les  arlères  thoraciques 
sont  si  fortes,  qu'elles  paraissent  cire 
la  continuation  du  tronc  des  sous-cla- 
vières,  et  que  les  artères  axillaitcs  ont 


(<?)  Baucr,  Op.  cit.,  p.  9. 

(b)  Hunier,  loc.  cit.,  pi.  25,  fîg.  t. 

(c)  Voyez  Barkow,  Op.  cit.  (Archiv  de  Meckcl,  4820,  pi.  8,  fi-,  4). 

- —  Milne  Edwards,  Cours  élémentaire  de  zoologie,  p.  402,  fîg.  250. 

(d)  Voyez  Neugebauer,  S'jst.  venosum  Avium  (Nova  Acta  Acad.  Nal.  curios.,  i.  XXI,  pi.  40, 


CHEZ    LES    OISEAUX.  &61 

Maorte  descendante,  c'est-à-dire  la  portion  de  l'aorte  qui  fait 
suite  à  la  crosse  et  qui  se  dirige  vers  le  bassin,  fournit  de  chaque 
côté  plusieurs  artères  intercostales  et  en  dessous  les  artères 
viscérales. 

Quelquefois  les  artères  intercostales  de  la  partie  antérieure  du 
thorax,  au  lieu  de  naître  chacune  directement  de  l'aorte,  provien- 
nent d'une  paire  de  vaisseaux  longitudinaux  intermédiaires,  qui 
sont  formés  par  l'anastomose  d'une  branche  descendante  de 
l'artère  vertébrale  et  une  branche  ascendante  de  la  première 
intercostale  abdominale  (1).  Les  intercostales  suivantes  ne  pré- 


Artères 

du  tronc. 


l'apparence  de  branches  qui  en  naî- 
traient (a). 

Le  plexus  sous-cutané  abdominal, 
qui  est  formé  par  les  branches  ter- 
minales de  ces  artères  Ihoraciques, 
est  extrêmement  développé  chez  la 
Grèbe  (6  .  Le  sang  y  arrive  aussi  par 
des  branches  anastomotiques  prove- 
nant des  artères  de  la  cuisse  et  des  par- 
ties génitales.  Barkow  n'a  pas  trouvé 
ce  réseau  vasculaire  aussi  développé 
chez  la  Foulque  et  la  Cigogne. 

Les  artères  sous-clavières  fournis- 
sent plusieurs  autres  branches  aux 
muscles  de  l'épaule  et  de  la  poitrine, 
ainsi  qu'une  artère  thoracique  interne, 
dite  mammaire  interne,  qui  descend 
sur  les  côtés  de  la  face  interne  des 
parois  thoraciques  (c).  Parvenus  dans 
la  portion  humérale  de  l'aile,  ces  vais- 
seaux perdent  le  nom  d'artères  axil- 
laires  pour  prendre  celui  d'arlères 
brachiales;  et.  avant  d'arriver  au  ni- 
veau de  l'articulation  du  coude,  ou 


même  dans  le  voisinage  de  l'épaule, 
elles  se  divisent  en  deux  branches, 
appelées  artère  cubitale  et  artère  ra- 
diale ou  interosseuse  {cl).  Une  autre 
branche  de  l'artère  humérale,  la  bra- 
chiale externe,  est  "très  développée 
chez  la  plupart  des  Oiseaux.  Chez  le 
Condor,  par  exemple,  on  trouve  dans 
toute  la  portion  humérale  de  l'aile  trois 
artères  qui  descendent  parallèlement 
vers  l'articulation  du  coude  et  qui 
sont  presque  de  même  calibre  [e). 

(1)  Ainsi,  chezl'Oie,  l'artère  verté- 
brale ,  fournie  ,  comme  nous  l'avons 
déjà  vu,  par  la  portion  inférieure  de 
la  carotide,  pénètre  dans  le  canal  pra- 
tiqué à  la  base  des  apophyses  trans- 
verses des  vertèbres  cervicales,  et  y 
donne  naissance  à  une  grosse  branche 
récurrente  qui  va  s'anastomoser  avec 
la  première  intercostale  abdominale 
du  même  côté.  Le  vaisseau  longitudi- 
nal ainsi  formé  est  une  artère  costale 
commune    dont   naissent   toutes    les 


(a)  Exemple  :  l'Oie.  Voyez  Hahn,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1 . 

(6)  Barkow,  Op   cit.  [Arch.  de  Meckel,  1829,  pi.  8,  fig.  \). 

(c)  Voyez  Hunier,  loc.  cit.,  pi.  25,  fig.  1. 

(d)  Exemple  :  le   Coq.  Voyez    Neugebauer  ,   Systema  venosum  Avium    (Xova  Acta  AcaA.tiat. 
curios.,  t.  XXI,  pi.  41,  iïg.  1  et  2). 

(e)  Exemple  :  le  Condor.  Voyez  Scliroeder  van  dur  Kolk  et  Yrulik,  Recherches  eur  les  plexus 
vasculaires  {Ami.  des  sciences  nat.,  1856,  4*  série,  t.  V,  pi.  4,  fig.  2). 


Z|62  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

sentent  rien  de  remarquable.  Il  en  est  de  même  du  trône 
cœliaque,  qui  naît  du  commencement  de  la  portion  abdominale 
de  l'aorte,  et  qui  se  rend  à  l'estomac  et  aux  parties  voisines 
de  l'intestin,  ainsi  qu'au  foie,  à  la  rate  et  au  pancréas  (1). 

Un  peu  plus  bas,  l'aorte  ventrale  fournit  une  artère  mésenté- 
rique  supérieure,  qui  se  distribue  à  la  portion  moyenne  du  tube 


intercostales  proprement  dites  clans  la 
région  occupée  par  les  poumons.  Il 
est  aussi  à  noter  que  les  trois  pre- 
mières intercostales  abdominales  sont 
également  reliées  entre  elles  par  des 
branches  anaslomotiques  qui  l'ont 
suite  à  celle  intercostale  commune  et 
donnent  naissance  aux  branches  de 
distribution  (a).  Ainsi,  depuis  la  tête 
jusqu'à  l'abdomen,  les  artères  de  la 
colonne  vertébrale  et  de  ses  dépen- 
dances sont  fournies  de  chaque  côté 
parrun  tronc  longitudinal  constitué 
par  Tarière  verlébrale  dans  le  cou, 
l'artère  costale  commune  dans  le 
thorax,  et  les  arcades  anaslomotiques 
des  premières  intercostales  abdomi- 
nales dans  le  ventre. 

Chez  le  Coq,  l'artère  costale  com- 
mune du  thorax  est  représentée  par 
une  branche  descendante  qui  vient, 
comme  d'ordinaire,  de  l'artère  verté- 
brale, et  par  une  branche  ascendante 
qui  naît  de  l'aorte,  près  du  tronc  cœ- 
liaque, et  constitue  la  première  inter- 
costale abdominale.  Chez  P Autruche, 
la  costale  descendante  provient  di- 
rectement de  la  sous-clavière  gauche. 

(1)  Le  tronc  cœliaque  se  divise  géné- 
ralement en  deux  branches  principales 


ou  artères  gastriques,  qui  se  distri- 
buent principalement  au  gésier  :  l'une, 
située  à  gauche ,  donne  aussi  des  ra- 
meaux au  ventricule  succenturié  et  au 
lobe  gauche  du  foie  ;  l'autre  fournit  les 
artères  du  caecum  du  côté  droit,  du 
duodénum  el  du  pancréas  \b). 

Chez  l' Aigle  royal,  Yart  ère  spiénique 
naît  aussi  du  tronc  cœliaque;  mais, 
dans  d'autres  Oiseaux,  tels  que  l'Au- 
truche, elle  est  une  branche  de  l'artère 
gastrique  gauche  ;  chez  l'Oie,  elle  pro- 
vient aussi  de  celle-ci,  mais  est  repré- 
sentée par  quatre  ou  cinq  branches. 

L'artère  hépatique  naît  de.  Tarière 
gastrique  droite  chez  l'Aigle.  Chez 
l'Oie  et  le  Dindon ,  les  deux  artères 
gastriques  fournissent  chacune  une 
branche  au  lobe  correspondant  du  foie. 
Enfin,  chez  le  Coq,  le  tronc  cœliaque, 
après  avoir  fourni  deux  artères  gas- 
triques ,  se  continue  vers  la  rate , 
donne  naissance  à  plusieurs  petites 
artères  spléniqucs,  ainsi  qu'à  une  ar- 
tère hépatique,  et  va  se  terminer  dans 
le  duodénum,  le  pancréas,  le  cae- 
cum, etc.  (c). 

La  disposition  des  artères  gastri- 
ques chez  la  Grèbe  a  été  figurée  par 
Barkow  (d). 


(a)  Voyez  Baucr,  Disquisitiones  circa  nonnullarum  Avium  sjjstema  arleriosum,  fig.  3. 

(b)  Exemple  ;  le  Canard.  Voyez  Neugeljjucr,  Op.  cit.  (Actes  de  i'Acad.  des  curieux  de  la  Nature, 
t.  XXI,  pi.  49,  fig.  1). 

(c)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  187. 

(d)  Barkow,  loc.  cit.,  pi.  28  el  20. 


CHliZ    LES    OISEAUX.  /|G3 

intestinal  (1  ),  une  paire  de  petites  artères  spermatiques  qui  vont 
aux  testicules  ou  aux  ovaires,  et  une  artère  mésentérique  posté- 
rieure qui  se  rend  à  la  portion  terminale  du  gros  intestin. 

On  donne  le  nom  d'artères  crurales  à  une  paire  de  vaisseaux     Artères 

1  des  pattes 

qui  naissent  de  l'aorte,  vers  la  fin  de  la  région  lombaire,  et 
qui,  après  avoir  fourni  aux  parois  de  l'abdomen  les  artères  épi- 
gastriques,  vont  se  terminer  dans  les  muscles  de  la  partie  anté- 
rieure de  la  cuisse  (2). 

Une  paire  d'artères  ischiatiques  se  détache  aussi  de  l'aorte 
au  niveau  du  bassin  et  fournit  presque  aussitôt  les  artères  ré- 
nales. Plus  loin,  chacune  d'elles  donne  naissance  à  une  iliaque 
postérieure,  puis  descend  le  long  de  la  cuisse  et  se  rend  à  la 
patte,  en  prenant  successivement  les  noms  d'artère  fémorale, 
A' artère  poplitée ,  d'artère  tibiale  antérieure,  et  d'artère  tar- 
sienne, suivant  la  portion  des  membres  où  elle  passe  (3). 

(1)  M.  Tiedemann  a  trouvé  que  chez  avec    les   branches    terminales    des 

l'Oie  l'artère  mésentérique  supérieure  artères  sous-cutanées  de  l'abdomen 

présente,  dans  le  point  où  elle  fournit  provenant    de    Tarière    tboracique. 

les  branches  intestinales,  une  dilata-  L'artère  crurale  occupe  la  partie  anté- 

tion  dont  les  parois  sont  épaisses  et  rieurc  de  la  cuisse  et  descend  jusque 

garnies  de  valvules  et  de  replis  disposés  dans  les  muscles  de  la  jambe  (c). 
en  manière  de  réseau.  Cette  structure  (3)  Vers  la  partie  moyenne  de  la 

a  été  décrite  aussi  par  Barkow  (a).  jambe,  l'artère   tibiale  antérieure  se 

(2)    Les  artères  crurales   sont,  en  divise  en  deux  ou  plusieurs  branches, 

général,   médiocrement  développées,  qui  sont  réunies  en  faisceaux  et  qui 

et  presque  aussitôt  après  leur  nais-  souvent    s'anastomosent   de  façon   à 

sauce    elles    fournissent   les   artères  constituer  un  plexus  plus  ou  moins 

épigastriques  (b),  qui  descendent  sur  développé.    Parvenue    dans  le  pied, 

les  côlés  du  bassin,  gagnent  la  région  deux    de    ses    branches    principales 

pelvienne,  et  remontent  ensuite  sur  suivent  la  face  dorsale  du  tarse  et  se 

la  paroi  antérieure  de  l'abdomen,  où  bifurquent  pour  constituer  une  artère 

elles  se  ramifient  et  s'anastomosent  collatérale  ,   destinée   à    chacun  des 

(a)  TieJciu;:nn,  Analomie  und  Naturgeschichte  der  Yiigel  (Zoologie,  1810,  t.  II,  p.  101). 

—  Barkow,  Disquisitiones  recentiores  de  arteriis  Mammalium  et  Avium  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  705,  pi.  34,  flg,  42  cl  43). 

(b)  Exemples  :  L'Oie.  Voyez  Halni,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  3. 

—  La  Grive.  Voyez  Barkow,  loc.  cit.,  pi.  8,  %.  1. 

—  La  Poule.  Voyez  Hunier,  loc.  cit.,  pi.  25,  %.  t. 

(c)  Voyez  Gants  et  V.  Otto,  Tab.  Anal,  compav,  illuslr,,  par»  vi,  pi.  G,  liy.  ù. 

m.  su 


Terminaison 
de  l'aorle. 


Système 
veineux. 


!lQll  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Enfin  l'aorte,  après  avoir  fourni  les  artères  crurales,  con- 
tinue à  se  porter  en  arrière,  et  les  anatomistes  l'appellent  alors 
artère  sacrée  moyenne,  parce  qu'elle  longe  la  face  antérieure  du 
sacrum,  où  elle  donne  naissance  à  divers  rameaux  analogues 
aux  intercostales.  Dans  le  voisinage  du  cloaque,  elle  fournit 
les  artères  hypogastriques  dont  les  principales  branches  se 
rendent  aux  organes  de  la  copulation  et  forment  dans  les  corps 
caverneux  un  plexus  très  riche  ;  puis  elle  arrive  dans  la  queue 
et  s'y  termine  par  deux  branches  disposées  en  arcade  sur  les 
côtés  du  croupion  (1). 

§  5.  —  Le  système  veineux  des  Oiseaux  (2)  ressemble  beau- 
coup à  celui  des  Reptiles  supérieurs,  mais  se  perfectionne  da- 
vantage, caries  valvules  s'y  développent  en  plus  grand  nombre 
et  sont  disposées  avec  plus  de  régularité  ;  or,  ces  replis  mem- 
braneux, comme  nous  le  verrons  bientôt,  facilitent  le  retour  du 
sang  vers  le  cœur. 

Toutes  les  veines  du  système  de  la  grande  circulation  se 
réunissent  au-dessus  de  l'oreillette  droite  du  cœur,  et  débou- 


doigts  interne  et  externe ,  et  deux 
artères  collatérales  pour  le  doigt  mé- 
dian (a).  Une  autre  branche,  appelée 
plantaire,  se  porte  à  la  face  inférieure 
du  pied  et  y  forme  une  arcade  vascu- 
laire. 

(1)  La  distribution  des  artères  du 
cloaque  et  des  parties  voisines  a  été 
étudiée  avec  beaucoup  de  soin  par 
Barkow  chez  la  Grèbe  et  quelques 
autres  Oiseaux  (6).  Elle  a  clé  repré- 
sentée aussi  chez  la  Poule  par  limi- 


ter (c),  et  d'une  manière  moins  com- 
plète chez  l'Oie  par  Hahn  (d). 

(2)  Cette  portion  de  l'appareil  cir- 
culatoire des  Oiseaux  a  été  étudiée 
d'une  manière  très  approfondie  par 
M.  Neugebauer,  dont  le  travail  est 
accompagné  d'un  grand  nombre  de 
planches  très  bien  exécutées  (e).  Je 
citerai  également  ici  la  description  des 
systèmes  veineux  des  Oiseaux  par 
Macartney  (/"). 


(a)  Voyez  Hunier  {Catal.  of  the  Mus.  of  the  Collège  of Surgeons,  t.  II,  pi.  25,  fig.  2). 
(6)  Barkow,  loc.  cit.,  pi.  9,  fig.  20  et  21. 

(c)  Hunier,  loc.  cit.,  pi   25,  fig.  1. 

(d)  Hahn,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  3  et  i. 

(c)  L.  A.  Neugebauer,  Systema  venosum  Avium,  cum  eo  Hammalium  et  imprimis  Ilominis 
colla tum  (Nova  Acta  Acad.  Cœs.  Leop.  Cavol.  Nat.  curiis.,  t.  XXI,  p.  521,  pi.  3G  à  50). 

(f)  Macartney  ,  article  Birds  (Ree's  Cyclopœdia,  reproduit  par  M.  Owen  dans  l'article  Aves  du 
Cnclop.  of  Anat.  and  Physiol.  de  Todd,  1. 1,  p.  338;. 


CHEZ    LES    OISEAUX.  A65 

client  dans  cet  organe  par  trois  gros  troncs  dont  deux  appar- 
tiennent à  la  partie  antérieure  du  corps  et  un  à  la  partie  posté- 
rieure :  ce  sont  les  veines  caves  supérieures  ou  antérieures,  et 
la  veine  cave  inférieure  ou  postérieure. 

Les  premières,  comme  d'ordinaire,  résultent  essentiellement      veines 

ii/.,.  ...  . ,  de  la  tcle. 

de  la  reunion  des  veines  jugulaires  et  sous-clavieres  de  chaque 
côté  de  la  base  du  cou  (1). 

Les  veines  jugulaires  sont  placées  superficiellement  sur  les 
côtés  du  cou  ;  quelquefois  elles  ont  à  peu  près  le  même  ca- 
libre (2),  mais  en  général  celle  du  côté  gauche  reste  très  grêle, 
tandis  que  celle  du  côté  droit  offre  un  volume  considérable  (3). 
Le  sang  arrive  cependant  en  même  quantité  des  deux  côtés  de 
la  tête  ;  mais  sous  la  base  du  crâne  ces  deux  vaisseaux  sont 
réunis  par  une  large  anastomose  transversale,  et  c'est  par  cette 
voie  qu'une  grande  partie  de  ce  liquide  passe  du  côté  gauche 
dans  la  jugulaire  droite  (h). 

Les  principales  veines  de  la  tête  qui  viennent  aboutir  dans 


(1)  Les  deux  veines  caves  supé-  cée  chez  le  Dindon  (g),  le  Canard  (h), 
rieures  sont  très  grosses  et  descendent  l'Ortolan  (?) ,  la  Corneille  (/),  etc. 

sur  les  côtés  de  la  crosse  aorlique  et  (Zi)  Cette  anastomose  existe  aussi 

du  tronc  des  veines  pulmonaires,  puis  chez  les  espèces  où  les  veines  jugu- 

se  recourbent  en  dedans  pour  gagner  laires  restent  symétriques,  et  se  voit 

la  face  dorsale  de  l'oreillette  droite  [a).  entre  l'extrémité  supérieure  de  l'œso- 

(2)  Par  exemple,  chez  le  Milan  (6),  phageetla  colonne  vertébrale.  Lorsque 
le  Hibou  (c),  le  Pigeon  id),  la  Per-  la  jugulaire  gauche  est  très  réduite, 
drix  (e),  le  Coq  (/").  cette  branche  transversale  forme  la  con- 

(3)  Celte  inégalité  est  très  pronon-  tinuation  principale  de  la  veine  faciale 


(a)  Voyez  Hunter,  loc,  cit.,  pi.  25,  fig.  1. 

—  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal  de  Cnvler,  Oiseaux,  pi.  3,  fig.  1  et  1  a. 

(b)  Neugebauer,  Op.  cit.,  pi.  39,  fig1.  4. 

(c)  Idem,  ibid.,  pi.  40,  fig.  6. 

(d)  Idem,  ibid.,  pi.  40,  fig.  5. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  39,  fig.  3. 

(/■)  Hunier,  Op.  cit.  (Cat.  of  the  Mus.  of  the  Coll.  ofSurg.,  I.  II,  p'.  25,  fig.  1). 

—  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Oiseaux,  pi.  3,  fig.  1  a. 
(g)  Neugebauer,  loc.  cit.,  pi.  3G,  fig.  1. 

(h)  Idem,  ibid.,  pi.  38,  fig,  I. 
(i)  idem,  ibid.,  pi.  39,  fig.  5. 
(;')  Idem,  ibid.,  pi.  40,  lig.  3. 


ft6G  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

les  jugulaires  sont  :  1°  la  faciale,  ou  céphalique  antérieure,  qui 
résulte  de  la  réunion  de  deux  branches  principales,  une  super- 
ficielle et  l'autre  profonde  ;  2°  la  veine  céphalique  postérieure, 
qui  reçoit  le  sang  de  la  cavité  crânienne  et  de  la  partie  posté- 
rieure delà  tête.  Le  mode  de  groupementde  tous  ces  vaisseaux  est 
très  complexe  et  ne  présente  pas  assez  d'intérêt  pour  nous  arrêter 
ici  ;  mais  je  dois  ajouter  que  plusieurs  d'entre  eux  constituent 
dans  la  région  temporale,  dans  la  région  sous-orbitaire  et  derrière 
l'oreille,  des  plexus  très  remarquables  et  analogues  aux  réseaux 
admirables  que  le  système  artériel  nous  a  déjà  offerts  dans 
diverses  parties  de  la  tête  de  ces  Animaux  (1). 


correspondante,  qui  semble  se  rendre 
du  côté  droit  pour  constituer  avec  sa 
congénère  la  jugulaire  droite;  dispo- 
sition qui  se  voit  chez  le  Dindon  (a). 

Ce  tronc  anastomotiqne  transversal 
reçoit  aussi  une  veine  occipitale  qui 
vient  de  la  colonne  vertébrale. 

(1)  Chez  le  Dindon ,  une  veine 
maxillaire  supérieure  vient  du  bec, 
communique  avec  la  faciale  sons- 
cutanée  par  une  branche  anastomo- 
lique  située  derrière  l'œil  (6),  reçoit  une 
veine  sublinguale  et  une  veine  pala- 
tine supérieure  (c)  ;  puis,  au-dessus  de 
l'articulation  sphéno-ptérygoïdienne , 
se  réunit  à  une  veine  ophthalmique 
venant  de  l'œil  (cl),  de  l'orbite  et  de 
la  fosse  temporale,  pour  constituer  le 
tronc  de  la  veine  faciale  interne  ou 
antérieure  (e).  Celle-ci  reçoit:  1°  une 
veine  alvéolaire  qui  accompagne  le 
nerf  de  la  mandibule  (f)  ;  2°  quelques 


rameaux  venant  des  muscles  voisins  ; 
3°  les  branches  efférentes  d'un  plexus 
veineux  situé  près  de  l'os  carré  et 
formé  par  la  veine  temporale  (rete 
mirabile  venosum  quadratoptery  • 
goideum),  d'un  plexus  basilaire  placé 
à  la  partie  supérieure  et  postérieure 
du  pharynx;  h"  une  veine  palatine 
inférieure  {g)  ;  enfin  elle  se  joint  à  la 
veine  faciale  externe  ou  postérieure. 
On  donne  ce  nom  au  tronc  qui  con- 
tourne en  arrière  l'articulation  de  la 
mâchoire  inférieure,  et  qui  résulte  de 
la  réunion  d'une  veine  faciale  externe, 
d'une  veine  palpébrale  commune, 
des  veines  temporales,  d'une  veine 
auriculaire  et  du  réseau  tympano- 
ptérygoïdien  déjà  mentionné.  La  fa- 
ciale cutanée  vient  du  front  ou  de  la 
caroncule  cutanée  dont  celui-ci  est 
garni,  traverse  obliquement  la  face, 
reçoit  une  veine  mandibulaire  et  con- 


ta) Neugebauer,  Op.  cit.,  pi.  36,  fig.  2. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  37,  fig.  1,  n»  4  7. 

(c)  ltlem,  ibid.,  pi.  36,  fig.  2,  n°  27. 

(d)  Idem,  ibid.,  pi.  36,  fig.  5,  n"  8. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  36,  fig.  2. 

"(/')  Idem,  ibid.,  pi.  36,  fig.  5,  n°  3. 
(g)  Idem,  ibid.,  pi.  36,  fig.  3,  n"  11  cl  1-. 


CHEZ    LES    OISEALX.  ÛG7 

Les  veines  des  ailes  sont,  les  unes  superficielles,  les  autres 
profondes.  Ces  dernières  suivent  à  peu  près  le  même  trajet  que 
les  principales  artères,  et  chez  plusieurs  espèces  d'Oiseaux 
grands  voiliers,  tels  que  le  Condor,  l'Épervier,  la  Grue  et  la 
Cigogne,  elles  forment  autour  des  artères  cubitale  et  radiale 
un  plexus  très  remarquable  (1).  La  veine  axillaire,  c'est-à-dire 
le  tronc  commun  formé  par  la  réunion  de  tous  ces  branches,  re- 
çoit les  veines  principales  de  la  paroi  antérieure  de  l'abdomen 
qui  accompagnent  les  artères  thoraciques  et  leurs  dépendances. 
Enfin  la  continuation  de  ce  grand  vaisseau  prend,   dans  la 


Veines 
des  ailes. 


stitue  au-dessous  de  l'orbite  un  plexus 
fusiforme  (a).  La  veine  palpébrale  pos- 
térieure forme  aussi  un  rete  mirabile 
en  passant  au  côté  externe  du  ligament 
temporo-maxillaire  (6).  Les  veines 
temporales  et  auriculaires  ne  présen- 
tent rien  de  remarquable.  Enfin  le  ré- 
seau tympano-ptérygoïdien  contourne 
l'os  carré  ou  tym panique,  et  provienten 
partie  du  rameau  temporal  de  la  veine 
ophthalmique  (c). 

Toutesces  veinesconcourent,  comme 
je  l'ai  déjà  dit,  à  former  de  chaque 
côté  de  la  base  du  crâne  une  veine 
faciale  commune  ou  céphalique  anté- 
rieure, qui  prend  le  nom  de  jugulaire 
après  avoir  reçu  la  veine  céphaliqus 
postérieure,  dans  laquelle  se  déver- 
sent plusieurs  grands  sinus  veineux 
qui  sont  logés  dans  la  boîte  crânienne 
et  reçoivent  le  sang  des  vaisseaux  de 
l'encéphale. 

Les  veines  jugulaires  reçoivent  les 


veines  sous-cutanées  du  cou  ,  des 
ramuscules  \enant  de  l'œsophage  , 
de  la  trachée,  de  la  colonne  verté- 
brale ,  etc.  Les  branches  veineuses 
du  jabot  y  débouchent  aussi  à  la  base 
du  cou  et  sont  très  développées  dans 
les  espèces  où  cet  organe  existe  {d). 

(1)  Ce  réseau  veineux  a  été  décou- 
vert par  MM.  Vrolik  et  Schrôder 
van  der  Kolk,  chez  le  Sarcoram- 
phus  gryphus,  le  S.  papa,  le  Faîco 
(Haliœlos)  albicilla,  le  F.  Nisus,  le 
Strix  otus,  VArdea  purpurea,  le  Grus 
cinerea ,  le  Podiceps  cristatus ,  le 
Larus  ridibundus.,  le  Carbo  cormora- 
nus  et  le  Cygnus  olor.  Ces  anatomisles 
l'ont  trouvé  faiblement  développé  chez 
YAnas  niger;  mais  ils  n'en  ont  pas 
rencontré  la  moindre  trace  chez  la  Pie 
et  le  Corbeau;  enfin,  ils  en  ont  trouvé 
des  vestiges  chez  le  Kakatoès,  le  Coq, 
le  Dindon ,  le  Pigeon ,  le  Coq  de 
Bruyère  à  queue  fourchue,  etc.  (e). 


(a)  Neugebauer,  Op.  cit.,  pi.  37,  fig.  G,  n*  7. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  37,  fig.  G,  n°  4. 

(c)  Idem,  ibid.,  pi.  3G,  fig.  5,  n°  24. 
(rf)  Hunter,  Cat.,  t.  II,  pi.  25,  fig.  1. 

(e)  Schrœder  van  der  Kolk  et  W.  Vrolik,  Nasporingen  omirent  vaalvlechlen  bij  onderscheiden 
Diervormen  (Bijdragen  tôt  de  Dierkunde  uitgegeven  door  hel  genootschap  nalura  artis  magistra 
te  Amsterdam,  1"  partie,  1848).  —  Recherches  sur  les  plexus  vasatlaires  chez-  différents  Ani- 
maux {Ann.  des  sciences  nat.,  4e  série,  t.-V,  p.  111,  pi.  4). 


&G8  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

région  claviculaire,  le  nom  de  veine  sous-clavière,  et  se  con- 
fond, comme  je  l'ai  déjà  dit,  avec  la  jugulaire  correspondante 
pour  constituer  la  veine  cave  supérieure  du  même  côté. 
veines         Les  veines  des  pattes  forment  en  général  au  bas  de  la  jambe 

des  pactes.  ,  ,  , 

un  plexus  très  développe,  et  le  tronc  principal  auquel  ces  vais- 
seaux donnent  naissance  remonte  d'abord  dans  la  cuisse,  à  côté 
de  la  grande  artère  fémorale;  mais,  en  approchant  du  bassin, 
il  l'abandonne  pour  se  rapprocher  de  l'artère  crurale  et  péné- 
trer dans  l'abdomen,  en  passant  devant  le  bord  de  l'os  de  la 
hanche  (1).  La  veine  crurale  ou  iliaque  externe,  ainsi  constituée, 
reçoit  dans  la  région  pelvienne  une  grosse  veine  hypogasfrique 
ou  iliaque  interne,  ainsi  que  des  veines  rénales  ;  enfin,  sous  le 
nom  d'iliaque  commune,  elle  remonte  obliquement  vers  la  région 
lombaire  et  se  réunit  à  sa  congénère  pour  former  la  veine  cave 
iïlX  abdominale.  Les  veines  hypogastriques  qui  apportent  le  sang 
de  la  région  anale  traversent  la  substance  des  reins,  mais  ne 
paraissent  pas  y  fournir  des  branches  afférentes  comme  chez  les 
Reptiles,  les  Batraciens  et  les  Poissons,  de  sorte  que  l'on  ne 
retrouve  plus  dans  la  classe  des  Oiseaux  de  système  de  veines 
portes  rénales  bien  caractérisé  (2);  mais  le  système  de  la  veine 


(1)  Pour  plus  de  détails,  au  sujet  de  beau  autour  du  nerf  et  de  l'artère 

l'origine  et  du  trajet  des  veiues  ilia-  fémorale  (d). 

ques  et  de  leurs  affluents,  je  renverrai  (2)  Jacobson  avait  cru  que  les  veines 

à  la  Monographie  de  M.  Neugebauer(a).  hypogastriques  qui  ramènent  le  sang 

MM.  CarusetV.  Otto  ont  donné  aussi  des  parties  profondes   du  bassin  se 

une  figure  de  ces  vaisseaux  chez  le  ramifiaient    dans    la   substance    des 

Cygne  (b),  et  Elunter  les  a  représentés  reins  et  constituaient  pour  ces  glandes 

chez  le  Coq  (c).  un  système  de  veines  afférentes  (e)  ; 

Dans  le  Cormoran  et  le  Cygne,  les  mais  Nicolaï  a  reconnu  que  ces  troncs 

veines  forment  un  plexus  réticulé  très  ne  font  que  plonger  en  quelque  sorte 


(a)  Neugebauer,  Op.  cit.  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XXI,  pi.  43,  fig.  1  et  2). 

(b)  CarusetV.  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  6,  fig.  1. 

(c)  Hunter,  loc.  cit.,  t.  II,  pi.  25,  fig.  1 . 

(à)  Schrœder  van  der  Kolk  et  Vrolik,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  V,  pi.  4,  fig.  3). 
(e)  Jacobson,  De  systemate  venoso  peculiari  in  permnUis  Animalibvs  observato,  p.  3  (182J). 


CHEZ    LES    OISEAUX. 


469 


porte  hépatique  est  très  développé  et  reçoit  même  une  portion  du 
sang  qui  arrive  par  les  veines  de  la  queue  (1). 

Les  veines  hépatiques  qui,  dans  la  substance  du  foie,  nais- 


dans  le  tissu  rénal,  et  en  ressortent 
bientôt  pour  aller  déboucher  dans  les 
veines  iliaques  internes  (a).  Les  obser- 
vations de  ce  naturaliste  ont  été  con- 
firmées par  les  recherches  plus  ré- 
centes de  Cuvier  ,  de  Meckel ,  et  de 
M.  Neugebauer  (6). 

M.  Ovven  a  présenté  quelques  vues 
intéressantes  au  sujet  du  rôle  physio- 
logique des  communications  qui  exis- 
tent entre  les  veines  des  reins  et  les 
autres  parties  du  système  circulatoire. 
Il  a  fait  remarquer  qu'à  l'aide  des 
anastomoses  établies  entre  ces  veines 
et  les  veines  iliaques,  d'une  part,  et 
certaines  branches  dépendantes  des 
veines  mésentériques,  d'autre  part,  le 
sang  qui  a  circulé  dans  cette  glande 
peut  aller  en  majeure  partie ,  soit 
dans  la  veine  cave  et  de  là  dans  le 
système  pulmonaire ,  soit  dans  le 
système  de  la  veine  porte,  et  il  pense 
que  le  courant  principal  s'établit  par 
l'une  ou  l'autre  de  ces  voies,  suivant 
le  degré  d'activité  relative  du  travail 
respiratoire  ou  des  fonctions  diges- 
tives.  Or  la  circulation  pulmonaire 
doit  être  surtout  active  chez  les  Oi- 
seaux grands  voiliers,  qui  font  une 
très  grande  dépense  de  forces  mus- 
culaires; et  c'est  au  contraire  lors- 
que les  Oiseaux  de  proie  sont  gorgés 
de  nourriture,  ce  qui  les  plonge  dans  un 


état  de  torpeur,  que  la  circulation 
viscérale  doit  devenir  prédominante. 
Il  est  cependant  à  noter  que  chez 
l'Aptéryx,  oiseau  qui  est  privé  de  la 
faculté  de  voler,  M.  Owen  n'a  rien 
observé  dans  la  disposition  des  veines 
rénales  qui  soit  en  accord  avec  cette 
hypothèse  relative  aux  modifications 
que  l'état  physiologique  détermine- 
rait dans  le  cours  du  sang  veineux 
des  viscères  (c). 

(1)  Le  système  de  la  veine  porte 
des  Oiseaux  se  compose  de  deux 
troncs  principaux  et  de  leurs  af- 
fluents :  l'un  est  situé  à  droite,  et  pé- 
nètre dans  la  portion  supérieure  et 
droite  du  foie  ;  l'autre  à  gauche,  et  se 
rend  à  la  portion  inférieure  et  gauche 
du  même  organe  (d).  Le  premier  se 
compose  de  la  réunion  d'une  veine 
mésentérique commune, qui  elle-même 
reçoit  une  veine  mésentérique  infé- 
rieure fournie  par  l'arcade  que  les 
veines  hypogastriques  constituent  au- 
devant  du  coccyx  ;  d'une  veine  més- 
entérique antérieure,  qui  naît  dans  la 
partie  postérieure  du  tube  intestinal  ; 
d'une  veine  dont  les  branches  viennent 
du  pancréas,  du  duodénum,  du  cae- 
cum ,  etc.,  et  d'une  veine  gastro- 
splénique.  La  veine  porte  gauche  est 
formée  principalement  par  une  veine 
gastrique. 


(a)  Nicolaï,  Untersuch.  iiber  den  Verlauf  und  die  Vertheihuig  der  Yenen  beieinigen  Vôyeln,  etc. 
sw, 1826,  t.  I,p.  404). 

(b)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  244. 

—  Meckel,  Traité  d' anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  3"4. 

—  Xeugebauer,  Op.  cit.,  p.  105. 

(c)  Owen,  On  the  Anatomy  of  the  Southern  Aptéryx  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  t,  II,  p.  375). 

(d)  Hunter,  loc.  cit.,  pi.  25,  %.  1. 

—  Neugebauer,  Op.  cit.,  pi.  49,  fig.  1,  etc. 


Petite 
circulation. 


/l70  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

sent  des  ramuscules  terminaux  de  la  veine  porte  (1),  débou- 
chent, comme  d'ordinaire,  dans  la  veine  cave  inférieure  qui 
traverse  une  portion  de  cet  organe  pour  se  rendre  à  l'oreil- 
lette (2),  et  qui  sur  ce  point  présente  chez  quelques  Oiseaux 
aquatiques  une  grande  dilatation  en  forme  de  réservoir  (3). 

§  6.  —  L'artère  pulmonaire,  qui  nait  de  la  partie  gauche  du 
ventricule  droit,  ne  présente  rien  de  remarquable  ;  à  son  en- 
trée elle  est  garnie  de  trois  valvules  semi-lunaires  disposées 
de  façon  à  empêcher  le  reflux  du  sang  vers  le  coeur  ;  presque 
immédiatement  elle  se  divise  en  deux  branches  qui  divergent 
adroite  et  à  gauche  pour  gagner  les  poumons  correspondants, 
et  qui,  dès  leur  entrée  dans  ces  organes,  se  subdivisent  en  trois 
rameaux  et  se  terminent  dans  le  réseau  capillaire  dont  les  cel- 
lules pulmonaires  sont  entourées  (&).  Le  passage  entre  ces 


(1)  Ces  veines  forment  deux  gros 
troncs.  Une  veine  ombilicale,  dont  Jes 
branches  viennentdes  réservoirs  pneu- 
matiques de  l'abdomen  et  du  péritoine, 
remonte  sur  le  devant  du  ventre  et 
va  déboucher  dans  la  veine  hépatique 
gauche  (a). 

(2)  L'ouverture  de  la  veine  cave 
postérieure  est  placée  à  la  partie  su- 
périeure et  dorsale  de  l'oreillette,  au- 
dessus  de  celle  des  veines  caves  anté- 
rieures qui  arrivent  horizontalement  en 
contournant  la  hase  de  l'oreillette  (6). 
Le  premier  de  ces  orifices  est  bordé 
latéralement  par  deux  larges  valvules 
semi-lunaires,  de  structure  musculo- 
membraneuse,  dont  la  gauche  dé- 
tourne le  courant  sanguin  de  la  fosse 
ovale,  et  dont  la  droite  se  prolonge 


sur  le  bord  gauche  de  l'embouchure 
de  la  veine  cave  antérieure,  de  façon 
à  diriger  également  le  courant  de  ce 
vaisseau  vers  l'orifice  auricu'o  ventri- 
culaire  et  à  l'empêcher  de  se  porter  du 
côté  de  la  fosse  ovale.  Une  autre  val- 
vule, plus  membraneuse,  borde  du 
côté  droit  l'embouchure  de  la  veine 
cave  antérieure  droite  (c). 

(3)  iMeckel  a  constaté  l'existence  de 
ce  réservoir  veineux  ,  formé  par  un 
élargissement  de  la  veine  cave  posté- 
rieure, chez  les  Plongeons  (d). 

(4)  L'artère  pulmonaire  commence 
à  l'angle  antérieur  et  interne  du  ven- 
tricule droit,  passe  sous  l'origine  de 
l'aorte,  et  se  porte  à  gauche  de  ce 
vaisseau,  puis  se  bifurque.  La  brandie 
gauche  passe  derrière  la  veine  cave 


(a)  Ralhke,  L'eber  den  Dau  und  die  Entwickelung  des  Venensystems  der  Wirbelthlere  (Drilter 
Berkhtûber  das  Naturwissenschaftliche  Seminar  z-u  Kônigsberg,  1838,  p.  12  et  13). 

—  Neugebaucr,  Op.  cit.,  p.  633,  pi.  50. 

(b)  Voyez  Laurillard,  Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Oiseaux,  pi.  3,  %.  1 . 

(c)  Duvernoy,  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier,  1.  VI,  p.  298. 

(d)  Mert<el,  Traité  d'anatomie  comparée,  I.  IX,  p.  373. 


CHEZ.  LES    OISEAUX.  Ô71 

BPtérioles  et  les  vaisseaux  efférents  du  système  de  la  petite  cir- 
culation, ou  veines  pulmonaires,  sont  assez  larges  pour  que  les 
injections  fines  puissent  couler  facilement  des  unes  dans  les 
autres.  Les  principales  branches  veineuses  qui  en  naissent  sui- 
vent à  peu  près  le  même  trajet  que  les  artères  et  se  réunissent 
en  un  tronc  unique  situé  derrière  le  canal  aérien.  Enfin,  les 
deux  veines  pulmonaires  ainsi  constituées  se  joignent  sur  la 
ligne  médiane  pour  aller  déboucher  dans  l'oreillette  gauche  (1). 
11  est  aussi  à  noter  que  chez  les  Oiseaux  le  système  artériel 
de  la  grande  circulation  ne  fournit  pas  de  vaisseaux  nourriciers 
aux  canaux  aérifères  des  poumons,  et  qu'il  n'y  a  par  conséquent 
dans  le  parenchyme  de  ces  organes  qu'une  seule  sorte  de 
capillaires  (2). 


du  côté  gauche,  et  la  brandie  droite 
contourne  en  arrière  le  commence- 
ment de  l'aorte  (c). 

Chacune  des  artères  pulmonaires 
spéciales,  en  arrivant  au  poumon,  se 
trouve  placée  au-devant  de  la  bronche 
correspondante.  Une  de  ses  branches 
principales  se  porte  en  avant  et  se 
distribue,  au  tiers  antérieur  du  pou- 
mon ;  la  seconde,  qui  semble  être  la 
continuation  du  tronc  principal,  ac- 
compagne d'abord  la  bronche  intra- 
pulmonaire;  mais  ses  rameaux  diver- 
gent dans  tous  les  sens  et  n'ont  aucun 
rapport  avec  les  divisions  bronchi- 
ques; enfin  la  troisième,  plus  petite 
que  les  précédentes,  est  située  entre 
le  bord  externe  des  poumons  et  les 
bronches  dites  costales.  Les  dernières 
ramifications  de  ces  vaisseaux  qui  se 


répandent  sur  les  parois  des  canaux  et 
des  canalicules,  ou  cellules  aérifères, 
y  affectent  principalement  la  forme  de 
pinceaux  ou  d'aigrettes  (b). 

(1)  Ces  veines  passent  entre  la  face 
antérieure  des  bronches  et  les  veines 
caves,  et  débouchent  à  la  parlic  supé- 
rieure ci  interne  de  l'oreillette  gauche, 
derrière  l'artère  pulmonaire  (c). 

Quelquefois  il  existe,  aux  points  de 
rencontre  de  leurs  principales  bran- 
ches, des  replis  valvulaires  assez  bien 
caractérisés.  Meckel  a  remarqué  celte 
disposition  chez  l'Autruche  et  le 
Casoar  {cl). 

('2)  Il  en  résulte  que  la  nutrition 
de  ces  organes  s'effectue  ici  à  l'aide 
des  vaisseaux  qui  sont  affectés  prin- 
cipalement à  la  fonction  de  la  respi- 
ration (c). 


(a)  Voyez  Y  Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Oiseaux,  pi.  3,  fig.  i  a. 

(b)  Sappey,  Recherches  sur  l'appareil  respiratoire  des  Oiseaux,  p.  i  1 , 

(c)  Voyez  l' Atlas  du  Règne  animal  de  Cuvier,  Oiseaux,  pi.  3,  frg.  1. 

(d)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  370. 

(e)  Sappey,  Op.  cit.,  p.  12. 


/|72  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION    CHEZ    LES    OISEAUX. 

§  7.  —  En  résumé ,  nous  voyons  donc  que  l'appareil  circu- 
latoire des  Oiseaux  est  plus  parfait  que  celui  des  Reptiles,  que 
la  division  du  travail  physiologique  y  est  portée  plus  loin ,  et 
que  la  centralisation  des  fonctions  y  est  plus  complète.  Ici ,  en 
effet,  la  grande  et  la  petite  circulation  sont  parfaitement  sépa- 
rées, et  les  deux  grandes  divisions  du  système  vasculaire  qui 
y  sont  affectées  sont  pourvues  chacune  d'un  organe  d'impulsion 
spécial  et  indépendant.  Non-seulement  le  cœur  est  pourvu  de 
deux  ventricules  et  de  deux  oreillettes  distinctes,  mode  d'orga- 
nisation que  nous  avons  déjà  rencontré  chez  les  Reptiles  supé- 
rieurs dont  se  compose  la  famille  des  Crocodiliens ,  mais  le 
ventricule  droit  est  affecté  exclusivement  au  service  de  la 
circulation  pulmonaire,  disposition  qui  ne  se  voit  chez  aucun 
Vertébré  à  sang  froid.  C'est  également  dans  la  classe  des  Oiseaux 
que,  pour  la  première  fois,  nous  avons  trouvé  la  totalité  du 
système  artériel  général  constitué  par  une  seule  crosse  aortique 
impaire.  Sous  tous  ces  rapports,  les  Oiseaux  ressemblent  extrê- 
mement aux  Mammifères  ;  mais,  ainsi  que  nous  le  verrons  dans 
la  prochaine  Leçon,  ils  s'en  distinguent  par  certaines  particula- 
rités du  système  circulatoire  aussi  bien  que  par  les  caractères 
que  nous  a  déjà  fournis  l'appareil  de  la  respiration. 


TRENTIEME  LEÇON. 

De  l'appareil  de  la  circulation  chez  les  Mammifères. 

§  1.  —  Tout  ce  que  j'ai  dit  dans  les  Leçons  précédentes  sur     Mode  je 
le  mode  de  formation  de  l'appareil  circulatoire  pendant  les  e"u°Sen 
premières  périodes  de  la  vie  embryonnaire  du  Poisson,  du  dépendances. 
Batracien,  du  Reptile  et  de  l'Oiseau,  est  applicable  aussi  à  la 
classe  des  Mammifères  ;  mais  ici  encore  cette  similitude  pri- 
mordiale n'est  que  transitoire,  et  des  différences  correspon- 
dantes aux  divisions  successives  que  la  Nature  semble  avoir 
voulu  établir  parmi  les  dérivés  du  type  Vertébré  apparaissent 
successivement  soit  dans  la  conformation  du  cœur,  soit  dans 
la  manière  dont  le  système  artériel  se  transforme  pour  arriver 
à  son  état  définitif. 

Chez  tout  embryon  de  Vertébré  ordinaire,  c'est-à-dire  chez 
tous  les  Animaux  de  ce  grand  embranchement ,  l'Amphyoxus 
excepté,  le  cœur,  représenté  d'abord  par  un  vaisseau  longitu- 
dinal de  forme  cylindrique,  se  développe  bientôt  d'une  manière 
inégale,  et  présente  de  la  sorte  une  série  de  trois  chambres  ou 
poches  placées  à  la  file  et  séparées  par  des  étranglements  :  le 
premier  de  ces  réservoirs  en  allant,  comme  le  fait  le  sang, 
d'arrière  en  avant,  est  le  vestibule  cardiaque  ou  sac  auriculaire  ; 
le  second  est  le  sac  ventriculaire,  et  le  troisième  le  sac  artériel. 
Chez  tous  ces  embryons,  le  tube  moniliforme  ainsi  constitué 
se  recourbe  aussi  en  manière  d'anse,  et  le  sac  postérieur  ou 
auriculaire  chevauche  sur  les  réservoirs  suivants,  de  façon  ta 
aller  se  placer   nu-dessus  ou  même  en  avant   du  sac  ven- 


!ill\  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

triculaire  ,  et  c'est  ce  dernier  dont  les  parois  acquièrent  le  plus 
d'épaisseur  (1). 

A  la  fin  de  cette  période  commune,  la  direction  du  travail 
embryogénique  varie  suivant  que  le  petit  être  en  voie  de  for- 
mation appartient  à  la  division  des  Vertébrés  Anallantoïdiens 
ou  des  Vertébrés  Allantoïdiens. 

Dans  le  premier  cas,  le  réservoir  antérieur  se  perfectionne 
et  devient  le  bulbe  artériel;  dans  le  second,  il  se  confond  avec 
le  réservoir  ventriculaire  et  disparaît. 

Les  arcs  vasculaires  qui  en  partent,  et  qui  constituent  la 
portion  basilaire  du  système  artériel,  cessent  aussi  de  se  déve- 
lopper d'une  manière  similaire  :  chez  les  Anallantoïdiens,  ils 
donnent  naissance  à  une  sorte  de  réseau  capillaire  qui  en  inter- 
rompt la  continuité  et  devient  le  siège  du  travail  respiratoire  ; 
chez  les  Allantoïdiens,  ces  arcs  restent  simples  et  ne  se  résol- 
vent jamais  en  appendices  branchiaux,  mais  se  perfectionnent 


(1)  La  premii  re  forme  que  le  cœur  courbure,  de  renflemeni  et  de  torsion 
revêt,  savoir,  celle  d'un  tube  cylin-  que  ce  vaisseau  présente  à  mesure 
di'iqnc  presque  droit,  est  plus  facile  à  qu'il  se  développe  et  constitue  un 
observer  cbez  les  Oiseaux  (a)  que  cbez  cœur  à  plusieurs  loges,  je  renverrai 
les  Mammifères,  mais  se  voit  très  bien  également  aux  ouvrages  de  ces  deux 
dans  une  figure  donnée  par  M.  Bi-  derniers  auteurs  et  aux  planches  pu- 
schpff  et  représentant  un  embryon  de  bliées  sur  le  même  sujet  par  M.  Wag- 
Lapin  âgé  de  quelques  heures  seule-  n'er  [d).  Quelques-unes  de  ces  formes 
ment  (b),  ainsi  que  dans  les  planches  transitoires  ont  été  représentées  dans 
de  M.  LIausmanh,  relatives  à  la  struc-  les  belles  planches  relatives  à  Pein- 
ture de  l'embryon  du  Mouton  et  du  bryologie  de  la  Brebis  (e)  et  de  l'espèce 
Cheval  (c).  Pour  les  divers  degrés  de  humaine  (/"),  dues  à  M.  Cosle. 


(a)  Voyez  Prévost  et  Dumas,  Développement  du  cœur  (Ami.  des  sciences  nat.,  1824,  t.  III, 
pi.  IV,  fig.  30). 

—  Remak,  Untersuch.  ùber  die  Entwickelung  der  Wlrbelthiere,  pi.  4,  fig.  3G  (1851). 

(b)  Bischoff,  Traité  du  développement  de  l'Homme  et  des  Mammifères,  pi.  13,  fig.  58  {Encyclop. 
anatomique,  1843,  t.  VIII). 

(c)  Hausmarm,  Ueber  die  Zeugung  und  Entstehung  des  luahreniveiblkhen  Eies  bel  den  Sauge- 
thieren  und  Menschen,  pi.  0,  fis.  1,  et  pi.  10,  fig.  11  (1840). 

{d)  Pi.  Wagner,  Icônes  physiologicœ,  pi.  0,  fig.  13,  14  et  15. 

(«)  Cosle,  Histoire  générale  et  particulière  du  développement  des  corps  organisés  ,  Vertébré.?, 
Rrebis,  pi.  4,  5  et  6  (1844). 

{()  Cosle,  Op.  cit.,  pi.  2  a,  fig.  2,  elc. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  /l75 

d'une  autre  manière,  et  deux  d'entre  eux  constituent  une  paire 
de  crosses  aorliques. 

Les  embryons  des  Vertébrés  Allantoïdiens  ,  en  avançant 
davantage  dans  leur  développement,  cessent  d'être  conformés 
sur  le  même  plan ,  lorsqu'ils  appartiennent ,  d'une  part  à  la 
classe  des  Reptiles ,  d'autre  part  à  celle  des  Oiseaux  ou  des 
Mammifères.  Dans  le  premier  cas,  le  jeune  Animal  conserve 
ses  deux  crosses  aortiques  paires ,  et  le  réservoir  auriculaire 
du  cœur  se  divise  en  deux  loges  avant  que  rien  de  semblable 
se  soit  effectué  dans  la  loge  ventriculaire.  Dans  le  second 
cas,  une  seule  crosse  aortique  se  développe  d'une  manière 
permanente,  et  l'autre  disparaît  plus  ou  moins  promptement. 
Enfin,  le  cloisonnement  intérieur  des  cavités  du  cœur  s'effectue 
autrement  :  le  réservoir  ventriculaire,  qui,  chez  les  Reptiles 
reste  indivis  ou  ne  se  partage  que  tardivement  en  deux  cavités, 
est  ici  le  premier  à  s'enrichir  d'une  cloison  complète,  et  le 
réservoir  auriculaire  reste,  au  contraire,  imparfaitement  divisé 
pendant  toute  la  durée  de  la  vie  embryonnaire  (1). 

La  similitude  primordiale  de  l'appareil  circulatoire  se  con- 
serve donc  plus  longtemps  entre  les  Mammifères  et  les  Oiseaux 
qu'entre  ceux-ci  et  les  Reptiles.  La  ressemblance  définitive  est 
aussi  plus  grande;  mais  cependant,  longtemps  avant  la  fin  de  la 
vie  embryonnaire,  les  progrès  du  développement  amènent 
certaines  différences  entre  ces  deux  types  d'Animaux  à  sang 
chaud.  Ainsi,  chez  le  Mammifère,  ce  n'est  pas  à  l'aide  de  l'un 
des  arcs  vasculaires  du  côté  droit  du  système  artériel  que  la 
crosse  aortique  se  constitue,  mais  au  moyen  de  l'autre  moitié  de 
ce  même  système,  de  façon  que  cette  crosse,  au  lieu  de  passer  à 

(1)  Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet,  l'Homme  cl  des  Mammifères  (1),  me 
je  renverrai  à  l'excellent  ouvrage  de  réservant  d'y  revenir  dans  la  seconde 
iM.  Bischoff  sur  le  développement  de      partie  de  ce  cours. 

)  Bischofï,  Op.  cit.,  p.  252  el  suis 


Caractères 
généraux 
du  système 
circulatoire 

des 
Mammifères. 


/|76  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

droite  de  l'œsophage,  se  trouve  située  du  côté  gauche  de  cet 
organe  (4).  11  y  a  aussi  des  différences  dans  le  mode  de  per- 
fectionnement du  cœur,  et  les  valvules  auriculo-ventriculaires, 
au  lieu  d'être  conformées  d'une  manière  différente  dans  les 
cavités  droites  et  gauches ,  offrent  le  même  mode  de  structure 
des  deux  côtés. 

Il  résulte  de  ce  mode  de  développement  que  dans  la  classe  des 
Mammifères,  de  même  que  chez  les  Oiseaux,  le  cœur  est  tou- 
jours complètement  séparé  en  deux  systèmes  de  cavités  contrac- 
tiles :  une  oreillette  et  un  ventricule  de  chaque  côté  ;  la  circu- 
lation est  double  et  complète  ;  enfin  le  système  artériel  est 
simple  à  son  origine ,  c'est-à-dire  pourvu  d'une  seule  crosse 
aortique.  Mais  l'appareil  circulatoire  du  Mammifère  se  distingue 
de  celui  de  l'Oiseau  par  plusieurs  caractères  d'une  valeur  secon- 
daire, tels  que  la  direction  de  cette  portion  de  l'aorte  et  la  struc- 
ture des  valvules  auriculo-ventriculaires  des  cavités  droites  du 
cœur.  J'ajouterai  aussi  que  chez  les  Mammifères  le  système 
veineux  ne  présente  plus  dans  la  partie  postérieure  de  la  région 
abdominale  ce  mode  particulier  de  distribution  que  nous 
avons  rencontré  chez  les  Reptiles,  les  Batraciens  et  les  Pois- 
sons :  il  n'y  a  plus  aucune  trace  d'une  veine  porte  rénale, 
et  la  veine  porte  hépatique  est  le  seul  réseau  capillaire  que  le 
sang  noir  rencontre  sur  son  passage  en  allant  des  veines  vers 
le  cœur. 

Ces  notions  préliminaires  étant  acquises,  examinons  d'une 
manière  plus  attentive  chacune  des  portions  constitutives  de 


(1)  L'étude  comparative  de  l'emploi 
organique  des  différents  arcs  vascu- 
laires,  ou  crosses  aortiques  primor- 
diales, chez  les  divers  Vertébrés,  vient 
d'être  reprise  par  M.  Ralhke,  et  les 


résultats  obtenus  ont  été  rendus  fa- 
ciles à  saisir  à  l'aide  d'une  série  de  fi- 
gures théoriques  (a).  Voyez  aussi  à  ce 
sujet  les  recherches  de  M.  Baer  (6). 


(a)Rathke,  Untersuchungen  ûber  die  Aortenwurxeln,  p.  50  et  suiv.,  pi.  G,  fig\  C  à  10  (extrait 
des  Mém.  de  l'Acad.  des  sciences  de  Vienne,  t.  XIII). 

(6)  Voyez  Burdach,  Traité  de  physiologie,  t.  III,  p.  518,  pi.  4,  fig.  3. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  477 

l'appareil  circulatoire  chez  les  Mammifères  en  général,  mais 
plus  particulièrement  chez  l'Homme,  et  occupons-nous  d'abord 

du  COEUR. 

§  2.  —  Chez  l'Homme  et  les  autres  Mammifères,  de  même  position 
que  chez  les  Oiseaux,  les  Reptiles,  les  Batraciens  et  les  Poissons, 
le  cœur  se  montre  d'abord  dans  la  région  pharyngienne  du 
corps,  mais  il  ne  conserve  cette  position  que  chez  les  Poissons, 
et  chez  tous  les  Vertébrés  supérieurs,  par  suite  de  la  croissance 
inégale  des  parties,  il  se  trouve  bientôt  porté  très  loin  de  la  tête 
et  logé  dans  le  thorax  (1).  Primitivement  il  y  est  simplement 
appendu,  mais  l'espèce  de  voûte  que  le  corps  du  petit  embryon 
forme  dans  cette  région  ne  tarde  pas  à  s'élargir  et  à  descendre, 
puis  à  se  recourber  en  dedans,  de  façon  à  constituer  les  parois 
latérales  et  sternales  de  la  cavité  viscérale ,  et  a  renfermer 
cet  organe  dans  la  chambre  thoracique  ainsi  constituée.  Chez 
l'embryon  humain,  à  l'âge  de  cinq  ou  six  semaines,  le  cœur 
se  trouve  suspendu  verticalement  sur  la  ligne  médiane  (2)  et  il 
descend  jusque  dans  l'abdomen  ,  car  son  volume  relatif  est  très 
considérable  et  le  diaphragme  n'est  pas  encore  formé  ;  mais 
vers  la  fin  du  second  mois,  le  développement  du  foie  l'oblige  à 
quitter  sa  direction  verticale,  et  sa  pointe  se  dirige  alors  en 


(1)  Cette  position  du  cœur  dans  le  chez  un  embryon  de  Chien  dont  le 

voisinage  immédiat  de  la  région  plia-  développement  était  moins  avancé, 

ryngienue  se  voit  chez  quelques  em-  et  dont  M.  Hausmann  a  donné  des 

bryons  humains   très  jeunes  figurés  figures  {cl). 

par  Meckel  {a)  et  par  M.  Coste  (b),  (!2)  Voyez  comme  exemple  de  Celte 
mais  était  encore  plus  prononcée  chez  disposition  l'embryon  humain  d'envi- 
un  jeune  embryon  de  Cocbon  ob-  ron  vingt-huit  jours  représenté  par 
serve  par  M.  Rathke  (c),  et  surtout  M.  Coste  (e). 


(a)  Meckel ,  Beitrâge  zur  Blldungsgeschkhte  des  Herzens  und  derLungen  der  Sâugethieve 
(Deutsches  Archiv  fur  die  Physiologie ,  1816,  t.  II,  p.  402,  pi.  4,  flg.  1,  3,  etc.). 

(b)  Coste,  Histoire  du  développement  des  corps  organisés,  pi.  4a,  fig.  1. 

(c)  Rathke,  Ueber  die  Entwickelung  der  Athrneiwerkz-euge  bei  den  Vôgeln  und  Sâugelhieren 
iNova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  1828,  t.  XIV,  pi.  17,  fig.  3). 

(d)  Hausmann,  Op.  cit.,  pi.  5,  fig.  6  et  7. 

(e)  Coste,  Op.  cit.;  pi.  3  a,  fig.  B. 


Û78  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

avant.  Chez  la  plupart  des  Mammifères,  il  conserve  toujours 
cette  position,  et,  placé  à  peu  près  sur  la  ligne  médiane,  il  est 
dirigé  directement  d'avant  en  arrière.  Chez  l'Homme,  au  con- 
traire, vers  le  commencement  du  quatrième  mois  de  la  vie 
embryonnaire,  il  cesse  d'être  placé  symétriquement-,  il  se  con- 
tourne sur  lui-même,  et  sa  pointe  se  porte  à  gauche.  Une 
déviation  analogue  se  remarque  aussi  chez  quelques  autres 
Mammifères  (1),  et  il  résulte  de  cette  disposition  que  chez  ces 
espèces  le  cœur  se  trouve  couché  obliquement  sur  le  dia- 
phragme. Ainsi,  chez  l'Homme,  son  grand  axe,  dirigé  de  haut 
en  bas,  d'arrière  en  avant  et  de  droite  à  gauche,  forme  avec  la 
ligne  verticale  un  angle  d'environ  50  degrés  ;  sa  base  corres- 
pond aux  vertèbres  dorsales  comprises  entre  le  quatrième  et 
le  huitième  de  ces  os  inclusivement,  et  son  sommet  s'applique 
contre  les  cartilages  des  cinquième  et  sixième  côtes  du  côté 
droit  (2).  Il  est  suspendu  par  les  gros  vaisseaux  qui  sont  en 


(1)  Celte  position  oblique  du  cœur 
existe  aussi  chez  les  Singes  les  plus 
élevés  en  organisation  :  elle  est  plus 
prononcée  chez  l'Orang  et  leChimpanzé 
que  chez  les  autres  Quadrumanes,  et 
quelques  analomisles  pensent  qu'elle 
se  rattache  à  la  position  bipède  (a)  ; 
mais  elle  se  remarque  aussi  chez 
quelques  Mammifères  dont  le  corps 
est  horizontal,  la  Taupe,  par  exem- 
ple (6),  et  elle  dépend  de  la  forte 
saillie  du  diaphragme  dans  l'intérieur 
de  la  cavité  du  thorax. 

Il  est  aussi  à  noterquechez  l'Homme 
le  plan  longitudinal  correspondant  à  la 
cloison  interventriculaire  est  incliné 
de  façon  que  le  ventricule  gauche  se 
trouve  en  bas  et  en  arrière,  tandis  que 


le  ventricule  droit  est  antérieur  et  su- 
périeur. C'est  à  raison  de  cette  obli- 
quité qu'on  désigne  quelquefois  le 
ventricule  droit  sous  le  nom  de  ven- 
tricule antérieur,  et  celui  de  gauche 
sous  le  nom  de  ventricule  postérieur. 

(2)  La  position  du  cœur  est  sujette 
à  varier  un  peu,  soit  dans  certaines 
attitudes  du  corps  ou  pendant  les 
contractions  violentes  du  diaphragme, 
soit  dans  quelques  cas  pathologiques. 
Ainsi,  dans  des  cas  d'hydrothorax  du 
côté  gauche,  cet  organe  est  souvent 
plus  ou  moins  refoulé  à  droite. 

On  rencontre  aussi  parfois  des  cas 
du  vice  de  conformation  nommé  ecto- 
pie  du  cœur,  dans  lesquels  ce  viscère 
est  plus  ou  moins  déplacé  et  se  trouve 


(a)  Cruvcllliier,  Traite  d'anatomie  descriptive,  l.  It,  p.  498  (1843). 

(b)  Uaubcnloii.  Voyez  Bufl'on,  Histoire  naturelle  des   Mammifères,  t.  IV,  p.  48G. 


<  HEZ    LEfc»    MAMMIFÈRES.  /|79 

con'nexité  avec  su  base,  et  il  est  maintenu  en  place  de  chaque 
côté  par  les  parties  voisines  des  deux  plèvres  costales  qui, 
adossées  l'une  à  l'autre,  constituent  au  milieu  de  la  poitrine  une 
sorte  de  cloison  membraneuse  verticale,  nommée  médiastin. 
Latéralement  il  est  en  rapport  avec  les  poumons,  qui  le  débor- 
dent en  avant,  surtout  vers  sa  base,  et  s'interposent  ainsi  entre 
sa  face  antérieure  et  les  parois  du  thorax. 

Le  péricarde  forme  autour  du  cœur,  comme  chez  les  autres  péricarde. 
Vertébrés,  une  double  tunique  séreuse.  Chez  l'Homme,'  cette 
membrane  se  constitue  vers  la  neuvième  semaine  de  la  vie 
embryonnaire ,  et  son  feuillet  interne  n'adhère  d'abord  que 
faiblement  à  la  surface  du  cœur.  Le  feuillet  externe  de  ce  sac 
est  aussi  presque  libre  primitivement;  mais,  par  les  progrès  du 
développement ,  il  conlracte  une  union  intime  avec  la  portion 
tendineuse  correspondante  du  diaphragme,  et  s'accole  latérale- 
ment aux  deux  lames  du  médiastin  (1). 

rejeté  à  droite  (a)  ,  ou  même  éloigné  lier  la  clôture  des  parois  antérieures 

encore  davantage  de  sa  position  noi  -  du  thorax,  il  peut  rester  hors  de  cette 

maie;  mais  cela  est  très  rare,  et  c'est  cavité,  ainsi  cpie  cela  a  été  observé 

seulement  après  avoir  traité  spécia-  chez  quelques  enfants  nouveau-nés, 

lement  du  développement  de  l'em-  ou  être  recouvert  seulement  par  la 

bryon   que  .nous  pourrons  examiner  peau.    La  plupart  des  médecins  de 

utilement  ces  cas   tératologiqnes.  Je  Paris,  del'Allemagne  et  de  l'Angleterre 

me  bornerai  à  ajouter  ici  que,  par  ont  eu  l'occasion  d'observer,  il  y  a 

l'effet  d'un  arrêt  de  développement  peu  d'années,  un  cas  de  ce  genre  chez 

du  diaphragme,  le   cœur  a  pu  être  un  Homme  adulte,  nommé  doux  , 

trouvé  dans  l'abdomen ,  et  que ,  par  qui  avait  une  fissure  congénitale  du 

suite   d'un    vice    semblable    dans  le  sternum  (6). 

travail  organogénique  destiné  à  ame-  (1)  Chez  un  petit  nombre  de  Mam- 

(ct)  Voyez  Breschet,  Mêm.  sur  l'ectopie  de  l'appareil  de  la  circulation,  et  particulièrement  du 
cœur  (Répertoire  général  d'anatomie  et  de  physiologie,  1826,  t.  H,  p.  1). 

—  Ollo,  Seltene  Beobachtangen,  lr*  parlie,  p.  95,  et  2°  partie,  p.  il. 

(b)  Hamcrnjk,  Fissura sterni  (Wiener  med.  Wochenschr.,  1853,  n"'29-32,  et  Schmidt's  Jahr- 
bûcher  der  gesammten  Medicin,  1853,  t.  LXXX.  p.  296). 

—  Martin,  Rapport  fait  à  l'Académie  de  médecine  sur  un  cas  de  fissure  du  sternum  présenté 
par  M.  Grouse  (Gazette  hebdomadaire,  4855,  t.  II,  p.  260). 

—  Ernst,  Studien  uber  die  Herzlhâtigkeit,  mit  besonderer  Berûcksichtigung  der  an  H.  Groux's 
Fissura  sterni  congenita  gemachten  Beobachtangen  (Archiv  fur  pathol,  Anat.  und  Physiol ,  t.  IX, 
p.  209). 

Ut.  31 


Volume 
du  cœur. 


/|8Û  APPAREIL    DE    L.V    CIRC'JLATIO^ 

Le  volume  du  cœur  est    assez    considérable  ,    compara- 
tivement à  celui  du  corps  ,   et  continue  à  augmenter  long- 


mifères,  mais  surtout  chez  le  Héris- 
son, le  péricarde,  dont  j'ai  déjà  eu 
l'occasion  de  Taire  connaître  la  dispo- 
sition générale  (a),  est  si  mince,  qu'on 
ne  le  distingue  qu'avec  peine,  et  que 
son  existence  a  été  méconnue  par 
quelques  anatomisles,  et  notamment 
par  Blâsius  et  Peyer  (6);  mais  il  ne 
manque  réellement  chez  aucun  de  ces 
Animaux,  et  les  exemples  de  l'absence 
anormale  de  cette  tunique  sont  même 
extrêmement  raies.  On  cite  cepen- 
dant quelques  cas  où  le  cœur  était 
réellement  dépourvu  de  péricarde 
chez  l'Homme.  D'autres  fois  il  a 
paru  manquer,  parce  qu'il  adhérait 
tout  entier  au  cœur  et  se  trouvait  ré- 
duit presque  à  du  tissu  conjonctif  (c). 
Dans  l'état  normal,  son  feuillet  interne 
(ou  Vépicarde) ,  qui  est  très  mince, 
adhère  intimement  à  la  surface  du  cœur 
et  du  commencement  des  gros  vais- 
seaux, et  n'estque  juxtaposé  à  son  feuil- 
let externe,  dont  il  est  même  séparé 
par  une  couche  très  mince  de  liquide 
séreux.  Dans  quelques  cas  pathologi- 
ques, ce  liquide  devient  très  abondant, 
et  son  accumulation  constitue  la  mala- 
die désignée  sous  le  nom  d'hydropéri- 
carde  ou  d'hydropisie  du  cœur.  Il  est 
aussi  à  noter  que  la  surface  interne  du 
péricarde  est  revêtue  d'une  couche  de 
tissu  épithélique  pavimenteux,  et  que 
c'est  seulement  à  la  suite  d'accidents 
inflammatoires  que  des  brides  analo- 
gues à  celles  dont  nous  avons  rencon  - 


tré  de  si  fréquents  exemples  chez  les 
Vertébrés  inférieurs,  s'y  développent. 
Le  feuillet  externe  est  beaucoup  plus 
épais  que  le  feuillet  cardiaque,  et  les 
libres  élastiques  qui  le  garnissent  en 
dehors  sont  beaucoup  plus  dévelop- 
pé! s  ;  elles  constituent  un  réseau  et 
rendent  la  poche  ainsi  constituée  peu 
extensible.  Enfin  du  tissu  conjonc- 
tif l'unit  extérieurement  au  sternum 
en  avant,  et  latéralement  aux  deux 
lames  du  médiastin,ou  portion  interne 
du  feuillet  costal  des  plèvres,  entre 
lesquelles  il  se  trouve  placé.  Chez 
l'Homme,  chez  l'Orang  -  Outang  et 
chez  quelques  autres  Singes,  le  péri- 
carde adhère  aussi  très  fortement  au 
centre  tendineux  du  diaphragme.  Il 
en  est  de  même  chez  les  Baleines  (d), 
les  Dauphins  et  le  Narwal  ;  mais  chez 
la  plupart  des  Mammifères  il  se  trouve 
complètement  séparé  de  celte  cloison 
musculaire,  et.  les  poumons  venant  à 
s'interposer  entre  celle-ci  et  son  ex- 
trémité postérieure,  il  est  retenu  dans 
cette  direction  par  le  médiastin  seu- 
lement. 

Les  petits  vaisseaux  qui  distribuent 
le  sang  dans  la  couche,  fibreuse  du 
péricarde  viennent  des  parties  cir- 
con voisines»  cl  sont  fournis  par  les 
artères  bronchiques,  œsophagienne, 
phrénique,  mammaire  interne,  coro- 
naire, etc.  On  y  découvre  aussi  des 
vaisseaux  lymphatiques  et  des  fila- 
ments nerveux    qui    dépendent   des 


(a)  Voyez  ci-ilcssus,  p.  311  et  suiv. 

(6)  Voyez  BlumenWhj  Handbuch  der  verglekh.  Anatomie,  p.  221  (1 805). 

(c)  Voyez  Brcschet,  Mém.  sur  les  vices  de  conformation  congénitale  des  enveloppes  du  cœur 
(Répertoire  général  d' anatomie,  t.  I,  p.  212). 

[d)  Hunier,  Observations  sur  la  structure  et  l'économie  des  Baleines  (Œuvres,  I.  IV,  p    UH). 


chez  Les  mammifères.  /|81 

Icmps  après  que  les  autres  organes  ont  terminé  leur  crois- 
sance (l). 


nerfs  ph réniques  et  récurrent  du  côté 
droit  (a). 

C'est  à  raison  du  peu  d'extensibilité 
de  cette  tunique  que  l'épanchcment 
brusque  d'une  quantité  minime  de 
sang  dans  son  intérieur  détermine 
souvent  une  mort  subite,  en  compri- 
mant le  cœur  et  l'empêchant  de  fonc- 
tionner. C'est  de  la  sorte  que  parfois 
une  hémorrhagie  de  250  grammes,  qui 
produirait  à  peine  un  peu  de  faiblesse 
si  elle  était  extérieure,  peut  devenir 
mortelle  instantanément  quand  elle  a 
son  siège  dans  le  péricarde. 

L'épicarde,  ou  feuillet  cardiaque  du 
péricarde,  est  généralement  transpa- 
rent, mais  présente  souvent  des  taches 
blanchâtres  qui  ne  paraissent  pas  être 
dues  à  un  état  pathologique,  et  dépen- 
dent plutôt  des  modifications  que  l'âge 
amené  dans  la  constitution  de  cette 
membrane  (6). 

(1)  Dans  les  premiers  temps  de  la 
vie  embryonnaire,  le  volume  relatif  du 
cœur  est  beaucoup  plus  considérable 
qu'à  l'époque  de  la  naissance.  Ainsi 
Meckel  estime  que  cet  organe  repré- 
sente ^  du  volume  total  du  corps, 
chez  un  embryon  humain  de  deux  à 
trois  mois,  et  seulement  ~  chez 
un  fœtus  à  terme.  Pendant  la  jeu- 
nesse et  l'adolescence,  le  cœur  paraît 
grandir  à  peu  près  proportionnelle- 


ment au  reste  du  corps;  mais  il  ré- 
sulte des  observations  nombreuses 
recueillies  par  M.  Bizot,  qu'il  continue 
à  augmenter  de  volume  après  que  la 
croissance  générale  est  terminée,  et 
qu'il  grandit  en  épaisseur  aussi  bien 
qu'en  capacité  jusque  dans  la  vieil- 
lesse (c). 

L'hypertrophie,  ou  développement 
excessif  du  cœur,  est  une  cause  de  trou- 
ble considérable   dans   les  fonctions 
de  l'appareil  circulatoire,  et  consécuti- 
vement dans  l'organisme  tout  entier  ; 
aussi  les  pathologistes  ont-ils  étudié 
avec  beaucoup  d'attention  le  volume 
et  le  poids  normal  de  cet  organe  chez 
l'Homme.  Laënnec,  à  qui  la  médecine 
doit  beaucoup  d'observations  impor- 
tantes pour  le  diagnostic  des  maladies 
du  cœur,  estimait  que  dans  l'état  sain 
!e  volume  de  cet  organe  est  à  peu  près 
égal  à  celui  du  poing  du  sujet  auquel 
il  appartient  (rf);  mais  aujourd'hui  on 
ne  se  contenie  pas  de  cette  approxima- 
tion, et  l'on  a  cherché  à  évaluer  avec 
plus  de  précision,  d'une  parties  dimen- 
sions de  ce  viscère,  d'autre  part  son 
poids,  et  beaucoup  de  déterminations 
de  ce  genre  ont  été  faites  par  MM.  Bouil- 
laud,  Bizot,  Neucourt  en  France  (e), 
et  par  MM.  Peacock  et  Clendenning  en 
Angleterre.  Ce  dernier  (en  se  fondant 
sur  environ  /i00  observations)  a  trouvé 


(a)  Voyez  Kiïlliker,  Traité  d'histologie,  p.  600. 

(6)  Bizot,  Recherches  sur  le  cœur  et  le  système  artériel  chez  l'Homme  (Mém.  de  la  Soc.  méd. 
d'observation  de  Paris,  1836,  t.  I,  p.  347). 

(c)  Bizot,  Op.  cit.  (Mém.  de  la  Soc.  méd.  d'observ*  de  Paris,  1836,  t.  I,  p.  262). 

(d)  Lnè'nnec,  Traité  de  l'auscultation  médiate  ,  1826,  t.  II,  p.  404,  2°  édit. 
(é)  Bouillauii,  Traité  clinique  des  maladies  du  cœur,  1835,  t.  I,  p.  25  et  suiv. 

—  Bizot,  Op.  cit.  (Mém.  de  la  Soc.  méd.  d'observation,  1836,  t.  1). 

—  Neucourl,  De  l'état  du  cœur  chez  le  vieillard  (Archives  gén.  de  médecine,  1843,   3°  séïie; 
t.  111,  p.  1). 

—  Peacock,  On  the  Weight  and  Dim-ensions  of  the  lleart  in  Health  and  Diseases  (Monthly 
Joum.  of  Med.  Se,  1854,  t.  XVIII,  p.  193). 


Forme 
du  cœur. 


ft82  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

A  l'époque  où  le  sac  ventriculaire  se  divise  intérieurement 
en  deux  loges  par  le  développement  d'une  cloison,  une  scissure 
se  forme  à  la  surface  extérieure  de  cet  organe,  et  en  partage  le 
sommet  ou  partie  inférieure  en  deux  moitiés  correspondantes 


pour  poids  moyen,  chez  l'Homme,  à 
l'état  normal  : 

De  15  à  30  ans.  .  .  264  grammes. 

30  à  50 272 

50  à  70 298 

70  et  au-dessus  .  .   312 

Les  pesées  comparatives  faites  chez 
les  femmes  ont  donné  pour  les  mêmes 
catégories  d'âges  :  260,  272,  276  et 
256  grammes  (a). 

Dans  les  cas  d'hypertrophie  du 
cœur,  le  poids  de  cet  organne,  au  lieu 
de  rester  entre  250  et  280  grammes, 
comme  cela  se  voit  le  plus  ordinaire- 
ment chez  l'Homme  adulte,  dans  l'état 
normalj  peut  devenir  trois  ou  quatre 
fois  plus  grand;  il  dépasse  cependant 
rarement  650  ou  700  grammes. 

Les  recherches  du  même  auteur 
montrent  que  le  poids  du  cœur  n'est 
pas  dans  un  rapport  constant  avec 
le  poids  total  du  corps,  mais  ne  varie 
d'ordinaire  que  dans  des  limites  assez 
restreintes.  Ainsi ,  chez  les  sujets 
qui  n'étaient  affectés  ni  de  phthisie 
pulmonaire,  ni  de  maladies  du  cœur, 
M.  Clcndcnning  a  trouvé  que  ce 
poids  relatif  oscillait  entre  —  et  ^ 
chez  les  hommes  de  15  à  70  ans 
ou  davantage,  et  entre  ^  et  ~  chez 
les  femmes.  La  moyenne  générale 
était  de  ~  pour  les  hommes,  et  de 


tvj  pour  les  femmes.  Chez  les  deux 
sexes,  la  fraction  était  la  plus  faible 
chez  les  individus  de  15  à  30  ans,  et 
c'est  chez  les  femmes  que  la  propor- 
tion s'est  montrée  la  plus  forte  clans 
la  vieillesse  (^j. 

Si  l'on  prend  pour  poids  moyen  de 
l'Homme  adulte  65  kilogrammes,  et 
pour  poids  moyen  du  cœur  270  gram- 
mes, on  trouvera  que  ce  viscère  con- 
stitue environ  T',-a  du  poids  total  de. 
l'organisme,  proportion  qui  se  rap- 
proche beaucoup  de  celle  constatée 
chez  quelques  Mammifères,  tels  que  le 
Mouton  et  le  Chat,  par  M.  Jones; mais 
qui  est  très  inférieure  à  celle  que  le 
même  physiologiste  a  trouvée  chez  le 
Chien  et  le  Raton  (Procyon  lator). 
Dans  ces  derniers,  le  poids  du  cœur 
représentait  de  -~j  à  777  du  poids  du 
corps,  tandis  que  chez  le  Chat,  la  Sa- 
rigue, l'Écureuil  et  le  Mouton,  il  va- 
riait entre  —7  et  ~  (b).  M.  Bouillaud 
a  trouvé  que  le  cœur  d'un  Bœuf  pesait 
1  kilogramme  (c),  et  si  l'on  prend 
comme  poids  moyen  des  Bœufs  abat- 
tus à  Paris  Zi00  kilogrammes,  on  aura 
aussi  le  rapport  d'environ  1  à  '_!0. 

M.  Parchappe  a  fait  aussi  une  série 
de  recherches  à  ce  sujet  (rf;,  et  il  a 
trouvé  que  si  l'on  représente  par 
1000  le  poids  du  corps,  celui  du  cœur 
sera  représenté  par  environ  : 


(a)  Clendenning,  Exper.  and  Observ.  relaliiuj  to  the  Pathology  of  the  Heart  (London.  Médical 
Gazette,  1837,  2"  série,  t.  II,  p.  445  et  suiv.). 

(b)  Joncs,    Investigations,  Chemical  and  Pliysioloijical  relative  to  certain  American   Yerte- 
brata,  p.  74  (Smithsonian  Contributions). 

(c)  Bouillaud,  Traité  des  maladies  du  cœur,  t.  I,  p.  79. 

(d)  Parchappe,  Du  cœur,  de  sa  structure  et  de  ses  mouvements,  p.  171, 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  /l83 

aux  deux  ventricules  (1) .  Pendant  quelque  temps  cette  disposition 
se  prononce  de  plus  en  plus,  mais  les  progrès  ultérieurs  du 
travail  embryonnaire  n'amènent  pas,'  sous  ce  rapport,  les  mêmes 
résultats  chez  tous  les  Mammifères,  et  de  là  certaines  différences 


5  ^  chez  l'Homme  adulle, 

fi  chez  le  Fœtus  à  terme, 

G  \  chez  le  Singe, 

5  1.  chaz  le  Chien, 

4  |  chez  le  Chat, 

0  chez  le  Lièvre, 

3   i-  chez  lo  Lapin, 

0  à  7  chez  le  Mouton,  le  Veau  et  lo  Cochon, 
7  à  9  \  chez  le  Coq  et  le  Moineau, 

3  chez  le  Crapaud, 

1  |  chez  la  Grenouille  et  l'Anguille. 

Ainsi,  chez  les  Mammifères,  le  poids 
du  cœur  paraît  osciller  autour  de  „'0 
du  poids  du  corps;  proportion  qui  se 
rapproche  beaucoup  de  ce  que  nous 
avons  déjà  trouvé  pour  les  Oiseaux, 
mais  qui  diffère  considérablement 
de  ce  qui  paraît  exister  d'ordinaire 
chez  les  Vertébrés  à  sang  froid.  Effec- 
tivement, ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit, 
AI.  Jones  a  vu  que  chez  les  lîepliles  et 


lesBatraciens,  celte  proportion  variait 
seulement  entre  environ  —^  et  ~ ,  et 
que  chez  les  Poissons,  elle  variait  d'en- 
viron -^  à  ~,.  Il  existe  donc  une  dif- 
férence très  grande  dans  le  développe- 
ment du  cœur  comparé  à  celui  de 
l'ensemble  de  l'organisme  chez  les 
Vertébrés  à  sang  chaud  et  les  Verté- 
brés à  sang  froid. 

M.  Bizot-a  trouvé  aussi  que  le  cœur 
s'accroît  sans  cesse  avec  l'âge  ;  que, 
toutes  choses  égales  d'ailleurs,  il  est 
plus  pelit  chez  la  femme  que  chez 
l'homme, et  que  son  volume  n'est  pas 
proportionné  à  la  taille  des  individus, 
mais  est  plutôt  en  rapport  avec  la  lar- 
geur de  la  poitrine. 

Voici  les  dimensions  en  longueur  et 
en  largeur  constatées  par  cet  anàto- 
misle  : 


HOMMES. 

FEMMES. 

AGE. 

s- -" "^ 

— ->. 

^— -^- 

— -^ 

LONGUEUR. 

LARGEUR. 

LONGUEUR. 

LARGEUR. 

Lignes. 

Lijm-s 

Usrtw- 

Lignes. 

22 

27 

22 

25 

5  à    9 

31 

33 

2G 

29 

1  0  à  1  5 

34 

37 

29 

31 

16  à  29 

42 

45 

38 

42 

30  à  49 

43 

47 

41 

44 

50  à  79 

45 

52 

42 

40 

(l)  Cette  bifurcation  de  la  portion  M.  llausmann  a  donnée  de  cet  or- 
inférieure  (ou  postérieure)  du  cœur  ganc  chez  de  très  jeunes  embryons 
se  voit  très  bien  dans  la  figure  que      de  Cheval  (a)  et  de  Chien  (6).  Elle  est 


(a)  Hausmann,    Ueber  die  Zeugung  und  Entstehung  des  wahren   weibUchen    FAes  bei  den 
Siïugethieren  und  dem  Menschen,  1840,  pi.  3,  tïg.  10  et  11. 
(&)  Hem,  ibid.  pi.  5,  fig.  13  et  17. 


k%k  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

dans  la  forme  générale  du  cœur  parmi  les  divers  Animaux  de 
cette  classe.  Effectivement,  chez  les  uns  cette  séparation  devient 
de  plus  en  plus  profonde,  et  se  prononce  d'une  manière  si  forte, 
que,  chez  l'Animal  parfait,  les  deux  ventricules  constituent  deux 
cônes  distincts,  quoique  accolés  par  leurs  faces  correspondantes, 
et  que  l'on  croirait,  au  premier  abord,  avoir  sous  les  yeux  non 
un  cœur  unique,  mais  deux  cœurs  simplement  soudés  l'un  à 
l'autre.  C'est  chez  les  Cétacés  herbivores  que  cette  disposition 
remarquable  se  rencontre,  et  c'est  chez  le  Dugong  qu'elle  est 
portée  le  plus  loin  (1).  Chez  les  autres  Mammifères,  la  scissure 
primordiale,  au  lieu  d'augmenter,  suit  chez  l'embryon  une 
marche  récurrente  et  tend  à  disparaître,  de  façon  que  le  cœur 
cesse  bientôt  d'être  bifide,  et  que  la  séparation  entre  les  deux 
ventricules  n'est  marquée  extérieurement  que  par  un  sillon 
oblique.  Sa  forme  est  celle  d'un  cône  à  base  presque  circulaire 
et  souvent  arrondi.  On  y  remarque  chez  les  divers  Mammifères 
quelques  variations  dans  les  proportions  (2),  mais  ces  diffé- 

aussi  fort  distincte  chez  des  embryons  Dans  les  Cétacés  proprement  dits, 

humains  âgés  d'environ  vingt-huit  et  le  cœur  est  remarquablement  large, 
trente-cinq  jours,  représentés  dans  le  mais  n'offre  que  rarement  une  bi- 
grand  allas  de  M.  Coste  (a).  furcalion    analogue    à   celle  dont   il 

(1)  Chez  ce  Mammifère  piscifoime,  vient  d'être  question.  Quelquefois 
les  ventricules  sont  séparés  de  la  sorte  cependant  Meckel  a  trouvé  ce  viscère 
dans  les  deux  tiers  de  leur  étendue  [b).  fendu  à  une  assez  grande  profon- 
Cuvier  a  trouvé  le  cœur  fendu  de  la  deur  chez  le  Marsouin  commun.  Il 
même  manière  dans  la  moitié  de  sa  a  même  rencontré  un  exemple  de„ 
longueur,  chez  le  Lamentin  (b)  ,  et  ce  mode  de  conformation  chez  le 
Sleller  a  constaté  la  même  division  dans       Phoque  (e). 

le  tiers  postérieur  de  cet  organe,  chez  ('2)  Le  cœur  est  assez  large  et  rac- 

le Hyiina  {cl).  courci  chez  les  Éléphants,  les  Pares- 

fa)  Coslc  ,   Histoire  générale  et  particulière  du  développement  des  corps  organisés  (espice 
humaine),  pi.  3,  fig.  D,  et  pi.  4  a,  fig.  2. 

(b)  Daubenton,  Description  d'un  embryon  de  Lamentin  (Buffun,  Mammifères,  t.  XII,  p.  372), 

—  Homo,  Comp.  Anat.,  1.  IV,  pi.  50. 

—  Rapp,  Die  Cetaccen,  zoologisch-anatumisch  dargestellt,  pi.  8. 

—  Carus  el  V.  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  7,  fig.  3. 
(e)  Cuvicr,  Leçons  d'Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  277. 

[dj  Sleller,  De  bestiis  marinis  (Novi  Commentant  Aead.  Petropolitanœ,  1740,  I.  H,  p.  310). 

—  Hunier,  Op.  cit.  (Œuvres,  I.  IV,  p.  464). 

(e)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  38-2. 


CHEZ    LF.g    MAMMIFÈRES.  A85 

rences  sont  sans  importance,  et  j'ajouterai  seulement  que  le 
sillon  interventriculaire  ne  passe  pas  par  le  sommet  de  l'organe, 
le  ventricule  gauche  descendant  plus  bas  que  le  ventricule  droit. 
Un  autre  sillon  transversal  et  circulaire,  qui  est  ordinairement 
occupé  par  de  la  graisse ,  sépare  les  ventricules  des  oreil- 
lettes (1).  Enfin  ces  dernières  poches  memhrano-musculaires 
sont  plus  ou  moins  libres  de  chaque  côté,  de  manière  à  consti- 
tuer des  appendices  qui  ont  reçu  plus  particulièrement  le  nom 
iïauricules,  parce  qu'à  raison  de  leur  forme  on  les  a  comparés 
à  de  petites  oreilles  de  Chien  (2). 


seux  et  chez  chez  les  Phoques  (a)  ; 
chez  la  Baleine,  il  est  plus  aplati  que 
chez  les  Quadrupèdes  (6). 

Il  est  arrondi  chez  la  plupart  des 
Uongeurs;  mais  chez  le  Lièvre,  ainsi 
que  chez  les  Ruminants,  les  Pachy- 
dermes ordinaires,  les  Carnassiers  et 
la  plupart  des  Quadrumanes  ,  il  a  la 
forme  d'un  cône  tronqué,  à  peu  près 
comme  chez  l'Homme  (c).  Chez  le 
Cheval  il  est  plus  pointu  (cl)  ;  chez  le 
Fourmilier  ,  au  contraire  ,  il  est  plus 
obtus  (e). 

(1)  Ce  sillon,  quoique  assez  super- 
ficiel en  apparence,  est  en  réalité  très 
profond  et  loge  en  arrière  les  vaisseaux 
coronaires  du  cœur.  Ces  vaisseaux 
occupent  également  les  sillons  anté- 
rieur et  postérieur  qui  correspondent 
à  la  cloison  interventriculaire ,  et 
qui,  chez  l'Homme,  sont  très  obli- 
ques. En  général,  de  la  graisse  s'accu- 
mule aussi  dans  ces  sillons  ventricu- 


laires,  et  quelquefois  même  des  fla- 
cons de  cette  substance  recouvrent 
presque  toute  la  surface  des  ventri- 
cules, entre  la  tunique  péricardique  et 
les  fibres  musculaires.  Ce  dépôt  de 
graisse  devient  plus  souvent  abondant 
chez  la  Femme  que  chez  l'Homme , 
et  n'est  pas  en  rapport  avec  l'état 
d'embonpoint  général  (/).  C'est  en 
grande  partie  à  celte  cause  que  lient 
l'augmentation  du  poids  du  cœur  dans 
la  vieillesse. 

(2)  Chez  l'Homme,  les  deux  oreil- 
lettes ne  sont  pas  séparées  entre  elles 
extérieurement  sur  leur  face  anté- 
rieure, mais  elles  paraissent,  au  pre- 
mier abord,  très  distinctes,  parce  que 
leur  portion  moyenne  se  trouve  ca- 
chée derrière  les  gros  troncs  artériels 
qui  sortent  des  venlricules  et  qu'à  leur 
face  supérieure  un  sillon  concave  leur 
sert  de  ligne  de  démarcation.  Leurs 
extrémités  latérales  sont  flottantes  et 


(a)  Voyez  Daubcnlon,  dans  Buffon,  Mammifères,  pi.  3A7. 

(b)  Voyez  Eschricht,  Unters.  uber  die  nordischen  Waldthiere,  p.  104,  fig.  25. 
(c)'  Exemple  :  Chevrolain.  Voyez  Carus  et  V.  Olto,  Op.  cit.,  pars  VI,  pi.  7,  fig.  2. 

—  Pécari.  Voyez  Daubcnlon,  Mammifères  de  Buffon,  pi.  302. 

—  Helamys.  Voyez  Bianconi,  Specimina  xoologica  Mosambicana,  Mammifères,  pi.  5,  fig\  16. 

—  Singe.  Voy.  Milne  Edwards,  Cours  élérri.  de  zoologie,  fig.  4. 

(d)  Voyez  Chameau,  Anat.  compar.  des  Animaux  domestiques,  p.  467,  fig.  {47. 

(e)  Voyez  Alefsandrini,  Annotazioni  anatomiche  sul  Fonnichiere  didatlilo  (Mem.  dell' Acad. 
délie  scienze  diBologna,  1851,  t.  III,  pi.  31,  fig.  2). 

(f)  Bizot,  Recherches  sur  le  cœur  (Mém.  de  la  Société  médicale  d'observation,  l.  I,  p.  352). 


Endocarde, 


Fibres 

musculaires  du 

cœur. 


486  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

L'endocarde,  ou  membrane  qui  revêt  intérieurement  les 
cavités  du  cœur,  et  qui  est  en  continuité  avec  la  tunique  interne 
des  vaisseaux  sanguins,  est  mince  et  transparente  ;  mais  elle 
se  compose  de  plusieurs  couches,  dont  l'interne  est  formée  de 
cellules  aplaties,  et  constitue  une  lame  analogue  à  l'épithélium 
dont  le  péricarde  est  revêtu  extérieurement  (1). 

Les  libres  musculaires  qui  sont  logées  entre  les  deux  tuni- 
ques formées  par  le  péricarde  et  l'endocarde,  et  qui  constituent 
la  tunique  moyenne  du  cœur,  sont  rouges,  striées  en  travers  et 
unies  très  intimement  entre  elles  (2).  Elles  ne  sont  que  peu 
développées  dans  les  oreillettes,  où  elles  peuvent  même  man- 
quer sur  quelques  points  ;  mais  dans  la  portion  ventriculaire 


dentelées  à  la  manière  d'une  crête  de 
Coq.  L'auriculc  droite  est  située  en 
avant;  l'aunciilc  gauche  se  trouve 
plus  en  arrière,  et  un  rétrécissement  la 
sépai;e  de  la  portion  principale  ou 
sinus  de  l'oreillette,  dont  elle  dépend, 

Chez  les  Marsupiaux,  la  portion  ap- 
pendiculaire  de  l'oreillette  droite  est 
toujours  divisée  en  deux  prolonge- 
ments coniques  situés,  l'un  en  avant, 
l'autre  en  arrière  de  l'aorte  (a). 

(1)  L'épithélium  de  l'endocarde  se 
compose  chez  l'Homme  de  cellules  po- 
lygonales à  noyau  et  ayant  de  0ra'",015 
à  0mra,027  de  largeur  (b).  Il  repose  sur 
une  membrane  basilaire  composée 
principalement  de  libres  élastiques 
disposées  en  réseaux  plus  ou  moins 
serrés,  mêlés  de  noyaux  et  parcourus 
par   des    vaisseaux    sanguins.    Enfin 


celle-ci  adhère  aux  parties  sous-ja- 
cenles  par  une  couche  mince  de  tissu 
conjonctif  ordinaire.  L'épaisseur  de 
la  couche  élastique  varie  ;  elle  se  dé- 
veloppe beaucoup  dans  les  oreillettes, 
et  y  constitue  souvent  une  sorte  de 
tunique  fehêlrée  de  tissu  jaune  (c). 
Il  est  aussi  à  noter  que  le  tissu  épi- 
thélique  est  extrêmement  délicat,  et 
ne  peut  être  bien  étudié  que  fort  peu 
de  temps  après  la  mort.  M.  Bovvrnan 
en  a  figuré  les  éléments  chez  le 
Cheval  [d). 

(2)  Les  fibres  du  cœur  sont  non- 
seulement  très  serrées  les  unes  contre 
les  autres ,  mais  encore  unies  entre 
elles  par  des  bifurcations,  et  des  fais- 
ceaux obliques  et  courts  qui  s'éten- 
dent entre  les  principaux  faisceaux 
longitudinaux  (e). 


{a)  Owen,  Marsupialia  (ToJd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  vol.  III,  p.  306,  fig.  131  et  132). 

(b)  Luschka,  Das  Endocardiumund  die  Endocarditis  (Virchow's  Archiv  fur  palliai.  Anat.  -und 
Physiol.,  1852-,  L  IV,  p.  173,  pi.  3,  fig.  1). 

(c)  Kôlliker,  Eléments  d'histologie  humaine,  p.  603. 

(d)  Todd  et  Bowman,  Physiological  Anatomy  and  Physiology  of  Mail,  t.  II,  p.  336,  fig.  196 
et  197. 

(e)  Leeuvrenhoek,  Arcana  Naturœ  détecta,  epist.  m,  p.  412. 

—  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  601,  fig.  279. 

—  Remak,  Ueber  den  Bail  des  Ikrzens  (Miïller's  Archiv  f'àr  Anat.  und  Physiol.,  1850,  p.  76). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  487 

du  cœur  elles  forment  une  couche  très  épaisse,  surtout  à 
gauche,  et  elles  offrent  une  disposition  très  compliquée.  Le 
mode  d'arrangement  de  toutes  ces  fibres  est  fort  complexe,  et 
depuis  Yésale  son  étude  a  souvent  exercé  la  patience  des 
anatomistes  (1).  Je  ne  m'arrêterai  pas  à  en  donner  ici  une  des- 
cription détaillée,  mais  je  crois  devoir  en  faire  connaître  les 
dispositions  principales. 

Les  fibres  musculaires  des  oreillettes  et  des  ventricules  sont 
parfaitement  indépendantes  les  unes  des  autres.  Celles  de  la 

(I)  Vésale,  dont  j'ai  déjà  eu  l'occa-  tomie  humaine  a  été  traité  d'une  ma- 

sion  de  citer   les   travaux  (a),  fut,  je  nière  spéciale  par  Gerdy,  MM.  Searle, 

crois,  le  premier  à  étudier  la  direc-  Parchappe,  Ludwig,  Dondcrs  et  quel- 

tion  des  fibres  charnues  du  cœur  (6).  ques  autres  auteurs  (e). 
Lower,  en  faisant  durcir  ces   fibres  Duvernoy  a  donné  une  description 

par  la  coclion,  est  parvenu  à  mieux  du  mode  d'arrangement  des  fibres  du 

comprendre    leur   disposition    gêné-  cœur  du  Bœuf  (/.'. 
raie  (c).  Sténon  ,  Vieussens  ,  Lancisi  ,  Pour  plus  de  détails  sur  les  travaux 

Olasius,  Senac  et  Wolff,  vinrent  en-  des  anciens  anatomistes  à  ce  sujet,  je 

suite  ajouter  de  nouveaux  faits  aux  ob-  renverrai  à  la  grande  Physiologie  de 

servalions  de  leurs  prédécesseurs  (d).  Haller  (g). 
Enfin,  de  nos  jours,  ce  point   d'ana- 

(a)  Voyez  ci-dessus,  page  14. 

(b)  Vésale,  De  corporis  humani  fabrica  (Opéra  omnia,  t.  I,  p.  508  et  suiv.,  édit.  de  1025  . 

(e)  Lower,   Tractatus  de  corde,  cap.  I,  p.   28  et  suiv.,  pi.  2,   fig.  1-8,   16G9  (reproduit  dans 
Mangel,  Bibliotheca  anatomica,  t.  I,  p.  882,  édit.  de  1C99). 

(d)  Sténon,  Observât,  anat.  de  masculis  et  glandulis  spécimen,  1604. 

—  Vieussens,  Nouvelles  découvertes  sur  le  cœur.  Montpellier,  1706.  Voyez  aussi  dans  Mangef, 
Bibl.anat.,XA,  p.  920,  pi.  47  à  49. 

—  Winslow,  Sur  les  fibres  du  cœur  (Bfétn.  de  VAcad.  des  sciences,  1711). 

—  Glasius,  De  circuitu  sanguinis.  In-4°,  1736. 

—  Lancisi,  De  structura  motuque  cordis,  1728  (Opéra  omnia,  t.  IV,  p.  89,  1749). 

—  Senac,  Traité  de  la  structure  dti  cœur,  t.  I,  p.  194  et  suiv.,  pi.  10  à  13  (1777). 

—  Wolff,  Dissertationes  de  ordine  fibrarum  muscularium  cordis  (Acta  Acad.  PetropoL,  1 780- 
1782,  et  Nova  acta,  1783  à  1792,  1. 1  à  X,  dix  Dissertations). 

(e)  Gerdy,  Mém.sur  l'organisation  du  cœur  (Journal  complémentaire  du  Dictionnaire  des 
sciences  médicales,  t.  X,  p.  97). 

—  Palicki,  De  musculari  cordis  structura  (Dissert,  inaug.,  Breslau,  1839). 

—  Searle,  On  the  Arrangement  ofthe  Fibres  of  the  Heart  (Todd's  Cgclop.  of  Anat.  and  Physiol., 
vol.  II,  p.  019  et  suiv.,  aveefig.). 

—  Ctiorial,  Considérations  sur  la  structure,  les  mouvements  et  les  bruits  du  cœur  (Thèse, 
Paris,  1841). 

—  Parchappe,  Du  cœur,  de  sa  structure  et  de  ses  mouvements.  Paris,  1844,  in-8,  avec  allas 
in-4. 

—  Ludwig',  Bau  der  Herzvenlrihel  (Zeitschr.  fur  ration.  Med.,  t.  VII,  p.  189). 

—  Donders,  Onderzoekingen  betrekkelijk  den  bomv  van  het  menschelijke  hart  (Xeederlandsch 
IfiHce/,1852,  3e  série,  t.  I,  p.  541). 

■ — Kôlliker,  Traité  d'histologie,  p.  €05. 

(f)  Voyez  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  292. 

(g)  Haller,  F.lementa  physiologiœ,  t.  1,  p.  350  et  suiv. 


/|88  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Disposition  portion  ventriculaire  du  cœur,  dont  je  m'occuperai  d'abord, 
muscuSiai.-esSdes  naissent  pour  la  plupart,  soit  des  orifices  artériels,  soit  de  l'anneau 
fibro-eartilagineux  qui  entoure  chaque  orifice  auriculo-ventri- 
culaire  (1),  et  elles  sont  de  deux  sortes,  les  unes  appartenant 
aux  deux  ventricules  en  commun  ,  les  autres  étant  destinées 
seulement  à  l'un  ou  à  l'autre  de  ces  organes.  Les  fibres  communes 
occupent,  la  superficie  du  cœur  (2)  ;  les  fibres  propres  à  chaque 
ventricule  sont  logées  plus  profondément,  et,  par  leur  assem- 
blage, elles  forment  en  quelque  sortedeux  bourses  charnues  inté- 
rieures qui,  placées  côte  à  côte,  se  trouvent  renfermées  dans  une 
troisième  bourse  commune.  Mais  les  fibres  musculaires  super- 
ficielles qui  constituent  cette  enveloppe  générale  ne  se  bornent 
pas  à  revêtir  ainsi  les  deux  poches  charnues  formées  par 
les  fibres  propres  à  chaque  ventricule  ;  après  être  descendues 
obliquement  jusqu'à  la  pointe  du  cœur,  elles  se  contournent  en 
spirale  et  rebroussent  chemin  pour  pénétrer  dans  l'intérieur  de 
l'un  et  l'autre  ventricule,  puis  remontent  vers  les  zones  fibreuses 
qui  occupent  la  paroi  supérieure  de  ceux-ci,  et  se  détachent, 
pour  ainsi  dire,  de  leurs  parois  pour  constituer  des  colonnes 
dont  l'extrémité  supérieure  est  iixée,  soit  directement,  soit  à  l'aide 
de  cordes  tendineuses,  à  d'autres  points  de  ces  mêmes  parois,  ou 
bien  au  bord  libre  des  valvules  auriculo-ventriculaires.  Il  résulte 
de  ce  mode  d'arrangement  que  toutes  les  parties  du  système  ven- 
triculaire sont  très  intimement  unies  entre  elles;  et,  pour  mieux 

(I  )  Les  anatomistes  désignent  sou-  (2)  Winslovv  fut,  je  crois,  le  premier 

vent  sous  les  noms  de  cercles  teruli-  à  bien  distinguer  la  couche  des  fibres 

neux  de  Lower,  ou  de  zones  fibreuses,  communes  aux  deux  ventricules    et 

les  bandes  de  tissu  élastique  qui  en-  celles  propres   à  chacune  de   ces  ca- 

tourent  les  deux  orifices  de  chaque  vîtes  ;   la  figure  qu'il  en   donna   (a) 

ventricule  et  qui  fournissent  les  pria-  se  trouve   reproduite   avec  quelques 

cipaux   points  d'attache    aux    fibres  légères     modifications    dans     divers 

musculaires  du  cœur.  ouvrages  récents. 

(a)  Winslow,  Observations  sur  les  fibres  du  cœur  cl  sur  les  valvules,  avec  la  manière  de  les 
préparer  pour  les  démontrer  (Mém,  de  l'Acad,  des  sciences,  1711,  p.  151,  pi.  i,  fig.  1  cl  2). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  /l 89 

indiquer  les  fonctions  des  fibres  communes  dont  il  vient  d'être 
question,  quelques  anatomistes  les  désignent  sous  le  nom  de 
fibres  anitives  (1).  Il  en  résulte  aussi  que  toutes  ces  fibres  con- 
stituent des  anses  simples  ou  doubles  qui  entourent  plus  ou 
moins  complètement  les  cavités  occupées  par  le  sang,  et  que 


(I  )  Les  fibres  superficielles  ou  tinilives 
des  ventricules  naissent  des  bandes 
fibro  cartilagineuses desquatrc  orifices 
qui  occupent  la  base  des  ventricules, 
et  elles  descendent  obliquement  vers 
la  pointe  du  cœur.  Celles  qui  provien- 
nent de  la  portion  antérieure  des  zones 
auriculo-ventriculaires  et  de  l'anneau 
de  l'artère  pulmonaire  recouvrent  la 
face  antérieure  ou  slernale  du  cœur, 
et  se  dirigent  en  bas  et  à  gauche  vers 
la  pointe  de  cet  organe,  où  elles  se 
contournent  sur  elles-mêmes  dans  le 
prolongement  de  l'axe  du  ventricule 
gauche,  de  façon  à  simuler  une  étoile 
à  rayons  courbes  ;  puis  elles  rebrous- 
sent chemin  et  pénètrent  dans  ce 
même  ventricule. 

Les  fibres  superficielles  qui  recou- 
vrent la  face  postérieure  ou  diaphrag- 
ma tique  du  cœur  se  portent  en  bas  et 
à  droite  vers  son  bord,  puis  s'engagent 
sous  les  précédentes,  et  remontent 
obliquement  dans  le  vcntricu'e  droit. 

Parvenues  ainsi  dans  l'intérieur  du 
cœur,  ces  fibres  unitives  se  compor- 
tent différemment.  Les  unes  forment 
des  anses  simples,  et  se  dirigent  de 
telle  sorte  que  leur  portion  superficielle 
et  leur  portion  profonde  ne  corres- 
pondent pas  au  même  ventricule.  Ainsi, 
celles  dont  la  branche  descendante,  ou 
superficielle  ,  correspond  à  la  paroi 
antérieure  du  ventricule  droit,  jettent 


leur  branche  ascendante  ou  profonde 
dans  la  paroi  postérieure  du  ventri- 
cule gauche,  et  vice  versa.  Les  autres 
se  recourbent  en  huit  de  chiffre  'a),  et 
remontent  dans  la  même  paroi  du 
cœur  par  laquelle  elles  étaient  descen- 
dues, mais  de  façon  à  correspondre 
à  un  autre  ventricule.  Par  exemple, 
celles  dont  la  branche  superficielle 
appartient  à  la  paroi  antérieure  du 
ventricule  droit  donnent  leur  branche 
profonde  ou  ascendante  à  la  paroi 
antérieure  du  ventricule  gauche. 

Les  fibres  propres  de  chaque  ven- 
tricule se  trouvent  donc  comprises 
entre  le  plan  superficiel  des  fibres 
communes  ou  unitives,  et  l'espèce  de 
gerbe  creuse  formée  intérieurement 
par  la  portion  ascendante  et  profonde 
de  ces  mêmes  fibres.  Elles  sont  dispo- 
sées aussi  en  forme  d'anses  simples 
ou  en  huit  de  chiffre,  et  constituent 
pour  chaque  ventricule  un  cylindre, 
ou  plutôt  un  cône  tronqué  creux  qui 
embrasse  la  portion  ascendante  des 
fibres  unitives,  après  avoir  été  recou- 
vert par  la  portion  superficielle  de 
ces  mêmes  fibres  (6).  Du  côté  interne, 
ces  deux  poches  coniques,  au  lieu 
d'être  unies  à  la  couche  superficielle 
commune  ,  adhèrent  entre  elles  et 
constituent  la  cloison  interventricu- 
laire;  de  façon  qu'après  avoir  enlevé 
la  couche  superficielle  commune ,  on 


(a)  Lowcr,  Tmctalus  de  corde,  pi.  2,  fig.  G  et  7. 

(5)  Voyez  Parcliappe,  Du  cœur,  de  se  structure  et  de  ses  mouvements,  pi.  6,  fig\  2. 


/l90  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

leur  contraction  doit   toujours  tendre  à  diminuer  ta  capacité 
des  ventricules. 

Les  colonnes  charnues  qui  garnissent  l'intérieur  des  ventri- 
cules ne  sont  que  peu  nombreuses  chez  quelques  Mammifères, 
tels  que  le  Mouton,  le  Bœuf  et  le  Lapin;  mais,  en  général,  elles 
se  multiplient  et  s'entrecroisent  de  façon  à  constituer  dans  le 
fond,  ou  même  tout  autour  de  ces  cavités,  une  masse  caver- 
neuse ou  aréolaire.  11  est  aussi  à  noter  que  ces  faisceaux  mus- 
culaires, plus  ou  moins  libres,  présentent  un  développement  plus 
grand  dans  le  ventricule  droit  que  dans  le  ventricule  gauche.  On 
distingue  trois  sortes  de  colonnes  charnues  :  les  unes,  que  l'on 
pourrait  appeler  pariétales,  adhérent  aux  parois  du  cœur  dans 
toute  leur  élendife,  et  constituent,  par  conséquent,  des  espèces 
de  petites  cloisons  en  forme  de  bourrelets  ;  les  autres  sont  libres 
vers  le  milieu,  et  peuvent  recevoir  le  nom  de  trabécules,  ou  de 
colonnes  sous -pariétales,  quand  elles  adhèrent  entre  elles  ou  aux 
parois  ventriculaires  par  leurs  deux  extrémités ,  et  celui  de 
muscles  papillaires,  ou  de  colonnes  a ppendiculair es ,  quand  leur 
extrémité  supérieure  donne  naissance  à  un  cordon  tendineux 
qui  va  s'attacher  au  bord  libre  des  replis  valvulaires  dont  l'em- 
bouchure de  l'oreillette  est  garnie  fi").  Ces  dernières  sont  les 


peut  séparer  les  deux  ventricules  l'un  des  fibres  ;  mais  celles-ci  ne  sonl  pas 
de  l'autre  sans  les  ouvrir  [a).  toutes  parallèles  entre  elles,  et  chaque 
Il  est  aussi  à  noter  cpie  les  bran-  couche  peut  être  ainsi  subdivisée  en 
cbes  profondes  des  fibres  unitives  plusieurs  bandes  continues  ou  super- 
croisent à  angles  plus  ou  moins  aigus  posées.  Ainsi  Wolff  a  décrit  huit  ban- 
la  direction  de  la  portion  superficielle  des  distinctes  à  la  surface  du  ventri- 
de  ces  mêmes  fibres  et  celle  des  fibres  cule  droit  (6) . 

propres.  (1)  En  général,  les  analomistes  dé- 
Dans  tout  ce  qui  précède,  il  n'a  été  signent  les  colonnes  charnues  appen- 
quesiion  que  de  la  direction  générale  diculaires  kous  le  nom  de  colonnes  d:i 

(a)  Winslow,  Observations  sur  les  fibres  du  cœur  {Mém.  de  l'Acad.  des  sciences,  1711,  p.  152, 
pi.  A,  fig.  1  et  2). 

—  Cetle  disposition  se  voit  mieux  dans  une  des  préparations  ligurées  par  Bourgery  ri  Jacob  [Anal, 
descriptive,  t.  IV,  pi.  10  bis,  fig.  5). 

(b)  Wolff,  Op.  cit.,  Disscrl.  VIII,  (Acta  Acad.  Petropol,  1786). 


CHEZ    LUS    MAMMIFÈRES.  Zi *J  1 

plus  grosses  et  les  plus  constantes  dans  leur  disposition  ;  elles 
ont  souvent  la  l'orme  de  gros  mamelons,  et,  ainsi  que  nous  le 
verrons  dans  la  prochaine  Leçon,  elles  jouent  un  rôle  impor- 
tant dans  le  mécanisme  de  la  circulation. 

11  est  aussi  à  noter  que  chez  certains  Mammifères  un  petit  os  0s  ,,u  cœur' 
se  développe  au  sommet  de  la  cloison  interventrieulaue  et  tend 
à  encadrer  imparfaitement  l'orifice  aortique.  C'est  surtout  chez 
les  Ruminants  et  les  Pachydermes  qu'on  rencontre  cette  dispo- 
sition, qui  du  reste  n'est  pas  toujours  constante  dans  les  espèces 
où  elle  existe,  et  peut  manquer  chez  des  espèces  très  voisines 
des  premières  (1). 


premier  ordre,  et  appellent  colonnes  raconte  même  une  anecdote  relative  à 

du  second  ordre  celles  qui  vont  direc-  une  discussion  qui  s'éleva  entre  lui  et 

tement  d'un  point  de  la  paroi  ventri-  les  médecins  de  Home  sur  l'existence 

culaire  à  un  autre  ,  ou  qui  s'étendent  de  l'os  du  cœur  chez  l'Éléphant,  où  il 

entre  des  colonnes  voisines  ;  enfin,  ils  constata  ce  fait   (6).  Les  anatomistes 

nomment  colonnes  du  troisième  ordre  de  la  renaissance  et  du  xvme  siècle 

celles  qui  sont  adhérentes  dans  toute  en  parlent  aussi,  comme  on  peut  s'en 

leur  étendue   et  que    j'ai   nommées  assurer  par  les  écrits  d'Adami,   de 

colonnes  pariétales.  neiehenius,  et  des  divers  auteurs  cilés 

Quelques  auteurs  réservent  le  nom  par  Ilaller,  etc.  (c). 

de  muscles  du  cœur,  de  piliers  du  Chez  le    Bœuf  adulte,  on    trouve 

cœur,  ou  de  muscles  papillaïres ,  aux  toujours  un  de  ces  os  en  forme  d'arc 

colonnes  appendiculaires.  qui  occupe  le  côté  interne  de  l'orifice 

(1)  L'existence  de  cet  os  chez  divers  aortique,   et  en   général,   un  second 

grands  Mammifères  a  été  annoncée  il  y  osselet  logé  du  côté  opposé  de  la  zone 

a  quelques  années  comme  une  décou-  fihreuse  dont  cet  orifice  est  garni  (d). 

verte  nouvelle,  mais  elle  était  connue  II  paraît  exister  aussi  d'une  manière 

d'Aristote  {a}  et  de  Galien.  Ce  dernier  normale  chez  le  Cerf;  mais  chez  le 

(a)  Ai'islote,  Histoire  des  Animaux,  livre  II  (Irad.  de  Camus,  t.  I,  p.  89). 

(b)  Galien,  Utilité  des  parties,  livre  VI,  chap.  xx,  et  Manuel  des  dissections,  livre  Vit,  cliap.  x. 
(Voyez  Œuvres,  trad.  par  Darembcrg,  t.  I,  p.  -447.) 

(c)  Adami,  Dissert,  de  osse  cordis  Cervi.  Giessa?,  1084. 

—  Haller,  Elementa  physiologiœ,  I.  1,  p.  318. 

—  Reicheniiis,  De  ossiculis  e  cordibus  Animalium.  Grôiiingcn,  1772. 

—  Luctli,  Dissert,  sistens  observât,  nonnullas  zootomicas  os  cordis,  etc.,  spectanlcs.  Tufainguc, 
1814. 

(d)  Daul  enlon,  Description  du  Taureau  (Buffon,  Mammifèuës,  l.  II,  p   05  et  10  <,  cdil.  in-8j. 

—  Place  ,  Description  des  os  situés  à  l'ouverture  du  coiur  dans  le  Boeuf  et  le  Mouton  (Recueil 
de  médecine  vétérinaire,  par  Girard,  elc.,  1828,  t.  V,  p.  513). 

—  Carus  et  V.  Ollo,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  8,  lig.  1. 

—  Chameau,  Anatomïe  comparée  des  Animaux  domestiques,  \>.  470. 


Ventricule 
gauche. 


k'ôÛ  APPAREIL    DK    LA    CIRCULATION 

§  3.  —  Les  parois  de  la  cavité  ventrieulaire  gauche  sont  plus 
épaisses  et  plus  régulièrement  disposées  que  celles  du  ventri- 
cule droit  (1  )  ;  elles  sont  concaves  du  côté  correspondant  à  la 


Chevreuil  et  le  Daim,  où  on  le  ren- 
contre aussi  (a),  il  manque  souvent, 
et  chez  le  Mouton  il  ne  paraît  se  foi- 
mer  qu'à  un  âge  avancé  (6). 

On  en  a  signalé  aussi  la  présence 
chez  le  Chameau  et  le  Lama  (c),  la 
Girafe  (d),  et  chez  le  Gnou,  parmi  les 
Antilopes  (e),  mais  pas  chez  d'autres 
espèces  du  même  genre  (/").  Chez  le 
Cochon,  la  Chèvre  et  chez  l'Éléphant, 
son  existence  n'est  pas  constante  (g)  ; 
enfin,  chez  le  Cheval,  où  il  se  déve- 
loppe aussi  parfois  dans  la  vieillesse  , 
il  est  en  général  remplacé  par  une 
pièce  cartilagineuse  [h). 

Chez  la  plupart  des  autres  Mam- 
mifères, il  n'est  représenté  que  par 
deux  petits  points  cartilagineux  qui  se 
trouvent  aussi  chez  l'Homme. 

Il  ne  faut  pas  confondre  ces  pièces 
osseuses  avec  les  points  d'ossification 
irrégulière  qui  se  développent  sou- 
vent, soit  chez  l'Homme,  soit  chez  les 
Animaux,  dans  le  pourtour  des  val- 
vules auriculo-ventriculaires. 

(1)  L'épaisseur  relative  des  parois 


des  deux  ventricules  du  cœur  chez 
l'Homme  a  été  évaluée  d'une  manière 
assez  différente  par  divers  anatomistes. 
Ainsi,  Laënnec  pense  que  les  parois 
du  ventricule  droit  n'ont  tout  au  plus 
que.  la  moitié  de  l'épaisseur  de  celles 
du  ventricule  gauche  (»)■;  Sœmme- 
ring  adopte  comme  rapport  normal 
1  à  3  (j),  tandis  que,  d'après  M.  Cru- 
veilhier,  ce  même  rapport  ne  serait 
que  dans  la  proportion  de  1  à  U  ou 
même  1  à  5  (k). 

Ces  discordances  dépendent  pro- 
bablement en  partie  de  la  hauteur 
à  laquelle  ces  observateurs  avaient 
l'habitude  de  faire  la  section  transver- 
sale du  cœur  pour  prendre  leurs  me- 
sures. En  effet  on  sait,  par  les  recher- 
ches de  M.  Bizot,  que  la  partie  la  plus 
épaisse  des  parois  du  ventricule  droit 
ne  correspond  pas  à  la  partie  du  ven- 
tricule gauche,  où  les  parois  de  celui- 
ci  sont  les  plus  fortes.  Ainsi,  au  point 
de  jonction  du  tiers  moyen  et  du  tiers 
supérieur  du  cœur,  les  parois  du  ven- 
tricule gauche  offrent  le  maximum 


(a)  Grève,  Bruchslûcke  %ur  vergl.  Anat.  und  Pliyslol.,  p.  21. 

(6)  Duvernoy,  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  292. 

—  F.  S.  Leuckart,  Bemerkungen  (Mcckel's  Deutsches  Archiv,  t.  VI,  p.  136). 

(c)  Jieger,  Ueber  das  Yorkommen  eines  Knochenr  im  Herxen  des  Hirsches  und  insbesondere 
eines  Knochens  im  Ziverchfelle  des  Dromadars  und  des  Yicunna  (Meckel's  Deutsches  Archiv ,  t.  V, 
p.  113). 

—  F.  S.  Leuckart,  Zwerchfellknochen  beim  Dromadar  (Meckel's  Deutsches  Archiv  ,  t.  VIII, 
p.  441). 

(d)  Owen,  Notes  on  the  Anat.  of  the  Nubian  Girafe  (Trans.  of  the  Zoot.  Soc,  t.  H,  p.  229). 

(e)  Hyrll,  Ueber  den  Herzknochen  und  die  unpaarige  Blulader  bei  Antelope  Gnou  (Med.  Jalir- 
biïcher  des  Oesler.  Staates,  1838,  t.  XV,  p.  387). 

(f)  Pallas,  Spkilegla  zoologica,  fasc.  1 ,  p.  4. 

(g)  Perrault,  Description  anatomique  d'un  Éléphant  (Mérn*  pour  servir  à  l'histoire  naturelle 
des  Animaux,  3'  partie,  p.  134). 

(h)  Chauveau,  Anat.  compar.des  Animaux  domestiques,  p.  473. 
(i)  Laënnec,   Traité  de  l'auscultation  médiate,  t.  II,  p.  404  (1820). 
(j)  Sœmmering,  Decorporis  humani  fabricant.  V,  p.  23. 
(k)  Cruveilhier,  Traité  d'anatomie  descriptive,  t.  II,  p.  512  (1843). 


CHEZ    LES    JIAMMJFÈRES.  /|9o 

cloison,  aussi  bien  que  dans  le  reste  de  leur  circonférence,  et 
chez  l'Homme  elles  ne  sont  lisses  que  dans  le  voisinage  de 
l'orifice  artériel  du  côté  interne  (1)  ;  partout  ailleurs  on  y 
remarque  une  multitude  de  fossettes  ou  aréoles  ovalaires  ou  en 
forme  de  losanges,  qui  résultent  de  l'union  des  diverses  colonnes 
charnues  entre  elles.  Chez  quelques  Mammifères,  le  Bœuf  par 
exemple ,  ces  faisceaux  musculaires  sont  plus  gros  et  moins 
saillants.  Il  est  aussi  des  espèces  où  l'intérieur  du  ventricule 
est  presque  entièrement  lisse ,  ainsi  que  cela  se  voit  chez 
le  Lion.  Enfin  deux  mamelons  charnus  simples  ou  deux 
faisceaux  de  colonnes  appendiculaires  naissent  vers  le  milieu 


d'épaisseur,  et  celles  du  Ventricule 
droit  n'arrivent  à  ce  maximum  que 
tout  près  de  la  base  du  cœur,  a  environ 
h  lignes  au-dessous  de  la  zone  tendi- 
neuse. 

M.  Amiral  a  remarqué  aussi  que 
l'épaisseur  relative  des  deux  ventri- 
cules varie  avec  l'âge,  et  que  chez  les 
enfants,  de  même  que  chez  les  vieil- 
lards, la  prépondérance  du  ventricule 
gauche  sur  le  ventricule  droit  est  plus 
considérable  que  chez  les  hommes  de 
moyen  âge  (a).  Les  mesures  prises 
par  M.  bizot  s'accordent  avec  celte 
observation.  En  effet,  il  a  trouvé  que 
l'épaisseur  des  parois  du  ventricule 
droit  est  plus  stationnaire  que  celle 
du  ventricule  gauche  ,  qui  s'accroît 
notablement  dans  la  vieillesse.  La 
paroi  du  ventricule  gauche,  mesurée 
vers  la  partie  moyenne  du  cœur  chez 
l'Homme,  lui  a  donné  les  résultats 
suivants  : 


Lignes. 

De     là     4  ans 2  -'- 

5  à     9 3    i 

10  à  15 3   i 

18  à  29 3    \ 

30  à  40 5  i 

50  à  79 29  1^ 

On  trouve  dans  le  mémoire  de 
M.  Bizot  beaucoup  d'autres  mesures 
relatives  à  l'épaisseur  des  diverses  par- 
lies  du  cœur,  à  la  grandeur  des  ori- 
fices et  à  la  capacité  des  diverses 
cavités  de  cet  organe  (b). 

D'après  quelques  observations  de 
Cuvier,  il  paraîtrait  que  chez  le  Dau- 
phin l'épaisseur  relative  des  parois  du 
ventricule  droit  serait  beaucoup  plus 
grande  que  chez  l'Homme  et  la  plu- 
pari  des  autres  Mammifères.  Cepen- 
dant ce  fait  n'a  pas  été  confirmé  par  les 
recherches  ultérieures  de  Meckel  (c). 

(1)  C'est-à-dire  sur  la  paroi  formée 
par  la  cloison  interventriculaire. 


(re)  Andral,  Anatomle  pathologique,  t.  II,  p.  283. 

(b)  Bizot,  Recherches  sur  le  cœur  et  le  système  artériel  chez  l'Homme  (Mém.  de  la  Soc.  méd. 
d'observation,  1837,  t.  I,  p.  262). 

(c)  Cuvier,  leçons  d'anatomie  comparée,  l.  VI,  p    285 
—  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  384. 


Valvule 

initiale 


lil.)h  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

ou  le  tiers  inférieur  du  ventricule,  et  les  cordes  tendineuses  qui 
les  terminent  vont  se  fixer  à  la  face  inférieure,  ainsi  qu'au  bord 
libre  de  la  valvule  auriculo-venlriculaire  (1).  Celle-ci  se  compose 


(1)  Ces  muscles  papillaires,  ou  co- 
lonnes  charnues  appendïculaires,  con- 
stituent la  portion  la  plus  importante 
et  la  plus  constante  du  système  de  fais- 
ceaux et  de  trabécules  dont  les  parois 
du  ventricule  gauche  sont  garnies,  et 
bien  que  leur  forme  et  leur  volume 
varient  beaucoup  suivant  les  espèces, 
leur  disposition  générale  est  toujours 
à  peu  près  la  même.  Chez  l'Homme, 
ces  mamelons  sont  eu  général  bifides 
ou  Uilides  à  leur  sommet ,  et  ils 
semblent  résulter  chacun  de  la  juxta- 
position de  deux  ou  plusieurs  colonnes 
plus  petites  réunies  entre  elles  et  se 
résolvant  inférieurcment  en  un  réseau 
cav|rnpux;(a);  L'un  d'eux  naît  de  la  paroi 
externe,  l'autre  de  la  paroi  postérieure 
du  ventricule  ,  et  les  nombreuses 
cordes  tendineuses  qui  parlent  de 
chacun  d'eux  vont,  en  s'irradiant, 
se  fixer  aux  deux  valvules  dont  la 
commissure  est  située  au-dessus. 
Il  est  aussi  à  noter  qu'ils  sont  dispo- 
sés de  façon  à  s'ajuster  assez  exacte- 
ment l'un  contre  l'autre  et  à  repré- 
senter par  leur  réunion  une  sorte  de 
pilier  central.  Pour  plus  de  détails  sur 
leur  forme  et  leur  mode  d'engrenage, 
je  renverrai  à  la  description  très  détail- 
lée qu'en  a  donnée  M.  l'archappc  (6). 

Chez  quelques  Mammifères,  la  forme 
columnaire  de  ces  deux  muscles  ou  fais- 
ceaux de   muscles  papillaires  est  plus 


marquée  et  leur  volume  est  plus  con- 
sidérable, tandis  que  la  structure  des 
autres  parties  des  parois  du  ventricule 
gauche  se  simplifie.  Ainsi,  chez  le 
Lapin,  ils  sont  très  développés  et  pres- 
que indivis  ;  mais  ils  s'engrènent 
moins  exactement  l'un  dans  l'autre,  et 
quelques  trabécules  fort  grêles  en  par- 
tent horizontalement,  soit  pour  les 
relier  entre  eux,  soit  pour  les  attacher 
aux  parties  circon  voisines  du  ventri- 
cule (c).  Chez  le  Cheval,  ils  sont  encore 
plus  gros  proportionnellement,  mais 
ils  adhèrent  aux  parois  correspon- 
dantes du  ventricule  jusqu'à  une  petite 
distance  de  leur  sommet,  où  ils  sont 
conformés  de  façon  à  s'engrener  lors- 
qu'ils se  rapprochent.  Chez  le  Mouton, 
leur  volume  est  aussi  très  considé- 
rable,mais  ils  sont  digités  vers  le  bout. 
Les  freins  valvulaires,  ou  cordons 
tendineux  qui  naissent  du  sommet  de 
chacun  de  ces  deux  piliers  charnus, 
montent  en  divergeant,  de  façon  à 
décrire  un  hémicycle,  et  vont  se  fixer 
à  la  moitié  correspondante  des  deux 
voiles  de  la  valvule  initiale;  de  sorte 
que  lors  du  rapprochement  des  pi- 
liers, ces  filaments  circonscrivent  un 
espace  conique  dont  la  base  est  re- 
présentée par  le  cercle  tendineux  de 
l'orifice  auriculo-venlriculaire,  et  que 
chaque  languette  de  la  valvule  se 
trouve  attachée  à   la   fois  aux  deux 


(«)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  1  i  bis,  fig.  2  et  4. 

—  l'archappc,  Du  cœur,  de  sa  structure,  etc.,  pi.  2,  lij.  \ . 

—  Sapp.y,  Op.  cit.,  t.  I,  fig.  1  18. 
(6)  Parehappc,  Op.  cit.,  p.  32. 

(c)  Idem,  ibid.,  p.  103,    pi.  7,  fi-.  2. 


CWÉZ    LES    MAMMIFÈRES.  /j95 

de  deux  voiles  qui  naissent  du  bord  de  l'orifice  auriculaire  el  se 

rencontrent  vers  le  milieu  de  ce  passage  ;  disposition  qui  lui  a 
valu  le  nom  de  valvule  bicuspide  ou  de  valvule  murale  (1  ).  Enfin, 


piliers  [a).  La  disposition  de  ce  sys- 
tème d'amarres  vasculaires  a  été  étu- 
diée d'une  manière  très  approfondie 
par  M;  Parchappe  et  fort  bien  repré- 
sentée dans  les  planches  de  son  ou- 
vrage (6). 

Chez  plusieurs  Mammifères  ,  tels 
que  la  Martre,  le  Lièvre,  le  Lapin,  etc. , 
les  parois  du  ventricule  gauche  sont 
lisses  ou  garnies  seulement  de  quel- 
ques piliers  peu  saillants.  Chez  le 
Bœuf  et  le  Mouton,  ces  colonnes  pa- 
riétales sont  plus  larges  et  se  détachent 
davantage  ;  mais  elles  ne  sont  séparées 
entre  elles  que  par  des  fossettes  peu 
profondes.  La  structure  caverneuse, 
qui  est  si  prononcée  chez  l'Homme, 
est  aussi  à  peine  indiquée  chez  le  Che- 
vreuil (c).  Cuviera  fait  remarquer  que 
chez  le  Dauphin  et  le  Marsouin  les  co- 
lonnes charnues  sont  au  contraire  plus 
caillantes,  plus  libres  et  plus  grosses 
que  chez  l'Homme,  mais  moins  nom- 
breuses. Enfinilcilele  Mandrill  comme 
ayant  le  ventricule  gauche  garni  de  cor- 
dons charnus  beaucoup  plus  minces  et 
plus  nombreux  que  chez  l'Homme  (d). 

(1)  Ce  nom,  employé  par  Vésale  et  la 
plupart  des  analomisles,  vient  de  ce 
qu'on  a  comparé  les  deux  segments  de 
la  valvule  aux  feuillets  d'une  mitre 
rabattue.  La  moitié  gauche  de  cette 
soupape,  située  un  peu  du  côté  posté- 
rieur et  inférieur,  est  moins  grande 


que  l'autre  et  se  termine  par  un  bord 
concave;  en  se  rabattant,  elle  s'ap- 
plique contre  la  paroi  ventriculaire. 
La  moitié  droite,  qui  est  supérieure  et 
antérieure,  est  plus  large  ;  son  bord 
libre  est  convexe,  et,  en  se  rabattant 
dans  la  cavité  du  ventricule,  elle  con- 
slilue  une  sorte  de  cloison  oblique  qui 
sépare  la  portion  gauche  de  la  portion 
aortiquede  cette  cavité. 

Ces  voiles  se  composent  d'un  repli 
très  saillant  de  l'endocarde  ou  tunique 
interne  du  cœur,  entre  les  deux  feuil- 
lets duquel  s'étend  une  couche  de  tissu 
conjonctif  et  un  réseau  de  tissu  élas- 
tique provenant  de  la  zone  auriculo- 
ventriculaire;  leur  face  supérieure  est 
lisse,  mais  à  leur  face  inférieure  ou 
ventriculaire  le  réseau  élastique  déter- 
mine des  saillies  et  se  relie  aux  cordes 
tendineuses  ou'  freins  provenant  des 
colonnes  charnues  situées  au-dessous. 

Les  valvules  du  cœur,  ainsi  que  je 
l'ai  déjà  dit  (e) ,  étaient  connues 
d'Érasislrate  et  de  Galien  ;  mais  Vésale 
et  Lower  furent  les  premiers  à  les 
décrire  avec  précision.  Pour  plus  de 
détails  au  sujet  des  observations  sub- 
séquentes dont  elles  furent  l'objet 
de  la  part  de  Vieussens,  Lancisi,  ftlor- 
gagni  ,  Winslow  et  les  autres  anato- 
mistes  de  la  même  époque,  on  peut 
consulter  l'examen  critique  qu'en  a 
fait  Senac  (/). 


(o)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV.  pi.  18,  fig.  7. 

(6)  Parchappe,  Op.  cit.,  p.  31,  pi.  H  ,  fig-.  1  à  4. 

(c)  Carus  et  V.  Otlo,  Tabula  Anat.  compar.  illustr.,  pars,  vi,  p] 

((/)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  291. 

(e)  Voyez  ci-dessus,  page  9. 

(f)  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  t.  I,  p.  G9  et  suiv. 

III. 


7,    fit 


32 


Orifice 
aortique 


ll9C)  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

au  côté  interne  de  l'ouverture  imrieiilo-ventriculaire,  se  trouve 
l'orifice  aortique  dont  les  bords  sont  garnis  de  trois  valvules 
sigmoïdes,  soupapes  qui  ont  la  l'orme  de  petites  poches  membra- 
neuses dont  le  fond  serait  dirigé  vers  le  ventricule  et  dont  le 
bord  semi-circulaire  serait  tourné  vers  le  centre  de  l'artère  (1). 


(1)  Chacune  de  ces  valvules  res- 
semble à  la  moitié  d'une  bourse  qui, 
par  sa  section,  serait  accolée  aux  pa- 
rois du  vaisseau,  et  dans  les  ouvrages 
d'anatomie  descriptive  on  les  compare 
souvent  aux  petits  paniers  demi-circu- 
laires qui  s'accrochent  aux  murs  et 
qui  sont  employés  pour  faire  couver 
les  œufs  de  pigeon.  Elles  consistent 
en  un  repli  de  l'endocarde  ou  mem- 
brane interne  du  cœur,  dont  le  bord 
est  renforcé  par  une  petite  bande 
transversale  de  fibres  élastiques,  et 
dont  le  fond  se  dilate  en  manière  de 
sac. 'Elles  occupent  toute  la  circonfé- 
rence de  l'orifice  aortique  ;  leur  con- 
cavité est  dirigée  en  haut  vers  l'inté- 
rieur de  l'artère,  et  lorsqu'elles  sont 
gonflées  par  la  pression  du  liquide 
contenu  dans  ce  vaisseau,  elles  se 
rapprochent  de  façon  à  se  toucher  et 
à  fermer  le  passage.  Il  est  aussi  à 
noter  qu'au  milieu  de  leur  bord  libre 
se  trouve  un  petit  tubercule,  appelé 
corpuscule  d'Arantius,  qui  concourt 
à  la  clôture  de  l'appareil  quand  ces 
valvules  se  rapprochent,  et  qu'une 
bande  fibreuse  longe  aussi  leur  bord 
externe  et  inférieur  ou  bord  adhérent. 
On  trouve  également  quelques  fibrilles 


très  grêles  entre  ces  deux  bandes  mar- 
ginales, et  les  anciens  anatomistes  les 
considéraient  comme  étant  de  nature 
charnue  (a).  Mais  elles  sont  tendi- 
neuses comme  les  précédentes  (6).  La 
structure  de  ces  valvules  et  leurs  rap- 
ports avec  les  parties  adjacentes  ont 
été  étudiés  avec  beaucoup  de  soin  par 
M.  Luschka  (c). 

Le  corpuscule  d'Arantius  ,  qui  oc- 
cupe le  milieu  du  bord  libre  de  cha- 
cune de  ces  valvules,  est  très  petit  chez 
les  enfants  ;  mais  il  se  développe  par  les 
progrès  de  l'âge,  et  chez  les  vieillards 
il  est  tout  à  fait  cartilagineux  {cl).  On  le 
désigne  sous  ce  nom  parce  que  Mor- 
gagni  en  attribuait  la  découverte  à 
Arantius,  anatomiste  célèbre  de  Bo- 
logne, dont  les  travaux  datent  d'en- 
viron 1670  (e)  ;  mais  ce  tubercule  avait 
été  décrit  précédemment  par  Vi- 
dais (/'J,  médecin  florentin  pour  lequel 
François  Ie'  fonda,  en  IbliU,  au  collège 
de  France,  la  chaire  de  médecine  qui 
est  occupée  aujourd'hui  par  mon 
savant  collègue  M.  Cl.  Bernard  (g). 

La  portion  de  la  paroi  artérielle  cor- 
respondante à  la  cavité  de  chacun  des 
replis  semi-lunaires  qui  constituent 
les  valvules  sigmoïdes  est  un  peu  di- 


(a)  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  t.  I,  p.  218. 

(b)  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  603. 

(c)  Luschka,  Die  Structur  der  halbmondfôrmigen  Klappen  des  Herzens  (Arch.  fur  phys.  Héilk., 
1856,  t.  XV,  p.  37,  pi.  3,  fig.  1). 

(d)  lïizot, -Op.  ci;.  (Mém.  delà  Soc.  méd.  d'observ.,  I.  I,  p.  262). 

(e)  Morgagni,  Advcrsaria  analomica,  V,  animad.  21  (Opéra  omnia,  t.  I,  p.  155),  p.  22,  23. 
if)  Vidus  Vidius  (Sen.),  De  anatome  corporis  humani,  lib.  VI,  p.  303  (1611). 

[g)  G.  Duval,  Le  collège  royal  de  France,  ln-4,  164 4,  p.  63  (anonyme). 


CHEZ    LES    MAMMIFERES. 


497 


Il  est  aussi  à  remarquer  que  la  cavité  du  ventricule  se  trouve    subdivision 

, .    .     ,  .  du  ventricule 

incomplètement  divisée  en  deux  portions  ou  chambres  par  le  gauche. 
bord  interne  de  l'orifice  auriculaire ,  la  valvule  qui  y  est  appen- 
due  et  les  colonnes  charnues  qui  s'attachent  à  ce  voile.  L'une 
de  ces  chambres  est  en  rapport  avec  l'orifice  aortique  et  se  pro- 
longe inférieurement  jusqu'à  la  pointe  du  cœur  ;  l'autre,  située 
à  gauche  de  la  précédente,  fait  suite  à  l'orifice  auriculo-ventri- 
culaire  :  elle  est  moins  spacieuse  que  la  précédente,  et  se  ter- 
mine en  un  cul-de-sac  réticulé  (1). 

La  cavité  du  ventricule  droit  n'est  pas  conique  comme  celle 
du  ventricule  gauche ,  car  sa  paroi  interne  ,  formée  par  la 
cloison  interventriculaire,  est  convexe  et  fait  saillie  dans  son 
intérieur  ;  la  coupe  transversale  de  cette  cavité  est  par  consé- 
quent plus  ou  moins  en  forme  de  croissant  (2),  mais  elle  n'est 


Ventricule 
droit. 


latée,  et  les  renflements  ainsi  formés 
ont  reçu  le  nom  de  sinus  de  Valsalva, 
en  l'honneur  de  l'anatomiste  qui  le 
premier  en  signala  l'existence  (a). 

Nous  reviendrons  sur  le  jeu  de  ces 
valvules  lorsque  nous  étudierons  le 
mécanisme  de  la  circulation. 

(1)  Cette  disposition  a  été  très  bien 
décrite  et  représentée  par  M.  Par- 
chappe  (6).  Quelques  anatomistes  dé- 
signent sous  le  nom  d'infundibulum 
de  l'aorte  la  portion  supérieure  et 
droite  du  ventricule  dans  laquelle  se 
trouve  l'orifice  aortique  ;  ouverture 
qui  du  reste  est  tout  à  fait  contigue 
à  l'orifice  auriculaire.  En  effet,  le  bord 
adhérent  de  la  portion  droite  de  la 
valvule  mitrale  est  uni  à  la  base  de 
la  valvule  sigmoïde  correspondante 
de  l'aorte. 


Je  dois  ajouter  que  parfois  on  ap- 
pelle sinus  de  ce  ventricule  les  por- 
tions de  sa  cavité  qui,  à  droite  et  à 
gauche,  se  prolongent  en  haut  der- 
rière la  valvule  mitrale,  et  s'y  termi- 
nent en  culs-de-sac. 

(2)  Si  l'on  fait  une  section  trans- 
versale du  cœur,  les  parois  du  ven- 
tricule gauche  se  présentent  sous  la 
forme  d'un  cercle,  tandis  que  celles 
du  ventricule  droit  décrivent  deux 
arcs  de  cercles  concentriques  à  eux- 
mêmes  et  à  la  paroi  droite  du 
ventricule  gauche  (c). 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  axes  des 
deux  ventricules  ne  sont  pas  dirigé» 
tout  à  fait  dans  le  même  sens,  et  que 
le  ventricule  droit  contourne  oblique- 
ment le  ventricule  gauche* 


(a)  Valsalva,  professeur  à  Bologne  vers  la  fin  du  xvn3  siècle,  et  maître  de  Morgagni. 
(6)  Parchappe,  Du  cosur,  de  sa  structure  et  de  ses  mouvements,  p.  28  et  suiv.,  pi.  2,  fi»    1 
pi;  3,  fig.  1. 

(c)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  11,  fig-,  2  et  3, 


/j9§  APPAREIL    DL    LA    CIRCULATION 

jamais  étroite  comme  chez  les  Oiseaux,  et  bien  qu'elle  ne  des- 
cende pas  aussi  loin  vers  la  pointe  du  cœur  que  le  ventricule 
o-auche,  sa  capacité  est  au  moins  aussi  considérable  (1).  Chez 
l'Homme ,  sa  portion  inférieure  est  occupée  par  le  réseau 
caverneux  résultant  de  l'entrecroisement  et  de  l'union  de  nom- 
breuses colonnes  et  trabécules  charnues;  mais  sa  portion  supé- 
rieure est  lisse,  et  se  prolonge  en  forme  d'entonnoir  vers  l'ori- 
fice de  l'artère  pulmonaire,  qui  est  situé  à  sa  partie  supérieure, 
antérieure  et  interne,  et  présente,  comme  d'ordinaire,  trois 
valvules  sigmoïdes  (2).  La  disposition  des  piliers  ou  mamelons 


(1)  Los  anciens  analomisles  ont  at- 
taché beaucoup  d'importance  à  l'étude 
de  la  capacité  relative  des  deux  ventri- 
cules du  cœur  chez  l'Homme,  et  la  plu- 
part des  auteurs,  depuis  Uippocrale, 
admettent  que  le  ventricule  droit  est  le 
plus  grand.  Suivant  les  uns  (Winslow, 
Duvemeyet  Morgagni,  par  exemple), 
la  différence  serait  dans  le  rapport  de 
5  à  6.  Mais  d'autres  observateurs  n'ont 
pas  trouvé  une  inégalité  aussi  grande, 
et  il  en  est  plusieurs  qui  regardent  les 
deux  ventricules  comme  ayant  la 
même  capacité  (a).  Il  est  certain  que 
sur  le  cadavre  le  ventricule  droit  est 
en  général  moins  contracté  que  l'autre; 
mais,  ainsi  que  l'a  fait  remarquer  Sa- 
batier,  cela  tient  probablement  à  la 
manière  dont  le  sang  s'accumule  dans 
le  système  veineux  et  abandonne  lé 
système  artériel  après  la  mort  :  et  ce 
chirurgien  célèbre  a  fait  voir  qu'on 
pouvait  à  volonté  faire  varier  cette 
prédominance  apparente  du  ventricule 


droit,  et  même  rendre  la  cavité  du 
ventricule  gauche  la  plus  grande  en 
empêchant  le  sang  de  se  distribuer  de 
la  manière  ordinaire  dans  le  cada- 
vre (6).  Weiss  a  obtenu  des  résultats 
analogues  (c). 

Il  est  cependant  à  remarquer  que 
dans  les  expériences  faites  par  Legal- 
lois  sur  des  Chiens,  des  Chats,  des 
Lapins  et  des  Cochons  d'Inde,  la  ca- 
pacité du  ventricule  droit  s'est  trouvée 
être  plus  grande  que  celle  du  ventri- 
cule gauche,  même  quand  l'animal 
avait  péri  par  hémorrhagie  (rf).  Les 
mesures  prises  par  M.  Bizot,  de  Ge- 
nève, indiquent  toujours  une  certaine 
prédominance  dans,  la  capacité  du 
ventricule  droit  (e). 

(2)  La  structure  de  ces  valvules  semi- 
lunaires  est  la  même  que  celle  des  val- 
vules aorliques.  Par  leur  bord  externe 
ces  soupapes  adhèrent  à  la  zone  fi- 
breuse qui  entoure  l'orifice  de  l'artère 
pulmonaire,  et  leur  bord  libre  est  ren- 


(o)  Voyez  Senac,  Traité  de  la  structure  du  mur,  t.  I,  p.  189. 

—  Haller,  Élém.physiol.,t.  I,  pi  327.  .,,_,-. 

(b)  Sabaiier,  Ergù  in  vivïs  Animalibus  ventrkulorum  corais  eadem  capacuas,  1  /  /i.. 

(c)  Weiss,  Ue  dextro  cordis  ventriculo  post  mortem  ampliori.  Altorf,  1767. 
(ri)  Legallois,  Anat.  et  pliysiol.  du  cœur  (Œuvres,  t.  I,  p.  331  et  suiv.). 

(e)  Bizot,  Recherches  sur  le  cœur  et  le  système  artériel  chez  l'Homme  (Mém.  de  la  Soc.  med. 
d'observation,  1837,  t.  I,  p.  280). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES. 


A  99 


charnus  dont  naissent  les  freins  ou  cordes  tendineuses  de  la 
valvule  auriculo  -  ventriculaire  est  à  peu  près  la  même  que 
dans  le  ventricule  gauche  (1)  ;  mais  il  y  a  aussi  plusieurs  de  ces 


forcé  par  une  petite  bande  fibreuse 
au  milieu  de  laquelle  se  trouve 
un  petit  tubercule  nommé  corpus 
Arantii,  corpus  Morgagnii  ou  cor- 
pus sesamoideum.  Ici  les  sinus  de 
Valsalva  sont  moins  marqués  que 
dans  l'aorte. 

(1)  Chez  l'Homme,  les  subdivisions 
de  la  cavité  du  ventricule  droit  sont 
beaucoup  plus  nombreuses  et  plus  com- 
pliquées que  celles  du  ventricule  gau- 
che (a)  ;  mais  de  même  que  dans  celte 
dernière,  on  peut  y  distinguer  deux 
portions  principales  que  M.  Parchappe 
désigne  sous  les  noms  de  chambre 
droite  ou  auriculaire,  et  de  chambre 
gauche  ou  pulmonaire.  Cet  anatomiste 
appelle  sinus  antérieur  du  ventricule 
droit  la  portion  angulaire  circonscrite 
en  avant  par  la  rencontre  de  la  paroi 
externe  et  concave  de  cettecavité  avec 
sa  paroi  interne  et  convexe  (ou  cloi- 
son interventriculaire) ,  et  sinus  pos- 
térieur la  partie  correspondante  du 
côté  dorsal  du  cœur  ;  enfin,  il  donne 
le  nom  de  sinus  supérieur  au 
sillon  qui  se  trouve  entre  la  ligne 
d'attache  de  la  valvule  tricuspide  et 
les  parois  du  ventricule,  en  avant,  à 
droite  et  en  arrière.  La  chambre  pul- 
monaire, dont  la  portion  supérieure 
(ou  infundibulum)  se  continue  avec 
l'artère  du  même  nom  et  occupe  la 
portion  que  quelques  auteurs  appel- 
lent Yappendice  conoïdal  du  ventri- 
cule droit,  est  séparée  de  la  chambre 


auriculaire  par  des  arcades  muscu- 
laires principales  et  par  un  réseau  à 
claire-voie,  mais  communique  libre- 
ment avec  elle  par  les  espaces  que  ces 
brides  charnues  laissent  entre  elles.  On 
remarque  sur  ses  parois  beaucoup  de 
saillies  musculaires  dont  les  princi- 
pales se  dirigent  verticalement  en  forme 
de  piliers  qui  correspondent  générale- 
ment par  leur  extrémité  supérieure 
au  bord  convexe  et  adhérent  des  val- 
vules sigmoïdes,  tandis  qu'in férié u re- 
ment ils  se  divisent,  se  réunissent  entre 
eux  et  finissent  par  se  résoudre  en  un 
réseau  à  mailles  plus  ou  moins  serrées. 
Undeces  pilastres,  naissant  de  la  paroi 
postérieure,  est  mieux  caractérisé  que 
les  autres  et  forme  l'arc  postérieur  de 
l'ouverture  principale  de  communica- 
tion entre  les  deux  chambres.  Le 
bord  antérieur  de  cet  orifice  est  con- 
stitué d'une  manière  analogue,  mais 
est  moins  bien  dessiné  (b).  La  chambre 
auriculaire  est  beaucoup  plus  vaste  ; 
elle  se  termine  inférieure  inent  en  cul- 
de-sac  au  sommet  du  ventricule, 
et  elle  comprend  les  sinus  antérieur, 
postérieur  et  supérieur  (c).  Les  pro- 
longements charnus  qui  en  garnissent 
les  parois  sont  en  très  grand  nombre 
et  constituent  par  leur  réunion  unré- 
seau  caverneux  très  irrégulier  et  fort 
variable  suivant  les  individus.  Ainsi 
que  je  l'ai  déjà  dit,  les  freins  valvu- 
laires  naissent  en  partie  d'un  simple 
tubercule  de  la  paroi  convexe  ou  cloi- 


(a)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.   !  1 ,  fie 
(i>)  Parchappe,  Du  cœur,  etc.,  p.  il  et  suïv.,  pi.  I,  fig.  !.. 
ic)  Idem,  ïbid.,  pi.  \ ,  fig.  9. 


3  ;  pi.  H  bis,  fig.  i  el  4. 


tricuspidc, 


500  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

cordes  qui  partent  directement  des  parois  du  ventricule.  Ainsi 
un  faisceau  de  ces  cordes  se  détache  du  milieu  de  la  portion 
lisse  de  la  cloison  interventriculaire,  pour  aller  se  fixer  sur  les 
parties  voisines  de  la  valvule.  Les  autres  naissent  pour  la  plupart, 
soit  d'une  colonne  charnue  antérieure  et  à  fût  simple,  soit  d'un 
groupe  de  colonnes  postérieures.  Enfin  des  cordes  chafnues,  dis- 
posées horizontalement  vers  la  basedeces  colonneë,  se  réunissent 
entre  elles,  et  rattachent  aussi  la  paroi  externe  et  concave  du 
ventricule  à  la  cloison  interventriculaire.  Jusque  dans  ces  der- 
niers temps  les  anatomistes  n'avaient  pas  accordé  assez  d'atten- 
tion à  ces  liens  musculaires  ;  lorsque  nous  étudierons  le  méca- 
nisme de  la  circulation,  nous  verrons  cependant  qu'ils  ne  sont 
pas  sans  importance ,  et,  à  raison  de  leurs  fonctions  ,  on  les  a 
désignés  sous  le  nom  de  trabécules  régulatrices . 
vaivnie         Le  sommet  de  la  chambre  auriculaire  du  ventricule  droit  est 
occupé  par  l'orifice  qui  la  fait  communiquer  avec  l'oreillette 
correspondante  (1).  La  valvule  dont  elle  est  garnie  n'est  pas 

son  interventriculaire,  en  partie  de  position  de  ces  faisceaux  transversaux 
colonnes  charnues  qui  se  détachent,  chez  l'Homme  et  chez  divers  Mam- 
soit  directement  de  la  paroi  externe  mifères,  et  il  les  désigne  sous  le  nom 
et  concave,  soit  du  réseau  caverneux  de  moderator  bands,  expression  que 
intermédiaire.  Les  fils  tendineux  de  je  traduirai  par  les  mots  trabécules 
chaque  faisceau  s'insèrent  sur  les  régulatrices  (&). 
deux  bords  contigus  de  chacune  des  (i)  ,T.  Meyer  a  fait  beaucoup  d'ob- 
échancrures  qui  séparent  ces  lobes  servations  sur  la  position  que  les  ori- 
valvulaires.  Enfin  il  y  a  aussi  des  tra-  fices artériels  et  auriculo-venlriculaires 
verses  charnues  et  des  trabécules  apo-  du  cœur  occupent  dans  le  thorax.  Il 
névrotiques  qui  s'étendent  presque  employa  dans  ce  but  de  longues  ai- 
horizonlalement  de  la  cloison  huer-  guides  qu'il  enfonçait  dans  cet  organe 
venlriculaire  à  la  paroi  externe  (a)  ;  à  travers  les  parois  du  thorax,  et  il 
les  arcades  musculaires  dont  il  a  déjà  a  trouvé  ainsi  que  presque  toujours 
été  question  font  partie  de  ce  système  les  valvules  de  l'embouchure  de  Tar- 
de liens  consolida teurs.  M.  King  a  1ère  pulmonaire  correspondent  au 
étudié  avec  beaucoup  de  soin  la  dis-  deuxième  espace  intercostal,  entre  8  et 

[a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  I.  IV,  pi.  H  bis,  fig.  4. 

(b)  T.  King,  On  Ihe  Safty-valve  Function  in  the  Rirjhl  Ventrale  of  the  Heart  (Gif y'*  Hotpitai 
Reports,  1837,  t.  II,  p.  422  el  sqq.,  pi.  1,  fig\  1  à  4). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  501 

charnue,  comme  clans  la  classe  des  Oiseaux  ;  elle  est  membra- 
neuse et  construite  sur  le  même  plan  que  la  valvule  mitrale  ; 
mais  elle  s'en  distingue  par  son  mode  de  division,  et,  à  raison 
de  cette  particularité  anatomique,  elle  a  reçu  les  noms  de  val- 
vule tricuspide  ou  triglochine  (1).  En  effet,  ce  voile  membra- 
neux ,  au  lieu  d'être  fendu  seulement  en  deux  lèvres,  comme 
la  valvule  mitrale,  est  partagé  en  plusieurs  languettes  dont  les 
principales  sont  au  nombre  de  trois  (2.). 

Chez  presque  tous  les  Mammifères,  la  disposition  de  cet 
appareil  isolant  est  à  peu  près  la  même  que  chez  l'Homme  (o)  ; 


12  millimètres  du  bord  sternal.  L'em- 
bouchure de  l'aorte  est  située  derrière 
l'extrémité  sternale  de  la  troisième 
côte  du  côté  gauche.  La  valvule  mi- 
trale se  trouve  également  derrière 
cette  côte,  et  la  valvule  tricuspide  der- 
rière le  sternum  ,  un  peu  moins  bas. 
La  détermination  précise  de  ces  rap- 
ports peut  avoir  de  l'intérêt  pour 
l'élude  des  bruits  du  cœur  ;  mais  on 
rencontre  à  cet  égard  quelques  diffé- 
rences suivant  les  individus.  Du  reste, 
la  position  du  cœur  est  à  peu  près  la 
même  dans  les  deux  sexes  (a). 

(1)  De  TpqXti/_tv,  ayant  trois  pointes. 

(2)  Chez  l'Homme  et  les  Singes,  les 
trois  lobes,  ou  lèvres  de  la  valvule 
triglochine,  sont  arrondis;  mais,  chez 
le  Bœuf  et  le  Mouton,  leur  portion 
terminale  s'allonge  en  une  pointe 
aiguë. 

11  est  aussi  à  noter  que  le  lobe  in- 
terne qui  naît  de  la  portion  de  l'an- 
neau auriculo-ventriculaire  voisine  de 
l'orifice  artériel  est  très  large  et  at- 
taché très  près  de  la  paroi  convexe  ou 


interne  du  ventricule,  de  façon  qu'en 
se  rabattant  il  tend  à  fermer  l'entrée 
de  l'infundibulum. 

(3)  Le  nombre  et  le  volume  des  ma- 
melons charnus  dont  naissent  les  cordes 
tendineuses  de  la  valvule  triglochine 
varient  un  peu  suivant  les  espèces.  Chez 
le  Bœuf,  on  en  trouve  trois  qui  sont 
gros,  courts  et  terminés  par  un  bord 
arqué  d'où  partent  des  filets  tendineux 
assez  forts.  Chez  le  Mandrill,  on  en 
compte  cinq,  et  ils  sont  allongés,  cy- 
lindriques et  bifides  ou  trifides  à  leur 
extrémité.  Chez  le  Cochon,  le  mame- 
lon de  la  paroi  antérieure  du  ventri- 
cule est  le  seul  qui  soit  bien  développé, 
et  les  faisceaux  de  fils  tendineux  qui 
correspondent  aux  deux  autres  échan- 
crures  delà  valvule  s'attachent  direc- 
tement à  la  paroi  interne  et  convexe 
du  ventricule.  Pour  plus  de  détails  à 
ce  sujet,  on  peut  consulter  les  addi- 
tions faites  par  Duvernoy  à  la  2e  édi- 
tion de  VAnatomie  comparée  de 
Cuvier  [b)  ,  et  les  recherches  de 
M.  Parchappe  sur  le  cœur  du  Lapin . 


(a)  J.  Meyer,  Ueber  die  Lagc  '1er  einzelnen  llerx-âbsehnilte  z-ur  Thorax-icand  und  die  Bedeu- 
tung  dièses  Verhâltnisses  fur  die  Auscultation  des  Her&ens  (Virchow's  Arrhiv  fur  pallwl.  Anut., 
1851,  t.  III,  p.  265). 

{b)  Op.  cit.,  t.  VI,  p.  289. 


502  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

mais,  chez  l'Ornithorhynque,  sa  structure  est  différente  et  se 
rapproche  un  peu  de  ce  que  nous  avons  yu  chez  les  Oiseaux  , 
car  on  y  remarque  des  espèces  de  clapets  charnus  (1). 


du  Chien  ,  du   Chat  el  de  quelques 
autres  Mammifères  (a). 

Mais  ce  qui  paraît  plus  important 
à  noter,  ce  sou  les  différences  qui 
existent  dans  les  rapports  des  freins 
valvulaires,  soit  avec  la  trahécule  mo- 
dératrice, soit  avec  la  paroi  externe  et 
concave  du  ventricule,  la  seule  qui 
soit  extensible  ;  car,  ainsi  que  nous  le 
verrons  par  la  suite,  celte  circonstance 
influe  sur  le  jeu  plus  ou  moins  parfait 
de  l'appareil  valvulaire.  M.  King  éta- 
blit à  cet  égard,  parmi  les  Mammi- 
fères, quatre  catégories  principales, 
mais  les  passages  des  uns  aux  autres 
sont  nombreux  et  gradués.  Dans  le 
premier  groupe,  il  range  les  espèces 
chez  lesquelles  tous  les  freins  de  la 
moitié  droite  de  la  valvule  tricuspide, 
aussi  bien  que  ceux  de  la  moitié  gau- 
che, sont  fixés  à  la  paroi  gauche  ou 
convexe  du  ventricule  (c'est-à-dire  à 
la  cloison  inlerventriculaire),  de  façon 
à  être  complètement  indépendants 
des  mouvements  de  la  paroi  concave 
et  extensible  de  ce  réservoir  ;  mode 
d'organisation  qui  est  accompagné 
d'un  état  plus  ou  moins  rudimentaire 
des  trabécules  modératrices,  et  se  ren- 
contre chez  la  plupart  des  Rongeurs 
el  des  Marsupiaux.  Dans  le  deuxième 
groupe,  M.  King  place  les  espèces  où 
les  freins  de  celte  même  portion 
externe  de  l'appareil  valvulaire  nais- 
sent de  colonnes  charnues  et  se  fixent 
inférieurement  sur  la  trabécule  mo- 
dératrice, mais  très  près  de  la   ter- 


minaison de  cette  traverse  dans  la 
paroi  convexe  et  résistante  du  ventri- 
cule. Celle  disposition  coïncide  avec 
un  développement  plus  considérable 
des  trabécules  modératrices,  et  se  voit 
chez  les  Animaux  du  genre  Chat  ; 
tandis  que  la  plupart  des  autres  Car- 
nassiers présentent  une  structure  in- 
termédiaire entre  celte  forme  el  la 
précédente.  Dans  le  troisième  type , 
décrit  par  M.  King,  la  trabécule  régu- 
latrice est  encore  plus  développée,  et 
les  colonnes  charnues  qui  donnent  atta- 
che aux  freins  déjà  mentionnés  nais- 
sent de  sa  partie  externe,  près  de  la 
paroi  concave  du  ventricule.  Exemple  : 
les  Quadrumanes  et  l'Homme.  Enfin, 
dans  la  quatrième  forme  organique, 
les  colonnes  charnues  dont  dépendent 
ces  freins  naissent  directement  de  la 
paroi  concave  et  externe  du  ventri- 
cule, au  point  d'insertion  de  la  bande 
transversale  ou  même  plus  ou  moins 
loin  de  celle-ci.  Exemples  :  le  Mouton 
et  la  Chèvre,  ainsi  que  la  plupart  des 
autres  Ruminants. 

Pour  plus  de  détails  relatifs  à  la 
disposition  de  ces  valvules  et  des 
faisceaux  musculaires  qui  s'y  atta- 
chent chez  l'Homme  et  divers  Mam- 
mifères, on  peut  consulter  le  travail 
de  M.  King  (b), 

(1)  Cbezl'Ornithorhynquela  valvule 
tricuspide  se  compose  de  deux  por- 
tions membraneuses  et  deux  portions 
charnues.  L'une  de  ces  dernières  est 
placée  près   de  l'origine  de   l'artère 


(a)  Pàrcliappe,  Du  exur,  p.  -1 01 ,  174clsuiv. 

{b)  T.  King;,  An  Essnrj  on  the  Sàfty-valve  Function  in  the  RUjht  Ventrkle  of  ihe  Heart  (Guy's 
Hospital  Reports,  vol.  Il,  p.  121 ,  142ctsuiv.,  pi,  \  el  2). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  508 

§  h.  —  Los  oreillettes  ont  des  parois  minces,  mais  clans  o^iicue* 
lesquelles  on  distingue  aussi  des  fibres  musculaires  de  divers 
ordres  :  les  unes  sont  communes  aux  deux  oreillettes  et  forment 
sur  leur  partie  antérieure  une  bande  transversale;  les  autres 
sont  propres  à  chacun  de  ces  organes,  et  constituent,  d'une 
part,  divers  faisceaux  disposés  en  éeharpe  autour  des  orifices 
veineux,  ou  qui  s'entrecroisent  en  manière  de  réseau  sur  leur 
partie  antérieure  ;  d'autre  part,  des  colonnes  charnues  qui  en 
garnissent  l'intérieur.  Du  reste,  presque  tous  ces  faisceaux 
s'unissent  aux  zones  fibreuses  qui  occupent  la  base  des  oreil- 
lettes et  entourent  les  orifices  ventriculaires  (1). 

L'oreillette  gauche  est  beaucoup  plus  petite  que  la  droite,  et     oreillette 

i  i  i       a  ii-  gauche. 

sa  portion  principale,  qui  semble  être  seulement  une.  dilatation 
du  confluent  des  veines  pulmonaires,  est  très  nettement  séparée 
de  sa  portion  auriculaire.  C'est  dans  celle-ci  seulement  qu'on 
trouve  des  colonnes  charnues  bien  développées,  et  les  parois  du 
sinus  sont,  lisses.  Enfin  les  orifices  des  veines  pulmonaires  sont 
situés  sur  la  face  postérieure  dont  ils  occupent  les  parties  laté- 
rales; ils  sont  au  nombre  de  quatre  et  ils  sont  dépourvus  de 
replis  valvulaires  (2). 

pulmonaire  et  paraît  correspondre  an  braneuse  correspondante  qui  se  trouve 
bourrelet,  ou  petite  valvule  charnue,  reliée  aussi  aux  parois  du  ventricule 
qui  se  remarque  à  la  même  place  par  de  petites  cordes  tendineuses  (a). 
chez  les  grands  Oiseaux  ,  tels  que  Chez  l'Échidné,  ce  mode  d'organisa- 
l'Autruche;  elle  esî  attachée  tout  le  lion  n'existe  pas. 
long  du  côté  de  la  portion  membra-  (1)  Chez  l'Homme,  la  disposition  des 
neuse  adjacente.  L'autre  portion  divers  faisceaux  musculaires  est  sur- 
charnue peut  être  comparée,  jusqu'à  tout  très  compliquée  à  la  partie  supé- 
un  certain  point,  à  la  grande  lame  rieure  de  l'oreillette  gauche,  où  ils 
valvulaire  des  Oiseaux  ;  mais  elle  s'entrecroisent  pour  embrasser  là 
n'adhère  pas  aux  parois  du  ventricule  base  des  veines  pulmonaires  (6). 
par  son  bord  latéral.  Supérieurement  ('2)  Nous  reviendrons  bientôt  sur  les 
elle  est  attachée  à  la  portion  mem-  différences  qui  s'observent  dans  les 

(a)Meckel,  Ornithorhynchi  paradoxi  descriptio  anatomica,  p.  81,  pi.  7,  Rg.  2. 
—  Owen,  Monotremata  (Tbdd's  Cyclopœdia  ofAnat.  and  Physiol.,  vol.  III,  p.  390). 
t,b)  Voyez  Boiirjery,  Anatomie  descriptive,  l.  IV,  pi.  10  bis,  fig\  2,  et  pi.  10  ter,  fig1.  1. 


droite. 


504  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

oreillette  Dans  l'oreillette  droite  la  distinction  entre  la  portion  princi- 
pale (ou  sinus)  et  l'appendice  auriculaire  est  moins  nette  que 
dans  l'oreillette  gauche  (1),  et  les  colonnes  charnues  qui  font 
saillie  dans  l'intérieur  de  cet  organe  sont  plus  nombreuses  et 
plus  fortes  :  les  principaux  de  ces  faisceaux  s'élèvent  de  la 
portion  inférieure  de  l'oreillette  près  de  l'orifice  venlriculaire 
et  rayonnent  vers  l'appendice  auriculaire,  disposition  qui  leur 
a  valu  le  nom  de  muscles  pectines  du  cœur. 

Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  la  cloison  qui  sépare  entre  elles  les 
deux  oreillettes  ne  s'établit  qu'incomplètement  chez  le  fœtus,  et 
même,  dans  les  premiers  temps  qui  suivent  la  naissance,  on  y 
aperçoit  un  orifice  appelé  trou  ovale,  ou  trou  de  Botal  (2). 
Mais  en  général  ce  pertuis  ne  tarde  pas  à  se  fermer,  et  du  côté 
de  l'oreillette  gauche  on  n'en  trouve  presque  aucune  trace  chez 
l'adulte  ;  seulement,  dans  le  ventricule  droit,  il  reste  indiqué  par 
une  dépression  qui,  à  raison  de  sa  forme,  est  appelée  la  fosse 
ovale  (S). 


orifices  veineux  de  l'oreillette  gauche,  portant    à   ce    que    l'on    connaissait 

lorsque  nous  étudierons  les  vaisseaux  déjà   (6).    Il    serait  donc    préférable 

de  la  petite  circulation.  d'appeler  cet  orifice  le  pertuis  inter- 

(1)  Chez  le  Phoque,  il  y  a  un  second  auriculaire  ou  le  trou  ovale,  plutôt 
appendice  de  ce  genre  en  arrière  (a).  que  le  trou  de  Botal  ;  mais  l'usage  de 

(2)  L'existence  de  l'orifice  inter-  ce  dernier  nom  est  tellement  enra- 
auriculaire,  ou  trou  ovale,  étaitconnue  ciné,  qu'il  serait  difficile  de  le  changer 
de  Galien ,  et  les  anatomistes  de  la  aujourd'hui. 

renaissance  en  avaient  également  La  conformation  et  la  clôture  de 
parlé  :  Vésale,  par  exemple.  C'est  cet  orifice  ont  été  mieux  étudiées  par 
donc  à  tort  que  quelques  auteurs  en  Ridley  que  par  ses  prédécesseurs  (c). 
ont  attribué  la  découverte  à  Botal ,  Lieutaud  en  a  donné  aussi  une  des- 
médecin de  Charles  IX.  La  descrip-  cription  très  détaillée  {d). 
tion  qu'il  en  donna  vers  la  fin  du  (3)  Chez  l'Homme,  cette  fosse,  si- 
xvie  siècle  n'ajouta  même  rien  d'im-  tuée  à  la  partie  inférieure  de  la  paroi 

(a)  Duvernoy,  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  282. 
(6)  Voyez  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  1. 1,  p.  151. 
—  Porta),  Histoire  de  l'analomie  et  de  la  chirurgie,  t.  II,  p.  562. 

(c)  Ridley,  Observationes  quœdam  medico-practicœ  et  physiologicœ,  1703,  obs.  32. 

(d)  Lieutaud,  Observations  anatomiq^t,es  sur  le  cceur  (Mém.  de  l'Académie  des  sciences,  1754, 
p.  377). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  505 

Le  nombre  des  orifices  veineux  de  l'oreillette  droite  varie 
suivant  qu'il  existe  une  ou  deux  veines  caves  antérieures.  Chez 
l'Homme,  l'embouchure  de  la  veine  cave  supérieure  se  trouve  à 


gauche  de  l'oreillette  droite,  est  super- 
ficielle, et  le  bourrelet  musculaire  qui 
eu  occupe  les  bords  et  qui  a  reçu  le 
nom  (Vanneau  de  Vieussens,  s'efface 
vers  sa  partie  inférieure  (a).  Souvent 
on  trouve  à  sa  partie  supérieure  une 
petite  fente  oblique  qui  s'avance  vers 
l'oreillette  gauche  et  qui  peut  même  y 
déboucher,  mais  qui  ne  laisse  pas 
passer  le  sang  à  cause  de  la  manière 
dont  ses  deux  lèvres  sont  appliquées 
l'une  contre  l'autre.  Senac  parle  de 
cette  fissure  comme  pouvant  presque 
toujours  se  laisser  traverser  par  une 
grosse  tête  d'épingle  (6) ,  et  M.  Cru- 
veilhier  a  constaté  que  dans  beaucoup 
de  cas  on  pouvait  par  cette  voie  faire 
pénétrer  le  manche  d'un  scalpel  jusque 
dans  l'oreillette  gauche  (c).  Quelque- 
fois la  persistance  de  cette  communi- 
cation entre  les  deux  oreillettes  cbez 
l'adulte  est  complète  (d),  mais  en  géné- 
ral le  trou  de  Botal  est  fermé,  ou  du 
moins  cesse  de  livrer  passage  au  sang 
vers  le  huitième  jour  après  la  nais- 


sance ,  quelquefois  même  beaucoup 
plus  tôt  (e).  Du  reste,  il  paraît  que  les 
perforations  de  la  cloison  interauri- 
culaire qui  se  rencontrent  chez  les 
adultes  ne  sont  pas  toujours  congéni- 
tales et  résultent  quelquefois  de  la 
rupture  de  la  lame  membraneuse,  assez 
mince,  qui  occupe  le  fond  de  la  fosse 
ovale  (/"). 

M.  Bizot  a  trouvé  le  trou  de  Botal 
ouvert  chez  l\h  sujets  sur  155  qu'il 
a  examinés  sous  ce  rapport,  et  il 
est  à  noter  que  18  de  ces  cas  de  non- 
oblitération  se  sont  rencontrés  chez 
des  sujets  âgés  de  seize  à  trente-neuf 
ans,  et  14  chez  des  individus  âgés  de 
plus  de  quarante  ans  ;  enfin  ,  chez 
aucun  d'entre  eux  il  ne  s'était  mani- 
festé aucun  symptôme  indicatif  d'un 
état  pathologique  du  cœur  (g). 

Quelques  anatomisles  ont  trouvé  le 
trou  de  Botal  largement  ouvert  chez 
les  Phoques  plus  ou  moins  avancés  en 
âge  (h),  et  ont  pensé  que  celte  voie  de 
communication  entre  les  deux  oreil- 


(a)  Voyez  Bourgery,  Anat.  descript.,  t.  IV,  pi.  11,  fig.  4. 

(b)  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  t.  I,  p.  168. 

(c)  Cruveilhier,  Traité  d'anatomie  descriptive,  t.  II,  p.  515. 

(d)  Sappey,  Traité  d'anatomie  descriptive,  t.  I,  p.  352. 

(e)  Voyez  Billard,  Traité  des  maladies  des  enfants  nouveau-nés,  1828,  p.  557. 

(f)  Morgagni,  De  sedibus  et  causis  morborum,  epist.  xvii  (Opéra  omnia,  1764,  t.  I,  p.  133). 

—  Corvisart,  Essai  sur  les  maladies  et  les  lésions  organiques  du  cœur,  p.  290  et  suiv.  (édit. 
de  1818). 

—  Abernethy,  Observ.  on  the  Foramina  Thebesii  of  the  Heart  (Phil.  Trans.,  t.  LXX1X,  p.  107). 

—  Otto,  Sellene  Beobachtungen  zur  Anatomie,  Physiologie  und  Pathologie,  1810,  t.  1,  p.  97. 

—  Pasqualini,  Mem.  sulla  fréquente  opertura  del  foramine  ovale  rinvenuto  nei  cadaveri  dei 
tisici.  Rome,  1827. 

(g~)  Bizot,  Op.  cit.  (Mém.  de  la  Soc.  méd.  d'observation,  1837,  1. 1,  p.  358). 
(h)  Perrault ,  Description  anatomique  d'un   Veau  marin  (Mém.  pour  servir  à  l'histoire  des 
Animaux,  t.  I,  p.  196). 

—  Kulm,  Phocœ  anatome  (Acta  Acad.  Nat.curios.,  1721,  t.  I,  p.  16). 

—  Parson,  Some  Account  of  the  Phoca  (Philos.  Trans.,  1743,  t.  XL1I,  p.  384). 

—  Portai,  Observations  sur  la  structure  de  quelques  parties  du  Veau  marin  (Mem.  de  Y  Acad. 
des  sciences,  1770,  p.  414). 

—  Blnmenbaoh,  Handbnch  der  Vergleichenden  Anatomie,  %  160  (4«  édit.,  1824). 


506  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

la  partie  supérieure  et  postérieure  de  ce  réservoir  (1)  ;  celle  de 
la  veine  cave  inférieure  est  placée  beaucoup  plus  bas,  et  l'on 
remarque  dans  son  voisinage  une  troisième  ouverture  qui  appar- 
tient à  la  grosse  veine  coronaire  du  cœur  (2).  Enfin  il  est  aussi  à 


telles  était  permanente  chez  ces  Ani- 
maux, et  même  chez  tous  les  Mammi- 
fères plongeurs.  Mais  des  recherches 
plus  multipliées  ont  bien  établi  qu'à 
l'état  adulte,  ce  mode  d'organisation 
n'est  normal  ni  chez  ces  Carnas- 
siers (a) ,  ni  chez  le  Castor  (b) ,  le 
Marsouin  (c)  ,  le  Narwal  (d) ,  le  Du- 
gong (e),  le  Rytina  (/"),  le  Cachalot  (g), 
l'Ornithorhynque  (h),  ou  tout  autre 
Mammifère.  Il  est  seulement  à  noter 
que,  chez  les  Phoques  et  quelques 
autres  espèces,  le  pertuis  interauricu- 
laire ne  paraît  pas  se  fermer  aussi 
promplement  que  chez  les  espèces 
plus  complètement  terrestres. 

(1)  Chez  l'Éléphant,  le  Porc-Épic 
et  les  autres  Mammifères  qui  ont  deux 
veinescaves  antérieures,  celle  du  côté 
gauche  s'ouvre  dans  l'oreillette,  tout 
près  de  son  embouchure  dans  le  ven- 
tricule. 


(2)  Chez  l'Homme,  il  existe  à  l'en- 
trée de  cette  veine  un  petit  repli 
semi-lunaire,  appelé  valvule  de  Thé- 
bésius  (i).  Mais  souvent  on  n'en  voit 
aucune  trace  :  ainsi,  chez  le  Rhinocé- 
ros indien,  l'orifice  de  la  veine  coro- 
naire, qui  est  de  la  grosseur  du  doigt, 
est  complètement  libre  (  j). 

Il  est  aussi  à  noter  qu'on  aperçoit 
sur  les  parois  de  l'oreillette  droite 
d'autres  orifices  accessoires  de  petites 
dimensions,  appelés  trous  de  Thébé- 
sins  (foraminula  Thebesii)  :  les  uns 
appartiennent  à  des  veines  du  cœur  ; 
les  autres  correspondent  seulement 
aux  espaces  ménagés  entre  les  co- 
lonnes charnues  et  donnent  dans  des 
culs-de-sac. 

La  découverte  de  la  valvule  dont 
l'orifice  des  veines  coronaires  est  garni 
appartient  en  réalité  à  Eustachi,  ana- 
tomiste  célèbre  qui  exerçait  la  méde- 


(a)  Selielhamer,  Phocœ  maris  analome  (Ephemiridum  Acad.  Nat.  curios.,  <leo.  ?,,  ann.  vu  et 
vin,  append.,  p.  24). 

—  Harlmann,  Dissert,  de  Phoca,  scu  Vitulo  marino.  Regiomont.,  1083. 
—  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  281. 

—  Albers,  Beitrâge  zur  Anatomie  und  Physiologie  der  Thiere,  1. 1,  p.  Il . 

—  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  386. 

—  Lobstein,  Observ.  d'anat.  comparée  sur  le  Phoque,  p.  26. 

—  Owen,  Descript.  and  Illuslr.  Catal.  of  the  Mus.  of  the  Coll.  of  Surgeons,  t.  II,  p.  54. 
(6)  Wepfer,  De  Castore  (Blasius,  Anatome  Animalium,  p.  45). 

—  Meckel,  loc.  cit. 

(c)  Idem,  ibid. 

(d)  Albers,  Undersogelse  over  Eeiihïorningen  (Monodon  Narwal)  Hierle,  p.  4  (extrait  des  Actes  de 
l'Acad.  de  Copenhague,  1809,  3e  série,  t.  V). 

(«)  Raffles,  Account  of  a  Dugong  (Philos.  Trans.,  1820,  p.  178). 

(/')  Steller,  De  Bestiis  marinis  (Nov.  Comment.  Acad.  Petropol.,  t.  II,  p.  317). 

(g)  Jackson,  Dissect.  of  a  Spermaceti  Wliale  (Boston  Journ.  ofNat.  thst.,  t.  V,  p.  147). 

(h)  Meckel,  Ornithorhynchi  paradoxi  descriptio  anatomica,  p.  31. 

(i)  Voyez  Bourgcry,  Anat.  descript.,  t.  IV,  pi.  10,  fig.  2  ;  [il.  11,  lig.  1. 

■ —  J.  Marshall,  On  the  Development  of  the  Great  Anterior  Veins  in  Man  and  Mammalia 
(Philos.  Trans.,  1850,  pi.  1 ,  Cg.  1  t). 

(j)  Owen,  On  the  Anatomy  of  the  Tndian  Rhinocéros  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  1852,  vol.  IV, 
p.  47). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES,  507 

noter  que  l'embouchure  de  la  veine  cave  supérieure  est  dépour- 
vue de  valvules,  mais  qu'il  existe  au-dessus  de  l'orifice  de  la 
veine  cave  intérieure  un  grand  repli  membraneux,  appelé  valvule 
(VEustache,  qui  le  recouvre  en  partie  quand  le  ventricule  se 
contracte  (1).  Cette  valvule  est  plus  développée  chez  quelques 
Mammifères,  tels  que  l'Éléphant  et  les  Singes,  mais  elle  manque 
chez  le  grand  nombre  de  ces  Animaux,  par  exemple,  chez  les 
Solipèdes  et  chez  la  plupart  des  Carnassiers  (2). 


Valvule 
d'Eustaclie. 


cine  à  Hoirie  vers  le  milieu  du 
xvic  siècle  ;  mais  Thébésius  fut  le 
premier  à  faire  bien  connaître  la  dis- 
position des  vaisseaux  propres  du 
cœur,  et  son  nom  est  resté  attaché 
à  plusieurs  parties  de  cet  organe,  bien 
(pie  son  travail  ne  date  que  du  com- 
mencement du  xvm0  siècle  («). 

(1)  L'existence  de  celte  valvule  avait 
été  brièvement  indiquée  vers  le  mi- 
lieu du  xvie  siècle  par  Jacques  Dubois 
(ou  Sylvius) ,  l'un  des  maîtres  et  des 
détracteurs  du  célèbre  Vésale  ;  mais 
Eustachi  fut  le  premier  à  la  faire  bien 
connaître  (jb) ,  et  Winslow  y  donna 
le  nom  de  cet  anatomisle  (c).  Haller 
en  publia  ensuite  une  description  plus 
détaillée  et  plus  exacte  (d). 

C'est  un  repli  de  forme  semi-lunaire 
qui  entoure  la  moitié  ou  même  les 
deux  tiers  antérieurs  de  l'ouverture 
de  la  veiue  cave  inférieure  ;  son  bord 
libre  et  concave  est  dirigé  en  haut, 
et  l'une  de  ses  extrémités  se  continue 
avec  le  pourtour  de  la  fosse  ovale , 


tandis  que  l'autre  se  perd  sur  le  bord 
de  l'embouchure  de  la  veine  cave.  On 
remarque  un  faisceau  musculaire  dans 
l'épaisseur  de  sa  partie  inférieure  (e). 
Sa  grandeur  est  très  variable  chez 
l'adulte;  mais  chez  le  fœtus,  ainsi  que 
nous  le  verrons  plus  tard ,  cette  val- 
vule est  très  développée. 

('2)  Il  paraît,  d'après  les  observa- 
lions  de  Meckel,  que  la  valvule  d'Eus- 
lachi  manque  le  plus  ordinairement 
chez  les  Carnassiers,  mais  elle  existe 
chez  quelques  espèces  de  cet  ordre, 
tellesquele  Putois  et  l'Ichneumon.  Cet 
anatomiste  en  a  constaté  la  présence 
chez  plusieurs  Singes,  chez  les  Makis, 
chez  divers  Hongeurs,  savoir  :  le  Hat, 
le  Cochon  d'Inde,  le  Castor  et  l'Agouti, 
ainsi  que  chez  le  Daman,  parmi  les 
Pachydermes.  Enfin  il  en  a  reconnu 
l'absence  chez  d'autres  Kongeurs  (l'É- 
cureuil, le  Paca  et  la  Marmotte),  ainsi 
que  chez  les  Solipèdes,  le  Cochon,  le 
Pécari,  le  Cerf,  le  Chamois,  les  Chats, 
les  Chiens,  l'Hyène,  les  Genettes,  la 


(a)  Thebesius,  Disserlatio  medica  de  circula  sanguinis  in  corde.  Leyde,  1716. 

(b)  Eustachi,  De  vena  sine  pari  (Opuscula  anatomica,  1564,  et  Tabula,  anatomicce,  tab.  S, 
fig.  6). 

('c)  Winslow,  Description  d'une  valvule  singulière  de  la  veine  cave  inférieure  (Mém.  de  l'Acad. 
des  sciences,  1717). 

(d)  Haller,  Observât,  de  valvula  Eustachi  (Opéra  minora,  t.  1,  p.  24,  pi.  1  à  4). 

(e)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  H  bis,  fig.  3  et  4. 

—  Parchappe,  Du  cœur,  sa  structure  et  ses  mouvements,  pi.  3,  fig.  2, 

—  Relzius,   Einige  Bemerkuugen  ùber  die  Scheideivand    des   Herztns  (Miiller's  Archiv  fur 
Anal,  und  Physiol.,  1835,  p.  161,  pi.  1,  iïg.  2). 


Nerfs 
du  cœur. 


508  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

J'ajouterai  que  l'oreillette  droite  est  en  général  plus  grande 
que  celle  de  gauche,  et  que  la  capacité  de  ces  réservoirs  est 
notablement  inférieure  à  celle  des  ventricules,  surtout  chez 
quelques  grands  Mammifères,  tels  que  le  Cheval  et  le  Bœuf  (1). 

§  5.  —  Quant  aux  filets  nerveux  et  aux  ganglions  en  nombre 
très  considérable  qui  se  rencontrent  dans  la  substance  du  cœur  ou 
à  la  surface  de  cet  organe  (2),  je  me  bornerai,  pour  le  moment, 


Loutre,  le  Blaireau,  plusieurs  Martres, 
l'Ours,  le  Coati,  le  Raton,  la  Musa- 
raigne,  le  Marsouin  et  la  Sarigue. 
M.  Owen  n'en  a  vu  aucune  trace  chez 
le  Rhinocéros  (a).  D'après  Cuvier, 
Alberset  Duvernoy,  cette  valvule  serait 
très  développée  chez  le  Phoque  [b)  ; 
niais  Meckel  n'en  a  trouvé  aucun  ves- 
tige chez  plusieurs  individus  dont  il  a 
faitPanatomie,  et  il  pense  qu'il  y  a  eu 
à  ce  sujet  quelque  erreur  dans  la  dé- 
terpiination  des  parties  (c). 

(1)  Chez  le  Cheval,  les  oreillettes 
sont  très  petites  comparativement  aux 
ventricules  (d). 

(2)  Les  premiers  analomistes  de 
l'époque  de  la  renaissance,  Eustacliiet 
Vésale,  par  exemple,  ont  entrevu  les 
nerfs  du  cœur,  et  Fallope  a  découvert 
l'espèce  de  réseau  ou  plexus  que  ces 
cordons  grêles  et  blanchâtres  forment 
vers  la  base  de  cet  organe  ;  mais  leur 
préparation  anatomique  présente  quel- 
ques difficultés,  et  leur  existence  fut 
ensuite  révoquée  en  doute  par  des  au- 
teurs dont  l'autorité  était  très  grande 


aux  yeux  de  leurs  contemporains,  tels 
que  Riolan,  le  célèbre  adversaire  de 
Harvey.  Les  recherches  subséquentes 
de  Lieutaud ,  Willis  ,  Vieussens  ,  Du- 
verney,  Lancisi ,  Winslow,  ne  lais- 
sèrent subsister  aucune  incertitude  à 
cet  égard  ;  mais  les  .descriptions  don- 
nées par  ces  différents  anatomistes 
s'accordaient  mal  entre  elles,  et  Haller 
pensait  qu'il  devait  y  avoir  dans  la 
disposition  des  nerfs  cardiaques  de 
grandes  variations  individuelles  (e). 
Senac,  après  avoir  exposé  avec  beau- 
coup de  soin  les  travaux  de  ses  devan- 
ciers ,  a  donné  à  son  tour  une  des- 
cription assez  détaillée  des  principaux 
troncs  nerveux  dont  le  cœur  est 
pourvu ,  et  la  question  sur  laquelle 
les  anatomistes  du  xvne  siècle  étaient 
divisés  se  trouvait  résolue,  lorsque  des 
incertitudes  surgirent  relativement  à 
un  autre  point  important  de  l'histoire 
anatomique  de  ces  nerfs.  Sœmmering 
reconnut  que  toutes  les  principales 
branches  des  nerfs  cardiaques  accom- 
pagnent les  vaisseaux  coronaires,  et  il 


(a)  Owen,  Op.  cit.  (Trans.  ofthe  Zool.  Soc,  t.  IV,  p.  47). 

(b)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  282. 

—  Albers,  Beitr.  zur  Anat.  und  Physiol.  der  Thiere,  p.  II. 

—  Duvernoy,  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier,  2e  édit. ,  t.  VI,  p.  282. 

(c)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  388. 

(d)  Voyez  Lafosse,  Cours  d'hippiatrique,  pi.  40,  fig.  2  et  3. 

—  Chauveau,  Traité  d'anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques  ,  p.  476,  fig.  147. 

(e)  Pour  plus  de  détails  au  sujet  de  ces  travaux,  je  renverrai  à  l'historique  qui  en  a  été  donné  par 
Senac  (Traité  de  la  structure  du  cœur,  t.  I,  p.  116  et  suiv.),  et  par  Haller  (Elem.  physiol.,  I.  1, 
p.  362). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  509 

à  en  signaler  l'existence  et  à  en  indiquer  les  principaux  carac- 
tères, me  réservant  d'en  parler  plus  au  long  clans  une  autre 
partie  de  ce  cours. 

Ces  nerfs  proviennent  de  deux  sources  :  les  uns  sont  fournis 
par  le  système  cérébro-spinal  et  naissent  des  nerfs  pneumo- 
gastriques ou  de  leurs  branches;  les  autres  sont  fournis  par 
le  système  sympathique,  et  se  détachent  soit  des  ganglions 
cervicaux,  soit  du  premier  ganglion  dorsal  de  ce  système.  Ils 
forment  près  de  l'a  base  du  cœur  des  plexus  très  remarquables, 
dans  lesquels  il  est  eu  général  facile  de  distinguer  quelques 
masses  de  tissu  médullaire  constituant  ce  que  les  anatomisles 
appellent  des  ganglions  ou  centres  nerveux.  Enfin  les  bran- 
ches qui  sortent  de  ces  plexus  suivent  d'abord  le  trajet  des 

pensa  que  leurs  ramifications  étaient  de  distribution  des  nerfs  du  cœur,  el 
destinées  aux  parois  de  ces  vaisseaux  fit  voir  que  leurs  ramifications  se  com- 
plutôt  qu'à  la  substance  charnue  du  portent  dans  les  parois  charnues  de 
cœur  (a).  Son  élève  Behrends  alla  plus  ce  viscère  comme  dans  les  muscles  de 
loin,  et  affirma  que  la  substance  mus-  l'appareil  de  la  locomotion.  Il  publia 
culaire  du  cœur  ne  recevait  pas  un  à  ce  sujet  un  magnifique  ouvrage  (d)\ 
seul  filament  nerveux  (b),  et  cette  opi-  mais  tout  en  décrivant  avec  une  rare 
nion,  combattue  par  Munniks  (c),  eut  précision  la  manière  dont  les  nerfs 
un  grand  retentissement,  à  raison  des  du  cœur  se  répandent  dans  la  sub- 
questions qui  se  débattaient  alors  stance  des  parois  de  cet  organe  ,  il  ne 
parmi  les  physiologistes  relativement  donna  pas  une  attention  suffisante  aux 
à  la  source  de  la  faculté  contractile  renflements  ganglioniformes  situés 
des  muscles.  Par  suite  de  ces  discus-  sur  leur  trajet ,  particularité  anato- 
sions,  Scarpa,  l'un  des  anatomistes  inique  qui  n'a  été  mise  bien  en  évi- 
les  plus  célèbres  de  la  seconde  moitié  dence  que  par  les  travaux  récents  de 
du  xvme  siècle,  entreprit  une  série  de  MM.  Remak,  Lee  et  Bowman  (e). 
recherches  approfondies  sur  le  mode 

(a)  Sœmmering,  Corporis  humani  fabrica,  t.  V,  p.  43. 

(6)  Behrends,  Dïssertatio    inauguralis  anatomico-physiotocjica  qua  demonstratur  cor  nervis 
carere.  In-4,  Moguntise,  1792; 

(c)  Munniks,  Observ.  prima  qua  indigatur  num  cordis  substantiam  muscularem  re  vera  nervi 
occupent  [Observa'tiones  variœ,  p.  1,  pi.  1  et  2,  Groningue,  1785). 

(d)  Scarpa,  Tabulée  nevrologicce  ad  illustrandum  historiam  anatomicam  cardiacorum  nervo- 
rum,  1794. 

(e)  Lee,  On  the  Ganglia  and  Nerves  of  the  Heart  (Philos.  Trans.,  1849,  p.  43,  pi.  1  à  5). 

—  Remak,   Nevrologische  Erlâuterungen  (Miiller's   Archiv  fur  Anat.   und  Phijsiol.,  1844. 
p.  403,  pi.  12). 

—  Bowman  et  Todd,  Physiological  Anatomy,  t.  II,  p.  342. 


510  APPAREIL    Ht;    LA    CIRCULATION 

artères  coronaires,  mais  s'en  séparent  ensuite,  et  se  répandent 
non-seulement  à  la  surface  des  ventricules,  mais  aussi  dans  la 
profondeur  de  ces  organes  et  dans  les  parois  des  oreillettes.  11 
est  aussi  à  noter  que  ces  branches,  au  lieu  de  rester  cylindriques 
et  uniformes,  comme  les  nerfs  ordinaires,  présentent  sur  leur 
trajet  une  multitude  de  petits  renflements  dont  quelques-uns 
paraissent  être  de  véritables  ganglions  (1). 


(I)  Les  nerfs  du  cœur  présentent 
une  disposition  très  complexe,  et  ils 
varient  beaucoup  dans  le  mode  de  di- 
vision et  de  groupement  de  leurs  fila- 
ments suivant  les  individus  aussi  bien 
que  clans  les  espèces  différentes.  Chez 
l'Homme,  où  l'on  en  a  fait  une  étude 
très  attentive ,  ces  variations  sont 
même  si  grandes  et  si  fréquentes,  que 
M.  Cruveilhier  regarde  comme  im- 
possible d'en  donner  une  description 
à  k  fois  détaillée  et  applicable  au  plus 
grand  nombre  des  sujets  (a).  En  gé- 
néral, cependant,  on  peut  reconnaître 
comme  origine  du  plexus  situé  près 
de  la  base  de  cet  organe  :  1°  trois 
paires  de  nerfs  cardiaques  fournis 
par  la  portion  cervicale  du  grand 
sympathique,  savoir,  de  chaque  côté, 
un  nerf  cardiaque  supérieur  ou  su- 
perficiel, qui  vient  du  ganglion  cer- 
vical supérieur  ou  de  son  rameau  des- 
cendant; un  nerf  cardiaque  profond 
(ou  grand  nerf  cardiaque),  qui  naît 
du  ganglion  cervical  moyen  ;  et  un 
petit  nerf  cardiaque,  qui  est  fourni 
par  le  ganglion  cervical  inférieur  ;  — 


2°  des  branches  provenant  des  nerfs 
pneumogastriques  ,  les  unes  directe- 
ment du  tronc  de  ce  nerf,  les  autres 
de  la  grosse  branche  qu'il  envoie  au 
larynx,  et  que  l'on  connaît  sous  le  nom 
de  nerf  récurrent  (b)  ;  —  3°  quelques 
filets  venant  du  premier  ganglion  tho- 
racique  du  système  sympathique.  Tous 
ces  nerfs,  non -seulement  ceux  du 
même  côté,  mais  aussi  ceux  des  côtés 
opposés  ,  s'anastomosent  entre  eux 
d'une  manière  très  variable,  et  consti- 
tuent au-dessus  du  cœur  un  plexus 
fort  étendu,  dont  la  portion  princi- 
pale, appelée  le  grand  plexus  car- 
diaque, ou  plexus  cardiaque  profond, 
est  logée  derrière  la  crosse  aortique, 
au-dessus  du  tronc  de  l'artère  pul- 
monaire et  devant  la  portion  corres- 
pondante de  la  trachée.  Au  centre  de 
ce  plexus,  on  trouve  ordinairement 
un  ganglion  gris  rougealre,  appelé 
ganglion  de  Wrisberg,  ou  ganglion 
cardiaque  inférieur  (c),  et  assez  sou- 
vent, au  lieu  d'un  seul  de  ces  corps, 
on  en  aperçoit  deux,  ou  même  trois. 
Un  autre  ganglion  (le  ganglion  car- 


(a)  Cruveilhier,  Traité  d'anatomie  descriptive,  t.  IV,  p.  730. 

(b)  Anderscli,  Fragmentant,  descriptions  nervorum  cardiacorum  (Ludwig,  Seriptores  nevrologici 
minores  selecli,  t.  II,  p.  d87  et  suiv.,  pi.  5). 

—  Neubauer,  Descr.  anat.  nervorum  cardiacorum  (Opéra  anatomica,  p.  1 39  et  suiv.,  pi.  3  à  5). 

—  Scarpa,  Tabula;  nevrologieœ,  pi.  3  et  4). 

—  Bcurgcry  et  Jacob,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  t2,  lîg.  1. 

(c)  Wrisberg,   Obs.  anat.  phys.  de  nervis  arterias  venasque  comitanlibus  (Commentutioiicn 
Societalis  scientiarum  Gottingensis ,  1784,  t.  VII,  p.  127). 


CHEZ    LES    MAMMIFERES. 


511 


§  6.  —  Les  artères  qui  partent  du  ventricule  gauche  du     système 
cœur  pour  se  distribuer  dans  les  diverses  parties  de  l'économie 


artériel 


diaque  supérieur)  se  voit  aussi  très 
souvent  à  la  partie  supérieure  de  ce 
lacis  plexiforme,  au-dessous  de  l'artère 
thyroïdienne  inférieure.  Ce  plexus  se 
prolonge  inférieurement  en  enlaçant 
les  gros  vaisseaux,  et  ses  branches, 
après  avoir  formé  trois  groupes  prin- 
cipaux et  avoir  donné  des  ramuscules 
aux  vaisseaux  adjacents,  vont  consti- 
tuer à  la  base  de  la  portion  ventricu- 
laire  du  cœur  deux  plexus  secondaires 
qui  sont  en  rapport  avec  les  artères  pro- 
pres de  cet  organe,  et  qui  peuvent  être 
distingués  sous  les  noms  de  plexus 
coronaire  antérieur  (ou  gauche)  et 
plexus  coronaire  postérieur  (a).  Ils 
suivent  pendant  un  certain  temps 
le  trajet  des  artères  dont  ils  portent 
les  noms  ;  mais  leurs  branches  ne 
tardent  pas  à  s'en  séparer,  soit  pour 
descendre  vers  la  pointe  du  cœur  en 
marchant  à  peu  près  parallèlement 
sous  la  tunique  péricardique  ,  soit 
pour  se  distribuer  aux  parois  des 
oreillettes  ;  leurs  ramifications  pénè- 
trent non-seulement  dans  l'épaisseur 
des  parois  des  ventricules ,  mais  ar- 
rivent jusque  sous  l'endocarde  et 
distribuent  des  filets  aux  colonnes 
charnues.  Il  y  a  aussi  des  branches 
qui  pénètrent  directement  dans  la 
profondeur  de  la  cloison  interventri- 
culaire.  Enfin  on  remarque ,  tant  au 
milieu  des  plexus  coronaires  que  sur 


le  trajet  des  branches  de  ces  nerfs 
ventriculaires,  une  multitude  de  ren- 
flements ganglioniformes,  dont  les 
principaux  n'avaient  pas  échappé  à 
l'attention  de  Scarpa,  mais  dont  les 
autres  n'ont  été  reconnus  que  plus 
récemment  par  MM.  Lee  et  Remak. 

M.  Lee  en  a  trouvé  un  nombre  très 
considérable  jusque  sur  les  plus  petits 
rameaux  de  ces  nerfs  (6)  ;  mais  il  pa- 
raîtrait que  beaucoup  de  ces  renfle- 
ments sont  dus  à  un  épaississement 
du  névrilème  seulement ,  et  ne  sont 
pas  de  véritables  ganglions  (c).  Pour 
d'autres  ,  cependant ,  la  nature  gan- 
glionnaire n'est  pas  douteuse ,  car 
on  a  reconnu  dans  leur  substance  le 
tissu  utriculaire  qui  est  caractéristique 
des  centres  nerveux  (d).  M.  Remak 
a  rencontré  de  ces  ganglions  dans 
l'épaisseur  de  la  cloison  interventri- 
culaire  (e). 

La  disposition  du  plexus  cardiaque 
et  de  ses  branches  d'origine  a  été  re- 
présentée par  Swan  chez  le  Veau  et  le 
Renard  (f).  Weber  aussi  a  donné  une 
figure  de  ces  nerfs  chez  le  Veau  {g). 

M.  Heidenheim  a  publié  dernière- 
ment un  travail  spécial  sur  les  nerfs 
du  cœur  ;  mais  n'ayant  pu  me  pro- 
curer cet  opuscule,  je  ne  puis  indi- 
quer les  résultats  obtenus  par  son 
auteur  (h). 


(a)  Scarpa,  Op.  cil.,  pi.  6,  %.  1  et  2,  et  pour  le  cœur  du  Cheval,  pi.  7,  fîg.  1  et  2. 

(b)  Lee,  On  the  Ganglia  and  Nerves  of  the  Heart  (Philos.  Trans.,  1849,  pi.  2,  3,  4  et  5). 
(e)  Kolliker,  Eléments  d'histologie,  p.  604. 

(d)  Bowmann  et  Tond,  Physiological  Anatomy,  t.  II,  p.  342. 

(e)  Remak,  Op.  cit.  (Muller's  Archiv  fur  Anat.  und  Phys.,  1844,  pi.  12,  fig.  1  et  2). 

(f)  Swan,  Illustrations  of  the  Comparative  Anatomy  of  the  Nervous  System,  1835   d]   "C 
fig.  1,2,  et  pi.  33).  '  '  '  "   ' 

(g)  E.  H.  Weber,  Anatomia  comparata  nervi  sympathici,  1817,  pi.  4. 
(h)  Heidenheim,  Disquisitio  de  nervis  cor  dis.  Berlin,  1854. 


III. 


33 


512  APPAREIL    DE   LA    CIRCULATION 

ont,  chez  les  Mammifères,  des  parois  plus  épaisses  et  plus 
fortement  constituées  que  dans  les  classes  inférieures  du  Règne 
animal.;  leur  structure  intime  a  été  étudiée  aussi  avec  plus  de 
soin,  et  par  conséquent  je  ne  puis  passer  aussi  rapidement  sur 
leur  histoire  anatomique  que  j'ai  cru  devoir  le  faire  en  parlant 
du  système  circulatoire  des  autres  Animaux  (1). 
Lorsqu'on  examine  le  mode  de  constitution  d'un  de  ces  tubes 

Structure 

de»  artères,  et  qu'on  fait  choix  d'un  gros  vaisseau,  il  est  facile  de  distinguer 
dans  ses  parois  trois  couches  principales  qui,  à  raison  de  leurs 
positions  relatives,  sont  généralement  désignées  sous  les  noms  de 
tuniques  interne,  moyenne  et  externe.  Mais  ces  couches  ne  sont 
pas  simples  ;  elles  se  laissent  décomposer  en  strates  secondaires 
et  elles  tendent  à  s'affaiblir  ou  à  disparaître  même  vers  les 
parties  terminales  du  système  artériel,  où  tous  les  vaisseaux 
se  réduisent  en  capillaires. 

La  tunique  interne  des  artères  est  la  continuation  de  l'endo- 
carde ou  membrane  interne  du  cœur  ;  elle  a  beaucoup  d'ana- 
logie avec  les  tuniques  séreuses  dont  les  diverses  cavités  viscé- 
rales sont  tapissées,  la  plèvre  et  le  péricarde,  par  exemple, 
et  elle  offre  trois  couches  assez  distinctes.  L'une  de  celles-ci 

(1)  Les  principaux  travaux  histolo-  depuis  quelques  années,  sont  dus  à 

giques  sur  les  vaisseaux  sanguins  de  MM.    Henle  ,    Ràuschel ,    Reichert , 

l'Homme  et  de  quelques  autres  Mam-  Valentin  ,    Kôlliker  ,    Schultze  ,  Re- 

mifères  dont  la  science  a  été  enrichie  mak,  etc.  (a). 

(a)  Henle,  Traité  d'anatomie  générale,  t.  II,  p.  23  et  suiv. 

—  Ràuschel,  De  arteriarum  et  venarum  structura  (Dissert.).  Vratisl.,  1836. 

—  Reichert,  Bericht  ûber  die  Fortschrilte  der  mikros.  Anat.  (Arch.  de  Miiller,  1841 ,  clxxxh). 

—  Valentin,  Gewebe  desmenschl.  und  thierischen  Korpers,  t.l,  p.  075  (Wagner's  Handwôrterb. 
der  Physiologie). 

—  Jaesche,  De  tells  epithelialibus  in  génère  et  de  Us  vasorum  in  specie.  Dorpat,  1847. 

■ —  Kôlliker,  Beitrdge  zur  Kenntniss  der  glatten  Muskeln  (Zeitschnft  fur  wissenschaflliche 
Zoologie,  1849,  t.l,  p.  79,  pi.  6,  fig.  13-15,  pi.  7,  %.  27  et  28),  et  Éléments  d'histologie 
humaine,  1855,  p.  606  et  suiv.). 

—  Max.  Schultze,  De  arteriarum  structura,  constitulione  chemica  et  situ;  disquisitio  critica. 
■             Gryphise,  1850. 

■ —  Remak,  Histologische  Bemerkungen  ûber  die  Blutgefdsswdnde  (Mûller's  Arvhiv  fur  Anat. 
undPhysiol.,  1850,  p.  79). 

—  Donders  et  Jansen ,  Unters.  ûber  die  krankh.  Verânder  der  Arlerienwànde  (Arch.  fur 
Physiol.  Heilkunde,  t.  VU,  p.  361). 

—  Bowman  et  Todd,  Physiological  Anatomy,  vol.  II,  p.  316  et  suiv.,  1856. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  513 

en  occupe  la  surface  libre  et  se  compose  de  tissu  épithélique, 
dont  les  cellules  constitutives  sont  fusiformes ,  très  pâles  et 
pourvues  d'un  noyau  ovalaire.  Quelquefois  ces  noyaux  seuls 
sont  distincts  ,  et  quand  on  examine  ce  tissu  à  l'aide  d'un 
microscope  dont  la  puissance  n'est  pas  très  grande ,  ils  lui 
donnent  un  aspect  grenu  (1).  Au-dessous  de  cet  épithélium  se 
trouve  une  couche  basilaire,  qui  est  ordinairement  désignée 
par  les  histologistes  sous  le  nom  de  membrane  fenétrée  ou  de 
tunique  striée ,  et  qui  se  compose  d'une  substance  amorphe  et 
de  fibrilles  hyalines  disposées  en  réseau.  Enfin,  plus  profondé- 
ment encore,  on  rencontre  des  fibres  plus  distinctes,  dont  la 
direction  dominante  est  longitudinale ,  mais  qui  ne  paraissent 
différer  que  peu  des  précédentes  (2). 


(î)L'existencedecettecouchemince  terne  paraît  formé  d'une  substance 

de  tissu  épithélique  pavimenteux  à  la  amorphe.  Quelques  auteurs  la  dési- 

face  interne  des  vaisseaux  a  été  con-  gnent  sous  le  nom  de  tunique  cellu- 

statée  en  1838  par  M.  Henle,  et  a  été  leusz;    mais   cette   expression  peut 

confirmée  par  les  observations  plus  donner  lieu  à  de  la  confusion,  car  on 

récentes  de  MM.  Schwann,  Valentin,  l'a  appliquée  aussi  à  la  tunique  ex- 

Rosenthal,  Kôlliker,  Bowman,  etc.  (a).  terne  des  artères. 

Les  éléments  anatomiques  de  cette  (2)  Cette  couche  fibreuse  est  dé- 
couche superficielle  de  la  tunique  in-  crite  par  quelques  histologistes  comme 
terne  des  artères  se  dissocient  et  s'a!-  appartenant  à  la  tunique  moyenne  des 
tèrent  très  promplement  après  la  artères  ;  mais  le  passage  entre  elle  et 
mort.  Ce  sont  des  cellules  ovalaires  la  membrane  striée  est  graduel,  et, 
ou  fusiformes,  terminées  en  pointe  et  à  raison  de  la  direction  des  fibres,  la 
ayant  dans  les  gros  troncs  de  Gm,01/j  ligne  de  démarcation  me  paraît  mieux 
à  0m,02  de  long  (a).  Dans  les  très  établie  entre  elle  et  la  couche  des 
petits  vaisseaux  les  noyaux  seuls  sont  fibres  transversales, 
visibles,  et  le  reste  de  la  pellicule  in- 


(a)  Henle,  Ueber  die  Ausbreitung  des  Epithélium  im  menschlichen  Kôrper  (Miïller's  Archiv  fur 
Anat.  undPhysiol.,  1838,  p.  127). 

—  Schwann,  Mikroscopischen  Vntersuchungen,  p.  84. 

—  Valentin,  Zur  Entwickelung  der  Gevjebe  des  Muskel,  des  Bhitgefàss-und  des  Nervensystems 
(Miiller's  Archiv,  1840,  p.  215). 

—  Rosenlhal,  Formatio  granulosa,  p.  12  (1839). 

(6)  Voyez  Henje,  Traité  d'anatomie  générale,  pi.  1,  fig.  2. 
■ — Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  51,  fig.  11. 

—  Bowman  et  Todd,  Physiological  Anatomy,  t.  II,  p.  321,  fig.  192  et  193  (cellules  épithéliales 
de  l'aorte  du  Bœuf  et  du  Cheval). 


51  II  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

La  tunique  moyenne  qui  engaîne  le  tube  membraneux  con- 
stitué par  les  éléments  histogéniques  dont  je  viens  de  parler,  est 
épaisse,  jaunâtre  et  très  élastique  :  les  anciens  anatomistes  ont 
beaucoup  varié  d'opinion  touchant  sa  nature  intime,  et  c'est 
seulement  dans  ces  dernières  années  que,  par  l'emploi  combiné 
du  microscope  et  de  certaines  réactions  chimiques,  on  est  par- 
venu à  s'en  former  une  idée  nette.  Aujourd'hui  on  sait  que 
dans  les  gros  vaisseaux  elle  se  compose  de  deux  couches  assez 
distinctes  :  la  première  est  formée  principalement  de  fibres 
transversales  qui  se  bifurquent  parfois  et  se  réunissent  de  ma- 
nière à  simuler  des  anneaux  ou  plutôt  un  lacis  irrégulier  dont 
les  principales  mèches  représentent  des  segments  de  cercle 
plus  ou  moins  grands.  Le  tissu  jaune  qui  les  constitue  est  d'une 
nature  particulière;  il  est  cassant,  il  rie  résiste  pas  à  l'action  de 
l'acide  acétique,  comme  le  font  les  fibres  longitudinales  de  la 
tunique  précédente,  et  il  paraît  être  composé  de  cellules  fusi- 
formes  très  allongées.  Enfin  des  fibres  musculaires  lisses  se 
trouvent  mêlées  en  plus  ofl  moins  grand  nombre  à  ces  libres  de 
tissu  jaune.  Dans  les  grosses  artères  il  n'y  en  a  que  très  peu, 
mais  dans  les  petites  elles  deviennent  dominantes  (1). 

(1)   Cet  élément  histologique  des  que  serait  composée  uniquement  de 

artères  est  constitué  par  des  cellules  fibres  musculaires  dans  les  artères, 

très  allongées  à  noyau  également  al-  dont  le  diamètre  n'excède  pas  chez 

longé.  MM.  Kôlliker  et  Remak  en  ont  l'Homme  lmm,5  à  2mm.  Dans  les  vais- 

trouvé  aussi  dans  la  tunique  interne  seaux  de  moyen  calibre  le  tissu  mus- 

de  diverses  artères  chez  l'Homme.  culaire  tend  à  former  des  couches  qui 

La  prédominance  du  tissu  muscu-  alternent  avec  le  tissu  élastique  Enfin, 

laire  dans  la   tunique  moyenne  des  dans  les  gros  vaisseaux,  on  n'en  trouve 

artères,  à  mesure  qu'on  approche  de  que  des  traces,  et  les  cellules  fibril- 

la  partie  périphérique  du  système  cir-  laires  qui  le  représentent  sont  si  peu 

dilatoire,  avait  été   remarquée    par  développées,  que  M.  Kôlliker  les  con- 

Cuvier  (a),  et  ressort  nettement  des  sidère  comme  ne  possédant  plus  la 

observations  plus  récentes  de  M.  Kôl-  contractilité  d'une  manière  bien  pro- 

liker.  Suivant  ce  dernier,  celte  luni-  noncée  (b). 

(a)  Cuvier,  Lepons  d'analomie  comparée,  t.  VI,  p.  102J 
(6)  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  612  et  616, 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  515 

La  seconde  couche  de  la  tunique  moyenne  se  compose  prin- 
cipalement d'un  tissu  élastique  blanchâtre  qui  ne  se  laisse  pas 
diviser  en  fibres  annulaires,  mais  constitue  des  lames  d'une 
structure  réticulée.  De  même  que  la  couche  précédente,  elle 
est  élastique  dans  la  direction  normale  à  l'axe  du  vaisseau,  mais 
se  casse  très  facilement  quand  on  la  tiraille  en  sens  contraire. 
Elle  se  subdivise  en  plusieurs  strates,  mais  celles-ci  ne  forment 
pas  des  gaines  distinctes  et  s'enchevêtrent. 

Du  tissu  conjonctif  ordinaire  (ou  tissu  cellulaire ,  pour  em- 
ein ployer  l'expression  généralement  adoptée  par  les  anciens 
anatomistes)  se  trouve  mêlé  à  ces  divers  matériaux  consti- 
tutifs des  parois  artérielles,  et  devient  surtout  abondant  vers 
leur  surface  extérieure,  où,  renforcé  par  des  filaments  de  tissu 
aponévrotique,  il  constitue  la  tunique  externe  et  se  continue 
avec  le  tissu  conjonctif  logé  entre  les  vaisseaux  et  les  organes 
circon voisins.  Les  filaments  de  cette  gaine  externe  sont  entre- 
croisés dans  tous  les  sens  et  constituent  une  sorte  de  feutrage  ; 
mais  cependant  leur  direction  dominante  est  longitudinale.  De 
même  que  la  tunique  moyenne,  elle  disparaît  dans  les  capillaires, 
où  l'on  ne  trouve  plus  que  la  tunique  interne. 

On  distingue  aussi,  dans  l'épaisseur  des  parois  artérielles,  de 
petits  vaisseaux  sanguins  (1),  des  vaisseaux  lymphatiques  et  des 
filaments  nerveux  qui  proviennent  principalement  du  système 
ganglionnaire  (2). 

(1)  Les  vaisseaux  nourriciers  des  les  mailles  sont  plus  ou  moins  arron- 
artères  (ou  vasa  vasorum)  ne  corn-  dies,  et  elles  se  prolongent  aussi  dans 
muniquent  pas  directement  avec  leur  les  couches  superficielles  de  la  tu- 
cavité.  Les  artérioles  naissent  des  nique  moyenne  ;  il  ne  paraît  en  exis- 
branches  voisines  et  se  distribuent  ter  aucune  trace  dans  la  tunique 
principalement  dans  la  tunique  ex-  interne  (a). 

terne  de  ces  tubes;  elles  y  forment  (2)  Les  divers  plexus  du  grand  sym- 

un  réseau  capillaire  assez  riche,  dont  pathique  fournissent  aux  artères  un 

(a)  E.  BurJach,  Bericht  dev  anatomischen  Anstalt  in  Kœnigsherg,  1835  (voy.  Mùller's  Archiv 
fur  Anat.  und  Physiol.,  1836,  p.  xxvn). 
—  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  610. 


Mode 
de 


de  l'aorte. 


516  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

§  7.  —  Chez  les  Mammifères,  de  même  que  chez  les  autres 
développement  Vertébrés,  il  y  a  une  période  de  la  vie  embryonnaire  pendant 
laquelle  un  bulbe  contractile  occupe  la  base  du  système  aortique, 
et  celui-ci  présente,  à  son  origine,  une  série  d'arcs  ou  de  crosses 
qui  se  portent  à  droite  et  à  gauche  pour  embrasser  le  tube 
digestif  et  se  réunir  en  un  tronc  médian  contre  la  colonne  ver- 
tébrale (1);  mais  ce  mode  d'organisation,  au  lieu  de  se  perfec- 


grand  nombre  de  petites  branches  ; 
mais  ces  vaisseaux  en  reçoivent  aussi 
quelques-unes  provenant  du  système 
cérébro-spinal  (a).  En  général ,  ces 
filaments  nerveux  semblent  accom- 
pagner le  vaisseau  plutôt  que  de  se 
distribuer  réellement  dans  la  sub- 
stance de  ses  parois  ;  et  lorsqu'ils  y 
pénètrent,  c'est  ordinairement  entre 
les  tuniques  externe  et  moyenne  qu'on 
les  voit  ramper.  Dans  quelques  cas, 
cependant,  on  les  a  suivis  jusque  dans 
la  tunique  moyenne  (6),  mais  ils  ne 
paraissaient  pas  y  rayonner  comme 
l'a  supposé  Luca  (c).  M.  Burggraeve 
croit  en  avoir  distingué  des  filaments 
jusque  dans  cette  tunique  (e),  et 
quelquefois  ils  s'y  perdent  bien  évi- 
demment (d).  Ribes  a  suivi  des 
filets  du  grand  sympathique  jusque 
dans  l'artère    poplitée    et    dans   les 


brandies  de  l'artère  branchiale  (f). 
M.  Henle  a  trouvé  des  nerfs  dans  des 
artères  d'un  très  petit  calibre  [g)  ; 
cependant  beaucoup  de  ces  vaisseaux 
paraissent  en  être  complètement  dé- 
pourvus. Ainsi  M.  Kôlliker  en  a  con- 
staté l'absence  dans  les  parois  de  la 
plupart  des  artères  du  cerveau,  de 
la  moelle  épinière  et  du  placenta,  et 
même  de  beaucoup  d'artères  mus- 
culaires [h).  Les  extrémités  libres  que 
ce  dernier  histologiste  a  observées  dans 
les  nerfs  des  parois  vasculaires  chez 
les  Batraciens  (i)  n'ont  pas  encore 
été  découvertes  chez  les  Mammi- 
fères. 

(1)  Cet  état  transitoire  du  système 
artériel,  dans  lequel  il  existe  de  chaque 
côté  du  cou  une  série  d'arcs  vascu- 
laires ou  crosses  aortiques  primitives, 
se  voit  très  bien  dans  les  figures  de 


(a)  Wrisberg,  De  nervis  arterias  venasque  comitantibus  (Commentationes  Soc.  scient.  Gottin- 
gensis,  1784-,  t.  VII,  p.  95). 
— ■  Gœring,  De  nervis  vasa  adeuntibus,  p.  12. 
(6)  Pappenheim,  Die  specielle  Gewebelhere  des  Gehororganes,  p.  67.  Breslau,  1840. 

(c)  Luca,  Anatomische  Beobachtungen  ûber  die  Nerven  diezu  den  Arterien  gehen  und  sie  be- 
gleiten,  nebst  einem  Anhang  ûber  das  Zellgeivebe  (Reil's  Archiv  fur  die  Physiologie,  1810,  t.  IX, 
p.  551,  pi.  xi  b). 

(d)  Schlemm,  Gefâss-Nerven(Eiicyclopadisches  Worterbuch  der  medicinischen  Wissenschaften). 
(<?)  Burggraeve,  Histologie,  p.  285  (1843). 

(f)  Ribes,  Exposé  sommaire  de  quelques  recherches  anatomiques,  physiologiques  et  patholo- 
giques (Mém.  de  la  Soc.  méd.  d'émulation,  1816,  t.  VIII,  p.  607). 

(g)  Par  exemple,  dans  des  artères  de  la  pie-mère  ayant  seulement  O^OÛO  (Henle,  Traité  d'ana- 
tomie  générale,  t.  II,  p.  43). 

—  Voyez  aussi  Valentin,  Ueber  den  Verlauf  und  die  letzten  Enden  der  Nerven  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  curios.,  1836,  t.  XVIII,  p.  121). 

(h)  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  610. 

(i)  Kôlliker,  Mikroskopische  Anatomie,  t.  II,  p.  533. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  517 

tionner,  comme  chez  les  Poissons  ou  les  Batraciens,  ne  tarde 
pas  à  disparaître  ;  le  bulbe  aortique  se  confond  avec  le  ventri- 
cule du  cœur,  et,  de  même  que  chez  les  Oiseaux,  un  seul  des 
arcs  vasculaires  se  développe  pour  constituer  la  crosse  aortique  ; 
seulement,  ici,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  ce  n'est  pas  aux  dépens 
de  la  portion  droite  de  ce  système  d'arcs  artériels  que  ce 
tronc  unique  se  forme,  c'est  à  l'aide  d'une  des  branches  situées 
du  côté  gauche  ;  et  par  conséquent,  chez  l'Animal  parfait,  ce 
vaisseau,  au  lieu  de  se  recourber  à  droite,  comme  chez  l'Oiseau, 
se  recourbe  à  gauche.  Cette  différence  dans  la  direction  de  la 
courbure  de  l'aorte,  qui  au  premier  abord  peut  paraître  de  peu 
d'importance,  tient  donc  à  un  mode  d'origine  particulier  de 
cette  portion  du  système  artériel  dans  la  classe  des  Mammifères 
et  mérite  de  fixer  l'attention. 

Ainsi,  dans  chacune  des  cinq  formes  secondaires  de  l'Animal 
vertébré ,  la  portion  du  travail  organogénique ,  qui  a  pour 
résultat  la  constitution  définitive  du  tronc  aortique,  se  fait  d'une 
façon  différente.  Le  développement  des  arcs  vasculaires  se 
poursuit  d'une  manière  symétrique  chez  le  Poisson,  le  Batra- 
cien et  le  Reptile.  Chez  les  deux  premiers  ces  arcs,  primitive- 
ment simples  et  continus  jusqu'à  leur  point,  de  jonction  dans  la 
région  dorsale ,  donnent  naissance  à  un  système  capillaire 
intermédiaire  qui  les  sépare  en  deux  moitiés,  l'une  inférieure 
et  afférente  à  l'appareil  branchial,  l'autre  supérieure  et  efférente 
à  ce  même  appareil.  Chez  le  Poisson,  ce  réseau  intermédiaire, 
qui  devient  l'organe  essentiel  de  la  respiration,  se  perfectionne 
de  plus  en  plus,  tandis  que  chez  le  Batracien  il  tend  à  dispa- 
raître, et  n'est  jamais  traversé  par  la  totalité  du  sang  chez 

l'embryon  de  la  Brebis  données  par  et  s'anastomosent  entre  eux  par  leur 
M.  Coste.  On  y  distingue  trois  paires  extrémité  supérieure  pour  donner 
de  ces  arcs  qui  remontent  vers  le  dos      naissance  à  l'aorte  dorsale  (a). 

(a)  Voyez  Coste,  Histoire  générale  du  développement  des  êtres  orga?iisés,  Vertébrés  Brebis 
pi.  6  et  7.  ». 


518  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

l'Animal  adulte.  Dans  les  trois  classes  de  Vertébrés  Àllantoï- 
diens,  le  développement  des  arcs  aortiques  se  poursuit  sans  que 
ceux-ci  soient  jamais  interrompus  dans  leur  trajet  par  un 
réseau  capillaire;  mais  ce  développement  porte  sur  une  paire 
de  ces  arcs  chez  les  Reptiles,  et  sur  un  seul  des  mêmes  arcs 
chez  les  Oiseaux  et  les  Mammifères.  Enfin  cet  arc  unique  qui 
doit  fournir  toutes  les  artères  du  corps,  appartient,  chez  les 
Oiseaux,  à  la  moitié  droite  du  système  primitivement  symé- 
trique, et  chez  les  Mammifères  à  la  moitié  gauche.  Quelquefois 
cependant  la  nature  se  départit  accidentellement  de  ces  règles, 
et  il  est  à  noter  que  dans  les  anomalies  ainsi  produites  elle  laisse 
apercevoir  la  tendance  à  l'imitation  des  types  voisins  dont  j'ai 
eu  l'occasion  de  parler  au  commencement  de  ce  cours.  Ainsi 
on  connaît  des  exemples  de  vice  de  conformation  de  l'aorte  chez 
l'Homme,  qui  rappellent  jusqu'à  un  certain  point  la  forme  nor- 
male du  système  artériel  de  l'Oiseau  ou  du  Reptile  ;  mais,  ainsi 
que  nous  le  verrons  par  la  suite,  ces  déviations  ne  sont  pas 
le  résultat  d'un  simple  arrêt  de  développement,  et  sont  la  con- 
séquence d'un  développement  progressif  vicié  par  imitation  (1). 


(1)  Ainsi  Malacarne  a  observé  chez  façon  à  former  un  anneau  vascnlaire 

un  vieillard  un  cas  de  vice  de  confor-  autour  de   la   trachée   et   de    l'œso- 

mation  où  l'aorte,   aussitôt  après  sa  pliage  (6) ,  disposition  qui  s'expiique 

naissance,  se  divisait  en  deux  crosses  également  par  le  développement  des 

qui,  après  avoir  fourni  chacune  les  deux    arcs     aortiques    primordiaux, 

artères  sous-clavières  et  carotides  cor-  Enfin  on  cite  aussi  des  exemples  de 

respondantes  ,  se    réunissaient   pour  la  courbure  de  la  crosse  aortique  à 

constituer    l'aorte    descendante    (a),  droite,  chez   l'Homme,  à   peu   près 

Chez  un  sujet  disséqué  par  Hommel,  comme  cela  a  lieu  normalement  chez 

la   crosse  aortique   se  bifurquait  de  les  Oiseaux  (c). 

(a)  Malacarne ,  Osservazioni  di  chirurgia,  t.  II,  p.  119,  pi.  1,  fig.  1,  2,  1784.  —  La  figure 
représentant  cette  anomalie  a  été  reproduite  par  M.  Tiedemann  (  Tabulœ  arteriarum  covporis 
humani,  pi.  4,  fig.  7). 

—  Voyez  aussi  Zagorsky,  Arcus  aorlce  bipartitio  prœtermturalis  (Mém.  de  l'Acad.  de  Saint- 
Pétersbourg,  1824,  t.  IX,  p.  387). 

(b)  Hommel,  dans  le  Comrnercium  litterarium.  Norimbergiae,  1737,  p.  161,  pi.  2,  fig.  1   et  2. 

(c)  Forali,  Insolita  posizione  dell'  aorta  e  stravagante  origine  de'suoi pvijni  rami  (Saggi  scien- 
tifici  e  lillerari  dell'  Acad.  di  Padova,  1786,  t.  I,  p.  69. 

—  Meckel,  Mon.  d'anat.  descript.,  t.  II,  p.  312. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  519 

§  8.  —  La  crosse,  ainsi  constituée,  suit  à  peu  près  la  même 
direction  chez  l'Homme  et  chez  les  divers  Mammifères.  Chez  le 
premier,  dont  la  position  est  verticale,  ce  vaisseau  naît  du 
ventricule  gauche  (1),  derrière  l'artère  pulmonaire,  et  se  dirige 
d'abord  en  haut  et  à  droite,  puis  se  recourbe  à  gauche  en  pas- 
sant devant  et  au-dessus  de  la  bifurcation  de  cette  même  artère, 
remonte  vers  la  base  du  cou,  se  contourne  sur  le  côté  gauche 
de  la  trachée  et  de  l'œsophage,  enfin  gagne  la  face  antérieure 
de  la  colonne  vertébrale  en  se  dirigeant  en  arrière,  et  descend 
ensuite  en  ligne  droite  vers  l'abdomen.  On  donne  le  nom  de 
crosse  de  l'aorte  à  la  portion  comprise  entre  le  cœur  et  la 
colonne ,  et  les  anatomistes  appellent  aorte  descendante  la 
portion  qui  est  adossée  à  cette  tige  osseuse  (2). 


Crosse 
de  l'aorte. 


(1)  Dans  quelques  cas  pathologiques 
on  a  trouvé  l'orifice  de  l'aorte  en  com- 
munication avec  les  deux  ventricules 
du  cœur  ;  mais  cette  anomalie  était 
probablement  le  résultat  d'une  lésion 
organique  dont  l'explication  est  donnée 
par  les  observations  de  M.  Hauska. 
Cet  analomiste  a  remarqué  que ,  im- 
médiatement au-dessous  de  l'angle  de 
réunion  des  valvules  semi -lunaires 
droite  et  postérieure  de  l'aorte,  il  existe 
dans  la  cloison  interventriculaire  un 
espace  dépourvu  de  fibres  musculaires 
et  occupé  par  les  membranes  endo- 
cardiques  seulement.  Dans  les  cas 
d'endocardite,  la  tunique  interne  du 
cœur  devient  souvent  plus  ou  moins 
friable,  et  lorsqu'une  altération  de  ce 
genre  a  lieu  dans  la  portion  amincie 
de  la  cloison  dont  il  vient  d'être  ques- 
tion, la  rupture  de  celle-ci  peut  en 
résulter.  Une  communication  s'établit 
alors  entre  les  deux  ventricules,  et  à 


chaque  systole  un  courant  de  sang 
veineux  pénètre  dans  l'aorte  ;  peu  à 
peu  l'orifice  de  ce  vaisseau  se  trouve 
ainsi  dévié  et  s'incline  à  droite ,  de 
façon  qu'il  paraît  appartenir  aux  deux 
ventricules  et  être  à  cheval  sur  la 
cloison.  C'est  de  la  sorte  que  M.  Hauska 
rend  compte  de  la  disposition  anor- 
male dans  l'origine  de  l'aorte  dont  il 
vient  d'être  question,  état  qui  a  été 
comparé  par  quelques  anatomistes  à 
ce  qui  existe  d'une  manière  normale 
chez  divers  Reptiles  (a). 

(2)  On  distingue  encore  dans  celle- 
ci  la  portion  thoracique  sous  le  nom 
d'aorte  descendante  supérieure ,  et  la 
portion  abdominale  sous  celui  d'aorte 
descendante  inférieure;  mais  toutes  ces 
dénominations  s'appliquent ,  comme 
on  le  voit,  à  un  seul  et  même  vais- 
seau, dans  les  divers  points  de  son 
parcours. 


(a)  Hauska,  Ueber  den  Durchbruch  des  sept  uni  ventricul.  cord.  (Wiener  medizinische  Wochen- 
sehrift,  1855,  n°  9). 


520 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Premières 
branches 
de  l'aorte. 


Il  est  à  noter  que  chez  l'Homme  la  grande  courbure  de  cette 
crosse  présente  une  dilatation  assez  prononcée,  et  que  cette 
disposition,  dépendante  sans  doute  de  la  pression  exercée  par  le 
sang  qui  sort  du  cœur,  augmente  avec  l'âge.  Chez  les  Mammi- 
fères plongeurs,  la  dilatation  de  cette  portion  de  l'aorte  est  sou- 
vent encore  plus  marquée  (1). 

§  9.  —  Immédiatement  au  delà  des  valvules  qui  en  garnis- 
sent l'entrée,  la  crosse  aortique  donne  naissance  aux  branches 
destinées  à  porter  le  sang  dans  la  substance  du  cœur,  et  appelées 
artères  coronaires  (2).  Elle  fournit  ensuite  plus  ou  moins  direc- 


(1)  Cette  dilatation  de  la  crosse  de 
l'aorte  a  été  remarquée  chez  les  Pho- 
ques (a),  le  Dauphin  et  le  Narwal  (6), 
ainsi  que  chez  la  Loutre  et  le  Cas- 
tor (c). 

(2)  Chez  l'Homme  et  la  plupart  des 
Mammifères,  l'aorte  donne  naissance 
à  deux  artères  cardiaques  ou  coro- 
naifes  du  cœur.  Elles  se  détachent  de 
la  face  sternale  de  ce  vaisseau  et  se 
dirigent  immédiatement  en  bas.  L'une, 
appelée  artère  cardiaque  antérieure 
ou  gauche,  suit  le  sillon  qui,  à  la  face 
antérieure  du  cœur,  correspond  à  la 
ligne  de  séparation  entre  les  deux 
ventricules;  elle  fournit  une  grosse 
branche  auriculo-ventriculaire  qui  se 
loge  dans  le  sillon  situé  entre  la  base 
du  ventricule  gauche  et  l'oreillette 
correspondante;  enfin  ses  ramifica- 
tions se  distribuent  dans  les  parties 
voisines  et  s'anastomosent  aussi  avec 
divers  rameaux  de  l'autre  division 
principale  (ou  artère  cardiaque  posté- 


rieure). Celle-ci  passe  entre  la  base  du 
ventricule  droit  et  l'oreillette  corres- 
pondante, et  contourne  ainsi  le  cœur 
pour  gagner  le  sillon  interventricu- 
laire  postérieur  ;  elle  donne  naissance 
à  une  branche  transversale  qui  va  s'a- 
nastomoser avec  la  portion  terminale 
de  l'artère  auriculo-ventriculaire  four- 
nie par  l'artère  cardiaque  antérieure  ; 
enfin  elle  s'anastomose  elle-même  avec 
la  portion  terminale  de  ce  dernier  vais- 
seau. Il  en  résulte  que  ces  artères 
forment  autour  du  cœur  deux  cercles, 
dont  l'un  embrasse  cet  organe  sui- 
vant la  ligne  de  partage  des  oreillettes 
et  des  ventricules  ;  l'autre  contourne 
sa  portion  ventriculaire  en  sens  opposé 
et  suit  le  sillon  qui  correspond  à  la 
cloison  interventriculaire  (d).  De  ces 
deux  cercles  vasculaires  partent  les 
branches  de  distribution  tant  pour 
les  oreillettes  que  pour  les  ventri- 
cules, et  une  de  celles-ci  a  reçu  le  nom 
cV artère  de  la  cloison,  parce  qu'elle 


(a)  Severinus,  De  Phoca  (Blasius,  Anatome  Animalium,  1681,  p.  285). 

—  Seger,  De  anatome  Phocoz  fœmellœ  junioris  (Ephem.  Nat.  cur.,  déc.  1,  ann  ix,  p.  252). 

—  Blumenbacli,  Handbuch  der  vergl.  Anatomie,  p.  224. 

—  Rapp,  Die  Cetaceen  zoologisch-anatomisch.  Dargestellt,  1805,  p.  158. 

(b)  Albers,  Undersôgelse  over  Eenhïorningens  hierte,  p.   5  (extrait  des  Actes  de  l'Acad.  de 
Copenhague,  3"  série,  t.  V). 

(c)  Meckel,  Traité  d' anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  434. 

(d)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Anat.  descript.,  t.  IV,  pi.  12,  fig.  2. 


CHEZ   LES    MAMMIFÈRES.  521 

tement  les  artères  qui  servent  à  porter  le  sang  à  la  tête  et  aux 
membres  antérieurs,  ainsi  qu'à  la  partie  antérieure  du  thorax, 
c'est-à-dire  les  artères  carotides  et  vertébrales,  les  sous-cla- 
vières  et  les  mammaires  ;  mais  il  existe  de  grandes  variations 
dans  le  mode  d'origine  de  ces  divers  vaisseaux,  ou  plutôt 
dans  leur  mode  de  groupement  dans  le  voisinage  du  cœur, 
et  l'étude  de  ces  différences  a  de  l'intérêt,  non  à  raison  de 
quelque  relation  qu'elles  auraient  avec  des  particularités  phy- 
siologiques, mais  parce  qu'elles  jettent  beaucoup  de  lumière 
sur  la  théorie  anatomique  des  modifications  du  système  vascu- 
laire,  et  parce  qu'elles  correspondent  souvent  à  certaines  ano- 
malies dont  l'organisation  de  l'Homme  nous  offre  parfois  des 
exemples. 
En  effet,  presque  toutes  ces  modifications  se  laissent  ramener  Mode  d'origine 

i  ,  •  •   1 5  i         <  ,n  des  artères    . 

a  un  type  unique,  si  1  on  admet  que  par  un  mouvement  de  cen-  carotides 
tralisation  analogue  à  celui  qui  détermine  la  disparition  du  bulbe  S0Us-ci9vières. 
aortique  chez  l'embryon,  la  portion  basilaire  du  système  des 
artères  brachio-céphaliques  rentre  à  divers  degrés  et  se  confond 
dans  le  tronc  aortique  dont  il  est  une  dépendance,  et  que  des 
phénomènes  du  même  genre  puissent  transporter  jusque  dans 
cette  portion  basilaire  l'embouchure  de  diverses  branches  qui, 
dans  le  tracé  primitif,  s'en  trouvaient  plus  ou  moins  éloignées. 
Ainsi,  prenons  pour  premier  exemple  le  Mouton.  Chez  cet 
Animal ,  la  crosse  de  l'aorte  donne  naissance  à  un  seul  tronc 


se  loge  dans  l'épaisseur  de  la  cloison  rencontrée  chez  l'Homme  (6).  D'autres 
interventriculaire  et  y  distribue  ses  fois ,  au  contraire  ,  trois  ou  même 
rameaux.  quatre  branches  cardiaques  partent 
Chez  quelques  Mammifères,  toutes  isolément  de  l'aorte,  mais  ces  variâ- 
tes artères  cardiaques  naissent  de  tions  ne  changent  en  rien  le  mode 
l'aorte  par  un  tronc  commun.  Camper  de  distribution  de  ces  vaisseaux  à  la 
a  signalé  cette  disposition  chez  l'Élé-  surface  du  cœur, 
pliant  (a),  et  accidentellement  on  l'a 

[a)  Camper,  Œuvres,  t.  n,  p.  133. 

(b)  Meckel,  Manuel  d'anatomic  descriptive,  t.  II,  p.  314. 


522  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

médian  dont  toutes  les  artères  de  la  tète  et  des  membres  anté- 
rieurs du  corps  sont  des  dépendances.  C'est  une  sorte  d'aorte 
cervicale  qui  se  dirige  en  avant,  et  qui  fournit  successivement, 
à  des  hauteurs  différentes,  d'abord  la  sous-clavière  gauche, 
puis  la  sous-clavière  droite,  et  enfin  les  deux  carotides  qui  en 
sont  les  branches  terminales.  Les  artères  vertébrales  et  mam- 
maires ne  naissent  pas  directement  de  ce  tronc  aortique  anté- 
rieur, mais  se  détachent  des  sous-clavières  près  de  la  base  de 
ces  vaisseaux. 

Chez  le  Cheval,  la  disposition  de  ce  système  est  la  même,  si 
ce  n'est  que  la  portion  basilaire  de  l'aorte  cervicale,  située  en 
amont  de  l'origine  de  la  sous-clavière  gauche,  est  plus  courte. 

Chez  le  Dromadaire,  elle  se  raccourcit  encore  davantage. 

Enfin ,  chez  la  Girafe ,  elle  semble  avoir  été  absorbée  en 
entier  par  la  crosse  de  l'aorte,  de  façon  que  la  sous-clavière 
gauche  naît  alors  directement  de  cette  crosse,  et  que  l'aorte 
cervicale  ne  fournit  que  la  sous-clavière  droite  et  les  deux 
carotides. 

Le  même  mode  de  conformation  se  rencontre  chez  le  Chien, 
le  Chat  et  un  grand  nombre  d'autres  Mammifères;  mais  quel- 
quefois, chez  le  Cochon  d'Inde,  par  exemple,  elle  se  modifie  un 
peu  par  suite  d'un  changement  analogue  à  celui  dont  il  vient 
d'être  question,  qui  s'opère  dans  la  portion  terminale  du  tronc 
commun.  Le  tronçon  de  ce  vaisseau  compris  entre  le  point 
d'origine  de  la  sous-clavière  droite  et  la  séparation  des  deux 
carotides  disparaît,  de  façon  que  ces  trois  branches  naissent 
ensemble,  ou  bien  la  coalescence  faisant  plus  de  progrès  entre 
les  vaisseaux  voisins,  le  tronc  commun  se  continue  après  avoir 
fourni  la  carotide  gauche,  et  la  séparation  entre  la  carotide 
droite  et  la  sous-clavière  du  même  côté  ne  s'effectue  qu'un  peu 
plus  loin. 

Un  degré  de  plus  dans  cette  espèce  de  centralisation  des 
gros  vaisseaux  artériels  de  la  base  du  cou  transformera  le  tracé 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  52a 

que  nous  venons  de  rencontrer  chez  le  Cochon  d'Inde  en  celui 
qui  se  voit  chez  l'Homme  et  plusieurs  autres  Mammifères.  En 
effet,  si  le  mouvement  de  retrait  que  nous  avons  supposé 
à  la  base  de  l'aorte  cervicale,  après  avoir  fait  rentrer,  comme 
chez  ce  Rongeur  et  chez  le  Chien,  un  premier  tronçon  de  celle- 
ci  dans  la  crosse  aortique,  et  avoir  de  la  sorte  ramené  le  point 
d'origine  de  la  sous-clavière  gauche  jusque  sur  les  parois  de 
cette  crosse,  se  continue  au  delà  du  point  de  séparation  delà 
portion  restante  de  l'aorte  cervicale  et  de  la  carotide  gauche,  il 
arrivera  aussi  que  ce  dernier  vaisseau  deviendra  une  branche 
de  la  crosse,  et  que  le  tronc  commun  de  tout  le  système  cé- 
phalo-brachial ne  se  trouvera  plus  représenté  que  par  la  portion 
terminale,  qui,  chez  le  Cochon  d'Inde,  se  bifurque  pour  con- 
stituer la  carotide  et  la  sous-clavière  droites.  Or,  c'est  là  préci- 
sément le  mode  d'organisation  qui  se  voit  chez  l'Homme,  où  la 
crosse  aortique  fournit  à  la  base  du  cou  trois  grosses  artères, 
savoir  :  1°  un  tronc  brachio-céphalique  dont  la  bifurcation 
produit  la  sous-clavière  et  la  carotide  droite  ;  2°  la  carotide 
gauche,  et  3°  la  sous-clavière  du  même  côté. 

Chez  d'autres  Mammifères  on  rencontre  des  particularités 
qui  ne  s'expliquent  pas  de  la  même  manière,  et  qui  semblent 
dues  à  la  persistance  de  la  division  binaire  et  symétrique  de  toute 
cette  portion  du  système  aortique  chez  l'embryon. 

Ainsi,  chez  la  Taupe,  la  crosse  aortique  donne  naissance  à 
une  paire  de  troncs  analogues  à  l'aorte  cervicale  commune  dont 
il  vient  d'être  question,  et  chacun  de  ces  troncs  mérite  de  porter 
le  nom  d'artère  brachio-céphalique,  car  il  se  bifurque  pour 
constituer  la  carotide  et  la  sous-clavière  de  son  côté. 

Un  mouvement  de  centralisation  qui  s'opérerait  à  la  fois 
d'avant  en  arrière  et  de  dehors  en  dedans  transformerait  les 
vaisseaux ,  ainsi  disposés ,  en  un  système  semblable  en  tout  à 
celui  que  Cuvier  a  trouvé  chez  l'Éléphant  (1). 

(1)  Ainsi,  en  résumé,  le  système      des  artères  fournies  à  la  tête  et  aux 


52/jj.  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Je  ne  connais  aucun  exemple  d'une  centralisation  normale  plus 
grande  de  ces  gros  vaisseaux,  mouvement  qui  amènerait  chacun 
d'eux  directement  à  la  crosse  aortique,  et  ferait  que  celle-ci  donne- 
rait naissance  à  deux  carotides  et  deux  sous-clavières  distinctes 

membres  antérieurs  par  la  crosse  aor-  Chauves-Souris  (g)  et  le  Marsouin  (h). 

tique  naît  de  la  manière  suivante  :  D'autres  fois  une  artère  sous-cla- 

1°  Par  un  seul  tronc  ou  aorte  anté-  vière  gauche  et  une  aorte  antérieure 

rieure,  chez  les  Solipèdes,  la  plupart  qui  fournit  les  deux  carotides  et  la 

des  Pachydermes   ordinaires   et  des  sous-clavière  droite,  et  dont  la  pre- 

Ruminants,  ainsi  que  chez  quelques  mière  branche  est  tantôt  la  carotide 

Rongeurs.  Exemple  :  le  Cheval  (a),  gauche,   comme  cela   se   voit  chez 

le  Chameau  (6),  le  Mouton,  le  Che-  certains  Singes,  tels  que  le  Magot  (■<); 

vreuil  (c)  et  le  Porc-Épic  (ci).  Meckel  chez  le  Putois  (j),la  Martre  (ft),leBlai- 

a  rencontré  aussi  ce  mode  d'organi-  reau,  le  Tigre  (l),  parmi  les  Carnassiers; 

sation  chez  un  Carnassier,  le  Viverra  l'Écureuil  (m),  le  Souslik  (ri),  la  Mar- 

genetta  (e).  motte, leCochond'Inde(o),leLapin(p), 

2°  Par  deux  troncs,  savoir  :  parmi  les  Rongeurs;  et  chez  le  Cochon 

Tantôt  une  paire  d'artères  brachio-  domestique  (g),  parmi  les  Pachydermes; 

céphaliques  donnant   naissance  cha-  le  Pangolin  (r),  etc.  ;  tantôt  une  carotide 

cune  à  l'une  des  sous-clavières  et  à  primitive,  dont  la  bifurcation  donne 

la  carotide  du  même  côté  ;  disposition  naissance  aux  deux  carotides.  Exem- 

qui  se  voit  chez  la  Taupe  (/),  les  pie  :  le  Chien  (s),  le  Chat,  le  Lion, 

(a)  Voyez  Leyh,  Handbuchder  Anatomie  der  Hausthiere,  p.  363,  fig.  160. 

—  Chauvenu,  Anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques,  fig.  147. 

(6)  Daubenton,  Description  du  Dromadaire  (Buiïbn,  Mammifères,  t.  X,  p.  205). 

—  Cuvier,  Leçons  d' anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  112. 

(c)  Carus,  Traité  élémentaire  d'anatomie  comparée,  t.  II,  p.  253. 

(d)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  112. 

(e)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  396. 

(/)  Otto,  De  Animalium  quorumdam  per  hiemem  dormientium  vasis  cephalicis  et  aure  interna 
(Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  1 826,  t.  XIII).  —  Mém.  sur  les  vaisseaux  céphaliques  des  Animaux 
qui  s'engourdissent  pendant  l'hiver  (Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  79). 

(g)  Otto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XI,  p.  73). 

(h)  Rapp,  Die  Cetaceen,  p.  159. 

—  Stannius,  Ueber  den  Verlaufder  Arterien  hei  Delphinus  phocjena  (Mùller's  Archiv  fur  Anal, 
und  Physiol.,  1841,  p.  382). 

(i)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  HO. 

(j)  Barkow,  Disquisit.  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mammalium,  p.  14. 
(k)  Barkow,  Disquisit.  recentiores  de  arte7*iis  Mammalium  et  Avhim  (Nova  Acta  Acad.  Nat. 
curios.,  1844,  t.  XX,  p.  640). 
(I)  Cuvier,  loc.  cit. 
(m)  Otlo,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  92). 

—  Carus  et  V.  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  7,  fig.  1. 

,     (n)  Barkow,  Disquisit.  récent.  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  618) 
(o)  Cuvier,  loc.  cit. 
(p)  Cuvier,  loc.  cit.,  p.  110. 

—  Barkow,  Disquisit.  circa  origin.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  39  et  43. 
(q)  Barkow,  Disquisit.  recentiores  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  609). 
(?•)  Hyrtl,  Beitr.zur  vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  pi.  1,  fig-.  1). 
(s)  Barkow,  Disquisit.  circa  origin.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  1. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  525 

dès  leur  origine  (1)  ;  mais  on  comprend  qu'un  phénomène  de  ce 
genre  pourrait  facilement  se  manifester,  et,  en  effet,  la  dispo- 
sition qui  en  résulterait  s'est  rencontrée  dans  quelques  cas  de 
vice  de  conformation  du  système  vasculaire  chez  l'Homme  (2). 
Je  pourrais  citer  d'autres  particularités  de  structure  dans 
le  mode  d'origine  des  artères  de  la  tête  et  des  membres  tho- 
raciques  chez  quelques  Mammifères,  et  montrer  que,  dans 
certains  cas  tératologiques,  la  Nature  semble  avoir  voulu  les 
reproduire  chez  l'Homme;  mais  ces  faits  de  détail  n'offrent  pas 

l'Ours,  la  Loutre  (a), la  Musaraigne  (6),  du  mouvement  centripète  d'un  de  ces 

la  Girafe  (c)  et  le  Kanguroo  (d);  deux  troncs  brachio-céphaliques,  aussi 

3°  Par  trois  troncs,  lesquels  sont  :  bien  que  des  transformations  décrites 

Tantôt  une  artère  brachio-cépha-  ci-dessus  pour  montrer    les  liaisons 

lique  droite,  une  carolide  gauche  et  entre  le  type  asymétrique  du  tronc 

une  sous-clavière  gauche,  comme  chez  aortique  cervical,  et  le  type  qui  offre 

l'Homme  (e) ,   le  Chimpanzé  {f) ,  le  un  tronc  commun  pour  le  côté  droit 

Hérisson  (g),  le  Phoque  (h),  le  Sur-  du  corps  et  deux  troncs  séparés  pour 

mulot  (i),  le  Loir,  le  Castor,  le  Rat,  le  côté  gauche. 

la  Gerbille  (j),  l'tlélamys  (k) ,  le  Pa-  (1)11  me  paraît  probable  cependant 

resseux  (l),  le  Phascolome  (m),  l'Or-  que    cette    disposition    se   rencontre 

nithorlrynque  (n).  chez  le  Morse  ,  car  Daubenton  a  re- 

D'autres  fois  une  paire  d'artères  sous-  marqué  que  chez  cet  Animal  la  crosse 

clavières  entre  lesquelles   se   trouve  aortique    fournit   quatre    branches  , 

une  carotide   commune.    Exemple  :  mais  il  ne  s'explique  pas  sur  la  nature 

l'Éléphant  (o).  de  ces  vaisseaux  (p). 

On  comprend  que  le  mode  d'orga-  (2)  Cette  disposition  anormale  a  été 

nisation  propre  à  ce  système  de  vais-  observée  dans  quelques  cas  tératolo- 

seaux  chez  l'Homme  pourrait  dériver  giques  décrits  par  Heister,  Winslow, 

(a)  Cuvier,  loc.  cit. 

(6)  Otto,  loc.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  X,  p.  77). 

(c)  On  the  Nubian  Girafe  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  t.  II,  p.  229). 

(d)  Owen,  art.  Marsupialia  (Todd's  Cyclop.  ofAnat.  and  Physiol.,  t.  III,  p.  306,  fig.  131). 

(e)  Voyez  Bourgery  et  Jacob  (Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  15),  ou  toute  aulre  iconographie  anatomique  rhi 
corps  humain. 

(f)  Vrolik,  Recherches  d'anatomie  comparée  sur  le  Chimpanzé,  pi.  6,  fig.  4. 

(g)  Barkow,  Disquisit.  circa  origin.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  24,  pi.  1,  fig.  1. 
—  Otto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XI,  p.  75). 

(h)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  111. 

(i)  Barkow,  Disquisit.  circa  origin.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  31. 

(j)  Otto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  XI,  p.  83  et  suiv.). 

(k)  Bianconi,  Specimina  zoologica  Mosambicana,  Mammalia,  pi.  5,  fig.  16. 

(I)  Owen,  art.  Marsupialia  (Todd's  Cyclop.  ofAnat.  and  Physiol.,  t.  III,  p.  307,  fig.  132). 

(m)  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  112. 

(?i)  Meckel,  Ornithorhynchi  paradoxi  descriptio  anatomica,  pi.  7,  fig.  1. 

(o)  Cuvier,  Op.  cit.,  p.  111. 

(p)  Daubenton,  Description  du  Morse  (Buffon,  Mammifères,  t.  XII,  p.  363). 


526  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

assez  d'importance  pour  nous  arrêter  plus  longuement  ici , 
et  les  exemples  que  j'ai  déjà  passés  en  revue  me  semblent 

Bœmer,  Walter,  Zagorsky,  Neubauer  Pour  plus  de  détails  sur  ces  diverses 

et  plusieurs  autres  anatomistes  (a).  On  anomalies  angiologiques,  je   renver- 

cite  également  des  exemplesde  l'origine  rai  aux  écrits  des  anatomistes  que  je 

des  artères  vertébrales  sur  la  crosse  viens  de  citer  ,   et  de  quelques  au- 

aortique  (b).  Parfois  aussi  les  artères  très  (c),  dont  Meckel  a  rendu  compte 

thyroïdiennes  inférieures  en  naissent.  dans  ses  différents  ouvrages  (d).  J'a- 

(a)  Heister,  Compendiurn  anatomicum,  t.  II,  p.  123  (4°  édit.). 

—  Winslow,  Exposition  anatomique  du  corps  humain,  1732,  p.  363. 

—  Huber,  Observ.  aliquot  de  arcus  aortœ  ramis,  etc.  (Acta  Helvetica,  1777,  t.  VIII,  p.  68, 
pi.  3,  fig.  3). 

—  Bellay,  Diversités  anatomiques  (Journal  de  médecine  de  Vandermonde ,  1758,  t.  VIII, 
p.  443). 

—  Neubauer,  Descriptio  anatomica  arteriœ  innominatœ  et  thyreoideœ  imœ  (Opéra  anatomica, 
p.  209). 

—  Zagorsky,  Observationum  anatomicarum  quadriges,  de  singulari  arteriarum  aberratioue 
(Mém.  de  VAcad.  de  Saint-Pétersbourg,  1803-1806,  t.  I,  p.  385). 

— :  Meckel,  Handbuch  der  pathologischen  Anatomie,  t.  II,  1"  partie,  p.  107. 

—  Tiederaann,  Tab.  arteriarum  corporis  humani,  pi.  3,  fig.  3. 

—  Alessandrini,  Descriptio  anatomica  humani  fœtus  bicorporei-monocephali  (Novi  Comment. 
Acad.  Bononiensis,  1836,  t.  II,  p.  179). 

—  Frandsen,  Arteriœ  subclaviœ  dextrœ  originis  abnormis  ac  decursus  casus  (Dissert,  inaug.) 
KieJ,  1854). 

(6)  Penada,  Saggio  terzo  di  osserv.  e  mem.  pathologico-anatomische.  Padova,  1801,  p.  44. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  4,  fig.  4  et  5. 

(c)  Bœmer,  Observationes  anatomicas  binas  dequatuor  etquinque  ramis  ex  arcu  arteriœ.  magnœ 
ascendenlibus  (Haller,  Disputationum  anatomicarum  selectarum,  1747,  t.  II,  p.  449,  pi.  3). 

—  Hunauld,  Obsei'vations  anatomiques  (Histoire  de  l'Académie  des  sciences,  1735,  p.  20). 

—  Petsche,  Dissert,  inaug.  qua  sylloge  anatomicarum  selectarum  observationum  continetur. 
Halte,  1736. 

—  Loder,  Progr.  de  vonnullis  arteriarum  varietatibus.  Ienœ,  1781. 

—  Murray,  Anatomische  Bemerkungen  bey  einer  sonderbaren  Stellung  einiger  grôssern  Puls- 
adernstâmme  unweit  des  Herzens  (Der  schwedischen  Akad.  der  Wissenschaften  Abhandl.,  1768, 
t.  XXX,  p.  92,  pi.  3). 

—  Sandifort,  Muséum  anatomicum  Academiœ  Lugduno-Batavœ  descriptum,  1793,  t.  1,  p.  242 
et  273,  pi.  106,  fig.  2,  et  pi.  107,  fig.  1,  2. 

—  Zagorsky,  De  arcus  aortœ  abnormitate,  etc.  (Mém.  de  VAcad.  de  Saint-Pétersbourg ,  1807- 
1808,  t.  II,  p.  318,  pi.  13). 

—  Koberwcin,  De  vasorum  decursu  abnormi,  etc.  Wiltenb.,  1810. 

—  Ryan,  Dissert,  de  quarumdam  arteriarum  in  corporc  humani  distributione.  Edinb.,  1812. 

—  G.  Fleischmann,  Leichenoffnungen,  1815,  p.  236. 

—  Bayer,  De  ramis  ex  arcu  aortœ  prodeunlibits.  Salzb.,  1817  (prsesid.  Tiedemann). 

—  Bernhard,  Dissert,  de  arler.  e  corde  prodeunlium  aberralionibvs.  Berlin,  1818. 

—  Schoen,  De  nonnull.  arteriarum  ortu  et  decursu  abnorm.  Halle,  1823. 

—  Isaaks,  Anomalies  ofArteries  (American  Journ.  ofMed.  Scienc,  1855,  new  Séries,  -vol.  XXX, 
P   400). 

—  Cavasse,  Anomalies  artérielles  (Bulletin  de  la  Société  anatomique  de  Paris,  1836,  2e  série, 
t.  I,  p.  72). 

(</)  Meckel,  Ueber  die  Bildungsfehler  des  Herzens  (Beil's  Archiv  fur  die  Physiologie,  1805, 
t.  VI,  p.  549).  —  Handbuch  der  pathologischen  Anatomie,  t.  II,  1"  partie,  p.  98  et  suW.  —  Ma- 
nuel d! anatomie  générale  et  descriptive,  t.  H,  p.  318. 

—  Voyez  aussi  Tiedemann,  Explicationes  tabularum  arteriarum  corporis  humani,  p.  12  et 
suiv.). 

—  Isidore  Geoffroy  Saint-Hilaire,  Histoire  générale  et  particulière  des  anomalies  de  l'organisa- 
tion, t.  I,  p.  358. 


chez  Les  mammifères.  527 

devoir  suffire  pour  nous  donner  la  clef  de  toutes  ces  modifica- 
tions (1). 

§  10.  —  Chez  l'Homme,  ainsi  que  chez  les  autres  Mammifères 
dont  le  cou  n'est  pas  remarquablement  court,  les  deux  artères 
carotides  s'avancent  directement  vers  la  tête  en  longeant  laté- 
ralement la  trachée  et  l'œsophage,  et  ne  donnent  en  général 
aucune  branche  jusqu'à  ce  qu'elles  soient  parvenues  dans  la 
région  pharyngienne  (2),  où  elles  se  bifurquent  pour  constituer 


Artères 
carotides. 


jouterai  que  M.  Tiedemann  a  donné 
une  série  de  figures,  les  unes  origi- 
nales, les  autres  tirées  des  ouvrages 
de  ses  prédécesseurs,  et  représentant 
les  principales  variations  dans  l'ori- 
gine des  artères  en  question  (a) , 
figures  qui,  pour  la  plupart,  ont  été 
reproduites  par  Bourgery  (b). 

(I)  Les  autres  modifications  qui  se 
rencontrent  dans  cette  portion  du 
système  artériel  n'affectent  pas  le  mode 
d'origine  des  branches  fournies  direc- 
tement par  la  crosse  aortique,  mais 
dépendent  de  certaines  variations  dans 
la  disposition  des  grosses  branches 
qui,  d'ordinaire,  sont  fournies  par  les 
artères  sous-clavières  et  qui  parfois 
s'avancent  davantage  vers  le  cœur. 

Ainsi  chez  le  Khinocéros,  où  tout  le 
système  brachio-céphalique  naît  d'un 
tronc  impair  commun,  celui  ci  fournit 
d'abord  une  paire  d'artères  thoraci- 
ques,  puis  les  deux  sous-clavières  et 
plus  loin  les  deux  carotides  (c).  Cuvier 
a  observé  une  disposition  analogue 
chez  le  Porc-Épic  [d)  ;  mais  clans  l'in- 
dividu décrit  par  Otto,  la  crosse  aor- 


tique donnait  naissance  à  un  tronc 
brachio-céphalique  et  à  une  carotide 
gauche  (e). 

Chez  le  Dauphin,  cette  tendance  à 
la  centralisation  des  troncs  latéraux 
porte  sur  les  artères  vertébrales,  qui, 
au  lieu  de  naître  des  sous-clavières 
comme  d'ordinaire,  résultent,  conjoin- 
tement avec  les  carotides  et  les  sous- 
clavières,  de  la  trifurcation  de  deux 
troncs  brachio-céphaliques  pairs  (/"). 
(2)  Chez  quelques  Mammifères  où 
la  région  cervicale  est  très  développée, 
les  carotides  primitives  donnent  nais- 
sance à  un  nombre  considérable  de 
petites  branches  latérales  qui  vont  se 
distribuer  aux  muscles  \oisins  et  à  la 
trachée.  M.  Vrolik  a  observé  environ 
soixante  et  dix  de  ces  branches  chez  le 
Dromadaire,  et  il  a  constaté  une  dis- 
position analogue  chez  l'Élan  (g). 

Les  artères  thyroïdiennes  inférieu- 
res, qui,  chez  l'Homme  et  quelques 
Mammifères,  proviennent  des  sous- 
clavières  et  passent  obliquement  der- 
rière les  carotides  pour  gagner  la 
partie  antérieure  du  cou  et  se  distri- 


(a)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig.  3-9;  pi.  3  et  i. 

(b)  Bourgery,  Analomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  33,  fig.  6,  9,  etc. 

(c)  Owen,  On  the  Anat.  of  the  Indian  Rhinocéros  (Trans.  of  the  Zool.  Soc,  t.  IV,  p.  47). 

(d)  Cuvier,  Leçons  d' analomie  comparée,  t.  VI,  p.  i\i. 

(e)  Otto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t.  X,  p.  95). 

(f)  Cuvier,  Op.  cit.,  p.  111. 

(g)  Vrolik,  Het  Leven  en  het  maaksel  der  Dieren,  1854,  t.  II,  p.  62. 


III. 


34 


528  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

la  carotide  externe  et  la  carotide  interne.  Mais,  chez  quelques 
Cétacés,  où  le  cou  est  extrêmement  court,  ce  tronc,  intermé- 
diaire entre  l'aorte  et  les  artères  particulières  de  la  face  et  du 
crâne,  ne  se  développe  pas,  et  les  carotides  internes  et  externes 
naissent  directement  des  troncs  brachio-céphaliques  (1). 

Souvent  la  carotide  cervicale  (ou  carotide  primitive)  de 
chaque  côté ,  au  lieu  de  se  bifurquer  supérieurement,  se  divise 
en  trois  branches ,  dont  la  première  se  dirige  en  avant  et  en 


buer  principalement  dans  le  corps 
thyroïde,  sont  souvent  fournies  direc- 
tement par  les  carotides.  Cette  dispo- 
sition se  rencontre  chez  le  Hérisson, 
le  Putois  (a),  le  Lièvre ,  le  Cochon 
d'Inde  (6),  les  Quadrumanes,  etc. 

Dans  la  Loutre ,  cette  paire  d'ar- 
tères est  représentée  de  chaque  côté 
par  deux  petits  rameaux  qui  naissent 
de  la  carotide  (c). 

D'après  Meckel,  chez  le  Fourmilier 
tridactyle,  ces  artères,  ainsi  que  la  thy- 
roïdienne supérieure,  seraient  rempla- 
cées par  un  tronc  unique  qui  provien- 
drait de  l'artère  brachio-céphalique  ou 
aortique  antérieure  [d)  ;  mais  M.  Ilyrtl 
les  a  vues  naître  de  la  sous-clavière, 
tandis  que  les  thyroïdiennes  supé- 
rieures étaient  fournies  par  les  caro- 
tides (e). 

Il  est  aussi  à  noter  que  dans  cer- 
tains cas  d'anomalies  angiologiques 
on  a  rencontré  une  disposition  assez 
analogue  chez  l'Homme,  car  on  a 
vu  une  artère  thyroïdienne  inférieure 
naître  directement  de  la  crosse  aortique 


ou  du  tronc  brachio-céphalique  (/"). 

Chez  l'Aï,  les  carotides  primitives 
s'élèvent ,  comme  d'ordinaire  ,  des 
deux  côtés  du  cou  ;  mais,  au  niveau 
de  chaque  espace  intervertébral,  elles 
s'anastomosent  avec  les  artères  verté- 
brales à  l'aide  de  petites  branches 
transversales  (g). 

(1)  Chez  le  Marsouin,  le  tronc  bra- 
chio-céphalique (  arteria  anonyma  ) 
du  côté  droit  donne  naissance  à  une 
artère  thoracique  postérieure,  à  une 
artère  carotide  cérébrale  ou  interne, 
et  à  une  artère  carotide  faciale  ou  ex- 
terne, puis  se  continue  sous  le  nom 
d'artère  sous-clavière  pour  fournir  la 
mammaire  interne,  etc.  Le  tronc  bra- 
chio  -  céphalique  gauche  fournit  la 
carotide  interne,  la  carotide  externe 
gauche  ,  et  une  artère  cervico-occipi 
taie,  puis,  comme  sous-clavière,  donne 
naissance  à  la  mammaire  interne 
gauche.  Une  troisième  branche  qui 
se  détache  aussi  de  la  crosse  aortique 
constitue  l'artère  thoracique  posté- 
rieure du  côté  gauche  (h). 


(a)  Barkow,  Disquisit.  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mammalium,  p.  15,  24 . 

(b)  Otto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  t,  XI,  p.  96  et  97). 

(c)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  403. 

(d)  Meckel,  loc.  cit. 

(e)  Hyrtl,  Beitrâge  zur  vergleichenden  Angiologie  [Mém.  de  l'Académie  de  Vienne,  t.  VI,  p.  33, 
pi.  4,  fig.  I). 

({)  Voyez  Tiedemann,  Eœplicaliones  tabularum  arteriarum  corporis  humani,  p.  59. 
(g)  Hyrtl,  Vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1. 1,  p.  21,  pi.  2,  fig.  1). 
(h)  Siannius,  Ueber  den  Verlauf  der  Arterien  bei  Delphinus  phncœna  (Mùller's  Archiv  fur  Anat, 
«.ndPhysiol.,  1841,  p.  383). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  529 

bas,  et  porte  le  nom  d'artère  thyroïdienne  supérieure;  mais 
d'autres  fois  celle-ci  n'est  qu'un  rameau  de  la  carotide  externe. 
Quoi  qu'il  en  soit,  elle  se  distribue  au  larynx,  au  corps  thy- 
roïde et  aux  muscles  de  la  partie  antérieure  du  cou  (1). 

Il  est  aussi  à  noter  que  d'autres  fois  la  bifurcation  de  l'artère 
carotide  cervicale  ou  primitive,  qui  est  si  bien  caractérisée 
chez  l'Homme,  ne  se  voit  pas  ;  la  carotide  interne  n'est  repré- 
sentée que  par  une  petite  branche,  et  le  tronc  commun,  en  se 
continuant,  constitue  la  carotide  externe;  disposition  qui  se  voit 
chez  le  Cochon  d'Inde,  par  exemple  ("2). 

L'artère  carotide  externe  remonte  derrière  l'angle  de  la 
mâchoire  inférieure,  et,  parvenue  auprès  de  l'articulation  de 
cet  os,  se  divise  en  deux  branches  appelées  artères  temporale 
superficielle  et  maxillaire  interne;  mais,  avant  d'arriver  à  ce 
point,  elle  fournit  plusieurs  rameaux. 

Ainsi,  chez  l'Homme,  il  en  part  d'abord  l'artère  thyroïdienne  Artère  carotide 
supérieure,  dont  j'ai  déjà  parlé;  puis  une  artère  linguale,  dont  chezrHomme. 
une  branche  se  rend  au  larynx  et  dont  le  tronc  se  distribue 
dans  la  langue,  la  glande  sublinguale  et  les  muscles  voisins  \ 
une  artère  faciale  qui  contourne  en  dessous  l'angle  de  la  mâ- 
choire et  remonte  obliquement  sur  la  joue,  vers  l'angle  du 
nez,  et  se  prolonge  jusque  sur  le  milieu  du  front,  en  fournis- 
sant, chemin  faisant,  les  artères  labiales,  etc.;  une  artère  occi- 
pitale destinée  aux  téguments  et  aux  muscles  de  la  nuque; 

(1)  Les  branches  terminales  de  la  (2)  Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet, 

thyroïdienne  supérieure  s'anastomo-  voyez  les  Mémoires  d'Otto  et  de  Bar- 

sent  avec  leurs  congénères   et  avec  kow   (6).    Chez  les  Fourmiliers,   la 

celles  de  la  thyroïdienne  inférieure.  carotide  primitive  paraît  trilurquée  à 

Ce  vaisseau  fournit  aussi  des  ramus-  raison   du   grand  développement  de 

cules  aux  muscles  voisins  (a).  Tarière  linguale  (c). 

(a)  Voyez  Tiedemann,  Tabula  arteriarvm  corporis  humani,  pi.  6, 

—  Bourgery  et  Jacob,  Anat.  descript.,  t.  IV,  pi.  29. 

(6)  Olto,  Op.  cit.  (Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  97). 

—  Barkow,  Disquisit.  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mammalium  p  38 
(c)  Hyrtl,  Vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1854,  t.  VI,  pi.  3  %.  1) 


530  APPAREIL    DE    Là    CIRCULATION 

une  artère  auriculaire  postérieure  qui  remonte  sur  le  côté  du 
crâne  en  passant  derrière  l'oreille;  enfin  une  artère  pharyn- 
gienne inférieure  qui  se  rend  au  pharynx  et  envoie  un  rameau 
jusque  dans  l'intérieur  du  crâne  (1). 

Vartère  temporale  superficielle,  qui  est  une  des  branches 
terminales  de  la  carotide  externe,  passe  devant  l'oreille  et 
remonte  sur  les  côtés  du  crâne  en  marchant  sous  la  peau  et  en 
fournissant,  chemin  faisant,  des  ramuscules  au  muscle  masséter  et 
aux  autres  parties  latérales  de  la  joue.  Un  de  ses  rameaux  sedirige 
en  avant  au-  dessus  de  l'arcade  orbitaire  et  se  répand  sur  le  front. 

Enfin,  Vartère  maxillaire  interne,  constituée  par  l'autre 
division  terminale  de  la  carotide  interne ,  s'enfonce  sous  la 
branche  montante  de  la  mâchoire  inférieure,  se  dirige  vers  le 
fond  de  l'orbite,  et  donne  naissance  à  plusieurs  branches  im- 
portantes qui  se  distribuent  principalement  aux  parties  pro- 
fondes de  la  face  et  des  tempes,  mais  dont  quelques-unes 
pénètrent  dans  l'intérieur  du  crâne  (2). 

(1)  Pour  se  faire  une  idée  nette  de  la  conduit  auditif  externe  et  à  la  caisse 
disposition  de  ces  diverses  artères,  il  du  tympan  par  la  scissure  de  Glaser, 
est  bon  d'avoir  sous  les  yeux  les  mais  qui  provient  quelquefois  de  l'ar- 
figures  qui  en  ont  été  données  dans  tère  temporale. 

l'une  des  iconographies  anatomiques  2°  Vartère  méningée  moyenne,  ou 

du  corps  humain  :  par  exemple,  le  artère  sphéno-épineuse,  qui  pénètre 

grand  atlas  de  M.  Tiedemann  ou  l'ou-  dans  l'intérieur   du   crâne  pour  s'y 

vrage  de  Bourgery  et  Jacob  (a).  distribuer  à  la  dure-mère  et  aux  os 

(2)  On  compte  chez  l'Homme  treize  crâniens. 

branches  qui  naissent  de  la  maxil-  3°  Vartère  maxillaire  inférieure, 

laire  interne,   indépendamment   de  ou  dentaire  inférieure,  qui  se  loge 

sa  portion  terminale,  que  les  anato-  dans  le  canal  dentaire  de  la  mâchoire 

mistes  désignent  sous  le  nom  d'artère  inférieure,  et  fournit  en  avant  une 

sphéno-palatine.  branche  dite  artère  mentonnière,  la- 

Sept  de  ces  branches  s'en  détachent  quelle  sort  de  ce  canal  par  le  trou  dont 

près  du  col  du  condyle  de  la  mâchoire  elle  porte  le  nom,  et  se  distribue  aux 

inférieure.  Ce  sont  :  parties  molles  du  menton. 

1°  Vartère  tympanique,  petit  ra-  U°  Vartère    temporale    profonde 

meau  qui  donne  des  ramuscules  au  postérieure,   qui  remonte  verticale- 
fa)  Tiedemann,  Tabulœ  arteriarum  coi*poris  humani,  p).  5,  6  et  7. 
—  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  27,  28  et  29, 


interne. 


CHEZ    LES    MAMJ11FÈKES.  531 

V  artère  carotide  interne  de  chaque  côté  pénètre  par  la  base  Artère  carotide 
du  crâne  dans  l'intérieur  de  cette  boîte  osseuse  et  y  fournit  deux 
ordres  de  vaisseaux  :  une  artère  ophthalmique  qui  sort  de  cette 
cavité  pour  pénétrer  dans  l'orbite  et  fournir  de  nombreuses 
branches  au  globe  de  l'œil  et  à  ses  muscles,  ainsi  qu'aux  parties 
voisines  des  fosses  nasales  et  du  front  (1);  puis  des  artères 


ment  sous  le  muscle  temporal  et  se 
ramifie  à  la  surface  des  os  du  crâne. 

5°  L'artère  massétérine  ,  petite 
branche  qui  se  rend  au  muscle  mas- 
séter. 

6°  Une  ou  plusieurs  petites  artères 
ptérygoïdiennes  se  distribuant  aux 
muscles  du  même  nom. 

7"  Une  petite  artère  ptérygo-mé- 
ningée,  qui  se  rend  en  partie  au  voile 
du  palais  et  en  partie  à  la  dure-mère. 

Un  peu  plus  loin,  dans  le  voisinage 
de  la  tubérosité  maxillaire,  l'artère 
maxillaire  interne  donne  naissance  à 
quatre  autres  branches,  savoir  : 

Une  artère  buccale,  qui  se  répand 
dans  le  muscle  buccinateur  ;  une  ar- 
tère temporale  profonde  antérieure, 
dont  le  nom  indique  suffisamment  la 
position  ;  une  artère  alvéolaire  ou 
dentaire  supérieure,  qui  contourne  la 
partie  postérieure  de  la  mâchoire  su- 
périeure et  donne  des  ramuscules  aux 
muscles  voisins ,  aux  racines  des 
dents,  etc.  ;  une  artère  sous-orbitaire, 
qui  traverse  le  canal  du  même  nom, 
donne  quelques  ramuscules  aux  dents 
canines  et  incisives,  puis  se  dégage 
à  la  partie  antérieure  de  la  joue,  pour 
distribuer  ses  ramuscules  aux  tégu- 
ments et  s'anastomoser  avec  les  bran- 
ches de  l'artère  buccale  externe. 

Parvenue  au  sommet  de  la  fosse 
zygomatïque   ou  plérygo-maxillaire , 


l'artère  maxillaire  interne  fournit 
encore  : 

1°  Une  artère  vidienne  ou  ptéry- 
goïdienne,  qui  est  très  grêle,  traverse 
le  conduit  dont  elle  porte  le  nom  et 
va  s'épanouir  dans  le  pharynx  et  la 
trompe  d'Eustache. 

2°  Une  artère  ptér  y  go-palatine  ou 
pharyngienne  supérieure,  qui  traverse 
le  conduit  ptérygo-palatin  et  se  ter- 
mine comme  la  précédente. 

3°  Une  artère  palatine  supérieure, 
qui  descend  par  le  conduit  palatin 
postérieur  dans  la  bouche,  et  se  dis- 
tribue à  la  voûte  du  palais  où  elle 
s'anastomose  en  arcade  avec  sa  con- 
génère. 

Enfin  la  portion  terminale  de  la 
maxillaire  interne,  connue  sous  les 
noms  d'artère  nasale  postérieure  ou 
d'artère  sphéno-palatine,  pénètre  dans 
les  fosses  nasales  par  le  trou  sphéno- 
palatin  et  se  distribue  à  la  membrane 
pituitaire. 

Toutes  ces  artères  sont  très  bien 
représentées  dans  le  grand  ouvrage  de 
Bourgery  (a)  et  dans  la  plupart  des 
autres  iconographies  anatomiques  du 
corps  humain. 

(1)  L'artère  carotide  interne  de 
l'Homme  est  très  grosse,  et  s'enfonce 
dans  l'espace  compris  entre  la  bran- 
che montante  de  la  mâchoire  infé- 
rieure, le  pharynx  et  le  sommet  de  la 


(a)  Bourgery  et  Jacob,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  31. 


Artère 
vertébrale. 


532  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

cérébrales  qui  se  répandent  dans  les  diverses  parties  de  l'en- 
céphale et  s'anastomosent  aussi  avec  les  artères  vertébrales. 

Pour  en  bien  saisir  la  disposition ,  il  est  nécessaire  de  ne 
pas  en  séparer  l'étude  de  celle  de  ce  dernier  vaisseau,  qui  est 


colonne  vertébrale  ;  elle  s'engage  en- 
suite dans  le  canal  carotidien  dont  la 
portion  rocheuse  de  l'os  temporal  est 
creusée,  et  pénètre  dans  la  cavité  du 
crâne,  où  elle  se  trouve  logée  dans  un 
grand  réservoir  veineux. appelé  le  sinus 
caverneux.  Avant  son  entrée  dans  le 
canal  carotidien,  elle  ne  fournit  aucune 
brandie,  et,  pendant  son  trajet  à  tra- 
vers celui-ci,  elle  ne  donne  que  quel- 
ques ramuscules  à  la  caisse  du  tym- 
pan. Dans  le  sinus  caverneux  on  en 
voit  partir  quelques  branches  qui  se 
répandent  sur  le  corps  pituitaire  et 
sur  les  parties  voisines  de  la  dure- 
mère.  Enfin,  en  passant  au-dessus  de 
l'apephyse  clinoïde  antérieure  de  l'os 
sphénoïde,  elle  fournit  V artère  oph- 
thalmique,  qui  sortimmédiatementdu 
crâne  par  le  trou  optique  correspon- 
dant, pénètre  dans  l'orbite  (a),  et  se 
termine  par  deux  branches  principales 
appelées  artère  nasale  et  artère  fron- 
tale. Pendant  ce  trajet,  l'artère  oph- 
thalmique  donne  naissance  à  un  grand 
nombre  de  branches  dont  les  plus 
importantes  sont  : 

1°  L'artère  lacrymale,  qui  naît  au 
fond  de  l'orbite,  traverse  la  glande 
lacrymale  en  y  distribuant  beaucoup 
de  ramuscules,  et  va  se  terminer  dans 
la  conjonctive. 

2°  L'artère  centrale  de  la  rétine,  qui 
est  très  grêle  et  qui  occupe  le  centre  du 
nerf  optique,  avec  lequel  elle  pénètre 
dans  le  globe  de  l'œil  pour  aller  se 
ramifier  dans  la  rétine,  la  membrane 


hyaloïde  et  la    capsule  du  cristallin. 

3°  Les  artères  ciliaires,  qu'on  dis- 
tingue en  ciliaires  courtes  ou  posté- 
rieures ,  moyennes  ou  longues  et 
antérieures.  Les  premières,  au  nom- 
bre de  trente  ou  quarante,  longent  le 
nerf  optique,  pénètrent  dans  le  globe 
de  l'œil ,  et  se  répandent  dans  la 
choroïde  et  les  procès  ciliaires;  les 
secondes,  au  nombre  de  deux,  vont 
former  autour  de  l'iris  un  cercle  vas- 
culaire  ;  enfin  les  dernières,  en  nom- 
bre indéterminé ,  donnent  quelques 
rameaux  à  la  conjonctive,  traversent 
la  sclérotique  près  de  la  cornée  et  se 
rendent  à  l'iris. 

ti°  Deux  artères  musculaires  :  l'une 
supérieure,  destinée  aux  muscles  élé- 
vateur de  la  paupière  ,  droit  supé- 
rieur, droit  interne  et  grand  oblique 
de  l'œil  ;  l'autre,  inférieure,  qui  se 
distribue  aux  muscles  droit  externe, 
droit  inférieur  et  petit  oblique  de 
l'œil. 

5°  Les  artères  ethmoïdales,  qui 
rentrent  dans  le  crâne  et  donnent  des 
ramuscules  à  la  dure-mère  et  aux 
parties  supérieures  des  fosses  nasales. 

6°  Deux  artères  palpébrales,  l'une 
supérieure,  l'autre  inférieure. 

Entin  ['artère  nasale,  qui  est  consti- 
tuée par  une  des  branches  terminales 
de  l'artère  ophthalmique,  sort  de  l'or- 
bite pour  se  ramifier  sur  les  côtés  et 
sur  le  dos  du  nez,  et  Vartère  frontale, 
formée  par  l'autre  branche,  se  distri- 
bue aux  muscles  et  à  la  peau  du  front. 


(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  pi.  30,  fiç.  1. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  533 

une  branche  de  la  grande  artère  sous-clavière  et  qui  monte  de 
chaque  côté  du  cou  dans  le  canal  formé  par  les  trous  situés  à  la 
base  des  apophyses  transverses  des  vertèbres  cervicales.  Par- 
venue à  la  base  du  crâne,  Y  artère  vertébrale  contourne  la  partie 
latérale  de  l'atlas,  traverse  le  grand  trou  occipital,  et  va  se 
réunir  à  sa  congénère  pour  constituer  un  vaisseau  impair  médian, 
appelé  le  tronc  basilaire,  qui  s'avance  entre  le  plancher  de  la 
cavité  crânienne  et  l'encéphale,  jusque  auprès  de  la  portion 
saillante  de  Fos  sphénoïde,  appelée  selle  turcique,  où  il  se 
bifurque.  Les  deux  branches  ainsi  constituées  portent  le  nom 
d'artères  cérébrales  postérieures,  et  fournissent  de  chaque  côté 
de  la  selle  turcique  une  branche  anastomotique  qui  se  joint  à 
une  des  divisions  de  la  carotide  interne  (1).  Une  autre  paire 
d'artères,  provenant  aussi  des  carotides  internes,  se  dirige  en 


(i)  On  donne  à  cette  branche  ana- 
stomotique le  nom  d'artère  communi- 
cante de  Willis,  ou  d'artère  commu- 
nicante postérieure. 

Les  artères  vertébrales,  en  s'élevant 
du  thorax  à  la  tête,  fournissent,  au  ni- 
veau de  chaque  espace  intervertébral, 
une  petite  artère  spinale  qui  pénètre 
dans  le  canal  vertébral  par  le  trou  de 
conjugaison  et  une  petite  branche  mus- 
culaire (a).  Dans  l'intérieur  du  crâne 
elles  fournissent  avant  leur  réunion 
deux  paires  d'artères  cérébelleuses  : 
l'une  inférieure,  l'autre  supérieure, 
qui  se  distribuent  au  cervelet.  Enfin, 
le  tronc  basilaire,  formé  par  la  réu- 
nion des  deux  artères  vertébrales , 
fournit  deux  paires  d'artères  dites 
cérébelleuses  antéro-inférieures ,  et 
cérébelleuses  supérieures,  lesquelles 
se  distribuent  également  au  cervelet. 


Les  branches  terminales  du  tronc 
basilaire,  ou  artères  cérébrales  posté- 
rieures, se  séparent  à  angle  droit  de 
ce  vaisseau,  et  vont  se  ramifier  dans 
les  parties  postérieures  de  l'encéphale. 

Chez  le  Kanguroo,  les  artères  ver- 
tébrales naissent  comme  d'ordinaire 
des  artères  sous-clavières  et  se  ren- 
dent à  la  boîte  crânienne  par  le  canal 
pratiqué  à  la  base  des  apophyses  trans- 
verses ;  au-dessous  de  la  moelle  allon- 
gée, elles  s'unissent  entre  elles  pour 
constituer  le  troue  basilaire  dont  naît 
à  angle  droit  une  paire  d'artères  céré- 
belleuses ;  enfin,  vers  le  niveau  du 
bord  antérieur  du  pont  de  Varole, 
ce  tronc  se  bifurque  pour  aller  con- 
courir à  la  formation  du  cercle  de 
Willis,  et  ses  deux  branches  sont 
reliées  entre  elles  par  deux  vaisseaux 
anastomotiques  transversaux  (b). 


(a)  Voyez  Bourg-ery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  30,  fig-.  2,  3  et  i. 

[b)  Owen,  JIarsupialia  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  t.  III,  p.  308). 


5o/l  APPAREIL    DE    LA.    C1RCULA.T10N 

avant  et  s'anastomose  sur  la  ligne  médiane,  de  façon  qu'il 
existe  à  la  base  de  l'encéphale  un  cercle  artériel  qui  tire  son 
origine  tout  à  la  fois  des  artères  vertébrales  et  des  artères  caro- 
tides internes,  et  qui  peut  être  considéré  comme  le  principal 
point  de  départ  des  artères  du  cerveau  (1).  Cette  disposition, 
comme  on  le  voit,  est  à  peu  près  la  même  que  celle  de  l'anneau 
artériel  que  nous  avons  vu  à  la  base  de  la  cavité  crânienne 
chez  les  Vertébrés  inférieurs,  et  que  l'on  a  appelé  le  cercle  de 
Willis. 
Artères  La  disposition  des  artères  de  la  tête  est  en  général  à  peu  près 
chet  £  ies  la  même  dans  toute  la  classe  des  Mammifères  ;  mais,  indépen- 
Mammiferes.  Raniment  <je  diverses  variations  dans  l'origine  de  plusieurs 
branches,  on  y  remarque,  chez  quelques  espèces,  des  particu- 
larités qui  influent  sur  la  manière  dont  le  sang  arrive  au  cerveau 
et  qui  méritent  d'être  notées.  Ainsi,  on  a  trouvé  que  chez  la 
plupart  des  Mammifères  hibernants  la  carotide  interne  pénètre 
dans  l'intérieur  du  crâne  par  une  route  moins  directe  que  chez 
l'Homme  et  les  autres  Mammifères  ordinaires;  elle  traverse  la 
caisse  du  tympan  et  elle  ne  fournit  au  cerveau  que  peu  de  sang  ; 
mais  cette  circonstance  n'a  pas  toute  l'importance  physiologique 
qu'au  premier  abord  elle  pourrait  sembler  avoir,  car  les  artères 

(1)    Les  artères   cérébrales    anté-  Les  carotides   internes  fournissent 

Heures,  ou  artères  du  corps  calleux,  aussi,  sur  le  côté  de  l'anneau  de  Willis, 

qui  sont  formées  par  une  des  branches  une  paire  d'artères  cérébrales  moyen- 

terminalesde  la  carotide  interne,  et  qui  nés  qui  suivent  la  scissure  de  Sylvius 

se  portent  en  avant  pour  gagner  la  et  se  terminent  sur  les  parties  voisines 

grande  scissure  du  cerveau  et  se  dis-  des  hémisphères  cérébraux.  Enfin,  on 

tribuer  dans  le  corps  calleux,  se  rap-  donne  le  nom  d'artère  choroïdienne  à 

prochent  beaucoup  entre  elles   im-  une  petite  branche  qui  naît  de  la  ca- 

médiatement   au-devant   de   la   selle  rotide  interne,  en  dessous  de  l'artère 

turcique,  et  s'y  réunissent  au  moyen  communicante,  et  qui  pénètre  dans  le 

d'un  petit  tronc  anastomotique  trans-  ventricule  latéral  du  cerveau,  où  ellese 

versai,  appelé  artère  communicante  termine  dans  un  réseau  appelé  plexus 

antérieure  (a).  choroïde. 

(«.)  Voyez  Bourgery,  Op. cit.,  t.  IV,  pi.  30,  fi§-.  i,  et  t.  III,  pi.  29. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5o5 

vertébrales  sont  assez  développées  pour  que  les  vaisseaux  de 
l'encéphale,  reliés  entre  eux  par  le  cercle  de  Willis,  aient  leur 
calibre  ordinaire  (1). 

Chez  les  Ruminants  et  quelques  autres  Mammifères ,  les 
artères  carotides  internes  ou  les  branches  correspondantes, 
en  pénétrant  dans  le  crâne,  se  divisent  en  une  multitude  de 
rameaux  pour  former  un  reùe  mirabile,  ou  plexus  vasculaire, 
dont  les  rameaux  efférents  se  réunissent  de  nouveau  pour 
constituer  de  chaque  côté  un  tronc  qui,  à  son  tour,  donne 
naissance  au  cercle  artériel  de  Willis  ;  et  il  est  à  noter  que 
chez  les  Animaux  où  cette  disposition  est  bien  caractérisée,  le 
cerveau  ne  reçoit  que  peu  ou  point  de  sang  par  l'intermédiaire 
des  artères  vertébrales  (2).  Chez  d'autres  Mammifères,  l'inéga- 


(1)  Chez  le  Hérisson,  par  exemple, 
l'artère  carotide  interne  n'est  guère 
plus  petite  que  la  carotide  externe  ; 
mais,  avant  d'entrer  dans  le  crâne,  elle 
fournit  les  branches  occipitales,  qui, 
chez  l'Homme,  proviennent  de  cette 
dernière.  Elle  s'engage  ensuite  dans  le 
trou  jugulaire,  pénètre  dans  la  caisse 
du  tympan,  et  s'y  divise  en  deux 
branches.  L'une  de  celles-ci  corres- 
pond jusqu'à  un  certain  point  à  l'artère 
ophthalmique,  et,  après  avoir  traversé 
rétrier  ,  arrive  dans  la  cavité  du 
crâne,  y  donne  naissance  à  l'artère 
méningéemoyenne  (qui  chez  l'Homme 
est  une  branche  de  la  maxillaire  in- 
terne), et  se  rend  ensuite  à  l'orbite. 
L'autre  branche  gagne  la  partie  la  plus 
profonde  de  la  caisse  du  tympan, 
pénètre  dans  la  cavité  du  crâne,  et 
débouche  dans  le  cercle  de  Willis  qui 


est  formé  principalement  aux  dépens 
des  artères  vertébrales. 

La  disposition  de  ces  vaisseaux  est  à 
peu  près  la  même  chez  beaucoup 
d'autres  Insectivores  et  Rongeurs,  tels 
que  la  Musaraigne,  la  Taupe,  la  Mar- 
motte, l'Écureuil,  le  Loir,  le  Rat,  le 
Hamster,  le  Lemming,  les  Mériones 
et  les  Gerbilles,  ainsi  que  chez  les 
Chauves-Souris,  qui  sont  également 
des  animaux  hibernants  (a). 

Chez  le  Castor,  le  Lapin,  le  Lièvre, 
le  Blaireau,  l'Ours,  etc.,  l'artère  caro- 
tide interne  passe  par  le  canal  caroti- 
dien  ;  mais  chez  ce  dernier,  avant 
d'aller  déboucher  dans  le  cercle  de 
Willis,  elle  se  replie  en  arrière,  de 
façon  à  former  uneanse  très  longue  (6). 

(2)  Le  plexus  carotidien  ou  crânien, 
qui  est  extrêmement  développé  chez 
le  Veau,  et  qui  se  voit  très  facilement 


(a)  Otto,  Op.  cit.  (Ami.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI,  p.  70,  pi.  20,  fig.  1,  2,  3.  —  De  Ani- 
malium  quorumdamper  hiemem  dormientium  vasis  cephalicis  et  aure  interna  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  cuiws.,  t.  XIII). 

(b)  Barkow,  Disquisit.  circa  orig.  etdecurs.  arter.  Mammalmm,  p.  107,  pi.  i,  fij.  1. 


536  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

lité  entre  ces  deux  artères  céphaliques  se  prononce  en  sens 
inverse.  Ainsi,  chez  le  Cochon  d'Inde  et  l'Agouti,  la  carotide 
interne  est  un  petit  rameau  fourni  par  la  portion  terminale  de 


chez  le  Mouton,  la  Chèvre  et  les  autres 
Ruminanls,  ainsi  que  chez  le  Cochon, 
a  été  remarqué  parles  anatomistes  de 
l'antiquité  et  décrit  par  eux  comme 
existant  chez  l'Homme  (a);  mais  on 
sait  aujourd'hui  qu'il  manque  dans 
l'espèce  humaine  ainsi  que  chez  les 
Singes  ,  la  plupart  des  Carnassiers, 
les  Rongeurs  ,  l'Éléphant ,  le  Che- 
val, etc.  Barkow  et  Rapp  en  ont  fait 
une  étude  très  attentive  (b). 

Ce  rete  mirabile  se  trouve  à  la 
base  du  crâne,  sur  les  côtés  de  la  selle 
turcique,  au-dessous  de  la  dure-mère 
et  dans  l'intérieur  du  sinus  caverneux, 
où  il  baigne  dans  le  sang  veineux.  11 
est  plus  développé  chez  le  fœtus  que 
chez  l'animal  adulte,  et  il  provient  de 
deux  branches  carolidiennes  qui,  chez 
les  Ruminants,  pénètrent,  l'une  par  un 
trou  situé  derrière  le  foramen  ovale, 
l'autre  par  la  fissure  sphénoïdale  ou 
orbitaire  supérieure,  mais  qui,  chez 
le  Cochon,  passent  l'une  et  l'autre  par 
le  trou  déchiré  antérieur  (c).  Les  vais- 
seaux qui  le  constituent  sont  très  grêles 
et  très  nombreux  chez  le  Mouton  ;  chez 
la  Chèvre,  leChamoisetleVeau,ilssont 
plus  gros  et  très  flexueux.  Desbranches 
anastomotiques  transversales  réunis- 


sent entre  eux  les  deux  réseaux  des  deux 
côtés  de  la  tête,  et  les  branches  effé- 
rentes  de  chacun  de  ces  plexus  vascu- 
laires  se  rassemblent  en  un  tronc  uni- 
que qui  perce  la  dure-mère  pour  aller 
constituer  le  cercle  de  Willis,  dont  la 
disposition  est  à  peu  près  la  même 
que  chez  les  espèces  où  les  artères 
vertébrales  concourent  à  sa  formation. 

Chez  les  Ruminants,  ces  derniers 
vaisseaux  pénètrent  dans  le  canal  ver- 
tébral assez  loin  de  la  tête  (en  général 
entre  la  deuxième  et  la  troisième  ver- 
tèbre cervicale),  et  après  s'être  réu- 
nis sur  la  ligne  médiane,  soit  en  un 
tronc  impair  très  court,  ainsi  que  cela 
se  voit  chez  la  Chèvre  (d),  soit  à  l'aide 
de  quelques  branches  anastomotiques 
transversales  seulement,  comme  chez 
le  Veau  (e),  ils  vont  se  terminer  de 
chaque  côté  dans  l'artère  condyloï- 
dienne,  qui  est  une  des  branches  occipi- 
tales provenant  de  la  carotide  interne. 

Quelquefois  le  rete  mirabile  de  la 
base  du  crâne  s'étend  en  arrière  jus- 
qu'auprès du  trou  occipital  et  reçoit  des 
branches  anastomotiques  des  artères 
vertébrales  (chez  le  Veau,  par  exemple), 
et  d'autres  fois  il  s'anastomose  avec  les 
artères  condyloïdiennes  (chez  le  Cha- 


(a)  Galien,  De  l'utilité  des  parties  du  corps,  livre  IX,  chap.  iv,  trad.  de  Daremberg,  Œuvres, 
t.  I,  p.  575. 

(6)  Rapp,  Ueber  das  Wundernetx  (Meckel's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol.,  1827,  p.  1,  pi.  1 
et  2). 

—  Barkow,  Ueber  der  Verlaufder  Schlagadem  am  Kopfe  des  Schafes  (Nova  Acta  Açad.  Nat. 
curios.,  1826,  t.  XIII,  p.  395),  et  Disquisitiones  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mam- 
malium,  in-4,  1829. 

(c)  Chez  le  Mouton,  la  carotide  interne  se  trouve  représentée  ainsi  par  trois  branches  de  l'artère 
maxillaire  interne  (voy.  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  562,  fig.  160). 

(d)  Rapp,  Op.  cit.,  pi.  2. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  1,  fig.  1. 

—  Carus  et  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  8,  fig.  2. 

—  Chauveau,  Traité  d' anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques,  p.  563,  fig.  161. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  537 

Ja  maxillaire  interne,  et  le  cercle  de  Willis  où  elle  va  déboucher 
est  formé  principalement  par  les  artères  vertébrales. 

Chez  divers  Mammifères,  on  trouve  aussi  des  plexus  vascu- 
laires  plus  ou  moins  développés  sur  le  trajet  de  plusieurs 
artères  de  la  face.  Ainsi,  chez  le  Chat,  la  carotide  externe 


mois)  ;  mais  c'est  seulement  le  ironc 
efférent  de  ce  plexus  qui,  de  chaque 
côté,  traverse  la  dure-mère  pour  aller 
constituer  l'anneau  de  Willis  et  fournir 
par  son  intermédiaire  toutes  les  artères 
du  cerveau.  Ce  tronc  carotidien  encé- 
phalique se  bifurque  ;  une  de  ses 
branches  se  dégage  en  avant  et  se  com- 
porte à  peu  près  comme  l'artère  céré- 
brale antérieure  chez  l'Homme  ;  l'autre 
branche  représente  l'artère  commu- 
nicante postérieure  dont  il  a  été  ques- 
tion ci-dessus,  mais  au  lieu  de  se 
joindre  à  la  fourche  formée  par  l'artère 
basilaire  et  provenant  des  vertébrales, 
elle  s'unit  à  sa  congénère  pour  com- 
pléter en  arrière  l'arcade  de  Willis  et 
donner  naissance  à  une  artère  médiane 
qui  longe  en  dessous  la  moelle  épi- 
nière  (a).  Chez  le  Chameau,  il  y  a  un 
plexus  carotidien  comme  chez  les 
autres  Ruminants  (6). 

Chez  le  Chien,  l'artère  carotide  in- 
terne,aprèss'ètreengagéedansle  canal 
osseux  qu'elle  traverse  pour  pénétrer 
dans  le  crâne,  forme  une  anse  et  re- 
paraît au  dehors  pour  recevoir  une 


branche  anastomotique  de  la  carotide 
externe;  puis,  parvenue  sur  les  côtés 
de  la  selle  turcique,  elle  s'anastomose 
avec  des  branches  rentrantes  de  l'artère 
ophthalmique  et  de  la  sphéno-épi- 
neuse,  de  façon  à  représenter  à  l'état 
rudimentaire  le  rete  mirabile  crânien, 
qui  acquiert  chez  les  Ruminants  un  si 
haut  degré  de  développement  (c). 

Chez  le  Chat ,  ce  plexus  carotidien 
est  plus  considérable  :  mais  ici,  de 
même  que  chez  le  Chien,  les  artères 
vertébrales  participent  à  la  formation 
du  cercle  de  Willis  {cl). 

Chez  le  Cochon,  au  contraire,  l'ar- 
tère vertébrale  ne  se  rend  pas  au  cer- 
veau et  se  termine  dans  l'artère  occi- 
pitale (e). 

La  Loutre  présente  aussi  des  vestiges 
d'un  rete  mirabile  carotidien  (f). 

Enfin,  chez  le  Marsouin,  les  caroti- 
descérébrales,  en  entrant  dans  le  crâne, 
constituent  un  plexus  très  considérable 
dont  partent  les  principales  artères  de 
la  dure-mère  et  du  cerveau,  et  dont 
la  partie  postérieure  est  en  communi- 
cation avec  le  plexus  costal  (g). 


(a)  Voyez  Rapp,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  2. 

(6)  Fr.  Mûller  et  Wedl,  Beitrdge  sur  Anatomie  des  Zweibuckeligen  Kameles  (Mém.  de  l'Acad. 
de  Vienne,  1852,  t.  III,  p.  277). 

(c)  Barkow,  Disquisit.  circa  orig.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  1,  pi.  3,  fig.  1. 

—  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  557. 

(d)  Barkow,  Disquisit.  circa  orig.  et  decurs.  arter.  Mammalium,  p.  10,  pi.  3,  fig.  2. 

(e)  Barkow,  Disquisitiones  recentiores  de  arteriis  Mammalium  et  Avium  (Actes  de  l'Acad.  des 
curieux  de  la  Nature,  1844,  t.  XX,  p.  610,  pi.  27,  fig.  1). 

(f)  Barkow,  Ueber  einige  Eigenthùmlichkeiten  im  Verlaufe  der  Sehlagadern  der  Fischotter 
(Meckel's  Archiv  fur  Anat.,  1829,  p.  35). 

(g)  Siannius,  Ueber  den  Verlauf  der  Arterien  bei  Delphinus  phocsena  (Miiller's  Archiv,  1841, 
p.  386,  pi.  14,  fig.  1). 

—  Breschet,  Histoire  anatomique  et  physiologique  d'un  organe  particulier  de  nature  vasculaire, 
découvert  chez  les  Cétacés,  1836,  pi.  4,  fig.  2. 


538  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

forme  derrière  le  condyle  de  la  mâchoire  inférieure  tin  rete 
mirabile  très  grand,  et  chez  l'Aï  il  existe  des  réseaux  du  même 
genre  sur  les  joues,  aussi  bien  que  dans  les  régions  temporales 
et  oculaires  (1). 

Enfin,  je  dois  faire  remarquer  encore  que  chez  les  Rumi- 
nants et  le  Cochon^  qui  sont  pourvus  d'un  plexus  carotidien 
bien  développé,  la  portion  terminale  de  l'artère  maxillaire 
interne  fournie  par  la  carotide  externe  constitue  sur  les  parois 
des  fosses  nasales  un  plexus  vasculaire  très  beau  (2).  Quant 
aux  autres  particularités  qui  s'observent  dans  le  mode  de  dis- 
tribution des  artères  de  la  tête  chez  les  divers  Animaux  de 
cette  classe,  elles  n'offrent  pas  assez  d'importance  pour  que 
nous  nous  y  arrêtions  ici  (3). 


(1)  M.  Hyrtl  a  trouvé  chez  l'Aï  un 
plexus  sous-orbi taire,  un  plexus  tem- 
poral et  un  plexus  ophthalmique,  mais 
ces  réseaux  ne  paraissent  être  formés 
que  par  un  petit  nombre  de  bran- 
ches vasculaires  (a). 

Le  plexus  maxillaire  du  Chat  est  en 
continuité  avec  le  plexus  carotidien 
dont  il  a  déjà  été  question,  et  donne 
naissance  aux  artères  maxillaire  in- 
terne, ciliaire,  ethmoïdale, ophthalmi- 
que propre  et  méningée  antérieure  (b). 

Chez  l'Éléphant ,  on  trouve  un 
plexus  artériel  très  développé  sous  la 
peau  entre  l'oreille  et  l'œil  (c). 

Chez  les  Ruminants  (le  Mouton,  par 
exemple),  l'artère  ophthalmique,  qui 
naît  de  l'artère  maxillaire  interne,  se 
résout  en  un  plexus  arrondi  dont 
naissent  l'artère  sourcilière  et  le  tronc 


commun   des   artères   de    l'œil    (d). 

(2)  Ce  plexus  nasal  est  formé  par 
l'artère  sphéno-palatine  et  revêt  les 
deux  faces  du  cornet  inférieur,  à  tra- 
vers la  substance  duquel  il  envoie 
beaucoup  de  branches  anastomotiques; 
de  sorte  que  son  existence  se  décèle 
même  sur  le  squelette  par  la  structure 
criblée  de  cet  os.  M.  Hyrtl  a  trouvé 
ce  rete  mirabile  dans  la  membrane 
pituitaire  du  Chamois,  du  Cerf,  de  la 
Chèvre,  du  Mouton,  du  Bœuf  et  du 
Cochon,  mais  n'en  a  aperçu  aucune 
trace  ni  chez  le  Cheval,  ni  chez  les 
Carnassiers,  les  Rongeurs,  les  Quadru- 
manes, etc.  (e). 

(3)  Pour  plus  de  détails  sur  le  mode 
d'origine  et  de  distribution  des  artères 
de  la  tète,  je  renverrai  aux  recherches 
de  A.  G.  Otto  sur  les  Chauves-Souris, 


(a)  Hyrtl,  Beitr.  zur  vergleichenden  Angiologie(Denkschriften  der  Akad.  der  Wissenschaften  %u 
Wien,  1. 1,  pi.  2,  flg.  2). 

(6)  Barkow,  Disquisit.  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mammalium,  p.  9. 
—  Carus  el  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  7,  fîg.  4. 

(c)  Carus  et  Otto,  Op.  cit.,  p.  16,  pi.  8,  fig.  3. 

(d)  Chauveau,  Traité  d'anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques ,  p.  562,  lîg.  150. 

(e)  Hyrtl,  Beitrâge  %ur  vergleichenden  Angiologie  [Mém.  de  l'Açad.  de   Vienne,  1849,   t.  I, 
p.  13,  pi  1,  fig.  1  à  3). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  539 

§11.  —  Les  artères  sous-clavières,  dont  nous  avons  déjà      Artère 

t  sous- clavières. 

vu  naître  les  artères  vertébrales,  se  rendent  aux  membres 
tboraciques,  et  prennent  successivement  les  noms  d'artère 
axillaire  dans  la  région  de  l'aisselle,  et  d'artère  brachiale  ou 
humérale  dans  le  bras.  Avant  d'arriver  au  niveau  de  l'articu- 
lation de  l'épaule,  elles  fournissent  plusieurs  grosses  branches, 
dont  les  unes  se  rendent  aux  parties  latérales  et  inférieures  du 
cou,  d'autres  aux  parois  antérieures  du  thorax,  et  d'autres 
encore  aux  muscles  de  l'épaule  (1). 

le  Hérisson,  la  Musaraigne,  la  Taupe,  (1)  Chez  l'Homme,   cette   grande 

l'Ours,  le  Blaireau,  le  Castor,  la  Mai-  artère   sort  de  la   cavité  thoracique 

motte ,  l'Écureuil  et  plusieurs  autres  en  passant  entre  la  première  côte  et 

Rongeurs  (a);  de  Barkow  sur  le  Mou-  la  clavicule:  elle  conserve  le  nom  de 

ton  (6),  le  Chien  ,  le  Chat,  le  Putois,  sous-clavière  jusqu'à  ce  qu'elle  se  soit 

le  Hérisson,  le  Surmulot,  le  Cabiai,  le  dégagée  de  dessous    ce   dernier  os, 

Lapin  ,  le   Callitriche   (Cercopithecus  et,  pendant  cette  première  portion  de 

sabœus),  le  Veau  (c),  la  Loutre  (d),  le  son  trajet,  elle  fournit  l'artère  verté- 

Cochon, \e$ous\ik(Arctomyscitillus),  brale    et  l'artère   thyroïdienne  infé- 

le  Hamster,   la  Martre,  etc.   {ey,   de  rieure  dont  il  a  été  déjà  question  (k); 

Burowsur  le  Phoque  (/")  ;  de  M.  Hyrtl  une  artère  mammaire,  interne   ou 

sur  les  Fourmiliers,  les  Pangolins,  les  thoracique  interne,  qui  descend  dans 

Tatous  (g)  et  l'Échidné  {h)  ;  enfin  de  la  cavité  du  thorax  entre  les  cartilages 

M.  Stannius  sur  le  Marsouin  (I).  costaux  et  la  plèvre,  donne  naissance 

Les  divisions  de  la  carotide  externe  à  l'artère  diaphragmatique  inférieure 

chez  le  Cheval  sont  représentées  dans  et  se  termine  dans  la  paroi  antérieure 

l'ouvrage  de  Leyh  (j>.  de  l'abdomen  (l)  ;  une  artère  cervi- 

(a)  Barkow,  Ueber  den  Verlauf  der  Schlagadern  am  Kopfe  des  Schafes  [Nova  Acta  Acad.  Nat. 
curios.,  18-26,  t.  Xlll.p.  397). 

(6)  Barkow,  Disquisit.  circa  originem  et  decursum  arteriarum  Mammalium.  Lipsiae,  4829. 

(e)  Barkow,  Ueber  einige  Eigentuhmlichkeiten  im  Verlauf  e  der  Schlagadern  der  Fischotter 
(Meckel's  Archiv,  1829,  p.  30). 

(d)  Barkow,  Disquisitiones  recenliores  de  arteriis  Mammalium  et  Avium  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  curios.,  1843,  t.  XX,  p.  609). 

(e)  Otto,  Deanimalium  quorumdam  per  hiemem  dormientium  vasis  cephalicis  et  aure  interna 
(Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  1826,  t.  XIII,  p.  25). 

(f)  Burow,  Ueber  die  Gefâss-System  der  Robben  (MùUer's  Archiv  fur  Anat.  und  Physiol,  1838, 
p.  230). 

(g)  Hjrtl,  Vergl,  Angiol.  (Mém.  de  V Acad.  de  Vienne,  1854,  t.  VI,  p.  21,  pi.  1,  2  et  3). 
(h)  Idem,  ibid.  (Mém.  de  VAcad.  de  Vienne,  1853,  t.  V,  p.  2,  pi.  2). . 

(i)  Stannius,  Ueber  den  Ver/flHfder.Arterien&eiDelphinusphocœna  (MùUer's  Archiv,  1841,  p.  379). 
(j)  Leyh,  Handbuch  der  Anatomie  der  Hausthiere,  p.  370,  fig.  162. 
(k)  Voyez  ci-dessus,  p.  527  et  532. 

(I)  Voyez  Bourgery,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  15,  21,  23,  24,  27  et  29. 
—  Tiedemann,  Tabula  arteriarum  corporis  humani,  pi.  18  (reproduite  en  petit  par  M.  Sappey, 
Traitéd'anat.  descript.,  t.  I,  p.  448,  fig.  138). 


Artère 
brachiale. 


5^0  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

V artère  brachiale  de  l'Homme  longe  la  partie  antérieure 
et  interne  du  bras,  donne  naissance  à  plusieurs  branches 
dont  les  plus  importantes  ont  reçu  les  noms  d'artères  collaté- 
rales externe  et  interne;  enfin  elle  se  bifurque  vers  le  niveau 
du  pli  du  coude  pour  constituer  les  deux  artères  principales 
de  l'avant-bras,  qui,  à  raison  de  leur  position,  sont  appelées 
artère  radiale  et  artère  cubitale  (1).  Cette  dernière  fournit  une 


cale  transverse  ou  scapulaire  posté- 
rieure ,  qui  se  porte  en  dehors  pour 
gagner  la  partie  postérieure  du  cou 
et  de  l'épaule  (a)  ;  une  artère  cervicale 
profonde  ou  cervicale  postérieure, 
qui  remonte  également  sur  les  côlés 
de  la  région  cervicale  postérieure, 
mais  dans  le  voisinage  immédiat  de 
la  colonne  vertébrale  (6)  ;  une  artère 
intercostale  supérieure  (c)  et  une 
scapulaire  sut  érieure  (d)  :  mais  il 
est  à*  noter  que  souvent  deux  ou  même 
plusieurs  de  ces  branches  naissent 
par  un  tronc  commun. 

La  portion  suivante  du  même  vais- 
seau (ou  l'artère  axillaire)  fournit 
également  des  branches  aux  parois 
du  thorax  ainsi  qu'aux  muscles  de 
l'épaule.  Le  plus  important  des  ra- 
meaux thoraciques  est  V artère  mam- 
maire externe,  qui  descend  entre  les 
muscles  pectoraux  et  les  côtes  (e).  Je 
citerai  aussi  Yartère  thoracique  su- 
périeure, ou  acromio-thoracique,  dont 


une  des  divisions  se  rend  aux  muscles 
pectoraux  et  aux  parties  voisines , 
l'autre  au  muscle  deltoïde,  etc.  (/"); 
Yartère  scapulaire  inférieure  ,  qui 
descend  le  long  du  bord  antérieur  des 
muscles  de  la  région  scapulaire  et  qui 
envoie  aussi  quelques  rameaux  sur  les 
parties  latérales  de  la  poitrine;  enfin, 
les  artères  circonflexes  postérieures 
et  antérieures  ,  qui  contournent  la 
partie  supérieure  de  l'humérus  et  se 
distribuent  à  cet  os  et  aux  parties 
molles  d'alentour  (g). 

(1)  Chez  l'Homme,  Yartère  bra- 
chiale descend  le  long  du  bord  interne 
du  muscle  biceps,  à  peu  de  distance 
de  la  peau,  dans  une  gaine  aponévro- 
tique  où  se  loge  aussi  le  nerf  médian 
du  bras. 

L'artère  collatérale  externe,  ou 
humer  aie  profonde,  naît  de  sa  partie 
supérieure,  au  niveau  du  bord  in- 
férieur du  muscle  grand  rond  ou 
scapulo-huméral,  soit  isolément,  soit 


(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  15,  18  et  24. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  10. 

—  Sappey,  Op.  cit.,  t.  I,  p.  455,  fig.  141. 

(5)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  17,  et  pi.  30,  fig.  3. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  8,  fig.  1. 

—  Sappey,  Op.  cit.,  t. 1,  p.  443,  fig.  140. 

(c)  Voyez  Bourgery,  loc.  cit.,  pi.  15,  21,  22. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  8,  fig.  6. 

—  Sappey,  Op.  cit.,  t.  I,  p.  450,  fig.  139. 

(d)  Voyei  Bourgery,  loc.  cit.,  pi.  15,  18,  27,  29. 

(e)  Idem,  ibid.,  pi.  19,  32. 

(f)  Idem,  ibid.,  pi.  15,  20,  23. 

(g)  Idem,  ibid.,  pi.  32,  36. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5/|l 

grosse  artère  dite  interosseuse,  qui  se  rend  à  la  face  pos- 
térieure de  l'avant-bras.  Enfin  l'artère  radiale ,  après  avoir 
remonté  sur  la  base  du  pouceaet  avoir  fourni  des  rameaux  au 


par  un  tronc  commun  avec  l'artère 
circonflexe  postérieure.  Elle  contourne 
l'humérus  et  gagne  la  face  postérieure 
du  bras,  où  elle  se  divise  en  deux 
branches  principales  :  Tune,  super- 
ficielle, qui  descend  vers  le  coude  en 
accompagnant  le  nerf  radial  ;  l'autre, 
profonde,  qui  suit  la  même  direction 
au  milieu  des  fibres  charnues  du 
muscle  triceps  brachial  et  s'anasto- 
mose comme  la  précédente  avec  les 
artères  de  la   région  du  coude  (a). 

L'artère  collatérale  interne,  beau- 
coup plus  petite  que  l'humérale  pro- 
fonde dont  elle  provient  quelquefois, 
naît  vers  la  partie  moyenne  du  bras  et 
se  porte  en  dedans  et  en  arrière  pour 
se  distribuer  aux  muscles  voisins.  Sou- 
vent elle  est  représentée  par  deux 
branches  qui  naissent  à  quelque  dis- 
tance l'une  de  l'autre  (6). 

La  hauteur  à  laquelle  l'artère  bra- 
chiale se  bifurque  est  assez  variable  : 
en  général,  c'est  vers  le  niveau  de 
l'articulation  du  coude;  mais  quelque- 
fois beaucoup  plus  haut  (c). 

Vartère  radiale,  qui  en  est  la 
branche  terminale  externe  (la  main 
étant  en  supination),  fournit,  pres- 
que aussitôt  après  sa  naissance,  une 
artère  récurrente  qui  remonte  sur 
le  bras  entre  les  muscles  de  la  portion 
antérieure  et  externe  de  cette  région. 
La  radiale  continue  ensuite  sa  route 


vers  la  main,  en  longeant  la  face  anté- 
rieure de  l'os  dont  elle  porte  le  nom  ; 
parvenue  dans  le  voisinage  du  poignet, 
elle  repose  sur  cet  os  et  se  trouve  très 
près  de  la  peau,  de  façon  que  ses  bat- 
tements sont  faciles  à  sentir,  et  que 
les  médecins  la  choisissent  d'ordinaire 
pour  tàter  le  pouls  de  leurs  malades. 
Elle  se  recourbe  ensuite  devant  l'ar- 
ticulation du  poignet  et  gagne  le  dos 
de  la  main,  où  elle  fournit  plusieurs 
branches  parmi  lesquelles  je  citerai 
Vartère  transverse  dorsale  du  carpe, 
qui  s'anastomose  avec  des  branches 
delà  cubitale,  et  la  collatérale  externe 
du  pouce;  puis  elle  passe  entre  le 
premier  et  le  second  os  métacarpien 
pour  s'enfoncer  dans  la  paume  de  la 
main,  et  va  concourir  à  la  formation  des 
arcades  palmaires. 

Vartère  cubitale  fournil  à  la  partie 
interne  du  coude  une  branche  qui  est 
analogue  à  la  récurrente  radiale,  et  se 
divise  en  deux  rameaux,  l'un  antérieur, 
l'autre  postérieur,  dont  les  ramuscules 
s'anastomosent  avec  les  branches  ter- 
minalesde  la  collatérale  interne  du  bras. 

Une  artère  interosseuse  naît  aussi  de 
la  cubitale,  à  peu  de  distance  au-dessous 
du  pli  du  coude,  et  plonge  tout  de  suite 
vers  la  membrane  fibreuse  qui  unit 
entre  eux  les  deux  os  de  l'avant- 
bras  (d).  Là  elle  se  divise  en  une  artère 
interosseuse  antérieure  qui  longe  la 


(a)  Voyez  Bourgery,  t.  IV,  pi.  36,  fig.  2. 

(b)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  pi.  36,  fig.  1. 

(c)  Voyez  les  exemples  de  variations  figure'es  dans  le  grand  ouvrage  de  M.  Tiedemann  (Tab-, 
arter.  corp.  hum.,  pi.  14,  15  et  16),  et  dans  l'Anatomie  descriptive  de  Bourgery  et  Jacob,  t.  IV, 
pi.  38,  fig.  1  à  6. 

{d)  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  36,  fig.  2  et  4. 


Artères 
de  la  main. 


Artères 
des  pattes 
antérieures. 


5'j2  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

dos  du  poignet,  gagne  la  paume  de  la  main,  s'y  anastomose 
avec  l'artère  cubitale,  et  concourt  avec  elle  à  former  des  arcades 
dont  naissent  les  artères  des  doigts.  Celles-ci  occupent  les  côtés 
de  ces  organes  et  s'anastomosent  en  arcade  à  leur  extrémité,  où 
elles  constituent  un  réseau  sous-cutané  très  riche. 

En  général,  la  disposition  des  artères  des  membres  thora- 
ciques  est  à  peu  près  la  même  dans  toute  la  classe  des  Mammi- 
fères (1)  ;  mais  on  y  remarque,  dans  quelques  espèces,  des 


face  antérieure  de  cette  cloison  apo- 
névrolique  jusque  dans  le  voisinage 
du  poignet,  où  elle  la  traverse  pour 
devenir  dorsale  et  s'anastomoser  avec 
l'artère  dorsale  du  carpe  :  et  une  ar- 
tère interosseuse  postérieure  qui  tra- 
verse tout  de  suite  le  ligament  inler- 
osseux  dont  il  vient  d'être  question, 
fournit  une  artère  radiale  récurrente 
postérieure,  et  descend  sous  les  mus- 
cles de  la  face  postérieure  de  l'avant-bras 
auxquels  ses  rameaux  se  distribuent. 
L'artère  cubitale  continue  ensuite 
sa  route  à  la  partie  antérieure  et 
interne  de  l'avant-bras,  en  longeant 
la  face  antérieure  de  l'os  cubilus,  et 
se  termine  dans  la  paume  de  la  main 
par  deux  brandies  dont  l'une  con- 
court à  la  formation  de  Varcade  pal- 
maire profonde  et  l'autre  constitue 
Varcade  palmaire  superficielle  [a). 
Celte  dernière  se  recourbe  transversa- 
lement en  dehors  et  fournit  successi- 
vement une  série  d'artères  digitales 
qui  descendent  dans  les  espaces  inter- 
osseux du  métacarpe,  et  vont  consti- 
tuer directement,  ou  en  se  bifurquant, 
les  artères  collatérales  des  doigts. 
Celles-ci  côtoient  les  bords  latéraux 
des  doigts  et  forment  à  l'extrémité  de 


ces  organes  un  réseau  anastomolique 
assez  développé. 

Varcade  palmaire  profonde  est 
formée  par  l'autre  branche  de  l'artère 
cubitale  et  par  la  portion  terminale 
de  l'artère  radiale  qui  s'anastomosent 
entre  elles.  Cette  arcade  est  située  dans 
la  paume  de  la  main,  entre  les  os  du 
métacarpe  et  les  tendons  des  muscles 
fléchisseurs  des  doigts  et  les  autres 
parties  molles  de  cette  région.  Enfin 
elle  fournit  d'ordinaire  une  série  de 
branches  interosseuses  palmaires  qui 
s'anastomosent  avec  les  artères  di- 
gitales ;  et  des  branches  perforantes 
qui  gagnent  la  face  dorsale  de  la 
main  et  s'y  logent  dans  les  espaces 
interosseux. 

(1)  La  disposition  du  système  artériel 
des  membres  thoraciques  ressemble 
beaucoup  à  ce  qui  existe  chez  l'Homme, 
lors  même  que  le  nombre  des  doigts 
se  trouve  beaucoup  réduit.  Ainsi,  chez 
le  Cheval,  l'artère  brachiale,  qui  des- 
cend le  long  de  la  face  interne  du 
bras,  se  bifurque  dans  le  voisinage 
de  l'extrémité  inférieure  de  l'humérus 
pour  former  deux  artères  qui  repré- 
sentent la  radiale  et  la  cubitale  de 
l'Homme,  et  qui  sont  désignées  par  les 


{a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  pi.  36,  fig.  1,  et  pi.  37.  fig.  1, 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5^0 

particularités  analogues  à  celles  que  nous  avons  déjà  ren- 
contrées dans  l'aile  de  certains  Oiseaux.  En  effet,  les  principaux 
troncs  sont  quelquefois  remplacés  par  un  faisceau  de  petits  vais- 
seaux qui  marchent  parallèlement  entre  eux,  et  s'anastomosent 
de  loin  en  loin  ou  se  réunissent  de  façon  à  constituer  un  plexus 


vélérinaires  sous  les  noms  d'artères 
radiales  antérieur eet  postérieure  (a). 
L'un  de  ces  vaisseaux  se  place  au- 
devant  de  l'os  de  l'avant-bras  et  se 
termine  sur  la  face  dorsale  du  carpe 
où  il  s'anastomose  avec  les  rameaux 
voisins  de  la  branche  postérieure.  Ce 
dernier  vaisseau  descend  derrière  l'os 
de  l'avant-bras,  fournit  une  artère  in- 
terosseuse d'un  volume  considérable, 
et,  parvenu  dans  la  région  carpienne, 
se  divise  en  deux  branches  :  l'une  su- 
perficielle, l'autre  profonde.  La  bran- 
che superficielle  (appelée  artère  col- 
latérale du  canon)  représente,  en 
raison  de  son  volume,  la  continuation 
du  tronc  commun,  et  correspond  à 
l'une  des  artères  digitales  de  l'Homme  ; 
elle  donne  naissance  à  une  arcade 
palmaire  rudimentaire  et,  vers  l'extré- 
mité inférieure  du  canon,  se  divise  en 
deux  rameaux  analogues  aux  artères 
collatérales  des  doigts;  enfin  celles-ci 
s'anastomosent  en  arcade  sous  la  der- 
nière phalange.  La  branche  profonde 
forme  au-dessous  de  la  précédente 
une  arcade  palmaire  profonde  qui 
donne  naissance  à  une  série  de  bran- 
ches interosseuses  métacarpiennes  (6). 


Quelques  anatomistes  considèrent 
la  branche  terminale  antérieure  de 
l'artère  brachiale  (ou  radiale  anté- 
rieure) comme  étant  l'analogue  de 
l'artère  cubitale  de  l'Homme  et  la 
branche  postérieure  comme  représen- 
tant notre  artère  radiale  (c)  ;  mais 
cette  détermination  ne  me  parait  pas 
admissible.  Effectivement  l'artère  ra- 
diale antérieure  du  Cheval,  de  même 
que  notre  artère  radiale,  occupe  le 
côté  interne  du  membre  (  celui-ci 
étant  supposé  dans  la  même  position, 
de  part  et  d'autre,  savoir,  avec  la  face 
palmaire  dirigée  en  arrière),  et  l'ar- 
tère radiale  postérieure  du  Cheval, 
de  même  que  notre  artère  cubi- 
tale, fournit  l'artère  interosseuse,  puis 
se  termine  dans  la  face  plantaire  du 
pied,  à  peu  près  comme  notre  artère 
cubitale  se  termine  dans  la  paume  de 
la  main. 

Pour  la  description  du  mode  de  di- 
vision et  de  distribution  des  artères 
des  membres  thoraciques  chez  les 
Ruminants,  le  Cochon,  les  Carnas- 
siers, etc.,  je  renverrai  aux  ouvrages 
de  Meckel,  Cuvier,  Bai  kow  et  M.  Chau- 
veau  (d). 


(a)  Voyez,  pour  plus  de  détails  à  ce  sujet  :  Chauveau,  Traité  d'analomie  comparée  des  Animaux 
domestiques,  p.  530  et  suiv. 

—  Lcyh,  Handbuch  der  Anatomie  der  Hausthiere,  p.  384,  fig.  165. 
(6)  Voyez  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  533,  fig-.  138. 

(c)  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  531  et  532. 

(d)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  408  et  suiv. 

—  Cuvier,  Leçons  d'anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  126  et  suiv. 

—  Barkow,  Disquisit.  recenliores  {Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  613,  etc.). 

—  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  536  et  suiv. 


III. 


35 


5/lfr  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

à  mailles  serrées.  Ce  mode  d'organisation  a  été  observé  d'abord 
chez  le  Paresseux  et  le  Loris,  animaux  dont  les  mouvements 
sont  extrêmement  lents  ;  mais  il  existe  aussi  chez  tous  les 
Édentés  proprement  dits,  ainsi  que  chez  les  Lamentins  et  les 
Phoques  ;  on  en  trouve  aussi  quelques  vestiges  chez  le 
Cochon  (1) . 

Chez  quelques  autres  Mammifères,  une  tendance  contraire 


(1  )  Carliste,  qui  a  découvert  cette 
disposition  plexiforme  de  l'artère  bra- 
chiale chez  le  Loris  du  Bengale  (Ste- 
nops  tardigradus),  petit  Quadrumane 
de  la  famille  des  Makis  ou  Lémuriens 
que  l'on  désigne  quelquefois  sous  le 
nom  de  Singe  paresseux,  vit  ce  vais- 
seau, en  arrivant  au  bras,  se  diviser 
tout  de  suite  en  un  faisceau  composé  de 
plus  de  vingt  branches  (a).  La  même 
structure  a  été  décrite  chez  le  Loris 
grêle,  par  M.  W.  Vrolik  {b). 

Chez  l'Aï,  ou  Paresseux  àtroisdoigts 
{Bradypus  tridactylus),  une  disposi- 
tion analogue  se  rencontre,  mais  les 
branches  formées  par  le  tronc  brachial 
sont  plus  nombreuses  et  s'anasto- 
mosent plus  fréquemment  entre 
elles  (c).  M.  Gaimard  et  M.  Oken  en 
ont  révoqué  en  doute  l'existence  (d)  ; 
mais  elle  a  été  constatée  par  Meckel, 
M.  Vrolik  et  plusieurs  autres  obser- 


vateurs (e).  Meckel  a  compté  soixante- 
deux  vaisseaux  réunis  ainsi  en  faisceaux 
dans  le  bras  de  cet  animal.  Il  paraît  ce- 
pendant que  l'un  de  ces  tubes,  situé  au 
centre  du  faisceau,  représente  plus  spé- 
cialement le  tronc  de  l'artère  bra- 
chiale. Une  disposition  semblable  se 
voit  chez  le  Bradypus  torquatus  (f). 
Chez  l'Unau,  ou  Paresseux  à  deux 
doigts,  le  nombre  des  branches  dans 
lequel  l'artère  brachiale  se  résout  est 
peu  considérable  (g). 

Chez  le  Fourmilier  à  deux  doigts 
(Myrmecophaga  didactyla),  l'artère 
brachiale  se  divise  en  deux  faisceaux 
de  petits  vaisseaux  qui  s'étendent  dans 
Pavant-bras,  où  l'un  représente  l'ar- 
tère radiale  et  l'autre  la  cubitale  (h). 
Chez  le  Tamandua  (  M.  tetradac- 
tyla),  plusieurs  des  divisions  de  l'ar- 
tère brachiale  sont  représentées  aussi 
par  un  faisceau  de  petites  artères  (i), 


(a)  A.  Carliste,  Account  ofa  Peculiarity  in  the  Distribution  ofthe  Arteries  sent  to  the  Limbs 
of  slow-moving  Animais  (Philos.  Trans.,  1800,  p.  98,  pi.  1). 

(b)  W.  Vrolik,  Disquisit.  anal,  physiol.  de  peculiari  arteriarum  extremitalum  in  nonnullis 
Animalïbus  disposilione,  p.  8,  pi.  2.  Amslerd.,  1826. 

(c)  Carlisle,  Op.  cit.,  pi.  2,  fig-.  1. 

{d)  Gaimard,  Note  sur  le  Paresseux  à  dos  brûlé  (Journal  de  physique,  1822,  t.  XCIV,  p.  389). 

Oken,  Beschreibung  und  Zergliederung  eines  fœtus  von  Bradypus  torquatus  (Beitr.  %ur 

Naturgesch.  von  Brasilien  von  Max.  Pr.  au  Wied,  1826,  t.  II,  p.  496). 

(e)  Vrolik,  Op.  cit. 

—  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  442. 

(f)  Carliste,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1800,  p.  100,  pi.  2,  fig.  3). 

(g)  Hyrll,  Vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  p.  53,  pi.  8,  fi/.  1). 

(k)  Meckel,  Anat.  des  ziueizehigen  Ameisenfressers  (Deutsches  Arch.,  1829,  l.  V,  p.  60). 
_  Vrolik,  Op.  cit.,  p.  6,  pi.  1,  fig.  2. 

—  Hyrll,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  p.  36,  pi.  3,  fig.  2). 
(i)  Idem,  ibid.  (loc.  cit.,  p.  28,  pi.  1,  fig.  2). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5/|5 

s'observe.  Ainsi,  chez  le  Morse,  l'artère  brachiale,  après  avoir 
fourni  la  collatérale  externe  (ou  brachiale  profonde),  se  continue 
jusque  dans  la  main  sans»  se  bifurquer,  et  le  tronc  unique  qui 
représente  ici  les  artères  radiale  et  cubitale  s'y  termine  par 
une  série  de  branches  digitales  dont  les  bifurcations  constituent 
comme  d'ordinaire  les  artères  collatérales  des  doigts  (1). 

11  est  une  autre  particularité  que  je  crois  devoir  signaler  ici, 
bien  qu'elle  n'ait  en  elle-même  que  peu  d'importance.  Chez 
plusieurs  Mammifères,  tels  que  le  Sajou  et  les  Makis,  l'artère 
brachiale  ou  la  cubitale,  pour  se  rendre  de  la  partie  interne  du 
bras  à  la  face  palmaire  de  l'avant-bras,  passe  dans  un  trou  ou 
un  canal  creusé  dans  le  condyle  interne  de  l'humérus  (2). 

et  chez  le    Pangolin  cette  disposition  Chez  le  Cochon,  il  existe  un  petit 

est  encore  plus  prononcée.  plexus  artériel  constitué  aux  dépens 

M.  Allman  a  trouvé  aussi  un  plexus  de  la  branche  interosseuse  de  la  cubi- 

brachial    fasciculaire    chez  le  Tatou  taie  (e). 

Encoubert  (Dasypus  sexcinctus  («),  (1)  L'artère  brachiale  se  continue 

et  M.  Hyrtl  a  fait  connaître  une  dis-  dans  l'avant-bras  et  jusque  sur  le  carpe 

position   analogue  chez   le   Tatou  à  sans  s'être  bifurquée;  mais,  vers  le 

neuf  bandes  {b).  tiers  supérieur  de   l'avant-bras,  elle 

Chez  le  Lamentin,  toutes  les  prin-  donne  naissance  à  une  petite  branche 

cipales  branches  de  l'artère  brachiale,  qui  contourne  l'os  radius  et  qui  repré- 

ainsi  que  le  tronc  de  ce  vaisseau,  sont  sente  l'artère  radiale  (f). 
représentées  par  des  faisceaux  de  petits  (2)  Le  trou  condylien,  dont  l'exis- 

tubes  artériels  (c),  tence  a  été  signalée  depuis  longtemps 

Chez  le  Phoque,  les  artères  des  bras  chez  divers  Singes  {g),  se  trouve  aussi 

et  de  l'avant-bras   affectent  aussi  la  chez  la  Taupe,  parmi  les  Insectivores; 

forme  de  plexus  (d}.  chez  le  Blaireau  ,  la  Loutre ,  les  Mar- 

(a)  Allman,  On  certain  Peculiarities  in  the  Arteries  of  the  Six-bandecl  Armadillo  (Report  of 
IhelStii  meeting  of  the  Brit.  Associât. Cork,,  1843,  sect.,  p.  G8). 

(b)  Hyril,  Op.  cit.  (ilém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  p.  46,  pi.  6,  fig.  1). 

(c)  Baer,  Ueber  die  Geflechte  in  welche  sich  einige  grôssere  Schlagadern  der  Siïugethiere  friih 
auflosen  (Mém.  présentés  à  l'Acad.  des  sciencesde  Saint-Pétersbourg,  1835, 1. 11,  p.  199, fig.  2). 

(d)  Baer,  loc.  cit.,  fig.  1. 

\e)  Barkow,  Disquisiliones  recenliores  de  arteriis  Mammalium  et  Àvium  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  613,  pi.  27,  fig.  2). 

(f)  Baer,  Op.  cit.  (Mém.  présentés  à  l'Académie  de  Saint-Pétersbourg,  t.  H,  p.  201 ,  fig.  3). 

(g)  Coilér,  Extemaram  et  internarum  principalium  humani  corporis  parlium  tabula,  etc. 
p.  61. 

—  Tiedemann,  Ueber  einen  ara  Oberarmbein  bel  mehreren  geschwdnxlen  Affen  vorkommendeu 
Kanal  und  eine  damit  in  Yerbindung  stehende  besondere  Anordnung  der  Arterien  tend  Nerven 
des  Arms  (Meckel's  Deulsches  Archiv  fur  die  Physiol.,  1818,  t.  IV,  p.  544,  pi.  5,  fig.  1  et  2),     - 

—  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  123. 


Aorte 
descendante. 


5/lG  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

J'ajouterai  aussi  que  chez  divers  Mammifères  l'artère  bra- 
chiale se  bifurque  pour  constituer  les  artères  radiale  et  cubitale 
vers  le  milieu  du  bras,  tandis  que  dans  d'autres  espèces  cette 
division  ne  se  fait  qu'assez  loin  au-dessus  de  l'articulation  du 
coude  (1). 

§  12.  —  La  grande  artère  aorte,  après  avoir  fourni  les  troncs 
dont  naissent  les  vaisseaux  destinés  à  la  tête  et  aux  membres 
antérieurs,  s'applique  contre  la  colonne  vertébrale  et  se  dirige 
presque  en  ligne  droite  vers  le  bassin.  Chez  les  Mammifères 
qui  sont  pourvus  d'une  queue  bien  développée,  elle  continue 
ainsi  sa  route  jusqu'à  l'extrémité  de  cet  organe,  en  diminuant 
de  grosseur  peu  à  peu  ;  mais  chez  l'Homme  et  les  Singes  an- 
thropomorphes, de  même  que  chez  les  autres  Mammifères  dont  la 
queue  est  rudimentaire  ou  très  courte,  elle  semble  se  terminer 
à  l'entrée  du  bassin,  au-devant  de  l'os  sacrum,  où  elle  donne 
naissance  aux  artères  des  membres  postérieurs,  et  elle  n'est 
représentée  dans  sa  portion  terminale  que  par  un  petit  vaisseau 

très,  les  Civeltes,  les  Mangoustes,  les  bifurque  dès  le  milieu  du  bras  (c). 
Chats  et  les  Phoques  parmi  les  Car-  Chez  la  Loutre,  la  bifurcation  de 
nassiers;  l'Écureuil,  le  Hamster  et  l'artère  brachiale  n'a  lieu  que  vers  le 
l'Hélamys  parmi  les  Rongeurs  ;  les  milieu  de  l'avant-bras,  après  la  nais- 
Tatous  et  les  Fourmiliers  parmi  les  sance  de  l'artère  inlerosseuse. 
Édentés;  les  Marsupiaux  et  les  Mono-  Il  est  aussi  à  noter  que  le  volume 
trèmes.  Mais  il  ne  donne  pas  toujours  relatif  des  artères  radiale  et  cubitale 
passage  à  l'artère  :  ainsi  Meckel  a  re-  varie  beaucoup  suivant  les  espèces, 
marqué  que  chez  quelques  Fourmi-  Ainsi,  chez  le  Chat,  le  dernier  de  ces 
liers  et  chez  l'Arctomys,  il  n'est  tra-  vaisseaux  n'est  représenté  que  par  une 
versé  que  par  le  nerf  médian  (a).  11  est  branche  très  grêle,  et  c'est  l'artère 
cependant  à  noter  que,  chez  le  Four-  radiale  qui  porte  la  plus  grande  partie 
milier  tamandua,  le  trou  condylien  est  du  sang  à  la  patte  et  qui  fournit  les  ar 
traversé  aussi  par  l'artère  (6).  lères  digitales.  Chez  le  Tigre,  aucon- 
(1)  Ainsi,  chez  les  Sarigues  ,  les  traire,  c'est  l'artère  cubitale  qui  est  la 
Kanguroos  et  la  plupart  des  autres  plus  forte  (d). 
Marsupiaux  ,    l'artère     brachiale    se 

(a)  Meckel,  Traité  d'anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  412. 

(b)  Hyrtl,  Vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  pi.  3,  fig'.  2). 

(c)  Guvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  127. 

(d)  C.uvier,  loc.  cit. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5/l7 

impair  nommé  artère  sacrée  moyenne.  Quelquefois  même  on  ne 
trouve  plus  de  traee  de  l'aorte  dans  cette  région,  et  ce  vaisseau 
se  termine  réellement  là  où  il  se  bifurque  pour  constituer  les 
artères  iliaques  (1). 

Du  reste ,  quelles  que  soient  les  modifications  que  l'on 
remarque  à  cet  égard,  l'aorte  descendante,  ou  aorte  postérieure, 
se  comporte  à  peu  près  de  même,  et  donne  naissance  à  trois 
systèmes  de  branches  destinés,  l'un  à  la  colonne  vertébrale  et 
à  ses  dépendances,  un  autre  aux  principaux  viscères  abdomi- 
naux, -et  le  troisième  aux  membres  postérieurs  et  aux  parties 
externes  de  la  région  pelvienne. 

J'ajouterai  que  quelquefois  l'artère  caudale,  formée  par  la  por- 
tion terminale  de  l'aorte,  s'entoure  d'un  plexus  vasculaire  analo- 
gue à  celui  que  nous  avons  déjà  rencontré  dans  le  crâne  de  divers 
Mammifères.  Cette  structure  a  été  observée  chez  le  Marsouin  (2), 


(1)  Cette  disposition  se  voit  chez  le  chio-céphalique  ou  vertébral ,  le  font 

Lamentin,  où  des  branches  des  artères  à  la  partie  supérieure  du  thorax, 

iliaques  internes  (ou  hypogastriques)  (2)  M.  Baer,  en  signalant  l'existence 

pénètrent  dans  le  canal  sous-rachidien  de  ce  plexus,  avait  pensé  qu'il  tenait 

pour  constituer  le  système  artériel  de  lieu    de    l'artère    caudale    (c).    Mais 

la  région  caudale  (a).  M.  Stannius  a  vu  que  ce  vaisseau  en 

11  est  aussi  à  noter  que  chez  l'Homme  est  seulement  entouré  comme  d'une 

et  beaucoup  d'autres  Mammifères,  les  gaine,  et  poursuit  sa   route  en  ligne 

branches  transversales  de  ce  système,  droite  jusque  auprès  de  la  nageoire 

au  lieu  de  provenir  toutes  de  l'artère  caudale,  en  fournissant  à  droite  et  à 

sacrée  moyenne,  partent  pour  la  plu-  gauche  une  série  de  branches  ana- 

part   de  deux  troncs  collatéraux  qui  logues  aux  artères  lombaires.  Le  tronc 

se  détachent  des  artères  iliaques  in-  artériel,  ainsi  enveloppé  d'un  lacis  de 

ternes,  et  se  comportent  dans  la  région  vaisseaux  très  fins,  disposés  sur  plu- 

du  sacrum  (6)  à  peu  près  de  la  même  sieurs  couches,  est  logé  dans  le  canal 

manière  que  les  artères   thoraciques  sous- vertébral  (d). 
postérieures,  provenant  du  tronc  bra- 


(a)  Stannius,  Beitrage  zur  Kenntniss  der  amerikanischen  Manatïs',  p.  33. 

(b)  Voyez  Bourgery,-Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  16  et  24. 

(c)  Baer,  Ueber  das  Gefàss- System  des  Braunfisches  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XVII 
p.  405). 

(d)  Stannius,  Ueber  den  Verlauf  der  Arterien  bel  Delphinus  phocœna   (Mùller's  Archiv  (ùrAnat. 
uni  Physiol.,  184-1,  p.  398). 


5/j8  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

les  Fourmiliers ,  le  Pangolin  ,  le  Tatou  et  quelques  autres 
Mammifères  (1). 
Artères  §  13.  —  Les  artères  du  système  rachidien  naissent  par  paires 
de  la  faee  dorsale  du  tronc  aortique,  au  niveau  des  diverses  ver- 
tèbres de  la  portion  postcéphalique  du  corps,  et  se  portent  en 
dehors  pour  se  répandre  dans  les  parois  de  la  grande  cavité  vis- 
cérale. Dans  le  thorax,  elles  suivent  le  bord  inférieur  des  côtes,  et 
sont  désignées  sous  le  nom  d'artères  intercostales.  Dans  la  région 
lombaire,  où  les  côtes  manquent,  elles  suivent  encore  la.même 
direction,  et  sont  appelées  artères  lombaires.  Dans  la  région 
pelvienne,  on  en  trouve  encore  des  vestiges,  et,  chez  les  Animaux 
à  grosse  queue,  les  analogues  de  ces  vaisseaux  se  détachent 
de  la  portion  terminale  de  l'aorte  de  vertèbre  en  vertèbre. 
Enfin,  dans  la  région  cervicale,  ces  mômes  vaisseaux  sont  re- 
présentés par  une  série  de  branches  provenant  des  artères 
vertébrales,  de  sorte  que,  dans  toute  la  longueur  de  la  portion 
postcéphalique  du  corps  ,  ce  système  se  trouve  constitué  à 
peu  près  de  la  même  manière  dans  chaque  tronçon  corres- 
pondant à  une  vertèbre.  Mais  c'est  dans  le  thorax  que  ces 
artères  latérales  sont  le  plus  développées.  Là  chacune  d'elles, 
aussitôt  arrivée  dans  l'espace  intercostal  correspondant,  se 
divise  en  deux  branches  :  l'une,  dorsale,  passe  entre  les  apo- 
physes transverses  des  vertèbres,  et,  après  avoir  fourni  un 
rameau  qui  pénètre  dans  le  canal  vertébral  pour  s'y  distribuer 
à  la  moelle  épinière  et  à  ses  enveloppes,  va  se  répandre 
dans  les  muscles  et  les  téguments  du  dos  ;  l'autre  branche  de 
l'artère  intercostale  continue  sa  route  en  dehors,  se  loge  dans 
une  gouttière  creusée  au  bord  inférieur  de  la  côte  adjacente, 

(1)  Voyez,  à  ce  sujet,  les  recherches  de  M.  Vrolik  et  de  M.  Hyrtl  (a), 

(a)  Vrolik,  Disquisit.  de  peculiari  arteriarum  extremitatum  in  nonnullis  Animalibus  disposi- 
tions, 182G. 

—  Hyrll,  Vergleichende  Angiologie.  Artérielle  Gefâss-System  der  Edentaten  (Denkschriften  der 
Akad.  der  Wissensch.  %u  Wien,  1854,  t.  VI,  pi.  2,  fîg\  2  ;  pi.  4,  fig.  1  ;  pi.  7,  %.  1). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  5/t9 

fournit  des  ramuscules  aux  muscles  intercostaux,  et  se  termine 
à  la  partie  antérieure  du  thorax,  où  elle  s'anastomose  avec  des 
rameaux  de  l'artère  mammaire  et  d'autres  vaisseaux  de  cette 
région  (1). 

La  disposition  des  artères  intercostales  est  à  peu  près  la  même 
chez  presque  tous  les  Mammifères,  sauf  quelques  variations 
dans  leur  nombre  et  le  mode  d'origine  de  celles  de  la  partie 
antérieure  du  thorax  (2);  mais,  chez  la  plupart  des  Cétacés, 
elles  sont  entourées  par  une  multitude  de  petites  artères 
flexueuses  qui  naissent  principalement  d'une  série  de  branches 
impaires  fournies  par  l'aorte,  et  qui  se  prolongent  sur  la  paroi 
dorsale  du  thorax,  de  façon  à  y  constituer  deux  plexus  vascu- 
laires  énormes  (S). 


(1)  Chez  l'Homme,  les  artères  inter- 
costales correspondantes  aux  côtes  des 
deur  ou  trois  premières  paires  nais- 
sent d'un  tronc  commun  provenant 
de  l'artère  sous  -  clavière,  de  façon 
que  l'aorte  n'en  fournit  directement 
que  huit  ou  neuf  paires  ;  mais  leur 
origine  n'influe  pas  notablement  sur 
leur  direction,  ni  sur  leur  mode  de 
distribution. 

Les  arlères  lombaires,  qui  repré- 
sentent ces  artères  intercostales  là  où 
la  colonne  vertébrale  cesse  de  porter 
des  côtes  et  n'est  pas  encore  unie  aux 
os  des  hanches  pour  former  le  bassin, 
ne  sont  qu'au  nombre  de  trois  ou  cinq 
paires,  et  leur  branche  antérieure  est 
peu  développée.  Enlin,  les  branches 
latérales  de  l'artère  sacrée  moyenne  de 
l'Homme  sont  rudimentaires. 

Toute  la  portion  cervicale  thora- 


cique  et  abdominale  de  ce  système 
d'artères  a  été  très  bien  représentée 
par  Bourgery  et  Jacob  (a). 

('2)  Ainsi,  chez  le  Cheval,  la  pre- 
mière intercostale  vient  de  l'artère 
cervicale  supérieure  ;  les  trois  suivantes 
naissent  tantôt  du  même  vaisseau, 
tantôt  d'un  tronc  commun  fourni  par 
l'aorte,  et  les  treize  suivantes  sortent 
directementde  cette  dernière  artère  (b). 
Elles  sont  suivies  par  cinq  ou  six  paires 
d'artères  lombaires  dont  la  dernière 
provient  de  l'artère  iliaque. 

(3)  Les  gros  paquets  de  vaisseaux 
flexueux  ainsi  constitués  avaient  été 
remarqués  chez  le  Marsouin  par 
Tyson,  qui  les  considérait  comme  une 
sorte  de  glande  vasculaire  (c).  limiter 
en  a  bien  reconnu  la  nature  chez  la 
Baleine  (d;,  et  pi  us  récemment  la  dispo- 
sition de  ces  plexus  a  été  étudiée  avec 


(a)  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  22. 

(6)  Voyez  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  486,  fig.  157. 

(c)  Tyson,  Anatomy  of  a  Porpesse,  p.  32,  pi.  2,  fig.  7,  et  Dublin  Philos.  Journ.,  1820,  l.  II, 
p.  196. 

(d)  Hunier,  Observ.  on  the  Struct.  and  Economy  of  IV haies  (Philos.  Trans.,  1787,  p.  571,  et 
Œuvres,  t.  IV,  p.  465). 


550 
$.14. 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Ancres         §  ift.  —  Le  système  des  artères  viscérales,  auquel  se  ratla- 

dos  viscères  x 

abdominaux,  chent  quelques  petites  branches  œsophagiennes  (1)  et  bron- 


plus  de  soin  par  Breschet  et  par 
M.  Stannius  (a).  Breschet  en  a  constaté 
l'existence  chez  le  Delphinus  globiceps 
et  chez  un  fœtus  de  Baleine  aussi  bien 
que  chez  le  Marsouin  ;  M.  Jackson 
les  a  aperçus  chez  le  Delphinus  del- 
phis  (b)  ;  enfin  M.  Slannius  les  a  ren- 
contrés chez  le  Lamentin  (c) ,  mais  il 
paraîtrait,  d'après  les  observations  de 
M»  Owen ,  qu'ils  manquent  chez  le 
Dugong  {d). 

Chez  le  Marsouin,  les  artères  inter- 
costales des  cinq  premières  paires  sont 
formées  de  chaque  côté  par  un  tronc 
unique  (ou  artère  thoracique  posté- 
rieure, Stannius)  qui  naît  de  l'aorte  à 
gauche  et  du  tronc  brachio-céphalique 
à  droite,  Celles  de  la  sixième  paire  et 
des  paires  suivantes  proviennent  de 
l'aorte  ,  soit  par  des  troncs  impairs 
qui  se  bifurquent  (ainsi  que  cela  se  voi^ 
pour  celles  des  sixième,  septième  et 
huitième  paires),  soit  isolément.  Enfin, 
au-devant  d'elles,  l'aorte  donne  aussi 
naissance  à  deux  brandies  impaires, 
qui  bientôt  se  bifurquent  pour  aller  se 
ramifier  dans  les  deux  plexus  thora- 
ciques.  Les  intercostales  fournissent 
comme  d'ordinaire  des  branches  dor- 
sales et  des  branches  qui  longent  les 
côtes,  mais  elles  donnent  aussi  nais- 
sance à  un  grand  nombre  de  rameaux 
flexueux  qui  se  pelotonnent  autourdes 
premières  et  entrent  dans  la  constitu- 


tion du  plexus.  Celui-ci  occupe  l'espace 
du  médiastin  postérieur  et  s'étend  entre 
les  côtes,  jusque  sur  la  partie  dorsale  de 
la  colonne  vertébrale;  en  arrière,  il  ne 
dépasse  guère  la  neuvième  côte,  mais 
en  avant  il  se  prolonge  dans  le  cou  et 
se  relie  au  plexus  cervical.  Les  vais- 
seaux qui  le  constituent  sont,  les  uns 
thoraciques,  les  autres  dorsaux.  Les 
premiers  proviennent  :  1°  des  artères 
thoraciques  postérieures  dont  naissent 
aussi  les  intercostales  des  cinq  pre- 
mières paires  ;  2°  des  deux  troncs  im- 
pairs qui  se  détachent  de  l'aorte  au- 
devant  du  tronc  également  impair 
dont  naissent  les  intercostales  de  la 
sixième  paire;  3° des  intercostales  des 
sixième,  septième,  huitième  et  neu- 
vième paires.  Les  racines  dorsales  du 
plexus  sont  fournies  par  des  branches 
de  l'artère  méningée  spinale,  qui  pro- 
vient de  l'artère  carotide  interne  ; 
branches  qui  sortent  du  canal  verté- 
bral par  les  trous  de  conjugaison  et 
se  pelotonnent  déjà  dans  la  région 
dorsale.  Ainsi  les  branches  de  distri- 
bution des  artères  intercostales  ne  se 
résolvent  pas  en  capillaires  pour  consti- 
tuer ce  rete  mirabile,  mais  le  traversent 
seulement  pour  se  rendre  à  leur  des- 
tination ordinaire,  et  le  plexus  est  un 
appareil  vasculaire  surajouté  à  ces 
vaisseaux  (e). 
(1)  Les  artères  œsophagiennes  sont 


(a)  Breschet,  Histoire  anatomique  et  physiologique  d'un  organe  de  nature  vasculaire  découvert 
dans  les  Cétacés.  In-4, 1836,  pi.  2  et  3. 

—  Stannius,  Ueber  den  Verlaufder  Arterien  bei  Delphinus  phocœna  (Miiller's  Archiv  fur  Anat. 
und  Physiol.,  1841,  p.  392). 

(b)  J.  B.Jackson,  Dissection  of  a  Spermaceti  Whale  and  three  other  Cetaceous  (Boston  Joum. 
ofNat.  Hist.,  1845,  vol.  V,  p.  158). 

(c)  Stannius,  Beitrâge  %ur  Kenntniss  der  amerikanischen  Manati's  (Zur  Geschichte  der  Natur- 
wissensch.  Institute  der  Universitat  Rostock,  1846,  p.  32).  ^ 

(d)  Owen,  On  the  Anatomy  of  the  Dugong  (Proceedings  of  the  Zool.  Soc,  1838,  p.  35). 

(e)  Slannius,  Op.  cit. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  551 

chiques  fournies  par  la  portion  thoracique  de  l'aorte,  se  compose 
principalement  des  artères  cœliaque,  mésentérique  supérieure, 
spermatiques,  capsulaires  moyennes,  rénales  et  mésentérique 
inférieure,  qui  naissent  toutes  dans  l'abdomen. 

Chez  l'Homme ,  Y  artère  cœliaque  (!)  se  sépare  du  tronc 
aortique  immédiatement  après  que  celui-ci  a  traversé  le  dia- 
phragme, et  elle  ne  tarde  pas  à  se  diviser  en  trois  branches  (2), 
dont  Tune,  appelée  artère  coronaire  stomachique,  ou  gastrique 
supérieure,  suit  la  petite  courbure  de  l'estomac  et  distribue 
ses  rameaux  à  ce  viscère  ainsi  qu'à  l'œsophage  (3).  Une  autre 
de  ces  divisions  du  tronc  cœliaque  constitue  Y  artère  hépatique, 
qui  se  termine  dans  le  foie,  après  avoir  donné  une  petite  artère 


Artère 
cœliaque. 


de  très  petits  vaisseaux  qui,  au  nombre 
de  trois  ou  quatre  (ou  même  davantage) 
naissent  de  la  face  antérieure  de  l'aorte 
thoracique  et  vont  se  ramifier  dans  la 
portion  voisine  de  l'œsophage  (a).  Les 
artères  mécliastines  postérieures  qui 
se  distribuent  au  médiastin  naissent 
tantôt  des  artères  œsophagiennes , 
d'autres  fois  du  tronc  aortique  ou 
même  des  artères  intercostales. 

L'aorte,  en  ira  versant  le  diaphragme, 
fournit  à  ce  muscle  une  paire  d'artères 
dites  diaphragmatiques  inférieures, 
parce  que  celte  cloison  charnue  reçoit 
aussi  une  paire  d'artères  qui  naissent 
plus  haut  et  qui  se  répandent  sur  sa 
partie  supérieure  et  antérieure.  Ces 
dernières,  appelées  diaphragmatiques 
supérieures,  sont  des  branches  des  ar- 
tères mammaires  internes  (b). 

(1)  C'est-à-dire,  artère  ventrale.  De 
xcûta,  ventre. 


(2)  Les  anatomisles  désignent  quel- 
quefois ce  vaisseau  sous  le  nom  de 
trépied  de  Haller,  à  cause  de  la  com- 
paraison que  cet  auteur  emploie  pour 
en  indiquer  la  forme. 

[^)Vartère  coronaire  stomachique, 
moins  grosse  que  les  deux  autres 
branches  terminales  du  tronc  cœliaque, 
se  porte  obliquement  en  haut  et  en 
avant  vers  l'extrémité  inférieure  de 
l'œsophage,  puis  se  contourne  à  droite, 
en  longeant  la  petite  courbure  de 
l'estomac,  et  va  se  terminer  près  du 
pylore  en  s'y  anastomosant  avec  une 
branche  de  l'artère  hépatique  (c).  Pen- 
dant ce  trajet,  elle  fournit  quelques 
branches  ascendantes  qui  vont  à  l'œso- 
phage, et  beaucoup  de  branches  trans- 
verses ou  descendantes  qui  se  ré- 
pandent sur  les  parois  de  l'estomac  et 
y  forment  quelques  anastomoses  avec 
des  branches  de  l'artère  splénique. 


(a)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  ii. 

(b)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  t.  IV,  pi.  1  5. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  20. 

(c)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  V,  pi.  20  et  20  bis. 

—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  21  «t  22. 


552 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


dite  pylorique,  destinée  à  l'estomac,  et  une  artère  gastro- 
épiploïque  droite  dont  les  ramuscules  se  rendent  dans  le  pylore, 
au  pancréas  et  à  l'épiploon,  pour  s'y  anastomoser  avec  l'artère 
mésentérique  supérieure  (1).  Enfin,  le  troisième  de  ces  vais- 
seaux porte  le  nom  d'artère  splénique,  et  après  avoir  fourni 
des  rameaux  au  pancréas,  une  artère  gastro-épiploïque  gauche 
et  plusieurs  vaisseaux  courts  qui  se  rendent  à  l'estomac  pour 
s'anastomoser  avec  des  rameaux  de  la  coronaire  stomachique,  il 
se  termine  par  un  grand  nombre  de  branches  qui  pénètrent  dans 
la  rate  (2). 


(1)  V artère  hépatique  se  dirige 
transversalement  de  gauche  à  droite, 
et  gagne  ainsi  le  sillon  transversal  du 
foie  où  elle  se  bifurque  avant  de  péné- 
trer dans  cet  organe  [a).  L'artère  pylo- 
rique, qui  en  naît,  va  s'anastomoser 
avec  l'extrémité  de  la  coronaire  stoma- 
chique, de  façon  à  former  avec  elle 
une  arcade.  V artère  gastro-épiploïque 
droite  s'en  sépare  un  peu  plus  loin, 
descend  derrière  le  duodénum,  et  se 
recourbe  ensuite  à  gauche  pour  suivre 
la  grande  courbure  de  l'estomac  et  s'y 
terminer  en  s'anastomosant  avec  sa 
congénère.  Pendant  ce  trajet  elle  four- 
nit plusieurs  branches  ascendantes  au 
pylore  et  à  l'estomac,  ainsi  que  des 
branches  descendantes  qui  se  logent 
dans  l'épiploon  et  se  terminent  à  l'arc 
transversal  du  côlon. 

Enfin  Vartèrecystique,  qui  naît  de 
la  branche  terminale  droite  de  l'artère 
hépatique,  est  très  grêle  et  se  répand 
dans  les  parois  de  la  vésicule  du  fiel. 

(2)  L'artère  splénique  de  l'Homme 
est  la  plus  grosse  des  trois  branches  ter- 
minales du  tronc  cœliaque;  elle  descend 
obliquement  derrière  l'estomac,    en 


décrivant  des  flexuosités  plus  ou  moins 
nombreuses  et  en  se  logeant  dans  une 
rainure  creusée  dans  le  bord  supérieur 
du  pancréas  (6).  Les  branches  qu'elle 
fournit  à  cette  glande  sont  assez  grosses 
et  varient  en  nombre.  L'artère  gastro- 
épiploïque  gauche ,  qui  en  naît  au 
niveau  de  la  grosse  tubérosité  de  l'es- 
tomac, gagne  la  grande  courbure  de 
cet  organe,  et,  comme  je  l'ai  déjà  dit, 
s'y  anastomose  avec  l'artère  gastro- 
épiploïque  droite.  Les  branches  ascen- 
dantes qui  naissent  de  l'arcade  vascu- 
laire  ainsi  constituée  se  répandent  sur 
les  deux  faces  de  l'estomac  et  s'y 
anastomosent  avec  les  autres  artères 
de  cet  organe,  de  façon  à  former  un 
réseau  à  grosses  mailles  irrégulières. 
Enfin  les  branches  appelées  vaisseaux 
courts  naissent  ordinairement  d'un  ou 
de  plusieurs  des  rameaux  terminaux 
de  l'artère  splénique,  au  moment  où 
ceux-ci  pénètrent  dans  la  rate,  et  elles 
retournent  vers  le  grand  cul-de-sac  de 
l'estomac  et  vers  le  cardia,  où  elles 
s'anastomosent  avec  les  branches  pro- 
venant de  l'artère  coronaire  stoma- 
chique. 


{a)  Voyez  Bourgery,  Awtomie  descriptive,  t.  V,  pi.  3G. 

—  Tiedemann,  loc.  cit. 

(b)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  22,  fîg.  1. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  553 

Le  mode  de  distribution  de  l'artère  cœliaque  est  à  peu  près 
le  même  chez  tous  les  Mammifères  ;  seulement,  au  lieu  de  se 
diviser  immédiatement  en  trois  branches,  il  arrive  souvent 
qu'elle  fournit  successivement  les  artères  gastrique,  hépatique 
et  splénique  (1). 

Chez  le  Cochon,  la  branche  gastrique  de  ce  tronc  artériel 
présente  cependant  une  particularité  remarquable,  car  elle  se 
résout  en  un  plexus  avant  de  se  ramifier  sur  la  paroi  postérieure 
de  l'estomac  (2). 

V artère  mésentérique  supérieure  naît   de  l'aorte  ventrale, 


(1)  Cette  disposition  se  rencontre 
chez  les  Ruminants,  Ainsi,  chez  le  Mou- 
ton, le  tronc  cœliaque  descend  sur  la 
panse  et  fournit  successivement  : 
1°  plusieurs  petites  artères  diaphrag- 
matiques;  2°  une  artère  splénique,  qui, 
à  son  origine,  fournit  souvent  l'artère 
supérieure  de  la  panse;  3° l'artère  du 
bonnet,  qui  se  divise  en  deux  branches, 
l'une  supérieure,  l'autre  inférieure, 
lesquelles  naissent  souvent  isolément  ; 
l\°  l'artère  hépatique,  et  5°  une  artère 
gastrique,  dont  une  branche  supérieure 
passe  sur  le  feuillet  et  suit  la  petite 
courbure  de  la  caillette  pour  aller  se 
terminer  par  inosculation  dans  une 
branche  duodénale  de  l'artère  hépa- 
tique ;  l'autre  branche  franchit  la 
grande  courbure  de  la  caillette  pour 
aller  se  perdre  clans  l'épiploon  (a). 

Chez  le  Chat,  la  cœliaque  fournit 
d'abord  une  artère  capsulaire  droite, 


puis  l'hépatique,  ensuite  la  gastrique, 
et  se  termine  par  la  splénique  (b). 

Chez  le  Cheval,  le  mode  de  division 
du  tronc  cœliaque  est  à  peu  près  le 
même,  que  chez  l'Homme  (c). 

Chez  le  Porc-Épic,  le  tronc  cœliaque 
se  bifurque  :  la  branche  gauche  con- 
stitue l'artère  splénique,  et  sa  branche 
droite  se  subdivise  en  artères  hépa- 
tique et  gastrique  (d). 

Cuvier  a  trouvé  le  tronc  cœliaque 
confondu,  à  son  origine,  avec  l'artère 
mésentérique  supérieure  chez  le  Mar- 
souin (e).  Mais  celte  disposition  n'est 
pas  constante  (/"). 

(2)  Ce  rete  mirabile  gastrique  a  été 
décrit  et  figuré,  il  y  a  une  quinzaine 
d'années,  par  Barkow  (g),  mais  paraît 
avoir  échappé  aux  recherches  des  au- 
teurs qui,  dans  ces  derniers  temps, 
ont  écrit  sur  l'anatomie  des  animaux 
domestiques. 


Artères 
mésentériques. 


(a)  Voyez  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  499,  fig.  152. 

(b)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  146. 

(c)  Voyez  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  490,  fig.  149. 
—  Leyh,  Op.  cit.,  p.  393,  fig.  168. 

(d)  Cuvier,  Anat.  comp.,  t.  VI,  p.  147. 

(e)  Cuvier,  Anat.  comp.,  t.  VI,  p.  148. 

(f)  Stannius,  Ueber  den  Verlattf  der  Arterien  bei  Delpliinus  pliocsena  (Mùller's  Archiv,  1841, 
p.  394). 

(g)  Barkow,  Disquisitiones  recentiores  de  arteriis  MammaUnm  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios., 
i.  XX,  p.  014,  pi.  28,  fig.  4). 


554  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

immédiatement  au-dessous  du  tronc  cœliaque,  et  distribue  ses 
branches  à  l'intestin  grêle  et  à  la  moitié  droite  du  gros  intestin. 
Elle  descend  entre  les  deux  lames  du  mésentère,  et  décrit  une 
légère  courbure,  de  la  convexité  de  laquelle  il  part  un  nombre 
considérable  de  grosses  branches  qui  se  bifurquent  pour  s'ana- 
stomoser entre  elles  et  constituer  des  arcades.  Le  bord  convexe 
de  celles-ci  produit  d'autres  branches  qui,  en  s'anastomosant 
d'une  manière  analogue,  forment  une  seconde  série  d'arcades 
plus  petites,  auxquelles  succède  une  troisième  série  d'anses 
vasculaires  disposées  de  la  même  manière,  mais  encore  plus 
petites  ;  puis,  dans  la  partie  moyenne  de  ce  système  de  vaisseaux, 
un  quatrième  ou  même  un  cinquième  ordre  d'arcades,  dont  la 
convexité  est  dirigée  vers  l'intestin,  donne  enfin  naissance  à 
une  multitude  de  ramuscules  qui  vont  se  répandre  dans  les 
parois  de  cette  portion  du  tube  digestif  (1).  D'autres  branches 
naissent  de  la  concavité  de  l'artère  mésentérique  supérieure,  et 
vont  former  de  grandes  arcades  le  long  du  gros  intestin  auquel 
leurs  ramuscules  se  distribuent.  Enfin,  dans  les  premiers  temps 
de  la  vie  intra-utérine,  cette  artère  fournit  aussi  une  branche 
ombilicale,  appelée  artère  omphalo -mésentérique,  qui  sort  de 
l'abdomen  pour  se  loger  dans  le  cordon  ombilical  et  se  rendre 
à  la  vésicule  du  même  nom  (2). 


(1)  Chacune  de  ces  branches  se  di-  Pour  la  disposition  générale  de  Paf- 

vise  en  deux  ordres  de  rameaux  :  les  1ère  mésentérique  supérieure,  voyez 

uns  sont  superficiels  et  se  répandent  les  planches  de  M.  ïiedemann  ou  de 

sur  l'intestin  en   marchant   sous   sa  Bourgery  (a). 

tunique  péritonéale,  et  vont  s'anasto-  (2)  Nous  reviendrons  sur  ce  vaisseau 

moser  sur   son    bord   convexe;   les  lorsque  nous  étudierons  le  dévelop- 

autres  sont  profonds  et  pénètrent  jus-  pement  de  l'embryon  ;  son  trajet  se 

qu'à  la  tunique  muqueuse,  où  ils  con-  voit  dans  les  planches  de  M.  Coste  (6). 
stituent  un  réseau  inextricable. 

(a)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  23  et  24  (réduites  dans  Sappcy,  Op.  cit.,  t.  I,  Hg.  128  et  129). 
—  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  V,  pi.  27. 

(6)  Coste ,  Histoire  générale  dit.  développement  des  êtres  organisés,  espèce   humaine,  pi  3  a, 
fig.  i  ;  pi.  4  a,  fig.  i . 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  555 

L'artère  mésentérique  inférieure  naît  beaucoup  plus  bns,  et 
complète  cet  ensemble  des  vaisseaux  de  l'intestin  en  allant 
distribuer  ses  branches  à  la  portion  gauche  du  gros  intestin  et 
au  rectum  (1). 

Les  particularités  qui  s'observent  dans  le  mode  de  division 
de  ces  vaisseaux,  chez  les  autres  Mammifères  ordinaires, 
n'offrent  rien  d'important  à  noter  ;  mais  il  est  à  remarquer 
que  chez  les  Marsupiaux  les  artères  mésentériques  postérieures 
manquent  (2). 


(1)  Voyez  les  Iconographies  anato- 
m iq ues  (a). 

(2)  M.  Owcn  considère  l'absence 
de  l'artère  mésentérique  inférieure 
comme  étant  constante  dans  l'ordre 
des  Marsupiaux  et  comme  se  liant  au 
mode  particulier  de  suspension  des 
intestins  chez  ces  Mammifères  (b). 

Chez  le  Cheval,  l'artère  mésenté- 
rique antérieure  (ou  grande  mésen- 
térique )  présente  une  disposition 
plus  compliquée  que  chez  l'Homme, 
et  les  branches  qui  en  partent  for- 
ment trois  faisceaux  assez  distincts  (c), 
savoir  :  1°  un  faisceau  gauche,  com- 
posé de  quinze  à  vingt  artères  de  l'in- 
testin grêle,  qui,  arrivées  près  du  bord 
mésentérique  de  l'intestin,  se  bifur- 
quent pour  s'anastomoser  en  une  série 
d'arcades  dont  naissent  les  rameaux  de 
distribution  (cl)  ;  —  2°  un  faisceau  droit, 
composé  de  V artère  iléo-cœcale,  qui 
suit  le  bord  de  la  portion  terminale 
de  l'intestin  grêle,  et  forme,  par  son 


inosculation  avec  la  dernière  branche 
du  faisceau  précédent,  une  grande 
arcade  ;  d'une  artère  cœcale  supé- 
rieure ou  externe,  qui  se  loge  dans  le 
sillon  antérieur  du  caecum  et  se  dis- 
tribue aux  parois  de  celle  portion 
de  l'intestin  ;  d'une  artère  cœcale  in- 
férieure, qui  contourne  la  face  externe 
du  caecum,  donne  naissance  à  une 
branche  remarquable  destinée  à  l'arc 
du  côlon,  et  se  termine  en  s'anastomo- 
sant  avec  la  caecale  interne  ;enfm,  d'une 
artère  colique  droite  ;  —  3°  un  fais- 
ceau antérieur  composé  d'une  artère 
colique  gauche,  qui  se  réunit  par 
inosculation  avec  la  précédente  et  con- 
stitue ainsi  une  arcade  très  allongée 
appartenant  à  l'anse  du  côlon  (e)  ;  en- 
lin,  d'une  artère  colique  postérieure, 
qui  suit  le  bord  et  la  portion  flottante 
du  côlon  et  s'anastomose  en  arcade 
avec  une  des  branches  de  la  mésenté- 
rique postérieure  ou  petite  mésenté- 
rique. Cette  dernière  artère  [f)  décrit 


(a)  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  24. 

—  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  VIII,  pi.  31. 

{b)  Owen,  Marsupialia  (Todd's  Cyclop.  of  Anal,  and  Physiol.,  vol.  IH,  p.  308,  fig-.  134). 

(c)  Voyez  Chauvcau,  Op.  cit.,  p.  493,  fig'.  150. 

(d)  Voyez  Leyh,  Op.  cit.,  p.  397,  fig.  169. 

(e)  Leyh,  Op.  cit.,  p.  398,  fig.  170. 

(/')  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  496,  fig.  151. 

—  Leyh,  Op.  cit.,  p.  401,  fig.  168. 


556 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Artères 
rénains. 


Artères 
capsulaires. 


Artères 

spermatiques 


Les  artères  rénales  sont  paires  et  naissent  de  l'aorte  ventrale, 
un  peu  au-dessus  de  la  mésentérique  inférieure  ;  elles  se  por- 
tent directement  en  dehors,  et,  après  avoir  fourni  quelques 
petits  rameaux  aux  capsules  surrénales,  elles  se  divisent  en 
plusieurs  branches  et  plongent  dans  la  substance  des  reins,  où 
elles  se  résolvent  en  un  réseau  capillaire  dont  je  ferai  connaître 
la  disposition  remarquable  quand  je  traiterai  de  la  structure 
intime  de  ces  glandes  (1).  - 

Quant  aux  artères  capsulaires  moyennes,  qui  naissent  de 
l'aorte  au-dessus  des  précédentes  et  qui  se  rendent  aux  capsules 
surrénales,  elles  sont  très  petites  et  ne  présentent  rien  d'im- 
portant à  noter. 

Enfin,  les  artères  spermatiques  naissent  de  l'aorte,  vers  le 
niveau  de  l'origine  des  rénales,  et  se  portent  immédiatement 
en  bas,  pour  gagner  le  bassin  et  se  rendre  aux  ovaires  ou  aux 
testicules.  Chez  l'Homme,  elles  sortent  de  l'abdomen  par  le 
canal  inguinal;  elles  sont  remarquables  par  leur  grande  lon- 
gueur, et,  comme  nous  le  verrons  plus  tard,  cette  particula- 
rité dépend  du  déplacement  que  les  glandes  auxquelles  elles  se 
distribuent  éprouvent  pendant  le  développement  du  fœtus  (2). 


une  courbe  en  se  rendant  au  rectum, 
et,  chemin  faisant,  donne  à  la  portion 
flottante  ou  terminale  du  côlon  des 
branches  dont  les  premières  forment 
des  arcades  comme  les  précédentes,  et 
les  autres  se  ramifient  directement 
dans  les  parois  de  l'intestin. 

Chez  les  Ruminants,  la  disposition 
de  ces  vaisseaux  est  à  peu  près  la  même 
que  chez  le  Cheval.  La  mésentérique 
postérieure  est  très  petite  chez  ces 
animaux  ainsi  que  chez  les  Carnas- 
siers. 


Chez  le  Marsouin  ,  la  mésentérique 
postérieure  naît  de  l'artère  iliaque  (a). 

Carlisle  indique  l'existence  d'une 
disposition  plexiforme  dans  les  ar- 
tères des  parois  du  gros  intestin  chez 
l'Agouti  (6). 

(1)  Chez  l'Homme,  ces  artères  sont 
courtes  et  grosses  (c)  ;  quelquefois 
l'aorte  envoie  deux  artères  ù  l'un  des 
reins. 

('2)  Les  artères  spermatiques  des- 
cendent de  la  région  lombaire,  derrière 
le  péritoine,  jusque  dans  le  bassin, 


(a)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  150. 

(b)  Carlisle,  Continuation  of  an  Account  ofa  Peculiar  Arrangement  in  the  Arleries  distributed 
in  the  Muscles  o[  sloiu-movin g  Animais  (Philos.  Trans.,  1804,  p.  19,  pi.  1,  lig.  2), 

(c)  Voyez  Bourgery,  t.  IV,  pi.  24  ;  t.  V,  pi.  6,  etc. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  557 

§  15.  —  Le  système  artériel  des  membres  abdominaux  se      Artères 

,       1  -,  .  ,    ,  des  membres 

compose  de  deux  paires  de  vaisseaux  principaux  qui  portent  les    inférieur». 
noms  d'artères  iliaques  externes  et  d'artères  hypogastriques  ou 
iliaques  internes. 

Chez  l'Homme,  ces  artères  sont,  confondues  à  leur  base,  et 
l'aorte,  arrivée  vers  le  bas  de  la  région  lombaire,  semble  se 
bifurquer  pour  donner  naissance  aux  deux  troncs  ainsi  consti- 
tués. On  appelle  ceux-ci  les  iliaques  primitives.  Us  s'écartent  Artères  iliaques 
l'un  de  l'autre,  en  descendant,  et  chez  l'adulte  les  iliaques    riul 
externes  semblent  en  être  la  continuation. 

Les  artères  hypogastriques,  ou  iliaques  internes,  s'en  sépa-      Artères 

,    .  hypogastriques. 

rent  au  niveau  du  bord  supérieur  du  sacrum,  et  descendent 
en  se  portant  en  arrière,  pour  s'enfoncer  dans  le  bassin  et 
aller  se  distribuer  aux  viscères  contenus  dans  cette  partie  de 
la  cavité  abdominale,  ainsi  qu'aux  muscles  de  la  région  fes- 
sière  et  aux  parties  génitales  externes  (1).  Chez  le  fœtus,  elles 

sans  fournir  aucune  branche  (a).  Par-  Chez  les  Mammifères  femelles,  les 
venues  dans  le  canal  inguinal,  elles  artères  spermatiques  prennent  le  nom 
donnent  quelques  ramuscules  très  (Tarières  ovariennes,  et  vont  se  dis- 
grêles au  muscle  crémasler  et  au  tribuer  à  l'utérus  aussi  bien  qu'à  l'o- 
cordon  spermatique;  enfin,  arrivées  vaire  (c).  Pendant  la  geslaiion,  elles 
dans  le  scrotum,  elles  se  bifurquent  prennent  un  grand  développement,  et 
pour  pénétrer  dans  l'épididyme  ci  le  leurs  branches  terminales  deviennent 
testicule.  extrêmement  flcxueuses. 

Chez  les  Mammifères,  donl  les  testi-  Chez  le  Kanguroo,  les  artères  ova- 
cules  restent  dans  l'abdomen  (l'Élé-  riennes  naissent  par  un  tronc  com- 
pilant et  le  lîhinocéros,  par  exemple),  mun  ((/). 

ou  ne  se  logent  que  dans  le  pli  de  (1)  Les  branches  de  l'artère  hypo- 

l'aiue,  comme  chez  le  Chameau  ,  ces  gastrique   peuvent   être    rangées   en 

vaisseaux  sont  moins  longs.  deux  groupes,  suivant  qu'elles   sont 

Chez  le  Marsouin,  ils  forment  des  destinées  principalement  aux  vis- 
plexus  très  remarquables  (6).  cères  (e)  ou  aux  parois  de  la   cavité 

\a)  N'oyez  Tiedcraann,  Op.  cit.,  pi  20. 

—  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  16. 

{b)  Duverrioy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  I,  VI,  p.   153. 

(c)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  27. 

(dj  Owen,  Marsi'pj.alia  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Phyxiol,  t.  111,  p.  308,  lig.  ij-i; 

(e)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  25,  fig.  1  ;  pi.  20,  fig.  1. 

■ —  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  14,  16. 


558  APPAREIL    1)E    LA    CIRCULATION 

se  continuent  en  avant  et  en  liant  avec  les  artères  ombilicales, 
dont  nous  aurons  à  nous  occuper  par  la  suite. 

Chez  les  Quadrumanes,  la  plupart  des  Rongeurs  et  quelques 
autres  Mammifères ,  les  deux  paires  d'artères  destinées  aux 


pelvienne  et  aux  parties  molles  qui 
entourent  le  bassin  (a).  Les  bran- 
ches vésicales  sont  :  1°  les  artères 
vésicales,  qui,  en  nombre  variable, 
naissent  soit  du  tronc  hypogastriquc, 
soit  de  la  branche  ombilicale  ou  même 
de  quelque  autre  rameau,  etse  rendent 
à  la  vessie  ;  2°  V artère  hémorrhoïdale 
moyenne,  qui  se  distribue  à  la  partie 
antérieure  des  parois  du  rectum  ; 
3°  Vartère  utérine,  qui  est  souvent 
confondue,  à  son  origine,  avec  une  des 
artères  viscérales  et  qui  se  porte  trans- 
versalement en  dedans  pour  gagner  la 
matrice,  où  ses  rameaux  décrivent  de 
nombreuses  tlexuosités  ;  W  Vartère 
vaginale,  qui  descend  sur  les  côtés 
du  vagin  et  s'anastomose  en  arcade 
avec  sa  congénère. 

Les  branches  essentiellement  parié- 
tales sont  :  1°  Vartère  iléo-lombaire, 
qui  remonte  entre  les  muscles  de  la 
paroi  dorsale  de  l'abdomen,  et  y  joue 
le  rôle  d'une  intercostale  en  donnant 
un  rameau  musculaire  aux  lombes, 
un  rameau  spinal  à  la  colonne  verté- 
brale et  un  rameau  transversal  aux 
parois  latérales  de  l'abdomen  ;  2°  les 
artères  sacrées  latérales,  qui  descen- 
dent sur  la  face  interne  du  sacrum, 
de  chaque  côté  de  l'artère  sacrée 
moyenne,  et  fournissent  latéralement 
des  rameaux  destinés,  les  uns  a  s'ana- 
stomoser avec  celle-ci,  les  autres  à  ga- 
gner la  face  postérieure  du  bassin  et 


à  s'y  distribuer  à  peu  près  comme  le 
font  les  artères  lombaires  un  peu  plus 
haut  ;  3°  Vartère  obturatrice  (à  moins 
que  celle-ci  ne  naisse  de  l'iliaque  ex- 
terne, comme  cela  se  voit  souvent), 
vaisseau  qui  fournit  des  rameaux  au 
muscle  iliaque  situé  sur  les  côtés  de 
la  cavité  du  bassin,  puis  se  rend  en 
partie  au  pubis,  en  partie  aux  organes 
génitaux  externes,  et  aux  muscles  de 
la  partie  supérieure  et  interne  de  la 
cuisse;  h°  Vartère  fessière,  ou  ilia- 
que postérieure,  qui  peut  être  consi- 
dérée comme  la  conlinualion  du  tronc 
hypogaslrique,  et  qui  sort  du  bassin 
par  le  sommet  de  l'écliancrure  ischia- 
tique  pour  aller  se  ramifier  dans  les 
muscles  dont  elle  porte  le  nom  ; 
5°  Vartère  ischialique,  ou  fessière 
inférieure,  qui,  à  son  origine,  est 
souvent  confondue  avec  la  précé- 
dente, et  sort  du  bassin  plus  bas  pour 
se  distribuer  en  partie  aux  mêmes 
muscles,  en  partie  dans  la  région  coc- 
cygienne  et  fémorale  interne  (b). 

Enfin,  une  branche,  dont  les  divi- 
sions appartiennent  à  la  fois  aux  vis- 
cères et  aux  parties  pariétales  du 
bassin,  est  appelée  artère  honteuse 
interne.  Elle  sort  du  bassin  avec  l'is- 
chiatique,  puis  rentre  dans  celte  ca- 
vité dans  le  voisinage  de  l'anus,  y 
fournit  un  ou  plusieurs  ramuscules 
appelés  artères  hémorrhoidales  infé- 
rieures, et  se  divise  ensuite  en  deux 


(a)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  25,  fig.  2,  et  26,  fig.  2. 
—  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  24,  25,  44  et  45. 

(b)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  p.  42. 


CHEZ    LES    MAMMIFERES. 


559 


membres  abdominaux  naissent  d'une  paire  de  troncs  iliaques 
primitifs,  comme  chez  l'Homme  (1);  mais  chez  le  Chien,  le 
Cheval  et  un  grand  nombre  d'autres  Animaux  de  cette  classe, 
les  artères  hypogastriques  proviennent  directement  de  l'aorte, 
à  quelque  distance  en  arrière  des  iliaques  externes  (2).  Quel- 


branches  principales,  dont  l'une  est 
superficielle  ou  inférieure,  et  se  rend 
au  périnée,  et  dont  l'autre  appartient 
aux  organes  génitaux.  La  première 
fournit  l'artère  dorsale  de  la  verge  et 
l'artère  caverneuse. 

Chez  l'enfant  nouveau-né,  de  même 
que  chez  le  fœtus ,  les  deux  artères 
hypogastriques  se  continuent  sous  la 
forme  d'artères  ombilicales,  sortent 
de  l'abdomen  par  l'ombilic,  et  vont 
se  ramifier  dans  le  placenta  (a)  ;  mais 
lorsque  le  cordon  ombilical  s'est  flé- 
tri ,  ces  derniers  vaisseaux  s'atro- 
phient et  se  transforment  peu  à  peu 
en  un  cordon  ligamenteux  qui  s'étend 
de  chaque  côté  de  la  vessie  jusqu'à 
l'ombilic  et  fait  suite  au  tronc  des 
artères  vésicales  (6). 


(1)  Ces  vaisseaux  naissent  des  artères 
iliaques  primitives,  chez  le  Hérisson  (c), 
le  Surmulot  (d),  le  Cochon  d'Inde  (p), 
le  Lapin  (/"),  le  Porc-Épic  (g),  l'Écu- 
reuil (h),  le  Soiislik(î),  le  Phoque  (_/), 
le  Pangolin  (k).  11  en  est  de  même 
chez  le  Fourmilier ,  soit  des  deux 
côtés  (l),  soit  d'un  côté  seulement  (m), 
défaut  de  symétrie  qui  se  voit  aussi 
chez  le  Tatou  (n). 

(2)  L'origine  bilatérale  des  artères 
hypogastriques  sur  le  tronc  aortique, 
en  arrière  des  iliaques  externes,  se  voit 
chez  la  plupart  des  Carnassiers,  tels 
que  le  Chat ,  le  Lion  ,  le  Tigre  , 
l'Ours  (o)  ;  chez  le  Cheval  (p),  le  Co- 
chon (q),  les  Ruminants  (r),  les  Mar- 
supiaux (s),  et  chez  l'Échidné  (t). 

Chez  le  Putois,  une  partie  des  ar- 


(<i)  Voyez  Bourgery ,  Anatomie  descriptive,  t.  VIII,  pi.  12,  et  pi.  13,  fig.  6. 

—  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang  considéré  chez  le  fœtus,  etc.,  fig.  1 ,  et  Dict.  Univ. 
d'hist.  nat.  de  d'Orbigny,  Mammifères,  pi.  4,  fig.  d. 

(b)  Voyez  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  25,  fig.  1. 

(c)  Barkow,  Disquisit.  circa  origin.  et  decurs.  arteriarum  Mammalium,  p.  29,  pi.  1,  fig.  {. 

(d)  Idem,  ibid  ,  p.  36. 

(e)  Idem,  ibid.,  p.  42. 
(Hldeiii,  ibid.,  p.  52. 

(g)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  158. 

(h)  Barkow,  Disquisit. récent,  de  arter.  Mammal.  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  t.  XX,  p.  633). 

(i)  Idem,  ibid.,  p.  625. 

(j)  Cuvier,  toc.  cit.,  p.  160. 

(k)  Hyrtl,  Op.  cit.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  pi.  2,  fig.  2). 

(I)  Meckel,  Traité  d' anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  416. 

(m)  Hyrll,  Op.  cit.  (ibid.,  pi.  4,  fig.  1). 

(n)  Idem,  ibid.,  pi.  7,  fig.  1. 

(o)  Cuvier,  Anatomie  comparée,  t.  VI,  p.  1 58. 

(p)  Voyez  Leyh,  Handbuch  der  Anat.  der  Hausthiere,  p.  403,  fig.  171 . 

—  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  506,  fig.  154. 

(q)  Barkow,  Disquisit.  récent.  (Op.  cit.,  t.  XX,  p.  633). 

(r)  Meckel,  Op.  cit.,  t.  IX,  p.  417. 

(s)  Owen,  Marsupialia  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol.,  t.  III,  p.  308). 

(0  Hyrll,  Op.  cit.  [Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  I.  V,  pi.  3,  fig.  1). 


111. 


36 


560  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

quefois  elles  forment  à  leur  origine  un  tronc  impair  qui  se 
dirige  en  arrière,  au-dessous  de  l'artère  sacrée  moyenne,  laquelle 
représente,  comme  d'ordinaire,  laportion  terminale  de  l'aorte  (1  ). 
Enfin,  chez  les  Cétacés,  dont  le  corps,  comme  on  le  sait, 
est  dépourvu  des  membres  postérieurs,  les  artères  iliaques 
externes  manquent,  et  les  branches  abdominales,  qui  d'ordinaire 
en  naissent,  sont  fournies  par  les  hypogastriques. 
Ariens  iliaques      L'artère  iliaque  externe  ressemble  beaucoup  à  l'artère  sous- 

exlernes.  1       •  *  <  i  •    •         >  ^^l  a  •  \  .  • 

claviere  et  se  divise  a  peu  près  de  la  même  manière.  Ainsi, 
avant  d'arriver  à  la  cuisse,  elle  fournit  aux  parties  antérieures 
et  latérales  des  parois  de  la  grande  cavité  viscérale  diverses 
branches  dont  les  plus  importantes  sont  l'artère  épigastrique  et 
l'artère  iliaque  antérieure  ;  or,  ces  vaisseaux  représentent  pour 
ainsi  dire  les  artères  mammaire  interne  et  thoracique  infé- 
rieure (2). 


tèresqui  d'ordinaire  dépendent  de  l'hy- 
pogastrique  viennent  des  iliaques,  et  les 
autres  des  artères  sacrées  latérales  (a). 

(1)  Cette  disposition  a  été  observée 
chez  le  Blaireau  (6). 

(2)  L'artère  épigastrique  naît  de 
l'iliaque  externe  au  moment  où  celle- 
ci  quitte  le  bassin ,  en  s'engageant 
sous  le  ligament  dont  se  compose  l'ar- 
cade crurale.  Souvent  elle  est  con- 
fondue, à  son  origine,  avec  l'artère 
obturatrice  ;  mais,  quoi  qu'il  en  soit 
à  cet  égard,  elle  se  porte  en  dedans, 
puis  se  recourbe  en  haut,  et  remonte 
sur  la  paroi  antérieure  de  l'abdomen 
pour  s'y  distribuer  et  s'anastomoser 
avec  des  branches  descendantes  de  la 
mammaire  interne  (c). 


Une  autre  branche  pariétale  naît 
au-dessous  de  l'arcade  crurale  et  re- 
monte aussi  sur  la  paroi  antérieure  de 
l'abdomen  ;  on  l'appelle  artère  sous- 
cutanée  abdominale,  et  l'on  peut  la 
considérer  comme  le  représentant  de 
l'artère  mammaire  externe  {cl). 

L'artère  iliaque  antérieure ,  ou 
circonflexe  iliaque ,  naît  au  même 
niveau  que  l'épigastrique,  et  remonte 
obliquement  derrière  l'arcade  crurale 
jusqu'à  la  crête  de  l'os  iliaque,  où  elle 
se  divise  en  deux  branches  :  une  as- 
cendante, qui  marche  parallèlement 
à  l'épigastrique  ,  se  distribue  aux 
muscles  de  la  paroi  latérale  de  l'ab- 
domen, et  s'y  anastomose  avec  les 
artères   lombaires    et    intercostales  ; 


(a)  Barkow,  Disquisit.  circa  origln.  arter.  Mammalium,  p.  23,  et  Disquisit.  recentiores  (loc.  cit. , 
l,  XX,  p.  658). 

(b)  Uuvernoy,  Anatomie  comparée  deCuvier,  t.  VI,  p.  158. 

(c)  Voyez  Bourgery,  Anat.  descripl.,  t.  IV,  pi.  21  et  22. 
—  Tiedemann,  Op.  cit.,  pi.  18. 

(d)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  23. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  561 

Elle  longe  ensuite  la  partie  interne  de  la  cuisse,  où  elle  prend  le      Artère 

,         .  i  i  -  fémorale. 

nom  d  artère  fémorale,  et  donne  naissance  à  une  grosse  branche 
collatérale  que  je  comparerai  à  la  brachiale  profonde  (1)  ;  puis 
elle  se  porte  obliquement  en  arrière,  passe  dans  le  creux  du 
jarret,  où  on  la  désigne  sous  le  nom  d' artère  poplitée,  et  arrive 
à  la  partie  supérieure  et  postérieure  de  la  jambe,  où  elle  se 
bifurque  pour  constituer  deux  branches  divergentes  dont  l'une     Ancres 

1       1  .        .  !     .  A  A  ^e    la  j3111^6' 

se  subdivise  bientôt,  de  sorte  qu'ici,  de  même  qu'à  l'avant-bras, 
il  y  a  trois  artères  principales  :  une  qui  traverse  l'aponévrose 
interosseuse  pour  descendre  le  long  de  la  face  opposée  de  la 
jambe  vers  le  dos  du  pied,  comme  le  fait  l'artère  interosseuse 
du  membre  supérieur,  et  qui  prend  le  nom  d'artère  tibiale  anté- 
rieure ;  deux  (appelées  artères  tibiale  postérieure  et  péronière) 
qui  restent  à  la  partie  postérieure  de  la  jambe,  et  qui  sont  les 
analogues  des  artères  cubitale  et  radiale.  Mais  le  mode  de  ter- 
minaison de  ces  vaisseaux  n'est  pas  tout  à  fait  le  même  que 
pour  les  artères  de  la  main.  Ainsi  l'artère  pédieuse,  qui  se 
trouve  sur  la  face  dorsale  du  pied  et  qui  s'y  comporte  à  peu 


l'autre,    transverse,  qui  continue   à  par  du  tissu  musculaire ,  elle  gagne 

longer  la  crête  iliaque  et  se  dirige  vers  la  face  postérieure  de  la  cuisse  et  con- 

les  lombes  (a).  linue  sa  route  vers  la  jambe  ,  sous  le 

L'artère  hypogastrique  correspond  nom  iïartère  poplitée. 
à  peu  près  à  l'artère  cervicale  trans-  A  la  partie  supérieure  et  interne  de 

verse.  la  cuisse,  elle  fournit  les  artères  hon- 

(1)  L'artère  fémorale  ou  crurale  sort  teuses  externes  qui  vont  se  rendre  aux 

du  bassin  en  passant  entre  le  bord  su-  parties  génitales  externes.  Elle  donne 

périeur  de  l'os  iliaque  et  l'arcade  cru-  naissance  à  diverses  branches  muscu- 

rale  ;  elle  se  trouve  d'abord  à  la  partie  laires,  dont  la   plus  importante   est 

antérieure  et  supérieure  de  la  cuisse,  Vartère  fémorale  profonde,  qui  se 

à  peu  de  distance  sous  la  peau,  mais  détache  à  peu  de  dislance  du  pubis  et 

elle  ne  tarde  pas  à  s'enfoncer  entre  les  descend  verticalement  au  milieu  des 

muscles,  et  après  être  descendue  près-  muscles  profonds  de  la  cuisse  (b),  à 

que  verticalement  le  long  de  la  face  peu  près  comme  l'artère  humérale 

interne  du  fémur,  dont  elle  est  séparée  profonde  dans  le  bras. 

(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  pi.  21,  22  et  24. 

(b)  Idem,  ibid.,  pi.  41,  42  et  43. 


Artères 
du  pied. 


56'2  APPAKEIL    DL    LA    CIRCULATION 

[très  comme  la  portion  terminale  de  la  radiale  sur  le  métacarpe, 
est  la  continuation  de  la  tibiale  antérieure.  L'artère  péronière, 
qui,  par  sa  position,  est  comparable  à  l'artère  cubitale,  tend  à 
s'atrophier,  et  au  lieu  de  donner  naissance  à  une  arcade  plan- 
taire superficielle,  se  termine  dans  le  voisinage  de  la  malléole 
externe.  Enfin  l'artère  tibiale  postérieure,  que  je  comparerai 
à  la  radiale,  se  rend  directement  sous  la  face  plantaire  du  pied, 
et  y  forme,  avec  une  branche  perforante  de  la  pédieuse,  une 
arcade  profonde  qui  donne  naissance  aux  artères  interosseuses 
métatarsiennes  dont  les  branches  terminales  constituent  les 
artères  collatérales  des  orteils  (1). 


(1)  L'artère  poplitée,  en  passant 
dans  le  creux  du  jarret,  fournit  de 
chaque  côté  des  branches  articulaires 
transversales  qui  contournent  le  ge- 
nou, et  qui  ressemblent  beaucoup  aux 
artères  collatérales  et  récurrentes  du 
coude. 

La  tibiale  antérieure,  que  j'ai  com- 
parée à  l'artère  interosseuse  posté- 
rieure de  l'avant-bras,  naît  avant  la 
division  du  tronc  tibio-péronier  et  se 
porte  immédiatement  en  avant,  perce 
la  partie  supérieure  du  ligament  in- 
terosseux et  descend  ensuite  vertica- 
lement sous  les  muscles  extérieurs  des 
orteils  et  le  jambier  antérieur,  four- 
nit des  rameaux  à  l'articulation  tibio- 
tarsienne,  et  va  constituer  sur  la  face 
supérieure  du  tarse  l'artère  pédieuse 
ou  dorsale  du  pied,  qui  s'avance  jus- 
qu'au sommet  du  premier  espace  in- 
terosseux du  métatarse,  et  y  plonge 
pour  aller  s'anastomoser  par  inoscu- 
lalion  avec  l'arcade  planlaire  {a).  Mais, 
avant  de  quitter  la   face  dorsale  du 


pied,  elle  fournit  plusieurs  branches, 
dont  une,  disposée  en  arcade  et  ap- 
pelée artère  dorsale  du  métatarse, 
donne  naissance  à  une  série  d'artères 
interosseuses  dorsales,  qui  s'anasto- 
mosent aussi  avec  des  branches  per- 
forantes de  la  plantaire,  et  qui,  en 
se  bifurquant,  vont  former  les  arlères 
collatérales  des  doigts  (6). 

Vartère  péronière  descend  direc- 
tement jusqu'au  calcanéum,  et  son 
calibre,  qui  varie  beaucoup,  est  le  plus 
ordinairement  en  raison  inverse  de 
celui  de  la  tibiale  anlérieure  (c). 

Vartère  tibiale  postérieure ,  plus 
grosse  que  les  précédentes,  descend 
le  long  de  la  partie  postérieure  et  in- 
terne de  la  jambe,  passe  derrière  la 
malléole  externe,  et  pénètre  sous  la 
voûte  du  pied  où  elle  se  divise  en  deux 
branches  appelées  artères  plantaires 
interne  et  externe  (d).  La  première 
de  celles-ci  longe  le  côté  interne  de  la 
plante  du  pied  et  va  constituer  les 
artères  collatérales  du  gros  orteil.  La 


(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  I.  IV,  pi.  45,  fig.  2,  et  pi.  4G,  fig-.  2. 
(6)  Idem,  ibid.,  pi.  48,  fig-.  i  et  2. 

(c)  Idem,  ibid.,  pi.  4G,  fig.  2. 

(d)  Voyez  Bourgery  et  Jacob,  Op.  cit.,  i.  IV,  pi.  48  et  49. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  563 

Le  mode  de  division  et  de  distribution  de  l'espèce  d'arbre 
vasculaire  dont  l'artère  crurale  représente  le  tronc  est  à  peu 
près  le  même  chez  la  plupart  des  Mammifères,  et  les  différences 
qui  s'y  rencontrent  dépendent,  en  général,  soit  de  la  hauteur 
variable  à  laquelle  certaines  branches  prennent  naissance,  soit 
de  la  simplification  de  la  partie  pédieuse  du  système  vasculaire, 
lorsque  le  nombre  des  doigts  vient  à  diminuer.  Comme  exemple 
de  ces  modifications,  je  citerai,  d'une  part,  les  Makis,  où  le 
tronc  crural  se  bifurque  pour  constituer  les  artères  tibiales 
antérieures  et  postérieures  dès  le  haut  de  la  cuisse  ;  d'autre 
part,  le  Cheval,  où  l'artère  péronière  disparaît  presque  com- 
plètement, et  où  l'artère  pédieuse  fournit  à  elle  seule  la  plupart 
des  branches  destinées  au  pied  (1).  Toujours  il  y  a  pour 


Artères 

îles  jiatles 

postérieures 


plantaire  externe  se  rapproche  du  bord 
externe  du  pied,  puis  se  recourbe  en 
dedans  pour  former  une  arcade  et 
s'anastomoser  par  inosculation  avec 
la  branche  perforante  de  la  pédieuse, 
dont  il  a  déjà  été  question.  Enfin, 
l'arcade  ainsi  constituée  fournit  di- 
verses branches  perforantes  qui  vont 
s'anastomoser  avec  les  interosseuses 
dorsales  et  cinq  artères  interosseuses 
plantaires  qui  se  bifurquent  pour  con- 
stituer les  collatérales  des  orteils. 

Quelques  anatomistes  considèrent 
l'artère  tibiale  antérieure  comme 
étant  le  représentant  de  l'artère  ra- 
diale; l'artère  péronière  comme  cor- 
respondant à  l'interosseusedel'avant- 
bras,  et  l'artère  tibiale  postérieure 
comme  l'analogue  de  l'artère  cubi- 
tale (a).  Mais  ces  rapprochements  ne 
me  semblent  pas  admissibles.  En  effet, 
pour  que  la  main  soit  dans  la  même 
position  que  le  pied,  elle  doit  être  en 
pronalion  ,  c'est-à-dire  avec  le  pouce 


en  dedans.  Alors  l'artère  radiale  oc- 
cupe le  côté  interne  de  la  face  palmaire 
de  l'avant-bras,  comme  l'artère  tibiale 
postérieure  longe  le  côté  interne  de 
la  face  plantaire  de  la  jambe  ;  l'artère 
cubitale  se  trouve  du  côté  du  petit 
doigt,  comme  l'artère  péronière  est 
du  côté  du  petit  orteil,  et  c'est  sur  la 
face  opposée  du  membre  que  se  trou- 
vent l'artère  interosseuse  postérieure 
de  l'avant-bras  et  l'artère  tibiale  an- 
térieure de  la  jambe.  H  est  vrai  que 
dans  le  pied  c'est  l'artère  tibiale  pos- 
térieure qui  joue  le  même  rôle  que 
l'artère  cubitale  dans  la  main,  et  que 
l'artère  dorsale  du  pied  se  comporte 
comme  la  portion  terminale  de  l'ar- 
tère radiale  ;  mais  cette  substitution 
s'explique  facilement  par  les  anasto- 
moses terminales  de  ces  deux  vais- 
seaux. 

(1)  Duvernoy  dit  que  chez  le  Che- 
val l'artère  fémorale  ne  fournit  pas, 
comme    d'ordinaire ,    une    branche 


(a)  Cruveilhier,  Anntnmie  descriptive,  (.  II,  p.  749. 


56ll  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

chaque  doigt,  comme  aux  membres  antérieurs,  deux  artères 
collatérales  qui  longent  les  faces  latérales  de  ces  organes,  et  les 
vaisseaux  dont  ces  artères  terminales  naissent  forment  des 
arcades  à  la  face  plantaire  du  pied. 

Les  divisions  fasciculaires  et  les  plexus  que  nous  avons  ren- 
contrés dans  le  système  artériel  des  membres  thoraciques,  chez 
les  Paresseux  et  quelques  autres  Mammifères,  se  retrouvent 
également  dans  les  artères  des  membres  abdominaux.  Ainsi, 
chezl'Unau,  l'artère  crurale  se  résout  presque  entièrement  en 
un  plexus  très  gros,  et  cette  disposition  se  continue  même  dans 
la  portion  tibiale  du  vaisseau  ;  chez  l'Aï,  ce  mode  d'organisation 
se  voit  aussi,  mais  ne  se  prolonge  guère  au-dessous  du  genou. 
Il  en  est  de  même  chez  le  Loris  grêle,  et  je  ferai  remarquer 
que  chez  le  Tarsier  elle  est  plus  développée  dans  les  pattes 
postérieures  que  dans  les  membres  antérieurs  (1). 


musculaire  profonde  (a);  mais  cette  tères   collatérales   du  doigt,   et   une 

anomalie  n'existe  pas.  La  crurale  pro-  branche  perforante  qui  gagne  la  face 

fonde  naît  de  la  fémorale  au  niveau  plantaire  du  pied  et  s'y  anastomose 

du  bord  pelvien,  se  porte  obliquement  en  arcade  avec  les  branches  termi- 

en  arrière  et  descend  entre  les  muscles  nales  de  la  tibiale  postérieure  ou  ar- 

de  la  partie  interne  et  postérieure  de  tères  plantaires.  Pour  plus  de  détails 

la  cuisse  (6).  sur  la  disposition  des  artères  du  pied 

L'artère  tibiale  postérieure,  parve-  du  Cheval,  je  renverrai  aux  ouvrages 

nue  derrière  le  tarse,  se  divise  en  spéciaux  sur  l'anatomie  de  ces  ahi- 

deux  artères  palmaires  qui  représen-  maux  (c) . 

tent  celles  de  l'Homme,  mais  qui  sont  (t)  Chez  le  Loris  grêle,  les  iliaques 

rudimentaires.  naissent  très  haut  dans  l'abdomen,  et 

L'artère  tibiale   antérieure  prend,  se  divisent  tout  de  suite  en  un  faisceau 

comme  d'ordinaire,  le  nom  d'artère  de  petites  artères  dont  une  portion 

pédiease  dans  la  région  tarsienne,  et  s'enfonce  dans  le  bassin  pour  tenir 

se  divise  en  deux  branches  principales,  lieu  d'hypogaslrique,  et  le  reste  pé- 

une  dite  pédieuse  métatarsienne,  qui  nètre  dans  la  cuisse,  mais  ne  paraît 

correspond  à  une  interosseuse  dorsale  pas  atteindre  le  genou.  Il  y  a  aussi 

chez  l'Homme,  et  qui  fournit  les  ar-  dans  le  bassin  un  faisceau  vasculaire 

(a)  Duvernoy,  Anatomie  comparée  de  Cuvier,  t.  VI,  p.  164. 

(b)  Voyez  Ghauveau,  Op.  cit.,  p.  512,  fig.  155. 

(c)  Leyh,  Handbuch  der  Anatomie  der  Hausthiere,  p.  407,  fîg.  173,-ctc.  (1850). 

—  Chaiiveau,  Anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques,  p.  513  et  suiv.,  fig.  155  et  156. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  565 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  branches  artérielles  fournies  aux 
parois  de  l'abdomen  par  le  tronc  crural,  vers  le  point  où  il  sort 
du  bassin  (1),  et  qui  remontent  vers  le  thorax  pour  s'anastomoser 
avec  les  mammaires,  sont  quelquefois  très  développées,  Ainsi, 
chez  le  Hérisson,  elles  forment  de  chaque  côté  du  ventre  un 
système  de  vaisseaux  sous-cutanés  très  remarquables ,  et , 
lorsque  les  mamelles  sont  logées  sous  l'abdomen  ou  dans  la 
région  inguinale,  ainsi  que  cela  se  voit  chez  la  Jument,  ce  sont 
ces  vaisseaux,  et  non  les  artères  mammaires,  qui  portent  le  sang 
aux  glandes  de  ce  nom  (2). 


Artères 
épigastriques. 


médian  qui  représente  l'artère  sacrée 
moyenne  (a). 

Chez  le  Loris  du  Bengale,  le  plexus 
iliaque  commence  après  l'origine  des 
artères  hypogastriques  (6), 

Chez  l'Aï  ou  Paresseux  à  trois 
doigts,  il  y  a  un  plexus  sacré  et  un 
plexus  hypogastrique  très  développé, 
aussi  bien  qu'un  plexus  crural  (c).  Il 
eu  est  de  même  chez  l'Aï  à  collier 
noir  (Bradypus  torquatus)  (d). 

Chez  l'Unau,  le  nombre  des  petits 
vaisseaux  dont  le  faisceau  crural  se 
compose  est  moins  considérable,  mais 
le  plexus  ainsi  constitué  se  prolonge 
jusqu'au  talon  (e).  Il  est  aussi  à  noter 
que  chez  ces  deux  Édentés  on  re- 
trouve, au  milieu  du  plexus,  un  tronc 
principal  qui  représente  le  tronc  de 
l'artère  crurale,  tandis  que  chez  les 


Loris  ce  vaisseau  se  résout  tout  entier 
en  un  pinceau  vasculaire. 

Chez  le  Tarsier  et  chez  le  Fourmi- 
lier à  deux  doigts  (/"),  cette  dernière 
disposition  se  rencontre  aussi.  Chez 
le  Tamandua  et  le  Pangolin  (g),  la 
disposition  plexiforme  de  ces  vais- 
seaux est  inoins  marquée  ;  mais  ils  se 
divisent  en  plusieurs  branches  dans 
le  voisinage  du  genou  (h\ 

Chez  l'Échidné,  la  plupart  des  bran- 
ches de  distribution  destinées  aux  mus- 
cles de  la  bancheet  de  la  cuisse  naissent 
très  près  de  l'origine  des  iliaques,  de 
façon  à  constituer  dans  le  bassin  des 
pinceaux  vasculaires  très  remarqua- 
bles, mais  elles  ne  paraissent  pas  y 
former  de  plexus  proprement  dit  (i). 

(1)  Voyez  ci-dessus,  page  560. 

(2)  Ainsi ,   chez  la  Jument ,   une 


(a)  Vrolik,  Disquisit.  anat.  physiol.  de  peculiari  arterianim  extremiiatum  in  nonnullis 
Animalibus  dispositione,  pi.  2. 

(6)  Carlisle,  Op.  cit.  (Philos.  Trans.,  1800,  pi.  i). 

(c)  Idem,  ibid.,  pi.  2,  fig.  2. 

—  Vrolik,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  1. 

{d)  Hyril,  Vergl.  Angiol.  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  t.  VI,  p.  56,  pi.  8,  fig.  2. 

(e)  Vrolik,  Op.  cit.,  pi.  1,  fig.  3. 

(/")  Idem,  ibid.,  pi.  1 ,  fig.  i  (Tarsier). 

(g)  Hyril,  Op.  cit.  [Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne,  1.  VI,  p.  21,  pi.  2,  fig.  1  ;  et  pi.  k,  fig.  1  el  2). 

(h)  Hyril,  loc.cit.,  pi.  7,  fig.  1. 

(i)  Hyril,  Das  artérielle,  Gefdss-System.  dtt  Monotremen  (Mém.  de  l'Acad.  de  Vienne ,  1853, 
t.  V,  pi.  1,  fig.  8). 


566 


APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 


Système 

îles  vaisseaux 

capillaires. 


§  16.  —  Les  artères  dont  nous  venons  de  suivre  le  mode  de 
distribution  dans  les  diverses  parties  de  l'économie  se  ramifient 
de  plus  en  plus  à  mesure  qu'elles  s'avancent  vers  leurs  desti- 
nations respectives;  quelquefois  elles  s'anastomosent  directe- 
ment avec  les  veines  (1  ),  mais  presque  toujours  elles  se  résolvent 
en  vaisseaux  capillaires  d'une  grande  ténuité,  qui  se  réunissent 
entre  eux  de  façon  à  former  un  réseau  à  mailles  plus  ou  moins 
serrées.  Il  y  a  des  tissus  qui  n'en  possèdent  pas,  les  membranes 
épithéliques,  par  exemple  (2)  ;  et  ces  vaisseaux  ne  pénètrent  pas 
dans  la  substance  de  la  plupart  des  matériaux  primaires  des 
organes,  mais  accompagnent  le  tissu  conjonctif  qui  les  unit,  et 
ils  occupent  par  conséquent  les  espaces  que  ces  éléments  ana- 
tomiques  laissent  entre  eux  (3).  11  en  résulte  que  la  disposition 


artère  prépubienne  naît  de  l'artère 
fémorale  et  se  divise  en  deux  branches  : 
l'une ,  dite  abdominale  postérieure , 
qui  correspond  à  l'épigastrique  de 
l'Homme  ;  l'autre ,  qui  est  l'analogue 
de  l'artère  honteuse  externe,  et  c'est 
un  rameau  de  celte  dernière  qui  se 
rend  à  la  mamelle  (a). 

Chez  le  Hérisson  ,  l'artère  épigas- 
trique  et  l'artère  sous -cutanée  abdo- 
minale (b)  sont  très  développées  et 
s'unissent  par  inosculation  avec  les 
artères  mammaire  externe  et  thora- 
cique,  de  façon  à  former  de  chaque 
côté  deux  grandes  arcades  vasculaires 
qui  relient  entre  elles  les  artères  sous- 
clavières  et  fémorales  et  qui  donnent 
des  branches  aux  muscles  sous-cuta- 
nés de  l'abdomen  (c). 

(1)  Quelquefois  des  anastomoses  de 
ce  genre  se  voient  au  milieu  du  ré- 
seau capillaire  qui  unit  les  artères  aux 


veines  ;  disposition  qui  a  été  obser- 
vée par  M.  Paget  dans  l'aile  de  la 
Chauve-Souris  (d),  et  que  j'ai  remar- 
quée plusieurs  fois  dans  les  vaisseaux 
sous-cutanés  des  Batraciens  et  des 
Poissons.  Il  est  aussi  à  noter  que  dans 
le  tissu  érectile  les  artères  déversent 
le  sang  dans  des  espaces  ou  lacunes 
veineuses  dont  naissent  les  veines 
ordinaires  (e).  Enfin,  on  trouve  aussi 
dans  les  parois  de  l'utérus,  pendant  la 
gestation,  des  artères  qui  débouchent 
dans  de  grands  sinus  veineux  (/). 

(2)  On  n'aperçoit  pas  de  vaisseaux 
sanguins  dans  les  cartilages  articu- 
laires, dans  le  tissu  du  cristallin,  ni 
dans  le  tissu  corné.  Le  tissu  dentaire  de 
l'Homme  en  est  également  dépourvu  ; 
mais  chez  les  Poissons  ce  tissu  est 
souvent  très  vasculaire. 

(3)  Ainsi,  les  capillaires  sanguins 
ne  pénètrent  jamais  dans  la  substance 


(a)  Chauveau,  Anatomie  des  Animaux  domestiques,  p.  512. 

(b)  Voyez  ci-dessus,  page  560. 

(c)  Barkow,  Disquisitiones  circa  originen  et  decursum  arteriarum  Mammalium,  p.  28,  pi.  1. 

(d)  Paget,  Lectures  on  Inflammation. 

(e)  Voyez  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  505. 

(f)  Voyez  Kdllikcr,  Op.  cit.,  p.  587. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  567 

du  réseau  capillaire  est  généralement  subordonnée  à  celle  des 
parties  constitutives  du  tissu  où  il  se  trouve  et  varie  avec  les 
caractères  de  ceux-ci.  Ainsi,  dans  les  organes  dont  la  texture 
est  fibreuse,  comme  les  muscles  et  les  nerfs,  les  vaisseaux 
capillaires  sont  placés  parallèlement  aux  filaments  constitutifs  de 
ces  parties  et  sont  réunis  d'espace  en  espace  par  des  branches 
transversales,  tandis  que  dans  les  membranes  muqueuses  ils 
sont  flexueux  et  forment  des  mailles  arrondies.  Ce  n'est  pas 
dans  ce  moment  que  nous  pourrions  étudier  utilement  ces 
variations;  mais  je  dois  faire  remarquer  qu'il  existe  d'ordinaire 
un  rapport  direct  entre  l'abondance  des  capillaires  sanguins 
dont  chaque  organe  ou  portion  d'organe  est  pourvue,  et  par 
conséquent  aussi  entre  la  petitesse  des  mailles  du  réseau  vascu- 
laire  et  le  degré  d'activité  du  travail  physiologique  dont  cette 
partie  de  l'économie  est  le  siège. 

Dans  les  glandes,  par  exemple,  où  le  sang  doit  alimenter  en 
quelque  sorte  la  fabrication  de  certaines  humeurs  dont  la  pro- 
duction est  rapide  et  abondante,  les  vaisseaux  capillaires  sont 
en  très  grand  nombre  et  constituent  un  réseau  à  mailles  très 
serrées.  Ils  forment  également  un  lacis  fort  riche  dans  les 
membranes  muqueuses  qui  sont  le  siège  de  phénomènes  du 
même  genre,  et  ils  sont  aussi  très  nombreux  dans  les  mus- 
cles et  dans  la  substance  grise  du  cerveau.  C'est  à  la  présence 
du  sang  dont  ils  abreuvent  les  muscles  que  ces  organes  doi- 
vent leur  couleur  rouge,  et  il  est  facile  de  voir  que  cette  teinte 
est  d'autant  plus  intense  que  la  puissance  motrice  de  ceux-ci 
est  plus  grande.  Chez  les  jeunes  Animaux,  le  Veau,  par 
exemple,  les  chairs  sont  pales,  parce  que  le  système  capillaire 
des  muscles  est  médiocrement  développé;  tandis  que  chez  les 
individus  adultes,  tels  que  le  Bœuf,  dont  la  puissance  muscu- 


des  fibres  musculaires  striées,  ou  dans      dans  les  cellules  des  glandes,  niiiis  les 
les  lubes  élémentaires  des  nerfs,  ou      contournent. 


568  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

laire  devient  très  grande,  les  chairs  sont  d'un  rouge  intense  par 
suite  de  la  quantité  considérable  de  sang  que  ces  petits  vais- 
seaux renferment.  Il  est  aussi  à  noter  que  dans  les  organes 
dont  l'activité  est  périodique,  le  système  capillaire  se  développe 
ou  s'atrophie  en  partie  alternativement,  et  que  toule  excitation, 
pathologique  aussi  bien  que  normale,  tend  à  augmenter  la 
vascularité  de  la  partie  sur  laquelle  le  stimulant  exerce  son 
influence. 

Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  les  artères,  en  se  résolvant  en  ra- 
muscules  d'une  grande  finesse,  perdent  peu  à  peu  presque 
toutes  les  parties  dont  leurs  parois  sont  composées,  et  se  trouvent 
réduites  à  leur  tunique  interne,  qui  elle-même  se  simplifie. 
Effectivement,  dans  les  capillaires,  celle-ci  se  présente  sous  la 
forme  d'une  simple  membrane  hyaline,  amorphe,  lisse  et  d'une 
grande  ténuité  (1).  Elle  est  parsemée  de  petits  renflements  dus 

(l)  Jusque  dans  ces  dernières  an-  laires  a  été  démontrée  dans  divers 

nées,  les  anatomistes  ont  été  partagés  organes  dont  la  substance,  se  laisse 

d'opinion  au  sujet  de  l'existence  de  facilement  détruire  par  la  macération, 

parois   propres    dans   les  capillaires  et  dont  le  réseau  vasculaire  a  pu  être 

sanguins.  Les  uns  pensaient  que  les  ainsi  isolé:  résultat  qui  a  élé  obtenu 

très  petits  vaisseaux  n'étaient  que  des  par  M.  Windischmann,  en  opérant  sur 

canaux  creusés  dans  la  substance  des  quelques  parlies  de  l'oreille  interne 

organes  auxquels  ils  appartiennent  (a),  chez  les  Oiseaux,  et  par  MM.  Trevi- 

d'autres  les  considéraient  comme  des  ranus ,  Miiller,  Valenlin  et  Schultz , 

tubes  membraneux  à  parois  distinctes  en  étudiant  d'une  manière  analogue 

des  parties  circonvoisines.  L'indépen-  la  structure  intime  des  reins  et  de 

dance  des  parois  des  vaisseaux  capil-  quelques  autres  parties  (b)  ;  mais  ce 

(a)  Leeuwenhoek,  Opéra  omnia,  t.  II,  epist.  lxvi. 

—  Doellinger,  Vom  Kreislaufe  des  Blutes  {Mém.  de  l'Acad.  de  Munich,  \  821 ,  4"  série,  t.  VII, 
p.  165). 

—  Kaltenbruner,  Exper.  de  inflammatione.  Munich,  1826,  p.  100. 

—  Oesterreicher,  Kreislauf  des  Blutes.  Nurerab.,  1826. 

—  Meyer,  De  primis  vitœ  phenomenis  (Dissert,  inaug.)  Berlin,  1826. 

—  Wedemeyer,  Ueber  den  Kreislauf  des  Blutes,  1828,  p.  262. 

—  Baumgartner,  Beobacht.  ûber  die  Nerven  und  das  Blut.  Fribourg,  1820. 

(b)  Windischmann,  De  peniliore  auris  in  Amphibiis  structura,  1831,  p.  38. 

—  Treviranus,  Nette  Untersucli.  iiber  die  organischen  Elemente  der  thierischcn  Kôrpcr  (Bei- 
trctge  zur  Aufklàrung  der  Erscheinungen  und  Geset%e  des  organischen  Lebens,  1835,  I.  I, 
2*  partie,  p.  99). 

—  Miiller,  Manuel  de  physiologie,  t.  I,  p.  167. 

—  Valentin,  Handbuch  der  Entivickelungsgeschichtc  des  Mensclien,  1835,  p.  299. 

—  Schullz,  System  der  Circulation,  p.  474. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  569 

à  la  présence  de  granulations  auxquelles  les  histologïsles 
donnent  le  nom  de  noyaux  de  cellules  (1)  ;  on  n'y  aperçoit 
généralement  aucune  trace  d'épithélium,  et  le  tube  membraneux 
constitué  de  la  sorte  n'est  pas  revêtu  extérieurement  par  des 
fibres  élastiques  ou  musculaires.  Leur  petitesse  est  extrême  (2)  : 


sont  surtout  les  observations  micros- 
copiques récentes  qui  ont  fixé  l'opi- 
nion des  histologistes  sur  la  généralité 
de  ce  mode  d'organisation  (a),  et  au- 
jourd'hui il  ne  peut  guère  y  avoir 
d'incertitude  à  cet  égard  qu'en  ce  qui 
concerne  les  capillaires  du  foie  (b). 

(1)  Les  corpuscules  dont  la  mem- 
brane hyaline  de  ces  vaisseaux  est 
parsemée  avaient  été  d'abord  pris 
pour  des  globules  du  sang  (c).  Us 
sont  en  général  ovalaires  et  leur 
grand  axe  est  dirigé  longitudinale- 
ment  :  quand  la  membrane  qui  les 
porte  devient  extrêmement  mince , 
ils  paraissent  être  placés  à  sa  surface 
interne  ;  mais  quand  elle  offre  plus 
d'épaisseur,  ils  sont  bien  évidem- 
ment logés  dans  sa  substance  {d). 
Vers  les  artères,  ces  noyaux  sont  plus 
serrés  ;  on  évalue  leur  longueur  à 
environ  0mu\008  (e). 

Quelquefois  on  remarque  aussi  sur 
les  parois  des  vaisseaux  capillaires  des 
stries  transversales,  et,  dans  le  voisi- 


nage des  veines,  ils  ne  tardent  pas  à 
se  revêtir  d'une  tunique  externe  qui 
paraît  être  composée  d'abord  de  tissu 
conjonciif  seulement ,  puis  de  ce 
même  tissu  mêlé  de  fibres  muscu- 
laires lisses. 

(2)  MM.  E.  Weber  et  Henle  ont  me- 
suré le  calibre  des  capillaires  sanguins 
sur  diverses  préparations  injectées  et 
sèches,  faites  par  un  anatomiste  très 
habile  du  siècle  dernier,  Lieberkuhn, 
et  ils  ont  trouvé  que  dans  le  tissu 
nerveux  ces  canalicules  n'avaient  par- 
fois que  0mm,002,  mais  offrent  en 
moyenne  0mm,003  de  diamètre  (f). 
M.  Kôlliker  évalue  le  calibre  des  ca- 
pillaires entre  0mn\005  et  0mm,01ii. 
Les  plus  fins  se  rencontrent  dans  les 
nerfs  et  les  muscles.  D'après  ce  der- 
nier anatomiste ,  ceux  de  la  peau  et 
des  membranes  muqueuses  ont  en 
général  de  0mm,007  à  0mn,,01;  ceux 
des  glandes,  de  0m'",009  à  0mn\014  ; 
enfin ,  ceux  des  os  ont  jusqu'à 
0mm,02  {g).    M.   Valentin  évalue   de 


(a)  Spallanzani,  Expériences  sur  la  circulation,  p.  169. 

—  Miiller,  Ueber  den  sichtbaren  Kreislauf  des  Blutes  in  der  Leber  der  jungen  Salamander- 
larven  (Meckel's  Archiv  fur  Physiol.,  4829,  p.  185). 

—  Sehwann,  Mikroscopische  Untersuchungen ,  1838,  p.  183. 

—  Henle,  Traité  d'anatomie  générale,  t.  II,  p.  20, 

—  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  620. 

(b)  Guillot,  Mém.  sur  la  structure  du  foie  (Ann.  des  sciences  nat.,  1848,  2°  série,  t.  IX, 
p.  145). 

—  Bowmann  etTodd,  Physiol.  Anat.  of  Man,  t.  II,  p.  330. 

(c)  Treviranus,  loc.  cit.  {Mém.  del'Acad.  de  Berlin,  1836). 
\d)  Henle,  Op.  cit.,  t.  II,  p.  20,  pi.  3,  fig.  7. 

—  Bowmann  etTodd,  Physiological  Anatomy  of  Man,  1856,  vol.  II,  p.  329,  fig.  195. 

(e)  Kôlliker,  Op.  cit.,  p.  623,  fig.  291. 

(f)  Henle,  Traité  d'anatomie  générale,  t.  H,  p.  3. 

(g)  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  624. 


des  veines. 


570  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

chez  l'Homme,  par  exemple,  le  diamètre  de  eeux  qui  méritent 
l'épithète  de  gros  capillaires,  n'est  en  général  que  d'environ 
1/100e  de  millimètre,  et  les  petits  capillaires  n'ont  souvent  que 
1 /200e  de  millimètre  (1). 
structure  §  17.  —  Les  capillaires,  qui,  en  se  réunissant,  augmentent  de 
calibre  et  constituent  les  racines  du  système  veineux,  éprouvent 
dans  leur  structure  des  modifications  analogues,  mais  inverses 
de  celles  que  les  artères  présentent  lorsqu'elles  se  résolvent 
en  ce  réseau  terminal.  La  tunique  amorphe  et  hyaline  qui  en 
constitue  les  parois  se  revêt  peu  à  peu  sur  ses  deux  surfaces 
d'une  couche  accessoire;  à  l'intérieur,  elle  se  garnit  d'un 
épithélium  à  cellules  oblongues  ou  sphériques,  et  à  l'extérieur 
elle  s'entoure  d'une  gaine  de  tissu  conjonctif  dans  l'épaisseur 
duquel  se  développent  bientôt  des  fibres  musculaires.  Dans  les 
veines  qui  sont  encore  très  petites,  mais  qui  sont  déjà  bien 
caractérisées ,  la  tunique  externe  ainsi  constituée  présente  des 
fibres  musculaires  dont  la  disposition  est  circulaire,  et  les  fibres 

la  manière  suivante  leur  calibre ,  serait  parfois  inférieur  au  diamètre 
dans  les  divers  organes,  en  prenant  des  globules  du  sang  :  ainsi,  en  pra- 
pour  unité  de  mesure  les  capillaires  tiquant  des  injections  successives  avec 
les  plus  fins  de  la  substance  fier-  des  dissolutions  de  cbromate  de  po- 
veuse  :  tasse  et  d'acétate  de  plomb,  il  a  rem- 
potons      0,97  P'i  des  vaisseaux  dont  le  diamètre  ne 

Nerf  médian 2,30  lui   a    paru    être    que    de    ^    de 

Muscle  biceps  brachial.  .  .  .    3,30  ligne  (b).  Des  résultats  analogues  ont 

Derme 3,60  été  obtenus  par  M.  Lambotte  (c),  ainsi 

Villosités  intestinales  ....     4,40  qHe    pai.     ]y]M#      ])0yère     et     Quatre- 

intestin  grêle 4,90  fages  ^_   Nous  reviendrons  sur  ce 

Estomac '  point  lorsque  nous  nous  occuperons 

ems ,'.'*'   „'„„  ,',  de  la  communication  des  capillaires 

Corpuscules  de  Malpighi.  .  .     7,09  (a).  .  ,  -  .  ,         , 

sanguins  avec  les  vaisseaux  lymphn- 
(1)    D'après    les    recherches    de      tiques# 

M.  Krause,  le  diamètre  des  capillaires 

(a)  Valenlin,  Ueber  die  Gestalt  und  Grosse  der  Durchmesser  der  feinsten  Blntcjefdsse  (Heckcr's 
Aiïnalen  der Gesammt.  Heilk.,  1834,  p.  277). 

(b)  Krause,  Vermischte  Beobachtungen  und  Bemerkungen  (Mûller's  Archiv,  1837,  p.  4). 

(c)  Lambotte,  Mémoire  sur  l'organisation  des  membranes  séreuses  (Bullet.  de  l'Académie  de 
Bruxelles,  1840). 

(d)  Quatrefagos  el  Doyèrc,  Sur  les  rapillaires  sanguins  (L'Institut,  1840,  t.  IX,  p.  73). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  571 

du  tissu  conjonclif  situé  au-dessous  affectent  en  général  une 
direction  longitudinale.  Dans  les  branches  veineuses  d'un 
volume  plus  considérable,  les  parois  s'enveloppent  d'un  réseau 
élastique,  et  dans  celles  d'un  diamètre  moyen  il  y  a,  comme 
dans  les  artères,  une  série  assez  nombreuse  de  couches  plus 
ou  moins  différentes  entre  elles;  mais  ici  l'élément  musculaire 
domine.  Enfin,  dans  les  gros  troncs,  les  couches  qui  représen- 
tent la  tunique  moyenne  s'affaiblissent  beaucoup  et  peuvent 
même  disparaître,  tandis  que  des  éléments  de  tissu  contractile 
se  développent  souvent  dans  la  tunique  externe  (1).  Mais  ce 
qu'il  importe  surtout  de  remarquer  dans  la  structure  des  veines 
comparée  à  celle  des  artères  ,  c'est  l'absence  presque  com- 
plète de  ce  tissu  élastique  à  fibres  circulaires,  qui  joue  un  rôle 
si  important  dans  la  constitution  de  ces  derniers  vaisseaux. 
Aussi  dit  -  on  communément  qu'elles  manquent  de  tunique 
moyenne  et  ne  sont  composées  que  d'une  tunique  séreuse , 
qui  est  interne,  et  d'une  tunique  dite  celluleuse,  qui  est 
externe  (2).   Il  en  résulte  de  grandes   différences  dans  les 

(1)  Les  anciens  anatomistes  étaient  de  nature  musculaire  et  ne  se  compo- 
sés divisés  d'opinion  au  sujet  de  la  serait  que  de  fibres  longitudinales  (a). 
structure  des  parois  des  veines.  Vésale  Haller  nie  aussi  l'existence  des  fibres 
admettait  l'existence  de  trois  sortes  musculaires  transverses  que  Borelli  et 
de  fibres  :  les  unes  longitudinales,  quelques  autres  observateurs  avaient 
d'autres  transversales,  et  d'autres  en-  décrites  (6).  Enfin  Bichat  ne  dis- 
core  dont  la  direction  serait  oblique.  tingue  dans  les  parois  des  veines, 
Fallope  et  Bartholin  nièrent  cette  indépendamment  du  tissu  conjonctif 
disposition  fibreuse  ;  et  Diemerbroeck  (ou  cellulaire)  dont  elles  sont  revêtues, 
soutenait  que  ces  vaisseaux  ne  sont  que  deux  tuniques  :  une  membrane 
pourvus  que  d'une  seule  tunique  ,  et  une  couche  de  fibres  de  nature  par- 
tandis  que  Willis,  Nicolaï  et  Blancard  liculière,  différentes  de  celles  des  ar- 
crurent  pouvoir  y  reconnaître  jusqu'à  tères  et  de  celles  du  tissu  muscu- 
quatre  enveloppes   distinctes.    Senac  laire  (c). 

les  considère  comme  étant  formées  de  (2)  11  y  a  encore  aujourd'hui  des 

trois  tuniques,  dont  la  moyenne  serait  anatomistes  qui  nient  l'existence  de 

(a)  Senac,  Traité  de  la  structure  du  cœur,  1. 1,  p.  254. 

(6)  Haller,  Elementa  physiologiœ  corporis  hum  an  i,  t.  I,  p.  i  24. 

(c)  Bichat,  Analomie  générale,  t.  I,  p.  304  (édit.  de  1818). 


573  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

propriétés  physiques  et  physiologiques  des  parois  de  ces  deux 
ordres  de  vaisseaux.  L'artère ,  à  raison  de  l'élasticité  de  sa 
tunique  moyenne ,  conserve  sa  forme  tubulaire  lorsqu'elle  est 
vide;  et  si  l'on  vient  à  en  fendre  les  parois,  on  voit  les  bords  de 
la  plaie  s'écarter  ou  se  renverser  même  en  dehors,  et  ne  se 
cicatriser  jamais  d'une  manière  parfaite.  Les  veines,  au  con- 
traire, sont  flasques;  dès  qu'elles  ne  sont  plus  distendues  parle 


tout  vestige  d'une  tunique  moyenne 
dans  les  veines  de  l'Homme,  et  qui 
assurent  n'avoir  jamais  pu  y  décou- 
vrir les  fibres  longitudinales  dont  tant 
d'auteurs  avaient  fait  mention  (a). 
Etïectivement  ,  quand  on  étudie  la 
structure  de  ces  vaisseaux  à  l'œil  nu 
seulement,  on  ne  parvient  que  diffici- 
lement à  y  distinguer  autre  chose  que 
les  deux  tuniques  indiquées  ci-dessus  ; 
mais  lorsqu'on  fait  l'analyse  anatomi- 
que  d'un  de  ces  tubes  sous  le  micros- 
cope, on  voit  que  l'organisation  de 
leurs  parois  est,  en  réalité,  beaucoup 
plus  complexe,  et  que  l'opinion  de 
Senac  ne  s'éloignait  que  peu  de  la 
vérité. 

La  tunique  interne  des  veines, 
comme  celle  des  artères,  est  garnie 
d'une  couche  de  cellules  épiihéliales. 
La  forme  de  celles-ci  est  oblongue  ou 
sphérique  et  leur  noyau  est  bien  dis- 
tinct (6).  La  tunique  moyenne  est  géné- 
ralement mince  et  d'une  couleur  gris 
rougeâtre  ;  elle  n'est  jamais  jaune, 
comme  aux  artères,  et  contient  beau- 
coup de  tissu  conjonctif  ;  on  y  trouve 
aussi  des  fibres  musculaires  et  des 
couches  de  fibres  élastiques  disposées 
longitudinalement.  La  tunique  externe 
ou  tunique  adventive  est,  en  général, 
la  plus  considérable,  et  elle  ressemble 


à  celle  des  artères,  si  ce  n'est  qu'on  y 
rencontre  souvent  des  fibres  muscu- 
laires longitudinales  très  distinctes. 

Dans  les  très  petites  veines  le  tissu 
conjonctif,  faiblement  fibrillaire,  re- 
vêt presque  directement  la  couche 
épithéliale  interne.  Dans  celles  d'en- 
viron 0n,m  ,05  de  diamètre,  la  couche 
musculaire,  composée  de  fibres  circu- 
laires, commence  à  se  montrer.  Elle 
se  compose  de  cellules  oblongues 
pourvues  d'un  petit  noyau,  qui  sont 
d'abord  très  écartées  entre  elles,  mais 
qui  forment  bientôt  une  couche  con- 
tinue. 

Dans  les  veines  de  moyen  calibre 
(c'est-à-dire  de  2  à  9  millimètres  de 
diamètre),  la  tunique  moyenne  acquiert 
un  développement  plus  considérable 
et  se  compose  de  couches  fibreuses 
transversales,  aussi  bien  que  de  cou- 
ches à  fibres  longitudinales.  Les  pre- 
mières sont  formées  par  du  tissu  con- 
jonctif ordinaire ,  mêlé  à  quelques 
fibres  élastiques  fines  et  ondulées,  et  à 
beaucoup  de  fibres  musculaires  lisses. 
Les  couches  longitudinales  sont  for- 
mées par  des  fibres  élastiques  réu- 
nies en  forme  de  réseau.  La  tunique 
externe,  en  général  très  épaisse,  se 
compose  essentiellement  de  tissu  con- 
jonctif et  de  fibres  élastiques  dirigées 


(a)  Cruveilhier,  Traité  d'anatomie  descriptive,  1843,  t.  III,  p.  9. 

(6)  Voyez  Salter,  Veins  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  and  Physiol,  t.  IV,  p.  1309,  fig.  853). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  573 

sang,  elles  s'affaissent,  et  quand  elles  ont  été  ouvertes,  les  lèvres 
de  la  plaie  se  laissent  facilement  rapprocher  et  se  soudent  promp- 
tement  entre  elles.  Du  reste,  les  canaux  veineux  ne  se  perfec- 
tionnent, comme  je  viens  de  l'indiquer,  que  là  où  les  parois  sont 
susceptibles  de  se  dilater  sous  la  pression  exercée  de  dedans  en 
dehors  par  le  sang  en  circulation.  Dans  les  points  où  ils  se 
trouvent  limités  par  des  parties  très  résistantes,  telles  que  des 
lames  osseuses  ou  des  cloisons  aponévrotiques,  ils  n'acquièrent 
que  leur  tunique  interne,  et  souvent,  au  lieu  d'affecter  une  forme 


longitudinalement  et  réunies  en  ré- 
seau (a);  quelquefois  on  y  voit  aussi 
des  fibres  musculaires  longitudinales. 
Enfin  la  tunique  interne  se  compose 
de  trois  couches  :  1°  une  lame  épi- 
lliélique  très  mince  ;  2°  une  lame 
striée  (quelquefois  plusieurs)  ;  3o  une 
membrane  élastique  à  fibres  longitu- 
dinales réunies  en  un  réseau  extrê- 
mement serré. 

Les  gros  troncs  veineux  se  font  re- 
marquer par  le  faible  développement 
de  la  tunique  moyenne,  et  plus  parti- 
culièrement des  fibres  musculaires  de 
celle  gaîne  intermédiaire  qui  parfois 
manque  complètement.  La  tunique 
externe  devient,  au  contraire,  plus 
épaisse  et  renferme  souvent  beaucoup 
de  fibres  musculaires  lisses  dont  la 
direction  est  longitudinale,  mêlées  à 
quelques  fibres  élastiques  (6).  Dans  le 
voisinage  du  cœur  on  trouve  aussi  à 
la  face  externe  des  veines  une  couche 
de  fibres  musculaires  striées ,  qui 
n'avaient  pas  échappé  à  l'attention  de 


quelques  anciens  anatomistes ,  tels 
que  Borelli  et  Bidloo  (c),  mais  qui 
n'ont  été  bien  observées  et  netlement 
caractérisées  que  dans  ces  dernières 
années  (d). 

Les  vaisseaux  nourriciers  des  parois 
des  veines  sont  visibles  dans  les  ra- 
muscules  dont  le  diamètre  n'est  que 
d'environ  1  millimètre.  Les  artérioles 
qui  s'y  ramifient  proviennent  de  bran- 
ches qui  se  distribuent  aussi  aux  par- 
ties voisines ,  et  les  veinules  de  ce 
système  de  vasa  vasorum  débouchent, 
en  général,  directement  dans  l'inté- 
rieur du  vaisseau  auquel  elles  appar- 
tiennent. 

Des  filets  nerveux  s'y  distribuent 
aussi,  mais  en  très  petit  nombre,  et 
dans  la  plupart  des  veines  on  n'en 
aperçoit  aucune  trace. 

Pour  plus  de  détails  sur  la  structure 
intime  des  tuniques  des  veines,  je 
renverrai  aux  travaux  de  MM.  Henle, 
Salter  et  Kôlliker  (e). 


(a)  Kôlliker,  Op.  cit.,  p.  618,  fig.  288. 

(b)  Râuschcl,  De  arteriar.  et  venar.  struct.  (Dissert,  inaug.).  Vratisl.,  1836. 

(c)  Borelli,  De  molu  Animalium,  pars  n,  cap.  4,  prop.  37,  p.  52. 

—  Bidloo,  Anatomia  corporis  humani,  pi.  23,  fig.  1-3. 

(tl)  Bernard,  Disposit.  des  fibres  musc,  dans  la  veinecave  du  Cheval  (Gaz.  méd.,  1849,  p.  33l). 

—  Salter,  Op.  cit.  (ïodd's  Cyclop.  ofAnat.  and  Physiol.,  t.  IV,  p.  1376,  fig.  861). 

—  Kôlliker,  Op.  cit.,  p.  620,  fig.  290. 

(e)  Voyez  Kôlliker,  Beitràge  xur  Kenntniss  der  glatten  Muskeln  (Zeitschrift  fur  VJissenschaftl. 
Zool.,  1849,  t.  I,p.  83). 


574  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

tabulaire,  ils  occupent  (oui  l'espace  que  ces  parties  laissent  entre 
elles,  de  façon  à  constituer  des  réservoirs  ou  sinus  qui  ressem- 
blent beaucoup  aux  cavités  lacunaires,  qui,  chez  la  plupart  des 
Animaux  invertébrés,  jouent  un  rôle  si  considérable  dans  la  con- 
stitution de  l'appareil  circulatoire.  Ainsi,  dans  la  substance  des 
os  spongieux,  le  sang  veineux  occupe  presque  toutes  les  cellules 
dont  le  tissu  de  ces  organes  est  formé,  et  les  cavités  vasculaires 
ainsi  constituées  ne  sont  tapissées  que  par  une  lame  membra- 
neuse extrêmement  mince  en  continuité  avec  la  tunique  interne 
des  veines  adjacentes.  Quelques-uns  de  ces  canaux  du  diploé 
se  terminent  en  cul-de-sac,  et  leur  trajet,  ainsi  que  leur  forme, 
paraît  être  déterminé  seulement  par  la  position  des  lamelles 
osseuses  circonvoisines  (1). 

Les  grosses  veines  de  l'Homme  et  des  autres  Mammifères  se 
font  remarquer  aussi  par  les  nombreuses  valvules  dont  elles 
sont  garnies  (2).  Les  très  petites  branches  en  sont  dépourvues, 

(1)  Les  anciens  anatomistes  n'a-  avait  été  constatée  vers  le  milieu  du 
vaient  que  des  notions  très  vagues  sur  xvr siècle,  d'abord  parCh.  Etienne  (d), 
la  disposition  des  veines  des  os.  En  puis  par  Sylvius ,  Canani ,  Piccolo- 
1813,  Fleury  et  Dupuytren  (a)  en  fi-  mini,  et  quelques  autres  anatomistes 
ren t  une  étude  sérieuse,  et  plus  tard  de  la  même  époque;  mais  les  faits 
Ghaussier  s'en  occupa  aussi  (6)  ;  mais  annoncés  par  ces  auteurs  furent  ré- 
c'est  à  mon  ancien  ami  et  collabora-  voqués  en  doute  par  Fallope,  Eusta- 
teur  Gilbert  Breschet  que  l'on  doit  les  cbi ,  clc,  et  Fabricius  d'Acquapen- 
travaux  les  plus  importants  sur  ce  dente  fut  le  premier  à  en  faire  une 
sujet  intéressant  (c).  étude  attentive  et  à  en  donner  une 

(2)  Ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit,  la  description  générale.  Ses  recherebes 
présence  de  valvules,  dans  quelques-  datent  de  1576  (e). 

unes  des  veines  du  corps  humain,  Pour  plus  de  détails  sur  l'historique 

(a)  Dupuytren,  Propositions  sur  quelques  points  d'anatomie,  de  physiologie  et  d'anatomie  patho- 
logique (Thèse,  Paris,  an  XII). 

—  Fleury,  Lettre  sur  la  découv.  des  canaux  veineux  des  os  (Gaz.  méd.,  1836,  p.  429). 

(b)  Chaussier,  De  l'encéphale,  p.  xix  et  suiv.,  pi.  *. 

(c)  Breschet,  Untcrsuch.  ûber  einige  neuentdeckte  Thcisle  des  Venensystems  (Nova  Acta  Acad. 
Nat.  curios.,  1826,  t.  XIII,  p.  359,  pi.  17  à  19),  et  Recherches  anat.,  physiol.  et  pathol.  sur  le 
système  veineux.  In-fol. 

—  Raciborski,  Hist.  des  découvertes  relatives  au  système  veineux  (Mém.  de  l'Acad.  de  méd., 
t.  IX,  1841). 

(d)  Voyez  Haller,  Elemenla  physiologiœ,  1. 1,  p.  137. 

—  Portai,  Histoire  de  l'analomie,  t.  I,  p.  339. 

(é)  Fabricius  ab  Ac^uapendcntc,  De  venarum  osliolis  (Opéra  omnia,  p.  150). 


CHÎ'Z    LES    MAMMIFÈRES.  575 

mais  celles  d'un  calibre  un  peu  fort  en  présentent  presque 
toujours  à  leur  embouchure,  et  dans  les  gros  troncs  on  en 
trouve  ordinairement  de  distance  en  disiance.  En  général,  ces 
espèces  de  soupapes  sont  disposées  par  paires,  et  elles  ressem- 
blent, par  leur  mode  de  conformation,  aux  valvules  sigmoïdes 
que  nous  avons  rencontrées  à  l'entrée  des  grosses  artères  qui 
naissent  du  cœur.  Leur  surface  concave,  et  par  conséquent  aussi 
leur  bord  libre,  sont  toujours  dirigés  vers  ce  dernier  organe; 
elles  se  rabattent  facilement  contre  les  parois  du  vaisseau,  mais 
lorsqu'elles  sont  distendues,  elles  se  rencontrent  et  ferment 
plus  ou  moins  complètement  le  canal  :  aussi  est-il  facile  d'injec- 
ter le  système  veineux  de  la  périphérie  vers  le  centre  de  l'appa- 
reil ;  néanmoins,  quand  on  cherche  à  pousser  le  liquide  en  sens 
inverse,  on  se  trouve  bientôt  arrêté,  car  ces  valvules,  comme 
des  portes  d'écluse,  se  rapprochent  alors  et  interceptent  le  pas- 
sage. Elles  semblent  être  formées  par  un  repli  ou  un  prolon- 
gement de  la  membrane  interne  de  la  veine  (1.)  ;  mais,  malgré 

des  découvertes  relatives  aux  valvules  quée  que  par  les  noyaux  épars  sur  la 
des  veines,  je  renverrai  à  la  thèse  de  surface  de  ces  appendices  ou  adhérents 
M.  Houzé  (a),  à  leurs  bords.  La  couche  fibreuse, 
(1)  M.  Henle  considère  les  valvules  située  au-dessous,  se  compose  princi- 
conime  étant  formées  non  par  une  paiement  de  filaments  ondulés  dont 
duplicature  de  la  tunique  interne  des  la  direction  générale  est  parallèle  au 
veines,  mais  par  un  prolongement  de  bord  libre  de  la  valvule,  et  dont  les 
la  tunique  épithéliale  renforcée  inlé-  extrémités  paraissent  être  en  conti- 
rieurement  par  du  tissu  conjonctif  et  nufté  avec  la  couche  de  fibres  trans- 
des  faisceaux  de  fibres  analogues  à  versales  de  la  paroi  veineuse  (c). 
celles  de  la  tunique  striée  (6)  ;  cepen-  M.  Kôlliker  n'y  a  pas  trouvé  de  fibres 
danlil  est  souvent  facile  d'y  reconnaître  musculaires  (d),  mais  quelques  obser- 
deux  feuillets  adossés  l'un  à  l'autre.  valeurs  en  ont  aperçu  (e);  et  lors- 
La  couche  épithéliale  est  très  mince  qu'on  traite  un  de  ces  appendices 
et,  en  général,  sa  présence  n'est  indi-  lamelleux   par  de    l'acide    acétique, 

(a)  Houzé  de  l'Aulnoit,  Recherches  anatomiques  et  physiologiques  sur  les  valvules  des  veines. 
Paris,  1854,  n°  44. 

(6)  Houle,  Traité  d'anatomie  générale,  t.  II,  p.  38. 

(c)  Saller,  Veins  (Todd's  Cyclop.  ofAnat.  and  Physiol.,  t.  IV,  p.  1380,  flg.  865,  A). 

(d)  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  022. 

(e)  Wahlgren,  Yensystemets  allmdnn.  Anatoinic.  Lund,  1851. 

m.  37 


576  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

leur  grande  minceur,  on  trouve  aussi  dans  leur  substance  des 
fibres  élastiques,  et  elles  sont  très  résistantes.  A  la  tête  et  au 
cou,  elles  manquent  ou  n'existent  qu'en  très  petit  nombre.  Le 
système  de  la  veine  porte  en  est  dépourvu,  ainsi  que  les 
veines  des  reins,  de  l'utérus,  du  poumon  et  de  quelques  autres 
parties  du  tronc.  Mais ,  dans  les  membres,  on  en  rencontre 
beaucoup  ;  et  comme  d'ordinaire  les  parois  du  vaisseau  se 
dilatent  un  peu  en  aval  de  chacun  de  ces  petits  appareils,  les 
veines  des  extrémités  ont  en  général  une  forme  noueuse  et 
paraissent  comme  étranglées  de  distance  en  distance  (1). 

§  18.  — Chez  l'Homme  et  les  autres  Mammifères,  de  même 
que  chez  les  Vertébrés  inférieurs,  les  veines  sont  plus  grosses 
et  plus  nombreuses  que  les  artères.  Les  anciens  physiologistes 
ont  cherché  à  évaluer  la  différence  de  capacité  qui  existe  entre 
ces  deux  systèmes  de  vaisseaux  ;  mais  les  bases  nous  manquent 
pour  de  pareils  calculs,  et  par  conséquent  je  ne  m'y  arrêterai 
pas* ici  (2). 

Il  est  aussi  à  noter  que  les  veines  communiquent  entre  elles 

on  y  distingue  deux  ordres  de  noyaux  où  il  existait  des  rangées  de  trois 
dont  les  uns  ,  disposés  parallèlement  de  ces  replis  semi-lunaires  (c),  et  chez 
au  bord  libre ,  dépendent  des  fibres  les  grands  Mammifères  cette  disposi- 
onduleuses,  et  dont  les  autres,  dirigés  tion  n'est  pas  rare, 
en  sens  opposé,  paraissent  provenir  Je  reviendrai  sur  l'histoire  de  ces 
de  fibres  musculaires  (a).  valvules,  en  traitant  du  mécanisme 
(1)  Chez  l'Homme  on  trouve  quel-  de  la  circulation  ;  et,  pour  plus  de 
quefois  des  valvules  dans  des  veines  détails  sur  leur  structure,  je  renverrai 
qui  n'ont  guère  plus  de  1  millimètre  à  un  très  bon  article  sur  les  veines, 
en  diamètre  (b).  Dans  les  petites  publié  récemment  par  M.  Salter  (c/). 
veines  elles  sont  en  général  simples,  (2)  En  prenant  la  capacité  des  ar- 
mais dans  les  grosses  elles  sont  près-  tères  comme  unité,  la  capacité  des 
que  toujours  opposées  par  paires.  veines  a  été  évaluée  à  2  environ  par 
Quelques  anatomistes  citent  des  cas  Haller,  et  à  h  par  Borelli  (e). 

(a)  Salter,  Op.  cit.,  fig.  865,  B. 

(b)  Henle,  Traité  d'anatomie  générale,  t.  II,  p.  88. 

(c)  Haller,  Elemenla  physiologiœ,  t.  I,  p.  141. 

(d)  Dans  le  Cyclopœdia  of  Anat.  and  Physiol.,  t.  IV,  p.  1377. 

(e)  Voyez  Haller,  Elementa  physiologue,  1. 1,  p.  131 . 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  577 

beaucoup  plus  fréquemment  que  ne  le  font  les  artères.  Les 
branches  d'un  volume  considérable  constituent  souvent  un 
réseau  à  larges  mailles,  et  les  plexus  veineux  sont  très  communs. 
Il  existe  même  des  anastomoses  plus  ou  moins  directes  entre 
tous  les  gros  troncs,  et  si  un  de  ces  vaisseaux  vient  à  être 
oblitéré  dans  un  point,  le  retour  du  sang  vers  le  cœur  ne  s'en 
effectue  pas  moins  à  l'aide  des  voies  latérales  qui  lui  sont  ainsi 
ouvertes. 

§  19.  —  Pour  donner  en  peu  de  mots  une  idée  nette  de  la  Mode  je 
disposition  de  l'ensemble  du  système  veineux  de  l'Homme  et  ^système"' 
des  autres  Mammifères,  il  est  bon  de  remonter  jusqu'aux  pre- 
mières périodes  de  la  vie  embryonnaire,  et  de  voir  comment 
cet  appareil  vasculaire  se  constitue  peu  à  peu.  Ce  sujet  a  été 
étudié  avec  beaucoup  de  soin  par  plusieurs  physiologistes, 
plus  particulièrement  par  le  professeur  Rathke,  et  nous  aurons 
à  y  revenir  dans  une  autre  partie  de  ce  cours  ;  mais  en  ce 
moment  je  n'entrerai  dans  aucun  détail ,  et  je  me  bornerai  à 
indiquer  brièvement  les  faits  dont  la  connaissance  est  néces- 
saire pour  nous  foire  saisir  les  liens  qui  existent  entre  le  mode 
d'organisation  du  système  veineux  de  l'Homme  et  celui  des 
autres  Vertébrés  (1  ) . 

Chez  l'embryon  de  tous  ces  Animaux,  le  retour  du  sang  vers 
Je  cœur  s'effectue  d'abord  par  deux  paires  de  vaisseaux,  dont 
les  uns  viennent  de  la  tête,  et  peuvent  être  désignés  sous  le 
nom  de  veines  céphaliques  (2) ,  et  les  autres,  appartenant  à  la 

il)  Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet,  je  très  embryologistes  désignent  ces  vais- 

renverrai  aux  travaux  de  \i  M.  RaLhke,  seaux  sous  le  nom  de  veines  jugu-  , 

Stotk  et  Marshall  (a).  laires  ;  mais   ils  correspondent    aux 

(2)  M.  Rathke  et  la  plupart  des  au-  veines  caves  supérieures  et  aux  troncs 

(a)  Rathke ,  Uebev  tien  Bau  und  die  Entwickelung  des  Venerisystems  der  Wirbelthiere 
(Dritter  Bericht  iiber  das  naturwissenschaflliche  Seminar  bei  der  Universitât  zu  Konigsberg, 
1838). 

—  Stark,  Comment,  anat.  phys.  de  venœ  azygos  natura,  vi  atque  munere.  Lipsiœ,  1835. 

—  J.  Marshall,  On  the  Development  of  the  Great  Anterior  Veins  in  Man  and  Mammalia  (Philos-, 
Trans.,  1850,  p.  133); 


578  APPAREIL    DE    LA    CIKCULAT10N 

portion  rachidienne  du  corps,  suivent  une  marche  inverse  et 
ont  été  appelés  veines  cardinales. 

La  veine  céphalique  et  la  veine  cardinale  du  même  côté  se 
réunissent  dans  le  voisinage  du  cœur  pour  constituer  un  tronc 
commun  analogue  au  canal  de  Cuvier,  dont  il  a  déjà  été  ques- 
tion chez  les  Poissons,  et  les  deux  troncs  ainsi  constitués  vont 
s'ouvrir  dans  l'oreillette  droite.  Plus  tard  des  vaisseaux  dépen- 
dants des  veines  cardinales  se  montrent  dans  la  région  cervi- 
cale, et  un  système  de  veines  viscérales,  qui  forment  en  quelque 
sorte  pendant  aux  veines  céphaliques,  se  développe  dans  la 
région  abdominale  et  se  termine  dans  l'oreillette  droite  du 
cœur.  Enfin  deux  paires  de  systèmes  veineux,  que  l'on  pourrait 
appeler  appendiculaires ,  car  elles  appartiennent  aux  membres, 
se  constituent,  et  viennent  déboucher,  l'une  dans  les  veines 
céphaliques,  l'autre  dans  les  veines  viscérales.  ïl  en  résulte  que, 
dans  le  voisinage  immédiat  du  cœur,  les  veines  du  système 
céphalique,  du  système  rachidien  et  du  système  appendiculairc 
antérieur,  se  confondent  en  une  seule  paire  de  vaisseaux  appelés 
les  veines  caves  antérieures;  et  que,  d'autre  part,  les  veines 
viscérales  et  les  veines  appendiculaires  postérieures  se  termi- 
nent en  s'unissant  pour  constituer  un  tronc  impair  unique, 
appelé  veine  cave  postérieure. 

Mais  les  transformations  du  système  veineux  ne  se  bornent 
pas  là.  Par  suite  d'une  sortede  contre-balancement  organique,  les 
veines  cardinales  et  leurs  affluents  se  rétrécissent,  et  perdent  de 
leur  importance  à  mesure  que  la  veine  cave  inférieure  et  ses 
annexes  se  développent.  Des  anastomoses  s'établissent  entre 
les  divers  systèmes,  et  vers  la  base  de  la  région  cervicale  un 
canal  transversal  fait  communiquer  entre  elles  les  deux  veines 
céphaliques. 


brachio-cépbaliques  aussi  bien  qu'aux      conséquent  il  m'a  semblé  préférable 
jugulaires  de  l'animal  parfait,  et  par      de  les  en  distinguer  nominalement. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  579 

Chez  quelques  Mammifères,  ce  modo  d'organisation  persiste 
et  se  perfectionne;  par  conséquent,  sauf  l'anastomose  entre 
deux  veines  céphaliques,  la  disposition  de  ce  système  vasculaire 
est  à  peu  près  la  même  que  chez  les  Oiseaux.  En  effet,  la  portion 
antérieure  des  veines  céphaliques  constitue  les  jugulaires  ;  la 
portion  , suivante  qui  se  trouve  en  aval  du  confluent  de  ces 
vaisseaux  avec  le  tronc  principal  du  système  appendiculaire 
antérieur,  c'est-à-dire  la  veine  sous-elavière,  prend  le  nom  de 
tronc  brachio+céphalique ,  et  ce  même  tronc,  en  approchant 
davantage  du  cœur,  constitue  de  chaque  côté  une  veine  cave 
antérieure.  Mais,  chez  la  plupart  des  Animaux  de  cette  classe, 
ainsi  que  chez  l'Homme,  des  changements  ultérieurs  se  mani- 
festent dans  ce  système  de  gros  vaisseaux  et  font  disparaître  la 
symétrie  qui  s'y  remarquait  primitivement.  La  branche  anasto- 
motique  transversale  qui  unit  la  grosse  veine  céphalique  gauche 
à  celle  du  côté  droit,  s'élargit  de  façon  à  permettre  à  la  totalité 
du  sang  venant  de  la  tête  et  du  membre  thoracique  par  le  pre- 
mier de  ces  vaisseaux,  de  passer  dans  le  second,  et  en  même 
temps  la  veine  cave  antérieure  du  côté  gauche,  c'est-à-dire  la 
portion  de  la  veine  céphalique  comprise  entre  l'anastomose  en 
question  et  le  cœur,  se  rétrécit  et  disparaît  plus  ou  moins  com- 
plètement. 

Le  tronc  brachio-céphalique  gauche  se  continue  alors  avec 
la  branche  anastomotique  transversale  qui  se  confond  avec  lui, 
et  la  veine  cave  du  côté  droit  devient  le  canal  d'écoulement 
commun  des  deux  moitiés  des  systèmes  veineux  de  la  tête  et 
des  membres  supérieurs. 

La  veine  cardinale  du  côté  droit,  qui  y  débouche,  ne  se  déve- 
loppe que  peu  et  constitue  la  grande  veine  azygos. 

Enfin  la  portion  terminale  de  la  veine  céphalique  gauche,  qui 
formait  d'abord  une  seconde  veine  cave  antérieure  et  qui  s'est 
flétrie,  disparaît  plus  ou  moins  complètement  ;  mais  on  en 
trouve  encore  des  traces  dans  le  voisinage  immédiat  de  son 


580  APPAREIL    DE    LA.    CIRCULATION 

embouchure  dans  l'oreillette,  où  elle  constitue  le  canal  appelé 
sinus  coronaire  du  cœur  (1), 

D'autres  fois  cette  portion  cardiaque  de  la  veine  céphalique 
primordiale  est  moins  atrophiée,  et  la  veine  cardinale  de  ce 
côté  se  retrouve  sous  la  forme  d'une  veine  azygos  gauche,  où 
viennent  aboutir  les  veines  intercostales  correspondantes,  ainsi 
que  certaines  veines  du  cœur. 

Quant  aux  changements  qui  s'opèrent  dans  la  veine  cave 
inférieure  et  ses  affluents,  c'est-à-dire  dans  les  veines  viscérales 
et  les  veines  des  membres  postérieurs,  nous  pouvons  les  négli- 
ger pour  le  moment,  car  les  données  que  nous  possédons  déjà 
suffiront  pour  nous  fournir  la  clef  des  variations  qui  se  ren- 
contrent dans  le  système  veineux  général  des  divers  Mammi- 
fères, et  nous  permettre  d'y  reconnaître  toujours  le  même  plan 
fondamental.  Mais  pour  acquérir  une  connaissance  suffisante 
des  voies  ouvertes  ainsi  au  sang  qui  revient  des  diverses  parties 
de  forganisme  vers  le  cœur,  il  est  nécessaire  d'examiner  de 
plus  près  la  disposition  de  chacune  des  portions  de  ce  vaste 
ensemble  de  canaux  centripètes. 
veines  §  20.  —  Chez  l'Homme,  les  veines  qui  naissent  des  capil- 

chez   l'Homme.  ,._/.•-.  ,  i  •  -, 

mires  tournis  par  les  ramuscules  terminaux  des  artères  caro- 
tides, et  qui  appartiennent  à  la  tête,  constituent  par  leurs 
rameaux  deux  paires  de  troncs  principaux.  Ces  grosses  veines 
veines  céphaliques,  que  l'on  désigne  sous  le  nom  de  jugulaires,  cor- 
respondent, jusqu'à  un  certain  point,  les  unes  aux  carotides 
externes,  les  autres  aux  carotides  internes,  mais  elles  ne  se 
confondent  pas  entre  elles  de  chaque  côté  du  cou,  comme  le 
font  ces  artères,  et  elles  descendent  isolément  jusque  dans  le 
thorax  (2). 

(1)  Voyez,  à  ce  sujet,  les  observations  nage  de  l'oreille  vers  le  tiers  interne 
de  M.  Marshall  (loc.  cit.).  de  la  clavicule ,  à  peu  de  distance  de 

(2)  La  veine  jugulaire  externe  des-  la  peau  ,  dont  elle  n'est  séparée  que 
cend  presque  verticalement  du  voisi-  par   le  muscle  pêaucier  el  on  dehors 


CHEZ    LES    MAMMIFERES. 


581 


Les  branches  dépendantes  du  cuir  chevelu  s'anastomosent  veine  juguiair 
fréquemment  entre  elles  et  forment  sous  la  peau  du  crâne  un  et  sesSims 
réseau  à  larges  mailles  dont  naissent  de  chaque  côté  trois  veines 
principales  situées,  l'une  à  la  partie  antérieure  du  front,  une 
autre  sur  la  tempe,  et  la  troisième  derrière  l'oreille.  La  veine 
temporale  accompagne  l'artère  du  même  nom  et  descend  verti- 
calement derrière  l'articulation  de  la  mâchoire  pour  gagner  les 
côtés  du  cou,  et  y  former  la  veine  jugulaire  externe,  après  avoir 
reçu  la  veine  occipitale  en  arrière  et  la  veine  satellite  de  Y  artère 
maxillaire  interne  en  avant  (1).  D'ordinaire  la  veine  faciale,  qui 
descend  du  front  sur  les  ailes  du  nez  et  traverse  obliquement  la 
joue,  y  débouche  également  derrière  l'angle  delà  mâchoire  (2). 
La  veine  jugulaire  externe,  ainsi  constituée,  reçoit  souvent 
d'autres  branches  venant  de  la  région  linguale  et  pharyngienne, 
et  par  conséquent  la  presque  totalité  du  sang  provenant  de  la 
face  et  des  parties  superficielles  du  crâne  y  arrive,  mais  une 
portion  plus  ou  moins  considérable  de  ce  liquide  peut  s'écouler 
immédiatement  dans  la  jugulaire  profonde,  car  il  existe  toujours 
dans  l'épaisseur  de  la  glande  parotide  une  branche  anastomo- 

du  muscle  sterno  -  mastoïdien,  qui  rière  la  branche  montante  de  la  mâ- 
croise  obliquement  sa  direction.  En  choire  inférieure  pour  aller  débou- 
général,  elle  est  dilatée  en  forme  d'am-  cher  dans  la  veine  temporale,  à  la 
poule  à  sa  partie  inférieure,  au-dessus  hauteur  du  lobule  de  l'oreille.  Sou- 
de la  valvule  qui  garnit  son  embou-  vent  une  grosse  branche  anastomo- 
chure  dans  la  veine  sous-clavière  (a).  tique  qui  en  part,  et  qui  va  s'ouvrir 
(l)La  veine  temporale  superficielle  plus  bas  dans  la  veine  jugulaire  in- 
dont  il  est  ici  question  reçoit  au-  terne,  semble  en  être  la  continuation 
devant  de  l'oreille  une  veine  tempo-  principale  (c). 
raie  moyenne  qui  y  arrive  de  la  par-  (2)  Très  souvent  la  veine  faciale 
tie  latérale  du  front,  en  descendant  va  déboucher  dans  la  veine  jugulaire 
obliquement  derrière  l'arcade  sourci-  interne,  au  lieu  de  s'ouvrir  dans  la 
lière  [b).  Laveine  maxillaire  interne  jugulaire  externe  {d). 
est  située  profondément  et  passe  der- 

(a)  Voyez  Bourgery,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  65,  67,  elc. 

(6)  Idem,  ibid.,  t.  IV,  pi.  65. 

(c)  Idem,  ibid.,  t.  IV,  pi.  66,  fig-.  1  et  2. 

\d)  Idem,  ibid.,  pi.  67. 


582  APPAREIL    DR    LA    CFRCULATION 

tique,  dite  branche  communicante,  qui  réunit  ces  deux  grands 
vaisseaux  entre  eux,  et  qui  offre  en  général  un  développement 
très  considérable. 

Les  diverses  veines  superficielles  dont  je  viens  de  signaler 
l'existence  ne  présentent  dans  leur  disposition  rien  de  remar- 
quable, si  ce  n'est  que  la  veine  maxillaire  interne  forme  derrière 
la  branche  ascendante  de  la  mâchoire  inférieure  un  plexus  très 
considérable. 
Dépendances       Les  veines  profondes  qui  rapportent  le  sang  de  l'encéphale 
veine  Claire  offrent ,  au  contraire,   des  particularités  très  importantes  à 
noter.  En  effet,  les  principaux  troncs  de  ce  système  sont  rem- 
placés, dans  l'intérieur  du  crâne,   par  de  grandes  cavités  à 
parois  fibreuses,  qui  semblent  être  des  lacunes  ménagées  entre 
les  lames  de  la  dure-mère,  et  qui  sont  tapissées  seulement  par 
une   expansion  membraneuse  en  continuité  avec  la  tunique 
interne  des  tubes  veineux  d'alentour.  Ces  réservoirs  sont  ap- 
sinus      pelés*  les  sinus  de  la  dure-mère;  ils  correspondent  généralement 

de  . 

a  di.re-m.re.  aux  espaces  compris  entre  les  grandes  masses  nerveuses  de 
l'encéphale:  ils  communiquent  tous  entre  eux  de  façon  à  former 
un  grand  système  de  canaux ,  et  par  l'intermédiaire  de  deux 
d'entre  eux,  situés  de  chaque  côté  de  la  base  du  crâne,  ils 
débouchent  au  dehors  dans  les  veines  jugulaires  internes.  On 
en  compte  quatorze,  dont  cinq  sont  pairs  et  quatre  occupent  la 
ligne  médiane. 

L'un  de  ces  derniers,  appelé  sinus  longitudinal  supérieur  ou 
sinus  triangulaire,  occupe  l'intérieur  du  bord  supérieur  de  la 
face  du  cerveau,  grand  repli  vertical  de  la  dure-mère  qui  descend 
de  la  voûte  du  crâne  entre  les  deux  hémisphères  cérébraux  (1). 

(1)  Ce  sinus  est  situé  par  consé-  l'ethmoïde  en  avant  jusqu'au  niveau 
quent  immédiatement  au-dessous  de  de  la  protubérance  occipitale  en  ar- 
ia voûte  du  crâne  ,  et  il  s'étend  ,  en  rière  (a).  Il  reçoit  non  -  seulement 
décrivant   un   demi  -  cercle  ,  depuis  beaucoup  de  veines  de  la  dure-mère 

(a)  Voyez  Rourgery,  Op.  rit.,  I.  IV,  pi.  72,  fig.  3  ;  pi.  73,  fig\  i . 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  583 

Sa  cavité  est  traversée  par  beaucoup  de  brides  fibreuses,  cl  il 
reçoit  les  veines  cérébrales  supérieures  et  internes,  ainsi  que 
diverses  branches  venant  de  la  dure-mère  et  des  os  du  crâne.  En 
arrière,  ce  sinus  longitudinal  se  réunit  à  un  autre  réservoir  de 
même  nature,  qui,  situé  également  sur  le  plan  médian,  occupe 
la  ligne  de  jonction  de  la  faux  du  cerveau  avec  un  second  repli 
de  la  dure-mère  disposé  horizontalement  en  travers,  et  appelé 
tente  du  cervelet. 

Cette  dernière  cavité  veineuse  est  nommée  le  sinus  droit  (1). 
Diverses  veines  venant  des  ventricules  du  cerveau  et  d'autres 
parties  profondes  de  l'encéphale  s'y  déversent.  De  même  que 
le  précédent,  il  débouche  postérieurement  dans  les  sinus  laté- 
raux, sur  un  point  où  vient  se  terminer  aussi  une  paire  de 
sinus  appelés  occipitaux  inférieurs,  à  raison  de  leur  position  (2). 
Le  confluent  de  ces  quatre  sinus  et  des  deux  sinus  latéraux 


et  des  os  crâniens ,  mais  aussi  plu- 
sieurs branches  anastomotiques  pro- 
venant des  veines  superficielles  du 
cuir  chevelu.  Deux  de  ces  vaisseaux 
de  communication,  appelés  veines  de 
Santorini ,  traversent  le  trou  parié- 
tal. 11  est  aussi  à  noter  que  la  surface 
interne  du  sinus  longitudinal  supé- 
rieur est  garnie  de  petiles  granulations 
appelées  glandes  de  Pacchioni  ;  mais 
ces  corpuscules  naissent  dans  l'ara- 
chnoïde et  pénètrent  ensuite  entre  les 
lames  de  la  dure-mère.  Leur  déve- 
loppement commence  en  général  vers 
l'âge  de  deux  ans,  et,  dans  la  vieillesse, 
ils  arrivent  jusque  dans  la  substance 
des  os  crâniens.  On  trouve  dans  ces 
granulations  de  la  silice  aussi  bien 
que  du  phosphaté  de  chaux  (aj. 


.  (1)  Ondistingue,  en  général,  sous  le 
nom  de  sinus  longitudinal  inférieur, 
la  portion  antérieure  de  ce  réservoir 
veineux  qui  occupe  le  bord  libre  de 
la  faux  cérébrale,  et  l'on  réserve  le 
nom  de  sinus  droit  pour  la  portion 
qui  longe  la  ligne  de  jonction  de  ce 
repli  falciforme  avec  la  tente  du  cer- 
velet (b).  Parmi  les  veines  qui  viennent 
y  déboucher,  je  signalerai  celles  dites 
ventriculaires  ,  ou  veines  de  Galien, 
qui  naissent  du  plexus  choroïde. 

(2)  Les  sinus  occipitaux  inférieurs 
ou  postérieurs  naissent  sur  les  bords 
du  trou  occipital  dans  l'épaisseur  de 
la  dure-mère,  et  remontent,  en  con- 
vergeant ,  dans  l'épaisseur  de  la  faux 
du  cervelet  pour  aller  déboucher  dans 
le  confluent  occipital. 


(a)  Faivre,  Observations  sur  les  granulations  méningiennes,  ou  glandes  de  Pacchioni  (Ann. 
des  sciences  nat . ,  1853,  3e  série,  t.  XX,  p.  321). 
tb)  Voyez  Bourgery!  Op.  cit.,  I.  IV,  pi.  73,  fig.  1. 


584  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

a  reçu  le  nom  de  pressoir  cl  H érophile ,  parce  que  cet  anato- 
miste  (1),  qui  en  a  donné  une  description,  il  y  a  plus  de  deux 
mille  ans,  supposait  que  les  colonnes  de  sang  contenues  dans 
les  réservoirs  d'alentour  devaient  y  exercer  une  pression  les 
unes  sur  les  autres. 

Les  Sinus  latéraux  qui  naissent  du  confluent  dont  il  vient 
d'être  question  occupent  les  gouttières  latérales  de  la  base  du 
crâne,  et  sont  logés  en  grande  partie  dans  le  bord  postérieur  de 
la  tente  du  cervelet.  Ils  se  dirigent  par  conséquent  d'abord 
horizontalement  en  dehors  et  en  avant  ;  puis,  arrivés  à  la  base 
du  rocher,  ils  descendent  obliquement  vers  l'orifice  crânien 
appelé  trou  déchiré  postérieur,  où  ils  se  continuent  de  chaque 
côté  avec  les  veines  jugulaires  internes  et  reçoivent  le  sang- 
venant  des  sinus  pétreux  inférieurs. 

Les  sinus  pétreux  supérieurs,  qui  longent  le  bord  supérieur 
du  rocher  et  occupent  la  moitié  antérieure  de  la  tente  du  cer- 
velet; reçoivent  quelques  veines  des  parties  latérales  du  cerveau, 
et,  par  leur  extrémité  postérieure,  s'ouvrent  aussi  de  chaque 
côté  de  la  base  du  crâne  dans  le  sinus  latéral  ;  mais  en  avant 
ils  communiquent  avec  le  point  de  jonction  d'une  autre  série 
de  réservoirs  appartenant  à  la  partie  antérieure  de  l'encéphale, 
confluent  où  s'ouvrent  également  les  sinus  pétreux  supérieurs 
dont  il  a  déjà  été  question.  Ce  système  antérieur  se  compose 
principalement  des  sinus  caverneux,  qui  occupent  les  côtés  de 
la  selle  turcique,  et  qui  sont  traversés ,  comme  nous  l'avons 
déjà  vu,  par  l'artère  carotide  interne,  ainsi  que  par  divers  troncs 
nerveux.  Les  veines  ophthalmiques ,  qui  s'anastomosent  avec  les 
veines  faciales,  y  débouchent  et  établissent  une  communication 
facile  entre  les  vaisseaux  profonds  et  superficiels  de  la  partie 
antérieure  de  la  tête.  Les  deux  sinus  caverneux  sont  unis  entre 
eux  par  un  canal  transversal  appelé  sinus  coronaire  ou  sinus 
circulaire  de  Hidley. 

(1)  Voyez  page  8. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  585 

Enfin  les  sinus  pétreuœ  inférieurs,  qui  vont  des  sinus  caver- 
neux aux  sinus  latéraux,  dans  le  point  où  ceux-ci  débouchent 
au  dehors  dans  la  veine  jugulaire,  sont  également  reliés  entre 
eux  par  un  sinus  impair  et  transversal,  appelé  sinus  basilaire 
ou  sinus  occipital  transverse.  Ces  sinus  pétreux  sont  par  con- 
séquent les  canaux  d'écoulement  du  système  veineux  de  la 
portion  antérieure  et  inférieure  de  l'encéphale,  comme  les  sinus 
latéraux  le  sont  pour  toutes  les  portions  postérieures  et  supé- 
rieures du  même  système  (1). 

Je  rappellerai  que  ni  les  veines  du  cerveau,  ni  les  réservoirs 
dont  je  viens  d'indiquer  la  position,  ne  présentent  de  valvules 
dans  leur  intérieur,  et,,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt,  les 
sinus  avoisinant  le  grand  trou  occipital  communiquent  sur  plu- 
sieurs points  avec  les  veines  plexiformes  du  canal  rachi- 
dien  (2). 

La  veine  jugulaire  interne,  qui,  de  chaque  côté  de  la  tête,  fait  veine  jugulaire 

interne. 

suite  à  ces  sinus  encéphaliques,  sort  du  crâne  par  le  trou  dé- 
chiré postérieur,  où  elle  forme  une  sorte  d'ampoule  appelée 
golfe.  Elle  descend  verticalement  sur  le  côté  du  cou,  en  passant    . 
sous  le  muscle  sterno -mastoïdien  et  en  longeant  l'artère  caro- 
tide. Très  souvent  la  veine  faciale  y  débouche,  au  lieu  de  s'ou- 

(1)  En  résumé  ,  nous  voyons  donc  chiré  antérieur,  à  la  jonction  des  sinus 

que  les  sinus  encéphaliques  sont  par-  caverneux,  pétreux  supérieur  et  pé- 

tout  continus  les  uns  avec  les  autres  treux  inférieur  (a)  ;   3"  le  confluent 

et  forment  par  leur  réunion  plusieurs  terminal,  qui,   de  chaque  côté  aussi, 

confluents  dont  les  principaux  sont  :  correspond   au    trou   déchiré    posté- 

1°  le  confluent  postérieur  ou  occipital,  rieur,  et  présente  en  avant  l'embou- 

situé  au  point  de  rencontre  du  sinus  chure  du  sinus  pétreux  inférieur  et 

longitudinal  supérieur,  du  sinus  droit,  en  arrière  celle  du  sinus  latéral, 

des  sinus  occipitaux  et  des  sinus  la  té-  (2)  Ces  anastomoses  des  plexus  in- 

raux  ;  2°  le   confluent  antérieur  ou  tra-rachidiens  ont  lieu  avec  les  sinus 

pétro-sphénoïdal ,   qui  se  trouve  de  occipitaux  et  transverses,  ainsi  qu'avec 

chaque  côté  au-dessus  du  trou  dé-  le  golfe  de  la  jugulaire  interne  (b). 

(a)  Bourgery,  loc.  cit.,  pi.  72,  %.  i. 

(b)  Voyez  Breschet ,  Recherches  anatomiques  ,  physiologiques  et  pathologiques  sur  le  système 
veineux,  pi.  i. 


Veines 
jugulaires 


586  APPAREIL    DE    LA    CIRCULAT!  ON 

vrirdans  la  jugulaire  externe,  et,  dans  la  région  pharyngienne, 
d'autres  veines  de  la  langue,  du  larynx,  de  l'arrière-boucbe, 
s'y  rendent  aussi,  à  moins  qu'elles  ne  rejoignent  la  jugulaire 
externe;  car,  à  cet  égard,  les  variations  sont  très  fréquentes,  et 
ces  deux  grands  troncs  cervicaux  qui  s'anastomosent  aussi  vers 
le  haut  du  cou  à  l'aide  de  branches  de  communication  plus  ou 
moins  fortes,  semblent  pouvoir  se  suppléer  mutuellement  sans 
inconvénient  (1). 

Sur  le  devant  du  cou  on  trouve  deux  autres  veines  qui  ont 
antérieures,  reçu  le  nom  de  jugulaires  antérieures.  Elles  viennent  du  menton 
et  descendent  sous  la  peau  jusque  dans  le  voisinage  du  sternum, 
où  elles  se  portent  obliquement  en  dehors  pour  passer  devant 
les  jugulaires  externe  et  interne,  et  aller  déboucher,  comme  le 
font  ces  deux  vaisseaux ,  dans  le  tronc  sous-clavier  corres- 
pondant (2). 

Enfin  la  veine  vertébrale,  qui  accompagne  l'artère  du  même 
nom"  naît  dans  la  région  occipitale,  et  après  avoir  reçu  des 
séries  de  petits  rameaux  venant,  les  uns  des  muscles  postérieurs 
du  cou,  les  autres  de  l'intérieur  du  canal  racbidien,  se  termine 
inférieurement  dans  le  tronc  sous-clavier,  derrière  la  jugu- 
laire externe  ou  même  dans  ce  dernier  vaisseau.  Mais  ces  veines 
vertébrales,  tout  en  venant  déboucher  ainsi  dans  le  système  des 
veines  céphaliques,   n'y  appartiennent  pas   et  dépendent  du 


Veines 
vertébrales. 


(1)  La  veine  jugulaire  interne  de 
l'Homme  est  beaucoup  plus  grosse 
que  la  jugulaire  externe  ,  et  son  ex- 
trémité inférieure  est  souvent  très 
dilatée  en  forme  d'ampoule  (a).  Chez 
les  asthmatiques  et  les  autres  per- 
sonnes dont  la  respiration  est  gênée  , 
cet  élargissement  devient  très  consi- 
dérable. 


(2)  Les  veines  jugulaires  antérieures 
sont  unies  entre  elles  par  plusieurs 
branches  anastomoliques  transver- 
sales, dont  une,  située  vers  le  bas  du 
cou,  est  remarquablement  dévelop- 
pée (b).  Ces  veines  s'anastomosent 
aussi  avec  les  jugulaires  externes  par 
plusieurs  branches  transversales. 


(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  67  et  68. 
(6)  Idem,  ihiil.,  pi.  07. 


CHEZ  LIlS  mammifères.  587 

système  des  veines  cardinales  ou  raehidiennes,  sur  la  descrip- 
tion desquelles  je  reviendrai  bientôt. 

La  disposition  des  veines  de  la  tête  est  à  peu  près  la  même 
chez  les  autres  Mammifères  ;  mais,  chez  un  grand  nombre  de 
ces  Animaux,  les  communications  entre  les  canaux  veineux  de 
l'encéphale  et  les  jugulaires  externes  sont  plus  directes,  et  la 
plus  grande  partie  du  sang  qui  revient  du  cerveau  passe  dans 
ces  derniers  vaisseaux  par  un  canal  ou  une  fente  pratiquée  à  la 
base  du  crâne  dans  l'os  temporal  ou  entre  cet  os  et  le  rocher. 
Cette  particularité  a  été  remarquée  d'abord  chez  divers  Ani- 
maux hibernants  (1);  mais  elle  se  rencontre  aussi  chez  des 
Quadrupèdes  qui  ne  s'engourdissent  pas  en  hiver  :  le  Cheval, 
par  exemple;  et  elle  paraît  être  liée  seulement  à  la  position  de 
la  tête  chez  ces  Mammifères,  dont  le  corps  est  horizontal. 

Chez  ces  Quadrupèdes,  les  veines  jugulaires  internes  sont  en 
même  temps  très  petites,  et  les  veines  vertébrales,  au  contraire, 
prennent  un  développement  considérable  (2). 

(1)  Otto  a  découvert  celte  disposi-  jugulaire  interne,  qui  accompagne 
tion  chez  la  Chauve-Souris,  le  Heris-  l'artère  carotide,  est  en  général  très 
son,  la  Musaraigne,  l'Ours,  le  Blaireau,  grêle,  et  ne  provient  que  de  la  région 
le  Castor,  le  Loir,  les  Rats,  la  Mar-  occipitale  ;  quelquefois  elle  manque 
motte,  l'Écureuil,  le  Lapin  et  le  Ça-  complètement  (6).  Les  jugulaires  in- 
biai.  ternes  sont  également  peu  distinctes  et 

Cliez  la  Taupe,  le  système  des  sinus  sans   communication  avec  les  vais- 

encéphaliques  communique  au  dehors  seaux  intracràniens  chez  le  Rat  (c). 
par  une  troisième  voie  constituée  à  Elles  sont  mieux  développées  chez 

l'aide  d'une    cavité    veineuse    située  le  Chien,  le  Chat,  la  Martre,  l'Ours, 

transversalement     au-devant    de    la  le  Blaireau,  le  Hérisson,  etc.  Enfin, 

lame  criblée  de  l'ethmoïde  et  débou-  chez  les  Singes,  de  même  que  chez 

chant  dans  la  veine  maxillaire  interne  l'Homme,  elles  sont,  en  général,  plus 

à  la  partie  supérieure  de  l'orbite  (a).  grosses  que  les  jugulaires  externes. 

(2)  Ainsi,  chez  le  Cheval,  la  veine  Pour  les  détails  relatifs  à  la  dispo- 

(«)  Otto,  De  Animalium  quorumdam  per  hiemem  dormientium  vasiscephalicis  et  aure  interna 
[Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,  1856,  t.  XIII,  p.  23,  et  Ann.  des  sciences  nat.,  1827,  t.  XI, 
P.  70). 

(b)  Cliauveau,  Traité  d'anatomie  comparée  des  Animaux  domestiques,  p.  568  et  suiv. 

(c)  Ratlike,  Dritter  Berïcht  (voyez  Stannius  et  Siebold,  Nouveau.  Manuel  d'anatomie  comparée, 
t.  II,  p.  484). 


588  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

veines  Les  veines  des  membres  Ihoraciques,  auxquelles  les  précè- 

des membres  .  ,.,,..  .  „ 

thoraciques.  dentés  viennent  se  reumr  dans  le  voisinage  du  cœur,  forment 
aussi  deux  systèmes  bien  distincts,  quoique  associés  entre  eux  : 
les  unes  sont  superficielles  et  se  trouvent  sous  la  peau;  les  autres 
sont  profondes  et  suivent  le  même  trajet  que  les  artères  dont 
elles  reçoivent  les  noms.  Ces  dernières  veines  sont  en  général 
doubles  et  côtoient  de  chaque  côté  l'artère  qu'elles  accompa- 
gnent. Près  de  l'épaule,  cependant,  les  deux  veines  satellites  de 
l'artère  brachiale  se  réunissent  en  un  seul  tronc  qui,  en  s'avan- 
çant  vers  le  thorax,  prend  successivement  les  noms  de  veine 
axillaire  et  de  veine  sous-clavière  (1). 

Les  principales  veines  sous-cutanées  occupent  d'abord  la 
face  dorsale  de  la  main;  mais,  en  remontant  sur  l'avant-bras, 
elles  constituent  un  réseau  à  larges  mailles  dont  les  troncs  les 
plus  considérables  se  dirigent  vers  le  pli  du  coude  (2);  leur 

sition  "des  veines  de  la  tète  et  du  cou  externe  du  muscle  biceps,  ainsi  que 

chez  le  Cheval,  je  renverrai  aux  ou-  le   bord    antérieur    du   deltoïde  ,   et 

vrages  spéciaux  sur  l'anatomie  de  ces  débouche  dans  la  veine  axillaire,  au 

Animaux  (a).  moment  où  celle-ci  va  s'engager  sous 

(1)  Les  veines  brachiales  sont  sou-  la  clavicule. 

vent  reliées  entre  elles  par  plusieurs  Une  autre  grosse  veine  sous-cutanée, 

branches  anastomotiques  (6).  désignée  sousle  nom  de  veine  médiane, 

(2)  On  donne  le  nom  de  veine  ce-  provient  des  veines  antérieures  du 
phalique  du  pouce,  puis  de  veine  ra~  poignet  et  de  l'avant-bras.  Elle  se 
diale  superficielle,  à  une  veine  sous-  trouve  d'abord  très  rapprochée  de  la 
cutanée  qui,  après  avoir  suivi  le  bord  radiale  superficielle,  mais  s'en  écarte 
dorsal  du  pouce  et  du  premier  os  vers  le  pli  du  coude,  où  elle  reçoit 
métacarpien,  remonte  le  long  du  bord  une  grosse  branche  anastomolique 
externe  du  radius ,  et  qui  est  souvent  venant  des  veines  profondes  ;  puis  elle 
double  au-dessus  du  pli  du  coude  ;  elle  se  divise  en  deux  branches,  dont  l'une, 
reçoit  une  branche  anastomolique  très  appelée  médiane  céphalique,  remonte 
considérable,  appelée  veine  médiane  obliquement  en  dehors  pour  se  réunir 
céphalique,  puis  elle  prend  le  nom  à  la  radiale  et  constituer,  comme  je 
de  veine  céphalique ,  longe  le  bord  l'ai  déjà  dit,  la  veine  céphalique,  et 

(a)  Voyez  Leyh,  Handbuch  der  Anatomie  cler  llausthiere,  p.  418,  fig'.  174. 
—  Chauveau,  Op.  cit.,  p.  592. 

(b)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  t35,  fig.  1 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  589 

disposition  ne  présente  d'ailleurs  rien  d'important  à  noter 
pour  le  physiologiste  ,  et  si  les  chirurgiens  en  décrivent  le 
trajet  avec  beaucoup  de  soin,  c'est  surtout  à  raison  des  faci- 
lités que  ces  vaisseaux  présentent  pour  l'opération  de  la  sai- 
gnée. 

La  veine  sous-clavière,  qui  fait  suite  à  la  veine  axillaire,  reçoit, 
comme  je  l'ai  déjà  dit,  les  veines  jugulaires  superficielles;  et, 
après  s'être  réunie  à  la  jugulaire  interne ,  elle  constitue  de 
chaque  côté  du  sommet  du  thorax  un  gros  tronc  appelé  veine 
brachio-céphalique,  où  viennent  déboucher  les  veines  thyroï- 
diennes inférieures.  Chez  l'Homme,  les  deux  troncs  brachio- 
céphaliques  ne  tardent  pas  à  se  réunir  à  leur  tour,  et  forment  la 
veine  cave  supérieure,  qui  descend  à  côté  de  l'aorte  et  va  dé- 
boucher à  la  face  postérieure  de  l'oreillette  droite  du  cœur, 
après  avoir  reçu  la  veine  azygos,  sur  les  relations  de  laquelle 
je  reviendrai  bientôt. 

La  disposition  des  gros  troncs  terminaux  des  systèmes 
brachio-céphaliques  que  nous  venons  de  trouver  chez  l'Homme 
se  voit  aussi  chez  les  Singes,  les  Carnassiers,  les  Solipèdes,  les 
Ruminants,  les  Édentés,  les  Cétacés  proprement  dits  et  quelques 
autres  Mammifères  (1).  Mais,  chez  l'Éléphant,  la  plupart  des 
Rongeurs,  des  Insectivores  et  des  Chéiroptères,  ainsi  que  chez 
les  Marsupiaux  et  les  Monotrèmes,  le  mode  d'organisation 
embryonnaire  commun  persiste,  et  il  y  a  par  conséquent  deux 
veines  caves  antérieures  (2).  Du  reste,  comme  je  l'ai  déjà  dit, 

dont  l'autre,  nommée  médiane  basi-  et  va  se  terminer  dans  la  veine  axil- 

lique,  continue  son  trajet  sans  changer  laire,  près  de  l'extrémité  supérieure  de 

de  direction,  et,  après  avoir  reçu  les  l'humérus  (a). 

veines  cubitales   superficielles    anté-  (1)   Par  exemple,  chez  la  Taupe, 

rieure  et  postérieure,  forme  le  tronc  parmi  les  Insectivores. 

brachial  appelé  veine  basilique,  qui  (2)  Exemples  :  Parmi  les  Rongeurs, 

suit  le  bord  interne  du  muscle  biceps  le  Lapin,  le  Lièvre,  la  Marmotte,  le 

(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  61. 


590  AITAUEIL    DE    LA    CIRCULATION 

ces  deux  troncs  sont  reliés  entre  eux  par  une  branche  anasto- 
motique  transversale  qui  correspond  à  la  veine  brachio-cépha- 
lique  gauche,  chez  les  espèces  où  la  veine  cave  de  ce  côté 
disparaît. 

§21.  —  Les  veines  des  membres  abdominaux  sont  disposées 
à  peu  près  de  la  même  manière  que  celles  des  membres  tho- 
raciques.  Celles  qui  appartiennent  au  système  profond  accom- 
pagnent, comme  d'ordinaire,  les  artères,  et  dans  la  jambe,  ainsi 
que  dans  le  pied,  elles  constituent  pour  chacun  de  ces  derniers 
vaisseaux  deux  troncs  satellites  qui  s'anastomosent  très  fré- 
quemment entre  eux  ;  mais,  à  partir  du  creux  poplité  (ou  creux 
du  genou),  ces  deux  veines  se  réunissent  en  une  seule  qui  prend 
le  nom  de  veine  fémorale  et  monte  d'abord  à  la  partie  postérieure 
de  la  cuisse,  puis  à  la  partie  interne  de  ce  membre,  et  va  péné- 
trer dans  le  bassin  par  l'arcade  crurale,  où  passe  aussi  l'artère 
fémorale.  Les  veines  sous-cutanées  forment,  comme  à  la  main 
et  à'1'avant-bras,  un  réseau  à  grandes  mailles,  dont  l'un  des 
troncs  principaux  suit  en  dessus  le  bord  interne  du  pied,  puis 
monte  vers  le  bassin,  à  la  face  interne  de  la  jambe  et  de  la 
cuisse.  Ce  vaisseau  correspond  à  la  veine  radiale  superficielle, 
et  porte  le  nom  de  veine  saphène  interne.  Parvenu  près  du  pli 
de  l'aine,  il  pénètre  sous  l'aponévrose  de  la  cuisse  et  va  débou- 
cher dans  la  veine  fémorale.  La  veine  saphène  externe,  qui 
occupe  le  milieu  du  mollet,  correspond  à  peu  près  aux  bran- 

lîal,  lu  Souris ,  l'Échimys,  le  Castor,  ces    deux  vaisseaux  esl    1res  déve- 

!e  Hamster,  l'Écureuil  («).  loppé  (6). 

Parmi  les  Insectivores,  le  Hérisson  11  existe  dans    les  annales  de   la 

et  le  Chrysochlore  du  Cap.  science     un     assez     grand    nombre 

Chez  rornilborbynque,  la  veine  cave  d'exemples  de  l'existence  d'une  se- 

gauche  esl  aussi  grosse  que  sa  congé-  conde    veine    cave   chez    l'Homme  , 

ncre,  cl  le  tronc  transversal  qui  réunit  même  chez  des  adultes  (c). 

(«)  Voyez  Carus  et  Otlo,   Tabula:  Analomiam  comparativam  illustrantes  ,  pars  VI,  pi.  7,  %.  1. 

(b)  Wcckel,  Ornithorhynchi  paradoxi  descriplio  anatomica,  pi.  7,  fig.  i. 

(c)  Voyez,  à  re  sujet ,  le  résumé  îles  observations  de  Mcckcl,  do  Wicse,  de  Brcschet  cl  de  plusieurs 
autres  analoiflisles,  présenté  p;:r  M.  Marshall  (Op  cit.,  Philos.  Trans.,  1850,  p.  100). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  591 

ches  cubitales  et  médianes  dont  la  racine  constitue  la  veine 
basilique  du  bras;  mais,  au  lieu  de  remonter  le  long  de  la 
cuisse,  elle  va  se  jeter  dans  le  tronc  principal  du  système 
veineux  profond,  au  niveau  du' creux  poplité  (1). 

Les  deux  veines  fémorales  qui  reçoivent  ainsi  la  presque 
totalité  du  sang  provenant  des  membres  inférieurs  côtoient  les 
artères  iliaques,  reçoivent  les  veines  hypogastriques,  et  vont  se 
réunir  entre  elles  au-dessus  de  la  partie  postérieure  du  bassin, 
où  elles  constituent  la  veine  cave  inférieure. 

Ç  2'2.  —  Ce  gros  tronc  vasculaire  est  adossé  à  la  colonne    Veine  cavc 

°  inférieure. 

vertébrale  et  se  place  à  droite  de  l'aorte  ventrale  ;  il  monte 
presque  verticalement  jusqu'au  diaphragme  ,  traverse  cette 
cloison  musculaire  par  un  orifice  spécial  situé  beaucoup  plus 
haut  que  celui  qui  livre  passage  à  l'aorte,  et  va  se  terminer 
dans  l'oreillette  droite  du  cœur  au-dessous  de  l'orifice  de  la 
veine  cave  supérieure  (2).  Pendant  ce  trajet  il  reçoit  de  chaque 
côté  plusieurs  veines  lombaires  qui  dépendent  du  système 
des  veines  costo- dorsales  sur  lesquelles  nous  aurons  bientôt  à 
revenir. 

La  veine  cave  inférieure ,  en  remontant  vers  le  thorax , 
reçoit  aussi  quelques  veines  viscérales ,  savoir  :  les  veines 
rénales  ou  émulgentes,  les  veines  capsulaires  moyennes  et  les 
veines  utero -ovariques  ou  les  spermatiques  ;  des  branches  ve- 
nant du  diaphragme  s'y  terminent  également  ;  mais  les  veines 


(1)  Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet,  figurée  dans  les  belles  planches  de 
voyez  les  traités  d'anatomie  descrip-  Breschet  sur  le  système  veineux  (6). 
tive  (a).  M.  Retzius  a  décrit  avec  plus  de  soin 

(2)  La  disposition  générale  de  la  le  mode  de  terminaison  de  ce  vaisseau 
veine  cave  inférieure   est  très  bien  dans  le  cœur  (c). 


(n)  Par  exemple  :  Cruvcilhier,  Op.  cit.,  t.  III,  p.  70  el  suiv. 
—  Bourgery,  Op.  cil.,  t.  IV,  pi.  55  à  59. 

(6)  Breschet,  Recherches  sur  le  système  veineux,  i'  livr.,  pi.  1  à  G. 

(c)  Reizins,  Ueber  die  Scheidewand  des  Herzens  heim  Menschen  (Mitller's  Archiv  fur  Anat.  v.nd 
Physiol.,  1835,  p.  164,  pi    1,  fig.  2). 

m.  38 


f)92  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

de  toute  la  portion  abdominale  du  tube  digestif,  de  la  rate  et 
du  pancréas  n'y  débouchent  pas  directement,  et,  après  s'être 
réunies,  constituent  dans  le  foie  un  réseau  capillaire  intermé- 
diaire, ou  système  portai  hépatique  (1). 
système  Chez  l'Homme ,  trois  veines  principales  convergent  pour 
ia  veineVne.  former  la  veine  porte,  savoir  :  1°  hveinemésentérique supérieure, 
ou  grande  mésaraïque,  qui  vient  de  l'intestin  grêle  et  de  la  moitié 
droite  du  gros  intestin  ;  2°  la  mésentérique  inférieure,  ou  petite 
mésaraïque,  qui  naît  sur  les  parois  du  rectum  et  de  la  moitié 
gauche  du  côlon.  Les  branches  postérieures  de  ce  vaisseau  , 
appelées  veines  hémorrhoïdales  supérieures ,  s'anastomosent 
près  de  l'anus  avec  les  veines  hémorrhoïdales  inférieures  et  les 
■plexus  veineux  qui  dépendent  des  veines  hypogastriques  ou 
iliaques  internes.  11  ya  par  conséquent,  dans  cette  région,  fusion 
entre  le  système  portai  et  le  système  veineux  général.  Enfin, 
3°  la  veine  splénique,  qui  a  son  origine  dans  la  rate  et  qui  reçoit 
diverses  branches  venant  de  l'estomac  et  du  duodénum.  Le 
tronc  de  la  veine  porte,  ainsi  constitué,  s'étend  de  l'extrémité 
droite  et  postérieure  du  pancréas  au  sillon  transversal  du  foie  ; 
chemin  faisant,  il  reçoit  quelques  veinules  venant  de  la  première 
de  ces  glandes,  de  l'estomac  et  de  la  vésicule  biliaire;  puis  il 
se  divise  en  deux  branches  pour  pénétrer  dans  la  substance  du 
foie  et  s'y  ramifier  (2)  ;  mais  chez  le  fœtus  il  communique  aussi 

(1)   La  disposition  générale  de  la  rapports   entre  les  branches  de  ce. 

Veine  porte  était  connue  des  anciens,  système  et  les  racines  de  la  veine  hé- 

ct  Galien    la  comparait  à  un  arbre  patique,  voyez  les  planches  de  l'ou- 

dont  le  tronc  serait  dans  le  foie  et  les  vrage  de  Bourgery  et  Jacob  (6). 
racines  dans  le  ventre.  On  a  désigné  (2)   On  appelle  sinus  de  la  veine 

ainsi  ce  vaisseau,  parce  qu'on  le  con-  porte  la  portion   divergente  de    ces 

sidérait  comme  étant  chargé  de  trans-  deux  branches  qui  occupe  le  sillon 

porter  jusque  dans  le  foie  les  matières  transversal  du  foie.  Les  divisions  ul- 

élal.orées  dans  l'estomac  (a).  Pour  les  térieuresdece  vaisseau  accompagnent 

(ci)  Culkn,  b.  l'utilité  des  parties  (Œuvres,  Irad.  par  Darembefg,  t.  I,  p.  280). 
[0}  Luurgery,  Op.  cit.,  t.  V,  pli  i)8,  ci),  etc. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  593 

avec  une  veine  dite  ombilicale,  qui  se  rend  directement  à  la 
veine  cave  sans  se  répandre  dans  le  foie  (1). 

Les  veines  hépatiques  ou  conduits  efférents  de  ce  système 
portai  naissent  dans  les  granulations  élémentaires  du  foie,  et 
convergent  d'avant  en  arrière  pour  former  un  certain  nombre 
de  grosses  branches  (2)  qui  vont  déboucher  dans  la  veine  cave 
pendant  que  celle-ci  parcourt  la  gouttière  creusée  dans  le  bord 
postérieur  de  cette  glande. 

Les  injections  passent  facilement  soit  des  branches  terminales 
de  la  veine  porte  dans  les  veines  efférentes  du  foie,  soit  en  sens 
inverse,  ce  qui  indique  l'absence  de  valvules  dans  l'intérieur  de 
ce  système  de  vaisseaux.  Les  veines  qui  vont  des  intestins  et 
de  la  rate  vers  le  foie  en  sont  également  dépourvues  (3). 

La  disposition  du  système  de  la  veine  porte  est  à  peu  près  la 
même  chez  les  autres  Mammifères  (4).  Dans  quelques  espèces, 


dans  leur  trajet  les   ramifications  de  (3)  Bauer  a  rencontré  des  valvules 

l'artère  hépatique  et  des  conduits  bi-  dans  les  veines  courtes  qui  vont  de 

liaires.  l'estomac  à  la  veine  splénique  ;  mais 

(1)  Ce  vaisseau  est  appelé  le  canal  l'existence  de  ces  replis  n'est  pas  con- 
veineux;  nous  l'éludierons  avec  plus  stanie,  et  d'autres  anatomistes  n'ont 
de  détail  quand  nous  nous  occuperons  pu  en  découvrir  aucune  trace  (a). 
du  développement  des  Animaux.  [l\)  La  disposition  générale  de  ce 

(2)  La  plupart  des  ramuscules  de  ce  système  a  été  étudiée  chez  le  Singe, 
système  efférent  se  réunissent  succès-  le  Chien  ,  le  Lapin  et  la  Brebis,  par 
si vement  en  branches  de  plus  en  plus  Hônlein  (6). 

grosses,  comme  le  font  les  veines  or-  M.  Baer  avait  pensé  que  chez  les 
dinaires;  mais  d'autres  vont  débou-  Cétacés,  les  anastomoses  de  ce  sys- 
cher  directement  dans  les  troncs  ainsi  tème  avec  les  veines  pelviennes  étaient 
constitués,  de  façon  que  les  parois  de  plus  nombreuses  que  chez  les  Marn- 
ées veines  sont  criblées  de  trous  for-  mifères  ordinaires  (c)  ;  mais  cette  opi- 
més  par  les  orifices  des  vaisseaux  capil-  nion  ne  paraît  pas  fondée  (d). 
laires  circonvoisins.  • 


(a)  Cruveilhier,  Anatomie  descriptive,  t.  II,  p.  85. 

(b)  Hônlein,  Descriptio  anatomica  systematis  vence  portarum  in  homine  et  quibusdam  brutis. 
Francof.,  1808. 

(c)  Baer,  Ueber  das  Gefàss-System des Braunfisches (NovaActaAcad.  Nat.  curios. ,  t. XVII),  p.  -401 . 

(d)  Stannius  et  Siebold,  Nouveau  Manuel  d' anatomie  comparée,  1. 1,  p.  486. 


594  APPAREIL    DE    LA.    CIRCULATION 

cependant,  on  rencontre  dans  ces  vaisseaux  des  valvules  plus 
ou  moins  nombreuses  (1). 
Tronc  §  2c.  —  Le  tronc  de  la  veine  cave  inférieure  présente  chez 


de 


inférieure. 


ia  veine  cave  l'Homme  une  dilatation  dans  le  point  où  les  veines  hépatiques 
viennent  s'y  ouvrir  (2).  Mais  chez  divers  Mammifères  cette 
disposition  est  beaucoup  plus  prononcée,  et  parfois  ce  vaisseau 
constitue  au-dessous  du  diaphragme  un  grand  réservoir  en 
forme  de  sac.  Ce  mode  d'organisation  est  très  marqué  chez  les 
Phoques,  la  Loutre  ,  le  Castor,  l'Ornithorhynque  et  quelques 
autres  Mammifères  plongeurs,  et  paraît  être  en  relation  avec  le 
ralentissement  du  cours  du  sang  dans  les  poumons,  quand  la 
respiration  se  trouve  suspendue.  Chez  les  Phoques,  la  veine 
cave  présente  même  une  autre  particularité  ont  l'utilité  s'ex- 
plique de  la  même  manière  :  après  son  passage  dans  le  dia- 
phragme, ce  vaisseau  est  entouré  d'un  anneau  musculaire  dont 
la  contraction  doit  modérer  l'afflux  du  sang  veineux  dans  le 
cœur  (3). 

(1)  L'existence  de  valvules  dans  le  Après  avoir  traversé  le  diaphragme, 
système  portai  a  été  observée  chez  le  la  veine  cave  reprend  brusquement  son 
Cheval  et  le  Bœuf  (a).  calibre  primitif  (c).  L'anneau  charnu 

(2)  Quelques  anatomistes  désignent  qui  l'entoure  dans  ce  point  provient 
ce  renflement  sous  le  nom  de  grande  du  diaphragme  et  se  compose  de  fibres 
ampoule  de  la  veine  cave  (6).  musculaires  striées  [d). 

(3)  Meckel  a  trouvé  que  chez  les  Chez  la  Loutre,  la  veine  cave  est 
Phoques  la  dilatation  de  la  veine  cave  extrêmement  dilatée  depuis  les  reins 
inférieure  commence  au-dessus  du  jusqu'au  diaphragme,  au  delà  duquel 
foie,  et  constitue  au  niveau  de  cet  or-  elle  reprend  son  calibre  ordinaire.  Les 
gane  un  sac  ovalaire  qui  s'étend  jus-  veines  hépatiques  sont  aussi  très  élar- 
qu'an  diaphragme.  Chez  un  individu  gies,  surtout  à  droite  (e). 
long  de  trois  pieds,  ce  réservoir  avait  Chez  le  Castor,  la  veine  cave  double 
cinq  pouces  de  large  sur  huit  de  long.  de  volume  au-devant  des  reins  et  se 

(a)  Weigel,  De  stvato  musculoso  tunicœ  venavum  mediœ.  Lipsiœ,  1823,  p.  31. 
(6)  Cruveillner,  Op.  cit.,  p.  84. 

(c)  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  44G. 

(d)  M.  J.  Weber,  Deschreibung  nebst  Abbildungen  des  Ziuerchfelles  einer  ausgewachsenen 
wëibliclien  Phoca  vilulina  (Miiller's  Archiv  fur  Anal,  und  Physiol.,  1840,  p.  23G,  pi.  C  à  8). 

—  Slannius  et  SicboM,  Nouveau  Manuel  d'analomie  comparée,  l.  I,  p.  480. 

(e)  Albers,  .4  Description  ofthe  Anat.  of  Ihe  Sea  Olter  (Philos.  Trans.,  1796,  p.  391), 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  595 

§  2h.  — Les  deux  veines  cardinales,  qui  chez  les  jeunes  veines  azygos. 
embryons  se  dirigent  d'arrière  en  avant  et  vont  se  joindre  aux 
veines  céphaliques  dans  le  voisinage  du  cœur,  se  développent 
beaucoup  dans  leur  portion  périphérique,  et  constituent  un  vaste 
système  de  vaisseaux  qui  rapportent  le  sang  de  la  région  rachi- 
dienne  du  tronc  et  des  parois  des  grandes  cavités  viscérales  ; 
mais  leur  portion  terminale,  au  contraire,  diminue  d'importance 
et  s'atrophie  en  partie,  de  façon  que  chez  l'individu  parfait  la 
plus  grande  partie  du  sang  contenu  dans  les  racines  de  ce 
système  s'écoule  dans  les  branches  voisines  du  système  bra- 
chio-céphalique  ou  dans  la  veine  cave  inférieure,  et  que  ses 
deux  troncs  terminaux  correspondants  aux  grosses  veines  car- 
dinales primitives  ne  sont  plus  représentés  que  par  les  veines 
azygos. 

Chez  quelques  Mammifères  où  il  existe  deux  veines  caves 
supérieures,  ces  vaisseaux  sont  au  nombre  de  deux,  et  le  nom 
qu'on  leur  applique  ne  pourrait  en  donner  que  des  idées  fausses 
si  l'on  attachait  quelque  importance  à  son  étymologie  ;  car  ces 
veines  dites  azygos,  c'est-à-dire  impaires  (1),  sont  en  réalité  à 
peu  près  symétriques  ;  elles  remontent  de  chaque  côté  de  la 


rétrécit  de  nouveau  au  delà  du  dia-  il  paraît  exister  quelquefois  un  anneau 

pliragme (a).  musculaire,  comme   chez  les   Pho- 

Ghez  le  Desman  de  Russie,  cette  di-  ques  (d),  mais  d'autres  fois  ce  sphinc- 

latation  de  la  velae  cave  est  double,  ter  manque  entièrement  (e). 

et  les  veines  iliaques  sont  tellement  Chez   l'Ornithorhynque ,   ce    tronc 

renflées,  qu'elles  forment  aussi   de  vasculaire  offre   aussi  une  dilatation 

véritables  poches  (6).  considérable  au  niveau  du  foie  (/"). 

Chez  le  Marsouin,  où  la  dilatation  (1)  De  a  privatif,  et  Çtryôç,  pair,  ou 

de  la  veine  cave  est  aussi  très  consi-  vena  sine  pari. 
dérable  au-dessous  du  diaphragme  (c), 


(a)  Meckel,  Analomie comparée,  t.  IX,  p.  447. 

(6)  Pallas,  Sorices  aliquot  illitstrati  {Acta  Petropolilaiice,  1781,  p.  332) 

(c)  Meckel,  Op.  cit.,  p.  448. 

(d)  Weber,  loc.  cit.,  p.  239. 

(e)  Stannius,  Op.  cit.,  p.  480. 

(/")  Meckel,  Ornithorhynchi paradoxi  descript.  anal.,  p.  32. 


596  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

colonne  vertébrale,  s'anastomosent  entre  elles  par  des  branches 
transversales  et  vont  déboucher  dans  les  veines  caves  corres- 
pondantes. Mais,  chez  l'Homme  et  la  plupart  des  Mammifères, 
un  seul  de  ces  troncs,  celui  du  côté  droit,  conserve  sa  disposition 
primitive,  tandis  que  l'autre  (situé  à  gauche)  disparaît  en  grande 
partie,  et  au  lieu  de  s'étendre  jusque  dans  le  voisinage  du  cœur, 
se  déverse,  par  une  anastomose,  dans  l'azygos  droite,  à  une 
distance  plus  ou  moins  considérable  de  cet  organe.  On  donne  à 
cette  portion  persistante  de  la  veine  cardinale  gauche  le  nom  de 
hémiazijgos,  et  dans  la  partie  du  corps  où  elle  existe  on  voit  les 
veines  intercostales  y  déboucher,  comme  elles  débouchent  du 
côté  opposé  dans  la  grande  azygos  (1).  Chez  d'autres  Mammi- 


(1  j  Chez  l'Homme,  Yazygos propre- 
ment dite,  ou  grande  azygos  (  ou 
veine  cardinale  droite),  et  Yhémi- 
azygos  (c'est-à-dire  le  représentant  de 
la  veine  cardinale  du  côté  gauche),  for- 
ment dans  la  partie  supérieure  de  l'ab- 
domen et  dansla  portion  inférieure  du 
thorax  deux  troncs  ascendants,  dispo- 
sés symétriquement  au-devant  de  la 
colonne  vertébrale  et  derrière  l'aorte 
et  la  veine  cave  inférieure  (a).  Les 
veines  intercostales  correspondantes 
s'y  ouvrent,  ainsi  que  les  veines  lom- 
baires ;  mais  la  plupart  de  ces  der- 
nières se  continuent  au  delà  et  vont 
se  terminer  dans  la  veine  cave  abdo- 
minale. Inférieurement  l'azygos  et  sa 
congénère  perdent  plus  ou  moins 
complètement  les  caractères  de  troncs 
vasculaires,  et  se  résolvent  en  deux  ou 
plusieurs  séries  de  branches  anasto- 
motiques  longitudinales ,  appelées 
veines  lombaires  ascendantes,  dont 
les  dernières  se  .prolongent  jusque 
dans  le  bassin  et  s'y  relient  aux  veines 


iliaques  primitives  (6).  D'espace  en 
espace  on  remarque  aussi  des  bran- 
ches transversales  qui  se  portent  obli- 
quement de  l'hémiazygos  à  la  grande 
azygos,  et  c'est  une  de  ces  anastomo- 
ses qui  constitue  la  portion  terminale 
du  premier  de  ces  deux  troncs. 

La  grande  azygos ,  après  avoir 
reçu  ainsi  la  majeure  partie  du  sang 
contenu  dans  sa  congénère,  continue 
à  monter  le  long  du  côté  droit  de  la 
face  antérieure  de  la  colonne  verté- 
brale ,  reçoit ,  chemin  faisant,  les 
veines  intercostales  correspondantes 
du  même  côté,  et  va  se  terminer  dans 
la  veine  cave  supérieure,  vers  le  point 
où  ce  vaisseau  s'engage  dans  le  péri- 
carde pour  gagner  le  cœur. 

On  donne  quelquefois  le  nom  de 
petite  azygos  supérieure  ou  de  veine 
intercostale  commune  gauche,  à  une 
branche  qui  reçoit  les  veines  inter- 
costales du  côté  gauche  de  la  partie 
supérieure  du  thorax,  et  qui  fait  en 
quelque  sorte  pendant  à  la   portion 


(a)  Voyez  Bourgcry  et  Jacob,  Anatomie  descriptive,  t.  IV,  pi.  76  et  77. 
(6)  Voyez  Breschet,  Recheixh.  sur  le  syst.  veineux,  3clivi\,  pi.  2  et  4. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  597 

fères,  le  Chien,  par  exemple,  le  trône  cardinal  gauche  disparaît 
complètement,  et  il  ne  reste  que  la  veine  azygos  droite  qui 
reçoit  les  veines  intercostales  correspondantes  des  deux  côtés 
du  corps.  Enfin  il  est  aussi  des  animaux  de  cette  classe  où  les 
deux  veines  cardinales  se  flétrissent  de  même,  et  où  par  consé- 
quent il  n'y  a  plus  de  veine  azygos.  Mais,  quoi  qu'il  en  soit 
à  cet  égard,  le  système  veineux,  qui,  dans  l'origine,  dépendait 
des  veines  cardinales,  et  que  l'on  pourrait  appeler  le  système 
dorso-costal  ou  pariétal ,  contracte  des  relations  multipliées 
avec  les  veines  du  système  céphalo-brachial,  ainsi  qu'avec  les 
affluents  de  la  veine  cave  inférieure,  de  façon  qu'une  portion 
plus  ou  moins  considérable  du  sang  contenu  dans  ces  vaisseaux 
revient  au  cœur  sans  passer  par  les  veines  azygos  (1). 

La  portion  périphérique  ou  radiculaire  de  ce  système  est  en      veines 

„„  ,       ,  ,  .  .  rachidiennes, 

ettet  très  étendue  et  se  compose  de  deux  groupes  de  vaisseaux 
appartenant  les  uns  à  la  colonne  vertébrale  et  à  ses  dépendances, 
les  autres  aux  côtes  et  aux  parties  qui  servent  à  cloisonner  laté- 
ralement les  grandes  cavités  du  tronc. 

Les  veines  rachidiennes  forment  à  la  face  dorsale  de  la  co- 
lonne vertébrale,  ainsi  que  dans  l'intérieur  du  canal  dont  cette 

supérieure  de  la  grande  azygos  :  elle  se  tentent  soit  dans   le  tronc  brachio- 

continue  inférieurement  avec  l'hémi-  céphalique  ,  soit  dans  la  veine  cave 

azygos.  supérieure.  Souvent  une  anastomose 

Enfin,  il  y  a  aussi  à  droite  une  pe-  assez  considérable  fait  communiquer 

tite  brandie  ascendante  qui  semble  la  partie  supérieure   de  ce  vaisseau 

être   une  continuation  de  la   grande  longitudinal  avec  le   tronc   brachio- 

azygos  au-dess,us  de  son  point  de  dé-  céphalique  droit.  Enfin,  il  est  aussi  à 

versement  dans  la  veine  cave  :   c'est  noter  que  parfois  la  veine  cervicale 

une  veine  intercostale  commune  qui  postérieure,   au  lieu   de  se  terminer 

reçoit  les  veines  intercostales  propre-  dans  la  veine  vertébrale,  vient  s'ouvrir 

ment  dites,  correspondantes  aux  deux  dans  ce  tronc  intercostal  commun  et 

ou  aux  trois  premières  côtes  (a)  ;  mais  en  constitue  la  partie  supérieure, 
il  arrive  fréquemment  que  ces  veines  (I)  On  peut  résumer  de  la  manière 

intercostales  vont  s'ouvrir  aussi  direc-  suivante  les  principales  variations  qui 

(a)  Voyez  Breschet,  Op.  cit.,  3'livr.,  pi.  3. 


598  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

colonne  est  creusée,  un  réseau  très  riche  qui  s'étend  depuis  la 
base  du  crâne  jusqu'au  sacrum  ou  même  jusque  dans  la  queue, 
lorsque  cet  appendice  acquiert  un  développement  considérable. 
On  y  distingue  un  plexus  superficiel  postérieur,  un  plexus 
inler-rachidien  postérieur  situé  derrière  la  moelle  épinière,  un 
plexus  intra-racbidien  antérieur  qui  occupe  la  face  antérieure  de 
la  moelle  épinière  (ou  inférieure  chez  les  Quadrupèdes),  et  des 
plexus  transversaux  qui,  au  niveau  de  chaque  vertèbre,  relient 
tous  ces  réseaux  entre  eux  (4).  Dans  la  portion  moyenne  du 


se  rencontrent  dans  la  disposition  de 
cette  portion  du  système  veineux  chez 
les  divers  Mammifères  (a). 

1°  Mammifères  ayant  deux  veines  caves  supé- 
rieures. 

a.  Deux  veines  azygos  se  terminant  dans  ces 
troncs ,    c'est-à-dire  une  azygos   propre- 
ment dite  à  droite,  et  une  hémiazygos  à 
gauche. 
*  Les  deux  veines  azygos  également  dévelop- 
pées. 
Exemples  :  Monotrèmes,  Marsupiaux. 
**  Les  deux  azygos  inégalement  développées. 
L'azygos  droite  plus  grande  que  l'azygos 

gauche. 
Exemples  :  Hérisson,  Rat,  Souris. 
L'azygos  droite  moins  grande  que  l'azy- 
gos gauche. 
Exemple  :  Lapin. 
&.  Une  veine  azygos  seulement  (adroite). 
Exemples  :  Lièvre,  Écureuil. 
2°  Mammifères  ayant  une  seule  veine  cave 
supérieure. 
C.  Une  azygos  et  une  hémiazygos. 

*  L'hémiazygos  débouchant  directement  dans 
l'oreillette  droite. 
Exemple  :  Taupe. 


**  L'hémiazygos  débouchant  dans  l'azygos  vers 
le  milieu  du  thorax. 
Exemple  :  Homme. 

d.  Une  veine  azygos  à  droite  qui  reçoit  les  veines 

intercostales  des  deux  côtés  du  corps  ;  pas 
d'hémiazygos. 

Exemples  :  Chien,  Chat,  Tigre,  Hyène, 
Cheval,  Ane,  Tapir. 

e.  Point   de   veine  azygos  à   droite;   mais,  à 

gauche ,  une  veine  hémiazygos  qui  reçoit 
quelques  veines  intercostales,  ainsi  que  la' 
grande  veine  coronaire,  et  débouche  di- 
rectement dans  l'oreillette  droite. 

Exemples  :  Mouton,  Bœuf,  Chèvre,  Che- 
vrotain,  Cochon,  Tapir. 

f.  Point  de  veine  azygos  ni  de  veine  hémiazygos. 

Exemple  :  Les  Cétacés. 

(1)  Chez  l'Homme,  ce  système  de 
veines,  dont  la  disposition  a  été  très 
bien  étudiée  par  Breschet  (6),  est  fort 
développé.  Les  veines  dorsi-spinales 
ou  rachidiennes  postérieures  super- 
ficielles naissent  des  téguments  et  des 
muscles  de  la  région  vertébrale  posté- 
rieure, et  constituent  un  plexus  pres- 
que inextricable,  qui  embrasse  dans 


(a)  Voyez,  à  ce  sujet  : 

—  Bardeleben ,   Ueber  Vena  A%ygos,  Hémiazygos  und  Coronaria  cordis  bei  den  Sàvgethieren 
(Mùller's  Archivfùr  Anat.  und  Physiol.,  1848,  p.  497). 

—  Marshall,  On  the  Development  of  Vie  Gréai  Anterior  Veins  of  Man  and  Mammaha  (Philos. 
Trans.,  1850,  p.  150).  ,  . 

(6)  Breschet,  Recherches  anatomiques,  physiologiques  et  pathologiques  sur  le  système  veineux. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  599 

torse,  les  canaux  d'écoulement  de  ce  lacis  vasculaire  débou- 
chent dans  les  veines  intercostales  qui  sont  les  satellites  des 
artères  du  même  nom  ,  et  ces  veines  intercostales  vont  se 
terminer  dans  les  azygos  ;  mais  dans  la  portion  inférieure  de 
l'abdomen,  ainsi  que  dans  la  région  cervicale,  les  veines  qui 
tiennent  lieu  d'intercostales  vont  s'ouvrir,  les  unes  dans  la  veine 
cave  inférieure  ou  dans  quelques-uns  de  ses  affluents,  les 
autres  dans  les  veines  appelées  vertébrales,  qui  représentent 
dans  la  région  cervicale  les  troncs  cardinaux  (ou  veines  azygos) 
et  qui  se  terminent  dans  les  veines  caves  supérieures. 

Ainsi,  on  trouve  au  niveau  de  chaque  vertèbre,  dans  toute 
la  longueur  du  corps,  depuis  la  tête  jusqu'au  sacrum,  ou  même 
jusque  dans  la  queue,  une  paire  de  veines  qui  pourraient  être 


ses  mailles  les  apophyses  épineuses, 
les  lames  vertébrales,  les  apophyses 
transverses  et  les  apophyses  articu- 
laires des  Vertèbres.  Supérieurement 
ce  réseau  s'anastomose  avec  les  veines 
occipitales  qui  se  rendent  aux  jugu- 
laires externes,  avec  les  veines  ju- 
gulaires internes  et  avec  les  veines 
vertébrales;  au  niveau  de  chaque  trou 
de  conjugaison,  il  communique  aussi 
avec  les  veines  intra-rachidiennes,  et 
souvent  directement  aussi  avec  les 
intercostales  ;  enfin,  il  s'anastomose 
inférieurement  avec  les  veines  ilia- 
ques, et  se  prolonge  sur  le  sacrum  et 
jusque  sur  les  côtés  du  coccyx  (a). 

Les  veines  intra-rachidiennes  for- 
ment de  chaque  côté,  entre  la  dure- 
mère  et  les  parois  du  canal  verlébral  : 
1°  un  plexus  postérieur  qui  est  plus 
développé  dans   la   région    lombaire 


que  dans  sa  portion  supérieure  ;  2°  un 
plexus  antérieur  qui  est  très  considé- 
rable et  qui  est  souvent  désigné  sous 
le  nom  de  sinus  vertébral.  Au  niveau 
du  corps  de  chaque  vertèbre,  des 
branches  anastomotiques  transver- 
sales relient  ces  quatre  plexus  longi- 
tudinaux entre  eux,  et  constituent 
ainsi  des  réseaux  appelés  plexus 
transversaux.  Les  veines  propres  des 
corps  des  vertèbres  y  débouchent,  et 
des  branches  efférenles  qui  en  partent 
traversent  les  trous  de  conjugaison 
pour  aller  s'ouvrir  dans  les  veines 
vertébrales,  intercostales,  lombaires 
et  sacrées  latérales  (b). 

Pour  plus  de  détails  à  ce  sujet,  je 
renverrai  aux  recherches  de  Breschet 
et  aux  ouvrages  d'anatomie  descrip- 
tive, où  les  observations  de  ce  savant 
ont  été  reproduites. 


(a)  Breschet,  Op.  cit.,  pi.  3  et  4. 

—  Voyez  aussi  Bourgery  et  Jacob,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  74,  fig\  3. 

(b)  Breschet,  Op.  cit.,  pi.  4,  1"  livr.,  pi.  5  et  6,  et  2°  livr.,  pi.  1  à  6. 

—  Voyez  aussi  Bourgcry  et  Jacob,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  73  et  74,  fig\  d. 


600  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

désignées  sous  le  nom  commun  de  veines  pleuro-rachidiennes, 
qui  ramènent  le  sang  des  parties  molles  du  dos,  de  la  colonne 
vertébrale  et  de  ses  annexes,  et  qui  débouchent  presque  toutes 
dans  une  série  de  vaisseaux  longitudinaux  placés  de  chaque 
côté  de  la  face  antérieure  du  rachis  et  se  terminant  dans  les 
veines  caves  ou  leurs  affluents  principaux.  Dans  la  région 
cervicale,  ces  vaisseaux  longitudinaux,  qui  correspondent  aux 
veines  cardinales  de  l'embryon,  sont  les  veines  vertébrales  (1); 
dans  la  portion  moyenne  du  tronc,  ce  sont  les  azygos  ;  dans  la 
région  des  lombes,  ce  sont  des  branches  anastomotiquesplus  ou 
moins  régulières  qui  unissent  entre  elles  les  veines  lombaires, 
lesquelles  sont  les  analogues  des  veines  intercostales  ;  enfin, 
dans  la  région  pelvienne,  ces  représentants  des  troncs  cardi- 
naux sont  les  veines  dites  sacrées  latérales  (2). 

Il  existe,  chez  l'Homme,  de  grandes  variations  dans  la 
disposition  des  branches  secondaires  de  ce  système  de  veines 
dorso-pariétales,  même  d'individu  à  individu  ;  mais  leur  mode 
d'arrangement  est  toujours  tel  que,  par  l'intermédiaire  de  ces 
vaisseaux,  tous  les  autres  systèmes  veineux  sont  mis  en  com- 
munication, et  que  le  sang  de  toutes  les  parties  de  l'organisme 
peut  arriver  au  cœur,  lors  même  que  l'un  des  gros  troncs  en 
continuité  directe  avec  cet  organe  viendrait  à  être  obstrué. 
Souvent  même  une  des  anastomoses  de  la  portion  inférieure 
de  la  veine  azygos  avec  la  veine  cave  inférieure  devient  si 

(1)  Voyez  ci-dessus,  page  586.  veines   sacrées  moyennes  ,   et   elles 

(l2)  Chez  l'Homme,  les  veines  sa-  reçoivent  des   branches   venant   des 

crées    latérales  sont  très  petites   et  plexus  inter-rachidiens  :   du   reste, 

longent  la    face  antérieure   du   sa-  leur  disposition  est  très  irrégulière, 
crum    pour  aller   se  jeter   dans   les  Chez  les  Mammifères  dont  la  queue 

iliaques.    Elles   s'anastomosent  aussi  est  très  développée,  ces  veines  acquiè- 

par  des  branches  transversales  avec  les  rent  plus  d'importance  (a). 

(a)  Exemple  :  l'Écureuil.  Voyez  Carus  et  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illustr.,  pars  vi,  pi.  7,  fig.  1. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  601 

large  et  si  directe,  que  le  premier  de  ces  vaisseaux  semble  être 
une  branche  du  second  (1). 

La  principale  veine  du  cœur  va  s'ouvrir  dans  la  veine  cave 
supérieure  gauche,  chez  les  Mammifères,  où  ce  vaisseau, est 
bien  développé.  Lorsque  celui-ci  s'atrophie  plus  ou  moins 
complètement,  comme  cela  a  lieu  chez  l'Homme,  elle  se  ter- 
mine au.  contraire  dans  un  canal  appelé  sinus  coronaire,  qui 
est  logé  dans  le  sillon  transversal  du  cœur,  et  qui  débouche 
directement  dans  l'oreillette  droite  ;  mais  ce  sinus  est,  en 
réalité,  le  dernier  vestige  de  la  veine  cave  supérieure  gauche 
qui  existait  chez  l'embryon;  et  chez  quelques  espèces  de  Mam- 
mifères, où  son  atrophie  est  portée  moins  loin  ,  on  trouve  de  ce 
côté  une  veine  hémiazygos  qui  reçoit  à  la  fois  la  grosse  veine 
cardiaque  et  les  veines  intercostales  voisines  (2). 


Veines 
du  cœur. 


(i)  Pour  que  la  veine  azygos  ait 
l'apparence  d'une  branche  fournie 
directement  par  la  veine  cave  infé- 
rieure, il  suffit  que  son  anastomose 
avec  l'une  des  veines  lombaires  ait 
lieu  très  près  de  l'embouchure  de 
celle-ci,  dans  la  veine  cave,  et  que  le 
calibre  de  ce  vaisseau  transversal  soit 
très  faible  au  delà  de  son  point  de 
jonction  avec  le  premier.  Effective- 
ment la  portion  de  cette  veine  lom- 
baire comprise  entre  sa  jonction  avec 
la  veine  azygos  et  sa  terminaison  dans 
la  veine  cave  semble  être  alors  la 
continuation  du  tronc  azygos ,  et  sa 
portion  externe  affecte  la  forme  d'une 
branche  de  ce  même  tronc. 

Il  arrive  souvent  aussi  qu'une 
branche  anastomotique,  établie  entre 
la  veine  rénale  droite  et  l'azygos,  se 


développe  de  façon  à  constituer  une 
des  principales  racines  de  ce  dernier 
vaisseau  (a). 

(2)  Chez  le  Mouton,  par  exemple, 
la  veine  azygos  gauche  vient  se  loger 
dans  le  sillon  auriculo-ventriculaire 
creusé  à  la  face  postérieure  du  cœur, 
et  va  déboucher  à  la  partie  inférieure 
et  interne  de  l'oreillette  droite,  sous 
l'orifice  de  la  veine  cave  inférieure.  Che- 
min faisant,  elle  reçoit  plusieurs  veines 
cardiaques,  qui,  à  leur  embouchure 
dans  l'espèce  de  sinus  formé  par  sa 
portion  terminale  ,  sont  garnies  de 
valvules,  mais  n'en  présentent  pas 
dans  le  reste  de  leur  étendue  (6). 

Chez  l'Homme,  cette  portion  ter- 
minale et  cardiaque  de  la  veine  azygos 
gauche  est  représentée  par  le  sinus 
coronaire  (c)  ,   que  les  anatomisies 


(a)  Voyez  Breschet,  Op.  cit.,  3°  livr.,  pi.  2. 

(6)  Eustachius,  Opusoula  anat.  de  vena  sine  pari,  p.  273. 

—  Scarpa,  Tàbulœ  nevrologicœ,  pi.  7,  fig.  i. 

—  Marshall,  Op. cit.,  pi.  1,  fig.  2  (Philos.  Trans.,  1850). 
(c)  Idem,  ibid.,  pi.  1,  fig.  i. 


602  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

On  voit  qu'il  existe  beaucoup  de  variations  dans  le  mode  de 
terminaison  des  veines  qui  dépendent  des  deux  troncs  car- 
dinaux primitifs;  mais  cela  n'a  rien  de  surprenant,  car  la 
fixité  dans  le  mode  d'organisation  d'une  partie  de  l'économie 
est  toujours  un  signe  de  son  importance,  et,  ainsi  que  je  l'ai 
déjà  dit,  cette  portion  terminale  du  système  des  veines  rachi- 
diennes,  qui  est  très  développée  dans  les  premiers  temps  de  la 
vie  embryonnaire,  tend  à  disparaître  par  les  progrès  du  travail 
organogénique,  et,  chez  l'adulte,  se  trouve  réduite  à  un  état 
plus  ou  moins  rudimentaire. 
piexus  veineux  La  disposition  des  autres  parties  du  système  veineux  présente 
Mammifères,  aussi  moins  de  fixité  que  celle  du  système  artériel,  et  il  arrive 
souvent  que,  chez  l'Homme,  telle  ou  telle  grosse  branche  dont 
je  viens  de  donner  une  description  sommaire  est  remplacée 
par  deux  ou  même  un  plus  grand  nombre  de  vaisseaux  à  peu 
près  parallèles  qui  communiquent  fréquemment  entre  eux.  Il 
en  est  de  même  chez  les  autres  Mammifères,  et  la  tendance  à 
former  des  plexus  est  portée  beaucoup  plus  loin  chez  cer- 
taines espèces,  où  la  multiplicité  des  veines  similaires  devient 
normale  (1). 
Cette  particularité  d'organisation  est  portée  au  plus  haut 

décrivent  comme  étant  seulement  une  et  de  la  veine  cardinale  (ou  azygos)  de 

portion  élargie    de   la  grande  veine  ce  côté,  se  voit  très  bien  chez  l'em- 

cardiaque,  mais  qui  est  séparée  de  la  bryon  humain  (6). 
portion  ascendante  de  ce  vaisseau  par  (1)  Chez  l'Aï  (Bradypus  tridacty- 

des  valvules,  comme  chez  les  Rumi-  lus),  la  veine  brachiale  est  représentée 

liants  (a).  La  continuité  entre  ce  sinus  par  un  réseau  disposé  en  manière  de 

et  le  canal  cuviérien  gauche,  c'est-à-  gaine  autour  du  plexus  artériel  qui 

dire  le  tronc  représentant  une  veine  tient  lieu  de  l'artère  brachiale   (c). 

cave  supérieure  gauche,  et  constitué  Une  disposition  analogue  se  voit  dans 

par  la  réunion  de  la  veine  céphalique  les  membres  postérieurs  (d),  et  des 

(a)  Voyez  Bourgery,  Op.  cit.,  t.  IV,  pi.  9  bis. 
(6)  Marshall,  Op.  cit.,  pi.  3,  fig.  1  et  3. 

(c)  Vrolik,  Recherches  sur  les  plexus  vasculaires  (Ami.  des  sciences  nat.,  -i"  série,  t.  V,  pi.  4, 
fig.  1). 

(d)  Vrolik,  Op.  cit. 


pulmonaire. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  603 

degré  chez  les  Cétacés.  Ainsi,  chez  le  Marsouin,  à  l'exception 
des  troncs  principaux,  presque  toutes  les  veines  ordinaires  sont 
remplacées  par  des  plexus  (1). 

§  25.  — J'ai  déià  fait  connaître  la  disposition  des  orifices     vaisseaux 

°  d  ,      ,  de  la  petile 

du  système  veineux  général  dans  l'oreillette  droite  du  cœur,    circulation. 
ainsi  que  le  mode  d'origine  de  ïartère  pulmonaire,  qui  est  mise 
en  communication  avec  ces  vaisseaux  par  l'intermédiaire  de 
cette  oreillette  et  du  ventricule  dont  elle  dépend. 

Cette  artère,  en  sortant  de  l'angle  supérieur  et  interne  du  Anère 
ventricule  droit  vers  la  partie  moyenne  et  antérieure  du  cœur 
chez  l'Homme,  passe  devant  l'aorte,  et,  se  dirigeant  obli- 
quement en  avant,  va  se  placer  à  gauche  de  ce  vaisseau.  Bien- 
tôt elle  se  bifurque,  et  une  de  ses  branches  se  porte  directement 
à  gauche  vers  le  poumon  correspondant,  tandis  que  l'autre, 
suivant  une  marche  opposée,  passe  sous  la  crosse  aortique  et 
derrière  la  veine  cave  supérieure  pour  gagner  le  poumon  gauche. 
Dans  le  point  où  l'artère  pulmonaire  commune  se  divise  de  la 
sorte,  elle  se  trouve  reliée  à  l'artère  aorte  par  une  branche 
anastomotique,  appelée  canal  artéiiel,  qui  chez  le  fœtus  pré- 
sente des  dimensions  considérables,  mais  qui  se  flétrit  et  s'obli- 
tère peu  après  la  naissance,  de  façon  à  se  transformer  en  un 
simple  cordon  ligamenteux  (2). 

plexus  très    compliqués   remplacent  dans  la  région  lombaire,  de  chaque 

aussi   les    veines  hypogaslriques   et  côté,  trois  autres  plexus  veineux.  On 

sacrées  (a).  trouve  aussi  des  réseaux  analogues 

(1)  Chez  le  Dauphin,  ainsi  que  chez  dans  la  tête,  et  plus  particulièrement 

le  Marsouin  ,  le  sang   de  la   région  autour  de  l'évent  et  à  la  mâchoire 

caudale  arrive  dans  la  veine  cave  par  inférieure  (6). 

un  grand  plexus  caudal  situé  dans  le  (2)  Nous  verrons,  dans  une  autre 

canal  sous-rachidien.  Un  plexus  vei-  partie  de  ce  cours,  que  le  canal  arté- 

neux  appartenant  au  rectum  se  ter-  riel  ou  canal  de  Botal  est  constitué  par 

mine  dans  l'extrémité  postérieure  de  la  portion  terminale  de  Tare  vascu- 

ce  tronc   vasculaire  ;   enfin  il  existe  laire  inférieur  qui  était  primitivement 

(a)  Voyez  Carus  et  Otto,  Tab.  Anat.  compar.  illuslr.,  par  VI,  pi.  8,  fig.  4. 
(&)  Bacr,  Ueber  das  Gefàss-System  des  Braun/isches  (Nova  Acta  Acad.  Nat.  curios.,   1835, 
t.  XVII,  p.  395,  pi.  19). 


QOll  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Chez  quelques  Mammifères,  tels  que  le  Phoque,  cette  com- 
munication entre  l'artère  pulmonaire  et  l'aorte  persiste  pendant 
fort  longtemps  après  la  naissance  ;  mais  chez  l'adulte  elle 
n'existe  chez  aucun  Animal  de  cette  classe,  si  ce  n'est  dans 
quelques  cas  tératologiques  (1) . 

Chez  la  plupart  des  Mammifères  aquatiques,  tels  que  le  Mar- 
souin, le  Phoque,  la  Loutre  et  le  Castor,  l'artère  pulmonaire 


une  des  crosses  aortiques,  et  qui  donne 
ensuite  naissance  aux  artères  pulmo- 
naires (a).  Il  va  déboucher  dans 
l'aorte,  vers  le  niveau  de  l'origine  de 
l'artère  sous-clavière  droite  (6) ,  et 
chez  le  fœtus  il  est  très  large;  mais 
lorsque  la  respiration  pulmonaire  s'est 
établie,  le  sang  cesse  bientôt  d'y  pas- 
ser, et  vers  le  troisième  jour  il  est 
d'ordinaire  obstrué  par  un  caillot , 
puis  il  s'oblitère  et  se  transforme  en 
un  cordon  ligamenteux.  Quelquefois 
ce  canal  reste  ouvert,  et  cet  état  téra- 
lologiqlie  est  généralement  accompa- 
gné d'un  trouble  dans  la  circulation, 
qui  constitue  la  maladie  appelée  cya- 
nose. 

(4)  Rapp  a  trouvé  le  canal  artériel 
ouvert  chez  des  Phoques  âgés  d'envi- 
ron trois  mois;  mais  ce  vaisseau  était 
oblitéré  chez  tous  les  individus  adultes 
dont  il  a  fait  Tanatomie  (c),  ainsi  que 
dans  ceux  examinés  par  plusieurs 
autres  naturalistes  (d).  Un  cas  de  per- 

(a)  Voyez  Burdach,  Traité  de  physiologie,  t.  Ill,  p.  519,  pi.  4,  fig.  3. 
(6)  Voyez  Bourgery,  Anat.  descript.,  t.  VIII,  pi.  13,  fig.  3,  et  pi.  14. 
—  Martin  Saint-Ange,  Circulation  du  sang  considérée  che%  le  fœtus,  fig.  1  et  15. 

(c)  Voyez  Meckel,  Anatomie  comparée,  t.  IX,  p.  440. 

(d)  Malacarne,  Saggio  di  splancnografia  de  encefalotomia  délia  Foca  (Mem.  délia  Soc.  itaLj 
t.  XII,  2e  partie,  p.  41,  pi.  1). 

(e)  Poelman ,  Note  sur  un  cas  de  communication  entre  l'artère  pulmonaire  et  l'aorte  descen- 
dante (Ann.  delà  Soc.  de  médecine  de  Gand,  1845,  fig.). 

(f)  Jackson,  Dissection  of  a  Spermaceti  Whale  (Boston  Journal  of  Nat.  Hist.,  1845  ,  t.  V, 
p.  148). 

{g)  Eichwald,  ObserVationes  nonnullœ  circa  fabricam  Delphini  phocœncc  (Mém.  de  l'Acad. 
dessc.  de  Saint-Pétersbourg,  1819  et  1820,  t.  IX,  p.  445). 
(h)  Piapp,  voy.  Meckel,  toc.  cit. 
(£)  Poelman,  Op.  cit.,  fig. 
(j)  Chairveau,  Anatomie  des  Animaux  domestiques,  fig.  147. 


sistance  de  cette  anastomose  chez  un 
Phoque  adulte  a  été  observé  par 
M.  Poelman  (e). 

M.  Jackson  a  trouvé  le  canal  arté- 
riel perméable  chez  un  jeune  Cacha- 
lot (/■) ,  et  Eichward  a  rencontré  la 
même  particularité  chez  un  jeune 
Marsouin  (g)  ;  mais  chez  l'adulte  ce 
passage  n'existe  plus ,  ni  chez  ce 
Célacé  ,  ni  chez  le  Dauphin  com- 
mun (h). 

Ce  canal  de  communication  entre 
l'artère  pulmonaire  et  l'aorte  était 
resté  ouvert  jusque  dans  l'âge  adulte 
chez  un  Singe  hurleur,  disséqué  par 
M.  Poelman  («'). 

Chez  les  Mammifères,  où  l'aorte  se 
divise  en  deux  troncs,  le  Cheval,  par 
exemple,  c'est  à  l'aorte  postérieure 
que  l'artère  pulmonaire  se  trouve  at- 
tachée par  le  cordon  ligamenteux 
résultant  de  l'oblitération  du  canal 
artériel  (j). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  605 

présente,  près  de  son  origine,  une  dilatation  considérable  (1)  ; 
mais,  du  reste,  la  disposition  de  ce  vaisseau  est  à  peu  près  la 
même  chez  tous  les  Animaux  de  cette  classe.  Au  moment  de 
pénétrer  dans  les  poumons,  chacune  de  ses  branches  se  subdi- 
vise en  deux  ou  plusieurs  rameaux,  et  ceux-ci  suivent  à  peu 
près  le  même  trajet  que  les  canaux  bronchiques  dont  ils  lon- 
gent la  face  postérieure  et  inférieure.  Chaque  lobule  pulmonaire 
reçoit  ainsi  une  branche  artérielle,  mais  celle-ci  n'y  plonge  pas, 
elle  se  loge  dans  les  fissures  comprises  entre  les  lobules  et  se 
distribue  à  plusieurs  de  ceux-ci  (2).  Enfin,  leurs  dernières  ra- 

(1)  Meckel,  Anat.    comp.,  t.  IX,  quand  elle  constitue  le  conduit  intra- 

p.  Zi50.  -StanniusetSiebold,ilia?iueZ  tabulaire  ou  entonnoir  (c),   mais  se 

d'anat.  comp.,  t.  II,  p.  /|86.  place  plus  superficiellement  entre  ce 

(•2)  Reisseisen  et  Krause  suppo-  lobule  et  ses  voisins,  de  façon  que  ces 
saient  que  les  branches  terminales  de  ramifications  peuvent  se  répandre  sur 
l'artère  pulmonaire  pénétraient  dans  deux  ou  plusieurs  de  ceux-ci.  C'est 
l'intérieur  des  lobules  et  donnaient  à  même  principalement  à  cause  de  cette 
chacune  des  cellules  dont  ces  lobules  position  extralobulaire  des  petits  ra- 
se composent  un  ramuscule  particu-  muscules  vasculaires  que  la  distinc- 
lier,  de  façon  à  constituer  pour  cha-  tion  entre  les  lobules  est  si  nette  vers 
que  cellule  ou  veinule  pulmonaire  la  surface  du  poumon. 
un  réseau  capillaire  spécial  [a]  ;  mais  Ilestaussiànoterque  lesramuscules 
les  recherches  de  M.  Schrœder  van  der  terminaux  de  l'artère  pulmonaire  se  dis- 
Kolk,  de  M.  Rainey  et  de  quelques  tribuent  exclusivement  aux  parois  des 
autres  anatomistes,  ont  fait  voir  que  cellules  ou  des  cavités  infundibulifor- 
ces  vaisseaux  n'offrent  pas  cette  dis-  mesdeslobules,et  ne  contribuent  pas  à 
position  (6).  L'artériole,  en  arrivant  formerleréseaucapillairedesbronches; 
au  lobule  avec  la  bronche  corres-  mais  ce  lacis  s'anastomose  avec  celui 
pondante,  n'accompagne  pas  celle-ci  dépendant  des  artères  bronchiques  (d). 

(a)  Reisseisen,  De  fabrica  pxilmonum  commentatio,  p.  17. 

—  Krause  (voyez  Huschke,  Traité  de  splanchnologie,  Encyclop.  anat.,  t.  V,  p.  253). 
(6)  Adriani,  Dissert,  de  subtiliori pulmonum  structura,  p.  46  et  suiv.,  pi.  1. 

—  Rainey,  On  the  Minute  Structure  of  the  Lungs  (Trans.  of  the  Med.  Chir.  Soc.,  t.  XXVIII). 

—  T.  Williams,  Respiration  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.  undPhysiol.,  Suppl.,  p.  273). 

—  Bowmann  et  Todd,  Physiological  Anatomy,  t.  II,  p.  392. 

—  Kôlliker,  Éléments  d'histologie,  p.  578. 

(c)  Voyez  tome  II,  page  323. 

(d)  Voyez  Reisseisen,  Op.  cit. 
—  Adriani,  Op.  cit. 

—  Rossignol,  Rech.  sur  la  structure  intime  des  poumons,  p.  64  (Acad.  de  méd.  de  Bruxelles) 

—  Williams,  Respiration  (Todd's  Cyclop.  of  Anat.,  Suppl.,  p.  275). 

L'opinion  contraire  a  été  soutenue  par  M.  N.  Guillol  (Yaiss.  parlicul.  des  poumons  des  phthi- 
siques,  dans  YExpérience,  1838)  et  par  M.  Heale  (Researches  on  the  Distribution  of  the  Blood 
Vessels,  in  th   Lungs,  m  Abstracts  ofPapers  communicated  to  the  Royal  Soc,  1853,  t  VI,  p.  31 5). 


Capillaires 
pulmonaires. 


Veines 
pulmonaires. 


606  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

mifîcations  s'étendent  irrégulièrement  sur  les  cellules  dont  ces 
lobules  se  composent  et  y  donnent  naissance  à  un  plexus  capil- 
laire des  plus  riches. 

Ce  lacis  forme  une  seule  couche  dans  l'épaisseur  des  cloi- 
sons intercellulaires,  de  façon  à  être  en  rapport  avec  l'air 
par  ses  deux  surfaces  opposées.  Il  se  compose  de  vaisseaux  si 
petits,  que  les  globules  de  sang  ne  paraissent  pouvoir  y  passer 
qu'à  la  file  sur  un  seul  rang,  et  les  mailles  formées  par  les 
anastomoses  de  ces  capillaires  microscopiques  sont  extrême- 
ment serrées  (1). 

§  26.  —  Les  ramuscules  veineux  qui  sortent  de  ce  réseau 
capillaire  ne  correspondent  pas  aux  branches  terminales  des 
artères  et  ne  dépendent  pas  chacun  d'un  lobule  en  particulier, 
mais  naissent  de  distance  en  distance,  de  façon  à  circonscrire 
des  aires  assez  régulières,  et  convergent  dans  les  fissures  inter- 
lobulaires.  Les  troncs  résultant  de  leur  réunion  ne  suivent  pas 
davantage  le  trajet  des  artères,  mais  se  dirigent  d'une  manière 


(1)  M.  Kôlliker  évalue  le  diamètre 
de  ces  capillaires  entre  0mm,01  et 
0mm,007  chez  l'Homme,  où  les  glo- 
bales du  sang  ont  aussi  environ 
0""",007. 

D'après  le  même  physiologiste,  les 
mailles  arrondies  ou  ovalaires  du  ré- 
seau capillaire  formé  par  ces  arté- 
rioles  ont  entre  0mm,005  et  0mm,0i8 
de  diamètre  (a). 

Le  réseau  provenant  d'une  même 
branche  artérielle  se  répand  sur  plu- 
sieurs cellules,  souvent  huit  ou  dix. 

Dans  quelques  cas  tératologiques  on 


a  vu  le  sang  arriver  aussi  aux  pou- 
mons de  l'Homme  par  une  branche 
de  l'aorte  descendante  (6),  disposition 
qui  rappelle  ce  que  nous  avons  trouvé 
dans  l'état  normal  chez  les  Ser- 
pents (c)  ;  et  il  est  à  noter  que  chez 
les  phthisiques,  à  mesure  que  les 
capillaires  de  la  petite  circulation 
s'oblitèrent  et  se  détruisent,  il  s'établit 
souvent  des  communications  vascu- 
laires  entre  les  poumons  et  les  di- 
verses branches  aortiques  circon voi- 
sines (d). 


(a)  Kôlliker,  Traité  d'histologie,  p.  519. 

(b)  Meckel,  Ueber  einigeinerkivurdige  Gefâssabweichungen  (ûeulsches  Archiv  fur  die  Physiol. 
t.  VI,  p.  453,  pi.  3). 

(c)  Voyez  ci-dessus,  page  449. 

(d)  Sclirœdér  van  dcrKolk,  Observ.  anaiomico-palhologicœ,  fasc.  1,  p.  84. 

—  Natalis  Guillot,  Description  des  vaisseaux  particuliers  qui  naissent  dans  lespoumons  tuber- 
culeux (l'Expérience,  n°  du  25  avril  1838). 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  607 

indépendante  vers  la  face  interne  des  poumons  pour  en  sortir 
au-dessous  du  point  d'immersion  du  système  bronchique  (1). 

La  disposition  des  veines  pulmonaires  qui  se  rendent  du 
poumon  au  cœur  est  également  différente  de  celle  des  artères 
correspondantes.  Chaque  lobe  pulmonaire  ne  fournit  qu'un 
tronc  veineux,  mais  ceux-ci  restent  en  général  indépendants  et 
vont  déboucher  isolément  dans  l'oreillette.  Ainsi,  il  y  a  chez 
l'Homme  deux  veines  pulmonaires  à  gauche  et  deux  ou  même 
quelquefois  trois  de  ces  vaisseaux  à  droite  (2).  Cette  dernière 
disposition  est  constante  chez  plusieurs  Mammifères,  et  chez 
quelques-uns  de  ces  Animaux  on  voit  entrer  dans  le  cœur  trois 
veines  pulmonaires  de  chaque  côté  (3).  D'autres  fois  cepen- 
dant la  concentration  de  ces  vaisseaux  est  portée  plus  loin 
que  chez  l'Homme ,  et  chez  un  petit  Rongeur ,  connu  sous 
le  nom  de  Hamster,  ils  se  réunissent  même  tous  en  un  seul 
tronc  (d). 

(1)  En  général,  dans  les  ouvrages  tronc,  de  façon  que  l'oreillette  ne 
d'anatoraie  humaine  ,  on  décrit  ces  reçoit  de  chaque  côté  que  deux  de  ces 
veines  comme  étant  satellites  des  ar-       vaisseaux. 

tères  pulmonaires,  et  l'on  signale  avec  (3)    Chez  quelques   Quadrumanes 

soin  cette  circonstance  qu'une  même  (  tels  que  le  Cebus  capiccina  et  le 

branche  de  celle-ci  n'est  jamais  ac-  Lemur  albifrons),  ainsi  que  chez  le 

compagnée  par  deux  veines,  comme  Castor,  il  y  a  deux  veines  pulmonaires 

cela  a  ordinairement  lieu    pour   les  à  gauche  et  trois  à  droite. 

artères  de  la  grande  circulation;  mais  Chez  le  Coati  (Nasua),  l'oreillette 

l'idée  que  l'on  donne  ainsi  de  la  dis-  droite    reçoit  de   chaque    côté    trois 

tribution  des  vaisseaux  sanguins  dans  veines  pulmonaires  (6). 

l'intérieur   des   poumons    n'est  pas  (Zi)  M.  Owen  a  signalé  l'existence 

exacte.  La  différence  dans  la  direction  d'un  seul  tronc  pulmonaire  commun 

des  artères  et  des  veines  a  été  bien  chez  le  Dugong  (c). 

indiquée  par  M.  Addison  (a).  Chez  le  Daman,  les  veines  pulmo- 

(2)  En  général ,  chez  l'Homme,  les  naires  se  réunissent  en  une  paire  de 
deux  veines  pulmonaires  supérieures  troncs  terminaux  (d).  Meckel  a  vu 
du  côté  droit  se  réunissent  en  un  seul  chez  le  Cheval  un  autre  mode  de  grou- 

(a)  Addison,  Observ.  on  the  Anatomy  of  the  Lungs  (Medico-chirurg.  Trans.,  1841,  t.  XXIV 
p.  151). 

(6)  Meckel,  Analomie  comparée,  t.  IX,  p.  431. 

(c)  Owen,  Notes  on  the  Dugong  (Proceed.  of  the  Zool.  Soc.  of  Londotl,  1838,  p.  35) 

(d)  Meckel,  p.  431. 

m.  39 


608  APPAREIL    DE    LA    CIRCULATION 

Chez  l'Homme,  toutes  ces  veines  sont  dépourvues  de  valvules 
ou  n'en  présentent  que  de  très  imparfaites  ;  mais,  chez  quelques 
grands  Quadrupèdes,  on  trouve  ces  replis  membraneux  bien 
développés  là  où  deux  branches  se  réunissent  sous  un  angle 
aigu  (1). 
Résumé.  §  27.  —  En  résumé,  nous  voyons  donc  que,  dans  la  classe 
des  Mammifères,  l'appareil  circulatoire  est  toujours  constitué 
d'après  un  même  plan.  La  totalité  du  sang,  qui,  après  avoir 
servi  à  l'entretien  du  travail  nutritif  dans  la  profondeur  des 
divers  organes,  arrive  dans  les  cavités  droites  du  cœur,  est 
envoyée  aux  poumons,  où  ce  liquide  subit  l'influence  vivifiante 
de  l'air,  puis  revient  dans  les  cavités  gauches  du  cœur  pour 
retourner  dans  le  système  capillaire  général  par  l'intermédiaire 
de  l'artère  aorte  et  de  ses  branches.  Chaque  molécule  de  sang, 
pour  revenir  à  son  point  de  départ  dans  l'appareil  circulatoire, 
parcourt  donc  un  double  circuit,  et  passe  successivement  dans 
les  vaisseaux  nourriciers  ou  vaisseaux  de  la  grande  circulation , 
et  dans  les  vaisseaux  respiratoires  ou  vaisseaux  de  la  petite  cir- 
culation. Une  moitié  de  chacun  de  ces  systèmes  de  conduits  est 
parcourue  par  le  sang  artériel ,  l'autre  moitié  par  le  sang  vei- 


pement  de  ces  vaisseaux  :  les  veines  presque  à  angle  droit  ;  mais,  chez  le 

pulmonaires  antérieures  restant  dis-  Bœuf,  elles  sont  bien  distinctes, 
tinctes,  et  celles  de  la  paire  posté-  Chez  l'Homme,  les  veines  pulmo- 

rieure  se  réunissant  en  un  tronc  com-  naires  se  laissent  facilement  injecter 

mun  (a);   mais  cette  disposition   ne  du  centre   vers  la  périphérie,  et  la 

paraît  pas  être  constante,  car  la  plu-  plupart  des  auteurs  considèrent  ces 

part    des    anatomistes   n'en   parlent  vaisseaux  comme  étant  complètement 

pas  [b).  dépourvus    de    valvules    (c)  ;    mais 

(1)  On  ne  trouve  pas  de  valvules  Meckel    et    quelques   autres    anato- 

dans  les  veines  pulmonaires  du  Co-  mistes  y  ont  trouvé  des  valvules  rudi- 


chon,  où  ces  vaisseaux  se  réunissent      mentaires  {cl). 


(a)  Meckel,  loc.  cit. 

(b)  Cliauveau,  Amlomie  des  Animaux  domestiques,  p.  566. 

(c)  Mayer,  Ueber  die  Klappen  in  den  Lungenvenen  (Zeitsclirift  fur  Physiologie  von  Treviranns 
1829,  t.  III,  p.  155). 

(d)  Cruveilhier,  Anatomie  descriptive,  t.  III,  p.  1 4. 


CHEZ    LES    MAMMIFÈRES.  609 

neux,  et  c'est  dans  les  deux  réseaux  de  vaisseaux  capillaires 
placés  entre  les  deux  moitiés  de  ces  cercles  irrigatoires  que  le 
sang  change  de  caractère  et  devient  alternativement  veineux 
ou  artériel.  Enfin  nous  avons  vu  aussi  que  dans  cette  classe, 
de  même  que  chez  les  Oiseaux,  la  disposition  de  l'appareil  cir- 
culatoire est  telle  que  ces  deux  sortes  de  sangs  ne  se  mêlent  nulle 
part.  Mais,  avant  la  naissance,  les  choses  ne  se  passent  pas  de 
la  même  manière,  et  la  plus  grande  portion  du  sang  qui  arrive 
au  cœur  par  les  veines  caves  pénètre  dans  l'aorte  sans  avoir 
passé  préalablement  dans  les  vaisseaux  de  la  petite  circulation. 
Je  ne  pourrais,  sans  anticiper  trop  sur  l'histoire  du  développe- 
ment de  l'embryon,  expliquer  dans  ce  moment  comment  la  cir- 
culation générale  s'effectue  chez  le  fœtus  ;  je  réserverai  donc 
cette  question  pour  une  autre  partie  de  ce  Cours ,  et ,  sans 
m'arrêter  davantage  sur  l'étude  anatomique  de  l'appareil  irri- 
gatoire ,  je  passerai  maintenant  à  l'examen  du  mécanisme  à 
l'aide  duquel  le  courant  sanguin  y  est  établi  et  des  circonstances 
qui  influent  sur  la  rapidité  avec  laquelle  ce  courant  parcourt 
l'organisme  vivant  ;  ou  ,  en  d'autres  mots,  après  avoir  décrit, 
comme  je  viens  de  le  faire,  le  système  hydraulique  des  Ani- 
maux, je  m'occuperai  des  phénomènes  physiologiques  dont  cet 
appareil  est  le  siège.  Pour  compléter  cette  étude,  il  nous  faut 
effectivement  examiner  ces  parties  quand  elles  sont  en  mouve- 
ment aussi  bien  que  lorsqu'elles  sont  en  repos,  et,  dans  la  pro- 
chaine Leçon,  je  commencerai  ces  investigations  en  m'occupant 
d'une  manière  spéciale  du  jeu  de  la  pompe  foulante  constituée 
par  le  cœur. 


ADDITIONS. 


VINGT -DEUXIÈME   LEÇON. 

Page  151,  note  n°  1.  —  Depuis  l'impression  de  cette  note,  l'illustre  natura- 
liste de  Berlin,  que  la  science  vient  de  perdre,  Johannes  Muller,  a  publié,  sur 
la  structure  des  Ptéropodes,  de  nouvelles  observations  qui  justifient  pleinement 
la  réserve  avec  laquelle  j'ai  cru  devoir  parler  de  la  communication  signalée 
par  quelques  zoologistes,  comme  existant  entre  le  système  veineux  de  ces 
Mollusques  et  l'extérieur.  En  effet,  le  péricarde  communique  avec  l'extér  ieu 
par  l'intermédiaire  du  sac  bojanien,  ainsi  que  l'avait  constaté  M.  Gegenbauer; 
mais  Muller  a  trouvé  que  le  canal  branchio-cardiaque  ne  débouche  pas  dans  la 
cavité  péricardique,  et  la  traverse  pour  pénétrer  jusque  dans  l'oreillette  du 
cœur.  Le  sang  ne  se  répand  pas  dans  le  péricarde,  et  le  liquide  contenu  dans 
cette  poche  ne  paraît  pas  pouvoir  arriver  dans  le  système  circulatoire  (Muller, 
Bemerkungen  ans  der  Entwickelungsgeschichte  der  Pteropoden,  aus  dem 
Monatsbericht  der  Âkad.  der  Wissensch.  su  Berlin,  1857;. 


FIN    DU    TOME    TROISIEME. 


TABLE  SOMMAIRE  DES  MATIERES 

DU  TOME  TROISIÈME. 


VINGTIÈME  LEÇON. 

DE     LA     CIRCULATION     DU     SANG. 

Histoire  de  la  découverte  de  ce 

phénomène 1 

Connaissances  acquises  à  ce  sujet 
par  les  anciens  médecins  de  la 

Grèce 2 

Par  Aristote 4 

Par  l'école  d'Alexandrie 6 

Par  Galien 11 

État  des  études  anatomiques  pen- 
dant le  moyen  âge  et  à  l'époque 

de  la  renaissance 13 

Travaux  de  Vésale 14 

Idées  de  Michel  Servet 15 

Observations   de  Colombo  et  de 

Césalpin .        19 

Découvertes  anatomiques  d'É- 
tienne.  de  Cannanus ,  d'Eus- 
tachi  et  de  Fabricius  d'Acqua- 

pendente 21 

Découvertes  de  Harvey 22 

Analyse  du  travail  de  ce  physio- 
logiste         24 

Opposition  faite  par  les  contem- 
porains de  Harvey 35 

Observations  de  Malpighi  sur  la 

circulation  dans  les  capillaires.        37 
Preuves  de  la  communication  des 
artères  et  des  veines  fournies 

par  les  injections 39 

Remarques  historiques  sur  l'art 

d'injecter  les  vaisseaux 40 

Recherches    sur    la    circulation 

chez  les  Animaux  inférieurs. .       42 
Observations   sur   la   circulation 
lacunaire 44 

VINGT  ET  UNIÈME  LEÇON. 

De  l'irrigation  physiologique  en 
général 4" 


De  l'irrigation  effectuée  par  l'ap- 
pareil gastrique  chez  les  Zoo- 
phytes 43 

Disposition  de  cet  appareil  et 
phénomènes  qui  s'y  observent 
chez  les  Sertulariens 49 

Appareil  gastro  -  vasculairc  des 
Acalèphes 55 

Médusaires 56 

Béroïdiens 62 

Appareil  gastro  -  vasculaire  des 
Coralliaires 69 

De  la  circulation  dans  l'embran- 
chement des  Mollusques 76 

Circulation  lacunaire  dans  la  classe 
des  Bryozoaires 77 

Circulation  semi-vasculaire  dans 
la  classe  des  Tuuiciers 79 

Vues  théoriques  sur  le  mode  de 
constitution  du  système  vas- 
culaire         81 

Du  phénomène  de  la  circulation 
alternante  chez  les  Tuniciers.        85 

Disposition  de  l'appareil  circula- 
toire chez  les  Ascidies 89 

Chez  les  Biphores 92 

VINGT-DEUXIÈME  LEÇON. 


De  la  circulation   du  sang  chez 

les  Mollusques  proprement  dits.  96 
Caractères  généraux  de  l'appareil 

circulatoire  chez  ces  Animaux.  98 
Du  système  circulatoire  dans  l'or- 
dre des  Acéphales 98 

Chez  les  Acéphales  Abranches  (ou 

Dentales) 98 

Chez  les  Brachiopodes 10 1 

Chez  les  Lamellibranches 103 

Du  cœur  chez  ces  Mollusques. . .  104 

De  leur  système  artériel 1 1 1 

Système  veineux H4 

Vaisseaux  branchiaux 127 


612  TABLE    SOMMAIRE 

De  la  circulation  chez  les  Mol- 
lusques Gastéropodes 129 

Cœur 130 

Système  artériel    incomplet  des 

Haliotides 131 

Des  Patelles 135 

Des  Oscabrions 136 

Système  artériel  complet  des  Gas- 
téropodes ordinaires 138 

Système  brauchio-cardiaque. .    .  139 

Système  veineux 143 

Système  veineux    lacunaire   des 

Aplysies 144 

Des  Colimaçons 146 

DesDoris,  etc 149 

Des  Firoles loi 

Des  Éolidiens 131 

Des  Planorbes,  Paludines,  etc.. .  154 
Observations  relatives  à  la  com- 
munication de  ce  système  avec 
l'extérieur  chez  divers  Gasté- 
ropodes      ....  155 

De  la  nature  des  canaux  appelés 
système  aquifère  par  M.  Délie 

Chiaje 158 

De  la  circulation  chez  les  Ptéro- 

podes 139 

Additions 160 

De  l'appareil  circulatoire  dans  la 

classa  des  Céphalopodes 161 

Cœur  artériel 163 

Artères '. 166 

Vaisseaux  branchio-cardiaques.  .  166 

Système  veineux  du  Poulpe 167 

Cœur  veineux 1 69 

Système  veineux  des  Calmars  et 

des  Seiches 170 

Système  veineux  du  Nautile.  ..  .  171 
Résumé  des  caractères  du  système 
circulatoire  chez    les   Mollus- 
ques   174 

VINGT-TROISIÈME  LEÇON. 

De  la  circulation  du  sang  chez 
les  Crustacés  ,  les  Arachnides 

et  les  Myriapodes 178 

Considérations  préliminaires..  .  .  178 
De  l'appareil  circulatoire  dans  la 

classe  des  Crustacés 179 

De  la  direction  du  courant  circu- 
latoire chez  les  Décapodes ...  .  180 

Cœur  des  Décapodes 183 

Système  artériel 185 

Cœur  et  artères  des  Squilles.  ...  188 


DES    MATIERES. 

Cœur  des  Crustacés  inférieurs.  . .  189 
Système  veineux    lacunaire  des 

Décapodes ,  etc 190 

Vaisseaux  branchio-cardiaques. .  193 

Sinus  péricardique 194 

Appareil  circulatoire  des  Crustacés 

inférieurs. . 196 

Résumé 199 

De  l'appareil  circulatoire  dans  la 

classe  des  Arachnides 200 

Cœur  du  Scorpion 202 

Système  artériel 203 

Système  veineux 204 

Résumé 206 

Mécanisme  de  la  circulation  chez 

ces  Arachnides 207 

De  l'appareil  circulatoire  chez  les 

Aranéides 208 

Appareil  circulatoire  des  Ara- 
chnides trachéennes 209 

De  la  circulation  dans  la  classe 

des  Myriapodes 211 

VINGT-QUATRIÈME  LEÇON. 

De  la  circulation  chez  les  In- 
sectes       215 

Découverte  du  vaisseau  dorsal ...     215 
Constatation  de  l'absence  d'ar- 
tères et  de  veines 215 

Découverte  des  phénomènes  de  la 
circulation  du   sang  chez  les 

Insectes 216 

Structure  du  vaisseau  dorsal. . .  .     219 

Système  lacunaire 224 

Questions  relatives  au  rôle   des 

espaces  péritrachéens 227 

Résumé  des  discussions  relatives 
à  la  circulation  lacunaire  chez 
les  Animaux  Invertébrés 232 

VINGT-CINQUIÈME  LEÇON. 

De  la  circulation  chez  les  Vers.     239 
De  l'existence  d'un   système  vas- 
culaire  complet  et  indépendant 

chez  ces  Animaux 239 

Mode  de  formation  de  ces  vais- 
seaux.      240 

Disposition  du  système  circula- 
toire dans  la  classe  des  Turbel- 

lariés 242 

Némertiens 243 

Planaires 246 

Des  vaisseaux  sanguins  dans  la 
classe  des  Nématoïdes 246 


TABLE    SOMMAIRE    DES    MATIÈRES. 


613 


De  l'appareil  circulatoire  dans  la 
classe  des  Ânnélides - .  .      247 

Système  cavitaire 2iS 

Disposition  générale  du  système 
vasculaire 250 

Système  vasculaire  des  Hirudi- 
nées 254 

Du  mouvement  du  sang  chez  les 
Hirudinées 261 

De  l'appareil  vasculaire  des  An- 
nélides Chétopodes 264 

Des  organes  moteurs  de  l'appareil 
circulatoire  chez  les  Annélides.     268 

Résumé 278 

De  la  circulation  chez  les  Tréma- 
todes 279 

Questions  relatives  aux  fonctions 
de  ces  vaisseaux 280 

Disposition  anatomique  d'un  sys- 
tème particulier  de  vaisseaux 
chez  ces  Vers 280 

Des  vaisseaux  rudimentaires  dans 
la  classe  des  Vers  cestoïdcs. . .     286 

Des  parties  qui  ont  été  considé- 
rées comme  étaut  des  vaisseaux 
sanguins  dans  la  classe  des 
Rotateurs 2S7 

De  la  circulation  chez  les  Zoo- 
phytes  de  la  classe  des  Échino- 
dermes 288 

Vaisseaux  des  Holothuries 292 

Vaisseaux  des  Oursins  et  des  As- 
téries      297 

Vaisseaux  des  Siponcles ,  etc. .  .  .     299 

VINGT-SIXIÈME  LEÇON. 

De  la  circulation  chez  les  Ani- 
maux VERTÉBRÉS 303 

Mode  de  formation  de  l'appareil 

vasculaire  chez  l'embryon. ..  .     303 
Appareil    circulatoire    de    l'Am- 

phyoxus 306 

Caractères  généraux  de  l'appareil 
circulatoire  des  Vertébrés  or- 
dinaires       308 

Position  du  cœur 309 

Péricarde 309 

Conformation  générale  du  cœur 

chez  les  divers  Vertébrés 314 

De    l'appareil    circulatoire    des 

Poissons 316 

Cœur 316 

Système  artériel . 326 

Aorte  antérieure  ou  artère  bran- 
chiale        327 


Racines  de  l'aorte  dorsale 333 

Artères  de  distribution 340 

Système  veineux 353 

Veines  cardinales  et  leurs  af- 
fluents       355 

Système  de  la  veine  porte  rénale.      356 
Système  de  la  veine  porte  hépa- 
tique       362 

Dégradation  du  système  veineux 

chez  les  Lamproies 369 

Des  communications  du  système 
veineux  avec  les  vaisseaux  lym- 
phatiques.        371 

VINGT-SEPTIEME  LEÇON. 


De  l'appareil  circulatoire  des 
Batraciens 

Disposition  générale 

Structure  du  cœur 

Système  artériel 

Vaisseaux  branchiaux 

Mode  de  transformation  des  vais- 
seaux branchiaux  en  crosses 
aortiques ,  etc 

Artères  pulmonaires 

Mode  de  distribution  des  artères. 

Système  veineux  général 

Veines  pulmonaires 

Du  courant  circulatoire  chez  les 
divers  Batraciens 

Comparaison  entre  les  Batraciens 
et  les  Poissons 


37  2 
372 
372 
378 
378 


384 
387 
395 
399 
401 

403 

406 


VINGT-HUITIÈME  LEÇON. 

De  la  circulation  chez  les  Rep- 
tiles       408 

Caractère  général    de    l'appareil 
circulatoire  de  ces  Animaux. .     408 

Cœur  des  Chéloniens 411 

Cœur  des  Ophidiens. 417 

Cœur  des  Sauriens  ordinaires. . .     421 

Cœur  des  Crocodiliens 424 

Des    crosses  .  aortiques    chez   les 

Sauriens  ordinaires 426 

Des   crosses    aortiques  chez   les 

Crocodiliens 429 

Système  artériel  général  des  Cro- 
codiliens       432 

Système  artériel  généra!  des  Sau- 
riens ordinaires 436 

Système  artériel  général  des  Ophi- 
diens       440 

Système  artériel  général  des  Ché- 
loniens       441 


61& 


TABLE    SOMMAIRE    DES    MATIERES. 


Système  veineux  des  Reptiles  en 

général 442 

Veines  des  Ophidiens.  ........  443 

Veines  des  Sauriens  ordinaires. .  4  44 

Veines  des  Crocodiliens 446 

Vaisseaux  de  la  petite  circula- 
tion   448 

VINGT-NEUVIÈME  LEÇON. 

Appareil  circulatoire  des  Oi- 
seaux  '.  .  £  450 

Disposition  générale 450 

Développement  du  cœur 4SI 

Structure  du  cœur 452 

Système  artériel 455 

Système  veineux 464 

Petite  circulation 470 

TRENTIÈME  LEÇON. 

Appareil   circulatoire    chez    les 

Mammifères 473 

Mode  de  développement  du  cœur 
et  de  ses  dépendances  ,  com- 
paré à  ce  qui  se  trouve  chez  les 

autres  Vertébrés 473 

Caractères  généraux  de  l'appareil 

circulatoire  des  Mammifères. .  476 

Position  du  cœur 47  7 

Péricarde 479 

Volume  du  cœur 480 

Forme  du  cœur 482 

Structure  du  cœur 486 

Ventricule  gauche 492 

Ventricule  droit 497 

Oreillettes- 503 

Nerfs  du  cœur 508 

Système  artériel 511 

Structure  des  artères 512 

Artère  aorte 510 

Origine  des  artères  de  la  tète  et 

des  membres  thoraciques. . . .  520 

Artères  carotides 527 


Artère   carotide    externe   et    ses 

branches  chez  l'Homme 529 

Artère   carotide  interne    et    ses 

branches 531 

Artère  vertébrale 532 

Des  artères  de  la  tète  chez  les 

autres  Mammifères 534 

Des  artères  sous-clavières  et  leurs 

branches  chez  l'Homme 539 

Des  artères  des  pattes  antérieures 

chez  les  divers  Mammifères. . .  542 

De  l'aorte  descendante 546 

Artères  intercostales,  etc 548 

Artères  des  viscères  abdominaux.  550 

Artères  des  membres  inférieurs. .  557 

Système  des  vaisseaux  capillaires .  566 

Structure  de  ces  vaisseaux. .....  568 

Système  veineux 570 

Structure  des  veines 570 

Capacité  des  veines 576 

Anastomoses 576 

Mode  de  développement  des  prin- 
cipales veines 577 

Système  des  veines  jugulaires. . .  580 
Veine  jugulaire  externe    et  ses 

affluents 58 1 

Veine  jugulaire  interne  et  ses  dé- 
pendances   582 

Veine  jugulaire  antérieure 586 

Veine  vertébrale 586 

Veines  des  membres  thoraciques.  588 

Veines  des  membres  abdominaux.  590 

Veine  cave  inférieure 591 

Système  de  la  veine  porte 592 

Terminaison  de  la  veine  cave  in- 
férieure   594 

Veine  azygos 595 

Veines  rachidienncs 597 

Veines  du  cœur 601 

Particularités  du  système  veineux 

chez  quelques  Mammifères. .  .  602 
Vaisseaux  de   la  petite  circula- 
tion    603 

Artère  pulmonaire 603 

Veines  pulmonaires 606 


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