LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
LEUR CULTURE
CHARTRES. — IMPRIMERIE DURAND, RUE FULBERT.
LES
\ B R A /^
wsw York'
B O T A N I C A L
ARBRES A GITTA- PERCHA
LEUR CULTURE
MISSION RELATIVE A LACCLIMATATION DE CES ARBRES
AUX AiNTILLES ET A LA GUYANE
l'A II
Henri LECOMTE
Agrégé de l'Université, Docteur es sciences,
Professeur au Lycée Saint-Louis,
Lauréat de l'Institut.
^
P A R I S
Georges CARRÉ ET C. NALD, Éditeurs
3 , R V E R A c I .\ E , 3
1899
?11
PREMIERE PARTIE
CONSIDERATIONS GENERALES SUR LES ARBRES A GLTTA
Uorigine botanique de la gutta-percJia.
La giitta-percha, pas plus que le caoutchouc, dont
<ille diffère bien plus d'ailleurs par les propriétés
physiques que par la composition chimique, n'est
un produit unique et chimiquement défini. En réa-
lité, sous le nom de gutta-percha, se cachent des pro-
duits très divers constitués par des mélanges dont la
formule est singulièrement variée.
L'étude de Torigine botanique des produits qui
se groupent sous la dénomination commune de gutta-
percha est rendue de ce fait très difficile et il faut
avouer que malgré les travaux de nombreux savants
elle est encore peu avancée.
Les travaux de Hooker, Murton, J. CoUins, S.
Wray, E, Sérullas, Pierre, Beauvisage, J.-R. Jack-
son, Burck, et de tant d'autres, n'ont pas encore pu
Lecomte. I
2 LES ABBRES A GUTTA-PEBCHA
jeter une lumière complète sur cette importante
question.
Sans vouloir faire Thistorique de la gutta-percha
depuis son introduction en Europe (i832) parle chi-
rurgien anglais Montgomery jusqu'à nos jours, il
convient d'envisager la question de 'l'origine bota-
nique comme l'une des plus importantes, car elle
seule permettra de se livrer efficacement aux opéra-
tions de culture des arbres à gutta-percha.
D'ailleurs, nous adoptons sans réserve l'opinion
de Léon Brasse [Lumière électrique, t. XL VI, 1898),
quand il dit : « II n'y a pas une bonne espèce de gutta-
jjercJia, mais plusieurs bonnes espèces qui répondent cha-
cune à un but et ce sont ces espèces qu il faut propac/er. »
En s'exprimant de cette façon, Léon Brasse se montre
un industriel avisé fort au courant de tout ce qui
concerne les propriétés et les emplois de la gutta-
pei'cha.
Dans la réalité, le nombre des végétaux produc-
teurs de gutta est assez considérable, mais ceux qui
fournissent les sortes les plus estimées appartiennent
exclusivement à la famille des Sapotacées.
W. Burck, dont il est diliicile de ne pas recon-
naître la compétence en cette matière et qui a repris,
après Beauvisage, Téludi^ des origines botanicjues do
la gutta-percha, allait même jusqu'à admettre, en
188G, que (( V [sonancha Gutta, llooker [Palaquium
Gutta, Burck), la plante considérée jusqu'à présent
comme l'arbre à gutta par excellence, n'existe plus
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES 3
à l'état spontané et que par conséquent la giitta-percha
commune ne provient pas de cet arbre. »
M. Burck est ai'rivé à cette conclusion après une
étude attentive du sujet et après avoir séjourné trois
mois sur les plateaux supérieurs de Padang, à la
recherche des arbres producteurs de gutta (i).
La gutta-percha produite exclusivement au début
par ïhonandra Gititaest donc aujourd'hui fournie par
d'autres arl^res. On savait que depuis longtemps (1857)
le dernier ar])re à gutta primitif (1. Gutta) avait été
abattu dans Tile de Singapore, mais sur la foi d'un
certain noml^re de voyageurs, on le croyait répandu
à Bornéo, Sumatra, Gélèbes, Banka, Iliouw et dans
la presqu'île de Malacca. 11 n'est plus possible de
l'admettre aujourd'hui après les recherches de W.
Burck corroborées d'ailleurs par l'enquête à laquelle
s'est livré le savant D' Treub, directeur du jardin
botanique de Buitenzorg. Ce dernier s'est adressé
aux fonctionnaires du département de l'intérieur et
les a priés de lui fournir les informations qu'ils pour-
raient recueillir sur les sortes de guttas récoltées
par les indigènes de leurs districts respectifs, leui'
demandant en même temps de lui envoyer des échan-
tillons d'herbier de chaque arbre producteur et des
échantillons de gutta.
(i) Rapport omirent een onderzoek naar de Getah-pertja produce-
erende boomsoorten in de Padangsche Bovenlanden, Batavia, Lands-
drukkerij, i884. (Broch. in-8 de 75 pages.)
U LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Fait singulier et qui vient bien à l'appui de la
thèse soutenue par M. Burck, Therbier du jardin de
Buitenzorg, pourtant si riche en plantes à gutta, ne
contient pas un seul échantillon du véritable Pala-
quium Gutta et Burck, de même que Teysmann, n'ont
pas rencontré ce végétal dans leurs importants voya-
ges. En réalité, les personnes qui ont parlé de l'ex-
tension considérable du Palaquiimi Gutta, comme sir
James Brooke etMotley n'ont pas apporté de preuves
certaines à l'appui de leurs assertions et c'est seule-
ment sur des resseml)lances de feuilles qu'ils ont
établi des analogies d'es[)èces.
Suivant Teysmann, le Palaquiuin Gutta porterait
dans la partie occidentale de Bornéo le nom de Getah-
Doerian ; mais l'inspection des ])lantes de l'herbiei*
de Buitenzorg existant sous ce nom a montré qu'on
a affaire non pas au Palaquium Gutta, mais bien au
Pal. ohlongifoUum ; c'est d'ailleurs cette dernière
espèce c[ui est exploilée dans la partie orientale de
l'île et qui fournit la meilleure sorte de gutta-percha.
Il est remarquable de constater que les relations
concernant l'habitat viennent encore* à l'appui de cette
manière de voir, car Thomas Lobb et le D' Oxley,
les seuls qui aient eu Toccasion d'observer la vraie
plante de Singapore [Pal. Gutta) , ont déclaré dans
leurs rapports (pfils Tavaient trouvée uniquement
dans les terres d'alluvions, au pied des collines où
V humidité est perùstantc. Au contraire, d'après Oxley,
les principaux arbres actuellement exploités se ren-
COXSIDÉRATIOXS GÉSÉRALES 5
contrent sur des collines ou sur des sommets plus
ou moins élevés, mais toujours à l'abri des eaux
stagnantes et des inondations.
Si le Pal. Gutta n'existe pas à Bornéo, il paraît
manquer aussi à Sumatra, car les échantillons rap-
portés par Miquel à cette espèce ou à sa variété,
Sumatrana appartiennent réellement au Palaquium
oblongifoliimi, d'après W. Burck.
De môme à Malacca, à Banka et à Riouw, il n'est
pas démontré que le Palaquium Gutta ait jamais
existé mais par contre on est sur de la présence du
Pa l. oblongifo Hum .
M. Burck en conclut que le produit àviPal. Gutta
ne se trouve plus actuellement dans le commerce,
mais le jardin de Buitenzorg possède deux plants de
ce précieux arbre.
Actuellement toute la gutta-percha récoltée est
donc produite par d'autres arbres appartenant d'ail-
leurs à la même famille des Sapotacées et la plupart
au même genre Palaquium.
Dans les Indes néerlandaises les six principaux
producteurs sont les suivants:
Palaquium Gutta ;
— . oblongifolium ;
— Borneense ;
— Treubii ;
— — var. parvifolium;
Payena Leerii.
11 faut ajouter à cette liste le Mimusops Balata qui
6 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
fournit, dans les Guyanes, un succédané de la gutta-
percha, connu sous le nom de Balata.
Le genre honandra et le genre Palaquiuni sont
d'ailleurs nettement distincts et ne constituent pas,
comme on le répète souvent, un même genre.
honandra : fleurs tétramères. Lobes de la corolle
plus longs que le tube. Etamines 8. Graines albumi-
nées. Stipules petites et caduques.
Palaquium: fleurs hexamères. Lobes de la corolle
plus longs que le tube ou parfois un peu plus courts.
Etamines 12. Albumen nul. Stipules petites et cadu-
ques.
Ces caractères diff'érentiels permettent actuelle-
ment de séparer ces deux genres autrefois réunis
dans le grenre honandra. Ce dernier est d'ailleurs re-
présenté aux Indes néerlandaises par deux espèces
dont Tune est assez répandue à Sumatra [Is. pulchra
Burck) où elle fournit le produit « Xjatoeb Balam
Doerian ».
Bien cpic le Pal. Culla ne suil plus actuellement
exploité en raison de sa rareté, il n'est pas inutile
d'en donner ici les caractères essentiels avec ceux
des autres arl^res producteurs de gutta.
Palaquium Gutta BuRCK
Svn. honandra Gutta, llook.
■y
Dir/fopsis Gutta. Benth et Hook. f.
7\rl)re dv i3-t^i mètres (d'après Hooker; pour
CONSIDÉRÂT IO.\S GÉXÉRALES 7
SeniUas, un arJjre de 3o ans mesure i3 à l^ mè-
Ires jusqu'aux premières branches) ; écorce rude,
grise, teintée de jaune ou de rouge ; les rameaux
les plus jeunes sont couverts de poils roux.
Feuilles à pétiole assez long (2 à 3 centimètres),
à limbe ovale-oblong, coriace^ atténué à la ])ase,
arrondi au sommet ou légèrement acuminé ; d'un
beau vert à la face supérieure, tandis que la face
inférieure est couverte d'un duvet roussâtre ; la
nervure principale donne de chaque côté 2\ à
<3o nervures secondaires à peine saillantes, ar-
([uées, parallèles les unes aux autres et donnant
naissance elles-mêmes à un fin réseau de nervures
tertiaires. Les dimensions des feuilles sont très varia-
bles ; chez Tarbre jeune, d'après Serullas, elles peu-
vent atteindre 23^™ sur 7, tandis que chez l'arbre
adulte ces dimensions se réduisent à la moitié.
Fleurs de 2 millimètres de long disposées en
faisceaux à l'aisselle des feuilles ; pédoncules
assez courts (3 millimètres), ne portant qu'une seule
fleur.
Calice légèrement campanule, à six divisions
profondes ; lobes ovales, obtus, tomenteux, disposés
en deux verticilles.
Corolle gamopétale, légèrement rotacée, à 6 lo-
bes elliptiques obtus ; le tube de la corolle dépasse à
peine le calice.
Etamines au nombre de 12, en 2 verticilles, à filets
filiformes de même longueur que les lobes de la
8 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
corolle, à anthères ovales, glabres, pointues au
sommet, extrorses.
Pistil composé d'un ovaire globuleux, pubescent,
à 6 loges uniovulées, surmonté d'un style filiforme
un peu plus long que les étamines et se terminant
par un stigmate obtus à peine, renflé.
Le fruit est une petite baie ovoïde, charnue, de
o"'o25 à o™o3o de diamètre sur o"'o3o à o'"o35 de
long. Des six loges de l'ovaire, quatre ou cinq avor-
tent généralement et il ne reste dans le fruit mûr que
I ou 2 loges monospermes ; les graines sont ellipti-
ques, comprimées et possèdent un hile très déve-
loppé.
Se rencontre dans les montao-nes de Sinofar>our.
Thomas Lobb (n° 290) ; l)"^ Oxley.
Palaquium oblongifolium Pierre
Syn. honandra Gutta vai'. ublongifolia de Vriese.
Dichopsis obloïKjlfoiia. Burck.
Arbre élancé duiil les rameaux jeunes sont cou-
verts d'un duvet roussàtre.
Feuilles pourvues d\ui [)ctiole court, oblon-
gues ou lancéolées-oblongues, assez longuement
acuminées, un peu coriaces, vertes à la face supé- •
l'ieure, mais couvertes d'un duvet jaune d or brillant
à la face inférieure. Les feuilles jeunes atteignent
CO\SI DÉRATIONS GENERALES
FiG. I. — Rameau de Palaquium ohlongifoUum.
lo LES ARBRES A GITTA-PERCHA
22 centimètres de longueui* et 7,5 centimètres de
largeur et le pétiole a i,5 à 2,5 centimètres de long;
ses feuilles se distinguent de celles du P. Gutta par
ce caractère qu'elles sont atténuées plus longuement
à leur partie inférieure. Leurs nervures latérales
perpendiculaires à la nervure principale, un peu re-
courbées, sont parallèles les unes aux autres et sont
au nombre de 20 à 3o de chaque côté de la nervure
principale; elles sont presque complètement immer-
gées dans le parenchyme.
Fleurs groupées (généralement de i à 6) à
l'aisselle des feuilles tombées, pourvues de pédon-
cules de 1.5 à 2 millimètres.
Calice ovoïde, campanule, à divisions ovales obtu-
ses, les intérieures plus grêles que les autres.
Corolle à tube dépassant lo calice ; ses lobes sont
de même longueur (jue le tube.
Etamines 12 en 2 verticilles; filets lilifoi'mes éga-
lant en lonouour les lobes de la corolle ; anthères
ulabres, aio-uës.
Baie charnue surmontée pnr le rc^stc du style, ac-
(*ompagné(* par le calice persistant, couverte d'un
(Uivet roux, longue de 3,5 à 4 centijiièlres et ayant
un diamètie de 3 à 3,5 centimètres. Pbisieurs loges
avortent. Los graines, au nombre de i, 2 ou 3, sont
ellipsoïdes ou com|)rimées latéralement, à tégument
crustacé et brillant. Le bile couvre une grande partie
de la surface.
Aux Indes Néerlandaises, c'est-à-dire dans les
CO.\SIDÉRATIO.\S GÉNÉRALES n
pays producteurs de gutta, le Palaquium oblon/jlfo-
liiim est la plante à gutta-percha par excellence.
On la rencontre à Sumatra, à Bornéo et dans la pres-
qu'île de Malacca. Une plante répandue sur une aire
aussi considérable doit nécessairement porter de
nombreux noms indio-ènes différents suivant les ré-
gions
/ Njatoeh Balani Tcniboga ;
1 — Sirah ;
c . / ^ ) — ^^er2\i ;
Sumatra (i).( c^
i — socsoen ;
— Pirang ;
— Abang.
_, , N i Niatoeh Balam Doerian ;
Bornco (i). . ^ ,.
( Ka-Malam-Faridi.
Malacca. . . | Taban Merah (d'après Beauvisage).
C'est le nom de Balam Temboga qui est le plus
répandu dans rarchipel étalais pour désigner le
Pal. oblongifoliuw \ ce nom rappelle la couleur jaune
de la face inférieure des feuilles (Temboga, cuivre
jaune en malais).
La gutta fournie par cette plante est compacte et
homogène. Plongée dans l'eau chaude elle se pétrit
sans devenir oluante et conserve en se refroidissant
toutes les formes qu'on lui a communiquées. Sa cou-
lure rouge ou rouge brunâtre est due au mélange
avec le latex de petits morceaux d'écorce dont
la matière tinctoriale se répand dans la gutta sous
l'influence de la cuisson.
(i) Noms sous lesquels se trouvent ces plantes dans l'herbier de Bui-
lenzorg.
12 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Le gouvernement néerlandais a donné Tordre de
cultiver ce Palaqitiiim à Java, concurremment avec le
Pal. Gutta, dont le Jardin possédait deux pieds seu-
lement, il y a une dizaine d'années.
Les produits fournis par les autres espèces du
genre Palaquium signalées plus haut présentent à
peu près les mêmes qualités et la culture de ces di-
verses espèces présente un intérêt considérable.
Palaquium Krantzianum Pierre
Syn. Dichopsis Krantziana Pierre.
Arbre de 3o à 35 mètres, pourvu de feuilles al-
ternes, oblongues ou ellipticpies, arrondies ou acu-
minées au sommet, à face inférieure plus ou moins
pubescente.
D'après le I)'^ Bcauvisage, les caractères de la fleur
sont les suivants (i) :
(( Les fleurs ont un réceptacle à [)eii j)rès plan et
« plutôt légèrement concave.
« Le calice est doul)le, construit le plus souvent
« siu^ le type 3 redoublé. Les 3 sépales extei^nes sont
« triangulaires, équilatéraux, presque plans, épais,
« coriaces, rugueux à Textérieur, lisses à Tinlérieur,
« donnant au sommet du bouton, par leur réu-
« nion avant Tanthèse, l'aspect d'une pyramide
(i) Beal'visage, Contvihut. à l'rtudc de la Gutta-pevclia, Pari«,
i88i, p. \2.
aONSIDËBATIOXS GENERALES i3
« triangulaire, légèrement imbriqués ou subval-
(c vaires ; l'un d'eux paraît situé directement en haut,
« les deux autres sur les côtés. Les 3 sépales inté-
a rieurs, alternes avec les précédents, sont ovales-
« arrondis, très concaves, coriaces et très épais au
<( milieu, surtout à leur base, minces et scarieux sur
<f.les l)ords, nettement imbriqués ; leur face interne
<( est lisse dans toute son étendue, tandis que leur
« face externe, mate dans la plus grande partie de
<( son étendue, est lisse et brillante sur les bords.
« La corolle, à peine gamopétale, se compose de
« 6 divisions presque entièrement distinctes, orbi-
« culaires-concaves, assez épaisses, amincies sur
<( les bords, tordues dextrorsum dans la préfloraison,
« alternes avec les 6 sépales. Le tube de la corolle est
« réduit à un simple anneau sur lequel s'insèrent les
<( étamines.
« Celles-ci sont au nombre de 12, disposées sur
c( deux rangs; elles ont des filets très courts, élargis
« à leur base, insérées par leur sommet subulé au
<( quart inférieur de la hauteur de la face interne du
« connectif; leurs anthères sont ovales-lancéolées-
« aiguës, extrorses, couvertes sur leur face externe
<c d'un duvet fin et serré. Les 6 étamines externes,
« plus grandes, sont opposées aux lobes de la corolle ;
« les 6 étamines internes, alternes avec les précé-
« dentés, sont entièrement recouvertes par elles
<c dans le bouton,
« L'ovaire, très petit, semble presque immergé
i4 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
a dans le réceptacle; il se compose de 6 loges. Gha-
(( CLine de ces loges contient un ovule court, incom-
« plètemenl anatrope, ascendant, à micropyle en bas
(c et en dehors. L'ovaire est surmonté d'un style gros,
(( court, cylindrique, à sommet obtus.
« Le fruit est charnu, réduit par avortement à
« une seule loge monosperme. La graine est ovoïde
(( et munie d'un tégument crustacé. »
Palaquium calophyllum Pierre
Syn. honandra calophylla T. et B.
— cJirfjsonotJia et costata de Yriese.
Dichopsis calophylla Benth. et Hook.
Arbre élevé, à rameaux jeunes couverts d'un duvet
iaune.
Feuilles pétiolées, coriaces, ovales-oblongues,
vertes à la l'ace supérieure, couvertes d'un duvet
jaune à la face inférieure; Hmbe terminé par un acu-
men court et obtus; lo à 12 nervures proéminentes
de chaque côté de la nervure principale.
Fleurs axillaires, fasciculées; |)é(loncules de 20
à 25 niilllnictres, grêles.
Galice ovoïde-campanulé à divisions ovales-ob-
tuses.
Tube de la coioUe aussi long que le calice, à lobes
ovales, aigus, plus longs que le tube.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES i5
Etamines 12, à filets égaux, grêles, glabres, aussi
longs que les lobes de la corolle ; anthères ovales,
atténuées mais non aiguës au sommet.
Ovaire globuleux pubescent surmonté d'un style
filiforme, plus long que les etamines et terminé par
un stigmate obtus.
Baie charnue, globuleuse, accompagnée par le
calice persistant, couverte de poils jaunes; son dia-
mètre est de 2 centimètres et demi et sa longueur
d'un pôle à l'autre de 2 centimètres; elle est donc
déprimée. Graine unique à hile très développé et à
tégument brillant.
Palaquium malaccense Pierrp:
Feuilles ellipti([ues ou oblongues pourvues d'un
pétiole assez long et terminées par un prolongement
obtus; le limbe possède 48 à 56 nervures secon-
daires.
Fleurs groupées par faisceaux de 2 à 6; briève-
ment pédonculées.
Calice à 6-7 sépales libres, atténués au sommet.
Corolle à 6-7 lobes arrondis, ciliés.
Etamines 12 à i/i à anthères elliptiques, poilues
en dehors.
Cette espèce a été trouvée dans la presqu'île de
Malacca près de Lahat-Perak. M. Pierre dit qu'elle
« donne une gutta de première qualité ».
i6 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Palaquium formosum Pierre
Ce Palaquium commun à Malacca se trouve aussi
à Sumatra dans les environs d'Assakan.
Il se distingue des précédents par le nombre des
nervures (48 à 5o), par le style cilié à la pointe et par
la graine munie d'un arille incomplet.
M. Pierre pense que la variété Siimatrana de Vlso-
nanclra giit.ta devrait être rapportée à cette espèce.
Palaquium princeps Pierre
Espèce de Bornéo.
Palaquium Borneense Burck
Arbre élevé ; rameaux jeunes couverts d'un duvet
roux.
Feuilles longuement pétiolées, subcoriaces, obo-
vales-elliptiques, vertes à la face supérieure et cou-
vertes à la face inférieure d'un duvet jaune; i5 à 20
nervures secondaires de chaque côté.
Fleurs axillaires en faisceaux comprenant i à 6
(leurs.
La longueur des fleurs est de 11 millimètres et
celle des pédoncules de 3 millimètres.
Galice ovoïde à lobes ovales-obtus.
Corolle à tube égal à la longueur du calice ; lobes
CONSIDÉBATIONS GÉXÉRALES 17
ovales-lancéolés, plus longs que le tube de la co-
rolle.
Etamines 12 en deux verticilles, à filets égaux,
grêles, égaux en longueur aux divisions de la corolle.
Anthères poilues, ovales, terminées en pointe au
sommet.
.Ovaire subglobuleux, pubescent ; style filiforme,
plus long que les etamines ; stigmate obtus.
Le fruit est une baie charnue, ovoïde, contenant
I, 2, 3 graines ellipsoïdes ou comprimées latérale-
ment et présentant un hile très développé.
Trouvé à Bornéo par Teysmann.
Palaquium Treubii Burck
Se dislingue par ses feuilles pourvues d'un pé-
tiole de 4 à 5 centimètres de long et dont le limbe
conticuit i3 à 16 nervures secondaires de chaque
côté de la nervure principale.
Cette espèce comporte une variété distincte : Pal.
Treubii var. pamifolium.
Se trouve à Banka.
D'après Bûrck, les seules espèces présentant un
véritable intérêt au point de vue industriel sont les
Pal. Gutta, oh long if 0 Hum j Bonieense et Treubii.
Le genre Palaquium comprend d'ailleurs un assez
grand nombre d'autres espèces et Biirck n'en énii-
mère pas moins de 38.
Lecomte. 2
ï8 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Toutes les espèces connues produisant de la
gutta-percha possèdent des feuilles couvertes à leur
face inférieure, au moins quand elles sont jeunes,
d'un duvet jaune de teinte plus ou moins foncée.
Nous ne fournirons pas même l'énumération des au-
tres espèces puisque leur utilisation paraît plus que
douteuse.
Payena Leerii BE>'Tn. et Hooker
Syn. Azaola Leeini T. et B.
Keratophorus Leerii Hassk.
CeratopJiorus Leerii Micj.
Feuilles ovales-oblongues, acuminées, un peu on-
duleuses sur les J)ords, coriaces, glal^res, mesurant
5-IO centimètres de long sur 2,5 à /| centimètres de
large ; pétiole grêle mesurant seulement 5 à 7 milli-
mètres de long.
Fascicules de fleurs au sommet des rameaux.
Lobes du calice arrondis, ayant 3 millimètres de
long.
Corolle à peu près di^w^ fois j)lus longue (|ue le
calice, pourvue de 8 lohcs mesurant chacun ,'> milli-
mètres de longueur.
Elamines 16 ; filets à peu près de même longueur
que les anthères, glabres.
Ovaire coni(jue, couvert de poils, 10-12 locuhure ;
style allongé, exserte.
C 0 XS I DEBAT 10 XS G E X Eli A LE S 19
Fruit charnu, conique, souvent un peu recourbé,
mesurant 3-''i centimètres de long, surmonté par une
pointe qui est le reste du style.
Une graine unique, allongée, mesurant i8 à 25
millimètres de long, à tégumentcoriace, brun pâle;
all^umen aljondant et corné ; cotylédons charnus,
cippliqués.
Se rencontre à Sumatra fTeysmann , à Banka
(Teysniann), k Fiornéo, îx Amboine, etc.
Le Pcujena Croixiana, décrit par Pierre, serait très
rapproché du précédent, dont il ne diffère que par
les léuilles un peu plus petites et possédant un moins
grand nombre de nervures secondaires ; par les
étamines qui ont le lilet un peu plus court et par
l'ovaire qui a 8 loges au lieu de lo ou 12.
IJIsonandra Benjamina créé par de Vriese paraît
aussi se rapprocher beaucoup du Paijena Leerii.
Le Pof/f'na Leerii est extrêmement répandu dans
les Indes Néerlandaises ; aussi lui connaît-on une
nudtitude de noms indigènes.
■Sjatoeh Balam Baringin ;
— ^^ aringin ;
— Soendai ;
— Pipis.
Sumatra. . . / Balam Tandjoeng ;
— Tjabée ;
— Tandoek ;
— Troenk ;
— Soute.
Bornéo. . . j Njatoeh Ka-malan ranas.
Banka.. . . 1 Koelan.
20
LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
La gutta qu'elle fournit est de bonne qualité ; elle
reste plus blanche que celle des Palaquiums, car le
lait s'écoulant abondamment des incisions pratiquées
dans l'écorce on en peut recueillir de grandes quan-
tités sans mélange avec des morceaux d'écorce,
ce qui n'est pas toujours le cas des arbres à Gutta.
Composition de diverses guttas provenant de Palaquium
Gutta et de PAYE^A (d'après Obach).
ORIGINE
GUTTA
RÉSINE
IMPU-
RETÉS
EAU
Getah Taban, provenant de Pal.
Gutta. Analyse de Ridicy
Getah Soondie , j)rovenant de
Payena Leerii. Analyse de Hugh
Low
00,7
/.3,o
I 1 , 0
32,0
0,2
5,1
l3.I
19,3
Le haut prix atteint par les lionnes guttas depuis
que la construction des cables sous-marins s'élend
de plus en plus a iiuilé à la iccherche des phuilcs
qui pourraient Tournir des produils analogues à la
gutta.
Nous venons de voir déjà que hi gutta livrée
acluellement au commei'ce est Ibuinie par des es-
pèces dillércntcs de celle qui était primitivement
exploitée et même par des arbres appartenant à des
genres diflerents [Pafjena). Tous les représenlanls
de la famille des Sapotacées ont été tour à tour Tobjet
de recherches dans le but d'en extraire de la gutta.
COXSIDÉBATIOXS GÉyÉRALES 21
De ce nombre il faut compter au premier rang le
Miimisops Balata Gaertn., commun à la Guyane, où
on le rencontre un peu partout dans les forets,
<lepuis la côte jusqu'aux régions les plus éloignées
(le la mer. Je Tai trouvé pour ma part dans les
bois qui avoisinent le pénitencier de Pariacabo, près
de Kourou. Geoffroy Fa sig-nalé aux Hattes, à Saint-
Laurent, et au village d'Apatou, dans la vallée du
Maroni, sur les rives de l'Awa, de Tltani, etc.
Mimusops Balata G-ERTN
Svn. Achras Balata Aublet ;
Luciuna mammom de Vriese;
Sapota Mullfri Blunie;
Mimusops hidentata D. G.
Le Mimusops Balata est un des beaux arbres qui
peuplent les forêts de la Guyane. Il peut atteindre
facilement 25 mètres de hauteur; son bois est très
recherché autant pour sa belle couleur rougeàtre
que pour la propriété qu'il possède de résister aux
attaques des insectes.
Les rameaux sont assez gros et couverts de lenti-
celles arrondies.
Feuilles oblongues-lancéoléesou elliptiques, acu-
minées ; le pétiole mesure 2 à 5 centimètres de
longueur; le limbe 10 à 22 centimètres de longueur
sur 4-IO centimètres de largeur et il présente 56
22 LES ABBRES A GUTTA-PERCIIA
à 64 nervures secondaires très fines. La face supé-
rieure du limbe est verte ; la face inférieure est bru-
nâtre avec des poils souvent agglutinés.
Fleurs fasciculées en groupes de lo à 20 avec
des pédicelles couverts de lenticelles linéaires.
Galice à 6 sépales ciliés à l'intérieur, longs de
5 à 6 nnllimètres.
Corolle aussi longue que le calice ou même plus
courte, glabre, à 6 ou 8 lobes réfléchis.
Étamines fertiles au nond^re de 6 ou 8 avec un filet
un peu dilaté à la base. Étamines stériles ligulées.
Ovaire et style glabres. Ovaire à 8-10 loges.
Le fruit est une baie ovoïde brune portant à sa
surface des sillons indiquant les séparalions entre les
graines.
Graines nombreuses, allongées, à albumen charnu
entourant deux cotviédons foliacés.
D'autres Mimiisops sont employés ou pourraient
être utilisés dans le même but:
Mimusops (jlobosa Gaertn. tlu Venezuela;
Mlmusops olata (massaranduba) du Brésil;
Mimusops Kunimcl Hochst, d'Abyssiiiie ;
Mimusops Schimperi llôchst, d'A])yssinie ;
Mimusops sp. (M'binio, sur toute la côte du Gabon
et M'/imou à Loaiigo).
Mimusops coriacea; Madagascar.
Mais il faut bien le dire, en dehors du Mimusops
Balata les produits fournis par les autres espèces
CONSIDÉRÂT 10. \ s GÉyÉRALES 28
(lu genre ne paraissent avoir qu'une valeur très mé-
diocre. Le produit que j'ai obtenu avec le M'bimo,
par exemple, ne possède que quelques caractères
communs avec la gutta-percha.
Le produit appelé Balata figurait déjà à Texposi-
tion universelle de i855 et sir W. Hooker en parle
daiis le rapport qu'il fut chargé de rédiger. Le
1)' Bleckrod, de l'Académie de Delft, ayant reçu de
Surinam le suc d'un arbre nommé Bolletrie (ou Bul-
lettree des Anglais) et dont le bois était appelé chair
de cheval, y constata la présence d'un produit ana-
logue à la gutta-percha et l'arbre l'ut décrit par
Blume sous le nom de Sapota Muileri, du nom de
J.-A. Millier, qui avait adressé les premiers échan-
lions à Bleckrod (i).
L'introduction de la Balata en Europe ne date
donc pas, comme on le répète souvent à tort,
d'après Bernardin, de l'envoi fait en 1860 à MM. Sil-
ver et G'*" de Londres, par le f)*" ^lelville, de Ber-
bice. La Balata était connue en France au moins
cinq ans auparavant, et au mois de novembre 1809,
un industriel parisien, après avoir fait l'analyse
des échantillons déposés à l'Exposition permanente
des colonies, sollicitait du ministère de l'Algérie et
des Colonies la récolte gratuite de la Balata dans tou-
tes les forêts de la Guyane dépendant de l'État (2). Mal-
(i) Bleckrod. Notice sur la gutta-perctia de Surinam. Ann. se. nat.,
série IV, tome VII, page 220 et suiv.
(2) Archives de l'exp. permanente des colonies.
2h
LES ARBRES A OUTTA-PERCHA
heureusement, comme nous le verrons plus loin,
malgré rabonclance des M. Balata clans les forêts de
la Guyane, l'exploitation en est aujourd'hui à peu
près abandonnée dans notre colonie. On vend seule-
ment à Gayenne quelques objets, et entre autre des
cravaches fabriquées par les libérés, avec le suc de
Balata.
Des analyses effectuées par divers chimistes an-
glais et hollandais, ont montré que la Balata a la
composition suivante (Obach) :
ORIGINE
Guyane anglaise.
Id.
mnnam.
GUTTA
3l , I
53,/,
43,5
R KSI NE
27,0
39,8
30,9
IMPU-
RETÉS
^3
4
5,3
i4,3
EAU
37,6
3,5
5.3
Ges analyses ont élé effecUiées, la ju-emière par
Jackson de Ivew, la deuxième par Ilowell Jones
de Londres et la troisième \rAv V . ^^^ Van Eedeii de
[laarhMii.
On peut récolter (Tailleuis à hi Guyane le latex
d'autres arbres et le nudanger à celui du M'nuusops
Balata \ nous citerons: Phuneria art'ualata \'ahl ; Ba-
gasm gui/anpnsis Au])l. ; Ferolia (/uj/anrnsis Aul)l. ;
Coama guijanensis Aubl. ; etc.
A cette longue listi^ nous ajouterons :
Bufi/roupermiim Parhii G. ])on. []'itel/a ria paradoxa
Gaertn.) = Biitf/r. nlloticani Kotschv ==: Bassia Parlai
COXSIDÉRATIONS GÉNÉRALES 25
Don) des régions tropicales crAfrique où il est dési-
gné sous les noms de Karité, Ce et Ghi. D'après
MM. Heckel et Schlagdenhauffen, le produit obtenu
avec le latex de cet arbre serait très voisin de la
gutta (i). Mais les essais n'ont été faits jusqu'à ce jour
que sur de très petites quantités et il n'est pas encore
possible de se prononcer d'une façon certaine sur la
valeur industrielle de ce produit.
Sapota Ac liras ^l\\\ [=Achras Sapota L.) ou Sapo-
tillier.
Achras australis^ du Ouensland.
honandra acuminata Miq. ou Bassia elliptica Dal-
zell, découvert en i85o dans l'Inde ; connu dans les
forêts de Malal^ar, du Goorg, de Travancore, etc. (2).
Imbricaria coriacea L. ;
Sideroxylon ;
OmpJialocarpum.
Luc lima cjigantea; L. fissilis ; L. lasiocarpa^ L. pro-
cera, du Brésil.
ChrysopJiyllum ramiflorum Brésil.
— africaniim D. G. d'Afrique.
Bassia longifolia Roxl)g. et
-s- latifolia Roxbg. de l'Inde.
Bassia Mode y ana Glarke, de Malaccaet de Bornéo.
Mais on a cherché aussi à employer les latex de
(i) La Nature, 1897. G. Rendus i885.
(2) Kew Reports, 1881, p. 44-
26 LES ARBRES A GU TTA-P ERCII A
plantes appartenant à d'autres familles et qui donnent
par la coagulation de leur latex des produits durs
dans lesquels on a voulu voir des succédanés de la
gutta, mais qui sont généralement inutilisables.
Famille des Ascléplvdées :
Calotropis procera R. Br. de l'Inde et du Sénégal;
Calotropis gigantea et un Cynanchum.
Famille des Apocynées :
Ahtonia scholaris R. Br. de l'Inde (i).
Famille des Euphorbiacées :
Euphorbla TirucaUi L. de TAfiique orientale.
Tous les voyageurs qui ont pris la peine de pro-
voquer la coagulation des latex fournis dans les forets
tropicales par une multitude d'arl)res ou de lianes de
diverses familles ont constaté que certains produits
obtenus se rapprochent beaucoup, du moins par
Faspcct général et j)ai'la consistance, des guttas pro-
venant desPalaquium ; malheureusement, cespseudo-
guttas ne sont autre chose, le plus souvent, que des
caoutchoucs plus ou moins résineux. Pour ma part,
(i) J'ai moi-même expérimenté le latex de cette plante sans succès.
D'autre part j'ai reçu le produit coagulé de M. Chalot. directeur du Jardin
<lc Libeville ; je ne crois pas qu'il puisse être employé utilement dans
l'industrie, au moins tel qu'on l'obtient aujourd'hui.
COXSIDERATIOXS GENERALES 27
j'ai obtenu, au Congo, des produits qui avaient les
caractères très nets de certaines guttas. De nombreux
voyageurs ont eu Toccasion défaire des constatations
identiques ; mais tant que des études suivies, tant
que des essais d'ordre industriel n'interviennent pas
il est sage de montrer la plus grande circonspection,
car juger un produit sur les apparences c'est se pré-
parer de cruelles désillusions.
Il est surtout dangereux de donner à de tels ré-
sultats une certaine publicité. 11 nous souvient par
exemple d'avoir lu au Journal officiel des extraits
étendus d'un rapport circonstancié sur la découverte
d'une nouvelle plante à gutta-perclia dans une de nos
colonies d'Afrique (i). Ce rapport spécial qui a été
cité dans diverses publications ou dans des rapports
ultérieurs contenait diverses indications sur lagutta-
percha empruntées à un ouvrage important de M. de
Lanessan, mais les soi-disant observations que l'au-
teur du rapport avait cru devoir y ajouter ne consti-
tuaient qu'un tissu d'erreurs grossières et sans la
moindre valeur. On reconnaîtra avec nous qu'il est
l^ien regrettable de voir accorder l'honneur d'une
publication officielle à des travaux ne méritant aucun
crédit, car c'est leur attribuer une importance qui
peut avoir pour l'avenir des conséquences fâcheuses.
(i) Journal officiel à\\ 1 4 septembre 1896, p. 5171
RECOLTE
Malheureusement , les hommes occupés à la
récolte du latex et à sa manipulation pratiquent
presque toujours des mélanges très préjudiciables
à la qualité du produit définitif. Si encore ils secon-
tentaient de faire entrer dans ces mélanges des latex
fournis par diverses espèces de Palaquium,\^ mal ne
serait pas très grand ; mais ils utilisent tous les latex
([u'ils peuvent trouver à leur disposition et ils ob-
tiennent ainsi des guttas qui sont non seulement de
cjualité très médiocre, mais encore qui présentent
d'un point à l'autre d'un même lot des différences
très appréciables, (^e (|ui constitue wnç", grande dif-
licHilté pour l'utilisation ultérieure. De |)lus, ces
produits peuvent bien posséder h^ j)ouvoir isolant
qu'on réclame de la gutta-percha pour la fabrication
des câbles, mais ils se travaill(Mit plus diiïicilement
(jue la l)onne gutta et se détériorent très vite.
D'ailleurs, dans les entrepôts de Singapour, on
pi'ali(|ue sui" une vaste échelle ces mêmes mélanges
et il serait ])resque toujours très diOicile d'assigner
RECOLTE 2<j
une origine botanique certaine aux guttas actuelle-
ment livrées au commerce.
A Sumatra, l'exploitation entraîne toujours l'abat-
tage de Tarbre ; les indigènes récolteurs de gutta,
quand ils ont découvert un arbre producteur de
gutta — : et pour cela ils n'ont pas même besoin de voir
le leuillao-e, l'examen du tronc et de Técorce leur
sufïit — ils abattent cet arbre en se servant de haches
de diverses formes et quand il est à terre, ils font
sur l'écorce, à des distances variant de o°',3o à o^'jôo,
des incisions annulaires dans lesquelles s'accumule
le latex.
Dans ces conditions, on le comprend facilement,
il se perd une grande quantité de latex qui tombe à
terre ; de plus celui qui reste dans les incisions est
toujours mélangé à des morceaux d'écorce. Bien
mieux, en certaines régions, pour empêcher la perte
du latex le récolteur déchire avec la hache les bords
de l'incision et détache ainsi de nombreux petits frag-
ments d'écorce qui se mélangent au latex, l'empâtant
et l'empêchant de s'écouler.
(( Les chercheurs de gutta qui viennent d'exploiter
un arbre dans les forêts et qui se sont procurés une
certaine quantité de son produit n'en ont point assez
pour la vendre à profit. Ils se mettent en route pour
trouver un autre pied qui leur donnera une gutta de
même qualité, et comme généralement ils ne le trou-
vent pas assez vite, à cause de l'exploitation des-
tructive pratiquée depuis longtemps, ils s'adressent.
3o LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
pour ne pas perdre de temps, au premier arbre à
gutta qu'ils rencontrent, jusqu'à ce qu'ils aient obtenu
une quantité suffisante. Revenus dans leurs villages
ils ont en main diverses sortes de guttas ; mais de
chaque sorte une trop petite quantité pour pouvoir la
vendre; c'est alors qu'ils se livrent à ce mélange
dont nous avons parlé plus haut. Ils savent bien eux-
mêmes que si l'opération du mélange ne réussit pas
à souhait ils ne pourront stipuler qu'un prix peu
élevé, beaucoup j^lus bas que celui qu'ils seraient en
droit d'exiger si la gutta était sans mélange. Mais pour
eux l'affaire est d'écouler le produit aussi vite que
possible. Ne faut-il pas qu'ils vivent et, pour vivre,
comment attendraient-ils qu'ils aient séparément des
gantans àc chaque sorte de gutta-percha ? (i)
Le latex épaissi et mélangé de fragments d'écorce
est jeté dans un pot rempli d'eau chaude ; la gutta se
ramollit ; on la pétrit à la main et on enlève générale-
ment les plus gros fragments de bois ou d'écorce.
(]ctle opération peut être pratiquée une seule fois
seulement ou au contraire répétée plusieurs fois:
C'est ce qui expli(|ue Taspect feuilleté des pains;
c'est aussi ce qui pi'oduit leur coloration car les
matières colorantes contenues dans les écorces se
mélangent intimement à la masse.
Burck évalue à 200 grammes la quantité de gutta
complètement épurée que peut fournir un Palaquium
(i) W. BuucK. Loc. cit., p. 78.
RÉCOLTE 3i
oblongifolium de 20 mètres de hauteur et de o°',6o de
circonférence à hauteur d'homme.
Serullaz dit qu'un arbre de 3o ans peut fournir
'j5o à 260 grammes de gutta.
Il faut ajouter d'ailleurs que les indigènes saignent
larement des arbres aussi jeunes et que les quantités
réellement obtenues sont toujours plus considérables.
Il serait évidemment bien préférable de saigner
l'arbre sur pied, sans l'abattre. Les expériences que
Burck a entreprises à ce sujet montrent bien que
cette opération serait sans danger, au moins si elle
était pratiquée avec un peu de soin.
Les renseignements que nous possédons actuelle-
ment sur la production et sur la récolte de la gutta-
percha à Bornéo ne sont ni assez précis, ni assez com-
parables aux données précédentes pour qu'il paraisse
utile de s'v arrêter.
Pour ce qui concerne la récolte et la coagulation
du latex de Balata on est beaucoup mieux renseigné.
Au Venezuela et dans la Guyane hollandaise (le
long des rivières Corantyn, Nickerie et Coppename),
des collecteurs peu scrupuleux abattent les arbres
pour en extraire le plus de latex possible. Quand les
arbres sont ainsi abattus et maintenus à une certaine
hauteur sur des traverses, on fait des incisions circu-
laires de 0^^,30 en o°',3o environ et le latex s'écoule
dans des récipients placés au-dessous. On emploie
même des presses portatives pour exprimer l'écorce
détachée de l'arbre et en retirer tout le contenu.
32 LES ARBBES A GUTTA-PERCHA
Dans la Guyane anglaise (aux environs de Berbice,
dans les bas-fonds de Swampey Ganje), on se contente
de saigner méthodiquement les arbres sans les
abattre. D'après M. Th. Rousseau, le meilleur moyen
consisterait à enlever et à laisser alternativement des
rectangles d'écorce égaux en surface et de presser
ensuite l'écorce détachée pour en exprimer tout le
latex qu'elle renferme (i). M. Hayes, agent général
des cultures de l'Administration pénitentiaire, pense
que pour exploiter la balata sans amener la des-
truction des arbres, il faudrait soumettre ceux-ci au
rjemmage à temps, c'est-à-dire ne les saigner que sur
un tiers de la circonférence tous les 5 ans. Cet
aorent recommande d'enlever d'abord les mousses
qui recouvrent l'écorce, puis de pratiquer une entaille
dirigée verlicalement. Sur cette entaille, qui sert de
collecteur viennent aboutir d'autres entailles dirigées
oblicpiement de haut en bas et espacées de o'",3o
à o^'jSô les unes des autres environ. Au bas de l'in-
cision verticale un récipient est disposé pour recevoir
le latex.
On se contente souvent de praticjuer des incisions
oblicpies sans collecteur vertical ; le latex coule alors
à la surface de l'écorce et on le recueille comme il
est dil |)lus hanl.
(^)uant à la coagulation elle se fait dans des jjacs
(i) Lecomte (II.) I-a Balala ù la Guyane française. Revue colo-
niale, juin i8g5, p. 'i~3.
RÉCOLTE S.'î
assez larges mais peu profonds (au plus o"",!©) où on
verse le latex. Celui-ci se coagule spontanément à la
surface et forme une croûte qu'on enlève pour per-
mettre une nouvelle coagulation. Les plaques ainsi
obtenues sont mises à sécher — comme du linge —
sur des cordes tendues à cet effet. Les expériences
que nous avons effectuées nous ont donné environ
3o pour loo de balata sèche sur des latex venant de la
Guyane. Il est clair que ces résultats sont suscepti-
bles de varier dans d'assez larges limites suivant la
richesse du latex en eau et par conséquent suivant
les saisons (Geoffroy, 44 pour loo ; Bleckrod, 1^,28
pour 100).
Un règlement adopté par le Conseil génér;d de la
Guyane française et qui a été rendu exécutoire par
arrêté du Gouverneur de la Colonie en date du 18 jan-
vier 1896 a réglementé le régime des concessions
pour éviter la destruction des arljres à Ijalata.
Extraction des feuilles. — Quand on déchire déli-
catement le limbe d'une feuille fraîche ou même
sèche d'un Palacjuium fournissant de la gutta utili-
sable on voit de nombreux filaments de ouita réunis-
sant les deux lèvres de la déchirure. L'observation
microscopique montre d'ailleurs de nombreux latici-
fères parcourant les tissus de la feuille. Il était donc
tout naturel de penser à retirer la gutta des feuilles.
En mars 1892, Dieudonné Rigole (i) proposait
(i) Engl. Pat. Spec. Mars 1892.
Lecomte.
3^1
LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
'?, "S
d'employer à cet usage le sulfure de carbone pour
le traitement des feuilles.
Presque au même moment MM. Jungfleisch et
Serullas indiquaient un autre procédé et en réalité il
n'est pas possible de leur refuser
la paternité de cette méthode car
si la communication de M. Jung-
fleisch à la Société d'Encourage-
ment date du lo juin 1892, deux
mois auparavant, M. Serullas, dans
une communication antérieure,
avait fait allusion à cette méthode
nouvelle et bien longtemps avant,
MM. Jungfleisch cl Serullas
avaient dressé un programme
(féludes. Le dissolvant le plus
facilement utilisable leur a paru
être le toluène. « Il dissout simul-
tanément, sans les altérer, les
trois composants essentiels de la
gutla-percha ; il est très facile à
séparer du produit dissous; il est
très maniable* sans grandes pertes
quand on le met en œuvre dans
des appareils a))propi'i('*s : il est |)ar suite écono-
mie] ue (1). »
FiG. 3.
(i) .luNCFLEiscii. /.'i i>rod action de la gutta-prrcha, communica-
lloii il la Soc. (rcncouriigfMiiciil . lo juin 189'i.
RECOLTE 35
« Le débris végétal est pulvérisé assez finement,
puis mis en suspension dans le toluène ; la bouillie
fluide ainsi obtenue est mise en digestion au bain-ma-
rie pendant quekjue temps. La gutta se dissout dans le
toluène avec une certaine lenteur; sa dissolution est
facilitée par des agilalions rapides et par des chauf-
fages intermittents au bain-marie. » On fdtre ensuite
et on épuise. 11 s'agil alors de se débarrasser du
dissolvant; celui-ci boul à 110° et ii ne serait pas
possible de porter la gulta à cette température sans
la détériorer. Aussi M. Jungfleisch s'est-il servi de
la vapeur (Leau à too" (\u[[ fait j^asser dans la solu-
lioii clIc-méme inainteiuie à cette température. La
vapeiii- d eau enlraîiie lapidement le toluène. Actuel-
leinenl M. .luiigfleisch |)i(''cipite la gutta parTacétone.
Les résultats sont i-emar(|ual)les. ^^)ici les chifTi'es
in(li(|u<''s par M. .lungnciscli :
Le vieux bois sec a fourni. . . q iT) à 10. '1 5 p. 100 de gutta;
Les bourgeons secs ont fourni. 10,20 —
Les feuilles scclies ont fourni. . 9,06 à 10,02 —
On peut donc comj)ter sur un rendement de 9 à
10 pour 100. D'après Serullas un arbre de 00 ans
j)eut donner 11 kilogrammes de feuilles sèches, ce
qui porte le rendement à 1,000 ou 1,100 grammes de
gutta, « alors que 1 arbre abattu en donne à peine
1265 grammes )>.
En 1897 le P' liamsay a proposé d'employer Lhuile
de résine comme dissolvant et de précipiter le pi'o-
duit par Lacétone.
56 LES ARBBES A GUTTA-PERCHA
Enfin M. Obach a lui-même indiqué un procédé
de dissolution par l'essence de pétrole bouillante et
la précipitation de la gutta par relVoidissement à I5^
Ce procédé a été ensuite modifié et un brevet a été
pris à cet effet par MM. Siemens et Obach pour
l'emploi de divers dissolvants, comme la benzoline.
Ces procédés, tout intéressants qu'ils soient, ne
peuvent entrer actuellement dans la pratique cou-
lante et ceux-là seuls qui n'ont jamais eu Tocca-
sion de parcourir une foret tropicale peuvent s'en
étonner.
Comment ])ourrait-on, en effet, recueillir les
feuilles ou les rameaux des arl)res à gutta dans la
forêt vierge quand les essences les [)lus diverses se
trouvent mêlées d'une façon inextrical)le ? Il est clair
(|ue cette récolte ne i)ourra se faire facilement et
(|ue par conséquent les procédés d'extraction que
nous venons de décrire ne |)ourront être mis en
(cuvre cpie si on ciM''e des forêls din lues à gutta ; alors
seulement la récollt^ des reuilles c[ des branches
sèches deviendra possible. A ce j)oint dr. vue il est
donc désirable (pi'on organise do vastes plantations
(Tarbres à gutia dans les régions tropicales.
T^a structure même et la disposition des laticifèies
(hins les plantes de la famille des Sapotacées ex-
|)li(pient amplement ce fait (pion obtient de très
laibh^s récoltes d'arbres de très grande taille et jus-
tifient rem|)loi de la méthode nouvelle crextraclion
par les feuilles.
liÉCOLTE 37
En elïel les rlucles d'Œsterlc (i), de Gliiiiiaiii (2)
ot d'autres ])olanisles sur les lalieilères des Sapola-
<:écs ont mon tic (|ue ees laticilères n'existent pas
seulement dans lécorec de la tige ; mais encore dans
la moelle et (ju ils se prolongent jusque dans les
feuilles où ils suivent nt)n seulement les nei'vui'es
mais se répantlent aussi dans le parenehymc.
De plus ces latic ifères ne consliluent pas des luhes
continus (3) comme ceux des Euphorbiacées et des
Apo( ynéesmaisdes filesde cellules contenant chacune
<lu lalexet séparées par des cloisons; en un mol on a
allai re ici à des lolkifi'rcis (irtirulés. Cette circonstance
l'ail (ju'iuie section de Técorcc ne laiss(^ échappCT que
le latex des tissus directement situés au voisinage de
la lésion tandis cpTil s'en échapj)e une grande quan-
tité j)ar les incisions dun Hprcd , ^\\\\\ Manilwl ou d'un
Landolphia. La méthode préconisée jusqu'ici, par des
incisions deTécorce, n'est donc pas juslitiable en théo-
rie et en réalité dans la j^raticpic elle ne donne que
des résultats médiocres.
(i) OEsterle. O. l^harmakogn. Stûdieii ul)er Gulta-pcrctia. Borne,
1893.
(2) Chimani. Uulcrsucliungcn lil^er Ban und Anonliiung dcr Mil-
chroliren. Botan. Centraliilatt, iSgô.
(3) A 1 encontre de ce qu'avance Œslcrlé, loc. cit.
LA PRODUCTION ET LE COMMERCE
DES GUTTAS
Presque toutes les guttas si on excepte la Balata
exploitée en Guyane sont expédiées à Singapore qui
est le marché le plus ancien et de beaucoup le plus
important. 11 n'est j)eut-etre pas inutile par conséquent
de montrer quelle a été, pour cet entrepôt spécial^
la marche des expoj'tations.
QUA>TITÉS DE GUTTA-PERCIIA BRUTE EXPORTEES
DE SINGAPORE DE l8/|4 A 1 8()(j
D'après Sfraits Settlements Govprnwenf Gazette.
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12.5O2 (wls
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30,4 10 cnts.
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17,454
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4o,4ii
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1877
3o, i54
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3o,388
1878
32,817
1888
28,164
1879
66,558
1889
60,933
1880
60,391
1890
89,035
I88I
.73,870
1891
63,327
1882
77,059
1892
49,701
i883
71,098
1893
44,907
520, 330 CAA
ts
470,526 cwts
Comme ou le voil parce tal)leau, el pi iiicipalemeiiL
si on tient compte des moyennes décennales, les
exportations suivent très nettement une marche
Quantités de Gutta-percha. brute
importées en Angleterre
Quantités de Gutta- percha-brute
exportées de Singapore
IS^t*- - '996
Si-'fci
Années
FiG. 3."
croissante malgré la destruction (|ue les récolteurs
font journellement des arbres à gutta ; l'explication
de cette anomalie se trouverait probablement dans ce
fait qu'on fabrique actuellement de la gutta non
seulement avec le lait des meilleurs arbres, mais
encore qu'on y mélange celui d'un grand nombre
•d'autres végétaux.
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Ce tableau tiré de Straits Settlements Government
(razette montre très nettement que si les exportations
totales de Singapore sont plutôt en décroissance, les
importations en France et en Allemagne ont pris dans
ces demi ères année s une valeur de pi us en plu s grande.
QUANTITÉS ET VVLELU DE LA GUTTA BRUTE IMPORTEE
A SINGAPORE AVEC EA PROVENANCE (d'aPRÈS UBACIi)
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Malacca. .
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Labuaii. .
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Le diagramme suivant indique encore mieux que
ce tableau rorioine de la outta vendue sur le marché
de Singapore et les variations de la production dans
ces diverses contrées.
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LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
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pnoDVCTi()\ ET Commerce des clttas
FLUCTUATIONS DU PRIX DE LA LIVRE DE GUTTA-PERCHA
SUR LE MARCHÉ DE SINGAPORE DE 1889 A 1897
(Tiré de Singapore MarJcets Reports).
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Ce tableau est très instructif car il montre quelle
énorme dillcience de prix sépare les guttas de bonne
qualité de celles qui ont seulement une* ((ualité mé-
diocre. Il serait donc diCficile de se l'aire une idée
exacte de la valeur de la gutta-percha en prenant une
moyenne des prix de vente de l'année. Les guttas
médiocres étant recherchées pour un grand nombre
d'usages entrent pour une part considérable dans les
importations européennes ; leur prix de vente tend à
s'abaisser. Au contraire les meilleures guttas, comme
le Pahang, maintiennent leur prix.
Le prix de vente du Pahang à Singapore pour 1S97
ressort comme on le voit ci-dessus à 45'', 66 la livre
anglaise, soit [\ fr. 76 la livre anglaise, ou 10 fr. ^-
le kilogramme.
Vi lES ARBRES A GITTA-PERCIIA
Nous iravons pas besoin d'ajouter que les chiffres
ci-dessus représentant les prix de vente sur le
marché de Singapore sont bien au-dessous des prix
de vente en Europe.
Ce qui manque surtout à l'industrie actuellement
ce n'est pas précisément la gutta, car elle arrive
encore en assez grande quantité ; mais elle se trouve
à peu près toujours en mélange et les bonnes sortes
pures se font de plus en plus rares. Or ce sont ces
dernières qui sont surtout rechercliées et qui attein-
dront un jour des prix de vente très élevés; c'est
])ourquoi on a pensé à entreprendre la culture
rationnelle d(*s abres à gutta. Les Hollandais surtout
nous ont j)récédés dans cette voie, comme on va le
voir par l'expose'' succinct dc^s essais tentés jusqu'à
cv jour.
La gutta de lîalata est exploitée à la (luyane an-
glaise (i) et à la (iuyane hollandaise et ces deux colo-
nies, connue on pouiia le voii- pai- les cliiUres qu(^
nous fournissons, en livrent des quant itc's assez con-
sidéi'aJjU^s. ()uant à la Guyane française, malgré ta
présence des I ransport(''s dont on poui-iait et dont on
devrait tirer un travail utile, (die n'expoi'te pas de
iialata. Un tiou\e seuleuKMit à (Mayenne quelcpies
objets fal>riqués à Toide de cette substance par d'an-
ciens traiispoi'lés vagabondant dans les bois.
(i) Je>m\n>. lialala aiid llic 13alala Induslrv. 188.").
PRODUCTIOX ET COMMERCE DES C UT TA S
EXPORTATIONS DE BAL AT A DE LA GUYANE ANGLAISE (l)
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1894-90
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1895- 96
73 -
Pour CCS i5 dernières années les prix payés à
Londres ont oscillé entre i sh. i d. et 2 sh. 6 d. la
livre avec une moyenne de i sh. 10 deniers la livre
ce qui représente environ 5 fiancs le kilogramme.
Les exportations de la Guyane hollandaise sont à
[)eu près équivalentes à celles de la Guyane anglaise.
D'après les rapports du Consul anglais à Paramaribo
(dles ont atteint les chiffres suivants :
EXPORTATIONS DE BAL AT A DE LA GUYANE HOLLANDAISE
1889 1,5 tonnes 1893 32 tonnes
1890 7O — 1894 107 —
1891 95 — 1890 i33 —
1892 120 189G 125 —
Comme on le voit ces exportations ne sont pas
très considérables ; mais elles dénotent, du moins,
dans les colonies anglaises et hollandaises, une
certaine activité (pii [)arait manquer dans notre
Guyane.
(i) Foreign office Mlscellan., n^ 4o6.
Z,G LES ARBRES A Gl TTA-PEBCIIA
ESSAIS DE CULTURE DES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Depuis qiron a reconnu les précieuses propriétés
de la gutta-percha et qu'on a vu ce produit acquérir
sur les marchés européens un prix de vente de plus
en plus élevé, on a eu Tidée d'assurer par la culture
rationnelle les récoltes de l'avenir rendues très
projjlénîatiques par la destruction barbare que les
récoltevrrs font des aibres à gutta.
Il n'est guère j)ossible de considérer sérieuse-
ment comme \\\\ ess;ii de culture l'inlroduction de
quelques plaiils de gulta au Jaidin royal de Kew
en 1847. Ces plants reçus de Singapoore pai-
MM. Wilkinson el Jcwesbury, de Londres, avaient
été confiés à llooker, (jui les avait accueillis avec
reconnaissance pour le Jaidiii de Kew.
Dès i848 d(*s tentatives sérieuses dc^ culture
étaient faites dans l'ib^ de Siiigapoui-e et on n y éta-
blissait jKis moins d(^ - phinlations du(^s à Tinitiative
de trois hommes dont les noms sont indissoluble-
nu;nl liés à riiisloirc de la gutta-peiciia : Oxley,
^tontgomerv cl d'Almeida. Mais peu à |)eu les Chi-
nois, lassés (res(M)in|)tei- un icMidement qui se faisait
trop allcndic a leur gi'é, (U't iiiisiicnt ces cultures
précieuses pour les reinplaciM- par d'autres j)lus ré-
jnunératrices. La plantation du D' Oxley ne compre-
nait g'uère, paraîl-il . (|ue des arbres à gulla de la meil-
leure sorte, provenant tous de la foret de Hukit f imah.
PRODUCTION ET COMMERCE DES GUTTAS A7
tandis que les autres plantations étaient surtout
constituées par des arbres appartenant au genre
F ici/ s.
La plantation de Sir José d'Ahneida, établie à Sé-
rangong, comptait plus de 4,ooo arbres. En 1888, il
n'en subsistait plus que quelques-uns; encore se
trouvaient-ils en tiès mauvais état et le latex de
<'eux qui suljsistent actuellement dans le nord de
1 lie n'est guère employé que pour falsifier ropium
Straits Tinifs, ]^u'\\\ 1892;.
Au Jardin botanique de Buitenzorg, dont les Hol-
landais ont fait depuis quekjues dizaines d'années
lin établissement scientifique de premier ordre,
unique dans les régions trcjpicales, on recevait, dès
18^7, de Singapour, un certain nombre déjeunes plants
d arbres à gutta ; mais, soit que le terrain ait été
mal chosi, soit que les soins de cullure n'aient
pas été sulfisants, il restait à peine au l)out de 2 ans
la moitié des Palaquiuin mis en terre. Un certain
nombre de ces arbres ont résisté aux diverses cau-
ses de destruction et, en 1880, deux d'entre eux
produisaient des fruits et desgraines en abondance.
Au mois de février de Tannée suivante i5o jeunes
plants, provenant de ces graines, transplantés dans
le Kultur Tuim de Tjikeumeuh S'Lands Platentuin
te Buitenzorg, Batavia 1892 p.p. 44-^ à ^^^^.
En i856 le Jardin botanique de Buitenzorg rece-
vait aussi 2,000 jeunes plants de Niato balam temboja
provenant de la côte ouest de Bornéo et le directeur
^8 LES ARBRES A G UT TA-P ERC JIA
du Jardin, J.-E. Teysmann, les faisait placer en 3 sta-
tions différentes de l'île de Java. Deux de ces planta-
tions disparurent ; celle de Puwokarta fut aussi dé-
truite en partie ; mais 80 arbres environ purent
résister, atteignirent leur taille adulte et les arbres
vigoureux qu'ils sont devenus pioduisent régulière-
ment des graines depuis i883. Ces graines sont
soigneusement recueillies (S'Lands Plantentuin te
Buitenzorg, Batavia, 1898, p. 36, 106, 170 et 180).
En 1884 l'établissement de Buitenzorg recevait un
certain nombre de plants bien authentiques de Pala-
quiimi et de Payena en bon état qui furent utilisés
pour l'organisation d'une plantation à Tjikeumeuh.
Les principales espèces étaient :
Palaquiuin oblongifolium (rapporté de Padang par
le D"^ Burck) ;
Pal. Giitta;
Pal. Treubii;
Pal. Bornernse ;
Paijena Leeri.
Le gouvernement hollandais est allé plus loin. I']ii
i885 il a fait établir an jardin d'expérience spéciale-
ment réservé aux arljres à gulla, à Tjipeter, dans la
])rovince de Preanger. On y a piaulé les mêmes ar-
bres qu'à Tjikeumeuli et la plantation parait avoir
donné d excellents résultats car, cin([ ans plus tard,
le I)"^ Eug.-F.-A. Obach a pu en prendre des photo-
graphies. Les j(Mines Pai/rna Lceri sont abrités par
des Albizzia moluccaiia plantés en même temps.
PfiODUCTIOX ET COMMERCE DES GUTTAS Vj
De renseignements fournis au 1)'' Eug. Obach par
le directeur du Musée colonial de Haarlem, il résulte
que,' dès i885, ces arbres ont produit une récolte
abondante de graines qui ont été utilisées pour des
semis et ont ainsi permis d'étendre les cultures. On
a même pu saigner les arbres et Obach a reçu des
échantillons de la gutta oljtenue.
A titre de renseignement, on peut encore citer,
pour les colonies anglaises, quelques plants d'arbres
à gnlta phicés dans les jardins botaniques de Pera-
deiiiya et de Henaratgoda à Ceylan. Ces plants prove-
naient de graines rapportées de Perack par Sir llug]i
Lowen en 1882 et représentaient Taibre productem*
duGetah taban pufeJi (probablement Dichopsis poltjan-
//^/Bentli) et (piekpies arl)res producteurs de Gctah
sundek \Paf/ena LpeniBvwiik).
^I. Seligmann-Lui (i), envoyé par le gouvcu-nc-
ment à Sumatra [)our y trouver des arbres à gutta
et pour en tenter l'importation en Indo-Chine, re-
commandai! de faire une tentative dans notre colonie,
tout en indiquant qu'elle pourrait très bien ne pas
donner de bons résultats, en raison de la natiii'c
même du climat.
M. Seligmann-Lui indique comme pouvant être
choisies pour Tétalilissement de ces cultures les
montagnes de Kamchay et leur prolongement vers
(i) Séligman.n-Lui. Rapport à M. le Ministre des postes et télé-
graplies sur les origines de la gutta-pcrcha. Paris, i883.
Lecomte. 4
5o LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
les montagnes de Cardamome. D'après des indica-
tions qu'il a recueillies, on pourrait aussi établir des
plantations d'arbres à gutta dans « le pays qui s'étend
depuis Baria et Bien-Hoa, vers les sources du Donnai
au nord, et à l'est vers les montagnes du Binh-Thuan
et du Tsiampa ». Malheureusement la température
y est assez fraîche pendant la nuit et la matinée ; c'est
peut-être là le danger le plus grand à redouter. Les
pluies y sont abondantes; la végétation se rapproche
de celle de Sumatra. M. Seligmann conseillait d'y
introduire le Mayang-Derian, le Batou et leSundek,
dont on peut se procurer des plants à Sumatra.
(( Quels que soient les soins apportés à la recherche
des meilleurs terrains de culture, toute entreprise d'ac-
climatation en Cochinchine renferme en elle-même
un élément aléatoire, et l'on ne saurait répondre de
la réussite. Au contraire, le hasard serait supprimé,
le succès deviendrait certain, si on pouvait créer un
établissement dans un pays de production actuelle,
où la présence spontanée des arbres à gutta est la
plus sure preuve qu'ils y peuvent [)rospérer (i). »
En raison des diflicultés ([ue présenterait la créa-
tion d'un étal)lisseinent dans les possessions néer-
landaises ^1. Seligmann préconisait la cote orientale
de la prescju'ile de Malacca et en particulier l'Etat
de Pahang qui lournit déjà « ce qu'il y a de meilleur
et de plus recherché dans le commerce ».
(i) Séligman.n-Lui, lor. cit.
PRODUCTION ET COMMERCE DES GUTTAS 5i
^lallieureusement les indications fournies par
!M. Seligmann-Lui ne furent point utilisées et la
question resta au point où elle se trouvait aupara-
vant.
D'un autre côté, M. Crozat de Fleury avait été
frappé de certaines analogies entre le Cambodge et
les îles de la ^lalaisie oîi se trouvent les arbres à
gutta ; il recommandait d'afiPecter à ces cultures la
région du Cambodge (pii s'étend entre le canal de
Ilatien jusqu'à la province de Rattambang et oii on
rencontre à peu près la même végétation qu'à Java.
En 1886 une nouvelle mission fut confiée à ^I. Serul-
las qui fut arrêté par la maladie dans son premier
voyage ; mais Tannée suivante (1887) il réussissait à
pénétrer dans les forêts de l'Etat de Perak et il rame-
menait à Singapoui- une certaine quantité de jeunes
arbres trouvés dans la forêt. Il rencontra même, pen-
dant son séjour à Singapour, dans la région autrefois
explorée par Lobb et Oxley, le Pal, Gutta qui avait été
signalé par ces deux voyageurs.
Des plants d'arbres à gutta, rapportés par M. Serul-
las, furent, il y a quelques années, distribués à quel-
ques-unes de nos colonies. J'ai vu pour ma part, au
jardin de Saint-Pierre (Martinique), un plant qu'on
m'a signalé comme étant de cette provenance ; on
lavait laissé en pot et il était resté maigre et chétif.
Cet essai ne parait avoir donné aucun résultat car
on n'a pas cherché à placer les plants dans les con-
ditions qui sont les plus favorables à leur végétation.
52 LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
Enfin, en 18S9, M. Humblot, résident honoraire
de la Grande-Gomore, emportait dans cette colonie
quatre pieds de Palaquiiim, dont trois purent arriver
en assez bon état pour être mis en terre. « Ils avaient
perdu toutes leurs feuilles et ne mesuraient que o",t 5
de haut. » M. Humblot plaça un de ses plants près
du littoral, un autre à 25o mètres d'altitude et le troi-
sième à 5oo mètres. Pendant deux ans ces plantes
restèrent à peu près stationnaires ; mais au bout de
ce temps celle qui était à 25o mètres prit un déve-
loppement rapide et devint l^icntot un bel arbre de
5 à 6 mètres de haut. Le plant (pii se trouvait à 5oo
mètres se décida aussi à s'accroître mais il ne prit
pas le développement du j)récédent. Quant à celui
qu'on avait laissé sur le littoral il resta petit et
chétif
Il paraît donc^ démontré par cette expérience que
les arbres à gu tta peuvent se développer à une lati-
tude différente de celle des régions où on les ren-
contre habituellenu'jit ; mais il fuit pour cuda leur
l'ournir l'humidité et la clialeur dont ils ont besoin.
Encore n'est-il pas prouvé (jue les résultats seront
en tous points satisfaisants c^ar M. Humblot déclare
lui-même qu'avant incisé l'écorce de son plus bel
arbre il n'a j)U en extraire de latex tandis que les
pousses et les l'euilles en contenaient une assez forte
l^i'oportion.
Des feuilles de cet arbre à gulta ont été soumises
par M. Milne-Edwards. directeur du Muséum, à
PRODUCTIOX ET COMMERCE DES GLTTAS 53
^I. le l^"" Guignarcl, meiu])r(' de Tlnstitiit,- qui a re-
connu un vrai Palaquium producteur de gulta.
Enfin, le dernier et le plus important essai d'ac-
climatation des plantes à gutta l'ut confié par le ^li-
nistre des Colonies aux soins du regretté Raoul,
pharmacien en chef des Colonies, qui contracta mal-
heureusement, dans les forets de Sumatra, la maladie
qui devait fenlever. Ce sont les ])laîites rapportées
par ce savant dévoué que le Ministre des Colonies a
J^ien voulu me charger de transporter aux Antilles
et à la Guyane pour tenter leur acclimatation; pen-
dant ce tem])s un autre lot de ces plantes à gutta
était dirigé sur le (]ongo; d autres doivent être four-
nies à diverses colonies de la zone tropicale.
CHOIX DES TEUUAIXS PROPRES A LA CLLTURE DES ARBRES
A GUTTA. CLLMAT
11 n'est guère [)()ssil)le. on le comprend facile-
ment, de préciser les conditions exactes que doit
remplir le sol choisi pour une plantation d'arbres à
gutta. 11 est clair, en effet, que de tels arbres peu-
vent, comme la phq^art des autres végétaux, vivre
sur des sols de nature assez différente ; il ne s'agit
donc pas de savoir si les arbres à gutta peuvent croî-
tre dans certaines conditions ; mais de rechercher
sous quelles influences ils acquièrent rapidement leur
54 LES ARBRES A GIJ TTA-P ERCH A
plus grand développement et fournissent le maxi-
mum de gutta utilisable de bonne qualité.
Thomas Lobb et le D' Oxley qui ont observé la
vraie plante de Singapour constatent dans leurs rap-
ports qu'ils n'ont trouvé le Pal. Gutta que sur des
terrains d'alluvions, au pied des collines où l'humi-
dité est constante.
D'après Oxley les conditions sont bien différentes
à Bornéo ; « c'est sur les montagnes de médiocre
altitude ou des collines moins élevées, exemptes
d'inondations, que l'on trouve les plus beaux arbres;
en outre, on a remarqué qu'ils croissent d'autant
mieux que leur situation les expose moins à l'in-
lluence de l'eau stagnante. » Ce terrain que décrit
Oxley est précisément le même où se développe le
Palaquium oblomjifolium sur les plateaux de Padang.
C'est probablement cette dernière espèce qui avait
été trouvée à Bornéo par Oxley et non pas le Pal.
(hitta, comme il le croyait. 11 en résulte que les exi-
gences paraissent différentes poui' ces doux espèces.
Les observations de Seligmann-T.ui (i) concordent
avec celles de Miirloii à Perack. « Les îles de la
« Sonde, dOrigine ériiplive et renfernjant encore
« plusieurs volcans en activité, présentent, en raison
« de cette nature, deux sortes de terrains bien dis-
« tincts. Au centre est une région montagneuse,
(( quelquefois très élevée; les rivières, recevant à
(i) Loc. cit., p. 13 et suiv
PBODUCTIOX ET COMMERCE DES GLTTAS 55
« l'époque des pluies une masse d'eau énorme, des-
« rendent avec impétuosité, ravinent profondément
« les berges des vallées supérieures et se chargent
<' d'une quantité considérable de limon qu'elles dé-
(( posent plus loin lorsque leurs cours est ralenti.
« Ainsi.se forme au pied des montagnes une cein-
<( ture de terres basses qui s'élargit tous les
« jours De ces alluvions les plus récentes sont
<( encore noyées à demi Au delà, des dépôts
« plus anciens, déjà asséchés par le soleil, forment
<( un sol ferme, mais absolument plat, peu élevé et
« souvent inondé par les crues des rivières. »
C'est dans cette deuxième zone ({u'on trouve les
plantations de tabac de Delli et de Langkat, les cul-
tures de canne, de poivre et de café de la province de
Palembang, etc.
(( Plus haut, enfin, dès que les premiers mouve-
<( ments du sol encaissent les rivières dans des val-
« lées plus profondes et emj^échent les déborde-
« ments; dès que, par suite, les terrains rocheux
(c commencent à émerger des couches épaisses des
« terrains de transports, on entre dans la région des
« grandes forets : c'est là que sur des bancs de grès
« recouverts d'un humus peu profond, se rencontrent
<c les Mavano^s arbres à Ofutta' : de nombreux ruis-
(( seaux qui ne tarissent pas dans la saison sèche et
« des pluies fréquentes réparties sur toute l'étendue
« de l'année conservent la fraîcheur et l'humidité
« du sol. L'altitude est trop faible encore pour que la
O C E A
N
INDIEN
10°
95°
Cl •iiuèpayA. SiniOTi. , 12, Jtixe. Nicole, l'eir'is .
100"
105°
58 LES ARBRES A GUTTA-P ERCII A
« température soit sensiJ^lemeiit abaissée et à la eôte
(( la moyenne des mois les moins chauds de Tannée
« ne descend pas au-dessous de 25 degrés. Que ces
<( conditions de sol et de climat soient les seules qui
« conviennent aux Mayangs, sans doute je n'oserai
« l'affirmer; tout ce que je puis dire c'est qu'il en est
« ainsi partout où j'ai vu de ces arbres et c'est égale-
« ment là que Murton les a rencontrés avant moi. »
Au point de vue de la nature du sol, s'il s'agit de
cultures de Palaquium oblompfoliiim, ces arbres re-
doutant les eaux stagnantes, il n'est guère possible
d'établir les ])lantations dans le fond des vallées où
on aurait quelque chance de trouver un sol profond,
car l'humidité du sol y serait un obstacle ; il paraît
préférable de choisir les escarpements, car la racine
pivotante peut ainsi glisser obliquement sur le sous-
sol. Les pentes des ravins encaissés au fond desquels
coulent des ruisseaux conviennent tout particulière-
ment. En ce (|ui concerne la conq)osition chimique^
du sol il parait seulement nécessaire d'éviter les
sols argileux com])acts dans lesquels ne viendraient
pas bien les racines i)iv()lantes.
Les arbi'es à gutta demandent une humidité con-
stante de l'ail' mais non pas du sol. Tous les voya-
geurs qui ont rencontré ces arbres sont d'accord pour
sio'naler l'humidité excessive de l'air. D'ailleurs dans
toute la région des arbres à gutta les chutes de pluie
sont fréquentes et abondantes comme le montre le
tableau ci-dessous qui est em])runlé à Seligmann.
PRODUCTIOX ET COMMERCE DES GUTTAS
59
CHUTES DE PLUIES EN MILLIMETRES
PENA.NG
SINGAPOIRE
PAD\NG
BUITE.NZORG
Janvier..
ii4
289
587
298
Février..
75
297
338
39 '^
Mars.
65
159
25l
4oi
Avril. . . .
i35
192
4o8
423
Mai
176
189
397
363
Juin.
i45
168
327
326
Juillet. . . .
l52
168
263
2o3
Août.
i63
171
386
249
Septembre..
2l5
207
390
2 36
Octobre.
207
172
4oo
242
^iovembre. .
368
281
587
33 1
Décembre. .
2l4
260
462
285
2,080
2 ,533
^'797
3,751
Xon seulement les chutes de pluies annuelles
sont a])ou(lantes, mais encore elles sont d'une très
grande fréquence. Ainsi à Singapour on peut comj)-
ter sur 200 jours de pluie par année, le mois le plus
favorisé n'en comptant pas moins de i3. A Palembang
les tableaux fournis par Seligmann-Lui en signalent
2i5, pour une moyenne d'un certain nombre d'années,
le mois le plus sec comptant encore 10 jours de pluie.
Gomme on le voit, les pays d'origine des arbres
producteurs de gutta sont particulièrement favorisés
au point de vue des chutes de pluie. Or les observa-
tions qui précèdent ont été recueillies dans les villes ;
Go LES ARBRES A GUTTA-PERCHA
il est clair que dans les régions montagneuses où on
recueille la gutta ces chutes de pluie sont encore
plus abondantes.
En ce qui concerne la température on peut dire
que la moyenne annuelle des pays où se trouvent les
arbres à gutta oscille entre 26° et 27° (Penang, 26*^,8;
Singapoure, 26^,6; I^adang, 26^6; Palembang, 27°,©) .
Telles sont les conditions cliinatériques obser-
vées. Elles limitent singulièrementraire sur laquelle
pourraient être tentées ces cultures ; elles imposent
dans tous les cas la nécessité de n'établir les planta-
tions que dans des pays montagneux où les précipi-
tations atmosphériques sont particulièrement fré-
([uentes et abondantes. Mais d'un autie coté Taltitude
ne doit pas être trop élevée car elle entraînerait un
abaissement de température très préjudiciable aux
arbres à gutta. 11 convient donc de choisir une altitude
convenable et le plus sage seraitde recueillir d'aJjoid
des observations météorologiques dans les localités
où on se propose d'établir une j)lantati<)n.
Dans leur pays d'origine, les arl)res à gutta ne
dépassent guère le y degré dv bitilii(U' nord et sud.
Il n'est pas prouvé qu'on ne pourrait tiouver à une
autre latitude un ensemjjle de conditions favoral)les ;
mais, (^omnu' le l'ail sagement remarqu(M^ Seligmann-
Liii, u /ps nrhres, tranxjjlantés sur un sol, sous un cl'wuit
'< (jul 11 est jias celui qui leur coneieni, [jériront ; ou hien^
(( rnuludifs et (léi/énérés, ils végéteront, ne donnunt
« qu'un produit dune quulité inférieure. »
PRODUCTIOA ET COMMERCE DES GUTTAS Gi
Enfin il sera bon d'abriter les jeunes plants pen-
dant les premières années; le mieux serait de les
placer en foret après avoir abattu les plus grands
arbres dont la destruction ultérieure serait trop
préjudiciable à la plantalion.
REPRODUCTION ET MULTIPLICATION DES ARBRES A GUTTA
La plupart des auteurs qui traitent de la gutta et
des arbres qui la produisent déclarent que la repro-
duction par graines est impratical)le. D'après le
C Treul), dont Tautorité est incontestal)le, cette
oj)inion est erronée et on peut o])tenir des plants
venant de graines. ^lais il est ])ien établi ([ue ces
graines perdent très rapidement leur faculté gernii-
native ; elles ne peuvent donc être transportées à
une grande distance sans devenir improductives. Le
moven le plus sur est le marcottage qui consiste à
enterrer sur une parlie de sa longueur, en la recour-
bant ou bien en l'entourant d'un tube de bambou,
une branche tenant encore à l'arbre et de la séparer
seulement de ce dernier quand les racines adventives
ont pu se développer.
Le bouturage peut lui-même donner de bons
résultats quand on a soin de prendre les Ijoutures sur
des plants bien développés. Quelques Chinois utili-
sentce moyen et vendent sur les marchés de Penang
02 LES ARBRES A GUTTA-PERCIIA
et de Batavia, à raison de 5o centimes la pièce, des
plants ainsi obtenus de boutures. Serullas a employé
ce moyen de môme que Piaoul.
Le D"" Treub accorde la préférence au bouturage
et d'après lui (opinion rapportée par Obach), les
plants obtenus de marcottage se montrent plus vigou-
reux que ceux obtenus de graines.
M. Ridley déclare que la greffe est impossible car
les bacilles et les champignons se développent très
rapidement.
Les graines qui tombent au pied des arbres
entrent souvent en germination et fournissent alors
de jeunes plants très vigoureux. Spofts Encyclopœdia
(5° partie) rapporte qu'on en a trouvé en très grand
nombre sur les formations granitiques de Perak et jus-
qu'à une altitude de 3,5oo pieds. Le regretté Raoul
dit lui-même dans une de ses lettres qu'il a rencontré
et recueilli un grand nombre de ces jeunes plants.
Quand il s'agit de les transporter, il est bon de choisir
des sujets vigour(uix ayant au moins un pied de hau-
leuj- et de les enlever avec leur racine pivotante. Les
jeunes plants rapportés par Piaoul et obtenus dans ces
conditions ont supporté très facilemenl de longs
transports en serres \\'ard et mis en place en terrain
convenal^le ils n'ont pas lardé à produire de nou-
velles feuilles. Au contraire, les plants provenant
de boutures avaient conservé leurs feuilles, mais un
grand nombre d'entre eux ne possédaient que des
racines insuflisantes et ne se conservaient en serre
PRODUCTIOy ET COMMERCE DES GUTTAS GS
que grâce à l'humidité excessive qu'on y avait main-
tenue.
En ce qui concerne les plants transportés dans
nos colonies il est bon de préciser les conditions
dans lesquelles devra se faire ultérieurement la mul-
tiplication. Le marcottage parait le meilleur moyen <)
employer ; mais^ comme nous l'cwons dit plus haut, il ne
faudra le pratiquer qu'au moment où les plants auront
atteint une taille assez élevée.
DEUXIEME PARTIE
RAPPORT A M. LE MIMSTRE DES COLOMES SUR L ACCLI-
MATATION DES ARBRES A GUTTA AUX ANTILLES ET A
LA GUYANE.
Monsieur le Ministre,
Conformément à vos instructions, je me disposais, dès le
commencement de juillet, à me rendre aux Antilles et à la
(juyane.
Le 9 juillet, je quittais Paris pour me rendre à Marseille,
où je devais veiller à la bonne organisation des serres Ward,
contenant les plantes à gutta dont j'étais chargé d'assurer le
transport.
La mise en serres avait été confiée par M. Heckel, profes-
seur à la Faculté des sciences, à son chef de cultures,
M. Davin, qui a réalisé l'emballage dans les meilleures condi-
tions.
L'examen que j'ai pu faire, à Marseille, des plants rap-
portés par le regretté Raoul, ne pouvait être que très super-
ficiel, puisque les matériaux se réduisaient à de très jeunes
plantes pourvues seulement de quelques feuilles; il ne pouvait
Lecomte. 5
GG RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
guère porter que sur la nature de ces derniers organes. Il me
permit cependant de reconnaître que les plants déposés à Mar-
seille et qui constituaient encore à mon arrivée dans cette ville
un lot de 5oo à 600 échantillons vivants comprenaient :
lo Des plants de Palaquium (probablement Pal. ohlon-
gifoliiim) susceptibles de fournir une excellente gutta ;
2° Des plants d'autres espèces du genre Palaquium et
probablement du genre Sideroxylon, dont les latex peuvent
être utilisés, mais ne fournissent que des produits de qualité
inférieure.
Malheureusement, les plants de Palaquium ohlongifo-
lium? étaient représentés par des boutures peu enracinées ou
même parfois dépourvues de racines. Peu de ces derniers
végétaux avaient été expédiés à la côte occidentale d'Afrique^
car la personne chargée du transport avait considéré, paraît-il,
la coloration jaune de la face inférieure des feuilles comme
un indice de mauvais état, alors que c'est précisément un des
caractères des feuilles chez les espèces de Palaquium utilisées
pour la production de la gutta. J'en trouvai donc encore un
nombre assez grand et je priai la personne chargée de l'embal-
lage de m'en confier le plus possible.
Les plants rapportés par la mission Raoul provenaient de
deux origines dilférenles ; en ellel, d'après un rapport qu'il
avait adressé en cours de voyage à M. le Ministre des colonies
et qui m'a été communiqué, le gouvernement des Indes néer-
landaises lui avait concédé quelques centaines de plants (pro-
bablement les boutures) ; les autres avaient été recueillis par
la mission dans les forêts de Sumatra, sous les arbres produc-
teurs de gutta ; ils ne pouvaient donc qu'appartenir à des
espèces et peut-être à des genres difTérents, car il est bien
difficile, dans ces conditions, d'opérer un triage parfait. Ces
derniers plants, bien enracinés, pouvaient être transportés
facilement ; il n'en était pas de même des boutures qui exi-
geaient des soins particulièrement minutieux.
Sril LES ARBRES A GUTTA AUX AMILLES 67
Le lot de plantes dont javais à assurer le transport aux
Antilles et à la Guyane comprenait :
71 plants de Palaquim ohlongifolium;
202 plants de diverses espèces de Palaquium et peut-être de
Sideroxylon ;
35 Diptérocarpées (rapportées aussi par Raoul).
J'ai fourni au chef de cultures de la ville de Marseille un
reçu de
325 plants de g^utta;
et 35 Diptérocarpées.
Il existait donc, en réalité, un écart de 2 unités dans le
nombre des plants de Palaquium. Cet écart provient d'une
erreur au moment de la mise en caisse.
Le paquebot Ferdinand-de-Lesseps de la Compag^nie trans-
iitlantique devant appareiller le 12 juillet dans Taprès-midi, les
caisses furent amenées à quai, le 12 au matin, par les soins
de l'Administration des serres de la ville et le commissariat
colonial de Marseille voulut bien se charg'er des formalités
relatives à l'embarquement.
Les 8 serres contenant les plantes furent placées par les
soins de ^L Darlan, commandant du Ferdinand-de-Lesseps,
sur le pont supérieur (spardeck) du navire, abritées sous une
tente, amarrées solidement et complètement à labri des
paquets de mer. Je ne saurais trop me louer de loblig'eance
que jai rencontrée chez le commandant du Ferdinand-de-
Lesseps et chez tous les officiers du bord; j'ai pu, grâce à cette
oblig-eance, entourer facilement les plantes dont j'étais charc^é
de tous les soins qu'elles réclamaient.
Dans un premier rapport adressé de Barcelone, le i4 juil-
let, j'ai déjà eu l'honneur de vous signaler tous ces faits et je
ne crois pas utile d'y insister davantage.
Malgré les précautions prises pour la mise en caisses, les
plantes ne se trouvaient pas complètement à l'abri de l'air
salin et je dus, au bout de quelques jours de traversée, pro-
68 RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
céder à des arrosages peu abondants. Ces arrosages furent
répétés quatre fois pendant la traversée à l'aide d'un pul-
vérisateur que j'avais eu soin de me procurer à Marseille
avant mon départ. Grâce à ces précautions, grâce au soin que
je prenais de les garantir de l'action directe du soleil, les
plants se trouvaient en bon état à leur arrivée à Fort-de-
France, le 29 juillet, après une longue traversée de 17 jours,
et c'est à peine si quelques-uns avaient leurs feuilles légère-
ment fanées; encore ces derniers plants appartenaient-ils à la
catégorie de ceux pour lesquels j'avais, dès le début, mani-
festé des craintes.
Le Ferdinand-de-Lesseps étant arrivé devant Fort-de-
France, le 29 juillet dans la soirée, le débarquement put seu-
lement avoir lieu le lendemain 3o juillet. Encore fallut-il
compter avec les formalités de la douane avant de procéder à
cette opération. Je dus courir de bureau en bureau dans les
rues de Fort-de-France pendant une journée entière, sous un
soleil ardent, pour obtenir le permis de débarquement ; la
douane, en effet, se demandait si les plants de gutta élaienl
des objets à mettre en consommation^ et pendant qu'on agi-
lait cette grave question, mes caisses de plantes restaient
exposées au soleil C'est seulement après une journée passée
en démarches fastidieuses et faliiranles, et sur l'assurance
formelle donnée par le secrétaire général du gouvernement
que les plants appartenaient au Ministère des colonies, qu'on
voulut bien consentir à me délivrer le permis nécessaire. Il
est dinicile de pousser plus loin et plus mal à propos le forma-
lisme et je tiens, en passant, à signaler ce fait, car, si ces tra-
casseries se répèlent souvent, elles doivent être très préjudi-
ciables au commerce de la Martinique.
Dès mon arrivée à Fort-de-France, c'est-à-dire le 3o juil-
let, je me présentais chez M. Gabrié, gouverneur de la colonie,
qui, très récemment installé dans la colonie, n'était pas encore
au courant des mstructions antérieurement reçues du Mmis-
SUR LES Al;BHES A G ITT A ALX ANTILLES Cq
1ère des colonies. Il fit effectuer des recherches et m'apprit
que les instructions ministérielles n'avaient pas été exécutées
et qu'aucun terrain n'avait été préparé pour recevoir les
plantes que j'apportais. Devant cette situation, et étant donné,
d'autre part, que le Jardin de Saint-Pierre ne convient en
aucune façon pour des plantations de gutta, car il se trouve
trop directement au voisinage de la mer, nous convînmes de
confier les plants de gutta à un certain nombre d'agriculteurs
sérieux de la colonie et, à cet effet, pour provoquer les
demandes dans le plus bref délai possible, un avis fut préparé
pour être inséré dans le Moniteur de la colonie devant paraître
quelques jours après.
En attendant, M. le Gouverneur de la colonie voulut bien
m'autoriser à me servir de la chaloupe à vapeur du port de
Fort-de-France pour transporter provisoirement les 8 serres
Ward contenant les plantes, au Jardin de Saint-Pierre, où
devaient rester celles qui étaient destinées à la Martinique et
à la Guyane, pendant le voyage que j'allais effectuer à la
Guadeloupe.
GUADELOUPE
Le lendemain, oi juillet, je m'embarquais à Fort-de-P>ance
sur le vapeur Salvador, de la Compagnie transatlantique,
pour aller à la Guadeloupe et transportais avec moi 3 caisses
contenant :
97 plants de Palaquium ;
i5 — de Diptérocarpées.
Les conditions climatériques de la Guadeloupe paraissent
très favorables à la culture des arbres à gutta, surtout si on
choisit une localité suffisamment élevée pour qu'elle reçoive
des pluies abondantes, et si on a soin, en même temps,
d'éviter les altitudes où la température s'abaisse notablement.
70 BAPPOBT A M. LE MINISTRE DES COLOMES
Au point de vue de la température, on peut dire que les
régions basses, comme la Pointe-à-Pitre et Basse-Terre pos-
sèdent une température moyenne annuelle de 26°. Les varia-
tions les plus grandes n'atteignent pas 5° au-dessus et au-
dessous de cette moyenne. Mais dans les parties élevées,
comme le Camp Jacob (545 mètres d'altitude) les variations
diurnes sont beaucoup plus considérables et ne se prêteraient
pas à la culture d'une plante aussi délicate que le Pala-
quium.
Quant au régime des pluies, il est bien indiqué dans le
tableau suivant emprunté au consciencieux, travail de Rau-
lin :
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FiG. 5. — Diagramme des chutes de pluie
à Basse-Terre ('1827-1870).
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FiG. 0. — Diagramme di s chutes de pluie
au Camp Jacob (1855-1870).
-j'i RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
Comme on le voit par le tableau ci-dessus et par les
diagrammes qui raccompagnent, les chutes de pluies sont
d'autant plus abondantes que l'altitude est plus élevée et on
peut trouver l'humidité suffisante, même pendant la période
la plus sèche de l'année, à partir de i5o mètres d'altitude, si
toutefois la localité choisie appartient au massif élevé de la
Soufrière.
Le T*^^ août, j'arrivais à Basse-Terre, chef-lieu de la colo-
nie, où j'avais le bonheur de rencontrer immédiatement
M. Moracchini, Gouverneur, qui voulut bien m'ofîrir l'hospi-
talité dans sa résidence du Camp Jacob, à proximité de la
colline de Matouba, préconisée avec raison par Raoul pour
effectuer des plantations de gutta.
Le Camp Jacob se trouve à environ 55o mètres d'altitude
sur le flanc du massif couronné par la Soufrière. Le sommet
de la Soufrière, situé à i,/454 mètres d'altitude, est presque
constamment couvert de nuages, et 1 humidité atmosphérique
devient de plus en plus prononcée à mesure qu'on atteint des
altitudes plus élevées; malheureusement la température
s'abaisse en même temps et il ne faut déjà plus songer à établir
des plantations de gutta à l'altitude du Camp Jacob, étant
donné surtout que la Guadeloupe se trouve entre les i6° et
i6° 3o' de latitude Nord environ.
Si l'administration de la Guadeloupe n'avait pas fait pré-
parer de terrain spécialement affecté à la culture des arbres à
gutta, elle avait du moins provoqué des demandes, et je pus,
dès le lendemain de mon arrivée, grâce à l'obligeance de M. le
Gouverneur, me mettre en communication avec des planteurs
sérieux qui désiraient recevoir des plants et promettaient de
leur accorder les soins les plus minutieux. Aucune demande
n'émanait d'habitants de la Grande Terre et d'ailleurs la confi-
guration de cette partie de l'île ne convient pas à la culture
de la gutta, car on n'y rencontre pas les altitudes nécessaires
pour provoquer une humidité atmosphérique extrême.
• SUR LES ARBRES A GUTTA AUX ANTILLES 78
Les planteurs auxquels, d'accord avec M. le Gouverneur,
je décidai de remettre des plants furent les suivants :
MM. de la Roncière, à Trois-Rivières ;
Clavssen, a Gourbevre ;
de Lagarde, à Saint-Claude ;
Cabre, à Saint-Claude.
Je me rendis tout d'abord à \ hahitalion de M. delà Ron-
cière dans la commune de Trois-Rivières. Cette localité se
trouve située au Xord-Ouest de la Rasse-Terre, et au pied de
la Soufrière. C'est là qu'aboutissent les eaux provenant de la
source du Galion.
L'habitation de l'IIermitage appartenant à M. de la Ron-
cière se trouve à 3 kilomètres environ de la localité et à une
altitude qui varie de i5oà 3oo mètres suivant les points que
l'on considère.
La superficie totale des terres dont M. de la Roncière est
propriétaire est considérable et les défrichements actuelle-
ment efïectués s'étendent sur près de 200 hectares dont [\o
sont déjà plantés en cacaoyers et en caféiers.
Les travaux de débroussaillement de la forêt nécessités par
la plantation de g-utta auraient nécessité plusieurs journées
et je dus me contenter d'établir une pépinière à 200 mètres
d'altitude environ sur la pente sud d'un petit vallon dont le
fond est occupé par un ruisseau d'eau claire.
Le sol y est meuble, profond et l'inclinaison du sol est
suffisante pour éviter la stagnation de l'eau.
Je procédai moi-même à la mise en place des plants com-
prenant :
26 Palaquium ;
3 Diptérocarpées.
Des plants de Madeira [Colocasia escalenta)eide Malanga
[Xaiithosoma sagittifolium) furent placés entre les plants de
gutta pour les abriter provisoirement contre le soleil. Des
cacaoyers et des bananiers complètent d'ailleurs cet abri. Je
7/i RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES •
suis persuadé que dans ces conditions les plants confiés
à M. de la Roncière pourront se développer et être prochaine
ment mis en place dans la forêt.
Dix autres plants de g-utta ont été confiés à M. Glayssen,
ancien conseiller général de la Guadeloupe, propriétaire de
riiabitation Saint-Charles, dans la commune de Gourbeyre à
trois kilomètres de la ville de Basse-Terre.
L'altitude est de 210 mètres et la situation même de la
localité au col de Gourbeyre la met à Tabri des vents de
mer.
L'habitation de M. de Lagarde se trouve sur les pentes
mêmes du Matouba à 5oo mètres d'altitude; malheureusement
le sol y est constitué par une argile un peu trop compacte et
il a fallu chercher dans Tétendue de la plantation le terrain le
plus favorable, l^a plantation comprend i5 hectares de café
et 2 ou 3 hectares de cacao. On y rencontre en outre de la
vanille, des muscadiers, des cannelliers, des girofliers, des poiT
vriers, etc. M. de Lagarde, secrétaire du Conseil général de
la Guadeloupe, chargé il y a quelques années d'une mission
au Venezuela pour l'étude de la culture et de la manipulation
du cacao accordera certainement tous ses soins aux plants de
gutta qui lui sont confiés et il en fournira quelques pieds à son
voisin M. Raulin, agriculteur distingué, qui jouit dans la
colonie d'une réputation méritée, mais qui se trouvait en
voyage au moment de mon séjour à la Guadeloupe.
AL de Lagarde a reçu :
33 plants de Pulaqiiiiim ;
6 — de Diptérocarpées.
Les plantations de café et de cacao de MM. Cabre et fils
s'étendent depuis le Camp Jacob jusqu'à Basse-Terre à des al-
titudes qui varient par conséquent de 100 à 55o mètres. Elles
ont une superficie totale de plus de 100 hectares et on y ren-
contre des séchoirs très bien installés pour le café, des appa-
reils à dépulper et à décortiquer. M. Cabre fils, dont l'habita-
SUE LES ARBRES A GUTTA AUX AXTILLES fo
lion se trouve sur remplacement dune ancienne plantation du
Père Labat, fabrique même un chocolat qui est très estimé.
J'ai livré à M. Cabre père :
2 2 plants de Palaquium ;
6 — de Diptérocarpées,
qui ont été placés à diverses altitudes dans la plantation.
Enfin j'ai encore laissé 6 plants de Palaquium qui ont été
confiés au jardinier de la résidence du gouverneur au Camp
Jacob.
Un rapport sommaire a été adressé à M. le Gouverneur de
la Guadeloupe sur les plantations effectuées dans la colonie
qu'il administre. Je lai prié de vouloir bien confiera M. Elot,
agronome de la colonie, le soin de visiter périodiquement ces
plantations et de le renseigner sur leur état.
Après une semaine de séjour, je quittais la Guadeloupe
le 8 août pour revenir à la Martinique.
Si les plantations de gutta effectuées à la Guadeloupe ne
donnent pas de bons résultats il faudra en attribuer la cause à
la situation géographique de 1 île qui se trouve véritablement
trop loin des limites habituelles des contrées qu'habitent ces
plantes à gutta et aussi à la nature argileuse du sol qui ne
convient peut-être pas très bien à la culture de plantes à raci-
nes pivotantes comme les Palaquium.
En résumé les plantes destinées à la Guadeloupe ont été
distribuées de la façon suivante :
-G RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
NOMS
LOCALITÉS
ALTITUDE
MM. de la Roncière. .
Trois -Rivières.
25o™'
26
3
plants de Palaquium.
Diptérocarpées.
Claysscn.
Gourbeyre .
210"^
10
plants de Palaquium.
de Lagarde.
Saint-Claude..
3oo-5oo™' ,,
plants de Palaquium.
Diptérocarpées.
Cabre. .
Saint-Claude..
Basse-Terre. .
(22
200-000™ ,,
/ b
plants de Palaquium .
Diptérocarpées.
le Gouverneur .
Camp-Jacob. .
5^om| 6
plants de Palaquium.
Total : 97 plaxiis de Palaquium.
i5 Diptérocarpées.
Des reçus joints à ce rapport ont été demandés aux con-
cessionnaires de plantes.
Avant mon retour pour la France, M. le Gouverneur de la
Guadeloupe a bien voulu me communiquer une lettre qui lui
avait été adressée par M. Élot, agronome de la colonie, chargé
sur ma demande de visiter les plantations. En voici le passage
essentiel :
« A part M. Cabre que je n'ai pas vu, malgré ma dé-
« marche, il ma été possible de rencontrer chez eux les dilTé-
« rents concessionnaires des plants de gutta et de voir ces
u végétaux en place. Le peu de temps depuis lequel ils ont été
« transplantés ne me permet pas de juger avec certitude de
u la proportion de la réussite ; mais létat actuel des sujets
u est généralement satisfaisant, et avec les soins dont ils sont
(( l'objet le succès est à prévoir » (9 septembre).
MARTINIQUE
Notre colonie de la Martinique se trouve située entre les
i4"33'43" et i4°52'47" de latitude N. et 63'^6'i9"-63°3i'34" de
Sun LES ARBRES A GUTTA AUX ANTILLES 77
lono^itude 0. du méridien de Paris et elle se trouve séparée de
la Guadeloupe par un bras de mer de 100 kilomètres environ
au milieu duquel se trouve l'Ile de la Dominique.
L'île est traversée du N.-O. au S.-E. par une longue chaîne
de hautes montagnes entrecoupées de vallées et de gorges.
Trois sommets principaux dominent cette chaîne de
hauteurs; d'une part la Montagne Pelée qui atteint i,35o mè-
tres et d'autre part les deux pitons du Garbet dont l'un, celui
du sud, s'élève à 1,207 mètres et l'autre, celui de l'ouest,
à 1,161 mètres.
Au nord et au nord-ouest, c'est-à-dire au voisinage de la
Montagne Pelée, le fond et les flancs des ravins et des vallées
sont constitués par une terre meuble dont la surface est cou-
verte d'une épaisse couche dhumus. Au sud, au contraire,
dominent les terres argileuses; le choix des terrains propres à
la plantation des Palaquium devait donc surtout se faire
dans la région de la Montagne Pelée où le sol relativement
meuble recouvre un sous-sol généralement constitué par de la
ponce.
Au point de vue climatérique, la Martinique comprend trois
saisons : la saison fraîche commence en décembre et finit en
mars ; le thermomètre oscille entre 21^ et 28*^,7 avec une
moyenne de 24", 4 pour les localités situées au voisinage immé-
diat et au niveau même de la mer. L'humidité relative de l'at-
mosphère pendant cette saison ne descend guère au-dessous
de 75 centièmes et il tombe environ ooo millimètres d'eau ;
c'est le printemps.
La saison chaude et sèche commence en avril et finit en
juillet ; le thermomètre, au niveau de la mer à Saint-Pierre,
oscille entre 22°, 9 et3i°,8 avec une moyenne de 26^,08.
La saison chaude et pluvieuse comprend les mois de juillet,
août, septembre, octobre et novembre. Le thermomètre
oscille entre 28°, 4 et 3i°,4 avec une moyenne de 27'', 4- L'hu-
midité relative de l'atmosphère est de 76 centièmes environ.
78 RAPPORT A M. LE MIMSTRE DES COLONIES
et il tombe i,3oo à i,4oo millimètres d'eau à Saint-Pierre et
à Fort-de-F'rance. C'est Thivernag^e.
Les températures moyennes indiquées ci-dessus sont celles
qu'on a observées au niveau de la mer ; mais à mesure qu'on
s'élève, cette moyenne s'abaisse notablement et au camp
Balata, à unealtitude de55o mètres environ, la moyenne de tem-
pérature de l'année s'abaisse notablement. Il ne faut donc pas
compter pouvoir établir des cultures d'arbres à gutta à une
altitude supérieure à 3oo ou 4oo mètres, car si on réalise de
mieux en mieux les conditions hyj^rométriques, ons'éloig-ne en
même temps de plus en plus des conditions de température
exi^^ées par cette culture.
Les vents les plus fréquents qui se font sentir sur l'île
étant les vents alizés dirif:^és de l'est au nord-est, il fallait aussi
se proposer de trouver des emplacements abrités contre les
vents ayant cette direction.
En ce qui concerne les chutes de pluie on a surtout des
observations faites à Saint-Pierre et à Fort-de-France, c'est-à-
dire au niveau de la mer. Disons en passant qu'il est regretta-
ble de ne pas trouver dans les principaux établissements de
nos colonies les instruments nécessaires aux observations mé-
téorologiques. Ainsi les jardins botaniques de Saint-Pierre, de
Basse-Terre et de Baduel (Guyane) ne possèdent rien de ce
qu'il faut pour réaliser ces observations.
Par contre, au jardin botanique de Port-d'Espagne (Trini-
dad), le directeur, ^L Hart, est chargé non seulement de faire
des observations dans le jardin qui lui est confié, mais encore
de contrôler les observations faites en divers points de Hle
pour les adresser ensuite au bureau central de la Métropole.
l^]t non seulement le directeur possède les appareils nécessaires,
mais il reçoit encore pour ce service une subvention annuelle
de 25 £ (G25 francs) qui vient s'ajouter à son traitement. Les
Anglais, si soucieux de répandre les diverses cultures dans
leurs colonies ont en elTet compris que la connaissance aussi
SLR LES ARBRES A GIT TA AUX ANTILLES 7.J
exacte que possible des conditions climatériques d'un pays
est indispensable pour y organiser des cultures avec quelque
chance de succès. Il est à désirer de voir les colonies françaises
entrer résolument dans cette voie et il faut bien convenir que
le budget de chaque commune permettrait de distraire faci-
lement quelques centaines de francs des frais de secrétariat de
mairie, qui sont exagérés, pour organiser un service météoro-
logique.
Le tableau suivant résume les observations faites en quel-
ques points de la colonie :
LOCALITÉS ALTITUDE MOYENNES DES CHUTES MENSUELLES DE PLUIE
Sainf-Pierre. . 12™ 127,3 io5,i io5,G 97,8 107,7 2'i7,ô 807,6 3'|8,7 208,0
(1830-1870). 232,3 277,5 193,0 = 2^29,3,
Fort-de-Francc. 2™ 119,1 10^,9 78,6 98,7 118,9 189,1 287,9 ^Ga.S 235, ^
(1835-1870). 25o,i 199,8 i5o,o =: 20^2,8.
Comme on le voit les chutes de pluie sont suffisantes
même à une très faible altitude pour permettre la culture des
plantes à gutta.
A mon retour à la Martinique, après une semaine de séjour
à la Guadeloupe, je trouvais Tune des caisses de plantes en
assez mauvais état ; cette caisse avait été ouverte dans le jardin
même et à l'abri des vents. Les feuilles étaient presque toutes
fanées, tandis qu'à l'arrivée les plantes se trouvaient en par-
fait état. Je fis immédiatement vider la caisse ; les plants
furent placés dans des pots en bambou et transportés près de
la cascade du jardin dans un endroit où l'air contient cons-
tamment une buée abondante. Quelques plants plus compro-
mis que les autres furent débarrassés de la terre qui les accom-
pagnait et je reconnus qu'ils étaient constitués par des
boutures à peu près complètement dépourvues de racines. Je
fis immédiatement rafraîchir ces boutures et je les plaçai
aussi dans des pots en bambou. Au moment de mon départ
8o RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
pour la France, j'ai eu la satisfaction de constater que presque
tous les plants se trouvaient en bon état et pourraient être mis
en terre très prochainement sans aucun danger.
M. Nollet, directeur du Jardin botanique de Saint-Pierre,
que M. le Gouverneur avait prié de se mettre à ma disposition
pendant mon séjour dans la colonie, avait reçu, après Tavis
inséré dans le Moniteur de la. Martinique, un certain nombre
de demandes émanant de planteurs désireux d'acclimater dans
leurs habitations les arbres à gutta-percha. Ces demandes
émanaient des personnes suivantes :
MM. Dormoy, habitation Pecoul, près de Saint-Pierre ;
Sainte-Luce, J., juge au tribunal de Saint-Pierre, pour
son habitation du F'onds-Galion ;
Diobine, propriétaire, Le Lorrain ;
Cornée, pour Thabitation Mackinstock du Morne-
Rouge ;
Carassus, conseiller général du Morne-Rouge, pour son
habitation du Morne-Rouge ;
Clos, Ajoupa-Bouillon ;
Littée, frères, habitation du Parnasse ;
i^a comtesse d'Espinay Saint-Luc, habitation Leyritz à
Basse-Pointe ;
Kneight, conseiller général, pour son habitation de
Grand'Rivière.
\i\\ raison des exigences des plantes à gutta et des difficultés
de communication, jai dû mettre de côté un certani nombre
de ces demandes, soit parce que les terrains proposés ne me
paraissaient pas convenables, soit parce qu'il ne m'était pas
possible de me rendre dans les localités sans une grande perte
de temps.
En définitive, j'ai distribué les plantes de la façon suivante:
i" M.NL Littée frères au Parnasse.
L'habitation porte le nom de Morne-Ktoile et se trouve
à 3^0 mètres d'altitude à Lest de Saint-Pierre. C'est une très
Sun LES AliBRES l <j i T l A AiX AMILLES 8i
belle plantation, certainement l'une des mieux ordonnées de la
colonie. Elle comprend environ Go hectares plantés pres-
que exclusivement en canne. Jai trouvé dans cette plantation
une série de plants venus de graines attestant chez les proprié-
taires le vif désir d'arriver à obtenir les meilleurs rendements.
Une multitude darbres exotiques ont été introduits dans la
plantation et y sont lobjet de soins minutieux.
M. Littée a reçu 5 plants de Palaquiam qui ont été placés
sur le versant dun petit vallon traversé par la canalisation qui
amène l'eau à la rhummerie pour y produire la force motrice.
2" M. Dormoy, habitation Pecoul, près de Saint-Pierre.
L'habitation Pecoul est une des plus importantes de la
colonie; ses propriétés s'étendent depuis Saint-Pierre jusqu'à
Basse-Pointe de l'autre côté de l'île, en passant par les con-
treforts de la montap^ne Pelée. Sur le versant ouest la pro-
priété est limitée par deux rivières, au Nord, la Rivière des
Pères et au Sud, la rivière Madame. La maison d'habitation
et la rhummerie se trouvent à environ 60 mètres d'altitude et
à 2 kilomètres à l'E.-N.-E. de Saint-Pierre. Des échantillons
de terre prélevés en divers point? de la plantation ont été
soumis à l'analyse par Lagarrigue de Survilliers; les résultats
de cette analyse pour la terre de Polijle, parcelle la plus rap-
prochée de celle où ont été placés les plants d'arbres à g"utta,
sont donnés par le tableau suivant :
Résidu insoluble 75,^90
Azote o,i45
Potasse 0,062
Soude o,3i5
Magnésie.. . . , 0,1 48
Chaux 1,218
Acide phosphorique 0,2o5
Acide carbonique 0,907
Chlore o,o43
Matières organiques 12,167
Oxyde de fer et aluoiine 9,35o
Lecomte. 6
83 RAPPORT A M. LE MINISTRE DES COLONIES
L'emplacement choisi pour la planlalion est la pente un
peu escarpée d'un ravin au fond duquel coule un petit ruis-
seau affluent de la rivière Madame. Le sol y est profond, riche
en humus ; la végétation se compose de Fougères arborescentes,
de bois canon [Cecropîa peltala)^ àlleliconias, de gommiers
[Bursera giimmlfera)^ de bois savonnettes [Sapiudiis sapo-
naria), etc., tous végétaux se rencontrant principalement
dans les endroits où lair est exceptionnellement humide; le
sol y est couvert de détritus végétaux et le Tri'gonocéphale est,
paraît-il, très abondant en cette région. L'altitude est d'envi-
ron 4oo mètres, c'est-à-dire, un peu moins que le Morne-
Rouge qui n'en est distant, à vol d'oiseau, que de 2 kilomètres
au plus. La Montagne Pelée qui domine ces contreforts est
presque constamment couverte de nuages; les pluies y sont
fréquentes même pendant la saison sèche et l'humidité at-
mosphérique est extrême. J'ai pensé que cette localité pouvait
réaliser aussi complètement que possible les conditions
exigées pour la culture des arbres à gutta et j'y ai fait placer
3i plants qui ont été mis en terre à G mètres de distance les
uns des autres en tous sens; chacun d'eux a été entouré d'une
garniture de piquets et le gérant de la propriété, M. AUain, m'a
formellement promis de faire établir une barrière en ronce
artificielle autour de la plantation.
L'abri est constitué par les Fougères arborescentes et les
arbres de la forêt; plus tard ces derniers, qui sont d'ailleurs
détaille moyenne, seront soigneusement éliminés. Dix jours
après la mise en place, j'ai visité la plantation avec M. Allain,
gérant de la propriété ; la reprise était assurée pour tous les
plants, et quelques-uns commençaient déjà à pousser de nou-
velles feuilles.
L'unique ennemi probable des plants de gutta dans
l'habitation Pecoul sera le crabe de terre qui coupe parfois
avec ses pinces les racines des jeunes arbres et qui est un
lléau pour les cacaoyers du pays. Il faut escompter, de ce
s un LES ARBRES A G l T TA AUX AMILLES SS
chef, quelques dégâts qu'il est à peu près impossible d'éviter.
Au voisinage de l'endroit choisi pour la plantation se voit,
en très bel état, un quinquina planté il y a près de 80 ans,
par le fondateur de l'habitation.
3° M. Carassus, maire et conseiller général du Morne-
Rouge (7 kilomètres de Saint-Pierre), a reçu cinq plants de
Palaqaium qui ont été placés dans un terrain sableux à sous-
sol de ponce à peu de distance de sa maison d'habitation et au
voisinage d'un petit ruisseau qui traverse une cacaoyère. Les
plants sont abrités par des cacaoyers et par des Malangas
(Xanlhosoma sa(jiHifoUum). M. Carassus cultive, près de son
habitation un grand nombre de plantes ; j'y ai rencontré la
Kola, la Coca, l'IIevea, le Castilloa, le Manihot Glaziovii, le
poirier, l'acajou, le mahogani, le Mammea, etc. Il accordera
aux plants de PaUiquîum qui lui sont confiés les mêmes
soins qu'il prodigue à tousces végétaux.
4° M. Cornée, Aug., entrepreneur de travaux à Saint-
Pierre, conseiller municipal de Morne-Rouge, a reçu 3 plants
de gutta pour son habitation Makinstock, située à 3 kilomètres
du Morne-Rouge, sur la rive droite de la rivière Capote.
L'emplacement choisi se trouve à 300 mètres d'altitude sur le
versant d'un ravin au fond duquel coule un petit allluent de
la rivière Capote. Le sol est constitué par une terre argilo-
sableuse recouverte d'humus et reposant sur un sous-sol pon-
ceux. Il est exposé à l'Ouest. La végétation constituée presque
uniquement par des Fougères arborescentes de toute beauté
dénote une humidité atmosphérique extrême. Les plants de
gutta ont été mis en terre à leur place définitive et à environ
G mètres les uns des autres. Les abris sont constitués par des
Fougères arborescentes et par des Pois doux gris. Au moment
de mon départ de la colonie (10 septembre), les plants de
gutta confiés à M. Cornée se trouvaient en excellent état.
[\° Une concession de i5 plants a été faite à M. Clos, pour
son habitation de l'Ajoupa Bouillon. Le sol est constitué par
84 RAPPORT A M. LE MI.MSTRE DES COLONIES
une terre sablonneuse sur un sous-sol ponceux. L'emplace-
ment choisi est le versant ouest d'une colline au bas de
laquelle coule la rivière Capote.
La plantation de M. Clos comprend près de loo hectares
de terres dont 60 en canne à sucre, 3o en cacoyers et 10 en
café de Libéria. On rencontre, au voisinai^e de Thabitation,
des muscadiers, des castilloa, des cotonniers, des arbres à
Kola, etc. M. Clos jouit en qualité d'agriculteur d'une excel-
lente réputation et les plants qui lui sont confiés se trouvent
en très bonnes mains.
5° M, de Chasteigner m'a demandé quelques plants pour
l'habitation qu'il possède à Basse-Pointe (habit. Leyritz) en
commun avec sa cousine la comtesse d'Epinay-Sajnt-Luc.
L'emplacement choisi est une petite vallée dominée par la
Montagne Pelée et située à aao mètres d'altitude. Le sol est
sableux avec un sous-sol ponceux. Les plants ont été mis en
place à G mètres les uns des autres. Le nombre des plants
concédés est de 10.
6° M. Massieux, inspecteur des douanes en retraite^ ex-
ploite avec son gendre, M. Cotrelle, l'habitation dite IVIontlouis
au Prêcheur, à 5 kilomètres nord de Saint-Pierre. M. Massieux
est un visiteur assidu du. Tardin botanique de Saint-Pierre et j'ai
pu me convaincre qu'il possède des connaissances botaniques
et agricoles très étendues. Je lui ai confié i5 plants de gutta
qui ont été placés à environ 370 mètres d'altitude sur le flanc
nord-ouest d'une colline élevée et escarpée qui constitue l'un
des contreforts de la Montagne Pelée et qui est constamment
couverte de nuages. Les pluies y sont fréquentes et Ihumi-
dité atmosphérique très grande. Le sol est léger avec un sous-
sol de ponce. M. Massieux est bien certainement parmi les
concessionnaires de plants de gutta celui qui leur accordera
les soins les plus constants et les plus minutieux; il m'a for-
mellement promis de me mettre régulièrement au courant des
résultats obtenus.
N I I! L E S ^ 1 /.' /.' /.' ES A (] l ' T r l 1 IX A X TIL L E S
85
11 rcslait encore au Jardin de Saint-Pierre 09 plants de
Pulaquium qui avaient soull'ert à l'ouverture des caisses.
Ayant reconnu à ma dernière visite qu'ils étaient à peu près
tous en bon état, j'ai prié M. XoUet, directeur du Jardin
botanique, d'en concéder 10 à M. Reybaud, gérant de Ihabi-
lation Saint-James, et 10 à M. Laugier, agent de la Compagnie
transatlantique à Saint-Pierre. Les autres, de même que les
Diptérocarpées, seront provisoirement conservés au Jardin de
Saint-Pierre.
En résumé, les plants de gutta destinés à la Martinique ont
été distribués de la façon suivante :
NOMS
LOCALITKS
.\LTIT( DE
M.M. Littcc frères. .
au Parnasse..
020'"
5 plantsciejPrt/«/y?///////.
Dormov .
%j
Pécoul. .
'|00'»
3i
Carassus.
Morne- RoLi^e. .
'120"»
5 —
Cornée. .
Makinstock. .
0.")0'^^
5 —
Clos
Ajoiipa Bouillon.
I.")0"»
i5 —
de Chasteignler.
Levritz. .
25o"'
10 —
Massieux.
iNtonllouis. .
2 7r)'«
Total :
I .") —
80 [)lants de Palaquium .
Il convient d'ajouter les concessions
suivantes :
Reylîaud. .! Saint- James .
10 —
Laugier. . . . Saint-Pierre .
Total :
10 —
loG plants de Pa/rt^?a'«m.
GUYANE FRANÇAISE
La Guyane française comprise entre les 2® et 6^ degrés de
latitude Nord se trouve précisément dans la zone qui corres-
pond aux pays à gutta-percba. Près de la côte se trouvent des
8G n A P P 0 R T l 1/. /. E M I \ [S T /.' E I) E S C 0 L O MES
terres basses constituées surtout par des alluvions ; elles
s'élendent jusqu'aux premiers sauts de rivières. A la suite de
ces terres basses, si on s'avance vers Tintérieur, on rencontre
une sorte de plateau dont l'altitude moyenne est de 5oo à
6oo mètres et qui commence à 6o ou 8o kilomètres des côtes.
C'est là que se trouvent les immenses forêts de la Guyane.
On possède peu de documents sur les conditions climaté-
riques de l'intérieur; mais par contre les renseignements sur
la climatologie de Gayenne sont nombreux.
Caycnne. — La température ne varie pas beaucoup; la
movenne des mois les plus froids est de 26'^, et celle des mois
les plus chauds de 27°. Le climat de la Guyane se fait donc
remarquer par l'uniformité de la température. Pendant la
saison chaude (août, septembre, octobre) le thermomètre
monte généralement à So*^ pendant le jour; mais il accuse
rarement plus de 3i°. Pendant la saison la plus fraîche il des-
cend très rarement à 21" et la movenne, comme nous l'avons
déjà dit, est de 26°.
Au point de vue des chutes de pluie, nous avons pu nous
procurer les moyennes décennales de i85o à 1880 (Gayenne).
SLR LES ABBBES A GLTTA AUX A \ TILLES
87
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chutes de pluie à Cayenne
(1871-1880).
88 liAPPOnT A M. LE ][ IMS THE DES COLO.MES
Dans cette long-ue période nous relevons seulement 2 mois
sans pluie, le mois de septembre 1861 et le mois de no-
vembre 1878,
Mais il faut bien le remarquer, ces données relatives
à la climatolog'ie de Cayenne ne donnent qu'une idée très
imparfaite du climat de l'intérieur; on sait seulement que
les chutes de pluie sont plus abondantes sur le plateau in-
térieur et que, par conséquent, la saison sèche est moins
prononcée.
En outre, l'humidité atmosphérique est extrême. L'hygro-
mètre descend rarement au-dessous de 77 et se tient le plus
souvent dans le voisinage de 85 ou au-dessus de ce chilfre. La
moyenne des années 1860, (ji, 62, 65, 72, 78, 74 et 75 est de
83, 10 et, d'après Van Leent,(lans la Guyane hollandaise, cette
movenne est de 82,5.
Toutes les conditions climatériques paraissent donc con-
venables pour la culture du PaUiquium, car le climat de
la Guyane se rapproche autant que possible de ceux de
Sumatra et de Java, aussi bien par la température élevée que
par l'humidité atmosphérique extrême et la répartition des
chutes de pluie sur l'année tout entière.
Il conviendrait peut-être, pour établir ces cultures de ne
pas choisir les premières collines déjà visibles de la mer et
dont la présence donne un cachet spécial à la Guyane fran-
çaise à côté des Guyanes anglaises et hollandaises, dont les
régions cotières forment d'immenses plaines sans élévation du
sol. Mais les cultures de Palaquiam, du moins les premières,
n'exigent pas seulement des conditions climatériques détermi-
nées; elles demandent encore des soins et une surveillance
qu'on ne pourrait malheureusement assurer dans les régions
éloignées qui forment le seuil du plateau.
Sans aucun doute il est possible de trouver dans notre
colonie de la Guyane des régions correspondant à celles que
Seligmann-Lui a décrites. Mais pour l'établissement des
s LU LES AUBRES A (j i T l [ AL\ A \r IEEE S 89
premières plantations, j"ai dû choisir des sommets plus rap-
prochés de la côte et des régions habitées.
Le 3 août, je m'embarquais à Fort-de-P"rance, sur la Ville-
de-Tnnrfei\ à destination de Cayenne, où nous arrivions le 8,
dans laprès-midi après des escales à Sainte-Lucie, à Port-
d'Espagne, à Démerari, à Surinam et aux Iles du Salut.
Le jour de l'arrivée à Cayenne étant un dimanche, je me
présentais le lendemain matin 9 août, chez ^L le Gouverneur
par intérim pour mentendre avec lui au sujet de l'accomplis-
sement de ma mission. Malheureusement, M. le Gouverneur
par intérim n'était pas au courant des instructions transmises
par le Département. Après quelques recherches on parvint à
découvrir que ces instructions avaient été réellement reçues
et quelles avaient été transmises à la Direction du service
pénitentiaire. On n'avait rien préparé pour recevoir les plants
de gutta et malgré la présence à Cayenne d'un jeune agronome,
directeur du Jardin botanique de Baduel, malgré les res-
sources que le service pénitentiaire possède au point de vue
agricole, les instructions ministérielles étaient restées lettres
mortes. Je me trouvais ici dans une situation plus dilhcileque
dans les colonies de la Guadeloupe et de la Martinique, car
les colons sont particulièrement rares à la Guyane et le prix:
élevé de la main-d'œuvre ne permet guère à ceux qui existent
de se livrer à des expériences.
Cependant la Guyane possède un service considérable, qui
dispose de grandes étendues de territoire et auquel la main-
d'œuvre ne fait pas défaut : c'est le Service pénitentiaire.
D'accord avec ^L le Gouverneur, j'allais immédiatement pro-
poser à AL le Directeur de ce Service de vouloir bien recevoir
les plants de gutta dans un de ses pénitenciers. Il voulut bien
accepter, et une dépèche fut adressée sur-le-champ au péni-
tencier du Maroni pour savoir de M. Hayes, chef de cultures,
si on pourrait y trouver un emplacement convenable. Mais
devant la difficulté des communications avec cette station et
'.)0
liAl'POllT A M. LE MIMSTHE DES CO LUMES
étant donné qu'il faut remonter assez haut dans la vallée du
Maroni pour trouver des altitudes un peu élevées, je me dé-
cidai à transporter les plants dont j'étais chargé au péniten-
cier de Kourou sur la rivière du même nom. Le service
pénitentiaire voulut bien mettre à ma disposition pour ce
transport le bateau à vapeur le Capi, commandé par M. le
lieutenant de vaisseau xMornu, et habituellement employé au
service des Iles du Salut. Le mardi lo août, je me rendais
donc à Kourou. Le lendemain t i, je remontais le Kourou avec
M. Bardoux, commandant du pénitencier jusqu'à la station
de Pariacabo, où se trouvent 120 transportés sous la surveil-
lance d'un certain nombre d'agents commandés par M. le
surveillant-chef Bonini. La vallée qui couronne le pénitencier
et qui vient se terminer sur la rivière est actuellement occupée
par des cultures vivrières et par des plantations de café et de
cacao. De l'autre côté se trouve la colline de Carapa, ainsi
nommée en raison de l'abondance des arbres du même nom.
En explorant la forêt qui couvre cette colline, je reconnus la
présence d'un ^irand nombre de Minuisops Bahita, arbres de
la famille des Sapotacées, très voisins du P<iJn([uium et four-
nissant le produit spécial, succédané de la gutta-percha, qui
est connu sous le nom de Balata. Ces arbres m'ont paru très
abondants et le surveillant chef Bonini m'a assuré qu'un grand
nombre avaient déjà été abattus pour leur bois qui est très
recherché. Je pensai que les Palnf/uiiim pourraient, près des
Miinusop,s, trouver les conditions nécessaires à leur dévelop-
pement et le sommet de Carapa qui atteint une centaine de
mètres fut choisi comme emplacement futur de la plantation.
Mais il ne fallait pas songer à établir détinilivement la planta-
tion à ce moment, car on traversait une période de sécheresse
qui aurait nécessité des arrosages pendant les premiers temps
de la transplantation. Je jugeai plus prudent d'établir d'abord
une pépinière et de charger le surveillant chef de la mise en
place détinitive au commencement de la saison pluvieuse,
s il! LUS [lil;l!l-:S A CITTA 1/ \ \ MILLES (ji
c'est-à-dire en novembre. La pépinière fut organisée sous mes
yeux, près des cultures vivrières, dans un endroit frais, om-
bragé par de grands arbres et sur le domaine même du péni-
tencier.
L'emplacement choisi pour la mise en place définitive est
exposé au sud-ouest et complètement à l'abri des vents du
nord qui sont souvent si préjudiciables aux cultures de la
Guyane.
Le sol de Pariacabo, légèrement sableux, profond, ma
paru beaucoup plus avantageux que celui des collines de
Cavenne, constitué par une argile rouge compacte provenant
dé la désagrégation de la roche à ravets.
Les plants laissés à Pariacabo comprennent :
(S- Palaquinm ;
lo Diptérocarpées.
Total : t)7 plants.
In lot de H) plants de Palric/niuDf a été en outre réservé
pour le Jardin botanique de Baduel près de Cavenne. Le jar-
din se trouvant établi sur un terrain plat et mal abrité, jai
prié ^L Bassières, directeur du jardin, de faire défricher une
petite surface de terrain sur le flanc sud de la montagne de
Baduel pour y établir la plantation.
Les plants de Palaquiiim à l^ariacobo aussi bien qu'à
Baduel auront à compter avec un ennemi redoutable qui est
le fléau des cultures en Guyane ; c'est la fourmi manioc qu'on
rencontre partout et qui dévaste les plantations. Il n'est pas
possible de mettre les plantations complètement à l'abri de
ses déprédations.
SurreiUance des plants.
Dans les trois colonies où j'ai eu l'occasion d'établir des
cultures j'ai adressé au gouverneur un rapport spécial sur les
()? RAPPORT A M. LE MIMSTRE DES COLONIES
conditions dans lesquelles ces cultures ont été organisés et je
lai prié de prendre les mesures nécessaires pour organiser
une surveillance efTective.
A la Guadeloupe j'ai demandé à M. le gouverneur de con-
fier cette surveillance à M. Elot, agent des cultures. A la
Martinique, c'est M. Nollet directeur du Jardin botanique de
Saint-Pierre qui doit en être chargé. Enfin, à la Guyane, je ne
pouvais demander de faire visiter les plantations du service
pénitentiaire par un agent étranger à ce service, mais j"ai
instamment prié M. le Directeur du service de confier cette
surveillance à l'un des agents de culture des pénitenciers et
j'ai insisté pour qu'au début de la saison humide un certain
nombre de plants soient adressés à M. Hayes agent de cul-
tures au pénitencier du Maroni qui s'est déjà fait remarquer
par des études intéressantes sur l'exploitation du suc de balata
et qui est à la Guyane la personne la plus autorisée pour
mener à bien cette tentative.
Dans les trois colonies aussi j'ai fourni les instructions
nécessaires pour permettre la multiplication des plants par
bouturage ou par marcottage aussitôt que la chose sera
possible. Mais il convient pour cela d'attendre un certain
nombre d'années, car les boutures obtenues de jeunes plants
n'ont jamais donné de bons résultats.
Il n'était pas inutile non plus de recommander aux admi-
nistrations qui ont assumé la responsabilité de faire cultiver et
de surveiller ces plants d'arbre à gutta, de ne pas laisser sai-
gner ces arbres avant i5 ou 20 ans (même à titre d'essai) pour
assurer autant que possible leur plein développement et pour
permettre de les multiplier dans le plus bref délai. Il serait
désirable que ces administrations voulussent bien organiser
des inspections périodiques des arbres dont elles ont la charge,
afin de rendre compte au Département des conditions dans
lesquelles ils se trouvent.
Telles sont. Monsieur le Ministre, les mesures que j'ai cru
Srn LES ARBRES A CITTA ALX AMIf.LES r,3
devoir prendre pour remplir la mission que vous aviez bien
voulu me confier ; elles auraient pu être considérablement sim-
plifiées et les chances de réussite seraient peut-être plus
Jurandes si les administrations locales avaient eu soin de pré-
parer à l'avance des terrains de culture conformément aux
instructions qui leur avaient été transmises par votre Dépar-
tement.
Veuillez ag'réer, Monsieur le Ministre des Colonies, l'assu-
rance de mon respectueux dé\ouement.
Henri LECOMTE
lo octobre i8q8.
(Des reçus fournis par les dépositaires de plants sont joints
à Torif^inal du rapport, déposé au Ministère des Colonies.)
f)'. H APPORT A M. LE MI.MSTliE DES COLOMES
Au dernier moment nous recevons de M. Nollet,
D"^ du Jardin d'essais de St-Pierre (Martinique) les
renseignements suivants sur la situation actuelle des
plants confiés à un certain nombre de personnes de
la colonie :
Habitation Cornée : ^ plants en bon état ;
Habitation Carassus : 3 plants en bon état ; un sans
feuilles ;
Habitation Massieu : 4 plants en bon état ;
Habitation Littée : 3 plants en bon état ; un sans
feuilles ;
Habitation Leyritz : 5 plants en très bon état ;
Ha])itation Clos : lo plants, presque tous en très
bon état ;
Habitation Pécoul : 17 plants en bon état.
Jardin botanique : 6 plants poitant des bourgeons.
Jusqu'ici les résultats sont donc satisfaisants malgré
les nombreuses causes de destruction auxquelles
sont exposés les plants dans des propriétés non fer-
mées.
24 avril 1899.
TABLE DES MATIERES
PREMIÈRE PARTIE
Pages.
Considéra lions générales sur les arbres à gutta i
Récolte 28
La production et le commerce des gutlas 87
DEUXIÈME PARTIE
Rapport à M. le Ministre des Colonies sur lacclimatalion des arbres
à gutta aux Antilles et à La Guyane 65
C MARTRES
IMPRIMERIE DURAND, RUE FULBERT